Sites (les) classés : protéger et transmettre notre patrimoine paysager

Auteur moral
République française ; France. Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature
Auteur secondaire
Résumé
"Ce guide présente la politique française des sites classés et inscrits, instaurée depuis 1906 pour protéger et transmettre des paysages remarquables. Plus de 2?700 sites couvrent 1,18?million d'hectares, soumis à des règles strictes et à l'accompagnement de l'État. Le classement assure une protection pérenne, valorise le patrimoine naturel et culturel, et favorise un tourisme durable conciliant préservation, attractivité et qualité de vie."
Editeur
Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature
Descripteur Urbamet
protection de l'environnement ; patrimoine naturel ; patrimoine culturel
Descripteur écoplanete
site classé
Thème
Environnement - Nature ; Environnement - Paysage
Texte intégral
LES SITES CLASSÉS PROTÉGER ET TRANSMETTRE NOTRE PATRIMOINE PAYSAGER 2 La politique des sites 04 Les sites classés 05 Plus d?un siècle de protection au bénéfice de tous 08 Critères et procédure de classement 10 Les grands principes de la protection des sites classés 12 Des projets respectueux des sites 14 La démarche Grand Site de France 24 Les sites inscrits 26SO M M A IR E 3 Les caps Gris-Nez et Blanc-Nez, la baie de Wissant et les dunes de la Manche (Pas-de-Calais), site classé en 1987. © IStock 4 LA POLITIQUE DES SITES Les sites classés et inscrits font par- tie de notre patrimoine. Chacun connaît un site et y est attaché. Il peut s?agir d?un paysage de grande notoriété, comme la baie du Mont- Saint-Michel, le massif du Mont-Blanc ou les gorges du Tarn et de la Jonte. Il peut aussi s?agir d?un site plus confi- dentiel, près de chez soi ou d?un lieu de vacances, par exemple. Ces sites sont source de fierté et de bien-être, et chacun apprécie de les découvrir en tant qu?habitant ou visiteur. Les sites témoignent de la beauté et de la diversité de nos paysages et contribuent au rayonnement et à l?attractivité de la France, notam- ment du point de vue touristique, et de chaque région. La politique des sites est mise en oeuvre depuis 1906, au service de l?intérêt général. Elle relève de la responsabilité de l?État et fait partie Les landes du Cap Fréhel et les abords du Fort La Latte (Côtes-d?Armor), site classé en 1967. © IStock des missions du ministère en charge de la Transition écologique. Elle comprend deux niveaux : ? Le classement : une protection pérenne, où toute modification du site est soumise à autorisation spéciale. ? L?inscription : une protection plus légère, qui permet à l?État d?as surer une veille sur l?évolution du site et de sensibiliser les collectivités territoriales. Politique des sites Découvrir l?ensemble des sites classés et inscrits Le littoral et les pentes nord-ouest de la montagne Pelée (Martinique), site classé en 1996. © DEAL Martinique Repérage sur le terrain. © Marine de Faup/DGALN La politique des sites est destinée à protéger et transmettre aux générations futures des paysages remarquables et monuments naturels dont la beauté, la singularité ou la valeur de mémoire justifient une protection de niveau national. 5 Si le classement reste une distinc- tion rare (environ 1,9 % de la super- ficie du territoire national), près de 2 700 sites classés sont répartis sur tout le territoire. Autant de trésors à découvrir, à mettre en valeur et à protéger. L?objectif du classement est de préser- ver le site de toute atteinte, de conser- ver ce qui fait son identité et « l?esprit des lieux ». La réalisation de travaux en site classé est ainsi soumise à auto- risation et chaque projet fait l?objet d?une instruction par les services de l?État, au regard des caractéristiques propres à chaque site. L?inspecteur des sites et l?architecte des Bâtiments de France, garants du respect du site, sont les premiers interlocuteurs à mobiliser. Les sites classés garantissent la pro- tection sur le temps long de ces espaces fragiles, qui réclament une attention particulière et des pra- tiques vertueuses. Plus largement, ils contribuent à la qualité du cadre de vie et à la protection de l?environ- nement, aujourd?hui et pour les générations futures. LES SITES CLASSÉS Le cirque de Gavarnie et les cirques et vallées avoisinants (Hautes-Pyrénées), classés en 1941 et 1997. © IStock Val de Loire, perspectives du château à Chaumont-sur-Loire et Veuzain-sur-Loire (Loir-et-Cher), site classé en 2023. © IStock Un site classé constitue à la fois une reconnaissance nationale de la valeur patrimoniale du site et une garantie de protection de ce paysage remarquable ou monument naturel, grâce au contrôle par l?État des travaux susceptibles de le modifier. C?est une montagne et une muraille tout à la fois ; c?est l?édifice le plus mystérieux du plus mystérieux des architectes ; c?est le colosseum de la nature ; c?est Gavarnie. » Victor Hugo, 1855 6 LES SITES CLASSÉS EN CHIFFRES AUVERGNE-RHÔNE- ALPES 236 sites 128 884 ha BRETAGNE 279 sites 52 285 ha BOURGOGNE- FRANCHE-COMTÉ 221 sites 49 105 ha CENTRE-VAL DE LOIRE 104 sites 19 599 ha CORSE 26 sites 39 745 ha GRAND EST 165 sites 17 397 ha HAUTS-DE-FRANCE 110 sites 60 363 ha ÎLE-DE-FRANCE 254 sites 96 847 ha NOUVELLE-AQUITAINE 284 sites 137 257 ha NORMANDIE 385 sites 60 738 ha OCCITANIE 298 sites 250 693 ha PAYS DE LA LOIRE 115 sites 59 284 ha PROVENCE-ALPES- CÔTE D?AZUR 222 sites 182 099 ha MARTINIQUE 4 sites 8 902 ha GUYANE 2 sites 16 580 ha LA RÉUNION 5 sites 421 ha MAYOTTE 0 site PLUS DE 2 700 SITES CLASSÉS PROTÈGENT LES PAYSAGES LES PLUS REMARQUABLES DU TERRITOIRE Source : Bureau des sites et espaces protégés, DGALN. GUADELOUPE 5 sites 2 060 ha 7 Superficie totale au 31 décembre 2024 : 1 182 520 hectares Un accompagnement des porteurs de projet par les agents de l?État Près de 3 900 COMMUNES ont un site classé sur leur territoire. Environ 257 000 personnes habitent dans un site classé (0,4 % de la population). 2 % ZONES URBANISÉES DES SITES À DOMINANTE NATURELLE 44 % FORÊT 26 % ESPACES NATURELS (PRAIRIES, MARAIS, ZONES HUMIDES, ROCHES, PLAGES, DUNES, ETC.) 21 % ESPACES AGRICOLES 7 % ESPACES MARITIMES ET PLANS D?EAU PLUSIEURS NOUVEAUX CLASSEMENTS CHAQUE ANNÉE ? Environ 90 INSPECTEURS DES SITES (au sein des directions régionales de l?environnement, de l?aménagement et du logement - DREAL) ? Environ 190 ARCHITECTES DES BÂTIMENTS DE FRANCE (au sein des unités départementales de l?architecture et du patrimoine - UDAP) ? Environ 15 AGENTS au sein des services centraux du ministère en charge des sites (Bureau des sites et espaces protégés et Inspection générale de l?environnement et du développement durable) UNE DISTINCTION RARE : seulement 1,9 % du territoire national 8 Inspirée de la loi sur les monuments historiques, adoptée en 1887, la loi du 21 avril 1906 organise la pro- tection des sites et monuments naturels, et fonde la notion de pa- trimoine naturel. Elle institue une commission des sites dans chaque département, chargée de réperto- rier les « propriétés foncières dont la conservation peut avoir, au point de vue artistique ou pittoresque, un in- térêt général ». Les propriétaires sont invités à prendre l?engagement de ne PLUS D?UN SIÈCLE DE PROTECTION, AU BÉNÉFICE DE TOUS pas modifier les lieux, sauf à dispo- ser d?une autorisation spéciale. Si cet engagement est donné, la propriété est classée. En 24 années d?application, cette loi a permis le classement de près de 500 sites, dont une majorité de propriétés publiques. La protec- tion concerne principalement des monuments naturels isolés et de petits ensembles pittoresques (arbres remarquables, rochers, cas- cades, sources, bois, etc.). « Ne devons-nous pas veiller à l?intégrité de nos beaux sites avec autant de sollicitude, même avec une piété plus tendre encore, qu?à la conservation de nos oeuvres d?art ? », interroge le poète Sully-Prudhomme lorsqu?il devient, en 1901, le premier président de la Société pour la protection des paysages de France, qui contribuera à l?adoption de la loi de 1906 sur la protection des sites et des monuments naturels. De la naissance de la notion de patrimoine naturel à l?intégration au code de l?environnement : retour sur plus d?un siècle de protection. LE RÔLE DÉTERMINANT DES ARTISTES ET ASSOCIATIONS POUR LA PROTECTION DU PATRIMOINE NATUREL Au XIXe siècle, les peintres de l?école de Barbizon, qui peignent « sur le motif » dans la forêt de Fontainebleau, souhaitent la mettre à l?abri de l?exploitation forestière. Napoléon III accède à leur demande en 1853, en instaurant une « série forestière artistique » qui en protège 624 hectares. Par la suite, la mobilisation des artistes et intellectuels (peintres, poètes, écrivains, etc.) ainsi que l?action des associations de protection et de promotion du voyage seront à l?origine de la loi de 1906. 1906 : NAISSANCE DE LA NOTION DE « PATRIMOINE NATUREL » La forêt domaniale de Fontainebleau, site classé en 1965. © Marie Lukasiewicz 9 QUELLE PLACE DANS LE PANORAMA DES PROTECTIONS ? Si les sites classés ont pour objectif principal la protection du paysage et la valorisation du patrimoine naturel et culturel, ils contribuent aussi à la lutte contre l?érosion de la biodiversité et le changement climatique. Ils font ainsi partie des « aires protégées ». En outre, les sites classés sont des protections soeurs de celles relevant du code du patrimoine (monuments historiques, abords de monuments historiques, sites patrimoniaux remarquables). De manière schématique, ces dernières portent sur des espaces à dominante bâtie, tandis que les sites classés concernent des espaces à dominante naturelle. Ces protections sont complémentaires. 1930 : RENFORCEMENT DE LA PROTECTION Le 2 mai 1930, une nouvelle loi est votée pour renforcer celle de 1906. Aux critères artistique et pit- toresque, la nouvelle loi ajoute les caractères historique, scientifique et légendaire. Deux niveaux de pro- tection sont distingués : l?inscription et le classement. La loi donne la pos- sibilité de passer outre le consen- tement des propriétaires, avec un classement prononcé par décret en Conseil d?État. Les protections se poursuivent durant la Seconde Guerre mondiale et, à partir des années 1950-1960, les classements se diversifient pour concerner plus fréquemment des espaces plus vastes (vallons, lacs, mas- sifs et cols, pointes et caps, îles, etc.). 1971 : PROTECTION DE GRANDS ENSEMBLES PAYSAGERS Avec la création du ministère de l?Environnement, en 1971, auquel sera confiée la politique des sites, un changement d?échelle s?opère : le classement porte de manière plus systématique sur de grands en- sembles paysagers, de plusieurs mil- liers d?hectares. 2000 : LE CODE DE L?ENVIRONNEMENT La loi de 1930 est intégrée au code de l?environnement, qui regroupe toutes les lois relatives au droit de l?environnement. Les terrains communaux de l?île de Bréhat ont été classés dès 1907, puis la protection a été étendue à l?archipel en 1980. © Istock Les glaciers, sommets et terrains domaniaux formant le massif du Mont-Blanc ont été classés en 1951 (26 000 ha). © Sylvain Magliocca 10 Le site des abattis et de la montagne Cottica, en Guyane, a été classé en 2011 pour son intérêt pittoresque, scientifique, historique et légendaire. © Sébastien Linarès LA COMMISSION SUPÉRIEURE DES SITES, PERSPECTIVES ET PAYSAGES (CSSPP) Cette commission, de niveau national, est composée de représentants des ministères, de députés, de sénateurs, de représentants élus des collectivités territoriales et de personnalités qualifiées. Par ses avis et travaux, elle joue un rôle essentiel dans la promotion des politiques de protection des sites et des paysages. Elle est notamment consultée sur les projets de classement, ainsi que sur certains projets de travaux en site classé. LA PROCÉDURE La protection porte sur des monuments naturels et des sites dont la conservation ou la préservation présente un intérêt général au point de vue pittoresque, historique, scientifique, légendaire ou artistique : PITTORESQUE : « qui frappe l?attention par sa beauté, son agrément, qui est digne d?être peint ». Par exemple, la montagne Sainte-Victoire, en Provence. HISTORIQUE : « associé à un événement marquant », tel que le champ de bataille de Verdun, ou « qui porte la marque d?activités socio-économiques ayant contribué à la création de paysages remarquables », à l?image des terrils du bassin minier du nord de la France. ARTISTIQUE : « lié à la vie et à l?oeuvre d?un artiste », comme Les Madères, lieu de création et d?inspiration du peintre Olivier Debré dans le Val de Loire. SCIENTIFIQUE : « dont l?intérêt scientifique égale ou dépasse la valeur esthétique », à l?instar de la chaîne des Puys, ensemble de volcans au sein du Massif central. LÉGENDAIRE : « lorsque le lieu est associé à une légende », tel que le tombeau de Merlin l?Enchanteur, dans la forêt de Paimpont, en Bretagne. Le critère pittoresque est le plus utilisé. Il est toutefois fréquent qu?un même site cumule plusieurs critères. La proposition de classement peut émaner des services de l?État, d?une collectivité territoriale, d?une association, d?un propriétaire, etc. Si l?opportunité est confirmée, la procédure est pilotée par les services de l?État, en associant les élus et acteurs locaux. Elle comprend plusieurs étapes : Une étude est réalisée pour définir les caractéristiques paysagères, le(s) critère(s) de protection et proposer un périmètre. Une concertation est menée avec les collectivités et acteurs du territoire. Une mission d?inspection générale permet d?expertiser la proposition, avec une visite sur site. Une consultation officielle des collectivités est effectuée. Une enquête publique est ouverte, pour une durée d?environ un mois. La commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS) donne son avis sur le projet de classement. Le dossier complet, transmis au ministre, est analysé par les services centraux du ministère. Sur la base d?un rapport de l?inspection générale, la commission supérieure des sites, perspectives et paysages (CSSPP) donne son avis sur le projet de classement. Après formalisation du projet de décret et des cartes associées, le dossier est présenté au Conseil d?État (cette étape n?est pas nécessaire si tous les propriétaires ont donné leur accord). La décision de classement est promulguée par décret en Conseil d?État (ou par arrêté ministériel si tous les propriétaires ont donné leur accord). CRITÈRES ET PROCÉDURES DE CLASSEMENT 11 DES ACTEURS LOCAUX ENGAGÉS : Pourquoi la commune a-t-elle souhaité le classement de ce site ? Stéphane Martin : En 1988, paral- lèlement à la réalisation de l?auto- route A31, la Haute vallée et les gorges de la Vingeanne ont bénéficié d?une inscription au titre des sites. Ces dernières années, la question d?une protection plus forte de ce patri- moine paysager remarquable, qui comprend le seul canyon calcaire du Grand Est, s?est posée, notamment dans un contexte de dévelop pement de l?éolien. En 2018, lors d?une réunion de terrain avec dif férents services en charge de l?environnement, Hélène Gaudin m?a indiqué qu?il était pos- sible d?en renforcer la protection par un classement. Comment s?est déroulée la procédure de classement ? Hélène Gaudin : Je suis allée expli- quer la démarche au Conseil muni- cipal qui a ensuite voté à l?unanimité le lancement de la procédure. De nombreuses rencontres avec les acteurs du territoire ont abouti à la définition d?un périmètre distinct de celui du site inscrit antérieurement, avec une plus grande cohérence pay- sagère. Une enquête publique, avec une permanence d?un mois en mairie d?Aprey, a permis à tous ceux qui le souhaitaient de faire part de leurs observations. S. M. : Les visites sur le terrain ont été déterminantes pour expliquer le projet et dissiper les fantasmes. Nous avons aussi organisé des sorties scolaires : les enfants ont pu rassurer leurs parents. Quelles sont les prochaines étapes ? H. G. : Le site se trouve dans une zone Natura 2000 dont le docu- ment d?objectif constitue en partie le cahier de gestion du site classé : les mesures de protection de la bio- diversité vont également préserver le paysage. Je vais continuer à expliquer aux agriculteurs, aux promeneurs et aux propriétaires ce qu?implique le classement du site afin que tous prennent part à la protection de ce patrimoine commun. S. M. : Nous allons valoriser ce site pour en faire un lieu de tou- risme durable, dans le respect du milieu naturel. Nous souhaitons sa connexion avec les chemins de randonnée du plateau de Langres, ainsi qu?un balisage des parcours et la création d?accès. Enfin, nous nous attachons à conserver le linéaire arboré le long de la rivière, aujourd?hui mis en péril par le chan- gement climatique. Nous travail- lons avec l?Office français de la biodiversité (OFB) et les proprié- taires concernés pour replanter des espèces résilientes et cohérentes avec l?ensemble forestier. LA HAUTE VALLÉE ET LES GORGES DE LA VINGEANNE À l?initiative de la commune d?Aprey, en Haute-Marne, les 200 hectares du site de la Haute vallée et des gorges de la Vingeanne ont été classés par décret en Conseil d?État, le 15 mai 2024. Entretien croisé avec Hélène Gaudin, inspectrice des sites de la DREAL Grand Est, et Stéphane Martin, premier adjoint au maire d?Aprey. La roche et les à-pics des falaises, la forêt et son sous-bois à la saisonnalité marquée, et l?eau vive qui jaillit de la source offrent, en toute saison, un paysage pittoresque. © Sébastien Gigon 12 Une instruction sur mesure Le classement d?un site est une ser- vitude d?utilité publique qui apporte une garantie de protection : les sites classés ne peuvent être modifiés dans leur état ou leur aspect sauf autorisation spéciale, délivrée par l?État. Chaque demande fait l?objet d?une instruction « sur mesure ». Le projet est analysé au regard des caractéristiques du site, de ce qui fait sa valeur patrimoniale. La décision est prise : ? soit par le ministre en charge des sites, après avis du service des sites (inspecteur des sites), de l?archi- tecte des Bâtiments de France et de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS) ; ? soit, pour certains travaux de faible ampleur, par le préfet de départe- ment, après avis de l?architecte des Bâtiments de France. La décision ministérielle s?appuie sur une instruction menée d?abord au niveau local puis par les services cen- traux du ministère en charge des sites, qui garantissent une analyse distan- ciée par rapport aux enjeux locaux et une harmonisation nationale. Trois règles sont communes à tous les sites : l?interdiction de la publicité, l?obligation d?enfouissement des nouveaux réseaux électriques et de communication, et l?interdiction de la création de terrains de camping et du camping pratiqué isolément (sauf dérogation). Les opérations d?entretien cou- rant (taille des végétaux, entretien d?une construction ou d?une voirie sans modification d?aspect, rem- placement à l?identique de mobi- lier, exploitation normale de terres agricoles, certaines opérations sylvi- coles, etc.), définies par les services de l?État en fonction des caractéris- tiques de chaque site, ne nécessitent pas d?autorisation particulière. Un accompagnement sur le terrain L?inspecteur des sites et l?architecte des Bâtiments de France accom- pagnent les particuliers, collectivités territoriales et entreprises qui envi- sagent des travaux en site classé. Ils étudient les projets d?aménagement et donnent leurs avis et recomman- dations. Ils s?assurent du respect de la réglementation relative à la pro- tection des sites classés. LES GRANDS PRINCIPES DE LA PROTECTION DES SITES CLASSÉS Au sein d?un site classé, une autorisation est nécessaire pour effectuer des travaux. Les services de l?État accompagnent les porteurs de projet pour trouver des solutions respectueuses du site. LA COMMISSION DÉPARTEMENTALE DE LA NATURE, DES PAYSAGES ET DES SITES (CDNPS) Dans chaque département, la formation « sites et paysages » de la CDNPS est chargée de rendre des avis sur les travaux en site classé soumis à autorisation ministérielle, en se prononçant sur l?impact du projet sur le site. Son avis peut être sollicité pour les travaux soumis à autorisation préfectorale. La commission est également consultée sur les projets de classement de site. Elle est composée de représentants des services de l?État (comprenant notamment le directeur régional de l?environnement), de représentants élus des collectivités territoriales, de personnalités qualifiées en matière de protection des sites et représentants d?associations agréées de protection de l?environnement, et de personnes compétentes en matière d?urbanisme, de paysage, d?architecture et d?environnement. LE PLAN DE GESTION Certains sites classés font l?objet d?un plan de gestion pour partager, au niveau local, une vision future du site et la trajectoire à suivre. Les principes d?intervention et orientations de gestion sont définis, dans le respect de l?identité du site. Ce document est réalisé en concertation avec l?ensemble des partenaires concernés, souvent avec l?appui d?un bureau d?étude (paysagistes concepteurs et/ou architectes). Il n?a pas de portée juridique mais définit un cadre qui permet aux porteurs de projet d?être informés en amont et aux services instructeurs de mieux appréhender les demandes d?autorisation de travaux. 13 LE SITE CLASSÉ : UNE PROTECTION RECONNUE AU NIVEAU INTERNATIONAL Les « Climats du vignoble de Bourgogne » ont été inscrits en 2015 sur la liste des biens du patrimoine mondial. Pour être inscrit sur cette liste établie par l?Organisation des Nations unies pour l?éducation, la science et la culture (UNESCO, de son acronyme anglais), un site doit bénéficier de mesures de protection nationales fortes. Près de la moitié des biens français inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l?UNESCO bénéficient d?une protection en tant que site classé. « Avec la Côte de Nuits et les Maranges, nous arriverons à 14 000 hectares classés, dont près de la moitié consti- tuée de vignobles. Pour conserver les vignes et leur écrin paysager, il est impératif d?associer les acteurs du territoire », explique Nicolas Drouhin, inspecteur des sites de la DREAL Bourgogne-Franche-Comté. Les viticulteurs ont participé, dans chacun des sites classés, à l?élabora- tion du cahier de gestion qui définit ce qui relève de l?entretien courant et ce qui est soumis à autorisation. « Les grands principes sont assez sem- blables d?un site à l?autre et pourraient converger un jour vers un cahier de gestion commun », relève l?inspec- teur, soucieux que cette vision d?ensemble soit compatible avec la grande diversité des terroirs. Une approche qui s?appuie sur une présence sur le terrain et une TRAVAILLER DANS UN SITE CLASSÉ : LES VIGNOBLES DE BOURGOGNE coordination avec la Confédération des appellations et des vignerons de Bour- gogne (CAVB). Cette dernière regroupe les 52 organismes de défense et de gestion (ODG) qui rédigent les cahiers des charges des di- verses appellations d?origine contrôlée (AOC). « Ces cahiers des charges dé- taillent les pratiques culturales autorisées et stipulent que tous les travaux susceptibles de modifier la mor- phologie de la parcelle doivent faire l?objet d?une déclaration à l?ODG membre de notre confédération », précise Charlotte Huber, directrice technique de la CAVB. Pour chaque déclaration, cette structure examine les servitudes auxquelles est soumise la parcelle : « Lorsque celle-ci est située en site classé, nous informons toutes les parties prenantes ? vigneron, ODG et DREAL ? et organisons une visite du site. Les échanges sont constructifs et aboutissent le plus souvent à une solution acceptable pour tous. Les vignerons ont conscience du caractère exceptionnel de leur terroir et de la nécessité de le protéger. » « LA PROTECTION N?EST PAS UNE MISE SOUS CLOCHE. GRÂCE AU DIALOGUE, LES VIGNERONS RÉALISENT DES TRAVAUX QUI RÉPONDENT AUX EXIGENCES LIÉES À LA PROTECTION DU SITE CLASSÉ, À CELLES DE LEUR CAHIER DES CHARGES ET À LA NÉCESSITÉ DE FAIRE ÉVOLUER LEURS PRATIQUES. » Charlotte Huber directrice technique de la Confédération des appellations et des vignerons de Bourgogne Côte nord de Beaune. © Nicolas Drouhin L?exceptionnelle mosaïque de parcelles de vignes entre Dijon, Beaune et Santenay est protégée par trois sites classés : la Côte nord de Beaune, la Côte méridionale de Beaune et la montagne des Trois Croix. La Côte de Nuits et les Maranges sont en cours de classement. Comment la protection de ce paysage remarquable s?articule-t-elle avec les enjeux économiques de ce terroir viticole ? 14 DES PROJETS RESPECTUEUX DES SITES LA CONFLUENCE MAINE-LOIRE ET LES COTEAUX ANGEVINS (Maine-et-Loire) Sur plus de 2 000 hectares aux portes d?Angers, le site de « l?ensemble formé par la Confluence Maine-Loire et les coteaux angevins », classé depuis 2010, présente un paysage composé d?îlots fluviaux boisés, prairies inondables et coteaux viticoles, et offre des panoramas remarquables, sur lesquels s?ouvrent de nombreux châteaux, parcs et jardins. Ces paysages emblématiques sont inclus dans le périmètre du bien « Val de Loire entre Sully-sur-Loire et Chalonnes » inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l?UNESCO. © Thierry Degen/DREAL Pays de la Loire 15 QUAI DE LA NOË : UNE MISE EN VALEUR DU SITE CLASSÉ, AU PROFIT DE LA QUALITÉ DU CADRE DE VIE À Bouchemaine, une des principales communes du site classé « La Confluence Maine-Loire et les coteaux angevins », la municipalité a décidé de faire du quai de la Noë un espace de circulation douce, en rétablissant sa valeur paysagère ainsi que les fonctions de ses prairies inondables, qui protègent des crues de la Maine et de la Loire. Une opération aux bénéfices multiples. « Dès mon élection, en 2014, j?ai sou- haité que la ville se réapproprie cet espace dénaturé. Le quai est une véri- table pépite qu?il fallait restaurer pour en faire un véritable lieu de vie », se souvient Véronique Maillet, maire de Bouchemaine. « Se battre contre la voiture n?a pas été simple », commente Patrice Nunez, son adjoint en charge de l?urbanisme, de la préservation du patrimoine et de la mobilité. Pour convaincre, les élus ont multi- plié les rencontres avec les riverains, les commerçants, la batellerie, les pêcheurs, etc., avec le soutien de l?architecte des Bâtiments de France et de David Couzin, l?inspecteur des sites. « Dans un contexte tendu, la municipalité a tenu bon et a défendu un projet ambitieux, qui reprofile la rive et recrée un espace naturel de divagation pour la rivière. Cette intervention, qui supprime le station- nement automobile et encadre l?em- prise des terrasses des restaurants, a permis la réouverture d?un panorama remarquable sur la Maine », s?enthou- siasme ce dernier, qui souligne la ligne directrice du projet : ne rien ajouter, aller vers l?épure. Achevé en 2019, cet aménage- ment contre lequel une pétition avait recueilli 1 200 signatures fait aujourd?hui l?unanimité. « Le souhaiterions- nous que nous ne pour- rions pas revenir en arrière », souligne la maire. Bouchemainois et visiteurs profitent désormais de cet espace de promenade à l?occasion du mar- ché dominical, en empruntant l?iti- néraire cyclable de la Loire à vélo, ou depuis les terrasses des restau- rants. « Je me souviens avec émotion, quelques jours après l?inauguration, du moment où les patients du centre de rééducation fonctionnelle voisin ont pu évoluer librement sur le quai en fauteuil roulant et profiter de la vue retrouvée sur la rivière », témoigne Patrice Nunez. Avec ce projet emblématique de mise en valeur de l?espace public en site classé, le paysage des rives de la Maine et le front bâti de Bouche- maine ont retrouvé leur harmonie, au profit d?une amélioration de la qualité du cadre de vie de tous. Après les travaux, le quai rendu à la promenade et à la contemplation du site. © Mairie de Bouchemaine Le quai de la Noë avant les travaux : un espace occupé par la voiture, avec un parking masquant la vue, et un mobilier disparate. 16 LE MONT BEUVRAY (Nièvre et Saône-et-Loire) Classé en 1990, le site du mont Beuvray, à cheval sur la Nièvre et la Saône- et-Loire, abrite, dans un paysage remarquable et un écrin forestier, les vestiges d?une cité gauloise abandonnée. Il constitue le coeur du Grand Site de France « Bibracte - Morvan des Sommets », dont le gestionnaire se mobilise pour préserver la forêt mise en péril par le changement climatique. © Aurélien Ibanez/BourgogneLive 17 MONT BEUVRAY : SAUVER LA FORÊT « Le classement implique de préserver ce qui fait la valeur patrimoniale du site. La forêt en est une composante essentielle parce qu?elle exprime l?ancienneté des vestiges qu?elle recouvre. Or les arbres, notamment les résineux, souffrent fortement du changement climatique : ainsi les épicéas sont ravagés par un parasite, ce qui conduit à des coupes sur de grandes surfaces. Face aux dif- ficultés à identifier le bon protocole de régénération, nous avons constitué un laboratoire d?expérimentation avec le financement d?un fonds européen et de la Région Bourgogne-Franche-Comté. Au-delà des aspects techniques, ce labo- ratoire vivant joue le rôle d?espace de dialogue sur le devenir de la forêt, qui fait l?objet de débats particulièrement âpres dans le Morvan. La protection du site par la loi de 1930 est une contrainte stimulante qui relève le niveau d?exigence et aide à conférer à nos actions un caractère d?exemplarité. » Vincent Guichard, directeur général de l?établissement public de coopération culturelle (EPCC) de Bibracte, gestionnaire du Grand Site de France Campagne de plantation avec un mélange d?essences forestières : chêne sessile, érable plane, châtaignier, pin laricio de Corse, pin maritime, sorbier des oiseleurs. © Antoine Maillier/Bibracte Après la coupe des épicéas attaqués par un parasite, le reboisement s?est appuyé sur la régénération naturelle et des plantations d?essences variées. « Le projet de reboisement est parti d?un diagnostic de la régénération naturelle. Il s?agit d?un travail très fin où, pour chaque parcelle, il a été évalué s?il valait mieux laisser faire la nature, replanter des petits bou- quets espacés ou tout reboiser avec un mélange d?essences. La diversité variétale augmente la résilience de la forêt face au changement climatique, tout en répondant aux enjeux paysa- gers de chaque parcelle. Nous avons ainsi replanté 16 espèces différentes, un quart de résineux et trois quarts de feuillus, avec une densité de 800 à 1 600 plants par hectare. Il faut désor- mais prendre soin de ces plantations pour s?assurer de transmettre la forêt aux prochaines générations. » Suzanne Thiéry, technicienne forestière territoriale de l?Office national des forêts (ONF) « Ce projet de reboisement, après une nécessaire coupe sanitaire, a été éla- boré pour s?adapter au changement climatique. La réflexion sur les choix variétaux a permis de recomposer le paysage en veillant à conserver un couvert forestier avec des motifs et des textures cohérents avec l?en- semble du site. En s?appuyant, autant qu?il est possible, sur la régénération naturelle et la gestion irrégulière du boisement, le projet est en cohérence avec le caractère patrimonial et histo- rique de la forêt du site classé du mont Beuvray. » Estelle Labbé-Bourdon, inspectrice des sites, DREAL Bourgogne-Franche-Comté 18 L?ARCHIPEL DES LAVEZZI (Corse-du-Sud) Classé en 1974, l?archipel des îles Lavezzi, au sud-est de Bonifacio, en Corse, constitue un ensemble remarquable du point de vue paysager, écologique et historique. Intégré à la réserve naturelle des Bouches de Bonifacio, ce patrimoine fragile est menacé par son succès. Les aménagements réalisés sur Lavezzu, la plus fréquentée des îles de l?archipel, ont vocation à améliorer l?accueil des visiteurs et à en réguler les flux. © DREAL Corse 19 ACCUEILLIR LE PUBLIC SANS COMPROMETTRE LA CONSERVATION DU PATRIMOINE NATUREL : L?EXEMPLE DE LAVEZZU « Outre sa beauté, l?île Lavezzu pré- sente de très forts enjeux en matière de biodiversité et abrite des espèces endémiques remarquables, comme le puffin de Scopoli. L?essor du tou- risme ne doit pas se faire à leur détri- ment », explique Jean-Michel Culioli, chef du service aires protégées de la mer, des îles et du littoral à l?Office de l?environnement de Corse. Dans les années 1970, Lavezzu recevait 10 000 visiteurs par an. En 2015, avec une moyenne annuelle de 300 000 visiteurs, 4 000 à 5 000 person nes pouvaient être pré- sentes simultanément sur l?île. Des outils de suivi de la fréquen- tation ont été mis en place et une réflexion globale a été engagée au sein de l?observatoire scientifique de la réserve. Un programme d?action a été intégré à son plan de gestion avec un objectif précis : une fréquenta- tion ramenée à moins de 2 000 per- sonnes présentes simultanément sur l?île et à 200 000 visiteurs à l?année, puis 150 000 visiteurs après 2026. Parmi les premières mesures mises en oeuvre : la limitation des points de débarquement et d?ancrage, le ramassage quotidien des déchets et papiers gras, l?information du public et des compagnies de bateliers. Enfin, un permis d?aménager dédié à la réorganisation des cheminements a reçu l?aval des services locaux de l?État et a été autorisé par le ministre de la Transition écologique. Pour Caroline Thill, inspectrice des sites de la Corse-du-Sud à la DREAL, « ce projet est exemplaire. Les amé- nagements améliorent l?accueil du public et la gestion du site classé, tout en préservant la biodiversité et en valorisant les qualités paysagères de l?île. Le recours à des matériaux natu- rels ? comme le bois, le chanvre et la pierre ? pour les aménagements aide à les intégrer dans le paysage et à conser- ver l?esprit des lieux ». Outre le réaménagement de l?em- barcadère, une grande partie du pro- jet a conduit à supprimer des che- mins. « Nous sommes passés de 27 km à 3 km de sentiers balisés », souligne Jean-Michel Culioli, qui se félicite des premiers résultats : « Alors même que les travaux ne sont pas terminés, la communication autour de notre plan d?action a conduit à une baisse de fréquentation : en 2023, nous avions 207 000 visiteurs et nous anticipons une baisse de 20 % en 2024. Au plus haut du pic estival, nous n?avons pas dépassé 1 700 personnes présentes simultanément sur l?île. Les objectifs ont été atteints en douceur. » État avant intervention : le sentier traverse une zone humide et des milieux présentant une végétation fragile. État projeté : les ganivelles barrent l?accès à la zone humide et le sentier part à gauche au milieu des chaos rocheux. © Office de l?environnement de Corse ? Erba Barona Paysage 20 LE CIRQUE DE NAVACELLES ET DES GORGES DE LA VIS (Gard et Hérault) Le cirque de Navacelles a été classé dès 1943. Le périmètre du site a fait l?objet d?une extension en 2018 pour porter sur l?entité paysagère du cirque, des gorges de la Vis et de leurs abords (5 257 hectares). Le label Grand Site de France a été attribué en 2017 au syndicat mixte du cirque de Navacelles qui en assure la gestion. Le site classé est également inclus dans le bien inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l?UNESCO « Les Causses et les Cévennes, paysage culturel de l?agropastoralisme méditerranéen ». Ce cirque de 2 kilomètres de diamètre et 300 mètres de profondeur attire chaque année plus de 250 000 visiteurs. © DREAL Occitanie 21 UNE ANTENNE RELAIS EN TOUTE DISCRÉTION, DANS UN PANORAMA D?EXCEPTION Comment concilier l?accès pour tous au réseau de téléphonie et la préservation des qualités paysagères des espaces naturels protégés ? C?est le défi qu?ont su relever ensemble, au coeur du site classé du cirque de Navacelles, l?inspection des sites de la DREAL, l?architecte des Bâtiments de France et un opérateur de téléphonie mobile. « Notre mission consiste souvent à composer avec des politiques qui peuvent entrer en contradiction. En l?occurrence : le déploiement du réseau mobile dans le cadre du pro- gramme ?zones blanches New Deal Mobile? et la préservation d?un site classé exceptionnel », explique Yoan Cassar, chef de la division Sites et paysages Est, à Direction de l?amé- nagement de la DREAL Occitanie. Les premiers projets soumis par l?opérateur, en 2020, proposaient de placer les antennes sur un pylône treillis ou dans un pylône tube sur un belvédère. Très visibles dans le paysage, ils ont fait l?objet d?un avis défavorable de l?inspecteur des sites et de l?architecte des Bâtiments de France, conduisant à revoir complè- tement le projet. « Chacun a accepté de faire un pas vers l?autre. D?emblée, la préserva- tion de ce paysage d?exception pour les générations futures a été mise au coeur du débat : des paysagistes ont été mandatés par les services de l?État, avec un rôle de conseil, et l?opé- rateur s?est adjoint les compétences d?un paysagiste concepteur et d?un L?antenne relais a été implantée dans une fausse cheminée sur un bâtiment existant. © Yoan Cassar/DREAL Occitanie architecte. Sur place, un drone nous a aidés à visualiser différentes hauteurs pour cette antenne. Plusieurs options ont été étudiées et il a finalement été décidé de la dissimuler dans une cheminée factice sur le bâtiment du belvédère de la Baume Auriol », décrit Yoan Cassar. Cette agilité a abouti à une solu- tion sur mesure, élaborée sur le ter- rain, avec un résultat visuellement et techniquement satisfaisant. « La cheminée se fond dans le décor, sans dénaturer le site », salue le chef de division. Si son intégration architectu- rale pourrait être encore améliorée, l?intégration dans le paysage, en évitant la création d?un pylône, est réussie. « C?est un modèle en matière d?ouverture d?esprit de l?ensemble des intervenants pour rechercher des solutions non conventionnelles », résume Yoan Cassar. Après la suppression programmée des paraboles restantes, le dispositif sera très peu perceptible. LE TRAVAIL EN AMONT ET LA CONCERTATION SONT, SANS NUL DOUTE, LE MEILLEUR MOYEN D?ARRIVER À UN RÉSULTAT SATISFAISANT POUR TOUS » Yoan Cassar chef de la division Sites et paysages Est, à la Direction de l?aménagement de la DREAL Occitanie 22 LE VILLAGE DE COLLONGES-LA-ROUGE, SON VALLON ET LES COLLINES AVOISINANTES (Corrèze) Classé depuis 1996, le village de Collonges- la-Rouge doit son nom au grès rouge avec lequel il a été bâti. En lisière des plateaux limousins, nichée dans un vallon verdoyant constellé de vergers, de noyers et de taillis de châtaigniers, la petite ville rouge aux ruelles ornées de treilles attire chaque année plus de 600 000 visiteurs. C?est dans ce bourg médiéval qu?est né le label des « Plus beaux villages de France ». © IStock 23 COLLONGES-LA-ROUGE : LA DEUXIÈME VIE DU CAFÉ DE LA GARE Pour réaliser son nouvel office du tourisme à Collonges-la-Rouge, le pôle d?équilibre territorial et rural (PETR) Vallée de la Dordogne Corrézienne s?est appuyé sur les recommandations du duo constitué par l?architecte des Bâtiments de France et l?inspecteur des sites. Résultat : un projet qui préserve l?esprit des lieux et offre aux visiteurs une qualité d?accueil renforcée. L?histoire commence par un coup de tonnerre. Le 28 décembre 2020, le ministre de la Transition écolo- gique refuse le permis de construire du nouvel office de tourisme de la Vallée de la Dordogne. Motif : le projet prévoit la démolition d?une grange du xviiie siècle, qui présente une façade en pierre de taille de grès rouge et une couverture en ardoise de pays, caractéristiques du village de Collonges-la-Rouge ; sa démoli- tion porterait atteinte au site classé. « Nous avons demandé à notre cabinet d?architectes de refondre entièrement son projet. Il fallait pro- céder rapidement pour ne pas perdre les financements qui nous avaient été accordés », raconte Jean-Pierre Lasserre, président du PETR Vallée de la Dordogne Corrézienne. « Tout le monde a repris sa copie », se sou- vient Élisabeth Pérot, architecte des Bâtiments de France. Avec l?ins- pecteur des sites, elle s?est appuyée sur ce refus pour faire émerger un projet qui aujourd?hui fait l?unanimité. « La décision minis- térielle a aidé à dépassionner les débats et a permis de rassembler tout le monde autour d?un projet qui pré- serve l?existant », relève Jean- François Puymérail, inspecteur des sites, de la DREAL Nouvelle- Aquitaine. Ensemble, architecte des Bâtiments de France et inspecteur des sites ont su conseiller maître d?oeuvre et maître d?ouvrage. « Nous aidons à construire un projet de qualité qui soit recevable, en orientant sans pres- crire », précise l?inspecteur des sites. Le projet a profité de la complé- mentarité des regards de ces deux garants de la protection des sites classés. « Ensemble, nous travaillons comme un peintre, l?architecte est au pied du bâtiment, l?inspecteur dans le grand paysage, nous articulons vue d?ensemble et souci du détail, hié- rarchie des volumes et intégration dans le décor », décrit Élisabeth Pérot. « En acceptant quelques concessions, nous avons réussi à satisfaire tout le monde : habitants, élus, associations et visiteurs. Aujourd?hui, nous disposons, à la porte d?entrée de la vallée de la Dor- dogne, d?un équipement moderne, qui se fond dans le décor et respecte le patrimoine, en offrant un accueil de qualité aux 600 000 visiteurs annuels », conclut Jean-Pierre Lasserre. L?ancien Café de la Gare, restauré pour accueillir l?Office du tourisme. © Jean-François Puymérail Une extension relie le bâtiment principal à la grange ancienne restaurée, dont la maçonnerie de grès rouge est typique de Collonges-la-Rouge. 24 Certains sites classés bénéficient d?une grande notoriété et sont sou- mis à une forte fréquentation. La démarche Grand Site de France est proposée par l?État, depuis 1980, aux collectivités territoriales pour répondre aux difficultés que posent l?accueil des visiteurs et l?entretien dans ces sites. Cette démarche permet aux collectivités de définir et mettre en oeuvre, en partenariat avec l?État et les acteurs locaux, un projet de ter- ritoire au service de la préservation du site classé et du paysage, d?un accueil et d?un développement compatibles avec les qualités patri- moniales du site. Plus de 50 territoires se sont engagés dans cette voie d?excellence, avec l?ambition de placer la préservation des paysages remarquables au coeur de leur action. Ils accueillent chaque année environ 40 millions de visi- teurs, en quête d?authenticité, dans des paysages façonnés au fil des siècles par la nature et les habitants qui s?y sont succédé. Ces territoires proposent un tourisme adapté à leurs caractéristiques patrimoniales, loin de toute standardisation. Le label « Grand Site de France » est attri- bué par le ministre chargé des sites lors- qu?un projet de pré- LA DÉMARCHE GRAND SITE DE FRANCE servation, de gestion et de mise en valeur du site classé, répondant aux principes du développement durable, est mis en oeuvre. Il est attribué à la structure gestionnaire du Grand Site de France pour une durée de 8 ans. Depuis la création du label en 2002, 22 territoires l?ont reçu et sont ainsi reconnus comme « Grand Site de France ». Tous ceux au stade « Projet Grand Site de France » ont vocation à l?obtenir à terme. Les territoires sont fédérés au sein du Réseau des Grands Sites de France, associa- tion nationale qui anime le partage d?expérience entre les collectivités engagées dans cette démarche. L?ensemble formé par la montagne Sainte-Victoire a été classé en 1983. Le territoire a obtenu en 2004 le label Grand Site de France, qui a été renouvelé par la suite et élargi au massif du Concors, classé en 2013. © DREAL PACA Grands Sites de France À la Hague, temps d?échanges sur site pour s?accorder sur des objectifs communs dans le cadre de la démarche Grand Site de France. © Nour Hachimi - La Hague 25 « Pour un élu, la démarche Grand Site de France est l?occasion de rassembler autour d?un projet d?amé- nagement du territoire l?ensemble des acteurs qui façonnent le paysage : agriculteurs, industriels, gestionnaires d?espaces naturels, habitants, repré- sentants de l?État et associations, pour s?accorder sur des objectifs communs et des moyens afin de garantir que la valeur patrimoniale du site classé, et de l?environnement plus large dans lequel il s?inscrit, perdure. Le Grand Site permet de prolonger la logique de protection, dont est garant le classement, par une logique de ges- tion et d?aménagement concertés, en particulier pour répondre à des pro- blématiques de fréquentation tou- ristique et pour soutenir le dévelop- pement d?activités économiques durables, en cohérence avec la pré- servation des paysages au sens large. En parallèle de la démarche Grand Site, nous sommes engagés dans une labellisation Géoparc mondial de l?UNESCO pour valoriser notre patrimoine géologique unique. Ces deux démarches lancées de front contribuent, chacune à leur niveau, à des objectifs communs : partager, valoriser et transmettre notre patri- moine paysager exceptionnel, dans le respect de l?esprit des lieux. » Manuela Mahier, maire de La Hague Le Nez de Jobourg, au sein de la zone côtière de la Hague. Depuis les falaises, des à-pics vertigineux sur de petites criques et les landes rases que les ajoncs, genêts ou bruyères colorent, s?offrent à la vue. © IStock À la pointe nord-ouest de la presqu?île du Cotentin, le site de la zone côtière de la Hague et du domaine public maritime a été classé en 1992. La commune de La Hague est engagée dans une démarche Grand Site de France, dont le projet de gestion a été validé par le ministère en charge des sites. La démarche porte sur 16 133 hectares, incluant le site classé, qui en constitue le coeur. LA HAGUE : LA CONCERTATION AU COEUR DE LA DÉMARCHE GRAND SITE DE FRANCE Un exemple d?intervention réalisée dans le cadre de la démarche Grand Site de France à La Hague : les murets de pierres sèches, composante essentielle du bocage lithique caractéristique du site classé, ont fait l?objet d?un inventaire et d?un plan d?actions défini en concertation avec la profession agricole et l?État. Des murets ont été restaurés et des ouvertures entre parcelles créées pour les adapter aux impératifs des exploitations agricoles d?aujourd?hui.© Jean Luc Cabrit/IGEDD 26 Elle constitue également une recon- naissance de la valeur patrimoniale d?un site. Elle permet à l?État d?as- surer une veille sur son évolution et de sensibiliser les collectivités ter- ritoriales, responsables de l?instruc- tion des autorisations d?urbanisme. En site inscrit, les travaux doivent ainsi faire l?objet d?une déclara- tion préalable, soumise à l?avis de l?architecte des Bâtiments de France ou à son accord pour les travaux de démolition (dans ce cas, l?autorisa- tion d?urbanisme doit se conformer à cet accord). Les travaux d?entretien des constructions ou d?exploitation courante des fonds ruraux ne sont pas concernés. La protection en tant que site inscrit permet d?instaurer un dialogue avec les collectivités sur les qualités du site et l?intérêt de sa préservation, et de bénéficier d?un accompagnement par l?architecte des Bâtiments de France. Environ 4 000 sites inscrits existent sur le territoire national. Il s?agit en majorité de sites naturels, agricoles et de petits ensembles bâtis (village, hameau ou élément ponctuel). Les sites inscrits recouverts par une autre mesure de protection de niveau au moins équivalent ont été désinscrits afin d?éviter les superposi- tions. Les sites inscrits de forte valeur patrimoniale ont été identifiés et ont vocation à évoluer vers une protec- tion plus forte : site classé pour les sites à dominante naturelle ou site patrimonial remarquable pour les sites à dominante bâtie. LES SITES INSCRITS Complémentaire au classement, protection pérenne où toute modi- fication du site est soumise à autori- sation spéciale, l?inscription est une protection plus légère. 27 Le bois de Cise, dans la Somme, lotissement de style balnéaire « Belle Époque » dans une valleuse boisée, inscrit en 1959. © Vanina Browaeys/DGALN La cascade du bassin des Aigrettes, dans le site de la ravine Saint-Gilles à La Réunion, inscrit en 1980. © IStock Le site du Vexin français, dans le Val-d?Oise, inscrit en 1972. © Istock Le village de Lavardin, dans le Loir-et-Cher, inscrit en 1944. © Jean-Paul Brillard Conception éditoriale et rédaction : Bureau des sites et espaces protégés, direction générale de l?aménagement, du logement et de la nature Conception graphique et mise en page : Citizen Press Crédits photos couverture : La vallée de la Clarée et la vallée Étroite (Hautes-Alpes), site classé en 1992 © IStock La Chaîne des Puys (Puy-de-Dôme), site classé en 2000 © CD63 - Valentin Uta La baie du Mont-Saint-Michel (Manche et Ille-et-Vilaine), site classé en 1987 © IStock L?ensemble formé par la Grande Anse et le Gros Morne (Guadeloupe), site classé en 1980 © IStock 2025

puce  Accés à la notice sur le site du portail documentaire du Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires

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