Programmation pluriannuelle de l'énergie de Mayotte 2016 - 2018 / 2019 - 2023
Auteur moral
France. Ministère de la transition écologique et solidaire
Auteur secondaire
Résumé
<span style="color: rgb(17, 17, 17); font-family: -apple-system, Roboto, SegoeUI, "Segoe UI", "Helvetica Neue", Helvetica, "Microsoft YaHei", "Meiryo UI", Meiryo, "Arial Unicode MS", sans-serif; font-size: 14px; font-style: normal; font-variant-ligatures: normal; font-variant-caps: normal; font-weight: 400; letter-spacing: normal; orphans: 2; text-align: left; text-indent: 0px; text-transform: none; widows: 2; word-spacing: 0px; -webkit-text-stroke-width: 0px; white-space: normal; background-color: rgb(243, 243, 243); text-decoration-thickness: initial; text-decoration-style: initial; text-decoration-color: initial; display: inline !important; float: none;">La Programmation Pluriannuelle de l'Énergie (PPE) de Mayotte (2016-2023) vise à piloter la transition énergétique de l'île en accord avec la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC). Elle établit des objectifs pour le développement des véhicules à faibles émissions, la sécurité d'approvisionnement en énergie, et l'intégration des énergies renouvelables, tout en gérant les impacts économiques, sociaux et environnementaux.</span>
Descripteur Urbamet
énergie
Descripteur écoplanete
Thème
Ressources - Nuisances
Texte intégral
CGEDD Avis délibéré du 28 juin 2017 - programmation pluriannuelle de l'énergie de la Martinique (972)
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Avis délibéré de l?Autorité environnementale
sur la programmation pluriannuelle de l'énergie
de la Martinique (972)
Avis délibéré n°2017-26 adopté lors de la séance du 28 juin 2017
Formation d?Autorité environnementale du Conseil général de l?environnement et du développement durable
n°Ae : 2017-26
CGEDD Avis délibéré du 28 juin 2017 - programmation pluriannuelle de l'énergie de la Martinique (972)
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Préambule relatif à l?élaboration de l?avis
L?Autorité environnementale1 du Conseil général de l?environnement et du développement durable (CGEDD),
s?est réunie le 28 juin 2017, à La Défense. L?ordre du jour comportait, notamment, l?avis sur la
programmation pluriannuelle de l'énergie de la Martinique (972).
Étaient présents et ont délibéré : Marie-Hélène Aubert, Christian Barthod, Barbara Bour-Desprez, François
Duval, Sophie Fonquernie, Philippe Ledenvic, François Letourneux, Serge Muller, Thérèse Perrin, Gabriel
Ullmann, Eric Vindimian.
En application de l?article 9 du règlement intérieur du CGEDD, chacun des membres délibérants cités ci-
dessus atteste qu?aucun intérêt particulier ou élément dans ses activités passées ou présentes n?est de nature
à mettre en cause son impartialité dans l?avis à donner sur le projet qui fait l?objet du présent avis.
Étaient absents ou excusés : Fabienne Allag-Dhuisme, Marc Clément, Thierry Galibert, François-Régis Orizet.
* *
L?Ae a été saisie pour avis par le directeur général de l'énergie et du climat du ministère de la Transition
écologique et solidaire, pour le compte du préfet de la Martinique et du président de la collectivité territoriale
de la Martinique, le dossier ayant été reçu complet le 6 avril 2017.
Cette saisine étant conforme à l?article R. 122-17 du code de l?environnement relatif à l?autorité
environnementale prévue à l?article L. 122-7 du même code, il en a été accusé réception. Conformément à
l?article R. 122-21 du même code, l?avis doit être fourni dans le délai de 3 mois.
Conformément aux dispositions de ce même article, l?Ae a consulté par courriers en date du 10 avril 2017 :
? le préfet de département de Martinique,
? la ministre chargée de la santé.
Sur le rapport de Charles Bourgeois et Éric Vindimian, après en avoir délibéré, l?Ae rend l?avis qui suit, dans
lequel les recommandations sont portées en italique gras pour en faciliter la lecture.
Il est rappelé ici que pour tous les plans et documents soumis à évaluation environnementale, une
autorité environnementale désignée par la réglementation doit donner son avis et le mettre à
disposition du maître d?ouvrage et du public.
Cet avis ne porte pas sur l?opportunité du plan ou du document mais sur la qualité de l?évaluation
environnementale présentée par le maître d?ouvrage, et sur la prise en compte de l?environnement
par le plan ou document. Il n?est donc ni favorable, ni défavorable. Il vise à permettre d?améliorer
la conception du plan ou du document, et la participation du public à l?élaboration des décisions
qui portent sur celui-ci.
Aux termes de l?article L. 122-4 du code de l?environnement, la présente consultation de l?Ae est
prise en compte lors de la prise de décision par l?autorité qui adopte ou approuve le plan-
programme.
1 Désignée ci-après par Ae.
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Synthèse de l?avis
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte fixe le cadre d?élaboration et le
contenu de la programmation pluriannuelle de l?énergie (PPE) pour la métropole, pour les Outre-
mer et pour certaines îles. La prise en compte de l?environnement par la PPE de la Martinique et
son évaluation environnementale font l?objet du présent avis.
La consommation d?énergie primaire sur l?île de la Martinique dépend pour environ 93 % d?énergie
fossile importée. La majorité de l'énergie primaire consommée en 2015 est affectée aux transports
(52,9 %), à l?électricité (33,1 %), et aux activités industrielles et agricoles (11%).
La PPE de la Martinique, élaborée conjointement par l'État et la collectivité territoriale de
Martinique, constituera le volet énergie du schéma régional climat air énergie.
Pour l?Ae, les principaux enjeux environnementaux sont :
? la forte dépendance du territoire aux importations d?énergie ;
? la qualité de l?air et la santé humaine, ainsi que les émissions de gaz à effet de serre, en
lien avec les choix en matière d?énergies thermiques ;
? la maîtrise des impacts des différentes filières de production sur les écosystèmes terrestres
et aquatiques, ainsi que la préservation des ressources en eau ;
? l?usage des sols en fonction du développement de la filière bioéthanol et des énergies
solaires.
Si l'Ae constate, à la lecture du dossier, une volonté forte de développer les énergies renouvelables
et les économies d?énergie, qui passe par un grand nombre d?idées et initiatives, leur
structuration, leur planification et leur organisation sous la forme attendue dans une telle
programmation restent encore embryonnaires. L?Ae recommande donc de faire apparaître de
manière claire dans la PPE la stratégie pour atteindre les objectifs ambitieux fixés par la loi de
50 % d'énergie renouvelable dès 2020 et d?autonomie énergétique en 2030, et de la traduire par
des trajectoires quantitatives et des leviers efficaces et ajustables.
L'évaluation environnementale de la PPE est de lecture aisée mais reste très générale et qualitative.
En particulier, l'analyse des impacts de la PPE est très succincte et peu appliquée au territoire. L'Ae
considère que le rapport d'évaluation environnementale ne permet dès lors pas d'apprécier de
manière pertinente les effets de la PPE, et recommande de reprendre entièrement ce document
lors de la révision prochaine de la PPE.
L?Ae recommande principalement aux pétitionnaires de :
? fournir, par filière renouvelable, une analyse quantitative de la puissance installable et de
l?énergie productible annuelle espérée par type de ressource, et de confronter ces résultats
à l?objectif d'atteinte de l'autonomie énergétique en 2030 ;
? d'expliciter et de justifier dans la PPE la stratégie d'allocation des sources d'énergie
primaire disponibles aux différents secteurs de la consommation, à l?aune des objectifs
d?autonomie énergétique globale pour 2030 ;
? renforcer les mesures nationales qui visent à diminuer la consommation d?énergie fossile
des transports terrestres et aériens, et accompagner les initiatives de la Martinique par un
effort de recherche ciblé sur les besoins des territoires non interconnectés ;
? revoir le volet qualité de l?air et santé de l'évaluation environnementale à l?aide de données
quantitatives, et y adjoindre une évaluation des risques sanitaires ;
? s?engager sur le tableau de suivi proposé par l?évaluateur, en le complétant, et ce avant la
consultation publique.
Elle fait par ailleurs d?autres recommandations, précisées dans l?avis détaillé.
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Avis détaillé
Le présent avis de l?Ae porte sur le projet de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de la
Martinique (972) pour les périodes 2016-2018 et 2019-2023, élaboré par l'État et la collectivité
territoriale de Martinique. Doivent être analysées à ce titre la qualité du rapport d?évaluation
environnementale, et la prise en compte de l'environnement par le projet de PPE. Par souci de
lisibilité, sont regroupées dans un même paragraphe la présentation des actions prévues par la
PPE et l?analyse de sa prise en compte de l?environnement.
L?Ae a estimé utile, pour la bonne information du public et pour éclairer certaines de ses
recommandations, de faire précéder ces deux analyses par une présentation du territoire et du
contexte général d?élaboration de cette PPE. Cette présentation est issue de l?ensemble des
documents transmis à l?Ae, qui seront soumis à l?enquête publique, et des renseignements
recueillis par les rapporteurs.
1 Contexte, présentation de la situation énergétique de la Martinique
1.1 Contexte général
Le code de l?énergie prévoit que le pays se dote d?une programmation pluriannuelle de l?énergie
(PPE) pour établir les priorités d?action des pouvoirs publics pour la gestion de l?ensemble des
formes d?énergie sur le territoire métropolitain continental, afin d?atteindre les objectifs
nationaux. La PPE est un document d?orientation qui doit être compatible avec les objectifs de
réduction des émissions de gaz à effet de serre, ainsi qu?avec la stratégie nationale bas-carbone.
La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte
(LTECV) fixe le cadre d?élaboration et le contenu de la PPE pour la métropole2, ainsi que pour les
Outre-mer et les autres zones non interconnectées3 (ZNI) du territoire national. La PPE est établie
au moins tous les cinq ans, et couvre la décennie qui suit sous la forme de deux périodes
quinquennales. La première période de la PPE est établie exceptionnellement au terme de l?année
2018. La PPE objet du présent avis couvre donc la période 2016-2023 et sera révisée en 2018
pour la période 2019-2030.
Conformément à ces dispositions, la programmation pluriannuelle de l'énergie de Martinique (972)
a été élaborée par le préfet de la région et par le président de la collectivité territoriale de
Martinique.
D'une superficie totale de 1 128 km², la Martinique est peuplée d'environ 390 000 habitants4 pour
une densité de 338 habitants/km², ce qui la situe parmi les régions françaises les plus densément
2 L'Ae a rendu un avis sur la PPE nationale le 24 août 2016 : Avis Ae n°2016-57.
3 Les zones non interconnectées (ZNI) désignent les îles françaises dont l?éloignement géographique empêche ou limite
une connexion au réseau électrique continental. Ces territoires présentent des particularités qui ont appelé une
législation spécifique, permettant notamment le financement des surcoûts de production de l?électricité par la
contribution au service public de l?électricité (CSPE). Les PPE des autres ZNI ont déjà été l?objet d?un avis de l?Ae.
4 Données de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE 2012).
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peuplées. La population est principalement concentrée sur le littoral5, près de la moitié du
territoire étant inhabitée du fait de contraintes naturelles fortes (zones montagneuses, dont le
volcan de la Montagne pelée au Nord, qui culmine à 1 397 m). Le territoire de la Martinique est
fortement soumis aux risques naturels : inondations torrentielles, séismes, glissements de terrain,
submersions marines, cyclones.
La population est en diminution depuis 2007, avec une variation annuelle d'environ -0,5 %, du fait
d'une baisse importante et régulière de la natalité et d'un solde migratoire négatif.
1.2 Contexte énergétique de la Martinique
1.2.1 Contexte général
Le taux d?indépendance énergétique de la Martinique est encore faible (7,2 % en 20156), bien
qu?en légère augmentation. L?essentiel des ressources provient de sources fossiles sous la forme
5 Plus de 60 % de la population martiniquaise se concentre dans le rectangle Trinité ? Schoelcher ? Ducos ? François. La
densité est la plus importante dans le grand Fort de France (Schoelcher, Fort-de-France, Lamentin) qui concentre 37 %
de la population totale.
6 La PPE est son évaluation environnementale se basent sur des données anciennes (2013 pour l'évaluation
environnementale, et 2014 pour la PPE). Lorsque cela est possible, l'Ae fait référence aux données les plus récentes
disponibles, notamment sur la base de l'édition 2016 du Bilan énergétique de la Martinique, publié par l'observatoire
martiniquais de l'énergie et des gaz à effet de serre (OMEGA). Ces chiffres plus récents sont parfois de nature à
remettre en cause certaines des analyses de la PPE, notamment dans la mesure où certaines données de 2014
présentaient des erreurs (voir 2.2).
Figure 1 : Carte de la Martinique (source Openstreet map et Shom via Géoportail) -
Certains espaces forestiers sont schématisés en vert
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principalement de fioul lourd et de gazole. La Figure 1 montre la répartition des sources d?énergie
et leur contribution aux différents types de demande. La majorité des 626,5 ktep7 (7 358 GWh)
d'énergie primaire consommée en 2015 est affectée aux transports (52,9 %), à l?électricité (33,1 %),
et aux activités industrielles et agricoles (11%). L?Ae note que selon cette figure le rendement de
production thermique de l?électricité serait très élevé, supérieur à 60%, alors que les centrales
thermiques les plus efficaces, dites à cycle combiné, ont un rendement de 61%.
L?Ae recommande de vérifier les données du schéma énergétique de la Martinique et de rectifier
les éventuelles erreurs ou omissions.
Figure 2 : Schéma énergétique de la Martinique en 2015. (Source : OMEGA) NB :les flèches ne sont pas à l?échelle.
S?agissant d?une zone non interconnectée, la Martinique bénéficie d?une organisation dérogatoire
du marché de l?électricité. La production de l'énergie est ouverte à la concurrence et est assurée
par EDF PEI8 et par d'autres producteurs. Les autres fonctions reviennent à EDF Martinique, qui doit
assurer la gestion du système, l'équilibre entre l'offre et la demande, le transport, la distribution et
la fourniture d'électricité (sous l'autorité du syndicat mixte d'électricité de la Martinique (SMEM) par
délégation, pour ces deux dernières compétences).
Le principe de péréquation tarifaire s'applique en Martinique : EDF Martinique assure la
commercialisation sur la base de tarifs réglementés nationaux. Notamment, la différence entre les
coûts de production (environ 259 ¤/MWh en 2013) et le tarif de vente réglementé est prise en
charge par la contribution au service public de l?électricité (CSPE), après validation par la
Commission de régulation de l?énergie (CRE). Ainsi, le client final achète l'électricité au fournisseur
7 Tep : Tonne d?équivalent pétrole. 1 tep = 11,6 kWh (kilowatt.heure). 1 ktep = 1 000 tep.
8 EDF PEI : Electricité de France Production Electrique Insulaire, filiale du groupe EDF.
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local, EDF Martinique, au tarif réglementé identique à celui de la métropole. Le coût moyen de
production est de 259 ¤/MWh en Martinique (2013), à comparer à 255 ¤/MWh dans les zones non
interconnectées et 59 ¤ en métropole.
La Martinique s'est dotée depuis 2016 d'un programme territorial de maîtrise de l'énergie (PTME).
Ce programme9, qui représente un investissement d?au moins 50 millions d?euros d?ici 2020, fixe
les orientations et les moyens nécessaires à la réussite de la transition énergétique en Martinique,
répartis en quatre axes10. Ce programme constitue, aux côtés de la PPE, un atout important dans
l'atteinte des objectifs de la LTECV.
1.2.2 Les transports
La consommation énergétique des transports est d'environ 328,8 ktep en 2015, globalement en
baisse depuis 2009 (environ -15 % entre 2009 et 2015) avec cependant des oscillations. Elle se
répartit entre le secteur routier (68,9 %), le secteur aérien (27,3 %), et le secteur maritime (3,8 %).
La circulation des transports terrestres est difficile dans l?île du fait de la densité de population et
de la faiblesse de l?offre de transports en commun. La part modale des déplacements domicile
travail (74 %) en voiture particulière a augmenté de 10 points entre 1999 et 2010, ce secteur
représentant 17 % des distances parcourues. En 2014, les modes actifs représentent 15 % et les
transports en commun 9 %.
La figure ci-dessous montre l'évolution de la consommation énergétique des transports terrestres
en Martinique. La tendance initiale anticipée par le schéma régional climat air énergie (SRCAE) en
2010 a été corrigée pour la PPE avec deux hypothèses (haute et basse). On notera que la
projection volontariste du SRCAE était plus ambitieuse que les projections de la PPE. Il est
également à noter que les chiffres de la consommation en 2015, non représentée sur ce schéma,
montrent une augmentation de la consommation pour revenir aux niveaux de 2013.
La consommation du transport aérien est globalement stable depuis 2009, du fait d'un volume de
voyageurs également stable à environ 1 600 000 passagers/an.
9 Le Programme Territorial de Maîtrise de l?Énergie est porté par l?État, l?ADEME, la CTM, le SMEM et EDF
10 L?éclairage public performant des technologies nouvelles développées pour le territoire ; Bâtiments performants un
programme opérationnel vers l?excellence énergétique ; Le chauffe-eau solaire, les atouts de l?énergie solaire
thermique ; Des projets innovants de développement pour la Martinique.
Figure 3 : Evolution de la consommation énergétique des transports terrestres de
la Martinique, en tep. (Source : dossier)
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1.2.3 L?électricité
La consommation d?électricité est stable depuis 2009, l?augmentation du nombre de clients d?EDF
compensant à peu près la baisse unitaire de la consommation. On notera un pic de demande en
2010 (4,4 % de consommation supplémentaire par rapport à 2009) lié à des records de chaleur
considérés comme les plus élevés depuis vingt ans.
La production d?électricité est fournie par plusieurs centrales thermiques dont la nouvelle centrale
au fioul de Bellefontaine, mise en service en 2013, d?une puissance de 211 MW et qui couvre 60 %
des besoins locaux. Elle remplace l'ancienne centrale de Bellefontaine, d'une puissance d'environ
200 MW, cette substitution permettant par ailleurs, selon le dossier, un gain de rendement de
15 %. La part des énergies renouvelables est de 23 % en termes de puissance installée,
essentiellement du fait de la combustion des ordures ménagères. En matière d?énergie produite
elle ne représente qu?un peu moins de 7 % (Figure 4).
Figure 4 : Productions annuelles d?électricité de la Martinique. Les données dans la
légende sont en GWh, les valeurs portées sur le graphe sont les pourcentages
correspondants. (Source : données du dossier)
Si on considère la puissance installée, les énergies renouvelables intermittentes (solaire
photovoltaïque et éolien sans stockage) représentent aujourd?hui 64,1 MW. D?après le dossier il
faudrait atteindre 90 MW de puissance installée pour que les conditions de déconnexion11 soient
susceptibles de se produire. Ce point est important car il constitue, dans l?état actuel de la
réglementation, une limitation de la quantité d?énergies intermittentes susceptibles d?alimenter le
réseau électrique12 L?ajout de certains moyens de stockage de l?électricité serait l'une des
11 L?article 22 de l?arrêté du 23 avril 2008 modifié indique que : « Toute installation de production dont la puissance Pmax
est supérieure ou égale à 3 kVA et mettant en oeuvre de l'énergie fatale à caractère aléatoire telles les fermes éoliennes
et les installations photovoltaïques peut être déconnectée du réseau public de distribution d'électricité à la demande du
gestionnaire de ce réseau lorsque ce dernier constate que la somme des puissances actives injectées par de telles
installations atteint 30 % de la puissance active totale transitant sur le réseau. »
12 Les résultats d?une étude indépendante des conditions du développement des énergies renouvelables en zone non
interconnectée sous la maîtrise d?ouvrage de l?Ademe sont très attendus, ils permettront notamment d?objectiver ces
conditions de déconnexion. L?Ae avait d?ailleurs recommandé, notamment dans ses avis sur la PPE de La Réunion du 4
novembre 2015, sur la PPE de la Guadeloupe du 19 octobre 2016 et sur la PPE de Mayotte du 19 octobre 2016 qu?une
« contre-expertise indépendante » soit menée sur cette question.
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solutions pour pallier ce problème. La raison d'être de ce mécanisme de déconnexion est bien
explicitée dans le dossier ; le réseau a besoin, pour fonctionner correctement :
? à l?échelle de la seconde, d?une inertie qui permet de pallier les variations rapides de
la production et de la demande, et d?éviter que les pertes de groupes ne fassent
immédiatement « tomber » la fréquence,
? à l?échelle de la dizaine de secondes, d?une réserve primaire qui permet d?ajuster
automatiquement la production et la consommation.
Le réseau est relativement simple avec notamment une ligne à 63 kV autour de l?île. Des postes
sources proches des agglomérations transforment la haute tension en moyenne tension (20 kV).
Le réseau est très majoritairement aérien (83 %).
1.3 Approvisionnement en produits énergétiques
Les importations de produits pétroliers sont principalement gérées par la Société anonyme de la
raffinerie des Antilles (SARA). Celle-ci possède une raffinerie en Martinique, et détient la majeure
partie des capacités de stockage de produits pétroliers de la zone Antilles-Guyane.
Le pétrole brut est importé par voie maritime, à raison d?une dizaine d?approvisionnements par an
pour un volume total qui fluctue selon les années entre 500 000 et 700 000 tonnes. Il est
principalement originaire de Mer du Nord, de Norvège et plus récemment d?Algérie.
La production de la raffinerie en produits finis est supérieure à la consommation martiniquaise,
sauf pour le kérosène et l'essence. Les excédents de production sont alors exportés vers la
Guadeloupe et la Guyane. Toutefois, pour des raisons logistiques, un certain nombre
d?importations de produits finis transitent par les installations de stockage de la Martinique.
Figure 5 : Schéma du réseau électrique de la Martinique. (Source dossier)
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1.4 Procédures relatives à la PPE de Martinique
La programmation pluriannuelle de l?énergie de Martinique, comme ses homologues des autres
territoires non interconnectés au réseau électrique métropolitain13, est prévue par l?article L.141-5
du code de l?énergie. Ce même article prévoit que la PPE constitue le volet énergie du SRCAE,
mentionné au 3° du I de l'article L. 222-1 du code de l'environnement. Elle fait l?objet d?une
évaluation environnementale14 en vertu de l?article R.122-17 8° du code de l?environnement.
Le 2° du IV de l?article R.122-17 cité ci-dessus précise que l?autorité environnementale
compétente est la formation d?autorité environnementale du Conseil général de l?environnement et
du développement durable.
2 Présentation de la PPE de la Martinique et analyse de sa prise en
compte de l?environnement
2.1 Contenu de la PPE et objectifs fixés
2.1.1 Contenu réglementaire
L?article L. 141-5 du code de l?énergie fixe les points à aborder par la PPE de la Martinique, qui
sont les mêmes que pour la PPE métropolitaine (sauf mention contraire). Elle doit de plus15
contenir :
? les objectifs de développement des véhicules à faibles émissions, établis de façon à
ne pas augmenter les émissions de gaz à effet de serre ;
? des volets relatifs à la sécurité d?approvisionnement en carburants et à la baisse de la
consommation d?énergie primaire fossile dans le secteur des transports ;
? des volets relatifs à l?approvisionnement en électricité, devant préciser les actions
mises en oeuvre pour donner accès à l?électricité aux habitations non raccordées à un
réseau public d?électricité, ainsi que les investissements dans les installations de
production d?électricité de proximité ;
? des volets relatifs à l?amélioration de l?efficacité énergétique et à la baisse de la
consommation d?électricité ;
? des volets relatifs au soutien des énergies renouvelables et de récupération (en
exprimant les objectifs quantitatifs par filières) ;
? des volets relatifs au développement équilibré des énergies renouvelables mettant en
oeuvre une énergie fatale16 à caractère aléatoire, des réseaux, de l?effacement de
consommation, du stockage et du pilotage de la demande d?électricité (en exprimant
les objectifs quantitatifs par filières).
13 Il s?agit de la Corse, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte, La Réunion, Saint-Pierre-et-Miquelon et les îles
Wallis et Futuna.
14 L?évaluation environnementale stratégique jointe au dossier étant antérieure au 11 août 2016, elle indique de façon
erronée que cette évaluation est facultative en ne tenant pas compte de la modification de l?article R.122-17 du code de
l?environnement par le décret n°2016-1110 du 11 août 2016 - art. 1 qui a inclus la PPE au sein de la liste des plans et
programmes devant faire l?objet d?une évaluation environnementale.
15 Ces dispositions supplémentaires s'appliquent également à la Guadeloupe, la Guyane, Mayotte, La Réunion, et Saint-
Pierre-et-Miquelon.
16 L?énergie fatale est celle qui serait perdue si elle n?était pas consommée.
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La PPE doit en outre fixer le seuil de déconnexion mentionné à l?article L. 141-9 du code de
l?énergie, préciser les enjeux de développement des filières industrielles sur les territoires, de
mobilisation des ressources énergétiques locales et de création d?emplois, et évaluer l?enveloppe
maximale indicative des ressources publiques.
2.1.2 Objectifs fixés par la PPE
L?article L.100-4 du code de l?énergie prévoit à alinéa 8° : « de parvenir à l'autonomie énergétique
dans les départements d'outre-mer à l'horizon 2030, avec, comme objectif intermédiaire, 50 %
d'énergies renouvelables à l'horizon 2020 ».
Les principaux objectifs affichés de la PPE de la Martinique sont les suivants :
Tableau 1 : principaux objectifs de la PPE (D'après les données du dossier)
Objectifs (par rapport à 2015) 2018 2023
Production d'électricité à partir d'énergies
renouvelables (EnR)
+366%, soit 25,3% d'EnR
dans le mix électrique
+805%, soit 55,6% d'EnR dans
le mix électrique
% d'EnR dans le mix électrique 25,30% 55,60%
Gain d'efficacité énergétique annuelle +75% +150%
Consommation d'hydrocarbures dans les transports
terrestres -9% -19%
Ces objectifs généraux sont développés en sous-objectifs, selon 7 axes :
? Diminuer la consommation d'énergie fossile dans le transport terrestre ;
? Développer la production d'électricité à partir de sources d'énergies renouvelables ;
? Développer la production de chaleur/froid ;
? Améliorer l'efficacité énergétique et la baisse de la consommation ;
? Développer les réseaux, le stockage et la transformation des énergies et le pilotage
de la demande ;
? Développer les compétences, la recherche et l'innovation ;
? Réaliser des études.
Les objectifs poursuivis sont résumés de manière claire à la fin du document. L'Ae revient sur
certains d'entre eux dans la suite de son avis.
2.2 Remarques générales
Sur la forme, le dossier est bien présenté mais n?est pas toujours accessible. Les figures sont en
général de qualité, mais comportent une légende succincte qui mériterait d?être complétée : le
lecteur devrait pouvoir comprendre chaque figure à partir de la légende, sans devoir se référer au
texte.
Le chapitre 2 « La demande d?énergie » comporte un sous-chapitre 2.4 « Objectifs » qui contient
en son sein un paragraphe sur les « sources d?énergie alternatives pour les transports » qui ne
devrait pas se situer dans la partie consacrée à la demande.
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Le sous-chapitre 4.3 « Prévisions de développement du parc de production » est très technique et
mériterait une reprise plus didactique pour la complète information du public17. Il s?inscrit dans un
chapitre 4 intitulé « L?offre d?énergie ,». Rien n?indique donc a priori qu?il s?agit pourtant d'un
sous-chapitre qui n'est consacré qu'à l'électricité. Il conviendrait de dissocier plus clairement le
chapitre 4 de la PPE du plan propre au gestionnaire du réseau électrique18. Les points de ce
chapitre qui traitent du biogaz, de l?éthanol et de la géothermie, par exemple, n?envisagent ces
sources que pour la production électrique.
L?Ae recommande, pour la complète information du public, de revoir le texte en s?attachant à
éviter toute confusion entre énergie et électricité et en améliorant sa lisibilité pour les non
spécialistes.
Les données utilisées dans le dossier sont relativement anciennes et non homogènes entre les
différents documents. La PPE se base ainsi sur les données de 2014 publiées par l'observatoire
martiniquais de l'énergie et des gaz à effet de serre (OMEGA), alors que l'évaluation
environnementale se base sur les données de 2013.
L'Ae relève que les données du bilan énergétique 201519, disponibles depuis décembre 2016, sont
parfois de nature à remettre en question certaines des orientations prises par la PPE, notamment
du fait de la correction de certains chiffres incorrects dans l'édition 2014.
C'est notamment le cas des données relatives à la destination des ressources primaires, qui, du
fait d'une mauvaise affectation d'une quantité de fioul domestique au secteur industriel, sous-
évaluaient en 2014 la part des activités industrielles et agricoles (4 %, alors qu'il s'agit en réalité de
9 %). Selon les informations fournies aux rapporteurs, cette part est de 11 % en 2015, et pourrait
atteindre 12,5 % en 2016.
Sur la base des chiffres non corrigés, la PPE indique qu' « il a été décidé que cette première édition
de la PPE n'abordera pas ces deux secteurs [Activités industrielles et agricoles, et production de
chaleur], très minoritaires en termes d'énergie primaire ». L?Ae considère que cette assertion n?est
plus vraie une fois l?erreur rectifiée et souligne qu?il sera nécessaire d'aborder explicitement ces
secteurs dans les futures révisions de la PPE, notamment du point de vue de la maîtrise de la
demande en énergie.
Par ailleurs, plusieurs données de 2014 ont été corrigées dans l'édition 2015 du bilan (en
particulier celles concernant l'intensité énergétique). Il conviendrait de mettre à jour la PPE sur la
base de ces chiffres corrigés.
L'Ae recommande :
? d'homogénéiser les données utilisées entre la PPE et son évaluation environnementale ;
? de corriger, le cas échéant, les données qui concernent l'année 2014 à partir des
corrections apportées dans le bilan énergétique 2015 ;
17 À titre d?exemple il est bien difficile de comprendre à quoi se réfère le paragraphe pages 87-88 sur les besoins
prévisionnels en investissements qui donne des valeurs de puissance dans le temps sans qu?on sache de quelle type de
production il s?agit.
18 Il en est de même pour le sous-chapitre 4.4 « Moyens d?action » qui ne concerne également que l?électricité.
19 Disponible à cette adresse :
http://energie.mq/wp-content/uploads/2016/12/OMEGA_Bilan_energetique_Detaille_2015.pdf
CGEDD Avis délibéré du 28 juin 2017 - programmation pluriannuelle de l'énergie de la Martinique (972)
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? de vérifier dans quelle mesure l?utilisation des données de l'année 2015 est susceptible de
modifier les principales tendances décrites dans la PPE ;
? d'aborder, dès la prochaine révision de la PPE, les consommations liées aux activités
industrielles et agricoles.
Sur le fond, la PPE adopte une stratégie qui conduit à diminuer la consommation d?énergie en
général,et à diversifier la production des énergies renouvelables. Il est notamment envisagé de
recourir à la fois aux énergies intermittentes et aux énergies plus stables comme les énergies
marines ou la géothermie. Il manque néanmoins une vision globale de la part des différents
vecteurs énergétiques. Ainsi, la PPE ne semble pas avoir décidé dans quelle proportion le secteur
des transports sera traité :
? d'une part, par une électrification massive, ce qui ferait porter l?effort sur la
production et le stockage de l?électricité ;
? d'autre part, par une utilisation maximale de carburants issus de ressources
renouvelables pour une utilisation directe par des moteurs.
De fait, il est difficile de comprendre comment l?objectif de 50 % d'énergies renouvelables en 2020
et d'autonomie énergétique en 2030 sera atteint, notamment parce qu?il implique un couplage des
efforts des différents secteurs, qui n?est pas lisible dans le projet.
Pour chacune des filières de production ou de transformation d?énergie, le dossier ne quantifie pas
les ressources disponibles et les efforts qu?il conviendrait de consentir pour les exploiter
durablement. L?Ae a bien noté que de nombreuses études de ce potentiel sont en cours et sont
bien mentionnées dans le dossier. Cette situation empêche cependant d?apprécier l?intensité de
l?utilisation de chacune des ressources et de comprendre dans quelles conditions les objectifs
d?autonomie énergétique en 2030 pourront être atteints. L?Ae considère qu?il conviendrait de
présenter des éléments quantitatifs, avec leurs marges d?incertitude le cas échéant, indiquant la
puissance potentiellement productible et la quantité d?énergie qui lui correspond sur un cycle
annuel moyen. Une analyse de la possibilité d?exploiter ce potentiel à l?horizon 2030 dans une
logique d?autonomie énergétique serait également pertinente.
L?Ae recommande de fournir, par filière renouvelable, une analyse quantitative de la puissance
installable et de l?énergie productible annuelle espérée, et de confronter ces résultats à l?objectif
d'atteinte de l?autonomie énergétique en 2030.
L?Ae constate, à la lecture du dossier, une volonté forte de développer les énergies renouvelables
et les économies d?énergie, qui passe par un grand nombre d?idées et initiatives20. La
structuration, la planification et l?organisation sous la forme attendue dans une telle
programmation sont cependant encore embryonnaires. L?Ae considère que la PPE devrait
concrétiser sous une forme stratégique et programmatique cette volonté d'atteindre
l?indépendance énergétique de l?île en 2030. Le document devrait présenter des objectifs clairs par
secteur, des trajectoires prospectives et les leviers mis en place pour les rejoindre, ainsi que les
mécanismes permettant de corriger les écarts éventuellement constatés par rapport à ces
trajectoires.
20 Les rapporteurs ont pu rencontrer sur place plusieurs porteurs de projets innovants et ont constaté la volonté de
développer des recherches pour imaginer et expérimenter les solutions de demain.
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L?Ae recommande de faire apparaître de manière claire la stratégie pour atteindre les objectifs de
50% d'énergie renouvelable en 2020 et d?autonomie énergétique en 2030, et de la traduire par des
trajectoires quantitatives et des leviers efficaces et ajustables.
2.3 Electricité
2.3.1 Évolution de la consommation d?électricité
Deux scénarios ont été élaborés conformément à la réglementation : un scénario dit « MDE »
(maîtrise de la demande d?électricité) qui tient compte de l?évolution démographique et
économique prévue ainsi que du maintien des efforts actuels d?économie d?énergie, et un scénario
« MDE renforcée » qui suppose des efforts supplémentaires notamment sur le chauffage de l?eau,
l?isolation et la climatisation des logements. Seul le scénario « MDE renforcée », qui ambitionne
des économies de 30 à 35 GWh en 2018 et 45 à 50 GWh en 2023, permet une relative maîtrise de
la consommation avec une augmentation de 11 % entre 2015 et 2030.
Les leviers de cette baisse de la consommation sont des actions en faveur de la construction et de
la rénovation des bâtiments ; l?efficacité énergétique des acteurs économiques ; les économies
d?énergie au sein des collectivités ; la recherche, l?innovation et la modernisation des réseaux. Un
certain nombre de ces leviers sont quantifiés avec des objectifs précis (par exemple
20 000 chauffe-eau solaires de plus en 2018, réduction de la consommation de l?éclairage public
de 50 % en 2023, etc.).
Les hypothèses sur lesquelles se basent ces scénarios ne sont pas suffisamment justifiées : les
hypothèses de croissance démographique et économique ne sont ainsi pas décrites, le dossier
précisant uniquement qu'il intègre « les hypothèses les plus probables ». Dans un contexte de
croissance démographique négative en Martinique ces dernières années (-0,6 %/an entre 2009 et
2014), il serait utile d'expliciter les données retenues, et la manière dont leur variation est
susceptible d'influencer les trajectoires modélisées.
Figure 6 : Evolution de la demande d?électricité selon les deux scénarios de la PPE « MDE » et « MDE
renforcée », les scénarios « haut » et « bas » ne sont pas explicités dans le dossier, d?après le
contexte il semblerait que le scénario « haut » corresponde à l?arrêt des efforts de maîtrise
d?énergie. Ces deux scénarios ne prennent pas en compte d'hypothèse de développement du
véhicule électrique. Source dossier.
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La manière dont les écarts aux objectifs seront corrigés n'est pas explicitée .
L'Ae recommande d'expliciter les hypothèses de croissance démographique et économique
retenues pour l'élaboration des scénarios de maîtrise de la demande d'électricité, et la sensibilité
des trajectoires modélisées à la variation de ces hypothèses.
Elle recommande également d'indiquer comment les éventuels écarts aux objectifs seront corrigés.
2.3.2 Production électrique
Le dossier propose, pour chacune des sources d?énergie potentiellement disponibles sur l?île, une
évolution de son utilisation pour la production électrique. Si elle se réalise conformément aux
objectifs, la PPE permettra à la Martinique de passer, avant 2023, d?une ressource essentiellement
fossile à une situation où plus de la moitié de la production électrique sera d?origine renouvelable
(voir les détails dans le tableau ci-dessous).
Source d?énergie électrique 2015 2018 2023
Fioul lourd 1 291 1 126 701
Fioul domestique 163 69 5
Photovoltaïque 84 106 195
Valorisation Thermique des déchets 22 28 91
Éolien 2 11 20
Biomasse combustible 0 251 247
Biogaz 0 6 9
Pile à hydrogène 0 3 3
Géothermie 0 0 268
Énergie thermique marine 0 0 74
Bioéthanol 0 0 52
Hydraulique 0 0 7
Total 1 562 1 600 1 672
Tableau 2: évolution de la production d'énergie électrique, en GWh, par source. Les énergies
renouvelables ont été inscrites en vert. À noter l?importance de la ressource biomasse
combustible dès 2018 du fait de la mise en service prochaine d?une centrale à biomasse qui
importera du bois en dehors de la période où la bagasse est disponible. (D'après les données
du dossier).
Bien que leur part dans la production électrique soit faible, y compris à l?horizon 2023, certaines
ressources (biogaz, éthanol, hydrogène) auraient un intérêt pour une utilisation directe par les
transports, dans l?hypothèse notamment où ceux-ci resteraient en proportion significative mus
par des moteurs thermiques. Leur utilisation pour la production d?électricité devrait être mieux
justifiée, y compris sur le long terme, où leur avantage pour la stabilisation de la production
pourrait s?effacer devant les progrès des systèmes de stockage.
L?Ae recommande d'expliciter et de justifier dans la PPE la stratégie d'allocation des sources
d'énergie primaire disponibles aux différents secteurs de la consommation, à l?aune des objectifs
d?autonomie énergétique globale pour 2030.
La production d?électricité à partir de sources de chaleur (chaleur fatale des centrales électriques
ou chaleur solaire), grâce à des centrales à cycle de Rankine, est envisagé. De même, il est indiqué
que la nouvelle centrale thermique de Bellefontaine est susceptible, moyennant un investissement
et l?organisation d?une filière d?approvisionnement, de fonctionner au gaz naturel, avec une
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diminution des émissions de gaz à effet de serre de 30 %. Ce dernier point, bien que ne
contribuant pas formellement à l?objectif d?autonomie énergétique, pourrait avoir une incidence
importante sur les émissions de gaz à effet de serre de la Martinique. Ces éléments sont des
hypothèses de travail qui ne sont pas à ce stade programmées au sein de la PPE.
L'Ae revient ci-dessous plus en détail sur certains des objectifs de développement du parc de
production.
2.3.2.1 Photovoltaïque
Le parc de production est actuellement constitué d'un millier d'installations raccordées au réseau,
pour une puissance totale d'environ 63 MW fin 2015. À ce chiffre s'ajoute une installation de
2,475 MW avec stockage, mise en service fin 2015.
La PPE envisage un développement important du photovoltaïque, avec et sans stockage. Il est
notamment prévu d'atteindre 111 MW sans stockage en 2023, ce qui doit nécessairement
s'accompagner de réflexions sur l'augmentation du seuil de déconnexion des énergies
renouvelables (voir 2.3.3).
Est également envisagé le développement de +14,5 MW avec stockage à l'horizon 2018, et de
+30 MW supplémentaires à l'horizon 2023.
2.3.2.2 Éolien
La Martinique possède actuellement un parc éolien sans stockage, d'une puissance totale de
1,1 MW. Il est envisagé dans la PPE de remplacer l'installation actuelle par une installation avec
stockage.
Par ailleurs, un projet de parc éolien avec stockage de 14 MW installés devrait être mis en service
avant 2018. Plusieurs autres projets, retenus dans des appels d'offre de la CRE, sont également
identifiés (4 MW à Sainte Marie et 9 MW au Marigot) à un horizon plus lointain.
À l'horizon 2023 est retenu un potentiel de 24 à 30 MW installés, étant noté que le schéma
régional éolien a estimé le potentiel total sur l'île à 23 à 47 MW.
2.3.2.3 Géothermie
Aucune installation géothermique n'est actuellement exploitée en Martinique.
Un projet de centrale géothermique, porté par le gouvernement de la Dominique, permettrait à
terme la construction sur cette île d'une unité de production importante. À moyen terme, le
dossier envisage l'exportation de l'électricité vers la Guadeloupe et la Martinique via une
interconnexion à construire.
Plusieurs études sur le potentiel géothermique de la Martinique, haute et basse enthalpie21, ont
été réalisées. Deux autres secteurs ont été identifiés comme présentant un potentiel de forage
21 Géothermie basse enthalpie (ou basse énergie) : consiste en l?extraction d?une eau à moins de 90°C dans des gisements
situés à moins de 2500 mètres de profondeur. Pour produire de l?électricité, une technologie nécessitant l?utilisation
d?un fluide intermédiaire est nécessaire.
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attractif pour la haute enthalpie : le flanc ouest de la Montagne Pelée et une zone côtière de la
source thermale des Anses d'Arlet. Un secteur de la plaine de Lamentin a été également identifié
comme potentiellement intéressant pour la basse enthalpie. Des études de caractérisation sont
cependant encore nécessaires afin de lever les incertitudes sur les potentiels disponibles.
La PPE de la Martinique retient ainsi un potentiel de + 40 MW à l'horizon 2023. Ce chiffre ne
semble inclure que le potentiel via une éventuelle interconnexion avec la Dominique, ce qu'il
conviendrait de confirmer22.
2.3.2.4 Biomasse
La PPE ne prévoit pas de développement supplémentaire de la production à partir de biomasse à
l'horizon 2023. Il est cependant à noter que les différentes données présentées dans les
documents incluent dans la production initiale celle qui est liée à une centrale à biomasse, dont la
mise en service est prévue mi-2017.
2.3.2.5 Autres sources d'énergie renouvelables
Un projet de centrale pilote de valorisation de l'énergie thermique des mers est intégré dans la PPE
(10 MW net). Sa mise en service est prévue avant 2023.
La PPE prévoit à l'horizon 2023 la mise en place d'une nouvelle turbine à combustion alimentée par
du bioéthanol (10 MW). Les raisons poussant à retenir ce projet ne sont pas détaillées, le
document précisant par ailleurs : « [qu?]Il n'y a pas de production de mélasse excédentaire
disponible en Martinique pour le bioéthanol. Des études approfondies sont donc à mener pour
étudier l'intérêt de mettre en place des cultures dédiées au bioéthanol dans le cadre du schéma
régional biomasse ». Pour l?Ae, ces études devraient intégrer l?ensemble des impacts potentiels, y
compris pour l?agriculture, et tenir compte du rendement surfacique en termes de puissance et
d?énergie productibles par unité de surface au sol.
L?Ae recommande d?intégrer aux études approfondies sur le développement de la filière éthanol,
l?analyse de la disponibilité des terres agricoles pour des productions non alimentaires et tenir
compte du faible rendement surfacique23 de la production électrique par l'intermédiaire des
biocarburants.
Il est également prévu un développement important de la filière de valorisation thermique des
déchets, un potentiel de 10,2 MWe supplémentaire étant identifié sur la base des volumes de
déchets collectés par les collectivités, et de l'augmentation prévue de la capacité de l'usine
d'incinération des ordures ménagères.
Un développement modéré de l'hydroélectricité est prévu à court terme : + 0,02 MW en 2018, et
+2,5 MW en 2023, des études devant être lancées afin d'évaluer le potentiel des rivières
martiniquaises du Nord Caraïbe.
Géothermie haute enthalpie (ou très haute énergie) : recherche de gisements profonds ayant des températures élevées,
supérieures à 150°C en général. L?électricité est produite au moyen de la vapeur géothermie.
Source : association française des professionnels de la géothermie.
22 Les différents tableaux font état d'un objectif global de + 40 MW au total pour la géothermie, cependant subdivisé dans
la dernière ligne du tableau entre « 40 MW Dominique » et « Anse d'Arlet ».
23 Le meilleur rendement connu est celui du palmier à huile qui produit environ 50 MWh/ha/an. En France métropolitaine
on estime que la production de panneaux photovoltaïques est en moyenne de 1,6 GWh/ha/an. (Source wikipedia)
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Enfin, un projet de mise en service d'une pile à combustible (hydrogène) de 1 MW est également à
noter.
2.3.2.6 Nouveaux besoins de moyens de production à partir d'énergies fossiles
Les besoins de nouveaux moyens de production à partir d'énergies fossiles sont définis sur la base
du scénario MDE renforcée. Aucun renouvellement de turbine à combustion (TAC) n'est prévu, et
plusieurs TAC devraient être déclassées.
Le seul nouveau besoin identifié concerne un moyen de pointe entre 2026 et 2030.
2.3.3 Stockage de l?électricité et réseaux de transport
Trois types de systèmes de stockage de l?énergie sont prévus : des stockages électrochimiques sur
les lieux de production pour lisser les variations en cours de journée ; des systèmes de stockage
centralisés pour stabiliser le réseau électrique et des systèmes de stockage hydraulique24 pour
fournir de l?électricité lors des pointes de demande. Des expérimentations du gestionnaire du
réseau (EDF) sont également prévues dès 2017 : elles visent à évaluer les besoins de capacités de
stockage afin d?amener le taux de déconnexion, c?est à dire le pourcentage plafond de la
production d?électricité par des sources intermittentes, aujourd?hui de 30 % à 45 % à l?horizon
2023. Les résultats de l?étude indépendante évoquée plus haut (Cf. note 12 page 9) sont
notamment très attendus.
Un prototype sera mis en place afin de disposer d?une batterie capable de fournir une puissance
de 5 MW pendant 30 min avec un déclenchement automatique en cas de baisse de la fréquence
dans un délai ne dépassant pas 300 millisecondes. Des parcs de batteries mutualisées utilisant les
informations disponibles sur le réseau en temps réel sont à l?étude. EDF compte également
s?appuyer sur la mise en place des compteurs électriques numériques connectés afin d?améliorer
la régulation du système électrique de l?île.
Dans le contexte de la délibération n° 2017-7025 de la commission de régulation de l'énergie
(CRE), l'Ae estime que le dossier devrait expliciter de manière claire le cadre de déploiement des
ouvrages de stockage d'électricité, et la manière dont les différents acteurs peuvent y prendre
part.
Les réseaux de transport seront sécurisés avec la création de liaisons sous-marines entre la
centrale de Bellefontaine et l?agglomération de Fort-de-France, ainsi qu'avec la poursuite de
l?enfouissement des liaisons HTA26 (liaison de moyenne tension). Il est prévu de mettre en place un
schéma de développement du réseau HTA et basse tension qui tiendra compte des besoins des
24 Stations de transfert d?énergie par pompage (Step) qui utilisent deux barrages afin de pomper de l?eau du réservoir aval
vers la retenue en amont pour stocker l?énergie en période de production excédentaire par rapport à la demande. Les
projets concernés sont des projets de micro-step urbaines, fonctionnant en circuit fermé et donc indépendants des
milieux aquatiques.
25 Délibération de la Commission de régulation de l?énergie du 30 mars 2017 portant communication relative à la
méthodologie d?examen d?un projet d?ouvrage de stockage d?électricité dans les zones non interconnectées.
26 Réseau de haute tension de type A, également appelé moyenne tension.
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énergies renouvelables. Le groupe de travail qui élabore le schéma de raccordement au réseau des
énergies renouvelables (S3REnR) sera relancé27.
2.3.4 Sécurité d'approvisionnement
Le dossier détaille les raisons pour lesquelles le critère de défaillance28 est fixé à 3 heures, ce qui
conditionne la stratégie de développement du parc de production d'électricité.
Pour la complète information du public, il conviendrait de préciser quelles sont les durées
moyennes annuelles de coupure observées à l'échelle du territoire ces dernières années, ainsi que
des indications sur la répartition spatiale de ces défaillances.
2.4 Transports
2.4.1 Réduction des consommations de carburant
La PPE s?appuie sur un certain nombre de mesures dans le but de diminuer la consommation
d?énergies fossiles des transports terrestres, avec pour objectif une poursuite de la baisse de
consommation de 1,95 % par an (objectif fixé par le SRCAE) :
? mesures de planification urbaine susceptibles de réduire de 10 % la longueur des
trajets ;
? mise en place du télétravail dans les administrations, acquisitions de véhicules
"faiblement émissifs" par les administrations ;
? développement des transports en commun29 avec un objectif de part modale de 25 %
en 2023 ;
? augmentation du taux d?occupation de 1,43 en 2014 à 1,6 passagers par véhicule
particulier en 2023 ;
? diverses actions d?incitation et de promotion à l?éco-conduite, aux modes actifs et
aux plans de déplacement.
Ces mesures conduisent, selon le dossier, à adopter un scénario de baisse, dans le domaine des
transports terrestres, de 9 % de la consommation énergétique à l'horizon 2018, et de 19 % de la
consommation énergétique à l?horizon 2023, par rapport à 2015.
L'Ae ne parvient pas à relier ces trajectoires à l'objectif initial d'une baisse de 1,95 % de la
consommation par an, qui semble moins ambitieux. Il semble, mais le texte n?est pas explicite sur
27 Le dossier précise : « Après la publication du SRCAE en décembre 2013, le gestionnaire du réseau a commencé
l?élaboration du S3REnR mais le travail a été interrompu. En effet, la quote-part à payer par les producteurs était en
effet si élevée qu?elle aurait bloqué tous les projets.
L?article 203 de la loi relative à la transition énergétique ainsi que le décret n°2016-434 du 11 avril 2016 ont modifié
les règles applicables en matières de raccordement dans les zones non-interconnectées. [...] le montant de la quote-
part mentionnée à l'article L. 342-1 et exigible dans le cadre des raccordements est plafonné à hauteur du montant de
la quotepart la plus élevée, augmentée de 30 %, constaté dans les schémas adoptés sur le territoire métropolitain
continental à la date d'approbation du schéma de raccordement au réseau des énergies renouvelables du département
ou de la région d'outre-mer considéré.
Compte tenu des nouveaux projets identifiés dans la PPE, il convient de mettre à jour les différentes études de
raccordement et de relancer le groupe de travail. »
28 Durée moyenne annuelle maximale de défaillance de la fourniture en électricité.
29 Un projet de bus en site propre est en phase d?essais à blanc, donc susceptible d?être opérationnel rapidement. Une
restructuration des réseaux urbains et inter-urbains est également prévue, ainsi qu'une confortement de l'offre
maritime.
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ce point, que cet objectif de baisse de la consommation soit de fait celui de la baisse de
consommation unitaire des véhicules qui viendrait s?ajouter à la diminution du parc et du nombre
de kilomètres parcourus. Ce point mériterait d?être clarifié.
L'Ae recommande d?expliciter la trajectoire du scénario de baisse de la consommation d'énergie
fossile dans les transports terrestres aux horizons 2018 et 2023, en précisant ce qui relève de la
consommation unitaire et ce qui relève de l?évolution démographique et des modes de transport.
En ce qui concerne le transport aérien le dossier propose une hypothèse haute d?augmentation de
25 % du trafic en 2023 et une hypothèse basse de stabilité, l?hypothèse haute étant celle projetée
par la société d'exploitation de l?aéroport de Fort-de-France (tableau 3). Les fondements de ces
hypothèses ne sont pas explicités.
Dans l'hypothèse haute, retenue par le dossier, l?augmentation importante du trafic est compensée
en partie par une amélioration de la consommation des aéronefs. Elle aboutit cependant à une
augmentation de consommation énergétique de 28 %, ce qui mériterait une explication.
Les autres énergies étant quasi stables sur la période on arrive in fine à une économie d?énergie
de 2 % à l?horizon 2023 par rapport à 2015, le transport aérien augmentant considérablement dès
2018 tandis que les transports terrestres présentent un niveau d?économie important (voir
également le tableau 1 page 12).
2.4.2 Sources d?énergies alternatives pour les transports
Le dossier indique qu?une étude de scénarios de développement de véhicules électriques
rechargés par des stations alimentées par des énergies renouvelables (principalement solaires) est
en cours et qu?elle devrait, en toute rigueur, conditionner le développement de leur
commercialisation. Un schéma de déploiement du véhicule électrique sera élaboré pour 2018 en
associant tous les acteurs de la filière.
Plusieurs leviers sont envisagés pour accompagner le développement des véhicules électriques
dans un contexte de diminution du recours aux énergies fossiles. La mise en place de moyens de
recharge à base d?énergies renouvelables permettant de gérer le compromis entre le besoin de
mobilité et la disponibilité de l?énergie est la clé de la réussite du schéma de déploiement. Des
actions d?incitation à une « recharge responsable » seront lancées ainsi que des plans
d?équipement en stations de recharge des flottes captives.
L?Ae insiste sur l?urgence de mettre en place l'ensemble de ces mesures. Elle note également que
l?État n?a pas mis en place de dispositifs qui permettraient de différencier le coût de l?électricité en
fonction de son contenu en émissions carbonées. Néanmoins, les arguments négatifs opposés
dans la PPE à un déploiement massif du véhicule électrique (appel de puissance sur le réseau,
absence d?avantage en termes d?émissions de gaz à effet de serre, gestion du recyclage des
Tableau 3 : Trafic en passagers et évolution prévue selon l?hypothèse
proposée par l?aéroport Aimé Césaire. (Source dossier)
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batteries) passent sous silence les avantages potentiels en termes d?émission de polluants
atmosphériques et de risque sanitaire.
L?État et la collectivité territoriale ont cependant bien pris conscience de l?intérêt des véhicules
électriques, notamment pour résoudre les problèmes de qualité de l?air occasionnés par les
transports et ont lancé une étude qui permettra de développer ce type de véhicule avec des
systèmes de recharge solaires diurnes sur les lieux de travail.
L?Ae recommande de présenter de façon plus équilibrée les avantages et inconvénients d'un
déploiement immédiat du véhicule électrique, en présentant également les avantages que ce
déploiement pourrait présenter en termes de réduction des émissions de polluants
atmosphériques et des risques sanitaires environnementaux.
La PPE évoque la question des carburants alternatifs sous la forme d?hypothèses qui ne sont pas
étayées par une analyse quantifiée de leur disponibilité réelle ou potentielle, leurs impacts en
termes d?émissions de gaz à effet de serre et les conflits d?usage potentiels. Elle ne prévoit pas
non plus de mesure particulière ni à l?horizon 2018, ni à l?horizon 2023. L?évaluation de la
possibilité d?utilisation des biocarburants est ainsi renvoyée à l?élaboration du schéma régional
biomasse. Le biogaz et, à l'horizon 2023, le bioéthanol, sont réservés à la production électrique
sans analyse de l?intérêt de cette mise en priorité, tandis que l?utilisation du gaz de pétrole liquéfié
est simplement mentionnée comme « envisageable ».
L?Ae recommande de produire une évaluation environnementale comparée des carburants à base
de biomasse et de gaz de pétrole liquéfié, comme alternative aux carburants actuellement utilisés
pour les usages directs de mobilité ou de production d'électricité.
2.4.3 Sécurité d'approvisionnement
L'ancienne réglementation30 relative à la constitution des stocks stratégiques pétroliers dans les
départements d'outre-mer fixait le niveau d'obligation de stockage à 20 % des mises à la
consommation annuelles, soit 73 jours, la Martinique et la Guadeloupe étant alors considérées
comme un territoire unique vis à vis de cette obligation.
Le décret du 25 mars 201631 prévoit désormais une zone unique regroupant la Martinique, la
Guadeloupe et la Guyane, avec toutefois un minimum de stocks de produits finis dans chacune des
collectivités, pour chaque catégorie de produits.
La PPE indique que les capacités de stockage actuellement disponibles pourront accueillir à la fois
les stocks stratégiques et les stocks commerciaux de la SARA et d'EDF, sans qu'il soit possible de
déterminer si ce constat porte uniquement sur le territoire de la Martinique ou sur la zone
Martinique Guadeloupe Guyane. Il en est de même pour le tableau présenté dans la partie Sécurité
d'approvisionnement, peu clair32.
30 Arrêté du 13 décembre 1993 relatif à la constitution des stocks stratégiques pétroliers dans les départements d'outre-
mer.
31 Arrêté du 25 mars 2016 relatif à la constitution des stocks stratégiques pétroliers en France métropolitaine, en
Martinique, en Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion et à Mayotte.
32 Le tableau présente, par catégorie de produit (Essences, Gazoles, Kérosène) l'ancienne obligation de 73 jours, et une
autonomie moyenne et minimum, en jours.
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2.5 Bâtiment
2.5.1 Économies d?énergie dans les bâtiments
Ce volet prévoit une amélioration des performances des climatiseurs tant dans les logements
existants que neufs. Les gains d'efficacité des climatiseurs attendus sont de 30 % en 2030 par
rapport à 2000 dans le scénario MDE renforcée. Une diminution du taux d?équipement des
logements neufs de 70 % en 2010 à 50 % en 2030 est en outre prévue.
Il est prévu de travailler spécifiquement sur les matériaux isolants ou protecteurs du soleil
fabriqué localement. Cette action qui semble porteuse de capacités de rénovation des bâtiments
existants ou de performance des nouvelles constructions n?est pas assortie d?objectifs.
2.5.2 Production de chaleur et de froid
La PPE prévoit l?installation de 8 000 chauffe-eau solaires d?ici à 2023, ce qui permettrait
d?atteindre 49 % des résidences principales. Il est également prévu une expérience pilote
d?installation d?un réseau de chaleur basé sur de la géothermie moyenne température et sur le
prélèvement d?eau de mer en profondeur pour les besoins de climatisation. Cette source d?énergie
ne fait pas l?objet d?un objectif quantifié.
2.6 Recherche et innovation dans le domaine des énergies
renouvelables, formation
La PPE présente un volet recherche et innovation qui vise à mettre au point des technologies et des
démonstrateurs de production d?énergies renouvelables adaptées aux territoires non
interconnectés. Il est prévu de développer des filières dans le domaine de la production d?eau
chaude solaire et de l?isolation ainsi qu?une plateforme d?essais de systèmes économes. Le site de
l?ancienne centrale de Bellefontaine sera notamment transformé en centre d?accueil des projets
innovants leur fournissant des facilités pour expérimenter. L?Ae a apprécié cette volonté
d?innovation à l?échelle du territoire. Elle encourage les acteurs de la recherche de la Martinique de
se rapprocher des autres territoires non interconnectés, afin de mutualiser les efforts de recherche
dans l?objectif de déboucher rapidement vers une trajectoire réaliste d?atteinte de l?objectif
d?autonomie énergétique du territoire.
Les documents fournis présentent également une forte volonté d'étendre et de développer l'offre
de formation dans le domaine de la transition énergétique, par la mise en place d'audits des
plateaux de formation existants, et leur développement dans les secteurs où ils sont absents. Il est
fixé comme objectif qu'à la fin 2017 soit opérationnel « un plateau technique de qualité », dans
chacune des thématiques suivantes : isolation des murs et toitures, eau chaude solaire,
climatisation performante, photovoltaïque, éclairage, ventilation.
L'Ae considère qu'il serait intéressant de développer dans la PPE une analyse des raisons pour
lesquelles les formations dans le domaine de la transition énergétique semblent aujourd'hui peu
attractives33, ainsi que des mesures pour améliorer cette attractivité.
33 La PPE évoque par exemple l'existence d'une plateforme de formation Photovoltaïque au lycée Chateaubriand, qui a
formé moins de 15 personnes en deux ans.
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2.7 Fiscalité
Le dossier n'évoque pas la question de la fiscalité dans le domaine des transports.
En particulier, les importations de carburant font l'objet de taxes locales (octroi de mer et taxe sur
la consommation finale d'énergie) qui alimentent notamment les recettes fiscales des collectivités
locales. Une évolution de la fiscalité sur ce point pourrait contribuer aux actions prises dans le
sens d'une diminution des consommations de carburants dans le domaine des transports, et à
l'atteinte des objectifs de la LTECV.
L?Ae recommande de compléter la PPE par un volet relatif à la fiscalité des transports en cherchant
à la rendre plus incitative vers la sobriété, en cohérence avec les objectifs poursuivis par la LTECV
et la PPE.
2.8 Synthèse
La PPE de la Martinique ne comportant que peu d?objectifs quantitatifs et de scénarios prospectifs,
il est difficile de s?assurer que les objectifs de la loi de transition énergétique pour la croissance
verte seront atteints. La trajectoire de l?autonomie énergétique en 2030 semble d?ores et déjà
compromise. Il est également peu probable, comme cela a été relevé par l?évaluation
environnementale stratégique, que l?objectif de 50 % d?énergies renouvelables en 2020, fixé par la
LTECV, soit atteint.
Tableau 4 : Tableau récapitulatif de l?évolution prévue de la consommation d?énergie pour différents usages (scénario MDE
renforcée). (Source dossier)
Il apparaît ainsi nécessaire de développer des solutions pour accroître les économies d?énergie et
diminuer la part des énergies fossiles dans les transports terrestres et aériens en complément des
efforts en matière d?électricité renouvelable. Ces efforts supposent que les initiatives en matière
de recherche et d?innovation, ainsi que les changements de comportement soient accompagnés
par diverses initiatives nationales en matière d?organisation du système de transport aérien,
d'augmentation du prix du carbone et de recherche.
L?Ae recommande à l?État de renforcer les mesures nationales qui visent à diminuer la
consommation d?énergie fossile des transports terrestres et aériens et d?accompagner les
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initiatives de la Martinique par un effort de recherche ciblé sur les besoins des territoires non
interconnectés.
3 Analyse de l?évaluation environnementale stratégique
Dans son ensemble, le rapport de l'évaluation environnementale est de lecture aisée mais reste
très général et qualitatif. En particulier, l'analyse des impacts de la PPE est très succincte, presque
entièrement qualitative, et peu appliquée au territoire34.
L'Ae considère que le rapport d'évaluation environnementale ne permet dès lors pas d'apprécier
les effets de la PPE. Elle formule dans la suite de cet avis un certain nombre de remarques et de
recommandations sur le document qui lui a été présenté, mais considère d'une manière générale
que cette évaluation devra être intégralement reprise lors de la révision prochaine de la PPE.
L'Ae recommande, lors la révision prochaine de la PPE, d'en reprendre entièrement l'évaluation
environnementale en tenant compte notamment des diverses recommandations du présent avis.
3.1 Principaux enjeux environnementaux relevés par l?Ae
Pour l?Ae les principaux enjeux environnementaux de la PPE de Martinique sont :
? la forte dépendance du territoire aux importations d?énergie ;
? la qualité de l?air et la santé humaine, ainsi que les émissions de gaz à effet de serre, en
lien avec les choix en matière d?énergies thermiques ;
? les impacts des différentes filières de production sur les écosystèmes terrestres et
aquatiques, ainsi que sur la préservation des ressources en eau ;
? l?usage des sols en fonction du développement de la filière bioéthanol et des énergies
solaires.
3.2 Articulation avec les autres plans, documents et programmes
L?évaluation environnementale stratégique aborde la question de la compatibilité avec le schéma
régional climat, air, énergie (SRCAE) alors que la loi de transition énergétique pour la croissance
verte prévoit que la PPE constitue le volet énergie du SRCAE. Sa conclusion est que la PPE est
globalement compatible avec le SRCAE actuel, voire le renforce, mais qu?il est en retrait sur
certains points35.
L'analyse de la compatibilité avec les autres plans, programmes n'appelle pas de commentaires de
la part de l'Ae.
34 Les maîtres d'ouvrages ont fait part aux rapporteurs de leurs difficultés dans la préparation de ce document, le bureau
d'étude ayant procédé à l'évaluation ayant fait faillite au cours du processus d'élaboration.
35 La PPE ne prévoit en effet pas, contrairement au SRCAE de 2013 de limitation des intrants agricoles (fertilisants,
pesticides), souvent fabriqués à partir de produits pétroliers.
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3.3 Analyse de l?état initial et de ses perspectives d?évolution
3.3.1 État initial de l?environnement
L?évaluation environnementale stratégique passe en revue la situation de l?état initial pour chacun
des compartiments de l?environnement. La liste des enjeux qui conclut chacun de ces paragraphes
n?est pas spécifique des pressions liées à la PPE, les enjeux spécifiques étant listés dans le
paragraphe sur l?évolution du territoire sans la PPE. Le niveau de détail sur chaque item n?est pas
proportionné à l?enjeu. Par exemple, le chapitre sur les ressources en eau est très détaillé tandis
que celui sur la qualité de l?air, dépendant directement du système de transports et de production
électrique, est très succinct.
3.3.1.1 Émissions de gaz à effet de serre et climat
Les émissions de gaz à effet de serre de la Martinique sont, en 2013, de 2 286 kteqCO2 dont
1 024 kteqCO2 pour les transports, 1 059 kteqCO2 pour la production d?électricité et 203 kteqCO2
pour la production de chaleur.
La Martinique est elle-même vulnérable au changement climatique qui pourrait provoquer, selon
les modèles, outre un réchauffement qui accroîtrait le nombre de jours de canicule, une
modification du régime des pluies qui seraient plus intenses à la saison des pluies tandis que la
saison sèche serait plus sèche, une baisse des ressources en eau et une élévation du niveau de la
mer. Sur le plan écologique, la Martinique est touchée par le phénomène de blanchiment des
coraux qui est largement d?origine climatique.
3.3.1.2 Milieux naturels et aquatiques
Le chapitre sur l?état initial des ressources en eau montre une situation chimique et biologique
dégradée à terre comme en mer. Les pressions quantitatives sur l?eau sont importantes, du fait
notamment de l?agriculture. Néanmoins, bien que l?évaluation environnementale stratégique
insiste sur les impacts potentiels de l?hydroélectricité la situation des eaux dans et à l?aval des 298
réservoirs hydrauliques n?est pas présentée..
La Martinique se caractérise d'une manière générale par une importante diversité des milieux
naturels et des espèces, et par un taux d'endémisme important. Le milieu marin, non entièrement
connu, est très vulnérable et présente une biodiversité remarquable.
3.3.1.3 Qualité de l?air, bruit et santé
La Martinique fait partie des onze territoires ciblés par la procédure d?infraction contre la France,
engagée par la Commission européenne pour non respect des normes de qualité de l?air et
insuffisance des plans d?action pour l?amélioration de la qualité de l?air. Le dossier indique que les
normes de qualité de l?air sont souvent dépassées pour ce qui concerne les polluants liés aux
transports. Néanmoins, il ne fournit aucune donnée quantitative sur la situation et son évolution
récente. Il ne procède pas non plus à une évaluation, même succincte, de l?impact de ces
pollutions sur la santé humaine.
Le rapport annuel 2015 de l?association agréée de surveillance de la qualité de l?air de Martinique,
Madininair, montre que l?air de Martinique est fortement dégradé. S?ajoutent aux pollutions
CGEDD Avis délibéré du 28 juin 2017 - programmation pluriannuelle de l'énergie de la Martinique (972)
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d?origine humaine les émanations de sulfure d?hydrogène liés à l?échouage des algues sargasses
et les nuages de poussières du Sahara.
L?Ae considère que la qualité de l?air et ses impacts sanitaires constituent un sujet majeur à la
Martinique et devraient faire l?objet d?une attention particulière dans le cadre de la PPE et de son
évaluation environnementale stratégique.
L?Ae recommande de revoir le volet qualité de l?air et santé à l?aide de données quantitatives et
d?élever le niveau d?enjeu qui lui est associé au sein de la PPE.
En matière de bruit, il est indiqué que la Martinique nécessitait une action particulière et qu?un
plan de prévention du bruit avait été mis en place. L?évaluation ne fournit pas de détail sur les
sites concernés et ne relie pas le bruit aux secteurs consommateurs ou producteurs d?énergie qui
sont potentiellement créateurs de nuisances sonores.
L?Ae recommande de fournir des valeurs quantitatives des concentrations des principaux polluants
atmosphériques et de leur évolution, des nuisances sonores, ainsi que des risques sanitaires
induits par ces deux types de pression sur l?environnement.
3.3.2 Les perspectives d?évolution du territoire, sans la PPE
L?évaluation environnementale consacre un chapitre à ce point qui liste bien les différents impacts
susceptibles de se produire sans la PPE. Une partie de ce chapitre évoque le coût de l?inaction en
matière de climat et les bénéfices économiques du volet efficacité énergétique de la PPE.
3.4 Exposé des motifs pour lesquels le projet de PPE a été retenu,
notamment au regard des objectifs de protection de
l?environnement, et les raisons qui justifient le choix opéré au
regard des autres solutions envisagées
Une partie de ce chapitre décrit les recommandations et préconisations du bureau d?étude chargé
de l?évaluation environnementale et comment celles-ci ont été prises en compte au cours du
processus d?élaboration de la PPE. Beaucoup de mesures font l?objet d?un engagement de prise en
compte postérieur à la PPE ou sont conditionnées à la réalisation d?études (exemple du schéma de
déploiement du véhicule électrique).
L?Ae recommande de veiller à bien intégrer dans la version de la PPE prévue fin 2018 les
différentes recommandations qui n?ont pu être formellement intégrées à la version de 2017.
3.5 Analyse des effets probables de la PPE et des mesures d?évitement
et de réduction
À titre préliminaire, l?Ae a noté que le chapitre correspondant de l?évaluation environnementale
stratégique était intitulé : « Analyse des effets notables probables du programme de coopération
territoriale européenne », ce qui traduit un copié-collé malencontreux qui est à corriger.
Le maître d?ouvrage a choisi d?aborder l?analyse des impacts par les questions évaluatives qui
correspondent aux enjeux identifiés au regard des impacts possibles de la PPE et de l?évaluation
CGEDD Avis délibéré du 28 juin 2017 - programmation pluriannuelle de l'énergie de la Martinique (972)
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de l?état initial. L?Ae souscrit à cette méthode qui permet de cibler l?évaluation sur les enjeux
majeurs et cela de façon proportionnée.
En revanche, l?évaluation est très succincte et uniquement qualitative. Même au stade d?une
évaluation environnementale stratégique il convient, avec une précision certes plus faible que pour
les projets, d?aborder avec des données chiffrées les enjeux majeurs.
L?Ae a également noté que, sur plusieurs points, l?évaluation, sans que l?analyse préalable soit
fournie, émettait des recommandations sur les techniques à adopter. Cette approche pourrait
s?apparenter à une stratégie d?évitement ou de réduction d?impacts environnementaux. En
l?absence d?enveloppe quantitative des impacts, il est à craindre que ces recommandations ne
soient pas pertinentes pour construire des stratégies d?évitement et de réduction et ne conduisent
les maîtres d?ouvrage des projets à restreindre les choix qu?ils opèrent sans réelle analyse
préalable des divers impacts environnementaux.
3.5.1 Qualité de l?air et santé
Le volet qualité de l?air est très succinct et ne répond pas aux attentes exprimées par l?Ae à propos
de l?analyse de l?état initial. L?évaluation environnementale stratégique conclut que l?impact de la
PPE sera positif du fait du développement des énergies propres. Le seul point de vigilance est celui
qui est lié au développement de la valorisation thermique des déchets pour lequel elle
recommande d?installer un traitement des fumées.
Compte tenu de l?importance de l?enjeu et du rôle des choix énergétiques dans les émissions de
polluants atmosphériques l?Ae attendait une évaluation précise, décomposée par filière, de
l?évolution des émissions de polluants atmosphériques. À cet égard, le sujet du véhicule
électrique, dont les inconvénients en termes de perturbation du réseau électrique sans gain
notable en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont largement mis en avant,
aurait mérité d?être évalué en termes d?amélioration des émissions de polluants toxiques (oxydes
d?azote, particules, benzène).
Enfin, munie de données quantitatives décomposées par filières, l?évaluation environnementale
stratégique pourrait procéder à une évaluation des risques sanitaires et permettre ainsi à la PPE de
refléter des choix éclairés par des préoccupations de santé publique.
L?Ae recommande de revoir l?évaluation des impacts sur la qualité de l?air et d?y adjoindre une
évaluation des risques sanitaires.
3.5.2 Milieux aquatiques
L?évaluation environnementale stratégique évoque, sans précision, le fait que : « le développement
de centrales hydroélectriques entraîne des modifications morphologiques des cours d?eau
(endiguements, seuils, conduites forcées) et des régulations de débits. Les centrales entraînent
aussi des discontinuités écologiques de l?écosystème aquatique, qui ont des impacts négatifs sur
la biodiversité. » Cette assertion est correcte dans le cas général, mais il conviendrait d?examiner
des sites types et de fournir une évaluation de leurs impacts. L?étude suggère une solution : « Afin
d?éviter ces impacts négatifs, il faut favoriser l?hydroélectricité sur des conduites d?amenée d?eau
brute » sans démontrer sa pertinence faute de comparaison objective des impacts par type de site.
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Néanmoins, l?enjeu de hydroélectricité est très faible car la ressource est quasi absente du
territoire et ne représenterait, à l?horizon 2023, qu?une puissance installée très faible.
3.5.3 Impact du développement des énergies thermiques marines
Le projet Nemo (10 MW) vise la récupération de l?énergie thermique des mers. Son étude d?impact
est réalisée et l?enquête publique terminée. L?évaluation environnementale insiste sur des
recommandations à mettre en oeuvre afin d?éviter les impacts sur les herbiers et le corail des fonds
marins, notamment pour les liaisons de raccordement ainsi que sur le risque accidentel de
pollution ammoniacale des eaux. Néanmoins ces impacts ne sont pas évalués de façon
quantitative alors qu?ils figurent dans l?étude d?impact du projet, qui est publique.
L?Ae recommande d?intégrer les principaux éléments de l?étude d?impact du projet Nemo dans
l?évaluation environnementale stratégique de la PPE.
3.5.4 Usage des sols et écosystèmes terrestres
L?évaluation environnementale stratégique reste très succincte sur cet enjeu, alors même que la
PPE envisage un développement parfois important des filières photovoltaïques, éolien et
bioéthanol. Les besoins en surface pour les différentes filières envisagées ne sont pas évalués et il
n?est donc pas possible d?évaluer les impacts des différents choix stratégiques. Les
recommandations émises : « [éviter] les fermes photovoltaïques [...] en favorisant leurs
installations sur les toitures, [requalifier] des voies existantes pour les transports en commun, au
lieu d?en créer de nouvelles, [optimiser] le foncier au maximum et l?emprise au sol des projets de
manière générale, etc. » sont empreintes de bon sens mais ne sauraient apporter aux décideurs
les arguments précis et quantifiés qui leurs permettent d?intégrer le respect de l?environnement
dans leurs choix stratégiques et opérationnels. Cette lacune est d?autant plus regrettable que de
nombreux projets, évoqués oralement devant les rapporteurs à l?occasion de leur visite,
envisagent de coupler production agricole et production ou stockage d?énergie dans une logique
très économe en termes d?usage des sols.
L?Ae recommande de renforcer la précision du volet usage des sols et écosystèmes terrestres afin
de disposer des indicateurs d?impact quantitatifs qui permettent d?éclairer les choix stratégiques à
l?aune des impacts sur l?environnement.
3.6 Suivi
L?évaluation environnementale stratégique souligne le fait que « dans sa version d?octobre 2015,
la PPE ne prévoit pas de dispositif de suivi environnemental. Toutefois, un dispositif sera intégré
au document dans le cadre du dispositif de suivi de la mise en oeuvre de la PPE elle-même. » La
PPE elle-même indique qu' « il reviendra au comité de suivi, dès l'adoption de la PPE de finaliser le
choix des indicateurs en se rapportant aux orientations de cette dernière. Une vigilance
particulière sera portée à la facilité de compréhension et de représentation de ceux-ci, pour que
l'ensemble des habitants puisse y accéder aisément et en faire un outil de sensibilisation de
l'action. » Force est donc de constater que le dispositif prévu n?est toujours pas précisé.
CGEDD Avis délibéré du 28 juin 2017 - programmation pluriannuelle de l'énergie de la Martinique (972)
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Un tableau d?indicateurs, présenté comme incomplet36 est proposé par l?évaluateur, ce qui ne
garantit pas qu?il sera mis en oeuvre par le comité de suivi. Il est important de compléter la PPE sur
ce volet, avant qu'elle ne soit mise à la consultation du public.
L?Ae recommande aux maîtres d?ouvrage de s?engager sur le tableau de suivi proposé par
l?évaluateur, en le complétant, et ce avant la consultation publique.
3.7 Résumé non technique
Le résumé non technique est constitué de larges extraits de l?évaluation environnementale
stratégique ; il comporte 32 pages alors que l?évaluation environnementale stratégique en
comporte 89. L?Ae considère qu?il est relativement long et ne présente pas les qualités de
didactisme et de synthèse attendus.
L?Ae recommande de revoir le résumé non technique avec une vision plus synthétique et
didactique ainsi que de prendre en compte, dans la nouvelle version, les conséquences des
recommandations du présent avis.
36 « À ce stade, la liste des indicateurs n'est pas complète, ce travail sera à compléter lors de la finalisation du document
et des procédures de mise en oeuvre de la PPE qui interviendront dans un second temps ».
Délibération n°2017-06 : avis sur le projet de Programmation pluriannuelle de l'énergie de la
Martinique
Adopté le 21 décembre 2017
Le Conseil national de la transition écologique,
Saisi par le Ministre d'État de la Transition écologique et solidaire d'un projet de Programmation
pluriannuelle de l'énergie (PPE) pour la Martinique pour les périodes de 2016-2018 et 2019-2023,
composé d?un rapport et d?un projet de décret reprenant les principales dispositions, de l?évaluation
environnementale stratégique et de sa synthèse, d?une étude d?impact économique et sociale, de
l?avis de l?Autorité Environnementale et des éléments de réponse ;
Prenant note de l'avis du 28 juin 2017 de l'autorité environnementale sur le projet de PPE pour la
Martinique ;
Salue le choix d'un scénario de maîtrise de la demande renforcé et souligne les mesures d?efficacité
énergétique proposées qui permettront d'augmenter de 150 % les gains d?efficacité énergétique
annuelle et d?éviter, en 2023, la production d?environ 118 GWh d?énergie par rapport à 2015 ;
Salue la très forte progression des énergies renouvelables (+ 805 %) dans la production électrique
atteignant 55,6 % d?ENR électriques en 2023 ;
Salue l?augmentation de la part des ENR thermiques dans le mix, qui sont de nature à éviter en
2023 près de 13 GWh de production électrique ;
Se félicite de la baisse de 19 % de la consommation d?hydrocarbures dans les transports terrestres,
grâce notamment au développement d'un système de transport global efficient, avec une maîtrise
des charges et une optimisation des ressources grâce à la mise en place d'une autorité organisatrice
unique.
Salue l?objectif de déployer 241 bornes de recharge privilégiant le recours aux énergies
renouvelables ;
Les ONGE souhaitent qu?aucun autre projet de biomasse importée (de type Galion 2) ne soit
développé à l?avenir ;
Recommande la mise en place d?indicateurs de suivi de mise en oeuvre de cette programmation ;
1
Demande que les travaux se poursuivent et soient approfondis dans les domaines des énergies
renouvelables, de l?efficacité énergétique, du stockage et de la gestion de la demande électrique, des
transports afin d?être en mesure de proposer pour la prochaine révision de la PPE des mesures
permettant d?atteindre les objectifs d?autonomie énergétique prévus pour 2030 par le code de
l?Énergie ;
Soutient qu?il est nécessaire de favoriser toutes les solutions qui permettent l?autonomie énergétique
de la région en développant toutes les ressources locales ;
Recommande que l?ambition forte du territoire, notamment en matière de développement des
énergies renouvelables intermittentes, s?accompagne de l?étude prévue quant à l?analyse des
impacts sur le réseau électrique martiniquais et sa capacité à supporter l?ensemble des nouveaux
moyens programmés ;
Demande que le schéma directeur de sécurité électrique du réseau soit adapté à la montée en
puissance des ENR électriques intermittentes et en général à une meilleure prévention du risque de
défaillance du réseau insulaire, et qu'en particulier les liaisons sous-marines ou souterraines
nécessaires soient réalisées ;
Demande que le développement des énergies renouvelables en mer s'inscrive en cohérence avec les
orientations du document stratégique de bassin relatif à la planification de l?espace maritime et
permette la coexistence avec les autres usages de la mer ;
Demande que le volet relatif au stockage de l'énergie soit précisé dans le rapport ;
Demande que les travaux d?évaluation de l?impact de la PPE sur l?économie, la création d?emplois,
les transitions professionnelles et les coûts de l?énergie soient affinés.
Avis certifié conforme par la Commissaire générale au développement durable.
2
Avis du CETE
sur la Programmation Pluriannuelle de l'Énergie de la Martinique
2015/2018 - 2019/2023
Notons en préambule que le « projet » de PPE qui nous est soumis ici couvre de façon prescriptive la
période 2015-2018, puis la période 2018-2023, et doit être renouvelé à l?issue de la première période.
Il est donc surprenant qu?il nous soit soumis en 2018, plus surprenant encore que cette soumission
tardive ne s?accompagne d?aucune explication sur le statut du document soumis, les raisons du délai,
la procédure envisagée désormais, ou une note d?actualisation de considérations qui datent déjà de 3,
voire 4 ans.
1. Un système énergétique dominé par les consommations d?électricité et de carburants
Le système énergétique de la Martinique est caractérisé par sa grande dépendance par rapport à
l?extérieur (94% sur les dix dernières années), sa vulnérabilité (petite taille et non connexion du
système électrique) et des coûts de production élevés pour l?électricité. Comme dans la plupart des
territoires ultramarins, la demande est dominée par les carburants-transport (48% de la consommation
d?énergie finale), et par l?électricité (44%).
La consommation d?énergie pour les transports terrestres est cependant en baisse régulière depuis
2011, alors que la consommation de kérosène pour l?aérien est globalement stable. Aujourd?hui les
véhicules électriques ne sont que quelques dizaines sur l?île.
Depuis 2010 on note également une décroissance lente mais régulière de la consommation d?électricité
pour toutes les catégories de consommateurs (tarif bleu = BT).
Le réseau électrique est alimenté par trois centrales principales et par des unités de plus petite taille.
En 2014, La production était de 1 560 GWh, dont 6,9% d?énergies renouvelables. L?arrivée de
quantités plus importantes d?énergies renouvelables variables (ERV) nécessite d?importantes
adaptations des réseaux et du système électrique. Ceci constitue à l?évidence un des défis majeurs à
relever. En 2013, les coûts de production de l?électricité en Martinique sont de 259 ¤/MWh (contre
225 en moyenne dans les ZNI).
Il serait utile de disposer ici d?indications précises sur le calcul des coûts afin de comprendre
notamment la hausse des coûts du solaire alors même que ceux-ci ont fortement décru dans tous les
appels d?offre au cours de cette période. De même, est donnée en comparaison un ?tarif régulé? de
59 ¤/MWh en Métropole, dont la nature devrait être documentée.
On peut regretter une fois de plus que les objectifs de la loi LTECV ne soient pas présentés dans le
cadre d?un bilan énergétique complet. Les grands objectifs quantifiés pour la Martinique ne sont
en effet présentés qu?en termes de variation en pourcentage. Il conviendrait de donner à voir les
développements nécessaires pour atteindre ces objectifs, et le bilan final non seulement en puissance,
mais en énergie. Par ailleurs, l?ambition de l?objectif d?efficacité ne peut être évaluée faute de pouvoir
comprendre comment il est mesuré : s?agit-t-il d?une évolution des économies d?énergie annuelles)
telles que mentionnées plus loin dans la PPE ? Ou d?une évolution de l?intensité énergétique du PIB de
l?ile ? Dans le premier cas c?est extrêmement peu ambitieux, dans le second cela semble irréaliste?
(la question se pose de savoir comment mesurés les gains d?efficacité énergétique, c?est probablement
en termes d?intensité énergétique du PIB de l?île).
2. La maitrise de la demande d?énergie
Electricité
L?habilitation du Conseil Régional en matière d?énergie et de politique de maîtrise de l?énergie depuis
2011 a conduit à des actions dans de nombreux domaines, notamment : amélioration de l?efficacité
énergétique des bâtiments, développement des chauffe-eau solaires, mesures en faveur de l?efficacité
des climatiseurs et des appareils d?ECS, participation au schéma de raccordement des ENR au réseau.
Le Programme Territorial de Maitrise de l?Energie a pour premier objectif la réduction de la
consommation d?énergie, en lien avec l?objectif de 50% de renouvelables en 2020.
Pour l?électricité, l?anticipation de la consommation s?appuie sur deux scénarios fondés sur le bilan
prévisionnel EDF : ?Référence MDE? et ?MDE renforcée?. Pour le résidentiel, les deux scénarios se
différencient essentiellement par les hypothèses sur les taux d?équipement et les coefficients de
performance pour la climatisation et l?ECS. L?intégration des véhicules électriques n?est pas
actuellement prise en compte. Du fait de la vulnérabilité du réseau en période de pointe, sont
envisagées actuellement des dispositifs indépendants de ?recharge verte?. Les scénarios de demande
ne prévoient au plus qu?une croissance modérée de la consommation. On peut regretter que, à ce stade,
l?hypothèse d?une gestion intelligente de la recharge ne soit pas mentionnée et développée dès la partie
initiale du document : plutôt que de développer artificiellement et de façon indépendante au réseau des
VE, il semble plus judicieux d?étudier leur contribution possible à moyen long terme à l?équilibre et la
sécurité de ce réseau, en conditions réelles (sachant que, dans l?absolu, le bilan CO2 total pourra être
pénalisé, ou inversement amélioré, selon la gestion qui sera réussie de la production PV et de la
charge/décharge des véhicules
De multiples actions d?amélioration de l?efficacité énergétique (dont un programme ?éclairage
public?) sont en effet engagées, avec pour objectif des économies de 30-35 GWh en 2018 et 45-
50 GWh en 2023 : bien que le rapport ne précise pas par rapport à quelle référence ces ?économies?
sont calculées (base 2014 ? tendance ?) cela semble dans l?absolu très peu par rapport à une
consommation totale de 1 500 GWh). Rappelons aussi que cette projection ne concerne que
l?électricité, et qu?il y a d?importants gisements dans les autres secteurs.
Des actions visent en outre à des transferts d?usage de l?électricité vers d?autres sources : réseau de
chaleur ou de froid à partir de sources propres, eau chaude solaire, production combinée (par cycle de
Rankine). Pour les actions portant sur des options matures, on s?interroge sur le peu de crédit qui
semble accordé au développement de l?eau chaude solaire. En termes d?innovation technologique,
EDF crée, sur le site de l?ancienne centrale de Bellefontaine, un incubateur de la Transition
Energétique en Martinique. Un certain nombre de projets SOLARICE (PV+stockage de froid),
démonstrateur smartgrid Madin?Grid et Madin?Storage, Smart Community Nord, Accueil des EnR
visent à accélérer la diffusion des innovations de la transition énergétique. N?apparait pas ici une
vision d?ensemble et coordonnée, à l?échelle régionale de ce que pourrait être un laboratoire de la
transition?
Transports
La demande de transports est évidemment fonction des variables démographiques et d?occupation des
sols. La Martinique est un territoire dense de 380 000 habitants mais la répartition est très hétérogène,
avec polarisation (37% dans le ?grand Fort de France?, 60% des emplois), périurbanisation et mitage.
Les flux de transport sont donc importants alors que les transports en commun peinent à s?adapter à la
nature des territoires et à la couverture de zones de plus en plus étendues.
Le vieillissement de la population est un facteur de réduction du nombre de déplacements, phénomène
qui pourrait être contrebalancé par une offre accrue de transports en commun. De 1999 à 2010 la part
modale des transports en VP a augmenté de 10 points et s?établit entre 66 et 79% selon les zones
considérées (taux d?occupation des véhicules 1,4 conforme à la moyenne nationale). Le parc de
véhicule est stable à 205 000 unités.
Pour les transports le scénario SRCAE ?volontariste? apparait aujourd?hui ?réaliste? et devrait se
traduire par une baisse des consommations de 9% en 2018 et 19% en 2023, par rapport en 2015. Pour
poursuivre la tendance, les solutions envisagées sont la réduction de la longueur des trajets par
l?aménagement du territoire, la dématérialisation (démarches administratives, télétravail).
La diffusion de nouvelles options techniques pose simultanément des questions d?orientation
stratégique de développement, d?adéquation aux besoins et de financement. La Martinique présente
cette caractéristique particulière d?avoir une activité touristique importante, qui peut sans doute servir
de tremplin à un modèle énergétique plus durable et le valoriser dans l?image du tourisme sur l?ile.
C?est une hypothèse, c?est aussi un modèle développé ailleurs (cas de Marie Galante par exemple), et
on peut s?étonner que jamais la question ne soit abordée en ces termes, et les données présentées utiles
pour commencer à évaluer cet enjeu.
Synthèse des projections de demande 2018-2023
3. Offre d?énergie et infrastructures
Electricité
Pour la production d?électricité, la nouvelle centrale mise en service en 2014 par EDF (Bellefontaine
B) comporte douze moteurs diesel avec des rendements supérieurs de 15% aux anciens groupes, mais
des impacts environnementaux qui demeureront importants. L?objectif d?augmentation de la part des
ENR et d?autonomie en 2030 est rappelé, sans indication d?objectif précis.
L?enjeu de la diversification des filières est celui du maintien de la sécurité d?approvisionnement dans
un système incorporant plus de sources locales intermittentes ; mais nous sommes encore loin
d?atteindre un niveau de développement des ENR variables problématiques, sur un système électrique
composé par ailleurs de générateurs fioul, et les choix qui sont faits de ne développer exclusivement
(et timidement) que des ENR avec stockage ne sont pas suffisamment étayés,étant donné par ailleurs
leur coût. Des réserves de puissance sont disponibles avec la TAC d?Albioma, les sites EDF de Pointe
des carrières et de Bellefontaine. Ce problème ne se posera de manière aigüe que sur le long terme
lorsque la part des ERV aura significativement augmenté. Il faudra alors parallèlement développer des
renouvelables dispatchables ou fatales avec inertie, ainsi que des moyens de stockage : batteries chez
l?usager en autoconsommation, associées à une installation de production ou gérées sur le réseau,
STEP? Le critère de défaillance de 3h/an est identique à celui de la métropole.
On peut ici s?étonner qu?aucune mention explicite ne soit faite (si ce n?est dans un tableau sur les
capacités de production électrique) au projet de centrale Galion 2 de la société Albioma qui brulera de
la biomasse (initialement importée sous forme de pellets, mais avec une montée de
l?approvisionnement local) pour alimenter une usine sucrière, mais aussi une centrale électrique de 36
MWe nets et qui pourrait produire 15% de la consommation de l?île, portant la part des renouvelables
de 7 à plus de 20%...
Les groupes de production thermique d?EDF à Belle fontaine pourraient être convertis au gaz naturel
avec un gain en CO2 de 30% (ainsi que NOx, SO2, particules) moyennant un investissement dont la
rentabilité reste à évaluer. Cette conversion devrait cependant être mise en perspective dans la vision
de la transformation du système électrique : si l?on vise un système électrique autonome dans la
décennie 2030, est-il encore judicieux de maintenir ouverte cette option de transformation dun
équiment très récent ?
Dans le projet Madin?Storage, le test d?une installation de stockage électrochimique en réseau de 10 à
15 MWe devrait permettre notamment de passer le seuil de déconnexion des sources intermittentes à
45% avec en vue l?équipement en stockage des points critiques du réseau.
Des renforcements par lignes souterraines ou sous-marines doivent être mis en service en 2019 et
l?élaboration d?un schéma directeur du réseau, ainsi qu?un Schéma de Raccordement au Réseau des
Energies Renouvelables (SRREnR) sont prévus. Madin?Storage doit permettre de déployer d?ici 2023
les capacités de stockage nécessaires au doublement de la capacité PV. De même la stratégie Smart
Grid avec le développement de compteurs communicants devrait permettre l?installation
supplémentaire. On s?interroge ici sur la manière dont devraient être positionnées les initiatives smart
grid ou stockage dans la trajectoire de montée en puissance des renouvelables, alors que la puissance
installée à l?horizon 2023 demeure modeste.
Pour favoriser les projets prévus dans la PPE les mécanismes mobilisés sont : les contrats en
obligation d?achat, les appels d?offre de la CRE, les contrats gré à gré, l?évaluation de la CSPE évitée,
la compensation du coût des études?
Transports
Dans les projets d?infrastructure de transports en commun, une ligne de BHNS est prévue entre Fort de
France et Le Lamentin. Avec d?autres actions de réorganisation des TC l?objectif est d?atteindre une
part modale de 25% proche de la part actuelle en 2023. Le CR a instauré en 2015 une Autorité
Organisatrice Unique des TC qui devrait permettre une organisation globale et une plus grande
efficacité des TC. Le covoiturage est encouragé dans les Plans de Déplacement Inter-Entreprises
(objectif taux d?occupation de 1,6 en 2023), ainsi que modes doux (15% des trajets, 3% des distances)
avec un objectif de part modale de 25% en 2023 et enfin l?écoconduite.
Le parc de VEL se réduit à quelques dizaines d?unités, alors que l?introduction de bioéthanol n?est pas
explorée à ce stade. Il est prévu qu?elle soit étudiée dans le cadre du Schéma Régional Biomasse. Pour
la motorisation des véhicules les options considérées sont donc :
? Le bioéthanol produit localement ou importé (hypothétique et sous contraintes
environnementales)
? Le gaz, de récupération (mais le gaz de méthanisation semble aujourd?hui devoir être réservé à
la production d?électricité), ou de raffinerie (dont le surplus actuel est exporté en Guadeloupe)
? L?électricité avec un déploiement qui doit être étudié en liaison avec la configuration du
réseau (cf. infra)
Inversment, le développement de la biomasse (et notamment l?association valorisation énergétique de
la canne / carburant automobile) devra être resituée dans la perspective de la meilleure valorisation de
biomasse liquide dans un système énergétique martiniquais largement décarboné, et discuté en
fonction des priorités dressées pour le secteur agricole, et la préservation de la biodiversité de l?ile :
est-il opportun d?envisager le développement d?une fraction du parc de véhicules à l?éthanol ? est-il
plus judicieux de réserver les combustibles liquides ou gazeux ex-biomasse pour des usages dans
l?inudstrie, le batiment ou la produciton électrique en pointe ? Encore une fois, il semble nécessaire de
construire une stratégie de moyen terme pour opérer des choix sur les développements de court terme.
4. Le développement du véhicule électrique
Le développement du véhicule électrique pourrait apparaitre comme un élément stratégique dans la
transition à long terme du système énergétique de la Martinique, modifiant à la fois les données de la
demande et l?organisation de l?offre et du réseau électrique.
L?application en Martinique de la LTECV doit conduire à 50% de véhicules basses émissions pour
l?Etat et 20% pour les collectivités locales à partir de 2019. Des normes similaires sont appliquées
pour les véhicules utilitaires et pour les véhicules de transport collectif.
Mais pour l?heure et sans indication sur les futurs besoins de recharge, il est supposé que celles-ci
auront lieu au moment de la pointe du soir lorsque les automobilistes rentrent à leur domicile et que les
besoins seront donc satisfaits à partir des moyens de pointe des TACs à impacts environnementaux
défavorables. D?ici à ce que le problème se pose de manière quantitativement significative, il sera très
probablement possible de mettre en oeuvre des moyens de flexibilisation et de gestion intelligente de la
recharge. La puissance potentiellement appelée n?est pas un problème à l?échelle du réseau HT, mais
peut au contraire entrainer des besoins de renforcement du réseau BT. Un schéma de développement
du VEL doit donc être préparé pour 2018. Le projet Madin Drive doit permettre de tester les solutions
les solutions de ?charge responsable? et couplant VEL et ENR.
Il est sans doute regrettable qu?aucune vision d?ensemble ne soit fournie sur les opportunités et défis
apportés par cette perspective.
5. Synthèse et commentaires sur le rapport principal
Le rapport offre une bonne mise en perspective du système énergétique martiniquais, de ses
caractéristiques structurelles de ses dynamiques de transformation et des défis à relever dans la
transition ; sa qualité formelle est très satisfaisante, même si les répétions multiples de certains
tableaux (certes les plus importants) révèlent sans doute quelques défauts de construction.
? Les dynamiques passées et futures de la demande sont bien décrites ; en revanche, au-delà de
liste des actions entreprises ou à entreprendre en matière de MDE, on s?attendrait à une
approche plus quantitative des mesures et de leurs impacts attendus ; en particulier l?ampleur
des économies d?énergie attendues apparait très modeste et cela devrait sans doute être
justifié.
? Le défi que constitue l?insertion de quantités croissantes d?énergies intermittentes est bien
identifié, ainsi qu?une partie des solutions à apporter, en particulier en matière de stockage
d?électricité et de renforcement des réseaux ; cependant on manque sur ce sujet d?une
description plus technique de ce que pourrait être un système électrique répondant aux
exigences et objectifs de la LTECV (par exemple courbes de charge prévisionnelles et
contributions des différents moyens de production)
? Ce point rejoint celui de l?absence de bilans énergétiques bouclés aux différents horizons de
temps considérés des éléments sont fournis d?un côté sur la demande, de l?autre sur les
capacités de production projetées, mais il n?y a pas de rapprochement effectué.
? On peut noter par ailleurs dans le rapport un certain nombre de ?points aveugles?, en
particulier pour ce qui concerne les potentiels des différentes énergies renouvelables (les
projets de différents types sont bien recensés, mais non les potentiels) ; cela est
particulièrement préjudiciable pour tout ce qui concerne la valorisation de la biomasse, alors
que la canne à sucre constitue l?une des seules cultures présentant un bilan effets de serre, en
ACV, très favorable.
? Autre point aveugle, le projet de nouvelle centrale Albioma (Galion 2), qui devrait à très court
terme multiplier par trois la production d?électricité renouvelable (biomasse importée au
début, mais avec montée des ressources locales) n?apparait pas en tant que tel?
? Certains dossiers techniques, comme la conversion des groupes diesel au gaz, le
développement de bioéthanol, la centrale à biomasse de Galion, la gestion de la recharge des
VEL, le stockage d?électricité? gagneraient à être resitués dans un contexte systémique et
dynamique.
? On note en effet que si que les défis structurels sont bien posés, ce rapport ne fournit pas une
vision cohérente à long terme de ce que pourrait être un système énergétique soutenable,
articulant de manière efficace, d?une part les besoins d?électricité et de transport et d?autre part
les ressources renouvelables locales que sont les sources d?électricité renouvelable et la
biomasse canne à sucre.
6. Analyse de l?évaluation environnementale de la PPE Martinique
Une des difficultés de l?avis est que est que les dernières données utilisées dans le document sont de
2014-2015 pour un plan dont la première partie allait jusqu?en 2018 et que nous sommes amenés à
nous prononcer en 2018. Les évolutions en matière de connaissance environnementale ou de
réalisation de projets EnR sont relativement rapides, et des points abordés dans le document sont peut-
être déjà obsolètes.
Le plan du de l?évaluation environnementale est pertinent et l?ensemble est conçu avec un souci de
faire ressortir l?adéquation avec les différentes directives environnementale et les enjeux de la
LTECV. En ce sens les tableaux récapitulatifs de la section 1 sont bien conçus. Ils n?appellent que des
remarques mineures :
- il manque une numérotation complète des différents tableaux.
- Il y a des redondances entre les lignes 2 et 5 du tableau présentant les objectifs de la PPE
Martinique, en particulier sur les LED. Ne faudrait-il pas séparer les éléments
différemment ?
- Il serait éventuellement souhaitable de revoir la formulation qui explique le code de
couleurs vert, rouge, blancs et gris des différentes cases. Le mot influence ne parait pas
entièrement adapté et peut-être suffit-il de mettre accord (sous-entendu, les objectifs sont
cohérents), conflit, etc. Ca éviterait de se demander pourquoi « véhicule électrique « est en
vert dans le tableau 1 (lien avec LTECV) alors qu?il y a des alertes sur le développement
concomitant des énergies renouvelables dans la suite de l?analyse.
Cette section 1 fait aussi ressortir que la PPE manque globalement de quantification sur les possibles
réductions de gaz à effet de serre associé à son déploiement. Elle insiste aussi sur le fait que la PPE
contribue à l?atteinte des objectifs de la LTECV, mais que les objectifs prévus sur la part d?énergie
renouvelable dans le mix énergétique ne seront pas tenus et que le d?autres objectifs ne sont pas
retranscrits dans la PPE ou non quantifiés. Cette conclusion est importante, mais devrait, en plus des
éléments fournis, être accompagnée d?une analyse des scénarios utilisés pour construire la PPE et
d?une analyse des raisons inhérentes à la Martinique permettant de revoir les objectifs de la PPE lors
de sa prochaine révision ou, si le cadre de la LTECV n?est pas tenable en Martinique, permettre de
redéfinir des objectifs en meilleure adéquation avec les capacités locales.
La section 2 sur l?état initial de l?environnement et les enjeux environnement remet en
perspective les différents enjeux pour la Martinique suivant les rubriques concernant l?énergie
et le changement climatique, les ressources en eau, les risques naturels, pollution de sols et
consommation d?espèce, cardre de vie et santé humaine, patrimoine naturels : milieu naturel,
faune flore, patrimoines paysagers, culturels et archéologiques. Cette section est néanmoins
trop longue et mériterait à être mieux particularisées aux aspects relevant de la PPE. C?est le
cas par exemple des encadrés atouts/faiblesses/opportunité/menaces. Pour la plupart de
sections cet état initial est en effet un peu trop générique et pourrait dans certaines rubriques
mettre plus l?accent sur les liens entre les infrastructures existantes (concernant l?énergie) et
l?environnement en se basant sur l?évolution des dernières années. La section concernant le
climat est assez pauvre et pourrait faire ressortir des seuils suivant le scénario climatique
envisagé ou les besoin croisés avec l?adaptation. L?ensemble de cette section 2 gagnerait à être
raccourcie en faisant apparaitre plus brièvement les aspects environnementaux particuliers de
la Martinique dans les différentes rubriques et en faisant ensuite ressortir les points critiques
pour la PPE. Le tableau p 56-57 apparaitrait mieux relié à la PPE avec des aspects plus
quantitatifs permettant de faire ressortir les risques ou enjeux ou points de vigilances majeurs
pour la PPE.
Il est d?ailleurs étonnant que ce tableau récapitulatif ne mentionne pas les déchets, ni la
mobilité qui font l?objet de paragraphes assez détaillés, et sont un enjeu pour la PPE. Les
éléments de la colonne concernant l?évolution des tendances en absence de PPE ne sont pas
tous convaincants. En particuliers le lien avec les risques devrait être plus circonstancié. Si
une infrastructure liée à la PPE artificialise une surface ou un cours d?eau, elle peut aussi
rendre une zone plus vulnérable à un événement extrême. Le lien direct avec les extrêmes est
aussi un peu optimiste. Les remarques sur l?anthropisation du littoral ou la dégradation des
milieux naturel, n?est certainement pas à sa place. Il en est de même avec la perte progressive
du patrimoine. Ces liens de cause à effet en absence de PPE sont globalement très flous et ne
ressortent pas de l?analyse des pages précédentes.
La section 2.3 mériterait d?être approfondie pour expliquer
- comment les coûts de l?inaction ont été estimés
- quel part de l?inaction concerne la PPE
En l?état on n?apprend pas grand-chose pour la PPE et la section laisse croire que le tableau
correspondrait à des coûts évités par la seule PPE.
Le tableau de la section 4.3 fait état des préconisations prises en compte dans la dernière version de la
PPE. Ce tableau est assez instructif. Il est dommage que le tableau précédent de la p 56-57 ne soit pas
conçu pour apporter plus directement les éléments de vigilance issus de l?analyse environnementale,
de façon à ce que ce tableau en découle directement en apportant les compléments concrets vis-à-vis
des actions prévues pour la PPE.
La partie 5.3 analyse les impacts de l?opérationnalité de la PPE sur l?environnement et est précédée
d?une section précisant la méthodologie pour définir les niveaux d?impacts, leurs échéances et la
durabilité des effets. Le tableau est globalement synthétique. Certaines de ses dimensions mériteraient
soit d?être remises en contexte soit documentées de manière plus précises.
Michel Colombier
Président du CETE
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