Pour une nouvelle économe immobilière : propositions destinées à faciliter l'émergence d'une industrie de la transformation des actifs immobiliers
YCHE, André
Auteur moral
Auteur secondaire
Résumé
La ligne directrice de ce rapport consiste à inciter à la cession des actifs matériels et immatériels obsolescents et à la mobilisation de compétences inexploitées afin de remettre les unes et les autres au service de la croissance économique et de l'utilité sociale. Les enjeux sont majeurs : soutenir la production de logements, reconvertir les surfaces de bureau excédentaires, reconfigurer les centres commerciaux et les zones d'activité ; mais surtout, redéfinir l'urbanisme en faveur de métropoles polycentriques et de quartiers, d'îlots, parfois d'immeubles multifonctionnels. 24 juin 2024 André Yché Rapport à l'attention du ministre délégué au Logement 6 Naturellement, un tel processus doit mobiliser une diversité d'acteurs économiques, politiques, dont les intérêts à court terme ne sont pas alignés et peuvent paraître, parfois, contradictoires, de telle sorte que la ligne de plus grande pente consiste dans le statu quo, à savoir le pire scénario collectif. Dans ces conditions, comment procéder, pour tenter d'« arrondir les angles » et d'aplanir les difficultés ? Il s'agit de dessiner une stratégie lisible et cohérente, en adressant des signaux aux uns et aux autres, après avoir énoncé un constat largement partagé. Inévitablement, telles qu'énoncées, les préconisations figurant dans ce rapport apparaîtront pour le moins « disruptives », parfois dangereuses ou inéquitables. Mais il convient d'en apprécier la juste portée : elles tendent à inciter à l'émergence accélérée de solutions consensuelles. Si celles-ci devaient s'imposer naturellement dans des délais raisonnables, il n'y aurait pas de problème. Mais nous n'avons plus le temps d'attendre que l'aggravation de la crise impose à tous les décisionnaires majeurs des ajustements plus coûteux et plus difficiles.
Descripteur Urbamet
Descripteur écoplanete
Thème
Habitat - Logement
Texte intégral
RAPPORT A L?ATTENTION DU MINISTRE DELEGUE AU LOGEMENT
POUR UNE NOUVELLE ECONOME IMMOBILIERE
PROPOSITIONS DESTINEES A FACILITER L?EMERGENCE
D?UNE INDUSTRIE DE LA TRANSFORMATION
DES ACTIFS IMMOBILIERS
ANDRE YCHE
« Il est tout à fait naturel qu?on ressente la nostalgie de ce qui était l?Empire, tout comme on peut
regretter la douceur des lampes à huile, la splendeur de la marine à voile, le charme du temps des
équipages. Mais, quoi ? Il n?y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités. »
Charles de Gaulle ? 14 juin 1960
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SOMMAIRE
PROLEGOMENES .......................................................................................................................................... 5
PARTIE I. CONTEXTE .................................................................................................................................... 7
I Facteurs conjoncturels ............................................................................................................................................. 7
II Facteurs structurels .................................................................................................................................................. 8
III Enseignements ........................................................................................................................................................ 9
PARTIE II. ETAT DES LIEUX ......................................................................................................................... 11
I Défi à relever .......................................................................................................................................................... 11
II Jeu des acteurs ...................................................................................................................................................... 12
A Gestionnaires et évaluateurs .......................................................................................................................................................... 12
B Collectivités locales et élus ............................................................................................................................................................ 13
C Postures paradoxales ..................................................................................................................................................................... 14
PARTIE III. PRECONISATIONS ...................................................................................................................... 15
I Transformation des bureaux .................................................................................................................................. 18
A Finalité : adapter l?offre immobilière aux mutations économiques, technologiques et sociétales .................................................. 18
B Incitations économiques à la transformation .................................................................................................................................. 19
C Incitations politico-administratives à la transformation ................................................................................................................... 21
II Transformation des centres commerciaux et des zones d?activité ......................................................................... 22
A Transposition des mesures proposées en faveur de la transformation des bureaux ..................................................................... 23
B Adoption de dispositions spécifiques ............................................................................................................................................. 23
III Transformation des actifs immobiliers publics ....................................................................................................... 25
SUITES ET CONCLUSION ............................................................................................................................. 27
ANNEXES .................................................................................................................................................. 31
A1. Synthèse des principales préconisations figurant dans le rapport ............................................................................ 33
A2. Contribution de Monsieur le Préfet des Hauts de Seine ........................................................................................... 35
A3. Jurisprudence du Conseil constitutionnel ................................................................................................................. 37
A4. Pour le logement intermédiaire (LLI) : crise du logement social, retour aux sources ............................................... 51
A5. Financement de la transformation des actifs immobiliers : les leçons du Baron Haussmann .................................. 53
A6. Démembrements, vente à réméré et fiducie dans les transformations d?actifs ........................................................ 57
A7 Revue de presse ........................................................................................................................................................ 59
A8 Création d?une « bourse des droits à construire » régionale ..................................................................................... 73
A9. Hypothèses financières sur 4 ans 2025/2028 ........................................................................................................... 75
A10. Acteurs consultés ................................................................................................................................................... 77
A11. Contributions des acteurs consultés ....................................................................................................................... 79
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PROLEGOMENES
Du point de vue de la politique de l?Etat, ce projet doit répondre à des préoccupations prioritaires :
1. Soutenir l?économie immobilière, en favorisant la conclusion de transactions et la relance de
l?investissement. A cette fin, il convient de réduire les mécanismes incitatifs à la rétention d?actifs
obsolètes au profit d?incitations à l?investissement de transformation.
2. Anticiper les mutations professionnelles et sociologiques liées à la diffusion des
technologies numériques (travail à distance, commerce électronique) et aux prémices des effets
structurels de l?intelligence artificielle.
3. Mobiliser ces mutations dans le cadre d?une politique cohérente de libération des énergies, à
travers une offre de logement couvrant tout le spectre des besoins, notamment au profit des travailleurs-
clés des secteurs public et privé et des classes moyennes.
4. Inciter tous les acteurs publics à contribuer à une stratégie de renouvellement urbain et
d?urbanisme inclusif et écologique, en prenant en compte les contraintes financières et politiques des
collectivités territoriales.
5. Contribuer au redressement des finances publiques : il doit générer des ressources
supplémentaires (TVA) et toute dépense fiscale doit être compensée par une recette assurée du même
ordre de grandeur.
La ligne directrice de ce rapport consiste à inciter à la cession des actifs matériels et
immatériels obsolescents et à la mobilisation de compétences inexploitées afin de remettre les
unes et les autres au service de la croissance économique et de l?utilité sociale.
Les enjeux sont majeurs : soutenir la production de logements, reconvertir les surfaces de bureau
excédentaires, reconfigurer les centres commerciaux et les zones d?activité ; mais surtout, redéfinir
l?urbanisme en faveur de métropoles polycentriques et de quartiers, d?îlots, parfois d?immeubles
multifonctionnels.
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Naturellement, un tel processus doit mobiliser une diversité d?acteurs économiques, politiques, dont
les intérêts à court terme ne sont pas alignés et peuvent paraître, parfois, contradictoires, de telle sorte
que la ligne de plus grande pente consiste dans le statu quo, à savoir le pire scénario collectif.
Dans ces conditions, comment procéder, pour tenter d?« arrondir les angles » et d?aplanir les
difficultés ? Il s?agit de dessiner une stratégie lisible et cohérente, en adressant des signaux aux uns et
aux autres, après avoir énoncé un constat largement partagé. Inévitablement, telles qu?énoncées, les
préconisations figurant dans ce rapport apparaîtront pour le moins « disruptives », parfois dangereuses
ou inéquitables. Mais il convient d?en apprécier la juste portée : elles tendent à inciter à l?émergence
accélérée de solutions consensuelles. Si celles-ci devaient s?imposer naturellement dans des délais
raisonnables, il n?y aurait pas de problème. Mais nous n?avons plus le temps d?attendre que l?aggravation
de la crise impose à tous les décisionnaires majeurs des ajustements plus coûteux et plus difficiles.
« Aussitôt qu?un sujet s?est rendu trop puissant,
encore qu?il soit sans crime, il n?est pas innocent. »
Pierre Corneille, Nicomède ? Acte 2 ? Scène 1
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PARTIE I. CONTEXTE
Un ralentissement conjoncturel sur fond de crise des finances publiques, doublé d?une mutation
technologique et sociologique de grande ampleur.
I Facteurs conjoncturels
Une longue période de taux bas, voire négatifs, prolongée par une injection massive de liquidités
par les banques centrales dont le bilan s?est considérablement alourdi, lors de la crise sanitaire et de ses
suites, par la domiciliation de titres d?Etat, fruits de l?explosion des dettes souveraines (« quantitative
easing »), a favorisé un mouvement de valorisation des actifs décorrélé des performances de l?économie
réelle. En ces circonstances, les détenteurs desdits actifs ont enregistré des plus-values de nature
purement nominale.
La hausse brutale des taux directeurs par les banques centrales (« quantitative tightening ») motivée
par le retour spectaculaire et prévisible de l?inflation, a fortement contribué au retournement de
conjoncture dans l?immobilier résidentiel, évinçant du marché des prêts immobiliers près de la moitié des
primo-accédants, tandis que la hausse des coûts de production (matériaux, inflation normative,
notamment thermique) combinée à une politique publique de sobriété foncière (fin de l?étalement urbain,
ZAN), suscitait un scénario de stagflation, substituant, à la baisse des prix, une régulation par le biais
d?une diminution des quantités mises sur le marché.
Tout au long du demi-siècle précédent, chaque crise de la demande solvable a fait l?objet
d?une relance budgétaire, jusqu?au dispositif « Pinel », ayant pour effet essentiel de soutenir
artificiellement la hausse des prix et la spéculation foncière. Depuis 2023, la crise de la dette
souveraine, bien au-delà du seuil symbolique des 3 000 milliards d?euros, interdit de poursuivre cette
politique, même si l?encours lui-même tend à dissimuler ses causes : la perte de compétitivité de
l?économie nationale, concrétisée par la persistance durable des déficits « jumeaux » : budgétaire et
commercial ; la croissance de la dette publique permet notamment de financer les importations tout en
dissuadant les efforts de redressement de la productivité indispensables pour la relance des
exportations1.
Ainsi donc, le moment est venu de s?interroger sur le contenu d?une autre politique et ce d?autant
plus qu?elle s?inscrit dans le champ d?une crise beaucoup plus globale qui touche plusieurs secteurs
stratégiques de l?économie immobilière : les bureaux et les centres de la grande distribution notamment.
1 Il serait erroné de considérer que productivité et urbanisme sont dépourvus de liens. Dans un contexte dominé par l?industrie,
l?économiste Robert Solow avait démontré que la croissance ne dérivait pas des facteurs primaires (capital, travail) pour plus
de la moitié de son niveau et que le « résidu », qu?il dénommait « productivité globale des facteurs » s?expliquait par le progrès
technique et la formation des salariés. Dans une économie tertiarisée, il est clair que la qualité de l?urbanisme intervient
significativement dans l?explication du « résidu de Solow ».
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II Facteurs structurels
Avec plus de cinq millions de mètres carrés de bureaux vacants en Ile-de-France et certaines
projections prévoyant, à terme, le doublement de ce chiffre à horizon de trois ou quatre ans, l?impact du
télétravail est évident, alors même que de nouveaux projets d?immobilier tertiaire continuent de voir le
jour, accélérant le déclassement de produits obsolètes et mal situés (livraison en Ile-de-France de plus
d?un million de m2 supplémentaires prévue en 2024).
Tel est l?effet manifeste de l?explosion du travail à distance, post-confinement, qui s?est diffusé de
façon inopinée dans l?ensemble de l?économie et des services publics.
Simultanément, le développement du commerce électronique (Amazon, etc.) a porté un rude coup
aux centres commerciaux les moins rentables et les plus vieillissants, soit environ le quart des grandes
plateformes de distribution dans notre pays, imposant leur reconfiguration : réduction des surfaces de
commercialisation et du stationnement, transformation des galeries marchandes en rues commerçantes,
les commerces en pied d?immeuble étant désormais surplombés par des logements en étages. Bref, le
retour à un urbanisme classique, reconnecté à l?environnement urbain, par opposition à la prolifération
des périphéries « américaines » des années 1980.
Il est essentiel d?analyser l?origine de ces retournements de marchés : ceux du tertiaire administratif
et commercial. Derrière l?un et l?autre, il s?agit de la diffusion des technologies de l?information à grande
échelle dans toutes les activités sociales, qu?elles soient ou non à contenu économique, et il s?agit
indubitablement d?un « cycle de Kondratieff » qui ne se limite pas au secteur immobilier (qui n?en offre
qu?une manifestation précoce et paroxystique) mais qui est destiné à impacter l?ensemble de l?économie,
selon un cycle long dont la phase baissière peut atteindre une vingtaine d?années. Tel fut le cas, en
France, au cours du dernier quart du XIXe siècle (1873-1896), période dite « de longue stagnation ». Il
est donc illusoire d?attendre l?issue d?un « cycle court » classique, qui ne viendra pas, tandis que la crise
atteindra l'ensemble des secteurs et sous-secteurs, relayée par l?irruption de l?intelligence artificielle dans
tous les processus productifs.
Un exemple ? La logistique, qui fait fonction de « placement refuge », alors qu?il s?agit d?une
catégorie d?actifs particulièrement sensible (à l?inverse du logement) à la croissance de l?économie et du
commerce international. Il paraît peu probable que l?une et que l?autre, exposée à la défiance croissante
à l?égard des accords de libre-échange, ne soutiennent durablement la conjoncture ; il n?est donc pas
improbable que l?engouement des investisseurs, logisticiens de circonstances, ne rencontre,
prochainement, la même désillusion que celle éprouvée par les mêmes, longtemps séduits par
l?investissement dans les bureaux.
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III Enseignements
Plusieurs conséquences méritent d?être déduites de cette analyse : en premier lieu, il serait erroné
d?envisager la crise sous un angle purement sectoriel alors que sa diffusion dans l?ensemble de
l?économie immobilière souligne sa nature systémique puisque ses canaux numériques concernent, de
fait, l?ensemble des activités sociales.
Cette observation peut inspirer quelques réflexions : l?économie dépend, d?abord, de la psychologie
collective ; l?approche libérale de la crise, confortée par l?état des finances publiques, pourrait inciter à
confier aux mécanismes de marché les ajustements nécessaires à la sortie de crise. Or, tout conduit à
penser que le processus de transformation immobilière peut être long et s?accompagner de friches
urbaines, fussent-elles verticales, génératrices d?ANRU 3, 4, 5 ? et néfastes pour le rétablissement de
la confiance publique ; dès lors, l?enjeu central de la politique publique consiste à réduire la durée
d?ajustement des marchés.
Enfin, deux idées majeures découlent des expériences antérieures et de la conjonction de crises
dissymétriques (sous-production de logements, surcapacités de bureaux) qui concernent les principales
catégories d?actifs immobiliers au point d?impacter le modèle d?urbanisme lui-même.
- Il est essentiel que l?action publique, en rupture avec les pratiques courantes, n?encourage pas
l?inflation des prix des actifs en solvabilisant artificiellement la demande (au profit, essentiellement, de la
valeur du foncier constructible), puisque c?est précisément ce mouvement qui a suscité, in fine, la
raréfaction des transactions, l?effet négatif sur la dynamique des flux d?investissement à moyen terme du
fait de la surévaluation des actifs surpassant l?effet positif d?un déversement budgétaire ou fiscal à court
terme.
- Puisque l?urbanisme extensif atteint ses limites écologiques (ZAN) et financières (les finances
locales, l?entretien et l?installation des réseaux, notamment d?adduction d?eau potable) la seule alternative
consiste dans l?émergence d?une industrie de la transformation des actifs qui repose sur l?interconnexion
des divers compartiments (résidentiel, tertiaire, commerce, etc.) de l?économie immobilière, sachant que
parmi eux, et telle est son utilité essentielle, corrélée aux tendances de la démographie française (bien
que de moins en moins différente de ce qu?elle est dans la plupart des pays d?Europe), c?est bien le
résidentiel qui présente la plus forte résilience (notamment pour des raisons sociologiques de
décohabitation intergénérationnelle et d?instabilité conjugale).
A cet égard, il est important de souligner les conséquences des mutations sociologiques actuelles
sur la définition même de l?habitat, à moyen terme. En effet, la réduction de la demande d?espaces de
travail spécialisés (les « bureaux ») et les surcapacités qu?elle engendre, suscite nécessairement un
besoin de substitution dans le cadre domestique (il s?agit là d?une évolution inverse de celle observée au
mitan du XIXe siècle lorsque la proto-industrie des ateliers familiaux a périclité au profit des « fabriques »,
paradoxe riche d?enseignements en termes d?organisation de l?espace tertiaire de plus en plus dictée par
le besoin de socialisation des salariés).
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La difficulté, pour les promoteurs, d?inclure de tels développements, qu?il s?agisse de les concevoir
sur un mode privatif ou partagé, dans l?équation économique des programmes offre des opportunités
induites par les contraintes de la mutation fonctionnelle des bâtiments qui engendre des surfaces
difficilement utilisables dans une perspective qui serait exclusivement tournée vers l?habitat. Il s?agit là
d?un des atouts potentiels de l?industrie de la transformation immobilière qui doit être conçue
comme une démarche de diversification fonctionnelle, dans une approche multiscalaire, au
niveau de l?immeuble, de l?îlot, comme à celui du quartier.
Il s?agit ainsi de prendre en compte la mutation sociologique sous-jacente à l?encontre de l?urbanisme
métropolitain monocentrique et monofonctionnel qui résulte fondamentalement des limites des mobilités
collectives. La transformation d?actifs tertiaires comporte des opportunités d?innovation architecturale
tirant toutes les conséquences de la porosité croissante entre les lieux de vie et de travail, à partir
d?espaces inutilisés ou d?éventuelles extensions. D?une manière générale, il s?agira donc de mettre à profit
certains aspects de la crise de l?immobilier tertiaire pour oeuvrer à la sortie de crise du résidentiel, mais
surtout pour engager une profonde mutation urbaine ; en d?autres termes, il s?agira de s?appuyer sur
des déséquilibres sectoriels pour susciter le mouvement.
« Pressé fortement sur ma droite, mon centre cède, impossible
de me mouvoir. Situation excellente, j?attaque. »
Ferdinand Foch, Première bataille de la Marne
Il reste à vérifier si l?état des marchés offre des perspectives réalistes à cet égard (Partie II), et quels
sont les éléments d?une politique publique visant à accélérer l?émergence d?une industrie de la
transformation immobilière (Partie III).
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PARTIE II. ETAT DES LIEUX
I Défi à relever
L?appréciation du défi à relever découle des classes d?actifs concernées :
- En termes de production de logements, en regard du niveau de plein emploi des capacités de
production, de l?ordre de 450 000 logements par an, le trend pour 2024-2025 se situe autour de
250 000 logements ; simultanément, les permis accordés et abandonnés en 2023 sont passés d?une
moyenne annuelle de 25 000 ? 30 000 à près de 150 000, du fait de redimensionnements de programmes
imposés par les autorités locales et du mauvais résultat des pré-commercialisations (taux de désistement
pour refus de prêt de l?ordre de 50%).
- En termes de surfaces de bureaux vacants, le niveau de 5 millions a été franchi en Ile-de-France,
engendrant une destruction de valeur potentielle de 20 à 25 milliards d?euros, tandis que la communauté
des professionnels du bureau prévoit le doublement de ce niveau d?ici trois à quatre années ; de plus, la
décision de l?Etat de désaffecter 25% de son parc tertiaire (soit cinq millions de m2), qui devrait être
répliquée par les collectivités territoriales, devrait contribuer à propager le mouvement en province2.
Deux autres caractéristiques de la vacance doivent être notées : environ un quart des espaces
vacants sont inutilisés depuis plus de deux ans et présentent donc les caractéristiques d?une désaffection
durable ; cette proportion est appelée à croître nettement au cours des prochaines années, alors que la
vacance elle-même augmentera fortement. De plus, environ un tiers de ces actifs n?ont pas bénéficié de
travaux de rénovation depuis vingt ans et leur remise à niveau en termes de performance thermique
s?avèrerait très onéreuse.
- S?agissant des centres commerciaux, un des principaux acteurs de la transformation estime à
25% la proportion des plateformes majeures de la grande distribution (300 sur 1 200) qui mériteront
d?être reconfigurées. Il convient de rappeler que sur un mode relativement mineur puisqu?il ne s?agit que
de valoriser des espaces artificialisés (parkings, annexes?), le Groupe Carrefour est déjà engagé dans
la densification et la diversification d?usage de plus de soixante-dix sites. Le Groupe Auchan étudie, de
son côté, la reconfiguration d?une dizaine de sites, à travers sa filiale spécialisée (Noods).
2 Cf. La description détaillée du parc de bureaux en Annexe 11.
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II Jeu des acteurs
« Je tiens ce monde pour ce qu?il est : un théâtre où chacun doit jouer son rôle. »
William Shakespeare, Le Marchand de Venise
A Gestionnaires et évaluateurs
Selon les véhicules concernés (les foncières cotées et non cotées pour moins de 100 milliards
d?euros d?immobilier d?entreprise, les SCPI pour près de 150 milliards d?euros), les stratégies diffèrent, à
divers titres.
- Les foncières souhaitent assainir leurs portefeuilles et constituent des provisions sur les actifs
vacants ou hors marché, qui peuvent être très récents (immeubles livrés et jamais loués). En règle
générale, elles tendent à réguler le mouvement de dépréciation, inexorable à terme, mais sont tacitement
disposées à saisir la première opportunité qui se présentera, sous la forme d?une initiative de l?Etat
(mesure fiscale, amortissement exceptionnel?), pour accélérer les prises de décision de « write-off ».
- Les gestionnaires de SCPI sont dans une situation plus délicate, dans la mesure où ils doivent
assurer, à terme, la liquidité aux souscripteurs alors que le flux des investisseurs ne compense plus celui
des désinvestisseurs (l?écart croissant atteignant d?ores-et-déjà plusieurs milliards d?euros), ce qui devrait
entraîner un courant important d?arbitrages, tandis que le niveau encore élevé des évaluations de « juste
valeur » interdit la réalisation effective de cessions à des fonds ou foncières « de transformation », les
gestionnaires de SCPI hésitant, par ailleurs, à modifier, dans le cadre de leur mandat, la nature des actifs
qui leur ont été confiés.
- Cette situation de blocage soulève plusieurs interrogations : d?abord, quant au rythme actuel de
décote alors que le marché est de plus en plus scindé en segments divergents. Ainsi, le marché parisien
(et surtout la composante QCA, quartier central des affaires) tire remarquablement son épingle du jeu en
absorbant la demande provenant des périphéries à l?occasion de la réduction du format des sièges
d?entreprise : la vacance pour le QCA est inférieure à 2%, le loyer de référence dépasse 1 100¤/m2.
A contrario, les autres secteurs souffrent plus ou moins sévèrement : La Défense enregistre 10% de
vacance et jusqu?à 15% de vacance potentielle et des loyers en baisse à moins de 500¤/m2, dont la réalité
doit être appréciée en regard des « remises commerciales » qui peuvent atteindre 40% de la durée du
bail. Et surtout, le secteur « Péri - Défense », tout comme la « 1ère couronne Nord » subissent un taux de
vacance de l?ordre de 25% et une baisse tendancielle des loyers en dessous de 300¤/m2.
Il en résulte que la notion de valorisation moyenne perd toute signification, celle des actifs obsolètes
ou mal situés (même récents) étant, en réalité, proche de zéro. Le retard d?ajustement de la valeur de
ces actifs constitue un obstacle sérieux pour leur transformation (le Groupe Mirabaud estime que sur 400
projets étudiés, seulement 25 sont susceptibles de faire l?objet d?un réinvestissement de transformation).
Ainsi, se pose la question des modalités et du rythme de dépréciation des actifs obsolètes détenus
par les véhicules d?investissement dits « alternatifs », c?est-à-dire ouverts à des investisseurs non-
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 13
professionnels, alors même que la Direction du Trésor étudie les modalités d?adaptation desdits véhicules
à la réglementation européenne relative à la dénomination ELTIF. Une occasion est dpnc offerte
d?introduire une certaine souplesse dans la constatation des moins-values latentes, par exemple en
prévoyant des dispositions de vente à réméré (sous réserve de la modification de la règle fiscale qui
assimile une vente à réméré avec exercice de l?option de rachat à une double transaction), voire de
fiducie3, permettant de reporter à la livraison des actifs transformés la constatation d?une moins-value.
S?agissant de supports faisant appel public à l?épargne de non-professionnels, la supervision de l?AMF
s?imposera d?évidence.
D?autres solutions sont envisageables : la communauté notariale, à travers notamment des figures
reconnues (Me Leonetti et Me Raunet de l?étude Cheuvreux et Me Lièvre de l?étude 14 Pyramides) à
l?instigation du Conseil Supérieur du Notariat, présidé par Sophie Sabot-Barcet, travaille notamment sur
les démembrements de propriété, procédé ingénieux dont les modalités et limites sont exposées en
annexe.
B Collectivités locales et élus
Les réticences financières des élus sont bien connues : la perte de la CFE et de la taxe sur les
bureaux, le coût des équipements de proximité liés à l?arrivée de nouveaux habitants, plus généralement,
la crise des finances locales?
Les objections politiques pèsent tout autant et parfois (notamment dans l?Ouest parisien), beaucoup
plus : le rejet des travaux et des nuisances qu?ils provoquent pour la population, le refus d?un nouveau
peuplement dans le quartier (« Not in my backyard »). Le maire lui-même (et la majorité dont il est issu)
ne souhaite pas nécessairement une modification trop sensible de la base sociologique, c?est-à-dire
électorale, de sa commune, du fait, notamment, des obligations instituées par la loi SRU.
Bien souvent, les préoccupations environnementales confèrent une apparence parfaitement
respectable à ces arrière-pensées qu?André Santini, en d?autres temps, avait résumées d?une formule
lapidaire : « Maire bâtisseur, maire battu ! » Malédiction qu?il avait d?ailleurs surmontée, en tertiarisant, en
avance sur toutes les communes de la « ceinture rouge », sa bonne ville d?Issy-les-Moulineaux, illustrant
ainsi tous les attraits de l?immobilier de bureaux, du moins avant le « grand retournement » du
confinement de 2020 et de l?explosion du télétravail.
Il faut dire qu?aujourd?hui, dans la mémoire collective des élus ayant connu cet âge d?or, tous ces
avantages subsistent, illusion entretenue, en Ile-de-France, par la persistance de la taxation des bureaux
vacants, justifiée par le financement du « Grand Paris Express ». Ainsi, la taxe sur les bureaux
(marchands ou non, occupés ou vacants) permet de financer le réseau de transport francilien à hauteur
de 600 millions d?euros par an, tandis que 200 millions d?euros sont versés à la Région Ile-de-France.
3 A cet égard, il convient de mentionner le projet d?« Helios Fiducie Capital » qui assume le rôle d?un précurseur en ce domaine,
appliquant rigoureusement le principe trop souvent ignoré par le capitalisme financier alors qu?il inspirait le capitalisme
industriel, selon lequel la meilleure façon de dominer un marché, c?est de le créer !
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 14
C Postures paradoxales
Force est de constater, en synthèse, que le jeu des acteurs, contre l?évidence même issue de l?état
des lieux, entretient une stratégie privilégiant le statu quo, car toutes les incitations concourent à ce qu?il
en soit ainsi : in fine, elles interdisent toute perspective de jeu coopératif, puisque chacun, dans le couloir
dans lequel il opère, s?efforce de restaurer ses propres équilibres au détriment du voisin, oubliant qu?il ne
peut s?agir, au mieux, que d?un jeu à somme nulle, négligeant la complexité du débat. Un exemple de
cette myopie volontaire ? Par rapport aux autres secteurs hors QCA, La Défense conserve des atouts
considérables qui peuvent laisser espérer un redressement des indicateurs, au détriment de sa
périphérie ; mais le très ambitieux projet de rénovation du premier quartier d?affaires européen n?implique-
t-il pas, afin de conforter son attractivité globale, d?introduire une réelle mixité d?usage qui restaure
durablement une animation permanente qui n?a jamais existé en dehors des horaires de travail et qui, de
ce fait, n?est plus viable alors que s?accentue la porosité entre l?espace du travail « à domicile » et celui,
dont il s?agit d?accentuer la convivialité, du retour en « présentiel » ?
Il s?agit donc d?instaurer les conditions d?un « jeu coopératif » en inversant toutes les
incitations, qui doivent être conçues en faveur du mouvement au lieu de jouer au profit de
l?immobilisme.
En effet, l?intérêt bien compris des investisseurs et gestionnaires de bureaux implique l?apurement
rapide des surcapacités actuelles et futures afin de restaurer un équilibre de marché qui autorise une
estimation assurée des produits locatifs escomptés. La relance de l?investissement dans le secteur des
bureaux dépend de cet ajustement qu?il s?agit de favoriser pour sortir de ce volet de la crise dans les
meilleurs délais et améliorer qualitativement l?offre marchande.
Le paradoxe tient au fait que la plupart des acteurs attendent, sans l?exprimer, une impulsion
qui les amène ? ou qui les contraigne ? à bouger, et tous sont conscients que cette impulsion ne
peut venir que de l?Etat.
S?agissant des plateformes déclinantes de la grande distribution, le même constat ceteris paribus,
peut être tiré et se traduit notamment par la durée imprévisible, mais toujours conséquente, de la phase
de planification et de préparation administrative de l?opération de transformation qui peut s?étendre sur
des périodes de quatre à huit années, voire au-delà. Il est donc difficile, pour un investisseur, d?anticiper
les coûts de portage « de transition », incertitude accrue par l?attentisme de certains propriétaires des
murs et des fonds de commerce, tentés d?exploiter leur actif, voire de spéculer sur le prix de leur retrait,
transformant ainsi progressivement d?anciennes « vaches à lait » en « poids morts » qui ne sont plus
guère susceptibles d?être « redorés ».
Il s?agit donc, tout comme au niveau de certains quartiers d?affaires, de faciliter l?alignement des
intérêts publics / privés en imaginant les incitations qui permettront d?accélérer les processus d?adaptation
indispensables. En définitive, l?enjeu fondamental de l?émergence d?une industrie de la transformation
des actifs immobiliers consiste dans la durée d?ajustement des stratégies non-coopératives d?acteurs
nécessairement complémentaires et, pour certains d?entre eux, tentés, contre leurs propres intérêts par
le statu quo justifié par une formule : « attendre et voir venir ».
Or, cette réactivité insuffisante de la société française confrontée à d?inévitables mutations, c?est
précisément la principale motivation de la réticence de certains investisseurs internationaux.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 15
PARTIE III. PRECONISATIONS
« Salus populi, suprema lex »
Ciceron ? De legibus
Puisque la méthode habituelle de relance par la solvabilisation de la demande grâce à des artifices
budgétaires ou fiscaux a démontré ses limites dans la durée et que de surcroît, la situation des finances
publiques fait qu?elle n?est plus envisageable, la seule voie praticable consiste dans la création de valeur.
Le véritable arbitrage à opérer porte sur le niveau d?activité créateur de richesses (les flux de
transaction et d?investissement) versus la valorisation des actifs à transformer. Celle-ci, pour des raisons
exposées ci-dessus, a atteint un niveau décorrélé de la croissance réelle et donc de leur valeur
économique, au sens de « valeur d?usage »4.
Or, lors de chaque grande mutation urbaine, les flux d?investissements nécessaires ont trouvé un
levier de rentabilité indispensable dans la dépréciation des actifs concernés, suivi par un remembrement
du foncier urbain et une densification du bâti, justifiant un nouveau départ à la hausse des valeurs
foncières : les expropriations opérées par Haussmann (60% de la superficie de Paris) suivies par la
démolition de 60% du bâti (18 000 bâtiments sur 30 000) ; les reconstructions d?après la Seconde Guerre
mondiale inspirées d?un modèle de densification « néo-haussmannien » (les façades néoclassiques en
pierre de taille en moins) tel qu?illustré par Auguste Perret au Havre ; l?aménagement des villes nouvelles,
avec la création très confidentielle par le « Groupe Central des Villes Nouvelles » des « zones
d?aménagement différé » (ZAD) dans lesquelles la valeur du foncier était figée au niveau de celle du
terrain agricole. Ainsi, en matière d?économie immobilière, pour créer de la valeur, il faut commencer par
en détruire !
Il convient de souligner, au passage, qu?il s?agit là du ressort économique du logement intermédiaire,
qualifié comme tel car « intermédiaire » entre régime conventionné (initialement) et libre (après dix ans
d?exploitation locative) : la destruction de valeur liée au conventionnement initial permet la création de
valeur, dès lors que les contraintes réglementaires (niveau de loyers, niveau de ressources) s?estompent
progressivement. Ainsi s?illustre un principe essentiel à l?origine de la création des « zones franches » :
la création de valeur est révélée lors du franchissement de la frontière économique, et celle-ci trouve tout
son intérêt dans un espace de souveraineté intégré (d?où le rôle des opérateurs « globaux », recouvrant
l?offre sociale et intermédiaire). C?est dans le même esprit qu?il serait pertinent de transférer, sous statut
intermédiaire, les logements sociaux dont les locataires dépassent les plafonds de ressources, ce qui
accroîtrait les ressources perçues par les bailleurs sans contraindre les occupants à déménager, leur
ouvrant de surcroît des perspectives d?accession à la propriété.
Une des grandes erreurs de la politique publique en matière immobilière, depuis un demi-siècle, a
consisté à ignorer la dimension temporelle dans le processus de création de valeur (le conventionnement
« à perpétuité » de la loi SRU), travers que l?on retrouve d?ailleurs dans une conception
« détemporalisée » des finances publiques : le soutien à l?investissement créateur de recettes de TVA
serait inutile, ledit investissement étant présumé survenir tôt ou tard ; l?exécution budgétaire 2023 a
démontré les limites de cette approche.
4 De la même manière que le pouvoir d?achat, financé par le creusement des déficits publics, est dangereusement décorrélé
de l?évolution de la productivité, en berne dans des proportions inédites depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 16
Pour restaurer des flux de transaction et de réinvestissement, il convient donc de ramener la valeur
des actifs à un niveau compatible avec leur transformation, par hypothèse, en programmes de logements
intermédiaires sur du foncier déjà artificialisé. Mais dans le cadre de l?Etat de droit, qui organise la sécurité
juridique des personnes physiques et morales à laquelle il n?est pas envisageable de déroger, il convient
d?abord de s?assurer de la compatibilité du dispositif envisagé au regard des principes fondamentaux du
droit constitutionnel.
Il s?agit donc d?imaginer les mesures permettant de restaurer l?utilité sociale des actifs immobiliers
obsolètes, sans porter une atteinte générale, excessive et permanente au droit de propriété, à l?égalité
des citoyens devant l?impôt et les charges publiques, ni remettre en cause les compétences des
collectivités locales en ce qu?elles contribuent à l?intérêt général de la Nation, à travers ses territoires.
Trois décisions du Conseil constitutionnel peuvent éclairer la réflexion :
- deux sur la taxe d'habitation sur les logements vacants : CC 29 juillet 1998, n°98-403 DC, cons.
17 à 19 et CC 29 déc. 2023, n° 2012-662 DC, cons. 134-139 ;
- une à propos d'une majoration de la taxe d'habitation dans certaines zones pour inciter les
propriétaires de résidences secondaires à les « rendre au marché » des résidences principales : CC 29
déc. 1014, n° 2014-708 DC.
Le point commun de ces décisions est de se prononcer sur la constitutionnalité de dispositions
législatives instituant des majorations fiscales dans le but d'infléchir le comportement de propriétaires
immobiliers dont le législateur estime que l'usage qu'ils font de leurs biens contrarie la poursuite d'un
objectif d'intérêt général.
Une lecture trop rapide de la jurisprudence 98-403 DC, toujours en vigueur, pourrait donner
l'impression que l'on ne peut pas surtaxer dès lors que la remise en service du bien vacant impose au
propriétaire des travaux importants, mais ce serait un contresens : si le Conseil constitutionnel a émis
cette réserve d'interprétation, c'est parce qu'elle découlait en l'espèce directement de l'intention du
législateur ; autrement dit, il n'a pas opposé au législateur la contrainte d'une règle qui lui serait
supérieure, il a simplement rappelé les limites du dispositif en cause compte tenu des objectifs que le
législateur s'est lui-même assignés.
Pour résumer la jurisprudence telle qu'il faut la lire :
1. C'est d'abord au regard des principes d'égalité devant l'impôt et d'égalité devant les charges
publiques, plutôt que de protection du droit de propriété, que le Conseil a examiné la constitutionnalité
des dispositions en cause. Cela tient bien sûr au fait qu'il était saisi de moyens en ce sens - mais l'on
peut noter qu'il ne s'est pas saisi d'office de la question d'une éventuelle atteinte au droit de propriété.
2. Dans la logique de sa jurisprudence sur les principes d'égalité devant l'impôt et d'égalité devant
les charges publiques :
- le Conseil constitutionnel s'attacherait donc d'abord face à de telles mesures à vérifier l'existence
d'un objectif d'intérêt général : il ne fait pas de doute que l'objectif de réduire les friches immobilières et
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 17
d'augmenter l'offre de logements abordables dans les zones tendues entre dans cette catégorie (l'on peut
considérer que c'est même jugé au vu des décisions ci-jointes).
- il s'assurerait ensuite que les surtaxes en cause sont en rapport direct avec l'objectif (égalité
devant l'impôt) et fondées sur des critères objectifs et rationnels (égalité devant les charges publiques).
Là encore, au vu des précédents, ce test ne devrait pas créer de difficulté insurmontable compte tenu de
l'objectif poursuivi (il est utile que le législateur le formule clairement), de la nature des mesures (des
majorations fiscales en rapport direct avec l'objectif), de leur encadrement dans l'espace et dans le temps,
des exonérations qui sont accordées au redevable dès lors qu'il s'inscrit dans une démarche active de
réalisation de l'objectif et, le cas échéant, des facilités qui lui seraient données (aides ou prêts pour
réaliser les travaux, crédit d?impôt).
Les mesures envisagées sont pleinement compatibles avec la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur l'égalité devant l'impôt et l'égalité devant les charges publiques, puisqu'elles
mettent en oeuvre des surtaxes temporaires fondées sur des critères objectifs et rationnels, et en
rapport direct avec l'objectif d'intérêt général qui s'attache à la réduction des friches immobilières
et à l'augmentation de l'offre de logements abordables.
« La fin capitale et principale en vue de laquelle les hommes s?associent dans les républiques et se
soumettent à des gouvernements, c?est la conservation de leur propriété. »
Thomas Hobbes
Qu?en est-il du droit de propriété ?
Dès lors que l?objectif principal consiste à transformer des bureaux en logements, il convient de
rappeler que s?agissant du « droit d?accès » que constitue le droit au logement, le Conseil constitutionnel
s?est efforcé de concilier ce qu?il qualifie dans une décision de 1995 d?« objectif de valeur
constitutionnelle » avec le droit de propriété, introduisant ainsi l?idée que les droits subjectifs peuvent
trouver une place dans la déclinaison d?un droit objectif en tant que critères d?appréciation des limites
d?un droit constitutionnellement protégé.
A travers le cheminement de sa jurisprudence, à compter de sa célèbre décision du 16 janvier 1982,
le Conseil constitutionnel, sur la base des articles 2 et 17 de la Déclaration des Droits de l?Homme et du
Citoyen, mais aussi du bloc de constitutionnalité incluant les préambules des constitutions de 1946 et de
1958, a constamment réaffirmé le rang constitutionnel du droit de propriété, mais l?a occasionnellement
relié à la liberté d?entreprendre et à la liberté contractuelle, soulignant ainsi la double finalité de la
propriété, droit patrimonial constitutif, avec la liberté et la sûreté, de l?ordre politique et social, mais aussi
mode de réalisation de l?utilité publique, s?agissant des biens affectés à un usage économique. Donc, la
protection de la propriété contribue à l?ordre public et à la paix civile, mais également à la prospérité en
tant que source de création de richesse et de distribution de revenus et donc, par le biais de leur
fiscalisation, à la couverture des charges publiques. Tel est d?ailleurs l?objet de la taxe sur les friches
commerciales.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 18
Ainsi, les actifs immobiliers à finalité économique, dont la propriété est garantie par le bloc de
constitutionnalité car conditionnant la liberté d?entreprendre, doivent justifier leur protection spéciale par
leur contribution à l?utilité collective, soit directement par leur affectation au service public et à l?économie
sociale et solidaire, soit indirectement en engendrant des revenus (loyers, taxes?) conformément à leur
destination première. Telle est d?ailleurs la justification de la nationalisation des entreprises, qu?elles
soient en difficulté ou entravées dans leur développement.
C?est dans cette perspective que doivent être conçues les dispositions favorisant l?émergence d?une
industrie de la transformation des actifs immobiliers : s?agissant des biens en voie d?obsolescence, c?est-
à-dire ne contribuant plus à l?utilité sociale, ni par le biais de leur affectation à l?intérêt général, ni à travers
leur usage économique, il s?agira d?imaginer les voies et moyens de leur réaffectation au bien commun
qui justifie le régime de protection constitutionnelle dont ils bénéficient.
Afin de permettre la nécessaire conciliation des intérêts fondamentaux évoqués ci-dessus,
les dispositions suivantes seront circonscrites dans l?espace aux seuls territoires métropolitains
et dans le temps car leur application sera limitée à dix ans, durée minimale de transformation de
l?économie immobilière et de l?industrie afférente.
I Transformation des bureaux
La transformation des bureaux fait figure de cas d?école et peut inspirer, à bien des égards, les
principes de la transformation de toutes les classes d?actifs immobiliers : commerces, logements? ainsi
qu?à terme, la mobilisation du foncier constructible.
A Finalité : adapter l?offre immobilière aux mutations économiques, technologiques et
sociétales
De l?état des lieux tel qu?il ressort, il s?agit, d?abord, de reconstruire une offre multifonctionnelle au
niveau des quartiers, des îlots, voire des bâtiments lorsqu?ils sont de grande dimension. A ce titre, la
création d?habitat, qu?il s?agisse de logements, de résidences gérées pour étudiants, jeunes travailleurs
ou seniors, sera prioritaire, mais elle se combinera à l?hôtellerie abordable, aux locaux dédiés à la
formation, au coworking ou au « flex offices » selon les circonstances. Les produits innovants (« co-
living », « Apart-Hôtel ») complèteront le spectre des possibilités, au même titre que les « hôtels
d?entreprises » destinés à accueillir des starts-up selon des thématiques technologiques particulières.
C?est cette approche multifonctionnelle de la transformation d?actifs qui permettra de surmonter les
contraintes techniques : l?épaisseur des trames, en dédiant les espaces centraux à des usages de « co-
working » ; la rénovation des façades, par création de terrasses et de loggias?
« Les villes sont les serres chaudes de la civilisation. »
Gaston Bachelard, La poétique de l?espact
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 19
B Incitations économiques à la transformation
1. Taxation de la vacance : un immeuble (ou une partie d?immeuble) de bureaux est réputé vacant
dès lors qu?il n?est pas effectivement occupé par son propriétaire ni par un tiers dans le cadre d?un bail
conforme au droit et donnant lieu au versement d?un loyer dont le montant est compatible avec les
conditions du marché.
Au-delà d?une période de vacance « frictionnelle » de deux ans, une taxe additionnelle d?un montant
égal à la taxe appliquée sur les bureaux (par ailleurs maintenue en Ile-de-France et dans certains
départements méridionaux dans la situation de vacance afin de financer de grands équipements publics)
serait instituée afin de compenser, pour l?Etat, la perte de ressources résultant de l?absence d?utilisation
économique des locaux et des revenus fiscalisés qu?elle est supposée engendrer5.
Cette taxe serait progressive, accrue de 50% de son montant initial pour toute année supplémentaire
d?inutilisation et elle serait doublée, quelle que soit la durée d?inoccupation effective des locaux, lors de
chaque franchissement d?un seuil de 50 000 m2 vacants pour chaque propriétaire concerné.
Cette taxe additionnelle serait exigible et collectée par l?Etat, à l?issue du « délai de grâce » de deux
années, calculé dès lors que les deux tiers de la surface de plancher des locaux seraient effectivement
vacants.
Toutefois, elle serait suspendue lorsqu?un projet de transformation de l?actif concerné sera déposé
en préfecture (donnant lieu à la délivrance d?un certificat de projet) et auprès de la collectivité territoriale
compétente pour délivrer les autorisations d?urbanisme nécessaires, sous réserve d?un lancement effectif
des travaux de transformation dans les deux années suivant le dépôt du dossier, le versement de la taxe
additionnelle suspendue pendant cette période redevenant exigible à l?issue de ce délai, en l?absence
d?ouverture de chantier. A contrario, lors de l?ouverture du chantier, la taxe additionnelle serait
définitivement abrogée, en même temps que la taxe sur les bureaux elle-même.
Dans l?hypothèse d?une impossibilité objective d?engager les travaux de transformation (occupation
durable d?une partie de la surface de plancher au titre d?un bail en cours, absence de délivrance des
autorisations d?urbanisme), le gestionnaire du bien peut bénéficier d?une exemption de la taxe
additionnelle, calculée au prorata de la surface vacante, s?il déclare en préfecture remettre volontairement
la surface inutilisée à la disposition de l?Etat en vue de son affectation transitoire à un opérateur de
l?économie sociale et solidaire (par l?intermédiaire, par exemple, de l?association « Surface + Utile » qui
se chargerait de trouver un usage transitoire) notamment pour l?hébergement de populations migrantes
et de personnes sans domicile fixe mais aussi pour l?installation d?activités artisanales peu capitalistes et
de sous-traitance tertiaire, reconstituant ainsi l?utilité sociale du bien tout en permettant à l?Etat de réaliser
des économies budgétaires (nuitées d?hôtel, etc.).
Naturellement, le propriétaire / gestionnaire de l?actif en voie d?obsolescence peut s?accorder
directement avec un opérateur de l?ESS et proposer aux autorités préfectorales et territoriales la
réaffectation transitoire du bien sollicitant, le cas échéant, une dérogation au PLU. Cette démarche
d?anticipation ouvre droit, d?emblée, à exemption de la taxe additionnelle.
5 Il convient de rappeler que la taxe sur les bureaux ne représente qu?une part modique de la fiscalité foncière des entreprises
(de l?ordre de 10%) qui inclut la CEE.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 20
De surcroît, cette taxe additionnelle ne doit pas contrarier l?atteinte de la neutralité carbone
2050 et, à cet effet, la mise aux normes édictées par la RE 2020, alors que 80% des 55 millions de
m2 de bureaux en Ile-de-France ne disposent d?aucun label environnemental.
Pour encourager les investisseurs et les filières qui prennent le risque de porter l?innovation sur le
secteur des bureaux, notamment sur le plan environnemental, il convient d?ajuster la taxe sur la vacance
pour les bureaux neufs ou restructurés de sorte :
- qu?elle s?applique après un délai de 4 ans après la livraison (et non de 2 ans), pour les bureaux
neufs respectant les seuils de la RE2020 et/ou les seuils du label Bâtiment Bas Carbone (BBCA) Neuf,
et qu?elle est suspendue en cas de signature d?un Bail en Etat Futur d?achèvement ;
- qu?elle s?applique après un délai de 4 ans après la livraison (et non de 2 ans), pour les bureaux
ayant fait l?objet d?une restructuration lourde dans le cadre de la RT2012 (la RE2020 ne s?appliquant pas
aux restructurations) et respectant les seuils du label BBCA Rénovation, et qu?elle est suspendue en cas
de signature d?un Bail en Etat Futur d?achèvement ;
- qu?elle ne s?applique pas aux bâtiments qui sont en avance sur la règlementation à raison de
respecter les seuils 2025 (et au-delà) de la RE2020 (pour l?immobilier neuf) et/ou le seuil « Excellent »
des labels BBCA Neuf et Rénovation6.
La « taxe additionnelle pourrait-elle être supplée par une taxe progressive sur les bureaux, en
fonction de la durée de la vacance ? Un tel dispositif comporterait un risque de « mélange des genres »
en impliquant le reversement à l?Etat d?une partie de son produit et en constituant, du point de vue des
collectivités territoriales, une incitation supplémentaire au statu quo, alors qu?il s?agit précisément d?aller
à son encontre.
2. Avantage fiscal en faveur de la transformation en logements
Sans compromettre l?équilibre des finances publiques grâce à la perception, par l?Etat, de la taxe
additionnelle d?inoccupation (comparable, dans son esprit, à la taxe d?habitation perçue sur les résidences
secondaires ou à la taxe susceptible d?être prélevée sur les logements vacants), un crédit d?impôt de
l?ordre de 20% pourrait être institué sur l?investissement consacré à la transformation en logements
intermédiaires et sociaux, hors coûts d?éventuelles démolitions et dans la limite de 2 000 ¤/m2 (soit le
surcoût de transformation maximal par rapport à une construction neuve), sous réserve que soient
remplies les conditions suivantes :
- Au moins 50% de la surface de plancher de l?immeuble sont affectés au logement ;
6 Le label BBCA, porté par l?Association pour le développement du Bâtiment Bas Carbone, association reconnue d?intérêt
général, est distribué par les certificateurs agréés tierce partie Cerqual, Certivea, Promotelec Services et Prestaterre
Certifications. Le label BBCA a fait l?objet de plusieurs reconnaissances officielles par les pouvoirs publics : (1) éligibilité au
rescrit fiscal, par courrier de la Direction Générale des Finances Publiques (DGFP) du 15 décembre 2016, (2) prérequis à
l?éligibilité à l?octroi de crédit carbone (déterminé selon la méthode « Bâtiment Neuf Bio-sourcé » élaborée par BBCA), avec
publication au Journal Officiel le 05 avril 2023, (3) attribution de subvention par la Région Ile-de-France, par délibération du 26
janvier 2017, (4) attribution de subvention par la Ville de Paris, dans le cadre de la circulaire de programmation du logement
social et abordable à Paris publiée en juin 2018.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 21
- La charge foncière consécutive à la valorisation des actifs à transformer est compatible avec la
réalisation d?un programme de logements intermédiaires susceptibles d?être acquis par un investisseur
institutionnel, c?est-à-dire inférieure à un plafond calculé à partir du paramétrage suivant :
- Loyer de marché (OLAP) ? 15%
- Coût des travaux de transformation de 3 000 ¤/m2
- Rentabilité locative nette (brute ? 100 points de base) au niveau de l?OAT + 100 points de base,
soit 5% de rentabilité locative brute dans les conditions actuelles (soit OAT + 200 points de base).
Ainsi, et ce point est essentiel, l?avantage fiscal envisagé, en tant que signal adressé au
marché, tendrait à produire un effet déflationniste, et non inflationniste, ce qui est inédit s?agissant
d?un tel dispositif.
D?autres mesures fiscales incitatives sont-elles envisageables ? Elles ne devraient pas contribuer à
réalimenter un processus inflationniste, s?agissant des actifs obsolètes qui représentent, a minima, 50%
de la vacance. De multiples propositions méritent d?être examinées, s?agissant notamment de l?adaptation
de l?amortissement fiscal des actifs destinés à être transformés de leur exclusion de l?assiette de l?IFI
pendant les travaux et les deux années suivantes, de l?exonération du reversement de TVA sur les actifs
concernés... Cet examen s?inscrit dans le champ des suites à donner à ce rapport.
C Incitations politico-administratives à la transformation
Le processus de transformation d?actifs implique l?approbation des autorités publiques compétentes
pour la délivrance des autorisations requises en matière d?urbanisme opérationnel et plus largement, la
mobilisation des pouvoirs politiques nationaux et locaux.
A cette fin, au-delà des mesures inscrites dans la proposition de loi préparée par le député Daubié,
il serait envisageable de prévoir, dans l?hypothèse de la délivrance des autorisations d?urbanisme
requises dans les deux ans suivant le dépôt officiel du projet de transformation, les mesures
d?accompagnement suivantes :
- Le versement à la collectivité concernée par la transformation d?un ou plusieurs immeubles de 50%
de la taxe additionnelle collectée au titre dudit (ou desdits) actif(s).
- S?agissant des logements intermédiaires et sociaux produits par ladite transformation, leur décompte
dans le cadre de la loi SRU modifiée pourrait être doublé (2 logements décomptés pour 1 livré), mesure
applicable au cours des cinq prochaines années.
Dans l?hypothèse où, en dépit de ces mesures d?accompagnement et alors que la taxe additionnelle
redevient exigible, les documents indispensables pour l?ouverture du chantier n?auraient pu être obtenus
dans les deux années suivant le dépôt du dossier, la compétence de délivrance des autorisations
d?urbanisme serait transférée à l?Etat (art. 302.9.1 du Code de la Construction et de l?Habitation à
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 22
compléter) avec « porté à connaissance » de l?autorisation d?urbanisme délivrée par le Préfet, dès lors
que la dimension du projet lui confèrerait les caractéristiques justifiant évidemment de l?intérêt public
(10 000 m2 de surface de plancher à transformer en logements), avec pour effet de proroger la
suspension de ladite taxe, sous réserve de la prolongation de l?autorisation d?occupation temporaire de
l?opérateur de l?ESS éventuellement installé dans les lieux.
Enfin, nos voisins britanniques ont abordé la même question avec leur pragmatisme traditionnel :
toute opération de transformation n?est soumise qu?à une déclaration préalable dont la contestation, à la
charge de la collectivité concernée, doit être solidement argumentée. La transposition d?une telle
disposition dans notre système politico-institutionnel, attaché à la préservation des libertés locales, n?est
guère envisageable. Toutefois, une réflexion sur sa déclinaison selon une approche « de minimis »
inspirée du droit européen, pour la transformation en logements de surfaces de bureau inférieures à
5 000 m2 mériterait d?être conduite.
Ainsi serait instauré, sur les territoires métropolitains correspondant aux « marchés tendus » et pour
une période de dix ans nécessaire à la transformation de l?urbanisme et de l?offre immobilière, le cadre
économique, juridique et politique indispensable à l?effectivité du processus de transformation.
Des mesures techniques d?adaptation complémentaires, relatives aux normes de transformation
et / ou de construction (façades, neutralisation des étages supérieurs des IGH, etc.) pourraient être mises
à l?étude en tant que de besoin afin de faciliter la mise en oeuvre des projets, dès lors que l?encadrement
stratégique de l?ensemble de la démarche de mutation urbaine serait défini et institué.
II Transformation des centres commerciaux et des zones d?activité
Si la question de la transformation des bureaux est essentiellement francilienne, dans l?attente de la
désaffection par l?Etat des 25% des surfaces qu?il occupe à l?échelle nationale (soit 5 millions de m2) et
qui entraînera la multiplication des projets à l?image de la reconversion programmée des cités
administratives de Lille, de Lyon et de Toulouse, celle des centres commerciaux et, plus encore, des
zones d?activité revêtent une dimension nationale. La reconfiguration des centres commerciaux et le
réaménagement des zones d?activités représentent un potentiel de construction de logements
appréciable et techniquement plus aisé à réaliser. Toutefois, la pression démographique étant moindre,
la transformation de ces actifs est plus facile là où elle est moins nécessaire.
De ce fait, deux questions essentielles méritent d?être mises en exergue : quelles sont les mesures
préconisées dans le cadre de la transformation des immeubles de bureaux qui doivent être transposées ?
Quelles sont les dispositions spécifiques à la situation particulière des actifs susmentionnés qui pourraient
être examinées ?
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 23
A Transposition des mesures proposées en faveur de la transformation des bureaux
1. Taxation de la vacance
Il est évident qu?en-dehors des territoires métropolitains, la pression économique et démographique
ne justifie pas la mise en place de mesures comparables qui résultent de l?équilibre contingent à réaliser
entre le droit de propriété et l?utilité collective. La seule circonstance dans laquelle une situation analogue
peut être évoquée est relative à la reconfiguration de centres commerciaux, dès lors qu?une situation de
blocage interdit, ou retarde, la réalisation d?un projet d?intérêt majeur, incluant, par exemple, la
construction d?un nombre significatif de logements (de l?ordre de 500 à 1 000 logements). Sous cette
condition, la duplication des mesures fiscales relatives à la vacance pourrait être envisagée.
S?agissant des zones d?activité, la mise en oeuvre de mesures fiscales analogues, accompagnées
de l?installation transitoire d?organismes relevant de l?économie sociale et solidaire pourrait faciliter leur
transformation au-delà d?un délai d?inaction excessif (trois à quatre ans).
2. Transfert de compétences
Il n?est envisageable qu?à titre exceptionnel (Cf. ci-après).
B Adoption de dispositions spécifiques
1. Durée des procédures et autres facteurs de découragement pour les investisseurs
La première question est relative à la durée des procédures et à l?incertitude susceptible de
décourager les investisseurs. Indépendamment des transferts de compétences envisageables dès lors
qu?un projet viable de création de plus de 1 000 logements ne reçoit pas de suite en termes d?autorisations
d?urbanisme opérationnel à l?issue d?un délai de deux ans suivant le dépôt dudit projet en préfecture
(ouvrant droit à l?obtention d?un certificat de projet), il serait souhaitable d?inscrire l?opération projetée dans
le cadre global d?une grande opération d?urbanisme (GOU), permettant la mise en place d?un projet
partenarial d?aménagement (PPA) ou d?une opération de revitalisation territoriale (ORT), permettant
l?élaboration d?un règlement d?ensemble préfigurant la délivrance assurée des autorisations d?urbanisme
conformes audit règlement. Un point d?attention particulier devrait être porté à la portabilité des
autorisations d?équipements commerciaux, dès lors que le projet inclut, notamment, la transformation
d?une galerie marchande en rue commerçante comportant la même surface commerciale à créer en pieds
d?immeubles.
2. Mise en place d?une organisation spécifique
La question majeure porte sur la mise en place d?une organisation spécifique, au plan territorial, de
nature à faciliter la mise en oeuvre d?opérations de transformation qui s?imposeront aux collectivités
locales, en nombre croissant, sous peine de voir se multiplier des friches commerciales en périphérie
urbaine.
L?objectif devrait consister à organiser la convergence des intérêts publics / privés, de nature à
rassurer les investisseurs dans l?opération de transformation, en constituant des sociétés de projets
combinant des participations publiques minoritaires et des participations privées majoritaires.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 24
A cet effet, les Etablissements Publics Fonciers (EPF) devraient jouer un rôle décisif en constituant,
avec leurs partenaires naturels que sont les EPL d?aménagement, des filiales communes destinées à
détenir 15% à 20% du capital des sociétés de projets, aux côtés d?investisseurs privés (les propriétaires
d?origine ou de nouveaux investisseurs). Afin d?obtenir un niveau de valorisation réaliste des actifs à
transformer, les dispositions relatives à la taxation de la vacance pourrait être mises en oeuvre dans le
cadre d?opérations de taille significative (création de 500 à 1 000 logements).
Le cas échéant et en fonction des projets proposés, la CDC pourrait intervenir, à l?issue d?un examen
au cas par cas des projets mis à l?étude, selon un principe d?additionnalité inspiré des pratiques de la
Commission européenne pour la mise en oeuvre des fonds structurels, c?est-à-dire en venant en
complément de la participation publique dès lors qu?elle a été décidée.
Plus généralement, le traitement d?un nombre nécessairement croissant de projets de reconversion
implique l?élaboration d?une stratégie territoriale de l?habitat et, par conséquent, la mise en place d?un
système d?action local, visant à construire une filière de production locale / régionale, au-delà des objectifs
limités de la loi ELAN, car visant à associer des opérateurs spécialisés sur les divers segments de
l?industrie immobilière pour constituer des « entreprises élargies » jouant le rôle d?« opérateurs globaux ».
La première condition de l?élaboration d?une stratégie territoriale de l?habitat consiste dans la
connaissance détaillée de la situation, notamment de celle de l?immobilier d?entreprise. En Ile-de-France,
celle des bureaux est connue grâce à l?Observatoire Régional de l?Immobilier d?Entreprise (ORIE) et au
GRECAM qui réalise, à cette fin, un suivi précis des loyers et de la vacance, notamment. Il serait donc
utile de développer une connaissance comparable sur l?ensemble du territoire national et de l?étendre aux
surfaces commerciales.
Une démarche dans ce sens a été engagée par un autre cabinet d?expertise, La Place de
l?Immobilier, spécialisé dans la collecte de données de gestion (et non de données purement techniques,
à la différence de Stonal), qui a réalisé, en partenariat avec un spécialiste du résidentiel, Adéquation, une
étude de l?aire lyonnaise qui complète le travail identique accompli en collaboration par ces deux
partenaires sur l?aire parisienne.
Un groupement réunissant La Place de l?Immobilier, Linkcity, Bouygues Construction et la FTI (Action
Logement) s?est ainsi constitué afin d?élargir l?évaluation du potentiel de transformation à l?échelle
nationale (le Consortium des Bureaux en France, CBF). Ainsi, avec le GRECAM et La Place de
l?Immobilier, des outils existent tandis qu?à travers l?ORIE, une organisation partenariale public / privé
remarquable constitue l?exemple francilien qui devrait s?étendre à l?échelle nationale et inclure, au-delà
des bureaux, les espaces commerciaux, les locaux d?activité, l?ensemble de l?immobilier tertiaire.
Les EPF pourraient jouer un rôle d?animation essentiel dans la constitution de cette base de
données nationale.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 25
III Transformation des actifs immobiliers publics
En la matière, un précédent devrait inspirer la stratégie des Pouvoirs publics : la cession de
l?Imprimerie nationale (rue Gutenberg à Paris) pour moins de 100 millions d?euros, à un investisseur
américain, rachetée deux ans plus tard pour 350 millions d?euros, après une cinquantaine de millions
d?euros d?investissements de transformation.
Par ailleurs, le ministère de l?Economie et des Finances a cultivé le projet d?une foncière publique,
la SOVAFIM, destinée initialement à capter la plus-value supposée recelée par les actifs non stratégiques
détenus par RFF, idée finalement abandonnée au profit du portage transitoire de l?« îlot Ségur ».
De ces deux expériences infructueuses devrait émerger le modèle d?un « système » de foncières
publiques, constituées autour de chaque grand projet (ex : les grandes cités administratives de Lille, Lyon,
Toulouse?) ou de grandes typologies d?actifs (les logements domaniaux de la Gendarmerie nationale),
chaque véhicule de portage et de transformation faisant l?objet d?un « club deal » avec des partenaires
institutionnels (CDC, Crédit Agricole, BPCE, BNP?), l?ensemble étant contrôlé par une structure faîtière
associant, aux côtés de l?Etat majoritaire, les principaux partenaires présents au capital des filiales dont
le désengagement progressif de l?Etat ne devrait survenir qu?après l?engagement du processus de
transformation et de valorisation (Cf. l?expérience de la SNI), permettant ainsi à ce dernier de capter une
partie de la valeur créée au cours du processus de transformation (et évitant la solution du type
« CEGELOG » concédant à un groupement d?entreprises privées la rénovation d?un parc de taille réduite
de 8 000 logements pour un coût budgétaire conséquent qui rend l?opération non reproductible).
« Les financiers ne font bien leurs affaires que lorsque l?Etat fait mal les siennes. »
Charles-Maurice de Talleyrand Périgord
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 27
SUITES ET CONCLUSION
« La politique est l?art de rendre possible le nécessaire. »
Armand Jean du Plessis, Cardinal duc de Richelieu
Une des questions essentielles dans le processus de transformation ne peut être ignorée, dont il a
été rappelé qu?elle avait fortement influencé toutes les grandes mutations urbaines survenues depuis
deux siècles : la densification, corollaire du remembrement foncier, qui a caractérisé aussi bien l?oeuvre
d?Haussmann que la reconstruction d?après la Seconde Guerre mondiale ainsi que l?édification des Villes
Nouvelles.
Il s?agit d?un enjeu d?autant plus crucial que les contraintes techniques et réglementaires qui
compliquent le processus de transformation doivent être prises en considération pour apprécier le
potentiel de transformation réel des immeubles :
- L?épaisseur des trames, les normes différentes selon la destination du bâti (accès aux escaliers,
désenfumage des circulations, conformité des façades au « c + d », organisation des gaines techniques
verticales et / ou horizontales, isolation phonique des planchers, pour n?en citer que quelques-unes?)
entraînent inéluctablement le délaissement de surfaces (10% à 15% de l?ensemble) qui, au mieux, seront
consacrées à des usages non commerciaux (espaces partagés, pièces annexes mutualisées...).
- La règlementation relative à la sécurité incendie, ne comporte aucune disposition d?alignement entre
les divers usages du bâtiment, question sensible qui mériterait un examen approfondi.
- D?une manière générale, la définition technique et réglementaire d?un « immeuble de moyenne
hauteur » (IMH) ou de « juste hauteur » (IJH), un temps mise à l?étude, s?est trouvée abandonnée pour
d?obscures raisons, alors qu?elle aurait pu constituer le cadre d?avenir de la réversibilité des bâtiments.
Quoi qu?il en soit demain, la réalité actuelle prévaut : la transformation des actifs entraînera des
surcoûts, certains immeubles devront être démolis et en l?absence de mécanismes subventionnels
coûteux pour les finances publiques, la création de valeur par remembrement et densification s?impose
d?évidence.
Le passage de la transformation artisanale à l?industrie de la transformation suppose de revoir
l?échelle des projets : il ne s?agit plus d?opérer immeuble par immeuble, mais de mettre en oeuvre une
stratégie de portefeuille, dans laquelle plusieurs investisseurs / gestionnaires constituent un lot de dix ou
quinze immeubles, parmi lesquels deux ou trois seront « déconstruits » pour constituer des espaces verts,
d?autres reconstruits et d?autres transformés et densifiés. Ainsi, le remembrement du foncier urbain
ne peut passer par la pratique de la « table rase » haussmannienne, impraticable à grande échelle
dans les métropoles modernes, mais par la constitution de « bouquets » d?actifs, dont l?équilibre
économique reposera sur une logique de péréquation, prénégociée : la densification d?une partie
significative des actifs s?avérera indispensable pour assurer la soutenabilité des projets par création de
valeur, et non plus par dépense budgétaire ou fiscale. Chaque « bouquet » ainsi constitué pourrait être
logé dans une société de projet, bénéficiant de dispositions fiscales particulières (exclusion du périmètre
de l?IFI pendant les travaux et les deux années suivant la remise en exploitation de chaque actif
transformé, etc.) ainsi que des facilités de financement (accès au prêt GAÏA, etc.).
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 28
Il découle de cette réalité que l?émergence d?une véritable industrie de la transformation immobilière
dépend de l?invention d?une architecture du « sur-mesure » qui renonce à la totale liberté du « geste
architectural » pour se couler dans la discipline de l?adaptation de l?existant.
Mais plus encore, c?est un nouvel urbanisme qui doit émerger, non pas en lieu et place des principes
et règles actuelles, mais qui développe un corpus spécifique, défini par la diversité des usages, leur
évolutivité et la multiplicité des objets et des localisations, ces nouvelles « règles classiques » s?imposant
dans un espace physique discontinu (la dispersion des projets) et anisotrope (la diversité de leurs
finalités).
A qui peut revenir la régulation de l?urbanisme opérationnel dans le cadre de cette nouvelle industrie
de la transformation ? En l?absence d?appétence manifeste des collectivités qui pourraient revendiquer
une compétence naturelle inspirée par une conception « girondine » de l?Etat (les régions et les
métropoles), c?est encore vers celui-ci qu?il faut bien se tourner dès lors qu?une logique multisites déborde
du cadre municipal traditionnel, sans que ce transfert inévitable de compétences ne s?opère au détriment
des avis simples des collectivités de premier rang.
Conception multisites du remembrement foncier et densification sont donc au coeur d?une
industrie de la transformation, ce qui implique une révision de nos principes et de nos règles
d?urbanisme afin de conjuguer deux démarches complémentaires : renaturation et densification.
Divers dispositifs législatifs et réglementaires ont été instaurés afin d?assouplir les PLU à cette fin,
instituant des mesures dérogatoires. Force est de constater que leur mise en oeuvre demeure
exceptionnelle, alors qu?elle conditionnera la faisabilité économique d?un grand nombre de projets qui
seront déposés dans le but de suspendre l?application de la taxe additionnelle pour vacance.
Comment favoriser une approche consensuelle de cette question, particulièrement cruciale dans le
cadre d?opérations multisites ? Il serait peut-être envisageable (et probablement, à terme, indispensable)
d?introduire des taux de densification obligatoire dans toute opération de transformation (sous réserve
de leur faisabilité physique et technique), en accompagnant cette mesure de la création d?un marché du
type « bourse des droits à construire régionale » (à l?image du marché des CEE), dans lequel les EPFR
joueraient le rôle de contreparties à l?égard des collectivités « obligées » qui souhaiteraient s?exonérer de
leurs obligations, lesdits EPFR mobilisant les ressources ainsi collectées pour faciliter les projets de
transformation, là où une densification raisonnable paraîtrait acceptable.
Une telle disposition, outre qu?elle s?inscrit logiquement dans la suite de la taxation des actifs (c?est-
à-dire du potentiel de création de valeur) inemployés, viserait à traduire en termes économiques les
conséquences d?une abstention contraire à l?obligation d?agir des personnes publiques (pour lesquelles
un principe du droit public rend l?exercice de leurs compétences obligatoire) sanctionnée par le Conseil
d?Etat.
Il est donc urgent, au-delà de la présente mission de réflexion, de constituer deux groupes
de travail destinés à élaborer les amendements nécessités par la transformation des actifs, qui ne
saurait s?accommoder des principes et règles d?application générale actuellement en vigueur
dans les deux champs stratégiques que sont le Code de la Construction et le Code de l?Urbanisme
qui ne peuvent être mis en oeuvre à droit constant dans le contexte des bouleversements
technologiques, économiques et sociologiques évoqués dans la première partie de ce rapport.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 29
Un troisième groupe de travail consacré à la fiscalité de la transformation devrait
accompagner les deux premiers en traitant une double question :
- Comment accompagner la dépréciation des actifs obsolètes et leur transformation ?
- Comment favoriser l?investissement de l?épargne publique dans le logement locatif ?
En synthèse, trois observations complémentaires doivent être soulignées :
1. L?émergence d?une industrie de la transformation est un processus de longue haleine, dont l?impact
économique et politique est potentiellement majeur, mais qui ne répond pas directement à l?atteinte d?un
résultat de court terme « quick win » conforme aux canons de la communication politique dans une ère
médiatique. A cet effet, l?examen des mesures proposées par la FPI conduit à privilégier l?exonération de
droits de succession, pour les logements construits au cours d?une période limitée, mais sous plafond, ce
qui en réduira nécessairement la portée. La mesure la plus efficace consisterait à favoriser
l?investissement des personnes physiques en immobilier résidentiel à travers des véhicules dédiés à cet
effet. Les propositions de l?ASPIM méritent un examen approfondi.
2. A terme, il sera difficile d?éviter la question d?une loi foncière, applicable aux personnes morales dans
les espaces métropolitains, qui permette de réguler le prix du foncier en édictant un principe de sur-
fiscalisation de la rétention spéculative de foncier constructible en zone « tendue » par transposition de
la « taxe additionnelle », ainsi que des plus-values réalisées au-delà d?un niveau de référence de la
charge foncière, calculée comme ci-dessus. Il s?agit en fait de réguler la valorisation d?une ressource rare,
à savoir le foncier urbain, dans un contexte de financiarisation de l?économie. Ignorer les conséquences
de la mutation socio-économique urbaine revient à se priver des moyens de la réguler, dans l?intérêt du
marché lui-même.
3. Le projet exposé ci-dessus offre l?opportunité d?une mise en perspective globale et cohérente de
mesures particulières qui ne s?inscrivent pas immédiatement dans un schéma d?ensemble : c?est bien la
transformation de l?économie immobilière, ni dirigiste, ni libérale par principe, qui peut procurer cette
« valeur ajoutée » conceptuelle. En définitive, la seule bonne question à examiner est, comme tel est
souvent le cas en politique, celle du « timing ». Les mesures proposées s?imposent d?évidence et finiront
par prévaloir. La question est donc de savoir à quelle échéance, et dans quelles circonstances ?
« Autour du roi joyeux riaient tous les anciens
qui le soir sont assis au temple, et délibèrent.
A la septième fois, les murailles tombèrent. »
Victor Hugo, Les châtiments
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 31
ANNEXES
A1. Synthèse des principales préconisations figurant dans le rapport
A2. Contribution de Monsieur le Préfet des Hauts de Seine
A3. Jurisprudence du Conseil constitutionnel
A4. Pour le logement intermédiaire (LLI) : crise du logement social, retour aux sources
A5. Financement de la transformation des actifs immobiliers : les leçons du Baron
Haussmann
A6. Démembrements, vente à réméré et fiducie dans les transformations d?actifs
A7. Revue de presse
A8. Création d?une « bourse des droits à construire » régionale
A9. Hypothèses financières sur 4 ans 2025/2028
A10. Acteurs consultés
A11. Contributions des acteurs consultés
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 33
A1. Synthèse des principales préconisations figurant dans le rapport
1. ACCELERER LA TRANSFORMATION DES ACTIFS OBSOLETES
- Taxer la vacance des bureaux et, éventuellement, des commerces dans le cadre des opérations
de reconfiguration des centres commerciaux, sur les territoires métropolitains et pour une période de
mutation de l?urbanisme et de l?économie immobilière limitée à dix ans.
- Suspendre la taxe additionnelle pour vacance à compter du dépôt d?un projet de transformation,
qui devra être effectivement lancé dans les deux années suivant son dépôt.
- Dans l?hypothèse d?un obstacle objectif à la réalisation dudit projet, la suspension de la taxe
additionnelle peut être prorogée si les surfaces inutilisées sont mises à la disposition, à titre transitoire,
d?un opérateur de l?économie sociale et solidaire.
- Instaurer un régime dérogatoire au profit des immeubles de construction récente et conformes
aux normes environnementales les plus exigeantes.
2. FAVORISER L?AJUSTEMENT DE LA VALEUR DES ACTIFS A TRANSFORMER EN LOGEMENTS ET / OU EN
HEBERGEMENT
- Instituer un avantage fiscal, sous forme d?un crédit d?impôt de 20% du surcoût de la
transformation de l?actif en logements ou en résidences gérées, sous réserve que cette destination
couvre, au minimum, 50% de la surface de plancher à transformer, dans la limite de 2 000¤/m2 et à
l?exclusion des coûts de démolition ; par ailleurs, l?éligibilité à l?avantage fiscal mentionné ci-dessus serait
conditionnée par un plafond de charge foncière correspondant aux actifs apportés permettant la
production de logements intermédiaires dans des conditions de rentabilité acceptables pour un
investisseur institutionnel (Cf. paramétrage décrit dans le rapport).
- Instruire des propositions en matière fiscale de nature à faciliter l?inscription de moins-values
comptables, s?agissant d?actifs obsolètes (contributions de l?ORIE, de la FEI et de l?IFPIMM).
3. FACILITER L?OBTENTION DES AUTORISATIONS D?URBANISME NECESSAIRES DANS LES DEUX ANS SUIVANT
LE DEPOT D?UN PROJET DE TRANSFORMATION
- Consentir à la collectivité locale concernée le reversement de 50% de la taxe additionnelle perçue
au titre des immeubles à transformer situés dans son champ de compétence, sous réserve de la
délivrance des autorisations d?urbanisme nécessaires à l?opération de transformation dans les deux
années suivant le dépôt du projet.
- Prévoir, sous la même condition, le décompte des logements intermédiaires et sociaux, au titre
des obligations instituées par la loi SRU, selon une règle prévoyant l?enregistrement de deux logements
pour chaque logement construit (disposition dérogatoire applicable au cours des trois prochaines
années).
- Dans l?hypothèse où, s?agissant d?un projet portant sur la transformation en logements de
10 000 m2 de plancher, les autorisations d?urbanisme n?ont pu être délivrées dans les deux années
suivant le dépôt du dossier, les avantages énumérés ci-dessus sont perdus et la compétence d?attribution
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 34
des autorisations précitées est transférée au Préfet du département concerné, dans le cadre de l?article
302.9.1 du Code de la Construction et de l?Habitation (à modifier). Cette décision a pour effet de proroger
la suspension de l?exigibilité de la taxe additionnelle, sous réserve que l?autorisation d?occupation
temporaire de l?opérateur de l?ESS éventuellement installé soit prolongée.
4. REGIME « DE MINIMIS »
- Les opérations de transformation n?excédant pas la création de 5 000 m2 de plancher dédiés à
l?habitat seraient soumises au régime de la déclaration préalable.
- Cette procédure est applicable, sous les mêmes conditions, à la transformation des zones
d?activité.
5. ACCOMPAGNEMENT DE LA RECONFIGURATION D?UN CENTRE COMMERCIAL OU D?UNE ZONE D?ACTIVITE
(CF. CI-DESSUS)
- Création d?un instrument financier public / privé dédié à la transformation.
- Etude de la possibilité d?étendre la taxe pour vacance aux surfaces commerciales.
6. TRANSFORMATION DES ACTIFS TERTIAIRES PUBLICS
- Constitution d?un système de foncières publiques destinées à l?amorçage des opérations ; (Cf.
modèle SNI).
- Ouverture du capital à l?issue des premières phases de transformation, afin de capter une partie
de la création de valeur (éviter un scénario « Imprimerie nationale »).
7. CREATION DE GROUPES DE TRAVAIL DESTINES A :
- Adapter à l?industrie de la transformation immobilière le Code de la Construction (adaptation à
l?immeuble « multiusages »).
- Adapter à l?industrie de la transformation immobilière le Code de l?Urbanisme (adaptation aux
opérations « multisites »).
- Adapter la fiscalité de la transformation immobilière pour accompagner la dépréciation des actifs
obsolètes et favoriser l?investissement de l?épargne publique dans le logement locatif (Cf. par exemple
les propositions de l?ASPIM, s?agissant de l?investissement résidentiel des personnes physiques).
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 35
A2. Contribution de Monsieur le Préfet des Hauts de Seine
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 37
A3. Jurisprudence du Conseil constitutionnel
1) Décision Conseil constitutionnel - 29 juillet 1998 - 98-403
Extraits (voir §§ 17 et 19)
10. Considérant que l'article 51 insère dans le code général des impôts un article 232 qui comporte huit
paragraphes ;
11. Considérant que le I institue à compter du 1er janvier 1999 une taxe annuelle sur les logements
vacants dans les communes dont la liste sera fixée par décret et qui appartiennent à des zones
d'urbanisation continue de plus de deux cent mille habitants où existe un déséquilibre marqué entre l'offre
et la demande de logements ; que le II rend exigible le paiement de la taxe pour les logements vacants
depuis au moins deux années consécutives à l'exception de ceux détenus par les organismes
d'habitations à loyer modéré et les sociétés d'économie mixte et destinés à être attribués sous conditions
de ressources ; que le III détermine la personne redevable de la taxe ; que le IV en définit l'assiette et le
taux ; que le V exclut du champ d'application de la taxe les logements dont la durée d'occupation est
supérieure à trente jours consécutifs au cours de chacune des deux années de la période de référence
définie au II ; que le VI dispose que la taxe n'est pas due en cas de vacance indépendante de la volonté
du contribuable ; que le VII prévoit que le contrôle, le recouvrement, le contentieux, les garanties et les
sanctions de la taxe sont régis comme en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties ; que le VIII
affecte le produit net de la taxe à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat ;
12. Considérant que les requérants soutiennent, en premier lieu, qu'en instituant ladite taxe, le
législateur n'aurait pas épuisé l'intégralité de la compétence qu'il tient de l'article 34 de la Constitution ;
que le champ d'application de la taxe serait en effet imprécis ; que les notions de « vacance » et de
« vacance indépendante de la volonté du contribuable », ainsi que les règles de recouvrement de la taxe,
auraient dû être définies par la loi ; qu'ils allèguent, en deuxième lieu, une méconnaissance du principe
d'égalité devant les charges publiques entre les bailleurs privés et publics et, parmi les bailleurs privés,
entre les sociétés d'économie mixte de logement social et les autres propriétaires ; qu'ils font grief, en
troisième lieu, à la taxe de contrevenir au principe d'universalité budgétaire énoncé à l'article 18 de
l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances ;
13. Considérant, en premier lieu, qu'en prévoyant qu'un décret fixera la liste des communes où la taxe
sera instituée, le législateur a pris soin de préciser les critères qui s'imposeront au pouvoir réglementaire ;
qu'en effet, ces communes devront appartenir « à des zones d'urbanisation continue de plus de deux
cent mille habitants où existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, au
détriment des personnes à revenus modestes et des personnes défavorisées, qui se concrétise par le
nombre élevé de demandeurs de logement par rapport au parc locatif et la proportion anormalement
élevée de logements vacants par rapport au parc immobilier existant » ; qu'en disposant en outre que la
taxe sera « due pour chaque logement vacant depuis au moins deux années consécutives, au 1er janvier
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 38
de l'année d'imposition », mais ne le sera pas « en cas de vacance indépendante de la volonté du
contribuable », le législateur a, conformément au sixième alinéa de l'article 34 de la Constitution, fixé des
règles d'assiette de la nouvelle contribution créée par la loi ; qu'enfin, en prévoyant que « le contrôle, le
recouvrement, le contentieux, les garanties et les sanctions de la taxe sont régis comme en matière de
taxe foncière sur les propriétés bâties », il a déterminé les règles de recouvrement de ladite taxe ; que,
dès lors, les griefs tirés de ce que le législateur n'aurait pas épuisé sa compétence sont infondés ;
14. Considérant, en deuxième lieu, que manque en fait le moyen tiré d'une rupture de l'égalité devant
les charges publiques entre bailleurs publics et bailleurs privés, aucune disposition de la loi n'établissant
entre eux de distinction en ce qui concerne leur assujettissement ; que l'exonération prévue en faveur
des organismes d'habitations à loyer modéré et des sociétés d'économie mixte pour les logements qu'ils
détiennent et qui sont destinés à être attribués sous conditions de ressources est justifiée par la différence
de situation entre, d'une part, ces organismes et sociétés et, d'autre part, les autres bailleurs publics et
privés ; qu'en effet, l'affectation des logements en cause fait l'objet d'un contrôle particulier de la part des
pouvoirs publics, renforcé au demeurant par les dispositions de la section 3 du chapitre II du titre 1er de
la loi déférée, et que la vacance temporaire de certains de ces logements trouve son fondement dans la
mise en oeuvre de politiques spécifiques, liées notamment à des opérations d'urbanisme ou à la recherche
de la « mixité sociale des villes et des quartiers » ; que, dès lors, le moyen invoqué doit être rejeté ;
15. Considérant, en troisième lieu, que l'article 51 affecte le produit net de la taxe, qui entre dans la
catégorie des impositions de toute nature visées à l'article 34 de la Constitution, à l'Agence nationale
d'amélioration de l'habitat, qui constitue un établissement public ; qu'aucune règle ni aucun principe de
valeur constitutionnelle n'interdit d'affecter le produit d'une imposition à un établissement public ; que, par
suite, la taxe a le caractère de ressource d'un établissement public et, comme telle, n'est pas soumise
aux prescriptions de l'article 18 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 susvisée qui s'appliquent aux seules
recettes de l'État ; que le grief allégué doit, dès lors, être rejeté ;
16. Considérant, toutefois, que l'objet de la taxation instituée par les dispositions critiquées est d'inciter
les personnes mentionnées au III de l'article 51 à mettre en location des logements susceptibles d'être
loués ; qu'il résulte des principes constitutionnels ci-dessus énoncés que la différence de traitement fiscal
instaurée par cet article entre ces personnes n'est conforme à la Constitution que si les critères
d'assujettissement retenus pour l'application du même article sont en rapport direct avec cet objet ; que
ladite taxation ne peut dès lors frapper que des logements habitables, vacants et dont la vacance tient à
la seule volonté de leur détenteur ;
17. Considérant, sur le premier point, que ne sauraient être assujettis des logements qui ne pourraient
être rendus habitables qu'au prix de travaux importants et dont la charge incomberait nécessairement à
leur détenteur ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 39
18. Considérant, sur le deuxième point, que ne sauraient être regardés comme vacants des logements
meublés affectés à l'habitation et, comme tels, assujettis, en vertu du 1° du I de l'article 1407 du code
général des impôts, à la taxe d'habitation ;
19. Considérant, sur le troisième point, que ne sauraient être assujettis des logements dont la vacance
est imputable à une cause étrangère à la volonté du bailleur, faisant obstacle à leur occupation durable,
à titre onéreux ou gratuit, dans des conditions normales d'habitation, ou s'opposant à leur occupation, à
titre onéreux, dans des conditions normales de rémunération du bailleur ; qu'ainsi, doivent être
notamment exonérés les logements ayant vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet
de travaux dans le cadre d'opérations d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition, ou les logements
mis en location ou en vente au prix du marché et ne trouvant pas preneur ;
20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sous ces réserves, l'article 51 est conforme à la
Constitution ;
2) Décision Cons. const. 29 décembre 2014 n° 2014-708 DC, Loi de finances rectificative pour
2014
a) Résumé (voir tout particulièrement I-1°-c ; les I-1°-a et b reproduisent par ailleurs le
considérant « standard » rappelant la règle appliquée chaque fois que sont invoqués,
respectivement, l?égalité devant la loi et l?égalité devant les charges publiques)
I. Majoration de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (art. 31).
1° Incompétence négative.
En prévoyant que le conseil municipal pourra instituer la majoration forfaitaire de la part communale
de taxe d'habitation due au titre des logements meublés non affectés à l'habitation principale dans les
communes classées dans les zones géographiques mentionnées au premier alinéa du paragraphe I de
l'article 232 du CGI, le législateur a précisément fixé les règles d'assiette de la nouvelle majoration. Il a
également précisément défini les contribuables qui pourront obtenir, sur réclamation, un dégrèvement de
cette majoration. A cette occasion, le contribuable pourra demander le bénéfice de l'application des
dispositions de l'article L 277 du LPF. En particulier, en vertu du 3° du paragraphe II de l'article 1407 ter
du CGI, le dégrèvement de la majoration instituée par le paragraphe I du même article pourra être obtenu
notamment par le contribuable se trouvant dans l'impossibilité d'affecter le logement à un usage
d'habitation principale imputable à une cause étrangère à sa volonté. Le grief tiré de ce que le législateur
n'aurait pas épuisé sa compétence doit être écarté.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 40
2° Principes d'égalité devant la loi et les charges publiques.
a) Le principe d'égalité devant la loi ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des
situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans
l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui
l'établit.
b) Le principe d'égalité devant les charges publiques ne serait pas respecté si l'impôt revêtait un
caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive au
regard de leurs facultés contributives. En vertu de l'article 34 de la Constitution, il appartient au législateur
de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de
chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées les facultés contributives. En particulier,
pour assurer le respect du principe d'égalité devant les charges publiques, il doit fonder son appréciation
sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose. Cette appréciation ne doit
cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.
c) L'objet de la majoration instituée par l'article 1407 ter du CGI est d'inciter la personne
occupant un logement à un titre autre que celui de la résidence principale dans une zone qui se
caractérise par la tension du marché immobilier à donner à ce logement un usage de résidence
principale. Il résulte des principes constitutionnels d'égalité devant la loi et les charges publiques
que la différence de traitement fiscal instaurée par cet article n'est conforme à la Constitution que
si les critères d'assujettissement retenus sont en rapport direct avec l'objectif poursuivi. Cette
majoration de la taxe d'habitation ne peut, dès lors, frapper que des logements meublés
habitables, qui ne sont pas affectés à l'habitation principale et dont l'absence d'affectation à
l'habitation principale tient à la seule volonté de leur occupant.
d) Il ressort du 1° du paragraphe II de l'article 1407 ter du CGI que sont dégrevées de la
majoration les personnes contraintes de résider dans un lieu distinct de celui de leur habitation
principale « pour le logement situé à proximité du lieu où elles exercent leur activité
professionnelle ». Il ressort du 3° du même paragraphe II que sont également dégrevés les
contribuables notamment pour des logements ayant vocation, dans un délai proche, à disparaître
ou à faire l'objet de travaux dans le cadre d'opérations d'urbanisme, de réhabilitation ou de
démolition ou pour des logements mis en location ou en vente au prix du marché et ne trouvant
pas preneur. Dans ces conditions, les critères légaux de dégrèvement de la majoration de la part
communale de la taxe d'habitation pouvant être décidée par le conseil municipal ne sont pas
contraires aux principes d'égalité devant la loi et les charges publiques.
Les dispositions du 3° du paragraphe I de l'article 31 doivent être déclarées conformes à la
Constitution.
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II. Majoration de 50 % de la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) (art. 46).
1° Intelligibilité de la loi.
Il ressort des termes mêmes des dispositions de l'article 46 que la majoration de 50% qu'elles
prévoient porte sur le montant de la taxe « avant application de la modulation » décidée par l'organe
délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou par le conseil municipal. Cette
modulation, prévue au cinquième alinéa du 1.2.4.1. de l'article 77 susmentionné, ne porte que sur le
produit de la taxe perçue au profit de la commune ou de l'établissement public. Il en va de même des
frais d'assiette et de recouvrement prélevés en application du dernier alinéa de ce 1.2.4.1. En prévoyant
que la majoration de 50% sera appliquée sur « le montant de la taxe calculé selon le présent article », le
dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 a entendu que cette majoration soit appliquée au
taux de cette taxe, majorée le cas échéant de 30% en application des dispositions de ce même article.
Ces dispositions ne sont pas inintelligibles.
2° Principe d'égalité devant les charges publiques.
En instituant une taxe sur les surfaces commerciales, le législateur a entendu favoriser un
développement équilibré du commerce. Il a, pour ce faire, choisi d'imposer les établissements
commerciaux de détail ayant une surface significative de vente.
En adoptant les dispositions contestées, il a entendu augmenter le rendement de cette taxe au profit du
budget de l'Etat.
En prévoyant que la majoration est applicable aux établissements dont la surface de vente est supérieure
à 2 500 mètres carrés, il a fixé un critère objectif et rationnel tant au regard de l'objet de cette majoration
que de l'objet de la taxe.
Eu égard aux taux de la taxe, cette majoration n'entraîne ni dans le montant de l'imposition ni dans les
effets de seuil de son barème une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.
Les dispositions de l'article 46, qui ne méconnaissent ni la garantie des droits ni aucune autre exigence
constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à la Constitution.
b) Extraits
1. Considérant que les députés et les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi
de finances rectificative pour 2014 ; qu'ils mettent en cause la conformité à la Constitution de son article
46 et de certaines dispositions de son article 72 ; que les députés contestent en outre la conformité à la
Constitution de certaines dispositions de son article 31 ainsi que la place des articles 19 et 106 en loi de
finances rectificative ;
- Sur la place de l'article 19 dans la loi déférée :
(?)
- Sur certaines dispositions de l'article 31 :
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 42
5. Considérant que le 3° du paragraphe I de l'article 31 insère dans le CGI un article 1407 ter ; que le
paragraphe I de cet article permet au conseil municipal, dans les communes classées dans les zones
géographiques mentionnées au premier alinéa du paragraphe I de l'article 232 du même Code, de décider
une majoration forfaitaire de la part communale de « la cotisation de taxe d'habitation due au titre des
logements meublés non affectés à l'habitation principale » ; que le paragraphe II de l'article 1407 ter
permet aux contribuables remplissant certaines conditions de bénéficier d'un dégrèvement de cette
majoration forfaitaire sur présentation d'une réclamation ; qu'en particulier, le 3° du paragraphe II permet
aux personnes « qui, pour une cause étrangère à leur volonté, ne peuvent affecter le logement à un usage
d'habitation principale » de bénéficier de ce dégrèvement ;
6. Considérant que les députés requérants contestent le critère de dégrèvement institué par le 3° du
paragraphe II de l'article 1407 ter du CGI ; que ce critère serait insuffisamment précis et méconnaîtrait
l'étendue de la compétence du législateur ;
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles
concernant? l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures » ;
8. Considérant qu'en prévoyant que le conseil municipal pourra instituer la majoration forfaitaire de la
part communale de taxe d'habitation due au titre des logements meublés non affectés à l'habitation
principale dans les communes classées dans les zones géographiques mentionnées au premier alinéa
du paragraphe I de l'article 232 du CGI, le législateur a précisément fixé les règles d'assiette de la nouvelle
majoration ; qu'il a également précisément défini les contribuables qui pourront obtenir, sur réclamation,
un dégrèvement de cette majoration ; qu'à cette occasion, le contribuable pourra demander le bénéfice
de l'application des dispositions de l'article L 277 du LPF ; qu'en particulier, en vertu du 3° du paragraphe
II de l'article 1407 ter du CGI, le dégrèvement de la majoration instituée par le paragraphe I du même
article pourra être obtenu notamment par le contribuable se trouvant dans l'impossibilité d'affecter le
logement à un usage d'habitation principale imputable à une cause étrangère à sa volonté ; que le grief
tiré de ce que le législateur n'aurait pas épuisé sa compétence doit être écarté ;
9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et
du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que
le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que législateur règle de façon différente des situations différentes
ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la
différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;
10. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la Déclaration de 1789 : « Pour l'entretien de la force
publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit
être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; que cette exigence ne serait
pas respectée si l'impôt revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de
contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives ; qu'en vertu de l'article 34
de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels
et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées
les facultés contributives ; qu'en particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, il doit fonder son
appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose ; que cette
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appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges
publiques ;
11. Considérant que l'objet de la majoration instituée par l'article 1407 ter du CGI est d'inciter la personne
occupant un logement à un titre autre que celui de la résidence principale dans une zone qui se
caractérise par la tension du marché immobilier à donner à ce logement un usage de résidence
principale ; qu'il résulte des principes constitutionnels d'égalité devant la loi et les charges publiques que
la différence de traitement fiscal instaurée par cet article n'est conforme à la Constitution que si les critères
d'assujettissement retenus sont en rapport direct avec l'objectif poursuivi ; que ladite majoration de la taxe
d'habitation ne peut, dès lors, frapper que des logements meublés habitables, qui ne sont pas affectés à
l'habitation principale et dont l'absence d'affectation à l'habitation principale tient à la seule volonté de leur
occupant ;
12. Considérant qu'il ressort du 1° du paragraphe II de l'article 1407 ter du CGI que sont dégrevées de
la majoration les personnes contraintes de résider dans un lieu distinct de celui de leur habitation
principale « pour le logement situé à proximité du lieu où elles exercent leur activité professionnelle » ;
qu'il ressort du 3° du même paragraphe II que sont également dégrevés les contribuables notamment
pour des logements ayant vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet de travaux dans
le cadre d'opérations d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition ou pour des logements mis en
location ou en vente au prix du marché et ne trouvant pas preneur ; que, dans ces conditions, les critères
légaux de dégrèvement de la majoration de la part communale de la taxe d'habitation pouvant être
décidée par le conseil municipal ne sont pas contraires aux principes d'égalité devant la loi et les charges
publiques ;
13. Considérant que les dispositions du 3° du paragraphe I de l'article 31 doivent être déclarées
conformes à la Constitution ;
- Sur l'article 46 :
14. Considérant que l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 susvisée institue une taxe sur les surfaces
commerciales assise sur la surface de vente des magasins de commerce de détail, lorsqu'elle dépasse
400 mètres carrés, des établissements ouverts à compter du 1er janvier 1960 ; qu'elle s'applique aux
établissements dont le chiffre d'affaires annuel est supérieur ou égal à 460 000 ¤ ; que, pour les
établissements dont le chiffre d'affaires au mètre carré est inférieur à 3 000 ¤, le taux de cette taxe est de
5,74 ¤ par mètre carré de surface de vente ; que, pour les établissements dont le chiffre d'affaires est
supérieur à 12 000 ¤ au mètre carré, ce taux est de 34,12¤ ; qu'entre 3 000 et 12 000¤ de chiffre d'affaires
au mètre carré, le taux augmente en proportion de l'augmentation du chiffre d'affaires au mètre carré ;
que des taux particuliers s'appliquent à certaines catégories de commerce ;
15. Considérant que le montant de la taxe est majoré de 30% pour les établissements dont la superficie
est supérieure à 5 000 mètres carrés et dont le chiffre d'affaires annuel hors taxes est supérieur à 3 000¤
par mètre carré ;
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16. Considérant que le 1.2.4.1. de l'article 77 de la loi du 30 décembre 2009 susvisée dispose que cette
taxe est perçue au profit de la commune sur le territoire de laquelle est situé l'établissement imposable
ou, le cas échéant, au profit de l'établissement public de coopération intercommunale ; que le cinquième
alinéa de ce 1.2.4.1. dispose que l'organe délibérant de l'établissement public de coopération
intercommunale ou, à défaut, le conseil municipal de la commune affectataire de la taxe peut moduler le
montant de la taxe de plus ou moins vingt pour cent ; que son dernier alinéa dispose que, pour les frais
d'assiette et de recouvrement, l'Etat effectue un prélèvement de 1,5 % sur le montant de cette taxe ;
17. Considérant que le paragraphe I de l'article 46 complète l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 par un
alinéa aux termes duquel : « Le montant de la taxe calculé selon le présent article et avant application de
la modulation prévue au cinquième alinéa du 1.2.4.1. de l'article 77 de la loi 2009-1673 du 30 décembre
2009 de finances pour 2010 est majoré de 50% pour les établissements dont la surface de vente excède
2 500 mètres carrés. Le produit de cette majoration est affecté au budget de l'Etat » ;
18. Considérant que les députés et les sénateurs requérants soutiennent que cette majoration est
instituée dans le but de compenser l'avantage que les entreprises de la grande distribution ont pu retirer
de l'application du « crédit d'impôt compétitivité emploi » ; que, d'une part, l'objectif poursuivi de
compenser, par une disposition fiscale, l'avantage conféré par une autre disposition fiscale porterait
atteinte à la garantie des droits ; que, d'autre part, la majoration ne serait pas en adéquation avec l'objectif
poursuivi dans la mesure où son champ d'application est plus restreint que celui du « crédit d'impôt
compétitivité emploi » ; qu'enfin, l'application de cette majoration de 50% de la taxe aux magasins de
commerce de détail alors que les entreprises de commerce électronique n'y sont pas assujetties
méconnaîtrait également l'égalité devant les charges publiques ;
19. Considérant que les sénateurs requérants soutiennent en outre que les dispositions de l'article 46
méconnaissent les principes d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi dans la mesure où l'absence de
précision sur les conditions dans lesquelles s'appliquent les diverses majorations de la taxe sur les
surfaces commerciales ne permet pas aux entreprises qui y sont assujetties de « prendre conscience »
de son taux effectif ; qu'en particulier l'articulation entre la majoration de 50% de la taxe et la modulation
qui peut être appliquée par les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale
ne serait pas claire ; qu'il en irait de même de l'éventuelle application à cette majoration du prélèvement
pour frais d'assiette et de recouvrement ;
20. Considérant que les sénateurs font enfin valoir que, pour les établissements disposant d'une surface
de vente supérieure à 5 000 mètres carrés, l'application cumulée de la majoration de 30% et de celle de
50% entraînerait une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ; qu'une telle rupture
serait accrue par l'application des autres majorations ; que serait d'ailleurs incohérente l'application du
prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement à une majoration perçue au profit de l'Etat ;
21. Considérant, en premier lieu, qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que
lui confie la Constitution et, en particulier, son article 34 ; que le plein exercice de cette compétence, ainsi
que l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles
4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, lui imposent d'adopter des dispositions suffisamment précises et
des formules non équivoques ;
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22. Considérant qu'il ressort des termes mêmes des dispositions contestées que la majoration de 50%
qu'elles prévoient porte sur le montant de la taxe « avant application de la modulation » décidée par
l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou par le conseil municipal ;
que cette modulation, prévue au cinquième alinéa du 1.2.4.1. de l'article 77 susmentionné, ne porte que
sur le produit de la taxe perçue au profit de la commune ou de l'établissement public ; qu'il en va de même
des frais d'assiette et de recouvrement prélevés en application du dernier alinéa de ce 1.2.4.1. ; qu'en
prévoyant que la majoration de 50% sera appliquée sur « le montant de la taxe calculé selon le présent
article », le dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 a entendu que cette majoration soit
appliquée au taux de cette taxe, majorée le cas échéant de 30% en application des dispositions de ce
même article ; que ces dispositions ne sont pas inintelligibles ;
23. Considérant, en second lieu, qu'en instituant une taxe sur les surfaces commerciales, le législateur
a entendu favoriser un développement équilibré du commerce ; qu'il a, pour ce faire, choisi d'imposer les
établissements commerciaux de détail ayant une surface significative de vente ; qu'en adoptant les
dispositions contestées, il a entendu augmenter le rendement de cette taxe au profit du budget de l'Etat ;
qu'en prévoyant que la majoration est applicable aux établissements dont la surface de vente est
supérieure à 2 500 mètre carrés, il a fixé un critère objectif et rationnel tant au regard de l'objet de cette
majoration que de l'objet de la taxe ; qu'eu égard aux taux de la taxe, cette majoration n'entraîne ni dans
le montant de l'imposition ni dans les effets de seuil de son barème une rupture caractérisée de l'égalité
devant les charges publiques ;
24. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article 46, qui ne méconnaissent
ni la garantie des droits ni aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à
la Constitution ;
- Sur certaines dispositions de l'article 72 :
25. Considérant que les dispositions combinées des articles 145 et 216 du CGI régissent le régime fiscal
des sociétés mères, qui permet à ces dernières, sur option, d'être exonérées d'impôt sur les sociétés sur
les produits de participation reçus de leurs filiales ; que l'article 216 prévoit que les produits nets des
participations perçus au cours d'un exercice par une société mère peuvent être retranchés du bénéfice
net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges, fixée uniformément à 5% du
produit total des participations ; que l'article 145 détermine les conditions requises pour bénéficier du
dispositif prévu à l'article 216 ; que le 6 de cet article 145 fixe la liste des cas dans lesquels ce dispositif
n'est pas applicable ;
26. Considérant que le a) introduit au 6 de l'article 145 par le cinquième alinéa du paragraphe I de l'article
72 de la loi déférée ajoute à cette liste les « produits des titres prélevés sur les bénéfices d'une société
afférents à une activité non soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent » ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 46
En ce qui concerne la procédure :
27. Considérant que les sénateurs requérants font valoir que le cinquième alinéa de l'article 72 a été
adopté à l'issue d'un débat « tronqué », le Gouvernement n'ayant fourni « aucune explication de son
sous-amendement n° 586, aucune analyse du dispositif proposé, aucune évaluation, et aucune
information au Sénat » ; qu'aurait ainsi été méconnue l'exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité
des débats parlementaires ;
28. Considérant, toutefois, que la disposition contestée est issue d'un amendement et d'un sous-
amendement adoptés lors des débats devant l'Assemblée nationale en première lecture ; que cet
amendement et ce sous-amendement étaient accompagnés d'un exposé des motifs détaillant leur objet ;
qu'il s'ensuit qu'en tout état de cause le grief tiré de la méconnaissance de l'exigence constitutionnelle de
clarté et de sincérité des débats parlementaires manque en fait ;
En ce qui concerne le fond :
29. Considérant que les requérants soutiennent que la disposition contestée est contraire aux
dispositions des directives de l'Union européenne du 30 novembre 2011 et du 8 juillet 2014 susvisées ;
que cette disposition porterait en outre atteinte à des situations légalement acquises ou aux effets qui
pouvaient légitimement être attendus de telles situations, ainsi qu'au principe d'égalité devant la loi ; que
selon les sénateurs requérants, le a) du 6 de l'article 145 méconnaît l'objectif d'accessibilité et
d'intelligibilité de la loi ;
30. Considérant qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie la
Constitution et, en particulier, son article 34 ;
31. Considérant que la disposition contestée subordonne le bénéfice du régime des sociétés mères à la
condition que les bénéfices sur lesquels sont prélevés les produits des titres perçus par la société mère
soient afférents à une activité soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent ; qu'en faisant
référence au fait que les bénéfices doivent être « afférents à une activité soumise à l'impôt sur les sociétés
ou à un impôt équivalent », le législateur n'a pas permis d'apprécier les activités soumises à l'impôt au
sens de cette disposition ; qu'en particulier, celle-ci ne permet pas de savoir si cette appréciation
s'effectue pour les activités de la filiale, y compris lorsque cette dernière a été exonérée de l'impôt en
application du régime fiscal des sociétés mères, ou si elle s'effectue aussi pour les activités des filiales
de cette filiale ; qu'eu égard à l'imprécision qui résulte de cette indétermination, le législateur a méconnu
l'étendue de sa compétence ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les griefs des requérants, le
cinquième alinéa du paragraphe I de l'article 72 doit être déclaré contraire à la Constitution ;
- Sur la place de l'article 106 dans la loi déférée :
32. Considérant que l'article 106 modifie les dispositions du premier alinéa de l'article 100 de la loi du
24 novembre 2009 susvisée ; que le 1° de l'article 106 prévoit un report au 1er janvier 2020 de la date à
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 47
compter de laquelle il ne peut être dérogé au placement en cellule individuelle dans les maisons d'arrêt
au motif tiré de ce que la distribution intérieure des locaux ou le nombre de personnes détenues présentes
ne permet pas son application ; que le 2° de l'article 106 prévoit que des rapports sur l'encellulement
individuel devront être remis au Parlement et devront comprendre en particulier une information financière
et budgétaire relative à l'exécution des programmes immobiliers pénitentiaires ;
33. Considérant que, selon les députés requérants, cet article n'a pas sa place en loi de finances
rectificative ;
34. Considérant qu'eu égard aux dépenses pour le budget de l'Etat qu'entraînerait l'application des
dispositions de la loi du 24 novembre 2009 relatives à l'encellulement individuel dont le 1° de l'article 106
prévoit le report, ce 1° de l'article 106 trouve sa place dans la loi de finances rectificative ;
35. Considérant que la disposition prévoyant la remise de rapports d'information au Parlement relatifs à
l'encellulement individuel et comprenant en particulier une information financière et budgétaire est une
disposition relative à l'information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ; que
le 2° de l'article 106 trouve donc sa place dans la loi de finances rectificative ;
36. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le grief tiré de ce que les dispositions de l'article 106
ont été adoptées selon une procédure contraire à la Constitution doit être écarté ;
- Sur certaines dispositions de l'article 60 :
37. Considérant que l'article 60 modifie les articles 200 B, 244 bis A et 1529 du CGI ; qu'il a pour objet
de réformer le régime d'imposition des plus-values immobilières des personnes physiques qui ne sont
pas fiscalement domiciliées en France et des personnes morales ou organismes dont le siège social est
situé hors de France ;
38. Considérant que, dans le cadre de cette réforme, le 1. du paragraphe III bis inséré dans l'article 244
bis A par le c) du 2° du paragraphe I de l'article 60 prévoit que les plus-values réalisées par ces personnes
et organismes lors de la cession des biens ou droits immobiliers ou des parts ou actions de sociétés à
prépondérance immobilière sont soumises à un prélèvement au taux de 33 1/3 % ; qu'il prévoit toutefois
que les personnes physiques, les associés personnes physiques de sociétés, groupements ou
organismes dont les bénéfices sont imposés au nom des associés et les porteurs de parts personnes
physiques de fonds de placement immobilier mentionnés à l'article 239 nonies sont soumis à un
prélèvement au taux de 19% ; que, par dérogation au 1. du paragraphe III bis de l'article 244 bis A, le 2.
du même paragraphe prévoit que « le taux est porté à 75% lorsque les plus-values sont réalisées par ces
mêmes personnes ou organismes lorsqu'ils sont domiciliés, établis ou constitués hors de France dans un
Etat ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A » ;
39. Considérant que l'exigence d'égalité devant les charges publiques ne serait pas respectée si l'impôt
revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de contribuables une charge
excessive au regard de leurs facultés contributives ;
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40. Considérant que les plus-values assujetties au prélèvement à un taux forfaitaire de 75% sont par
ailleurs assujetties aux contributions sociales sur les produits de placement prévues par l'article 16 de
l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, par l'article L 14-10-4 du Code de l'action sociale et des
familles, par l'article 1600-0 F bis du CGI et par les articles L 136-7 et L 245-15 du Code de la sécurité
sociale ; que le taux forfaitaire de 75% a pour effet de porter à 90,5% le taux d'imposition sur les plus-
values immobilières réalisées par les personnes ou organismes visés au 2. du paragraphe III bis de
l'article 244 bis A ; que, par suite, ce régime dérogatoire fait peser sur les contribuables une charge
excessive au regard de leur capacité contributive et est contraire au principe d'égalité devant les charges
publiques ; que, dès lors, le 2. du paragraphe III bis de l'article 244 bis A du CGI dans sa rédaction
résultant du c) du 2° du paragraphe I de l'article 60 doit être déclaré contraire à la Constitution ;
(?)
44. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question
de conformité à la Constitution,
Décide : 1° Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi de finances rectificative
pour 2014 : le quatrième alinéa du c du 2° du paragraphe I de l'article 60 ; le cinquième alinéa de l'article
72 ; (?) 2° Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de cette même loi : l'article 1407
ter du CGI, tel qu'il résulte du 3° du paragraphe I de l'article 31 ; le dernier alinéa de l'article 3 de la loi
72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et
artisans âgés, tel qu'il résulte de l'article 46.
c) Observations
I. 2° Sur le champ de la taxe et celui des dégrèvements, rapprocher des réserves du Conseil
constitutionnel quant à la taxe sur les locaux vacants (Cons. const. 29 décembre 2012 n° 2012-662 DC,
loi de finances pour 2013, cons. 134-139 : RJF 3/13 n° 335, XX).
II Même si le montant total des majorations et modulations pouvait conduire, pour les établissements
les plus importants, à une majoration du taux de base de plus de 100%, le taux maximum de la taxe
calculé en euros/m2 demeurait dans un rapport avec le chiffre d'affaires ne caractérisant pas une rupture
de l'égalité devant les charges publiques.
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3) Cons. const. 29 décembre 2012 n° 2012-662 DC, loi de finances pour 2013, cons. 134-139
a) Résumé
XX. Taxe sur les logements vacants (article 16 de la loi). La taxe sur les logements vacants dont le
législateur étend le champ, réduit la durée de vacance admissible, relève le taux, tout en exigeant une
occupation effective plus importante, n'est constitutionnelle que sous les trois réserves suivantes :
1° Ne sauraient être assujettis à cette taxe des logements qui ne pourraient être rendus habitables
qu'au prix de travaux importants et dont la charge incomberait nécessairement à leur détenteur.
2° Ne sauraient être regardés comme vacants des logements meublés affectés à l'habitation et, comme
tels, assujettis, en vertu du 1° du paragraphe I de l'article 1407 du CGI, à la taxe d'habitation.
3° Ne sauraient être assujettis des logements dont la vacance est imputable à une cause étrangère à
la volonté du bailleur, faisant obstacle à leur occupation durable, à titre onéreux ou gratuit, dans des
conditions normales d'habitation, ou s'opposant à leur occupation, à titre onéreux, dans des conditions
normales de rémunération du bailleur. Ainsi, doivent être notamment exonérés les logements ayant
vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet de travaux dans le cadre d'opérations
d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition, ou les logements mis en location ou en vente au prix du
marché et ne trouvant pas preneur.
b) b) Extraits
134. Considérant que le paragraphe I de l'article 16 modifie l'article 232 du code général des impôts relatif
à la taxe sur les logements vacants ; que son 1° donne une nouvelle rédaction de la première phrase du
premier alinéa de cet article, relatif à la définition des zones urbaines dans lesquelles cette taxe peut être
instituée ; qu'il assouplit les critères qui encadrent l'institution de cette taxe et étend son application aux
communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de cent cinquante mille habitants et
de moins de deux cent mille habitants ; que son 2° réduit de deux ans à un an le délai de vacance à
l'expiration duquel la taxe est due ; que son 3° modifie le tarif et relève le taux de cette taxe en le fixant à
12,5% de la valeur locative la première année d'imposition et 25% à compter de la deuxième ; que le 4°
porte de trente jours à quatre-vingt-dix jours consécutifs par an la durée d'occupation d'un logement en
deçà de laquelle ce dernier est regardé comme vacant ;
135. Considérant que l'objet de la taxation instituée par les dispositions de l'article 232 du code général
des impôts est d'inciter les personnes redevables de cette taxe à mettre en location des logements
susceptibles d'être loués ; qu'il résulte des principes constitutionnels d'égalité devant la loi et les charges
publiques que la différence de traitement fiscal instaurée par cet article à l'égard des personnes
redevables de cette taxe n'est conforme à la Constitution que si les critères d'assujettissement retenus
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 50
sont en rapport direct avec l'objectif poursuivi ; que ladite taxation ne peut, dès lors, frapper que des
logements habitables, vacants et dont la vacance tient à la seule volonté de leur détenteur ;
136. Considérant, en premier lieu, que ne sauraient être assujettis à cette taxe des logements qui ne
pourraient être rendus habitables qu'au prix de travaux importants et dont la charge incomberait
nécessairement à leur détenteur ;
137. Considérant, en deuxième lieu, que ne sauraient être regardés comme vacants des logements
meublés affectés à l'habitation et, comme tels, assujettis, en vertu du 1° du paragraphe I de l'article 1407
du code général des impôts, à la taxe d'habitation ;
138. Considérant, en troisième lieu, que ne sauraient être assujettis des logements dont la vacance est
imputable à une cause étrangère à la volonté du bailleur, faisant obstacle à leur occupation durable, à
titre onéreux ou gratuit, dans des conditions normales d'habitation, ou s'opposant à leur occupation, à
titre onéreux, dans des conditions normales de rémunération du bailleur ; qu'ainsi, doivent être
notamment exonérés les logements ayant vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet
de travaux dans le cadre d'opérations d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition, ou les logements
mis en location ou en vente au prix du marché et ne trouvant pas preneur ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 51
A4. Pour le logement intermédiaire (LLI) : crise du logement social, retour aux
sources
A l?issue d?une enquête aussi minutieuse que de coutume et faisant appel à sa clairvoyance
proverbiale autant qu?à sa perspicacité légendaire, Hercule Poirot conclurait que la crise du logement ne
doit rien à un accident imprévisible, mais qu?elle résulte d?un crime méthodiquement organisé ! S?agissant
de la qualification des faits, sans doute le plus « British » des Belges s?avancerait-il quelque peu du point
de vue de l?intentionnalité du forfait, difficile à imputer à ses auteurs ; pour autant, les faits constituent par
eux-mêmes un faisceau de preuves suffisant pour emporter notre intime conviction. Jugez-en donc !
A l?origine, le logement social est une idée du patronat humaniste chrétien, influencé par la
mouvance fouriériste du Saint-Simonisme en vogue sous le Second Empire et aux débuts de la Troisième
République conservatrice, que d?aucuns qualifieraient aisément de réactionnaire : celle qui s?est légitimée
dans nos campagnes en réprimant les Communards parisiens ! Il s?agit d?éteindre d?emblée la « lutte des
classes » menaçante en restaurant, autour de l?entreprise sociale, la communauté professionnelle et
humaine des travailleurs : quoi de plus respectable que cet idéal progressiste, inspiré par Pierre-Joseph
Proudhon critique véhément du socialisme de Marx taxé de répandre une « philosophie de la misère » ?
Mais, parfaitement en phase avec la nouvelle encyclique de Léon XIII, Rerum Novarum dans laquelle le
pape dénonce fermement la condition ouvrière, fruit du capitalisme industriel.
Cet idéal universaliste, qui rassemble dans des phalanstères constitués autour de « fabriques
industrielles » les ouvriers, les contremaîtres et jusqu?aux directeurs dans une communauté familiale et
solidaire, annonciatrice de la redécouverte du jardin d?Eden : le familistère de Guise, mais aussi les
« Cités ? jardins » d?Arcueil, de Suresnes, d?Asnières qui, au nombre d?une quinzaine, encerclent Paris,
et celle du Foyer Rémois érigée au « Chemin du Moulin vert ».
Ainsi est né le logement social, porté par une vision universaliste, humaniste et patronale qui donne
naissance aux « Habitations à Bon Marché » (HBM) issues d?initiatives privées, encouragées par la loi
Siegfried de 1894 qui ouvre l?accès des organismes de logement ouvrier à des exonérations fiscales et
aux prêts de la Caisse des Dépôts.
Dès lors, alimentée par le « laboratoire philanthropique » qu?est devenu le « Musée social », une
dynamique nouvelle tendant à inscrire le logement social dans l?action publique va se créer à travers les
lois Strauss (1906) qui légitiment l?interventionnisme communal en faveur des plus démunis, la loi
Bonnevay (1912) qui crée les offices publics d?HBM et que couronne la loi Loucheur (1928) qui décide de
l?intervention de l?Etat (central) en instituant une programmation de 200 000 logements sociaux.
Entretemps, la Première Guerre mondiale a entraîné le blocage des loyers qui perdurera jusqu?en 1948,
illustrant le principe de Lindbeck (1970) selon lequel une telle mesure, hormis par le moyen de
bombardements, est le plus sûr moyen de détruire une ville.
Pour autant, les ressources publiques adaptées à cette ambition prométhéenne font défaut et, après
la loi Ribot qui crée le Crédit Immobilier pour financer l?accession sociale à la propriété, c?est finalement
le plan Courant de 1953 qui s?appuie sur la « participation des employeurs à l?effort de construction »
(PEEC) qui mobilise les financements privés pour accompagner la volonté politique de l?Etat. Le logement
social va ainsi osciller entre volontarisme public et mobilisation, plus ou moins spontanée, de ressources
privées, non sans susciter maintes contradictions.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 52
Héritage de la vocation universaliste originelle, le plafond du revenu ouvrant droit au logement social
couvre 80% de la population, alors qu?il ne représente, au tournant du XXIe siècle, que 18% du parc de
résidences principales (soit, tout de même, cinq millions et demi d?habitations sur trente-deux millions),
ce qui n?est guère éloigné du maximum admissible selon les règles européennes qui tendent à ne pas
déséquilibrer le marché au détriment de l?offre privée.
En 2009, la loi Molle a tenté de réduire cet écart abyssal entre les droits subjectifs et l?offre objective
en instituant des surloyers auxquels n?échappent que ? 70% de la population !
Sauf qu?auparavant, deux « véhicules législatifs » sont venus accentuer les contradictions : en 2000,
la loi « Solidarité et Renouvellement Urbain » (SRU) a institué un quota minimal de logements sociaux
(20%, bientôt porté à 25% du parc existant) tout en interdisant, de fait, l?accession dans le parc
conventionné ancien qui était le seul moyen de refinancer durablement les constructions nouvelles?
Et surtout, la loi « DALO » institue « le droit au logement opposable » qui a pour effet de réserver
l?offre de logements sociaux aux publics les plus précaires, c?est-à-dire de les concentrer dans les
« quartiers prioritaires de la ville » où le bon sens le plus élémentaire commanderait de fixer, pour accéder
au parc social, des « planchers » de revenu, et non des « plafonds » !
Ainsi, le logement social, régi par les Pouvoirs Publics mais principalement financé par les
ressources privées du « 1% Logement », s?est détourné de sa vocation universaliste conçue, initialement,
au profit du monde des travailleurs, et n?apporte plus de réponse crédible aux classes moyennes. Se
trouve ouverte une voie royale au logement intermédiaire, financé par des fonds privés et propice à
l?accession à la propriété, à l?issue d?une dizaine d?années d?exploitation locative.
Il reste le plus difficile : aligner le droit sur la réalité, faire prévaloir l?éthique de responsabilité sur
l?éthique de conviction qui tend à s?imposer dans les démocraties d?opinion régies par l?émotion, à
l?encontre de la Raison promue par les Lumières !
Puisqu?il n?est guère envisageable d?accueillir les 70% de la population éligibles au logement social
dans les 20% affectées au « DALO », il ne reste qu?à inclure dans le logement d?intérêt public le logement
intermédiaire qui permet de retrouver la vocation universaliste d?origine, au profit notamment des salariés
de l?industrie et des services publics, qu?il est convenu de qualifier de « key workers ».
Ces logements conventionnés privés, dits « intermédiaires », peut-être ne faudrait-il pas les
décompter au titre des quotas de la loi SRU selon une parité parfaite vis-à-vis du logement social (1 pour
1) mais seulement pour moitié (0,5 pour 1) ; mais alors, il serait pour le moins raisonnable de surpondérer
l?offre « très sociale » (les PLAI) en les décomptant selon un barème ajusté (1,5 pour 1) de façon à
confirmer la priorité sociale de la politique du logement.
Il n?est guère d?autre voie qui permette d?éviter que ne se creuse, en matière de logement comme
dans bien d?autres domaines, le fossé entre le discours politique et la réalité, écart qui constitue,
aujourd?hui, la principale menace pesant sur l?appréhension du « Bien Public », la « Res Publica », jadis
la « Res Publica christiana », dans l?opinion.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 53
A5. Financement de la transformation des actifs immobiliers : les leçons du Baron
Haussmann
Lorsqu?en référence à l?heure de gloire de son grand-oncle à Austerlitz, Charles-Louis-Napoléon
Bonaparte, le 2 décembre 1851, réussit un coup d?Etat prévisible depuis son « élection de Maréchal »,
grâce à l?appui des campagnes, à la Présidence de la République pour un seul mandat de quatre ans, le
pays est en retard d?une révolution industrielle (mais aussi agricole), financière et urbaine.
Retard en matière de réseaux de voies ferrées : 10 000 km au Royaume-Uni ; 3 000 km en France,
incluant le Paris-Orléans et quelques lignes dans le Nord et dans l?Ouest. Retard en termes de liquidité
monétaire et de crédit : pour 1 000 francs de monnaie métallique, 140 francs de billets seulement sont en
circulation, dont plus de 100 émis par la Banque de France, versus 1 300 livres « papier » pour
1 000 livres « métal » au Royaume-Uni. Enfin, un million de Parisiens vivent dans une ville à peine sortie
du Moyen Age, versus deux millions et demi dans Londres, pourvue du tout-à-l?égout et éclairée au gaz.
Les Saint-Simoniens qui entourent Napoléon III vont apporter une véritable rupture dans tous les
domaines, projetant un souffle de modernité au-delà des frontières, avec les canaux de Suez et de
Panama initiés par Ferdinand de Lesseps ainsi que les voies ferrées, en Algérie notamment, lancées par
Prosper Enfantin?
Pour mettre un terme à l?hégémonie de la « Haute Banque » de la dynastie des Rothschild et de
quelques grandes lignées de banquiers d?affaires en situation oligopolistique, les Frères Pereire créent le
Crédit Mobilier qui finance les industries en plein essor ainsi que l?extraction minière (Saint Avold) autant
que le tourisme balnéaire (Arcachon, Deauville, Plombières, Aix-les-Bains) et la grande distribution (Le
Bon Marche), et le Crédit Foncier destiné à permettre la rénovation de Paris. L?homme chargé de cette
immense tâche sera le préfet de la Seine, le Baron Haussmann.
En dix-huit années d?une oeuvre inconcevable de nos jours, il va mener à bien la plus grande
opération d?urbanisme de l?Histoire de France, rénovant 60% de la surface de Paris, avant de doubler la
superficie de la capitale en lui rattachant les communes voisines : Neuilly, Auteuil, Passy, Montmartre,
etc. Le bilan est éloquent : sur 30 000 immeubles anciens, près de 20 000 sont démolis et 30 000 rebâtis ;
500 km de tout-à-l?égout et d?adduction d?eau courante sont réalisés avec les aqueducs et réservoirs
associés ; 65 km de voieries sont ouverts, le boulevard Raspail clôturant cet immense chantier en 1905.
Pour financer l?opération en échappant au contrôle tatillon du Conseil législatif (ancêtre de
l?Assemblée nationale sous le Second Empire), constitué de ruraux peu enclins à approuver les emprunts
destinés à embellir la capitale, il crée le « Caisse des travaux » qui est soustraite à la compétence
parlementaire, ce que Jules Ferry dénoncera comme une illégalité flagrante.
Il met alors en branle un « système » d?une redoutable efficacité. Il exproprie, progressivement,
toutes les parcelles interférant, fût-ce à la marge, avec ses projets d?urbanisme, sur la base d?estimations
modiques correspondant à l?absence de viabilisation, à la difficulté d?accès et à l?état de vétusté du bâti
existant. Le financement est assuré par le Crédit Foncier qui prend également en charge les opérations
d?aménagement, en échange de titres émis par la « Caisse des travaux », ainsi que la reconstruction à
laquelle sont priés de participer les investisseurs institutionnels. Toutefois, après leur valorisation par le
programme d?aménagement, les charges foncières sont revendues à un prix cinq à dix fois supérieur,
selon les quartiers, à la valeur d?expropriation.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 54
Ce mécanisme fonctionne admirablement pendant une dizaine d?années jusqu?au moment où,
l?Empire connaissant un affaiblissement continu avec sa conversion au libéralisme politique, le Conseil
d?Etat s?avise du caractère spoliateur de certaines décisions d?expropriation et les annule ; dès lors, c?est
la voie transactionnelle qui prévaudra, laissant à la Ville de Paris, par le truchement de la liquidation de
la « Caisse des travaux » avec l?effondrement de l?Empire en 1870, une dette de 1,5 milliard de francs-
or, faisant des Parisiens la population la mieux logée et la plus endettée du monde, la première
caractéristique compensant la seconde.
Par chance, la Première Guerre mondiale, vient rebattre les cartes des rapports de puissance dans
le monde et, concomitamment, des créances et dettes anciennes sur le plan national : en 1926, le franc
a perdu 75% de sa valeur-or de 1914 et 85% quelques années plus tard ; les finances de la Ville de Paris
sont, pour cette fois, sauvées par une tragédie européenne !
Le premier enseignement intemporel de cette belle histoire, c?est qu?en matière immobilière (et peut-
être même, mobilière), toute création de valeur rapide suppose une destruction de valeur préalable. Le
second, c?est que l?inflation facilite l?établissement de nouvelles rentes sur les décombres des anciennes :
l?histoire des « biens nationaux », sous la Révolution, illustre parfaitement ce principe, les propriétés du
clergé, en tous temps, se prêtant admirablement à ce processus de transformation en faveur de nouvelles
élites.
S?agissant donc de principes intemporels, il convient de s?en accommoder ; et même plus, d?en tirer
profit.
175 ans après le lancement des travaux du Baron Haussmann, nous sommes à la veille d?ouvrir un
chantier d?ampleur comparable, d?abord en Ile-de-France, mais qui est appelé à s?étendre rapidement à
toutes les métropoles, et même au-delà. C?est celui de la transformation des actifs : ensembles de
bureaux durablement vacants (de l?ordre de quatre millions de mètres carrés en Ile-de-France), centres
commerciaux à reconfigurer (250 sur le territoire national), immeubles tertiaires utilisés par les services
publics à réhabiliter, après adaptation au télétravail et, bientôt à la diffusion de l?intelligence artificielle
dans tous les processus de production? Enfin, il faudra envisager les mesures de massification des
rénovations thermiques, afin d?engager plus rapidement les provisions budgétaires affectées à « Ma
Prime Rénov » ?
Devant ce « mur d?investissement », il convient de s?inspirer des enseignements qui méritent d?être
tirés de l?action du Baron Haussmann ; en premier lieu, ce qui fait défaut aujourd?hui, ce ne sont plus les
ressources financières, ce sont des projets rentables, et comme la situation financière du pays interdit
d?escompter le recours aux fonds publics pour revitaliser le modèle par le subventionnement d?opérations
déficitaires, la seule solution envisageable consiste à susciter des projets créateurs de valeur, c?est-à-
dire, conformément à la méthode d?Haussmann, de transformation d?actifs préalablement dépréciés.
Les temps ont changé et le Conseil d?Etat veille au respect du droit de propriété, de rang
constitutionnel. Dès lors, pour amener les propriétaires d?actifs obsolètes (ou en voie d?obsolescence) à
accélérer des prises de décision de « write off » inéluctables, la seule voie offerte aux Pouvoirs Publics
consiste à adresser des signaux au marché : en conditionnant un mécanisme de défiscalisation des
réinvestissements de transformation au niveau de valorisation des « intrants » (c?est-à-dire de la charge
foncière) apportés dans le processus de transformation ; en préparant une loi foncière à effet différée de
dix-huit à vingt-quatre mois, centrée sur les espaces métropolitains et appliquée aux cessions des
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 55
personnes morales, et « sur-fiscalisant » les plus-values réalisées à l?occasion des cessions opérées au-
dessus du niveau moyen des charges foncières constatées sur le marché concerné.
Bien sûr, il reste à définir précisément les modalités de mise en oeuvre de ce dispositif à « double
détente » et pour citer Napoléon « La guerre est un art simple et tout d?exécution ». Mais une relance
significative et peu consommatrice de financement public ne sera possible qu?à travers cette vision
« haussmannienne » du réaménagement urbain.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 57
A6. Démembrements, vente à réméré et fiducie dans les transformations d?actifs
Depuis un quart de siècle, le thème des démembrements de propriété est de retour, tout particulier
sous la forme de la dissociation du foncier et du bâti conçue comme le moyen de faciliter un processus
d?accession progressive à la propriété via la constitution d?un droit réel (le bail réel solidaire ou BRS) et,
pour la collectivité territoriale concernée, de conserver la maîtrise d?une ressource de plus en plus rare,
le foncier constructible dans le tissu urbain.
En arrière-fond de cette tendance apparaît un phénomène récurrent dans l?histoire économique qui
est le surenchérissement de la rente foncière dans les espaces métropolitains, qui en vient à peser pour
40%, voire plus, dans le coût d?un programme immobilier.
I. Six siècles auparavant, le système féodal qui avait succédé à l?Empire romain avait aboli le régime
de propriété classique (usus, fructus, abusus) qui ne fut rétabli que par la Révolution pour promouvoir
une dissociation distinguant la propriété « éminente » du sol détenu par une seigneurie politique (laïque
ou religieuse) et donnant lieu au versement d?une redevance par le propriétaire « utile » organisant
l?exploitation économique du bien, par exemple par des « métayers », ou par des « journaliers », selon
les cas.
Le tout est que dans le contexte d?anémie de l?économie et du commerce de la guerre de Cent Ans,
le poids des redevances seigneuriales étant devenu excessif, de nombreuses tenures s?en trouvèrent
délaissées par « dégurpissement » des tenanciers et Charles VII, parvenu sur le trône, dut se saisir du
problème de la « relance » ; comment opéra-t-il, en accord sur ce point avec son rival anglais ? En
sacrifiant les redevances dues aux propriétaires « éminents » au profit de la création de richesses, c?est-
à-dire des flux de revenus, par les propriétaires « utiles ».
Ce précédent, jamais démenti par la suite, a condamné les démembrements, dans notre pays, en
tant que mode général de gestion de la propriété foncière, conduisant à réserver au financement par
l?impôt, c?est-à-dire par des personnes publiques, la détention durable de sols grevés des droits réels du
propriétaire « utile », c?est-à-dire du bâti acquis par des possesseurs privés. Ainsi, la puissance publique
assume-t-elle le prix de ses faiblesses ; après avoir favorisé l?inflation foncière par une politique constante
de solvabilisation de la demande (Cf. Pinel), elle s?est efforcée de palier ses effets à travers la création
d?organismes fonciers solidaires (OFS) destinés à porter la « propriété éminente » d?actifs devenus trop
onéreux, eu égard au pouvoir d?achat de l?acquéreur médian.
L?ensemble de ces considérations conduisant à distinguer deux types de démembrements, selon
l?horizon considéré :
- Un démembrement à long terme, dont l?horizon est supérieur à quinze ans et qui, dans les faits, ne
peut être assumé que par un financement public ou parapublic (PEEC) eu égard au risque de non
remboursement de la charge foncière par le possesseur du bien impécunieux, dont l?éviction par décision
de justice paraît fort improbable.
- Un démembrement à court terme, pour une durée d?une dizaine d?années, voire au maximum pour
quinze ans, incluant une option de cession du bâti à un bailleur institutionnel (avec maintien dans les lieux
de l?occupant devenu locataire) ou de rachat de la charge foncière, à cette échéance.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 58
En d?autres termes, le démembrement doit correspondre à une période transitoire (Cf. le PSLA,
quelque peu détourné de sa finalité du fait du taux de TVA de 5,5%, très avantageux), la valorisation du
bien n?étant rendu possible que par la reconstitution de la pleine propriété.
II. C?est dans cette perspective qu?une nouvelle dynamique pourrait être amorcée dans le cadre de la
transformation d?actifs immobiliers. Le champ d?application de transferts de propriété « réversibles »
pourrait s?appliquer à divers scenarii :
- La transformation d?actifs détenus par des SCPI, dans l?hypothèse où les souscripteurs
souhaiteraient conserver tout ou partie des actifs transformés.
- La mise aux normes de copropriétés ou de patrimoines privés détenus par des propriétaires ne
disposant pas des ressources nécessaires pour financer une rénovation thermique.
Dans ce cadre, diverses formules pourraient être explorées :
- La vente à réméré de la nu-propriété du bien ;
- La constitution d?une fiducie destinée à externaliser la requalification des actifs, sous condition de
dédommagement du fiduciaire, de manière à restaurer la commercialité du bien.
Le développement de formules susceptibles de mobiliser des financements de marché doit s?inscrire
dans un cadre légal clarifié et dans la perspective d?un remembrement à court/moyen terme. L?hypothèse
d?une reprise par un bailleur institutionnel et du maintien dans les lieux du propriétaire sous statut locatif
doit alors être sérieusement envisagé.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 59
A7 Revue de presse
Revue de presse rétrospective, l?occasion d?une simple crise conjoncturelle, alors les technologies
numériques n?étaient guère diffusées et que les métropoles naissantes n?avaient pas atteint un point de
saturation.
Articles parus en 1994, année de parution du rapport Darmon
Les Echos ? En dépit de la chute des prix, la construction de bureaux s'est emballée en 1993
Mercredi 26 janvier 1994
Alors que la crise immobilière s'est déclenchée à la mi-1990 pour ne cesser de s'aggraver depuis, la
construction de bureaux n'a jamais été aussi forte que l'année dernière.
Avec 14,42 millions de mètres carrés de bureaux, Paris concentre 40 % des bureaux de l'Ile-de-France,
selon les statistiques de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme de la Région Ile- de-France, et la volonté
de la Ville de Paris de donner un coût d'arrêt à la construction de bureaux apparaît bien tardive. Dans
une étude sur les bureaux parisiens publiée début janvier, l'Observatoire régional de l'immobilier
d'entreprise (ORIE) souligne que de 1985, l'année de suppression de l'agrément-constructeur, à la fin
1992, plus de 1,4 million de mètres carrés de bureaux ont été mis en chantier dans la capitale : 722.000m2
dans les arrondissements de l'Ouest, 158.000 m2 dans le Centre et 546.000 m2 à l'Est.
L'Observatoire ajoute que si 1985 a été le point de départ de l'envol de la construction de bureaux en Ile-
de- France, à Paris il a fallu attendre 1989, au plus fort de la spéculation immobilière. Cela explique
beaucoup des déconvenues enregistrées par les banques et les promoteurs. Rappelons que, de juillet
1987 à juillet 1990, les prix de vente des bureaux et des logements ont doublé. Et dans le fameux
« triangle d'or », ils ont quadruplé entre 1985 et juillet 1990 ! Quand en 1985, le mètre carré se vendait
25.000 francs avenue Montaigne, il atteignait le record de 110.000 m2 fin 1988 !
Alors que, dans l'Ile-de-France, la construction de bureaux ne cesse de décroître depuis 1991, les mises
en chantier se sont accélérées à Paris au cours des trois dernières années. La capitale se trouve donc
dans une situation paradoxale, avec un niveau très élevé de stocks de bureaux vacants, représentant
environ 21 % du total des surfaces vides de l'Ile-de-France, et une production qui reste forte. De 1990 à
1992, les promoteurs ont ainsi engagé la construction de plus de 1 million de mètres carrés, dont 585.000
m2 compensent de fait la démolition de bureaux jugés obsolètes. Et, en 1993, trois ans après le
déclenchement de la crise immobilière, la construction ne ralentit toujours pas. Au contraire, avec 315.000
m2 de bureaux autorisés et 337.000 m2 mis effectivement en chantier, la ville enregistre le plus haut
niveau de construction de la décennie (voir graphique).
Ces mises en chantier ont un peu profité à l'Est parisien. Selon l'ORIE, c'est le douzième arrondissement
qui a enregistré le plus de changements depuis 1985 avec la création des ZAC de Bercy et de Reuilly.
Par contre dans le neuvième, la différence entre les démolitions et reconstructions aboutit à un solde net
négatif (- 14.200 m2). Dans le huitième, le solde démolition-construction est légèrement positif (+ 8.800
m2). Ces deux arrondissements gardent très nettement leur vocation de quartier d'affaires puisqu'ils
totalisent toujours 33 % des bureaux intra-muros. Le rééquilibrage vers l'Est parisien est encore timide.
Dans huit arrondissements, la surface de bureaux mise en chantier depuis 1985 est restée inférieure à
10.000 m2, soit 12 % du total des opération commencées à Paris.
Sachant que plus de 90 % des bureaux lancés depuis 1985 le sont en blanc, le stock de bureaux vacants
n'a jamais été aussi abondant. A la fin de 1993, Bourdais l'estimait à 1,3 million de mètres carrés, sachant
que 400.000 m2 vont encore alourdir cette donne en 1994. Les grands programmes comme Atlantique
Montparnasse, Etoile/Saint-Honoré, Chancelier Adenauer, Washington Plazza attendent le client.
L'année dernière, la demande placée n'a, selon Bourdais, pas dépassé 400.000 m2. La ville a donc tout
intérêt à encourager les propriétaires à transformer leurs bureaux vides en logements.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 60
Le Monde ? Les 24 propositions du rapport Darmon : 800 000 mètres carrés recyclables, l'Etat doit
aider à transformer des bureaux en logements
Jeudi 15 septembre 1994
Il est possible de transformer environ 800 000 mètres carrés de bureaux vides en logements, dont la
moitié à Paris, mais l'Etat doit aider financièrement ces opérations, estime un rapport rendu public
mercredi 14 septembre.
Transformer les bureaux vides en logements. Lorsque l'idée est apparue la première fois, à la fin 1992,
elle a suscité un torrent de scepticisme. Ensuite, certains l'ont vue comme une panacée permettant de
résoudre à la fois les gigantesques stocks de bureaux vacants (5 millions de mètres carrés,
majoritairement en région parisienne) et la pénurie chronique de logements. Pour se faire une idée exacte
sur le sujet, le ministre du logement, Hervé de Charette, a donc demandé il y a quelques mois à Jacques
Darmon, président de la Banque de financement et de Trésorerie, un rapport, publié mercredi
14 septembre.
Cette transformation est tout à fait possible et, bien menée, elle permettrait de résoudre 40 % du « stock
structurel » de bureaux (c'est-à-dire des mètres carrés excédentaires par rapport à ce que justifie la
fluidité normale du marché), que l'auteur estime à environ 2 millions de mètres carrés. Ces 800 000
mètres carrés recyclables seraient situés pour moitié à Paris (soit l'équivalent d'une année de construction
neuve de logements dans la capitale).
Contrairement à une idée répandue, ils ne se trouveraient pas dans les immeubles haussmanniens,
anciens logements transformés une première fois en bureaux, qui continuent d'être recherchés. M.
Darmon distingue, en revanche, deux autres « gisements » : les bureaux anciens de certains quartiers
résidentiels, bien insérés dans le tissu urbain et donc, faciles à reconvertir ; ceux situés dans des zones
périphériques mal situées et qui exigent un important accompagnement de la collectivité (transports,
équipements publics...).
Vu leur coût, les opérations de transformations ne pourront toutefois se faire sans l'aide de l'Etat, surtout
lorsque les bureaux concernés appartiennent à de petits propriétaires qui doivent déjà se résoudre à
accepter une décote importante de leur bien ou de sa rentabilité. Le rapport propose donc vingt-quatre
mesures de deux natures : d'une part, une levée de toute une série d'obstacles légaux et réglementaires
freinant ou empêchant la transformation ; d'autre part, une aide sonnante et trébuchante, temporaire et
facile à comprendre.
Parmi les premières, l'auteur propose une exemption de permis de constuire dans certains cas et la
dispense de créer un parking pour chaque logement créé. Dans les secondes, on relèvera notamment
une subvention temporaire de 1 000 francs par mètre carré transformé, plafonnée à 50 ou 60 000 francs
par logement créé et la possibilité de déduire du revenu foncier les dépenses d'amélioration destinées à
transformer un local en logement.
Estimant que tout logement transformé peut être considéré comme du neuf, M. Darmon propose
notamment que les premiers acheteurs puissent bénéficier de la déduction fiscale dite " Quilès-
Méhaignerie ". De même, les acquéreurs de bureaux destinés à être transformés en logements se
verraient appliquer des droits de mutation à taux réduit des logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 61
Le Monde ? Prochaines mesures pour transformer des bureaux en logements
Vendredi 16 septembre 1994
La transformation des bureaux en logements est " un devoir national ", a estimé, mercredi 15 septembre,
le ministre du logement, Hervé de Charette, lors de la présentation du rapport Darmon sur ce sujet (le
Monde du 15 septembre). " Dans la mesure où cette transformation est techniquement faisable, peut-on
accepter de rester l'arme au pied alors que, dans le même temps, perdure la crise du logement social et
du logement tout court ? ", s'est interrogé M. de Charette. Le rapport Darmon estime que 800 000 mètres
carrés de bureaux vides peuvent être reconvertis en logements, dont la moitié à Paris. La mesure la plus
spectaculaire qu'il préconise est une prime temporaire de 1 000 francs au mètre carré, plafonnée, qui
coûterait, selon l'auteur, 250 millions de francs en trois ans. Le ministre devrait prendre des décisions
avant la fin de l'année.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 62
Les Echos supplément immobilier ? Premières réalisations et beaucoup de projets : recyclage des
bureaux en logements : le doute
Jeudi 22 septembre 1994
Des projets de plus en plus nombreux, des opérateurs qui se laissent convaincre, un ministre décidé à
aller de l'avant : l'idée de transformer des bureaux en logements entre peu à peu dans les esprits et dans
les faits. Mais le scepticisme domine toujours chez les opérateurs. Etat des réflexions une semaine après
la publication du rapport Darmon.
« Quand il n'est plus possible de louer un bureau à plus de 1.400 francs le mètre carré par an, il vaut
mieux le transformer en logement. » Samir Rayess, le patron d'UFFI, un « poids lourd » de l'immobilier
avec un parc géré de plus de 5 millions de mètres carrés de bureaux, a décidé de franchir le pas. Son
projet - créer 48 logements PLA ou PLI dans un ancien immeuble de bureaux à Chatou (Yvelines) - a
d'ailleurs été primé cet été par le plan construction et architecture (PCA). Avec, comme principaux
arguments : l'écart de loyer entre logement et bureau s'atténue, la demande des entreprises se concentre
sur le neuf et les centres-villes.
Devenus obsolètes, de petits immeubles d'entreprise situés en périphérie se découvrent ainsi une
nouvelle vocation. A Vaucresson (Hauts-de-Seine), le cabinet d'architectes 2AD propose la mutation de
3.500 m2 de bureaux en une cinquantaine de logements locatifs. « Le cadre résidentiel, entouré
d'espaces verts, encourage cette opération », dit un des concepteurs, qui ajoute que le projet revient « 25
% moins cher que la construction neuve ». A Rouen, en plein centre-ville cette fois, la Caisse régionale
d'assurance-maladie a réalisé 142 logements d'étudiant dans un immeuble de bureaux, avec une
subvention de la ville (2 millions de francs). L'ensemble sera inauguré le 1er octobre prochain.
De telles expériences se multiplient aujourd'hui avec la bénédiction du PCA qui peut financer les études
de faisabilité (jusqu'à 40.000 francs). Leur aspect expérimental l'emporte encore souvent sur leur viabilité
économique. Qu'importe : jusqu'à présent, les projets recensés n'émanaient que de la Régie Immobilière
de la Ville de Paris (RIVP), qui bénéficie de prêts intéressants de la mairie (Les Echos Immobilier du 21
avril). Seuls les pouvoirs publics croyaient vraiment aux vertus de ces transformations, à la fois pour
résorber les stocks de bureaux vides et pour résoudre la crise du logement.
800.000 m2 à transformer en dix ans
Dorénavant les professionnels de l'immobilier suivent de près ces initiatives, tout en gardant l'oeil rivé sur
leur calculette. La rentabilité d'abord. De ce point de vue, Auguste-Thouard est sans doute l'un des
premiers à envisager sérieusement la question. La transformation de bureaux en logements, notamment
à Paris, devient économiquement intéressante, juge ainsi Jean-Marie Forestier, président du directoire
d'Habitat Foncier (ATHF), filiale du groupe. Car, après des baisses importantes, le prix des bureaux se
retrouve aujourd'hui au niveau et parfois même en dessous de celui des logements. « Le loyer moyen
d'un appartement parisien est de l'ordre de 1.200 francs/m2 /an, et celui d'un bureau s'en rapproche » ,
précise Jean-Marie Forestier.
La valeur vénale des bureaux de la capitale tend elle-même à devenir inférieure à celle des logements,
ajoute-t-il. Et de citer l'exemple de l'opération réalisée récemment par le Sultan de Brunei, qui vient de
racheter les anciens bureaux d'IBM, place Vendôme, une des adresses les plus cotées de Paris, pour en
faire des appartements. Une opération de prestige uniquement ? Elle révèle cependant un nouvel état
d'esprit de la part des acteurs du marché.
Le gouvernement milite en ce sens, au nom d'un « impératif économique et social » à assumer d'urgence.
On ne peut en effet opposer indéfiniment 4 millions de mal-logés à 5 millions de mètres carrés de bureaux
vides en région parisienne. Un chiffre donné la semaine dernière, lors de la présentation du rapport
Darmon, est éloquent : la valeur vénale du parc de bureaux parisiens s'élève à 800 milliards de francs.
Toute mesure à même de rééquilibrer le marché et donc de limiter la baisse de cette valeur (une décote
de 20 % « pèse » 160 milliards) est bienvenue...
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 63
Un premier coup de pouce a été donné dans la loi Habitat adoptée en juillet dernier. Désormais, il est
impossible de revenir pendant treize ans à l'affectation primitive d'un bureau transformé en logement,
sans autorisation préfectorale. La loi accorde également une réduction d'impôts pour investissement
locatif (réduction Méhaignerie représentant 10 % du prix de l'acquisition dans la limite de 30.000 francs
pour un célibataire, le double pour un couple marié, à étaler sur deux ans), sous réserve que l'opération
soit réalisée avant fin 1997.
Une rentabilité incertaine
Il y a tout juste un an, la Ville de Paris s'était, elle aussi, engagée en faveur des transformations. Les élus
avaient alors décidé, dans le cadre de l'élaboration du nouveau plan d'occupation des sols (POS),
d'exonérer ces opérations de l'obligation de créer des places de stationnement. En attendant, la
compensation financière à verser en cas de non-réalisation des parkings a été ramenée de 50.000 francs
au montant symbolique de 10 francs.
Le rapport Darmon va plus loin. Pour transformer 800.000 m2 de bureaux en Ile-de-France en dix ans, le
document propose une série de simplifications administratives et d'incitations financières. Une prime de
1.000 francs par mètre carré transformé, plafonnée à 60.000 francs, va ainsi être prochainement soumise
au législateur : en quelque sorte, un dispositif semblable à la « prime d'arrachage » accordée aux
viticulteurs. Le document suggère que ces opérations bénéficient également des mêmes droits que la
construction de logements classiques (accès aux prêts, avantages fiscaux).
En dépit de ces avancées, le scepticisme reste de règle parmi les opérateurs immobiliers. Echaudés par
la crise immobilière, banquiers et investisseurs institutionnels n'apparaissent guère pressés de se lancer
dans l'aventure ; au bout de leurs comptes, la rentabilité ne paraît pas garantie sur facture. C'est qu'en
termes de revenus annuels de location les appartements ne l'emportent toujours pas sur les bureaux à
Paris. Avec une moyenne de 100 francs/m2/mois pour la location d'un appartement, soit 1.200
francs/m2/an, on est encore loin des 2.000 francs que peut rapporter en moyenne un mètre carré de
bureau. « Sans compter les charges qui pèsent sur les propriétaires de logements, soit une perte
supplémentaire de 20% » , souligne Michel Pariat, directeur du département des investissements à l'UAP.
Parcours du combattant
S'y ajoute le fait qu'un immeuble de bureau, moins cher à l'achat, sera plus rapidement rentabilisé que
son équivalent destiné à l'habitation. Patrick Dallemagne, de la Fédération nationale de l'immobilier
(FNAIM), faisait récemment état d'une étude démontrant que la rentabilité locative brute d'un bureau
(7,5% à 8%) restait très largement supérieure, de l'ordre de 60%, à celle du logement dit du « secteur
libre » (5% à 5,5%). « Transformer un bureau en logement revient à diviser par deux ou trois la rentabilité
nette et à perdre sur la valeur vénale du bien » , concluait l'expert.
Résultat : à Paris, mises à part les opérations de la ville, les seuls grandes transformations de bureaux
en logement ne se font souvent que par le jeu des compensations. La Société Générale a ainsi entrepris
la reconversion de 5.000 m2 de bureaux en 76 logements dans le 16e et le 9e arrondissements, en
échange d'une surface équivalente au Trocadéro pour un centre tertiaire. Mais les surcoûts sont
importants. De 6.000 francs le mètre carré pour une construction traditionnelle, on passe en effet
couramment à 10.000 francs pour une réhabilitation, en raison notamment de la hauteur des plafonds.
Sachant que les appartements réalisés, d'une surface moyenne de 100 m2, ont, avec des loyers de
10.000 à 14.000 francs par mois, quelque difficulté à trouver preneur.
Il est vrai que les résultats des calculs économiques sont radicalement différents selon que l'on se situe
dans les beaux quartiers parisiens (la valeur du bureau y excède largement celle du logement) ou dans
la périphérie de la capitale, voire en province.
Incertaine, la transformation requiert en outre des trésors d'énergie. Un véritable parcours du combattant
! Des règlements de copropriété à modifier en cas d'immeubles mixtes, au problème du non-
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 64
remboursement des taxes sur les bureaux amenés à disparaître, le chemin est semé d'embûches
administratives. Entre les déclarations d'intention et la réalité, le fossé peut être important. Aucune
réponse n'a enfin été apportée à la demande de remboursement de la TVA, lors de travaux de
transformation, sujet de préoccupation souvent exprimé par les opérateurs.
Bien que convaincu des atouts de la formule, qui permet de contourner l'écueil du foncier, le président de
la Fédération nationale du bâtiment, Jean Domange, juge que la transformation de bureaux en logements
« ne va pas bouleverser le paysage de l'immobilier ». « Il faut laisser le marché évoluer de lui-même,
conclut de son côté Alain Lambolley, président de la Sogeprom, filiale de promotion de la Société
Générale. Les beaux immeubles garderont leur destination, alors que les mal fichus redeviendront, selon
les cas, bureaux ou logements. » Le débat entre les adeptes de la transformation et les sceptiques a
encore de beaux jours devant lui.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 65
Les Echos ? L'encombrant trésor immobilier des services publics
20 octobre 1994
Les administrations et les grandes entreprises publiques ont pris conscience de la valeur de leur
patrimoine. L'immobilier devient un poste stratégique, comme dans le privé. Valorisation, transformation,
promotion, commercialisation ? Comment disposer des biens publics ?
A chacun son boulet. Si les promoteurs privés se débattent avec des millions de mètres carrés vides, les
administrations et les entreprises publiques sont assises, elles, sur un encombrant trésor. Des
immeubles, des terrains, d'anciens sites industriels souvent en centre-ville, un patrimoine qu'il ne s'agit
plus seulement de posséder, mais de gérer.
Cette volonté de mettre en place une politique immobilière a moins de dix ans. Elle a été inspirée à la
SNCF par la LOTI (loi d'orientation des transports intérieurs) de 1982 et, à d'autres entreprises publiques,
par la prise de conscience que la rentabilité de l'activité immobilière pourrait aider à rééquilibrer les
comptes d'exploitation. Elle paraît d'autant plus nécessaire aujourd'hui que les biens de l'Etat (répertoriés
dans le TGPE, le tableau général des propriétés de l'Etat, à la direction générale des Impôts) ont
longtemps été peu entretenus, ses locaux mal adaptés à l'évolution des conditions de travail, ses terrains
inutilisés souvent laissés en friche.
« Les préoccupations sont pourtant les mêmes parmi les professionnels de l'immobilier, qu'ils soient
publics ou privés : ne pas perdre d'argent et si possible en gagner , explique Georges du Halgouet,
directeur général adjoint chez Bourdais. Lorsqu'il s'agit de locations, les administrations tentent de
renégocier les baux. En cas de cession ou d'achat, les procédures sont plus longues parce que le public
souffre d'une certaine inertie et ne peut disposer librement d'un bien qui appartient à l'Etat. Mais le secteur
s'est doté, depuis peu, de structures adéquates, très efficaces. »
Inventer de nouveaux usages
Le secteur public est confronté aux mêmes efforts d'économie et de meilleure gestion que les entreprises,
pour lesquelles l'immobilier représente désormais le deuxième poste après les salaires. Mais
l'administration ne se bat pas tout à fait avec les mêmes armes. Si un ministère ou un établissement
public peut décider, seul, de vendre un immeuble ou un terrain, c'est au service des Domaines, à la
direction générale des Impôts, que revient la délicate estimation. « L'avis que nous donnons représente
la garantie que des biens publics ne seront pas bradés, précise Jean Lemierre, directeur général des
Impôts. Nos experts calculent une valeur de référence qui correspond au prix du marché. Notre avis n'est
pas impératif, mais il est respecté dans la majorité des cas. »
En fait, selon certains directeurs immobiliers, les Domaines ont plutôt la réputation d'être décalés par
rapport à ce marché. Trop bas en période de hausse, trop haut en période de faibles transactions, bref,
pénalisant pour un patrimoine qui, vu son état ou sa taille, est déjà difficile à vendre.
Qu'il s'agisse de gares de triage désaffectées, d'entrepôts, d'anciennes usines à gaz, ces hectares publics
ne sont pas cessibles en l'état. Quand ils ne sont pas inaliénables, comme les 985 hectares constructibles
qu'Aéroports de Paris (ADP) gère et aménage grâce à une AOT, une autorisation d'occupation temporaire
du domaine public, délivrée pour soixante-dix ans au maximum.
En accord avec les communes sur lesquelles ses terrains sont implantés, l'Etat doit d'abord les déclasser
et les réintégrer au plan d'occupation des sols en leur inventant un nouvel usage (espaces verts, zone
d'activité, ZAC...). La procédure est longue, complexe et suppose de multiples négociations avec des
maires, pressés de récupérer, en dépensant le moins possible, des emplacements intéressants pour des
opérations immobilières. Elle est menée aujourd'hui par des structures que des établissements, comme
la SNCF, la RATP, EDF ou GDF, entre autres, ont mises en place.
H4 Valorisation (EDF), Espaces Ferroviaires, la Société Foncière et Immobilière du Gaz (SFIG), sont des
filiales qui achètent les terrains de leur société mère, parfois en concurrence avec d'autres promoteurs.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 66
A elles, ensuite, de viabiliser ces hectares, de financer des études d'aménagement, de mener la
discussion avec la collectivité locale pour les revendre au meilleur prix. « Nos objectifs annuels varient
évidemment en fonction des prix du marché, explique Jean-Pierre Pronost, directeur de l'aménagement
à la SNCF, mais les contrats de plan signés avec l'Etat indiquent les ordres de grandeur : 600 millions à
tirer des ventes, 800 millions des concessions et des revenus des loyers. Cela paraît négligeable pour un
chiffre d'affaires de 57 milliards de francs, beaucoup moins par rapport à l'excédent brut d'exploitation qui
est de 7 milliards. »
Jusqu'à la promotion
La Poste, par le biais de sa toute jeune direction nationale de l'immobilier, a cédé en 1993 pour 300
millions d'actifs. Objectif : de 400 à 500 millions au cours des trois prochaines années. Ce « service à
compétences nationales », qui n'est pas une filiale, ne vend rien sans avoir étudié et créé au préalable
des droits à construire. Mais il refuse pour l'instant d'aller plus loin. H4 ou Espaces Ferroviaires, de leur
côté, vont jusqu'à la promotion ou la copromotion et la commercialisation, avec deux avantages évidents
sur des sociétés immobilières privées : un portage foncier nul et une très bonne connaissance des
terrains, comme du fonctionnement du propriétaire.
Soucieux d'une bonne gestion sur tout le territoire, les établissements publics commencent également à
imposer à leurs directions régionales une politique de loyers internes. « Pour l'instant, les frais
d'amortissement qui sont pris en charge par les chefs d'unité d'exploitation ne reflètent absolument pas
la valeur patrimoniale du bâti, souligne Daniel Paccoud, directeur de la SFIG. Ils sont voisins de zéro
dans l'ancien, chers dans le neuf. A partir de janvier 1995, un loyer sera calculé en fonction de la valeur
actualisée au prix du marché des mètres carrés utiles. Il s'agit évidemment de flux internes mais qui
permettront aux directions régionales de décider seules de se regrouper sur moins de mètres carrés pour
faire des économies. »
L'inertie n'est pas forcément un frein
Les administrations n'en sont pas encore là. Globalement, la tendance est plutôt au resserrement des
effectifs (- 1,5 % par an dans la fonction publique) et à la rationalisation de l'occupation des surfaces.
L'Université s'étend (et vient de racheter 19.000 mètres carrés à IBM à Boulogne), l'Assistance Publique-
Hôpitaux de Paris manque de place et construit des logements pour son personnel dès qu'elle parvient à
dégager des réserves foncières. A ces deux exceptions près, les organismes publics, lorsqu'ils le peuvent,
essaient plutôt de regrouper leurs implantations et de s'inventer une gestion. Mais leur mission s'arrête
le plus souvent là où commence le risque. Et la plupart n'ont même pas encore atteint la première étape,
celle de l'inventaire, sans parler des outils de valorisation : une stratégie et des spécialistes pour
l'appliquer.
La question ne se pose même pas pour certains, comme la Justice, dont 80 % du parc est « à usage
indéfini », ayant donc tous les droits du propriétaire sauf la vente. Les Armées, dont la restructuration
implique la cession de terrains militaires immenses, sont allées plus loin mais pas jusqu'à l'aménagement.
Et il n'est pas si fréquent qu'une société d'économie mixte ou même une ville soit prête à acheter en bloc
plusieurs centaines d'hectares dont il faudra ensuite financer la transformation. « C'est aussi un manque
à gagner pour l'Etat qui est obligé de vendre à bas prix, ajoute Alain Villaret, chef de la mission pour la
réalisation des actifs immobiliers au ministère de la Défense. Mais, pour l'instant, ni l'aménagement ni la
promotion ne sont envisagés. Les établissements publics peuvent mettre en place des filiales. Pour les
administrations, c'est plus compliqué. »
Jusqu'à il y a peu, celles-ci n'avaient d'ailleurs aucun intérêt à aller se loger ailleurs, mieux ou moins cher.
C'est seulement depuis la circulaire Cresson de février 1992 qu'elles sont autorisées à réintégrer dans
leur budget propre 90 % de la recette d'une cession immobilière. Avant cette date, l'argent retournait dans
les caisses de l'Etat qui décidait de sa nouvelle affectation.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 67
« Aujourd'hui, la circulaire est appliquée dans le cas de transactions public-privé , explique Michel Malieu-
Lassus, chef du service des opérations fiscales et foncières à la DGI. En cas de transfert d'une
administration à l'autre, en revanche, la recette n'est pas immédiatement réaffectée. »
Les opérations à tiroirs - un organisme remplacé par un autre qui laisse à son tour des locaux vides - sont
pourtant les plus fréquentes. Et, dans l'autre cas, les grands et beaux immeubles classés dans la
catégorie " locaux administratifs ", qu'ils soient fonctionnels ou non, se vendent nettement moins cher que
des bureaux commerciaux, la décote variant de 10 à 30 %, selon les arrondissements, à Paris. Là aussi,
il faut donc prévoir un nouvel usage (du logement, par exemple, comme sur les terrains libérés à Paris
par la SNCF et la RATP) et inclure les études dans les coûts de la transaction.
Heureusement l'administration jouit quand même d'un avantage en temps de crise : son inertie. « En
période de hausse forte, l'Etat ratait toutes les bonnes affaires car les arbitrages, qui remontent parfois
jusqu'à Matignon, prenaient trop de temps. Au contraire, aujourd'hui, l'Etat propriétaire peut patienter,
peut négocier ; en attendant, il ne paie rien » , explique Georges du Halgouet.
Stratégie propre à chaque ministère, outils différents ou inexistants... C'est, entre autres, contre ce
manque de cohérence que s'élève le rapport Picq sur la modernisation de l'Etat, en prônant la création
d'une " direction des politiques immobilières " rattachée à Bercy. Elle pourrait se charger de la valorisation
du patrimoine administratif, en ne se cantonnant pas au rôle d'expert des Domaines. En revanche, elle
laisserait aux établissements publics toute latitude de gestion, en accord avec les contrats d'objectifs
pluriannuels passés avec l'Etat.
Peser sur le marché
Cette solution ne déplairait sûrement pas aux directeurs de filiales ou de départements immobiliers qui
se réunissent régulièrement en un « club de l'immobilier public » : ce club leur permet d'analyser des
opérations et des stratégies tout en se refusant le rôle d'un groupe de pression. Vu le nombre de mètres
carrés que cette association très informelle représente, elle pourrait peser sur le marché. Chacun de ces
grands propriétaires souhaite, en fait, pouvoir - indépendamment de la tutelle commune, l'Etat - décider
de sa politique et de sa rentabilité. Reste à savoir pour quel réinvestissement.
La valorisation du patrimoine permet de dégager des revenus, de financer des projets, d'équilibrer des
comptes. On voit déjà se développer, notamment par le biais de sociétés d'HLM, des opérations de
construction. S'il paraît logique qu'ADP se diversifie vers l'immobilier, quelle légitimité la SNCF, GDF ou
EDF auraient-ils à développer la promotion ? Sans doute pour « sauver » des biens publics qu'il n'est pas
plus légitime de laisser à l'abandon. Mais est-ce là le métier de ces grands établissements ?
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 68
Les Echos supplément immobilier ? Premières réalisations et beaucoup de projets : recyclage des
bureaux en logements : le doute
Jeudi 22 septembre 1994
Des projets de plus en plus nombreux, des opérateurs qui se laissent convaincre, un ministre décidé à
aller de l'avant : l'idée de transformer des bureaux en logements entre peu à peu dans les esprits et dans
les faits. Mais le scepticisme domine toujours chez les opérateurs. Etat des réflexions une semaine après
la publication du rapport Darmon.
« Quand il n'est plus possible de louer un bureau à plus de 1.400 francs le mètre carré par an, il vaut
mieux le transformer en logement. » Samir Rayess, le patron d'UFFI, un « poids lourd » de l'immobilier
avec un parc géré de plus de 5 millions de mètres carrés de bureaux, a décidé de franchir le pas. Son
projet - créer 48 logements PLA ou PLI dans un ancien immeuble de bureaux à Chatou (Yvelines) - a
d'ailleurs été primé cet été par le plan construction et architecture (PCA). Avec, comme principaux
arguments : l'écart de loyer entre logement et bureau s'atténue, la demande des entreprises se concentre
sur le neuf et les centres-villes.
Devenus obsolètes, de petits immeubles d'entreprise situés en périphérie se découvrent ainsi une
nouvelle vocation. A Vaucresson (Hauts-de-Seine), le cabinet d'architectes 2AD propose la mutation de
3.500 m2 de bureaux en une cinquantaine de logements locatifs. « Le cadre résidentiel, entouré
d'espaces verts, encourage cette opération », dit un des concepteurs, qui ajoute que le projet revient
« 25% moins cher que la construction neuve ». A Rouen, en plein centre-ville cette fois, la Caisse
régionale d'assurance-maladie a réalisé 142 logements d'étudiant dans un immeuble de bureaux, avec
une subvention de la ville (2 millions de francs). L'ensemble sera inauguré le 1er octobre prochain.
De telles expériences se multiplient aujourd'hui avec la bénédiction du PCA qui peut financer les études
de faisabilité (jusqu'à 40.000 francs). Leur aspect expérimental l'emporte encore souvent sur leur viabilité
économique. Qu'importe : jusqu'à présent, les projets recensés n'émanaient que de la Régie Immobilière
de la Ville de Paris (RIVP), qui bénéficie de prêts intéressants de la mairie (Les Echos Immobilier du 21
avril). Seuls les pouvoirs publics croyaient vraiment aux vertus de ces transformations, à la fois pour
résorber les stocks de bureaux vides et pour résoudre la crise du logement.
800.000 m2 à transformer en dix ans
Dorénavant les professionnels de l'immobilier suivent de près ces initiatives, tout en gardant l'oeil rivé sur
leur calculette. La rentabilité d'abord. De ce point de vue, Auguste-Thouard est sans doute l'un des
premiers à envisager sérieusement la question. La transformation de bureaux en logements, notamment
à Paris, devient économiquement intéressante, juge ainsi Jean-Marie Forestier, président du directoire
d'Habitat Foncier (ATHF), filiale du groupe. Car, après des baisses importantes, le prix des bureaux se
retrouve aujourd'hui au niveau et parfois même en dessous de celui des logements. " Le loyer moyen
d'un appartement parisien est de l'ordre de 1.200 francs/m 2 /an, et celui d'un bureau s'en rapproche " ,
précise Jean-Marie Forestier.
La valeur vénale des bureaux de la capitale tend elle-même à devenir inférieure à celle des logements,
ajoute-t-il. Et de citer l'exemple de l'opération réalisée récemment par le Sultan de Brunei, qui vient de
racheter les anciens bureaux d'IBM, place Vendôme, une des adresses les plus cotées de Paris, pour en
faire des appartements. Une opération de prestige uniquement ? Elle révèle cependant un nouvel état
d'esprit de la part des acteurs du marché.
Le gouvernement milite en ce sens, au nom d'un « impératif économique et social » à assumer d'urgence.
On ne peut en effet opposer indéfiniment 4 millions de mal-logés à 5 millions de mètres carrés de bureaux
vides en région parisienne. Un chiffre donné la semaine dernière, lors de la présentation du rapport
Darmon, est éloquent : la valeur vénale du parc de bureaux parisiens s'élève à 800 milliards de francs.
Toute mesure à même de rééquilibrer le marché et donc de limiter la baisse de cette valeur (une décote
de 20 % « pèse » 160 milliards) est bienvenue...
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 69
Un premier coup de pouce a été donné dans la loi Habitat adoptée en juillet dernier. Désormais, il est
impossible de revenir pendant treize ans à l'affectation primitive d'un bureau transformé en logement,
sans autorisation préfectorale. La loi accorde également une réduction d'impôts pour investissement
locatif (réduction Méhaignerie représentant 10 % du prix de l'acquisition dans la limite de 30.000 francs
pour un célibataire, le double pour un couple marié, à étaler sur deux ans), sous réserve que l'opération
soit réalisée avant fin 1997.
Une rentabilité incertaine
Il y a tout juste un an, la Ville de Paris s'était, elle aussi, engagée en faveur des transformations. Les élus
avaient alors décidé, dans le cadre de l'élaboration du nouveau plan d'occupation des sols (POS),
d'exonérer ces opérations de l'obligation de créer des places de stationnement. En attendant, la
compensation financière à verser en cas de non-réalisation des parkings a été ramenée de 50.000 francs
au montant symbolique de 10 francs.
Le rapport Darmon va plus loin. Pour transformer 800.000 m2 de bureaux en Ile-de-France en dix ans, le
document propose une série de simplifications administratives et d'incitations financières. Une prime de
1.000 francs par mètre carré transformé, plafonnée à 60.000 francs, va ainsi être prochainement soumise
au législateur : en quelque sorte, un dispositif semblable à la « prime d'arrachage » accordée aux
viticulteurs. Le document suggère que ces opérations bénéficient également des mêmes droits que la
construction de logements classiques (accès aux prêts, avantages fiscaux).
En dépit de ces avancées, le scepticisme reste de règle parmi les opérateurs immobiliers. Echaudés par
la crise immobilière, banquiers et investisseurs institutionnels n'apparaissent guère pressés de se lancer
dans l'aventure ; au bout de leurs comptes, la rentabilité ne paraît pas garantie sur facture. C'est qu'en
termes de revenus annuels de location les appartements ne l'emportent toujours pas sur les bureaux à
Paris. Avec une moyenne de 100 francs/m2/mois pour la location d'un appartement, soit 1.200
francs/m2/an, on est encore loin des 2.000 francs que peut rapporter en moyenne un mètre carré de
bureau. « Sans compter les charges qui pèsent sur les propriétaires de logements, soit une perte
supplémentaire de 20% » , souligne Michel Pariat, directeur du département des investissements à l'UAP.
Parcours du combattant
S'y ajoute le fait qu'un immeuble de bureau, moins cher à l'achat, sera plus rapidement rentabilisé que
son équivalent destiné à l'habitation. Patrick Dallemagne, de la Fédération nationale de l'immobilier
(FNAIM), faisait récemment état d'une étude démontrant que la rentabilité locative brute d'un bureau
(7,5% à 8 %) restait très largement supérieure, de l'ordre de 60 %, à celle du logement dit du « secteur
libre » (5 % à 5,5 %). « Transformer un bureau en logement revient à diviser par deux ou trois la rentabilité
nette et à perdre sur la valeur vénale du bien » , concluait l'expert.
Résultat : à Paris, mises à part les opérations de la ville, les seuls grandes transformations de bureaux
en logement ne se font souvent que par le jeu des compensations. La Société Générale a ainsi entrepris
la reconversion de 5.000 m2 de bureaux en 76 logements dans le 16e et le 9e arrondissements, en
échange d'une surface équivalente au Trocadéro pour un centre tertiaire. Mais les surcoûts sont
importants. De 6.000 francs le mètre carré pour une construction traditionnelle, on passe en effet
couramment à 10.000 francs pour une réhabilitation, en raison notamment de la hauteur des plafonds.
Sachant que les appartements réalisés, d'une surface moyenne de 100 m2, ont, avec des loyers de
10.000 à 14.000 francs par mois, quelque difficulté à trouver preneur. Il est vrai que les résultats des
calculs économiques sont radicalement différents selon que l'on se situe dans les beaux quartiers
parisiens (la valeur du bureau y excède largement celle du logement) ou dans la périphérie de la capitale,
voire en province.
Incertaine, la transformation requiert en outre des trésors d'énergie. Un véritable parcours du combattant !
Des règlements de copropriété à modifier en cas d'immeubles mixtes, au problème du non-
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 70
remboursement des taxes sur les bureaux amenés à disparaître, le chemin est semé d'embûches
administratives. Entre les déclarations d'intention et la réalité, le fossé peut être important. Aucune
réponse n'a enfin été apportée à la demande de remboursement de la TVA, lors de travaux de
transformation, sujet de préoccupation souvent exprimé par les opérateurs.
Bien que convaincu des atouts de la formule, qui permet de contourner l'écueil du foncier, le président de
la Fédération nationale du bâtiment, Jean Domange, juge que la transformation de bureaux en logements
« ne va pas bouleverser le paysage de l'immobilier ». « Il faut laisser le marché évoluer de lui-même,
conclut de son côté Alain Lambolley, président de la Sogeprom, filiale de promotion de la Société
Générale. Les beaux immeubles garderont leur destination, alors que les mal fichus redeviendront, selon
les cas, bureaux ou logements. » Le débat entre les adeptes de la transformation et les sceptiques a
encore de beaux jours devant lui.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 71
Les Echos ? De Charette se prononce pour une loi d'orientation sur le logement
Mercredi 7 décembre 1994
Devant les reproches des agents immobiliers qui se plaignent des maigres avancées en matière de
fiscalité du logement, le ministre, Hervé de Charette, a estimé que la meilleure façon d'avancer serait de
voter une loi d'orientation sur le logement et l'immobilier, fixant des objectifs à moyen terme.
Devant la stagnation du marché immobilier, les agents immobiliers réunis à l'occasion du congrès annuel
de leur fédération, la FNAIM, ont une nouvelle fois souligné les oublis des politiques du logement
consécutives. Ces spécialistes du logement ancien se sentent mal aimés par les gouvernements
successifs, qui se penchent, selon eux, toujours sur le sort de la construction et donc du logement neuf
et rarement sur le parc ancien.
Tout en dénonçant un projet de loi pour 1995 « maigre en dispositions véritablement avantageuses pour
le logement ancien », Yves Boussard, président de la FNAIM, a rappelé dans son discours de clôture que
« les Français accèdent à la propriété en majorité dans le logement ancien, que l'ancien génère une
activité qui a permis aux entreprises de survivre entre 1990 et 1994 et qu'une partie croissante des achats
dans le neuf résulte de la vente d'un logement ancien ».
Tout en reconnaissant que la conjoncture immobilière était entrée dans une phase de « tassement
conjoncturel », le ministre du Logement, Hervé de Charette, a déclaré qu'il y avait quand même eu une
reprise générale, même modérée. Il a néanmoins reconnu que l'état des finances publiques ne lui avait
pas permis d'adopter autant de mesures que celles promises, comme, par exemple, l'augmentation de la
déduction forfaitaire sur les revenus fonciers. Afin que « l'année 1995 ne soit pas une année perdue pour
l'immobilier », en raison de l'attentisme provoqué par l'approche de l'élection présidentielle, il s'est
prononcé en faveur d'une « loi d'orientation sur le logement et l'immobilier ». Une telle loi permettrait,
selon lui, de tordre le cou à deux idées fausses largement répandues dans l'administration, selon
lesquelles la France dépense trop pour le logement et dispose d'une fiscalité immobilière satisfaisante.
Des petits pas en faveur de l'ancien
A propos du logement ancien, il a énuméré les petits pas faits en faveur du secteur. En critiquant d'abord,
une nouvelle fois, l'absence d'intérêt des grandes banques de dépôt pour le PAS (prêt d'accession
sociale), un type de prêt aidé qui prend un réel essor actuellement et qui est utilisé à 90 % pour l'achat
d'un logement ancien. Il a rappelé les diverses mesures fiscales inclues dans la loi de Finances 1995,
l'augmentation du budget de l'ANAH (Agence nationale d'amélioration de l'habitat), qui aura distribué
cette année 2,75 milliards de francs de subventions, et rappelé que le Sénat avait voté la prolongation
jusqu'au 30 juin 1995 de l'exonération de l'impôt sur les plus-values des Sicav réinvesties dans
l'immobilier.
Actuellement, le ministère continue à explorer ce qui peut être fait pour remettre sur le marché des
logements vacants, tandis qu'il espère pouvoir bientôt mettre en oeuvre une mesure préconisée par le
rapport Darmon sur la transformation de bureaux en logements. Grâce au Fonds d'aménagement de la
Région Ile-de-France (FARIF), le ministère du Logement estime qu'il est possible de subventionner la
transformation de bureaux en logements en région parisienne, à concurrence d'environ 1.000 francs par
mètre carré.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 73
A8 Création d?une « bourse des droits à construire » régionale
1. CONSTAT
La transformation d?un actif tertiaire obsolète / vacant en un ensemble mixte ou résidentiel se heurte à
des freins structurels et techniques générateurs de surcoûts conséquents et à des pertes de surfaces
habitables (plans non optimisés et contraintes fonctionnelles) destructrices de valeur, à des contraintes
administratives (PLU/ PLUi non compatibles) et à des oppositions politiques susceptibles de rallonger les
durées de portage et donc d?augmenter les coûts afférents. Il est donc nécessaire de proposer aux
foncières et aux opérateurs des systèmes de compensation incitatifs, qui ne pèsent pas pour autant sur
la dépense publique.
2. PROPOSITION : METTRE EN PLACE UN SYSTEME DE « BOURSE DE DROITS A CONSTRUIRE »
- L?éligibilité à ces droits à construire additionnels serait conditionnée à la réalisation d?une
opération de transformation de bureaux vacants en un ensemble mixte ou résidentiel.
- Ces droits à construire additionnels seraient calculés sur la base du bilan de l?opération de
transformation pour permettre de l?équilibrer.
- Ils pourraient être déployés sur site, si l?actif et le PLU permettent une surélévation ou une
densification, ou hors site pour fluidifier le marché et démultiplier les opportunités. Ils pourraient
également s?échanger et se valoriser, sur le principe des certificats d?économies d?énergie ou encore de
la commercialité.
- Pour que ce dispositif soit réellement incitatif, il faut sécuriser les opérateurs sur l?effectivité de
cette compensation, avec un modèle contractuel robuste et une temporalité maîtrisée.
- Pour cette raison, il nous semblerait intéressant de territorialiser cette bourse à la bonne échelle :
cette bourse pourrait, dans un 1er temps, s?organiser en partenariat avec l?EPF IdF ou GPA.
- A titre d?exemple, grâce à ce mécanisme, un opérateur pourrait réaliser une opération de
reconversion de bureaux vacants en résidence étudiante dans une commune d?Ile-de-France, grâce à
l?octroi, en gré à gré, de xxx m² de constructibilité sur un foncier maîtrisé par l?EPF IdF, potentiellement
dans une autre commune, lui permettant de trouver un équilibre économique à l?échelle de ces deux
opérations : c?est ainsi à la fois la transformation des actifs obsolètes et la construction de logements
neufs qui seraient encouragées.
3. AVANTAGES
? Ce dispositif permet de fluidifier le marché de la transformation, en élargissant la compensation à
d?autres territoires, si l?actif transformé ne peut pas être densifié ou surélevé.
? Ce dispositif n?induit pas de dépenses publiques.
? Les droits à construire de compensation constituent un effet de levier supplémentaire en faveur de la
construction de logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 75
A9. Hypothèses financières sur 4 ans 2025/2028
« Je ne crois qu?aux statistiques que j?ai moi-même falsifiées. »
Winston Churchill
Evolution de l'assiette utile (nationale)
DU
RE
E
DE
V
AC
AN
CE
Année n Année n+1 Année n+2 Année n+3
(2025)
(2026)
(2027)
(2028)
m2 vacants 6M 7M 8M 9M
m2 vacants >24 mois 3M 3,5M 4M 4,5M
m2 vacants >36 mois 2M 2,5M 3M 3,5M
m2 vacants >48 mois
PR
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CE
Année n Année n+1 Année n+2 Année n+3
(2025)
(2026)
(2027)
(2028)
> 24 mois 10M¤ 10M¤ 10M¤ 10M¤
> 36 mois 30M¤ 37,5M¤ 45M¤ 52,5M¤
> 48 mois
TOTAL 40M¤ 47,5M¤ 55M¤ 62,5M¤
TOTAL GENERAL COLLECTE 205 M¤, majoré par le franchissement des seuils, minoré par
(4 ans) les suspensions pour projets déposés
Dont : 100M¤ reversés aux collectivités locales
100M¤ consacrés aux crédits d'impôts
Travaux de transformation : 6Md¤ à 10Md¤
Logements créés : 25 000 (150k¤ de travaux par logement pour 50m2 de surface moyenne)
Potentiel de transformation global : 12 000 / 15 000 par an
(bureaux + centres commerciaux + zones d'activités)
Surfaces de bureau transformées : 2 millions à 4 millions de m2
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 77
A10. Acteurs consultés
RAISON SOCIALE Prénom NOM
ACTION LOGEMENT Bruno ARCADIPANE
Nadia BOUYER
ALTAREA
Alain TARAVELLA
Jacques EHRMANN
Ronald SANNINO
AMUNDI IMMOBILIER Antoine AUBRY
Marc BERTRAND
APSYS Group M. BANSAY
ARKEA FLEX
Florent LEMAIRE
Alexis HAUSEMER
François-Xavier STEFANI
ASPIM
M. COLY
Mme DONNADIEU
Mme STOJANOVIC
ASSEMBLEE NATIONALE Romain DAUBIE
ACNF (Association Congrès des Notaires de France)
Sophie SABOT-BARCET
Marie-Hélène PERO
Xavier LIEVRE
ADHERENTS de l?ACNF
BNP PARIBAS // CARDIF
France ASSUREURS Nathalie ROBIN
BNP Real Estate
Thierry LAROUE-PONT
Olivier BOKOBZA
Séverine CHAPUS
Jean-Maxime JOUIS
CDC Eric LOMBARD
Kosta KRASTRIDINIS
CDC BANQUE DES TERRITOIRES Pierre LAURENT
Equipe universitaire de chercheurs
CDC HABITAT Thierry LAGET
Commission de surveillance CDC M. HONROYD
& MEMBRES
CGEDD M. DELORME
CITALLIOS Maurice SISSOKO
CLUB VILLE & AMENAGEMENT Eric BAZARD
CREDIT AGRICOLE IMMO Marc OPPENHEIM
DGFIP / DIE Alain RESPLANDY-BERNARD
DHUP / Financement
Sébastien DORLHIAC
Raphaël MONTAGNER
Maï-Caroline BULLIER
Sylvain BERGAMINI
DLF Laurent MARTEL
DRIHL Ile-de-France
Laurent BRESSON
Guillaume MANGIN
Frédéric ESNAULT
EGF-BTP Mme FRANCQUEVILLE
& ADHERENTS
EPF Occitanie Sophie LAFENETRE
EPA MARNE M. GIROMETTI
ETUDE NOTARIALE CHEUVREUX M. LEONETTI
Mme RAUNET
FEI iMMOBILIER
Maryse AULAGNON
Delphine CHARLES-PERONNE
& ADHERENTS
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 78
RAISON SOCIALE Prénom NOM
FFB
M. SALLERON
M. CHAPEAUX
M. CHENUET
M. BOUCAUX
FONCIERE FREY
Antoine FREY
M. BARBONI
M. LECOCQ
FPI M. BOULANGER
& ADHERENTS
FRANCE ASSUREURS M. TAFFIN
FTI Katelle LE GUILLOU
GRAND PARIS AMENAGEMENT M. de FAY
GRECAM M. GARNIER
GROUPAMA IMMOBILIER Mme WEILL
M. CUBIN
HELIOS FIDUCIE CAPITAL Jean-Philippe CLAVEL
ICAMAP Guillaume POITRINAL
Alexandre AQUIEN
JLL Raphaëlle BOUR
Rémi MOREL
KAREG Benoît LABAT
Personnalité qualifiée ex-LA FRANCAISE Xavier LEPINE
LA PLACE DE L?IMMOBILIER M. HEURTEUX
LE PATCHWORK Lucie PERRAUDIN
LINKCITY Laurent WARNIER
METROPOLE DE TOULOUSE Bertrand SERP
MIRABAUD Olivier SEUX
NEXITY Véronique BEDAGUE
NHOOD M. GROLIN
NOVAXIA M. AZAN
Mathieu DESCOUT
OMNES (fonds Invest.) Gonzague de TREMIOLLES
OPPIDEA Raphaël CATONNET
ORIE Smaïn AOUADJ
& MEMBRES
PARIS LA DEFENSE
M. GUICE
M. SCHOENTJES
Mme CRESTIN
PGIM Antoine TINCELIN
Préfecture Hauts-de-Seine M. HOTTIAUX
M. GAUCY
REDMAN Matthias NAVARRO
Réseau des EPFR Sophie LAFENETRE
& ADHERENTS
SCET Romain LUCAZEAU
Christophe LASNIER
SENAT M. MARSEILLE
Mme ESTROSI SASSONE
SOCIETE GENERALE IMMOBILIER M. GROVEN
SOCFIM Olivier COLONNA D?ISTRIA
SPL LYON PART-DIEU M. SAINTE FARE GARNOT
SURFACE + UTILE (association de l?ESS) M. CITRON
UNIBAIL-RODAMCO-WESTFIELD M. TRITANT
VILOGIA Philippe REMIGNON
Tristan BARRES
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 79
A11. Contributions des acteurs consultés
A11.1 Contribution d?Action Logement
A11.2 Contribution de l?ASPIM
A11.3 Contribution de CDC Habitat & Groupe Mirabaud
A11.4 Contribution du Consortium des Bureaux en France (CBF)
A11.5 Contribution de la Foncière FREY
A11.6 Contribution du GRECAM
A11.7 Contribution du KAREG
A11.8 Contribution d?un cabinet de conseil en immobilier d?entreprise
A11.9 Contribution de l?ORIE
A11.10 Contribution de « Surface + Utile » (acteur de l?Economie Sociale et Solidaire)
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 81
A11.1 : Contribution d?Action Logement
A. Fiche d?analyse dans la perspective de la lettre de mission du 14 mars 2024
La note d?Action Logement couvrant un vaste champ d?analyse et de propositions, les seules
observations mentionnées ci-après ne concernent que les dispositions les plus « impactantes » du point
de vue de ladite lettre de mission.
1. La principale réalisation d?Action Logement, à savoir la création de la Foncière de Transformation
immobilière (FTI) constitue une avancée considérable en soi, d?un triple point de vue :
- Il s?agit du premier véhicule institutionnel, à la différence des initiatives privées comparables :
NOVAXIA, KAREG, le Groupe Mirabaud, Omnes / Redman, etc.
- La FTI démontre, sous certaines conditions, la faisabilité d?opérations concrètes, quoiqu?en nombre
limité, et permet de mieux apprécier le potentiel de transformation d?actifs obsolètes, à partir des premiers
résultats enregistrés. Il convient néanmoins de souligner la part largement dominante des résidences
gérées pour étudiants, prise dans les réalisations et les projets, qui limite la portée de l?expérience.
- Elle illustre les limites actuelles du modèle non reproductible sur la base duquel elle opère : la
mobilisation de 500 millions d?euros de capital sans perspective assurée de rentabilisation, fût-ce à long
terme, ainsi que des quasi-fonds propres à hauteur de 300 millions d?euros, faiblement rémunérés ; un
horizon moyen de dénouement hypothétique à 57 ans.
En bref, le modèle expérimental (dans un cadre juridique préexistant) du bail à construction s?inscrit
dans le courant actuellement « porteur » (à divers titres) des « démembrements de propriété », sans qu?il
s?agisse, à proprement parler, d?une telle opération, mais plutôt d?une forme de « concession de
réalisation et d?exploitation d?un ouvrage d?intérêt public », mais dont la caractéristique principale tient à
la non-reproductibilité en dehors d?un environnement public (ou parapublic de par les ressources de la
PEEC) dont il n?est pas évident qu?il soit soutenable pour les finances publiques.
2. S?agissant des propositions de nature à susciter l?émergence d?une industrie de la transformation des
actifs immobiliers, outre des ajustements à la marge qui pourraient s?avérer fort utiles, ou de la création
de foncières de transformation que nul ne saurait récuser, la principale disposition mise à l?étude est
relative à la constitution d?un avantage fiscal au profit du vendeur d?actifs obsolètes, sous la forme d?un
crédit d?impôt correspondant, en valeur, à la taxe acquittée au titre de la détention desdits actifs au cours
des deux années précédentes, éventuellement étendue à la taxe d?aménagement acquitté par ledit
vendeur. Il est important de souligner que ce crédit d?impôt viendrait en déduction de l?imposition (à
hauteur de 19%) due au titre de la plus-value réalisée au titre de ladite transaction.
Cette mesure paraît pouvoir s?inscrire dans une démarche tendant à accélérer la cession d?actifs
obsolètes en vue de leur transformation. Toutefois, elle suscite trois objections majeures :
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 82
- Sa déclinaison au très important secteur des SCPI (60% des bureaux relevant du périmètre
« marchand »), s?agissant de véhicules opérant en transparence fiscale, est d?autant moins aisée à
concevoir qu?au-delà des personnes physiques, une part importante du capital desdites SCPI est détenu
par des personnes morales exemptées d?impôt ou bénéficiant d?un régime d?encadrement très favorable
(mutuelles, EPCI « fiscal » ?).
- Politiquement, il s?agit d?un avantage fiscal portant sur les plus-values réalisées lors de la cession de
l?actif de telle sorte qu?il est difficile de le justifier autrement que par une prime à la cession d?autant plus
recherchée que le prix de cession sera plus élevé, ce qui est exactement l?inverse de l?effet souhaité.
- Enfin, et c?est peut-être l?essentiel, alors qu?il s?agit d?inciter au réinvestissement d?avenir, d?abord en
conditionnant l?avantage fiscal à un niveau de charge foncière plafonné (c?est-à-dire de fait, à un prix de
cession ou de valorisation dans le cas d?une transformation opérée par le propriétaire de l?actif), le
dispositif fiscal proposé par Action Logement est tourné, non pas vers le réinvestissement d?avenir, mais
vers le désinvestissement portant sur des choix hasardeux opérés dans le passé. Il est donc difficile de
justifier ce dispositif dans une perspective de relance.
Conclusion
L?expérience d?Action Logement est utile et éclairante quant à la nécessité, pour construire un système
reproductible et soutenable (hors soutien fiscal et parafiscal) d?agir en amont de toute opération de
transformation sur la valorisation des actifs. Tel est l?objet de la démarche proposée au ministre, à travers,
d?une part, le plafond de charge foncière conditionnant l?accès à l?avantage fiscal et d?autre part, la
surfiscalisation des bureaux vacants, à partir de modalités à préciser, qui pourraient découler d?une
obligation déclarative. Elle s?inscrit dès lors dans la suite de maintes innovations introduites par Action
Logement, s?agissant par exemple de la constitution de l?Association Foncière Logement qui a ouvert la
voie au logement intermédiaire institutionnel (LII) ou de l?organisme national de vente qui a permis
d?accélérer l?accession dans le parc social, sans dégrader les comptes des OLS bénéficiaires.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 83
B. Contribution d?Action Logement
« Les secteurs tendus en offre de logements souffrent tout à la fois d?un manque de logements
disponibles et d?une vacance importante des immeubles de bureaux, principalement dus à l?essor du
télétravail déclenché par la crise sanitaire de 2020. En effet, alors que la demande de logements
abordables ne fait qu?augmenter (la vacance locative est estimée à 24% du parc marchand en 1ère
couronne), plus de 4,9 millions de mètres carrés de bureaux seraient vacants en Île-de-France, dont la
transformation permettrait la réalisation de 100 000 logements supplémentaires. En effet, plus de
417 000 m² de logements sont issus d?une transformation entre 2018 et 2020.
La transformation de bureaux en logements, et en particulier en logements abordables, pourrait
constituer, au moins partiellement, un remède à ces problématiques, tout en répondant à l?enjeu de
transition écologique.
Dans ce cadre, le Groupe Action Logement a créé la Foncière de Transformation immobilière (FTI) en
juillet 2020. Elle facilite la réalisation d?opérations de transformation, dans des zones où la tension
foncière rend plus difficile l?équilibre des opérations à caractère social. Spécialisée dans l'acquisition
d'actifs économiques obsolètes dans toute la France, cette filiale contribue à la production d?une nouvelle
offre de logements abordables, durables et pérennes.
Cette expertise du Groupe le conduit à soutenir la proposition de loi soumise à l?examen du Parlement.
Ces mesures gagneraient à être enrichies par une mesure fiscale nouvelle incitative pour libérer le
potentiel de transformation.
Cette note vise à apporter une contribution à Monsieur André Yché, chargé par le ministre du
Logement d?accompagner l?émergence d?une industrie de la transformation des actifs immobiliers en voie
d?obsolescence à la suite de la rencontre du 18 avril 2024.
1. Une filiale dédiée à la transformation au sein du Groupe Action Logement
1.1. Raison d?être et positionnement de la Foncière de transformation immobilière
La FTI assure le portage puis le démembrement à long terme des biens acquis transformés au profit
des bailleurs de logement abordable, tant sociaux qu?intermédiaires, et potentiellement, la cession de ce
patrimoine à l?issue du démembrement. Par ailleurs, l?investissement par la FTI dans une période de
correction forte des valeurs d?actif crée de la valeur sur le moyen-terme. La FTI joue un rôle actif dans la
décarbonation et la sobriété énergétique, en reconstruisant la ville sur la ville et en renforçant le lien
emploi-logement.
En tant qu'entreprise à impact, la FTI se distingue par son expertise, son agilité et son ingénierie
innovante. Son modèle unique de portage foncier et de démembrement s?inscrit sur le long terme grâce
au bail à construction. Forte de l'expertise de ses équipes et de la synergie avec ses partenaires, des
acteurs locaux de l?immobilier et des décideurs publics, la FTI relève les défis de la régénération urbaine
en répondant aux impératifs citoyens, réglementaires, environnementaux et financiers. La FTI est
spécialisée dans la revalorisation d'actifs professionnels souvent vides et vétustes, présentant diverses
formes d'obsolescence : technique et/ou commerciale.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 84
Chiffres clés au 31/12/2023 :
49 opérations engagées, soit 4 573 logements,
7 opérations avec un permis de construire obtenu ou purgé soit 655 logements,
12 opérations en chantier soit 735 logements,
4 opérations livrées soit 683 logements.
? Une vision de la transformation des immeubles : de l'inoccupation à la valorisation durable
En tant que foncière, la FTI met en oeuvre son expertise en matière d?ingénierie foncière pour favoriser
la transformation des immeubles afin de limiter les déchets et favoriser l?économie de matière. Le recours
à la déconstruction peut être décidé pour favoriser une densité ou à l?issue d?un arbitrage économique lié
à la cherté des coûts de transformation (en raison des caractéristiques techniques du bâtiment).
Un large potentiel d?actifs à transformer est proposé : Immeubles de bureaux, Friches avec ateliers,
Locaux d?activités, Garages, Hôtels, EPHAD, Centres hospitaliers et cliniques, Établissements scolaires,
Entrepôts, etc.
? Un engagement pour le logement partout en France accentuée dans les zones tendues où
le besoin en logement est une priorité :
En travaillant en étroite collaboration avec les décideurs publics locaux, la FTI contribue de manière
durable à la préservation de l?attractivité des territoires en proposant des logements et des services au
plus proche des zones d?emploi, en particulier dans les régions où les tensions foncières sont élevées.
Elle les accompagne pour développer leur parc pour faciliter l'accès au logement et favoriser l'emploi sur
les territoires. Sa dynamique opérationnelle s?applique aux centres-villes, aux quartiers d?affaires et aux
zones économiques desservies par les transports. La FTI reçoit plusieurs centaines de propositions
d?investissement par an, ce qui implique une méthode de sélection efficace. Pour entrer dans le « vivier
» des opérations que la FTI étudiera, les projets doivent satisfaire à un nombre de critères cumulatifs. La
répartition géographique des opérations de la FTI est la suivante : 70% en Île-de-France, 30% dans les
autres régions dont la Nouvelle-Aquitaine, Provence-Alpes-Côte-d'Azur, les Hauts-de-France, l?Occitanie
et le Grand-Est.
1.2. Un modèle économique novateur et vertueux, aux ressources contraintes, pour répondre à un objectif
déterminé :
? Une approche novatrice en matière d'ingénierie
Le modèle repose sur le principe de la dissociation foncière, également appelé "démembrement". Ce
modèle, basé sur un bail à long terme est dédié à tous les opérateurs de logement social ou intermédiaire
(Groupe et hors Groupe Action Logement). La FTI a développé une ingénierie foncière au profit des
opérateurs du logement, qui assurent distinctement d?une part, la maîtrise d'ouvrage des opérations de
transformation et d?autre part, la gestion des logements.
Dans une approche partenariale dès l'amont, elle conçoit le montage juridique et foncier puis du
démembrement en respect de l?équilibre économique des investissements des bailleurs, tout en veillant
à favoriser la mixité sociale et fonctionnelle. La FTI vend également une partie de ses droits à construire
à des opérateurs privés pour la production de logements économiques, accession.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 85
La FTI recherche une mixité programmatique, sociale et fonctionnelle, en développant la production
nécessaire aux attentes des locataires, des propriétaires et des riverains :
- Logements locatifs sociaux familiaux ou résidences gérées,
- Logements locatifs intermédiaires ou résidences gérées,
- Accession à la propriété (social ? libre - bail réel solidaire),
- Création de bureaux, d'espaces de coworking complémentaires,
- Locaux d'activités et commerces complémentaires.
? Un modèle économique reposant sur l?investissement et des retours d?actifs à long terme
La FTI a mis en place un modèle économique propre reposant sur l?acquisition de biens professionnels
répondant en cible à un certain nombre de critères (voir encadré ci-dessous). La transformation en
logements locatifs sociaux et intermédiaires est assurée par un opérateur, en général bailleur social ou
promoteurs, signataires avec la FTI d?un bail à construction. Afin d?assurer la soutenabilité financière de
l?opération, la FTI assure le portage foncier jusqu?à l?obtention des autorisations d?urbanisme puis un
portage secondaire à long terme au bénéfice des bailleurs LLS et LLI, soit en moyenne 57 ans. Durant
ce portage, une redevance annuelle, à la charge du preneur à bail, rémunère la FTI. Celle-ci est estimée
en vue de couvrir 50% en moyenne de la charge foncière, sa perception intervenant au terme de deux
ans7 des travaux de transformation. Enfin, la cession du patrimoine intervient au terme du bail.
Critères de choix d?une opération
- des immeubles indépendants / des ensembles immobiliers / des portefeuilles d?actifs affectés à un
usage professionnel (bureaux, activités, commerces?), obsolescents ou obsolètes sur leur marché,
- présentant des caractéristiques techniques permettant la transformation,
- des immeubles vacants au jour de la vente ou dont la libération est programmée à 2-3 ans,
- situés en France entière, dans les zones urbaines résidentielles tendues (A bis, A, B1), bien
desservies
- éligibles au changement d?usage en habitation (PLU, équipements) ou à des évolutions du PLU
convenues avec les décideurs locaux (accord préalable à toute acquisition)
- d?une taille minimale de 3 500 m² SDP pour la part de logements abordables - sociaux ou
intermédiaires,
- détenus de préférence en pleine propriété par un monopropriétaire vendeur (ou lot(s) de volume).
La part de logements en accession réalisée au sein des opérations (20% en moyenne destinée à
l?accession) est cédée à l?opérateur, en général promoteur, à l?issue de la purge des autorisations
d?urbanisme, soit 2 à 3 ans.
Si ses produits d?exploitation sont en forte croissance depuis 2020, le résultat d?exploitation de la FTI
reste creusé par le volume d?acquisition nécessaire et le décalage de perception des redevances par
rapport aux investissements, au-delà du contexte d?inflation. Pour autant, une tendance à l?équilibre est
recherchée par la rentrée progressive des redevances, les cessions de patrimoine ainsi qu?un
développement marginal de l?usufruit locatif intermédiaire (ULI).
7 Estimation sur une opération type
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 86
? Des ressources dédiées constituées de fonds propres, dette long terme et dette bancaire
classique pour répondre à un objectif déterminé :
Dans le cadre actuel, Action Logement a doté la Foncière pour transformer 10 500 logements à horizon
fin 2028. Les ressources de la FTI sont les suivantes :
- 461 M¤ de fonds propres constitués par l?associé unique Action Logement immobilier ;
- 300 M¤ d?enveloppe de prêts long terme, bonifiés accordés par ALS ;
Par ailleurs, 80 M¤ d?enveloppe de prêt bancaire classique ont été souscrits auprès de la Caisse
d?Épargne Île-de-France.
? Des coûts de transformation élevés, justifiés par les externalités positives des projets ciblés
Les contraintes techniques particulières de la transformation sont nombreuses : l?année de
construction (présence d?amiante), les principes constructifs, l?épaisseur des bâtiments, la hauteur sous
plafond, la position des circulations dans l?immeuble et la nature de la façade sont autant d?inducteurs de
coûts à prendre en compte.
L?ambition de la performance environnementale (bâtimentaire et énergétique) souhaitée pour la
transformation (avance de phase) a également des impacts techniques et financiers sur le coût de la
transformation.
Voici quelques exemples de coûts pour des opérations en province, en grande et en petite couronne
francilienne :
- Metz (Résidence) : 5 823 259 ¤ HT (notification marché) soit 1 579¤HT en sdp et 3 222¤HT en shab
(atrium en verre)
- Combs (Résidence) : 5 849 529,52 ¤ HT (signature BAC) 1 884¤HT en sdp et 2 816¤HT en shab
- Suresnes (Résidence) : 50 Rouget de Lisle : 6 983 050 ¤ HT (VEFA) soit 2 227¤HT en sdp et 2 815¤HT
en shab
? Un opérateur fonctionnel qui mérite d?être soutenu
En synthèse, la FTI apporte donc une réponse opérationnelle et efficiente au besoin de transformation
de logements à l?appui d?une équipe structurée, de compétences dédiées, d?une technicité et d?une
ingénierie élevées, de standards d?exigence, d?une agilité des montages fonciers et de la force d?un
groupe immobilier comptant les ressources indispensables au pilotage de plus de 1 million de logements.
Par essence, le modèle de la FTI méritera d?être renforcé pour accompagner durablement la
transformation de locaux d?activité inoccupés en logements.
2. Des propositions visant à faciliter la transformation des bureaux en logements
2.1. Avis d?Action Logement sur la proposition de loi en faveur de la transformation des bureaux en
logements
Fort de l?expertise acquise en matière de transformation, le Groupe Action Logement a suivi la
proposition de loi lors de son examen par l?Assemblée nationale en mars 2024. Ses dispositions
désormais examinées au Sénat apportent des réponses éclairées et pragmatiques pour le secteur. Cette
proposition de loi marque une étape clé dans la généralisation de ces opérations en faveur du « choc de
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 87
l?offre » de logements. Le groupe Action Logement soutient ainsi la majorité des dispositions proposées
et peut commenter ainsi les articles retenus dans sa version déposée au Sénat.
? Dérogation au PLU - Article 1er :
La disposition porte sur la création d'un nouvel article L. 152-6-5 du CU et précise :
- La suppression de la limitation territoriale ;
- L?élargissement de la mesure aux locaux des administrations publiques ;
- La demande de dérogation est transmise, le cas échéant, à l'autorité compétente en matière de PLU.
En l'absence d'une délibération motivée de l'autorité compétente en matière de PLU, s'opposant à la
dérogation dans un délai de 3 mois à compter de la transmission de la demande, la dérogation est
accordée. La délibération d'opposition est motivée par les risques de nuisances auxquels le projet peut
être exposé, son accessibilité par les transports alternatifs à l'usage individuel de la voiture, son effet sur
la démographie scolaire au regard des écoles existantes ou en construction et ses objectifs de mixité
sociale et fonctionnelle.
- Si la compétence pour délivrer le PC a été déléguée à l'EPCI, la demande de dérogation est transmise
au maire de la commune de situation du projet. La dérogation ne peut être accordée en cas de délibération
contraire motivée du CM dans un délai de 2 mois.
Action Logement relève la pertinence de cette disposition ; il est toutefois notable que :
- la situation des locaux commerciaux non situés en rez-de-chaussée puisse poser question ;
- l'autorité en charge de délivrer le permis de construire semble liée par la délibération de l'autorité en
charge de l'élaboration du PLU qui peut s'opposer à la dérogation. Cela peut poser un risque de blocage
des projets.
Il est donc proposé de simplifier la mesure en supprimant toute demande d'accord de l'autorité
compétente en matière de PLU. À défaut, il pourrait être préconisé un retour au système de l'avis proposé
dans la version initiale8.
? Opérations soumises à la taxe d?aménagement (TA) - Article 2 :
La disposition porte sur :
- Les opérations de transformation de bureaux en logements qui ne sont pas des opérations
d'aménagement, construction, reconstruction et agrandissement (alinéa 1), donnant lieu au paiement de
la TA, par délibération prise par les communes, les EPCI à fiscalité propre, les départements et la région
IDF ayant institué la TA ;
- Par exception au droit commun, les délibérations visant à assujettir à la TA les opérations de
transformation de bureaux en logements peuvent être prises jusqu'au 31 décembre 2024 pour 2025
(alinéa 2).
8 Dérogation au PLU par l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire pour autoriser la destination d?habitation
pour les projets de transformation de bureaux en logements [?] Après avis de l'autorité compétente en matière de PLU, rendu
dans un délai de 3 mois. Avis réputé favorable passé ce délai.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 88
L?utilité de cette disposition pour les opérations de transformation de bureaux en logements, la TA est
instituée par délibération spéciale des territoires concernés. Toutefois, en pratique, il sera peut-être
difficile de réussir à distinguer les opérations de transformation des opérations de construction,
agrandissement et reconstruction.
? Assiette de la taxe d?aménagement (TA) - Article 3 :
La mesure prévoit un calcul de l'assiette de la TA à partir de la "surface transformée dans les
conditions prévues au dernier alinéa [alinéa 2] de l'article 1635 quater B". Action Logement souligne que
le dernier alinéa de l'article 1635 quater B du CGI prévoit que, « par dérogation au droit commun, les
délibérations visant à assujettir à la TA les opérations de transformation de bureaux en logements peuvent
être prises jusqu'au 31 décembre 2024 pour 2025. ».
Sur ce point, le texte gagnerait donc à être précisé par la Haute Assemblée : la nature du lien entre
l'assiette de la TA et la date exceptionnelle pour 2025 des délibérations instituant la TA pour les opérations
de transformation de bureaux en logements pourrait être clarifiée.
? Exonération de taxe sur les bureaux - Article 3 bis A (nouveau) :
La disposition prévoit l?ajout aux articles 231 ter et 231 quater V du CGI d'un nouveau cas
d'exonération de taxe sur les bureaux : l?exonération de la taxe sur les bureaux pour les locaux à usage
de bureaux qui font l'objet d'un projet de transformation en logements ayant fait l'objet d'un dépôt de
permis de construire au cours de l'année précédant la déclaration de la taxe.
La pertinence de cette disposition peut être soulignée à deux titres (avant et après acquisition). Les
locaux à usage de bureaux qui font l'objet d'un projet de transformation en logements sont exonérés de
taxe sur les bureaux dès lors qu'ils font l'objet d'une demande de permis de construire déposée au cours
de l'année précédant la déclaration de la taxe.
? Reversement aux communes membres du produit de la TA perçu par les EPCI - Article 3 bis
B (nouveau) :
La disposition prévoit un complément apporté à l'article 1379-0 bis, IX 3, du CGI : Pour les opérations
mentionnées à l'alinéa 2 de l'article 1635 quater B du CGI (opérations de transformation de bureaux en
logements), une délibération spéciale peut prévoir le reversement de tout ou partie de la TA par les EPCI
à leurs communes membres ou groupements de collectivités, compte tenu de la charge des équipements
publics relevant de leurs compétences.
Sans remettre en cause la pertinence de cette mesure, le renvoi à l'alinéa 2 de l'article 1635 quater B
du CGI pose question quant à la volonté de l'AN de cibler toutes les opérations de transformation de
bureaux en logements ou uniquement celles pour lesquelles la TA a été instituée pour l'année 2025
(alinéa 2 du CGI).
? Permis de construire multidestinations - Article 4 :
Cette mesure pertinente et utile, prévoit que dans une commune ou une partie de commune où une
délibération du CM ou de l'EPCI compétent en matière de PLU, prise sur avis conforme du CM de la
commune concernée, le permet, la demande de PC peut porter sur un projet de construction nouvelle
comportant plusieurs destinations possibles :
- Lorsqu'elle est saisie à cet effet par l'EPCI compétent en matière de PLU, la commune dispose d'un
délai de 3 mois pour émettre son avis. A défaut, celui-ci est réputé favorable.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 89
- Dans ce cas, le projet fait l'objet d'un arrêté de l'autorité compétente autorisant les différentes
destinations de la construction nouvelle / la mise en oeuvre de l'autorisation portant sur ces destinations
est insusceptible de modification ultérieure liée aux destinations de la construction / le PC autorise les
changements de destination ultérieurs entre les destinations autorisées sur le fondement des règles
d'urbanisme applicables à la date de sa délivrance.
- Le propriétaire informe de chaque changement de destination le maire de la commune et, le cas
échéant, l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme : soit lors du dépôt de l'autorisation
d'urbanisme nécessaire à la réalisation de la transformation, soit, si la transformation ne requiert pas
d'autorisation d'urbanisme, au moins 3 moins avant le changement effectif.
? Copropriétés et changement de destination des parties privatives en logements - Article 6 et 7 :
Ces dispositions utiles aux projets de transformation prévoient des compléments apportés à l'article 9
de la loi du 10 juillet 1965 :
- Un copropriétaire peut modifier librement la destination de ses parties privatives à usage de bureau
ou de local professionnel en habitation (lorsque le changement de destination ne contrevient pas à la
destination de l'immeuble prévue par le RCP) / il doit obtenir l'accord de l'AG statuant à la majorité simple
(majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par
correspondance) (lorsque le changement de destination contrevient à la destination de l'immeuble prévue
par le RCP).
- A peine de nullité de l'approbation de l'AG, le bénéfice de cette dérogation est conditionné à
l'occupation des logements ainsi créés à titre de résidence principale pour une durée d'au moins 3 ans à
compter de la réception des travaux permettant le changement de destination des locaux concernés.
- La modification de la répartition des charges induite par le changement de destination d'un local de
bureaux ou professionnel en habitation soumise au vote de l'AG à la majorité simple.
2.2. Autres pistes visant à favoriser la transformation
? Une mesure fiscale incitative en faveur de la transformation de bureaux en logements
Action Logement soutient une mesure destinée à accélérer la transformation en soutenant le modèle
économique sous-jacent. La proposition de loi débattue devant le Parlement tend à répondre aux enjeux
d?augmentation de la demande de logements abordables dans un secteur tendus en offre de logements.
Cependant, force est de constater que de nombreux investisseurs de bureaux demeurent encore réticents
à les vendre, préférant souvent les conserver en actifs surestimés à leur bilan, malgré des plus-values
immobilières imposées à l?impôt sur les sociétés au taux réduit de 19 % lorsque ces bureaux sont vendus
à des personnes morales qui s?engagent à les transformer en logements (210 F du Code général des
impôts). Afin d?accélérer la transformation de bureaux en logements abordables, il est proposé d?aller plus
loin et de renforcer l?article 3 bis A en créant une incitation fiscale temporaire, propre à la transformation
de bureaux en logements abordables.
La mesure fiscale prendrait la forme d'un crédit d'impôt sur les sociétés, limité dans le temps, d?un
montant égal à celui de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe annuelle sur les bureaux et
stationnements relatifs à l?immeuble et appelé pendant les deux années avant la vente, et, le cas échéant,
augmenté de 25% du montant de la taxe d?aménagement lorsque le vendeur s?est acquitté d?une telle
taxe.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 90
Représentant entre 2 et 3 % du prix de la vente, cet avantage permettrait de stimuler de telles ventes
tout en représentant un coût mesuré pour les finances publiques.
Il est par conséquent proposé de créer un nouvel article au sein du Code général des impôts. Au sein du
livre 1er, première partie, titre 1er, chapitre II, section V du Code général des impôts, après l?article 220
Z septies, il est proposé la création d?un nouvel article numéroté 220 Z octies.
En permettant la transformation de projets qui n?auraient pas abouti, cette disposition est génératrice
de recettes fiscales nettes pour l?État.
L?hypothèse suivante donne à voir une opération de transformation type. Le crédit d?impôt sur l?impôt
sur les sociétés équivaut aux différentes taxes (bureaux, stationnement et foncières) acquittées dans les
deux dernières années par le cédant. Le dispositif permet de réunir les parties, de telle sorte à provoquer
l?arbitrage du détenteur des actifs puis l?acquisition par un opérateur de la transformation. Compte tenu
des retours de TVA, basée sur une moyenne logement social / non-logement social de 8%, sur les travaux
d?une opération qui n?aurait pas été lancée, on constate que cette opération supplémentaire génère des
recettes supérieures au montant du crédit d?impôt pour l?État.
Ex : Issy-les-Moulineaux
TS (1 an / 2 ans) 12 350,00 ¤ 24 700,00 ¤
TB (1 an / 2 ans) 93 750,00 ¤ 187 500,00 ¤
TF (1 an / 2 ans) 111 060,00 ¤ 222 120,00 ¤
Crédit d'impôt IS 434 320,00 ¤
TVA sur travaux estimée 704 000,00 ¤
Gain net 269 680,00 ¤
? L?évolution de la taxe sur les bureaux pour financer les travaux de transformation
Selon l?annexe Voies et moyens du PLF 2024, la taxe sur les bureaux franciliens est aujourd?hui perçue
par la Société du Grand Paris (655 M¤ en 2023), le Fonds national des aides au logements (66,2 M¤ en
2023), la Région Île-de-France (212,9 M¤ en 2023 et 231,8 M¤ prévus en 2024) et le budget général (15
M¤ prévu en 2024). Dans les départements des Bouches-du-Rhône, du Var et des Alpes-Maritimes, elle
est affectée au financement de la ligne nouvelle Provence Côte d?Azur.
Avec 2,5% de hausse en 2024, les barèmes de la taxe recouvrent des montants de 25,31 ¤ du m²
pour les locaux à usage de bureaux de la première circonscription, en Île-de-France à 0,21¤ pour des
locaux de stockage de la région PACA.
L?absence d?application de la taxe pendant les travaux, dès lors qu?un permis de construire a été
déposé est une mesure positive. En ce sens, la mesure de modification de l?article 231-ter du CGI porté
par la proposition de loi « Transformation Bureaux en Logements » introduit des cas d?exonération de la
taxe bureaux notamment lorsque l?immeuble est impropre à sa destination d?origine (phase chantier des
transformations), cette disposition est particulièrement attendue par les acteurs, car elle allège l?équilibre
financier des opérations.
Par ailleurs, l?affectation de la part de son produit issue des bureaux vacants, permettrait de financer
les travaux de transformation au sein d?un fond dédié au sujet.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 91
? Une taxe d?aménagement au profit des collectivités intégrant une condition de densification
Le montant de la taxe d?aménagement résulte d?une multiplication entre la surface taxable de la
construction créée et une valeur annuelle des m² (1036 ¤ en IDF actuellement), qui est encore multiplié
par le taux voté par la collectivité (1% ou 5%, ou alors 20% dans le cadre d?une taxe renforcée). Ainsi, la
notion de densité est intégrée au calcul même de la taxe. Pour mémoire, dans l?esprit de la proposition
de loi, l?assujettissement des opérations de transformation à la taxe d?aménagement est une mesure
positive envers les collectivités pour les inciter à porter les projets.
? Le renforcement du rôle des établissements publics fonciers au service de la transformation
Une intervention foncière publique pour réaliser un portage long-terme des terrains ou d?actifs est
adaptée pour accompagner le développement des OIN ou des projets de réindustrialisation de la France
qui nécessitent des aménagements urbains d?envergure et répondent à des enjeux publics. Au regard
des délais de conception et la validation de l?étude urbaine (environ 8 ans) et des couts liés à la
dépollution/ aménagements/ création d?équipements publics, il serait nécessaire que la valeur des
fonciers ou actifs concernés corresponde aux enjeux satisfaisant le bilan économique d?un tel projet.
Dans cette perspective, les établissements publics fonciers pourraient intervenir alors que la
transformation de bureaux, à travers des filiales dédiées. Ces filiales disposeraient d?une ingénierie
dédiée. Dans le droit actuel, ces filiales, contrairement aux délégataires existants, n?ont pas accès au
droit de préemption et négocient en conséquence leurs acquisitions dans l?univers concurrentiel. Il serait
pertinent que des filiales dans lequel un EPF aurait des participations majoritaires puissent se voir
déléguer tant le droit de préemption urbain (DPU) qui celui qui existe en ZAD (DP-ZAD).
L?utilisation de ces droits de préemption sera justifiée par une opération de transformation de bureaux
en logements en tablant sur une mixité de destination (part de logements sociaux, de intermédiaires et
libres à définir). Ces outils pourraient ainsi conduire une politique de préemption au juste prix. Des coûts
de construction spécifiques à la transformation seraient intégrés pour définir, à rebours, le prix de sortie.
? L?émergence de nouvelles foncières publiques/privées pour mener ces opérations
Les EPF et/ou leurs filiales dédiées pourraient céder ces actifs à des foncières sous forme de société
d?aménagement ou des SSCV, au sein desquels les propriétaires des fonciers concernés, des bailleurs
sociaux, des collectivités territoriales et/ou d?autres acteurs privés pourraient prendre des participations.
Ces SSCV interviendraient avec un engagement à construire sous un délai convenu. Un tel montage
permettrait ainsi de disposer d?une vision d?ensemble garantie par l?intervention d?un établissement public,
la démultiplication des moyens par l?intervention des foncières et l?incitation des propriétaires, encouragés
à (re)créer de la valeur en participant à la transformation de leurs actifs.
Annexe 1 : Proposition de rédaction pour l?article 220 Z du code général des impôts
Annexes 2 : Montant des taxes annuelles sur les locaux à usage de bureaux -Extrait du BOI-IF-AUT-50-
20 ? en application de l?article 231 ter du code général des impôts (CGI) et à l?article 231 quater du CGI
Annexes 3 : Exemples d?opérations FTI livrées ou en cours »
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 93
A11.2 : Contribution de l?ASPIM
« Note de novembre 2021
Les fonds logement, pourquoi et comment drainer l?épargne des Français
vers le résidentiel intermédié ?
Executive Summary
L?impérieux besoin d?une offre locative abordable en France
Et si la thématique du logement s?invitait enfin dans une élection présidentielle ? Absent des débats
en 2017, il semblerait que les ingrédients soient cette fois réunis pour que les grandes questions soient
posées : Comment augmenter l?offre de logements dans les zones tendues ? Quels moyens mettre en
oeuvre pour que ces nouvelles habitations ne soient par réservées aux plus aisés mais profitent aussi aux
travailleurs modestes ? Sommes-nous condamnés à produire des unités de plus en plus compactes qui
dégradent les conditions d?habitabilité ?
Les sociétés de gestion de portefeuilles immobiliers, rassemblées au sein de l?ASPIM, sont
convaincues de pouvoir apporter une partie de la solution. Elles font le constat que la France manque
avant tout d?une offre locative abordable dans les zones tendues (métropoles, villes moyennes
dynamiques et territoires touristiques). Le tout accession est un mirage alors même que les taux d?intérêt
ont certainement atteint leur point bas et que de nombreux français sont exclus de ce marché
(augmentation du nombre d?indépendants, précarité économique pour de nombreux travailleurs de la
première ligne, etc.). La France compterait aujourd?hui seulement 140 000 logements à loyers
abordables accessibles aux personnes considérées comme trop aisés pour prétendre au logement social
mais pas assez riche pour accéder au marché libre. Nous proposons de viser un objectif de 500 000
logements à loyers abordables à horizon 20240.
Les vertus de l?intermédiation
Qui doit être propriétaire de ce parc condamné à croitre pour répondre aux besoins des Français ?
Nous pensons que le recours exclusif à des investisseurs locatifs particuliers qui investissent en direct
est une impasse. Il doit s?accompagner d?un appel aux investisseurs professionnels, seuls capables
de garantir le maintien dans le temps des loyers abordables tout en assurant les dépenses
nécessaires à la bonne maintenance des bâtiments.
Contrairement aux personnes physiques, ces acteurs de l?immobilier ne sont pas soumis à des aléas
moraux et peuvent supporter des investissements dont les retours économiques se feront à long-terme.
Le tout-Pinel a aussi montré ses limités en matière de qualité des logements conçus. Le rapport Laurent
Girometti et François Leclercq en fait le triste constat et préconise le retour des institutionnel dans le
résidentiel aussi pour cette raison.
Des fonds « logement abordable » ouverts au grand public
Si nous défendons les vertus de l?intermédiation, nous avons aussi à coeur d?associer les Français
à ce grand défi du logement pour tous. Les sociétés de gestion de portefeuille sont prêtes à lancer des
fonds « résidentiel abordable » ouverts au grand public. L?épargne accumulée pendant la crise devant
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 94
atteindre 180 milliards d?euros fin 2021, soit 7% du PIB, nous pensons que le moment est propice pour
lancer des nouveaux produits d?investissement qui ont un sens sociétal.
Ces fonds auraient vocation à se porter acquéreurs de programmes neufs en LLI (logement
intermédiaire, avec une décote de loyer de 20%) comme de programmes en LAC (logement locatif
abordable, avec une décote de loyer de 10%). Ils devraient aussi mener des opérations de
réhabilitation dans le parc ancien dans l?ensemble des zones tendues où il y a des besoins. En matière
de volume, nous pensons que ces véhicules pourraient acquérir environ 20 000 unités par an, avec une
hypothèse de collecte d?environ 1 milliard d?euros par an. Ils concourraient à hauteur de 30% à 50% à
l?atteinte de l?objectif évoqué plus haut : disposer d?un parc de 500 000 logements abordables sur le
marché locatif en 2040. Ils viendraient donc en soutien des acteurs publics spécialistes du LLI et du LAC
comme CDC Habitat et in?li.
Améliorer la fiscalité au niveau du fonds et des souscripteurs pour rendre le produit attractif et pérenne
Un soutien de l?Etat est indispensable pour attirer de l?épargne vers des fonds dédiés au
logement abordable. En effet, les rendements dans le résidentiel sont souvent inférieurs à 3,5%. Dès
lors, en s?imposant une décote de loyers de 10% à 20%, ce qui nous semble indispensable étant donné
le contexte de marché, le rendement brut diminue encore pour atteindre environ 3%. C?est moins que
l?immobilier tertiaire et moins que l?investissement résidentiel en direct qui bénéficie de nombreux
avantages fiscaux. Il faut trouver des mécanismes pour améliorer la performance de ces véhicules. Il en
va de leur capacité à collecter de l?épargne et à la rendre sans déstructurer les portefeuilles. Moins de
performance se traduit par moins de liquidité et donc une obligation pour les fonds de vendre des actifs.
Nous sommes convaincus qu?il faut favoriser l?émergence de fonds « evergreen » dont les performances
assurent une liquidité permettant la détention longue d?actifs.
Le principal avantage demandé consiste à appliquer le régime TVA de droit commun au logement.
Autrement dit, faire en sorte que la TVA soit récupérable sur les achats de biens neufs comme sur toutes
les dépenses de travaux et de gestion liés aux actifs résidentiels. C?est le cas pour les actifs tertiaires et
commerciaux et nous pensons qu?il est temps d?aligner les pratiques. De même, nous proposons
quelques ajustements sur la fiscalité propre du souscripteur (assiette réduise pour l?IFI, amortissement
notionnel pour les parts qui distribuent et qui capitalisent, etc.). Nous disons à l?Etat : investissez à nos
côtés pour nous aider à drainer de l?épargne française en faveur du logement abordable. »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 95
A11.3 : Contribution de CDC Habitat & Groupe Mirabaud
A. Fiche d?analyse dans la perspective de la lettre de mission du 14 mars 2024
La note s?inscrit pleinement dans la logique de la lettre de mission du 14 mars 2024.
La principale innovation proposée est relative à l?affectation du crédit d?impôt sur la plus-value dégagée
à l?occasion de l?opération de transformation. Elle tend donc à privilégier le réinvestisseur et, à ce titre,
elle est parfaitement cohérente avec l?objectif recherché.
Toutefois, l?angle d?analyse retenu privilégie un processus de cession / transformation qui résulte
logiquement de l?expérience acquise par les rédacteurs, ignorant un scenario dans lequel c?est le
détenteur des actifs qui initie lui-même la transformation, au prix d?une moindre plus-value, voire d?une
perte à provisionner. Tout en soutenant cette proposition, il convient de poursuivre la réflexion dans
l?hypothèse où le lien entre le détenteur initial du bien et la foncière de transformation ne serait ni
intégralement, ni définitivement (cas d?une vente à réméré) rompu.
B. Contribution de CDC Habitat & Groupe Mirabaud
« Accélération des opérations de transformation des immeubles de bureaux en logements
? La crise du marché des bureaux crée une vacance importante du parc, souvent bien situé près des
transports en commun, pouvant ainsi constituer, via la transformation, un potentiel important de
développement d?une offre résidentielle nouvelle.
? Des modifications législatives (projet de loi Daubier) sont en cours pour faciliter les procédures
juridiques nécessaires pour mener à bien ces transformations (concernant les PLU) et ainsi en accélérer
la production, condition nécessaire pour permettre la rentabilité économique de ces opérations.
? Ces mesures ne sont néanmoins pas toujours suffisantes pour convaincre les propriétaires
investisseurs des bureaux de céder leurs actifs, la valeur de cession de ces bureaux pour une
transformation étant souvent bien inférieure à la valeur comptable voir à la valeur d?acquisition.
? Pour autant, la valeur comptable de ces actifs dans leur format bureau est en partie fictive, puisque
ces actifs ne seront pas reloués et par ailleurs mériteront à plus long terme des travaux importants pour
les maintenir au niveau environnemental.
L?enjeu est donc d?identifier les moyens permettant d?accélérer la mise en vente de ces actifs par leur
propriétaire, en vue de leur reconversion en logements. Deux pistes sont proposées :
- D?une part, à l?image de ce qui est prévu dans le logement avec l?interdiction progressive de location
des logements étiquette G, puis F et E, le renforcement des obligations de mise aux normes et de travaux
pourrait inciter les vendeurs à accélérer les cessions d?actifs, l?investissement dans des travaux ne
pouvant être amorti pour les actifs ne trouvant pas de locataire ;
- D?autre part, une taxation des biens vacants pourrait également provoquer la vente d?actifs obsolètes,
l?allocation de cette ressource nouvelle devant favoriser la réalisation des programmes de logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 96
Nous proposons d?approfondir dans cette note cette seconde piste.
? Concernant la collecte de cette taxe, un régime de déclaration concernant l?occupation des immeubles
pourrait être mis en place, comme cela a été mis en place pour les propriétaires de logements. La taxe
pourra être perçue une fois constatée une vacance durable de l?immeuble (par exemple vacance de + de
50% sur 2 années fiscales successives). La déclaration pourrait être rétroactive concernant les deux
dernières années d?occupation, afin de mettre en place rapidement la collecte de la taxe.
? Concernant le montant de cette taxe, il doit être suffisamment important pour motiver la vente plutôt
qu?une détention de l?actif. Nous l?estimons à minima (voir ci-après) à 15 ¤/m2/an soit pour un actif type
de l?Ile de France, de 10 000 m2, un coût annuel de l?ordre de 150 000 ¤/an (charge supplémentaire
s?ajoutant aux charges d?entretien, assurances, impôts fonciers, coûts de gestion... supporté par le
propriétaire en cas de vacances de son actif). Cette taxe pourrait s?appliquer aux actifs immobiliers d?une
taille minimale de 5 000 m2.
? Concernant l?usage de cette taxe, nous proposons de l?affecter à crédit d?impôt sur la plus-value
dégagée par la transformation. En effet, outre le coût d?acquisition de l?immeuble et les travaux, le coût
de la transformation intègrent des coûts de portage (coût des capitaux mobilisés pendant la phase de
transformation de 1 à 3 ans) et la fiscalité sur la plus-value dégagée par l?opération (IS). L?ensemble de
ces coûts renchérissent le prix de revient de l?opération et donc le prix de vente des logements, rendant
parfois les opérations incompatibles avec le prix de marché.
Estimation de l?impact sur les prix de vente de 10.000 logements neufs créé par an d?un crédit
d?impôt sur la plus-value dégagée à l?occasion d?une opération de restructuration.
- Hypothèse de prix de vente unitaire : 250.000 ¤ par logement HT
- Chiffre d?affaires dégagé : 2,5 milliards ¤ HT
- Plus-value dégagée (sur la base de 7% de taux de marge) : 175 millions d?¤
- IS payé sur la plus-value : 44 millions d'¤
- Surface développée (sur base 60 m2 par logement) : 600.000 m2 soit environ 600 à 700 000 m2 de
bureaux existant à transformer
Si l?on considère une vacance structurelle de 3 millions de m2, la taxe serait de l?ordre de 4,4¤/m2
pour compenser l?IS.
L?impact sur le prix du logement demeurera toutefois limité, de l?ordre de 2% du prix de vente. La
réduction du prix de vente du logement est surtout liée à la baisse du prix de vente de l?actif à transformer.
SYNTHESE DES PROPOSITIONS
? Poursuivre les adaptations législatives en vue de renforcer la sécurité des opérations (notamment sur
les modifications de PLU et les évictions)
? Renforcer les obligations de travaux pesant les propriétaires d?actifs obsolètes afin de provoquer un
choc foncier (en excluant les particuliers)
? Réduire les coûts de portage inhérents aux projets de transformation par un crédit d?impôt financé par
une taxation des locaux vacants. »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 97
A11.4 : Contribution du Consortium des Bureaux en France (CBF)
A. Synthèse de la contribution commune de La Place de l?Immobilier et Adéquation
180 millions de m2 de bureaux en France dont :
- 40 millions de m2 de parc public (20% en Ile-de-France ; 80% en régions ; 50% pour l?Etat, 50%
autres : collectivités locales, etc.) ;
- 45 millions de m2 pour le parc privé non marchand (20% en Ile-de-France ; 80% en régions ; 1/3 du
parc privé d?Ile-de-France, soit 17 millions de m2) ;
- 95 millions de m2 pour le parc privé marchand, dont 38 millions de m2 en Ile-de-France, dont 5 millions
de m2 vacants (dont 1,2 million de m2 depuis plus de 2 ans et 2,5 millions de m2 vacants de plus de deux
ans en 2025).
B. Contribution du Consortium des Bureaux en France : note du 17 juin 2024
« LES SECTEURS À FORTE RÉVERSIBILITÉ DE BUREAUX EN LOGEMENTS
À PARIS ET LYON (MÉTROPOLES)
Comment identifier les territoires offrant les meilleures opportunités de transformation des
bureaux vacants en offre résidentielle de demain ? LA PLACE DE L?IMMOBILIER et ADEQUATION
ont partagé leurs expertises pour proposer une approche méthodologique exclusive.
Une des pistes explorées par les acteurs de l?immobilier pour faire face à la contraction de la
construction neuve et aux obligations réglementaires (ZAN) est d?allouer davantage de moyens
(financiers, techniques et humains) à la transformation d'immeubles existants, que ce soit sous forme de
surélévation, de rénovation lourde ou de changement d?usage. Sur ce dernier point, et même si les
montages sont encore complexes, la transformation de bureaux en logements paraît offrir un fort potentiel
au regard des bâtiments tertiaires obsolètes, déjà vacants ou à forts risques à court ou moyen terme.
Si le sujet n?est pas nouveau, la transformation de bureaux en logements (ordinaires ou sous forme
de résidences gérées) bénéficie aujourd'hui d?un contexte favorable permettant d?envisager un
développement plus important : couple rendement/risque plus favorable au logement, obsolescence
climatique accélérée des bureaux, perte d?attractivité de certains actifs tertiaires, élus convaincus par la
pertinence de ces réponses sur leurs territoires touchés de plein fouet par la crise immobilière. Les
annonces récentes de grands groupes de promotion immobilière témoignent de cette tendance.
Pour autant, ces conditions ne sont pas homogènes sur tous les marchés. Pour éclairer les acteurs
concernés (promoteurs, investisseurs, collectivités, propriétaires, brokers, etc.) et limiter les aléas liés à
ce type d?opération, LA PLACE DE L?IMMOBILIER et ADEQUATION ont mis au point une méthode pour
croiser leurs données relatives à l?occupation des immeubles tertiaires et aux besoins résidentiels. Elle
permet de faire ressortir les communes à fort potentiel, en commençant par les métropoles du Grand
Paris et de Lyon.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 98
La méthode
Pour conduire l?analyse présentée ci-après, LA PLACE DE L?IMMOBILIER et ADEQUATION ont
croisé leurs banques de données, qui portent respectivement sur l?état du parc immobilier tertiaire existant
et sur les dynamiques du marché immobilier résidentiel.
Les données de LA PLACE DE L?IMMOBILIER ont permis d?identifier les communes possédant des
immeubles de bureau vacants de manière structurelle.
ADEQUATION a de son côté mobilisé ses bases de données portant sur l?immobilier résidentiel pour
mesurer les dynamiques récentes en termes de construction neuve, l?intensité des besoins en immobilier
résidentiel, et la faisabilité « marché », au regard notamment des valorisations existantes.
L'interopérabilité de nos données et nos savoir-faire respectifs nous a permis d'identifier les territoires
présentant les plus forts potentiels de transformation de l'offre de bureaux en logement en croisant les
estimations :
- Des surfaces de bureaux potentiellement mutables
- Des besoins de logements et de résidences services.
Cas de la métropole du Grand Paris : des potentiels centrés sur le Nord-Ouest
Sur la métropole du Grand Paris, plusieurs territoires affichent des potentiels importants car s?y
conjuguent des besoins résidentiels forts, des constructions de logements neufs insuffisantes et un grand
nombre ou de grandes surfaces d?actifs tertiaires obsolescents ou risquant de le devenir à court terme.
C?est notamment le cas de Nanterre, Suresnes, Courbevoie sur l?Établissement Public Territorial
(EPT) de La Défense, mais aussi de Saint-Denis, Clichy et Saint-Ouen, à cheval des EPT Boucle Nord
92 et Plaine Commune, secteurs qui souffrent d?une vacance tertiaire élevée.
À l?inverse, la ville de Paris, à l?attractivité tertiaire encore forte, et les communes de seconde
couronne, qui accueillent des parcs de bureaux modestes et/ou à la valorisation immobilière résidentielle
plus modérée, présentent moins de potentiel.
Globalement, les potentiels semblent relativement nombreux, bien que concentrés majoritairement
sur le Nord-Ouest du Grand Paris. Ils sont également présents de manière plus ponctuelle en 1ère
couronne (Fontenay-sous-Bois, Issy-les-Moulineaux?) et plus marginalement en grande couronne, à
Sucy-en-Brie par exemple.
À noter que l?ensemble du territoire enregistre d?ailleurs des besoins nettement insatisfaits, estimés à
70 000 par an sur l?ensemble du Grand Paris, alors que la production sera pour mémoire inférieure à
30 000 logements commencés pour l?année 2023.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 99
Potentiels de transformation d?actifs tertiaires en logements ordinaires et
résidences gérées sur la Métropole du Grand Paris
Cas de la métropole de Lyon : des gisements plus modestes en majorité sur l?Est lyonnais
La géographie des potentiels sur la métropole lyonnaise est quelque peu différente. Ils sont
globalement moins importants malgré les tensions de marché sur le segment résidentiel. Ils semblent
davantage concentrés, notamment le coeur de l?agglomération, et secondairement sur la frange Est.
Villeurbanne apparaît comme présentant les potentialités les plus fortes, même si une analyse plus
fine permettrait probablement de distinguer des écarts sensibles entre quartiers, comme sur le 3ème
arrondissement par ailleurs.
Si les communes de Rillieux-la-Pape, Décines-Charpieu, Saint-Priest et les arrondissements Sud de
Lyon semblent offrir des potentiels légèrement moindres à ce jour, elles pourraient prochainement voir
leur attractivité progresser, compte tenu d?un parc de bureaux majoritairement ancien, en voie de
déqualification.
Sur la 3ème polarité tertiaire du territoire, le Nord-Ouest lyonnais, les capacités à activer la réversibilité
des actifs tertiaires, souvent peu denses et assez récents, semblent encore plus faibles à court terme,
malgré des valeurs de marché élevées en immobilier résidentiel.
Ici aussi, les besoins restent très nettement insatisfaits, en particulier sur le coeur de la métropole, qui
souffre d?une insuffisance de projets, notamment dans des valeurs ?intermédiaires? (moins de 6 400
logements commencés tous segments confondus en 2022, pour un objectif annuel compris entre 8 000
et 8 500 nouveaux logements d?ici 2026).
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 100
Potentiels transformation d?actifs tertiaires en logements ordinaires et
résidences gérées sur le Métropole de Lyon
Révéler les opportunités pour aller plus loin dans l'analyse
Cette analyse peut être effectuée sur l'ensemble des territoires de France métropolitaine, et affinée et
ce, tant à l'échelle globale comme présenté ici, qu'à l'échelle de l'îlot/foncier.
La mutabilité de chaque actif tertiaire peut également être évaluée selon différents critères de
faisabilité intrinsèque, mais également en regard de son environnement et du marché potentiel permettant
de développer une offre de logements ordinaires ou en résidences gérées (seniors, étudiants, coliving).
Ces premiers résultats mettent en évidence l?importance des gisements et laissent augurer des
conditions économiques favorables à la transformation des bureaux en logement sur deux territoires
marqués par une très forte demande de logements et par la faiblesse de l?offre foncière aisément
mobilisable.
Tous les acteurs de la filière (collectivités, aménageurs, promoteurs, investisseurs, propriétaires)
devraient s?intéresser à ce potentiel de transformation des territoires, de valorisation d?actifs et de
production de logements qui apporte en outre une réponse au double impératif de décarbonation et de
non-artificialisation qui structure désormais la production urbaine.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 101
LA PLACE de l?immobilier
Votre contact : Blaise HEURTEUX
06 09 24 65 39 / bheurteux@laplacedelimmobilier.com
Créée en 2006, LA PLACE de l'immobilier a pour vocation de contribuer à un marché de la transaction
immobilière « meilleur », plus éthique et plus efficient, grâce à un accès pour tous à la data. L'entreprise
a constitué la 1ère base de données sur les immeubles en France, considérée par de nombreux
professionnels comme LA base de référence du marché.
Dans un souci d'accroître la valeur ajoutée de ses clients, professionnels de l'immobilier, la société a
développé des solutions métiers intégrant l'intelligence de la data ainsi que des services associés.
LA PLACE de l'immobilier propose d'accompagner les professionnels de l?immobilier (brokers,
promoteurs, investisseurs, utilisateurs) avec 3 offres différentes :
- Accéder à la DATA : info à l'immeuble, listing de prospection, étude de marché
- Utiliser des outils métiers connectés à la data : le Module Brokers (CRM et rapprochement offres /
demandes) et le Module Utilisateurs (gestion de parc)
- Réaliser de missions de conseil : recherche de fonciers et d'actifs, recherche de locataires, recherche
d'implantations
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ADEQUATION
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Bureau d?Etudes et de Conseil indépendant, ADEQUATION accompagne l?ensemble des acteurs du
foncier, de l?aménagement et de l?immobilier (promoteurs, bailleurs, aménageurs et collectivités) dans la
réussite de leurs projets, dans la compréhension de leurs marchés et dans le développement de leurs
stratégies.
Depuis 1992, la société ADEQUATION observe et étudie les marchés immobiliers résidentiels en France,
une expertise au long cours qui en a fait un acteur réputé de la production de données immobilières.
Solutions digitales, Etudes & Conseil deux métiers nourris par la data, étendus à l?ensemble des
opérateurs de projets résidentiels.
Adossée à un solide ancrage régional, ADEQUATION maille l?ensemble du territoire national et s?est
dessinée une place unique qui ouvre des perspectives sur la maîtrise du risque inhérent au marché
immobilier.
https://adequation.fr/
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 103
A11.5 : Contribution de la Foncière FREY
« Mobilisation du foncier commercial en faveur de la création de logements
Un contexte économique et sociogéographique propice à la transformation des périphéries
Le commerce s?organise autour de typologies, structurées ou non, et de spatialités différentes :
centres commerciaux, zones commerciales, parc d?activités commerciales, etc. S?agissant des entrées
de villes, les zones commerciales se sont développées historiquement autour de locomotives
alimentaires (supermarchés, hypermarchés) ou de galeries commerciales en périphérie des
agglomérations ou « entrées de villes ». Ces zones ont la particularité de concentrer majoritairement
des commerces de moyennes surfaces (500 à 2 000 m² ou plus) non alimentaires, très difficiles à
implanter en coeur de ville, et ne présentant pas nécessairement d?homogénéité entre elles.
Leur hétérogénéité concerne également les acteurs immobiliers : ces zones commerciales ou parc
d?activités commerciales sont investis par une pluralité d?investisseurs, promoteurs et foncières
d?horizons différents : immobilières de la grande distribution, investisseurs institutionnels, SCI
familiales, et bien sûr les enseignes elles-mêmes (succursalistes ou franchisés).
65% de la population française vit autour d?une métropole (ville > à 200 000 habitants) : la « zone
commerciale » est de fait déjà une forme de proximité. 72% des dépenses de consommation seraient
réalisées dans les périphéries de villes. « La périphérie des uns est la proximité des autres ».
Plusieurs inputs majeurs convergent aujourd?hui pour faire du périurbain existant un lieu de
reconquête urbaine, économique et sociale :
? La protection de la biodiversité et des fonciers non artificialisés nécessite une évolution dans
le développement de l?urbain ex-nihilo et appelle à privilégier l?implantation de nouvelles
constructions sur des zones commerciales existantes déjà artificialisées, et plus généralement sur
les zones d?activités économiques.
? Logement, logistique, industries vertes : des filières aux besoins importants, l?opportunité de
valoriser des fonciers.
? L?évolution des comportements et des attentes est propice au développement d?une nouvelle
proximité. Les contraintes économiques, et plus encore environnementales, rendent nécessaire une
meilleure gestion des déplacements et l?accroissement de la mixité fonctionnelle et
programmatique.
? Les politiques publiques se sont concentrées depuis plusieurs années sur la redynamisation des
centres-villes, dont la population stagne depuis 40 ans : il est opportun de considérer à présent la
qualité de vie et les contraintes qui pèsent sur les habitants du péri-urbain.
? Les entrées de ville peuvent devenir le lieu privilégié de la mutation urbaine de notre pays, vers un
modèle plus sobre en foncier et moins générateur de besoins de mobilités, vers un modèle urbain
polycentrique.
Le modèle économique de ces zones commerciales reste toujours aussi intéressant tant du point de
vue des consommateurs que de celui des propriétaires et surtout exploitants.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 104
Ce modèle viable demeure un frein important pour la création d?opération mixte complexe tant par la
recherche d?un équilibre économique pour ces opérations forcément plus onéreuses que par la capacité
de mobiliser la pluralité des propriétaires / investisseurs.
Le puzzle du remembrement pour toute opération de transformation nécessite un remembrement
préalable, lourd en investissements et en portage. Ce travail réclame de longues années de
négociations, de levées de contraintes juridiques en plus des classiques autorisations (autorisations
d?exploitation commerciale notamment) à obtenir? et à purger.
Afin de créer des conditions favorables à la mobilisation de ces fonciers commerciaux pour la création
de logement, il est utile de rappeler que les zones commerciales de périphérie concentrent à l?heure
actuelle une vacance commerciale estimée à 14,89% dans les centres commerciaux et 6,62% dans les
zones commerciales.
La capacité a influencé la transformation des commerces pourrait être de créer une surtaxe sur la
vacance commerciale à partir d?une vacance de plus de 50% de la propriété détenue. Afin de
disposer d?éléments factuels pour déterminer une vacance commerciale, le point de départ de cette
surtaxe pourrait être le non-paiement d?une TASCOM sur une cellule depuis plus de 6 mois. Cette surtaxe
pourrait ainsi créer un phénomène de décision plus rapide, notamment chez les investisseurs
institutionnels.
Cette surtaxe pourrait permettre à l?Etat de financer « une prime à la transformation » en faveur des
opérateurs qui initieraient un projet mixte en lieu et place de commerce existant afin notamment
d?accompagner les opérations économiquement fragiles en finançant l?indemnisation des locataires
et / ou propriétaires. Cette prime à la transformation pourrait être soumise à des conditions de
programmation telle qu?un pourcentage de logements sociaux ou de logements intermédiaires
développés, un pourcentage de renaturation / pleine terre.
Afin de faciliter les négociations foncières avec certains propriétaires particuliers, notamment à travers
des SCI familiales issues d?anciens commerçants, un abattement exceptionnel (de 70% ou 85%)
applicable sur les plus-values immobilières résultant de la cession de biens immobiliers bâtis, ou de
droits relatifs à ces mêmes biens dans le périmètre d?une opération de transformation d?une zone
commerciale pourrait être mis en place.
Au-delà des aspects économiques, et comme précisé supra, le remembrement foncier confère une
complexité telle que certains opérateurs pourraient être découragés devant l?ampleur de la tâche. Afin de
faciliter ce remembrement, il pourrait être intéressant, pour les collectivités de systématiser le droit de
préemption et d?expropriation lors de l?inscription d?une zone de Projet (PPA, GOU, OAP,?). Cette
inscription pourrait générer de fait une DUP sur le périmètre du Projet (L 211-4 et L 214-1 c. urb.),
analogue à la DUP « travaux ». »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 105
A11.6 : Contribution du GRECAM
« Extrait Rapport « Analyse du marché de la reconversion et des marchés porteurs
en Ile-de-France (2024)
Différentiel de prix de vente entre les bureaux et les logements
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 107
A11.7 : Contribution du KAREG
« Note sur la transformation de bureaux en logements
1) Avant 2020 une vacance de bureaux faible
La création de KAREG en janvier 2019, avait pour objectif de proposer aux propriétaires institutionnels
et aux investisseurs de travailler à la restructuration et au repositionnement de leur parc de bureaux
obsolètes et/ou non occupés. Ce parc était alors estimé à 800 000 m² (vides depuis au moins quatre ans
en Ile-de-France) sur les 55M de m² du parc tertiaire francilien. Le constat par ailleurs que la durée de
vie moyenne d?un immeuble de bureaux avant travaux lourds pouvait être estimée à 30 ans conduisait à
évaluer à 1,5 M de m² annuels le parc devant faire l?objet de travaux pour des remises en location. Pour
autant les loyers inférieurs à 200¤/m² annuels sur une partie importante du parc (quasi-totalité de la
seconde couronne et parc de seconde main de première couronne) faisait craindre que les propriétaires
de ces actifs ne renoncent à engager des travaux de l?ordre de 2000¤/m² impossible à amortir dans le
cadre de baux 3/6/9 voire 9 ans fermes.
La création de KAREG faisait également suite à la promulgation de la loi ELAN le 23 novembre 2018
dont l?article 28 proposait plusieurs dispositifs pour faciliter les transformations de bureaux en logements.
2) La nouvelle situation post pandémie, crise structurelle et prime croissante à la centralité
La pandémie de COVID 19 a profondément bouleversé le marché du bureau. La mise en oeuvre
généralisée du télétravail à l?échelle mondiale et nationale a structurellement déstabilisé ce marché et
ses acteurs.
Sur la seule région Ile-de-France ce sont plus de 800 accords de télétravail qui ont été signés en
entreprise avec une moyenne 2,4 jours de télétravail par semaine. Il est à noter qu?au moins 45% des
salariés franciliens pratiquent le télétravail au moins une fois par semaine. Après 3 ans de mise en oeuvre
et les premiers retours d?expérience, une première phase de renouvellement des accords a été engagée
et un consensus s?établit autour d?une moyenne de 2 jours par semaine.
Ces nouveaux modes de travail ont pour conséquence un impact très lourd sur les parcs de bureaux.
Les entreprises ont engagé une réflexion de fond sur leurs besoins en bureaux avec une tendance vers
moins de bureaux mais « mieux de bureaux ». Si mathématiquement 2 jours de télétravail correspondent
à une diminution de 40% des besoins en surface la pratique évolue vers une diminution moindre avec
l?aménagement de nouveaux espaces collaboratifs ou de convivialité. Ils doivent permettre aux
collaborateurs qui se côtoient moins de se retrouver et de renforcer l?esprit d?entreprise. La baisse des
surfaces louées serait ainsi comprise entre 20 et 30% des surfaces antérieures.
Dans l?immédiat, une grande majorité d?entreprise restent dans une phase d?observation. Pour éviter
des engagements trop risqués en termes de politique immobilière, elles réduisent leurs surfaces à
l?occasion des renouvellements de baux ou de la signature de nouveaux baux et adaptent leurs besoins
en ayant recours à des bureaux opérés (co-working) solution plus onéreuse mais beaucoup plus souple.
En parallèle on assiste à une évolution géographique de la demande. Le « mieux » de bureaux
s?accompagne d?une recherche de la centralité et de la desserte la plus efficiente. La limitation de la place
de la voiture au coeur de la métropole dissuade les jeunes générations du déplacement automobile et
incite les entreprises à des implantations très centrales pour attirer les meilleurs profils.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 108
Les chiffres de la vacance tertiaire reflètent clairement cette tendance. Au T1 2024 le taux de vacance
est ainsi de 2,4% dans Paris QCA (avec des loyers « prime » de plus de 1000¤/m²).
A contrario la vacance atteint 13,3% à la Défense et dépasse les 20% dans l?ensemble des Hauts de
Seine à l?exception de 4 communes (Neuilly, Levallois-Perret, Boulogne et Issy-les-Moulineaux). Les
autres départements de petite couronne ont atteint ou dépassé les 20% de vacance et la vacance
s?accroît encore en seconde couronne.
Au T1 2024, le taux de vacance global en Ile de France est de 8,4% avec 4,9M de m² libres mais
devrait encore s?accroitre fortement (cf supra). En effet, nombre d?experts estiment que la vacance devrait
quasiment tripler dans les deux ou trois ans car au regard de la rigidité des baux, beaucoup d?entreprises
n?ont pas encore procédé aux ajustements de leurs besoins9.
3) Mise en oeuvre des opérations de transformation et retour d?expérience
? Les opérations de transformation n?ont pas débuté avec la pandémie de COVID 19. Dès la fin des
années 90, la ville de Paris initiait certaines opérations notamment avec la RIVP. Celles-ci consistaient
pour l?essentiel à redonner une destination « logement » à des immeubles haussmanniens conçus un
siècle auparavant à cet usage. A partir des années 2010, la ville de Paris a fait de la transformation de
bureaux en logements un axe fort de sa politique mais les équilibres financiers parisiens et les coûts
travaux admissibles tout comme les subventions pour surcharge foncière accordées dans le cas de
production de logements sociaux sont très éloignés des standards franciliens.
? L?ORIE (Observatoire régional de l?immobilier d?entreprise) conduit avec l?appui des services de l?Etat
(DRIEAT, DGFIP?) et des notaires, un travail de recensement régulier du parc tertiaire francilien mais
également des parcs d?activité ou encore logistiques. Il en étudie la croissance mais en suit également
l?usage grâce notamment aux informations relatives à la taxe annuelle sur les bureaux en IDF.
C?est ainsi que l?ORIE au T1 2024 recense près de 3 200 immeubles de bureaux partiellement ou
totalement inoccupés en Ile-de-France sur un parc total de 55,5M de m² (dont 39M de m² de parc
marchand).
Ce sont ces immeubles qui sont donc prioritairement destinés à changer d?usage dès lors que leur
implantation où leur obsolescence ne permet plus de leur donner un avenir en bureaux.
? Les acteurs de la transformation
KAREG dans le cadre de sa stratégie a décidé dès 2019 de travailler pour le compte de propriétaires
ou celui d?investisseurs à la transformation de ces immeubles en logements, familiaux, ou gérés, libres
ou sociaux parfois dans le cadre d?opérations mixtes (bureaux-logements, centres de santé, écoles?). A
compter de 2023 KAREG agréée comme société de gestion par l?AMF a créé des fonds d?investissement
destinés à cet objectif.
Les quelques opérations déjà lancées et les très nombreuses opérations étudiées lui ont permis
d?identifier les principaux enjeux liés à la mise en oeuvre de ces opérations.
9 Dans le cadre d?une mission pour le compte d?un propriétaire institutionnel dont des services de l?Etat sont locataires, ce
dernier va regrouper différents services pour passer d?un ratio de 50m² de SU/agent (post pandémie) à 16 m² SU/agent.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 109
a) Les PLU.
Aujourd?hui la plupart des PLU présentent des zonages très figés permettant le développement de
quartiers spécialisés (bureaux, logements, activité etc?). Chaque opération de transformation nécessite
par conséquent une modification de PLU quand ce n?est pas une révision. Plus récemment les PLUI se
sont orientés vers des zonages beaucoup plus souples (Paris, Plaine Commune etc?) Par ailleurs la
proposition de loi Daubié qui pourrait être adoptée en septembre 2024, propose que les dérogations au
PLU puissent être accordées à l?initiative des maires pour la transformation de bureaux en logements.
b) Les blocages « mairie ».
C?est aujourd?hui encore le principal obstacle rencontré par les opérateurs. De nombreux maires
espèrent encore le retour d?utilisateurs y compris pour des immeubles qui ne répondent à aucun des
critères de choix de ces derniers. D?autres font état de la perte de recettes fiscales (CVAE notamment),
de la crainte d?un rejet par la population (en dépit de chantiers « allégés »), ou encore de leur impossibilité
à financer nouveaux équipements publics avec la disparition de la taxe d?habitation et la très forte
réduction de la DGF. Le préfet des Hauts-de-Seine, Laurent Hottiaux, lors d?une réunion ce 22 avril a
précisé que les maires de son département pouvaient difficilement invoquer cet argument au regard de
leur bonne situation budgétaire. Quand ils ne refusent pas les transformations beaucoup de maires
refusent en revanche tout bonus de constructibilité prévus par la loi ELAN (comme la loi ALUR de 2019
pour les logements sociaux).
c) Les problèmes techniques.
Une partie non négligeable des immeubles ne se prête pas à une transformation pour des raisons de
structure, rarement d?épaisseur (immeuble « Nuages » à Paris jusqu?à 24 m d?épaisseur, campus ECLA
à Noisy le grand, 22 m, etc.).
Ce peut être pour des raisons d?implantations défavorables, proximité d?axes particulièrement
bruyants, quartiers mono fonctionnels en activité ou bureaux (Villepinte, certains quartiers de Saint-
Quentin en Yvelines, des secteurs entiers de la Défense?).
Pour ce qui concerne les coûts de transformation, ils sont généralement proches de ceux d?une
opération neuve. Les économies sont possibles sur les coûts de gros oeuvre (infrastructure et structure
du bâtiment). En contrepartie, il convient d?ajouter le plus souvent des coûts liés potentiellement au
désamiantage, au renforcement de structures, à la création de nouveaux noyaux, de chapes acoustiques
etc.
d) Les copropriétés
Le blocage par des copropriétaires parfois très minoritaires devrait être levé par les dispositions de la
proposition de loi Daubié.
e) Le blocage des propriétaires.
Les propriétaires institutionnels ne peuvent pas (en tout cas pour les SCPI qui détiennent 24,1% du
parc tertiaire en IDF) vendre en dessous de la valeur d?expertise. Il y a là un point bloquant auquel ont
été confrontés la plupart des candidats à l?acquisition. En effet, alors même que la valeur d?un actif est
directement liée à son usage et que sa vacance totale devrait conduire à une valeur nulle, les experts
procèdent à des réévaluations à la baisse très progressives. Les propriétaires même vendeurs, fixent
donc comme prix de réserve la valeur d?expertise. En 2023 c?est ainsi un volume de 15Mds¤ d?immobilier
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 110
de bureau qui a été retiré de la vente à l?issue des consultations. Bien évidemment cet aspect doit être
considéré au regard également des « blocages des maires ». Un candidat acquéreur qui fait une offre sur
un actif qui n?a plus de perspectives d?être reloué en bureau et dont le maire ne souhaite pas qu?il fasse
l?objet d?une quelconque transformation doit se résigner à le porter un temps indéterminé et parfois très
long. »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 111
A11.8 Contribution d?un cabinet de conseil en immobilier d?entreprise
La réflexion porte sur « des pistes utilisant des dispositifs existants permettant de canaliser de l?épargne
privée (institutionnelle ou des particuliers) en direction de ces transformations ». Le cabinet attire
l?« attention sur le fait que ces pistes doivent être vérifiées par des spécialistes fiscalistes.
1. Apporter les actifs à transformer à des structures ad-hoc
Les actifs à convertir pourraient être apportés à des structures de détention spécifiques permettant de
mutualiser les risques sur plusieurs produits, géographies ou temporalités. L?effet volume du portefeuille
crée une dynamique auprès des investisseurs et la mutualisation des actifs permet de présenter un profil
de risque plus attractif.
A notre sens il paraît difficile d?envisager des structures de détention qui seraient abondées par
différents investisseurs car trop complexe à mettre en oeuvre. A contrario certains investisseurs
possédant de grands portefeuilles pourraient loger leurs actifs à transformer dans un véhicule spécifique.
Les véhicules pourraient être structurés en fonction de la cible d?investisseurs visés (particuliers ou
institutionnels) ? permettant d?y associer des incitations spécifiques.
Des mécanismes comme le démembrement de propriété pourraient également être mis en oeuvre
avec cession d?usufruit à des bailleurs sociaux pour le développement d?opérations.
L?idée est également de ne pas rechercher à créer des structures de détention où l?Etat aurait vocation
à investir mais au contraire de structurer des véhicules capables de capter de l?épargne privée.
2. Des incitations adaptées à la cible d?investisseurs :
Pour les particuliers :
L?investissement dans un véhicule de transformation identifié comme tel (pourrait être une SCPI par
exemple) pourrait être assorti d?incitations conditionnelles et limitées dans le temps (10 ans) telles que :
? La sortie de la valeur des parts de l?assiette de calcul l?IFI
? La sortie des revenus fonciers de l?assiette de calcul de l?IR
? L?amortissement déductible des revenus fonciers
? Une dispense d?imposition sur la plus-value en cas de revente des parts.
Indépendamment de la transformation des bureaux en logement, les règles d?abattement qui
s?appliquent actuellement sur les revenus des locations non-meublées vs les locations meublées ou
touristiques devraient être revues pour favoriser la location de longue durée ? ce qui n?est pas le cas
aujourd?hui.
Pour les institutionnels :
Pour les institutionnels les leviers portent sur la minoration de la fiscalité des dividendes et sur
l?imposition des plus-values.
Le régime SIIC tel qu?il avait été défini au moment de son lancement pourrait être une base de
réflexion : transparence fiscale du véhicule de détention, obligation de remonter en dividendes un % élevé
du résultat, abattement sur les dividendes perçus par les actionnaires.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 113
A11.9 : Contribution de l?ORIE
« Avis de l?ORIE sur transformation de bureaux en logements
Contexte
Le 21 mai dernier, a été examinée au sénat une Proposition de loi visant à faciliter la transformation des
bureaux en logements pour répondre à la crise du logement en France.
L'ORIE (Observatoire Régional de l?Immobilier d?Entreprise), organe privilégié de concertation entre
pouvoirs publics et professionnels de l?immobilier regroupe, au sein d'une association loi 1901, l'ensemble
des acteurs du marché de l'immobilier d'entreprise francilien se réjouit et partage cette initiative du
gouvernement qui permettra à moyen terme de recycler un gisement considérable de bureaux obsolètes
pour alimenter la production de logements. Par ailleurs l?ORIE encourage à poursuivre les réflexions au
Sénat de la proposition de loi DAUBIÉ.
En parallèle, une rencontre a été organisée le 23 mai dernier entre les membres du CA et M. André YCHE
missionné par le ministère du Logement dans le cadre de sa mission sur la transformation de bureaux en
logements et dont le rapport sera publié fin juin.
Suite à cette rencontre, l?ORIE a animé différents ateliers thématiques dont les conclusions sont
consignées dans ce présent avis.
Propositions de l?ORIE
Les recommandations de l?ORIE concernent 2 grands enjeux.
Enjeu 1 : Libéraliser le marché de la transformation de bureaux en logements
Partant du constat que l?autorisation à la transformation de bureaux en logements existe certes, mais est
soumise à de nombreuses règles administratives et d?urbanisme au niveau local qui retardent voire
rendent impossible certaines opérations, l?ORIE propose de :
- Elargir au-delà du logement (logement libre, intermédiaire et abordable), la destination des
transformations à l?hébergement résidentiel (résidences étudiantes, résidences senior, co-living avec
ou la possibilité d?y insérer des espaces de co-working, des services et/ou commerces de première
nécessité pour les grands ensembles immobiliers [+ 5000 m² ]) et l?hébergement commercial (hôtels et
tourisme) avec la possibilité de changer de destination définie à l?article R.151-27 et de sous -
destination définie à l?article R.151-28 du Code de l?urbanisme sans autorisation préalable et en
permettant une réversibilité vers la destination initiale au bout de 30 ans par exemple.
Enjeu 2 : Promouvoir une incitation financière à la transformation des bureaux en logements
Dans le contexte économique actuel difficile et du fait de son rendement locatif brut espéré inférieur dans
le segment du logement que celui de l?immobilier tertiaire, l?ORIE propose 2 types de mesures incitatives
qui excluent tant la création de toute nouvelle taxe que de subventions publiques ; ce qui créerait des
dépenses supplémentaires pour l?Etat.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 114
- Redonner de l?intérêt au rendement brut locatif
- Exonération totale de la taxe annuelle sur le bureau et de la taxe foncière durant les travaux de
transformation. A compter de l?achèvement des travaux et lorsque l?habitat est occupé à 75%,
mettre en place une exonération de 50 % de la taxe foncière pendant 10 ans.
- Autoriser un amortissement accéléré des coûts de travaux de transformation.
- Réduire les coûts de cession d?actifs pour une transformation future
- Suspension pendant 10 ans des régularisations de TVA en cas de cession des actifs, ce qui
permettrait de réduire considérablement le prix de cession pour une transformation future. Cette
exonération de TVA devra être limitée aux baux d?habitation consentis sur des logements loués
nus à des particuliers.
- Faciliter les opérations de transformation sur l?aspect financier
- Mettre en place un accompagnement public et financier : à l?instar du prêt Gaïa qui permet
depuis 2005, de financer la construction de logements sociaux à travers des prêts à taux réduits,
l?ORIE propose que l?Etat mette en place un accompagnement financier public qui présenterait le
grand avantage de ne pas être synonyme de dépenses publiques supplémentaires. Les avantages
sont en effet multiples pour ce type de prêts publics :
? Modalités d?amortissement (jusqu?à 15 ans),
? Mobilisation sur plusieurs années (1 à 15 ans), couverture jusqu?à 100 % et exonération des
indemnités de remboursement en cas de revente.
- Améliorer la gestion et le financement des équipements publics
- La question des équipements et aménités publics que créent la création de nouveaux logements
est aujourd?hui traité par un mécanisme qui permet de gérer le financement des équipements
publics nécessités par la réalisation d?une opération : le PUP (Projet Urbain Partenarial).
Cependant, le mécanisme actuel est limité à une réflexion et gestion par projet. Afin d?assurer à
la fois les services publics et des péréquations économiques entre projets de différents
opérateurs, l?ORIE propose d?élargir cette gestion au cas par cas du PUP à une gestion par
ensemble de projets. »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 115
A11.10 : Contribution de « Surface + Utile » (acteur de l?Economie Sociale et Solidaire)
« Propositions pour faciliter l'usage des actifs tertiaires vacants
par les acteurs de l?Economie Sociale et Solidaire (ESS)
- Orienter vers le secteur de l'ESS la mise à disposition des actifs vacants à titre gracieux ou à des prix
décorrélés du marché en échange de l'exemption de la taxe sur les bureaux vides.
- Cet usage et cet avantage fiscal donne droit à l'appellation « espace économique de la transition »,
qui pourra donner lieu à d'autres mesures.
- A titre expérimental, les « espaces économiques de la transition » bénéficient d'une dérogation
temporaire aux règles de destination du PLU. Cet usage dérogatoire est alors réservé aux acteurs de
l'ESS / ou bénéficiant du statut de structure reconnue d'intérêt général ou d'utilité publique.
- Anticiper la possible longue durée de ces mises à disposition (pour les actifs les plus en difficulté) en
créant un statut de bail de long terme, sans motif de précarité, mais qui ne donne pas de droit à une
propriété commerciale de la part du locataire (statut du bail entre le bail précaire, le bail commercial, et le
bail dérogatoire).
- Laisser au propriétaire de l'actif vacant depuis plus de 2 ans le soin de faire occuper le bien par des
acteurs ESS, sans quoi la collectivité ou la préfecture pourront le réquisitionner pour le confier à un acteur
ESS ou pour une mission de service public, jusqu'à ce qu'un permis de construire purgé (ou autre
autorisation administrative) soit délivré ou qu'un bail commercial soit conclu. Le propriétaire échappe alors
à la taxe sur les bureaux vides. Cette disposition permettrait d'ajouter une possibilité d'usage d'intérêt
écologique et sociétal des actifs vides sans faire peser son organisation et sa gestion sur le propriétaire.
- Imposer aux collectivités de rendre public le stock d'actifs vacants sur leur territoire. Ces données sont
disponibles auprès de des services de Bercy mais presque jamais demandées par les collectivités.
- Ajouter la "lutte contre la vacance immobilière" dans les objectifs des OAP pour en faire un objectif
des collectivités dans leurs politiques d'urbanisme (1er alinéa du I de l?article L151-7 du code de
l?urbanisme). »
(ATTENTION: OPTION e ce 1.2.4.1. En prévoyant
que la majoration de 50% sera appliquée sur « le montant de la taxe calculé selon le présent article », le
dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 a entendu que cette majoration soit appliquée au
taux de cette taxe, majorée le cas échéant de 30% en application des dispositions de ce même article.
Ces dispositions ne sont pas inintelligibles.
2° Principe d'égalité devant les charges publiques.
En instituant une taxe sur les surfaces commerciales, le législateur a entendu favoriser un
développement équilibré du commerce. Il a, pour ce faire, choisi d'imposer les établissements
commerciaux de détail ayant une surface significative de vente.
En adoptant les dispositions contestées, il a entendu augmenter le rendement de cette taxe au profit du
budget de l'Etat.
En prévoyant que la majoration est applicable aux établissements dont la surface de vente est supérieure
à 2 500 mètres carrés, il a fixé un critère objectif et rationnel tant au regard de l'objet de cette majoration
que de l'objet de la taxe.
Eu égard aux taux de la taxe, cette majoration n'entraîne ni dans le montant de l'imposition ni dans les
effets de seuil de son barème une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.
Les dispositions de l'article 46, qui ne méconnaissent ni la garantie des droits ni aucune autre exigence
constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à la Constitution.
b) Extraits
1. Considérant que les députés et les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi
de finances rectificative pour 2014 ; qu'ils mettent en cause la conformité à la Constitution de son article
46 et de certaines dispositions de son article 72 ; que les députés contestent en outre la conformité à la
Constitution de certaines dispositions de son article 31 ainsi que la place des articles 19 et 106 en loi de
finances rectificative ;
- Sur la place de l'article 19 dans la loi déférée :
(?)
- Sur certaines dispositions de l'article 31 :
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 42
5. Considérant que le 3° du paragraphe I de l'article 31 insère dans le CGI un article 1407 ter ; que le
paragraphe I de cet article permet au conseil municipal, dans les communes classées dans les zones
géographiques mentionnées au premier alinéa du paragraphe I de l'article 232 du même Code, de décider
une majoration forfaitaire de la part communale de « la cotisation de taxe d'habitation due au titre des
logements meublés non affectés à l'habitation principale » ; que le paragraphe II de l'article 1407 ter
permet aux contribuables remplissant certaines conditions de bénéficier d'un dégrèvement de cette
majoration forfaitaire sur présentation d'une réclamation ; qu'en particulier, le 3° du paragraphe II permet
aux personnes « qui, pour une cause étrangère à leur volonté, ne peuvent affecter le logement à un usage
d'habitation principale » de bénéficier de ce dégrèvement ;
6. Considérant que les députés requérants contestent le critère de dégrèvement institué par le 3° du
paragraphe II de l'article 1407 ter du CGI ; que ce critère serait insuffisamment précis et méconnaîtrait
l'étendue de la compétence du législateur ;
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles
concernant? l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures » ;
8. Considérant qu'en prévoyant que le conseil municipal pourra instituer la majoration forfaitaire de la
part communale de taxe d'habitation due au titre des logements meublés non affectés à l'habitation
principale dans les communes classées dans les zones géographiques mentionnées au premier alinéa
du paragraphe I de l'article 232 du CGI, le législateur a précisément fixé les règles d'assiette de la nouvelle
majoration ; qu'il a également précisément défini les contribuables qui pourront obtenir, sur réclamation,
un dégrèvement de cette majoration ; qu'à cette occasion, le contribuable pourra demander le bénéfice
de l'application des dispositions de l'article L 277 du LPF ; qu'en particulier, en vertu du 3° du paragraphe
II de l'article 1407 ter du CGI, le dégrèvement de la majoration instituée par le paragraphe I du même
article pourra être obtenu notamment par le contribuable se trouvant dans l'impossibilité d'affecter le
logement à un usage d'habitation principale imputable à une cause étrangère à sa volonté ; que le grief
tiré de ce que le législateur n'aurait pas épuisé sa compétence doit être écarté ;
9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et
du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que
le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que législateur règle de façon différente des situations différentes
ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la
différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;
10. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la Déclaration de 1789 : « Pour l'entretien de la force
publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit
être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; que cette exigence ne serait
pas respectée si l'impôt revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de
contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives ; qu'en vertu de l'article 34
de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels
et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées
les facultés contributives ; qu'en particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, il doit fonder son
appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose ; que cette
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 43
appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges
publiques ;
11. Considérant que l'objet de la majoration instituée par l'article 1407 ter du CGI est d'inciter la personne
occupant un logement à un titre autre que celui de la résidence principale dans une zone qui se
caractérise par la tension du marché immobilier à donner à ce logement un usage de résidence
principale ; qu'il résulte des principes constitutionnels d'égalité devant la loi et les charges publiques que
la différence de traitement fiscal instaurée par cet article n'est conforme à la Constitution que si les critères
d'assujettissement retenus sont en rapport direct avec l'objectif poursuivi ; que ladite majoration de la taxe
d'habitation ne peut, dès lors, frapper que des logements meublés habitables, qui ne sont pas affectés à
l'habitation principale et dont l'absence d'affectation à l'habitation principale tient à la seule volonté de leur
occupant ;
12. Considérant qu'il ressort du 1° du paragraphe II de l'article 1407 ter du CGI que sont dégrevées de
la majoration les personnes contraintes de résider dans un lieu distinct de celui de leur habitation
principale « pour le logement situé à proximité du lieu où elles exercent leur activité professionnelle » ;
qu'il ressort du 3° du même paragraphe II que sont également dégrevés les contribuables notamment
pour des logements ayant vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet de travaux dans
le cadre d'opérations d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition ou pour des logements mis en
location ou en vente au prix du marché et ne trouvant pas preneur ; que, dans ces conditions, les critères
légaux de dégrèvement de la majoration de la part communale de la taxe d'habitation pouvant être
décidée par le conseil municipal ne sont pas contraires aux principes d'égalité devant la loi et les charges
publiques ;
13. Considérant que les dispositions du 3° du paragraphe I de l'article 31 doivent être déclarées
conformes à la Constitution ;
- Sur l'article 46 :
14. Considérant que l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 susvisée institue une taxe sur les surfaces
commerciales assise sur la surface de vente des magasins de commerce de détail, lorsqu'elle dépasse
400 mètres carrés, des établissements ouverts à compter du 1er janvier 1960 ; qu'elle s'applique aux
établissements dont le chiffre d'affaires annuel est supérieur ou égal à 460 000 ¤ ; que, pour les
établissements dont le chiffre d'affaires au mètre carré est inférieur à 3 000 ¤, le taux de cette taxe est de
5,74 ¤ par mètre carré de surface de vente ; que, pour les établissements dont le chiffre d'affaires est
supérieur à 12 000 ¤ au mètre carré, ce taux est de 34,12¤ ; qu'entre 3 000 et 12 000¤ de chiffre d'affaires
au mètre carré, le taux augmente en proportion de l'augmentation du chiffre d'affaires au mètre carré ;
que des taux particuliers s'appliquent à certaines catégories de commerce ;
15. Considérant que le montant de la taxe est majoré de 30% pour les établissements dont la superficie
est supérieure à 5 000 mètres carrés et dont le chiffre d'affaires annuel hors taxes est supérieur à 3 000¤
par mètre carré ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 44
16. Considérant que le 1.2.4.1. de l'article 77 de la loi du 30 décembre 2009 susvisée dispose que cette
taxe est perçue au profit de la commune sur le territoire de laquelle est situé l'établissement imposable
ou, le cas échéant, au profit de l'établissement public de coopération intercommunale ; que le cinquième
alinéa de ce 1.2.4.1. dispose que l'organe délibérant de l'établissement public de coopération
intercommunale ou, à défaut, le conseil municipal de la commune affectataire de la taxe peut moduler le
montant de la taxe de plus ou moins vingt pour cent ; que son dernier alinéa dispose que, pour les frais
d'assiette et de recouvrement, l'Etat effectue un prélèvement de 1,5 % sur le montant de cette taxe ;
17. Considérant que le paragraphe I de l'article 46 complète l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 par un
alinéa aux termes duquel : « Le montant de la taxe calculé selon le présent article et avant application de
la modulation prévue au cinquième alinéa du 1.2.4.1. de l'article 77 de la loi 2009-1673 du 30 décembre
2009 de finances pour 2010 est majoré de 50% pour les établissements dont la surface de vente excède
2 500 mètres carrés. Le produit de cette majoration est affecté au budget de l'Etat » ;
18. Considérant que les députés et les sénateurs requérants soutiennent que cette majoration est
instituée dans le but de compenser l'avantage que les entreprises de la grande distribution ont pu retirer
de l'application du « crédit d'impôt compétitivité emploi » ; que, d'une part, l'objectif poursuivi de
compenser, par une disposition fiscale, l'avantage conféré par une autre disposition fiscale porterait
atteinte à la garantie des droits ; que, d'autre part, la majoration ne serait pas en adéquation avec l'objectif
poursuivi dans la mesure où son champ d'application est plus restreint que celui du « crédit d'impôt
compétitivité emploi » ; qu'enfin, l'application de cette majoration de 50% de la taxe aux magasins de
commerce de détail alors que les entreprises de commerce électronique n'y sont pas assujetties
méconnaîtrait également l'égalité devant les charges publiques ;
19. Considérant que les sénateurs requérants soutiennent en outre que les dispositions de l'article 46
méconnaissent les principes d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi dans la mesure où l'absence de
précision sur les conditions dans lesquelles s'appliquent les diverses majorations de la taxe sur les
surfaces commerciales ne permet pas aux entreprises qui y sont assujetties de « prendre conscience »
de son taux effectif ; qu'en particulier l'articulation entre la majoration de 50% de la taxe et la modulation
qui peut être appliquée par les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale
ne serait pas claire ; qu'il en irait de même de l'éventuelle application à cette majoration du prélèvement
pour frais d'assiette et de recouvrement ;
20. Considérant que les sénateurs font enfin valoir que, pour les établissements disposant d'une surface
de vente supérieure à 5 000 mètres carrés, l'application cumulée de la majoration de 30% et de celle de
50% entraînerait une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ; qu'une telle rupture
serait accrue par l'application des autres majorations ; que serait d'ailleurs incohérente l'application du
prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement à une majoration perçue au profit de l'Etat ;
21. Considérant, en premier lieu, qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que
lui confie la Constitution et, en particulier, son article 34 ; que le plein exercice de cette compétence, ainsi
que l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles
4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, lui imposent d'adopter des dispositions suffisamment précises et
des formules non équivoques ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 45
22. Considérant qu'il ressort des termes mêmes des dispositions contestées que la majoration de 50%
qu'elles prévoient porte sur le montant de la taxe « avant application de la modulation » décidée par
l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou par le conseil municipal ;
que cette modulation, prévue au cinquième alinéa du 1.2.4.1. de l'article 77 susmentionné, ne porte que
sur le produit de la taxe perçue au profit de la commune ou de l'établissement public ; qu'il en va de même
des frais d'assiette et de recouvrement prélevés en application du dernier alinéa de ce 1.2.4.1. ; qu'en
prévoyant que la majoration de 50% sera appliquée sur « le montant de la taxe calculé selon le présent
article », le dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 a entendu que cette majoration soit
appliquée au taux de cette taxe, majorée le cas échéant de 30% en application des dispositions de ce
même article ; que ces dispositions ne sont pas inintelligibles ;
23. Considérant, en second lieu, qu'en instituant une taxe sur les surfaces commerciales, le législateur
a entendu favoriser un développement équilibré du commerce ; qu'il a, pour ce faire, choisi d'imposer les
établissements commerciaux de détail ayant une surface significative de vente ; qu'en adoptant les
dispositions contestées, il a entendu augmenter le rendement de cette taxe au profit du budget de l'Etat ;
qu'en prévoyant que la majoration est applicable aux établissements dont la surface de vente est
supérieure à 2 500 mètre carrés, il a fixé un critère objectif et rationnel tant au regard de l'objet de cette
majoration que de l'objet de la taxe ; qu'eu égard aux taux de la taxe, cette majoration n'entraîne ni dans
le montant de l'imposition ni dans les effets de seuil de son barème une rupture caractérisée de l'égalité
devant les charges publiques ;
24. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article 46, qui ne méconnaissent
ni la garantie des droits ni aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à
la Constitution ;
- Sur certaines dispositions de l'article 72 :
25. Considérant que les dispositions combinées des articles 145 et 216 du CGI régissent le régime fiscal
des sociétés mères, qui permet à ces dernières, sur option, d'être exonérées d'impôt sur les sociétés sur
les produits de participation reçus de leurs filiales ; que l'article 216 prévoit que les produits nets des
participations perçus au cours d'un exercice par une société mère peuvent être retranchés du bénéfice
net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges, fixée uniformément à 5% du
produit total des participations ; que l'article 145 détermine les conditions requises pour bénéficier du
dispositif prévu à l'article 216 ; que le 6 de cet article 145 fixe la liste des cas dans lesquels ce dispositif
n'est pas applicable ;
26. Considérant que le a) introduit au 6 de l'article 145 par le cinquième alinéa du paragraphe I de l'article
72 de la loi déférée ajoute à cette liste les « produits des titres prélevés sur les bénéfices d'une société
afférents à une activité non soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent » ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 46
En ce qui concerne la procédure :
27. Considérant que les sénateurs requérants font valoir que le cinquième alinéa de l'article 72 a été
adopté à l'issue d'un débat « tronqué », le Gouvernement n'ayant fourni « aucune explication de son
sous-amendement n° 586, aucune analyse du dispositif proposé, aucune évaluation, et aucune
information au Sénat » ; qu'aurait ainsi été méconnue l'exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité
des débats parlementaires ;
28. Considérant, toutefois, que la disposition contestée est issue d'un amendement et d'un sous-
amendement adoptés lors des débats devant l'Assemblée nationale en première lecture ; que cet
amendement et ce sous-amendement étaient accompagnés d'un exposé des motifs détaillant leur objet ;
qu'il s'ensuit qu'en tout état de cause le grief tiré de la méconnaissance de l'exigence constitutionnelle de
clarté et de sincérité des débats parlementaires manque en fait ;
En ce qui concerne le fond :
29. Considérant que les requérants soutiennent que la disposition contestée est contraire aux
dispositions des directives de l'Union européenne du 30 novembre 2011 et du 8 juillet 2014 susvisées ;
que cette disposition porterait en outre atteinte à des situations légalement acquises ou aux effets qui
pouvaient légitimement être attendus de telles situations, ainsi qu'au principe d'égalité devant la loi ; que
selon les sénateurs requérants, le a) du 6 de l'article 145 méconnaît l'objectif d'accessibilité et
d'intelligibilité de la loi ;
30. Considérant qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie la
Constitution et, en particulier, son article 34 ;
31. Considérant que la disposition contestée subordonne le bénéfice du régime des sociétés mères à la
condition que les bénéfices sur lesquels sont prélevés les produits des titres perçus par la société mère
soient afférents à une activité soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent ; qu'en faisant
référence au fait que les bénéfices doivent être « afférents à une activité soumise à l'impôt sur les sociétés
ou à un impôt équivalent », le législateur n'a pas permis d'apprécier les activités soumises à l'impôt au
sens de cette disposition ; qu'en particulier, celle-ci ne permet pas de savoir si cette appréciation
s'effectue pour les activités de la filiale, y compris lorsque cette dernière a été exonérée de l'impôt en
application du régime fiscal des sociétés mères, ou si elle s'effectue aussi pour les activités des filiales
de cette filiale ; qu'eu égard à l'imprécision qui résulte de cette indétermination, le législateur a méconnu
l'étendue de sa compétence ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les griefs des requérants, le
cinquième alinéa du paragraphe I de l'article 72 doit être déclaré contraire à la Constitution ;
- Sur la place de l'article 106 dans la loi déférée :
32. Considérant que l'article 106 modifie les dispositions du premier alinéa de l'article 100 de la loi du
24 novembre 2009 susvisée ; que le 1° de l'article 106 prévoit un report au 1er janvier 2020 de la date à
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 47
compter de laquelle il ne peut être dérogé au placement en cellule individuelle dans les maisons d'arrêt
au motif tiré de ce que la distribution intérieure des locaux ou le nombre de personnes détenues présentes
ne permet pas son application ; que le 2° de l'article 106 prévoit que des rapports sur l'encellulement
individuel devront être remis au Parlement et devront comprendre en particulier une information financière
et budgétaire relative à l'exécution des programmes immobiliers pénitentiaires ;
33. Considérant que, selon les députés requérants, cet article n'a pas sa place en loi de finances
rectificative ;
34. Considérant qu'eu égard aux dépenses pour le budget de l'Etat qu'entraînerait l'application des
dispositions de la loi du 24 novembre 2009 relatives à l'encellulement individuel dont le 1° de l'article 106
prévoit le report, ce 1° de l'article 106 trouve sa place dans la loi de finances rectificative ;
35. Considérant que la disposition prévoyant la remise de rapports d'information au Parlement relatifs à
l'encellulement individuel et comprenant en particulier une information financière et budgétaire est une
disposition relative à l'information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ; que
le 2° de l'article 106 trouve donc sa place dans la loi de finances rectificative ;
36. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le grief tiré de ce que les dispositions de l'article 106
ont été adoptées selon une procédure contraire à la Constitution doit être écarté ;
- Sur certaines dispositions de l'article 60 :
37. Considérant que l'article 60 modifie les articles 200 B, 244 bis A et 1529 du CGI ; qu'il a pour objet
de réformer le régime d'imposition des plus-values immobilières des personnes physiques qui ne sont
pas fiscalement domiciliées en France et des personnes morales ou organismes dont le siège social est
situé hors de France ;
38. Considérant que, dans le cadre de cette réforme, le 1. du paragraphe III bis inséré dans l'article 244
bis A par le c) du 2° du paragraphe I de l'article 60 prévoit que les plus-values réalisées par ces personnes
et organismes lors de la cession des biens ou droits immobiliers ou des parts ou actions de sociétés à
prépondérance immobilière sont soumises à un prélèvement au taux de 33 1/3 % ; qu'il prévoit toutefois
que les personnes physiques, les associés personnes physiques de sociétés, groupements ou
organismes dont les bénéfices sont imposés au nom des associés et les porteurs de parts personnes
physiques de fonds de placement immobilier mentionnés à l'article 239 nonies sont soumis à un
prélèvement au taux de 19% ; que, par dérogation au 1. du paragraphe III bis de l'article 244 bis A, le 2.
du même paragraphe prévoit que « le taux est porté à 75% lorsque les plus-values sont réalisées par ces
mêmes personnes ou organismes lorsqu'ils sont domiciliés, établis ou constitués hors de France dans un
Etat ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A » ;
39. Considérant que l'exigence d'égalité devant les charges publiques ne serait pas respectée si l'impôt
revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de contribuables une charge
excessive au regard de leurs facultés contributives ;
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 48
40. Considérant que les plus-values assujetties au prélèvement à un taux forfaitaire de 75% sont par
ailleurs assujetties aux contributions sociales sur les produits de placement prévues par l'article 16 de
l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, par l'article L 14-10-4 du Code de l'action sociale et des
familles, par l'article 1600-0 F bis du CGI et par les articles L 136-7 et L 245-15 du Code de la sécurité
sociale ; que le taux forfaitaire de 75% a pour effet de porter à 90,5% le taux d'imposition sur les plus-
values immobilières réalisées par les personnes ou organismes visés au 2. du paragraphe III bis de
l'article 244 bis A ; que, par suite, ce régime dérogatoire fait peser sur les contribuables une charge
excessive au regard de leur capacité contributive et est contraire au principe d'égalité devant les charges
publiques ; que, dès lors, le 2. du paragraphe III bis de l'article 244 bis A du CGI dans sa rédaction
résultant du c) du 2° du paragraphe I de l'article 60 doit être déclaré contraire à la Constitution ;
(?)
44. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question
de conformité à la Constitution,
Décide : 1° Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi de finances rectificative
pour 2014 : le quatrième alinéa du c du 2° du paragraphe I de l'article 60 ; le cinquième alinéa de l'article
72 ; (?) 2° Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de cette même loi : l'article 1407
ter du CGI, tel qu'il résulte du 3° du paragraphe I de l'article 31 ; le dernier alinéa de l'article 3 de la loi
72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et
artisans âgés, tel qu'il résulte de l'article 46.
c) Observations
I. 2° Sur le champ de la taxe et celui des dégrèvements, rapprocher des réserves du Conseil
constitutionnel quant à la taxe sur les locaux vacants (Cons. const. 29 décembre 2012 n° 2012-662 DC,
loi de finances pour 2013, cons. 134-139 : RJF 3/13 n° 335, XX).
II Même si le montant total des majorations et modulations pouvait conduire, pour les établissements
les plus importants, à une majoration du taux de base de plus de 100%, le taux maximum de la taxe
calculé en euros/m2 demeurait dans un rapport avec le chiffre d'affaires ne caractérisant pas une rupture
de l'égalité devant les charges publiques.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 49
3) Cons. const. 29 décembre 2012 n° 2012-662 DC, loi de finances pour 2013, cons. 134-139
a) Résumé
XX. Taxe sur les logements vacants (article 16 de la loi). La taxe sur les logements vacants dont le
législateur étend le champ, réduit la durée de vacance admissible, relève le taux, tout en exigeant une
occupation effective plus importante, n'est constitutionnelle que sous les trois réserves suivantes :
1° Ne sauraient être assujettis à cette taxe des logements qui ne pourraient être rendus habitables
qu'au prix de travaux importants et dont la charge incomberait nécessairement à leur détenteur.
2° Ne sauraient être regardés comme vacants des logements meublés affectés à l'habitation et, comme
tels, assujettis, en vertu du 1° du paragraphe I de l'article 1407 du CGI, à la taxe d'habitation.
3° Ne sauraient être assujettis des logements dont la vacance est imputable à une cause étrangère à
la volonté du bailleur, faisant obstacle à leur occupation durable, à titre onéreux ou gratuit, dans des
conditions normales d'habitation, ou s'opposant à leur occupation, à titre onéreux, dans des conditions
normales de rémunération du bailleur. Ainsi, doivent être notamment exonérés les logements ayant
vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet de travaux dans le cadre d'opérations
d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition, ou les logements mis en location ou en vente au prix du
marché et ne trouvant pas preneur.
b) b) Extraits
134. Considérant que le paragraphe I de l'article 16 modifie l'article 232 du code général des impôts relatif
à la taxe sur les logements vacants ; que son 1° donne une nouvelle rédaction de la première phrase du
premier alinéa de cet article, relatif à la définition des zones urbaines dans lesquelles cette taxe peut être
instituée ; qu'il assouplit les critères qui encadrent l'institution de cette taxe et étend son application aux
communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de cent cinquante mille habitants et
de moins de deux cent mille habitants ; que son 2° réduit de deux ans à un an le délai de vacance à
l'expiration duquel la taxe est due ; que son 3° modifie le tarif et relève le taux de cette taxe en le fixant à
12,5% de la valeur locative la première année d'imposition et 25% à compter de la deuxième ; que le 4°
porte de trente jours à quatre-vingt-dix jours consécutifs par an la durée d'occupation d'un logement en
deçà de laquelle ce dernier est regardé comme vacant ;
135. Considérant que l'objet de la taxation instituée par les dispositions de l'article 232 du code général
des impôts est d'inciter les personnes redevables de cette taxe à mettre en location des logements
susceptibles d'être loués ; qu'il résulte des principes constitutionnels d'égalité devant la loi et les charges
publiques que la différence de traitement fiscal instaurée par cet article à l'égard des personnes
redevables de cette taxe n'est conforme à la Constitution que si les critères d'assujettissement retenus
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 50
sont en rapport direct avec l'objectif poursuivi ; que ladite taxation ne peut, dès lors, frapper que des
logements habitables, vacants et dont la vacance tient à la seule volonté de leur détenteur ;
136. Considérant, en premier lieu, que ne sauraient être assujettis à cette taxe des logements qui ne
pourraient être rendus habitables qu'au prix de travaux importants et dont la charge incomberait
nécessairement à leur détenteur ;
137. Considérant, en deuxième lieu, que ne sauraient être regardés comme vacants des logements
meublés affectés à l'habitation et, comme tels, assujettis, en vertu du 1° du paragraphe I de l'article 1407
du code général des impôts, à la taxe d'habitation ;
138. Considérant, en troisième lieu, que ne sauraient être assujettis des logements dont la vacance est
imputable à une cause étrangère à la volonté du bailleur, faisant obstacle à leur occupation durable, à
titre onéreux ou gratuit, dans des conditions normales d'habitation, ou s'opposant à leur occupation, à
titre onéreux, dans des conditions normales de rémunération du bailleur ; qu'ainsi, doivent être
notamment exonérés les logements ayant vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet
de travaux dans le cadre d'opérations d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition, ou les logements
mis en location ou en vente au prix du marché et ne trouvant pas preneur ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 51
A4. Pour le logement intermédiaire (LLI) : crise du logement social, retour aux
sources
A l?issue d?une enquête aussi minutieuse que de coutume et faisant appel à sa clairvoyance
proverbiale autant qu?à sa perspicacité légendaire, Hercule Poirot conclurait que la crise du logement ne
doit rien à un accident imprévisible, mais qu?elle résulte d?un crime méthodiquement organisé ! S?agissant
de la qualification des faits, sans doute le plus « British » des Belges s?avancerait-il quelque peu du point
de vue de l?intentionnalité du forfait, difficile à imputer à ses auteurs ; pour autant, les faits constituent par
eux-mêmes un faisceau de preuves suffisant pour emporter notre intime conviction. Jugez-en donc !
A l?origine, le logement social est une idée du patronat humaniste chrétien, influencé par la
mouvance fouriériste du Saint-Simonisme en vogue sous le Second Empire et aux débuts de la Troisième
République conservatrice, que d?aucuns qualifieraient aisément de réactionnaire : celle qui s?est légitimée
dans nos campagnes en réprimant les Communards parisiens ! Il s?agit d?éteindre d?emblée la « lutte des
classes » menaçante en restaurant, autour de l?entreprise sociale, la communauté professionnelle et
humaine des travailleurs : quoi de plus respectable que cet idéal progressiste, inspiré par Pierre-Joseph
Proudhon critique véhément du socialisme de Marx taxé de répandre une « philosophie de la misère » ?
Mais, parfaitement en phase avec la nouvelle encyclique de Léon XIII, Rerum Novarum dans laquelle le
pape dénonce fermement la condition ouvrière, fruit du capitalisme industriel.
Cet idéal universaliste, qui rassemble dans des phalanstères constitués autour de « fabriques
industrielles » les ouvriers, les contremaîtres et jusqu?aux directeurs dans une communauté familiale et
solidaire, annonciatrice de la redécouverte du jardin d?Eden : le familistère de Guise, mais aussi les
« Cités ? jardins » d?Arcueil, de Suresnes, d?Asnières qui, au nombre d?une quinzaine, encerclent Paris,
et celle du Foyer Rémois érigée au « Chemin du Moulin vert ».
Ainsi est né le logement social, porté par une vision universaliste, humaniste et patronale qui donne
naissance aux « Habitations à Bon Marché » (HBM) issues d?initiatives privées, encouragées par la loi
Siegfried de 1894 qui ouvre l?accès des organismes de logement ouvrier à des exonérations fiscales et
aux prêts de la Caisse des Dépôts.
Dès lors, alimentée par le « laboratoire philanthropique » qu?est devenu le « Musée social », une
dynamique nouvelle tendant à inscrire le logement social dans l?action publique va se créer à travers les
lois Strauss (1906) qui légitiment l?interventionnisme communal en faveur des plus démunis, la loi
Bonnevay (1912) qui crée les offices publics d?HBM et que couronne la loi Loucheur (1928) qui décide de
l?intervention de l?Etat (central) en instituant une programmation de 200 000 logements sociaux.
Entretemps, la Première Guerre mondiale a entraîné le blocage des loyers qui perdurera jusqu?en 1948,
illustrant le principe de Lindbeck (1970) selon lequel une telle mesure, hormis par le moyen de
bombardements, est le plus sûr moyen de détruire une ville.
Pour autant, les ressources publiques adaptées à cette ambition prométhéenne font défaut et, après
la loi Ribot qui crée le Crédit Immobilier pour financer l?accession sociale à la propriété, c?est finalement
le plan Courant de 1953 qui s?appuie sur la « participation des employeurs à l?effort de construction »
(PEEC) qui mobilise les financements privés pour accompagner la volonté politique de l?Etat. Le logement
social va ainsi osciller entre volontarisme public et mobilisation, plus ou moins spontanée, de ressources
privées, non sans susciter maintes contradictions.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 52
Héritage de la vocation universaliste originelle, le plafond du revenu ouvrant droit au logement social
couvre 80% de la population, alors qu?il ne représente, au tournant du XXIe siècle, que 18% du parc de
résidences principales (soit, tout de même, cinq millions et demi d?habitations sur trente-deux millions),
ce qui n?est guère éloigné du maximum admissible selon les règles européennes qui tendent à ne pas
déséquilibrer le marché au détriment de l?offre privée.
En 2009, la loi Molle a tenté de réduire cet écart abyssal entre les droits subjectifs et l?offre objective
en instituant des surloyers auxquels n?échappent que ? 70% de la population !
Sauf qu?auparavant, deux « véhicules législatifs » sont venus accentuer les contradictions : en 2000,
la loi « Solidarité et Renouvellement Urbain » (SRU) a institué un quota minimal de logements sociaux
(20%, bientôt porté à 25% du parc existant) tout en interdisant, de fait, l?accession dans le parc
conventionné ancien qui était le seul moyen de refinancer durablement les constructions nouvelles?
Et surtout, la loi « DALO » institue « le droit au logement opposable » qui a pour effet de réserver
l?offre de logements sociaux aux publics les plus précaires, c?est-à-dire de les concentrer dans les
« quartiers prioritaires de la ville » où le bon sens le plus élémentaire commanderait de fixer, pour accéder
au parc social, des « planchers » de revenu, et non des « plafonds » !
Ainsi, le logement social, régi par les Pouvoirs Publics mais principalement financé par les
ressources privées du « 1% Logement », s?est détourné de sa vocation universaliste conçue, initialement,
au profit du monde des travailleurs, et n?apporte plus de réponse crédible aux classes moyennes. Se
trouve ouverte une voie royale au logement intermédiaire, financé par des fonds privés et propice à
l?accession à la propriété, à l?issue d?une dizaine d?années d?exploitation locative.
Il reste le plus difficile : aligner le droit sur la réalité, faire prévaloir l?éthique de responsabilité sur
l?éthique de conviction qui tend à s?imposer dans les démocraties d?opinion régies par l?émotion, à
l?encontre de la Raison promue par les Lumières !
Puisqu?il n?est guère envisageable d?accueillir les 70% de la population éligibles au logement social
dans les 20% affectées au « DALO », il ne reste qu?à inclure dans le logement d?intérêt public le logement
intermédiaire qui permet de retrouver la vocation universaliste d?origine, au profit notamment des salariés
de l?industrie et des services publics, qu?il est convenu de qualifier de « key workers ».
Ces logements conventionnés privés, dits « intermédiaires », peut-être ne faudrait-il pas les
décompter au titre des quotas de la loi SRU selon une parité parfaite vis-à-vis du logement social (1 pour
1) mais seulement pour moitié (0,5 pour 1) ; mais alors, il serait pour le moins raisonnable de surpondérer
l?offre « très sociale » (les PLAI) en les décomptant selon un barème ajusté (1,5 pour 1) de façon à
confirmer la priorité sociale de la politique du logement.
Il n?est guère d?autre voie qui permette d?éviter que ne se creuse, en matière de logement comme
dans bien d?autres domaines, le fossé entre le discours politique et la réalité, écart qui constitue,
aujourd?hui, la principale menace pesant sur l?appréhension du « Bien Public », la « Res Publica », jadis
la « Res Publica christiana », dans l?opinion.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 53
A5. Financement de la transformation des actifs immobiliers : les leçons du Baron
Haussmann
Lorsqu?en référence à l?heure de gloire de son grand-oncle à Austerlitz, Charles-Louis-Napoléon
Bonaparte, le 2 décembre 1851, réussit un coup d?Etat prévisible depuis son « élection de Maréchal »,
grâce à l?appui des campagnes, à la Présidence de la République pour un seul mandat de quatre ans, le
pays est en retard d?une révolution industrielle (mais aussi agricole), financière et urbaine.
Retard en matière de réseaux de voies ferrées : 10 000 km au Royaume-Uni ; 3 000 km en France,
incluant le Paris-Orléans et quelques lignes dans le Nord et dans l?Ouest. Retard en termes de liquidité
monétaire et de crédit : pour 1 000 francs de monnaie métallique, 140 francs de billets seulement sont en
circulation, dont plus de 100 émis par la Banque de France, versus 1 300 livres « papier » pour
1 000 livres « métal » au Royaume-Uni. Enfin, un million de Parisiens vivent dans une ville à peine sortie
du Moyen Age, versus deux millions et demi dans Londres, pourvue du tout-à-l?égout et éclairée au gaz.
Les Saint-Simoniens qui entourent Napoléon III vont apporter une véritable rupture dans tous les
domaines, projetant un souffle de modernité au-delà des frontières, avec les canaux de Suez et de
Panama initiés par Ferdinand de Lesseps ainsi que les voies ferrées, en Algérie notamment, lancées par
Prosper Enfantin?
Pour mettre un terme à l?hégémonie de la « Haute Banque » de la dynastie des Rothschild et de
quelques grandes lignées de banquiers d?affaires en situation oligopolistique, les Frères Pereire créent le
Crédit Mobilier qui finance les industries en plein essor ainsi que l?extraction minière (Saint Avold) autant
que le tourisme balnéaire (Arcachon, Deauville, Plombières, Aix-les-Bains) et la grande distribution (Le
Bon Marche), et le Crédit Foncier destiné à permettre la rénovation de Paris. L?homme chargé de cette
immense tâche sera le préfet de la Seine, le Baron Haussmann.
En dix-huit années d?une oeuvre inconcevable de nos jours, il va mener à bien la plus grande
opération d?urbanisme de l?Histoire de France, rénovant 60% de la surface de Paris, avant de doubler la
superficie de la capitale en lui rattachant les communes voisines : Neuilly, Auteuil, Passy, Montmartre,
etc. Le bilan est éloquent : sur 30 000 immeubles anciens, près de 20 000 sont démolis et 30 000 rebâtis ;
500 km de tout-à-l?égout et d?adduction d?eau courante sont réalisés avec les aqueducs et réservoirs
associés ; 65 km de voieries sont ouverts, le boulevard Raspail clôturant cet immense chantier en 1905.
Pour financer l?opération en échappant au contrôle tatillon du Conseil législatif (ancêtre de
l?Assemblée nationale sous le Second Empire), constitué de ruraux peu enclins à approuver les emprunts
destinés à embellir la capitale, il crée le « Caisse des travaux » qui est soustraite à la compétence
parlementaire, ce que Jules Ferry dénoncera comme une illégalité flagrante.
Il met alors en branle un « système » d?une redoutable efficacité. Il exproprie, progressivement,
toutes les parcelles interférant, fût-ce à la marge, avec ses projets d?urbanisme, sur la base d?estimations
modiques correspondant à l?absence de viabilisation, à la difficulté d?accès et à l?état de vétusté du bâti
existant. Le financement est assuré par le Crédit Foncier qui prend également en charge les opérations
d?aménagement, en échange de titres émis par la « Caisse des travaux », ainsi que la reconstruction à
laquelle sont priés de participer les investisseurs institutionnels. Toutefois, après leur valorisation par le
programme d?aménagement, les charges foncières sont revendues à un prix cinq à dix fois supérieur,
selon les quartiers, à la valeur d?expropriation.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 54
Ce mécanisme fonctionne admirablement pendant une dizaine d?années jusqu?au moment où,
l?Empire connaissant un affaiblissement continu avec sa conversion au libéralisme politique, le Conseil
d?Etat s?avise du caractère spoliateur de certaines décisions d?expropriation et les annule ; dès lors, c?est
la voie transactionnelle qui prévaudra, laissant à la Ville de Paris, par le truchement de la liquidation de
la « Caisse des travaux » avec l?effondrement de l?Empire en 1870, une dette de 1,5 milliard de francs-
or, faisant des Parisiens la population la mieux logée et la plus endettée du monde, la première
caractéristique compensant la seconde.
Par chance, la Première Guerre mondiale, vient rebattre les cartes des rapports de puissance dans
le monde et, concomitamment, des créances et dettes anciennes sur le plan national : en 1926, le franc
a perdu 75% de sa valeur-or de 1914 et 85% quelques années plus tard ; les finances de la Ville de Paris
sont, pour cette fois, sauvées par une tragédie européenne !
Le premier enseignement intemporel de cette belle histoire, c?est qu?en matière immobilière (et peut-
être même, mobilière), toute création de valeur rapide suppose une destruction de valeur préalable. Le
second, c?est que l?inflation facilite l?établissement de nouvelles rentes sur les décombres des anciennes :
l?histoire des « biens nationaux », sous la Révolution, illustre parfaitement ce principe, les propriétés du
clergé, en tous temps, se prêtant admirablement à ce processus de transformation en faveur de nouvelles
élites.
S?agissant donc de principes intemporels, il convient de s?en accommoder ; et même plus, d?en tirer
profit.
175 ans après le lancement des travaux du Baron Haussmann, nous sommes à la veille d?ouvrir un
chantier d?ampleur comparable, d?abord en Ile-de-France, mais qui est appelé à s?étendre rapidement à
toutes les métropoles, et même au-delà. C?est celui de la transformation des actifs : ensembles de
bureaux durablement vacants (de l?ordre de quatre millions de mètres carrés en Ile-de-France), centres
commerciaux à reconfigurer (250 sur le territoire national), immeubles tertiaires utilisés par les services
publics à réhabiliter, après adaptation au télétravail et, bientôt à la diffusion de l?intelligence artificielle
dans tous les processus de production? Enfin, il faudra envisager les mesures de massification des
rénovations thermiques, afin d?engager plus rapidement les provisions budgétaires affectées à « Ma
Prime Rénov » ?
Devant ce « mur d?investissement », il convient de s?inspirer des enseignements qui méritent d?être
tirés de l?action du Baron Haussmann ; en premier lieu, ce qui fait défaut aujourd?hui, ce ne sont plus les
ressources financières, ce sont des projets rentables, et comme la situation financière du pays interdit
d?escompter le recours aux fonds publics pour revitaliser le modèle par le subventionnement d?opérations
déficitaires, la seule solution envisageable consiste à susciter des projets créateurs de valeur, c?est-à-
dire, conformément à la méthode d?Haussmann, de transformation d?actifs préalablement dépréciés.
Les temps ont changé et le Conseil d?Etat veille au respect du droit de propriété, de rang
constitutionnel. Dès lors, pour amener les propriétaires d?actifs obsolètes (ou en voie d?obsolescence) à
accélérer des prises de décision de « write off » inéluctables, la seule voie offerte aux Pouvoirs Publics
consiste à adresser des signaux au marché : en conditionnant un mécanisme de défiscalisation des
réinvestissements de transformation au niveau de valorisation des « intrants » (c?est-à-dire de la charge
foncière) apportés dans le processus de transformation ; en préparant une loi foncière à effet différée de
dix-huit à vingt-quatre mois, centrée sur les espaces métropolitains et appliquée aux cessions des
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 55
personnes morales, et « sur-fiscalisant » les plus-values réalisées à l?occasion des cessions opérées au-
dessus du niveau moyen des charges foncières constatées sur le marché concerné.
Bien sûr, il reste à définir précisément les modalités de mise en oeuvre de ce dispositif à « double
détente » et pour citer Napoléon « La guerre est un art simple et tout d?exécution ». Mais une relance
significative et peu consommatrice de financement public ne sera possible qu?à travers cette vision
« haussmannienne » du réaménagement urbain.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 57
A6. Démembrements, vente à réméré et fiducie dans les transformations d?actifs
Depuis un quart de siècle, le thème des démembrements de propriété est de retour, tout particulier
sous la forme de la dissociation du foncier et du bâti conçue comme le moyen de faciliter un processus
d?accession progressive à la propriété via la constitution d?un droit réel (le bail réel solidaire ou BRS) et,
pour la collectivité territoriale concernée, de conserver la maîtrise d?une ressource de plus en plus rare,
le foncier constructible dans le tissu urbain.
En arrière-fond de cette tendance apparaît un phénomène récurrent dans l?histoire économique qui
est le surenchérissement de la rente foncière dans les espaces métropolitains, qui en vient à peser pour
40%, voire plus, dans le coût d?un programme immobilier.
I. Six siècles auparavant, le système féodal qui avait succédé à l?Empire romain avait aboli le régime
de propriété classique (usus, fructus, abusus) qui ne fut rétabli que par la Révolution pour promouvoir
une dissociation distinguant la propriété « éminente » du sol détenu par une seigneurie politique (laïque
ou religieuse) et donnant lieu au versement d?une redevance par le propriétaire « utile » organisant
l?exploitation économique du bien, par exemple par des « métayers », ou par des « journaliers », selon
les cas.
Le tout est que dans le contexte d?anémie de l?économie et du commerce de la guerre de Cent Ans,
le poids des redevances seigneuriales étant devenu excessif, de nombreuses tenures s?en trouvèrent
délaissées par « dégurpissement » des tenanciers et Charles VII, parvenu sur le trône, dut se saisir du
problème de la « relance » ; comment opéra-t-il, en accord sur ce point avec son rival anglais ? En
sacrifiant les redevances dues aux propriétaires « éminents » au profit de la création de richesses, c?est-
à-dire des flux de revenus, par les propriétaires « utiles ».
Ce précédent, jamais démenti par la suite, a condamné les démembrements, dans notre pays, en
tant que mode général de gestion de la propriété foncière, conduisant à réserver au financement par
l?impôt, c?est-à-dire par des personnes publiques, la détention durable de sols grevés des droits réels du
propriétaire « utile », c?est-à-dire du bâti acquis par des possesseurs privés. Ainsi, la puissance publique
assume-t-elle le prix de ses faiblesses ; après avoir favorisé l?inflation foncière par une politique constante
de solvabilisation de la demande (Cf. Pinel), elle s?est efforcée de palier ses effets à travers la création
d?organismes fonciers solidaires (OFS) destinés à porter la « propriété éminente » d?actifs devenus trop
onéreux, eu égard au pouvoir d?achat de l?acquéreur médian.
L?ensemble de ces considérations conduisant à distinguer deux types de démembrements, selon
l?horizon considéré :
- Un démembrement à long terme, dont l?horizon est supérieur à quinze ans et qui, dans les faits, ne
peut être assumé que par un financement public ou parapublic (PEEC) eu égard au risque de non
remboursement de la charge foncière par le possesseur du bien impécunieux, dont l?éviction par décision
de justice paraît fort improbable.
- Un démembrement à court terme, pour une durée d?une dizaine d?années, voire au maximum pour
quinze ans, incluant une option de cession du bâti à un bailleur institutionnel (avec maintien dans les lieux
de l?occupant devenu locataire) ou de rachat de la charge foncière, à cette échéance.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 58
En d?autres termes, le démembrement doit correspondre à une période transitoire (Cf. le PSLA,
quelque peu détourné de sa finalité du fait du taux de TVA de 5,5%, très avantageux), la valorisation du
bien n?étant rendu possible que par la reconstitution de la pleine propriété.
II. C?est dans cette perspective qu?une nouvelle dynamique pourrait être amorcée dans le cadre de la
transformation d?actifs immobiliers. Le champ d?application de transferts de propriété « réversibles »
pourrait s?appliquer à divers scenarii :
- La transformation d?actifs détenus par des SCPI, dans l?hypothèse où les souscripteurs
souhaiteraient conserver tout ou partie des actifs transformés.
- La mise aux normes de copropriétés ou de patrimoines privés détenus par des propriétaires ne
disposant pas des ressources nécessaires pour financer une rénovation thermique.
Dans ce cadre, diverses formules pourraient être explorées :
- La vente à réméré de la nu-propriété du bien ;
- La constitution d?une fiducie destinée à externaliser la requalification des actifs, sous condition de
dédommagement du fiduciaire, de manière à restaurer la commercialité du bien.
Le développement de formules susceptibles de mobiliser des financements de marché doit s?inscrire
dans un cadre légal clarifié et dans la perspective d?un remembrement à court/moyen terme. L?hypothèse
d?une reprise par un bailleur institutionnel et du maintien dans les lieux du propriétaire sous statut locatif
doit alors être sérieusement envisagé.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 59
A7 Revue de presse
Revue de presse rétrospective, l?occasion d?une simple crise conjoncturelle, alors les technologies
numériques n?étaient guère diffusées et que les métropoles naissantes n?avaient pas atteint un point de
saturation.
Articles parus en 1994, année de parution du rapport Darmon
Les Echos ? En dépit de la chute des prix, la construction de bureaux s'est emballée en 1993
Mercredi 26 janvier 1994
Alors que la crise immobilière s'est déclenchée à la mi-1990 pour ne cesser de s'aggraver depuis, la
construction de bureaux n'a jamais été aussi forte que l'année dernière.
Avec 14,42 millions de mètres carrés de bureaux, Paris concentre 40 % des bureaux de l'Ile-de-France,
selon les statistiques de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme de la Région Ile- de-France, et la volonté
de la Ville de Paris de donner un coût d'arrêt à la construction de bureaux apparaît bien tardive. Dans
une étude sur les bureaux parisiens publiée début janvier, l'Observatoire régional de l'immobilier
d'entreprise (ORIE) souligne que de 1985, l'année de suppression de l'agrément-constructeur, à la fin
1992, plus de 1,4 million de mètres carrés de bureaux ont été mis en chantier dans la capitale : 722.000m2
dans les arrondissements de l'Ouest, 158.000 m2 dans le Centre et 546.000 m2 à l'Est.
L'Observatoire ajoute que si 1985 a été le point de départ de l'envol de la construction de bureaux en Ile-
de- France, à Paris il a fallu attendre 1989, au plus fort de la spéculation immobilière. Cela explique
beaucoup des déconvenues enregistrées par les banques et les promoteurs. Rappelons que, de juillet
1987 à juillet 1990, les prix de vente des bureaux et des logements ont doublé. Et dans le fameux
« triangle d'or », ils ont quadruplé entre 1985 et juillet 1990 ! Quand en 1985, le mètre carré se vendait
25.000 francs avenue Montaigne, il atteignait le record de 110.000 m2 fin 1988 !
Alors que, dans l'Ile-de-France, la construction de bureaux ne cesse de décroître depuis 1991, les mises
en chantier se sont accélérées à Paris au cours des trois dernières années. La capitale se trouve donc
dans une situation paradoxale, avec un niveau très élevé de stocks de bureaux vacants, représentant
environ 21 % du total des surfaces vides de l'Ile-de-France, et une production qui reste forte. De 1990 à
1992, les promoteurs ont ainsi engagé la construction de plus de 1 million de mètres carrés, dont 585.000
m2 compensent de fait la démolition de bureaux jugés obsolètes. Et, en 1993, trois ans après le
déclenchement de la crise immobilière, la construction ne ralentit toujours pas. Au contraire, avec 315.000
m2 de bureaux autorisés et 337.000 m2 mis effectivement en chantier, la ville enregistre le plus haut
niveau de construction de la décennie (voir graphique).
Ces mises en chantier ont un peu profité à l'Est parisien. Selon l'ORIE, c'est le douzième arrondissement
qui a enregistré le plus de changements depuis 1985 avec la création des ZAC de Bercy et de Reuilly.
Par contre dans le neuvième, la différence entre les démolitions et reconstructions aboutit à un solde net
négatif (- 14.200 m2). Dans le huitième, le solde démolition-construction est légèrement positif (+ 8.800
m2). Ces deux arrondissements gardent très nettement leur vocation de quartier d'affaires puisqu'ils
totalisent toujours 33 % des bureaux intra-muros. Le rééquilibrage vers l'Est parisien est encore timide.
Dans huit arrondissements, la surface de bureaux mise en chantier depuis 1985 est restée inférieure à
10.000 m2, soit 12 % du total des opération commencées à Paris.
Sachant que plus de 90 % des bureaux lancés depuis 1985 le sont en blanc, le stock de bureaux vacants
n'a jamais été aussi abondant. A la fin de 1993, Bourdais l'estimait à 1,3 million de mètres carrés, sachant
que 400.000 m2 vont encore alourdir cette donne en 1994. Les grands programmes comme Atlantique
Montparnasse, Etoile/Saint-Honoré, Chancelier Adenauer, Washington Plazza attendent le client.
L'année dernière, la demande placée n'a, selon Bourdais, pas dépassé 400.000 m2. La ville a donc tout
intérêt à encourager les propriétaires à transformer leurs bureaux vides en logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 60
Le Monde ? Les 24 propositions du rapport Darmon : 800 000 mètres carrés recyclables, l'Etat doit
aider à transformer des bureaux en logements
Jeudi 15 septembre 1994
Il est possible de transformer environ 800 000 mètres carrés de bureaux vides en logements, dont la
moitié à Paris, mais l'Etat doit aider financièrement ces opérations, estime un rapport rendu public
mercredi 14 septembre.
Transformer les bureaux vides en logements. Lorsque l'idée est apparue la première fois, à la fin 1992,
elle a suscité un torrent de scepticisme. Ensuite, certains l'ont vue comme une panacée permettant de
résoudre à la fois les gigantesques stocks de bureaux vacants (5 millions de mètres carrés,
majoritairement en région parisienne) et la pénurie chronique de logements. Pour se faire une idée exacte
sur le sujet, le ministre du logement, Hervé de Charette, a donc demandé il y a quelques mois à Jacques
Darmon, président de la Banque de financement et de Trésorerie, un rapport, publié mercredi
14 septembre.
Cette transformation est tout à fait possible et, bien menée, elle permettrait de résoudre 40 % du « stock
structurel » de bureaux (c'est-à-dire des mètres carrés excédentaires par rapport à ce que justifie la
fluidité normale du marché), que l'auteur estime à environ 2 millions de mètres carrés. Ces 800 000
mètres carrés recyclables seraient situés pour moitié à Paris (soit l'équivalent d'une année de construction
neuve de logements dans la capitale).
Contrairement à une idée répandue, ils ne se trouveraient pas dans les immeubles haussmanniens,
anciens logements transformés une première fois en bureaux, qui continuent d'être recherchés. M.
Darmon distingue, en revanche, deux autres « gisements » : les bureaux anciens de certains quartiers
résidentiels, bien insérés dans le tissu urbain et donc, faciles à reconvertir ; ceux situés dans des zones
périphériques mal situées et qui exigent un important accompagnement de la collectivité (transports,
équipements publics...).
Vu leur coût, les opérations de transformations ne pourront toutefois se faire sans l'aide de l'Etat, surtout
lorsque les bureaux concernés appartiennent à de petits propriétaires qui doivent déjà se résoudre à
accepter une décote importante de leur bien ou de sa rentabilité. Le rapport propose donc vingt-quatre
mesures de deux natures : d'une part, une levée de toute une série d'obstacles légaux et réglementaires
freinant ou empêchant la transformation ; d'autre part, une aide sonnante et trébuchante, temporaire et
facile à comprendre.
Parmi les premières, l'auteur propose une exemption de permis de constuire dans certains cas et la
dispense de créer un parking pour chaque logement créé. Dans les secondes, on relèvera notamment
une subvention temporaire de 1 000 francs par mètre carré transformé, plafonnée à 50 ou 60 000 francs
par logement créé et la possibilité de déduire du revenu foncier les dépenses d'amélioration destinées à
transformer un local en logement.
Estimant que tout logement transformé peut être considéré comme du neuf, M. Darmon propose
notamment que les premiers acheteurs puissent bénéficier de la déduction fiscale dite " Quilès-
Méhaignerie ". De même, les acquéreurs de bureaux destinés à être transformés en logements se
verraient appliquer des droits de mutation à taux réduit des logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 61
Le Monde ? Prochaines mesures pour transformer des bureaux en logements
Vendredi 16 septembre 1994
La transformation des bureaux en logements est " un devoir national ", a estimé, mercredi 15 septembre,
le ministre du logement, Hervé de Charette, lors de la présentation du rapport Darmon sur ce sujet (le
Monde du 15 septembre). " Dans la mesure où cette transformation est techniquement faisable, peut-on
accepter de rester l'arme au pied alors que, dans le même temps, perdure la crise du logement social et
du logement tout court ? ", s'est interrogé M. de Charette. Le rapport Darmon estime que 800 000 mètres
carrés de bureaux vides peuvent être reconvertis en logements, dont la moitié à Paris. La mesure la plus
spectaculaire qu'il préconise est une prime temporaire de 1 000 francs au mètre carré, plafonnée, qui
coûterait, selon l'auteur, 250 millions de francs en trois ans. Le ministre devrait prendre des décisions
avant la fin de l'année.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 62
Les Echos supplément immobilier ? Premières réalisations et beaucoup de projets : recyclage des
bureaux en logements : le doute
Jeudi 22 septembre 1994
Des projets de plus en plus nombreux, des opérateurs qui se laissent convaincre, un ministre décidé à
aller de l'avant : l'idée de transformer des bureaux en logements entre peu à peu dans les esprits et dans
les faits. Mais le scepticisme domine toujours chez les opérateurs. Etat des réflexions une semaine après
la publication du rapport Darmon.
« Quand il n'est plus possible de louer un bureau à plus de 1.400 francs le mètre carré par an, il vaut
mieux le transformer en logement. » Samir Rayess, le patron d'UFFI, un « poids lourd » de l'immobilier
avec un parc géré de plus de 5 millions de mètres carrés de bureaux, a décidé de franchir le pas. Son
projet - créer 48 logements PLA ou PLI dans un ancien immeuble de bureaux à Chatou (Yvelines) - a
d'ailleurs été primé cet été par le plan construction et architecture (PCA). Avec, comme principaux
arguments : l'écart de loyer entre logement et bureau s'atténue, la demande des entreprises se concentre
sur le neuf et les centres-villes.
Devenus obsolètes, de petits immeubles d'entreprise situés en périphérie se découvrent ainsi une
nouvelle vocation. A Vaucresson (Hauts-de-Seine), le cabinet d'architectes 2AD propose la mutation de
3.500 m2 de bureaux en une cinquantaine de logements locatifs. « Le cadre résidentiel, entouré
d'espaces verts, encourage cette opération », dit un des concepteurs, qui ajoute que le projet revient « 25
% moins cher que la construction neuve ». A Rouen, en plein centre-ville cette fois, la Caisse régionale
d'assurance-maladie a réalisé 142 logements d'étudiant dans un immeuble de bureaux, avec une
subvention de la ville (2 millions de francs). L'ensemble sera inauguré le 1er octobre prochain.
De telles expériences se multiplient aujourd'hui avec la bénédiction du PCA qui peut financer les études
de faisabilité (jusqu'à 40.000 francs). Leur aspect expérimental l'emporte encore souvent sur leur viabilité
économique. Qu'importe : jusqu'à présent, les projets recensés n'émanaient que de la Régie Immobilière
de la Ville de Paris (RIVP), qui bénéficie de prêts intéressants de la mairie (Les Echos Immobilier du 21
avril). Seuls les pouvoirs publics croyaient vraiment aux vertus de ces transformations, à la fois pour
résorber les stocks de bureaux vides et pour résoudre la crise du logement.
800.000 m2 à transformer en dix ans
Dorénavant les professionnels de l'immobilier suivent de près ces initiatives, tout en gardant l'oeil rivé sur
leur calculette. La rentabilité d'abord. De ce point de vue, Auguste-Thouard est sans doute l'un des
premiers à envisager sérieusement la question. La transformation de bureaux en logements, notamment
à Paris, devient économiquement intéressante, juge ainsi Jean-Marie Forestier, président du directoire
d'Habitat Foncier (ATHF), filiale du groupe. Car, après des baisses importantes, le prix des bureaux se
retrouve aujourd'hui au niveau et parfois même en dessous de celui des logements. « Le loyer moyen
d'un appartement parisien est de l'ordre de 1.200 francs/m2 /an, et celui d'un bureau s'en rapproche » ,
précise Jean-Marie Forestier.
La valeur vénale des bureaux de la capitale tend elle-même à devenir inférieure à celle des logements,
ajoute-t-il. Et de citer l'exemple de l'opération réalisée récemment par le Sultan de Brunei, qui vient de
racheter les anciens bureaux d'IBM, place Vendôme, une des adresses les plus cotées de Paris, pour en
faire des appartements. Une opération de prestige uniquement ? Elle révèle cependant un nouvel état
d'esprit de la part des acteurs du marché.
Le gouvernement milite en ce sens, au nom d'un « impératif économique et social » à assumer d'urgence.
On ne peut en effet opposer indéfiniment 4 millions de mal-logés à 5 millions de mètres carrés de bureaux
vides en région parisienne. Un chiffre donné la semaine dernière, lors de la présentation du rapport
Darmon, est éloquent : la valeur vénale du parc de bureaux parisiens s'élève à 800 milliards de francs.
Toute mesure à même de rééquilibrer le marché et donc de limiter la baisse de cette valeur (une décote
de 20 % « pèse » 160 milliards) est bienvenue...
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 63
Un premier coup de pouce a été donné dans la loi Habitat adoptée en juillet dernier. Désormais, il est
impossible de revenir pendant treize ans à l'affectation primitive d'un bureau transformé en logement,
sans autorisation préfectorale. La loi accorde également une réduction d'impôts pour investissement
locatif (réduction Méhaignerie représentant 10 % du prix de l'acquisition dans la limite de 30.000 francs
pour un célibataire, le double pour un couple marié, à étaler sur deux ans), sous réserve que l'opération
soit réalisée avant fin 1997.
Une rentabilité incertaine
Il y a tout juste un an, la Ville de Paris s'était, elle aussi, engagée en faveur des transformations. Les élus
avaient alors décidé, dans le cadre de l'élaboration du nouveau plan d'occupation des sols (POS),
d'exonérer ces opérations de l'obligation de créer des places de stationnement. En attendant, la
compensation financière à verser en cas de non-réalisation des parkings a été ramenée de 50.000 francs
au montant symbolique de 10 francs.
Le rapport Darmon va plus loin. Pour transformer 800.000 m2 de bureaux en Ile-de-France en dix ans, le
document propose une série de simplifications administratives et d'incitations financières. Une prime de
1.000 francs par mètre carré transformé, plafonnée à 60.000 francs, va ainsi être prochainement soumise
au législateur : en quelque sorte, un dispositif semblable à la « prime d'arrachage » accordée aux
viticulteurs. Le document suggère que ces opérations bénéficient également des mêmes droits que la
construction de logements classiques (accès aux prêts, avantages fiscaux).
En dépit de ces avancées, le scepticisme reste de règle parmi les opérateurs immobiliers. Echaudés par
la crise immobilière, banquiers et investisseurs institutionnels n'apparaissent guère pressés de se lancer
dans l'aventure ; au bout de leurs comptes, la rentabilité ne paraît pas garantie sur facture. C'est qu'en
termes de revenus annuels de location les appartements ne l'emportent toujours pas sur les bureaux à
Paris. Avec une moyenne de 100 francs/m2/mois pour la location d'un appartement, soit 1.200
francs/m2/an, on est encore loin des 2.000 francs que peut rapporter en moyenne un mètre carré de
bureau. « Sans compter les charges qui pèsent sur les propriétaires de logements, soit une perte
supplémentaire de 20% » , souligne Michel Pariat, directeur du département des investissements à l'UAP.
Parcours du combattant
S'y ajoute le fait qu'un immeuble de bureau, moins cher à l'achat, sera plus rapidement rentabilisé que
son équivalent destiné à l'habitation. Patrick Dallemagne, de la Fédération nationale de l'immobilier
(FNAIM), faisait récemment état d'une étude démontrant que la rentabilité locative brute d'un bureau
(7,5% à 8%) restait très largement supérieure, de l'ordre de 60%, à celle du logement dit du « secteur
libre » (5% à 5,5%). « Transformer un bureau en logement revient à diviser par deux ou trois la rentabilité
nette et à perdre sur la valeur vénale du bien » , concluait l'expert.
Résultat : à Paris, mises à part les opérations de la ville, les seuls grandes transformations de bureaux
en logement ne se font souvent que par le jeu des compensations. La Société Générale a ainsi entrepris
la reconversion de 5.000 m2 de bureaux en 76 logements dans le 16e et le 9e arrondissements, en
échange d'une surface équivalente au Trocadéro pour un centre tertiaire. Mais les surcoûts sont
importants. De 6.000 francs le mètre carré pour une construction traditionnelle, on passe en effet
couramment à 10.000 francs pour une réhabilitation, en raison notamment de la hauteur des plafonds.
Sachant que les appartements réalisés, d'une surface moyenne de 100 m2, ont, avec des loyers de
10.000 à 14.000 francs par mois, quelque difficulté à trouver preneur.
Il est vrai que les résultats des calculs économiques sont radicalement différents selon que l'on se situe
dans les beaux quartiers parisiens (la valeur du bureau y excède largement celle du logement) ou dans
la périphérie de la capitale, voire en province.
Incertaine, la transformation requiert en outre des trésors d'énergie. Un véritable parcours du combattant
! Des règlements de copropriété à modifier en cas d'immeubles mixtes, au problème du non-
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 64
remboursement des taxes sur les bureaux amenés à disparaître, le chemin est semé d'embûches
administratives. Entre les déclarations d'intention et la réalité, le fossé peut être important. Aucune
réponse n'a enfin été apportée à la demande de remboursement de la TVA, lors de travaux de
transformation, sujet de préoccupation souvent exprimé par les opérateurs.
Bien que convaincu des atouts de la formule, qui permet de contourner l'écueil du foncier, le président de
la Fédération nationale du bâtiment, Jean Domange, juge que la transformation de bureaux en logements
« ne va pas bouleverser le paysage de l'immobilier ». « Il faut laisser le marché évoluer de lui-même,
conclut de son côté Alain Lambolley, président de la Sogeprom, filiale de promotion de la Société
Générale. Les beaux immeubles garderont leur destination, alors que les mal fichus redeviendront, selon
les cas, bureaux ou logements. » Le débat entre les adeptes de la transformation et les sceptiques a
encore de beaux jours devant lui.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 65
Les Echos ? L'encombrant trésor immobilier des services publics
20 octobre 1994
Les administrations et les grandes entreprises publiques ont pris conscience de la valeur de leur
patrimoine. L'immobilier devient un poste stratégique, comme dans le privé. Valorisation, transformation,
promotion, commercialisation ? Comment disposer des biens publics ?
A chacun son boulet. Si les promoteurs privés se débattent avec des millions de mètres carrés vides, les
administrations et les entreprises publiques sont assises, elles, sur un encombrant trésor. Des
immeubles, des terrains, d'anciens sites industriels souvent en centre-ville, un patrimoine qu'il ne s'agit
plus seulement de posséder, mais de gérer.
Cette volonté de mettre en place une politique immobilière a moins de dix ans. Elle a été inspirée à la
SNCF par la LOTI (loi d'orientation des transports intérieurs) de 1982 et, à d'autres entreprises publiques,
par la prise de conscience que la rentabilité de l'activité immobilière pourrait aider à rééquilibrer les
comptes d'exploitation. Elle paraît d'autant plus nécessaire aujourd'hui que les biens de l'Etat (répertoriés
dans le TGPE, le tableau général des propriétés de l'Etat, à la direction générale des Impôts) ont
longtemps été peu entretenus, ses locaux mal adaptés à l'évolution des conditions de travail, ses terrains
inutilisés souvent laissés en friche.
« Les préoccupations sont pourtant les mêmes parmi les professionnels de l'immobilier, qu'ils soient
publics ou privés : ne pas perdre d'argent et si possible en gagner , explique Georges du Halgouet,
directeur général adjoint chez Bourdais. Lorsqu'il s'agit de locations, les administrations tentent de
renégocier les baux. En cas de cession ou d'achat, les procédures sont plus longues parce que le public
souffre d'une certaine inertie et ne peut disposer librement d'un bien qui appartient à l'Etat. Mais le secteur
s'est doté, depuis peu, de structures adéquates, très efficaces. »
Inventer de nouveaux usages
Le secteur public est confronté aux mêmes efforts d'économie et de meilleure gestion que les entreprises,
pour lesquelles l'immobilier représente désormais le deuxième poste après les salaires. Mais
l'administration ne se bat pas tout à fait avec les mêmes armes. Si un ministère ou un établissement
public peut décider, seul, de vendre un immeuble ou un terrain, c'est au service des Domaines, à la
direction générale des Impôts, que revient la délicate estimation. « L'avis que nous donnons représente
la garantie que des biens publics ne seront pas bradés, précise Jean Lemierre, directeur général des
Impôts. Nos experts calculent une valeur de référence qui correspond au prix du marché. Notre avis n'est
pas impératif, mais il est respecté dans la majorité des cas. »
En fait, selon certains directeurs immobiliers, les Domaines ont plutôt la réputation d'être décalés par
rapport à ce marché. Trop bas en période de hausse, trop haut en période de faibles transactions, bref,
pénalisant pour un patrimoine qui, vu son état ou sa taille, est déjà difficile à vendre.
Qu'il s'agisse de gares de triage désaffectées, d'entrepôts, d'anciennes usines à gaz, ces hectares publics
ne sont pas cessibles en l'état. Quand ils ne sont pas inaliénables, comme les 985 hectares constructibles
qu'Aéroports de Paris (ADP) gère et aménage grâce à une AOT, une autorisation d'occupation temporaire
du domaine public, délivrée pour soixante-dix ans au maximum.
En accord avec les communes sur lesquelles ses terrains sont implantés, l'Etat doit d'abord les déclasser
et les réintégrer au plan d'occupation des sols en leur inventant un nouvel usage (espaces verts, zone
d'activité, ZAC...). La procédure est longue, complexe et suppose de multiples négociations avec des
maires, pressés de récupérer, en dépensant le moins possible, des emplacements intéressants pour des
opérations immobilières. Elle est menée aujourd'hui par des structures que des établissements, comme
la SNCF, la RATP, EDF ou GDF, entre autres, ont mises en place.
H4 Valorisation (EDF), Espaces Ferroviaires, la Société Foncière et Immobilière du Gaz (SFIG), sont des
filiales qui achètent les terrains de leur société mère, parfois en concurrence avec d'autres promoteurs.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 66
A elles, ensuite, de viabiliser ces hectares, de financer des études d'aménagement, de mener la
discussion avec la collectivité locale pour les revendre au meilleur prix. « Nos objectifs annuels varient
évidemment en fonction des prix du marché, explique Jean-Pierre Pronost, directeur de l'aménagement
à la SNCF, mais les contrats de plan signés avec l'Etat indiquent les ordres de grandeur : 600 millions à
tirer des ventes, 800 millions des concessions et des revenus des loyers. Cela paraît négligeable pour un
chiffre d'affaires de 57 milliards de francs, beaucoup moins par rapport à l'excédent brut d'exploitation qui
est de 7 milliards. »
Jusqu'à la promotion
La Poste, par le biais de sa toute jeune direction nationale de l'immobilier, a cédé en 1993 pour 300
millions d'actifs. Objectif : de 400 à 500 millions au cours des trois prochaines années. Ce « service à
compétences nationales », qui n'est pas une filiale, ne vend rien sans avoir étudié et créé au préalable
des droits à construire. Mais il refuse pour l'instant d'aller plus loin. H4 ou Espaces Ferroviaires, de leur
côté, vont jusqu'à la promotion ou la copromotion et la commercialisation, avec deux avantages évidents
sur des sociétés immobilières privées : un portage foncier nul et une très bonne connaissance des
terrains, comme du fonctionnement du propriétaire.
Soucieux d'une bonne gestion sur tout le territoire, les établissements publics commencent également à
imposer à leurs directions régionales une politique de loyers internes. « Pour l'instant, les frais
d'amortissement qui sont pris en charge par les chefs d'unité d'exploitation ne reflètent absolument pas
la valeur patrimoniale du bâti, souligne Daniel Paccoud, directeur de la SFIG. Ils sont voisins de zéro
dans l'ancien, chers dans le neuf. A partir de janvier 1995, un loyer sera calculé en fonction de la valeur
actualisée au prix du marché des mètres carrés utiles. Il s'agit évidemment de flux internes mais qui
permettront aux directions régionales de décider seules de se regrouper sur moins de mètres carrés pour
faire des économies. »
L'inertie n'est pas forcément un frein
Les administrations n'en sont pas encore là. Globalement, la tendance est plutôt au resserrement des
effectifs (- 1,5 % par an dans la fonction publique) et à la rationalisation de l'occupation des surfaces.
L'Université s'étend (et vient de racheter 19.000 mètres carrés à IBM à Boulogne), l'Assistance Publique-
Hôpitaux de Paris manque de place et construit des logements pour son personnel dès qu'elle parvient à
dégager des réserves foncières. A ces deux exceptions près, les organismes publics, lorsqu'ils le peuvent,
essaient plutôt de regrouper leurs implantations et de s'inventer une gestion. Mais leur mission s'arrête
le plus souvent là où commence le risque. Et la plupart n'ont même pas encore atteint la première étape,
celle de l'inventaire, sans parler des outils de valorisation : une stratégie et des spécialistes pour
l'appliquer.
La question ne se pose même pas pour certains, comme la Justice, dont 80 % du parc est « à usage
indéfini », ayant donc tous les droits du propriétaire sauf la vente. Les Armées, dont la restructuration
implique la cession de terrains militaires immenses, sont allées plus loin mais pas jusqu'à l'aménagement.
Et il n'est pas si fréquent qu'une société d'économie mixte ou même une ville soit prête à acheter en bloc
plusieurs centaines d'hectares dont il faudra ensuite financer la transformation. « C'est aussi un manque
à gagner pour l'Etat qui est obligé de vendre à bas prix, ajoute Alain Villaret, chef de la mission pour la
réalisation des actifs immobiliers au ministère de la Défense. Mais, pour l'instant, ni l'aménagement ni la
promotion ne sont envisagés. Les établissements publics peuvent mettre en place des filiales. Pour les
administrations, c'est plus compliqué. »
Jusqu'à il y a peu, celles-ci n'avaient d'ailleurs aucun intérêt à aller se loger ailleurs, mieux ou moins cher.
C'est seulement depuis la circulaire Cresson de février 1992 qu'elles sont autorisées à réintégrer dans
leur budget propre 90 % de la recette d'une cession immobilière. Avant cette date, l'argent retournait dans
les caisses de l'Etat qui décidait de sa nouvelle affectation.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 67
« Aujourd'hui, la circulaire est appliquée dans le cas de transactions public-privé , explique Michel Malieu-
Lassus, chef du service des opérations fiscales et foncières à la DGI. En cas de transfert d'une
administration à l'autre, en revanche, la recette n'est pas immédiatement réaffectée. »
Les opérations à tiroirs - un organisme remplacé par un autre qui laisse à son tour des locaux vides - sont
pourtant les plus fréquentes. Et, dans l'autre cas, les grands et beaux immeubles classés dans la
catégorie " locaux administratifs ", qu'ils soient fonctionnels ou non, se vendent nettement moins cher que
des bureaux commerciaux, la décote variant de 10 à 30 %, selon les arrondissements, à Paris. Là aussi,
il faut donc prévoir un nouvel usage (du logement, par exemple, comme sur les terrains libérés à Paris
par la SNCF et la RATP) et inclure les études dans les coûts de la transaction.
Heureusement l'administration jouit quand même d'un avantage en temps de crise : son inertie. « En
période de hausse forte, l'Etat ratait toutes les bonnes affaires car les arbitrages, qui remontent parfois
jusqu'à Matignon, prenaient trop de temps. Au contraire, aujourd'hui, l'Etat propriétaire peut patienter,
peut négocier ; en attendant, il ne paie rien » , explique Georges du Halgouet.
Stratégie propre à chaque ministère, outils différents ou inexistants... C'est, entre autres, contre ce
manque de cohérence que s'élève le rapport Picq sur la modernisation de l'Etat, en prônant la création
d'une " direction des politiques immobilières " rattachée à Bercy. Elle pourrait se charger de la valorisation
du patrimoine administratif, en ne se cantonnant pas au rôle d'expert des Domaines. En revanche, elle
laisserait aux établissements publics toute latitude de gestion, en accord avec les contrats d'objectifs
pluriannuels passés avec l'Etat.
Peser sur le marché
Cette solution ne déplairait sûrement pas aux directeurs de filiales ou de départements immobiliers qui
se réunissent régulièrement en un « club de l'immobilier public » : ce club leur permet d'analyser des
opérations et des stratégies tout en se refusant le rôle d'un groupe de pression. Vu le nombre de mètres
carrés que cette association très informelle représente, elle pourrait peser sur le marché. Chacun de ces
grands propriétaires souhaite, en fait, pouvoir - indépendamment de la tutelle commune, l'Etat - décider
de sa politique et de sa rentabilité. Reste à savoir pour quel réinvestissement.
La valorisation du patrimoine permet de dégager des revenus, de financer des projets, d'équilibrer des
comptes. On voit déjà se développer, notamment par le biais de sociétés d'HLM, des opérations de
construction. S'il paraît logique qu'ADP se diversifie vers l'immobilier, quelle légitimité la SNCF, GDF ou
EDF auraient-ils à développer la promotion ? Sans doute pour « sauver » des biens publics qu'il n'est pas
plus légitime de laisser à l'abandon. Mais est-ce là le métier de ces grands établissements ?
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 68
Les Echos supplément immobilier ? Premières réalisations et beaucoup de projets : recyclage des
bureaux en logements : le doute
Jeudi 22 septembre 1994
Des projets de plus en plus nombreux, des opérateurs qui se laissent convaincre, un ministre décidé à
aller de l'avant : l'idée de transformer des bureaux en logements entre peu à peu dans les esprits et dans
les faits. Mais le scepticisme domine toujours chez les opérateurs. Etat des réflexions une semaine après
la publication du rapport Darmon.
« Quand il n'est plus possible de louer un bureau à plus de 1.400 francs le mètre carré par an, il vaut
mieux le transformer en logement. » Samir Rayess, le patron d'UFFI, un « poids lourd » de l'immobilier
avec un parc géré de plus de 5 millions de mètres carrés de bureaux, a décidé de franchir le pas. Son
projet - créer 48 logements PLA ou PLI dans un ancien immeuble de bureaux à Chatou (Yvelines) - a
d'ailleurs été primé cet été par le plan construction et architecture (PCA). Avec, comme principaux
arguments : l'écart de loyer entre logement et bureau s'atténue, la demande des entreprises se concentre
sur le neuf et les centres-villes.
Devenus obsolètes, de petits immeubles d'entreprise situés en périphérie se découvrent ainsi une
nouvelle vocation. A Vaucresson (Hauts-de-Seine), le cabinet d'architectes 2AD propose la mutation de
3.500 m2 de bureaux en une cinquantaine de logements locatifs. « Le cadre résidentiel, entouré
d'espaces verts, encourage cette opération », dit un des concepteurs, qui ajoute que le projet revient
« 25% moins cher que la construction neuve ». A Rouen, en plein centre-ville cette fois, la Caisse
régionale d'assurance-maladie a réalisé 142 logements d'étudiant dans un immeuble de bureaux, avec
une subvention de la ville (2 millions de francs). L'ensemble sera inauguré le 1er octobre prochain.
De telles expériences se multiplient aujourd'hui avec la bénédiction du PCA qui peut financer les études
de faisabilité (jusqu'à 40.000 francs). Leur aspect expérimental l'emporte encore souvent sur leur viabilité
économique. Qu'importe : jusqu'à présent, les projets recensés n'émanaient que de la Régie Immobilière
de la Ville de Paris (RIVP), qui bénéficie de prêts intéressants de la mairie (Les Echos Immobilier du 21
avril). Seuls les pouvoirs publics croyaient vraiment aux vertus de ces transformations, à la fois pour
résorber les stocks de bureaux vides et pour résoudre la crise du logement.
800.000 m2 à transformer en dix ans
Dorénavant les professionnels de l'immobilier suivent de près ces initiatives, tout en gardant l'oeil rivé sur
leur calculette. La rentabilité d'abord. De ce point de vue, Auguste-Thouard est sans doute l'un des
premiers à envisager sérieusement la question. La transformation de bureaux en logements, notamment
à Paris, devient économiquement intéressante, juge ainsi Jean-Marie Forestier, président du directoire
d'Habitat Foncier (ATHF), filiale du groupe. Car, après des baisses importantes, le prix des bureaux se
retrouve aujourd'hui au niveau et parfois même en dessous de celui des logements. " Le loyer moyen
d'un appartement parisien est de l'ordre de 1.200 francs/m 2 /an, et celui d'un bureau s'en rapproche " ,
précise Jean-Marie Forestier.
La valeur vénale des bureaux de la capitale tend elle-même à devenir inférieure à celle des logements,
ajoute-t-il. Et de citer l'exemple de l'opération réalisée récemment par le Sultan de Brunei, qui vient de
racheter les anciens bureaux d'IBM, place Vendôme, une des adresses les plus cotées de Paris, pour en
faire des appartements. Une opération de prestige uniquement ? Elle révèle cependant un nouvel état
d'esprit de la part des acteurs du marché.
Le gouvernement milite en ce sens, au nom d'un « impératif économique et social » à assumer d'urgence.
On ne peut en effet opposer indéfiniment 4 millions de mal-logés à 5 millions de mètres carrés de bureaux
vides en région parisienne. Un chiffre donné la semaine dernière, lors de la présentation du rapport
Darmon, est éloquent : la valeur vénale du parc de bureaux parisiens s'élève à 800 milliards de francs.
Toute mesure à même de rééquilibrer le marché et donc de limiter la baisse de cette valeur (une décote
de 20 % « pèse » 160 milliards) est bienvenue...
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 69
Un premier coup de pouce a été donné dans la loi Habitat adoptée en juillet dernier. Désormais, il est
impossible de revenir pendant treize ans à l'affectation primitive d'un bureau transformé en logement,
sans autorisation préfectorale. La loi accorde également une réduction d'impôts pour investissement
locatif (réduction Méhaignerie représentant 10 % du prix de l'acquisition dans la limite de 30.000 francs
pour un célibataire, le double pour un couple marié, à étaler sur deux ans), sous réserve que l'opération
soit réalisée avant fin 1997.
Une rentabilité incertaine
Il y a tout juste un an, la Ville de Paris s'était, elle aussi, engagée en faveur des transformations. Les élus
avaient alors décidé, dans le cadre de l'élaboration du nouveau plan d'occupation des sols (POS),
d'exonérer ces opérations de l'obligation de créer des places de stationnement. En attendant, la
compensation financière à verser en cas de non-réalisation des parkings a été ramenée de 50.000 francs
au montant symbolique de 10 francs.
Le rapport Darmon va plus loin. Pour transformer 800.000 m2 de bureaux en Ile-de-France en dix ans, le
document propose une série de simplifications administratives et d'incitations financières. Une prime de
1.000 francs par mètre carré transformé, plafonnée à 60.000 francs, va ainsi être prochainement soumise
au législateur : en quelque sorte, un dispositif semblable à la « prime d'arrachage » accordée aux
viticulteurs. Le document suggère que ces opérations bénéficient également des mêmes droits que la
construction de logements classiques (accès aux prêts, avantages fiscaux).
En dépit de ces avancées, le scepticisme reste de règle parmi les opérateurs immobiliers. Echaudés par
la crise immobilière, banquiers et investisseurs institutionnels n'apparaissent guère pressés de se lancer
dans l'aventure ; au bout de leurs comptes, la rentabilité ne paraît pas garantie sur facture. C'est qu'en
termes de revenus annuels de location les appartements ne l'emportent toujours pas sur les bureaux à
Paris. Avec une moyenne de 100 francs/m2/mois pour la location d'un appartement, soit 1.200
francs/m2/an, on est encore loin des 2.000 francs que peut rapporter en moyenne un mètre carré de
bureau. « Sans compter les charges qui pèsent sur les propriétaires de logements, soit une perte
supplémentaire de 20% » , souligne Michel Pariat, directeur du département des investissements à l'UAP.
Parcours du combattant
S'y ajoute le fait qu'un immeuble de bureau, moins cher à l'achat, sera plus rapidement rentabilisé que
son équivalent destiné à l'habitation. Patrick Dallemagne, de la Fédération nationale de l'immobilier
(FNAIM), faisait récemment état d'une étude démontrant que la rentabilité locative brute d'un bureau
(7,5% à 8 %) restait très largement supérieure, de l'ordre de 60 %, à celle du logement dit du « secteur
libre » (5 % à 5,5 %). « Transformer un bureau en logement revient à diviser par deux ou trois la rentabilité
nette et à perdre sur la valeur vénale du bien » , concluait l'expert.
Résultat : à Paris, mises à part les opérations de la ville, les seuls grandes transformations de bureaux
en logement ne se font souvent que par le jeu des compensations. La Société Générale a ainsi entrepris
la reconversion de 5.000 m2 de bureaux en 76 logements dans le 16e et le 9e arrondissements, en
échange d'une surface équivalente au Trocadéro pour un centre tertiaire. Mais les surcoûts sont
importants. De 6.000 francs le mètre carré pour une construction traditionnelle, on passe en effet
couramment à 10.000 francs pour une réhabilitation, en raison notamment de la hauteur des plafonds.
Sachant que les appartements réalisés, d'une surface moyenne de 100 m2, ont, avec des loyers de
10.000 à 14.000 francs par mois, quelque difficulté à trouver preneur. Il est vrai que les résultats des
calculs économiques sont radicalement différents selon que l'on se situe dans les beaux quartiers
parisiens (la valeur du bureau y excède largement celle du logement) ou dans la périphérie de la capitale,
voire en province.
Incertaine, la transformation requiert en outre des trésors d'énergie. Un véritable parcours du combattant !
Des règlements de copropriété à modifier en cas d'immeubles mixtes, au problème du non-
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 70
remboursement des taxes sur les bureaux amenés à disparaître, le chemin est semé d'embûches
administratives. Entre les déclarations d'intention et la réalité, le fossé peut être important. Aucune
réponse n'a enfin été apportée à la demande de remboursement de la TVA, lors de travaux de
transformation, sujet de préoccupation souvent exprimé par les opérateurs.
Bien que convaincu des atouts de la formule, qui permet de contourner l'écueil du foncier, le président de
la Fédération nationale du bâtiment, Jean Domange, juge que la transformation de bureaux en logements
« ne va pas bouleverser le paysage de l'immobilier ». « Il faut laisser le marché évoluer de lui-même,
conclut de son côté Alain Lambolley, président de la Sogeprom, filiale de promotion de la Société
Générale. Les beaux immeubles garderont leur destination, alors que les mal fichus redeviendront, selon
les cas, bureaux ou logements. » Le débat entre les adeptes de la transformation et les sceptiques a
encore de beaux jours devant lui.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 71
Les Echos ? De Charette se prononce pour une loi d'orientation sur le logement
Mercredi 7 décembre 1994
Devant les reproches des agents immobiliers qui se plaignent des maigres avancées en matière de
fiscalité du logement, le ministre, Hervé de Charette, a estimé que la meilleure façon d'avancer serait de
voter une loi d'orientation sur le logement et l'immobilier, fixant des objectifs à moyen terme.
Devant la stagnation du marché immobilier, les agents immobiliers réunis à l'occasion du congrès annuel
de leur fédération, la FNAIM, ont une nouvelle fois souligné les oublis des politiques du logement
consécutives. Ces spécialistes du logement ancien se sentent mal aimés par les gouvernements
successifs, qui se penchent, selon eux, toujours sur le sort de la construction et donc du logement neuf
et rarement sur le parc ancien.
Tout en dénonçant un projet de loi pour 1995 « maigre en dispositions véritablement avantageuses pour
le logement ancien », Yves Boussard, président de la FNAIM, a rappelé dans son discours de clôture que
« les Français accèdent à la propriété en majorité dans le logement ancien, que l'ancien génère une
activité qui a permis aux entreprises de survivre entre 1990 et 1994 et qu'une partie croissante des achats
dans le neuf résulte de la vente d'un logement ancien ».
Tout en reconnaissant que la conjoncture immobilière était entrée dans une phase de « tassement
conjoncturel », le ministre du Logement, Hervé de Charette, a déclaré qu'il y avait quand même eu une
reprise générale, même modérée. Il a néanmoins reconnu que l'état des finances publiques ne lui avait
pas permis d'adopter autant de mesures que celles promises, comme, par exemple, l'augmentation de la
déduction forfaitaire sur les revenus fonciers. Afin que « l'année 1995 ne soit pas une année perdue pour
l'immobilier », en raison de l'attentisme provoqué par l'approche de l'élection présidentielle, il s'est
prononcé en faveur d'une « loi d'orientation sur le logement et l'immobilier ». Une telle loi permettrait,
selon lui, de tordre le cou à deux idées fausses largement répandues dans l'administration, selon
lesquelles la France dépense trop pour le logement et dispose d'une fiscalité immobilière satisfaisante.
Des petits pas en faveur de l'ancien
A propos du logement ancien, il a énuméré les petits pas faits en faveur du secteur. En critiquant d'abord,
une nouvelle fois, l'absence d'intérêt des grandes banques de dépôt pour le PAS (prêt d'accession
sociale), un type de prêt aidé qui prend un réel essor actuellement et qui est utilisé à 90 % pour l'achat
d'un logement ancien. Il a rappelé les diverses mesures fiscales inclues dans la loi de Finances 1995,
l'augmentation du budget de l'ANAH (Agence nationale d'amélioration de l'habitat), qui aura distribué
cette année 2,75 milliards de francs de subventions, et rappelé que le Sénat avait voté la prolongation
jusqu'au 30 juin 1995 de l'exonération de l'impôt sur les plus-values des Sicav réinvesties dans
l'immobilier.
Actuellement, le ministère continue à explorer ce qui peut être fait pour remettre sur le marché des
logements vacants, tandis qu'il espère pouvoir bientôt mettre en oeuvre une mesure préconisée par le
rapport Darmon sur la transformation de bureaux en logements. Grâce au Fonds d'aménagement de la
Région Ile-de-France (FARIF), le ministère du Logement estime qu'il est possible de subventionner la
transformation de bureaux en logements en région parisienne, à concurrence d'environ 1.000 francs par
mètre carré.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 73
A8 Création d?une « bourse des droits à construire » régionale
1. CONSTAT
La transformation d?un actif tertiaire obsolète / vacant en un ensemble mixte ou résidentiel se heurte à
des freins structurels et techniques générateurs de surcoûts conséquents et à des pertes de surfaces
habitables (plans non optimisés et contraintes fonctionnelles) destructrices de valeur, à des contraintes
administratives (PLU/ PLUi non compatibles) et à des oppositions politiques susceptibles de rallonger les
durées de portage et donc d?augmenter les coûts afférents. Il est donc nécessaire de proposer aux
foncières et aux opérateurs des systèmes de compensation incitatifs, qui ne pèsent pas pour autant sur
la dépense publique.
2. PROPOSITION : METTRE EN PLACE UN SYSTEME DE « BOURSE DE DROITS A CONSTRUIRE »
- L?éligibilité à ces droits à construire additionnels serait conditionnée à la réalisation d?une
opération de transformation de bureaux vacants en un ensemble mixte ou résidentiel.
- Ces droits à construire additionnels seraient calculés sur la base du bilan de l?opération de
transformation pour permettre de l?équilibrer.
- Ils pourraient être déployés sur site, si l?actif et le PLU permettent une surélévation ou une
densification, ou hors site pour fluidifier le marché et démultiplier les opportunités. Ils pourraient
également s?échanger et se valoriser, sur le principe des certificats d?économies d?énergie ou encore de
la commercialité.
- Pour que ce dispositif soit réellement incitatif, il faut sécuriser les opérateurs sur l?effectivité de
cette compensation, avec un modèle contractuel robuste et une temporalité maîtrisée.
- Pour cette raison, il nous semblerait intéressant de territorialiser cette bourse à la bonne échelle :
cette bourse pourrait, dans un 1er temps, s?organiser en partenariat avec l?EPF IdF ou GPA.
- A titre d?exemple, grâce à ce mécanisme, un opérateur pourrait réaliser une opération de
reconversion de bureaux vacants en résidence étudiante dans une commune d?Ile-de-France, grâce à
l?octroi, en gré à gré, de xxx m² de constructibilité sur un foncier maîtrisé par l?EPF IdF, potentiellement
dans une autre commune, lui permettant de trouver un équilibre économique à l?échelle de ces deux
opérations : c?est ainsi à la fois la transformation des actifs obsolètes et la construction de logements
neufs qui seraient encouragées.
3. AVANTAGES
? Ce dispositif permet de fluidifier le marché de la transformation, en élargissant la compensation à
d?autres territoires, si l?actif transformé ne peut pas être densifié ou surélevé.
? Ce dispositif n?induit pas de dépenses publiques.
? Les droits à construire de compensation constituent un effet de levier supplémentaire en faveur de la
construction de logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 75
A9. Hypothèses financières sur 4 ans 2025/2028
« Je ne crois qu?aux statistiques que j?ai moi-même falsifiées. »
Winston Churchill
Evolution de l'assiette utile (nationale)
DU
RE
E
DE
V
AC
AN
CE
Année n Année n+1 Année n+2 Année n+3
(2025)
(2026)
(2027)
(2028)
m2 vacants 6M 7M 8M 9M
m2 vacants >24 mois 3M 3,5M 4M 4,5M
m2 vacants >36 mois 2M 2,5M 3M 3,5M
m2 vacants >48 mois
PR
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AC
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CE
Année n Année n+1 Année n+2 Année n+3
(2025)
(2026)
(2027)
(2028)
> 24 mois 10M¤ 10M¤ 10M¤ 10M¤
> 36 mois 30M¤ 37,5M¤ 45M¤ 52,5M¤
> 48 mois
TOTAL 40M¤ 47,5M¤ 55M¤ 62,5M¤
TOTAL GENERAL COLLECTE 205 M¤, majoré par le franchissement des seuils, minoré par
(4 ans) les suspensions pour projets déposés
Dont : 100M¤ reversés aux collectivités locales
100M¤ consacrés aux crédits d'impôts
Travaux de transformation : 6Md¤ à 10Md¤
Logements créés : 25 000 (150k¤ de travaux par logement pour 50m2 de surface moyenne)
Potentiel de transformation global : 12 000 / 15 000 par an
(bureaux + centres commerciaux + zones d'activités)
Surfaces de bureau transformées : 2 millions à 4 millions de m2
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 77
A10. Acteurs consultés
RAISON SOCIALE Prénom NOM
ACTION LOGEMENT Bruno ARCADIPANE
Nadia BOUYER
ALTAREA
Alain TARAVELLA
Jacques EHRMANN
Ronald SANNINO
AMUNDI IMMOBILIER Antoine AUBRY
Marc BERTRAND
APSYS Group M. BANSAY
ARKEA FLEX
Florent LEMAIRE
Alexis HAUSEMER
François-Xavier STEFANI
ASPIM
M. COLY
Mme DONNADIEU
Mme STOJANOVIC
ASSEMBLEE NATIONALE Romain DAUBIE
ACNF (Association Congrès des Notaires de France)
Sophie SABOT-BARCET
Marie-Hélène PERO
Xavier LIEVRE
ADHERENTS de l?ACNF
BNP PARIBAS // CARDIF
France ASSUREURS Nathalie ROBIN
BNP Real Estate
Thierry LAROUE-PONT
Olivier BOKOBZA
Séverine CHAPUS
Jean-Maxime JOUIS
CDC Eric LOMBARD
Kosta KRASTRIDINIS
CDC BANQUE DES TERRITOIRES Pierre LAURENT
Equipe universitaire de chercheurs
CDC HABITAT Thierry LAGET
Commission de surveillance CDC M. HONROYD
& MEMBRES
CGEDD M. DELORME
CITALLIOS Maurice SISSOKO
CLUB VILLE & AMENAGEMENT Eric BAZARD
CREDIT AGRICOLE IMMO Marc OPPENHEIM
DGFIP / DIE Alain RESPLANDY-BERNARD
DHUP / Financement
Sébastien DORLHIAC
Raphaël MONTAGNER
Maï-Caroline BULLIER
Sylvain BERGAMINI
DLF Laurent MARTEL
DRIHL Ile-de-France
Laurent BRESSON
Guillaume MANGIN
Frédéric ESNAULT
EGF-BTP Mme FRANCQUEVILLE
& ADHERENTS
EPF Occitanie Sophie LAFENETRE
EPA MARNE M. GIROMETTI
ETUDE NOTARIALE CHEUVREUX M. LEONETTI
Mme RAUNET
FEI iMMOBILIER
Maryse AULAGNON
Delphine CHARLES-PERONNE
& ADHERENTS
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 78
RAISON SOCIALE Prénom NOM
FFB
M. SALLERON
M. CHAPEAUX
M. CHENUET
M. BOUCAUX
FONCIERE FREY
Antoine FREY
M. BARBONI
M. LECOCQ
FPI M. BOULANGER
& ADHERENTS
FRANCE ASSUREURS M. TAFFIN
FTI Katelle LE GUILLOU
GRAND PARIS AMENAGEMENT M. de FAY
GRECAM M. GARNIER
GROUPAMA IMMOBILIER Mme WEILL
M. CUBIN
HELIOS FIDUCIE CAPITAL Jean-Philippe CLAVEL
ICAMAP Guillaume POITRINAL
Alexandre AQUIEN
JLL Raphaëlle BOUR
Rémi MOREL
KAREG Benoît LABAT
Personnalité qualifiée ex-LA FRANCAISE Xavier LEPINE
LA PLACE DE L?IMMOBILIER M. HEURTEUX
LE PATCHWORK Lucie PERRAUDIN
LINKCITY Laurent WARNIER
METROPOLE DE TOULOUSE Bertrand SERP
MIRABAUD Olivier SEUX
NEXITY Véronique BEDAGUE
NHOOD M. GROLIN
NOVAXIA M. AZAN
Mathieu DESCOUT
OMNES (fonds Invest.) Gonzague de TREMIOLLES
OPPIDEA Raphaël CATONNET
ORIE Smaïn AOUADJ
& MEMBRES
PARIS LA DEFENSE
M. GUICE
M. SCHOENTJES
Mme CRESTIN
PGIM Antoine TINCELIN
Préfecture Hauts-de-Seine M. HOTTIAUX
M. GAUCY
REDMAN Matthias NAVARRO
Réseau des EPFR Sophie LAFENETRE
& ADHERENTS
SCET Romain LUCAZEAU
Christophe LASNIER
SENAT M. MARSEILLE
Mme ESTROSI SASSONE
SOCIETE GENERALE IMMOBILIER M. GROVEN
SOCFIM Olivier COLONNA D?ISTRIA
SPL LYON PART-DIEU M. SAINTE FARE GARNOT
SURFACE + UTILE (association de l?ESS) M. CITRON
UNIBAIL-RODAMCO-WESTFIELD M. TRITANT
VILOGIA Philippe REMIGNON
Tristan BARRES
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 79
A11. Contributions des acteurs consultés
A11.1 Contribution d?Action Logement
A11.2 Contribution de l?ASPIM
A11.3 Contribution de CDC Habitat & Groupe Mirabaud
A11.4 Contribution du Consortium des Bureaux en France (CBF)
A11.5 Contribution de la Foncière FREY
A11.6 Contribution du GRECAM
A11.7 Contribution du KAREG
A11.8 Contribution d?un cabinet de conseil en immobilier d?entreprise
A11.9 Contribution de l?ORIE
A11.10 Contribution de « Surface + Utile » (acteur de l?Economie Sociale et Solidaire)
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 81
A11.1 : Contribution d?Action Logement
A. Fiche d?analyse dans la perspective de la lettre de mission du 14 mars 2024
La note d?Action Logement couvrant un vaste champ d?analyse et de propositions, les seules
observations mentionnées ci-après ne concernent que les dispositions les plus « impactantes » du point
de vue de ladite lettre de mission.
1. La principale réalisation d?Action Logement, à savoir la création de la Foncière de Transformation
immobilière (FTI) constitue une avancée considérable en soi, d?un triple point de vue :
- Il s?agit du premier véhicule institutionnel, à la différence des initiatives privées comparables :
NOVAXIA, KAREG, le Groupe Mirabaud, Omnes / Redman, etc.
- La FTI démontre, sous certaines conditions, la faisabilité d?opérations concrètes, quoiqu?en nombre
limité, et permet de mieux apprécier le potentiel de transformation d?actifs obsolètes, à partir des premiers
résultats enregistrés. Il convient néanmoins de souligner la part largement dominante des résidences
gérées pour étudiants, prise dans les réalisations et les projets, qui limite la portée de l?expérience.
- Elle illustre les limites actuelles du modèle non reproductible sur la base duquel elle opère : la
mobilisation de 500 millions d?euros de capital sans perspective assurée de rentabilisation, fût-ce à long
terme, ainsi que des quasi-fonds propres à hauteur de 300 millions d?euros, faiblement rémunérés ; un
horizon moyen de dénouement hypothétique à 57 ans.
En bref, le modèle expérimental (dans un cadre juridique préexistant) du bail à construction s?inscrit
dans le courant actuellement « porteur » (à divers titres) des « démembrements de propriété », sans qu?il
s?agisse, à proprement parler, d?une telle opération, mais plutôt d?une forme de « concession de
réalisation et d?exploitation d?un ouvrage d?intérêt public », mais dont la caractéristique principale tient à
la non-reproductibilité en dehors d?un environnement public (ou parapublic de par les ressources de la
PEEC) dont il n?est pas évident qu?il soit soutenable pour les finances publiques.
2. S?agissant des propositions de nature à susciter l?émergence d?une industrie de la transformation des
actifs immobiliers, outre des ajustements à la marge qui pourraient s?avérer fort utiles, ou de la création
de foncières de transformation que nul ne saurait récuser, la principale disposition mise à l?étude est
relative à la constitution d?un avantage fiscal au profit du vendeur d?actifs obsolètes, sous la forme d?un
crédit d?impôt correspondant, en valeur, à la taxe acquittée au titre de la détention desdits actifs au cours
des deux années précédentes, éventuellement étendue à la taxe d?aménagement acquitté par ledit
vendeur. Il est important de souligner que ce crédit d?impôt viendrait en déduction de l?imposition (à
hauteur de 19%) due au titre de la plus-value réalisée au titre de ladite transaction.
Cette mesure paraît pouvoir s?inscrire dans une démarche tendant à accélérer la cession d?actifs
obsolètes en vue de leur transformation. Toutefois, elle suscite trois objections majeures :
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 82
- Sa déclinaison au très important secteur des SCPI (60% des bureaux relevant du périmètre
« marchand »), s?agissant de véhicules opérant en transparence fiscale, est d?autant moins aisée à
concevoir qu?au-delà des personnes physiques, une part importante du capital desdites SCPI est détenu
par des personnes morales exemptées d?impôt ou bénéficiant d?un régime d?encadrement très favorable
(mutuelles, EPCI « fiscal » ?).
- Politiquement, il s?agit d?un avantage fiscal portant sur les plus-values réalisées lors de la cession de
l?actif de telle sorte qu?il est difficile de le justifier autrement que par une prime à la cession d?autant plus
recherchée que le prix de cession sera plus élevé, ce qui est exactement l?inverse de l?effet souhaité.
- Enfin, et c?est peut-être l?essentiel, alors qu?il s?agit d?inciter au réinvestissement d?avenir, d?abord en
conditionnant l?avantage fiscal à un niveau de charge foncière plafonné (c?est-à-dire de fait, à un prix de
cession ou de valorisation dans le cas d?une transformation opérée par le propriétaire de l?actif), le
dispositif fiscal proposé par Action Logement est tourné, non pas vers le réinvestissement d?avenir, mais
vers le désinvestissement portant sur des choix hasardeux opérés dans le passé. Il est donc difficile de
justifier ce dispositif dans une perspective de relance.
Conclusion
L?expérience d?Action Logement est utile et éclairante quant à la nécessité, pour construire un système
reproductible et soutenable (hors soutien fiscal et parafiscal) d?agir en amont de toute opération de
transformation sur la valorisation des actifs. Tel est l?objet de la démarche proposée au ministre, à travers,
d?une part, le plafond de charge foncière conditionnant l?accès à l?avantage fiscal et d?autre part, la
surfiscalisation des bureaux vacants, à partir de modalités à préciser, qui pourraient découler d?une
obligation déclarative. Elle s?inscrit dès lors dans la suite de maintes innovations introduites par Action
Logement, s?agissant par exemple de la constitution de l?Association Foncière Logement qui a ouvert la
voie au logement intermédiaire institutionnel (LII) ou de l?organisme national de vente qui a permis
d?accélérer l?accession dans le parc social, sans dégrader les comptes des OLS bénéficiaires.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 83
B. Contribution d?Action Logement
« Les secteurs tendus en offre de logements souffrent tout à la fois d?un manque de logements
disponibles et d?une vacance importante des immeubles de bureaux, principalement dus à l?essor du
télétravail déclenché par la crise sanitaire de 2020. En effet, alors que la demande de logements
abordables ne fait qu?augmenter (la vacance locative est estimée à 24% du parc marchand en 1ère
couronne), plus de 4,9 millions de mètres carrés de bureaux seraient vacants en Île-de-France, dont la
transformation permettrait la réalisation de 100 000 logements supplémentaires. En effet, plus de
417 000 m² de logements sont issus d?une transformation entre 2018 et 2020.
La transformation de bureaux en logements, et en particulier en logements abordables, pourrait
constituer, au moins partiellement, un remède à ces problématiques, tout en répondant à l?enjeu de
transition écologique.
Dans ce cadre, le Groupe Action Logement a créé la Foncière de Transformation immobilière (FTI) en
juillet 2020. Elle facilite la réalisation d?opérations de transformation, dans des zones où la tension
foncière rend plus difficile l?équilibre des opérations à caractère social. Spécialisée dans l'acquisition
d'actifs économiques obsolètes dans toute la France, cette filiale contribue à la production d?une nouvelle
offre de logements abordables, durables et pérennes.
Cette expertise du Groupe le conduit à soutenir la proposition de loi soumise à l?examen du Parlement.
Ces mesures gagneraient à être enrichies par une mesure fiscale nouvelle incitative pour libérer le
potentiel de transformation.
Cette note vise à apporter une contribution à Monsieur André Yché, chargé par le ministre du
Logement d?accompagner l?émergence d?une industrie de la transformation des actifs immobiliers en voie
d?obsolescence à la suite de la rencontre du 18 avril 2024.
1. Une filiale dédiée à la transformation au sein du Groupe Action Logement
1.1. Raison d?être et positionnement de la Foncière de transformation immobilière
La FTI assure le portage puis le démembrement à long terme des biens acquis transformés au profit
des bailleurs de logement abordable, tant sociaux qu?intermédiaires, et potentiellement, la cession de ce
patrimoine à l?issue du démembrement. Par ailleurs, l?investissement par la FTI dans une période de
correction forte des valeurs d?actif crée de la valeur sur le moyen-terme. La FTI joue un rôle actif dans la
décarbonation et la sobriété énergétique, en reconstruisant la ville sur la ville et en renforçant le lien
emploi-logement.
En tant qu'entreprise à impact, la FTI se distingue par son expertise, son agilité et son ingénierie
innovante. Son modèle unique de portage foncier et de démembrement s?inscrit sur le long terme grâce
au bail à construction. Forte de l'expertise de ses équipes et de la synergie avec ses partenaires, des
acteurs locaux de l?immobilier et des décideurs publics, la FTI relève les défis de la régénération urbaine
en répondant aux impératifs citoyens, réglementaires, environnementaux et financiers. La FTI est
spécialisée dans la revalorisation d'actifs professionnels souvent vides et vétustes, présentant diverses
formes d'obsolescence : technique et/ou commerciale.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 84
Chiffres clés au 31/12/2023 :
49 opérations engagées, soit 4 573 logements,
7 opérations avec un permis de construire obtenu ou purgé soit 655 logements,
12 opérations en chantier soit 735 logements,
4 opérations livrées soit 683 logements.
? Une vision de la transformation des immeubles : de l'inoccupation à la valorisation durable
En tant que foncière, la FTI met en oeuvre son expertise en matière d?ingénierie foncière pour favoriser
la transformation des immeubles afin de limiter les déchets et favoriser l?économie de matière. Le recours
à la déconstruction peut être décidé pour favoriser une densité ou à l?issue d?un arbitrage économique lié
à la cherté des coûts de transformation (en raison des caractéristiques techniques du bâtiment).
Un large potentiel d?actifs à transformer est proposé : Immeubles de bureaux, Friches avec ateliers,
Locaux d?activités, Garages, Hôtels, EPHAD, Centres hospitaliers et cliniques, Établissements scolaires,
Entrepôts, etc.
? Un engagement pour le logement partout en France accentuée dans les zones tendues où
le besoin en logement est une priorité :
En travaillant en étroite collaboration avec les décideurs publics locaux, la FTI contribue de manière
durable à la préservation de l?attractivité des territoires en proposant des logements et des services au
plus proche des zones d?emploi, en particulier dans les régions où les tensions foncières sont élevées.
Elle les accompagne pour développer leur parc pour faciliter l'accès au logement et favoriser l'emploi sur
les territoires. Sa dynamique opérationnelle s?applique aux centres-villes, aux quartiers d?affaires et aux
zones économiques desservies par les transports. La FTI reçoit plusieurs centaines de propositions
d?investissement par an, ce qui implique une méthode de sélection efficace. Pour entrer dans le « vivier
» des opérations que la FTI étudiera, les projets doivent satisfaire à un nombre de critères cumulatifs. La
répartition géographique des opérations de la FTI est la suivante : 70% en Île-de-France, 30% dans les
autres régions dont la Nouvelle-Aquitaine, Provence-Alpes-Côte-d'Azur, les Hauts-de-France, l?Occitanie
et le Grand-Est.
1.2. Un modèle économique novateur et vertueux, aux ressources contraintes, pour répondre à un objectif
déterminé :
? Une approche novatrice en matière d'ingénierie
Le modèle repose sur le principe de la dissociation foncière, également appelé "démembrement". Ce
modèle, basé sur un bail à long terme est dédié à tous les opérateurs de logement social ou intermédiaire
(Groupe et hors Groupe Action Logement). La FTI a développé une ingénierie foncière au profit des
opérateurs du logement, qui assurent distinctement d?une part, la maîtrise d'ouvrage des opérations de
transformation et d?autre part, la gestion des logements.
Dans une approche partenariale dès l'amont, elle conçoit le montage juridique et foncier puis du
démembrement en respect de l?équilibre économique des investissements des bailleurs, tout en veillant
à favoriser la mixité sociale et fonctionnelle. La FTI vend également une partie de ses droits à construire
à des opérateurs privés pour la production de logements économiques, accession.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 85
La FTI recherche une mixité programmatique, sociale et fonctionnelle, en développant la production
nécessaire aux attentes des locataires, des propriétaires et des riverains :
- Logements locatifs sociaux familiaux ou résidences gérées,
- Logements locatifs intermédiaires ou résidences gérées,
- Accession à la propriété (social ? libre - bail réel solidaire),
- Création de bureaux, d'espaces de coworking complémentaires,
- Locaux d'activités et commerces complémentaires.
? Un modèle économique reposant sur l?investissement et des retours d?actifs à long terme
La FTI a mis en place un modèle économique propre reposant sur l?acquisition de biens professionnels
répondant en cible à un certain nombre de critères (voir encadré ci-dessous). La transformation en
logements locatifs sociaux et intermédiaires est assurée par un opérateur, en général bailleur social ou
promoteurs, signataires avec la FTI d?un bail à construction. Afin d?assurer la soutenabilité financière de
l?opération, la FTI assure le portage foncier jusqu?à l?obtention des autorisations d?urbanisme puis un
portage secondaire à long terme au bénéfice des bailleurs LLS et LLI, soit en moyenne 57 ans. Durant
ce portage, une redevance annuelle, à la charge du preneur à bail, rémunère la FTI. Celle-ci est estimée
en vue de couvrir 50% en moyenne de la charge foncière, sa perception intervenant au terme de deux
ans7 des travaux de transformation. Enfin, la cession du patrimoine intervient au terme du bail.
Critères de choix d?une opération
- des immeubles indépendants / des ensembles immobiliers / des portefeuilles d?actifs affectés à un
usage professionnel (bureaux, activités, commerces?), obsolescents ou obsolètes sur leur marché,
- présentant des caractéristiques techniques permettant la transformation,
- des immeubles vacants au jour de la vente ou dont la libération est programmée à 2-3 ans,
- situés en France entière, dans les zones urbaines résidentielles tendues (A bis, A, B1), bien
desservies
- éligibles au changement d?usage en habitation (PLU, équipements) ou à des évolutions du PLU
convenues avec les décideurs locaux (accord préalable à toute acquisition)
- d?une taille minimale de 3 500 m² SDP pour la part de logements abordables - sociaux ou
intermédiaires,
- détenus de préférence en pleine propriété par un monopropriétaire vendeur (ou lot(s) de volume).
La part de logements en accession réalisée au sein des opérations (20% en moyenne destinée à
l?accession) est cédée à l?opérateur, en général promoteur, à l?issue de la purge des autorisations
d?urbanisme, soit 2 à 3 ans.
Si ses produits d?exploitation sont en forte croissance depuis 2020, le résultat d?exploitation de la FTI
reste creusé par le volume d?acquisition nécessaire et le décalage de perception des redevances par
rapport aux investissements, au-delà du contexte d?inflation. Pour autant, une tendance à l?équilibre est
recherchée par la rentrée progressive des redevances, les cessions de patrimoine ainsi qu?un
développement marginal de l?usufruit locatif intermédiaire (ULI).
7 Estimation sur une opération type
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 86
? Des ressources dédiées constituées de fonds propres, dette long terme et dette bancaire
classique pour répondre à un objectif déterminé :
Dans le cadre actuel, Action Logement a doté la Foncière pour transformer 10 500 logements à horizon
fin 2028. Les ressources de la FTI sont les suivantes :
- 461 M¤ de fonds propres constitués par l?associé unique Action Logement immobilier ;
- 300 M¤ d?enveloppe de prêts long terme, bonifiés accordés par ALS ;
Par ailleurs, 80 M¤ d?enveloppe de prêt bancaire classique ont été souscrits auprès de la Caisse
d?Épargne Île-de-France.
? Des coûts de transformation élevés, justifiés par les externalités positives des projets ciblés
Les contraintes techniques particulières de la transformation sont nombreuses : l?année de
construction (présence d?amiante), les principes constructifs, l?épaisseur des bâtiments, la hauteur sous
plafond, la position des circulations dans l?immeuble et la nature de la façade sont autant d?inducteurs de
coûts à prendre en compte.
L?ambition de la performance environnementale (bâtimentaire et énergétique) souhaitée pour la
transformation (avance de phase) a également des impacts techniques et financiers sur le coût de la
transformation.
Voici quelques exemples de coûts pour des opérations en province, en grande et en petite couronne
francilienne :
- Metz (Résidence) : 5 823 259 ¤ HT (notification marché) soit 1 579¤HT en sdp et 3 222¤HT en shab
(atrium en verre)
- Combs (Résidence) : 5 849 529,52 ¤ HT (signature BAC) 1 884¤HT en sdp et 2 816¤HT en shab
- Suresnes (Résidence) : 50 Rouget de Lisle : 6 983 050 ¤ HT (VEFA) soit 2 227¤HT en sdp et 2 815¤HT
en shab
? Un opérateur fonctionnel qui mérite d?être soutenu
En synthèse, la FTI apporte donc une réponse opérationnelle et efficiente au besoin de transformation
de logements à l?appui d?une équipe structurée, de compétences dédiées, d?une technicité et d?une
ingénierie élevées, de standards d?exigence, d?une agilité des montages fonciers et de la force d?un
groupe immobilier comptant les ressources indispensables au pilotage de plus de 1 million de logements.
Par essence, le modèle de la FTI méritera d?être renforcé pour accompagner durablement la
transformation de locaux d?activité inoccupés en logements.
2. Des propositions visant à faciliter la transformation des bureaux en logements
2.1. Avis d?Action Logement sur la proposition de loi en faveur de la transformation des bureaux en
logements
Fort de l?expertise acquise en matière de transformation, le Groupe Action Logement a suivi la
proposition de loi lors de son examen par l?Assemblée nationale en mars 2024. Ses dispositions
désormais examinées au Sénat apportent des réponses éclairées et pragmatiques pour le secteur. Cette
proposition de loi marque une étape clé dans la généralisation de ces opérations en faveur du « choc de
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 87
l?offre » de logements. Le groupe Action Logement soutient ainsi la majorité des dispositions proposées
et peut commenter ainsi les articles retenus dans sa version déposée au Sénat.
? Dérogation au PLU - Article 1er :
La disposition porte sur la création d'un nouvel article L. 152-6-5 du CU et précise :
- La suppression de la limitation territoriale ;
- L?élargissement de la mesure aux locaux des administrations publiques ;
- La demande de dérogation est transmise, le cas échéant, à l'autorité compétente en matière de PLU.
En l'absence d'une délibération motivée de l'autorité compétente en matière de PLU, s'opposant à la
dérogation dans un délai de 3 mois à compter de la transmission de la demande, la dérogation est
accordée. La délibération d'opposition est motivée par les risques de nuisances auxquels le projet peut
être exposé, son accessibilité par les transports alternatifs à l'usage individuel de la voiture, son effet sur
la démographie scolaire au regard des écoles existantes ou en construction et ses objectifs de mixité
sociale et fonctionnelle.
- Si la compétence pour délivrer le PC a été déléguée à l'EPCI, la demande de dérogation est transmise
au maire de la commune de situation du projet. La dérogation ne peut être accordée en cas de délibération
contraire motivée du CM dans un délai de 2 mois.
Action Logement relève la pertinence de cette disposition ; il est toutefois notable que :
- la situation des locaux commerciaux non situés en rez-de-chaussée puisse poser question ;
- l'autorité en charge de délivrer le permis de construire semble liée par la délibération de l'autorité en
charge de l'élaboration du PLU qui peut s'opposer à la dérogation. Cela peut poser un risque de blocage
des projets.
Il est donc proposé de simplifier la mesure en supprimant toute demande d'accord de l'autorité
compétente en matière de PLU. À défaut, il pourrait être préconisé un retour au système de l'avis proposé
dans la version initiale8.
? Opérations soumises à la taxe d?aménagement (TA) - Article 2 :
La disposition porte sur :
- Les opérations de transformation de bureaux en logements qui ne sont pas des opérations
d'aménagement, construction, reconstruction et agrandissement (alinéa 1), donnant lieu au paiement de
la TA, par délibération prise par les communes, les EPCI à fiscalité propre, les départements et la région
IDF ayant institué la TA ;
- Par exception au droit commun, les délibérations visant à assujettir à la TA les opérations de
transformation de bureaux en logements peuvent être prises jusqu'au 31 décembre 2024 pour 2025
(alinéa 2).
8 Dérogation au PLU par l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire pour autoriser la destination d?habitation
pour les projets de transformation de bureaux en logements [?] Après avis de l'autorité compétente en matière de PLU, rendu
dans un délai de 3 mois. Avis réputé favorable passé ce délai.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 88
L?utilité de cette disposition pour les opérations de transformation de bureaux en logements, la TA est
instituée par délibération spéciale des territoires concernés. Toutefois, en pratique, il sera peut-être
difficile de réussir à distinguer les opérations de transformation des opérations de construction,
agrandissement et reconstruction.
? Assiette de la taxe d?aménagement (TA) - Article 3 :
La mesure prévoit un calcul de l'assiette de la TA à partir de la "surface transformée dans les
conditions prévues au dernier alinéa [alinéa 2] de l'article 1635 quater B". Action Logement souligne que
le dernier alinéa de l'article 1635 quater B du CGI prévoit que, « par dérogation au droit commun, les
délibérations visant à assujettir à la TA les opérations de transformation de bureaux en logements peuvent
être prises jusqu'au 31 décembre 2024 pour 2025. ».
Sur ce point, le texte gagnerait donc à être précisé par la Haute Assemblée : la nature du lien entre
l'assiette de la TA et la date exceptionnelle pour 2025 des délibérations instituant la TA pour les opérations
de transformation de bureaux en logements pourrait être clarifiée.
? Exonération de taxe sur les bureaux - Article 3 bis A (nouveau) :
La disposition prévoit l?ajout aux articles 231 ter et 231 quater V du CGI d'un nouveau cas
d'exonération de taxe sur les bureaux : l?exonération de la taxe sur les bureaux pour les locaux à usage
de bureaux qui font l'objet d'un projet de transformation en logements ayant fait l'objet d'un dépôt de
permis de construire au cours de l'année précédant la déclaration de la taxe.
La pertinence de cette disposition peut être soulignée à deux titres (avant et après acquisition). Les
locaux à usage de bureaux qui font l'objet d'un projet de transformation en logements sont exonérés de
taxe sur les bureaux dès lors qu'ils font l'objet d'une demande de permis de construire déposée au cours
de l'année précédant la déclaration de la taxe.
? Reversement aux communes membres du produit de la TA perçu par les EPCI - Article 3 bis
B (nouveau) :
La disposition prévoit un complément apporté à l'article 1379-0 bis, IX 3, du CGI : Pour les opérations
mentionnées à l'alinéa 2 de l'article 1635 quater B du CGI (opérations de transformation de bureaux en
logements), une délibération spéciale peut prévoir le reversement de tout ou partie de la TA par les EPCI
à leurs communes membres ou groupements de collectivités, compte tenu de la charge des équipements
publics relevant de leurs compétences.
Sans remettre en cause la pertinence de cette mesure, le renvoi à l'alinéa 2 de l'article 1635 quater B
du CGI pose question quant à la volonté de l'AN de cibler toutes les opérations de transformation de
bureaux en logements ou uniquement celles pour lesquelles la TA a été instituée pour l'année 2025
(alinéa 2 du CGI).
? Permis de construire multidestinations - Article 4 :
Cette mesure pertinente et utile, prévoit que dans une commune ou une partie de commune où une
délibération du CM ou de l'EPCI compétent en matière de PLU, prise sur avis conforme du CM de la
commune concernée, le permet, la demande de PC peut porter sur un projet de construction nouvelle
comportant plusieurs destinations possibles :
- Lorsqu'elle est saisie à cet effet par l'EPCI compétent en matière de PLU, la commune dispose d'un
délai de 3 mois pour émettre son avis. A défaut, celui-ci est réputé favorable.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 89
- Dans ce cas, le projet fait l'objet d'un arrêté de l'autorité compétente autorisant les différentes
destinations de la construction nouvelle / la mise en oeuvre de l'autorisation portant sur ces destinations
est insusceptible de modification ultérieure liée aux destinations de la construction / le PC autorise les
changements de destination ultérieurs entre les destinations autorisées sur le fondement des règles
d'urbanisme applicables à la date de sa délivrance.
- Le propriétaire informe de chaque changement de destination le maire de la commune et, le cas
échéant, l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme : soit lors du dépôt de l'autorisation
d'urbanisme nécessaire à la réalisation de la transformation, soit, si la transformation ne requiert pas
d'autorisation d'urbanisme, au moins 3 moins avant le changement effectif.
? Copropriétés et changement de destination des parties privatives en logements - Article 6 et 7 :
Ces dispositions utiles aux projets de transformation prévoient des compléments apportés à l'article 9
de la loi du 10 juillet 1965 :
- Un copropriétaire peut modifier librement la destination de ses parties privatives à usage de bureau
ou de local professionnel en habitation (lorsque le changement de destination ne contrevient pas à la
destination de l'immeuble prévue par le RCP) / il doit obtenir l'accord de l'AG statuant à la majorité simple
(majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par
correspondance) (lorsque le changement de destination contrevient à la destination de l'immeuble prévue
par le RCP).
- A peine de nullité de l'approbation de l'AG, le bénéfice de cette dérogation est conditionné à
l'occupation des logements ainsi créés à titre de résidence principale pour une durée d'au moins 3 ans à
compter de la réception des travaux permettant le changement de destination des locaux concernés.
- La modification de la répartition des charges induite par le changement de destination d'un local de
bureaux ou professionnel en habitation soumise au vote de l'AG à la majorité simple.
2.2. Autres pistes visant à favoriser la transformation
? Une mesure fiscale incitative en faveur de la transformation de bureaux en logements
Action Logement soutient une mesure destinée à accélérer la transformation en soutenant le modèle
économique sous-jacent. La proposition de loi débattue devant le Parlement tend à répondre aux enjeux
d?augmentation de la demande de logements abordables dans un secteur tendus en offre de logements.
Cependant, force est de constater que de nombreux investisseurs de bureaux demeurent encore réticents
à les vendre, préférant souvent les conserver en actifs surestimés à leur bilan, malgré des plus-values
immobilières imposées à l?impôt sur les sociétés au taux réduit de 19 % lorsque ces bureaux sont vendus
à des personnes morales qui s?engagent à les transformer en logements (210 F du Code général des
impôts). Afin d?accélérer la transformation de bureaux en logements abordables, il est proposé d?aller plus
loin et de renforcer l?article 3 bis A en créant une incitation fiscale temporaire, propre à la transformation
de bureaux en logements abordables.
La mesure fiscale prendrait la forme d'un crédit d'impôt sur les sociétés, limité dans le temps, d?un
montant égal à celui de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe annuelle sur les bureaux et
stationnements relatifs à l?immeuble et appelé pendant les deux années avant la vente, et, le cas échéant,
augmenté de 25% du montant de la taxe d?aménagement lorsque le vendeur s?est acquitté d?une telle
taxe.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 90
Représentant entre 2 et 3 % du prix de la vente, cet avantage permettrait de stimuler de telles ventes
tout en représentant un coût mesuré pour les finances publiques.
Il est par conséquent proposé de créer un nouvel article au sein du Code général des impôts. Au sein du
livre 1er, première partie, titre 1er, chapitre II, section V du Code général des impôts, après l?article 220
Z septies, il est proposé la création d?un nouvel article numéroté 220 Z octies.
En permettant la transformation de projets qui n?auraient pas abouti, cette disposition est génératrice
de recettes fiscales nettes pour l?État.
L?hypothèse suivante donne à voir une opération de transformation type. Le crédit d?impôt sur l?impôt
sur les sociétés équivaut aux différentes taxes (bureaux, stationnement et foncières) acquittées dans les
deux dernières années par le cédant. Le dispositif permet de réunir les parties, de telle sorte à provoquer
l?arbitrage du détenteur des actifs puis l?acquisition par un opérateur de la transformation. Compte tenu
des retours de TVA, basée sur une moyenne logement social / non-logement social de 8%, sur les travaux
d?une opération qui n?aurait pas été lancée, on constate que cette opération supplémentaire génère des
recettes supérieures au montant du crédit d?impôt pour l?État.
Ex : Issy-les-Moulineaux
TS (1 an / 2 ans) 12 350,00 ¤ 24 700,00 ¤
TB (1 an / 2 ans) 93 750,00 ¤ 187 500,00 ¤
TF (1 an / 2 ans) 111 060,00 ¤ 222 120,00 ¤
Crédit d'impôt IS 434 320,00 ¤
TVA sur travaux estimée 704 000,00 ¤
Gain net 269 680,00 ¤
? L?évolution de la taxe sur les bureaux pour financer les travaux de transformation
Selon l?annexe Voies et moyens du PLF 2024, la taxe sur les bureaux franciliens est aujourd?hui perçue
par la Société du Grand Paris (655 M¤ en 2023), le Fonds national des aides au logements (66,2 M¤ en
2023), la Région Île-de-France (212,9 M¤ en 2023 et 231,8 M¤ prévus en 2024) et le budget général (15
M¤ prévu en 2024). Dans les départements des Bouches-du-Rhône, du Var et des Alpes-Maritimes, elle
est affectée au financement de la ligne nouvelle Provence Côte d?Azur.
Avec 2,5% de hausse en 2024, les barèmes de la taxe recouvrent des montants de 25,31 ¤ du m²
pour les locaux à usage de bureaux de la première circonscription, en Île-de-France à 0,21¤ pour des
locaux de stockage de la région PACA.
L?absence d?application de la taxe pendant les travaux, dès lors qu?un permis de construire a été
déposé est une mesure positive. En ce sens, la mesure de modification de l?article 231-ter du CGI porté
par la proposition de loi « Transformation Bureaux en Logements » introduit des cas d?exonération de la
taxe bureaux notamment lorsque l?immeuble est impropre à sa destination d?origine (phase chantier des
transformations), cette disposition est particulièrement attendue par les acteurs, car elle allège l?équilibre
financier des opérations.
Par ailleurs, l?affectation de la part de son produit issue des bureaux vacants, permettrait de financer
les travaux de transformation au sein d?un fond dédié au sujet.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 91
? Une taxe d?aménagement au profit des collectivités intégrant une condition de densification
Le montant de la taxe d?aménagement résulte d?une multiplication entre la surface taxable de la
construction créée et une valeur annuelle des m² (1036 ¤ en IDF actuellement), qui est encore multiplié
par le taux voté par la collectivité (1% ou 5%, ou alors 20% dans le cadre d?une taxe renforcée). Ainsi, la
notion de densité est intégrée au calcul même de la taxe. Pour mémoire, dans l?esprit de la proposition
de loi, l?assujettissement des opérations de transformation à la taxe d?aménagement est une mesure
positive envers les collectivités pour les inciter à porter les projets.
? Le renforcement du rôle des établissements publics fonciers au service de la transformation
Une intervention foncière publique pour réaliser un portage long-terme des terrains ou d?actifs est
adaptée pour accompagner le développement des OIN ou des projets de réindustrialisation de la France
qui nécessitent des aménagements urbains d?envergure et répondent à des enjeux publics. Au regard
des délais de conception et la validation de l?étude urbaine (environ 8 ans) et des couts liés à la
dépollution/ aménagements/ création d?équipements publics, il serait nécessaire que la valeur des
fonciers ou actifs concernés corresponde aux enjeux satisfaisant le bilan économique d?un tel projet.
Dans cette perspective, les établissements publics fonciers pourraient intervenir alors que la
transformation de bureaux, à travers des filiales dédiées. Ces filiales disposeraient d?une ingénierie
dédiée. Dans le droit actuel, ces filiales, contrairement aux délégataires existants, n?ont pas accès au
droit de préemption et négocient en conséquence leurs acquisitions dans l?univers concurrentiel. Il serait
pertinent que des filiales dans lequel un EPF aurait des participations majoritaires puissent se voir
déléguer tant le droit de préemption urbain (DPU) qui celui qui existe en ZAD (DP-ZAD).
L?utilisation de ces droits de préemption sera justifiée par une opération de transformation de bureaux
en logements en tablant sur une mixité de destination (part de logements sociaux, de intermédiaires et
libres à définir). Ces outils pourraient ainsi conduire une politique de préemption au juste prix. Des coûts
de construction spécifiques à la transformation seraient intégrés pour définir, à rebours, le prix de sortie.
? L?émergence de nouvelles foncières publiques/privées pour mener ces opérations
Les EPF et/ou leurs filiales dédiées pourraient céder ces actifs à des foncières sous forme de société
d?aménagement ou des SSCV, au sein desquels les propriétaires des fonciers concernés, des bailleurs
sociaux, des collectivités territoriales et/ou d?autres acteurs privés pourraient prendre des participations.
Ces SSCV interviendraient avec un engagement à construire sous un délai convenu. Un tel montage
permettrait ainsi de disposer d?une vision d?ensemble garantie par l?intervention d?un établissement public,
la démultiplication des moyens par l?intervention des foncières et l?incitation des propriétaires, encouragés
à (re)créer de la valeur en participant à la transformation de leurs actifs.
Annexe 1 : Proposition de rédaction pour l?article 220 Z du code général des impôts
Annexes 2 : Montant des taxes annuelles sur les locaux à usage de bureaux -Extrait du BOI-IF-AUT-50-
20 ? en application de l?article 231 ter du code général des impôts (CGI) et à l?article 231 quater du CGI
Annexes 3 : Exemples d?opérations FTI livrées ou en cours »
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 93
A11.2 : Contribution de l?ASPIM
« Note de novembre 2021
Les fonds logement, pourquoi et comment drainer l?épargne des Français
vers le résidentiel intermédié ?
Executive Summary
L?impérieux besoin d?une offre locative abordable en France
Et si la thématique du logement s?invitait enfin dans une élection présidentielle ? Absent des débats
en 2017, il semblerait que les ingrédients soient cette fois réunis pour que les grandes questions soient
posées : Comment augmenter l?offre de logements dans les zones tendues ? Quels moyens mettre en
oeuvre pour que ces nouvelles habitations ne soient par réservées aux plus aisés mais profitent aussi aux
travailleurs modestes ? Sommes-nous condamnés à produire des unités de plus en plus compactes qui
dégradent les conditions d?habitabilité ?
Les sociétés de gestion de portefeuilles immobiliers, rassemblées au sein de l?ASPIM, sont
convaincues de pouvoir apporter une partie de la solution. Elles font le constat que la France manque
avant tout d?une offre locative abordable dans les zones tendues (métropoles, villes moyennes
dynamiques et territoires touristiques). Le tout accession est un mirage alors même que les taux d?intérêt
ont certainement atteint leur point bas et que de nombreux français sont exclus de ce marché
(augmentation du nombre d?indépendants, précarité économique pour de nombreux travailleurs de la
première ligne, etc.). La France compterait aujourd?hui seulement 140 000 logements à loyers
abordables accessibles aux personnes considérées comme trop aisés pour prétendre au logement social
mais pas assez riche pour accéder au marché libre. Nous proposons de viser un objectif de 500 000
logements à loyers abordables à horizon 20240.
Les vertus de l?intermédiation
Qui doit être propriétaire de ce parc condamné à croitre pour répondre aux besoins des Français ?
Nous pensons que le recours exclusif à des investisseurs locatifs particuliers qui investissent en direct
est une impasse. Il doit s?accompagner d?un appel aux investisseurs professionnels, seuls capables
de garantir le maintien dans le temps des loyers abordables tout en assurant les dépenses
nécessaires à la bonne maintenance des bâtiments.
Contrairement aux personnes physiques, ces acteurs de l?immobilier ne sont pas soumis à des aléas
moraux et peuvent supporter des investissements dont les retours économiques se feront à long-terme.
Le tout-Pinel a aussi montré ses limités en matière de qualité des logements conçus. Le rapport Laurent
Girometti et François Leclercq en fait le triste constat et préconise le retour des institutionnel dans le
résidentiel aussi pour cette raison.
Des fonds « logement abordable » ouverts au grand public
Si nous défendons les vertus de l?intermédiation, nous avons aussi à coeur d?associer les Français
à ce grand défi du logement pour tous. Les sociétés de gestion de portefeuille sont prêtes à lancer des
fonds « résidentiel abordable » ouverts au grand public. L?épargne accumulée pendant la crise devant
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 94
atteindre 180 milliards d?euros fin 2021, soit 7% du PIB, nous pensons que le moment est propice pour
lancer des nouveaux produits d?investissement qui ont un sens sociétal.
Ces fonds auraient vocation à se porter acquéreurs de programmes neufs en LLI (logement
intermédiaire, avec une décote de loyer de 20%) comme de programmes en LAC (logement locatif
abordable, avec une décote de loyer de 10%). Ils devraient aussi mener des opérations de
réhabilitation dans le parc ancien dans l?ensemble des zones tendues où il y a des besoins. En matière
de volume, nous pensons que ces véhicules pourraient acquérir environ 20 000 unités par an, avec une
hypothèse de collecte d?environ 1 milliard d?euros par an. Ils concourraient à hauteur de 30% à 50% à
l?atteinte de l?objectif évoqué plus haut : disposer d?un parc de 500 000 logements abordables sur le
marché locatif en 2040. Ils viendraient donc en soutien des acteurs publics spécialistes du LLI et du LAC
comme CDC Habitat et in?li.
Améliorer la fiscalité au niveau du fonds et des souscripteurs pour rendre le produit attractif et pérenne
Un soutien de l?Etat est indispensable pour attirer de l?épargne vers des fonds dédiés au
logement abordable. En effet, les rendements dans le résidentiel sont souvent inférieurs à 3,5%. Dès
lors, en s?imposant une décote de loyers de 10% à 20%, ce qui nous semble indispensable étant donné
le contexte de marché, le rendement brut diminue encore pour atteindre environ 3%. C?est moins que
l?immobilier tertiaire et moins que l?investissement résidentiel en direct qui bénéficie de nombreux
avantages fiscaux. Il faut trouver des mécanismes pour améliorer la performance de ces véhicules. Il en
va de leur capacité à collecter de l?épargne et à la rendre sans déstructurer les portefeuilles. Moins de
performance se traduit par moins de liquidité et donc une obligation pour les fonds de vendre des actifs.
Nous sommes convaincus qu?il faut favoriser l?émergence de fonds « evergreen » dont les performances
assurent une liquidité permettant la détention longue d?actifs.
Le principal avantage demandé consiste à appliquer le régime TVA de droit commun au logement.
Autrement dit, faire en sorte que la TVA soit récupérable sur les achats de biens neufs comme sur toutes
les dépenses de travaux et de gestion liés aux actifs résidentiels. C?est le cas pour les actifs tertiaires et
commerciaux et nous pensons qu?il est temps d?aligner les pratiques. De même, nous proposons
quelques ajustements sur la fiscalité propre du souscripteur (assiette réduise pour l?IFI, amortissement
notionnel pour les parts qui distribuent et qui capitalisent, etc.). Nous disons à l?Etat : investissez à nos
côtés pour nous aider à drainer de l?épargne française en faveur du logement abordable. »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 95
A11.3 : Contribution de CDC Habitat & Groupe Mirabaud
A. Fiche d?analyse dans la perspective de la lettre de mission du 14 mars 2024
La note s?inscrit pleinement dans la logique de la lettre de mission du 14 mars 2024.
La principale innovation proposée est relative à l?affectation du crédit d?impôt sur la plus-value dégagée
à l?occasion de l?opération de transformation. Elle tend donc à privilégier le réinvestisseur et, à ce titre,
elle est parfaitement cohérente avec l?objectif recherché.
Toutefois, l?angle d?analyse retenu privilégie un processus de cession / transformation qui résulte
logiquement de l?expérience acquise par les rédacteurs, ignorant un scenario dans lequel c?est le
détenteur des actifs qui initie lui-même la transformation, au prix d?une moindre plus-value, voire d?une
perte à provisionner. Tout en soutenant cette proposition, il convient de poursuivre la réflexion dans
l?hypothèse où le lien entre le détenteur initial du bien et la foncière de transformation ne serait ni
intégralement, ni définitivement (cas d?une vente à réméré) rompu.
B. Contribution de CDC Habitat & Groupe Mirabaud
« Accélération des opérations de transformation des immeubles de bureaux en logements
? La crise du marché des bureaux crée une vacance importante du parc, souvent bien situé près des
transports en commun, pouvant ainsi constituer, via la transformation, un potentiel important de
développement d?une offre résidentielle nouvelle.
? Des modifications législatives (projet de loi Daubier) sont en cours pour faciliter les procédures
juridiques nécessaires pour mener à bien ces transformations (concernant les PLU) et ainsi en accélérer
la production, condition nécessaire pour permettre la rentabilité économique de ces opérations.
? Ces mesures ne sont néanmoins pas toujours suffisantes pour convaincre les propriétaires
investisseurs des bureaux de céder leurs actifs, la valeur de cession de ces bureaux pour une
transformation étant souvent bien inférieure à la valeur comptable voir à la valeur d?acquisition.
? Pour autant, la valeur comptable de ces actifs dans leur format bureau est en partie fictive, puisque
ces actifs ne seront pas reloués et par ailleurs mériteront à plus long terme des travaux importants pour
les maintenir au niveau environnemental.
L?enjeu est donc d?identifier les moyens permettant d?accélérer la mise en vente de ces actifs par leur
propriétaire, en vue de leur reconversion en logements. Deux pistes sont proposées :
- D?une part, à l?image de ce qui est prévu dans le logement avec l?interdiction progressive de location
des logements étiquette G, puis F et E, le renforcement des obligations de mise aux normes et de travaux
pourrait inciter les vendeurs à accélérer les cessions d?actifs, l?investissement dans des travaux ne
pouvant être amorti pour les actifs ne trouvant pas de locataire ;
- D?autre part, une taxation des biens vacants pourrait également provoquer la vente d?actifs obsolètes,
l?allocation de cette ressource nouvelle devant favoriser la réalisation des programmes de logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 96
Nous proposons d?approfondir dans cette note cette seconde piste.
? Concernant la collecte de cette taxe, un régime de déclaration concernant l?occupation des immeubles
pourrait être mis en place, comme cela a été mis en place pour les propriétaires de logements. La taxe
pourra être perçue une fois constatée une vacance durable de l?immeuble (par exemple vacance de + de
50% sur 2 années fiscales successives). La déclaration pourrait être rétroactive concernant les deux
dernières années d?occupation, afin de mettre en place rapidement la collecte de la taxe.
? Concernant le montant de cette taxe, il doit être suffisamment important pour motiver la vente plutôt
qu?une détention de l?actif. Nous l?estimons à minima (voir ci-après) à 15 ¤/m2/an soit pour un actif type
de l?Ile de France, de 10 000 m2, un coût annuel de l?ordre de 150 000 ¤/an (charge supplémentaire
s?ajoutant aux charges d?entretien, assurances, impôts fonciers, coûts de gestion... supporté par le
propriétaire en cas de vacances de son actif). Cette taxe pourrait s?appliquer aux actifs immobiliers d?une
taille minimale de 5 000 m2.
? Concernant l?usage de cette taxe, nous proposons de l?affecter à crédit d?impôt sur la plus-value
dégagée par la transformation. En effet, outre le coût d?acquisition de l?immeuble et les travaux, le coût
de la transformation intègrent des coûts de portage (coût des capitaux mobilisés pendant la phase de
transformation de 1 à 3 ans) et la fiscalité sur la plus-value dégagée par l?opération (IS). L?ensemble de
ces coûts renchérissent le prix de revient de l?opération et donc le prix de vente des logements, rendant
parfois les opérations incompatibles avec le prix de marché.
Estimation de l?impact sur les prix de vente de 10.000 logements neufs créé par an d?un crédit
d?impôt sur la plus-value dégagée à l?occasion d?une opération de restructuration.
- Hypothèse de prix de vente unitaire : 250.000 ¤ par logement HT
- Chiffre d?affaires dégagé : 2,5 milliards ¤ HT
- Plus-value dégagée (sur la base de 7% de taux de marge) : 175 millions d?¤
- IS payé sur la plus-value : 44 millions d'¤
- Surface développée (sur base 60 m2 par logement) : 600.000 m2 soit environ 600 à 700 000 m2 de
bureaux existant à transformer
Si l?on considère une vacance structurelle de 3 millions de m2, la taxe serait de l?ordre de 4,4¤/m2
pour compenser l?IS.
L?impact sur le prix du logement demeurera toutefois limité, de l?ordre de 2% du prix de vente. La
réduction du prix de vente du logement est surtout liée à la baisse du prix de vente de l?actif à transformer.
SYNTHESE DES PROPOSITIONS
? Poursuivre les adaptations législatives en vue de renforcer la sécurité des opérations (notamment sur
les modifications de PLU et les évictions)
? Renforcer les obligations de travaux pesant les propriétaires d?actifs obsolètes afin de provoquer un
choc foncier (en excluant les particuliers)
? Réduire les coûts de portage inhérents aux projets de transformation par un crédit d?impôt financé par
une taxation des locaux vacants. »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 97
A11.4 : Contribution du Consortium des Bureaux en France (CBF)
A. Synthèse de la contribution commune de La Place de l?Immobilier et Adéquation
180 millions de m2 de bureaux en France dont :
- 40 millions de m2 de parc public (20% en Ile-de-France ; 80% en régions ; 50% pour l?Etat, 50%
autres : collectivités locales, etc.) ;
- 45 millions de m2 pour le parc privé non marchand (20% en Ile-de-France ; 80% en régions ; 1/3 du
parc privé d?Ile-de-France, soit 17 millions de m2) ;
- 95 millions de m2 pour le parc privé marchand, dont 38 millions de m2 en Ile-de-France, dont 5 millions
de m2 vacants (dont 1,2 million de m2 depuis plus de 2 ans et 2,5 millions de m2 vacants de plus de deux
ans en 2025).
B. Contribution du Consortium des Bureaux en France : note du 17 juin 2024
« LES SECTEURS À FORTE RÉVERSIBILITÉ DE BUREAUX EN LOGEMENTS
À PARIS ET LYON (MÉTROPOLES)
Comment identifier les territoires offrant les meilleures opportunités de transformation des
bureaux vacants en offre résidentielle de demain ? LA PLACE DE L?IMMOBILIER et ADEQUATION
ont partagé leurs expertises pour proposer une approche méthodologique exclusive.
Une des pistes explorées par les acteurs de l?immobilier pour faire face à la contraction de la
construction neuve et aux obligations réglementaires (ZAN) est d?allouer davantage de moyens
(financiers, techniques et humains) à la transformation d'immeubles existants, que ce soit sous forme de
surélévation, de rénovation lourde ou de changement d?usage. Sur ce dernier point, et même si les
montages sont encore complexes, la transformation de bureaux en logements paraît offrir un fort potentiel
au regard des bâtiments tertiaires obsolètes, déjà vacants ou à forts risques à court ou moyen terme.
Si le sujet n?est pas nouveau, la transformation de bureaux en logements (ordinaires ou sous forme
de résidences gérées) bénéficie aujourd'hui d?un contexte favorable permettant d?envisager un
développement plus important : couple rendement/risque plus favorable au logement, obsolescence
climatique accélérée des bureaux, perte d?attractivité de certains actifs tertiaires, élus convaincus par la
pertinence de ces réponses sur leurs territoires touchés de plein fouet par la crise immobilière. Les
annonces récentes de grands groupes de promotion immobilière témoignent de cette tendance.
Pour autant, ces conditions ne sont pas homogènes sur tous les marchés. Pour éclairer les acteurs
concernés (promoteurs, investisseurs, collectivités, propriétaires, brokers, etc.) et limiter les aléas liés à
ce type d?opération, LA PLACE DE L?IMMOBILIER et ADEQUATION ont mis au point une méthode pour
croiser leurs données relatives à l?occupation des immeubles tertiaires et aux besoins résidentiels. Elle
permet de faire ressortir les communes à fort potentiel, en commençant par les métropoles du Grand
Paris et de Lyon.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 98
La méthode
Pour conduire l?analyse présentée ci-après, LA PLACE DE L?IMMOBILIER et ADEQUATION ont
croisé leurs banques de données, qui portent respectivement sur l?état du parc immobilier tertiaire existant
et sur les dynamiques du marché immobilier résidentiel.
Les données de LA PLACE DE L?IMMOBILIER ont permis d?identifier les communes possédant des
immeubles de bureau vacants de manière structurelle.
ADEQUATION a de son côté mobilisé ses bases de données portant sur l?immobilier résidentiel pour
mesurer les dynamiques récentes en termes de construction neuve, l?intensité des besoins en immobilier
résidentiel, et la faisabilité « marché », au regard notamment des valorisations existantes.
L'interopérabilité de nos données et nos savoir-faire respectifs nous a permis d'identifier les territoires
présentant les plus forts potentiels de transformation de l'offre de bureaux en logement en croisant les
estimations :
- Des surfaces de bureaux potentiellement mutables
- Des besoins de logements et de résidences services.
Cas de la métropole du Grand Paris : des potentiels centrés sur le Nord-Ouest
Sur la métropole du Grand Paris, plusieurs territoires affichent des potentiels importants car s?y
conjuguent des besoins résidentiels forts, des constructions de logements neufs insuffisantes et un grand
nombre ou de grandes surfaces d?actifs tertiaires obsolescents ou risquant de le devenir à court terme.
C?est notamment le cas de Nanterre, Suresnes, Courbevoie sur l?Établissement Public Territorial
(EPT) de La Défense, mais aussi de Saint-Denis, Clichy et Saint-Ouen, à cheval des EPT Boucle Nord
92 et Plaine Commune, secteurs qui souffrent d?une vacance tertiaire élevée.
À l?inverse, la ville de Paris, à l?attractivité tertiaire encore forte, et les communes de seconde
couronne, qui accueillent des parcs de bureaux modestes et/ou à la valorisation immobilière résidentielle
plus modérée, présentent moins de potentiel.
Globalement, les potentiels semblent relativement nombreux, bien que concentrés majoritairement
sur le Nord-Ouest du Grand Paris. Ils sont également présents de manière plus ponctuelle en 1ère
couronne (Fontenay-sous-Bois, Issy-les-Moulineaux?) et plus marginalement en grande couronne, à
Sucy-en-Brie par exemple.
À noter que l?ensemble du territoire enregistre d?ailleurs des besoins nettement insatisfaits, estimés à
70 000 par an sur l?ensemble du Grand Paris, alors que la production sera pour mémoire inférieure à
30 000 logements commencés pour l?année 2023.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 99
Potentiels de transformation d?actifs tertiaires en logements ordinaires et
résidences gérées sur la Métropole du Grand Paris
Cas de la métropole de Lyon : des gisements plus modestes en majorité sur l?Est lyonnais
La géographie des potentiels sur la métropole lyonnaise est quelque peu différente. Ils sont
globalement moins importants malgré les tensions de marché sur le segment résidentiel. Ils semblent
davantage concentrés, notamment le coeur de l?agglomération, et secondairement sur la frange Est.
Villeurbanne apparaît comme présentant les potentialités les plus fortes, même si une analyse plus
fine permettrait probablement de distinguer des écarts sensibles entre quartiers, comme sur le 3ème
arrondissement par ailleurs.
Si les communes de Rillieux-la-Pape, Décines-Charpieu, Saint-Priest et les arrondissements Sud de
Lyon semblent offrir des potentiels légèrement moindres à ce jour, elles pourraient prochainement voir
leur attractivité progresser, compte tenu d?un parc de bureaux majoritairement ancien, en voie de
déqualification.
Sur la 3ème polarité tertiaire du territoire, le Nord-Ouest lyonnais, les capacités à activer la réversibilité
des actifs tertiaires, souvent peu denses et assez récents, semblent encore plus faibles à court terme,
malgré des valeurs de marché élevées en immobilier résidentiel.
Ici aussi, les besoins restent très nettement insatisfaits, en particulier sur le coeur de la métropole, qui
souffre d?une insuffisance de projets, notamment dans des valeurs ?intermédiaires? (moins de 6 400
logements commencés tous segments confondus en 2022, pour un objectif annuel compris entre 8 000
et 8 500 nouveaux logements d?ici 2026).
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 100
Potentiels transformation d?actifs tertiaires en logements ordinaires et
résidences gérées sur le Métropole de Lyon
Révéler les opportunités pour aller plus loin dans l'analyse
Cette analyse peut être effectuée sur l'ensemble des territoires de France métropolitaine, et affinée et
ce, tant à l'échelle globale comme présenté ici, qu'à l'échelle de l'îlot/foncier.
La mutabilité de chaque actif tertiaire peut également être évaluée selon différents critères de
faisabilité intrinsèque, mais également en regard de son environnement et du marché potentiel permettant
de développer une offre de logements ordinaires ou en résidences gérées (seniors, étudiants, coliving).
Ces premiers résultats mettent en évidence l?importance des gisements et laissent augurer des
conditions économiques favorables à la transformation des bureaux en logement sur deux territoires
marqués par une très forte demande de logements et par la faiblesse de l?offre foncière aisément
mobilisable.
Tous les acteurs de la filière (collectivités, aménageurs, promoteurs, investisseurs, propriétaires)
devraient s?intéresser à ce potentiel de transformation des territoires, de valorisation d?actifs et de
production de logements qui apporte en outre une réponse au double impératif de décarbonation et de
non-artificialisation qui structure désormais la production urbaine.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 101
LA PLACE de l?immobilier
Votre contact : Blaise HEURTEUX
06 09 24 65 39 / bheurteux@laplacedelimmobilier.com
Créée en 2006, LA PLACE de l'immobilier a pour vocation de contribuer à un marché de la transaction
immobilière « meilleur », plus éthique et plus efficient, grâce à un accès pour tous à la data. L'entreprise
a constitué la 1ère base de données sur les immeubles en France, considérée par de nombreux
professionnels comme LA base de référence du marché.
Dans un souci d'accroître la valeur ajoutée de ses clients, professionnels de l'immobilier, la société a
développé des solutions métiers intégrant l'intelligence de la data ainsi que des services associés.
LA PLACE de l'immobilier propose d'accompagner les professionnels de l?immobilier (brokers,
promoteurs, investisseurs, utilisateurs) avec 3 offres différentes :
- Accéder à la DATA : info à l'immeuble, listing de prospection, étude de marché
- Utiliser des outils métiers connectés à la data : le Module Brokers (CRM et rapprochement offres /
demandes) et le Module Utilisateurs (gestion de parc)
- Réaliser de missions de conseil : recherche de fonciers et d'actifs, recherche de locataires, recherche
d'implantations
https://www.laplacedelimmobilier.com/
ADEQUATION
Votre contact : Nicolas DEBRUYNE
06 22 95 06 55 / n.debruyne@adequation-france.com
Bureau d?Etudes et de Conseil indépendant, ADEQUATION accompagne l?ensemble des acteurs du
foncier, de l?aménagement et de l?immobilier (promoteurs, bailleurs, aménageurs et collectivités) dans la
réussite de leurs projets, dans la compréhension de leurs marchés et dans le développement de leurs
stratégies.
Depuis 1992, la société ADEQUATION observe et étudie les marchés immobiliers résidentiels en France,
une expertise au long cours qui en a fait un acteur réputé de la production de données immobilières.
Solutions digitales, Etudes & Conseil deux métiers nourris par la data, étendus à l?ensemble des
opérateurs de projets résidentiels.
Adossée à un solide ancrage régional, ADEQUATION maille l?ensemble du territoire national et s?est
dessinée une place unique qui ouvre des perspectives sur la maîtrise du risque inhérent au marché
immobilier.
https://adequation.fr/
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 103
A11.5 : Contribution de la Foncière FREY
« Mobilisation du foncier commercial en faveur de la création de logements
Un contexte économique et sociogéographique propice à la transformation des périphéries
Le commerce s?organise autour de typologies, structurées ou non, et de spatialités différentes :
centres commerciaux, zones commerciales, parc d?activités commerciales, etc. S?agissant des entrées
de villes, les zones commerciales se sont développées historiquement autour de locomotives
alimentaires (supermarchés, hypermarchés) ou de galeries commerciales en périphérie des
agglomérations ou « entrées de villes ». Ces zones ont la particularité de concentrer majoritairement
des commerces de moyennes surfaces (500 à 2 000 m² ou plus) non alimentaires, très difficiles à
implanter en coeur de ville, et ne présentant pas nécessairement d?homogénéité entre elles.
Leur hétérogénéité concerne également les acteurs immobiliers : ces zones commerciales ou parc
d?activités commerciales sont investis par une pluralité d?investisseurs, promoteurs et foncières
d?horizons différents : immobilières de la grande distribution, investisseurs institutionnels, SCI
familiales, et bien sûr les enseignes elles-mêmes (succursalistes ou franchisés).
65% de la population française vit autour d?une métropole (ville > à 200 000 habitants) : la « zone
commerciale » est de fait déjà une forme de proximité. 72% des dépenses de consommation seraient
réalisées dans les périphéries de villes. « La périphérie des uns est la proximité des autres ».
Plusieurs inputs majeurs convergent aujourd?hui pour faire du périurbain existant un lieu de
reconquête urbaine, économique et sociale :
? La protection de la biodiversité et des fonciers non artificialisés nécessite une évolution dans
le développement de l?urbain ex-nihilo et appelle à privilégier l?implantation de nouvelles
constructions sur des zones commerciales existantes déjà artificialisées, et plus généralement sur
les zones d?activités économiques.
? Logement, logistique, industries vertes : des filières aux besoins importants, l?opportunité de
valoriser des fonciers.
? L?évolution des comportements et des attentes est propice au développement d?une nouvelle
proximité. Les contraintes économiques, et plus encore environnementales, rendent nécessaire une
meilleure gestion des déplacements et l?accroissement de la mixité fonctionnelle et
programmatique.
? Les politiques publiques se sont concentrées depuis plusieurs années sur la redynamisation des
centres-villes, dont la population stagne depuis 40 ans : il est opportun de considérer à présent la
qualité de vie et les contraintes qui pèsent sur les habitants du péri-urbain.
? Les entrées de ville peuvent devenir le lieu privilégié de la mutation urbaine de notre pays, vers un
modèle plus sobre en foncier et moins générateur de besoins de mobilités, vers un modèle urbain
polycentrique.
Le modèle économique de ces zones commerciales reste toujours aussi intéressant tant du point de
vue des consommateurs que de celui des propriétaires et surtout exploitants.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 104
Ce modèle viable demeure un frein important pour la création d?opération mixte complexe tant par la
recherche d?un équilibre économique pour ces opérations forcément plus onéreuses que par la capacité
de mobiliser la pluralité des propriétaires / investisseurs.
Le puzzle du remembrement pour toute opération de transformation nécessite un remembrement
préalable, lourd en investissements et en portage. Ce travail réclame de longues années de
négociations, de levées de contraintes juridiques en plus des classiques autorisations (autorisations
d?exploitation commerciale notamment) à obtenir? et à purger.
Afin de créer des conditions favorables à la mobilisation de ces fonciers commerciaux pour la création
de logement, il est utile de rappeler que les zones commerciales de périphérie concentrent à l?heure
actuelle une vacance commerciale estimée à 14,89% dans les centres commerciaux et 6,62% dans les
zones commerciales.
La capacité a influencé la transformation des commerces pourrait être de créer une surtaxe sur la
vacance commerciale à partir d?une vacance de plus de 50% de la propriété détenue. Afin de
disposer d?éléments factuels pour déterminer une vacance commerciale, le point de départ de cette
surtaxe pourrait être le non-paiement d?une TASCOM sur une cellule depuis plus de 6 mois. Cette surtaxe
pourrait ainsi créer un phénomène de décision plus rapide, notamment chez les investisseurs
institutionnels.
Cette surtaxe pourrait permettre à l?Etat de financer « une prime à la transformation » en faveur des
opérateurs qui initieraient un projet mixte en lieu et place de commerce existant afin notamment
d?accompagner les opérations économiquement fragiles en finançant l?indemnisation des locataires
et / ou propriétaires. Cette prime à la transformation pourrait être soumise à des conditions de
programmation telle qu?un pourcentage de logements sociaux ou de logements intermédiaires
développés, un pourcentage de renaturation / pleine terre.
Afin de faciliter les négociations foncières avec certains propriétaires particuliers, notamment à travers
des SCI familiales issues d?anciens commerçants, un abattement exceptionnel (de 70% ou 85%)
applicable sur les plus-values immobilières résultant de la cession de biens immobiliers bâtis, ou de
droits relatifs à ces mêmes biens dans le périmètre d?une opération de transformation d?une zone
commerciale pourrait être mis en place.
Au-delà des aspects économiques, et comme précisé supra, le remembrement foncier confère une
complexité telle que certains opérateurs pourraient être découragés devant l?ampleur de la tâche. Afin de
faciliter ce remembrement, il pourrait être intéressant, pour les collectivités de systématiser le droit de
préemption et d?expropriation lors de l?inscription d?une zone de Projet (PPA, GOU, OAP,?). Cette
inscription pourrait générer de fait une DUP sur le périmètre du Projet (L 211-4 et L 214-1 c. urb.),
analogue à la DUP « travaux ». »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 105
A11.6 : Contribution du GRECAM
« Extrait Rapport « Analyse du marché de la reconversion et des marchés porteurs
en Ile-de-France (2024)
Différentiel de prix de vente entre les bureaux et les logements
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 107
A11.7 : Contribution du KAREG
« Note sur la transformation de bureaux en logements
1) Avant 2020 une vacance de bureaux faible
La création de KAREG en janvier 2019, avait pour objectif de proposer aux propriétaires institutionnels
et aux investisseurs de travailler à la restructuration et au repositionnement de leur parc de bureaux
obsolètes et/ou non occupés. Ce parc était alors estimé à 800 000 m² (vides depuis au moins quatre ans
en Ile-de-France) sur les 55M de m² du parc tertiaire francilien. Le constat par ailleurs que la durée de
vie moyenne d?un immeuble de bureaux avant travaux lourds pouvait être estimée à 30 ans conduisait à
évaluer à 1,5 M de m² annuels le parc devant faire l?objet de travaux pour des remises en location. Pour
autant les loyers inférieurs à 200¤/m² annuels sur une partie importante du parc (quasi-totalité de la
seconde couronne et parc de seconde main de première couronne) faisait craindre que les propriétaires
de ces actifs ne renoncent à engager des travaux de l?ordre de 2000¤/m² impossible à amortir dans le
cadre de baux 3/6/9 voire 9 ans fermes.
La création de KAREG faisait également suite à la promulgation de la loi ELAN le 23 novembre 2018
dont l?article 28 proposait plusieurs dispositifs pour faciliter les transformations de bureaux en logements.
2) La nouvelle situation post pandémie, crise structurelle et prime croissante à la centralité
La pandémie de COVID 19 a profondément bouleversé le marché du bureau. La mise en oeuvre
généralisée du télétravail à l?échelle mondiale et nationale a structurellement déstabilisé ce marché et
ses acteurs.
Sur la seule région Ile-de-France ce sont plus de 800 accords de télétravail qui ont été signés en
entreprise avec une moyenne 2,4 jours de télétravail par semaine. Il est à noter qu?au moins 45% des
salariés franciliens pratiquent le télétravail au moins une fois par semaine. Après 3 ans de mise en oeuvre
et les premiers retours d?expérience, une première phase de renouvellement des accords a été engagée
et un consensus s?établit autour d?une moyenne de 2 jours par semaine.
Ces nouveaux modes de travail ont pour conséquence un impact très lourd sur les parcs de bureaux.
Les entreprises ont engagé une réflexion de fond sur leurs besoins en bureaux avec une tendance vers
moins de bureaux mais « mieux de bureaux ». Si mathématiquement 2 jours de télétravail correspondent
à une diminution de 40% des besoins en surface la pratique évolue vers une diminution moindre avec
l?aménagement de nouveaux espaces collaboratifs ou de convivialité. Ils doivent permettre aux
collaborateurs qui se côtoient moins de se retrouver et de renforcer l?esprit d?entreprise. La baisse des
surfaces louées serait ainsi comprise entre 20 et 30% des surfaces antérieures.
Dans l?immédiat, une grande majorité d?entreprise restent dans une phase d?observation. Pour éviter
des engagements trop risqués en termes de politique immobilière, elles réduisent leurs surfaces à
l?occasion des renouvellements de baux ou de la signature de nouveaux baux et adaptent leurs besoins
en ayant recours à des bureaux opérés (co-working) solution plus onéreuse mais beaucoup plus souple.
En parallèle on assiste à une évolution géographique de la demande. Le « mieux » de bureaux
s?accompagne d?une recherche de la centralité et de la desserte la plus efficiente. La limitation de la place
de la voiture au coeur de la métropole dissuade les jeunes générations du déplacement automobile et
incite les entreprises à des implantations très centrales pour attirer les meilleurs profils.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 108
Les chiffres de la vacance tertiaire reflètent clairement cette tendance. Au T1 2024 le taux de vacance
est ainsi de 2,4% dans Paris QCA (avec des loyers « prime » de plus de 1000¤/m²).
A contrario la vacance atteint 13,3% à la Défense et dépasse les 20% dans l?ensemble des Hauts de
Seine à l?exception de 4 communes (Neuilly, Levallois-Perret, Boulogne et Issy-les-Moulineaux). Les
autres départements de petite couronne ont atteint ou dépassé les 20% de vacance et la vacance
s?accroît encore en seconde couronne.
Au T1 2024, le taux de vacance global en Ile de France est de 8,4% avec 4,9M de m² libres mais
devrait encore s?accroitre fortement (cf supra). En effet, nombre d?experts estiment que la vacance devrait
quasiment tripler dans les deux ou trois ans car au regard de la rigidité des baux, beaucoup d?entreprises
n?ont pas encore procédé aux ajustements de leurs besoins9.
3) Mise en oeuvre des opérations de transformation et retour d?expérience
? Les opérations de transformation n?ont pas débuté avec la pandémie de COVID 19. Dès la fin des
années 90, la ville de Paris initiait certaines opérations notamment avec la RIVP. Celles-ci consistaient
pour l?essentiel à redonner une destination « logement » à des immeubles haussmanniens conçus un
siècle auparavant à cet usage. A partir des années 2010, la ville de Paris a fait de la transformation de
bureaux en logements un axe fort de sa politique mais les équilibres financiers parisiens et les coûts
travaux admissibles tout comme les subventions pour surcharge foncière accordées dans le cas de
production de logements sociaux sont très éloignés des standards franciliens.
? L?ORIE (Observatoire régional de l?immobilier d?entreprise) conduit avec l?appui des services de l?Etat
(DRIEAT, DGFIP?) et des notaires, un travail de recensement régulier du parc tertiaire francilien mais
également des parcs d?activité ou encore logistiques. Il en étudie la croissance mais en suit également
l?usage grâce notamment aux informations relatives à la taxe annuelle sur les bureaux en IDF.
C?est ainsi que l?ORIE au T1 2024 recense près de 3 200 immeubles de bureaux partiellement ou
totalement inoccupés en Ile-de-France sur un parc total de 55,5M de m² (dont 39M de m² de parc
marchand).
Ce sont ces immeubles qui sont donc prioritairement destinés à changer d?usage dès lors que leur
implantation où leur obsolescence ne permet plus de leur donner un avenir en bureaux.
? Les acteurs de la transformation
KAREG dans le cadre de sa stratégie a décidé dès 2019 de travailler pour le compte de propriétaires
ou celui d?investisseurs à la transformation de ces immeubles en logements, familiaux, ou gérés, libres
ou sociaux parfois dans le cadre d?opérations mixtes (bureaux-logements, centres de santé, écoles?). A
compter de 2023 KAREG agréée comme société de gestion par l?AMF a créé des fonds d?investissement
destinés à cet objectif.
Les quelques opérations déjà lancées et les très nombreuses opérations étudiées lui ont permis
d?identifier les principaux enjeux liés à la mise en oeuvre de ces opérations.
9 Dans le cadre d?une mission pour le compte d?un propriétaire institutionnel dont des services de l?Etat sont locataires, ce
dernier va regrouper différents services pour passer d?un ratio de 50m² de SU/agent (post pandémie) à 16 m² SU/agent.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 109
a) Les PLU.
Aujourd?hui la plupart des PLU présentent des zonages très figés permettant le développement de
quartiers spécialisés (bureaux, logements, activité etc?). Chaque opération de transformation nécessite
par conséquent une modification de PLU quand ce n?est pas une révision. Plus récemment les PLUI se
sont orientés vers des zonages beaucoup plus souples (Paris, Plaine Commune etc?) Par ailleurs la
proposition de loi Daubié qui pourrait être adoptée en septembre 2024, propose que les dérogations au
PLU puissent être accordées à l?initiative des maires pour la transformation de bureaux en logements.
b) Les blocages « mairie ».
C?est aujourd?hui encore le principal obstacle rencontré par les opérateurs. De nombreux maires
espèrent encore le retour d?utilisateurs y compris pour des immeubles qui ne répondent à aucun des
critères de choix de ces derniers. D?autres font état de la perte de recettes fiscales (CVAE notamment),
de la crainte d?un rejet par la population (en dépit de chantiers « allégés »), ou encore de leur impossibilité
à financer nouveaux équipements publics avec la disparition de la taxe d?habitation et la très forte
réduction de la DGF. Le préfet des Hauts-de-Seine, Laurent Hottiaux, lors d?une réunion ce 22 avril a
précisé que les maires de son département pouvaient difficilement invoquer cet argument au regard de
leur bonne situation budgétaire. Quand ils ne refusent pas les transformations beaucoup de maires
refusent en revanche tout bonus de constructibilité prévus par la loi ELAN (comme la loi ALUR de 2019
pour les logements sociaux).
c) Les problèmes techniques.
Une partie non négligeable des immeubles ne se prête pas à une transformation pour des raisons de
structure, rarement d?épaisseur (immeuble « Nuages » à Paris jusqu?à 24 m d?épaisseur, campus ECLA
à Noisy le grand, 22 m, etc.).
Ce peut être pour des raisons d?implantations défavorables, proximité d?axes particulièrement
bruyants, quartiers mono fonctionnels en activité ou bureaux (Villepinte, certains quartiers de Saint-
Quentin en Yvelines, des secteurs entiers de la Défense?).
Pour ce qui concerne les coûts de transformation, ils sont généralement proches de ceux d?une
opération neuve. Les économies sont possibles sur les coûts de gros oeuvre (infrastructure et structure
du bâtiment). En contrepartie, il convient d?ajouter le plus souvent des coûts liés potentiellement au
désamiantage, au renforcement de structures, à la création de nouveaux noyaux, de chapes acoustiques
etc.
d) Les copropriétés
Le blocage par des copropriétaires parfois très minoritaires devrait être levé par les dispositions de la
proposition de loi Daubié.
e) Le blocage des propriétaires.
Les propriétaires institutionnels ne peuvent pas (en tout cas pour les SCPI qui détiennent 24,1% du
parc tertiaire en IDF) vendre en dessous de la valeur d?expertise. Il y a là un point bloquant auquel ont
été confrontés la plupart des candidats à l?acquisition. En effet, alors même que la valeur d?un actif est
directement liée à son usage et que sa vacance totale devrait conduire à une valeur nulle, les experts
procèdent à des réévaluations à la baisse très progressives. Les propriétaires même vendeurs, fixent
donc comme prix de réserve la valeur d?expertise. En 2023 c?est ainsi un volume de 15Mds¤ d?immobilier
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 110
de bureau qui a été retiré de la vente à l?issue des consultations. Bien évidemment cet aspect doit être
considéré au regard également des « blocages des maires ». Un candidat acquéreur qui fait une offre sur
un actif qui n?a plus de perspectives d?être reloué en bureau et dont le maire ne souhaite pas qu?il fasse
l?objet d?une quelconque transformation doit se résigner à le porter un temps indéterminé et parfois très
long. »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 111
A11.8 Contribution d?un cabinet de conseil en immobilier d?entreprise
La réflexion porte sur « des pistes utilisant des dispositifs existants permettant de canaliser de l?épargne
privée (institutionnelle ou des particuliers) en direction de ces transformations ». Le cabinet attire
l?« attention sur le fait que ces pistes doivent être vérifiées par des spécialistes fiscalistes.
1. Apporter les actifs à transformer à des structures ad-hoc
Les actifs à convertir pourraient être apportés à des structures de détention spécifiques permettant de
mutualiser les risques sur plusieurs produits, géographies ou temporalités. L?effet volume du portefeuille
crée une dynamique auprès des investisseurs et la mutualisation des actifs permet de présenter un profil
de risque plus attractif.
A notre sens il paraît difficile d?envisager des structures de détention qui seraient abondées par
différents investisseurs car trop complexe à mettre en oeuvre. A contrario certains investisseurs
possédant de grands portefeuilles pourraient loger leurs actifs à transformer dans un véhicule spécifique.
Les véhicules pourraient être structurés en fonction de la cible d?investisseurs visés (particuliers ou
institutionnels) ? permettant d?y associer des incitations spécifiques.
Des mécanismes comme le démembrement de propriété pourraient également être mis en oeuvre
avec cession d?usufruit à des bailleurs sociaux pour le développement d?opérations.
L?idée est également de ne pas rechercher à créer des structures de détention où l?Etat aurait vocation
à investir mais au contraire de structurer des véhicules capables de capter de l?épargne privée.
2. Des incitations adaptées à la cible d?investisseurs :
Pour les particuliers :
L?investissement dans un véhicule de transformation identifié comme tel (pourrait être une SCPI par
exemple) pourrait être assorti d?incitations conditionnelles et limitées dans le temps (10 ans) telles que :
? La sortie de la valeur des parts de l?assiette de calcul l?IFI
? La sortie des revenus fonciers de l?assiette de calcul de l?IR
? L?amortissement déductible des revenus fonciers
? Une dispense d?imposition sur la plus-value en cas de revente des parts.
Indépendamment de la transformation des bureaux en logement, les règles d?abattement qui
s?appliquent actuellement sur les revenus des locations non-meublées vs les locations meublées ou
touristiques devraient être revues pour favoriser la location de longue durée ? ce qui n?est pas le cas
aujourd?hui.
Pour les institutionnels :
Pour les institutionnels les leviers portent sur la minoration de la fiscalité des dividendes et sur
l?imposition des plus-values.
Le régime SIIC tel qu?il avait été défini au moment de son lancement pourrait être une base de
réflexion : transparence fiscale du véhicule de détention, obligation de remonter en dividendes un % élevé
du résultat, abattement sur les dividendes perçus par les actionnaires.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 113
A11.9 : Contribution de l?ORIE
« Avis de l?ORIE sur transformation de bureaux en logements
Contexte
Le 21 mai dernier, a été examinée au sénat une Proposition de loi visant à faciliter la transformation des
bureaux en logements pour répondre à la crise du logement en France.
L'ORIE (Observatoire Régional de l?Immobilier d?Entreprise), organe privilégié de concertation entre
pouvoirs publics et professionnels de l?immobilier regroupe, au sein d'une association loi 1901, l'ensemble
des acteurs du marché de l'immobilier d'entreprise francilien se réjouit et partage cette initiative du
gouvernement qui permettra à moyen terme de recycler un gisement considérable de bureaux obsolètes
pour alimenter la production de logements. Par ailleurs l?ORIE encourage à poursuivre les réflexions au
Sénat de la proposition de loi DAUBIÉ.
En parallèle, une rencontre a été organisée le 23 mai dernier entre les membres du CA et M. André YCHE
missionné par le ministère du Logement dans le cadre de sa mission sur la transformation de bureaux en
logements et dont le rapport sera publié fin juin.
Suite à cette rencontre, l?ORIE a animé différents ateliers thématiques dont les conclusions sont
consignées dans ce présent avis.
Propositions de l?ORIE
Les recommandations de l?ORIE concernent 2 grands enjeux.
Enjeu 1 : Libéraliser le marché de la transformation de bureaux en logements
Partant du constat que l?autorisation à la transformation de bureaux en logements existe certes, mais est
soumise à de nombreuses règles administratives et d?urbanisme au niveau local qui retardent voire
rendent impossible certaines opérations, l?ORIE propose de :
- Elargir au-delà du logement (logement libre, intermédiaire et abordable), la destination des
transformations à l?hébergement résidentiel (résidences étudiantes, résidences senior, co-living avec
ou la possibilité d?y insérer des espaces de co-working, des services et/ou commerces de première
nécessité pour les grands ensembles immobiliers [+ 5000 m² ]) et l?hébergement commercial (hôtels et
tourisme) avec la possibilité de changer de destination définie à l?article R.151-27 et de sous -
destination définie à l?article R.151-28 du Code de l?urbanisme sans autorisation préalable et en
permettant une réversibilité vers la destination initiale au bout de 30 ans par exemple.
Enjeu 2 : Promouvoir une incitation financière à la transformation des bureaux en logements
Dans le contexte économique actuel difficile et du fait de son rendement locatif brut espéré inférieur dans
le segment du logement que celui de l?immobilier tertiaire, l?ORIE propose 2 types de mesures incitatives
qui excluent tant la création de toute nouvelle taxe que de subventions publiques ; ce qui créerait des
dépenses supplémentaires pour l?Etat.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 114
- Redonner de l?intérêt au rendement brut locatif
- Exonération totale de la taxe annuelle sur le bureau et de la taxe foncière durant les travaux de
transformation. A compter de l?achèvement des travaux et lorsque l?habitat est occupé à 75%,
mettre en place une exonération de 50 % de la taxe foncière pendant 10 ans.
- Autoriser un amortissement accéléré des coûts de travaux de transformation.
- Réduire les coûts de cession d?actifs pour une transformation future
- Suspension pendant 10 ans des régularisations de TVA en cas de cession des actifs, ce qui
permettrait de réduire considérablement le prix de cession pour une transformation future. Cette
exonération de TVA devra être limitée aux baux d?habitation consentis sur des logements loués
nus à des particuliers.
- Faciliter les opérations de transformation sur l?aspect financier
- Mettre en place un accompagnement public et financier : à l?instar du prêt Gaïa qui permet
depuis 2005, de financer la construction de logements sociaux à travers des prêts à taux réduits,
l?ORIE propose que l?Etat mette en place un accompagnement financier public qui présenterait le
grand avantage de ne pas être synonyme de dépenses publiques supplémentaires. Les avantages
sont en effet multiples pour ce type de prêts publics :
? Modalités d?amortissement (jusqu?à 15 ans),
? Mobilisation sur plusieurs années (1 à 15 ans), couverture jusqu?à 100 % et exonération des
indemnités de remboursement en cas de revente.
- Améliorer la gestion et le financement des équipements publics
- La question des équipements et aménités publics que créent la création de nouveaux logements
est aujourd?hui traité par un mécanisme qui permet de gérer le financement des équipements
publics nécessités par la réalisation d?une opération : le PUP (Projet Urbain Partenarial).
Cependant, le mécanisme actuel est limité à une réflexion et gestion par projet. Afin d?assurer à
la fois les services publics et des péréquations économiques entre projets de différents
opérateurs, l?ORIE propose d?élargir cette gestion au cas par cas du PUP à une gestion par
ensemble de projets. »
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 115
A11.10 : Contribution de « Surface + Utile » (acteur de l?Economie Sociale et Solidaire)
« Propositions pour faciliter l'usage des actifs tertiaires vacants
par les acteurs de l?Economie Sociale et Solidaire (ESS)
- Orienter vers le secteur de l'ESS la mise à disposition des actifs vacants à titre gracieux ou à des prix
décorrélés du marché en échange de l'exemption de la taxe sur les bureaux vides.
- Cet usage et cet avantage fiscal donne droit à l'appellation « espace économique de la transition »,
qui pourra donner lieu à d'autres mesures.
- A titre expérimental, les « espaces économiques de la transition » bénéficient d'une dérogation
temporaire aux règles de destination du PLU. Cet usage dérogatoire est alors réservé aux acteurs de
l'ESS / ou bénéficiant du statut de structure reconnue d'intérêt général ou d'utilité publique.
- Anticiper la possible longue durée de ces mises à disposition (pour les actifs les plus en difficulté) en
créant un statut de bail de long terme, sans motif de précarité, mais qui ne donne pas de droit à une
propriété commerciale de la part du locataire (statut du bail entre le bail précaire, le bail commercial, et le
bail dérogatoire).
- Laisser au propriétaire de l'actif vacant depuis plus de 2 ans le soin de faire occuper le bien par des
acteurs ESS, sans quoi la collectivité ou la préfecture pourront le réquisitionner pour le confier à un acteur
ESS ou pour une mission de service public, jusqu'à ce qu'un permis de construire purgé (ou autre
autorisation administrative) soit délivré ou qu'un bail commercial soit conclu. Le propriétaire échappe alors
à la taxe sur les bureaux vides. Cette disposition permettrait d'ajouter une possibilité d'usage d'intérêt
écologique et sociétal des actifs vides sans faire peser son organisation et sa gestion sur le propriétaire.
- Imposer aux collectivités de rendre public le stock d'actifs vacants sur leur territoire. Ces données sont
disponibles auprès de des services de Bercy mais presque jamais demandées par les collectivités.
- Ajouter la "lutte contre la vacance immobilière" dans les objectifs des OAP pour en faire un objectif
des collectivités dans leurs politiques d'urbanisme (1er alinéa du I de l?article L151-7 du code de
l?urbanisme). »
INVALIDE) (ATTENTION: OPTION 2 a entendu que cette majoration soit appliquée au
taux de cette taxe, majorée le cas échéant de 30% en application des dispositions de ce même article.
Ces dispositions ne sont pas inintelligibles.
2° Principe d'égalité devant les charges publiques.
En instituant une taxe sur les surfaces commerciales, le législateur a entendu favoriser un
développement équilibré du commerce. Il a, pour ce faire, choisi d'imposer les établissements
commerciaux de détail ayant une surface significative de vente.
En adoptant les dispositions contestées, il a entendu augmenter le rendement de cette taxe au profit du
budget de l'Etat.
En prévoyant que la majoration est applicable aux établissements dont la surface de vente est supérieure
à 2 500 mètres carrés, il a fixé un critère objectif et rationnel tant au regard de l'objet de cette majoration
que de l'objet de la taxe.
Eu égard aux taux de la taxe, cette majoration n'entraîne ni dans le montant de l'imposition ni dans les
effets de seuil de son barème une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.
Les dispositions de l'article 46, qui ne méconnaissent ni la garantie des droits ni aucune autre exigence
constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à la Constitution.
b) Extraits
1. Considérant que les députés et les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi
de finances rectificative pour 2014 ; qu'ils mettent en cause la conformité à la Constitution de son article
46 et de certaines dispositions de son article 72 ; que les députés contestent en outre la conformité à la
Constitution de certaines dispositions de son article 31 ainsi que la place des articles 19 et 106 en loi de
finances rectificative ;
- Sur la place de l'article 19 dans la loi déférée :
(?)
- Sur certaines dispositions de l'article 31 :
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 42
5. Considérant que le 3° du paragraphe I de l'article 31 insère dans le CGI un article 1407 ter ; que le
paragraphe I de cet article permet au conseil municipal, dans les communes classées dans les zones
géographiques mentionnées au premier alinéa du paragraphe I de l'article 232 du même Code, de décider
une majoration forfaitaire de la part communale de « la cotisation de taxe d'habitation due au titre des
logements meublés non affectés à l'habitation principale » ; que le paragraphe II de l'article 1407 ter
permet aux contribuables remplissant certaines conditions de bénéficier d'un dégrèvement de cette
majoration forfaitaire sur présentation d'une réclamation ; qu'en particulier, le 3° du paragraphe II permet
aux personnes « qui, pour une cause étrangère à leur volonté, ne peuvent affecter le logement à un usage
d'habitation principale » de bénéficier de ce dégrèvement ;
6. Considérant que les députés requérants contestent le critère de dégrèvement institué par le 3° du
paragraphe II de l'article 1407 ter du CGI ; que ce critère serait insuffisamment précis et méconnaîtrait
l'étendue de la compétence du législateur ;
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles
concernant? l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures » ;
8. Considérant qu'en prévoyant que le conseil municipal pourra instituer la majoration forfaitaire de la
part communale de taxe d'habitation due au titre des logements meublés non affectés à l'habitation
principale dans les communes classées dans les zones géographiques mentionnées au premier alinéa
du paragraphe I de l'article 232 du CGI, le législateur a précisément fixé les règles d'assiette de la nouvelle
majoration ; qu'il a également précisément défini les contribuables qui pourront obtenir, sur réclamation,
un dégrèvement de cette majoration ; qu'à cette occasion, le contribuable pourra demander le bénéfice
de l'application des dispositions de l'article L 277 du LPF ; qu'en particulier, en vertu du 3° du paragraphe
II de l'article 1407 ter du CGI, le dégrèvement de la majoration instituée par le paragraphe I du même
article pourra être obtenu notamment par le contribuable se trouvant dans l'impossibilité d'affecter le
logement à un usage d'habitation principale imputable à une cause étrangère à sa volonté ; que le grief
tiré de ce que le législateur n'aurait pas épuisé sa compétence doit être écarté ;
9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et
du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que
le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que législateur règle de façon différente des situations différentes
ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la
différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;
10. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la Déclaration de 1789 : « Pour l'entretien de la force
publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit
être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; que cette exigence ne serait
pas respectée si l'impôt revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de
contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives ; qu'en vertu de l'article 34
de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels
et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées
les facultés contributives ; qu'en particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, il doit fonder son
appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose ; que cette
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 43
appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges
publiques ;
11. Considérant que l'objet de la majoration instituée par l'article 1407 ter du CGI est d'inciter la personne
occupant un logement à un titre autre que celui de la résidence principale dans une zone qui se
caractérise par la tension du marché immobilier à donner à ce logement un usage de résidence
principale ; qu'il résulte des principes constitutionnels d'égalité devant la loi et les charges publiques que
la différence de traitement fiscal instaurée par cet article n'est conforme à la Constitution que si les critères
d'assujettissement retenus sont en rapport direct avec l'objectif poursuivi ; que ladite majoration de la taxe
d'habitation ne peut, dès lors, frapper que des logements meublés habitables, qui ne sont pas affectés à
l'habitation principale et dont l'absence d'affectation à l'habitation principale tient à la seule volonté de leur
occupant ;
12. Considérant qu'il ressort du 1° du paragraphe II de l'article 1407 ter du CGI que sont dégrevées de
la majoration les personnes contraintes de résider dans un lieu distinct de celui de leur habitation
principale « pour le logement situé à proximité du lieu où elles exercent leur activité professionnelle » ;
qu'il ressort du 3° du même paragraphe II que sont également dégrevés les contribuables notamment
pour des logements ayant vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet de travaux dans
le cadre d'opérations d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition ou pour des logements mis en
location ou en vente au prix du marché et ne trouvant pas preneur ; que, dans ces conditions, les critères
légaux de dégrèvement de la majoration de la part communale de la taxe d'habitation pouvant être
décidée par le conseil municipal ne sont pas contraires aux principes d'égalité devant la loi et les charges
publiques ;
13. Considérant que les dispositions du 3° du paragraphe I de l'article 31 doivent être déclarées
conformes à la Constitution ;
- Sur l'article 46 :
14. Considérant que l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 susvisée institue une taxe sur les surfaces
commerciales assise sur la surface de vente des magasins de commerce de détail, lorsqu'elle dépasse
400 mètres carrés, des établissements ouverts à compter du 1er janvier 1960 ; qu'elle s'applique aux
établissements dont le chiffre d'affaires annuel est supérieur ou égal à 460 000 ¤ ; que, pour les
établissements dont le chiffre d'affaires au mètre carré est inférieur à 3 000 ¤, le taux de cette taxe est de
5,74 ¤ par mètre carré de surface de vente ; que, pour les établissements dont le chiffre d'affaires est
supérieur à 12 000 ¤ au mètre carré, ce taux est de 34,12¤ ; qu'entre 3 000 et 12 000¤ de chiffre d'affaires
au mètre carré, le taux augmente en proportion de l'augmentation du chiffre d'affaires au mètre carré ;
que des taux particuliers s'appliquent à certaines catégories de commerce ;
15. Considérant que le montant de la taxe est majoré de 30% pour les établissements dont la superficie
est supérieure à 5 000 mètres carrés et dont le chiffre d'affaires annuel hors taxes est supérieur à 3 000¤
par mètre carré ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 44
16. Considérant que le 1.2.4.1. de l'article 77 de la loi du 30 décembre 2009 susvisée dispose que cette
taxe est perçue au profit de la commune sur le territoire de laquelle est situé l'établissement imposable
ou, le cas échéant, au profit de l'établissement public de coopération intercommunale ; que le cinquième
alinéa de ce 1.2.4.1. dispose que l'organe délibérant de l'établissement public de coopération
intercommunale ou, à défaut, le conseil municipal de la commune affectataire de la taxe peut moduler le
montant de la taxe de plus ou moins vingt pour cent ; que son dernier alinéa dispose que, pour les frais
d'assiette et de recouvrement, l'Etat effectue un prélèvement de 1,5 % sur le montant de cette taxe ;
17. Considérant que le paragraphe I de l'article 46 complète l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 par un
alinéa aux termes duquel : « Le montant de la taxe calculé selon le présent article et avant application de
la modulation prévue au cinquième alinéa du 1.2.4.1. de l'article 77 de la loi 2009-1673 du 30 décembre
2009 de finances pour 2010 est majoré de 50% pour les établissements dont la surface de vente excède
2 500 mètres carrés. Le produit de cette majoration est affecté au budget de l'Etat » ;
18. Considérant que les députés et les sénateurs requérants soutiennent que cette majoration est
instituée dans le but de compenser l'avantage que les entreprises de la grande distribution ont pu retirer
de l'application du « crédit d'impôt compétitivité emploi » ; que, d'une part, l'objectif poursuivi de
compenser, par une disposition fiscale, l'avantage conféré par une autre disposition fiscale porterait
atteinte à la garantie des droits ; que, d'autre part, la majoration ne serait pas en adéquation avec l'objectif
poursuivi dans la mesure où son champ d'application est plus restreint que celui du « crédit d'impôt
compétitivité emploi » ; qu'enfin, l'application de cette majoration de 50% de la taxe aux magasins de
commerce de détail alors que les entreprises de commerce électronique n'y sont pas assujetties
méconnaîtrait également l'égalité devant les charges publiques ;
19. Considérant que les sénateurs requérants soutiennent en outre que les dispositions de l'article 46
méconnaissent les principes d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi dans la mesure où l'absence de
précision sur les conditions dans lesquelles s'appliquent les diverses majorations de la taxe sur les
surfaces commerciales ne permet pas aux entreprises qui y sont assujetties de « prendre conscience »
de son taux effectif ; qu'en particulier l'articulation entre la majoration de 50% de la taxe et la modulation
qui peut être appliquée par les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale
ne serait pas claire ; qu'il en irait de même de l'éventuelle application à cette majoration du prélèvement
pour frais d'assiette et de recouvrement ;
20. Considérant que les sénateurs font enfin valoir que, pour les établissements disposant d'une surface
de vente supérieure à 5 000 mètres carrés, l'application cumulée de la majoration de 30% et de celle de
50% entraînerait une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ; qu'une telle rupture
serait accrue par l'application des autres majorations ; que serait d'ailleurs incohérente l'application du
prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement à une majoration perçue au profit de l'Etat ;
21. Considérant, en premier lieu, qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que
lui confie la Constitution et, en particulier, son article 34 ; que le plein exercice de cette compétence, ainsi
que l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles
4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, lui imposent d'adopter des dispositions suffisamment précises et
des formules non équivoques ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 45
22. Considérant qu'il ressort des termes mêmes des dispositions contestées que la majoration de 50%
qu'elles prévoient porte sur le montant de la taxe « avant application de la modulation » décidée par
l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou par le conseil municipal ;
que cette modulation, prévue au cinquième alinéa du 1.2.4.1. de l'article 77 susmentionné, ne porte que
sur le produit de la taxe perçue au profit de la commune ou de l'établissement public ; qu'il en va de même
des frais d'assiette et de recouvrement prélevés en application du dernier alinéa de ce 1.2.4.1. ; qu'en
prévoyant que la majoration de 50% sera appliquée sur « le montant de la taxe calculé selon le présent
article », le dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 a entendu que cette majoration soit
appliquée au taux de cette taxe, majorée le cas échéant de 30% en application des dispositions de ce
même article ; que ces dispositions ne sont pas inintelligibles ;
23. Considérant, en second lieu, qu'en instituant une taxe sur les surfaces commerciales, le législateur
a entendu favoriser un développement équilibré du commerce ; qu'il a, pour ce faire, choisi d'imposer les
établissements commerciaux de détail ayant une surface significative de vente ; qu'en adoptant les
dispositions contestées, il a entendu augmenter le rendement de cette taxe au profit du budget de l'Etat ;
qu'en prévoyant que la majoration est applicable aux établissements dont la surface de vente est
supérieure à 2 500 mètre carrés, il a fixé un critère objectif et rationnel tant au regard de l'objet de cette
majoration que de l'objet de la taxe ; qu'eu égard aux taux de la taxe, cette majoration n'entraîne ni dans
le montant de l'imposition ni dans les effets de seuil de son barème une rupture caractérisée de l'égalité
devant les charges publiques ;
24. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article 46, qui ne méconnaissent
ni la garantie des droits ni aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à
la Constitution ;
- Sur certaines dispositions de l'article 72 :
25. Considérant que les dispositions combinées des articles 145 et 216 du CGI régissent le régime fiscal
des sociétés mères, qui permet à ces dernières, sur option, d'être exonérées d'impôt sur les sociétés sur
les produits de participation reçus de leurs filiales ; que l'article 216 prévoit que les produits nets des
participations perçus au cours d'un exercice par une société mère peuvent être retranchés du bénéfice
net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges, fixée uniformément à 5% du
produit total des participations ; que l'article 145 détermine les conditions requises pour bénéficier du
dispositif prévu à l'article 216 ; que le 6 de cet article 145 fixe la liste des cas dans lesquels ce dispositif
n'est pas applicable ;
26. Considérant que le a) introduit au 6 de l'article 145 par le cinquième alinéa du paragraphe I de l'article
72 de la loi déférée ajoute à cette liste les « produits des titres prélevés sur les bénéfices d'une société
afférents à une activité non soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent » ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 46
En ce qui concerne la procédure :
27. Considérant que les sénateurs requérants font valoir que le cinquième alinéa de l'article 72 a été
adopté à l'issue d'un débat « tronqué », le Gouvernement n'ayant fourni « aucune explication de son
sous-amendement n° 586, aucune analyse du dispositif proposé, aucune évaluation, et aucune
information au Sénat » ; qu'aurait ainsi été méconnue l'exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité
des débats parlementaires ;
28. Considérant, toutefois, que la disposition contestée est issue d'un amendement et d'un sous-
amendement adoptés lors des débats devant l'Assemblée nationale en première lecture ; que cet
amendement et ce sous-amendement étaient accompagnés d'un exposé des motifs détaillant leur objet ;
qu'il s'ensuit qu'en tout état de cause le grief tiré de la méconnaissance de l'exigence constitutionnelle de
clarté et de sincérité des débats parlementaires manque en fait ;
En ce qui concerne le fond :
29. Considérant que les requérants soutiennent que la disposition contestée est contraire aux
dispositions des directives de l'Union européenne du 30 novembre 2011 et du 8 juillet 2014 susvisées ;
que cette disposition porterait en outre atteinte à des situations légalement acquises ou aux effets qui
pouvaient légitimement être attendus de telles situations, ainsi qu'au principe d'égalité devant la loi ; que
selon les sénateurs requérants, le a) du 6 de l'article 145 méconnaît l'objectif d'accessibilité et
d'intelligibilité de la loi ;
30. Considérant qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie la
Constitution et, en particulier, son article 34 ;
31. Considérant que la disposition contestée subordonne le bénéfice du régime des sociétés mères à la
condition que les bénéfices sur lesquels sont prélevés les produits des titres perçus par la société mère
soient afférents à une activité soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent ; qu'en faisant
référence au fait que les bénéfices doivent être « afférents à une activité soumise à l'impôt sur les sociétés
ou à un impôt équivalent », le législateur n'a pas permis d'apprécier les activités soumises à l'impôt au
sens de cette disposition ; qu'en particulier, celle-ci ne permet pas de savoir si cette appréciation
s'effectue pour les activités de la filiale, y compris lorsque cette dernière a été exonérée de l'impôt en
application du régime fiscal des sociétés mères, ou si elle s'effectue aussi pour les activités des filiales
de cette filiale ; qu'eu égard à l'imprécision qui résulte de cette indétermination, le législateur a méconnu
l'étendue de sa compétence ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les griefs des requérants, le
cinquième alinéa du paragraphe I de l'article 72 doit être déclaré contraire à la Constitution ;
- Sur la place de l'article 106 dans la loi déférée :
32. Considérant que l'article 106 modifie les dispositions du premier alinéa de l'article 100 de la loi du
24 novembre 2009 susvisée ; que le 1° de l'article 106 prévoit un report au 1er janvier 2020 de la date à
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 47
compter de laquelle il ne peut être dérogé au placement en cellule individuelle dans les maisons d'arrêt
au motif tiré de ce que la distribution intérieure des locaux ou le nombre de personnes détenues présentes
ne permet pas son application ; que le 2° de l'article 106 prévoit que des rapports sur l'encellulement
individuel devront être remis au Parlement et devront comprendre en particulier une information financière
et budgétaire relative à l'exécution des programmes immobiliers pénitentiaires ;
33. Considérant que, selon les députés requérants, cet article n'a pas sa place en loi de finances
rectificative ;
34. Considérant qu'eu égard aux dépenses pour le budget de l'Etat qu'entraînerait l'application des
dispositions de la loi du 24 novembre 2009 relatives à l'encellulement individuel dont le 1° de l'article 106
prévoit le report, ce 1° de l'article 106 trouve sa place dans la loi de finances rectificative ;
35. Considérant que la disposition prévoyant la remise de rapports d'information au Parlement relatifs à
l'encellulement individuel et comprenant en particulier une information financière et budgétaire est une
disposition relative à l'information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ; que
le 2° de l'article 106 trouve donc sa place dans la loi de finances rectificative ;
36. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le grief tiré de ce que les dispositions de l'article 106
ont été adoptées selon une procédure contraire à la Constitution doit être écarté ;
- Sur certaines dispositions de l'article 60 :
37. Considérant que l'article 60 modifie les articles 200 B, 244 bis A et 1529 du CGI ; qu'il a pour objet
de réformer le régime d'imposition des plus-values immobilières des personnes physiques qui ne sont
pas fiscalement domiciliées en France et des personnes morales ou organismes dont le siège social est
situé hors de France ;
38. Considérant que, dans le cadre de cette réforme, le 1. du paragraphe III bis inséré dans l'article 244
bis A par le c) du 2° du paragraphe I de l'article 60 prévoit que les plus-values réalisées par ces personnes
et organismes lors de la cession des biens ou droits immobiliers ou des parts ou actions de sociétés à
prépondérance immobilière sont soumises à un prélèvement au taux de 33 1/3 % ; qu'il prévoit toutefois
que les personnes physiques, les associés personnes physiques de sociétés, groupements ou
organismes dont les bénéfices sont imposés au nom des associés et les porteurs de parts personnes
physiques de fonds de placement immobilier mentionnés à l'article 239 nonies sont soumis à un
prélèvement au taux de 19% ; que, par dérogation au 1. du paragraphe III bis de l'article 244 bis A, le 2.
du même paragraphe prévoit que « le taux est porté à 75% lorsque les plus-values sont réalisées par ces
mêmes personnes ou organismes lorsqu'ils sont domiciliés, établis ou constitués hors de France dans un
Etat ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A » ;
39. Considérant que l'exigence d'égalité devant les charges publiques ne serait pas respectée si l'impôt
revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de contribuables une charge
excessive au regard de leurs facultés contributives ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 48
40. Considérant que les plus-values assujetties au prélèvement à un taux forfaitaire de 75% sont par
ailleurs assujetties aux contributions sociales sur les produits de placement prévues par l'article 16 de
l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, par l'article L 14-10-4 du Code de l'action sociale et des
familles, par l'article 1600-0 F bis du CGI et par les articles L 136-7 et L 245-15 du Code de la sécurité
sociale ; que le taux forfaitaire de 75% a pour effet de porter à 90,5% le taux d'imposition sur les plus-
values immobilières réalisées par les personnes ou organismes visés au 2. du paragraphe III bis de
l'article 244 bis A ; que, par suite, ce régime dérogatoire fait peser sur les contribuables une charge
excessive au regard de leur capacité contributive et est contraire au principe d'égalité devant les charges
publiques ; que, dès lors, le 2. du paragraphe III bis de l'article 244 bis A du CGI dans sa rédaction
résultant du c) du 2° du paragraphe I de l'article 60 doit être déclaré contraire à la Constitution ;
(?)
44. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question
de conformité à la Constitution,
Décide : 1° Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi de finances rectificative
pour 2014 : le quatrième alinéa du c du 2° du paragraphe I de l'article 60 ; le cinquième alinéa de l'article
72 ; (?) 2° Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de cette même loi : l'article 1407
ter du CGI, tel qu'il résulte du 3° du paragraphe I de l'article 31 ; le dernier alinéa de l'article 3 de la loi
72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et
artisans âgés, tel qu'il résulte de l'article 46.
c) Observations
I. 2° Sur le champ de la taxe et celui des dégrèvements, rapprocher des réserves du Conseil
constitutionnel quant à la taxe sur les locaux vacants (Cons. const. 29 décembre 2012 n° 2012-662 DC,
loi de finances pour 2013, cons. 134-139 : RJF 3/13 n° 335, XX).
II Même si le montant total des majorations et modulations pouvait conduire, pour les établissements
les plus importants, à une majoration du taux de base de plus de 100%, le taux maximum de la taxe
calculé en euros/m2 demeurait dans un rapport avec le chiffre d'affaires ne caractérisant pas une rupture
de l'égalité devant les charges publiques.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 49
3) Cons. const. 29 décembre 2012 n° 2012-662 DC, loi de finances pour 2013, cons. 134-139
a) Résumé
XX. Taxe sur les logements vacants (article 16 de la loi). La taxe sur les logements vacants dont le
législateur étend le champ, réduit la durée de vacance admissible, relève le taux, tout en exigeant une
occupation effective plus importante, n'est constitutionnelle que sous les trois réserves suivantes :
1° Ne sauraient être assujettis à cette taxe des logements qui ne pourraient être rendus habitables
qu'au prix de travaux importants et dont la charge incomberait nécessairement à leur détenteur.
2° Ne sauraient être regardés comme vacants des logements meublés affectés à l'habitation et, comme
tels, assujettis, en vertu du 1° du paragraphe I de l'article 1407 du CGI, à la taxe d'habitation.
3° Ne sauraient être assujettis des logements dont la vacance est imputable à une cause étrangère à
la volonté du bailleur, faisant obstacle à leur occupation durable, à titre onéreux ou gratuit, dans des
conditions normales d'habitation, ou s'opposant à leur occupation, à titre onéreux, dans des conditions
normales de rémunération du bailleur. Ainsi, doivent être notamment exonérés les logements ayant
vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet de travaux dans le cadre d'opérations
d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition, ou les logements mis en location ou en vente au prix du
marché et ne trouvant pas preneur.
b) b) Extraits
134. Considérant que le paragraphe I de l'article 16 modifie l'article 232 du code général des impôts relatif
à la taxe sur les logements vacants ; que son 1° donne une nouvelle rédaction de la première phrase du
premier alinéa de cet article, relatif à la définition des zones urbaines dans lesquelles cette taxe peut être
instituée ; qu'il assouplit les critères qui encadrent l'institution de cette taxe et étend son application aux
communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de cent cinquante mille habitants et
de moins de deux cent mille habitants ; que son 2° réduit de deux ans à un an le délai de vacance à
l'expiration duquel la taxe est due ; que son 3° modifie le tarif et relève le taux de cette taxe en le fixant à
12,5% de la valeur locative la première année d'imposition et 25% à compter de la deuxième ; que le 4°
porte de trente jours à quatre-vingt-dix jours consécutifs par an la durée d'occupation d'un logement en
deçà de laquelle ce dernier est regardé comme vacant ;
135. Considérant que l'objet de la taxation instituée par les dispositions de l'article 232 du code général
des impôts est d'inciter les personnes redevables de cette taxe à mettre en location des logements
susceptibles d'être loués ; qu'il résulte des principes constitutionnels d'égalité devant la loi et les charges
publiques que la différence de traitement fiscal instaurée par cet article à l'égard des personnes
redevables de cette taxe n'est conforme à la Constitution que si les critères d'assujettissement retenus
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 50
sont en rapport direct avec l'objectif poursuivi ; que ladite taxation ne peut, dès lors, frapper que des
logements habitables, vacants et dont la vacance tient à la seule volonté de leur détenteur ;
136. Considérant, en premier lieu, que ne sauraient être assujettis à cette taxe des logements qui ne
pourraient être rendus habitables qu'au prix de travaux importants et dont la charge incomberait
nécessairement à leur détenteur ;
137. Considérant, en deuxième lieu, que ne sauraient être regardés comme vacants des logements
meublés affectés à l'habitation et, comme tels, assujettis, en vertu du 1° du paragraphe I de l'article 1407
du code général des impôts, à la taxe d'habitation ;
138. Considérant, en troisième lieu, que ne sauraient être assujettis des logements dont la vacance est
imputable à une cause étrangère à la volonté du bailleur, faisant obstacle à leur occupation durable, à
titre onéreux ou gratuit, dans des conditions normales d'habitation, ou s'opposant à leur occupation, à
titre onéreux, dans des conditions normales de rémunération du bailleur ; qu'ainsi, doivent être
notamment exonérés les logements ayant vocation, dans un délai proche, à disparaître ou à faire l'objet
de travaux dans le cadre d'opérations d'urbanisme, de réhabilitation ou de démolition, ou les logements
mis en location ou en vente au prix du marché et ne trouvant pas preneur ;
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 51
A4. Pour le logement intermédiaire (LLI) : crise du logement social, retour aux
sources
A l?issue d?une enquête aussi minutieuse que de coutume et faisant appel à sa clairvoyance
proverbiale autant qu?à sa perspicacité légendaire, Hercule Poirot conclurait que la crise du logement ne
doit rien à un accident imprévisible, mais qu?elle résulte d?un crime méthodiquement organisé ! S?agissant
de la qualification des faits, sans doute le plus « British » des Belges s?avancerait-il quelque peu du point
de vue de l?intentionnalité du forfait, difficile à imputer à ses auteurs ; pour autant, les faits constituent par
eux-mêmes un faisceau de preuves suffisant pour emporter notre intime conviction. Jugez-en donc !
A l?origine, le logement social est une idée du patronat humaniste chrétien, influencé par la
mouvance fouriériste du Saint-Simonisme en vogue sous le Second Empire et aux débuts de la Troisième
République conservatrice, que d?aucuns qualifieraient aisément de réactionnaire : celle qui s?est légitimée
dans nos campagnes en réprimant les Communards parisiens ! Il s?agit d?éteindre d?emblée la « lutte des
classes » menaçante en restaurant, autour de l?entreprise sociale, la communauté professionnelle et
humaine des travailleurs : quoi de plus respectable que cet idéal progressiste, inspiré par Pierre-Joseph
Proudhon critique véhément du socialisme de Marx taxé de répandre une « philosophie de la misère » ?
Mais, parfaitement en phase avec la nouvelle encyclique de Léon XIII, Rerum Novarum dans laquelle le
pape dénonce fermement la condition ouvrière, fruit du capitalisme industriel.
Cet idéal universaliste, qui rassemble dans des phalanstères constitués autour de « fabriques
industrielles » les ouvriers, les contremaîtres et jusqu?aux directeurs dans une communauté familiale et
solidaire, annonciatrice de la redécouverte du jardin d?Eden : le familistère de Guise, mais aussi les
« Cités ? jardins » d?Arcueil, de Suresnes, d?Asnières qui, au nombre d?une quinzaine, encerclent Paris,
et celle du Foyer Rémois érigée au « Chemin du Moulin vert ».
Ainsi est né le logement social, porté par une vision universaliste, humaniste et patronale qui donne
naissance aux « Habitations à Bon Marché » (HBM) issues d?initiatives privées, encouragées par la loi
Siegfried de 1894 qui ouvre l?accès des organismes de logement ouvrier à des exonérations fiscales et
aux prêts de la Caisse des Dépôts.
Dès lors, alimentée par le « laboratoire philanthropique » qu?est devenu le « Musée social », une
dynamique nouvelle tendant à inscrire le logement social dans l?action publique va se créer à travers les
lois Strauss (1906) qui légitiment l?interventionnisme communal en faveur des plus démunis, la loi
Bonnevay (1912) qui crée les offices publics d?HBM et que couronne la loi Loucheur (1928) qui décide de
l?intervention de l?Etat (central) en instituant une programmation de 200 000 logements sociaux.
Entretemps, la Première Guerre mondiale a entraîné le blocage des loyers qui perdurera jusqu?en 1948,
illustrant le principe de Lindbeck (1970) selon lequel une telle mesure, hormis par le moyen de
bombardements, est le plus sûr moyen de détruire une ville.
Pour autant, les ressources publiques adaptées à cette ambition prométhéenne font défaut et, après
la loi Ribot qui crée le Crédit Immobilier pour financer l?accession sociale à la propriété, c?est finalement
le plan Courant de 1953 qui s?appuie sur la « participation des employeurs à l?effort de construction »
(PEEC) qui mobilise les financements privés pour accompagner la volonté politique de l?Etat. Le logement
social va ainsi osciller entre volontarisme public et mobilisation, plus ou moins spontanée, de ressources
privées, non sans susciter maintes contradictions.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 52
Héritage de la vocation universaliste originelle, le plafond du revenu ouvrant droit au logement social
couvre 80% de la population, alors qu?il ne représente, au tournant du XXIe siècle, que 18% du parc de
résidences principales (soit, tout de même, cinq millions et demi d?habitations sur trente-deux millions),
ce qui n?est guère éloigné du maximum admissible selon les règles européennes qui tendent à ne pas
déséquilibrer le marché au détriment de l?offre privée.
En 2009, la loi Molle a tenté de réduire cet écart abyssal entre les droits subjectifs et l?offre objective
en instituant des surloyers auxquels n?échappent que ? 70% de la population !
Sauf qu?auparavant, deux « véhicules législatifs » sont venus accentuer les contradictions : en 2000,
la loi « Solidarité et Renouvellement Urbain » (SRU) a institué un quota minimal de logements sociaux
(20%, bientôt porté à 25% du parc existant) tout en interdisant, de fait, l?accession dans le parc
conventionné ancien qui était le seul moyen de refinancer durablement les constructions nouvelles?
Et surtout, la loi « DALO » institue « le droit au logement opposable » qui a pour effet de réserver
l?offre de logements sociaux aux publics les plus précaires, c?est-à-dire de les concentrer dans les
« quartiers prioritaires de la ville » où le bon sens le plus élémentaire commanderait de fixer, pour accéder
au parc social, des « planchers » de revenu, et non des « plafonds » !
Ainsi, le logement social, régi par les Pouvoirs Publics mais principalement financé par les
ressources privées du « 1% Logement », s?est détourné de sa vocation universaliste conçue, initialement,
au profit du monde des travailleurs, et n?apporte plus de réponse crédible aux classes moyennes. Se
trouve ouverte une voie royale au logement intermédiaire, financé par des fonds privés et propice à
l?accession à la propriété, à l?issue d?une dizaine d?années d?exploitation locative.
Il reste le plus difficile : aligner le droit sur la réalité, faire prévaloir l?éthique de responsabilité sur
l?éthique de conviction qui tend à s?imposer dans les démocraties d?opinion régies par l?émotion, à
l?encontre de la Raison promue par les Lumières !
Puisqu?il n?est guère envisageable d?accueillir les 70% de la population éligibles au logement social
dans les 20% affectées au « DALO », il ne reste qu?à inclure dans le logement d?intérêt public le logement
intermédiaire qui permet de retrouver la vocation universaliste d?origine, au profit notamment des salariés
de l?industrie et des services publics, qu?il est convenu de qualifier de « key workers ».
Ces logements conventionnés privés, dits « intermédiaires », peut-être ne faudrait-il pas les
décompter au titre des quotas de la loi SRU selon une parité parfaite vis-à-vis du logement social (1 pour
1) mais seulement pour moitié (0,5 pour 1) ; mais alors, il serait pour le moins raisonnable de surpondérer
l?offre « très sociale » (les PLAI) en les décomptant selon un barème ajusté (1,5 pour 1) de façon à
confirmer la priorité sociale de la politique du logement.
Il n?est guère d?autre voie qui permette d?éviter que ne se creuse, en matière de logement comme
dans bien d?autres domaines, le fossé entre le discours politique et la réalité, écart qui constitue,
aujourd?hui, la principale menace pesant sur l?appréhension du « Bien Public », la « Res Publica », jadis
la « Res Publica christiana », dans l?opinion.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 53
A5. Financement de la transformation des actifs immobiliers : les leçons du Baron
Haussmann
Lorsqu?en référence à l?heure de gloire de son grand-oncle à Austerlitz, Charles-Louis-Napoléon
Bonaparte, le 2 décembre 1851, réussit un coup d?Etat prévisible depuis son « élection de Maréchal »,
grâce à l?appui des campagnes, à la Présidence de la République pour un seul mandat de quatre ans, le
pays est en retard d?une révolution industrielle (mais aussi agricole), financière et urbaine.
Retard en matière de réseaux de voies ferrées : 10 000 km au Royaume-Uni ; 3 000 km en France,
incluant le Paris-Orléans et quelques lignes dans le Nord et dans l?Ouest. Retard en termes de liquidité
monétaire et de crédit : pour 1 000 francs de monnaie métallique, 140 francs de billets seulement sont en
circulation, dont plus de 100 émis par la Banque de France, versus 1 300 livres « papier » pour
1 000 livres « métal » au Royaume-Uni. Enfin, un million de Parisiens vivent dans une ville à peine sortie
du Moyen Age, versus deux millions et demi dans Londres, pourvue du tout-à-l?égout et éclairée au gaz.
Les Saint-Simoniens qui entourent Napoléon III vont apporter une véritable rupture dans tous les
domaines, projetant un souffle de modernité au-delà des frontières, avec les canaux de Suez et de
Panama initiés par Ferdinand de Lesseps ainsi que les voies ferrées, en Algérie notamment, lancées par
Prosper Enfantin?
Pour mettre un terme à l?hégémonie de la « Haute Banque » de la dynastie des Rothschild et de
quelques grandes lignées de banquiers d?affaires en situation oligopolistique, les Frères Pereire créent le
Crédit Mobilier qui finance les industries en plein essor ainsi que l?extraction minière (Saint Avold) autant
que le tourisme balnéaire (Arcachon, Deauville, Plombières, Aix-les-Bains) et la grande distribution (Le
Bon Marche), et le Crédit Foncier destiné à permettre la rénovation de Paris. L?homme chargé de cette
immense tâche sera le préfet de la Seine, le Baron Haussmann.
En dix-huit années d?une oeuvre inconcevable de nos jours, il va mener à bien la plus grande
opération d?urbanisme de l?Histoire de France, rénovant 60% de la surface de Paris, avant de doubler la
superficie de la capitale en lui rattachant les communes voisines : Neuilly, Auteuil, Passy, Montmartre,
etc. Le bilan est éloquent : sur 30 000 immeubles anciens, près de 20 000 sont démolis et 30 000 rebâtis ;
500 km de tout-à-l?égout et d?adduction d?eau courante sont réalisés avec les aqueducs et réservoirs
associés ; 65 km de voieries sont ouverts, le boulevard Raspail clôturant cet immense chantier en 1905.
Pour financer l?opération en échappant au contrôle tatillon du Conseil législatif (ancêtre de
l?Assemblée nationale sous le Second Empire), constitué de ruraux peu enclins à approuver les emprunts
destinés à embellir la capitale, il crée le « Caisse des travaux » qui est soustraite à la compétence
parlementaire, ce que Jules Ferry dénoncera comme une illégalité flagrante.
Il met alors en branle un « système » d?une redoutable efficacité. Il exproprie, progressivement,
toutes les parcelles interférant, fût-ce à la marge, avec ses projets d?urbanisme, sur la base d?estimations
modiques correspondant à l?absence de viabilisation, à la difficulté d?accès et à l?état de vétusté du bâti
existant. Le financement est assuré par le Crédit Foncier qui prend également en charge les opérations
d?aménagement, en échange de titres émis par la « Caisse des travaux », ainsi que la reconstruction à
laquelle sont priés de participer les investisseurs institutionnels. Toutefois, après leur valorisation par le
programme d?aménagement, les charges foncières sont revendues à un prix cinq à dix fois supérieur,
selon les quartiers, à la valeur d?expropriation.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 54
Ce mécanisme fonctionne admirablement pendant une dizaine d?années jusqu?au moment où,
l?Empire connaissant un affaiblissement continu avec sa conversion au libéralisme politique, le Conseil
d?Etat s?avise du caractère spoliateur de certaines décisions d?expropriation et les annule ; dès lors, c?est
la voie transactionnelle qui prévaudra, laissant à la Ville de Paris, par le truchement de la liquidation de
la « Caisse des travaux » avec l?effondrement de l?Empire en 1870, une dette de 1,5 milliard de francs-
or, faisant des Parisiens la population la mieux logée et la plus endettée du monde, la première
caractéristique compensant la seconde.
Par chance, la Première Guerre mondiale, vient rebattre les cartes des rapports de puissance dans
le monde et, concomitamment, des créances et dettes anciennes sur le plan national : en 1926, le franc
a perdu 75% de sa valeur-or de 1914 et 85% quelques années plus tard ; les finances de la Ville de Paris
sont, pour cette fois, sauvées par une tragédie européenne !
Le premier enseignement intemporel de cette belle histoire, c?est qu?en matière immobilière (et peut-
être même, mobilière), toute création de valeur rapide suppose une destruction de valeur préalable. Le
second, c?est que l?inflation facilite l?établissement de nouvelles rentes sur les décombres des anciennes :
l?histoire des « biens nationaux », sous la Révolution, illustre parfaitement ce principe, les propriétés du
clergé, en tous temps, se prêtant admirablement à ce processus de transformation en faveur de nouvelles
élites.
S?agissant donc de principes intemporels, il convient de s?en accommoder ; et même plus, d?en tirer
profit.
175 ans après le lancement des travaux du Baron Haussmann, nous sommes à la veille d?ouvrir un
chantier d?ampleur comparable, d?abord en Ile-de-France, mais qui est appelé à s?étendre rapidement à
toutes les métropoles, et même au-delà. C?est celui de la transformation des actifs : ensembles de
bureaux durablement vacants (de l?ordre de quatre millions de mètres carrés en Ile-de-France), centres
commerciaux à reconfigurer (250 sur le territoire national), immeubles tertiaires utilisés par les services
publics à réhabiliter, après adaptation au télétravail et, bientôt à la diffusion de l?intelligence artificielle
dans tous les processus de production? Enfin, il faudra envisager les mesures de massification des
rénovations thermiques, afin d?engager plus rapidement les provisions budgétaires affectées à « Ma
Prime Rénov » ?
Devant ce « mur d?investissement », il convient de s?inspirer des enseignements qui méritent d?être
tirés de l?action du Baron Haussmann ; en premier lieu, ce qui fait défaut aujourd?hui, ce ne sont plus les
ressources financières, ce sont des projets rentables, et comme la situation financière du pays interdit
d?escompter le recours aux fonds publics pour revitaliser le modèle par le subventionnement d?opérations
déficitaires, la seule solution envisageable consiste à susciter des projets créateurs de valeur, c?est-à-
dire, conformément à la méthode d?Haussmann, de transformation d?actifs préalablement dépréciés.
Les temps ont changé et le Conseil d?Etat veille au respect du droit de propriété, de rang
constitutionnel. Dès lors, pour amener les propriétaires d?actifs obsolètes (ou en voie d?obsolescence) à
accélérer des prises de décision de « write off » inéluctables, la seule voie offerte aux Pouvoirs Publics
consiste à adresser des signaux au marché : en conditionnant un mécanisme de défiscalisation des
réinvestissements de transformation au niveau de valorisation des « intrants » (c?est-à-dire de la charge
foncière) apportés dans le processus de transformation ; en préparant une loi foncière à effet différée de
dix-huit à vingt-quatre mois, centrée sur les espaces métropolitains et appliquée aux cessions des
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 55
personnes morales, et « sur-fiscalisant » les plus-values réalisées à l?occasion des cessions opérées au-
dessus du niveau moyen des charges foncières constatées sur le marché concerné.
Bien sûr, il reste à définir précisément les modalités de mise en oeuvre de ce dispositif à « double
détente » et pour citer Napoléon « La guerre est un art simple et tout d?exécution ». Mais une relance
significative et peu consommatrice de financement public ne sera possible qu?à travers cette vision
« haussmannienne » du réaménagement urbain.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 57
A6. Démembrements, vente à réméré et fiducie dans les transformations d?actifs
Depuis un quart de siècle, le thème des démembrements de propriété est de retour, tout particulier
sous la forme de la dissociation du foncier et du bâti conçue comme le moyen de faciliter un processus
d?accession progressive à la propriété via la constitution d?un droit réel (le bail réel solidaire ou BRS) et,
pour la collectivité territoriale concernée, de conserver la maîtrise d?une ressource de plus en plus rare,
le foncier constructible dans le tissu urbain.
En arrière-fond de cette tendance apparaît un phénomène récurrent dans l?histoire économique qui
est le surenchérissement de la rente foncière dans les espaces métropolitains, qui en vient à peser pour
40%, voire plus, dans le coût d?un programme immobilier.
I. Six siècles auparavant, le système féodal qui avait succédé à l?Empire romain avait aboli le régime
de propriété classique (usus, fructus, abusus) qui ne fut rétabli que par la Révolution pour promouvoir
une dissociation distinguant la propriété « éminente » du sol détenu par une seigneurie politique (laïque
ou religieuse) et donnant lieu au versement d?une redevance par le propriétaire « utile » organisant
l?exploitation économique du bien, par exemple par des « métayers », ou par des « journaliers », selon
les cas.
Le tout est que dans le contexte d?anémie de l?économie et du commerce de la guerre de Cent Ans,
le poids des redevances seigneuriales étant devenu excessif, de nombreuses tenures s?en trouvèrent
délaissées par « dégurpissement » des tenanciers et Charles VII, parvenu sur le trône, dut se saisir du
problème de la « relance » ; comment opéra-t-il, en accord sur ce point avec son rival anglais ? En
sacrifiant les redevances dues aux propriétaires « éminents » au profit de la création de richesses, c?est-
à-dire des flux de revenus, par les propriétaires « utiles ».
Ce précédent, jamais démenti par la suite, a condamné les démembrements, dans notre pays, en
tant que mode général de gestion de la propriété foncière, conduisant à réserver au financement par
l?impôt, c?est-à-dire par des personnes publiques, la détention durable de sols grevés des droits réels du
propriétaire « utile », c?est-à-dire du bâti acquis par des possesseurs privés. Ainsi, la puissance publique
assume-t-elle le prix de ses faiblesses ; après avoir favorisé l?inflation foncière par une politique constante
de solvabilisation de la demande (Cf. Pinel), elle s?est efforcée de palier ses effets à travers la création
d?organismes fonciers solidaires (OFS) destinés à porter la « propriété éminente » d?actifs devenus trop
onéreux, eu égard au pouvoir d?achat de l?acquéreur médian.
L?ensemble de ces considérations conduisant à distinguer deux types de démembrements, selon
l?horizon considéré :
- Un démembrement à long terme, dont l?horizon est supérieur à quinze ans et qui, dans les faits, ne
peut être assumé que par un financement public ou parapublic (PEEC) eu égard au risque de non
remboursement de la charge foncière par le possesseur du bien impécunieux, dont l?éviction par décision
de justice paraît fort improbable.
- Un démembrement à court terme, pour une durée d?une dizaine d?années, voire au maximum pour
quinze ans, incluant une option de cession du bâti à un bailleur institutionnel (avec maintien dans les lieux
de l?occupant devenu locataire) ou de rachat de la charge foncière, à cette échéance.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 58
En d?autres termes, le démembrement doit correspondre à une période transitoire (Cf. le PSLA,
quelque peu détourné de sa finalité du fait du taux de TVA de 5,5%, très avantageux), la valorisation du
bien n?étant rendu possible que par la reconstitution de la pleine propriété.
II. C?est dans cette perspective qu?une nouvelle dynamique pourrait être amorcée dans le cadre de la
transformation d?actifs immobiliers. Le champ d?application de transferts de propriété « réversibles »
pourrait s?appliquer à divers scenarii :
- La transformation d?actifs détenus par des SCPI, dans l?hypothèse où les souscripteurs
souhaiteraient conserver tout ou partie des actifs transformés.
- La mise aux normes de copropriétés ou de patrimoines privés détenus par des propriétaires ne
disposant pas des ressources nécessaires pour financer une rénovation thermique.
Dans ce cadre, diverses formules pourraient être explorées :
- La vente à réméré de la nu-propriété du bien ;
- La constitution d?une fiducie destinée à externaliser la requalification des actifs, sous condition de
dédommagement du fiduciaire, de manière à restaurer la commercialité du bien.
Le développement de formules susceptibles de mobiliser des financements de marché doit s?inscrire
dans un cadre légal clarifié et dans la perspective d?un remembrement à court/moyen terme. L?hypothèse
d?une reprise par un bailleur institutionnel et du maintien dans les lieux du propriétaire sous statut locatif
doit alors être sérieusement envisagé.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 59
A7 Revue de presse
Revue de presse rétrospective, l?occasion d?une simple crise conjoncturelle, alors les technologies
numériques n?étaient guère diffusées et que les métropoles naissantes n?avaient pas atteint un point de
saturation.
Articles parus en 1994, année de parution du rapport Darmon
Les Echos ? En dépit de la chute des prix, la construction de bureaux s'est emballée en 1993
Mercredi 26 janvier 1994
Alors que la crise immobilière s'est déclenchée à la mi-1990 pour ne cesser de s'aggraver depuis, la
construction de bureaux n'a jamais été aussi forte que l'année dernière.
Avec 14,42 millions de mètres carrés de bureaux, Paris concentre 40 % des bureaux de l'Ile-de-France,
selon les statistiques de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme de la Région Ile- de-France, et la volonté
de la Ville de Paris de donner un coût d'arrêt à la construction de bureaux apparaît bien tardive. Dans
une étude sur les bureaux parisiens publiée début janvier, l'Observatoire régional de l'immobilier
d'entreprise (ORIE) souligne que de 1985, l'année de suppression de l'agrément-constructeur, à la fin
1992, plus de 1,4 million de mètres carrés de bureaux ont été mis en chantier dans la capitale : 722.000m2
dans les arrondissements de l'Ouest, 158.000 m2 dans le Centre et 546.000 m2 à l'Est.
L'Observatoire ajoute que si 1985 a été le point de départ de l'envol de la construction de bureaux en Ile-
de- France, à Paris il a fallu attendre 1989, au plus fort de la spéculation immobilière. Cela explique
beaucoup des déconvenues enregistrées par les banques et les promoteurs. Rappelons que, de juillet
1987 à juillet 1990, les prix de vente des bureaux et des logements ont doublé. Et dans le fameux
« triangle d'or », ils ont quadruplé entre 1985 et juillet 1990 ! Quand en 1985, le mètre carré se vendait
25.000 francs avenue Montaigne, il atteignait le record de 110.000 m2 fin 1988 !
Alors que, dans l'Ile-de-France, la construction de bureaux ne cesse de décroître depuis 1991, les mises
en chantier se sont accélérées à Paris au cours des trois dernières années. La capitale se trouve donc
dans une situation paradoxale, avec un niveau très élevé de stocks de bureaux vacants, représentant
environ 21 % du total des surfaces vides de l'Ile-de-France, et une production qui reste forte. De 1990 à
1992, les promoteurs ont ainsi engagé la construction de plus de 1 million de mètres carrés, dont 585.000
m2 compensent de fait la démolition de bureaux jugés obsolètes. Et, en 1993, trois ans après le
déclenchement de la crise immobilière, la construction ne ralentit toujours pas. Au contraire, avec 315.000
m2 de bureaux autorisés et 337.000 m2 mis effectivement en chantier, la ville enregistre le plus haut
niveau de construction de la décennie (voir graphique).
Ces mises en chantier ont un peu profité à l'Est parisien. Selon l'ORIE, c'est le douzième arrondissement
qui a enregistré le plus de changements depuis 1985 avec la création des ZAC de Bercy et de Reuilly.
Par contre dans le neuvième, la différence entre les démolitions et reconstructions aboutit à un solde net
négatif (- 14.200 m2). Dans le huitième, le solde démolition-construction est légèrement positif (+ 8.800
m2). Ces deux arrondissements gardent très nettement leur vocation de quartier d'affaires puisqu'ils
totalisent toujours 33 % des bureaux intra-muros. Le rééquilibrage vers l'Est parisien est encore timide.
Dans huit arrondissements, la surface de bureaux mise en chantier depuis 1985 est restée inférieure à
10.000 m2, soit 12 % du total des opération commencées à Paris.
Sachant que plus de 90 % des bureaux lancés depuis 1985 le sont en blanc, le stock de bureaux vacants
n'a jamais été aussi abondant. A la fin de 1993, Bourdais l'estimait à 1,3 million de mètres carrés, sachant
que 400.000 m2 vont encore alourdir cette donne en 1994. Les grands programmes comme Atlantique
Montparnasse, Etoile/Saint-Honoré, Chancelier Adenauer, Washington Plazza attendent le client.
L'année dernière, la demande placée n'a, selon Bourdais, pas dépassé 400.000 m2. La ville a donc tout
intérêt à encourager les propriétaires à transformer leurs bureaux vides en logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 60
Le Monde ? Les 24 propositions du rapport Darmon : 800 000 mètres carrés recyclables, l'Etat doit
aider à transformer des bureaux en logements
Jeudi 15 septembre 1994
Il est possible de transformer environ 800 000 mètres carrés de bureaux vides en logements, dont la
moitié à Paris, mais l'Etat doit aider financièrement ces opérations, estime un rapport rendu public
mercredi 14 septembre.
Transformer les bureaux vides en logements. Lorsque l'idée est apparue la première fois, à la fin 1992,
elle a suscité un torrent de scepticisme. Ensuite, certains l'ont vue comme une panacée permettant de
résoudre à la fois les gigantesques stocks de bureaux vacants (5 millions de mètres carrés,
majoritairement en région parisienne) et la pénurie chronique de logements. Pour se faire une idée exacte
sur le sujet, le ministre du logement, Hervé de Charette, a donc demandé il y a quelques mois à Jacques
Darmon, président de la Banque de financement et de Trésorerie, un rapport, publié mercredi
14 septembre.
Cette transformation est tout à fait possible et, bien menée, elle permettrait de résoudre 40 % du « stock
structurel » de bureaux (c'est-à-dire des mètres carrés excédentaires par rapport à ce que justifie la
fluidité normale du marché), que l'auteur estime à environ 2 millions de mètres carrés. Ces 800 000
mètres carrés recyclables seraient situés pour moitié à Paris (soit l'équivalent d'une année de construction
neuve de logements dans la capitale).
Contrairement à une idée répandue, ils ne se trouveraient pas dans les immeubles haussmanniens,
anciens logements transformés une première fois en bureaux, qui continuent d'être recherchés. M.
Darmon distingue, en revanche, deux autres « gisements » : les bureaux anciens de certains quartiers
résidentiels, bien insérés dans le tissu urbain et donc, faciles à reconvertir ; ceux situés dans des zones
périphériques mal situées et qui exigent un important accompagnement de la collectivité (transports,
équipements publics...).
Vu leur coût, les opérations de transformations ne pourront toutefois se faire sans l'aide de l'Etat, surtout
lorsque les bureaux concernés appartiennent à de petits propriétaires qui doivent déjà se résoudre à
accepter une décote importante de leur bien ou de sa rentabilité. Le rapport propose donc vingt-quatre
mesures de deux natures : d'une part, une levée de toute une série d'obstacles légaux et réglementaires
freinant ou empêchant la transformation ; d'autre part, une aide sonnante et trébuchante, temporaire et
facile à comprendre.
Parmi les premières, l'auteur propose une exemption de permis de constuire dans certains cas et la
dispense de créer un parking pour chaque logement créé. Dans les secondes, on relèvera notamment
une subvention temporaire de 1 000 francs par mètre carré transformé, plafonnée à 50 ou 60 000 francs
par logement créé et la possibilité de déduire du revenu foncier les dépenses d'amélioration destinées à
transformer un local en logement.
Estimant que tout logement transformé peut être considéré comme du neuf, M. Darmon propose
notamment que les premiers acheteurs puissent bénéficier de la déduction fiscale dite " Quilès-
Méhaignerie ". De même, les acquéreurs de bureaux destinés à être transformés en logements se
verraient appliquer des droits de mutation à taux réduit des logements.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 61
Le Monde ? Prochaines mesures pour transformer des bureaux en logements
Vendredi 16 septembre 1994
La transformation des bureaux en logements est " un devoir national ", a estimé, mercredi 15 septembre,
le ministre du logement, Hervé de Charette, lors de la présentation du rapport Darmon sur ce sujet (le
Monde du 15 septembre). " Dans la mesure où cette transformation est techniquement faisable, peut-on
accepter de rester l'arme au pied alors que, dans le même temps, perdure la crise du logement social et
du logement tout court ? ", s'est interrogé M. de Charette. Le rapport Darmon estime que 800 000 mètres
carrés de bureaux vides peuvent être reconvertis en logements, dont la moitié à Paris. La mesure la plus
spectaculaire qu'il préconise est une prime temporaire de 1 000 francs au mètre carré, plafonnée, qui
coûterait, selon l'auteur, 250 millions de francs en trois ans. Le ministre devrait prendre des décisions
avant la fin de l'année.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 62
Les Echos supplément immobilier ? Premières réalisations et beaucoup de projets : recyclage des
bureaux en logements : le doute
Jeudi 22 septembre 1994
Des projets de plus en plus nombreux, des opérateurs qui se laissent convaincre, un ministre décidé à
aller de l'avant : l'idée de transformer des bureaux en logements entre peu à peu dans les esprits et dans
les faits. Mais le scepticisme domine toujours chez les opérateurs. Etat des réflexions une semaine après
la publication du rapport Darmon.
« Quand il n'est plus possible de louer un bureau à plus de 1.400 francs le mètre carré par an, il vaut
mieux le transformer en logement. » Samir Rayess, le patron d'UFFI, un « poids lourd » de l'immobilier
avec un parc géré de plus de 5 millions de mètres carrés de bureaux, a décidé de franchir le pas. Son
projet - créer 48 logements PLA ou PLI dans un ancien immeuble de bureaux à Chatou (Yvelines) - a
d'ailleurs été primé cet été par le plan construction et architecture (PCA). Avec, comme principaux
arguments : l'écart de loyer entre logement et bureau s'atténue, la demande des entreprises se concentre
sur le neuf et les centres-villes.
Devenus obsolètes, de petits immeubles d'entreprise situés en périphérie se découvrent ainsi une
nouvelle vocation. A Vaucresson (Hauts-de-Seine), le cabinet d'architectes 2AD propose la mutation de
3.500 m2 de bureaux en une cinquantaine de logements locatifs. « Le cadre résidentiel, entouré
d'espaces verts, encourage cette opération », dit un des concepteurs, qui ajoute que le projet revient « 25
% moins cher que la construction neuve ». A Rouen, en plein centre-ville cette fois, la Caisse régionale
d'assurance-maladie a réalisé 142 logements d'étudiant dans un immeuble de bureaux, avec une
subvention de la ville (2 millions de francs). L'ensemble sera inauguré le 1er octobre prochain.
De telles expériences se multiplient aujourd'hui avec la bénédiction du PCA qui peut financer les études
de faisabilité (jusqu'à 40.000 francs). Leur aspect expérimental l'emporte encore souvent sur leur viabilité
économique. Qu'importe : jusqu'à présent, les projets recensés n'émanaient que de la Régie Immobilière
de la Ville de Paris (RIVP), qui bénéficie de prêts intéressants de la mairie (Les Echos Immobilier du 21
avril). Seuls les pouvoirs publics croyaient vraiment aux vertus de ces transformations, à la fois pour
résorber les stocks de bureaux vides et pour résoudre la crise du logement.
800.000 m2 à transformer en dix ans
Dorénavant les professionnels de l'immobilier suivent de près ces initiatives, tout en gardant l'oeil rivé sur
leur calculette. La rentabilité d'abord. De ce point de vue, Auguste-Thouard est sans doute l'un des
premiers à envisager sérieusement la question. La transformation de bureaux en logements, notamment
à Paris, devient économiquement intéressante, juge ainsi Jean-Marie Forestier, président du directoire
d'Habitat Foncier (ATHF), filiale du groupe. Car, après des baisses importantes, le prix des bureaux se
retrouve aujourd'hui au niveau et parfois même en dessous de celui des logements. « Le loyer moyen
d'un appartement parisien est de l'ordre de 1.200 francs/m2 /an, et celui d'un bureau s'en rapproche » ,
précise Jean-Marie Forestier.
La valeur vénale des bureaux de la capitale tend elle-même à devenir inférieure à celle des logements,
ajoute-t-il. Et de citer l'exemple de l'opération réalisée récemment par le Sultan de Brunei, qui vient de
racheter les anciens bureaux d'IBM, place Vendôme, une des adresses les plus cotées de Paris, pour en
faire des appartements. Une opération de prestige uniquement ? Elle révèle cependant un nouvel état
d'esprit de la part des acteurs du marché.
Le gouvernement milite en ce sens, au nom d'un « impératif économique et social » à assumer d'urgence.
On ne peut en effet opposer indéfiniment 4 millions de mal-logés à 5 millions de mètres carrés de bureaux
vides en région parisienne. Un chiffre donné la semaine dernière, lors de la présentation du rapport
Darmon, est éloquent : la valeur vénale du parc de bureaux parisiens s'élève à 800 milliards de francs.
Toute mesure à même de rééquilibrer le marché et donc de limiter la baisse de cette valeur (une décote
de 20 % « pèse » 160 milliards) est bienvenue...
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 63
Un premier coup de pouce a été donné dans la loi Habitat adoptée en juillet dernier. Désormais, il est
impossible de revenir pendant treize ans à l'affectation primitive d'un bureau transformé en logement,
sans autorisation préfectorale. La loi accorde également une réduction d'impôts pour investissement
locatif (réduction Méhaignerie représentant 10 % du prix de l'acquisition dans la limite de 30.000 francs
pour un célibataire, le double pour un couple marié, à étaler sur deux ans), sous réserve que l'opération
soit réalisée avant fin 1997.
Une rentabilité incertaine
Il y a tout juste un an, la Ville de Paris s'était, elle aussi, engagée en faveur des transformations. Les élus
avaient alors décidé, dans le cadre de l'élaboration du nouveau plan d'occupation des sols (POS),
d'exonérer ces opérations de l'obligation de créer des places de stationnement. En attendant, la
compensation financière à verser en cas de non-réalisation des parkings a été ramenée de 50.000 francs
au montant symbolique de 10 francs.
Le rapport Darmon va plus loin. Pour transformer 800.000 m2 de bureaux en Ile-de-France en dix ans, le
document propose une série de simplifications administratives et d'incitations financières. Une prime de
1.000 francs par mètre carré transformé, plafonnée à 60.000 francs, va ainsi être prochainement soumise
au législateur : en quelque sorte, un dispositif semblable à la « prime d'arrachage » accordée aux
viticulteurs. Le document suggère que ces opérations bénéficient également des mêmes droits que la
construction de logements classiques (accès aux prêts, avantages fiscaux).
En dépit de ces avancées, le scepticisme reste de règle parmi les opérateurs immobiliers. Echaudés par
la crise immobilière, banquiers et investisseurs institutionnels n'apparaissent guère pressés de se lancer
dans l'aventure ; au bout de leurs comptes, la rentabilité ne paraît pas garantie sur facture. C'est qu'en
termes de revenus annuels de location les appartements ne l'emportent toujours pas sur les bureaux à
Paris. Avec une moyenne de 100 francs/m2/mois pour la location d'un appartement, soit 1.200
francs/m2/an, on est encore loin des 2.000 francs que peut rapporter en moyenne un mètre carré de
bureau. « Sans compter les charges qui pèsent sur les propriétaires de logements, soit une perte
supplémentaire de 20% » , souligne Michel Pariat, directeur du département des investissements à l'UAP.
Parcours du combattant
S'y ajoute le fait qu'un immeuble de bureau, moins cher à l'achat, sera plus rapidement rentabilisé que
son équivalent destiné à l'habitation. Patrick Dallemagne, de la Fédération nationale de l'immobilier
(FNAIM), faisait récemment état d'une étude démontrant que la rentabilité locative brute d'un bureau
(7,5% à 8%) restait très largement supérieure, de l'ordre de 60%, à celle du logement dit du « secteur
libre » (5% à 5,5%). « Transformer un bureau en logement revient à diviser par deux ou trois la rentabilité
nette et à perdre sur la valeur vénale du bien » , concluait l'expert.
Résultat : à Paris, mises à part les opérations de la ville, les seuls grandes transformations de bureaux
en logement ne se font souvent que par le jeu des compensations. La Société Générale a ainsi entrepris
la reconversion de 5.000 m2 de bureaux en 76 logements dans le 16e et le 9e arrondissements, en
échange d'une surface équivalente au Trocadéro pour un centre tertiaire. Mais les surcoûts sont
importants. De 6.000 francs le mètre carré pour une construction traditionnelle, on passe en effet
couramment à 10.000 francs pour une réhabilitation, en raison notamment de la hauteur des plafonds.
Sachant que les appartements réalisés, d'une surface moyenne de 100 m2, ont, avec des loyers de
10.000 à 14.000 francs par mois, quelque difficulté à trouver preneur.
Il est vrai que les résultats des calculs économiques sont radicalement différents selon que l'on se situe
dans les beaux quartiers parisiens (la valeur du bureau y excède largement celle du logement) ou dans
la périphérie de la capitale, voire en province.
Incertaine, la transformation requiert en outre des trésors d'énergie. Un véritable parcours du combattant
! Des règlements de copropriété à modifier en cas d'immeubles mixtes, au problème du non-
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 64
remboursement des taxes sur les bureaux amenés à disparaître, le chemin est semé d'embûches
administratives. Entre les déclarations d'intention et la réalité, le fossé peut être important. Aucune
réponse n'a enfin été apportée à la demande de remboursement de la TVA, lors de travaux de
transformation, sujet de préoccupation souvent exprimé par les opérateurs.
Bien que convaincu des atouts de la formule, qui permet de contourner l'écueil du foncier, le président de
la Fédération nationale du bâtiment, Jean Domange, juge que la transformation de bureaux en logements
« ne va pas bouleverser le paysage de l'immobilier ». « Il faut laisser le marché évoluer de lui-même,
conclut de son côté Alain Lambolley, président de la Sogeprom, filiale de promotion de la Société
Générale. Les beaux immeubles garderont leur destination, alors que les mal fichus redeviendront, selon
les cas, bureaux ou logements. » Le débat entre les adeptes de la transformation et les sceptiques a
encore de beaux jours devant lui.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 65
Les Echos ? L'encombrant trésor immobilier des services publics
20 octobre 1994
Les administrations et les grandes entreprises publiques ont pris conscience de la valeur de leur
patrimoine. L'immobilier devient un poste stratégique, comme dans le privé. Valorisation, transformation,
promotion, commercialisation ? Comment disposer des biens publics ?
A chacun son boulet. Si les promoteurs privés se débattent avec des millions de mètres carrés vides, les
administrations et les entreprises publiques sont assises, elles, sur un encombrant trésor. Des
immeubles, des terrains, d'anciens sites industriels souvent en centre-ville, un patrimoine qu'il ne s'agit
plus seulement de posséder, mais de gérer.
Cette volonté de mettre en place une politique immobilière a moins de dix ans. Elle a été inspirée à la
SNCF par la LOTI (loi d'orientation des transports intérieurs) de 1982 et, à d'autres entreprises publiques,
par la prise de conscience que la rentabilité de l'activité immobilière pourrait aider à rééquilibrer les
comptes d'exploitation. Elle paraît d'autant plus nécessaire aujourd'hui que les biens de l'Etat (répertoriés
dans le TGPE, le tableau général des propriétés de l'Etat, à la direction générale des Impôts) ont
longtemps été peu entretenus, ses locaux mal adaptés à l'évolution des conditions de travail, ses terrains
inutilisés souvent laissés en friche.
« Les préoccupations sont pourtant les mêmes parmi les professionnels de l'immobilier, qu'ils soient
publics ou privés : ne pas perdre d'argent et si possible en gagner , explique Georges du Halgouet,
directeur général adjoint chez Bourdais. Lorsqu'il s'agit de locations, les administrations tentent de
renégocier les baux. En cas de cession ou d'achat, les procédures sont plus longues parce que le public
souffre d'une certaine inertie et ne peut disposer librement d'un bien qui appartient à l'Etat. Mais le secteur
s'est doté, depuis peu, de structures adéquates, très efficaces. »
Inventer de nouveaux usages
Le secteur public est confronté aux mêmes efforts d'économie et de meilleure gestion que les entreprises,
pour lesquelles l'immobilier représente désormais le deuxième poste après les salaires. Mais
l'administration ne se bat pas tout à fait avec les mêmes armes. Si un ministère ou un établissement
public peut décider, seul, de vendre un immeuble ou un terrain, c'est au service des Domaines, à la
direction générale des Impôts, que revient la délicate estimation. « L'avis que nous donnons représente
la garantie que des biens publics ne seront pas bradés, précise Jean Lemierre, directeur général des
Impôts. Nos experts calculent une valeur de référence qui correspond au prix du marché. Notre avis n'est
pas impératif, mais il est respecté dans la majorité des cas. »
En fait, selon certains directeurs immobiliers, les Domaines ont plutôt la réputation d'être décalés par
rapport à ce marché. Trop bas en période de hausse, trop haut en période de faibles transactions, bref,
pénalisant pour un patrimoine qui, vu son état ou sa taille, est déjà difficile à vendre.
Qu'il s'agisse de gares de triage désaffectées, d'entrepôts, d'anciennes usines à gaz, ces hectares publics
ne sont pas cessibles en l'état. Quand ils ne sont pas inaliénables, comme les 985 hectares constructibles
qu'Aéroports de Paris (ADP) gère et aménage grâce à une AOT, une autorisation d'occupation temporaire
du domaine public, délivrée pour soixante-dix ans au maximum.
En accord avec les communes sur lesquelles ses terrains sont implantés, l'Etat doit d'abord les déclasser
et les réintégrer au plan d'occupation des sols en leur inventant un nouvel usage (espaces verts, zone
d'activité, ZAC...). La procédure est longue, complexe et suppose de multiples négociations avec des
maires, pressés de récupérer, en dépensant le moins possible, des emplacements intéressants pour des
opérations immobilières. Elle est menée aujourd'hui par des structures que des établissements, comme
la SNCF, la RATP, EDF ou GDF, entre autres, ont mises en place.
H4 Valorisation (EDF), Espaces Ferroviaires, la Société Foncière et Immobilière du Gaz (SFIG), sont des
filiales qui achètent les terrains de leur société mère, parfois en concurrence avec d'autres promoteurs.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 66
A elles, ensuite, de viabiliser ces hectares, de financer des études d'aménagement, de mener la
discussion avec la collectivité locale pour les revendre au meilleur prix. « Nos objectifs annuels varient
évidemment en fonction des prix du marché, explique Jean-Pierre Pronost, directeur de l'aménagement
à la SNCF, mais les contrats de plan signés avec l'Etat indiquent les ordres de grandeur : 600 millions à
tirer des ventes, 800 millions des concessions et des revenus des loyers. Cela paraît négligeable pour un
chiffre d'affaires de 57 milliards de francs, beaucoup moins par rapport à l'excédent brut d'exploitation qui
est de 7 milliards. »
Jusqu'à la promotion
La Poste, par le biais de sa toute jeune direction nationale de l'immobilier, a cédé en 1993 pour 300
millions d'actifs. Objectif : de 400 à 500 millions au cours des trois prochaines années. Ce « service à
compétences nationales », qui n'est pas une filiale, ne vend rien sans avoir étudié et créé au préalable
des droits à construire. Mais il refuse pour l'instant d'aller plus loin. H4 ou Espaces Ferroviaires, de leur
côté, vont jusqu'à la promotion ou la copromotion et la commercialisation, avec deux avantages évidents
sur des sociétés immobilières privées : un portage foncier nul et une très bonne connaissance des
terrains, comme du fonctionnement du propriétaire.
Soucieux d'une bonne gestion sur tout le territoire, les établissements publics commencent également à
imposer à leurs directions régionales une politique de loyers internes. « Pour l'instant, les frais
d'amortissement qui sont pris en charge par les chefs d'unité d'exploitation ne reflètent absolument pas
la valeur patrimoniale du bâti, souligne Daniel Paccoud, directeur de la SFIG. Ils sont voisins de zéro
dans l'ancien, chers dans le neuf. A partir de janvier 1995, un loyer sera calculé en fonction de la valeur
actualisée au prix du marché des mètres carrés utiles. Il s'agit évidemment de flux internes mais qui
permettront aux directions régionales de décider seules de se regrouper sur moins de mètres carrés pour
faire des économies. »
L'inertie n'est pas forcément un frein
Les administrations n'en sont pas encore là. Globalement, la tendance est plutôt au resserrement des
effectifs (- 1,5 % par an dans la fonction publique) et à la rationalisation de l'occupation des surfaces.
L'Université s'étend (et vient de racheter 19.000 mètres carrés à IBM à Boulogne), l'Assistance Publique-
Hôpitaux de Paris manque de place et construit des logements pour son personnel dès qu'elle parvient à
dégager des réserves foncières. A ces deux exceptions près, les organismes publics, lorsqu'ils le peuvent,
essaient plutôt de regrouper leurs implantations et de s'inventer une gestion. Mais leur mission s'arrête
le plus souvent là où commence le risque. Et la plupart n'ont même pas encore atteint la première étape,
celle de l'inventaire, sans parler des outils de valorisation : une stratégie et des spécialistes pour
l'appliquer.
La question ne se pose même pas pour certains, comme la Justice, dont 80 % du parc est « à usage
indéfini », ayant donc tous les droits du propriétaire sauf la vente. Les Armées, dont la restructuration
implique la cession de terrains militaires immenses, sont allées plus loin mais pas jusqu'à l'aménagement.
Et il n'est pas si fréquent qu'une société d'économie mixte ou même une ville soit prête à acheter en bloc
plusieurs centaines d'hectares dont il faudra ensuite financer la transformation. « C'est aussi un manque
à gagner pour l'Etat qui est obligé de vendre à bas prix, ajoute Alain Villaret, chef de la mission pour la
réalisation des actifs immobiliers au ministère de la Défense. Mais, pour l'instant, ni l'aménagement ni la
promotion ne sont envisagés. Les établissements publics peuvent mettre en place des filiales. Pour les
administrations, c'est plus compliqué. »
Jusqu'à il y a peu, celles-ci n'avaient d'ailleurs aucun intérêt à aller se loger ailleurs, mieux ou moins cher.
C'est seulement depuis la circulaire Cresson de février 1992 qu'elles sont autorisées à réintégrer dans
leur budget propre 90 % de la recette d'une cession immobilière. Avant cette date, l'argent retournait dans
les caisses de l'Etat qui décidait de sa nouvelle affectation.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 67
« Aujourd'hui, la circulaire est appliquée dans le cas de transactions public-privé , explique Michel Malieu-
Lassus, chef du service des opérations fiscales et foncières à la DGI. En cas de transfert d'une
administration à l'autre, en revanche, la recette n'est pas immédiatement réaffectée. »
Les opérations à tiroirs - un organisme remplacé par un autre qui laisse à son tour des locaux vides - sont
pourtant les plus fréquentes. Et, dans l'autre cas, les grands et beaux immeubles classés dans la
catégorie " locaux administratifs ", qu'ils soient fonctionnels ou non, se vendent nettement moins cher que
des bureaux commerciaux, la décote variant de 10 à 30 %, selon les arrondissements, à Paris. Là aussi,
il faut donc prévoir un nouvel usage (du logement, par exemple, comme sur les terrains libérés à Paris
par la SNCF et la RATP) et inclure les études dans les coûts de la transaction.
Heureusement l'administration jouit quand même d'un avantage en temps de crise : son inertie. « En
période de hausse forte, l'Etat ratait toutes les bonnes affaires car les arbitrages, qui remontent parfois
jusqu'à Matignon, prenaient trop de temps. Au contraire, aujourd'hui, l'Etat propriétaire peut patienter,
peut négocier ; en attendant, il ne paie rien » , explique Georges du Halgouet.
Stratégie propre à chaque ministère, outils différents ou inexistants... C'est, entre autres, contre ce
manque de cohérence que s'élève le rapport Picq sur la modernisation de l'Etat, en prônant la création
d'une " direction des politiques immobilières " rattachée à Bercy. Elle pourrait se charger de la valorisation
du patrimoine administratif, en ne se cantonnant pas au rôle d'expert des Domaines. En revanche, elle
laisserait aux établissements publics toute latitude de gestion, en accord avec les contrats d'objectifs
pluriannuels passés avec l'Etat.
Peser sur le marché
Cette solution ne déplairait sûrement pas aux directeurs de filiales ou de départements immobiliers qui
se réunissent régulièrement en un « club de l'immobilier public » : ce club leur permet d'analyser des
opérations et des stratégies tout en se refusant le rôle d'un groupe de pression. Vu le nombre de mètres
carrés que cette association très informelle représente, elle pourrait peser sur le marché. Chacun de ces
grands propriétaires souhaite, en fait, pouvoir - indépendamment de la tutelle commune, l'Etat - décider
de sa politique et de sa rentabilité. Reste à savoir pour quel réinvestissement.
La valorisation du patrimoine permet de dégager des revenus, de financer des projets, d'équilibrer des
comptes. On voit déjà se développer, notamment par le biais de sociétés d'HLM, des opérations de
construction. S'il paraît logique qu'ADP se diversifie vers l'immobilier, quelle légitimité la SNCF, GDF ou
EDF auraient-ils à développer la promotion ? Sans doute pour « sauver » des biens publics qu'il n'est pas
plus légitime de laisser à l'abandon. Mais est-ce là le métier de ces grands établissements ?
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 68
Les Echos supplément immobilier ? Premières réalisations et beaucoup de projets : recyclage des
bureaux en logements : le doute
Jeudi 22 septembre 1994
Des projets de plus en plus nombreux, des opérateurs qui se laissent convaincre, un ministre décidé à
aller de l'avant : l'idée de transformer des bureaux en logements entre peu à peu dans les esprits et dans
les faits. Mais le scepticisme domine toujours chez les opérateurs. Etat des réflexions une semaine après
la publication du rapport Darmon.
« Quand il n'est plus possible de louer un bureau à plus de 1.400 francs le mètre carré par an, il vaut
mieux le transformer en logement. » Samir Rayess, le patron d'UFFI, un « poids lourd » de l'immobilier
avec un parc géré de plus de 5 millions de mètres carrés de bureaux, a décidé de franchir le pas. Son
projet - créer 48 logements PLA ou PLI dans un ancien immeuble de bureaux à Chatou (Yvelines) - a
d'ailleurs été primé cet été par le plan construction et architecture (PCA). Avec, comme principaux
arguments : l'écart de loyer entre logement et bureau s'atténue, la demande des entreprises se concentre
sur le neuf et les centres-villes.
Devenus obsolètes, de petits immeubles d'entreprise situés en périphérie se découvrent ainsi une
nouvelle vocation. A Vaucresson (Hauts-de-Seine), le cabinet d'architectes 2AD propose la mutation de
3.500 m2 de bureaux en une cinquantaine de logements locatifs. « Le cadre résidentiel, entouré
d'espaces verts, encourage cette opération », dit un des concepteurs, qui ajoute que le projet revient
« 25% moins cher que la construction neuve ». A Rouen, en plein centre-ville cette fois, la Caisse
régionale d'assurance-maladie a réalisé 142 logements d'étudiant dans un immeuble de bureaux, avec
une subvention de la ville (2 millions de francs). L'ensemble sera inauguré le 1er octobre prochain.
De telles expériences se multiplient aujourd'hui avec la bénédiction du PCA qui peut financer les études
de faisabilité (jusqu'à 40.000 francs). Leur aspect expérimental l'emporte encore souvent sur leur viabilité
économique. Qu'importe : jusqu'à présent, les projets recensés n'émanaient que de la Régie Immobilière
de la Ville de Paris (RIVP), qui bénéficie de prêts intéressants de la mairie (Les Echos Immobilier du 21
avril). Seuls les pouvoirs publics croyaient vraiment aux vertus de ces transformations, à la fois pour
résorber les stocks de bureaux vides et pour résoudre la crise du logement.
800.000 m2 à transformer en dix ans
Dorénavant les professionnels de l'immobilier suivent de près ces initiatives, tout en gardant l'oeil rivé sur
leur calculette. La rentabilité d'abord. De ce point de vue, Auguste-Thouard est sans doute l'un des
premiers à envisager sérieusement la question. La transformation de bureaux en logements, notamment
à Paris, devient économiquement intéressante, juge ainsi Jean-Marie Forestier, président du directoire
d'Habitat Foncier (ATHF), filiale du groupe. Car, après des baisses importantes, le prix des bureaux se
retrouve aujourd'hui au niveau et parfois même en dessous de celui des logements. " Le loyer moyen
d'un appartement parisien est de l'ordre de 1.200 francs/m 2 /an, et celui d'un bureau s'en rapproche " ,
précise Jean-Marie Forestier.
La valeur vénale des bureaux de la capitale tend elle-même à devenir inférieure à celle des logements,
ajoute-t-il. Et de citer l'exemple de l'opération réalisée récemment par le Sultan de Brunei, qui vient de
racheter les anciens bureaux d'IBM, place Vendôme, une des adresses les plus cotées de Paris, pour en
faire des appartements. Une opération de prestige uniquement ? Elle révèle cependant un nouvel état
d'esprit de la part des acteurs du marché.
Le gouvernement milite en ce sens, au nom d'un « impératif économique et social » à assumer d'urgence.
On ne peut en effet opposer indéfiniment 4 millions de mal-logés à 5 millions de mètres carrés de bureaux
vides en région parisienne. Un chiffre donné la semaine dernière, lors de la présentation du rapport
Darmon, est éloquent : la valeur vénale du parc de bureaux parisiens s'élève à 800 milliards de francs.
Toute mesure à même de rééquilibrer le marché et donc de limiter la baisse de cette valeur (une décote
de 20 % « pèse » 160 milliards) est bienvenue...
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 69
Un premier coup de pouce a été donné dans la loi Habitat adoptée en juillet dernier. Désormais, il est
impossible de revenir pendant treize ans à l'affectation primitive d'un bureau transformé en logement,
sans autorisation préfectorale. La loi accorde également une réduction d'impôts pour investissement
locatif (réduction Méhaignerie représentant 10 % du prix de l'acquisition dans la limite de 30.000 francs
pour un célibataire, le double pour un couple marié, à étaler sur deux ans), sous réserve que l'opération
soit réalisée avant fin 1997.
Une rentabilité incertaine
Il y a tout juste un an, la Ville de Paris s'était, elle aussi, engagée en faveur des transformations. Les élus
avaient alors décidé, dans le cadre de l'élaboration du nouveau plan d'occupation des sols (POS),
d'exonérer ces opérations de l'obligation de créer des places de stationnement. En attendant, la
compensation financière à verser en cas de non-réalisation des parkings a été ramenée de 50.000 francs
au montant symbolique de 10 francs.
Le rapport Darmon va plus loin. Pour transformer 800.000 m2 de bureaux en Ile-de-France en dix ans, le
document propose une série de simplifications administratives et d'incitations financières. Une prime de
1.000 francs par mètre carré transformé, plafonnée à 60.000 francs, va ainsi être prochainement soumise
au législateur : en quelque sorte, un dispositif semblable à la « prime d'arrachage » accordée aux
viticulteurs. Le document suggère que ces opérations bénéficient également des mêmes droits que la
construction de logements classiques (accès aux prêts, avantages fiscaux).
En dépit de ces avancées, le scepticisme reste de règle parmi les opérateurs immobiliers. Echaudés par
la crise immobilière, banquiers et investisseurs institutionnels n'apparaissent guère pressés de se lancer
dans l'aventure ; au bout de leurs comptes, la rentabilité ne paraît pas garantie sur facture. C'est qu'en
termes de revenus annuels de location les appartements ne l'emportent toujours pas sur les bureaux à
Paris. Avec une moyenne de 100 francs/m2/mois pour la location d'un appartement, soit 1.200
francs/m2/an, on est encore loin des 2.000 francs que peut rapporter en moyenne un mètre carré de
bureau. « Sans compter les charges qui pèsent sur les propriétaires de logements, soit une perte
supplémentaire de 20% » , souligne Michel Pariat, directeur du département des investissements à l'UAP.
Parcours du combattant
S'y ajoute le fait qu'un immeuble de bureau, moins cher à l'achat, sera plus rapidement rentabilisé que
son équivalent destiné à l'habitation. Patrick Dallemagne, de la Fédération nationale de l'immobilier
(FNAIM), faisait récemment état d'une étude démontrant que la rentabilité locative brute d'un bureau
(7,5% à 8 %) restait très largement supérieure, de l'ordre de 60 %, à celle du logement dit du « secteur
libre » (5 % à 5,5 %). « Transformer un bureau en logement revient à diviser par deux ou trois la rentabilité
nette et à perdre sur la valeur vénale du bien » , concluait l'expert.
Résultat : à Paris, mises à part les opérations de la ville, les seuls grandes transformations de bureaux
en logement ne se font souvent que par le jeu des compensations. La Société Générale a ainsi entrepris
la reconversion de 5.000 m2 de bureaux en 76 logements dans le 16e et le 9e arrondissements, en
échange d'une surface équivalente au Trocadéro pour un centre tertiaire. Mais les surcoûts sont
importants. De 6.000 francs le mètre carré pour une construction traditionnelle, on passe en effet
couramment à 10.000 francs pour une réhabilitation, en raison notamment de la hauteur des plafonds.
Sachant que les appartements réalisés, d'une surface moyenne de 100 m2, ont, avec des loyers de
10.000 à 14.000 francs par mois, quelque difficulté à trouver preneur. Il est vrai que les résultats des
calculs économiques sont radicalement différents selon que l'on se situe dans les beaux quartiers
parisiens (la valeur du bureau y excède largement celle du logement) ou dans la périphérie de la capitale,
voire en province.
Incertaine, la transformation requiert en outre des trésors d'énergie. Un véritable parcours du combattant !
Des règlements de copropriété à modifier en cas d'immeubles mixtes, au problème du non-
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 70
remboursement des taxes sur les bureaux amenés à disparaître, le chemin est semé d'embûches
administratives. Entre les déclarations d'intention et la réalité, le fossé peut être important. Aucune
réponse n'a enfin été apportée à la demande de remboursement de la TVA, lors de travaux de
transformation, sujet de préoccupation souvent exprimé par les opérateurs.
Bien que convaincu des atouts de la formule, qui permet de contourner l'écueil du foncier, le président de
la Fédération nationale du bâtiment, Jean Domange, juge que la transformation de bureaux en logements
« ne va pas bouleverser le paysage de l'immobilier ». « Il faut laisser le marché évoluer de lui-même,
conclut de son côté Alain Lambolley, président de la Sogeprom, filiale de promotion de la Société
Générale. Les beaux immeubles garderont leur destination, alors que les mal fichus redeviendront, selon
les cas, bureaux ou logements. » Le débat entre les adeptes de la transformation et les sceptiques a
encore de beaux jours devant lui.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 71
Les Echos ? De Charette se prononce pour une loi d'orientation sur le logement
Mercredi 7 décembre 1994
Devant les reproches des agents immobiliers qui se plaignent des maigres avancées en matière de
fiscalité du logement, le ministre, Hervé de Charette, a estimé que la meilleure façon d'avancer serait de
voter une loi d'orientation sur le logement et l'immobilier, fixant des objectifs à moyen terme.
Devant la stagnation du marché immobilier, les agents immobiliers réunis à l'occasion du congrès annuel
de leur fédération, la FNAIM, ont une nouvelle fois souligné les oublis des politiques du logement
consécutives. Ces spécialistes du logement ancien se sentent mal aimés par les gouvernements
successifs, qui se penchent, selon eux, toujours sur le sort de la construction et donc du logement neuf
et rarement sur le parc ancien.
Tout en dénonçant un projet de loi pour 1995 « maigre en dispositions véritablement avantageuses pour
le logement ancien », Yves Boussard, président de la FNAIM, a rappelé dans son discours de clôture que
« les Français accèdent à la propriété en majorité dans le logement ancien, que l'ancien génère une
activité qui a permis aux entreprises de survivre entre 1990 et 1994 et qu'une partie croissante des achats
dans le neuf résulte de la vente d'un logement ancien ».
Tout en reconnaissant que la conjoncture immobilière était entrée dans une phase de « tassement
conjoncturel », le ministre du Logement, Hervé de Charette, a déclaré qu'il y avait quand même eu une
reprise générale, même modérée. Il a néanmoins reconnu que l'état des finances publiques ne lui avait
pas permis d'adopter autant de mesures que celles promises, comme, par exemple, l'augmentation de la
déduction forfaitaire sur les revenus fonciers. Afin que « l'année 1995 ne soit pas une année perdue pour
l'immobilier », en raison de l'attentisme provoqué par l'approche de l'élection présidentielle, il s'est
prononcé en faveur d'une « loi d'orientation sur le logement et l'immobilier ». Une telle loi permettrait,
selon lui, de tordre le cou à deux idées fausses largement répandues dans l'administration, selon
lesquelles la France dépense trop pour le logement et dispose d'une fiscalité immobilière satisfaisante.
Des petits pas en faveur de l'ancien
A propos du logement ancien, il a énuméré les petits pas faits en faveur du secteur. En critiquant d'abord,
une nouvelle fois, l'absence d'intérêt des grandes banques de dépôt pour le PAS (prêt d'accession
sociale), un type de prêt aidé qui prend un réel essor actuellement et qui est utilisé à 90 % pour l'achat
d'un logement ancien. Il a rappelé les diverses mesures fiscales inclues dans la loi de Finances 1995,
l'augmentation du budget de l'ANAH (Agence nationale d'amélioration de l'habitat), qui aura distribué
cette année 2,75 milliards de francs de subventions, et rappelé que le Sénat avait voté la prolongation
jusqu'au 30 juin 1995 de l'exonération de l'impôt sur les plus-values des Sicav réinvesties dans
l'immobilier.
Actuellement, le ministère continue à explorer ce qui peut être fait pour remettre sur le marché des
logements vacants, tandis qu'il espère pouvoir bientôt mettre en oeuvre une mesure préconisée par le
rapport Darmon sur la transformation de bureaux en logements. Grâce au Fonds d'aménagement de la
Région Ile-de-France (FARIF), le ministère du Logement estime qu'il est possible de subventionner la
transformation de bureaux en logements en région parisienne, à concurrence d'environ 1.000 francs par
mètre carré.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 73
A8 Création d?une « bourse des droits à construire » régionale
1. CONSTAT
La transformation d?un actif tertiaire obsolète / vacant en un ensemble mixte ou résidentiel se heurte à
des freins structurels et techniques générateurs de surcoûts conséquents et à des pertes de surfaces
habitables (plans non optimisés et contraintes fonctionnelles) destructrices de valeur, à des contraintes
administratives (PLU/ PLUi non compatibles) et à des oppositions politiques susceptibles de rallonger les
durées de portage et donc d?augmenter les coûts afférents. Il est donc nécessaire de proposer aux
foncières et aux opérateurs des systèmes de compensation incitatifs, qui ne pèsent pas pour autant sur
la dépense publique.
2. PROPOSITION : METTRE EN PLACE UN SYSTEME DE « BOURSE DE DROITS A CONSTRUIRE »
- L?éligibilité à ces droits à construire additionnels serait conditionnée à la réalisation d?une
opération de transformation de bureaux vacants en un ensemble mixte ou résidentiel.
- Ces droits à construire additionnels seraient calculés sur la base du bilan de l?opération de
transformation pour permettre de l?équilibrer.
- Ils pourraient être déployés sur site, si l?actif et le PLU permettent une surélévation ou une
densification, ou hors site pour fluidifier le marché et démultiplier les opportunités. Ils pourraient
également s?échanger et se valoriser, sur le principe des certificats d?économies d?énergie ou encore de
la commercialité.
- Pour que ce dispositif soit réellement incitatif, il faut sécuriser les opérateurs sur l?effectivité de
cette compensation, avec un modèle contractuel robuste et une temporalité maîtrisée.
- Pour cette raison, il nous semblerait intéressant de territorialiser cette bourse à la bonne échelle :
cette bourse pourrait, dans un 1er temps, s?organiser en partenariat avec l?EPF IdF ou GPA.
- A titre d?exemple, grâce à ce mécanisme, un opérateur pourrait réaliser une opération de
reconversion de bureaux vacants en résidence étudiante dans une commune d?Ile-de-France, grâce à
l?octroi, en gré à gré, de xxx m² de constructibilité sur un foncier maîtrisé par l?EPF IdF, potentiellement
dans une autre commune, lui permettant de trouver un équilibre économique à l?échelle de ces deux
opérations : c?est ainsi à la fois la transformation des actifs obsolètes et la construction de logements
neufs qui seraient encouragées.
3. AVANTAGES
? Ce dispositif permet de fluidifier le marché de la transformation, en élargissant la compensation à
d?autres territoires, si l?actif transformé ne peut pas être densifié ou surélevé.
? Ce dispositif n?induit pas de dépenses publiques.
? Les droits à construire de compensation constituent un effet de levier supplémentaire en faveur de la
construction de logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 75
A9. Hypothèses financières sur 4 ans 2025/2028
« Je ne crois qu?aux statistiques que j?ai moi-même falsifiées. »
Winston Churchill
Evolution de l'assiette utile (nationale)
DU
RE
E
DE
V
AC
AN
CE
Année n Année n+1 Année n+2 Année n+3
(2025)
(2026)
(2027)
(2028)
m2 vacants 6M 7M 8M 9M
m2 vacants >24 mois 3M 3,5M 4M 4,5M
m2 vacants >36 mois 2M 2,5M 3M 3,5M
m2 vacants >48 mois
PR
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CE
Année n Année n+1 Année n+2 Année n+3
(2025)
(2026)
(2027)
(2028)
> 24 mois 10M¤ 10M¤ 10M¤ 10M¤
> 36 mois 30M¤ 37,5M¤ 45M¤ 52,5M¤
> 48 mois
TOTAL 40M¤ 47,5M¤ 55M¤ 62,5M¤
TOTAL GENERAL COLLECTE 205 M¤, majoré par le franchissement des seuils, minoré par
(4 ans) les suspensions pour projets déposés
Dont : 100M¤ reversés aux collectivités locales
100M¤ consacrés aux crédits d'impôts
Travaux de transformation : 6Md¤ à 10Md¤
Logements créés : 25 000 (150k¤ de travaux par logement pour 50m2 de surface moyenne)
Potentiel de transformation global : 12 000 / 15 000 par an
(bureaux + centres commerciaux + zones d'activités)
Surfaces de bureau transformées : 2 millions à 4 millions de m2
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 77
A10. Acteurs consultés
RAISON SOCIALE Prénom NOM
ACTION LOGEMENT Bruno ARCADIPANE
Nadia BOUYER
ALTAREA
Alain TARAVELLA
Jacques EHRMANN
Ronald SANNINO
AMUNDI IMMOBILIER Antoine AUBRY
Marc BERTRAND
APSYS Group M. BANSAY
ARKEA FLEX
Florent LEMAIRE
Alexis HAUSEMER
François-Xavier STEFANI
ASPIM
M. COLY
Mme DONNADIEU
Mme STOJANOVIC
ASSEMBLEE NATIONALE Romain DAUBIE
ACNF (Association Congrès des Notaires de France)
Sophie SABOT-BARCET
Marie-Hélène PERO
Xavier LIEVRE
ADHERENTS de l?ACNF
BNP PARIBAS // CARDIF
France ASSUREURS Nathalie ROBIN
BNP Real Estate
Thierry LAROUE-PONT
Olivier BOKOBZA
Séverine CHAPUS
Jean-Maxime JOUIS
CDC Eric LOMBARD
Kosta KRASTRIDINIS
CDC BANQUE DES TERRITOIRES Pierre LAURENT
Equipe universitaire de chercheurs
CDC HABITAT Thierry LAGET
Commission de surveillance CDC M. HONROYD
& MEMBRES
CGEDD M. DELORME
CITALLIOS Maurice SISSOKO
CLUB VILLE & AMENAGEMENT Eric BAZARD
CREDIT AGRICOLE IMMO Marc OPPENHEIM
DGFIP / DIE Alain RESPLANDY-BERNARD
DHUP / Financement
Sébastien DORLHIAC
Raphaël MONTAGNER
Maï-Caroline BULLIER
Sylvain BERGAMINI
DLF Laurent MARTEL
DRIHL Ile-de-France
Laurent BRESSON
Guillaume MANGIN
Frédéric ESNAULT
EGF-BTP Mme FRANCQUEVILLE
& ADHERENTS
EPF Occitanie Sophie LAFENETRE
EPA MARNE M. GIROMETTI
ETUDE NOTARIALE CHEUVREUX M. LEONETTI
Mme RAUNET
FEI iMMOBILIER
Maryse AULAGNON
Delphine CHARLES-PERONNE
& ADHERENTS
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 78
RAISON SOCIALE Prénom NOM
FFB
M. SALLERON
M. CHAPEAUX
M. CHENUET
M. BOUCAUX
FONCIERE FREY
Antoine FREY
M. BARBONI
M. LECOCQ
FPI M. BOULANGER
& ADHERENTS
FRANCE ASSUREURS M. TAFFIN
FTI Katelle LE GUILLOU
GRAND PARIS AMENAGEMENT M. de FAY
GRECAM M. GARNIER
GROUPAMA IMMOBILIER Mme WEILL
M. CUBIN
HELIOS FIDUCIE CAPITAL Jean-Philippe CLAVEL
ICAMAP Guillaume POITRINAL
Alexandre AQUIEN
JLL Raphaëlle BOUR
Rémi MOREL
KAREG Benoît LABAT
Personnalité qualifiée ex-LA FRANCAISE Xavier LEPINE
LA PLACE DE L?IMMOBILIER M. HEURTEUX
LE PATCHWORK Lucie PERRAUDIN
LINKCITY Laurent WARNIER
METROPOLE DE TOULOUSE Bertrand SERP
MIRABAUD Olivier SEUX
NEXITY Véronique BEDAGUE
NHOOD M. GROLIN
NOVAXIA M. AZAN
Mathieu DESCOUT
OMNES (fonds Invest.) Gonzague de TREMIOLLES
OPPIDEA Raphaël CATONNET
ORIE Smaïn AOUADJ
& MEMBRES
PARIS LA DEFENSE
M. GUICE
M. SCHOENTJES
Mme CRESTIN
PGIM Antoine TINCELIN
Préfecture Hauts-de-Seine M. HOTTIAUX
M. GAUCY
REDMAN Matthias NAVARRO
Réseau des EPFR Sophie LAFENETRE
& ADHERENTS
SCET Romain LUCAZEAU
Christophe LASNIER
SENAT M. MARSEILLE
Mme ESTROSI SASSONE
SOCIETE GENERALE IMMOBILIER M. GROVEN
SOCFIM Olivier COLONNA D?ISTRIA
SPL LYON PART-DIEU M. SAINTE FARE GARNOT
SURFACE + UTILE (association de l?ESS) M. CITRON
UNIBAIL-RODAMCO-WESTFIELD M. TRITANT
VILOGIA Philippe REMIGNON
Tristan BARRES
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 79
A11. Contributions des acteurs consultés
A11.1 Contribution d?Action Logement
A11.2 Contribution de l?ASPIM
A11.3 Contribution de CDC Habitat & Groupe Mirabaud
A11.4 Contribution du Consortium des Bureaux en France (CBF)
A11.5 Contribution de la Foncière FREY
A11.6 Contribution du GRECAM
A11.7 Contribution du KAREG
A11.8 Contribution d?un cabinet de conseil en immobilier d?entreprise
A11.9 Contribution de l?ORIE
A11.10 Contribution de « Surface + Utile » (acteur de l?Economie Sociale et Solidaire)
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 81
A11.1 : Contribution d?Action Logement
A. Fiche d?analyse dans la perspective de la lettre de mission du 14 mars 2024
La note d?Action Logement couvrant un vaste champ d?analyse et de propositions, les seules
observations mentionnées ci-après ne concernent que les dispositions les plus « impactantes » du point
de vue de ladite lettre de mission.
1. La principale réalisation d?Action Logement, à savoir la création de la Foncière de Transformation
immobilière (FTI) constitue une avancée considérable en soi, d?un triple point de vue :
- Il s?agit du premier véhicule institutionnel, à la différence des initiatives privées comparables :
NOVAXIA, KAREG, le Groupe Mirabaud, Omnes / Redman, etc.
- La FTI démontre, sous certaines conditions, la faisabilité d?opérations concrètes, quoiqu?en nombre
limité, et permet de mieux apprécier le potentiel de transformation d?actifs obsolètes, à partir des premiers
résultats enregistrés. Il convient néanmoins de souligner la part largement dominante des résidences
gérées pour étudiants, prise dans les réalisations et les projets, qui limite la portée de l?expérience.
- Elle illustre les limites actuelles du modèle non reproductible sur la base duquel elle opère : la
mobilisation de 500 millions d?euros de capital sans perspective assurée de rentabilisation, fût-ce à long
terme, ainsi que des quasi-fonds propres à hauteur de 300 millions d?euros, faiblement rémunérés ; un
horizon moyen de dénouement hypothétique à 57 ans.
En bref, le modèle expérimental (dans un cadre juridique préexistant) du bail à construction s?inscrit
dans le courant actuellement « porteur » (à divers titres) des « démembrements de propriété », sans qu?il
s?agisse, à proprement parler, d?une telle opération, mais plutôt d?une forme de « concession de
réalisation et d?exploitation d?un ouvrage d?intérêt public », mais dont la caractéristique principale tient à
la non-reproductibilité en dehors d?un environnement public (ou parapublic de par les ressources de la
PEEC) dont il n?est pas évident qu?il soit soutenable pour les finances publiques.
2. S?agissant des propositions de nature à susciter l?émergence d?une industrie de la transformation des
actifs immobiliers, outre des ajustements à la marge qui pourraient s?avérer fort utiles, ou de la création
de foncières de transformation que nul ne saurait récuser, la principale disposition mise à l?étude est
relative à la constitution d?un avantage fiscal au profit du vendeur d?actifs obsolètes, sous la forme d?un
crédit d?impôt correspondant, en valeur, à la taxe acquittée au titre de la détention desdits actifs au cours
des deux années précédentes, éventuellement étendue à la taxe d?aménagement acquitté par ledit
vendeur. Il est important de souligner que ce crédit d?impôt viendrait en déduction de l?imposition (à
hauteur de 19%) due au titre de la plus-value réalisée au titre de ladite transaction.
Cette mesure paraît pouvoir s?inscrire dans une démarche tendant à accélérer la cession d?actifs
obsolètes en vue de leur transformation. Toutefois, elle suscite trois objections majeures :
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 82
- Sa déclinaison au très important secteur des SCPI (60% des bureaux relevant du périmètre
« marchand »), s?agissant de véhicules opérant en transparence fiscale, est d?autant moins aisée à
concevoir qu?au-delà des personnes physiques, une part importante du capital desdites SCPI est détenu
par des personnes morales exemptées d?impôt ou bénéficiant d?un régime d?encadrement très favorable
(mutuelles, EPCI « fiscal » ?).
- Politiquement, il s?agit d?un avantage fiscal portant sur les plus-values réalisées lors de la cession de
l?actif de telle sorte qu?il est difficile de le justifier autrement que par une prime à la cession d?autant plus
recherchée que le prix de cession sera plus élevé, ce qui est exactement l?inverse de l?effet souhaité.
- Enfin, et c?est peut-être l?essentiel, alors qu?il s?agit d?inciter au réinvestissement d?avenir, d?abord en
conditionnant l?avantage fiscal à un niveau de charge foncière plafonné (c?est-à-dire de fait, à un prix de
cession ou de valorisation dans le cas d?une transformation opérée par le propriétaire de l?actif), le
dispositif fiscal proposé par Action Logement est tourné, non pas vers le réinvestissement d?avenir, mais
vers le désinvestissement portant sur des choix hasardeux opérés dans le passé. Il est donc difficile de
justifier ce dispositif dans une perspective de relance.
Conclusion
L?expérience d?Action Logement est utile et éclairante quant à la nécessité, pour construire un système
reproductible et soutenable (hors soutien fiscal et parafiscal) d?agir en amont de toute opération de
transformation sur la valorisation des actifs. Tel est l?objet de la démarche proposée au ministre, à travers,
d?une part, le plafond de charge foncière conditionnant l?accès à l?avantage fiscal et d?autre part, la
surfiscalisation des bureaux vacants, à partir de modalités à préciser, qui pourraient découler d?une
obligation déclarative. Elle s?inscrit dès lors dans la suite de maintes innovations introduites par Action
Logement, s?agissant par exemple de la constitution de l?Association Foncière Logement qui a ouvert la
voie au logement intermédiaire institutionnel (LII) ou de l?organisme national de vente qui a permis
d?accélérer l?accession dans le parc social, sans dégrader les comptes des OLS bénéficiaires.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 83
B. Contribution d?Action Logement
« Les secteurs tendus en offre de logements souffrent tout à la fois d?un manque de logements
disponibles et d?une vacance importante des immeubles de bureaux, principalement dus à l?essor du
télétravail déclenché par la crise sanitaire de 2020. En effet, alors que la demande de logements
abordables ne fait qu?augmenter (la vacance locative est estimée à 24% du parc marchand en 1ère
couronne), plus de 4,9 millions de mètres carrés de bureaux seraient vacants en Île-de-France, dont la
transformation permettrait la réalisation de 100 000 logements supplémentaires. En effet, plus de
417 000 m² de logements sont issus d?une transformation entre 2018 et 2020.
La transformation de bureaux en logements, et en particulier en logements abordables, pourrait
constituer, au moins partiellement, un remède à ces problématiques, tout en répondant à l?enjeu de
transition écologique.
Dans ce cadre, le Groupe Action Logement a créé la Foncière de Transformation immobilière (FTI) en
juillet 2020. Elle facilite la réalisation d?opérations de transformation, dans des zones où la tension
foncière rend plus difficile l?équilibre des opérations à caractère social. Spécialisée dans l'acquisition
d'actifs économiques obsolètes dans toute la France, cette filiale contribue à la production d?une nouvelle
offre de logements abordables, durables et pérennes.
Cette expertise du Groupe le conduit à soutenir la proposition de loi soumise à l?examen du Parlement.
Ces mesures gagneraient à être enrichies par une mesure fiscale nouvelle incitative pour libérer le
potentiel de transformation.
Cette note vise à apporter une contribution à Monsieur André Yché, chargé par le ministre du
Logement d?accompagner l?émergence d?une industrie de la transformation des actifs immobiliers en voie
d?obsolescence à la suite de la rencontre du 18 avril 2024.
1. Une filiale dédiée à la transformation au sein du Groupe Action Logement
1.1. Raison d?être et positionnement de la Foncière de transformation immobilière
La FTI assure le portage puis le démembrement à long terme des biens acquis transformés au profit
des bailleurs de logement abordable, tant sociaux qu?intermédiaires, et potentiellement, la cession de ce
patrimoine à l?issue du démembrement. Par ailleurs, l?investissement par la FTI dans une période de
correction forte des valeurs d?actif crée de la valeur sur le moyen-terme. La FTI joue un rôle actif dans la
décarbonation et la sobriété énergétique, en reconstruisant la ville sur la ville et en renforçant le lien
emploi-logement.
En tant qu'entreprise à impact, la FTI se distingue par son expertise, son agilité et son ingénierie
innovante. Son modèle unique de portage foncier et de démembrement s?inscrit sur le long terme grâce
au bail à construction. Forte de l'expertise de ses équipes et de la synergie avec ses partenaires, des
acteurs locaux de l?immobilier et des décideurs publics, la FTI relève les défis de la régénération urbaine
en répondant aux impératifs citoyens, réglementaires, environnementaux et financiers. La FTI est
spécialisée dans la revalorisation d'actifs professionnels souvent vides et vétustes, présentant diverses
formes d'obsolescence : technique et/ou commerciale.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 84
Chiffres clés au 31/12/2023 :
49 opérations engagées, soit 4 573 logements,
7 opérations avec un permis de construire obtenu ou purgé soit 655 logements,
12 opérations en chantier soit 735 logements,
4 opérations livrées soit 683 logements.
? Une vision de la transformation des immeubles : de l'inoccupation à la valorisation durable
En tant que foncière, la FTI met en oeuvre son expertise en matière d?ingénierie foncière pour favoriser
la transformation des immeubles afin de limiter les déchets et favoriser l?économie de matière. Le recours
à la déconstruction peut être décidé pour favoriser une densité ou à l?issue d?un arbitrage économique lié
à la cherté des coûts de transformation (en raison des caractéristiques techniques du bâtiment).
Un large potentiel d?actifs à transformer est proposé : Immeubles de bureaux, Friches avec ateliers,
Locaux d?activités, Garages, Hôtels, EPHAD, Centres hospitaliers et cliniques, Établissements scolaires,
Entrepôts, etc.
? Un engagement pour le logement partout en France accentuée dans les zones tendues où
le besoin en logement est une priorité :
En travaillant en étroite collaboration avec les décideurs publics locaux, la FTI contribue de manière
durable à la préservation de l?attractivité des territoires en proposant des logements et des services au
plus proche des zones d?emploi, en particulier dans les régions où les tensions foncières sont élevées.
Elle les accompagne pour développer leur parc pour faciliter l'accès au logement et favoriser l'emploi sur
les territoires. Sa dynamique opérationnelle s?applique aux centres-villes, aux quartiers d?affaires et aux
zones économiques desservies par les transports. La FTI reçoit plusieurs centaines de propositions
d?investissement par an, ce qui implique une méthode de sélection efficace. Pour entrer dans le « vivier
» des opérations que la FTI étudiera, les projets doivent satisfaire à un nombre de critères cumulatifs. La
répartition géographique des opérations de la FTI est la suivante : 70% en Île-de-France, 30% dans les
autres régions dont la Nouvelle-Aquitaine, Provence-Alpes-Côte-d'Azur, les Hauts-de-France, l?Occitanie
et le Grand-Est.
1.2. Un modèle économique novateur et vertueux, aux ressources contraintes, pour répondre à un objectif
déterminé :
? Une approche novatrice en matière d'ingénierie
Le modèle repose sur le principe de la dissociation foncière, également appelé "démembrement". Ce
modèle, basé sur un bail à long terme est dédié à tous les opérateurs de logement social ou intermédiaire
(Groupe et hors Groupe Action Logement). La FTI a développé une ingénierie foncière au profit des
opérateurs du logement, qui assurent distinctement d?une part, la maîtrise d'ouvrage des opérations de
transformation et d?autre part, la gestion des logements.
Dans une approche partenariale dès l'amont, elle conçoit le montage juridique et foncier puis du
démembrement en respect de l?équilibre économique des investissements des bailleurs, tout en veillant
à favoriser la mixité sociale et fonctionnelle. La FTI vend également une partie de ses droits à construire
à des opérateurs privés pour la production de logements économiques, accession.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 85
La FTI recherche une mixité programmatique, sociale et fonctionnelle, en développant la production
nécessaire aux attentes des locataires, des propriétaires et des riverains :
- Logements locatifs sociaux familiaux ou résidences gérées,
- Logements locatifs intermédiaires ou résidences gérées,
- Accession à la propriété (social ? libre - bail réel solidaire),
- Création de bureaux, d'espaces de coworking complémentaires,
- Locaux d'activités et commerces complémentaires.
? Un modèle économique reposant sur l?investissement et des retours d?actifs à long terme
La FTI a mis en place un modèle économique propre reposant sur l?acquisition de biens professionnels
répondant en cible à un certain nombre de critères (voir encadré ci-dessous). La transformation en
logements locatifs sociaux et intermédiaires est assurée par un opérateur, en général bailleur social ou
promoteurs, signataires avec la FTI d?un bail à construction. Afin d?assurer la soutenabilité financière de
l?opération, la FTI assure le portage foncier jusqu?à l?obtention des autorisations d?urbanisme puis un
portage secondaire à long terme au bénéfice des bailleurs LLS et LLI, soit en moyenne 57 ans. Durant
ce portage, une redevance annuelle, à la charge du preneur à bail, rémunère la FTI. Celle-ci est estimée
en vue de couvrir 50% en moyenne de la charge foncière, sa perception intervenant au terme de deux
ans7 des travaux de transformation. Enfin, la cession du patrimoine intervient au terme du bail.
Critères de choix d?une opération
- des immeubles indépendants / des ensembles immobiliers / des portefeuilles d?actifs affectés à un
usage professionnel (bureaux, activités, commerces?), obsolescents ou obsolètes sur leur marché,
- présentant des caractéristiques techniques permettant la transformation,
- des immeubles vacants au jour de la vente ou dont la libération est programmée à 2-3 ans,
- situés en France entière, dans les zones urbaines résidentielles tendues (A bis, A, B1), bien
desservies
- éligibles au changement d?usage en habitation (PLU, équipements) ou à des évolutions du PLU
convenues avec les décideurs locaux (accord préalable à toute acquisition)
- d?une taille minimale de 3 500 m² SDP pour la part de logements abordables - sociaux ou
intermédiaires,
- détenus de préférence en pleine propriété par un monopropriétaire vendeur (ou lot(s) de volume).
La part de logements en accession réalisée au sein des opérations (20% en moyenne destinée à
l?accession) est cédée à l?opérateur, en général promoteur, à l?issue de la purge des autorisations
d?urbanisme, soit 2 à 3 ans.
Si ses produits d?exploitation sont en forte croissance depuis 2020, le résultat d?exploitation de la FTI
reste creusé par le volume d?acquisition nécessaire et le décalage de perception des redevances par
rapport aux investissements, au-delà du contexte d?inflation. Pour autant, une tendance à l?équilibre est
recherchée par la rentrée progressive des redevances, les cessions de patrimoine ainsi qu?un
développement marginal de l?usufruit locatif intermédiaire (ULI).
7 Estimation sur une opération type
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 86
? Des ressources dédiées constituées de fonds propres, dette long terme et dette bancaire
classique pour répondre à un objectif déterminé :
Dans le cadre actuel, Action Logement a doté la Foncière pour transformer 10 500 logements à horizon
fin 2028. Les ressources de la FTI sont les suivantes :
- 461 M¤ de fonds propres constitués par l?associé unique Action Logement immobilier ;
- 300 M¤ d?enveloppe de prêts long terme, bonifiés accordés par ALS ;
Par ailleurs, 80 M¤ d?enveloppe de prêt bancaire classique ont été souscrits auprès de la Caisse
d?Épargne Île-de-France.
? Des coûts de transformation élevés, justifiés par les externalités positives des projets ciblés
Les contraintes techniques particulières de la transformation sont nombreuses : l?année de
construction (présence d?amiante), les principes constructifs, l?épaisseur des bâtiments, la hauteur sous
plafond, la position des circulations dans l?immeuble et la nature de la façade sont autant d?inducteurs de
coûts à prendre en compte.
L?ambition de la performance environnementale (bâtimentaire et énergétique) souhaitée pour la
transformation (avance de phase) a également des impacts techniques et financiers sur le coût de la
transformation.
Voici quelques exemples de coûts pour des opérations en province, en grande et en petite couronne
francilienne :
- Metz (Résidence) : 5 823 259 ¤ HT (notification marché) soit 1 579¤HT en sdp et 3 222¤HT en shab
(atrium en verre)
- Combs (Résidence) : 5 849 529,52 ¤ HT (signature BAC) 1 884¤HT en sdp et 2 816¤HT en shab
- Suresnes (Résidence) : 50 Rouget de Lisle : 6 983 050 ¤ HT (VEFA) soit 2 227¤HT en sdp et 2 815¤HT
en shab
? Un opérateur fonctionnel qui mérite d?être soutenu
En synthèse, la FTI apporte donc une réponse opérationnelle et efficiente au besoin de transformation
de logements à l?appui d?une équipe structurée, de compétences dédiées, d?une technicité et d?une
ingénierie élevées, de standards d?exigence, d?une agilité des montages fonciers et de la force d?un
groupe immobilier comptant les ressources indispensables au pilotage de plus de 1 million de logements.
Par essence, le modèle de la FTI méritera d?être renforcé pour accompagner durablement la
transformation de locaux d?activité inoccupés en logements.
2. Des propositions visant à faciliter la transformation des bureaux en logements
2.1. Avis d?Action Logement sur la proposition de loi en faveur de la transformation des bureaux en
logements
Fort de l?expertise acquise en matière de transformation, le Groupe Action Logement a suivi la
proposition de loi lors de son examen par l?Assemblée nationale en mars 2024. Ses dispositions
désormais examinées au Sénat apportent des réponses éclairées et pragmatiques pour le secteur. Cette
proposition de loi marque une étape clé dans la généralisation de ces opérations en faveur du « choc de
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 87
l?offre » de logements. Le groupe Action Logement soutient ainsi la majorité des dispositions proposées
et peut commenter ainsi les articles retenus dans sa version déposée au Sénat.
? Dérogation au PLU - Article 1er :
La disposition porte sur la création d'un nouvel article L. 152-6-5 du CU et précise :
- La suppression de la limitation territoriale ;
- L?élargissement de la mesure aux locaux des administrations publiques ;
- La demande de dérogation est transmise, le cas échéant, à l'autorité compétente en matière de PLU.
En l'absence d'une délibération motivée de l'autorité compétente en matière de PLU, s'opposant à la
dérogation dans un délai de 3 mois à compter de la transmission de la demande, la dérogation est
accordée. La délibération d'opposition est motivée par les risques de nuisances auxquels le projet peut
être exposé, son accessibilité par les transports alternatifs à l'usage individuel de la voiture, son effet sur
la démographie scolaire au regard des écoles existantes ou en construction et ses objectifs de mixité
sociale et fonctionnelle.
- Si la compétence pour délivrer le PC a été déléguée à l'EPCI, la demande de dérogation est transmise
au maire de la commune de situation du projet. La dérogation ne peut être accordée en cas de délibération
contraire motivée du CM dans un délai de 2 mois.
Action Logement relève la pertinence de cette disposition ; il est toutefois notable que :
- la situation des locaux commerciaux non situés en rez-de-chaussée puisse poser question ;
- l'autorité en charge de délivrer le permis de construire semble liée par la délibération de l'autorité en
charge de l'élaboration du PLU qui peut s'opposer à la dérogation. Cela peut poser un risque de blocage
des projets.
Il est donc proposé de simplifier la mesure en supprimant toute demande d'accord de l'autorité
compétente en matière de PLU. À défaut, il pourrait être préconisé un retour au système de l'avis proposé
dans la version initiale8.
? Opérations soumises à la taxe d?aménagement (TA) - Article 2 :
La disposition porte sur :
- Les opérations de transformation de bureaux en logements qui ne sont pas des opérations
d'aménagement, construction, reconstruction et agrandissement (alinéa 1), donnant lieu au paiement de
la TA, par délibération prise par les communes, les EPCI à fiscalité propre, les départements et la région
IDF ayant institué la TA ;
- Par exception au droit commun, les délibérations visant à assujettir à la TA les opérations de
transformation de bureaux en logements peuvent être prises jusqu'au 31 décembre 2024 pour 2025
(alinéa 2).
8 Dérogation au PLU par l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire pour autoriser la destination d?habitation
pour les projets de transformation de bureaux en logements [?] Après avis de l'autorité compétente en matière de PLU, rendu
dans un délai de 3 mois. Avis réputé favorable passé ce délai.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 88
L?utilité de cette disposition pour les opérations de transformation de bureaux en logements, la TA est
instituée par délibération spéciale des territoires concernés. Toutefois, en pratique, il sera peut-être
difficile de réussir à distinguer les opérations de transformation des opérations de construction,
agrandissement et reconstruction.
? Assiette de la taxe d?aménagement (TA) - Article 3 :
La mesure prévoit un calcul de l'assiette de la TA à partir de la "surface transformée dans les
conditions prévues au dernier alinéa [alinéa 2] de l'article 1635 quater B". Action Logement souligne que
le dernier alinéa de l'article 1635 quater B du CGI prévoit que, « par dérogation au droit commun, les
délibérations visant à assujettir à la TA les opérations de transformation de bureaux en logements peuvent
être prises jusqu'au 31 décembre 2024 pour 2025. ».
Sur ce point, le texte gagnerait donc à être précisé par la Haute Assemblée : la nature du lien entre
l'assiette de la TA et la date exceptionnelle pour 2025 des délibérations instituant la TA pour les opérations
de transformation de bureaux en logements pourrait être clarifiée.
? Exonération de taxe sur les bureaux - Article 3 bis A (nouveau) :
La disposition prévoit l?ajout aux articles 231 ter et 231 quater V du CGI d'un nouveau cas
d'exonération de taxe sur les bureaux : l?exonération de la taxe sur les bureaux pour les locaux à usage
de bureaux qui font l'objet d'un projet de transformation en logements ayant fait l'objet d'un dépôt de
permis de construire au cours de l'année précédant la déclaration de la taxe.
La pertinence de cette disposition peut être soulignée à deux titres (avant et après acquisition). Les
locaux à usage de bureaux qui font l'objet d'un projet de transformation en logements sont exonérés de
taxe sur les bureaux dès lors qu'ils font l'objet d'une demande de permis de construire déposée au cours
de l'année précédant la déclaration de la taxe.
? Reversement aux communes membres du produit de la TA perçu par les EPCI - Article 3 bis
B (nouveau) :
La disposition prévoit un complément apporté à l'article 1379-0 bis, IX 3, du CGI : Pour les opérations
mentionnées à l'alinéa 2 de l'article 1635 quater B du CGI (opérations de transformation de bureaux en
logements), une délibération spéciale peut prévoir le reversement de tout ou partie de la TA par les EPCI
à leurs communes membres ou groupements de collectivités, compte tenu de la charge des équipements
publics relevant de leurs compétences.
Sans remettre en cause la pertinence de cette mesure, le renvoi à l'alinéa 2 de l'article 1635 quater B
du CGI pose question quant à la volonté de l'AN de cibler toutes les opérations de transformation de
bureaux en logements ou uniquement celles pour lesquelles la TA a été instituée pour l'année 2025
(alinéa 2 du CGI).
? Permis de construire multidestinations - Article 4 :
Cette mesure pertinente et utile, prévoit que dans une commune ou une partie de commune où une
délibération du CM ou de l'EPCI compétent en matière de PLU, prise sur avis conforme du CM de la
commune concernée, le permet, la demande de PC peut porter sur un projet de construction nouvelle
comportant plusieurs destinations possibles :
- Lorsqu'elle est saisie à cet effet par l'EPCI compétent en matière de PLU, la commune dispose d'un
délai de 3 mois pour émettre son avis. A défaut, celui-ci est réputé favorable.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 89
- Dans ce cas, le projet fait l'objet d'un arrêté de l'autorité compétente autorisant les différentes
destinations de la construction nouvelle / la mise en oeuvre de l'autorisation portant sur ces destinations
est insusceptible de modification ultérieure liée aux destinations de la construction / le PC autorise les
changements de destination ultérieurs entre les destinations autorisées sur le fondement des règles
d'urbanisme applicables à la date de sa délivrance.
- Le propriétaire informe de chaque changement de destination le maire de la commune et, le cas
échéant, l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme : soit lors du dépôt de l'autorisation
d'urbanisme nécessaire à la réalisation de la transformation, soit, si la transformation ne requiert pas
d'autorisation d'urbanisme, au moins 3 moins avant le changement effectif.
? Copropriétés et changement de destination des parties privatives en logements - Article 6 et 7 :
Ces dispositions utiles aux projets de transformation prévoient des compléments apportés à l'article 9
de la loi du 10 juillet 1965 :
- Un copropriétaire peut modifier librement la destination de ses parties privatives à usage de bureau
ou de local professionnel en habitation (lorsque le changement de destination ne contrevient pas à la
destination de l'immeuble prévue par le RCP) / il doit obtenir l'accord de l'AG statuant à la majorité simple
(majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par
correspondance) (lorsque le changement de destination contrevient à la destination de l'immeuble prévue
par le RCP).
- A peine de nullité de l'approbation de l'AG, le bénéfice de cette dérogation est conditionné à
l'occupation des logements ainsi créés à titre de résidence principale pour une durée d'au moins 3 ans à
compter de la réception des travaux permettant le changement de destination des locaux concernés.
- La modification de la répartition des charges induite par le changement de destination d'un local de
bureaux ou professionnel en habitation soumise au vote de l'AG à la majorité simple.
2.2. Autres pistes visant à favoriser la transformation
? Une mesure fiscale incitative en faveur de la transformation de bureaux en logements
Action Logement soutient une mesure destinée à accélérer la transformation en soutenant le modèle
économique sous-jacent. La proposition de loi débattue devant le Parlement tend à répondre aux enjeux
d?augmentation de la demande de logements abordables dans un secteur tendus en offre de logements.
Cependant, force est de constater que de nombreux investisseurs de bureaux demeurent encore réticents
à les vendre, préférant souvent les conserver en actifs surestimés à leur bilan, malgré des plus-values
immobilières imposées à l?impôt sur les sociétés au taux réduit de 19 % lorsque ces bureaux sont vendus
à des personnes morales qui s?engagent à les transformer en logements (210 F du Code général des
impôts). Afin d?accélérer la transformation de bureaux en logements abordables, il est proposé d?aller plus
loin et de renforcer l?article 3 bis A en créant une incitation fiscale temporaire, propre à la transformation
de bureaux en logements abordables.
La mesure fiscale prendrait la forme d'un crédit d'impôt sur les sociétés, limité dans le temps, d?un
montant égal à celui de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe annuelle sur les bureaux et
stationnements relatifs à l?immeuble et appelé pendant les deux années avant la vente, et, le cas échéant,
augmenté de 25% du montant de la taxe d?aménagement lorsque le vendeur s?est acquitté d?une telle
taxe.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 90
Représentant entre 2 et 3 % du prix de la vente, cet avantage permettrait de stimuler de telles ventes
tout en représentant un coût mesuré pour les finances publiques.
Il est par conséquent proposé de créer un nouvel article au sein du Code général des impôts. Au sein du
livre 1er, première partie, titre 1er, chapitre II, section V du Code général des impôts, après l?article 220
Z septies, il est proposé la création d?un nouvel article numéroté 220 Z octies.
En permettant la transformation de projets qui n?auraient pas abouti, cette disposition est génératrice
de recettes fiscales nettes pour l?État.
L?hypothèse suivante donne à voir une opération de transformation type. Le crédit d?impôt sur l?impôt
sur les sociétés équivaut aux différentes taxes (bureaux, stationnement et foncières) acquittées dans les
deux dernières années par le cédant. Le dispositif permet de réunir les parties, de telle sorte à provoquer
l?arbitrage du détenteur des actifs puis l?acquisition par un opérateur de la transformation. Compte tenu
des retours de TVA, basée sur une moyenne logement social / non-logement social de 8%, sur les travaux
d?une opération qui n?aurait pas été lancée, on constate que cette opération supplémentaire génère des
recettes supérieures au montant du crédit d?impôt pour l?État.
Ex : Issy-les-Moulineaux
TS (1 an / 2 ans) 12 350,00 ¤ 24 700,00 ¤
TB (1 an / 2 ans) 93 750,00 ¤ 187 500,00 ¤
TF (1 an / 2 ans) 111 060,00 ¤ 222 120,00 ¤
Crédit d'impôt IS 434 320,00 ¤
TVA sur travaux estimée 704 000,00 ¤
Gain net 269 680,00 ¤
? L?évolution de la taxe sur les bureaux pour financer les travaux de transformation
Selon l?annexe Voies et moyens du PLF 2024, la taxe sur les bureaux franciliens est aujourd?hui perçue
par la Société du Grand Paris (655 M¤ en 2023), le Fonds national des aides au logements (66,2 M¤ en
2023), la Région Île-de-France (212,9 M¤ en 2023 et 231,8 M¤ prévus en 2024) et le budget général (15
M¤ prévu en 2024). Dans les départements des Bouches-du-Rhône, du Var et des Alpes-Maritimes, elle
est affectée au financement de la ligne nouvelle Provence Côte d?Azur.
Avec 2,5% de hausse en 2024, les barèmes de la taxe recouvrent des montants de 25,31 ¤ du m²
pour les locaux à usage de bureaux de la première circonscription, en Île-de-France à 0,21¤ pour des
locaux de stockage de la région PACA.
L?absence d?application de la taxe pendant les travaux, dès lors qu?un permis de construire a été
déposé est une mesure positive. En ce sens, la mesure de modification de l?article 231-ter du CGI porté
par la proposition de loi « Transformation Bureaux en Logements » introduit des cas d?exonération de la
taxe bureaux notamment lorsque l?immeuble est impropre à sa destination d?origine (phase chantier des
transformations), cette disposition est particulièrement attendue par les acteurs, car elle allège l?équilibre
financier des opérations.
Par ailleurs, l?affectation de la part de son produit issue des bureaux vacants, permettrait de financer
les travaux de transformation au sein d?un fond dédié au sujet.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 91
? Une taxe d?aménagement au profit des collectivités intégrant une condition de densification
Le montant de la taxe d?aménagement résulte d?une multiplication entre la surface taxable de la
construction créée et une valeur annuelle des m² (1036 ¤ en IDF actuellement), qui est encore multiplié
par le taux voté par la collectivité (1% ou 5%, ou alors 20% dans le cadre d?une taxe renforcée). Ainsi, la
notion de densité est intégrée au calcul même de la taxe. Pour mémoire, dans l?esprit de la proposition
de loi, l?assujettissement des opérations de transformation à la taxe d?aménagement est une mesure
positive envers les collectivités pour les inciter à porter les projets.
? Le renforcement du rôle des établissements publics fonciers au service de la transformation
Une intervention foncière publique pour réaliser un portage long-terme des terrains ou d?actifs est
adaptée pour accompagner le développement des OIN ou des projets de réindustrialisation de la France
qui nécessitent des aménagements urbains d?envergure et répondent à des enjeux publics. Au regard
des délais de conception et la validation de l?étude urbaine (environ 8 ans) et des couts liés à la
dépollution/ aménagements/ création d?équipements publics, il serait nécessaire que la valeur des
fonciers ou actifs concernés corresponde aux enjeux satisfaisant le bilan économique d?un tel projet.
Dans cette perspective, les établissements publics fonciers pourraient intervenir alors que la
transformation de bureaux, à travers des filiales dédiées. Ces filiales disposeraient d?une ingénierie
dédiée. Dans le droit actuel, ces filiales, contrairement aux délégataires existants, n?ont pas accès au
droit de préemption et négocient en conséquence leurs acquisitions dans l?univers concurrentiel. Il serait
pertinent que des filiales dans lequel un EPF aurait des participations majoritaires puissent se voir
déléguer tant le droit de préemption urbain (DPU) qui celui qui existe en ZAD (DP-ZAD).
L?utilisation de ces droits de préemption sera justifiée par une opération de transformation de bureaux
en logements en tablant sur une mixité de destination (part de logements sociaux, de intermédiaires et
libres à définir). Ces outils pourraient ainsi conduire une politique de préemption au juste prix. Des coûts
de construction spécifiques à la transformation seraient intégrés pour définir, à rebours, le prix de sortie.
? L?émergence de nouvelles foncières publiques/privées pour mener ces opérations
Les EPF et/ou leurs filiales dédiées pourraient céder ces actifs à des foncières sous forme de société
d?aménagement ou des SSCV, au sein desquels les propriétaires des fonciers concernés, des bailleurs
sociaux, des collectivités territoriales et/ou d?autres acteurs privés pourraient prendre des participations.
Ces SSCV interviendraient avec un engagement à construire sous un délai convenu. Un tel montage
permettrait ainsi de disposer d?une vision d?ensemble garantie par l?intervention d?un établissement public,
la démultiplication des moyens par l?intervention des foncières et l?incitation des propriétaires, encouragés
à (re)créer de la valeur en participant à la transformation de leurs actifs.
Annexe 1 : Proposition de rédaction pour l?article 220 Z du code général des impôts
Annexes 2 : Montant des taxes annuelles sur les locaux à usage de bureaux -Extrait du BOI-IF-AUT-50-
20 ? en application de l?article 231 ter du code général des impôts (CGI) et à l?article 231 quater du CGI
Annexes 3 : Exemples d?opérations FTI livrées ou en cours »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 93
A11.2 : Contribution de l?ASPIM
« Note de novembre 2021
Les fonds logement, pourquoi et comment drainer l?épargne des Français
vers le résidentiel intermédié ?
Executive Summary
L?impérieux besoin d?une offre locative abordable en France
Et si la thématique du logement s?invitait enfin dans une élection présidentielle ? Absent des débats
en 2017, il semblerait que les ingrédients soient cette fois réunis pour que les grandes questions soient
posées : Comment augmenter l?offre de logements dans les zones tendues ? Quels moyens mettre en
oeuvre pour que ces nouvelles habitations ne soient par réservées aux plus aisés mais profitent aussi aux
travailleurs modestes ? Sommes-nous condamnés à produire des unités de plus en plus compactes qui
dégradent les conditions d?habitabilité ?
Les sociétés de gestion de portefeuilles immobiliers, rassemblées au sein de l?ASPIM, sont
convaincues de pouvoir apporter une partie de la solution. Elles font le constat que la France manque
avant tout d?une offre locative abordable dans les zones tendues (métropoles, villes moyennes
dynamiques et territoires touristiques). Le tout accession est un mirage alors même que les taux d?intérêt
ont certainement atteint leur point bas et que de nombreux français sont exclus de ce marché
(augmentation du nombre d?indépendants, précarité économique pour de nombreux travailleurs de la
première ligne, etc.). La France compterait aujourd?hui seulement 140 000 logements à loyers
abordables accessibles aux personnes considérées comme trop aisés pour prétendre au logement social
mais pas assez riche pour accéder au marché libre. Nous proposons de viser un objectif de 500 000
logements à loyers abordables à horizon 20240.
Les vertus de l?intermédiation
Qui doit être propriétaire de ce parc condamné à croitre pour répondre aux besoins des Français ?
Nous pensons que le recours exclusif à des investisseurs locatifs particuliers qui investissent en direct
est une impasse. Il doit s?accompagner d?un appel aux investisseurs professionnels, seuls capables
de garantir le maintien dans le temps des loyers abordables tout en assurant les dépenses
nécessaires à la bonne maintenance des bâtiments.
Contrairement aux personnes physiques, ces acteurs de l?immobilier ne sont pas soumis à des aléas
moraux et peuvent supporter des investissements dont les retours économiques se feront à long-terme.
Le tout-Pinel a aussi montré ses limités en matière de qualité des logements conçus. Le rapport Laurent
Girometti et François Leclercq en fait le triste constat et préconise le retour des institutionnel dans le
résidentiel aussi pour cette raison.
Des fonds « logement abordable » ouverts au grand public
Si nous défendons les vertus de l?intermédiation, nous avons aussi à coeur d?associer les Français
à ce grand défi du logement pour tous. Les sociétés de gestion de portefeuille sont prêtes à lancer des
fonds « résidentiel abordable » ouverts au grand public. L?épargne accumulée pendant la crise devant
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 94
atteindre 180 milliards d?euros fin 2021, soit 7% du PIB, nous pensons que le moment est propice pour
lancer des nouveaux produits d?investissement qui ont un sens sociétal.
Ces fonds auraient vocation à se porter acquéreurs de programmes neufs en LLI (logement
intermédiaire, avec une décote de loyer de 20%) comme de programmes en LAC (logement locatif
abordable, avec une décote de loyer de 10%). Ils devraient aussi mener des opérations de
réhabilitation dans le parc ancien dans l?ensemble des zones tendues où il y a des besoins. En matière
de volume, nous pensons que ces véhicules pourraient acquérir environ 20 000 unités par an, avec une
hypothèse de collecte d?environ 1 milliard d?euros par an. Ils concourraient à hauteur de 30% à 50% à
l?atteinte de l?objectif évoqué plus haut : disposer d?un parc de 500 000 logements abordables sur le
marché locatif en 2040. Ils viendraient donc en soutien des acteurs publics spécialistes du LLI et du LAC
comme CDC Habitat et in?li.
Améliorer la fiscalité au niveau du fonds et des souscripteurs pour rendre le produit attractif et pérenne
Un soutien de l?Etat est indispensable pour attirer de l?épargne vers des fonds dédiés au
logement abordable. En effet, les rendements dans le résidentiel sont souvent inférieurs à 3,5%. Dès
lors, en s?imposant une décote de loyers de 10% à 20%, ce qui nous semble indispensable étant donné
le contexte de marché, le rendement brut diminue encore pour atteindre environ 3%. C?est moins que
l?immobilier tertiaire et moins que l?investissement résidentiel en direct qui bénéficie de nombreux
avantages fiscaux. Il faut trouver des mécanismes pour améliorer la performance de ces véhicules. Il en
va de leur capacité à collecter de l?épargne et à la rendre sans déstructurer les portefeuilles. Moins de
performance se traduit par moins de liquidité et donc une obligation pour les fonds de vendre des actifs.
Nous sommes convaincus qu?il faut favoriser l?émergence de fonds « evergreen » dont les performances
assurent une liquidité permettant la détention longue d?actifs.
Le principal avantage demandé consiste à appliquer le régime TVA de droit commun au logement.
Autrement dit, faire en sorte que la TVA soit récupérable sur les achats de biens neufs comme sur toutes
les dépenses de travaux et de gestion liés aux actifs résidentiels. C?est le cas pour les actifs tertiaires et
commerciaux et nous pensons qu?il est temps d?aligner les pratiques. De même, nous proposons
quelques ajustements sur la fiscalité propre du souscripteur (assiette réduise pour l?IFI, amortissement
notionnel pour les parts qui distribuent et qui capitalisent, etc.). Nous disons à l?Etat : investissez à nos
côtés pour nous aider à drainer de l?épargne française en faveur du logement abordable. »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 95
A11.3 : Contribution de CDC Habitat & Groupe Mirabaud
A. Fiche d?analyse dans la perspective de la lettre de mission du 14 mars 2024
La note s?inscrit pleinement dans la logique de la lettre de mission du 14 mars 2024.
La principale innovation proposée est relative à l?affectation du crédit d?impôt sur la plus-value dégagée
à l?occasion de l?opération de transformation. Elle tend donc à privilégier le réinvestisseur et, à ce titre,
elle est parfaitement cohérente avec l?objectif recherché.
Toutefois, l?angle d?analyse retenu privilégie un processus de cession / transformation qui résulte
logiquement de l?expérience acquise par les rédacteurs, ignorant un scenario dans lequel c?est le
détenteur des actifs qui initie lui-même la transformation, au prix d?une moindre plus-value, voire d?une
perte à provisionner. Tout en soutenant cette proposition, il convient de poursuivre la réflexion dans
l?hypothèse où le lien entre le détenteur initial du bien et la foncière de transformation ne serait ni
intégralement, ni définitivement (cas d?une vente à réméré) rompu.
B. Contribution de CDC Habitat & Groupe Mirabaud
« Accélération des opérations de transformation des immeubles de bureaux en logements
? La crise du marché des bureaux crée une vacance importante du parc, souvent bien situé près des
transports en commun, pouvant ainsi constituer, via la transformation, un potentiel important de
développement d?une offre résidentielle nouvelle.
? Des modifications législatives (projet de loi Daubier) sont en cours pour faciliter les procédures
juridiques nécessaires pour mener à bien ces transformations (concernant les PLU) et ainsi en accélérer
la production, condition nécessaire pour permettre la rentabilité économique de ces opérations.
? Ces mesures ne sont néanmoins pas toujours suffisantes pour convaincre les propriétaires
investisseurs des bureaux de céder leurs actifs, la valeur de cession de ces bureaux pour une
transformation étant souvent bien inférieure à la valeur comptable voir à la valeur d?acquisition.
? Pour autant, la valeur comptable de ces actifs dans leur format bureau est en partie fictive, puisque
ces actifs ne seront pas reloués et par ailleurs mériteront à plus long terme des travaux importants pour
les maintenir au niveau environnemental.
L?enjeu est donc d?identifier les moyens permettant d?accélérer la mise en vente de ces actifs par leur
propriétaire, en vue de leur reconversion en logements. Deux pistes sont proposées :
- D?une part, à l?image de ce qui est prévu dans le logement avec l?interdiction progressive de location
des logements étiquette G, puis F et E, le renforcement des obligations de mise aux normes et de travaux
pourrait inciter les vendeurs à accélérer les cessions d?actifs, l?investissement dans des travaux ne
pouvant être amorti pour les actifs ne trouvant pas de locataire ;
- D?autre part, une taxation des biens vacants pourrait également provoquer la vente d?actifs obsolètes,
l?allocation de cette ressource nouvelle devant favoriser la réalisation des programmes de logements.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 96
Nous proposons d?approfondir dans cette note cette seconde piste.
? Concernant la collecte de cette taxe, un régime de déclaration concernant l?occupation des immeubles
pourrait être mis en place, comme cela a été mis en place pour les propriétaires de logements. La taxe
pourra être perçue une fois constatée une vacance durable de l?immeuble (par exemple vacance de + de
50% sur 2 années fiscales successives). La déclaration pourrait être rétroactive concernant les deux
dernières années d?occupation, afin de mettre en place rapidement la collecte de la taxe.
? Concernant le montant de cette taxe, il doit être suffisamment important pour motiver la vente plutôt
qu?une détention de l?actif. Nous l?estimons à minima (voir ci-après) à 15 ¤/m2/an soit pour un actif type
de l?Ile de France, de 10 000 m2, un coût annuel de l?ordre de 150 000 ¤/an (charge supplémentaire
s?ajoutant aux charges d?entretien, assurances, impôts fonciers, coûts de gestion... supporté par le
propriétaire en cas de vacances de son actif). Cette taxe pourrait s?appliquer aux actifs immobiliers d?une
taille minimale de 5 000 m2.
? Concernant l?usage de cette taxe, nous proposons de l?affecter à crédit d?impôt sur la plus-value
dégagée par la transformation. En effet, outre le coût d?acquisition de l?immeuble et les travaux, le coût
de la transformation intègrent des coûts de portage (coût des capitaux mobilisés pendant la phase de
transformation de 1 à 3 ans) et la fiscalité sur la plus-value dégagée par l?opération (IS). L?ensemble de
ces coûts renchérissent le prix de revient de l?opération et donc le prix de vente des logements, rendant
parfois les opérations incompatibles avec le prix de marché.
Estimation de l?impact sur les prix de vente de 10.000 logements neufs créé par an d?un crédit
d?impôt sur la plus-value dégagée à l?occasion d?une opération de restructuration.
- Hypothèse de prix de vente unitaire : 250.000 ¤ par logement HT
- Chiffre d?affaires dégagé : 2,5 milliards ¤ HT
- Plus-value dégagée (sur la base de 7% de taux de marge) : 175 millions d?¤
- IS payé sur la plus-value : 44 millions d'¤
- Surface développée (sur base 60 m2 par logement) : 600.000 m2 soit environ 600 à 700 000 m2 de
bureaux existant à transformer
Si l?on considère une vacance structurelle de 3 millions de m2, la taxe serait de l?ordre de 4,4¤/m2
pour compenser l?IS.
L?impact sur le prix du logement demeurera toutefois limité, de l?ordre de 2% du prix de vente. La
réduction du prix de vente du logement est surtout liée à la baisse du prix de vente de l?actif à transformer.
SYNTHESE DES PROPOSITIONS
? Poursuivre les adaptations législatives en vue de renforcer la sécurité des opérations (notamment sur
les modifications de PLU et les évictions)
? Renforcer les obligations de travaux pesant les propriétaires d?actifs obsolètes afin de provoquer un
choc foncier (en excluant les particuliers)
? Réduire les coûts de portage inhérents aux projets de transformation par un crédit d?impôt financé par
une taxation des locaux vacants. »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 97
A11.4 : Contribution du Consortium des Bureaux en France (CBF)
A. Synthèse de la contribution commune de La Place de l?Immobilier et Adéquation
180 millions de m2 de bureaux en France dont :
- 40 millions de m2 de parc public (20% en Ile-de-France ; 80% en régions ; 50% pour l?Etat, 50%
autres : collectivités locales, etc.) ;
- 45 millions de m2 pour le parc privé non marchand (20% en Ile-de-France ; 80% en régions ; 1/3 du
parc privé d?Ile-de-France, soit 17 millions de m2) ;
- 95 millions de m2 pour le parc privé marchand, dont 38 millions de m2 en Ile-de-France, dont 5 millions
de m2 vacants (dont 1,2 million de m2 depuis plus de 2 ans et 2,5 millions de m2 vacants de plus de deux
ans en 2025).
B. Contribution du Consortium des Bureaux en France : note du 17 juin 2024
« LES SECTEURS À FORTE RÉVERSIBILITÉ DE BUREAUX EN LOGEMENTS
À PARIS ET LYON (MÉTROPOLES)
Comment identifier les territoires offrant les meilleures opportunités de transformation des
bureaux vacants en offre résidentielle de demain ? LA PLACE DE L?IMMOBILIER et ADEQUATION
ont partagé leurs expertises pour proposer une approche méthodologique exclusive.
Une des pistes explorées par les acteurs de l?immobilier pour faire face à la contraction de la
construction neuve et aux obligations réglementaires (ZAN) est d?allouer davantage de moyens
(financiers, techniques et humains) à la transformation d'immeubles existants, que ce soit sous forme de
surélévation, de rénovation lourde ou de changement d?usage. Sur ce dernier point, et même si les
montages sont encore complexes, la transformation de bureaux en logements paraît offrir un fort potentiel
au regard des bâtiments tertiaires obsolètes, déjà vacants ou à forts risques à court ou moyen terme.
Si le sujet n?est pas nouveau, la transformation de bureaux en logements (ordinaires ou sous forme
de résidences gérées) bénéficie aujourd'hui d?un contexte favorable permettant d?envisager un
développement plus important : couple rendement/risque plus favorable au logement, obsolescence
climatique accélérée des bureaux, perte d?attractivité de certains actifs tertiaires, élus convaincus par la
pertinence de ces réponses sur leurs territoires touchés de plein fouet par la crise immobilière. Les
annonces récentes de grands groupes de promotion immobilière témoignent de cette tendance.
Pour autant, ces conditions ne sont pas homogènes sur tous les marchés. Pour éclairer les acteurs
concernés (promoteurs, investisseurs, collectivités, propriétaires, brokers, etc.) et limiter les aléas liés à
ce type d?opération, LA PLACE DE L?IMMOBILIER et ADEQUATION ont mis au point une méthode pour
croiser leurs données relatives à l?occupation des immeubles tertiaires et aux besoins résidentiels. Elle
permet de faire ressortir les communes à fort potentiel, en commençant par les métropoles du Grand
Paris et de Lyon.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 98
La méthode
Pour conduire l?analyse présentée ci-après, LA PLACE DE L?IMMOBILIER et ADEQUATION ont
croisé leurs banques de données, qui portent respectivement sur l?état du parc immobilier tertiaire existant
et sur les dynamiques du marché immobilier résidentiel.
Les données de LA PLACE DE L?IMMOBILIER ont permis d?identifier les communes possédant des
immeubles de bureau vacants de manière structurelle.
ADEQUATION a de son côté mobilisé ses bases de données portant sur l?immobilier résidentiel pour
mesurer les dynamiques récentes en termes de construction neuve, l?intensité des besoins en immobilier
résidentiel, et la faisabilité « marché », au regard notamment des valorisations existantes.
L'interopérabilité de nos données et nos savoir-faire respectifs nous a permis d'identifier les territoires
présentant les plus forts potentiels de transformation de l'offre de bureaux en logement en croisant les
estimations :
- Des surfaces de bureaux potentiellement mutables
- Des besoins de logements et de résidences services.
Cas de la métropole du Grand Paris : des potentiels centrés sur le Nord-Ouest
Sur la métropole du Grand Paris, plusieurs territoires affichent des potentiels importants car s?y
conjuguent des besoins résidentiels forts, des constructions de logements neufs insuffisantes et un grand
nombre ou de grandes surfaces d?actifs tertiaires obsolescents ou risquant de le devenir à court terme.
C?est notamment le cas de Nanterre, Suresnes, Courbevoie sur l?Établissement Public Territorial
(EPT) de La Défense, mais aussi de Saint-Denis, Clichy et Saint-Ouen, à cheval des EPT Boucle Nord
92 et Plaine Commune, secteurs qui souffrent d?une vacance tertiaire élevée.
À l?inverse, la ville de Paris, à l?attractivité tertiaire encore forte, et les communes de seconde
couronne, qui accueillent des parcs de bureaux modestes et/ou à la valorisation immobilière résidentielle
plus modérée, présentent moins de potentiel.
Globalement, les potentiels semblent relativement nombreux, bien que concentrés majoritairement
sur le Nord-Ouest du Grand Paris. Ils sont également présents de manière plus ponctuelle en 1ère
couronne (Fontenay-sous-Bois, Issy-les-Moulineaux?) et plus marginalement en grande couronne, à
Sucy-en-Brie par exemple.
À noter que l?ensemble du territoire enregistre d?ailleurs des besoins nettement insatisfaits, estimés à
70 000 par an sur l?ensemble du Grand Paris, alors que la production sera pour mémoire inférieure à
30 000 logements commencés pour l?année 2023.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 99
Potentiels de transformation d?actifs tertiaires en logements ordinaires et
résidences gérées sur la Métropole du Grand Paris
Cas de la métropole de Lyon : des gisements plus modestes en majorité sur l?Est lyonnais
La géographie des potentiels sur la métropole lyonnaise est quelque peu différente. Ils sont
globalement moins importants malgré les tensions de marché sur le segment résidentiel. Ils semblent
davantage concentrés, notamment le coeur de l?agglomération, et secondairement sur la frange Est.
Villeurbanne apparaît comme présentant les potentialités les plus fortes, même si une analyse plus
fine permettrait probablement de distinguer des écarts sensibles entre quartiers, comme sur le 3ème
arrondissement par ailleurs.
Si les communes de Rillieux-la-Pape, Décines-Charpieu, Saint-Priest et les arrondissements Sud de
Lyon semblent offrir des potentiels légèrement moindres à ce jour, elles pourraient prochainement voir
leur attractivité progresser, compte tenu d?un parc de bureaux majoritairement ancien, en voie de
déqualification.
Sur la 3ème polarité tertiaire du territoire, le Nord-Ouest lyonnais, les capacités à activer la réversibilité
des actifs tertiaires, souvent peu denses et assez récents, semblent encore plus faibles à court terme,
malgré des valeurs de marché élevées en immobilier résidentiel.
Ici aussi, les besoins restent très nettement insatisfaits, en particulier sur le coeur de la métropole, qui
souffre d?une insuffisance de projets, notamment dans des valeurs ?intermédiaires? (moins de 6 400
logements commencés tous segments confondus en 2022, pour un objectif annuel compris entre 8 000
et 8 500 nouveaux logements d?ici 2026).
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 100
Potentiels transformation d?actifs tertiaires en logements ordinaires et
résidences gérées sur le Métropole de Lyon
Révéler les opportunités pour aller plus loin dans l'analyse
Cette analyse peut être effectuée sur l'ensemble des territoires de France métropolitaine, et affinée et
ce, tant à l'échelle globale comme présenté ici, qu'à l'échelle de l'îlot/foncier.
La mutabilité de chaque actif tertiaire peut également être évaluée selon différents critères de
faisabilité intrinsèque, mais également en regard de son environnement et du marché potentiel permettant
de développer une offre de logements ordinaires ou en résidences gérées (seniors, étudiants, coliving).
Ces premiers résultats mettent en évidence l?importance des gisements et laissent augurer des
conditions économiques favorables à la transformation des bureaux en logement sur deux territoires
marqués par une très forte demande de logements et par la faiblesse de l?offre foncière aisément
mobilisable.
Tous les acteurs de la filière (collectivités, aménageurs, promoteurs, investisseurs, propriétaires)
devraient s?intéresser à ce potentiel de transformation des territoires, de valorisation d?actifs et de
production de logements qui apporte en outre une réponse au double impératif de décarbonation et de
non-artificialisation qui structure désormais la production urbaine.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 101
LA PLACE de l?immobilier
Votre contact : Blaise HEURTEUX
06 09 24 65 39 / bheurteux@laplacedelimmobilier.com
Créée en 2006, LA PLACE de l'immobilier a pour vocation de contribuer à un marché de la transaction
immobilière « meilleur », plus éthique et plus efficient, grâce à un accès pour tous à la data. L'entreprise
a constitué la 1ère base de données sur les immeubles en France, considérée par de nombreux
professionnels comme LA base de référence du marché.
Dans un souci d'accroître la valeur ajoutée de ses clients, professionnels de l'immobilier, la société a
développé des solutions métiers intégrant l'intelligence de la data ainsi que des services associés.
LA PLACE de l'immobilier propose d'accompagner les professionnels de l?immobilier (brokers,
promoteurs, investisseurs, utilisateurs) avec 3 offres différentes :
- Accéder à la DATA : info à l'immeuble, listing de prospection, étude de marché
- Utiliser des outils métiers connectés à la data : le Module Brokers (CRM et rapprochement offres /
demandes) et le Module Utilisateurs (gestion de parc)
- Réaliser de missions de conseil : recherche de fonciers et d'actifs, recherche de locataires, recherche
d'implantations
https://www.laplacedelimmobilier.com/
ADEQUATION
Votre contact : Nicolas DEBRUYNE
06 22 95 06 55 / n.debruyne@adequation-france.com
Bureau d?Etudes et de Conseil indépendant, ADEQUATION accompagne l?ensemble des acteurs du
foncier, de l?aménagement et de l?immobilier (promoteurs, bailleurs, aménageurs et collectivités) dans la
réussite de leurs projets, dans la compréhension de leurs marchés et dans le développement de leurs
stratégies.
Depuis 1992, la société ADEQUATION observe et étudie les marchés immobiliers résidentiels en France,
une expertise au long cours qui en a fait un acteur réputé de la production de données immobilières.
Solutions digitales, Etudes & Conseil deux métiers nourris par la data, étendus à l?ensemble des
opérateurs de projets résidentiels.
Adossée à un solide ancrage régional, ADEQUATION maille l?ensemble du territoire national et s?est
dessinée une place unique qui ouvre des perspectives sur la maîtrise du risque inhérent au marché
immobilier.
https://adequation.fr/
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 103
A11.5 : Contribution de la Foncière FREY
« Mobilisation du foncier commercial en faveur de la création de logements
Un contexte économique et sociogéographique propice à la transformation des périphéries
Le commerce s?organise autour de typologies, structurées ou non, et de spatialités différentes :
centres commerciaux, zones commerciales, parc d?activités commerciales, etc. S?agissant des entrées
de villes, les zones commerciales se sont développées historiquement autour de locomotives
alimentaires (supermarchés, hypermarchés) ou de galeries commerciales en périphérie des
agglomérations ou « entrées de villes ». Ces zones ont la particularité de concentrer majoritairement
des commerces de moyennes surfaces (500 à 2 000 m² ou plus) non alimentaires, très difficiles à
implanter en coeur de ville, et ne présentant pas nécessairement d?homogénéité entre elles.
Leur hétérogénéité concerne également les acteurs immobiliers : ces zones commerciales ou parc
d?activités commerciales sont investis par une pluralité d?investisseurs, promoteurs et foncières
d?horizons différents : immobilières de la grande distribution, investisseurs institutionnels, SCI
familiales, et bien sûr les enseignes elles-mêmes (succursalistes ou franchisés).
65% de la population française vit autour d?une métropole (ville > à 200 000 habitants) : la « zone
commerciale » est de fait déjà une forme de proximité. 72% des dépenses de consommation seraient
réalisées dans les périphéries de villes. « La périphérie des uns est la proximité des autres ».
Plusieurs inputs majeurs convergent aujourd?hui pour faire du périurbain existant un lieu de
reconquête urbaine, économique et sociale :
? La protection de la biodiversité et des fonciers non artificialisés nécessite une évolution dans
le développement de l?urbain ex-nihilo et appelle à privilégier l?implantation de nouvelles
constructions sur des zones commerciales existantes déjà artificialisées, et plus généralement sur
les zones d?activités économiques.
? Logement, logistique, industries vertes : des filières aux besoins importants, l?opportunité de
valoriser des fonciers.
? L?évolution des comportements et des attentes est propice au développement d?une nouvelle
proximité. Les contraintes économiques, et plus encore environnementales, rendent nécessaire une
meilleure gestion des déplacements et l?accroissement de la mixité fonctionnelle et
programmatique.
? Les politiques publiques se sont concentrées depuis plusieurs années sur la redynamisation des
centres-villes, dont la population stagne depuis 40 ans : il est opportun de considérer à présent la
qualité de vie et les contraintes qui pèsent sur les habitants du péri-urbain.
? Les entrées de ville peuvent devenir le lieu privilégié de la mutation urbaine de notre pays, vers un
modèle plus sobre en foncier et moins générateur de besoins de mobilités, vers un modèle urbain
polycentrique.
Le modèle économique de ces zones commerciales reste toujours aussi intéressant tant du point de
vue des consommateurs que de celui des propriétaires et surtout exploitants.
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 104
Ce modèle viable demeure un frein important pour la création d?opération mixte complexe tant par la
recherche d?un équilibre économique pour ces opérations forcément plus onéreuses que par la capacité
de mobiliser la pluralité des propriétaires / investisseurs.
Le puzzle du remembrement pour toute opération de transformation nécessite un remembrement
préalable, lourd en investissements et en portage. Ce travail réclame de longues années de
négociations, de levées de contraintes juridiques en plus des classiques autorisations (autorisations
d?exploitation commerciale notamment) à obtenir? et à purger.
Afin de créer des conditions favorables à la mobilisation de ces fonciers commerciaux pour la création
de logement, il est utile de rappeler que les zones commerciales de périphérie concentrent à l?heure
actuelle une vacance commerciale estimée à 14,89% dans les centres commerciaux et 6,62% dans les
zones commerciales.
La capacité a influencé la transformation des commerces pourrait être de créer une surtaxe sur la
vacance commerciale à partir d?une vacance de plus de 50% de la propriété détenue. Afin de
disposer d?éléments factuels pour déterminer une vacance commerciale, le point de départ de cette
surtaxe pourrait être le non-paiement d?une TASCOM sur une cellule depuis plus de 6 mois. Cette surtaxe
pourrait ainsi créer un phénomène de décision plus rapide, notamment chez les investisseurs
institutionnels.
Cette surtaxe pourrait permettre à l?Etat de financer « une prime à la transformation » en faveur des
opérateurs qui initieraient un projet mixte en lieu et place de commerce existant afin notamment
d?accompagner les opérations économiquement fragiles en finançant l?indemnisation des locataires
et / ou propriétaires. Cette prime à la transformation pourrait être soumise à des conditions de
programmation telle qu?un pourcentage de logements sociaux ou de logements intermédiaires
développés, un pourcentage de renaturation / pleine terre.
Afin de faciliter les négociations foncières avec certains propriétaires particuliers, notamment à travers
des SCI familiales issues d?anciens commerçants, un abattement exceptionnel (de 70% ou 85%)
applicable sur les plus-values immobilières résultant de la cession de biens immobiliers bâtis, ou de
droits relatifs à ces mêmes biens dans le périmètre d?une opération de transformation d?une zone
commerciale pourrait être mis en place.
Au-delà des aspects économiques, et comme précisé supra, le remembrement foncier confère une
complexité telle que certains opérateurs pourraient être découragés devant l?ampleur de la tâche. Afin de
faciliter ce remembrement, il pourrait être intéressant, pour les collectivités de systématiser le droit de
préemption et d?expropriation lors de l?inscription d?une zone de Projet (PPA, GOU, OAP,?). Cette
inscription pourrait générer de fait une DUP sur le périmètre du Projet (L 211-4 et L 214-1 c. urb.),
analogue à la DUP « travaux ». »
24 juin 2024
André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 105
A11.6 : Contribution du GRECAM
« Extrait Rapport « Analyse du marché de la reconversion et des marchés porteurs
en Ile-de-France (2024)
Différentiel de prix de vente entre les bureaux et les logements
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 107
A11.7 : Contribution du KAREG
« Note sur la transformation de bureaux en logements
1) Avant 2020 une vacance de bureaux faible
La création de KAREG en janvier 2019, avait pour objectif de proposer aux propriétaires institutionnels
et aux investisseurs de travailler à la restructuration et au repositionnement de leur parc de bureaux
obsolètes et/ou non occupés. Ce parc était alors estimé à 800 000 m² (vides depuis au moins quatre ans
en Ile-de-France) sur les 55M de m² du parc tertiaire francilien. Le constat par ailleurs que la durée de
vie moyenne d?un immeuble de bureaux avant travaux lourds pouvait être estimée à 30 ans conduisait à
évaluer à 1,5 M de m² annuels le parc devant faire l?objet de travaux pour des remises en location. Pour
autant les loyers inférieurs à 200¤/m² annuels sur une partie importante du parc (quasi-totalité de la
seconde couronne et parc de seconde main de première couronne) faisait craindre que les propriétaires
de ces actifs ne renoncent à engager des travaux de l?ordre de 2000¤/m² impossible à amortir dans le
cadre de baux 3/6/9 voire 9 ans fermes.
La création de KAREG faisait également suite à la promulgation de la loi ELAN le 23 novembre 2018
dont l?article 28 proposait plusieurs dispositifs pour faciliter les transformations de bureaux en logements.
2) La nouvelle situation post pandémie, crise structurelle et prime croissante à la centralité
La pandémie de COVID 19 a profondément bouleversé le marché du bureau. La mise en oeuvre
généralisée du télétravail à l?échelle mondiale et nationale a structurellement déstabilisé ce marché et
ses acteurs.
Sur la seule région Ile-de-France ce sont plus de 800 accords de télétravail qui ont été signés en
entreprise avec une moyenne 2,4 jours de télétravail par semaine. Il est à noter qu?au moins 45% des
salariés franciliens pratiquent le télétravail au moins une fois par semaine. Après 3 ans de mise en oeuvre
et les premiers retours d?expérience, une première phase de renouvellement des accords a été engagée
et un consensus s?établit autour d?une moyenne de 2 jours par semaine.
Ces nouveaux modes de travail ont pour conséquence un impact très lourd sur les parcs de bureaux.
Les entreprises ont engagé une réflexion de fond sur leurs besoins en bureaux avec une tendance vers
moins de bureaux mais « mieux de bureaux ». Si mathématiquement 2 jours de télétravail correspondent
à une diminution de 40% des besoins en surface la pratique évolue vers une diminution moindre avec
l?aménagement de nouveaux espaces collaboratifs ou de convivialité. Ils doivent permettre aux
collaborateurs qui se côtoient moins de se retrouver et de renforcer l?esprit d?entreprise. La baisse des
surfaces louées serait ainsi comprise entre 20 et 30% des surfaces antérieures.
Dans l?immédiat, une grande majorité d?entreprise restent dans une phase d?observation. Pour éviter
des engagements trop risqués en termes de politique immobilière, elles réduisent leurs surfaces à
l?occasion des renouvellements de baux ou de la signature de nouveaux baux et adaptent leurs besoins
en ayant recours à des bureaux opérés (co-working) solution plus onéreuse mais beaucoup plus souple.
En parallèle on assiste à une évolution géographique de la demande. Le « mieux » de bureaux
s?accompagne d?une recherche de la centralité et de la desserte la plus efficiente. La limitation de la place
de la voiture au coeur de la métropole dissuade les jeunes générations du déplacement automobile et
incite les entreprises à des implantations très centrales pour attirer les meilleurs profils.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 108
Les chiffres de la vacance tertiaire reflètent clairement cette tendance. Au T1 2024 le taux de vacance
est ainsi de 2,4% dans Paris QCA (avec des loyers « prime » de plus de 1000¤/m²).
A contrario la vacance atteint 13,3% à la Défense et dépasse les 20% dans l?ensemble des Hauts de
Seine à l?exception de 4 communes (Neuilly, Levallois-Perret, Boulogne et Issy-les-Moulineaux). Les
autres départements de petite couronne ont atteint ou dépassé les 20% de vacance et la vacance
s?accroît encore en seconde couronne.
Au T1 2024, le taux de vacance global en Ile de France est de 8,4% avec 4,9M de m² libres mais
devrait encore s?accroitre fortement (cf supra). En effet, nombre d?experts estiment que la vacance devrait
quasiment tripler dans les deux ou trois ans car au regard de la rigidité des baux, beaucoup d?entreprises
n?ont pas encore procédé aux ajustements de leurs besoins9.
3) Mise en oeuvre des opérations de transformation et retour d?expérience
? Les opérations de transformation n?ont pas débuté avec la pandémie de COVID 19. Dès la fin des
années 90, la ville de Paris initiait certaines opérations notamment avec la RIVP. Celles-ci consistaient
pour l?essentiel à redonner une destination « logement » à des immeubles haussmanniens conçus un
siècle auparavant à cet usage. A partir des années 2010, la ville de Paris a fait de la transformation de
bureaux en logements un axe fort de sa politique mais les équilibres financiers parisiens et les coûts
travaux admissibles tout comme les subventions pour surcharge foncière accordées dans le cas de
production de logements sociaux sont très éloignés des standards franciliens.
? L?ORIE (Observatoire régional de l?immobilier d?entreprise) conduit avec l?appui des services de l?Etat
(DRIEAT, DGFIP?) et des notaires, un travail de recensement régulier du parc tertiaire francilien mais
également des parcs d?activité ou encore logistiques. Il en étudie la croissance mais en suit également
l?usage grâce notamment aux informations relatives à la taxe annuelle sur les bureaux en IDF.
C?est ainsi que l?ORIE au T1 2024 recense près de 3 200 immeubles de bureaux partiellement ou
totalement inoccupés en Ile-de-France sur un parc total de 55,5M de m² (dont 39M de m² de parc
marchand).
Ce sont ces immeubles qui sont donc prioritairement destinés à changer d?usage dès lors que leur
implantation où leur obsolescence ne permet plus de leur donner un avenir en bureaux.
? Les acteurs de la transformation
KAREG dans le cadre de sa stratégie a décidé dès 2019 de travailler pour le compte de propriétaires
ou celui d?investisseurs à la transformation de ces immeubles en logements, familiaux, ou gérés, libres
ou sociaux parfois dans le cadre d?opérations mixtes (bureaux-logements, centres de santé, écoles?). A
compter de 2023 KAREG agréée comme société de gestion par l?AMF a créé des fonds d?investissement
destinés à cet objectif.
Les quelques opérations déjà lancées et les très nombreuses opérations étudiées lui ont permis
d?identifier les principaux enjeux liés à la mise en oeuvre de ces opérations.
9 Dans le cadre d?une mission pour le compte d?un propriétaire institutionnel dont des services de l?Etat sont locataires, ce
dernier va regrouper différents services pour passer d?un ratio de 50m² de SU/agent (post pandémie) à 16 m² SU/agent.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 109
a) Les PLU.
Aujourd?hui la plupart des PLU présentent des zonages très figés permettant le développement de
quartiers spécialisés (bureaux, logements, activité etc?). Chaque opération de transformation nécessite
par conséquent une modification de PLU quand ce n?est pas une révision. Plus récemment les PLUI se
sont orientés vers des zonages beaucoup plus souples (Paris, Plaine Commune etc?) Par ailleurs la
proposition de loi Daubié qui pourrait être adoptée en septembre 2024, propose que les dérogations au
PLU puissent être accordées à l?initiative des maires pour la transformation de bureaux en logements.
b) Les blocages « mairie ».
C?est aujourd?hui encore le principal obstacle rencontré par les opérateurs. De nombreux maires
espèrent encore le retour d?utilisateurs y compris pour des immeubles qui ne répondent à aucun des
critères de choix de ces derniers. D?autres font état de la perte de recettes fiscales (CVAE notamment),
de la crainte d?un rejet par la population (en dépit de chantiers « allégés »), ou encore de leur impossibilité
à financer nouveaux équipements publics avec la disparition de la taxe d?habitation et la très forte
réduction de la DGF. Le préfet des Hauts-de-Seine, Laurent Hottiaux, lors d?une réunion ce 22 avril a
précisé que les maires de son département pouvaient difficilement invoquer cet argument au regard de
leur bonne situation budgétaire. Quand ils ne refusent pas les transformations beaucoup de maires
refusent en revanche tout bonus de constructibilité prévus par la loi ELAN (comme la loi ALUR de 2019
pour les logements sociaux).
c) Les problèmes techniques.
Une partie non négligeable des immeubles ne se prête pas à une transformation pour des raisons de
structure, rarement d?épaisseur (immeuble « Nuages » à Paris jusqu?à 24 m d?épaisseur, campus ECLA
à Noisy le grand, 22 m, etc.).
Ce peut être pour des raisons d?implantations défavorables, proximité d?axes particulièrement
bruyants, quartiers mono fonctionnels en activité ou bureaux (Villepinte, certains quartiers de Saint-
Quentin en Yvelines, des secteurs entiers de la Défense?).
Pour ce qui concerne les coûts de transformation, ils sont généralement proches de ceux d?une
opération neuve. Les économies sont possibles sur les coûts de gros oeuvre (infrastructure et structure
du bâtiment). En contrepartie, il convient d?ajouter le plus souvent des coûts liés potentiellement au
désamiantage, au renforcement de structures, à la création de nouveaux noyaux, de chapes acoustiques
etc.
d) Les copropriétés
Le blocage par des copropriétaires parfois très minoritaires devrait être levé par les dispositions de la
proposition de loi Daubié.
e) Le blocage des propriétaires.
Les propriétaires institutionnels ne peuvent pas (en tout cas pour les SCPI qui détiennent 24,1% du
parc tertiaire en IDF) vendre en dessous de la valeur d?expertise. Il y a là un point bloquant auquel ont
été confrontés la plupart des candidats à l?acquisition. En effet, alors même que la valeur d?un actif est
directement liée à son usage et que sa vacance totale devrait conduire à une valeur nulle, les experts
procèdent à des réévaluations à la baisse très progressives. Les propriétaires même vendeurs, fixent
donc comme prix de réserve la valeur d?expertise. En 2023 c?est ainsi un volume de 15Mds¤ d?immobilier
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 110
de bureau qui a été retiré de la vente à l?issue des consultations. Bien évidemment cet aspect doit être
considéré au regard également des « blocages des maires ». Un candidat acquéreur qui fait une offre sur
un actif qui n?a plus de perspectives d?être reloué en bureau et dont le maire ne souhaite pas qu?il fasse
l?objet d?une quelconque transformation doit se résigner à le porter un temps indéterminé et parfois très
long. »
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 111
A11.8 Contribution d?un cabinet de conseil en immobilier d?entreprise
La réflexion porte sur « des pistes utilisant des dispositifs existants permettant de canaliser de l?épargne
privée (institutionnelle ou des particuliers) en direction de ces transformations ». Le cabinet attire
l?« attention sur le fait que ces pistes doivent être vérifiées par des spécialistes fiscalistes.
1. Apporter les actifs à transformer à des structures ad-hoc
Les actifs à convertir pourraient être apportés à des structures de détention spécifiques permettant de
mutualiser les risques sur plusieurs produits, géographies ou temporalités. L?effet volume du portefeuille
crée une dynamique auprès des investisseurs et la mutualisation des actifs permet de présenter un profil
de risque plus attractif.
A notre sens il paraît difficile d?envisager des structures de détention qui seraient abondées par
différents investisseurs car trop complexe à mettre en oeuvre. A contrario certains investisseurs
possédant de grands portefeuilles pourraient loger leurs actifs à transformer dans un véhicule spécifique.
Les véhicules pourraient être structurés en fonction de la cible d?investisseurs visés (particuliers ou
institutionnels) ? permettant d?y associer des incitations spécifiques.
Des mécanismes comme le démembrement de propriété pourraient également être mis en oeuvre
avec cession d?usufruit à des bailleurs sociaux pour le développement d?opérations.
L?idée est également de ne pas rechercher à créer des structures de détention où l?Etat aurait vocation
à investir mais au contraire de structurer des véhicules capables de capter de l?épargne privée.
2. Des incitations adaptées à la cible d?investisseurs :
Pour les particuliers :
L?investissement dans un véhicule de transformation identifié comme tel (pourrait être une SCPI par
exemple) pourrait être assorti d?incitations conditionnelles et limitées dans le temps (10 ans) telles que :
? La sortie de la valeur des parts de l?assiette de calcul l?IFI
? La sortie des revenus fonciers de l?assiette de calcul de l?IR
? L?amortissement déductible des revenus fonciers
? Une dispense d?imposition sur la plus-value en cas de revente des parts.
Indépendamment de la transformation des bureaux en logement, les règles d?abattement qui
s?appliquent actuellement sur les revenus des locations non-meublées vs les locations meublées ou
touristiques devraient être revues pour favoriser la location de longue durée ? ce qui n?est pas le cas
aujourd?hui.
Pour les institutionnels :
Pour les institutionnels les leviers portent sur la minoration de la fiscalité des dividendes et sur
l?imposition des plus-values.
Le régime SIIC tel qu?il avait été défini au moment de son lancement pourrait être une base de
réflexion : transparence fiscale du véhicule de détention, obligation de remonter en dividendes un % élevé
du résultat, abattement sur les dividendes perçus par les actionnaires.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 113
A11.9 : Contribution de l?ORIE
« Avis de l?ORIE sur transformation de bureaux en logements
Contexte
Le 21 mai dernier, a été examinée au sénat une Proposition de loi visant à faciliter la transformation des
bureaux en logements pour répondre à la crise du logement en France.
L'ORIE (Observatoire Régional de l?Immobilier d?Entreprise), organe privilégié de concertation entre
pouvoirs publics et professionnels de l?immobilier regroupe, au sein d'une association loi 1901, l'ensemble
des acteurs du marché de l'immobilier d'entreprise francilien se réjouit et partage cette initiative du
gouvernement qui permettra à moyen terme de recycler un gisement considérable de bureaux obsolètes
pour alimenter la production de logements. Par ailleurs l?ORIE encourage à poursuivre les réflexions au
Sénat de la proposition de loi DAUBIÉ.
En parallèle, une rencontre a été organisée le 23 mai dernier entre les membres du CA et M. André YCHE
missionné par le ministère du Logement dans le cadre de sa mission sur la transformation de bureaux en
logements et dont le rapport sera publié fin juin.
Suite à cette rencontre, l?ORIE a animé différents ateliers thématiques dont les conclusions sont
consignées dans ce présent avis.
Propositions de l?ORIE
Les recommandations de l?ORIE concernent 2 grands enjeux.
Enjeu 1 : Libéraliser le marché de la transformation de bureaux en logements
Partant du constat que l?autorisation à la transformation de bureaux en logements existe certes, mais est
soumise à de nombreuses règles administratives et d?urbanisme au niveau local qui retardent voire
rendent impossible certaines opérations, l?ORIE propose de :
- Elargir au-delà du logement (logement libre, intermédiaire et abordable), la destination des
transformations à l?hébergement résidentiel (résidences étudiantes, résidences senior, co-living avec
ou la possibilité d?y insérer des espaces de co-working, des services et/ou commerces de première
nécessité pour les grands ensembles immobiliers [+ 5000 m² ]) et l?hébergement commercial (hôtels et
tourisme) avec la possibilité de changer de destination définie à l?article R.151-27 et de sous -
destination définie à l?article R.151-28 du Code de l?urbanisme sans autorisation préalable et en
permettant une réversibilité vers la destination initiale au bout de 30 ans par exemple.
Enjeu 2 : Promouvoir une incitation financière à la transformation des bureaux en logements
Dans le contexte économique actuel difficile et du fait de son rendement locatif brut espéré inférieur dans
le segment du logement que celui de l?immobilier tertiaire, l?ORIE propose 2 types de mesures incitatives
qui excluent tant la création de toute nouvelle taxe que de subventions publiques ; ce qui créerait des
dépenses supplémentaires pour l?Etat.
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 114
- Redonner de l?intérêt au rendement brut locatif
- Exonération totale de la taxe annuelle sur le bureau et de la taxe foncière durant les travaux de
transformation. A compter de l?achèvement des travaux et lorsque l?habitat est occupé à 75%,
mettre en place une exonération de 50 % de la taxe foncière pendant 10 ans.
- Autoriser un amortissement accéléré des coûts de travaux de transformation.
- Réduire les coûts de cession d?actifs pour une transformation future
- Suspension pendant 10 ans des régularisations de TVA en cas de cession des actifs, ce qui
permettrait de réduire considérablement le prix de cession pour une transformation future. Cette
exonération de TVA devra être limitée aux baux d?habitation consentis sur des logements loués
nus à des particuliers.
- Faciliter les opérations de transformation sur l?aspect financier
- Mettre en place un accompagnement public et financier : à l?instar du prêt Gaïa qui permet
depuis 2005, de financer la construction de logements sociaux à travers des prêts à taux réduits,
l?ORIE propose que l?Etat mette en place un accompagnement financier public qui présenterait le
grand avantage de ne pas être synonyme de dépenses publiques supplémentaires. Les avantages
sont en effet multiples pour ce type de prêts publics :
? Modalités d?amortissement (jusqu?à 15 ans),
? Mobilisation sur plusieurs années (1 à 15 ans), couverture jusqu?à 100 % et exonération des
indemnités de remboursement en cas de revente.
- Améliorer la gestion et le financement des équipements publics
- La question des équipements et aménités publics que créent la création de nouveaux logements
est aujourd?hui traité par un mécanisme qui permet de gérer le financement des équipements
publics nécessités par la réalisation d?une opération : le PUP (Projet Urbain Partenarial).
Cependant, le mécanisme actuel est limité à une réflexion et gestion par projet. Afin d?assurer à
la fois les services publics et des péréquations économiques entre projets de différents
opérateurs, l?ORIE propose d?élargir cette gestion au cas par cas du PUP à une gestion par
ensemble de projets. »
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André Yché Rapport à l?attention du ministre délégué au Logement 115
A11.10 : Contribution de « Surface + Utile » (acteur de l?Economie Sociale et Solidaire)
« Propositions pour faciliter l'usage des actifs tertiaires vacants
par les acteurs de l?Economie Sociale et Solidaire (ESS)
- Orienter vers le secteur de l'ESS la mise à disposition des actifs vacants à titre gracieux ou à des prix
décorrélés du marché en échange de l'exemption de la taxe sur les bureaux vides.
- Cet usage et cet avantage fiscal donne droit à l'appellation « espace économique de la transition »,
qui pourra donner lieu à d'autres mesures.
- A titre expérimental, les « espaces économiques de la transition » bénéficient d'une dérogation
temporaire aux règles de destination du PLU. Cet usage dérogatoire est alors réservé aux acteurs de
l'ESS / ou bénéficiant du statut de structure reconnue d'intérêt général ou d'utilité publique.
- Anticiper la possible longue durée de ces mises à disposition (pour les actifs les plus en difficulté) en
créant un statut de bail de long terme, sans motif de précarité, mais qui ne donne pas de droit à une
propriété commerciale de la part du locataire (statut du bail entre le bail précaire, le bail commercial, et le
bail dérogatoire).
- Laisser au propriétaire de l'actif vacant depuis plus de 2 ans le soin de faire occuper le bien par des
acteurs ESS, sans quoi la collectivité ou la préfecture pourront le réquisitionner pour le confier à un acteur
ESS ou pour une mission de service public, jusqu'à ce qu'un permis de construire purgé (ou autre
autorisation administrative) soit délivré ou qu'un bail commercial soit conclu. Le propriétaire échappe alors
à la taxe sur les bureaux vides. Cette disposition permettrait d'ajouter une possibilité d'usage d'intérêt
écologique et sociétal des actifs vides sans faire peser son organisation et sa gestion sur le propriétaire.
- Imposer aux collectivités de rendre public le stock d'actifs vacants sur leur territoire. Ces données sont
disponibles auprès de des services de Bercy mais presque jamais demandées par les collectivités.
- Ajouter la "lutte contre la vacance immobilière" dans les objectifs des OAP pour en faire un objectif
des collectivités dans leurs politiques d'urbanisme (1er alinéa du I de l?article L151-7 du code de
l?urbanisme). »
INVALIDE)