Rapport d'enquête technique sur la collision et le déraillement d'un train de travaux le 17 janvier 2024 sur la base arrière de Saint-Florentin-Vergigny (89)

Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre
Auteur secondaire
Résumé
<p align="justify" style="line-height: 100%; margin-bottom: 0cm"><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">Le 17 janvier 2024 à 10 h 11 sur la base arrière travaux implantée dans les emprises de la gare de Saint-Florentin-Vergigny dans l'Yonne (89), un mouvement de manoeuvre en refoulement heurte deux wagons stationnés au butoir de la voie 7 </font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">qui viennent percuter</font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt"> des bungalows </font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">et</font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt"> deux véhicules stationnés. </font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">Cet accident ne faisait aucune victime, mais a provoqué </font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">d'</font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">importants dégâts. </font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">La raison principale de la collision est l'usage entre les acteurs d'une radio non conforme. A l'issue de son enquête le B</font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">EA</font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">-TT </font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">émett</font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">ait</font></font><font face="LiberationSans, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt"> 6 recommandations et 1 invitation</font><font size="2">.</font></font></p>
Editeur
BEATT
Descripteur Urbamet
accident ; sécurité ; train ; travaux ; sous-traitant ; DERAILLEMENT
Descripteur écoplanete
voie ferrée
Thème
Transports
Texte intégral
RAPPORT D?ENQUÊTE TECHNIQUE sur la collision et le déraillement d'un train de travaux le 17 janvier 2024 sur la base arrière de Saint-Florentin-Vergigny (89) Décembre 2024 Avertissement L?enquête technique faisant l?objet du présent rapport est réalisée dans le cadre des articles L.1621-1 à 1622-2 et R.1621-1 à 1621-26 du Code des transports relatifs, notamment, aux enquêtes techniques après accident ou incident de transport terrestre. Cette enquête a pour seul objet de prévenir de futurs accidents. Sans préjudice, le cas échéant, de l?enquête judiciaire qui peut être ouverte, elle consiste à collecter et analyser les informations utiles, à déterminer les circonstances et les causes certaines ou possibles de l?évènement, de l?accident ou de l?incident et, s?il y a lieu, à établir des recommandations de sécurité. Elle ne vise pas à déterminer des responsabilités. En conséquence, l?utilisation de ce rapport à d?autres fins que la prévention pourrait conduire à des interprétations erronées. Glossaire ? AC: Agent Circulation (SNCF-R) ? CF: cylindre de frein ? CG: Conduite générale ? COMAN: Correspondant Manoeuvre ? COSIT: Coordinateur de site ? Cv: Carré violet (signal de protection SNCF) ? DBA: Dirigeant de base arrière ? DPX: Dirigeant de Proximité ? EF: Entreprise Ferroviaire ? EIC: Établissement Infra-Circulations (SNCF R) ? ETF: Entreprise de Travaux Ferroviaires (groupe Vinci) ? ETF-S:Entreprise de Travaux Ferroviaires-Services (groupe Vinci) ? GI: Gestionnaire d?Infrastructures ? ITIF: Infralog Travaux Île-de-France (SNCF-R) ? SIBAS: Siemens Bahn Automatisierungs System (système d?automatisation ferroviaire) ? SNCF R: Société Nationale des Chemins de Fer Réseau ? TEVO: Traverse Evolution (train usine appartenant à ETF) Bordereau documentaire Organisme auteur: Bureau d?Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre (BEA-TT) Titre du document: Rapport d?enquête technique sur la collision et le déraillement d?un train de travaux le 17janvier2024 sur la base arrière de Saint-Florentin-Vergigny (89) N°ISRN: EQ-BEAT?24-10--FR Affaire n° BEATT-2024-01 Proposition de mots-clés: travaux, base arrière, processus, manoeuvres, management, contrôle, sous-traitant 1 - Synthèse Le 17 janvier 2024 à 10h11 sur la base arrière travaux implantée dans les emprises de la gare de Saint-Florentin-Vergigny dans l?Yonne (89), un mouvement de manoeuvre en refoulement sur une voie en impasse occupée heurte les deux véhicules stationnés sur la voie7, en dépit des ordres de ralentissement puis d?arrêt répétés par le chef de la manoeuvre. Sous l?effet de l?énergie cinétique acquise par le mouvement de manoeuvre, les deux wagons plats poussent le butoir et poursuivent leur course déraillés pour heurter des bungalows situés perpendiculairement à la voie et des véhicules routiers stationnés à proximité. L?arrêt du mouvement de manoeuvre et de la course des 2 wagons est obtenu par l?effort de retenue dû au déraillement et aux collisions associé à la mise en action automatique des freins par la rupture de la continuité de la conduite générale. Cet accident n?a fait aucune victime. Le bilan matériel est important. Les 2 wagons plats sont endommagés et la rame «TEVO» qui a subi des dommages est rendue indisponible pour les travaux programmés de régénération du réseau ferré en Île-de-France. L?extrémité de la voie 7 est hors d?usage. Les bungalows de la base vie et des véhicules routiers sont détruits. La cause immédiate de la collision de la manoeuvre avec les deux wagons stationnés au butoir de la voie 7 est l?utilisation par les acteurs de la manoeuvre d?une radio non dédiée. Plusieurs facteurs ont été identifiés comme ayant pu concourir à cette situation: ? la mise en place des bases arrière; ? la conception des processus de production sur les bases arrière; ? la mise oeuvre des processus de production sur les bases arrière; ? le management de la sécurité sur les bases arrière. L?absence de dégât corporel, malgré l?ampleur des dommages, s?explique par l?excellent comportement du chef de la manoeuvre qui a ordonné aux agents de se mettre en sécurité et à l?absence de tout agent dans la base vie et dans les véhicules. Une recommandation immédiate a été émise concernant l?utilisation d?une radio non conforme aux obligations décrites dans le document SNCF R numéroté MT 07320. Le BEA-TT émet 6 recommandations pour prévenir ce type d?accident dans les domaines suivants: ? évaluation des risques de collision du personnel par une circulation ferroviaire; ? amélioration de l?état des bases arrière; ? conception de processus de production et de processus supports; ? renforcement du briefing; ? consolidation du management opérationnel; ? amélioration du contrôle sécurité interne de chaque exploitant et du contrôle commun; ? intégration des règles de sécurité dans les contrats et leur maîtrise par les acteurs du management de la sécurité Le BEA-TT émet une invitation pour une situation non conforme aux règles dans le domaine suivant: ? utilisation d?une méthode de travail non conventionnelle 1 Summary (english version) On January 17, 2024 at 10:11 a.m. on the rear works base located in the Saint-Florentin- Vergigny station rights-of-way in Yonne (89), a shunting movement in pushback on an occupied dead-end track hit the two vehicles parked on track 7, despite the slowdown and then repeated stops orders by the shunting manager. Under the effect of the kinetic energy acquired by the shunting movement, the two flat cars push the buffer and continue their derailed course to hit bungalows located perpendicular to the track and road vehicles parked nearby. The stopping of the shunting movement and the course of the 2 cars is obtained by the restraining force due to the derailment and collisions associated with the automatic application of the brakes by the break in the continuity of the general pipe. This accident did not cause any casualties. The material toll is significant. The 2 flat cars are damaged and the "TEVO" train which suffered damage is made unavailable for the scheduled works to regenerate the rail network in Île-de-France. The end of track 7 is out of service. The bungalows of the base camp and the road vehicles are destroyed. The immediate cause of the collision of the shunting with the two cars parked at the end of track 7 is the use by the actors of the shunting of a non-dedicated radio. Several factors have been identified as having contributed to this situation: ? the setting up of the rear bases; ? the design of the production processes on the rear bases; ? the implementation of the production processes on the rear bases; ? the management of safety on the rear bases. The absence of bodily harm, despite the extent of the damage, is explained by the excellent behavior of the head of the shunting who ordered the agents to get to safety and the absence of any agent in the base camp and in the vehicles. An immediate recommendation was issued concerning the use of a radio that did not comply with the requirements described in the SNCF R document numbered MT 07320. The BEA-TT issues 6 recommendations to prevent this type of accident in the following areas: ? assessment of the risks of personnel collision by rail traffic; ? improvement of the condition of rear bases; ? design of production processes and support processes; ? reinforcement of briefing; ? consolidation of operational management; ? improvement of each operator's internal safety control and joint control; ? integration of safety rules into contracts and their control by safety management stakeholders The BEA-TT issues an invitation for a situation that does not comply with the rules in the following area: ? use of an unconventional working method 2 SOMMAIRE 1 - SYNTHÈSE..............................................................................................................................1 SUMMARY (ENGLISH VERSION).................................................................................................2 2 - L?ENQUÊTE ET SON CONTEXTE..........................................................................................5 2.1 - Les circonstances de l?accident.........................................................................................5 2.2 - Le bilan de l?accident.........................................................................................................7 2.3 - Les entreprises impliquées et leurs liens...........................................................................7 2.4 - L?engagement de l?enquête................................................................................................7 3 - LA DESCRIPTION DU FAIT SURVENU.................................................................................8 3.1 - Le contexte de l?accident...................................................................................................8 3.1.1 - Le site de l?événement........................................................................................................................... 8 3.1.2 - La rame accidentée............................................................................................................................... 9 3.1.3 - La météorologie..................................................................................................................................... 9 3.2 - Description factuelle des évènements...............................................................................9 3.2.1 - Constitution du train et équipage...........................................................................................................9 3.2.2 - Les témoignages................................................................................................................................... 9 3.2.2.1 - Les agents présents sur le terrain:...........................................................................................................................................9 3.2.2.2 - Les acteurs sur le terrain.........................................................................................................................................................10 3.2.2.3 - Les principaux témoignages...................................................................................................................................................10 3.2.3 - Habilitation des agents et respect du temps de travail.........................................................................13 3.2.4 - Les postes radio utilisés par le personnel ETFS sur la base arrière de Saint-Florentin-Vergigny.......13 3.2.5 - Le dépouillement des enregistrements................................................................................................13 3.2.6 - La vérification du fonctionnement des appareils de commande du frein des deux locomotives..........17 3.2.7 - Les dommages.................................................................................................................................... 17 4 - ANALYSE DU FAIT SURVENU.............................................................................................18 4.1 - L?état du site.....................................................................................................................18 4.2 - La répartition des tâches par le responsable des manoeuvres........................................19 4.3 - Le retard du train et l?interaction sur les opérateurs du site..............................................19 4.4 - L?état de fatigue des conducteurs cédants A et C............................................................19 4.5 - La réception du train sur la voie 3 Garage et le mouvement en «Tirez» sur la voie17..20 4.6 - Le mouvement en «Tirez» sur la voie 11 et la pousse...................................................21 4.7 - Le franchissement de la pancarte «ARRÊT».................................................................22 4.8 - La coupe des 2 rames (rames Bloc et TEVO).................................................................23 4.8.1 - Principes de fonctionnement du frein continu automatique.................................................................23 4.8.2 - État des freins des rames Bloc et TEVO..............................................................................................24 4.9 - Le mouvement en «Tirez» de la rame Bloc sur la voie 9bis...........................................26 4.10 - Le mouvement en «Refoulez» de la rame TEVO sur la voie 7....................................26 4.11 - La collision de la rame TEVO sur la voie7 avec les deux wagons plats........................27 4.12 - La collision des wagons plats avec les bungalows et des véhicules en stationnement. 28 4.13 - Protection des agents de maintenance et recherche d?éventuelles victimes.................29 4.14 - L?organisation et le fonctionnement du site....................................................................29 4.14.1 - Le choix du site et son utilisation en site ouvert.................................................................................29 4.14.2 - Les textes organisationnels...............................................................................................................29 4.14.3 - Les radios de manoeuvre utilisées.....................................................................................................31 4.14.4 - La pousse en manoeuvre...................................................................................................................33 4.14.5 - La méthode dite «chaîne de manoeuvre»........................................................................................34 4.14.6 - Le contrôle sécurité de SNCF R de l?entreprise qualifiée ETF S et le management des DBA...........34 4.15 - La reconstitution des faits..............................................................................................35 4.16 - Rencontre des dirigeants des entreprises impliquées et des experts métiers...............36 5 - CONCLUSIONS SUR LA RECHERCHE DES CAUSES ET DES FACTEURS...................39 5.1 - Arbre des causes.............................................................................................................39 5.2 - Les causes de l?accident..................................................................................................40 5.3 - Les mesures prises depuis l?accident..............................................................................41 5.3.1 - Mise en oeuvre de la recommandation immédiate par SNCFR...........................................................41 5.3.2 - Mesures mises en oeuvre par SNCFR................................................................................................43 5.3.3 - Mesures mises en oeuvre par ETFS...................................................................................................43 CONCLUSION (ENGLISH VERSION).........................................................................................45 6 - LES RECOMMANDATIONS ET LES INVITATIONS EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ............48 6.1 - Mise en place des bases arrière......................................................................................48 6.2 - Conception des processus de production sur les bases arrière.......................................49 6.3 - Mise en oeuvre des processus de production sur les bases arrière.................................49 6.4 - Management de la sécurité sur les bases arrière............................................................50 6.5 - La méthode de travail non conventionnelle......................................................................51 SAFETY RECOMMENDATIONS (ENGLISH VERSION)............................................................52 ANNEXES.....................................................................................................................................56 Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête..............................................................................57 Annexe 2: les enregistrements.................................................................................................58 Atess locomotive G1206, conducteurs A et B.................................................................................................58 Enregistrement SIBAS «matériel» locomotive G1206...................................................................................59 Atess locomotive E4000, conducteurs C et D.................................................................................................59 RÈGLEMENT GÉNÉRAL DE PROTECTION DES DONNÉES..................................................61 2 - L?enquête et son contexte 2.1 - Les circonstances de l?accident L?événement s?est produit le 17 janvier 2024 à 10h11 sur la base arrière travaux implantée dans les emprises de la gare de Saint-Florentin-Vergigny, dans l?Yonne (89) et sur la ligne classique n°830000 (Paris Gare de Lyon vers Dijon). C?est une ligne électrifiée en 1500V continu, exploitée en double voie, la plateforme est composée de 4 voies principales. Le cantonnement (espacement entre les trains) est assuré par du bloc automatique lumineux. Les travaux de régénération industrielle du réseau ferroviaire en Île-de-France, nécessitent l?utilisation des voies de service de la gare de Saint-Florentin-Vergigny pour l?activité du projet «SR ZD RVB PSE 01» conduit par l?établissement Infralog Travaux Île-de-France (ITIF). La maintenance, le réapprovisionnement et l?adaptation de la formation du train de travaux ont lieu sur cette base arrière. Figure 1: Schéma de situation (SNCF Réseau légendé BEA-TT) Le train n°822153 assure la mission Essonne-Robinson ? Saint-Florentin. Il est composé d?une rame usine dénommée «TEVO» (Traverse Evolution) et d?une rame «Bloc» (wagons transportant les déchets) de 736m de long pour une masse de 3165t. La traction est assurée par deux locomotives diesel de la série G1206 en tête et Euro 4000 en pousse. La conduite du train est opérée par ETF Services qui a le statut d?Entreprise Ferroviaire. Il circule sous l?agrément de sécurité de SNCF R. Deux conducteurs, un par locomotive située à chaque extrémité, assurent la conduite du train. Ils communiquent par talkie-walkie. Le mercredi 17 janvier 2024, le train n°822153 part en retard de la zone de travaux située entre Corbeil-Essonnes et Melun. Des conflits de circulations conduisent le service de gestion des circulations du GI SNCFRéseau à garer ce train à Melun puis à Montereau pour laisser passer des circulations prioritaires. Le train est reçu sur la voie3 Garage de la gare de Saint-Florentin-Vergigny à 9h 52 avec 2h 24min de retard. 5 Le thème de la manoeuvre est de répartir la rame du train en deux sections sur les voies9bis et 7. La voie 9bis est la voie permettant le traitement des déchets transportés dans la rame Bloc. La voie 7 est utilisée pour la maintenance du train usine TEVO appartenant à ETF. Les mouvements successifs de manoeuvre sont : ? tirer de la voie 3 Garage sur la voie 17, locomotive G1206 en tête pour dégager le panneau Cv930; ? tirer sur la voie 11, locomotive E4000 en tête; ? couper la rame du train en deux parties (rame Bloc et TEVO); ? tirer sur voie 9bis occupée la rame Bloc, locomotive E4000 en tête; ? refouler sur voie 7 occupée la partie train usine TEVO, locomotive G1206 en queue. Figure 2: Schéma de l?accident (SNCF Réseau légendé BEA-TT) Lors de la mise en place du train usine sur la voie 7, les ordres de ralentissement et d?arrêt donnés par le chef de la manoeuvre ne sont pas tous entendus et compris par le conducteur. Les 2 wagons plats situés au butoir de la voie7 sont heurtés par la manoeuvre de refoulement, le butoir est renversé, les 2 wagons plats sont poussés dans les bungalows implantés perpendiculairement aux voies 5 et 7 à environ 50 m au-delà du butoir. Figure 3: photos des dégâts (BEA-TT) 6 2.2 - Le bilan de l?accident Aucune personne ne se situait lors de l?événement dans les bungalows, ni dans les véhicules personnels stationnés dans la zone du déraillement. Aucun blessé n?est à déplorer. Les dommages matériels sont supérieurs à 2M¤. Le train usine est partiellement endommagé, deux wagons plats heurtés ont des dommages majeurs, l?extrémité de la voie7 et son heurtoir sont à reprendre, les bungalows de la base vie comme les véhicules routiers stationnés dans la zone du déraillement sont détruits. 2.3 - Les entreprises impliquées et leurs liens SNCF Réseau est une des sociétés anonymes du groupe SNCF. Elle est mise en place au 1er janvier 2020 après une première étape sous forme d?EPIC en 2014 qui regroupait RFF (Réseau Ferré de France), la DCF (Direction de la Circulation Ferroviaire) et SNCF Infra. En tant que Gestionnaire d?infrastructure, SNCF Réseau commercialise l?accès au réseau, gère les circulations des trains (voyageurs et fret) et assure la maintenance des infrastructures ainsi que leur développement. L?ensemble de ses activités est réalisé sous son agrément de sécurité délivré par l?EPSF. ETF (Entreprise de Travaux Ferroviaires) est une des sociétés constituant le groupe Vinci Construction. Elle assure la construction et la maintenance d?infrastructures ferroviaires. ETF Services (Entreprise de Travaux Ferroviaires Services) est une des sociétés constituant le groupe Vinci Construction. Elle assure notamment la gestion de bases arrière, la conduite de trains et assure des taches essentielles de sécurité sur la formation des trains comme chef de la manoeuvre. Dans le cadre de ses chantiers de régénération industrielle du réseau, SNCF Réseau a confié par contrat à ETF, des travaux à réaliser sur le réseau, la gestion de bases arrière, la fourniture de moyens de traction, du personnel de conduite et du personnel chargé des opérations au sol. Ce contrat oblige ETF à faire appel à une entreprise sous-traitante qui soit «qualifiée» par SNCF Réseau pour ce qui concerne la conduite des trains, leur formation et le fonctionnement global des bases arrière. Ceci nécessite que l?entreprise sous-traitante désignée réponde en tout point aux normes fixées par SNCF Réseau et qu?elle soit une entreprise ferroviaire munie d?un certificat de sécurité unique délivré par l?EPSF pour la conduite des trains. Cela détermine sa «qualification» par SNCF Réseau et l?autorise à mettre en oeuvre ces métiers liés à la sécurité de l?exploitation ferroviaire sous l?agrément de sécurité du GI SNCF Réseau. 2.4 - L?engagement de l?enquête Au vu des circonstances de cet événement (collision avec plus de 2M¤ de dégâts implique enquête obligatoire) et de son haut potentiel de gravité comme d?apprentissage, le directeur du bureau d?enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) a ouvert le 18 janvier 2024 la présente enquête technique en application des articles L.1621-1 à L.1622-2 et R.1621-1 à R.1621-26 du Code des transports. L?enquête vise à identifier les causes et circonstances de l?accident afin d?établir des recommandations. Les enquêteurs du BEA-TT se sont rendus sur place et ont rencontré les représentants du gestionnaire de l?infrastructure ferroviaire (GI), ainsi que les représentants de ETF Services «Ferroway». Ils ont interviewé les personnels directement impliqués dans l?évènement. Une reconstitution a été réalisée avec l?ensemble des agents concernés et en présence des experts métiers de ETF Services «Ferroway» Les enquêteurs ont pu disposer de l?ensemble des pièces et documents nécessaires. 7 3 - La description du fait survenu 3.1 - Le contexte de l?accident 3.1.1 - Le site de l?événement L?événement s?est produit sur la ligne classique n°830000 de Paris Gare de Lyon vers Dijon, dans le faisceau de voies de service de la gare de Saint-Florentin-Vergigny. Cette gare est située dans l?Yonne (89) sur la commune de Vergigny. Figure 4: situation géographique (Google Maps légendé BEA-TT) Le lieu dénommé sur le plan «base arrière SNCF de Vergigny» est en fait un faisceau de voies de service qui est sous l?autorité de l?agent circulation de la gare de Saint-Florentin- Vergigny et accessible par toute entreprise ferroviaire qui en fait la demande. Figure 5: Schéma de situation (SNCF Réseau légendé BEA-TT) La rame du train a été tirée sur la voie 17 depuis la voie 3 Garage. Elle a été ensuite manoeuvrée sur la voie 11. Une fois la coupe réalisée, la locomotive en tête du mouvement et les wagons transportant les déchets ont effectué un mouvement en «Tirez» sur la voie 9bis. Le train usine a ensuite été manoeuvré sur la voie 7 pour permettre sa maintenance. 8 3.1.2 - La rame accidentée L?accident concerne la partie de la rame du train usine devant être mise en place à la voie7 pour permettre sa maintenance. Figure 6: composition rame TEVO (SNCF Réseau) Masse de la partie de rame accidentée, locomotive comprise: 2507 tonnes. Longueur de la partie de rame accidentée, locomotive comprise: 623 mètres. La locomotive est en queue. 3.1.3 - La météorologie Le jour de l?événement, le 17 janvier 2024 à 10h00, la température relevée à Auxerre est de l?ordre de 2,4°C avec une pluie faible et intermittente. La visibilité est correcte. 3.2 - Description factuelle des évènements 3.2.1 - Constitution du train et équipage Figure 7: composition train (SNCF Réseau) ? une locomotive G1206 en tête parcours (chantier vers Saint-Florentin), 1 conducteur; ? la rame TEVO (en jaune); ? la rame Bloc (en bleu); ? une locomotive E4000 en pousse (chantier vers Saint-Florentin), 1 conducteur. 3.2.2 - Les témoignages 3.2.2.1 - Les agents présents sur le terrain: Tous les agents impliqués ou témoins de l?accident ont été interviewés par les enquêteurs du BEA-TT. ETF Service: ? les conducteurs; ? les agents de manoeuvre et les stagiaires; ? le responsable des manoeuvres appelé «COMAN»; ? les responsables du site. 9 ETF: ? les mécaniciens assurant la maintenance du train usine; ? le responsable de la maintenance; ? la personne chargée de l?entretien des locaux des agents de maintenance. SNCF R: Composante Exploitation (EIC PSE) ? l?agent circulation de la gare de Saint-Florentin-Vergigny (AC); ? le dirigeant de proximité. Composante Maintenance et Travaux(ITIF) ? les dirigeants de la base arrière (DBA). 3.2.2.2 - Les acteurs sur le terrain ? A et B conducteurs G1206 (A cédant, B prenant); ? C et D conducteurs E4000 (C cédant, D prenant); ? M1 et M2 agents de manoeuvre point C sur la voie 17 accompagnés d?un stagiaire; ? M3 agent de manoeuvre coupe des rames Bloc et TEVO sur la voie 11; ? M4 agent de manoeuvre voie 9bis; ? M5 agent de manoeuvre voie 7 accompagné d?un stagiaire. 3.2.2.3 - Les principaux témoignages ? Les conducteurs: Les conducteurs de la locomotive G1206 seront appelésA (conducteur cédant) et B (conducteur prenant), ceux de la locomotive E4000 seront appelésC (conducteur cédant) et D (conducteur prenant). ? G1206 Conducteur A cédant: il est conducteur de ligne depuis 2017. Il a commencé sa journée de travail la veille de l?événement à 23h30 après un repos jugé satisfaisant à son domicile situé en banlieue sud de Paris à proximité du chantier. Il devait finir son service à 8h00 à Saint-Florentin-Vergigny et regagner son domicile en voiture. Il a effectué les travaux sur le chantier puis a assuré la conduite en tête du train de Melun à Saint-Florentin. Le train circulait en retard, il a été reçu sur la voie3 Garage de Saint-Florentin qui permet d?accéder au faisceau de voies de service. Dès l?entrée sur la voie3 Garage, il a appelé le chef de la manoeuvre au moyen de son talkie-walkie. Le chef de la manoeuvre lui indique «à l?ouverture du signal, tu dégages l?aiguille». Le signal était ouvert, il précise qu?habituellement il est fermé, il ne provoque pas l?arrêt de son train au chevron1 matérialisant l?extrémité de la voie de réception et poursuit le mouvement en direction de la voie17. Il reçoit l?ordre de s?arrêter. À l?arrêt, il dispose sa locomotive en pousse et avise le conducteurC. Il reçoit en phonie «au desserrage tu pousses». Il constate que la pression de la conduite générale (CG) remonte à 5bars et que la pression des cylindres de freins (CF) de la locomotive tombe à 0bar, il commande l?effort de pousse jusqu?à une vitesse d?environ 10km/h. Lorsqu?il constate l?arrêt du mouvement, il estime que la tête du train se situe à la pancarte «ARRÊT». Il précise que la veille il était le conducteur de tête pour ce même mouvement. Il a entendu un échange par talkie-walkie entre les conducteursC et D. Il a ressenti un léger à-coup vers l?avant, il a vu la CG à 5bars et les CF à 0bar. Il commande un effort de pousse 1 Le chevron pointe en haut implanté à l?extrémité des voies de services repère le point où l?arrêt est imposé aux mouvements exécutés en direction des croisements de sortie d?un faisceau de voies convergentes. Il est placé à gauche de la voie à laquelle il s?adresse et en talon de l?aiguille de sortie correspondante. Il n?est pas éclairé la nuit. 10 sans en avoir reçu l?ordre. Après quelques tours de roue, la porte de la cabine de conduite s?ouvre et le conducteurB prend place à bord de la locomotive. Le conducteurB lui propose de le relever. Il indique au conducteurB qu?il est en pousse et descend de la locomotive. Il précise que normalement il ne lui appartenait pas de faire cette manoeuvre et que la journée de travail avait été très longue. ? E4000 Conducteur C cédant: il est conducteur de ligne ETFS depuis 2017, avant il travaillait pour un autre sous-traitant de SNCFR. Il a commencé sa journée de travail la veille de l?événement à 23h30 après un repos jugé satisfaisant à son domicile situé à environ 1heure de voiture du chantier. Il devait finir son service à 8h00 à Saint-Florentin-Vergigny et regagner son domicile en voiture. Il a effectué les travaux sur le chantier puis a assuré la conduite en pousse du train de Melun à Saint-Florentin. Le train circulait en retard, il a été reçu sur la voie3 Garage de Saint-Florentin. Il a mis son talkie-walkie en marche. Il a entendu le chef de manoeuvre dire à la radio de tirer à dégager l?aiguille. Dès l?arrêt, le conducteur A lui a indiqué qu?il pouvait reprendre les freins. Il a reçu l?ordre de tirer sur la voie11. La CG étant alimentée à 5bars, il a avisé le conducteurA qui lui a dit que la rame n?était pas complètement desserrée. Il a attendu quelques secondes et a commandé l?effort de traction. Il précise qu?il n?a pas demandé la pousse et que la puissance de sa locomotive avec le profil favorable était suffisante pour mettre en mouvement la rame. À l?approche de la pancarte «ARRÊT» il a sollicité l?agent de manoeuvreM3 pour franchir la pancarte sans s?arrêter. Il a provoqué l?arrêt du mouvement au droit du conducteur prenant «E4000 conducteurD». La CG était à 3,5bars. Il a échangé quelques paroles avec son collègue, s?est rendu au bureau et a pris la route pour rentrer à son domicile. C?est alors qu?il a été appelé au téléphone et a appris l?accident qui venait de se produire. ? E4000 ConducteurD prenant: Conducteur de ligne ETFS depuis 2016, au préalable il travaillait pour un autre sous-traitant de SNCFR. Il effectue le service 5h00?13h00 sur la base arrière. Il a bénéficié du briefing réalisé par le «COMAN». Lorsque le train a été annoncé, il s?est rendu en voiture aux environs de l?appareil de voie donnant accès à la voie9bis. La manoeuvre a franchi la pancarte «ARRÊT» à très faible vitesse sur autorisation du chef de la manoeuvre. Ce dernier a positionné la rame pour effectuer la coupe. Déclare prendre place dans la locomotive et constater que la CG est à 3,5bars et serrer le frein direct. Il a informé le chef de manoeuvre qu?il pouvait réaliser la coupe. À la réception de l?avis de la réalisation de la coupe, alimente la CG à 5bars et tire en direction de la voie9bis. Il place son talkie-walkie sur le canal 2 comme prévu. Il effectue le mouvement attendu. ? G1206 ConducteurB prenant: Conducteur ETFS depuis 2022. Il effectue le service 5h00?13h00 sur la base arrière. Il a bénéficié du briefing réalisé par le «COMAN». Il s?est rendu au point de relève en voiture avec un peu de retard car il ne connaît pas bien la zone. Il a décidé de monter dans la locomotive en marche pour relever son collègue. Ce dernier l?a informé qu?il était en pousse. Il a pris les commandes de la locomotive et le conducteur cédant est descendu en marche. Il déclare avoir tenté de joindre en vain le conducteur de tête au moyen de son talkie-walkie. Il déclare n?avoir pas entendu le chef de la manoeuvre donner des ordres de refoulement mais avoir entendu des ordres répétés comme «TEVO à l?arrêt», il a interrompu l?effort de pousse et constaté la fuite CG. Il a immobilisé la rame et s?est rendu en tête du mouvement. Il a découvert le déraillement. ? Le responsable des manoeuvres appelé «COMAN»: travaille chez ETFS depuis 2016. Il a bénéficié du briefing réalisé par le DBA de SNCFR qu?il a partagé ensuite avec les deux conducteursB et D et les agents de manoeuvres du site. À la connaissance de l?arrivée imminente du TEVO, il a placé les agents et défini leur rôle respectif (PointC: 2 agents M1 et M2, coupe du train voie9bis/7 agent M3, voie9bis 11 agentM4 et voie7 agentM5). Il a préconisé le recours à la méthode dite «chaîne de manoeuvre» pour les agents M3 et M5 pour mettre à disposition des mécaniciens d?entretien la rame du TEVO sur la voie7. Il a entendu les ordres de ralentissement et d?arrêt d?urgence donnés par l?agentM5. Il s?est rendu sur les lieux et a constaté l?événement. ? L?agent de manoeuvreM1 pointC: Opérateur sol depuis 2020à ETFS. Auparavant il était sapeur pompier dans l?industrie. Il est toujours sapeur pompier volontaire. Il effectue le service 5h00?13h00 sur la base arrière. Il a bénéficié du briefing réalisé par le «COMAN». Il a été avisé de l?arrivée du TEVO par le «COMAN» qui lui a défini de prendre en charge le point C avec un autre agent (M2) en charge de la manoeuvre du train. Il a entendu à la radio son collègue M2 dire au conducteur A «c?est ouvert pour toi, dès que tu peux tu pourras tirer». C?est l?agent M2 qui a arrêté le mouvement une fois l?aiguille dégagée. Il manoeuvre l?aiguille pour donner accès à la voie11 et avise son collègue M2. Il entend à la radio son collègue M2 dire au conducteur C (E4000) «tu peux tirer jusqu?à la pancarte «ARRÊT». Il a ensuite entendu la demande du conducteurC (E4000) à l?agent de manoeuvreM3 s?il pouvait franchir la pancarte «ARRÊT», les échanges entre M3 et le conducteur C (E4000) et le «refoulement» de la rame sur la voie7 sous les ordres des agents de manoeuvresM3 et M5 dont les ordres de ralentissement et d?arrêt de l?agent de manoeuvreM5. À la connaissance de l?accident, il se rend sur place et visite les bungalows et la zone environnante à la recherche de blessés. ? L?agent de manoeuvreM2 point C: Opérateur sol depuis 2013à ETFS. Il effectue le service de 5h00 à 13h00 sur la base arrière. Il a bénéficié du briefing réalisé par le «COMAN». Ses déclarations confirment en tous points celles de son collègue M1. ? L?agent de manoeuvreM3 coupe du TEVO: Opérateur sol depuis 2017à ETFS. Il effectue le service de 5h00 à 13h00 sur la base arrière. Il a bénéficié du briefing réalisé par le «COMAN» qui l?a chargé d?assurer la coupe du TEVO. Il a été sollicité par le conducteurC (E4000) au moyen de la radio pour franchir sans arrêt la pancarte «ARRÊT». Il a autorisé le franchissement sans arrêt. Il précise qu?il s?était assuré de la bonne position de l?appareil de voie. Il a commandé l?arrêt de la manoeuvre au point judicieux pour effectuer la coupe en donnant la distance demeurant à parcourir au conducteur. C?est après avoir reçu du conducteurD (E4000) (le prenant) l?autorisation de rentrer dans l?attelage qu?il a effectué la coupe. Il a donné l?ordre au conducteurD (E4000) de tirer vers la voie 9bis occupée. Au dégagement de l?aiguille, il a établi l?itinéraire pour diriger la deuxième partie de la rame vers la voie7. Il a annoncé par radio au conducteur G1206 qu?il allait refouler vers la voie7 occupée et précise la mise en place d?une chaîne de refoulement. Il n?a pas reçu de collationnement du conducteur, la rame s?est mise en mouvement. Très rapidement l?agent de manoeuvreM5 a annoncé par radio qu?il prenait en charge le refoulement. Il a entendu les ordres de refoulement puis de ralentissement et d?arrêt d?urgence donnés par l?agentM5 au moyen de la radio. ? L?agent de manoeuvreM4 voie9bis:Opérateur sol depuis 2020à ETFS. Auparavant a travaillé pour FretSNCF après un contrat de professionnalisation. Il effectue le service de 5h00 à 13h00 sur la base arrière. Il a bénéficié du briefing réalisé par le «COMAN» qui l?a chargé de gérer la manoeuvre sur la voie9bis de la rame Bloc. Il est sur le canal2 quand la première partie de la manoeuvre tire en sa direction sur la voie9bis. Il a entendu un énorme bruit. La manoeuvre a été arrêtée et il s?est rendu sur les lieux de l?accident. ? L?agent de manoeuvreM5 voie7:Opérateur sol depuis 2022à ETFS. De formation électricien, il a auparavant travaillé pour la pétrochimie et sur le site de l?Aérospatiale à Kourou. Il effectue le service de 5h00 à 13h00 sur la base arrière. Il a bénéficié du briefing réalisé par le «COMAN» qui l?a chargé de la manoeuvre du TEVO sur la voie7. Il s?est présenté au chef de machine (chef des mécaniciens de maintenance) 12 pour définir le point d?arrêt à respecter pour faciliter leurs interventions. Il a pris place vers la tête de la voie7, voyait son collègue M4 et entendait les échanges. Il n?a pas entendu le conducteur de la G1206 collationner l?ordre de son collègueM4. Dès la vue du TEVO, il a indiqué par radio qu?il prenait en charge le refoulement. À environ 150m du point d?arrêt il a donné l?ordre de ralentir, qu?il a répété plusieurs fois car il n?a pas constaté de ralentissement. À environ 100m du point d?arrêt, il s?est rendu compte que la situation n?était pas normale et a donné des ordres d?arrêt répétés. Il a ordonné aux mécaniciens de maintenance de se mettre à l?abri. Il va en faire de même avec son stagiaire alors que la rame est à environ 40m du point d?arrêt. La rame étant arrêtée, il se rend sur les lieux. ? Les 2 stagiaires: ils sont en formation agent de manoeuvre. Dans ce cadre, ils effectuaient un stage pratique sur le site en accompagnant les agents titulaires. Leurs témoignages n?apportent aucun élément supplémentaire. Le jour de l?événement ils étaient présents en qualité d?observateurs et n?ont pas pris part aux opérations de manoeuvre. 3.2.3 - Habilitation des agents et respect du temps de travail Chaque agent impliqué dans l?événement est muni d?un titre d?habilitation en cours de validité et en conformité avec la ou les missions réalisées sur le site. Chaque activité des agents se situait dans l?amplitude horaire respectant le Code du travail. 3.2.4 - Les postes radio utilisés par le personnel ETFS sur la base arrière de Saint-Florentin-Vergigny Les postes radio utilisés sont du type «Radio Motorola DP4400 et R7». L?entreprise ETFS, sous traitante de ETF, en application du contrat tri parties ORGSOL23087 mis en place par SNCF R a eu l?obligation de se doter de ses propres appareils. C?est un appareil grand public qui n?offre pas un niveau de sûreté élevé. Ce type d?appareil fonctionne par alternat et n?est pas muni d?un système permettant l?émission de tops sonores et d?un signal d?alerte. L?appui sur l?alternat coupe la communication en cours de réception à contrario du mode full duplex. Cette appellation se réfère à latransmission bidirectionnelle du son lors des communications. Avec ce mode, chaque participant peut parler et être entendu simultanément. C?est d?ailleurs le cas avec les radios de manoeuvre utilisés par SNCF R. Les postes du type «Radio Motorola DP4400 et R7» sont utilisés sur le site par tous les acteurs pour commander comme exécuter les mouvements de manoeuvre. Les conducteurs de ligne en sont individuellement équipés. Les raisons de l?utilisation de ce genre de poste seront approfondies par la suite. Ces appareils ne correspondent pas à ceux définis par SNCF R, pour l?exécution de manoeuvre commandée par radio, comme indiqué dans le document MT07320. Pour éviter toute confusion avec les postes radio dédiés de SNCF R, les postes utilisés par les agents de ETFS seront appelés «talkie-walkie» dans la suite du rapport. 3.2.5 - Le dépouillement des enregistrements Les deux locomotives sont équipées du système ATESS (Acquisition et Traitement des Évènements Sécurité en Statique) qui enregistre les données «conduite» de la locomotive. Les horloges des 2 locomotives sont synchronisées. La locomotive G1206 possède un système d?enregistrement de données pour le service de maintenance du 13 matériel appelé «SIBAS*». Il enregistre quantité de données techniques et permet de définir dans le temps la disposition technique de l?engin moteur en locomotive de tête ou de pousse. Les enregistrements sont consultables dans l?annexe 2 du rapport. ATESS des locomotives G1206 et E4000 1. Réception du train sur la voie 3 Garage (locomotive G1206 en tête, locomotive E4000 en pousse): ? la vitesse est de 25km/h à l?entrée de la voie; ? la vitesse chute progressivement à 5km/h. Interprétation du BEA-TT: ? le conducteurA a rencontré en amont un avertissement fermé, qui commande au conducteur d?être en mesure de s?arrêter avant le signal d?arrêt annoncé; ? l?avertissement fermé est groupé avec un rappel30 fermé, il commande au conducteur de ne pas dépasser la vitesse de 30km/h au franchissement de l?aiguille correspondante; ? un tableauG est présenté sur le panneau, il indique au conducteur que la direction donnée est une voie de service. 2. Gestion de l?arrêt obligatoire à l?extrémité de la voie3 Garage (locomotive G1206 en tête, locomotive E4000 en pousse): ? le conducteur communique avec le chef manoeuvre; ? le signal de sortie de la voie3 Garage (Cv921) est ouvert à l?indication «feu blanc», il est répété (muni d?un système qui impose au conducteur, pour éviter un freinage d?urgence automatique, d?acquitter la répétition du signal par une action volontaire sur un bouton poussoir); ? le conducteur décide de ne pas s?arrêter à l?extrémité de la voie3 Garage matérialisée par un chevron; ? le conducteur commande l?effort de traction; ? la vitesse augmente pour atteindre 15km/h, le conducteur interrompt l?effort de traction; ? la vitesse chute à 9km/h lors de la répétition «signal fermé» (passage sur le crocodile du signal placé en aval du chevron); ? aucun arrêt n?est constaté en amont de la répétition signal fermé; ? le conducteur acquitte la répétition par plusieurs actions sur le bouton poussoir d?acquittement. Interprétation du BEA-TT: ? le conducteur A n?a pas respecté l?obligation de s?arrêter à l?extrémité de la voie de service; ? le passage de la circulation de train à mouvement de manoeuvre est réalisé en mouvement; ? les ententes préalables attendues entre le chef de manoeuvre et le conducteur n?ont pas lieu (définition du thème de la manoeuvre et du premier mouvement à effectuer, et essais des radios de manoeuvre). * voir glossaire 14 3. Manoeuvre de la rame en «Tirez» à dégager le pointC sur la voie17 (locomotive G1206 en tête, locomotive E4000 en pousse): ? la vitesse atteint au maximum 14km/h; ? à 10h00min58s la manoeuvre s?arrête; ? à 10h01min14s le robinet du mécanicien de la locomotive G1206 est isolé; ? à 10h01min38s la locomotive E4000 alimente le frein; ? à 10h03min24s la locomotive G1206 fournit un effort de pousse; ? à 10h03min34s la locomotive E4000 est en traction. Interprétation du BEA-TT: ? le conducteurC a pris la commande des freins, il n?a pas respecté l?obligation de s?assurer du fonctionnement du frein automatique avant la mise en mouvement; ? le conducteurA commande un effort de pousse sans ordre du conducteurC lorsqu?il constate que la CG est à 5 bars et que les CF de la locomotive G1206 sont à 0. 4. Manoeuvre de la rame en «Tirez» sur la voie11 (locomotive E4000 en tête, locomotive G1206 en pousse): ? à la prise de commande des freins par le conducteurC de la locomotive E4000 on observe l?absence d?essai de fonctionnement du frein automatique; ? interruption de l?effort de pousse de la locomotive G1206 à 13km/h; ? la vitesse ne dépasse pas 15km/h. Interprétation du BEA-TT: ? le conducteurC est en tête du mouvement; ? il lui appartient de rechercher et d?obéir aux signaux le concernant. 5. Gestion de la pancarte «ARRÊT» (locomotive E4000 en tête, locomotive G1206 en pousse): ? franchissement la pancarte sans arrêt sur «autorisation» du chef de manoeuvre. Interprétation du BEA-TT: ? non-respect de la signalisation par le conducteur C; ? non-respect de la signalisation par l?agent de manoeuvre M3. 6. Coupe entre la rame Bloc et la rame TEVO: ? arrêt à 10h07min04s sur ordre du chef de manoeuvre; ? à 10h07min12s la CG est réalimentée; ? à 10h08min08s mise en mouvement de la rame Bloc. Interprétation du BEA-TT: ? le conducteur E4000 (C) cédant a vraisemblablement commandé la réalimentation de la CG un peu avant l?arrêt; ? ceci explique que le conducteur E4000 (D) prenant déclare avoir serré le frein direct dès son arrivée en cabine de conduite; ? le conducteurD ne peut pas prendre place dans la cabine et obtenir le desserrage des freins en 8s; 15 ? l?agent de la manoeuvre (M3) effectue le dételage alors que la CG est à 5bars; ? la mise en mouvement de la rame Bloc a eu lieu 1min4s après l?arrêt. 7. Manoeuvre «Tirez» sur la voie9bis de la rame Bloc (locomotive E4000 en tête): ? la vitesse atteint 12km/h, ? le mouvement s?arrête à 10h10min42s. Interprétation du BEA-TT: ? l?arrêt de la rame Bloc a lieu lors de la collision de la rame TEVO sur la voie7. 8. Manoeuvre en refoulement sur la voie7 de la rame TEVO (locomotive G1206 en queue): ? à 10h08min42s mise en mouvement de la rame TEVO (34s après la mise en mouvement de la rame Bloc; ? le conducteurB prend place; ? changement de conducteurA par B; ? le conducteurA descend; ? à 10h11min22s l?effort de pousse est interrompu par le conducteur B; ? à 10h11min24s la vitesse atteint 16km/h. Interprétation du BEA-TT: ? le conducteurB est persuadé d?être en pousse. 9. Collision, déraillement et arrêt de la manoeuvre de la rame TEVO sur la voie7 (locomotive G1206 en queue): ? aucune commande de freinage depuis la mise en mouvement de la rame TEVO; ? 10h11min40s arrêt; ? 10h11min42s CG<2,5bars. Interprétation du BEA-TT: ? l?arrêt du mouvement de la rame TEVO a été obtenu par la collision avec les deux wagons plats stationnant à l?extrémité de la voie7 puis de ceux-ci avec les bungalows et par la rupture de la canalisation CG. Données Matériel extrait du système SIBAS La locomotive G1206 est équipée d?un système d?enregistrement de données «Matériel» (voir annexe2) qui permet aux mainteneurs de prendre en considération de nombreux paramètres. Parmi les points enregistrés, on dispose des heures d?isolement ou de mise en action de la valveAB. L?isolement de la valve AB concourt à la mise en configuration «pousse» de la locomotive G1206. Elle interdit notamment la réalimentation du frein automatique par le robinet du mécanicien. L?enregistrement via le code207 indique que la valve AB a été isolée manuellement entre 10h07min49s et 10h15min12s. Il permet d?avoir l?assurance que le robinet du mécanicien de la locomotive G1206 ne pouvait pas réalimenter la conduite générale. Le conducteur A a correctement disposé les appareils de la locomotive G1206. 16 3.2.6 - La vérification du fonctionnement des appareils de commande du frein des deux locomotives Les 2 locomotives, configurées dans leur état lors de l?accident, ont fait l?objet d?une vérification du fonctionnement des appareils de commande du frein. Cette investigation a été réalisée en présence du BEA-TT et de l?expert Métier Conduite de ETFS. Toutes les fonctions des robinets du mécanicien des 2 locomotives ont été éprouvées. On note particulièrement: ? E4000: en serrage gradué aucune réalimentation intempestive de la conduite générale; ? G1206: en mode «pousse» absence de réalimentation de la conduite générale y compris sous l?action d?une commande de desserrage complet du conducteur. Ceci conduit le BEA-TT à avoir la certitude que le desserrage de la rame TEVO immédiatement après la coupe n?a pas de lien avec un dysfonctionnement des locomotives ou une manipulation du conducteur A de la locomotive G1206. 3.2.7 - Les dommages Aucune victime n?est à déplorer du fait du retard du train à l?arrivée qui a conduit l?ensemble du personnel à se positionner à l?extérieur des bungalows prêts à assurer la maintenance de la rame TEVO dès sa mise en place sur la voie7. Le personnel chargé du nettoyage des locaux n?était pas présent ce matin. Les dommages sont uniquement matériels. Ils sont supérieurs à 2M¤. Le train usine est partiellement endommagé, inutilisable pendant plusieurs mois, les 2 wagons plats heurtés ont des dommages majeurs, la voie7 et son heurtoir sont à reprendre, les bungalows de la base vie comme les véhicules routiers stationnés dans la zone du déraillement ont été détruits. 17 4 - Analyse du fait survenu 4.1 - L?état du site SNCF Réseau a remis en état les installations ferroviaires pour exploiter le site en base arrière. Les différents chemins carrossables de la base arrière ont fait l?objet de travaux sommaires comme l?étalement de craie en surface. Le passage de véhicules lourds creuse par endroit ces chemins, les nids de poules et les mares sont nombreux. La craie répandue sur le sol avec les pluies hivernales conduit les agents à évoluer dans une boue blanche collante qui salit à outrance leur tenue, les véhicules de service et les locaux. Le BEA-TT a constaté que des damiers rouge et blanc ont été vissés sur les butoirs des voies en impasse. Ils ne sont pas associés à un feu rouge pour observation de nuit et le damier n?est pas posé correctement. Il a subi une rotation d?un quart de tour qui ne dispose pas les couleurs à l?endroit attendu. Cela a vraisemblablement été observé par des agents SNCF R et ETF S présents sur le site sans qu?une correction ne soit apportée. Figure 8: jalons à damiers rouge et blanc mal disposés (BEA-TT) Figure 9: damier rouge et blanc correctement disposé (SNCF R) Ces constats suggèrent que les agents ne sont pas sur un site qui incite à la rigueur. 18 4.2 - La répartition des tâches par le responsable des manoeuvres Le responsable des manoeuvres de l?entreprise ETF S a participé au briefing réalisé par le Dirigeant de Base Arrière (DBA) de SNCF R. Il a ensuite réalisé le briefing de son équipe (agents de manoeuvre, stagiaires et conducteursB et D), leur a désigné les postes à occuper pour la gestion du train à l?arrivée et a défini la répartition des rames à réaliser sur les voies9bis et 7. Concernant l?utilisation de la radio, le responsable ETF S des manoeuvres sur le site a indiqué que l?ensemble de la manoeuvre sera réalisé sur le canal 1, seul le mouvement en «Tirez» de la rame Bloc sur la voie 9bis sera réalisé sur le canal 2. Les agents au sol comme les conducteurs de ETFS ont à disposition dans leur bungalow des tableaux d?information sécurité. Ils sont mis à jour régulièrement par les encadrants locaux. Ces tableaux permettent de prendre connaissance de situations à risque, de rappels réglementaires, d?une décision de leur encadrement? Un livret des menaces est aussi à leur disposition. C?est un document volumineux qui permet aux opérateurs d?identifier les points difficiles de la ligne ou du site où ils interviennent. Ces documents sont réalisés, affichés et commentés par l?encadrement de l?entreprise ETFS. Le BEA-TT a constaté que les informations à disposition sont connues des opérateurs. Ces derniers estiment que ces tableaux d?informations et livrets de menaces sont des outils de communication utiles tout comme le briefing quotidien dont ils bénéficient. 4.3 - Le retard du train et l?interaction sur les opérateurs du site Les investigations menées montrent qu?il n?existe pas à proprement parler de pression temporelle sur les agents sauf celle qu?ils s?imposent. En effet, tous sans exception déclarent ne subir aucune pression de leur encadrement mais être conscients de l?importance de mettre le train à disposition des agents de maintenance le plus tôt possible. C?est en effet un préalable pour garantir la réalisation des opérations de maintenance avant la période de travail suivante. La même démarche existe aussi pour tenir le train prêt au départ dans les temps. Ceci garantit son accès à l?heure sur le réseau ferré national et par conséquent sa mise à disposition dans les meilleurs délais sur la zone de chantier. Cette volonté partagée traduit leur implication personnelle dans la réalisation des grands travaux de maintenance du réseau ferré national. C?est un facteur qui a pu favoriser la liberté dont certains d?entre eux font preuve vis-à-vis des règles et du devoir d?obéissance passive et immédiate aux signaux. Le train est annoncé en retard. À la réception de l?avis de son arrivée imminente sur la voie3 Garage, le personnel s?est positionné pour être prêt à le prendre en charge. Les conducteurs prenantsB et D se déplacent en voiture sur le site. Ces véhicules sont ensuite repris par les conducteurs cédantsA et C pour rentrer sur leur lieu de repos. Cependant le conducteurB (prenant) de la G1206 arrivera avec un peu de retard au lieu de relève car il ne connaît pas suffisamment le site et ses différents accès routiers. Ces manques de rigueur répétés contribuent indéniablement à l?enchaînement de causes qui va conduire à l?événement. 4.4 - L?état de fatigue des conducteurs cédants A et C. Les deux agents ont commencé leur période de travail la veille à 23h30. Ils ont assuré durant toute la nuit la conduite du train de travaux sur la zone de chantier. Le train est reçu sur la voie3 Garage de la gare de Saint-Florentin-Vergigny à 9h52 avec 2h24min de retard. Leur journée de service devait prendre fin à 08h00. Il est certain qu?ils sont 19 sous l?effet d?un état de fatigue, qui peut altérer leur niveau de vigilance et de discernement. De plus, les parcours finaux et les opérations comme une manoeuvre en fin de service sont souvent réalisés par les conducteurs avec une attention moins soutenue que lors de la période de conduite et avec des capacités moindres pour exécuter les dernières opérations. Sans être en mesure d?en apprécier exactement l?effet sur les 2 agents, la fatigue et l?empressement légitime d?être relevé ont probablement favorisé certaines de leurs décisions non conformes aux règles comme le non-respect de la pancarte «ARRÊT» et la création d?un effort de pousse non attendu. Le BEA-TT estime que la fatigue des 2 conducteurs est une des causes de l?événement. 4.5 - La réception du train sur la voie 3 Garage et le mouvement en «Tirez» sur la voie17 La voie3 Garage possède à son extrémité un chevron pointe en haut matérialisant le point à ne pas dépasser sans ordre. L?entrée est commandée par un signal qui présente à l?ouverture un avertissement fermé groupé avec un rappel30 fermé et un tableauG. Cette signalisation commande au conducteur d?être en mesure de s?arrêter avant le signal d?arrêt annoncé, de ne pas dépasser la vitesse de 30km/h au franchissement de l?appareil de voie et lui indique qu?il est dirigé vers une voie de service. Ce dernier point lui impose notamment de s?arrêter à l?extrémité de la voie de réception et d?observer la marche en manoeuvre. Le conducteurA du train alors qu?il est en mouvement sur la voie3 Garage met en service son talkie-walkie et appelle le chef de manoeuvre. À ce moment, il s?agit toujours d?une circulation à considérer comme un train. Son terminus est fixé à l?extrémité de cette voie. Cette action n?est pas attendue de la part d?un conducteur lorsqu?il est soumis à la règle de l?avertissement fermé et à l?observation de la marche en manoeuvre. Cela interdit normalement une action de ce genre qui peut être à l?origine d?un événement sécurité comme le franchissement intempestif du signal d?arrêt annoncé ou du point limite de la voie à ne pas dépasser. Le chevron pointe en haut matérialise l?extrémité de la voie3 Garage, c?est le point qui ne devait pas être dépassé par le train et c?est à cet endroit que les conducteurs cédantsA et C auraient dû être relevés par leurs collègues prenantsB et D. Seulement, pour s?éviter de marcher à travers les voies jusqu?à leur voiture, les conducteurs cédants assurent systématiquement la première partie de la manoeuvre en «Tirez» sur la voie 17 puis le mouvement en «Tirez» sur la voie11. La relève s?effectue habituellement lors de l?arrêt sur la voie11 pour la coupe des deux rames. Pour un mouvement en «Tirez», le conducteur est en tête du mouvement. Il lui appartient de rechercher et d?obéir aux signaux le concernant. Cette adaptation des journées de service par les agents est aussi une des causes qui va conduire à l?événement. Le talkie-walkie mis en service par le conducteur A est un appareil de communication utilisant des fréquences accessibles par le grand public. L?utilisation d?un poste radio de manoeuvre dédié comme le prévoit SNCF R dans son document MT 07320 et représenté par nombre de photographies dans ce même document aurait conduit le chef de manoeuvre à remettre au conducteurA un «portage conducteur» équipé d?un poste portatif. Ceci aurait rendu incontournable à minima le respect du point d?arrêt à l?extrémité de la voie3 Garage, le test radio voire, comme le prévoit la réglementation, les échanges sur le thème de la manoeuvre et le premier mouvement à exécuter. 20 L?utilisation de talkie-walkie en lieu et place de postes radio dédiés est une des causes qui conduit à l?événement. Le conducteurA et le chef de manoeuvre ne respectent pas l?obligation d?échanger à l?arrêt sur le thème de manoeuvre, d?identifier le premier mouvement à exécuter et d?effectuer le test radio comme le prévoient les règles de manoeuvres. Ceci traduit un manque flagrant de rigueur, partagé par les deux agents. La connaissance par les acteurs de la manoeuvre qu?ils ont déjà réalisée à plusieurs reprises et la volonté de gagner du temps sont des éléments qui ont favorisé cette situation. Il en est de même du fait de disposer des talkies-walkies à bord des locomotives. En offrant la possibilité de communiquer avec le chef de manoeuvre dès l?accès à la voie 3 Garage, la situation les pousse à ne pas appliquer les procédures imposées. Ces manquements n?appartiennent pas directement aux causes qui vont conduire à l?événement. Ils sont toutefois révélateurs d?une pratique habituelle et d?une liberté excessive prise avec les règles par de nombreux agents. Ceci conduit le BEA-TT à s?interroger sur le management des agents réalisé sur le site dont la veille sécurité appartenant à ETF S et sur l?efficacité du contrôle sécurité exercé par SNCFR sur une entreprise«qualifiée» par ses soins. Ce dernier point sera examiné par la suite. 4.6 - Le mouvement en «Tirez» sur la voie 11 et la pousse Pour un mouvement en «Tirez», le conducteur est en tête du mouvement. Il lui appartient de rechercher et d?obéir aux signaux le concernant. Dès l?arrêt, le conducteurA de la G1206 a disposé sa locomotive en pousse pour permettre au conducteurC de la E4000 de prendre la commande des freins. À l?observation de la mise en mouvement sur ATESS, il participe en créant un effort de pousse qu?il maintient jusqu?à la vitesse de 13km/h. Le conducteurC de tête a déclaré ne pas avoir demandé le concours de la locomotive de pousse et que la locomotive E4000 dispose d?une puissance suffisante pour assurer le mouvement par ses propres moyens. Produire cet effort de pousse sans ordre correspond à une décision non fondée et particulièrement dangereuse. Cette décision repose sur la connaissance du mouvement attendu. Le conducteur A a déjà réalisé la mission comme conducteur en tête du mouvement. À l?écoute d?un ordre de mise en mouvement ne le concernant pas directement, mais s?adressant uniquement au conducteur de tête, et en appuyant sa décision sur l?observation du desserrage des freins aux manomètres de sa locomotive, le conducteur A commande un effort de pousse. Au-delà du manque de rigueur de cet opérateur, le BEA-TT estime que cette situation repose sur un défaut d?organisation du traitement en manoeuvre d?un train lourd et sur une veille insuffisante des opérateurs par ETFS. Les conducteurs ont d?eux-mêmes mis en place un mode de production qui n?appartient à aucune méthode prescrite et ce mode de fonctionnement n?a pas été perçu par les managers de ETFS. La pousse en manoeuvre fait l?objet d?un paragraphe par la suite. Le processus de traitement en manoeuvre du train lourd n?a pas été défini en amont par les responsables de ETFS et a laissé le libre choix aux opérateurs pour gérer la présence de locomotives actives de part et d?autre du train à manoeuvrer. Le BEA-TT estime que l?absence d?organisation pour décrire le traitement du train lourd en manoeuvre, associée à une veille insuffisante sur les opérateurs sur le site de Saint-Florentin-Vergigny par ETFS est une des causes de l?événement. 21 4.7 - Le franchissement de la pancarte «ARRÊT» Figure 10: Schéma et photo pancarte «ARRÊT» (SNCF Réseau) La lecture de l?enregistrement ATESS montre le non-respect de la pancarte «ARRÊT» par le conducteurC de la locomotive E4000. Le conducteur déclare avoir demandé à l?agent de manoeuvre l?autorisation de franchir la pancarte. L?agent de manoeuvre confirme avoir donné son accord. Le conducteurC de la locomotive E4000 est en tête du mouvement. Il lui appartient de rechercher et d?obéir aux signaux le concernant. La pancarte «ARRÊT» est implantée à gauche de la voie parcourue par le mouvement. Elle s?adresse au conducteur. Elle commande l?arrêt en amont de la pancarte et interdit de la franchir sans un ordre verbal du chef de la manoeuvre (cet ordre peut être donné par radio). Pour le BEA-TT, le conducteur a fait preuve d?un manquement grave en ne s?arrêtant pas en amont de la pancarte. Sa décision repose sur la volonté de ne pas perdre quelques minutes pour gérer l?arrêt et la remise en mouvement. Son but est de ne pas aggraver le retard. L?opérateur au sol en autorisant le franchissement sans arrêt préalable se situe dans la même démarche. Il prend sa décision en ayant l?assurance que l?appareil de voie protégé par cette pancarte est correctement disposé pour la poursuite du mouvement. Cet arrêt non respecté va générer dans l?esprit du conducteur A de la locomotive G1206 (situé en queue à plus de 600m de là) une confusion dans le schéma mental de la situation qu?il se représente. Il situe la position de la manoeuvre sur le site en utilisant sa mémoire de la veille de l?événement. Il était le conducteur de tête de ce même mouvement. Pour cela, il estimera à tort que l?arrêt du mouvement pour la coupe correspond à celui pour la pancarte «ARRÊT». C?est un point qui associé à d?autres facteurs explique la mise en mouvement de la rame TEVO en pousse en direction de la voie7. Le non-respect de la pancarte «ARRÊT» est une des causes de l?événement. 22 4.8 - La coupe des 2 rames (rames Bloc et TEVO) 4.8.1 - Principes de fonctionnement du frein continu automatique Le frein équipant le train est un frein continu et automatique. Il est appelé frein continu car il peut être mis en action depuis n?importe quel point du train. Il est appelé frein automatique car tout fractionnement accidentel du train conduit à sa mise en action sur l?ensemble des équipements de frein. Figure 11: schématisation du frein (BEA-TT) Les différents éléments constituant l?équipement de frein sont: La conduite générale: une conduite générale (CG) alimentée à la pression de 5 bars en mode nominal par le robinet du mécanicien depuis la locomotive parcourt l?ensemble du train. Entre chaque véhicule, des accouplements pneumatiques CG assurent sa continuité. Sur chaque véhicule, une conduite dérivée de la CG alimente un distributeur. L?accouplement pneumatique: Chaque accouplement est monté sur un robinet d?arrêt CG équipé d?un trou de fuite. Ouvert, le robinet d?arrêt CG permet le passage de l?air contenu dans la CG, le trou de fuite est colmaté. Fermé, le robinet d?arrêt s?oppose au passage de l?air contenu dans la CG et le trou de fuite met à l?atmosphère l?accouplement qui lui est relié. Le distributeur: Cet appareil est implanté sur la conduite dérivée de la CG pour permettre son éventuel isolement sans interrompre la continuité de la CG. Il permet à partir de variation de pression à la CG de commander le freinage par l?application de sabots sur la table de roulement des roues. Figure 12: schématisation du distributeur (SNCF) 23 Quelques éléments du vocabulaire spécifique au frein: L?armement du distributeur: lorsque la CG est à 5bars, que le réservoir auxiliaire et le réservoir de commande sont à 5bars et que le cylindre de frein (CF) est à l?atmosphère le distributeur est dit armé. Le freinage gradué: le freinage est commandé par une baisse de la pression à la CG. Le distributeur soumis à une baisse de la pression CG, mémorise la pression nominale via un réservoir de commande qui se verrouille. Il alimente en pression un cylindre de frein via un réservoir auxiliaire en fonction de la valeur de la dépression à la CG. La pression admise dans le cylindre de frein pousse un piston relié à la timonerie. Celle-ci par son déplacement provoque la mise en contact du sabot sur la table de roulement de la roue. Lorsque la roue est en rotation, le frottement obtenu permet de transformer l?énergie cinétique en énergie calorifique. Le desserrage complet: le desserrage complet des freins est obtenu lorsque la CG est à nouveau à la pression nominale de 5bars et que le réservoir de commande se déverrouille. Le CF est mis à l?atmosphère, la pression exercée par la timonerie cesse, les sabots se décollent de la table de roulement des roues. Le régime de frein: le temps de serrage et de desserrage des freins dépend du régime de frein utilisé. Il peut être «voyageur» avec des temps de réponse au desserrage d?environ5 à 10secondes ou «marchandise» avec des temps de réponse de 30secondes à 1minute. Cette différence est nécessaire pour prendre en compte les efforts de compression longitudinaux importants qui s?exercent sur les trains longs et lourds. Ce train est freiné au frein continu marchandises. Cas particulier de la présence d?une locomotive de pousse: en présence d?une locomotive de pousse, la commande du frein est réalisée depuis la locomotive de tête. Le robinet du mécanicien de la locomotive de pousse est positionné pour être dans l?incapacité de réalimenter le frein. Le conducteur de pousse peut toutefois commander un freinage d?urgence. Pour une locomotive du type G1206 sa mise en configuration «pousse» implique pour le robinet du mécanicien d?agir électriquement sur une commande de valve AB. Cette action est enregistrée dans les données SIBAS de l?engin moteur. Synthèse du freinage sur la rame manoeuvrée: La rame est freinée au frein continu marchandises. ? Le conducteur de la locomotive de tête a la commande du frein. Le robinet du mécanicien fonctionne normalement. Tout desserrage qu?il soit gradué ou complet ne peut intervenir sans une action volontaire du conducteur. Le desserrage complet des freins nécessite environ 1minute. ? Le conducteur de la locomotive de queue a correctement disposé la locomotive en pousse. Le robinet du mécanicien et la valveAB fonctionnent normalement. Toute réalimentation de la CG ne peut être obtenue depuis la locomotive de queue lorsqu?elle est configurée en locomotive de pousse. 4.8.2 - État des freins des rames Bloc et TEVO Le terme «coupe» désigne dans le langage ferroviaire l?action de séparer un train en plusieurs parties. Pour ce faire, un agent chargé des opérations au sol prend place entre les 2véhicules d?extrémité de chaque partie pour assurer le dételage. Cette action doit être réalisée alors qu?un serrage gradué est maintenu sur l?ensemble du train. 24 Avant la coupe ? à 10h07min04s arrêt de la manoeuvre sur voie11 sur ordre du chef de manoeuvre; ? le chef de manoeuvre déclare s?être rendu immédiatement au niveau de la coupe, il faut environ 10s (temps mesuré lors de la reconstitution); ? il faut environ 5s pour que le conducteurD de relève prenne place dans la cabine (temps mesuré lors de la reconstitution); ? à 10h07min09s le conducteur D est dans la cabine de conduite; ? à 10h07min12s la CG est réalimentée soit 8s après l?arrêt et 3s après l?arrivée du conducteur; ? Le conducteurC descend de la locomotive et quitte les lieux. Le BEA-TT en déduit que contrairement aux déclarations des conducteursC et D: la CG était à 5bars quand la relève s?est réalisée. Le conducteurC a commandé le desserrage complet avant l?arrêt du mouvement. Comme l?a précisé le conducteurD, il a aussitôt actionné le frein direct de la locomotive dès son arrivée dans la cabine de conduite. Il n?a pas souscrit à son obligation de s?assurer de l?immobilisation de la rame pendant l?opération de coupe en actionnant le frein automatique. Il est possible que sa décision repose uniquement sur la volonté de gagner quelques minutes. Il n?a pas mesuré le risque qu?il pouvait faire courir à l?opérateur au sol et encore moins la confusion dans l?esprit du conducteur de queue. La CG de la rame étant à 5 bars, les distributeurs de chaque véhicule vont commander le desserrage complet qui va prendre environ 1min. L?opérateur au sol n?avait pas conscience de la situation et va réaliser le dételage alors que le frein est en cours de desserrage sur les 2 parties qu?il doit séparer. La coupe ? à 10h07min14s l?agent de manoeuvre est au droit de la coupe; ? il faut environ 18s pour exécuter la coupe (temps mesuré lors de la reconstitution intégrant l?entrée et la sortie de l?attelage); ? les robinets d?arrêt CG au droit de la coupe sont aisément manoeuvrables par l?opérateur en passant son bras au-dessus du tendeur d?attelage. Lors de la reconstitution, si l?opérateur a fermé en premier le robinet côté source, l?autre robinet est fermé avec un décalage de temps si court qu?il ne provoque pas une dépression CG suffisante pour déclencher la réaction des distributeurs. La CG demeure quasiment à 5bars de part et d?autre de la coupe. Les freins continuent de se desserrer de part et d?autre; ? à 10h07min32s la coupe est réalisée (fermeture des robinets d?arrêt CG, désaccouplement des liaisons pneumatiques et retrait du tendeur d?attelage); Le BEA-TT en déduit que la pression de la CG de part et d?autre de la coupe demeure à la pression de 5bars et que le desserrage complet des freins se poursuit. Les distributeurs sont réarmés au-delà d?une minute.2 Après la coupe ? à 10h08min08s les freins sont complètements desserrés sur les 2 rames, la voie est légèrement en pente et la locomotive assure le freinage au seul moyen de son frein direct. Les 2 rames viennent en appui progressif sur la locomotive de tête dont le frein direct est actionné. 2 Un distributeur est armé lorsque le réservoir de commande est déverrouillé, la pression maximale est atteinte dans le réservoir auxiliaire et le cylindre de frein est mis à l?atmosphère. 25 Une condition supplémentaire est ainsi réunie pour conduire à l?événement. Le conducteur de queue, qui situe à tort l?arrêt de la manoeuvre au niveau de la pancarte «ARRÊT», observe de plus la CG à 5bars et va être conforté dans sa décision de fournir un effort de pousse. Le BEA-TT a la certitude que le maintien de la mise en action des freins sur la rame avant la coupe aurait conduit la partie de rame TEVO à demeurer serrée. Le conducteur A de la G1206 n?aurait pas produit un effort de pousse et aurait fini par se manifester à la radio et aurait obtenu l?information sur l?opération réellement en cours. Il ne serait pas demeuré dans un schéma mental erroné quant au point d?arrêt et aurait identifié qu?il n?était plus en «pousse». L?accident n?aurait pas eu lieu. Synthèse: La commande du desserrage complet de la rame par le conducteur C cédant de la locomotive de tête E4000 avant la coupe et la non-mise en action du frein automatique par le conducteur D prenant de la locomotive de tête E4000 avant la coupe appartiennent aux causes de l?événement. Il n?y a eu aucune communication entre les conducteurs de tête et de queue pendant cette opération de coupe. Prendre le temps nécessaire pour une information du conducteur de tête au conducteur de queue sur l?opération en cours aurait évité l?événement. 4.9 - Le mouvement en «Tirez» de la rame Bloc sur la voie 9bis Pour un mouvement en «Tirez», le conducteur est en tête du mouvement. Il lui appartient de rechercher et d?obéir aux signaux le concernant. ? le chef de la manoeuvre autorise la rame Bloc à tirer vers la voie9bis; ? à 10h08min08s mise en mouvement de la rame Bloc soit 1minute30 après la réalimentation de la CG; ? au dégagement de l?appareil de voie, le chef de la manoeuvre établit l?itinéraire pour diriger la rame TEVO vers la voie7; ? à la perte de contact entre les deux rames, la rame TEVO est soumise à un léger choc vers l?avant dû à la réaction des tampons jusque-là maintenus en compression et à l?effet de la légère pente de la voie (descente). Wagon par wagon, le choc se répercute jusqu?à la locomotive G1206. Le conducteur de queue ne sait pas qu?une coupe a été réalisée, il constate que la CG est à 5bars et il n?a eu aucune communication pour l?informer de la situation. Presque tous les éléments sont réunis pour créer l?événement. 4.10 - Le mouvement en «Refoulez» de la rame TEVO sur la voie 7 Pour un mouvement en «Refoulez», la recherche et l?obéissance aux signaux appartient au chef de la manoeuvre qui commande le mouvement. ? Le conducteur déclare avoir ressenti un choc vers l?avant du train qu?il identifie comme une mise en mouvement commandée par le conducteur de tête; ? il commande un effort de pousse vraisemblablement au moment où l?ordre de refouler est donné; ? à 10h08min42s, mise en mouvement de la rame TEVO soit 34s après la mise en mouvement de la rame Bloc; ? pour le chef de manoeuvre, la situation est normale; 26 ? dès que la rame s?est trouvée à son niveau c?est l?agent de manoeuvreM5 qui a repris le refoulement en phonie au moyen de son talkie-walkie; ? le conducteurB arrivé en retard monte sur la locomotive et relève son collègue qui lui indique qu?il est en pousse; ? le conducteurA descend en marche de la locomotive et quitte les lieux. Le léger choc dû à la décompression des tampons est interprété par le conducteurA de la G1206 située en queue comme une mise en mouvement depuis la pancarte «ARRÊT». Il n?a pas conscience que la coupe a été réalisée. Il décide de participer à la mise en mouvement en créant un effort de pousse. Il est surpris de constater que son collègue, le conducteurB, est monté en marche pour le relever. Il va décider, sans vraiment réfléchir, de descendre en marche de la locomotive après avoir indiqué à son collègue qu?il est en pousse. On peut imaginer que le conducteurB aurait pu par radio conduire à l?arrêt d?urgence du mouvement lorsque le conducteurA, sans réponse du conducteurC, se serait rendu compte de la situation dangereuse du mouvement. De même, le conducteurA aurait pu par radio demander l?arrêt au conducteurC. En l?absence de réponse, il se serait rendu compte de la situation dangereuse du mouvement et aurait provoqué l?arrêt d?urgence. La décision de monter et de descendre d?un engin moteur en mouvement est un manquement grave des opérateurs vis-à-vis de la sécurité du personnel. Elle est révélatrice d?un manque de rigueur dans l?exécution de la mission de conducteur. Il est connu dans l?examen des événements sécurité de tout ordre que le non-respect des règles de la sécurité du personnel est généralement associé au non-respect des règles de la sécurité de l?exploitation ferroviaire. Le BEA-TT estime que la relève en marche réalisée par les 2 conducteurs est une des causes de l?événement. 4.11 - La collision de la rame TEVO sur la voie7 avec les deux wagons plats Le mouvement identifié comme un refoulement par les opérateurs au sol est dirigé par une «chaîne de manoeuvre». Il s?agit d?une succession d?opérateurs qui tour à tour commandent le refoulement en phonie par radio sans discontinuité du mouvement. Cette méthode non conventionnelle sera exploitée par la suite. Dans le cas présent deux agents de manoeuvre se succèdent (M3 et M5). L?opérateurM3 a donné des ordres de refoulement en phonie et très rapidement l?opérateur M5 a pris en charge le mouvement. À l?extrémité de la voie, côté heurtoir, 2 wagons plats du type«R90» sont stationnés. L?opérateur au sol M5 a communiqué avec le chef de machine (responsable des agents de maintenance) pour déterminer le point d?arrêt afin de faciliter les opérations de maintenance ultérieures. Il s?est rendu ensuite en tête de voie pour être en mesure de commander le refoulement qu?il allait accompagner à pied en se tenant en amont de la rame. Dès que le premier véhicule de refoulement a dépassé l?opérateur M3, il a immédiatement pris le refoulement en charge selon la méthode «chaîne de manoeuvre». Pour ce faire, au moyen de son talkie-walkie, il répète régulièrement l?ordre «refoulez». Le conducteur B de la G1206 a entendu ces ordres. Il a considéré qu?ils ne le concernaient pas, car il était persuadé d?être en pousse. Il tente à plusieurs reprises en utilisant le même canal que l?opérateurM5 de joindre le conducteur de tête. À chaque 27 appui sur l?alternat de son talkie-walkie il s?oppose à la réception des ordres donnés par l?opérateur M5. À environ 150m du point d?arrêt, celui-ci a donné l?ordre de ralentir qu?il a répété plusieurs fois car il n?a pas constaté de ralentissement. À environ 100m du point d?arrêt, il s?est rendu compte que la situation n?était pas normale et a donné des ordres d?arrêt répétés. Il a ordonné aux mécaniciens de maintenance de se mettre à l?abri. Il va en faire de même avec son stagiaire. Après l?arrêt de la rame, il se rend sur les lieux. À 10h11min22s, à la vitesse de 15km/h lorsque le conducteur B interrompt l?effort de pousse, le choc avec les wagons plats a lieu ou vient de se produire. Le conducteur B vient probablement de se rendre compte que la situation est anormale mais n?a pas le réflexe de commander un freinage d?urgence, car il est encore dans le schéma mental d?une pousse. Les wagons plats sont soumis à la force exercée par la rame en mouvement et s?appuient sur le heurtoir qui cède et se couche. Le BEA-TT estime que si l?équipement radio avait été en conformité avec le document SNCF R «MT 07320» et identique à ceux montrés en photographie à plusieurs reprises sur ce même document, c?est-à-dire muni du signal d?alerte, l?événement n?aurait pas eu lieu ou aurait eu de moindres conséquences. Le BEA-TT rappelle qu?un poste radio de manoeuvre muni du signal d?alerte est entreposé dans les locaux du DBA. 4.12 - La collision des wagons plats avec les bungalows et des véhicules en stationnement Derrière le heurtoir, à environ 40m, se situent des bungalows utilisés comme base vie par les agents de maintenance du TEVO, des véhicules personnels sont garés à proximité. Le premier wagon plat passe par-dessus le heurtoir suivi de l?autre wagon plat et de la rame TEVO qui pousse l?ensemble. Le tout se dirige vers les bungalows de la base vie. La rupture de la continuité CG provoque le freinage automatique de la rame TEVO. Il faut environ 30s pour obtenir la pression maximale aux cylindres des freins de chaque wagon. Le premier wagon plat heurte des véhicules personnels et s?encastre dans les bungalows. L?arrêt du mouvement a lieu par la conjugaison de la résistance à l?avancement dû aux véhicules déraillés, aux chocs avec les différents obstacles et à la mise en action automatique des freins suite à la rupture de la continuité CG. À 10h11min40s arrêt du mouvement après avoir parcouru environ 50m depuis la collision avec les wagons plats. Le BEA-TT observe que l?implantation des bungalows n?a pas fait l?objet d?une étude de risques. L?absence de personnel dans ces bungalows et dans les voitures personnelles stationnées à proximité lors de la collision tient du concours de circonstances. Le train est en retard et des opérations de maintenance doivent être absolument réalisées dans un délai plus court. Tous les agents sont par conséquent répartis le long de la voie7 pour mettre en oeuvre les opérations dès la mise à disposition de la rame. Les témoignages font état que régulièrement des agents patientent dans leur véhicule. L?absence d?étude de risques pour l?implantation des bungalows et des zones de stationnement est une des causes de la gravité de l?événement. 28 4.13 - Protection des agents de maintenance et recherche d?éventuelles victimes Le BEA-TT remarque l?attitude particulièrement professionnelle de l?agentM5 qui a ordonné aux agents de maintenance de se mettre à l?abri dès qu?il s?est rendu compte que la collision était inévitable. De même, l?attitude de l?opérateur au sol M3 est remarquable. Il est sapeur-pompier volontaire. Il n?a pas hésité à se porter immédiatement sur les lieux pour faire une reconnaissance dans les bungalows, à la recherche de potentielles victimes, avant l?arrivée des secours sur le site. 4.14 - L?organisation et le fonctionnement du site 4.14.1 - Le choix du site et son utilisation en site ouvert Certains représentants de SNCF Réseau et de ETF S partagent la même appréciation du site comme base arrière pour les travaux entre Melun et Corbeil-Essonnes. Ils estiment que sa conception est partiellement adaptée pour gérer ce genre de train et que son éloignement de la zone de travaux implique des parcours d?approche trop longs. Le trajet aller-retour est d?environ 260km. La multiplicité des travaux en région parisienne a rendu les bases travaux régionales habituellement utilisées indisponibles. Ce choix s?inscrit dans l?absolue nécessité de réaliser les travaux programmés. Il tient compte du fait que le site se trouve dans la zone de production ferroviaire dépendant du territoire Île-de-France et possède un accès facile au réseau ferré comme routier. SNCF Réseau a préféré ne pas recourir à la mise en place d?une consigne temporaire qui lui aurait permis de gérer le site au sein de sa seule base arrière en le retirant temporairement de la zone d?action de l?Établissement Infra Circulations de Paris Sud-Est. De ce fait, le site et l?ensemble des activités réalisées demeurent sous l?autorité de l?Agent Circulation (AC) de la gare de Saint-Florentin-Vergigny en ce qui concerne les opérations de manoeuvre, l?utilisation des installations simples et celles liées à la sécurité du personnel intervenant sur le matériel roulant. Pour le BEA-TT le fonctionnement de la base arrière n?a pas respecté en tout point l?autorité de l?agent circulation de la gare pourtant affirmée dans les textes organisationnels. Ces textes demeurent néanmoins critiquables sous certains aspects. 4.14.2 - Les textes organisationnels ? La Consigne Locale d?Exploitation (CLE): c?est le document d?exploitation qui s?inscrit dans l?application de l?article14 du décret n°2019-5253 et la volonté d?interopérabilité du système ferroviaire. Les prescriptions de ce document sont à destination des exploitants ferroviaires. Il appartient au référentiel de l?EIC PSE4. La consigne définit l?AC comme «COSIT» (agent chargé entre autres fonctions de coordonner les mouvements de manoeuvre). Le BEA-TT a observé que l?AC n?a aucune vision, ni information des mouvements qui s?opèrent sur le site des voies de service de sa gare. Le document précise que la gestion de la concomitance d?exploitation ferroviaire n?est pas organisée selon le principe des blocs (attribution d?un espace spatio-temporel de voies de service à un exploitant dans lequel il organise seul les manoeuvres). Le BEA-TT s?étonne de constater l?emploi inadapté à plusieurs reprises de l?acronyme «COMAN» qui n?a de sens que lors du recours à des blocs de manoeuvre. 3 Décret n°2019-525 du 27 mai 2019 relatif à la sécurité et l?interopérabilité du système ferroviaire 4 cf. paragraphe 3.2.2.1 29 Concernant la pancarte «ARRÊT», le document indique à plusieurs reprises que son franchissement est «autorisé par le COMAN» alors que la réglementation indique qu?il s?effectue sur ordre verbal du chef de la manoeuvre. Le BEA-TT remarque la liberté dont font preuve le rédacteur et le vérificateur du texte vis-à-vis des règles communes à tous les exploitants. Ces points seront exploités par la suite. ? La Consigne Locale Opérationnelle (CLO): Ce texte décrit le fonctionnement et l?organisation à mettre en oeuvre dans le cas d?opérations sur la base arrière de Saint-Florentin-Vergigny. Il décline la CLE pour les opérateurs. Il appartient au référentiel de l?Établissement ITIF. Il est applicable en tous points par ETF S agissant en qualité de sous-traitant de ETF. Le BEA-TT remarque que la définition de l?acronyme «CLO» dans le titre du document n?est pas identique à celle partagée dans le monde ferroviaire. Le «O» communément utilisé pour «Opérationnelle» est devenu «Organisation». Cela interroge sur la qualité de la rédaction et de sa vérification. La «CLO» indique qu?un poste radio spécifique mouvement de manoeuvre guidé sera mis à disposition par le responsable de la base arrière. Le BEA-TT s?étonne que dans le contrat qui lie SNCF R à son prestataire ETF S il soit prévu qu?il appartient à ce dernier de s?équiper de postes de radio. Ce texte en ce qui concerne la concomitance d?exploitation ferroviaire indique que l?exploitant ferroviaire doit se rapprocher du Dirigeant de Base Arrière. Le BEA-TT constate que ce point est en en totale contradiction avec la CLE qui prévoit que seul l?Agent Circulation de la gare est la personne idoine pour traiter la demande. De plus, cette injonction faite aux autres EF ne peut être connue de leur part; la CLO écrite par ITIF à la différence de la CLE écrite par l?EIC PSE n?est pas à la disposition de chaque exploitant titulaire d?un certificat de sécurité. En ce qui concerne la pancarte «ARRÊT», il indique à plusieurs reprises que son franchissement «est autorisé par le CDM» alors que la réglementation indique qu?il s?effectue sur ordre verbal du chef de la manoeuvre. Le BEA-TT remarque la liberté dont font preuve le rédacteur et le vérificateur du texte vis-à-vis des règles communes à tous les exploitants. Enfin, à l?instar de la CLE la protection du personnel intervenant sur le matériel roulant doit être demandée à l?Agent Circulation. Ce point est d?ailleurs surligné dans la CLO. Dans les faits, cette obligation n?est pas respectée, c?est le Dirigeant de Base Arrière qui la réalise à la demande des agents de maintenance du TEVO qui appartiennent à ETF. Ces points seront exploités par la suite. Le document métier «Chef de manoeuvre» (MT 07320): ce document regroupe l?ensemble des règles et procédures a mettre en oeuvre pour exercer les missions de Chef de la manoeuvre et Agent de desserte pour les convois du Gestionnaire d?Infrastructure SNCF Réseau. Il est applicable en tous points par ETFS agissant en qualité de sous-traitant d?ETF et reconnu entreprise qualifiée par SNCF R. Il prévoit notamment: ? Avant de désaccoupler la conduite principale (si présente) et la conduite générale, vous devez fermer les robinets d?arrêt en commençant par le robinet situe côté source d?air. Fiche n°24-03; ? La pancarte ARRET ne peut être franchie qu?après réception ? ? d?un ordre verbal délivré par l?agent désigné a la CLO (Agent de poste, COMAN, Chef de la manoeuvre). Fiche n°34-00; ? Chaque mouvement de manoeuvre guidé est commandé par un agent unique Fiche n°50-01; 30 ? Lorsque vous devez vous faire remplacer au cours du mouvement de manoeuvre guidé: Arrêtez le mouvement de manoeuvre guidé en cours, Informez tous les intervenants et désignez l?agent chargé de vous remplacer. Etc. Fiche n°51-01; ? L?arrêt d?un mouvement de manoeuvre guidé doit pouvoir être commandé à tout moment par les agents habilités qui y participent. Fiche n°51-02; ? Le Chef de la manoeuvre et le conducteur peuvent, pour l?exécution des mouvements de manoeuvre guidés, correspondre entre eux à l?aide de la radio. Cette correspondance est établie sur une fréquence déterminée, affectée a SNCF R pour ses besoins propres. Si l?engin moteur n?est pas équipé d?un appareil pouvant être réglé sur cette fréquence, le Chef de la manoeuvre remet au conducteur un équipement portatif pour la durée du mouvement de manoeuvre guidé. Fiche n°51-12; ? Le briefing (ententes préalables).définir le thème du mouvement de manoeuvre guidé et renseigner avec précision les participants. Fiche n°52-01. Le document ne traite pas de «pousse» en manoeuvre et de chaîne de manoeuvre. Ces points seront exploités par la suite. 4.14.3 - Les radios de manoeuvre utilisées Le document ORGSOL23087 de SNCF R décrit les prescriptions à respecter dans le cadre de la prestation des opérations au sol réalisées par ETF Services pour le compte de ETF et de SNCF Réseau sur les bases arrière. Il indique notamment que «Le prestataire utilise et gère ses propres radios dédiées à la manoeuvre». Cette obligation contractuelle est contraire aux documents suivants qui ont tous été écrits par SNCF R et sont applicables par ses prestataires: CLO du site de Saint-Florentin- Vergigny et MT 07320. Le premier indique dans son point 5.13 «Un poste radio spécifique mouvement de manoeuvre guidé sera mis à disposition par le responsable base arrière» et le deuxième dans sa fiche 51.12 concernant la radio de manoeuvre indique «Cette correspondance est établie sur une fréquence déterminée, affectée à SNCF Réseau pour ses besoins propres». Ces documents ne prévoient pas qu?il puisse être procédé autrement. Pour appliquer ce contrat, ETFS a fait l?acquisition de postes Radio Motorola du type DP4400 et R7 accessibles à tout un chacun et dont les canaux utilisés ne sont pas dédiés à une entreprise par l?Agence Nationale des Fréquences (ANFR). Leur niveau de sûreté de fonctionnement est nettement inférieur à celui des postes détenus par SNCFR, qui disposent d?une fréquence dédiée. Pour exemples, tout possesseur d?un poste de radio grand public comme ceux utilisés par ETFS et réglé sur le même canal peut interférer dans les communications des opérateurs et toute pression sur l?alternat d?un poste coupe la réception du signal d?un autre poste émetteur. Ces appareils ne permettent pas l?émission d?un signal d?alerte commandant l?arrêt d?urgence en cas de danger imminent. Le jour de l?événement, tous les opérateurs ETFS sont munis de ce genre de poste grand public. Le conducteurB prenant de la G1206 va entendre les ordres de refouler sans jamais identifier qu?ils le concernent. Il va à de multiples reprises tenter de joindre le conducteur de tête de E4000 qui ne l?entend pas, car il est passé sur un autre canal pour tirer sur la voie9bis. À chaque action sur l?alternat il coupe la réception des ordres donnés par l?agent de manoeuvreM5. Ce dernier qui va se rendre compte de la situation de danger imminent va donner des ordres répétés d?arrêt en phonie. Il ne dispose pas de la possibilité d?émettre un signal d?alerte commandant l?arrêt d?urgence. D?autres opérateurs vont relayer ces ordres d?arrêt par radio, interférant à leur tour sur l?émission et la 31 réception des ordres de l?opérateurM5. Le conducteurB ne discernera pas que ces ordres le concernent. Les enquêteurs du BEA-TT au cours des investigations menées sur le site se rendent compte que les DBA disposent d?un poste de radio dédié et d?un portage conducteur. Ces appareils qui correspondent à ceux présentés dans les documents SNCF R comme la MT07320 sont qui plus est capables d?émettre un signal sonore d?alerte via un dispositif d?appel d?urgence. Les DBA font état que l?usage de ces appareils est réservé à la manoeuvre de trains transportant des longs rails soudés. Figure 13: radio de manoeuvre dédiée de SNCF R sur le site de Saint-Florentin (photo BEA-TT) Pour le BEA-TT, l?usage d?un appareil de radio de ce type aurait évité l?ampleur de l?événement voire aurait conduit à obtenir l?arrêt suffisamment tôt. Suite à ce constat, le BEA-TT, sans attendre la publication du rapport d?enquête, en application de l?article L.1621-20 du Code des transports5, a émis le 22février2024, la recommandation suivante à SNCFR: - Sans délai, assurer que les agents en charge de réaliser les manoeuvres sur le site de Saint-Florentin-Vergigny utilisent les postes de radio conformes. - Assurer que les clauses contractuelles soient cohérentes avec les règles de sécurité. - Vérifier la situation sur l?ensemble des sites analogues et procéder aux redressements nécessaires. Le BEA-TT rappelle que ces appareils sont munis d?un dispositif d?appel d?urgence (touche rouge spécifique du clavier du poste). Ce dispositif permet l?émission d?un signal sonore modulé (analogue au signal d?alerte radio) pendant environ 3s qui interrompt la liaison entre chef de la manoeuvre et conducteur notamment pendant l?émission des tops sonores. Il peut être utilisé par les agents participant à la manoeuvre mais aussi par des tiers et notamment par un aiguilleur ou un agent-circulation doté d?un tel équipement relié sur la seule fréquence affectée à la manoeuvre. Ceci s?intègre parfaitement dans l?application de plusieurs fiches de la MT07320. Pour exemples: la fiche n°51.02 qui précise que l?arrêt d?un mouvement de manoeuvre guidé doit pouvoir être commandé à tout moment par les agents habilités qui y participent et la fiche n°51.06 qui traite de l?arrêt d?urgence d?un mouvement. Le BEA-TT s?interroge sur la motivation du contrat «ORGSOL 23087» de SNCFR avec ETF et son sous-traitant ETF S concernant l?appareillage radio. Elle n?apparaît pas clairement. Chacun mesure l?importance de ce train usine dans la réalisation des grands travaux de régénération du réseau. De même, chacun mesure que la manoeuvre d?un train usine sur les voies de service d?une base arrière est soumise à un niveau de risque 5 Article L.1621-20 du Code des transports: «Au cours de leurs enquêtes, l?organisme permanent ou l?autorité responsable des enquêtes de sécurité peuvent émettre des recommandations de sécurité s?ils estiment que leur mise en oeuvre immédiate est de nature à prévenir un accident ou incident.» 32 élevé d?incident. Le refoulement est une méthode indispensable dans le traitement de la manoeuvre, tous les opérateurs ferroviaires savent que c?est un mouvement particulièrement accidentogène. La conception du véhicule de queue de la rame TEVO ne permet pas que le chef de manoeuvre y prenne place. D?où l?impossibilité d?utiliser le dispositif AMCFA (Appareil mobile de commande du frein automatique). Cet appareil est relié à la CG de la rame au moyen de l?accouplement CG et par l?ouverture de son robinet d?arrêt. L?agent via une commande peut à tout moment créer la mise à l?atmosphère de la CG. Cela conduit à la commande du freinage maximal sur l?ensemble des équipements de frein de la rame. L?impossibilité pour l?opérateur de prendre place sur le véhicule impose la nécessité d?un accompagnement à pied du mouvement par l?opérateur au sol et l?impossibilité de commander un freinage en cas de danger imminent. Pour toutes ces raisons, le BEA-TT a la certitude que l?utilisation d?un poste dédié à la manoeuvre et muni du dispositif d?urgence aurait évité cet accident lors des manoeuvres de refoulement. L?utilisation de postes radio non dédiés à la manoeuvre est la cause immédiate de l?accident. La réglementation opposable gérant les opérations de manoeuvre impose l?emploi d?un poste radio muni de tops sonores pour tout refoulement supérieur à 750m. Dans le cas présent, aucun moyen ne permet au chef de manoeuvre de déterminer avec certitude si la distance à parcourir est supérieure à 750m. Seule une étude préalable du processus à réaliser par l?entreprise en charge de la prestation «opérations au sol» peut permettre de connaître les distances à parcourir, d?en informer les opérationnels et d?imposer l?emploi de tops sonores pour commander un refoulement. Enfin, le document SNCF R «IG 97914» ayant pour titre «Livret technique des prestations trains du GI» met un terme à toute discussion sur le bien fondé de posséder une radio de manoeuvre dédiée type SNCF R sur le site de la base arrière. Dans la partie qualification «09201» qui traite des opérations au sol, SNCF R s?engage à assurer le prêt des moyens en radio de manoeuvre à son sous-traitant et précise que les radios doivent être dotées de tops sonores avec bouton d'urgence. 4.14.4 - La pousse en manoeuvre La notion de pousse n?existe pas en manoeuvre et n?est décrite dans aucun document structurant les mouvements sur la base arrière. Le document «ORG POUS 23057» qui traite du sujet pour les parcours en ligne et sur le chantier n?est pas applicable en manoeuvre sur le site de la base arrière de Saint-Florentin-Vergigny. Ce document présente quelques incohérences qui ont été partagées avec SNCFR. En manoeuvre, les situations décrites dans le document MT07320 ne traitent que du duo chef de manoeuvre/conducteur. À aucun moment il n?est fait état d?une situation intégrant 2 conducteurs simultanément. Sur ce site, le train étant particulièrement lourd, les conducteurs qui tour à tour se situent en tête, puis en queue, en fonction du sens du mouvement réalisé, ont mis en place une méthode qui intègre la pousse. Les conducteurs de tête et de queue entendent les ordres de manoeuvre simultanément et selon le cas, sur demande du conducteur de tête ou de leur propre initiative comme ce fut le cas le jour de l?accident, les conducteurs de queue fournissent un effort de pousse. Lors de l?arrêt pour la coupe, le conducteur A de queue a pensé à tort qu?il s?agissait de l?arrêt pour la pancarte «ARRÊT». Aucune information contraire ne lui est parvenue. Le conducteurA a vu que la CG était à 5bars lorsqu?il a ressenti un léger à-coup suite à la réaction des attelages qui se décompriment. Il n?échange pas avec le conducteurC de tête et décide de lui-même de fournir un effort de pousse pour aider au démarrage. Il va ensuite transmettre l?information qu?il est en pousse au conducteur B prenant. Pour cela, 33 ce dernier va demeurer dans l?erreur et dans l?incompréhension des ordres de ralentissement et d?arrêt qu?il entend parfois et qui le concernent. Pour le BEA-TT cette méthode non réglementaire s?effectue sans qu?une organisation ne soit mise en place par l?EF ETFS après validation par SNCF R, décrite dans un texte et contrôlée par les encadrants. C?est une des causes de l?événement. 4.14.5 - La méthode dite «chaîne de manoeuvre» La méthode appelée «chaîne de manoeuvre» s?opère par la mise en place d?une succession d?opérateurs qui tour à tour commandent le refoulement en phonie par radio sans discontinuité du mouvement. Les investigations menées par le BEA-TT ont vérifié que cette méthode est largement répandue dans les entreprises sous traitantes de SNCFR et que sa mise en oeuvre régulière est connue par SNCF R. Le document MT07320 de SNCFR est applicable pour toute manoeuvre de SNCFR exécutée sur le réseau ferré national dans le cadre de son agrément de sécurité. Il en est de même pour l?entreprise qualifiée par ses soins agissant elle aussi sous l?agrément sécurité du GI SNCFR. Ce document ne traite pas de la méthode dite «chaîne de manoeuvre». Dans sa fichen°51-01, le document MT07320 s?oppose à sa mise en oeuvre en imposant l?arrêt systématique du mouvement lors du remplacement de l?agent commandant le mouvement au cours d?une manoeuvre. Cette méthode de travail a été mise en oeuvre lors du refoulement de la rame TEVO sur la voie 7. Elle n?appartient pas aux causes qui ont conduit à l?accident. Le BEA-TT estime toutefois qu?il est dangereux, qu?une méthode de cette envergure, pour un mouvement aussi particulier qu?un refoulement, puisse être mise en oeuvre de façon habituelle alors qu?elle est en opposition avec les prescriptions applicables. Cette situation interroge sur les contrôles et les audits internes de sécurité menés jusque-là, qui n?ont pas identifié ce point comme un écart majeur aux règles ce qui aurait permis de mettre fin à une pratique hors cadre réglementaire. 4.14.6 - Le contrôle sécurité de SNCF R de l?entreprise qualifiée ETF S et le management des DBA Un cadre du GI SNCFR s?est rendu sur le site de Saint-Florentin-Vergigny les 8 et 9janvier2024. L?après-midi du 8 janvier a été consacrée à un contrôle sécurité d?opérateurs de ETFS assurant des manoeuvres sous l?agrément de sécurité de SNCFR, la matinée du 09/01 a été utilisée au management des DBA dont il est le hiérarchique. Le contrôle sécurité a fait l?objet d?un compte rendu. Il ne permet pas d?identifier les types de mouvement qui ont été observés et leur ampleur. L?appréciation générale est: Contrôle acceptable, quelques points à perfectionner. Échange auprès du manager Ferroway, de rappeler aux opérateurs au sol, qu?il est primordial, d?appliquer les missions qui leur sont confiées et de rester dans leurs périmètres d?actions. Le contrôleur déclare avoir constaté l?emploi de postes talkie-walkie utilisés par les opérateurs ETFS. Lorsque le BEA-TT fait état que ces postes sont non conformes à la MT07320 (fiche n°51.12) et n?ont pas été remis par le DBA comme le prévoit la CLO dans son point 5.13, le contrôleur répond qu?il ne connaît pas ces obligations. Le suivi managérial des DBA a conduit le cadre de l?établissement ITIF à observer que les DBA assuraient la protection du personnel intervenant sur le TEVO alors que la CLO indique dans son point 9.1 que c?est une mission qui appartient à l?AC de la gare de 34 Saint-Florentin-Vergigny. Le cadre SNCF R mis face à la situation répond qu?il ne connaît pas cette obligation. La connaissance du document CLO n?est pas maîtrisée par le contrôleur sécurité de SNCFR. Cette méconnaissance l?a conduit à ne pas discerner des écarts importants dans la mise en oeuvre d?opérations de sécurité et à valider tacitement le renouvellement de situations non conformes. Pour le BEA-TT n?avoir pas identifié que les postes radio de manoeuvre utilisés par les opérateurs de ETFS n?étaient pas conformes et de ce fait ne pas avoir pris de mesure immédiate pour rétablir la situation au niveau attendu est une des causes de l?événement. 4.15 - La reconstitution des faits L?exploitation des enregistrements a permis de s?assurer que le non-serrage de la rame TEVO après la coupe avec la rame Bloc n?avait pas de lien avec un dysfonctionnement des locomotives ou une action non attendue de la part du conducteurA de la G1206. Ceci implique que la coupe a été réalisée alors que la pression à la CG était à 5 bars de part et d?autre du point de la coupe et que la fermeture quasi simultanée des 2 robinets d?arrêt CG n?a pas provoqué de chute de pression suffisante à la CG pour conduire à un serrage gradué de la partie TEVO. L?interprétation de l?ATESS de la locomotive E4000 s?oppose aux déclarations des 2conducteursC et D qui étaient persuadés d?avoir constaté une dépression de 1,5bar à la CG lors de la relève. Une reconstitution en salle a été organisée avec l?aide essentielle des représentants de ETFS qui ont mis à disposition des enquêteurs du BEA-TT l?ensemble du personnel impliqué. Reconstitution en salle Chaque situation depuis l?entrée du train sur la voie3 Garage jusqu?à la collision de la rame TEVO avec les wagons plats sur la voie7 a fait l?objet d?un partage complet (faits, témoignages, lecture et interprétation des enregistrements, retour aux textes). Les écarts aux règles mis en avant par le BEA-TT ont été admis par les participants. Les conducteursC et D de la locomotive E4000 demeurant persuadés que la coupe avait été réalisée avec une pression à la CG de l?ordre de 3,5bars, une reconstitution sur le terrain a été organisée avec le concours des représentants de ETFS. Reconstitution sur le terrain Le personnel directement impliqué, les 2 locomotives utilisées le jour de l?accident et une rame de wagons ont été mis à la disposition des enquêteurs du BEA-TT. Seule la partie coupe entre les rames Bloc et TEVO a été observée. Les opérations liées à la conduite et aux opérations au sol ont fait l?objet d?un chronométrage pour chaque action connue ou déclarée par les agents. Le résultat des observations «conduite» a fait l?objet d?une comparaison avec les propos tenus et les enregistrements évoqués lors de la reconstitution en salle. Ceci a conduit les 2 conducteurs à admettre qu?ils s?étaient persuadés à tort du maintien de la dépression de 1,5bar à la CG pendant la coupe. Les agents ont compris que la commande de desserrage complet avait été obligatoirement commandée en amont de l?arrêt, que la CG était à 5 bars lors de la coupe et que l?immobilisation était obtenue par l?action conjuguée 35 du frein direct de la locomotive E4000 et du freinage des 2 rames en cours de desserrage complet. L?opérateur au sol a refait les gestes et déplacements qu?il a exécutés le jour de l?accident. La méthode pour dételer entre 2 wagons est correctement mise en oeuvre par rapport aux règles définies. La fermeture du robinet d?arrêt CG situé côté source est réalisée en premier lieu. Sa dextérité conduit à fermer le deuxième robinet avec un décalage de temps si court qu?il interdit une mise à l?atmosphère suffisante de la CG (par le trou de fuite du robinet d?arrêt fermé côté source) pour commander un freinage. Le BEA-TT en déduit que la CG était à 5bars lors de la coupe et que la fermeture quasi instantanée des robinets d?arrêt CG a maintenu la CG à 5bars dans les 2rames. L?absence de freinage gradué maintenu pendant la coupe est une cause de l?événement. Les enquêteurs du BEA-TT soulignent la bonne volonté de l?ensemble des agents de ETFS pour identifier toutes les causes ayant conduit à l?accident. Tous les agents, sans exception, se sont montrés constructifs lors des échanges. Le BEA-TT a apprécié l?aide fournie par ETFS pour organiser rapidement sur les lieux de l?événement ces 2reconstitutions avec des moyens humains et logistiques conséquents. 4.16 - Rencontre des dirigeants des entreprises impliquées et des experts métiers Dans le cadre des investigations, les enquêteurs du BEA-TT ont été reçus par les représentants des deux entreprises pour partager les points saillants de l?enquête. Chacune de ces réunions a fait l?objet d?un compte rendu réalisé par le BEA-TT et envoyé aux participants. ETF Service: ? le directeur; ? le chef d?agence; ? le directeur sécurité; ? l?expert métier «conduite»; ? l?expert métier «opérations au sol». La réunion a eu lieu dans les locaux de l?entreprise ETFS. Les points majeurs des investigations menées au sujet des points concernant ETFS ont fait l?objet d?échanges: ? les contrats avec SNCF R; ? les documents applicables; ? la radio de manoeuvre; ? la préparation et mise en oeuvre du processus de manoeuvre; ? la veille sur les opérateurs et les contrôles communs avec SNCF R; ? le lieu d?implantation des bungalows. Les points étudiés par le BEA-TT ont été présentés. Les écarts aux règles en opérationnel comme les faiblesses de l?organisation et celles du management sur le site ont reçu un écho favorable de ETFS. On notera que le TEVO était sur les lieux depuis seulement une semaine ce qui n?a pas favorisé la réalisation de la veille. D?ores et déjà, ETFS a pris des mesures pour améliorer le niveau de sécurité de sa production. Ces points seront listés dans la partie 5.3 du rapport. 36 SNCF R: Composante Exploitation (EIC PSE) ? le dirigeant de la gare de Saint-Florentin-Vergigny (DPX); ? le chef de pôle sécurité et son adjoint; ? le rédacteur de la CLE. La réunion a eu lieu dans les locaux de SNCF R. Les points majeurs des investigations menées au sujet des points concernant l?EIC ont fait l?objet d?échanges: ? les incohérences et imprécisions de la CLE; ? le COSIT qui n?est pas intégré dans le suivi des manoeuvres; ? l?absence de protection pour le personnel intervenant sur le matériel roulant. Les points analysés par le BEA-TT ont été présentés. L?EIC a reconnu la réalité des situations mises en avant et pris acte des points à modifier. Les résultats seront listés dans la partie 5.3 du rapport. Composante Maintenance et Travaux Direction Sécurité de la Direction Générale Opération et Production (DGOP), Direction Générale Île-de-France (DG IdF) et Établissement «INFRALOG TRAVAUX ÎLE-DE-FRANCE» (ITIF) ? le directeur des travaux IdF; ? le directeur sécurité DG IdF; ? le directeur de l?établissement ITIF; ? le chef de pôle sécurité de l?établissement ITIF; ? l?expert métier «conduite» de l?établissement ITIF; ? l?expert métier «opérations au sol» de l?établissement ITIF; ? le contrôleur sécurité de l?établissement ITIF (rencontré hors réunion). La réunion a eu lieu dans les locaux de SNCFR. Les points majeurs des investigations menées au sujet des points concernant l?Établissement ITIF ont fait l?objet d?échanges. ? le choix du lieu de la base arrière et du mode d?exploitation; ? les contrats entre SNCF R et ETF S; ? les documents applicables et leurs incohérences; ? la radio de manoeuvre; ? la préparation et mise en oeuvre du processus de manoeuvre; ? les contrôles communs avec ETF S; ? le lieu d?implantation des bungalows. Les points examinés par le BEA-TT ont été présentés. L?échange n?a pas donné lieu à un partage efficace des situations mises en avant. La majorité des participants ne savait pas que les trains assurés par ETFS entre la base travaux de Saint-Florentin-Vergigny et la zone de chantier située vers Melun étaient réalisés sous l?agrément de sécurité de SNCFR. De même, il aura nécessité que le BEA-TT interpelle l?EPSF pour faire accepter aux participants que les opérations de manoeuvre sur le site de la base arrière étaient elles aussi réalisées sous l?agrément de sécurité de SNCFR. 37 Le point concernant la «radio de manoeuvre» qui apparaît pour le BEA-TT comme la cause immédiate de l?événement et qui demeure particulièrement névralgique a obtenu pour réponse: «les règles SNCF R ne prévoient pas la mise à disposition d?un appareil radio possédant les fonctions de «tops sonores» de refoulement et d?un signal d?arrêt d?urgence. Le jour de l?événement cet appareil n?aurait pas conduit à éviter l?événement». Une deuxième réunion a eu lieu à la demande du responsable du département Convois du GI (DGOP). Le BEA-TT a une nouvelle fois présenté l?ensemble des points déjà évoqués dans la réunion précédente. L?écho a été nettement plus favorable. La réalité de leur existence et l?exactitude des analyses ont été pleinement partagés. 38 5 - Conclusions sur la recherche des causes et des facteurs 5.1 - Arbre des causes 39 5.2 - Les causes de l?accident Au terme de l?enquête, le BEA-TT considère que la cause immédiate de l?accident est l?utilisation par ETFS de radios non conformes aux règles établies par SNCFR pour l?exécution de manoeuvres sous son agrément de sécurité. Plusieurs facteurs systémiques ont été identifiés comme concourant à l?événement. Ils apparaissent dans l?arbre des causes. Il est possible de les regrouper par famille: Mise en place des bases arrière ? la non-réalisation d?une étude de risques préventivement à l?installation de bungalows à proximité de voies en impasse; ? l?état global du site qui n?incite pas à la rigueur; ? l?éloignement du site de la zone de chantier. Conception de la production sur les bases arrière ? l?absence de définition du processus de manoeuvre d?un train lourd qui conduit à recourir à la pousse; ? le retard du train à l?arrivée qui conduit à l?empressement des agents et à l?état de fatigue des conducteurs cédants. Réalisation de la production sur les bases arrière ? le manque de rigueur partagé par beaucoup d?acteurs vis-à-vis du respect des règles de production en sécurité qui conduit à ne pas obéir immédiatement aux signaux ni à réaliser les opérations de base comme définies dans les textes métier; ? l?adaptation des journées de service par les agents qui ne respectent pas le point de relève des conducteurs; ? le non-respect des conditions de franchissement de la pancarte «ARRÊT» qui conduit le conducteur de queue à se fourvoyer sur la situation géographique du mouvement; ? la commande de desserrage complet des freins avant la coupe entre les 2 rames qui conduit à ne pas maintenir serrée la rame TEVO après la coupe; ? l?absence de communication entre le conducteur de tête et de queue qui ne lui permet pas de se rendre compte de l?opération de coupe; ? la relève en marche entre les conducteurs qui ne conduit pas à l?arrêt d?urgence de ce mouvement. Management de la sécurité sur les bases arrière ? le contrôle sécurité de SNCF R sur ETF S et le management opérationnel de ETF S qui n?ont pas permis de rétablir le niveau de sécurité des manoeuvres sur le site; ? le non-respect de la Consigne Locale Opérationnelle (CLO). Il apparaît globalement que le choix du site et de son utilisation en site ouvert comme son éloignement des zones de chantier ne sont pas pleinement adaptés au traitement de ce genre de train. Les textes organisationnels comme la CLE et la CLO sont perfectibles et présentent quelques incohérences. La méthode de travail dite «chaîne de manoeuvre» qui a été opérée le jour de l?événement et qui s?opère régulièrement sur le réseau ferré national dans les bases arrière, n?est pas en conformité avec les règles de SNCF R. 40 5.3 - Les mesures prises depuis l?accident 5.3.1 - Mise en oeuvre de la recommandation immédiate par SNCFR 41 42 5.3.2 - Mesures mises en oeuvre par SNCFR SNCF R a fait parvenir au BEA-TT les actions mises en oeuvre post accident en complément des actions réalisées dans le cadre de la recommandation immédiate. ? Action n° 1 Contrôles renforcés en bases arrière mis en place après l?accident sur le périmètre Île-de-France, sur une durée permettant de vérifier l?efficacité des actions. ? Action n° 2 Vérification systématisée de l?implantation des bungalows vis-à-vis des heurtoirs sur les bases arrière des projets de suite rapide Île-de-France. ? Action n° 3 Recours systématisés à des radios homologuées par SNCF Réseau, conformes à l?offre RLE (Radio Locale d?Entreprise), sans être nécessairement équipées de la fonctionnalité BIP de refoulement, après analyse des conditions d?utilisation (longueur des mouvements et vitesse). ? Action n° 4 Animation, sensibilisation des collectifs de régénération industrielle voie de portée nationale. 5.3.3 - Mesures mises en oeuvre par ETFS ETF S a fait parvenir au BEA-TT les actions mises en oeuvre post accident. ? Action n° 1 Augmentation des effectifs au niveau de l'Encadrement Travaux en privilégiant des profils habilités à une (ou des) TES6 ou ayant déjà encadré techniquement une (ou des) TES. ? Action n° 2 Rédaction des «livrets de menaces Conduite / Opérations SOL» pour chaque chantier jugé complexe (Chantiers Grands Projets) et déclinaison aux Opérationnels, en complément des documents d?exploitation obligatoires. ? Action n° 3 Safety DAYS 2024: journées dédiées à la Prévention: Briefing/Débriefing avec ateliers et film dont le message porté est le suivant «avant de savoir ce qu?il ne faut pas faire, encore faut-il savoir ce qui était prévu». ? Action n° 4 Augmentation de la fréquence des KN27 sur les Évaluateurs (sur le vif et a posteriori) afin de s'assurer de la qualité de leur veille exercée sur les Opérationnels. ? Action n° 5 Déploiement des Radios de Manoeuvre avec Top Sonore et Bouton d?alerte sur les bases arrière en accord avec le livret technique IG 97914. ? Action n° 6 Audits externes ETF/ETF Services engagés sur la Base de Saint-Florentin afin de vérifier la nouvelle organisation mise en place, le respect des attendus suite à la mise en place de Responsables Base Arrière (Autorité, application des consignes?) 6 TES: tâches essentielles pour la sécurité. L?arrêté du 7 mai 2015 a pour but de définir la liste des tâches essentielles pour la sécurité (autres que la conduite de trains) et confier à l?employeur la définition des critères d?aptitude physique et psychologique des personnes affectées aux tâches essentielles pour la sécurité (autres que la conduite de trains). 7 KN2: Le système de management de la sécurité implique la mise en place d?une veille sur les opérateurs, associée à un contrôle de niveau 1 (KN1) qui permet à un dirigeant d?unité de s?assurer que ses collaborateurs assurent la veille et un contrôle de niveau 2 (KN2) qui permet à la direction d?une entité de s?assurer du fonctionnement global du système de management dans chacune des unités qui la composent. 43 ? Action n° 7 Définition des Règles d?Or en Base Arrière. Le non-respect de ces règles expose systématiquement à des sanctions. Exemples: -Définition et figeage des points de relève dans la mesure du possible; -Relevé de composition une fois le train formé; -Respect des consignes de calage et application du MT 7320 si absentes dans les Consignes Locales Opérationnelles; -Vérification de l'itinéraire au sol. ? Action n° 8 Planification de l?ensemble des Conducteurs et Agents de manoeuvre ETF Services sur la formation e-learning ETF Academy «communications radio» ? Action n° 9 Relève encadrée sur base arrière par le Chef d?équipe ETF S et figée sur la voie 3G ? Action n° 10 Rédaction d?un Rex sur l?évènement (circonstances et actions correctives) et diffusion aux équipes pour partage et application. ? Action n° 11 Création d?une Direction Sécurité Ferroviaire (DSF), composée d?experts métier issus de divers horizons, au service d?ETF Grands Projets et ETF Services. Les missions de cette direction incluront: - Audits internes (KN2 et Référentiel CSU8) et audits de chantier (base arrière), - Analyse des risques des chantiers et des bases arrière, - Analyse des incidents et production de rapports, - Redéfinition des lignes directrices en matière de sécurité ferroviaire (formation, montée en compétences). 8 CSU: Certificat de sécurité unique. La transposition en droit français de la directive (UE) 2016/798 relative à la sécurité ferroviaire par le décret n° 2019-525 du 27 mai 2019 relatif à la sécurité et à l?interopérabilité du système ferroviaire prévoit que chaque entreprise ferroviaire est dans l?obligation d?élaborer son système de gestion de la sécurité, lequel doit expliciter «l?organisation, les modalités et les procédures établies pour assurer la gestion sûre de ses propres opérations». Pour ce faire et afin d?assurer des services de transport ferroviaire au sein du système ferroviaire (fret et voyageurs), une entreprise ferroviaire (entreprise titulaire, sauf cas particuliers, d?une licence d?entreprise ferroviaire délivrée, en France, par le ministère chargé des Transports) doit être titulaire d?un certificat de sécurité unique (CSU). 44 Conclusion (english version) Causes of the accident At the end of the investigation, the BEA-TT considers, in light of the findings and testimonies collected, that the immediate cause of the accident was the use by ETF S of radios that did not comply with the rules established by SNCF R for the execution of maneuvers under its safety approval. Several systemic factors were identified as contributing to the event. They appear in the cause tree. They can be grouped by family: Setting up rear bases ? failure to carry out a risk study as a preventive measure for the installation of bungalows near dead-end tracks; ? the overall condition of the site, which does not encourage rigor. ? the distance of the site from the construction area. Design of production on rear bases ? the lack of definition of the maneuvering process for a heavy train, which leads to the use of pushing; ? the delay of the train on arrival which leads to the haste of the agents and the fatigue of the yielding drivers. Production on the rear bases ? the lack of rigor shared by many actors with regard to compliance with the rules of safe production which leads to not immediately obeying the signals or carrying out the basic operations as defined in the professional texts; ? the adaptation of the service days by the agents who do not respect the point of change of the drivers; ? the non-compliance with the conditions of crossing the "STOP" sign which leads the rear driver to get confused about the geographical location of the movement; ? the order to completely release the brakes before the cut between the 2 trains which leads to not keeping the TEVO train tight after the cut; ? the lack of communication between the head and rear driver which does not allow him to realize the cutting operation; ? the changeover between drivers that does not lead to the emergency stop of this movement. Safety management on the rear bases ? the safety control of SNCF R on on ETF S and the operational management of ETF S which did not restore the level of safety of the maneuvers on the site; ? the non-compliance with the Local Operational Instructions (CLO). It appears overall that the choice of the site and its use on an open site as well as its distance from the construction sites are not fully adapted to the processing of this type of train. The organizational texts such as the CLE and the CLO are perfectible and present some inconsistencies. The working method called "shunting chain" which was carried out on the day of the event and which is regularly carried out on the national rail network in the rear bases, is not in compliance with the rules of SNCF R. 45 Measures taken since the accident Measures implemented by SNCF R SNCF R sent the BEA-TT the actions implemented after the accident in addition to the actions carried out as part of the immediate recommendation. Action No. 1 Reinforced checks at the rear bases implemented after the accident in the Île-de-France area, over a period of time to verify the effectiveness of the actions. Action No. 2 Systematic verification of the location of bungalows with regard to the bumpers at the rear bases of the Île-de-France rapid follow-up projects. Action No. 3 Systematic use of radios approved by SNCF Réseau, compliant with the RLE offer, without necessarily being equipped with the BIP push-back functionality, after analysis of the conditions of use (length of movements and speed). Action No. 4 Animation, awareness-raising of industrial track regeneration groups of national scope. Measures implemented by ETF S ETF S has sent the BEA-TT the actions implemented after the accident. Action No. 1 Increase the workforce at the Works Management level by prioritizing profiles authorized for one (or more) TES1 or having already technically supervised one (or more) TES. Action No. 2 Drafting of "Ground Operations / Management threat booklets" for each construction site deemed complex (Major Project Sites) and adaptation to Operational staff, in addition to the mandatory operating documents. Action No. 3 Safety DAYS 2024: days dedicated to Prevention: Briefing/Debriefing with workshops and film whose message is as follows "before knowing what not to do, you still need to know what was planned". Action No. 4 Increase the frequency of KN22s on Evaluators (on the spot and a posteriori) in order to ensure the quality of their monitoring of Operational Staff. Action No. 5 Deployment of Maneuvering Radios with Sound Top and Alert Button on the rear bases in accordance with the IG 97 914 technical booklet. Action No. 6 External ETF/ETF Services audits engaged on the Saint-Florentin Base in order to verify the new organization set up, compliance with expectations following the establishment of Rear Base Managers (Authority, application of instructions, etc.) Action No. 7 Definition of the Golden Rules in the Rear Base. Failure to comply with these rules systematically exposes you to sanctions. Examples: - Definition and freezing of handover points as far as possible; 46 - Composition survey once the train is formed; - Compliance with the timing instructions and application of MT 7320 if absent in the Local Operational Instructions; - Verification of the route on the ground. Action No. 8 Planning of all ETF Services Drivers and Shunters on the ETF Academy e-learning training "radio communications" Action No. 9 Supervised handover on the rear base by the ETF S Team Leader and fixed on the 3G track Action No. 10 Drafting of a Rex on the event (circumstances and corrective actions) and distribution to the teams for sharing and application. Action No. 11 Creation of a Railway Safety Department (DSF), composed of business experts from various backgrounds, at the service of ETF Grands Projets and ETF Services. The missions of this department will include: - Internal audits (KN2 and CSU3 Reference) and site audits (rear base), - Analysis of site and rear base risks, - Analysis of incidents and production of reports, - Redefinition of railway safety guidelines (training, skills development). 47 6 - Les recommandations et les invitations en matière de sécurité Les 6 recommandations de sécurité directement liées à l?accident et des invitations de sécurité associées sont à rechercher dans les domaines suivants: ? la mise en place des bases arrière; ? la conception des processus de production sur les bases arrière; ? la mise oeuvre des processus de production sur les bases arrière; ? le management de la sécurité sur les bases arrière. Une invitation de sécurité complémentaire, liée aux investigations concerne: ? la méthode de travail non conventionnelle pour les refoulements guidés par radio en phonie. 6.1 - Mise en place des bases arrière ? la non-réalisation d?une étude de risques préventivement à l?installation de bungalows à proximité de voies en impasse. Le BEA-TT a constaté que la situation des bungalows et des zones de stationnement de véhicules personnels a été choisie sans une évaluation des risques compte tenu de leur position par rapport à deux voies en impasse sur lesquelles des refoulements ont lieu quotidiennement. L?accident n?a pas fait de victime, car le retard du train a conduit tous les opérateurs à se situer hors cette zone pour être prêts à mettre en oeuvre les opérations de maintenance. ? l?état global du site qui n?incite pas à la rigueur. Le BEA-TT a constaté sur site que l?état des chemins utilisés par le personnel et que des implantations de signaux n?obéissant pas aux règles ne sont pas propices à la rigueur. ? l?éloignement du site de la zone de chantier. Le BEA-TT a constaté que le retard du train usine à l?arrivée sur le site est lié à sa sortie tardive du chantier et aux conflits de circulation induits lors du passage de noeuds ferroviaires. Des parcours de moindre importance entre la zone de chantier et la base arrière limiteraient cet inconvénient. Le BEA-TT émet la recommandation ci-dessous. Recommandation R1 à l?attention de SNCF Réseau: Veiller sur les bases arrière, lieux de production ferroviaire, au bon état et à la propreté des pistes de cheminement, à la mise en place de signaux conformes à la réglementation et à la mise en place d?éléments constitutifs de la base vie et de zones de stationnement de manière à maîtriser le risque de heurt par une circulation ferroviaire. Intégrer dans les critères de choix du positionnement de la base arrière, par rapport à la zone de chantier, la volonté de limiter la distance à parcourir pour maîtriser les risques vis-à-vis de la sécurité de l?exploitation ferroviaire et du personnel. 48 6.2 - Conception des processus de production sur les bases arrière ? l?absence de définition du processus de manoeuvre d?un train lourd qui conduit à recourir à la pousse. Le BEA-TT a constaté que la mise en oeuvre des manoeuvres pour traiter des situations à risques comme la manoeuvre du train usine n?avait pas fait l?objet de la définition d?un processus par l?entreprise ETF S. Le BEA-TT émet la recommandation ci-dessous. Recommandation R2 à l?attention de ETFS: Concevoir des processus de production et supports pour toutes les opérations de manoeuvre courantes, notamment de trains lourds sur les bases arrière avant leur mise en service. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. ? le retard du train à l?arrivée qui conduit à l?empressement des agents et à l?état de fatigue des conducteurs cédants. Le BEA-TT a constaté que le retard à l?arrivée du train usine et que l?état de fatigue des 2 conducteurs cédants ont conduit à vouloir limiter le temps nécessaire aux manoeuvres en prenant des libertés excessives avec la réglementation. Le BEA-TT émet la recommandation ci-dessous. Recommandation R3 à l?attention de SNCF R et de ETF S: Intégrer dans les briefings réalisés sur les bases arrière, l?importance de l?anticipation des situations dégradées prévisibles comme le traitement des problématiques induites par le retard du train à traiter et la prise en compte de l?état de fatigue d?opérateurs. Insister sur l?absolue nécessité de mettre en oeuvre les processus de production dans le respect des règles de sécurité. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. 6.3 - Mise en oeuvre des processus de production sur les bases arrière ? le manque de rigueur partagé par beaucoup d?acteurs vis-à-vis du respect des règles de production en sécurité qui conduit à ne pas obéir immédiatement aux signaux ni à réaliser les opérations de base comme définies dans les textes métier; ? l?adaptation des journées de service par les agents qui ne respectent pas le point de relève des conducteurs; ? le non-respect des conditions de franchissement de la pancarte «ARRÊT» qui conduit le conducteur de queue à se fourvoyer sur la situation géographique du mouvement; ? la commande de desserrage complet des freins avant la coupe entre les 2 rames qui conduit à ne pas maintenir serrée la rame TEVO après la coupe; ? l?absence de communication entre le conducteur de tête et de queue qui ne lui permet pas de se rendre compte de l?opération de coupe; ? la relève en marche entre les conducteurs qui ne conduit pas à l?arrêt d?urgence de ce mouvement. Le BEA-TT a constaté un large spectre d?écarts aux règles de sécurité concernant majoritairement les conducteurs. Ces écarts ont pour points communs un manque de 49 rigueur de l?opérateur et la non-perception du risque créé voire subi. Il ne peut s?agir de situations à caractère exceptionnel. Nécessairement, il s?agit de libertés prises au fil du temps, insuffisamment prises en compte par le management opérationnel, et devenues un état de fait récurrent. Le BEA-TT émet ainsi la recommandation suivante. Recommandation R4 à l?attention de ETFS: Consolider le management opérationnel sur les bases arrière pour garantir la mise en oeuvre des processus de production dans le respect scrupuleux des règles. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. 6.4 - Management de la sécurité sur les bases arrière ? le contrôle sécurité de SNCFR sur l?entreprise qualifiée ETF S sous-traitante de ETF et le management de ETFS qui n?ont pas permis de rétablir le niveau de sécurité des manoeuvres sur le site. Le BEA-TT a constaté que le contrôle sécurité exercé par SNCFR sur ETF S réalisé quelques jours avant l?événement, comme celui exercé en interne par ETFS, se sont révélés inopérants pour identifier les écarts majeurs aux règles structurant la sécurité sur le réseau ferré national et pour prendre des mesures immédiates qui auraient évité l?événement. Le BEA-TT émet ainsi la recommandation suivante. Recommandation R5 à l?attention de SNCF Réseau et ETFS: Redéfinir des modes de contrôle sécurité efficaces et rigoureux pour chaque exploitant et des modes de contrôles communs et réguliers sur les bases arrière pour améliorer leur niveau de sécurité en s?assurant notamment des conditions minimales en matière de compétences des personnels en charge des contrôles sécurité. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. ? non-respect de la Consigne Locale Opérationnelle (CLO) Le BEA-TT a constaté que la CLO n?était pas prise en considération lors de l?établissement du contrat entre SNCFR, ETF et ETF S et qu?elle n?était pas connue du contrôleur sécurité de SNCFR. Le BEA-TT émet ainsi la recommandation suivante. Recommandation R6 à l?attention de SNCF Réseau et ETFS: Vérifier que les textes structurant la sécurité de l?exploitation ferroviaire applicables sur les bases arrière sont pris en compte pour l?établissement des contrats écrits par SNCF R et que les acteurs du management de la sécurité les maîtrisent. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. 50 6.5 - La méthode de travail non conventionnelle ? la méthode de travail dite «chaîne de manoeuvre». Le BEA-TT a constaté que cette méthode qui consiste, lors d?une manoeuvre en refoulement guidée par radio en phonie, en la mise en place d?une succession d?opérateurs qui tour à tour commandent le refoulement en phonie par radio sans discontinuité du mouvement est contraire au texte de SNCF R numéroté MT7320. Le BEA-TT émet ainsi l?invitation suivante. Invitation à l?attention de SNCF Réseau et de l?EPSF: Proscrire le recours à la méthode dite de la «chaîne de manoeuvre» pour les refoulements guidés par radio en phonie sur le réseau ferré national pour les agents de SNCFR et des EF qualifiées par ses soins opérant sous son agrément de sécurité. 51 Safety recommendations (english version) Safety recommendations directly related to the accident are to be sought in the following areas: ? the establishment of rear bases; ? the design of production processes on the rear bases; ? the implementation of production processes on the rear bases; ? safety management on the rear bases; An additional safety invitation, linked to the investigations concerns: ? the unconventional working method for radio-guided pushbacks in speech. Setting up rear bases ? the failure to carry out a risk study as a precaution against installing bungalows near dead-end tracks. The BEA-TT noted that the location of the bungalows and the parking areas for personal vehicles was chosen without a risk assessment given their position in relation to two dead- end tracks on which traffic is pushed back daily. The accident did not cause any casualties, as the train delay led all operators to be located outside this area to be ready to carry out maintenance operations. ? the overall condition of the site which does not encourage rigour. The BEA-TT noted on site that the condition of the paths used by staff and the signal installations which do not comply with the rules are not conducive to rigour. ? the distance of the site from the construction zone. The BEA-TT noted that the delay of the factory train on arrival at the site is linked to its late departure from the construction site and to traffic conflicts caused when passing through railway junctions. Shorter distances between the construction zone and the rear base would limit this inconvenience. The BEA-TT issues the recommendation below. Recommendation R1 for the attention of SNCF Réseau: Ensure that the rear bases, railway production sites, ensure that the tracks are in good condition and clean, that signals are in place that comply with regulations and that components of the base camp and parking areas are in place so as to control the risk of collision with railway traffic. Integrate into the criteria for choosing the positioning of the rear base, in relation to the construction site area, the desire to limit the distance to be covered in order to control the risks with regard to the safety of railway operations and staff. 52 Design of production processes on rear bases ? the lack of definition of the process for shunting a heavy train, which leads to the use of pushing. The BEA-TT noted that the implementation of shunting to deal with risky situations such as shunting the factory train had not been defined as a process by the company ETF S. The BEA-TT issues the following recommendation. Recommendation R2 for ETF S: Design production processes and supports for all routine shunting operations of heavy trains particularly, on rear bases before they are put into service SNCF R is invited to pass on this recommendation to all RUs qualified by it and operating under its safety approval. ? the delay of the train on arrival, which leads to the haste of the agents and the fatigue of the yielding drivers. The BEA-TT noted that the delay in the arrival of the factory train and the fatigue of the 2 drivers who gave way led to a desire to limit the time needed for the maneuvers by taking excessive liberties with the regulations. The BEA-TT issues the recommendation below. Recommendation R3 for the attention of SNCF R and ETF S: Integrate into the briefings carried out on the rear bases, the importance of anticipating foreseeable degraded situations such as dealing with problems caused by the delay of the train to be dealt with and taking into account the fatigue of operators. Insist on the absolute necessity of implementing production processes in compliance with safety rules. SNCF R is invited to relay this recommendation to all RUs qualified by it and operating under its safety approval. Implementation of production processes on the rear bases ? the lack of rigor shared by many actors with regard to compliance with the rules of safe production which leads to not immediately obeying the signals or carrying out the basic operations as defined in the professional texts; ? the adaptation of the service days by the agents who do not respect the driver's handover point; ? the non-compliance with the conditions for crossing the "STOP" sign which leads the rear driver to get confused about the geographical location of the movement; ? the command to completely release the brakes before the cut between the 2 trains which leads to not keeping the TEVO train tight after the cut; ? the lack of communication between the head and rear driver which does not allow him to be aware of the cutting operation; ? the handover in progress between the drivers which does not lead to the emergency stop of this movement. 53 The BEA-TT has noted a wide range of deviations from safety rules, mainly concerning drivers. These deviations have in common a lack of rigor on the part of the operator and the failure to perceive the risk created or even suffered. These cannot be exceptional situations. Necessarily, these are liberties taken over time and insufficiently taken into account by operational management to become a recurring state of affairs. The BEA-TT therefore issues the following recommendation. Recommendation R4 for the attention of ETF S: Consolidate operational management on the rear bases to guarantee the implementation of production processes in strict compliance with the rules. SNCF R is invited to relay this recommendation to all EFs qualified by it and operating under its safety approval. Safety management at the rear bases ? the safety inspection by SNCF R on the qualified company ETF S, a subcontractor of ETF and the management of ETF S which did not allow the level of safety of the maneuvers on the site to be restored. The BEA-TT noted that the safety inspection carried out by SNCF R on its subcontractor carried out a few days before the event, as well as that carried out internally by ETF S, proved ineffective in identifying major deviations in compliance with the rules structuring safety on the national rail network and in taking immediate measures that would have prevented the event. The BEA-TT therefore issues the following recommendation. Recommendation R5 for the attention of SNCF Réseau and ETF S: Redefine effective and rigorous safety inspection methods for each operator and common and regular inspection methods on the rear bases to improve their level of safety by ensuring in particular the minimum conditions in terms of skills of the personnel in charge of safety inspections. SNCF R is invited to relay this recommendation to all EFs qualified by it and operating under its safety approval. ? non-compliance with the Local Operational Instructions (CLO) The BEA-TT noted that the CLO was not taken into consideration in establishing the contract between SNCF R, ETF and ETF S and that it was not known to the SNCF R safety controller. The BEA-TT therefore issues the following recommendation. Recommendation R6 for the attention of SNCF Réseau and ETF S: Check that the texts structuring the safety of railway operations applicable on the rear bases are taken into account for the establishment of the contracts written by SNCF R and that the safety management stakeholders master them. SNCF R is invited to relay this recommendation to all RUs qualified by it and operating under its safety approval. 54 The unconventional working method ? the working method known as the "shunting chain". The BEA-TT has noted that this method, which consists, during a pushback maneuver guided by radio in speech, of setting up a succession of operators who take turns controlling the pushback in speech by radio without discontinuity of movement, is contrary to the SNCF R text numbered MT 7320. The BEA-TT therefore issues the following invitation. Invitation to the attention of SNCF Réseau and EPSF: Prohibit the use of the so-called "shunting chain" method for pushbacks guided by radio in speech on the national rail network for SNCF R agents and RUs qualified by it operating under its safety approval. 55 ANNEXES Annexe 1: décision d?ouverture d?enquête Annexe 2: les enregistrements 56 Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête 57 Annexe 2: les enregistrements Atess locomotive G1206, conducteurs A et B Ci-dessus le fichier texte qui permet de discerner les moments particuliers du mouvement de manoeuvre juste avant l?accident. On distingue particulièrement l?arrêt pour la coupe, le moment où se produit la collision avec les 2 wagons plats et toute la décélération obtenue sans commande de freinage commandée par le conducteur mais due à la résistance à l?avancement des véhicules déraillés et par le fonctionnement de l?automaticité du frein suite à la rupture de la conduite générale. 58 Ci-contre un extrait de la courbe de vitesse du train qui permet d?identifier l?absence d?arrêt sur la voie 3G lors de la réception du train à Saint-Florentin-Vergigny. On distingue le moment de la collision de la rame «TEVO» avec les 2 wagons plats stationnant sur le voie 7. Enregistrement SIBAS «matériel» locomotive G1206 Cet enregistrement a permis de montrer que le conducteur A avait correctement disposé sa locomotive en «pousse» lors de l?arrêt sur la voie 17. Atess locomotive E4000, conducteurs C et D 59 On distingue clairement les différents mouvements depuis la réception du train sur la voie 3G, l?arrêt sur la voie 17 avec la locomotive E4000 en «pousse», puis les autres mouvements avec la même locomotive cette fois en tête. Le non respect de la pancarte «ARRET» est flagrant, sa place le situerait lors du mouvement en «Tirez» depuis la voie 17 sur la voie 11. Ci-dessus le fichier texte qui permet de discerner les moments particuliers du mouvement de manoeuvre juste avant l?accident. On distingue particulièrement le non-respect de la pancarte «ARRÊT» lors du mouvement en «Tirez» depuis la voie 17 sur la voie 11 pour atteindre le point de coupe. L?alimentation à 5 bars de la CG avant la réalisation de la coupe est établi par la mesure de la CG>4,7 bars, 8 secondes après l?arrêt. 60 Règlement général de protection des données Le bureau d?enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) est investi d?une mission de service public dont la finalité est la réalisation de rapports sur les accidents afin d?améliorer la sécurité des transports terrestres (articles L. 1621-1 et 1621-2 du code des transports, voir la page de présentation de l?organisme). Pour remplir cette mission, les personnes chargées de l?enquête, agents du BEA-TT habilités ainsi que d?éventuels enquêteurs extérieurs spécialement commissionnés, peuvent rencontrer toute personne impliquée dans un accident de transport terrestre (articles L. 1621-14) et recueillir toute donnée utile. Ils traitent alors les données recueillies dans le cadre de l?enquête dont ils ont la responsabilité uniquement pour la seule finalité prédéfinie en garantissant la confidentialité des données à caractère personnel. Les rapports d?enquêtes sont publiés sans le nom des personnes et ne font état que des informations nécessaires à la détermination des circonstances et des causes de l?accident. Les données personnelles sont conservées pour une durée de 4 années à compter de la publication du rapport d?enquête, elles sont ensuite détruites. Le traitement «Enquête accident BEA-TT» est mis en oeuvre sous la responsabilité du BEA-TT relevant du ministère des transports. Le ministère s?engage à ce que les traitements de données à caractère personnel dont il est le responsable de traitement soient mis en oeuvre conformément au règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l?égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (ci-après, «règlement général sur la protection des données» ou RGPD) et à la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l?informatique, aux fichiers et aux libertés. Les personnes concernées par le traitement, conformément à la législation en vigueur, peuvent exercer leurs droits auprès du responsable de traitement: droit d?accès aux données, droit de rectification, droit à la limitation, droit d?opposition. Pour toute information ou exercice de vos droits, vous pouvez contacter: 1- Le responsable de traitement, qui peut être contacté à l?adresse suivante: - à l?adresse: bea-tt@developpement-durable.gouv.fr - ou par courrier (avec copie de votre pièce d?identité en cas d?exercice de vos droits) à l?adresse suivante: Ministère des transports À l?attention du directeur du BEA-TT Grande Arche - Paroi Sud, 29e étage, 92055 LA DEFENSE Cedex 2- Le délégué à la protection des données(DPD) du ministère: - à l?adresse suivante: ajag2.daj.sg@developpement-durable.gouv.fr ; - ou par courrier (avec copie de votre pièce d?identité en cas d?exercice de vos droits) à l?adresse suivante: Ministère des transports À l?attention du Délégué à la protection des données SG/DAJ/AJAG2 92055 La Défense cedex Vous avez également la possibilité d?adresser une réclamation relative aux traitements mis en oeuvre à la Commission nationale informatique et libertés. (3 Place de Fontenoy - TSA 80715 - 75334 PARIS CEDEX 07) 61 Bureaud?Enquêtessur lesAccidentsdeTransport Terrestre ? GrandeArche -Paroi Sud 92055LaDéfensecedex Téléphone : 01 40 81 21 83 bea-tt@developpement-durable.gouv.fr www.bea-tt.developpement-durable.gouv.fr  1 - Synthèse  Summary (english version)  2 - L?enquête et son contexte  2.1 - Les circonstances de l?accident  2.2 - Le bilan de l?accident  2.3 - Les entreprises impliquées et leurs liens  2.4 - L?engagement de l?enquête  3 - La description du fait survenu  3.1 - Le contexte de l?accident  3.1.1 - Le site de l?événement  3.1.2 - La rame accidentée  3.1.3 - La météorologie  3.2 - Description factuelle des évènements  3.2.1 - Constitution du train et équipage  3.2.2 - Les témoignages  3.2.2.1 - Les agents présents sur le terrain:  3.2.2.2 - Les acteurs sur le terrain  3.2.2.3 - Les principaux témoignages  3.2.3 - Habilitation des agents et respect du temps de travail  3.2.4 - Les postes radio utilisés par le personnel ETFS sur la base arrière de Saint?Florentin-Vergigny  3.2.5 - Le dépouillement des enregistrements  3.2.6 - La vérification du fonctionnement des appareils de commande du frein des deux locomotives  3.2.7 - Les dommages  4 - Analyse du fait survenu  4.1 - L?état du site  4.2 - La répartition des tâches par le responsable des manoeuvres  4.3 - Le retard du train et l?interaction sur les opérateurs du site  4.4 - L?état de fatigue des conducteurs cédants A et C.  4.5 - La réception du train sur la voie 3 Garage et le mouvement en «Tirez» sur la voie17  4.6 - Le mouvement en «Tirez» sur la voie 11 et la pousse  4.7 - Le franchissement de la pancarte «ARRÊT»  4.8 - La coupe des 2 rames (rames Bloc et TEVO)  4.8.1 - Principes de fonctionnement du frein continu automatique  4.8.2 - État des freins des rames Bloc et TEVO  4.9 - Le mouvement en «Tirez» de la rame Bloc sur la voie 9bis  4.10 - Le mouvement en «Refoulez» de la rame TEVO sur la voie 7  4.11 - La collision de la rame TEVO sur la voie7 avec les deux wagons plats  4.12 - La collision des wagons plats avec les bungalows et des véhicules en stationnement  4.13 - Protection des agents de maintenance et recherche d?éventuelles victimes  4.14 - L?organisation et le fonctionnement du site  4.14.1 - Le choix du site et son utilisation en site ouvert  4.14.2 - Les textes organisationnels  4.14.3 - Les radios de manoeuvre utilisées  4.14.4 - La pousse en manoeuvre  4.14.5 - La méthode dite «chaîne de manoeuvre»  4.14.6 - Le contrôle sécurité de SNCF R de l?entreprise qualifiée ETF S et le management des DBA  4.15 - La reconstitution des faits  4.16 - Rencontre des dirigeants des entreprises impliquées et des experts métiers  5 - Conclusions sur la recherche des causes et des facteurs  5.1 - Arbre des causes  5.2 - Les causes de l?accident  5.3 - Les mesures prises depuis l?accident  5.3.1 - Mise en oeuvre de la recommandation immédiate par SNCFR  5.3.2 - Mesures mises en oeuvre par SNCFR  5.3.3 - Mesures mises en oeuvre par ETFS  Conclusion (english version)  6 - Les recommandations et les invitations en matière de sécurité  6.1 - Mise en place des bases arrière  6.2 - Conception des processus de production sur les bases arrière  6.3 - Mise en oeuvre des processus de production sur les bases arrière  6.4 - Management de la sécurité sur les bases arrière  6.5 - La méthode de travail non conventionnelle  Safety recommendations (english version)  ANNEXES  Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête  Annexe 2: les enregistrements  Atess locomotive G1206, conducteurs A et B  Enregistrement SIBAS «matériel» locomotive G1206  Atess locomotive E4000, conducteurs C et D  Règlement général de protection des données (ATTENTION: OPTION rage. Il va ensuite transmettre l?information qu?il est en pousse au conducteur B prenant. Pour cela, 33 ce dernier va demeurer dans l?erreur et dans l?incompréhension des ordres de ralentissement et d?arrêt qu?il entend parfois et qui le concernent. Pour le BEA-TT cette méthode non réglementaire s?effectue sans qu?une organisation ne soit mise en place par l?EF ETFS après validation par SNCF R, décrite dans un texte et contrôlée par les encadrants. C?est une des causes de l?événement. 4.14.5 - La méthode dite «chaîne de manoeuvre» La méthode appelée «chaîne de manoeuvre» s?opère par la mise en place d?une succession d?opérateurs qui tour à tour commandent le refoulement en phonie par radio sans discontinuité du mouvement. Les investigations menées par le BEA-TT ont vérifié que cette méthode est largement répandue dans les entreprises sous traitantes de SNCFR et que sa mise en oeuvre régulière est connue par SNCF R. Le document MT07320 de SNCFR est applicable pour toute manoeuvre de SNCFR exécutée sur le réseau ferré national dans le cadre de son agrément de sécurité. Il en est de même pour l?entreprise qualifiée par ses soins agissant elle aussi sous l?agrément sécurité du GI SNCFR. Ce document ne traite pas de la méthode dite «chaîne de manoeuvre». Dans sa fichen°51-01, le document MT07320 s?oppose à sa mise en oeuvre en imposant l?arrêt systématique du mouvement lors du remplacement de l?agent commandant le mouvement au cours d?une manoeuvre. Cette méthode de travail a été mise en oeuvre lors du refoulement de la rame TEVO sur la voie 7. Elle n?appartient pas aux causes qui ont conduit à l?accident. Le BEA-TT estime toutefois qu?il est dangereux, qu?une méthode de cette envergure, pour un mouvement aussi particulier qu?un refoulement, puisse être mise en oeuvre de façon habituelle alors qu?elle est en opposition avec les prescriptions applicables. Cette situation interroge sur les contrôles et les audits internes de sécurité menés jusque-là, qui n?ont pas identifié ce point comme un écart majeur aux règles ce qui aurait permis de mettre fin à une pratique hors cadre réglementaire. 4.14.6 - Le contrôle sécurité de SNCF R de l?entreprise qualifiée ETF S et le management des DBA Un cadre du GI SNCFR s?est rendu sur le site de Saint-Florentin-Vergigny les 8 et 9janvier2024. L?après-midi du 8 janvier a été consacrée à un contrôle sécurité d?opérateurs de ETFS assurant des manoeuvres sous l?agrément de sécurité de SNCFR, la matinée du 09/01 a été utilisée au management des DBA dont il est le hiérarchique. Le contrôle sécurité a fait l?objet d?un compte rendu. Il ne permet pas d?identifier les types de mouvement qui ont été observés et leur ampleur. L?appréciation générale est: Contrôle acceptable, quelques points à perfectionner. Échange auprès du manager Ferroway, de rappeler aux opérateurs au sol, qu?il est primordial, d?appliquer les missions qui leur sont confiées et de rester dans leurs périmètres d?actions. Le contrôleur déclare avoir constaté l?emploi de postes talkie-walkie utilisés par les opérateurs ETFS. Lorsque le BEA-TT fait état que ces postes sont non conformes à la MT07320 (fiche n°51.12) et n?ont pas été remis par le DBA comme le prévoit la CLO dans son point 5.13, le contrôleur répond qu?il ne connaît pas ces obligations. Le suivi managérial des DBA a conduit le cadre de l?établissement ITIF à observer que les DBA assuraient la protection du personnel intervenant sur le TEVO alors que la CLO indique dans son point 9.1 que c?est une mission qui appartient à l?AC de la gare de 34 Saint-Florentin-Vergigny. Le cadre SNCF R mis face à la situation répond qu?il ne connaît pas cette obligation. La connaissance du document CLO n?est pas maîtrisée par le contrôleur sécurité de SNCFR. Cette méconnaissance l?a conduit à ne pas discerner des écarts importants dans la mise en oeuvre d?opérations de sécurité et à valider tacitement le renouvellement de situations non conformes. Pour le BEA-TT n?avoir pas identifié que les postes radio de manoeuvre utilisés par les opérateurs de ETFS n?étaient pas conformes et de ce fait ne pas avoir pris de mesure immédiate pour rétablir la situation au niveau attendu est une des causes de l?événement. 4.15 - La reconstitution des faits L?exploitation des enregistrements a permis de s?assurer que le non-serrage de la rame TEVO après la coupe avec la rame Bloc n?avait pas de lien avec un dysfonctionnement des locomotives ou une action non attendue de la part du conducteurA de la G1206. Ceci implique que la coupe a été réalisée alors que la pression à la CG était à 5 bars de part et d?autre du point de la coupe et que la fermeture quasi simultanée des 2 robinets d?arrêt CG n?a pas provoqué de chute de pression suffisante à la CG pour conduire à un serrage gradué de la partie TEVO. L?interprétation de l?ATESS de la locomotive E4000 s?oppose aux déclarations des 2conducteursC et D qui étaient persuadés d?avoir constaté une dépression de 1,5bar à la CG lors de la relève. Une reconstitution en salle a été organisée avec l?aide essentielle des représentants de ETFS qui ont mis à disposition des enquêteurs du BEA-TT l?ensemble du personnel impliqué. Reconstitution en salle Chaque situation depuis l?entrée du train sur la voie3 Garage jusqu?à la collision de la rame TEVO avec les wagons plats sur la voie7 a fait l?objet d?un partage complet (faits, témoignages, lecture et interprétation des enregistrements, retour aux textes). Les écarts aux règles mis en avant par le BEA-TT ont été admis par les participants. Les conducteursC et D de la locomotive E4000 demeurant persuadés que la coupe avait été réalisée avec une pression à la CG de l?ordre de 3,5bars, une reconstitution sur le terrain a été organisée avec le concours des représentants de ETFS. Reconstitution sur le terrain Le personnel directement impliqué, les 2 locomotives utilisées le jour de l?accident et une rame de wagons ont été mis à la disposition des enquêteurs du BEA-TT. Seule la partie coupe entre les rames Bloc et TEVO a été observée. Les opérations liées à la conduite et aux opérations au sol ont fait l?objet d?un chronométrage pour chaque action connue ou déclarée par les agents. Le résultat des observations «conduite» a fait l?objet d?une comparaison avec les propos tenus et les enregistrements évoqués lors de la reconstitution en salle. Ceci a conduit les 2 conducteurs à admettre qu?ils s?étaient persuadés à tort du maintien de la dépression de 1,5bar à la CG pendant la coupe. Les agents ont compris que la commande de desserrage complet avait été obligatoirement commandée en amont de l?arrêt, que la CG était à 5 bars lors de la coupe et que l?immobilisation était obtenue par l?action conjuguée 35 du frein direct de la locomotive E4000 et du freinage des 2 rames en cours de desserrage complet. L?opérateur au sol a refait les gestes et déplacements qu?il a exécutés le jour de l?accident. La méthode pour dételer entre 2 wagons est correctement mise en oeuvre par rapport aux règles définies. La fermeture du robinet d?arrêt CG situé côté source est réalisée en premier lieu. Sa dextérité conduit à fermer le deuxième robinet avec un décalage de temps si court qu?il interdit une mise à l?atmosphère suffisante de la CG (par le trou de fuite du robinet d?arrêt fermé côté source) pour commander un freinage. Le BEA-TT en déduit que la CG était à 5bars lors de la coupe et que la fermeture quasi instantanée des robinets d?arrêt CG a maintenu la CG à 5bars dans les 2rames. L?absence de freinage gradué maintenu pendant la coupe est une cause de l?événement. Les enquêteurs du BEA-TT soulignent la bonne volonté de l?ensemble des agents de ETFS pour identifier toutes les causes ayant conduit à l?accident. Tous les agents, sans exception, se sont montrés constructifs lors des échanges. Le BEA-TT a apprécié l?aide fournie par ETFS pour organiser rapidement sur les lieux de l?événement ces 2reconstitutions avec des moyens humains et logistiques conséquents. 4.16 - Rencontre des dirigeants des entreprises impliquées et des experts métiers Dans le cadre des investigations, les enquêteurs du BEA-TT ont été reçus par les représentants des deux entreprises pour partager les points saillants de l?enquête. Chacune de ces réunions a fait l?objet d?un compte rendu réalisé par le BEA-TT et envoyé aux participants. ETF Service: ? le directeur; ? le chef d?agence; ? le directeur sécurité; ? l?expert métier «conduite»; ? l?expert métier «opérations au sol». La réunion a eu lieu dans les locaux de l?entreprise ETFS. Les points majeurs des investigations menées au sujet des points concernant ETFS ont fait l?objet d?échanges: ? les contrats avec SNCF R; ? les documents applicables; ? la radio de manoeuvre; ? la préparation et mise en oeuvre du processus de manoeuvre; ? la veille sur les opérateurs et les contrôles communs avec SNCF R; ? le lieu d?implantation des bungalows. Les points étudiés par le BEA-TT ont été présentés. Les écarts aux règles en opérationnel comme les faiblesses de l?organisation et celles du management sur le site ont reçu un écho favorable de ETFS. On notera que le TEVO était sur les lieux depuis seulement une semaine ce qui n?a pas favorisé la réalisation de la veille. D?ores et déjà, ETFS a pris des mesures pour améliorer le niveau de sécurité de sa production. Ces points seront listés dans la partie 5.3 du rapport. 36 SNCF R: Composante Exploitation (EIC PSE) ? le dirigeant de la gare de Saint-Florentin-Vergigny (DPX); ? le chef de pôle sécurité et son adjoint; ? le rédacteur de la CLE. La réunion a eu lieu dans les locaux de SNCF R. Les points majeurs des investigations menées au sujet des points concernant l?EIC ont fait l?objet d?échanges: ? les incohérences et imprécisions de la CLE; ? le COSIT qui n?est pas intégré dans le suivi des manoeuvres; ? l?absence de protection pour le personnel intervenant sur le matériel roulant. Les points analysés par le BEA-TT ont été présentés. L?EIC a reconnu la réalité des situations mises en avant et pris acte des points à modifier. Les résultats seront listés dans la partie 5.3 du rapport. Composante Maintenance et Travaux Direction Sécurité de la Direction Générale Opération et Production (DGOP), Direction Générale Île-de-France (DG IdF) et Établissement «INFRALOG TRAVAUX ÎLE-DE-FRANCE» (ITIF) ? le directeur des travaux IdF; ? le directeur sécurité DG IdF; ? le directeur de l?établissement ITIF; ? le chef de pôle sécurité de l?établissement ITIF; ? l?expert métier «conduite» de l?établissement ITIF; ? l?expert métier «opérations au sol» de l?établissement ITIF; ? le contrôleur sécurité de l?établissement ITIF (rencontré hors réunion). La réunion a eu lieu dans les locaux de SNCFR. Les points majeurs des investigations menées au sujet des points concernant l?Établissement ITIF ont fait l?objet d?échanges. ? le choix du lieu de la base arrière et du mode d?exploitation; ? les contrats entre SNCF R et ETF S; ? les documents applicables et leurs incohérences; ? la radio de manoeuvre; ? la préparation et mise en oeuvre du processus de manoeuvre; ? les contrôles communs avec ETF S; ? le lieu d?implantation des bungalows. Les points examinés par le BEA-TT ont été présentés. L?échange n?a pas donné lieu à un partage efficace des situations mises en avant. La majorité des participants ne savait pas que les trains assurés par ETFS entre la base travaux de Saint-Florentin-Vergigny et la zone de chantier située vers Melun étaient réalisés sous l?agrément de sécurité de SNCFR. De même, il aura nécessité que le BEA-TT interpelle l?EPSF pour faire accepter aux participants que les opérations de manoeuvre sur le site de la base arrière étaient elles aussi réalisées sous l?agrément de sécurité de SNCFR. 37 Le point concernant la «radio de manoeuvre» qui apparaît pour le BEA-TT comme la cause immédiate de l?événement et qui demeure particulièrement névralgique a obtenu pour réponse: «les règles SNCF R ne prévoient pas la mise à disposition d?un appareil radio possédant les fonctions de «tops sonores» de refoulement et d?un signal d?arrêt d?urgence. Le jour de l?événement cet appareil n?aurait pas conduit à éviter l?événement». Une deuxième réunion a eu lieu à la demande du responsable du département Convois du GI (DGOP). Le BEA-TT a une nouvelle fois présenté l?ensemble des points déjà évoqués dans la réunion précédente. L?écho a été nettement plus favorable. La réalité de leur existence et l?exactitude des analyses ont été pleinement partagés. 38 5 - Conclusions sur la recherche des causes et des facteurs 5.1 - Arbre des causes 39 5.2 - Les causes de l?accident Au terme de l?enquête, le BEA-TT considère que la cause immédiate de l?accident est l?utilisation par ETFS de radios non conformes aux règles établies par SNCFR pour l?exécution de manoeuvres sous son agrément de sécurité. Plusieurs facteurs systémiques ont été identifiés comme concourant à l?événement. Ils apparaissent dans l?arbre des causes. Il est possible de les regrouper par famille: Mise en place des bases arrière ? la non-réalisation d?une étude de risques préventivement à l?installation de bungalows à proximité de voies en impasse; ? l?état global du site qui n?incite pas à la rigueur; ? l?éloignement du site de la zone de chantier. Conception de la production sur les bases arrière ? l?absence de définition du processus de manoeuvre d?un train lourd qui conduit à recourir à la pousse; ? le retard du train à l?arrivée qui conduit à l?empressement des agents et à l?état de fatigue des conducteurs cédants. Réalisation de la production sur les bases arrière ? le manque de rigueur partagé par beaucoup d?acteurs vis-à-vis du respect des règles de production en sécurité qui conduit à ne pas obéir immédiatement aux signaux ni à réaliser les opérations de base comme définies dans les textes métier; ? l?adaptation des journées de service par les agents qui ne respectent pas le point de relève des conducteurs; ? le non-respect des conditions de franchissement de la pancarte «ARRÊT» qui conduit le conducteur de queue à se fourvoyer sur la situation géographique du mouvement; ? la commande de desserrage complet des freins avant la coupe entre les 2 rames qui conduit à ne pas maintenir serrée la rame TEVO après la coupe; ? l?absence de communication entre le conducteur de tête et de queue qui ne lui permet pas de se rendre compte de l?opération de coupe; ? la relève en marche entre les conducteurs qui ne conduit pas à l?arrêt d?urgence de ce mouvement. Management de la sécurité sur les bases arrière ? le contrôle sécurité de SNCF R sur ETF S et le management opérationnel de ETF S qui n?ont pas permis de rétablir le niveau de sécurité des manoeuvres sur le site; ? le non-respect de la Consigne Locale Opérationnelle (CLO). Il apparaît globalement que le choix du site et de son utilisation en site ouvert comme son éloignement des zones de chantier ne sont pas pleinement adaptés au traitement de ce genre de train. Les textes organisationnels comme la CLE et la CLO sont perfectibles et présentent quelques incohérences. La méthode de travail dite «chaîne de manoeuvre» qui a été opérée le jour de l?événement et qui s?opère régulièrement sur le réseau ferré national dans les bases arrière, n?est pas en conformité avec les règles de SNCF R. 40 5.3 - Les mesures prises depuis l?accident 5.3.1 - Mise en oeuvre de la recommandation immédiate par SNCFR 41 42 5.3.2 - Mesures mises en oeuvre par SNCFR SNCF R a fait parvenir au BEA-TT les actions mises en oeuvre post accident en complément des actions réalisées dans le cadre de la recommandation immédiate. ? Action n° 1 Contrôles renforcés en bases arrière mis en place après l?accident sur le périmètre Île-de-France, sur une durée permettant de vérifier l?efficacité des actions. ? Action n° 2 Vérification systématisée de l?implantation des bungalows vis-à-vis des heurtoirs sur les bases arrière des projets de suite rapide Île-de-France. ? Action n° 3 Recours systématisés à des radios homologuées par SNCF Réseau, conformes à l?offre RLE (Radio Locale d?Entreprise), sans être nécessairement équipées de la fonctionnalité BIP de refoulement, après analyse des conditions d?utilisation (longueur des mouvements et vitesse). ? Action n° 4 Animation, sensibilisation des collectifs de régénération industrielle voie de portée nationale. 5.3.3 - Mesures mises en oeuvre par ETFS ETF S a fait parvenir au BEA-TT les actions mises en oeuvre post accident. ? Action n° 1 Augmentation des effectifs au niveau de l'Encadrement Travaux en privilégiant des profils habilités à une (ou des) TES6 ou ayant déjà encadré techniquement une (ou des) TES. ? Action n° 2 Rédaction des «livrets de menaces Conduite / Opérations SOL» pour chaque chantier jugé complexe (Chantiers Grands Projets) et déclinaison aux Opérationnels, en complément des documents d?exploitation obligatoires. ? Action n° 3 Safety DAYS 2024: journées dédiées à la Prévention: Briefing/Débriefing avec ateliers et film dont le message porté est le suivant «avant de savoir ce qu?il ne faut pas faire, encore faut-il savoir ce qui était prévu». ? Action n° 4 Augmentation de la fréquence des KN27 sur les Évaluateurs (sur le vif et a posteriori) afin de s'assurer de la qualité de leur veille exercée sur les Opérationnels. ? Action n° 5 Déploiement des Radios de Manoeuvre avec Top Sonore et Bouton d?alerte sur les bases arrière en accord avec le livret technique IG 97914. ? Action n° 6 Audits externes ETF/ETF Services engagés sur la Base de Saint-Florentin afin de vérifier la nouvelle organisation mise en place, le respect des attendus suite à la mise en place de Responsables Base Arrière (Autorité, application des consignes?) 6 TES: tâches essentielles pour la sécurité. L?arrêté du 7 mai 2015 a pour but de définir la liste des tâches essentielles pour la sécurité (autres que la conduite de trains) et confier à l?employeur la définition des critères d?aptitude physique et psychologique des personnes affectées aux tâches essentielles pour la sécurité (autres que la conduite de trains). 7 KN2: Le système de management de la sécurité implique la mise en place d?une veille sur les opérateurs, associée à un contrôle de niveau 1 (KN1) qui permet à un dirigeant d?unité de s?assurer que ses collaborateurs assurent la veille et un contrôle de niveau 2 (KN2) qui permet à la direction d?une entité de s?assurer du fonctionnement global du système de management dans chacune des unités qui la composent. 43 ? Action n° 7 Définition des Règles d?Or en Base Arrière. Le non-respect de ces règles expose systématiquement à des sanctions. Exemples: -Définition et figeage des points de relève dans la mesure du possible; -Relevé de composition une fois le train formé; -Respect des consignes de calage et application du MT 7320 si absentes dans les Consignes Locales Opérationnelles; -Vérification de l'itinéraire au sol. ? Action n° 8 Planification de l?ensemble des Conducteurs et Agents de manoeuvre ETF Services sur la formation e-learning ETF Academy «communications radio» ? Action n° 9 Relève encadrée sur base arrière par le Chef d?équipe ETF S et figée sur la voie 3G ? Action n° 10 Rédaction d?un Rex sur l?évènement (circonstances et actions correctives) et diffusion aux équipes pour partage et application. ? Action n° 11 Création d?une Direction Sécurité Ferroviaire (DSF), composée d?experts métier issus de divers horizons, au service d?ETF Grands Projets et ETF Services. Les missions de cette direction incluront: - Audits internes (KN2 et Référentiel CSU8) et audits de chantier (base arrière), - Analyse des risques des chantiers et des bases arrière, - Analyse des incidents et production de rapports, - Redéfinition des lignes directrices en matière de sécurité ferroviaire (formation, montée en compétences). 8 CSU: Certificat de sécurité unique. La transposition en droit français de la directive (UE) 2016/798 relative à la sécurité ferroviaire par le décret n° 2019-525 du 27 mai 2019 relatif à la sécurité et à l?interopérabilité du système ferroviaire prévoit que chaque entreprise ferroviaire est dans l?obligation d?élaborer son système de gestion de la sécurité, lequel doit expliciter «l?organisation, les modalités et les procédures établies pour assurer la gestion sûre de ses propres opérations». Pour ce faire et afin d?assurer des services de transport ferroviaire au sein du système ferroviaire (fret et voyageurs), une entreprise ferroviaire (entreprise titulaire, sauf cas particuliers, d?une licence d?entreprise ferroviaire délivrée, en France, par le ministère chargé des Transports) doit être titulaire d?un certificat de sécurité unique (CSU). 44 Conclusion (english version) Causes of the accident At the end of the investigation, the BEA-TT considers, in light of the findings and testimonies collected, that the immediate cause of the accident was the use by ETF S of radios that did not comply with the rules established by SNCF R for the execution of maneuvers under its safety approval. Several systemic factors were identified as contributing to the event. They appear in the cause tree. They can be grouped by family: Setting up rear bases ? failure to carry out a risk study as a preventive measure for the installation of bungalows near dead-end tracks; ? the overall condition of the site, which does not encourage rigor. ? the distance of the site from the construction area. Design of production on rear bases ? the lack of definition of the maneuvering process for a heavy train, which leads to the use of pushing; ? the delay of the train on arrival which leads to the haste of the agents and the fatigue of the yielding drivers. Production on the rear bases ? the lack of rigor shared by many actors with regard to compliance with the rules of safe production which leads to not immediately obeying the signals or carrying out the basic operations as defined in the professional texts; ? the adaptation of the service days by the agents who do not respect the point of change of the drivers; ? the non-compliance with the conditions of crossing the "STOP" sign which leads the rear driver to get confused about the geographical location of the movement; ? the order to completely release the brakes before the cut between the 2 trains which leads to not keeping the TEVO train tight after the cut; ? the lack of communication between the head and rear driver which does not allow him to realize the cutting operation; ? the changeover between drivers that does not lead to the emergency stop of this movement. Safety management on the rear bases ? the safety control of SNCF R on on ETF S and the operational management of ETF S which did not restore the level of safety of the maneuvers on the site; ? the non-compliance with the Local Operational Instructions (CLO). It appears overall that the choice of the site and its use on an open site as well as its distance from the construction sites are not fully adapted to the processing of this type of train. The organizational texts such as the CLE and the CLO are perfectible and present some inconsistencies. The working method called "shunting chain" which was carried out on the day of the event and which is regularly carried out on the national rail network in the rear bases, is not in compliance with the rules of SNCF R. 45 Measures taken since the accident Measures implemented by SNCF R SNCF R sent the BEA-TT the actions implemented after the accident in addition to the actions carried out as part of the immediate recommendation. Action No. 1 Reinforced checks at the rear bases implemented after the accident in the Île-de-France area, over a period of time to verify the effectiveness of the actions. Action No. 2 Systematic verification of the location of bungalows with regard to the bumpers at the rear bases of the Île-de-France rapid follow-up projects. Action No. 3 Systematic use of radios approved by SNCF Réseau, compliant with the RLE offer, without necessarily being equipped with the BIP push-back functionality, after analysis of the conditions of use (length of movements and speed). Action No. 4 Animation, awareness-raising of industrial track regeneration groups of national scope. Measures implemented by ETF S ETF S has sent the BEA-TT the actions implemented after the accident. Action No. 1 Increase the workforce at the Works Management level by prioritizing profiles authorized for one (or more) TES1 or having already technically supervised one (or more) TES. Action No. 2 Drafting of "Ground Operations / Management threat booklets" for each construction site deemed complex (Major Project Sites) and adaptation to Operational staff, in addition to the mandatory operating documents. Action No. 3 Safety DAYS 2024: days dedicated to Prevention: Briefing/Debriefing with workshops and film whose message is as follows "before knowing what not to do, you still need to know what was planned". Action No. 4 Increase the frequency of KN22s on Evaluators (on the spot and a posteriori) in order to ensure the quality of their monitoring of Operational Staff. Action No. 5 Deployment of Maneuvering Radios with Sound Top and Alert Button on the rear bases in accordance with the IG 97 914 technical booklet. Action No. 6 External ETF/ETF Services audits engaged on the Saint-Florentin Base in order to verify the new organization set up, compliance with expectations following the establishment of Rear Base Managers (Authority, application of instructions, etc.) Action No. 7 Definition of the Golden Rules in the Rear Base. Failure to comply with these rules systematically exposes you to sanctions. Examples: - Definition and freezing of handover points as far as possible; 46 - Composition survey once the train is formed; - Compliance with the timing instructions and application of MT 7320 if absent in the Local Operational Instructions; - Verification of the route on the ground. Action No. 8 Planning of all ETF Services Drivers and Shunters on the ETF Academy e-learning training "radio communications" Action No. 9 Supervised handover on the rear base by the ETF S Team Leader and fixed on the 3G track Action No. 10 Drafting of a Rex on the event (circumstances and corrective actions) and distribution to the teams for sharing and application. Action No. 11 Creation of a Railway Safety Department (DSF), composed of business experts from various backgrounds, at the service of ETF Grands Projets and ETF Services. The missions of this department will include: - Internal audits (KN2 and CSU3 Reference) and site audits (rear base), - Analysis of site and rear base risks, - Analysis of incidents and production of reports, - Redefinition of railway safety guidelines (training, skills development). 47 6 - Les recommandations et les invitations en matière de sécurité Les 6 recommandations de sécurité directement liées à l?accident et des invitations de sécurité associées sont à rechercher dans les domaines suivants: ? la mise en place des bases arrière; ? la conception des processus de production sur les bases arrière; ? la mise oeuvre des processus de production sur les bases arrière; ? le management de la sécurité sur les bases arrière. Une invitation de sécurité complémentaire, liée aux investigations concerne: ? la méthode de travail non conventionnelle pour les refoulements guidés par radio en phonie. 6.1 - Mise en place des bases arrière ? la non-réalisation d?une étude de risques préventivement à l?installation de bungalows à proximité de voies en impasse. Le BEA-TT a constaté que la situation des bungalows et des zones de stationnement de véhicules personnels a été choisie sans une évaluation des risques compte tenu de leur position par rapport à deux voies en impasse sur lesquelles des refoulements ont lieu quotidiennement. L?accident n?a pas fait de victime, car le retard du train a conduit tous les opérateurs à se situer hors cette zone pour être prêts à mettre en oeuvre les opérations de maintenance. ? l?état global du site qui n?incite pas à la rigueur. Le BEA-TT a constaté sur site que l?état des chemins utilisés par le personnel et que des implantations de signaux n?obéissant pas aux règles ne sont pas propices à la rigueur. ? l?éloignement du site de la zone de chantier. Le BEA-TT a constaté que le retard du train usine à l?arrivée sur le site est lié à sa sortie tardive du chantier et aux conflits de circulation induits lors du passage de noeuds ferroviaires. Des parcours de moindre importance entre la zone de chantier et la base arrière limiteraient cet inconvénient. Le BEA-TT émet la recommandation ci-dessous. Recommandation R1 à l?attention de SNCF Réseau: Veiller sur les bases arrière, lieux de production ferroviaire, au bon état et à la propreté des pistes de cheminement, à la mise en place de signaux conformes à la réglementation et à la mise en place d?éléments constitutifs de la base vie et de zones de stationnement de manière à maîtriser le risque de heurt par une circulation ferroviaire. Intégrer dans les critères de choix du positionnement de la base arrière, par rapport à la zone de chantier, la volonté de limiter la distance à parcourir pour maîtriser les risques vis-à-vis de la sécurité de l?exploitation ferroviaire et du personnel. 48 6.2 - Conception des processus de production sur les bases arrière ? l?absence de définition du processus de manoeuvre d?un train lourd qui conduit à recourir à la pousse. Le BEA-TT a constaté que la mise en oeuvre des manoeuvres pour traiter des situations à risques comme la manoeuvre du train usine n?avait pas fait l?objet de la définition d?un processus par l?entreprise ETF S. Le BEA-TT émet la recommandation ci-dessous. Recommandation R2 à l?attention de ETFS: Concevoir des processus de production et supports pour toutes les opérations de manoeuvre courantes, notamment de trains lourds sur les bases arrière avant leur mise en service. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. ? le retard du train à l?arrivée qui conduit à l?empressement des agents et à l?état de fatigue des conducteurs cédants. Le BEA-TT a constaté que le retard à l?arrivée du train usine et que l?état de fatigue des 2 conducteurs cédants ont conduit à vouloir limiter le temps nécessaire aux manoeuvres en prenant des libertés excessives avec la réglementation. Le BEA-TT émet la recommandation ci-dessous. Recommandation R3 à l?attention de SNCF R et de ETF S: Intégrer dans les briefings réalisés sur les bases arrière, l?importance de l?anticipation des situations dégradées prévisibles comme le traitement des problématiques induites par le retard du train à traiter et la prise en compte de l?état de fatigue d?opérateurs. Insister sur l?absolue nécessité de mettre en oeuvre les processus de production dans le respect des règles de sécurité. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. 6.3 - Mise en oeuvre des processus de production sur les bases arrière ? le manque de rigueur partagé par beaucoup d?acteurs vis-à-vis du respect des règles de production en sécurité qui conduit à ne pas obéir immédiatement aux signaux ni à réaliser les opérations de base comme définies dans les textes métier; ? l?adaptation des journées de service par les agents qui ne respectent pas le point de relève des conducteurs; ? le non-respect des conditions de franchissement de la pancarte «ARRÊT» qui conduit le conducteur de queue à se fourvoyer sur la situation géographique du mouvement; ? la commande de desserrage complet des freins avant la coupe entre les 2 rames qui conduit à ne pas maintenir serrée la rame TEVO après la coupe; ? l?absence de communication entre le conducteur de tête et de queue qui ne lui permet pas de se rendre compte de l?opération de coupe; ? la relève en marche entre les conducteurs qui ne conduit pas à l?arrêt d?urgence de ce mouvement. Le BEA-TT a constaté un large spectre d?écarts aux règles de sécurité concernant majoritairement les conducteurs. Ces écarts ont pour points communs un manque de 49 rigueur de l?opérateur et la non-perception du risque créé voire subi. Il ne peut s?agir de situations à caractère exceptionnel. Nécessairement, il s?agit de libertés prises au fil du temps, insuffisamment prises en compte par le management opérationnel, et devenues un état de fait récurrent. Le BEA-TT émet ainsi la recommandation suivante. Recommandation R4 à l?attention de ETFS: Consolider le management opérationnel sur les bases arrière pour garantir la mise en oeuvre des processus de production dans le respect scrupuleux des règles. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. 6.4 - Management de la sécurité sur les bases arrière ? le contrôle sécurité de SNCFR sur l?entreprise qualifiée ETF S sous-traitante de ETF et le management de ETFS qui n?ont pas permis de rétablir le niveau de sécurité des manoeuvres sur le site. Le BEA-TT a constaté que le contrôle sécurité exercé par SNCFR sur ETF S réalisé quelques jours avant l?événement, comme celui exercé en interne par ETFS, se sont révélés inopérants pour identifier les écarts majeurs aux règles structurant la sécurité sur le réseau ferré national et pour prendre des mesures immédiates qui auraient évité l?événement. Le BEA-TT émet ainsi la recommandation suivante. Recommandation R5 à l?attention de SNCF Réseau et ETFS: Redéfinir des modes de contrôle sécurité efficaces et rigoureux pour chaque exploitant et des modes de contrôles communs et réguliers sur les bases arrière pour améliorer leur niveau de sécurité en s?assurant notamment des conditions minimales en matière de compétences des personnels en charge des contrôles sécurité. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. ? non-respect de la Consigne Locale Opérationnelle (CLO) Le BEA-TT a constaté que la CLO n?était pas prise en considération lors de l?établissement du contrat entre SNCFR, ETF et ETF S et qu?elle n?était pas connue du contrôleur sécurité de SNCFR. Le BEA-TT émet ainsi la recommandation suivante. Recommandation R6 à l?attention de SNCF Réseau et ETFS: Vérifier que les textes structurant la sécurité de l?exploitation ferroviaire applicables sur les bases arrière sont pris en compte pour l?établissement des contrats écrits par SNCF R et que les acteurs du management de la sécurité les maîtrisent. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. 50 6.5 - La méthode de travail non conventionnelle ? la méthode de travail dite «chaîne de manoeuvre». Le BEA-TT a constaté que cette méthode qui consiste, lors d?une manoeuvre en refoulement guidée par radio en phonie, en la mise en place d?une succession d?opérateurs qui tour à tour commandent le refoulement en phonie par radio sans discontinuité du mouvement est contraire au texte de SNCF R numéroté MT7320. Le BEA-TT émet ainsi l?invitation suivante. Invitation à l?attention de SNCF Réseau et de l?EPSF: Proscrire le recours à la méthode dite de la «chaîne de manoeuvre» pour les refoulements guidés par radio en phonie sur le réseau ferré national pour les agents de SNCFR et des EF qualifiées par ses soins opérant sous son agrément de sécurité. 51 Safety recommendations (english version) Safety recommendations directly related to the accident are to be sought in the following areas: ? the establishment of rear bases; ? the design of production processes on the rear bases; ? the implementation of production processes on the rear bases; ? safety management on the rear bases; An additional safety invitation, linked to the investigations concerns: ? the unconventional working method for radio-guided pushbacks in speech. Setting up rear bases ? the failure to carry out a risk study as a precaution against installing bungalows near dead-end tracks. The BEA-TT noted that the location of the bungalows and the parking areas for personal vehicles was chosen without a risk assessment given their position in relation to two dead- end tracks on which traffic is pushed back daily. The accident did not cause any casualties, as the train delay led all operators to be located outside this area to be ready to carry out maintenance operations. ? the overall condition of the site which does not encourage rigour. The BEA-TT noted on site that the condition of the paths used by staff and the signal installations which do not comply with the rules are not conducive to rigour. ? the distance of the site from the construction zone. The BEA-TT noted that the delay of the factory train on arrival at the site is linked to its late departure from the construction site and to traffic conflicts caused when passing through railway junctions. Shorter distances between the construction zone and the rear base would limit this inconvenience. The BEA-TT issues the recommendation below. Recommendation R1 for the attention of SNCF Réseau: Ensure that the rear bases, railway production sites, ensure that the tracks are in good condition and clean, that signals are in place that comply with regulations and that components of the base camp and parking areas are in place so as to control the risk of collision with railway traffic. Integrate into the criteria for choosing the positioning of the rear base, in relation to the construction site area, the desire to limit the distance to be covered in order to control the risks with regard to the safety of railway operations and staff. 52 Design of production processes on rear bases ? the lack of definition of the process for shunting a heavy train, which leads to the use of pushing. The BEA-TT noted that the implementation of shunting to deal with risky situations such as shunting the factory train had not been defined as a process by the company ETF S. The BEA-TT issues the following recommendation. Recommendation R2 for ETF S: Design production processes and supports for all routine shunting operations of heavy trains particularly, on rear bases before they are put into service SNCF R is invited to pass on this recommendation to all RUs qualified by it and operating under its safety approval. ? the delay of the train on arrival, which leads to the haste of the agents and the fatigue of the yielding drivers. The BEA-TT noted that the delay in the arrival of the factory train and the fatigue of the 2 drivers who gave way led to a desire to limit the time needed for the maneuvers by taking excessive liberties with the regulations. The BEA-TT issues the recommendation below. Recommendation R3 for the attention of SNCF R and ETF S: Integrate into the briefings carried out on the rear bases, the importance of anticipating foreseeable degraded situations such as dealing with problems caused by the delay of the train to be dealt with and taking into account the fatigue of operators. Insist on the absolute necessity of implementing production processes in compliance with safety rules. SNCF R is invited to relay this recommendation to all RUs qualified by it and operating under its safety approval. Implementation of production processes on the rear bases ? the lack of rigor shared by many actors with regard to compliance with the rules of safe production which leads to not immediately obeying the signals or carrying out the basic operations as defined in the professional texts; ? the adaptation of the service days by the agents who do not respect the driver's handover point; ? the non-compliance with the conditions for crossing the "STOP" sign which leads the rear driver to get confused about the geographical location of the movement; ? the command to completely release the brakes before the cut between the 2 trains which leads to not keeping the TEVO train tight after the cut; ? the lack of communication between the head and rear driver which does not allow him to be aware of the cutting operation; ? the handover in progress between the drivers which does not lead to the emergency stop of this movement. 53 The BEA-TT has noted a wide range of deviations from safety rules, mainly concerning drivers. These deviations have in common a lack of rigor on the part of the operator and the failure to perceive the risk created or even suffered. These cannot be exceptional situations. Necessarily, these are liberties taken over time and insufficiently taken into account by operational management to become a recurring state of affairs. The BEA-TT therefore issues the following recommendation. Recommendation R4 for the attention of ETF S: Consolidate operational management on the rear bases to guarantee the implementation of production processes in strict compliance with the rules. SNCF R is invited to relay this recommendation to all EFs qualified by it and operating under its safety approval. Safety management at the rear bases ? the safety inspection by SNCF R on the qualified company ETF S, a subcontractor of ETF and the management of ETF S which did not allow the level of safety of the maneuvers on the site to be restored. The BEA-TT noted that the safety inspection carried out by SNCF R on its subcontractor carried out a few days before the event, as well as that carried out internally by ETF S, proved ineffective in identifying major deviations in compliance with the rules structuring safety on the national rail network and in taking immediate measures that would have prevented the event. The BEA-TT therefore issues the following recommendation. Recommendation R5 for the attention of SNCF Réseau and ETF S: Redefine effective and rigorous safety inspection methods for each operator and common and regular inspection methods on the rear bases to improve their level of safety by ensuring in particular the minimum conditions in terms of skills of the personnel in charge of safety inspections. SNCF R is invited to relay this recommendation to all EFs qualified by it and operating under its safety approval. ? non-compliance with the Local Operational Instructions (CLO) The BEA-TT noted that the CLO was not taken into consideration in establishing the contract between SNCF R, ETF and ETF S and that it was not known to the SNCF R safety controller. The BEA-TT therefore issues the following recommendation. Recommendation R6 for the attention of SNCF Réseau and ETF S: Check that the texts structuring the safety of railway operations applicable on the rear bases are taken into account for the establishment of the contracts written by SNCF R and that the safety management stakeholders master them. SNCF R is invited to relay this recommendation to all RUs qualified by it and operating under its safety approval. 54 The unconventional working method ? the working method known as the "shunting chain". The BEA-TT has noted that this method, which consists, during a pushback maneuver guided by radio in speech, of setting up a succession of operators who take turns controlling the pushback in speech by radio without discontinuity of movement, is contrary to the SNCF R text numbered MT 7320. The BEA-TT therefore issues the following invitation. Invitation to the attention of SNCF Réseau and EPSF: Prohibit the use of the so-called "shunting chain" method for pushbacks guided by radio in speech on the national rail network for SNCF R agents and RUs qualified by it operating under its safety approval. 55 ANNEXES Annexe 1: décision d?ouverture d?enquête Annexe 2: les enregistrements 56 Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête 57 Annexe 2: les enregistrements Atess locomotive G1206, conducteurs A et B Ci-dessus le fichier texte qui permet de discerner les moments particuliers du mouvement de manoeuvre juste avant l?accident. On distingue particulièrement l?arrêt pour la coupe, le moment où se produit la collision avec les 2 wagons plats et toute la décélération obtenue sans commande de freinage commandée par le conducteur mais due à la résistance à l?avancement des véhicules déraillés et par le fonctionnement de l?automaticité du frein suite à la rupture de la conduite générale. 58 Ci-contre un extrait de la courbe de vitesse du train qui permet d?identifier l?absence d?arrêt sur la voie 3G lors de la réception du train à Saint-Florentin-Vergigny. On distingue le moment de la collision de la rame «TEVO» avec les 2 wagons plats stationnant sur le voie 7. Enregistrement SIBAS «matériel» locomotive G1206 Cet enregistrement a permis de montrer que le conducteur A avait correctement disposé sa locomotive en «pousse» lors de l?arrêt sur la voie 17. Atess locomotive E4000, conducteurs C et D 59 On distingue clairement les différents mouvements depuis la réception du train sur la voie 3G, l?arrêt sur la voie 17 avec la locomotive E4000 en «pousse», puis les autres mouvements avec la même locomotive cette fois en tête. Le non respect de la pancarte «ARRET» est flagrant, sa place le situerait lors du mouvement en «Tirez» depuis la voie 17 sur la voie 11. Ci-dessus le fichier texte qui permet de discerner les moments particuliers du mouvement de manoeuvre juste avant l?accident. On distingue particulièrement le non-respect de la pancarte «ARRÊT» lors du mouvement en «Tirez» depuis la voie 17 sur la voie 11 pour atteindre le point de coupe. L?alimentation à 5 bars de la CG avant la réalisation de la coupe est établi par la mesure de la CG>4,7 bars, 8 secondes après l?arrêt. 60 Règlement général de protection des données Le bureau d?enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) est investi d?une mission de service public dont la finalité est la réalisation de rapports sur les accidents afin d?améliorer la sécurité des transports terrestres (articles L. 1621-1 et 1621-2 du code des transports, voir la page de présentation de l?organisme). Pour remplir cette mission, les personnes chargées de l?enquête, agents du BEA-TT habilités ainsi que d?éventuels enquêteurs extérieurs spécialement commissionnés, peuvent rencontrer toute personne impliquée dans un accident de transport terrestre (articles L. 1621-14) et recueillir toute donnée utile. Ils traitent alors les données recueillies dans le cadre de l?enquête dont ils ont la responsabilité uniquement pour la seule finalité prédéfinie en garantissant la confidentialité des données à caractère personnel. Les rapports d?enquêtes sont publiés sans le nom des personnes et ne font état que des informations nécessaires à la détermination des circonstances et des causes de l?accident. Les données personnelles sont conservées pour une durée de 4 années à compter de la publication du rapport d?enquête, elles sont ensuite détruites. Le traitement «Enquête accident BEA-TT» est mis en oeuvre sous la responsabilité du BEA-TT relevant du ministère des transports. Le ministère s?engage à ce que les traitements de données à caractère personnel dont il est le responsable de traitement soient mis en oeuvre conformément au règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l?égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (ci-après, «règlement général sur la protection des données» ou RGPD) et à la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l?informatique, aux fichiers et aux libertés. Les personnes concernées par le traitement, conformément à la législation en vigueur, peuvent exercer leurs droits auprès du responsable de traitement: droit d?accès aux données, droit de rectification, droit à la limitation, droit d?opposition. Pour toute information ou exercice de vos droits, vous pouvez contacter: 1- Le responsable de traitement, qui peut être contacté à l?adresse suivante: - à l?adresse: bea-tt@developpement-durable.gouv.fr - ou par courrier (avec copie de votre pièce d?identité en cas d?exercice de vos droits) à l?adresse suivante: Ministère des transports À l?attention du directeur du BEA-TT Grande Arche - Paroi Sud, 29e étage, 92055 LA DEFENSE Cedex 2- Le délégué à la protection des données(DPD) du ministère: - à l?adresse suivante: ajag2.daj.sg@developpement-durable.gouv.fr ; - ou par courrier (avec copie de votre pièce d?identité en cas d?exercice de vos droits) à l?adresse suivante: Ministère des transports À l?attention du Délégué à la protection des données SG/DAJ/AJAG2 92055 La Défense cedex Vous avez également la possibilité d?adresser une réclamation relative aux traitements mis en oeuvre à la Commission nationale informatique et libertés. (3 Place de Fontenoy - TSA 80715 - 75334 PARIS CEDEX 07) 61 Bureaud?Enquêtessur lesAccidentsdeTransport Terrestre ? GrandeArche -Paroi Sud 92055LaDéfensecedex Téléphone : 01 40 81 21 83 bea-tt@developpement-durable.gouv.fr www.bea-tt.developpement-durable.gouv.fr 1 - Synthèse Summary (english version) 2 - L?enquête et son contexte 2.1 - Les circonstances de l?accident 2.2 - Le bilan de l?accident 2.3 - Les entreprises impliquées et leurs liens 2.4 - L?engagement de l?enquête 3 - La description du fait survenu 3.1 - Le contexte de l?accident 3.1.1 - Le site de l?événement 3.1.2 - La rame accidentée 3.1.3 - La météorologie 3.2 - Description factuelle des évènements 3.2.1 - Constitution du train et équipage 3.2.2 - Les témoignages 3.2.2.1 - Les agents présents sur le terrain: 3.2.2.2 - Les acteurs sur le terrain 3.2.2.3 - Les principaux témoignages 3.2.3 - Habilitation des agents et respect du temps de travail 3.2.4 - Les postes radio utilisés par le personnel ETFS sur la base arrière de Saint?Florentin-Vergigny 3.2.5 - Le dépouillement des enregistrements 3.2.6 - La vérification du fonctionnement des appareils de commande du frein des deux locomotives 3.2.7 - Les dommages 4 - Analyse du fait survenu 4.1 - L?état du site 4.2 - La répartition des tâches par le responsable des manoeuvres 4.3 - Le retard du train et l?interaction sur les opérateurs du site 4.4 - L?état de fatigue des conducteurs cédants A et C. 4.5 - La réception du train sur la voie 3 Garage et le mouvement en «Tirez» sur la voie17 4.6 - Le mouvement en «Tirez» sur la voie 11 et la pousse 4.7 - Le franchissement de la pancarte «ARRÊT» 4.8 - La coupe des 2 rames (rames Bloc et TEVO) 4.8.1 - Principes de fonctionnement du frein continu automatique 4.8.2 - État des freins des rames Bloc et TEVO 4.9 - Le mouvement en «Tirez» de la rame Bloc sur la voie 9bis 4.10 - Le mouvement en «Refoulez» de la rame TEVO sur la voie 7 4.11 - La collision de la rame TEVO sur la voie7 avec les deux wagons plats 4.12 - La collision des wagons plats avec les bungalows et des véhicules en stationnement 4.13 - Protection des agents de maintenance et recherche d?éventuelles victimes 4.14 - L?organisation et le fonctionnement du site 4.14.1 - Le choix du site et son utilisation en site ouvert 4.14.2 - Les textes organisationnels 4.14.3 - Les radios de manoeuvre utilisées 4.14.4 - La pousse en manoeuvre 4.14.5 - La méthode dite «chaîne de manoeuvre» 4.14.6 - Le contrôle sécurité de SNCF R de l?entreprise qualifiée ETF S et le management des DBA 4.15 - La reconstitution des faits 4.16 - Rencontre des dirigeants des entreprises impliquées et des experts métiers 5 - Conclusions sur la recherche des causes et des facteurs 5.1 - Arbre des causes 5.2 - Les causes de l?accident 5.3 - Les mesures prises depuis l?accident 5.3.1 - Mise en oeuvre de la recommandation immédiate par SNCFR 5.3.2 - Mesures mises en oeuvre par SNCFR 5.3.3 - Mesures mises en oeuvre par ETFS Conclusion (english version) 6 - Les recommandations et les invitations en matière de sécurité 6.1 - Mise en place des bases arrière 6.2 - Conception des processus de production sur les bases arrière 6.3 - Mise en oeuvre des processus de production sur les bases arrière 6.4 - Management de la sécurité sur les bases arrière 6.5 - La méthode de travail non conventionnelle Safety recommendations (english version) ANNEXES Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête Annexe 2: les enregistrements Atess locomotive G1206, conducteurs A et B Enregistrement SIBAS «matériel» locomotive G1206 Atess locomotive E4000, conducteurs C et D Règlement général de protection des données INVALIDE) (ATTENTION: OPTION issement et d?arrêt qu?il entend parfois et qui le concernent. Pour le BEA-TT cette méthode non réglementaire s?effectue sans qu?une organisation ne soit mise en place par l?EF ETFS après validation par SNCF R, décrite dans un texte et contrôlée par les encadrants. C?est une des causes de l?événement. 4.14.5 - La méthode dite «chaîne de manoeuvre» La méthode appelée «chaîne de manoeuvre» s?opère par la mise en place d?une succession d?opérateurs qui tour à tour commandent le refoulement en phonie par radio sans discontinuité du mouvement. Les investigations menées par le BEA-TT ont vérifié que cette méthode est largement répandue dans les entreprises sous traitantes de SNCFR et que sa mise en oeuvre régulière est connue par SNCF R. Le document MT07320 de SNCFR est applicable pour toute manoeuvre de SNCFR exécutée sur le réseau ferré national dans le cadre de son agrément de sécurité. Il en est de même pour l?entreprise qualifiée par ses soins agissant elle aussi sous l?agrément sécurité du GI SNCFR. Ce document ne traite pas de la méthode dite «chaîne de manoeuvre». Dans sa fichen°51-01, le document MT07320 s?oppose à sa mise en oeuvre en imposant l?arrêt systématique du mouvement lors du remplacement de l?agent commandant le mouvement au cours d?une manoeuvre. Cette méthode de travail a été mise en oeuvre lors du refoulement de la rame TEVO sur la voie 7. Elle n?appartient pas aux causes qui ont conduit à l?accident. Le BEA-TT estime toutefois qu?il est dangereux, qu?une méthode de cette envergure, pour un mouvement aussi particulier qu?un refoulement, puisse être mise en oeuvre de façon habituelle alors qu?elle est en opposition avec les prescriptions applicables. Cette situation interroge sur les contrôles et les audits internes de sécurité menés jusque-là, qui n?ont pas identifié ce point comme un écart majeur aux règles ce qui aurait permis de mettre fin à une pratique hors cadre réglementaire. 4.14.6 - Le contrôle sécurité de SNCF R de l?entreprise qualifiée ETF S et le management des DBA Un cadre du GI SNCFR s?est rendu sur le site de Saint-Florentin-Vergigny les 8 et 9janvier2024. L?après-midi du 8 janvier a été consacrée à un contrôle sécurité d?opérateurs de ETFS assurant des manoeuvres sous l?agrément de sécurité de SNCFR, la matinée du 09/01 a été utilisée au management des DBA dont il est le hiérarchique. Le contrôle sécurité a fait l?objet d?un compte rendu. Il ne permet pas d?identifier les types de mouvement qui ont été observés et leur ampleur. L?appréciation générale est: Contrôle acceptable, quelques points à perfectionner. Échange auprès du manager Ferroway, de rappeler aux opérateurs au sol, qu?il est primordial, d?appliquer les missions qui leur sont confiées et de rester dans leurs périmètres d?actions. Le contrôleur déclare avoir constaté l?emploi de postes talkie-walkie utilisés par les opérateurs ETFS. Lorsque le BEA-TT fait état que ces postes sont non conformes à la MT07320 (fiche n°51.12) et n?ont pas été remis par le DBA comme le prévoit la CLO dans son point 5.13, le contrôleur répond qu?il ne connaît pas ces obligations. Le suivi managérial des DBA a conduit le cadre de l?établissement ITIF à observer que les DBA assuraient la protection du personnel intervenant sur le TEVO alors que la CLO indique dans son point 9.1 que c?est une mission qui appartient à l?AC de la gare de 34 Saint-Florentin-Vergigny. Le cadre SNCF R mis face à la situation répond qu?il ne connaît pas cette obligation. La connaissance du document CLO n?est pas maîtrisée par le contrôleur sécurité de SNCFR. Cette méconnaissance l?a conduit à ne pas discerner des écarts importants dans la mise en oeuvre d?opérations de sécurité et à valider tacitement le renouvellement de situations non conformes. Pour le BEA-TT n?avoir pas identifié que les postes radio de manoeuvre utilisés par les opérateurs de ETFS n?étaient pas conformes et de ce fait ne pas avoir pris de mesure immédiate pour rétablir la situation au niveau attendu est une des causes de l?événement. 4.15 - La reconstitution des faits L?exploitation des enregistrements a permis de s?assurer que le non-serrage de la rame TEVO après la coupe avec la rame Bloc n?avait pas de lien avec un dysfonctionnement des locomotives ou une action non attendue de la part du conducteurA de la G1206. Ceci implique que la coupe a été réalisée alors que la pression à la CG était à 5 bars de part et d?autre du point de la coupe et que la fermeture quasi simultanée des 2 robinets d?arrêt CG n?a pas provoqué de chute de pression suffisante à la CG pour conduire à un serrage gradué de la partie TEVO. L?interprétation de l?ATESS de la locomotive E4000 s?oppose aux déclarations des 2conducteursC et D qui étaient persuadés d?avoir constaté une dépression de 1,5bar à la CG lors de la relève. Une reconstitution en salle a été organisée avec l?aide essentielle des représentants de ETFS qui ont mis à disposition des enquêteurs du BEA-TT l?ensemble du personnel impliqué. Reconstitution en salle Chaque situation depuis l?entrée du train sur la voie3 Garage jusqu?à la collision de la rame TEVO avec les wagons plats sur la voie7 a fait l?objet d?un partage complet (faits, témoignages, lecture et interprétation des enregistrements, retour aux textes). Les écarts aux règles mis en avant par le BEA-TT ont été admis par les participants. Les conducteursC et D de la locomotive E4000 demeurant persuadés que la coupe avait été réalisée avec une pression à la CG de l?ordre de 3,5bars, une reconstitution sur le terrain a été organisée avec le concours des représentants de ETFS. Reconstitution sur le terrain Le personnel directement impliqué, les 2 locomotives utilisées le jour de l?accident et une rame de wagons ont été mis à la disposition des enquêteurs du BEA-TT. Seule la partie coupe entre les rames Bloc et TEVO a été observée. Les opérations liées à la conduite et aux opérations au sol ont fait l?objet d?un chronométrage pour chaque action connue ou déclarée par les agents. Le résultat des observations «conduite» a fait l?objet d?une comparaison avec les propos tenus et les enregistrements évoqués lors de la reconstitution en salle. Ceci a conduit les 2 conducteurs à admettre qu?ils s?étaient persuadés à tort du maintien de la dépression de 1,5bar à la CG pendant la coupe. Les agents ont compris que la commande de desserrage complet avait été obligatoirement commandée en amont de l?arrêt, que la CG était à 5 bars lors de la coupe et que l?immobilisation était obtenue par l?action conjuguée 35 du frein direct de la locomotive E4000 et du freinage des 2 rames en cours de desserrage complet. L?opérateur au sol a refait les gestes et déplacements qu?il a exécutés le jour de l?accident. La méthode pour dételer entre 2 wagons est correctement mise en oeuvre par rapport aux règles définies. La fermeture du robinet d?arrêt CG situé côté source est réalisée en premier lieu. Sa dextérité conduit à fermer le deuxième robinet avec un décalage de temps si court qu?il interdit une mise à l?atmosphère suffisante de la CG (par le trou de fuite du robinet d?arrêt fermé côté source) pour commander un freinage. Le BEA-TT en déduit que la CG était à 5bars lors de la coupe et que la fermeture quasi instantanée des robinets d?arrêt CG a maintenu la CG à 5bars dans les 2rames. L?absence de freinage gradué maintenu pendant la coupe est une cause de l?événement. Les enquêteurs du BEA-TT soulignent la bonne volonté de l?ensemble des agents de ETFS pour identifier toutes les causes ayant conduit à l?accident. Tous les agents, sans exception, se sont montrés constructifs lors des échanges. Le BEA-TT a apprécié l?aide fournie par ETFS pour organiser rapidement sur les lieux de l?événement ces 2reconstitutions avec des moyens humains et logistiques conséquents. 4.16 - Rencontre des dirigeants des entreprises impliquées et des experts métiers Dans le cadre des investigations, les enquêteurs du BEA-TT ont été reçus par les représentants des deux entreprises pour partager les points saillants de l?enquête. Chacune de ces réunions a fait l?objet d?un compte rendu réalisé par le BEA-TT et envoyé aux participants. ETF Service: ? le directeur; ? le chef d?agence; ? le directeur sécurité; ? l?expert métier «conduite»; ? l?expert métier «opérations au sol». La réunion a eu lieu dans les locaux de l?entreprise ETFS. Les points majeurs des investigations menées au sujet des points concernant ETFS ont fait l?objet d?échanges: ? les contrats avec SNCF R; ? les documents applicables; ? la radio de manoeuvre; ? la préparation et mise en oeuvre du processus de manoeuvre; ? la veille sur les opérateurs et les contrôles communs avec SNCF R; ? le lieu d?implantation des bungalows. Les points étudiés par le BEA-TT ont été présentés. Les écarts aux règles en opérationnel comme les faiblesses de l?organisation et celles du management sur le site ont reçu un écho favorable de ETFS. On notera que le TEVO était sur les lieux depuis seulement une semaine ce qui n?a pas favorisé la réalisation de la veille. D?ores et déjà, ETFS a pris des mesures pour améliorer le niveau de sécurité de sa production. Ces points seront listés dans la partie 5.3 du rapport. 36 SNCF R: Composante Exploitation (EIC PSE) ? le dirigeant de la gare de Saint-Florentin-Vergigny (DPX); ? le chef de pôle sécurité et son adjoint; ? le rédacteur de la CLE. La réunion a eu lieu dans les locaux de SNCF R. Les points majeurs des investigations menées au sujet des points concernant l?EIC ont fait l?objet d?échanges: ? les incohérences et imprécisions de la CLE; ? le COSIT qui n?est pas intégré dans le suivi des manoeuvres; ? l?absence de protection pour le personnel intervenant sur le matériel roulant. Les points analysés par le BEA-TT ont été présentés. L?EIC a reconnu la réalité des situations mises en avant et pris acte des points à modifier. Les résultats seront listés dans la partie 5.3 du rapport. Composante Maintenance et Travaux Direction Sécurité de la Direction Générale Opération et Production (DGOP), Direction Générale Île-de-France (DG IdF) et Établissement «INFRALOG TRAVAUX ÎLE-DE-FRANCE» (ITIF) ? le directeur des travaux IdF; ? le directeur sécurité DG IdF; ? le directeur de l?établissement ITIF; ? le chef de pôle sécurité de l?établissement ITIF; ? l?expert métier «conduite» de l?établissement ITIF; ? l?expert métier «opérations au sol» de l?établissement ITIF; ? le contrôleur sécurité de l?établissement ITIF (rencontré hors réunion). La réunion a eu lieu dans les locaux de SNCFR. Les points majeurs des investigations menées au sujet des points concernant l?Établissement ITIF ont fait l?objet d?échanges. ? le choix du lieu de la base arrière et du mode d?exploitation; ? les contrats entre SNCF R et ETF S; ? les documents applicables et leurs incohérences; ? la radio de manoeuvre; ? la préparation et mise en oeuvre du processus de manoeuvre; ? les contrôles communs avec ETF S; ? le lieu d?implantation des bungalows. Les points examinés par le BEA-TT ont été présentés. L?échange n?a pas donné lieu à un partage efficace des situations mises en avant. La majorité des participants ne savait pas que les trains assurés par ETFS entre la base travaux de Saint-Florentin-Vergigny et la zone de chantier située vers Melun étaient réalisés sous l?agrément de sécurité de SNCFR. De même, il aura nécessité que le BEA-TT interpelle l?EPSF pour faire accepter aux participants que les opérations de manoeuvre sur le site de la base arrière étaient elles aussi réalisées sous l?agrément de sécurité de SNCFR. 37 Le point concernant la «radio de manoeuvre» qui apparaît pour le BEA-TT comme la cause immédiate de l?événement et qui demeure particulièrement névralgique a obtenu pour réponse: «les règles SNCF R ne prévoient pas la mise à disposition d?un appareil radio possédant les fonctions de «tops sonores» de refoulement et d?un signal d?arrêt d?urgence. Le jour de l?événement cet appareil n?aurait pas conduit à éviter l?événement». Une deuxième réunion a eu lieu à la demande du responsable du département Convois du GI (DGOP). Le BEA-TT a une nouvelle fois présenté l?ensemble des points déjà évoqués dans la réunion précédente. L?écho a été nettement plus favorable. La réalité de leur existence et l?exactitude des analyses ont été pleinement partagés. 38 5 - Conclusions sur la recherche des causes et des facteurs 5.1 - Arbre des causes 39 5.2 - Les causes de l?accident Au terme de l?enquête, le BEA-TT considère que la cause immédiate de l?accident est l?utilisation par ETFS de radios non conformes aux règles établies par SNCFR pour l?exécution de manoeuvres sous son agrément de sécurité. Plusieurs facteurs systémiques ont été identifiés comme concourant à l?événement. Ils apparaissent dans l?arbre des causes. Il est possible de les regrouper par famille: Mise en place des bases arrière ? la non-réalisation d?une étude de risques préventivement à l?installation de bungalows à proximité de voies en impasse; ? l?état global du site qui n?incite pas à la rigueur; ? l?éloignement du site de la zone de chantier. Conception de la production sur les bases arrière ? l?absence de définition du processus de manoeuvre d?un train lourd qui conduit à recourir à la pousse; ? le retard du train à l?arrivée qui conduit à l?empressement des agents et à l?état de fatigue des conducteurs cédants. Réalisation de la production sur les bases arrière ? le manque de rigueur partagé par beaucoup d?acteurs vis-à-vis du respect des règles de production en sécurité qui conduit à ne pas obéir immédiatement aux signaux ni à réaliser les opérations de base comme définies dans les textes métier; ? l?adaptation des journées de service par les agents qui ne respectent pas le point de relève des conducteurs; ? le non-respect des conditions de franchissement de la pancarte «ARRÊT» qui conduit le conducteur de queue à se fourvoyer sur la situation géographique du mouvement; ? la commande de desserrage complet des freins avant la coupe entre les 2 rames qui conduit à ne pas maintenir serrée la rame TEVO après la coupe; ? l?absence de communication entre le conducteur de tête et de queue qui ne lui permet pas de se rendre compte de l?opération de coupe; ? la relève en marche entre les conducteurs qui ne conduit pas à l?arrêt d?urgence de ce mouvement. Management de la sécurité sur les bases arrière ? le contrôle sécurité de SNCF R sur ETF S et le management opérationnel de ETF S qui n?ont pas permis de rétablir le niveau de sécurité des manoeuvres sur le site; ? le non-respect de la Consigne Locale Opérationnelle (CLO). Il apparaît globalement que le choix du site et de son utilisation en site ouvert comme son éloignement des zones de chantier ne sont pas pleinement adaptés au traitement de ce genre de train. Les textes organisationnels comme la CLE et la CLO sont perfectibles et présentent quelques incohérences. La méthode de travail dite «chaîne de manoeuvre» qui a été opérée le jour de l?événement et qui s?opère régulièrement sur le réseau ferré national dans les bases arrière, n?est pas en conformité avec les règles de SNCF R. 40 5.3 - Les mesures prises depuis l?accident 5.3.1 - Mise en oeuvre de la recommandation immédiate par SNCFR 41 42 5.3.2 - Mesures mises en oeuvre par SNCFR SNCF R a fait parvenir au BEA-TT les actions mises en oeuvre post accident en complément des actions réalisées dans le cadre de la recommandation immédiate. ? Action n° 1 Contrôles renforcés en bases arrière mis en place après l?accident sur le périmètre Île-de-France, sur une durée permettant de vérifier l?efficacité des actions. ? Action n° 2 Vérification systématisée de l?implantation des bungalows vis-à-vis des heurtoirs sur les bases arrière des projets de suite rapide Île-de-France. ? Action n° 3 Recours systématisés à des radios homologuées par SNCF Réseau, conformes à l?offre RLE (Radio Locale d?Entreprise), sans être nécessairement équipées de la fonctionnalité BIP de refoulement, après analyse des conditions d?utilisation (longueur des mouvements et vitesse). ? Action n° 4 Animation, sensibilisation des collectifs de régénération industrielle voie de portée nationale. 5.3.3 - Mesures mises en oeuvre par ETFS ETF S a fait parvenir au BEA-TT les actions mises en oeuvre post accident. ? Action n° 1 Augmentation des effectifs au niveau de l'Encadrement Travaux en privilégiant des profils habilités à une (ou des) TES6 ou ayant déjà encadré techniquement une (ou des) TES. ? Action n° 2 Rédaction des «livrets de menaces Conduite / Opérations SOL» pour chaque chantier jugé complexe (Chantiers Grands Projets) et déclinaison aux Opérationnels, en complément des documents d?exploitation obligatoires. ? Action n° 3 Safety DAYS 2024: journées dédiées à la Prévention: Briefing/Débriefing avec ateliers et film dont le message porté est le suivant «avant de savoir ce qu?il ne faut pas faire, encore faut-il savoir ce qui était prévu». ? Action n° 4 Augmentation de la fréquence des KN27 sur les Évaluateurs (sur le vif et a posteriori) afin de s'assurer de la qualité de leur veille exercée sur les Opérationnels. ? Action n° 5 Déploiement des Radios de Manoeuvre avec Top Sonore et Bouton d?alerte sur les bases arrière en accord avec le livret technique IG 97914. ? Action n° 6 Audits externes ETF/ETF Services engagés sur la Base de Saint-Florentin afin de vérifier la nouvelle organisation mise en place, le respect des attendus suite à la mise en place de Responsables Base Arrière (Autorité, application des consignes?) 6 TES: tâches essentielles pour la sécurité. L?arrêté du 7 mai 2015 a pour but de définir la liste des tâches essentielles pour la sécurité (autres que la conduite de trains) et confier à l?employeur la définition des critères d?aptitude physique et psychologique des personnes affectées aux tâches essentielles pour la sécurité (autres que la conduite de trains). 7 KN2: Le système de management de la sécurité implique la mise en place d?une veille sur les opérateurs, associée à un contrôle de niveau 1 (KN1) qui permet à un dirigeant d?unité de s?assurer que ses collaborateurs assurent la veille et un contrôle de niveau 2 (KN2) qui permet à la direction d?une entité de s?assurer du fonctionnement global du système de management dans chacune des unités qui la composent. 43 ? Action n° 7 Définition des Règles d?Or en Base Arrière. Le non-respect de ces règles expose systématiquement à des sanctions. Exemples: -Définition et figeage des points de relève dans la mesure du possible; -Relevé de composition une fois le train formé; -Respect des consignes de calage et application du MT 7320 si absentes dans les Consignes Locales Opérationnelles; -Vérification de l'itinéraire au sol. ? Action n° 8 Planification de l?ensemble des Conducteurs et Agents de manoeuvre ETF Services sur la formation e-learning ETF Academy «communications radio» ? Action n° 9 Relève encadrée sur base arrière par le Chef d?équipe ETF S et figée sur la voie 3G ? Action n° 10 Rédaction d?un Rex sur l?évènement (circonstances et actions correctives) et diffusion aux équipes pour partage et application. ? Action n° 11 Création d?une Direction Sécurité Ferroviaire (DSF), composée d?experts métier issus de divers horizons, au service d?ETF Grands Projets et ETF Services. Les missions de cette direction incluront: - Audits internes (KN2 et Référentiel CSU8) et audits de chantier (base arrière), - Analyse des risques des chantiers et des bases arrière, - Analyse des incidents et production de rapports, - Redéfinition des lignes directrices en matière de sécurité ferroviaire (formation, montée en compétences). 8 CSU: Certificat de sécurité unique. La transposition en droit français de la directive (UE) 2016/798 relative à la sécurité ferroviaire par le décret n° 2019-525 du 27 mai 2019 relatif à la sécurité et à l?interopérabilité du système ferroviaire prévoit que chaque entreprise ferroviaire est dans l?obligation d?élaborer son système de gestion de la sécurité, lequel doit expliciter «l?organisation, les modalités et les procédures établies pour assurer la gestion sûre de ses propres opérations». Pour ce faire et afin d?assurer des services de transport ferroviaire au sein du système ferroviaire (fret et voyageurs), une entreprise ferroviaire (entreprise titulaire, sauf cas particuliers, d?une licence d?entreprise ferroviaire délivrée, en France, par le ministère chargé des Transports) doit être titulaire d?un certificat de sécurité unique (CSU). 44 Conclusion (english version) Causes of the accident At the end of the investigation, the BEA-TT considers, in light of the findings and testimonies collected, that the immediate cause of the accident was the use by ETF S of radios that did not comply with the rules established by SNCF R for the execution of maneuvers under its safety approval. Several systemic factors were identified as contributing to the event. They appear in the cause tree. They can be grouped by family: Setting up rear bases ? failure to carry out a risk study as a preventive measure for the installation of bungalows near dead-end tracks; ? the overall condition of the site, which does not encourage rigor. ? the distance of the site from the construction area. Design of production on rear bases ? the lack of definition of the maneuvering process for a heavy train, which leads to the use of pushing; ? the delay of the train on arrival which leads to the haste of the agents and the fatigue of the yielding drivers. Production on the rear bases ? the lack of rigor shared by many actors with regard to compliance with the rules of safe production which leads to not immediately obeying the signals or carrying out the basic operations as defined in the professional texts; ? the adaptation of the service days by the agents who do not respect the point of change of the drivers; ? the non-compliance with the conditions of crossing the "STOP" sign which leads the rear driver to get confused about the geographical location of the movement; ? the order to completely release the brakes before the cut between the 2 trains which leads to not keeping the TEVO train tight after the cut; ? the lack of communication between the head and rear driver which does not allow him to realize the cutting operation; ? the changeover between drivers that does not lead to the emergency stop of this movement. Safety management on the rear bases ? the safety control of SNCF R on on ETF S and the operational management of ETF S which did not restore the level of safety of the maneuvers on the site; ? the non-compliance with the Local Operational Instructions (CLO). It appears overall that the choice of the site and its use on an open site as well as its distance from the construction sites are not fully adapted to the processing of this type of train. The organizational texts such as the CLE and the CLO are perfectible and present some inconsistencies. The working method called "shunting chain" which was carried out on the day of the event and which is regularly carried out on the national rail network in the rear bases, is not in compliance with the rules of SNCF R. 45 Measures taken since the accident Measures implemented by SNCF R SNCF R sent the BEA-TT the actions implemented after the accident in addition to the actions carried out as part of the immediate recommendation. Action No. 1 Reinforced checks at the rear bases implemented after the accident in the Île-de-France area, over a period of time to verify the effectiveness of the actions. Action No. 2 Systematic verification of the location of bungalows with regard to the bumpers at the rear bases of the Île-de-France rapid follow-up projects. Action No. 3 Systematic use of radios approved by SNCF Réseau, compliant with the RLE offer, without necessarily being equipped with the BIP push-back functionality, after analysis of the conditions of use (length of movements and speed). Action No. 4 Animation, awareness-raising of industrial track regeneration groups of national scope. Measures implemented by ETF S ETF S has sent the BEA-TT the actions implemented after the accident. Action No. 1 Increase the workforce at the Works Management level by prioritizing profiles authorized for one (or more) TES1 or having already technically supervised one (or more) TES. Action No. 2 Drafting of "Ground Operations / Management threat booklets" for each construction site deemed complex (Major Project Sites) and adaptation to Operational staff, in addition to the mandatory operating documents. Action No. 3 Safety DAYS 2024: days dedicated to Prevention: Briefing/Debriefing with workshops and film whose message is as follows "before knowing what not to do, you still need to know what was planned". Action No. 4 Increase the frequency of KN22s on Evaluators (on the spot and a posteriori) in order to ensure the quality of their monitoring of Operational Staff. Action No. 5 Deployment of Maneuvering Radios with Sound Top and Alert Button on the rear bases in accordance with the IG 97 914 technical booklet. Action No. 6 External ETF/ETF Services audits engaged on the Saint-Florentin Base in order to verify the new organization set up, compliance with expectations following the establishment of Rear Base Managers (Authority, application of instructions, etc.) Action No. 7 Definition of the Golden Rules in the Rear Base. Failure to comply with these rules systematically exposes you to sanctions. Examples: - Definition and freezing of handover points as far as possible; 46 - Composition survey once the train is formed; - Compliance with the timing instructions and application of MT 7320 if absent in the Local Operational Instructions; - Verification of the route on the ground. Action No. 8 Planning of all ETF Services Drivers and Shunters on the ETF Academy e-learning training "radio communications" Action No. 9 Supervised handover on the rear base by the ETF S Team Leader and fixed on the 3G track Action No. 10 Drafting of a Rex on the event (circumstances and corrective actions) and distribution to the teams for sharing and application. Action No. 11 Creation of a Railway Safety Department (DSF), composed of business experts from various backgrounds, at the service of ETF Grands Projets and ETF Services. The missions of this department will include: - Internal audits (KN2 and CSU3 Reference) and site audits (rear base), - Analysis of site and rear base risks, - Analysis of incidents and production of reports, - Redefinition of railway safety guidelines (training, skills development). 47 6 - Les recommandations et les invitations en matière de sécurité Les 6 recommandations de sécurité directement liées à l?accident et des invitations de sécurité associées sont à rechercher dans les domaines suivants: ? la mise en place des bases arrière; ? la conception des processus de production sur les bases arrière; ? la mise oeuvre des processus de production sur les bases arrière; ? le management de la sécurité sur les bases arrière. Une invitation de sécurité complémentaire, liée aux investigations concerne: ? la méthode de travail non conventionnelle pour les refoulements guidés par radio en phonie. 6.1 - Mise en place des bases arrière ? la non-réalisation d?une étude de risques préventivement à l?installation de bungalows à proximité de voies en impasse. Le BEA-TT a constaté que la situation des bungalows et des zones de stationnement de véhicules personnels a été choisie sans une évaluation des risques compte tenu de leur position par rapport à deux voies en impasse sur lesquelles des refoulements ont lieu quotidiennement. L?accident n?a pas fait de victime, car le retard du train a conduit tous les opérateurs à se situer hors cette zone pour être prêts à mettre en oeuvre les opérations de maintenance. ? l?état global du site qui n?incite pas à la rigueur. Le BEA-TT a constaté sur site que l?état des chemins utilisés par le personnel et que des implantations de signaux n?obéissant pas aux règles ne sont pas propices à la rigueur. ? l?éloignement du site de la zone de chantier. Le BEA-TT a constaté que le retard du train usine à l?arrivée sur le site est lié à sa sortie tardive du chantier et aux conflits de circulation induits lors du passage de noeuds ferroviaires. Des parcours de moindre importance entre la zone de chantier et la base arrière limiteraient cet inconvénient. Le BEA-TT émet la recommandation ci-dessous. Recommandation R1 à l?attention de SNCF Réseau: Veiller sur les bases arrière, lieux de production ferroviaire, au bon état et à la propreté des pistes de cheminement, à la mise en place de signaux conformes à la réglementation et à la mise en place d?éléments constitutifs de la base vie et de zones de stationnement de manière à maîtriser le risque de heurt par une circulation ferroviaire. Intégrer dans les critères de choix du positionnement de la base arrière, par rapport à la zone de chantier, la volonté de limiter la distance à parcourir pour maîtriser les risques vis-à-vis de la sécurité de l?exploitation ferroviaire et du personnel. 48 6.2 - Conception des processus de production sur les bases arrière ? l?absence de définition du processus de manoeuvre d?un train lourd qui conduit à recourir à la pousse. Le BEA-TT a constaté que la mise en oeuvre des manoeuvres pour traiter des situations à risques comme la manoeuvre du train usine n?avait pas fait l?objet de la définition d?un processus par l?entreprise ETF S. Le BEA-TT émet la recommandation ci-dessous. Recommandation R2 à l?attention de ETFS: Concevoir des processus de production et supports pour toutes les opérations de manoeuvre courantes, notamment de trains lourds sur les bases arrière avant leur mise en service. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. ? le retard du train à l?arrivée qui conduit à l?empressement des agents et à l?état de fatigue des conducteurs cédants. Le BEA-TT a constaté que le retard à l?arrivée du train usine et que l?état de fatigue des 2 conducteurs cédants ont conduit à vouloir limiter le temps nécessaire aux manoeuvres en prenant des libertés excessives avec la réglementation. Le BEA-TT émet la recommandation ci-dessous. Recommandation R3 à l?attention de SNCF R et de ETF S: Intégrer dans les briefings réalisés sur les bases arrière, l?importance de l?anticipation des situations dégradées prévisibles comme le traitement des problématiques induites par le retard du train à traiter et la prise en compte de l?état de fatigue d?opérateurs. Insister sur l?absolue nécessité de mettre en oeuvre les processus de production dans le respect des règles de sécurité. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. 6.3 - Mise en oeuvre des processus de production sur les bases arrière ? le manque de rigueur partagé par beaucoup d?acteurs vis-à-vis du respect des règles de production en sécurité qui conduit à ne pas obéir immédiatement aux signaux ni à réaliser les opérations de base comme définies dans les textes métier; ? l?adaptation des journées de service par les agents qui ne respectent pas le point de relève des conducteurs; ? le non-respect des conditions de franchissement de la pancarte «ARRÊT» qui conduit le conducteur de queue à se fourvoyer sur la situation géographique du mouvement; ? la commande de desserrage complet des freins avant la coupe entre les 2 rames qui conduit à ne pas maintenir serrée la rame TEVO après la coupe; ? l?absence de communication entre le conducteur de tête et de queue qui ne lui permet pas de se rendre compte de l?opération de coupe; ? la relève en marche entre les conducteurs qui ne conduit pas à l?arrêt d?urgence de ce mouvement. Le BEA-TT a constaté un large spectre d?écarts aux règles de sécurité concernant majoritairement les conducteurs. Ces écarts ont pour points communs un manque de 49 rigueur de l?opérateur et la non-perception du risque créé voire subi. Il ne peut s?agir de situations à caractère exceptionnel. Nécessairement, il s?agit de libertés prises au fil du temps, insuffisamment prises en compte par le management opérationnel, et devenues un état de fait récurrent. Le BEA-TT émet ainsi la recommandation suivante. Recommandation R4 à l?attention de ETFS: Consolider le management opérationnel sur les bases arrière pour garantir la mise en oeuvre des processus de production dans le respect scrupuleux des règles. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. 6.4 - Management de la sécurité sur les bases arrière ? le contrôle sécurité de SNCFR sur l?entreprise qualifiée ETF S sous-traitante de ETF et le management de ETFS qui n?ont pas permis de rétablir le niveau de sécurité des manoeuvres sur le site. Le BEA-TT a constaté que le contrôle sécurité exercé par SNCFR sur ETF S réalisé quelques jours avant l?événement, comme celui exercé en interne par ETFS, se sont révélés inopérants pour identifier les écarts majeurs aux règles structurant la sécurité sur le réseau ferré national et pour prendre des mesures immédiates qui auraient évité l?événement. Le BEA-TT émet ainsi la recommandation suivante. Recommandation R5 à l?attention de SNCF Réseau et ETFS: Redéfinir des modes de contrôle sécurité efficaces et rigoureux pour chaque exploitant et des modes de contrôles communs et réguliers sur les bases arrière pour améliorer leur niveau de sécurité en s?assurant notamment des conditions minimales en matière de compétences des personnels en charge des contrôles sécurité. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. ? non-respect de la Consigne Locale Opérationnelle (CLO) Le BEA-TT a constaté que la CLO n?était pas prise en considération lors de l?établissement du contrat entre SNCFR, ETF et ETF S et qu?elle n?était pas connue du contrôleur sécurité de SNCFR. Le BEA-TT émet ainsi la recommandation suivante. Recommandation R6 à l?attention de SNCF Réseau et ETFS: Vérifier que les textes structurant la sécurité de l?exploitation ferroviaire applicables sur les bases arrière sont pris en compte pour l?établissement des contrats écrits par SNCF R et que les acteurs du management de la sécurité les maîtrisent. SNCF R est invité à relayer cette recommandation à l?ensemble des EF qualifiées par ses soins et opérant sous son agrément de sécurité. 50 6.5 - La méthode de travail non conventionnelle ? la méthode de travail dite «chaîne de manoeuvre». Le BEA-TT a constaté que cette méthode qui consiste, lors d?une manoeuvre en refoulement guidée par radio en phonie, en la mise en place d?une succession d?opérateurs qui tour à tour commandent le refoulement en phonie par radio sans discontinuité du mouvement est contraire au texte de SNCF R numéroté MT7320. Le BEA-TT émet ainsi l?invitation suivante. Invitation à l?attention de SNCF Réseau et de l?EPSF: Proscrire le recours à la méthode dite de la «chaîne de manoeuvre» pour les refoulements guidés par radio en phonie sur le réseau ferré national pour les agents de SNCFR et des EF qualifiées par ses soins opérant sous son agrément de sécurité. 51 Safety recommendations (english version) Safety recommendations directly related to the accident are to be sought in the following areas: ? the establishment of rear bases; ? the design of production processes on the rear bases; ? the implementation of production processes on the rear bases; ? safety management on the rear bases; An additional safety invitation, linked to the investigations concerns: ? the unconventional working method for radio-guided pushbacks in speech. Setting up rear bases ? the failure to carry out a risk study as a precaution against installing bungalows near dead-end tracks. The BEA-TT noted that the location of the bungalows and the parking areas for personal vehicles was chosen without a risk assessment given their position in relation to two dead- end tracks on which traffic is pushed back daily. The accident did not cause any casualties, as the train delay led all operators to be located outside this area to be ready to carry out maintenance operations. ? the overall condition of the site which does not encourage rigour. The BEA-TT noted on site that the condition of the paths used by staff and the signal installations which do not comply with the rules are not conducive to rigour. ? the distance of the site from the construction zone. The BEA-TT noted that the delay of the factory train on arrival at the site is linked to its late departure from the construction site and to traffic conflicts caused when passing through railway junctions. Shorter distances between the construction zone and the rear base would limit this inconvenience. The BEA-TT issues the recommendation below. Recommendation R1 for the attention of SNCF Réseau: Ensure that the rear bases, railway production sites, ensure that the tracks are in good condition and clean, that signals are in place that comply with regulations and that components of the base camp and parking areas are in place so as to control the risk of collision with railway traffic. Integrate into the criteria for choosing the positioning of the rear base, in relation to the construction site area, the desire to limit the distance to be covered in order to control the risks with regard to the safety of railway operations and staff. 52 Design of production processes on rear bases ? the lack of definition of the process for shunting a heavy train, which leads to the use of pushing. The BEA-TT noted that the implementation of shunting to deal with risky situations such as shunting the factory train had not been defined as a process by the company ETF S. The BEA-TT issues the following recommendation. Recommendation R2 for ETF S: Design production processes and supports for all routine shunting operations of heavy trains particularly, on rear bases before they are put into service SNCF R is invited to pass on this recommendation to all RUs qualified by it and operating under its safety approval. ? the delay of the train on arrival, which leads to the haste of the agents and the fatigue of the yielding drivers. The BEA-TT noted that the delay in the arrival of the factory train and the fatigue of the 2 drivers who gave way led to a desire to limit the time needed for the maneuvers by taking excessive liberties with the regulations. The BEA-TT issues the recommendation below. Recommendation R3 for the attention of SNCF R and ETF S: Integrate into the briefings carried out on the rear bases, the importance of anticipating foreseeable degraded situations such as dealing with problems caused by the delay of the train to be dealt with and taking into account the fatigue of operators. Insist on the absolute necessity of implementing production processes in compliance with safety rules. SNCF R is invited to relay this recommendation to all RUs qualified by it and operating under its safety approval. Implementation of production processes on the rear bases ? the lack of rigor shared by many actors with regard to compliance with the rules of safe production which leads to not immediately obeying the signals or carrying out the basic operations as defined in the professional texts; ? the adaptation of the service days by the agents who do not respect the driver's handover point; ? the non-compliance with the conditions for crossing the "STOP" sign which leads the rear driver to get confused about the geographical location of the movement; ? the command to completely release the brakes before the cut between the 2 trains which leads to not keeping the TEVO train tight after the cut; ? the lack of communication between the head and rear driver which does not allow him to be aware of the cutting operation; ? the handover in progress between the drivers which does not lead to the emergency stop of this movement. 53 The BEA-TT has noted a wide range of deviations from safety rules, mainly concerning drivers. These deviations have in common a lack of rigor on the part of the operator and the failure to perceive the risk created or even suffered. These cannot be exceptional situations. Necessarily, these are liberties taken over time and insufficiently taken into account by operational management to become a recurring state of affairs. The BEA-TT therefore issues the following recommendation. Recommendation R4 for the attention of ETF S: Consolidate operational management on the rear bases to guarantee the implementation of production processes in strict compliance with the rules. SNCF R is invited to relay this recommendation to all EFs qualified by it and operating under its safety approval. Safety management at the rear bases ? the safety inspection by SNCF R on the qualified company ETF S, a subcontractor of ETF and the management of ETF S which did not allow the level of safety of the maneuvers on the site to be restored. The BEA-TT noted that the safety inspection carried out by SNCF R on its subcontractor carried out a few days before the event, as well as that carried out internally by ETF S, proved ineffective in identifying major deviations in compliance with the rules structuring safety on the national rail network and in taking immediate measures that would have prevented the event. The BEA-TT therefore issues the following recommendation. Recommendation R5 for the attention of SNCF Réseau and ETF S: Redefine effective and rigorous safety inspection methods for each operator and common and regular inspection methods on the rear bases to improve their level of safety by ensuring in particular the minimum conditions in terms of skills of the personnel in charge of safety inspections. SNCF R is invited to relay this recommendation to all EFs qualified by it and operating under its safety approval. ? non-compliance with the Local Operational Instructions (CLO) The BEA-TT noted that the CLO was not taken into consideration in establishing the contract between SNCF R, ETF and ETF S and that it was not known to the SNCF R safety controller. The BEA-TT therefore issues the following recommendation. Recommendation R6 for the attention of SNCF Réseau and ETF S: Check that the texts structuring the safety of railway operations applicable on the rear bases are taken into account for the establishment of the contracts written by SNCF R and that the safety management stakeholders master them. SNCF R is invited to relay this recommendation to all RUs qualified by it and operating under its safety approval. 54 The unconventional working method ? the working method known as the "shunting chain". The BEA-TT has noted that this method, which consists, during a pushback maneuver guided by radio in speech, of setting up a succession of operators who take turns controlling the pushback in speech by radio without discontinuity of movement, is contrary to the SNCF R text numbered MT 7320. The BEA-TT therefore issues the following invitation. Invitation to the attention of SNCF Réseau and EPSF: Prohibit the use of the so-called "shunting chain" method for pushbacks guided by radio in speech on the national rail network for SNCF R agents and RUs qualified by it operating under its safety approval. 55 ANNEXES Annexe 1: décision d?ouverture d?enquête Annexe 2: les enregistrements 56 Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête 57 Annexe 2: les enregistrements Atess locomotive G1206, conducteurs A et B Ci-dessus le fichier texte qui permet de discerner les moments particuliers du mouvement de manoeuvre juste avant l?accident. On distingue particulièrement l?arrêt pour la coupe, le moment où se produit la collision avec les 2 wagons plats et toute la décélération obtenue sans commande de freinage commandée par le conducteur mais due à la résistance à l?avancement des véhicules déraillés et par le fonctionnement de l?automaticité du frein suite à la rupture de la conduite générale. 58 Ci-contre un extrait de la courbe de vitesse du train qui permet d?identifier l?absence d?arrêt sur la voie 3G lors de la réception du train à Saint-Florentin-Vergigny. On distingue le moment de la collision de la rame «TEVO» avec les 2 wagons plats stationnant sur le voie 7. Enregistrement SIBAS «matériel» locomotive G1206 Cet enregistrement a permis de montrer que le conducteur A avait correctement disposé sa locomotive en «pousse» lors de l?arrêt sur la voie 17. Atess locomotive E4000, conducteurs C et D 59 On distingue clairement les différents mouvements depuis la réception du train sur la voie 3G, l?arrêt sur la voie 17 avec la locomotive E4000 en «pousse», puis les autres mouvements avec la même locomotive cette fois en tête. Le non respect de la pancarte «ARRET» est flagrant, sa place le situerait lors du mouvement en «Tirez» depuis la voie 17 sur la voie 11. Ci-dessus le fichier texte qui permet de discerner les moments particuliers du mouvement de manoeuvre juste avant l?accident. On distingue particulièrement le non-respect de la pancarte «ARRÊT» lors du mouvement en «Tirez» depuis la voie 17 sur la voie 11 pour atteindre le point de coupe. L?alimentation à 5 bars de la CG avant la réalisation de la coupe est établi par la mesure de la CG>4,7 bars, 8 secondes après l?arrêt. 60 Règlement général de protection des données Le bureau d?enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) est investi d?une mission de service public dont la finalité est la réalisation de rapports sur les accidents afin d?améliorer la sécurité des transports terrestres (articles L. 1621-1 et 1621-2 du code des transports, voir la page de présentation de l?organisme). Pour remplir cette mission, les personnes chargées de l?enquête, agents du BEA-TT habilités ainsi que d?éventuels enquêteurs extérieurs spécialement commissionnés, peuvent rencontrer toute personne impliquée dans un accident de transport terrestre (articles L. 1621-14) et recueillir toute donnée utile. Ils traitent alors les données recueillies dans le cadre de l?enquête dont ils ont la responsabilité uniquement pour la seule finalité prédéfinie en garantissant la confidentialité des données à caractère personnel. Les rapports d?enquêtes sont publiés sans le nom des personnes et ne font état que des informations nécessaires à la détermination des circonstances et des causes de l?accident. Les données personnelles sont conservées pour une durée de 4 années à compter de la publication du rapport d?enquête, elles sont ensuite détruites. Le traitement «Enquête accident BEA-TT» est mis en oeuvre sous la responsabilité du BEA-TT relevant du ministère des transports. Le ministère s?engage à ce que les traitements de données à caractère personnel dont il est le responsable de traitement soient mis en oeuvre conformément au règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l?égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (ci-après, «règlement général sur la protection des données» ou RGPD) et à la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l?informatique, aux fichiers et aux libertés. Les personnes concernées par le traitement, conformément à la législation en vigueur, peuvent exercer leurs droits auprès du responsable de traitement: droit d?accès aux données, droit de rectification, droit à la limitation, droit d?opposition. Pour toute information ou exercice de vos droits, vous pouvez contacter: 1- Le responsable de traitement, qui peut être contacté à l?adresse suivante: - à l?adresse: bea-tt@developpement-durable.gouv.fr - ou par courrier (avec copie de votre pièce d?identité en cas d?exercice de vos droits) à l?adresse suivante: Ministère des transports À l?attention du directeur du BEA-TT Grande Arche - Paroi Sud, 29e étage, 92055 LA DEFENSE Cedex 2- Le délégué à la protection des données(DPD) du ministère: - à l?adresse suivante: ajag2.daj.sg@developpement-durable.gouv.fr ; - ou par courrier (avec copie de votre pièce d?identité en cas d?exercice de vos droits) à l?adresse suivante: Ministère des transports À l?attention du Délégué à la protection des données SG/DAJ/AJAG2 92055 La Défense cedex Vous avez également la possibilité d?adresser une réclamation relative aux traitements mis en oeuvre à la Commission nationale informatique et libertés. (3 Place de Fontenoy - TSA 80715 - 75334 PARIS CEDEX 07) 61 Bureaud?Enquêtessur lesAccidentsdeTransport Terrestre ? GrandeArche -Paroi Sud 92055LaDéfensecedex Téléphone : 01 40 81 21 83 bea-tt@developpement-durable.gouv.fr www.bea-tt.developpement-durable.gouv.fr 1 - Synthèse Summary (english version) 2 - L?enquête et son contexte 2.1 - Les circonstances de l?accident 2.2 - Le bilan de l?accident 2.3 - Les entreprises impliquées et leurs liens 2.4 - L?engagement de l?enquête 3 - La description du fait survenu 3.1 - Le contexte de l?accident 3.1.1 - Le site de l?événement 3.1.2 - La rame accidentée 3.1.3 - La météorologie 3.2 - Description factuelle des évènements 3.2.1 - Constitution du train et équipage 3.2.2 - Les témoignages 3.2.2.1 - Les agents présents sur le terrain: 3.2.2.2 - Les acteurs sur le terrain 3.2.2.3 - Les principaux témoignages 3.2.3 - Habilitation des agents et respect du temps de travail 3.2.4 - Les postes radio utilisés par le personnel ETFS sur la base arrière de Saint?Florentin-Vergigny 3.2.5 - Le dépouillement des enregistrements 3.2.6 - La vérification du fonctionnement des appareils de commande du frein des deux locomotives 3.2.7 - Les dommages 4 - Analyse du fait survenu 4.1 - L?état du site 4.2 - La répartition des tâches par le responsable des manoeuvres 4.3 - Le retard du train et l?interaction sur les opérateurs du site 4.4 - L?état de fatigue des conducteurs cédants A et C. 4.5 - La réception du train sur la voie 3 Garage et le mouvement en «Tirez» sur la voie17 4.6 - Le mouvement en «Tirez» sur la voie 11 et la pousse 4.7 - Le franchissement de la pancarte «ARRÊT» 4.8 - La coupe des 2 rames (rames Bloc et TEVO) 4.8.1 - Principes de fonctionnement du frein continu automatique 4.8.2 - État des freins des rames Bloc et TEVO 4.9 - Le mouvement en «Tirez» de la rame Bloc sur la voie 9bis 4.10 - Le mouvement en «Refoulez» de la rame TEVO sur la voie 7 4.11 - La collision de la rame TEVO sur la voie7 avec les deux wagons plats 4.12 - La collision des wagons plats avec les bungalows et des véhicules en stationnement 4.13 - Protection des agents de maintenance et recherche d?éventuelles victimes 4.14 - L?organisation et le fonctionnement du site 4.14.1 - Le choix du site et son utilisation en site ouvert 4.14.2 - Les textes organisationnels 4.14.3 - Les radios de manoeuvre utilisées 4.14.4 - La pousse en manoeuvre 4.14.5 - La méthode dite «chaîne de manoeuvre» 4.14.6 - Le contrôle sécurité de SNCF R de l?entreprise qualifiée ETF S et le management des DBA 4.15 - La reconstitution des faits 4.16 - Rencontre des dirigeants des entreprises impliquées et des experts métiers 5 - Conclusions sur la recherche des causes et des facteurs 5.1 - Arbre des causes 5.2 - Les causes de l?accident 5.3 - Les mesures prises depuis l?accident 5.3.1 - Mise en oeuvre de la recommandation immédiate par SNCFR 5.3.2 - Mesures mises en oeuvre par SNCFR 5.3.3 - Mesures mises en oeuvre par ETFS Conclusion (english version) 6 - Les recommandations et les invitations en matière de sécurité 6.1 - Mise en place des bases arrière 6.2 - Conception des processus de production sur les bases arrière 6.3 - Mise en oeuvre des processus de production sur les bases arrière 6.4 - Management de la sécurité sur les bases arrière 6.5 - La méthode de travail non conventionnelle Safety recommendations (english version) ANNEXES Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête Annexe 2: les enregistrements Atess locomotive G1206, conducteurs A et B Enregistrement SIBAS «matériel» locomotive G1206 Atess locomotive E4000, conducteurs C et D Règlement général de protection des données INVALIDE)

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