Exode urbain, un mythe, des réalités ? Présentation des résultats

MILET, Hélène ; MAISETTI, Nicolas ; SIMON, Eva ; BLEHAUT, Marianne ; BREUILLE, Marie ; COLLET, Anaïs ; COULONDRE, Alexandre ; DELAGE, Aurélie ; GRIVAULT, Camille ; LE GALLO, Julie ; LISION, Olivier ; ROUSSEAU, Max

Auteur moral
France. Plan Urbanisme construction architecture ; Groupement d'intérêt public L'Europe des projets architecturaux et urbains
Auteur secondaire
Résumé
<p class="western" style="line-height: 100%; margin-bottom: 0cm"><font size="2" style="font-size: 10pt">Les auteurs s'appuient sur les travaux menés par plusieurs équipes de recherche qui ont mis en oeuvre diverses approches d'évaluation et d'étude du phénomène d'exode urbain en France dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Une équipe a travaillé sur les données de consultation des annonces d'une plateforme internet d'annonces immobilières (Le Bon Coin) pour documenter les projections des internautes qui témoignent de leurs aspirations territoriales. La seconde, en utilisant les données d'autres plateformes (Meilleurs Agents, Se Loger) et celles des contrats de réexpédition de courrier souscrits auprès de La Poste, a documenté les déménagements effectifs des Français depuis la crise de la Covid-19. La troisième a enquêté auprès de divers acteurs (élus et praticiens, habitants, acteurs du marché immobilier) de six terrains ruraux, semi-ruraux ou périurbains. Ces trois approches complémentaires donnent des résultats convergents qui montrent une grande stabilité des équilibres territoriaux. Il apparaît que p</font><font color="#181715"><font size="2" style="font-size: 10pt">lutôt qu'un départ massif des villes vers les campagnes comme sous-tendu dans cette idée mythique d'un exode urbain, la pandémie a plus globalement accéléré les départs en provenance des grands centres urbains, en particulier des plus grandes métropoles, vers d'autres territoires, au premier rang desquels des villes un peu plus petites, et des couronnes périurbaines, ceci accentua</font></font><font color="#181715"><font size="2" style="font-size: 10pt">nt un phénomène de (ré)équilibrage de l'armature urbaine déjà à l'oeuvre avant la crise.</font></font></p>
Editeur
PUCA
Descripteur Urbamet
mobilité résidentielle ; marche immobilier ; enquête ; armature urbaine ; métropole ; agglomération ; périurbain ; donnée statistique ; évolution
Descripteur écoplanete
Thème
Habitat - Logement ; Sciences humaines
Texte intégral
présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 1 exode urbain un mythe, des réalités présentation des résultats Directeur de la publication : Jean-Baptiste Marie Rédacteurs : Hélène Milet, Nicolas Maisetti, Eva Simon, sur la base des travaux originaux des trois équipes de recherche : Marianne Blehaut, Marie Breuille, Anaïs Collet, Alexandre Coulondre, Aurelie Delage, Camille Grivault, Julie Le Gallo, Olivier Lision, Max Rousseau Relecture : Gabrielle Nogier Cartographies : Arthur Beaubois-Jude Identité graphique et mise en page sur logiciels libres : Figures Libres Février 2022 Gip L?Europe des Projets Architecturaux et Urbains Tour Séquoia, 1, pl. Carpeaux, 92800 Puteaux éditorial Dominique Faure Ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité Exode urbain, mythe ou réalité? Dès le début de la pandémie de la Covid-19, les interrogations sur les effets de cette nouvelle crise sur l?organisation du territoire français ont été nombreuses. Au-delà de l?exode urbain, ce que nous enseignent ces travaux, c?est avant tout la diversité des dynamiques territoriales et la nécessité de regarder chaque territoire dans son contexte pour l?accompagner au mieux. Ils témoignent aussi du renouvellement des imaginaires autour des ruralités, de plus en plus associées à une qualité de vie, de logement et une proximité à la nature au coeur des aspirations de nos concitoyens. Au travers de cette étude, la preuve est faite, à nouveau, de la fertilité de mobiliser la recherche au plus près de l?action publique pour éclairer ses décisions: par le terrain, par la donnée, les chercheurs de toutes disciplines s?engagent auprès des élus et des acteurs des territoires pour construire ensemble une meilleure compréhension des réalités en train de se déployer. Car c?est bien là l?un des enjeux de ce travail : comment décrire ce qui est en train de se faire? Que dire d?un phénomène encore aux prémices de son déploiement ? Cette étude s?inscrit ainsi dans une volonté de mieux connaître nos ruralités et les dynamiques qui les animent. Elle fait écho aux travaux menés par l?Agence Nationale de la Cohésion des Territoires, l?Observatoire des Territoires, le Réseau rural français et le Plan Urbanisme Construction Architecture ou encore la Plateforme d?Observation des Projets et Stratégies Urbaines, pour documenter et alimenter l?action publique à toutes les échelles des territoires. En effet, si l?enjeu de l? «exode urbain», de ses mythes et de ses réalités a autant passionné les acteurs et élus locaux, c?est bien parce qu?il éclaire sous un jour nouveau la vitalité des territoires ruraux et la multiplicité des enjeux qu?ils portent: quels sont les leviers du bien-vivre dans nos ruralités ? Comment assurer leur capacité d?accueil de nouveaux habitants sur le long terme? Nos ruralités ont de nombreux atouts à faire valoir dans les choix résidentiels de nos concitoyens, et l?alliance entre la recherche et l?action publique contribuera à les accompagner. Si l?enjeu de l? «exode urbain», de ses mythes et de ses réalités a autant passionné les acteurs et élus locaux, c?est bien parce qu?il éclaire sous un jour nouveau la vitalité des territoires ruraux et la multiplicité des enjeux qu?ils portent. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 4 sommaire résultats Monde d?avant, monde d?après : pas de bouleversement géographique Les villes, terres d?accueil des ur- bains PopFlux : un outil interactif pour visualiser les soldes migratoires et les flux entre territoires Ceux qui partent vers les campagnes : une diversité de profils Désir de campagne ou désir d?espace : quels moteurs des déménagements ? pour aller plus loin Étude «diversité des ruralités» Ruralités et Agenda rural introduction Exode urbain : mythe ou réalité ? La pandémie de Covid-19 a-t-elle déclenché le départ des habitants des grandes villes vers les communes rurales ? 06 10 méthodologie 08 35 présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 5 présentation des équipes de recherche Équipe 1 : une approche par les projections des Français Équipe 2 : l'exode urbain au prisme des déménagements Équipe 3 : documenter les évolutions par le terrain partenaires et financeurs Réseau rural français Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) Groupement d'intérêt public L'Europe des Projets Architecturaux et Urbains POPSU Territoires 37 47 présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 6 introduction Exode urbain : mythe ou réalité ? La pandémie de Covid-19 a-t-elle déclenché le départ des habitants des grandes villes vers les communes rurales ? Commandée par le Réseau rural français, l?étude « Exode urbain : impacts de la pandémie de COVID-19 sur les mobilités résidentielles», a été lancée en juin 2021 avec le soutien du Plan Urbanisme Construction Architecture et de l?Europe (FEADER). Elle est opérée par le GIP L'Europe des Projets Archi- tecturaux et Urbains dans le cadre du programme POPSU Territoires. Coordination : Hélène Milet Eva Simon, Aurore Meyfroidt et Nicolas Maisetti présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 7 Les résultats invitent à fortement nuancer l?idée d?un exode urbain, qui bouleverserait les structures territoriales françaises. Dans les faits, la géographie des projections et des déménagements des Français dans le « monde d?après » ressemble finalement très fortement à celle du «monde d?avant», c?est-à-dire principalement structurée autour des pôles urbains, qui concentrent emplois, services, structures éducatives, ainsi qu?une grande partie de la population française. Aussi, la première note de synthèse, «Exode urbain : petits flux, grands effets»,1 publiée au printemps 2022, décrivait un renforcement, depuis le début de la pandémie, de « petits flux » qui, à l?échelle nationale, nourrissent cinq phénomènes largement préexistants à la crise : ? la métropolisation, qui concentre fonctions et population dans les grands centres urbains; ? la périurbanisation, qui, en s?étendant à des territoires plus éloignés, devient «méga-périurbanisation »; ? le desserrement urbain, en particulier dans les villes les plus denses, qui entraîne le départ de certains ménages des coeurs des villes; ? la « renaissance rurale », qui se traduit par un renforcement de l?attractivité des espaces de villégiature, au coeur de circulations résidentielles et de pratiques pluri-résidentielles; ? la littoralisation, qui se poursuit et confirme le pouvoir d'attraction des territoires littoraux. En poursuivant les travaux, les résultats se confirment et s?affinent. Plutôt qu?un départ massif des villes vers les campagnes, sous-tendu dans l?idée d?exode «urbain», la pandémie a plus globalement accéléré les départs en provenance des grands centres urbains, en particulier des plus grandes métropoles, vers d?autres territoires, au premier rang desquels? des villes (un peu) plus petites, et des couronnes périurbaines, accentuant un phénomène de « (ré)équilibrage de l?armature urbaine » déjà à l?oeuvre avant la crise. En ce sens, l?exode urbain tient triplement d?un mythe : loin d?un bouleversement territorial, la pandémie de Covid-19 a principalement accéléré et renforcé des tendances préexistantes à la crise. De même, l?idée d?un désamour global des villes, sous-entendu par l?adjectif «urbain» accolé à «exode», est tout à fait exagérée : si départs il y a, ils concernent principalement les coeurs des villes les plus grandes ? les métropoles ? et de nombreux déménagements se relocalisent dans des villes. Enfin, le terme d?exode est associé à un mouvement massif de population, ce qui ne caractérise pas les mobilités observées depuis mars 2020. Mythe aussi, celui d?un profil-type de ménages susceptibles de déménager à la faveur de la crise : les traitements médiatiques des mobilités démographiques à la suite des confinements ont en effet eu tendance à construire une image binaire des «exodeurs» : parfois des ménages de classe supérieure, dotés d?un fort capital socioculturel et économiques et s?inscrivant dans des démarches multi- résidentielles ; et souvent des ménages qui « ont quitté la ville »2 pour un changement de vie, souvent inscrits dans l?imaginaire de la «transition rurale». Les travaux de terrain soulignent que, si ces deux profils existent, la réalité sociologique des ménages qui déménagent à la faveur de la crise est bien plus diversifiée et s?émaille aussi de profils en situation de précarité, de pré-retraite ou encore de dynamiques nouvelles d?investissement en milieu rural. Sur le terrain, les réalités des migrations urbaines impulsées par le Covid sont donc à aborder au pluriel, et au travers d?une attention à l?extrême diversité des territoires. 2. «Comment se sentent ceux qui ont quitté la ville ?» Le Nouvel Obs, le 3 décembre 2021 https:// www.nouvelobs.com/ societe/20211203.OBS51754/ lea-nathalie-sebastien- laure-comment-se-sentent- ceux-qui-ont-quitte-la- ville.html 1. Retrouvez les premiers résultats dans la note de synthèse L'exode urbain ? Petits flux, grands effets. Les mobilités résidentielles à l'ère (post-)covid, POPSU Territoires, mars 2022 sur : https://popsu.archi.fr/ actualite/lexode-urbain- petits-flux-grands-effets présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 8 3. «Quest-ce que le nowcasting ?» Le Pourquoi du comment, France Culture, lundi 14 mars 2022 https://www.radiofrance.fr/ franceculture/podcasts/le- pourquoi-du-comment- economie-et-social/qu-est- ce-que-le-nowcasting- 9906473 Capter les changements en temps réel Comment capter des changements récents, possiblement en cours, en temps quasi réel, tout en conservant une rigueur scientifique ? Deux parti-pris de méthode caractérisent cette étude : 1) parier sur la complémentarité des disciplines et des démarches méthodolo- giques : les trois équipes mobilisent différentes disciplines des sciences humaines et sociales, et s?inscrivent dans des démarches quantitatives (pour deux équipes) et qualitatives (pour une équipe). 2) faire du «nowcasting» (des «prévisions en direct») en mobilisant des sources de données inédites : à travers des partenariats avec les plateformes d?annonces immobilières en ligne (leboncoin, Meilleurs Agents, SeLoger) ainsi qu'avec La Poste, les deux équipes quantitatives ont exploité des données disponibles à haute fréquence pour connaître quasiment en temps réel les intentions de mobilité résidentielle (avec les recherches de biens immobiliers et les estimations en ligne) et leurs concrétisations (avec les contrats de réexpédition de courrier)3. Une approche croisée et interdisciplinaire Cette étude mobilise, trois équipes de recherche, interdisciplinaires, et adoptant des démarches méthodologiques complémentaires : ? Une équipe de chercheurs en sociologie et géographie quantitative, travaillant sur les données de consultation des annonces de la plateforme leboncoin en partenariat avec le CREDOC, sous la responsabilité d?Alexandre Coulondre (LATTS, ENPC), de Claire Juillard (OGGI) et de Marianne Bléhaut (Crédoc); ? À partir de ces données, cette équipe s'attache à documenter les projections des internautes, qui témoignent de leurs aspirations territoriales; ? Une équipe de chercheurs en économie et géographie quantitative du CESAER, travaillant sur les données des plateformes immobilières Meilleurs Agents, SeLoger et sur les contrats de réexpédition de courrier souscrits auprès de La Poste, coordonnée par Marie Breuillé (INRAE), Julie Le Gallo (L?Institut Agro Dijon) et Pierre Vidal (Meilleurs Agents); ? Cette équipe analyse d?une part les intentions de mobilité résidentielle, en travaillant sur les estimations réalisées sur la plateforme M eilleurs Agents et d?autre part, documente les déménagements effectifs des Français depuis la crise avec les données de réexpédition définitive de courrier du groupe La Poste. ? Une équipe de chercheurs en sociologie et géographie qualitative, qui étudie six terrains ruraux, semi-ruraux ou périurbains coordonnée par Anaïs Collet (Université de Strasbourg), Aurélie Delage (Université de Perpignan) et Max Rousseau (CIRAD). L?originalité du dispositif de recherche tient à ce qu?il combine des approches quantitatives et qualitatives et repose, grâce à des partenariats inédits, sur l?exploitation de données nouvelles : les données de navigation du groupe méthodologie présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 9 leboncoin pour la première équipe quantitative, les données du groupe SeLoger- Meilleurs Agents et de La Poste pour la seconde équipe quantitative, et une enquête de terrain auprès d?acteurs diversifiés (élus et praticiens locaux, habitants, acteurs du marché immobilier) pour l?équipe qualitative. Ces trois approches, complémentaires, convergent dans leurs résultats, et constatent une grande stabilité des équilibres territoriaux en France. Différentes échelles d?analyse Un des enjeux de cette étude a consisté à sélectionner l?échelle d?analyse la plus pertinente pour capter les phénomènes à l?oeuvre dans les différents types de territoires, compte-tenu des caractéristiques des bases de données et des éclairages souhaités. Cinq découpages sont mobilisés : La typologie urbain/rural construite par l?INSEE4 à partir de la grille communale de densité permet d?analyser les changements dans les flux d?intention de mobilité entre les deux agrégats que sont l?urbain et le rural, et ce dans le cadre de l?exploitation des estimations sur la plateforme Meilleurs Agents. Le zonage en aires d?attraction des villes de l?INSEE5 permet d?affiner la catégorisation des espaces avec une approche fonctionnelle du territoire qui tient compte des aires d?influence des pôles urbains sur la base des mobilités pendulaires. Ce zonage permet d?intégrer 1) la partition centre-périphérie avec la distinction entre les pôles et les couronnes, avec par ailleurs les communes isolées hors attraction des villes, et 2) la hiérarchie urbaine avec des aires de tailles différentes (moins de 50 000 habitants, de 50 000 à moins de 200 000 habitants, de 200 000 à moins de 700 000 habitants, et 700 000 habitants et plus). L?analyse du phénomène de périurbanisation à partir des données des contrats de réexpédition de courrier de La Poste est notamment menée avec ce découpage. Les unités urbaines définies par l?INSEE6 reposent sur la continuité du bâti et la taille de la population. Une grande ville correspond à une unité urbaine de plus de 200000habitants qui regroupe plusieurs communes, une ville moyenne à une unité urbaine de 20 000 à 199 999 habitants, une petite ville à une unité urbaine de 2 000 à 19 999 habitants et une commune rurale aux autres territoires de taille inférieure. Ce découpage est largement utilisé pour analyser l'évolution des soldes migratoires et les déménagements entre catégories d?espace. Les 775 mailles habitat construites par le Service des Données et Études Statistiques (SDES)7 partitionnent le territoire en zones homogènes du point de vue des marchés immobiliers. Elles constituent ainsi un maillage pertinent pour l?analyse des mobilités résidentielles et représentent un bon arbitrage entre la finesse de l?information et sa lisibilité graphique. Toutes les analyses sur les données leboncoin sont à cette échelle, ainsi que certaines cartographies sur les données de contrats de réexpédition de courrier de La Poste, dont celles réalisées avec l?outil PopFlux. La circonscription administrative de la commune est l?échelle la plus fine, utilisée dans cette note uniquement pour quantifier les déménagements à l?intérieur d?une même commune, sur la base des contrats de réexpédition de courrier de La Poste. 4. https://www.insee.fr/fr/ information/4808607 5. https://www.insee.fr/fr/ information/4808607 6. https://www.insee.fr/fr/in- formation/4802589 7. https:// www.statistiques.developpe ment-durable.gouv.fr/une- nouvelle-grille-de-lecture- des-territoires-pour-le- logement-la-maille-habitat présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 10 résultats Monde d?avant, monde d?après : pas de bouleversement géographique Les métropoles conservent leur rôle sructurant dans le territoire Premier phénomène structurant le territoire, la «métropolisation», ou «processus de concentration de populations, d'activités, de valeur dans des villes de grande taille»8 : les villes les plus grandes jouent un rôle structurant dans l?organisation du territoire national, qui se reflète dans les projections des Français comme dans leurs déménagements. À titre d?exemple, l?exploitation des données de la plateforme de recherche immobilière en ligne leboncoin permet de restituer, à l?échelle nationale, la géographie des territoires dans lesquels les Français se projettent en 2019, 2020 et 2021. Cette analyse considère l?ensemble des recherches immobilières (achats) et sur toute la période. Elle renseigne sur les aspirations territoriales et les probables mobilités à venir. Les cartes qui composent la figure 1 représentent les flux entre les lieux où se situent les internautes, et les lieux où se situent les annonces qu?ils consultent, pour les seconds trimestres de 2019, 2020 et 2021. L?analyse est réalisée à l?échelle des mailles habitat définies par le Service des données et études statistiques (SDES). Les cercles représentent ces mailles et sont d?autant plus grands que la maille est attractive (cumul du nombre de vues entrantes). Les flèches représentent les liens entre les mailles, ainsi que leur intensité (l'épaisseur des flèche est calculée en fonction du nombre d?internautes qui consultent depuis la maille A des annonces de biens en vente dans la maille B). À noter que les cartes ne présentent que les liens les plus significatifs en volume (> 2000 vues). Alors qu?elles photographient des contextes sanitaires très différents (avant et après l?éclatement de la pandémie), on note une très forte similarité des trois cartes. Loin d?un renversement territorial, nous retrouvons là la structure territoriale « classique » de l?Hexagone, ainsi qu?une confirmation de tendances lourdes préexistantes au Covid. Elles démontrent en particulier l'attractivité des grands pôles urbains, en l?occurrence Paris, Marseille, Lyon, ainsi que les autres métropoles régionales - Lille, Strasbourg, Grenoble, Toulouse, Bordeaux, Nantes, 8. «Métropolisation », Géoconfluences, janvier 2023. http:// geoconfluences.ens-lyon.fr/ glossaire/metropolisation présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 11 Source : Leboncoin, exploitation Alexandre Coulondre, Claire Juillard, Marianne Bléhaut Janvier 2022 Zonage : maille habitat Second Trimestre 2019 Second Trimestre 2020 Légende Intensité du lien entre deuxmailles (taille proportionnelle au nombre de vues) Attractivité de la maille (taille proportionnelle au cumul des vues entrantes) Pole urbain très tendu Pôle urbain tendu Couronne attractive Couronne moins attractive Territoires touristiques à marché tendu Espace à dominante rurale Second Trimestre 2021 Figure 1 LES MÉTROPOLES, STRUCTURANTES DANS LES PROJECTIONS DES FRANÇAIS Liens bruts entre mailles au second trimestre 2019, second trimestre 2020 et second trimestre 2021 présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 12 Source : données des contrats réexpédition de courrier, La Poste - traitement UMR CESAER Rennes, Brest, Nice ? qui concentrent, outre la population, de nombreux emplois et services. Ce sont ces pôles et leurs relations entre eux qui captent l?écrasante majorité des flux de recherche immobilière. L?analyse des déménagements à partir des données des contrats de réexpédition de courrier du groupe La Poste confirment ces analyses (figure 2) : ? le rôle important et constant que jouent les grandes villes (+ 200 000 habitants) dans la structuration des flux de déménagement à l?échelle nationale : 36,5 % des déménagements continuent de se faire de grande ville à grande ville après le début de la crise sanitaire (avec toutefois une légère baisse par rapport à la dernière année pré-covid). À l?inverse, les déménagements de commune rurale à commune rurale représentent 7% des déménagements, mais connaissent un léger essor. ? la grande stabilité des structures résidentielles : plus d?un quart des déménagements du pays ont lieu au sein de la même commune. Enfin, cette structure métropolitaine est particulièrement visible sur la figure 3, qui cartographie les flux de déménagements après crise (entre mars 2020 et mars 2022). Elle confirme la grande stabilité de la géographie des flux migratoires par rapport au « monde d?avant », avec, 1) un poids prépondérant des grandes métropoles, en particulier l?Île-de-France qui est au centre d?une étoile de flux entrants, sortants et internes (en jaune, carte en bas à gauche), et dans une moindre mesure les métropoles régionales entre elles (en bleu), 2) l?attractivité des espaces littoraux atlantique et méditerranéen et 3) le phénomène de péri-urbanisation avec des flux de mobilité d?échelle régionale reliant les métropoles et leur espace environnant. Figure 2 présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 13 Source : UMR CESAER, données des contrats de réexpédition de courrier La Poste Zonage : EPCI Figure 3 LES PÔLES URBAINS, STRUCTURANTS DANS LA GÉOGRAPHIE DES DÉMÉNAGEMENTS EN FRANCE présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 14 Ainsi, on ne trouve ni les traces d'une réorientation géographique massive des populations, ni celles d?une recomposition des flux vers des espaces isolés, hors des aires d?attraction des villes. Il n?y a donc pas de grande « rupture » territoriale dans les intentions de mobilité avant et après la crise, que l?on considère l?ensemble des aspirations des utilisateurs de la plateforme leboncoin, ou les contrats de réexpédition de courrier. Les littoraux, champions de l'attractivité résidentielle La littoralisation désigne le «processus de concentration des populations et des activités humaines le long ou à proximité des littoraux», soutenue, dans le cadre des mobilités résidentielles, principalement par une «recherche d?aménités pour le cadre de vie des lieux de résidence»9. Les façades littorales confirment leur attractivité depuis le début de la pandémie, à la fois dans les aspirations des Français (cf figure 1) et dans les mobilités (figure 4). 9. «Littoralisation», Géoconfluences, mars 2021, http://geoconfluences.ens- lyon.fr/glossaire/ littoralisation-ou- maritimisation Figures 4 Source : données des contrats de réexpédition de courrier, La Poste - traitement UMR CESAER Zonage : maille habitat présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 15 10. La France en douze portraits. Rapport 2019- 2020. Cartes et données, Observatoire des territoires, Février 2021 : https:// www.observatoire-des- territoires.gouv.fr/kiosque/ rapport-2019-2020-la- france-en-douze-portraits 11. Sur ce point, les témoignages des acteurs bretons ou basques sur la tension des marchés immobiliers locaux ont été nombreux. Voir par exemple « Faut-il quitter les grandes villes ? » Le débat de midi, France Inter, 23 août 2021 ; https:// www.franceinter.fr/ emissions/le-debat-de-midi/ le-debat-de-midi-du-lundi- 23-aout-2021 Les deux cartographies ci-dessus (figure 4) relatives aux soldes migratoires des territoires (maille habitat) donnent une image de l?attractivité résidentielle des territoires depuis mars 2020. La carte de gauche présente les soldes migratoires (différence entre le nombre de ménages entrants et le nombre de ménages sortants rapportée au nombre d?habi- tants) depuis mars 2020, et s?inscrit dans la poursuite de tendances lourdes. Elle dessine, d?abord, une ligne « allant de Saint Malo à Genève », pour reprendre l?analyse proposée par l?Observatoire des territoires en février 202110, de territoires qui, au global, attirent des habitants depuis de nombreuses années : notamment dans le coeur de la Bretagne, le long de la vallée du Rhône (piémont du Massif Central, Alpes de Haute-Provence, Drôme), ou encore dans le coeur de la Nouvelle Aquitaine. Elle confirme aussi tout particulièrement la forte attractivité résidentielle des littoraux ? en particulier de la façade atlantique ; à ce titre, les mailles rétro-littorales connaissent aussi une forte augmentation des soldes migratoires, ce qui indique une diffusion croissante de l?attractivité des littoraux au- delà du trait de côte. A contrario, les soldes les plus négatifs apparaissent dans le coeur des métropoles et mais aussi dans certains territoires du Nord-est de la France et de montagne. La carte de la variation des soldes migratoires entre les deux années pré-Covid et les deux années post-Covid (droite) présente les évolutions des soldes migratoires précédemment décrits depuis le début de la crise sanitaire (hausse, baisse plus ou moins importantes) : elle renseigne sur les tendances depuis deux ans dans les territoires par rapport aux dynamiques démographiques d?avant-crise. Si les dynamiques des territoires apparaissent ici très contrastées, deux remarques sont à noter : ? Les soldes migratoires des littoraux, bien que toujours très positifs, ont pu légèrement baisser dans certains territoires (solde négatif de plusieurs mailles du pourtour méditerranéen et de l?Atlantique), ce qui peut indiquer une forme de saturation des marchés immobiliers locaux, qui engendre un tassement des dynamiques démographiques dans un contexte de tension forte des marchés immobiliers11. ? Un certain nombre de territoires aux dynamiques migratoires plutôt faibles (carte de gauche) connaissent néanmoins une variation positive importante (carte de droite), en particulier dans le coeur du Massif Central, au Nord de la région Nouvelle-Aquitaine, ou dans le piémont des Pyrénées. Ces « petits flux» peuvent contribuer à alimenter la « renaissance rurale », géographique- ment sélective. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 16 Le desserrement des centres urbains denses, moteurs de la périurbanisation Les espaces périurbains enregistrent presque tous un « effet Covid » positif sur leur solde migratoire11. Cette attractivité des communes « de grande couronne » est une conséquence du phénomène de desserrement urbain12, qui désigne le départ des populations des centres urbains au profit de leurs périphéries. Le desserrement urbain, un des principaux moteurs de la périurbanisation, est particulièrement sensible à Paris intra-muros à la suite de la crise13. Les couronnes parisiennes, globalement, accueillent plus de ménages sur la même période (avec un solde migratoire qui augmente de 1,9 dans les communes de la couronne de l?aire de Paris, d?après l?exploitation des contrats de réexpédition de courrier de la Poste par l?UMR CESAER). Zoom sur le desserrement urbain, phénomène structurant la géographie urbaine, en particulier francilienne Décrit dès les années 1980, le desserrement urbain désigne « une tendance vers une répartition moins concentrée du peuplement », résultant de départs des zones les plus denses ? ou concentrées en population, vers leur environnement proche. Fort moteur de la périurbanisation, le desserrement urbain confirme son statut de phénomène structurant : une note récente14 de l?INSEE rappelle, à l?aide des données de recensement de l?année 2018 ? dans le « monde d?avant » donc, l?ampleur du déficit migratoire15 francilien. La Région Île-de-France joue, depuis de nombreuses décennies, un rôle qualifié de « pompe aspirante et refoulante » à l?échelle du pays : elle accueille beaucoup de ménages chaque année, notamment des jeunes, étudiants et personnes à la recherche d?un premier emploi, qu?elle attire par les nombreuses opportunités scolaires et professionnelles qu?elle déploie. Si elle attire beaucoup, l?Île-de-France ne conserve pas tous ces nouveaux habitants : de très nombreux ménages, à l?aune de changements professionnels ou d?un changement de vie, quittent la métropole parisienne pour s?installer dans d?autres territoires. À noter, ce phénomène apparaît comme socialement sélectif : il concernerait tout particulièrement des groupes sociaux précis, dans des moments de vie spécifiques, par exemple l?arrivée en retraite, ou l?arrivée d?un enfant. À ce titre, les analyses portées par Olivier Bouba-Olga sur les inscriptions scolaires dénotent un départ accentué des ménages avec des enfants jeunes (enseignement primaire), qui ne se retrouve pas dans l?enseignement secon- daire16. Ainsi, la population de l'agglomération parisienne, en particulier dans le centre parisien, décroît historiquement, et a perdu jusqu?à 100 000 ménages en 2018. Ce phénomène de desserrement est particulièrement sensible dans les villes les plus grandes bien qu?il touche plus ou moins fortement les autres grandes villes françaises. 11. +0,5 pour les couronnes des aires urbaines de 200 000 à 700 000 habitants, +1,2 pour les couronnes des aires urbaines de 50 000 à 200 000 habitants, +1,4 pour les couronnes des aires urbaines de moins de 50 0000, pour 1000 ménages entre la période pré-Covid (mars 2019 à mars 2020) et la crise (mars 2020 à mars 2021), d?après l?exploitation des données des contrats de réexpédition de courrier de La Poste par l?UMR CESAER. 12. http://geocon- fluences.ens-lyon.fr/glossai- re/desserrement 13. Le solde migratoire de la capitale passe de -21 à -25,4 départs pour mille ménages, en comparant les 12 mois avant le début du Covid et les 12 mois suivant les premières mesures de confinement, d?après l?exploitation des données des contrats de réexpédition de courrier de La Poste par l?UMR CESAER. 14. Départs des Franciliens vers la province : des écarts de niveau de vie parfois importants avec leurs nouveaux voisins, François Dubujet, Pierre Laurent, Ivan Tissot, Insee 2022 : https://www.insee.fr/fr/sta- tistiques/6527491#titre-- bloc-4 15. Le solde migratoire est la différence entre le nombre d?arrivées sur un territoire et le nombre de départs sur la même période donnée ; il est déficitaire quand le nombre de départs excède le nombre d?arrivées sur la période. 16. Géographie du monde d?après : assiste-t-on à un exode urbain ?, Olivier Bouba Olga et Etienne Fouqueray, Région Nouvelle Aquitaine, 2022 : https:// blogs.univ-poitiers.fr/o- bouba-olga/2022/01/08/ geographie-du-monde- dapres-assiste-t-on-a-un- exode-urbain/ présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 17 Source : données des contrats réexpédition de courrier, La Poste - traitement UMR CESAER, dans le zonage en aire d?attraction des villes de l?INSEE La figure 5 représente les déménagements des ménages entre les communes- centres des villes (les plus denses), les autres communes du pôle urbain (pourtours directs des centres) et les couronnes des villes (espaces périurbains). Ils matérialisent deux tendances des ménages renforcées depuis le début de la crise : ? le départ des centres urbains denses (desserrement) pour emménager dans les autres communes du pôle urbain ou dans les couronnes; ? le départ des communes des pôles urbains pour s?installer dans les couronnes. En moyenne à l?échelle nationale, les espaces périurbains ont fortement gagné en population depuis le début de la crise sanitaire, et les variations les plus importantes concernent les départs des centres vers les couronnes, avec une hausse de 14,1% pour les plus grandes aires et de 23,5% pour les plus petites. Par ailleurs, alors que les grandes aires poursuivent leur déprise (avec une augmentation de 27,3% des flux nets17) en direction du reste du territoire (petites aires et zones hors attraction), les villes petites et moyennes confirment le rebond, avec une augmentation de 24,4 % des flux nets, en provenance de l?extérieur (grandes aires et zones hors attraction) depuis le début de la crise sanitaire. Une poursuite de la renaissance rurale Enfin les espaces ruraux, à l?échelle nationale, voient aussi leur solde migratoire augmenter fortement après le début de la crise sanitaire. Ce solde migratoire était par ailleurs déjà positif, du fait de la « renaissance rurale » largement documentée par la recherche depuis la fin des années 197018 : Prudence néanmoins, l?histoire nous apprend que la renaissance rurale ne touche pas l?ensemble des territoires ruraux19, et la géographie souligne qu?elle concerne en particulier des territoires proches des centres urbains ? ce sont les « campagnes urbaines »20 mais aussi des territoires qui bénéficient d?aménités spécifiques ? l?accessibilité, un climat, une dynamique économique locale favorable, par exemple. Loin d?annoncer une revitalisation de toutes les campagnes, les mouvements résidentiels actuels peuvent tendre à accentuer les différences territoriales, entre les territoires attractifs ? parfois en « surchauffe »21 ? et des territoires qui le sont moins (figure 4). 17. Un « flux net » présente la différence de mobilités entre deux territoires (flux de A vers B moins flux de B vers A). 18. « La Renaissance rurale», Géoconfuences, http://geoconfluences.ens-- lyon.fr/glossaire/renais- sance-rurale 19. voir par exemple «Evolutions démographiques», La France en douze portraits, rapport 2019-2020 de l?Observatoire des territoires, ANCT : https:// www.observatoire-des- territoires.gouv.fr/kiosque/ rapport-2019-2020-la- france-en-douze-portraits 20. « Campagnes urbaines », hors-série du Programme B, BINGE Audio en partenariat avec le Plan Urbanisme Construction Architecture https://www.- binge.audio/podcast/pro- gramme-b/campagnes-urba ines-episode-1-hors-serie 21. « Repenser l?attractivité territoriale », H. Reigner, Le 1 « Quel horizon pour les petites villes ? » en partenariat avec POPSU : https://le1hebdo.fr/journal/ quel-horizon-pour-les- petites-villes/372/article/ repenser-l-attractivit- territoriale-4981.html? specialAttribute=1 Figures 5 présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 18 Les villes, terres d?accueil des urbains Parmi les moteurs de l?exode urbain mis en avant au sortir des premiers confinements, le «désir de campagne » occupait une place de choix22. Associant les campagnes à une proximité avec des espaces naturels et à une qualité de vie autres que dans les espaces urbains, le discours sur le « désir de campagne », souvent mâtiné d?urba-phobie, mérite un examen plus précis pour comprendre ce que cachent les projections «ruralophiles», ainsi que leurs liens aux mobilités résidentielles depuis le début de la pandémie. Où se projettent les Français qui quittent les centres urbains denses ? Pas seulement vers les campagnes ! L?idée de l?exode urbain se construit sur une différence nette entre « urbain » et « rural » comme deux catégories indépendantes, et postule, à l?aune de la pandémie, une accentuation des départs « des villes » vers « les campagnes ». Si l?on suit le raisonnement, les habitants des grandes villes se relocaliseraient dans des territoires de campagne, c?est-à-dire de faible densité et à l?habitat dispersé. Qu?en est-il vraiment ? Confirmant les acquis de la géographie23, les travaux menés sur les données de la plateforme leboncoin montrent que la distinction entre espaces urbains et espaces ruraux n?est pas opérante pour expliquer les mobilités résidentielles depuis le début de la pandémie. Pour comprendre les projections des Français : une approche par les marchés immobiliers Afin de saisir les évolutions territoriales des mobilités résidentielles, les équipes de recherche ont fait le choix d?utiliser un découpage original de l?Hexagone, celui de la maille habitat construite par le Commissariat général au développement durable (SDES - Services de données et études statistiques) en 201924. Ce découpage permet une approche des territoires selon la structure des marchés du logement, au-delà d?une catégorisation entre « urbain » et «rural ». Ainsi les « mailles » rassemblent des communes ayant des marchés du logement aux fonctionnement similaires, qui dessinent un « continuum de tension des 22. « Désir de campagne : de nouvelles façons de vivre et de travailler en milieu rural », Cours public de Claire Delfosse (Université Lyon 2), Ecole Urbaine de Lyon https:// www.youtube.com/watch? v=eJoLqmPHvpY 23. Voir à ce titre La revanche des villages, Eric Charmes : dans cet essai grand public, Eric Charmes interroge les liens entre villes et campagnes à l?aune des espaces « entre-deux » : le périurbain. A travers ce prisme, il montre, notamment, que les catégories géographiques ne correspondent pas à des catégories sociales et que, ni en ville, ni à la campagne, ni dans le périurbain, ne se trouvent des réalites socialement homogènes. 24. Une nouvelle grille de lecture des territoires pour le logement, la maille habitat, SDES, 2019 https:// www.statistiques.developpe ment-durable.gouv.fr/une- nouvelle-grille-de-lecture- des-territoires-pour-le- logement-la-maille-habitat présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 19 marchés immobiliers », du moins tendu au plus tendu, du plus rural au plus urbain. 6 types de territoires sont ainsi identifiés : ? les mailles détendues à dominante rurale : soit les campagnes, espaces peu denses ? TYPE 1 ? les mailles peu tendues à dominante périurbaine : des regroupements d?espaces ruraux peu denses et de campagnes périurbaines ? TYPE 2 ? les mailles assez tendues à dominante urbaine : rassemblent des grandes villes assez dynamiques, notamment les métropoles régionales, et capitales départementales ? TYPE 3 ? les mailles assez tendues des périphéries urbaines : regroupent des espaces périurbains attractifs, des centres urbains secondaires autour des métropoles, notamment dans les couronnes de Toulouse, Bordeaux, Lyon, Montpellier, Pau ? TYPE 4 ? les mailles tendues urbaines, où les difficultés d?accès au logement sont très prononcées : ce sont les territoires urbains où le marché du logement est le plus tendu (tension sur l?offre, prix élevés) en particulier des mailles francilienne, de Marseille ou de Lille ? TYPE 5 ? les mailles tendues mixtes et touristiques : territoires, non métropolitains, qui connaissent aussi une forte tension du marché du logement, en lien notamment avec l?attractivité touristique des territoires : des petites villes et campagnes touristiques, notamment en Corse, sur la façade Atlantique, les massifs des Alpes et des Pyrénées ? TYPE 6 - + tension im m obilière Figure 6 TYPES DES MAILLES HABITAT Zonage 2020 du SDES requalifié par les auteurs Source : SDES (2020) - fond de carte : IGN (2020) - réalisation : A. Coulondre, M. Bléhaut et C. Juillard (2022) Zonage : maille habitat présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 20 Les analyses menées sur les données de la plateforme leboncoin permettent de matérialiser les territoires vers lesquels se projettent les Français qui consultent des annonces immobilières. Elles permettent de saisir dans quels territoires les habitants des territoires urbains les plus denses se projettent, et si et comment ces projections ont évolué avec la pandémie de Covid-19. Elles nuancent finalement fortement l?hypothèse d?un désir de campagne comme moteur principal des mobilités. Premier constat : sur l?ensemble des flux observés, ceux qui concernent les mouvements de l?urbain (type 5, type 3) vers une maille rurale (type 1) représentent une minorité (14 % seulement, sur l?ensemble des projections des Français). À titre de comparaison, les flux entre mailles urbaines (type 5 et 3) représentent à eux seuls 28 % des projections. Les projections des urbains vers le rural n?ont ainsi rien d?un phénomène massif, et, de surcroît, elles n?augmentent pas avec la pandémie. Aussi, dans la structure globale des projections entre les territoires, le flux de départs des villes vers la campagne existe, sans être un phénomène structurant à l?échelle nationale, ni une tendance qui s?accentue. Qu?en est-il des habitants des villes les plus tendues (type 5), candidats les plus identifiés à l?exode urbain ? Lorsque sont isolées les projections des habitants des centres urbains les plus tendus, les résultats montrent une nouvelle fois une variété de territoires d?élection des habitants des métropoles, et une stabilité de ces projections dans le temps (figure 7) : Source : leboncoin et SDES, exploitation Alexandre Coulondre, Claire Juilliard, Marianne Bléhaut. Périmètre d?observation : visites ayant mené à au moins une vue sur les pages «immobilier» pour les logements à vendre en France métropolitaine et en Corse quel que soit le bien Note de lecture : au deuxième trimestre 2019, 9 % du trafic (nombre de vues sur les annonces) correspond à des internautes situés dans des mailles de type 5 (très tendues) se projetant dans des mailles de type 2 (détendues à dominante rurale). Cette proposition est stable aux deuxièmes trimestres 2020 et 2021. Figure 7 PROJECTIONS DES INTERNAUTES ISSUS DES CENTRES URBAINS DENSES (TYPE 5) VERS D?AUTRES TERRITOIRES, DONT LES ESPACES RURAUX présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 21 Ainsi, les habitants des marchés urbains les plus tendus ciblent, dans des proportions proches et sans changement significatif avec la crise, aussi bien des zones rurales (type 1) que des franges périurbaines (type 2) et des métropoles et des villes moyennes moins tendues (type 3). Ils se détournent en revanche pour une large part des mailles les plus tendues des périphéries urbaines, périurbain compris (type 4). L?ensemble de leurs projections révèle combien la tension immobilière constitue un puissant moteur des intentions d?achat hors des marchés urbains les plus tendus. CAS PRATIQUE : Déménagements post-Covid depuis et vers Paris Source : UMR CESAER, données des contrats de réexpédition de courrier La Poste ; zonage en unités urbaines pour les schémas, en départements pour la carte présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 22 Vers un rééquilibrage de l?armature urbaine ? Les Français qui souhaitent quitter un grand centre urbain, loin de se rediriger exclusivement vers la campagne se projettent donc dans une myriade de territoires, parmi lesquels des territoires ruraux, certes, mais aussi une variété de villes, petites et grandes. Les analyses menées sur les données de contrats de réexpédition définitive de courrier de la Poste permettent de quantifier ce rééquilibrage de la hiérarchie urbaine, consistant en un déplacement des ménages vers des villes de taille plus modeste et vers les espaces ruraux. Lorsqu?un ménage choisit de quitter un centre urbain, il aura tendance, s?il ne s?installe pas dans une couronne périurbaine, à s?installer dans une ville un peu plus petite que celle qu?il quitte : un Parisien peut choisir d?aller s?installer à Nantes, Marseille ou Lyon ; un Rennais à Quimper ou Vannes ; un Toulousain à Albi ou Foix, etc. Ce phénomène s?est accéléré depuis le début de la pandémie, et de manière beaucoup plus intense au départ des plus grandes unités urbaines25. La figure 9 illustre ce phénomène. Flux de réexpédition définitive de courrier pour les particuliers entre catégories d?unités urbaines (grandes villes, villes moyennes, petites villes et hors unités urbaines) sur les 12 premiers mois de crise sanitaire (période entre mars 2020 et mars 2021), avec évolution par rapport à la période avant crise (période entre mars 2019-mars 2020). Source : données de réexpédition du courrier de La Poste (contrats définitifs pour les particuliers) ; Base des unités urbaines 2020, Insee ; Recensement de la population 2018, Insee ; UMR CESAER 1041, 2022. Note de lecture : la largeur d?une bande de couleur est proportionnelle à l?importance des flux des déménagements entre la catégorie d?origine (à gauche) et la catégorie de destination (à droite). Sur la droite, la hauteur de la bande noire associée à une catégorie d?espaces est proportionnelle au pourcentage des flux de déménagements qu?elle reçoit. Ainsi, 43% des ménages ayant changé de résidence principale se sont installés dans les grandes villes dans les 12 premiers mois de crise sanitaire, contre 20% dans les villes moyennes, 19% dans les petites villes et 18% dans les communes rurales. 25. Les unités urbaines sont construites en France métropolitaine et dans les DOM d?après la définition suivante : une commune ou un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) qui compte au moins 2 000 habitants. https://www.insee.fr/fr/ metadonnees/definition/ c1501 Figure 9 présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 23 Deux types de flux sont à différencier sur ce graphique : ? Des flux qui demeurent dans la même catégorie d?espace : une part importante des déménagements nationaux se font au sein d?un même territoire (d?un centre vers une périphérie, ou d?une commune d?un pôle à l?autre). Ces flux rassemblent aussi les déménagements entre deux unités urbaines de taille similairs et constituent, pour chaque catégorie, la majorité des déplacements, avec 36,5% des flux entre grandes villes, 11,6% des flux entre villes moyennes et 8,3 % des flux entre petites villes, mais leur proportion tend à baisser depuis la pandémie (-1,4 points). ? Des flux, moins importants en volume, qui changent de catégorie urbaine, en direction soit d?un territoire plus grand (vers le haut), soit d?un territoire plus petit (vers le bas). Depuis la pandémie, tous les flux en direction d?espaces moins peuplés augmentent, les plus fortes hausses concernant les flux des grandes villes en direction des villes moyennes (+0,29 points), des petites villes (+0,48 points) et des communes rurales (+0,53 points). A l?inverse, à l?exception des flux des communes rurales vers les petites villes, tous les flux en direction des espaces plus peuplés diminuent après le début de la crise sanitaire. Ainsi, ce graphique montre d?une part, que les grandes villes concentrent toujours une part importante des déménagements français, avec 43% des emménagements dans les grandes villes, et d?autre part, que les flux qui quittent les villes plus grandes vers les villes plus petites sont plus importants que ceux qui quittent les villes plus petites vers les villes plus grandes. La figure 10 complète ces analyses. Figure 10 Source : données des contrats de réexpédition de courrier, La Poste - traitement UMR CESAER Zonage : unité urbaine présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 24 Enfin, une approche par les soldes migratoires (différence entre le nombre de personnes qui sont entrées sur le territoire et le nombre de personnes qui en sont sorties au cours de l'année) permet de documenter les trajectoires démogra- phiques des territoires avant et après le début de la crise (figure 11). Ainsi, la comparaison de l?évolution des soldes migratoires entre les différentes ca- tégories de villes et de territoires montre tout d?abord une relation négative entre le solde migratoire et la catégorie de population. Aux extrêmes, le solde migratoire de l?unité urbaine de Paris, très négatif en période pré-Covid (autour de -10,5 pour 1000 ménages), s?est fortement détérioré avec la crise sanitaire de la Covid-19 en tombant à -14,6 durant la seconde année de crise sanitaire. A l?autre extrême, le solde migratoire des communes rurales, déjà très excédentaire avant Covid (autour de 8 pour 1000 ménages), a connu une belle progression avec la crise sanitaire qui se confirme sur la période la plus récente, pour atteindre 10,39. À l?intérieur de la classe des villes moyennes, des disparités existent avec une tendance différente pour les unités urbaines de moins de 100 000 habitants, qui connaissent une amélioration de leur solde migratoire, contrairement aux villes plus peuplées de la même catégorie. En bref, si les résultats préliminaires repéraient le renforcement et l?accélération de phénomènes déjà présents dans les territoires à savoir le desserrement urbain, la périurbanisation ? qui s?étend à d?autres territoires et devient une « méga- périurbanisation », la « renaissance rurale », et le renforcement de l?attractivité des espaces de villégiature, il convient d?ajouter, au vu de ces résultats, un processus de rééquilibrage dans l?armature urbaine française. Source : données des contrats de réexpédition de courrier, La Poste - traitement UMR CESAER Zonage : unité urbaine Figure 11 présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 25 PopFlux : un outil interactif pour visualiser les soldes migratoires et les flux entre territoires Dans le cadre de cette étude, l?UMR CESAER a développé une application interactive de visualisation des déménagements qui ont eu lieu en France métropolitaine entre 2017 et 2022 ; ce qui permet, notamment, d?évaluer les conséquences de la crise de la Covid-19 sur les flux de mobilité résidentielle. Construite sur les contrats de réexpédition de courrier souscrits auprès de La Poste, cette application est consultable gratuitement au lien suivant : https://popsu.archi.fr/programme/exode-urbain L?application comporte deux interfaces cartographiques : ? l?interface «Soldes migratoires» qui propose des cartes interactives des soldes migratoires et de leur variation entre plusieurs périodes. ? l?interface «Flux de déménagements» qui permet de visualiser sous forme de flux, les soldes migratoires entre deux territoires ainsi que leur variation. Elle fournit également pour chaque territoire le pourcentage de flux internes, de flux entrants et de flux sortants et leur variation par rapport à la période précédente. Accédez à l'outil en ligne présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 26 Dans ces deux interfaces, l?utilisateur peut choisir de représenter les indicateurs à trois échelles géographiques différentes, qui sont la maille habitat, le département et la région. Ces outils permettent de rendre compte des disparités territoriales et de leur évolution sous l?effet du Covid-19. Les cartes interactives mettent par exemple en avant l?attractivité résidentielle des littoraux, comme dans les Côtes-d?Armor, avec une large majorité de flèches rouges qui matérialisent des gains nets de ménages par rapport aux autres départements. Ou encore les différentiels d?attractivité résidentielle entre les différentes catégories d?espaces (centres urbains, espaces périurbains et ruraux). présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 27 Les enquêtes de terrain26 menées auprès de ménages qui ont quitté les centres urbains depuis le début de la pandémie témoignent d?une grande diversité de profils, de stratégies, de modes de vie et d?engagement : il n?y a pas d?unité sociolo- gique ? ou de portrait-robot, d?un « exodeur », mais bien une myriade de ménages, marqués par des capitaux sociaux, culturels et économiques différenciés, soumis à des contraintes variées et avec des projets plus ou moins en rupture avec la vie urbaine. Adoptant une approche par la construction de « profils », qui utilise une logique idéal-typique, l?équipe portant les travaux qualitatifs a identifié cinq profils différents de ménages ayant quitté un centre urbain depuis le début de la pandémie. Chaque profil articule des éléments sur les propriétés sociologiques des ménages (âge et structure du ménage, position sociale et niveau de vie, types d?emploi et conditions de travail, lieux de vie antérieur) et sur leurs projets résidentiels (motifs du départ, ressources et contraintes, besoins et envies, goûts et dégoûts, manières d?habiter). Ces cinq profils rappellent le poids des facteurs traditionnels de la mobilité résidentielle : âge et cycle de vie (effet retraite ; effet jeunes enfants dans le départ de la grande ville et le retour aux origines), socialisation résidentielle enfantine (avoir grandi à la campagne), contraintes professionnelles (qui parfois s?assouplissent avec un accès généralisé au télétravail pour une partie de la population active, qui produit des effets de desserrement géographique). Cepen- dant ils font aussi émerger des facteurs de mobilité nouveaux (en particulier les préoccupations écologiques) ou renforcés par les crises sanitaire et économique (prix des logements en ville, précarité de la jeunesse, épargne croissante pour les mieux lotis), ainsi que la diffusion de rapports non conventionnels à l?habitat : outre le classique désir d?espace (troquer l'exiguïté d?un appartement en ville pour un pavillon avec jardin permettant un accès à la nature ou doté d?une pièce en plus), émergent la recherche de biens et de territoires refuges face aux crises (sanitaire, écologique, économique), des formes de multi-résidentialité, la diffusion de l?habitat léger. Ceux qui partent vers les campagnes : une diversité de profils 26. Enquêtes menées sur les installations dans les territoires des Monts du Pilat, des Vosges du Nord, des Cévennes, des Corbières et Pyrénées audoises, de la CC des Causses et de la Vallée de la Dordogne, et auprès de ménages quittant Paris et sa petite couronne. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 28 Sous le soleil rien de nouveau : des retraités et pré-retraités toujours nombreux Bien que peu médiatisés, les retraités et pré-retraités sont présents comme nouveaux arrivants dans tous les territoires d?étude. Deux profils se dégagent : d?un côté, les retours au pays après une vie professionnelle en ville ; de l?autre, les personnes extérieures au territoire, en quête d?un cadre de vie de qualité (soleil, verdure, mer) et qui connaissent souvent la région pour y avoir passé des vacances. Les (pré)retraités constituent une importante composante de la dynamique démographique dans les espaces traditionnels de villégiature. Ce type de territoire est marqué par une forte tension sur le marché du logement, accentuée par l?accroissement de la bi-résidentialité et de l?offre locative touristique, qui conduisent à un déficit de logements pour les résidents à l?année. La saisonnalité de leur présence induit aussi des difficultés à maintenir une offre de services continue. Cette catégorie de population est attentive à l?offre médicale et paramédicale (la présence de la pharmacie est cruciale), à l?accessibilité pour ses déplacements (les routes de moyenne montagne étroites et à virages peuvent poser problème l?âge avançant) mais aussi dans la perspective de l?accueil des petits-enfants pendant les vacances scolaires. Nombreux, ils s?insèrent dans le tissu local et peuvent former des groupes mobilisés pour la défense de leur cadre de vie. Vers la « méga-périurbanisation » ? : ménages de profession intermédiaire et classes populaires stables, allongeant leurs navettes quotidiennes grâce au télétravail Ces profils concernent des ménages de professions intermédiaires et classes populaires stables, allongeant leurs navettes quotidiennes grâce au télétravail. Ces ménages s?installent dans les couronnes périurbaines éloignées en rejouant les divisions sociales connues dans les territoires urbains, avec des communes et des secteurs plus ou moins valorisés. À titre d?exemple, les lointaines périphéries de Perpignan, ou de Carcassonne, constituent des espaces d?arrivée de ménages s?éloignant de ces villes où acquérir un pavillon en première couronne est devenu trop cher. Le moteur de la migration repose ici sur les prix du territoire de départ plus que sur le choix positif du territoire d?arrivée. Néanmoins, la nature souvent contrainte du déménagement peut se retourner en sentiment d?amélioration des conditions de vie, lié notamment aux aménités des territoires d?accueil. La crise sanitaire a accéléré ces déménagements, même s?ils peuvent être d?abord liés à des crises familiales ou professionnelles (maladies, ruptures familiales, burn-outs, problèmes scolaires des enfants), ce qui invite à croiser trajectoires micro et contextes macro pour comprendre les mobilités résidentielles actuelles. Ce résultat se retrouve aussi dans les analyses quantitatives menées sur les données de navigation du site leboncoin. Lorsque l?on isole les liens nouvellement apparus ou s?étant significativement renforcés entre 2019 et 2020, les projections allant de l?urbain vers les couronnes périurbaines les moins tendues apparaissent tout particulièrement (figure 12) : elles témoignent d'un renforcement relatif des projections des internautes dans les pôles urbains vers les couronnes périurbaines à la faveur de la crise. Ce graphique est aussi un témoin de la complexité des flux résidentiels : si l'augmentation des projections vers les couronnes périurbaines est bien la plus forte, suivie par une augmentation des projections vers le rural, se sont aussi renforcées, depuis le début de la crise, les projections depuis les mailles périurbaines vers les mailles les plus tendues (dans une moindre mesure). Ce coup de sonde permet de voir une tendance à un instant précis (un an après le début de la crise). présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 29 Extension du domaine des possibles : cadres supérieurs et professionnels qualifiés avec enfants, alliant grande mobilité et télétravail Les profils de cadres supérieurs et professionnels ont été parmi les plus fortement médiatisés. Si ce profil est présent dans les enquêtes, il est loin de concerner la majorité des cas dans les territoires d?étude. Alliant grande mobilité et télétravail, l?un des deux membres du ménage conserve souvent son poste métropolitain et alterne télétravail et navettes de longue distance régulières, tandis que l?autre travaille à domicile. Ce type peut s?étendre aux ménages de même profil sociologique qui conservent leur résidence principale dans une métropole mais investissent à la campagne dans un bien immobilier « multifonction » : résidence secondaire, lieu de reconfinement possible ou permettant la mise en place d?une multi-résidence (semaine partagée entre la ville et la campagne) à la faveur d?un télétravail partiel. Ce bien « multifonction » représente aussi un investissement sûr pour ces ménages : potentiellement rentabilisable par les locations saisonnières ou ponctuelles facilitées par les plateformes en ligne, le bien prendra probablement de la valeur dans le contexte du réchauffement climatique. Ce profil correspond à des ménages relativement aisés et de plus de 40 ans. Cela concerne essentiellement les littoraux, les territoires ruraux desservis par le TGV ou une ligne de TER connectée à une gare TGV, mais aussi les espaces à haute qualité paysagère : principalement, donc, des territoires déjà attractifs avant le début de la pandémie (figure 4). Réseau simplifié des « sur-liens » apparus entre types de mailles en France au deuxième trimestre 2020 par rapport au deuxième trimestre 2019 (projections normalisées et comparées des internautes à travers les vues d?annonces immobilières) Source : leboncoin et SDES ; exploitation : M. Bléhaut, A. Coulondre, C. Juillard Zonage : maille habitat Périmètre d?observation : visites ayant mené à au moins une vue sur les pages « immobilier » pour les logements à vendre en France Métropolitaine et Corse quel que soit le bien (appartements et maisons) Notion de « sur-lien » : indicateur ad hoc permettant de faire ressortir les liens entre mailles qui se sont significativement renforcés d?un point de vue relatif (en prenant notamment en compte la taille relative des territoires). Cette approche fait ressortir les écarts à la tendance même s?ils concernent de petits flux. En effet, une augmentation de trafic de quelques centaines de vues d?annonces entre deux types mailles très petites pourra ressortir comme un « sur-lien », alors qu?il faudra que le trafic augmente de plusieurs dizaines de milliers pour qu?un sur-lien soit identifié entre deux types mailles très grosse. Note de lecture : les projections allant des mailles de type 3 vers le type 2 (périurbanisation) a eu tendance à augmenter d?un point de vue relatif entre le deuxième trimestre 2019 et le deuxième trimestre 2020. Il s?agit de la plus forte augmentation (plus important sur-lien). Figure 12 «SUR-LIENS» ENTRE LES TYPES DE MAILLES AVANT-APRÈS LE DÉBUT DE LA CRISE Maille détendue à dominante rurale Maille assez détendue des périphéries urbaines Maille tendue urbaine Maille assez ten- due à dominante urbaine Maille peu tendue à dominante périurbaine Maille tendue mixte Liens : Attractivité relative du type de maille (taille proportion- nelle au cumul des coeffi- cients de sur-liens entrants) Noeud : Intensité du sur-lien entre les types de mailles (taille pro- portionnelle au coefficient de sur-lien) présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 30 « Être les pieds dans la terre » : une recrudescence de familles de diplômés alliant télétravail et reconversion professionnelle Prolongeant les travaux sur la renaissance rurale, l?enquête de terrain identifie des profils de ménages généralement diplômés, alliant télétravail et projet de reconversion professionnelle plus ou moins alternatif. Ces reconversions concernent des projets d?autoentreprise de service (consultant, coaching personnel, bien-être etc.), d?artisanat (bijouterie, menuiserie, boulangerie, etc.), de maraîchage ou de cultures à haute valeur ajoutée (plantes aromatiques par exemple). Ces profils ont pour particularité de passer l?essentiel de leur temps, de résidence comme de travail, dans le territoire d?installation. Parfois très diplômés, et passés par des grandes agglomérations pour leurs études et le début de leur vie active, ils ont souvent des origines rurales et montrent de fortes préoccupations écologiques, qui peuvent les conduire à un fonctionnement en réseau (lieux d?approvisionne- ment, canaux institutionnels de soutien aux travaux ou aux activités profession- nelles, réseaux sociaux plus ou moins militants?). Ils alimentent en même temps un imaginaire de « transition rurale » par leur présence, leurs pratiques écologiques en matière d?habitat, mais aussi par leurs projets professionnels et leur investissement multiforme dans le territoire (cafés associatifs, épiceries coopératives, offre culturelle, réseaux militants et/ou festifs, etc.). « Sous les radars » : marginaux et population à la précarité plus ou moins choisie en quête d?un mode de vie alternatif Enfin, l?enquête de terrain identifie des profils moins médiatisés, rencontrés dans les territoires où il est possible de vivre de peu grâce à la solidarité locale, la débrouille et l?autosuffisance : des ménages en situation de précarité, plus ou moins choisie. Pour certains, c?est la combinaison des conditions de (sur)vie dans les grandes métropoles (difficulté d?accès au logement et à l?emploi) et de la montée en puissance de la problématique de l?effondrement qui les pousse à choisir une forme de marginalité. Ils cherchent alors des formes d?autonomie dans une économie de survie : autonomie énergétique, alimentaire, en eau... D?où la recherche de territoires non seulement structurés par des liens d?entraide, mais aussi relativement cachés, à l?écart des axes de communication, et dotés de ressources naturelles (cours d?eau, terres cultivables, fruitiers), où peuvent se développer des formes d?habitat léger (auto-construction, « tiny houses », voire yourtes ou camions). Mobiles et méfiants, ils sont difficiles à quantifier, mais leur nombre aurait augmenté depuis le confinement, d?après les acteurs locaux. Pour d?autres, il s?agit d?une marginalisation davantage subie (mais il existe un continuum), correspondant à une éviction de longue durée du marché du travail et du marché du logement, conduisant à des formes de « cabanisation » : habitat en vieille caravane dans un terrain agricole isolé, ou en camion (souvent des hommes jeunes, seuls, et instabilité ? voir le turnover dans certaines vallées cévenoles). Ces derniers profils semblent rester quantitativement assez peu nombreux et concentrés dans les régions méridionales non littorales. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 31 Désir de campagne ou désir d?espace : quels moteurs des déménagements ? Rééquilibrage de l?armature urbaine, projection des habitants des centres urbains denses vers des centres urbains moins denses : ces résultats questionnent les moteurs des mobilités résidentielles et leurs évolutions depuis le début de la pandémie. En préambule, rappeler peut-être que les choix des territoires d?accueil dans les déménagements sont fruits de compromis des ménages entre facteurs variés. Classiquement, la démographie identifie des facteurs «push» (du verbe anglais pousser - facteurs de «répulsivité») et des facteurs «pull» (tirer - facteurs d?«attractivité») qui s?associent dans les mouvements migratoires27. Les raisons des mobilités résidentielles sont donc fondamentalement complexes : à ces facteurs, liés aux territoires de départ et de destination, se mêlent des caractéristiques propres aux ménages, notamment des dimensions culturelles et socio-économiques qui influencent aussi fortement les choix de mobilité. Dans ce contexte, les liens entre moteurs de déménagement et pandémie ne se limitent pas au seul «désir de campagne» largement médiatisé, mais se diversifient en fonction des profils et des trajectoires des ménages. Un désir de campagne ? Les travaux menés sur les données d?estimations immobilières réalisées sur la plateforme Meilleurs Agents par les acheteurs soulignent une baisse des intentions de relocalisation inter zones urbaines et une hausse des intentions de relocalisation depuis une zone urbaine vers une zone rurale. La part des recherches du premier type est passée de 75,3% à 70% entre la période pré-Covid (entre le 01/01/2019 et le 12/03/2020) et la période suivant la fin du 3e et dernier confinement (entre le 3/05/2021 et le 20/09/2021), quand la part du second type de recherches est passée de 9,2% à 12,9%. L?analyse économétrique28, réalisée en croisant les estimations « propriétaires » et «acheteurs » faites par un même utilisateur sur le site, révèle un effet significatif de la crise sanitaire sur les intentions de mobilité des urbains. Premièrement, parmi les utilisateurs habitant dans l?urbain, la probabilité de rechercher en dehors de l?aire d?attraction de sa ville est 13% plus élevée depuis la crise. Pour les résidents ruraux, cette probabilité augmente moins (de 10,8 %). Le second résultat concerne la 27. «Pull factors et push factors (démographie)», Géoconfluences, 1er février 2023, http:// geoconfluences.ens-lyon.fr/ glossaire/pull-and-push 28. « Nouvelles ruralités en Lorraine : un "désir de cam- pagne" limité à quelques espaces résidentiels et récréatifs », Philippe Debard, Économie lorraine 205-06, INSEE, 2010 : https:// www.insee.fr/fr/statistiques/ 1294663 présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 32 probabilité de chercher dans une zone rurale depuis une zone urbaine qui augmente de 7,7 % depuis la crise. En revanche, il n?y a pas d?augmentation significative pour les résidents ruraux. Quand on croise les deux dimensions, on voit que la probabilité de chercher dans une zone rurale dans une autre aire d?attraction plutôt que de chercher dans une zone urbaine dans l?aire d?attraction de son lieu de résidence est plus élevée depuis la crise (+13,9 % pour les résidents urbains et +18,7 % pour les résidents ruraux). Ainsi, les utilisateurs urbains cherchent significativement plus loin et plus dans les zones rurales depuis la crise. D?ailleurs, ce regain d?intérêt pour les zones rurales et, à l?inverse, le moindre intérêt pour les zones urbaines depuis la crise se ressentent sur les prix de l?immobilier. Alors que durant les trois années avant la crise (mars 2017 - mars 2020), les prix de l'immobilier augmentaient bien plus fortement à Paris et dans les 10 plus grandes villes de France (respectivement +21,1% et +22,3%) que dans les zones rurales (+4,6%), la tendance s?est inversée depuis le premier confinement. Paris a même vu ses prix baisser de -2,5% entre mars 2020 et février 2023, quand les prix des 10 plus grandes villes françaises ont augmenté de seulement 17,4% et les zones rurales de +21,5%. À l?échelle nationale, les projections des internautes de Meilleurs Agents répondent ainsi aux évolutions des soldes migratoires dans les zones rurales (figure 13). À noter néanmoins, la renaissance rurale est marquée par une réelle sélectivité géographie : elle ne touche pas tous les territoires, et même dans les territoires connaissant des dynamiques au global positives, de fortes disparités se font jour29. La généralisation du télétravail, des effets relatifs sur les modes de vie d?une partie des actifs Les premiers mois de la pandémie ont fortement contribué à diffuser et à normaliser des pratiques de télétravail, pour une partie de la population active (estimée de 20 à 30 %), avec une importance toute particulière en Île-de-France. Bien que restreinte à certains corps de métiers, la progression des pratiques de té- létravail30 a des effets sur les choix résidentiels de certains ménages, en permettant 29. Pour plus de détails voir Breuillé, M.-L., Le Gallo, J. & Verlhiac, A. (2022) ; Residential Migration and the COVID-19 Crisis: Towards an Urban Exodus in France? Economie et Statistique / Economics and Statistics, 536-37, 57?73. 30. Jérémie Almosni & Nicolas Louvet & Abigaëlle Nivoix & Léa Wester, «Quand le télétravail devient possible : analyse des impacts de la crise sanitaire sur les pratiques de mobilité », Métropolitiques, 14 octobre 2021. URL : https:// metropolitiques.eu/Quand- le-teletravail-devient- possible-analyse-des- impacts-de-la-crise- sanitaire.html Source : Meilleurs Agents Figure 13 présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 33 notamment un assouplissement de la contrainte de proximité du lieu de travail, et une installation dans des territoires plus éloignés (en distance physique et en distance temps). À l'aune de l'enquête, la généralisation du télétravail peut avoir un impact sur les choix de mobilité de trois types de profils : ? Des cadres supérieurs qui ont adopté la bi- voire la tri-résidentialité, un mode de vie qui leur permet de s'installer « en pointillé » dans des territoires éloignés et ruraux, en maintenant un lien à un espace de métropole par une connexion aux réseaux de transports (ferrés ou autoroutiers) ; ? Des professions intermédiaires, qui accèdent, à la faveur de la pandémie, à des conditions renforcées et permanentes de télétravail (en général de deux ou trois jours par semaine). Ce nouveau paramètre influence les équilibres à l?heure dans leurs choix résidentiels : alors que le télétravail permet de rester au domicile quelques jours par semaine, les ménages peuvent considérer un éloignement vis-à-vis de leur lieu de travail, et un allongement des temps de navette. Cet éloignement permet, souvent, d?accéder à des biens présentant de nouvelles qualités (taille, extérieur, etc.) dans des marchés moins tendus, voire d?accéder à la propriété pour des jeunes ménages31 ; ? Des jeunes diplômés avec un projet de reconversion professionnelle (souvent préexistant à la crise) pour un des membres du couple, et l?autre membre pouvant télétravailler. L? « effet moisson » : la concrétisation d?un projet ancien à la faveur des confinements La pandémie du Covid 19 a joué un rôle catalyseur dans les projets de vie de ménages. Elle est devenue l?opportunité qui cristallise un projet de déménagement préexistant à la crise, le concrétise et lui donne corps. Si les confinements ont d?abord stoppé les projets de déménagements, la levée des restrictions sanitaires a accéléré les départs des personnes déjà désireuses de quitter les métropoles, en particulier les familles de 25-40 ans avec des jeunes enfants. Cette hypothèse est corroborée par le fait que si les inscriptions dans les écoles primaires franciliennes ont légèrement baissé, signe d?un départ de ménages avec jeunes enfants dans le centre de la métropole, ce n?est pas le cas des inscriptions dans l?enseignement se- condaire32. Cette accélération de la concrétisation de projets de personnes qui souhaitaient déjà partir constitue un « effet moisson » qui a pu renforcer, le sentiment d?accélération des départs vers des villes plus petites ou des territoires ruraux. Le rejet de la ville ou l?éco-anxiété La pandémie de Covid-19, et les causes de l?émergence du virus, ont alimenté pour certaines personnes un projet de changement de vie qui prend racine, pour partie, dans une forme d?éco-anxiété, et de rejet d?un modèle de vie « urbain », marqué par le carcan que représentent les emplois de bureaux, l?exiguïté du cadre de vie en ville et la compétition de l?économie néo-libérale. Les personnes enquêtées, ayant fait le choix de déménager dans des espaces éloignés, en particulier quand ils s?accompagnent d?un projet de changement de vie, témoignent du rôle central des crises dans les vies précédentes (burn out, maladie) qui constituent un élément déclencheur de déménagement. 31. Les enjeux des liens entre télétravail et développement territorial demeurent largement à explorer ; à ce titre, les travaux coordonnés par Julie Perrin, Anne Aguilera et Laurent Terral apportent des premiers éléments d?analyse à l?échelle de l?Île-de-France. Synthèse des travaux menés dans le cadre du Smart Lab Lability [En ligne, à paraître]. 32. « Géographie du monde d?après : assiste-t-on à un exode urbain ? », Olivier Bouba Olga et Etienne Fouqueray, Région Nouvelle Aquitaine, 2022 : https:// blogs.univ-poitiers.fr/o- bouba-olga/2022/01/08/ geographie-du-monde- dapres-assiste-t-on-a-un- exode-urbain/ présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 34 Une évolution des attentes des ménages vis-à-vis des caractéristiques de leur logement Les confinements successifs, couplés à la possibilité de télétravailler, semblent nourrir une évolution des attentes des Français vis-à-vis de leurs logements, notamment documentée par la plateforme Meilleurs Agents au cours de sondages auprès de ses utilisateurs. En substance, les recherches des internautes font état d?une demande plus forte vis-à-vis de pièces en plus, mais aussi d?un extérieur (jardin ou balcon), et bien souvent d?une maison, souvent couplée à une proximité renforcée aux espaces de nature33. Cependant, face à un budget contraint, et avec des centres-villes denses qui présentent souvent une offre très limitée (en stock, en type de biens et en qualité), et souvent financièrement inaccessible à une grande partie des candidats au déménagement, l?accès à des logements qui répondent à ces attentes pour les habitants des centres-villes denses est bien souvent synonyme d?un départ desdits centres-villes, vers d?autres territoires ? moins chers, plus ou moins loin en fonction de la capacité de mobilité des ménages, parfois à la campagne mais pas toujours. À titre d?exemple, la note récente de l?INSEE34, déjà citée, signale que les ménages quittant l?Île-de-France occupent après leur déménagement des logements jusqu?à 31% plus grands que leur logement francilien35. Cette hypothèse fait écho aux travaux menés sur les données de la plateforme leboncoin qui soulignent que la tension sur les marchés immobiliers locaux ? qui rend plus difficile l?accès au logement en pesant sur les prix ? constitue un facteur fort d?explication des mobilités résidentielles à l?échelle nationale : une grande partie des déménagements depuis les zones tendues se fait vers des zones moins tendues, qu?elles soient urbaines (villes plus petites), périurbaines (couronnes) ou rurales. Les effets (limités) des prophéties auto-réalisatrices L?annonce d?une ruée vers les campagnes, très médiatisée et parfois entretenue par des opérations de communication de marketing territorial de collectivités territoriales, a pu contribuer à accélérer le phénomène et à précipiter les achats, entraînant la raréfaction de l?offre et la hausse des prix dans les premiers mois suivant le premier confinement, dans des territoires caractérisés par une étroitesse des marchés immobiliers (peu d?offres). Ce phénomène, relevé par les élus locaux et par les acteurs des marchés immobiliers, a pu être renforcé par une série d?évolutions : le haut niveau d?épargne des 20% les plus riches des Français36, la relative facilité d?accès au crédit immobilier (taux d?intérêt historiquement bas jusque fin 2021), les espoirs suscités par le développement du télétravail ainsi que le caractère de refuge de l?investissement dans la pierre, la crainte de nouveaux rebonds de la crise sanitaire, l?anticipation des effets de la crise écologique et le filet de sécurité que représente la location touristique. Attention donc, les investissements ne sont pas automatiquement suivis d?installation dans les territoires ruraux comme le montrait la première note «Exode urbain, petits flux, grands effets». 33. Sondage Meilleurs Agents : 1 porteur de projet immobilier sur 2 déclare avoir changé ses critères de recherche suite à la crise sanitaire. La recherche d?espace supplémentaire, avec au moins une pièce en plus, se place désormais au coeur des préoccupations, en quatrième position après l?accès aux espaces extérieurs et la proximité à la nature. Étude Toluna pour Meilleurs Agents réalisée du 5 au 11 juillet 2021 sur 2722 personnes représentatives de la population française dont 1133 personnes ayant déménagé ou ayant l?intention de déménager. 34. « Départs des Franciliens vers la province : des écarts de niveau de vie parfois importants avec leurs nouveaux voisins », François Dubujet, Pierre Laurent, Ivan Tissot, Insee 2022 : https://www.insee.fr/- fr/statistiques/6527491#- titre-bloc-4 35. Pour les ménages qui ne connaissent pas de changement significatif de leur structure (arrivée d?un enfant notamment). 36. Conseil d?Analyse Economique, 2020, «Dynamiques de consommation dans la crise : les enseignements en temps réels des données bancaires », Focus, n°49, en ligne : https://www.caeeco.fr/ dynamiques-de- consommation-dans-la- crise-les-enseignements-en- temps-reel-des- donneesbancaires présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 35 pour aller plus loin Étude «diversité des ruralités » Le Comité interministériel aux ruralités (CIR) du 14 novembre 2020 a acté la définition du rural à partir de la grille de densité communale INSEE / Eurostat. Ce critère morphologique a permis de définir les communes rurales (plus de 32 % de la population nationale et plus de 85 % des communes françaises). Il a également proposé de poursuivre les réflexions pour qualifier la diversité de ces communes rurales. Ainsi, l?ANCT a engagé fin 2021 une étude sur la «diversité des ruralités», confiée à la coopérative Acadie associée à Magali Talandier. Finalités de l?étude : ? Rendre compte de la diversité des ruralités : situation actuelle et en dynamique par rapport aux analyses des typologies des campagnes réalisées par la DATAR et l?INRAE en 2003 et 2010; ? Identifier des typologies robustes des territoires ruraux au regard des principaux enjeux des transitions auxquels ils sont et vont être confrontés, en vue d?orienter les politiques publiques. Principaux résultats: deux productionscomplémentaires : ? Une photographie des ruralités sur les dimensions structurelles: économie, profils démographiques, attractivité, dynamiques sociales, accès au numérique, logement et artificialisation des sols, ainsi qu?une évolution des territoires ruraux entre 2033 et 2018; ? Une typologie structurelle : ruralités résidentielles ; petites polarités ; ruralités productives; ruralités touristiques; ? Des trajectoires qui s?affirment : progression des activités touristiques ; redéveloppement industriel ; progression des ruralités résidentielles et affirmation du rôle structurant des petites polarités rurales. ? Une lecture systémique, donnant à voir les capacités contributives des territoires ruraux aux enjeux écologiques, économiques et sociaux au travers de leur inscription dans des réseaux multiscalaires: ? Trois approches systémiques: contribution aux services environnementaux, alimentaires et énergétiques ; contributions à l?économie productive ; contributions à l?accueil et à la mobilité des personnes; ? Une typologie en quatre regroupements de territoires ruraux au regard des transitions : transition agro-écologique; transition agro-industrielle; transition agro-métropolitaine; transition agro-technique. Synthèse et rapport en ligne sur : Agence nationale de la cohésion des territoires ANCT : https://agence-cohesion- territoires.gouv.fr/ L'Observatoire des Territoires : https:// www.observatoire-des- territoires.gouv.fr/ présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 36 Ruralités et Agenda rural Pour répondre à l'ambition gouvernementale d'améliorer la qualité de vie dans les territoires ruraux, l'Agenda rural a été lancé en septembre 2019 par Édouard Philippe, sur la base de propositions de 5 élus (mission Agenda rural37). Ce plan d'action s'inscrit, par ailleurs, dans la démarche d'un Agenda rural européen lancé par la Commission européenne, qui a fait l'objet d'une valorisation spécifique dans le cadre de la Présidence française de l'Union européenne. L'Agenda rural, décliné en 181 mesures impliquant l'ensemble des ministères poursuit quatre grands objectifs : ? faire des territoires ruraux les fers de lance de la transition écologique, ? renforcer leur attractivité, ? améliorer la vie quotidienne des habitants, ? appuyer les élus locaux dans leur action. Depuis le lancement de l'Agenda rural en septembre 2019, sur 181 mesures, 94 ont été réalisées et 79 sont en cours de réalisation. Ces mesures ont permis des avancées notables dans le déploiement numérique, l'égalité des chances dans les territoires, l'accès aux services et le soutien aux initiatives innovantes afin de proposer de nouveaux services comme avec le déploiement des maisons France Services. Plusieurs mesures visant à structurer la gouvernance et à renforcer la territorialisation de l'Agenda rural ont été mises en oeuvre: ? la nomination d'un « référent ruralité » dans chaque cabinet ministériel, chaque administration centrale et chaque préfecture de département (sous-préfet référent ruralité), ? la mise en place, en lien avec les associations d'élus, de 82 feuilles de route départementales pour la ruralité. Des travaux ont été engagés par Dominique Faure associant largement les acteurs de la ruralité visant à lancer le second souffle de l'Agenda rural autour d'une série de mesures resserrées dont la réforme des zones de revitalisation rurales. L'étude « Exode urbain » s'inscrit dans les travaux de prospective pour une meilleure connaissance des ruralités et les évolutions relatives aux mobilités résidentielles qui impacteront les politiques publiques des territoires ruraux. Ces connaissances compléteront d'autres travaux initiés par l'Agenda rural comme l'étude sur la diversité des ruralités « Typologies et trajectoires des territoires » prochainement disponible en mars 2023. Les différents résultats observés permettront de mieux orienter les actions de l'acte 2 de l'Agenda Rural dans les domaines de la santé, de l'éducation, du télétravail, de la mobilité et plus globalement les services coconstruits pour répondre aux enjeux de demain. Pour en savoir plus : https://agence-cohesion- territoires.gouv.fr/ agenda-rural-46 37. Patrice Joly, sénateur de la Nièvre, Cécile Gallien, maire de Vorey-vice présidente de l'AMF, Daniel Labaronne député d'Indre- et-Loire, Dominique Dhumeaux vice président de l'AMRF et maire de La Ferté-sous-Sarthe et Pierre Jarlier, maire de Saint Flour. Exode urbain : les équipes de recherche présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 38 Marianne Bléhaut est statisticienne et économiste, spécialiste d?économie urbaine et environnementale ainsi que d?évaluation des politiques publiques. Au Crédoc, elle dirige le pôle Data et économie et porte plusieurs études à composante territoriale, en particulier sur les comportements de mobilités résidentielles ou du quotidien. Alexandre Coulondre est spécialiste des données et des marchés immobiliers. Il est chercheur universitaire associé au LATTS (laboratoire de l?Ecole des Ponts Paristech) et consultant indépendant auprès des acteurs de l?immobilier et des territoires (DIT Conseil). Il anime par ailleurs le comité « DATA » du LIFTI (Laboratoire d?Initiatives Foncières et Territoriales Innovantes) qui réunit les utilisateurs professionnels de la donnée foncière et immobilière en France. Claire Juillard est docteure en sociologie de l'EHESS (2004). Après avoir co-fondé et co-dirigé pendant sept ans la Chaire Ville et Immobilier de l'Université Paris- Dauphine, elle développe désormais au sein d'OGGI Conseil, sa propre structure, une activité de recherches réalisées grâce à la souscription financière de partenaires issus de l'immobilier ou dans le cadre d'appels d'offre publics de recherche. Elle intervient également en tant que consultante auprès des acteurs de l'immobilier, tant en amont qu'en aval de leurs projets. Équipe 1 : une approche par les projections des Français présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 39 Documenter les projections des Français : un défi méthodologique Pour quantifier l?« exode urbain », le recours à des données originales s?impose donc. Le choix effectué prend appui sur un partenariat avec le site leboncoin. Ce site est le premier portail d?annonces immobilières en France. Il enregistre 16 millions de visiteurs uniques par mois sur les pages d?achat et de location immobilière (contre 6,4 millions pour SeLoger, le second portail le plus visité du pays)38. Il se distingue aussi par sa large couverture territoriale et par sa bonne représentativité sociodémographique. Cette assise offre les conditions d?une méthodologie robuste. Deux types de données ont été exploités dans le cadre de ce partenariat : d?abord, les données de navigation des internautes sur le site ; ensuite, les données issues d?une enquête par questionnaires administrée aux internautes via le portail. Les données de navigation : originalité et spécificités méthodologiques Les données de navigation renvoient aux traces numériques que laissent les internautes lors de leurs parcours de recherche. Pour chaque visite sur le site, plusieurs informations sont collectées de façon anonyme : le lieu de connexion de l?internaute ainsi que la liste des pages d?annonces immobilières consultées, pages pour lesquelles les caractéristiques et la localisation des biens sont connues. Ces informations permettent de savoir dans quel territoire se situe l?internaute et dans quel(s) territoire(s) il se projette. L?ensemble permet de reconstituer, à partir des deux informations de localisation, le réseau des projections géographiques des internautes au sein du territoire français. L?analyse de ces informations trimestre par trimestre entre 2019 (point de référence antérieur au début de la crise) et 2021 (période la plus récente au moment des analyses) permet de suivre l?évolution des projections et les éventuelles déformations géographiques survenues avec la crise sanitaire. Elle permet de tester l?hypothèse d?un accroissement des projections allant des centres urbains vers les espaces ruraux. Les résultats présentés se focalisent sur un sous-ensemble de données portant exclusivement sur les intentions d?achat (et non de location) appréhendées à travers la consultation d?annonces (sans distinction des consultations menant à des prises de contact avec les annonceurs). Ce choix résulte d?analyses empiriques exploratoires qui ont établi que les différents sous-ensembles dessinaient globalement des tendances communes. Finalement, l?étude repose sur 3,5 milliards d?observations statistiques qui correspondent à autant de vues sur les annonces de biens à la vente en France métropolitaine et en Corse enregistrées sur la plateforme leboncoin durant les 12 trimestres de la période 2019-2021. Le défi méthodologique a donc également consisté à prendre en charge cette quantité massive de données. Cette approche basée sur les intentions est essentielle car elle témoigne des aspirations territoriales des ménages de façon beaucoup moins dépendante des conditions locales de marché. Un territoire peut susciter l?intérêt des internautes alors même que le nombre de biens disponibles sur le marché local n?évolue pas et que leur prix n?est pas forcément en adéquation avec leurs moyens effectifs. Ce surcroît d?intérêt détectable dans les données de navigation serait invisible dans une étude portant sur les transactions effectives. En cela, les données de navigation forment une des rares sources disponibles pour appréhender la localisation de la demande résidentielle et ses évolutions. 38. Médiamétrie NetRatings, Audience Internet Global, Avril 2021. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 40 L?enquête par questionnaires Dans un deuxième temps, une enquête par questionnaires auprès des utilisateurs du site leboncoin a permis de constituer une source d?informations plus qualitatives sur les projets des internautes. Elle a représenté l?opportunité d?élargir le champ d?investigation et d?y intégrer des projets réalisés, aux côtés de projets en cours. L?enquête visait plusieurs objectifs : caractériser les modalités possibles de l?exode urbain, entre mobilité résidentielle et bi-résidence notamment, à l?exclusion des configurations s?organisant autour de deux logements déjà possédés avant la crise ; dessiner le profil sociodémographique des candidats à l?exode urbain ; cerner leurs motivations ; et tester le rôle déterminant de la crise sanitaire. Le questionnaire a été adressé en ligne en février 2022. Il a reçu 1725 réponses. Parmi l?ensemble des de ces réponses, 907 ont pu être exploitées dans le cadre de ce travail dans la mesure où les répondants avaient renseigné dans un format exploitable l?ensemble des questions de localisation qui leurs étaient adressées. Un redressement a ensuite été effectué sur l?échantillon afin de respecter la structure des projections géographiques repérée dans les données de navigation. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 41 Marie Breuillé, chercheuse en économie, à l?INRAE et membre du CESAER. Ses travaux portent principalement sur les finances publiques locales (impact de la coopération intercommunale, performance de la péréquation, efficacité de la dépense publique) et sur les marchés immobiliers (méthodologie de la carte des loyers développée avec Camille Grivault et Julie Le Gallo, ratios loyer sur prix, encadrement des loyers, location touristique meublée). Julie Le Gallo, est professeure en économie à l'Institut Agro Dijon et membre du CESAER. Ses travaux portent principalement sur les marchés fonciers et immobiliers (capitalisation des aménités dans les prix de l'immobilier, méthodologie de la carte des loyers développée avec Camille Grivault et Marie Breuillé, location touristique meublée, politiques du logement), l'économie des territoires (mobilités résidentielles, disparités territoriales) et l'économétrie des données géolocalisées. Pierre Vidal, Head of Science chez Meilleurs Agents, a réalisé une thèse CIFRE en économie en partenariat avec l?Université de Cergy Pontoise sur l?utilisation des données de plateforme immobilière pour l?étude des marchés immobiliers. Il a travaillé à la mise en place et l?amélioration des indices, cartes de prix et outils d?estimation des sites du groupe Aviv en France, Allemagne et Belgique. Depuis 2021, il pilote l?équipe de recherche en Data Science au sein du groupe. Équipe 2 : l'exode urbain au prisme des déménagements Cette équipe est coordonnée par Marie Breuillé, Julie Le Gallo et Pierre Vidal. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 42 Elle a rassemblé : Félix Baillet est géographe et cartographe, diplômé du Master Carthagéo (Université Paris Cité). Il a contribué à la recherche dans le cadre de son stage de fin d'études au sein de l'UMR CESAER. Barbara Castillo Rico est Head of Economic Studies chez Meilleurs Agents. Elle est diplômée d?un doctorat en économie immobilière sur des sujets en lien avec le financement immobilier de ménages et l'accès au logement en France, réalisée à l?Aix-Marseille School of Economics en partenariat avec la Banque de France. Depuis 2021, elle pilote l'équipe d?études économiques au sein du groupe AVIV. Camille Grivault est ingénieur d?études en géographie au CESAER. Il apporte un appui aux chercheurs en matière de conception et d?analyse de bases de données spatialisées. Ses travaux portent principalement sur les finances publiques locales (efficacité de la dépense publique) et sur l?analyse des marchés immobiliers et locatifs (méthodologie de la carte des loyers développée avec Marie Breuillé et Julie Le Gallo et la location touristique meublée). Thomas Lefebvre VP Data science entre chez Meilleurs Agents en 2010 pour effectuer une thèse en collaboration avec l?Université Paris Dauphine. Il est aujourd?hui Docteur en Finance de l?immobilier et pilote les projets et les équipes de Data Science du groupe Aviv, propriétaire en France des marques Se Loger et Meilleurs Agents. Sous sa responsabilité, l?équipe Scientifique produit de nombreuses analyses sur l?évolution du marché immobilier français. Il est également enseignant de finance et d?économie de l?immobilier dans le master de gestion de patrimoine de l?Université Paris Dauphine. Olivier Lision rejoint le CESAER en décembre 2021, après ses études à l'école d'économie de Toulouse (TSE). Il est titulaire d'un master en politique publique et développement. Au sein du projet, il est chargé principalement des statistiques descriptives et de la manipulation des données, et il contribue également au développement de l'outil de visualisation de ces données. Alexandra Verlhiac, Économiste, rejoint Meilleurs Agents en 2019 dans l?équipe études économiques. Après un Master en économétrie à la Toulouse School of Economics, elle effectue sa thèse en collaboration avec la société et le CESAER sous la direction de Marie Breuillé et Julie Le Gallo sur les mobilités résidentielles. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 43 Deux sources inédites de données pour quantifier les intentions de mobilité et les mouvements de population Dans l?attente de la publication des données issues des enquêtes logement et du recensement de la population par l'INSEE, qui sont les deux principales sources de données utilisées par les études traitant des mobilités résidentielles, le principal défi a constitué à extraire de l?information de données originales permettant de reconstituer un flux de mobilité (intentionnel ou réel) entre une commune d?origine et une commune de destination. Pour ce faire, l?équipe de recherche a mobilisé deux principales bases de données : les données de la plateforme Meilleurs Agents pour les intentions de mobilité et les données de réexpédition de courrier de La Poste pour les mobilités effectives. Les données de la plateforme Meilleurs Agents Des intentions de mobilité sont reconstituées à partir de l?outil Meilleurs Agents qui permet de réaliser une estimation de la valeur d?un bien immobilier en complétant un formulaire en ligne. Les informations demandées à l?utilisateur sont les caractéristiques du bien, son adresse, ainsi que son statut (propriétaire ou potentiel acheteur du bien estimé). Au final, 100 193 liens ont été reconstitués entre une commune d?origine et une commune de destination, pour 80 662 utilisateurs différents ayant réalisé des recherches entre le 1er janvier 2019 et le 20 septembre 2021. Par ailleurs, l?équipe a mobilisé les consultations d?annonces sur la plateforme Meilleurs Agents ainsi que les remontées des ventes immobilières réalisées par les agences partenaires. Meilleurs Agents a également réalisé l?Étude Toluna du 5 au 11 juillet 2021 sur 2722 personnes représentatives de la population française dont 1133 personnes ayant déménagé ou ayant l?intention de déménager. Les données des contrats réexpédition de courrier de La Poste Plus de 2/3 des ménages qui déménagent souscrivent un contrat de réexpédition du courrier. La base de données transmise par La Poste, qui est exploitée pour la première fois dans la recherche académique, contient près de 12,5 millions de contrats sur la période allant du 17 mars 2016 au 16 mars 202139, dont 8,79 millions de contrats souscrits par des particuliers qui déménagent. Les communes d'origine et d'arrivée40 permettent de retracer les flux de mobilité résidentielle à une échelle spatiale fine et leur évolution sur plusieurs années. La comparaison à l?échelle départementale entre les flux de mobilité résidentielle des ménages basés sur la base des réexpéditions de courrier de La Poste entre le 1er janvier 2017 et le 1er janvier 2018 et ceux des individus provenant du dernier «Fichier détail migrations résidentielles» de l'INSEE sur la même période montre une corrélation de 0,97 pour les flux de mobilité, qu?ils soient inter-départementaux ou intra-départementaux. Avec près de 2/3 de la mobilité résidentielle couverte par des contrats de réexpédition de courrier, et compte tenu de ces très fortes corrélations, la confiance dans la représentativité des données de La Poste est forte. 39. La période d?étude a été choisie en référence à la date du 17 mars 2020 correspondant à la date de début du premier confine- ment. 40. Pour se conformer au Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD), aucune caractéristique concernant le contractant et aucune adresse précise ne sont connues, le niveau le plus fin accessible étant l?IRIS. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 44 Anaïs Collet, est sociologue, maîtresse de conférences à l'Université de Strasbourg (Faculté des Sciences sociales / laboratoire SAGE) et co-directrice de la rédaction de la revue Métropolitiques. Spécialiste de la gentrification, des transformations des classes moyennes et des trajectoires résidentielles, elle est l'auteure de Rester bourgeois. Les quartiers populaires, nouveaux chantiers de la distinction (La Découverte, 2015). Aurélie Delage est enseignante-chercheuse en aménagement et urbanisme à l?université de Perpignan Via Domitia (UMR Art-Dev). Ses travaux portent sur les trajectoires et stratégies de développement des territoires périphériques, notamment les alternatives qui y apparaissent. Elle porte un intérêt récent aux enjeux territoriaux de l?éducation. Max Rousseau est géographe et politiste au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) et membre de l?unité mixte de recherche Acteurs, ressources et territoires dans le développement (ART Dev ; UMR CNRS 5281). Ses travaux portent notamment sur les mutations des espaces en déclin ainsi que sur les contradictions de l?urbanisation étendue. Il a récemment publié Déclin urbain. La France dans une perspective internationale (dir., avec N. Cauchi-Duval et V. Béal, Éditions du Croquant, 2021) et Plus vite que le coeur d?un mortel. Désurbanisation et résistances dans l?Amérique abandonnée (avec V. Béal, Grevis, 2021). Équipe 3 : documenter les évolutions par le terrain Cette équipe est coordonnée par Anaïs Collet, Aurélie Delage et Max Rousseau. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 45 Ce rapport prend appui sur les travaux menés par une équipe pluridisciplinaire, rassemblant : Maryame Amarouche (ENTPE / EVS), Vincent Béal (Université de Strasbourg / SAGE), Eric Charmes (ENTPE / EVS), Solange Coupe (stagiaire Sciences Po Toulouse), Emma Favret (étudiante IEP de Strasbourg) David Giband (Université de Perpignan / Art-Dev), Aurelio Labat (Université de Toulouse / LISST-CIEU), Nathalie Magne (Université de Montpellier-Paul Valéry / Art-Dev), Nicolas Meignant (stagiaire Université de Saint-Etienne / CIRAD / ART-Dev), Christelle Morel-Journel (Université de Saint-Etienne / EVS), Thomas Prima (stagiaire Université de Strasbourg / SAGE), Armand Rousseau (stagiaire Université de Montpellier-Paul Valéry / CIRAD / ART- Dev), François Taulelle (Université de Toulouse / LISST-CIEU), Et des étudiants de la promotion 2021-2022 de la Licence Pro « Développement de projets de territoires » de la Faculté des Sciences sociales de Strasbourg : Mathis Cothenet, Sarah Dutour, Orlane Hurel, Mathilde Lichtenthaler, Mathias Michelli, Etienne Noizet. Méthodologie : enquêter dans cinq territoires ruraux, les replacer dans un panorama plus large Le parti-pris méthodologique a été de nous placer du point de vue des potentiels territoires d?accueil de nouveaux habitants en provenance des métropoles, en enquêtant à deux niveaux de précision : 5 enquêtes localisées d?une part, et d?autre part un tour d?horizon complémentaire. Formant une équipe pluridisciplinaire, nous avons mobilisé des questionnements et des outils relevant de la géographie, de l?aménagement, de la sociologie et de la science politique. Des enquêtes de terrain dans cinq territoires Les cinq territoires étudiés ont été choisis selon deux partis-pris : d?une part en décalage avec les cas largement médiatisés (Perche en tête), d?autre part et surtout en partenariat avec des acteurs locaux : EPURES, agence d?urbanisme de la région stéphanoise pour le Pilat ; l?Agence d?urbanisme de la région nîmoise et arlésienne pour les Cévennes ; l?AURCA, Agence d?urbanisme catalane Pyrénées Méditerranée pour les Corbières ; le PNR des Vosges du Nord ; et la région Occitanie. Enfin, le territoire de Martel était déjà à l?étude dans le cadre du programme POPSU- Territoires : dans le cadre de ce projet, son étude a été élargie à la Communauté de communes Causses et Vallée de la Dordogne. Ces cinq territoires ont fait l?objet d?enquêtes localisées prenant appui sur divers matériaux et croisant les points de vue de différents acteurs. Il s?agissait d?aller voir sur le terrain, dans cinq territoires pouvant potentiellement accueillir des ménages en partance des métropoles, si un « exode urbain » était observé, sous quelle(s) forme(s), et quels enjeux il soulevait alors. Cette enquête qualitative multi-située repose sur une base méthodologique commune à tous les territoires, à laquelle présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 46 s?ajoutent des déclinaisons spécifiques en fonction des problématiques locales et des matériaux disponibles. Dans les cinq territoires étudiés, nous avons : ? mené des entretiens avec des acteurs locaux (élus et services techniques des collectivités, services déconcentrés de l?Etat, commerçants, agents immobiliers, acteurs associatifs, etc.) ; ? conduit des récits de vie avec des nouveaux habitants post-confinement aux profils diversifiés, matériau complété par des récits de vies de couple quittant l?Île-de-France pour des destinations rurales ; ? analysé les données du répertoire SIRENE sur les créations d?entreprises. En outre, deux questionnaires ont été administrés et traités : l?un auprès de porteurs de projets de rénovation de bâtiments anciens dans les Vosges du Nord (N=65) ; l?autre auprès des 99 maires du PNR Corbières-Fenouillèdes (N = 33). Un panorama national Cette enquête sur cinq territoires spécifiques a été complétée par un panorama des dynamiques à l?oeuvre dans d?autres territoires (Finistère, Côtes d?Armor, Bourgogne, Causses, Clunisois, Montagne bourbonnaise, Pays basque, Champagne). Pour cela, des entretiens ont été menés en visio auprès d?une dizaine d?agences d?urbanisme, mais aussi des bureaux d?études et agences d?attractivité couvrant des territoires hors de nos cinq périmètres d?étude, ainsi que de grandes métropoles « de départ» (Paris, Bordeaux, Toulouse). Une revue de presse nationale complète ce panorama. Atouts et limites de ces choix méthodologiques Les partenariats institutionnels avec les agences d?urbanisme et les PNR, ainsi que l?engagement préexistant des membres de l?équipe sur la plupart de ces territoires ont facilité les démarches d?enquête qui étaient à mener dans un calendrier serré. Ils ont aussi permis une diversification des angles et des approches en fonction des enjeux locaux (habitat, développement local, conflit et cohabitation, pauvreté et marginalité, télétravail, etc.). Ces cinq territoires sont au demeurant bien spécifiques. Tous situés dans des Parcs Naturels Régionaux, ils bénéficient à la fois d?une qualité paysagère et d?un accompagnement institutionnel particuliers. Ils présentent néanmoins une gamme relativement étendue de situations sociodémographiques, allant de la relative aisance liée au tourisme (Lot) ou à la proximité métropolitaine (Pilat) à des formes de fragilité sociale et économique (Corbières, Cévennes), en passant par des problématiques de dépeuplement et vieillissement (Vosges du Nord). Mais ils ne permettent pas de saisir toute la diversité des dynamiques à l?oeuvre dans les territoires ruraux de l?Hexagone, loin s?en faut. En particulier, les territoires touristiques attractifs (littoraux ou montagneux), les territoires ruraux en nette déprise démographique et économique, et les couronnes périurbaines éloignées des grandes métropoles (bassin parisien en particulier) sont ici peu représentés. Le panorama national ne corrige qu?en partie ce défaut, et des enquêtes complémentaires seront à mener sur ces territoires. Exode urbain : les partenaires du programme présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 48 présentation des partenaires Réseau rural français Les zones rurales représentent 80% du territoire de l?Union européenne (UE) et 30% de sa population (137 millions de personnes). Ces territoires sont touchés par la diminution et le vieillissement de ses habitants et doivent faire face à de nombreux défis : manque de connectivité, absence de possibilités d?emploi, services limités en matière de transports publics, d?écoles, d?hôpitaux et de commerces, etc. Le FEADER (Fonds européen agricole pour le développement rural), permet de contribuer à une politique de développement rural - deuxième pilier de la Politique agricole commune. Le Réseau rural français (RRF), co-piloté par le ministère en charge de l?agriculture, l?Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et les Régions de France (RdF), contribue à la mise en place de cette politique. Structuré à l?échelle régionale, le RRF contribue aux réflexions et aux débats liés à la mise en oeuvre des politiques utiles au développement des territoires ruraux. En France, ce sont 11,4 milliards d?euros qui sont mobilisés pour la période 2014-2020 à travers les 27 programmes de développement rural gérés par les conseils régionaux. En soutien aux Réseaux ruraux régionaux, le RRF se donne quatre objectifs stratégiques : 1) accroître la participation des parties prenantes à la mise en oeuvre de la politique de développement rural, 2) améliorer la qualité de la mise en oeuvre des programmes de développement rural régionaux (PDRR), 3) informer le grand public et les potentiels bénéficiaires sur la politique de développement rural et les possibilités de financement, 4) favoriser l?innovation dans les secteurs de l?agriculture, la production alimentaire, la foresterie et dans les zones rurales. Dans ce cadre, le Réseau rural français a commandé en 2021 un appel à projet de recherche sur l?« Exode urbain : impacts de la pandémie de Covid-19 sur les mobilités résidentielles », en partenariat avec le Plan urbanisme construction architecture (PUCA) et POPSU territoires, avec le soutien de l'Europe à travers les Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). Par ailleurs, dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) et du Pacte vert européen, la Commission européenne a présenté, fin juin 2021, une vision à long terme pour l?avenir des zones rurales à l?horizon 2040. Elle propose un plan d?actions en faveur des zones rurales pour renforcer leur attractivité et le bien vivre de la population de ces territoires, le développement de la recherche et l?innovation, des services au public, la résilience au changement climatique, le soutien à la diversification des activités économiques. Le pacte rural fournit un cadre commun pour l'engagement et la coopération d'un ensemble d'acteurs à l'échelle européenne, nationale, régionale et locale. Publications : FEADER : 101 regards sur une programmation Guide « Culture et développement rural » Guide « Smart village, vers un modèle français au service des territoires ruraux » Pour en savoir plus : https:// www.reseaurural.fr/ présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 49 Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) Le Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) est un service interministériel créé en 1998 afin de faire progresser les connaissances sur les territoires et les villes, et éclairer l?action publique. Il initie des programmes de recherche incitative, de recherche-action, d?expérimentation et apporte son soutien à l?innovation et à la valorisation dans les domaines de l?aménagement des territoires, de l?urbanisme, de l?habitat, de l?architecture et de la construction. Depuis 2018, l?activité du PUCA s?est recentrée sur de nouveaux enjeux, devenus centraux dans la gouvernance et l?aménagement des villes : la résilience environnementale et économique. C?est ainsi que le PUCA a par exemple été sollicité pour travailler sur les solutions d?aménagement en zone inondable mutable (AMITER) ou sur la recomposition foncière littorale liée à la montée des eaux (OPHROM), et sur des domaines de compétence, qui croisent les savoir-faire urbains (conception architecturale et urbaine, planification), la démarche sociologique (gouvernance, impacts socio-spatiaux et jeux d?acteurs), les sciences politiques et géographiques (stratégies territoriales, évaluation des politiques publiques) et les enjeux technico-économiques de la construction et de la réhabilitation. Ces dernières années, le PUCA initié de nombreux programmes, sur la relation entre formes urbaines et biodiversité (BAUM), sur les conditions de l?accélération de la rénovation énergétique des logements (Sociétés de tiers financement, Copropriétés), sur la sobriété foncière (territoires pilotes), mais également sur la place de l?activité et des travailleurs dans la ville (Ville productive). Si l?enjeu de résilience figurait déjà dans ses priorités d?action, il a pris le dessus et fini par englober les questions de solidarité, d?innovation et d?organisation des territoires. Dernières publications : Desjardins Xavier, Estèbe Philippe, La valeur des territoires hors jeu. Leçons espagnoles, italiennes et polonaises, éditions PUCA, coll. « Réflexions en partage », 2023 (disponible en ligne) Gangloff Emmanuelle, Morteau Hélène, La ville à l?épreuve de la crise sanitaire, éditions PUCA, coll. « Recherche », 2022 Brès Antoine, Mariolle Béatrice, Le local déployé. Les campagnes au prisme de l?écologie, éditions PUCA, hors collection, novembre 2022 (disponible en ligne) présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 50 L?Europe des Projets Architecturaux et Urbains L?Europe des Projets Architecturaux et Urbains est un Groupement d?intérêt public, sous la tutelle du ministère en charge de l?architecture, du ministère en charge de l?urbanisme, la Cité de l?architecture et du patrimoine et de l?association Europan France. L?EPAU conduit cinq programmes nationaux de recherche et d?expérimentation : le concours d?architecture et d?urbanisme Europan, le programme d?expérimentation Engagés pour la qualité du logement de demain, les programmes de recherche POPSU Métropoles, POPSU Territoires et Coubertin. Il mène des actions de valorisation et d?animation des réseaux professionnels, du cadre bâti, de la ville et des territoires. Au croisement des sphères des élus, des professionnels de l?urbain, des chercheurs, et des concepteurs, il contribue à alimenter les relations sciences-société. Il rassemble un collège de financeurs diversifié : le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, le ministère de la Culture, l?Agence nationale de la cohésion des territoires, la Banque des Territoires (Groupe Caisse des Dépôts), l?ADEME, les fonds européens, le Plan Urbanisme Construction Architecture. L?EPAU s?incarne au plus près de l?action : c?est un organisme « orienté territoires », au bénéfice des élus et des acteurs. Son fonctionnement répond à une triple exigence de souplesse, de partage des financements entre les ministères de tutelle et de création de valeur additionnelle, qu?il convient de rapprocher de celle, plus actuelle que jamais, d?une action publique plus agile et plus efficiente. Fort de ses communautés, il collabore à ce jour avec près de 200 collectivités territoriales, mobilise une communauté scientifique de 600 chercheurs, et près de 1 500 professionnels de la ville. Espace de réflexion et d?observation, l?EPAU contribue à produire de la connaissance au croisement des disciplines et des générations, notamment par la mobilisation des jeunes chercheurs et concepteurs. Il favorise l?inventivité et le dialogue pour contribuer à construire collectivement les réponses aux grands enjeux que traverse la société : changements climatiques, transitions, cohésion territoriale et architecture innovante. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 51 POPSU Territoires POPSU Territoires est un programme de recherche-action qui réunit des chercheurs, praticiens et élus afin d?enrichir les connaissances sur les petites villes et les ruralités. Le programme compte aujourd'hui 50 petites villes et autant de thématiques de recherche abordées sur l'ensemble du territoire français. Au coeur d'un système partenarial diversifié, le programme POPSU Territoires piloté par l'Europe des Projets Architecturaux et Urbain est porté avec le Ministère de la Transition écologique, des Territoires et de la Mer, le Ministère de la Culture, et l'Agence Nationale de la Cohésion des Territoires. Le programme POPSU Territoires vise, par le croisement des savoirs scientifiques et opérationnels, à mieux connaître les processus qui transforment les petites villes et les ruralités françaises. Il s?agit dans le même temps de nourrir les réflexions stratégiques des décideurs sur l?avenir de leurs territoires. Le programme aspire à créer une dynamique de collaboration qui permette un enrichissement réciproque des élus, des praticiens de la ville, des concepteurs architectes et urbanistes, des chercheurs de diverses disciplines et des citoyens. Pour ce faire, des équipes de recherche organisent une observation in situ des territoires, à travers des études de cas approfondies permettant d?expliquer échecs ou réussites, puis de proposer des pistes d?action. En parallèle, dans le cadre de l'action de l'État auprès des territoires, la Plateforme d'observation des Projets et Stratégies Urbaines a été missionnée par Madame la Ministre Dominique Faure pour développer une vaste mission documentaire sur les ruralités et les petites villes. Portant sur l'ensemble du territoire national et documentant la grande diversité des paysages, des modes de vie et des richesses des territoires français, la mission documentaire vise à constituer un fonds inédit d?images sur les ruralités. Elle se construit à partir d'ouvrages, Les carnets de territoires, édités aux éditions Autrement, de reportages photographiques, et de documentaires audiovisuels produits dans les petites villes et les territoires ruraux en partenariat avec des chercheurs. Dernières publications : Gérer la petite ville touristique, Marseillan (Hérault) face aux fluctuations démographiques saisonnières par Joël Idt, Jules-Mathieu Meunier, Lucie Renou Urbanités campagnardes, le paysage, matrice d'un récit de transition à Saint-Loubès (Gironde) par Xavier Guillot, Julie Ambal avec un reportage photographique de Damien Carles Régénérer une petite ville sous double influence métropolitaine, le cas de Rive-de-Gier (Loire) par Christelle Morel-Journel, Emmanuel Martinais, François Duchêne, Georges Gay, Laurence Rocher L?étude « Exode urbain : impacts de la pandémie de COVID-19 sur les mobilités résidentielles » a été commandée par le Réseau Rural Français en juin 2021, avec le soutien du Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) et de l?Europe à travers les Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). Ce programme est opéré par le GIP Europe des Projets Architecturaux et Urbains dans le cadre du programme POPSU Territoires. CONTACT Hélène Milet helene.milet@developpement-durable.gouv.fr + 33 (0)1 40 81 92 68 | +33 (0)7 86 50 42 84 (ATTENTION: OPTION tions des espaces en déclin ainsi que sur les contradictions de l?urbanisation étendue. Il a récemment publié Déclin urbain. La France dans une perspective internationale (dir., avec N. Cauchi-Duval et V. Béal, Éditions du Croquant, 2021) et Plus vite que le coeur d?un mortel. Désurbanisation et résistances dans l?Amérique abandonnée (avec V. Béal, Grevis, 2021). Équipe 3 : documenter les évolutions par le terrain Cette équipe est coordonnée par Anaïs Collet, Aurélie Delage et Max Rousseau. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 45 Ce rapport prend appui sur les travaux menés par une équipe pluridisciplinaire, rassemblant : Maryame Amarouche (ENTPE / EVS), Vincent Béal (Université de Strasbourg / SAGE), Eric Charmes (ENTPE / EVS), Solange Coupe (stagiaire Sciences Po Toulouse), Emma Favret (étudiante IEP de Strasbourg) David Giband (Université de Perpignan / Art-Dev), Aurelio Labat (Université de Toulouse / LISST-CIEU), Nathalie Magne (Université de Montpellier-Paul Valéry / Art-Dev), Nicolas Meignant (stagiaire Université de Saint-Etienne / CIRAD / ART-Dev), Christelle Morel-Journel (Université de Saint-Etienne / EVS), Thomas Prima (stagiaire Université de Strasbourg / SAGE), Armand Rousseau (stagiaire Université de Montpellier-Paul Valéry / CIRAD / ART- Dev), François Taulelle (Université de Toulouse / LISST-CIEU), Et des étudiants de la promotion 2021-2022 de la Licence Pro « Développement de projets de territoires » de la Faculté des Sciences sociales de Strasbourg : Mathis Cothenet, Sarah Dutour, Orlane Hurel, Mathilde Lichtenthaler, Mathias Michelli, Etienne Noizet. Méthodologie : enquêter dans cinq territoires ruraux, les replacer dans un panorama plus large Le parti-pris méthodologique a été de nous placer du point de vue des potentiels territoires d?accueil de nouveaux habitants en provenance des métropoles, en enquêtant à deux niveaux de précision : 5 enquêtes localisées d?une part, et d?autre part un tour d?horizon complémentaire. Formant une équipe pluridisciplinaire, nous avons mobilisé des questionnements et des outils relevant de la géographie, de l?aménagement, de la sociologie et de la science politique. Des enquêtes de terrain dans cinq territoires Les cinq territoires étudiés ont été choisis selon deux partis-pris : d?une part en décalage avec les cas largement médiatisés (Perche en tête), d?autre part et surtout en partenariat avec des acteurs locaux : EPURES, agence d?urbanisme de la région stéphanoise pour le Pilat ; l?Agence d?urbanisme de la région nîmoise et arlésienne pour les Cévennes ; l?AURCA, Agence d?urbanisme catalane Pyrénées Méditerranée pour les Corbières ; le PNR des Vosges du Nord ; et la région Occitanie. Enfin, le territoire de Martel était déjà à l?étude dans le cadre du programme POPSU- Territoires : dans le cadre de ce projet, son étude a été élargie à la Communauté de communes Causses et Vallée de la Dordogne. Ces cinq territoires ont fait l?objet d?enquêtes localisées prenant appui sur divers matériaux et croisant les points de vue de différents acteurs. Il s?agissait d?aller voir sur le terrain, dans cinq territoires pouvant potentiellement accueillir des ménages en partance des métropoles, si un « exode urbain » était observé, sous quelle(s) forme(s), et quels enjeux il soulevait alors. Cette enquête qualitative multi-située repose sur une base méthodologique commune à tous les territoires, à laquelle présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 46 s?ajoutent des déclinaisons spécifiques en fonction des problématiques locales et des matériaux disponibles. Dans les cinq territoires étudiés, nous avons : ? mené des entretiens avec des acteurs locaux (élus et services techniques des collectivités, services déconcentrés de l?Etat, commerçants, agents immobiliers, acteurs associatifs, etc.) ; ? conduit des récits de vie avec des nouveaux habitants post-confinement aux profils diversifiés, matériau complété par des récits de vies de couple quittant l?Île-de-France pour des destinations rurales ; ? analysé les données du répertoire SIRENE sur les créations d?entreprises. En outre, deux questionnaires ont été administrés et traités : l?un auprès de porteurs de projets de rénovation de bâtiments anciens dans les Vosges du Nord (N=65) ; l?autre auprès des 99 maires du PNR Corbières-Fenouillèdes (N = 33). Un panorama national Cette enquête sur cinq territoires spécifiques a été complétée par un panorama des dynamiques à l?oeuvre dans d?autres territoires (Finistère, Côtes d?Armor, Bourgogne, Causses, Clunisois, Montagne bourbonnaise, Pays basque, Champagne). Pour cela, des entretiens ont été menés en visio auprès d?une dizaine d?agences d?urbanisme, mais aussi des bureaux d?études et agences d?attractivité couvrant des territoires hors de nos cinq périmètres d?étude, ainsi que de grandes métropoles « de départ» (Paris, Bordeaux, Toulouse). Une revue de presse nationale complète ce panorama. Atouts et limites de ces choix méthodologiques Les partenariats institutionnels avec les agences d?urbanisme et les PNR, ainsi que l?engagement préexistant des membres de l?équipe sur la plupart de ces territoires ont facilité les démarches d?enquête qui étaient à mener dans un calendrier serré. Ils ont aussi permis une diversification des angles et des approches en fonction des enjeux locaux (habitat, développement local, conflit et cohabitation, pauvreté et marginalité, télétravail, etc.). Ces cinq territoires sont au demeurant bien spécifiques. Tous situés dans des Parcs Naturels Régionaux, ils bénéficient à la fois d?une qualité paysagère et d?un accompagnement institutionnel particuliers. Ils présentent néanmoins une gamme relativement étendue de situations sociodémographiques, allant de la relative aisance liée au tourisme (Lot) ou à la proximité métropolitaine (Pilat) à des formes de fragilité sociale et économique (Corbières, Cévennes), en passant par des problématiques de dépeuplement et vieillissement (Vosges du Nord). Mais ils ne permettent pas de saisir toute la diversité des dynamiques à l?oeuvre dans les territoires ruraux de l?Hexagone, loin s?en faut. En particulier, les territoires touristiques attractifs (littoraux ou montagneux), les territoires ruraux en nette déprise démographique et économique, et les couronnes périurbaines éloignées des grandes métropoles (bassin parisien en particulier) sont ici peu représentés. Le panorama national ne corrige qu?en partie ce défaut, et des enquêtes complémentaires seront à mener sur ces territoires. Exode urbain : les partenaires du programme présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 48 présentation des partenaires Réseau rural français Les zones rurales représentent 80% du territoire de l?Union européenne (UE) et 30% de sa population (137 millions de personnes). Ces territoires sont touchés par la diminution et le vieillissement de ses habitants et doivent faire face à de nombreux défis : manque de connectivité, absence de possibilités d?emploi, services limités en matière de transports publics, d?écoles, d?hôpitaux et de commerces, etc. Le FEADER (Fonds européen agricole pour le développement rural), permet de contribuer à une politique de développement rural - deuxième pilier de la Politique agricole commune. Le Réseau rural français (RRF), co-piloté par le ministère en charge de l?agriculture, l?Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et les Régions de France (RdF), contribue à la mise en place de cette politique. Structuré à l?échelle régionale, le RRF contribue aux réflexions et aux débats liés à la mise en oeuvre des politiques utiles au développement des territoires ruraux. En France, ce sont 11,4 milliards d?euros qui sont mobilisés pour la période 2014-2020 à travers les 27 programmes de développement rural gérés par les conseils régionaux. En soutien aux Réseaux ruraux régionaux, le RRF se donne quatre objectifs stratégiques : 1) accroître la participation des parties prenantes à la mise en oeuvre de la politique de développement rural, 2) améliorer la qualité de la mise en oeuvre des programmes de développement rural régionaux (PDRR), 3) informer le grand public et les potentiels bénéficiaires sur la politique de développement rural et les possibilités de financement, 4) favoriser l?innovation dans les secteurs de l?agriculture, la production alimentaire, la foresterie et dans les zones rurales. Dans ce cadre, le Réseau rural français a commandé en 2021 un appel à projet de recherche sur l?« Exode urbain : impacts de la pandémie de Covid-19 sur les mobilités résidentielles », en partenariat avec le Plan urbanisme construction architecture (PUCA) et POPSU territoires, avec le soutien de l'Europe à travers les Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). Par ailleurs, dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) et du Pacte vert européen, la Commission européenne a présenté, fin juin 2021, une vision à long terme pour l?avenir des zones rurales à l?horizon 2040. Elle propose un plan d?actions en faveur des zones rurales pour renforcer leur attractivité et le bien vivre de la population de ces territoires, le développement de la recherche et l?innovation, des services au public, la résilience au changement climatique, le soutien à la diversification des activités économiques. Le pacte rural fournit un cadre commun pour l'engagement et la coopération d'un ensemble d'acteurs à l'échelle européenne, nationale, régionale et locale. Publications : FEADER : 101 regards sur une programmation Guide « Culture et développement rural » Guide « Smart village, vers un modèle français au service des territoires ruraux » Pour en savoir plus : https:// www.reseaurural.fr/ présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 49 Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) Le Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) est un service interministériel créé en 1998 afin de faire progresser les connaissances sur les territoires et les villes, et éclairer l?action publique. Il initie des programmes de recherche incitative, de recherche-action, d?expérimentation et apporte son soutien à l?innovation et à la valorisation dans les domaines de l?aménagement des territoires, de l?urbanisme, de l?habitat, de l?architecture et de la construction. Depuis 2018, l?activité du PUCA s?est recentrée sur de nouveaux enjeux, devenus centraux dans la gouvernance et l?aménagement des villes : la résilience environnementale et économique. C?est ainsi que le PUCA a par exemple été sollicité pour travailler sur les solutions d?aménagement en zone inondable mutable (AMITER) ou sur la recomposition foncière littorale liée à la montée des eaux (OPHROM), et sur des domaines de compétence, qui croisent les savoir-faire urbains (conception architecturale et urbaine, planification), la démarche sociologique (gouvernance, impacts socio-spatiaux et jeux d?acteurs), les sciences politiques et géographiques (stratégies territoriales, évaluation des politiques publiques) et les enjeux technico-économiques de la construction et de la réhabilitation. Ces dernières années, le PUCA initié de nombreux programmes, sur la relation entre formes urbaines et biodiversité (BAUM), sur les conditions de l?accélération de la rénovation énergétique des logements (Sociétés de tiers financement, Copropriétés), sur la sobriété foncière (territoires pilotes), mais également sur la place de l?activité et des travailleurs dans la ville (Ville productive). Si l?enjeu de résilience figurait déjà dans ses priorités d?action, il a pris le dessus et fini par englober les questions de solidarité, d?innovation et d?organisation des territoires. Dernières publications : Desjardins Xavier, Estèbe Philippe, La valeur des territoires hors jeu. Leçons espagnoles, italiennes et polonaises, éditions PUCA, coll. « Réflexions en partage », 2023 (disponible en ligne) Gangloff Emmanuelle, Morteau Hélène, La ville à l?épreuve de la crise sanitaire, éditions PUCA, coll. « Recherche », 2022 Brès Antoine, Mariolle Béatrice, Le local déployé. Les campagnes au prisme de l?écologie, éditions PUCA, hors collection, novembre 2022 (disponible en ligne) présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 50 L?Europe des Projets Architecturaux et Urbains L?Europe des Projets Architecturaux et Urbains est un Groupement d?intérêt public, sous la tutelle du ministère en charge de l?architecture, du ministère en charge de l?urbanisme, la Cité de l?architecture et du patrimoine et de l?association Europan France. L?EPAU conduit cinq programmes nationaux de recherche et d?expérimentation : le concours d?architecture et d?urbanisme Europan, le programme d?expérimentation Engagés pour la qualité du logement de demain, les programmes de recherche POPSU Métropoles, POPSU Territoires et Coubertin. Il mène des actions de valorisation et d?animation des réseaux professionnels, du cadre bâti, de la ville et des territoires. Au croisement des sphères des élus, des professionnels de l?urbain, des chercheurs, et des concepteurs, il contribue à alimenter les relations sciences-société. Il rassemble un collège de financeurs diversifié : le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, le ministère de la Culture, l?Agence nationale de la cohésion des territoires, la Banque des Territoires (Groupe Caisse des Dépôts), l?ADEME, les fonds européens, le Plan Urbanisme Construction Architecture. L?EPAU s?incarne au plus près de l?action : c?est un organisme « orienté territoires », au bénéfice des élus et des acteurs. Son fonctionnement répond à une triple exigence de souplesse, de partage des financements entre les ministères de tutelle et de création de valeur additionnelle, qu?il convient de rapprocher de celle, plus actuelle que jamais, d?une action publique plus agile et plus efficiente. Fort de ses communautés, il collabore à ce jour avec près de 200 collectivités territoriales, mobilise une communauté scientifique de 600 chercheurs, et près de 1 500 professionnels de la ville. Espace de réflexion et d?observation, l?EPAU contribue à produire de la connaissance au croisement des disciplines et des générations, notamment par la mobilisation des jeunes chercheurs et concepteurs. Il favorise l?inventivité et le dialogue pour contribuer à construire collectivement les réponses aux grands enjeux que traverse la société : changements climatiques, transitions, cohésion territoriale et architecture innovante. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 51 POPSU Territoires POPSU Territoires est un programme de recherche-action qui réunit des chercheurs, praticiens et élus afin d?enrichir les connaissances sur les petites villes et les ruralités. Le programme compte aujourd'hui 50 petites villes et autant de thématiques de recherche abordées sur l'ensemble du territoire français. Au coeur d'un système partenarial diversifié, le programme POPSU Territoires piloté par l'Europe des Projets Architecturaux et Urbain est porté avec le Ministère de la Transition écologique, des Territoires et de la Mer, le Ministère de la Culture, et l'Agence Nationale de la Cohésion des Territoires. Le programme POPSU Territoires vise, par le croisement des savoirs scientifiques et opérationnels, à mieux connaître les processus qui transforment les petites villes et les ruralités françaises. Il s?agit dans le même temps de nourrir les réflexions stratégiques des décideurs sur l?avenir de leurs territoires. Le programme aspire à créer une dynamique de collaboration qui permette un enrichissement réciproque des élus, des praticiens de la ville, des concepteurs architectes et urbanistes, des chercheurs de diverses disciplines et des citoyens. Pour ce faire, des équipes de recherche organisent une observation in situ des territoires, à travers des études de cas approfondies permettant d?expliquer échecs ou réussites, puis de proposer des pistes d?action. En parallèle, dans le cadre de l'action de l'État auprès des territoires, la Plateforme d'observation des Projets et Stratégies Urbaines a été missionnée par Madame la Ministre Dominique Faure pour développer une vaste mission documentaire sur les ruralités et les petites villes. Portant sur l'ensemble du territoire national et documentant la grande diversité des paysages, des modes de vie et des richesses des territoires français, la mission documentaire vise à constituer un fonds inédit d?images sur les ruralités. Elle se construit à partir d'ouvrages, Les carnets de territoires, édités aux éditions Autrement, de reportages photographiques, et de documentaires audiovisuels produits dans les petites villes et les territoires ruraux en partenariat avec des chercheurs. Dernières publications : Gérer la petite ville touristique, Marseillan (Hérault) face aux fluctuations démographiques saisonnières par Joël Idt, Jules-Mathieu Meunier, Lucie Renou Urbanités campagnardes, le paysage, matrice d'un récit de transition à Saint-Loubès (Gironde) par Xavier Guillot, Julie Ambal avec un reportage photographique de Damien Carles Régénérer une petite ville sous double influence métropolitaine, le cas de Rive-de-Gier (Loire) par Christelle Morel-Journel, Emmanuel Martinais, François Duchêne, Georges Gay, Laurence Rocher L?étude « Exode urbain : impacts de la pandémie de COVID-19 sur les mobilités résidentielles » a été commandée par le Réseau Rural Français en juin 2021, avec le soutien du Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) et de l?Europe à travers les Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). Ce programme est opéré par le GIP Europe des Projets Architecturaux et Urbains dans le cadre du programme POPSU Territoires. CONTACT Hélène Milet helene.milet@developpement-durable.gouv.fr + 33 (0)1 40 81 92 68 | +33 (0)7 86 50 42 84 INVALIDE) (ATTENTION: OPTION -Duval et V. Béal, Éditions du Croquant, 2021) et Plus vite que le coeur d?un mortel. Désurbanisation et résistances dans l?Amérique abandonnée (avec V. Béal, Grevis, 2021). Équipe 3 : documenter les évolutions par le terrain Cette équipe est coordonnée par Anaïs Collet, Aurélie Delage et Max Rousseau. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 45 Ce rapport prend appui sur les travaux menés par une équipe pluridisciplinaire, rassemblant : Maryame Amarouche (ENTPE / EVS), Vincent Béal (Université de Strasbourg / SAGE), Eric Charmes (ENTPE / EVS), Solange Coupe (stagiaire Sciences Po Toulouse), Emma Favret (étudiante IEP de Strasbourg) David Giband (Université de Perpignan / Art-Dev), Aurelio Labat (Université de Toulouse / LISST-CIEU), Nathalie Magne (Université de Montpellier-Paul Valéry / Art-Dev), Nicolas Meignant (stagiaire Université de Saint-Etienne / CIRAD / ART-Dev), Christelle Morel-Journel (Université de Saint-Etienne / EVS), Thomas Prima (stagiaire Université de Strasbourg / SAGE), Armand Rousseau (stagiaire Université de Montpellier-Paul Valéry / CIRAD / ART- Dev), François Taulelle (Université de Toulouse / LISST-CIEU), Et des étudiants de la promotion 2021-2022 de la Licence Pro « Développement de projets de territoires » de la Faculté des Sciences sociales de Strasbourg : Mathis Cothenet, Sarah Dutour, Orlane Hurel, Mathilde Lichtenthaler, Mathias Michelli, Etienne Noizet. Méthodologie : enquêter dans cinq territoires ruraux, les replacer dans un panorama plus large Le parti-pris méthodologique a été de nous placer du point de vue des potentiels territoires d?accueil de nouveaux habitants en provenance des métropoles, en enquêtant à deux niveaux de précision : 5 enquêtes localisées d?une part, et d?autre part un tour d?horizon complémentaire. Formant une équipe pluridisciplinaire, nous avons mobilisé des questionnements et des outils relevant de la géographie, de l?aménagement, de la sociologie et de la science politique. Des enquêtes de terrain dans cinq territoires Les cinq territoires étudiés ont été choisis selon deux partis-pris : d?une part en décalage avec les cas largement médiatisés (Perche en tête), d?autre part et surtout en partenariat avec des acteurs locaux : EPURES, agence d?urbanisme de la région stéphanoise pour le Pilat ; l?Agence d?urbanisme de la région nîmoise et arlésienne pour les Cévennes ; l?AURCA, Agence d?urbanisme catalane Pyrénées Méditerranée pour les Corbières ; le PNR des Vosges du Nord ; et la région Occitanie. Enfin, le territoire de Martel était déjà à l?étude dans le cadre du programme POPSU- Territoires : dans le cadre de ce projet, son étude a été élargie à la Communauté de communes Causses et Vallée de la Dordogne. Ces cinq territoires ont fait l?objet d?enquêtes localisées prenant appui sur divers matériaux et croisant les points de vue de différents acteurs. Il s?agissait d?aller voir sur le terrain, dans cinq territoires pouvant potentiellement accueillir des ménages en partance des métropoles, si un « exode urbain » était observé, sous quelle(s) forme(s), et quels enjeux il soulevait alors. Cette enquête qualitative multi-située repose sur une base méthodologique commune à tous les territoires, à laquelle présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 46 s?ajoutent des déclinaisons spécifiques en fonction des problématiques locales et des matériaux disponibles. Dans les cinq territoires étudiés, nous avons : ? mené des entretiens avec des acteurs locaux (élus et services techniques des collectivités, services déconcentrés de l?Etat, commerçants, agents immobiliers, acteurs associatifs, etc.) ; ? conduit des récits de vie avec des nouveaux habitants post-confinement aux profils diversifiés, matériau complété par des récits de vies de couple quittant l?Île-de-France pour des destinations rurales ; ? analysé les données du répertoire SIRENE sur les créations d?entreprises. En outre, deux questionnaires ont été administrés et traités : l?un auprès de porteurs de projets de rénovation de bâtiments anciens dans les Vosges du Nord (N=65) ; l?autre auprès des 99 maires du PNR Corbières-Fenouillèdes (N = 33). Un panorama national Cette enquête sur cinq territoires spécifiques a été complétée par un panorama des dynamiques à l?oeuvre dans d?autres territoires (Finistère, Côtes d?Armor, Bourgogne, Causses, Clunisois, Montagne bourbonnaise, Pays basque, Champagne). Pour cela, des entretiens ont été menés en visio auprès d?une dizaine d?agences d?urbanisme, mais aussi des bureaux d?études et agences d?attractivité couvrant des territoires hors de nos cinq périmètres d?étude, ainsi que de grandes métropoles « de départ» (Paris, Bordeaux, Toulouse). Une revue de presse nationale complète ce panorama. Atouts et limites de ces choix méthodologiques Les partenariats institutionnels avec les agences d?urbanisme et les PNR, ainsi que l?engagement préexistant des membres de l?équipe sur la plupart de ces territoires ont facilité les démarches d?enquête qui étaient à mener dans un calendrier serré. Ils ont aussi permis une diversification des angles et des approches en fonction des enjeux locaux (habitat, développement local, conflit et cohabitation, pauvreté et marginalité, télétravail, etc.). Ces cinq territoires sont au demeurant bien spécifiques. Tous situés dans des Parcs Naturels Régionaux, ils bénéficient à la fois d?une qualité paysagère et d?un accompagnement institutionnel particuliers. Ils présentent néanmoins une gamme relativement étendue de situations sociodémographiques, allant de la relative aisance liée au tourisme (Lot) ou à la proximité métropolitaine (Pilat) à des formes de fragilité sociale et économique (Corbières, Cévennes), en passant par des problématiques de dépeuplement et vieillissement (Vosges du Nord). Mais ils ne permettent pas de saisir toute la diversité des dynamiques à l?oeuvre dans les territoires ruraux de l?Hexagone, loin s?en faut. En particulier, les territoires touristiques attractifs (littoraux ou montagneux), les territoires ruraux en nette déprise démographique et économique, et les couronnes périurbaines éloignées des grandes métropoles (bassin parisien en particulier) sont ici peu représentés. Le panorama national ne corrige qu?en partie ce défaut, et des enquêtes complémentaires seront à mener sur ces territoires. Exode urbain : les partenaires du programme présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 48 présentation des partenaires Réseau rural français Les zones rurales représentent 80% du territoire de l?Union européenne (UE) et 30% de sa population (137 millions de personnes). Ces territoires sont touchés par la diminution et le vieillissement de ses habitants et doivent faire face à de nombreux défis : manque de connectivité, absence de possibilités d?emploi, services limités en matière de transports publics, d?écoles, d?hôpitaux et de commerces, etc. Le FEADER (Fonds européen agricole pour le développement rural), permet de contribuer à une politique de développement rural - deuxième pilier de la Politique agricole commune. Le Réseau rural français (RRF), co-piloté par le ministère en charge de l?agriculture, l?Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et les Régions de France (RdF), contribue à la mise en place de cette politique. Structuré à l?échelle régionale, le RRF contribue aux réflexions et aux débats liés à la mise en oeuvre des politiques utiles au développement des territoires ruraux. En France, ce sont 11,4 milliards d?euros qui sont mobilisés pour la période 2014-2020 à travers les 27 programmes de développement rural gérés par les conseils régionaux. En soutien aux Réseaux ruraux régionaux, le RRF se donne quatre objectifs stratégiques : 1) accroître la participation des parties prenantes à la mise en oeuvre de la politique de développement rural, 2) améliorer la qualité de la mise en oeuvre des programmes de développement rural régionaux (PDRR), 3) informer le grand public et les potentiels bénéficiaires sur la politique de développement rural et les possibilités de financement, 4) favoriser l?innovation dans les secteurs de l?agriculture, la production alimentaire, la foresterie et dans les zones rurales. Dans ce cadre, le Réseau rural français a commandé en 2021 un appel à projet de recherche sur l?« Exode urbain : impacts de la pandémie de Covid-19 sur les mobilités résidentielles », en partenariat avec le Plan urbanisme construction architecture (PUCA) et POPSU territoires, avec le soutien de l'Europe à travers les Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). Par ailleurs, dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) et du Pacte vert européen, la Commission européenne a présenté, fin juin 2021, une vision à long terme pour l?avenir des zones rurales à l?horizon 2040. Elle propose un plan d?actions en faveur des zones rurales pour renforcer leur attractivité et le bien vivre de la population de ces territoires, le développement de la recherche et l?innovation, des services au public, la résilience au changement climatique, le soutien à la diversification des activités économiques. Le pacte rural fournit un cadre commun pour l'engagement et la coopération d'un ensemble d'acteurs à l'échelle européenne, nationale, régionale et locale. Publications : FEADER : 101 regards sur une programmation Guide « Culture et développement rural » Guide « Smart village, vers un modèle français au service des territoires ruraux » Pour en savoir plus : https:// www.reseaurural.fr/ présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 49 Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) Le Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) est un service interministériel créé en 1998 afin de faire progresser les connaissances sur les territoires et les villes, et éclairer l?action publique. Il initie des programmes de recherche incitative, de recherche-action, d?expérimentation et apporte son soutien à l?innovation et à la valorisation dans les domaines de l?aménagement des territoires, de l?urbanisme, de l?habitat, de l?architecture et de la construction. Depuis 2018, l?activité du PUCA s?est recentrée sur de nouveaux enjeux, devenus centraux dans la gouvernance et l?aménagement des villes : la résilience environnementale et économique. C?est ainsi que le PUCA a par exemple été sollicité pour travailler sur les solutions d?aménagement en zone inondable mutable (AMITER) ou sur la recomposition foncière littorale liée à la montée des eaux (OPHROM), et sur des domaines de compétence, qui croisent les savoir-faire urbains (conception architecturale et urbaine, planification), la démarche sociologique (gouvernance, impacts socio-spatiaux et jeux d?acteurs), les sciences politiques et géographiques (stratégies territoriales, évaluation des politiques publiques) et les enjeux technico-économiques de la construction et de la réhabilitation. Ces dernières années, le PUCA initié de nombreux programmes, sur la relation entre formes urbaines et biodiversité (BAUM), sur les conditions de l?accélération de la rénovation énergétique des logements (Sociétés de tiers financement, Copropriétés), sur la sobriété foncière (territoires pilotes), mais également sur la place de l?activité et des travailleurs dans la ville (Ville productive). Si l?enjeu de résilience figurait déjà dans ses priorités d?action, il a pris le dessus et fini par englober les questions de solidarité, d?innovation et d?organisation des territoires. Dernières publications : Desjardins Xavier, Estèbe Philippe, La valeur des territoires hors jeu. Leçons espagnoles, italiennes et polonaises, éditions PUCA, coll. « Réflexions en partage », 2023 (disponible en ligne) Gangloff Emmanuelle, Morteau Hélène, La ville à l?épreuve de la crise sanitaire, éditions PUCA, coll. « Recherche », 2022 Brès Antoine, Mariolle Béatrice, Le local déployé. Les campagnes au prisme de l?écologie, éditions PUCA, hors collection, novembre 2022 (disponible en ligne) présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 50 L?Europe des Projets Architecturaux et Urbains L?Europe des Projets Architecturaux et Urbains est un Groupement d?intérêt public, sous la tutelle du ministère en charge de l?architecture, du ministère en charge de l?urbanisme, la Cité de l?architecture et du patrimoine et de l?association Europan France. L?EPAU conduit cinq programmes nationaux de recherche et d?expérimentation : le concours d?architecture et d?urbanisme Europan, le programme d?expérimentation Engagés pour la qualité du logement de demain, les programmes de recherche POPSU Métropoles, POPSU Territoires et Coubertin. Il mène des actions de valorisation et d?animation des réseaux professionnels, du cadre bâti, de la ville et des territoires. Au croisement des sphères des élus, des professionnels de l?urbain, des chercheurs, et des concepteurs, il contribue à alimenter les relations sciences-société. Il rassemble un collège de financeurs diversifié : le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, le ministère de la Culture, l?Agence nationale de la cohésion des territoires, la Banque des Territoires (Groupe Caisse des Dépôts), l?ADEME, les fonds européens, le Plan Urbanisme Construction Architecture. L?EPAU s?incarne au plus près de l?action : c?est un organisme « orienté territoires », au bénéfice des élus et des acteurs. Son fonctionnement répond à une triple exigence de souplesse, de partage des financements entre les ministères de tutelle et de création de valeur additionnelle, qu?il convient de rapprocher de celle, plus actuelle que jamais, d?une action publique plus agile et plus efficiente. Fort de ses communautés, il collabore à ce jour avec près de 200 collectivités territoriales, mobilise une communauté scientifique de 600 chercheurs, et près de 1 500 professionnels de la ville. Espace de réflexion et d?observation, l?EPAU contribue à produire de la connaissance au croisement des disciplines et des générations, notamment par la mobilisation des jeunes chercheurs et concepteurs. Il favorise l?inventivité et le dialogue pour contribuer à construire collectivement les réponses aux grands enjeux que traverse la société : changements climatiques, transitions, cohésion territoriale et architecture innovante. présentation des résultats | Exode urbain, un mythe des réalités 51 POPSU Territoires POPSU Territoires est un programme de recherche-action qui réunit des chercheurs, praticiens et élus afin d?enrichir les connaissances sur les petites villes et les ruralités. Le programme compte aujourd'hui 50 petites villes et autant de thématiques de recherche abordées sur l'ensemble du territoire français. Au coeur d'un système partenarial diversifié, le programme POPSU Territoires piloté par l'Europe des Projets Architecturaux et Urbain est porté avec le Ministère de la Transition écologique, des Territoires et de la Mer, le Ministère de la Culture, et l'Agence Nationale de la Cohésion des Territoires. Le programme POPSU Territoires vise, par le croisement des savoirs scientifiques et opérationnels, à mieux connaître les processus qui transforment les petites villes et les ruralités françaises. Il s?agit dans le même temps de nourrir les réflexions stratégiques des décideurs sur l?avenir de leurs territoires. Le programme aspire à créer une dynamique de collaboration qui permette un enrichissement réciproque des élus, des praticiens de la ville, des concepteurs architectes et urbanistes, des chercheurs de diverses disciplines et des citoyens. Pour ce faire, des équipes de recherche organisent une observation in situ des territoires, à travers des études de cas approfondies permettant d?expliquer échecs ou réussites, puis de proposer des pistes d?action. En parallèle, dans le cadre de l'action de l'État auprès des territoires, la Plateforme d'observation des Projets et Stratégies Urbaines a été missionnée par Madame la Ministre Dominique Faure pour développer une vaste mission documentaire sur les ruralités et les petites villes. Portant sur l'ensemble du territoire national et documentant la grande diversité des paysages, des modes de vie et des richesses des territoires français, la mission documentaire vise à constituer un fonds inédit d?images sur les ruralités. Elle se construit à partir d'ouvrages, Les carnets de territoires, édités aux éditions Autrement, de reportages photographiques, et de documentaires audiovisuels produits dans les petites villes et les territoires ruraux en partenariat avec des chercheurs. Dernières publications : Gérer la petite ville touristique, Marseillan (Hérault) face aux fluctuations démographiques saisonnières par Joël Idt, Jules-Mathieu Meunier, Lucie Renou Urbanités campagnardes, le paysage, matrice d'un récit de transition à Saint-Loubès (Gironde) par Xavier Guillot, Julie Ambal avec un reportage photographique de Damien Carles Régénérer une petite ville sous double influence métropolitaine, le cas de Rive-de-Gier (Loire) par Christelle Morel-Journel, Emmanuel Martinais, François Duchêne, Georges Gay, Laurence Rocher L?étude « Exode urbain : impacts de la pandémie de COVID-19 sur les mobilités résidentielles » a été commandée par le Réseau Rural Français en juin 2021, avec le soutien du Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) et de l?Europe à travers les Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). Ce programme est opéré par le GIP Europe des Projets Architecturaux et Urbains dans le cadre du programme POPSU Territoires. CONTACT Hélène Milet helene.milet@developpement-durable.gouv.fr + 33 (0)1 40 81 92 68 | +33 (0)7 86 50 42 84 INVALIDE)

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