État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
Auteur moral
France. Direction générale de l'énergie et du climat
;France. Ministère de l'économie
Auteur secondaire
Résumé
<span style="color: rgb(17, 17, 17); font-family: -apple-system, Roboto, SegoeUI, "Segoe UI", "Helvetica Neue", Helvetica, "Microsoft YaHei", "Meiryo UI", Meiryo, "Arial Unicode MS", sans-serif; font-size: 14px; font-style: normal; font-variant-ligatures: normal; font-variant-caps: normal; font-weight: 400; letter-spacing: normal; orphans: 2; text-align: left; text-indent: 0px; text-transform: none; widows: 2; word-spacing: 0px; -webkit-text-stroke-width: 0px; white-space: normal; background-color: rgb(243, 243, 243); text-decoration-thickness: initial; text-decoration-style: initial; text-decoration-color: initial; display: inline !important; float: none;">La France avance dans le déploiement des technologies de Capture, Stockage et Valorisation du Carbone (CCUS) pour atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. Les premiers projets de capture et stockage de CO2 seront soutenus dès cette année, ciblant les zones industrielles les plus émettrices.</span>
Descripteur Urbamet
industrie
;EMISSION DE CO2
;neutralité carbone
Descripteur écoplanete
Thème
Environnement - Paysage
;Méthodes - Techniques
;Ressources - Nuisances
Texte intégral
État des lieux
et perspectives
de déploiement
du CCUS en France
Juillet 2024
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
3
RÉSUMÉ EXECUTIF
Les technologies de Capture, stockage et valorisation du
carbone (CCUS) consistent à capturer les émissions de CO2
dans le but de les stocker durablement, ou de les réutiliser
comme intrants dans la fabrication de certains produits,
substituant ainsi des consommations fossiles.
La France a publié ses premiers travaux1 sur le CCUS en juin
2023, constituant des premières orientations stratégiques sur
ce domaine, qui avaient été soumises à consultation. Ce
document constitue la suite des travaux entrepris depuis
l?année dernière.
À l?échelle mondiale et européenne, dans les rapports du
GIEC et les orientations de la Commission Européenne, le
CCS est largement considéré comme un levier nécessaire à
l?atteinte de la neutralité carbone, notamment pour la
décarbonation des activités pour lesquelles il n?existe pas de
technologie bas-carbone accessible techniquement ou
économiquement, mais aussi en soutien du puits de carbone
naturel (forêts) si celui-ci devait être dégradé par les effets du
changement climatique.
La France a fait le choix de recourir à cette technologie pour
la capture des émissions les plus difficiles à abattre, en
l?absence d?autres solutions de décarbonation technico-
économiquement viables.
L?atteinte des objectifs fixés à l?industrie dans le cadre de la
planification écologique, baisse des émissions industrielles
d?environ 45% entre 2015 et 2030 puis neutralité carbone en
2050, nécessite de déployer les premières chaînes CCUS dès
l?horizon 2030, d?abord au niveau des zones industrielles qui
rassemblent les plus grandes densités d?émetteurs de CO2,
puis de capter dans un second temps, aux horizons 2040 et
2050, le carbone provenant d?autres secteurs d?activités et
d?émetteurs plus diffus sur le territoire.
Pour atteindre cet objectif, l?État soutiendra, dès cette
année, les premiers grands projets de capture et de stockage
de carbone (CCS). Ce soutien public, versé aux émetteurs en
amont de la chaîne, permettra le déploiement des
infrastructures de transport et de stockage sur plusieurs
« vallées CCS » à travers le territoire.
1 Disponible ici : Lancement d?une consultation sur la stratégie CCUS | Conseil national de
l'industrie (conseil-national-industrie.gouv.fr)
https://www.conseil-national-industrie.gouv.fr/actualites/consultation-sur-la-strategie-nationale-ccus
https://www.conseil-national-industrie.gouv.fr/actualites/consultation-sur-la-strategie-nationale-ccus
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
4
Une régulation des infrastructures de transport du CO2 est
envisagée. Cette régulation fournira un cadre souple et
sécurisant pour assurer une bonne répartition de la valeur sur
l?ensemble de la chaîne CCS, basée sur les principes d?accès
non discriminatoire au réseau, de transparence et de contrôle
tarifaire.
En matière de stockage du CO2, la France travaille dans le
cadre européen et bilatéral pour faciliter l?accès aux
stockages en mer du Nord et en Méditerranée, qui
constituent à court terme les seuls exutoires opérationnels
pour les émissions françaises. Elle vise à l?horizon 2030 le
développement de capacités de stockage nationales, plus
compétitives et accessibles, via une évaluation du potentiel
de stockage français et le financement d?actions permettant
d?améliorer la connaissance du sous-sol.
La valorisation du CO2 sera nécessaire à la décarbonation des
secteurs de l?aviation, du maritime et de certains secteurs
industriels, par la fabrication de molécules alternatives aux
consommations fossiles. Les réglementations en vigueur et
leurs évolutions à venir devraient permettre à terme
d?accompagner le développement de ces usages.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
5
SOMMAIRE
RÉSUMÉ EXECUTIF ...................................................................................................... 3
SOMMAIRE .................................................................................................................... 5
CONTEXTE .................................................................................................................... 6
Le CCUS : de quoi s?agit-il ? ................................................................................................................... 7
Le CCUS dans le monde ......................................................................................................................... 8
Retours de la consultation sur la stratégie nationale CCUS en France .......................................11
CAPTAGE ..................................................................................................................... 12
Trajectoire CCUS : un déploiement progressif commençant par les zones
industrielles les plus émettrices ......................................................................................................... 13
Soutien au déploiement du CCUS ..................................................................................................... 15
TRANSPORT ................................................................................................................ 21
Un enjeu de déploiement des infrastructures de transport ....................................................... 22
Un cadre de régulation nécessaire pour développer les infrastructures de
transport ................................................................................................................................................ 22
Accélérer le déploiement des premiers hubs en adoptant une régulation souple ................ 23
STOCKAGE .................................................................................................................. 25
Différentes modalités de stockage du CO2 .................................................................................... 26
Une stratégie française de coopération internationale pour favoriser l?accès aux
sites de stockage de CO2 à l?étranger .............................................................................................. 26
Développer les capacités de stockage du CO2 en France : une opportunité pour
notre économie et notre décarbonation ........................................................................................ 27
Un cadre réglementaire permettant la recherche et l?exploitation de sites de
stockage géologique de CO2 .............................................................................................................. 29
VALORISATION ......................................................................................................... 31
Voies de valorisation du CO2 ............................................................................................................. 32
Cadres réglementaires des produits issus du captage du CO2 ................................................... 33
Soutien à la filière CCU ....................................................................................................................... 33
CONTEXTE
La capture du CO2 :
un levier de décarbonation
de l?économie
Les technologies de Capture, Stockage et Valorisation du
Carbone (CCUS) consistent à capturer les émissions de CO2
dans le but de les stocker durablement ou de les réutiliser
comme intrant dans la fabrication de certains produits.
La CCUS constitue un levier de décarbonation mentionné dans
les scénarios de neutralité carbone au niveau mondial, européen
ou national, en particulier pour réduire les émissions des
secteurs n?ayant pas d?autre alternative.
La France a fait le choix de recourir à cette technologie, à
travers une stratégie nationale CCUS annoncée par le Président
de la République le 8 novembre 2022.
Présentée dans une première version pour consultation en juin
2023 à l?issue des travaux de planification écologique, la
stratégie nationale CCUS a fait l?objet au cours des 12 derniers
mois d?une consultation publique et d?un avis du Haut Conseil
pour le Climat, confortant tous deux les premières orientations
retenues par l?État.
Ce document, construit sur le fondement des retours de la
consultation de juin 2023, des travaux réalisés par la
Commission de régulation de l?énergie sur les 12 derniers mois
sur les perspectives de régulation du transport de CO2 et de
l?étude menée sous l?égide du CSF « Nouveaux systèmes
énergétiques » sur le potentiel de stockage en France, constitue
la version mise à jour de cette stratégie CCUS.
Il vise à détailler le cadre de déploiement de cette technologie
en France, et à fournir à l?ensemble des acteurs la visibilité
réglementaire et économique leur permettant d?entreprendre
leurs projets.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
7
Le CCUS : de quoi s?agit-il ?
Le CCUS (Carbon Capture, Utilisation and Storage) se réfère à un ensemble
de technologies visant à capturer les émissions de dioxyde de carbone (CO2),
généralement issues de sites industriels :
- pour injecter et stocker le CO2 dans des formations géologiques
adaptées, et donc éviter qu?il ne soit simplement relâché dans
l?atmosphère où il contribuerait au réchauffement climatique ;
- pour l?utiliser comme ressource dans la fabrication de produits.
Ces technologies sont nécessaires pour la décarbonation des activités pour
lesquelles il n?existe pas d?alternative bas carbone à moyen terme. C?est
notamment le cas de nombreuses émissions industrielles directement liées
au procédé employé (production de ciment, de chaux, chimie, métallurgie,
etc.), qu?il n?est pas possible de réduire par une sortie des énergies fossiles.
Le CCUS implique une succession d?étapes :
? La capture du CO2 sur un site industriel vise à extraire le CO2 issu du
processus industriel et à le concentrer. Plusieurs technologies de
capture existent et leur choix dépend de la nature et de la
concentration en CO2 de la source. Les principales technologies
regroupent le captage aux amines, l?oxycombustion ou encore le
captage cryogénique. Les technologies de captage présentent des
cas d?usage et des degrés de maturité différents. La capture aux
amines constitue aujourd?hui la solution la plus largement déployée.
La capture du CO2 est déjà déployée au sein de nombreuses
industries, et en particulier la production d?ammoniaque, le raffinage,
et le traitement des gaz issus de l?exploitation de gaz fossiles ;
? Le transport : une fois capté, le CO2 est acheminé vers des lieux de
stockage ou d?utilisation, situés en mer ou sur terre, par canalisations
ou bateaux, ou, dans le cas de volumes plus réduits, en trains, barges,
camions etc. La logistique du CO2 des sites émetteurs vers les lieux de
stockage ou d?utilisation nécessite le déploiement d?infrastructures
mutualisées de transport et de conditionnement (canalisation,
terminal de liquéfaction...) similaires à celles utilisées pour le
transport de gaz ou du pétrole ;
? Le stockage de CO2 : l?injection de CO2 sous forme dense dans des
structures fermées des bassins sédimentaires, ou dans des anciens
gisements d?hydrocarbures déplétés, permet de stocker le CO2 de
manière sûre et permanente (échelle de temps géologique) dans le
sous-sol. Des stockages se développent dans plusieurs États
européens (principalement en mer) et pourraient accueillir le CO2
capté par les industriels français à court terme ;
? La valorisation du CO2 (ou « utilisation »), alternativement au stockage,
consiste à utiliser le CO2 capté pour la fabrication de produits. Elle
regroupe différents usages : e-carburants (carburants alternatifs
produits à partir d?hydrogène et de CO2), production de plastiques,
ou encore la carbonatation du béton. La valorisation du CO2
nécessite cependant d?importantes quantités d?électricité
décarbonée.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
8
Le CCUS dans le monde
À l?échelle mondiale et européenne, le CCUS est considéré
comme un levier nécessaire à l?atteinte de la neutralité carbone.
Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC),
dans son évaluation des trajectoires permettant d?atteindre des émissions
mondiales net zéro de CO2 (condition clé de la stabilisation du
réchauffement planétaire) évalue le rôle de la capture et séquestration du
carbone (CCUS) comme une option crédible pour réduire les émissions
provenant de grands systèmes industriels ou énergétiques ayant recours aux
énergies fossiles. Par ailleurs, le GIEC estime que le déploiement des
technologies CCUS est à ce jour largement inférieur à celui cohérent avec
une limitation du réchauffement sous 2°C2.
En outre, l?Agence Internationale de l?Énergie estime que le CCUS
permettrait de réduire d?environ 10% des émissions mondiales de GES à
l?horizon 2050. L?intérêt de recourir aux technologies de CCUS pour lutter
contre le changement climatique a également été acté dans la décision de la
COP28 qui s?est tenue à Dubaï en décembre 2023.
Au niveau européen, le règlement « Net-Zero Industry Act » (NZIA) fera du
CCUS une option stratégique clé pour l?atteinte de la neutralité carbone à
horizon 2050, au même titre que l?hydrogène, les énergies renouvelables
électriques et le nucléaire. Ce cadre prévoit ainsi le développement de 50
millions de tonnes de capacité annuelle de stockage géologique de CO2 au
sein de l?Union Européenne d?ici 2030, ainsi que des obligations pour les
producteurs d?hydrocarbures de contribuer à l?atteinte de ces objectifs.
La Commission Européenne a également publié le 6 février 2024 une
première version de la stratégie pour la gestion industrielle du carbone,
mettant l?accent sur le développement des capacités de stockage, du réseau
de transport ainsi que la mobilisation d?instruments financiers existants pour
développer ces projets en ligne avec les besoins pour atteindre la neutralité
climatique en 2050. La Commission Européenne projette ainsi un
développement de la capture du CO2 pouvant atteindre 280 MTCO2e en
2040 et 450 MTCO2e en 2050, ces volumes incluant des émissions négatives,
des réductions d?émissions et de l?utilisation du CO2.
De nombreux projets de stockage de CO2 sont en cours de construction ou
de développement en Europe, en particulier en Norvège, au Danemark, aux
Pays-Bas, en Italie et en Grèce.
L?Europe déjà engagée dans le développement de projet CCUS
Plusieurs réglementations européennes ont déjà été prises concernant le
CCUS. La possibilité de recourir au stockage de carbone est par exemple déjà
prévue par le Système d?Echange de Quotas d?Emissions de l?Union
Européenne. Plus récemment, la Commission Européenne a proposé le Net
Zero Industry Act, identifiant le CCUS comme l?une des technologies
importantes à développer pour l?atteinte de nos ambitions climatiques
européennes. La Commission a également publié une stratégie sur la gestion
industrielle du carbone3 donnant les orientations qu?elle compte prendre
dans les prochaines années sur ce sujet.
2 Haut Conseil pour le Climat, Avis sur la stratégie de capture du carbone, son utilisation et son
stockage ? Novembre 2023
3 Disponible ici : EUR-Lex - 52024DC0062 - FR - EUR-Lex (europa.eu)
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=COM%3A2024%3A62%3AFIN&qid=1707312980822
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
9
Norvège
La Norvège est un des pays les plus avancés en matière de CCS, avec une
stratégie établie en 2014, fruit de plus de 25 ans de recherches et
d?expérience dans ce domaine, ainsi qu?un environnement législatif et
financier très favorable au développement de la filière. Le pays est impliqué
dans neuf projets CCS permettant de stocker 1,7 MtCO2 par an actuellement
et plus de 40 MtCO2 par an à horizon 2030.
La Norvège, petit émetteur de gaz à effet de serre (36 MtCO2 par an) par
rapport à d?autres pays développés, dispose d?un grand potentiel de
capacité de stockage (estimé à 80 Gt, exclusivement offshore). Par
conséquent, ce potentiel constitue une opportunité pour le stockage de CO2
en provenance d?émetteurs étrangers.
La France a engagé un partenariat stratégique sur les industries vertes avec la
Norvège, qui prévoit notamment la facilitation du stockage de CO2. Les deux
pays ont organisé un forum des industries vertes le 16 janvier 2024 puis une
rencontre entre industriels français et norvégiens du stockage de CO2 le 17
juin 2024.
Projet
Date de mise
en opération
prévisionnelle
Capacité de stockage Remarques
Sleipner 1996 0,9 MtCO2/an
Première réalisation de
CCS offshore dans le
monde, pour la
purification du gaz naturel
extrait
Snohvit 2007
0,7 MtCO2/an ;
Total : 30-40 MtCO2
Pour la purification du gaz
naturel extrait
Northern
Lights
2025
1,5 MtCO2/an
Puis 5 MtCO2/an à
partir de 2030 ;
Total : 100 Mt
Premier projet commercial
Plusieurs émetteurs
français sont en discussion
avancée pour un contrat
de stockage
Barents
Blue
2025
2 MtCO2/an
Total : 100 Mt
-
Smeaheia 2028
5 MtCO2/an en phase 1
Puis 15-30 MtCO2/an
en 2035
Transport du CO2 par
bateau puis par un réseau
de pipelines relié à la côte
nord-ouest européenne
(CO2 Highway Europe)
Havstjerne 2028
7 MtCO2/an ;
Total : 200 Mt
Site qui sera ouvert aux
émetteurs européens
(discussion en cours avec
Pays Baltes, Pays-Bas,
Portugal, Espagne)
Poseidon 2030 5 MtCO2/an -
Luna 2030 5 MtCO2/an -
Trudvang 2030
9 MtCO2/an ;
Total : 225 Mt
-
Tableau 1 ? Principaux projets de stockage norvégiens
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
10
Danemark
Le Danemark a mis en place une stratégie dotée de 5 milliards d?euros pour
développer tous les éléments de la chaîne de valeur CCS, ainsi que pour
capter et stocker 3,2 Mt de CO2 par an dès 2030.
Le potentiel de stockage danois à horizon 2035 est estimé à 45 Mt de CO2
par an. Les capacités de stockage totales seraient de 12 à 25 Gt dans le sous-
sol danois, à la fois sur terre, à proximité du littoral et en mer.
Le pays a déjà signé des accords bilatéraux avec la France, la Belgique,
l?Allemagne, le Pays-Bas, la Norvège et le Royaume-Uni. Le Danemark mène
actuellement cinq projets de stockage géologique : Greensand (1,5 MtCO2/an
en 2025 puis 8 Mt en 2030), Bifrost (16 MtCO2/an en 2032), Stenllile (0,5
MtCO2/an en 2025), Norne (2 MtCO2/an en 2027 puis 20 Mt en 2030) et Rodby
(1 MtCO2/an en 2027 puis 5-10 Mt en 2030).
Pays-Bas
Les Pays-Bas visent un maximum de 7,2 Mt d?émissions nationales de CO2 par
an à capter, soit 50% des émissions de l?industrie du pays. Trois projets de
CCS offshore sont en cours de développement, avec des degrés de maturité
assez élevés : Porthos (2,5 MtCO2/an en 2026) et Aramis (5 MtCO2/an en 2030
et 7,5 Mt à terme), qui comprennent des réseaux de pipelines conséquents,
ainsi que L10 (5 MtCO2/an après 2030, puis 9 Mt à terme), dédié uniquement
au stockage.
Italie
Le seul projet de stockage actuellement recensé en Italie est celui de
Ravenne, qui ambitionne de devenir le pôle CCS de référence en mer
Méditerranée. Il concerne un ensemble de gisements d?hydrocarbures
arrivant peu à peu en fin d?exploitation et qui seront progressivement
convertis en autant de sites de stockage de carbone, avec un démonstrateur
en 2024 (25 ktCO2/an), puis des capacités allant à 4 Mt d?ici 2027 et 16 Mt à
partir de 2030. La capacité totale de stockage est estimée à 500 Mt.
Ravenne est intégré au projet d?intérêt européen commun « Callisto » qui
prévoit le déploiement d?infrastructures dès 2029 pour transporter et
stocker en Italie les émissions des sites industriels de Fos-Marseille (6,4
MtCO2/an envisagés à terme).
Grèce
Le développement du CCS en Grèce est récent. Cependant, le projet Prinos,
dont sont partenaires la Bulgarie, Chypre, la Croatie, l?Italie et la Slovénie,
pourrait devenir un site de stockage clé pour l?Europe du Sud-Est. Des
infrastructures pétrolières et gazières existent déjà et elles pourraient être
assez rapidement adaptées pour stocker 3 MtCO2 par an d?ici 2027, avec une
capacité totale estimée à 60-70 MtCO2.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
11
Retours de la consultation sur la stratégie
nationale CCUS en France
Dans le cadre des travaux de la planification écologique, le Gouvernement a
publié des premières orientations stratégiques en 2023, sur les modalités
d?intervention et l?action publique pour soutenir le développement du CCUS
en France. Cette publication a été suivie d?une mise en consultation de cette
stratégie4.
Comptabilisant plus de 90 contributions d?une grande diversité d?acteurs, les
résultats montrent un consensus global sur la nécessité de déployer le CCUS,
les contributeurs accueillant favorablement l?initiative française de se doter
d?une stratégie nationale pour encadrer le développement du CCUS en
France en la matière :
- Les acteurs privés (entreprises, fédérations) expriment notamment un
besoin de clarification du cadre de régulation et des modalités de
soutiens publics alloués au CCUS, pour motiver les décisions
d?investissements ;
- Les acteurs de la société civile (associations, citoyens) attirent l?attention
du gouvernement sur la nécessité d?un développement maitrisé et ne
devant pas occulter les autres leviers de décarbonation (efficacité
énergétique, électrification), afin de ne pas faciliter le maintien de
dépendances aux énergies fossiles.
Parallèlement, le Haut Conseil pour le Climat a émis un avis sur les premiers
éléments de stratégie nationale CCUS5. Cet avis relève un certain nombre de
points devant être éclaircis comme « la comptabilité carbone du CCUS, les
responsabilités des différentes parties prenantes, et les stratégies
d?investissement dans ces technologies » afin limiter les incertitudes sur le
développement du CCUS en France.
Par ailleurs, le Haut Conseil estime que ces incertitudes doivent conduire à
une priorisation du CCUS vers des usages visant à la réduction des émissions
résiduelles qui ne peuvent être supprimées à la source, en complément des
actions de sobriété et d?efficacité énergétique.
Pour autant, Le Haut Conseil pour le Climat conclut que le CCUS peut servir
de levier de décarbonation en France, en appui aux réductions d?émissions
du secteur de l?industrie.
4 https://www.conseil-national-industrie.gouv.fr/actualites/consultation-sur-la-strategie-
nationale-ccus
5 https://www.hautconseilclimat.fr/publications/avis-sur-la-strategie-de-capture-du-carbone-
son-utilisation-et-son-stockage-ccus/
https://www.conseil-national-industrie.gouv.fr/actualites/consultation-sur-la-strategie-nationale-ccus
https://www.conseil-national-industrie.gouv.fr/actualites/consultation-sur-la-strategie-nationale-ccus
https://www.hautconseilclimat.fr/publications/avis-sur-la-strategie-de-capture-du-carbone-son-utilisation-et-son-stockage-ccus/
https://www.hautconseilclimat.fr/publications/avis-sur-la-strategie-de-capture-du-carbone-son-utilisation-et-son-stockage-ccus/
CAPTAGE
Trajectoire CCUS : un potentiel de baisse de 5 à 10% des
émissions industrielles en 2030, et la génération d?émissions
négatives à horizon 2050.
Les objectifs de la planification écologique en matière de
décarbonation et de souveraineté industrielle impliquent de déployer
rapidement les premières chaînes CCUS au niveau des grandes zones
industrielles, puis de capter le carbone provenant d?autres secteurs
d?activités et d?émetteurs plus diffus. L?Etat envisage donc plusieurs
phases de déploiement du CCUS :
? 2025-2030, des premiers déploiements pour capter 4 à 8 MtCO2/an
dans l?industrie au niveau notamment des hubs industrialo-
portuaires du Havre, Dunkerque, Saint-Nazaire et de l?axe Rhône.
? 2030-2040, une deuxième phase de déploiement permettra de
capter 12 à 20 MtCO2/an, portée par le développement de
nouveaux réseaux CCS, des évolutions réglementaires du marché
carbone européen et l?extension du captage de CO2 à d?autres
secteurs d?activités émissives, telles que l?incinération des déchets,
et à une partie des émissions d?origine biogénique.
? 2040-2050, la décarbonation profonde de l?industrie et l?atteinte
de la neutralité climatique devraient nécessiter le captage de 30 à
50 MtCO2/an. Ces volumes impliqueront de capter l?ensemble des
émissions résiduelles des sites industriels très émissifs, et de
développer de nouvelles sources de CO2, telles que le bioraffinage,
ou si nécessaire la capture du CO2 atmosphérique (DAC).
Des dispositifs de soutien existants devant être renforcés :
? Des dispositifs de soutien en amont des projets industriels de CCS
sont déjà déployés en France :
o Des soutiens à la Recherche et au Développement,
contribuant au dynamisme de l?écosystème français en
matière de CCS sur l?ensemble de la chaîne de valeur ;
o Des soutiens à la réalisation d?études stratégiques dans les
Zones Industrielles Bas Carbone (ZIBaC), facilitant les
décisions finales d?investissements des consortiums
régionaux émetteurs.
? L?État soutiendra le déploiement des premiers grands projets de
CCS. Ce soutien public, versé aux émetteurs, permettra de couvrir
les coûts liés au CCS tout en tenant compte des économies sur le
coût évité de l?EU-ETS (¤/tCO2 captée et stockée) sur des durées
suffisamment longues pour favoriser les investissements privés.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
13
Trajectoire CCUS : un déploiement progressif
commençant par les zones industrielles les plus
émettrices
Un tissu industriel français, fortement concentré autours de
7 grands hubs industriels, propice à une planification régionale
Les 110 plus gros émetteurs industriels français sont majoritairement répartis
(90 % du volume d?émissions) au niveau de 7 grands clusters industriels, dont
4 disposent d?une façade maritime (Fos-sur-Mer, Dunkerque, Le Havre, Saint-
Nazaire) rendant possible l?export de CO2 vers des sites de stockage en mer.
Les zones situées dans le Bassin parisien, dans le Sud-Ouest, voire le Grand
Est, pourraient également bénéficier de stockages à terre, voire d?un
raccordement à un futur réseau de transport du CO2 en cas de quantités
suffisantes.
Ces objectifs français en matière de CCUS ont été coconstruits par l?État et
les industriels, en intégrant :
- Les besoins en CCUS exprimés par les industriels dans le cadre de la
planification écologique et de l?élaboration des feuilles de route de
décarbonation des 50 plus grands sites industriels. Ces besoins sont
également mentionnés dans les Plans de Transition Sectoriels réalisés par
l?ADEME. Ces feuilles de route montrent qu?à court et moyen termes, le
recours au CCUS est massivement envisagé pour réduire les émissions des
sites industriels, en particulier pour le secteur de la chimie, des engrais,
du ciment, de la chaux et de la métallurgie ;
- Les travaux interministériels visant à inclure ces besoins dans une logique
intégrée de déploiement territorial, en lien avec les appels à projets
France 2030 « Zones Industrielles Bas Carbone » (ZIBaC) et des
perspectives de déploiement de stockages souverains ;
- Les travaux de révision de la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC).
Trajectoire détaillée du captage de CO2 en France
Figure 1 : Carte de la trajectoire du CCUS en France
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
14
Phase 1 : 2024-2030, le développement d?au moins deux hubs CCUS
permettrait d?atteindre des volumes de captage de 4 à 8 MtCO2/an en
2030
Le dispositif de soutien à la décarbonation profonde de l?industrie mis en
consultation6 le 26 Juin devrait faire émerger entre deux et quatre hubs CCUS
au niveau des zones industrialo-portuaires de Dunkerque, Fos-sur-Mer et l?axe
Rhône, Le Havre et Saint-Nazaire. Ces zones sont particulièrement adaptées
à des premiers déploiements puisqu?elles présentent une forte
concentration de grands sites émetteurs industriels, d?opérateurs
d?infrastructures mutualisées parfois déjà existantes (terminaux de
liquéfaction, pipeline, etc.) et des possibilités de transport maritime vers des
stockages de CO2 principalement localisés en Mer du Nord et Méditerranée.
En considérant un délai de déploiement des chaînes CCUS de 3 à 5 ans
suivant la décision d?investissement, au moins deux hubs CCUS pourraient
voir le jour d?ici 2030, avec un premier hub potentiellement fonctionnel dès
2028. Les volumes de CO2 capté par cluster varient de 1,5 à 4 MtCO2/an,
permettant d?envisager, avec le développement de deux à quatre hubs CO2,
de capter 4 à 8 MtCO2/an à horizon 2030.
Phase 2 : 2030-2040, le développement de stockages souverains et les
évolutions réglementaires permettraient de capter entre 12 à 20
MtCO2/an à horizon 2040
La révision de l?EU-ETS, prévue en 2026, pourrait s?accompagner de plusieurs
modifications majeures, dont le développement d?un cadre incitatif pour les
émissions négatives issues du captage d?émissions biogéniques.
En outre, il est attendu que des stockages souverains, onshore notamment,
se développent après 2030 en France, ce qui permettra (i) de désenclaver
certaines zones industrielles éloignées des stockages étrangers, comme le
bassin parisien, la Méditerranée ou le piémont pyrénéen, et (ii) de faire
baisser les coûts du CCS.
Le développement de nouveaux hubs CO2 et la montée en charge des hubs
existants à travers un prolongement progressif des infrastructures de
transport sous la forme de vallées CO2 permettraient d?atteindre un volume
de CO2 capté compris entre 12 et 20 MtCO2/an.
Phase 3 : 2040-2050, les quantités de CO2 captées pourraient atteindre
30 à 50 Mt/an
L?objectif de captage de CO2 à horizon 2050 est plus incertain, mais
l?ambition de capter 30 à 50 MtCO2/an semble réaliste au regard de l?objectif
politique de neutralité carbone. Ces volumes pourraient être atteints en
considérant :
? Un réseau d?infrastructures CO2 à l?échelle nationale et européenne,
permettant le raccordement d?émetteurs isolés en particulier, le
raccordement des installations d?incinération de déchets et des
chaufferies de chauffage urbain dans les grandes agglomérations
proches des vallées CO2.
6 Disponible ici : Actualité entreprises | Entreprises | Agir pour la transition écologique |
ADEME
https://agirpourlatransition.ademe.fr/entreprises/actualite-entreprises?ressource_id=1132
https://agirpourlatransition.ademe.fr/entreprises/actualite-entreprises?ressource_id=1132
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
15
? Le développement d?émissions négatives via le captage du CO2 issu des
bioénergies ou directement retiré dans l?air ;
? L?implantation de nouveaux sites industriels, en particulier dans le
secteur du bioraffinage ;
? L?atteinte de la décarbonation profonde des plus grands sites,
conformément aux engagements mutuels des industriels émetteurs et
de l?État dans le cadre des Contrats de Transition Ecologiques.
Figure 2 : Prévisions 2050 en MtCO2/an captées, par origine et par destination
Ces chiffres sont de premières estimations, qui pourraient évoluer avec les
orientations définitives de la Stratégie Nationale Bas Carbone, notamment
l?hypothèse sur le DACC qui est dérivée des estimations de la Commission
européenne dans sa communication sur le management industriel du
carbone7 (de l?ordre de 100-150 MtCO2 au niveau européen en 2050).
Soutien au déploiement du CCUS
Dispositifs existants pour soutenir l?amont des projets de
CCUS
Des programmes nationaux pour financer la recherche et l?innovation
de la chaîne de valeur CCUS
Le Programme et Équipements Prioritaires de Recherche (PEPR) "Soutenir
l'innovation pour développer de nouveaux procédés industriels largement
décarbonés" (SPLEEN) a vocation à encourager et à soutenir des activités de
recherche amont, dans la gamme TRL 1-4, dans le domaine de la
décarbonation de l?industrie. Sur les dix projets lancés en 2023 pour un
budget de 35 M¤, mobilisant des communautés structurées autour de ces
enjeux majeurs, 6 projets sont en lien avec les sujets de CCUS.
7 COM(2024) 62 final
3
1
,
4
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
16
Les appels à projet IBaC PME et DEMIBaC du programme France 2030
permettent de soutenir les briques technologiques et démonstrateurs
innovants permettant de décarboner l?industrie, y compris relatifs à la chaîne
CCUS.
ZIBaC : un dispositif pour accompagner la planification territoriale des
hub CCUS
A travers l?appel à projets France 2030 « Zone Industrielle Bas Carbone
(ZIBaC) », l?État accompagne les territoires industriels dans leur
transformation écologique et énergétique afin de gagner en compétitivité et
en attractivité dans une logique de décarbonation et de réindustrialisation
du territoire.
Aujourd?hui, ce sont 4 zones qui ont été lauréates dans un premier temps, se
situant dans les zones industrielles les plus émettrices, suivies de 6 nouvelles
zones, également dans les zones industrielles identifiées comme étant
fortement émettrices (cf Figure 3). ZIBaC permettra de financer de
nombreuses études en lien avec le CCUS, portant en particulier sur les flux
de CO2pertinents au sein des zones industrielles, les infrastructures et les
réutilisations d?infrastructures, et la pertinence économique du CCUS.
Des dispositifs européens permettant de financer des projets de
capture du CO2 à l?échelle industrielle
L?innovation Fund (IF), ou Fonds européen pour l'Innovation, est l'un des plus
importants programmes de financement au monde pour la démonstration
de technologies innovantes à faible teneur en carbone, dont le CCUS. Ce
sont aujourd?hui 26 projets de CCUS, dont trois en France, qui ont reçu des
financements de l?Innovation Fund à hauteur de 3.3 Mds¤. Deux projets
français de capture et stockage du carbone concernent le déploiement d?une
chaîne complète de captage, transport et stockage depuis les sites français
d?Eqiom et Lhoist dans le Dunkerquois avec du stockage en Mer du Nord,
permettant d?atteindre un objectif de baisse de 1,5 MtCO2/an dès 2030. Un
projet de capture et utilisation du CO2 porté par Elyse Energy avec du CO2
issu d?une cimenterie de Lafarge pour la production d?e-méthanol a
également été sélectionné.
Le programme Européen Horizon Europe a également permis de soutenir le
développement de projets CCUS de recherche et d?innovation sur le
territoire français :
? Le pilote 3D de captage de CO2 à Dunkerque, lancé en 2022 et piloté
par un consortium comprenant Axens, Arcelor Mittal, l?IFPEN et
TotalEnergies devant permettre de vérifier à l?échelle d?un pilote
industriel les performances du procédé de captage de CO2 DMX?
développé dans les laboratoires d?IFPEN depuis plus de 10 ans.
? Le projet Pilot Strategy (2021-2026), piloté en France par le BRGM, qui
vise à identifier les formations géologiques adaptées au stockage de
CO2 en Europe, et à étudier les enjeux liés au déploiement d?un pilote
de stockage de CO2, d?un point de vue technique, économique, social
et environnemental.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
17
Le CCUS dans la pratique : les chantiers en cours de l?écosystème CCUS
de Dunkerque
? Capture du carbone sur le territoire : programme « K6 » et projet CalCC
La cimenterie d?EQIOM à Lumbres (50 km de Dunkerque) fabrique chaque
année 800 000 tonnes de ciment. Un tiers des émissions est lié à la
combustion d?énergies fossiles pour chauffer le four rotatif à 1 400 °C ; les
deux tiers restants sont liés à la réaction chimique de la production du
matériau.
La programme K6 du groupe EQIOM vise la décarbonation à 100% du site dès
2028, en installant une nouvelle ligne de production avec une meilleure
efficacité énergétique et en substituant les combustibles fossiles par des
énergies renouvelables. La seconde phase du programme se concentre sur la
capture des émissions résiduelles qui sont incompressibles. A cet effet, la
technologie Cryocap Oxy d?Air Liquide sera installée dans la cimenterie et
alimentée par un nouveau raccordement électrique souterrain de 13 km
assuré par RTE.
L?usine de LHOIST à Réty (70 km de Dunkerque) est le premier site de
production de chaux en France (700 000 tonnes chaque année). Ce matériau
est utilisé notamment dans la production d?acier, la construction,
l?agriculture, et présente des enjeux de décarbonation similaires à ceux du
ciment. Le projet de décarbonation CalCC du groupe LHOIST vise à installer
une unité de captage Cryocap FG d?Air Liquide, dès 2028 afin de neutraliser
les émissions incompressibles intrinsèques au procédé, en complément
d?actions d?efficacité énergétique et du déploiement d?énergies
renouvelables.
A terme, ces deux projets permettront d?éviter le rejet de 1,5 MtCO2 par an,
soit l?équivalent des émissions de plus de 800 000 véhicules particuliers.
Ces deux projets ont été lauréats de l?appel d?offres « Fonds d?Innovation »
de la Commission Européenne pour 270 M¤ en 2021 et 2022, ce qui a permis
de lancer les travaux de construction des deux installations de capture de
carbone qui entreront en service d?ici 4 ans.
? Transport : projets D?Artagnan et GRTgaz-Equinor
Mené par Air Liquide et Dunkerque LNG, le projet d?Artagnan prévoit le
développement des infrastructures nécessaires au transport et à
l?exportation de 1,5 MtCO2 dès 2027 et 4 MtCO2 à moyen terme. Ainsi, un
réseau de 80 km de canalisations permettra d?acheminer le carbone issu des
usines de Lumbres et de Réty vers un terminal CO2 sur le port de Dunkerque.
Après liquéfaction, dans un premier temps, le carbone sera chargé sur des
navires, en vue de leur expédition vers les sites de stockage.
Ce projet, nommé d?Artagnan, a reçu en juin 2024 un soutien financier de
160 M¤ de la Commission Européenne au titre du mécanisme pour
l?interconnexion en Europe.
A plus long terme, ce CO2 a vocation à être transporté par une canalisation
(carboduc). A la suite d?un accord conclu le 17 juin dernier, suite à la visite du
ministre Roland Lescure en Norvège en octobre 2023, GRTgaz et le norvégien
Equinor ont lancé un projet de canalisation reliant directement Dunkerque
aux stockages de CO2 en mer du Nord au large de la Norvège. Ce projet
permettra d?exporter 3 à 5 MtCO2 à compter de 2029.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
18
? Stockage sous-marin en Mer du Nord
Les partenariats conclus ou en cours de discussion avec les pays bordant la
Mer du Nord (notamment la Norvège, le Danemark et les Pays-Bas)
permettront de stocker durablement le carbone émis par les industriels des
alentours de Dunkerque. En particulier, un accord de partenariat stratégique
avec la Norvège a été concrétisée en janvier 2024, trois mois après le
déplacement de Roland Lescure, ministre de l?Industrie, sur le site du projet
Northern Lights. Ce stockage permettra de séquestrer 1,5 MtCO2 par an d?ici
2025 et jusqu?à 5 MtCO2 à horizon 2026. Les industriels français sont d?ores
et déjà en discussion pour y stocker leurs émissions.
Figure 3 : Carte de déploiement des différents projets CCUS en France
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
19
Lancement d?un nouveau soutien pour accompagner le
déploiement des premiers grands hubs CO2
Un dispositif de soutien au déploiement complémentaire de l?EU-ETS
Le cadre européen des lignes Directrices sur les aides d?État en faveur du
Climat, de l?Environnement et de l?Énergie permet aux États de soutenir les
projets de décarbonation de l?industrie, tout en évitant les effets potentiels
de distorsion de la concurrence au sein de l?Union Européenne. En janvier
2024, l?État a initié des discussions avec la Commission Européenne pour
valider le mécanisme de soutien français, permettant de soutenir les grands
projets de décarbonation dont les besoins en soutiens publics sont
supérieurs à 20 M¤, ce qui devrait être le cas de la plupart des projets CCS
initiaux. Dans le cadre de ces discussions, un dispositif de soutien
comprenant le CCS a été mis en consultation le 26 Juin.
Le soutien au CCS sera réalisé en octroyant des subventions aux projets
industriels permettant de réduire leurs émissions. Il visera à déclencher les
investissements dans un contexte où les incitations financières liées au
marché carbone ne sont pas encore suffisantes pour permettre les
investissements dans des projets à l?échelle industrielle. Le soutien sera
octroyé aux émetteurs industriels pour leur permettre de limiter les surcoûts
liés au captage et aux dépenses opérationnelles liées à l?utilisation des
infrastructures de transport et de stockage.
Ce soutien visera à compenser la différence entre le coût du carbone payé
au titre des mécanismes européens et les coûts de captage, transport et
stockage payés par l?industriel, afin de donner une rentabilité suffisante à
l?investissement. Ce type de mécanisme, de type « contrat carbone pour
différences »8, est déjà mis en oeuvre dans plusieurs pays comme les Pays-Bas,
l?Allemagne, le Danemark et le Royaume-Uni pour soutenir les projets de
CCS. Au-delà des frontières européennes, les Etats-Unis ont mis en place un
crédit d?impôt pouvant aller jusqu?à 85 USD/tCO2 pour les industriels captant
et stockant leur CO2.
Le financement sera octroyé aux industriels émetteurs pour une durée de
15 ans avec un versement annualisé de l?aide en fonction des émissions
effectivement séquestrées. Ce type d?aides permettra indirectement de
soutenir le déploiement de ces infrastructures, en particulier en fournissant
de la visibilité aux investisseurs.
Une priorisation du soutien au déploiement du CCUS selon la nature
des émetteurs
La capture, l?utilisation, et le stockage du CO2 constituent des leviers
importants de réduction des émissions industrielles, en particulier pour les
émissions incompressibles de procédés qui ne peuvent être réduites par des
actions d?efficacité énergétique, d?électrification, de recours à la biomasse,
de recyclage ou d?autres changements de procédé. Ces besoins sont
notamment matérialisés dans les contrats de transition écologique (CTE)
signés entre l?État et les industriels les plus émetteurs, ainsi que dans les Plans
de Transition Sectoriels réalisés par l?Ademe9.
La capture de carbone doit être priorisée sur les émissions résiduelles
incompressibles, en l?absence d?autres solutions de décarbonation, afin de
8 Carbon Contract for Difference - CCfD
9 Disponibles ici : https://agirpourlatransition.ademe.fr/entreprises/demarche-decarbonation-
industrie/plans-transition-sectoriels
https://agirpourlatransition.ademe.fr/entreprises/demarche-decarbonation-industrie/plans-transition-sectoriels
https://agirpourlatransition.ademe.fr/entreprises/demarche-decarbonation-industrie/plans-transition-sectoriels
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
20
permettre une décarbonation profonde des sites industriels couverts par les
marchés du carbone, en particulier ceux concernés par la fin des allocations
gratuites de quotas de carbone en 2034. A plus long terme, l?atteinte de la
neutralité carbone et les besoins de CO2 biogénique pour la production d?e-
carburants, nécessiteront de capter le CO2 issus de la combustion des bio-
énergies.
Pour l?industrie cimentière, le CCUS sera mobilisé pour réduire les émissions
de procédés de production de clinker qui constituent environ deux tiers des
émissions de CO2 des cimenteries. Si la modification du taux de clinker,
l?efficacité énergétique et le recours à la biomasse permettent une
diminution des émissions du secteur cimentier, la neutralité carbone ne peut
pas être atteinte pour la production de clinker sans un recours au CCUS ou
un changement majeur dans la formulation des ciments. Il en va de même
pour la production de chaux. A terme, la capture du CO2 biogénique (issu de
la combustion de biomasse) de ces secteurs sera également nécessaire pour
générer des émissions négatives et atteindre la neutralité carbone.
Pour l?industrie chimique, le recours au CCUS est nécessaire pour atteindre
la cible ambitieuse de division par deux des émissions en dix ans prévue par
la feuille de route de la filière. En effet, même si la chimie peut largement
électrifier ses procédés ou recourir à des sources de chaleur décarbonée, de
nombreux procédés produisent du CO2 ce qui rend difficile de réduire ces
émissions autrement qu?en les captant.
Pour l?acier, le recours à la réduction directe du minerai de fer par de
l?hydrogène produit par électrolyse est la solution aujourd?hui envisagée pour
réduire à terme les émissions du secteur. Cette technologie permet aussi de
sortir de la dépendance aux énergies fossiles, comme le charbon aujourd?hui
utilisé ou le gaz naturel qui pourrait être utilisé en transition. En fonction de
du coût pour les entreprises et du coût pour l?Etat de la solution hydrogène,
le CCUS pourra donc être employée dans la décennie à venir, dans une
logique transitoire ou en complément d?une solution H2 sur la réduction
directe ou sur d?autres procédés sidérurgiques.
Pour l?aluminium primaire, bien que le CO2 soit émis en faible concentration,
la capture peut être envisagée compte tenu de la maturité limitée des
procédés utilisant une anode inerte, nécessitant à ce stade de se baser sur
des anodes carbonées.
À terme, d?autres secteurs, comme l?incinération des déchets, la
transformation de la biomasse, le secteur papetier voire l?industrie agro-
alimentaire, pourraient également déployer des projets CCUS, en fonction
des évolutions de l?ETS.
TRANSPORT
Le CCUS nécessitera le déploiement d?infrastructures de transport de
CO2 en particulier pour connecter les bassins industriels régionaux aux
hubs d?export du CO2.
A l?instar d?autres secteurs économiques, les opérateurs
d?infrastructures de transport pourraient faire l?objet d?une régulation,
notamment s?ils sont en situation monopolistique.
La régulation garantira d?une part un accès transparent et non
discriminatoire à ces infrastructures aux émetteurs dont les projets de
CCS ne sont pas matures au moment du dimensionnement des
infrastructures de transport.
D?autre part, une régulation permettra d?assurer une juste répartition
de la valeur sur l?ensemble de la chaîne CCS, y compris des opérateurs
de transport.
Il n?est pas prévu de mécanismes subventionnels complémentaires
pour le déploiement des infrastructures de transport, au-delà des
fonds européens qui peuvent venir aider au déploiement
d?infrastructures transfrontalières.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
22
Un enjeu de déploiement des infrastructures
de transport
Plusieurs modalités de transport du CO2 existent pour relier l?émetteur vers
un lieu de stockage ou terminal de liquéfaction (en vue de son export vers un
site de stockage situé à l?étranger) : transport routier, fluvial, rail ou
canalisation. La logistique par canalisation constituera à terme la colonne
vertébrale des réseaux de CCUS régionaux, dans les cas où des volumes de
CO2 importants doivent être transportés et sur des périodes
d?amortissement suffisantes. Ces infrastructures ont vocation à constituer
des actifs privés.
Le dispositif de soutien à la décarbonation versés aux émetteurs permettra
de soutenir le déploiement des infrastructures de transport nécessaires et
pertinentes en permettant aux industriels de s?engager sur des contrats
longs-termes d?une période de 15 ans. Parallèlement, les mécanismes
d?interconnexion européens pourraient soutenir certaines infrastructures et
en particulier leur bon dimensionnement
Les financements du « Mécanisme d?Interconnexion Européen - Energie »
(MIE-E ou TEN-E en anglais) peuvent notamment permettre de financer une
partie des infrastructures transfrontalières de CO2. Les projets labellisés
« Projet d?Intérêt Commun » (PIC ou PCI en anglais) par la Commission
Européenne peuvent solliciter des financements MIE-E. Actuellement, la
France compte plusieurs projets avec hubs CCS labelisés PCI, dont les projets
Callisto (hub de captage et stockage dans le bassin méditerranéen), Nautilus
(réseau d?export de CO2 vers la Mer du Nord incluant la zone industrielle du
Havre et Dunkerque), et Pycasso (hub de transport et stockage on-shore dans
le Sud-Ouest de la France).
L?État vise un développement rapide des infrastructures structurantes pour
la décarbonation des territoires industriels et envisage une mise en service
du premier réseau de transport de CO2 sur le territoire national à l?horizon
2028.
Un cadre de régulation nécessaire pour
développer les infrastructures de transport
Les infrastructures de transport mutualisé de CO2 par pipeline présentent
certaines caractéristiques communes avec les réseaux de transport de gaz ou
d?électricité, en particulier le caractère de monopole naturel lié aux économies
d?échelle et le risque de constitution de situations de rente préjudiciables au
coût global du CCUS et du besoin de soutien public afférents.
Une intervention publique afin d?assurer la bonne répartition de la valeur sur
l?ensemble de la chaîne de capture, de transport et de stockage du dioxyde
de carbone pourrait favoriser les investissements privés.
Lors de la consultation menée auprès des acteurs industriels et des
financeurs, la mise en place d?une régulation économique a été soutenue,
notamment par les sites industriels émetteurs, dans les conditions suivantes :
- que le cadre de régulation soit connu ou mis en place avant les décisions
d?investissement ou la passation des contrats d?accès entre les industriels
et les opérateurs de transport ou ne remette pas en cause les contrats
déjà conclus ;
- que ce cadre soit adapté aux caractéristiques des réseaux de transport
de CO2 : nombre de clients limité et infrastructures en cours de
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
23
déploiement.
La fragmentation de la chaîne de valeur du CCS, impliquant une grande
diversité d?acteurs et de modèles économiques, demande une approche
régulatoire plus flexible que pour l?électricité et le gaz, qui sont des marchés
beaucoup plus matures, avec des acteurs issus de monopoles historiques et
avec des enjeux d?accès territoriaux plus forts.
L?Union Européenne devrait se saisir des questions de régulation du transport
de CO2 au-delà des règles déjà prévues par la directive CCS, mais les
réflexions restent préliminaires à ce stade. D?éventuelles évolutions
européennes ne sont pas attendues dans les prochaines années, et devraient
contenir des éléments sur la non-remise en cause des contrats déjà conclus.
Dès lors, la France se propose de mettre en oeuvre au niveau national, sans
attendre la possible réglementation européenne, un cadre de régulation
national fondée sur les principes définis par le droit européen existant
(directive 2009/31/CE), à savoir la transparence et le libre accès aux
infrastructures de transport et stockage.
Accélérer le déploiement des premiers hubs en
adoptant une régulation souple
Une régulation concernant l?accès au réseau principal (collecte et transport),
ouvert aux tiers et reliant différents clusters et sites de stockages est
envisagée. Sous la forme d?un « ATR négocié » (Accès des Tiers au Réseau),
cette régulation permettrait d?assurer un cadre stable et prévisible aux
émetteurs (tarifs et conditions de raccordement entres autres).
Le Gouvernement a demandé à la Commission de Régulation de l?Energie son
analyse sur les modalités les d?analyse des modalités les plus opportunes de
régulation des infrastructures de CO2.
Ce rapport, rendu en juin 2024, propose d?organiser à terme cette régulation
selon les principes suivants, en fonction des caractéristiques des maillons de
la chaîne de valeur :
- Les activités de capture relèvent du domaine concurrentiel, il n?apparaît
donc pas nécessaire de les réguler.
- Les activités de collecte par canalisation pourront être en compétition avec
des activités non régulées (transport routier, fluvial ou ferroviaire). Afin de
laisser les industriels s?organiser au sein des hubs, la CRE considère qu?il est
préférable de prévoir un accès négocié, avec des obligations de
transparence et de non-discrimination, contrôlées par la CRE.
- Le transport par canalisation, les terminaux de liquéfaction et le stockage
de CO2 constitueront très probablement des monopoles naturels. Ils seront
donc en position de dégager une rentabilité excessive au détriment de la
compétitivité des industriels émetteurs. La CRE recommande ainsi de
prévoir dès à présent dans la loi la possibilité d?appliquer une régulation
pour ces activités (accès des tiers régulé avec un tarif et des règles d?accès
fixés par le régulateur). La régulation de tout ou partie de ces infrastructures
pourra être décidée sur la base d?une analyse globale, incluant l?étude de la
rentabilité des infrastructures, associé à une consultation publique des
utilisateurs et donnant lieu à la publication de rapports réguliers (au moins
tous les 3 ans).
- La CRE considère qu?une séparation comptable des activités de transport
de CO2 par canalisation, de stockage et de liquéfaction avec les autres
activités de la chaine de valeur est nécessaire pour permettre, dans un
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
24
premier temps, un contrôle de la rentabilité de ces infrastructures, et, le
cas échéant, d?établir les tarifs d?utilisation régulés reflétant les coûts10.
L?État envisage de mettre en oeuvre ces recommandations de la CRE.
La CRE rendra un rapport détaillé au gouvernement avant la fin de l?année
2024, ce qui pourra constituer le support d?un cadre législatif pour le
déploiement de ces infrastructures, dans le respect des principes énoncés ci-
dessus.
Cet « ATR négocié » pourrait à terme évoluer en un « ATR régulé » dans la
perspective de la création d?un réseau maillé. Cette évolution du cadre de
régulation applicable aux opérateurs d?infrastructures de transport
mutualisé11 s?accompagnerait, d?après les travaux de la CRE, de plusieurs
principes.
- Établissement de tarifs d?utilisations reflétant les coûts de l?opérateur sur
un réseau donné qui serait considéré comme une base d?actifs régulés
(BAR).
- Approbation par le régulateur des plans de développement de réseau et
des investissements réalisés par les opérateurs de transport de CO2.
- Maintien a minima d?une séparation comptable entre les activités de
transport de CO2 par canalisations et le reste des activités de l?opérateur.
- Encadrement et approbation des conditions de raccordement de
nouveaux émetteurs utilisant les réseaux pour garantir notamment un
accès non discriminatoire aux capacités de réseau non utilisées.
10 Rapport de la Commission de Régulation de l?Energie sur le cadre de régulation des
infrastructures d?hydrogène et de dioxyde de carbone - 06/06/2024
11 Transport par pipeline, stockage intermédiaire, terminal maritime et installations de
compression.
STOCKAGE
L?État facilitera l?accès aux stockages en mer du Nord et en
Méditerranée, qui constituent à court terme les seuls exutoires
opérationnels pour les émissions françaises, notamment via :
- La ratification de l?amendement de 2009 au Protocole de Londres,
permettant l?export de CO2 pour stockage dans les formations
géologiques du sous-sol marin, qui sera présentée devant le
Parlement français courant 2024 ;
- La conclusion d?accords bilatéraux avec les pays hors de l?Espace
Economique Européen disposant de capacités de stockage.
Plusieurs actions stratégiques pour développer des capacités de
stockage souveraines, plus compétitives et accessibles que le stockage
à l?étranger, ont été lancées ou sont envisagées. Ces capacités
garantiront une sécurité des opérations conformément à la
réglementation française et européenne en vigueur. Ces actions
concernent :
- Un état des lieux des potentiels théoriques de stockage géologique
de CO2 (en cours) ;
- Un appel à manifestation d?intérêt lancé fin avril 2024, afin
d?identifier les acteurs intéressés pour accélérer le développement
des capacités de stockage ;
- Un appel à projet pour subventionner des actions permettant
d?améliorer la connaissance du sous-sol et de favoriser la recherche
de capacités de stockage géologique de CO2 en France ;
- Au titre de l?évaluation environnementale, l?examen au cas par cas
des essais d?injections et de soutirage de CO2 pendant la phase de
recherche depuis la publication du décret n° 2024-529 du 10 juin
2024 ;
- La mise en chantier de l?arrêté ministériel prévu en application du
L. 229-33 précisant les concentrations maximales admissibles pour
les substances ajoutées au CO2 injecté en couches géologiques
profondes ;
- Des campagnes d?information et d?échanges avec les parties
prenantes.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
26
Différentes modalités de stockage du CO2
Le stockage géologique de CO2 se fait principalement dans des champs
d?hydrocarbures déplétés (c?est-à-dire d?où des hydrocarbures ont été
extraits) ou des aquifères salins (couches géologiques profondes, poreuses,
perméables et saturées en eaux salées appelées saumures) à une profondeur
minimale de 800 m afin de stocker le CO2 sous une forme dense (la forme
dense nécessitant moins de volume de stockage). Dans ces deux cas, le
« stockage » consiste à avoir une structure géologique réservoir fermée d?un
certain volume, recouverte par une couche imperméable au passage du CO2 et
qui permet de piéger de façon sûre et permanente le CO2. Plusieurs projets
étudient aussi la possibilité de stocker de façon sûre et permanente le CO2
sous forme dissoute dans des eaux de gisement.
Stocker géologiquement du CO2 est une technologie relativement ancienne :
certains pays, comme les États-Unis ou la Norvège, stockent du CO2 dans des
réservoirs d?hydrocarbures depuis des décennies. En France, environ 50 kt de
CO2 ont été stockées entre 2010 et 2012 dans le pilote de Rousse (Piémont
pyrénéen). Et la France dispose de compétences historiques dans le stockage
souterrain de gaz puisque plusieurs sites de stockages de gaz (principalement
du méthane) sont déjà exploités sur le sol national depuis des décennies.
Une stratégie française de coopération
internationale pour favoriser l?accès aux sites
de stockage de CO2 à l?étranger
La plupart des projets de captage français en cours de développement sont
situés dans des régions industrielles ayant un accès à des capacités de
stockage déjà identifiées :
- En Mer du Nord, avec les projets Northern Lights en Norvège, et Aramis
aux Pays-Bas ;
- En Méditerranée, avec les projets Callisto en Italie, et Prinos en Grèce.
Le développement des capacités européennes de stockage de CO2 sera
renforcé par la mise en oeuvre du règlement européen NZIA (Net Zero
Industry Act), qui impose aux producteurs d?hydrocarbures de l?Union
Européenne de contribuer aux objectifs de stockage de 50 Mt de CO2 par an
en 2030 (hors capacités de la Norvège), et ce au prorata de la part de chaque
entité dans la production de pétrole brut et de gaz naturel de l?UE entre 2020
et 2023. De nouveaux objectifs pour 2040 et 2050 pourraient être fixés dans
les prochaines années. Une partie de ces objectifs seront remplis par le
Danemark qui, notamment grâce à ses projets Bifrost, Greensand et Norme,
prévoit de disposer de près de 52 Mt par an en 2030-2032.
La France facilitera l?accès à ces capacités européennes afin de permettre
aux industriels français émetteurs de pouvoir développer des projets de
capture et de stockage de CO2.
Les échanges de CO2 transfrontaliers sont notamment encadrés par
l?amendement de 2009 à l?article 6 du Protocole de Londres, permettant
l?export de CO2 par voie maritime à des fins de stockage dans les formations
géologiques du sous-sol marin, qui sera soumis pour ratification au parlement
français en 2024. Pour les États-membres de l?UE et les pays participants à
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
27
l?Espace Économique Européen, la Commission Européenne12 a précisé que
le cadre juridique de l?UE en vigueur est l?«arrangement» juridique pertinent
entre les parties et que, si des protocoles d?entente sont signés, ils doivent
être limités aux questions résiduelles qui ne sont pas régies par le droit de
l?Union, comme la coopération entre les autorités responsables de l?octroi
des permis.
La France a donc, depuis deux ans, noué des partenariats sur le CCUS avec
ses partenaires européens :
- Une lettre d?intention actant la coopération franco-danoise sur le CCUS
et un accord bilatéral sur l?export de CO2 par voie maritime ont été signés
en mars 2024 entre le Ministre en charge de l?énergie et son homologue
danois.
- Une lettre d?intention similaire a été signée en décembre 2022 entre le
ministère de la Transition énergétique et son homologue norvégien. La
France a accueilli mi-juin 2024 une délégation norvégienne d?industriels
impliqués dans les projets CCS Norvégiens. Des discussions avec les
industriels français ont ainsi pu avoir lieu, dans le but de continuer à nouer
des partenariats stratégiques avec nos voisins pour accélérer le
déploiement de la chaîne CCS.
- La France a rejoint début 2023 la North Sea Basin Task Force, groupe de
travail de pays bordant la Mer du Nord relatif au déploiement du CCS
dans cette région.
- Du côté de la Méditerranée, l?Italie, la Grèce et la France ont également
signé début 2023 un plan régional stratégique, non engageant, visant à
établir un cadre permettant le développement d?infrastructures
transfrontalières de transport du CO2. D?autres pays du bassin
méditerranéen pourraient rejoindre à court-terme ce plan.
La France poursuivra une collaboration renforcée avec les principaux pays
fournissant des capacités de stockage de CO2.
Développer les capacités de stockage du CO2
en France : une opportunité pour notre
économie et notre décarbonation
La France dispose d?un sous-sol varié, avec plusieurs régions propices au
stockage géologique de CO2.
Cependant, il est nécessaire d?identifier plus précisément les volumes de
stockage, pour des enjeux de souveraineté et de compétitivité, afin de
disposer de nos propres capacités de stockage du CO2, des enjeux
d?optimisation des coûts liés au transport du CO2, ou encore des enjeux de
difficultés d?accès de certains émetteurs aux futurs hubs d?export.
La connaissance du sous-sol français dans les bassins sédimentaires repose
historiquement sur les concessions de production ou de stockage
d?hydrocarbures et, plus récemment, de géothermie.
Les études conduites depuis 20 ans conduisent à de premières estimations
de ressources de stockage sous forme dense qui devront être affinées :
12 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au comité
économique et social européen et au Comité des régions du 6 février 2024 : https///eur-
lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/ ?uri=CELEX :52024DC0062
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
28
- A minima 10 Mt dans les champs déplétés du Bassin parisien ;
- Environ 100 Mt dans les pièges en aquifère salin pour le Bassin aquitain ;
- Jusqu?à 650 Mt dans les champs déplétés du bassin d?Aquitaine (en incluant
le Piémont pyrénéen) ;
- Pour l?offshore Méditerranée et l?offshore Atlantique, une étude en cours
conduit à une première approximation de respectivement 360 Mt et
24 Mt sur les capacités de stockage de CO2 dans les pièges
structuraux/stratigraphiques des aquifères salins ;
- Pour les autres bassins sédimentaires, comme le graben du Rhin (Alsace)
et celui du Nord ? Pas-de-Calais, il n?existe pas encore d?études
suffisamment détaillées sur les capacités de stockage de CO2.
Figure 4 : Carte du potentiel de stockage géologique de CO2 en France selon des études
théoriques et les données issues de la production pétrolière et gazière
Ces chiffres sont des valeurs géologiques théoriques et ne prennent pas en
compte tous les facteurs nécessaires pour déterminer des capacités
effectives, notamment les aspects économiques ou de conflit d?usage
Des stockages de CO2 sous forme dissoute dans des aquifères salins
permettraient d?augmenter les quantités stockables tout en permettant une
meilleure répartition des capacités de stockage sur le territoire national. Ce
potentiel reste à déterminer.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
29
Afin de faire émerger rapidement des projets de stockage de CO2 en France,
ont été lancées ou sont prévues les actions suivantes, visant l?amélioration et
la diffusion des connaissances du sous-sol français :
- La réalisation d?un état des lieux des potentiels de stockage de CO2 à
partir des études précédemment menées sur les principaux bassins
sédimentaires. Les conclusions de cet état des lieux seront disponibles
dans un rapport synthétique mis à disposition du public ;
- Le lancement d?un appel à manifestation d?intérêt (AMI). Lancé fin avril
2024, cet AMI non-engageant est ouvert jusqu?au 26 juillet 2024 pour
identifier les acteurs intéressés par le captage, le transport et le stockage
géologique de CO2, notamment les sociétés disposant de moyens pour
accélérer le développement des connaissances géologiques sur des
formations aptes au stockage de CO2 ;
- Le lancement d?un appel à projet d?ici fin 2024 ? début 2025, sur la base
des données de l?état des lieux et de l?AMI, pour subventionner des
actions permettant d?améliorer la connaissance du sous-sol et de
favoriser la recherche de capacités de stockage géologique de CO2 en
France : des campagnes sismiques, des tests de faisabilité d?injection de
CO2 et de qualification de la couverture du réservoir (en laboratoire ou
dans des sites pilotes), avec des premiers essais qui pourraient débuter en
2025-2026 ;
- Au titre de l?évaluation environnementale, l?examen au cas par cas des
essais d?injections et de soutirage de CO2 pendant la phase de recherche
depuis la publication du décret n° 2024-529 du 10 juin 2024 ;
- La mise en chantier de l?arrêté ministériel prévu en application du L. 229-
33 précisant les concentrations maximales admissibles pour les
substances ajoutées au CO2 injecté en couches géologiques profondes ;
- La facilitation de l?appropriation de la filière CCUS par le lancement de
campagnes d?information et d?échanges avec les parties prenantes sur le
sujet de la faisabilité et les conditions de réalisation des projets. Le CCUS
est en effet un des leviers de décarbonation, et les objectifs du stockage
géologique de CO2 doivent être intégrés dans ceux plus généraux de lutte
contre le changement climatique. Au niveau des projets, l?État incitera les
demandeurs de titres de stockage à initier le dialogue avec les parties
prenantes, notamment des populations locales, le plus tôt possible.
Un cadre réglementaire permettant la
recherche et l?exploitation de sites de stockage
géologique de CO2
La directive 2009/31/CE du parlement européen et du conseil du 23 avril 2009
relative au stockage géologique du dioxyde de carbone (dite « Directive
CCS ») établit un cadre législatif et réglementaire pour le stockage
géologique sûr et pérenne du CO2 sur le territoire des États membres, leurs
zones économiques exclusives et leurs plateaux continentaux, afin de
contribuer à la lutte contre le changement climatique. La transposition en
droit français de cette directive a été finalisée en 2011 dans le code de
l'environnement : articles L.229-27 à L.229-54 et R.229-57 à R.229-102.
La directive CCS prévoit que la recherche de formation de stockage ne peut
se faire que dans le cadre d?un "permis d?exploration" (correspondant à un
permis exclusif de recherches, ou PER, en droit minier français) et que
l?exploitation d?une formation géologique ne peut se faire qu?après
délivrance d?un "permis de stockage" (correspondant à une concession en
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
30
droit minier). Cette concession n?est accordée que si le demandeur
démontre que - dans les conditions d?utilisation envisagées, il n?existe ni
risques de fuite, ni dangers, ni inconvénients pour l?environnement ou la
santé humaine.
Pendant l?exploitation, l?exploitant procède à la surveillance des installations
et de la formation géologique, afin notamment de détecter d?éventuelles
fuites et les effets sur le milieu environnant.
Par ailleurs, la procédure de stockage de CO2 à des fins de lutte contre le
réchauffement climatique, y compris les installations de surface nécessaires
à son fonctionnement, à l?exclusion de celles déjà visées par d?autres
rubriques de la nomenclature, est soumise à autorisation au titre de la
rubrique 2970 de la nomenclature des installations classées pour la
protection de l'environnement (ICPE). Il convient de préciser que les essais
d?injection et de soutirage de CO2 durant la phase de recherche sont soumis
au régime de l?autorisation environnementale en tant que première phase
d?un projet de stockage géologique de CO2 qui est soumis à autorisation au
titre de la rubrique 2970 des installations classées. Depuis le décret n° 2024-
529 du 10 juin 2024, ces essais sont soumis à une procédure au cas par cas au
lieu d'une évaluation environnementale systématique.
En période d?exploitation, les risques sont essentiellement centrés sur le puits
d?injection et sur son environnement proche au sein de la roche-réservoir. Les
risques à prévenir concernent principalement :
- Les fuites massives de CO2,
- Les fuites plus diffuses ainsi que les contaminations de compartiments
de l?environnement, par le CO2 et/ou par des impuretés qu?il contient.
- Les phénomènes de sismicité induite et les mouvements de terrain.
Au terme de l?exploitation et après une période de post-fermeture qui ne
peut être inférieure à 10 ans, le site est transféré à l?État qui devient
responsable de la surveillance et de la mise en oeuvre éventuelle de mesures
correctives ainsi que de la restitution des quotas de CO2 en cas de fuite du
site. Préalablement à ce transfert, outre le versement d?une contribution
financière à l?État, l?exploitant doit notamment démontrer que le CO2 restera
parfaitement confiné de façon permanente et sûre.
En France, il n?y a pas de restriction géographique au dépôt d?une demande
de PER ou de concession et tout industriel peut d?ores et déjà adresser une
demande de titre au ministre chargé des mines sur l?ensemble du territoire
national.
En outre, pour intéresser au mieux les territoires aux projets de stockages
souterrains de CO2, une réflexion est envisagée pour réformer la fiscalité
minière.
VALORISATION
La valorisation du CO2 constitue une piste intéressante pour
produire des molécules alternatives à certains intrants fossiles,
et contribuer à la décarbonation des secteurs comme la chimie
ou le transport maritime et aérien.
Si certains usages « séquestrants », comme la production de
matériaux à partir de CO2, permettent effectivement de réduire
les émissions, la majorité des produits ne constituent pas une
« séquestration » pérenne du carbone et n?est donc pas
comptabilisé au même niveau qu?une séquestration géologique.
L?évolution des règles de comptabilisation, notamment au
niveau du marché carbone européen et dans le cadre du
développement de la certification des absorptions de carbone,
tout en étant cohérente avec la réalité physique des procédés,
permettrait de mieux mobiliser le CCU « matériaux » comme
levier technologique.
Par ailleurs, l?équilibre économique de la valorisation du CO2
demeure complexe eu égard aux besoins en électricité bas
carbone pouvant être utilisés de manière plus vertueuse par
ailleurs.
Dans une logique d?efficacité de la dépense publique, l?Etat
soutiendra la baisse d?émission liée aux usages « séquestrant »
du CO2 dans les dispositifs de soutien au CCS. Le
développement de la valorisation du CO2 dans les e-carburants
sera notamment tiré par les différentes obligations sectorielles
d?incorporation. L?Etat définira quels e-carburants pourront
bénéficier de ces obligations sectorielles, en veillant à ce que le
CO2 utilisé soit d?origine biogénique, en complément du cadre
européen existant.
Parallèlement, l?Etat proposera un cadre national de
certification des émissions biogéniques permettant de faciliter
le déploiement des projets CCU sur le territoire, et soutiendra la
généralisation d?un tel cadre dans le droit européen lors des
évolutions prévues du système ETS.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
32
Voies de valorisation du CO2
La valorisation énergétique du CO2 peut contribuer à décarboner le
transport aérien et maritime.
Le CO2 peut être utilisé dans les processus de fabrication de molécules
servant de base aux carburants utilisés dans les secteurs du maritime et de
l?aviation. Au niveau européen, les règlements FuelEU Maritime et ReFuelEu
Aviation fixent des objectifs d?incorporation de carburants alternatifs
durables dans ces secteurs et la directive sur les énergies renouvelables (RED)
fixe des objectifs d?énergies renouvelables dans l?ensemble des secteurs des
transports. Le volume de CO2 valorisé dépendra de l?évolution de l?équilibre
économique, mais les besoins pour la décarbonation du secteur aérien et
maritime devraient faire émerger une filière de production en France.
Néanmoins, cette valorisation nécessite une certaine prudence afin de
répondre aux enjeux climatiques. La production de e-carburants est associée
à une consommation importante d?électricité : en 2050, elle pourrait
nécessiter plus de 100 TWh d?électricité? (en large partie due à la production
d?hydrogène nécessaire et en plus faible partie liée à la capture du CO2). Par
ailleurs, le CO2 utilisé pour la synthèse des e-carburants est réémis lors de leur
utilisation. L?État souhaite donc prioriser pour la production d?e-carburants
le recours au CO2 biogénique et au CO2 retiré de l?air (avec un déploiement
de ce dernier à une échéance plus lointaine), et à terme, exclure tout autre
CO2 pour ces usages.
Le CO2 peut également servir de molécule pour la chimie de base
Le CO2 peut être utilisé comme matière première pour produire un certain
nombre de produits chimiques intermédiaires (éthylène, propylène ou
encore méthanol), qui peuvent ensuite être transformés en produits plus
complexes et nécessaires pour l?industrie de la pétrochimie. Ces produits
pourraient à terme remplacer les produits de base issus de la pétrochimie
actuelle, mais devront être soutenus en termes de R&D et d?industrialisation,
étant donné le coût actuellement encore élevé de ces procédés, et leur
consommation d?énergie et d?eau.
Le CO2 peut être valorisé et séquestré durablement dans des
matériaux
Le CO2 valorisé est alors considéré comme séquestré dans ces matériaux sur
une longue période. On parle parfois d?« usage séquestrant » du CO2. C?est
notamment le cas de la carbonatation du béton.
Le CO2 peut être réinjecté directement dans des produits qui en
consomment
L?usage direct du CO2 est déjà en place et installé : il sert d?intrant dans des
procédés industriels (solvant, décapage...), dans les serres, ou dans l?industrie
agro-alimentaire. Mais le marché français, de l?ordre de 800 ktCO?/an, reste
marginal et ne constitue pas un usage permettant de décarboner car il est
généralement réémis dans l?atmosphère.
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
33
Cadres réglementaires des produits issus du
captage du CO2
Dans le cadre de l?EU-ETS, le CO2 capté en vue de sa valorisation est considéré
comme émis sur le site industriel. L?industriel ne reçoit donc aucune
exemption à l?obligation de restituer des quotas carbone dans le cas où il
choisirait de valoriser le CO2 capté. Le bénéfice de la réduction d?émissions
est alors attribué au secteur utilisant le produit fabriqué à partir du CO2
capté.
Concernant le CCU dit « séquestrant », la directive « EU-ETS » considère que
la réduction d?émission permise par la valorisation du CO2 n?est effective
pour l?industriel que dans le cas où le CO2 est transféré hors de l?installation
industrielle émettrice vers une autre installation, pour y être « lié
chimiquement de manière permanente à un produit, de sorte qu'il ne
pénètre pas dans l'atmosphère dans des conditions normales d'utilisation »).
Un acte délégué est en cours d?élaboration au niveau européen pour préciser
ce point et devrait être publié au troisième trimestre 202413.
La revue cadre de l?EU-ETS attendue en 2026 pourrait conduire à une mise à
jour du cadre de comptabilité du CCU, notamment pour les produits à
moyenne durée de vie (quelques dizaines d'années), tout en évitant tout
double comptage. Une modification de ces incitations a déjà été évoquée
par la Commission Européenne dans le cadre de sa communication sur la
stratégie sur la gestion industrielle du carbone et sera encouragée par la
France.
Soutien à la filière CCU
Le CCU est une industrie encore peu mature dont l?économie est fragile, et
reste dépendante du prix du carbone et des incitations et aides financières.
L?Etat soutiendra, via le dispositif de soutien au CCS, la baisse d?émission liée
aux usages dits séquestrants du CO2 ? notamment pour la production de
matériaux.
La production de e-carburants permet par ailleurs de réutiliser le CO2 et
réduire les émissions de gaz à effet de serre, contribuant à l?atteinte des
objectifs de la planification écologique.
Plusieurs mécanismes économiques sont déjà mis en oeuvre et constitue des
leviers puissants pour le déploiement de projets visant à réutiliser du CO2
pour produire des carburants de synthèse pour l?aviation et le maritime tels
que :
- Au niveau européen :
? l?EU-ETS pour les secteurs aviation et maritime dans lequel les
carburants de synthèse sont considérés zéro-émisisons et
avecl?allocation spécifique de quotas gratuits pour les compagnies
aériennes utilisant des carburant d?aviation durable,
13 https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/14135-Permanent-
storage-of-EU-ETS-emissions-through-carbon-capture-and-utilisation_en
https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/14135-Permanent-storage-of-EU-ETS-emissions-through-carbon-capture-and-utilisation_en
https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/14135-Permanent-storage-of-EU-ETS-emissions-through-carbon-capture-and-utilisation_en
État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France
34
? les obligations d?incorporation de carburants alternatifs durables dans
les secteurs maritime et aviation fixées par la directive sur les énergies
renouvelables (RED), ainsi que les règlements FuelEU Maritime qui
oblige les compagnies maritimes à décarboner leur sources d?énergie
et ReFuelEu qui oblige les fournisseurs de carburants à incorporer des
carburants durables d?aviation.
- Au niveau national : les obligations d?incorporation de carburants
alternatifs au travers, aujourd?hui, de la taxe incitative relative à
l'utilisation de l'énergie renouvelable dans les transports (TIRUERT).
La production de e-carburants peut être éligible à l?appel à projets national
CARB AERO14 financé par France 2030 pour le développement d?une filière
de production française de carburants aéronautiques durables, et
notamment le soutien aux études d?ingénierie d?avant-projet (FEED), mis en
place en décembre 2023, et doté d?un montant global de 200 millions
d?euros. Le niveau d?aide prend en compte la part biogénique de l?usage
de CO2.
Pour anticiper la fin de la reconnaissance du CO2 fossile pour la production
de e-carburants à l'horizon 2041, il est essentiel de prioriser la valorisation du
CO2 biogénique. Le cadre incitatif national pourrait être adapté pour
favoriser davantage le CO2 biogénique, tout en répondant aux enjeux
méthodologiques liés à la traçabilité.
14 Appel à projet « CARB AERO » opéré par l?ADEME
https://agirpourlatransition.ademe.fr/entreprises/aides-financieres/20231214/developpement-dune-filiere-production-francaise-carburants-aeronautiques
Conception : Direction générale des Entreprises
Rédaction : Direction générale des Entreprises, Direction générale de
l?Energie et du Climat
Réalisation graphique : Sircom
Juillet 2024