Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser
Auteur moral
France. Cour des comptes
Auteur secondaire
Résumé
L'Union européenne harmonise actuellement les données nationales sur les déchets, car les divergences de définition entre États dégradent artificiellement la position comparative de certains d'entre eux, dont la France. Toutefois, même en tenant compte de ce biais, notre pays se situe, au regard des principaux indicateurs (quantité de déchets produite, recyclage, élimination), légèrement en deçà des performances de la moyenne européenne et plus loin encore des pays les plus avancés, que sont l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas et les pays scandinaves.
Descripteur Urbamet
déchet
;déchet ménager
Descripteur écoplanete
Thème
Texte intégral
PRÉVENTION,
COLLECTE
ET TRAITEMENT
DES DÉCHETS
MÉNAGERS :
UNE AMBITION
À CONCRÉTISER
Rapport public thématique
Septembre 2022
?
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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Sommaire
Procédures et méthodes ................................................................................ 5
Synthèse ......................................................................................................... 9
Récapitulatif des recommandations ...........................................................17
Introduction ..................................................................................................19
Une réduction des déchets contrariée
par un pilotage insuffisant ...........................................................................23
I - Le volume élevé de déchets produits .........................................................23
A - Le volume total des déchets ménagers ........................................................... 23
B - Les ordures ménagères résiduelles .................................................................. 26
II - Des acteurs insuffisamment coordonnés ..................................................27
A - L?organisation des responsabilités : cadrage par l?État
et mise en oeuvre par les intercommunalités ......................................................... 28
B - Une programmation qui ne parvient pas à garantir la coordination
des différents niveaux territoriaux ........................................................................ 32
III - Un dispositif de suivi toujours défaillant ................................................36
A - La faiblesse des comptes-rendus alimentant les données nationales
de l?Ademe ........................................................................................................... 36
B - L?absence d?un tableau de bord synthétique ................................................... 39
IV - Un financement peu lisible et trop faiblement incitatif ..........................43
A - Des dépenses de gestion des déchets en augmentation ................................... 44
B - Des modalités de financement complexes ...................................................... 47
C - Une fiscalité incitative à développer ............................................................... 52
D - La spécificité des territoires touristiques ........................................................ 60
Le dispositif opérationnel : une transformation
à accélérer vers l?économie circulaire ........................................................65
I - La prévention : priorité officielle, mais parent pauvre
de la gestion des déchets ................................................................................65
A - À l?étape de la production : écoconception et durabilité des produits ............ 66
B - Dans les territoires : une action trop exclusivement centrée
sur la communication ............................................................................................ 68
II - La collecte : peu de progrès sur les enjeux prioritaires ............................73
A - Une organisation territoriale multiforme ........................................................ 74
B - Promouvoir la collecte et le tri des bio déchets et des emballages
en plastique ........................................................................................................... 77
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COUR DES COMPTES
4
III - Le traitement : une coûteuse modernisation à entreprendre ....................85
A - L?adaptation des capacités de traitement : répondre à l?évolution
des flux, limiter la hausse des coûts ..................................................................... 86
B - Le recyclage et la valorisation : des performances et une organisation
à améliorer ............................................................................................................ 92
C - La valorisation énergétique, un mode de traitement à assumer
pour les déchets non recyclables ......................................................................... 103
Conclusion générale ...................................................................................109
Liste des abréviations ................................................................................111
Annexes .......................................................................................................113
Réponses des administrations et des organismes concernés ...................161
?
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Procédures et méthodes
Les rapports de la Cour des comptes sont réalisés par l?une des six
chambres thématiques1 que comprend la Cour ou par une formation
associant plusieurs chambres et/ou plusieurs chambres régionales ou
territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux gouvernent l?organisation et l?activité
de la Cour ainsi que des chambres régionales et territoriales des comptes,
donc aussi bien l?exécution de leurs contrôles et enquêtes que l?élaboration
des rapports publics : l?indépendance, la contradiction et la collégialité.
L?indépendance institutionnelle des juridictions financières et
l?indépendance statutaire de leurs membres garantissent que les contrôles
effectués et les conclusions tirées le sont en toute liberté d?appréciation.
La contradiction implique que toutes les constatations et
appréciations faites lors d?un contrôle ou d?une enquête, de même que toutes
les observations et recommandations formulées ensuite, sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ; elles ne peuvent être rendues définitives qu?après
prise en compte des réponses reçues et, s?il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
La collégialité intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication. Tout contrôle ou enquête est confié
à un ou plusieurs rapporteurs. Le rapport d?instruction, comme les projets
ultérieurs d?observations et de recommandations, provisoires et définitives,
sont examinés et délibérés de façon collégiale, par une formation
comprenant au moins trois magistrats. L?un des magistrats assure le rôle de
contre-rapporteur et veille à la qualité des contrôles.
Sauf pour les rapports réalisés à la demande du Parlement ou du
Gouvernement, la publication d?un rapport est nécessairement précédée par
la communication du projet de texte que la Cour se propose de publier aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu?aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Leurs réponses
sont présentées en annexe du rapport publié par la Cour.
1 La Cour comprend aussi une chambre contentieuse, dont les arrêts sont rendus publics.
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COUR DES COMPTES
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Le présent rapport est issu d?une enquête conduite sur le fondement
de l?article L.143-6 du code des juridictions financières qui permet à la Cour
de mener des enquêtes thématiques.
L?arrêté n°19-129 du 8 février 2019 a créé une formation commune
à la Cour et aux chambres régionales des comptes, relative à une enquête
sur la prévention et la gestion des déchets, associant la Cour des comptes et
onze chambres régionales des comptes : Auvergne-Rhône-Alpes,
Bourgogne-Franche-Comté, Corse, Centre-Val de Loire, Grand-Est, Hauts-
de-France, Île-de-France, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Provence-Alpes-
Côte d?Azur et Pays de la Loire.
Sur le fondement d?une note de faisabilité et d?un guide de contrôle
adoptés par la formation commune en septembre 2019 et janvier 2020, le
périmètre de contrôle a été arrêté aux déchets ménagers et assimilés (DMA).
Cette enquête intervient, dix ans après le précédent rapport thématique sur
le sujet2 et quelques années après les travaux consacrés aux éco-
organismes3. Ce nouveau rapport se nourrit de 51 contrôles des CRC
portant sur 23 syndicats mixtes, 3 métropoles (Lyon, Nice, Aix-Marseille),
Paris et 22 communautés de communes et d?agglomération, et d?une
enquête de la Cour des comptes portant sur la dimension nationale et
internationale du sujet.
Au niveau national, les contrôles ont principalement porté sur
l?action de l?État (direction générale de la prévention des risques du
ministère de l?Écologie et Ademe), les éco-organismes, le volet industriel
de la valorisation des déchets et les comparaisons internationales. Les
rapporteurs ont échangé avec les administrations centrales (Direction
générale de la prévention des risques, Commissariat général au
développement durable, Direction générale des collectivités locale),
l?Ademe, les corps de contrôle compétents (contrôle général économique et
financier, conseil général de l?environnement et du développement durable),
l?éco-organisme Citeo, l?association des Maires de France, la Fédération des
emballages plastiques (ELIPSO), la Fédération nationale des activités de la
dépollution et de l?environnement (FNADE) et les associations Amorce,
Zero Waste France et l?UFC Que Choisir.
2 Cour des comptes, Les collectivités territoriales et la gestion des déchets ménagers et
assimilés, rapport public thématique, septembre 2011. Un rapport de suivi a été inséré
au Rapport public annuel 2014 de la Cour des comptes, intitulé « La gestion des déchets
ménagers : des progrès inégaux au regard des enjeux environnementaux ».
3 « Les éco-organismes : un dispositif original à consolider », insertion au Rapport public
annuel 2016 et « Les éco-organismes : une performance à confirmer, une régulation à
renforcer », chapitre de suivi, Rapport public annuel 2020.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-collectivites-locales-et-la-gestion-des-dechets-menagers
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PROCÉDURES ET MÉTHODES
7
Au niveau territorial, les contrôles ont porté sur la gouvernance, la
prévention, la collecte, la valorisation et le financement du service public de
gestion des déchets. Des échanges ont eu lieu avec les principaux acteurs
concernés au niveau territorial, dont les exécutifs locaux, les présidents et
directeurs des services et les responsables de centres de tri. Les contrôles
ont été réalisés en s?appuyant sur le guide de contrôle utilisé par tous les
rapporteurs.
Les juridictions financières ont utilisé les données collectées sur les
déchets ménagers et assimilés depuis dix ans par l?Ademe dans SINOE®-
déchets, outil d?analyse et de compilation des données locales qu?elles ont
rapprochées des données qu?elles avaient elles-mêmes collectées.
Les comparaisons internationales portent sur cinq États de l?Union
européenne : l?Allemagne, l?Autriche, la Belgique (Flandre), les Pays-Bas
et la Suède et ont été réalisées à partir des publications de l?Union
européenne, de documents nationaux, d?articles et d?entretiens avec la
Commission européenne et les administrations des pays cités.
En outre, la formation commune a pris l?initiative de recevoir en
audition le directeur général de la prévention des risques, le président de
l?Ademe ainsi que trois associations d?élus locaux intéressées
(Intercommunalités de France, France Urbaine et Régions de France).
?
Le projet de rapport a été préparé, puis délibéré le 12 mai 2022, par
la formation interjuridictions susvisée, présidée par Mme Podeur, présidente
de chambre, et composée de Mme Catherine Périn, conseillère maître, M.
Dominique Roguez, conseiller maître, président de la chambre régionale des
comptes Grand Est, Mme Cécile Daussin-Charpantier, conseillère
référendaire, présidente de la chambre régionale des comptes Centre-Val de
Loire, Mme Nathalie Gervais, conseillère référendaire, présidente de la
chambre régionale des comptes Corse, M. Alain Stéphan, président de
section à la chambre régionale des comptes Île-de-France, M. Pierre-Jean
Espi, président de section à la chambre régionale des comptes Pays de la
Loire, M. Jean-Marc Le Gall, président de section à la chambre régionale
des comptes Hauts-de-France, ainsi que, en tant que rapporteur général, M.
Hervé Boullanger, conseiller maître, en tant que rapporteur général adjoint,
M. Armand Thévot, premier conseiller, et en tant que rapporteur, M.
Vladimir Dolique, premier conseiller, assistés par Mme Rahima Chabane,
vérificatrice, et, en tant que contre-rapporteur, M. Jean-Yves Perrot,
conseiller maître.
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COUR DES COMPTES
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Le comité du rapport public et des programmes de la Cour des
comptes, composé de M. Pierre Moscovici, Premier président, M. Morin,
M. Andréani, Mme Podeur, MM. Charpy, Gautier et Bertucci, Mme Camby,
rapporteure générale du comité, présidents de chambre, MM. Meddah,
Martin, Advielle, Lejeune, Mmes Bergogne et Renet, présidents de chambre
régionale des comptes, et Mme Hirsch, Procureure générale, a été consulté
sur le projet de rapport le 5 juillet 2022. Le Premier président en a approuvé
la publication le 27 septembre 2022.
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des
comptes.
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https://www.ccomptes.fr/fr/documents/1106
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Synthèse
Les déchets ménagers et assimilés (DMA) sont produits à hauteur
de 80 % par les ménages et de 20 % par les petites entreprises et les
commerces, puis collectés en porte à porte ou en point d?apport volontaire
(PAV) et en déchèteries.
Plus de dix années se sont écoulées depuis le précédent rapport public
thématique des juridictions financières consacré aux politiques publiques de
prévention et de gestion de ces déchets, à l?échelon national comme à
l?échelon local.
Depuis ce rapport, le cadre législatif et réglementaire français a été
profondément remanié, en vue d?instaurer une économie dite « circulaire ».
Celle-ci considère les déchets comme des ressources réutilisables et
hiérarchise leurs modes de traitement dans l?ordre préférentiel suivant :
prévention, réemploi, réutilisation, recyclage, valorisation énergétique et
enfin élimination. Malgré cette refonte du droit applicable, plusieurs
besoins d?améliorations pointés par les juridictions financières en 2011, et
qui avaient fait l?objet de recommandations, restent à réaliser.
Le volume élevé des déchets produits
Le volume d?ordures ménagères produit par habitant en France (583
kg de DMA par habitant en 2019) tend à se stabiliser sur la dernière décennie
mais il reste à un niveau élevé. Dès lors, la France n?atteindra l?objectif de
baisse des DMA qu?elle s?est fixée à l?horizon 2030 (- 15 % par rapport à
2010) qu?au prix d?une accélération forte de la tendance actuelle.
L?Union européenne harmonise actuellement les données nationales
sur les déchets, car les divergences de définition entre États dégradent
artificiellement la position comparative de certains d?entre eux, dont la
France. Toutefois, même en tenant compte de ce biais, notre pays se situe,
au regard des principaux indicateurs (quantité de déchets produite, recyclage,
élimination), légèrement en deçà des performances de la moyenne
européenne et plus loin encore des pays les plus avancés, que sont
l?Allemagne, l?Autriche, les Pays-Bas et les pays scandinaves.
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COUR DES COMPTES
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En effet, la part non triée des déchets ménagers, soit 249 kg
d?ordures ménagères résiduelles (OMR) qui sont jetées en vrac dans le bac
tout venant représente encore 249 kg par an et par habitant. Or, 80 % des
OMR collectées en France, en particulier les déchets organiques et ceux
relevant d?une filière à responsabilité élargie des producteurs (REP),
pourraient faire l?objet d?une valorisation adaptée à leur nature si elles étaient
triées par les usagers et orientées vers leurs filières de traitement spécifiques.
Graphique n° 1 : diminution de la masse de déchets ménagers
et assimilés par habitant en France
Source : Cour des comptes
Des acteurs insuffisamment coordonnés
À partir des normes européennes, l?État fixe le cadre législatif et
réglementaire dans lequel figurent de nombreux objectifs chiffrés de
réduction et de traitement des déchets, assortis d?une échéance.
Ces orientations sont mises en oeuvre par le service public de gestion
des déchets (SPGD) exercé par les établissements publics de coopération
intercommunale (EPCI) qui n?assument, généralement en direct, que la
compétence « collecte ». Ils délèguent en effet la compétence «?traitement?», le
plus souvent, à des syndicats intercommunaux, parfois de niveau
départemental.
Pour assurer la déclinaison des objectifs législatifs nationaux au
niveau local et la continuité entre prévention, collecte et traitement, une
programmation efficace est donc nécessaire.
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SYNTHÈSE
11
Or, ni la programmation nationale, ni les plans régionaux, qui ont
vocation à coordonner les actions entreprises à l?échelle des territoires mais
qui demeurent insuffisamment précis et contraignants sur les
investissements, ni les programmes locaux de prévention des déchets
ménagers et assimilés (PLPDMA), qui peinent à se généraliser et à s?articuler
avec l?action des syndicats de traitement, ne s?avèrent à la hauteur des défis
à relever. C?est pourquoi les juridictions financières recommandent
d?améliorer la planification par l?unification de la programmation nationale
et l?adoption d?un programme de mise en oeuvre spécifique par EPCI.
Un dispositif de suivi toujours défaillant
Comme les juridictions financières l?avaient déjà souligné en 2011,
la prévention et la gestion des déchets nécessitent en premier lieu un recueil
et une présentation des données pertinentes afin d?orienter l?action
publique. Or, les indicateurs réglementaires actuels, à la fois trop nombreux
et publiés trop tardivement par l?Ademe à partir de données locales
incomplètes, ne parviennent pas à jouer ce rôle. Pour mobiliser citoyens,
collectivités territoriales et entreprises autour de priorités partagées, créer
une émulation entre territoires et accélérer la mise en oeuvre des objectifs
nationaux, les indicateurs devraient être recentrés sur des tableaux de bord
synthétiques regroupant les principales données utiles.
Ces tableaux de bord annuels devraient être produits par chaque
observatoire régional pour les EPCI de leurs territoires, à partir de comptes-
rendus annuels locaux simplifiés et par chaque éco-organisme. Consolidés
à l?échelon national, ils reprendraient un indicateur-clef pour chacun des
six principaux thèmes (prévention, production, financement incitatif,
collecte, valorisation, élimination) présentés sous la forme d?un graphique
comparant la trajectoire visée et la trajectoire réelle constatée. Ces
graphiques ont été réalisés pour partie par les juridictions financières dans
ce rapport et repris pour deux d?entre eux dans la présente synthèse, afin
d?en démontrer la faisabilité.
Un financement peu lisible et trop faiblement incitatif
Les DMA représentent 12 % de l?ensemble des déchets produits en
France, mais mobilisent 61,5 % du total des dépenses correspondantes, qui
s?élèvent à 15,9 Md¤4. De plus, ces dépenses augmentent de manière
continue (+ 4,3 % par an au cours des 20 dernières années).
4 En 2016, dernières données disponibles. Ademe. Déchets chiffres-clés 2020
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/28-dechets-chiffres-cles-edition-2020-9791029712135.html
COUR DES COMPTES
12
Elles sont financées par la fiscalité ou la tarification locale (81,5 %),
par les filières à responsabilité élargie des producteurs (10 %) et, plus
marginalement, par la vente des produits du traitement et par des
subventions de l?État (Ademe).
La France compte une vingtaine de filières à responsabilité élargie
des producteurs (REP)5, plus nombreuses que dans les autres pays de
l?Union Européenne et dont plus de la moitié concerne des produits du
quotidien. De nouvelles filières se mettent en place comme celles des
lingettes, des jouets ou des produits du secteur du bâtiment, du bricolage,
du jardin ainsi que des sports et loisirs.
Comme les juridictions financières l?avaient déjà indiqué en 2011,
la part financée par l?usager est insuffisamment incitative. La taxe
d?enlèvement des ordures ménagères (TEOM) fondée sur la valeur locative
immobilière, et non sur la quantité de déchets produits, reste en effet
largement majoritaire et ne décroit que lentement.
La tarification incitative (taxe ou redevance d?enlèvement des
ordures ménagères), qui devait concerner 15 millions d?habitants en 2020
selon le code de l?environnement (art. L. 541-1), n?atteint aujourd?hui que
6 millions de personnes.
Graphique n° 2 : population bénéficiant de la tarification incitative
Source : Cour des comptes
5 Cf. « Les éco-organismes : une performance à confirmer, une régulation à renforcer ».
Cour des comptes, Rapport public annuel 2020.
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SYNTHÈSE
13
Les collectivités chargées de mettre en oeuvre la tarification incitative
lui reprochent d?être à la fois complexe, coûteuse dans sa gestion et aléatoire
dans son produit. La TEOM, à l?inverse, apparaît plus facile à recouvrer et
mieux garantir la ressource. La tarification ou fiscalité incitative a pourtant
montré son efficacité dans la réduction des tonnages collectés et des coûts de
gestion, en France comme à l?étranger. Une nouvelle étape est donc
aujourd?hui nécessaire pour encourager les EPCI à l?adopter.
Le financement du service public doit aussi être adapté aux spécificités
territoriales. Ainsi, les surcouts causés par la fréquentation touristique doivent
être mieux pris en compte pour permettre un financement équilibré entre les
usagers du service public habitants et touristes.
La prévention, priorité officielle mais parent pauvre
de la gestion des déchets
Affichée dans la loi comme la priorité, la prévention reste marginale
dans les actions des deux principaux acteurs chargés de la prise en charge
des déchets : les éco-organismes et les collectivités territoriales.
Concernées au premier chef puisqu?elles mettent sur le marché des
produits qui deviendront déchets, les entreprises ne sauraient s?exonérer de
cette responsabilité par leur seule contribution financière auprès des éco-
organismes. Elles doivent aussi réduire les matières mises sur le marché,
notamment par une meilleure écoconception de leurs produits, une réduction
du volume et de l?impact des emballages, et, parallèlement, par une capacité
à mieux réparer les produits.
Les collectivités territoriales, de leur côté, ne consacrent qu?environ
1 % du coût total du service public de gestion des déchets (SPGD) à la
prévention, et ce ratio évolue peu depuis 2015. Leurs actions sont souvent
limitées à une sensibilisation des citoyens en faveur des gestes de tri, qui
touche une population réduite et dont les résultats ne sont pas quantifiés.
Ces actions de communication sont cependant essentielles pour que le
citoyen devienne un consommateur et un trieur averti. Comme le montrent
certains exemples français (Besançon) ou étrangers (Belgique et Autriche),
l?éventail d?actions de prévention locales plus opérationnelles et
ambitieuses peut être élargi avec, notamment, des formes concrètes d?éco-
exemplarité comme la lutte contre le gaspillage alimentaire et
l?encouragement des réparations et réemplois autour des déchèteries.
Pour encourager les éco-organismes et les collectivités territoriales
à s?engager davantage dans cette direction, leur effort financier en faveur
de la prévention, mesuré par un indicateur-clef de leurs tableaux de bord
annuels, devrait s?appuyer sur une liste précise d?actions considérées
comme relevant de la prévention.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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COUR DES COMPTES
14
La collecte : peu de progrès sur les enjeux prioritaires
Une organisation de la collecte qui assure une politique réussie de
réduction des déchets doit être adaptée à chaque territoire. Elle doit prendre
en compte les besoins (notamment la fréquence de collecte), la densité de
population et les autres particularités locales (rural/urbain dense, habitat
collectif/habitat individuel, logement social). Elle doit aussi rechercher un
équilibre optimal entre le coût et la qualité du service proposé.
La séparation des biodéchets (qui représentent encore un tiers des
OMR), prévue par le code de l?environnement au plus tard au 31 décembre
2023, constitue un enjeu majeur pour limiter leurs coûts de traitement et
utiliser leur capacité de valorisation. Pour les territoires fortement
urbanisés avec une prédominance d?habitat collectif, la collecte séparée,
malgré ses difficultés de mise en place et son coût, et le compostage partagé
sont généralement considérés à ce stade comme des solutions pertinentes.
Réduire la fréquence des collectes d?OMR par ajout d?une collecte
spécifique de biodéchets est expérimentée avec succès dans plusieurs
territoires, comme par exemple en zone mixte, rurale et urbaine dans le
Puy-de-Dôme ou en zone densément peuplée pour la ville de Milan. Les
difficultés techniques, financières et sociales pour parvenir à un meilleur
tri et à une valorisation des biodéchets devront être levées au cas par cas,
en fonction des spécificités locales, aucune solution n?apparaissant
uniformément applicable, ce qui explique que le législateur n?ait pas à ce
jour préconisé une solution unique pour tous les territoires.
Pour les déchets relevant de la responsabilité élargie des producteurs
(REP) d?emballages, les EPCI restent chargés de la commercialisation des
matières préparées pour être recyclées, sans toujours disposer des moyens
techniques et humains pour l?optimiser.
Les matières revendues aux filières de recyclage se diversifient,
augmentent en tonnage et subissent de fortes variations de cours. Les
collectivités volontaires pourraient choisir de confier cette mission
commerciale aux éco-organismes, sous la condition d?un suivi plus
rigoureux des obligations qui leur sont fixées dans les cahiers des charges.
Le traitement : une coûteuse modernisation à entreprendre
L?augmentation continue de la dépense consacrée au traitement
(40 % de la dépense totale du service public) va se poursuivre avec les
investissements de modernisation, de mise aux normes et de recherche
d?une taille critique des équipements.
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SYNTHÈSE
15
Pour y faire face, les syndicats de traitement sont incités à se
regrouper à une échelle départementale, voire supra-départementale. La
conclusion de partenariats à l?échelle de bassins géographiques très vastes,
entre des acteurs aux profils et intérêts potentiellement divergents, n?est
toutefois pas aisée. De plus, les syndicats de traitement ne disposent pas
toujours des capacités financières et techniques pour assurer la nécessaire
modernisation de leurs installations.
Dans ce contexte, les régions doivent jouer pleinement leur rôle de
planificateur, d?animateur voire de financeur, afin de garantir la mise en
oeuvre effective des objectifs arrêtés dans leurs plans. Cette implication
régionale est nécessaire pour surmonter les difficultés d?amortissement et
de bon dimensionnement des installations et pour assurer une répartition
territoriale cohérente des équipements structurants.
Un chemin significatif reste à parcourir pour rejoindre les pays les
plus avancés, comme l?Allemagne, l?Autriche, les Pays-Bas et les pays
scandinaves et atteindre les objectifs actuels de valorisation matière que
nous nous sommes fixés (55 % en 2020 et 65 % en 2025, soit 21 points de
plus que les dernières données disponibles).
Graphique n° 3 : pourcentage des déchets municipaux recyclés
dans la production totale de déchets municipaux (2018)
Source : Cour des comptes d?après Eurostat. Note : données indisponibles pour Irlande, Grèce et Chypre.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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COUR DES COMPTES
16
Si la France souhaite atteindre ses objectifs en matière de recyclage
des déchets, elle doit mieux mobiliser tous les leviers à sa disposition, au
plan national et au plan local.
Pour donner leur plein effet aux mesures d?élargissement du tri à la
source (plastiques et bio déchets) et répondre à l?augmentation continue
des flux collectés en déchèteries, des efforts d?adaptation très importants
doivent être poursuivis tant sur les équipements de tri que sur les
installations de valorisation de la matière organique (plateformes de
compostage, unités de méthanisation).
Davantage doit être fait, par ailleurs, pour limiter drastiquement les
déchets plastiques. Compte tenu de leurs fortes externalités négatives sur
l?environnement et de la diversité de leur forme, ces derniers posent des
difficultés de traitement particulières. La généralisation de la collecte en
poubelle jaune de tous les déchets plastiques prévue pour la fin 2022
(extension des consignes de tri ou ECT) n?était réalisée qu?à 62% fin 2021.
Pour réduire l?impact environnemental de ce type de déchets, de
nombreux programmes dotés de financements importants (plan de relance
puis plan France 2030, stratégie 3R) sont déployés par l?État depuis 2021
afin de renforcer la filière française de recyclage. En vue d?une meilleure
cohérence de toutes ces actions, le plan national devrait comporter une
partie consacrée aux enjeux industriels prioritaires, particulièrement la
plasturgie et la valorisation énergétique. Parallèlement, l?interdiction de
l?enfouissement et de l?incinération des déchets ayant fait l'objet d'une
collecte séparée a été instaurée en 2020. Elle s?applique désormais aux
emballages plastiques, collectés séparément depuis janvier 2022. Cette
stratégie d?élimination de la mise en décharge, couplée avec l?application
d?une taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) fortement
désincitative, devrait permettre d?améliorer notoirement les performances
du recyclage en France, comme chez nos voisins (Pays-Bas, Autriche,
Belgique, Allemagne) qui ont adopté ce type de mesure depuis les années
1990.
Tant que la prévention et les modes de valorisation prioritaires n?auront
pas abouti à une réduction drastique des ordures ménagères résiduelles, la
valorisation énergétique des déchets non recyclés, grâce à la modernisation des
installations, constitue l?alternative la plus crédible à l?enfouissement. Celui-ci
recule mais occupe encore une trop grande place (21 % du traitement des
déchets) au regard des objectifs du code de l?environnement à l?horizon 2030
et, a fortiori, en comparaison des pays européens les plus performants en
termes de recyclage.
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Récapitulatif des recommandations
Les progrès nécessaires s?articulent autour de deux orientations et
de neuf recommandations.
Orientation 1 : améliorer la lisibilité et la transparence des résultats
1. Unifier, au plus tard en 2024, les documents de programmation
nationale de la prévention et de la gestion des déchets, en y renforçant
le volet industriel de la plasturgie et de la valorisation énergétique
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
2. Rendre obligatoire, au plus tard en 2024, lorsque le programme local
de prévention des déchets ménagers est élaboré par le syndicat de
traitement, l?adoption d?un programme de mise en oeuvre spécifique
par établissement public de coopération intercommunale (ministère de
la transition écologique et de la cohésion des territoires, EPCI).
3. Publier, au plus tard en 2024, un tableau de bord annuel du Service
public de gestion des déchets, à l?échelle nationale et par type
d?établissement public de coopération intercommunale, des six
indicateurs-clefs, incluant la prévention et le poids des ordures
ménagères résiduelles, assortis d?une représentation graphique des
trajectoires constatées par rapport aux trajectoires cibles (ministère de
la transition écologique et de la cohésion des territoires, EPCI,
régions).
4. Publier, au plus tard en 2024, un tableau de bord annuel, pour
l?ensemble des filières de Responsabilité élargie du producteur et, pour
chacune d?elles, des six indicateurs-clefs, incluant la prévention,
assortis d?une représentation graphique des trajectoires constatées par
rapport aux trajectoires cibles (ministère de la transition écologique et
de la cohésion des territoires, éco-organismes).
5. Harmoniser, au plus tard en 2024, dans un seul compte-rendu le bilan
annuel, par intercommunalité, des actions de prévention et de gestion
des déchets ménagers autour des six indicateurs-clefs et du coût du
service par habitant (ministère de la transition écologique et de la
cohésion des territoires, EPCI).
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18
Orientation 2 : renforcer les incitations inspirées de l?économie circulaire
6. Favoriser la mise en place de la tarification incitative en allégeant son
coût pour l?intercommunalité grâce à un financement complémentaire
porté à 80 % des coûts correspondants sur les premiers exercices
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique).
7. Instaurer une surtaxe à la taxe de séjour dont le produit serait affecté
aux actions relatives à la prévention et à la gestion des déchets
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique).
8. Fixer dans la réglementation la liste des actions financées par les
intercommunalités et les éco organismes pouvant être considérées
comme dépenses de prévention (ministère de la transition écologique
et de la cohésion des territoires).
9. Autoriser les collectivités territoriales volontaires à confier aux éco-
organismes chargés des emballages la vente des produits issus du tri
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
EPCI).
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Introduction
Jusqu?au XIXe siècle, les déchets ménagers (« boues »)
constituaient un bien commun en tant qu?engrais. Puis, pendant la période
hygiéniste6 (1850-1970), leur élimination dans des conditions de sécurité
sanitaire et environnementale satisfaisantes a représenté la raison d?être des
services de gestion des déchets. Au tournant des années 1970, cette mission
s?est élargie à des enjeux économiques et environnementaux.
Plus récemment, la crise sanitaire (cf. annexe n°10) a rappelé que la
gestion des déchets et, en particulier, le service public de gestion des
déchets (SPGD) constitue un service essentiel, assuré par les collectivités
territoriales les plus proches des usagers, à savoir les communes ou leurs
groupements7.
Les déchets ménagers et assimilés (DMA) correspondent pour
l?essentiel aux déchets dits « municipaux » dans la terminologie européenne
et internationale8. On distingue, d?une part, les déchets qui doivent faire
l?objet d?un tri à la source (comme les biodéchets, au plus tard le 31 décembre
20239) ou d?une collecte sélective (notamment les résidus secs des ordures
ménagères, RSOM, en papier, verre, métal et plastique10) parmi lesquels
avant 2022 les plastiques (films d?emballage)11 qui demeurent encore exclus
de la collecte sélective et, d?autre part, les ordures ménagères résiduelles
(OMR), c?est-à-dire les déchets jetés en vrac dans les sacs poubelles.
6 L'hygiénisme est un courant de pensée apparu au milieu du XIXe siècle, lié en partie
aux travaux de Pasteur et qui considère notamment les déchets comme « un domaine
de la vie urbaine à gérer, maîtriser, contrôler » (cf. les décrets de 1883 et 1884 du préfet
Poubelle). Voir Baptiste Monsaingeon. Homo Detritus, Seuil, 2017.
7 Articles L. 2224-13 à L. 2224-17-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).
8 Les « déchets municipaux » au sens d?Eurostat n?incluent pas les déblais et gravats
intégrés dans la notion française des « déchets ménagers et assimilés », soit une
différence annuelle de 3,5 millions de tonnes.
9 Article L. 541-21-1 du code de l?environnement
10 Article L. 2224-16 du CGCT
11 Article L. 541-1, I 5° du code de l?environnement
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006070633/LEGISCTA000006164563/#LEGISCTA000006164563
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20
Schéma n° 1 : périmètre des déchets ménagers et assimilés
Source : Ademe chiffres clés 2019 (parution en juin 2021).
Les enjeux financiers sont majeurs. La très grande variété de matières
et d?objets qui composent les 39 millions de tonnes de DMA produits en
France12, soit 12 % de l?ensemble des déchets13, rend leur collecte et leur
traitement à la fois plus complexes et plus coûteux que ceux des autres
déchets14 qui représentent pourtant un volume plus significatif. Les dépenses
annuelles de gestion des DMA s?élèvent en effet à 10,9 Md¤, soit 61,5 % des
dépenses totales de gestion des déchets, estimées à 17,7 Md¤15.
Il est, dès lors, apparu utile aux juridictions financières, dix ans après
leur précédent rapport thématique16, de réexaminer la pertinence et
l?efficience de la politique de prévention et de gestion des déchets ménagers
et assimilés. Ce travail s?est appuyé sur une analyse nationale et
internationale par la Cour des comptes et sur 51 contrôles menés par les
chambres régionales des comptes et portant sur 23 syndicats mixtes,
3 métropoles (Lyon, Nice, Aix-Marseille), un syndicat intercommunal à
12 Données 2019, qui sont les plus récentes.
13 La production nationale de déchets en 2017 représente 326 Mt qui se décomposent
comme suit : DMA : 39 Mt, Collectivités : 4 Mt, Déchets des activités économiques
(DAE) : 59 Mt, Déchets de construction : 224 Mt.
14 Déchets des activités économiques (DAE) et des déchets du bâtiment et des travaux
publics (BTP)
15 Ademe, Déchets chiffres clés ? Edition 2020, p. 68.
16 Cour des comptes, Les collectivités territoriales et la gestion des déchets ménagers et
assimilés, rapport public thématique, septembre 2011. Un suivi en a été réalisé au Rapport
public annuel 2014 : « La gestion des déchets ménagers : des progrès inégaux au regard des
enjeux environnementaux ».
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-collectivites-locales-et-la-gestion-des-dechets-menagers
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https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/2_2_gestion_dechets_menagers_tome_II.pdf
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INTRODUCTION
21
vocation unique, une société par actions simplifiée, Paris et 22 communautés
de communes, d?agglomération et urbaines.
Le rapport de 2011 relevait des insuffisances comme autant de
points à améliorer (cf. annexe n° 2) qui, dix ans après restent d?actualité :
- la périodicité et la qualité insuffisantes des mécanismes de suivi
statistique, d?évaluation et de traitement des données ;
- une planification élaborée par les collectivités territoriales qui ne
constitue pas un levier efficace pour résorber les carences en
équipements et oblige encore à transporter les déchets parfois très loin
de leur lieu d?origine, avec un coût financier et environnemental élevé ;
- un financement complexe et inadapté, car non incitatif, alors même
que l?évolution des dépenses n?est pas maîtrisée ;
- des retards en matière de recyclage par rapport à nos voisins européens.
Afin de réduire à la fois le volume global des déchets ménagers
produits et leur part non triée et non valorisée, les États membres de
l?Union européenne ont fait évoluer en profondeur leurs législations
communes et nationales depuis dix ans. Le cadre législatif et réglementaire
français est constitué pour une large part de la transposition d?un droit de
l?Union européenne récent17 à travers six lois adoptées depuis 2010 qui ont
largement refondu les articles du code l?environnement et du code de la
consommation relatifs à cette politique18. Cette évolution législative vise à
limiter la part du modèle économique dit « linéaire » (extraire, fabriquer,
utiliser et jeter) au profit de l?économie dite « circulaire »19. Dans ce
modèle, afin de réduire la pression sur les ressources naturelles, les déchets
doivent, autant qu?il est possible et s?ils ne sont évités, constituer à nouveau
des ressources susceptibles d?être réutilisées ou recyclées dans un nouveau
cycle productif. Ce modèle hiérarchise donc les modes de traitement des
déchets avec, par ordre de priorité, la prévention, dont le réemploi et la
réutilisation, le recyclage, toute autre valorisation, notamment énergétique,
et, en dernier ressort, l?élimination par incinération et enfouissement.
17 Paquet « économie circulaire » de 2018, directive relative à la réduction du plastique
à usage unique de 2019, plan pour l?économie circulaire de 2020.
18 Grenelle II en 2010, LTECV en 2015, EGALIM en 2016, loi AGEC du 10 février
2020, ordonnance n°2020-920 du 29 juillet 2020 et loi du 22 août 2021 portant lutte
contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
19 Selon la définition de l?Ademe : système économique d?échange et de production qui,
à tous les stades du cycle de vie des produits (biens et services), vise à augmenter
l?efficacité de l?utilisation des ressources et à diminuer l?impact sur l?environnement
tout en permettant le bien-être des individus.
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22
Depuis 2015, cette dynamique a aussi trouvé un écho dans l?Agenda 2030
des Nations-Unies et dans les objectifs de développement durable20.
Schéma n° 2 : hiérarchie des modes de traitement
et économie circulaire
Source : Cour des comptes
Cette ambition de refondation tarde cependant à être suivie d?effets
en France, en raison de l?insuffisance, d?une part, de la transposition des
objectifs nationaux et internationaux au niveau local et, d?autre part, des
efforts de prévention et de recyclage des déchets ménagers.
Le présent rapport, examinera dans un premier chapitre les
faiblesses persistantes, depuis 2011, du pilotage du service public
(coordination, suivi statistique et financement) et, dans le deuxième
chapitre, les volets opérationnels de la prévention, de la collecte et du
traitement qu?il est indispensable de renforcer pour tendre vers une
économie véritablement circulaire.
?
20 ODD n°12 (consommation et production responsables) et ODD n°11 (villes et
communautés durables dont gestion municipale des déchets). Cf. annexe sur les
indicateurs internationaux.
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Une réduction des déchets contrariée
par un pilotage insuffisant
Le volume des déchets ménagers reste à un niveau élevé en France.
Réduire ce gisement nécessite à la fois un cadrage efficace de la politique,
un suivi chiffré précis de sa réalisation et un financement incitatif. Dans
leur rapport de 2011, les juridictions financières avaient déjà attiré
l?attention sur ces priorités (cf. annexe n°2), avec des résultats qui restent
aujourd?hui très inégaux ou partiels.
I - Le volume élevé de déchets produits
A - Le volume total des déchets ménagers
Le volume de DMA en France tend à se stabiliser sur la dernière
décennie. La production annuelle de déchets, qui avait diminué, entre 2009
et 2015, de 588 à 568 kg par habitant lorsque la consommation des
ménages stagnait21, est repartie à la hausse avec une certaine reprise de
l?économie. Les dernières données disponibles concernent l?année 2019
(582 kg par habitant)22 et traduisent une faible diminution du volume entre
21 Insee Consommation des ménages
22 Source : SINOE déchets, base de données sur la gestion des DMA, juin 2021
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https://www.insee.fr/fr/statistiques/5413924
https://www.sinoe.org/
COUR DES COMPTES
24
2010 et 2019, de - 0,9 % seulement. Au regard de cette situation, l?objectif
de - 10 % en 2020 par rapport à 201023 est loin d?être atteint24.
Graphique n° 4 : production de déchets ménagers par habitant
en France depuis 2009 (en kilos)
Source : Cour des comptes, d?après données SINOE.
Note : Production : en trait plein les volumes constatés et en pointillé les projections.
Objectifs : partir des chiffres 2009 et des pourcentages de réduction prévus dans la loi.
L?indicateur européen de « production des déchets municipaux »,
distinct de la production des DMA8, permet une comparaison entre États
membres et fait apparaître que la production de déchets en France reste
supérieure à la moyenne européenne.
23 Art. L. 541-1 1° du code l?environnement issu de la loi n°2015-992 du 17 août 2015
relative à la transition énergétique pour une croissance verte (LTECV)
24 Les dernières données disponibles à la date de rédaction concernent l?année 2019
pour les chiffres nationaux et l?année 2018 avec des données provisoires pour les
chiffres Eurostat.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
25
Graphique n° 5 : production de déchets municipaux
par habitant en Europe
Source : Cour des comptes, d?après données Eurostat 2018
Pour l?avenir, comme le montre le graphique ci-dessous, l?hypothèse d?une
poursuite de la trajectoire de baisse actuelle rendrait le nouvel objectif ?
réduire de 15 % la production en 2030 par rapport à 201025 ? inatteignable.
Graphique n° 6 : (indicateur clef n° 3) la diminution de la masse
de déchets ménagers et assimilés par habitant en France
Source : Cour des comptes
25 Loi relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire dite loi AGEC de février 2020
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26
Réduire les DMA implique donc d?agir à la fois sur la prévention
des déchets et sur le poids des ordures ménagères résiduelles.
B - Les ordures ménagères résiduelles
Au sein des DMA, les 249 kg d?ordures ménagères résiduelles
(OMR) en 2019, mises en vrac dans les sacs poubelle, restent le principal
flux collecté par le service public, en diminution de - 2,2 % entre 2017 et
2019 selon l?Ademe (- 380 000 tonnes). Or, l?examen du contenu de ces
OMR montre qu?elles sont constituées à près de 80 % de déchets qui
pourraient faire l?objet d?une valorisation s?ils étaient triés par les usagers
et orientés vers des filières de traitement26. Tel est le cas d?un tiers de ces
OMR, constitué de biodéchets relevant du service public de gestion des
déchets et des 40 % d?entre elles relevant d?une filière à responsabilité
élargie du producteur (REP).
Graphique n° 7 : le contenu des ordures ménagères résiduelles
Source : ADEME. Enquête Modecom, 2021.
Aujourd?hui, comme indiqué dans le graphique ci-dessous, ces 70 %
d?ordures ménagères résiduelles « triables » et valorisables sont pour
l?essentiel incinérées ou mises en décharge (stockage).
26 Enquête périodique MODECOM (MODE de Caractérisation des Ordures
Ménagères) établies par l?Ademe sur la base de caractérisations et d?un échantillonnage.
Cette méthode permet de déterminer la composition des déchets produits par les
habitants d?une aire géographique définie.
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https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/4350-modecom-2017.html
UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
27
Graphique n° 8 : principaux modes de traitement
des ordures ménagères résiduelles
Source : ADEME référentiel national des coûts du SPGD (2016) ;
note : la catégorie « Autres » comprend le tri en vue du recyclage, le
traitement mécano biologique (TMB), etc.
II - Des acteurs insuffisamment coordonnés
En 2011, les responsabilités étaient organisées autour des rôles
d?orientation confiés à l?État, de planification aux départements et de collecte
et de traitement aux communes et établissements de coopération
intercommunale (EPCI). La période récente est marquée, comme signalé
précédemment, par l?intervention croissante du cadre européen et par celle des
régions. Par ailleurs, des organisations complexes se sont mises en place au
niveau local afin de concilier une plus grande optimisation des coûts et le
respect de la responsabilité principale, confiée aux groupements de communes.
Pour permettre à ces différents niveaux territoriaux de s?articuler,
chaque État européen est libre de concevoir un ou plusieurs plans pour
programmer ses actions de gestion et de prévention des déchets, sous
réserve qu?ils couvrent l?ensemble du territoire et comportent les rubriques
et les objectifs chiffrés énoncés par la directive 2008/9827. La
programmation française prend la forme d?une planification en cascade qui
part des plans nationaux et se déclinent en plans régionaux, eux-mêmes mis
en oeuvre par des plans conçus à l?échelle des intercommunalités.
27 Art. 28 et 29 de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19
novembre 2008 relative aux déchets. Art. L. 541-11 du code de l?environnement.
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/L?article%20L.%20541-11%20du%20code%20de%20l?environnement
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28
A - L?organisation des responsabilités : cadrage
par l?État et mise en oeuvre par les intercommunalités
1 - Le rôle de l?État
En matière de déchets, l'État fixe la politique et le cadre légal, à la
fois en participant à l?adoption des directives européennes, et en adoptant
les dispositions législatives et réglementaires reprises principalement dans
le code l?environnement. Celles-ci édictent des obligations, normes et
interdictions et prévoient les modes de financement de ce service public. À
côté de ces dispositions impératives, figurent dans la réglementation des
indicateurs de suivi de la politique des déchets.
Les indicateurs de suivi de la politique des déchets
La prévention et la gestion des déchets ménagers et assimilés se
caractérise par la fixation d?objectifs chiffrés assortis d?une date limite de
réalisation. Pour le service public des déchets, ces objectifs sont fixés dans
la loi, le plus souvent par transposition du droit européen (p. ex. assurer en
2025 la valorisation énergétique d?au moins 70 % des déchets qui auront
fait l?objet d?une collecte séparée ou d?un tri et ne pouvant faire l?objet
d?une valorisation matière28). Les documents nationaux de programmation
et les traités internationaux (p. ex. Agenda 2030) reprennent ces objectifs
ou en ajoutent de nouveaux.
Pour les filières économiques, les objectifs sont fixés dans des
cahiers des charges repris par arrêté interministériel (p. ex. atteindre un taux
de recyclage de 75 % des emballages à domicile d?ici 202229 et de 70 % en
poids de tous les déchets d?emballage d?ici 203030).
L?État assure la concertation avec les parties prenantes (conseil
national des déchets) et délègue à l?Ademe les recherches et études et les
interventions (Fonds économie circulaire). Il élabore et fait appliquer la
réglementation des installations classées pour la protection de
l?environnement (ICPE) intervenant sur les déchets (sites de transport, de
traitement, de valorisation énergétique et d?enfouissement). Dès lors que
cette réglementation est respectée (respect de la quantité maximale
28 Art. 9° du I. de L. 541-1 du code de l?environnement
29 Dont leurs détenteurs se défont au domicile des ménages comme en dehors des foyers.
30 Arrêté du 29 novembre 2016 relatif à la procédure d?agrément portant cahier des
charges des éco-organismes de la filière emballages ménagers, modifié par l?arrêté du
13 avril 2017 et les arrêtés du 4 janvier 2019.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
29
d?entrants autorisés, valeurs limites d?émissions de polluants, etc.), les
préfets de région, après avis du conseil régional, délivrent les autorisations
permettant d'exploiter les installations. L?État intervient en droit et non en
opportunité. À ce titre, il ne dispose pas du pouvoir d?empêcher la création
ou la poursuite d?exploitation d?un site inadapté aux besoins du territoire.
2 - Le service public de gestion des déchets
La mission opérationnelle ? le service public de gestion des déchets
(SPGD) ? s?exerce désormais à l?échelon intercommunal, sur l?ensemble
du territoire français. Les établissements publics de coopération
intercommunale (EPCI) à fiscalité propre31 se sont en effet vu confier cette
compétence par la loi. En matière de collecte, ils l?exercent le plus souvent
directement, tandis qu?ils délèguent la compétence « traitement » à un
syndicat32, parfois de niveau départemental ou même couvrant des
territoires sur plusieurs départements33. Les importants changements
intervenus dans les périmètres intercommunaux à la suite des fusions
impulsées par l?État complexifient encore la situation, avec des
appartenances fréquentes à plusieurs syndicats pour un même EPCI,
comme en Moselle34. Lorsque les intercommunalités de collecte et celles
de traitement exercent leur action sur des territoires différents, la recherche
d?économies d?échelle est rendue plus difficile, y compris dans les grandes
métropoles, à l?exemple d?Aix-Marseille35.
Des schémas d?organisation avec double transfert (compétence
traitement confiée à un syndicat mixte qui, lui-même, la transfère à un autre
syndicat chargé d?une unité de traitement) ont aussi été relevés par les
juridictions financières36.
Le comité syndical est composé de représentants des adhérents, sur
une base démographique et selon les règles propres à chaque syndicat. Parmi
31 Métropoles et communautés urbaines, communautés d?agglomération et les
communautés de communes ; art. L5214-16 et L. 2224-13 à L. 2224-17-1 du CGCT.
32 Cette séparation de l?exercice de la compétence est une spécificité française (rapport
de l?Ademe sur le « benchmark tarification incitative 2018 »).
33 Les articles L. 5211-61 alinéas 1 et 2 et L. 2224-13 et L. 5711-1 du CGCT autorisent
ce transfert, via une habilitation statutaire et une convention en fixant les modalités. Le
transfert peut concerner tout ou partie du territoire et soit la collecte et le traitement de
façon conjointe, soit seulement le traitement.
34 CRC Grand Est Syndicat mixte de transport et de traitement des déchets de Lorraine
Nord (Sydelon), décembre 2021.
35 CRC Provence-Alpes-Côte d?Azur, métropole d?Aix-Marseille, octobre 2021.
36 CRC Occitanie, SICTOM Pézenas-Agde, février 2021.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006070633/LEGISCTA000006164563/#LEGISCTA000006164563
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-transport-et-de-traitement-des-dechets-menagers-de-lorraine-nord
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-transport-et-de-traitement-des-dechets-menagers-de-lorraine-nord
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-aix-marseille-provence-mamp-marseille-bouches-du-rhone-gestion-et-prevention
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-sictom-1
COUR DES COMPTES
30
ses délégués, le comité syndical élit un président et des vice-présidents qui
composent le bureau, organe exécutif du syndicat. Cette nécessité d?assurer
la représentation de toutes les parties prenantes au sein du comité syndical
aboutit à un nombre élevé de délégués (à l?image des 115 délégués au comité
syndical du département de la Haute-Marne37), ce qui peut limiter les débats
lors du vote du budget, de la fixation des contributions financières et des
choix d?investissements, et entraîner une faible participation aux réunions
comme dans l?Ain38. Le traitement de certaines questions (p. ex. mutualisation
de l?achat public) est renvoyé à une comitologie complexe, indépendante des
assemblées délibérantes à l?exemple du Tarn39.
Les opérations de transport, transit et regroupement des déchets,
peuvent être associées tantôt aux activités de collecte, tantôt à celles de
traitement. Pour l?ensemble de la chaine des compétences, le service est assuré
soit en régie directe, soit par recours à un prestataire (marché de prestations et
de délégation de services), ou sous forme d?un groupement d?intérêt
économique (GIE) ou d?une délégation à un autre établissement public.
L?analyse de l?équilibre économique et du suivi par les
intercommunalités de ces contrats, qui concernent prioritairement les
investissements les plus lourds, a vocation à être traitée ultérieurement par
les juridictions financières.
37 CRC Grand-Est, Syndicat départemental d?énergie et des déchets de la Haute-Marne,
décembre 2021.
38 CRC Auvergne-Rhône-Alpes Syndicat mixte d?élimination, de traitement et de
valorisation des déchets Beaujolais-Dombes (Sytraival), octobre 2021.
39 CRC Occitanie - Syndicat mixte départemental TRIFYL- septembre 2021
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-departemental-denergie-et-des-dechets-de-la-haute-marne-sded-52
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-delimination-de-traitement-et-de-valorisation-des-dechets-beaujolais
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-delimination-de-traitement-et-de-valorisation-des-dechets-beaujolais
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
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Schéma n° 3 : les flux des déchets ménagers en France pris en charge
par le service public de gestion des déchets
Source : Cour des comptes
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32
Comme ce schéma le montre, les opérations qui interviennent dans
le circuit de collecte, de traitement et d?élimination des DMA sont
nombreuses. La volonté de combiner la responsabilité première des EPCI
dans la mise en oeuvre de cette chaîne d?opérations, les économies d?échelle
dans le traitement et l?intervention des acteurs de la valorisation (depuis les
usagers jusqu?aux industries de la fabrication ou de l?énergie) rend
inévitable la complexité de ce circuit.
L?enquête menée ne permet pas de conclure que ce schéma doive
être remis en cause, par exemple par un déplacement de la collecte au
niveau départemental. La nécessaire adaptation aux spécificités de chaque
territoire invite plutôt au maintien de cette organisation. La contrepartie de
cette stabilité organisationnelle, en dépit de sa complexité, est une exigence
plus forte en matière de programmation.
B - Une programmation qui ne parvient pas à garantir
la coordination des différents niveaux territoriaux
1 - Une planification nationale à recentrer sur la prévention
Trois documents nationaux déclinent actuellement le cadre prévu
par la directive.
Le plan national de prévention des déchets (PNPD) est prévu par le
code de l?environnement40 pour « atteindre les objectifs nationaux et les
orientations des politiques de prévention des déchets »41. Celui
actuellement en vigueur (2014-2020), couvre les trois grandes catégories
de déchets (DMA, déchets des activités économiques et du BTP) et liste 54
actions confiées aux différents acteurs publics, économiques et ONG. Le
prochain plan (2022-2027) est en préparation.
Le plan national de gestion des déchets (PNGD), publié en octobre
2019, a constitué la réponse transitoire des autorités françaises à la
directive-cadre sur les déchets de 200842. La couverture de l'ensemble du
territoire géographique national (métropole et outre-mer) par des plans
régionaux de gestion des déchets (cf. annexe n° 3) n?étant pas encore
complète, le plan national présente les orientations et objectifs nationaux
40 Art. L. 541-11 du code de l?environnement
41 Objectifs visés à l?art. L.541-1 du code de l?environnement et inscrits dans la feuille de
route économie circulaire de 2018, la loi anti gaspillage et la loi portant lutte contre le
dérèglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses effets, du 22 août 2022.
42 Article 28 de la directive 2008/98/CE.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176142/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043974936/
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:32008L0098
UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
33
selon huit axes au sein desquels sont déclinés des objectifs, les mesures
associées, des indicateurs et des fiches régionales.
La Feuille de route économie circulaire (FREC), établie en 2018,
comporte 50 mesures, dont la moitié est détaillée dans un mode d?emploi
de mise en oeuvre. La FREC est un document de nature politique (exposé
d?actions générales de mobilisation) alors que le PNPD et le PNGD ont une
vocation opérationnelle. Ces deux plans s?imposent aux plans territoriaux
(régionaux et locaux), qui doivent être compatibles43 avec leur contenu.
L?éclatement de la programmation nationale en trois documents
présentés selon des structures et des objectifs prioritaires différents mobilise
fortement les services et ne facilite pas la compréhension de la politique menée.
À l?occasion de la nouvelle version du programme national de
prévention des déchets actuellement en préparation, les juridictions
financières recommandent l?élaboration, pour la décennie à venir, d?un
document-cadre unique réunissant le PNPD et le PNGD.
2 - Des plans régionaux à généraliser et à enrichir
sur le volet investissements
Les régions exercent leur compétence de planification à travers
l?élaboration de plans régionaux dont la forme et le nom ont plusieurs fois
changé récemment44. Ces documents cadre n?imposent pas aux régions
d?atteindre les objectifs nationaux, mais seulement d?y contribuer, en
fonction de leurs spécificités.
Les juridictions financières ont examiné en détail chacun des plans
régionaux (cf. annexe n°3). Leurs orientations sont souvent imprécises et
manquent de contextualisation locale et de caractère réellement opérationnel,
en matière de prévention, de risque sanitaire, de planification des
installations et de promotion de la tarification incitative. Les observatoires
régionaux des déchets constituent l?appui opérationnel des régions pour
l?élaboration et la mise en oeuvre de leurs plans, la collecte et la diffusion des
données et la concertation dans les territoires. Le nombre d?observatoires
43 Art. L. 541-15 du code de l?environnement
44 Produit de la loi NOTRe qui confie à la région la compétence de planification en
matière de déchets, les plans régionaux de prévention et de gestion des déchets
(PRPGD) remplacent trois plans préexistants. Sauf en Ile-de France, en Corse et dans
les Outre-Mer, le PRPGD est appelé à disparaître à mesure que sont arrêtés les schémas
régionaux d?aménagement, de développement durable et d?égalité des territoires
(Sraddet) se substituant à plusieurs plans régionaux sectoriels.
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34
régionaux augmente, mais ils disposent de peu de ressources et n?existent
pas dans toutes les régions, notamment en outre-mer45.
Les juridictions financières ne méconnaissent pas les contraintes,
notamment calendaires et organisationnelles auxquelles les régions ont été
confrontées lors de l?élaboration de leur plan. Elles rappellent cependant
que la réglementation46 exige des orientations régionales un niveau de
précision suffisant pour encadrer les choix d?organisation et d?implantation
locales. Or, trop souvent, les plans régionaux, ne présentent pas ce degré
de précision. C?est notamment le cas pour les projets d?équipements
structurants47, installations qu?il apparaît nécessaire selon les cas de créer,
adapter ou fermer afin d?atteindre les objectifs régionaux.
Compte tenu de la difficulté inhérente à une planification dans un
contexte d?évolution constante des volumes de déchets à traiter, la
mobilisation par les régions de l?ensemble des acteurs, dans le cadre d?une
animation dynamique de leur plan, est la condition indispensable pour
parvenir à des choix d?implantation rationnels et assurer l?interface
nécessaire entre le niveau local et le niveau national.
3 - Des programmes locaux à compléter et à mieux articuler
avec les syndicats de traitement
Les EPCI doivent fixer leur stratégie locale (diagnostic et plan
d?actions) permettant d?atteindre l?ensemble des objectifs de la politique
nationale dans des programmes locaux de prévention des déchets ménagers
et assimilés (PLPDMA)48. Les PLPDMA doivent indiquer les objectifs
chiffrés et des indicateurs de suivi et les mesures, notamment financières,
mises en place pour les atteindre49. Ils doivent être compatibles avec les
plans régionaux.
Or, cette planification locale s?avère également déficiente. Les
PLPDMA, qui devaient être élaborés au plus tard le 1er janvier 2012,
peinent en effet à se généraliser et sont souvent manquants puisque seuls
45 Les observatoires des Hauts-de-France etdes Pays de la Loire seront réellement
opérationnels en 2023. Il n?y a pas d?observatoires en Guyane, en Polynésie Française,
en Nouvelle Calédonie ou à Mayotte.
46 Article R. 541-19 et 5° de l?article R 541-16 du code de l?environnement.
47 Exemples : la mise aux normes ou la construction d?une unité de valorisation énergétique,
d?un réseau de chaleur alimenté par de la chaleur fatale, d?un centre de tri ou d?un méthaniseur
48 Articles L. 541-1, L. 541-15-1 et R. 541-41-19 et s. du code de l?environnement.
49 Article R. 541-41-23 du code l?environnement.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000022496455/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074220/LEGISCTA000030720147/#LEGISCTA000032728577
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000030720182
UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
35
73 EPCI, couvrant 13 millions d?habitants, en avaient élaboré un en 2019
(dernière référence disponible)50. En l?absence de plan, l?évolution des
volumes de déchets traités n?est fixée que dans le seul cadre contractuel
des marchés publics, de manière à la fois moins transparente et plus
partielle. Dans les territoires qui ont adopté un PLPDMA, le niveau de
concertation préalable est très variable : certains s?appuient sur la
commission consultative locale (CCES)51, d?autres sont adoptés sans
consultation ou sans être mis en ligne. Alors qu?ils sont tenus à une
obligation de compatibilité52, il arrive que les PLPDMA divergent du plan
régional. Un programme local plus ambitieux que le plan régional (comme
à Paris) ne présente pas de difficulté, mais dans une configuration inverse,
le plan régional ne joue pas son rôle d?encadrement. Dans l?échantillon
contrôlé par les juridictions financières, 90 % des collectivités territoriales
ont fixé dans leur PLPDMA des objectifs chiffrés moins ambitieux que les
objectifs nationaux. De plus, les résultats issus de leurs indicateurs de suivi
sont souvent en deçà de leurs propres objectifs. Même dans l?hypothèse où
des collectivités hors de l?échantillon auraient des résultats supérieurs aux
objectifs nationaux, la moyenne nationale resterait trop basse.
Le positionnement des syndicats de traitement à l?égard du
PLPDMA est révélateur de la difficulté de l?EPCI à assumer ses
responsabilités de programmation. Alors même qu?ils sont amenés à
conduire des opérations aux lourds engagements financiers, les syndicats
ne disposent pas en effet de document d?orientation propre (schéma
directeur, projet d?établissement, etc.). Afin de contourner cette difficulté
et permettre aux syndicats de disposer d?un plan, les EPCI membres
peuvent leur confier l?élaboration de leur propre programme local. Le
syndicat élabore alors un programme commun à tous les EPCI53.
Cette mise en commun des ressources de programmation facilite la
bonne coordination entre la collecte pilotée par les EPCI et le traitement
assuré par un ou des syndicats. Certains objectifs des EPCI membres (p. ex.
réduire les tonnages produits) doivent en effet être rendus compatibles avec
50 Bilan du programme national de prévention des déchets 2014-2020.
51 Article R. 541-41-22 du code de l?environnement. La CCES peut réunir des représentants
de l?agglomération, de l?État (Ademe), des organisations professionnelles, des éco-
organismes, des associations de protection de l?environnement et du syndicat mixte de
traitement. P. ex. Métropole Lyonnaise, Communauté d?agglomération d?Annecy.
52 Article L. 541-15 du code de l?environnement : PNPD, PRGD et PRPGD sont
opposables aux PLPDMA.
53 Article R. 541-41-25 ; dans un tel cas, le plan doit être adopté par les organes
délibérants de chacune des collectivités dans les mêmes termes.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-de-lyon-enquete-sur-la-prevention-et-la-gestion-des-dechets
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-grand-annecy-haute-savoie
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176161/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000030720188
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36
ceux différents de leur syndicat de traitement (p. ex. optimiser le
fonctionnement de ses installations avec maintien des tonnages traités).
Cette facilité ne doit cependant pas aboutir à déresponsabiliser
l?EPCI des orientations spécifiques à son territoire qui peuvent être
sensiblement différentes de celles des autres EPCI membres du syndicat.
Les actions de prévention, par exemple, doivent être adaptées aux
caractéristiques de l?EPCI (urbain, rural, habitat concentré ou dispersé,
etc.) et relèvent rarement d?une stratégie commune à l?ensemble du
territoire du syndicat.
C?est pourquoi, s?il est utile qu?il n?existe qu?un seul plan pour
l?ensemble du territoire couvert par le syndicat, son contenu doit préciser
les objectifs et indicateurs spécifiques de chaque EPCI.
III - Un dispositif de suivi toujours défaillant
La collecte locale et sectorielle des données sur les DMA et leur
consolidation au niveau national ne sont pas adaptées à un suivi efficace de
la prévention et de la gestion des DMA.
A - La faiblesse des comptes-rendus alimentant
les données nationales de l?Ademe
Les données de suivi des objectifs législatifs et réglementaires sur
les DMA sont collectées, compilées et traitées par l?Ademe dans sa base
SINOE54 en respectant un cadre fixé par le droit statistique européen55.
L?Ademe exploite ces données dans des synthèses nationales, notamment
sa publication annuelle « Déchets chiffres clés », qui servent de références
pour élaborer la politique de prévention et de gestion des déchets. Pour être
pertinentes, ces données doivent être collectées avec fiabilité auprès des
acteurs du SPGD et des filières REP.
54 La base SINOE déchets de l?Ademe regroupe l?ensemble de données des dix
dernières années sur les flux de déchets et les coûts relatifs à la gestion des DMA. Sa
version 3 développée progressivement en 2023 devrait selon l?Ademe, être pleinement
opérationnel en 2024.
55 Notamment les règlement n° 2150/2002 et directive 2018/852.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
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37
Or, la collecte de ces données rencontre des difficultés persistantes.
Comme la Cour l?a déjà souligné56, l?Ademe a eu du mal à obtenir des
éco-organismes les données nécessaires57. La loi a dû rendre obligatoire
cette transmission en 202058 pour améliorer la situation.
Pour le SPGD, la réglementation précise le contenu des comptes-rendus
techniques, financiers et analytiques qui doivent comporter les données
chiffrées (quantités de déchets, coûts, qualité, recettes issues des valorisations)
et des analyses sur les évolutions d?un exercice sur l?autre, de l?efficacité et de
l?efficience des actions menées. Une fois élaborés, ces comptes-rendus sont
examinés par une commission consultative d?élaboration et de suivi (CCES59),
puis présentés à leur assemblée délibérante et publiés. Les données chiffrées
de ces comptes-rendus ainsi établis, doivent alors être intégrées dans le
dispositif national de recueil des données de l?Ademe.
Cette dernière est confrontée de façon générale à la faible qualité et
au retard des comptes-rendus sur les DMA que doivent élaborer chaque
année les intercommunalités.
Tout d?abord, les EPCI ne disposent directement que des données de
collecte et dépendent des syndicats et des exploitants des installations pour les
données sur le traitement. Or, les informations communiquées aux EPCI sont
souvent incomplètes en raison du non-respect fréquent par les délégataires de
leurs obligations contractuelles sur la transmission des données ou des
faiblesses des applications informatiques mises à leur disposition. De telles
carences ont été relevées dans la communauté d?agglomération de
Valenciennes60 ou dans la métropole de Lyon, pour laquelle plus de la moitié
des indicateurs de suivi obligatoires n?est pas renseignée.
En outre, l?échantillon des comptes-rendus examiné par les
juridictions financières montre qu?ils ne respectent pas la formalisation
prévue par la réglementation, qu?ils sont réalisés selon une fréquence
irrégulière (p. ex. CC Gorges Ardèche), ou qu?ils comportent des lacunes
56 Rapport public annuel 2016, chapitre « Les éco-organismes : un dispositif original à
consolider ».
57 Art. L. 541-9 du code l?environnement : L?enquête SYDEREP permet de s?assurer
du respect des objectifs des producteurs dans le cadre des filières REP.
58 Art. L541-7-1 et L. 541-10-13 à L. 541-10-16 du code de l?environnement imposent
aux filières REP une obligation de transmission des données à l?Ademe.
59 Art. R541-41-22 code de l?environnement et R541-41-27 code de l?environnement
60 La difficulté à faire respecter par les titulaires de marchés publics leurs obligations
dites de reporting est constatée dans l?ensemble de la commande publique.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-de-lyon-enquete-sur-la-prevention-et-la-gestion-des-dechets
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-de-communes-des-gorges-de-lardeche-vallon-pont-darc-ardeche
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000030720193
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000030720193
COUR DES COMPTES
38
comme l?absence d?indicateurs, d?analyse quantitative ou de mise en
perspective (p. ex. Syndicat mixte Kerval-Centre-Armor).
Le programme local (PLDMA) de la communauté
d?agglomération Valenciennes métropole (2017-2020)61
Les indicateurs de ce PLPDMA, labellisé « Territoire zéro déchet zéro
gaspillage »146 et aligné sur les objectifs nationaux sont surtout des indicateurs
de moyens (actions à mettre en oeuvre) et peu de résultats (variation de la
production de déchets). Ils sont très nombreux (une centaine au total, soit en
moyenne quatre par action). Ils ne sont pas accompagnés de cibles chiffrées
sur la collecte et le traitement, alors même que l?agglomération gagnerait à
suivre la performance des services qui en sont chargés.
En raison de leur nombre, de leur hétérogénéité et de leur complexité,
ces indicateurs mal suivis, ont limité les possibilités d?une appréciation
qualitative des initiatives menées, ont abouti à des incohérences dans les
données transmises à l?Ademe, et n?ont pas permis le pilotage des
différentes actions selon une logique de priorité. Alors même que les actions
prévues ont été dans l?ensemble menées à bien, la construction des
indicateurs affecte le bilan du PLPDMA.
Enfin, le processus est à l?origine de longs délais de production des
informations consolidées62. La réglementation n?imposant pas encore
d?échéances pour livrer les données, les EPCI tardent à les transmettre à
l?Ademe. Cette transmission, sous la forme de bordereaux papiers, est
consommatrice de ressources, aussi bien dans les EPCI et syndicats qui
effectuent les saisies qu?à l?Ademe, qui réalise des vérifications et des
ressaisies.
Dès lors, l?exploitation annuelle des comptes-rendus locaux est
difficile et l?Ademe recourt plutôt à des enquêtes bisannuelles63, dont les
délais de production ne permettent pas de réaliser les analyses
comparatives fréquentes qui aiguillonneraient les EPCI en retard sur les
objectifs nationaux et les inciteraient à s?aligner sur les meilleures
pratiques. L?impératif d?exhaustivité et de fiabilité a primé jusqu?ici sur
l?objectif de réactivité.
61 CRC Hauts-de-France, CA Valenciennes métropole, juin 2021.
62 Le processus nécessite plusieurs mois de travail de mars à décembre de l?année N
pour une production de données en mars N+2 des données de N-1.
63 L?enquête « collecte » est réalisée les années impaires auprès des EPCI et communes
indépendantes de plus de 1 000 habitants, l?enquête ITOM est réalisée les années paires
et porte sur les installations de traitement.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-kerval-centre-armor-cotes-darmor
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39
Pour améliorer cette situation, l?Ademe poursuit des travaux, sur
plusieurs plans : liste des indicateurs à produire, avec leur méthode de
calcul et suivi des séries, marge d?erreur acceptable et processus de
collecte/contrôle/validation des données. Les travaux avancent, mais
tardent à se conclure. Dans les réponses transmises à la Cour à l?occasion
de son rapport précédent68, ce chantier était pourtant jugé prioritaire par
l?État et devait démarrer de manière imminente. Or, il ne semble pas avoir
connu d?avancées décisives, même si un important travail préparatoire a
déjà été réalisé. Au regard des enjeux, les juridictions financières invitent
donc l?Ademe à accélérer ces chantiers en garantissant la fluidité de la
transmission des données.
Dans cet esprit, afin de faciliter la bonne compréhension par les EPCI
de ce qui est attendu de leur part pour rendre compte de leur activité et afin
d?améliorer la lisibilité, la comparabilité et la complétude des comptes-
rendus et leur exploitation informatique par l?Ademe, les juridictions
financières recommandent que ces comptes-rendus n?existent que sous une
seule forme et qu?elle soit harmonisée (rapport type). Or, aujourd?hui, la loi
exige des collectivités, non un, mais deux types de compte-rendu : les bilans
des programmes locaux (PLPDMA64) et les rapports annuels sur le prix et la
qualité du service public de prévention et de gestion des déchets (RPQS)65.
Les bilans des PLPDMA pourraient être supprimés66 au profit des seuls
RPQS qui deviendraient le document unique de compte-rendu des évolutions
locales du SPGD. Cette unification et standardisation des comptes-rendus
n?empêcheraient bien sûr pas les collectivités d?y ajouter des informations à
caractère plus local pour leurs administrés.
B - L?absence d?un tableau de bord synthétique
Les objectifs chiffrés nationaux fixés à la politique de prévention et
de gestion des déchets ménagers sont tellement nombreux qu?ils ne font
l?objet aujourd?hui d?aucun recensement sous forme d?un tableau de
synthèse. Au terme de leur enquête, les juridictions financières ont effectué
ce recensement qui permet d?évaluer le nombre de ces indicateurs chiffrés à
une quarantaine pour le SPGD et à 14 types d?indicateurs repris par arrêtés
et déclinés par filières pour les éco-organismes (Cf. annexes n° 4, 5 et 6 du
rapport). Collectivités territoriales et éco-organismes soulignent ce grand
nombre de données qu?il leur revient de transmettre sans recevoir en retour
64Art. L.541-15-1 du code de l?environnement
65Art. L2224-17-1 et articles D. 2224-1 à D. 2224-5 et annexe XIII du CGCT.
66 Les dispositions utiles du bilan PLPDMA ne figurant pas dans le RPQS pourraient y
être ajoutées.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000022496455/
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COUR DES COMPTES
40
ni analyse comparée ni indicateurs fiables. Ils déplorent les délais de
production des indicateurs et l?absence de séries statistiques longues pour
mesurer les évolutions constatées. Les collectivités indiquent qu?elles
préféreraient fournir à l?Ademe des données moins nombreuses choisies
parmi celles dont elles disposent au premier trimestre et qui leur donneraient
accès à des indicateurs plus fréquents et plus rapidement disponibles.
Le nombre trop élevé d?indicateurs à suivre gêne la production des
bilans qualitatifs et quantitatifs des actions et donc leur évaluation. Il
entrave la définition par les décideurs publics de priorités politiques
assumées ainsi que leur compréhension et leur mise en oeuvre par les
citoyens, les entreprises, les partenaires professionnels et associatifs67.
Les juridictions financières recommandaient déjà il y a dix ans, dans
leur rapport public sur les déchets68 une amélioration de ce dispositif. Elles
demandaient une sélection des objectifs les plus pertinents et leur
présentation annuelle sous une forme synthétique permettant d?identifier
les écarts par rapport aux objectifs.
La situation s?est peu améliorée sur ce point en dix ans, en dépit du
constat déjà partagé de revoir la présentation des données pour les
simplifier, en accélérer la production et les rendre plus lisibles pour les
citoyens. C?est pourquoi, les juridictions financières souhaitent préciser
leurs recommandations antérieures, par deux nouvelles recommandations
demandant, pour le SPGD d?une part et pour les filières REP d?autre part,
la publication annuelle par l?Ademe de tableaux de bord qui reprendraient
les indicateurs-clefs des six champs de la prévention et de la gestion des
DMA (prévention, financement incitatif, production de déchets, collecte,
valorisation et élimination).
Ces tableaux de bord seraient produits pour le SPGD par les
observatoires régionaux à partir du compte-rendu annuel unique de chaque
EPCI (RPQS fusionné avec le bilan du programme local : voir ci-dessus)
et par chaque éco-organisme dans son rapport annuel. Les données de
l?ensemble des observatoires régionaux et des éco-organismes seraient
67 Les données rassemblées pourraient aussi éclairer, le cas échéant, l?analyse des
tribunaux saisis pour apprécier l?action de l?État pour respecter ses engagements
normatifs. Voir, sur ces questions, CE, 12 juillet 2017, Les amis de la Terre, n°394254,
publié au recueil Lebon ; CE, 19 novembre 2020, Commune de Grande-Synthe,
n°427301, publié au recueil Lebon ; TA de Paris, 3 février 2021, n°1904967-1904968-
1904972-1904976 (affaire dite « L?Affaire du siècle »).
68 Recommandations n°1.3., 1.10. ,1.11, 3.1., 3.2., 3.3., 3.4. du rapport de la Cour des
comptes, Les collectivités territoriales et la gestion des déchets ménagers et assimilés,
septembre 2011.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
41
consolidées par l?Ademe dès 2024 dans deux tableaux de bord nationaux
du SPGD et des filières REP69.
Tableau n° 1 : tableaux de bord recommandés pour le suivi des
objectifs de prévention et de gestion des déchets ménagers et assimilés
N° Thèmes
Indicateurs du tableau de bord
SPGD
Indicateurs du tableau de
bord REP70
1 Prévention
Dépenses de prévention /coût total
du SPGPD (en %).
Dépenses de prévention/CA
des éco-organismes (en %)
2
Financement
incitatif
Population couverte
par la fiscalité incitative
(en million d?habitants) 71
Produits mis sur le marché
soumis à une éco-modulation
(en %)
3 Production
Volume de DMA par habitants
(en kg) 72,
Gisement de déchets calculé
(en kt)73
4 Collecte
Volume d?OMR par habitant
(en kg)
Taux de collecte séparée (en %)
5 Valorisation
Quantité de déchets faisant l'objet
d'une valorisation sous forme
de matière (en Mt) 74
Taux de recyclage par rapport
au gisement ou aux mises
sur le marché (en %)
6 Élimination
Quantités de déchets admis en
installation de stockage (en Mt)75
Élimination (en kt)
Source : Cour des comptes
69 À publier chaque année sur le portail du site du ministère de la transition écologique
(MTE), du ministère de l?économie et des finances et de l?Ademe. Cette dernière est
chargée désormais d?une mission de supervision des filières REP et dispose pour ce
faire d?un budget annexe financé par une redevance perçue auprès des éco-organismes.
70 Indicateurs prévus dans les cahiers des charges établis par filière, repris par arrêté
interministériel et présentés chaque année dans le mémo des filières REP qui constitue
une première ébauche de tableau de bord mais, qui comme pour le SPGD, ne comporte
ni analyse graphique comparant les objectifs fixés et leurs réalisations, ni d?indicateur-
clef consacré à la prévention.
71 10° du L541-1 du code de l?environnement.
72 1° du L541-1 du code de l?environnement.
73 Il existe plusieurs méthodes d?évaluation du gisement de déchets en fonction de
paramètres estimatifs (p. ex. comportements de stockage/déstockage des ménages)
74 Quantité de déchets non dangereux non inertes, mesurés en masse faisant l'objet d'une
valorisation sous forme de matière, notamment organique (4° du L541-1 du code de
l?environnement).
75 Quantités de déchets non dangereux non inertes admis en installation de stockage (7°
de l?article L. 541-1 du code de l?environnement).
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https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/4832-memo-rep-2021.html
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42
Comme indiqué dans le tableau ci-dessus, les indicateurs-clefs
envisagés sont, pour la plupart, déjà prévus par la réglementation et les
données sont disponibles dans la base Sinoe de l?ADEME.
Deux autres indicateurs-clefs mériteraient cependant d?être ajoutés
dans la réglementation et dans les tableaux de bord :
? les dépenses en faveur de la prévention qui, en dépit de leur importance,
ne font l?objet d?aucun indicateur législatif ou réglementaire suivi par le
SPGD et les éco-organismes. La notion de dépenses de prévention
n?étant pas définie dans les textes, une harmonisation préalable du
concept et des dépenses éligibles est nécessaire76.
? la réduction annuelle moyenne par habitant du poids des ordures
ménagères résiduelles (OMR) par rapport à une date de référence. Cet
indicateur-clef du SPGD présenterait en effet l?avantage d?être
révélateur des progrès obtenus dans l?atteinte de l?ensemble des objectifs
de collecte et de tri et d?être plus facile à appréhender par les citoyens.
Ceux-ci, en attente d?une information pratique et simplifiée pour savoir
ce qu?ils doivent faire et si leurs efforts portent leurs fruits, peuvent
comprendre facilement la consigne attachée à cet indicateur : faire
baisser le poids de sa poubelle non triée. Le poids des OMR est d?ailleurs
l?indicateur souvent mis en avant dans les visuels de communication
grand public des semaines européennes de la réduction des déchets77.
Pour chacun des indicateurs du tableau de bord, une partie graphique
pourrait être ajoutée qui permettrait la comparaison simple de la trajectoire
théorique nécessaire pour atteindre l?objectif et de la trajectoire observée78.
Pour le SPGD, afin de préciser également leur attente à l?égard de
cette modalité de présentation, les juridictions financières ont établi, pour
quatre des six indicateurs-clefs demandés (ceux déjà prévus dans la
réglementation), cette analyse graphique des trajectoires nationales. Les
76 Devront être inclus par exemples les dépenses d?écoconception et de recherches
développement des éco-organismes et les dépenses dédiées au réemploi et à la
réparation du SPGD.
77 Coordonnée en France par l?Ademe, la Semaine Européenne de la Réduction des Déchets
(SERD) est un temps fort de mobilisation annuelle pour diffuser les bonnes pratiques de
production et de consommation qui vont dans le sens de la prévention des déchets.
78 Trajectoire observée : obtenue par projection vers l?avenir des résultats déjà observés
à action inchangée (en prenant en compte l?ensemble des mesures connues et les
actualisations successives). Trajectoire théorique : trajectoire linéaire à partir de la date
à laquelle l?objectif a été fixé pour l?atteindre à l?échéance.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
43
graphiques correspondants figurent dans les différents chapitres qui traitent
de ces quatre sujets79.
Au niveau local, le compte-rendu annuel de chaque
intercommunalité (RPQS unifié comme indiqué ci-dessus) pourrait
s?ouvrir sur ces graphiques calculés à l?échelon du territoire par les
observatoires régionaux pour maintenir un historique détaillé et permettre
une exploitation précise par territoire. Les éventuels écarts entre la
trajectoire prévue par la loi et la trajectoire réelle constatée localement
pourraient être analysés par comparaison avec les collectivités partageant
les mêmes caractéristiques : notamment habitat dispersé ou concentré,
communes touristiques, communes de montagne, zones de revitalisation
rurale, territoires ultramarins, croissance démographique? Pour faciliter
cette analyse, l?Ademe pourrait publier une déclinaison des objectifs et
résultats par groupes homogènes de collectivités. Une telle approche a été
mise en oeuvre avec succès en Flandre belge à une échelle géographique
comparable à un EPCI (cf. annexe n° 7 sur les comparaisons
internationales). En comparant leurs propres graphiques et celui de leur
groupe homogène, les acteurs locaux pourraient ainsi apprécier leur
situation relative, ainsi que leur éventuelle marge de progrès.
IV - Un financement peu lisible
et trop faiblement incitatif
Le financement du service public repose globalement sur un
équilibre entre la part assumée par le consommateur à travers le prix payé
intégrant les participations aux éco organismes et celle restant à la charge
du contribuable ?usager, qui supporte la fiscalité ou la tarification.
La tarification incitative est un levier important de
responsabilisation. En effet, elle permet l?application du principe pollueur-
payeur aux usagers du service en intégrant dans la facturation le niveau de
production des déchets.
79 Graphiques sur la production de DMA et sur la tarification incitative dans le présent
chapitre, graphiques sur le recyclage et l?élimination dans le 2ème chapitre.
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44
A - Des dépenses de gestion des déchets
en augmentation
La dépense nationale consacrée à la gestion de tous les déchets
augmente de manière continue depuis 20 ans avec une hausse annuelle
moyenne de 4,3 % entre 2000 et 2017, supérieure à la croissance annuelle
du PIB moyenne sur la même période (+ 1,4 %). En 2017, cette dépense
s?élevait à 18,1 Md¤80 et représentait le premier poste (37 %) des dépenses
françaises de protection de l?environnement (48,9 Md¤ en 2019)81. Les
entreprises sont les premiers financeurs de ce poste de dépenses, à hauteur
de 52 %, suivies des ménages qui contribuent via la fiscalité locale (34 %)
et des administrations publiques (14 %) principalement l?ADEME.
En 2016, la prise en charge des déchets par le SPGD, y compris les
déchets des entreprises et le nettoyage des rues, a coûté 15,9 Md¤
(graphique ci-dessous). Au sein de cet ensemble, le coût spécifique de la
collecte et du traitement des DMA (10,9 Md¤ en 2016) a connu depuis dix
ans une hausse de près de 50 %82 en valeur absolue mais une stabilité en
valeur relative (la quantité des DMA a augmenté 83 mais leur coût relatif
est resté stable autour de 62 % des dépenses du SPGD84).
80 La dépense de gestion des déchets, fiche thématique, rapport sur l?état de
l?environnement, 2019.
81 Les dépenses de protection de l?environnement mesurent pour chaque pays européen
(règlement Eurostat n°691/2011) l?effort financier des ménages, des entreprises et des
administrations publiques pour la prévention, la réduction ou la suppression des
dégradations de l?environnement c?est-à-dire les taxes, dépenses et emplois nécessaires
à la production de biens et services favorables à l?environnement. Comptes de
l?environnement, service des statistiques du ministère de la transition écologique,
SDES, éditions 2016,
82 Ces dépenses sont chiffrées en euros courants. En euros constants (après correction
de l?inflation), la hausse enregistrée entre 2006 et 2016 s?élève à 31 %.
83 De 8,3 % en 2010 (29,5 Mt sur 355 Mt) à 12 % en 2016 (32 Mt sur 326 Mt).
84 9,3 Md¤ sur 14,9 Md¤ en 2010 et 10,9 Md¤ (dont 9,7 Md¤ de fonctionnement) sur
15,9 Md¤ en 2016. Source : Ademe, Déchets chiffres-clés, Éditions 2014 et 2020.
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https://ree.developpement-durable.gouv.fr/themes/economie-verte/depenses-pour-l-environnement/depenses-par-domaines/article/la-depense-de-gestion-des-dechets
https://ree.developpement-durable.gouv.fr/themes/economie-verte/depenses-pour-l-environnement/depenses-par-domaines/article/la-depense-de-gestion-des-dechets
https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/environnement
https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/environnement
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
45
Graphique n° 9 : évolution des dépenses totales
de gestion des déchets
Source : Cour des comptes d?après chiffres clés de l?Ademe 2020.
Dépenses en euros courants. Le processus de collecte et de compilation de données applicable ne
permet à l?Ademe de publier dans ses chiffres clés de l?année N qu?une synthèse basée sur les
chiffres N-4 (voir infra à propos du dispositif inadapté de suivi des objectifs)
Comme indiqué dans le graphique ci-dessus, l?ensemble des
dépenses du SPGD coûte en moyenne 124 ¤ TTC (117 ¤ HT) par habitant.
Les charges de traitement représentant 47 ¤ (38 % du coût HT) et les
charges de collecte 49 ¤ (39 %).
Coté produits, la vente des matières issues du tri, du recyclage et, plus
largement, du traitement des DMA (vente d?énergie après incinération,
compost?) représente 9 ¤ (7 % des produits). Les aides apportées par les éco-
organismes dans le cadre de la responsabilité élargie du producteur (filières
REP) représentent 13 ¤ (10 % des produits). Les subventions (notamment
celles de l?Ademe) constituent une recette marginale (2 ¤). Ces trois types de
produits permettent de déterminer le reste à charge pour la collectivité
gestionnaire du service (dit « coût aidé »). Ce coût « aidé » est de 92,50 euros
HT par habitant et par an85. Il est financé par une contribution des ménages de
106 ¤ en moyenne (81,5 %) sous forme d?une fiscalité locale affectée ou d?une
redevance (TEOM/REOM)86 ou indirectement (financement intégral ou
partiel) par le budget général de la collectivité gestionnaire.
Les produits (130 ¤ par habitant) financent donc les charges à
hauteur de 105 %.
85 « Référentiel national des coûts du service public de prévention et de gestion des
déchets ménagers et assimiles 2016 » et mise à jour 2019.
86 La TEOM représente de loin la première modalité de financement du SGPD (81 %
des produits perçus), contre 8 % pour la REOM. Pour une présentation détaillée des
modalités de financement du SGPD, voir plus loin la partie sur le financement.
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https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/587-referentiel-national-des-couts-du-service-public-de-prevention-et-de-gestion-des-dechets.html
https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/587-referentiel-national-des-couts-du-service-public-de-prevention-et-de-gestion-des-dechets.html
https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/575-referentiel-national-des-couts-du-service-public-de-prevention-et-de-gestion-des-dechets-synthese-9791029714450.html
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46
Graphique n° 10 : répartition des coûts de gestion des déchets
et de leurs financements (SPGPD)87
Source : Cour des comptes, d?après Ademe référentiel des coûts du SPGPD 2019 (chiffres 2016)
Le taux moyen de couverture des charges par les produits est de 105 % : cet excédent des produits sur
les charges correspond principalement à la constitution de provisions pour de futurs investissements
Plus de la moitié des coûts financés par les ménages au travers de la
fiscalité locale (53,1 ¤, soit 57 %) sert à couvrir la prise en charge des
OMR. La réduction de leur volume par des actions sur la prévention, le tri,
la collecte et le traitement est donc favorable non seulement à
l?environnement mais également à la maîtrise des coûts.
87 Produits industriels : ventes de matériaux et d?énergie, prestations à des tiers,
Soutien : versement des éco-organismes (filières à responsabilité élargie du
producteur/REP), aides : subventions publiques (Ademe notamment).
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
47
B - Des modalités de financement complexes
1 - Un financement national marqué par l?augmentation
de la TGAP
Le précédent rapport de la Cour sur le SPGD en 2011 notait déjà le
caractère complexe et inadapté des modes de financement qui n?intégraient
guère l?équité sociale, très peu le coût réel du service et surtout
marginalement le caractère incitatif (principe du pollueur-payeur).
Dix ans après et malgré les recommandations pour améliorer la
situation et l?adoption de plusieurs lois, la situation décrite reste largement
inchangée.
La seule évolution financière marquante est, au niveau national, la
forte augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP),
ressource fiscale pour l?État, qui continuera d?augmenter encore jusqu?en
2025, permettant à la France de rejoindre les pays qui pratiquent depuis
longtemps cette politique fiscale efficace pour réduire la mise en décharge
et l?incinération. Elle doit inciter les EPCI à privilégier la prévention et
accentuer les efforts pour réduire les tonnages d?OMR en utilisant un
signal-prix88.
La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) :
une incitation financière à la réduction des tonnages enfouis
et incinérés
La TGAP a été instituée par la loi de finances 1999 et a vocation à
modifier les comportements et à réduire le volume des déchets non recyclés.
Elle est entrée en vigueur le 1er janvier 2000 avec l?objectif d?appliquer le
principe pollueur-payeur et de lever des fonds afin de financer les politiques
environnementales. Cette taxe s?applique à chaque tonne d?ordures
ménagères ou de tout-venant entrant en centre de stockage ou
d?incinération. Elle est due par l?exploitant de l?installation de traitement et
finalement assumée par les EPCI en charge de la compétence. Sa croissance
a une incidence sur le coût total du service à financer.
88 La méthode du signal-prix, appliquée à la politique des déchets consiste à refléter dans le
prix des produits et des services le coût de leur impact sur l'environnement en pénalisant les
méthodes de traitement les moins vertueuses (incinération et enfouissement).
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48
Pour favoriser l'atteinte des objectifs de réduction des déchets et
d'augmentation de la valorisation, fixés par la loi de transition énergétique
(LTECV), les lois de finances pour 2016 et 2019 ont accentué le rôle
incitatif de la TGAP. Le taux de la TGAP passera progressivement à 65 ¤
par tonne enfouie en 202589. Une évolution similaire mais moins
importante90 s?applique aux tonnages incinérés, conformément à la
hiérarchie des modes de traitement.
Cette hausse uniforme a l?inconvénient de frapper indistinctement
les déchets qui pourraient être mieux triés grâce à l?intervention des
collectivités et les déchets non recyclables du fait des choix techniques des
entreprises sur les volumes desquels les collectivités ne disposent d?aucun
moyen d?action.
2 - Le renforcement de la responsabilité élargie des producteurs
En application du principe pollueur-payeur, la responsabilité élargie
des producteurs (REP) met à contribution les producteurs pour assurer, au
moins en partie, la gestion des déchets issus de leurs produits. Plus
précisément, l?obligation est faite aux fabricants et importateurs concernés
soit de les prendre en charge eux-mêmes, soit de confier cette prise en
charge à un éco-organisme en lui versant une écocontribution91.
La France s?appuie ainsi sur une vingtaine de filières REP, dont plus
de la moitié concernent des produits du quotidien, susceptibles de grossir le
gisement des déchets municipaux : emballages ménagers et papiers
graphiques, piles et accumulateurs portables, déchets d?équipements
électriques et électroniques, textiles, linges et chaussures. Elles couvrent un
plus large spectre que dans les autres pays de l?UE et cette couverture est en
augmentation92. Des produits, y compris ceux qui produisent des volumes
89 La TGAP est fixée à 37 ¤ par tonne enfouie en 2021 dans les installations de stockage
de déchets non dangereux réalisant une valorisation énergétique de plus de 75 %.
90 La TGAP pour les incinérateurs conformes à la norme internationale ISO 50001
passera de 17 ¤ en 2021 à 25 ¤ en 2025.
91 Les éco-organismes sont des personnes morales de droit privé, à but non lucratif,
pouvant prendre des formes juridiques variées : sociétés par actions simplifiées, sociétés
agréées par l?État (Ademe).
92 La loi AGEC a ajouté une dizaine de filières en 2022 : jouets, articles de bricolage
et jardin, sports et loisirs de l?autre, produits et matériaux du secteur de la construction
et du bâtiment (opérationnelle à compter du 1er janvier 2023). La filière des lingettes
doit être créée au 1er janvier 2024. La création d?une REP pour tous types d?emballages
est prévue au 31décembre 2024.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
49
significatifs de déchets (couches et litières par exemples), ne sont pas encore
rattachés à une filière REP. Les contributions perçues par les éco-organismes
en 2019 étaient de 1,464 Md¤ (+ 200 M¤ par rapport à 201793). Les éco-
organismes utilisent ces contributions en partie pour prendre en charge
directement des coûts de collecte et de traitement (508 M¤ en 2017) et en
partie pour participer au financement du service public de gestion des déchets
(805 M¤ de soutiens financiers versés aux collectivités locales, dont plus de
80 % versés par l?éco-organisme Citéo au titre des emballages ménagers)94.
3 - Un financement du SPGD marqué par la diversité des recettes
et la prédominance de la TEOM
Une fois déduites les ventes des produits issus du traitement et les
aides des éco-organismes et de l?État, le financement du reste à charge (dit
« coût aidé »), relève quasi-exclusivement au plan local de décisions des
EPCI à fiscalité propre95, y compris à travers leur participation à un
syndicat mixte.
a) Les différentes fiscalités affectées
Comme le prévoit le code général des impôts96, les EPCI peuvent
instituer une fiscalité affectée « à pourvoir aux dépenses du service de
collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés ». Modalité
dominante de financement du SPGD par les usagers, la taxe d?enlèvement
des ordures ménagères (TEOM) présente, en plus de sa simplicité
d?application et de sa garantie de rendement appréciable pour les
collectivités, un avantage redistributif de par la nature de sa base
d?imposition.
93 La principale filière est la filière emballages ménagers avec 708,7 M¤ en 2019, suivie
de la filière DEEE (déchets d?équipements électriques et électroniques) avec 188 M¤
puis celle des papiers graphiques avec 95,8 M¤.
94 On distingue ainsi les éco-organismes « opérationnels ». Articles L. 541-10 à L. 541-
15-2 du code de l?environnement qui prennent en charge directement les déchets des
entreprises de leur secteur (p. ex. piles électriques) et qui représentent 40 % de la prise
en charge des DMA et les éco-organismes financeurs qui reversent aux collectivités
locales les contributions (p. ex. emballages). Les éco-organismes mixtes (p. ex.
ameublement) financent la collecte par les collectivités mais assurent le traitement.
95 Communautés de communes, communautés d?agglomération, communautés urbaines
et métropoles.
96 Article 1520 du code général des impôts.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037986339/
COUR DES COMPTES
50
La base de la TEOM, commune avec la taxe foncière sur les
propriétés bâties est la valeur locative foncière, qui permet de prendre en
compte la valeur du patrimoine foncier imposé97. À titre d?exemple, une
personne seule habitant une habitation individuelle vaste verra son
imposition à la TEOM plus élevée qu?une famille de six personnes
occupant un appartement exigu, du fait de la valeur locative foncière des
habitations respectives. Si cette situation peut paraître partiellement
contestable du fait de l?inadéquation entre le montant de l?imposition et la
quantité de déchets produite, elle présente un certain avantage social98. La
TEOM permet aussi l?imposition de surfaces commerciales (par exemple
la grande distribution) qui génèrent indirectement des quantités
importantes de déchets (notamment les emballages même si les grandes
surfaces n?utilisent pas les prestations du SPGD). Une tarification
incitative peut être adossée à la TEOM (TEOMi).
À la place de la TEOM, l?EPCI peut instituer la redevance
d?enlèvement des ordures ménagères (REOM) versée par l?usager comme
contrepartie directe de la prestation et souvent liée à la composition de la
famille de l?usager (nombre de personnes dans le foyer). Cette redevance
dite « classique » ne reflète pas la quantité réellement produite et les efforts
de réduction des déchets réalisés par l?usager.
Le montant de la REOM peut aussi se fonder sur le volume et le
nombre de présentation des bacs à la collecte (ce qui implique
l?identification des bacs par la benne à ordures ménagères), voire le poids
des déchets par la mise en place d?une pesée embarquée. Dans ce cas, elle
est qualifiée de redevance incitative (RI ou REOMI).
97 La Cour des comptes indiquait, dans son rapport public annuel de 2009, que « le
processus d'établissement des bases cadastrales par la DGFIP est d'une grande
opacité : il est à la fois exagérément complexe, fragile, et d'un coût mal cerné. En outre,
l'absence de révision générale des bases depuis 1970, combinée à une mise en oeuvre
trop restreinte des procédures d'actualisation par les services fiscaux, dans le cadre du
droit existant, produit une situation obsolète et inéquitable ».
98 L?absence d?actualisation des valeurs locatives foncières vient toutefois limiter cet
effet social favorable.
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51
La redevance spéciale (RS) : une tentative non aboutie
de financement dédié des déchets non ménagers
La redevance spéciale (RS) désormais facultative permet de facturer
le coût de la collecte et du traitement des déchets dits « assimilés » aux
ordures ménagères (produits par certaines activités économiques :
commerces, PME, restauration, etc. et estimés par l?ADEME à 20 % de
l?ensemble des DMA).
Elle a été instaurée pour éviter de faire payer aux ménages
l?élimination des déchets non ménagers. Sa mise en place très aléatoire et
limitée a conduit à l?abandon du caractère obligatoire qui lui avait été
conféré en 1993, alors que la Cour recommandait en 2011 d?imposer sa
généralisation. Quand elle est instaurée, les recettes de RS sont souvent
restreintes et ne représentent qu?une part très marginale du financement du
service public (exemple de la CA de Bastia).
L?échec de la généralisation de la RS montre la difficulté de distinguer
l?origine des flux de déchets et au sein des DMA les déchets ménagers des
déchets assimilés. Les EPCI sont le plus souvent dans l?incapacité de fournir
ces données qui permettraient un financement différencié.
Cette situation conduit à un report exclusif de la charge du
financement du SPGD vers l?usager habitant.
b) La combinaison de la fiscalité affectée et du budget général
Les collectivités peuvent choisir différentes modalités pour assurer le
financement du reste à charge par l?usager du service public : TEOM, Budget
général, RS, REOM, REOMi ou TEOMi (cf. annexe n° 9). Les modes de
financement retenus sont donc très variés, souvent complexes, mixant
TEOM et participation du budget principal, parfois avec une part de taxe sur
le foncier bâti explicitement dédiée. En raison de ses avantages et malgré ses
inconvénients, la TEOM reste toutefois très largement majoritaire.
La combinaison des modalités de financement est soumise à
plusieurs règles d?incompatibilités juridiques. Ainsi, par exemple, le choix
du financement du reste à charge par la REOM induit la qualification de
service public industriel et commercial (SPIC), l?obligation d?un budget
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52
annexe dédié et son équilibre par des recettes propres sans recours à une
participation du budget principal99.
La fiscalité affectée instituée par les EPCI doit pourvoir à la gestion
des DMA et non à d?autres dépenses de la collectivité. Le juge
administratif rappelle constamment cette interdiction du suréquilibre100
lorsque le produit de la TEOM est nettement supérieur101 aux dépenses
consacrées au SPGD.
Afin de définir les conditions de financement du SPGD sans
suréquilibre, il est essentiel de connaître le périmètre des dépenses à
prendre en compte. Comme le regrettait déjà le rapport des juridictions
financières en 2011, ce périmètre n?est connu qu?imparfaitement par une
construction jurisprudentielle inachevée. Le juge a ainsi exclu des charges
du SPGD le ramassage des corbeilles de propreté et les déchets des marchés
alimentaires et forains.
C - Une fiscalité incitative à développer
1 - Une fiscalité incitative devenue prioritaire
en raison de ses atouts
L?objectif de baisse des quantités collectées de DMA102 et le
surenchérissement de la TGAP qui pénalise de plus en plus fortement
l?incinération et l?enfouissement conduisent à privilégier une incitation
financière des usagers pour réduire leurs déchets.
La France était, en 2011, très en retard dans la mise en place d?une
tarification incitative en comparaison de plusieurs pays (graphique n°1) et
sa progression très lente depuis cette date ne lui a pas permis de le rattraper.
Le caractère incitatif de la tarification est mis en avant par la
LTECV103 comme un des leviers permettant d?atteindre les objectifs de
réduction des volumes de déchets en envoyant un « signal prix » à l?usager
99 Dans un délai de quatre ans suivant l?instauration de la REOM
100 La situation de suréquilibre consiste à lever une fiscalité (TEOM) d?un montant
supérieur au coût net (en enlevant les autres recettes : ventes de produits, recettes ces
éco organismes et subventions) du service pour la collectivité.
101 Le niveau du surfinancement acceptable a varié mais semble s?établir selon les
dernières jurisprudences à 115 % au maximum de couverture des dépenses.
102 Art. L. 541-1 1° du code de l?environnement - 10 % en 2020 / 2010 et - 15 % en 2030 / 2010
103 10° de L. 141-1 code de l?environnement.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
53
et en liant le prix qu?il paie au coût réel du service et à la quantité d?ordures
ménagères résiduelles qu?il produit.
L?efficacité dans ce domaine de la tarification incitative est
confirmée par plusieurs études récentes104. En moyenne, la mise en place
de la tarification incitative permet de réduire de 41 % la quantité d?OMR,
d?augmenter à due concurrence la collecte des recyclables et de réduire de
8 % les DMA. La relation forte entre la performance des EPCI et la mise
en place d?une fiscalité incitative est ainsi établie, en France comme à
l?étranger, selon une étude de l?Ademe105. 97 % des intercommunalités qui
produisent moins de 150 kg d?OMR et 100 % de celles qui produisent
moins de 100 kg d?OMR par habitant ont recours à une tarification
incitative. Par ailleurs, le coût moyen aidé des déchets est de 20 % en deçà
de la moyenne dans les territoires en tarification incitative car celle-ci
pousse à l?optimisation des coûts de collecte et de traitement106.
La baisse des OMR après mise en oeuvre de la tarification incitative,
avec l?ensemble des mesures d'accompagnement, a créé un effet report sur
les volumes collectés en déchèteries (avec des qualités et des taux de
tri/valorisation variables) dans une proportion non quantifiable.
Les avantages de la tarification incitative ont conduit la Convention
citoyenne pour le climat (CCC) à proposer de « remplacer une part
significative de la taxe d?enlèvement des ordures ménagères (TEOM) par
des modalités plus justes et favorisant les comportements
écoresponsables » (proposition C3.4).
Les associations d?élus représentants les groupements
intercommunaux (Communautés de France et France urbaine) considèrent
cependant que la fiscalité incitative n?est qu?un levier parmi d?autres de la
réduction des OMR même si Communautés de France se déclare favorable
au déploiement d?une dimension incitative dans la tarification du SPGD.
104 Étude du commissariat général au développement durable de mars 2016 et étude de
l?Ademe sur l?implantation de la TI (bilan à mi-parcours TI AMO). 4/11/2021.
105 Le parangonnage des pratiques de tarification incitative pour la gestion des déchets
ménagers dans plusieurs pays industrialisés » (Ademe 2018) indique que « dans tous
les territoires ayant mis en place une TI, la production d?OMR a diminué. »
106 Ademe, Étude sur les territoires pionniers de la prévention, confirmé par contrôles de la
communauté d?agglomération de Mauges et de la communauté urbaine de Besançon.
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/La%20tarification%20incitative%20de%20la%20gestion%20des%20ordures%20ménagères%20:%20quels%20impacts%20sur%20les%20quantités%20collectées
https://www.ademe.fr/dossier/modes-financement-service-public-gestion-dechets/tarification-incitative-ti
https://www.ademe.fr/dossier/modes-financement-service-public-gestion-dechets/tarification-incitative-ti
https://librairie.ademe.fr/air-et-bruit/3628-territoires-pionniers-de-la-prevention-des-dechets.html
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-mauges-communaute-maine-et-loire
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-urbaine-du-grand-besancon-doubs
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54
2 - Une complexité qui ralentit sa diffusion
La tarification incitative reste cependant insuffisamment attractive
pour les collectivités du fait des coûts ainsi que de la complexité de sa mise
en place et des incertitudes sur les recettes perçues par le service public.
La tarification incitative reste très peu mise en oeuvre dans
l'échantillon des EPCI de l?enquête, même s?il est fait régulièrement mention
de sa mise à l?étude. Les territoires ayant mis en oeuvre la tarification
incitative en France sont souvent ruraux ou mixtes et, à de rares exceptions
(par exemple l?agglomération de Besançon), les territoires les plus urbanisés
ne sont pas engagés dans des démarches de fiscalité incitative.
La part des collectivités qui recourent à la TEOM sans part incitative
comme mode majoritaire, voire exclusif, de financement ne décroit que très
lentement. La population qui reste soumise à cette imposition est constante,
principalement dans les zones fortement urbanisées (à l?exemple de la région
Ile-de-France). La part de la TEOM dans le financement du service public
de gestion des déchets continue de croitre en 2020 et en 2021 (7,1 Md¤ en
2020 et 7,4 Md¤ en 2021) et demeure très largement dominante par rapport
à la redevance. Même lorsqu?elle est mise en place, la part réellement
incitative107 reste résiduelle dans le prix payé par l?usager et représente, en
2020, moins de 0,5 % de l?ensemble du produit de la TEOM108.
Les espoirs placés dans une tarification plus incitative (TEOMI ou
REOMI) qui devait concerner 15 millions d?habitants en 2020 et
25 millions en 2025 sont pour l?instant déçus par le rythme très lent de sa
mise en place (moins de 6 millions d?habitants concernés en 2019109).
Le graphique ci-dessous montre l?écart important entre ces objectifs
législatifs et l?évolution de la population bénéficiant d?une tarification
incitative. L?objectif de 25 millions d?habitants en 2025110 apparaît hors
d?atteinte sans accélération très forte et sans nouvelles mesures
encourageant cette mise en place.
107 La part incitative ne représente que 10 à 45 % de la TEOMI, la part fixe majoritaire
reste basée sur la valeur locative foncière (VLF) de l?habitation.
108 34 M¤ sur les 7 137 M¤ du produit total de la TEOM (Source : DGCL Bis 151
fiscalité locale 2020).
109 Au 1er janvier 2019, 195 collectivités appliquaient une tarification incitative (5,6 M
d?habitants) dont 18 en TEOMI (0,940 M d?habitants). Au 1er janvier 2020 :
5,9 millions d?habitants et 9,3 millions si on inclut les collectivités en cours de mise en
oeuvre (source Ademe). Par ailleurs en 2020 et 2021, des collectivités représentant
9 millions d?habitants bénéficient des études de faisabilité aidées par l?Ademe.
110 Ces deux objectifs sont fixés par la LTECV de 2015.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
55
Graphique n° 11 : (indicateur-clef n° 2) population bénéficiant
de la tarification incitative
Source : Cour des comptes
La fiscalité incitative est souvent perçue comme compliquée et
coûteuse dans sa gestion (transfert de la gestion du fichier des redevables
de la direction des finances publiques à l?EPCI, insécurité sur les recettes)
et peut être source de rejet de la part des usagers. Les modalités de collecte
sont en effet plus complexes et impliquent l?équipement :
- des bacs à puces chez les usagers permettant déterminer leur nombre
réellement collecté et ainsi individualiser la facturation ;
- des points d?apport volontaire (PAV) avec un système de tambour à
reconnaissance par carte du propriétaire, des sacs apportés ;
- des bennes avec des systèmes électroniques de reconnaissance des
puces des bacs.
Comme le montre l?exemple ci-dessous, la mise en place d?une
fiscalité incitative ou d?une redevance incitative est un processus long et
peut s?étaler sur sept années entre l?étude d?opportunité et la mise en place
effective111.
111 Ce délai peut toutefois être réduit à l?exemple de communauté de communes
d?Oléron qui prévoit une mise en place de la REOMI en 2022 à la suite d?une démarche
initiée en 2018. Cf. CRC Nouvelle-Aquitaine, Communauté de communes de l?Ile
d?Oléron, décembre 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-de-communes-de-lile-doleron-saint-pierre-doleron-charente-maritime
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56
Organigramme n° 1 : processus d?instauration de la TEOMI
sur le territoire du syndicat du Bois de l?Aumône (Puy De Dôme)
Source : présentation webinaire du 30 juin 2021 ADEME, CITEO
et Région Occitanie
Plusieurs études de mise en place, voire de délibérations, n?ont pas
été suivies d?effet, notamment du fait du coût des investissements à réaliser
pour déployer un nouveau schéma de collecte en cohérence.
Par exemple, la communauté de communes Coeur du Var a décidé en
2016, après étude, de reporter la décision de la mise en place d?une TEOMI
à 2021 puis au-delà de 2025 au motif de la lourdeur des investissements à
réaliser et des bouleversements induits dans son organisation.
La mise en place d?une fiscalité incitative implique en outre des
efforts importants en termes de portage politique, de communication
auprès des usagers et d?engagements des services techniques des
collectivités. L?absence d?attention suffisante à ces préalables ou leur sous-
évaluation peut conduire à l?échec voire à des abandons et retours vers des
modes de fiscalité sans lien avec la qualité du tri, le plus souvent la TEOM
(à l?exemple de la communauté de communes des Gorges de l?Ardèche).
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
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57
Les conditions de la réussite de la mise en place d?une tarification
incitative : le contre-exemple des Gorges de l?Ardèche.
La communauté de communes des Gorges de l?Ardèche issue de la
fusion en 2017 de plusieurs intercommunalités dont certaines avaient mis
en place une tarification incitative pour une partie de leur territoire, a décidé
en 2018 une généralisation de la REOMI au 1er janvier 2021. Des carences
dans la conduite de ce projet, la sous-estimation des coûts induits par les
changements, le manque d?anticipation ont abouti, après plusieurs reports
et décalages par rapport au calendrier prévisionnel, à son abandon au
deuxième trimestre 2020 et à la généralisation de la TEOM en 2021.
La modification des modalités de collecte (généralisation de la collecte
en PAV en remplacement du PAP) simultanément à la mise en place de la
fiscalité incitative a amplifié les difficultés rencontrées par l?EPCI, montrant
la difficulté de mener de front deux chantiers lourds modifiant à la fois les
modalités de collecte et de financement du service public.
Les regroupements d?EPCI issus des schémas départementaux de
coopération intercommunale (SDCI issus de la loi NOTRE de 2015) ont
souvent conduit à la généralisation de la TEOM, alors que certains territoires
fusionnés avaient élaboré des politiques ambitieuses basées sur une fiscalité
incitative ou la redevance d?enlèvement des ordures ménagères (REOM).
La communauté de communes d?Oléron : un exemple de passage
de la REOM vers la REOMI112
La CC d?Oléron, actuellement en REOM, a décidé en 2018 de mettre
en oeuvre la REOMI à l?horizon 2023 avec un objectif de réduction de 20 %
des DMA.
Le système retenu prévoit une part forfaitaire établie sur la base d?un
nombre de levées ou de dépôts minimaux et de la taille du bac de l?usager ou
à la taille du tambour des colonnes d?apport volontaire. Au-delà de ce forfait,
la part variable est calculée pour toutes les levées et apports supplémentaires.
Le calendrier prévoit la réalisation d?une enquête auprès de chaque
usager et, en 2022, une facturation « à blanc » (simulation de facturation
incitative permettant la comparaison avec la facturation réelle).
112 Cf. CRC Nouvelle-Aquitaine, CC de l?île d?Oléron, décembre 2021.
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58
3 - Accélérer la mise en place de la fiscalité incitative
Les recommandations de développement de la tarification incitative
formulées antérieurement par la Cour113 n?ont pas été suivies d?effets et
doivent être réitérées.
La redevance d?enlèvement des ordures ménagères incitative, dont
la mise en place est mieux adaptée à l?habitat individuel, a connu un certain
développement, dans les zones rurales et péri-urbaines mais ses possibilités
d?extension en milieu urbain sont limitées par les contraintes spécifiques
de l?individualisation du tri dans l?habitat collectif.
Plus récemment, un mouvement semble s?amorcer, de collectivités
urbaines qui cherchent à s?engager ou qui expérimentent la mise en oeuvre
de la tarification incitative sous forme de TEOMi (Grenoble Alpes
Métropole et Versailles Grand Parc notamment), tandis que d'autres
l?étudient.
Nombreux sont ceux qui considèrent que l?application sur
l?intégralité du territoire sera difficile alors qu?elle pourrait être plus
facilement envisagée sur seulement une partie du territoire (habitat
pavillonnaire, communes périphériques, ?) : une dérogation à l?obligation
d?uniformité du mode de financement sur un EPCI à fiscalité propre et donc
l?autorisation de faire cohabiter formes classique et incitative d?un mode
de financement donné (TEOM/TEOMi ou REOM/REOMi) au-delà des
sept ans explicitement prévus au Code général des impôts pour la TEOMi
pourrait répondre à cette difficulté et favoriserait le développement de la
TI en milieu urbain, au prix sans doute d?une certaine complexité de
gestion voire d?une insécurité juridique.
La sécurité financière apportée par la TEOM pour les collectivités
gestionnaires du service public, son caractère redistributif et sa très large
implantation sur le territoire, amènent à ne pas remettre en cause cette
fiscalité, mais plutôt à favoriser l?introduction d?une part incitative
(TEOMI) dans les limites actuellement prévues par la loi (10 à 45 % de
part incitative dans la TEOM totale).
La métropole de Rennes, relayée par l?association France urbaine,
étudie la possibilité d?une TEOMI « collective » qui ne serait plus
individualisée mais établie au niveau du quartier ou d?un secteur
géographique.
113 Rapport 2011, Les collectivités locales et la gestion des déchets ménagers et
assimilés, op. cit.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-collectivites-locales-et-la-gestion-des-dechets-menagers
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
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59
La Métropole de Rennes étudie un dispositif innovant
mais aux bases juridiques fragiles.
Devant la difficulté à établir une individualisation de la performance
de tri en milieu fortement urbanisé, Rennes métropole a étudié la possibilité
d?établir la part incitative non pas sur les quantités d?OMR produites par
chaque usager, mais en tenant compte de la performance collective réalisée
au niveau d?un quartier.
Ce dispositif permettrait, selon la métropole rennaise, de développer
des dynamiques collectives sur des secteurs territoriaux et de limiter les
coûts de gestion administrative pour consacrer plus de moyens à l?animation
du dispositif.
Toutefois, sa mise en place se heurte à des difficultés juridiques. En
effet, le passage d?une individualisation de la taxe au prorata des valeurs
locatives à une performance de tri collective (au niveau d?un quartier ou
d?un secteur) n?est pas autorisé par la règlementation et pourrait se révéler
juridiquement fragile au regard du principe d?égalité.
Un des principaux obstacles au développement de la tarification
incitative est le coût de sa mise en place, estimé entre 20 et 40 ¤ par
habitant, ramené à 15 ¤ après pris en compte des aides (soit de 45 à 75 %
d?aides)114. Ce surcoût est dû principalement aux investissements à réaliser
au démarrage, mais aussi à l?accompagnement de la démarche qui doit se
poursuivre sur une longue période115. Toutefois, les économies réalisées du
fait de la baisse des tonnages d?OMR (et donc de la baisse des coûts de
traitement) doivent permettre de couvrir les frais initiaux. En effet,
l?économie observée réalisée sur le coût aidé (reste à charge) par les EPCI
ayant mis en place une tarification incitative est, en moyenne en 2021116,
de 13 euros par habitant. Les aides au démarrage sont donc essentielles
pour soutenir les collectivités qui mettent en place la tarification incitative.
Pour encourager plus fortement les EPCI à recourir à la TEOMI, la
loi de finances initiale pour 2019 comporte deux mesures : l?année
d?instauration de la part incitative, le produit de TEOM peut augmenter
114 Source : Ademe 2020 - chiffres clés : coût de la mise en place de la TI.
115 En 2022, l?Ademe a enrichi l?offre de soutien aux collectivités en tarification
incitative au travers une nouvelle modalité d?aide d?accompagnement de l?information
individuelle des usagers sur leur utilisation du service.
116 Source : Ademe 2021 - chiffres clés : coût de la mise en place de la TI.
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COUR DES COMPTES
60
jusqu?à 10 % (par rapport à l?année précédente) et les frais de gestion levés
par l?État, fixés à 8 % sur la TEOM, sont limités à 3 % pendant cinq ans.
Ces incitations se sont cependant avérées insuffisantes, au regard
des coûts induits par cette évolution et n?ont pas permis de rendre la
TEOMI plus attractive que la TEOM.
Afin de développer la tarification incitative (TEOMI ou REOMI), la
Cour recommande donc d?accentuer les aides au démarrage, en allégeant
le coût de sa mise en place, en portant la part du financement extérieur à
80 % du surcoût117. Ces aides ponctuelles pourraient prendre la forme par
exemple de subventions directes (fonds chaleur et fonds économie
circulaire gérés par l?Ademe) ou d?une atténuation supplémentaire des frais
de gestion grevant la TEOMI.
D - La spécificité des territoires touristiques
Les territoires à forte activité touristique118, le plus souvent
saisonnière, connaissent des problèmes spécifiques pour adapter leurs
fréquences de collecte à la variation parfois très importante des populations
utilisant le service public.
Les tournées supplémentaires et le traitement des tonnages générés
par l?activité touristique entrainent pour ces territoires des coûts plus élevés.
La moyenne des tonnages collectés par habitant indique la même tendance
en étant supérieure à la moyenne nationale tant pour les DMA (669
kg/habitant pour 529 kg/habitant) que pour les OMR (356 kg/habitant pour
249 kg/habitant en moyenne nationale)119. Cette différence est encore
accentuée pour la sous-catégorie120 des territoires dits « très touristiques »121.
117 La part couverte par des aides extérieures à l?EPCI est actuellement, en moyenne,
de 50 %.
118 « Territoires à dominante touristique » selon la classification proposée par l?Ademe
119 Source : Ademe chiffres clés de la collecte en 2019.
120 La typologie des habitats de l?Ademe comprend cinq catégories et dix sous-
catégories. Dans la catégorie touristique sont distingués : les territoires très touristiques,
les touristiques urbains et les autres touristiques.
121 La région Provence-Alpes-Côte d?Azur (PACA), aux caractéristiques touristiques
affirmées, présente par exemple des tonnages d?ordures ménagères exceptionnellement
élevés avec 713 kg de DMA par an et par habitant et 372? kg d?OMR en 2019 (source :
observatoire régional des déchets PACA).
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61
Graphique n° 12 : ratios de collecte des OMR par typologie
de territoires en 2019
Source : Ademe chiffres clés 2019 (parution : juin 2021)
La taxe de séjour (TS) : une taxe affectée au développement touristique
Créée par une loi de 1910, la taxe de séjour est instituée à l?initiative
des communes réalisant des dépenses favorisant l?accueil des touristes.
À l'origine, elle ne pouvait être instituée que par les stations classées de
tourisme. Cette possibilité s?est élargie au fur et à mesure des années (aux
communes de montagne, du littoral, réalisant des actions de promotion
touristique ou de gestion de leurs espaces naturels ?).
Elle est due par personne et par nuit et son montant varie selon le
type d'hébergement (hôtel, meublé de tourisme, camping) et selon le
classement de l'hébergement. Les recettes de la taxe de séjour sont affectées
obligatoirement aux dépenses destinées à favoriser la fréquentation
touristique d'une commune ou d'une intercommunalité.
Afin de permettre la couverture des charges supplémentaires du service
public des déchets générés spécifiquement par la fréquentation touristique,
pourrait être envisagée l?affectation d?une part additionnelle à la taxe de séjour
(surtaxe) perçue par les EPCI122. Le produit de la TS resterait ainsi affecté au
développement touristique mais les territoires classés « touristiques », selon la
classification de l?Ademe, pourraient percevoir, sur la même base que la TS,
cette part complémentaire affectée au financement des opérations de
prévention, de collecte et de traitement des ordures ménagères.
122 La TS est actuellement obligatoirement affectée aux offices de tourisme et ne peut
donc financer des surcoûts liés à la collecte et au traitement des déchets.
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62
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
En France, le volume d?ordures ménagères par habitant, notamment
résiduelles, se stabilise à un niveau supérieur à la moyenne européenne.
Le service public de gestion des déchets (SPGD) est exercé par les
établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats
intercommunaux de traitement, dans le cadre d?une programmation
tripartite État-région-intercommunalités.
Or, cette programmation est trop complexe et souffre d?une
articulation insuffisante entre les différents niveaux territoriaux qui la rend
finalement inefficace. Pour permettre à la France de réaliser les objectifs
que le législateur a fixés dans le code de l?environnement et rejoindre les
meilleurs standards européens de prévention et de gestion des DMA, la
programmation doit être améliorée. Une simplification des documents de
programmation nationaux, une programmation régionale plus
opérationnelle, grâce à davantage de précisions sur les investissements à
réaliser et à des plans locaux de prévention des déchets ménagers et
assimilés déclinés pour chaque EPCI, contribueraient à une plus grande
lisibilité des différents niveaux et outils de programmation.
Par ailleurs, comme la Cour l?avait déjà souligné en 2011, la
mobilisation des parties prenantes implique de disposer de tableaux de
bord synthétiques permettant de confirmer une direction et un rythme de
réalisation adéquats. Pour atteindre ce résultat, la collecte locale des
données doit être accélérée et simplifiée dans un compte-rendu unique et
harmonisé.
Les dépenses du service public de gestion des déchets augmentent
de manière continue depuis vingt ans et sont financées principalement par
la fiscalité ou la tarification locale et les filières REP. Pour réduire cette
dépense et atteindre l?objectif prioritaire de réduction des quantités de
déchets collectées et traitées, les modalités de tarification (ou de fiscalité)
doivent inciter plus clairement l?usager à des efforts de tri. La tarification
incitative (REOMi ou TEOMi) permet de limiter les quantités d?OMR en
liant, au moins partiellement, la qualité du tri et le prix payé par l?usager.
Toutefois, son développement, prévu par la loi, se heurte à des difficultés
de mise en place et à des coûts de démarrage importants qui doivent être
mieux pris en charge.
La spécificité des territoires touristiques entraine des charges pour
le SPGD qui nécessitent la mobilisation de moyens complémentaires. Une
part additionnelle de taxe de séjour payée par les usagers à l?origine de
ces surcoûts permettrait de les financer.
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Au vu de l?ensemble de ces constats, les juridictions financières
formulent les recommandations suivantes :
1. Unifier, au plus tard en 2024 les documents de programmation
nationale de la prévention et de la gestion des déchets, en y renforçant
le volet industriel de la plasturgie et de la valorisation énergétique
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
2. Rendre obligatoire, au plus tard en 2024, lorsque le programme local
de prévention des déchets ménagers est élaboré par le syndicat de
traitement, l?adoption d?un programme de mise en oeuvre spécifique
par EPCI (ministère de la transition écologique et de la cohésion des
territoires).
3. Publier, au plus tard en 2024, un tableau de bord annuel du Service
public de gestion des déchets, à l?échelon national et par type
d?établissement public de coopération intercommunale, des six
indicateurs-clefs, incluant la prévention et le poids des ordures
ménagères résiduelles assortis d?une représentation graphique des
trajectoires constatées par rapport aux trajectoires cibles (ministère
de la transition écologique et de la cohésion des territoires, régions).
4. Publier, au plus tard en 2024, un tableau de bord annuel, pour
l?ensemble des filières de Responsabilité élargie du producteur et,
pour chacune d?elles, des six indicateurs-clefs, incluant la prévention,
assortis d?une représentation graphique des trajectoires constatées
par rapport aux trajectoires cibles (ministère de la transition
écologique et de la cohésion des territoires, éco-organismes).
5. Harmoniser, au plus tard en 2024, dans un seul compte-rendu le bilan
annuel, par intercommunalité, des actions de prévention et de gestion
des déchets ménagers autour des six indicateurs-clefs et du coût du
service par habitant (ministère de la transition écologique et de la
cohésion des territoires).
6. Favoriser la mise en place de la tarification incitative en allégeant son
coût pour l?intercommunalité grâce à un financement complémentaire
porté à 80 % sur les premiers exercices (ministère de la transition
écologique et de la cohésion des territoires, ministère du budget, des
comptes publics et de la fonction publique) ;
7. Instaurer une surtaxe à la taxe de séjour dont le produit serait affecté
aux actions relatives à la prévention et à la gestion des déchets
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
ministère du Budget, des Comptes publics et de la Fonction Publique).
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Le dispositif opérationnel : une
transformation à accélérer vers
l?économie circulaire
Le présent chapitre examine les étapes du processus de gestion des
déchets ménagers et assimilés (la prévention, la collecte et le traitement)
telles qu?elles sont mises en oeuvre par les organismes qui en ont la charge.
Les résultats atteints par la France et les choix de gestion de déchets
y sont exposés et comparés à ceux des autres pays de l?Union Européenne.
Ces comparaisons et les exemples de bonnes pratiques comme les
difficultés rencontrées aux niveaux local et national, illustrent la
complexité de cette politique et mettent en évidence les efforts qui doivent
être réalisés en France pour atteindre les objectifs fixés.
I - La prévention : priorité officielle, mais
parent pauvre de la gestion des déchets
L?article L. 541-1 du code de l?environnement prévoit de « donner la
priorité à la prévention ». La prévention consiste à réduire la quantité de
déchets produits et leur dangerosité en intervenant à la fois sur les modes de
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66
production et de consommation des produits123. Elle relève au premier chef
des entreprises puisqu?elles sont en mesure de réduire à la source la quantité
de matière des produits qu?elles mettent sur le marché. Certains territoires,
pionniers mais trop minoritaires, montrent qu?ils peuvent aussi avoir une
action déterminante sur la prévention en accompagnant la consommation
responsable, l?autogestion des déchets et le geste de tri des citoyens.
A - À l?étape de la production : écoconception
et durabilité des produits
80 % des incidences des produits sur l?environnement sont
déterminées lors de la phase de conception124. Cette responsabilité des
entreprises se traduit par les écocontributions qu?une partie d?entre elles
paient aux éco-organismes. Ce principe pollueur-payeur doit les inciter à
réduire les quantités de matière125 ainsi qu?à prêter attention aux conditions
d?approvisionnement en matières premières et au recyclage des biens
fabriqués. Par exemple, pour prévenir les déchets plastiques, les entreprises
ont la possibilité de supprimer les contenants à usage unique ou sans
fonction technique (comme les propriétés barrière pour les produits
alimentaires) ou les produits et objets qui perturbent les chaînes de
recyclage parce qu?ils sont trop petits ou dépourvus de filière de recyclage
opérationnelle126 .
Les entreprises sont également invitées, tant par la réglementation
européenne que par la législation française, à construire des biens
incorporant des matières premières recyclées, qui soient susceptibles d?être
réparés et réutilisés127 ou à développer l?économie dite de la fonctionnalité.
Les fabricants de produits générateurs de déchets sont tenus de soutenir les
réseaux de réemploi, de réutilisation et de réparation, notamment ceux
gérés par les structures de l?économie sociale et solidaire128.
123 Selon l?article L. 541-1-1 du code de l?environnement, qui regroupe les définitions des
termes en lien avec les déchets, la prévention désigne l?ensemble des mesures qui visent à
réduire la quantité de déchets, leur nocivité et les matières nocives entrant dans les produits.
124 Rapport du Parlement européen pour aboutir à une économie circulaire du 10-02-2021
125 Par exemple, l?écocontribution payée annuellement par les metteurs en marché est
modulée aux poids et à l?Unité de Vente Consommateur (UVC) qui intègrent les emballages.
126 C?est-à-dire les produits et objets hors filières déjà opérationnelles (p. ex. bouteilles
en plastique de PET) ou en passe de le devenir (p. ex. pot de yaourt en PS).
127 Un indice de réparabilité doit pouvoir être communiqué pour les équipements
électriques et électroniques et, à compter du 1er janvier 2024, un indice de durabilité.
Règlement (UE) 2021/341 de la Commission du 23/2/21.
128 Article L. 541-10 du code de l?environnement
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176087/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599099
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
67
L?économie de la fonctionnalité
L?économie de la fonctionnalité privilégie l?usage souvent ponctuel
(se déplacer, s?alimenter, habiter, etc.) à la possession permanente et tend à
vendre des services (location, etc.) plutôt que les produits eux-mêmes.
Conservant la propriété des matériels, le loueur a intérêt à allonger leur durée
de vie et réduire la consommation des intrants (énergie, engrais, etc.), comme
par exemple pour un contrat d?installation et d?entretien se substituant à la
vente d?une chaudière.
Dans le tableau de bord national des éco-organismes que les
juridictions financières recommandent de créer, un des six objectifs devrait
être, comme proposé supra, un indicateur de l?effort de financement de la
prévention (dépenses en faveur de la prévention/ pourcentage du chiffre
d?affaires des éco-organismes).
L?évolution de la demande des consommateurs a une influence de
plus en plus forte sur l?engagement des entreprises dans ces directions129.
L?écoconception peut aussi être encouragée par des mécanismes incitatifs
ou prescriptifs mis en place par les pouvoirs publics. Les mécanismes
incitatifs prévus dans la loi comme les éco-modulations130, pour les
produits soumis à une REP, conservent la préférence des entreprises. Ils
peuvent même aboutir, dans certains cas, au versement à l?entreprise d?une
prime supérieure à son écocontribution131.
Les instruments prescriptifs se développent quant à eux dans le
cadre de l?harmonisation des conditions du marché unique européen132. Tel
129 L?indicateur 9 du PNPD 2014-2020 mesure la sensibilité des Français à la prévention
(Indice global calculé par l?Ademe à partir d?enquêtes).
130 L?art. L. 541-10-3 du code l?environnement issu de la loi AGEC (annexe IV bis à la
directive 2008/98) rend possible le recours aux contributions financières pour
promouvoir l?incorporation de matériaux recyclés et le réemploi. Ces « éco-
modulations » sont des modifications (en %) de l?écocontribution, acquittée par les
producteurs à l?éco-organisme.
131 Arrêté du 25/12/2020 modifiant le cahier des charges de la filière emballages
ménagers et créant une prime pour intégration de 10 % de matière plastique recyclée
dans ces emballages. Ce dispositif fait l?objet d?un recours au motif qu?il revient à faire
financer la prise en charge des déchets du bénéficiaire par les autres adhérents et
constitue donc une rupture avec le principe d?internalisation des externalités négatives
générées par la mise en marché.
132 Dans sa proposition de règlement relatif aux batteries du 10 décembre 2020, la
Commission propose qu?à partir de 2030, les batteries respectent des objectifs de
collecte et des proportions minimales de contenu recyclé.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043974919
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68
a été le cas avec l?interdiction progressive par la directive sur le plastique
à usage unique « single use plastic » (SUP) de tous les plastiques à usage
unique entre 2016 et 2040133. La mise sur le marché de certaines catégories
de produits et de matériaux peut également être subordonnée au respect
d?un taux minimal d?incorporation de matières recyclées134 (p. ex. 25 % de
plastique recyclé en 2025 pour les bouteilles pour boisson fabriquées en
PET)135 , d?intégration des déchets produits dans une filière de recyclage
136 ou d?affichage d?un indice de réparabilité ou de durabilité137.
Si l?engagement des entreprises en faveur de la prévention demeure
insuffisant, l?État disposera de la possibilité de renforcer les mécanismes
incitatifs et prescriptifs (interdiction de certains produits ou matériaux,
incorporation obligatoire de matières recyclées, ratio minimal de dépenses
de prévention).
B - Dans les territoires : une action trop exclusivement
centrée sur la communication
Pour les EPCI qui en disposent, les programmes locaux mentionnent
peu d?actions de prévention ou sont défaillants, tant dans le champ de la
prévention couvert que dans les moyens mis en oeuvre ou dans les outils de
suivi prévus.
Dans les programmes intercommunaux et leurs comptes-rendus de
mise en oeuvre déjà présentés en première partie du rapport, le volet
prévention est presque systématiquement manquant ou lacunaire. N?y
figurent ni bilan chiffré des quantités de déchets évitées (p. ex. tonnages de
bio déchets détournés à la suite d?actions de communication ou de
composteurs subventionnés138), ni analyse des facteurs de réussite et
d?échec des actions conduites139 (p. ex. mise en rapport dans certains cas
133 Directive (UE) du 5 juin 2019 relative à la réduction de l?incidence de certains produits
en plastique sur l?environnement. Cf. détail année par année des interdictions en annexe 2.
134 II. de l?article L. 541-9 du code de l?environnement
135 Article 6 de la directive 2019/904 et annexe II de la directive emballages.
136 III. et IV. de l?article L. 541-9 du code de l?environnement.
137 Art. L. 541-9-2.-I du code de l?environnement
138 Le prix d?un composteur subventionné à Valenciennes varie de 13 à 22 ¤ selon leur
matière (bois ou plastique) et leur volume (400 à 800 litres)
139 Des indicateurs de prévention sont pourtant proposés pour les RPQS, dans le
progiciel ComptaCoût® alimentant SINOE.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074220/LEGISCTA000006176616/#LEGISCTA000023268652
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074220/LEGISCTA000006176616/#LEGISCTA000023268652
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041555848/
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VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
69
de la hausse des dépenses de communication sur le tri et de l?augmentation
des taux de refus de tri sur la même période).
Lorsqu?ils sont précisés, les crédits et les ressources humaines140
alloués aux actions de prévention sont, pour la plupart, inférieurs à 1 % du
coût total du service public (au maximum 2 % pour certaines collectivités).
Avec une moyenne nationale de dépenses de prévention par habitant de
1,5 ¤ en 2018 et 2019141, le nombre de personnes touchées, y compris dans
les territoires pilotes, est faible.
Dans les programmes locaux de prévention des déchets ménagers et
assimilés (PLDMA), la prévention se limite le plus souvent à des actions
générales insuffisamment adaptées aux différents publics de
communication pour former des « écocitoyens » : sensibilisation du public
au tri142, au jardinage durable et à la gestion des déchets verts, au recyclage
et aux nuisances des dépôts sauvages.
Ce type d?actions est utile dans l?accompagnement des particuliers
pour modifier leurs comportements notamment en phase d?extension des
consignes de tri ou de mise en place de la tarification incitative.
Cependant, comme le montre le schéma ci-dessous et comme on
le constate dans les collectivités territoriales pionnières en France et à
l?étranger, les actions de prévention pouvant être mises en oeuvre par
les intercommunalités couvrent un champ plus large que la seule
communication143.
140 Par exemple 3,8 ETP en moyenne au SMICTOM Alsace centrale (CRC Grand Est,
novembre 2021).
141 Ademe, synthèse du guide « Élaborer et conduire avec succès un PLPDMA » (2018)
La moyenne en 2016 était de 0,8. Exemples (2019) : 0,19 ¤ par habitant pour le syndicat
du département de la Haute-Marne. 1,14 ¤ pour la métropole de Lyon, 0,9 ¤ pour la
métropole de Nice (objectif de 2,48 ¤ pour la période 2022-2026).
142 Distribution de mémo-tri et guides du compostage, porte à porte, recrutement
d?ambassadeurs de tri et de référents compostage pour faire du porte-à-porte,
manifestations grand public, lettres d?information, animations scolaires et extra-
scolaires, autocollants « stop pub », nettoyage citoyen.
143 Pour le gaspillage alimentaire dans la restauration scolaire et périscolaire, le réseau
REGAL (RÉseaux de lutte contre le Gaspillage Alimentaire), lancé par le ministère de
l?Agriculture qui vise mobiliser, à l'échelle d'un territoire, l'ensemble des acteurs de la
chaîne alimentaire (professionnels de l?alimentation, associations, acteurs
institutionnels, porteurs de projets, citoyens).
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-8
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-departemental-denergie-et-des-dechets-de-la-haute-marne-sded-52
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-de-lyon-enquete-sur-la-prevention-et-la-gestion-des-dechets
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-nice-cote-dazur-nca-nice-alpes-maritimes
https://agriculture.gouv.fr/avec-regal-les-regions-se-mobilisent-contre-le-gaspillage-alimentaire
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70
Schéma n° 4 : les actions de prévention accessibles
aux collectivités territoriales
Source : Cour des comptes
Le plan local de prévention de Besançon144
Le syndicat de traitement de l?agglomération de Besançon145 a appuyé
son action de prévention sur un plan Territoire Zéro Déchets Zéro Gaspillage146
bénéficiant d?un soutien financier significatif de l?Ademe (450 000 ¤).
144 CRC Bourgogne-Franche-Comté, Syndicat de traitement de l?agglomération de
Besançon (Sybert), janvier 2021.
145 Le Sybert couvre un territoire d?environ 1250 km2 et traite les déchets de 163
communes regroupant 225 000 habitants. C?est un territoire au profil mixte, composé
d?une zone urbaine très dense, la ville de Besançon (qui regroupe 52 % de la population
desservie) et de zones rurales.
146 Le programme « Territoire Zéro Déchet Zéro Gaspillage » (TZDZG) de l?Ademe a
pour l?objet est l?accompagnement des collectivités dans une dynamique d'économie
circulaire. Les 153 EPCI retenus bénéficient de soutien financier et d?un
accompagnement méthodologique de l?agence pour l?élaboration d?un plan d?actions
aux fins d?amélioration du recyclage et de la valorisation des déchets.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-besancon-et-de-sa-region-pour-le-traitement-des-dechets-sybert-0
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
71
La deuxième version de ce plan (2015-2020), qui a été conçue comme
un accompagnement de la mise en oeuvre de la redevance incitative, affichait
parmi les indicateurs clés une cible moyenne de 100 kg d?OMR par an et par
habitant en 2022. Le plan, quantifiait notamment les objectifs de baisse de
volume des OMR, des DMA et des déchets dangereux déposés en déchèteries
et de ceux détournés de l?élimination vers le réemploi via les ressourceries.
Pour atteindre ces objectifs, le Sybert avait retenu d?abord un axe de
travail relatif à la promotion et l?accompagnement des différents modes de
compostage (collectif en pieds d?immeuble, chalet de compostage, composteur
électromécanique en collectif dense, lombricompostage, vente de composteurs
individuels). Il prévoyait également des actions de sensibilisation du public
telles que le prêt de vaisselle réutilisable, la promotion d?un « Gourmet Bag »
auprès des restaurateurs pour prévenir le gaspillage alimentaire et la mise en
place d?une stratégie de communication. En outre, des dispositifs d?évitement
des déchets étaient développés comme le prêt d?un kit de couches lavables et
l?accompagnement des structures volontaires, la promotion du réemploi et de la
réparation à travers l?installation de locaux dédiés aux ressourceries dans
chacune des déchèteries du territoire.
Ces actions ont contribué, à côté du déploiement de la tarification
incitative, de l?extension des consignes de tri et de mesures telles que la
baisse des fréquences de collecte, à la réduction des volumes d?ordures
ménagères résiduelles. Fin 2020, le volume d?OMR collecté par le Sybert
s?élevait à 136 kg par an et par habitant, soit une très bonne performance
par rapport à la moyenne nationale (les meilleurs ratios, soit 95 kg par
habitant et par an, sont relevés dans des territoires à forte dominante rurale).
À l?interface entre la prévention et le recyclage, les actions dites en
« R » (réparation, réemploi147, ressourcerie148 et réutilisation) offrent des
perspectives prometteuses. La loi prévoit qu?en 2030, 5 % du tonnage de
déchets ménagers, notamment des textiles et des équipements électriques
et électroniques et d'ameublement, soient concernés149.
147 Le réemploi consiste à collecter en déchetteries des matières et objets (meubles,
vaisselles, jouets textiles?) les reconditionner et réparer et les revendre (produits de
seconde main).
148 Une ressourcerie est une structure qui gère la récupération, la valorisation et la
revente de biens sur un territoire donné. 154 étaient en activité en 2020 dont une
vingtaine à Paris. Le taux de remise sur le marché est de 41 % des objets collectés.
(Observatoire annuel des ressourceries).
149 Art. L. 541-1 I. 3° du code de l?environnement
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72
Les collectivités territoriales doivent depuis 2020, dans toutes leurs
déchèteries, qui jouent déjà un rôle central de vecteur des messages de
prévention, disposer d?une zone de dépôt destinée aux produits
réemployables150. Elles ont l?obligation de permettre par contrat aux
acteurs de l'économie sociale et solidaire d?y récupérer et traiter les objets
en bon état et réparables. Elles peuvent aussi subventionner ces
associations lorsqu?elles collectent les articles chez les particuliers. En cas
de carence des initiatives privées, elles peuvent structurer les filières de
réemploi par la création de sociétés d?économie mixte151 qui peuvent
contractualiser avec les éco-organismes et développer une activité
commerciale.152 Les déchèteries peuvent devenir ainsi des éco-pôles
mettant en relation les ameneurs et les preneurs pour offrir une deuxième
vie aux objets, à l?image de ce qui se fait en Autriche, en Flandre belge,
mais aussi en France, par exemple en Gironde 153.
Des exemples étrangers de réseaux de réemploi
À titre d?exemples, la Belgique (Flandre) et l?Autriche, considérées
comme pionnières dans ce domaine, ont mis en place, des réseaux denses
de réemploi/ seconde main. En Flandre, ils sont présents dans chaque
municipalité (ou centre commun à plusieurs municipalités voisines), avec
des objectifs fixés en termes de biens réutilisés en kg par habitant. Les biens
sont déposés par les habitants dans ces centres ou collectés dans les
déchèteries (une benne pour les biens hors d?usage et une benne pour les
biens réparables/réutilisables) afin d?être revendus. En Autriche, le réseau
« repanet » regroupe 27 organisations employant 1 800 personnes dans 140
lieux (principalement pour le textile et les équipements électroniques).
Cet adossement des ressourceries aux déchèteries est encore trop
rare, mais il se heurte, il est vrai, à certaines contraintes (sites des
déchèteries manquant de place, trop excentrés ou mal sécurisés). La mise
en place de nouvelles REP qui collectent désormais des objets et appareils
en amont des déchèteries154répond aussi à cet objectif.
150 Article L. 2224-13 du CGCT
151 Centre Vosges TLC de tri textile de valorisation par la revente, l?export ou
l?incinération et d?insertion des personnes en difficulté au regard de l?emploi. 330
bornes d?apport volontaire. 30 salariés et 150 tonnes collectées chaque mois.
152 Article L. 2224-13 du CGCT
153 En Gironde, le SMICVAL, profitant de la modernisation de son réseau de
déchèteries, a créé un supermarché inversé, lieu de réemploi mais aussi de formation et
de sensibilisation, fonctionnant sur le principe du « donnez, prenez, recyclez ».
154 Exemples : jouets, articles de sport, de loisirs, de bricolage et de jardins, deux roues.
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
73
Les intercommunalités et les éco-organismes doivent être incités à
augmenter la part de leurs dépenses consacrées à la prévention et à financer
des actions plus opérationnelles et ambitieuses que la communication. Les
recommandations n°3 et 4 présentées ci-dessus et visant à publier des
tableaux de bord annuel de six indicateurs-clefs parmi lesquels la prévention
(ratio dépenses de prévention/ dépenses totales), répondent aussi à cet
objectif. Pour permettre le calcul et la publication de cet indicateur, les
juridictions financières recommandent dans un premier temps de dresser
dans la réglementation la liste des actions financées par les EPCI et les REP
pouvant être considérées comme dépenses de prévention (État).
II - La collecte : peu de progrès
sur les enjeux prioritaires
Malgré leur réduction régulière (249 kg/habitant en 2019 pour
298 kg/habitant en 2009), les tonnages d?OMR (16 611 kt en 2019) restent
la part la plus importante de l?ensemble des déchets collectés.
Tableau n° 2 : les tonnages collectés en 2019
Source : ADEME, chiffres clés 2019 (parution juin 2021)
La dernière étude de caractérisation MODECOM de 2017 montre
que les OMR sont composées d?une majorité de produits valorisables dont
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COUR DES COMPTES
74
40 % de flux ciblés par des filières REP existantes et 38 % potentiellement
concernés par une valorisation organique (dont un tiers de bio déchets).
L?enjeu est donc de développer les efforts de pré-collecte155 et de
collecte afin de distraire des OMR le plus possible de produits valorisables.
A - Une organisation territoriale multiforme
1 - Une gestion partagée entre régie et marchés de prestations
de service
La collecte s?exerce soit en régie (directement par les services de la
collectivité ou par des contrats de prestation de service), soit en délégation
de service public (DSP). L?enquête a révélé plusieurs exemples mixtes avec
une partie du territoire en gestion directe (régie ou marchés publics) et une
autre en DSP. Cette organisation résulte de la volonté de maintenir une forme
de concurrence entre les différents modes de gestion et aussi de conserver la
compétence technique permettant d?évoluer dans les choix de gestion.
Nice et Lyon : une volonté de maintenir un fonctionnement mixte
entre collecte en régie ou confiée à des prestataires
Pour Nice-Côte d?Azur, la compétence est exercée à la fois en régie
(51 % de la population en 2022), s?agissant notamment de la collecte de la
ville de Nice et via des marchés (49 %) attribués à des entreprises différentes
pour d?autres secteurs géographiques.
La métropole de Lyon a fait le choix d?une collecte effectuée en
partie en régie directe par ses propres services et en partie par des entreprises
prestataires. La part de ces dernières est passée de 49 à 57 % des tonnages
collectés entre 2015 et 2019.
La collectivité explique l?externalisation partielle du service collecte
et le maintien d?un système mixte par la volonté de mettre en place une
émulation entre les secteurs public et privé ainsi qu?une démarche
d?amélioration continue. Cette organisation permet, selon la métropole, un
meilleur contrôle des prestataires grâce à la connaissance technique du métier
détenue par ses services et permet de limiter les blocages en cas de grève.
155 La pré-collecte est l?ensemble des opérations (principalement de tri) qui précèdent
le ramassage des déchets par le service d?enlèvement.
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75
La différence de coûts entre la gestion en régie et le recours à un
prestataire est difficile à établir compte tenu de la diversité des conditions
de collecte. Toutefois, le coût à la tonne collectée en régie peut être
supérieur au coût de la collecte par un prestataire : par exemple pour le
SICTOM Pézenas-Agde156, les tonnages collectés par un prestataire sur le
secteur d?Agde représentent un tiers des tonnages totaux alors que le coût
ne représente que 22 % du total157.
Certaines collectivités constatent que lorsque la collecte est assurée
par un prestataire (dans le cadre d?un marché par exemple), il est plus
difficile de contrôler la qualité du tri.
L?enjeu pour les EPCI reste d?assurer un équilibre optimal entre
l?indispensable maîtrise des coûts et la qualité du service proposé.
2 - Un équilibre à trouver entre qualité et coût du service rendu
La diversité des types d?habitat au sein de la très grande majorité des
EPCI conduit à différentes modalités de collecte, prenant en compte la
densité de population et le type d?habitat (ville-centre, zones périurbaines,
zones plus rurales, habitat collectif/habitat individuel).
Cette hétérogénéité n?est pas un problème : l?adaptation de la
collecte (notamment sa fréquence) aux particularités d?un territoire
intercommunal est une condition de la réussite d?une politique de réduction
des déchets.
La collecte est organisée selon trois modalités adaptées aux
différentes typologies de territoire et à la nature des produits triés :
- La collecte en porte à porte (PAP) particulièrement adaptée au milieu
urbain dense ;
- La collecte en points d?apports volontaires (PAV) souvent utilisée pour
une partie au moins du tri sélectif et quasiment généralisée pour le verre ;
- La collecte en points de regroupement158, utilisée dans les secteurs à
faible densité de population.
156 cf. CRC Occitanie, Smictom Pézenas-Agde, février 2021.
157 La configuration du territoire (densité de population beaucoup plus forte sur la commune
d?Agde et activité touristique importante) peut expliquer ces différences de coûts.
158 Les points de regroupement concernent des usagers identifiés, ce qui n?est le cas des PAV.
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76
Photo n° 1 : les trois modalités du tri à la source des bio déchets
Source : Présentation de la société Les Alchimistes à destination des juridictions financières
octobre 2020
Si la collecte en porte à porte présente de nombreux avantages dont
un plus grand confort pour les usagers, elle engendre les coûts les plus
élevés tant en matériel qu?en personnel159. L?amélioration de la qualité du
tri conduit à des arbitrages sur les fréquences de collecte. Ainsi, l?ajout
d?une tournée spécifique (par exemple pour les bio déchets) ne peut se faire
à coût égal qu?en supprimant une tournée de collecte des OMR.
3 - Professionnels : une orientation prioritaire vers les déchèteries
Un accès facilité aux déchèteries (notamment pour les
professionnels) permet de développer le tri et de limiter les dépôts
sauvages, sources de nuisances et de coûts importants. C?est pourquoi le
volume des dépôts en déchèteries, hors secteur urbain dense, est en forte
augmentation et les modalités d?accès à ces équipements, la qualité du tri
réalisé et le développement de filières de traitement deviennent des enjeux
déterminants pour le service public des déchets.
L?étude MODECOM 2017 montre que, dans les déchèteries, la
benne tout-venant peut contenir encore potentiellement 28 % de déchets
relevant d?une filière REP et 40 % de déchets (plastiques, métaux, bois non
transformé, etc.) qui pourraient faire l?objet d?une valorisation matière. La
159 Le coût moyen par habitant de la collecte en porte à porte est supérieur de 20 % au coût
moyen en point d?apport volontaire (référentiel national des coûts 2016 de l?Ademe.
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77
recommandation précitée de retenir la quantité d?OMR collectée, y
compris les bio déchets, les emballages et les déchets des professionnels,
comme indicateur-clef pour mesurer la performance du service public,
permettra aussi de suivre les avancées dans ces domaines.
B - Promouvoir la collecte et le tri des bio déchets
et des emballages en plastique
1 - Les fortes potentialités de la collecte des bio déchets
malgré sa complexité
a) La complexité propre à la collecte des bio déchets
La séparation des biodéchets du flux des déchets résiduels et leur
exploitation par le compostage, l?épandage ou la méthanisation a un impact
déterminant sur le poids des OMR. Elle constitue, depuis la loi sur la
transition énergétique et pour une croissance verte (LTECV), un des
objectifs prioritaires des politiques de gestion des déchets.
Le tiers des OMR encore composé de bio déchets (75 kg par habitant
et par an) est une source de gaspillage de ressources importante160. Ces
matières fermentescibles contiennent des matières organiques précieuses
dont le traitement non spécifique (par exemple leur incinération) se révèle
inutilement coûteux161.
La LTECV fixe l?objectif de la généralisation du tri à la source des
bio déchets au 31 décembre 2023162. Toutefois, elle ne comporte pas
l?obligation d?organiser la collecte distincte des biodéchets. L?article 70 de
cette loi précise que : « Chaque citoyen disposera d?une solution lui
permettant de ne pas jeter ses biodéchets dans les ordures ménagères
résiduelles. » Les solutions possibles sont donc les collectes séparées et/ou
la gestion de proximité à l?aide de composteurs individuels ou partagés en
pied d?immeuble, à l?échelle d?un quartier ou d?un village. Des
160 Le retour au sol des bio déchets est particulièrement utile car la majorité des sols
agricoles du territoire français sont appauvris en matières organiques.
161 Les bio déchets sont composés majoritairement d?eau rendant leur incinération
(lorsqu?ils sont traités en OMR) encore plus regrettable.
162 La date initialement fixée au 1er janvier 2025 a été avancée au 31 décembre 2023 par
la loi AGEC.
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COUR DES COMPTES
78
expérimentations technologiques pour réduire les coûts sont actuellement
en cours mais ne peuvent pas encore être évaluées.
Toutefois, le tri des biodéchets peut se révéler délicat compte tenu
des difficultés techniques, financières et sociales pour mobiliser ces flux.
La collecte séparée des biodéchets devrait, selon l?Ademe, induire à elle
seule un coût supplémentaire de 15 à 25 ¤ par habitant.
Les modalités de tri à la source devront être adaptées à chaque
spécificité locale et il n?apparaît pas opportun de recommander, à ce stade,
une modalité plutôt qu?une autre. La diversité des solutions envisageables
et surtout la possibilité de les combiner sur un même territoire pour les
adapter aux typologies d?habitat, conduisent à ne pas imposer de mesures
généralisées trop radicales (comme la collecte sélective des biodéchets) qui
pourraient se révéler contre-productives et coûteuses.
Les EPCI présentant les politiques les plus efficaces de tri des bio
déchets sont le plus souvent engagés sur de longues périodes avec une
planification et une programmation d?actions précises associées à des
évaluations fréquentes, à l?exemple du syndicat intercommunal pour la
valorisation et le traitement des déchets ménagers du Puy-de-Dôme
(Valtom).
Une politique volontariste de collecte des bio déchets
Le syndicat intercommunal pour la valorisation et le traitement des
déchets ménagers du Puy-de-Dôme (Valtom163) assure le traitement des
DMA pour neuf EPCI du Puy de Dôme et de la Haute Loire.
Le Valtom a mis en oeuvre un schéma territorial de gestion des
déchets organiques (STGDO), adopté en 2017, pour le compte de ses
membres avec des objectifs à l?horizon 2025 en référence à 2017 : réduire
de moitié la quantité des bio déchets présents dans les OMR, tripler le
volume de bio déchets alimentaires traités et diminuer de 12 % les tonnages
de déchets verts à traiter en déchèterie.
Le schéma prévoit d?utiliser plusieurs leviers comprenant la création
d?un réseau de maitres-composteurs (9 emplois), la diffusion d?un grand
nombre de composteurs : 50 000 individuels, 225 en pied d?immeuble, près
de 1 000 en quartier et 450 en établissement.
163 Cf. rapport CRC Auvergne-Rhône-Alpes, syndicat Valtom, juin 2022.
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https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/valorisation-biodechets-agir
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-pour-la-valorisation-et-le-traitement-des-dechets-menagers-et-assimiles-du
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
79
Selon les premières estimations présentées dans les rapports
d?activité du Valtom (rapport 2020), le développement du compostage
aurait permis de détourner 4 812 tonnes de bio déchets soit environ 10 % du
gisement annuel. La plus grande part de ce détournement tiendrait au
compostage individuel (3 859 t), puis au compostage en établissement
(484 t), en pied d?immeuble (275 t) et enfin en quartier (194 t).
La difficulté pour mesurer les quantités de bio déchets, distraites des
OMR ne permet pas de suivi précis de l?évolution du tri. C?est pourquoi,
comme indiqué précédemment, la quantité d?OMR collectée doit faire
partie des indicateurs-clefs pour mesurer la performance du service public
car il intègre la réduction de la part des biodéchets, principale composante
des OMR.
b) La solution du compostage de proximité
Carte n° 1 : Gestion de proximité des bio déchets
Source : ADEME
Le compostage de proximité apparaît comme un axe de progrès, y
compris en milieu urbain dense, puisqu?il permet l?accès à un équipement
pour l?ensemble des usagers, professionnels et particuliers.
Traditionnellement centré sur le compostage autonome domestique
(à l?aide d?un composteur individuel), le compostage de proximité peut
prendre d?autres formes. Le mode partagé consiste pour un établissement
à ouvrir son équipement à d?autres usagers. Le mode collectif regroupe
différents foyers avec une organisation propre sur un lieu choisi en
commun. Des expériences de compostage partagé existent aussi dans le
cadre des résidences collectives, parfois de tailles importantes, et
contribuent, outre leur intérêt intrinsèque, au renforcement du lien social.
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80
Une expérience de distribution de composteurs individuels
rapidement amortie : la CC de l?Ile d?Oléron (CCIO) 164
Depuis 2019, la CCIO a précisé et étendu sa politique en matière de
bio déchets, en décidant que le tri à la source des bio déchets serait déployé
par la distribution de composteurs gratuits (15 000 individuels
renouvelables tous les huit ans pour les usagers pouvant composter et 50 à
60 partagés pour les particuliers ne disposant pas d?assez d?espace, avec une
gestion et un suivi par les services techniques des communes ou de l?EPCI),
et par une collecte séparée des bio déchets pour les gros producteurs ne
pouvant pas composter.
Le développement du compostage individuel a permis d?éviter la
production de 700 tonnes de bio déchets en 2019 avec une économie
annuelle de coût de transfert et de traitement estimée par la CCIO à
120 000 ¤ correspondant au coût d?investissement en composteurs.
Le coût de ce schéma de développement du tri est estimé (sur les six
ans) à 10,5 M¤ mais la réduction du coût de traitement est évaluée à 14 M¤.
Une première évaluation produite en février 2021 indique un détournement
de plus de 10 % de biodéchets représentant près de 5 000 tonnes du gisement.
c) Le défi du tri des biodéchets dans l?habitat urbain dense
Le tri et la collecte des biodéchets posent des problèmes spécifiques
dans les territoires fortement urbanisés alors même que les tonnages
produits sont très importants. Les capacités de stockage limitées dans
l?habitat vertical et les désagréments (odeurs et risque sanitaire) liés à la
conservation des biodéchets comptent parmi les principaux obstacles au
développement du tri sélectif des bio déchets.
164 Cf .CRC Nouvelle-Aquitaine, décembre 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-de-communes-de-lile-doleron-saint-pierre-doleron-charente-maritime
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
81
La Ville de Paris : des objectifs ambitieux
qui peinent à se concrétiser165
La Ville de Paris, compétente pour la collecte et le traitement des
ordures ménagères, s?est fixé des objectifs parfois plus ambitieux que les
dispositions législatives en matière de biodéchets. Elle projetait notamment
de généraliser leur tri à l?horizon 2020. Toutefois, en 2021, la collecte
séparée des déchets organiques n?est réalisée que dans trois
arrondissements166 et seulement auprès des ménages et des établissements
de l?administration parisienne, à l?exclusion des professionnels et
notamment des restaurateurs. En 2018, selon le baromètre
comportemental167 de la Ville, 74 % des parisiens interrogés déclaraient
jeter les restes alimentaires à la poubelle montrant les importantes marges
de progrès restant à réaliser.
Le tonnage de biodéchets collectés augmente dans les trois
arrondissements mais reste encore minime par rapport au gisement. Les
bacs d?OMR y sont encore composés à hauteur de 21 % de déchets
alimentaires168. Les 3 000 tonnes, tous usagers confondus, collectées à Paris
restent très éloignées de l?objectif à atteindre d?ici la fin de 2023.
La difficulté spécifique, souvent relevée, pour la collecte en milieu
urbain dense n?est cependant pas absolue, aussi bien en France que dans
d?autres pays comme le montrent les expériences probantes relevées par
les juridictions financières.
Ainsi, la métropole de Rennes (avec 500 aires de compostage
partagé desservant 28 000 logements) obtient un tonnage d?OMR par
habitant (185?kg par habitant en 2019) peu élevé pour une collectivité de
cette taille169. D?autres collectivités ont entrepris des démarches similaires
comme l?agglomération de Lorient depuis 2002 ou plus récemment
Grenoble. Plusieurs métropoles françaises (Paris, Strasbourg, Aix-
165 Cf. CRC Ile-de-France, mars 2022.
166 Depuis mai 2017, dans les 2ème et 12ème arrondissements étendue au 19ème
arrondissement en 2019.
167 La mairie de Paris réalise tous les deux ans un sondage comportemental auprès d?un
échantillon représentatif de 3 500 Parisiens.
168 Campagne de caractérisation des déchets de 2017. Rapportés aux OMR (752 000
tonnes en 2019), les bio déchets représentent donc 157 000 tonnes.
169 450 000 habitants
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/ville-de-paris-prevention-et-gestion-des-dechets
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82
Marseille, Nantes et Lyon) sont également engagées dans des
expérimentations170 de collectes sélectives des biodéchets. Même si elles
ne concernent qu?une partie des territoires métropolitains, les premiers
résultats de ces expérimentations171 indiquent une collecte entre 15 et 20 %
du gisement estimé de biodéchets et la nécessité, pour obtenir des résultats
probants d?utiliser l?ensemble des leviers possibles (collecte en PAP, en
PAV, compostage de proximité individuel ou collectif).
Des exemples étrangers confirment ces potentialités (cf. annexe n° 7
sur les comparaisons internationales), notamment en Allemagne où la
collecte spécifique des biodéchets est assurée, pour 70 % de la population,
mais aussi aux Pays-Bas et en Flandre.
Un exemple européen de collecte des biodéchets en milieu
fortement urbanisé : la ville de Milan172
Milan compte une population urbaine d?environ 1,7 millions
d?habitants (7 520 hab./km2). Milan est trois fois plus densément peuplée
que Rome et plus de 80 % de ses habitants vivent en appartement. La ville
a développé des plans ambitieux de gestion des déchets depuis les années
1990 : 55 000 points de collecte, collecte des déchets alimentaires des
habitants et des commerces en sacs compostables, recyclage organique. Elle
est passée de 35 % de collective sélective en 2011, à 50 % dès 2014 et à
61,8 % en 2022, soit plus de 800 000 tonnes collectées dont 85 % de bio
déchets. Milan est la plus grande métropole européenne à avoir mis en place
un système de collecte des déchets alimentaires à l'échelle de la ville173,
impliquant presque 100 % des habitants dès 2014.
Le compostage partagé dans les centres urbains peut être une solution
d?accompagnement, à condition que la gestion des chalets/station de
compostage soit professionnalisée : c?est la solution mise en oeuvre par le
Sybert174, syndicat en charge du traitement des déchets de Grand Besançon,
qui à côté de la collecte en PAV des biodéchets réalisée par la communauté
urbaine, assure la gestion en régie de chalets de compostage urbains.
170 Article « déchetsinfos » du 20/10/2021.
171 Installation d?abribacs en métal contenant un bac roulant dans lequel les habitants
que la collectivité a équipés de bio-seaux et sacs en plastique biodégradable ou en papier
viennent apporter de manière volontaire leurs bio déchets (hors déchets verts).
172 « Guide économie circulaire » France Urbaine et Science po, août 2021.
173 Tous les nouveaux immeubles disposent d?un espace dédié à la collecte des déchets,
géré par un résident désigné. Les citoyens y amènent leurs déchets alimentaires dans
des sacs compostables collectés deux fois par semaine en porte à porte.
174 Cf. CRC Bourgogne-Franche-Comté, janvier 2021.
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https://www.amsa.it/fr/cittadini
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-besancon-et-de-sa-region-pour-le-traitement-des-dechets-sybert-0
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
83
2 - La collecte séparée et la prise en charge des emballages
en plastique : une responsabilité à mieux partager
Le rattrapage du retard pris par la France dans le recyclage des
emballages est largement conditionné par la qualité de la collecte séparée des
emballages en plastique qui reste très inférieure aux moyennes européennes.
a) Des intercommunalités confrontées à l?extension des consignes de tri
L?extension des consignes de tri (ECT)
L?ECT consiste à demander à l?usager de jeter la totalité des
emballages plastiques (pots, barquettes, films, tubes?), dans le bac jaune
et les collecteurs de tri et non plus seulement certains d?entre eux (bouteilles
et flacons). Cette évolution facilite le geste de tri des citoyens, améliore leur
respect des consignes et augmente les quantités d?emballages collectés
(+10 % soit + 4 kg par habitant et par an). La loi prévoit cette extension à
tous les habitants d?ici fin 2022175. Malgré les progrès constatés, 70 % de la
population couverte au 31 juin 2022176, cet objectif parait difficilement
atteignable.
Pour mettre en place l?ECT, les collectivités doivent préalablement
développer des actions de communication et entreprendre de lourds
investissements d?adaptation des centres de tri à ces nouveaux flux qui
obligent les EPCI à se regrouper pour y faire face. L?ampleur de ces
investissements entraine des délais au-delà de 2022, à l?exemple du centre
de tri de la communauté d?agglomération de Valenciennes et de son
syndicat (Siaved)177.
b) Des éco-organismes à mieux responsabiliser
L?un des objectifs principaux des filières REP est, via une collecte
sélective de qualité, de détourner des OMR le plus de déchets possibles.
Or, seule la moitié du gisement de déchets issus des filières REP était en
2018 recyclée, le reste relevant donc toujours des ordures résiduelles.
175 5° de L. 541-1 du code de l?environnement issu de la loi LTECV de 2015
176 Source : Citéo
177 CRC Hauts-de France, CA Valenciennes Métropole, juin 2021
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-valenciennes-metropole-tome-2-prevention-et-gestion-des
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84
Comme la Cour l?a déjà souligné178, les résultats insuffisants sont constatés
dans plusieurs filières, mais concernent au premier chef les emballages
plastiques. Pour l?ensemble des emballages (dont un quart d?emballages
plastiques) le taux de recyclage est de 68 % en 2020 et 72 % en 2021 au
lieu des 75 % visés dans le cadre du cahier des charges fixé par l?État. Or
la consommation de plastiques en France est de 70 kg par an et par habitant,
dont près de la moitié pour les emballages179.
La loi AGEC du 10 février 2020 revoit le dispositif en supprimant cet
objectif de 75% de recyclage pour toutes les matières d?emballage au profit
d?une déclinaison des objectifs par matière180 qui permettra de mieux isoler
les retards de collecte des emballages en plastique. Par ailleurs, jusqu?à
présent, la filière ne pouvait pas faire l?objet de sanctions administratives en
cas de non-atteinte de ses objectifs. L?État n?avait le choix qu?entre un retrait
d?agrément aux lourdes conséquences et une amende de 30 000 ¤, peu
dissuasive au regard de la surface financière des éco-organismes. Le nouveau
système de sanctions est davantage incitatif181 et devrait permettre un suivi
plus rigoureux des obligations auxquelles les éco-organismes s?engagent à la
faveur du renouvellement de leurs cahiers des charges en 2022.
Le principal savoir-faire des collectivités territoriales concerne la
collecte, le transport, le tri et la préparation des déchets. Pour la reprise des
matières issues du tri, elles n?ont pas la responsabilité de la gestion des
déchets collectés relevant de la compétence exclusive des éco-organismes
de la filière, qui prennent en charge le traitement final de ces déchets 182.
178 Rapport public annuel 2020, « Les éco-organismes : une performance à confirmer,
une régulation à renforcer » ; rapport public annuel 2016, « Les éco-organismes : un
dispositif original à consolider ».
179 Stratégie 3R. Avril 2022
180 II de l?article L. 541-10 du code de l?environnement : les objectifs des REP doivent
être en cohérence avec les objectifs nationaux de l?article L. 541-1 : .
181 Jusqu?à présent, si les objectifs n?étaient pas atteints, la perspective de la pénalité
financière était bien inférieure aux économies permises par la non-atteinte des objectifs.
Désormais, la sanction sera équivalente à 1,5 fois l?économie attendue, car par
définition, non réalisée. (Article L. 541-9-6 du code de l?environnement).
182 Les filières dites opérationnelles sont majoritaires en nombre, mais pas en volume.
Elles prennent en charge directement les déchets des entreprises de leur secteur en
contractualisant avec les collectivités. Dans le cas du syndicat SMICTOM d?Alsace
centrale, trois types de contrats ont utilisés : l?un avec des éco-organismes pour les
meubles, piles, déchets d?équipements électriques et électroniques ; l?un pour les huiles
végétales, les radiographies, les objets réemployables (recyclerie) et les cartouches
d?encre ; et des marchés publics de prestations pour les gravats, papiers-cartons, déchets
incinérables, bois, déchets diffus spécifiques, métaux-ferrailles, plâtre, déchets verts,
huiles minérales.
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https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-02/20200225-11-TomeI-eco-organismes.pdf
https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-02/20200225-11-TomeI-eco-organismes.pdf
https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/05-eco-organismes-RPA2016-Tome-1.pdf
https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/05-eco-organismes-RPA2016-Tome-1.pdf
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599099/2021-01-01
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041583353/
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-8
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-8
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
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85
Les emballages constituent à cet égard une exception. Les EPCI (ou
leur syndicat de traitement) restent aujourd?hui chargés de la
commercialisation des matières préparées pour être recyclées. Elles
doivent négocier individuellement avec les repreneurs. Les éco-organismes
des emballages sont dits « financeurs », c?est-à-dire qu?ils ne prennent pas
en charge les déchets collectés mais versent aux collectivités territoriales
80 % des coûts de collecte et de traitement qu?elles supportent. Ces éco-
organismes disposent pourtant d?une réelle compétence pour la
commercialisation sur les marchés des matières recyclées puisqu?ils
accomplissent cette mission pour les emballages collectés dans les
entreprises.
Cette compétence supplémentaire de commercialisation est lourde
pour les collectivités territoriales alors qu?elles ont encore beaucoup à
accomplir dans leurs missions principales de collecte et de tri avec
l?extension des consignes de tri. Elles doivent en outre s?adapter à un
contexte marqué par de fortes variations des cours, une augmentation
continue des tonnages et une diversification croissante des filières. Elles
sont impuissantes enfin à encourager les débouchés pour les emballages en
plastique encore peu recyclables.
Afin de répondre à ces inconvénients, les collectivités territoriales
pourraient aussi être autorisées à faire le choix, alternatif, de déléguer cette
compétence de commercialisation, sur la base du volontariat, aux éco-
organismes chargés des emballages183. Cette prise en charge devrait se
réaliser à coût zéro pour les collectivités, et donc pour les contribuables,
sur le modèle du dispositif en vigueur en Belgique (système Fost+ ; cf.
annexe n° 7).
III - Le traitement : une coûteuse modernisation
à entreprendre
Le traitement des déchets collectés regroupe leur préparation (le tri
dans des centres de tri préalable au traitement), leur valorisation (recyclage,
183 Le caractère opérationnel de l?éco-organisme a été renforcée pour la filière REP
emballages ménagers par l?arrêté du 15 mars 2022. L?éco-organisme en charge des
emballages (CITEO) expérimente l?enlèvement aux collectivités, le surtri (matière déjà
triée qui doit être triée à nouveau pour un meilleur affinage) et l?envoi vers des filières
de recyclage.
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86
valorisation organique et énergétique) et leur élimination (stockage,
incinération sans valorisation énergétique).
La réduction des modes d?élimination de déchets sans valorisation
visée par les objectifs nationaux impose une adaptation des capacités
industrielles de traitement à des besoins en évolution continue. Elle rend
également indispensable l?amélioration des performances de recyclage, qui
restent très variables selon les matières et selon les groupements de
collectivités en charge de la compétence traitement.
C?est pourquoi la valorisation énergétique des déchets est un mode de
traitement qu?il faut assumer, tant que la prévention et les modes de valorisation
prioritaires n?auront pas abouti à une réduction drastique des OMR.
A - L?adaptation des capacités de traitement : répondre
à l?évolution des flux, limiter la hausse des coûts
Le parc des installations de traitement s?est fortement transformé au
cours de la dernière décennie en France comme dans l?ensemble de l?Union
Européenne, avec le développement des installations de valorisation
matière (tri, compostage) et la réduction progressive du nombre des
installations de stockage comme illustré dans le graphique ci-après :
Graphique n° 13 : évolution des modes de traitement
des déchets municipaux en France sur la période 2009-2018
Source : Cour des comptes d?après données Eurostat.
L?adaptation du parc va se poursuivre. La priorité donnée à la
réduction des OMR rend encore plus cruciale l?optimisation des capacités
de traitement des unités existantes pour gérer un flux de déchets amené à
évoluer quantitativement et qualitativement au cours des prochaines
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
87
années. L?importance des investissements à réaliser par les collectivités
(voir infra) impose une planification à l?échelle régionale, en recherchant
la meilleure coordination entre EPCI voisins, afin d?en limiter l?impact sur
le coût du service.
Cette nouvelle planification régionale et cette coordination
renforcée entre EPCI pourraient favoriser un rééquilibrage des relations
contractuelles avec les grands délégataires pour la construction et la gestion
des équipements lourds, sujet qui a vocation être traitée ultérieurement par
les juridictions financières.
1 - Un coût du traitement des déchets en augmentation continue
Comme indiqué dans le chapitre 1, la dépense nationale consacrée à
la gestion des déchets184 augmente de manière continue depuis 20 ans
(hausse annuelle de 4,3 %, supérieure à la croissance du PIB) et en 2016,
la prise en charge des déchets par le SPGD a coûté en moyenne 117 ¤ (HT)
par habitant et par an.
La collecte et le traitement avec respectivement 49 ¤ et 47 ¤ par
habitant et par an, concentrent les enjeux d?optimisation de la logistique et
de l?exploitation des équipements, mais c?est le traitement des déchets qui,
avec 40 % des dépenses du SPGD, constitue la partie du service dont le
coût connaît la progression la plus dynamique, le coût de la collecte tendant
à se stabiliser.
Cette tendance haussière va s?inscrire dans la durée du fait des
dépenses induites par les investissements nécessaires à la modernisation et
à la mise aux normes d?un outil industriel français de traitement
vieillissant185. Celui-ci doit mieux répondre aux objectifs nationaux, qu?il
s?agisse d?améliorer la performance des unités de valorisation énergétique
ou d?accompagner l?extension des consignes de tri (ETC) et le traitement
des bio déchets.
Par ailleurs, la recherche d?une taille critique est indispensable pour
assurer une gestion plus efficiente du traitement. En matière de tri par exemple,
elle pousse à la création de centres de tri de grande capacité (comme pour le
184 Gestion des déchets pris en charge par le SPGD, la gestion des déchets des
entreprises ainsi que le nettoyage des rues.
185 Le parc des usines d?incinération a un âge moyen de 28 ans (Chiffres Ademe,
enquête Itom 2018).
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88
syndicat mixte de transport et de traitement des déchets ménagers de Lorraine
nord)186 et à la recherche de débouchés pour les matières recyclables à une
échelle départementale, voire supra-départementale, en raison des
investissements requis et de la technicité des missions.
Dans un rapport publié en 2020187, la Commission européenne a
estimé que, si la France ne semblait pas présenter un risque de manquer
l?objectif européen de 50 % des déchets municipaux recyclés en 2020, ceux
fixés pour 2035 (65 %) nécessiteraient des investissements estimés à
3,3 Md¤ pour la période 2021-2027, dont environ 1,5 Md¤ à la charge des
collectivités territoriales, soit le niveau le plus élevé de l?Union européenne
en valeur absolue. En dépit des subventions de l?État, ces investissements
devront être financés au premier chef par la fiscalité locale et
indirectement, dans le partage de l?effort, par les filières de responsabilité
élargie des producteurs.
L?ampleur et la variété des investissements que les syndicats en
charge du traitement des déchets doivent réaliser pour assurer la
modernisation de leurs équipements et disposer d?infrastructures de
traitement répondant aux enjeux et aux normes du SPGDP, parfois dans
des délais courts (Syndicat de traitement et de valorisation de la région de
Toulouse, Syndicat de traitement des déchets des microrégions Sud et
Ouest de la Réunion - Ileva) conduisent à s?interroger sur la capacité
financière et technique des acteurs locaux à porter ces projets (Syndicat
mixte de transport et de traitement des déchets ménagers de Lorraine nord).
Ces investissements exercent une pression sur le coût du service.
Quelques exemples donnent la mesure des efforts que doivent réaliser les
collectivités locales pour absorber la hausse significative du coût de
traitement. Ainsi la rénovation de l?unité de valorisation énergétique du
syndicat de traitement de la région de Besançon188 pour 58M¤ a entraîné une
augmentation de 22 % du coût de traitement des OMR. Le syndicat de
traitement de l?agglomération d?Annecy189 prévoit pour sa part que la
rénovation de son unité de valorisation énergétique pour 83 M¤ se traduira
par une augmentation de l?ordre de 10 % des tarifs facturés à ses membres.
Le syndicat de traitement départemental du Tarn TRIFYL, qui a prévu
186 Citéo n?accompagne financièrement que la création, modernisation des centres de tri
d?une capacité supérieure à 50 000 tonnes/an.
187 Rapport 2020 pour la France : évaluation des progrès des réformes structurelles et
résultats des bilans approfondis au titre du règlement UE n° 1176/2011
188 Rapport CRC Bourgogne-Franche-Comté, Sybert, janvier 2021
189 Rapport CRC Auvergne-Rhône-Alpes, Sila, juin 2021
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-transport-et-de-traitement-des-dechets-menagers-de-lorraine-nord
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-traitement-des-dechets-des-microregions-sud-et-ouest-de-la-reunion
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VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
89
d?investir quelque 190 M¤ dans ses équipements de traitement d?ici 2030,
anticipe de même une augmentation de 8 % des tarifs facturés à ses membres.
Ces décisions d?investissement se prennent dans un certain contexte
économique (besoins actuels des usagers), environnemental (hiérarchie en
vigueur des modes de traitement) ou réglementaire, qui peut rendre les
collectivités territoriales prisonnières de solutions technologiques
coûteuses. Des changements affectant le volume ou la nature des déchets,
des recettes de l?énergie produite moins assurées (surtout l?électricité avec
la fin des prix garantis de rachat et la modulation de la TGAP en fonction
des performances énergétiques et environnementales des installations)
peuvent rendre ensuite ces installations obsolètes ou mal dimensionnées.
La remise en cause par le législateur du tri mécano-biologique (TMB)190
comme solution de prétraitement des OMR, un temps privilégié pour
limiter la valorisation énergétique et l?élimination des déchets, illustre ce
risque. Plusieurs syndicats mixtes ayant investi dans ce procédé se trouvent
contraints de réviser leur stratégie industrielle (syndicat de traitement de la
région de Villerupt, Syndicat départemental de Vendée Trivalis191).
D?autres organismes qui ont fait des choix de technologies non matures,
comme une valorisation énergétique basée sur la production de biogaz
connaissent également des difficultés (Syndicat traitement déchets du
Douaisis-Symevad).
Dans ce contexte, les choix technologiques et le dimensionnement
des installations (fours, centres de tri, méthaniseurs) nécessitent un effort
d?anticipation et d?adaptation lors de la programmation des équipements,
afin d?éviter d?investir massivement dans des solutions de traitement dont
les coûts de fonctionnement ne seraient pas soutenables. Une telle analyse
implique une capacité d?expertise des collectivités territoriales et de leurs
groupements pour, le cas échéant, remettre en question les offres
190 Le procédé de traitement mécano-biologique permet d?extraire la fraction organique et
bio dégradable des déchets ménagers par des opérations mécaniques de tri, en la séparant
des autres matériaux recyclables (métaux, plastiques et verre) ou non. Les déchets
organiques issus du TMB sont traités biologiquement pour devenir du compost ou du
biogaz ; les déchets non recyclables sont, eux, broyés et séchés pour être transformés en
produits « stabilisés » avant envoi en décharge ou en usine d?incinération. Avec la loi
LTECV du 17 aoûts 2015, qui généralise le tri à la source des biodéchets et a fortiori avec
la loi AGEC du 10 février 2020, qui interdit d'utiliser la fraction fermentescible des
déchets issus de ces installations dans la fabrication de compost à partir de 2027, le TMB
comme solution de prétraitement des OMR perd de sa pertinence.
191 Rapport CRC Pays de la Loire, mars 2021.
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90
techniques du secteur très concentré de l?industrie des déchets. L?État
intervient par l?intermédiaire de l?Ademe, mais les conseils de l?agence
sont limités aux installations de tri qu?elle finance (il en va de même pour
l?éco-organisme CITEO). Les maîtres d?ouvrage locaux (EPCI et syndicats
de traitement) en revanche, peuvent s?appuyer, au-delà des bureaux
d?études qu?ils mobilisent, sur des associations telles qu?Amorce192qui
assure une mise en commun des expertises publiques locales.
2 - La nécessité d?une meilleure coordination des investissements
Pour adapter la capacité de traitement aux besoins, surmonter les
difficultés d?amortissement induites par des investissements lourds et
éviter une concurrence néfaste entre des projets d?équipements publics
nécessitant une taille critique, une bonne coordination entre structures et
entre territoires est indispensable.
Certains acteurs privilégient délibérément un sous-dimensionnement de
leur équipement par rapport à la quantité de déchets traités, en cohérence avec
la priorité donnée à la prévention et à la diminution des quantités (Grand
Besançon193, Grenoble Alpes Métropole194, Grand Paris195). D?autres au
contraire, confrontés à un surdimensionnement du fait de la baisse des
volumes d?OMR, sont contraints de rechercher des volumes de déchets
extérieurs au territoire ou issus du secteur privé pour assurer l?équilibre
financier des installations et éviter les augmentations du coût du traitement
(Syndicat mixte Flandre Morinie196, Syndicat d'Études et de Réalisations
pour le Traitement intercommunal des Déchets de Belfort197).
Pour gérer la période de transition durant laquelle les équipements
de traitement ne sont pas correctement dimensionnés ou répartis et pour
assurer la rentabilité des investissements réalisés, des coopérations doivent
être nouées à une échelle élargie, entre organismes ayant besoin d?exutoires
à leurs déchets et ceux qui ont intérêt à les accueillir pour couvrir leurs
coûts marginaux d?exploitation. Prendre l?initiative de ces partenariats dès
l?élaboration des projets d?investissement comme l?a fait la métropole
192 Association nationale des collectivités territoriales et de leurs partenaires pour la
gestion de l?énergie, des déchets, de l?eau et de l?assainissement, en faveur de la
transition écologique et de la protection du climat.
193 Rapport CRC Bourgogne-Franche-Comté, CU de Besançon, novembre 2021
194 Rapport CRC Auvergne-Rhône-Alpes, septembre 2021
195 Rapport CRC Ile de France, Ville de Paris
196 Rapport CRC Hauts-de-France, août 2021
197 Rapport CRC Bourgogne-Franche-Comté, Sertrid, décembre 2016
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grenobloise avec ses communes limitrophes pour le renouvellement et
l?exploitation de son centre de tri et de son unité de valorisation
énergétique, évite d?y être contraint. Ainsi, le Syndicat Valor 3E198 (Maine-
et-Loire), confronté à une mauvaise évaluation et à une saturation des
capacités de ses installations suite à l?extension de la consigne de tri aux
plastiques et en attendant le projet de centre de tri interrégional, a enregistré
une détérioration de ses performances de tri.
Le niveau régional serait le plus pertinent pour organiser une
programmation et une coordination optimales des investissements. En
principe, les plans régionaux (PRPGD et Sraddet) adoptés en 2018-2019,
doivent planifier les besoins en installations de traitement sur les
12 prochaines années. En pratique, ils manquent souvent de déclinaison
temporelle et géographique détaillée des actions à mener pour atteindre les
objectifs du plan. Pour assurer cependant une mise en oeuvre effective des
objectifs arrêtés dans les plans régionaux, les projets d?investissement des
équipements structurants doivent y être indiqués avec la précision exigée
par la loi. Celle-ci prévoit que les plans doivent mentionner toutes « les
installations qu'il apparaît nécessaire de créer, d'adapter ou de fermer afin
d'atteindre les objectifs » nationaux (5° de l?article R. 541-16 du code de
l?environnement).
Or, dans leur volet prospectif, les plans ne recensent le plus souvent
que les installations de stockage et d?incinération sans valorisation
énergétique et les limites de capacité qui sont visées par les articles R.541-
17 et R.541-19 du code de l?environnement. La formulation vague des
objectifs souvent constatée dans les plans (Ile de France, Bourgogne-
Franche-Comté, Bretagne, Rhône-Alpes-Auvergne) quant à la localisation
des installations, au type de déchets et à l?évolution des quantités associées,
prive d?effectivité leur opposabilité aux décisions locales d?investissement.
La répartition cohérente des équipements structurants implique que la
région joue pleinement son rôle de planificateur (voir l?analyse des
12 plans régionaux en annexe n°3).
Compte tenu de l?évolution continue du volume, de la nature des
déchets et des technologies de traitement, une animation dynamique de leur
plan par les régions, de manière à actualiser les objectifs régionaux en
fonction de ces évolutions est une autre condition de la réussite de la
planification régionale. Pour assurer une localisation des besoins en
équipements dans les documents d'urbanisme en fonction des règles
établies dans leurs plans et parvenir à une adaptation des exutoires aux
198 Rapport CRC Pays de la Loire, septembre 2021
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besoins, les régions doivent associer l?ensemble des acteurs (collectivités
territoriales, filières, Dréal, Ademe) et offrir une assistance technique et un
accompagnement financier des projets d?équipement, comme le font déjà
certaines régions (Provence-Alpes-Côte d?Azur, Occitanie, Grand Est ou
Normandie) et comme d?autres ont prévu de le faire (Nouvelle-Aquitaine).
B - Le recyclage et la valorisation : des performances
et une organisation à améliorer
A la faveur de l?amélioration de la collecte et du tri sélectif, des
volumes croissants de déchets ont été détournés ces dix dernières années
de l?enfouissement et de l?incinération.
Ces résultats sont le fait des évolutions réglementaires qui, tout en
affichant des objectifs de recyclage plus ambitieux, ont contraint les
organismes en charge à mieux exploiter les gisements de matières
recyclables (extension de la consigne de tri) et en ont facilité l?exploitation
(augmentation et meilleure structuration des filières REP). Grâce à
l?ensemble de ces mesures, le taux de recyclage français est aujourd?hui de
44 %199.
Sous réserve de l?harmonisation des données européennes prévue en
2023,200 ce taux situe la France légèrement en dessous de la moyenne
européenne (47 %), comme le montre le graphique ci-dessous. Un chemin
significatif reste donc à parcourir pour rejoindre les pays les plus avancés,
comme l?Allemagne, l?Autriche, les Pays-Bas et les pays scandinaves et
atteindre les objectifs actuels de valorisation matière201 que nous nous
sommes fixés 55 % en 2020 et 65 % en 2025, soit 21 points de plus que les
dernières données disponibles).
199 Le taux de recyclage dans les données Eurostat comprend la valorisation matière
ainsi que la valorisation organique (compostage et méthanisation).
200 Décisions d?exécution (UE) de la Commission 2019/665 du 17/4/ 2019, 2019/1004 du
6/7/2019 et 2019/1885 du 6/10/2019. Les pays seront plus ou moins impactés par ces
réformes statistiques en fonction de leur mode actuel de calcul. La situation relative de la
France pourrait s?en trouver améliorée car elle pratique déjà la prise en compte préconisée
par l?UE des seuls flux sortants des centres de tri (orientés vers une filière de valorisation)
et non la méthode d?autres États dont l?Allemagne qui comptabilise aussi les flux entrants
(incluant les refus de tri et autres flux à ne pas prendre en compte comme les
mâchefers?). Pour l?Allemagne par exemple, cette nouvelle comptabilisation aboutirait
à dégrader 750 000 tonnes de déchets de la catégorie « recyclés » à la catégorie « stockés »
soit une variation de 1,8 % d?une catégorie à l?autre.
201 4° de L. 541-1 du code de l?environnement issu de LTECV.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
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93
Graphique n° 14 : pourcentage des déchets municipaux recyclés
dans la production totale de déchets municipaux (2018)
Source : Cour des comptes d?après Eurostat. N.B : données non disponibles pour Irlande, Grèce et Chypre.
Comme le montre le graphique ci-dessous qui retrace l?un des six
indicateurs-clefs recommandés dans ce rapport, ces objectifs paraissent
difficilement atteignables, compte tenu du rythme de progression
enregistré au cours des années précédentes.
Si des territoires à dominante rurale, où il est plus aisé de détourner
la part fermentescible des OMR, parviennent déjà à atteindre des taux de
valorisation de l?ordre de 75 %, très supérieurs aux objectifs nationaux
(Syndicat Mixte à Vocation Unique pour la Valorisation et l'Élimination
des Ordures ménagères de Haute Saône202, Communauté d?agglomération
Clisson Sèvre et Maine203), c?est loin d?être le cas des territoires urbains.
En 2019, Paris se situait à seulement 27 % tandis que le syndicat chargé du
traitement des déchets de Besançon, agglomération pourtant engagée de
longue date dans des démarches de prévention et de valorisation des
déchets, présentait un taux de valorisation matières de 60 %.
202 Rapport de la CRC Bourgogne-Franche-Comté, juillet 2020.
203 Rapport de la CRC Pays de la Loire, octobre 2021.
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94
Graphique n° 15 : (Indicateur-clef n°5) valorisation matière204
Source : Cour des comptes
Si la France souhaite atteindre ses objectifs en matière de recyclage
des déchets, elle doit mieux mobiliser tous les leviers à sa disposition, au
plan national et au plan local.
204 Quantité de déchets non dangereux non inertes, mesurés en masse faisant l'objet
d'une valorisation sous forme de matière, notamment organique
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
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1 - Une stratégie industrielle nationale à accentuer
en faveur de la filière de recyclage du plastique
a) Des résultats de valorisation très inégaux selon les matières
qui doivent orienter les actions de l?État
La performance de la valorisation d?une matière recyclable recouvre
deux aspects : l?un porte sur la quantité de matière recyclée rapportée à la
quantité mise sur le marché (taux de recyclage) ; l?autre porte sur la
quantité de matière recyclée intégrée dans un nouveau cycle de production
(taux d?incorporation205).
Les performances de recyclage et d?incorporation sont très variables
d?un matériau à l?autre en fonction de différents critères notamment de
leurs pr0opriétés physiques (l?aluminium et le verre sont recyclables à
l?infini, pas les autres matières), de la maturité de la filière de recyclage et
de régénération, du prix de la matière recyclée par rapport au cours variable
des matières premières, des coûts de production, de l?intégration ou non de
la filière et de l?existence d?une demande pour la matière recyclée.
Ainsi, l?acier et la fonte recyclés ou le verre recyclé avec
respectivement 49 % et 56 %206 des matériaux utilisés dans les productions
connaissent de très bons taux à la fois de recyclage et d?incorporation. De
même, le papier-carton, première industrie de recyclage en France malgré
ses difficultés récentes207 connaît un taux d?incorporation de 67 % pour
92 % d?emballages recyclés.
205 Dix filières matériaux sont concernées par l?incorporation (métaux ferreux, métaux
non ferreux (aluminium, cuivre, zinc, plomb), verre, papiers-cartons, plastiques,
déchets inertes du BTP, et bois https://www.ademe.fr/bilan-national-recyclage-bnr-
2008-2017-acv-flux-dechets-recycles
206 L?industrie verrière connait un taux de collecte de 78 % (contre 76 % dans l?UE)
mais avec 100 % d?utilisation de la matière recyclée (soit 58 % de substitution de
matières vierges par des MPR). La France dispose d?industries de recyclage du verre
en nombre suffisant (14 centres de traitement, 22 verreries de verre creux et 5 verreries
de verre plat). La France est le 2ème producteur européen de verre d?emballage
(bouteilles, flacons et pots) derrière l?Allemagne.
207 Avec un taux de collecte de 79 % (contre 72 % en moyenne européenne) et un taux
d?utilisation des papiers-cartons recyclés de 66,3 %, cette industrie qui conserve une
bonne capacité pour la préparation et l?utilisation des cartons (emballage, hygiène) a
été touchée par la fermeture en juin 2020 de l?usine de La Chapelle Darblay qui a fait
perdre à la France toute capacité de recycler du papier (papier écriture et presse).
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Globalement, en 2017, la France incorporait environ 17 Mt de
matières recyclées dans ses processus de fabrication (hors bois et granulats
du BTP). L?Ademe souligne à juste titre que si ces quantités peuvent
paraître faibles au regard de la consommation en matières premières de
l?économie française (787 Mt), elles sont, en revanche, primordiales dans
l?approvisionnement de certaines de ces matières premières.
En revanche pour les plastiques, comme le montre le tableau ci-
dessous, les résultats obtenus en France sont très en retrait, tant en termes
de taux de recyclage que d?incorporation.
Tableau n° 3 : taux de valorisation (recyclage et incorporation)
des emballages ménagers et non ménagers en France en 2018
En tonnes
Déchets
d'emballages
produits
Recyclage/
déchets
produits
Valorisation
énergétique/
déchets produits
Enfouissement/
déchets produits
Taux
d?incorporation
Plastique 2 356 851 27 % 43 % 30 % 6 %
Bois 2 404 392 31 % 9 % 60 %
Acier 464 213 91 % 0 % 9 % 49 %
Aluminium 65 673 63 % 8 % 29 % 50 %
Verre 2 858 804 76 % 8 % 16 % 58 %
Papier et
carton
5 062 561 92 % 4 % 3 % 67 %
Autres 5 301
Total 13 217 795 66 % 13 % 21 %
Source : Cour des comptes d?après le rapport sur la valorisation des emballages en France,
Chiffres-clés 2020 et bilan national du recyclage 2008-2017
Au regard des taux de recyclage actuels des matières plastiques, les
nombreux objectifs fixés208 sont peu réalistes si aucune action n?est
envisagée pour corriger les obstacles à leur recyclage et incorporation. Pour
la sous-catégorie des déchets plastiques que sont les emballages, le taux de
recyclage français plafonne autour de 26 % depuis une dizaine d?années
(26,9 % en 2018). Ce chiffre est éloigné des taux allant jusqu?à près de 50 %
en Allemagne et aux Pays-Bas, ainsi que de ceux des autres filières françaises
de recyclage et des objectifs fixés (50 % en 2025 et 55 % en 2030).
208 Comme, par exemple, tendre vers 100 % de plastique recyclé au 1er janvier 2025 ou
réduire de 20 % les emballages plastiques à usage unique mis sur le marché pour les
cinq prochaines années (2021-2015).
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b) Les difficultés spécifiques du recyclage des plastiques :
une industrie à accompagner
L?impact du plastique est désormais bien connu (cf. annexe n°8) sur
l?empreinte carbone209, la santé210 et la biodiversité. Les juridictions
financières ne méconnaissent pas ces risques,211 même si elles ne les ont
pas traités spécifiquement dans ce rapport.
Pour réduire les risques, il convient d?agir tant sur la collecte que sur
le traitement et tant sur les plastiques facilement recyclables
(principalement les bouteilles) que sur les autres plastiques.
De nouvelles pistes doivent être envisagées pour réduire les déchets
plastiques encore trop présents dans les OMR. Outre l?extension des
consignes de tri et les actions pour réguler les emballages en plastique212,
l?article L. 541-10-11 du code de l?environnement prévoit la possibilité de
mettre en place une consigne sur les bouteilles en plastique après 2023 si
l?analyse des performances de recyclage montre que l?objectif européen
fixant à 90 % le taux de collecte de ces bouteilles en 2029, risque de ne pas
être atteint.
Le recyclage et l?utilisation du plastique recyclé se heurtent en
premier lieu à des freins technologiques communs à tous les pays en raison
de la variété et de la complexité des usages et des résines. La rentabilité du
plastique recyclé est par ailleurs affectée par sa grande sensibilité au cours
des matières premières vierges.
En France, le manque de maturité de la filière explique aussi en
grande partie le retard du recyclage plastique. À ce jour, il n?y existe pas
encore d?industries de recyclage pour toutes les résines et celles qui
209 En 2020, la production, l?élimination et l?incinération de matières plastiques avaient
rejeté autant de gaz à effet de serre que 189 centrales à charbon (3,8% des émissions
mondiales soit plus que le secteur de l?aviation). D?ici à 2050, le plastique pourrait
représenter 15 % du budget carbone mondial (cf. Sénat, Pollution plastique : une bombe
à retardement décembre 2020 et Stratégie 3R, avril 2022).
210 L?effet de l?essaimage des microparticules plastiques et des nanoparticules, y
compris lors du traitement des déchets, sur la santé humaine ne sont pas encore
parfaitement connus. On constate qu?un être humain ingère en moyenne chaque
semaine l?équivalent en plastique du poids d?une carte de crédit (5 grammes).
211 Les 3/4 des déchets plastiques produits dans le monde restent rejetés dans les milieux
naturels et se décomposent en micro- plastiques qui entrent dans la chaîne alimentaire.
1,4 million d?oiseaux et 14 000 mammifères meurent chaque année de l?ingestion de
plastiques.
212 Art. L. 541-10-17 du code de l?environnement et décret du 29 avril 2021 « 3R ».
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https://www.senat.fr/espace_presse/actualites/202012/pollution_plastique.html
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041555598/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599010/
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98
existent sont distinctes des industries chimiques qui produisent les résines
vierges (contrairement aux autres filières où les producteurs de matières
vierges gèrent la filière de recyclage). Un rapprochement entre filières va
cependant se développer en raison de la nécessité pour les metteurs sur le
marché d?objets plastiques de développer des solutions d?écoconception et
des décisions prises par plusieurs pays de fermer leurs frontières aux
déchets en provenance de l?Union européenne.
Pour accélérer cette mutation, des soutiens financiers importants ont
été déployés par l?État à partir de 2021, notamment à travers des aides
financées par l?Ademe au titre des plans de relance et de France 2030.
Quelque 870 M¤ de soutiens financiers ont ainsi été affichés pour le
développement du recyclage des plastiques : 200 M¤ dans le plan de
relance, 300 M¤ dans le plan France 2030 et 370 M¤, pour la stratégie 3R
« recyclabilité, recyclage et réincorporation », dans le dernier programme
d?investissement d?avenir. Les crédits réellement affectés à cette action
pourraient toutefois être inférieurs à cette somme en raison de reports d?un
plan à l?autre. La stratégie 3R, arrêtée 2021, fait du recyclage du plastique
une de ses priorités et doit favoriser la constitution d?une filière française
intégrée de collecte, tri et de recyclage des plastiques. Par ailleurs, le
nouveau cahier des charges de la filière emballage arrêté en mars 2022
prévoit des incitations tarifaires pour pousser les entreprises à un recours
croissant à des emballages qui incorporent des plastiques recyclés.
Pour donner une cohérence à toutes ces actions, le plan national
devrait intégrer un volet industriel substantiel sur la plasturgie, cohérent
avec le partenariat conclu entre l?État et la filière. L?État devra veiller à ce
que les nombreuses mesures de soutien se traduisent effectivement par une
consolidation de la filière.
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99
Graphique n° 16 : évolution du taux de recyclage des déchets
d?emballages plastiques dans l?Union européenne 2009-2018 (en %)
Source : Cour des comptes à partir des données Eurostat
En outre, la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le
gaspillage et à l?économie circulaire a introduit des règles plus coercitives à
l?encontre des plastiques non recyclés. Depuis août 2020, les déchets ayant
fait l'objet d'une collecte séparée en vue de la réutilisation ou un recyclage ne
peuvent plus être enfouis ou incinérés. Cette interdiction s?applique en
particulier aux emballages plastiques, collectés séparément depuis janvier
2022. Par ailleurs, pour les plastiques qui resteront collectés en mélange
(dans les ordures ménagères résiduelles, sous forme d?encombrants ou dans
les déchèteries), une interdiction progressive de mise en décharge s?applique
progressivement à partir du 1er janvier 2022 jusqu?au 1er janvier 2030, avec
l?entrée en vigueur du décret du 16 septembre 2021 relatif aux conditions
d'élimination des déchets non dangereux.
Au regard des résultats constatés chez nos voisins, une telle mesure
devrait permettre d?améliorer notoirement les performances du recyclage,
en France. Les pays européens ayant décidé cette interdiction il y a une
vingtaine d?années, sont en effet également les pays présentant à la fois les
meilleurs taux de recyclage et la meilleure utilisation, par l?incinération
avec valorisation énergétique, du fort pouvoir calorifique des plastiques
comme le montre le graphique n°13 ci-dessus.
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COUR DES COMPTES
100
2 - Des capacités de tri et de recyclage à consolider
Pour donner leur plein effet aux mesures d?élargissement du tri à la
source (plastiques et bio déchets) et répondre à l?augmentation continue
des flux collectés en déchèteries, des efforts d?adaptation très importants
doivent être réalisés sur les équipements de tri.
Au cours des vingt dernières années, le nombre de centres de tri a
augmenté de 50 % (entre 2000 et 2016 213) permettant de prendre en charge
des tonnages qui ont plus que doublé (4,9 Mt de déchets envoyées en
centres de tri en 2000 contre 11,1 Mt en 2016).
La massification des flux de matières et le développement de la
valorisation économique et industrielle des déchets d?emballages impose
l?automatisation, l?augmentation des capacités et la haute qualité du tri.
Or, la France se caractérise par un coût élevé, une performance
insuffisante et une dispersion sur le territoire de centres de tri214 de taille
modeste215, qui résultent de l?organisation du SPGD au niveau des EPCI.
Pour tendre vers les objectifs de recyclage fixés par le code de
l?environnement et rendre les centres de tri plus performants dans la
séparation des matières216, des investissements sont donc nécessaires.
Le principal défi à relever est l?extension des consignes de tri (ECT)
aux plastiques. La plupart des organismes concernés ont déjà adapté leurs
équipements de tri pour répondre à ces nouveaux flux ou sont en train de
le faire, avec des soutiens financiers de Citéo et de l?Ademe. Un nombre
important d?EPCI ne dispose cependant pas en 2022 de centres de tri
capables d?accueillir l?ensemble des emballages plastiques et se voit donc
contraint de différer la mise en oeuvre des nouvelles consignes.
Pour les EPCI qui ont mis en place la mesure d?extension en lien
avec leur syndicat de traitement, les résultats obtenus sont contrastés : ils
montrent les efforts à poursuivre pour accompagner les changements,
comportementaux et de mode de gestion, induits par cette mesure. Ces
efforts sont nécessaires pour éviter l?augmentation des taux de refus de tri
213 Il s?agit du nombre total de centres de tri sur le territoire accueillant des DMA (cela
recouvre ainsi également des centres qui trient principalement des déchets issus des
activités économiques). Source : Ademe, enquête ITOM, 2018
214 Taille moyenne par centre de tri de 12 000 tonnes et zone moyenne de chalandise de
250 000 habitants pour 500 000 habitants en Espagne, un million d?habitants en
Allemagne et en Belgique. Étude prospective sur la collecte et le tri des déchets
d?emballages et de papier dans le SPGD, réalisé pour l?Ademe (mai 2014).
215 Cour des comptes, Rapport public annuel 2016, Tome I. Les éco-organismes : un
dispositif original à consolider.
216 En 2016, sur 11,1 Mt de déchets reçus dans les centres de tri recevant des DMA,
6,6 Mt de déchets triés ont été envoyés en recyclage.
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
101
souvent constaté après l?instauration de l?extension. Certains organismes
ont mené l?extension avec succès et ont obtenu une réduction ou une
stabilisation des volumes d?OMR tout en assurant un meilleur recyclage
des plastiques (Syndicat mixte pour le développement durable de l?Est Var,
Grand Besançon). D?autres ont engagé la mesure mais ont mal anticipé
l?augmentation des volumes associés, conduisant à une valorisation
énergétique de flux voués initialement au recyclage (Syndicat de traitement
Valor 3E). De manière générale, les EPCI et leurs syndicats de traitement
doivent profiter des évolutions en cours pour s?interroger sur le
dimensionnement des installations de tri en lien avec leur zone de
chalandise, comme l?a fait le Syndicat de valorisation des ordures
ménagères de la Marne, en concevant un nouveau centre de tri mutualisé
avec les acteurs du territoire voisin de la Meuse.
Parallèlement, les volumes croissants de déchets collectés en
déchèteries (en moyenne de l?ordre de 40 % de la masse totale des DMA
et dépassant dans certains territoires la masse des OMR) poussent les
syndicats de traitement à se doter de nouvelles capacités de tri pour mieux
valoriser les matières collectées.
Même si le développement progressif de nouvelles filières REP
contribue à structurer les débouchés, des volumes importants de déchets
restent collectés dans des bennes « tout-venant » dans les déchèteries et
sont donc incinérés ou enfouis. L?adoption d?une organisation et de
moyens adaptés pour assurer le traitement de ces flux revêt donc une
importance croissante. Certains organismes se dotent d?unités de tri
spécifiques aux déchets occasionnels (déchèteries et encombrants) pour
répondre à cet enjeu (installation de tri-massification de l?agglomération de
Besançon, valorisation en combustibles solides de récupération par les
syndicats Sytraival - Beaujolais-Dombes et Trifyl).
3 - Le développement de la valorisation organique
Les déchets ménagers organiques collectés séparément
(principalement déchets verts, déchets alimentaires et bio déchets collectés
à la source), lorsqu?ils ne sont pas compostés par les ménages eux-mêmes,
sont principalement orientés vers des plateformes de compostage217 et plus
marginalement, vers des installations de méthanisation218.
217 657 installations traitaient 8,7 Mt de biodéchets en 2018, Ademe, enquête ITOM 2018
218 13 unités de méthanisation étaient en activité en 2018, pour seulement
240 000 tonnes de biodéchets traités, Ademe, enquête ITOM 2018
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-urbaine-du-grand-besancon-doubs
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-urbaine-du-grand-besancon-doubs
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-pour-le-traitement-et-la-valorisation-des-dechets-menagers-valor3e
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-pour-le-traitement-et-la-valorisation-des-dechets-menagers-valor3e
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-delimination-de-traitement-et-de-valorisation-des-dechets-beaujolais
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-departemental-trifyl-tarn
COUR DES COMPTES
102
Avec le développement du tri à la source des biodéchets (et
probablement les collectes sélectives), le besoin en exutoire va aller
croissant. Les collectivités vont donc être amenées soit à mettre en place
leurs propres installations, soit à s?appuyer sur des installations existantes,
et notamment les unités de méthanisation agricole qui sont encouragées par
les politiques publiques depuis plusieurs années.
Le nombre de plateformes de compostage va continuer de croitre
régulièrement et, s?agissant du parc d?unités de méthanisation, il se
développera du fait de l?extension aux DMA de l?accès aux installations
auparavant consacrées aux seuls déchets agricoles ou agroalimentaires. Le
nombre d?unités de traitement mécano-biologique des OMR est appelé quant
à lui à décroitre. La production de compost à partir des installations de TMB
étant proscrite à compter de 2027, les collectivités gestionnaires de ces
équipements sont contraintes de réorienter progressivement les flux de
déchets vers la méthanisation et vers la production de combustibles solides
de récupération (CSR), sans certitude de pouvoir rentabiliser les équipements
associés à ce nouveau procédé de valorisation (Syndicat Trivalis).
Graphique n° 17 : évolution du parc d?installations de traitement
Source : Ademe, Enquête ITOM 2018
TMB : Tri mécano-biologique
ISDND : Installation de stockage de déchets non dangereux
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-trivalis-vendee
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
103
C - La valorisation énergétique, un mode de traitement
à assumer pour les déchets non recyclables
En France, les déchets ménagers et assimilés non recyclés sont
principalement valorisés par la production d?énergie ou mis en décharge.
Ce dernier mode de traitement (on parle aussi de stockage ou
d?enfouissement) ne doit concerner que les DMA ne pouvant faire l?objet
d?aucune valorisation. Encore supérieur à la valorisation énergétique il y a
15 ans, l?enfouissement des déchets a vu sa part relative diminuer année
après année. Alors qu?il représentait encore en France 30 % du traitement
des déchets produits en 2009, ce taux est passé à 21 % en 2018, pour une
moyenne européenne à 23 %. Les installations de stockage, dont le nombre
a été divisé par deux entre 2000 et 2016, ont été modernisées et agrandies
avec une récupération et une valorisation des gaz qui s?en échappent.
Ce besoin de modernisation des installations de stockage est
particulièrement marquant dans un contexte insulaire. Ainsi, en Corse, le
refus de l?incinération et l?absence d?équipements de traitement se traduit
par un taux d?enfouissement de plus de 2/3 des déchets.
Un exemple de problématique insulaire : l?île de La Réunion219
L?île de La Réunion, territoire complexe (rural, urbain et touristique
à la fois, composé de cinq EPCI et de deux syndicats mixtes de traitement
des déchets) est confronté à des enjeux spécifiques. La densité contrastée de
population sur un territoire au relief accidenté, parfois peu accessible, et la
forte volumétrie des déchets verts ont un impact sur les modalités techniques
et les coûts de gestion des déchets. Avec une part de plus de 83 % (hors
déchets verts), l?enfouissement reste le principal mode de traitement alors
que les sites de stockage sont en état de saturation.
219 Cf. CRC la Réunion, SYDNE, septembre 2021, et ILEVA, avril 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-traitement-des-dechets-du-nord-et-de-lest-de-la-reunion-sydne
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-du-territoire-de-la-cote-ouest-tco-cahier-2-la-reunion
COUR DES COMPTES
104
L?enjeu central des syndicats de traitement de l?île réside donc dans
la mise en oeuvre rapide d?une solution alternative à l?enfouissement. Le
recyclage apparaît comme une solution peu rentable en raison des coûts de
transport des matériaux vers la métropole ou d?autres pays. La taille limitée
du territoire restreint les capacités de production et les débouchés des
matières recyclées. À l?inverse, la construction d?une unité de valorisation
énergétique (UVE) constitue une solution qui concilie les enjeux
énergétiques et de gestion des déchets. Tel est le choix réalisé par le syndicat
du sud et ouest ILEVA pour faire face à la saturation du site de Pierrefonds.
L?extension des zones de stockage demeure une alternative dont la
pérennité n?est plus assurée, ce qui conduit également le syndicat du nord
et de l?est (SYDNE) à envisager la mise oeuvre d?une UVE. Cependant le
montage de ce projet se heurte à des difficultés juridiques et économiques
qui retardent la mise en service d?une filière de valorisation énergétique des
déchets pour près de 40 % de la population de l?île.
Comme le montre le graphique ci-dessous qui illustre l?un des six
indicateurs-clefs, la France, en diminuant l?enfouissement au profit des
filières de valorisation matière (recyclage) ou organique (bio déchets) a
déjà atteint une partie des objectifs qu?elle s?était fixée, à savoir une
réduction de 30 % entre 2010 et 2020 des quantités de déchets (DNDDI)
admis en installation de stockage (loi LTECV).
Si l?amélioration constatée au cours de la dernière décennie se
poursuit dans les prochaines années au même rythme, la part des déchets
enfouis restera encore trop élevée, pour atteindre nos objectifs (- 50 % entre
2020 et 2025 ; - 10 % au plus du poids des DMA produits d?ici 2035220) et
a fortiori en comparaison des pays européens qui sont à la fois les plus
performants en termes de recyclage et qui ont aussi éliminé la mise en
décharge.
220 7 bis art. L. 541-1 du code de l?environnement.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043974936/2022-06-14
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
105
Graphique n° 18 : indicateur-clef n°6 ? Stockage (Quantités de
déchets non dangereux non inertes admis en installation de stockage)
Source : Cour des comptes
La stratégie d?élimination de la mise en décharge, avec une TGAP
fortement désincitative221 et l?interdiction de certaines catégories de
déchets, oriente la France dans la même direction que les États (Pays-Bas,
Autriche, Belgique, Allemagne) qui ont adopté ce type de mesure depuis
les années 1990.
Cette application plus ferme du principe pollueur-payeur rend
caduque la politique d?élimination et le choix prioritaire de l?enfouissement
qu?avaient fait de nombreux organismes par souci de limitation des coûts de
traitement et qu?ils vont devoir revoir rapidement (syndicat de traitement de
l?agglomération de Lorient, syndicat départemental de traitement Valor
Aisne, communauté d?agglomération du Grand Villeneuvois, syndicat
221 Le syndicat de collecte et de traitement de la Dordogne SMD3, devra régler 65 ¤ la
tonne en 2025 pour ses installations de stockage des déchets, contre 17 ¤ en 2019.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-departemental-de-traitement-des-dechets-menagers-de-laisne-valoraisne-2
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-du-grand-villeneuvois-cagv-casseneuil-lot-et-garonne-0
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COUR DES COMPTES
106
départemental d?élimination des déchets de l?Aube). Pour gérer la transition,
tant que la prévention et les modes de valorisation prioritaires n?auront pas
abouti à une réduction drastique des OMR, la valorisation énergétique va
rester un mode de traitement indispensable.
La valorisation énergétique
En 2020, 35 % des déchets municipaux produits en France étaient
valorisés énergétiquement, sous forme d?électricité de chaleur ou de
carburant, ce qui place la France au-dessus de la moyenne européenne à
29 %, selon Eurostat. Proche de l?Allemagne, du Benelux, de l?Autriche, ce
taux reste toutefois inférieur à celui des pays scandinaves qui atteignent des
taux supérieurs à 50 %.
Les tonnages incinérés avec production d?énergie ont progressé entre
2000 et 2016 passant de 10 à 14,4 Mt, soit + 40 %. Cette augmentation s?est
produite dans un contexte de limitation des émissions de polluants des
usines d?incinération222 et sans augmentation équivalente du nombre
d?usines. Leur nombre est passé de 109 en 2000 à 118 en 2018. La part de
l?incinération au sein des différents modes de traitement n?ayant pas
augmenté, cette hausse ne s?est donc pas faite au détriment du recyclage.
L?analyse des besoins permet de prévoir que le nombre d?unités de
valorisation énergétique (UVE) restera globalement stable, même si des
besoins ponctuels existent. Le parc sera en revanche contraint de se
moderniser pour s?aligner sur la norme européenne de rendement
énergétique (44 % des DMA sont incinérés en France dans des
incinérateurs n?atteignant pas le seuil attendu223). L?adoption obligatoire
des meilleures techniques disponibles au niveau européen d?ici 2023224
permettra, parallèlement, de limiter encore plus drastiquement l?impact
environnemental des unités de valorisation énergétique, en poursuivant les
travaux de réduction et de suivi de leurs émissions atmosphériques. La
modulation de la TGAP pénalisant les unités d?incinération à mauvais
222 Entre 1990 et 2003, les émissions de dioxines liées au traitement des déchets ont
baissé de 90 %, conséquence de la fermeture graduelle des anciens incinérateurs ou leur
mise aux normes. Depuis 2006, les émissions de dioxines par les unités d?incinération
de déchets sont très réduites.
223 Directive 2008/98 CE, le statut d?installation de valorisation énergétique est atteint
si le rendement est supérieur à 65 %.
224 La législation continue de se renforcer : adoption d?ici fin 2023 des meilleures
pratiques européennes rendue obligatoire par la directive 2010/75/UE sur les émissions
industrielles et le « BREF sur l?incinération des déchets » adopté par la Commission
Européenne en novembre 2019
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
107
rendement et présentant des niveaux d?émission de fumées médiocres va
permettre d?accélérer l?adoption de ces standards de qualité, indispensables
à une meilleure acceptation publique des équipements de traitement.
Dans cette nouvelle situation, la production de chaleur issue de
l?incinération des déchets peut fournir à un prix attractif une énergie en
substitution de sources d?énergie non renouvelable plus polluantes. La
valorisation énergétique doit pouvoir, à côté d?autres sources d?énergie
renouvelable, contribuer au développement des réseaux de chaleur qui
restent insuffisamment exploités comme la Cour l?a relevé dans son rapport
de 2021 consacré au chauffage urbain225.
L?État devrait intégrer dans le plan national un volet industriel
substantiel couvrant, outre la filière plasturgie, comme indiqué
précédemment, la filière valorisation énergétique.
En France, la hiérarchie entre prévention, recyclage, valorisation
énergétique et enfouissement n?est que partiellement respectée dans la prise
en charge des déchets ménagers et assimilés. La prévention reste un volet
insuffisamment pris en compte dans les actions mises en oeuvre. Les progrès
de la collecte se heurtent au retard pris pour s?aligner sur les meilleures
pratiques concernant les biodéchets, pour adapter les installations à
l?extension des consignes de tri du plastique et pour mieux commercialiser
les matières triées. Si la valorisation par recyclage et production d?énergie
gagne du terrain au détriment du stockage, elle reste insuffisante.
225 Cour des comptes, rapport public thématique, le chauffage urbain, septembre 2021.
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COUR DES COMPTES
108
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Les performances de recyclage et d?incorporation des plastiques en
France sont très en retrait par rapport à d?autres pays européens. Pour
réduire l?impact du plastique sur l?empreinte carbone, sur la biodiversité
et la santé, il convient d?agir tant sur la prévention, sur le tri sélectif que
sur le traitement.
Pour surmonter les freins technologiques et de rentabilité que
rencontre la filière du plastique recyclé, des soutiens financiers ont été
déployés par l?État qui par ailleurs a interdit l?incinération des déchets
ayant fait l'objet d'une collecte séparée. Les pays européens ayant décidé
cette interdiction sont ceux qui présentent les meilleurs taux de traitement
des plastiques.
Au vu de ces constats, les juridictions financières formulent les
recommandations suivantes :
8. Fixer dans la réglementation la liste des actions financées par les
intercommunalités et les éco-organismes pouvant être considérées
comme dépenses de prévention (ministère de la transition écologique
et de la cohésion des territoires).
9. Autoriser les collectivités territoriales volontaires à confier aux éco-
organismes chargés des emballages la vente des produits issus du tri
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
EPCI).
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Conclusion générale
La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire du 11 février
2020 vise à substituer progressivement à une économie linéaire fondée sur
le triptyque « fabriquer, conserver, jeter », un nouveau paradigme, celui de
l?économie circulaire.
Elle repose sur toute une série de mesures qui ont vocation à entrer
progressivement en vigueur et qui, dans leur ensemble, visent à lutter contre le
gaspillage et l?obsolescence programmée, ainsi qu?à favoriser le réemploi.
Sont ainsi prévues la création de nouvelles filières REP dans des
secteurs importants (produits et matériaux de construction du bâtiment,
jouets et articles de sport dès 2022, emballages professionnels en 2025,
lutte contre le gaspillage alimentaire, réduction progressive des emballages
plastiques à usage unique, avec une étape importante prévue au 1er janvier
2025 de recyclage des emballages plastiques à usage unique).
C?est donc désormais dans ce cadre que devra s?inscrire la question
de la collecte et du traitement des déchets ménagers sur laquelle l?enquête
menée par les juridictions financières en 2021-2022 confirme qu?il existe
d?importants progrès à réaliser.
Pour accompagner la transition vers l?économie circulaire recherchée
par les réformes législatives de cette dernière décennie, notamment les plus
récentes, une meilleure prise en charge des déchets existants par un tri, une
collecte et un traitement performants doit être réalisée.
L?accélération de ce mouvement est nécessaire à la fois pour réduire
la hausse continue des dépenses du service public de gestion des déchets et
pour le faire mieux contribuer à la transition écologique.
La prévention, c?est-à-dire la réduction de la production de déchets,
en constitue un volet fondamental et doit être véritablement amplifiée. Le
meilleur déchet est en effet celui qui n?est pas produit.
Les orientations et recommandations retenues s?inscrivent dans
cette vision.
Le citoyen ne peut pas être responsabilisé sur ses déchets uniquement à
travers la hausse des prélèvements obligatoires qui concernent ce domaine. Les
entreprises, les éco-organismes, l?État et les collectivités territoriales doivent
conjointement lui offrir les moyens de modifier ses habitudes de
consommation en vue de réduire le gisement des déchets.
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Liste des abréviations
ADEME??.. Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie
AGEC???.. Loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le
gaspillage et à l?économie circulaire
CCC????.Convention citoyenne pour le climat
CCES???..Commission Consultative d'Élaboration et de Suivi
CGCT???.Code général des collectivités territoriales
CSR????.Combustible solide de récupération
C.envir???Code de l?environnement
DMA ............ Déchets ménagers et assimilés
DNDNI??.. Déchets non dangereux non inertes
ECT????.Extension des consignes de tri
EEE????.Équipements électriques et électroniques
EPCI???.. Établissement public de coopération intercommunale
ISDND??? Installation de stockage de déchets non dangereux
FREC???. Feuille de route économie circulaire
LTECV???. Loi n°2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition
énergétique pour une croissance verte
MTE???...Ministère de la transition écologique
ODD ???.Objectifs de développement durable
OMR ............ Ordures ménagères résiduelles
PAP??........Porte à porte (collecte en)
PAV ???..Point d?apport volontaire
PLPDMA ?..Programmes locaux de prévention des déchets ménagers et
assimilés
PNGD??? Plan national de gestion des déchets
PNPD??? Programme national de prévention des déchets
PRPGD ......... Plan régional de prévention et de gestion des déchets
REOM .......... Redevance d?enlèvement des ordures ménagères
REOMi??.. Redevance d?enlèvement des ordures ménagères Incitative
REP .............. Responsabilité élargie du producteur
RPQS???.Rapport sur le prix et la qualité du service
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112
RS????..Redevance spéciale
RSOM .......... Recyclables secs des ordures ménagères
SPGD ........... Service public de gestion des déchets
SUP????Directive (UE) 2019/904 relative à la réduction de l?incidence de
certains produits en plastique sur l?environnement (SUP pour
single use plastic)
TEOM .......... Taxe d?enlèvement des ordures ménagères
TEOMi ......... Taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative
TGAP ........... Taxe générale sur les activités polluantes
TI .................. Tarification incitative
TMB???..Tri mécano-biologique
TZDZG??..Territoire Zéro Déchet Zéro Gaspillage
UIOM ........... Usine d'incinération d'ordures ménagères
UVE ............. Unité de valorisation énergétique
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Annexes
Annexe n° 1 : présentation de l?échantillon des contrôles réalisés par
la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des
comptes (CRTC) ..........................................................................................114
Annexe n° 2 : le suivi des recommandations des juridictions
financières sur les déchets ménagers............................................................117
Annexe n° 3 : les Plans Régionaux de Prévention et de Gestion des
Déchets (PRPGD) ........................................................................................121
Annexe n° 4 : les indicateurs internationaux ................................................127
Annexe n° 5 : les indicateurs du service public des déchets ........................129
Annexe n° 6 : les indicateurs des filières à responsabilité élargie du
producteur (REP) .........................................................................................135
Annexe n° 7 : comparaisons internationales ................................................137
Annexe n° 8 : les déchets en matière plastique ............................................147
Annexe n° 9 : comparatif entre les différentes modalités de
financement du service public ......................................................................158
Annexe n° 10 : les conséquences de la crise sanitaire sur la gestion des
déchets .........................................................................................................159
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COUR DES COMPTES
114
Annexe n° 1 : présentation de l?échantillon des
contrôles réalisés par la Cour des comptes et les
chambres régionales et territoriales des comptes
(CRTC)
Tableau n° 4 : contrôle de la Cour des comptes
Contrôle réalisé dans le cadre de la formation commune
Prévention et gestion des déchets : aspects nationaux et internationaux
Tableau n° 5 : contrôles effectués par les chambres régionales
et territoriales des comptes
CRTC Nom de l?organisme
Contrôles réalisés dans le cadre de la formation commune
Auvergne
-Rhône-
Alpes
Communauté de communes Gorges de l?Ardèche
Communauté de communes le Grésivaudan
Syndicat intercommunal de traitement des déchets ménagers du Puy-de-Dôme
(VALTOM)
Métropole de Lyon
Syndicat mixte d'élimination, de traitement et de valorisation des déchets du Beaujolais
Dombes (SYTRAIVAL)
Communauté d'Agglomération du Grand Annecy
SMIX Savoie Déchets
Bourgogn
e-
Franche-
Comté
Communauté urbaine du Grand Besançon Métropole
Centre-
Val de
Loire
SMICTOM d?Amboise
Corse
Communauté de Communes Fium'Orbu Castellu
Communauté d'agglomération de de Bastia
Communauté de Communes du Cap Corse
Communauté de Communes du Centre Corse
Grand
Est
Syndicat Départemental d?Élimination des Déchets de l?Aube (SDEDA)
Syndicat Intercommunal d'Élimination des Déchets Ménagers du Territoire d'Orient
(SIEDMTO)
Syndicat de Valorisation des Ordures Ménagères de la Marne (SYVALOM)
Véolia Auréade Unité de valorisation énergétique et agronomique - Marne
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ANNEXES
115
Syndicat Mixte de Traitement des Om de la Région de Villerupt
Communauté de Communes de Cattenom et environs
Syndicat Mixte de Transport et Traitement des Déchets de Lorraine Nord (SYDELON)
Syndicat Mixte Intercommunal de Collecte et Traitement des Ordures Ménagères d'Als
ace Centrale
Communauté de Communes de Sélestat
Syndicat départemental d'énergie et des déchets (SDED 52)
EVODIA
Hauts-de-
France
Communauté d'Agglomération du Saint-quentinois
Valor'Aisne
Communauté de communes Flandre Lys
Communauté d'Agglomération Valenciennes Métropole
Communauté de Communes Pévèle Carembault
Syndicat Intercommunal de Valorisation des Déchets Ménagers du Hainaut
Valenciennois Ecovalor
Syndicat Mixte du Département de l'Oise (SMDO)
Syndicat mixte élimination et valorisation des déchets
CA Douaisis-Hénin-Carvin et communes Osartis (SYMEVAD)
Syndicat mixte Flandre Morinie (SMFM)
Syndicat Mixte Lys Audomarois
Ile-de-
France
Ville de Paris ? Direction de la propreté et de l?eau (DPE)
Nouvelle-
Aquitaine
Communauté de Communes de l'Ile de Ré
Communauté de Communes de l'Ile d'Oléron
Occitanie
Sictom Pézenas Agde
Decoset
Syndicat Mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés et
pôle des énergies renouvelables / Trifyl
PACA
Métropole Nice Côte d?Azur
Métropole Aix-Marseille Provence
Communauté d'Agglomération Var Esterel Méditerranée
Communauté de Communes Coeur du Var
Syndicat Mixte du Développement Durable de l'Est Var (SMIDDEV)
Pays de la
Loire
Trivalis
Communauté d'Agglomération Clisson Sèvre et Maine Agglo
Communauté d'Agglomération de la Presqu'île de Guérande Atlantique
Communauté d'Agglomération Mauges Communauté
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COUR DES COMPTES
116
VALOR3E
Communauté de Communes Loué-brûlon-noyen
Contrôles réalisés hors formation commune mais ayant servi pour le rapport
Auvergne
-Rhône-
Alpes
Communauté de communes de la plaine de l'Ain
Grenoble Alpes Métropole
Syndicat Mixte du Lac d'Annecy
Communauté de communes du Diois
Bretagne Lorient agglomération
Grand
Est
Métropole du grand Nancy
Régie Haganis
Hauts-de-
France
Communauté d?agglomération porte du Hainaut
Communauté d?agglomération du St-Quentinois
Communauté d?agglomération Maubeuge Val de Sambre
Nouvelle-
Aquitaine
Syndicat mixte départemental pour la gestion et le traitement des déchets ménagers et
assimilés (SMD3)
Communauté d'agglomération du grand Villeneuvois
Pays de la
Loire
Communauté urbaine Angers Loire métropole
Communauté de communes du bocage Mayennais
Syndicat mixte de collecte des ordures ménagères Est-Vendéen (SCOM)
La
Réunion
Mayotte
Syndicat mixte de traitement des déchets des microrégions
Sud et Ouest de la Réunion (ILEVA)
Société publique locale SUDEC
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Annexe n° 2 : le suivi des recommandations des
juridictions financières sur les déchets ménagers
Au cours de la décennie 2010-2020, la Cour des comptes, seule ou
en lien avec une ou plusieurs chambres régionales des comptes, a publié
deux rapports portant spécifiquement sur les déchets ménagers et assimilés
et des rapports consacrés aux éco-organismes.
Suites données aux rapports consacrés au déchets ménagers
Le rapport public thématique Les collectivités territoriales et la
gestion des déchets ménagers et assimilés, publié en septembre 2011,
formulait trente recommandations réparties au sein de quatre rubriques
principales. Un rapport de suivi de ce rapport public thématique a été
inséré au Rapport public annuel 2014 de la Cour des comptes, intitulé « La
gestion des déchets ménagers : des progrès inégaux au regard des enjeux
environnementaux ». Celui-ci comportait huit recommandations, certaines
reconduisant celles formulées en 2011.
Les recommandations visant à rendre plus claire et plus adaptée la
répartition des compétences entre les collectivités territoriales ont été pour
l?essentiel satisfaites ou rendues sans objet par la loi n° 2015-991 du 7 août
2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République qui a
redistribué les compétences territoriales226. Ainsi en est-il également de la
recommandation visant à promouvoir la prise en charge par une même
collectivité ou groupement (département ou syndicat mixte) du traitement
des déchets et des installations nécessaires227.
Les recommandations visant à renforcer le rôle des préfets en
matière de contrôle et de suivi des plans, d'autorisation et de contrôle des
équipements228 n?ont pas été mises en oeuvre. L?instruction du présent
rapport fait apparaître en effet que les dispositions encadrant les
PRPGD/SRADDET229 et le rôle de l?État déconcentré en matière
d?autorisation et de contrôle des ICPE ne suffisent toujours pas à planifier
et organiser les équipements à la hauteur des besoins.
226 Références des recommandations dans les rapports : rapport public thématique 2011
(pour la suite des références « RPT 2011 ») recommandation 1.1 et Rapport public
annuel 2014 (pour la suite des références « RPA 2014 ») recommandation 1.
227 RPT 2011 recommandation 1.8 satisfaite par l?article L. 2224-13 du CGCT.
228 RPT 2011 recommandation 1.12, 1.14, RPA 2014 recommandation 2.
229 Les plans, programmes et décisions des EPCI doivent être compatibles (L. 541-15
code de l'environnement).
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-collectivites-locales-et-la-gestion-des-dechets-menagers
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-collectivites-locales-et-la-gestion-des-dechets-menagers
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118
La recommandation visant à décliner au niveau régional et
intercommunal certains objectifs nationaux et d?en rendre compte au
moyen d?un rapport annuel, ainsi que la mise en place d?observatoires
locaux230, est satisfaite par les dispositions de la loi NOTRe précitée et par
celles de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le
gaspillage et à l'économie circulaire (AGEC). En revanche demeurent
pertinentes les critiques émises par les juridictions financières en 2011 qui
relevaient les « limites des mécanismes de pilotage, de suivi, d?évaluation
et d?appui » et qui recommandaient une plus grande fréquence et qualité
dans la collecte et le traitement des données231.
Les évolutions dans les mécanismes de financement du SPGD
qu?appelaient plusieurs recommandations, n?ont pas été suivies d?effets
significatifs. L?adaptation des textes pour encourager la tarification
incitative a été réalisée par la réduction des frais de gestion232 mais cet
encouragement est insuffisant pour en permettre l?essor. La clarification du
cadre juridique du financement du SPGD n?a pas été réalisée : ni la
codification de la jurisprudence définissant le suréquilibre233, ni les
dispositions sur les compensations, exonérations et dérogations aux
augmentations de TEOM234 ni la remise à plat de la distinction des services
publics entre administratifs et industriels et commerciaux235. Une
recommandation a connu une suite inverse à la demande formulée : la
redevance spéciale est devenue facultative alors que la Cour demandait sa
généralisation236.
Les recommandations concernant la mise en oeuvre d?une comptabilité
analytique et d?un budget annexe consacrés au SPGD237 ont été partiellement
suivies d?effet : la réglementation prévoit désormais l?obligation de
comptabilité analytique238 mais le budget annexe demeure facultatif pour les
collectivités, majoritaires, qui financent le service par la TEOM.
Les recommandations des juridictions financières pour corriger
l?insuffisance des équipements de proximité pour l?incinération et le
230 RPT 2011 recommandation 1.10.
231 RPT 2011 recommandations 1.11, 3.1, 3.2, 3.3 et 3.5.
232 Recommandations 4.1. et 4.2. du RPT 2011 et recommandation 7 du RPA 2014
satisfaites par l?art.7 de la LFI 2019.
233 Recommandation 4.6 du RPT 2011.
234 Recommandation 4.4 et 4.5 du RPT 2011.
235 RPT 2011 recommandation 4.6 et RPA 2014 recommandation 6.
236 Recommandation 4.3. du RPT 2011et recommandation 3 du RPA 2014.
237 RPT 2011 recommandation 2.1, 2.2, et RPA 2014 recommandations 5 et 8.
238 L. 2224-17-1 CGCT.
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ANNEXES
119
stockage (carence en exutoires)239 n?ont pas été mises en oeuvre : la TGAP
n?a pas été augmentée240 pour les déchets exportés ou réceptionnés au-delà
des limites d?un périmètre car le ministère chargé de l?environnement
considère qu?une telle augmentation encouragerait la création
d?installations d?élimination alors que l?objectif général est de respecter
autant qu?il est possible la hiérarchie des modes de traitement des déchets.
Suites réservées aux dix recommandations formulées par les
rapports consacrés aux éco-organismes
Les recommandations formulées dans le rapport « Les éco-
organismes : un dispositif original à consolider, insertion au rapport public
annuel 2016 » et le rapport « Les éco-organismes : une performance à
confirmer, une régulation à renforcer », insertion de suivi de l?insertion
précitée, publiée dans le rapport public annuel 2020, ont donné lieu à des
suites satisfaisantes.
Les dispositions de la loi AGEC et de ses textes d?application
concernant les éco-organismes satisfont neuf recommandations sur dix. La
simplification des cahiers des charges des éco-organismes s?accompagne
du renforcement des exigences (fixation et contrôle des résultats,
dispositifs de sanctions)241 et la durée des agréments des éco-organismes
est adaptée entre un et six ans242. La loi renforce et précise les informations
qui devront figurer sur les produits pour renseigner les citoyens sur les
gestes de tri et l?État pourra fédérer plusieurs éco-organismes pour des
campagnes d?information243. Le conditionnement des soutiens aux
collectivités versés par l?éco-organisme chargé de la filière REP
emballages à la mise à jour des consignes de tri est prévu par le cahier des
charges de l?organisme qui est approuvé par l?État244. Le partage avec les
pouvoirs publics, les producteurs et les collectivités des données et des
informations détenues par les éco-organismes est clarifié245 et l?extension
des consignes de tri, couplé à la subordination des autorisations concernant
les centres de tri mécano biologiques à la mise en place du tri à la source
239 RPT 2011 recommandation 3.6 et 3.7 et RPA 2014 recommandation 4.
240 L. 2333-92 et s. du CGCT.
241 RPA 2020 recommandation 1, 4 et 5 satisfaites par les articles L541-10 II
(encadrement des cahiers des charges) et L. 541-9-6 (sanctions).
242 RPA 2020 recommandation 3.
243 RPA 2016 recommandation 1, RPA 2020 recommandation 2 satisfaites par l?article
L. 541-9-3 du code de l'environnement.
244 RPA 2016 recommandation 2.
245 RPA 2016 recommandation 4.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2020
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2020
COUR DES COMPTES
120
des biodéchets vont dans le sens d?une modernisation des centres de tri et,
nécessairement, d?une diminution de leur nombre246. La visibilité sur les
produits de l?écocontribution247 est en revanche écartée car regardée
comme source de confusion (logo pouvant être pris pour le signe d?un
produit fait en matière recyclée ou d?un produit à recycler).
Enfin, un rapport propre à l?Île-de-France a été inséré au rapport
public annuel 2017 de la Cour. Ce dernier comportait six recommandations,
dont deux à caractère général et quatre adressées aux collectivités et aux
syndicats de traitement des ordures ménagères de la région.
246 RPA 2016 recommandation 5.
247 RPA 2016 recommandation 3.
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Annexe n° 3 : les Plans Régionaux de Prévention
et de Gestion des Déchets (PRPGD)
Régi par les dispositions des articles L. 541-13 à L. 541-15-2 et R.
541-13 à R. 541-27 du code de l?environnement248, le Plan régional de
prévention et gestion des déchets (PRPGD) est un document élaboré par
le conseil régional qui a pour but de coordonner à l'échelle régionale les
actions entreprises par l'ensemble des parties prenantes.
Instrument de planification et de programmation prévu par la
réglementation européenne249, le PRPGD est appelé à disparaître à mesure
que seront arrêtés les schémas régionaux d?aménagement, de
développement durable et d?égalité des territoires (SRADDET)250.
Les PRPGD sont opposables aux décisions prises par les personnes
morales de droit public et leurs concessionnaires251 notamment pour les
installations à adapter, créer ou fermer. Le plan sert ainsi de cadre aux
services déconcentrés de l?État pour délivrer les diverses autorisations en
matière d?Installations Classées pour la Protection de l?Environnement
(ICPE).
Les juridictions financières ont analysé dans le cadre du présent
rapport les 12 plans adoptés.
248 Introduit par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation
territoriale de la République (dite loi NOTRe)
249 Articles 28 et 29 de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil
du 19 novembre 2008 relative aux déchets
250 Articles L. 4251-1 à L. 4251-10 et R. 4251-1 à R. 4251-17 du code général des
collectivités territoriales (CGCT). L?Île-de-France, les régions d'outre-mer et les
collectivités territoriales à statut particulier constituent des cas spécifiques, dans la
mesure où des plans régionaux ou territoriaux de prévention et de gestion des déchets
continuent de s?appliquer de façon autonome, à côté d?un autre document de
planification stratégique (tel que le SDRIF en Ile de France ou le PADDUC en Corse).
251 Article L. 541-15 du code de l?environnement
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176161
COUR DES COMPTES
122
Le code l?environnement252 fixe le contenu des PRPGD et rend
obligatoires notamment les rubriques suivantes :
1/ État des lieux : (production, prévention, collecte et installations
existantes)
Réalisée grâce à plusieurs bases de données du ministère de
l?écologie et de l?ADEME et des observatoires locaux253, cette partie
descriptive est dans certains plans complète et exhaustive254 avec des
niveaux de précision géographiques variables255.
Des lacunes de données que ni l?État ni les régions n?ont comblées
par des enquêtes de terrain, nuisent à la fiabilité de l?état des lieux256 :
exutoires inconnus, informations manquantes quant à la catégorie d?ICPE,
tonnages par installations, traitement réalisé supérieur aux capacités ? Par
ailleurs, on relève des problèmes de lisibilité des données257, qui gênent la
clarté de l?information donnée aux collectivités locales infrarégionales.
Du fait des différences de couverture des territoires par la
tarification incitative, les états des lieux sur ce sujet sont d?amplitude et de
qualité variables. Dans les régions où elle est plus développée, des résultats
éclairants montrent son efficacité sur la réduction des OMR et
l?augmentation des collectes de recyclables258.
Enfin, la description des mesures visant à promouvoir le
développement de cette tarification incitative est souvent très sommaire. Ainsi,
le plan de la Normandie a été partiellement annulé par la décision n°1802969
du tribunal administratif de Caen du 20 juin 2019 car il ne présentait pas
d?actions de développement de la tarification incitative en contradiction avec
252 Art. L. 541-13 et l?article R-541-16 du code de l?environnement
253 Par exemple, la base de données GEREQ, le registre ICPE ou encore le registre IREP
et le registre ITOM
254 Par exemple, la région Auvergne-Rhône-Alpes détaille les 33 millions de tonnes (en
2015) qu?elle a produits.
255 Par exemple, le Plan de la région Grand Est présente des données départementales
là où la région Occitanie présente des données agrégées au niveau régional.
256 Voir par exemple le tableau 86 (p169) du Plan des Pays de la Loire où les capacités
réglementaires en tonnes des plateformes de compostage de la région sont manquantes
pour 18 des 39 installations, ou la figure 86 (p.115) du Plan Grand Est où 409 tonnes
de déchets produites dans l?Aube ont un exutoire « non précisé ».
257 Voir par exemple les données sur les combustibles solides de récupération (CSR)
sont difficilement interprétables dans le Plan des Pays de la Loire, p. 193 et p. 87.
258 Par exemple, le Plan de Nouvelle-Aquitaine, où la tarification incitative couvre 6 %
de la population régionale, montre que les quantités d?OMR ont diminué de 36 % et les
recyclables secs hors verre collectés ont augmenté de 26 % (voir pp 76-78).
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http://manche-nature.fr/wp-content/uploads/2019/07/jgt_PRPGD.pdf
http://manche-nature.fr/wp-content/uploads/2019/07/jgt_PRPGD.pdf
ANNEXES
123
les dispositions de l?article D. 541-16-2 du code de l?environnement259. À la
suite de cette décision de justice, la région Normandie a dû amender son plan
et adopter, le 22 juin 2020, deux compléments portant sur les actions prévues
pour le développement de la tarification incitative260 et sur la planification des
installations dédiées à la valorisation énergétique des combustibles de
récupération. Sur ce point, le niveau de généralité des autres plans régionaux
ne diffère pas de la première version du plan de la région Normandie.
2/ Prospective des gisements à 6 et 12 ans et objectifs de
prévention, recyclage et valorisation
Cette prospective se fonde sur la présentation de deux scenarii : l?un
évalue les quantités produites en l?absence de mesures de prévention, le
second les prend en compte261. On constate cependant des différences
quant au niveau de précision et de détails fournis et quant à la justification
des scénarios de référence.
3/ Planification de la prévention des déchets à 6 et 12 ans
La prévention se présente dans les plans sous la forme d?un
ensemble cohérent d'actions par types de déchets262. Les objectifs
manquent cependant de caractère opérationnel et de contextualisation
locale et sont trop généraux263.
259 Dans sa première version, le Plan de la région Normandie ne donnait aucune
modalité pratique d?implantation ni d?objectifs clairs quant à la couverture de cette taxe
en termes de population ou de volumes de déchets et préconisait seulement d?« Engager
une réflexion sur la mise en place de la TI à travers la réalisation d?études de faisabilité ;
Valoriser les retours d?expériences ? ; Intégrer la TI dans une réflexion d?optimisation
globale ? ; Définir les moyens humains pour le développement de la TI ; Informer et
sensibiliser les usagers ? » (p103).
260 La région Normandie se fixe désormais l?objectif d'un taux de couverture de 30% de
la population régionale par la tarification incitative, à l'horizon 2025
261 Ainsi, la région Île-de-France prévoit un scénario dit « tendanciel » (sans prévention)
où 5 607 262 tonnes de DMA seront générées en 2020, 5 971 954 en 2025 et 6 358 105
en 2031. Le scénario « avec mesures de prévention » prévoit 5 483 938 tonnes de DMA
en 2025 et n?a toutefois pas de valeur cible en 2031 (p.52, Chapitre 1)
262 Ainsi, la région Bretagne décline des objectifs pour les DMA et DAE relatifs aux
déchets végétaux (stabilisation en 2020 par rapport à 2016 et réduction de 20 % en 2030
par rapport à 2016, p32), aux biodéchets (100 % de la population doit avoir accès à une
solution de tri à la source des biodéchets d?ici 2023, accès au tri à la source pour les
professionnels d?ici 2023, p34).
263 Par exemple, la région Bretagne mentionne l?objectif de réduire le gaspillage alimentaire
par une liste d?objectifs vagues tels que « l?accompagnement de la restauration collective [?]
dans la mise en place d?actions » (p. 36, Chapitre II), le développement du « don alimentaire »
(p. 36, Chapitre II), « Accompagner les entreprises et administrations dans la réduction de la
production de leurs déchets », « Accompagner la mise en oeuvre des PLPDMA » ou encore
« Sensibiliser tous les acteurs ». Les actions sont quasiment identiques à celles que l?on trouve
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042662953
COUR DES COMPTES
124
Nombreux sont les renvois aux programmes locaux auxquels est
laissée la mise en oeuvre concrète264.
4/ Planification de la gestion des déchets à termes de 6 et 12 ans,
incluant les installations nécessaires afin d?atteindre les objectifs.
Au même titre que pour la prévention, l?ensemble des actions
portant sur la gestion des déchets, bien que cohérentes entre elles et axées
autour d?objectifs, apparaissent le plus souvent vagues et sans caractère
réellement opérationnel265.
La planification des installations qu?il apparaît nécessaire de créer,
adapter ou fermer afin d?atteindre les objectifs est une lacune significative
dans les plans alors que cette précision est exigée par l?article R. 541-19 et
le 5° de l?article R 541-16 du code de l?environnement.
En effet, les plans ne recensent que les installations de stockage
ainsi que d?incinération sans valorisation énergétique266. Ils ne recensent
pas les autres types d?installation et renvoient sur ce point à des études
ultérieures267. Même les plans les plus aboutis ne planifient pas à un niveau
suffisamment précis l?évolution des équipements et des capacités de
traitement associés, pour toutes les natures de déchets et d?installation268.
dans tous les autres plans et ne comportent aucune spécificité liée à la région, ni de plan d?action
précis en termes de dates et de budget.
264 Ainsi, les Plans des Hauts-de-France (p.117) et de Centre-Val de Loire (p.229)
renvoient au déploiement des programmes locaux pour la mise en oeuvre des stratégies
Zéro Déchets Zéro Gaspillage
265 Ainsi, le Plan des Hauts-de-France (pp.123-130 du fascicule des règles) ne
comprend aucune planification précise des installations de traitement et se limite à des
orientations générales telles que « Renforcer la performance environnementale des
installations de valorisation énergétique en appliquant le principe de proximité et en
prenant en compte l?impact CO2 des zones de chalandise » ou « Pour tout projet de
modernisation des installations de valorisation énergétique, tenir compte de l?évolution
des nouvelles normes européennes à l?horizon 2022- 2024.. Il en va de même du plan
de la région Occitanie (pp 248 -256).
266 Ainsi par exemple le plan de la région Bourogne-Franche-Comté, après avoir recensé
de manière détaillée, à l?échelle de chaque département, les déficits ou excédents de
capacité de traitement (p 109), se limite à la planification des installations de stockage.
267 Ainsi, par exemple, le Plan de la région Centre-Val de Loire, concernant les
installations de valorisation organique, «il sera nécessaire d?identifier et suivre les
capacités de traitement des déchets organiques et anticiper les besoins à venir. » p.289
268 Sur le thème de la planification des installations, le plan PACA, divisé en 4 bassins
de vie, est divisé en flux de déchets et positionné sur la capacité de traitement des
biodéchets triés à la source représente néanmoins un exemple intéressant. On peut aussi
citer l?exemple du plan de la région Grand Est, qui décline de manière détaillée, à
l?échelle départementale, les installations de stockage qu?il sera nécessaire de créer (pp
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032728246/2016-06-20
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032728264/2016-06-20
ANNEXES
125
Les 12 plans adoptés ne relèvent pas d?une véritable planification et
apparaissent trop vagues quant au nombre, au type de déchets associés et
leurs quantités et à la localisation des installations269. À ce titre, les plans
ne revêtent pas leur pleine valeur prescriptive et n?épuisent pas la
compétence de la région.
Suivi des plans
Les modalités de suivi des plans prévues lors de l?adoption de ces
derniers sont souvent incomplètes, même pour ceux qui sont les plus
aboutis270. En effet, bien que les indicateurs de suivi du plan soient
explicités, associés aux actions dont ils relèvent et recensés de manière
exhaustive271, nombreux sont les plans qui manquent d?une réelle
planification du suivi272.
Sept régions sont couvertes par un observatoire de déchets chargé
d?obtenir et de consolider les données à l?échelle régionale, d?améliorer la
connaissance des gisements et de s?assurer du suivi des objectifs, les
5 régions restantes prévoient seulement d?en créer273.
347-352) et qui projette les besoins en capacité de traitement à l?échelle de deux bassins
de vie (Est et Ouest) les besoins.
269 Le plan de Normandie, par exemple, « n?interdit pas la création de nouvelles
capacités de valorisation des déchets ménagers résiduels » (p103) ou le plan des Hauts-
de-France, où la « règle de planification » prévoit « d?adapter les capacités régionales
d?incinération et de valorisation [?] en cohérence avec le développement de la
prévention et de la valorisation matière conformément à la hiérarchie des modes de
gestion [?] » (p148).
270 Les qualités et défauts des plans sont multiformes, aucun d?eux ne peut être
considéré comme un modèle. Le PRGPD de la région PACA a le mérite de préciser
(voir pages 137-138 du fascicule des règles du SRADDET, les moyens financiers que
la région entend consacrer, dans le cadre de ses contrats régionaux d?équilibre
territorial, au soutien des projets d?équipement structurants pour le territoire en matière
de recyclage et de valorisation des déchets, d?économie d?énergie et de développement
des énergies renouvelables.
271 Voir par exemple les pages 318-325 du Plan de la région Auvergne-Rhône-Alpes ou
284-288 du Plan de la région Hauts-de-France
272 La région Bourgogne-Franche-Comté liste les indicateurs et modalités de suivi du
Plan, sans mention de son organisation pratique (voir pp 158-166).
273 Le PRPGD Grand Est est très précis quant aux missions de l?observatoire qu?il
entend créer. On peut par ailleurs saluer l?effort de prévision budgétaire effectué (en
moyens humains et financiers) p478-479. Les autres régions manquent de précision
quant au budget : la Bourgogne-Franche-Comté, par exemple, ne mentionne que le
projet de création p88, sans en préciser les modalités pratiques.
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Annexe n° 4 : les indicateurs internationaux
En septembre 2015, les 193 États membres de l?ONU ont adopté un
programme de développement durable Agenda 2030 structuré autour de 17
objectifs de développement durable (ODD). Les déchets sont concernés par
l?ODD n°11 qui porte notamment la thématique de la ville durable et
l?ODD n°12 : « Consommation et production responsables » (impact
environnemental et social de l?ensemble de la chaîne de valeur des
produits). Ces ODD généraux comportent des indicateurs qui ont été repris
dans la programmation nationale française : le PNPD 2014-2020 et la
feuille de route de la France pour l?économie circulaire (FREC).
Indicateurs issus des ODD N°
Taux de recyclage des déchets municipaux274 11.6.1.
Empreinte matières275 12.2.1
Consommation intérieure de matière276 12.2.2
Perte et gaspillage alimentaire 12.3.1
Taux de recyclage national et tonnes de matériaux recyclés 12.5.1
274 Proportion de déchets urbains solides régulièrement collectés et éliminés de façon
adéquate sur le total des déchets urbains solides générés, par ville.
275 Empreinte matérielle, Empreinte matières (RMC) Empreinte matière par habitant
(RMC/hab.) et Empreinte matière par unité de PIB (PIB/RMC). Repris dans les
indicateurs 2 et 8 du PNPD 2014-2020 (INSSE SDES).
276 Consommation matérielle nationale, consommation matérielle nationale par habitant
et consommation matérielle nationale par unité de PIB. Indicateurs n°12 et n°7 du
PNPD 2014-2020 et indicateur FREC sous la forme « Réduire la consommation de
ressources liées à la consommation française de 30 % entre 2010 et 2030 » et
« recyclage de100 % de plastiques en 2030 » (INSEE. EUROSTAT)
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https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010596190#Documentation
https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010596191
https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010596192
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Annexe n° 5 : les indicateurs du service public
des déchets
Il n?existait à ce jour aucun recensement des objectifs chiffrés assortis
d?une échéance qui ont été fixés par l?État (code de l?environnement ou
programmation) pour le service public des déchets. Les juridictions
financières se sont attachées à ce recensement. Comme indiqué dans le
rapport, pour faciliter et simplifier le suivi de l?ensemble de ces objectifs, une
partie d?entre eux représentatifs des autres doit être choisie afin de bâtir un
tableau de bord annuel (indicateurs numérotés ci-dessous 1, 2, 10 et 23
surlignés en jaune) auxquels les juridictions financières recommandent
d?ajouter deux indicateurs qui n?existent pas encore dans la réglementation :
la quantité des OMR (Volume d?OMR par habitant en kg et par an) et la
prévention (dépenses de prévention /coût total du SPGPD en %).
Tableau n° 6 : les indicateurs généraux du service public des déchets
Nos Objectifs Base juridique
PRODUCTION
1
Production des DMA par habitant277
- 7% entre 2009 et 2014
-10 % en 2020 / 2010278
- 15 % en 2030 / 2010 279
Art. L. 541-1 1°
c.envir
TARIFICATION INCITATIVE
2
Couvrir 15 millions d?habitants en 2020 et 25
millions en 2022
10° de l?art. L. 541-1
code de
l?environnement280
COLLECTE et TRI A LA SOURCE
277 Indicateur 1 du PNPD 2014-2020 et du PNGD 2019. Déchets ménagers collectés
par habitant en année n ? déchets collectés en 2010) /déchets ménagers et assimilés en
2010 * 100 - Enquête collecte Ademe
278 Loi LTECV
279 Loi AGEC et ordonnance n°2020-920 du 29 juillet 2020
280 L?article 46 loi n°2009-967 de la loi de programmation Grenelle prévoyait déjà que
La TEOM et la REOM doivent intégrer au plus tard en 2014 une part variable incitative.
Axe 3 du PNGD 2019 « Étendre le déploiement de la fiscalité incitative (nombre de
collectivités et population) »
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/issu%20de%20l?ord.%202020-920%20-%20Directive%202008/98%20modifiée%202018/851
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
COUR DES COMPTES
130
Nos Objectifs Base juridique
3
Généralisation du tri à la source des biodéchets
au plus tard au 31 décembre 2023
Art. L. 541-21-1
code de
l?environnement281
4
Étendre à l?ensemble des emballages plastiques
les consignes de tri avant 2022 (en millions de
personnes)
5° de L. 541-1 code
de l?environnement
5
Généralisation d'ici au 1er janvier 2025 de la
collecte séparée pour les produits consommés
hors foyer (corbeilles de tri).
IV. de L. 541-10-18
6
Collecte bouteilles en plastique : 77% en 2025 et
90% en 2030
L. 541-10-11 du
Code de
l?environnement282
7
Atteindre 100% de collecte des emballages
plastiques ménagers en 2025
Axe 4 PNGD 2019
8
Augmenter les quantités de bouteilles et canettes
collectées dans le secteur des cafés, hôtels et
restaurants (CHR)
VALORISATION
9
Préparation en vue du réemploi et recyclage 55%
en 2025 et 60% en 2030 et 65% en 2035 des
DMA en masse
4 bis de L. 541-1 283
10
Quantité de DNDNI284 faisant l'objet d'une
valorisation sous forme de matière, notamment
organique : 55 % en 2020 et 65 % en 2025
4° de L. 541-1
11
Assurer en 2025 la valorisation énergétique d?au
moins 70% des déchets qui auront fait l?objet
d?une collecte séparée ou d?un tri et ne pouvant
faire l?objet d?une valorisation matière
9° du I. de L. 541-1
12
Atteindre un tonnage de produits réemployés et.
/ou de déchets préparés à la réutilisation de
4° art. L.541-1du
code de
l?environnement
281 Art. 22 directive (UE) 2018/851 et Axe 5 PNGD 2019. Art. L. 2224-16 du Code
général des collectivités territoriales
282 Article 9 de la directive SUP (collecte séparée)
283 Issu de l?ord. 2020-920 - Articles 6 et 11 Directive 2008/98 modifiée 2018/851.
Indicateur non chiffré axe 2 PNGD 2019. Directive 1994/62/CE : « Atteindre 50 % en
2025 et 55 % en 2030 de déchets d?emballages en plastique recyclé »
284 Les déchets non dangereux non inertes (DNDNI), mesurés en masse, recouvrent les
DMA et les déchets d?activités économiques et excluent les déchets du BTP.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041989925
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/règlement%20européen%20d?interdiction%20d?enfouissement%20des%20DMA%20collectés%20séparément
ANNEXES
131
Nos Objectifs Base juridique
l?équivalent de 5 % du tonnage de déchets
ménagers en 2030285
13
Réduire de 50% les quantités de produits
manufacturés non recyclables mis sur le marché
(2020/2015)
Art. 8° de L. 541-1
14
La mise sur le marché de certains produits ou
matériaux peut être subordonnée à l?incorporation
d?un taux minimal de matière recyclée
II. art. L. 541-9 code
de l?environnement
15
Tendre vers l?objectif de 100% de plastiques
recyclés au 1er janvier 2025
4ter du I. de L. 541-
1286
16
Atteindre 400 000 tonnes de plastiques régénérés
réincorporés en 2025
FREC avril 2018287
17
Intégrer 25% de matière recyclée dans les
bouteilles en PET en 2025 et 30% (toutes
bouteilles en 2030)
Article 6 de la
directive SUP
18
5% des emballages mis sur le marché sont des
emballages réemployés en 2023, 10% en 2027288
I. 1° de L. 541-1
code de
l?environnement
19
65 % de recyclage de l?ensemble des déchets de
papiers gérés par le SPGD289
L. 541-10-1
code de
l?environnement
20
Au 1/1 2030, les producteurs290, doivent justifier
que les déchets des produits sont de nature à
intégrer une filière de recyclage.
Art L.541-9 code de
l?environnement
PREVENTION
285 Produits réemployés et/ou déchets préparés à la réutilisation / déchets ménagers et
assimilés. Ademe - Observatoire du réemploi à venir (notamment D3E, textiles et
éléments d?ameublements).
286 Stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire
(01/18) et FREC p.3 et Axe 4 PNGD 2019
287 Stratégie de la Commission européenne sur les matières plastiques dans l?économie
circulaire COM (2018) 28 final (Atteindre 10 millions de tonnes de plastiques recyclés
incorporés dans de nouveaux produits dans l?Union européenne en 2025)
288 Unité de vente ou équivalent
289 Tonnage des papiers recyclés issus de la collecte sélective / tonnage total de papiers
graphiques pris en charge par le SPGD.
290 Ceux qui mettent sur le marché au moins 10 000 unités de produits par an et réalisent
10 M¤ CA
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
COUR DES COMPTES
132
Nos Objectifs Base juridique
21
Interdiction des plastiques à usage unique :
ventes sacs de caisse (1/1/2016), sacs
d?emballage (1/1/2017), particules produits
cosmétiques (1/1/2018), cotons tiges, vaisselle
jetable, bouteilles d?eau plate (écoles), pailles,
bâtonnets mélangeurs, gobelets et couvercles,
plateaux-repas, pots à glace, saladiers (1/1/2020),
fabrication/importation des sacs interdits à la
vente, distribution gratuite des bouteilles
(1/1/2021), sachets de thé non biodégradables,
jouets dans restauration, suremballage des fruits
et légumes frais, emballages presse et publicités,
étiquette sur fruits et légumes, achat par l?État
(1/1/2022), vaisselle jetable dans la restauration
pour les repas servis sur place (1/1/2023),
microplastiques médicaux (1/1/2024), contenants
cuisson en cantines (1/1/2025) tous les emballage
plastique à usage unique (2040)
Art. L541-10-5 et
L541-15-10 du code
de l?environnement
291
22 Publication d?un indice de durabilité (1/1/2024) Art. L541-2 c.envir
ELIMINATION
23
Quantités de déchets non dangereux non inertes
admis en installation de stockage :
- 30% entre 2010 et 2020
- 50% entre 2010 et 2025
7° art. L. 541-1 code
de
l?environnement292
24
Interdiction progressive de la mise en décharge
des déchets non dangereux valorisable
7° art. L. 541-1
c.envir293 et décret du
16.09.2021
25
Réduire les quantités de DMA admis en
installation de stockage en 2035 à 10% au plus du
poids des DMA produits
7 bis art. L. 541-1
294code de
l?environnement
291 Interdictions introduites par la directive SUP et transposées par la LTECV,
modifiées en 2016, 2018 (loi ELIM) et 2020 (loi AGEC).
292 p. 3 FREC Axe 7 du PNGD
293 Règlement européen d?interdiction d?enfouissement des DMA collectés séparément
3 bis du 2. de l?article 5 de la directive 1999/31 concernant la mise en décharge des
déchets
294 5. du 2 de l?article 5 de la directive 1999/31/CE
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ANNEXES
133
Nos Objectifs Base juridique
26
Arrêt d?ici 2025 des unités d?incinération des
ordures ménagères (UIOM) sans valorisation
énergétique et renforcement de l?efficience des
UIOM dont la valorisation énergétique est
insatisfaisante
Plan de réduction et
de valorisation des
déchets 2014-2020295
Tableau n° 7 : les indicateurs sectoriels (exemples)
TEXTILES LINGES CHAUSSURES296
1
Atteindre un taux de collecte de 50 % du gisement mis en marché
(soit 4,6 kg par habitant) en 2019
2
Atteindre un taux de valorisation matière (réutilisation et recyclage)
de 95 %
3
Atteindre un maximum de 2 % de déchets éliminés (déchets ne faisant l?objet
d?aucune valorisation).
ELEMENTS AMEUBLEMENT MENAGERS
4
Atteindre un taux de collecte séparée en 2023 des DEA de 40 %
des quantités d?éléments d?ameublement mis sur le marché
5
Un taux de recyclage et de réutilisation de 45 % sur la période 2018-2021 et
de 50 % pour la période 2022-2023 des DEA collectés séparément
6
Mettre à disposition des acteurs de l?économie sociale et solidaire 1,5 % des
DEA collectés à partir de 2021 pour ceux détenus par les ménages
7
Valoriser (réutilisation, recyclage et valorisation énergétique) en 2022
90 % des DEA collectés séparément des autres déchets
EQUIPEMENTS ELECTRIQUES ELECTRONIQUES (EEE)
8
Atteindre un taux de collecte de 65 % des équipements électriques
et électroniques mis sur le marché
9
Taux minimaux de recyclage et de valorisation pour les DEEE ménagers pris
en charge
DECHETS DE SOINS
10 Taux de collecte de 80 % en 2021297
295 Axe 2 du PNGD 2019 « Améliorer la valorisation énergétique des déchets »
296 Ademe : Déclarations des producteurs, y compris distributeurs et importateurs
d?équipements destinés aux particuliers
297 Quantités collectées année N /moyenne des quantités mises sur le marché moyenne
des quantités de produits mis sur le marché des années N et N-1.
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134
11
Taux de collecte d?au moins 3% / an tous DDS ménagers confondus (soit une
collecte de 0,6 kg de DDS ménagers par habitant à fin 2024)
12 Taux de valorisation énergétique : 90 % des DDS ménagers
13
2024 - taux de valorisation matière de 5 % des tonnages de DDS ménagers
collectés
14
Atteindre chaque année 45% de taux de collecte séparée de piles et
accumulateurs portables par rapport aux mises sur le marché
15
Taux de recyclage poids moyen des piles et accumulateurs portables : 65%
(plomb-acide), 75 % (nickel-cadmium) et 50 % (autres)
Source : Cour des comptes, à partir du tableau de suivi préparé par la DGPR et communiqué dans
le cadre de l?instruction
?
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135
Annexe n° 6 : les indicateurs des filières
à responsabilité élargie du producteur (REP)
Les éco-organismes sont agréés par l?État pour une durée maximale
de six ans renouvelable, sous réserve de répondre aux exigences d?un
cahier des charges établi par filière et fixé par arrêté interministériel. Ces
arrêtés leur fixent des missions, mesurées par l?atteinte d?objectifs précis
et cohérents avec les objectifs nationaux298. Des sanctions sévères sont
prévues299 en cas de non-respect de ces objectifs.
L?ADEME publie chaque année un Mémo des filières REP qui
reprend de façon groupé les résultats des 14 principaux indicateurs ci-
dessous pour chacune des filières.
Comme indiqué dans le rapport, pour faciliter et simplifier le suivi
de l?ensemble de ces objectifs, une partie d?entre eux représentatifs des
autres, doit être choisie afin de bâtir un tableau de bord annuel (indicateurs
numérotés ci-dessous 2, 4, 9, 10 et 11 surlignés en jaune) auxquels les
juridictions financières recommandent d?ajouter un indicateur qui
n?existent pas encore dans la réglementation : la prévention (dépenses de
prévention/CA des éco-organismes (en %).
Tableau n° 8 : objectifs-indicateurs du « mémo des filières REP »
N° Thèmes Formulations techniques
1 Production Mise sur le marché de produits assujettis en milliers
de tonnes
2 Gisement de déchets calculé en milliers de tonnes
3 Collecte Collecte séparée en milliers de tonnes
4 Taux de collecte séparée ou taux de collecte séparée
apparent pour valorisation
5
Valorisation (matière et énergétique) en milliers de
tonnes
6
Taux de valorisation par rapport aux tonnages
collectés séparément Recyclage (dont réutilisation)
en milliers de tonnes
298 II de l?article L. 541-10 du code de l?environnement
299 Article L. 541-9-6 du code de l?environnement (amende administrative limitée à
10 % des charges annuelles relatives à la gestion des déchets).
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https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/4832-memo-rep-2021.html
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599099/2021-01-01
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136
N° Thèmes Formulations techniques
7
Taux de recyclage par rapport aux tonnages collectés
séparément
8
Taux de recyclage par rapport au gisement ou aux
mises sur le marché
9
Quantités réellement réemployées et réutilisées en
milliers de tonnes300
10 Élimination Élimination en milliers de tonnes
11 Financement
incitatif
Produits mis sur le marché soumis à une éco-
modulation en pourcentage (bonus et malus)
12
Financement
Montant total des écocontributions perçues par les
éco-organismes en millions d?euros
13
Montant total des coûts opérationnels des éco
organismes en millions d?euros
14
Montant total des soutiens reversés aux collectivités
(opération et communication) en millions d?euro
Source : Cour des comptes
300 En ?unités de vente ou équivalent unités de vente? pour le suivi des objectifs des
filières équipements électriques et électroniques, des textiles et des éléments
d?ameublements
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137
Annexe n° 7 : comparaisons internationales
Selon Eurostat, la production des déchets municipaux en France à
582 kg en 2019 par habitant est supérieure à la moyenne européenne (487
kg/habitant). Les fortes disparités existantes au sein de l?UE apparaissant
dans la carte ci-dessous reflètent le lien entre activité économique
(Danemark, Allemagne, Luxembourg) et touristique par habitant (Chypre,
Malte) et la production de déchets par habitant.
Carte n° 2 : déchets municipaux produits par habitant
en Europe en 2018 (hors déblais et gravats)
Source : Eurostat
Le découplage de la croissance économique et de la production de
déchets est donc un des enjeux principaux de la politique de prévention et
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138
gestion des DMA. L?augmentation de la part des déchets à recycler constitue
un autre défi commun à l?ensemble de ces pays en vue des objectifs
européens de recyclage de 60 % à horizon 2030. Il implique de diminuer la
part des déchets recyclables qui se trouvent encore dans les OMR.
Les comparaisons internationales ci-dessous ont été choisies en
raison des succès de ces pays dans les domaines suivants :
un taux de recyclage des déchets municipaux proche ou supérieur à
50 % (cible européenne pour 2020).
l?élimination de la mise en décharge par orientation vers le recyclage
et l?incinération à valorisation énergétique301 rendus plus attractifs que les
autres modes de traitement par la mise en place d?une taxe pour la mise en
décharge, par l?interdiction directe (Allemagne) ou indirecte (Autriche)
d?enfouissement des déchets non traités et par l?interdiction d?incinérer et
d?enfouir les déchets ayant fait l?objet d?une collecte séparée (Pays-Bas) ;
la responsabilité opérationnelle des producteurs d?emballages pour
le tri et la valorisation : Allemagne, Flandre, Pays-Bas ;
les systèmes de consigne (Allemagne, Pays-Bas, Suède).
Allemagne
? Production : L?Allemagne est le 3ème plus important producteur de
déchets par habitant en Europe. Le recyclage est le principal mode de
traitement des déchets municipaux (68 %)302. L?incinération s?élève à
30 %.
? Gouvernance : La responsabilité de la gestion des déchets est partagée
entre le gouvernement national, les Länder et les autorités locales. Ces
dernières sont en charge de l?élimination des déchets municipaux (294
arrondissements ? Landkreise et 110 grandes villes). Les collectivités
déterminent chacune leur système de collecte et le montant des
redevances dans le cadre des objectifs de planification arrêtés par les
301 La directive décharge 31/99 CE du 26 avril 1999 marque une étape décisive dans la
mise en oeuvre de l?évitement de la mise en décharge.
302 La mise en oeuvre des nouvelles règles européennes statistiques de comptabilisation
des déchets municipaux devrait dégrader le classement allemand qui devrait cependant
rester supérieur à 50 %.
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ANNEXES
139
Länder303. À l?exception d?objectifs de recyclage pour les emballages,
peu d?objectifs quantitatifs ont été fixés au niveau fédéral. À l?inverse de
la France, les éco-organismes des emballages sont tous
« opérationnels »304.
? Collecte : 70 % de la population est concernée par une collecte séparée
des biodéchets. Il reste des progrès à faire notamment dans les grandes
villes (exemple de Berlin)305. La consigne pour les emballages de
boissons à usage unique mise en place depuis 2003 est un dispositif
obligatoire : lors de l?achat dans les magasins de détail, le
consommateur doit s?acquitter d?un « pfand » de 25 cts (une consigne)
qui est remboursée lorsque l?emballage est restitué dans les réceptacles
automatiques prévus à cet effet dans les magasins (qui absorbent la
bouteille et la compactent).
? Valorisation et élimination : L?Allemagne a atteint un très faible niveau
de mise en décharge (1 %) sans passer par une taxe, contrairement à ses
voisins européens, mais en interdisant la mise en décharge de déchets
préalablement non traités306, et en imposant la collecte séparée des bio
déchets et du papier dès le début des années 90. Les DMA sont soit
incinérés, à un coût très élevé (100 ¤ la tonne pour les déchets
municipaux), soit recyclés. De par cet effet prix, collecter les déchets en
flux séparés coûte moins cher que de collecter des déchets mélangés qui
devront être traités puis incinérés307. Fruit de plusieurs décennies de
politique orientées dans la même direction, le geste de tri et l?incinération
avec valorisation énergétique sont aujourd?hui largement acceptés en
Allemagne308 (environ 70 U.V.E. sur le territoire avec une capacité de
303 À titre d?exemple, dans le Land de Hessen, les autorités locales en charge de la
gestion des déchets doivent, en application des objectifs de planification arrêtés dans la
loi d?application régionale « hessische Ausführungsgesetz zum
Kreislaufwirtschaftsgesetz », diminuer les quantités d?ordures ménagère résiduelles en
deçà d?une quantité cible 150 kg/an/habitant d?ici 2025. Cet objectif est valable tant en
secteur à dominante urbaine qu?en secteur plutôt rural.
304 Voir définition de ce terme dans la note de bas de page de l?annexe sur les éco-
organismes
305 Source : entretien avec M. Jaron, chef de la division Économie circulaire au
ministère de l?environnement allemand.
306 Depuis 2005, ne peuvent être stockés que les déchets ayant fait l?objet d?un
prétraitement en installations de traitement mécano-biologique ou en incinérateurs
(résidus de ce traitement) ou les déchets inertes.
307 À l?inverse de la situation française par exemple où les collectivités indiquent que la
collecte séparée peut représenter un coût trop élevé.
308 Le rapport de l?Agence européenne de l?environnement datant de 2009 sur la mise
en oeuvre de la directive ?Décharge (« Diverting waste from landfill, effectiveness of
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140
18,8 Mt309? à comparer aux 125 unités en France avec une capacité de
15,6 Mt310). L?Allemagne présente un taux de recyclage de 46 % des
emballages en plastique, supérieur à celui de la France (26 %) et 98 %
des emballages de boissons en plastiques.
Autriche
? Production : 570 kg/habitant (supérieure à la moyenne européenne).
? Gouvernance : elle est répartie entre le gouvernement fédéral et les
provinces.
? Prévention : L?Autriche est considérée avec la Flandre comme l?un des
pionniers pour la mise en place de réseaux de réutilisation offrant des
biens d?occasion de qualité. L?initiative la plus importante, « Repanet »
est un réseau de réparation et de réemploi, principalement le textile et les
équipements électroniques, qui regroupe 27 organisations employant
1 800 personnes dans 140 lieux.
? Collecte : L?Autriche a mis en place une collecte séparée des déchets
« biogéniques » et des emballages en papier dès 1992, accompagnée de
mesures visant à réglementer la qualité du compost afin d?assurer sa
compétitivité311. 22 % des DMA faisant l?objet d?une collecte séparée
sont des bio déchets (hors compost au domicile ou communautaire)
valorisés au sein de sites de compostage agricoles, municipaux ou
commerciaux312 ou au sein de sites de méthanisation. Dans les zones
fortement urbanisées, comme Vienne, les déchets collectés ne sont pas
de qualités suffisantes pour pouvoir être compostés.
? Valorisation et élimination : L?Autriche a élaboré une stratégie
d?élimination de la mise en décharge qui repose sur une double approche
d?interdiction pour les déchets non traités, biodégradables et organiques
waste-management policies in the EU ») souligne l?importance de l?acceptation
publique en matière de traitement de déchets.
309 Cf. Wilts Henning et Von Gries Najda, Europe?s waste incineration capacity in a
circular economy, ICE proceedings, mai 2015
310 Ademe. Le traitement des déchets ménagers et assimilés en 2018, Exploitation des
données de l?enquête sur les installations de traitement des déchets ménagers et
assimilés en France en 2018, Décembre 2020
311 Agence européenne de l?environnement. Municipal Waste management in Austria,
Février 2013.
312 Fertilisant pour les espaces verts, cimetières, etc.
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https://ec.europa.eu/environment/eir/pdf/report_at_en.pdf
ANNEXES
141
(ce qui comprend le plastique) et de taxation. Selon la Commission
européenne313, l?Autriche fait partie des États les plus performants : le
taux de mise en décharge est parmi les plus faibles de l?UE (2 %), le taux
de recyclage à 58 % en 2018 dont 33 % de compostage314 est le plus
élevé de l?UE, derrière l?Allemagne. À compter de 2004, et
graduellement jusqu?en 2008, la mise en décharge des déchets non traités
a été interdite pour les biodéchets et les déchets plastiques315. L?Autriche
a également adopté une taxe sur la mise en décharge des déchets, moins
élevée pour les installations à la pointe de la technologie afin de
moderniser les sites. Malgré la diminution du revenu de la taxe, elle a été
maintenue. La situation autrichienne montre une très forte corrélation
entre l?augmentation des taxes et l?interdiction du stockage et la
diminution des déchets effectivement enfouis. Les emballages plastiques
ménagers et commerciaux sont couverts par une filière REP. En cas de
chute du prix de la matière recyclée, les éco-organismes doivent
compenser en augmentant les prix versés aux collectivités territoriales
collectrices. En 2015, le taux de recyclage des emballages plastiques
s?élevait à 34 % pour un taux européen de 67,5 %.
Belgique ?Flandre
? Production : 490 kg/hab. (-10 % sur dix ans)
? Gouvernance : En Belgique, les questions environnementales relèvent
des régions. S?agissant de la Flandre, c?est l?OVAM (Agence publique
des déchets de Flandre) qui définit les objectifs définit et les règles
communes obligatoires (p. ex. le nombre de flux faisant l?objet d?une
collecte séparée, la fréquence des collectes) pour les 300 municipalités
en charge de la gestion opérationnelle des déchets. La politique de
gestion des déchets en Flandre remonte au début des années 1980.
Depuis lors, tous les quatre ou cinq ans, l?OVAM adopte de nouveaux
313 Commission européenne. The environmental implementation review 2019 ? country
report Austria, avril 2019.
314 L?Autriche présente par ailleurs le plus haut niveau de recyclage en Europe
s?agissant des déchets organiques.
315 Cette interdiction s?applique aux déchets présentant un taux de COT (« Carbone
organique total ») supérieurs à 5 %. Ce seuil revient à interdire la mise en décharge des
déchets plastiques. Le carbone atome caractéristique des matières vivantes est
également à la base du pétrole et donc des matériaux en plastique.
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142
plans et en assure le suivi et l?accompagnement316. La gouvernance du
système ne repose pas sur une approche coercitive mais d?une part sur
une coopération de long terme entre les municipalités et l?OVAM, cette
dernière accompagnant les autorités locales techniquement et
financièrement et d?autre part sur un système transparent de publication
des résultats (« naming and shaming 317»).
? Prévention : Des réseaux de réemploi / seconde main sont installés dans
chaque municipalité ou centre commun à plusieurs municipalités
voisines, avec des objectifs fixés en termes de biens réutilisés en kg par
habitant.
? Collecte : Les tarifs payés par le citoyen pour les collectes séparées sont
plus faibles que pour les OMR318. Les déchets organiques (déchets verts
d?un côté et fruits et légumes d?un autre côté) font également l?objet
d?une collecte séparée depuis 1991. La Flandre ne dispose pas de
système de consigne pour la collecte des bouteilles en plastique.
? Valorisation et élimination : D?après la Commission européenne, la
Belgique, particulièrement la Flandre319, figure parmi les pays les plus
performants avec un taux de recyclage de 54 % en 2017. La Belgique a
mis en place à la fois l?une des taxes les plus élevées en Europe et une
interdiction de l?enfouissement garantissant que le coût de la mise en
décharge (1 % en 2018) est supérieur à celui de l?incinération qui doit-
être lui-même supérieur au coût du recyclage. La Belgique présente un
taux de recyclage de 55 % et un taux d?incinération de 44 % et pour les
emballages de 80 % (le plus haut niveau en Europe). Les emballages
plastiques non recyclables font l?objet d?un malus très élevé. Dans le
système REP, les producteurs restent propriétaires de la matière sur le
marché jusqu?au stade du déchet et doivent investir dans les centres de
tri et dans les capacités de recyclage nécessaire pour faire face à
316 OVAM. Implementation plan for household waste and comparable industrial waste-
summary
317 Cette locution anglaise (litt. « nommer et couvrir de honte »), pouvant être traduite
par l?expression française « mise au pilori », désigne ici le fait de déclarer publiquement
les mauvais résultats d?une municipalité.
318 Concernant les collectes séparées, les municipalités peuvent fixer les tarifs, à
l?exception du papier/cartons qui n?est pas taxé, compte tenu de la valeur recyclable.
319 La Flandre est la région la plus peuplée de Belgique avec 6,6 millions d?habitants
sur un total de 11,5 millions et compte une densité de population élevée de 489 habitants
au mètre carré.
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ANNEXES
143
l?extension des emballages collectés320. La prise en charge totale de la
filière REP emballages se réalise à coût zéro pour les collectivités et donc
les contribuables (système Fost+). Dans son plan 2016-2022, l?office de
gestion des déchets de Flandres (OVAM) impose des cibles chiffrées aux
municipalités en matière d?OMR, de réemploi et de déchets abandonnés.
Ce programme est fondé sur une approche en « clusters » de
municipalités avec déclinaison d?objectifs locaux. Les municipalités
sont regroupées en 16 groupes de municipalités à profil socio-
économique similaire ou « clusters » (le profil prend en compte
notamment le type d?habitat, l?intensité de l?activité économique et le
dynamisme démographique321). Chacun de ces 16 clusters se voit
attribuer 11 objectifs chiffrés spécifiques. Pour les OMR, les objectifs
chiffrés sont compris entre 116 kg par habitant pour les municipalités les
plus rurales et 258 kg/habt pour les municipalités touristiques.
Carte n° 3 : déclinaison des objectifs de réduction des OMR
à horizon 2022 par « clusters » de municipalités
Source : OVAM (Agence flamande pour l?environnement). Implementation plan for household
waste and comparable industrial waste, 2017-2022.
320 L?entreprise flamande Eco-oh (https://www.eco-oh.com/fr/groupe-eco-oh) recycle
22 000 tonnes par an d?emballages plastiques mixtes soit l?équivalent de la production
de déchets de 2,5 millions de flamands. L?entreprise recycle les déchets plastiques et
soit les vend déjà transformés aux fins d?application industrielle soit les transforme au
sein d?usine en objets plastiques dits « design ».
321 Exemple de groupes de municipalités : municipalités côtières, grandes villes,
municipalités à fort taux d?urbanisation et à faible revenu, villes moyennes, métropoles
avec activités tertiaires?
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https://www.eco-oh.com/fr/groupe-eco-oh
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144
Pays-Bas
? Production : 511 kg par habitant en 2017, ce qui reste supérieur à la
moyenne européenne mais représente une baisse de 15 % sur dix ans.
? Gouvernance : Elle est recentralisée depuis 1996 par transfert de la
responsabilité du niveau des provinces au niveau du gouvernement
central. Le ministère de l?environnement est chargé élaborer tous les six
ans le plan national de gestion des déchets. Les municipalités sont
chargées de la collecte des déchets ménagers sur leur territoire.
? Valorisation et élimination : Le taux de recyclage des DMA est parmi
les plus élevés en Europe et le taux de mise en décharge l?un des plus
bas (inférieur à 1 %). Avec un taux de 56 % (2018) parmi les plus élevés
de l?UE (moyenne européenne à 48 %), les Pays-Bas ont dépassé dès
2013 la cible européenne de recyclage de 50 % des déchets municipaux
prévue pour 2020. L?incinération de déchets municipaux atteint 43 %.
La mise en décharge est parmi les plus basses d?Europe (1 %), bien en-
deçà de la moyenne européenne à 24 %, du fait de l?effet combiné des
interdictions et taxes pesant sur les mises en décharge. En 1995, le
gouvernement a en effet pris un décret interdisant la mise en décharge
de 35 catégories de déchets incluant les OMR et les déchets organiques.
Une taxe sur la mise en décharge a également été introduite la même
année et a augmenté jusqu?en 2010 afin de rendre l?incinération et le
recyclage financièrement plus attractif que la mise en décharge. La taxe
néerlandaise devient alors la plus élevée d?Europe (107,5 ¤ par tonne).
Deux ans plus tard, le gouvernement décide sa suppression, le faible
niveau de mise en décharge ne justifiant plus son existence et la taxe
ayant rempli son objectif.
Suède
? Production : 443 kg/habitant (4,5 Mt)
? Collecte : Le système de consigne permet de collecter et recycler environ
90 % des canettes en aluminium et bouteilles PET. La Suède a introduit
ce dispositif pour les canettes dès 1984 (0,10 ¤ par canette), puis sur les
bouteilles plastiques PET en 1994 (entre 0,10 ¤ et 0,20 ¤). Plus de 75 %
des 290 communes suédoises proposent désormais un bac spécial aux
ménages pour collecter leurs déchets alimentaires. Les ménages peuvent
bénéficier, à proportion de leur tri sélectif, d?une réduction non
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ANNEXES
145
harmonisée de leur redevance annuelle communale de traitement des
déchets.
? Valorisation et élimination (données 2018) : 50 % des déchets ménagers
suédois sont aujourd?hui incinérés, 35 % sont recyclés (taux en-dessous
de pays comme l?Allemagne), et 15 % font l?objet d?un traitement
biologique. Les pays nordiques dans leur ensemble poursuivent une
politique à l?égard des DMA qui visent à un équilibre 50 % recyclage /
50 % combustion. La mise en décharge des déchets ménagers ne subsiste
plus qu?à l?état résiduel (0,7 %) à la suite de l?introduction d?une taxe
sur la mise en décharge des déchets. Le recours accru à l?incinération des
déchets non organiques représente aujourd?hui 20 % de l?énergie utilisée
par les réseaux urbains de chaleur qui approvisionnent en chauffage
92 % des appartements suédois et a contribué à la disparition des
combustibles fossiles du secteur du chauffage en Suède. Cette politique
conduit les communes suédoises à importer des déchets frontaliers pour
alimenter en continu leur réseau et amène des inquiétudes dans l?opinion
publique sur les rejets des polluants dans l?atmosphère. La Suède opère
la méthanisation des déchets organiques pour produire du biocarburant
pour les transports en commun.
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Annexe n° 8 : les déchets en matière plastique
Le plastique est léger, polyvalent, adapté à l?automatisation et
difficilement remplaçable pour la protection des produits de consommation
et leur distribution. C?est pourquoi, les 359 millions de tonnes (2018) de
plastiques produits chaque année dans le monde, qui représentent 4 à 6 %
de la consommation annuelle mondiale de pétrole (350 Md$)322, ont des
usages très divers et sont notamment utilisés323 pour les emballages tels que
les pots de yaourt ou les bouteilles d'eau (40 % de la consommation
européenne de plastiques et plus de 60 % des déchets plastiques), le BTP
(20 %), l?industrie automobile (10 %), les appareils électriques et
électroniques (EEE) (6 %)324.
L?utilisation de ce matériau est en pleine expansion depuis 1950
avec un doublement de la demande depuis 2000, aujourd?hui tirée par les
pays en voie de développement qui consomment encore 20 fois moins de
plastique que les pays de l?OCDE. Le développement de la consommation
d'aliments et de boissons « à emporter » favorise l?essor des plastiques à
usage unique. Un "pic du plastique" pourrait cependant être atteint en 2027
selon les experts325, avec une croissance de la demande qui passerait
ensuite de 4 % à moins de 1 % par an.
322 Le commerce mondial des plastiques représente 1 000 milliards de dollars par an
soit 5 % du commerce global de marchandises. https://unctad.org/fr/news/nouvelle-
etude-le-commerce-mondial-du-plastique-depasse-de-40-les-evaluations-precedentes
323 CGEDD et CGEIET Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine,
Rapport conjoint, janvier 2020.
324 Les déchets d'équipements électriques et électroniques DEEE sont constitués pour
20 % de plastique.
325 ?The Future?s Not in Plastics: Why plastics demand won?t rescue the oil sector?. 4
septembre 2020. Carbon tracker think tank
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https://www.economie.gouv.fr/cge/filieres-dechets-recyclage
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148
Externalités négatives des déchets plastiques
Les effets des matières plastiques sont significatifs sur le
réchauffement climatique (l?équivalent du fonctionnement de 189 centrales
à charbon326), la biodiversité327, la consommation d?eau et d?énergie, la
santé et indirectement sur l?économie pour des activités telles que le
tourisme, la pêche328 et le transport maritime. L?ensemble de ces
externalités négatives du plastique est évalué financièrement à 1 000
dollars par tonne.
Les trois-quarts des déchets plastiques (6,3 milliards de tonnes) sont
rejetés dans les milieux naturels329 dont entre 4,8 et 12,7 millions de tonnes
de déchets plastiques déversées chaque année dans les océans (les rejets
européens représente l?équivalent chaque minute du contenu d?un camion
poubelle jeté en mer330). Qualifié de « continent » ou de « soupe », les
déchets plastique en mer se décomposent en microplastiques, (fragments
de moins de 5 mm), entrent dans la chaîne alimentaire via les organismes
marins, l?air et l?eau potable. Sans que l?on connaisse encore l?effet sur la
santé humaine, on constate qu?un être humain ingère en moyenne chaque
326 5 tonnes de CO2 émises par tonne de plastique produite. Centrales à charbon de 500
mégawatts en tenant compte des différentes étapes du cycle des plastiques : (extraction,
transport, fabrication, gestion de la fin de vie des déchets), le bilan carbone des
plastiques représenterait 860 Mt de CO2 par an. En 2050, l?industrie plastique pourrait
représenter 10 à 15 % des émissions mondiales de CO2. Sénat Pollution plastique : une
bombe à retardement décembre 2020
327 Une méta-analyse récente a estimé à 2 249 le nombre de plantes, d?animaux et de
microbes affectés par la pollution plastique à l?échelle mondiale.
328 1 % des recettes des captures réalisées de la flotte de l'Union européenne.
329 Les 8,3 milliards de tonnes de plastiques fabriquées depuis 60 ans n?ont été pris en
charge qu?à hauteur d?un quart (9 % ont été recyclées, 12 % incinérées). Si rien n?est
fait 12 milliards de tonnes de déchets plastiques pourraient leur être ajoutées d?ici 2050.
Ce phénomène de rejet dans les milieux naturels concerne peu l?Europe : 83 % des
plastiques dans les océans viennent de 20 pays dont aucun situé en Europe et selon les
données de l?Ademe et une extrapolation des enseignements issus du rapport WWF, en
France, plus de 98 % des emballages ménagers sont collectés. Production, use, and fate
of all plastics ever made. Science Advances Roland Geyer1, Jenna R. Jambeck and
Kara Lavender Law Vol. 3 n°7 19 juillet 2017
330La tendance est anticipée à la hausse jusqu?en 2100 au moins. (UE : 150 000 et 500
000 tonnes par l?Union européenne) Jambeck, Jenna R. et al., « Plastic waste inputs
from land into the ocean », Science, volume 347, Février 2015 et Study to support the
development pf measures to combat a range of marie litter resource Eunomia report
for European Commission Janvier 2016
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https://www.senat.fr/espace_presse/actualites/202012/pollution_plastique.html
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ANNEXES
149
semaine l?équivalent du poids d?une carte de crédit331, que l?on retrouve
notamment dans le placenta des femmes enceintes332.
La contrainte technique du recyclage des plastiques
Les objectifs fixés en matière de recyclage des déchets plastiques,
en général (« tendre » vers 100 % de plastique recyclé au 1er janvier 2025)
ou pour le cas particulier des emballages (20 % de réduction des
emballages plastique à usage unique mis sur le marché pour les cinq
prochaines années 2021-2025) semblent hors d?atteinte au regard du
rythme de réduction actuel. Les progrès du recyclage des plastiques sont
en effet entravés par certaines contraintes de cette matière :
? La variété des plastiques (résines ou polymères) implique pour chacun
une filière de recyclage spécifique. Les résines utilisées sont nombreuses
(une cinquantaine parmi lesquelles cinq principales333 : voir tableau ci-
dessous).
331 Soit cinq grammes de plastique ?Assessing plastic ingestion from nature to people
WWF, Dalberg and the university of Newcastle Australia juin 2019 (Soit cinq grammes
de plastique constitués de 52.000 microparticules de plastique par an, 121.000 si l?on
prend en compte la pollution de l?air).
332 Revue Environment International. Janvier 2021 Plasticenta : First evidence of
microplastics in human placenta. Antonia Ragusa
333 Les emballages sont cependant constitués pour 90 % des cinq principales résines,
dont la moitié sont déjà recyclable., Les 598 000 tonnes de déchets recyclées sont
essentiellement du PET et du PEHD (61 % de ces deux matières sont recyclés).
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150
Tableau n° 9 : les 5 principales variétés de plastiques334
Variétés de plastique et
part de marché en Europe
Utilisation primaire
Possibilités de
recyclage et
débouchés335
Polytétraphtalate
d?éthylène (PET) 7,9%
Bouteilles boissons et détergents
Facile (40% du
gisement) : retour
possible au contact
alimentaire (p. ex.
nouvelles bouteilles).
336
Polyéthylène (PE)
Haute (PEHD) et basse
intensité
(PELD/PEBD) 29,8%
Bâtiment, films alimentaires,
barquettes, jouets bouchons,
bouteilles de lait, flacons pour la
cosmétique, sac, pots de glace
Possible : sacs
poubelles, flacons de
détergent, mobilier
urbain, stylos, tuyaux,
automobile?
Polypropylène (PP)19,4%
Automobile, EEE, emballages
alimentaires, masques et tissus
Difficile. Pas de retour
possible à l?alimentaire.
Polystyrène (PS)
expansé et autres 6,2%
Protection des appareils,
emballages alimentaires (comme
les pots de yaourt, barquettes),
EEE
Difficile. Pots de yaourt
(4 %) : béton allégé,
rembourrage, boites,
cintres, pots de fleurs
Polychlorure de vinyle
(PVC) 10%
Surtout bâtiment : canalisation,
fenêtres, sols et murs et aussi
blisters et automobile
Moyen. Fenêtres,
canalisations, sols,
tuyaux, meubles de
jardin
Autres résines complexes
(PUR, thermoplastiques,
?) 26,7 %
Optique, télécommunications,
médical, isolation
Très difficile
Source : Cour des comptes
? La complexité des usages : S?ajoutent à la variété des résines une
complexification supplémentaire due au marketing (bouteilles d?eau de
couleur), aux additifs chimiques polluants (p. ex. DEEE), aux
combinaisons de matériaux impossibles à séparer dans la phase de
recyclage337 et à la décontamination obligatoire des plastiques recyclés
334 La nouvelle grille tarifaire en vigueur sur les mises en marché 2020 distingue 7
catégories d?emballages.
335 La couleur exprime le degré de facilité technique du recyclage
336 On parle de boucle fermée du recyclage lorsqu?un type de plastique (le PET clair
des bouteilles par exemple) permet de produire à nouveau des contenants eux-mêmes
recyclables.
337 P. ex. aluminium et plastique dans les sacs de chips et de barres chocolatées et les
blisters de médicaments, carton et plastique dans les boîtes de pizza.
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ANNEXES
151
utilisés pour un usage alimentaire. Ni les nouvelles résines ni les
nouveaux usages ne font pas l?objet d?études d?impact de recyclage
préalables.
? Les contraintes du tri : Le recyclage est principalement mécanique
(transformation des déchets plastique en matières premières secondaires
?granulats338- sans changer la structure chimique de la matière) et pour
l?instant plus marginalement chimique (retour aux composants
chimiques de base équivalent à la qualité de la matière vierge). Les
différents types de plastiques fondant à différentes températures, un tri
précis est nécessaire. Les plastiques d?emballage non triés ne peuvent
produire que des produits grossiers tels que des plaques ou des canaux
ou, après broyage, des carburants secondaires pour la production
d?énergie dans l?industrie.
? L?altération progressive de la structure, de la qualité visuelle
(transparence) et des qualités sanitaires du plastique par les opérations
successives de recyclage. Un à trois recyclages pour une bouteille qui
deviendra un « polaire » avant de devenir définitivement un déchet.
? La taille : Les produits qui ne seront jamais recyclables car trop petits
ou trop techniques (sachets de thé, papier bonbon, petit emballage). Un
emballage de fromage à la coupe de 10?microns contient six couches de
différents plastiques.
? Les pertes en ligne dans le recyclage : en raison des liquides,
adhérences, matières qui compromettent la pureté (pour certains
plastiques, 20 à 30 %).
? Le manque de maturité de la filière : La plasturgie française reste un
secteur atomisé339, faible en investissement, et spécialisée par résine. Au
sein de ce secteur, les filières françaises de recyclage sont prises en étau
entre, en amont, les chaînes de collecte et de tri, aux coûts et volumes de
production rigides, et en aval, les utilisateurs de plastiques qui comparent
le prix du recyclé au cours fluctuant des matières vierges. Ces PME du
recyclage sont cependant progressivement acquises par des grands
338 41 000 tonnes des granulés sont perdues dans la nature chaque année, soit
l'équivalent de 11,5 milliards de bouteilles en plastique.
339 4 000 PME et TPE dont 56 % de 1 à 9 salariés et 1/3 d?entreprises indépendantes
130 000 salariés et 30 Md¤ et faibles capacités industrielles (20-40 000 tonnes/an)
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groupes, qui veulent maîtriser leur approvisionnement en produits
recyclés et s?assurer une intégration verticale340.
? La sensibilité du plastique recyclé au cours des matières premières
vierges (prix du pétrole) : Si certains plastiques sont recyclables « en
théorie », leur coût comparé avec le plastique vierge est prohibitif (du
simple au double), expliquant la faible demande de matières plastiques
recyclées de 6-7 % en Europe341. Les plastiques recyclés issus des PEHD
peinent à trouver preneurs aujourd?hui tandis qu?à l?inverse la demande
de PET est très forte (annonce marketing de contenants 100 % recyclés)
provoquant des prix spéculatifs.
Les nouvelles pistes pour prévenir et gérer les déchets plastiques
? La taxe européenne sur les emballages plastiques non recyclés
Une taxe européenne de 800 euros par tonne de déchets
d'emballages plastiques non recyclés est instituée depuis le 1er janvier
2021342 et doit être versé du budget national vers le budget européen La
France pourrait ainsi être le 1er ou le 2e plus gros contributeur d?Europe
(1.2?Md¤ inscrit en LFI 2021) en raison du poids d?emballages plastiques
qu?elle met sur le marché et des faibles taux de recyclage.
Lorsque la France disposera d?une REP sur les emballages ménagers
et industriels à partir de 2025, cette taxe sera répercutée avec un faible taux
sur de nombreux assujettis (fabricants, metteurs en marché et importateurs
puis éco-organismes) à partir de 2025.
? La consigne des bouteilles
Dans ce système, qui permet d?obtenir des matières de meilleure
qualité, plus facilement valorisables, le consommateur doit s?acquitter, au
moment de l?achat, d?une somme consignée ? qui majore le prix de vente.
Cette somme lui est remboursée, sous forme monétaire ou de bons d?achat,
quand il rapporte son emballage vide pour qu?il soit recyclé.
Selon l?ADEME, la trajectoire de collecte des bouteilles en plastique
pour boisson (autour de 57 % aujourd?hui, 71,5 % en 2025 et 78,9 % en
340 Un géant mondial du soda est actionnaire à 50 % de PlastikPack, le n°1 européen de
la régénération du plastique.
341 Les acteurs économiques et l?environnement, édition 2017 Insee références
342 Réunion extraordinaire du Conseil européen (17, 18, 19, 20 et 21 juillet 2020).
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ANNEXES
153
2030) ne permettra pas d?atteindre l?objectif européen de 90 % en 2030343.
Les régions rurales atteindraient cet objectif, mais les régions urbaines
(10 % de collecte seulement aujourd?hui dans les villes de Paris et
Marseille) n?y parviendront vraisemblablement pas sans la mise en place
de la consigne ou d?autres mesures ambitieuses et contraignantes.
Tableau n° 10 : taux de recyclage des emballages plastiques
En % 2017 2018 2019 2020
Bouteilles et flacons 55,6 58,3 56,6 54,7
Autres emballages plastiques 3,9 4,2 6,2 7,5
Source : Cgefi
Dans les États membres qui l?ont mise en place344, la consigne a fait
la preuve de son efficacité avec un taux de collecte en moyenne de plus de
80 % des bouteilles en PET, contre une moyenne de 58 % dans l?ensemble
de l?UE345. La loi AGEC a renvoyé pour sa part cette option à 2023 si
l?analyse des performances de collecte et de recyclage issue du rapport
annuel de l?ADEME confirme que l?objectif 2030 de 90 % ne sera pas
atteint346. D?ici là, divers tests de consigne sont mis en place347et
l?ensemble des parties prenantes concernées sont associées à la réflexion
pour mettre en balance avantages mais aussi inconvénients 348. Une
disposition de la loi AGEC349 institue par ailleurs un dispositif de reprise
obligatoire par les distributeurs des produits usagés relevant d?une REP.
? La communication pédagogique à l?égard du public
343 Dont 77 % des bouteilles en PET dès 2025 - Directive européenne sur les plastiques
à usage unique dite « directive SUP (single-use-plastic) UE n° 2019/904 du 5 juin 2019.
344 Danemark, Estonie, Pays-Bas, Allemagne, Croatie, Lituanie, Finlande et Suède.
Hors UE : Norvège et Islande.
345Cf. annexe sur les comparaisons internationales et Cour des comptes européennes. Les
mesures prises par l?UE pour lutter contre le problème des déchets plastiques, 2020.
346 Art. L. 541-10-11.-I code de l?environnement. L?article 9 de la directive sur les
plastiques à usage unique n?oblige pas à recourir à la consigne mais la cite comme
possibilité.
347 420 automates CITEO donnant 1 ou 2 centimes d?euros par bouteille triée, bouteilles
contre places de cinéma dans l?habitat social d?Argenteuil.
348Confusion pour le citoyen avec les instructions qu?il a reçues depuis 20 ans de mettre
les bouteilles en plastique dans la poubelle jaune, crainte des collectivités locales des
pertes de recettes associées à la revente des bouteilles et à la surcapacité des centres de
tri sans soutien compensatoire de l?éco-organisme.
349 Article L. 541-10-8 du code de l?environnement
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https://www.eca.europa.eu/Lists/ECADocuments/RW20_04/RW_Plastic_waste_FR.pdf
https://www.eca.europa.eu/Lists/ECADocuments/RW20_04/RW_Plastic_waste_FR.pdf
COUR DES COMPTES
154
En dépit des documents pédagogiques et des efforts d?explication
proposés par l?ADEME350, les médias et nombre d?acteurs publics et
privés, les citoyens ne sont pas en mesure de savoir quelle attitude
écoresponsable choisir, à l?égard par exemples des nouveaux produits
pouvant perturber le geste de tri et le traitement, de la différence entre un
sac en plastique biosourcé et un sac en plastique biodégradable ou des
avantages relatifs d?un pot de yaourt en verre par rapport à un pot en
plastique (voir tableau ci-dessous).
Tableau n° 11 : impacts environnementaux comparés du polystyrène
et du verre pour l?emballage des yaourts
Impacts
environnementaux
Avantage
verre
Avantage
plastique
Explication
Recyclabilité X
76 % de recyclage contre
27%
Ressources (matières
premières d?origine)
X
(+430 %) Le sable
comme le pétrole est une
ressource rare
Consommation d?eau X +27 %
Durée de décomposition
dans la nature
X
450 ans contre 1 million
d?années
Changement climatique
(CO2)
X
+ 306 % (12 fois plus de
camions de transport) et
énergie pour la
fabrication
Toxicité et pollution pour
l?environnement, la santé
et la biodiversité
X
Microplastiques dans la
chaine alimentaire des
organismes vivants
Source : Cour des comptes à partir de différents articles d?analyse de cycle de vie351
350 L?Ademe renforce ses travaux d?ACV et réalise depuis 2002 un Bilan national du
recyclage, auquel est joint une Analyse du cycle de vie des flux de déchets recyclés sur
le territoire français.
351 La synthèse proposée par ce tableau rend compte des impacts environnementaux
issus des ACV. L?état actuel de la recherche scientifique ne permet cependant pas
encore de tirer un bilan global qui serait une aide à la décision. Les ACV menées par
les fédérations professionnelles ne comportent en général pas de "revue critique" par
des experts indépendants validant la méthodologie. L?Ademe travaille à un tel
référentiel méthodologique.
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ANNEXES
155
L?analyse du cycle de vie (ACV)
L?ACV est une « compilation et évaluation des intrants, des extrants
(flux physiques de matière et d?énergie associés) et des impacts
environnementaux potentiels d?un système de produits au cours de son cycle
de vie » : distribution, utilisation, collecte et élimination vers les filières de
fin de vie ainsi que transport.
L?ACV est l'outil d?évaluation multicritères le plus abouti fondé sur
la normalisation internationale352. L?utilisation des ACV pour formuler des
recommandations ne permet cependant pas les généralisations. Une ACV
ne peut être prise en compte que pour les hypothèses sur laquelle elle est
fondée (situation à l?instant « t », emballage ou produit spécifique pris en
compte, méthodes de mesure la pollution).
Source : Cour des comptes à partir de l?ADEME353
? Les changements intervenus sur le marché international des déchets
Les décisions prises par plusieurs pays de fermer leurs frontières aux
déchets en provenance de l?Union européenne aura pour conséquence à
court terme une augmentation des produits incinérés ou mis en décharge
mais, à moyen terme, ces décisions devraient conduire à développer de
réelles capacités industrielles en Europe354.
? Le soutien de l?État à la structuration et au renforcement de la filière
L?État peut intervenir par des subventions pour réduire les prix des
matières premières recyclées, encourager la recherche et développement
(Crédit Impôt Recherche, Programme d?Investissement d?Avenir-PIA,
Banque Publique d?Investissement), mettre en place des « clusters » de
coopération scientifique et industrielle, commander des études
scientifiques, voire prendre des participations directes ou indirectes (CDC)
dans certaines entreprises ou favoriser fiscalement le secteur (capital risque
ou suramortissement). L?État dispose en outre d?autres leviers comme les
interventions de la puissance publique pour soutenir ou contrer certaines
352 Normes ISO (14040 à 14043)
353https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-
laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv et
https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Rapport_Quel_Potentiel_3R.pdf
354 EEA-ETC/WMGE, 2019/5, Plastic waste trade and environment, octobre 2019.
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https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv
https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv
https://www.eea.europa.eu/publications/the-plastic-waste-trade-in
COUR DES COMPTES
156
opérations de fusion-acquisition dans les activités d?importance vitale 355,
les normes techniques et les achats publics.
Dans le cadre du Plan France relance pour la transition écologique,
plus de 200 millions d?euros sont dédiés à la filière Plastique (dispositif
ORPLAST) afin de doubler la capacité annuelle d?incorporation pour
atteindre 700 000 tonnes d?ici fin 2022.
Le dispositif Orplast
Lancé en 2016 et piloté par l?Ademe, le dispositif Orplast ? objectif
recyclage plastiques- vise spécifiquement à soutenir la filière aval de
recyclage des plastiques en augmentant l?incorporation de matières premières
de recyclage (MPR) plastiques par les plasturgistes en substitution à de la
matière vierge (soutien aux investissements dédiés à l?incorporation de
matière plastique recyclée et aux technologies de recyclage).
En complément, dans le cadre de la stratégie d?accélération visant
l?augmentation du recyclage, le Programme d?investissement d?Avenir
(PIA 4) dispose d?actions de soutien à l?innovation pour augmenter le
recyclage des plastiques et des composites356.
? Le levier réglementaire pour lutter contre les déchets plastiques non recyclés
- L?incorporation obligatoires et les interdictions de matières
La loi permet d?imposer des taux minimaux d?incorporation de
matières recyclées dans les produits neufs, d?interdire des « substances ou
éléments susceptibles de compromettre l'utilisation du matériau
recyclé »357(perturbation des chaînes de tri et du recyclage) et l?obligation de
justifier que les déchets peuvent intégrer une filière de recyclage358.
355 Le décret du 23 février 2006 définit les activités d?importance vitale comme « un
ensemble d?activités, essentielles et difficilement substituables ou remplaçables,
concourant à un même objectif ou visant à produire et à distribuer des biens ou des
services indispensables ». Voir aussi l?article L1332-1 du code de la défense.
356 Sur 4 ans : 15 M¤ pour les technologies de tri, 60 M¤ sur la recyclabilité des
plastiques, 15 M¤ sur la recyclabilité des composites
357 L?art. L. 541-10-17 du code de l?environnement décliné dans le décret du 29 avril 2021
dit « 3R »fixe l?objectif d'atteindre la fin de la mise sur le marché d'emballages en plastique
à usage unique d'ici à 2040 et la stratégie pour y parvenir pour la période 2021-2025).
358 IV de L. 541-9 du code de l?environnement : au plus tard en 2030, les personnes
mettant sur le marché plus de 10 000 unités par an et réalisant un chiffre d?affaires
supérieur à 10 M¤ doivent justifier que les déchets induits par les produits peuvent
intégrer une filière de recyclage.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041555598/
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043458675
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043458675
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599010/
ANNEXES
157
- L?interdiction d?enfouissement
Cette mesure a été très efficace chez nos voisins européens (cf.
annexe sur les comparaisons internationales) particulièrement pour les
déchets triés, notamment ceux en plastique. Le décret n°2021-1199 du 16
septembre 2021 relatif aux conditions d?élimination des déchets non
dangereux pris en application de la loi AGEC359 constitue la version
française de cette interdiction.
Graphique n° 19 : recyclage (vert), incinération (jaune) et
enfouissement (rouge) des déchets plastiques en Europe en 2018
Source : Les filières de recyclage des déchets en France, CGEDD, Janvier 2020, données Plastics Europe.
Les pays en pointillés ont déjà mis en oeuvre l?interdiction de l?enfouissement des déchets plastiques
359 Article 6 d?AGEC « la mise en décharge des déchets non dangereux valorisables
est progressivement interdite » et Article 10 « les producteurs ou détenteurs de déchets
ne peuvent éliminer ou faire éliminer leurs déchets dans des installations ? que s?ils
justifient qu?ils respectent les obligations de tri ».
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https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044060460
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COUR DES COMPTES
158
Annexe n° 9 : comparatif entre les différentes
modalités de financement
du service public
Production de déchets
Sécurité budgétaire et de
recouvrement
Service rendu et investissement
nécessaire
Équité pour les usagers
Pour Contre Pour Contre Pour Contre Pour Contre
TEOM
Limitation
du risque
de dépôts
sauvages
Aucun lien
entre quantité
de déchets et
facturation
Grande
facilité et
sécurité de la
ressource
aucun
Moindre
investissement
sur les outils de
collecte (bennes
et bacs)
Relation plus
distendue avec
l'usager (faible
communication)
Caractère
social des
bases
d'imposition
Sans lien
avec les
quantités
produites.
Valeurs
locatives
obsolètes
TEOMI
Incitatif
(effet prix)
Risques de
détournement
(dépôts
sauvages)
Sécurité
budgétaire
grâce à la part
fixe.
Recouvrement
assurée par les
services de
l'État.
Établissement
du rôle plus
complexe
(décalage
d'un an de la
prise en
compte de la
part variable).
Meilleure
connaissance des
usagers
Investissements
(bennes et bacs-
puçage). Efforts
de
communication
et de suivi des
usagers
Lien partiel
coût du
service
/quantités
produites
mais
maintien
base liée au
patrimoine
(VLF)
Part
variable
minoritaire
(de 10 à
45 %)
REOM
Lien
théorique
avec les
quantités
de déchets
produites
Lien indirect
entre prix
payé par
l'usager et sa
production
de déchets
(absence de
caractère
incitatif).
Aucun
avantage
Complexité
(tenue du rôle
et gestion des
impayés par
la
collectivité)
Pas
d'investissements
à prévoir.
Gestion des
évolutions du
rôle des usagers
complexe (p.
ex. changement
de composition
du foyer).
Apparence
d'équité (si
pertinence
des critères
retenus)
Perte de
l'aspect
redistributif
(social).
Critères
pouvant
être
contestés
REOMI
Prix payé
directement
lié à la
production
de déchets.
Risques
d'effet de
détournement
(dépôts
sauvages)
Meilleure
connaissance des
usagers
Investissements
indispensables
(bennes et bacs-
puçage). Efforts
de
communication
et de suivi des
usagers
L'usager
paie pour
les quantités
produites
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ANNEXES
159
Annexe n° 10 : les conséquences de la crise
sanitaire sur la gestion des déchets
La production des déchets en général, a été inférieure à ce qu'elle est
en période normale, notamment en raison d'une moindre production de
déchets issus des activités économiques (- 25 % en Ile-de-France) mais les
emballages en plastique ont augmenté (+30 % du fait de leur réputation de
sécurité sanitaire et de la hausse des ventes de plats à emporter).
Les nouveaux protocoles sanitaires (masques, règles de
distanciation sociale dans les temps de pause et croisement des équipes) et
le manque de personnel ont généré une perte du temps de travail et une
diminution des performances de gestion de déchets et, pour certains
territoires, la fin des collectes sélectives et de l?exploitation des centres de
tri (arrêts provisoires en raison de l?impossibilité de se déplacer des salariés
des entreprises de maintenance).
Près de 100 % des déchèteries ont été fermées au niveau national.
Or, dans le même temps, certaines activités des ménages productrices de
déchets (jardinage, bricolage, tri) ont été plus intenses que d?ordinaire.
Par conséquent, des déchets qui auraient normalement dû être
évacués en déchèteries ont été présentés dans les bacs d?ordures ménagères
conduisant à une forte augmentation des dépôts sauvages sur les points
d?apport volontaire et du taux de refus de tri (+ 15 %). Les volumes déposés
ont fortement augmenté après les périodes de confinement, conduisant à
des augmentations des coûts de transport.
Les dépenses du SPGD ont augmenté en outre, du fait de l?achat de
masques, de produits d?entretien, d?actions de communication pour la
réouverture des équipements et des charges supplémentaires en moyens
humains. Les recettes quant à elles, ont baissé puisque les effets de la crise
ont induit une chute des quantités de produits valorisables collectées en
déchèterie, et une baisse des soutiens des éco-organismes (par exemple -
25 % pour la communauté de communes du Grésivaudan).
Les masques déposés dans les OMR n?ont pas été recyclés pour des
raisons sanitaires et de coût (12 fois plus cher qu?un emballage plastique)360.
360 Les masques sont responsables de 40 000 tonnes de déchets non recyclés
supplémentaires en 2020. 16?millions d?euros d?aides ont ainsi été accordés aux
recycleurs des masques et le plan de relance comporte une mesure de soutien de
10 millions d?euros sur la période 2021-2022.
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Réponses des administrations
et des organismes concernés
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Sommaire des réponses reçues à la date de la
publication
Les réponses parvenues après la publication du présent document ne sont pas incluses ici mais
publiées avec le rapport sur le site de la Cour des comptes.
Madame la présidente de l?Association
des régions de France (ARF) .................................................................. 167
Monsieur le président de l?Association
des Intercommunalités de France ........................................................... 171
Madame la présidente de France Urbaine ............................................... 175
Monsieur le président de l'Association
des maires de France (AMF) .................................................................. 182
Monsieur le président de la Métropole de Lyon ..................................... 189
Madame la présidente de la communauté
de communes de l'Île d'Oléron ................................................................ 191
Monsieur le président du conseil régional de Bretagne .......................... 194
Monsieur le président du conseil régional Grand Est ............................. 195
Monsieur le président du conseil régional de Normandie ....................... 198
Monsieur le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine ......... 198
Monsieur le président du conseil régional
Provence-Alpes-Côte d?Azur .................................................................. 202
Madame la maire de Paris ....................................................................... 204
Monsieur le président du Syndicat mixte départemental
en charge d'études et du traitement des déchets ménagers
et assimilés de la Vendée (TRIVALIS) .................................................. 205
Monsieur le président de l?Association AMORCE ................................. 210
Destinataires n?ayant pas d?observation
Madame la présidente de la Métropole Aix-Marseille-Provence
Madame la présidente de la communauté urbaine
du Grand Besançon Métropole
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COUR DES COMPTES
164
Monsieur le président de la Métropole de Nice Côte d?Azur
Monsieur le président de la communauté d?agglomération
Valenciennes Métropole
Monsieur le président du conseil régional des Hauts-de-France
Madame la présidente du conseil régional d?Occitanie
Monsieur le président du Syndicat mixte de transport et de traitement
des déchets ménagers de Lorraine Nord (SYDELON)
Monsieur le président du Syndicat mixte pour le traitement
et la valorisation des déchets ménagers résiduels - « Valor3e »
Monsieur le président du Syndicat départemental d'élimination
des déchets de l'Aube (SDEDA)
Monsieur le président du Syndicat Inter-Arrondissement
de valorisation et d?élimination des déchets (SIAVED)
Monsieur le président du Syndicat d?études et de réalisations
pour le traitement intercommunal des déchets de Belfort (SERTRID)
Destinataires n?ayant pas répondu à la date de la
publication
Madame la Première ministre
Madame la présidente du conseil régional des Pays de la Loire
Monsieur le président de la communauté d'agglomération
du Grand Villeneuvois
Monsieur le président de la communauté de communes
des Gorges de l'Ardèche
Monsieur le président de la communauté de communes de l'Île d'Oléron
Monsieur le président du conseil régional d?Auvergne-Rhône-Alpes
Monsieur le président du conseil régional Centre-Val de Loire
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS
165
Madame la présidente du conseil régional d?Île-de-France
Monsieur le président du Syndicat mixte Flandre Morinie (SMFM)
Monsieur le président du Syndicat mixte de traitement
des ordures ménagères de la région de Villerupt
Monsieur le président du Syndicat mixte d?élimination
et de valorisation des déchets des Communautés d'Agglomération
du Douaisis, Hénin-Carvin et de la Communauté de Communes
d?Osartis-Marquion (SYMEVAD)
Monsieur le président du Service Intercommunal de collecte
de traitement des ordures ménagères (SICTOM) de Pézenas-Agde
Monsieur le président du Syndicat pour la valorisation
et le traitement des déchets ménagers et assimilés (VALTOM)
Monsieur le directeur général de CITEO
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MADAME LA PRÉSIDENTE DE L?ASSOCIATION
DES RÉGIONS DE FRANCE (ARF)
Par courrier en date du 18 juillet 2022, vous m?avez transmis le
relevé d?observations provisoires portant sur les rôles respectifs des divers
niveaux territoriaux en matière de déchets ménagers et assimilés,
document préparatoire à un chapitre du rapport public annuel publié au
premier trimestre 2023.
Dans le cadre de la préparation du rapport interne de la Cour sur
le panorama institutionnel et économique sur l?évolution des Déchets
ménagers et assimilés en France, Régions de France avait transmis une
contribution portant sur des éléments d?éclairage sur l?exercice de la
compétence de planification de la prévention et de la gestion des déchets
par les Régions et sur leur collaboration avec l?État et les collectivités en
charge de la mise en oeuvre.
Les recommandations formulées par la Cour des comptes dans son
document préparatoire m?amènent à vous formuler les remarques
complémentaires suivantes :
1 - Sur l?observation régionale de la gestion
et de la prévention des déchets
La Cour recommande de confier en 2023 aux observatoires
régionaux de la gestion et de la prévention des déchets le suivi de la mise
en oeuvre par les intercommunalités des objectifs nationaux (Ministère de
la transition écologique et de la cohésion des territoires, régions).
En 2022, la majorité des Régions sont déjà couvertes par un
observatoire régional. Ceux-ci sont d?ailleurs représentés par le RARE au
sein du Comité National Observation Economie Circulaire piloté par le
Ministère (qui s?est réuni une première fois le 5 juillet 2022). Le RARE
rassemble les observatoires régionaux des déchets français :
- Auvergne-Rhône-Alpes : SINDRA (portée par AURA-EE)
- Bourgogne-Franche-Comté : Alterre Bourgogne-Franche-Comté
- Bretagne : Observatoire Environnement Bretagne
- Centre Val de Loire : pas d?observatoire (consulter la page du Conseil
régional)
- Corse : Observatoire territorial des déchets
- Grand Est : Observatoire des déchets et de l?économie circulaire
- Guadeloupe : Observatoire des déchets de la Guadeloupe (portée par
Synerg?Ile)
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168 COUR DES COMPTES
- Guyane : Observatoire des déchets de la Guyane
- Hauts de France : ODEMA
- Ile de France : ORDIF (porté par l?Institut Paris Région)
- Martinique : pas d?observatoire
- Mayotte : pas d?observatoire
- Normandie : Biomasse Normandie et NEC (alimenté par les travaux
de Biomasse Normandie et de la CERC)
- Nouvelle-Aquitaine : ORDEC Nouvelle-Aquitaine (porté par l?AREC
Nouvelle-Aquitaine)
- Occitanie : ORDECO
- Provence-Alpes-Côte-d?Azur : ORD&EC
- Pays de la Loire : TEO Pays de la Loire
- Réunion : Observatoire Réunionnais des Déchets
Les observatoires régionaux des déchets ont pour mission de
contribuer à la prévention et à l?amélioration de la gestion des déchets et
de leurs impacts, par l?étude et la diffusion d?informations et de données.
Ils appuient l?élaboration des planifications régionales et suivent leur mise
en oeuvre. Enfin, ils peuvent contribuer aux échanges et à la concertation
sur ces enjeux prégnants des territoires. Disposant d?une véritable
expertise de la donnée, ils constituent un appui opérationnel des Régions
et de l?ADEME pour la mise en place des stratégies de prévention et de
gestion des déchets et des ressources. Les observatoires régionaux des
déchets peuvent être hébergés au sein d?une agence régionale de
l?environnement, d?une autre structure, ou mis en oeuvre directement par
leurs pilotes (Conseil régional, ADEME en général).
Le RARE leur offre un espace d?échanges et de mutualisation unique
et indispensable à l?amélioration des pratiques et l?optimisation des
moyens.
Un cadre de discussion national entre Régions de France et le
RARE permet d?assurer une convergence méthodologique des
observatoires répondant aux stratégies et objectifs régionaux.
Le cofinancement par l?ADEME de l?observation a constitué un
apport financier indispensable pour l?émergence des observatoires
régionaux dont la question de la pérennisation financière reste entière.
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 169
2- Sur le renforcement du rôle planificateur des régions
La Cour des comptes appelle à un nécessaire renforcement du rôle
des régions avec un rôle de planification à affirmer et mentionne que dans
le cadre de la libre administration des collectivités territoriales, les
niveaux supra-intercommunaux, c?est-à-dire l?État et les régions
interviennent aujourd?hui en recourant principalement aux outils de
planification et de cofinancement. Le renforcement de ces outils implique
moins une évolution significative des compétences de l?État ou de ses
opérateurs qu?une plus grande implication des régions.
Une meilleure articulation entre le Code général des collectivités
territoriales (volet SRADDET) et le code de l?environnement (volet
PRPGD) pourrait être utile pour assurer la bonne lisibilité des obligations
législatives et réglementaires qui incombent aux Régions et aux EPCI.
3- Sur la déclinaison régionale des objectifs des REP
La Cour propose d?intégrer aux prochains arrêtés de cahier des
charges des filières REP une déclinaison de leurs objectifs au niveau
régional (Ministère de la transition écologique et de la cohésion des
territoires).
L?intégration aux prochains arrêtés de cahier des charges des
filières REP d?une déclinaison de leurs objectifs au niveau régional semble
cohérente avec le rôle de planification et de coordination confié aux
Régions d?autant que les quantités de déchets traitées par les filières REP
sont importantes puisqu?elles représentent plus de 10% des déchets non
dangereux non inertes. Cependant la déclinaison régionale des objectifs
nationaux et européens peut s?avérer complexe en fonction des filières et
des territoires. Il faut noter que des partenariats techniques et financiers
existent entre certaines filières REP et certaines Régions, lesquels peuvent
s?appuyer sur des conventions bipartites (voire tripartites avec l?ADEME).
Cette proposition viendrait compléter les éléments inscrits dans le
projet d?arrêté relatif aux données des filières à responsabilité élargie des
producteurs (REP) mis en consultation du public du 7 juin au 29 juillet
2022. Celui-ci prévoit que les éco-organismes transmettent chaque année
des informations aux Régions pour l?élaboration et le suivi des SRADDET.
Les Régions réitèrent leur demande que ces données soient des données
transmises à l?échelle territorialisée des EPCI et syndicats.
En effet, le maillage territorial des données devra permettre de
répondre à l?article R.541-16 du code de l?Environnement qui mentionne
que : « I. 5° [?] Le plan mentionne notamment les installations qu?il
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170 COUR DES COMPTES
apparaît nécessaire de créer, d?adapter ou de fermer afin d?atteindre ces
objectifs et de gérer l?ensemble de déchets pris en compte [?]et en
cohérence avec les principes de proximité et d?autosuffisance, appliqués
de manière proportionnée aux flux de déchets concernés [?] et adaptée
aux bassins de vie? ». Par ailleurs, la mise à disposition à ces autorités
compétentes des données régionales sur les biens mis sur le marché est
nécessaire à la déclinaison régionale des objectifs européens et nationaux.
4 ? Sur la généralisation de la délégation des crédits ADEME
via les CPER
La Cour propose de généraliser à chaque contrat de plan État-
Région la délégation des crédits de l?ADEME en matière de transition
énergétique et d'économie circulaire (Ministère de la transition écologique
et de la cohésion des territoires, régions).
Un transfert du fonds économie circulaire (ou une partie) aux
Régions aurait été préférable pour offrir aux Régions toute latitude pour
financer des projets sur le territoire et mettre en oeuvre les objectifs de la
planification, comme Régions de France l?a fait valoir lors des discussions
parlementaires du projet de loi 3DS qui a malgré tout disposé dans son
article 57 une délégation de gestion pour les régions volontaires. Jugée
lourde administrativement et techniquement, très encadrée et partielle, la
mise en oeuvre de cette délégation apparait peu effective après plusieurs
mois de discussions.
En effet, il conviendrait que les Régions puissent disposer de
l?autonomie d?emploi des crédits pour mettre en oeuvre la planification et
accompagner les territoires en cohérence avec les stratégies, plans et feuilles
de routes régionaux. Par exemple, les critères d?intervention de l?ADEME
ne permettent pas de soutenir des opérations de mise aux normes
réglementaires alors même que certaines régions sont en retard sur le sujet.
Or les délégations ne peuvent se faire que sur la base des critères
d?intervention de l?ADEME. La mise en place de critères d?intervention
régionalisés et adaptés aux besoins propres des territoires semble nécessaire
pour permettre de financer davantage les équipements structurants et
indispensables à la réalisation des objectifs régionaux et nationaux.
Tels sont les remarques dont je voulais vous faire part en vue de leur
prise en compte dans le rapport de la Cour.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 171
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE L?ASSOCIATION
DES INTERCOMMUNALITÉS DE FRANCE
Au nom d?Intercommunalités de France, je tiens à vous remercier
pour avoir sollicité, par votre courrier du 28 juillet 2022, les réactions de
notre association au projet de rapport public thématique « Prévention,
collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser »
que la Cour publiera prochainement. Ce projet appelle de notre part les
observations exprimées dans le présent courrier.
Intercommunalités de France salue tout d?abord l?important travail
d?analyse mené par la Cour au travers de ce rapport et confirme
l?implication de notre association dans l?accompagnement à la prévention
et la gestion des déchets. A ce titre, nous partageons avec la Cour le constat
de la non-atteinte des objectifs nationaux de réduction des déchets
collectés et traités. Notre association considère cependant que les
comparaisons chiffrées avec d?autres pays sont à relativiser au regard des
incertitudes documentées sur les différences de méthodes statistiques, ainsi
que tous les autres facteurs culturels, économiques dans chaque pays. Par
ailleurs, nous tenons à souligner que ce mandat sera marqué par l?entrée
en vigueur de nouvelles obligations qui permettront une réduction à la
source de la production de certains déchets :
? Généralisation de l?extension des consignes de tri plastique à compter
du 31 décembre 2022
? Généralisation du tri à la source des biodéchets
? Mise en oeuvre de nouvelles filières REP
Nous souscrivons aux recommandations formulées par la Cour
d?unification des documents nationaux de programmation (PNPD et
PNGD) ainsi que d?harmonisation des documents locaux (RPQS et
PLPDMA) considérant qu?elles répondent à un besoin d?une plus grande
intégration des enjeux de prévention dans les stratégies de gestion des
déchets.
Intercommunalités de France s?interroge toutefois sur les
propositions formulées par la Cour dans sa recommandation n°6 pour
encourager le déploiement de la tarification incitative en renforçant le
soutien financier aux collectivités qui semblent à ce jour insuffisantes pour
contourner les difficultés de sa mise en oeuvre.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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172 COUR DES COMPTES
1. Réduction des déchets à la source : la responsabilité
des metteurs en marché
Nous réitérons notre analyse consistant à remarquer que les
différents acteurs en responsabilité en France, ne bénéficient pas des
mêmes remarques et injonctions à agir. Les collectivités, pourtant situées
« au bout du tuyau » du cycle « production vente usage destruction ou
abandon des produits », sont sommées d?être les acteurs principaux de la
politique de prévention-réduction. Ainsi, si l?on excepte les biodéchets, ce
sont davantage les stratégies commerciales des metteurs en marché, qui
orientent les comportements des consommateurs.
Au regard des dépenses de publicité, faites par les producteurs et
les distributeurs ? plus de 470 ¤ par Français en 2021361, soit trois fois le
coût du service public de gestion des déchets (SPGD) ? il conviendrait de
laisser aux premiers la prise en charge totale des coûts des services de tri
et de collecte des produits de chaque filière actuellement supportés par les
collectivités afin de rééquilibrer la répartition des coûts entre producteurs
et consommateurs. En parallèle, les objectifs attribués aux acteurs des
filières REP sont pour le moins vagues mais surtout non contrôlés.
Intercommunalités de France regrette cette situation, qui en plus de
laisser à charge des contribuables locaux ce qui devrait être à charge des
consommateurs, ne concerne pas toutes les productions commercialisées
qui pourtant finissent dans les circuits de collecte et de traitement des
collectivités. Par ailleurs, la loi de finances de 2019 a acté une trajectoire
haussière de la TGAP, dans l?objectif de pénaliser le traitement par
enfouissement ou incinération et encourager le déploiement d?une
économie circulaire. Cette hausse est particulièrement problématique pour
les collectivités qui ne disposent pas de leviers d?action pour influer sur la
réemployabilité et la recyclabilité des produits ou encore sur l?acte
d?achat. Il existe un volume incompressible de déchets qui doivent être
dirigés aujourd?hui vers ces exutoires et qui pourrait faire l?objet d?un
tarif de base révisé. Nous renouvelons donc notre proposition d?une TGAP
amont sur tous les produits des filières pour responsabiliser les metteurs
en marché ; cela concernerait autant d?incitation à la durabilité, à la
réutilisation qu?au recyclage matière. Cette tarification, outre qu?elle
permettrait la prise en charge de tous les produits manufacturés devenus
déchets (qui seront facturés par l?État 6,5 centimes par kg en 2025), sans
pour cela que le consommateur puisse arbitrer sur ses achats puisque c?est
le contribuable qui paie la TGAP.
361 Baromètre unifié du marché publicitaire, Kantar, 2021
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 173
Nous rappelons aussi que l?atteinte des objectifs nationaux et
régionaux assignés aux politiques et actions d?économie circulaire
suppose des ressources comme la TGAP nantie d?une hausse programmée
par un accord conclu lors du Grenelle de l?Environnement en 2008 et qui
devait alimenter la politique déchets via l?ADEME. Ces ressources sont
aujourd?hui dissoutes dans le budget de l?État sans que les fonds
nécessaires pour la prévention et pour l?économie circulaire ne soient
rendus disponibles. Intercommunalités de France continue d?appeler à un
retour des recettes de la TGAP vers le financement d?actions vertueuses
dans lesquelles s?engagent les collectivités dans le traitement des déchets.
Cette piste vient soutenir la proposition de la Cour, que nous partageons,
d?impliquer davantage les régions dans la planification, l?animation, et
le financement qui acterait le lien entre les Plans Régionaux de
Prévention et de Gestion des Déchets et les Plans régionaux pour
l?Économie Circulaire.
2. Assouplir le cadre de déploiement de la tarification incitative
Une nouvelle fois la Cour insiste sur l?efficacité de la tarification
incitative dans certains des territoires où sa mise en oeuvre a pu être
vérifiée sur un temps long et un effort soutenu sur le tri à la source des
biodéchets.
Le rendez-vous de la généralisation obligatoire de ce tri à la source
des biodéchets devrait nous instruire sur les limites de l?exercice du signal
prix sur le comportement des citoyens contribuables consommateurs. En
effet toutes les expériences en cours et les études de dimensionnement des
services nécessaires à ce tri à la source indiquent une hausse des dépenses
du SPGD, effaçant les bénéfices jusqu?alors promis aux « bons élèves » et
contraignant encore les budgets des collectivités.
Par ailleurs, le volume croissant des déchets issus de produits
manufacturés collectés en déchèterie interroge sur l?extension des
systèmes de facturation liée à ce type de collecte et donc sur le coût global
de la redevance. Ces équipements qui reçoivent des tonnages équivalents
à ceux du porte-à-porte, doivent régulièrement être mis à niveau :
l?augmentation du nombre de filières suppose des extensions foncières
souvent difficiles à envisager sans parler de la formation technique et
administrative des agents chargés de faire appliquer des réglementations
souvent vécues comme contraignantes par les usagers, et auxquelles
s?ajoutent des relations tendues avec les prestataires des REP
opérationnelles.
Intercommunalités de France demeure favorable au déploiement
d?une dimension incitative dans la tarification du SPGD lorsque cela est
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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174 COUR DES COMPTES
possible mais estime qu?elle ne constitue qu?un levier parmi d?autres de
prévention des ordures ménagères résiduelles (OMR), d?autant plus
qu?elle opère en aval de la chaîne, après les actes de production et de
consommation.
Afin de tendre vers une plus grande couverture de la population, au-
delà des frontières administratives, Intercommunalités de France appelle
ainsi à adopter certaines souplesses dans le cadre de la tarification
incitative. En premier lieu, Intercommunalités de France propose de
permettre par la loi une coexistence pérenne de plusieurs régimes de
tarification sur un même territoire. Cette possibilité existe déjà à titre
transitoire que ce soit pour permettre l?expérimentation de la taxe
incitative362 ou pour tenir compte de la fusion d?intercommunalités aux
régimes différents363. En effet, les principales difficultés techniques
identifiées pour ce déploiement apparaissent dans les milieux urbains
denses et dans les milieux touristiques ; ceux-ci caractérisent rarement
l?intégralité d?un territoire intercommunal. Une seconde alternative
transitoire pourrait consister en une capacité de zonage de la TEOM, en
fonction des performances à l?image de ce qui est déjà permis aujourd?hui
mais en fonction de l?importance du service rendu364.
? Faciliter l?accès des collectivités au fichier de taxe sur le foncier bâti :
Intercommunalités de France souhaite attirer l?attention de la Cour
sur un autre défi technique propre à la mise en oeuvre de la tarification
incitative. La taxation et le recouvrement de la part incitative de la TEOM
sont effectués dans le cadre de la taxation et du recouvrement de la taxe
foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Les collectivités qui souhaitent
mettre en place une part incitative de la TEOM sont conduites à repartir
du fichier foncier de la taxe foncière sur les propriétés bâties.
Elles ont la charge d?établir et de notifier aux services de la DGFiP,
avant le 31 mars de l?année d?imposition, le montant, en valeur absolue,
de la part incitative de la TEOM pour chaque local imposé à la TEOM. A
cet effet, les services de la DGFiP leur fournissent un fichier dit « d?appel
» recensant les locaux imposables au 1er janvier de l'année d'imposition
(hors constructions neuves) et notamment la valeur locative foncière
retenue pour l?établissement de la TEOM (décret de 2012).
Ce fichier doit être complété par la collectivité avec les éléments utiles
à l?administration fiscale pour établir l?imposition, à savoir : le montant de
362 Article 1522 bis du Code général des impôts, pour une durée portée à 7 ans
363 Article 1639 A bis du Code général des impôts et article L2333-76 du Code général
des collectivités territoriales
364 Article 1636 B undecies du Code général des impôts
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 175
cotisation correspondant à la part incitative de la TEOM pour chaque local
imposable. Il est malheureusement fréquent que ces fichiers, soient
incomplets et que l?interface informatique rende compliqué l?appariement
du fichier foncier avec le fichier des usagers du service de déchets.
De fait, alors que la redevance est payée par l?usager (qu?il soit
propriétaire ou locataire), la TEOM est considérée comme une taxe
additionnelle à la taxe foncière, payée par les seuls propriétaires, tout en
étant considérée comme une charge récupérable. Par conséquent, les
fichiers de TEOM comportent le nom des propriétaires, alors que
l?individualisation de la part incitative nécessite d?identifier le « producteur
de déchets », c?est-à-dire le locataire. Il peut en résulter des difficultés de
connexion entre le fichier fourni par la DGFiP et les bacs nominatifs. Par
conséquent, la mise en oeuvre de la tarification incitative en habitat collectif
représente une réelle difficulté d?identification des redevables potentiels
Ces difficultés sont connues et rapportées par de nombreuses
collectivités qui renoncent de ce fait à instituer une part incitative de
TEOM. Ainsi, Intercommunalités de France considère que la mise en place
et le bon fonctionnement d?une tarification incitative nécessite que
l?administration fiscale, qui par ailleurs prélève un pourcentage au titre
de la gestion et du recouvrement de la fiscalité foncière et de la TEOM,
facilite le travail de recoupement des fichiers.
Telles sont les observations que nous souhaitions porter à votre
connaissance. Espérant que ces éléments répondront à vos attentes et
pourront contribuer au travail d?évaluation et de propositions de la Cour,
je vous prie de croire, Monsieur le Premier président, à l?assurance de mes
sentiments les meilleurs.
MADAME LA PRÉSIDENTE DE FRANCE URBAINE
Par courrier en date du 28 juillet 2022, vous nous avez adressé le
projet de rapport public thématique « Prévention, collecte et traitement des
déchets ménagers : une ambition à concrétiser » que la Cour se propose
de publier prochainement. Ce projet de rapport appelle de notre part les
observations exprimées dans la présente lettre.
France urbaine salue le travail d?analyse de la Cour et souscrit à
plusieurs de ses recommandations, qu?il s?agisse d?aller vers une
harmonisation des bilans PLPDMA et des rapports annuels sur le prix et
la qualité du service public de prévention et de gestion des déchets (PROS)
en les fusionnant en un compte-rendu unique (n°5), d?« instaurer une taxe
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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176 COUR DES COMPTES
de séjour additionnelle dont le produit serait affecté aux actions relatives
à la prévention et à la gestion des déchets », permettant de couvrir les coûts
supplémentaires spécifiques supportés par les communes touristique, ou
de réduire le nombre d?indicateurs de pilotage à quelques indicateurs-clefs
dans un tableau de bord national annuel et par type d?EPCI, une mesure
qui nous paraît aller dans le bon sens, dès lors que les collectivités et leurs
groupements seront associés à leur construction et à la définition de leur
périmètre.
Nous nous félicitons que la Cour préconise dans sa
recommandation n°7 de renforcer le soutien financier aux collectivités qui
souhaiteraient déployer la tarification incitative, plutôt que d?aller vers un
système plus contraignant qui viendrait pénaliser celles qui y ont renoncé,
pour des raisons de coût de mise en oeuvre et/ou de complexification
opérationnelle. Nous doutons toutefois qu?elle soit suffisante pour infléchir
significativement la tendance dans les zones urbaines, lesquelles sont
notamment confrontées aux difficultés techniques inhérentes aux
copropriétés en habitat collectif.
La tarification incitative n?est qu?un des leviers de réduction des
OMR...
Il nous apparaît que si la tarification incitative agit comme un levier
de réorientation des flux et peut contribuer à l?amélioration des gestes de
tri, elle n?induit pas, comme le souligne le Cercle national du recyclage,
« de tendance à la baisse des quantités totales de déchets ménagers
collectés »365, et ne semble pas avoir d?effet notable sur la réduction
globale du volume des OMR, si l?on s?en réfère notamment à l?exemple
allemand366.
Il est de surcroît difficile d?attribuer ces réallocations entre flux à
la seule mise en place de la tarification incitative, tant elle n'est souvent
que l?un des éléments d?une politique globale d?amélioration des
performances, si bien, comme le rappelle le CGDD, que « l?écart constaté
entre les tonnages collectés dans les collectivités en REOMi et dans celles
qui ne le sont pas ne peut s?interpréter comme directement causé par le
passage en REOMi. En effet, les collectivités ayant adopté ce type de
tarification peuvent présenter d?autres caractéristiques qui expliquent cet
365 Tarification incitative : la communication en première ligne, mars 2018, Centre
National du Recyclage, page 65.
366 En Allemagne, où part de communes ayant institué la tarification incitative avoisine
les 100 %, la production de DMA était de 625 kg par habitant en 2015, contre 573 kg
en France la même année.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 177
écart367 ». Car la mise en place de la tarification incitative s?accompagne
généralement d?autres actions de sensibilisation et de prévention, et il est
utile de rappeler que les baisses des tonnages des OMR interviennent
« avant la mise en place effective de la tarification incitative, plus
précisément entre l?année de communication sur ce nouveau mode de
financement et l?année de la première facturation. Après la mise en place
effective de la tarification incitative il est possible d?observer pour les
quatre collectivités étudiées une stabilisation des quantités d?ordures
ménagères résiduelles. Ceci prouve que ce n?est pas la tarification
incitative en elle-même qui peut jouer un rôle mais l?annonce de la
tarification incitative »368.
La réduction des tonnages d?OMR devrait par ailleurs connaître
une nouvelle baisse avec l?entrée en vigueur récente ou prochaine de
nouvelles dispositions législatives et réglementaires, qu?il s?agisse :
- de la généralisation de l?extension des consignes de tri plastique à
tous les EPCI d?ici le 31 décembre 2022 : dans les territoires où elle a été
expérimentée, la simplification des gestes de tri des emballages a permis
d?augmenter la part des déchets triés de de 3 kg par habitant369 ;
- de la généralisation au plus tard au 31 décembre 2023 prévue par
la loi AGEC, du tri à la source des biodéchets (en collecte séparée, en porte
à porte, ou en gestion de proximité, avec compostage individuel ou
partagé) qui représentent, comme le rappelle la Cour, jusqu?à un tiers des
volumes des déchets des ménages et des entreprises ;
- de la création de nouvelles filières REP sur les produits du tabac,
les jouets, les articles de sport, de loisir, de bricolage et de jardin370, et les
produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment371 ;
- de la montée en puissance des filières REP existantes ;
- des nouvelles règles visant à rendre la quasi-totalité des biens
physiques présents sur le marché de l'Union européenne plus écologiques,
circulaires et sobres en énergie tout au long de leur cycle de vie, englobant
la conception, l'utilisation courante, la réaffectation et l'élimination des
367 La tarification incitative de la gestion des ordures ménagères - Quels impacts sur les
quantités collectées ? ? CGDD 2016 (page 21).
368 Tarification incitative : la communication en première ligne, mars 2018, Cercle
National du Recyclage, page 60.
369 https://www.citeo.com/le-mag/simplification-du-tri-en-france-fait-le-point/
370 Décret n° 2021-1213 du 22 septembre 2021.
371 Décret n° 2021-1941 du 31 décembre 2021.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://www.citeo.com/le-mag/simplification-du-tri-en-france-fait-le-point/
178 COUR DES COMPTES
produits, telles qu?annoncées par la Commission européenne le 30 mars
2022 dans son plan d?action pour une économie circulaire372.
Assouplir le cadre de la tarification incitative
Alors que ces mesures vont diminuer mécaniquement et
significativement les volumes de déchets, un allégement des coûts de mise
en oeuvre de la tarification incitative des premières années, objet de la
recommandation n°6 de la Cour, sera-t-il de nature à enclencher une
nouvelle dynamique en faveur de la tarification incitative ?
Si France urbaine accueille cette proposition favorablement, elle
constate également son caractère limité dans le temps, alors que les coûts
de mise en oeuvre de la tarification incitative demeurent, eux, pérennes.
Nous savons par ailleurs par expérience que l?État cherche toujours à
réduire dans le temps le niveau de ses transferts aux collectivités, et qu?il
pourrait chercher à compenser d?une manière ou d?une autre l?effort qu?il
consentirait sur la réduction des frais de gestion sur la TEOMi mise en
oeuvre par les collectivités.
Cette question est par ailleurs posée dans un contexte où les
collectivités sont confrontées à de nouvelles contraintes et d?immenses
défis :
- l?explosion des prix de l?énergie, dont tout laisse à penser qu?elle
sera durable, contraint très fortement leurs budgets, et entraîne déjà des
arbitrages difficiles allant parfois jusqu?à la réduction de la disponibilité
voire la fermeture de certains équipements ;
- les enjeux climatiques vont nécessiter de leur part de lourds
investissements, tant pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre
que pour adapter leur territoire aux bouleversements climatiques en cours
et à venir.
C?est pourquoi, au-delà des mesures d?accompagnement financier,
il nous semble indispensable de simplifier les modalités de mise en oeuvre
de la tarification incitative dans les zones urbaines. en l?adaptant aux
contraintes et aux spécificités de ces territoires, où il est souvent très
complexe de mettre en oeuvre une mesure individuelle de la production de
déchets.
372 Communication from the Commission to the European parliament, the Council, the
European economic and social committee and the Committee of the regions on making
sustainable products the norm, 30 mars 2022.
https://eur-lex.europa.eu/legal-
content/EN/TXT/PDF/?uri=COM:2022:140:FIN&from=DA
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=COM:2022:140:FIN&from=DA
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=COM:2022:140:FIN&from=DA
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 179
Le franchissement de ces obstacles techniques suppose, lorsque cela
est possible, d?engager de lourds investissements, qui pourraient certes
être en partie subventionnés par un rehaussement des mesures de soutien
sur les premiers exercices, mais dont les effets de moyen/long terme sur les
coûts de traitement restent limités : pré-collecte et collecte ne représentent
pour mémoire que 40% du coût total du SPGD, et la part variable du
SPGD n?est elle-même que d?une vingtaine de pourcent de ce coût total.
Assouplir le cadre pour tenir compte des spécificités de ces
territoires permettrait d?aboutir à des résultats de même ordre, à des coûts
considérablement réduits, et sans complexification opérationnelle de la
collecte.
Deux mesures nous sembleraient ainsi de nature à lever les
blocages :
1. autoriser la cohabitation pérenne de la TEOM et de la TEOMi
sur un même territoire, une option qui permettrait aux collectivités
volontaires d?instituer une part incitative dans les zones à faible densité
d?habitation sans avoir à craindre une généralisation, avant d?envisager
une extension progressive à d?autres secteurs. À défaut d?une coexistence
pérenne TEOM/TEOMi, il conviendrait a minima d?allonger
significativement le délai au-delà duquel s?opère une bascule vers l?un ou
l?autre modèle, à condition dans ce cas d?imaginer des solutions moins
coûteuses pour développer la tarification incitative en zones denses.
Depuis 2012, la TEOM incitative (TEOMi) peut être instituée sur
une partie du territoire d?une collectivité, dans le cadre d?une
expérimentation initialement limitée à 5 ans ? puis portée à 7 ans par la
loi de finance 2021 - à l?issue de laquelle la tarification incitative doit être
généralisée, ou abandonnée. Cet allongement de deux ans ne résout pas
fondamentalement le problème qui retient de nombreuses collectivités de
se lancer dans la démarche ;
2. permettre la mise en oeuvre d?une tarification incitative collective
sur tout un territoire, ou autoriser la cohabitation des deux types de
tarification incitative (individuelle et collective) au sein d?un même
territoire. Une métropole adhérente a ainsi étudié trois scénarios de passage
à l?incitatif : un basculement en REOMi, l?instauration d?une TEOMi, ou la
mise en place d?une « tarification incitative collective », basée sur une
production de déchets mesurée collectivement par secteur (communes,
quartiers de la ville centre). Dans ce dernier scénario, la répartition des
quantités de déchets, sur lesquelles seraient appliquées des tarifs, serait en
fonction de la valeur locative de chaque local soumis à la TEOM, au prorata
de la valeur locative du secteur (ménages et professionnels, hors bases des
locaux non-utilisateurs). L?objectif de cette solution est de créer des
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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180 COUR DES COMPTES
dynamiques collectives de réduction des déchets sur les zones concernées,
d?éviter certains comportements d?évitement (jets clandestins etc.) parfois
associés à la tarification individuelle, et de consacrer plus de moyens aux
actions de prévention, plutôt que de les affecter aux importantes tâches
administratives et opérationnelles nécessaires à la mise en oeuvre d?une
tarification individuelle. La tarification incitative collective mériterait, dans
l?esprit de la loi 3DS, d?être expérimentée dans des collectivités volontaires
sur la totalité de leur territoire ou, au choix des collectivités, n?être activée
que dans les zones denses, avec une tarification incitative individuelle dans
les zones de faible densité.
Nous notons avec satisfaction que cette dernière proposition est
citée dans le rapport de la Cour.
Réduire la production de déchets produits à la source...
Au-delà des questions de fiscalité, il nous semble indispensable de
considérer l?ensemble de la chaîne de « production de déchets », car plan
de réduction drastique des tonnages ne saurait reposer sur le seul aval,
c?est-à-dire une fois que le déchet a été créé. Il faut agir le plus en amont
possible, en poursuivant les efforts de développement d?une économie
circulaire et de la fonctionnalité, en interdisant les emballages
objectivement inutiles et en réduisant le volume de tous ceux qui peuvent
l?être, et en envoyant un signal prix au moment où il est le plus efficace
pour orienter les choix de consommation et éviter que le déchet ne soit
créé, c?est-à-dire au moment de l?acte d?achat.
Or le financement du traitement du SPGD, qui repose aujourd?hui
à 80 % sur les collectivités, traduit un profond déséquilibre entre acteurs
que France urbaine juge impératif de corriger pour tendre a minima vers
la parité. La proposition C.4 de la Convention citoyenne pour le climat,
citée par la Cour, de « remplacer une part significative de la taxe
d?enlèvement des ordures ménagères (TEOM) par des modalités plus
justes et favorisant les comportements écoresponsables » peut aussi
s?entendre comme un nécessaire rééquilibrage des responsabilités et des
contributions entre acteurs.
La TGAP dans sa version actuelle mériterait ainsi d?être
entièrement revue, car si l?objectif de réduction des mises en décharge et
d?incinération est évidemment légitime, la forte augmentation décidée par
la loi de finances 2019 pénalise fortement les collectivités et, comme le
souligne la Cour, « cette hausse uniforme a l?inconvénient de frapper
indistinctement les déchets qui pourraient être mieux triés grâce à
l?intervention des collectivités et les déchets non recyclables du fait des
choix techniques des entreprises sur les volumes desquels les collectivités
ne disposent d?aucun moyen d?action. » D?autant que contrairement aux
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 181
demandes réitérées des collectivités, les recettes supplémentaires générées
par cette hausse n?ont pas été fléchées vers des projets d?économie
circulaire, et que la mise en place des nouvelles filières REP prévue par la
loi AGEC de 2020, qui devait constituer l?une des contreparties de la
hausse de la TGAP, a pris un retard (bâtiment, bricolage, jouets et sport,
notamment) qui n?a fait l?objet d?aucune compensation pour les
collectivités373.
La question de l?instauration d?une taxation amont de tous les
déchets non ou difficilement recyclables, qui avait fait l?objet d?un débat
lors du vote de l?augmentation de la TGAP en 2019, doit à nos yeux être
relancée. Cette taxation, qui enverrait le signal prix évoqué supra, pourrait
prendre la forme d?une TGAP dite « amont », ou d?une REP « déchets
résiduels », qui garantirait un retour des recettes afférentes aux
collectivités374.
Les recettes dégagées par ces nouvelles taxes amont (et
l?augmentation de taxe aval décidée en 2019) pourraient ainsi être
affectées à des fonds ou actions de réduction des déchets à la source, qu?il
s?agisse :
- du fonds « économie circulaire » de l?ADEME visant à
« accompagner la politique des pouvoirs publics et orienter le
comportement des acteurs et les investissements en multipliant les actions
de prévention portées par les collectivités locales et les entreprises, en
déployant les démarches territoriales intégrées de prévention et de gestion,
et en soutenant les investissements de tri, de recyclage, de valorisation
organique et énergétiques nécessaires »375 ;
- de subventionner la collecte des biodéchets, dont la valorisation
deviendra obligatoire au 1er janvier 2024, et qui n?est pas aujourd?hui
aidée ;
373 Le déséquilibre des efforts se lit aussi dans le niveau d?efforts demandés aux
collectivités par rapport aux acteurs économiques : la loi AGEC votée en 2000 fixe en
effet un objectif de réduction de 15 % des quantités de DMA produits par habitant,
quand elle ne demande un effort limité à 5 % sur les quantités de déchets résultant
d?activités économiques (par unité de valeur produite).
374 Les éco-contributions associés à une REP « déchets résiduels » pourraient par
ailleurs être modulées en fonction de l?intégration en amont par le fabricant d?une
démarche de développement durable (ex : utilisation de matières recyclées).
375 https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/fonds-
economie-circulaire
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/fonds-economie-circulaire
https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/fonds-economie-circulaire
182 COUR DES COMPTES
- ou de créer un fonds spécifique d?aide aux actions de prévention
de la production de déchets à la source, actions qui comme le souligne la
Cour dans le paragraphe B/ du rapport mériteraient d?être renforcées, tant
qualitativement que quantitativement. France urbaine s?est constamment
positionnée en faveur de la prévention et de la réduction de la production
de déchets à la source, en poussant cet axe pendant les débats
parlementaires autour de la loi AGEC, ou en participant à des initiatives
comme celle des territoires zéro plastique376. La prévention et la réduction
sont les volets prioritaires à privilégier et à renforcer, tout comme le
respect de la hiérarchie des modes de traitement des déchets inscrite dans
le code l?environnement : réutilisation, recyclage, valorisation et
élimination377. La création d?un tel fonds apparaît d?autant plus nécessaire
que si nous partageons entièrement la nécessité d?allouer un volant plus
important de crédits au volet prévention, le contexte budgétaire, marqué
par la poursuite de la hausse de la TGAP, et l?impact des coûts afférents à
la collecte séparative des biodéchets, qui devrait selon l?ADEME être de
l?ordre de 15 à 25 ¤ par habitant378, va réduire les marges de manoeuvre
budgétaires des collectivités.
Telles sont les observations que nous souhaitions porter à votre
connaissance.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE L'ASSOCIATION
DES MAIRES DE FRANCE (AMF)
Vous avez bien voulu transmettre à l'Association des maires de
France et des présidents d'intercommunalité le projet de rapport public
thématique intitulé « Prévention, collecte et traitement des déchets
ménagers : une ambition à concrétiser » et je vous en remercie.
L'AMF souhaite vous faire part de ses remarques concernant, d'une
part vos recommandations, et d'autre part votre analyse plus générale de
la gestion des déchets.
Concernant les recommandations n°1 à n°5, qui ont pour objectifs
de simplifier et de rationaliser les documents de planification et de suivi,
mais également de mettre en place six indicateurs de suivi, l'AMF appuie
376 Guide « territoires zéro pollution plastique », WWF des territoires zéro plastique,
WWF, septembre 2020 : https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-
09/20200920_Guide_Territoires-Zéro-Pollution-Plastique_WWF.pdf
377 Article L. 541-1 II du Code de l?Environnement
378 https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/valorisation-biodechets-agir
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https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-09/20200920_Guide_Territoires-Zéro-Pollution-Plastique_WWF.pdf
https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-09/20200920_Guide_Territoires-Zéro-Pollution-Plastique_WWF.pdf
https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/valorisation-biodechets-agir
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 183
ces recommandations. La multiplication de documents ayant sensiblement
les mêmes objectifs nuit à la clarté de la politique de prévention et de
gestion des déchets. Les acteurs opérationnels s'épuisent à fournir des
données pour alimenter des démarches de planification qui sont obsolètes
à peine publiées. C'est particulièrement vrai pour les plans régionaux qui
ont fait l'objet de nombreuses modifications législatives ou réglementaires
nécessitant une refonte des documents.
L'AMF estime donc qu'il est préférable de mettre en oeuvre un plan
imparfait plutôt que de perfectionner sans cesse un document qui restera
incomplet. Les collectivités ont besoin de temps et de visibilité pour donner
un sens à une démarche de planification.
Concernant les indicateurs de suivi, l'AMF ne peut que converger
avec votre analyse. Comme les autres acteurs de la gestion des déchets, les
collectivités sont sollicitées pour fournir des données afin d'alimenter un
grand nombre d'études initiées par l'ADEME. En dehors du fait que ces
données étant spécifiques à chaque étude, elles demandent souvent des
recherches et des calculs, augmentant de ce fait le temps qui leur est
consacré, elles sont trop spécifiques à l'objet de l'étude pour pouvoir être
utilisées pour le suivi de la mise en oeuvre de la politique des déchets.
Épuisées par ces demandes incessantes de données, les collectivités
éprouvent un agacement certain de ne pas pouvoir obtenir des indicateurs
fiables en retour. Sans remettre en cause la pertinence des études réalisées,
l'ensemble des acteurs, et les collectivités en particulier, ont besoin
d'indicateurs faciles à renseigner, raisonnablement fiables et surtout
stables dans le temps, afin de constituer des séries statistiques susceptibles
de mesurer les évolutions constatées.
L'harmonisation des différents bilans et rapports demandés aux
EPCI éviterait également la dispersion des informations, qui rendent
souvent illisibles des documents, pourtant destinés à informer les citoyens.
Cette standardisation, qui n'empêche pas les collectivités d'y ajouter des
informations à caractère plus local pour leurs administrés, permettrait
également une meilleure comparaison, voire une compilation plus aisée de
ces documents.
Il serait également pertinent de mettre en place des indicateurs,
nationaux et locaux, qui pourraient être communiqués rapidement car ils
sont calculés sur la base de données à date, sans attendre la clôture
définitive de tous les comptes. Par exemple, les tonnages collectés et
recyclés, ainsi qu'une estimation fiable des dépenses engagées et des
recettes perçues, sont disponibles au premier trimestre de l'année suivante.
Ces données, même incomplètes, pourraient être utilisées pour mettre en
place des indicateurs immédiatement disponibles et sans attendre deux ans
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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184 COUR DES COMPTES
une validation statistique qui portera sur une variation inférieure à 5%.
Les collectivités de traitement sont en capacité de renseigner de tels
indicateurs rapidement, ce qui permettrait aux EPCI de disposer d'un
meilleur suivi de la gestion de leurs déchets. A l'échelle nationale, les
autorités publiques gagneraient également à disposer d'indicateurs moins
précis, mais plus fréquents, afin de mieux suivre les politiques publiques
mises en place.
L'AMF est également sensible à votre recommandation de décliner
les plans de prévention élaborés par les syndicats de traitement au niveau
de chaque EPCI. Nous suggérons même, dans la mesure du possible, de
laisser chaque commune s'approprier certains éléments de ce plan pour
les mettre en oeuvre. Si la collecte et le traitement sont des opérations
techniques qui bénéficient de la mutualisation, la prévention des déchets
est l'affaire de chacun, qui peut agir à son échelle.
Concernant votre recommandation n°6 qui propose de favoriser la
mise en place de la tarification incitative en allégeant le coût pour les
collectivités grâce à un financement complémentaire de 80% sur les
premiers exercices, l'AMF trouve cette proposition intéressante et adaptée
aux obstacles rencontrés pour effectuer les investissements nécessaires.
Nous avons particulièrement apprécié la mesure et les nuances de votre
analyse concernant les difficultés rencontrées par les collectivités pour
mettre en place la tarification incitative.
Dans ce domaine, les collectivités ne sont pas opposées à cette
évolution de la tarification des déchets, mais elles sont inquiètes face à la
perspective de plusieurs risques : la fragilisation de leurs ressources alors
qu'elles ont besoin d'assurer un service de salubrité, les investissements
conséquents que représente l'acquisition des matériels nécessaires
(identification des bacs, bennes équipées de systèmes de mesures, logiciels
de suivi), la crainte d'une multiplication des dépôts sauvages et la gestion
des impayés. La gestion des impayés tend à devenir de plus en plus en plus
difficile et fait peser des risques financiers sur les collectivités. C'est le cas
des redevances qui ne permettent pas de compenser les déficits par le
budget général. Il devient urgent de traiter ces problèmes si les pouvoirs
publics veulent réellement inciter les collectivités à la mettre en oeuvre.
S'agissant de la TEOM, l'AMF partage votre souhait de clarification
du périmètre des dépenses prises en compte. Toutefois, nous trouvons
regrettable que la jurisprudence tende à exclure des dépenses éligibles le
ramassage des corbeilles de rue, le nettoyage des marchés alimentaires et
forains ; il s'agit de déchets ménagers et assimilés ou de déchets des
services des collectivités (de la voirie plus particulièrement), collectés
dans le cadre du service public afin d'assurer la salubrité et traités avec
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 185
les autres DMA. Dans le contexte actuel, il semble inutile et non pertinent
d'ouvrir ce chantier.
Concernant votre recommandation n°9 qui ouvre la possibilité
pour les collectivités de confier la vente des produits issus du tri à l'éco-
organisme des emballages, l'AMF est particulièrement attentive à ce que
cette opportunité soit fondée sur le volontariat des collectivités. De plus,
les marchés des matériaux ayant des caractéristiques différentes en
fonction des matières, il est préférable que ce choix soit effectué matériau
par matériau, comme c'est le cas pour les options de reprise.
Concernant la prévention, son arrivée dans le débat public
encourage les collectivités à mettre en place des politiques dépassant
largement la seule sensibilisation. Il serait regrettable que la prévention
soit réservée uniquement aux intercommunalités et aux syndicats de
gestion des déchets. Si la réduction des déchets a des impacts directs sur
les quantités et la qualité des déchets gérés, elle se prépare bien en amont.
Les politiques de prévention doivent être partagées par tous les niveaux
des collectivités, dans la gestion de leurs propres déchets, mais aussi dans
la mise en oeuvre de leurs autres politiques.
Toutefois, I'AMF est opposée à l'idée d'adosser systématiquement
des ressourceries aux déchèteries. En effet, les déchèteries sont situées
dans des zones peu attractives et les particuliers s'y rendent uniquement
pour se débarrasser de leurs déchets puis en repartent aussitôt. Ils ne
viennent pas pour y faire des achats. Le succès de l'initiative de la «
déchèterie à l'envers » n'est pas reproductible partout. Que les déchèteries
servent à alimenter les ressourceries est tout à fait envisageable, mais les
déchets récupérés pour réemploi ne doivent pas rester sur le même site.
Les déchèteries ne sont pas aménagées pour cela et le risque de pillage et
de violence n'est pas négligeable. Et quoi qu'il en soit, cette décision est du
domaine de la libre administration des collectivités.
Concernant la gestion des déchets produits par les activités
économiques, l'AMF tient à faire observer que, si la gestion des déchets
des particuliers fait l'objet de nombreux contrôles à travers les collectivités
et les éco-organismes, il n'en est pas de même des déchets des activités
économiques, qui représentent des tonnages dix fois supérieurs. Les
difficultés rencontrées pour faire appliquer le décret « 5 flux » puis « 7 flux
», en sont l'illustration. En effet, les services de l'État sont compétents pour
les installations de traitement des déchets, les maires pour les espaces
publics et la voirie, mais personne ne peut contrôler la gestion des déchets
à l'intérieur des entreprises. Cette dissymétrie dans les obligations et les
responsabilités nuit à l'efficacité de la politique nationale de gestion des
déchets.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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186 COUR DES COMPTES
L'AMF ne partage pas votre souhait de voir les déchets des
professionnels rejoindre les installations de collecte des collectivités,
notamment les déchèteries. Depuis plus de 10 ans, les collectivités gérant
des déchèteries essaient d'éviter d'accueillir les déchets de professionnels.
En effet, les professionnels n'ont ni les mêmes attentes que les particuliers
(notamment en terme d'horaires d'ouverture ou de volumes acceptés), ni
les mêmes déchets (déchets dangereux spécifiques aux activités
professionnelles, quantité et taille des cartons d'emballages par exemple).
De ce fait, les professionnels ne sont pas satisfaits du service et la présence
des déchets professionnels perturbe le fonctionnement pour les
particuliers.
De plus, il est souvent difficile de faire payer le service par les
professionnels alors qu'il semble gratuit pour les particuliers (en fait il est
payé par leurs impôts). Dans ce cas, la gestion des déchets des
professionnels est financée par les ménages. Enfin, lorsqu'il existe une
filière REP pour les déchets ménagers, l'accès des professionnels à la
déchèterie conduit la collectivité à devoir payer pour le traitement des
déchets des professionnels, qui ne sont pas de sa compétence, alors que la
filière REP prend en charge gratuitement les déchets des ménages.
C'est pourquoi, les collectivités sont réticentes à accueillir les
déchets des professionnels dans leurs installations car ils sont sources de
désorganisation, de problèmes techniques et de pertes financières. En
outre, l'acceptation des déchets des professionnels dans les dites
installations nuit à la mise en place de solutions pertinentes de valorisation
de ces déchets. Cette situation prolonge l'existence de solutions à faibles
coûts pour les déchets des professionnels qui ne permettent pas de dégager
les financements nécessaires aux investissements.
Concernant la collecte des déchets des ménages, l'AMF vous
signale que vous n'avez pas mentionné la collecte pneumatique dans les
modes d'organisation cités dans votre rapport. Bien que limitée à certains
territoires, elle aurait mérité une analyse, notamment de son coût et de son
efficacité. Par ailleurs, la répartition entre le porte-à-porte et l'apport
volontaire est en train de bouger. En effet, certaines collectivités
s'interrogent sur le coût environnemental de la collecte en porte-à-porte,
notamment en matière de contribution à la pollution atmosphérique et à
l'utilisation de carburants. La difficulté à organiser les calendriers de
collecte, surtout avec la multiplication des collectes séparées, conduit
certaines collectivités à envisager d'autres organisations. Cette réflexion
est trop récente pour en tirer des conclusions dès à présent, mais elle
intéresse de plus en plus de collectivités.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 187
Concernant la collecte et la valorisation des déchets
biodégradables, l'AMF partage votre constat d'un faible développement
des collectes séparées des biodéchets. Toutefois, cette situation tient
essentiellement à la faiblesse des débouchés. Depuis presque un an, les
collectivités attendent une modernisation des normes « compost » qui
serait de nature à sécuriser les utilisateurs et les producteurs de compost.
En fait les différents ministères concernés (en particulier ceux de
l'environnement et de l'agriculture) ne semblent pas arriver à trouver un
accord sur les normes nécessaires.
Les perspectives de débouchés qui semblaient s'ouvrir avec le
développement de la méthanisation ont été déçues pour plusieurs raisons :
une difficulté à trouver le cadre juridique pertinent pour une coopération
avec les opérateurs de méthanisation agricole, la gestion des digestats qui
se heurtent aux mêmes difficultés que les composts, mais surtout
l'impossibilité d'implanter des installations de méthanisation. Alors que
l'économie circulaire commence à intéresser le public, il est encore plus
difficile de faire accepter les installations nécessaires aux riverains. Dans
ce contexte difficile, les collectivités déplorent la grande prudence des
pouvoirs publics, au niveau préfectoral comme au niveau national, qui se
traduit par un faible appui aux projets en matière de méthanisation. Tant
que les incertitudes sur les débouchés ne seront pas levées, les collectivités
continueront à expérimenter des modalités de collecte ; elles pourront les
déployer largement quand il existera réellement des débouchés. Enfin, une
association des communes au développement des collectes de proximité
organisées par les EPCI permet de lever certains obstacles locaux et
d'améliorer la sensibilisation des habitants.
Concernant la collecte séparée des emballages plastiques, l'AMF
ne partage pas votre appréciation. En effet, à la fin du premier trimestre
2022, toutes les collectivités avaient déposé un dossier de modification de
leurs centres de tri et nous pouvons raisonnablement penser que l'ensemble
des territoires métropolitains passera à l'extension des consignes de
collecte en 2023. Les territoires ultramarins auront besoin d'un délai
supplémentaire en raison de leurs contraintes spécifiques.
Si la collecte sera au rendez-vous de l'échéance de 2023, la
rénovation et l'adaptation de la totalité des centres de tri ne seront pas
terminées au 1er janvier 2023. Ces retards ont des causes multiples : débat
sur la consigne qui a conduit certaines collectivités à suspendre leurs
projets dans l'attente d'une plus grande visibilité sur les produits entrant
dans le centre de tri (présence ou non des bouteilles), décalage de certaines
décisions en raison des circonstances des élections municipales,
perturbations du calendrier des travaux du fait de la crise sanitaire,
saturation des carnets de commandes des équipementiers. Pour prévenir
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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188 COUR DES COMPTES
les conséquences de ces retards, l'éco-organisme des emballages et les
collectivités ont mis en place des solutions transitoires, afin de trier les
tonnages collectés dans de bonnes conditions et sans dégrader la qualité,
même pendant la période d'indisponibilité de certains nouveaux centres.
Concernant la valorisation des matériaux, l'AMF confirme que la
complexité et la spécialisation des marchés des matériaux recyclables rend
leur commercialisation de plus en plus difficile pour les collectivités : leur
fonctionnement n'est pas adapté à la réactivité nécessaire. La priorité pour
les collectivités, qui a été un préalable à leur participation aux filières REP
dès 1992, reste l'enlèvement des déchets triés, à coût positif ou nul au
départ du centre de tri ; elles ne peuvent pas arrêter de collecter et leurs
capacités de stockage sont limitées. En conséquence, si les collectivités
doivent renoncer à la commercialisation des matériaux triés (et aux
recettes qui les accompagnent), c'est à la condition non négociable d'avoir
la garantie des enlèvements. Cette exigence est valable pour toutes les
filières REP.
Concernant l'incinération, l'AMF regrette la dégradation du parc
des unités de valorisation énergétique depuis plus de 15 ans. L'effort de
modernisation, notamment en ce qui concerne les traitements des fumées,
qui a été mené dans les années 1990-2000, s'est heurté ensuite à
l'impopularité des installations de traitement. Les difficultés
d'implantation et l'hostilité des pouvoirs publics n'ont pas permis d'investir
dans les capacités nécessaires, ni parfois de procéder aux rénovations
indispensables.
Une intense campagne de communication « anti-incinération » a
parfois conduit à compromettre des opérations de valorisation
énergétique ; des occasions de développement de réseaux de chaleur ont
été écartées. Même la constatation que cette politique bénéficiait surtout à
la mise en décharge n'a pas permis une révision réelle de l'absence de
soutien de l'État. Le développement des combustibles solides de
récupération est actuellement entravé par des obstacles réglementaires,
alors que leur production présente des avantages en matière de stockage
et de souplesse d'utilisation. L'incinération aux normes les plus exigeantes
constitue un des maillons dans la chaîne du traitement des déchets par une
valorisation énergétique pertinente.
Il n'est pas possible de réduire et de recycler la totalité des déchets,
même s'il existe encore d'importantes marges de progression. Pour
développer la réutilisation et le recyclage, il faut massivement investir dans
la création de débouchés pour les matériaux. En l'absence de débouchés,
la réduction arbitraire des capacités d'élimination ne permet pas de
développer le recyclage, mais elle favorise les solutions illégales et les
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 189
dépôts sauvages. A cette occasion, l'AMF regrette qu'il ne soit pas prévu
d'utiliser l'augmentation de la TGAP pour soutenir financièrement les
investissements nécessaires dans le domaine de l'économie circulaire, par
exemple pour le déploiement des nouvelles collectes, la construction des
infrastructures et des installations nécessaires, mais aussi la création de
débouchés innovants. La TGAP devient une simple sanction, loin des
ambitions de développement et d'amélioration qui existaient lors de sa
création
Concernant la gestion des dépôts sauvages, l'AMF regrette que
cette question ne soit pas abordée dans votre rapport. Il est vrai qu'elle ne
relève pas de la gestion des déchets au sens strict et qu'elle n'est pas de la
compétence des mêmes collectivités. Toutefois, l'existence des dépôts
sauvages est directement liée aux faiblesses de la politique de gestion des
déchets. En effet, l'absence de contrôles, notamment des déchets des
professionnels, le manque d'installations de traitement et les difficultés
opérationnelles de sanctionner les actes d'incivisme sont des causes de
l'existence de certains dépôts sauvages. Leur élimination constitue la
principale difficulté pour les élus et leurs équipes, c'est également la
première source de nuisances évoquées par les habitants au sujet des
déchets. Si la loi AGEC a apporté quelques améliorations, les collectivités
restent seules et démunies pour lutter contre ce fléau. L'ampleur du
phénomène ne permet plus de se contenter de perfectionner les moyens à
la disposition des collectivités, il faut mobiliser l'ensemble des autorités
publiques, depuis les collectivités jusqu'à l'État, en passant par le ministère
de la Justice. Les élus, en particulier les maires, sont déterminés à lutter
contre les dépôts sauvages, mais ils ne pourront pas en venir à bout seuls,
et il leur faut des moyens juridiques.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE LA MÉTROPOLE DE LYON
Par lettre du 28 juillet 2022, vous m?avez communiqué le rapport
public thématique que la Cour des Comptes se propose de publier
prochainement sur la prévention, la collecte et le traitement des déchets
ménagers.
J?ai pris connaissance avec un très vif intérêt des observations
formulées par la Cour sur la gestion de cette politique publique essentielle,
à laquelle la Métropole de Lyon accorde la plus grande attention. Ces
observations confirment la pertinence des orientations retenues par notre
collectivité, à la faveur de l?adoption, en juin 2022, du schéma directeur
des déchets à l?horizon 2030.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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190 COUR DES COMPTES
La Métropole de Lyon vise en effet la sobriété en matière de
consommation et de production de déchets et une meilleure valorisation
des déchets résiduels produits. Nos objectifs pour 2030 sont de réduire de
25 % la production de déchets par habitant, de 50 % la quantité incinérée
et d?atteindre 60 % de valorisation matière (réemploi, recyclage,
compostage?) des déchets ménagers et assimilés.
Pour atteindre ces objectifs ambitieux, un plan d?actions articulé
autour de trois axes a été défini.
Tout d?abord, déployer des solutions adaptées aux usagers pour
réduire et trier les déchets.
La Métropole de Lyon va développer des équipements
complémentaires pour mieux trier (silos à verre, silos à emballages, silos
textiles) sur l?ensemble du territoire métropolitain. D?ici 2024, elle
équipera l?ensemble des quartiers densément peuplés, de bornes à compost
(1 million d?habitants couverts par ce nouveau service) pour permettre le
tri de tous les déchets alimentaires. En parallèle, les distributions de
composteurs pour les habitants en maison individuelle et les installations
de composteurs partagés en pied d?immeuble ou dans les quartiers, seront
poursuivies. Les déchèteries existantes seront modernisées en vue de
favoriser le don, le réemploi, la réutilisation et le recyclage. Ainsi, des
écocentres verront prochainement le jour sur le territoire.
Ensuite, accompagner les usagers dans le changement de pratiques.
La Métropole va mettre en place une communication régulière et
ciblée pour faire connaître les nouveaux services mis à disposition des
usagers, mais aussi pour les informer sur la qualité du tri et sur la quantité
des déchets produits. Pour inciter au changement, le nombre de personnes
sensibilisées par an sera doublé, passant de 70 000 à 140 000. Une
attention particulière sera portée aux jeunes publics, notamment les
scolaires et collégiens. En complément, la Métropole de Lyon déploiera
des opérations de contrôle et de sanction. Elle prévoit ainsi d?assermenter
180 agents pour faire respecter le règlement de collecte des déchets
ménagers et assimilés.
Enfin, faire des déchets des ressources durables.
Pour répondre aux objectifs métropolitains, la collectivité doit, en
lien avec les territoires voisins, augmenter les capacités de tri et de
valorisation de la collecte sélective par la création d?un nouveau centre de
tri. Parallèlement, des plateformes de compostage métropolitaines seront
créées pour accueillir et traiter les déchets alimentaires collectés via les
bornes à compost. Enfin, les deux incinérateurs du territoire devront
également être modernisés et repensés à horizon 2030, afin de s?adapter
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 191
aux évolutions quantitatives et qualitatives des déchets et de développer
des partenariats et des mutualisations avec les territoires voisins.
Ainsi, au-delà de budgets de fonctionnement significatifs, quelques
145 M¤ seront consacrés en investissements à la politique des déchets
pendant le mandat 2020-2026.
Telles sont les précisions que j?estimais utiles de porter à votre
connaissance.
MADAME LA PRÉSIDENTE DE LA COMMUNAUTÉ
DE COMMUNES DE L'ÎLE D'OLÉRON
Par courrier en date du 28 juillet 2022, vous me proposez de réagir
au rapport public thématique intitulé "Prévention, collecte et traitement
des déchets ménagers : une ambition à concrétiser". La région Bourgogne-
Franche-Comté a une responsabilité en termes de planification régionale
de la prévention et de la gestion des déchets, suite au transfert de
compétence issue de la loi NOTRé du 08 aout 2015. L'analyse du rapport
amène les observations suivantes :
Élaboration du PRPGD (p. 33)
La Région a adopté en novembre 2019 son Plan Régional de
Prévention et de Gestion des Déchets (PRPGD) qui fait désormais partie
intégrante du SRADDET, adopté en 2020.
? La loi NOTRé a transféré aux Régions l'élaboration des PRPGD,
imposant des délais impossibles à tenir (février 2017) pour des
collectivités nouvelles, issues des fusions au 1 er janvier 2016. Le conseil
régional de Bourgogne-Franche-Comté a choisi néanmoins de prendre
le temps nécessaire à la concertation tout en accélérant l'élaboration de
son PRPGD afin de répondre à la demande de l'État dans le cadre du
précontentieux qui l'oppose à l'Union Européenne. Sachant que, par
ailleurs, les procédures administratives entre l'arrêt du projet et
l'approbation du plan, qui s'étalent sur une année complète, viennent
raccourcir d'autant les phases rédactionnelles. Le PRPGD a donc, dans
les faits, été rédigé dès l'automne 2018. Ce temps, très contraint, n'a pas
permis de creuser des solutions opérationnelles ni d'engager dans le
même temps la création d'un observatoire à l'échelle du territoire.
? L'état des lieux des gisements, en particulier issus des acteurs
économiques et du BTP, a été et reste très aléatoire en raison de la
multitude des producteurs, majoritairement des TPE. Par ailleurs, les
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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192 COUR DES COMPTES
données présentes dans les bases de l'État ne concernent pas tous les
producteurs et ne constituent donc qu'une source d'information partielle.
? L'élaboration du PRPGD s'est faite en concertation avec les acteurs du
territoire afin de définir des objectifs communs de réduction, de
valorisation et de gestion des déchets. La rédaction du document final
s'est faite en étroite collaboration avec les services de la DREAL et de
l'ADEME, en particulier concernant la planification des installations de
stockage, usines d'incinération et centres de tri des DMA.
? Le conseil régional n'ayant pas autorité en matière d'ouverture ou de
fermeture des installations de traitement (p. 34), mission qui incombe
aux services de l'État, nous avons eu une approche par bassin et en
tenant compte des réalités de terrain afin de proposer une adéquation
des capacités et des gisements. Vous noterez que, dans le temps
d'élaboration du PRPGD, de nouvelles autorisations ont été accordées
par l'État et sont venues modifier la trajectoire concernant la baisse des
capacités de traitement sur notre territoire, décalant de trois ans
l'atteinte des objectifs prévus dans le Plan. La Région avait suggéré aux
services de l'État qu'ils prononcent un sursis à statuer, par analogie à
cette faculté existant dans le droit de l'urbanisme ; ceux-ci n'ont pas
souhaité donner suite.
? De même, le conseil régional ne peut prévoir la création d'installations
de gestion ou traitement, création qui appartient au domaine
concurrentiel, limitant ainsi le pouvoir de planification à constater des
décalages entre les besoins et les capacités présentes sur le territoire.
? Enfin, il est nécessaire de rappeler que la mise en oeuvre de cette
nouvelle mission dévolue aux Régions n'a fait l'objet, en Bourgogne-
Franche-Comté, d'aucun transfert de ressources humaines des
Départements et d'une compensation financière équivalente à 20 K¤ du
département de la Haute-Saône sans commune mesure avec la charge
transférée. Madame la préfète de Région n'a pas donné suite à la
demande de la Région de prononcer le transfert de charges de 5
équivalents temps plein issus des 8 départements de Bourgogne-
Franche-Comté, dont l'existence était pourtant avérée. Par ailleurs, les
Régions ont proposé à l'État depuis plusieurs années, un transfert partiel
de TGAP afin d'accélérer la mise en oeuvre des actions sur le terrain. La
possibilité de gestion d'une partie du fonds déchets de l'ADEME ne
constitue pas une réponse satisfaisante à cette demande car le budget
global alloué aux territoires reste constant et serait délégué aux Régions
sous l'autorité de l'ADEME, limitant strictement l'intérêt et les marges
de manoeuvre pour les Régions.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 193
Mise en oeuvre du PRPGD
? Depuis la rédaction du PRPGD (projet achevé fin 2018), de nombreuses
actions ont été mises en place par la Région. En premier lieu, la
réglementation imposait un plan d'action économie circulaire, inclus
dans le PRPGD. La région Bourgogne-Franche-Comté a fait le choix de
se doter dès juin 2020, d'une Feuille de Route Économie Circulaire
(FREC) très opérationnelle qui permet de décliner des actions de terrain
en coopération avec les acteurs du territoire (téléchargeable sur notre
site internet : https://www.bourgognefranchecomte.frivers-le-zero-
dechet) (p. 65-73).
? Concernant l'animation du territoire, la région BFC anime un réseau
des collectivités en complément du réseau A3P porté par l'ADEME et
soutient financièrement d'autres réseaux portés par des acteurs de notre
territoire. Chaque année, une thématique fait l'objet d'une déclinaison
en termes de communication et de soutien aux actions : vrac, réemploi,
biodéchets.
? La Cour salue les initiatives de financement des équipements par
certaines Régions. La Région ne dispose pas de clause générale de
compétence depuis la loi NOTRé. Par conséquent, elle ne peut engager
des financements qu'autre titre de sa compétence planification. Il
convient, en effet, de rappeler que le mode de financement de la gestion
des déchets (p. 43-48) repose sur la TEOM et/ou la REOM pour service
rendu, les financements ADEME provenant de la TGAP et les éco-
organismes, prélevant les contributions des producteurs de déchets.
Pour autant, la Région finance depuis 2018 en cogestion avec l'ADEME,
avec un renfort budgétaire notable en 2021 via le Plan d'Accélération
de l'Investissement Régional (PAIR), des projets d'économie circulaire,
d'installations de traitement et, depuis 2020, des projets liés à la
généralisation du tri à la source des biodéchets.
? Enfin, pour ce qui est de l'observation (p. 33), la Région est désormais
dotée d'un observatoire régional, porté par l'association ALTERRE BFC
et en cours de mise en place d'un outil de collecte des données innovant
qui permettra à l'avenir de limiter les sollicitations des producteurs et
de favoriser les échanges avec d'autres bases existantes. L'enquête
relative à la collecte et aux traitements des DMA a été mise en oeuvre
sous maitrise d'ouvrage de la Région en 2021. Par ailleurs, la Région
participe activement aux ateliers menés par l'ADEME nationale dans le
but d'améliorer et d'harmoniser la collecte des données.
Il est rappelé que la région Bourgogne-Franche-Comté a déjà
déposé le 15 avril 2022 un certain nombre de remarques sur la plateforme,
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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194 COUR DES COMPTES
suite à la sollicitation que la Cour des Comptes avait faite auprès de
Régions de France. Nos premières remarques n'ont toutefois pas été
intégrées dans le projet définitif.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
DE BRETAGNE
Je tiens tout d?abord à redire que je partage l?analyse de Régions
de France, retranscrite dans son courrier du 11 avril dernier. Les
problématiques et les conditions particulières encadrant la mise en oeuvre
de la compétence régionale de la planification de la prévention et de la
gestion des déchets y sont parfaitement traduites et illustrent concrètement
les difficultés que nous rencontrons aussi en Bretagne.
Dès le transfert de compétence issu de la loi NOTRé, la Région s?est
largement engagée dans son rôle de chef de file et d?animation pour la
prévention et la gestion des déchets, tous flux confondus. En dépit d?un
contexte réglementaire marqué depuis plusieurs années par de nombreuses
évolutions législatives, non toujours transcrites rapidement de façon
opérationnelle, la Région a adopté en mars 2020 son PRPGD, en juillet
2020 une Feuille de route bretonne dédiée à l?Économie circulaire, et son
SRADDET en novembre 2020.
Le PRPGD breton est le fruit de démarches partenariales et
concertées avec l?ensemble des parties prenantes de la prévention et de la
gestion des déchets. Outre les 10 principes fondamentaux du plan, les 18
objectifs inscrits dans le PRPGD déclinent et renforcent, en prenant en
compte le contexte et les particularités bretonnes, les objectifs européens
et nationaux.
Une trajectoire très ambitieuse est fixée par la Région dans le
PRPGD avec le « zéro enfouissement des déchets » à l?horizon 2030 et le
« zéro déchets » en 2040. Le déploiement de l?économie circulaire, la
recherche de l?efficacité collective et l?engagement de tous au quotidien
constituent autant de moyens pour y parvenir.
Malgré la volonté clairement partagée par la Région et l?ensemble
des partenaires et acteurs concernés en Bretagne de relever les défis, le
déploiement de certaines actions de prévention et de gestion des déchets
reste complexe. Certaines dispositions structurelles, règlementaires,
techniques ou financières limitent l?efficacité de l?action et l?engagement
des collectivités locales, des opérateurs et acteurs des déchets sur le
terrain. Le déploiement actuel des nouvelles filières REP par certains éco-
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 195
organismes, parfois insuffisamment partagé avec les collectivités pourtant
directement concernées, ou encore l?absence de moyens
d?accompagnement suffisants pour les installations de combustion
(chaudières CSR) constituent deux exemples parmi bien d?autres,
révélateurs des difficultés auxquelles doivent faire face les parties
prenantes bretonnes.
La Région entend pourtant, malgré toutes ces difficultés, relever les
défis et poursuivre son engagement, avec conviction, sens des
responsabilités et sans relâcher ses efforts.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
GRAND EST
Par une correspondance en date du 28 juillet 2022, vous avez bien
voulu porter à ma connaissance le rapport public thématique intitulé
« Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à
concrétiser », et je vous en remercie.
- J?ai procédé à une lecture attentive de ce document et souhaite vous
apporter des éléments de réponse.
Concernant le chapitre III / A ? 2 « La nécessité d?une meilleure
coordination des investissements
La Région Grand Est, en co-animation avec la DREAL Grand Est,
rassemble dans un groupe de travail depuis février 2019, l?ensemble des
exploitants des installations de stockage de déchets non dangereux et de
valorisation énergétique (UVE), ainsi que les plus gros producteurs de
déchets.
L'objectif de ce groupe de travail est de permettre une optimisation
du traitement des flux de déchets résiduels, dans le respect des
préconisations et des règles du SRADDET, à savoir :
- Principe de proximité (gestion des déchets au plus près de leur zone
de production, et de proche en proche) ;
- Respect de la hiérarchie des modes de traitement en saturant les
incinérateurs.
L?objectif est de mettre autour de la table l?ensemble des acteurs
afin de faire des projections quasiment en temps réel des besoins en
matière de traitement, et d?anticiper les éventuels points de blocage.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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196 COUR DES COMPTES
Ces derniers peuvent être liés aux arrêts techniques, aux incidents
et accidents et aux situations exceptionnelles. La région a été marquée par
une suite d?évènements entre 2016 et fin 2019, qui ont fortement réduit ses
capacités de traitement jusque ce début d?année 2022.
Le partage des données régionalisées (sur les tonnages stockés et
incinérés, les coûts appliqués, les besoins de détournements de flux vers
d?autres exutoires et la prise d?arrêtés d?exploiter par les préfets
concernés) a permis d?assoir le rôle de la Région en tant que planificateur.
La non augmentation des capacités de stockage fortement
demandées par les acteurs, même pendant les années difficiles, a été
respectée. Le partenariat Région / DREAL a par ailleurs montré sa force
dans le rassemblement d?acteurs à la base concurrents, pour trouver
ensemble les solutions.
Ainsi, la Région a diminué ses capacités entre 2015 et 2022, et tend
vers l?objectif au travers des nouveaux arrêtés d?exploitation pris et à
venir.
Le groupe de travail a permis pour cela de décliner, dans les arrêtés
d?exploitation, les règles et principes du SRADDET en termes de demande
de prolongation ou de création, ou encore de modification de zone de
chalandise ; cela avec pour finalité d?atteindre les objectifs de réduction,
en définissant notamment des capacités maximales.
La suite de la réflexion se fait autour des actions à mettre en oeuvre
pour l?atteinte des objectifs, au travers de la projection à 2025 et 2031, des
capacités réelles à prévoir sur 3 bassins de vie.
Deux groupes de travail « stockage » et « incinération » ont découlé
de ce premier groupe et traitent des sujets spécifiques à chacune de ces 2
thématiques (points d?alerte, actions possibles, coordination des arrêts
techniques, veille règlementaire, ?).
Concernant l?annexe 3 relative aux Plans Régionaux
de Prévention et de Gestion des Déchets
La Région Grand Est présente non seulement des données
départementalisées dans son état des lieux (données DAE, DMA, BTP ou
certains déchets dangereux), mais également pour ses objectifs à atteindre
en matière de capacité d?installations de stockage de déchets inertes
(ISDI), notamment dans la mesure où il s?agit de gestion de déchets de
proximité (déchets du BTP).
Le présent rapport fait état de lacunes de données que ni l?État, ni
les régions n?ont comblées par des enquêtes de terrain. Pour ce qui est de
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 197
la Région Grand Est, il s?agit de 408 tonnes pour lesquels l?exutoire n?est
pas précisé, sur un total de 1 994 000 tonnes. Tous les autres tonnages ont
un exutoire.
Le plan de la Région Grand Est décline de manière détaillée, à
l?échelle départementale, les installations de stockage qu?il sera
nécessaire de créer et projette les besoins en capacité de traitement à
l?échelle de deux bassins de vie (Est et Ouest).
La Région Grand Est a effectivement fait le choix de décliner
finement la planification de ses installations, pour être au plus près des
besoins.
L?observatoire « déchets », lancé le 23 novembre 2020 en Région
Grand Est, est un des premiers de ce type en France (marchés à lots /
partenaires publiques / prestations internes).
Contrairement à d?autres observatoires, il recouvre l?ensemble des
typologies de déchets. Il s?agit d?une initiative volontariste de la Région
Grand Est (l?observation n?est pas règlementaire), demandée par les
acteurs de la Commission Consultative d?Élaboration et de Suivi (CCES),
dès les premiers travaux du Plan.
L?Observatoire « Déchet et Économie Circulaire » a fait l?objet
d?une délibération de la Commission Permanente du Conseil Régional
Grand Est, votée en Séance le 26 avril 2019, soit avant même l?adoption
du SRADDET en février 2020.
Son déploiement rapide a été permis par la volonté régionale
d?anticiper et de doter cet observatoire des moyens humains et financiers
conséquents, mais nécessaires pour sa mise en oeuvre.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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198 COUR DES COMPTES
Il joue, outre sa fonction de suivi des objectifs, un rôle primordial
en matière d?information et d?appui aux collectivités locales et aux
entreprises sur :
? les Déchets Ménagers et Assimilés (DMA) ;
? les Déchets d?Activités Économiques (DAE) ;
? les Déchets Dangereux (DD) ;
? les déchets de Chantiers du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP).
Je reste naturellement à votre disposition pour toute information
complémentaire.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
DE NORMANDIE
A la lecture de ce rapport, je suis étonné du peu d'évolution, au final,
du rapport malgré l'envoi d'éléments complémentaires transmis à vos
services le 1 avril 2022, dont je ne retrouve pas trace ni intégration.
En effet, votre position reste inchangée par rapport à la description,
que vous qualifiez de sommaire, quant aux mesures prises pour atteindre
l'objectif de couverture de 30 % de la population normande par une
tarification incitative. Pourtant et grâce à sa dynamique d'animation
régionale, et sa présence auprès des acteurs normands, la Région a réussi
à avancer sereinement vers cet objectif que je qualifierais d'ambitieux afin
d'atteindre les 30 % en 2025.
Par ailleurs, et comme vous, je porte une attention particulière à
l'efficience de nos politiques publiques. A cette fin, je réitère l'ambition de
la Région Normandie de revendiquer son droit à l'expérimentation en se
portant volontaire pour que sa compétence en matière de prévention et de
gestion des déchets soit étendue comme l'indiquait le rapport « Évolution
des capacités de traitement des déchets en France à l'horizon 2040 » rédigé
par Jean-Louis Chaussade et remis à Barbara Pompili.
Mes services se tiennent à votre entière disposition pour vous fournir
des informations plus détaillées sur nos travaux et réflexions à venir.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
DE NOUVELLE-AQUITAINE
Dans le cadre du rapport public thématique « Prévention, collecte
et traitement des déchets ménagers » que vous m?avez adressé par courrier
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 199
du 28 juillet 2022 reçu le même jour, j?ai pris connaissance avec attention
de ce document.
Je partage pour l?essentiel les propositions émises notamment
concernant le nécessaire renforcement des actions en matière de
prévention, l?amélioration de la collecte des données et la simplification
des actions avec le fonctionnement des filières à la responsabilité élargie
du producteur.
Je me permets d?apporter des précisions complémentaires
concernant plusieurs thèmes :
1. Massifier le soutien aux actions de prévention
et de réduction des déchets
Je partage le constat de la Cour concernant le manque de moyens
sur la prévention.
Pour les collectivités territoriales, les moyens humains et financiers
allouées aux actions de prévention manquent pour atteindre les objectifs
nationaux.
La mobilisation et l?accompagnement technique et financier auprès
des parties prenantes doivent être accrus et partagés entre les différents
financeurs.
Les conseillers régionaux délégués et les services de la Région ont
identifié la prévention comme la priorité pour répondre aux enjeux
environnementaux de la gestion des déchets et j?ai traduit cette priorité
régionale en actes en impliquant fortement sur le sujet l?ensemble des
acteurs (collectivités, entreprises et associations) : élaboration d?une
feuille de route déchets, lancement en 2022 de conventions avec les EPCI
pour accompagner la réalisation des programmes locaux de prévention
des déchets ménagers et assimilés (PLPDMA), lancement en 2022 d?un
nouvel appel à projets pour les EPCI avec un axe prévention?
2. L?amélioration de la collecte des données permettra
de clarifier l?atteinte des objectifs
La Région Nouvelle-Aquitaine est déjà pleinement mobilisée et prête
à jouer un rôle encore plus important en matière de consolidation des
données relatives aux déchets. En effet, la Région, avec son observatoire
des déchets porté par l?AREC (Agence Régionale Évaluation
environnement et Climat) enquête déjà les intercommunalités à
compétence Déchets. La confiance instaurée avec les collectivités nous
permet d?avoir une remontée des données effectives et un suivi des
évolutions sans difficulté dans la remontée de ces informations régionales.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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200 COUR DES COMPTES
Je partage avec la Cour :
- le besoin de simplifier et d?uniformiser les informations transmises
par les EPCI à l?échelle nationale en s?assurant notamment que les
bases de calcul soient identiques afin de faciliter une comparaison des
indicateurs à l?échelle nationale ;
- la proposition de compiler les différents documents ou plan nationaux.
Cela permettrait de faciliter la compréhension et l?appropriation des
objectifs à atteindre pour les territoires et de les mettre en cohérence
avec les documents cadres régionaux.
3. Inciter les filières à responsabilité élargie du producteur (REP)
à améliorer le suivi, amélioration du tri et la prévention
Je constate ces dernières années une multiplication du nombre de
filières à responsabilité élargie du producteur (REP). Je m?interroge sur
l?efficacité de ces dispositifs, la visibilité et le suivi des filières REP, la
multiplicité des interlocuteurs pour les collectivités et les besoins
spécifiques de point de collecte notamment dans les déchetteries.
Les éco-organismes des filières REP doivent améliorer le suivi des
tonnages et le tri sur les sites de collecte.
En outre, je partage votre proposition concernant la nécessité
d?augmenter la participation aux efforts de prévention à travers le
financement d?actions à fort impact sur les flux collectés. Dans la mesure
où l?éco-conception doit être une priorité pour nos entreprises, comme j?ai
souhaité l?intégrer dans le nouveau SRDEII de la Région, les dispositifs
incitatifs et prescriptifs doivent être renforcés et le financement par les
filières REP massifié.
4. Une nécessaire distinction entre planification et programmation
Si la Région peut en sa qualité de planificateur et d?animateur
faciliter les coopérations et l?émergence de solutions partagées, il me
semble important de rappeler que les collectivités en charge du traitement
restent les seules décisionnaires. La Région planifie mais ne peut pas
programmer la réalisation des installations. Ainsi la Région joue d?ores et
déjà un rôle clef pour faciliter les synergies locales dans la programmation
des équipements de gestion des déchets et ce en tenant compte des
disparités géographiques, historiques et/ou des spécificités locales. Ce
travail se fait dans le respect du principe de libre administration,
d?absence de tutelle et donc des choix locaux des intercommunalités qui
restent pleinement décisionnaires en matière de programmation des
équipements.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 201
En outre, il me semble important de rappeler que ce sont les services
de l?État qui restent compétents sur la délivrance des autorisations
relatives aux installations classées pour la protection de l?environnement
(ICPE) pour les EPCI à compétence Déchets. Afin de s?assurer de la
compatibilité avec le volet Déchets du SRADDET, l?État saisit la Région,
qui ensuite émet un avis (opposabilité du plan), qui n?engage pas l?État
dans sa décision finale. Ainsi, la compétence régionale en matière de
prévention et de gestion des déchets est essentielle, mais sa portée peut
s?en voir limitée du fait de la multiplicité des acteurs concernés et de leurs
différentes compétences. Les étapes successives de décentralisation et de
transfert de compétences ont amené à cette multiplicité des acteurs qui
nécessite désormais une coordination de ceux-ci afin de s?assurer de la
complémentarité et de la pertinence des actions.
5. Une plus forte mobilisation des Régions qui se heurte à la limitation
des moyens octroyés
L?échelle régionale paraît être la plus pertinente pour la
programmation et la coordination des investissements pour les
installations de traitement à travers le SRADDET et le dialogue entre
l?État, la Région et les EPCI. La cour appelle de ses voeux dans sa synthèse
à un renforcement du rôle de « financeur » des Régions. Si je partage le
principe de renforcement de la compétence de la Région sur le financement
des grands équipements structurants régionaux, notamment pour faciliter
la « cohérence territoriale », l?opérationnalité d?une telle proposition se
heurte à l?absence de moyens alloués aux Régions. En effet, je vous
rappelle que le transfert de la compétence planification des déchets des
Départements auprès de la Région Nouvelle-Aquitaine s?est réalisé sans
moyen. La recommandation d?une plus grande mobilisation de la Région
en matière de financement doit donc s?accompagner d?une réflexion plus
globale sur son financement. Les recommandations de la Cour en matière
de financement portent sur l?échelon intercommunal et les spécificités
littorales uniquement ; elles gagneraient donc à être complétées par des
propositions pour l?échelon régional.
Le principe de pollueur payeur a bien guidé l?instauration de la
Taxe Générale sur les Activités Polluantes pour les déchets s?appliquant
aux installations de traitement des déchets, mais le fruit de cette taxe
revient au budget de l?État et à son agence l?ADEME et nullement aux
Régions. Il en va de même pour les éco-contributions des filières REP, dont
les ressources reviennent aux éco-organismes et nullement aux Régions
malgré leur compétence en matière de développement économique.
Enfin, je tiens à vous témoigner du travail mené par les conseillers
régionaux et les agents de la Région Nouvelle-Aquitaine sur le sujet de la
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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202 COUR DES COMPTES
prévention et de la réduction des déchets, et de mon engagement à le
poursuivre.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
PROVENCE-ALPES-CÔTE D?AZUR
Par courrier en date du 28 juillet 2022, vous m?avez communiqué le
projet de rapport public thématique intitulé « Prévention, collecte et
traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser » que la Cour
propose de publier prochainement avec les réponses des destinataires
intéressés conformément aux articles L 143-8 et R. 143-13 du Code des
juridictions financières. Je vous en remercie.
L?objet du rapport est de réexaminer la pertinence et l?efficience de
la politique de prévention et de gestion des déchets.
La Région Provence-Alpes-Côte d?Azur a été consultée, en mars
2022, sur un extrait du rapport d?observations provisoires relatif à
l?enquête nationale que la Cour des comptes et les Chambres régionales
des comptes ont mené sur les déchets ménagers et assimilés en vue du futur
rapport public thématique.
La Cour des comptes appelle les Régions à « jouer pleinement leur
rôle de planificateur, d?animateur voire de financeur, afin de garantir la
mise en oeuvre effective des objectifs arrêtés dans leurs plans. » Elle pointe
une « programmation à renforcer » et des plans régionaux qui demeurent
insuffisamment précis et contraignants sur les investissements et qui ne «
s?avèrent pas à la hauteur des défis à relever. » Elle précise que le « niveau
régional serait le plus pertinent pour organiser une programmation et une
coordination optimales des investissements. »
Le Plan régional de prévention et de gestion des déchets de la région
Provence-Alpes-Côte d?Azur a été approuvé le 26 juin 2019, puis intégré
au Schéma régional d?aménagement, de développement durable et
d?égalité des territoires et abrogé le 16 octobre 2021.
Le Schéma régional d?aménagement, de développement durable et
d?égalité des territoires de la région Provence-Alpes-Côte d?Azur a été
arrêté par le Préfet le 15 octobre 2019. Celui-ci comporte un volet
« planification régionale des déchets » qui est opposable à toutes les
décisions publiques prises en matière de déchets, d?autorisations
environnementales ou d?installations classées pour la protection de
l?environnement. Pour une localisation des équipements adaptée aux
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 203
contextes des collectivités, le Schéma régional d?aménagement, de
développement durable et d?égalité des territoires de la région Provence
Alpes-Côte d?Azur a fixé trois règles pour permettre aux acteurs
compétents en matière de prévention et de gestion des déchets de
spatialiser les besoins en équipements en fonction d?état des lieux
territoriaux et dans leurs documents d?urbanisme.
Conformément à l?article L1111-9 du Code général des collectivités
territoriales, la Région, en tant que chef de file dans les questions
environnementales, exerce pleinement son rôle de planificateur, de
coordinateur et d?animateur des projets structurants en matière de
prévention et de gestion des déchets. Cependant, outre la définition des
besoins en équipements par bassin de vie, une évaluation économique,
présentée lors de la phase d?enquête publique, mentionnait 700 M¤
d?investissements nécessaires pour atteindre les objectifs.
Aussi un transfert partiel ou total du « Fonds économie circulaire
», actuellement géré par l?ADEME, aux Régions est nécessaire afin de leur
permettre d?accompagner efficacement les projets sur le territoire et
mettre en oeuvre les objectifs de la planification.
En effet, il conviendrait que la Région puisse disposer de
l?autonomie d?emploi des crédits pour mettre en oeuvre la planification et
accompagner les territoires en adéquation avec les priorités soulignées
par la planification régionale. Par exemple, les critères actuels
d?intervention de l?ADEME ne permettent pas de soutenir des opérations
de mise aux normes réglementaires alors même que certaines régions sont
en retard sur le sujet. Or les délégations ne peuvent se faire que sur la base
des critères d?intervention de l?ADEME. La mise en place de critères
d?intervention régionalisés et adaptés aux besoins propres des territoires
semble nécessaire pour permettre de financer davantage les équipements
structurants et indispensables à la réalisation des objectifs régionaux et
nationaux.
En matière de planification de la gestion des déchets, expressément
prévue à l?article R541-16 du Code de l?environnement, la Région travaille
en étroite collaboration avec les services de l?État sur les dossiers de
demande d?autorisation environnementale en matière d?Installations de
stockage des déchets non dangereux et d?Unités de valorisation
énergétique. La Région formule des avis sur les dossiers de demande
d?autorisation environnementale au titre des collectivités intéressées par
le projet au regard des incidences environnementales. Ces avis arrivent
après l?enquête publique et servent aux services de l?État pour rédiger les
arrêtés préfectoraux. Le Code de l?environnement ne prévoit pas
explicitement une saisine de la Région au titre de sa compétence «
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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204 COUR DES COMPTES
planification » et en amont de l?enquête publique durant notamment la
phase d?instruction des dossiers par les services de l?État. Un
éclaircissement sur ce point permettrait de renforcer le rôle du
planificateur.
Par ailleurs, la Région propose une meilleure articulation entre le
Code général des collectivités territoriales (volet Schéma régional
d?aménagement, de développement durable et d?égalité des territoires) et
le Code de l?environnement (volet plan régional de prévention et de gestion
des déchets) pour assurer une meilleure lisibilité des obligations
législatives et réglementaires qui incombent aux Régions et aux EPCI.
Mes services se tiennent à votre disposition pour vous fournir des
informations plus détaillées sur les actions et travaux en cours.
MADAME LA MAIRE DE PARIS
Par courrier du 20 juillet dernier, vous m?avez transmis le rapport
public thématique intitulé Prévention, collecte et traitement des déchets :
une ambition à concrétiser.
Je souhaite vous apporter des précisions concernant l?encart
consacré à l?action de la Ville de Paris pour la collecte de déchets
organiques. La tonalité globale de cet encart peut en effet laisser à penser
que la Ville aurait revu ses ambitions à la baisse, notamment au regard du
rythme de déploiement de la collecte séparative en porte-à-porte.
Je tiens à souligner que la situation est toute autre, la Ville ayant au
contraire multiplié les vecteurs de collecte dans les immeubles et dans
l?espace public, afin de permettre à tous les Parisiens de trier leurs déchets
alimentaires, en maximiser la collecte et ainsi la valorisation.
Comme vous le savez, la Ville de Paris a ouvert le chemin en matière
de collecte séparative des déchets alimentaires et ce, plus de cinq ans avant
que la loi ne la rende obligatoire au 1er janvier 2024. La Ville collecte ainsi
en porte-à-porte 350 000 habitants des 2ème, 12ème et 19ème
arrondissements. Suite à l?arrêt de cette collecte pendant le premier
confinement, nous l?avons relancée à travers des actions de sensibilisation
et la distribution aux habitants de kits et de sacs leur permettant de trier
leurs déchets alimentaires.
Afin de répondre aux besoins et usages différents des habitants et
professionnels, nous déployons également différentes solutions de tri, dont
des bornes d?apport dit « volontaire ». Nous avons équipé la soixantaine
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 205
de marchés alimentaires de bacs dans lesquels les Parisiens peuvent
apporter leurs déchets alimentaires et tous les marchés seront équipés en
bacs fixes à partir de cette rentrée. En complément, sera ajouté un module
dédié aux déchets alimentaires aux stations Trilib?, qui étaient au nombre
de 340 au 1er septembre 2022 et seront 500 au terme de leur déploiement.
Nous avons aussi augmenté l?installation de bacs à composts (plus
de 1 000 à ce jour) et soutenons la mise en oeuvre de solutions innovantes
de compostage. Un appel à projet « compostage de proximité » a été lancé
l?été dernier et les premiers projets, dont certains semi-industriels, seront
cofinancés par la Ville. Nous avons enfin distribué plus de 5 600
lombricomposteurs.
Par ailleurs, la Ville collecte les déchets alimentaires d?une grande
partie des écoles et des restaurants administratifs parisiens. A partir de
2024, la totalité des restaurants, écoles, collèges et crèches sera collectée.
Entre 2020 et 2021, les déchets collectés ont ainsi connu une forte
augmentation de plus de 26 %.
La Ville poursuivra ses efforts pour déployer ces dispositifs jusqu?en
2024, date de l?obligation légale de tri à la source, dans le souci permanent
de proposer à tous les Parisiens et à proximité de chez eux, une solution
simple de tri de leurs déchets alimentaires, permettant une collecte efficace
au coût le plus maîtrisé possible. Le moment venu, nous pourrons partager
avec la Cour et nos homologues une évaluation précise de l?efficience des
différents modes de collecte.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU SYNDICAT MIXTE
DÉPARTEMENTAL EN CHARGE D'ÉTUDES
ET DU TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS
ET ASSIMILÉS DE LA VENDÉE (TRIVALIS)
Suite à la lecture du rapport public : « Prévention, collecte et
traitement des déchets Ménagers : une ambition à concrétiser », je
souhaite réagir en tant que Président de Trivalis, syndicat public de
traitement des déchets de la Vendée, qui couvre depuis 2003 l?ensemble du
territoire départemental pour une population DGF de plus de
800 000 habitants.
Je tiens d?abord à saluer votre initiative de rédiger ce rapport qui met
en avant la complexité de la gestion des déchets et l?importance de ce
service dans la vie quotidienne de nos concitoyens. Les déchets ont souvent
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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206 COUR DES COMPTES
été considérés à tort comme le « parent pauvre » de la transition
écologique.
Je souhaite malgré tout apporter des éléments complémentaires et des
précisions sur trois sujets particuliers évoqués dans votre rapport, et pour
lesquels Trivalis a parfois été cité.
Une stratégie nationale basée sur des objectifs de résultats
plutôt que de moyens
Vous évoquez dans le rapport,, la nécessité pour le traitement des
déchets de gagner en cohérence, en indiquant en préambule sur la partie
des biodéchets : « Les difficultés techniques, financières et sociales pour
parvenir à un meilleur tri et à une valorisation des biodéchets devront être
levées au cas par cas, en fonction des spécificités locales , aucune solution
n?apparaissant uniformément applicable, ce qui explique que le législateur
n?ait pas à ce jour préconisé une solution unique pour tous les territoires ».
Je vous rejoins parfaitement sur ce constat, que le territoire français
n?est pas uniforme et que le législateur ne devrait pas exclure ou
préconiser des moyens de traitement des déchets mais plutôt des objectifs
de résultats : respect de seuils, de qualité, objectif de collecte, des tonnages
maximum ou minimum?
Pour reprendre l?exemple des biodéchets (mais ce constat est hélas
extensible à d?autres matières), il ne faut pas penser que toutes les
collectivités ont attendu la loi AGEC pour s?intéresser aux biodéchets et
au tri à la source.
À titre d?exemple, depuis 2003, c?est plus de 160 000 composteurs
individuels qui ont été distribués aux ménages vendéens pour détourner la
matière fermentescible des ordures ménagères. Ce choix ancien de
détournement amont des biodéchets est une des raisons, avec la redevance
incitative (j?y reviendrai) et l?extension des consignes de tri dès 2017, qui
explique une baisse de 118 kg/an/hab d?Ordures Ménagères résiduelles
(OMr) en Vendée depuis 2003, en passant de 260 kg/an/hab. à 142
kg/an/hab. en 2021.
La collecte en porte à porte des biodéchets, promue fortement par le
ministère de la transition écologique, pourra s?effectuer peut-être
ponctuellement sur des territoires denses. En revanche, c?est une absurdité
économique et environnementale en zone rurale.
Il n?en demeure pas moins que malgré une politique forte de
détournement en amont de biodéchets par le compostage individuel, le
compostage collectif et la collecte en porte à porte sur certains secteurs, il
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 207
restera encore de l?organique dans les OMr, sans doute entre 20 % et 30
% si on se réfère à certains exemples allemands de villes qui ont mis en
place la collecte de biodéchets depuis plus 25 ans. C?est pour cette raison
que le choix du législateur que vous évoque, de remise en cause du tri-
mécano-biologique (TMB) n?est pas pertinente. Le Tri-Compostage est un
moyen complémentaire de la politique des biodéchets.
Le législateur a remis en cause un moyen, alors qu?il aurait dû fixer
un objectif de résultats. Il aurait été plus cohérent de définir des nouveaux
seuils de qualité pour valider un compost issu de Tri-Compostage.
Rappelons d?ailleurs que plus 95 % des composts de TMB produits en
France respectent très facilement à la NFU 44-051. C?est la même norme
imposée au compost de biodéchets.
Cette obligation de résultats aurait permis à des territoires ruraux de
développer une technique qui valide les obligations environnementales et
répond à une demande locale d?économie circulaire puisque la production
de compost de TMB est reprise intégralement par des agriculteurs locaux.
L?importance de la matière organique que vous citez dans votre
rapport, incite à trouver des solutions tous azimuts pour éviter qu?elle ne
se retrouve dans un trou ou dans un four. Au lieu d?opposer les moyens de
captation sans argumentation scientifique, le législateur devrait favoriser
la complémentarité des techniques afin de pallier la diminution drastique
de l?élevage qui génère donc moins de matière organique pour
l?agriculture. Cette situation est encore aggravée aujourd?hui par la
guerre en Ukraine et la crise énergétique qui limitent fortement la
production d?amendement pour les sols.
Tarification incitative, l?État doit soutenir les territoires
qui ont fait ce choix
Vous évoquez à juste raison l?importance de la tarification incitative
comme levier d?action sur la réduction des déchets. Dans le rapport vous
mettez en exergue la complexité de la tarification incitative qui ralentit sa
diffusion.
Également, vous soulignez que les espoirs de voir 15 millions
d?habitants concernés par la tarification incitative en 2020, puis 25
millions en 2025, ont été rapidement déçus puisque seulement 6 millions
d?habitants étaient concernés en France en 2019.
J?ai été surpris que la Vendée n?ait pas été citée en exemple dans votre
rapport, puisqu?en 2019, 60 % de la population vendéenne étaient à la
REOMI, et presque 75 % en 2023. Cela signifie que pour une population
INSEE de 685 642 habitants en 2019, donc environ 411 000 habitants à la
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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208 COUR DES COMPTES
REOMI, les vendéens représentaient 6,85 % des Français à la tarification
incitative, alors que le département ne pesait en 2019 que 1 % de la
population française.
Je pense donc, qu?au-delà de la complexité, une volonté politique forte
est nécessaire. Cette dernière peut être incitée et récompensée par un
bonus ou un dégrèvement qui viennent soutenir les collectivités qui
s?investissent dans cette direction.
Il pourrait y avoir par exemple une baisse de la TGAP ciblée sur les
territoires leaders en ce domaine. Cette orientation rejoint votre
recommandation n°6 en page 63.
L?implication dans l?économie circulaire est un risque assumé
qu?il faut défendre
Vous citez en page 102 de votre rapport l?exemple de Trivalis qui fait
évoluer un de ses TMB en ajoutant une unité de préparation de CSR. Vous
soulignez : « Ce procédé étant désormais proscrit (il s?agit du Tri
Compostage) pour produire du compost, les collectivités sont contraintes
de réorienter les flux de déchets vers la seule méthanisation et vers la
production de combustibles solides de récupération, sans certitude de
pouvoir rentabiliser les équipements associés à ce nouveau procédé de
valorisation ».
Je souhaite d?abord préciser que l?interdiction de la production de
compost par Tri-Compostage ne sera active qu?en 2027, si la loi AGEC
n?est pas modifiée. Par ailleurs, indiquer que les flux de déchets sont
réorientés vers la production de CSR est une erreur. Les flux concernés
par la production de CSR dans un TMB sont les refus primaires, donc les
flux qui n?étaient pas valorisés mais enfouis. La production de CSR
n?intervient donc pas sur la matière organique qui continue à être
valorisée en compost normé.
Il ne s?agit donc pas d?une réorientation de flux mais d?une nouvelle
valorisation de flux existant. Je rappelle que la fabrication de CSR a
comme finalité la fabrication d?un combustible, mais qu?au préalable va
être extrait de ces refus tout ce qui peut être « valorisé matière » : ferraille,
aluminium, certains plastiques?
Le choix de Trivalis d?une unité de préparation de CSR accolée à une
unité de Tri-Compostage d?OMr, est sans doute la meilleure chaine de
valorisation des déchets existante aujourd?hui en France, bien plus qu?un
incinérateur urbain ou l?enfouissement brut. C?est d?ailleurs pour cette
raison que l?on ne parle plus de TMB mais d?UVEOr pour Unité de
Valorisation Énergétique et Organique.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 209
Vous évoquez « l?incertitude de pouvoir rentabiliser les équipements
associés? », rappelons que ce choix cherche d?abord à respecter la loi.
D?abord la loi TEPCV de 2015 qui exige une valorisation énergétique
(donc CSR) de 70 % des déchets ultimes mis à l?enfouissement mais aussi
de la loi AGEC de 2020 qui fixe des objectifs de réduction de
l?enfouissement très importants dans des délais très courts.
Si la prévention comme vous le rappelez souvent dans le rapport est
un axe à développer fortement, et je vous rejoins parfaitement sur ce point,
il ne faut pas nier que ces changements de comportement s?effectueront
dans un temps long alors que le législateur a fixé des objectifs de réduction
ambitieux dans un temps court. En complément, je précise que les grands
principes de changement de comportement peuvent être balayés très
rapidement, comme lors de la pandémie de covid, où l?emballage sanitaire
est devenu la norme et qu?il a fallu que les équipements de traitement soient
en pleine capacité. La cohérence de la stratégie nationale, évoquée dans
le premier point, doit aussi s?inscrire dans une temporalité acceptable avec
la capacité de revoyure en fonction des situations de crise.
Le choix de la production de CSR en Vendée, avec ce facteur risque de
rentabilité que vous soulignez, s?inscrit aussi dans un principe d?économie
circulaire de territoire puisque l?objectif est que ce produit alimente une
chaudière industrielle de proximité dont l?enquête publique est en cours.
Cette nécessité de favoriser l?économie circulaire, soulignée à
plusieurs reprises dans votre rapport, implique le soutien des initiatives
locales en acceptant une part de risque. D?ailleurs, la rentabilité
financière de la gestion des déchets est un concept limité. Il s?agit plutôt
d?une maîtrise de l?évolution des coûts en améliorant la qualité
environnementale.
Pour conclure, je souhaite vraiment qu?il puisse exister au niveau
national une réelle stratégie de gestion et de valorisation des déchets. Cette
stratégie doit fixer des objectifs de résultats cohérents et scientifiques, sans
dogmatisme.
Les collectivités locales sous l?égide des plans régionaux ont la
capacité d?assurer de manière opérationnelle l?atteinte de ces objectifs,
mais avec une liberté d?adaptation des moyens en fonction de la
particularité des territoires. Je suis d?accord avec vous, sur la nécessité
que les collectivités se réunissent et massifient leurs actions pour atteindre
les objectifs. Certaines comme Trivalis, l?ont déjà effectué.
Il est indispensable que l?État soutiennent les collectivités qui
fournissent des efforts, celles qui se sont emparées des sujets en évoluant
vers le caractère incitatif du financement de la gestion des déchets, celles
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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210 COUR DES COMPTES
qui évoluent vers une économie circulaire concrète et anticipent des choix
de prévention et de meilleure valorisation matière.
Enfin, la situation actuelle de crise des matières premières et de
l?énergie, doit être un accélérateur pour faire de nos déchets des
ressources. De nombreuses initiatives locales et publiques vont dans ce
sens, il est nécessaire de faciliter leur développement.
À ce titre une vigilance particulière devra être portée sur le
développement massif des REP. Il ne faudrait pas que l?intention bénéfique
du principe de pollueur payeur masque un dessaisissement du service
public des déchets et une réorientation des recettes uniquement vers les
entreprises privées gestionnaires des REP.
En espérant avoir contribué à l?éclairage de certains aspects du
rapport et instauré une vision plus positive des évolutions à venir, je vous
prie d?agréer, Monsieur le Premier Président, l?expression de ma haute
considération.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE L?ASSOCIATION AMORCE
A propos d?AMORCE
Rassemblant plus de 1000 adhérents pour plus de 60 millions
d?habitants représentés, AMORCE constitue le premier réseau français
d?information, de partage d?expériences et d?accompagnement des
collectivités (communes, intercommunalités, conseils départementaux,
conseils régionaux) et autres acteurs locaux (entreprises, associations,
fédérations professionnelles) en matière de politiques Énergie-Climat des
territoires (maîtrise de l?énergie, lutte contre la précarité énergétique,
production d?énergie décentralisée, distribution d?énergie, planification),
de gestion territoriale des déchets (planification, prévention, collecte,
valorisation, traitement des déchets) et de gestion de l?eau.
Objet de la consultation
Une nouvelle enquête de la Cour des Comptes intitulée? Prévention,
collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser?
a abouti à la production d?un projet rapport public thématique soumis à
l?avis d?AMORCE avant publication définitive. Cette enquête intervient 10
ans après le précédent rapport thématique de septembre 2011, complété
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 211
par un rapport de suivi inséré au rapport public annuel de 2014 de la Cour
des Comptes intitulé ?La gestion des déchets ménagers, des progrès
inégaux au regard des enjeux environnementaux?. Des travaux avaient été
également consacrés aux éco-organismes insérés aux rapports publics
annuels de 2016 (Les éco-organismes : un dispositif original à consolider)
et 2020 (Les éco-organismes : une performance à confirmer, une
régulation à renforcer) de la Cour des Comptes. Ce nouveau rapport est
basé sur 51 contrôles des Cours Régionales des Comptes et des échanges
avec les administrations centrales, l?ADEME, CITEO, l?AMF, ELIPSO, la
FNADE, UFC que Choisir, Zéro Waste France et AMORCE lors de 2
auditions en 2022.
Avis d?AMORCE validé lors du Conseil d?Administration du
7 Septembre 2022.
Le rapport pointe le retard pris par la France dans l?atteinte des
objectifs nationaux et européens et formule des recommandations pour
améliorer l?organisation et le financement de la gestion des déchets. Pour
AMORCE, il ressort au premier plan une absence criante de
l?accompagnement de l?État en matière de gestion des déchets, qui ne joue
notamment pas son rôle de régulateur auprès des éco-organismes pour
mieux affecter les soutiens perçus auprès des metteurs sur le marché vers
les collectivités. In fine, le citoyen se retrouve toujours à devoir supporter
une grande partie du coût de gestion des déchets.
Au niveau de la comparaison des performances européennes, les
calculs ne sont pas homogènes d'un pays à l'autre car l?Europe ne disposait
pas, avant la Directive déchets de 2018, d?une méthode de mesure
uniforme. Chaque pays proposait des méthodes de calcul qui lui sont
propres : par exemple, dans le domaine du tri des emballages ménagers,
la France ne comptabilise comme recyclé que les matières effectivement
remises sur le marché, déduction faite des refus de tri, alors que
l?Allemagne comptabilise tous les tonnages entrant en centre de tri soit un
écart dans les comptes de 17% en faveur de cette dernière à tonnages
entrants égaux. Une tentative, non encore aboutie, d?harmonisation des
calculs réalisée par un groupe d?experts au niveau Européen montre que
la France se situe effectivement plutôt dans la moyenne des pays
Européens. A noter que, malgré les travaux de refonte de l?observatoire
national de suivi des déchets piloté par l?ADEME et entamés depuis près
de 2 ans, les collectivités ne disposent toujours pas de la méthode officielle
de calcul de l?objectif de préparation ou recyclage des déchets introduit
par l?Ordonnance n° 2020-920 du 29 juillet 2020 et nécessaire au pilotage
du SPGD (indicateur européen également).
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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212 COUR DES COMPTES
Il est par ailleurs mis en avant que ni la programmation nationale,
ni les PRPGD (insuffisamment précis et contraignants sur les
investissements), ni les PLPDMA ne sont à la hauteur des défis à relever :
il est proposé dans le rapport d?améliorer la planification par une
unification de la programmation nationale et l?adoption d'un programme
de mise en oeuvre spécifique par EPCI. AMORCE partage le même
constat : le planificateur ne met pas en place les moyens de ses objectifs,
avec les mêmes objectifs et la même échéance. Les régions doivent jouer
pleinement leur rôle de planificateur, d'animateur voir de financeur (pour
surmonter effectivement les difficultés d'amortissement) pour garantir la
mise en oeuvre des objectifs et une répartition territoriale cohérente des
équipements structurants. Pour aller plus loin dans la démarche jusqu?à
l?échelon territorial, AMORCE préconise de décliner les objectifs et
actions pour les atteindre dans un plan intercommunal, avec un dialogue
équilibré intercommunalités - régions. Il semble par ailleurs nécessaire de
réfléchir à un financement en permettant que les régions perçoivent une
part de la recette de TGAP et puissent établir un dispositif d'aide adapté
qui correspond à l'application du PRPGD. Le simple transfert d?une partie
du fonds Économie Circulaire vers les régions ne permet en effet pas aux
régions de piloter ce fonds en fonction des priorités identifiées au PRPGD.
La création d?une composante locale de la TGAP (défalquée du montant
de la TGAP nationale) permettrait également de donner des moyens
financiers aux territoires en charge du SPGD.
Pour le dispositif de suivi des plans à améliorer avec des indicateurs
annuels pertinents et synthétiques, le rapport préconise de publier d?ici
2024 un tableau de bord annuel du SPGD à l?échelle nationale produits
par les observatoires régionaux à partir de comptes-rendus simplifiés et
par type d'EPCI avec 6 indicateurs clés, complété par un tableau de bord
des filières REP selon le même principe et par chaque éco-organisme
regroupant les principales données utiles. AMORCE est favorable à des
indicateurs de pilotage pertinents et communs à l?ensemble des échelons -
à définir conjointement avec les acteurs du déchets - mais qui doivent
comporter des indicateurs amont en lien avec les mises sur le marché. A
noter que le travail de refonte de l?Observatoire des déchets cité ci-avant
piloté par l?ADEME n?a pas abouti pour l?instant (en tout cas non transmis
aux parties prenantes) à une meilleure visibilité sur les indicateurs
pertinents à retenir ni pour le moment à la définition d?une méthode
harmonisée de calcul des indicateurs nationaux manquants. Le rapport de
la Cour des Comptes envisage également de simplifier le rapport annuel
sur le prix et la qualité du SPGD d?ici 2024 autour de ces 6 indicateurs
associés aux coûts de gestion des déchets à l'habitant : AMORCE y est
favorable.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 213
Au niveau du retard pris en matière de prévention des déchets, pour
AMORCE la responsabilité en revient principalement aux metteurs sur le
marché qui n'ont pas respecté les objectifs fixés par l'État. En effet, à
l'exception du compostage de proximité qui dépend d'une politique
ambitieuse de tri source des biodéchets (cf. point ci-après), les actions de
prévention d'une collectivité sont nécessaires mais impactent peu la baisse
des tonnages. Elles dépendent davantage des évolutions de consommation
et des metteurs sur le marché qu'il s'agirait pour AMORCE de contraindre
davantage. La Cour des comptes propose par ailleurs de rendre
obligatoire, quand le PLPDMA est élaboré par un syndicat de traitement,
une déclinaison territoriale.
Quant au financement complexe de la gestion des déchets dont en
particulier la recommandation de la Cour des Comptes de favoriser la
tarification incitative en allégeant son coût pour les EPCI grâce à un
financement complémentaire porté à 80% des coûts sur les premiers
exercices, Il faut pour AMORCE se poser en réalité deux questions :
? Quel type de signal prix ou autre forme d?incitation ou de dissuasion
financière ou fiscal faut-il développer et sur quel acteur, pour que les
citoyens contribuent davantage par leur comportement d?achat,
d?utilisation, de réparation, de tri au respect des objectifs de
prévention, de réemploi, de collecte sélective et de tri à la source, de
recyclage et de valorisation des déchets ménagers et assimilés ? Cela
impose inéluctablement d?évaluer l?efficacité de signaux prix portant sur
le prix du produit, la fiscalité locale des déchets, la fiscalité nationale de
la gestion des déchets. La réflexion sur les mesures et dispositifs
incitatifs en faveur de la réduction des déchets ne doit pas porter
uniquement sur les usagers du service public mais sur l?ensemble des
acteurs qui peuvent favoriser l?action des citoyens en faveur des
objectifs de la France en matière d?économie circulaire (prévention-
réutilisation, recyclage, réduction de l?enfouissement), à chaque étape
du cycle de vie d?un produit (de sa conception, son achat, son utilisation
et sa fin de vie) :
? Le citoyen consommateur : qui doit être informé et incité dans ses
actes de consommation avec des mesures portant sur la taxation
amont (REP généralisée), la TVA, des logiques de bonus/malus et
leur information grand public dans le cadre des filières REP.
? Le citoyen usager du service public : qui doit comprendre en tant
qu?utilisateur du SPGD l?impact de son geste de tri sur les coûts et
être intéressé à la prévention et au tri la source efficace de ses
déchets avec des mesures incitatives. Cette seule approche permet
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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214 COUR DES COMPTES
d'améliorer le geste de tri mais ne modifie pas les habitudes de
consommation. Il est donc nécessaire d'agir sur toute la chaîne.
? Le citoyen contribuable : qui, en tant que financeur d?une partie des
services, doit appréhender le coût de la gestion des déchets et son
mode de financement avec des mesures portant sur l?affichage, la
compréhension et la lisibilité des taxes TGAP/TVA, des recettes et
de la fiscalité locale (TEOM, REOM).
? Comment doit se répartir le financement de la gestion de la gestion des
déchets ou plus largement la boucle d?économie circulaire au regard
des responsabilités de chacun des acteurs de la chaîne d?économie
circulaire (collectivités via la fiscalité locale, metteurs sur le marché
via les REP, acteurs économiques du recyclage et de la valorisation via
les prix de reprise et recette de valorisation, État via les aides de
l?ADEME issues des recettes de TGAP (bien que non affectées) ? À
noter que la TGAP doit être revue dans sa trajectoire pour qu'elle soit
incitative (aujourd'hui sa trajectoire ne permet pas les investissements
des collectivités pourtant nécessaires). Il s?agit par ailleurs, d?une
fiscalité écologique dont le principe même est d?inciter à la prévention
des déchets, au recyclage et à la limitation de l?élimination. Il est donc
nécessaire de la rendre incitative. Sur ce sujet, AMORCE défend depuis
de nombreuses années des évolutions de cette fiscalité (minoration du
montant pour les collectivités performantes, franchise de TGAP sur le
gisement sur lequel les collectivités ne peuvent agir...).
Sur la proposition d?instaurer une surtaxe à la taxe de séjour avec
produit affecté aux actions de prévention et gestion déchets : cette mesure
est intéressante mais si elle est clairement insuffisante
pour AMORCE. Une plus grande réflexion sur le financement et sa
dimension locale devrait être menée (notamment TGAP localisée).
Le tri à la source des biodéchets est souligné comme étant à juste
titre un enjeu majeur pour les territoires. Cependant, au regard du retard
de déploiement pris au niveau national, AMORCE préconise de modifier
la date de mise en oeuvre de l?obligation de sorte à ce que la date butoir du
31 décembre 2023 ne soit plus une obligation de généralisation mais une
obligation d?étude de faisabilité sous peine de ne plus pouvoir bénéficier
des aides de l?ADEME à échéance de l?obligation de tri à la source des
biodéchets prévu au 31 décembre 2023 et qui serait alors reportée au 31
décembre 2025. AMORCE demande également un renforcement du
dispositif financier pour garantir l'absence de surcoûts à la collectivité (cf.
études ADEME et FNADE/CME) et accélérer le déploiement dans des
conditions financières acceptables. Le nouveau système de financement et
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 215
d?aides pour l'accélération du développement du tri à la source des
biodéchets peut s?appuyer sur les propositions suivantes :
- Affecter jusqu?en 2025, la totalité des recettes de la TGAP afin
d?augmenter de 300 millions d?euros le fonds Économie Circulaire en
particulier au profit des solutions de tri à la source des biodéchets,
permettant d?assurer une aide de 90% pour les études de faisabilité et
de 100% sur les investissements de compostage de proximité (dont
compostage individuel non soutenu actuellement), de pré-collecte, de
collecte et de valorisation des biodéchets jusqu?au 31 décembre 2025,
permettant de compenser les surcoûts,
- Introduire une modulation de TGAP de 30 euros la tonne éliminée
d?OMR (soit environ 10 euros par habitant) pour les collectivités qui
ont mis en place le tri à la source des biodéchets,
- Permettre l?application d?un taux de TVA réduit aux matières
fermentescibles d?origine résiduaire,
- Créer un système de bonus à l?usage de matières fertilisantes issues
des biodéchets dans les sols ou instaurer des quotas à l?usage
d?engrais chimiques pour les producteurs de denrées et produits
alimentaires bruts (céréales, légumes, fruits) à hauteur des parts de
marchés des produits agro-alimentaires,
AMORCE demande également une modification du cadre
réglementaire pour :
- Revoir la réglementation sur les conditions de traitement et
l?interdiction de mélanger des biodéchets avec d?autres déchets
n?ayant pas fait l?objet d?un même tri,
- Clarifier de manière opérationnelle les conditions de limitations de la
fraction organique des déchets dans les ordures ménagères
résiduelles à éliminer.
Au niveau des matières revendues aux filières de recyclage qui se
diversifient et subissent de fortes variations de cours, la Cour des Comptes
préconise que les collectivités volontaires puissent choisir de confier cette
mission commerciale aux éco-organismes, sous condition de suivi
rigoureux des obligations qui leur sont fixées dans les cahiers des charges.
AMORCE s?oppose au choix de confier la revente de matières
commerciales aux éco-organismes car les REP financent déjà mal les
collectivités locales alors qu'elles essaient de reprendre la main sur les
matériaux qui ont plus de valeur. Les collectivités ont besoin de ces
reventes matières pour compenser le manque de soutien des éco-
organismes. La seule condition acceptable du transfert de la revente
matière serait un financement à plus de 80% des coûts par la REP.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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216 COUR DES COMPTES
Enfin au niveau des enjeux industriels prioritaires qui doivent être
mieux intégrés au plan national :
? sur le volet de la plasturgie, avec les difficultés de traitement des
plastiques dues à leur diversité et la cible de généralisation de l?ECT fin
2022 qui n?est pas atteinte : AMORCE appelle à ne pas se focaliser que
sur les emballages ménagers qui représentent 1MT sur 4MT de
plastiques mais sur l?ensemble des plastiques (4MT) et à réaliser un
inventaire des résines et des installations capables de les traiter.
? sur la place de la valorisation énergétique des déchets : pour AMORCE
elle doit être réaffirmée, dans le respect de la hiérarchie des modes de
traitement, en tant source d?énergie renouvelable produite localement et
issue de déchets non recyclables constituant un potentiel de valeur qui
mérite d?être mieux exploité. Elle participe à l?autonomie de la France
sur le plan énergétique.
En résumé pour AMORCE il s?agit donc avant tout de :
? Renforcer l?efficacité de la planification écologique et rééquilibrer le
financement de la gestion des déchets.
? Réaffirmer la nécessité de faire évoluer et de renforcer les outils de
planification de l?État et des collectivités en faveur de l?atteinte des
objectifs nationaux en unifiant les objectifs et les échéances ainsi que les
indicateurs de suivi communs et en adoptant un programme de mise en
oeuvre spécifique par EPCI pour dialoguer avec les PRPGD.
? Demander une affectation financière plus efficace pour mettre en oeuvre
la planification territoriale avec un signal prix fort en amont au niveau
des metteurs sur le marché impactant les habitudes de consommation,
au niveau intermédiaire avec les modulations des filières REP et la
tarification incitative appliquée aux usagers et en aval via la TGAP,
pour la rendre plus incitative (minoration à la performance des
collectivités) et pour redistribuer son produit en faveur
d?investissements pour la transition écologique dans les territoires.
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Sommaire
Procédures et méthodes
Synthèse
Récapitulatif des recommandations
Introduction
Chapitre I Une réduction des déchets contrariée par un pilotage insuffisant
I - Le volume élevé de déchets produits
II - Des acteurs insuffisamment coordonnés
III - Un dispositif de suivi toujours défaillant
IV - Un financement peu lisible et trop faiblement incitatif
Chapitre II Le dispositif opérationnel : une transformation à accélérer vers l?économie circulaire
I - La prévention : priorité officielle, mais parent pauvre de la gestion des déchets
II - La collecte : peu de progrès sur les enjeux prioritaires
III - Le traitement : une coûteuse modernisation à entreprendre
Conclusion générale
Liste des abréviations
Annexes
Annexe n° 1 : présentation de l?échantillon des contrôles réalisés par la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC)
Annexe n° 2 : le suivi des recommandations des juridictions financières sur les déchets ménagers
Annexe n° 3 : les Plans Régionaux de Prévention et de Gestion des Déchets (PRPGD
Annexe n° 4 : les indicateurs internationaux
Annexe n° 5 : les indicateurs du service public des déchets
Annexe n° 6 : les indicateurs des filières à responsabilité élargie du producteur (REP)
Annexe n° 7 : comparaisons internationales
Annexe n° 8 : les déchets en matière plastique
Annexe n° 9 : comparatif entre les différentes modalités de financement du service public
Annexe n° 10 : les conséquences de la crise sanitaire sur la gestion des déchets
Réponses des administrations et des organismes concernés
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https://ree.developpement-durable.gouv.fr/themes/economie-verte/depenses-pour-l-environnement/depenses-par-domaines/article/la-depense-de-gestion-des-dechets
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https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/environnement
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Graphique n° 9 : évolution des dépenses totales
de gestion des déchets
Source : Cour des comptes d?après chiffres clés de l?Ademe 2020.
Dépenses en euros courants. Le processus de collecte et de compilation de données applicable ne
permet à l?Ademe de publier dans ses chiffres clés de l?année N qu?une synthèse basée sur les
chiffres N-4 (voir infra à propos du dispositif inadapté de suivi des objectifs)
Comme indiqué dans le graphique ci-dessus, l?ensemble des
dépenses du SPGD coûte en moyenne 124 ¤ TTC (117 ¤ HT) par habitant.
Les charges de traitement représentant 47 ¤ (38 % du coût HT) et les
charges de collecte 49 ¤ (39 %).
Coté produits, la vente des matières issues du tri, du recyclage et, plus
largement, du traitement des DMA (vente d?énergie après incinération,
compost?) représente 9 ¤ (7 % des produits). Les aides apportées par les éco-
organismes dans le cadre de la responsabilité élargie du producteur (filières
REP) représentent 13 ¤ (10 % des produits). Les subventions (notamment
celles de l?Ademe) constituent une recette marginale (2 ¤). Ces trois types de
produits permettent de déterminer le reste à charge pour la collectivité
gestionnaire du service (dit « coût aidé »). Ce coût « aidé » est de 92,50 euros
HT par habitant et par an85. Il est financé par une contribution des ménages de
106 ¤ en moyenne (81,5 %) sous forme d?une fiscalité locale affectée ou d?une
redevance (TEOM/REOM)86 ou indirectement (financement intégral ou
partiel) par le budget général de la collectivité gestionnaire.
Les produits (130 ¤ par habitant) financent donc les charges à
hauteur de 105 %.
85 « Référentiel national des coûts du service public de prévention et de gestion des
déchets ménagers et assimiles 2016 » et mise à jour 2019.
86 La TEOM représente de loin la première modalité de financement du SGPD (81 %
des produits perçus), contre 8 % pour la REOM. Pour une présentation détaillée des
modalités de financement du SGPD, voir plus loin la partie sur le financement.
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https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/587-referentiel-national-des-couts-du-service-public-de-prevention-et-de-gestion-des-dechets.html
https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/587-referentiel-national-des-couts-du-service-public-de-prevention-et-de-gestion-des-dechets.html
https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/575-referentiel-national-des-couts-du-service-public-de-prevention-et-de-gestion-des-dechets-synthese-9791029714450.html
COUR DES COMPTES
46
Graphique n° 10 : répartition des coûts de gestion des déchets
et de leurs financements (SPGPD)87
Source : Cour des comptes, d?après Ademe référentiel des coûts du SPGPD 2019 (chiffres 2016)
Le taux moyen de couverture des charges par les produits est de 105 % : cet excédent des produits sur
les charges correspond principalement à la constitution de provisions pour de futurs investissements
Plus de la moitié des coûts financés par les ménages au travers de la
fiscalité locale (53,1 ¤, soit 57 %) sert à couvrir la prise en charge des
OMR. La réduction de leur volume par des actions sur la prévention, le tri,
la collecte et le traitement est donc favorable non seulement à
l?environnement mais également à la maîtrise des coûts.
87 Produits industriels : ventes de matériaux et d?énergie, prestations à des tiers,
Soutien : versement des éco-organismes (filières à responsabilité élargie du
producteur/REP), aides : subventions publiques (Ademe notamment).
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B - Des modalités de financement complexes
1 - Un financement national marqué par l?augmentation
de la TGAP
Le précédent rapport de la Cour sur le SPGD en 2011 notait déjà le
caractère complexe et inadapté des modes de financement qui n?intégraient
guère l?équité sociale, très peu le coût réel du service et surtout
marginalement le caractère incitatif (principe du pollueur-payeur).
Dix ans après et malgré les recommandations pour améliorer la
situation et l?adoption de plusieurs lois, la situation décrite reste largement
inchangée.
La seule évolution financière marquante est, au niveau national, la
forte augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP),
ressource fiscale pour l?État, qui continuera d?augmenter encore jusqu?en
2025, permettant à la France de rejoindre les pays qui pratiquent depuis
longtemps cette politique fiscale efficace pour réduire la mise en décharge
et l?incinération. Elle doit inciter les EPCI à privilégier la prévention et
accentuer les efforts pour réduire les tonnages d?OMR en utilisant un
signal-prix88.
La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) :
une incitation financière à la réduction des tonnages enfouis
et incinérés
La TGAP a été instituée par la loi de finances 1999 et a vocation à
modifier les comportements et à réduire le volume des déchets non recyclés.
Elle est entrée en vigueur le 1er janvier 2000 avec l?objectif d?appliquer le
principe pollueur-payeur et de lever des fonds afin de financer les politiques
environnementales. Cette taxe s?applique à chaque tonne d?ordures
ménagères ou de tout-venant entrant en centre de stockage ou
d?incinération. Elle est due par l?exploitant de l?installation de traitement et
finalement assumée par les EPCI en charge de la compétence. Sa croissance
a une incidence sur le coût total du service à financer.
88 La méthode du signal-prix, appliquée à la politique des déchets consiste à refléter dans le
prix des produits et des services le coût de leur impact sur l'environnement en pénalisant les
méthodes de traitement les moins vertueuses (incinération et enfouissement).
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Pour favoriser l'atteinte des objectifs de réduction des déchets et
d'augmentation de la valorisation, fixés par la loi de transition énergétique
(LTECV), les lois de finances pour 2016 et 2019 ont accentué le rôle
incitatif de la TGAP. Le taux de la TGAP passera progressivement à 65 ¤
par tonne enfouie en 202589. Une évolution similaire mais moins
importante90 s?applique aux tonnages incinérés, conformément à la
hiérarchie des modes de traitement.
Cette hausse uniforme a l?inconvénient de frapper indistinctement
les déchets qui pourraient être mieux triés grâce à l?intervention des
collectivités et les déchets non recyclables du fait des choix techniques des
entreprises sur les volumes desquels les collectivités ne disposent d?aucun
moyen d?action.
2 - Le renforcement de la responsabilité élargie des producteurs
En application du principe pollueur-payeur, la responsabilité élargie
des producteurs (REP) met à contribution les producteurs pour assurer, au
moins en partie, la gestion des déchets issus de leurs produits. Plus
précisément, l?obligation est faite aux fabricants et importateurs concernés
soit de les prendre en charge eux-mêmes, soit de confier cette prise en
charge à un éco-organisme en lui versant une écocontribution91.
La France s?appuie ainsi sur une vingtaine de filières REP, dont plus
de la moitié concernent des produits du quotidien, susceptibles de grossir le
gisement des déchets municipaux : emballages ménagers et papiers
graphiques, piles et accumulateurs portables, déchets d?équipements
électriques et électroniques, textiles, linges et chaussures. Elles couvrent un
plus large spectre que dans les autres pays de l?UE et cette couverture est en
augmentation92. Des produits, y compris ceux qui produisent des volumes
89 La TGAP est fixée à 37 ¤ par tonne enfouie en 2021 dans les installations de stockage
de déchets non dangereux réalisant une valorisation énergétique de plus de 75 %.
90 La TGAP pour les incinérateurs conformes à la norme internationale ISO 50001
passera de 17 ¤ en 2021 à 25 ¤ en 2025.
91 Les éco-organismes sont des personnes morales de droit privé, à but non lucratif,
pouvant prendre des formes juridiques variées : sociétés par actions simplifiées, sociétés
agréées par l?État (Ademe).
92 La loi AGEC a ajouté une dizaine de filières en 2022 : jouets, articles de bricolage
et jardin, sports et loisirs de l?autre, produits et matériaux du secteur de la construction
et du bâtiment (opérationnelle à compter du 1er janvier 2023). La filière des lingettes
doit être créée au 1er janvier 2024. La création d?une REP pour tous types d?emballages
est prévue au 31décembre 2024.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
49
significatifs de déchets (couches et litières par exemples), ne sont pas encore
rattachés à une filière REP. Les contributions perçues par les éco-organismes
en 2019 étaient de 1,464 Md¤ (+ 200 M¤ par rapport à 201793). Les éco-
organismes utilisent ces contributions en partie pour prendre en charge
directement des coûts de collecte et de traitement (508 M¤ en 2017) et en
partie pour participer au financement du service public de gestion des déchets
(805 M¤ de soutiens financiers versés aux collectivités locales, dont plus de
80 % versés par l?éco-organisme Citéo au titre des emballages ménagers)94.
3 - Un financement du SPGD marqué par la diversité des recettes
et la prédominance de la TEOM
Une fois déduites les ventes des produits issus du traitement et les
aides des éco-organismes et de l?État, le financement du reste à charge (dit
« coût aidé »), relève quasi-exclusivement au plan local de décisions des
EPCI à fiscalité propre95, y compris à travers leur participation à un
syndicat mixte.
a) Les différentes fiscalités affectées
Comme le prévoit le code général des impôts96, les EPCI peuvent
instituer une fiscalité affectée « à pourvoir aux dépenses du service de
collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés ». Modalité
dominante de financement du SPGD par les usagers, la taxe d?enlèvement
des ordures ménagères (TEOM) présente, en plus de sa simplicité
d?application et de sa garantie de rendement appréciable pour les
collectivités, un avantage redistributif de par la nature de sa base
d?imposition.
93 La principale filière est la filière emballages ménagers avec 708,7 M¤ en 2019, suivie
de la filière DEEE (déchets d?équipements électriques et électroniques) avec 188 M¤
puis celle des papiers graphiques avec 95,8 M¤.
94 On distingue ainsi les éco-organismes « opérationnels ». Articles L. 541-10 à L. 541-
15-2 du code de l?environnement qui prennent en charge directement les déchets des
entreprises de leur secteur (p. ex. piles électriques) et qui représentent 40 % de la prise
en charge des DMA et les éco-organismes financeurs qui reversent aux collectivités
locales les contributions (p. ex. emballages). Les éco-organismes mixtes (p. ex.
ameublement) financent la collecte par les collectivités mais assurent le traitement.
95 Communautés de communes, communautés d?agglomération, communautés urbaines
et métropoles.
96 Article 1520 du code général des impôts.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037986339/
COUR DES COMPTES
50
La base de la TEOM, commune avec la taxe foncière sur les
propriétés bâties est la valeur locative foncière, qui permet de prendre en
compte la valeur du patrimoine foncier imposé97. À titre d?exemple, une
personne seule habitant une habitation individuelle vaste verra son
imposition à la TEOM plus élevée qu?une famille de six personnes
occupant un appartement exigu, du fait de la valeur locative foncière des
habitations respectives. Si cette situation peut paraître partiellement
contestable du fait de l?inadéquation entre le montant de l?imposition et la
quantité de déchets produite, elle présente un certain avantage social98. La
TEOM permet aussi l?imposition de surfaces commerciales (par exemple
la grande distribution) qui génèrent indirectement des quantités
importantes de déchets (notamment les emballages même si les grandes
surfaces n?utilisent pas les prestations du SPGD). Une tarification
incitative peut être adossée à la TEOM (TEOMi).
À la place de la TEOM, l?EPCI peut instituer la redevance
d?enlèvement des ordures ménagères (REOM) versée par l?usager comme
contrepartie directe de la prestation et souvent liée à la composition de la
famille de l?usager (nombre de personnes dans le foyer). Cette redevance
dite « classique » ne reflète pas la quantité réellement produite et les efforts
de réduction des déchets réalisés par l?usager.
Le montant de la REOM peut aussi se fonder sur le volume et le
nombre de présentation des bacs à la collecte (ce qui implique
l?identification des bacs par la benne à ordures ménagères), voire le poids
des déchets par la mise en place d?une pesée embarquée. Dans ce cas, elle
est qualifiée de redevance incitative (RI ou REOMI).
97 La Cour des comptes indiquait, dans son rapport public annuel de 2009, que « le
processus d'établissement des bases cadastrales par la DGFIP est d'une grande
opacité : il est à la fois exagérément complexe, fragile, et d'un coût mal cerné. En outre,
l'absence de révision générale des bases depuis 1970, combinée à une mise en oeuvre
trop restreinte des procédures d'actualisation par les services fiscaux, dans le cadre du
droit existant, produit une situation obsolète et inéquitable ».
98 L?absence d?actualisation des valeurs locatives foncières vient toutefois limiter cet
effet social favorable.
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51
La redevance spéciale (RS) : une tentative non aboutie
de financement dédié des déchets non ménagers
La redevance spéciale (RS) désormais facultative permet de facturer
le coût de la collecte et du traitement des déchets dits « assimilés » aux
ordures ménagères (produits par certaines activités économiques :
commerces, PME, restauration, etc. et estimés par l?ADEME à 20 % de
l?ensemble des DMA).
Elle a été instaurée pour éviter de faire payer aux ménages
l?élimination des déchets non ménagers. Sa mise en place très aléatoire et
limitée a conduit à l?abandon du caractère obligatoire qui lui avait été
conféré en 1993, alors que la Cour recommandait en 2011 d?imposer sa
généralisation. Quand elle est instaurée, les recettes de RS sont souvent
restreintes et ne représentent qu?une part très marginale du financement du
service public (exemple de la CA de Bastia).
L?échec de la généralisation de la RS montre la difficulté de distinguer
l?origine des flux de déchets et au sein des DMA les déchets ménagers des
déchets assimilés. Les EPCI sont le plus souvent dans l?incapacité de fournir
ces données qui permettraient un financement différencié.
Cette situation conduit à un report exclusif de la charge du
financement du SPGD vers l?usager habitant.
b) La combinaison de la fiscalité affectée et du budget général
Les collectivités peuvent choisir différentes modalités pour assurer le
financement du reste à charge par l?usager du service public : TEOM, Budget
général, RS, REOM, REOMi ou TEOMi (cf. annexe n° 9). Les modes de
financement retenus sont donc très variés, souvent complexes, mixant
TEOM et participation du budget principal, parfois avec une part de taxe sur
le foncier bâti explicitement dédiée. En raison de ses avantages et malgré ses
inconvénients, la TEOM reste toutefois très largement majoritaire.
La combinaison des modalités de financement est soumise à
plusieurs règles d?incompatibilités juridiques. Ainsi, par exemple, le choix
du financement du reste à charge par la REOM induit la qualification de
service public industriel et commercial (SPIC), l?obligation d?un budget
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COUR DES COMPTES
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annexe dédié et son équilibre par des recettes propres sans recours à une
participation du budget principal99.
La fiscalité affectée instituée par les EPCI doit pourvoir à la gestion
des DMA et non à d?autres dépenses de la collectivité. Le juge
administratif rappelle constamment cette interdiction du suréquilibre100
lorsque le produit de la TEOM est nettement supérieur101 aux dépenses
consacrées au SPGD.
Afin de définir les conditions de financement du SPGD sans
suréquilibre, il est essentiel de connaître le périmètre des dépenses à
prendre en compte. Comme le regrettait déjà le rapport des juridictions
financières en 2011, ce périmètre n?est connu qu?imparfaitement par une
construction jurisprudentielle inachevée. Le juge a ainsi exclu des charges
du SPGD le ramassage des corbeilles de propreté et les déchets des marchés
alimentaires et forains.
C - Une fiscalité incitative à développer
1 - Une fiscalité incitative devenue prioritaire
en raison de ses atouts
L?objectif de baisse des quantités collectées de DMA102 et le
surenchérissement de la TGAP qui pénalise de plus en plus fortement
l?incinération et l?enfouissement conduisent à privilégier une incitation
financière des usagers pour réduire leurs déchets.
La France était, en 2011, très en retard dans la mise en place d?une
tarification incitative en comparaison de plusieurs pays (graphique n°1) et
sa progression très lente depuis cette date ne lui a pas permis de le rattraper.
Le caractère incitatif de la tarification est mis en avant par la
LTECV103 comme un des leviers permettant d?atteindre les objectifs de
réduction des volumes de déchets en envoyant un « signal prix » à l?usager
99 Dans un délai de quatre ans suivant l?instauration de la REOM
100 La situation de suréquilibre consiste à lever une fiscalité (TEOM) d?un montant
supérieur au coût net (en enlevant les autres recettes : ventes de produits, recettes ces
éco organismes et subventions) du service pour la collectivité.
101 Le niveau du surfinancement acceptable a varié mais semble s?établir selon les
dernières jurisprudences à 115 % au maximum de couverture des dépenses.
102 Art. L. 541-1 1° du code de l?environnement - 10 % en 2020 / 2010 et - 15 % en 2030 / 2010
103 10° de L. 141-1 code de l?environnement.
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53
et en liant le prix qu?il paie au coût réel du service et à la quantité d?ordures
ménagères résiduelles qu?il produit.
L?efficacité dans ce domaine de la tarification incitative est
confirmée par plusieurs études récentes104. En moyenne, la mise en place
de la tarification incitative permet de réduire de 41 % la quantité d?OMR,
d?augmenter à due concurrence la collecte des recyclables et de réduire de
8 % les DMA. La relation forte entre la performance des EPCI et la mise
en place d?une fiscalité incitative est ainsi établie, en France comme à
l?étranger, selon une étude de l?Ademe105. 97 % des intercommunalités qui
produisent moins de 150 kg d?OMR et 100 % de celles qui produisent
moins de 100 kg d?OMR par habitant ont recours à une tarification
incitative. Par ailleurs, le coût moyen aidé des déchets est de 20 % en deçà
de la moyenne dans les territoires en tarification incitative car celle-ci
pousse à l?optimisation des coûts de collecte et de traitement106.
La baisse des OMR après mise en oeuvre de la tarification incitative,
avec l?ensemble des mesures d'accompagnement, a créé un effet report sur
les volumes collectés en déchèteries (avec des qualités et des taux de
tri/valorisation variables) dans une proportion non quantifiable.
Les avantages de la tarification incitative ont conduit la Convention
citoyenne pour le climat (CCC) à proposer de « remplacer une part
significative de la taxe d?enlèvement des ordures ménagères (TEOM) par
des modalités plus justes et favorisant les comportements
écoresponsables » (proposition C3.4).
Les associations d?élus représentants les groupements
intercommunaux (Communautés de France et France urbaine) considèrent
cependant que la fiscalité incitative n?est qu?un levier parmi d?autres de la
réduction des OMR même si Communautés de France se déclare favorable
au déploiement d?une dimension incitative dans la tarification du SPGD.
104 Étude du commissariat général au développement durable de mars 2016 et étude de
l?Ademe sur l?implantation de la TI (bilan à mi-parcours TI AMO). 4/11/2021.
105 Le parangonnage des pratiques de tarification incitative pour la gestion des déchets
ménagers dans plusieurs pays industrialisés » (Ademe 2018) indique que « dans tous
les territoires ayant mis en place une TI, la production d?OMR a diminué. »
106 Ademe, Étude sur les territoires pionniers de la prévention, confirmé par contrôles de la
communauté d?agglomération de Mauges et de la communauté urbaine de Besançon.
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/La%20tarification%20incitative%20de%20la%20gestion%20des%20ordures%20ménagères%20:%20quels%20impacts%20sur%20les%20quantités%20collectées
https://www.ademe.fr/dossier/modes-financement-service-public-gestion-dechets/tarification-incitative-ti
https://www.ademe.fr/dossier/modes-financement-service-public-gestion-dechets/tarification-incitative-ti
https://librairie.ademe.fr/air-et-bruit/3628-territoires-pionniers-de-la-prevention-des-dechets.html
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-mauges-communaute-maine-et-loire
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-urbaine-du-grand-besancon-doubs
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54
2 - Une complexité qui ralentit sa diffusion
La tarification incitative reste cependant insuffisamment attractive
pour les collectivités du fait des coûts ainsi que de la complexité de sa mise
en place et des incertitudes sur les recettes perçues par le service public.
La tarification incitative reste très peu mise en oeuvre dans
l'échantillon des EPCI de l?enquête, même s?il est fait régulièrement mention
de sa mise à l?étude. Les territoires ayant mis en oeuvre la tarification
incitative en France sont souvent ruraux ou mixtes et, à de rares exceptions
(par exemple l?agglomération de Besançon), les territoires les plus urbanisés
ne sont pas engagés dans des démarches de fiscalité incitative.
La part des collectivités qui recourent à la TEOM sans part incitative
comme mode majoritaire, voire exclusif, de financement ne décroit que très
lentement. La population qui reste soumise à cette imposition est constante,
principalement dans les zones fortement urbanisées (à l?exemple de la région
Ile-de-France). La part de la TEOM dans le financement du service public
de gestion des déchets continue de croitre en 2020 et en 2021 (7,1 Md¤ en
2020 et 7,4 Md¤ en 2021) et demeure très largement dominante par rapport
à la redevance. Même lorsqu?elle est mise en place, la part réellement
incitative107 reste résiduelle dans le prix payé par l?usager et représente, en
2020, moins de 0,5 % de l?ensemble du produit de la TEOM108.
Les espoirs placés dans une tarification plus incitative (TEOMI ou
REOMI) qui devait concerner 15 millions d?habitants en 2020 et
25 millions en 2025 sont pour l?instant déçus par le rythme très lent de sa
mise en place (moins de 6 millions d?habitants concernés en 2019109).
Le graphique ci-dessous montre l?écart important entre ces objectifs
législatifs et l?évolution de la population bénéficiant d?une tarification
incitative. L?objectif de 25 millions d?habitants en 2025110 apparaît hors
d?atteinte sans accélération très forte et sans nouvelles mesures
encourageant cette mise en place.
107 La part incitative ne représente que 10 à 45 % de la TEOMI, la part fixe majoritaire
reste basée sur la valeur locative foncière (VLF) de l?habitation.
108 34 M¤ sur les 7 137 M¤ du produit total de la TEOM (Source : DGCL Bis 151
fiscalité locale 2020).
109 Au 1er janvier 2019, 195 collectivités appliquaient une tarification incitative (5,6 M
d?habitants) dont 18 en TEOMI (0,940 M d?habitants). Au 1er janvier 2020 :
5,9 millions d?habitants et 9,3 millions si on inclut les collectivités en cours de mise en
oeuvre (source Ademe). Par ailleurs en 2020 et 2021, des collectivités représentant
9 millions d?habitants bénéficient des études de faisabilité aidées par l?Ademe.
110 Ces deux objectifs sont fixés par la LTECV de 2015.
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Graphique n° 11 : (indicateur-clef n° 2) population bénéficiant
de la tarification incitative
Source : Cour des comptes
La fiscalité incitative est souvent perçue comme compliquée et
coûteuse dans sa gestion (transfert de la gestion du fichier des redevables
de la direction des finances publiques à l?EPCI, insécurité sur les recettes)
et peut être source de rejet de la part des usagers. Les modalités de collecte
sont en effet plus complexes et impliquent l?équipement :
- des bacs à puces chez les usagers permettant déterminer leur nombre
réellement collecté et ainsi individualiser la facturation ;
- des points d?apport volontaire (PAV) avec un système de tambour à
reconnaissance par carte du propriétaire, des sacs apportés ;
- des bennes avec des systèmes électroniques de reconnaissance des
puces des bacs.
Comme le montre l?exemple ci-dessous, la mise en place d?une
fiscalité incitative ou d?une redevance incitative est un processus long et
peut s?étaler sur sept années entre l?étude d?opportunité et la mise en place
effective111.
111 Ce délai peut toutefois être réduit à l?exemple de communauté de communes
d?Oléron qui prévoit une mise en place de la REOMI en 2022 à la suite d?une démarche
initiée en 2018. Cf. CRC Nouvelle-Aquitaine, Communauté de communes de l?Ile
d?Oléron, décembre 2021.
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COUR DES COMPTES
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Organigramme n° 1 : processus d?instauration de la TEOMI
sur le territoire du syndicat du Bois de l?Aumône (Puy De Dôme)
Source : présentation webinaire du 30 juin 2021 ADEME, CITEO
et Région Occitanie
Plusieurs études de mise en place, voire de délibérations, n?ont pas
été suivies d?effet, notamment du fait du coût des investissements à réaliser
pour déployer un nouveau schéma de collecte en cohérence.
Par exemple, la communauté de communes Coeur du Var a décidé en
2016, après étude, de reporter la décision de la mise en place d?une TEOMI
à 2021 puis au-delà de 2025 au motif de la lourdeur des investissements à
réaliser et des bouleversements induits dans son organisation.
La mise en place d?une fiscalité incitative implique en outre des
efforts importants en termes de portage politique, de communication
auprès des usagers et d?engagements des services techniques des
collectivités. L?absence d?attention suffisante à ces préalables ou leur sous-
évaluation peut conduire à l?échec voire à des abandons et retours vers des
modes de fiscalité sans lien avec la qualité du tri, le plus souvent la TEOM
(à l?exemple de la communauté de communes des Gorges de l?Ardèche).
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
57
Les conditions de la réussite de la mise en place d?une tarification
incitative : le contre-exemple des Gorges de l?Ardèche.
La communauté de communes des Gorges de l?Ardèche issue de la
fusion en 2017 de plusieurs intercommunalités dont certaines avaient mis
en place une tarification incitative pour une partie de leur territoire, a décidé
en 2018 une généralisation de la REOMI au 1er janvier 2021. Des carences
dans la conduite de ce projet, la sous-estimation des coûts induits par les
changements, le manque d?anticipation ont abouti, après plusieurs reports
et décalages par rapport au calendrier prévisionnel, à son abandon au
deuxième trimestre 2020 et à la généralisation de la TEOM en 2021.
La modification des modalités de collecte (généralisation de la collecte
en PAV en remplacement du PAP) simultanément à la mise en place de la
fiscalité incitative a amplifié les difficultés rencontrées par l?EPCI, montrant
la difficulté de mener de front deux chantiers lourds modifiant à la fois les
modalités de collecte et de financement du service public.
Les regroupements d?EPCI issus des schémas départementaux de
coopération intercommunale (SDCI issus de la loi NOTRE de 2015) ont
souvent conduit à la généralisation de la TEOM, alors que certains territoires
fusionnés avaient élaboré des politiques ambitieuses basées sur une fiscalité
incitative ou la redevance d?enlèvement des ordures ménagères (REOM).
La communauté de communes d?Oléron : un exemple de passage
de la REOM vers la REOMI112
La CC d?Oléron, actuellement en REOM, a décidé en 2018 de mettre
en oeuvre la REOMI à l?horizon 2023 avec un objectif de réduction de 20 %
des DMA.
Le système retenu prévoit une part forfaitaire établie sur la base d?un
nombre de levées ou de dépôts minimaux et de la taille du bac de l?usager ou
à la taille du tambour des colonnes d?apport volontaire. Au-delà de ce forfait,
la part variable est calculée pour toutes les levées et apports supplémentaires.
Le calendrier prévoit la réalisation d?une enquête auprès de chaque
usager et, en 2022, une facturation « à blanc » (simulation de facturation
incitative permettant la comparaison avec la facturation réelle).
112 Cf. CRC Nouvelle-Aquitaine, CC de l?île d?Oléron, décembre 2021.
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COUR DES COMPTES
58
3 - Accélérer la mise en place de la fiscalité incitative
Les recommandations de développement de la tarification incitative
formulées antérieurement par la Cour113 n?ont pas été suivies d?effets et
doivent être réitérées.
La redevance d?enlèvement des ordures ménagères incitative, dont
la mise en place est mieux adaptée à l?habitat individuel, a connu un certain
développement, dans les zones rurales et péri-urbaines mais ses possibilités
d?extension en milieu urbain sont limitées par les contraintes spécifiques
de l?individualisation du tri dans l?habitat collectif.
Plus récemment, un mouvement semble s?amorcer, de collectivités
urbaines qui cherchent à s?engager ou qui expérimentent la mise en oeuvre
de la tarification incitative sous forme de TEOMi (Grenoble Alpes
Métropole et Versailles Grand Parc notamment), tandis que d'autres
l?étudient.
Nombreux sont ceux qui considèrent que l?application sur
l?intégralité du territoire sera difficile alors qu?elle pourrait être plus
facilement envisagée sur seulement une partie du territoire (habitat
pavillonnaire, communes périphériques, ?) : une dérogation à l?obligation
d?uniformité du mode de financement sur un EPCI à fiscalité propre et donc
l?autorisation de faire cohabiter formes classique et incitative d?un mode
de financement donné (TEOM/TEOMi ou REOM/REOMi) au-delà des
sept ans explicitement prévus au Code général des impôts pour la TEOMi
pourrait répondre à cette difficulté et favoriserait le développement de la
TI en milieu urbain, au prix sans doute d?une certaine complexité de
gestion voire d?une insécurité juridique.
La sécurité financière apportée par la TEOM pour les collectivités
gestionnaires du service public, son caractère redistributif et sa très large
implantation sur le territoire, amènent à ne pas remettre en cause cette
fiscalité, mais plutôt à favoriser l?introduction d?une part incitative
(TEOMI) dans les limites actuellement prévues par la loi (10 à 45 % de
part incitative dans la TEOM totale).
La métropole de Rennes, relayée par l?association France urbaine,
étudie la possibilité d?une TEOMI « collective » qui ne serait plus
individualisée mais établie au niveau du quartier ou d?un secteur
géographique.
113 Rapport 2011, Les collectivités locales et la gestion des déchets ménagers et
assimilés, op. cit.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
59
La Métropole de Rennes étudie un dispositif innovant
mais aux bases juridiques fragiles.
Devant la difficulté à établir une individualisation de la performance
de tri en milieu fortement urbanisé, Rennes métropole a étudié la possibilité
d?établir la part incitative non pas sur les quantités d?OMR produites par
chaque usager, mais en tenant compte de la performance collective réalisée
au niveau d?un quartier.
Ce dispositif permettrait, selon la métropole rennaise, de développer
des dynamiques collectives sur des secteurs territoriaux et de limiter les
coûts de gestion administrative pour consacrer plus de moyens à l?animation
du dispositif.
Toutefois, sa mise en place se heurte à des difficultés juridiques. En
effet, le passage d?une individualisation de la taxe au prorata des valeurs
locatives à une performance de tri collective (au niveau d?un quartier ou
d?un secteur) n?est pas autorisé par la règlementation et pourrait se révéler
juridiquement fragile au regard du principe d?égalité.
Un des principaux obstacles au développement de la tarification
incitative est le coût de sa mise en place, estimé entre 20 et 40 ¤ par
habitant, ramené à 15 ¤ après pris en compte des aides (soit de 45 à 75 %
d?aides)114. Ce surcoût est dû principalement aux investissements à réaliser
au démarrage, mais aussi à l?accompagnement de la démarche qui doit se
poursuivre sur une longue période115. Toutefois, les économies réalisées du
fait de la baisse des tonnages d?OMR (et donc de la baisse des coûts de
traitement) doivent permettre de couvrir les frais initiaux. En effet,
l?économie observée réalisée sur le coût aidé (reste à charge) par les EPCI
ayant mis en place une tarification incitative est, en moyenne en 2021116,
de 13 euros par habitant. Les aides au démarrage sont donc essentielles
pour soutenir les collectivités qui mettent en place la tarification incitative.
Pour encourager plus fortement les EPCI à recourir à la TEOMI, la
loi de finances initiale pour 2019 comporte deux mesures : l?année
d?instauration de la part incitative, le produit de TEOM peut augmenter
114 Source : Ademe 2020 - chiffres clés : coût de la mise en place de la TI.
115 En 2022, l?Ademe a enrichi l?offre de soutien aux collectivités en tarification
incitative au travers une nouvelle modalité d?aide d?accompagnement de l?information
individuelle des usagers sur leur utilisation du service.
116 Source : Ademe 2021 - chiffres clés : coût de la mise en place de la TI.
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COUR DES COMPTES
60
jusqu?à 10 % (par rapport à l?année précédente) et les frais de gestion levés
par l?État, fixés à 8 % sur la TEOM, sont limités à 3 % pendant cinq ans.
Ces incitations se sont cependant avérées insuffisantes, au regard
des coûts induits par cette évolution et n?ont pas permis de rendre la
TEOMI plus attractive que la TEOM.
Afin de développer la tarification incitative (TEOMI ou REOMI), la
Cour recommande donc d?accentuer les aides au démarrage, en allégeant
le coût de sa mise en place, en portant la part du financement extérieur à
80 % du surcoût117. Ces aides ponctuelles pourraient prendre la forme par
exemple de subventions directes (fonds chaleur et fonds économie
circulaire gérés par l?Ademe) ou d?une atténuation supplémentaire des frais
de gestion grevant la TEOMI.
D - La spécificité des territoires touristiques
Les territoires à forte activité touristique118, le plus souvent
saisonnière, connaissent des problèmes spécifiques pour adapter leurs
fréquences de collecte à la variation parfois très importante des populations
utilisant le service public.
Les tournées supplémentaires et le traitement des tonnages générés
par l?activité touristique entrainent pour ces territoires des coûts plus élevés.
La moyenne des tonnages collectés par habitant indique la même tendance
en étant supérieure à la moyenne nationale tant pour les DMA (669
kg/habitant pour 529 kg/habitant) que pour les OMR (356 kg/habitant pour
249 kg/habitant en moyenne nationale)119. Cette différence est encore
accentuée pour la sous-catégorie120 des territoires dits « très touristiques »121.
117 La part couverte par des aides extérieures à l?EPCI est actuellement, en moyenne,
de 50 %.
118 « Territoires à dominante touristique » selon la classification proposée par l?Ademe
119 Source : Ademe chiffres clés de la collecte en 2019.
120 La typologie des habitats de l?Ademe comprend cinq catégories et dix sous-
catégories. Dans la catégorie touristique sont distingués : les territoires très touristiques,
les touristiques urbains et les autres touristiques.
121 La région Provence-Alpes-Côte d?Azur (PACA), aux caractéristiques touristiques
affirmées, présente par exemple des tonnages d?ordures ménagères exceptionnellement
élevés avec 713 kg de DMA par an et par habitant et 372? kg d?OMR en 2019 (source :
observatoire régional des déchets PACA).
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61
Graphique n° 12 : ratios de collecte des OMR par typologie
de territoires en 2019
Source : Ademe chiffres clés 2019 (parution : juin 2021)
La taxe de séjour (TS) : une taxe affectée au développement touristique
Créée par une loi de 1910, la taxe de séjour est instituée à l?initiative
des communes réalisant des dépenses favorisant l?accueil des touristes.
À l'origine, elle ne pouvait être instituée que par les stations classées de
tourisme. Cette possibilité s?est élargie au fur et à mesure des années (aux
communes de montagne, du littoral, réalisant des actions de promotion
touristique ou de gestion de leurs espaces naturels ?).
Elle est due par personne et par nuit et son montant varie selon le
type d'hébergement (hôtel, meublé de tourisme, camping) et selon le
classement de l'hébergement. Les recettes de la taxe de séjour sont affectées
obligatoirement aux dépenses destinées à favoriser la fréquentation
touristique d'une commune ou d'une intercommunalité.
Afin de permettre la couverture des charges supplémentaires du service
public des déchets générés spécifiquement par la fréquentation touristique,
pourrait être envisagée l?affectation d?une part additionnelle à la taxe de séjour
(surtaxe) perçue par les EPCI122. Le produit de la TS resterait ainsi affecté au
développement touristique mais les territoires classés « touristiques », selon la
classification de l?Ademe, pourraient percevoir, sur la même base que la TS,
cette part complémentaire affectée au financement des opérations de
prévention, de collecte et de traitement des ordures ménagères.
122 La TS est actuellement obligatoirement affectée aux offices de tourisme et ne peut
donc financer des surcoûts liés à la collecte et au traitement des déchets.
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COUR DES COMPTES
62
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
En France, le volume d?ordures ménagères par habitant, notamment
résiduelles, se stabilise à un niveau supérieur à la moyenne européenne.
Le service public de gestion des déchets (SPGD) est exercé par les
établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats
intercommunaux de traitement, dans le cadre d?une programmation
tripartite État-région-intercommunalités.
Or, cette programmation est trop complexe et souffre d?une
articulation insuffisante entre les différents niveaux territoriaux qui la rend
finalement inefficace. Pour permettre à la France de réaliser les objectifs
que le législateur a fixés dans le code de l?environnement et rejoindre les
meilleurs standards européens de prévention et de gestion des DMA, la
programmation doit être améliorée. Une simplification des documents de
programmation nationaux, une programmation régionale plus
opérationnelle, grâce à davantage de précisions sur les investissements à
réaliser et à des plans locaux de prévention des déchets ménagers et
assimilés déclinés pour chaque EPCI, contribueraient à une plus grande
lisibilité des différents niveaux et outils de programmation.
Par ailleurs, comme la Cour l?avait déjà souligné en 2011, la
mobilisation des parties prenantes implique de disposer de tableaux de
bord synthétiques permettant de confirmer une direction et un rythme de
réalisation adéquats. Pour atteindre ce résultat, la collecte locale des
données doit être accélérée et simplifiée dans un compte-rendu unique et
harmonisé.
Les dépenses du service public de gestion des déchets augmentent
de manière continue depuis vingt ans et sont financées principalement par
la fiscalité ou la tarification locale et les filières REP. Pour réduire cette
dépense et atteindre l?objectif prioritaire de réduction des quantités de
déchets collectées et traitées, les modalités de tarification (ou de fiscalité)
doivent inciter plus clairement l?usager à des efforts de tri. La tarification
incitative (REOMi ou TEOMi) permet de limiter les quantités d?OMR en
liant, au moins partiellement, la qualité du tri et le prix payé par l?usager.
Toutefois, son développement, prévu par la loi, se heurte à des difficultés
de mise en place et à des coûts de démarrage importants qui doivent être
mieux pris en charge.
La spécificité des territoires touristiques entraine des charges pour
le SPGD qui nécessitent la mobilisation de moyens complémentaires. Une
part additionnelle de taxe de séjour payée par les usagers à l?origine de
ces surcoûts permettrait de les financer.
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Au vu de l?ensemble de ces constats, les juridictions financières
formulent les recommandations suivantes :
1. Unifier, au plus tard en 2024 les documents de programmation
nationale de la prévention et de la gestion des déchets, en y renforçant
le volet industriel de la plasturgie et de la valorisation énergétique
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
2. Rendre obligatoire, au plus tard en 2024, lorsque le programme local
de prévention des déchets ménagers est élaboré par le syndicat de
traitement, l?adoption d?un programme de mise en oeuvre spécifique
par EPCI (ministère de la transition écologique et de la cohésion des
territoires).
3. Publier, au plus tard en 2024, un tableau de bord annuel du Service
public de gestion des déchets, à l?échelon national et par type
d?établissement public de coopération intercommunale, des six
indicateurs-clefs, incluant la prévention et le poids des ordures
ménagères résiduelles assortis d?une représentation graphique des
trajectoires constatées par rapport aux trajectoires cibles (ministère
de la transition écologique et de la cohésion des territoires, régions).
4. Publier, au plus tard en 2024, un tableau de bord annuel, pour
l?ensemble des filières de Responsabilité élargie du producteur et,
pour chacune d?elles, des six indicateurs-clefs, incluant la prévention,
assortis d?une représentation graphique des trajectoires constatées
par rapport aux trajectoires cibles (ministère de la transition
écologique et de la cohésion des territoires, éco-organismes).
5. Harmoniser, au plus tard en 2024, dans un seul compte-rendu le bilan
annuel, par intercommunalité, des actions de prévention et de gestion
des déchets ménagers autour des six indicateurs-clefs et du coût du
service par habitant (ministère de la transition écologique et de la
cohésion des territoires).
6. Favoriser la mise en place de la tarification incitative en allégeant son
coût pour l?intercommunalité grâce à un financement complémentaire
porté à 80 % sur les premiers exercices (ministère de la transition
écologique et de la cohésion des territoires, ministère du budget, des
comptes publics et de la fonction publique) ;
7. Instaurer une surtaxe à la taxe de séjour dont le produit serait affecté
aux actions relatives à la prévention et à la gestion des déchets
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
ministère du Budget, des Comptes publics et de la Fonction Publique).
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Le dispositif opérationnel : une
transformation à accélérer vers
l?économie circulaire
Le présent chapitre examine les étapes du processus de gestion des
déchets ménagers et assimilés (la prévention, la collecte et le traitement)
telles qu?elles sont mises en oeuvre par les organismes qui en ont la charge.
Les résultats atteints par la France et les choix de gestion de déchets
y sont exposés et comparés à ceux des autres pays de l?Union Européenne.
Ces comparaisons et les exemples de bonnes pratiques comme les
difficultés rencontrées aux niveaux local et national, illustrent la
complexité de cette politique et mettent en évidence les efforts qui doivent
être réalisés en France pour atteindre les objectifs fixés.
I - La prévention : priorité officielle, mais
parent pauvre de la gestion des déchets
L?article L. 541-1 du code de l?environnement prévoit de « donner la
priorité à la prévention ». La prévention consiste à réduire la quantité de
déchets produits et leur dangerosité en intervenant à la fois sur les modes de
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production et de consommation des produits123. Elle relève au premier chef
des entreprises puisqu?elles sont en mesure de réduire à la source la quantité
de matière des produits qu?elles mettent sur le marché. Certains territoires,
pionniers mais trop minoritaires, montrent qu?ils peuvent aussi avoir une
action déterminante sur la prévention en accompagnant la consommation
responsable, l?autogestion des déchets et le geste de tri des citoyens.
A - À l?étape de la production : écoconception
et durabilité des produits
80 % des incidences des produits sur l?environnement sont
déterminées lors de la phase de conception124. Cette responsabilité des
entreprises se traduit par les écocontributions qu?une partie d?entre elles
paient aux éco-organismes. Ce principe pollueur-payeur doit les inciter à
réduire les quantités de matière125 ainsi qu?à prêter attention aux conditions
d?approvisionnement en matières premières et au recyclage des biens
fabriqués. Par exemple, pour prévenir les déchets plastiques, les entreprises
ont la possibilité de supprimer les contenants à usage unique ou sans
fonction technique (comme les propriétés barrière pour les produits
alimentaires) ou les produits et objets qui perturbent les chaînes de
recyclage parce qu?ils sont trop petits ou dépourvus de filière de recyclage
opérationnelle126 .
Les entreprises sont également invitées, tant par la réglementation
européenne que par la législation française, à construire des biens
incorporant des matières premières recyclées, qui soient susceptibles d?être
réparés et réutilisés127 ou à développer l?économie dite de la fonctionnalité.
Les fabricants de produits générateurs de déchets sont tenus de soutenir les
réseaux de réemploi, de réutilisation et de réparation, notamment ceux
gérés par les structures de l?économie sociale et solidaire128.
123 Selon l?article L. 541-1-1 du code de l?environnement, qui regroupe les définitions des
termes en lien avec les déchets, la prévention désigne l?ensemble des mesures qui visent à
réduire la quantité de déchets, leur nocivité et les matières nocives entrant dans les produits.
124 Rapport du Parlement européen pour aboutir à une économie circulaire du 10-02-2021
125 Par exemple, l?écocontribution payée annuellement par les metteurs en marché est
modulée aux poids et à l?Unité de Vente Consommateur (UVC) qui intègrent les emballages.
126 C?est-à-dire les produits et objets hors filières déjà opérationnelles (p. ex. bouteilles
en plastique de PET) ou en passe de le devenir (p. ex. pot de yaourt en PS).
127 Un indice de réparabilité doit pouvoir être communiqué pour les équipements
électriques et électroniques et, à compter du 1er janvier 2024, un indice de durabilité.
Règlement (UE) 2021/341 de la Commission du 23/2/21.
128 Article L. 541-10 du code de l?environnement
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176087/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599099
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
67
L?économie de la fonctionnalité
L?économie de la fonctionnalité privilégie l?usage souvent ponctuel
(se déplacer, s?alimenter, habiter, etc.) à la possession permanente et tend à
vendre des services (location, etc.) plutôt que les produits eux-mêmes.
Conservant la propriété des matériels, le loueur a intérêt à allonger leur durée
de vie et réduire la consommation des intrants (énergie, engrais, etc.), comme
par exemple pour un contrat d?installation et d?entretien se substituant à la
vente d?une chaudière.
Dans le tableau de bord national des éco-organismes que les
juridictions financières recommandent de créer, un des six objectifs devrait
être, comme proposé supra, un indicateur de l?effort de financement de la
prévention (dépenses en faveur de la prévention/ pourcentage du chiffre
d?affaires des éco-organismes).
L?évolution de la demande des consommateurs a une influence de
plus en plus forte sur l?engagement des entreprises dans ces directions129.
L?écoconception peut aussi être encouragée par des mécanismes incitatifs
ou prescriptifs mis en place par les pouvoirs publics. Les mécanismes
incitatifs prévus dans la loi comme les éco-modulations130, pour les
produits soumis à une REP, conservent la préférence des entreprises. Ils
peuvent même aboutir, dans certains cas, au versement à l?entreprise d?une
prime supérieure à son écocontribution131.
Les instruments prescriptifs se développent quant à eux dans le
cadre de l?harmonisation des conditions du marché unique européen132. Tel
129 L?indicateur 9 du PNPD 2014-2020 mesure la sensibilité des Français à la prévention
(Indice global calculé par l?Ademe à partir d?enquêtes).
130 L?art. L. 541-10-3 du code l?environnement issu de la loi AGEC (annexe IV bis à la
directive 2008/98) rend possible le recours aux contributions financières pour
promouvoir l?incorporation de matériaux recyclés et le réemploi. Ces « éco-
modulations » sont des modifications (en %) de l?écocontribution, acquittée par les
producteurs à l?éco-organisme.
131 Arrêté du 25/12/2020 modifiant le cahier des charges de la filière emballages
ménagers et créant une prime pour intégration de 10 % de matière plastique recyclée
dans ces emballages. Ce dispositif fait l?objet d?un recours au motif qu?il revient à faire
financer la prise en charge des déchets du bénéficiaire par les autres adhérents et
constitue donc une rupture avec le principe d?internalisation des externalités négatives
générées par la mise en marché.
132 Dans sa proposition de règlement relatif aux batteries du 10 décembre 2020, la
Commission propose qu?à partir de 2030, les batteries respectent des objectifs de
collecte et des proportions minimales de contenu recyclé.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043974919
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68
a été le cas avec l?interdiction progressive par la directive sur le plastique
à usage unique « single use plastic » (SUP) de tous les plastiques à usage
unique entre 2016 et 2040133. La mise sur le marché de certaines catégories
de produits et de matériaux peut également être subordonnée au respect
d?un taux minimal d?incorporation de matières recyclées134 (p. ex. 25 % de
plastique recyclé en 2025 pour les bouteilles pour boisson fabriquées en
PET)135 , d?intégration des déchets produits dans une filière de recyclage
136 ou d?affichage d?un indice de réparabilité ou de durabilité137.
Si l?engagement des entreprises en faveur de la prévention demeure
insuffisant, l?État disposera de la possibilité de renforcer les mécanismes
incitatifs et prescriptifs (interdiction de certains produits ou matériaux,
incorporation obligatoire de matières recyclées, ratio minimal de dépenses
de prévention).
B - Dans les territoires : une action trop exclusivement
centrée sur la communication
Pour les EPCI qui en disposent, les programmes locaux mentionnent
peu d?actions de prévention ou sont défaillants, tant dans le champ de la
prévention couvert que dans les moyens mis en oeuvre ou dans les outils de
suivi prévus.
Dans les programmes intercommunaux et leurs comptes-rendus de
mise en oeuvre déjà présentés en première partie du rapport, le volet
prévention est presque systématiquement manquant ou lacunaire. N?y
figurent ni bilan chiffré des quantités de déchets évitées (p. ex. tonnages de
bio déchets détournés à la suite d?actions de communication ou de
composteurs subventionnés138), ni analyse des facteurs de réussite et
d?échec des actions conduites139 (p. ex. mise en rapport dans certains cas
133 Directive (UE) du 5 juin 2019 relative à la réduction de l?incidence de certains produits
en plastique sur l?environnement. Cf. détail année par année des interdictions en annexe 2.
134 II. de l?article L. 541-9 du code de l?environnement
135 Article 6 de la directive 2019/904 et annexe II de la directive emballages.
136 III. et IV. de l?article L. 541-9 du code de l?environnement.
137 Art. L. 541-9-2.-I du code de l?environnement
138 Le prix d?un composteur subventionné à Valenciennes varie de 13 à 22 ¤ selon leur
matière (bois ou plastique) et leur volume (400 à 800 litres)
139 Des indicateurs de prévention sont pourtant proposés pour les RPQS, dans le
progiciel ComptaCoût® alimentant SINOE.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074220/LEGISCTA000006176616/#LEGISCTA000023268652
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074220/LEGISCTA000006176616/#LEGISCTA000023268652
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041555848/
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
69
de la hausse des dépenses de communication sur le tri et de l?augmentation
des taux de refus de tri sur la même période).
Lorsqu?ils sont précisés, les crédits et les ressources humaines140
alloués aux actions de prévention sont, pour la plupart, inférieurs à 1 % du
coût total du service public (au maximum 2 % pour certaines collectivités).
Avec une moyenne nationale de dépenses de prévention par habitant de
1,5 ¤ en 2018 et 2019141, le nombre de personnes touchées, y compris dans
les territoires pilotes, est faible.
Dans les programmes locaux de prévention des déchets ménagers et
assimilés (PLDMA), la prévention se limite le plus souvent à des actions
générales insuffisamment adaptées aux différents publics de
communication pour former des « écocitoyens » : sensibilisation du public
au tri142, au jardinage durable et à la gestion des déchets verts, au recyclage
et aux nuisances des dépôts sauvages.
Ce type d?actions est utile dans l?accompagnement des particuliers
pour modifier leurs comportements notamment en phase d?extension des
consignes de tri ou de mise en place de la tarification incitative.
Cependant, comme le montre le schéma ci-dessous et comme on
le constate dans les collectivités territoriales pionnières en France et à
l?étranger, les actions de prévention pouvant être mises en oeuvre par
les intercommunalités couvrent un champ plus large que la seule
communication143.
140 Par exemple 3,8 ETP en moyenne au SMICTOM Alsace centrale (CRC Grand Est,
novembre 2021).
141 Ademe, synthèse du guide « Élaborer et conduire avec succès un PLPDMA » (2018)
La moyenne en 2016 était de 0,8. Exemples (2019) : 0,19 ¤ par habitant pour le syndicat
du département de la Haute-Marne. 1,14 ¤ pour la métropole de Lyon, 0,9 ¤ pour la
métropole de Nice (objectif de 2,48 ¤ pour la période 2022-2026).
142 Distribution de mémo-tri et guides du compostage, porte à porte, recrutement
d?ambassadeurs de tri et de référents compostage pour faire du porte-à-porte,
manifestations grand public, lettres d?information, animations scolaires et extra-
scolaires, autocollants « stop pub », nettoyage citoyen.
143 Pour le gaspillage alimentaire dans la restauration scolaire et périscolaire, le réseau
REGAL (RÉseaux de lutte contre le Gaspillage Alimentaire), lancé par le ministère de
l?Agriculture qui vise mobiliser, à l'échelle d'un territoire, l'ensemble des acteurs de la
chaîne alimentaire (professionnels de l?alimentation, associations, acteurs
institutionnels, porteurs de projets, citoyens).
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-8
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-departemental-denergie-et-des-dechets-de-la-haute-marne-sded-52
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-departemental-denergie-et-des-dechets-de-la-haute-marne-sded-52
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-de-lyon-enquete-sur-la-prevention-et-la-gestion-des-dechets
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-nice-cote-dazur-nca-nice-alpes-maritimes
https://agriculture.gouv.fr/avec-regal-les-regions-se-mobilisent-contre-le-gaspillage-alimentaire
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70
Schéma n° 4 : les actions de prévention accessibles
aux collectivités territoriales
Source : Cour des comptes
Le plan local de prévention de Besançon144
Le syndicat de traitement de l?agglomération de Besançon145 a appuyé
son action de prévention sur un plan Territoire Zéro Déchets Zéro Gaspillage146
bénéficiant d?un soutien financier significatif de l?Ademe (450 000 ¤).
144 CRC Bourgogne-Franche-Comté, Syndicat de traitement de l?agglomération de
Besançon (Sybert), janvier 2021.
145 Le Sybert couvre un territoire d?environ 1250 km2 et traite les déchets de 163
communes regroupant 225 000 habitants. C?est un territoire au profil mixte, composé
d?une zone urbaine très dense, la ville de Besançon (qui regroupe 52 % de la population
desservie) et de zones rurales.
146 Le programme « Territoire Zéro Déchet Zéro Gaspillage » (TZDZG) de l?Ademe a
pour l?objet est l?accompagnement des collectivités dans une dynamique d'économie
circulaire. Les 153 EPCI retenus bénéficient de soutien financier et d?un
accompagnement méthodologique de l?agence pour l?élaboration d?un plan d?actions
aux fins d?amélioration du recyclage et de la valorisation des déchets.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-besancon-et-de-sa-region-pour-le-traitement-des-dechets-sybert-0
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71
La deuxième version de ce plan (2015-2020), qui a été conçue comme
un accompagnement de la mise en oeuvre de la redevance incitative, affichait
parmi les indicateurs clés une cible moyenne de 100 kg d?OMR par an et par
habitant en 2022. Le plan, quantifiait notamment les objectifs de baisse de
volume des OMR, des DMA et des déchets dangereux déposés en déchèteries
et de ceux détournés de l?élimination vers le réemploi via les ressourceries.
Pour atteindre ces objectifs, le Sybert avait retenu d?abord un axe de
travail relatif à la promotion et l?accompagnement des différents modes de
compostage (collectif en pieds d?immeuble, chalet de compostage, composteur
électromécanique en collectif dense, lombricompostage, vente de composteurs
individuels). Il prévoyait également des actions de sensibilisation du public
telles que le prêt de vaisselle réutilisable, la promotion d?un « Gourmet Bag »
auprès des restaurateurs pour prévenir le gaspillage alimentaire et la mise en
place d?une stratégie de communication. En outre, des dispositifs d?évitement
des déchets étaient développés comme le prêt d?un kit de couches lavables et
l?accompagnement des structures volontaires, la promotion du réemploi et de la
réparation à travers l?installation de locaux dédiés aux ressourceries dans
chacune des déchèteries du territoire.
Ces actions ont contribué, à côté du déploiement de la tarification
incitative, de l?extension des consignes de tri et de mesures telles que la
baisse des fréquences de collecte, à la réduction des volumes d?ordures
ménagères résiduelles. Fin 2020, le volume d?OMR collecté par le Sybert
s?élevait à 136 kg par an et par habitant, soit une très bonne performance
par rapport à la moyenne nationale (les meilleurs ratios, soit 95 kg par
habitant et par an, sont relevés dans des territoires à forte dominante rurale).
À l?interface entre la prévention et le recyclage, les actions dites en
« R » (réparation, réemploi147, ressourcerie148 et réutilisation) offrent des
perspectives prometteuses. La loi prévoit qu?en 2030, 5 % du tonnage de
déchets ménagers, notamment des textiles et des équipements électriques
et électroniques et d'ameublement, soient concernés149.
147 Le réemploi consiste à collecter en déchetteries des matières et objets (meubles,
vaisselles, jouets textiles?) les reconditionner et réparer et les revendre (produits de
seconde main).
148 Une ressourcerie est une structure qui gère la récupération, la valorisation et la
revente de biens sur un territoire donné. 154 étaient en activité en 2020 dont une
vingtaine à Paris. Le taux de remise sur le marché est de 41 % des objets collectés.
(Observatoire annuel des ressourceries).
149 Art. L. 541-1 I. 3° du code de l?environnement
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https://ressourceries.info/?FfF
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
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72
Les collectivités territoriales doivent depuis 2020, dans toutes leurs
déchèteries, qui jouent déjà un rôle central de vecteur des messages de
prévention, disposer d?une zone de dépôt destinée aux produits
réemployables150. Elles ont l?obligation de permettre par contrat aux
acteurs de l'économie sociale et solidaire d?y récupérer et traiter les objets
en bon état et réparables. Elles peuvent aussi subventionner ces
associations lorsqu?elles collectent les articles chez les particuliers. En cas
de carence des initiatives privées, elles peuvent structurer les filières de
réemploi par la création de sociétés d?économie mixte151 qui peuvent
contractualiser avec les éco-organismes et développer une activité
commerciale.152 Les déchèteries peuvent devenir ainsi des éco-pôles
mettant en relation les ameneurs et les preneurs pour offrir une deuxième
vie aux objets, à l?image de ce qui se fait en Autriche, en Flandre belge,
mais aussi en France, par exemple en Gironde 153.
Des exemples étrangers de réseaux de réemploi
À titre d?exemples, la Belgique (Flandre) et l?Autriche, considérées
comme pionnières dans ce domaine, ont mis en place, des réseaux denses
de réemploi/ seconde main. En Flandre, ils sont présents dans chaque
municipalité (ou centre commun à plusieurs municipalités voisines), avec
des objectifs fixés en termes de biens réutilisés en kg par habitant. Les biens
sont déposés par les habitants dans ces centres ou collectés dans les
déchèteries (une benne pour les biens hors d?usage et une benne pour les
biens réparables/réutilisables) afin d?être revendus. En Autriche, le réseau
« repanet » regroupe 27 organisations employant 1 800 personnes dans 140
lieux (principalement pour le textile et les équipements électroniques).
Cet adossement des ressourceries aux déchèteries est encore trop
rare, mais il se heurte, il est vrai, à certaines contraintes (sites des
déchèteries manquant de place, trop excentrés ou mal sécurisés). La mise
en place de nouvelles REP qui collectent désormais des objets et appareils
en amont des déchèteries154répond aussi à cet objectif.
150 Article L. 2224-13 du CGCT
151 Centre Vosges TLC de tri textile de valorisation par la revente, l?export ou
l?incinération et d?insertion des personnes en difficulté au regard de l?emploi. 330
bornes d?apport volontaire. 30 salariés et 150 tonnes collectées chaque mois.
152 Article L. 2224-13 du CGCT
153 En Gironde, le SMICVAL, profitant de la modernisation de son réseau de
déchèteries, a créé un supermarché inversé, lieu de réemploi mais aussi de formation et
de sensibilisation, fonctionnant sur le principe du « donnez, prenez, recyclez ».
154 Exemples : jouets, articles de sport, de loisirs, de bricolage et de jardins, deux roues.
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
73
Les intercommunalités et les éco-organismes doivent être incités à
augmenter la part de leurs dépenses consacrées à la prévention et à financer
des actions plus opérationnelles et ambitieuses que la communication. Les
recommandations n°3 et 4 présentées ci-dessus et visant à publier des
tableaux de bord annuel de six indicateurs-clefs parmi lesquels la prévention
(ratio dépenses de prévention/ dépenses totales), répondent aussi à cet
objectif. Pour permettre le calcul et la publication de cet indicateur, les
juridictions financières recommandent dans un premier temps de dresser
dans la réglementation la liste des actions financées par les EPCI et les REP
pouvant être considérées comme dépenses de prévention (État).
II - La collecte : peu de progrès
sur les enjeux prioritaires
Malgré leur réduction régulière (249 kg/habitant en 2019 pour
298 kg/habitant en 2009), les tonnages d?OMR (16 611 kt en 2019) restent
la part la plus importante de l?ensemble des déchets collectés.
Tableau n° 2 : les tonnages collectés en 2019
Source : ADEME, chiffres clés 2019 (parution juin 2021)
La dernière étude de caractérisation MODECOM de 2017 montre
que les OMR sont composées d?une majorité de produits valorisables dont
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40 % de flux ciblés par des filières REP existantes et 38 % potentiellement
concernés par une valorisation organique (dont un tiers de bio déchets).
L?enjeu est donc de développer les efforts de pré-collecte155 et de
collecte afin de distraire des OMR le plus possible de produits valorisables.
A - Une organisation territoriale multiforme
1 - Une gestion partagée entre régie et marchés de prestations
de service
La collecte s?exerce soit en régie (directement par les services de la
collectivité ou par des contrats de prestation de service), soit en délégation
de service public (DSP). L?enquête a révélé plusieurs exemples mixtes avec
une partie du territoire en gestion directe (régie ou marchés publics) et une
autre en DSP. Cette organisation résulte de la volonté de maintenir une forme
de concurrence entre les différents modes de gestion et aussi de conserver la
compétence technique permettant d?évoluer dans les choix de gestion.
Nice et Lyon : une volonté de maintenir un fonctionnement mixte
entre collecte en régie ou confiée à des prestataires
Pour Nice-Côte d?Azur, la compétence est exercée à la fois en régie
(51 % de la population en 2022), s?agissant notamment de la collecte de la
ville de Nice et via des marchés (49 %) attribués à des entreprises différentes
pour d?autres secteurs géographiques.
La métropole de Lyon a fait le choix d?une collecte effectuée en
partie en régie directe par ses propres services et en partie par des entreprises
prestataires. La part de ces dernières est passée de 49 à 57 % des tonnages
collectés entre 2015 et 2019.
La collectivité explique l?externalisation partielle du service collecte
et le maintien d?un système mixte par la volonté de mettre en place une
émulation entre les secteurs public et privé ainsi qu?une démarche
d?amélioration continue. Cette organisation permet, selon la métropole, un
meilleur contrôle des prestataires grâce à la connaissance technique du métier
détenue par ses services et permet de limiter les blocages en cas de grève.
155 La pré-collecte est l?ensemble des opérations (principalement de tri) qui précèdent
le ramassage des déchets par le service d?enlèvement.
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75
La différence de coûts entre la gestion en régie et le recours à un
prestataire est difficile à établir compte tenu de la diversité des conditions
de collecte. Toutefois, le coût à la tonne collectée en régie peut être
supérieur au coût de la collecte par un prestataire : par exemple pour le
SICTOM Pézenas-Agde156, les tonnages collectés par un prestataire sur le
secteur d?Agde représentent un tiers des tonnages totaux alors que le coût
ne représente que 22 % du total157.
Certaines collectivités constatent que lorsque la collecte est assurée
par un prestataire (dans le cadre d?un marché par exemple), il est plus
difficile de contrôler la qualité du tri.
L?enjeu pour les EPCI reste d?assurer un équilibre optimal entre
l?indispensable maîtrise des coûts et la qualité du service proposé.
2 - Un équilibre à trouver entre qualité et coût du service rendu
La diversité des types d?habitat au sein de la très grande majorité des
EPCI conduit à différentes modalités de collecte, prenant en compte la
densité de population et le type d?habitat (ville-centre, zones périurbaines,
zones plus rurales, habitat collectif/habitat individuel).
Cette hétérogénéité n?est pas un problème : l?adaptation de la
collecte (notamment sa fréquence) aux particularités d?un territoire
intercommunal est une condition de la réussite d?une politique de réduction
des déchets.
La collecte est organisée selon trois modalités adaptées aux
différentes typologies de territoire et à la nature des produits triés :
- La collecte en porte à porte (PAP) particulièrement adaptée au milieu
urbain dense ;
- La collecte en points d?apports volontaires (PAV) souvent utilisée pour
une partie au moins du tri sélectif et quasiment généralisée pour le verre ;
- La collecte en points de regroupement158, utilisée dans les secteurs à
faible densité de population.
156 cf. CRC Occitanie, Smictom Pézenas-Agde, février 2021.
157 La configuration du territoire (densité de population beaucoup plus forte sur la commune
d?Agde et activité touristique importante) peut expliquer ces différences de coûts.
158 Les points de regroupement concernent des usagers identifiés, ce qui n?est le cas des PAV.
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76
Photo n° 1 : les trois modalités du tri à la source des bio déchets
Source : Présentation de la société Les Alchimistes à destination des juridictions financières
octobre 2020
Si la collecte en porte à porte présente de nombreux avantages dont
un plus grand confort pour les usagers, elle engendre les coûts les plus
élevés tant en matériel qu?en personnel159. L?amélioration de la qualité du
tri conduit à des arbitrages sur les fréquences de collecte. Ainsi, l?ajout
d?une tournée spécifique (par exemple pour les bio déchets) ne peut se faire
à coût égal qu?en supprimant une tournée de collecte des OMR.
3 - Professionnels : une orientation prioritaire vers les déchèteries
Un accès facilité aux déchèteries (notamment pour les
professionnels) permet de développer le tri et de limiter les dépôts
sauvages, sources de nuisances et de coûts importants. C?est pourquoi le
volume des dépôts en déchèteries, hors secteur urbain dense, est en forte
augmentation et les modalités d?accès à ces équipements, la qualité du tri
réalisé et le développement de filières de traitement deviennent des enjeux
déterminants pour le service public des déchets.
L?étude MODECOM 2017 montre que, dans les déchèteries, la
benne tout-venant peut contenir encore potentiellement 28 % de déchets
relevant d?une filière REP et 40 % de déchets (plastiques, métaux, bois non
transformé, etc.) qui pourraient faire l?objet d?une valorisation matière. La
159 Le coût moyen par habitant de la collecte en porte à porte est supérieur de 20 % au coût
moyen en point d?apport volontaire (référentiel national des coûts 2016 de l?Ademe.
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
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77
recommandation précitée de retenir la quantité d?OMR collectée, y
compris les bio déchets, les emballages et les déchets des professionnels,
comme indicateur-clef pour mesurer la performance du service public,
permettra aussi de suivre les avancées dans ces domaines.
B - Promouvoir la collecte et le tri des bio déchets
et des emballages en plastique
1 - Les fortes potentialités de la collecte des bio déchets
malgré sa complexité
a) La complexité propre à la collecte des bio déchets
La séparation des biodéchets du flux des déchets résiduels et leur
exploitation par le compostage, l?épandage ou la méthanisation a un impact
déterminant sur le poids des OMR. Elle constitue, depuis la loi sur la
transition énergétique et pour une croissance verte (LTECV), un des
objectifs prioritaires des politiques de gestion des déchets.
Le tiers des OMR encore composé de bio déchets (75 kg par habitant
et par an) est une source de gaspillage de ressources importante160. Ces
matières fermentescibles contiennent des matières organiques précieuses
dont le traitement non spécifique (par exemple leur incinération) se révèle
inutilement coûteux161.
La LTECV fixe l?objectif de la généralisation du tri à la source des
bio déchets au 31 décembre 2023162. Toutefois, elle ne comporte pas
l?obligation d?organiser la collecte distincte des biodéchets. L?article 70 de
cette loi précise que : « Chaque citoyen disposera d?une solution lui
permettant de ne pas jeter ses biodéchets dans les ordures ménagères
résiduelles. » Les solutions possibles sont donc les collectes séparées et/ou
la gestion de proximité à l?aide de composteurs individuels ou partagés en
pied d?immeuble, à l?échelle d?un quartier ou d?un village. Des
160 Le retour au sol des bio déchets est particulièrement utile car la majorité des sols
agricoles du territoire français sont appauvris en matières organiques.
161 Les bio déchets sont composés majoritairement d?eau rendant leur incinération
(lorsqu?ils sont traités en OMR) encore plus regrettable.
162 La date initialement fixée au 1er janvier 2025 a été avancée au 31 décembre 2023 par
la loi AGEC.
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78
expérimentations technologiques pour réduire les coûts sont actuellement
en cours mais ne peuvent pas encore être évaluées.
Toutefois, le tri des biodéchets peut se révéler délicat compte tenu
des difficultés techniques, financières et sociales pour mobiliser ces flux.
La collecte séparée des biodéchets devrait, selon l?Ademe, induire à elle
seule un coût supplémentaire de 15 à 25 ¤ par habitant.
Les modalités de tri à la source devront être adaptées à chaque
spécificité locale et il n?apparaît pas opportun de recommander, à ce stade,
une modalité plutôt qu?une autre. La diversité des solutions envisageables
et surtout la possibilité de les combiner sur un même territoire pour les
adapter aux typologies d?habitat, conduisent à ne pas imposer de mesures
généralisées trop radicales (comme la collecte sélective des biodéchets) qui
pourraient se révéler contre-productives et coûteuses.
Les EPCI présentant les politiques les plus efficaces de tri des bio
déchets sont le plus souvent engagés sur de longues périodes avec une
planification et une programmation d?actions précises associées à des
évaluations fréquentes, à l?exemple du syndicat intercommunal pour la
valorisation et le traitement des déchets ménagers du Puy-de-Dôme
(Valtom).
Une politique volontariste de collecte des bio déchets
Le syndicat intercommunal pour la valorisation et le traitement des
déchets ménagers du Puy-de-Dôme (Valtom163) assure le traitement des
DMA pour neuf EPCI du Puy de Dôme et de la Haute Loire.
Le Valtom a mis en oeuvre un schéma territorial de gestion des
déchets organiques (STGDO), adopté en 2017, pour le compte de ses
membres avec des objectifs à l?horizon 2025 en référence à 2017 : réduire
de moitié la quantité des bio déchets présents dans les OMR, tripler le
volume de bio déchets alimentaires traités et diminuer de 12 % les tonnages
de déchets verts à traiter en déchèterie.
Le schéma prévoit d?utiliser plusieurs leviers comprenant la création
d?un réseau de maitres-composteurs (9 emplois), la diffusion d?un grand
nombre de composteurs : 50 000 individuels, 225 en pied d?immeuble, près
de 1 000 en quartier et 450 en établissement.
163 Cf. rapport CRC Auvergne-Rhône-Alpes, syndicat Valtom, juin 2022.
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https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/valorisation-biodechets-agir
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-pour-la-valorisation-et-le-traitement-des-dechets-menagers-et-assimiles-du
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79
Selon les premières estimations présentées dans les rapports
d?activité du Valtom (rapport 2020), le développement du compostage
aurait permis de détourner 4 812 tonnes de bio déchets soit environ 10 % du
gisement annuel. La plus grande part de ce détournement tiendrait au
compostage individuel (3 859 t), puis au compostage en établissement
(484 t), en pied d?immeuble (275 t) et enfin en quartier (194 t).
La difficulté pour mesurer les quantités de bio déchets, distraites des
OMR ne permet pas de suivi précis de l?évolution du tri. C?est pourquoi,
comme indiqué précédemment, la quantité d?OMR collectée doit faire
partie des indicateurs-clefs pour mesurer la performance du service public
car il intègre la réduction de la part des biodéchets, principale composante
des OMR.
b) La solution du compostage de proximité
Carte n° 1 : Gestion de proximité des bio déchets
Source : ADEME
Le compostage de proximité apparaît comme un axe de progrès, y
compris en milieu urbain dense, puisqu?il permet l?accès à un équipement
pour l?ensemble des usagers, professionnels et particuliers.
Traditionnellement centré sur le compostage autonome domestique
(à l?aide d?un composteur individuel), le compostage de proximité peut
prendre d?autres formes. Le mode partagé consiste pour un établissement
à ouvrir son équipement à d?autres usagers. Le mode collectif regroupe
différents foyers avec une organisation propre sur un lieu choisi en
commun. Des expériences de compostage partagé existent aussi dans le
cadre des résidences collectives, parfois de tailles importantes, et
contribuent, outre leur intérêt intrinsèque, au renforcement du lien social.
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80
Une expérience de distribution de composteurs individuels
rapidement amortie : la CC de l?Ile d?Oléron (CCIO) 164
Depuis 2019, la CCIO a précisé et étendu sa politique en matière de
bio déchets, en décidant que le tri à la source des bio déchets serait déployé
par la distribution de composteurs gratuits (15 000 individuels
renouvelables tous les huit ans pour les usagers pouvant composter et 50 à
60 partagés pour les particuliers ne disposant pas d?assez d?espace, avec une
gestion et un suivi par les services techniques des communes ou de l?EPCI),
et par une collecte séparée des bio déchets pour les gros producteurs ne
pouvant pas composter.
Le développement du compostage individuel a permis d?éviter la
production de 700 tonnes de bio déchets en 2019 avec une économie
annuelle de coût de transfert et de traitement estimée par la CCIO à
120 000 ¤ correspondant au coût d?investissement en composteurs.
Le coût de ce schéma de développement du tri est estimé (sur les six
ans) à 10,5 M¤ mais la réduction du coût de traitement est évaluée à 14 M¤.
Une première évaluation produite en février 2021 indique un détournement
de plus de 10 % de biodéchets représentant près de 5 000 tonnes du gisement.
c) Le défi du tri des biodéchets dans l?habitat urbain dense
Le tri et la collecte des biodéchets posent des problèmes spécifiques
dans les territoires fortement urbanisés alors même que les tonnages
produits sont très importants. Les capacités de stockage limitées dans
l?habitat vertical et les désagréments (odeurs et risque sanitaire) liés à la
conservation des biodéchets comptent parmi les principaux obstacles au
développement du tri sélectif des bio déchets.
164 Cf .CRC Nouvelle-Aquitaine, décembre 2021.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-de-communes-de-lile-doleron-saint-pierre-doleron-charente-maritime
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
81
La Ville de Paris : des objectifs ambitieux
qui peinent à se concrétiser165
La Ville de Paris, compétente pour la collecte et le traitement des
ordures ménagères, s?est fixé des objectifs parfois plus ambitieux que les
dispositions législatives en matière de biodéchets. Elle projetait notamment
de généraliser leur tri à l?horizon 2020. Toutefois, en 2021, la collecte
séparée des déchets organiques n?est réalisée que dans trois
arrondissements166 et seulement auprès des ménages et des établissements
de l?administration parisienne, à l?exclusion des professionnels et
notamment des restaurateurs. En 2018, selon le baromètre
comportemental167 de la Ville, 74 % des parisiens interrogés déclaraient
jeter les restes alimentaires à la poubelle montrant les importantes marges
de progrès restant à réaliser.
Le tonnage de biodéchets collectés augmente dans les trois
arrondissements mais reste encore minime par rapport au gisement. Les
bacs d?OMR y sont encore composés à hauteur de 21 % de déchets
alimentaires168. Les 3 000 tonnes, tous usagers confondus, collectées à Paris
restent très éloignées de l?objectif à atteindre d?ici la fin de 2023.
La difficulté spécifique, souvent relevée, pour la collecte en milieu
urbain dense n?est cependant pas absolue, aussi bien en France que dans
d?autres pays comme le montrent les expériences probantes relevées par
les juridictions financières.
Ainsi, la métropole de Rennes (avec 500 aires de compostage
partagé desservant 28 000 logements) obtient un tonnage d?OMR par
habitant (185?kg par habitant en 2019) peu élevé pour une collectivité de
cette taille169. D?autres collectivités ont entrepris des démarches similaires
comme l?agglomération de Lorient depuis 2002 ou plus récemment
Grenoble. Plusieurs métropoles françaises (Paris, Strasbourg, Aix-
165 Cf. CRC Ile-de-France, mars 2022.
166 Depuis mai 2017, dans les 2ème et 12ème arrondissements étendue au 19ème
arrondissement en 2019.
167 La mairie de Paris réalise tous les deux ans un sondage comportemental auprès d?un
échantillon représentatif de 3 500 Parisiens.
168 Campagne de caractérisation des déchets de 2017. Rapportés aux OMR (752 000
tonnes en 2019), les bio déchets représentent donc 157 000 tonnes.
169 450 000 habitants
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/ville-de-paris-prevention-et-gestion-des-dechets
COUR DES COMPTES
82
Marseille, Nantes et Lyon) sont également engagées dans des
expérimentations170 de collectes sélectives des biodéchets. Même si elles
ne concernent qu?une partie des territoires métropolitains, les premiers
résultats de ces expérimentations171 indiquent une collecte entre 15 et 20 %
du gisement estimé de biodéchets et la nécessité, pour obtenir des résultats
probants d?utiliser l?ensemble des leviers possibles (collecte en PAP, en
PAV, compostage de proximité individuel ou collectif).
Des exemples étrangers confirment ces potentialités (cf. annexe n° 7
sur les comparaisons internationales), notamment en Allemagne où la
collecte spécifique des biodéchets est assurée, pour 70 % de la population,
mais aussi aux Pays-Bas et en Flandre.
Un exemple européen de collecte des biodéchets en milieu
fortement urbanisé : la ville de Milan172
Milan compte une population urbaine d?environ 1,7 millions
d?habitants (7 520 hab./km2). Milan est trois fois plus densément peuplée
que Rome et plus de 80 % de ses habitants vivent en appartement. La ville
a développé des plans ambitieux de gestion des déchets depuis les années
1990 : 55 000 points de collecte, collecte des déchets alimentaires des
habitants et des commerces en sacs compostables, recyclage organique. Elle
est passée de 35 % de collective sélective en 2011, à 50 % dès 2014 et à
61,8 % en 2022, soit plus de 800 000 tonnes collectées dont 85 % de bio
déchets. Milan est la plus grande métropole européenne à avoir mis en place
un système de collecte des déchets alimentaires à l'échelle de la ville173,
impliquant presque 100 % des habitants dès 2014.
Le compostage partagé dans les centres urbains peut être une solution
d?accompagnement, à condition que la gestion des chalets/station de
compostage soit professionnalisée : c?est la solution mise en oeuvre par le
Sybert174, syndicat en charge du traitement des déchets de Grand Besançon,
qui à côté de la collecte en PAV des biodéchets réalisée par la communauté
urbaine, assure la gestion en régie de chalets de compostage urbains.
170 Article « déchetsinfos » du 20/10/2021.
171 Installation d?abribacs en métal contenant un bac roulant dans lequel les habitants
que la collectivité a équipés de bio-seaux et sacs en plastique biodégradable ou en papier
viennent apporter de manière volontaire leurs bio déchets (hors déchets verts).
172 « Guide économie circulaire » France Urbaine et Science po, août 2021.
173 Tous les nouveaux immeubles disposent d?un espace dédié à la collecte des déchets,
géré par un résident désigné. Les citoyens y amènent leurs déchets alimentaires dans
des sacs compostables collectés deux fois par semaine en porte à porte.
174 Cf. CRC Bourgogne-Franche-Comté, janvier 2021.
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https://www.amsa.it/fr/cittadini
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-besancon-et-de-sa-region-pour-le-traitement-des-dechets-sybert-0
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
83
2 - La collecte séparée et la prise en charge des emballages
en plastique : une responsabilité à mieux partager
Le rattrapage du retard pris par la France dans le recyclage des
emballages est largement conditionné par la qualité de la collecte séparée des
emballages en plastique qui reste très inférieure aux moyennes européennes.
a) Des intercommunalités confrontées à l?extension des consignes de tri
L?extension des consignes de tri (ECT)
L?ECT consiste à demander à l?usager de jeter la totalité des
emballages plastiques (pots, barquettes, films, tubes?), dans le bac jaune
et les collecteurs de tri et non plus seulement certains d?entre eux (bouteilles
et flacons). Cette évolution facilite le geste de tri des citoyens, améliore leur
respect des consignes et augmente les quantités d?emballages collectés
(+10 % soit + 4 kg par habitant et par an). La loi prévoit cette extension à
tous les habitants d?ici fin 2022175. Malgré les progrès constatés, 70 % de la
population couverte au 31 juin 2022176, cet objectif parait difficilement
atteignable.
Pour mettre en place l?ECT, les collectivités doivent préalablement
développer des actions de communication et entreprendre de lourds
investissements d?adaptation des centres de tri à ces nouveaux flux qui
obligent les EPCI à se regrouper pour y faire face. L?ampleur de ces
investissements entraine des délais au-delà de 2022, à l?exemple du centre
de tri de la communauté d?agglomération de Valenciennes et de son
syndicat (Siaved)177.
b) Des éco-organismes à mieux responsabiliser
L?un des objectifs principaux des filières REP est, via une collecte
sélective de qualité, de détourner des OMR le plus de déchets possibles.
Or, seule la moitié du gisement de déchets issus des filières REP était en
2018 recyclée, le reste relevant donc toujours des ordures résiduelles.
175 5° de L. 541-1 du code de l?environnement issu de la loi LTECV de 2015
176 Source : Citéo
177 CRC Hauts-de France, CA Valenciennes Métropole, juin 2021
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-valenciennes-metropole-tome-2-prevention-et-gestion-des
COUR DES COMPTES
84
Comme la Cour l?a déjà souligné178, les résultats insuffisants sont constatés
dans plusieurs filières, mais concernent au premier chef les emballages
plastiques. Pour l?ensemble des emballages (dont un quart d?emballages
plastiques) le taux de recyclage est de 68 % en 2020 et 72 % en 2021 au
lieu des 75 % visés dans le cadre du cahier des charges fixé par l?État. Or
la consommation de plastiques en France est de 70 kg par an et par habitant,
dont près de la moitié pour les emballages179.
La loi AGEC du 10 février 2020 revoit le dispositif en supprimant cet
objectif de 75% de recyclage pour toutes les matières d?emballage au profit
d?une déclinaison des objectifs par matière180 qui permettra de mieux isoler
les retards de collecte des emballages en plastique. Par ailleurs, jusqu?à
présent, la filière ne pouvait pas faire l?objet de sanctions administratives en
cas de non-atteinte de ses objectifs. L?État n?avait le choix qu?entre un retrait
d?agrément aux lourdes conséquences et une amende de 30 000 ¤, peu
dissuasive au regard de la surface financière des éco-organismes. Le nouveau
système de sanctions est davantage incitatif181 et devrait permettre un suivi
plus rigoureux des obligations auxquelles les éco-organismes s?engagent à la
faveur du renouvellement de leurs cahiers des charges en 2022.
Le principal savoir-faire des collectivités territoriales concerne la
collecte, le transport, le tri et la préparation des déchets. Pour la reprise des
matières issues du tri, elles n?ont pas la responsabilité de la gestion des
déchets collectés relevant de la compétence exclusive des éco-organismes
de la filière, qui prennent en charge le traitement final de ces déchets 182.
178 Rapport public annuel 2020, « Les éco-organismes : une performance à confirmer,
une régulation à renforcer » ; rapport public annuel 2016, « Les éco-organismes : un
dispositif original à consolider ».
179 Stratégie 3R. Avril 2022
180 II de l?article L. 541-10 du code de l?environnement : les objectifs des REP doivent
être en cohérence avec les objectifs nationaux de l?article L. 541-1 : .
181 Jusqu?à présent, si les objectifs n?étaient pas atteints, la perspective de la pénalité
financière était bien inférieure aux économies permises par la non-atteinte des objectifs.
Désormais, la sanction sera équivalente à 1,5 fois l?économie attendue, car par
définition, non réalisée. (Article L. 541-9-6 du code de l?environnement).
182 Les filières dites opérationnelles sont majoritaires en nombre, mais pas en volume.
Elles prennent en charge directement les déchets des entreprises de leur secteur en
contractualisant avec les collectivités. Dans le cas du syndicat SMICTOM d?Alsace
centrale, trois types de contrats ont utilisés : l?un avec des éco-organismes pour les
meubles, piles, déchets d?équipements électriques et électroniques ; l?un pour les huiles
végétales, les radiographies, les objets réemployables (recyclerie) et les cartouches
d?encre ; et des marchés publics de prestations pour les gravats, papiers-cartons, déchets
incinérables, bois, déchets diffus spécifiques, métaux-ferrailles, plâtre, déchets verts,
huiles minérales.
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https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-02/20200225-11-TomeI-eco-organismes.pdf
https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-02/20200225-11-TomeI-eco-organismes.pdf
https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/05-eco-organismes-RPA2016-Tome-1.pdf
https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/05-eco-organismes-RPA2016-Tome-1.pdf
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599099/2021-01-01
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041583353/
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-8
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-8
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
85
Les emballages constituent à cet égard une exception. Les EPCI (ou
leur syndicat de traitement) restent aujourd?hui chargés de la
commercialisation des matières préparées pour être recyclées. Elles
doivent négocier individuellement avec les repreneurs. Les éco-organismes
des emballages sont dits « financeurs », c?est-à-dire qu?ils ne prennent pas
en charge les déchets collectés mais versent aux collectivités territoriales
80 % des coûts de collecte et de traitement qu?elles supportent. Ces éco-
organismes disposent pourtant d?une réelle compétence pour la
commercialisation sur les marchés des matières recyclées puisqu?ils
accomplissent cette mission pour les emballages collectés dans les
entreprises.
Cette compétence supplémentaire de commercialisation est lourde
pour les collectivités territoriales alors qu?elles ont encore beaucoup à
accomplir dans leurs missions principales de collecte et de tri avec
l?extension des consignes de tri. Elles doivent en outre s?adapter à un
contexte marqué par de fortes variations des cours, une augmentation
continue des tonnages et une diversification croissante des filières. Elles
sont impuissantes enfin à encourager les débouchés pour les emballages en
plastique encore peu recyclables.
Afin de répondre à ces inconvénients, les collectivités territoriales
pourraient aussi être autorisées à faire le choix, alternatif, de déléguer cette
compétence de commercialisation, sur la base du volontariat, aux éco-
organismes chargés des emballages183. Cette prise en charge devrait se
réaliser à coût zéro pour les collectivités, et donc pour les contribuables,
sur le modèle du dispositif en vigueur en Belgique (système Fost+ ; cf.
annexe n° 7).
III - Le traitement : une coûteuse modernisation
à entreprendre
Le traitement des déchets collectés regroupe leur préparation (le tri
dans des centres de tri préalable au traitement), leur valorisation (recyclage,
183 Le caractère opérationnel de l?éco-organisme a été renforcée pour la filière REP
emballages ménagers par l?arrêté du 15 mars 2022. L?éco-organisme en charge des
emballages (CITEO) expérimente l?enlèvement aux collectivités, le surtri (matière déjà
triée qui doit être triée à nouveau pour un meilleur affinage) et l?envoi vers des filières
de recyclage.
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valorisation organique et énergétique) et leur élimination (stockage,
incinération sans valorisation énergétique).
La réduction des modes d?élimination de déchets sans valorisation
visée par les objectifs nationaux impose une adaptation des capacités
industrielles de traitement à des besoins en évolution continue. Elle rend
également indispensable l?amélioration des performances de recyclage, qui
restent très variables selon les matières et selon les groupements de
collectivités en charge de la compétence traitement.
C?est pourquoi la valorisation énergétique des déchets est un mode de
traitement qu?il faut assumer, tant que la prévention et les modes de valorisation
prioritaires n?auront pas abouti à une réduction drastique des OMR.
A - L?adaptation des capacités de traitement : répondre
à l?évolution des flux, limiter la hausse des coûts
Le parc des installations de traitement s?est fortement transformé au
cours de la dernière décennie en France comme dans l?ensemble de l?Union
Européenne, avec le développement des installations de valorisation
matière (tri, compostage) et la réduction progressive du nombre des
installations de stockage comme illustré dans le graphique ci-après :
Graphique n° 13 : évolution des modes de traitement
des déchets municipaux en France sur la période 2009-2018
Source : Cour des comptes d?après données Eurostat.
L?adaptation du parc va se poursuivre. La priorité donnée à la
réduction des OMR rend encore plus cruciale l?optimisation des capacités
de traitement des unités existantes pour gérer un flux de déchets amené à
évoluer quantitativement et qualitativement au cours des prochaines
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
87
années. L?importance des investissements à réaliser par les collectivités
(voir infra) impose une planification à l?échelle régionale, en recherchant
la meilleure coordination entre EPCI voisins, afin d?en limiter l?impact sur
le coût du service.
Cette nouvelle planification régionale et cette coordination
renforcée entre EPCI pourraient favoriser un rééquilibrage des relations
contractuelles avec les grands délégataires pour la construction et la gestion
des équipements lourds, sujet qui a vocation être traitée ultérieurement par
les juridictions financières.
1 - Un coût du traitement des déchets en augmentation continue
Comme indiqué dans le chapitre 1, la dépense nationale consacrée à
la gestion des déchets184 augmente de manière continue depuis 20 ans
(hausse annuelle de 4,3 %, supérieure à la croissance du PIB) et en 2016,
la prise en charge des déchets par le SPGD a coûté en moyenne 117 ¤ (HT)
par habitant et par an.
La collecte et le traitement avec respectivement 49 ¤ et 47 ¤ par
habitant et par an, concentrent les enjeux d?optimisation de la logistique et
de l?exploitation des équipements, mais c?est le traitement des déchets qui,
avec 40 % des dépenses du SPGD, constitue la partie du service dont le
coût connaît la progression la plus dynamique, le coût de la collecte tendant
à se stabiliser.
Cette tendance haussière va s?inscrire dans la durée du fait des
dépenses induites par les investissements nécessaires à la modernisation et
à la mise aux normes d?un outil industriel français de traitement
vieillissant185. Celui-ci doit mieux répondre aux objectifs nationaux, qu?il
s?agisse d?améliorer la performance des unités de valorisation énergétique
ou d?accompagner l?extension des consignes de tri (ETC) et le traitement
des bio déchets.
Par ailleurs, la recherche d?une taille critique est indispensable pour
assurer une gestion plus efficiente du traitement. En matière de tri par exemple,
elle pousse à la création de centres de tri de grande capacité (comme pour le
184 Gestion des déchets pris en charge par le SPGD, la gestion des déchets des
entreprises ainsi que le nettoyage des rues.
185 Le parc des usines d?incinération a un âge moyen de 28 ans (Chiffres Ademe,
enquête Itom 2018).
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syndicat mixte de transport et de traitement des déchets ménagers de Lorraine
nord)186 et à la recherche de débouchés pour les matières recyclables à une
échelle départementale, voire supra-départementale, en raison des
investissements requis et de la technicité des missions.
Dans un rapport publié en 2020187, la Commission européenne a
estimé que, si la France ne semblait pas présenter un risque de manquer
l?objectif européen de 50 % des déchets municipaux recyclés en 2020, ceux
fixés pour 2035 (65 %) nécessiteraient des investissements estimés à
3,3 Md¤ pour la période 2021-2027, dont environ 1,5 Md¤ à la charge des
collectivités territoriales, soit le niveau le plus élevé de l?Union européenne
en valeur absolue. En dépit des subventions de l?État, ces investissements
devront être financés au premier chef par la fiscalité locale et
indirectement, dans le partage de l?effort, par les filières de responsabilité
élargie des producteurs.
L?ampleur et la variété des investissements que les syndicats en
charge du traitement des déchets doivent réaliser pour assurer la
modernisation de leurs équipements et disposer d?infrastructures de
traitement répondant aux enjeux et aux normes du SPGDP, parfois dans
des délais courts (Syndicat de traitement et de valorisation de la région de
Toulouse, Syndicat de traitement des déchets des microrégions Sud et
Ouest de la Réunion - Ileva) conduisent à s?interroger sur la capacité
financière et technique des acteurs locaux à porter ces projets (Syndicat
mixte de transport et de traitement des déchets ménagers de Lorraine nord).
Ces investissements exercent une pression sur le coût du service.
Quelques exemples donnent la mesure des efforts que doivent réaliser les
collectivités locales pour absorber la hausse significative du coût de
traitement. Ainsi la rénovation de l?unité de valorisation énergétique du
syndicat de traitement de la région de Besançon188 pour 58M¤ a entraîné une
augmentation de 22 % du coût de traitement des OMR. Le syndicat de
traitement de l?agglomération d?Annecy189 prévoit pour sa part que la
rénovation de son unité de valorisation énergétique pour 83 M¤ se traduira
par une augmentation de l?ordre de 10 % des tarifs facturés à ses membres.
Le syndicat de traitement départemental du Tarn TRIFYL, qui a prévu
186 Citéo n?accompagne financièrement que la création, modernisation des centres de tri
d?une capacité supérieure à 50 000 tonnes/an.
187 Rapport 2020 pour la France : évaluation des progrès des réformes structurelles et
résultats des bilans approfondis au titre du règlement UE n° 1176/2011
188 Rapport CRC Bourgogne-Franche-Comté, Sybert, janvier 2021
189 Rapport CRC Auvergne-Rhône-Alpes, Sila, juin 2021
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-transport-et-de-traitement-des-dechets-menagers-de-lorraine-nord
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-transport-et-de-traitement-des-dechets-menagers-de-lorraine-nord
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-traitement-des-dechets-des-microregions-sud-et-ouest-de-la-reunion
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-transport-et-de-traitement-des-dechets-menagers-de-lorraine-nord
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-besancon-et-de-sa-region-pour-le-traitement-des-dechets-sybert-0
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
89
d?investir quelque 190 M¤ dans ses équipements de traitement d?ici 2030,
anticipe de même une augmentation de 8 % des tarifs facturés à ses membres.
Ces décisions d?investissement se prennent dans un certain contexte
économique (besoins actuels des usagers), environnemental (hiérarchie en
vigueur des modes de traitement) ou réglementaire, qui peut rendre les
collectivités territoriales prisonnières de solutions technologiques
coûteuses. Des changements affectant le volume ou la nature des déchets,
des recettes de l?énergie produite moins assurées (surtout l?électricité avec
la fin des prix garantis de rachat et la modulation de la TGAP en fonction
des performances énergétiques et environnementales des installations)
peuvent rendre ensuite ces installations obsolètes ou mal dimensionnées.
La remise en cause par le législateur du tri mécano-biologique (TMB)190
comme solution de prétraitement des OMR, un temps privilégié pour
limiter la valorisation énergétique et l?élimination des déchets, illustre ce
risque. Plusieurs syndicats mixtes ayant investi dans ce procédé se trouvent
contraints de réviser leur stratégie industrielle (syndicat de traitement de la
région de Villerupt, Syndicat départemental de Vendée Trivalis191).
D?autres organismes qui ont fait des choix de technologies non matures,
comme une valorisation énergétique basée sur la production de biogaz
connaissent également des difficultés (Syndicat traitement déchets du
Douaisis-Symevad).
Dans ce contexte, les choix technologiques et le dimensionnement
des installations (fours, centres de tri, méthaniseurs) nécessitent un effort
d?anticipation et d?adaptation lors de la programmation des équipements,
afin d?éviter d?investir massivement dans des solutions de traitement dont
les coûts de fonctionnement ne seraient pas soutenables. Une telle analyse
implique une capacité d?expertise des collectivités territoriales et de leurs
groupements pour, le cas échéant, remettre en question les offres
190 Le procédé de traitement mécano-biologique permet d?extraire la fraction organique et
bio dégradable des déchets ménagers par des opérations mécaniques de tri, en la séparant
des autres matériaux recyclables (métaux, plastiques et verre) ou non. Les déchets
organiques issus du TMB sont traités biologiquement pour devenir du compost ou du
biogaz ; les déchets non recyclables sont, eux, broyés et séchés pour être transformés en
produits « stabilisés » avant envoi en décharge ou en usine d?incinération. Avec la loi
LTECV du 17 aoûts 2015, qui généralise le tri à la source des biodéchets et a fortiori avec
la loi AGEC du 10 février 2020, qui interdit d'utiliser la fraction fermentescible des
déchets issus de ces installations dans la fabrication de compost à partir de 2027, le TMB
comme solution de prétraitement des OMR perd de sa pertinence.
191 Rapport CRC Pays de la Loire, mars 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-trivalis-vendee
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90
techniques du secteur très concentré de l?industrie des déchets. L?État
intervient par l?intermédiaire de l?Ademe, mais les conseils de l?agence
sont limités aux installations de tri qu?elle finance (il en va de même pour
l?éco-organisme CITEO). Les maîtres d?ouvrage locaux (EPCI et syndicats
de traitement) en revanche, peuvent s?appuyer, au-delà des bureaux
d?études qu?ils mobilisent, sur des associations telles qu?Amorce192qui
assure une mise en commun des expertises publiques locales.
2 - La nécessité d?une meilleure coordination des investissements
Pour adapter la capacité de traitement aux besoins, surmonter les
difficultés d?amortissement induites par des investissements lourds et
éviter une concurrence néfaste entre des projets d?équipements publics
nécessitant une taille critique, une bonne coordination entre structures et
entre territoires est indispensable.
Certains acteurs privilégient délibérément un sous-dimensionnement de
leur équipement par rapport à la quantité de déchets traités, en cohérence avec
la priorité donnée à la prévention et à la diminution des quantités (Grand
Besançon193, Grenoble Alpes Métropole194, Grand Paris195). D?autres au
contraire, confrontés à un surdimensionnement du fait de la baisse des
volumes d?OMR, sont contraints de rechercher des volumes de déchets
extérieurs au territoire ou issus du secteur privé pour assurer l?équilibre
financier des installations et éviter les augmentations du coût du traitement
(Syndicat mixte Flandre Morinie196, Syndicat d'Études et de Réalisations
pour le Traitement intercommunal des Déchets de Belfort197).
Pour gérer la période de transition durant laquelle les équipements
de traitement ne sont pas correctement dimensionnés ou répartis et pour
assurer la rentabilité des investissements réalisés, des coopérations doivent
être nouées à une échelle élargie, entre organismes ayant besoin d?exutoires
à leurs déchets et ceux qui ont intérêt à les accueillir pour couvrir leurs
coûts marginaux d?exploitation. Prendre l?initiative de ces partenariats dès
l?élaboration des projets d?investissement comme l?a fait la métropole
192 Association nationale des collectivités territoriales et de leurs partenaires pour la
gestion de l?énergie, des déchets, de l?eau et de l?assainissement, en faveur de la
transition écologique et de la protection du climat.
193 Rapport CRC Bourgogne-Franche-Comté, CU de Besançon, novembre 2021
194 Rapport CRC Auvergne-Rhône-Alpes, septembre 2021
195 Rapport CRC Ile de France, Ville de Paris
196 Rapport CRC Hauts-de-France, août 2021
197 Rapport CRC Bourgogne-Franche-Comté, Sertrid, décembre 2016
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-urbaine-du-grand-besancon-doubs
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/grenoble-alpes-metropole-isere-1
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/ville-de-paris-prevention-et-gestion-des-dechets
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-flandre-morinie-smfm-dont-enquete-sur-la-prevention-et-la-gestion-des
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-detudes-et-de-realisations-pour-le-traitement-intercommunal-des-dechets
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91
grenobloise avec ses communes limitrophes pour le renouvellement et
l?exploitation de son centre de tri et de son unité de valorisation
énergétique, évite d?y être contraint. Ainsi, le Syndicat Valor 3E198 (Maine-
et-Loire), confronté à une mauvaise évaluation et à une saturation des
capacités de ses installations suite à l?extension de la consigne de tri aux
plastiques et en attendant le projet de centre de tri interrégional, a enregistré
une détérioration de ses performances de tri.
Le niveau régional serait le plus pertinent pour organiser une
programmation et une coordination optimales des investissements. En
principe, les plans régionaux (PRPGD et Sraddet) adoptés en 2018-2019,
doivent planifier les besoins en installations de traitement sur les
12 prochaines années. En pratique, ils manquent souvent de déclinaison
temporelle et géographique détaillée des actions à mener pour atteindre les
objectifs du plan. Pour assurer cependant une mise en oeuvre effective des
objectifs arrêtés dans les plans régionaux, les projets d?investissement des
équipements structurants doivent y être indiqués avec la précision exigée
par la loi. Celle-ci prévoit que les plans doivent mentionner toutes « les
installations qu'il apparaît nécessaire de créer, d'adapter ou de fermer afin
d'atteindre les objectifs » nationaux (5° de l?article R. 541-16 du code de
l?environnement).
Or, dans leur volet prospectif, les plans ne recensent le plus souvent
que les installations de stockage et d?incinération sans valorisation
énergétique et les limites de capacité qui sont visées par les articles R.541-
17 et R.541-19 du code de l?environnement. La formulation vague des
objectifs souvent constatée dans les plans (Ile de France, Bourgogne-
Franche-Comté, Bretagne, Rhône-Alpes-Auvergne) quant à la localisation
des installations, au type de déchets et à l?évolution des quantités associées,
prive d?effectivité leur opposabilité aux décisions locales d?investissement.
La répartition cohérente des équipements structurants implique que la
région joue pleinement son rôle de planificateur (voir l?analyse des
12 plans régionaux en annexe n°3).
Compte tenu de l?évolution continue du volume, de la nature des
déchets et des technologies de traitement, une animation dynamique de leur
plan par les régions, de manière à actualiser les objectifs régionaux en
fonction de ces évolutions est une autre condition de la réussite de la
planification régionale. Pour assurer une localisation des besoins en
équipements dans les documents d'urbanisme en fonction des règles
établies dans leurs plans et parvenir à une adaptation des exutoires aux
198 Rapport CRC Pays de la Loire, septembre 2021
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besoins, les régions doivent associer l?ensemble des acteurs (collectivités
territoriales, filières, Dréal, Ademe) et offrir une assistance technique et un
accompagnement financier des projets d?équipement, comme le font déjà
certaines régions (Provence-Alpes-Côte d?Azur, Occitanie, Grand Est ou
Normandie) et comme d?autres ont prévu de le faire (Nouvelle-Aquitaine).
B - Le recyclage et la valorisation : des performances
et une organisation à améliorer
A la faveur de l?amélioration de la collecte et du tri sélectif, des
volumes croissants de déchets ont été détournés ces dix dernières années
de l?enfouissement et de l?incinération.
Ces résultats sont le fait des évolutions réglementaires qui, tout en
affichant des objectifs de recyclage plus ambitieux, ont contraint les
organismes en charge à mieux exploiter les gisements de matières
recyclables (extension de la consigne de tri) et en ont facilité l?exploitation
(augmentation et meilleure structuration des filières REP). Grâce à
l?ensemble de ces mesures, le taux de recyclage français est aujourd?hui de
44 %199.
Sous réserve de l?harmonisation des données européennes prévue en
2023,200 ce taux situe la France légèrement en dessous de la moyenne
européenne (47 %), comme le montre le graphique ci-dessous. Un chemin
significatif reste donc à parcourir pour rejoindre les pays les plus avancés,
comme l?Allemagne, l?Autriche, les Pays-Bas et les pays scandinaves et
atteindre les objectifs actuels de valorisation matière201 que nous nous
sommes fixés 55 % en 2020 et 65 % en 2025, soit 21 points de plus que les
dernières données disponibles).
199 Le taux de recyclage dans les données Eurostat comprend la valorisation matière
ainsi que la valorisation organique (compostage et méthanisation).
200 Décisions d?exécution (UE) de la Commission 2019/665 du 17/4/ 2019, 2019/1004 du
6/7/2019 et 2019/1885 du 6/10/2019. Les pays seront plus ou moins impactés par ces
réformes statistiques en fonction de leur mode actuel de calcul. La situation relative de la
France pourrait s?en trouver améliorée car elle pratique déjà la prise en compte préconisée
par l?UE des seuls flux sortants des centres de tri (orientés vers une filière de valorisation)
et non la méthode d?autres États dont l?Allemagne qui comptabilise aussi les flux entrants
(incluant les refus de tri et autres flux à ne pas prendre en compte comme les
mâchefers?). Pour l?Allemagne par exemple, cette nouvelle comptabilisation aboutirait
à dégrader 750 000 tonnes de déchets de la catégorie « recyclés » à la catégorie « stockés »
soit une variation de 1,8 % d?une catégorie à l?autre.
201 4° de L. 541-1 du code de l?environnement issu de LTECV.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
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Graphique n° 14 : pourcentage des déchets municipaux recyclés
dans la production totale de déchets municipaux (2018)
Source : Cour des comptes d?après Eurostat. N.B : données non disponibles pour Irlande, Grèce et Chypre.
Comme le montre le graphique ci-dessous qui retrace l?un des six
indicateurs-clefs recommandés dans ce rapport, ces objectifs paraissent
difficilement atteignables, compte tenu du rythme de progression
enregistré au cours des années précédentes.
Si des territoires à dominante rurale, où il est plus aisé de détourner
la part fermentescible des OMR, parviennent déjà à atteindre des taux de
valorisation de l?ordre de 75 %, très supérieurs aux objectifs nationaux
(Syndicat Mixte à Vocation Unique pour la Valorisation et l'Élimination
des Ordures ménagères de Haute Saône202, Communauté d?agglomération
Clisson Sèvre et Maine203), c?est loin d?être le cas des territoires urbains.
En 2019, Paris se situait à seulement 27 % tandis que le syndicat chargé du
traitement des déchets de Besançon, agglomération pourtant engagée de
longue date dans des démarches de prévention et de valorisation des
déchets, présentait un taux de valorisation matières de 60 %.
202 Rapport de la CRC Bourgogne-Franche-Comté, juillet 2020.
203 Rapport de la CRC Pays de la Loire, octobre 2021.
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Graphique n° 15 : (Indicateur-clef n°5) valorisation matière204
Source : Cour des comptes
Si la France souhaite atteindre ses objectifs en matière de recyclage
des déchets, elle doit mieux mobiliser tous les leviers à sa disposition, au
plan national et au plan local.
204 Quantité de déchets non dangereux non inertes, mesurés en masse faisant l'objet
d'une valorisation sous forme de matière, notamment organique
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1 - Une stratégie industrielle nationale à accentuer
en faveur de la filière de recyclage du plastique
a) Des résultats de valorisation très inégaux selon les matières
qui doivent orienter les actions de l?État
La performance de la valorisation d?une matière recyclable recouvre
deux aspects : l?un porte sur la quantité de matière recyclée rapportée à la
quantité mise sur le marché (taux de recyclage) ; l?autre porte sur la
quantité de matière recyclée intégrée dans un nouveau cycle de production
(taux d?incorporation205).
Les performances de recyclage et d?incorporation sont très variables
d?un matériau à l?autre en fonction de différents critères notamment de
leurs pr0opriétés physiques (l?aluminium et le verre sont recyclables à
l?infini, pas les autres matières), de la maturité de la filière de recyclage et
de régénération, du prix de la matière recyclée par rapport au cours variable
des matières premières, des coûts de production, de l?intégration ou non de
la filière et de l?existence d?une demande pour la matière recyclée.
Ainsi, l?acier et la fonte recyclés ou le verre recyclé avec
respectivement 49 % et 56 %206 des matériaux utilisés dans les productions
connaissent de très bons taux à la fois de recyclage et d?incorporation. De
même, le papier-carton, première industrie de recyclage en France malgré
ses difficultés récentes207 connaît un taux d?incorporation de 67 % pour
92 % d?emballages recyclés.
205 Dix filières matériaux sont concernées par l?incorporation (métaux ferreux, métaux
non ferreux (aluminium, cuivre, zinc, plomb), verre, papiers-cartons, plastiques,
déchets inertes du BTP, et bois https://www.ademe.fr/bilan-national-recyclage-bnr-
2008-2017-acv-flux-dechets-recycles
206 L?industrie verrière connait un taux de collecte de 78 % (contre 76 % dans l?UE)
mais avec 100 % d?utilisation de la matière recyclée (soit 58 % de substitution de
matières vierges par des MPR). La France dispose d?industries de recyclage du verre
en nombre suffisant (14 centres de traitement, 22 verreries de verre creux et 5 verreries
de verre plat). La France est le 2ème producteur européen de verre d?emballage
(bouteilles, flacons et pots) derrière l?Allemagne.
207 Avec un taux de collecte de 79 % (contre 72 % en moyenne européenne) et un taux
d?utilisation des papiers-cartons recyclés de 66,3 %, cette industrie qui conserve une
bonne capacité pour la préparation et l?utilisation des cartons (emballage, hygiène) a
été touchée par la fermeture en juin 2020 de l?usine de La Chapelle Darblay qui a fait
perdre à la France toute capacité de recycler du papier (papier écriture et presse).
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Globalement, en 2017, la France incorporait environ 17 Mt de
matières recyclées dans ses processus de fabrication (hors bois et granulats
du BTP). L?Ademe souligne à juste titre que si ces quantités peuvent
paraître faibles au regard de la consommation en matières premières de
l?économie française (787 Mt), elles sont, en revanche, primordiales dans
l?approvisionnement de certaines de ces matières premières.
En revanche pour les plastiques, comme le montre le tableau ci-
dessous, les résultats obtenus en France sont très en retrait, tant en termes
de taux de recyclage que d?incorporation.
Tableau n° 3 : taux de valorisation (recyclage et incorporation)
des emballages ménagers et non ménagers en France en 2018
En tonnes
Déchets
d'emballages
produits
Recyclage/
déchets
produits
Valorisation
énergétique/
déchets produits
Enfouissement/
déchets produits
Taux
d?incorporation
Plastique 2 356 851 27 % 43 % 30 % 6 %
Bois 2 404 392 31 % 9 % 60 %
Acier 464 213 91 % 0 % 9 % 49 %
Aluminium 65 673 63 % 8 % 29 % 50 %
Verre 2 858 804 76 % 8 % 16 % 58 %
Papier et
carton
5 062 561 92 % 4 % 3 % 67 %
Autres 5 301
Total 13 217 795 66 % 13 % 21 %
Source : Cour des comptes d?après le rapport sur la valorisation des emballages en France,
Chiffres-clés 2020 et bilan national du recyclage 2008-2017
Au regard des taux de recyclage actuels des matières plastiques, les
nombreux objectifs fixés208 sont peu réalistes si aucune action n?est
envisagée pour corriger les obstacles à leur recyclage et incorporation. Pour
la sous-catégorie des déchets plastiques que sont les emballages, le taux de
recyclage français plafonne autour de 26 % depuis une dizaine d?années
(26,9 % en 2018). Ce chiffre est éloigné des taux allant jusqu?à près de 50 %
en Allemagne et aux Pays-Bas, ainsi que de ceux des autres filières françaises
de recyclage et des objectifs fixés (50 % en 2025 et 55 % en 2030).
208 Comme, par exemple, tendre vers 100 % de plastique recyclé au 1er janvier 2025 ou
réduire de 20 % les emballages plastiques à usage unique mis sur le marché pour les
cinq prochaines années (2021-2015).
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b) Les difficultés spécifiques du recyclage des plastiques :
une industrie à accompagner
L?impact du plastique est désormais bien connu (cf. annexe n°8) sur
l?empreinte carbone209, la santé210 et la biodiversité. Les juridictions
financières ne méconnaissent pas ces risques,211 même si elles ne les ont
pas traités spécifiquement dans ce rapport.
Pour réduire les risques, il convient d?agir tant sur la collecte que sur
le traitement et tant sur les plastiques facilement recyclables
(principalement les bouteilles) que sur les autres plastiques.
De nouvelles pistes doivent être envisagées pour réduire les déchets
plastiques encore trop présents dans les OMR. Outre l?extension des
consignes de tri et les actions pour réguler les emballages en plastique212,
l?article L. 541-10-11 du code de l?environnement prévoit la possibilité de
mettre en place une consigne sur les bouteilles en plastique après 2023 si
l?analyse des performances de recyclage montre que l?objectif européen
fixant à 90 % le taux de collecte de ces bouteilles en 2029, risque de ne pas
être atteint.
Le recyclage et l?utilisation du plastique recyclé se heurtent en
premier lieu à des freins technologiques communs à tous les pays en raison
de la variété et de la complexité des usages et des résines. La rentabilité du
plastique recyclé est par ailleurs affectée par sa grande sensibilité au cours
des matières premières vierges.
En France, le manque de maturité de la filière explique aussi en
grande partie le retard du recyclage plastique. À ce jour, il n?y existe pas
encore d?industries de recyclage pour toutes les résines et celles qui
209 En 2020, la production, l?élimination et l?incinération de matières plastiques avaient
rejeté autant de gaz à effet de serre que 189 centrales à charbon (3,8% des émissions
mondiales soit plus que le secteur de l?aviation). D?ici à 2050, le plastique pourrait
représenter 15 % du budget carbone mondial (cf. Sénat, Pollution plastique : une bombe
à retardement décembre 2020 et Stratégie 3R, avril 2022).
210 L?effet de l?essaimage des microparticules plastiques et des nanoparticules, y
compris lors du traitement des déchets, sur la santé humaine ne sont pas encore
parfaitement connus. On constate qu?un être humain ingère en moyenne chaque
semaine l?équivalent en plastique du poids d?une carte de crédit (5 grammes).
211 Les 3/4 des déchets plastiques produits dans le monde restent rejetés dans les milieux
naturels et se décomposent en micro- plastiques qui entrent dans la chaîne alimentaire.
1,4 million d?oiseaux et 14 000 mammifères meurent chaque année de l?ingestion de
plastiques.
212 Art. L. 541-10-17 du code de l?environnement et décret du 29 avril 2021 « 3R ».
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https://www.senat.fr/espace_presse/actualites/202012/pollution_plastique.html
https://www.senat.fr/espace_presse/actualites/202012/pollution_plastique.html
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041555598/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599010/
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98
existent sont distinctes des industries chimiques qui produisent les résines
vierges (contrairement aux autres filières où les producteurs de matières
vierges gèrent la filière de recyclage). Un rapprochement entre filières va
cependant se développer en raison de la nécessité pour les metteurs sur le
marché d?objets plastiques de développer des solutions d?écoconception et
des décisions prises par plusieurs pays de fermer leurs frontières aux
déchets en provenance de l?Union européenne.
Pour accélérer cette mutation, des soutiens financiers importants ont
été déployés par l?État à partir de 2021, notamment à travers des aides
financées par l?Ademe au titre des plans de relance et de France 2030.
Quelque 870 M¤ de soutiens financiers ont ainsi été affichés pour le
développement du recyclage des plastiques : 200 M¤ dans le plan de
relance, 300 M¤ dans le plan France 2030 et 370 M¤, pour la stratégie 3R
« recyclabilité, recyclage et réincorporation », dans le dernier programme
d?investissement d?avenir. Les crédits réellement affectés à cette action
pourraient toutefois être inférieurs à cette somme en raison de reports d?un
plan à l?autre. La stratégie 3R, arrêtée 2021, fait du recyclage du plastique
une de ses priorités et doit favoriser la constitution d?une filière française
intégrée de collecte, tri et de recyclage des plastiques. Par ailleurs, le
nouveau cahier des charges de la filière emballage arrêté en mars 2022
prévoit des incitations tarifaires pour pousser les entreprises à un recours
croissant à des emballages qui incorporent des plastiques recyclés.
Pour donner une cohérence à toutes ces actions, le plan national
devrait intégrer un volet industriel substantiel sur la plasturgie, cohérent
avec le partenariat conclu entre l?État et la filière. L?État devra veiller à ce
que les nombreuses mesures de soutien se traduisent effectivement par une
consolidation de la filière.
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Graphique n° 16 : évolution du taux de recyclage des déchets
d?emballages plastiques dans l?Union européenne 2009-2018 (en %)
Source : Cour des comptes à partir des données Eurostat
En outre, la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le
gaspillage et à l?économie circulaire a introduit des règles plus coercitives à
l?encontre des plastiques non recyclés. Depuis août 2020, les déchets ayant
fait l'objet d'une collecte séparée en vue de la réutilisation ou un recyclage ne
peuvent plus être enfouis ou incinérés. Cette interdiction s?applique en
particulier aux emballages plastiques, collectés séparément depuis janvier
2022. Par ailleurs, pour les plastiques qui resteront collectés en mélange
(dans les ordures ménagères résiduelles, sous forme d?encombrants ou dans
les déchèteries), une interdiction progressive de mise en décharge s?applique
progressivement à partir du 1er janvier 2022 jusqu?au 1er janvier 2030, avec
l?entrée en vigueur du décret du 16 septembre 2021 relatif aux conditions
d'élimination des déchets non dangereux.
Au regard des résultats constatés chez nos voisins, une telle mesure
devrait permettre d?améliorer notoirement les performances du recyclage,
en France. Les pays européens ayant décidé cette interdiction il y a une
vingtaine d?années, sont en effet également les pays présentant à la fois les
meilleurs taux de recyclage et la meilleure utilisation, par l?incinération
avec valorisation énergétique, du fort pouvoir calorifique des plastiques
comme le montre le graphique n°13 ci-dessus.
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2 - Des capacités de tri et de recyclage à consolider
Pour donner leur plein effet aux mesures d?élargissement du tri à la
source (plastiques et bio déchets) et répondre à l?augmentation continue
des flux collectés en déchèteries, des efforts d?adaptation très importants
doivent être réalisés sur les équipements de tri.
Au cours des vingt dernières années, le nombre de centres de tri a
augmenté de 50 % (entre 2000 et 2016 213) permettant de prendre en charge
des tonnages qui ont plus que doublé (4,9 Mt de déchets envoyées en
centres de tri en 2000 contre 11,1 Mt en 2016).
La massification des flux de matières et le développement de la
valorisation économique et industrielle des déchets d?emballages impose
l?automatisation, l?augmentation des capacités et la haute qualité du tri.
Or, la France se caractérise par un coût élevé, une performance
insuffisante et une dispersion sur le territoire de centres de tri214 de taille
modeste215, qui résultent de l?organisation du SPGD au niveau des EPCI.
Pour tendre vers les objectifs de recyclage fixés par le code de
l?environnement et rendre les centres de tri plus performants dans la
séparation des matières216, des investissements sont donc nécessaires.
Le principal défi à relever est l?extension des consignes de tri (ECT)
aux plastiques. La plupart des organismes concernés ont déjà adapté leurs
équipements de tri pour répondre à ces nouveaux flux ou sont en train de
le faire, avec des soutiens financiers de Citéo et de l?Ademe. Un nombre
important d?EPCI ne dispose cependant pas en 2022 de centres de tri
capables d?accueillir l?ensemble des emballages plastiques et se voit donc
contraint de différer la mise en oeuvre des nouvelles consignes.
Pour les EPCI qui ont mis en place la mesure d?extension en lien
avec leur syndicat de traitement, les résultats obtenus sont contrastés : ils
montrent les efforts à poursuivre pour accompagner les changements,
comportementaux et de mode de gestion, induits par cette mesure. Ces
efforts sont nécessaires pour éviter l?augmentation des taux de refus de tri
213 Il s?agit du nombre total de centres de tri sur le territoire accueillant des DMA (cela
recouvre ainsi également des centres qui trient principalement des déchets issus des
activités économiques). Source : Ademe, enquête ITOM, 2018
214 Taille moyenne par centre de tri de 12 000 tonnes et zone moyenne de chalandise de
250 000 habitants pour 500 000 habitants en Espagne, un million d?habitants en
Allemagne et en Belgique. Étude prospective sur la collecte et le tri des déchets
d?emballages et de papier dans le SPGD, réalisé pour l?Ademe (mai 2014).
215 Cour des comptes, Rapport public annuel 2016, Tome I. Les éco-organismes : un
dispositif original à consolider.
216 En 2016, sur 11,1 Mt de déchets reçus dans les centres de tri recevant des DMA,
6,6 Mt de déchets triés ont été envoyés en recyclage.
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101
souvent constaté après l?instauration de l?extension. Certains organismes
ont mené l?extension avec succès et ont obtenu une réduction ou une
stabilisation des volumes d?OMR tout en assurant un meilleur recyclage
des plastiques (Syndicat mixte pour le développement durable de l?Est Var,
Grand Besançon). D?autres ont engagé la mesure mais ont mal anticipé
l?augmentation des volumes associés, conduisant à une valorisation
énergétique de flux voués initialement au recyclage (Syndicat de traitement
Valor 3E). De manière générale, les EPCI et leurs syndicats de traitement
doivent profiter des évolutions en cours pour s?interroger sur le
dimensionnement des installations de tri en lien avec leur zone de
chalandise, comme l?a fait le Syndicat de valorisation des ordures
ménagères de la Marne, en concevant un nouveau centre de tri mutualisé
avec les acteurs du territoire voisin de la Meuse.
Parallèlement, les volumes croissants de déchets collectés en
déchèteries (en moyenne de l?ordre de 40 % de la masse totale des DMA
et dépassant dans certains territoires la masse des OMR) poussent les
syndicats de traitement à se doter de nouvelles capacités de tri pour mieux
valoriser les matières collectées.
Même si le développement progressif de nouvelles filières REP
contribue à structurer les débouchés, des volumes importants de déchets
restent collectés dans des bennes « tout-venant » dans les déchèteries et
sont donc incinérés ou enfouis. L?adoption d?une organisation et de
moyens adaptés pour assurer le traitement de ces flux revêt donc une
importance croissante. Certains organismes se dotent d?unités de tri
spécifiques aux déchets occasionnels (déchèteries et encombrants) pour
répondre à cet enjeu (installation de tri-massification de l?agglomération de
Besançon, valorisation en combustibles solides de récupération par les
syndicats Sytraival - Beaujolais-Dombes et Trifyl).
3 - Le développement de la valorisation organique
Les déchets ménagers organiques collectés séparément
(principalement déchets verts, déchets alimentaires et bio déchets collectés
à la source), lorsqu?ils ne sont pas compostés par les ménages eux-mêmes,
sont principalement orientés vers des plateformes de compostage217 et plus
marginalement, vers des installations de méthanisation218.
217 657 installations traitaient 8,7 Mt de biodéchets en 2018, Ademe, enquête ITOM 2018
218 13 unités de méthanisation étaient en activité en 2018, pour seulement
240 000 tonnes de biodéchets traités, Ademe, enquête ITOM 2018
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102
Avec le développement du tri à la source des biodéchets (et
probablement les collectes sélectives), le besoin en exutoire va aller
croissant. Les collectivités vont donc être amenées soit à mettre en place
leurs propres installations, soit à s?appuyer sur des installations existantes,
et notamment les unités de méthanisation agricole qui sont encouragées par
les politiques publiques depuis plusieurs années.
Le nombre de plateformes de compostage va continuer de croitre
régulièrement et, s?agissant du parc d?unités de méthanisation, il se
développera du fait de l?extension aux DMA de l?accès aux installations
auparavant consacrées aux seuls déchets agricoles ou agroalimentaires. Le
nombre d?unités de traitement mécano-biologique des OMR est appelé quant
à lui à décroitre. La production de compost à partir des installations de TMB
étant proscrite à compter de 2027, les collectivités gestionnaires de ces
équipements sont contraintes de réorienter progressivement les flux de
déchets vers la méthanisation et vers la production de combustibles solides
de récupération (CSR), sans certitude de pouvoir rentabiliser les équipements
associés à ce nouveau procédé de valorisation (Syndicat Trivalis).
Graphique n° 17 : évolution du parc d?installations de traitement
Source : Ademe, Enquête ITOM 2018
TMB : Tri mécano-biologique
ISDND : Installation de stockage de déchets non dangereux
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-trivalis-vendee
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
103
C - La valorisation énergétique, un mode de traitement
à assumer pour les déchets non recyclables
En France, les déchets ménagers et assimilés non recyclés sont
principalement valorisés par la production d?énergie ou mis en décharge.
Ce dernier mode de traitement (on parle aussi de stockage ou
d?enfouissement) ne doit concerner que les DMA ne pouvant faire l?objet
d?aucune valorisation. Encore supérieur à la valorisation énergétique il y a
15 ans, l?enfouissement des déchets a vu sa part relative diminuer année
après année. Alors qu?il représentait encore en France 30 % du traitement
des déchets produits en 2009, ce taux est passé à 21 % en 2018, pour une
moyenne européenne à 23 %. Les installations de stockage, dont le nombre
a été divisé par deux entre 2000 et 2016, ont été modernisées et agrandies
avec une récupération et une valorisation des gaz qui s?en échappent.
Ce besoin de modernisation des installations de stockage est
particulièrement marquant dans un contexte insulaire. Ainsi, en Corse, le
refus de l?incinération et l?absence d?équipements de traitement se traduit
par un taux d?enfouissement de plus de 2/3 des déchets.
Un exemple de problématique insulaire : l?île de La Réunion219
L?île de La Réunion, territoire complexe (rural, urbain et touristique
à la fois, composé de cinq EPCI et de deux syndicats mixtes de traitement
des déchets) est confronté à des enjeux spécifiques. La densité contrastée de
population sur un territoire au relief accidenté, parfois peu accessible, et la
forte volumétrie des déchets verts ont un impact sur les modalités techniques
et les coûts de gestion des déchets. Avec une part de plus de 83 % (hors
déchets verts), l?enfouissement reste le principal mode de traitement alors
que les sites de stockage sont en état de saturation.
219 Cf. CRC la Réunion, SYDNE, septembre 2021, et ILEVA, avril 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-traitement-des-dechets-du-nord-et-de-lest-de-la-reunion-sydne
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-du-territoire-de-la-cote-ouest-tco-cahier-2-la-reunion
COUR DES COMPTES
104
L?enjeu central des syndicats de traitement de l?île réside donc dans
la mise en oeuvre rapide d?une solution alternative à l?enfouissement. Le
recyclage apparaît comme une solution peu rentable en raison des coûts de
transport des matériaux vers la métropole ou d?autres pays. La taille limitée
du territoire restreint les capacités de production et les débouchés des
matières recyclées. À l?inverse, la construction d?une unité de valorisation
énergétique (UVE) constitue une solution qui concilie les enjeux
énergétiques et de gestion des déchets. Tel est le choix réalisé par le syndicat
du sud et ouest ILEVA pour faire face à la saturation du site de Pierrefonds.
L?extension des zones de stockage demeure une alternative dont la
pérennité n?est plus assurée, ce qui conduit également le syndicat du nord
et de l?est (SYDNE) à envisager la mise oeuvre d?une UVE. Cependant le
montage de ce projet se heurte à des difficultés juridiques et économiques
qui retardent la mise en service d?une filière de valorisation énergétique des
déchets pour près de 40 % de la population de l?île.
Comme le montre le graphique ci-dessous qui illustre l?un des six
indicateurs-clefs, la France, en diminuant l?enfouissement au profit des
filières de valorisation matière (recyclage) ou organique (bio déchets) a
déjà atteint une partie des objectifs qu?elle s?était fixée, à savoir une
réduction de 30 % entre 2010 et 2020 des quantités de déchets (DNDDI)
admis en installation de stockage (loi LTECV).
Si l?amélioration constatée au cours de la dernière décennie se
poursuit dans les prochaines années au même rythme, la part des déchets
enfouis restera encore trop élevée, pour atteindre nos objectifs (- 50 % entre
2020 et 2025 ; - 10 % au plus du poids des DMA produits d?ici 2035220) et
a fortiori en comparaison des pays européens qui sont à la fois les plus
performants en termes de recyclage et qui ont aussi éliminé la mise en
décharge.
220 7 bis art. L. 541-1 du code de l?environnement.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043974936/2022-06-14
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
105
Graphique n° 18 : indicateur-clef n°6 ? Stockage (Quantités de
déchets non dangereux non inertes admis en installation de stockage)
Source : Cour des comptes
La stratégie d?élimination de la mise en décharge, avec une TGAP
fortement désincitative221 et l?interdiction de certaines catégories de
déchets, oriente la France dans la même direction que les États (Pays-Bas,
Autriche, Belgique, Allemagne) qui ont adopté ce type de mesure depuis
les années 1990.
Cette application plus ferme du principe pollueur-payeur rend
caduque la politique d?élimination et le choix prioritaire de l?enfouissement
qu?avaient fait de nombreux organismes par souci de limitation des coûts de
traitement et qu?ils vont devoir revoir rapidement (syndicat de traitement de
l?agglomération de Lorient, syndicat départemental de traitement Valor
Aisne, communauté d?agglomération du Grand Villeneuvois, syndicat
221 Le syndicat de collecte et de traitement de la Dordogne SMD3, devra régler 65 ¤ la
tonne en 2025 pour ses installations de stockage des déchets, contre 17 ¤ en 2019.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-departemental-de-traitement-des-dechets-menagers-de-laisne-valoraisne-2
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-du-grand-villeneuvois-cagv-casseneuil-lot-et-garonne-0
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-departemental-delimination-des-dechets-de-laube-sdeda
COUR DES COMPTES
106
départemental d?élimination des déchets de l?Aube). Pour gérer la transition,
tant que la prévention et les modes de valorisation prioritaires n?auront pas
abouti à une réduction drastique des OMR, la valorisation énergétique va
rester un mode de traitement indispensable.
La valorisation énergétique
En 2020, 35 % des déchets municipaux produits en France étaient
valorisés énergétiquement, sous forme d?électricité de chaleur ou de
carburant, ce qui place la France au-dessus de la moyenne européenne à
29 %, selon Eurostat. Proche de l?Allemagne, du Benelux, de l?Autriche, ce
taux reste toutefois inférieur à celui des pays scandinaves qui atteignent des
taux supérieurs à 50 %.
Les tonnages incinérés avec production d?énergie ont progressé entre
2000 et 2016 passant de 10 à 14,4 Mt, soit + 40 %. Cette augmentation s?est
produite dans un contexte de limitation des émissions de polluants des
usines d?incinération222 et sans augmentation équivalente du nombre
d?usines. Leur nombre est passé de 109 en 2000 à 118 en 2018. La part de
l?incinération au sein des différents modes de traitement n?ayant pas
augmenté, cette hausse ne s?est donc pas faite au détriment du recyclage.
L?analyse des besoins permet de prévoir que le nombre d?unités de
valorisation énergétique (UVE) restera globalement stable, même si des
besoins ponctuels existent. Le parc sera en revanche contraint de se
moderniser pour s?aligner sur la norme européenne de rendement
énergétique (44 % des DMA sont incinérés en France dans des
incinérateurs n?atteignant pas le seuil attendu223). L?adoption obligatoire
des meilleures techniques disponibles au niveau européen d?ici 2023224
permettra, parallèlement, de limiter encore plus drastiquement l?impact
environnemental des unités de valorisation énergétique, en poursuivant les
travaux de réduction et de suivi de leurs émissions atmosphériques. La
modulation de la TGAP pénalisant les unités d?incinération à mauvais
222 Entre 1990 et 2003, les émissions de dioxines liées au traitement des déchets ont
baissé de 90 %, conséquence de la fermeture graduelle des anciens incinérateurs ou leur
mise aux normes. Depuis 2006, les émissions de dioxines par les unités d?incinération
de déchets sont très réduites.
223 Directive 2008/98 CE, le statut d?installation de valorisation énergétique est atteint
si le rendement est supérieur à 65 %.
224 La législation continue de se renforcer : adoption d?ici fin 2023 des meilleures
pratiques européennes rendue obligatoire par la directive 2010/75/UE sur les émissions
industrielles et le « BREF sur l?incinération des déchets » adopté par la Commission
Européenne en novembre 2019
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
107
rendement et présentant des niveaux d?émission de fumées médiocres va
permettre d?accélérer l?adoption de ces standards de qualité, indispensables
à une meilleure acceptation publique des équipements de traitement.
Dans cette nouvelle situation, la production de chaleur issue de
l?incinération des déchets peut fournir à un prix attractif une énergie en
substitution de sources d?énergie non renouvelable plus polluantes. La
valorisation énergétique doit pouvoir, à côté d?autres sources d?énergie
renouvelable, contribuer au développement des réseaux de chaleur qui
restent insuffisamment exploités comme la Cour l?a relevé dans son rapport
de 2021 consacré au chauffage urbain225.
L?État devrait intégrer dans le plan national un volet industriel
substantiel couvrant, outre la filière plasturgie, comme indiqué
précédemment, la filière valorisation énergétique.
En France, la hiérarchie entre prévention, recyclage, valorisation
énergétique et enfouissement n?est que partiellement respectée dans la prise
en charge des déchets ménagers et assimilés. La prévention reste un volet
insuffisamment pris en compte dans les actions mises en oeuvre. Les progrès
de la collecte se heurtent au retard pris pour s?aligner sur les meilleures
pratiques concernant les biodéchets, pour adapter les installations à
l?extension des consignes de tri du plastique et pour mieux commercialiser
les matières triées. Si la valorisation par recyclage et production d?énergie
gagne du terrain au détriment du stockage, elle reste insuffisante.
225 Cour des comptes, rapport public thématique, le chauffage urbain, septembre 2021.
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COUR DES COMPTES
108
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Les performances de recyclage et d?incorporation des plastiques en
France sont très en retrait par rapport à d?autres pays européens. Pour
réduire l?impact du plastique sur l?empreinte carbone, sur la biodiversité
et la santé, il convient d?agir tant sur la prévention, sur le tri sélectif que
sur le traitement.
Pour surmonter les freins technologiques et de rentabilité que
rencontre la filière du plastique recyclé, des soutiens financiers ont été
déployés par l?État qui par ailleurs a interdit l?incinération des déchets
ayant fait l'objet d'une collecte séparée. Les pays européens ayant décidé
cette interdiction sont ceux qui présentent les meilleurs taux de traitement
des plastiques.
Au vu de ces constats, les juridictions financières formulent les
recommandations suivantes :
8. Fixer dans la réglementation la liste des actions financées par les
intercommunalités et les éco-organismes pouvant être considérées
comme dépenses de prévention (ministère de la transition écologique
et de la cohésion des territoires).
9. Autoriser les collectivités territoriales volontaires à confier aux éco-
organismes chargés des emballages la vente des produits issus du tri
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
EPCI).
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Conclusion générale
La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire du 11 février
2020 vise à substituer progressivement à une économie linéaire fondée sur
le triptyque « fabriquer, conserver, jeter », un nouveau paradigme, celui de
l?économie circulaire.
Elle repose sur toute une série de mesures qui ont vocation à entrer
progressivement en vigueur et qui, dans leur ensemble, visent à lutter contre le
gaspillage et l?obsolescence programmée, ainsi qu?à favoriser le réemploi.
Sont ainsi prévues la création de nouvelles filières REP dans des
secteurs importants (produits et matériaux de construction du bâtiment,
jouets et articles de sport dès 2022, emballages professionnels en 2025,
lutte contre le gaspillage alimentaire, réduction progressive des emballages
plastiques à usage unique, avec une étape importante prévue au 1er janvier
2025 de recyclage des emballages plastiques à usage unique).
C?est donc désormais dans ce cadre que devra s?inscrire la question
de la collecte et du traitement des déchets ménagers sur laquelle l?enquête
menée par les juridictions financières en 2021-2022 confirme qu?il existe
d?importants progrès à réaliser.
Pour accompagner la transition vers l?économie circulaire recherchée
par les réformes législatives de cette dernière décennie, notamment les plus
récentes, une meilleure prise en charge des déchets existants par un tri, une
collecte et un traitement performants doit être réalisée.
L?accélération de ce mouvement est nécessaire à la fois pour réduire
la hausse continue des dépenses du service public de gestion des déchets et
pour le faire mieux contribuer à la transition écologique.
La prévention, c?est-à-dire la réduction de la production de déchets,
en constitue un volet fondamental et doit être véritablement amplifiée. Le
meilleur déchet est en effet celui qui n?est pas produit.
Les orientations et recommandations retenues s?inscrivent dans
cette vision.
Le citoyen ne peut pas être responsabilisé sur ses déchets uniquement à
travers la hausse des prélèvements obligatoires qui concernent ce domaine. Les
entreprises, les éco-organismes, l?État et les collectivités territoriales doivent
conjointement lui offrir les moyens de modifier ses habitudes de
consommation en vue de réduire le gisement des déchets.
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Liste des abréviations
ADEME??.. Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie
AGEC???.. Loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le
gaspillage et à l?économie circulaire
CCC????.Convention citoyenne pour le climat
CCES???..Commission Consultative d'Élaboration et de Suivi
CGCT???.Code général des collectivités territoriales
CSR????.Combustible solide de récupération
C.envir???Code de l?environnement
DMA ............ Déchets ménagers et assimilés
DNDNI??.. Déchets non dangereux non inertes
ECT????.Extension des consignes de tri
EEE????.Équipements électriques et électroniques
EPCI???.. Établissement public de coopération intercommunale
ISDND??? Installation de stockage de déchets non dangereux
FREC???. Feuille de route économie circulaire
LTECV???. Loi n°2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition
énergétique pour une croissance verte
MTE???...Ministère de la transition écologique
ODD ???.Objectifs de développement durable
OMR ............ Ordures ménagères résiduelles
PAP??........Porte à porte (collecte en)
PAV ???..Point d?apport volontaire
PLPDMA ?..Programmes locaux de prévention des déchets ménagers et
assimilés
PNGD??? Plan national de gestion des déchets
PNPD??? Programme national de prévention des déchets
PRPGD ......... Plan régional de prévention et de gestion des déchets
REOM .......... Redevance d?enlèvement des ordures ménagères
REOMi??.. Redevance d?enlèvement des ordures ménagères Incitative
REP .............. Responsabilité élargie du producteur
RPQS???.Rapport sur le prix et la qualité du service
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COUR DES COMPTES
112
RS????..Redevance spéciale
RSOM .......... Recyclables secs des ordures ménagères
SPGD ........... Service public de gestion des déchets
SUP????Directive (UE) 2019/904 relative à la réduction de l?incidence de
certains produits en plastique sur l?environnement (SUP pour
single use plastic)
TEOM .......... Taxe d?enlèvement des ordures ménagères
TEOMi ......... Taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative
TGAP ........... Taxe générale sur les activités polluantes
TI .................. Tarification incitative
TMB???..Tri mécano-biologique
TZDZG??..Territoire Zéro Déchet Zéro Gaspillage
UIOM ........... Usine d'incinération d'ordures ménagères
UVE ............. Unité de valorisation énergétique
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Annexes
Annexe n° 1 : présentation de l?échantillon des contrôles réalisés par
la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des
comptes (CRTC) ..........................................................................................114
Annexe n° 2 : le suivi des recommandations des juridictions
financières sur les déchets ménagers............................................................117
Annexe n° 3 : les Plans Régionaux de Prévention et de Gestion des
Déchets (PRPGD) ........................................................................................121
Annexe n° 4 : les indicateurs internationaux ................................................127
Annexe n° 5 : les indicateurs du service public des déchets ........................129
Annexe n° 6 : les indicateurs des filières à responsabilité élargie du
producteur (REP) .........................................................................................135
Annexe n° 7 : comparaisons internationales ................................................137
Annexe n° 8 : les déchets en matière plastique ............................................147
Annexe n° 9 : comparatif entre les différentes modalités de
financement du service public ......................................................................158
Annexe n° 10 : les conséquences de la crise sanitaire sur la gestion des
déchets .........................................................................................................159
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COUR DES COMPTES
114
Annexe n° 1 : présentation de l?échantillon des
contrôles réalisés par la Cour des comptes et les
chambres régionales et territoriales des comptes
(CRTC)
Tableau n° 4 : contrôle de la Cour des comptes
Contrôle réalisé dans le cadre de la formation commune
Prévention et gestion des déchets : aspects nationaux et internationaux
Tableau n° 5 : contrôles effectués par les chambres régionales
et territoriales des comptes
CRTC Nom de l?organisme
Contrôles réalisés dans le cadre de la formation commune
Auvergne
-Rhône-
Alpes
Communauté de communes Gorges de l?Ardèche
Communauté de communes le Grésivaudan
Syndicat intercommunal de traitement des déchets ménagers du Puy-de-Dôme
(VALTOM)
Métropole de Lyon
Syndicat mixte d'élimination, de traitement et de valorisation des déchets du Beaujolais
Dombes (SYTRAIVAL)
Communauté d'Agglomération du Grand Annecy
SMIX Savoie Déchets
Bourgogn
e-
Franche-
Comté
Communauté urbaine du Grand Besançon Métropole
Centre-
Val de
Loire
SMICTOM d?Amboise
Corse
Communauté de Communes Fium'Orbu Castellu
Communauté d'agglomération de de Bastia
Communauté de Communes du Cap Corse
Communauté de Communes du Centre Corse
Grand
Est
Syndicat Départemental d?Élimination des Déchets de l?Aube (SDEDA)
Syndicat Intercommunal d'Élimination des Déchets Ménagers du Territoire d'Orient
(SIEDMTO)
Syndicat de Valorisation des Ordures Ménagères de la Marne (SYVALOM)
Véolia Auréade Unité de valorisation énergétique et agronomique - Marne
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ANNEXES
115
Syndicat Mixte de Traitement des Om de la Région de Villerupt
Communauté de Communes de Cattenom et environs
Syndicat Mixte de Transport et Traitement des Déchets de Lorraine Nord (SYDELON)
Syndicat Mixte Intercommunal de Collecte et Traitement des Ordures Ménagères d'Als
ace Centrale
Communauté de Communes de Sélestat
Syndicat départemental d'énergie et des déchets (SDED 52)
EVODIA
Hauts-de-
France
Communauté d'Agglomération du Saint-quentinois
Valor'Aisne
Communauté de communes Flandre Lys
Communauté d'Agglomération Valenciennes Métropole
Communauté de Communes Pévèle Carembault
Syndicat Intercommunal de Valorisation des Déchets Ménagers du Hainaut
Valenciennois Ecovalor
Syndicat Mixte du Département de l'Oise (SMDO)
Syndicat mixte élimination et valorisation des déchets
CA Douaisis-Hénin-Carvin et communes Osartis (SYMEVAD)
Syndicat mixte Flandre Morinie (SMFM)
Syndicat Mixte Lys Audomarois
Ile-de-
France
Ville de Paris ? Direction de la propreté et de l?eau (DPE)
Nouvelle-
Aquitaine
Communauté de Communes de l'Ile de Ré
Communauté de Communes de l'Ile d'Oléron
Occitanie
Sictom Pézenas Agde
Decoset
Syndicat Mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés et
pôle des énergies renouvelables / Trifyl
PACA
Métropole Nice Côte d?Azur
Métropole Aix-Marseille Provence
Communauté d'Agglomération Var Esterel Méditerranée
Communauté de Communes Coeur du Var
Syndicat Mixte du Développement Durable de l'Est Var (SMIDDEV)
Pays de la
Loire
Trivalis
Communauté d'Agglomération Clisson Sèvre et Maine Agglo
Communauté d'Agglomération de la Presqu'île de Guérande Atlantique
Communauté d'Agglomération Mauges Communauté
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COUR DES COMPTES
116
VALOR3E
Communauté de Communes Loué-brûlon-noyen
Contrôles réalisés hors formation commune mais ayant servi pour le rapport
Auvergne
-Rhône-
Alpes
Communauté de communes de la plaine de l'Ain
Grenoble Alpes Métropole
Syndicat Mixte du Lac d'Annecy
Communauté de communes du Diois
Bretagne Lorient agglomération
Grand
Est
Métropole du grand Nancy
Régie Haganis
Hauts-de-
France
Communauté d?agglomération porte du Hainaut
Communauté d?agglomération du St-Quentinois
Communauté d?agglomération Maubeuge Val de Sambre
Nouvelle-
Aquitaine
Syndicat mixte départemental pour la gestion et le traitement des déchets ménagers et
assimilés (SMD3)
Communauté d'agglomération du grand Villeneuvois
Pays de la
Loire
Communauté urbaine Angers Loire métropole
Communauté de communes du bocage Mayennais
Syndicat mixte de collecte des ordures ménagères Est-Vendéen (SCOM)
La
Réunion
Mayotte
Syndicat mixte de traitement des déchets des microrégions
Sud et Ouest de la Réunion (ILEVA)
Société publique locale SUDEC
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Annexe n° 2 : le suivi des recommandations des
juridictions financières sur les déchets ménagers
Au cours de la décennie 2010-2020, la Cour des comptes, seule ou
en lien avec une ou plusieurs chambres régionales des comptes, a publié
deux rapports portant spécifiquement sur les déchets ménagers et assimilés
et des rapports consacrés aux éco-organismes.
Suites données aux rapports consacrés au déchets ménagers
Le rapport public thématique Les collectivités territoriales et la
gestion des déchets ménagers et assimilés, publié en septembre 2011,
formulait trente recommandations réparties au sein de quatre rubriques
principales. Un rapport de suivi de ce rapport public thématique a été
inséré au Rapport public annuel 2014 de la Cour des comptes, intitulé « La
gestion des déchets ménagers : des progrès inégaux au regard des enjeux
environnementaux ». Celui-ci comportait huit recommandations, certaines
reconduisant celles formulées en 2011.
Les recommandations visant à rendre plus claire et plus adaptée la
répartition des compétences entre les collectivités territoriales ont été pour
l?essentiel satisfaites ou rendues sans objet par la loi n° 2015-991 du 7 août
2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République qui a
redistribué les compétences territoriales226. Ainsi en est-il également de la
recommandation visant à promouvoir la prise en charge par une même
collectivité ou groupement (département ou syndicat mixte) du traitement
des déchets et des installations nécessaires227.
Les recommandations visant à renforcer le rôle des préfets en
matière de contrôle et de suivi des plans, d'autorisation et de contrôle des
équipements228 n?ont pas été mises en oeuvre. L?instruction du présent
rapport fait apparaître en effet que les dispositions encadrant les
PRPGD/SRADDET229 et le rôle de l?État déconcentré en matière
d?autorisation et de contrôle des ICPE ne suffisent toujours pas à planifier
et organiser les équipements à la hauteur des besoins.
226 Références des recommandations dans les rapports : rapport public thématique 2011
(pour la suite des références « RPT 2011 ») recommandation 1.1 et Rapport public
annuel 2014 (pour la suite des références « RPA 2014 ») recommandation 1.
227 RPT 2011 recommandation 1.8 satisfaite par l?article L. 2224-13 du CGCT.
228 RPT 2011 recommandation 1.12, 1.14, RPA 2014 recommandation 2.
229 Les plans, programmes et décisions des EPCI doivent être compatibles (L. 541-15
code de l'environnement).
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-collectivites-locales-et-la-gestion-des-dechets-menagers
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COUR DES COMPTES
118
La recommandation visant à décliner au niveau régional et
intercommunal certains objectifs nationaux et d?en rendre compte au
moyen d?un rapport annuel, ainsi que la mise en place d?observatoires
locaux230, est satisfaite par les dispositions de la loi NOTRe précitée et par
celles de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le
gaspillage et à l'économie circulaire (AGEC). En revanche demeurent
pertinentes les critiques émises par les juridictions financières en 2011 qui
relevaient les « limites des mécanismes de pilotage, de suivi, d?évaluation
et d?appui » et qui recommandaient une plus grande fréquence et qualité
dans la collecte et le traitement des données231.
Les évolutions dans les mécanismes de financement du SPGD
qu?appelaient plusieurs recommandations, n?ont pas été suivies d?effets
significatifs. L?adaptation des textes pour encourager la tarification
incitative a été réalisée par la réduction des frais de gestion232 mais cet
encouragement est insuffisant pour en permettre l?essor. La clarification du
cadre juridique du financement du SPGD n?a pas été réalisée : ni la
codification de la jurisprudence définissant le suréquilibre233, ni les
dispositions sur les compensations, exonérations et dérogations aux
augmentations de TEOM234 ni la remise à plat de la distinction des services
publics entre administratifs et industriels et commerciaux235. Une
recommandation a connu une suite inverse à la demande formulée : la
redevance spéciale est devenue facultative alors que la Cour demandait sa
généralisation236.
Les recommandations concernant la mise en oeuvre d?une comptabilité
analytique et d?un budget annexe consacrés au SPGD237 ont été partiellement
suivies d?effet : la réglementation prévoit désormais l?obligation de
comptabilité analytique238 mais le budget annexe demeure facultatif pour les
collectivités, majoritaires, qui financent le service par la TEOM.
Les recommandations des juridictions financières pour corriger
l?insuffisance des équipements de proximité pour l?incinération et le
230 RPT 2011 recommandation 1.10.
231 RPT 2011 recommandations 1.11, 3.1, 3.2, 3.3 et 3.5.
232 Recommandations 4.1. et 4.2. du RPT 2011 et recommandation 7 du RPA 2014
satisfaites par l?art.7 de la LFI 2019.
233 Recommandation 4.6 du RPT 2011.
234 Recommandation 4.4 et 4.5 du RPT 2011.
235 RPT 2011 recommandation 4.6 et RPA 2014 recommandation 6.
236 Recommandation 4.3. du RPT 2011et recommandation 3 du RPA 2014.
237 RPT 2011 recommandation 2.1, 2.2, et RPA 2014 recommandations 5 et 8.
238 L. 2224-17-1 CGCT.
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ANNEXES
119
stockage (carence en exutoires)239 n?ont pas été mises en oeuvre : la TGAP
n?a pas été augmentée240 pour les déchets exportés ou réceptionnés au-delà
des limites d?un périmètre car le ministère chargé de l?environnement
considère qu?une telle augmentation encouragerait la création
d?installations d?élimination alors que l?objectif général est de respecter
autant qu?il est possible la hiérarchie des modes de traitement des déchets.
Suites réservées aux dix recommandations formulées par les
rapports consacrés aux éco-organismes
Les recommandations formulées dans le rapport « Les éco-
organismes : un dispositif original à consolider, insertion au rapport public
annuel 2016 » et le rapport « Les éco-organismes : une performance à
confirmer, une régulation à renforcer », insertion de suivi de l?insertion
précitée, publiée dans le rapport public annuel 2020, ont donné lieu à des
suites satisfaisantes.
Les dispositions de la loi AGEC et de ses textes d?application
concernant les éco-organismes satisfont neuf recommandations sur dix. La
simplification des cahiers des charges des éco-organismes s?accompagne
du renforcement des exigences (fixation et contrôle des résultats,
dispositifs de sanctions)241 et la durée des agréments des éco-organismes
est adaptée entre un et six ans242. La loi renforce et précise les informations
qui devront figurer sur les produits pour renseigner les citoyens sur les
gestes de tri et l?État pourra fédérer plusieurs éco-organismes pour des
campagnes d?information243. Le conditionnement des soutiens aux
collectivités versés par l?éco-organisme chargé de la filière REP
emballages à la mise à jour des consignes de tri est prévu par le cahier des
charges de l?organisme qui est approuvé par l?État244. Le partage avec les
pouvoirs publics, les producteurs et les collectivités des données et des
informations détenues par les éco-organismes est clarifié245 et l?extension
des consignes de tri, couplé à la subordination des autorisations concernant
les centres de tri mécano biologiques à la mise en place du tri à la source
239 RPT 2011 recommandation 3.6 et 3.7 et RPA 2014 recommandation 4.
240 L. 2333-92 et s. du CGCT.
241 RPA 2020 recommandation 1, 4 et 5 satisfaites par les articles L541-10 II
(encadrement des cahiers des charges) et L. 541-9-6 (sanctions).
242 RPA 2020 recommandation 3.
243 RPA 2016 recommandation 1, RPA 2020 recommandation 2 satisfaites par l?article
L. 541-9-3 du code de l'environnement.
244 RPA 2016 recommandation 2.
245 RPA 2016 recommandation 4.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2020
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2020
COUR DES COMPTES
120
des biodéchets vont dans le sens d?une modernisation des centres de tri et,
nécessairement, d?une diminution de leur nombre246. La visibilité sur les
produits de l?écocontribution247 est en revanche écartée car regardée
comme source de confusion (logo pouvant être pris pour le signe d?un
produit fait en matière recyclée ou d?un produit à recycler).
Enfin, un rapport propre à l?Île-de-France a été inséré au rapport
public annuel 2017 de la Cour. Ce dernier comportait six recommandations,
dont deux à caractère général et quatre adressées aux collectivités et aux
syndicats de traitement des ordures ménagères de la région.
246 RPA 2016 recommandation 5.
247 RPA 2016 recommandation 3.
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Annexe n° 3 : les Plans Régionaux de Prévention
et de Gestion des Déchets (PRPGD)
Régi par les dispositions des articles L. 541-13 à L. 541-15-2 et R.
541-13 à R. 541-27 du code de l?environnement248, le Plan régional de
prévention et gestion des déchets (PRPGD) est un document élaboré par
le conseil régional qui a pour but de coordonner à l'échelle régionale les
actions entreprises par l'ensemble des parties prenantes.
Instrument de planification et de programmation prévu par la
réglementation européenne249, le PRPGD est appelé à disparaître à mesure
que seront arrêtés les schémas régionaux d?aménagement, de
développement durable et d?égalité des territoires (SRADDET)250.
Les PRPGD sont opposables aux décisions prises par les personnes
morales de droit public et leurs concessionnaires251 notamment pour les
installations à adapter, créer ou fermer. Le plan sert ainsi de cadre aux
services déconcentrés de l?État pour délivrer les diverses autorisations en
matière d?Installations Classées pour la Protection de l?Environnement
(ICPE).
Les juridictions financières ont analysé dans le cadre du présent
rapport les 12 plans adoptés.
248 Introduit par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation
territoriale de la République (dite loi NOTRe)
249 Articles 28 et 29 de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil
du 19 novembre 2008 relative aux déchets
250 Articles L. 4251-1 à L. 4251-10 et R. 4251-1 à R. 4251-17 du code général des
collectivités territoriales (CGCT). L?Île-de-France, les régions d'outre-mer et les
collectivités territoriales à statut particulier constituent des cas spécifiques, dans la
mesure où des plans régionaux ou territoriaux de prévention et de gestion des déchets
continuent de s?appliquer de façon autonome, à côté d?un autre document de
planification stratégique (tel que le SDRIF en Ile de France ou le PADDUC en Corse).
251 Article L. 541-15 du code de l?environnement
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COUR DES COMPTES
122
Le code l?environnement252 fixe le contenu des PRPGD et rend
obligatoires notamment les rubriques suivantes :
1/ État des lieux : (production, prévention, collecte et installations
existantes)
Réalisée grâce à plusieurs bases de données du ministère de
l?écologie et de l?ADEME et des observatoires locaux253, cette partie
descriptive est dans certains plans complète et exhaustive254 avec des
niveaux de précision géographiques variables255.
Des lacunes de données que ni l?État ni les régions n?ont comblées
par des enquêtes de terrain, nuisent à la fiabilité de l?état des lieux256 :
exutoires inconnus, informations manquantes quant à la catégorie d?ICPE,
tonnages par installations, traitement réalisé supérieur aux capacités ? Par
ailleurs, on relève des problèmes de lisibilité des données257, qui gênent la
clarté de l?information donnée aux collectivités locales infrarégionales.
Du fait des différences de couverture des territoires par la
tarification incitative, les états des lieux sur ce sujet sont d?amplitude et de
qualité variables. Dans les régions où elle est plus développée, des résultats
éclairants montrent son efficacité sur la réduction des OMR et
l?augmentation des collectes de recyclables258.
Enfin, la description des mesures visant à promouvoir le
développement de cette tarification incitative est souvent très sommaire. Ainsi,
le plan de la Normandie a été partiellement annulé par la décision n°1802969
du tribunal administratif de Caen du 20 juin 2019 car il ne présentait pas
d?actions de développement de la tarification incitative en contradiction avec
252 Art. L. 541-13 et l?article R-541-16 du code de l?environnement
253 Par exemple, la base de données GEREQ, le registre ICPE ou encore le registre IREP
et le registre ITOM
254 Par exemple, la région Auvergne-Rhône-Alpes détaille les 33 millions de tonnes (en
2015) qu?elle a produits.
255 Par exemple, le Plan de la région Grand Est présente des données départementales
là où la région Occitanie présente des données agrégées au niveau régional.
256 Voir par exemple le tableau 86 (p169) du Plan des Pays de la Loire où les capacités
réglementaires en tonnes des plateformes de compostage de la région sont manquantes
pour 18 des 39 installations, ou la figure 86 (p.115) du Plan Grand Est où 409 tonnes
de déchets produites dans l?Aube ont un exutoire « non précisé ».
257 Voir par exemple les données sur les combustibles solides de récupération (CSR)
sont difficilement interprétables dans le Plan des Pays de la Loire, p. 193 et p. 87.
258 Par exemple, le Plan de Nouvelle-Aquitaine, où la tarification incitative couvre 6 %
de la population régionale, montre que les quantités d?OMR ont diminué de 36 % et les
recyclables secs hors verre collectés ont augmenté de 26 % (voir pp 76-78).
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ANNEXES
123
les dispositions de l?article D. 541-16-2 du code de l?environnement259. À la
suite de cette décision de justice, la région Normandie a dû amender son plan
et adopter, le 22 juin 2020, deux compléments portant sur les actions prévues
pour le développement de la tarification incitative260 et sur la planification des
installations dédiées à la valorisation énergétique des combustibles de
récupération. Sur ce point, le niveau de généralité des autres plans régionaux
ne diffère pas de la première version du plan de la région Normandie.
2/ Prospective des gisements à 6 et 12 ans et objectifs de
prévention, recyclage et valorisation
Cette prospective se fonde sur la présentation de deux scenarii : l?un
évalue les quantités produites en l?absence de mesures de prévention, le
second les prend en compte261. On constate cependant des différences
quant au niveau de précision et de détails fournis et quant à la justification
des scénarios de référence.
3/ Planification de la prévention des déchets à 6 et 12 ans
La prévention se présente dans les plans sous la forme d?un
ensemble cohérent d'actions par types de déchets262. Les objectifs
manquent cependant de caractère opérationnel et de contextualisation
locale et sont trop généraux263.
259 Dans sa première version, le Plan de la région Normandie ne donnait aucune
modalité pratique d?implantation ni d?objectifs clairs quant à la couverture de cette taxe
en termes de population ou de volumes de déchets et préconisait seulement d?« Engager
une réflexion sur la mise en place de la TI à travers la réalisation d?études de faisabilité ;
Valoriser les retours d?expériences ? ; Intégrer la TI dans une réflexion d?optimisation
globale ? ; Définir les moyens humains pour le développement de la TI ; Informer et
sensibiliser les usagers ? » (p103).
260 La région Normandie se fixe désormais l?objectif d'un taux de couverture de 30% de
la population régionale par la tarification incitative, à l'horizon 2025
261 Ainsi, la région Île-de-France prévoit un scénario dit « tendanciel » (sans prévention)
où 5 607 262 tonnes de DMA seront générées en 2020, 5 971 954 en 2025 et 6 358 105
en 2031. Le scénario « avec mesures de prévention » prévoit 5 483 938 tonnes de DMA
en 2025 et n?a toutefois pas de valeur cible en 2031 (p.52, Chapitre 1)
262 Ainsi, la région Bretagne décline des objectifs pour les DMA et DAE relatifs aux
déchets végétaux (stabilisation en 2020 par rapport à 2016 et réduction de 20 % en 2030
par rapport à 2016, p32), aux biodéchets (100 % de la population doit avoir accès à une
solution de tri à la source des biodéchets d?ici 2023, accès au tri à la source pour les
professionnels d?ici 2023, p34).
263 Par exemple, la région Bretagne mentionne l?objectif de réduire le gaspillage alimentaire
par une liste d?objectifs vagues tels que « l?accompagnement de la restauration collective [?]
dans la mise en place d?actions » (p. 36, Chapitre II), le développement du « don alimentaire »
(p. 36, Chapitre II), « Accompagner les entreprises et administrations dans la réduction de la
production de leurs déchets », « Accompagner la mise en oeuvre des PLPDMA » ou encore
« Sensibiliser tous les acteurs ». Les actions sont quasiment identiques à celles que l?on trouve
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COUR DES COMPTES
124
Nombreux sont les renvois aux programmes locaux auxquels est
laissée la mise en oeuvre concrète264.
4/ Planification de la gestion des déchets à termes de 6 et 12 ans,
incluant les installations nécessaires afin d?atteindre les objectifs.
Au même titre que pour la prévention, l?ensemble des actions
portant sur la gestion des déchets, bien que cohérentes entre elles et axées
autour d?objectifs, apparaissent le plus souvent vagues et sans caractère
réellement opérationnel265.
La planification des installations qu?il apparaît nécessaire de créer,
adapter ou fermer afin d?atteindre les objectifs est une lacune significative
dans les plans alors que cette précision est exigée par l?article R. 541-19 et
le 5° de l?article R 541-16 du code de l?environnement.
En effet, les plans ne recensent que les installations de stockage
ainsi que d?incinération sans valorisation énergétique266. Ils ne recensent
pas les autres types d?installation et renvoient sur ce point à des études
ultérieures267. Même les plans les plus aboutis ne planifient pas à un niveau
suffisamment précis l?évolution des équipements et des capacités de
traitement associés, pour toutes les natures de déchets et d?installation268.
dans tous les autres plans et ne comportent aucune spécificité liée à la région, ni de plan d?action
précis en termes de dates et de budget.
264 Ainsi, les Plans des Hauts-de-France (p.117) et de Centre-Val de Loire (p.229)
renvoient au déploiement des programmes locaux pour la mise en oeuvre des stratégies
Zéro Déchets Zéro Gaspillage
265 Ainsi, le Plan des Hauts-de-France (pp.123-130 du fascicule des règles) ne
comprend aucune planification précise des installations de traitement et se limite à des
orientations générales telles que « Renforcer la performance environnementale des
installations de valorisation énergétique en appliquant le principe de proximité et en
prenant en compte l?impact CO2 des zones de chalandise » ou « Pour tout projet de
modernisation des installations de valorisation énergétique, tenir compte de l?évolution
des nouvelles normes européennes à l?horizon 2022- 2024.. Il en va de même du plan
de la région Occitanie (pp 248 -256).
266 Ainsi par exemple le plan de la région Bourogne-Franche-Comté, après avoir recensé
de manière détaillée, à l?échelle de chaque département, les déficits ou excédents de
capacité de traitement (p 109), se limite à la planification des installations de stockage.
267 Ainsi, par exemple, le Plan de la région Centre-Val de Loire, concernant les
installations de valorisation organique, «il sera nécessaire d?identifier et suivre les
capacités de traitement des déchets organiques et anticiper les besoins à venir. » p.289
268 Sur le thème de la planification des installations, le plan PACA, divisé en 4 bassins
de vie, est divisé en flux de déchets et positionné sur la capacité de traitement des
biodéchets triés à la source représente néanmoins un exemple intéressant. On peut aussi
citer l?exemple du plan de la région Grand Est, qui décline de manière détaillée, à
l?échelle départementale, les installations de stockage qu?il sera nécessaire de créer (pp
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ANNEXES
125
Les 12 plans adoptés ne relèvent pas d?une véritable planification et
apparaissent trop vagues quant au nombre, au type de déchets associés et
leurs quantités et à la localisation des installations269. À ce titre, les plans
ne revêtent pas leur pleine valeur prescriptive et n?épuisent pas la
compétence de la région.
Suivi des plans
Les modalités de suivi des plans prévues lors de l?adoption de ces
derniers sont souvent incomplètes, même pour ceux qui sont les plus
aboutis270. En effet, bien que les indicateurs de suivi du plan soient
explicités, associés aux actions dont ils relèvent et recensés de manière
exhaustive271, nombreux sont les plans qui manquent d?une réelle
planification du suivi272.
Sept régions sont couvertes par un observatoire de déchets chargé
d?obtenir et de consolider les données à l?échelle régionale, d?améliorer la
connaissance des gisements et de s?assurer du suivi des objectifs, les
5 régions restantes prévoient seulement d?en créer273.
347-352) et qui projette les besoins en capacité de traitement à l?échelle de deux bassins
de vie (Est et Ouest) les besoins.
269 Le plan de Normandie, par exemple, « n?interdit pas la création de nouvelles
capacités de valorisation des déchets ménagers résiduels » (p103) ou le plan des Hauts-
de-France, où la « règle de planification » prévoit « d?adapter les capacités régionales
d?incinération et de valorisation [?] en cohérence avec le développement de la
prévention et de la valorisation matière conformément à la hiérarchie des modes de
gestion [?] » (p148).
270 Les qualités et défauts des plans sont multiformes, aucun d?eux ne peut être
considéré comme un modèle. Le PRGPD de la région PACA a le mérite de préciser
(voir pages 137-138 du fascicule des règles du SRADDET, les moyens financiers que
la région entend consacrer, dans le cadre de ses contrats régionaux d?équilibre
territorial, au soutien des projets d?équipement structurants pour le territoire en matière
de recyclage et de valorisation des déchets, d?économie d?énergie et de développement
des énergies renouvelables.
271 Voir par exemple les pages 318-325 du Plan de la région Auvergne-Rhône-Alpes ou
284-288 du Plan de la région Hauts-de-France
272 La région Bourgogne-Franche-Comté liste les indicateurs et modalités de suivi du
Plan, sans mention de son organisation pratique (voir pp 158-166).
273 Le PRPGD Grand Est est très précis quant aux missions de l?observatoire qu?il
entend créer. On peut par ailleurs saluer l?effort de prévision budgétaire effectué (en
moyens humains et financiers) p478-479. Les autres régions manquent de précision
quant au budget : la Bourgogne-Franche-Comté, par exemple, ne mentionne que le
projet de création p88, sans en préciser les modalités pratiques.
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Annexe n° 4 : les indicateurs internationaux
En septembre 2015, les 193 États membres de l?ONU ont adopté un
programme de développement durable Agenda 2030 structuré autour de 17
objectifs de développement durable (ODD). Les déchets sont concernés par
l?ODD n°11 qui porte notamment la thématique de la ville durable et
l?ODD n°12 : « Consommation et production responsables » (impact
environnemental et social de l?ensemble de la chaîne de valeur des
produits). Ces ODD généraux comportent des indicateurs qui ont été repris
dans la programmation nationale française : le PNPD 2014-2020 et la
feuille de route de la France pour l?économie circulaire (FREC).
Indicateurs issus des ODD N°
Taux de recyclage des déchets municipaux274 11.6.1.
Empreinte matières275 12.2.1
Consommation intérieure de matière276 12.2.2
Perte et gaspillage alimentaire 12.3.1
Taux de recyclage national et tonnes de matériaux recyclés 12.5.1
274 Proportion de déchets urbains solides régulièrement collectés et éliminés de façon
adéquate sur le total des déchets urbains solides générés, par ville.
275 Empreinte matérielle, Empreinte matières (RMC) Empreinte matière par habitant
(RMC/hab.) et Empreinte matière par unité de PIB (PIB/RMC). Repris dans les
indicateurs 2 et 8 du PNPD 2014-2020 (INSSE SDES).
276 Consommation matérielle nationale, consommation matérielle nationale par habitant
et consommation matérielle nationale par unité de PIB. Indicateurs n°12 et n°7 du
PNPD 2014-2020 et indicateur FREC sous la forme « Réduire la consommation de
ressources liées à la consommation française de 30 % entre 2010 et 2030 » et
« recyclage de100 % de plastiques en 2030 » (INSEE. EUROSTAT)
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https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010596190#Documentation
https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010596191
https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010596192
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Annexe n° 5 : les indicateurs du service public
des déchets
Il n?existait à ce jour aucun recensement des objectifs chiffrés assortis
d?une échéance qui ont été fixés par l?État (code de l?environnement ou
programmation) pour le service public des déchets. Les juridictions
financières se sont attachées à ce recensement. Comme indiqué dans le
rapport, pour faciliter et simplifier le suivi de l?ensemble de ces objectifs, une
partie d?entre eux représentatifs des autres doit être choisie afin de bâtir un
tableau de bord annuel (indicateurs numérotés ci-dessous 1, 2, 10 et 23
surlignés en jaune) auxquels les juridictions financières recommandent
d?ajouter deux indicateurs qui n?existent pas encore dans la réglementation :
la quantité des OMR (Volume d?OMR par habitant en kg et par an) et la
prévention (dépenses de prévention /coût total du SPGPD en %).
Tableau n° 6 : les indicateurs généraux du service public des déchets
Nos Objectifs Base juridique
PRODUCTION
1
Production des DMA par habitant277
- 7% entre 2009 et 2014
-10 % en 2020 / 2010278
- 15 % en 2030 / 2010 279
Art. L. 541-1 1°
c.envir
TARIFICATION INCITATIVE
2
Couvrir 15 millions d?habitants en 2020 et 25
millions en 2022
10° de l?art. L. 541-1
code de
l?environnement280
COLLECTE et TRI A LA SOURCE
277 Indicateur 1 du PNPD 2014-2020 et du PNGD 2019. Déchets ménagers collectés
par habitant en année n ? déchets collectés en 2010) /déchets ménagers et assimilés en
2010 * 100 - Enquête collecte Ademe
278 Loi LTECV
279 Loi AGEC et ordonnance n°2020-920 du 29 juillet 2020
280 L?article 46 loi n°2009-967 de la loi de programmation Grenelle prévoyait déjà que
La TEOM et la REOM doivent intégrer au plus tard en 2014 une part variable incitative.
Axe 3 du PNGD 2019 « Étendre le déploiement de la fiscalité incitative (nombre de
collectivités et population) »
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/issu%20de%20l?ord.%202020-920%20-%20Directive%202008/98%20modifiée%202018/851
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
COUR DES COMPTES
130
Nos Objectifs Base juridique
3
Généralisation du tri à la source des biodéchets
au plus tard au 31 décembre 2023
Art. L. 541-21-1
code de
l?environnement281
4
Étendre à l?ensemble des emballages plastiques
les consignes de tri avant 2022 (en millions de
personnes)
5° de L. 541-1 code
de l?environnement
5
Généralisation d'ici au 1er janvier 2025 de la
collecte séparée pour les produits consommés
hors foyer (corbeilles de tri).
IV. de L. 541-10-18
6
Collecte bouteilles en plastique : 77% en 2025 et
90% en 2030
L. 541-10-11 du
Code de
l?environnement282
7
Atteindre 100% de collecte des emballages
plastiques ménagers en 2025
Axe 4 PNGD 2019
8
Augmenter les quantités de bouteilles et canettes
collectées dans le secteur des cafés, hôtels et
restaurants (CHR)
VALORISATION
9
Préparation en vue du réemploi et recyclage 55%
en 2025 et 60% en 2030 et 65% en 2035 des
DMA en masse
4 bis de L. 541-1 283
10
Quantité de DNDNI284 faisant l'objet d'une
valorisation sous forme de matière, notamment
organique : 55 % en 2020 et 65 % en 2025
4° de L. 541-1
11
Assurer en 2025 la valorisation énergétique d?au
moins 70% des déchets qui auront fait l?objet
d?une collecte séparée ou d?un tri et ne pouvant
faire l?objet d?une valorisation matière
9° du I. de L. 541-1
12
Atteindre un tonnage de produits réemployés et.
/ou de déchets préparés à la réutilisation de
4° art. L.541-1du
code de
l?environnement
281 Art. 22 directive (UE) 2018/851 et Axe 5 PNGD 2019. Art. L. 2224-16 du Code
général des collectivités territoriales
282 Article 9 de la directive SUP (collecte séparée)
283 Issu de l?ord. 2020-920 - Articles 6 et 11 Directive 2008/98 modifiée 2018/851.
Indicateur non chiffré axe 2 PNGD 2019. Directive 1994/62/CE : « Atteindre 50 % en
2025 et 55 % en 2030 de déchets d?emballages en plastique recyclé »
284 Les déchets non dangereux non inertes (DNDNI), mesurés en masse, recouvrent les
DMA et les déchets d?activités économiques et excluent les déchets du BTP.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041989925
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/règlement%20européen%20d?interdiction%20d?enfouissement%20des%20DMA%20collectés%20séparément
ANNEXES
131
Nos Objectifs Base juridique
l?équivalent de 5 % du tonnage de déchets
ménagers en 2030285
13
Réduire de 50% les quantités de produits
manufacturés non recyclables mis sur le marché
(2020/2015)
Art. 8° de L. 541-1
14
La mise sur le marché de certains produits ou
matériaux peut être subordonnée à l?incorporation
d?un taux minimal de matière recyclée
II. art. L. 541-9 code
de l?environnement
15
Tendre vers l?objectif de 100% de plastiques
recyclés au 1er janvier 2025
4ter du I. de L. 541-
1286
16
Atteindre 400 000 tonnes de plastiques régénérés
réincorporés en 2025
FREC avril 2018287
17
Intégrer 25% de matière recyclée dans les
bouteilles en PET en 2025 et 30% (toutes
bouteilles en 2030)
Article 6 de la
directive SUP
18
5% des emballages mis sur le marché sont des
emballages réemployés en 2023, 10% en 2027288
I. 1° de L. 541-1
code de
l?environnement
19
65 % de recyclage de l?ensemble des déchets de
papiers gérés par le SPGD289
L. 541-10-1
code de
l?environnement
20
Au 1/1 2030, les producteurs290, doivent justifier
que les déchets des produits sont de nature à
intégrer une filière de recyclage.
Art L.541-9 code de
l?environnement
PREVENTION
285 Produits réemployés et/ou déchets préparés à la réutilisation / déchets ménagers et
assimilés. Ademe - Observatoire du réemploi à venir (notamment D3E, textiles et
éléments d?ameublements).
286 Stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire
(01/18) et FREC p.3 et Axe 4 PNGD 2019
287 Stratégie de la Commission européenne sur les matières plastiques dans l?économie
circulaire COM (2018) 28 final (Atteindre 10 millions de tonnes de plastiques recyclés
incorporés dans de nouveaux produits dans l?Union européenne en 2025)
288 Unité de vente ou équivalent
289 Tonnage des papiers recyclés issus de la collecte sélective / tonnage total de papiers
graphiques pris en charge par le SPGD.
290 Ceux qui mettent sur le marché au moins 10 000 unités de produits par an et réalisent
10 M¤ CA
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/Stratégie%20européenne%20sur%20les%20matières%20plastiques%20dans%20une%20économie%20circulaire%20(01/18)
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
COUR DES COMPTES
132
Nos Objectifs Base juridique
21
Interdiction des plastiques à usage unique :
ventes sacs de caisse (1/1/2016), sacs
d?emballage (1/1/2017), particules produits
cosmétiques (1/1/2018), cotons tiges, vaisselle
jetable, bouteilles d?eau plate (écoles), pailles,
bâtonnets mélangeurs, gobelets et couvercles,
plateaux-repas, pots à glace, saladiers (1/1/2020),
fabrication/importation des sacs interdits à la
vente, distribution gratuite des bouteilles
(1/1/2021), sachets de thé non biodégradables,
jouets dans restauration, suremballage des fruits
et légumes frais, emballages presse et publicités,
étiquette sur fruits et légumes, achat par l?État
(1/1/2022), vaisselle jetable dans la restauration
pour les repas servis sur place (1/1/2023),
microplastiques médicaux (1/1/2024), contenants
cuisson en cantines (1/1/2025) tous les emballage
plastique à usage unique (2040)
Art. L541-10-5 et
L541-15-10 du code
de l?environnement
291
22 Publication d?un indice de durabilité (1/1/2024) Art. L541-2 c.envir
ELIMINATION
23
Quantités de déchets non dangereux non inertes
admis en installation de stockage :
- 30% entre 2010 et 2020
- 50% entre 2010 et 2025
7° art. L. 541-1 code
de
l?environnement292
24
Interdiction progressive de la mise en décharge
des déchets non dangereux valorisable
7° art. L. 541-1
c.envir293 et décret du
16.09.2021
25
Réduire les quantités de DMA admis en
installation de stockage en 2035 à 10% au plus du
poids des DMA produits
7 bis art. L. 541-1
294code de
l?environnement
291 Interdictions introduites par la directive SUP et transposées par la LTECV,
modifiées en 2016, 2018 (loi ELIM) et 2020 (loi AGEC).
292 p. 3 FREC Axe 7 du PNGD
293 Règlement européen d?interdiction d?enfouissement des DMA collectés séparément
3 bis du 2. de l?article 5 de la directive 1999/31 concernant la mise en décharge des
déchets
294 5. du 2 de l?article 5 de la directive 1999/31/CE
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ANNEXES
133
Nos Objectifs Base juridique
26
Arrêt d?ici 2025 des unités d?incinération des
ordures ménagères (UIOM) sans valorisation
énergétique et renforcement de l?efficience des
UIOM dont la valorisation énergétique est
insatisfaisante
Plan de réduction et
de valorisation des
déchets 2014-2020295
Tableau n° 7 : les indicateurs sectoriels (exemples)
TEXTILES LINGES CHAUSSURES296
1
Atteindre un taux de collecte de 50 % du gisement mis en marché
(soit 4,6 kg par habitant) en 2019
2
Atteindre un taux de valorisation matière (réutilisation et recyclage)
de 95 %
3
Atteindre un maximum de 2 % de déchets éliminés (déchets ne faisant l?objet
d?aucune valorisation).
ELEMENTS AMEUBLEMENT MENAGERS
4
Atteindre un taux de collecte séparée en 2023 des DEA de 40 %
des quantités d?éléments d?ameublement mis sur le marché
5
Un taux de recyclage et de réutilisation de 45 % sur la période 2018-2021 et
de 50 % pour la période 2022-2023 des DEA collectés séparément
6
Mettre à disposition des acteurs de l?économie sociale et solidaire 1,5 % des
DEA collectés à partir de 2021 pour ceux détenus par les ménages
7
Valoriser (réutilisation, recyclage et valorisation énergétique) en 2022
90 % des DEA collectés séparément des autres déchets
EQUIPEMENTS ELECTRIQUES ELECTRONIQUES (EEE)
8
Atteindre un taux de collecte de 65 % des équipements électriques
et électroniques mis sur le marché
9
Taux minimaux de recyclage et de valorisation pour les DEEE ménagers pris
en charge
DECHETS DE SOINS
10 Taux de collecte de 80 % en 2021297
295 Axe 2 du PNGD 2019 « Améliorer la valorisation énergétique des déchets »
296 Ademe : Déclarations des producteurs, y compris distributeurs et importateurs
d?équipements destinés aux particuliers
297 Quantités collectées année N /moyenne des quantités mises sur le marché moyenne
des quantités de produits mis sur le marché des années N et N-1.
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134
11
Taux de collecte d?au moins 3% / an tous DDS ménagers confondus (soit une
collecte de 0,6 kg de DDS ménagers par habitant à fin 2024)
12 Taux de valorisation énergétique : 90 % des DDS ménagers
13
2024 - taux de valorisation matière de 5 % des tonnages de DDS ménagers
collectés
14
Atteindre chaque année 45% de taux de collecte séparée de piles et
accumulateurs portables par rapport aux mises sur le marché
15
Taux de recyclage poids moyen des piles et accumulateurs portables : 65%
(plomb-acide), 75 % (nickel-cadmium) et 50 % (autres)
Source : Cour des comptes, à partir du tableau de suivi préparé par la DGPR et communiqué dans
le cadre de l?instruction
?
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135
Annexe n° 6 : les indicateurs des filières
à responsabilité élargie du producteur (REP)
Les éco-organismes sont agréés par l?État pour une durée maximale
de six ans renouvelable, sous réserve de répondre aux exigences d?un
cahier des charges établi par filière et fixé par arrêté interministériel. Ces
arrêtés leur fixent des missions, mesurées par l?atteinte d?objectifs précis
et cohérents avec les objectifs nationaux298. Des sanctions sévères sont
prévues299 en cas de non-respect de ces objectifs.
L?ADEME publie chaque année un Mémo des filières REP qui
reprend de façon groupé les résultats des 14 principaux indicateurs ci-
dessous pour chacune des filières.
Comme indiqué dans le rapport, pour faciliter et simplifier le suivi
de l?ensemble de ces objectifs, une partie d?entre eux représentatifs des
autres, doit être choisie afin de bâtir un tableau de bord annuel (indicateurs
numérotés ci-dessous 2, 4, 9, 10 et 11 surlignés en jaune) auxquels les
juridictions financières recommandent d?ajouter un indicateur qui
n?existent pas encore dans la réglementation : la prévention (dépenses de
prévention/CA des éco-organismes (en %).
Tableau n° 8 : objectifs-indicateurs du « mémo des filières REP »
N° Thèmes Formulations techniques
1 Production Mise sur le marché de produits assujettis en milliers
de tonnes
2 Gisement de déchets calculé en milliers de tonnes
3 Collecte Collecte séparée en milliers de tonnes
4 Taux de collecte séparée ou taux de collecte séparée
apparent pour valorisation
5
Valorisation (matière et énergétique) en milliers de
tonnes
6
Taux de valorisation par rapport aux tonnages
collectés séparément Recyclage (dont réutilisation)
en milliers de tonnes
298 II de l?article L. 541-10 du code de l?environnement
299 Article L. 541-9-6 du code de l?environnement (amende administrative limitée à
10 % des charges annuelles relatives à la gestion des déchets).
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https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/4832-memo-rep-2021.html
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599099/2021-01-01
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136
N° Thèmes Formulations techniques
7
Taux de recyclage par rapport aux tonnages collectés
séparément
8
Taux de recyclage par rapport au gisement ou aux
mises sur le marché
9
Quantités réellement réemployées et réutilisées en
milliers de tonnes300
10 Élimination Élimination en milliers de tonnes
11 Financement
incitatif
Produits mis sur le marché soumis à une éco-
modulation en pourcentage (bonus et malus)
12
Financement
Montant total des écocontributions perçues par les
éco-organismes en millions d?euros
13
Montant total des coûts opérationnels des éco
organismes en millions d?euros
14
Montant total des soutiens reversés aux collectivités
(opération et communication) en millions d?euro
Source : Cour des comptes
300 En ?unités de vente ou équivalent unités de vente? pour le suivi des objectifs des
filières équipements électriques et électroniques, des textiles et des éléments
d?ameublements
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137
Annexe n° 7 : comparaisons internationales
Selon Eurostat, la production des déchets municipaux en France à
582 kg en 2019 par habitant est supérieure à la moyenne européenne (487
kg/habitant). Les fortes disparités existantes au sein de l?UE apparaissant
dans la carte ci-dessous reflètent le lien entre activité économique
(Danemark, Allemagne, Luxembourg) et touristique par habitant (Chypre,
Malte) et la production de déchets par habitant.
Carte n° 2 : déchets municipaux produits par habitant
en Europe en 2018 (hors déblais et gravats)
Source : Eurostat
Le découplage de la croissance économique et de la production de
déchets est donc un des enjeux principaux de la politique de prévention et
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138
gestion des DMA. L?augmentation de la part des déchets à recycler constitue
un autre défi commun à l?ensemble de ces pays en vue des objectifs
européens de recyclage de 60 % à horizon 2030. Il implique de diminuer la
part des déchets recyclables qui se trouvent encore dans les OMR.
Les comparaisons internationales ci-dessous ont été choisies en
raison des succès de ces pays dans les domaines suivants :
un taux de recyclage des déchets municipaux proche ou supérieur à
50 % (cible européenne pour 2020).
l?élimination de la mise en décharge par orientation vers le recyclage
et l?incinération à valorisation énergétique301 rendus plus attractifs que les
autres modes de traitement par la mise en place d?une taxe pour la mise en
décharge, par l?interdiction directe (Allemagne) ou indirecte (Autriche)
d?enfouissement des déchets non traités et par l?interdiction d?incinérer et
d?enfouir les déchets ayant fait l?objet d?une collecte séparée (Pays-Bas) ;
la responsabilité opérationnelle des producteurs d?emballages pour
le tri et la valorisation : Allemagne, Flandre, Pays-Bas ;
les systèmes de consigne (Allemagne, Pays-Bas, Suède).
Allemagne
? Production : L?Allemagne est le 3ème plus important producteur de
déchets par habitant en Europe. Le recyclage est le principal mode de
traitement des déchets municipaux (68 %)302. L?incinération s?élève à
30 %.
? Gouvernance : La responsabilité de la gestion des déchets est partagée
entre le gouvernement national, les Länder et les autorités locales. Ces
dernières sont en charge de l?élimination des déchets municipaux (294
arrondissements ? Landkreise et 110 grandes villes). Les collectivités
déterminent chacune leur système de collecte et le montant des
redevances dans le cadre des objectifs de planification arrêtés par les
301 La directive décharge 31/99 CE du 26 avril 1999 marque une étape décisive dans la
mise en oeuvre de l?évitement de la mise en décharge.
302 La mise en oeuvre des nouvelles règles européennes statistiques de comptabilisation
des déchets municipaux devrait dégrader le classement allemand qui devrait cependant
rester supérieur à 50 %.
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ANNEXES
139
Länder303. À l?exception d?objectifs de recyclage pour les emballages,
peu d?objectifs quantitatifs ont été fixés au niveau fédéral. À l?inverse de
la France, les éco-organismes des emballages sont tous
« opérationnels »304.
? Collecte : 70 % de la population est concernée par une collecte séparée
des biodéchets. Il reste des progrès à faire notamment dans les grandes
villes (exemple de Berlin)305. La consigne pour les emballages de
boissons à usage unique mise en place depuis 2003 est un dispositif
obligatoire : lors de l?achat dans les magasins de détail, le
consommateur doit s?acquitter d?un « pfand » de 25 cts (une consigne)
qui est remboursée lorsque l?emballage est restitué dans les réceptacles
automatiques prévus à cet effet dans les magasins (qui absorbent la
bouteille et la compactent).
? Valorisation et élimination : L?Allemagne a atteint un très faible niveau
de mise en décharge (1 %) sans passer par une taxe, contrairement à ses
voisins européens, mais en interdisant la mise en décharge de déchets
préalablement non traités306, et en imposant la collecte séparée des bio
déchets et du papier dès le début des années 90. Les DMA sont soit
incinérés, à un coût très élevé (100 ¤ la tonne pour les déchets
municipaux), soit recyclés. De par cet effet prix, collecter les déchets en
flux séparés coûte moins cher que de collecter des déchets mélangés qui
devront être traités puis incinérés307. Fruit de plusieurs décennies de
politique orientées dans la même direction, le geste de tri et l?incinération
avec valorisation énergétique sont aujourd?hui largement acceptés en
Allemagne308 (environ 70 U.V.E. sur le territoire avec une capacité de
303 À titre d?exemple, dans le Land de Hessen, les autorités locales en charge de la
gestion des déchets doivent, en application des objectifs de planification arrêtés dans la
loi d?application régionale « hessische Ausführungsgesetz zum
Kreislaufwirtschaftsgesetz », diminuer les quantités d?ordures ménagère résiduelles en
deçà d?une quantité cible 150 kg/an/habitant d?ici 2025. Cet objectif est valable tant en
secteur à dominante urbaine qu?en secteur plutôt rural.
304 Voir définition de ce terme dans la note de bas de page de l?annexe sur les éco-
organismes
305 Source : entretien avec M. Jaron, chef de la division Économie circulaire au
ministère de l?environnement allemand.
306 Depuis 2005, ne peuvent être stockés que les déchets ayant fait l?objet d?un
prétraitement en installations de traitement mécano-biologique ou en incinérateurs
(résidus de ce traitement) ou les déchets inertes.
307 À l?inverse de la situation française par exemple où les collectivités indiquent que la
collecte séparée peut représenter un coût trop élevé.
308 Le rapport de l?Agence européenne de l?environnement datant de 2009 sur la mise
en oeuvre de la directive ?Décharge (« Diverting waste from landfill, effectiveness of
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COUR DES COMPTES
140
18,8 Mt309? à comparer aux 125 unités en France avec une capacité de
15,6 Mt310). L?Allemagne présente un taux de recyclage de 46 % des
emballages en plastique, supérieur à celui de la France (26 %) et 98 %
des emballages de boissons en plastiques.
Autriche
? Production : 570 kg/habitant (supérieure à la moyenne européenne).
? Gouvernance : elle est répartie entre le gouvernement fédéral et les
provinces.
? Prévention : L?Autriche est considérée avec la Flandre comme l?un des
pionniers pour la mise en place de réseaux de réutilisation offrant des
biens d?occasion de qualité. L?initiative la plus importante, « Repanet »
est un réseau de réparation et de réemploi, principalement le textile et les
équipements électroniques, qui regroupe 27 organisations employant
1 800 personnes dans 140 lieux.
? Collecte : L?Autriche a mis en place une collecte séparée des déchets
« biogéniques » et des emballages en papier dès 1992, accompagnée de
mesures visant à réglementer la qualité du compost afin d?assurer sa
compétitivité311. 22 % des DMA faisant l?objet d?une collecte séparée
sont des bio déchets (hors compost au domicile ou communautaire)
valorisés au sein de sites de compostage agricoles, municipaux ou
commerciaux312 ou au sein de sites de méthanisation. Dans les zones
fortement urbanisées, comme Vienne, les déchets collectés ne sont pas
de qualités suffisantes pour pouvoir être compostés.
? Valorisation et élimination : L?Autriche a élaboré une stratégie
d?élimination de la mise en décharge qui repose sur une double approche
d?interdiction pour les déchets non traités, biodégradables et organiques
waste-management policies in the EU ») souligne l?importance de l?acceptation
publique en matière de traitement de déchets.
309 Cf. Wilts Henning et Von Gries Najda, Europe?s waste incineration capacity in a
circular economy, ICE proceedings, mai 2015
310 Ademe. Le traitement des déchets ménagers et assimilés en 2018, Exploitation des
données de l?enquête sur les installations de traitement des déchets ménagers et
assimilés en France en 2018, Décembre 2020
311 Agence européenne de l?environnement. Municipal Waste management in Austria,
Février 2013.
312 Fertilisant pour les espaces verts, cimetières, etc.
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https://ec.europa.eu/environment/eir/pdf/report_at_en.pdf
ANNEXES
141
(ce qui comprend le plastique) et de taxation. Selon la Commission
européenne313, l?Autriche fait partie des États les plus performants : le
taux de mise en décharge est parmi les plus faibles de l?UE (2 %), le taux
de recyclage à 58 % en 2018 dont 33 % de compostage314 est le plus
élevé de l?UE, derrière l?Allemagne. À compter de 2004, et
graduellement jusqu?en 2008, la mise en décharge des déchets non traités
a été interdite pour les biodéchets et les déchets plastiques315. L?Autriche
a également adopté une taxe sur la mise en décharge des déchets, moins
élevée pour les installations à la pointe de la technologie afin de
moderniser les sites. Malgré la diminution du revenu de la taxe, elle a été
maintenue. La situation autrichienne montre une très forte corrélation
entre l?augmentation des taxes et l?interdiction du stockage et la
diminution des déchets effectivement enfouis. Les emballages plastiques
ménagers et commerciaux sont couverts par une filière REP. En cas de
chute du prix de la matière recyclée, les éco-organismes doivent
compenser en augmentant les prix versés aux collectivités territoriales
collectrices. En 2015, le taux de recyclage des emballages plastiques
s?élevait à 34 % pour un taux européen de 67,5 %.
Belgique ?Flandre
? Production : 490 kg/hab. (-10 % sur dix ans)
? Gouvernance : En Belgique, les questions environnementales relèvent
des régions. S?agissant de la Flandre, c?est l?OVAM (Agence publique
des déchets de Flandre) qui définit les objectifs définit et les règles
communes obligatoires (p. ex. le nombre de flux faisant l?objet d?une
collecte séparée, la fréquence des collectes) pour les 300 municipalités
en charge de la gestion opérationnelle des déchets. La politique de
gestion des déchets en Flandre remonte au début des années 1980.
Depuis lors, tous les quatre ou cinq ans, l?OVAM adopte de nouveaux
313 Commission européenne. The environmental implementation review 2019 ? country
report Austria, avril 2019.
314 L?Autriche présente par ailleurs le plus haut niveau de recyclage en Europe
s?agissant des déchets organiques.
315 Cette interdiction s?applique aux déchets présentant un taux de COT (« Carbone
organique total ») supérieurs à 5 %. Ce seuil revient à interdire la mise en décharge des
déchets plastiques. Le carbone atome caractéristique des matières vivantes est
également à la base du pétrole et donc des matériaux en plastique.
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COUR DES COMPTES
142
plans et en assure le suivi et l?accompagnement316. La gouvernance du
système ne repose pas sur une approche coercitive mais d?une part sur
une coopération de long terme entre les municipalités et l?OVAM, cette
dernière accompagnant les autorités locales techniquement et
financièrement et d?autre part sur un système transparent de publication
des résultats (« naming and shaming 317»).
? Prévention : Des réseaux de réemploi / seconde main sont installés dans
chaque municipalité ou centre commun à plusieurs municipalités
voisines, avec des objectifs fixés en termes de biens réutilisés en kg par
habitant.
? Collecte : Les tarifs payés par le citoyen pour les collectes séparées sont
plus faibles que pour les OMR318. Les déchets organiques (déchets verts
d?un côté et fruits et légumes d?un autre côté) font également l?objet
d?une collecte séparée depuis 1991. La Flandre ne dispose pas de
système de consigne pour la collecte des bouteilles en plastique.
? Valorisation et élimination : D?après la Commission européenne, la
Belgique, particulièrement la Flandre319, figure parmi les pays les plus
performants avec un taux de recyclage de 54 % en 2017. La Belgique a
mis en place à la fois l?une des taxes les plus élevées en Europe et une
interdiction de l?enfouissement garantissant que le coût de la mise en
décharge (1 % en 2018) est supérieur à celui de l?incinération qui doit-
être lui-même supérieur au coût du recyclage. La Belgique présente un
taux de recyclage de 55 % et un taux d?incinération de 44 % et pour les
emballages de 80 % (le plus haut niveau en Europe). Les emballages
plastiques non recyclables font l?objet d?un malus très élevé. Dans le
système REP, les producteurs restent propriétaires de la matière sur le
marché jusqu?au stade du déchet et doivent investir dans les centres de
tri et dans les capacités de recyclage nécessaire pour faire face à
316 OVAM. Implementation plan for household waste and comparable industrial waste-
summary
317 Cette locution anglaise (litt. « nommer et couvrir de honte »), pouvant être traduite
par l?expression française « mise au pilori », désigne ici le fait de déclarer publiquement
les mauvais résultats d?une municipalité.
318 Concernant les collectes séparées, les municipalités peuvent fixer les tarifs, à
l?exception du papier/cartons qui n?est pas taxé, compte tenu de la valeur recyclable.
319 La Flandre est la région la plus peuplée de Belgique avec 6,6 millions d?habitants
sur un total de 11,5 millions et compte une densité de population élevée de 489 habitants
au mètre carré.
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ANNEXES
143
l?extension des emballages collectés320. La prise en charge totale de la
filière REP emballages se réalise à coût zéro pour les collectivités et donc
les contribuables (système Fost+). Dans son plan 2016-2022, l?office de
gestion des déchets de Flandres (OVAM) impose des cibles chiffrées aux
municipalités en matière d?OMR, de réemploi et de déchets abandonnés.
Ce programme est fondé sur une approche en « clusters » de
municipalités avec déclinaison d?objectifs locaux. Les municipalités
sont regroupées en 16 groupes de municipalités à profil socio-
économique similaire ou « clusters » (le profil prend en compte
notamment le type d?habitat, l?intensité de l?activité économique et le
dynamisme démographique321). Chacun de ces 16 clusters se voit
attribuer 11 objectifs chiffrés spécifiques. Pour les OMR, les objectifs
chiffrés sont compris entre 116 kg par habitant pour les municipalités les
plus rurales et 258 kg/habt pour les municipalités touristiques.
Carte n° 3 : déclinaison des objectifs de réduction des OMR
à horizon 2022 par « clusters » de municipalités
Source : OVAM (Agence flamande pour l?environnement). Implementation plan for household
waste and comparable industrial waste, 2017-2022.
320 L?entreprise flamande Eco-oh (https://www.eco-oh.com/fr/groupe-eco-oh) recycle
22 000 tonnes par an d?emballages plastiques mixtes soit l?équivalent de la production
de déchets de 2,5 millions de flamands. L?entreprise recycle les déchets plastiques et
soit les vend déjà transformés aux fins d?application industrielle soit les transforme au
sein d?usine en objets plastiques dits « design ».
321 Exemple de groupes de municipalités : municipalités côtières, grandes villes,
municipalités à fort taux d?urbanisation et à faible revenu, villes moyennes, métropoles
avec activités tertiaires?
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https://www.eco-oh.com/fr/groupe-eco-oh
COUR DES COMPTES
144
Pays-Bas
? Production : 511 kg par habitant en 2017, ce qui reste supérieur à la
moyenne européenne mais représente une baisse de 15 % sur dix ans.
? Gouvernance : Elle est recentralisée depuis 1996 par transfert de la
responsabilité du niveau des provinces au niveau du gouvernement
central. Le ministère de l?environnement est chargé élaborer tous les six
ans le plan national de gestion des déchets. Les municipalités sont
chargées de la collecte des déchets ménagers sur leur territoire.
? Valorisation et élimination : Le taux de recyclage des DMA est parmi
les plus élevés en Europe et le taux de mise en décharge l?un des plus
bas (inférieur à 1 %). Avec un taux de 56 % (2018) parmi les plus élevés
de l?UE (moyenne européenne à 48 %), les Pays-Bas ont dépassé dès
2013 la cible européenne de recyclage de 50 % des déchets municipaux
prévue pour 2020. L?incinération de déchets municipaux atteint 43 %.
La mise en décharge est parmi les plus basses d?Europe (1 %), bien en-
deçà de la moyenne européenne à 24 %, du fait de l?effet combiné des
interdictions et taxes pesant sur les mises en décharge. En 1995, le
gouvernement a en effet pris un décret interdisant la mise en décharge
de 35 catégories de déchets incluant les OMR et les déchets organiques.
Une taxe sur la mise en décharge a également été introduite la même
année et a augmenté jusqu?en 2010 afin de rendre l?incinération et le
recyclage financièrement plus attractif que la mise en décharge. La taxe
néerlandaise devient alors la plus élevée d?Europe (107,5 ¤ par tonne).
Deux ans plus tard, le gouvernement décide sa suppression, le faible
niveau de mise en décharge ne justifiant plus son existence et la taxe
ayant rempli son objectif.
Suède
? Production : 443 kg/habitant (4,5 Mt)
? Collecte : Le système de consigne permet de collecter et recycler environ
90 % des canettes en aluminium et bouteilles PET. La Suède a introduit
ce dispositif pour les canettes dès 1984 (0,10 ¤ par canette), puis sur les
bouteilles plastiques PET en 1994 (entre 0,10 ¤ et 0,20 ¤). Plus de 75 %
des 290 communes suédoises proposent désormais un bac spécial aux
ménages pour collecter leurs déchets alimentaires. Les ménages peuvent
bénéficier, à proportion de leur tri sélectif, d?une réduction non
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ANNEXES
145
harmonisée de leur redevance annuelle communale de traitement des
déchets.
? Valorisation et élimination (données 2018) : 50 % des déchets ménagers
suédois sont aujourd?hui incinérés, 35 % sont recyclés (taux en-dessous
de pays comme l?Allemagne), et 15 % font l?objet d?un traitement
biologique. Les pays nordiques dans leur ensemble poursuivent une
politique à l?égard des DMA qui visent à un équilibre 50 % recyclage /
50 % combustion. La mise en décharge des déchets ménagers ne subsiste
plus qu?à l?état résiduel (0,7 %) à la suite de l?introduction d?une taxe
sur la mise en décharge des déchets. Le recours accru à l?incinération des
déchets non organiques représente aujourd?hui 20 % de l?énergie utilisée
par les réseaux urbains de chaleur qui approvisionnent en chauffage
92 % des appartements suédois et a contribué à la disparition des
combustibles fossiles du secteur du chauffage en Suède. Cette politique
conduit les communes suédoises à importer des déchets frontaliers pour
alimenter en continu leur réseau et amène des inquiétudes dans l?opinion
publique sur les rejets des polluants dans l?atmosphère. La Suède opère
la méthanisation des déchets organiques pour produire du biocarburant
pour les transports en commun.
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Annexe n° 8 : les déchets en matière plastique
Le plastique est léger, polyvalent, adapté à l?automatisation et
difficilement remplaçable pour la protection des produits de consommation
et leur distribution. C?est pourquoi, les 359 millions de tonnes (2018) de
plastiques produits chaque année dans le monde, qui représentent 4 à 6 %
de la consommation annuelle mondiale de pétrole (350 Md$)322, ont des
usages très divers et sont notamment utilisés323 pour les emballages tels que
les pots de yaourt ou les bouteilles d'eau (40 % de la consommation
européenne de plastiques et plus de 60 % des déchets plastiques), le BTP
(20 %), l?industrie automobile (10 %), les appareils électriques et
électroniques (EEE) (6 %)324.
L?utilisation de ce matériau est en pleine expansion depuis 1950
avec un doublement de la demande depuis 2000, aujourd?hui tirée par les
pays en voie de développement qui consomment encore 20 fois moins de
plastique que les pays de l?OCDE. Le développement de la consommation
d'aliments et de boissons « à emporter » favorise l?essor des plastiques à
usage unique. Un "pic du plastique" pourrait cependant être atteint en 2027
selon les experts325, avec une croissance de la demande qui passerait
ensuite de 4 % à moins de 1 % par an.
322 Le commerce mondial des plastiques représente 1 000 milliards de dollars par an
soit 5 % du commerce global de marchandises. https://unctad.org/fr/news/nouvelle-
etude-le-commerce-mondial-du-plastique-depasse-de-40-les-evaluations-precedentes
323 CGEDD et CGEIET Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine,
Rapport conjoint, janvier 2020.
324 Les déchets d'équipements électriques et électroniques DEEE sont constitués pour
20 % de plastique.
325 ?The Future?s Not in Plastics: Why plastics demand won?t rescue the oil sector?. 4
septembre 2020. Carbon tracker think tank
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https://www.economie.gouv.fr/cge/filieres-dechets-recyclage
COUR DES COMPTES
148
Externalités négatives des déchets plastiques
Les effets des matières plastiques sont significatifs sur le
réchauffement climatique (l?équivalent du fonctionnement de 189 centrales
à charbon326), la biodiversité327, la consommation d?eau et d?énergie, la
santé et indirectement sur l?économie pour des activités telles que le
tourisme, la pêche328 et le transport maritime. L?ensemble de ces
externalités négatives du plastique est évalué financièrement à 1 000
dollars par tonne.
Les trois-quarts des déchets plastiques (6,3 milliards de tonnes) sont
rejetés dans les milieux naturels329 dont entre 4,8 et 12,7 millions de tonnes
de déchets plastiques déversées chaque année dans les océans (les rejets
européens représente l?équivalent chaque minute du contenu d?un camion
poubelle jeté en mer330). Qualifié de « continent » ou de « soupe », les
déchets plastique en mer se décomposent en microplastiques, (fragments
de moins de 5 mm), entrent dans la chaîne alimentaire via les organismes
marins, l?air et l?eau potable. Sans que l?on connaisse encore l?effet sur la
santé humaine, on constate qu?un être humain ingère en moyenne chaque
326 5 tonnes de CO2 émises par tonne de plastique produite. Centrales à charbon de 500
mégawatts en tenant compte des différentes étapes du cycle des plastiques : (extraction,
transport, fabrication, gestion de la fin de vie des déchets), le bilan carbone des
plastiques représenterait 860 Mt de CO2 par an. En 2050, l?industrie plastique pourrait
représenter 10 à 15 % des émissions mondiales de CO2. Sénat Pollution plastique : une
bombe à retardement décembre 2020
327 Une méta-analyse récente a estimé à 2 249 le nombre de plantes, d?animaux et de
microbes affectés par la pollution plastique à l?échelle mondiale.
328 1 % des recettes des captures réalisées de la flotte de l'Union européenne.
329 Les 8,3 milliards de tonnes de plastiques fabriquées depuis 60 ans n?ont été pris en
charge qu?à hauteur d?un quart (9 % ont été recyclées, 12 % incinérées). Si rien n?est
fait 12 milliards de tonnes de déchets plastiques pourraient leur être ajoutées d?ici 2050.
Ce phénomène de rejet dans les milieux naturels concerne peu l?Europe : 83 % des
plastiques dans les océans viennent de 20 pays dont aucun situé en Europe et selon les
données de l?Ademe et une extrapolation des enseignements issus du rapport WWF, en
France, plus de 98 % des emballages ménagers sont collectés. Production, use, and fate
of all plastics ever made. Science Advances Roland Geyer1, Jenna R. Jambeck and
Kara Lavender Law Vol. 3 n°7 19 juillet 2017
330La tendance est anticipée à la hausse jusqu?en 2100 au moins. (UE : 150 000 et 500
000 tonnes par l?Union européenne) Jambeck, Jenna R. et al., « Plastic waste inputs
from land into the ocean », Science, volume 347, Février 2015 et Study to support the
development pf measures to combat a range of marie litter resource Eunomia report
for European Commission Janvier 2016
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https://www.senat.fr/espace_presse/actualites/202012/pollution_plastique.html
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149
semaine l?équivalent du poids d?une carte de crédit331, que l?on retrouve
notamment dans le placenta des femmes enceintes332.
La contrainte technique du recyclage des plastiques
Les objectifs fixés en matière de recyclage des déchets plastiques,
en général (« tendre » vers 100 % de plastique recyclé au 1er janvier 2025)
ou pour le cas particulier des emballages (20 % de réduction des
emballages plastique à usage unique mis sur le marché pour les cinq
prochaines années 2021-2025) semblent hors d?atteinte au regard du
rythme de réduction actuel. Les progrès du recyclage des plastiques sont
en effet entravés par certaines contraintes de cette matière :
? La variété des plastiques (résines ou polymères) implique pour chacun
une filière de recyclage spécifique. Les résines utilisées sont nombreuses
(une cinquantaine parmi lesquelles cinq principales333 : voir tableau ci-
dessous).
331 Soit cinq grammes de plastique ?Assessing plastic ingestion from nature to people
WWF, Dalberg and the university of Newcastle Australia juin 2019 (Soit cinq grammes
de plastique constitués de 52.000 microparticules de plastique par an, 121.000 si l?on
prend en compte la pollution de l?air).
332 Revue Environment International. Janvier 2021 Plasticenta : First evidence of
microplastics in human placenta. Antonia Ragusa
333 Les emballages sont cependant constitués pour 90 % des cinq principales résines,
dont la moitié sont déjà recyclable., Les 598 000 tonnes de déchets recyclées sont
essentiellement du PET et du PEHD (61 % de ces deux matières sont recyclés).
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150
Tableau n° 9 : les 5 principales variétés de plastiques334
Variétés de plastique et
part de marché en Europe
Utilisation primaire
Possibilités de
recyclage et
débouchés335
Polytétraphtalate
d?éthylène (PET) 7,9%
Bouteilles boissons et détergents
Facile (40% du
gisement) : retour
possible au contact
alimentaire (p. ex.
nouvelles bouteilles).
336
Polyéthylène (PE)
Haute (PEHD) et basse
intensité
(PELD/PEBD) 29,8%
Bâtiment, films alimentaires,
barquettes, jouets bouchons,
bouteilles de lait, flacons pour la
cosmétique, sac, pots de glace
Possible : sacs
poubelles, flacons de
détergent, mobilier
urbain, stylos, tuyaux,
automobile?
Polypropylène (PP)19,4%
Automobile, EEE, emballages
alimentaires, masques et tissus
Difficile. Pas de retour
possible à l?alimentaire.
Polystyrène (PS)
expansé et autres 6,2%
Protection des appareils,
emballages alimentaires (comme
les pots de yaourt, barquettes),
EEE
Difficile. Pots de yaourt
(4 %) : béton allégé,
rembourrage, boites,
cintres, pots de fleurs
Polychlorure de vinyle
(PVC) 10%
Surtout bâtiment : canalisation,
fenêtres, sols et murs et aussi
blisters et automobile
Moyen. Fenêtres,
canalisations, sols,
tuyaux, meubles de
jardin
Autres résines complexes
(PUR, thermoplastiques,
?) 26,7 %
Optique, télécommunications,
médical, isolation
Très difficile
Source : Cour des comptes
? La complexité des usages : S?ajoutent à la variété des résines une
complexification supplémentaire due au marketing (bouteilles d?eau de
couleur), aux additifs chimiques polluants (p. ex. DEEE), aux
combinaisons de matériaux impossibles à séparer dans la phase de
recyclage337 et à la décontamination obligatoire des plastiques recyclés
334 La nouvelle grille tarifaire en vigueur sur les mises en marché 2020 distingue 7
catégories d?emballages.
335 La couleur exprime le degré de facilité technique du recyclage
336 On parle de boucle fermée du recyclage lorsqu?un type de plastique (le PET clair
des bouteilles par exemple) permet de produire à nouveau des contenants eux-mêmes
recyclables.
337 P. ex. aluminium et plastique dans les sacs de chips et de barres chocolatées et les
blisters de médicaments, carton et plastique dans les boîtes de pizza.
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151
utilisés pour un usage alimentaire. Ni les nouvelles résines ni les
nouveaux usages ne font pas l?objet d?études d?impact de recyclage
préalables.
? Les contraintes du tri : Le recyclage est principalement mécanique
(transformation des déchets plastique en matières premières secondaires
?granulats338- sans changer la structure chimique de la matière) et pour
l?instant plus marginalement chimique (retour aux composants
chimiques de base équivalent à la qualité de la matière vierge). Les
différents types de plastiques fondant à différentes températures, un tri
précis est nécessaire. Les plastiques d?emballage non triés ne peuvent
produire que des produits grossiers tels que des plaques ou des canaux
ou, après broyage, des carburants secondaires pour la production
d?énergie dans l?industrie.
? L?altération progressive de la structure, de la qualité visuelle
(transparence) et des qualités sanitaires du plastique par les opérations
successives de recyclage. Un à trois recyclages pour une bouteille qui
deviendra un « polaire » avant de devenir définitivement un déchet.
? La taille : Les produits qui ne seront jamais recyclables car trop petits
ou trop techniques (sachets de thé, papier bonbon, petit emballage). Un
emballage de fromage à la coupe de 10?microns contient six couches de
différents plastiques.
? Les pertes en ligne dans le recyclage : en raison des liquides,
adhérences, matières qui compromettent la pureté (pour certains
plastiques, 20 à 30 %).
? Le manque de maturité de la filière : La plasturgie française reste un
secteur atomisé339, faible en investissement, et spécialisée par résine. Au
sein de ce secteur, les filières françaises de recyclage sont prises en étau
entre, en amont, les chaînes de collecte et de tri, aux coûts et volumes de
production rigides, et en aval, les utilisateurs de plastiques qui comparent
le prix du recyclé au cours fluctuant des matières vierges. Ces PME du
recyclage sont cependant progressivement acquises par des grands
338 41 000 tonnes des granulés sont perdues dans la nature chaque année, soit
l'équivalent de 11,5 milliards de bouteilles en plastique.
339 4 000 PME et TPE dont 56 % de 1 à 9 salariés et 1/3 d?entreprises indépendantes
130 000 salariés et 30 Md¤ et faibles capacités industrielles (20-40 000 tonnes/an)
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152
groupes, qui veulent maîtriser leur approvisionnement en produits
recyclés et s?assurer une intégration verticale340.
? La sensibilité du plastique recyclé au cours des matières premières
vierges (prix du pétrole) : Si certains plastiques sont recyclables « en
théorie », leur coût comparé avec le plastique vierge est prohibitif (du
simple au double), expliquant la faible demande de matières plastiques
recyclées de 6-7 % en Europe341. Les plastiques recyclés issus des PEHD
peinent à trouver preneurs aujourd?hui tandis qu?à l?inverse la demande
de PET est très forte (annonce marketing de contenants 100 % recyclés)
provoquant des prix spéculatifs.
Les nouvelles pistes pour prévenir et gérer les déchets plastiques
? La taxe européenne sur les emballages plastiques non recyclés
Une taxe européenne de 800 euros par tonne de déchets
d'emballages plastiques non recyclés est instituée depuis le 1er janvier
2021342 et doit être versé du budget national vers le budget européen La
France pourrait ainsi être le 1er ou le 2e plus gros contributeur d?Europe
(1.2?Md¤ inscrit en LFI 2021) en raison du poids d?emballages plastiques
qu?elle met sur le marché et des faibles taux de recyclage.
Lorsque la France disposera d?une REP sur les emballages ménagers
et industriels à partir de 2025, cette taxe sera répercutée avec un faible taux
sur de nombreux assujettis (fabricants, metteurs en marché et importateurs
puis éco-organismes) à partir de 2025.
? La consigne des bouteilles
Dans ce système, qui permet d?obtenir des matières de meilleure
qualité, plus facilement valorisables, le consommateur doit s?acquitter, au
moment de l?achat, d?une somme consignée ? qui majore le prix de vente.
Cette somme lui est remboursée, sous forme monétaire ou de bons d?achat,
quand il rapporte son emballage vide pour qu?il soit recyclé.
Selon l?ADEME, la trajectoire de collecte des bouteilles en plastique
pour boisson (autour de 57 % aujourd?hui, 71,5 % en 2025 et 78,9 % en
340 Un géant mondial du soda est actionnaire à 50 % de PlastikPack, le n°1 européen de
la régénération du plastique.
341 Les acteurs économiques et l?environnement, édition 2017 Insee références
342 Réunion extraordinaire du Conseil européen (17, 18, 19, 20 et 21 juillet 2020).
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153
2030) ne permettra pas d?atteindre l?objectif européen de 90 % en 2030343.
Les régions rurales atteindraient cet objectif, mais les régions urbaines
(10 % de collecte seulement aujourd?hui dans les villes de Paris et
Marseille) n?y parviendront vraisemblablement pas sans la mise en place
de la consigne ou d?autres mesures ambitieuses et contraignantes.
Tableau n° 10 : taux de recyclage des emballages plastiques
En % 2017 2018 2019 2020
Bouteilles et flacons 55,6 58,3 56,6 54,7
Autres emballages plastiques 3,9 4,2 6,2 7,5
Source : Cgefi
Dans les États membres qui l?ont mise en place344, la consigne a fait
la preuve de son efficacité avec un taux de collecte en moyenne de plus de
80 % des bouteilles en PET, contre une moyenne de 58 % dans l?ensemble
de l?UE345. La loi AGEC a renvoyé pour sa part cette option à 2023 si
l?analyse des performances de collecte et de recyclage issue du rapport
annuel de l?ADEME confirme que l?objectif 2030 de 90 % ne sera pas
atteint346. D?ici là, divers tests de consigne sont mis en place347et
l?ensemble des parties prenantes concernées sont associées à la réflexion
pour mettre en balance avantages mais aussi inconvénients 348. Une
disposition de la loi AGEC349 institue par ailleurs un dispositif de reprise
obligatoire par les distributeurs des produits usagés relevant d?une REP.
? La communication pédagogique à l?égard du public
343 Dont 77 % des bouteilles en PET dès 2025 - Directive européenne sur les plastiques
à usage unique dite « directive SUP (single-use-plastic) UE n° 2019/904 du 5 juin 2019.
344 Danemark, Estonie, Pays-Bas, Allemagne, Croatie, Lituanie, Finlande et Suède.
Hors UE : Norvège et Islande.
345Cf. annexe sur les comparaisons internationales et Cour des comptes européennes. Les
mesures prises par l?UE pour lutter contre le problème des déchets plastiques, 2020.
346 Art. L. 541-10-11.-I code de l?environnement. L?article 9 de la directive sur les
plastiques à usage unique n?oblige pas à recourir à la consigne mais la cite comme
possibilité.
347 420 automates CITEO donnant 1 ou 2 centimes d?euros par bouteille triée, bouteilles
contre places de cinéma dans l?habitat social d?Argenteuil.
348Confusion pour le citoyen avec les instructions qu?il a reçues depuis 20 ans de mettre
les bouteilles en plastique dans la poubelle jaune, crainte des collectivités locales des
pertes de recettes associées à la revente des bouteilles et à la surcapacité des centres de
tri sans soutien compensatoire de l?éco-organisme.
349 Article L. 541-10-8 du code de l?environnement
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https://www.eca.europa.eu/Lists/ECADocuments/RW20_04/RW_Plastic_waste_FR.pdf
https://www.eca.europa.eu/Lists/ECADocuments/RW20_04/RW_Plastic_waste_FR.pdf
COUR DES COMPTES
154
En dépit des documents pédagogiques et des efforts d?explication
proposés par l?ADEME350, les médias et nombre d?acteurs publics et
privés, les citoyens ne sont pas en mesure de savoir quelle attitude
écoresponsable choisir, à l?égard par exemples des nouveaux produits
pouvant perturber le geste de tri et le traitement, de la différence entre un
sac en plastique biosourcé et un sac en plastique biodégradable ou des
avantages relatifs d?un pot de yaourt en verre par rapport à un pot en
plastique (voir tableau ci-dessous).
Tableau n° 11 : impacts environnementaux comparés du polystyrène
et du verre pour l?emballage des yaourts
Impacts
environnementaux
Avantage
verre
Avantage
plastique
Explication
Recyclabilité X
76 % de recyclage contre
27%
Ressources (matières
premières d?origine)
X
(+430 %) Le sable
comme le pétrole est une
ressource rare
Consommation d?eau X +27 %
Durée de décomposition
dans la nature
X
450 ans contre 1 million
d?années
Changement climatique
(CO2)
X
+ 306 % (12 fois plus de
camions de transport) et
énergie pour la
fabrication
Toxicité et pollution pour
l?environnement, la santé
et la biodiversité
X
Microplastiques dans la
chaine alimentaire des
organismes vivants
Source : Cour des comptes à partir de différents articles d?analyse de cycle de vie351
350 L?Ademe renforce ses travaux d?ACV et réalise depuis 2002 un Bilan national du
recyclage, auquel est joint une Analyse du cycle de vie des flux de déchets recyclés sur
le territoire français.
351 La synthèse proposée par ce tableau rend compte des impacts environnementaux
issus des ACV. L?état actuel de la recherche scientifique ne permet cependant pas
encore de tirer un bilan global qui serait une aide à la décision. Les ACV menées par
les fédérations professionnelles ne comportent en général pas de "revue critique" par
des experts indépendants validant la méthodologie. L?Ademe travaille à un tel
référentiel méthodologique.
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ANNEXES
155
L?analyse du cycle de vie (ACV)
L?ACV est une « compilation et évaluation des intrants, des extrants
(flux physiques de matière et d?énergie associés) et des impacts
environnementaux potentiels d?un système de produits au cours de son cycle
de vie » : distribution, utilisation, collecte et élimination vers les filières de
fin de vie ainsi que transport.
L?ACV est l'outil d?évaluation multicritères le plus abouti fondé sur
la normalisation internationale352. L?utilisation des ACV pour formuler des
recommandations ne permet cependant pas les généralisations. Une ACV
ne peut être prise en compte que pour les hypothèses sur laquelle elle est
fondée (situation à l?instant « t », emballage ou produit spécifique pris en
compte, méthodes de mesure la pollution).
Source : Cour des comptes à partir de l?ADEME353
? Les changements intervenus sur le marché international des déchets
Les décisions prises par plusieurs pays de fermer leurs frontières aux
déchets en provenance de l?Union européenne aura pour conséquence à
court terme une augmentation des produits incinérés ou mis en décharge
mais, à moyen terme, ces décisions devraient conduire à développer de
réelles capacités industrielles en Europe354.
? Le soutien de l?État à la structuration et au renforcement de la filière
L?État peut intervenir par des subventions pour réduire les prix des
matières premières recyclées, encourager la recherche et développement
(Crédit Impôt Recherche, Programme d?Investissement d?Avenir-PIA,
Banque Publique d?Investissement), mettre en place des « clusters » de
coopération scientifique et industrielle, commander des études
scientifiques, voire prendre des participations directes ou indirectes (CDC)
dans certaines entreprises ou favoriser fiscalement le secteur (capital risque
ou suramortissement). L?État dispose en outre d?autres leviers comme les
interventions de la puissance publique pour soutenir ou contrer certaines
352 Normes ISO (14040 à 14043)
353https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-
laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv et
https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Rapport_Quel_Potentiel_3R.pdf
354 EEA-ETC/WMGE, 2019/5, Plastic waste trade and environment, octobre 2019.
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https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv
https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv
https://www.eea.europa.eu/publications/the-plastic-waste-trade-in
COUR DES COMPTES
156
opérations de fusion-acquisition dans les activités d?importance vitale 355,
les normes techniques et les achats publics.
Dans le cadre du Plan France relance pour la transition écologique,
plus de 200 millions d?euros sont dédiés à la filière Plastique (dispositif
ORPLAST) afin de doubler la capacité annuelle d?incorporation pour
atteindre 700 000 tonnes d?ici fin 2022.
Le dispositif Orplast
Lancé en 2016 et piloté par l?Ademe, le dispositif Orplast ? objectif
recyclage plastiques- vise spécifiquement à soutenir la filière aval de
recyclage des plastiques en augmentant l?incorporation de matières premières
de recyclage (MPR) plastiques par les plasturgistes en substitution à de la
matière vierge (soutien aux investissements dédiés à l?incorporation de
matière plastique recyclée et aux technologies de recyclage).
En complément, dans le cadre de la stratégie d?accélération visant
l?augmentation du recyclage, le Programme d?investissement d?Avenir
(PIA 4) dispose d?actions de soutien à l?innovation pour augmenter le
recyclage des plastiques et des composites356.
? Le levier réglementaire pour lutter contre les déchets plastiques non recyclés
- L?incorporation obligatoires et les interdictions de matières
La loi permet d?imposer des taux minimaux d?incorporation de
matières recyclées dans les produits neufs, d?interdire des « substances ou
éléments susceptibles de compromettre l'utilisation du matériau
recyclé »357(perturbation des chaînes de tri et du recyclage) et l?obligation de
justifier que les déchets peuvent intégrer une filière de recyclage358.
355 Le décret du 23 février 2006 définit les activités d?importance vitale comme « un
ensemble d?activités, essentielles et difficilement substituables ou remplaçables,
concourant à un même objectif ou visant à produire et à distribuer des biens ou des
services indispensables ». Voir aussi l?article L1332-1 du code de la défense.
356 Sur 4 ans : 15 M¤ pour les technologies de tri, 60 M¤ sur la recyclabilité des
plastiques, 15 M¤ sur la recyclabilité des composites
357 L?art. L. 541-10-17 du code de l?environnement décliné dans le décret du 29 avril 2021
dit « 3R »fixe l?objectif d'atteindre la fin de la mise sur le marché d'emballages en plastique
à usage unique d'ici à 2040 et la stratégie pour y parvenir pour la période 2021-2025).
358 IV de L. 541-9 du code de l?environnement : au plus tard en 2030, les personnes
mettant sur le marché plus de 10 000 unités par an et réalisant un chiffre d?affaires
supérieur à 10 M¤ doivent justifier que les déchets induits par les produits peuvent
intégrer une filière de recyclage.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041555598/
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043458675
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043458675
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599010/
ANNEXES
157
- L?interdiction d?enfouissement
Cette mesure a été très efficace chez nos voisins européens (cf.
annexe sur les comparaisons internationales) particulièrement pour les
déchets triés, notamment ceux en plastique. Le décret n°2021-1199 du 16
septembre 2021 relatif aux conditions d?élimination des déchets non
dangereux pris en application de la loi AGEC359 constitue la version
française de cette interdiction.
Graphique n° 19 : recyclage (vert), incinération (jaune) et
enfouissement (rouge) des déchets plastiques en Europe en 2018
Source : Les filières de recyclage des déchets en France, CGEDD, Janvier 2020, données Plastics Europe.
Les pays en pointillés ont déjà mis en oeuvre l?interdiction de l?enfouissement des déchets plastiques
359 Article 6 d?AGEC « la mise en décharge des déchets non dangereux valorisables
est progressivement interdite » et Article 10 « les producteurs ou détenteurs de déchets
ne peuvent éliminer ou faire éliminer leurs déchets dans des installations ? que s?ils
justifient qu?ils respectent les obligations de tri ».
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https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044060460
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044060460
COUR DES COMPTES
158
Annexe n° 9 : comparatif entre les différentes
modalités de financement
du service public
Production de déchets
Sécurité budgétaire et de
recouvrement
Service rendu et investissement
nécessaire
Équité pour les usagers
Pour Contre Pour Contre Pour Contre Pour Contre
TEOM
Limitation
du risque
de dépôts
sauvages
Aucun lien
entre quantité
de déchets et
facturation
Grande
facilité et
sécurité de la
ressource
aucun
Moindre
investissement
sur les outils de
collecte (bennes
et bacs)
Relation plus
distendue avec
l'usager (faible
communication)
Caractère
social des
bases
d'imposition
Sans lien
avec les
quantités
produites.
Valeurs
locatives
obsolètes
TEOMI
Incitatif
(effet prix)
Risques de
détournement
(dépôts
sauvages)
Sécurité
budgétaire
grâce à la part
fixe.
Recouvrement
assurée par les
services de
l'État.
Établissement
du rôle plus
complexe
(décalage
d'un an de la
prise en
compte de la
part variable).
Meilleure
connaissance des
usagers
Investissements
(bennes et bacs-
puçage). Efforts
de
communication
et de suivi des
usagers
Lien partiel
coût du
service
/quantités
produites
mais
maintien
base liée au
patrimoine
(VLF)
Part
variable
minoritaire
(de 10 à
45 %)
REOM
Lien
théorique
avec les
quantités
de déchets
produites
Lien indirect
entre prix
payé par
l'usager et sa
production
de déchets
(absence de
caractère
incitatif).
Aucun
avantage
Complexité
(tenue du rôle
et gestion des
impayés par
la
collectivité)
Pas
d'investissements
à prévoir.
Gestion des
évolutions du
rôle des usagers
complexe (p.
ex. changement
de composition
du foyer).
Apparence
d'équité (si
pertinence
des critères
retenus)
Perte de
l'aspect
redistributif
(social).
Critères
pouvant
être
contestés
REOMI
Prix payé
directement
lié à la
production
de déchets.
Risques
d'effet de
détournement
(dépôts
sauvages)
Meilleure
connaissance des
usagers
Investissements
indispensables
(bennes et bacs-
puçage). Efforts
de
communication
et de suivi des
usagers
L'usager
paie pour
les quantités
produites
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ANNEXES
159
Annexe n° 10 : les conséquences de la crise
sanitaire sur la gestion des déchets
La production des déchets en général, a été inférieure à ce qu'elle est
en période normale, notamment en raison d'une moindre production de
déchets issus des activités économiques (- 25 % en Ile-de-France) mais les
emballages en plastique ont augmenté (+30 % du fait de leur réputation de
sécurité sanitaire et de la hausse des ventes de plats à emporter).
Les nouveaux protocoles sanitaires (masques, règles de
distanciation sociale dans les temps de pause et croisement des équipes) et
le manque de personnel ont généré une perte du temps de travail et une
diminution des performances de gestion de déchets et, pour certains
territoires, la fin des collectes sélectives et de l?exploitation des centres de
tri (arrêts provisoires en raison de l?impossibilité de se déplacer des salariés
des entreprises de maintenance).
Près de 100 % des déchèteries ont été fermées au niveau national.
Or, dans le même temps, certaines activités des ménages productrices de
déchets (jardinage, bricolage, tri) ont été plus intenses que d?ordinaire.
Par conséquent, des déchets qui auraient normalement dû être
évacués en déchèteries ont été présentés dans les bacs d?ordures ménagères
conduisant à une forte augmentation des dépôts sauvages sur les points
d?apport volontaire et du taux de refus de tri (+ 15 %). Les volumes déposés
ont fortement augmenté après les périodes de confinement, conduisant à
des augmentations des coûts de transport.
Les dépenses du SPGD ont augmenté en outre, du fait de l?achat de
masques, de produits d?entretien, d?actions de communication pour la
réouverture des équipements et des charges supplémentaires en moyens
humains. Les recettes quant à elles, ont baissé puisque les effets de la crise
ont induit une chute des quantités de produits valorisables collectées en
déchèterie, et une baisse des soutiens des éco-organismes (par exemple -
25 % pour la communauté de communes du Grésivaudan).
Les masques déposés dans les OMR n?ont pas été recyclés pour des
raisons sanitaires et de coût (12 fois plus cher qu?un emballage plastique)360.
360 Les masques sont responsables de 40 000 tonnes de déchets non recyclés
supplémentaires en 2020. 16?millions d?euros d?aides ont ainsi été accordés aux
recycleurs des masques et le plan de relance comporte une mesure de soutien de
10 millions d?euros sur la période 2021-2022.
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Réponses des administrations
et des organismes concernés
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Sommaire des réponses reçues à la date de la
publication
Les réponses parvenues après la publication du présent document ne sont pas incluses ici mais
publiées avec le rapport sur le site de la Cour des comptes.
Madame la présidente de l?Association
des régions de France (ARF) .................................................................. 167
Monsieur le président de l?Association
des Intercommunalités de France ........................................................... 171
Madame la présidente de France Urbaine ............................................... 175
Monsieur le président de l'Association
des maires de France (AMF) .................................................................. 182
Monsieur le président de la Métropole de Lyon ..................................... 189
Madame la présidente de la communauté
de communes de l'Île d'Oléron ................................................................ 191
Monsieur le président du conseil régional de Bretagne .......................... 194
Monsieur le président du conseil régional Grand Est ............................. 195
Monsieur le président du conseil régional de Normandie ....................... 198
Monsieur le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine ......... 198
Monsieur le président du conseil régional
Provence-Alpes-Côte d?Azur .................................................................. 202
Madame la maire de Paris ....................................................................... 204
Monsieur le président du Syndicat mixte départemental
en charge d'études et du traitement des déchets ménagers
et assimilés de la Vendée (TRIVALIS) .................................................. 205
Monsieur le président de l?Association AMORCE ................................. 210
Destinataires n?ayant pas d?observation
Madame la présidente de la Métropole Aix-Marseille-Provence
Madame la présidente de la communauté urbaine
du Grand Besançon Métropole
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164
Monsieur le président de la Métropole de Nice Côte d?Azur
Monsieur le président de la communauté d?agglomération
Valenciennes Métropole
Monsieur le président du conseil régional des Hauts-de-France
Madame la présidente du conseil régional d?Occitanie
Monsieur le président du Syndicat mixte de transport et de traitement
des déchets ménagers de Lorraine Nord (SYDELON)
Monsieur le président du Syndicat mixte pour le traitement
et la valorisation des déchets ménagers résiduels - « Valor3e »
Monsieur le président du Syndicat départemental d'élimination
des déchets de l'Aube (SDEDA)
Monsieur le président du Syndicat Inter-Arrondissement
de valorisation et d?élimination des déchets (SIAVED)
Monsieur le président du Syndicat d?études et de réalisations
pour le traitement intercommunal des déchets de Belfort (SERTRID)
Destinataires n?ayant pas répondu à la date de la
publication
Madame la Première ministre
Madame la présidente du conseil régional des Pays de la Loire
Monsieur le président de la communauté d'agglomération
du Grand Villeneuvois
Monsieur le président de la communauté de communes
des Gorges de l'Ardèche
Monsieur le président de la communauté de communes de l'Île d'Oléron
Monsieur le président du conseil régional d?Auvergne-Rhône-Alpes
Monsieur le président du conseil régional Centre-Val de Loire
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS
165
Madame la présidente du conseil régional d?Île-de-France
Monsieur le président du Syndicat mixte Flandre Morinie (SMFM)
Monsieur le président du Syndicat mixte de traitement
des ordures ménagères de la région de Villerupt
Monsieur le président du Syndicat mixte d?élimination
et de valorisation des déchets des Communautés d'Agglomération
du Douaisis, Hénin-Carvin et de la Communauté de Communes
d?Osartis-Marquion (SYMEVAD)
Monsieur le président du Service Intercommunal de collecte
de traitement des ordures ménagères (SICTOM) de Pézenas-Agde
Monsieur le président du Syndicat pour la valorisation
et le traitement des déchets ménagers et assimilés (VALTOM)
Monsieur le directeur général de CITEO
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MADAME LA PRÉSIDENTE DE L?ASSOCIATION
DES RÉGIONS DE FRANCE (ARF)
Par courrier en date du 18 juillet 2022, vous m?avez transmis le
relevé d?observations provisoires portant sur les rôles respectifs des divers
niveaux territoriaux en matière de déchets ménagers et assimilés,
document préparatoire à un chapitre du rapport public annuel publié au
premier trimestre 2023.
Dans le cadre de la préparation du rapport interne de la Cour sur
le panorama institutionnel et économique sur l?évolution des Déchets
ménagers et assimilés en France, Régions de France avait transmis une
contribution portant sur des éléments d?éclairage sur l?exercice de la
compétence de planification de la prévention et de la gestion des déchets
par les Régions et sur leur collaboration avec l?État et les collectivités en
charge de la mise en oeuvre.
Les recommandations formulées par la Cour des comptes dans son
document préparatoire m?amènent à vous formuler les remarques
complémentaires suivantes :
1 - Sur l?observation régionale de la gestion
et de la prévention des déchets
La Cour recommande de confier en 2023 aux observatoires
régionaux de la gestion et de la prévention des déchets le suivi de la mise
en oeuvre par les intercommunalités des objectifs nationaux (Ministère de
la transition écologique et de la cohésion des territoires, régions).
En 2022, la majorité des Régions sont déjà couvertes par un
observatoire régional. Ceux-ci sont d?ailleurs représentés par le RARE au
sein du Comité National Observation Economie Circulaire piloté par le
Ministère (qui s?est réuni une première fois le 5 juillet 2022). Le RARE
rassemble les observatoires régionaux des déchets français :
- Auvergne-Rhône-Alpes : SINDRA (portée par AURA-EE)
- Bourgogne-Franche-Comté : Alterre Bourgogne-Franche-Comté
- Bretagne : Observatoire Environnement Bretagne
- Centre Val de Loire : pas d?observatoire (consulter la page du Conseil
régional)
- Corse : Observatoire territorial des déchets
- Grand Est : Observatoire des déchets et de l?économie circulaire
- Guadeloupe : Observatoire des déchets de la Guadeloupe (portée par
Synerg?Ile)
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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168 COUR DES COMPTES
- Guyane : Observatoire des déchets de la Guyane
- Hauts de France : ODEMA
- Ile de France : ORDIF (porté par l?Institut Paris Région)
- Martinique : pas d?observatoire
- Mayotte : pas d?observatoire
- Normandie : Biomasse Normandie et NEC (alimenté par les travaux
de Biomasse Normandie et de la CERC)
- Nouvelle-Aquitaine : ORDEC Nouvelle-Aquitaine (porté par l?AREC
Nouvelle-Aquitaine)
- Occitanie : ORDECO
- Provence-Alpes-Côte-d?Azur : ORD&EC
- Pays de la Loire : TEO Pays de la Loire
- Réunion : Observatoire Réunionnais des Déchets
Les observatoires régionaux des déchets ont pour mission de
contribuer à la prévention et à l?amélioration de la gestion des déchets et
de leurs impacts, par l?étude et la diffusion d?informations et de données.
Ils appuient l?élaboration des planifications régionales et suivent leur mise
en oeuvre. Enfin, ils peuvent contribuer aux échanges et à la concertation
sur ces enjeux prégnants des territoires. Disposant d?une véritable
expertise de la donnée, ils constituent un appui opérationnel des Régions
et de l?ADEME pour la mise en place des stratégies de prévention et de
gestion des déchets et des ressources. Les observatoires régionaux des
déchets peuvent être hébergés au sein d?une agence régionale de
l?environnement, d?une autre structure, ou mis en oeuvre directement par
leurs pilotes (Conseil régional, ADEME en général).
Le RARE leur offre un espace d?échanges et de mutualisation unique
et indispensable à l?amélioration des pratiques et l?optimisation des
moyens.
Un cadre de discussion national entre Régions de France et le
RARE permet d?assurer une convergence méthodologique des
observatoires répondant aux stratégies et objectifs régionaux.
Le cofinancement par l?ADEME de l?observation a constitué un
apport financier indispensable pour l?émergence des observatoires
régionaux dont la question de la pérennisation financière reste entière.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 169
2- Sur le renforcement du rôle planificateur des régions
La Cour des comptes appelle à un nécessaire renforcement du rôle
des régions avec un rôle de planification à affirmer et mentionne que dans
le cadre de la libre administration des collectivités territoriales, les
niveaux supra-intercommunaux, c?est-à-dire l?État et les régions
interviennent aujourd?hui en recourant principalement aux outils de
planification et de cofinancement. Le renforcement de ces outils implique
moins une évolution significative des compétences de l?État ou de ses
opérateurs qu?une plus grande implication des régions.
Une meilleure articulation entre le Code général des collectivités
territoriales (volet SRADDET) et le code de l?environnement (volet
PRPGD) pourrait être utile pour assurer la bonne lisibilité des obligations
législatives et réglementaires qui incombent aux Régions et aux EPCI.
3- Sur la déclinaison régionale des objectifs des REP
La Cour propose d?intégrer aux prochains arrêtés de cahier des
charges des filières REP une déclinaison de leurs objectifs au niveau
régional (Ministère de la transition écologique et de la cohésion des
territoires).
L?intégration aux prochains arrêtés de cahier des charges des
filières REP d?une déclinaison de leurs objectifs au niveau régional semble
cohérente avec le rôle de planification et de coordination confié aux
Régions d?autant que les quantités de déchets traitées par les filières REP
sont importantes puisqu?elles représentent plus de 10% des déchets non
dangereux non inertes. Cependant la déclinaison régionale des objectifs
nationaux et européens peut s?avérer complexe en fonction des filières et
des territoires. Il faut noter que des partenariats techniques et financiers
existent entre certaines filières REP et certaines Régions, lesquels peuvent
s?appuyer sur des conventions bipartites (voire tripartites avec l?ADEME).
Cette proposition viendrait compléter les éléments inscrits dans le
projet d?arrêté relatif aux données des filières à responsabilité élargie des
producteurs (REP) mis en consultation du public du 7 juin au 29 juillet
2022. Celui-ci prévoit que les éco-organismes transmettent chaque année
des informations aux Régions pour l?élaboration et le suivi des SRADDET.
Les Régions réitèrent leur demande que ces données soient des données
transmises à l?échelle territorialisée des EPCI et syndicats.
En effet, le maillage territorial des données devra permettre de
répondre à l?article R.541-16 du code de l?Environnement qui mentionne
que : « I. 5° [?] Le plan mentionne notamment les installations qu?il
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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170 COUR DES COMPTES
apparaît nécessaire de créer, d?adapter ou de fermer afin d?atteindre ces
objectifs et de gérer l?ensemble de déchets pris en compte [?]et en
cohérence avec les principes de proximité et d?autosuffisance, appliqués
de manière proportionnée aux flux de déchets concernés [?] et adaptée
aux bassins de vie? ». Par ailleurs, la mise à disposition à ces autorités
compétentes des données régionales sur les biens mis sur le marché est
nécessaire à la déclinaison régionale des objectifs européens et nationaux.
4 ? Sur la généralisation de la délégation des crédits ADEME
via les CPER
La Cour propose de généraliser à chaque contrat de plan État-
Région la délégation des crédits de l?ADEME en matière de transition
énergétique et d'économie circulaire (Ministère de la transition écologique
et de la cohésion des territoires, régions).
Un transfert du fonds économie circulaire (ou une partie) aux
Régions aurait été préférable pour offrir aux Régions toute latitude pour
financer des projets sur le territoire et mettre en oeuvre les objectifs de la
planification, comme Régions de France l?a fait valoir lors des discussions
parlementaires du projet de loi 3DS qui a malgré tout disposé dans son
article 57 une délégation de gestion pour les régions volontaires. Jugée
lourde administrativement et techniquement, très encadrée et partielle, la
mise en oeuvre de cette délégation apparait peu effective après plusieurs
mois de discussions.
En effet, il conviendrait que les Régions puissent disposer de
l?autonomie d?emploi des crédits pour mettre en oeuvre la planification et
accompagner les territoires en cohérence avec les stratégies, plans et feuilles
de routes régionaux. Par exemple, les critères d?intervention de l?ADEME
ne permettent pas de soutenir des opérations de mise aux normes
réglementaires alors même que certaines régions sont en retard sur le sujet.
Or les délégations ne peuvent se faire que sur la base des critères
d?intervention de l?ADEME. La mise en place de critères d?intervention
régionalisés et adaptés aux besoins propres des territoires semble nécessaire
pour permettre de financer davantage les équipements structurants et
indispensables à la réalisation des objectifs régionaux et nationaux.
Tels sont les remarques dont je voulais vous faire part en vue de leur
prise en compte dans le rapport de la Cour.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 171
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE L?ASSOCIATION
DES INTERCOMMUNALITÉS DE FRANCE
Au nom d?Intercommunalités de France, je tiens à vous remercier
pour avoir sollicité, par votre courrier du 28 juillet 2022, les réactions de
notre association au projet de rapport public thématique « Prévention,
collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser »
que la Cour publiera prochainement. Ce projet appelle de notre part les
observations exprimées dans le présent courrier.
Intercommunalités de France salue tout d?abord l?important travail
d?analyse mené par la Cour au travers de ce rapport et confirme
l?implication de notre association dans l?accompagnement à la prévention
et la gestion des déchets. A ce titre, nous partageons avec la Cour le constat
de la non-atteinte des objectifs nationaux de réduction des déchets
collectés et traités. Notre association considère cependant que les
comparaisons chiffrées avec d?autres pays sont à relativiser au regard des
incertitudes documentées sur les différences de méthodes statistiques, ainsi
que tous les autres facteurs culturels, économiques dans chaque pays. Par
ailleurs, nous tenons à souligner que ce mandat sera marqué par l?entrée
en vigueur de nouvelles obligations qui permettront une réduction à la
source de la production de certains déchets :
? Généralisation de l?extension des consignes de tri plastique à compter
du 31 décembre 2022
? Généralisation du tri à la source des biodéchets
? Mise en oeuvre de nouvelles filières REP
Nous souscrivons aux recommandations formulées par la Cour
d?unification des documents nationaux de programmation (PNPD et
PNGD) ainsi que d?harmonisation des documents locaux (RPQS et
PLPDMA) considérant qu?elles répondent à un besoin d?une plus grande
intégration des enjeux de prévention dans les stratégies de gestion des
déchets.
Intercommunalités de France s?interroge toutefois sur les
propositions formulées par la Cour dans sa recommandation n°6 pour
encourager le déploiement de la tarification incitative en renforçant le
soutien financier aux collectivités qui semblent à ce jour insuffisantes pour
contourner les difficultés de sa mise en oeuvre.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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172 COUR DES COMPTES
1. Réduction des déchets à la source : la responsabilité
des metteurs en marché
Nous réitérons notre analyse consistant à remarquer que les
différents acteurs en responsabilité en France, ne bénéficient pas des
mêmes remarques et injonctions à agir. Les collectivités, pourtant situées
« au bout du tuyau » du cycle « production vente usage destruction ou
abandon des produits », sont sommées d?être les acteurs principaux de la
politique de prévention-réduction. Ainsi, si l?on excepte les biodéchets, ce
sont davantage les stratégies commerciales des metteurs en marché, qui
orientent les comportements des consommateurs.
Au regard des dépenses de publicité, faites par les producteurs et
les distributeurs ? plus de 470 ¤ par Français en 2021361, soit trois fois le
coût du service public de gestion des déchets (SPGD) ? il conviendrait de
laisser aux premiers la prise en charge totale des coûts des services de tri
et de collecte des produits de chaque filière actuellement supportés par les
collectivités afin de rééquilibrer la répartition des coûts entre producteurs
et consommateurs. En parallèle, les objectifs attribués aux acteurs des
filières REP sont pour le moins vagues mais surtout non contrôlés.
Intercommunalités de France regrette cette situation, qui en plus de
laisser à charge des contribuables locaux ce qui devrait être à charge des
consommateurs, ne concerne pas toutes les productions commercialisées
qui pourtant finissent dans les circuits de collecte et de traitement des
collectivités. Par ailleurs, la loi de finances de 2019 a acté une trajectoire
haussière de la TGAP, dans l?objectif de pénaliser le traitement par
enfouissement ou incinération et encourager le déploiement d?une
économie circulaire. Cette hausse est particulièrement problématique pour
les collectivités qui ne disposent pas de leviers d?action pour influer sur la
réemployabilité et la recyclabilité des produits ou encore sur l?acte
d?achat. Il existe un volume incompressible de déchets qui doivent être
dirigés aujourd?hui vers ces exutoires et qui pourrait faire l?objet d?un
tarif de base révisé. Nous renouvelons donc notre proposition d?une TGAP
amont sur tous les produits des filières pour responsabiliser les metteurs
en marché ; cela concernerait autant d?incitation à la durabilité, à la
réutilisation qu?au recyclage matière. Cette tarification, outre qu?elle
permettrait la prise en charge de tous les produits manufacturés devenus
déchets (qui seront facturés par l?État 6,5 centimes par kg en 2025), sans
pour cela que le consommateur puisse arbitrer sur ses achats puisque c?est
le contribuable qui paie la TGAP.
361 Baromètre unifié du marché publicitaire, Kantar, 2021
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 173
Nous rappelons aussi que l?atteinte des objectifs nationaux et
régionaux assignés aux politiques et actions d?économie circulaire
suppose des ressources comme la TGAP nantie d?une hausse programmée
par un accord conclu lors du Grenelle de l?Environnement en 2008 et qui
devait alimenter la politique déchets via l?ADEME. Ces ressources sont
aujourd?hui dissoutes dans le budget de l?État sans que les fonds
nécessaires pour la prévention et pour l?économie circulaire ne soient
rendus disponibles. Intercommunalités de France continue d?appeler à un
retour des recettes de la TGAP vers le financement d?actions vertueuses
dans lesquelles s?engagent les collectivités dans le traitement des déchets.
Cette piste vient soutenir la proposition de la Cour, que nous partageons,
d?impliquer davantage les régions dans la planification, l?animation, et
le financement qui acterait le lien entre les Plans Régionaux de
Prévention et de Gestion des Déchets et les Plans régionaux pour
l?Économie Circulaire.
2. Assouplir le cadre de déploiement de la tarification incitative
Une nouvelle fois la Cour insiste sur l?efficacité de la tarification
incitative dans certains des territoires où sa mise en oeuvre a pu être
vérifiée sur un temps long et un effort soutenu sur le tri à la source des
biodéchets.
Le rendez-vous de la généralisation obligatoire de ce tri à la source
des biodéchets devrait nous instruire sur les limites de l?exercice du signal
prix sur le comportement des citoyens contribuables consommateurs. En
effet toutes les expériences en cours et les études de dimensionnement des
services nécessaires à ce tri à la source indiquent une hausse des dépenses
du SPGD, effaçant les bénéfices jusqu?alors promis aux « bons élèves » et
contraignant encore les budgets des collectivités.
Par ailleurs, le volume croissant des déchets issus de produits
manufacturés collectés en déchèterie interroge sur l?extension des
systèmes de facturation liée à ce type de collecte et donc sur le coût global
de la redevance. Ces équipements qui reçoivent des tonnages équivalents
à ceux du porte-à-porte, doivent régulièrement être mis à niveau :
l?augmentation du nombre de filières suppose des extensions foncières
souvent difficiles à envisager sans parler de la formation technique et
administrative des agents chargés de faire appliquer des réglementations
souvent vécues comme contraignantes par les usagers, et auxquelles
s?ajoutent des relations tendues avec les prestataires des REP
opérationnelles.
Intercommunalités de France demeure favorable au déploiement
d?une dimension incitative dans la tarification du SPGD lorsque cela est
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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174 COUR DES COMPTES
possible mais estime qu?elle ne constitue qu?un levier parmi d?autres de
prévention des ordures ménagères résiduelles (OMR), d?autant plus
qu?elle opère en aval de la chaîne, après les actes de production et de
consommation.
Afin de tendre vers une plus grande couverture de la population, au-
delà des frontières administratives, Intercommunalités de France appelle
ainsi à adopter certaines souplesses dans le cadre de la tarification
incitative. En premier lieu, Intercommunalités de France propose de
permettre par la loi une coexistence pérenne de plusieurs régimes de
tarification sur un même territoire. Cette possibilité existe déjà à titre
transitoire que ce soit pour permettre l?expérimentation de la taxe
incitative362 ou pour tenir compte de la fusion d?intercommunalités aux
régimes différents363. En effet, les principales difficultés techniques
identifiées pour ce déploiement apparaissent dans les milieux urbains
denses et dans les milieux touristiques ; ceux-ci caractérisent rarement
l?intégralité d?un territoire intercommunal. Une seconde alternative
transitoire pourrait consister en une capacité de zonage de la TEOM, en
fonction des performances à l?image de ce qui est déjà permis aujourd?hui
mais en fonction de l?importance du service rendu364.
? Faciliter l?accès des collectivités au fichier de taxe sur le foncier bâti :
Intercommunalités de France souhaite attirer l?attention de la Cour
sur un autre défi technique propre à la mise en oeuvre de la tarification
incitative. La taxation et le recouvrement de la part incitative de la TEOM
sont effectués dans le cadre de la taxation et du recouvrement de la taxe
foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Les collectivités qui souhaitent
mettre en place une part incitative de la TEOM sont conduites à repartir
du fichier foncier de la taxe foncière sur les propriétés bâties.
Elles ont la charge d?établir et de notifier aux services de la DGFiP,
avant le 31 mars de l?année d?imposition, le montant, en valeur absolue,
de la part incitative de la TEOM pour chaque local imposé à la TEOM. A
cet effet, les services de la DGFiP leur fournissent un fichier dit « d?appel
» recensant les locaux imposables au 1er janvier de l'année d'imposition
(hors constructions neuves) et notamment la valeur locative foncière
retenue pour l?établissement de la TEOM (décret de 2012).
Ce fichier doit être complété par la collectivité avec les éléments utiles
à l?administration fiscale pour établir l?imposition, à savoir : le montant de
362 Article 1522 bis du Code général des impôts, pour une durée portée à 7 ans
363 Article 1639 A bis du Code général des impôts et article L2333-76 du Code général
des collectivités territoriales
364 Article 1636 B undecies du Code général des impôts
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 175
cotisation correspondant à la part incitative de la TEOM pour chaque local
imposable. Il est malheureusement fréquent que ces fichiers, soient
incomplets et que l?interface informatique rende compliqué l?appariement
du fichier foncier avec le fichier des usagers du service de déchets.
De fait, alors que la redevance est payée par l?usager (qu?il soit
propriétaire ou locataire), la TEOM est considérée comme une taxe
additionnelle à la taxe foncière, payée par les seuls propriétaires, tout en
étant considérée comme une charge récupérable. Par conséquent, les
fichiers de TEOM comportent le nom des propriétaires, alors que
l?individualisation de la part incitative nécessite d?identifier le « producteur
de déchets », c?est-à-dire le locataire. Il peut en résulter des difficultés de
connexion entre le fichier fourni par la DGFiP et les bacs nominatifs. Par
conséquent, la mise en oeuvre de la tarification incitative en habitat collectif
représente une réelle difficulté d?identification des redevables potentiels
Ces difficultés sont connues et rapportées par de nombreuses
collectivités qui renoncent de ce fait à instituer une part incitative de
TEOM. Ainsi, Intercommunalités de France considère que la mise en place
et le bon fonctionnement d?une tarification incitative nécessite que
l?administration fiscale, qui par ailleurs prélève un pourcentage au titre
de la gestion et du recouvrement de la fiscalité foncière et de la TEOM,
facilite le travail de recoupement des fichiers.
Telles sont les observations que nous souhaitions porter à votre
connaissance. Espérant que ces éléments répondront à vos attentes et
pourront contribuer au travail d?évaluation et de propositions de la Cour,
je vous prie de croire, Monsieur le Premier président, à l?assurance de mes
sentiments les meilleurs.
MADAME LA PRÉSIDENTE DE FRANCE URBAINE
Par courrier en date du 28 juillet 2022, vous nous avez adressé le
projet de rapport public thématique « Prévention, collecte et traitement des
déchets ménagers : une ambition à concrétiser » que la Cour se propose
de publier prochainement. Ce projet de rapport appelle de notre part les
observations exprimées dans la présente lettre.
France urbaine salue le travail d?analyse de la Cour et souscrit à
plusieurs de ses recommandations, qu?il s?agisse d?aller vers une
harmonisation des bilans PLPDMA et des rapports annuels sur le prix et
la qualité du service public de prévention et de gestion des déchets (PROS)
en les fusionnant en un compte-rendu unique (n°5), d?« instaurer une taxe
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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176 COUR DES COMPTES
de séjour additionnelle dont le produit serait affecté aux actions relatives
à la prévention et à la gestion des déchets », permettant de couvrir les coûts
supplémentaires spécifiques supportés par les communes touristique, ou
de réduire le nombre d?indicateurs de pilotage à quelques indicateurs-clefs
dans un tableau de bord national annuel et par type d?EPCI, une mesure
qui nous paraît aller dans le bon sens, dès lors que les collectivités et leurs
groupements seront associés à leur construction et à la définition de leur
périmètre.
Nous nous félicitons que la Cour préconise dans sa
recommandation n°7 de renforcer le soutien financier aux collectivités qui
souhaiteraient déployer la tarification incitative, plutôt que d?aller vers un
système plus contraignant qui viendrait pénaliser celles qui y ont renoncé,
pour des raisons de coût de mise en oeuvre et/ou de complexification
opérationnelle. Nous doutons toutefois qu?elle soit suffisante pour infléchir
significativement la tendance dans les zones urbaines, lesquelles sont
notamment confrontées aux difficultés techniques inhérentes aux
copropriétés en habitat collectif.
La tarification incitative n?est qu?un des leviers de réduction des
OMR...
Il nous apparaît que si la tarification incitative agit comme un levier
de réorientation des flux et peut contribuer à l?amélioration des gestes de
tri, elle n?induit pas, comme le souligne le Cercle national du recyclage,
« de tendance à la baisse des quantités totales de déchets ménagers
collectés »365, et ne semble pas avoir d?effet notable sur la réduction
globale du volume des OMR, si l?on s?en réfère notamment à l?exemple
allemand366.
Il est de surcroît difficile d?attribuer ces réallocations entre flux à
la seule mise en place de la tarification incitative, tant elle n'est souvent
que l?un des éléments d?une politique globale d?amélioration des
performances, si bien, comme le rappelle le CGDD, que « l?écart constaté
entre les tonnages collectés dans les collectivités en REOMi et dans celles
qui ne le sont pas ne peut s?interpréter comme directement causé par le
passage en REOMi. En effet, les collectivités ayant adopté ce type de
tarification peuvent présenter d?autres caractéristiques qui expliquent cet
365 Tarification incitative : la communication en première ligne, mars 2018, Centre
National du Recyclage, page 65.
366 En Allemagne, où part de communes ayant institué la tarification incitative avoisine
les 100 %, la production de DMA était de 625 kg par habitant en 2015, contre 573 kg
en France la même année.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 177
écart367 ». Car la mise en place de la tarification incitative s?accompagne
généralement d?autres actions de sensibilisation et de prévention, et il est
utile de rappeler que les baisses des tonnages des OMR interviennent
« avant la mise en place effective de la tarification incitative, plus
précisément entre l?année de communication sur ce nouveau mode de
financement et l?année de la première facturation. Après la mise en place
effective de la tarification incitative il est possible d?observer pour les
quatre collectivités étudiées une stabilisation des quantités d?ordures
ménagères résiduelles. Ceci prouve que ce n?est pas la tarification
incitative en elle-même qui peut jouer un rôle mais l?annonce de la
tarification incitative »368.
La réduction des tonnages d?OMR devrait par ailleurs connaître
une nouvelle baisse avec l?entrée en vigueur récente ou prochaine de
nouvelles dispositions législatives et réglementaires, qu?il s?agisse :
- de la généralisation de l?extension des consignes de tri plastique à
tous les EPCI d?ici le 31 décembre 2022 : dans les territoires où elle a été
expérimentée, la simplification des gestes de tri des emballages a permis
d?augmenter la part des déchets triés de de 3 kg par habitant369 ;
- de la généralisation au plus tard au 31 décembre 2023 prévue par
la loi AGEC, du tri à la source des biodéchets (en collecte séparée, en porte
à porte, ou en gestion de proximité, avec compostage individuel ou
partagé) qui représentent, comme le rappelle la Cour, jusqu?à un tiers des
volumes des déchets des ménages et des entreprises ;
- de la création de nouvelles filières REP sur les produits du tabac,
les jouets, les articles de sport, de loisir, de bricolage et de jardin370, et les
produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment371 ;
- de la montée en puissance des filières REP existantes ;
- des nouvelles règles visant à rendre la quasi-totalité des biens
physiques présents sur le marché de l'Union européenne plus écologiques,
circulaires et sobres en énergie tout au long de leur cycle de vie, englobant
la conception, l'utilisation courante, la réaffectation et l'élimination des
367 La tarification incitative de la gestion des ordures ménagères - Quels impacts sur les
quantités collectées ? ? CGDD 2016 (page 21).
368 Tarification incitative : la communication en première ligne, mars 2018, Cercle
National du Recyclage, page 60.
369 https://www.citeo.com/le-mag/simplification-du-tri-en-france-fait-le-point/
370 Décret n° 2021-1213 du 22 septembre 2021.
371 Décret n° 2021-1941 du 31 décembre 2021.
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https://www.citeo.com/le-mag/simplification-du-tri-en-france-fait-le-point/
178 COUR DES COMPTES
produits, telles qu?annoncées par la Commission européenne le 30 mars
2022 dans son plan d?action pour une économie circulaire372.
Assouplir le cadre de la tarification incitative
Alors que ces mesures vont diminuer mécaniquement et
significativement les volumes de déchets, un allégement des coûts de mise
en oeuvre de la tarification incitative des premières années, objet de la
recommandation n°6 de la Cour, sera-t-il de nature à enclencher une
nouvelle dynamique en faveur de la tarification incitative ?
Si France urbaine accueille cette proposition favorablement, elle
constate également son caractère limité dans le temps, alors que les coûts
de mise en oeuvre de la tarification incitative demeurent, eux, pérennes.
Nous savons par ailleurs par expérience que l?État cherche toujours à
réduire dans le temps le niveau de ses transferts aux collectivités, et qu?il
pourrait chercher à compenser d?une manière ou d?une autre l?effort qu?il
consentirait sur la réduction des frais de gestion sur la TEOMi mise en
oeuvre par les collectivités.
Cette question est par ailleurs posée dans un contexte où les
collectivités sont confrontées à de nouvelles contraintes et d?immenses
défis :
- l?explosion des prix de l?énergie, dont tout laisse à penser qu?elle
sera durable, contraint très fortement leurs budgets, et entraîne déjà des
arbitrages difficiles allant parfois jusqu?à la réduction de la disponibilité
voire la fermeture de certains équipements ;
- les enjeux climatiques vont nécessiter de leur part de lourds
investissements, tant pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre
que pour adapter leur territoire aux bouleversements climatiques en cours
et à venir.
C?est pourquoi, au-delà des mesures d?accompagnement financier,
il nous semble indispensable de simplifier les modalités de mise en oeuvre
de la tarification incitative dans les zones urbaines. en l?adaptant aux
contraintes et aux spécificités de ces territoires, où il est souvent très
complexe de mettre en oeuvre une mesure individuelle de la production de
déchets.
372 Communication from the Commission to the European parliament, the Council, the
European economic and social committee and the Committee of the regions on making
sustainable products the norm, 30 mars 2022.
https://eur-lex.europa.eu/legal-
content/EN/TXT/PDF/?uri=COM:2022:140:FIN&from=DA
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https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=COM:2022:140:FIN&from=DA
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=COM:2022:140:FIN&from=DA
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 179
Le franchissement de ces obstacles techniques suppose, lorsque cela
est possible, d?engager de lourds investissements, qui pourraient certes
être en partie subventionnés par un rehaussement des mesures de soutien
sur les premiers exercices, mais dont les effets de moyen/long terme sur les
coûts de traitement restent limités : pré-collecte et collecte ne représentent
pour mémoire que 40% du coût total du SPGD, et la part variable du
SPGD n?est elle-même que d?une vingtaine de pourcent de ce coût total.
Assouplir le cadre pour tenir compte des spécificités de ces
territoires permettrait d?aboutir à des résultats de même ordre, à des coûts
considérablement réduits, et sans complexification opérationnelle de la
collecte.
Deux mesures nous sembleraient ainsi de nature à lever les
blocages :
1. autoriser la cohabitation pérenne de la TEOM et de la TEOMi
sur un même territoire, une option qui permettrait aux collectivités
volontaires d?instituer une part incitative dans les zones à faible densité
d?habitation sans avoir à craindre une généralisation, avant d?envisager
une extension progressive à d?autres secteurs. À défaut d?une coexistence
pérenne TEOM/TEOMi, il conviendrait a minima d?allonger
significativement le délai au-delà duquel s?opère une bascule vers l?un ou
l?autre modèle, à condition dans ce cas d?imaginer des solutions moins
coûteuses pour développer la tarification incitative en zones denses.
Depuis 2012, la TEOM incitative (TEOMi) peut être instituée sur
une partie du territoire d?une collectivité, dans le cadre d?une
expérimentation initialement limitée à 5 ans ? puis portée à 7 ans par la
loi de finance 2021 - à l?issue de laquelle la tarification incitative doit être
généralisée, ou abandonnée. Cet allongement de deux ans ne résout pas
fondamentalement le problème qui retient de nombreuses collectivités de
se lancer dans la démarche ;
2. permettre la mise en oeuvre d?une tarification incitative collective
sur tout un territoire, ou autoriser la cohabitation des deux types de
tarification incitative (individuelle et collective) au sein d?un même
territoire. Une métropole adhérente a ainsi étudié trois scénarios de passage
à l?incitatif : un basculement en REOMi, l?instauration d?une TEOMi, ou la
mise en place d?une « tarification incitative collective », basée sur une
production de déchets mesurée collectivement par secteur (communes,
quartiers de la ville centre). Dans ce dernier scénario, la répartition des
quantités de déchets, sur lesquelles seraient appliquées des tarifs, serait en
fonction de la valeur locative de chaque local soumis à la TEOM, au prorata
de la valeur locative du secteur (ménages et professionnels, hors bases des
locaux non-utilisateurs). L?objectif de cette solution est de créer des
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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180 COUR DES COMPTES
dynamiques collectives de réduction des déchets sur les zones concernées,
d?éviter certains comportements d?évitement (jets clandestins etc.) parfois
associés à la tarification individuelle, et de consacrer plus de moyens aux
actions de prévention, plutôt que de les affecter aux importantes tâches
administratives et opérationnelles nécessaires à la mise en oeuvre d?une
tarification individuelle. La tarification incitative collective mériterait, dans
l?esprit de la loi 3DS, d?être expérimentée dans des collectivités volontaires
sur la totalité de leur territoire ou, au choix des collectivités, n?être activée
que dans les zones denses, avec une tarification incitative individuelle dans
les zones de faible densité.
Nous notons avec satisfaction que cette dernière proposition est
citée dans le rapport de la Cour.
Réduire la production de déchets produits à la source...
Au-delà des questions de fiscalité, il nous semble indispensable de
considérer l?ensemble de la chaîne de « production de déchets », car plan
de réduction drastique des tonnages ne saurait reposer sur le seul aval,
c?est-à-dire une fois que le déchet a été créé. Il faut agir le plus en amont
possible, en poursuivant les efforts de développement d?une économie
circulaire et de la fonctionnalité, en interdisant les emballages
objectivement inutiles et en réduisant le volume de tous ceux qui peuvent
l?être, et en envoyant un signal prix au moment où il est le plus efficace
pour orienter les choix de consommation et éviter que le déchet ne soit
créé, c?est-à-dire au moment de l?acte d?achat.
Or le financement du traitement du SPGD, qui repose aujourd?hui
à 80 % sur les collectivités, traduit un profond déséquilibre entre acteurs
que France urbaine juge impératif de corriger pour tendre a minima vers
la parité. La proposition C.4 de la Convention citoyenne pour le climat,
citée par la Cour, de « remplacer une part significative de la taxe
d?enlèvement des ordures ménagères (TEOM) par des modalités plus
justes et favorisant les comportements écoresponsables » peut aussi
s?entendre comme un nécessaire rééquilibrage des responsabilités et des
contributions entre acteurs.
La TGAP dans sa version actuelle mériterait ainsi d?être
entièrement revue, car si l?objectif de réduction des mises en décharge et
d?incinération est évidemment légitime, la forte augmentation décidée par
la loi de finances 2019 pénalise fortement les collectivités et, comme le
souligne la Cour, « cette hausse uniforme a l?inconvénient de frapper
indistinctement les déchets qui pourraient être mieux triés grâce à
l?intervention des collectivités et les déchets non recyclables du fait des
choix techniques des entreprises sur les volumes desquels les collectivités
ne disposent d?aucun moyen d?action. » D?autant que contrairement aux
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 181
demandes réitérées des collectivités, les recettes supplémentaires générées
par cette hausse n?ont pas été fléchées vers des projets d?économie
circulaire, et que la mise en place des nouvelles filières REP prévue par la
loi AGEC de 2020, qui devait constituer l?une des contreparties de la
hausse de la TGAP, a pris un retard (bâtiment, bricolage, jouets et sport,
notamment) qui n?a fait l?objet d?aucune compensation pour les
collectivités373.
La question de l?instauration d?une taxation amont de tous les
déchets non ou difficilement recyclables, qui avait fait l?objet d?un débat
lors du vote de l?augmentation de la TGAP en 2019, doit à nos yeux être
relancée. Cette taxation, qui enverrait le signal prix évoqué supra, pourrait
prendre la forme d?une TGAP dite « amont », ou d?une REP « déchets
résiduels », qui garantirait un retour des recettes afférentes aux
collectivités374.
Les recettes dégagées par ces nouvelles taxes amont (et
l?augmentation de taxe aval décidée en 2019) pourraient ainsi être
affectées à des fonds ou actions de réduction des déchets à la source, qu?il
s?agisse :
- du fonds « économie circulaire » de l?ADEME visant à
« accompagner la politique des pouvoirs publics et orienter le
comportement des acteurs et les investissements en multipliant les actions
de prévention portées par les collectivités locales et les entreprises, en
déployant les démarches territoriales intégrées de prévention et de gestion,
et en soutenant les investissements de tri, de recyclage, de valorisation
organique et énergétiques nécessaires »375 ;
- de subventionner la collecte des biodéchets, dont la valorisation
deviendra obligatoire au 1er janvier 2024, et qui n?est pas aujourd?hui
aidée ;
373 Le déséquilibre des efforts se lit aussi dans le niveau d?efforts demandés aux
collectivités par rapport aux acteurs économiques : la loi AGEC votée en 2000 fixe en
effet un objectif de réduction de 15 % des quantités de DMA produits par habitant,
quand elle ne demande un effort limité à 5 % sur les quantités de déchets résultant
d?activités économiques (par unité de valeur produite).
374 Les éco-contributions associés à une REP « déchets résiduels » pourraient par
ailleurs être modulées en fonction de l?intégration en amont par le fabricant d?une
démarche de développement durable (ex : utilisation de matières recyclées).
375 https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/fonds-
economie-circulaire
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/fonds-economie-circulaire
https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/fonds-economie-circulaire
182 COUR DES COMPTES
- ou de créer un fonds spécifique d?aide aux actions de prévention
de la production de déchets à la source, actions qui comme le souligne la
Cour dans le paragraphe B/ du rapport mériteraient d?être renforcées, tant
qualitativement que quantitativement. France urbaine s?est constamment
positionnée en faveur de la prévention et de la réduction de la production
de déchets à la source, en poussant cet axe pendant les débats
parlementaires autour de la loi AGEC, ou en participant à des initiatives
comme celle des territoires zéro plastique376. La prévention et la réduction
sont les volets prioritaires à privilégier et à renforcer, tout comme le
respect de la hiérarchie des modes de traitement des déchets inscrite dans
le code l?environnement : réutilisation, recyclage, valorisation et
élimination377. La création d?un tel fonds apparaît d?autant plus nécessaire
que si nous partageons entièrement la nécessité d?allouer un volant plus
important de crédits au volet prévention, le contexte budgétaire, marqué
par la poursuite de la hausse de la TGAP, et l?impact des coûts afférents à
la collecte séparative des biodéchets, qui devrait selon l?ADEME être de
l?ordre de 15 à 25 ¤ par habitant378, va réduire les marges de manoeuvre
budgétaires des collectivités.
Telles sont les observations que nous souhaitions porter à votre
connaissance.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE L'ASSOCIATION
DES MAIRES DE FRANCE (AMF)
Vous avez bien voulu transmettre à l'Association des maires de
France et des présidents d'intercommunalité le projet de rapport public
thématique intitulé « Prévention, collecte et traitement des déchets
ménagers : une ambition à concrétiser » et je vous en remercie.
L'AMF souhaite vous faire part de ses remarques concernant, d'une
part vos recommandations, et d'autre part votre analyse plus générale de
la gestion des déchets.
Concernant les recommandations n°1 à n°5, qui ont pour objectifs
de simplifier et de rationaliser les documents de planification et de suivi,
mais également de mettre en place six indicateurs de suivi, l'AMF appuie
376 Guide « territoires zéro pollution plastique », WWF des territoires zéro plastique,
WWF, septembre 2020 : https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-
09/20200920_Guide_Territoires-Zéro-Pollution-Plastique_WWF.pdf
377 Article L. 541-1 II du Code de l?Environnement
378 https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/valorisation-biodechets-agir
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https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-09/20200920_Guide_Territoires-Zéro-Pollution-Plastique_WWF.pdf
https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-09/20200920_Guide_Territoires-Zéro-Pollution-Plastique_WWF.pdf
https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/valorisation-biodechets-agir
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 183
ces recommandations. La multiplication de documents ayant sensiblement
les mêmes objectifs nuit à la clarté de la politique de prévention et de
gestion des déchets. Les acteurs opérationnels s'épuisent à fournir des
données pour alimenter des démarches de planification qui sont obsolètes
à peine publiées. C'est particulièrement vrai pour les plans régionaux qui
ont fait l'objet de nombreuses modifications législatives ou réglementaires
nécessitant une refonte des documents.
L'AMF estime donc qu'il est préférable de mettre en oeuvre un plan
imparfait plutôt que de perfectionner sans cesse un document qui restera
incomplet. Les collectivités ont besoin de temps et de visibilité pour donner
un sens à une démarche de planification.
Concernant les indicateurs de suivi, l'AMF ne peut que converger
avec votre analyse. Comme les autres acteurs de la gestion des déchets, les
collectivités sont sollicitées pour fournir des données afin d'alimenter un
grand nombre d'études initiées par l'ADEME. En dehors du fait que ces
données étant spécifiques à chaque étude, elles demandent souvent des
recherches et des calculs, augmentant de ce fait le temps qui leur est
consacré, elles sont trop spécifiques à l'objet de l'étude pour pouvoir être
utilisées pour le suivi de la mise en oeuvre de la politique des déchets.
Épuisées par ces demandes incessantes de données, les collectivités
éprouvent un agacement certain de ne pas pouvoir obtenir des indicateurs
fiables en retour. Sans remettre en cause la pertinence des études réalisées,
l'ensemble des acteurs, et les collectivités en particulier, ont besoin
d'indicateurs faciles à renseigner, raisonnablement fiables et surtout
stables dans le temps, afin de constituer des séries statistiques susceptibles
de mesurer les évolutions constatées.
L'harmonisation des différents bilans et rapports demandés aux
EPCI éviterait également la dispersion des informations, qui rendent
souvent illisibles des documents, pourtant destinés à informer les citoyens.
Cette standardisation, qui n'empêche pas les collectivités d'y ajouter des
informations à caractère plus local pour leurs administrés, permettrait
également une meilleure comparaison, voire une compilation plus aisée de
ces documents.
Il serait également pertinent de mettre en place des indicateurs,
nationaux et locaux, qui pourraient être communiqués rapidement car ils
sont calculés sur la base de données à date, sans attendre la clôture
définitive de tous les comptes. Par exemple, les tonnages collectés et
recyclés, ainsi qu'une estimation fiable des dépenses engagées et des
recettes perçues, sont disponibles au premier trimestre de l'année suivante.
Ces données, même incomplètes, pourraient être utilisées pour mettre en
place des indicateurs immédiatement disponibles et sans attendre deux ans
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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184 COUR DES COMPTES
une validation statistique qui portera sur une variation inférieure à 5%.
Les collectivités de traitement sont en capacité de renseigner de tels
indicateurs rapidement, ce qui permettrait aux EPCI de disposer d'un
meilleur suivi de la gestion de leurs déchets. A l'échelle nationale, les
autorités publiques gagneraient également à disposer d'indicateurs moins
précis, mais plus fréquents, afin de mieux suivre les politiques publiques
mises en place.
L'AMF est également sensible à votre recommandation de décliner
les plans de prévention élaborés par les syndicats de traitement au niveau
de chaque EPCI. Nous suggérons même, dans la mesure du possible, de
laisser chaque commune s'approprier certains éléments de ce plan pour
les mettre en oeuvre. Si la collecte et le traitement sont des opérations
techniques qui bénéficient de la mutualisation, la prévention des déchets
est l'affaire de chacun, qui peut agir à son échelle.
Concernant votre recommandation n°6 qui propose de favoriser la
mise en place de la tarification incitative en allégeant le coût pour les
collectivités grâce à un financement complémentaire de 80% sur les
premiers exercices, l'AMF trouve cette proposition intéressante et adaptée
aux obstacles rencontrés pour effectuer les investissements nécessaires.
Nous avons particulièrement apprécié la mesure et les nuances de votre
analyse concernant les difficultés rencontrées par les collectivités pour
mettre en place la tarification incitative.
Dans ce domaine, les collectivités ne sont pas opposées à cette
évolution de la tarification des déchets, mais elles sont inquiètes face à la
perspective de plusieurs risques : la fragilisation de leurs ressources alors
qu'elles ont besoin d'assurer un service de salubrité, les investissements
conséquents que représente l'acquisition des matériels nécessaires
(identification des bacs, bennes équipées de systèmes de mesures, logiciels
de suivi), la crainte d'une multiplication des dépôts sauvages et la gestion
des impayés. La gestion des impayés tend à devenir de plus en plus en plus
difficile et fait peser des risques financiers sur les collectivités. C'est le cas
des redevances qui ne permettent pas de compenser les déficits par le
budget général. Il devient urgent de traiter ces problèmes si les pouvoirs
publics veulent réellement inciter les collectivités à la mettre en oeuvre.
S'agissant de la TEOM, l'AMF partage votre souhait de clarification
du périmètre des dépenses prises en compte. Toutefois, nous trouvons
regrettable que la jurisprudence tende à exclure des dépenses éligibles le
ramassage des corbeilles de rue, le nettoyage des marchés alimentaires et
forains ; il s'agit de déchets ménagers et assimilés ou de déchets des
services des collectivités (de la voirie plus particulièrement), collectés
dans le cadre du service public afin d'assurer la salubrité et traités avec
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 185
les autres DMA. Dans le contexte actuel, il semble inutile et non pertinent
d'ouvrir ce chantier.
Concernant votre recommandation n°9 qui ouvre la possibilité
pour les collectivités de confier la vente des produits issus du tri à l'éco-
organisme des emballages, l'AMF est particulièrement attentive à ce que
cette opportunité soit fondée sur le volontariat des collectivités. De plus,
les marchés des matériaux ayant des caractéristiques différentes en
fonction des matières, il est préférable que ce choix soit effectué matériau
par matériau, comme c'est le cas pour les options de reprise.
Concernant la prévention, son arrivée dans le débat public
encourage les collectivités à mettre en place des politiques dépassant
largement la seule sensibilisation. Il serait regrettable que la prévention
soit réservée uniquement aux intercommunalités et aux syndicats de
gestion des déchets. Si la réduction des déchets a des impacts directs sur
les quantités et la qualité des déchets gérés, elle se prépare bien en amont.
Les politiques de prévention doivent être partagées par tous les niveaux
des collectivités, dans la gestion de leurs propres déchets, mais aussi dans
la mise en oeuvre de leurs autres politiques.
Toutefois, I'AMF est opposée à l'idée d'adosser systématiquement
des ressourceries aux déchèteries. En effet, les déchèteries sont situées
dans des zones peu attractives et les particuliers s'y rendent uniquement
pour se débarrasser de leurs déchets puis en repartent aussitôt. Ils ne
viennent pas pour y faire des achats. Le succès de l'initiative de la «
déchèterie à l'envers » n'est pas reproductible partout. Que les déchèteries
servent à alimenter les ressourceries est tout à fait envisageable, mais les
déchets récupérés pour réemploi ne doivent pas rester sur le même site.
Les déchèteries ne sont pas aménagées pour cela et le risque de pillage et
de violence n'est pas négligeable. Et quoi qu'il en soit, cette décision est du
domaine de la libre administration des collectivités.
Concernant la gestion des déchets produits par les activités
économiques, l'AMF tient à faire observer que, si la gestion des déchets
des particuliers fait l'objet de nombreux contrôles à travers les collectivités
et les éco-organismes, il n'en est pas de même des déchets des activités
économiques, qui représentent des tonnages dix fois supérieurs. Les
difficultés rencontrées pour faire appliquer le décret « 5 flux » puis « 7 flux
», en sont l'illustration. En effet, les services de l'État sont compétents pour
les installations de traitement des déchets, les maires pour les espaces
publics et la voirie, mais personne ne peut contrôler la gestion des déchets
à l'intérieur des entreprises. Cette dissymétrie dans les obligations et les
responsabilités nuit à l'efficacité de la politique nationale de gestion des
déchets.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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186 COUR DES COMPTES
L'AMF ne partage pas votre souhait de voir les déchets des
professionnels rejoindre les installations de collecte des collectivités,
notamment les déchèteries. Depuis plus de 10 ans, les collectivités gérant
des déchèteries essaient d'éviter d'accueillir les déchets de professionnels.
En effet, les professionnels n'ont ni les mêmes attentes que les particuliers
(notamment en terme d'horaires d'ouverture ou de volumes acceptés), ni
les mêmes déchets (déchets dangereux spécifiques aux activités
professionnelles, quantité et taille des cartons d'emballages par exemple).
De ce fait, les professionnels ne sont pas satisfaits du service et la présence
des déchets professionnels perturbe le fonctionnement pour les
particuliers.
De plus, il est souvent difficile de faire payer le service par les
professionnels alors qu'il semble gratuit pour les particuliers (en fait il est
payé par leurs impôts). Dans ce cas, la gestion des déchets des
professionnels est financée par les ménages. Enfin, lorsqu'il existe une
filière REP pour les déchets ménagers, l'accès des professionnels à la
déchèterie conduit la collectivité à devoir payer pour le traitement des
déchets des professionnels, qui ne sont pas de sa compétence, alors que la
filière REP prend en charge gratuitement les déchets des ménages.
C'est pourquoi, les collectivités sont réticentes à accueillir les
déchets des professionnels dans leurs installations car ils sont sources de
désorganisation, de problèmes techniques et de pertes financières. En
outre, l'acceptation des déchets des professionnels dans les dites
installations nuit à la mise en place de solutions pertinentes de valorisation
de ces déchets. Cette situation prolonge l'existence de solutions à faibles
coûts pour les déchets des professionnels qui ne permettent pas de dégager
les financements nécessaires aux investissements.
Concernant la collecte des déchets des ménages, l'AMF vous
signale que vous n'avez pas mentionné la collecte pneumatique dans les
modes d'organisation cités dans votre rapport. Bien que limitée à certains
territoires, elle aurait mérité une analyse, notamment de son coût et de son
efficacité. Par ailleurs, la répartition entre le porte-à-porte et l'apport
volontaire est en train de bouger. En effet, certaines collectivités
s'interrogent sur le coût environnemental de la collecte en porte-à-porte,
notamment en matière de contribution à la pollution atmosphérique et à
l'utilisation de carburants. La difficulté à organiser les calendriers de
collecte, surtout avec la multiplication des collectes séparées, conduit
certaines collectivités à envisager d'autres organisations. Cette réflexion
est trop récente pour en tirer des conclusions dès à présent, mais elle
intéresse de plus en plus de collectivités.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 187
Concernant la collecte et la valorisation des déchets
biodégradables, l'AMF partage votre constat d'un faible développement
des collectes séparées des biodéchets. Toutefois, cette situation tient
essentiellement à la faiblesse des débouchés. Depuis presque un an, les
collectivités attendent une modernisation des normes « compost » qui
serait de nature à sécuriser les utilisateurs et les producteurs de compost.
En fait les différents ministères concernés (en particulier ceux de
l'environnement et de l'agriculture) ne semblent pas arriver à trouver un
accord sur les normes nécessaires.
Les perspectives de débouchés qui semblaient s'ouvrir avec le
développement de la méthanisation ont été déçues pour plusieurs raisons :
une difficulté à trouver le cadre juridique pertinent pour une coopération
avec les opérateurs de méthanisation agricole, la gestion des digestats qui
se heurtent aux mêmes difficultés que les composts, mais surtout
l'impossibilité d'implanter des installations de méthanisation. Alors que
l'économie circulaire commence à intéresser le public, il est encore plus
difficile de faire accepter les installations nécessaires aux riverains. Dans
ce contexte difficile, les collectivités déplorent la grande prudence des
pouvoirs publics, au niveau préfectoral comme au niveau national, qui se
traduit par un faible appui aux projets en matière de méthanisation. Tant
que les incertitudes sur les débouchés ne seront pas levées, les collectivités
continueront à expérimenter des modalités de collecte ; elles pourront les
déployer largement quand il existera réellement des débouchés. Enfin, une
association des communes au développement des collectes de proximité
organisées par les EPCI permet de lever certains obstacles locaux et
d'améliorer la sensibilisation des habitants.
Concernant la collecte séparée des emballages plastiques, l'AMF
ne partage pas votre appréciation. En effet, à la fin du premier trimestre
2022, toutes les collectivités avaient déposé un dossier de modification de
leurs centres de tri et nous pouvons raisonnablement penser que l'ensemble
des territoires métropolitains passera à l'extension des consignes de
collecte en 2023. Les territoires ultramarins auront besoin d'un délai
supplémentaire en raison de leurs contraintes spécifiques.
Si la collecte sera au rendez-vous de l'échéance de 2023, la
rénovation et l'adaptation de la totalité des centres de tri ne seront pas
terminées au 1er janvier 2023. Ces retards ont des causes multiples : débat
sur la consigne qui a conduit certaines collectivités à suspendre leurs
projets dans l'attente d'une plus grande visibilité sur les produits entrant
dans le centre de tri (présence ou non des bouteilles), décalage de certaines
décisions en raison des circonstances des élections municipales,
perturbations du calendrier des travaux du fait de la crise sanitaire,
saturation des carnets de commandes des équipementiers. Pour prévenir
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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188 COUR DES COMPTES
les conséquences de ces retards, l'éco-organisme des emballages et les
collectivités ont mis en place des solutions transitoires, afin de trier les
tonnages collectés dans de bonnes conditions et sans dégrader la qualité,
même pendant la période d'indisponibilité de certains nouveaux centres.
Concernant la valorisation des matériaux, l'AMF confirme que la
complexité et la spécialisation des marchés des matériaux recyclables rend
leur commercialisation de plus en plus difficile pour les collectivités : leur
fonctionnement n'est pas adapté à la réactivité nécessaire. La priorité pour
les collectivités, qui a été un préalable à leur participation aux filières REP
dès 1992, reste l'enlèvement des déchets triés, à coût positif ou nul au
départ du centre de tri ; elles ne peuvent pas arrêter de collecter et leurs
capacités de stockage sont limitées. En conséquence, si les collectivités
doivent renoncer à la commercialisation des matériaux triés (et aux
recettes qui les accompagnent), c'est à la condition non négociable d'avoir
la garantie des enlèvements. Cette exigence est valable pour toutes les
filières REP.
Concernant l'incinération, l'AMF regrette la dégradation du parc
des unités de valorisation énergétique depuis plus de 15 ans. L'effort de
modernisation, notamment en ce qui concerne les traitements des fumées,
qui a été mené dans les années 1990-2000, s'est heurté ensuite à
l'impopularité des installations de traitement. Les difficultés
d'implantation et l'hostilité des pouvoirs publics n'ont pas permis d'investir
dans les capacités nécessaires, ni parfois de procéder aux rénovations
indispensables.
Une intense campagne de communication « anti-incinération » a
parfois conduit à compromettre des opérations de valorisation
énergétique ; des occasions de développement de réseaux de chaleur ont
été écartées. Même la constatation que cette politique bénéficiait surtout à
la mise en décharge n'a pas permis une révision réelle de l'absence de
soutien de l'État. Le développement des combustibles solides de
récupération est actuellement entravé par des obstacles réglementaires,
alors que leur production présente des avantages en matière de stockage
et de souplesse d'utilisation. L'incinération aux normes les plus exigeantes
constitue un des maillons dans la chaîne du traitement des déchets par une
valorisation énergétique pertinente.
Il n'est pas possible de réduire et de recycler la totalité des déchets,
même s'il existe encore d'importantes marges de progression. Pour
développer la réutilisation et le recyclage, il faut massivement investir dans
la création de débouchés pour les matériaux. En l'absence de débouchés,
la réduction arbitraire des capacités d'élimination ne permet pas de
développer le recyclage, mais elle favorise les solutions illégales et les
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 189
dépôts sauvages. A cette occasion, l'AMF regrette qu'il ne soit pas prévu
d'utiliser l'augmentation de la TGAP pour soutenir financièrement les
investissements nécessaires dans le domaine de l'économie circulaire, par
exemple pour le déploiement des nouvelles collectes, la construction des
infrastructures et des installations nécessaires, mais aussi la création de
débouchés innovants. La TGAP devient une simple sanction, loin des
ambitions de développement et d'amélioration qui existaient lors de sa
création
Concernant la gestion des dépôts sauvages, l'AMF regrette que
cette question ne soit pas abordée dans votre rapport. Il est vrai qu'elle ne
relève pas de la gestion des déchets au sens strict et qu'elle n'est pas de la
compétence des mêmes collectivités. Toutefois, l'existence des dépôts
sauvages est directement liée aux faiblesses de la politique de gestion des
déchets. En effet, l'absence de contrôles, notamment des déchets des
professionnels, le manque d'installations de traitement et les difficultés
opérationnelles de sanctionner les actes d'incivisme sont des causes de
l'existence de certains dépôts sauvages. Leur élimination constitue la
principale difficulté pour les élus et leurs équipes, c'est également la
première source de nuisances évoquées par les habitants au sujet des
déchets. Si la loi AGEC a apporté quelques améliorations, les collectivités
restent seules et démunies pour lutter contre ce fléau. L'ampleur du
phénomène ne permet plus de se contenter de perfectionner les moyens à
la disposition des collectivités, il faut mobiliser l'ensemble des autorités
publiques, depuis les collectivités jusqu'à l'État, en passant par le ministère
de la Justice. Les élus, en particulier les maires, sont déterminés à lutter
contre les dépôts sauvages, mais ils ne pourront pas en venir à bout seuls,
et il leur faut des moyens juridiques.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE LA MÉTROPOLE DE LYON
Par lettre du 28 juillet 2022, vous m?avez communiqué le rapport
public thématique que la Cour des Comptes se propose de publier
prochainement sur la prévention, la collecte et le traitement des déchets
ménagers.
J?ai pris connaissance avec un très vif intérêt des observations
formulées par la Cour sur la gestion de cette politique publique essentielle,
à laquelle la Métropole de Lyon accorde la plus grande attention. Ces
observations confirment la pertinence des orientations retenues par notre
collectivité, à la faveur de l?adoption, en juin 2022, du schéma directeur
des déchets à l?horizon 2030.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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190 COUR DES COMPTES
La Métropole de Lyon vise en effet la sobriété en matière de
consommation et de production de déchets et une meilleure valorisation
des déchets résiduels produits. Nos objectifs pour 2030 sont de réduire de
25 % la production de déchets par habitant, de 50 % la quantité incinérée
et d?atteindre 60 % de valorisation matière (réemploi, recyclage,
compostage?) des déchets ménagers et assimilés.
Pour atteindre ces objectifs ambitieux, un plan d?actions articulé
autour de trois axes a été défini.
Tout d?abord, déployer des solutions adaptées aux usagers pour
réduire et trier les déchets.
La Métropole de Lyon va développer des équipements
complémentaires pour mieux trier (silos à verre, silos à emballages, silos
textiles) sur l?ensemble du territoire métropolitain. D?ici 2024, elle
équipera l?ensemble des quartiers densément peuplés, de bornes à compost
(1 million d?habitants couverts par ce nouveau service) pour permettre le
tri de tous les déchets alimentaires. En parallèle, les distributions de
composteurs pour les habitants en maison individuelle et les installations
de composteurs partagés en pied d?immeuble ou dans les quartiers, seront
poursuivies. Les déchèteries existantes seront modernisées en vue de
favoriser le don, le réemploi, la réutilisation et le recyclage. Ainsi, des
écocentres verront prochainement le jour sur le territoire.
Ensuite, accompagner les usagers dans le changement de pratiques.
La Métropole va mettre en place une communication régulière et
ciblée pour faire connaître les nouveaux services mis à disposition des
usagers, mais aussi pour les informer sur la qualité du tri et sur la quantité
des déchets produits. Pour inciter au changement, le nombre de personnes
sensibilisées par an sera doublé, passant de 70 000 à 140 000. Une
attention particulière sera portée aux jeunes publics, notamment les
scolaires et collégiens. En complément, la Métropole de Lyon déploiera
des opérations de contrôle et de sanction. Elle prévoit ainsi d?assermenter
180 agents pour faire respecter le règlement de collecte des déchets
ménagers et assimilés.
Enfin, faire des déchets des ressources durables.
Pour répondre aux objectifs métropolitains, la collectivité doit, en
lien avec les territoires voisins, augmenter les capacités de tri et de
valorisation de la collecte sélective par la création d?un nouveau centre de
tri. Parallèlement, des plateformes de compostage métropolitaines seront
créées pour accueillir et traiter les déchets alimentaires collectés via les
bornes à compost. Enfin, les deux incinérateurs du territoire devront
également être modernisés et repensés à horizon 2030, afin de s?adapter
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 191
aux évolutions quantitatives et qualitatives des déchets et de développer
des partenariats et des mutualisations avec les territoires voisins.
Ainsi, au-delà de budgets de fonctionnement significatifs, quelques
145 M¤ seront consacrés en investissements à la politique des déchets
pendant le mandat 2020-2026.
Telles sont les précisions que j?estimais utiles de porter à votre
connaissance.
MADAME LA PRÉSIDENTE DE LA COMMUNAUTÉ
DE COMMUNES DE L'ÎLE D'OLÉRON
Par courrier en date du 28 juillet 2022, vous me proposez de réagir
au rapport public thématique intitulé "Prévention, collecte et traitement
des déchets ménagers : une ambition à concrétiser". La région Bourgogne-
Franche-Comté a une responsabilité en termes de planification régionale
de la prévention et de la gestion des déchets, suite au transfert de
compétence issue de la loi NOTRé du 08 aout 2015. L'analyse du rapport
amène les observations suivantes :
Élaboration du PRPGD (p. 33)
La Région a adopté en novembre 2019 son Plan Régional de
Prévention et de Gestion des Déchets (PRPGD) qui fait désormais partie
intégrante du SRADDET, adopté en 2020.
? La loi NOTRé a transféré aux Régions l'élaboration des PRPGD,
imposant des délais impossibles à tenir (février 2017) pour des
collectivités nouvelles, issues des fusions au 1 er janvier 2016. Le conseil
régional de Bourgogne-Franche-Comté a choisi néanmoins de prendre
le temps nécessaire à la concertation tout en accélérant l'élaboration de
son PRPGD afin de répondre à la demande de l'État dans le cadre du
précontentieux qui l'oppose à l'Union Européenne. Sachant que, par
ailleurs, les procédures administratives entre l'arrêt du projet et
l'approbation du plan, qui s'étalent sur une année complète, viennent
raccourcir d'autant les phases rédactionnelles. Le PRPGD a donc, dans
les faits, été rédigé dès l'automne 2018. Ce temps, très contraint, n'a pas
permis de creuser des solutions opérationnelles ni d'engager dans le
même temps la création d'un observatoire à l'échelle du territoire.
? L'état des lieux des gisements, en particulier issus des acteurs
économiques et du BTP, a été et reste très aléatoire en raison de la
multitude des producteurs, majoritairement des TPE. Par ailleurs, les
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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192 COUR DES COMPTES
données présentes dans les bases de l'État ne concernent pas tous les
producteurs et ne constituent donc qu'une source d'information partielle.
? L'élaboration du PRPGD s'est faite en concertation avec les acteurs du
territoire afin de définir des objectifs communs de réduction, de
valorisation et de gestion des déchets. La rédaction du document final
s'est faite en étroite collaboration avec les services de la DREAL et de
l'ADEME, en particulier concernant la planification des installations de
stockage, usines d'incinération et centres de tri des DMA.
? Le conseil régional n'ayant pas autorité en matière d'ouverture ou de
fermeture des installations de traitement (p. 34), mission qui incombe
aux services de l'État, nous avons eu une approche par bassin et en
tenant compte des réalités de terrain afin de proposer une adéquation
des capacités et des gisements. Vous noterez que, dans le temps
d'élaboration du PRPGD, de nouvelles autorisations ont été accordées
par l'État et sont venues modifier la trajectoire concernant la baisse des
capacités de traitement sur notre territoire, décalant de trois ans
l'atteinte des objectifs prévus dans le Plan. La Région avait suggéré aux
services de l'État qu'ils prononcent un sursis à statuer, par analogie à
cette faculté existant dans le droit de l'urbanisme ; ceux-ci n'ont pas
souhaité donner suite.
? De même, le conseil régional ne peut prévoir la création d'installations
de gestion ou traitement, création qui appartient au domaine
concurrentiel, limitant ainsi le pouvoir de planification à constater des
décalages entre les besoins et les capacités présentes sur le territoire.
? Enfin, il est nécessaire de rappeler que la mise en oeuvre de cette
nouvelle mission dévolue aux Régions n'a fait l'objet, en Bourgogne-
Franche-Comté, d'aucun transfert de ressources humaines des
Départements et d'une compensation financière équivalente à 20 K¤ du
département de la Haute-Saône sans commune mesure avec la charge
transférée. Madame la préfète de Région n'a pas donné suite à la
demande de la Région de prononcer le transfert de charges de 5
équivalents temps plein issus des 8 départements de Bourgogne-
Franche-Comté, dont l'existence était pourtant avérée. Par ailleurs, les
Régions ont proposé à l'État depuis plusieurs années, un transfert partiel
de TGAP afin d'accélérer la mise en oeuvre des actions sur le terrain. La
possibilité de gestion d'une partie du fonds déchets de l'ADEME ne
constitue pas une réponse satisfaisante à cette demande car le budget
global alloué aux territoires reste constant et serait délégué aux Régions
sous l'autorité de l'ADEME, limitant strictement l'intérêt et les marges
de manoeuvre pour les Régions.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 193
Mise en oeuvre du PRPGD
? Depuis la rédaction du PRPGD (projet achevé fin 2018), de nombreuses
actions ont été mises en place par la Région. En premier lieu, la
réglementation imposait un plan d'action économie circulaire, inclus
dans le PRPGD. La région Bourgogne-Franche-Comté a fait le choix de
se doter dès juin 2020, d'une Feuille de Route Économie Circulaire
(FREC) très opérationnelle qui permet de décliner des actions de terrain
en coopération avec les acteurs du territoire (téléchargeable sur notre
site internet : https://www.bourgognefranchecomte.frivers-le-zero-
dechet) (p. 65-73).
? Concernant l'animation du territoire, la région BFC anime un réseau
des collectivités en complément du réseau A3P porté par l'ADEME et
soutient financièrement d'autres réseaux portés par des acteurs de notre
territoire. Chaque année, une thématique fait l'objet d'une déclinaison
en termes de communication et de soutien aux actions : vrac, réemploi,
biodéchets.
? La Cour salue les initiatives de financement des équipements par
certaines Régions. La Région ne dispose pas de clause générale de
compétence depuis la loi NOTRé. Par conséquent, elle ne peut engager
des financements qu'autre titre de sa compétence planification. Il
convient, en effet, de rappeler que le mode de financement de la gestion
des déchets (p. 43-48) repose sur la TEOM et/ou la REOM pour service
rendu, les financements ADEME provenant de la TGAP et les éco-
organismes, prélevant les contributions des producteurs de déchets.
Pour autant, la Région finance depuis 2018 en cogestion avec l'ADEME,
avec un renfort budgétaire notable en 2021 via le Plan d'Accélération
de l'Investissement Régional (PAIR), des projets d'économie circulaire,
d'installations de traitement et, depuis 2020, des projets liés à la
généralisation du tri à la source des biodéchets.
? Enfin, pour ce qui est de l'observation (p. 33), la Région est désormais
dotée d'un observatoire régional, porté par l'association ALTERRE BFC
et en cours de mise en place d'un outil de collecte des données innovant
qui permettra à l'avenir de limiter les sollicitations des producteurs et
de favoriser les échanges avec d'autres bases existantes. L'enquête
relative à la collecte et aux traitements des DMA a été mise en oeuvre
sous maitrise d'ouvrage de la Région en 2021. Par ailleurs, la Région
participe activement aux ateliers menés par l'ADEME nationale dans le
but d'améliorer et d'harmoniser la collecte des données.
Il est rappelé que la région Bourgogne-Franche-Comté a déjà
déposé le 15 avril 2022 un certain nombre de remarques sur la plateforme,
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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194 COUR DES COMPTES
suite à la sollicitation que la Cour des Comptes avait faite auprès de
Régions de France. Nos premières remarques n'ont toutefois pas été
intégrées dans le projet définitif.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
DE BRETAGNE
Je tiens tout d?abord à redire que je partage l?analyse de Régions
de France, retranscrite dans son courrier du 11 avril dernier. Les
problématiques et les conditions particulières encadrant la mise en oeuvre
de la compétence régionale de la planification de la prévention et de la
gestion des déchets y sont parfaitement traduites et illustrent concrètement
les difficultés que nous rencontrons aussi en Bretagne.
Dès le transfert de compétence issu de la loi NOTRé, la Région s?est
largement engagée dans son rôle de chef de file et d?animation pour la
prévention et la gestion des déchets, tous flux confondus. En dépit d?un
contexte réglementaire marqué depuis plusieurs années par de nombreuses
évolutions législatives, non toujours transcrites rapidement de façon
opérationnelle, la Région a adopté en mars 2020 son PRPGD, en juillet
2020 une Feuille de route bretonne dédiée à l?Économie circulaire, et son
SRADDET en novembre 2020.
Le PRPGD breton est le fruit de démarches partenariales et
concertées avec l?ensemble des parties prenantes de la prévention et de la
gestion des déchets. Outre les 10 principes fondamentaux du plan, les 18
objectifs inscrits dans le PRPGD déclinent et renforcent, en prenant en
compte le contexte et les particularités bretonnes, les objectifs européens
et nationaux.
Une trajectoire très ambitieuse est fixée par la Région dans le
PRPGD avec le « zéro enfouissement des déchets » à l?horizon 2030 et le
« zéro déchets » en 2040. Le déploiement de l?économie circulaire, la
recherche de l?efficacité collective et l?engagement de tous au quotidien
constituent autant de moyens pour y parvenir.
Malgré la volonté clairement partagée par la Région et l?ensemble
des partenaires et acteurs concernés en Bretagne de relever les défis, le
déploiement de certaines actions de prévention et de gestion des déchets
reste complexe. Certaines dispositions structurelles, règlementaires,
techniques ou financières limitent l?efficacité de l?action et l?engagement
des collectivités locales, des opérateurs et acteurs des déchets sur le
terrain. Le déploiement actuel des nouvelles filières REP par certains éco-
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 195
organismes, parfois insuffisamment partagé avec les collectivités pourtant
directement concernées, ou encore l?absence de moyens
d?accompagnement suffisants pour les installations de combustion
(chaudières CSR) constituent deux exemples parmi bien d?autres,
révélateurs des difficultés auxquelles doivent faire face les parties
prenantes bretonnes.
La Région entend pourtant, malgré toutes ces difficultés, relever les
défis et poursuivre son engagement, avec conviction, sens des
responsabilités et sans relâcher ses efforts.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
GRAND EST
Par une correspondance en date du 28 juillet 2022, vous avez bien
voulu porter à ma connaissance le rapport public thématique intitulé
« Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à
concrétiser », et je vous en remercie.
- J?ai procédé à une lecture attentive de ce document et souhaite vous
apporter des éléments de réponse.
Concernant le chapitre III / A ? 2 « La nécessité d?une meilleure
coordination des investissements
La Région Grand Est, en co-animation avec la DREAL Grand Est,
rassemble dans un groupe de travail depuis février 2019, l?ensemble des
exploitants des installations de stockage de déchets non dangereux et de
valorisation énergétique (UVE), ainsi que les plus gros producteurs de
déchets.
L'objectif de ce groupe de travail est de permettre une optimisation
du traitement des flux de déchets résiduels, dans le respect des
préconisations et des règles du SRADDET, à savoir :
- Principe de proximité (gestion des déchets au plus près de leur zone
de production, et de proche en proche) ;
- Respect de la hiérarchie des modes de traitement en saturant les
incinérateurs.
L?objectif est de mettre autour de la table l?ensemble des acteurs
afin de faire des projections quasiment en temps réel des besoins en
matière de traitement, et d?anticiper les éventuels points de blocage.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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196 COUR DES COMPTES
Ces derniers peuvent être liés aux arrêts techniques, aux incidents
et accidents et aux situations exceptionnelles. La région a été marquée par
une suite d?évènements entre 2016 et fin 2019, qui ont fortement réduit ses
capacités de traitement jusque ce début d?année 2022.
Le partage des données régionalisées (sur les tonnages stockés et
incinérés, les coûts appliqués, les besoins de détournements de flux vers
d?autres exutoires et la prise d?arrêtés d?exploiter par les préfets
concernés) a permis d?assoir le rôle de la Région en tant que planificateur.
La non augmentation des capacités de stockage fortement
demandées par les acteurs, même pendant les années difficiles, a été
respectée. Le partenariat Région / DREAL a par ailleurs montré sa force
dans le rassemblement d?acteurs à la base concurrents, pour trouver
ensemble les solutions.
Ainsi, la Région a diminué ses capacités entre 2015 et 2022, et tend
vers l?objectif au travers des nouveaux arrêtés d?exploitation pris et à
venir.
Le groupe de travail a permis pour cela de décliner, dans les arrêtés
d?exploitation, les règles et principes du SRADDET en termes de demande
de prolongation ou de création, ou encore de modification de zone de
chalandise ; cela avec pour finalité d?atteindre les objectifs de réduction,
en définissant notamment des capacités maximales.
La suite de la réflexion se fait autour des actions à mettre en oeuvre
pour l?atteinte des objectifs, au travers de la projection à 2025 et 2031, des
capacités réelles à prévoir sur 3 bassins de vie.
Deux groupes de travail « stockage » et « incinération » ont découlé
de ce premier groupe et traitent des sujets spécifiques à chacune de ces 2
thématiques (points d?alerte, actions possibles, coordination des arrêts
techniques, veille règlementaire, ?).
Concernant l?annexe 3 relative aux Plans Régionaux
de Prévention et de Gestion des Déchets
La Région Grand Est présente non seulement des données
départementalisées dans son état des lieux (données DAE, DMA, BTP ou
certains déchets dangereux), mais également pour ses objectifs à atteindre
en matière de capacité d?installations de stockage de déchets inertes
(ISDI), notamment dans la mesure où il s?agit de gestion de déchets de
proximité (déchets du BTP).
Le présent rapport fait état de lacunes de données que ni l?État, ni
les régions n?ont comblées par des enquêtes de terrain. Pour ce qui est de
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 197
la Région Grand Est, il s?agit de 408 tonnes pour lesquels l?exutoire n?est
pas précisé, sur un total de 1 994 000 tonnes. Tous les autres tonnages ont
un exutoire.
Le plan de la Région Grand Est décline de manière détaillée, à
l?échelle départementale, les installations de stockage qu?il sera
nécessaire de créer et projette les besoins en capacité de traitement à
l?échelle de deux bassins de vie (Est et Ouest).
La Région Grand Est a effectivement fait le choix de décliner
finement la planification de ses installations, pour être au plus près des
besoins.
L?observatoire « déchets », lancé le 23 novembre 2020 en Région
Grand Est, est un des premiers de ce type en France (marchés à lots /
partenaires publiques / prestations internes).
Contrairement à d?autres observatoires, il recouvre l?ensemble des
typologies de déchets. Il s?agit d?une initiative volontariste de la Région
Grand Est (l?observation n?est pas règlementaire), demandée par les
acteurs de la Commission Consultative d?Élaboration et de Suivi (CCES),
dès les premiers travaux du Plan.
L?Observatoire « Déchet et Économie Circulaire » a fait l?objet
d?une délibération de la Commission Permanente du Conseil Régional
Grand Est, votée en Séance le 26 avril 2019, soit avant même l?adoption
du SRADDET en février 2020.
Son déploiement rapide a été permis par la volonté régionale
d?anticiper et de doter cet observatoire des moyens humains et financiers
conséquents, mais nécessaires pour sa mise en oeuvre.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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198 COUR DES COMPTES
Il joue, outre sa fonction de suivi des objectifs, un rôle primordial
en matière d?information et d?appui aux collectivités locales et aux
entreprises sur :
? les Déchets Ménagers et Assimilés (DMA) ;
? les Déchets d?Activités Économiques (DAE) ;
? les Déchets Dangereux (DD) ;
? les déchets de Chantiers du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP).
Je reste naturellement à votre disposition pour toute information
complémentaire.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
DE NORMANDIE
A la lecture de ce rapport, je suis étonné du peu d'évolution, au final,
du rapport malgré l'envoi d'éléments complémentaires transmis à vos
services le 1 avril 2022, dont je ne retrouve pas trace ni intégration.
En effet, votre position reste inchangée par rapport à la description,
que vous qualifiez de sommaire, quant aux mesures prises pour atteindre
l'objectif de couverture de 30 % de la population normande par une
tarification incitative. Pourtant et grâce à sa dynamique d'animation
régionale, et sa présence auprès des acteurs normands, la Région a réussi
à avancer sereinement vers cet objectif que je qualifierais d'ambitieux afin
d'atteindre les 30 % en 2025.
Par ailleurs, et comme vous, je porte une attention particulière à
l'efficience de nos politiques publiques. A cette fin, je réitère l'ambition de
la Région Normandie de revendiquer son droit à l'expérimentation en se
portant volontaire pour que sa compétence en matière de prévention et de
gestion des déchets soit étendue comme l'indiquait le rapport « Évolution
des capacités de traitement des déchets en France à l'horizon 2040 » rédigé
par Jean-Louis Chaussade et remis à Barbara Pompili.
Mes services se tiennent à votre entière disposition pour vous fournir
des informations plus détaillées sur nos travaux et réflexions à venir.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
DE NOUVELLE-AQUITAINE
Dans le cadre du rapport public thématique « Prévention, collecte
et traitement des déchets ménagers » que vous m?avez adressé par courrier
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 199
du 28 juillet 2022 reçu le même jour, j?ai pris connaissance avec attention
de ce document.
Je partage pour l?essentiel les propositions émises notamment
concernant le nécessaire renforcement des actions en matière de
prévention, l?amélioration de la collecte des données et la simplification
des actions avec le fonctionnement des filières à la responsabilité élargie
du producteur.
Je me permets d?apporter des précisions complémentaires
concernant plusieurs thèmes :
1. Massifier le soutien aux actions de prévention
et de réduction des déchets
Je partage le constat de la Cour concernant le manque de moyens
sur la prévention.
Pour les collectivités territoriales, les moyens humains et financiers
allouées aux actions de prévention manquent pour atteindre les objectifs
nationaux.
La mobilisation et l?accompagnement technique et financier auprès
des parties prenantes doivent être accrus et partagés entre les différents
financeurs.
Les conseillers régionaux délégués et les services de la Région ont
identifié la prévention comme la priorité pour répondre aux enjeux
environnementaux de la gestion des déchets et j?ai traduit cette priorité
régionale en actes en impliquant fortement sur le sujet l?ensemble des
acteurs (collectivités, entreprises et associations) : élaboration d?une
feuille de route déchets, lancement en 2022 de conventions avec les EPCI
pour accompagner la réalisation des programmes locaux de prévention
des déchets ménagers et assimilés (PLPDMA), lancement en 2022 d?un
nouvel appel à projets pour les EPCI avec un axe prévention?
2. L?amélioration de la collecte des données permettra
de clarifier l?atteinte des objectifs
La Région Nouvelle-Aquitaine est déjà pleinement mobilisée et prête
à jouer un rôle encore plus important en matière de consolidation des
données relatives aux déchets. En effet, la Région, avec son observatoire
des déchets porté par l?AREC (Agence Régionale Évaluation
environnement et Climat) enquête déjà les intercommunalités à
compétence Déchets. La confiance instaurée avec les collectivités nous
permet d?avoir une remontée des données effectives et un suivi des
évolutions sans difficulté dans la remontée de ces informations régionales.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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200 COUR DES COMPTES
Je partage avec la Cour :
- le besoin de simplifier et d?uniformiser les informations transmises
par les EPCI à l?échelle nationale en s?assurant notamment que les
bases de calcul soient identiques afin de faciliter une comparaison des
indicateurs à l?échelle nationale ;
- la proposition de compiler les différents documents ou plan nationaux.
Cela permettrait de faciliter la compréhension et l?appropriation des
objectifs à atteindre pour les territoires et de les mettre en cohérence
avec les documents cadres régionaux.
3. Inciter les filières à responsabilité élargie du producteur (REP)
à améliorer le suivi, amélioration du tri et la prévention
Je constate ces dernières années une multiplication du nombre de
filières à responsabilité élargie du producteur (REP). Je m?interroge sur
l?efficacité de ces dispositifs, la visibilité et le suivi des filières REP, la
multiplicité des interlocuteurs pour les collectivités et les besoins
spécifiques de point de collecte notamment dans les déchetteries.
Les éco-organismes des filières REP doivent améliorer le suivi des
tonnages et le tri sur les sites de collecte.
En outre, je partage votre proposition concernant la nécessité
d?augmenter la participation aux efforts de prévention à travers le
financement d?actions à fort impact sur les flux collectés. Dans la mesure
où l?éco-conception doit être une priorité pour nos entreprises, comme j?ai
souhaité l?intégrer dans le nouveau SRDEII de la Région, les dispositifs
incitatifs et prescriptifs doivent être renforcés et le financement par les
filières REP massifié.
4. Une nécessaire distinction entre planification et programmation
Si la Région peut en sa qualité de planificateur et d?animateur
faciliter les coopérations et l?émergence de solutions partagées, il me
semble important de rappeler que les collectivités en charge du traitement
restent les seules décisionnaires. La Région planifie mais ne peut pas
programmer la réalisation des installations. Ainsi la Région joue d?ores et
déjà un rôle clef pour faciliter les synergies locales dans la programmation
des équipements de gestion des déchets et ce en tenant compte des
disparités géographiques, historiques et/ou des spécificités locales. Ce
travail se fait dans le respect du principe de libre administration,
d?absence de tutelle et donc des choix locaux des intercommunalités qui
restent pleinement décisionnaires en matière de programmation des
équipements.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 201
En outre, il me semble important de rappeler que ce sont les services
de l?État qui restent compétents sur la délivrance des autorisations
relatives aux installations classées pour la protection de l?environnement
(ICPE) pour les EPCI à compétence Déchets. Afin de s?assurer de la
compatibilité avec le volet Déchets du SRADDET, l?État saisit la Région,
qui ensuite émet un avis (opposabilité du plan), qui n?engage pas l?État
dans sa décision finale. Ainsi, la compétence régionale en matière de
prévention et de gestion des déchets est essentielle, mais sa portée peut
s?en voir limitée du fait de la multiplicité des acteurs concernés et de leurs
différentes compétences. Les étapes successives de décentralisation et de
transfert de compétences ont amené à cette multiplicité des acteurs qui
nécessite désormais une coordination de ceux-ci afin de s?assurer de la
complémentarité et de la pertinence des actions.
5. Une plus forte mobilisation des Régions qui se heurte à la limitation
des moyens octroyés
L?échelle régionale paraît être la plus pertinente pour la
programmation et la coordination des investissements pour les
installations de traitement à travers le SRADDET et le dialogue entre
l?État, la Région et les EPCI. La cour appelle de ses voeux dans sa synthèse
à un renforcement du rôle de « financeur » des Régions. Si je partage le
principe de renforcement de la compétence de la Région sur le financement
des grands équipements structurants régionaux, notamment pour faciliter
la « cohérence territoriale », l?opérationnalité d?une telle proposition se
heurte à l?absence de moyens alloués aux Régions. En effet, je vous
rappelle que le transfert de la compétence planification des déchets des
Départements auprès de la Région Nouvelle-Aquitaine s?est réalisé sans
moyen. La recommandation d?une plus grande mobilisation de la Région
en matière de financement doit donc s?accompagner d?une réflexion plus
globale sur son financement. Les recommandations de la Cour en matière
de financement portent sur l?échelon intercommunal et les spécificités
littorales uniquement ; elles gagneraient donc à être complétées par des
propositions pour l?échelon régional.
Le principe de pollueur payeur a bien guidé l?instauration de la
Taxe Générale sur les Activités Polluantes pour les déchets s?appliquant
aux installations de traitement des déchets, mais le fruit de cette taxe
revient au budget de l?État et à son agence l?ADEME et nullement aux
Régions. Il en va de même pour les éco-contributions des filières REP, dont
les ressources reviennent aux éco-organismes et nullement aux Régions
malgré leur compétence en matière de développement économique.
Enfin, je tiens à vous témoigner du travail mené par les conseillers
régionaux et les agents de la Région Nouvelle-Aquitaine sur le sujet de la
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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202 COUR DES COMPTES
prévention et de la réduction des déchets, et de mon engagement à le
poursuivre.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
PROVENCE-ALPES-CÔTE D?AZUR
Par courrier en date du 28 juillet 2022, vous m?avez communiqué le
projet de rapport public thématique intitulé « Prévention, collecte et
traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser » que la Cour
propose de publier prochainement avec les réponses des destinataires
intéressés conformément aux articles L 143-8 et R. 143-13 du Code des
juridictions financières. Je vous en remercie.
L?objet du rapport est de réexaminer la pertinence et l?efficience de
la politique de prévention et de gestion des déchets.
La Région Provence-Alpes-Côte d?Azur a été consultée, en mars
2022, sur un extrait du rapport d?observations provisoires relatif à
l?enquête nationale que la Cour des comptes et les Chambres régionales
des comptes ont mené sur les déchets ménagers et assimilés en vue du futur
rapport public thématique.
La Cour des comptes appelle les Régions à « jouer pleinement leur
rôle de planificateur, d?animateur voire de financeur, afin de garantir la
mise en oeuvre effective des objectifs arrêtés dans leurs plans. » Elle pointe
une « programmation à renforcer » et des plans régionaux qui demeurent
insuffisamment précis et contraignants sur les investissements et qui ne «
s?avèrent pas à la hauteur des défis à relever. » Elle précise que le « niveau
régional serait le plus pertinent pour organiser une programmation et une
coordination optimales des investissements. »
Le Plan régional de prévention et de gestion des déchets de la région
Provence-Alpes-Côte d?Azur a été approuvé le 26 juin 2019, puis intégré
au Schéma régional d?aménagement, de développement durable et
d?égalité des territoires et abrogé le 16 octobre 2021.
Le Schéma régional d?aménagement, de développement durable et
d?égalité des territoires de la région Provence-Alpes-Côte d?Azur a été
arrêté par le Préfet le 15 octobre 2019. Celui-ci comporte un volet
« planification régionale des déchets » qui est opposable à toutes les
décisions publiques prises en matière de déchets, d?autorisations
environnementales ou d?installations classées pour la protection de
l?environnement. Pour une localisation des équipements adaptée aux
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 203
contextes des collectivités, le Schéma régional d?aménagement, de
développement durable et d?égalité des territoires de la région Provence
Alpes-Côte d?Azur a fixé trois règles pour permettre aux acteurs
compétents en matière de prévention et de gestion des déchets de
spatialiser les besoins en équipements en fonction d?état des lieux
territoriaux et dans leurs documents d?urbanisme.
Conformément à l?article L1111-9 du Code général des collectivités
territoriales, la Région, en tant que chef de file dans les questions
environnementales, exerce pleinement son rôle de planificateur, de
coordinateur et d?animateur des projets structurants en matière de
prévention et de gestion des déchets. Cependant, outre la définition des
besoins en équipements par bassin de vie, une évaluation économique,
présentée lors de la phase d?enquête publique, mentionnait 700 M¤
d?investissements nécessaires pour atteindre les objectifs.
Aussi un transfert partiel ou total du « Fonds économie circulaire
», actuellement géré par l?ADEME, aux Régions est nécessaire afin de leur
permettre d?accompagner efficacement les projets sur le territoire et
mettre en oeuvre les objectifs de la planification.
En effet, il conviendrait que la Région puisse disposer de
l?autonomie d?emploi des crédits pour mettre en oeuvre la planification et
accompagner les territoires en adéquation avec les priorités soulignées
par la planification régionale. Par exemple, les critères actuels
d?intervention de l?ADEME ne permettent pas de soutenir des opérations
de mise aux normes réglementaires alors même que certaines régions sont
en retard sur le sujet. Or les délégations ne peuvent se faire que sur la base
des critères d?intervention de l?ADEME. La mise en place de critères
d?intervention régionalisés et adaptés aux besoins propres des territoires
semble nécessaire pour permettre de financer davantage les équipements
structurants et indispensables à la réalisation des objectifs régionaux et
nationaux.
En matière de planification de la gestion des déchets, expressément
prévue à l?article R541-16 du Code de l?environnement, la Région travaille
en étroite collaboration avec les services de l?État sur les dossiers de
demande d?autorisation environnementale en matière d?Installations de
stockage des déchets non dangereux et d?Unités de valorisation
énergétique. La Région formule des avis sur les dossiers de demande
d?autorisation environnementale au titre des collectivités intéressées par
le projet au regard des incidences environnementales. Ces avis arrivent
après l?enquête publique et servent aux services de l?État pour rédiger les
arrêtés préfectoraux. Le Code de l?environnement ne prévoit pas
explicitement une saisine de la Région au titre de sa compétence «
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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204 COUR DES COMPTES
planification » et en amont de l?enquête publique durant notamment la
phase d?instruction des dossiers par les services de l?État. Un
éclaircissement sur ce point permettrait de renforcer le rôle du
planificateur.
Par ailleurs, la Région propose une meilleure articulation entre le
Code général des collectivités territoriales (volet Schéma régional
d?aménagement, de développement durable et d?égalité des territoires) et
le Code de l?environnement (volet plan régional de prévention et de gestion
des déchets) pour assurer une meilleure lisibilité des obligations
législatives et réglementaires qui incombent aux Régions et aux EPCI.
Mes services se tiennent à votre disposition pour vous fournir des
informations plus détaillées sur les actions et travaux en cours.
MADAME LA MAIRE DE PARIS
Par courrier du 20 juillet dernier, vous m?avez transmis le rapport
public thématique intitulé Prévention, collecte et traitement des déchets :
une ambition à concrétiser.
Je souhaite vous apporter des précisions concernant l?encart
consacré à l?action de la Ville de Paris pour la collecte de déchets
organiques. La tonalité globale de cet encart peut en effet laisser à penser
que la Ville aurait revu ses ambitions à la baisse, notamment au regard du
rythme de déploiement de la collecte séparative en porte-à-porte.
Je tiens à souligner que la situation est toute autre, la Ville ayant au
contraire multiplié les vecteurs de collecte dans les immeubles et dans
l?espace public, afin de permettre à tous les Parisiens de trier leurs déchets
alimentaires, en maximiser la collecte et ainsi la valorisation.
Comme vous le savez, la Ville de Paris a ouvert le chemin en matière
de collecte séparative des déchets alimentaires et ce, plus de cinq ans avant
que la loi ne la rende obligatoire au 1er janvier 2024. La Ville collecte ainsi
en porte-à-porte 350 000 habitants des 2ème, 12ème et 19ème
arrondissements. Suite à l?arrêt de cette collecte pendant le premier
confinement, nous l?avons relancée à travers des actions de sensibilisation
et la distribution aux habitants de kits et de sacs leur permettant de trier
leurs déchets alimentaires.
Afin de répondre aux besoins et usages différents des habitants et
professionnels, nous déployons également différentes solutions de tri, dont
des bornes d?apport dit « volontaire ». Nous avons équipé la soixantaine
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 205
de marchés alimentaires de bacs dans lesquels les Parisiens peuvent
apporter leurs déchets alimentaires et tous les marchés seront équipés en
bacs fixes à partir de cette rentrée. En complément, sera ajouté un module
dédié aux déchets alimentaires aux stations Trilib?, qui étaient au nombre
de 340 au 1er septembre 2022 et seront 500 au terme de leur déploiement.
Nous avons aussi augmenté l?installation de bacs à composts (plus
de 1 000 à ce jour) et soutenons la mise en oeuvre de solutions innovantes
de compostage. Un appel à projet « compostage de proximité » a été lancé
l?été dernier et les premiers projets, dont certains semi-industriels, seront
cofinancés par la Ville. Nous avons enfin distribué plus de 5 600
lombricomposteurs.
Par ailleurs, la Ville collecte les déchets alimentaires d?une grande
partie des écoles et des restaurants administratifs parisiens. A partir de
2024, la totalité des restaurants, écoles, collèges et crèches sera collectée.
Entre 2020 et 2021, les déchets collectés ont ainsi connu une forte
augmentation de plus de 26 %.
La Ville poursuivra ses efforts pour déployer ces dispositifs jusqu?en
2024, date de l?obligation légale de tri à la source, dans le souci permanent
de proposer à tous les Parisiens et à proximité de chez eux, une solution
simple de tri de leurs déchets alimentaires, permettant une collecte efficace
au coût le plus maîtrisé possible. Le moment venu, nous pourrons partager
avec la Cour et nos homologues une évaluation précise de l?efficience des
différents modes de collecte.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU SYNDICAT MIXTE
DÉPARTEMENTAL EN CHARGE D'ÉTUDES
ET DU TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS
ET ASSIMILÉS DE LA VENDÉE (TRIVALIS)
Suite à la lecture du rapport public : « Prévention, collecte et
traitement des déchets Ménagers : une ambition à concrétiser », je
souhaite réagir en tant que Président de Trivalis, syndicat public de
traitement des déchets de la Vendée, qui couvre depuis 2003 l?ensemble du
territoire départemental pour une population DGF de plus de
800 000 habitants.
Je tiens d?abord à saluer votre initiative de rédiger ce rapport qui met
en avant la complexité de la gestion des déchets et l?importance de ce
service dans la vie quotidienne de nos concitoyens. Les déchets ont souvent
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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206 COUR DES COMPTES
été considérés à tort comme le « parent pauvre » de la transition
écologique.
Je souhaite malgré tout apporter des éléments complémentaires et des
précisions sur trois sujets particuliers évoqués dans votre rapport, et pour
lesquels Trivalis a parfois été cité.
Une stratégie nationale basée sur des objectifs de résultats
plutôt que de moyens
Vous évoquez dans le rapport,, la nécessité pour le traitement des
déchets de gagner en cohérence, en indiquant en préambule sur la partie
des biodéchets : « Les difficultés techniques, financières et sociales pour
parvenir à un meilleur tri et à une valorisation des biodéchets devront être
levées au cas par cas, en fonction des spécificités locales , aucune solution
n?apparaissant uniformément applicable, ce qui explique que le législateur
n?ait pas à ce jour préconisé une solution unique pour tous les territoires ».
Je vous rejoins parfaitement sur ce constat, que le territoire français
n?est pas uniforme et que le législateur ne devrait pas exclure ou
préconiser des moyens de traitement des déchets mais plutôt des objectifs
de résultats : respect de seuils, de qualité, objectif de collecte, des tonnages
maximum ou minimum?
Pour reprendre l?exemple des biodéchets (mais ce constat est hélas
extensible à d?autres matières), il ne faut pas penser que toutes les
collectivités ont attendu la loi AGEC pour s?intéresser aux biodéchets et
au tri à la source.
À titre d?exemple, depuis 2003, c?est plus de 160 000 composteurs
individuels qui ont été distribués aux ménages vendéens pour détourner la
matière fermentescible des ordures ménagères. Ce choix ancien de
détournement amont des biodéchets est une des raisons, avec la redevance
incitative (j?y reviendrai) et l?extension des consignes de tri dès 2017, qui
explique une baisse de 118 kg/an/hab d?Ordures Ménagères résiduelles
(OMr) en Vendée depuis 2003, en passant de 260 kg/an/hab. à 142
kg/an/hab. en 2021.
La collecte en porte à porte des biodéchets, promue fortement par le
ministère de la transition écologique, pourra s?effectuer peut-être
ponctuellement sur des territoires denses. En revanche, c?est une absurdité
économique et environnementale en zone rurale.
Il n?en demeure pas moins que malgré une politique forte de
détournement en amont de biodéchets par le compostage individuel, le
compostage collectif et la collecte en porte à porte sur certains secteurs, il
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 207
restera encore de l?organique dans les OMr, sans doute entre 20 % et 30
% si on se réfère à certains exemples allemands de villes qui ont mis en
place la collecte de biodéchets depuis plus 25 ans. C?est pour cette raison
que le choix du législateur que vous évoque, de remise en cause du tri-
mécano-biologique (TMB) n?est pas pertinente. Le Tri-Compostage est un
moyen complémentaire de la politique des biodéchets.
Le législateur a remis en cause un moyen, alors qu?il aurait dû fixer
un objectif de résultats. Il aurait été plus cohérent de définir des nouveaux
seuils de qualité pour valider un compost issu de Tri-Compostage.
Rappelons d?ailleurs que plus 95 % des composts de TMB produits en
France respectent très facilement à la NFU 44-051. C?est la même norme
imposée au compost de biodéchets.
Cette obligation de résultats aurait permis à des territoires ruraux de
développer une technique qui valide les obligations environnementales et
répond à une demande locale d?économie circulaire puisque la production
de compost de TMB est reprise intégralement par des agriculteurs locaux.
L?importance de la matière organique que vous citez dans votre
rapport, incite à trouver des solutions tous azimuts pour éviter qu?elle ne
se retrouve dans un trou ou dans un four. Au lieu d?opposer les moyens de
captation sans argumentation scientifique, le législateur devrait favoriser
la complémentarité des techniques afin de pallier la diminution drastique
de l?élevage qui génère donc moins de matière organique pour
l?agriculture. Cette situation est encore aggravée aujourd?hui par la
guerre en Ukraine et la crise énergétique qui limitent fortement la
production d?amendement pour les sols.
Tarification incitative, l?État doit soutenir les territoires
qui ont fait ce choix
Vous évoquez à juste raison l?importance de la tarification incitative
comme levier d?action sur la réduction des déchets. Dans le rapport vous
mettez en exergue la complexité de la tarification incitative qui ralentit sa
diffusion.
Également, vous soulignez que les espoirs de voir 15 millions
d?habitants concernés par la tarification incitative en 2020, puis 25
millions en 2025, ont été rapidement déçus puisque seulement 6 millions
d?habitants étaient concernés en France en 2019.
J?ai été surpris que la Vendée n?ait pas été citée en exemple dans votre
rapport, puisqu?en 2019, 60 % de la population vendéenne étaient à la
REOMI, et presque 75 % en 2023. Cela signifie que pour une population
INSEE de 685 642 habitants en 2019, donc environ 411 000 habitants à la
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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208 COUR DES COMPTES
REOMI, les vendéens représentaient 6,85 % des Français à la tarification
incitative, alors que le département ne pesait en 2019 que 1 % de la
population française.
Je pense donc, qu?au-delà de la complexité, une volonté politique forte
est nécessaire. Cette dernière peut être incitée et récompensée par un
bonus ou un dégrèvement qui viennent soutenir les collectivités qui
s?investissent dans cette direction.
Il pourrait y avoir par exemple une baisse de la TGAP ciblée sur les
territoires leaders en ce domaine. Cette orientation rejoint votre
recommandation n°6 en page 63.
L?implication dans l?économie circulaire est un risque assumé
qu?il faut défendre
Vous citez en page 102 de votre rapport l?exemple de Trivalis qui fait
évoluer un de ses TMB en ajoutant une unité de préparation de CSR. Vous
soulignez : « Ce procédé étant désormais proscrit (il s?agit du Tri
Compostage) pour produire du compost, les collectivités sont contraintes
de réorienter les flux de déchets vers la seule méthanisation et vers la
production de combustibles solides de récupération, sans certitude de
pouvoir rentabiliser les équipements associés à ce nouveau procédé de
valorisation ».
Je souhaite d?abord préciser que l?interdiction de la production de
compost par Tri-Compostage ne sera active qu?en 2027, si la loi AGEC
n?est pas modifiée. Par ailleurs, indiquer que les flux de déchets sont
réorientés vers la production de CSR est une erreur. Les flux concernés
par la production de CSR dans un TMB sont les refus primaires, donc les
flux qui n?étaient pas valorisés mais enfouis. La production de CSR
n?intervient donc pas sur la matière organique qui continue à être
valorisée en compost normé.
Il ne s?agit donc pas d?une réorientation de flux mais d?une nouvelle
valorisation de flux existant. Je rappelle que la fabrication de CSR a
comme finalité la fabrication d?un combustible, mais qu?au préalable va
être extrait de ces refus tout ce qui peut être « valorisé matière » : ferraille,
aluminium, certains plastiques?
Le choix de Trivalis d?une unité de préparation de CSR accolée à une
unité de Tri-Compostage d?OMr, est sans doute la meilleure chaine de
valorisation des déchets existante aujourd?hui en France, bien plus qu?un
incinérateur urbain ou l?enfouissement brut. C?est d?ailleurs pour cette
raison que l?on ne parle plus de TMB mais d?UVEOr pour Unité de
Valorisation Énergétique et Organique.
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 209
Vous évoquez « l?incertitude de pouvoir rentabiliser les équipements
associés? », rappelons que ce choix cherche d?abord à respecter la loi.
D?abord la loi TEPCV de 2015 qui exige une valorisation énergétique
(donc CSR) de 70 % des déchets ultimes mis à l?enfouissement mais aussi
de la loi AGEC de 2020 qui fixe des objectifs de réduction de
l?enfouissement très importants dans des délais très courts.
Si la prévention comme vous le rappelez souvent dans le rapport est
un axe à développer fortement, et je vous rejoins parfaitement sur ce point,
il ne faut pas nier que ces changements de comportement s?effectueront
dans un temps long alors que le législateur a fixé des objectifs de réduction
ambitieux dans un temps court. En complément, je précise que les grands
principes de changement de comportement peuvent être balayés très
rapidement, comme lors de la pandémie de covid, où l?emballage sanitaire
est devenu la norme et qu?il a fallu que les équipements de traitement soient
en pleine capacité. La cohérence de la stratégie nationale, évoquée dans
le premier point, doit aussi s?inscrire dans une temporalité acceptable avec
la capacité de revoyure en fonction des situations de crise.
Le choix de la production de CSR en Vendée, avec ce facteur risque de
rentabilité que vous soulignez, s?inscrit aussi dans un principe d?économie
circulaire de territoire puisque l?objectif est que ce produit alimente une
chaudière industrielle de proximité dont l?enquête publique est en cours.
Cette nécessité de favoriser l?économie circulaire, soulignée à
plusieurs reprises dans votre rapport, implique le soutien des initiatives
locales en acceptant une part de risque. D?ailleurs, la rentabilité
financière de la gestion des déchets est un concept limité. Il s?agit plutôt
d?une maîtrise de l?évolution des coûts en améliorant la qualité
environnementale.
Pour conclure, je souhaite vraiment qu?il puisse exister au niveau
national une réelle stratégie de gestion et de valorisation des déchets. Cette
stratégie doit fixer des objectifs de résultats cohérents et scientifiques, sans
dogmatisme.
Les collectivités locales sous l?égide des plans régionaux ont la
capacité d?assurer de manière opérationnelle l?atteinte de ces objectifs,
mais avec une liberté d?adaptation des moyens en fonction de la
particularité des territoires. Je suis d?accord avec vous, sur la nécessité
que les collectivités se réunissent et massifient leurs actions pour atteindre
les objectifs. Certaines comme Trivalis, l?ont déjà effectué.
Il est indispensable que l?État soutiennent les collectivités qui
fournissent des efforts, celles qui se sont emparées des sujets en évoluant
vers le caractère incitatif du financement de la gestion des déchets, celles
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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210 COUR DES COMPTES
qui évoluent vers une économie circulaire concrète et anticipent des choix
de prévention et de meilleure valorisation matière.
Enfin, la situation actuelle de crise des matières premières et de
l?énergie, doit être un accélérateur pour faire de nos déchets des
ressources. De nombreuses initiatives locales et publiques vont dans ce
sens, il est nécessaire de faciliter leur développement.
À ce titre une vigilance particulière devra être portée sur le
développement massif des REP. Il ne faudrait pas que l?intention bénéfique
du principe de pollueur payeur masque un dessaisissement du service
public des déchets et une réorientation des recettes uniquement vers les
entreprises privées gestionnaires des REP.
En espérant avoir contribué à l?éclairage de certains aspects du
rapport et instauré une vision plus positive des évolutions à venir, je vous
prie d?agréer, Monsieur le Premier Président, l?expression de ma haute
considération.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE L?ASSOCIATION AMORCE
A propos d?AMORCE
Rassemblant plus de 1000 adhérents pour plus de 60 millions
d?habitants représentés, AMORCE constitue le premier réseau français
d?information, de partage d?expériences et d?accompagnement des
collectivités (communes, intercommunalités, conseils départementaux,
conseils régionaux) et autres acteurs locaux (entreprises, associations,
fédérations professionnelles) en matière de politiques Énergie-Climat des
territoires (maîtrise de l?énergie, lutte contre la précarité énergétique,
production d?énergie décentralisée, distribution d?énergie, planification),
de gestion territoriale des déchets (planification, prévention, collecte,
valorisation, traitement des déchets) et de gestion de l?eau.
Objet de la consultation
Une nouvelle enquête de la Cour des Comptes intitulée? Prévention,
collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser?
a abouti à la production d?un projet rapport public thématique soumis à
l?avis d?AMORCE avant publication définitive. Cette enquête intervient 10
ans après le précédent rapport thématique de septembre 2011, complété
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 211
par un rapport de suivi inséré au rapport public annuel de 2014 de la Cour
des Comptes intitulé ?La gestion des déchets ménagers, des progrès
inégaux au regard des enjeux environnementaux?. Des travaux avaient été
également consacrés aux éco-organismes insérés aux rapports publics
annuels de 2016 (Les éco-organismes : un dispositif original à consolider)
et 2020 (Les éco-organismes : une performance à confirmer, une
régulation à renforcer) de la Cour des Comptes. Ce nouveau rapport est
basé sur 51 contrôles des Cours Régionales des Comptes et des échanges
avec les administrations centrales, l?ADEME, CITEO, l?AMF, ELIPSO, la
FNADE, UFC que Choisir, Zéro Waste France et AMORCE lors de 2
auditions en 2022.
Avis d?AMORCE validé lors du Conseil d?Administration du
7 Septembre 2022.
Le rapport pointe le retard pris par la France dans l?atteinte des
objectifs nationaux et européens et formule des recommandations pour
améliorer l?organisation et le financement de la gestion des déchets. Pour
AMORCE, il ressort au premier plan une absence criante de
l?accompagnement de l?État en matière de gestion des déchets, qui ne joue
notamment pas son rôle de régulateur auprès des éco-organismes pour
mieux affecter les soutiens perçus auprès des metteurs sur le marché vers
les collectivités. In fine, le citoyen se retrouve toujours à devoir supporter
une grande partie du coût de gestion des déchets.
Au niveau de la comparaison des performances européennes, les
calculs ne sont pas homogènes d'un pays à l'autre car l?Europe ne disposait
pas, avant la Directive déchets de 2018, d?une méthode de mesure
uniforme. Chaque pays proposait des méthodes de calcul qui lui sont
propres : par exemple, dans le domaine du tri des emballages ménagers,
la France ne comptabilise comme recyclé que les matières effectivement
remises sur le marché, déduction faite des refus de tri, alors que
l?Allemagne comptabilise tous les tonnages entrant en centre de tri soit un
écart dans les comptes de 17% en faveur de cette dernière à tonnages
entrants égaux. Une tentative, non encore aboutie, d?harmonisation des
calculs réalisée par un groupe d?experts au niveau Européen montre que
la France se situe effectivement plutôt dans la moyenne des pays
Européens. A noter que, malgré les travaux de refonte de l?observatoire
national de suivi des déchets piloté par l?ADEME et entamés depuis près
de 2 ans, les collectivités ne disposent toujours pas de la méthode officielle
de calcul de l?objectif de préparation ou recyclage des déchets introduit
par l?Ordonnance n° 2020-920 du 29 juillet 2020 et nécessaire au pilotage
du SPGD (indicateur européen également).
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212 COUR DES COMPTES
Il est par ailleurs mis en avant que ni la programmation nationale,
ni les PRPGD (insuffisamment précis et contraignants sur les
investissements), ni les PLPDMA ne sont à la hauteur des défis à relever :
il est proposé dans le rapport d?améliorer la planification par une
unification de la programmation nationale et l?adoption d'un programme
de mise en oeuvre spécifique par EPCI. AMORCE partage le même
constat : le planificateur ne met pas en place les moyens de ses objectifs,
avec les mêmes objectifs et la même échéance. Les régions doivent jouer
pleinement leur rôle de planificateur, d'animateur voir de financeur (pour
surmonter effectivement les difficultés d'amortissement) pour garantir la
mise en oeuvre des objectifs et une répartition territoriale cohérente des
équipements structurants. Pour aller plus loin dans la démarche jusqu?à
l?échelon territorial, AMORCE préconise de décliner les objectifs et
actions pour les atteindre dans un plan intercommunal, avec un dialogue
équilibré intercommunalités - régions. Il semble par ailleurs nécessaire de
réfléchir à un financement en permettant que les régions perçoivent une
part de la recette de TGAP et puissent établir un dispositif d'aide adapté
qui correspond à l'application du PRPGD. Le simple transfert d?une partie
du fonds Économie Circulaire vers les régions ne permet en effet pas aux
régions de piloter ce fonds en fonction des priorités identifiées au PRPGD.
La création d?une composante locale de la TGAP (défalquée du montant
de la TGAP nationale) permettrait également de donner des moyens
financiers aux territoires en charge du SPGD.
Pour le dispositif de suivi des plans à améliorer avec des indicateurs
annuels pertinents et synthétiques, le rapport préconise de publier d?ici
2024 un tableau de bord annuel du SPGD à l?échelle nationale produits
par les observatoires régionaux à partir de comptes-rendus simplifiés et
par type d'EPCI avec 6 indicateurs clés, complété par un tableau de bord
des filières REP selon le même principe et par chaque éco-organisme
regroupant les principales données utiles. AMORCE est favorable à des
indicateurs de pilotage pertinents et communs à l?ensemble des échelons -
à définir conjointement avec les acteurs du déchets - mais qui doivent
comporter des indicateurs amont en lien avec les mises sur le marché. A
noter que le travail de refonte de l?Observatoire des déchets cité ci-avant
piloté par l?ADEME n?a pas abouti pour l?instant (en tout cas non transmis
aux parties prenantes) à une meilleure visibilité sur les indicateurs
pertinents à retenir ni pour le moment à la définition d?une méthode
harmonisée de calcul des indicateurs nationaux manquants. Le rapport de
la Cour des Comptes envisage également de simplifier le rapport annuel
sur le prix et la qualité du SPGD d?ici 2024 autour de ces 6 indicateurs
associés aux coûts de gestion des déchets à l'habitant : AMORCE y est
favorable.
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 213
Au niveau du retard pris en matière de prévention des déchets, pour
AMORCE la responsabilité en revient principalement aux metteurs sur le
marché qui n'ont pas respecté les objectifs fixés par l'État. En effet, à
l'exception du compostage de proximité qui dépend d'une politique
ambitieuse de tri source des biodéchets (cf. point ci-après), les actions de
prévention d'une collectivité sont nécessaires mais impactent peu la baisse
des tonnages. Elles dépendent davantage des évolutions de consommation
et des metteurs sur le marché qu'il s'agirait pour AMORCE de contraindre
davantage. La Cour des comptes propose par ailleurs de rendre
obligatoire, quand le PLPDMA est élaboré par un syndicat de traitement,
une déclinaison territoriale.
Quant au financement complexe de la gestion des déchets dont en
particulier la recommandation de la Cour des Comptes de favoriser la
tarification incitative en allégeant son coût pour les EPCI grâce à un
financement complémentaire porté à 80% des coûts sur les premiers
exercices, Il faut pour AMORCE se poser en réalité deux questions :
? Quel type de signal prix ou autre forme d?incitation ou de dissuasion
financière ou fiscal faut-il développer et sur quel acteur, pour que les
citoyens contribuent davantage par leur comportement d?achat,
d?utilisation, de réparation, de tri au respect des objectifs de
prévention, de réemploi, de collecte sélective et de tri à la source, de
recyclage et de valorisation des déchets ménagers et assimilés ? Cela
impose inéluctablement d?évaluer l?efficacité de signaux prix portant sur
le prix du produit, la fiscalité locale des déchets, la fiscalité nationale de
la gestion des déchets. La réflexion sur les mesures et dispositifs
incitatifs en faveur de la réduction des déchets ne doit pas porter
uniquement sur les usagers du service public mais sur l?ensemble des
acteurs qui peuvent favoriser l?action des citoyens en faveur des
objectifs de la France en matière d?économie circulaire (prévention-
réutilisation, recyclage, réduction de l?enfouissement), à chaque étape
du cycle de vie d?un produit (de sa conception, son achat, son utilisation
et sa fin de vie) :
? Le citoyen consommateur : qui doit être informé et incité dans ses
actes de consommation avec des mesures portant sur la taxation
amont (REP généralisée), la TVA, des logiques de bonus/malus et
leur information grand public dans le cadre des filières REP.
? Le citoyen usager du service public : qui doit comprendre en tant
qu?utilisateur du SPGD l?impact de son geste de tri sur les coûts et
être intéressé à la prévention et au tri la source efficace de ses
déchets avec des mesures incitatives. Cette seule approche permet
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214 COUR DES COMPTES
d'améliorer le geste de tri mais ne modifie pas les habitudes de
consommation. Il est donc nécessaire d'agir sur toute la chaîne.
? Le citoyen contribuable : qui, en tant que financeur d?une partie des
services, doit appréhender le coût de la gestion des déchets et son
mode de financement avec des mesures portant sur l?affichage, la
compréhension et la lisibilité des taxes TGAP/TVA, des recettes et
de la fiscalité locale (TEOM, REOM).
? Comment doit se répartir le financement de la gestion de la gestion des
déchets ou plus largement la boucle d?économie circulaire au regard
des responsabilités de chacun des acteurs de la chaîne d?économie
circulaire (collectivités via la fiscalité locale, metteurs sur le marché
via les REP, acteurs économiques du recyclage et de la valorisation via
les prix de reprise et recette de valorisation, État via les aides de
l?ADEME issues des recettes de TGAP (bien que non affectées) ? À
noter que la TGAP doit être revue dans sa trajectoire pour qu'elle soit
incitative (aujourd'hui sa trajectoire ne permet pas les investissements
des collectivités pourtant nécessaires). Il s?agit par ailleurs, d?une
fiscalité écologique dont le principe même est d?inciter à la prévention
des déchets, au recyclage et à la limitation de l?élimination. Il est donc
nécessaire de la rendre incitative. Sur ce sujet, AMORCE défend depuis
de nombreuses années des évolutions de cette fiscalité (minoration du
montant pour les collectivités performantes, franchise de TGAP sur le
gisement sur lequel les collectivités ne peuvent agir...).
Sur la proposition d?instaurer une surtaxe à la taxe de séjour avec
produit affecté aux actions de prévention et gestion déchets : cette mesure
est intéressante mais si elle est clairement insuffisante
pour AMORCE. Une plus grande réflexion sur le financement et sa
dimension locale devrait être menée (notamment TGAP localisée).
Le tri à la source des biodéchets est souligné comme étant à juste
titre un enjeu majeur pour les territoires. Cependant, au regard du retard
de déploiement pris au niveau national, AMORCE préconise de modifier
la date de mise en oeuvre de l?obligation de sorte à ce que la date butoir du
31 décembre 2023 ne soit plus une obligation de généralisation mais une
obligation d?étude de faisabilité sous peine de ne plus pouvoir bénéficier
des aides de l?ADEME à échéance de l?obligation de tri à la source des
biodéchets prévu au 31 décembre 2023 et qui serait alors reportée au 31
décembre 2025. AMORCE demande également un renforcement du
dispositif financier pour garantir l'absence de surcoûts à la collectivité (cf.
études ADEME et FNADE/CME) et accélérer le déploiement dans des
conditions financières acceptables. Le nouveau système de financement et
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 215
d?aides pour l'accélération du développement du tri à la source des
biodéchets peut s?appuyer sur les propositions suivantes :
- Affecter jusqu?en 2025, la totalité des recettes de la TGAP afin
d?augmenter de 300 millions d?euros le fonds Économie Circulaire en
particulier au profit des solutions de tri à la source des biodéchets,
permettant d?assurer une aide de 90% pour les études de faisabilité et
de 100% sur les investissements de compostage de proximité (dont
compostage individuel non soutenu actuellement), de pré-collecte, de
collecte et de valorisation des biodéchets jusqu?au 31 décembre 2025,
permettant de compenser les surcoûts,
- Introduire une modulation de TGAP de 30 euros la tonne éliminée
d?OMR (soit environ 10 euros par habitant) pour les collectivités qui
ont mis en place le tri à la source des biodéchets,
- Permettre l?application d?un taux de TVA réduit aux matières
fermentescibles d?origine résiduaire,
- Créer un système de bonus à l?usage de matières fertilisantes issues
des biodéchets dans les sols ou instaurer des quotas à l?usage
d?engrais chimiques pour les producteurs de denrées et produits
alimentaires bruts (céréales, légumes, fruits) à hauteur des parts de
marchés des produits agro-alimentaires,
AMORCE demande également une modification du cadre
réglementaire pour :
- Revoir la réglementation sur les conditions de traitement et
l?interdiction de mélanger des biodéchets avec d?autres déchets
n?ayant pas fait l?objet d?un même tri,
- Clarifier de manière opérationnelle les conditions de limitations de la
fraction organique des déchets dans les ordures ménagères
résiduelles à éliminer.
Au niveau des matières revendues aux filières de recyclage qui se
diversifient et subissent de fortes variations de cours, la Cour des Comptes
préconise que les collectivités volontaires puissent choisir de confier cette
mission commerciale aux éco-organismes, sous condition de suivi
rigoureux des obligations qui leur sont fixées dans les cahiers des charges.
AMORCE s?oppose au choix de confier la revente de matières
commerciales aux éco-organismes car les REP financent déjà mal les
collectivités locales alors qu'elles essaient de reprendre la main sur les
matériaux qui ont plus de valeur. Les collectivités ont besoin de ces
reventes matières pour compenser le manque de soutien des éco-
organismes. La seule condition acceptable du transfert de la revente
matière serait un financement à plus de 80% des coûts par la REP.
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216 COUR DES COMPTES
Enfin au niveau des enjeux industriels prioritaires qui doivent être
mieux intégrés au plan national :
? sur le volet de la plasturgie, avec les difficultés de traitement des
plastiques dues à leur diversité et la cible de généralisation de l?ECT fin
2022 qui n?est pas atteinte : AMORCE appelle à ne pas se focaliser que
sur les emballages ménagers qui représentent 1MT sur 4MT de
plastiques mais sur l?ensemble des plastiques (4MT) et à réaliser un
inventaire des résines et des installations capables de les traiter.
? sur la place de la valorisation énergétique des déchets : pour AMORCE
elle doit être réaffirmée, dans le respect de la hiérarchie des modes de
traitement, en tant source d?énergie renouvelable produite localement et
issue de déchets non recyclables constituant un potentiel de valeur qui
mérite d?être mieux exploité. Elle participe à l?autonomie de la France
sur le plan énergétique.
En résumé pour AMORCE il s?agit donc avant tout de :
? Renforcer l?efficacité de la planification écologique et rééquilibrer le
financement de la gestion des déchets.
? Réaffirmer la nécessité de faire évoluer et de renforcer les outils de
planification de l?État et des collectivités en faveur de l?atteinte des
objectifs nationaux en unifiant les objectifs et les échéances ainsi que les
indicateurs de suivi communs et en adoptant un programme de mise en
oeuvre spécifique par EPCI pour dialoguer avec les PRPGD.
? Demander une affectation financière plus efficace pour mettre en oeuvre
la planification territoriale avec un signal prix fort en amont au niveau
des metteurs sur le marché impactant les habitudes de consommation,
au niveau intermédiaire avec les modulations des filières REP et la
tarification incitative appliquée aux usagers et en aval via la TGAP,
pour la rendre plus incitative (minoration à la performance des
collectivités) et pour redistribuer son produit en faveur
d?investissements pour la transition écologique dans les territoires.
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Sommaire
Procédures et méthodes
Synthèse
Récapitulatif des recommandations
Introduction
Chapitre I Une réduction des déchets contrariée par un pilotage insuffisant
I - Le volume élevé de déchets produits
II - Des acteurs insuffisamment coordonnés
III - Un dispositif de suivi toujours défaillant
IV - Un financement peu lisible et trop faiblement incitatif
Chapitre II Le dispositif opérationnel : une transformation à accélérer vers l?économie circulaire
I - La prévention : priorité officielle, mais parent pauvre de la gestion des déchets
II - La collecte : peu de progrès sur les enjeux prioritaires
III - Le traitement : une coûteuse modernisation à entreprendre
Conclusion générale
Liste des abréviations
Annexes
Annexe n° 1 : présentation de l?échantillon des contrôles réalisés par la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC)
Annexe n° 2 : le suivi des recommandations des juridictions financières sur les déchets ménagers
Annexe n° 3 : les Plans Régionaux de Prévention et de Gestion des Déchets (PRPGD
Annexe n° 4 : les indicateurs internationaux
Annexe n° 5 : les indicateurs du service public des déchets
Annexe n° 6 : les indicateurs des filières à responsabilité élargie du producteur (REP)
Annexe n° 7 : comparaisons internationales
Annexe n° 8 : les déchets en matière plastique
Annexe n° 9 : comparatif entre les différentes modalités de financement du service public
Annexe n° 10 : les conséquences de la crise sanitaire sur la gestion des déchets
Réponses des administrations et des organismes concernés
INVALIDE) (ATTENTION: OPTION enses-par-domaines/article/la-depense-de-gestion-des-dechets
https://ree.developpement-durable.gouv.fr/themes/economie-verte/depenses-pour-l-environnement/depenses-par-domaines/article/la-depense-de-gestion-des-dechets
https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/environnement
https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/environnement
https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/environnement
UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
45
Graphique n° 9 : évolution des dépenses totales
de gestion des déchets
Source : Cour des comptes d?après chiffres clés de l?Ademe 2020.
Dépenses en euros courants. Le processus de collecte et de compilation de données applicable ne
permet à l?Ademe de publier dans ses chiffres clés de l?année N qu?une synthèse basée sur les
chiffres N-4 (voir infra à propos du dispositif inadapté de suivi des objectifs)
Comme indiqué dans le graphique ci-dessus, l?ensemble des
dépenses du SPGD coûte en moyenne 124 ¤ TTC (117 ¤ HT) par habitant.
Les charges de traitement représentant 47 ¤ (38 % du coût HT) et les
charges de collecte 49 ¤ (39 %).
Coté produits, la vente des matières issues du tri, du recyclage et, plus
largement, du traitement des DMA (vente d?énergie après incinération,
compost?) représente 9 ¤ (7 % des produits). Les aides apportées par les éco-
organismes dans le cadre de la responsabilité élargie du producteur (filières
REP) représentent 13 ¤ (10 % des produits). Les subventions (notamment
celles de l?Ademe) constituent une recette marginale (2 ¤). Ces trois types de
produits permettent de déterminer le reste à charge pour la collectivité
gestionnaire du service (dit « coût aidé »). Ce coût « aidé » est de 92,50 euros
HT par habitant et par an85. Il est financé par une contribution des ménages de
106 ¤ en moyenne (81,5 %) sous forme d?une fiscalité locale affectée ou d?une
redevance (TEOM/REOM)86 ou indirectement (financement intégral ou
partiel) par le budget général de la collectivité gestionnaire.
Les produits (130 ¤ par habitant) financent donc les charges à
hauteur de 105 %.
85 « Référentiel national des coûts du service public de prévention et de gestion des
déchets ménagers et assimiles 2016 » et mise à jour 2019.
86 La TEOM représente de loin la première modalité de financement du SGPD (81 %
des produits perçus), contre 8 % pour la REOM. Pour une présentation détaillée des
modalités de financement du SGPD, voir plus loin la partie sur le financement.
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https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/587-referentiel-national-des-couts-du-service-public-de-prevention-et-de-gestion-des-dechets.html
https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/587-referentiel-national-des-couts-du-service-public-de-prevention-et-de-gestion-des-dechets.html
https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/575-referentiel-national-des-couts-du-service-public-de-prevention-et-de-gestion-des-dechets-synthese-9791029714450.html
COUR DES COMPTES
46
Graphique n° 10 : répartition des coûts de gestion des déchets
et de leurs financements (SPGPD)87
Source : Cour des comptes, d?après Ademe référentiel des coûts du SPGPD 2019 (chiffres 2016)
Le taux moyen de couverture des charges par les produits est de 105 % : cet excédent des produits sur
les charges correspond principalement à la constitution de provisions pour de futurs investissements
Plus de la moitié des coûts financés par les ménages au travers de la
fiscalité locale (53,1 ¤, soit 57 %) sert à couvrir la prise en charge des
OMR. La réduction de leur volume par des actions sur la prévention, le tri,
la collecte et le traitement est donc favorable non seulement à
l?environnement mais également à la maîtrise des coûts.
87 Produits industriels : ventes de matériaux et d?énergie, prestations à des tiers,
Soutien : versement des éco-organismes (filières à responsabilité élargie du
producteur/REP), aides : subventions publiques (Ademe notamment).
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
47
B - Des modalités de financement complexes
1 - Un financement national marqué par l?augmentation
de la TGAP
Le précédent rapport de la Cour sur le SPGD en 2011 notait déjà le
caractère complexe et inadapté des modes de financement qui n?intégraient
guère l?équité sociale, très peu le coût réel du service et surtout
marginalement le caractère incitatif (principe du pollueur-payeur).
Dix ans après et malgré les recommandations pour améliorer la
situation et l?adoption de plusieurs lois, la situation décrite reste largement
inchangée.
La seule évolution financière marquante est, au niveau national, la
forte augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP),
ressource fiscale pour l?État, qui continuera d?augmenter encore jusqu?en
2025, permettant à la France de rejoindre les pays qui pratiquent depuis
longtemps cette politique fiscale efficace pour réduire la mise en décharge
et l?incinération. Elle doit inciter les EPCI à privilégier la prévention et
accentuer les efforts pour réduire les tonnages d?OMR en utilisant un
signal-prix88.
La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) :
une incitation financière à la réduction des tonnages enfouis
et incinérés
La TGAP a été instituée par la loi de finances 1999 et a vocation à
modifier les comportements et à réduire le volume des déchets non recyclés.
Elle est entrée en vigueur le 1er janvier 2000 avec l?objectif d?appliquer le
principe pollueur-payeur et de lever des fonds afin de financer les politiques
environnementales. Cette taxe s?applique à chaque tonne d?ordures
ménagères ou de tout-venant entrant en centre de stockage ou
d?incinération. Elle est due par l?exploitant de l?installation de traitement et
finalement assumée par les EPCI en charge de la compétence. Sa croissance
a une incidence sur le coût total du service à financer.
88 La méthode du signal-prix, appliquée à la politique des déchets consiste à refléter dans le
prix des produits et des services le coût de leur impact sur l'environnement en pénalisant les
méthodes de traitement les moins vertueuses (incinération et enfouissement).
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48
Pour favoriser l'atteinte des objectifs de réduction des déchets et
d'augmentation de la valorisation, fixés par la loi de transition énergétique
(LTECV), les lois de finances pour 2016 et 2019 ont accentué le rôle
incitatif de la TGAP. Le taux de la TGAP passera progressivement à 65 ¤
par tonne enfouie en 202589. Une évolution similaire mais moins
importante90 s?applique aux tonnages incinérés, conformément à la
hiérarchie des modes de traitement.
Cette hausse uniforme a l?inconvénient de frapper indistinctement
les déchets qui pourraient être mieux triés grâce à l?intervention des
collectivités et les déchets non recyclables du fait des choix techniques des
entreprises sur les volumes desquels les collectivités ne disposent d?aucun
moyen d?action.
2 - Le renforcement de la responsabilité élargie des producteurs
En application du principe pollueur-payeur, la responsabilité élargie
des producteurs (REP) met à contribution les producteurs pour assurer, au
moins en partie, la gestion des déchets issus de leurs produits. Plus
précisément, l?obligation est faite aux fabricants et importateurs concernés
soit de les prendre en charge eux-mêmes, soit de confier cette prise en
charge à un éco-organisme en lui versant une écocontribution91.
La France s?appuie ainsi sur une vingtaine de filières REP, dont plus
de la moitié concernent des produits du quotidien, susceptibles de grossir le
gisement des déchets municipaux : emballages ménagers et papiers
graphiques, piles et accumulateurs portables, déchets d?équipements
électriques et électroniques, textiles, linges et chaussures. Elles couvrent un
plus large spectre que dans les autres pays de l?UE et cette couverture est en
augmentation92. Des produits, y compris ceux qui produisent des volumes
89 La TGAP est fixée à 37 ¤ par tonne enfouie en 2021 dans les installations de stockage
de déchets non dangereux réalisant une valorisation énergétique de plus de 75 %.
90 La TGAP pour les incinérateurs conformes à la norme internationale ISO 50001
passera de 17 ¤ en 2021 à 25 ¤ en 2025.
91 Les éco-organismes sont des personnes morales de droit privé, à but non lucratif,
pouvant prendre des formes juridiques variées : sociétés par actions simplifiées, sociétés
agréées par l?État (Ademe).
92 La loi AGEC a ajouté une dizaine de filières en 2022 : jouets, articles de bricolage
et jardin, sports et loisirs de l?autre, produits et matériaux du secteur de la construction
et du bâtiment (opérationnelle à compter du 1er janvier 2023). La filière des lingettes
doit être créée au 1er janvier 2024. La création d?une REP pour tous types d?emballages
est prévue au 31décembre 2024.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
49
significatifs de déchets (couches et litières par exemples), ne sont pas encore
rattachés à une filière REP. Les contributions perçues par les éco-organismes
en 2019 étaient de 1,464 Md¤ (+ 200 M¤ par rapport à 201793). Les éco-
organismes utilisent ces contributions en partie pour prendre en charge
directement des coûts de collecte et de traitement (508 M¤ en 2017) et en
partie pour participer au financement du service public de gestion des déchets
(805 M¤ de soutiens financiers versés aux collectivités locales, dont plus de
80 % versés par l?éco-organisme Citéo au titre des emballages ménagers)94.
3 - Un financement du SPGD marqué par la diversité des recettes
et la prédominance de la TEOM
Une fois déduites les ventes des produits issus du traitement et les
aides des éco-organismes et de l?État, le financement du reste à charge (dit
« coût aidé »), relève quasi-exclusivement au plan local de décisions des
EPCI à fiscalité propre95, y compris à travers leur participation à un
syndicat mixte.
a) Les différentes fiscalités affectées
Comme le prévoit le code général des impôts96, les EPCI peuvent
instituer une fiscalité affectée « à pourvoir aux dépenses du service de
collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés ». Modalité
dominante de financement du SPGD par les usagers, la taxe d?enlèvement
des ordures ménagères (TEOM) présente, en plus de sa simplicité
d?application et de sa garantie de rendement appréciable pour les
collectivités, un avantage redistributif de par la nature de sa base
d?imposition.
93 La principale filière est la filière emballages ménagers avec 708,7 M¤ en 2019, suivie
de la filière DEEE (déchets d?équipements électriques et électroniques) avec 188 M¤
puis celle des papiers graphiques avec 95,8 M¤.
94 On distingue ainsi les éco-organismes « opérationnels ». Articles L. 541-10 à L. 541-
15-2 du code de l?environnement qui prennent en charge directement les déchets des
entreprises de leur secteur (p. ex. piles électriques) et qui représentent 40 % de la prise
en charge des DMA et les éco-organismes financeurs qui reversent aux collectivités
locales les contributions (p. ex. emballages). Les éco-organismes mixtes (p. ex.
ameublement) financent la collecte par les collectivités mais assurent le traitement.
95 Communautés de communes, communautés d?agglomération, communautés urbaines
et métropoles.
96 Article 1520 du code général des impôts.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037986339/
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50
La base de la TEOM, commune avec la taxe foncière sur les
propriétés bâties est la valeur locative foncière, qui permet de prendre en
compte la valeur du patrimoine foncier imposé97. À titre d?exemple, une
personne seule habitant une habitation individuelle vaste verra son
imposition à la TEOM plus élevée qu?une famille de six personnes
occupant un appartement exigu, du fait de la valeur locative foncière des
habitations respectives. Si cette situation peut paraître partiellement
contestable du fait de l?inadéquation entre le montant de l?imposition et la
quantité de déchets produite, elle présente un certain avantage social98. La
TEOM permet aussi l?imposition de surfaces commerciales (par exemple
la grande distribution) qui génèrent indirectement des quantités
importantes de déchets (notamment les emballages même si les grandes
surfaces n?utilisent pas les prestations du SPGD). Une tarification
incitative peut être adossée à la TEOM (TEOMi).
À la place de la TEOM, l?EPCI peut instituer la redevance
d?enlèvement des ordures ménagères (REOM) versée par l?usager comme
contrepartie directe de la prestation et souvent liée à la composition de la
famille de l?usager (nombre de personnes dans le foyer). Cette redevance
dite « classique » ne reflète pas la quantité réellement produite et les efforts
de réduction des déchets réalisés par l?usager.
Le montant de la REOM peut aussi se fonder sur le volume et le
nombre de présentation des bacs à la collecte (ce qui implique
l?identification des bacs par la benne à ordures ménagères), voire le poids
des déchets par la mise en place d?une pesée embarquée. Dans ce cas, elle
est qualifiée de redevance incitative (RI ou REOMI).
97 La Cour des comptes indiquait, dans son rapport public annuel de 2009, que « le
processus d'établissement des bases cadastrales par la DGFIP est d'une grande
opacité : il est à la fois exagérément complexe, fragile, et d'un coût mal cerné. En outre,
l'absence de révision générale des bases depuis 1970, combinée à une mise en oeuvre
trop restreinte des procédures d'actualisation par les services fiscaux, dans le cadre du
droit existant, produit une situation obsolète et inéquitable ».
98 L?absence d?actualisation des valeurs locatives foncières vient toutefois limiter cet
effet social favorable.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
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51
La redevance spéciale (RS) : une tentative non aboutie
de financement dédié des déchets non ménagers
La redevance spéciale (RS) désormais facultative permet de facturer
le coût de la collecte et du traitement des déchets dits « assimilés » aux
ordures ménagères (produits par certaines activités économiques :
commerces, PME, restauration, etc. et estimés par l?ADEME à 20 % de
l?ensemble des DMA).
Elle a été instaurée pour éviter de faire payer aux ménages
l?élimination des déchets non ménagers. Sa mise en place très aléatoire et
limitée a conduit à l?abandon du caractère obligatoire qui lui avait été
conféré en 1993, alors que la Cour recommandait en 2011 d?imposer sa
généralisation. Quand elle est instaurée, les recettes de RS sont souvent
restreintes et ne représentent qu?une part très marginale du financement du
service public (exemple de la CA de Bastia).
L?échec de la généralisation de la RS montre la difficulté de distinguer
l?origine des flux de déchets et au sein des DMA les déchets ménagers des
déchets assimilés. Les EPCI sont le plus souvent dans l?incapacité de fournir
ces données qui permettraient un financement différencié.
Cette situation conduit à un report exclusif de la charge du
financement du SPGD vers l?usager habitant.
b) La combinaison de la fiscalité affectée et du budget général
Les collectivités peuvent choisir différentes modalités pour assurer le
financement du reste à charge par l?usager du service public : TEOM, Budget
général, RS, REOM, REOMi ou TEOMi (cf. annexe n° 9). Les modes de
financement retenus sont donc très variés, souvent complexes, mixant
TEOM et participation du budget principal, parfois avec une part de taxe sur
le foncier bâti explicitement dédiée. En raison de ses avantages et malgré ses
inconvénients, la TEOM reste toutefois très largement majoritaire.
La combinaison des modalités de financement est soumise à
plusieurs règles d?incompatibilités juridiques. Ainsi, par exemple, le choix
du financement du reste à charge par la REOM induit la qualification de
service public industriel et commercial (SPIC), l?obligation d?un budget
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annexe dédié et son équilibre par des recettes propres sans recours à une
participation du budget principal99.
La fiscalité affectée instituée par les EPCI doit pourvoir à la gestion
des DMA et non à d?autres dépenses de la collectivité. Le juge
administratif rappelle constamment cette interdiction du suréquilibre100
lorsque le produit de la TEOM est nettement supérieur101 aux dépenses
consacrées au SPGD.
Afin de définir les conditions de financement du SPGD sans
suréquilibre, il est essentiel de connaître le périmètre des dépenses à
prendre en compte. Comme le regrettait déjà le rapport des juridictions
financières en 2011, ce périmètre n?est connu qu?imparfaitement par une
construction jurisprudentielle inachevée. Le juge a ainsi exclu des charges
du SPGD le ramassage des corbeilles de propreté et les déchets des marchés
alimentaires et forains.
C - Une fiscalité incitative à développer
1 - Une fiscalité incitative devenue prioritaire
en raison de ses atouts
L?objectif de baisse des quantités collectées de DMA102 et le
surenchérissement de la TGAP qui pénalise de plus en plus fortement
l?incinération et l?enfouissement conduisent à privilégier une incitation
financière des usagers pour réduire leurs déchets.
La France était, en 2011, très en retard dans la mise en place d?une
tarification incitative en comparaison de plusieurs pays (graphique n°1) et
sa progression très lente depuis cette date ne lui a pas permis de le rattraper.
Le caractère incitatif de la tarification est mis en avant par la
LTECV103 comme un des leviers permettant d?atteindre les objectifs de
réduction des volumes de déchets en envoyant un « signal prix » à l?usager
99 Dans un délai de quatre ans suivant l?instauration de la REOM
100 La situation de suréquilibre consiste à lever une fiscalité (TEOM) d?un montant
supérieur au coût net (en enlevant les autres recettes : ventes de produits, recettes ces
éco organismes et subventions) du service pour la collectivité.
101 Le niveau du surfinancement acceptable a varié mais semble s?établir selon les
dernières jurisprudences à 115 % au maximum de couverture des dépenses.
102 Art. L. 541-1 1° du code de l?environnement - 10 % en 2020 / 2010 et - 15 % en 2030 / 2010
103 10° de L. 141-1 code de l?environnement.
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et en liant le prix qu?il paie au coût réel du service et à la quantité d?ordures
ménagères résiduelles qu?il produit.
L?efficacité dans ce domaine de la tarification incitative est
confirmée par plusieurs études récentes104. En moyenne, la mise en place
de la tarification incitative permet de réduire de 41 % la quantité d?OMR,
d?augmenter à due concurrence la collecte des recyclables et de réduire de
8 % les DMA. La relation forte entre la performance des EPCI et la mise
en place d?une fiscalité incitative est ainsi établie, en France comme à
l?étranger, selon une étude de l?Ademe105. 97 % des intercommunalités qui
produisent moins de 150 kg d?OMR et 100 % de celles qui produisent
moins de 100 kg d?OMR par habitant ont recours à une tarification
incitative. Par ailleurs, le coût moyen aidé des déchets est de 20 % en deçà
de la moyenne dans les territoires en tarification incitative car celle-ci
pousse à l?optimisation des coûts de collecte et de traitement106.
La baisse des OMR après mise en oeuvre de la tarification incitative,
avec l?ensemble des mesures d'accompagnement, a créé un effet report sur
les volumes collectés en déchèteries (avec des qualités et des taux de
tri/valorisation variables) dans une proportion non quantifiable.
Les avantages de la tarification incitative ont conduit la Convention
citoyenne pour le climat (CCC) à proposer de « remplacer une part
significative de la taxe d?enlèvement des ordures ménagères (TEOM) par
des modalités plus justes et favorisant les comportements
écoresponsables » (proposition C3.4).
Les associations d?élus représentants les groupements
intercommunaux (Communautés de France et France urbaine) considèrent
cependant que la fiscalité incitative n?est qu?un levier parmi d?autres de la
réduction des OMR même si Communautés de France se déclare favorable
au déploiement d?une dimension incitative dans la tarification du SPGD.
104 Étude du commissariat général au développement durable de mars 2016 et étude de
l?Ademe sur l?implantation de la TI (bilan à mi-parcours TI AMO). 4/11/2021.
105 Le parangonnage des pratiques de tarification incitative pour la gestion des déchets
ménagers dans plusieurs pays industrialisés » (Ademe 2018) indique que « dans tous
les territoires ayant mis en place une TI, la production d?OMR a diminué. »
106 Ademe, Étude sur les territoires pionniers de la prévention, confirmé par contrôles de la
communauté d?agglomération de Mauges et de la communauté urbaine de Besançon.
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/La%20tarification%20incitative%20de%20la%20gestion%20des%20ordures%20ménagères%20:%20quels%20impacts%20sur%20les%20quantités%20collectées
https://www.ademe.fr/dossier/modes-financement-service-public-gestion-dechets/tarification-incitative-ti
https://www.ademe.fr/dossier/modes-financement-service-public-gestion-dechets/tarification-incitative-ti
https://librairie.ademe.fr/air-et-bruit/3628-territoires-pionniers-de-la-prevention-des-dechets.html
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-mauges-communaute-maine-et-loire
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-urbaine-du-grand-besancon-doubs
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54
2 - Une complexité qui ralentit sa diffusion
La tarification incitative reste cependant insuffisamment attractive
pour les collectivités du fait des coûts ainsi que de la complexité de sa mise
en place et des incertitudes sur les recettes perçues par le service public.
La tarification incitative reste très peu mise en oeuvre dans
l'échantillon des EPCI de l?enquête, même s?il est fait régulièrement mention
de sa mise à l?étude. Les territoires ayant mis en oeuvre la tarification
incitative en France sont souvent ruraux ou mixtes et, à de rares exceptions
(par exemple l?agglomération de Besançon), les territoires les plus urbanisés
ne sont pas engagés dans des démarches de fiscalité incitative.
La part des collectivités qui recourent à la TEOM sans part incitative
comme mode majoritaire, voire exclusif, de financement ne décroit que très
lentement. La population qui reste soumise à cette imposition est constante,
principalement dans les zones fortement urbanisées (à l?exemple de la région
Ile-de-France). La part de la TEOM dans le financement du service public
de gestion des déchets continue de croitre en 2020 et en 2021 (7,1 Md¤ en
2020 et 7,4 Md¤ en 2021) et demeure très largement dominante par rapport
à la redevance. Même lorsqu?elle est mise en place, la part réellement
incitative107 reste résiduelle dans le prix payé par l?usager et représente, en
2020, moins de 0,5 % de l?ensemble du produit de la TEOM108.
Les espoirs placés dans une tarification plus incitative (TEOMI ou
REOMI) qui devait concerner 15 millions d?habitants en 2020 et
25 millions en 2025 sont pour l?instant déçus par le rythme très lent de sa
mise en place (moins de 6 millions d?habitants concernés en 2019109).
Le graphique ci-dessous montre l?écart important entre ces objectifs
législatifs et l?évolution de la population bénéficiant d?une tarification
incitative. L?objectif de 25 millions d?habitants en 2025110 apparaît hors
d?atteinte sans accélération très forte et sans nouvelles mesures
encourageant cette mise en place.
107 La part incitative ne représente que 10 à 45 % de la TEOMI, la part fixe majoritaire
reste basée sur la valeur locative foncière (VLF) de l?habitation.
108 34 M¤ sur les 7 137 M¤ du produit total de la TEOM (Source : DGCL Bis 151
fiscalité locale 2020).
109 Au 1er janvier 2019, 195 collectivités appliquaient une tarification incitative (5,6 M
d?habitants) dont 18 en TEOMI (0,940 M d?habitants). Au 1er janvier 2020 :
5,9 millions d?habitants et 9,3 millions si on inclut les collectivités en cours de mise en
oeuvre (source Ademe). Par ailleurs en 2020 et 2021, des collectivités représentant
9 millions d?habitants bénéficient des études de faisabilité aidées par l?Ademe.
110 Ces deux objectifs sont fixés par la LTECV de 2015.
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Graphique n° 11 : (indicateur-clef n° 2) population bénéficiant
de la tarification incitative
Source : Cour des comptes
La fiscalité incitative est souvent perçue comme compliquée et
coûteuse dans sa gestion (transfert de la gestion du fichier des redevables
de la direction des finances publiques à l?EPCI, insécurité sur les recettes)
et peut être source de rejet de la part des usagers. Les modalités de collecte
sont en effet plus complexes et impliquent l?équipement :
- des bacs à puces chez les usagers permettant déterminer leur nombre
réellement collecté et ainsi individualiser la facturation ;
- des points d?apport volontaire (PAV) avec un système de tambour à
reconnaissance par carte du propriétaire, des sacs apportés ;
- des bennes avec des systèmes électroniques de reconnaissance des
puces des bacs.
Comme le montre l?exemple ci-dessous, la mise en place d?une
fiscalité incitative ou d?une redevance incitative est un processus long et
peut s?étaler sur sept années entre l?étude d?opportunité et la mise en place
effective111.
111 Ce délai peut toutefois être réduit à l?exemple de communauté de communes
d?Oléron qui prévoit une mise en place de la REOMI en 2022 à la suite d?une démarche
initiée en 2018. Cf. CRC Nouvelle-Aquitaine, Communauté de communes de l?Ile
d?Oléron, décembre 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-de-communes-de-lile-doleron-saint-pierre-doleron-charente-maritime
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Organigramme n° 1 : processus d?instauration de la TEOMI
sur le territoire du syndicat du Bois de l?Aumône (Puy De Dôme)
Source : présentation webinaire du 30 juin 2021 ADEME, CITEO
et Région Occitanie
Plusieurs études de mise en place, voire de délibérations, n?ont pas
été suivies d?effet, notamment du fait du coût des investissements à réaliser
pour déployer un nouveau schéma de collecte en cohérence.
Par exemple, la communauté de communes Coeur du Var a décidé en
2016, après étude, de reporter la décision de la mise en place d?une TEOMI
à 2021 puis au-delà de 2025 au motif de la lourdeur des investissements à
réaliser et des bouleversements induits dans son organisation.
La mise en place d?une fiscalité incitative implique en outre des
efforts importants en termes de portage politique, de communication
auprès des usagers et d?engagements des services techniques des
collectivités. L?absence d?attention suffisante à ces préalables ou leur sous-
évaluation peut conduire à l?échec voire à des abandons et retours vers des
modes de fiscalité sans lien avec la qualité du tri, le plus souvent la TEOM
(à l?exemple de la communauté de communes des Gorges de l?Ardèche).
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Les conditions de la réussite de la mise en place d?une tarification
incitative : le contre-exemple des Gorges de l?Ardèche.
La communauté de communes des Gorges de l?Ardèche issue de la
fusion en 2017 de plusieurs intercommunalités dont certaines avaient mis
en place une tarification incitative pour une partie de leur territoire, a décidé
en 2018 une généralisation de la REOMI au 1er janvier 2021. Des carences
dans la conduite de ce projet, la sous-estimation des coûts induits par les
changements, le manque d?anticipation ont abouti, après plusieurs reports
et décalages par rapport au calendrier prévisionnel, à son abandon au
deuxième trimestre 2020 et à la généralisation de la TEOM en 2021.
La modification des modalités de collecte (généralisation de la collecte
en PAV en remplacement du PAP) simultanément à la mise en place de la
fiscalité incitative a amplifié les difficultés rencontrées par l?EPCI, montrant
la difficulté de mener de front deux chantiers lourds modifiant à la fois les
modalités de collecte et de financement du service public.
Les regroupements d?EPCI issus des schémas départementaux de
coopération intercommunale (SDCI issus de la loi NOTRE de 2015) ont
souvent conduit à la généralisation de la TEOM, alors que certains territoires
fusionnés avaient élaboré des politiques ambitieuses basées sur une fiscalité
incitative ou la redevance d?enlèvement des ordures ménagères (REOM).
La communauté de communes d?Oléron : un exemple de passage
de la REOM vers la REOMI112
La CC d?Oléron, actuellement en REOM, a décidé en 2018 de mettre
en oeuvre la REOMI à l?horizon 2023 avec un objectif de réduction de 20 %
des DMA.
Le système retenu prévoit une part forfaitaire établie sur la base d?un
nombre de levées ou de dépôts minimaux et de la taille du bac de l?usager ou
à la taille du tambour des colonnes d?apport volontaire. Au-delà de ce forfait,
la part variable est calculée pour toutes les levées et apports supplémentaires.
Le calendrier prévoit la réalisation d?une enquête auprès de chaque
usager et, en 2022, une facturation « à blanc » (simulation de facturation
incitative permettant la comparaison avec la facturation réelle).
112 Cf. CRC Nouvelle-Aquitaine, CC de l?île d?Oléron, décembre 2021.
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3 - Accélérer la mise en place de la fiscalité incitative
Les recommandations de développement de la tarification incitative
formulées antérieurement par la Cour113 n?ont pas été suivies d?effets et
doivent être réitérées.
La redevance d?enlèvement des ordures ménagères incitative, dont
la mise en place est mieux adaptée à l?habitat individuel, a connu un certain
développement, dans les zones rurales et péri-urbaines mais ses possibilités
d?extension en milieu urbain sont limitées par les contraintes spécifiques
de l?individualisation du tri dans l?habitat collectif.
Plus récemment, un mouvement semble s?amorcer, de collectivités
urbaines qui cherchent à s?engager ou qui expérimentent la mise en oeuvre
de la tarification incitative sous forme de TEOMi (Grenoble Alpes
Métropole et Versailles Grand Parc notamment), tandis que d'autres
l?étudient.
Nombreux sont ceux qui considèrent que l?application sur
l?intégralité du territoire sera difficile alors qu?elle pourrait être plus
facilement envisagée sur seulement une partie du territoire (habitat
pavillonnaire, communes périphériques, ?) : une dérogation à l?obligation
d?uniformité du mode de financement sur un EPCI à fiscalité propre et donc
l?autorisation de faire cohabiter formes classique et incitative d?un mode
de financement donné (TEOM/TEOMi ou REOM/REOMi) au-delà des
sept ans explicitement prévus au Code général des impôts pour la TEOMi
pourrait répondre à cette difficulté et favoriserait le développement de la
TI en milieu urbain, au prix sans doute d?une certaine complexité de
gestion voire d?une insécurité juridique.
La sécurité financière apportée par la TEOM pour les collectivités
gestionnaires du service public, son caractère redistributif et sa très large
implantation sur le territoire, amènent à ne pas remettre en cause cette
fiscalité, mais plutôt à favoriser l?introduction d?une part incitative
(TEOMI) dans les limites actuellement prévues par la loi (10 à 45 % de
part incitative dans la TEOM totale).
La métropole de Rennes, relayée par l?association France urbaine,
étudie la possibilité d?une TEOMI « collective » qui ne serait plus
individualisée mais établie au niveau du quartier ou d?un secteur
géographique.
113 Rapport 2011, Les collectivités locales et la gestion des déchets ménagers et
assimilés, op. cit.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-collectivites-locales-et-la-gestion-des-dechets-menagers
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
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59
La Métropole de Rennes étudie un dispositif innovant
mais aux bases juridiques fragiles.
Devant la difficulté à établir une individualisation de la performance
de tri en milieu fortement urbanisé, Rennes métropole a étudié la possibilité
d?établir la part incitative non pas sur les quantités d?OMR produites par
chaque usager, mais en tenant compte de la performance collective réalisée
au niveau d?un quartier.
Ce dispositif permettrait, selon la métropole rennaise, de développer
des dynamiques collectives sur des secteurs territoriaux et de limiter les
coûts de gestion administrative pour consacrer plus de moyens à l?animation
du dispositif.
Toutefois, sa mise en place se heurte à des difficultés juridiques. En
effet, le passage d?une individualisation de la taxe au prorata des valeurs
locatives à une performance de tri collective (au niveau d?un quartier ou
d?un secteur) n?est pas autorisé par la règlementation et pourrait se révéler
juridiquement fragile au regard du principe d?égalité.
Un des principaux obstacles au développement de la tarification
incitative est le coût de sa mise en place, estimé entre 20 et 40 ¤ par
habitant, ramené à 15 ¤ après pris en compte des aides (soit de 45 à 75 %
d?aides)114. Ce surcoût est dû principalement aux investissements à réaliser
au démarrage, mais aussi à l?accompagnement de la démarche qui doit se
poursuivre sur une longue période115. Toutefois, les économies réalisées du
fait de la baisse des tonnages d?OMR (et donc de la baisse des coûts de
traitement) doivent permettre de couvrir les frais initiaux. En effet,
l?économie observée réalisée sur le coût aidé (reste à charge) par les EPCI
ayant mis en place une tarification incitative est, en moyenne en 2021116,
de 13 euros par habitant. Les aides au démarrage sont donc essentielles
pour soutenir les collectivités qui mettent en place la tarification incitative.
Pour encourager plus fortement les EPCI à recourir à la TEOMI, la
loi de finances initiale pour 2019 comporte deux mesures : l?année
d?instauration de la part incitative, le produit de TEOM peut augmenter
114 Source : Ademe 2020 - chiffres clés : coût de la mise en place de la TI.
115 En 2022, l?Ademe a enrichi l?offre de soutien aux collectivités en tarification
incitative au travers une nouvelle modalité d?aide d?accompagnement de l?information
individuelle des usagers sur leur utilisation du service.
116 Source : Ademe 2021 - chiffres clés : coût de la mise en place de la TI.
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COUR DES COMPTES
60
jusqu?à 10 % (par rapport à l?année précédente) et les frais de gestion levés
par l?État, fixés à 8 % sur la TEOM, sont limités à 3 % pendant cinq ans.
Ces incitations se sont cependant avérées insuffisantes, au regard
des coûts induits par cette évolution et n?ont pas permis de rendre la
TEOMI plus attractive que la TEOM.
Afin de développer la tarification incitative (TEOMI ou REOMI), la
Cour recommande donc d?accentuer les aides au démarrage, en allégeant
le coût de sa mise en place, en portant la part du financement extérieur à
80 % du surcoût117. Ces aides ponctuelles pourraient prendre la forme par
exemple de subventions directes (fonds chaleur et fonds économie
circulaire gérés par l?Ademe) ou d?une atténuation supplémentaire des frais
de gestion grevant la TEOMI.
D - La spécificité des territoires touristiques
Les territoires à forte activité touristique118, le plus souvent
saisonnière, connaissent des problèmes spécifiques pour adapter leurs
fréquences de collecte à la variation parfois très importante des populations
utilisant le service public.
Les tournées supplémentaires et le traitement des tonnages générés
par l?activité touristique entrainent pour ces territoires des coûts plus élevés.
La moyenne des tonnages collectés par habitant indique la même tendance
en étant supérieure à la moyenne nationale tant pour les DMA (669
kg/habitant pour 529 kg/habitant) que pour les OMR (356 kg/habitant pour
249 kg/habitant en moyenne nationale)119. Cette différence est encore
accentuée pour la sous-catégorie120 des territoires dits « très touristiques »121.
117 La part couverte par des aides extérieures à l?EPCI est actuellement, en moyenne,
de 50 %.
118 « Territoires à dominante touristique » selon la classification proposée par l?Ademe
119 Source : Ademe chiffres clés de la collecte en 2019.
120 La typologie des habitats de l?Ademe comprend cinq catégories et dix sous-
catégories. Dans la catégorie touristique sont distingués : les territoires très touristiques,
les touristiques urbains et les autres touristiques.
121 La région Provence-Alpes-Côte d?Azur (PACA), aux caractéristiques touristiques
affirmées, présente par exemple des tonnages d?ordures ménagères exceptionnellement
élevés avec 713 kg de DMA par an et par habitant et 372? kg d?OMR en 2019 (source :
observatoire régional des déchets PACA).
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
61
Graphique n° 12 : ratios de collecte des OMR par typologie
de territoires en 2019
Source : Ademe chiffres clés 2019 (parution : juin 2021)
La taxe de séjour (TS) : une taxe affectée au développement touristique
Créée par une loi de 1910, la taxe de séjour est instituée à l?initiative
des communes réalisant des dépenses favorisant l?accueil des touristes.
À l'origine, elle ne pouvait être instituée que par les stations classées de
tourisme. Cette possibilité s?est élargie au fur et à mesure des années (aux
communes de montagne, du littoral, réalisant des actions de promotion
touristique ou de gestion de leurs espaces naturels ?).
Elle est due par personne et par nuit et son montant varie selon le
type d'hébergement (hôtel, meublé de tourisme, camping) et selon le
classement de l'hébergement. Les recettes de la taxe de séjour sont affectées
obligatoirement aux dépenses destinées à favoriser la fréquentation
touristique d'une commune ou d'une intercommunalité.
Afin de permettre la couverture des charges supplémentaires du service
public des déchets générés spécifiquement par la fréquentation touristique,
pourrait être envisagée l?affectation d?une part additionnelle à la taxe de séjour
(surtaxe) perçue par les EPCI122. Le produit de la TS resterait ainsi affecté au
développement touristique mais les territoires classés « touristiques », selon la
classification de l?Ademe, pourraient percevoir, sur la même base que la TS,
cette part complémentaire affectée au financement des opérations de
prévention, de collecte et de traitement des ordures ménagères.
122 La TS est actuellement obligatoirement affectée aux offices de tourisme et ne peut
donc financer des surcoûts liés à la collecte et au traitement des déchets.
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COUR DES COMPTES
62
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
En France, le volume d?ordures ménagères par habitant, notamment
résiduelles, se stabilise à un niveau supérieur à la moyenne européenne.
Le service public de gestion des déchets (SPGD) est exercé par les
établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats
intercommunaux de traitement, dans le cadre d?une programmation
tripartite État-région-intercommunalités.
Or, cette programmation est trop complexe et souffre d?une
articulation insuffisante entre les différents niveaux territoriaux qui la rend
finalement inefficace. Pour permettre à la France de réaliser les objectifs
que le législateur a fixés dans le code de l?environnement et rejoindre les
meilleurs standards européens de prévention et de gestion des DMA, la
programmation doit être améliorée. Une simplification des documents de
programmation nationaux, une programmation régionale plus
opérationnelle, grâce à davantage de précisions sur les investissements à
réaliser et à des plans locaux de prévention des déchets ménagers et
assimilés déclinés pour chaque EPCI, contribueraient à une plus grande
lisibilité des différents niveaux et outils de programmation.
Par ailleurs, comme la Cour l?avait déjà souligné en 2011, la
mobilisation des parties prenantes implique de disposer de tableaux de
bord synthétiques permettant de confirmer une direction et un rythme de
réalisation adéquats. Pour atteindre ce résultat, la collecte locale des
données doit être accélérée et simplifiée dans un compte-rendu unique et
harmonisé.
Les dépenses du service public de gestion des déchets augmentent
de manière continue depuis vingt ans et sont financées principalement par
la fiscalité ou la tarification locale et les filières REP. Pour réduire cette
dépense et atteindre l?objectif prioritaire de réduction des quantités de
déchets collectées et traitées, les modalités de tarification (ou de fiscalité)
doivent inciter plus clairement l?usager à des efforts de tri. La tarification
incitative (REOMi ou TEOMi) permet de limiter les quantités d?OMR en
liant, au moins partiellement, la qualité du tri et le prix payé par l?usager.
Toutefois, son développement, prévu par la loi, se heurte à des difficultés
de mise en place et à des coûts de démarrage importants qui doivent être
mieux pris en charge.
La spécificité des territoires touristiques entraine des charges pour
le SPGD qui nécessitent la mobilisation de moyens complémentaires. Une
part additionnelle de taxe de séjour payée par les usagers à l?origine de
ces surcoûts permettrait de les financer.
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UNE RÉDUCTION DES DÉCHETS CONTRARIÉE PAR UN PILOTAGE
INSUFFISANT
63
Au vu de l?ensemble de ces constats, les juridictions financières
formulent les recommandations suivantes :
1. Unifier, au plus tard en 2024 les documents de programmation
nationale de la prévention et de la gestion des déchets, en y renforçant
le volet industriel de la plasturgie et de la valorisation énergétique
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
2. Rendre obligatoire, au plus tard en 2024, lorsque le programme local
de prévention des déchets ménagers est élaboré par le syndicat de
traitement, l?adoption d?un programme de mise en oeuvre spécifique
par EPCI (ministère de la transition écologique et de la cohésion des
territoires).
3. Publier, au plus tard en 2024, un tableau de bord annuel du Service
public de gestion des déchets, à l?échelon national et par type
d?établissement public de coopération intercommunale, des six
indicateurs-clefs, incluant la prévention et le poids des ordures
ménagères résiduelles assortis d?une représentation graphique des
trajectoires constatées par rapport aux trajectoires cibles (ministère
de la transition écologique et de la cohésion des territoires, régions).
4. Publier, au plus tard en 2024, un tableau de bord annuel, pour
l?ensemble des filières de Responsabilité élargie du producteur et,
pour chacune d?elles, des six indicateurs-clefs, incluant la prévention,
assortis d?une représentation graphique des trajectoires constatées
par rapport aux trajectoires cibles (ministère de la transition
écologique et de la cohésion des territoires, éco-organismes).
5. Harmoniser, au plus tard en 2024, dans un seul compte-rendu le bilan
annuel, par intercommunalité, des actions de prévention et de gestion
des déchets ménagers autour des six indicateurs-clefs et du coût du
service par habitant (ministère de la transition écologique et de la
cohésion des territoires).
6. Favoriser la mise en place de la tarification incitative en allégeant son
coût pour l?intercommunalité grâce à un financement complémentaire
porté à 80 % sur les premiers exercices (ministère de la transition
écologique et de la cohésion des territoires, ministère du budget, des
comptes publics et de la fonction publique) ;
7. Instaurer une surtaxe à la taxe de séjour dont le produit serait affecté
aux actions relatives à la prévention et à la gestion des déchets
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
ministère du Budget, des Comptes publics et de la Fonction Publique).
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Le dispositif opérationnel : une
transformation à accélérer vers
l?économie circulaire
Le présent chapitre examine les étapes du processus de gestion des
déchets ménagers et assimilés (la prévention, la collecte et le traitement)
telles qu?elles sont mises en oeuvre par les organismes qui en ont la charge.
Les résultats atteints par la France et les choix de gestion de déchets
y sont exposés et comparés à ceux des autres pays de l?Union Européenne.
Ces comparaisons et les exemples de bonnes pratiques comme les
difficultés rencontrées aux niveaux local et national, illustrent la
complexité de cette politique et mettent en évidence les efforts qui doivent
être réalisés en France pour atteindre les objectifs fixés.
I - La prévention : priorité officielle, mais
parent pauvre de la gestion des déchets
L?article L. 541-1 du code de l?environnement prévoit de « donner la
priorité à la prévention ». La prévention consiste à réduire la quantité de
déchets produits et leur dangerosité en intervenant à la fois sur les modes de
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COUR DES COMPTES
66
production et de consommation des produits123. Elle relève au premier chef
des entreprises puisqu?elles sont en mesure de réduire à la source la quantité
de matière des produits qu?elles mettent sur le marché. Certains territoires,
pionniers mais trop minoritaires, montrent qu?ils peuvent aussi avoir une
action déterminante sur la prévention en accompagnant la consommation
responsable, l?autogestion des déchets et le geste de tri des citoyens.
A - À l?étape de la production : écoconception
et durabilité des produits
80 % des incidences des produits sur l?environnement sont
déterminées lors de la phase de conception124. Cette responsabilité des
entreprises se traduit par les écocontributions qu?une partie d?entre elles
paient aux éco-organismes. Ce principe pollueur-payeur doit les inciter à
réduire les quantités de matière125 ainsi qu?à prêter attention aux conditions
d?approvisionnement en matières premières et au recyclage des biens
fabriqués. Par exemple, pour prévenir les déchets plastiques, les entreprises
ont la possibilité de supprimer les contenants à usage unique ou sans
fonction technique (comme les propriétés barrière pour les produits
alimentaires) ou les produits et objets qui perturbent les chaînes de
recyclage parce qu?ils sont trop petits ou dépourvus de filière de recyclage
opérationnelle126 .
Les entreprises sont également invitées, tant par la réglementation
européenne que par la législation française, à construire des biens
incorporant des matières premières recyclées, qui soient susceptibles d?être
réparés et réutilisés127 ou à développer l?économie dite de la fonctionnalité.
Les fabricants de produits générateurs de déchets sont tenus de soutenir les
réseaux de réemploi, de réutilisation et de réparation, notamment ceux
gérés par les structures de l?économie sociale et solidaire128.
123 Selon l?article L. 541-1-1 du code de l?environnement, qui regroupe les définitions des
termes en lien avec les déchets, la prévention désigne l?ensemble des mesures qui visent à
réduire la quantité de déchets, leur nocivité et les matières nocives entrant dans les produits.
124 Rapport du Parlement européen pour aboutir à une économie circulaire du 10-02-2021
125 Par exemple, l?écocontribution payée annuellement par les metteurs en marché est
modulée aux poids et à l?Unité de Vente Consommateur (UVC) qui intègrent les emballages.
126 C?est-à-dire les produits et objets hors filières déjà opérationnelles (p. ex. bouteilles
en plastique de PET) ou en passe de le devenir (p. ex. pot de yaourt en PS).
127 Un indice de réparabilité doit pouvoir être communiqué pour les équipements
électriques et électroniques et, à compter du 1er janvier 2024, un indice de durabilité.
Règlement (UE) 2021/341 de la Commission du 23/2/21.
128 Article L. 541-10 du code de l?environnement
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176087/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599099
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
67
L?économie de la fonctionnalité
L?économie de la fonctionnalité privilégie l?usage souvent ponctuel
(se déplacer, s?alimenter, habiter, etc.) à la possession permanente et tend à
vendre des services (location, etc.) plutôt que les produits eux-mêmes.
Conservant la propriété des matériels, le loueur a intérêt à allonger leur durée
de vie et réduire la consommation des intrants (énergie, engrais, etc.), comme
par exemple pour un contrat d?installation et d?entretien se substituant à la
vente d?une chaudière.
Dans le tableau de bord national des éco-organismes que les
juridictions financières recommandent de créer, un des six objectifs devrait
être, comme proposé supra, un indicateur de l?effort de financement de la
prévention (dépenses en faveur de la prévention/ pourcentage du chiffre
d?affaires des éco-organismes).
L?évolution de la demande des consommateurs a une influence de
plus en plus forte sur l?engagement des entreprises dans ces directions129.
L?écoconception peut aussi être encouragée par des mécanismes incitatifs
ou prescriptifs mis en place par les pouvoirs publics. Les mécanismes
incitatifs prévus dans la loi comme les éco-modulations130, pour les
produits soumis à une REP, conservent la préférence des entreprises. Ils
peuvent même aboutir, dans certains cas, au versement à l?entreprise d?une
prime supérieure à son écocontribution131.
Les instruments prescriptifs se développent quant à eux dans le
cadre de l?harmonisation des conditions du marché unique européen132. Tel
129 L?indicateur 9 du PNPD 2014-2020 mesure la sensibilité des Français à la prévention
(Indice global calculé par l?Ademe à partir d?enquêtes).
130 L?art. L. 541-10-3 du code l?environnement issu de la loi AGEC (annexe IV bis à la
directive 2008/98) rend possible le recours aux contributions financières pour
promouvoir l?incorporation de matériaux recyclés et le réemploi. Ces « éco-
modulations » sont des modifications (en %) de l?écocontribution, acquittée par les
producteurs à l?éco-organisme.
131 Arrêté du 25/12/2020 modifiant le cahier des charges de la filière emballages
ménagers et créant une prime pour intégration de 10 % de matière plastique recyclée
dans ces emballages. Ce dispositif fait l?objet d?un recours au motif qu?il revient à faire
financer la prise en charge des déchets du bénéficiaire par les autres adhérents et
constitue donc une rupture avec le principe d?internalisation des externalités négatives
générées par la mise en marché.
132 Dans sa proposition de règlement relatif aux batteries du 10 décembre 2020, la
Commission propose qu?à partir de 2030, les batteries respectent des objectifs de
collecte et des proportions minimales de contenu recyclé.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043974919
COUR DES COMPTES
68
a été le cas avec l?interdiction progressive par la directive sur le plastique
à usage unique « single use plastic » (SUP) de tous les plastiques à usage
unique entre 2016 et 2040133. La mise sur le marché de certaines catégories
de produits et de matériaux peut également être subordonnée au respect
d?un taux minimal d?incorporation de matières recyclées134 (p. ex. 25 % de
plastique recyclé en 2025 pour les bouteilles pour boisson fabriquées en
PET)135 , d?intégration des déchets produits dans une filière de recyclage
136 ou d?affichage d?un indice de réparabilité ou de durabilité137.
Si l?engagement des entreprises en faveur de la prévention demeure
insuffisant, l?État disposera de la possibilité de renforcer les mécanismes
incitatifs et prescriptifs (interdiction de certains produits ou matériaux,
incorporation obligatoire de matières recyclées, ratio minimal de dépenses
de prévention).
B - Dans les territoires : une action trop exclusivement
centrée sur la communication
Pour les EPCI qui en disposent, les programmes locaux mentionnent
peu d?actions de prévention ou sont défaillants, tant dans le champ de la
prévention couvert que dans les moyens mis en oeuvre ou dans les outils de
suivi prévus.
Dans les programmes intercommunaux et leurs comptes-rendus de
mise en oeuvre déjà présentés en première partie du rapport, le volet
prévention est presque systématiquement manquant ou lacunaire. N?y
figurent ni bilan chiffré des quantités de déchets évitées (p. ex. tonnages de
bio déchets détournés à la suite d?actions de communication ou de
composteurs subventionnés138), ni analyse des facteurs de réussite et
d?échec des actions conduites139 (p. ex. mise en rapport dans certains cas
133 Directive (UE) du 5 juin 2019 relative à la réduction de l?incidence de certains produits
en plastique sur l?environnement. Cf. détail année par année des interdictions en annexe 2.
134 II. de l?article L. 541-9 du code de l?environnement
135 Article 6 de la directive 2019/904 et annexe II de la directive emballages.
136 III. et IV. de l?article L. 541-9 du code de l?environnement.
137 Art. L. 541-9-2.-I du code de l?environnement
138 Le prix d?un composteur subventionné à Valenciennes varie de 13 à 22 ¤ selon leur
matière (bois ou plastique) et leur volume (400 à 800 litres)
139 Des indicateurs de prévention sont pourtant proposés pour les RPQS, dans le
progiciel ComptaCoût® alimentant SINOE.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074220/LEGISCTA000006176616/#LEGISCTA000023268652
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074220/LEGISCTA000006176616/#LEGISCTA000023268652
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041555848/
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
69
de la hausse des dépenses de communication sur le tri et de l?augmentation
des taux de refus de tri sur la même période).
Lorsqu?ils sont précisés, les crédits et les ressources humaines140
alloués aux actions de prévention sont, pour la plupart, inférieurs à 1 % du
coût total du service public (au maximum 2 % pour certaines collectivités).
Avec une moyenne nationale de dépenses de prévention par habitant de
1,5 ¤ en 2018 et 2019141, le nombre de personnes touchées, y compris dans
les territoires pilotes, est faible.
Dans les programmes locaux de prévention des déchets ménagers et
assimilés (PLDMA), la prévention se limite le plus souvent à des actions
générales insuffisamment adaptées aux différents publics de
communication pour former des « écocitoyens » : sensibilisation du public
au tri142, au jardinage durable et à la gestion des déchets verts, au recyclage
et aux nuisances des dépôts sauvages.
Ce type d?actions est utile dans l?accompagnement des particuliers
pour modifier leurs comportements notamment en phase d?extension des
consignes de tri ou de mise en place de la tarification incitative.
Cependant, comme le montre le schéma ci-dessous et comme on
le constate dans les collectivités territoriales pionnières en France et à
l?étranger, les actions de prévention pouvant être mises en oeuvre par
les intercommunalités couvrent un champ plus large que la seule
communication143.
140 Par exemple 3,8 ETP en moyenne au SMICTOM Alsace centrale (CRC Grand Est,
novembre 2021).
141 Ademe, synthèse du guide « Élaborer et conduire avec succès un PLPDMA » (2018)
La moyenne en 2016 était de 0,8. Exemples (2019) : 0,19 ¤ par habitant pour le syndicat
du département de la Haute-Marne. 1,14 ¤ pour la métropole de Lyon, 0,9 ¤ pour la
métropole de Nice (objectif de 2,48 ¤ pour la période 2022-2026).
142 Distribution de mémo-tri et guides du compostage, porte à porte, recrutement
d?ambassadeurs de tri et de référents compostage pour faire du porte-à-porte,
manifestations grand public, lettres d?information, animations scolaires et extra-
scolaires, autocollants « stop pub », nettoyage citoyen.
143 Pour le gaspillage alimentaire dans la restauration scolaire et périscolaire, le réseau
REGAL (RÉseaux de lutte contre le Gaspillage Alimentaire), lancé par le ministère de
l?Agriculture qui vise mobiliser, à l'échelle d'un territoire, l'ensemble des acteurs de la
chaîne alimentaire (professionnels de l?alimentation, associations, acteurs
institutionnels, porteurs de projets, citoyens).
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-8
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-8
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-departemental-denergie-et-des-dechets-de-la-haute-marne-sded-52
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-departemental-denergie-et-des-dechets-de-la-haute-marne-sded-52
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-de-lyon-enquete-sur-la-prevention-et-la-gestion-des-dechets
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-nice-cote-dazur-nca-nice-alpes-maritimes
https://agriculture.gouv.fr/avec-regal-les-regions-se-mobilisent-contre-le-gaspillage-alimentaire
COUR DES COMPTES
70
Schéma n° 4 : les actions de prévention accessibles
aux collectivités territoriales
Source : Cour des comptes
Le plan local de prévention de Besançon144
Le syndicat de traitement de l?agglomération de Besançon145 a appuyé
son action de prévention sur un plan Territoire Zéro Déchets Zéro Gaspillage146
bénéficiant d?un soutien financier significatif de l?Ademe (450 000 ¤).
144 CRC Bourgogne-Franche-Comté, Syndicat de traitement de l?agglomération de
Besançon (Sybert), janvier 2021.
145 Le Sybert couvre un territoire d?environ 1250 km2 et traite les déchets de 163
communes regroupant 225 000 habitants. C?est un territoire au profil mixte, composé
d?une zone urbaine très dense, la ville de Besançon (qui regroupe 52 % de la population
desservie) et de zones rurales.
146 Le programme « Territoire Zéro Déchet Zéro Gaspillage » (TZDZG) de l?Ademe a
pour l?objet est l?accompagnement des collectivités dans une dynamique d'économie
circulaire. Les 153 EPCI retenus bénéficient de soutien financier et d?un
accompagnement méthodologique de l?agence pour l?élaboration d?un plan d?actions
aux fins d?amélioration du recyclage et de la valorisation des déchets.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-besancon-et-de-sa-region-pour-le-traitement-des-dechets-sybert-0
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
71
La deuxième version de ce plan (2015-2020), qui a été conçue comme
un accompagnement de la mise en oeuvre de la redevance incitative, affichait
parmi les indicateurs clés une cible moyenne de 100 kg d?OMR par an et par
habitant en 2022. Le plan, quantifiait notamment les objectifs de baisse de
volume des OMR, des DMA et des déchets dangereux déposés en déchèteries
et de ceux détournés de l?élimination vers le réemploi via les ressourceries.
Pour atteindre ces objectifs, le Sybert avait retenu d?abord un axe de
travail relatif à la promotion et l?accompagnement des différents modes de
compostage (collectif en pieds d?immeuble, chalet de compostage, composteur
électromécanique en collectif dense, lombricompostage, vente de composteurs
individuels). Il prévoyait également des actions de sensibilisation du public
telles que le prêt de vaisselle réutilisable, la promotion d?un « Gourmet Bag »
auprès des restaurateurs pour prévenir le gaspillage alimentaire et la mise en
place d?une stratégie de communication. En outre, des dispositifs d?évitement
des déchets étaient développés comme le prêt d?un kit de couches lavables et
l?accompagnement des structures volontaires, la promotion du réemploi et de la
réparation à travers l?installation de locaux dédiés aux ressourceries dans
chacune des déchèteries du territoire.
Ces actions ont contribué, à côté du déploiement de la tarification
incitative, de l?extension des consignes de tri et de mesures telles que la
baisse des fréquences de collecte, à la réduction des volumes d?ordures
ménagères résiduelles. Fin 2020, le volume d?OMR collecté par le Sybert
s?élevait à 136 kg par an et par habitant, soit une très bonne performance
par rapport à la moyenne nationale (les meilleurs ratios, soit 95 kg par
habitant et par an, sont relevés dans des territoires à forte dominante rurale).
À l?interface entre la prévention et le recyclage, les actions dites en
« R » (réparation, réemploi147, ressourcerie148 et réutilisation) offrent des
perspectives prometteuses. La loi prévoit qu?en 2030, 5 % du tonnage de
déchets ménagers, notamment des textiles et des équipements électriques
et électroniques et d'ameublement, soient concernés149.
147 Le réemploi consiste à collecter en déchetteries des matières et objets (meubles,
vaisselles, jouets textiles?) les reconditionner et réparer et les revendre (produits de
seconde main).
148 Une ressourcerie est une structure qui gère la récupération, la valorisation et la
revente de biens sur un territoire donné. 154 étaient en activité en 2020 dont une
vingtaine à Paris. Le taux de remise sur le marché est de 41 % des objets collectés.
(Observatoire annuel des ressourceries).
149 Art. L. 541-1 I. 3° du code de l?environnement
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https://ressourceries.info/?FfF
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
COUR DES COMPTES
72
Les collectivités territoriales doivent depuis 2020, dans toutes leurs
déchèteries, qui jouent déjà un rôle central de vecteur des messages de
prévention, disposer d?une zone de dépôt destinée aux produits
réemployables150. Elles ont l?obligation de permettre par contrat aux
acteurs de l'économie sociale et solidaire d?y récupérer et traiter les objets
en bon état et réparables. Elles peuvent aussi subventionner ces
associations lorsqu?elles collectent les articles chez les particuliers. En cas
de carence des initiatives privées, elles peuvent structurer les filières de
réemploi par la création de sociétés d?économie mixte151 qui peuvent
contractualiser avec les éco-organismes et développer une activité
commerciale.152 Les déchèteries peuvent devenir ainsi des éco-pôles
mettant en relation les ameneurs et les preneurs pour offrir une deuxième
vie aux objets, à l?image de ce qui se fait en Autriche, en Flandre belge,
mais aussi en France, par exemple en Gironde 153.
Des exemples étrangers de réseaux de réemploi
À titre d?exemples, la Belgique (Flandre) et l?Autriche, considérées
comme pionnières dans ce domaine, ont mis en place, des réseaux denses
de réemploi/ seconde main. En Flandre, ils sont présents dans chaque
municipalité (ou centre commun à plusieurs municipalités voisines), avec
des objectifs fixés en termes de biens réutilisés en kg par habitant. Les biens
sont déposés par les habitants dans ces centres ou collectés dans les
déchèteries (une benne pour les biens hors d?usage et une benne pour les
biens réparables/réutilisables) afin d?être revendus. En Autriche, le réseau
« repanet » regroupe 27 organisations employant 1 800 personnes dans 140
lieux (principalement pour le textile et les équipements électroniques).
Cet adossement des ressourceries aux déchèteries est encore trop
rare, mais il se heurte, il est vrai, à certaines contraintes (sites des
déchèteries manquant de place, trop excentrés ou mal sécurisés). La mise
en place de nouvelles REP qui collectent désormais des objets et appareils
en amont des déchèteries154répond aussi à cet objectif.
150 Article L. 2224-13 du CGCT
151 Centre Vosges TLC de tri textile de valorisation par la revente, l?export ou
l?incinération et d?insertion des personnes en difficulté au regard de l?emploi. 330
bornes d?apport volontaire. 30 salariés et 150 tonnes collectées chaque mois.
152 Article L. 2224-13 du CGCT
153 En Gironde, le SMICVAL, profitant de la modernisation de son réseau de
déchèteries, a créé un supermarché inversé, lieu de réemploi mais aussi de formation et
de sensibilisation, fonctionnant sur le principe du « donnez, prenez, recyclez ».
154 Exemples : jouets, articles de sport, de loisirs, de bricolage et de jardins, deux roues.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041598995/
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
73
Les intercommunalités et les éco-organismes doivent être incités à
augmenter la part de leurs dépenses consacrées à la prévention et à financer
des actions plus opérationnelles et ambitieuses que la communication. Les
recommandations n°3 et 4 présentées ci-dessus et visant à publier des
tableaux de bord annuel de six indicateurs-clefs parmi lesquels la prévention
(ratio dépenses de prévention/ dépenses totales), répondent aussi à cet
objectif. Pour permettre le calcul et la publication de cet indicateur, les
juridictions financières recommandent dans un premier temps de dresser
dans la réglementation la liste des actions financées par les EPCI et les REP
pouvant être considérées comme dépenses de prévention (État).
II - La collecte : peu de progrès
sur les enjeux prioritaires
Malgré leur réduction régulière (249 kg/habitant en 2019 pour
298 kg/habitant en 2009), les tonnages d?OMR (16 611 kt en 2019) restent
la part la plus importante de l?ensemble des déchets collectés.
Tableau n° 2 : les tonnages collectés en 2019
Source : ADEME, chiffres clés 2019 (parution juin 2021)
La dernière étude de caractérisation MODECOM de 2017 montre
que les OMR sont composées d?une majorité de produits valorisables dont
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COUR DES COMPTES
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40 % de flux ciblés par des filières REP existantes et 38 % potentiellement
concernés par une valorisation organique (dont un tiers de bio déchets).
L?enjeu est donc de développer les efforts de pré-collecte155 et de
collecte afin de distraire des OMR le plus possible de produits valorisables.
A - Une organisation territoriale multiforme
1 - Une gestion partagée entre régie et marchés de prestations
de service
La collecte s?exerce soit en régie (directement par les services de la
collectivité ou par des contrats de prestation de service), soit en délégation
de service public (DSP). L?enquête a révélé plusieurs exemples mixtes avec
une partie du territoire en gestion directe (régie ou marchés publics) et une
autre en DSP. Cette organisation résulte de la volonté de maintenir une forme
de concurrence entre les différents modes de gestion et aussi de conserver la
compétence technique permettant d?évoluer dans les choix de gestion.
Nice et Lyon : une volonté de maintenir un fonctionnement mixte
entre collecte en régie ou confiée à des prestataires
Pour Nice-Côte d?Azur, la compétence est exercée à la fois en régie
(51 % de la population en 2022), s?agissant notamment de la collecte de la
ville de Nice et via des marchés (49 %) attribués à des entreprises différentes
pour d?autres secteurs géographiques.
La métropole de Lyon a fait le choix d?une collecte effectuée en
partie en régie directe par ses propres services et en partie par des entreprises
prestataires. La part de ces dernières est passée de 49 à 57 % des tonnages
collectés entre 2015 et 2019.
La collectivité explique l?externalisation partielle du service collecte
et le maintien d?un système mixte par la volonté de mettre en place une
émulation entre les secteurs public et privé ainsi qu?une démarche
d?amélioration continue. Cette organisation permet, selon la métropole, un
meilleur contrôle des prestataires grâce à la connaissance technique du métier
détenue par ses services et permet de limiter les blocages en cas de grève.
155 La pré-collecte est l?ensemble des opérations (principalement de tri) qui précèdent
le ramassage des déchets par le service d?enlèvement.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-nice-cote-dazur-nca-nice-alpes-maritimes
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-de-lyon-enquete-sur-la-prevention-et-la-gestion-des-dechets
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
75
La différence de coûts entre la gestion en régie et le recours à un
prestataire est difficile à établir compte tenu de la diversité des conditions
de collecte. Toutefois, le coût à la tonne collectée en régie peut être
supérieur au coût de la collecte par un prestataire : par exemple pour le
SICTOM Pézenas-Agde156, les tonnages collectés par un prestataire sur le
secteur d?Agde représentent un tiers des tonnages totaux alors que le coût
ne représente que 22 % du total157.
Certaines collectivités constatent que lorsque la collecte est assurée
par un prestataire (dans le cadre d?un marché par exemple), il est plus
difficile de contrôler la qualité du tri.
L?enjeu pour les EPCI reste d?assurer un équilibre optimal entre
l?indispensable maîtrise des coûts et la qualité du service proposé.
2 - Un équilibre à trouver entre qualité et coût du service rendu
La diversité des types d?habitat au sein de la très grande majorité des
EPCI conduit à différentes modalités de collecte, prenant en compte la
densité de population et le type d?habitat (ville-centre, zones périurbaines,
zones plus rurales, habitat collectif/habitat individuel).
Cette hétérogénéité n?est pas un problème : l?adaptation de la
collecte (notamment sa fréquence) aux particularités d?un territoire
intercommunal est une condition de la réussite d?une politique de réduction
des déchets.
La collecte est organisée selon trois modalités adaptées aux
différentes typologies de territoire et à la nature des produits triés :
- La collecte en porte à porte (PAP) particulièrement adaptée au milieu
urbain dense ;
- La collecte en points d?apports volontaires (PAV) souvent utilisée pour
une partie au moins du tri sélectif et quasiment généralisée pour le verre ;
- La collecte en points de regroupement158, utilisée dans les secteurs à
faible densité de population.
156 cf. CRC Occitanie, Smictom Pézenas-Agde, février 2021.
157 La configuration du territoire (densité de population beaucoup plus forte sur la commune
d?Agde et activité touristique importante) peut expliquer ces différences de coûts.
158 Les points de regroupement concernent des usagers identifiés, ce qui n?est le cas des PAV.
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76
Photo n° 1 : les trois modalités du tri à la source des bio déchets
Source : Présentation de la société Les Alchimistes à destination des juridictions financières
octobre 2020
Si la collecte en porte à porte présente de nombreux avantages dont
un plus grand confort pour les usagers, elle engendre les coûts les plus
élevés tant en matériel qu?en personnel159. L?amélioration de la qualité du
tri conduit à des arbitrages sur les fréquences de collecte. Ainsi, l?ajout
d?une tournée spécifique (par exemple pour les bio déchets) ne peut se faire
à coût égal qu?en supprimant une tournée de collecte des OMR.
3 - Professionnels : une orientation prioritaire vers les déchèteries
Un accès facilité aux déchèteries (notamment pour les
professionnels) permet de développer le tri et de limiter les dépôts
sauvages, sources de nuisances et de coûts importants. C?est pourquoi le
volume des dépôts en déchèteries, hors secteur urbain dense, est en forte
augmentation et les modalités d?accès à ces équipements, la qualité du tri
réalisé et le développement de filières de traitement deviennent des enjeux
déterminants pour le service public des déchets.
L?étude MODECOM 2017 montre que, dans les déchèteries, la
benne tout-venant peut contenir encore potentiellement 28 % de déchets
relevant d?une filière REP et 40 % de déchets (plastiques, métaux, bois non
transformé, etc.) qui pourraient faire l?objet d?une valorisation matière. La
159 Le coût moyen par habitant de la collecte en porte à porte est supérieur de 20 % au coût
moyen en point d?apport volontaire (référentiel national des coûts 2016 de l?Ademe.
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
77
recommandation précitée de retenir la quantité d?OMR collectée, y
compris les bio déchets, les emballages et les déchets des professionnels,
comme indicateur-clef pour mesurer la performance du service public,
permettra aussi de suivre les avancées dans ces domaines.
B - Promouvoir la collecte et le tri des bio déchets
et des emballages en plastique
1 - Les fortes potentialités de la collecte des bio déchets
malgré sa complexité
a) La complexité propre à la collecte des bio déchets
La séparation des biodéchets du flux des déchets résiduels et leur
exploitation par le compostage, l?épandage ou la méthanisation a un impact
déterminant sur le poids des OMR. Elle constitue, depuis la loi sur la
transition énergétique et pour une croissance verte (LTECV), un des
objectifs prioritaires des politiques de gestion des déchets.
Le tiers des OMR encore composé de bio déchets (75 kg par habitant
et par an) est une source de gaspillage de ressources importante160. Ces
matières fermentescibles contiennent des matières organiques précieuses
dont le traitement non spécifique (par exemple leur incinération) se révèle
inutilement coûteux161.
La LTECV fixe l?objectif de la généralisation du tri à la source des
bio déchets au 31 décembre 2023162. Toutefois, elle ne comporte pas
l?obligation d?organiser la collecte distincte des biodéchets. L?article 70 de
cette loi précise que : « Chaque citoyen disposera d?une solution lui
permettant de ne pas jeter ses biodéchets dans les ordures ménagères
résiduelles. » Les solutions possibles sont donc les collectes séparées et/ou
la gestion de proximité à l?aide de composteurs individuels ou partagés en
pied d?immeuble, à l?échelle d?un quartier ou d?un village. Des
160 Le retour au sol des bio déchets est particulièrement utile car la majorité des sols
agricoles du territoire français sont appauvris en matières organiques.
161 Les bio déchets sont composés majoritairement d?eau rendant leur incinération
(lorsqu?ils sont traités en OMR) encore plus regrettable.
162 La date initialement fixée au 1er janvier 2025 a été avancée au 31 décembre 2023 par
la loi AGEC.
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78
expérimentations technologiques pour réduire les coûts sont actuellement
en cours mais ne peuvent pas encore être évaluées.
Toutefois, le tri des biodéchets peut se révéler délicat compte tenu
des difficultés techniques, financières et sociales pour mobiliser ces flux.
La collecte séparée des biodéchets devrait, selon l?Ademe, induire à elle
seule un coût supplémentaire de 15 à 25 ¤ par habitant.
Les modalités de tri à la source devront être adaptées à chaque
spécificité locale et il n?apparaît pas opportun de recommander, à ce stade,
une modalité plutôt qu?une autre. La diversité des solutions envisageables
et surtout la possibilité de les combiner sur un même territoire pour les
adapter aux typologies d?habitat, conduisent à ne pas imposer de mesures
généralisées trop radicales (comme la collecte sélective des biodéchets) qui
pourraient se révéler contre-productives et coûteuses.
Les EPCI présentant les politiques les plus efficaces de tri des bio
déchets sont le plus souvent engagés sur de longues périodes avec une
planification et une programmation d?actions précises associées à des
évaluations fréquentes, à l?exemple du syndicat intercommunal pour la
valorisation et le traitement des déchets ménagers du Puy-de-Dôme
(Valtom).
Une politique volontariste de collecte des bio déchets
Le syndicat intercommunal pour la valorisation et le traitement des
déchets ménagers du Puy-de-Dôme (Valtom163) assure le traitement des
DMA pour neuf EPCI du Puy de Dôme et de la Haute Loire.
Le Valtom a mis en oeuvre un schéma territorial de gestion des
déchets organiques (STGDO), adopté en 2017, pour le compte de ses
membres avec des objectifs à l?horizon 2025 en référence à 2017 : réduire
de moitié la quantité des bio déchets présents dans les OMR, tripler le
volume de bio déchets alimentaires traités et diminuer de 12 % les tonnages
de déchets verts à traiter en déchèterie.
Le schéma prévoit d?utiliser plusieurs leviers comprenant la création
d?un réseau de maitres-composteurs (9 emplois), la diffusion d?un grand
nombre de composteurs : 50 000 individuels, 225 en pied d?immeuble, près
de 1 000 en quartier et 450 en établissement.
163 Cf. rapport CRC Auvergne-Rhône-Alpes, syndicat Valtom, juin 2022.
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https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/valorisation-biodechets-agir
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-pour-la-valorisation-et-le-traitement-des-dechets-menagers-et-assimiles-du
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
79
Selon les premières estimations présentées dans les rapports
d?activité du Valtom (rapport 2020), le développement du compostage
aurait permis de détourner 4 812 tonnes de bio déchets soit environ 10 % du
gisement annuel. La plus grande part de ce détournement tiendrait au
compostage individuel (3 859 t), puis au compostage en établissement
(484 t), en pied d?immeuble (275 t) et enfin en quartier (194 t).
La difficulté pour mesurer les quantités de bio déchets, distraites des
OMR ne permet pas de suivi précis de l?évolution du tri. C?est pourquoi,
comme indiqué précédemment, la quantité d?OMR collectée doit faire
partie des indicateurs-clefs pour mesurer la performance du service public
car il intègre la réduction de la part des biodéchets, principale composante
des OMR.
b) La solution du compostage de proximité
Carte n° 1 : Gestion de proximité des bio déchets
Source : ADEME
Le compostage de proximité apparaît comme un axe de progrès, y
compris en milieu urbain dense, puisqu?il permet l?accès à un équipement
pour l?ensemble des usagers, professionnels et particuliers.
Traditionnellement centré sur le compostage autonome domestique
(à l?aide d?un composteur individuel), le compostage de proximité peut
prendre d?autres formes. Le mode partagé consiste pour un établissement
à ouvrir son équipement à d?autres usagers. Le mode collectif regroupe
différents foyers avec une organisation propre sur un lieu choisi en
commun. Des expériences de compostage partagé existent aussi dans le
cadre des résidences collectives, parfois de tailles importantes, et
contribuent, outre leur intérêt intrinsèque, au renforcement du lien social.
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80
Une expérience de distribution de composteurs individuels
rapidement amortie : la CC de l?Ile d?Oléron (CCIO) 164
Depuis 2019, la CCIO a précisé et étendu sa politique en matière de
bio déchets, en décidant que le tri à la source des bio déchets serait déployé
par la distribution de composteurs gratuits (15 000 individuels
renouvelables tous les huit ans pour les usagers pouvant composter et 50 à
60 partagés pour les particuliers ne disposant pas d?assez d?espace, avec une
gestion et un suivi par les services techniques des communes ou de l?EPCI),
et par une collecte séparée des bio déchets pour les gros producteurs ne
pouvant pas composter.
Le développement du compostage individuel a permis d?éviter la
production de 700 tonnes de bio déchets en 2019 avec une économie
annuelle de coût de transfert et de traitement estimée par la CCIO à
120 000 ¤ correspondant au coût d?investissement en composteurs.
Le coût de ce schéma de développement du tri est estimé (sur les six
ans) à 10,5 M¤ mais la réduction du coût de traitement est évaluée à 14 M¤.
Une première évaluation produite en février 2021 indique un détournement
de plus de 10 % de biodéchets représentant près de 5 000 tonnes du gisement.
c) Le défi du tri des biodéchets dans l?habitat urbain dense
Le tri et la collecte des biodéchets posent des problèmes spécifiques
dans les territoires fortement urbanisés alors même que les tonnages
produits sont très importants. Les capacités de stockage limitées dans
l?habitat vertical et les désagréments (odeurs et risque sanitaire) liés à la
conservation des biodéchets comptent parmi les principaux obstacles au
développement du tri sélectif des bio déchets.
164 Cf .CRC Nouvelle-Aquitaine, décembre 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-de-communes-de-lile-doleron-saint-pierre-doleron-charente-maritime
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
81
La Ville de Paris : des objectifs ambitieux
qui peinent à se concrétiser165
La Ville de Paris, compétente pour la collecte et le traitement des
ordures ménagères, s?est fixé des objectifs parfois plus ambitieux que les
dispositions législatives en matière de biodéchets. Elle projetait notamment
de généraliser leur tri à l?horizon 2020. Toutefois, en 2021, la collecte
séparée des déchets organiques n?est réalisée que dans trois
arrondissements166 et seulement auprès des ménages et des établissements
de l?administration parisienne, à l?exclusion des professionnels et
notamment des restaurateurs. En 2018, selon le baromètre
comportemental167 de la Ville, 74 % des parisiens interrogés déclaraient
jeter les restes alimentaires à la poubelle montrant les importantes marges
de progrès restant à réaliser.
Le tonnage de biodéchets collectés augmente dans les trois
arrondissements mais reste encore minime par rapport au gisement. Les
bacs d?OMR y sont encore composés à hauteur de 21 % de déchets
alimentaires168. Les 3 000 tonnes, tous usagers confondus, collectées à Paris
restent très éloignées de l?objectif à atteindre d?ici la fin de 2023.
La difficulté spécifique, souvent relevée, pour la collecte en milieu
urbain dense n?est cependant pas absolue, aussi bien en France que dans
d?autres pays comme le montrent les expériences probantes relevées par
les juridictions financières.
Ainsi, la métropole de Rennes (avec 500 aires de compostage
partagé desservant 28 000 logements) obtient un tonnage d?OMR par
habitant (185?kg par habitant en 2019) peu élevé pour une collectivité de
cette taille169. D?autres collectivités ont entrepris des démarches similaires
comme l?agglomération de Lorient depuis 2002 ou plus récemment
Grenoble. Plusieurs métropoles françaises (Paris, Strasbourg, Aix-
165 Cf. CRC Ile-de-France, mars 2022.
166 Depuis mai 2017, dans les 2ème et 12ème arrondissements étendue au 19ème
arrondissement en 2019.
167 La mairie de Paris réalise tous les deux ans un sondage comportemental auprès d?un
échantillon représentatif de 3 500 Parisiens.
168 Campagne de caractérisation des déchets de 2017. Rapportés aux OMR (752 000
tonnes en 2019), les bio déchets représentent donc 157 000 tonnes.
169 450 000 habitants
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/ville-de-paris-prevention-et-gestion-des-dechets
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82
Marseille, Nantes et Lyon) sont également engagées dans des
expérimentations170 de collectes sélectives des biodéchets. Même si elles
ne concernent qu?une partie des territoires métropolitains, les premiers
résultats de ces expérimentations171 indiquent une collecte entre 15 et 20 %
du gisement estimé de biodéchets et la nécessité, pour obtenir des résultats
probants d?utiliser l?ensemble des leviers possibles (collecte en PAP, en
PAV, compostage de proximité individuel ou collectif).
Des exemples étrangers confirment ces potentialités (cf. annexe n° 7
sur les comparaisons internationales), notamment en Allemagne où la
collecte spécifique des biodéchets est assurée, pour 70 % de la population,
mais aussi aux Pays-Bas et en Flandre.
Un exemple européen de collecte des biodéchets en milieu
fortement urbanisé : la ville de Milan172
Milan compte une population urbaine d?environ 1,7 millions
d?habitants (7 520 hab./km2). Milan est trois fois plus densément peuplée
que Rome et plus de 80 % de ses habitants vivent en appartement. La ville
a développé des plans ambitieux de gestion des déchets depuis les années
1990 : 55 000 points de collecte, collecte des déchets alimentaires des
habitants et des commerces en sacs compostables, recyclage organique. Elle
est passée de 35 % de collective sélective en 2011, à 50 % dès 2014 et à
61,8 % en 2022, soit plus de 800 000 tonnes collectées dont 85 % de bio
déchets. Milan est la plus grande métropole européenne à avoir mis en place
un système de collecte des déchets alimentaires à l'échelle de la ville173,
impliquant presque 100 % des habitants dès 2014.
Le compostage partagé dans les centres urbains peut être une solution
d?accompagnement, à condition que la gestion des chalets/station de
compostage soit professionnalisée : c?est la solution mise en oeuvre par le
Sybert174, syndicat en charge du traitement des déchets de Grand Besançon,
qui à côté de la collecte en PAV des biodéchets réalisée par la communauté
urbaine, assure la gestion en régie de chalets de compostage urbains.
170 Article « déchetsinfos » du 20/10/2021.
171 Installation d?abribacs en métal contenant un bac roulant dans lequel les habitants
que la collectivité a équipés de bio-seaux et sacs en plastique biodégradable ou en papier
viennent apporter de manière volontaire leurs bio déchets (hors déchets verts).
172 « Guide économie circulaire » France Urbaine et Science po, août 2021.
173 Tous les nouveaux immeubles disposent d?un espace dédié à la collecte des déchets,
géré par un résident désigné. Les citoyens y amènent leurs déchets alimentaires dans
des sacs compostables collectés deux fois par semaine en porte à porte.
174 Cf. CRC Bourgogne-Franche-Comté, janvier 2021.
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https://www.amsa.it/fr/cittadini
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-besancon-et-de-sa-region-pour-le-traitement-des-dechets-sybert-0
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
83
2 - La collecte séparée et la prise en charge des emballages
en plastique : une responsabilité à mieux partager
Le rattrapage du retard pris par la France dans le recyclage des
emballages est largement conditionné par la qualité de la collecte séparée des
emballages en plastique qui reste très inférieure aux moyennes européennes.
a) Des intercommunalités confrontées à l?extension des consignes de tri
L?extension des consignes de tri (ECT)
L?ECT consiste à demander à l?usager de jeter la totalité des
emballages plastiques (pots, barquettes, films, tubes?), dans le bac jaune
et les collecteurs de tri et non plus seulement certains d?entre eux (bouteilles
et flacons). Cette évolution facilite le geste de tri des citoyens, améliore leur
respect des consignes et augmente les quantités d?emballages collectés
(+10 % soit + 4 kg par habitant et par an). La loi prévoit cette extension à
tous les habitants d?ici fin 2022175. Malgré les progrès constatés, 70 % de la
population couverte au 31 juin 2022176, cet objectif parait difficilement
atteignable.
Pour mettre en place l?ECT, les collectivités doivent préalablement
développer des actions de communication et entreprendre de lourds
investissements d?adaptation des centres de tri à ces nouveaux flux qui
obligent les EPCI à se regrouper pour y faire face. L?ampleur de ces
investissements entraine des délais au-delà de 2022, à l?exemple du centre
de tri de la communauté d?agglomération de Valenciennes et de son
syndicat (Siaved)177.
b) Des éco-organismes à mieux responsabiliser
L?un des objectifs principaux des filières REP est, via une collecte
sélective de qualité, de détourner des OMR le plus de déchets possibles.
Or, seule la moitié du gisement de déchets issus des filières REP était en
2018 recyclée, le reste relevant donc toujours des ordures résiduelles.
175 5° de L. 541-1 du code de l?environnement issu de la loi LTECV de 2015
176 Source : Citéo
177 CRC Hauts-de France, CA Valenciennes Métropole, juin 2021
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-valenciennes-metropole-tome-2-prevention-et-gestion-des
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84
Comme la Cour l?a déjà souligné178, les résultats insuffisants sont constatés
dans plusieurs filières, mais concernent au premier chef les emballages
plastiques. Pour l?ensemble des emballages (dont un quart d?emballages
plastiques) le taux de recyclage est de 68 % en 2020 et 72 % en 2021 au
lieu des 75 % visés dans le cadre du cahier des charges fixé par l?État. Or
la consommation de plastiques en France est de 70 kg par an et par habitant,
dont près de la moitié pour les emballages179.
La loi AGEC du 10 février 2020 revoit le dispositif en supprimant cet
objectif de 75% de recyclage pour toutes les matières d?emballage au profit
d?une déclinaison des objectifs par matière180 qui permettra de mieux isoler
les retards de collecte des emballages en plastique. Par ailleurs, jusqu?à
présent, la filière ne pouvait pas faire l?objet de sanctions administratives en
cas de non-atteinte de ses objectifs. L?État n?avait le choix qu?entre un retrait
d?agrément aux lourdes conséquences et une amende de 30 000 ¤, peu
dissuasive au regard de la surface financière des éco-organismes. Le nouveau
système de sanctions est davantage incitatif181 et devrait permettre un suivi
plus rigoureux des obligations auxquelles les éco-organismes s?engagent à la
faveur du renouvellement de leurs cahiers des charges en 2022.
Le principal savoir-faire des collectivités territoriales concerne la
collecte, le transport, le tri et la préparation des déchets. Pour la reprise des
matières issues du tri, elles n?ont pas la responsabilité de la gestion des
déchets collectés relevant de la compétence exclusive des éco-organismes
de la filière, qui prennent en charge le traitement final de ces déchets 182.
178 Rapport public annuel 2020, « Les éco-organismes : une performance à confirmer,
une régulation à renforcer » ; rapport public annuel 2016, « Les éco-organismes : un
dispositif original à consolider ».
179 Stratégie 3R. Avril 2022
180 II de l?article L. 541-10 du code de l?environnement : les objectifs des REP doivent
être en cohérence avec les objectifs nationaux de l?article L. 541-1 : .
181 Jusqu?à présent, si les objectifs n?étaient pas atteints, la perspective de la pénalité
financière était bien inférieure aux économies permises par la non-atteinte des objectifs.
Désormais, la sanction sera équivalente à 1,5 fois l?économie attendue, car par
définition, non réalisée. (Article L. 541-9-6 du code de l?environnement).
182 Les filières dites opérationnelles sont majoritaires en nombre, mais pas en volume.
Elles prennent en charge directement les déchets des entreprises de leur secteur en
contractualisant avec les collectivités. Dans le cas du syndicat SMICTOM d?Alsace
centrale, trois types de contrats ont utilisés : l?un avec des éco-organismes pour les
meubles, piles, déchets d?équipements électriques et électroniques ; l?un pour les huiles
végétales, les radiographies, les objets réemployables (recyclerie) et les cartouches
d?encre ; et des marchés publics de prestations pour les gravats, papiers-cartons, déchets
incinérables, bois, déchets diffus spécifiques, métaux-ferrailles, plâtre, déchets verts,
huiles minérales.
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https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-02/20200225-11-TomeI-eco-organismes.pdf
https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-02/20200225-11-TomeI-eco-organismes.pdf
https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/05-eco-organismes-RPA2016-Tome-1.pdf
https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/05-eco-organismes-RPA2016-Tome-1.pdf
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599099/2021-01-01
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041583353/
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-intercommunal-de-collecte-et-de-traitement-des-ordures-menageres-8
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
85
Les emballages constituent à cet égard une exception. Les EPCI (ou
leur syndicat de traitement) restent aujourd?hui chargés de la
commercialisation des matières préparées pour être recyclées. Elles
doivent négocier individuellement avec les repreneurs. Les éco-organismes
des emballages sont dits « financeurs », c?est-à-dire qu?ils ne prennent pas
en charge les déchets collectés mais versent aux collectivités territoriales
80 % des coûts de collecte et de traitement qu?elles supportent. Ces éco-
organismes disposent pourtant d?une réelle compétence pour la
commercialisation sur les marchés des matières recyclées puisqu?ils
accomplissent cette mission pour les emballages collectés dans les
entreprises.
Cette compétence supplémentaire de commercialisation est lourde
pour les collectivités territoriales alors qu?elles ont encore beaucoup à
accomplir dans leurs missions principales de collecte et de tri avec
l?extension des consignes de tri. Elles doivent en outre s?adapter à un
contexte marqué par de fortes variations des cours, une augmentation
continue des tonnages et une diversification croissante des filières. Elles
sont impuissantes enfin à encourager les débouchés pour les emballages en
plastique encore peu recyclables.
Afin de répondre à ces inconvénients, les collectivités territoriales
pourraient aussi être autorisées à faire le choix, alternatif, de déléguer cette
compétence de commercialisation, sur la base du volontariat, aux éco-
organismes chargés des emballages183. Cette prise en charge devrait se
réaliser à coût zéro pour les collectivités, et donc pour les contribuables,
sur le modèle du dispositif en vigueur en Belgique (système Fost+ ; cf.
annexe n° 7).
III - Le traitement : une coûteuse modernisation
à entreprendre
Le traitement des déchets collectés regroupe leur préparation (le tri
dans des centres de tri préalable au traitement), leur valorisation (recyclage,
183 Le caractère opérationnel de l?éco-organisme a été renforcée pour la filière REP
emballages ménagers par l?arrêté du 15 mars 2022. L?éco-organisme en charge des
emballages (CITEO) expérimente l?enlèvement aux collectivités, le surtri (matière déjà
triée qui doit être triée à nouveau pour un meilleur affinage) et l?envoi vers des filières
de recyclage.
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valorisation organique et énergétique) et leur élimination (stockage,
incinération sans valorisation énergétique).
La réduction des modes d?élimination de déchets sans valorisation
visée par les objectifs nationaux impose une adaptation des capacités
industrielles de traitement à des besoins en évolution continue. Elle rend
également indispensable l?amélioration des performances de recyclage, qui
restent très variables selon les matières et selon les groupements de
collectivités en charge de la compétence traitement.
C?est pourquoi la valorisation énergétique des déchets est un mode de
traitement qu?il faut assumer, tant que la prévention et les modes de valorisation
prioritaires n?auront pas abouti à une réduction drastique des OMR.
A - L?adaptation des capacités de traitement : répondre
à l?évolution des flux, limiter la hausse des coûts
Le parc des installations de traitement s?est fortement transformé au
cours de la dernière décennie en France comme dans l?ensemble de l?Union
Européenne, avec le développement des installations de valorisation
matière (tri, compostage) et la réduction progressive du nombre des
installations de stockage comme illustré dans le graphique ci-après :
Graphique n° 13 : évolution des modes de traitement
des déchets municipaux en France sur la période 2009-2018
Source : Cour des comptes d?après données Eurostat.
L?adaptation du parc va se poursuivre. La priorité donnée à la
réduction des OMR rend encore plus cruciale l?optimisation des capacités
de traitement des unités existantes pour gérer un flux de déchets amené à
évoluer quantitativement et qualitativement au cours des prochaines
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
87
années. L?importance des investissements à réaliser par les collectivités
(voir infra) impose une planification à l?échelle régionale, en recherchant
la meilleure coordination entre EPCI voisins, afin d?en limiter l?impact sur
le coût du service.
Cette nouvelle planification régionale et cette coordination
renforcée entre EPCI pourraient favoriser un rééquilibrage des relations
contractuelles avec les grands délégataires pour la construction et la gestion
des équipements lourds, sujet qui a vocation être traitée ultérieurement par
les juridictions financières.
1 - Un coût du traitement des déchets en augmentation continue
Comme indiqué dans le chapitre 1, la dépense nationale consacrée à
la gestion des déchets184 augmente de manière continue depuis 20 ans
(hausse annuelle de 4,3 %, supérieure à la croissance du PIB) et en 2016,
la prise en charge des déchets par le SPGD a coûté en moyenne 117 ¤ (HT)
par habitant et par an.
La collecte et le traitement avec respectivement 49 ¤ et 47 ¤ par
habitant et par an, concentrent les enjeux d?optimisation de la logistique et
de l?exploitation des équipements, mais c?est le traitement des déchets qui,
avec 40 % des dépenses du SPGD, constitue la partie du service dont le
coût connaît la progression la plus dynamique, le coût de la collecte tendant
à se stabiliser.
Cette tendance haussière va s?inscrire dans la durée du fait des
dépenses induites par les investissements nécessaires à la modernisation et
à la mise aux normes d?un outil industriel français de traitement
vieillissant185. Celui-ci doit mieux répondre aux objectifs nationaux, qu?il
s?agisse d?améliorer la performance des unités de valorisation énergétique
ou d?accompagner l?extension des consignes de tri (ETC) et le traitement
des bio déchets.
Par ailleurs, la recherche d?une taille critique est indispensable pour
assurer une gestion plus efficiente du traitement. En matière de tri par exemple,
elle pousse à la création de centres de tri de grande capacité (comme pour le
184 Gestion des déchets pris en charge par le SPGD, la gestion des déchets des
entreprises ainsi que le nettoyage des rues.
185 Le parc des usines d?incinération a un âge moyen de 28 ans (Chiffres Ademe,
enquête Itom 2018).
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88
syndicat mixte de transport et de traitement des déchets ménagers de Lorraine
nord)186 et à la recherche de débouchés pour les matières recyclables à une
échelle départementale, voire supra-départementale, en raison des
investissements requis et de la technicité des missions.
Dans un rapport publié en 2020187, la Commission européenne a
estimé que, si la France ne semblait pas présenter un risque de manquer
l?objectif européen de 50 % des déchets municipaux recyclés en 2020, ceux
fixés pour 2035 (65 %) nécessiteraient des investissements estimés à
3,3 Md¤ pour la période 2021-2027, dont environ 1,5 Md¤ à la charge des
collectivités territoriales, soit le niveau le plus élevé de l?Union européenne
en valeur absolue. En dépit des subventions de l?État, ces investissements
devront être financés au premier chef par la fiscalité locale et
indirectement, dans le partage de l?effort, par les filières de responsabilité
élargie des producteurs.
L?ampleur et la variété des investissements que les syndicats en
charge du traitement des déchets doivent réaliser pour assurer la
modernisation de leurs équipements et disposer d?infrastructures de
traitement répondant aux enjeux et aux normes du SPGDP, parfois dans
des délais courts (Syndicat de traitement et de valorisation de la région de
Toulouse, Syndicat de traitement des déchets des microrégions Sud et
Ouest de la Réunion - Ileva) conduisent à s?interroger sur la capacité
financière et technique des acteurs locaux à porter ces projets (Syndicat
mixte de transport et de traitement des déchets ménagers de Lorraine nord).
Ces investissements exercent une pression sur le coût du service.
Quelques exemples donnent la mesure des efforts que doivent réaliser les
collectivités locales pour absorber la hausse significative du coût de
traitement. Ainsi la rénovation de l?unité de valorisation énergétique du
syndicat de traitement de la région de Besançon188 pour 58M¤ a entraîné une
augmentation de 22 % du coût de traitement des OMR. Le syndicat de
traitement de l?agglomération d?Annecy189 prévoit pour sa part que la
rénovation de son unité de valorisation énergétique pour 83 M¤ se traduira
par une augmentation de l?ordre de 10 % des tarifs facturés à ses membres.
Le syndicat de traitement départemental du Tarn TRIFYL, qui a prévu
186 Citéo n?accompagne financièrement que la création, modernisation des centres de tri
d?une capacité supérieure à 50 000 tonnes/an.
187 Rapport 2020 pour la France : évaluation des progrès des réformes structurelles et
résultats des bilans approfondis au titre du règlement UE n° 1176/2011
188 Rapport CRC Bourgogne-Franche-Comté, Sybert, janvier 2021
189 Rapport CRC Auvergne-Rhône-Alpes, Sila, juin 2021
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-transport-et-de-traitement-des-dechets-menagers-de-lorraine-nord
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-traitement-des-dechets-des-microregions-sud-et-ouest-de-la-reunion
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
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89
d?investir quelque 190 M¤ dans ses équipements de traitement d?ici 2030,
anticipe de même une augmentation de 8 % des tarifs facturés à ses membres.
Ces décisions d?investissement se prennent dans un certain contexte
économique (besoins actuels des usagers), environnemental (hiérarchie en
vigueur des modes de traitement) ou réglementaire, qui peut rendre les
collectivités territoriales prisonnières de solutions technologiques
coûteuses. Des changements affectant le volume ou la nature des déchets,
des recettes de l?énergie produite moins assurées (surtout l?électricité avec
la fin des prix garantis de rachat et la modulation de la TGAP en fonction
des performances énergétiques et environnementales des installations)
peuvent rendre ensuite ces installations obsolètes ou mal dimensionnées.
La remise en cause par le législateur du tri mécano-biologique (TMB)190
comme solution de prétraitement des OMR, un temps privilégié pour
limiter la valorisation énergétique et l?élimination des déchets, illustre ce
risque. Plusieurs syndicats mixtes ayant investi dans ce procédé se trouvent
contraints de réviser leur stratégie industrielle (syndicat de traitement de la
région de Villerupt, Syndicat départemental de Vendée Trivalis191).
D?autres organismes qui ont fait des choix de technologies non matures,
comme une valorisation énergétique basée sur la production de biogaz
connaissent également des difficultés (Syndicat traitement déchets du
Douaisis-Symevad).
Dans ce contexte, les choix technologiques et le dimensionnement
des installations (fours, centres de tri, méthaniseurs) nécessitent un effort
d?anticipation et d?adaptation lors de la programmation des équipements,
afin d?éviter d?investir massivement dans des solutions de traitement dont
les coûts de fonctionnement ne seraient pas soutenables. Une telle analyse
implique une capacité d?expertise des collectivités territoriales et de leurs
groupements pour, le cas échéant, remettre en question les offres
190 Le procédé de traitement mécano-biologique permet d?extraire la fraction organique et
bio dégradable des déchets ménagers par des opérations mécaniques de tri, en la séparant
des autres matériaux recyclables (métaux, plastiques et verre) ou non. Les déchets
organiques issus du TMB sont traités biologiquement pour devenir du compost ou du
biogaz ; les déchets non recyclables sont, eux, broyés et séchés pour être transformés en
produits « stabilisés » avant envoi en décharge ou en usine d?incinération. Avec la loi
LTECV du 17 aoûts 2015, qui généralise le tri à la source des biodéchets et a fortiori avec
la loi AGEC du 10 février 2020, qui interdit d'utiliser la fraction fermentescible des
déchets issus de ces installations dans la fabrication de compost à partir de 2027, le TMB
comme solution de prétraitement des OMR perd de sa pertinence.
191 Rapport CRC Pays de la Loire, mars 2021.
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90
techniques du secteur très concentré de l?industrie des déchets. L?État
intervient par l?intermédiaire de l?Ademe, mais les conseils de l?agence
sont limités aux installations de tri qu?elle finance (il en va de même pour
l?éco-organisme CITEO). Les maîtres d?ouvrage locaux (EPCI et syndicats
de traitement) en revanche, peuvent s?appuyer, au-delà des bureaux
d?études qu?ils mobilisent, sur des associations telles qu?Amorce192qui
assure une mise en commun des expertises publiques locales.
2 - La nécessité d?une meilleure coordination des investissements
Pour adapter la capacité de traitement aux besoins, surmonter les
difficultés d?amortissement induites par des investissements lourds et
éviter une concurrence néfaste entre des projets d?équipements publics
nécessitant une taille critique, une bonne coordination entre structures et
entre territoires est indispensable.
Certains acteurs privilégient délibérément un sous-dimensionnement de
leur équipement par rapport à la quantité de déchets traités, en cohérence avec
la priorité donnée à la prévention et à la diminution des quantités (Grand
Besançon193, Grenoble Alpes Métropole194, Grand Paris195). D?autres au
contraire, confrontés à un surdimensionnement du fait de la baisse des
volumes d?OMR, sont contraints de rechercher des volumes de déchets
extérieurs au territoire ou issus du secteur privé pour assurer l?équilibre
financier des installations et éviter les augmentations du coût du traitement
(Syndicat mixte Flandre Morinie196, Syndicat d'Études et de Réalisations
pour le Traitement intercommunal des Déchets de Belfort197).
Pour gérer la période de transition durant laquelle les équipements
de traitement ne sont pas correctement dimensionnés ou répartis et pour
assurer la rentabilité des investissements réalisés, des coopérations doivent
être nouées à une échelle élargie, entre organismes ayant besoin d?exutoires
à leurs déchets et ceux qui ont intérêt à les accueillir pour couvrir leurs
coûts marginaux d?exploitation. Prendre l?initiative de ces partenariats dès
l?élaboration des projets d?investissement comme l?a fait la métropole
192 Association nationale des collectivités territoriales et de leurs partenaires pour la
gestion de l?énergie, des déchets, de l?eau et de l?assainissement, en faveur de la
transition écologique et de la protection du climat.
193 Rapport CRC Bourgogne-Franche-Comté, CU de Besançon, novembre 2021
194 Rapport CRC Auvergne-Rhône-Alpes, septembre 2021
195 Rapport CRC Ile de France, Ville de Paris
196 Rapport CRC Hauts-de-France, août 2021
197 Rapport CRC Bourgogne-Franche-Comté, Sertrid, décembre 2016
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-urbaine-du-grand-besancon-doubs
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/grenoble-alpes-metropole-isere-1
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/ville-de-paris-prevention-et-gestion-des-dechets
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-flandre-morinie-smfm-dont-enquete-sur-la-prevention-et-la-gestion-des
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-detudes-et-de-realisations-pour-le-traitement-intercommunal-des-dechets
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
91
grenobloise avec ses communes limitrophes pour le renouvellement et
l?exploitation de son centre de tri et de son unité de valorisation
énergétique, évite d?y être contraint. Ainsi, le Syndicat Valor 3E198 (Maine-
et-Loire), confronté à une mauvaise évaluation et à une saturation des
capacités de ses installations suite à l?extension de la consigne de tri aux
plastiques et en attendant le projet de centre de tri interrégional, a enregistré
une détérioration de ses performances de tri.
Le niveau régional serait le plus pertinent pour organiser une
programmation et une coordination optimales des investissements. En
principe, les plans régionaux (PRPGD et Sraddet) adoptés en 2018-2019,
doivent planifier les besoins en installations de traitement sur les
12 prochaines années. En pratique, ils manquent souvent de déclinaison
temporelle et géographique détaillée des actions à mener pour atteindre les
objectifs du plan. Pour assurer cependant une mise en oeuvre effective des
objectifs arrêtés dans les plans régionaux, les projets d?investissement des
équipements structurants doivent y être indiqués avec la précision exigée
par la loi. Celle-ci prévoit que les plans doivent mentionner toutes « les
installations qu'il apparaît nécessaire de créer, d'adapter ou de fermer afin
d'atteindre les objectifs » nationaux (5° de l?article R. 541-16 du code de
l?environnement).
Or, dans leur volet prospectif, les plans ne recensent le plus souvent
que les installations de stockage et d?incinération sans valorisation
énergétique et les limites de capacité qui sont visées par les articles R.541-
17 et R.541-19 du code de l?environnement. La formulation vague des
objectifs souvent constatée dans les plans (Ile de France, Bourgogne-
Franche-Comté, Bretagne, Rhône-Alpes-Auvergne) quant à la localisation
des installations, au type de déchets et à l?évolution des quantités associées,
prive d?effectivité leur opposabilité aux décisions locales d?investissement.
La répartition cohérente des équipements structurants implique que la
région joue pleinement son rôle de planificateur (voir l?analyse des
12 plans régionaux en annexe n°3).
Compte tenu de l?évolution continue du volume, de la nature des
déchets et des technologies de traitement, une animation dynamique de leur
plan par les régions, de manière à actualiser les objectifs régionaux en
fonction de ces évolutions est une autre condition de la réussite de la
planification régionale. Pour assurer une localisation des besoins en
équipements dans les documents d'urbanisme en fonction des règles
établies dans leurs plans et parvenir à une adaptation des exutoires aux
198 Rapport CRC Pays de la Loire, septembre 2021
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92
besoins, les régions doivent associer l?ensemble des acteurs (collectivités
territoriales, filières, Dréal, Ademe) et offrir une assistance technique et un
accompagnement financier des projets d?équipement, comme le font déjà
certaines régions (Provence-Alpes-Côte d?Azur, Occitanie, Grand Est ou
Normandie) et comme d?autres ont prévu de le faire (Nouvelle-Aquitaine).
B - Le recyclage et la valorisation : des performances
et une organisation à améliorer
A la faveur de l?amélioration de la collecte et du tri sélectif, des
volumes croissants de déchets ont été détournés ces dix dernières années
de l?enfouissement et de l?incinération.
Ces résultats sont le fait des évolutions réglementaires qui, tout en
affichant des objectifs de recyclage plus ambitieux, ont contraint les
organismes en charge à mieux exploiter les gisements de matières
recyclables (extension de la consigne de tri) et en ont facilité l?exploitation
(augmentation et meilleure structuration des filières REP). Grâce à
l?ensemble de ces mesures, le taux de recyclage français est aujourd?hui de
44 %199.
Sous réserve de l?harmonisation des données européennes prévue en
2023,200 ce taux situe la France légèrement en dessous de la moyenne
européenne (47 %), comme le montre le graphique ci-dessous. Un chemin
significatif reste donc à parcourir pour rejoindre les pays les plus avancés,
comme l?Allemagne, l?Autriche, les Pays-Bas et les pays scandinaves et
atteindre les objectifs actuels de valorisation matière201 que nous nous
sommes fixés 55 % en 2020 et 65 % en 2025, soit 21 points de plus que les
dernières données disponibles).
199 Le taux de recyclage dans les données Eurostat comprend la valorisation matière
ainsi que la valorisation organique (compostage et méthanisation).
200 Décisions d?exécution (UE) de la Commission 2019/665 du 17/4/ 2019, 2019/1004 du
6/7/2019 et 2019/1885 du 6/10/2019. Les pays seront plus ou moins impactés par ces
réformes statistiques en fonction de leur mode actuel de calcul. La situation relative de la
France pourrait s?en trouver améliorée car elle pratique déjà la prise en compte préconisée
par l?UE des seuls flux sortants des centres de tri (orientés vers une filière de valorisation)
et non la méthode d?autres États dont l?Allemagne qui comptabilise aussi les flux entrants
(incluant les refus de tri et autres flux à ne pas prendre en compte comme les
mâchefers?). Pour l?Allemagne par exemple, cette nouvelle comptabilisation aboutirait
à dégrader 750 000 tonnes de déchets de la catégorie « recyclés » à la catégorie « stockés »
soit une variation de 1,8 % d?une catégorie à l?autre.
201 4° de L. 541-1 du code de l?environnement issu de LTECV.
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LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
93
Graphique n° 14 : pourcentage des déchets municipaux recyclés
dans la production totale de déchets municipaux (2018)
Source : Cour des comptes d?après Eurostat. N.B : données non disponibles pour Irlande, Grèce et Chypre.
Comme le montre le graphique ci-dessous qui retrace l?un des six
indicateurs-clefs recommandés dans ce rapport, ces objectifs paraissent
difficilement atteignables, compte tenu du rythme de progression
enregistré au cours des années précédentes.
Si des territoires à dominante rurale, où il est plus aisé de détourner
la part fermentescible des OMR, parviennent déjà à atteindre des taux de
valorisation de l?ordre de 75 %, très supérieurs aux objectifs nationaux
(Syndicat Mixte à Vocation Unique pour la Valorisation et l'Élimination
des Ordures ménagères de Haute Saône202, Communauté d?agglomération
Clisson Sèvre et Maine203), c?est loin d?être le cas des territoires urbains.
En 2019, Paris se situait à seulement 27 % tandis que le syndicat chargé du
traitement des déchets de Besançon, agglomération pourtant engagée de
longue date dans des démarches de prévention et de valorisation des
déchets, présentait un taux de valorisation matières de 60 %.
202 Rapport de la CRC Bourgogne-Franche-Comté, juillet 2020.
203 Rapport de la CRC Pays de la Loire, octobre 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-vocation-unique-pour-le-transfert-lelimination-et-la-valorisation-des-0
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-dagglomeration-clisson-sevre-et-maine-agglo-loire-atlantique
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94
Graphique n° 15 : (Indicateur-clef n°5) valorisation matière204
Source : Cour des comptes
Si la France souhaite atteindre ses objectifs en matière de recyclage
des déchets, elle doit mieux mobiliser tous les leviers à sa disposition, au
plan national et au plan local.
204 Quantité de déchets non dangereux non inertes, mesurés en masse faisant l'objet
d'une valorisation sous forme de matière, notamment organique
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1 - Une stratégie industrielle nationale à accentuer
en faveur de la filière de recyclage du plastique
a) Des résultats de valorisation très inégaux selon les matières
qui doivent orienter les actions de l?État
La performance de la valorisation d?une matière recyclable recouvre
deux aspects : l?un porte sur la quantité de matière recyclée rapportée à la
quantité mise sur le marché (taux de recyclage) ; l?autre porte sur la
quantité de matière recyclée intégrée dans un nouveau cycle de production
(taux d?incorporation205).
Les performances de recyclage et d?incorporation sont très variables
d?un matériau à l?autre en fonction de différents critères notamment de
leurs pr0opriétés physiques (l?aluminium et le verre sont recyclables à
l?infini, pas les autres matières), de la maturité de la filière de recyclage et
de régénération, du prix de la matière recyclée par rapport au cours variable
des matières premières, des coûts de production, de l?intégration ou non de
la filière et de l?existence d?une demande pour la matière recyclée.
Ainsi, l?acier et la fonte recyclés ou le verre recyclé avec
respectivement 49 % et 56 %206 des matériaux utilisés dans les productions
connaissent de très bons taux à la fois de recyclage et d?incorporation. De
même, le papier-carton, première industrie de recyclage en France malgré
ses difficultés récentes207 connaît un taux d?incorporation de 67 % pour
92 % d?emballages recyclés.
205 Dix filières matériaux sont concernées par l?incorporation (métaux ferreux, métaux
non ferreux (aluminium, cuivre, zinc, plomb), verre, papiers-cartons, plastiques,
déchets inertes du BTP, et bois https://www.ademe.fr/bilan-national-recyclage-bnr-
2008-2017-acv-flux-dechets-recycles
206 L?industrie verrière connait un taux de collecte de 78 % (contre 76 % dans l?UE)
mais avec 100 % d?utilisation de la matière recyclée (soit 58 % de substitution de
matières vierges par des MPR). La France dispose d?industries de recyclage du verre
en nombre suffisant (14 centres de traitement, 22 verreries de verre creux et 5 verreries
de verre plat). La France est le 2ème producteur européen de verre d?emballage
(bouteilles, flacons et pots) derrière l?Allemagne.
207 Avec un taux de collecte de 79 % (contre 72 % en moyenne européenne) et un taux
d?utilisation des papiers-cartons recyclés de 66,3 %, cette industrie qui conserve une
bonne capacité pour la préparation et l?utilisation des cartons (emballage, hygiène) a
été touchée par la fermeture en juin 2020 de l?usine de La Chapelle Darblay qui a fait
perdre à la France toute capacité de recycler du papier (papier écriture et presse).
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Globalement, en 2017, la France incorporait environ 17 Mt de
matières recyclées dans ses processus de fabrication (hors bois et granulats
du BTP). L?Ademe souligne à juste titre que si ces quantités peuvent
paraître faibles au regard de la consommation en matières premières de
l?économie française (787 Mt), elles sont, en revanche, primordiales dans
l?approvisionnement de certaines de ces matières premières.
En revanche pour les plastiques, comme le montre le tableau ci-
dessous, les résultats obtenus en France sont très en retrait, tant en termes
de taux de recyclage que d?incorporation.
Tableau n° 3 : taux de valorisation (recyclage et incorporation)
des emballages ménagers et non ménagers en France en 2018
En tonnes
Déchets
d'emballages
produits
Recyclage/
déchets
produits
Valorisation
énergétique/
déchets produits
Enfouissement/
déchets produits
Taux
d?incorporation
Plastique 2 356 851 27 % 43 % 30 % 6 %
Bois 2 404 392 31 % 9 % 60 %
Acier 464 213 91 % 0 % 9 % 49 %
Aluminium 65 673 63 % 8 % 29 % 50 %
Verre 2 858 804 76 % 8 % 16 % 58 %
Papier et
carton
5 062 561 92 % 4 % 3 % 67 %
Autres 5 301
Total 13 217 795 66 % 13 % 21 %
Source : Cour des comptes d?après le rapport sur la valorisation des emballages en France,
Chiffres-clés 2020 et bilan national du recyclage 2008-2017
Au regard des taux de recyclage actuels des matières plastiques, les
nombreux objectifs fixés208 sont peu réalistes si aucune action n?est
envisagée pour corriger les obstacles à leur recyclage et incorporation. Pour
la sous-catégorie des déchets plastiques que sont les emballages, le taux de
recyclage français plafonne autour de 26 % depuis une dizaine d?années
(26,9 % en 2018). Ce chiffre est éloigné des taux allant jusqu?à près de 50 %
en Allemagne et aux Pays-Bas, ainsi que de ceux des autres filières françaises
de recyclage et des objectifs fixés (50 % en 2025 et 55 % en 2030).
208 Comme, par exemple, tendre vers 100 % de plastique recyclé au 1er janvier 2025 ou
réduire de 20 % les emballages plastiques à usage unique mis sur le marché pour les
cinq prochaines années (2021-2015).
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b) Les difficultés spécifiques du recyclage des plastiques :
une industrie à accompagner
L?impact du plastique est désormais bien connu (cf. annexe n°8) sur
l?empreinte carbone209, la santé210 et la biodiversité. Les juridictions
financières ne méconnaissent pas ces risques,211 même si elles ne les ont
pas traités spécifiquement dans ce rapport.
Pour réduire les risques, il convient d?agir tant sur la collecte que sur
le traitement et tant sur les plastiques facilement recyclables
(principalement les bouteilles) que sur les autres plastiques.
De nouvelles pistes doivent être envisagées pour réduire les déchets
plastiques encore trop présents dans les OMR. Outre l?extension des
consignes de tri et les actions pour réguler les emballages en plastique212,
l?article L. 541-10-11 du code de l?environnement prévoit la possibilité de
mettre en place une consigne sur les bouteilles en plastique après 2023 si
l?analyse des performances de recyclage montre que l?objectif européen
fixant à 90 % le taux de collecte de ces bouteilles en 2029, risque de ne pas
être atteint.
Le recyclage et l?utilisation du plastique recyclé se heurtent en
premier lieu à des freins technologiques communs à tous les pays en raison
de la variété et de la complexité des usages et des résines. La rentabilité du
plastique recyclé est par ailleurs affectée par sa grande sensibilité au cours
des matières premières vierges.
En France, le manque de maturité de la filière explique aussi en
grande partie le retard du recyclage plastique. À ce jour, il n?y existe pas
encore d?industries de recyclage pour toutes les résines et celles qui
209 En 2020, la production, l?élimination et l?incinération de matières plastiques avaient
rejeté autant de gaz à effet de serre que 189 centrales à charbon (3,8% des émissions
mondiales soit plus que le secteur de l?aviation). D?ici à 2050, le plastique pourrait
représenter 15 % du budget carbone mondial (cf. Sénat, Pollution plastique : une bombe
à retardement décembre 2020 et Stratégie 3R, avril 2022).
210 L?effet de l?essaimage des microparticules plastiques et des nanoparticules, y
compris lors du traitement des déchets, sur la santé humaine ne sont pas encore
parfaitement connus. On constate qu?un être humain ingère en moyenne chaque
semaine l?équivalent en plastique du poids d?une carte de crédit (5 grammes).
211 Les 3/4 des déchets plastiques produits dans le monde restent rejetés dans les milieux
naturels et se décomposent en micro- plastiques qui entrent dans la chaîne alimentaire.
1,4 million d?oiseaux et 14 000 mammifères meurent chaque année de l?ingestion de
plastiques.
212 Art. L. 541-10-17 du code de l?environnement et décret du 29 avril 2021 « 3R ».
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https://www.senat.fr/espace_presse/actualites/202012/pollution_plastique.html
https://www.senat.fr/espace_presse/actualites/202012/pollution_plastique.html
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041555598/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599010/
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98
existent sont distinctes des industries chimiques qui produisent les résines
vierges (contrairement aux autres filières où les producteurs de matières
vierges gèrent la filière de recyclage). Un rapprochement entre filières va
cependant se développer en raison de la nécessité pour les metteurs sur le
marché d?objets plastiques de développer des solutions d?écoconception et
des décisions prises par plusieurs pays de fermer leurs frontières aux
déchets en provenance de l?Union européenne.
Pour accélérer cette mutation, des soutiens financiers importants ont
été déployés par l?État à partir de 2021, notamment à travers des aides
financées par l?Ademe au titre des plans de relance et de France 2030.
Quelque 870 M¤ de soutiens financiers ont ainsi été affichés pour le
développement du recyclage des plastiques : 200 M¤ dans le plan de
relance, 300 M¤ dans le plan France 2030 et 370 M¤, pour la stratégie 3R
« recyclabilité, recyclage et réincorporation », dans le dernier programme
d?investissement d?avenir. Les crédits réellement affectés à cette action
pourraient toutefois être inférieurs à cette somme en raison de reports d?un
plan à l?autre. La stratégie 3R, arrêtée 2021, fait du recyclage du plastique
une de ses priorités et doit favoriser la constitution d?une filière française
intégrée de collecte, tri et de recyclage des plastiques. Par ailleurs, le
nouveau cahier des charges de la filière emballage arrêté en mars 2022
prévoit des incitations tarifaires pour pousser les entreprises à un recours
croissant à des emballages qui incorporent des plastiques recyclés.
Pour donner une cohérence à toutes ces actions, le plan national
devrait intégrer un volet industriel substantiel sur la plasturgie, cohérent
avec le partenariat conclu entre l?État et la filière. L?État devra veiller à ce
que les nombreuses mesures de soutien se traduisent effectivement par une
consolidation de la filière.
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99
Graphique n° 16 : évolution du taux de recyclage des déchets
d?emballages plastiques dans l?Union européenne 2009-2018 (en %)
Source : Cour des comptes à partir des données Eurostat
En outre, la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le
gaspillage et à l?économie circulaire a introduit des règles plus coercitives à
l?encontre des plastiques non recyclés. Depuis août 2020, les déchets ayant
fait l'objet d'une collecte séparée en vue de la réutilisation ou un recyclage ne
peuvent plus être enfouis ou incinérés. Cette interdiction s?applique en
particulier aux emballages plastiques, collectés séparément depuis janvier
2022. Par ailleurs, pour les plastiques qui resteront collectés en mélange
(dans les ordures ménagères résiduelles, sous forme d?encombrants ou dans
les déchèteries), une interdiction progressive de mise en décharge s?applique
progressivement à partir du 1er janvier 2022 jusqu?au 1er janvier 2030, avec
l?entrée en vigueur du décret du 16 septembre 2021 relatif aux conditions
d'élimination des déchets non dangereux.
Au regard des résultats constatés chez nos voisins, une telle mesure
devrait permettre d?améliorer notoirement les performances du recyclage,
en France. Les pays européens ayant décidé cette interdiction il y a une
vingtaine d?années, sont en effet également les pays présentant à la fois les
meilleurs taux de recyclage et la meilleure utilisation, par l?incinération
avec valorisation énergétique, du fort pouvoir calorifique des plastiques
comme le montre le graphique n°13 ci-dessus.
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100
2 - Des capacités de tri et de recyclage à consolider
Pour donner leur plein effet aux mesures d?élargissement du tri à la
source (plastiques et bio déchets) et répondre à l?augmentation continue
des flux collectés en déchèteries, des efforts d?adaptation très importants
doivent être réalisés sur les équipements de tri.
Au cours des vingt dernières années, le nombre de centres de tri a
augmenté de 50 % (entre 2000 et 2016 213) permettant de prendre en charge
des tonnages qui ont plus que doublé (4,9 Mt de déchets envoyées en
centres de tri en 2000 contre 11,1 Mt en 2016).
La massification des flux de matières et le développement de la
valorisation économique et industrielle des déchets d?emballages impose
l?automatisation, l?augmentation des capacités et la haute qualité du tri.
Or, la France se caractérise par un coût élevé, une performance
insuffisante et une dispersion sur le territoire de centres de tri214 de taille
modeste215, qui résultent de l?organisation du SPGD au niveau des EPCI.
Pour tendre vers les objectifs de recyclage fixés par le code de
l?environnement et rendre les centres de tri plus performants dans la
séparation des matières216, des investissements sont donc nécessaires.
Le principal défi à relever est l?extension des consignes de tri (ECT)
aux plastiques. La plupart des organismes concernés ont déjà adapté leurs
équipements de tri pour répondre à ces nouveaux flux ou sont en train de
le faire, avec des soutiens financiers de Citéo et de l?Ademe. Un nombre
important d?EPCI ne dispose cependant pas en 2022 de centres de tri
capables d?accueillir l?ensemble des emballages plastiques et se voit donc
contraint de différer la mise en oeuvre des nouvelles consignes.
Pour les EPCI qui ont mis en place la mesure d?extension en lien
avec leur syndicat de traitement, les résultats obtenus sont contrastés : ils
montrent les efforts à poursuivre pour accompagner les changements,
comportementaux et de mode de gestion, induits par cette mesure. Ces
efforts sont nécessaires pour éviter l?augmentation des taux de refus de tri
213 Il s?agit du nombre total de centres de tri sur le territoire accueillant des DMA (cela
recouvre ainsi également des centres qui trient principalement des déchets issus des
activités économiques). Source : Ademe, enquête ITOM, 2018
214 Taille moyenne par centre de tri de 12 000 tonnes et zone moyenne de chalandise de
250 000 habitants pour 500 000 habitants en Espagne, un million d?habitants en
Allemagne et en Belgique. Étude prospective sur la collecte et le tri des déchets
d?emballages et de papier dans le SPGD, réalisé pour l?Ademe (mai 2014).
215 Cour des comptes, Rapport public annuel 2016, Tome I. Les éco-organismes : un
dispositif original à consolider.
216 En 2016, sur 11,1 Mt de déchets reçus dans les centres de tri recevant des DMA,
6,6 Mt de déchets triés ont été envoyés en recyclage.
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101
souvent constaté après l?instauration de l?extension. Certains organismes
ont mené l?extension avec succès et ont obtenu une réduction ou une
stabilisation des volumes d?OMR tout en assurant un meilleur recyclage
des plastiques (Syndicat mixte pour le développement durable de l?Est Var,
Grand Besançon). D?autres ont engagé la mesure mais ont mal anticipé
l?augmentation des volumes associés, conduisant à une valorisation
énergétique de flux voués initialement au recyclage (Syndicat de traitement
Valor 3E). De manière générale, les EPCI et leurs syndicats de traitement
doivent profiter des évolutions en cours pour s?interroger sur le
dimensionnement des installations de tri en lien avec leur zone de
chalandise, comme l?a fait le Syndicat de valorisation des ordures
ménagères de la Marne, en concevant un nouveau centre de tri mutualisé
avec les acteurs du territoire voisin de la Meuse.
Parallèlement, les volumes croissants de déchets collectés en
déchèteries (en moyenne de l?ordre de 40 % de la masse totale des DMA
et dépassant dans certains territoires la masse des OMR) poussent les
syndicats de traitement à se doter de nouvelles capacités de tri pour mieux
valoriser les matières collectées.
Même si le développement progressif de nouvelles filières REP
contribue à structurer les débouchés, des volumes importants de déchets
restent collectés dans des bennes « tout-venant » dans les déchèteries et
sont donc incinérés ou enfouis. L?adoption d?une organisation et de
moyens adaptés pour assurer le traitement de ces flux revêt donc une
importance croissante. Certains organismes se dotent d?unités de tri
spécifiques aux déchets occasionnels (déchèteries et encombrants) pour
répondre à cet enjeu (installation de tri-massification de l?agglomération de
Besançon, valorisation en combustibles solides de récupération par les
syndicats Sytraival - Beaujolais-Dombes et Trifyl).
3 - Le développement de la valorisation organique
Les déchets ménagers organiques collectés séparément
(principalement déchets verts, déchets alimentaires et bio déchets collectés
à la source), lorsqu?ils ne sont pas compostés par les ménages eux-mêmes,
sont principalement orientés vers des plateformes de compostage217 et plus
marginalement, vers des installations de méthanisation218.
217 657 installations traitaient 8,7 Mt de biodéchets en 2018, Ademe, enquête ITOM 2018
218 13 unités de méthanisation étaient en activité en 2018, pour seulement
240 000 tonnes de biodéchets traités, Ademe, enquête ITOM 2018
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-urbaine-du-grand-besancon-doubs
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/communaute-urbaine-du-grand-besancon-doubs
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-pour-le-traitement-et-la-valorisation-des-dechets-menagers-valor3e
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-pour-le-traitement-et-la-valorisation-des-dechets-menagers-valor3e
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-delimination-de-traitement-et-de-valorisation-des-dechets-beaujolais
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-departemental-trifyl-tarn
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102
Avec le développement du tri à la source des biodéchets (et
probablement les collectes sélectives), le besoin en exutoire va aller
croissant. Les collectivités vont donc être amenées soit à mettre en place
leurs propres installations, soit à s?appuyer sur des installations existantes,
et notamment les unités de méthanisation agricole qui sont encouragées par
les politiques publiques depuis plusieurs années.
Le nombre de plateformes de compostage va continuer de croitre
régulièrement et, s?agissant du parc d?unités de méthanisation, il se
développera du fait de l?extension aux DMA de l?accès aux installations
auparavant consacrées aux seuls déchets agricoles ou agroalimentaires. Le
nombre d?unités de traitement mécano-biologique des OMR est appelé quant
à lui à décroitre. La production de compost à partir des installations de TMB
étant proscrite à compter de 2027, les collectivités gestionnaires de ces
équipements sont contraintes de réorienter progressivement les flux de
déchets vers la méthanisation et vers la production de combustibles solides
de récupération (CSR), sans certitude de pouvoir rentabiliser les équipements
associés à ce nouveau procédé de valorisation (Syndicat Trivalis).
Graphique n° 17 : évolution du parc d?installations de traitement
Source : Ademe, Enquête ITOM 2018
TMB : Tri mécano-biologique
ISDND : Installation de stockage de déchets non dangereux
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103
C - La valorisation énergétique, un mode de traitement
à assumer pour les déchets non recyclables
En France, les déchets ménagers et assimilés non recyclés sont
principalement valorisés par la production d?énergie ou mis en décharge.
Ce dernier mode de traitement (on parle aussi de stockage ou
d?enfouissement) ne doit concerner que les DMA ne pouvant faire l?objet
d?aucune valorisation. Encore supérieur à la valorisation énergétique il y a
15 ans, l?enfouissement des déchets a vu sa part relative diminuer année
après année. Alors qu?il représentait encore en France 30 % du traitement
des déchets produits en 2009, ce taux est passé à 21 % en 2018, pour une
moyenne européenne à 23 %. Les installations de stockage, dont le nombre
a été divisé par deux entre 2000 et 2016, ont été modernisées et agrandies
avec une récupération et une valorisation des gaz qui s?en échappent.
Ce besoin de modernisation des installations de stockage est
particulièrement marquant dans un contexte insulaire. Ainsi, en Corse, le
refus de l?incinération et l?absence d?équipements de traitement se traduit
par un taux d?enfouissement de plus de 2/3 des déchets.
Un exemple de problématique insulaire : l?île de La Réunion219
L?île de La Réunion, territoire complexe (rural, urbain et touristique
à la fois, composé de cinq EPCI et de deux syndicats mixtes de traitement
des déchets) est confronté à des enjeux spécifiques. La densité contrastée de
population sur un territoire au relief accidenté, parfois peu accessible, et la
forte volumétrie des déchets verts ont un impact sur les modalités techniques
et les coûts de gestion des déchets. Avec une part de plus de 83 % (hors
déchets verts), l?enfouissement reste le principal mode de traitement alors
que les sites de stockage sont en état de saturation.
219 Cf. CRC la Réunion, SYDNE, septembre 2021, et ILEVA, avril 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-mixte-de-traitement-des-dechets-du-nord-et-de-lest-de-la-reunion-sydne
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104
L?enjeu central des syndicats de traitement de l?île réside donc dans
la mise en oeuvre rapide d?une solution alternative à l?enfouissement. Le
recyclage apparaît comme une solution peu rentable en raison des coûts de
transport des matériaux vers la métropole ou d?autres pays. La taille limitée
du territoire restreint les capacités de production et les débouchés des
matières recyclées. À l?inverse, la construction d?une unité de valorisation
énergétique (UVE) constitue une solution qui concilie les enjeux
énergétiques et de gestion des déchets. Tel est le choix réalisé par le syndicat
du sud et ouest ILEVA pour faire face à la saturation du site de Pierrefonds.
L?extension des zones de stockage demeure une alternative dont la
pérennité n?est plus assurée, ce qui conduit également le syndicat du nord
et de l?est (SYDNE) à envisager la mise oeuvre d?une UVE. Cependant le
montage de ce projet se heurte à des difficultés juridiques et économiques
qui retardent la mise en service d?une filière de valorisation énergétique des
déchets pour près de 40 % de la population de l?île.
Comme le montre le graphique ci-dessous qui illustre l?un des six
indicateurs-clefs, la France, en diminuant l?enfouissement au profit des
filières de valorisation matière (recyclage) ou organique (bio déchets) a
déjà atteint une partie des objectifs qu?elle s?était fixée, à savoir une
réduction de 30 % entre 2010 et 2020 des quantités de déchets (DNDDI)
admis en installation de stockage (loi LTECV).
Si l?amélioration constatée au cours de la dernière décennie se
poursuit dans les prochaines années au même rythme, la part des déchets
enfouis restera encore trop élevée, pour atteindre nos objectifs (- 50 % entre
2020 et 2025 ; - 10 % au plus du poids des DMA produits d?ici 2035220) et
a fortiori en comparaison des pays européens qui sont à la fois les plus
performants en termes de recyclage et qui ont aussi éliminé la mise en
décharge.
220 7 bis art. L. 541-1 du code de l?environnement.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043974936/2022-06-14
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
105
Graphique n° 18 : indicateur-clef n°6 ? Stockage (Quantités de
déchets non dangereux non inertes admis en installation de stockage)
Source : Cour des comptes
La stratégie d?élimination de la mise en décharge, avec une TGAP
fortement désincitative221 et l?interdiction de certaines catégories de
déchets, oriente la France dans la même direction que les États (Pays-Bas,
Autriche, Belgique, Allemagne) qui ont adopté ce type de mesure depuis
les années 1990.
Cette application plus ferme du principe pollueur-payeur rend
caduque la politique d?élimination et le choix prioritaire de l?enfouissement
qu?avaient fait de nombreux organismes par souci de limitation des coûts de
traitement et qu?ils vont devoir revoir rapidement (syndicat de traitement de
l?agglomération de Lorient, syndicat départemental de traitement Valor
Aisne, communauté d?agglomération du Grand Villeneuvois, syndicat
221 Le syndicat de collecte et de traitement de la Dordogne SMD3, devra régler 65 ¤ la
tonne en 2025 pour ses installations de stockage des déchets, contre 17 ¤ en 2019.
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106
départemental d?élimination des déchets de l?Aube). Pour gérer la transition,
tant que la prévention et les modes de valorisation prioritaires n?auront pas
abouti à une réduction drastique des OMR, la valorisation énergétique va
rester un mode de traitement indispensable.
La valorisation énergétique
En 2020, 35 % des déchets municipaux produits en France étaient
valorisés énergétiquement, sous forme d?électricité de chaleur ou de
carburant, ce qui place la France au-dessus de la moyenne européenne à
29 %, selon Eurostat. Proche de l?Allemagne, du Benelux, de l?Autriche, ce
taux reste toutefois inférieur à celui des pays scandinaves qui atteignent des
taux supérieurs à 50 %.
Les tonnages incinérés avec production d?énergie ont progressé entre
2000 et 2016 passant de 10 à 14,4 Mt, soit + 40 %. Cette augmentation s?est
produite dans un contexte de limitation des émissions de polluants des
usines d?incinération222 et sans augmentation équivalente du nombre
d?usines. Leur nombre est passé de 109 en 2000 à 118 en 2018. La part de
l?incinération au sein des différents modes de traitement n?ayant pas
augmenté, cette hausse ne s?est donc pas faite au détriment du recyclage.
L?analyse des besoins permet de prévoir que le nombre d?unités de
valorisation énergétique (UVE) restera globalement stable, même si des
besoins ponctuels existent. Le parc sera en revanche contraint de se
moderniser pour s?aligner sur la norme européenne de rendement
énergétique (44 % des DMA sont incinérés en France dans des
incinérateurs n?atteignant pas le seuil attendu223). L?adoption obligatoire
des meilleures techniques disponibles au niveau européen d?ici 2023224
permettra, parallèlement, de limiter encore plus drastiquement l?impact
environnemental des unités de valorisation énergétique, en poursuivant les
travaux de réduction et de suivi de leurs émissions atmosphériques. La
modulation de la TGAP pénalisant les unités d?incinération à mauvais
222 Entre 1990 et 2003, les émissions de dioxines liées au traitement des déchets ont
baissé de 90 %, conséquence de la fermeture graduelle des anciens incinérateurs ou leur
mise aux normes. Depuis 2006, les émissions de dioxines par les unités d?incinération
de déchets sont très réduites.
223 Directive 2008/98 CE, le statut d?installation de valorisation énergétique est atteint
si le rendement est supérieur à 65 %.
224 La législation continue de se renforcer : adoption d?ici fin 2023 des meilleures
pratiques européennes rendue obligatoire par la directive 2010/75/UE sur les émissions
industrielles et le « BREF sur l?incinération des déchets » adopté par la Commission
Européenne en novembre 2019
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/syndicat-departemental-delimination-des-dechets-de-laube-sdeda
LE DISPOSITIF OPÉRATIONNEL : UNE TRANSFORMATION À ACCÉLÉRER
VERS L?ÉCONOMIE CIRCULAIRE
107
rendement et présentant des niveaux d?émission de fumées médiocres va
permettre d?accélérer l?adoption de ces standards de qualité, indispensables
à une meilleure acceptation publique des équipements de traitement.
Dans cette nouvelle situation, la production de chaleur issue de
l?incinération des déchets peut fournir à un prix attractif une énergie en
substitution de sources d?énergie non renouvelable plus polluantes. La
valorisation énergétique doit pouvoir, à côté d?autres sources d?énergie
renouvelable, contribuer au développement des réseaux de chaleur qui
restent insuffisamment exploités comme la Cour l?a relevé dans son rapport
de 2021 consacré au chauffage urbain225.
L?État devrait intégrer dans le plan national un volet industriel
substantiel couvrant, outre la filière plasturgie, comme indiqué
précédemment, la filière valorisation énergétique.
En France, la hiérarchie entre prévention, recyclage, valorisation
énergétique et enfouissement n?est que partiellement respectée dans la prise
en charge des déchets ménagers et assimilés. La prévention reste un volet
insuffisamment pris en compte dans les actions mises en oeuvre. Les progrès
de la collecte se heurtent au retard pris pour s?aligner sur les meilleures
pratiques concernant les biodéchets, pour adapter les installations à
l?extension des consignes de tri du plastique et pour mieux commercialiser
les matières triées. Si la valorisation par recyclage et production d?énergie
gagne du terrain au détriment du stockage, elle reste insuffisante.
225 Cour des comptes, rapport public thématique, le chauffage urbain, septembre 2021.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-chauffage-urbain
COUR DES COMPTES
108
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Les performances de recyclage et d?incorporation des plastiques en
France sont très en retrait par rapport à d?autres pays européens. Pour
réduire l?impact du plastique sur l?empreinte carbone, sur la biodiversité
et la santé, il convient d?agir tant sur la prévention, sur le tri sélectif que
sur le traitement.
Pour surmonter les freins technologiques et de rentabilité que
rencontre la filière du plastique recyclé, des soutiens financiers ont été
déployés par l?État qui par ailleurs a interdit l?incinération des déchets
ayant fait l'objet d'une collecte séparée. Les pays européens ayant décidé
cette interdiction sont ceux qui présentent les meilleurs taux de traitement
des plastiques.
Au vu de ces constats, les juridictions financières formulent les
recommandations suivantes :
8. Fixer dans la réglementation la liste des actions financées par les
intercommunalités et les éco-organismes pouvant être considérées
comme dépenses de prévention (ministère de la transition écologique
et de la cohésion des territoires).
9. Autoriser les collectivités territoriales volontaires à confier aux éco-
organismes chargés des emballages la vente des produits issus du tri
(ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
EPCI).
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Conclusion générale
La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire du 11 février
2020 vise à substituer progressivement à une économie linéaire fondée sur
le triptyque « fabriquer, conserver, jeter », un nouveau paradigme, celui de
l?économie circulaire.
Elle repose sur toute une série de mesures qui ont vocation à entrer
progressivement en vigueur et qui, dans leur ensemble, visent à lutter contre le
gaspillage et l?obsolescence programmée, ainsi qu?à favoriser le réemploi.
Sont ainsi prévues la création de nouvelles filières REP dans des
secteurs importants (produits et matériaux de construction du bâtiment,
jouets et articles de sport dès 2022, emballages professionnels en 2025,
lutte contre le gaspillage alimentaire, réduction progressive des emballages
plastiques à usage unique, avec une étape importante prévue au 1er janvier
2025 de recyclage des emballages plastiques à usage unique).
C?est donc désormais dans ce cadre que devra s?inscrire la question
de la collecte et du traitement des déchets ménagers sur laquelle l?enquête
menée par les juridictions financières en 2021-2022 confirme qu?il existe
d?importants progrès à réaliser.
Pour accompagner la transition vers l?économie circulaire recherchée
par les réformes législatives de cette dernière décennie, notamment les plus
récentes, une meilleure prise en charge des déchets existants par un tri, une
collecte et un traitement performants doit être réalisée.
L?accélération de ce mouvement est nécessaire à la fois pour réduire
la hausse continue des dépenses du service public de gestion des déchets et
pour le faire mieux contribuer à la transition écologique.
La prévention, c?est-à-dire la réduction de la production de déchets,
en constitue un volet fondamental et doit être véritablement amplifiée. Le
meilleur déchet est en effet celui qui n?est pas produit.
Les orientations et recommandations retenues s?inscrivent dans
cette vision.
Le citoyen ne peut pas être responsabilisé sur ses déchets uniquement à
travers la hausse des prélèvements obligatoires qui concernent ce domaine. Les
entreprises, les éco-organismes, l?État et les collectivités territoriales doivent
conjointement lui offrir les moyens de modifier ses habitudes de
consommation en vue de réduire le gisement des déchets.
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Liste des abréviations
ADEME??.. Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie
AGEC???.. Loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le
gaspillage et à l?économie circulaire
CCC????.Convention citoyenne pour le climat
CCES???..Commission Consultative d'Élaboration et de Suivi
CGCT???.Code général des collectivités territoriales
CSR????.Combustible solide de récupération
C.envir???Code de l?environnement
DMA ............ Déchets ménagers et assimilés
DNDNI??.. Déchets non dangereux non inertes
ECT????.Extension des consignes de tri
EEE????.Équipements électriques et électroniques
EPCI???.. Établissement public de coopération intercommunale
ISDND??? Installation de stockage de déchets non dangereux
FREC???. Feuille de route économie circulaire
LTECV???. Loi n°2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition
énergétique pour une croissance verte
MTE???...Ministère de la transition écologique
ODD ???.Objectifs de développement durable
OMR ............ Ordures ménagères résiduelles
PAP??........Porte à porte (collecte en)
PAV ???..Point d?apport volontaire
PLPDMA ?..Programmes locaux de prévention des déchets ménagers et
assimilés
PNGD??? Plan national de gestion des déchets
PNPD??? Programme national de prévention des déchets
PRPGD ......... Plan régional de prévention et de gestion des déchets
REOM .......... Redevance d?enlèvement des ordures ménagères
REOMi??.. Redevance d?enlèvement des ordures ménagères Incitative
REP .............. Responsabilité élargie du producteur
RPQS???.Rapport sur le prix et la qualité du service
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COUR DES COMPTES
112
RS????..Redevance spéciale
RSOM .......... Recyclables secs des ordures ménagères
SPGD ........... Service public de gestion des déchets
SUP????Directive (UE) 2019/904 relative à la réduction de l?incidence de
certains produits en plastique sur l?environnement (SUP pour
single use plastic)
TEOM .......... Taxe d?enlèvement des ordures ménagères
TEOMi ......... Taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative
TGAP ........... Taxe générale sur les activités polluantes
TI .................. Tarification incitative
TMB???..Tri mécano-biologique
TZDZG??..Territoire Zéro Déchet Zéro Gaspillage
UIOM ........... Usine d'incinération d'ordures ménagères
UVE ............. Unité de valorisation énergétique
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Annexes
Annexe n° 1 : présentation de l?échantillon des contrôles réalisés par
la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des
comptes (CRTC) ..........................................................................................114
Annexe n° 2 : le suivi des recommandations des juridictions
financières sur les déchets ménagers............................................................117
Annexe n° 3 : les Plans Régionaux de Prévention et de Gestion des
Déchets (PRPGD) ........................................................................................121
Annexe n° 4 : les indicateurs internationaux ................................................127
Annexe n° 5 : les indicateurs du service public des déchets ........................129
Annexe n° 6 : les indicateurs des filières à responsabilité élargie du
producteur (REP) .........................................................................................135
Annexe n° 7 : comparaisons internationales ................................................137
Annexe n° 8 : les déchets en matière plastique ............................................147
Annexe n° 9 : comparatif entre les différentes modalités de
financement du service public ......................................................................158
Annexe n° 10 : les conséquences de la crise sanitaire sur la gestion des
déchets .........................................................................................................159
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114
Annexe n° 1 : présentation de l?échantillon des
contrôles réalisés par la Cour des comptes et les
chambres régionales et territoriales des comptes
(CRTC)
Tableau n° 4 : contrôle de la Cour des comptes
Contrôle réalisé dans le cadre de la formation commune
Prévention et gestion des déchets : aspects nationaux et internationaux
Tableau n° 5 : contrôles effectués par les chambres régionales
et territoriales des comptes
CRTC Nom de l?organisme
Contrôles réalisés dans le cadre de la formation commune
Auvergne
-Rhône-
Alpes
Communauté de communes Gorges de l?Ardèche
Communauté de communes le Grésivaudan
Syndicat intercommunal de traitement des déchets ménagers du Puy-de-Dôme
(VALTOM)
Métropole de Lyon
Syndicat mixte d'élimination, de traitement et de valorisation des déchets du Beaujolais
Dombes (SYTRAIVAL)
Communauté d'Agglomération du Grand Annecy
SMIX Savoie Déchets
Bourgogn
e-
Franche-
Comté
Communauté urbaine du Grand Besançon Métropole
Centre-
Val de
Loire
SMICTOM d?Amboise
Corse
Communauté de Communes Fium'Orbu Castellu
Communauté d'agglomération de de Bastia
Communauté de Communes du Cap Corse
Communauté de Communes du Centre Corse
Grand
Est
Syndicat Départemental d?Élimination des Déchets de l?Aube (SDEDA)
Syndicat Intercommunal d'Élimination des Déchets Ménagers du Territoire d'Orient
(SIEDMTO)
Syndicat de Valorisation des Ordures Ménagères de la Marne (SYVALOM)
Véolia Auréade Unité de valorisation énergétique et agronomique - Marne
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ANNEXES
115
Syndicat Mixte de Traitement des Om de la Région de Villerupt
Communauté de Communes de Cattenom et environs
Syndicat Mixte de Transport et Traitement des Déchets de Lorraine Nord (SYDELON)
Syndicat Mixte Intercommunal de Collecte et Traitement des Ordures Ménagères d'Als
ace Centrale
Communauté de Communes de Sélestat
Syndicat départemental d'énergie et des déchets (SDED 52)
EVODIA
Hauts-de-
France
Communauté d'Agglomération du Saint-quentinois
Valor'Aisne
Communauté de communes Flandre Lys
Communauté d'Agglomération Valenciennes Métropole
Communauté de Communes Pévèle Carembault
Syndicat Intercommunal de Valorisation des Déchets Ménagers du Hainaut
Valenciennois Ecovalor
Syndicat Mixte du Département de l'Oise (SMDO)
Syndicat mixte élimination et valorisation des déchets
CA Douaisis-Hénin-Carvin et communes Osartis (SYMEVAD)
Syndicat mixte Flandre Morinie (SMFM)
Syndicat Mixte Lys Audomarois
Ile-de-
France
Ville de Paris ? Direction de la propreté et de l?eau (DPE)
Nouvelle-
Aquitaine
Communauté de Communes de l'Ile de Ré
Communauté de Communes de l'Ile d'Oléron
Occitanie
Sictom Pézenas Agde
Decoset
Syndicat Mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés et
pôle des énergies renouvelables / Trifyl
PACA
Métropole Nice Côte d?Azur
Métropole Aix-Marseille Provence
Communauté d'Agglomération Var Esterel Méditerranée
Communauté de Communes Coeur du Var
Syndicat Mixte du Développement Durable de l'Est Var (SMIDDEV)
Pays de la
Loire
Trivalis
Communauté d'Agglomération Clisson Sèvre et Maine Agglo
Communauté d'Agglomération de la Presqu'île de Guérande Atlantique
Communauté d'Agglomération Mauges Communauté
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COUR DES COMPTES
116
VALOR3E
Communauté de Communes Loué-brûlon-noyen
Contrôles réalisés hors formation commune mais ayant servi pour le rapport
Auvergne
-Rhône-
Alpes
Communauté de communes de la plaine de l'Ain
Grenoble Alpes Métropole
Syndicat Mixte du Lac d'Annecy
Communauté de communes du Diois
Bretagne Lorient agglomération
Grand
Est
Métropole du grand Nancy
Régie Haganis
Hauts-de-
France
Communauté d?agglomération porte du Hainaut
Communauté d?agglomération du St-Quentinois
Communauté d?agglomération Maubeuge Val de Sambre
Nouvelle-
Aquitaine
Syndicat mixte départemental pour la gestion et le traitement des déchets ménagers et
assimilés (SMD3)
Communauté d'agglomération du grand Villeneuvois
Pays de la
Loire
Communauté urbaine Angers Loire métropole
Communauté de communes du bocage Mayennais
Syndicat mixte de collecte des ordures ménagères Est-Vendéen (SCOM)
La
Réunion
Mayotte
Syndicat mixte de traitement des déchets des microrégions
Sud et Ouest de la Réunion (ILEVA)
Société publique locale SUDEC
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Annexe n° 2 : le suivi des recommandations des
juridictions financières sur les déchets ménagers
Au cours de la décennie 2010-2020, la Cour des comptes, seule ou
en lien avec une ou plusieurs chambres régionales des comptes, a publié
deux rapports portant spécifiquement sur les déchets ménagers et assimilés
et des rapports consacrés aux éco-organismes.
Suites données aux rapports consacrés au déchets ménagers
Le rapport public thématique Les collectivités territoriales et la
gestion des déchets ménagers et assimilés, publié en septembre 2011,
formulait trente recommandations réparties au sein de quatre rubriques
principales. Un rapport de suivi de ce rapport public thématique a été
inséré au Rapport public annuel 2014 de la Cour des comptes, intitulé « La
gestion des déchets ménagers : des progrès inégaux au regard des enjeux
environnementaux ». Celui-ci comportait huit recommandations, certaines
reconduisant celles formulées en 2011.
Les recommandations visant à rendre plus claire et plus adaptée la
répartition des compétences entre les collectivités territoriales ont été pour
l?essentiel satisfaites ou rendues sans objet par la loi n° 2015-991 du 7 août
2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République qui a
redistribué les compétences territoriales226. Ainsi en est-il également de la
recommandation visant à promouvoir la prise en charge par une même
collectivité ou groupement (département ou syndicat mixte) du traitement
des déchets et des installations nécessaires227.
Les recommandations visant à renforcer le rôle des préfets en
matière de contrôle et de suivi des plans, d'autorisation et de contrôle des
équipements228 n?ont pas été mises en oeuvre. L?instruction du présent
rapport fait apparaître en effet que les dispositions encadrant les
PRPGD/SRADDET229 et le rôle de l?État déconcentré en matière
d?autorisation et de contrôle des ICPE ne suffisent toujours pas à planifier
et organiser les équipements à la hauteur des besoins.
226 Références des recommandations dans les rapports : rapport public thématique 2011
(pour la suite des références « RPT 2011 ») recommandation 1.1 et Rapport public
annuel 2014 (pour la suite des références « RPA 2014 ») recommandation 1.
227 RPT 2011 recommandation 1.8 satisfaite par l?article L. 2224-13 du CGCT.
228 RPT 2011 recommandation 1.12, 1.14, RPA 2014 recommandation 2.
229 Les plans, programmes et décisions des EPCI doivent être compatibles (L. 541-15
code de l'environnement).
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-collectivites-locales-et-la-gestion-des-dechets-menagers
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COUR DES COMPTES
118
La recommandation visant à décliner au niveau régional et
intercommunal certains objectifs nationaux et d?en rendre compte au
moyen d?un rapport annuel, ainsi que la mise en place d?observatoires
locaux230, est satisfaite par les dispositions de la loi NOTRe précitée et par
celles de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le
gaspillage et à l'économie circulaire (AGEC). En revanche demeurent
pertinentes les critiques émises par les juridictions financières en 2011 qui
relevaient les « limites des mécanismes de pilotage, de suivi, d?évaluation
et d?appui » et qui recommandaient une plus grande fréquence et qualité
dans la collecte et le traitement des données231.
Les évolutions dans les mécanismes de financement du SPGD
qu?appelaient plusieurs recommandations, n?ont pas été suivies d?effets
significatifs. L?adaptation des textes pour encourager la tarification
incitative a été réalisée par la réduction des frais de gestion232 mais cet
encouragement est insuffisant pour en permettre l?essor. La clarification du
cadre juridique du financement du SPGD n?a pas été réalisée : ni la
codification de la jurisprudence définissant le suréquilibre233, ni les
dispositions sur les compensations, exonérations et dérogations aux
augmentations de TEOM234 ni la remise à plat de la distinction des services
publics entre administratifs et industriels et commerciaux235. Une
recommandation a connu une suite inverse à la demande formulée : la
redevance spéciale est devenue facultative alors que la Cour demandait sa
généralisation236.
Les recommandations concernant la mise en oeuvre d?une comptabilité
analytique et d?un budget annexe consacrés au SPGD237 ont été partiellement
suivies d?effet : la réglementation prévoit désormais l?obligation de
comptabilité analytique238 mais le budget annexe demeure facultatif pour les
collectivités, majoritaires, qui financent le service par la TEOM.
Les recommandations des juridictions financières pour corriger
l?insuffisance des équipements de proximité pour l?incinération et le
230 RPT 2011 recommandation 1.10.
231 RPT 2011 recommandations 1.11, 3.1, 3.2, 3.3 et 3.5.
232 Recommandations 4.1. et 4.2. du RPT 2011 et recommandation 7 du RPA 2014
satisfaites par l?art.7 de la LFI 2019.
233 Recommandation 4.6 du RPT 2011.
234 Recommandation 4.4 et 4.5 du RPT 2011.
235 RPT 2011 recommandation 4.6 et RPA 2014 recommandation 6.
236 Recommandation 4.3. du RPT 2011et recommandation 3 du RPA 2014.
237 RPT 2011 recommandation 2.1, 2.2, et RPA 2014 recommandations 5 et 8.
238 L. 2224-17-1 CGCT.
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ANNEXES
119
stockage (carence en exutoires)239 n?ont pas été mises en oeuvre : la TGAP
n?a pas été augmentée240 pour les déchets exportés ou réceptionnés au-delà
des limites d?un périmètre car le ministère chargé de l?environnement
considère qu?une telle augmentation encouragerait la création
d?installations d?élimination alors que l?objectif général est de respecter
autant qu?il est possible la hiérarchie des modes de traitement des déchets.
Suites réservées aux dix recommandations formulées par les
rapports consacrés aux éco-organismes
Les recommandations formulées dans le rapport « Les éco-
organismes : un dispositif original à consolider, insertion au rapport public
annuel 2016 » et le rapport « Les éco-organismes : une performance à
confirmer, une régulation à renforcer », insertion de suivi de l?insertion
précitée, publiée dans le rapport public annuel 2020, ont donné lieu à des
suites satisfaisantes.
Les dispositions de la loi AGEC et de ses textes d?application
concernant les éco-organismes satisfont neuf recommandations sur dix. La
simplification des cahiers des charges des éco-organismes s?accompagne
du renforcement des exigences (fixation et contrôle des résultats,
dispositifs de sanctions)241 et la durée des agréments des éco-organismes
est adaptée entre un et six ans242. La loi renforce et précise les informations
qui devront figurer sur les produits pour renseigner les citoyens sur les
gestes de tri et l?État pourra fédérer plusieurs éco-organismes pour des
campagnes d?information243. Le conditionnement des soutiens aux
collectivités versés par l?éco-organisme chargé de la filière REP
emballages à la mise à jour des consignes de tri est prévu par le cahier des
charges de l?organisme qui est approuvé par l?État244. Le partage avec les
pouvoirs publics, les producteurs et les collectivités des données et des
informations détenues par les éco-organismes est clarifié245 et l?extension
des consignes de tri, couplé à la subordination des autorisations concernant
les centres de tri mécano biologiques à la mise en place du tri à la source
239 RPT 2011 recommandation 3.6 et 3.7 et RPA 2014 recommandation 4.
240 L. 2333-92 et s. du CGCT.
241 RPA 2020 recommandation 1, 4 et 5 satisfaites par les articles L541-10 II
(encadrement des cahiers des charges) et L. 541-9-6 (sanctions).
242 RPA 2020 recommandation 3.
243 RPA 2016 recommandation 1, RPA 2020 recommandation 2 satisfaites par l?article
L. 541-9-3 du code de l'environnement.
244 RPA 2016 recommandation 2.
245 RPA 2016 recommandation 4.
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
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https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2016
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2020
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COUR DES COMPTES
120
des biodéchets vont dans le sens d?une modernisation des centres de tri et,
nécessairement, d?une diminution de leur nombre246. La visibilité sur les
produits de l?écocontribution247 est en revanche écartée car regardée
comme source de confusion (logo pouvant être pris pour le signe d?un
produit fait en matière recyclée ou d?un produit à recycler).
Enfin, un rapport propre à l?Île-de-France a été inséré au rapport
public annuel 2017 de la Cour. Ce dernier comportait six recommandations,
dont deux à caractère général et quatre adressées aux collectivités et aux
syndicats de traitement des ordures ménagères de la région.
246 RPA 2016 recommandation 5.
247 RPA 2016 recommandation 3.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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Annexe n° 3 : les Plans Régionaux de Prévention
et de Gestion des Déchets (PRPGD)
Régi par les dispositions des articles L. 541-13 à L. 541-15-2 et R.
541-13 à R. 541-27 du code de l?environnement248, le Plan régional de
prévention et gestion des déchets (PRPGD) est un document élaboré par
le conseil régional qui a pour but de coordonner à l'échelle régionale les
actions entreprises par l'ensemble des parties prenantes.
Instrument de planification et de programmation prévu par la
réglementation européenne249, le PRPGD est appelé à disparaître à mesure
que seront arrêtés les schémas régionaux d?aménagement, de
développement durable et d?égalité des territoires (SRADDET)250.
Les PRPGD sont opposables aux décisions prises par les personnes
morales de droit public et leurs concessionnaires251 notamment pour les
installations à adapter, créer ou fermer. Le plan sert ainsi de cadre aux
services déconcentrés de l?État pour délivrer les diverses autorisations en
matière d?Installations Classées pour la Protection de l?Environnement
(ICPE).
Les juridictions financières ont analysé dans le cadre du présent
rapport les 12 plans adoptés.
248 Introduit par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation
territoriale de la République (dite loi NOTRe)
249 Articles 28 et 29 de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil
du 19 novembre 2008 relative aux déchets
250 Articles L. 4251-1 à L. 4251-10 et R. 4251-1 à R. 4251-17 du code général des
collectivités territoriales (CGCT). L?Île-de-France, les régions d'outre-mer et les
collectivités territoriales à statut particulier constituent des cas spécifiques, dans la
mesure où des plans régionaux ou territoriaux de prévention et de gestion des déchets
continuent de s?appliquer de façon autonome, à côté d?un autre document de
planification stratégique (tel que le SDRIF en Ile de France ou le PADDUC en Corse).
251 Article L. 541-15 du code de l?environnement
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COUR DES COMPTES
122
Le code l?environnement252 fixe le contenu des PRPGD et rend
obligatoires notamment les rubriques suivantes :
1/ État des lieux : (production, prévention, collecte et installations
existantes)
Réalisée grâce à plusieurs bases de données du ministère de
l?écologie et de l?ADEME et des observatoires locaux253, cette partie
descriptive est dans certains plans complète et exhaustive254 avec des
niveaux de précision géographiques variables255.
Des lacunes de données que ni l?État ni les régions n?ont comblées
par des enquêtes de terrain, nuisent à la fiabilité de l?état des lieux256 :
exutoires inconnus, informations manquantes quant à la catégorie d?ICPE,
tonnages par installations, traitement réalisé supérieur aux capacités ? Par
ailleurs, on relève des problèmes de lisibilité des données257, qui gênent la
clarté de l?information donnée aux collectivités locales infrarégionales.
Du fait des différences de couverture des territoires par la
tarification incitative, les états des lieux sur ce sujet sont d?amplitude et de
qualité variables. Dans les régions où elle est plus développée, des résultats
éclairants montrent son efficacité sur la réduction des OMR et
l?augmentation des collectes de recyclables258.
Enfin, la description des mesures visant à promouvoir le
développement de cette tarification incitative est souvent très sommaire. Ainsi,
le plan de la Normandie a été partiellement annulé par la décision n°1802969
du tribunal administratif de Caen du 20 juin 2019 car il ne présentait pas
d?actions de développement de la tarification incitative en contradiction avec
252 Art. L. 541-13 et l?article R-541-16 du code de l?environnement
253 Par exemple, la base de données GEREQ, le registre ICPE ou encore le registre IREP
et le registre ITOM
254 Par exemple, la région Auvergne-Rhône-Alpes détaille les 33 millions de tonnes (en
2015) qu?elle a produits.
255 Par exemple, le Plan de la région Grand Est présente des données départementales
là où la région Occitanie présente des données agrégées au niveau régional.
256 Voir par exemple le tableau 86 (p169) du Plan des Pays de la Loire où les capacités
réglementaires en tonnes des plateformes de compostage de la région sont manquantes
pour 18 des 39 installations, ou la figure 86 (p.115) du Plan Grand Est où 409 tonnes
de déchets produites dans l?Aube ont un exutoire « non précisé ».
257 Voir par exemple les données sur les combustibles solides de récupération (CSR)
sont difficilement interprétables dans le Plan des Pays de la Loire, p. 193 et p. 87.
258 Par exemple, le Plan de Nouvelle-Aquitaine, où la tarification incitative couvre 6 %
de la population régionale, montre que les quantités d?OMR ont diminué de 36 % et les
recyclables secs hors verre collectés ont augmenté de 26 % (voir pp 76-78).
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http://manche-nature.fr/wp-content/uploads/2019/07/jgt_PRPGD.pdf
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ANNEXES
123
les dispositions de l?article D. 541-16-2 du code de l?environnement259. À la
suite de cette décision de justice, la région Normandie a dû amender son plan
et adopter, le 22 juin 2020, deux compléments portant sur les actions prévues
pour le développement de la tarification incitative260 et sur la planification des
installations dédiées à la valorisation énergétique des combustibles de
récupération. Sur ce point, le niveau de généralité des autres plans régionaux
ne diffère pas de la première version du plan de la région Normandie.
2/ Prospective des gisements à 6 et 12 ans et objectifs de
prévention, recyclage et valorisation
Cette prospective se fonde sur la présentation de deux scenarii : l?un
évalue les quantités produites en l?absence de mesures de prévention, le
second les prend en compte261. On constate cependant des différences
quant au niveau de précision et de détails fournis et quant à la justification
des scénarios de référence.
3/ Planification de la prévention des déchets à 6 et 12 ans
La prévention se présente dans les plans sous la forme d?un
ensemble cohérent d'actions par types de déchets262. Les objectifs
manquent cependant de caractère opérationnel et de contextualisation
locale et sont trop généraux263.
259 Dans sa première version, le Plan de la région Normandie ne donnait aucune
modalité pratique d?implantation ni d?objectifs clairs quant à la couverture de cette taxe
en termes de population ou de volumes de déchets et préconisait seulement d?« Engager
une réflexion sur la mise en place de la TI à travers la réalisation d?études de faisabilité ;
Valoriser les retours d?expériences ? ; Intégrer la TI dans une réflexion d?optimisation
globale ? ; Définir les moyens humains pour le développement de la TI ; Informer et
sensibiliser les usagers ? » (p103).
260 La région Normandie se fixe désormais l?objectif d'un taux de couverture de 30% de
la population régionale par la tarification incitative, à l'horizon 2025
261 Ainsi, la région Île-de-France prévoit un scénario dit « tendanciel » (sans prévention)
où 5 607 262 tonnes de DMA seront générées en 2020, 5 971 954 en 2025 et 6 358 105
en 2031. Le scénario « avec mesures de prévention » prévoit 5 483 938 tonnes de DMA
en 2025 et n?a toutefois pas de valeur cible en 2031 (p.52, Chapitre 1)
262 Ainsi, la région Bretagne décline des objectifs pour les DMA et DAE relatifs aux
déchets végétaux (stabilisation en 2020 par rapport à 2016 et réduction de 20 % en 2030
par rapport à 2016, p32), aux biodéchets (100 % de la population doit avoir accès à une
solution de tri à la source des biodéchets d?ici 2023, accès au tri à la source pour les
professionnels d?ici 2023, p34).
263 Par exemple, la région Bretagne mentionne l?objectif de réduire le gaspillage alimentaire
par une liste d?objectifs vagues tels que « l?accompagnement de la restauration collective [?]
dans la mise en place d?actions » (p. 36, Chapitre II), le développement du « don alimentaire »
(p. 36, Chapitre II), « Accompagner les entreprises et administrations dans la réduction de la
production de leurs déchets », « Accompagner la mise en oeuvre des PLPDMA » ou encore
« Sensibiliser tous les acteurs ». Les actions sont quasiment identiques à celles que l?on trouve
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COUR DES COMPTES
124
Nombreux sont les renvois aux programmes locaux auxquels est
laissée la mise en oeuvre concrète264.
4/ Planification de la gestion des déchets à termes de 6 et 12 ans,
incluant les installations nécessaires afin d?atteindre les objectifs.
Au même titre que pour la prévention, l?ensemble des actions
portant sur la gestion des déchets, bien que cohérentes entre elles et axées
autour d?objectifs, apparaissent le plus souvent vagues et sans caractère
réellement opérationnel265.
La planification des installations qu?il apparaît nécessaire de créer,
adapter ou fermer afin d?atteindre les objectifs est une lacune significative
dans les plans alors que cette précision est exigée par l?article R. 541-19 et
le 5° de l?article R 541-16 du code de l?environnement.
En effet, les plans ne recensent que les installations de stockage
ainsi que d?incinération sans valorisation énergétique266. Ils ne recensent
pas les autres types d?installation et renvoient sur ce point à des études
ultérieures267. Même les plans les plus aboutis ne planifient pas à un niveau
suffisamment précis l?évolution des équipements et des capacités de
traitement associés, pour toutes les natures de déchets et d?installation268.
dans tous les autres plans et ne comportent aucune spécificité liée à la région, ni de plan d?action
précis en termes de dates et de budget.
264 Ainsi, les Plans des Hauts-de-France (p.117) et de Centre-Val de Loire (p.229)
renvoient au déploiement des programmes locaux pour la mise en oeuvre des stratégies
Zéro Déchets Zéro Gaspillage
265 Ainsi, le Plan des Hauts-de-France (pp.123-130 du fascicule des règles) ne
comprend aucune planification précise des installations de traitement et se limite à des
orientations générales telles que « Renforcer la performance environnementale des
installations de valorisation énergétique en appliquant le principe de proximité et en
prenant en compte l?impact CO2 des zones de chalandise » ou « Pour tout projet de
modernisation des installations de valorisation énergétique, tenir compte de l?évolution
des nouvelles normes européennes à l?horizon 2022- 2024.. Il en va de même du plan
de la région Occitanie (pp 248 -256).
266 Ainsi par exemple le plan de la région Bourogne-Franche-Comté, après avoir recensé
de manière détaillée, à l?échelle de chaque département, les déficits ou excédents de
capacité de traitement (p 109), se limite à la planification des installations de stockage.
267 Ainsi, par exemple, le Plan de la région Centre-Val de Loire, concernant les
installations de valorisation organique, «il sera nécessaire d?identifier et suivre les
capacités de traitement des déchets organiques et anticiper les besoins à venir. » p.289
268 Sur le thème de la planification des installations, le plan PACA, divisé en 4 bassins
de vie, est divisé en flux de déchets et positionné sur la capacité de traitement des
biodéchets triés à la source représente néanmoins un exemple intéressant. On peut aussi
citer l?exemple du plan de la région Grand Est, qui décline de manière détaillée, à
l?échelle départementale, les installations de stockage qu?il sera nécessaire de créer (pp
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ANNEXES
125
Les 12 plans adoptés ne relèvent pas d?une véritable planification et
apparaissent trop vagues quant au nombre, au type de déchets associés et
leurs quantités et à la localisation des installations269. À ce titre, les plans
ne revêtent pas leur pleine valeur prescriptive et n?épuisent pas la
compétence de la région.
Suivi des plans
Les modalités de suivi des plans prévues lors de l?adoption de ces
derniers sont souvent incomplètes, même pour ceux qui sont les plus
aboutis270. En effet, bien que les indicateurs de suivi du plan soient
explicités, associés aux actions dont ils relèvent et recensés de manière
exhaustive271, nombreux sont les plans qui manquent d?une réelle
planification du suivi272.
Sept régions sont couvertes par un observatoire de déchets chargé
d?obtenir et de consolider les données à l?échelle régionale, d?améliorer la
connaissance des gisements et de s?assurer du suivi des objectifs, les
5 régions restantes prévoient seulement d?en créer273.
347-352) et qui projette les besoins en capacité de traitement à l?échelle de deux bassins
de vie (Est et Ouest) les besoins.
269 Le plan de Normandie, par exemple, « n?interdit pas la création de nouvelles
capacités de valorisation des déchets ménagers résiduels » (p103) ou le plan des Hauts-
de-France, où la « règle de planification » prévoit « d?adapter les capacités régionales
d?incinération et de valorisation [?] en cohérence avec le développement de la
prévention et de la valorisation matière conformément à la hiérarchie des modes de
gestion [?] » (p148).
270 Les qualités et défauts des plans sont multiformes, aucun d?eux ne peut être
considéré comme un modèle. Le PRGPD de la région PACA a le mérite de préciser
(voir pages 137-138 du fascicule des règles du SRADDET, les moyens financiers que
la région entend consacrer, dans le cadre de ses contrats régionaux d?équilibre
territorial, au soutien des projets d?équipement structurants pour le territoire en matière
de recyclage et de valorisation des déchets, d?économie d?énergie et de développement
des énergies renouvelables.
271 Voir par exemple les pages 318-325 du Plan de la région Auvergne-Rhône-Alpes ou
284-288 du Plan de la région Hauts-de-France
272 La région Bourgogne-Franche-Comté liste les indicateurs et modalités de suivi du
Plan, sans mention de son organisation pratique (voir pp 158-166).
273 Le PRPGD Grand Est est très précis quant aux missions de l?observatoire qu?il
entend créer. On peut par ailleurs saluer l?effort de prévision budgétaire effectué (en
moyens humains et financiers) p478-479. Les autres régions manquent de précision
quant au budget : la Bourgogne-Franche-Comté, par exemple, ne mentionne que le
projet de création p88, sans en préciser les modalités pratiques.
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Annexe n° 4 : les indicateurs internationaux
En septembre 2015, les 193 États membres de l?ONU ont adopté un
programme de développement durable Agenda 2030 structuré autour de 17
objectifs de développement durable (ODD). Les déchets sont concernés par
l?ODD n°11 qui porte notamment la thématique de la ville durable et
l?ODD n°12 : « Consommation et production responsables » (impact
environnemental et social de l?ensemble de la chaîne de valeur des
produits). Ces ODD généraux comportent des indicateurs qui ont été repris
dans la programmation nationale française : le PNPD 2014-2020 et la
feuille de route de la France pour l?économie circulaire (FREC).
Indicateurs issus des ODD N°
Taux de recyclage des déchets municipaux274 11.6.1.
Empreinte matières275 12.2.1
Consommation intérieure de matière276 12.2.2
Perte et gaspillage alimentaire 12.3.1
Taux de recyclage national et tonnes de matériaux recyclés 12.5.1
274 Proportion de déchets urbains solides régulièrement collectés et éliminés de façon
adéquate sur le total des déchets urbains solides générés, par ville.
275 Empreinte matérielle, Empreinte matières (RMC) Empreinte matière par habitant
(RMC/hab.) et Empreinte matière par unité de PIB (PIB/RMC). Repris dans les
indicateurs 2 et 8 du PNPD 2014-2020 (INSSE SDES).
276 Consommation matérielle nationale, consommation matérielle nationale par habitant
et consommation matérielle nationale par unité de PIB. Indicateurs n°12 et n°7 du
PNPD 2014-2020 et indicateur FREC sous la forme « Réduire la consommation de
ressources liées à la consommation française de 30 % entre 2010 et 2030 » et
« recyclage de100 % de plastiques en 2030 » (INSEE. EUROSTAT)
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https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010596190#Documentation
https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010596191
https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010596192
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Annexe n° 5 : les indicateurs du service public
des déchets
Il n?existait à ce jour aucun recensement des objectifs chiffrés assortis
d?une échéance qui ont été fixés par l?État (code de l?environnement ou
programmation) pour le service public des déchets. Les juridictions
financières se sont attachées à ce recensement. Comme indiqué dans le
rapport, pour faciliter et simplifier le suivi de l?ensemble de ces objectifs, une
partie d?entre eux représentatifs des autres doit être choisie afin de bâtir un
tableau de bord annuel (indicateurs numérotés ci-dessous 1, 2, 10 et 23
surlignés en jaune) auxquels les juridictions financières recommandent
d?ajouter deux indicateurs qui n?existent pas encore dans la réglementation :
la quantité des OMR (Volume d?OMR par habitant en kg et par an) et la
prévention (dépenses de prévention /coût total du SPGPD en %).
Tableau n° 6 : les indicateurs généraux du service public des déchets
Nos Objectifs Base juridique
PRODUCTION
1
Production des DMA par habitant277
- 7% entre 2009 et 2014
-10 % en 2020 / 2010278
- 15 % en 2030 / 2010 279
Art. L. 541-1 1°
c.envir
TARIFICATION INCITATIVE
2
Couvrir 15 millions d?habitants en 2020 et 25
millions en 2022
10° de l?art. L. 541-1
code de
l?environnement280
COLLECTE et TRI A LA SOURCE
277 Indicateur 1 du PNPD 2014-2020 et du PNGD 2019. Déchets ménagers collectés
par habitant en année n ? déchets collectés en 2010) /déchets ménagers et assimilés en
2010 * 100 - Enquête collecte Ademe
278 Loi LTECV
279 Loi AGEC et ordonnance n°2020-920 du 29 juillet 2020
280 L?article 46 loi n°2009-967 de la loi de programmation Grenelle prévoyait déjà que
La TEOM et la REOM doivent intégrer au plus tard en 2014 une part variable incitative.
Axe 3 du PNGD 2019 « Étendre le déploiement de la fiscalité incitative (nombre de
collectivités et population) »
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/issu%20de%20l?ord.%202020-920%20-%20Directive%202008/98%20modifiée%202018/851
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
COUR DES COMPTES
130
Nos Objectifs Base juridique
3
Généralisation du tri à la source des biodéchets
au plus tard au 31 décembre 2023
Art. L. 541-21-1
code de
l?environnement281
4
Étendre à l?ensemble des emballages plastiques
les consignes de tri avant 2022 (en millions de
personnes)
5° de L. 541-1 code
de l?environnement
5
Généralisation d'ici au 1er janvier 2025 de la
collecte séparée pour les produits consommés
hors foyer (corbeilles de tri).
IV. de L. 541-10-18
6
Collecte bouteilles en plastique : 77% en 2025 et
90% en 2030
L. 541-10-11 du
Code de
l?environnement282
7
Atteindre 100% de collecte des emballages
plastiques ménagers en 2025
Axe 4 PNGD 2019
8
Augmenter les quantités de bouteilles et canettes
collectées dans le secteur des cafés, hôtels et
restaurants (CHR)
VALORISATION
9
Préparation en vue du réemploi et recyclage 55%
en 2025 et 60% en 2030 et 65% en 2035 des
DMA en masse
4 bis de L. 541-1 283
10
Quantité de DNDNI284 faisant l'objet d'une
valorisation sous forme de matière, notamment
organique : 55 % en 2020 et 65 % en 2025
4° de L. 541-1
11
Assurer en 2025 la valorisation énergétique d?au
moins 70% des déchets qui auront fait l?objet
d?une collecte séparée ou d?un tri et ne pouvant
faire l?objet d?une valorisation matière
9° du I. de L. 541-1
12
Atteindre un tonnage de produits réemployés et.
/ou de déchets préparés à la réutilisation de
4° art. L.541-1du
code de
l?environnement
281 Art. 22 directive (UE) 2018/851 et Axe 5 PNGD 2019. Art. L. 2224-16 du Code
général des collectivités territoriales
282 Article 9 de la directive SUP (collecte séparée)
283 Issu de l?ord. 2020-920 - Articles 6 et 11 Directive 2008/98 modifiée 2018/851.
Indicateur non chiffré axe 2 PNGD 2019. Directive 1994/62/CE : « Atteindre 50 % en
2025 et 55 % en 2030 de déchets d?emballages en plastique recyclé »
284 Les déchets non dangereux non inertes (DNDNI), mesurés en masse, recouvrent les
DMA et les déchets d?activités économiques et excluent les déchets du BTP.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041989925
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/règlement%20européen%20d?interdiction%20d?enfouissement%20des%20DMA%20collectés%20séparément
ANNEXES
131
Nos Objectifs Base juridique
l?équivalent de 5 % du tonnage de déchets
ménagers en 2030285
13
Réduire de 50% les quantités de produits
manufacturés non recyclables mis sur le marché
(2020/2015)
Art. 8° de L. 541-1
14
La mise sur le marché de certains produits ou
matériaux peut être subordonnée à l?incorporation
d?un taux minimal de matière recyclée
II. art. L. 541-9 code
de l?environnement
15
Tendre vers l?objectif de 100% de plastiques
recyclés au 1er janvier 2025
4ter du I. de L. 541-
1286
16
Atteindre 400 000 tonnes de plastiques régénérés
réincorporés en 2025
FREC avril 2018287
17
Intégrer 25% de matière recyclée dans les
bouteilles en PET en 2025 et 30% (toutes
bouteilles en 2030)
Article 6 de la
directive SUP
18
5% des emballages mis sur le marché sont des
emballages réemployés en 2023, 10% en 2027288
I. 1° de L. 541-1
code de
l?environnement
19
65 % de recyclage de l?ensemble des déchets de
papiers gérés par le SPGD289
L. 541-10-1
code de
l?environnement
20
Au 1/1 2030, les producteurs290, doivent justifier
que les déchets des produits sont de nature à
intégrer une filière de recyclage.
Art L.541-9 code de
l?environnement
PREVENTION
285 Produits réemployés et/ou déchets préparés à la réutilisation / déchets ménagers et
assimilés. Ademe - Observatoire du réemploi à venir (notamment D3E, textiles et
éléments d?ameublements).
286 Stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire
(01/18) et FREC p.3 et Axe 4 PNGD 2019
287 Stratégie de la Commission européenne sur les matières plastiques dans l?économie
circulaire COM (2018) 28 final (Atteindre 10 millions de tonnes de plastiques recyclés
incorporés dans de nouveaux produits dans l?Union européenne en 2025)
288 Unité de vente ou équivalent
289 Tonnage des papiers recyclés issus de la collecte sélective / tonnage total de papiers
graphiques pris en charge par le SPGD.
290 Ceux qui mettent sur le marché au moins 10 000 unités de produits par an et réalisent
10 M¤ CA
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/Stratégie%20européenne%20sur%20les%20matières%20plastiques%20dans%20une%20économie%20circulaire%20(01/18)
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COUR DES COMPTES
132
Nos Objectifs Base juridique
21
Interdiction des plastiques à usage unique :
ventes sacs de caisse (1/1/2016), sacs
d?emballage (1/1/2017), particules produits
cosmétiques (1/1/2018), cotons tiges, vaisselle
jetable, bouteilles d?eau plate (écoles), pailles,
bâtonnets mélangeurs, gobelets et couvercles,
plateaux-repas, pots à glace, saladiers (1/1/2020),
fabrication/importation des sacs interdits à la
vente, distribution gratuite des bouteilles
(1/1/2021), sachets de thé non biodégradables,
jouets dans restauration, suremballage des fruits
et légumes frais, emballages presse et publicités,
étiquette sur fruits et légumes, achat par l?État
(1/1/2022), vaisselle jetable dans la restauration
pour les repas servis sur place (1/1/2023),
microplastiques médicaux (1/1/2024), contenants
cuisson en cantines (1/1/2025) tous les emballage
plastique à usage unique (2040)
Art. L541-10-5 et
L541-15-10 du code
de l?environnement
291
22 Publication d?un indice de durabilité (1/1/2024) Art. L541-2 c.envir
ELIMINATION
23
Quantités de déchets non dangereux non inertes
admis en installation de stockage :
- 30% entre 2010 et 2020
- 50% entre 2010 et 2025
7° art. L. 541-1 code
de
l?environnement292
24
Interdiction progressive de la mise en décharge
des déchets non dangereux valorisable
7° art. L. 541-1
c.envir293 et décret du
16.09.2021
25
Réduire les quantités de DMA admis en
installation de stockage en 2035 à 10% au plus du
poids des DMA produits
7 bis art. L. 541-1
294code de
l?environnement
291 Interdictions introduites par la directive SUP et transposées par la LTECV,
modifiées en 2016, 2018 (loi ELIM) et 2020 (loi AGEC).
292 p. 3 FREC Axe 7 du PNGD
293 Règlement européen d?interdiction d?enfouissement des DMA collectés séparément
3 bis du 2. de l?article 5 de la directive 1999/31 concernant la mise en décharge des
déchets
294 5. du 2 de l?article 5 de la directive 1999/31/CE
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https://partagejf.ccomptes.fr/sites/fcjpgdechets/02Synthese/07_CRPP/règlement%20européen%20d?interdiction%20d?enfouissement%20des%20DMA%20collectés%20séparément
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042176062/
ANNEXES
133
Nos Objectifs Base juridique
26
Arrêt d?ici 2025 des unités d?incinération des
ordures ménagères (UIOM) sans valorisation
énergétique et renforcement de l?efficience des
UIOM dont la valorisation énergétique est
insatisfaisante
Plan de réduction et
de valorisation des
déchets 2014-2020295
Tableau n° 7 : les indicateurs sectoriels (exemples)
TEXTILES LINGES CHAUSSURES296
1
Atteindre un taux de collecte de 50 % du gisement mis en marché
(soit 4,6 kg par habitant) en 2019
2
Atteindre un taux de valorisation matière (réutilisation et recyclage)
de 95 %
3
Atteindre un maximum de 2 % de déchets éliminés (déchets ne faisant l?objet
d?aucune valorisation).
ELEMENTS AMEUBLEMENT MENAGERS
4
Atteindre un taux de collecte séparée en 2023 des DEA de 40 %
des quantités d?éléments d?ameublement mis sur le marché
5
Un taux de recyclage et de réutilisation de 45 % sur la période 2018-2021 et
de 50 % pour la période 2022-2023 des DEA collectés séparément
6
Mettre à disposition des acteurs de l?économie sociale et solidaire 1,5 % des
DEA collectés à partir de 2021 pour ceux détenus par les ménages
7
Valoriser (réutilisation, recyclage et valorisation énergétique) en 2022
90 % des DEA collectés séparément des autres déchets
EQUIPEMENTS ELECTRIQUES ELECTRONIQUES (EEE)
8
Atteindre un taux de collecte de 65 % des équipements électriques
et électroniques mis sur le marché
9
Taux minimaux de recyclage et de valorisation pour les DEEE ménagers pris
en charge
DECHETS DE SOINS
10 Taux de collecte de 80 % en 2021297
295 Axe 2 du PNGD 2019 « Améliorer la valorisation énergétique des déchets »
296 Ademe : Déclarations des producteurs, y compris distributeurs et importateurs
d?équipements destinés aux particuliers
297 Quantités collectées année N /moyenne des quantités mises sur le marché moyenne
des quantités de produits mis sur le marché des années N et N-1.
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134
11
Taux de collecte d?au moins 3% / an tous DDS ménagers confondus (soit une
collecte de 0,6 kg de DDS ménagers par habitant à fin 2024)
12 Taux de valorisation énergétique : 90 % des DDS ménagers
13
2024 - taux de valorisation matière de 5 % des tonnages de DDS ménagers
collectés
14
Atteindre chaque année 45% de taux de collecte séparée de piles et
accumulateurs portables par rapport aux mises sur le marché
15
Taux de recyclage poids moyen des piles et accumulateurs portables : 65%
(plomb-acide), 75 % (nickel-cadmium) et 50 % (autres)
Source : Cour des comptes, à partir du tableau de suivi préparé par la DGPR et communiqué dans
le cadre de l?instruction
?
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135
Annexe n° 6 : les indicateurs des filières
à responsabilité élargie du producteur (REP)
Les éco-organismes sont agréés par l?État pour une durée maximale
de six ans renouvelable, sous réserve de répondre aux exigences d?un
cahier des charges établi par filière et fixé par arrêté interministériel. Ces
arrêtés leur fixent des missions, mesurées par l?atteinte d?objectifs précis
et cohérents avec les objectifs nationaux298. Des sanctions sévères sont
prévues299 en cas de non-respect de ces objectifs.
L?ADEME publie chaque année un Mémo des filières REP qui
reprend de façon groupé les résultats des 14 principaux indicateurs ci-
dessous pour chacune des filières.
Comme indiqué dans le rapport, pour faciliter et simplifier le suivi
de l?ensemble de ces objectifs, une partie d?entre eux représentatifs des
autres, doit être choisie afin de bâtir un tableau de bord annuel (indicateurs
numérotés ci-dessous 2, 4, 9, 10 et 11 surlignés en jaune) auxquels les
juridictions financières recommandent d?ajouter un indicateur qui
n?existent pas encore dans la réglementation : la prévention (dépenses de
prévention/CA des éco-organismes (en %).
Tableau n° 8 : objectifs-indicateurs du « mémo des filières REP »
N° Thèmes Formulations techniques
1 Production Mise sur le marché de produits assujettis en milliers
de tonnes
2 Gisement de déchets calculé en milliers de tonnes
3 Collecte Collecte séparée en milliers de tonnes
4 Taux de collecte séparée ou taux de collecte séparée
apparent pour valorisation
5
Valorisation (matière et énergétique) en milliers de
tonnes
6
Taux de valorisation par rapport aux tonnages
collectés séparément Recyclage (dont réutilisation)
en milliers de tonnes
298 II de l?article L. 541-10 du code de l?environnement
299 Article L. 541-9-6 du code de l?environnement (amende administrative limitée à
10 % des charges annuelles relatives à la gestion des déchets).
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https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/4832-memo-rep-2021.html
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599099/2021-01-01
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136
N° Thèmes Formulations techniques
7
Taux de recyclage par rapport aux tonnages collectés
séparément
8
Taux de recyclage par rapport au gisement ou aux
mises sur le marché
9
Quantités réellement réemployées et réutilisées en
milliers de tonnes300
10 Élimination Élimination en milliers de tonnes
11 Financement
incitatif
Produits mis sur le marché soumis à une éco-
modulation en pourcentage (bonus et malus)
12
Financement
Montant total des écocontributions perçues par les
éco-organismes en millions d?euros
13
Montant total des coûts opérationnels des éco
organismes en millions d?euros
14
Montant total des soutiens reversés aux collectivités
(opération et communication) en millions d?euro
Source : Cour des comptes
300 En ?unités de vente ou équivalent unités de vente? pour le suivi des objectifs des
filières équipements électriques et électroniques, des textiles et des éléments
d?ameublements
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137
Annexe n° 7 : comparaisons internationales
Selon Eurostat, la production des déchets municipaux en France à
582 kg en 2019 par habitant est supérieure à la moyenne européenne (487
kg/habitant). Les fortes disparités existantes au sein de l?UE apparaissant
dans la carte ci-dessous reflètent le lien entre activité économique
(Danemark, Allemagne, Luxembourg) et touristique par habitant (Chypre,
Malte) et la production de déchets par habitant.
Carte n° 2 : déchets municipaux produits par habitant
en Europe en 2018 (hors déblais et gravats)
Source : Eurostat
Le découplage de la croissance économique et de la production de
déchets est donc un des enjeux principaux de la politique de prévention et
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138
gestion des DMA. L?augmentation de la part des déchets à recycler constitue
un autre défi commun à l?ensemble de ces pays en vue des objectifs
européens de recyclage de 60 % à horizon 2030. Il implique de diminuer la
part des déchets recyclables qui se trouvent encore dans les OMR.
Les comparaisons internationales ci-dessous ont été choisies en
raison des succès de ces pays dans les domaines suivants :
un taux de recyclage des déchets municipaux proche ou supérieur à
50 % (cible européenne pour 2020).
l?élimination de la mise en décharge par orientation vers le recyclage
et l?incinération à valorisation énergétique301 rendus plus attractifs que les
autres modes de traitement par la mise en place d?une taxe pour la mise en
décharge, par l?interdiction directe (Allemagne) ou indirecte (Autriche)
d?enfouissement des déchets non traités et par l?interdiction d?incinérer et
d?enfouir les déchets ayant fait l?objet d?une collecte séparée (Pays-Bas) ;
la responsabilité opérationnelle des producteurs d?emballages pour
le tri et la valorisation : Allemagne, Flandre, Pays-Bas ;
les systèmes de consigne (Allemagne, Pays-Bas, Suède).
Allemagne
? Production : L?Allemagne est le 3ème plus important producteur de
déchets par habitant en Europe. Le recyclage est le principal mode de
traitement des déchets municipaux (68 %)302. L?incinération s?élève à
30 %.
? Gouvernance : La responsabilité de la gestion des déchets est partagée
entre le gouvernement national, les Länder et les autorités locales. Ces
dernières sont en charge de l?élimination des déchets municipaux (294
arrondissements ? Landkreise et 110 grandes villes). Les collectivités
déterminent chacune leur système de collecte et le montant des
redevances dans le cadre des objectifs de planification arrêtés par les
301 La directive décharge 31/99 CE du 26 avril 1999 marque une étape décisive dans la
mise en oeuvre de l?évitement de la mise en décharge.
302 La mise en oeuvre des nouvelles règles européennes statistiques de comptabilisation
des déchets municipaux devrait dégrader le classement allemand qui devrait cependant
rester supérieur à 50 %.
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ANNEXES
139
Länder303. À l?exception d?objectifs de recyclage pour les emballages,
peu d?objectifs quantitatifs ont été fixés au niveau fédéral. À l?inverse de
la France, les éco-organismes des emballages sont tous
« opérationnels »304.
? Collecte : 70 % de la population est concernée par une collecte séparée
des biodéchets. Il reste des progrès à faire notamment dans les grandes
villes (exemple de Berlin)305. La consigne pour les emballages de
boissons à usage unique mise en place depuis 2003 est un dispositif
obligatoire : lors de l?achat dans les magasins de détail, le
consommateur doit s?acquitter d?un « pfand » de 25 cts (une consigne)
qui est remboursée lorsque l?emballage est restitué dans les réceptacles
automatiques prévus à cet effet dans les magasins (qui absorbent la
bouteille et la compactent).
? Valorisation et élimination : L?Allemagne a atteint un très faible niveau
de mise en décharge (1 %) sans passer par une taxe, contrairement à ses
voisins européens, mais en interdisant la mise en décharge de déchets
préalablement non traités306, et en imposant la collecte séparée des bio
déchets et du papier dès le début des années 90. Les DMA sont soit
incinérés, à un coût très élevé (100 ¤ la tonne pour les déchets
municipaux), soit recyclés. De par cet effet prix, collecter les déchets en
flux séparés coûte moins cher que de collecter des déchets mélangés qui
devront être traités puis incinérés307. Fruit de plusieurs décennies de
politique orientées dans la même direction, le geste de tri et l?incinération
avec valorisation énergétique sont aujourd?hui largement acceptés en
Allemagne308 (environ 70 U.V.E. sur le territoire avec une capacité de
303 À titre d?exemple, dans le Land de Hessen, les autorités locales en charge de la
gestion des déchets doivent, en application des objectifs de planification arrêtés dans la
loi d?application régionale « hessische Ausführungsgesetz zum
Kreislaufwirtschaftsgesetz », diminuer les quantités d?ordures ménagère résiduelles en
deçà d?une quantité cible 150 kg/an/habitant d?ici 2025. Cet objectif est valable tant en
secteur à dominante urbaine qu?en secteur plutôt rural.
304 Voir définition de ce terme dans la note de bas de page de l?annexe sur les éco-
organismes
305 Source : entretien avec M. Jaron, chef de la division Économie circulaire au
ministère de l?environnement allemand.
306 Depuis 2005, ne peuvent être stockés que les déchets ayant fait l?objet d?un
prétraitement en installations de traitement mécano-biologique ou en incinérateurs
(résidus de ce traitement) ou les déchets inertes.
307 À l?inverse de la situation française par exemple où les collectivités indiquent que la
collecte séparée peut représenter un coût trop élevé.
308 Le rapport de l?Agence européenne de l?environnement datant de 2009 sur la mise
en oeuvre de la directive ?Décharge (« Diverting waste from landfill, effectiveness of
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COUR DES COMPTES
140
18,8 Mt309? à comparer aux 125 unités en France avec une capacité de
15,6 Mt310). L?Allemagne présente un taux de recyclage de 46 % des
emballages en plastique, supérieur à celui de la France (26 %) et 98 %
des emballages de boissons en plastiques.
Autriche
? Production : 570 kg/habitant (supérieure à la moyenne européenne).
? Gouvernance : elle est répartie entre le gouvernement fédéral et les
provinces.
? Prévention : L?Autriche est considérée avec la Flandre comme l?un des
pionniers pour la mise en place de réseaux de réutilisation offrant des
biens d?occasion de qualité. L?initiative la plus importante, « Repanet »
est un réseau de réparation et de réemploi, principalement le textile et les
équipements électroniques, qui regroupe 27 organisations employant
1 800 personnes dans 140 lieux.
? Collecte : L?Autriche a mis en place une collecte séparée des déchets
« biogéniques » et des emballages en papier dès 1992, accompagnée de
mesures visant à réglementer la qualité du compost afin d?assurer sa
compétitivité311. 22 % des DMA faisant l?objet d?une collecte séparée
sont des bio déchets (hors compost au domicile ou communautaire)
valorisés au sein de sites de compostage agricoles, municipaux ou
commerciaux312 ou au sein de sites de méthanisation. Dans les zones
fortement urbanisées, comme Vienne, les déchets collectés ne sont pas
de qualités suffisantes pour pouvoir être compostés.
? Valorisation et élimination : L?Autriche a élaboré une stratégie
d?élimination de la mise en décharge qui repose sur une double approche
d?interdiction pour les déchets non traités, biodégradables et organiques
waste-management policies in the EU ») souligne l?importance de l?acceptation
publique en matière de traitement de déchets.
309 Cf. Wilts Henning et Von Gries Najda, Europe?s waste incineration capacity in a
circular economy, ICE proceedings, mai 2015
310 Ademe. Le traitement des déchets ménagers et assimilés en 2018, Exploitation des
données de l?enquête sur les installations de traitement des déchets ménagers et
assimilés en France en 2018, Décembre 2020
311 Agence européenne de l?environnement. Municipal Waste management in Austria,
Février 2013.
312 Fertilisant pour les espaces verts, cimetières, etc.
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https://ec.europa.eu/environment/eir/pdf/report_at_en.pdf
ANNEXES
141
(ce qui comprend le plastique) et de taxation. Selon la Commission
européenne313, l?Autriche fait partie des États les plus performants : le
taux de mise en décharge est parmi les plus faibles de l?UE (2 %), le taux
de recyclage à 58 % en 2018 dont 33 % de compostage314 est le plus
élevé de l?UE, derrière l?Allemagne. À compter de 2004, et
graduellement jusqu?en 2008, la mise en décharge des déchets non traités
a été interdite pour les biodéchets et les déchets plastiques315. L?Autriche
a également adopté une taxe sur la mise en décharge des déchets, moins
élevée pour les installations à la pointe de la technologie afin de
moderniser les sites. Malgré la diminution du revenu de la taxe, elle a été
maintenue. La situation autrichienne montre une très forte corrélation
entre l?augmentation des taxes et l?interdiction du stockage et la
diminution des déchets effectivement enfouis. Les emballages plastiques
ménagers et commerciaux sont couverts par une filière REP. En cas de
chute du prix de la matière recyclée, les éco-organismes doivent
compenser en augmentant les prix versés aux collectivités territoriales
collectrices. En 2015, le taux de recyclage des emballages plastiques
s?élevait à 34 % pour un taux européen de 67,5 %.
Belgique ?Flandre
? Production : 490 kg/hab. (-10 % sur dix ans)
? Gouvernance : En Belgique, les questions environnementales relèvent
des régions. S?agissant de la Flandre, c?est l?OVAM (Agence publique
des déchets de Flandre) qui définit les objectifs définit et les règles
communes obligatoires (p. ex. le nombre de flux faisant l?objet d?une
collecte séparée, la fréquence des collectes) pour les 300 municipalités
en charge de la gestion opérationnelle des déchets. La politique de
gestion des déchets en Flandre remonte au début des années 1980.
Depuis lors, tous les quatre ou cinq ans, l?OVAM adopte de nouveaux
313 Commission européenne. The environmental implementation review 2019 ? country
report Austria, avril 2019.
314 L?Autriche présente par ailleurs le plus haut niveau de recyclage en Europe
s?agissant des déchets organiques.
315 Cette interdiction s?applique aux déchets présentant un taux de COT (« Carbone
organique total ») supérieurs à 5 %. Ce seuil revient à interdire la mise en décharge des
déchets plastiques. Le carbone atome caractéristique des matières vivantes est
également à la base du pétrole et donc des matériaux en plastique.
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142
plans et en assure le suivi et l?accompagnement316. La gouvernance du
système ne repose pas sur une approche coercitive mais d?une part sur
une coopération de long terme entre les municipalités et l?OVAM, cette
dernière accompagnant les autorités locales techniquement et
financièrement et d?autre part sur un système transparent de publication
des résultats (« naming and shaming 317»).
? Prévention : Des réseaux de réemploi / seconde main sont installés dans
chaque municipalité ou centre commun à plusieurs municipalités
voisines, avec des objectifs fixés en termes de biens réutilisés en kg par
habitant.
? Collecte : Les tarifs payés par le citoyen pour les collectes séparées sont
plus faibles que pour les OMR318. Les déchets organiques (déchets verts
d?un côté et fruits et légumes d?un autre côté) font également l?objet
d?une collecte séparée depuis 1991. La Flandre ne dispose pas de
système de consigne pour la collecte des bouteilles en plastique.
? Valorisation et élimination : D?après la Commission européenne, la
Belgique, particulièrement la Flandre319, figure parmi les pays les plus
performants avec un taux de recyclage de 54 % en 2017. La Belgique a
mis en place à la fois l?une des taxes les plus élevées en Europe et une
interdiction de l?enfouissement garantissant que le coût de la mise en
décharge (1 % en 2018) est supérieur à celui de l?incinération qui doit-
être lui-même supérieur au coût du recyclage. La Belgique présente un
taux de recyclage de 55 % et un taux d?incinération de 44 % et pour les
emballages de 80 % (le plus haut niveau en Europe). Les emballages
plastiques non recyclables font l?objet d?un malus très élevé. Dans le
système REP, les producteurs restent propriétaires de la matière sur le
marché jusqu?au stade du déchet et doivent investir dans les centres de
tri et dans les capacités de recyclage nécessaire pour faire face à
316 OVAM. Implementation plan for household waste and comparable industrial waste-
summary
317 Cette locution anglaise (litt. « nommer et couvrir de honte »), pouvant être traduite
par l?expression française « mise au pilori », désigne ici le fait de déclarer publiquement
les mauvais résultats d?une municipalité.
318 Concernant les collectes séparées, les municipalités peuvent fixer les tarifs, à
l?exception du papier/cartons qui n?est pas taxé, compte tenu de la valeur recyclable.
319 La Flandre est la région la plus peuplée de Belgique avec 6,6 millions d?habitants
sur un total de 11,5 millions et compte une densité de population élevée de 489 habitants
au mètre carré.
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ANNEXES
143
l?extension des emballages collectés320. La prise en charge totale de la
filière REP emballages se réalise à coût zéro pour les collectivités et donc
les contribuables (système Fost+). Dans son plan 2016-2022, l?office de
gestion des déchets de Flandres (OVAM) impose des cibles chiffrées aux
municipalités en matière d?OMR, de réemploi et de déchets abandonnés.
Ce programme est fondé sur une approche en « clusters » de
municipalités avec déclinaison d?objectifs locaux. Les municipalités
sont regroupées en 16 groupes de municipalités à profil socio-
économique similaire ou « clusters » (le profil prend en compte
notamment le type d?habitat, l?intensité de l?activité économique et le
dynamisme démographique321). Chacun de ces 16 clusters se voit
attribuer 11 objectifs chiffrés spécifiques. Pour les OMR, les objectifs
chiffrés sont compris entre 116 kg par habitant pour les municipalités les
plus rurales et 258 kg/habt pour les municipalités touristiques.
Carte n° 3 : déclinaison des objectifs de réduction des OMR
à horizon 2022 par « clusters » de municipalités
Source : OVAM (Agence flamande pour l?environnement). Implementation plan for household
waste and comparable industrial waste, 2017-2022.
320 L?entreprise flamande Eco-oh (https://www.eco-oh.com/fr/groupe-eco-oh) recycle
22 000 tonnes par an d?emballages plastiques mixtes soit l?équivalent de la production
de déchets de 2,5 millions de flamands. L?entreprise recycle les déchets plastiques et
soit les vend déjà transformés aux fins d?application industrielle soit les transforme au
sein d?usine en objets plastiques dits « design ».
321 Exemple de groupes de municipalités : municipalités côtières, grandes villes,
municipalités à fort taux d?urbanisation et à faible revenu, villes moyennes, métropoles
avec activités tertiaires?
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https://www.eco-oh.com/fr/groupe-eco-oh
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144
Pays-Bas
? Production : 511 kg par habitant en 2017, ce qui reste supérieur à la
moyenne européenne mais représente une baisse de 15 % sur dix ans.
? Gouvernance : Elle est recentralisée depuis 1996 par transfert de la
responsabilité du niveau des provinces au niveau du gouvernement
central. Le ministère de l?environnement est chargé élaborer tous les six
ans le plan national de gestion des déchets. Les municipalités sont
chargées de la collecte des déchets ménagers sur leur territoire.
? Valorisation et élimination : Le taux de recyclage des DMA est parmi
les plus élevés en Europe et le taux de mise en décharge l?un des plus
bas (inférieur à 1 %). Avec un taux de 56 % (2018) parmi les plus élevés
de l?UE (moyenne européenne à 48 %), les Pays-Bas ont dépassé dès
2013 la cible européenne de recyclage de 50 % des déchets municipaux
prévue pour 2020. L?incinération de déchets municipaux atteint 43 %.
La mise en décharge est parmi les plus basses d?Europe (1 %), bien en-
deçà de la moyenne européenne à 24 %, du fait de l?effet combiné des
interdictions et taxes pesant sur les mises en décharge. En 1995, le
gouvernement a en effet pris un décret interdisant la mise en décharge
de 35 catégories de déchets incluant les OMR et les déchets organiques.
Une taxe sur la mise en décharge a également été introduite la même
année et a augmenté jusqu?en 2010 afin de rendre l?incinération et le
recyclage financièrement plus attractif que la mise en décharge. La taxe
néerlandaise devient alors la plus élevée d?Europe (107,5 ¤ par tonne).
Deux ans plus tard, le gouvernement décide sa suppression, le faible
niveau de mise en décharge ne justifiant plus son existence et la taxe
ayant rempli son objectif.
Suède
? Production : 443 kg/habitant (4,5 Mt)
? Collecte : Le système de consigne permet de collecter et recycler environ
90 % des canettes en aluminium et bouteilles PET. La Suède a introduit
ce dispositif pour les canettes dès 1984 (0,10 ¤ par canette), puis sur les
bouteilles plastiques PET en 1994 (entre 0,10 ¤ et 0,20 ¤). Plus de 75 %
des 290 communes suédoises proposent désormais un bac spécial aux
ménages pour collecter leurs déchets alimentaires. Les ménages peuvent
bénéficier, à proportion de leur tri sélectif, d?une réduction non
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ANNEXES
145
harmonisée de leur redevance annuelle communale de traitement des
déchets.
? Valorisation et élimination (données 2018) : 50 % des déchets ménagers
suédois sont aujourd?hui incinérés, 35 % sont recyclés (taux en-dessous
de pays comme l?Allemagne), et 15 % font l?objet d?un traitement
biologique. Les pays nordiques dans leur ensemble poursuivent une
politique à l?égard des DMA qui visent à un équilibre 50 % recyclage /
50 % combustion. La mise en décharge des déchets ménagers ne subsiste
plus qu?à l?état résiduel (0,7 %) à la suite de l?introduction d?une taxe
sur la mise en décharge des déchets. Le recours accru à l?incinération des
déchets non organiques représente aujourd?hui 20 % de l?énergie utilisée
par les réseaux urbains de chaleur qui approvisionnent en chauffage
92 % des appartements suédois et a contribué à la disparition des
combustibles fossiles du secteur du chauffage en Suède. Cette politique
conduit les communes suédoises à importer des déchets frontaliers pour
alimenter en continu leur réseau et amène des inquiétudes dans l?opinion
publique sur les rejets des polluants dans l?atmosphère. La Suède opère
la méthanisation des déchets organiques pour produire du biocarburant
pour les transports en commun.
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Annexe n° 8 : les déchets en matière plastique
Le plastique est léger, polyvalent, adapté à l?automatisation et
difficilement remplaçable pour la protection des produits de consommation
et leur distribution. C?est pourquoi, les 359 millions de tonnes (2018) de
plastiques produits chaque année dans le monde, qui représentent 4 à 6 %
de la consommation annuelle mondiale de pétrole (350 Md$)322, ont des
usages très divers et sont notamment utilisés323 pour les emballages tels que
les pots de yaourt ou les bouteilles d'eau (40 % de la consommation
européenne de plastiques et plus de 60 % des déchets plastiques), le BTP
(20 %), l?industrie automobile (10 %), les appareils électriques et
électroniques (EEE) (6 %)324.
L?utilisation de ce matériau est en pleine expansion depuis 1950
avec un doublement de la demande depuis 2000, aujourd?hui tirée par les
pays en voie de développement qui consomment encore 20 fois moins de
plastique que les pays de l?OCDE. Le développement de la consommation
d'aliments et de boissons « à emporter » favorise l?essor des plastiques à
usage unique. Un "pic du plastique" pourrait cependant être atteint en 2027
selon les experts325, avec une croissance de la demande qui passerait
ensuite de 4 % à moins de 1 % par an.
322 Le commerce mondial des plastiques représente 1 000 milliards de dollars par an
soit 5 % du commerce global de marchandises. https://unctad.org/fr/news/nouvelle-
etude-le-commerce-mondial-du-plastique-depasse-de-40-les-evaluations-precedentes
323 CGEDD et CGEIET Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine,
Rapport conjoint, janvier 2020.
324 Les déchets d'équipements électriques et électroniques DEEE sont constitués pour
20 % de plastique.
325 ?The Future?s Not in Plastics: Why plastics demand won?t rescue the oil sector?. 4
septembre 2020. Carbon tracker think tank
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https://www.economie.gouv.fr/cge/filieres-dechets-recyclage
COUR DES COMPTES
148
Externalités négatives des déchets plastiques
Les effets des matières plastiques sont significatifs sur le
réchauffement climatique (l?équivalent du fonctionnement de 189 centrales
à charbon326), la biodiversité327, la consommation d?eau et d?énergie, la
santé et indirectement sur l?économie pour des activités telles que le
tourisme, la pêche328 et le transport maritime. L?ensemble de ces
externalités négatives du plastique est évalué financièrement à 1 000
dollars par tonne.
Les trois-quarts des déchets plastiques (6,3 milliards de tonnes) sont
rejetés dans les milieux naturels329 dont entre 4,8 et 12,7 millions de tonnes
de déchets plastiques déversées chaque année dans les océans (les rejets
européens représente l?équivalent chaque minute du contenu d?un camion
poubelle jeté en mer330). Qualifié de « continent » ou de « soupe », les
déchets plastique en mer se décomposent en microplastiques, (fragments
de moins de 5 mm), entrent dans la chaîne alimentaire via les organismes
marins, l?air et l?eau potable. Sans que l?on connaisse encore l?effet sur la
santé humaine, on constate qu?un être humain ingère en moyenne chaque
326 5 tonnes de CO2 émises par tonne de plastique produite. Centrales à charbon de 500
mégawatts en tenant compte des différentes étapes du cycle des plastiques : (extraction,
transport, fabrication, gestion de la fin de vie des déchets), le bilan carbone des
plastiques représenterait 860 Mt de CO2 par an. En 2050, l?industrie plastique pourrait
représenter 10 à 15 % des émissions mondiales de CO2. Sénat Pollution plastique : une
bombe à retardement décembre 2020
327 Une méta-analyse récente a estimé à 2 249 le nombre de plantes, d?animaux et de
microbes affectés par la pollution plastique à l?échelle mondiale.
328 1 % des recettes des captures réalisées de la flotte de l'Union européenne.
329 Les 8,3 milliards de tonnes de plastiques fabriquées depuis 60 ans n?ont été pris en
charge qu?à hauteur d?un quart (9 % ont été recyclées, 12 % incinérées). Si rien n?est
fait 12 milliards de tonnes de déchets plastiques pourraient leur être ajoutées d?ici 2050.
Ce phénomène de rejet dans les milieux naturels concerne peu l?Europe : 83 % des
plastiques dans les océans viennent de 20 pays dont aucun situé en Europe et selon les
données de l?Ademe et une extrapolation des enseignements issus du rapport WWF, en
France, plus de 98 % des emballages ménagers sont collectés. Production, use, and fate
of all plastics ever made. Science Advances Roland Geyer1, Jenna R. Jambeck and
Kara Lavender Law Vol. 3 n°7 19 juillet 2017
330La tendance est anticipée à la hausse jusqu?en 2100 au moins. (UE : 150 000 et 500
000 tonnes par l?Union européenne) Jambeck, Jenna R. et al., « Plastic waste inputs
from land into the ocean », Science, volume 347, Février 2015 et Study to support the
development pf measures to combat a range of marie litter resource Eunomia report
for European Commission Janvier 2016
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https://www.senat.fr/espace_presse/actualites/202012/pollution_plastique.html
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ANNEXES
149
semaine l?équivalent du poids d?une carte de crédit331, que l?on retrouve
notamment dans le placenta des femmes enceintes332.
La contrainte technique du recyclage des plastiques
Les objectifs fixés en matière de recyclage des déchets plastiques,
en général (« tendre » vers 100 % de plastique recyclé au 1er janvier 2025)
ou pour le cas particulier des emballages (20 % de réduction des
emballages plastique à usage unique mis sur le marché pour les cinq
prochaines années 2021-2025) semblent hors d?atteinte au regard du
rythme de réduction actuel. Les progrès du recyclage des plastiques sont
en effet entravés par certaines contraintes de cette matière :
? La variété des plastiques (résines ou polymères) implique pour chacun
une filière de recyclage spécifique. Les résines utilisées sont nombreuses
(une cinquantaine parmi lesquelles cinq principales333 : voir tableau ci-
dessous).
331 Soit cinq grammes de plastique ?Assessing plastic ingestion from nature to people
WWF, Dalberg and the university of Newcastle Australia juin 2019 (Soit cinq grammes
de plastique constitués de 52.000 microparticules de plastique par an, 121.000 si l?on
prend en compte la pollution de l?air).
332 Revue Environment International. Janvier 2021 Plasticenta : First evidence of
microplastics in human placenta. Antonia Ragusa
333 Les emballages sont cependant constitués pour 90 % des cinq principales résines,
dont la moitié sont déjà recyclable., Les 598 000 tonnes de déchets recyclées sont
essentiellement du PET et du PEHD (61 % de ces deux matières sont recyclés).
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COUR DES COMPTES
150
Tableau n° 9 : les 5 principales variétés de plastiques334
Variétés de plastique et
part de marché en Europe
Utilisation primaire
Possibilités de
recyclage et
débouchés335
Polytétraphtalate
d?éthylène (PET) 7,9%
Bouteilles boissons et détergents
Facile (40% du
gisement) : retour
possible au contact
alimentaire (p. ex.
nouvelles bouteilles).
336
Polyéthylène (PE)
Haute (PEHD) et basse
intensité
(PELD/PEBD) 29,8%
Bâtiment, films alimentaires,
barquettes, jouets bouchons,
bouteilles de lait, flacons pour la
cosmétique, sac, pots de glace
Possible : sacs
poubelles, flacons de
détergent, mobilier
urbain, stylos, tuyaux,
automobile?
Polypropylène (PP)19,4%
Automobile, EEE, emballages
alimentaires, masques et tissus
Difficile. Pas de retour
possible à l?alimentaire.
Polystyrène (PS)
expansé et autres 6,2%
Protection des appareils,
emballages alimentaires (comme
les pots de yaourt, barquettes),
EEE
Difficile. Pots de yaourt
(4 %) : béton allégé,
rembourrage, boites,
cintres, pots de fleurs
Polychlorure de vinyle
(PVC) 10%
Surtout bâtiment : canalisation,
fenêtres, sols et murs et aussi
blisters et automobile
Moyen. Fenêtres,
canalisations, sols,
tuyaux, meubles de
jardin
Autres résines complexes
(PUR, thermoplastiques,
?) 26,7 %
Optique, télécommunications,
médical, isolation
Très difficile
Source : Cour des comptes
? La complexité des usages : S?ajoutent à la variété des résines une
complexification supplémentaire due au marketing (bouteilles d?eau de
couleur), aux additifs chimiques polluants (p. ex. DEEE), aux
combinaisons de matériaux impossibles à séparer dans la phase de
recyclage337 et à la décontamination obligatoire des plastiques recyclés
334 La nouvelle grille tarifaire en vigueur sur les mises en marché 2020 distingue 7
catégories d?emballages.
335 La couleur exprime le degré de facilité technique du recyclage
336 On parle de boucle fermée du recyclage lorsqu?un type de plastique (le PET clair
des bouteilles par exemple) permet de produire à nouveau des contenants eux-mêmes
recyclables.
337 P. ex. aluminium et plastique dans les sacs de chips et de barres chocolatées et les
blisters de médicaments, carton et plastique dans les boîtes de pizza.
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ANNEXES
151
utilisés pour un usage alimentaire. Ni les nouvelles résines ni les
nouveaux usages ne font pas l?objet d?études d?impact de recyclage
préalables.
? Les contraintes du tri : Le recyclage est principalement mécanique
(transformation des déchets plastique en matières premières secondaires
?granulats338- sans changer la structure chimique de la matière) et pour
l?instant plus marginalement chimique (retour aux composants
chimiques de base équivalent à la qualité de la matière vierge). Les
différents types de plastiques fondant à différentes températures, un tri
précis est nécessaire. Les plastiques d?emballage non triés ne peuvent
produire que des produits grossiers tels que des plaques ou des canaux
ou, après broyage, des carburants secondaires pour la production
d?énergie dans l?industrie.
? L?altération progressive de la structure, de la qualité visuelle
(transparence) et des qualités sanitaires du plastique par les opérations
successives de recyclage. Un à trois recyclages pour une bouteille qui
deviendra un « polaire » avant de devenir définitivement un déchet.
? La taille : Les produits qui ne seront jamais recyclables car trop petits
ou trop techniques (sachets de thé, papier bonbon, petit emballage). Un
emballage de fromage à la coupe de 10?microns contient six couches de
différents plastiques.
? Les pertes en ligne dans le recyclage : en raison des liquides,
adhérences, matières qui compromettent la pureté (pour certains
plastiques, 20 à 30 %).
? Le manque de maturité de la filière : La plasturgie française reste un
secteur atomisé339, faible en investissement, et spécialisée par résine. Au
sein de ce secteur, les filières françaises de recyclage sont prises en étau
entre, en amont, les chaînes de collecte et de tri, aux coûts et volumes de
production rigides, et en aval, les utilisateurs de plastiques qui comparent
le prix du recyclé au cours fluctuant des matières vierges. Ces PME du
recyclage sont cependant progressivement acquises par des grands
338 41 000 tonnes des granulés sont perdues dans la nature chaque année, soit
l'équivalent de 11,5 milliards de bouteilles en plastique.
339 4 000 PME et TPE dont 56 % de 1 à 9 salariés et 1/3 d?entreprises indépendantes
130 000 salariés et 30 Md¤ et faibles capacités industrielles (20-40 000 tonnes/an)
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152
groupes, qui veulent maîtriser leur approvisionnement en produits
recyclés et s?assurer une intégration verticale340.
? La sensibilité du plastique recyclé au cours des matières premières
vierges (prix du pétrole) : Si certains plastiques sont recyclables « en
théorie », leur coût comparé avec le plastique vierge est prohibitif (du
simple au double), expliquant la faible demande de matières plastiques
recyclées de 6-7 % en Europe341. Les plastiques recyclés issus des PEHD
peinent à trouver preneurs aujourd?hui tandis qu?à l?inverse la demande
de PET est très forte (annonce marketing de contenants 100 % recyclés)
provoquant des prix spéculatifs.
Les nouvelles pistes pour prévenir et gérer les déchets plastiques
? La taxe européenne sur les emballages plastiques non recyclés
Une taxe européenne de 800 euros par tonne de déchets
d'emballages plastiques non recyclés est instituée depuis le 1er janvier
2021342 et doit être versé du budget national vers le budget européen La
France pourrait ainsi être le 1er ou le 2e plus gros contributeur d?Europe
(1.2?Md¤ inscrit en LFI 2021) en raison du poids d?emballages plastiques
qu?elle met sur le marché et des faibles taux de recyclage.
Lorsque la France disposera d?une REP sur les emballages ménagers
et industriels à partir de 2025, cette taxe sera répercutée avec un faible taux
sur de nombreux assujettis (fabricants, metteurs en marché et importateurs
puis éco-organismes) à partir de 2025.
? La consigne des bouteilles
Dans ce système, qui permet d?obtenir des matières de meilleure
qualité, plus facilement valorisables, le consommateur doit s?acquitter, au
moment de l?achat, d?une somme consignée ? qui majore le prix de vente.
Cette somme lui est remboursée, sous forme monétaire ou de bons d?achat,
quand il rapporte son emballage vide pour qu?il soit recyclé.
Selon l?ADEME, la trajectoire de collecte des bouteilles en plastique
pour boisson (autour de 57 % aujourd?hui, 71,5 % en 2025 et 78,9 % en
340 Un géant mondial du soda est actionnaire à 50 % de PlastikPack, le n°1 européen de
la régénération du plastique.
341 Les acteurs économiques et l?environnement, édition 2017 Insee références
342 Réunion extraordinaire du Conseil européen (17, 18, 19, 20 et 21 juillet 2020).
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ANNEXES
153
2030) ne permettra pas d?atteindre l?objectif européen de 90 % en 2030343.
Les régions rurales atteindraient cet objectif, mais les régions urbaines
(10 % de collecte seulement aujourd?hui dans les villes de Paris et
Marseille) n?y parviendront vraisemblablement pas sans la mise en place
de la consigne ou d?autres mesures ambitieuses et contraignantes.
Tableau n° 10 : taux de recyclage des emballages plastiques
En % 2017 2018 2019 2020
Bouteilles et flacons 55,6 58,3 56,6 54,7
Autres emballages plastiques 3,9 4,2 6,2 7,5
Source : Cgefi
Dans les États membres qui l?ont mise en place344, la consigne a fait
la preuve de son efficacité avec un taux de collecte en moyenne de plus de
80 % des bouteilles en PET, contre une moyenne de 58 % dans l?ensemble
de l?UE345. La loi AGEC a renvoyé pour sa part cette option à 2023 si
l?analyse des performances de collecte et de recyclage issue du rapport
annuel de l?ADEME confirme que l?objectif 2030 de 90 % ne sera pas
atteint346. D?ici là, divers tests de consigne sont mis en place347et
l?ensemble des parties prenantes concernées sont associées à la réflexion
pour mettre en balance avantages mais aussi inconvénients 348. Une
disposition de la loi AGEC349 institue par ailleurs un dispositif de reprise
obligatoire par les distributeurs des produits usagés relevant d?une REP.
? La communication pédagogique à l?égard du public
343 Dont 77 % des bouteilles en PET dès 2025 - Directive européenne sur les plastiques
à usage unique dite « directive SUP (single-use-plastic) UE n° 2019/904 du 5 juin 2019.
344 Danemark, Estonie, Pays-Bas, Allemagne, Croatie, Lituanie, Finlande et Suède.
Hors UE : Norvège et Islande.
345Cf. annexe sur les comparaisons internationales et Cour des comptes européennes. Les
mesures prises par l?UE pour lutter contre le problème des déchets plastiques, 2020.
346 Art. L. 541-10-11.-I code de l?environnement. L?article 9 de la directive sur les
plastiques à usage unique n?oblige pas à recourir à la consigne mais la cite comme
possibilité.
347 420 automates CITEO donnant 1 ou 2 centimes d?euros par bouteille triée, bouteilles
contre places de cinéma dans l?habitat social d?Argenteuil.
348Confusion pour le citoyen avec les instructions qu?il a reçues depuis 20 ans de mettre
les bouteilles en plastique dans la poubelle jaune, crainte des collectivités locales des
pertes de recettes associées à la revente des bouteilles et à la surcapacité des centres de
tri sans soutien compensatoire de l?éco-organisme.
349 Article L. 541-10-8 du code de l?environnement
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https://www.eca.europa.eu/Lists/ECADocuments/RW20_04/RW_Plastic_waste_FR.pdf
https://www.eca.europa.eu/Lists/ECADocuments/RW20_04/RW_Plastic_waste_FR.pdf
COUR DES COMPTES
154
En dépit des documents pédagogiques et des efforts d?explication
proposés par l?ADEME350, les médias et nombre d?acteurs publics et
privés, les citoyens ne sont pas en mesure de savoir quelle attitude
écoresponsable choisir, à l?égard par exemples des nouveaux produits
pouvant perturber le geste de tri et le traitement, de la différence entre un
sac en plastique biosourcé et un sac en plastique biodégradable ou des
avantages relatifs d?un pot de yaourt en verre par rapport à un pot en
plastique (voir tableau ci-dessous).
Tableau n° 11 : impacts environnementaux comparés du polystyrène
et du verre pour l?emballage des yaourts
Impacts
environnementaux
Avantage
verre
Avantage
plastique
Explication
Recyclabilité X
76 % de recyclage contre
27%
Ressources (matières
premières d?origine)
X
(+430 %) Le sable
comme le pétrole est une
ressource rare
Consommation d?eau X +27 %
Durée de décomposition
dans la nature
X
450 ans contre 1 million
d?années
Changement climatique
(CO2)
X
+ 306 % (12 fois plus de
camions de transport) et
énergie pour la
fabrication
Toxicité et pollution pour
l?environnement, la santé
et la biodiversité
X
Microplastiques dans la
chaine alimentaire des
organismes vivants
Source : Cour des comptes à partir de différents articles d?analyse de cycle de vie351
350 L?Ademe renforce ses travaux d?ACV et réalise depuis 2002 un Bilan national du
recyclage, auquel est joint une Analyse du cycle de vie des flux de déchets recyclés sur
le territoire français.
351 La synthèse proposée par ce tableau rend compte des impacts environnementaux
issus des ACV. L?état actuel de la recherche scientifique ne permet cependant pas
encore de tirer un bilan global qui serait une aide à la décision. Les ACV menées par
les fédérations professionnelles ne comportent en général pas de "revue critique" par
des experts indépendants validant la méthodologie. L?Ademe travaille à un tel
référentiel méthodologique.
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ANNEXES
155
L?analyse du cycle de vie (ACV)
L?ACV est une « compilation et évaluation des intrants, des extrants
(flux physiques de matière et d?énergie associés) et des impacts
environnementaux potentiels d?un système de produits au cours de son cycle
de vie » : distribution, utilisation, collecte et élimination vers les filières de
fin de vie ainsi que transport.
L?ACV est l'outil d?évaluation multicritères le plus abouti fondé sur
la normalisation internationale352. L?utilisation des ACV pour formuler des
recommandations ne permet cependant pas les généralisations. Une ACV
ne peut être prise en compte que pour les hypothèses sur laquelle elle est
fondée (situation à l?instant « t », emballage ou produit spécifique pris en
compte, méthodes de mesure la pollution).
Source : Cour des comptes à partir de l?ADEME353
? Les changements intervenus sur le marché international des déchets
Les décisions prises par plusieurs pays de fermer leurs frontières aux
déchets en provenance de l?Union européenne aura pour conséquence à
court terme une augmentation des produits incinérés ou mis en décharge
mais, à moyen terme, ces décisions devraient conduire à développer de
réelles capacités industrielles en Europe354.
? Le soutien de l?État à la structuration et au renforcement de la filière
L?État peut intervenir par des subventions pour réduire les prix des
matières premières recyclées, encourager la recherche et développement
(Crédit Impôt Recherche, Programme d?Investissement d?Avenir-PIA,
Banque Publique d?Investissement), mettre en place des « clusters » de
coopération scientifique et industrielle, commander des études
scientifiques, voire prendre des participations directes ou indirectes (CDC)
dans certaines entreprises ou favoriser fiscalement le secteur (capital risque
ou suramortissement). L?État dispose en outre d?autres leviers comme les
interventions de la puissance publique pour soutenir ou contrer certaines
352 Normes ISO (14040 à 14043)
353https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-
laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv et
https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Rapport_Quel_Potentiel_3R.pdf
354 EEA-ETC/WMGE, 2019/5, Plastic waste trade and environment, octobre 2019.
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https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv
https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv
https://www.eea.europa.eu/publications/the-plastic-waste-trade-in
COUR DES COMPTES
156
opérations de fusion-acquisition dans les activités d?importance vitale 355,
les normes techniques et les achats publics.
Dans le cadre du Plan France relance pour la transition écologique,
plus de 200 millions d?euros sont dédiés à la filière Plastique (dispositif
ORPLAST) afin de doubler la capacité annuelle d?incorporation pour
atteindre 700 000 tonnes d?ici fin 2022.
Le dispositif Orplast
Lancé en 2016 et piloté par l?Ademe, le dispositif Orplast ? objectif
recyclage plastiques- vise spécifiquement à soutenir la filière aval de
recyclage des plastiques en augmentant l?incorporation de matières premières
de recyclage (MPR) plastiques par les plasturgistes en substitution à de la
matière vierge (soutien aux investissements dédiés à l?incorporation de
matière plastique recyclée et aux technologies de recyclage).
En complément, dans le cadre de la stratégie d?accélération visant
l?augmentation du recyclage, le Programme d?investissement d?Avenir
(PIA 4) dispose d?actions de soutien à l?innovation pour augmenter le
recyclage des plastiques et des composites356.
? Le levier réglementaire pour lutter contre les déchets plastiques non recyclés
- L?incorporation obligatoires et les interdictions de matières
La loi permet d?imposer des taux minimaux d?incorporation de
matières recyclées dans les produits neufs, d?interdire des « substances ou
éléments susceptibles de compromettre l'utilisation du matériau
recyclé »357(perturbation des chaînes de tri et du recyclage) et l?obligation de
justifier que les déchets peuvent intégrer une filière de recyclage358.
355 Le décret du 23 février 2006 définit les activités d?importance vitale comme « un
ensemble d?activités, essentielles et difficilement substituables ou remplaçables,
concourant à un même objectif ou visant à produire et à distribuer des biens ou des
services indispensables ». Voir aussi l?article L1332-1 du code de la défense.
356 Sur 4 ans : 15 M¤ pour les technologies de tri, 60 M¤ sur la recyclabilité des
plastiques, 15 M¤ sur la recyclabilité des composites
357 L?art. L. 541-10-17 du code de l?environnement décliné dans le décret du 29 avril 2021
dit « 3R »fixe l?objectif d'atteindre la fin de la mise sur le marché d'emballages en plastique
à usage unique d'ici à 2040 et la stratégie pour y parvenir pour la période 2021-2025).
358 IV de L. 541-9 du code de l?environnement : au plus tard en 2030, les personnes
mettant sur le marché plus de 10 000 unités par an et réalisant un chiffre d?affaires
supérieur à 10 M¤ doivent justifier que les déchets induits par les produits peuvent
intégrer une filière de recyclage.
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041555598/
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043458675
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043458675
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599010/
ANNEXES
157
- L?interdiction d?enfouissement
Cette mesure a été très efficace chez nos voisins européens (cf.
annexe sur les comparaisons internationales) particulièrement pour les
déchets triés, notamment ceux en plastique. Le décret n°2021-1199 du 16
septembre 2021 relatif aux conditions d?élimination des déchets non
dangereux pris en application de la loi AGEC359 constitue la version
française de cette interdiction.
Graphique n° 19 : recyclage (vert), incinération (jaune) et
enfouissement (rouge) des déchets plastiques en Europe en 2018
Source : Les filières de recyclage des déchets en France, CGEDD, Janvier 2020, données Plastics Europe.
Les pays en pointillés ont déjà mis en oeuvre l?interdiction de l?enfouissement des déchets plastiques
359 Article 6 d?AGEC « la mise en décharge des déchets non dangereux valorisables
est progressivement interdite » et Article 10 « les producteurs ou détenteurs de déchets
ne peuvent éliminer ou faire éliminer leurs déchets dans des installations ? que s?ils
justifient qu?ils respectent les obligations de tri ».
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https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044060460
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COUR DES COMPTES
158
Annexe n° 9 : comparatif entre les différentes
modalités de financement
du service public
Production de déchets
Sécurité budgétaire et de
recouvrement
Service rendu et investissement
nécessaire
Équité pour les usagers
Pour Contre Pour Contre Pour Contre Pour Contre
TEOM
Limitation
du risque
de dépôts
sauvages
Aucun lien
entre quantité
de déchets et
facturation
Grande
facilité et
sécurité de la
ressource
aucun
Moindre
investissement
sur les outils de
collecte (bennes
et bacs)
Relation plus
distendue avec
l'usager (faible
communication)
Caractère
social des
bases
d'imposition
Sans lien
avec les
quantités
produites.
Valeurs
locatives
obsolètes
TEOMI
Incitatif
(effet prix)
Risques de
détournement
(dépôts
sauvages)
Sécurité
budgétaire
grâce à la part
fixe.
Recouvrement
assurée par les
services de
l'État.
Établissement
du rôle plus
complexe
(décalage
d'un an de la
prise en
compte de la
part variable).
Meilleure
connaissance des
usagers
Investissements
(bennes et bacs-
puçage). Efforts
de
communication
et de suivi des
usagers
Lien partiel
coût du
service
/quantités
produites
mais
maintien
base liée au
patrimoine
(VLF)
Part
variable
minoritaire
(de 10 à
45 %)
REOM
Lien
théorique
avec les
quantités
de déchets
produites
Lien indirect
entre prix
payé par
l'usager et sa
production
de déchets
(absence de
caractère
incitatif).
Aucun
avantage
Complexité
(tenue du rôle
et gestion des
impayés par
la
collectivité)
Pas
d'investissements
à prévoir.
Gestion des
évolutions du
rôle des usagers
complexe (p.
ex. changement
de composition
du foyer).
Apparence
d'équité (si
pertinence
des critères
retenus)
Perte de
l'aspect
redistributif
(social).
Critères
pouvant
être
contestés
REOMI
Prix payé
directement
lié à la
production
de déchets.
Risques
d'effet de
détournement
(dépôts
sauvages)
Meilleure
connaissance des
usagers
Investissements
indispensables
(bennes et bacs-
puçage). Efforts
de
communication
et de suivi des
usagers
L'usager
paie pour
les quantités
produites
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ANNEXES
159
Annexe n° 10 : les conséquences de la crise
sanitaire sur la gestion des déchets
La production des déchets en général, a été inférieure à ce qu'elle est
en période normale, notamment en raison d'une moindre production de
déchets issus des activités économiques (- 25 % en Ile-de-France) mais les
emballages en plastique ont augmenté (+30 % du fait de leur réputation de
sécurité sanitaire et de la hausse des ventes de plats à emporter).
Les nouveaux protocoles sanitaires (masques, règles de
distanciation sociale dans les temps de pause et croisement des équipes) et
le manque de personnel ont généré une perte du temps de travail et une
diminution des performances de gestion de déchets et, pour certains
territoires, la fin des collectes sélectives et de l?exploitation des centres de
tri (arrêts provisoires en raison de l?impossibilité de se déplacer des salariés
des entreprises de maintenance).
Près de 100 % des déchèteries ont été fermées au niveau national.
Or, dans le même temps, certaines activités des ménages productrices de
déchets (jardinage, bricolage, tri) ont été plus intenses que d?ordinaire.
Par conséquent, des déchets qui auraient normalement dû être
évacués en déchèteries ont été présentés dans les bacs d?ordures ménagères
conduisant à une forte augmentation des dépôts sauvages sur les points
d?apport volontaire et du taux de refus de tri (+ 15 %). Les volumes déposés
ont fortement augmenté après les périodes de confinement, conduisant à
des augmentations des coûts de transport.
Les dépenses du SPGD ont augmenté en outre, du fait de l?achat de
masques, de produits d?entretien, d?actions de communication pour la
réouverture des équipements et des charges supplémentaires en moyens
humains. Les recettes quant à elles, ont baissé puisque les effets de la crise
ont induit une chute des quantités de produits valorisables collectées en
déchèterie, et une baisse des soutiens des éco-organismes (par exemple -
25 % pour la communauté de communes du Grésivaudan).
Les masques déposés dans les OMR n?ont pas été recyclés pour des
raisons sanitaires et de coût (12 fois plus cher qu?un emballage plastique)360.
360 Les masques sont responsables de 40 000 tonnes de déchets non recyclés
supplémentaires en 2020. 16?millions d?euros d?aides ont ainsi été accordés aux
recycleurs des masques et le plan de relance comporte une mesure de soutien de
10 millions d?euros sur la période 2021-2022.
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Réponses des administrations
et des organismes concernés
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Sommaire des réponses reçues à la date de la
publication
Les réponses parvenues après la publication du présent document ne sont pas incluses ici mais
publiées avec le rapport sur le site de la Cour des comptes.
Madame la présidente de l?Association
des régions de France (ARF) .................................................................. 167
Monsieur le président de l?Association
des Intercommunalités de France ........................................................... 171
Madame la présidente de France Urbaine ............................................... 175
Monsieur le président de l'Association
des maires de France (AMF) .................................................................. 182
Monsieur le président de la Métropole de Lyon ..................................... 189
Madame la présidente de la communauté
de communes de l'Île d'Oléron ................................................................ 191
Monsieur le président du conseil régional de Bretagne .......................... 194
Monsieur le président du conseil régional Grand Est ............................. 195
Monsieur le président du conseil régional de Normandie ....................... 198
Monsieur le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine ......... 198
Monsieur le président du conseil régional
Provence-Alpes-Côte d?Azur .................................................................. 202
Madame la maire de Paris ....................................................................... 204
Monsieur le président du Syndicat mixte départemental
en charge d'études et du traitement des déchets ménagers
et assimilés de la Vendée (TRIVALIS) .................................................. 205
Monsieur le président de l?Association AMORCE ................................. 210
Destinataires n?ayant pas d?observation
Madame la présidente de la Métropole Aix-Marseille-Provence
Madame la présidente de la communauté urbaine
du Grand Besançon Métropole
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COUR DES COMPTES
164
Monsieur le président de la Métropole de Nice Côte d?Azur
Monsieur le président de la communauté d?agglomération
Valenciennes Métropole
Monsieur le président du conseil régional des Hauts-de-France
Madame la présidente du conseil régional d?Occitanie
Monsieur le président du Syndicat mixte de transport et de traitement
des déchets ménagers de Lorraine Nord (SYDELON)
Monsieur le président du Syndicat mixte pour le traitement
et la valorisation des déchets ménagers résiduels - « Valor3e »
Monsieur le président du Syndicat départemental d'élimination
des déchets de l'Aube (SDEDA)
Monsieur le président du Syndicat Inter-Arrondissement
de valorisation et d?élimination des déchets (SIAVED)
Monsieur le président du Syndicat d?études et de réalisations
pour le traitement intercommunal des déchets de Belfort (SERTRID)
Destinataires n?ayant pas répondu à la date de la
publication
Madame la Première ministre
Madame la présidente du conseil régional des Pays de la Loire
Monsieur le président de la communauté d'agglomération
du Grand Villeneuvois
Monsieur le président de la communauté de communes
des Gorges de l'Ardèche
Monsieur le président de la communauté de communes de l'Île d'Oléron
Monsieur le président du conseil régional d?Auvergne-Rhône-Alpes
Monsieur le président du conseil régional Centre-Val de Loire
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS
165
Madame la présidente du conseil régional d?Île-de-France
Monsieur le président du Syndicat mixte Flandre Morinie (SMFM)
Monsieur le président du Syndicat mixte de traitement
des ordures ménagères de la région de Villerupt
Monsieur le président du Syndicat mixte d?élimination
et de valorisation des déchets des Communautés d'Agglomération
du Douaisis, Hénin-Carvin et de la Communauté de Communes
d?Osartis-Marquion (SYMEVAD)
Monsieur le président du Service Intercommunal de collecte
de traitement des ordures ménagères (SICTOM) de Pézenas-Agde
Monsieur le président du Syndicat pour la valorisation
et le traitement des déchets ménagers et assimilés (VALTOM)
Monsieur le directeur général de CITEO
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MADAME LA PRÉSIDENTE DE L?ASSOCIATION
DES RÉGIONS DE FRANCE (ARF)
Par courrier en date du 18 juillet 2022, vous m?avez transmis le
relevé d?observations provisoires portant sur les rôles respectifs des divers
niveaux territoriaux en matière de déchets ménagers et assimilés,
document préparatoire à un chapitre du rapport public annuel publié au
premier trimestre 2023.
Dans le cadre de la préparation du rapport interne de la Cour sur
le panorama institutionnel et économique sur l?évolution des Déchets
ménagers et assimilés en France, Régions de France avait transmis une
contribution portant sur des éléments d?éclairage sur l?exercice de la
compétence de planification de la prévention et de la gestion des déchets
par les Régions et sur leur collaboration avec l?État et les collectivités en
charge de la mise en oeuvre.
Les recommandations formulées par la Cour des comptes dans son
document préparatoire m?amènent à vous formuler les remarques
complémentaires suivantes :
1 - Sur l?observation régionale de la gestion
et de la prévention des déchets
La Cour recommande de confier en 2023 aux observatoires
régionaux de la gestion et de la prévention des déchets le suivi de la mise
en oeuvre par les intercommunalités des objectifs nationaux (Ministère de
la transition écologique et de la cohésion des territoires, régions).
En 2022, la majorité des Régions sont déjà couvertes par un
observatoire régional. Ceux-ci sont d?ailleurs représentés par le RARE au
sein du Comité National Observation Economie Circulaire piloté par le
Ministère (qui s?est réuni une première fois le 5 juillet 2022). Le RARE
rassemble les observatoires régionaux des déchets français :
- Auvergne-Rhône-Alpes : SINDRA (portée par AURA-EE)
- Bourgogne-Franche-Comté : Alterre Bourgogne-Franche-Comté
- Bretagne : Observatoire Environnement Bretagne
- Centre Val de Loire : pas d?observatoire (consulter la page du Conseil
régional)
- Corse : Observatoire territorial des déchets
- Grand Est : Observatoire des déchets et de l?économie circulaire
- Guadeloupe : Observatoire des déchets de la Guadeloupe (portée par
Synerg?Ile)
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168 COUR DES COMPTES
- Guyane : Observatoire des déchets de la Guyane
- Hauts de France : ODEMA
- Ile de France : ORDIF (porté par l?Institut Paris Région)
- Martinique : pas d?observatoire
- Mayotte : pas d?observatoire
- Normandie : Biomasse Normandie et NEC (alimenté par les travaux
de Biomasse Normandie et de la CERC)
- Nouvelle-Aquitaine : ORDEC Nouvelle-Aquitaine (porté par l?AREC
Nouvelle-Aquitaine)
- Occitanie : ORDECO
- Provence-Alpes-Côte-d?Azur : ORD&EC
- Pays de la Loire : TEO Pays de la Loire
- Réunion : Observatoire Réunionnais des Déchets
Les observatoires régionaux des déchets ont pour mission de
contribuer à la prévention et à l?amélioration de la gestion des déchets et
de leurs impacts, par l?étude et la diffusion d?informations et de données.
Ils appuient l?élaboration des planifications régionales et suivent leur mise
en oeuvre. Enfin, ils peuvent contribuer aux échanges et à la concertation
sur ces enjeux prégnants des territoires. Disposant d?une véritable
expertise de la donnée, ils constituent un appui opérationnel des Régions
et de l?ADEME pour la mise en place des stratégies de prévention et de
gestion des déchets et des ressources. Les observatoires régionaux des
déchets peuvent être hébergés au sein d?une agence régionale de
l?environnement, d?une autre structure, ou mis en oeuvre directement par
leurs pilotes (Conseil régional, ADEME en général).
Le RARE leur offre un espace d?échanges et de mutualisation unique
et indispensable à l?amélioration des pratiques et l?optimisation des
moyens.
Un cadre de discussion national entre Régions de France et le
RARE permet d?assurer une convergence méthodologique des
observatoires répondant aux stratégies et objectifs régionaux.
Le cofinancement par l?ADEME de l?observation a constitué un
apport financier indispensable pour l?émergence des observatoires
régionaux dont la question de la pérennisation financière reste entière.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 169
2- Sur le renforcement du rôle planificateur des régions
La Cour des comptes appelle à un nécessaire renforcement du rôle
des régions avec un rôle de planification à affirmer et mentionne que dans
le cadre de la libre administration des collectivités territoriales, les
niveaux supra-intercommunaux, c?est-à-dire l?État et les régions
interviennent aujourd?hui en recourant principalement aux outils de
planification et de cofinancement. Le renforcement de ces outils implique
moins une évolution significative des compétences de l?État ou de ses
opérateurs qu?une plus grande implication des régions.
Une meilleure articulation entre le Code général des collectivités
territoriales (volet SRADDET) et le code de l?environnement (volet
PRPGD) pourrait être utile pour assurer la bonne lisibilité des obligations
législatives et réglementaires qui incombent aux Régions et aux EPCI.
3- Sur la déclinaison régionale des objectifs des REP
La Cour propose d?intégrer aux prochains arrêtés de cahier des
charges des filières REP une déclinaison de leurs objectifs au niveau
régional (Ministère de la transition écologique et de la cohésion des
territoires).
L?intégration aux prochains arrêtés de cahier des charges des
filières REP d?une déclinaison de leurs objectifs au niveau régional semble
cohérente avec le rôle de planification et de coordination confié aux
Régions d?autant que les quantités de déchets traitées par les filières REP
sont importantes puisqu?elles représentent plus de 10% des déchets non
dangereux non inertes. Cependant la déclinaison régionale des objectifs
nationaux et européens peut s?avérer complexe en fonction des filières et
des territoires. Il faut noter que des partenariats techniques et financiers
existent entre certaines filières REP et certaines Régions, lesquels peuvent
s?appuyer sur des conventions bipartites (voire tripartites avec l?ADEME).
Cette proposition viendrait compléter les éléments inscrits dans le
projet d?arrêté relatif aux données des filières à responsabilité élargie des
producteurs (REP) mis en consultation du public du 7 juin au 29 juillet
2022. Celui-ci prévoit que les éco-organismes transmettent chaque année
des informations aux Régions pour l?élaboration et le suivi des SRADDET.
Les Régions réitèrent leur demande que ces données soient des données
transmises à l?échelle territorialisée des EPCI et syndicats.
En effet, le maillage territorial des données devra permettre de
répondre à l?article R.541-16 du code de l?Environnement qui mentionne
que : « I. 5° [?] Le plan mentionne notamment les installations qu?il
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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170 COUR DES COMPTES
apparaît nécessaire de créer, d?adapter ou de fermer afin d?atteindre ces
objectifs et de gérer l?ensemble de déchets pris en compte [?]et en
cohérence avec les principes de proximité et d?autosuffisance, appliqués
de manière proportionnée aux flux de déchets concernés [?] et adaptée
aux bassins de vie? ». Par ailleurs, la mise à disposition à ces autorités
compétentes des données régionales sur les biens mis sur le marché est
nécessaire à la déclinaison régionale des objectifs européens et nationaux.
4 ? Sur la généralisation de la délégation des crédits ADEME
via les CPER
La Cour propose de généraliser à chaque contrat de plan État-
Région la délégation des crédits de l?ADEME en matière de transition
énergétique et d'économie circulaire (Ministère de la transition écologique
et de la cohésion des territoires, régions).
Un transfert du fonds économie circulaire (ou une partie) aux
Régions aurait été préférable pour offrir aux Régions toute latitude pour
financer des projets sur le territoire et mettre en oeuvre les objectifs de la
planification, comme Régions de France l?a fait valoir lors des discussions
parlementaires du projet de loi 3DS qui a malgré tout disposé dans son
article 57 une délégation de gestion pour les régions volontaires. Jugée
lourde administrativement et techniquement, très encadrée et partielle, la
mise en oeuvre de cette délégation apparait peu effective après plusieurs
mois de discussions.
En effet, il conviendrait que les Régions puissent disposer de
l?autonomie d?emploi des crédits pour mettre en oeuvre la planification et
accompagner les territoires en cohérence avec les stratégies, plans et feuilles
de routes régionaux. Par exemple, les critères d?intervention de l?ADEME
ne permettent pas de soutenir des opérations de mise aux normes
réglementaires alors même que certaines régions sont en retard sur le sujet.
Or les délégations ne peuvent se faire que sur la base des critères
d?intervention de l?ADEME. La mise en place de critères d?intervention
régionalisés et adaptés aux besoins propres des territoires semble nécessaire
pour permettre de financer davantage les équipements structurants et
indispensables à la réalisation des objectifs régionaux et nationaux.
Tels sont les remarques dont je voulais vous faire part en vue de leur
prise en compte dans le rapport de la Cour.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 171
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE L?ASSOCIATION
DES INTERCOMMUNALITÉS DE FRANCE
Au nom d?Intercommunalités de France, je tiens à vous remercier
pour avoir sollicité, par votre courrier du 28 juillet 2022, les réactions de
notre association au projet de rapport public thématique « Prévention,
collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser »
que la Cour publiera prochainement. Ce projet appelle de notre part les
observations exprimées dans le présent courrier.
Intercommunalités de France salue tout d?abord l?important travail
d?analyse mené par la Cour au travers de ce rapport et confirme
l?implication de notre association dans l?accompagnement à la prévention
et la gestion des déchets. A ce titre, nous partageons avec la Cour le constat
de la non-atteinte des objectifs nationaux de réduction des déchets
collectés et traités. Notre association considère cependant que les
comparaisons chiffrées avec d?autres pays sont à relativiser au regard des
incertitudes documentées sur les différences de méthodes statistiques, ainsi
que tous les autres facteurs culturels, économiques dans chaque pays. Par
ailleurs, nous tenons à souligner que ce mandat sera marqué par l?entrée
en vigueur de nouvelles obligations qui permettront une réduction à la
source de la production de certains déchets :
? Généralisation de l?extension des consignes de tri plastique à compter
du 31 décembre 2022
? Généralisation du tri à la source des biodéchets
? Mise en oeuvre de nouvelles filières REP
Nous souscrivons aux recommandations formulées par la Cour
d?unification des documents nationaux de programmation (PNPD et
PNGD) ainsi que d?harmonisation des documents locaux (RPQS et
PLPDMA) considérant qu?elles répondent à un besoin d?une plus grande
intégration des enjeux de prévention dans les stratégies de gestion des
déchets.
Intercommunalités de France s?interroge toutefois sur les
propositions formulées par la Cour dans sa recommandation n°6 pour
encourager le déploiement de la tarification incitative en renforçant le
soutien financier aux collectivités qui semblent à ce jour insuffisantes pour
contourner les difficultés de sa mise en oeuvre.
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172 COUR DES COMPTES
1. Réduction des déchets à la source : la responsabilité
des metteurs en marché
Nous réitérons notre analyse consistant à remarquer que les
différents acteurs en responsabilité en France, ne bénéficient pas des
mêmes remarques et injonctions à agir. Les collectivités, pourtant situées
« au bout du tuyau » du cycle « production vente usage destruction ou
abandon des produits », sont sommées d?être les acteurs principaux de la
politique de prévention-réduction. Ainsi, si l?on excepte les biodéchets, ce
sont davantage les stratégies commerciales des metteurs en marché, qui
orientent les comportements des consommateurs.
Au regard des dépenses de publicité, faites par les producteurs et
les distributeurs ? plus de 470 ¤ par Français en 2021361, soit trois fois le
coût du service public de gestion des déchets (SPGD) ? il conviendrait de
laisser aux premiers la prise en charge totale des coûts des services de tri
et de collecte des produits de chaque filière actuellement supportés par les
collectivités afin de rééquilibrer la répartition des coûts entre producteurs
et consommateurs. En parallèle, les objectifs attribués aux acteurs des
filières REP sont pour le moins vagues mais surtout non contrôlés.
Intercommunalités de France regrette cette situation, qui en plus de
laisser à charge des contribuables locaux ce qui devrait être à charge des
consommateurs, ne concerne pas toutes les productions commercialisées
qui pourtant finissent dans les circuits de collecte et de traitement des
collectivités. Par ailleurs, la loi de finances de 2019 a acté une trajectoire
haussière de la TGAP, dans l?objectif de pénaliser le traitement par
enfouissement ou incinération et encourager le déploiement d?une
économie circulaire. Cette hausse est particulièrement problématique pour
les collectivités qui ne disposent pas de leviers d?action pour influer sur la
réemployabilité et la recyclabilité des produits ou encore sur l?acte
d?achat. Il existe un volume incompressible de déchets qui doivent être
dirigés aujourd?hui vers ces exutoires et qui pourrait faire l?objet d?un
tarif de base révisé. Nous renouvelons donc notre proposition d?une TGAP
amont sur tous les produits des filières pour responsabiliser les metteurs
en marché ; cela concernerait autant d?incitation à la durabilité, à la
réutilisation qu?au recyclage matière. Cette tarification, outre qu?elle
permettrait la prise en charge de tous les produits manufacturés devenus
déchets (qui seront facturés par l?État 6,5 centimes par kg en 2025), sans
pour cela que le consommateur puisse arbitrer sur ses achats puisque c?est
le contribuable qui paie la TGAP.
361 Baromètre unifié du marché publicitaire, Kantar, 2021
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 173
Nous rappelons aussi que l?atteinte des objectifs nationaux et
régionaux assignés aux politiques et actions d?économie circulaire
suppose des ressources comme la TGAP nantie d?une hausse programmée
par un accord conclu lors du Grenelle de l?Environnement en 2008 et qui
devait alimenter la politique déchets via l?ADEME. Ces ressources sont
aujourd?hui dissoutes dans le budget de l?État sans que les fonds
nécessaires pour la prévention et pour l?économie circulaire ne soient
rendus disponibles. Intercommunalités de France continue d?appeler à un
retour des recettes de la TGAP vers le financement d?actions vertueuses
dans lesquelles s?engagent les collectivités dans le traitement des déchets.
Cette piste vient soutenir la proposition de la Cour, que nous partageons,
d?impliquer davantage les régions dans la planification, l?animation, et
le financement qui acterait le lien entre les Plans Régionaux de
Prévention et de Gestion des Déchets et les Plans régionaux pour
l?Économie Circulaire.
2. Assouplir le cadre de déploiement de la tarification incitative
Une nouvelle fois la Cour insiste sur l?efficacité de la tarification
incitative dans certains des territoires où sa mise en oeuvre a pu être
vérifiée sur un temps long et un effort soutenu sur le tri à la source des
biodéchets.
Le rendez-vous de la généralisation obligatoire de ce tri à la source
des biodéchets devrait nous instruire sur les limites de l?exercice du signal
prix sur le comportement des citoyens contribuables consommateurs. En
effet toutes les expériences en cours et les études de dimensionnement des
services nécessaires à ce tri à la source indiquent une hausse des dépenses
du SPGD, effaçant les bénéfices jusqu?alors promis aux « bons élèves » et
contraignant encore les budgets des collectivités.
Par ailleurs, le volume croissant des déchets issus de produits
manufacturés collectés en déchèterie interroge sur l?extension des
systèmes de facturation liée à ce type de collecte et donc sur le coût global
de la redevance. Ces équipements qui reçoivent des tonnages équivalents
à ceux du porte-à-porte, doivent régulièrement être mis à niveau :
l?augmentation du nombre de filières suppose des extensions foncières
souvent difficiles à envisager sans parler de la formation technique et
administrative des agents chargés de faire appliquer des réglementations
souvent vécues comme contraignantes par les usagers, et auxquelles
s?ajoutent des relations tendues avec les prestataires des REP
opérationnelles.
Intercommunalités de France demeure favorable au déploiement
d?une dimension incitative dans la tarification du SPGD lorsque cela est
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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174 COUR DES COMPTES
possible mais estime qu?elle ne constitue qu?un levier parmi d?autres de
prévention des ordures ménagères résiduelles (OMR), d?autant plus
qu?elle opère en aval de la chaîne, après les actes de production et de
consommation.
Afin de tendre vers une plus grande couverture de la population, au-
delà des frontières administratives, Intercommunalités de France appelle
ainsi à adopter certaines souplesses dans le cadre de la tarification
incitative. En premier lieu, Intercommunalités de France propose de
permettre par la loi une coexistence pérenne de plusieurs régimes de
tarification sur un même territoire. Cette possibilité existe déjà à titre
transitoire que ce soit pour permettre l?expérimentation de la taxe
incitative362 ou pour tenir compte de la fusion d?intercommunalités aux
régimes différents363. En effet, les principales difficultés techniques
identifiées pour ce déploiement apparaissent dans les milieux urbains
denses et dans les milieux touristiques ; ceux-ci caractérisent rarement
l?intégralité d?un territoire intercommunal. Une seconde alternative
transitoire pourrait consister en une capacité de zonage de la TEOM, en
fonction des performances à l?image de ce qui est déjà permis aujourd?hui
mais en fonction de l?importance du service rendu364.
? Faciliter l?accès des collectivités au fichier de taxe sur le foncier bâti :
Intercommunalités de France souhaite attirer l?attention de la Cour
sur un autre défi technique propre à la mise en oeuvre de la tarification
incitative. La taxation et le recouvrement de la part incitative de la TEOM
sont effectués dans le cadre de la taxation et du recouvrement de la taxe
foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Les collectivités qui souhaitent
mettre en place une part incitative de la TEOM sont conduites à repartir
du fichier foncier de la taxe foncière sur les propriétés bâties.
Elles ont la charge d?établir et de notifier aux services de la DGFiP,
avant le 31 mars de l?année d?imposition, le montant, en valeur absolue,
de la part incitative de la TEOM pour chaque local imposé à la TEOM. A
cet effet, les services de la DGFiP leur fournissent un fichier dit « d?appel
» recensant les locaux imposables au 1er janvier de l'année d'imposition
(hors constructions neuves) et notamment la valeur locative foncière
retenue pour l?établissement de la TEOM (décret de 2012).
Ce fichier doit être complété par la collectivité avec les éléments utiles
à l?administration fiscale pour établir l?imposition, à savoir : le montant de
362 Article 1522 bis du Code général des impôts, pour une durée portée à 7 ans
363 Article 1639 A bis du Code général des impôts et article L2333-76 du Code général
des collectivités territoriales
364 Article 1636 B undecies du Code général des impôts
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 175
cotisation correspondant à la part incitative de la TEOM pour chaque local
imposable. Il est malheureusement fréquent que ces fichiers, soient
incomplets et que l?interface informatique rende compliqué l?appariement
du fichier foncier avec le fichier des usagers du service de déchets.
De fait, alors que la redevance est payée par l?usager (qu?il soit
propriétaire ou locataire), la TEOM est considérée comme une taxe
additionnelle à la taxe foncière, payée par les seuls propriétaires, tout en
étant considérée comme une charge récupérable. Par conséquent, les
fichiers de TEOM comportent le nom des propriétaires, alors que
l?individualisation de la part incitative nécessite d?identifier le « producteur
de déchets », c?est-à-dire le locataire. Il peut en résulter des difficultés de
connexion entre le fichier fourni par la DGFiP et les bacs nominatifs. Par
conséquent, la mise en oeuvre de la tarification incitative en habitat collectif
représente une réelle difficulté d?identification des redevables potentiels
Ces difficultés sont connues et rapportées par de nombreuses
collectivités qui renoncent de ce fait à instituer une part incitative de
TEOM. Ainsi, Intercommunalités de France considère que la mise en place
et le bon fonctionnement d?une tarification incitative nécessite que
l?administration fiscale, qui par ailleurs prélève un pourcentage au titre
de la gestion et du recouvrement de la fiscalité foncière et de la TEOM,
facilite le travail de recoupement des fichiers.
Telles sont les observations que nous souhaitions porter à votre
connaissance. Espérant que ces éléments répondront à vos attentes et
pourront contribuer au travail d?évaluation et de propositions de la Cour,
je vous prie de croire, Monsieur le Premier président, à l?assurance de mes
sentiments les meilleurs.
MADAME LA PRÉSIDENTE DE FRANCE URBAINE
Par courrier en date du 28 juillet 2022, vous nous avez adressé le
projet de rapport public thématique « Prévention, collecte et traitement des
déchets ménagers : une ambition à concrétiser » que la Cour se propose
de publier prochainement. Ce projet de rapport appelle de notre part les
observations exprimées dans la présente lettre.
France urbaine salue le travail d?analyse de la Cour et souscrit à
plusieurs de ses recommandations, qu?il s?agisse d?aller vers une
harmonisation des bilans PLPDMA et des rapports annuels sur le prix et
la qualité du service public de prévention et de gestion des déchets (PROS)
en les fusionnant en un compte-rendu unique (n°5), d?« instaurer une taxe
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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176 COUR DES COMPTES
de séjour additionnelle dont le produit serait affecté aux actions relatives
à la prévention et à la gestion des déchets », permettant de couvrir les coûts
supplémentaires spécifiques supportés par les communes touristique, ou
de réduire le nombre d?indicateurs de pilotage à quelques indicateurs-clefs
dans un tableau de bord national annuel et par type d?EPCI, une mesure
qui nous paraît aller dans le bon sens, dès lors que les collectivités et leurs
groupements seront associés à leur construction et à la définition de leur
périmètre.
Nous nous félicitons que la Cour préconise dans sa
recommandation n°7 de renforcer le soutien financier aux collectivités qui
souhaiteraient déployer la tarification incitative, plutôt que d?aller vers un
système plus contraignant qui viendrait pénaliser celles qui y ont renoncé,
pour des raisons de coût de mise en oeuvre et/ou de complexification
opérationnelle. Nous doutons toutefois qu?elle soit suffisante pour infléchir
significativement la tendance dans les zones urbaines, lesquelles sont
notamment confrontées aux difficultés techniques inhérentes aux
copropriétés en habitat collectif.
La tarification incitative n?est qu?un des leviers de réduction des
OMR...
Il nous apparaît que si la tarification incitative agit comme un levier
de réorientation des flux et peut contribuer à l?amélioration des gestes de
tri, elle n?induit pas, comme le souligne le Cercle national du recyclage,
« de tendance à la baisse des quantités totales de déchets ménagers
collectés »365, et ne semble pas avoir d?effet notable sur la réduction
globale du volume des OMR, si l?on s?en réfère notamment à l?exemple
allemand366.
Il est de surcroît difficile d?attribuer ces réallocations entre flux à
la seule mise en place de la tarification incitative, tant elle n'est souvent
que l?un des éléments d?une politique globale d?amélioration des
performances, si bien, comme le rappelle le CGDD, que « l?écart constaté
entre les tonnages collectés dans les collectivités en REOMi et dans celles
qui ne le sont pas ne peut s?interpréter comme directement causé par le
passage en REOMi. En effet, les collectivités ayant adopté ce type de
tarification peuvent présenter d?autres caractéristiques qui expliquent cet
365 Tarification incitative : la communication en première ligne, mars 2018, Centre
National du Recyclage, page 65.
366 En Allemagne, où part de communes ayant institué la tarification incitative avoisine
les 100 %, la production de DMA était de 625 kg par habitant en 2015, contre 573 kg
en France la même année.
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 177
écart367 ». Car la mise en place de la tarification incitative s?accompagne
généralement d?autres actions de sensibilisation et de prévention, et il est
utile de rappeler que les baisses des tonnages des OMR interviennent
« avant la mise en place effective de la tarification incitative, plus
précisément entre l?année de communication sur ce nouveau mode de
financement et l?année de la première facturation. Après la mise en place
effective de la tarification incitative il est possible d?observer pour les
quatre collectivités étudiées une stabilisation des quantités d?ordures
ménagères résiduelles. Ceci prouve que ce n?est pas la tarification
incitative en elle-même qui peut jouer un rôle mais l?annonce de la
tarification incitative »368.
La réduction des tonnages d?OMR devrait par ailleurs connaître
une nouvelle baisse avec l?entrée en vigueur récente ou prochaine de
nouvelles dispositions législatives et réglementaires, qu?il s?agisse :
- de la généralisation de l?extension des consignes de tri plastique à
tous les EPCI d?ici le 31 décembre 2022 : dans les territoires où elle a été
expérimentée, la simplification des gestes de tri des emballages a permis
d?augmenter la part des déchets triés de de 3 kg par habitant369 ;
- de la généralisation au plus tard au 31 décembre 2023 prévue par
la loi AGEC, du tri à la source des biodéchets (en collecte séparée, en porte
à porte, ou en gestion de proximité, avec compostage individuel ou
partagé) qui représentent, comme le rappelle la Cour, jusqu?à un tiers des
volumes des déchets des ménages et des entreprises ;
- de la création de nouvelles filières REP sur les produits du tabac,
les jouets, les articles de sport, de loisir, de bricolage et de jardin370, et les
produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment371 ;
- de la montée en puissance des filières REP existantes ;
- des nouvelles règles visant à rendre la quasi-totalité des biens
physiques présents sur le marché de l'Union européenne plus écologiques,
circulaires et sobres en énergie tout au long de leur cycle de vie, englobant
la conception, l'utilisation courante, la réaffectation et l'élimination des
367 La tarification incitative de la gestion des ordures ménagères - Quels impacts sur les
quantités collectées ? ? CGDD 2016 (page 21).
368 Tarification incitative : la communication en première ligne, mars 2018, Cercle
National du Recyclage, page 60.
369 https://www.citeo.com/le-mag/simplification-du-tri-en-france-fait-le-point/
370 Décret n° 2021-1213 du 22 septembre 2021.
371 Décret n° 2021-1941 du 31 décembre 2021.
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178 COUR DES COMPTES
produits, telles qu?annoncées par la Commission européenne le 30 mars
2022 dans son plan d?action pour une économie circulaire372.
Assouplir le cadre de la tarification incitative
Alors que ces mesures vont diminuer mécaniquement et
significativement les volumes de déchets, un allégement des coûts de mise
en oeuvre de la tarification incitative des premières années, objet de la
recommandation n°6 de la Cour, sera-t-il de nature à enclencher une
nouvelle dynamique en faveur de la tarification incitative ?
Si France urbaine accueille cette proposition favorablement, elle
constate également son caractère limité dans le temps, alors que les coûts
de mise en oeuvre de la tarification incitative demeurent, eux, pérennes.
Nous savons par ailleurs par expérience que l?État cherche toujours à
réduire dans le temps le niveau de ses transferts aux collectivités, et qu?il
pourrait chercher à compenser d?une manière ou d?une autre l?effort qu?il
consentirait sur la réduction des frais de gestion sur la TEOMi mise en
oeuvre par les collectivités.
Cette question est par ailleurs posée dans un contexte où les
collectivités sont confrontées à de nouvelles contraintes et d?immenses
défis :
- l?explosion des prix de l?énergie, dont tout laisse à penser qu?elle
sera durable, contraint très fortement leurs budgets, et entraîne déjà des
arbitrages difficiles allant parfois jusqu?à la réduction de la disponibilité
voire la fermeture de certains équipements ;
- les enjeux climatiques vont nécessiter de leur part de lourds
investissements, tant pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre
que pour adapter leur territoire aux bouleversements climatiques en cours
et à venir.
C?est pourquoi, au-delà des mesures d?accompagnement financier,
il nous semble indispensable de simplifier les modalités de mise en oeuvre
de la tarification incitative dans les zones urbaines. en l?adaptant aux
contraintes et aux spécificités de ces territoires, où il est souvent très
complexe de mettre en oeuvre une mesure individuelle de la production de
déchets.
372 Communication from the Commission to the European parliament, the Council, the
European economic and social committee and the Committee of the regions on making
sustainable products the norm, 30 mars 2022.
https://eur-lex.europa.eu/legal-
content/EN/TXT/PDF/?uri=COM:2022:140:FIN&from=DA
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https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=COM:2022:140:FIN&from=DA
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 179
Le franchissement de ces obstacles techniques suppose, lorsque cela
est possible, d?engager de lourds investissements, qui pourraient certes
être en partie subventionnés par un rehaussement des mesures de soutien
sur les premiers exercices, mais dont les effets de moyen/long terme sur les
coûts de traitement restent limités : pré-collecte et collecte ne représentent
pour mémoire que 40% du coût total du SPGD, et la part variable du
SPGD n?est elle-même que d?une vingtaine de pourcent de ce coût total.
Assouplir le cadre pour tenir compte des spécificités de ces
territoires permettrait d?aboutir à des résultats de même ordre, à des coûts
considérablement réduits, et sans complexification opérationnelle de la
collecte.
Deux mesures nous sembleraient ainsi de nature à lever les
blocages :
1. autoriser la cohabitation pérenne de la TEOM et de la TEOMi
sur un même territoire, une option qui permettrait aux collectivités
volontaires d?instituer une part incitative dans les zones à faible densité
d?habitation sans avoir à craindre une généralisation, avant d?envisager
une extension progressive à d?autres secteurs. À défaut d?une coexistence
pérenne TEOM/TEOMi, il conviendrait a minima d?allonger
significativement le délai au-delà duquel s?opère une bascule vers l?un ou
l?autre modèle, à condition dans ce cas d?imaginer des solutions moins
coûteuses pour développer la tarification incitative en zones denses.
Depuis 2012, la TEOM incitative (TEOMi) peut être instituée sur
une partie du territoire d?une collectivité, dans le cadre d?une
expérimentation initialement limitée à 5 ans ? puis portée à 7 ans par la
loi de finance 2021 - à l?issue de laquelle la tarification incitative doit être
généralisée, ou abandonnée. Cet allongement de deux ans ne résout pas
fondamentalement le problème qui retient de nombreuses collectivités de
se lancer dans la démarche ;
2. permettre la mise en oeuvre d?une tarification incitative collective
sur tout un territoire, ou autoriser la cohabitation des deux types de
tarification incitative (individuelle et collective) au sein d?un même
territoire. Une métropole adhérente a ainsi étudié trois scénarios de passage
à l?incitatif : un basculement en REOMi, l?instauration d?une TEOMi, ou la
mise en place d?une « tarification incitative collective », basée sur une
production de déchets mesurée collectivement par secteur (communes,
quartiers de la ville centre). Dans ce dernier scénario, la répartition des
quantités de déchets, sur lesquelles seraient appliquées des tarifs, serait en
fonction de la valeur locative de chaque local soumis à la TEOM, au prorata
de la valeur locative du secteur (ménages et professionnels, hors bases des
locaux non-utilisateurs). L?objectif de cette solution est de créer des
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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180 COUR DES COMPTES
dynamiques collectives de réduction des déchets sur les zones concernées,
d?éviter certains comportements d?évitement (jets clandestins etc.) parfois
associés à la tarification individuelle, et de consacrer plus de moyens aux
actions de prévention, plutôt que de les affecter aux importantes tâches
administratives et opérationnelles nécessaires à la mise en oeuvre d?une
tarification individuelle. La tarification incitative collective mériterait, dans
l?esprit de la loi 3DS, d?être expérimentée dans des collectivités volontaires
sur la totalité de leur territoire ou, au choix des collectivités, n?être activée
que dans les zones denses, avec une tarification incitative individuelle dans
les zones de faible densité.
Nous notons avec satisfaction que cette dernière proposition est
citée dans le rapport de la Cour.
Réduire la production de déchets produits à la source...
Au-delà des questions de fiscalité, il nous semble indispensable de
considérer l?ensemble de la chaîne de « production de déchets », car plan
de réduction drastique des tonnages ne saurait reposer sur le seul aval,
c?est-à-dire une fois que le déchet a été créé. Il faut agir le plus en amont
possible, en poursuivant les efforts de développement d?une économie
circulaire et de la fonctionnalité, en interdisant les emballages
objectivement inutiles et en réduisant le volume de tous ceux qui peuvent
l?être, et en envoyant un signal prix au moment où il est le plus efficace
pour orienter les choix de consommation et éviter que le déchet ne soit
créé, c?est-à-dire au moment de l?acte d?achat.
Or le financement du traitement du SPGD, qui repose aujourd?hui
à 80 % sur les collectivités, traduit un profond déséquilibre entre acteurs
que France urbaine juge impératif de corriger pour tendre a minima vers
la parité. La proposition C.4 de la Convention citoyenne pour le climat,
citée par la Cour, de « remplacer une part significative de la taxe
d?enlèvement des ordures ménagères (TEOM) par des modalités plus
justes et favorisant les comportements écoresponsables » peut aussi
s?entendre comme un nécessaire rééquilibrage des responsabilités et des
contributions entre acteurs.
La TGAP dans sa version actuelle mériterait ainsi d?être
entièrement revue, car si l?objectif de réduction des mises en décharge et
d?incinération est évidemment légitime, la forte augmentation décidée par
la loi de finances 2019 pénalise fortement les collectivités et, comme le
souligne la Cour, « cette hausse uniforme a l?inconvénient de frapper
indistinctement les déchets qui pourraient être mieux triés grâce à
l?intervention des collectivités et les déchets non recyclables du fait des
choix techniques des entreprises sur les volumes desquels les collectivités
ne disposent d?aucun moyen d?action. » D?autant que contrairement aux
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 181
demandes réitérées des collectivités, les recettes supplémentaires générées
par cette hausse n?ont pas été fléchées vers des projets d?économie
circulaire, et que la mise en place des nouvelles filières REP prévue par la
loi AGEC de 2020, qui devait constituer l?une des contreparties de la
hausse de la TGAP, a pris un retard (bâtiment, bricolage, jouets et sport,
notamment) qui n?a fait l?objet d?aucune compensation pour les
collectivités373.
La question de l?instauration d?une taxation amont de tous les
déchets non ou difficilement recyclables, qui avait fait l?objet d?un débat
lors du vote de l?augmentation de la TGAP en 2019, doit à nos yeux être
relancée. Cette taxation, qui enverrait le signal prix évoqué supra, pourrait
prendre la forme d?une TGAP dite « amont », ou d?une REP « déchets
résiduels », qui garantirait un retour des recettes afférentes aux
collectivités374.
Les recettes dégagées par ces nouvelles taxes amont (et
l?augmentation de taxe aval décidée en 2019) pourraient ainsi être
affectées à des fonds ou actions de réduction des déchets à la source, qu?il
s?agisse :
- du fonds « économie circulaire » de l?ADEME visant à
« accompagner la politique des pouvoirs publics et orienter le
comportement des acteurs et les investissements en multipliant les actions
de prévention portées par les collectivités locales et les entreprises, en
déployant les démarches territoriales intégrées de prévention et de gestion,
et en soutenant les investissements de tri, de recyclage, de valorisation
organique et énergétiques nécessaires »375 ;
- de subventionner la collecte des biodéchets, dont la valorisation
deviendra obligatoire au 1er janvier 2024, et qui n?est pas aujourd?hui
aidée ;
373 Le déséquilibre des efforts se lit aussi dans le niveau d?efforts demandés aux
collectivités par rapport aux acteurs économiques : la loi AGEC votée en 2000 fixe en
effet un objectif de réduction de 15 % des quantités de DMA produits par habitant,
quand elle ne demande un effort limité à 5 % sur les quantités de déchets résultant
d?activités économiques (par unité de valeur produite).
374 Les éco-contributions associés à une REP « déchets résiduels » pourraient par
ailleurs être modulées en fonction de l?intégration en amont par le fabricant d?une
démarche de développement durable (ex : utilisation de matières recyclées).
375 https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/fonds-
economie-circulaire
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https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/fonds-economie-circulaire
https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/fonds-economie-circulaire
182 COUR DES COMPTES
- ou de créer un fonds spécifique d?aide aux actions de prévention
de la production de déchets à la source, actions qui comme le souligne la
Cour dans le paragraphe B/ du rapport mériteraient d?être renforcées, tant
qualitativement que quantitativement. France urbaine s?est constamment
positionnée en faveur de la prévention et de la réduction de la production
de déchets à la source, en poussant cet axe pendant les débats
parlementaires autour de la loi AGEC, ou en participant à des initiatives
comme celle des territoires zéro plastique376. La prévention et la réduction
sont les volets prioritaires à privilégier et à renforcer, tout comme le
respect de la hiérarchie des modes de traitement des déchets inscrite dans
le code l?environnement : réutilisation, recyclage, valorisation et
élimination377. La création d?un tel fonds apparaît d?autant plus nécessaire
que si nous partageons entièrement la nécessité d?allouer un volant plus
important de crédits au volet prévention, le contexte budgétaire, marqué
par la poursuite de la hausse de la TGAP, et l?impact des coûts afférents à
la collecte séparative des biodéchets, qui devrait selon l?ADEME être de
l?ordre de 15 à 25 ¤ par habitant378, va réduire les marges de manoeuvre
budgétaires des collectivités.
Telles sont les observations que nous souhaitions porter à votre
connaissance.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE L'ASSOCIATION
DES MAIRES DE FRANCE (AMF)
Vous avez bien voulu transmettre à l'Association des maires de
France et des présidents d'intercommunalité le projet de rapport public
thématique intitulé « Prévention, collecte et traitement des déchets
ménagers : une ambition à concrétiser » et je vous en remercie.
L'AMF souhaite vous faire part de ses remarques concernant, d'une
part vos recommandations, et d'autre part votre analyse plus générale de
la gestion des déchets.
Concernant les recommandations n°1 à n°5, qui ont pour objectifs
de simplifier et de rationaliser les documents de planification et de suivi,
mais également de mettre en place six indicateurs de suivi, l'AMF appuie
376 Guide « territoires zéro pollution plastique », WWF des territoires zéro plastique,
WWF, septembre 2020 : https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-
09/20200920_Guide_Territoires-Zéro-Pollution-Plastique_WWF.pdf
377 Article L. 541-1 II du Code de l?Environnement
378 https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/valorisation-biodechets-agir
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https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-09/20200920_Guide_Territoires-Zéro-Pollution-Plastique_WWF.pdf
https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-09/20200920_Guide_Territoires-Zéro-Pollution-Plastique_WWF.pdf
https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/valorisation-biodechets-agir
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 183
ces recommandations. La multiplication de documents ayant sensiblement
les mêmes objectifs nuit à la clarté de la politique de prévention et de
gestion des déchets. Les acteurs opérationnels s'épuisent à fournir des
données pour alimenter des démarches de planification qui sont obsolètes
à peine publiées. C'est particulièrement vrai pour les plans régionaux qui
ont fait l'objet de nombreuses modifications législatives ou réglementaires
nécessitant une refonte des documents.
L'AMF estime donc qu'il est préférable de mettre en oeuvre un plan
imparfait plutôt que de perfectionner sans cesse un document qui restera
incomplet. Les collectivités ont besoin de temps et de visibilité pour donner
un sens à une démarche de planification.
Concernant les indicateurs de suivi, l'AMF ne peut que converger
avec votre analyse. Comme les autres acteurs de la gestion des déchets, les
collectivités sont sollicitées pour fournir des données afin d'alimenter un
grand nombre d'études initiées par l'ADEME. En dehors du fait que ces
données étant spécifiques à chaque étude, elles demandent souvent des
recherches et des calculs, augmentant de ce fait le temps qui leur est
consacré, elles sont trop spécifiques à l'objet de l'étude pour pouvoir être
utilisées pour le suivi de la mise en oeuvre de la politique des déchets.
Épuisées par ces demandes incessantes de données, les collectivités
éprouvent un agacement certain de ne pas pouvoir obtenir des indicateurs
fiables en retour. Sans remettre en cause la pertinence des études réalisées,
l'ensemble des acteurs, et les collectivités en particulier, ont besoin
d'indicateurs faciles à renseigner, raisonnablement fiables et surtout
stables dans le temps, afin de constituer des séries statistiques susceptibles
de mesurer les évolutions constatées.
L'harmonisation des différents bilans et rapports demandés aux
EPCI éviterait également la dispersion des informations, qui rendent
souvent illisibles des documents, pourtant destinés à informer les citoyens.
Cette standardisation, qui n'empêche pas les collectivités d'y ajouter des
informations à caractère plus local pour leurs administrés, permettrait
également une meilleure comparaison, voire une compilation plus aisée de
ces documents.
Il serait également pertinent de mettre en place des indicateurs,
nationaux et locaux, qui pourraient être communiqués rapidement car ils
sont calculés sur la base de données à date, sans attendre la clôture
définitive de tous les comptes. Par exemple, les tonnages collectés et
recyclés, ainsi qu'une estimation fiable des dépenses engagées et des
recettes perçues, sont disponibles au premier trimestre de l'année suivante.
Ces données, même incomplètes, pourraient être utilisées pour mettre en
place des indicateurs immédiatement disponibles et sans attendre deux ans
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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184 COUR DES COMPTES
une validation statistique qui portera sur une variation inférieure à 5%.
Les collectivités de traitement sont en capacité de renseigner de tels
indicateurs rapidement, ce qui permettrait aux EPCI de disposer d'un
meilleur suivi de la gestion de leurs déchets. A l'échelle nationale, les
autorités publiques gagneraient également à disposer d'indicateurs moins
précis, mais plus fréquents, afin de mieux suivre les politiques publiques
mises en place.
L'AMF est également sensible à votre recommandation de décliner
les plans de prévention élaborés par les syndicats de traitement au niveau
de chaque EPCI. Nous suggérons même, dans la mesure du possible, de
laisser chaque commune s'approprier certains éléments de ce plan pour
les mettre en oeuvre. Si la collecte et le traitement sont des opérations
techniques qui bénéficient de la mutualisation, la prévention des déchets
est l'affaire de chacun, qui peut agir à son échelle.
Concernant votre recommandation n°6 qui propose de favoriser la
mise en place de la tarification incitative en allégeant le coût pour les
collectivités grâce à un financement complémentaire de 80% sur les
premiers exercices, l'AMF trouve cette proposition intéressante et adaptée
aux obstacles rencontrés pour effectuer les investissements nécessaires.
Nous avons particulièrement apprécié la mesure et les nuances de votre
analyse concernant les difficultés rencontrées par les collectivités pour
mettre en place la tarification incitative.
Dans ce domaine, les collectivités ne sont pas opposées à cette
évolution de la tarification des déchets, mais elles sont inquiètes face à la
perspective de plusieurs risques : la fragilisation de leurs ressources alors
qu'elles ont besoin d'assurer un service de salubrité, les investissements
conséquents que représente l'acquisition des matériels nécessaires
(identification des bacs, bennes équipées de systèmes de mesures, logiciels
de suivi), la crainte d'une multiplication des dépôts sauvages et la gestion
des impayés. La gestion des impayés tend à devenir de plus en plus en plus
difficile et fait peser des risques financiers sur les collectivités. C'est le cas
des redevances qui ne permettent pas de compenser les déficits par le
budget général. Il devient urgent de traiter ces problèmes si les pouvoirs
publics veulent réellement inciter les collectivités à la mettre en oeuvre.
S'agissant de la TEOM, l'AMF partage votre souhait de clarification
du périmètre des dépenses prises en compte. Toutefois, nous trouvons
regrettable que la jurisprudence tende à exclure des dépenses éligibles le
ramassage des corbeilles de rue, le nettoyage des marchés alimentaires et
forains ; il s'agit de déchets ménagers et assimilés ou de déchets des
services des collectivités (de la voirie plus particulièrement), collectés
dans le cadre du service public afin d'assurer la salubrité et traités avec
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 185
les autres DMA. Dans le contexte actuel, il semble inutile et non pertinent
d'ouvrir ce chantier.
Concernant votre recommandation n°9 qui ouvre la possibilité
pour les collectivités de confier la vente des produits issus du tri à l'éco-
organisme des emballages, l'AMF est particulièrement attentive à ce que
cette opportunité soit fondée sur le volontariat des collectivités. De plus,
les marchés des matériaux ayant des caractéristiques différentes en
fonction des matières, il est préférable que ce choix soit effectué matériau
par matériau, comme c'est le cas pour les options de reprise.
Concernant la prévention, son arrivée dans le débat public
encourage les collectivités à mettre en place des politiques dépassant
largement la seule sensibilisation. Il serait regrettable que la prévention
soit réservée uniquement aux intercommunalités et aux syndicats de
gestion des déchets. Si la réduction des déchets a des impacts directs sur
les quantités et la qualité des déchets gérés, elle se prépare bien en amont.
Les politiques de prévention doivent être partagées par tous les niveaux
des collectivités, dans la gestion de leurs propres déchets, mais aussi dans
la mise en oeuvre de leurs autres politiques.
Toutefois, I'AMF est opposée à l'idée d'adosser systématiquement
des ressourceries aux déchèteries. En effet, les déchèteries sont situées
dans des zones peu attractives et les particuliers s'y rendent uniquement
pour se débarrasser de leurs déchets puis en repartent aussitôt. Ils ne
viennent pas pour y faire des achats. Le succès de l'initiative de la «
déchèterie à l'envers » n'est pas reproductible partout. Que les déchèteries
servent à alimenter les ressourceries est tout à fait envisageable, mais les
déchets récupérés pour réemploi ne doivent pas rester sur le même site.
Les déchèteries ne sont pas aménagées pour cela et le risque de pillage et
de violence n'est pas négligeable. Et quoi qu'il en soit, cette décision est du
domaine de la libre administration des collectivités.
Concernant la gestion des déchets produits par les activités
économiques, l'AMF tient à faire observer que, si la gestion des déchets
des particuliers fait l'objet de nombreux contrôles à travers les collectivités
et les éco-organismes, il n'en est pas de même des déchets des activités
économiques, qui représentent des tonnages dix fois supérieurs. Les
difficultés rencontrées pour faire appliquer le décret « 5 flux » puis « 7 flux
», en sont l'illustration. En effet, les services de l'État sont compétents pour
les installations de traitement des déchets, les maires pour les espaces
publics et la voirie, mais personne ne peut contrôler la gestion des déchets
à l'intérieur des entreprises. Cette dissymétrie dans les obligations et les
responsabilités nuit à l'efficacité de la politique nationale de gestion des
déchets.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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186 COUR DES COMPTES
L'AMF ne partage pas votre souhait de voir les déchets des
professionnels rejoindre les installations de collecte des collectivités,
notamment les déchèteries. Depuis plus de 10 ans, les collectivités gérant
des déchèteries essaient d'éviter d'accueillir les déchets de professionnels.
En effet, les professionnels n'ont ni les mêmes attentes que les particuliers
(notamment en terme d'horaires d'ouverture ou de volumes acceptés), ni
les mêmes déchets (déchets dangereux spécifiques aux activités
professionnelles, quantité et taille des cartons d'emballages par exemple).
De ce fait, les professionnels ne sont pas satisfaits du service et la présence
des déchets professionnels perturbe le fonctionnement pour les
particuliers.
De plus, il est souvent difficile de faire payer le service par les
professionnels alors qu'il semble gratuit pour les particuliers (en fait il est
payé par leurs impôts). Dans ce cas, la gestion des déchets des
professionnels est financée par les ménages. Enfin, lorsqu'il existe une
filière REP pour les déchets ménagers, l'accès des professionnels à la
déchèterie conduit la collectivité à devoir payer pour le traitement des
déchets des professionnels, qui ne sont pas de sa compétence, alors que la
filière REP prend en charge gratuitement les déchets des ménages.
C'est pourquoi, les collectivités sont réticentes à accueillir les
déchets des professionnels dans leurs installations car ils sont sources de
désorganisation, de problèmes techniques et de pertes financières. En
outre, l'acceptation des déchets des professionnels dans les dites
installations nuit à la mise en place de solutions pertinentes de valorisation
de ces déchets. Cette situation prolonge l'existence de solutions à faibles
coûts pour les déchets des professionnels qui ne permettent pas de dégager
les financements nécessaires aux investissements.
Concernant la collecte des déchets des ménages, l'AMF vous
signale que vous n'avez pas mentionné la collecte pneumatique dans les
modes d'organisation cités dans votre rapport. Bien que limitée à certains
territoires, elle aurait mérité une analyse, notamment de son coût et de son
efficacité. Par ailleurs, la répartition entre le porte-à-porte et l'apport
volontaire est en train de bouger. En effet, certaines collectivités
s'interrogent sur le coût environnemental de la collecte en porte-à-porte,
notamment en matière de contribution à la pollution atmosphérique et à
l'utilisation de carburants. La difficulté à organiser les calendriers de
collecte, surtout avec la multiplication des collectes séparées, conduit
certaines collectivités à envisager d'autres organisations. Cette réflexion
est trop récente pour en tirer des conclusions dès à présent, mais elle
intéresse de plus en plus de collectivités.
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 187
Concernant la collecte et la valorisation des déchets
biodégradables, l'AMF partage votre constat d'un faible développement
des collectes séparées des biodéchets. Toutefois, cette situation tient
essentiellement à la faiblesse des débouchés. Depuis presque un an, les
collectivités attendent une modernisation des normes « compost » qui
serait de nature à sécuriser les utilisateurs et les producteurs de compost.
En fait les différents ministères concernés (en particulier ceux de
l'environnement et de l'agriculture) ne semblent pas arriver à trouver un
accord sur les normes nécessaires.
Les perspectives de débouchés qui semblaient s'ouvrir avec le
développement de la méthanisation ont été déçues pour plusieurs raisons :
une difficulté à trouver le cadre juridique pertinent pour une coopération
avec les opérateurs de méthanisation agricole, la gestion des digestats qui
se heurtent aux mêmes difficultés que les composts, mais surtout
l'impossibilité d'implanter des installations de méthanisation. Alors que
l'économie circulaire commence à intéresser le public, il est encore plus
difficile de faire accepter les installations nécessaires aux riverains. Dans
ce contexte difficile, les collectivités déplorent la grande prudence des
pouvoirs publics, au niveau préfectoral comme au niveau national, qui se
traduit par un faible appui aux projets en matière de méthanisation. Tant
que les incertitudes sur les débouchés ne seront pas levées, les collectivités
continueront à expérimenter des modalités de collecte ; elles pourront les
déployer largement quand il existera réellement des débouchés. Enfin, une
association des communes au développement des collectes de proximité
organisées par les EPCI permet de lever certains obstacles locaux et
d'améliorer la sensibilisation des habitants.
Concernant la collecte séparée des emballages plastiques, l'AMF
ne partage pas votre appréciation. En effet, à la fin du premier trimestre
2022, toutes les collectivités avaient déposé un dossier de modification de
leurs centres de tri et nous pouvons raisonnablement penser que l'ensemble
des territoires métropolitains passera à l'extension des consignes de
collecte en 2023. Les territoires ultramarins auront besoin d'un délai
supplémentaire en raison de leurs contraintes spécifiques.
Si la collecte sera au rendez-vous de l'échéance de 2023, la
rénovation et l'adaptation de la totalité des centres de tri ne seront pas
terminées au 1er janvier 2023. Ces retards ont des causes multiples : débat
sur la consigne qui a conduit certaines collectivités à suspendre leurs
projets dans l'attente d'une plus grande visibilité sur les produits entrant
dans le centre de tri (présence ou non des bouteilles), décalage de certaines
décisions en raison des circonstances des élections municipales,
perturbations du calendrier des travaux du fait de la crise sanitaire,
saturation des carnets de commandes des équipementiers. Pour prévenir
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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188 COUR DES COMPTES
les conséquences de ces retards, l'éco-organisme des emballages et les
collectivités ont mis en place des solutions transitoires, afin de trier les
tonnages collectés dans de bonnes conditions et sans dégrader la qualité,
même pendant la période d'indisponibilité de certains nouveaux centres.
Concernant la valorisation des matériaux, l'AMF confirme que la
complexité et la spécialisation des marchés des matériaux recyclables rend
leur commercialisation de plus en plus difficile pour les collectivités : leur
fonctionnement n'est pas adapté à la réactivité nécessaire. La priorité pour
les collectivités, qui a été un préalable à leur participation aux filières REP
dès 1992, reste l'enlèvement des déchets triés, à coût positif ou nul au
départ du centre de tri ; elles ne peuvent pas arrêter de collecter et leurs
capacités de stockage sont limitées. En conséquence, si les collectivités
doivent renoncer à la commercialisation des matériaux triés (et aux
recettes qui les accompagnent), c'est à la condition non négociable d'avoir
la garantie des enlèvements. Cette exigence est valable pour toutes les
filières REP.
Concernant l'incinération, l'AMF regrette la dégradation du parc
des unités de valorisation énergétique depuis plus de 15 ans. L'effort de
modernisation, notamment en ce qui concerne les traitements des fumées,
qui a été mené dans les années 1990-2000, s'est heurté ensuite à
l'impopularité des installations de traitement. Les difficultés
d'implantation et l'hostilité des pouvoirs publics n'ont pas permis d'investir
dans les capacités nécessaires, ni parfois de procéder aux rénovations
indispensables.
Une intense campagne de communication « anti-incinération » a
parfois conduit à compromettre des opérations de valorisation
énergétique ; des occasions de développement de réseaux de chaleur ont
été écartées. Même la constatation que cette politique bénéficiait surtout à
la mise en décharge n'a pas permis une révision réelle de l'absence de
soutien de l'État. Le développement des combustibles solides de
récupération est actuellement entravé par des obstacles réglementaires,
alors que leur production présente des avantages en matière de stockage
et de souplesse d'utilisation. L'incinération aux normes les plus exigeantes
constitue un des maillons dans la chaîne du traitement des déchets par une
valorisation énergétique pertinente.
Il n'est pas possible de réduire et de recycler la totalité des déchets,
même s'il existe encore d'importantes marges de progression. Pour
développer la réutilisation et le recyclage, il faut massivement investir dans
la création de débouchés pour les matériaux. En l'absence de débouchés,
la réduction arbitraire des capacités d'élimination ne permet pas de
développer le recyclage, mais elle favorise les solutions illégales et les
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 189
dépôts sauvages. A cette occasion, l'AMF regrette qu'il ne soit pas prévu
d'utiliser l'augmentation de la TGAP pour soutenir financièrement les
investissements nécessaires dans le domaine de l'économie circulaire, par
exemple pour le déploiement des nouvelles collectes, la construction des
infrastructures et des installations nécessaires, mais aussi la création de
débouchés innovants. La TGAP devient une simple sanction, loin des
ambitions de développement et d'amélioration qui existaient lors de sa
création
Concernant la gestion des dépôts sauvages, l'AMF regrette que
cette question ne soit pas abordée dans votre rapport. Il est vrai qu'elle ne
relève pas de la gestion des déchets au sens strict et qu'elle n'est pas de la
compétence des mêmes collectivités. Toutefois, l'existence des dépôts
sauvages est directement liée aux faiblesses de la politique de gestion des
déchets. En effet, l'absence de contrôles, notamment des déchets des
professionnels, le manque d'installations de traitement et les difficultés
opérationnelles de sanctionner les actes d'incivisme sont des causes de
l'existence de certains dépôts sauvages. Leur élimination constitue la
principale difficulté pour les élus et leurs équipes, c'est également la
première source de nuisances évoquées par les habitants au sujet des
déchets. Si la loi AGEC a apporté quelques améliorations, les collectivités
restent seules et démunies pour lutter contre ce fléau. L'ampleur du
phénomène ne permet plus de se contenter de perfectionner les moyens à
la disposition des collectivités, il faut mobiliser l'ensemble des autorités
publiques, depuis les collectivités jusqu'à l'État, en passant par le ministère
de la Justice. Les élus, en particulier les maires, sont déterminés à lutter
contre les dépôts sauvages, mais ils ne pourront pas en venir à bout seuls,
et il leur faut des moyens juridiques.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE LA MÉTROPOLE DE LYON
Par lettre du 28 juillet 2022, vous m?avez communiqué le rapport
public thématique que la Cour des Comptes se propose de publier
prochainement sur la prévention, la collecte et le traitement des déchets
ménagers.
J?ai pris connaissance avec un très vif intérêt des observations
formulées par la Cour sur la gestion de cette politique publique essentielle,
à laquelle la Métropole de Lyon accorde la plus grande attention. Ces
observations confirment la pertinence des orientations retenues par notre
collectivité, à la faveur de l?adoption, en juin 2022, du schéma directeur
des déchets à l?horizon 2030.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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190 COUR DES COMPTES
La Métropole de Lyon vise en effet la sobriété en matière de
consommation et de production de déchets et une meilleure valorisation
des déchets résiduels produits. Nos objectifs pour 2030 sont de réduire de
25 % la production de déchets par habitant, de 50 % la quantité incinérée
et d?atteindre 60 % de valorisation matière (réemploi, recyclage,
compostage?) des déchets ménagers et assimilés.
Pour atteindre ces objectifs ambitieux, un plan d?actions articulé
autour de trois axes a été défini.
Tout d?abord, déployer des solutions adaptées aux usagers pour
réduire et trier les déchets.
La Métropole de Lyon va développer des équipements
complémentaires pour mieux trier (silos à verre, silos à emballages, silos
textiles) sur l?ensemble du territoire métropolitain. D?ici 2024, elle
équipera l?ensemble des quartiers densément peuplés, de bornes à compost
(1 million d?habitants couverts par ce nouveau service) pour permettre le
tri de tous les déchets alimentaires. En parallèle, les distributions de
composteurs pour les habitants en maison individuelle et les installations
de composteurs partagés en pied d?immeuble ou dans les quartiers, seront
poursuivies. Les déchèteries existantes seront modernisées en vue de
favoriser le don, le réemploi, la réutilisation et le recyclage. Ainsi, des
écocentres verront prochainement le jour sur le territoire.
Ensuite, accompagner les usagers dans le changement de pratiques.
La Métropole va mettre en place une communication régulière et
ciblée pour faire connaître les nouveaux services mis à disposition des
usagers, mais aussi pour les informer sur la qualité du tri et sur la quantité
des déchets produits. Pour inciter au changement, le nombre de personnes
sensibilisées par an sera doublé, passant de 70 000 à 140 000. Une
attention particulière sera portée aux jeunes publics, notamment les
scolaires et collégiens. En complément, la Métropole de Lyon déploiera
des opérations de contrôle et de sanction. Elle prévoit ainsi d?assermenter
180 agents pour faire respecter le règlement de collecte des déchets
ménagers et assimilés.
Enfin, faire des déchets des ressources durables.
Pour répondre aux objectifs métropolitains, la collectivité doit, en
lien avec les territoires voisins, augmenter les capacités de tri et de
valorisation de la collecte sélective par la création d?un nouveau centre de
tri. Parallèlement, des plateformes de compostage métropolitaines seront
créées pour accueillir et traiter les déchets alimentaires collectés via les
bornes à compost. Enfin, les deux incinérateurs du territoire devront
également être modernisés et repensés à horizon 2030, afin de s?adapter
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 191
aux évolutions quantitatives et qualitatives des déchets et de développer
des partenariats et des mutualisations avec les territoires voisins.
Ainsi, au-delà de budgets de fonctionnement significatifs, quelques
145 M¤ seront consacrés en investissements à la politique des déchets
pendant le mandat 2020-2026.
Telles sont les précisions que j?estimais utiles de porter à votre
connaissance.
MADAME LA PRÉSIDENTE DE LA COMMUNAUTÉ
DE COMMUNES DE L'ÎLE D'OLÉRON
Par courrier en date du 28 juillet 2022, vous me proposez de réagir
au rapport public thématique intitulé "Prévention, collecte et traitement
des déchets ménagers : une ambition à concrétiser". La région Bourgogne-
Franche-Comté a une responsabilité en termes de planification régionale
de la prévention et de la gestion des déchets, suite au transfert de
compétence issue de la loi NOTRé du 08 aout 2015. L'analyse du rapport
amène les observations suivantes :
Élaboration du PRPGD (p. 33)
La Région a adopté en novembre 2019 son Plan Régional de
Prévention et de Gestion des Déchets (PRPGD) qui fait désormais partie
intégrante du SRADDET, adopté en 2020.
? La loi NOTRé a transféré aux Régions l'élaboration des PRPGD,
imposant des délais impossibles à tenir (février 2017) pour des
collectivités nouvelles, issues des fusions au 1 er janvier 2016. Le conseil
régional de Bourgogne-Franche-Comté a choisi néanmoins de prendre
le temps nécessaire à la concertation tout en accélérant l'élaboration de
son PRPGD afin de répondre à la demande de l'État dans le cadre du
précontentieux qui l'oppose à l'Union Européenne. Sachant que, par
ailleurs, les procédures administratives entre l'arrêt du projet et
l'approbation du plan, qui s'étalent sur une année complète, viennent
raccourcir d'autant les phases rédactionnelles. Le PRPGD a donc, dans
les faits, été rédigé dès l'automne 2018. Ce temps, très contraint, n'a pas
permis de creuser des solutions opérationnelles ni d'engager dans le
même temps la création d'un observatoire à l'échelle du territoire.
? L'état des lieux des gisements, en particulier issus des acteurs
économiques et du BTP, a été et reste très aléatoire en raison de la
multitude des producteurs, majoritairement des TPE. Par ailleurs, les
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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192 COUR DES COMPTES
données présentes dans les bases de l'État ne concernent pas tous les
producteurs et ne constituent donc qu'une source d'information partielle.
? L'élaboration du PRPGD s'est faite en concertation avec les acteurs du
territoire afin de définir des objectifs communs de réduction, de
valorisation et de gestion des déchets. La rédaction du document final
s'est faite en étroite collaboration avec les services de la DREAL et de
l'ADEME, en particulier concernant la planification des installations de
stockage, usines d'incinération et centres de tri des DMA.
? Le conseil régional n'ayant pas autorité en matière d'ouverture ou de
fermeture des installations de traitement (p. 34), mission qui incombe
aux services de l'État, nous avons eu une approche par bassin et en
tenant compte des réalités de terrain afin de proposer une adéquation
des capacités et des gisements. Vous noterez que, dans le temps
d'élaboration du PRPGD, de nouvelles autorisations ont été accordées
par l'État et sont venues modifier la trajectoire concernant la baisse des
capacités de traitement sur notre territoire, décalant de trois ans
l'atteinte des objectifs prévus dans le Plan. La Région avait suggéré aux
services de l'État qu'ils prononcent un sursis à statuer, par analogie à
cette faculté existant dans le droit de l'urbanisme ; ceux-ci n'ont pas
souhaité donner suite.
? De même, le conseil régional ne peut prévoir la création d'installations
de gestion ou traitement, création qui appartient au domaine
concurrentiel, limitant ainsi le pouvoir de planification à constater des
décalages entre les besoins et les capacités présentes sur le territoire.
? Enfin, il est nécessaire de rappeler que la mise en oeuvre de cette
nouvelle mission dévolue aux Régions n'a fait l'objet, en Bourgogne-
Franche-Comté, d'aucun transfert de ressources humaines des
Départements et d'une compensation financière équivalente à 20 K¤ du
département de la Haute-Saône sans commune mesure avec la charge
transférée. Madame la préfète de Région n'a pas donné suite à la
demande de la Région de prononcer le transfert de charges de 5
équivalents temps plein issus des 8 départements de Bourgogne-
Franche-Comté, dont l'existence était pourtant avérée. Par ailleurs, les
Régions ont proposé à l'État depuis plusieurs années, un transfert partiel
de TGAP afin d'accélérer la mise en oeuvre des actions sur le terrain. La
possibilité de gestion d'une partie du fonds déchets de l'ADEME ne
constitue pas une réponse satisfaisante à cette demande car le budget
global alloué aux territoires reste constant et serait délégué aux Régions
sous l'autorité de l'ADEME, limitant strictement l'intérêt et les marges
de manoeuvre pour les Régions.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 193
Mise en oeuvre du PRPGD
? Depuis la rédaction du PRPGD (projet achevé fin 2018), de nombreuses
actions ont été mises en place par la Région. En premier lieu, la
réglementation imposait un plan d'action économie circulaire, inclus
dans le PRPGD. La région Bourgogne-Franche-Comté a fait le choix de
se doter dès juin 2020, d'une Feuille de Route Économie Circulaire
(FREC) très opérationnelle qui permet de décliner des actions de terrain
en coopération avec les acteurs du territoire (téléchargeable sur notre
site internet : https://www.bourgognefranchecomte.frivers-le-zero-
dechet) (p. 65-73).
? Concernant l'animation du territoire, la région BFC anime un réseau
des collectivités en complément du réseau A3P porté par l'ADEME et
soutient financièrement d'autres réseaux portés par des acteurs de notre
territoire. Chaque année, une thématique fait l'objet d'une déclinaison
en termes de communication et de soutien aux actions : vrac, réemploi,
biodéchets.
? La Cour salue les initiatives de financement des équipements par
certaines Régions. La Région ne dispose pas de clause générale de
compétence depuis la loi NOTRé. Par conséquent, elle ne peut engager
des financements qu'autre titre de sa compétence planification. Il
convient, en effet, de rappeler que le mode de financement de la gestion
des déchets (p. 43-48) repose sur la TEOM et/ou la REOM pour service
rendu, les financements ADEME provenant de la TGAP et les éco-
organismes, prélevant les contributions des producteurs de déchets.
Pour autant, la Région finance depuis 2018 en cogestion avec l'ADEME,
avec un renfort budgétaire notable en 2021 via le Plan d'Accélération
de l'Investissement Régional (PAIR), des projets d'économie circulaire,
d'installations de traitement et, depuis 2020, des projets liés à la
généralisation du tri à la source des biodéchets.
? Enfin, pour ce qui est de l'observation (p. 33), la Région est désormais
dotée d'un observatoire régional, porté par l'association ALTERRE BFC
et en cours de mise en place d'un outil de collecte des données innovant
qui permettra à l'avenir de limiter les sollicitations des producteurs et
de favoriser les échanges avec d'autres bases existantes. L'enquête
relative à la collecte et aux traitements des DMA a été mise en oeuvre
sous maitrise d'ouvrage de la Région en 2021. Par ailleurs, la Région
participe activement aux ateliers menés par l'ADEME nationale dans le
but d'améliorer et d'harmoniser la collecte des données.
Il est rappelé que la région Bourgogne-Franche-Comté a déjà
déposé le 15 avril 2022 un certain nombre de remarques sur la plateforme,
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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194 COUR DES COMPTES
suite à la sollicitation que la Cour des Comptes avait faite auprès de
Régions de France. Nos premières remarques n'ont toutefois pas été
intégrées dans le projet définitif.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
DE BRETAGNE
Je tiens tout d?abord à redire que je partage l?analyse de Régions
de France, retranscrite dans son courrier du 11 avril dernier. Les
problématiques et les conditions particulières encadrant la mise en oeuvre
de la compétence régionale de la planification de la prévention et de la
gestion des déchets y sont parfaitement traduites et illustrent concrètement
les difficultés que nous rencontrons aussi en Bretagne.
Dès le transfert de compétence issu de la loi NOTRé, la Région s?est
largement engagée dans son rôle de chef de file et d?animation pour la
prévention et la gestion des déchets, tous flux confondus. En dépit d?un
contexte réglementaire marqué depuis plusieurs années par de nombreuses
évolutions législatives, non toujours transcrites rapidement de façon
opérationnelle, la Région a adopté en mars 2020 son PRPGD, en juillet
2020 une Feuille de route bretonne dédiée à l?Économie circulaire, et son
SRADDET en novembre 2020.
Le PRPGD breton est le fruit de démarches partenariales et
concertées avec l?ensemble des parties prenantes de la prévention et de la
gestion des déchets. Outre les 10 principes fondamentaux du plan, les 18
objectifs inscrits dans le PRPGD déclinent et renforcent, en prenant en
compte le contexte et les particularités bretonnes, les objectifs européens
et nationaux.
Une trajectoire très ambitieuse est fixée par la Région dans le
PRPGD avec le « zéro enfouissement des déchets » à l?horizon 2030 et le
« zéro déchets » en 2040. Le déploiement de l?économie circulaire, la
recherche de l?efficacité collective et l?engagement de tous au quotidien
constituent autant de moyens pour y parvenir.
Malgré la volonté clairement partagée par la Région et l?ensemble
des partenaires et acteurs concernés en Bretagne de relever les défis, le
déploiement de certaines actions de prévention et de gestion des déchets
reste complexe. Certaines dispositions structurelles, règlementaires,
techniques ou financières limitent l?efficacité de l?action et l?engagement
des collectivités locales, des opérateurs et acteurs des déchets sur le
terrain. Le déploiement actuel des nouvelles filières REP par certains éco-
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 195
organismes, parfois insuffisamment partagé avec les collectivités pourtant
directement concernées, ou encore l?absence de moyens
d?accompagnement suffisants pour les installations de combustion
(chaudières CSR) constituent deux exemples parmi bien d?autres,
révélateurs des difficultés auxquelles doivent faire face les parties
prenantes bretonnes.
La Région entend pourtant, malgré toutes ces difficultés, relever les
défis et poursuivre son engagement, avec conviction, sens des
responsabilités et sans relâcher ses efforts.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
GRAND EST
Par une correspondance en date du 28 juillet 2022, vous avez bien
voulu porter à ma connaissance le rapport public thématique intitulé
« Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à
concrétiser », et je vous en remercie.
- J?ai procédé à une lecture attentive de ce document et souhaite vous
apporter des éléments de réponse.
Concernant le chapitre III / A ? 2 « La nécessité d?une meilleure
coordination des investissements
La Région Grand Est, en co-animation avec la DREAL Grand Est,
rassemble dans un groupe de travail depuis février 2019, l?ensemble des
exploitants des installations de stockage de déchets non dangereux et de
valorisation énergétique (UVE), ainsi que les plus gros producteurs de
déchets.
L'objectif de ce groupe de travail est de permettre une optimisation
du traitement des flux de déchets résiduels, dans le respect des
préconisations et des règles du SRADDET, à savoir :
- Principe de proximité (gestion des déchets au plus près de leur zone
de production, et de proche en proche) ;
- Respect de la hiérarchie des modes de traitement en saturant les
incinérateurs.
L?objectif est de mettre autour de la table l?ensemble des acteurs
afin de faire des projections quasiment en temps réel des besoins en
matière de traitement, et d?anticiper les éventuels points de blocage.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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196 COUR DES COMPTES
Ces derniers peuvent être liés aux arrêts techniques, aux incidents
et accidents et aux situations exceptionnelles. La région a été marquée par
une suite d?évènements entre 2016 et fin 2019, qui ont fortement réduit ses
capacités de traitement jusque ce début d?année 2022.
Le partage des données régionalisées (sur les tonnages stockés et
incinérés, les coûts appliqués, les besoins de détournements de flux vers
d?autres exutoires et la prise d?arrêtés d?exploiter par les préfets
concernés) a permis d?assoir le rôle de la Région en tant que planificateur.
La non augmentation des capacités de stockage fortement
demandées par les acteurs, même pendant les années difficiles, a été
respectée. Le partenariat Région / DREAL a par ailleurs montré sa force
dans le rassemblement d?acteurs à la base concurrents, pour trouver
ensemble les solutions.
Ainsi, la Région a diminué ses capacités entre 2015 et 2022, et tend
vers l?objectif au travers des nouveaux arrêtés d?exploitation pris et à
venir.
Le groupe de travail a permis pour cela de décliner, dans les arrêtés
d?exploitation, les règles et principes du SRADDET en termes de demande
de prolongation ou de création, ou encore de modification de zone de
chalandise ; cela avec pour finalité d?atteindre les objectifs de réduction,
en définissant notamment des capacités maximales.
La suite de la réflexion se fait autour des actions à mettre en oeuvre
pour l?atteinte des objectifs, au travers de la projection à 2025 et 2031, des
capacités réelles à prévoir sur 3 bassins de vie.
Deux groupes de travail « stockage » et « incinération » ont découlé
de ce premier groupe et traitent des sujets spécifiques à chacune de ces 2
thématiques (points d?alerte, actions possibles, coordination des arrêts
techniques, veille règlementaire, ?).
Concernant l?annexe 3 relative aux Plans Régionaux
de Prévention et de Gestion des Déchets
La Région Grand Est présente non seulement des données
départementalisées dans son état des lieux (données DAE, DMA, BTP ou
certains déchets dangereux), mais également pour ses objectifs à atteindre
en matière de capacité d?installations de stockage de déchets inertes
(ISDI), notamment dans la mesure où il s?agit de gestion de déchets de
proximité (déchets du BTP).
Le présent rapport fait état de lacunes de données que ni l?État, ni
les régions n?ont comblées par des enquêtes de terrain. Pour ce qui est de
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 197
la Région Grand Est, il s?agit de 408 tonnes pour lesquels l?exutoire n?est
pas précisé, sur un total de 1 994 000 tonnes. Tous les autres tonnages ont
un exutoire.
Le plan de la Région Grand Est décline de manière détaillée, à
l?échelle départementale, les installations de stockage qu?il sera
nécessaire de créer et projette les besoins en capacité de traitement à
l?échelle de deux bassins de vie (Est et Ouest).
La Région Grand Est a effectivement fait le choix de décliner
finement la planification de ses installations, pour être au plus près des
besoins.
L?observatoire « déchets », lancé le 23 novembre 2020 en Région
Grand Est, est un des premiers de ce type en France (marchés à lots /
partenaires publiques / prestations internes).
Contrairement à d?autres observatoires, il recouvre l?ensemble des
typologies de déchets. Il s?agit d?une initiative volontariste de la Région
Grand Est (l?observation n?est pas règlementaire), demandée par les
acteurs de la Commission Consultative d?Élaboration et de Suivi (CCES),
dès les premiers travaux du Plan.
L?Observatoire « Déchet et Économie Circulaire » a fait l?objet
d?une délibération de la Commission Permanente du Conseil Régional
Grand Est, votée en Séance le 26 avril 2019, soit avant même l?adoption
du SRADDET en février 2020.
Son déploiement rapide a été permis par la volonté régionale
d?anticiper et de doter cet observatoire des moyens humains et financiers
conséquents, mais nécessaires pour sa mise en oeuvre.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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198 COUR DES COMPTES
Il joue, outre sa fonction de suivi des objectifs, un rôle primordial
en matière d?information et d?appui aux collectivités locales et aux
entreprises sur :
? les Déchets Ménagers et Assimilés (DMA) ;
? les Déchets d?Activités Économiques (DAE) ;
? les Déchets Dangereux (DD) ;
? les déchets de Chantiers du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP).
Je reste naturellement à votre disposition pour toute information
complémentaire.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
DE NORMANDIE
A la lecture de ce rapport, je suis étonné du peu d'évolution, au final,
du rapport malgré l'envoi d'éléments complémentaires transmis à vos
services le 1 avril 2022, dont je ne retrouve pas trace ni intégration.
En effet, votre position reste inchangée par rapport à la description,
que vous qualifiez de sommaire, quant aux mesures prises pour atteindre
l'objectif de couverture de 30 % de la population normande par une
tarification incitative. Pourtant et grâce à sa dynamique d'animation
régionale, et sa présence auprès des acteurs normands, la Région a réussi
à avancer sereinement vers cet objectif que je qualifierais d'ambitieux afin
d'atteindre les 30 % en 2025.
Par ailleurs, et comme vous, je porte une attention particulière à
l'efficience de nos politiques publiques. A cette fin, je réitère l'ambition de
la Région Normandie de revendiquer son droit à l'expérimentation en se
portant volontaire pour que sa compétence en matière de prévention et de
gestion des déchets soit étendue comme l'indiquait le rapport « Évolution
des capacités de traitement des déchets en France à l'horizon 2040 » rédigé
par Jean-Louis Chaussade et remis à Barbara Pompili.
Mes services se tiennent à votre entière disposition pour vous fournir
des informations plus détaillées sur nos travaux et réflexions à venir.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
DE NOUVELLE-AQUITAINE
Dans le cadre du rapport public thématique « Prévention, collecte
et traitement des déchets ménagers » que vous m?avez adressé par courrier
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 199
du 28 juillet 2022 reçu le même jour, j?ai pris connaissance avec attention
de ce document.
Je partage pour l?essentiel les propositions émises notamment
concernant le nécessaire renforcement des actions en matière de
prévention, l?amélioration de la collecte des données et la simplification
des actions avec le fonctionnement des filières à la responsabilité élargie
du producteur.
Je me permets d?apporter des précisions complémentaires
concernant plusieurs thèmes :
1. Massifier le soutien aux actions de prévention
et de réduction des déchets
Je partage le constat de la Cour concernant le manque de moyens
sur la prévention.
Pour les collectivités territoriales, les moyens humains et financiers
allouées aux actions de prévention manquent pour atteindre les objectifs
nationaux.
La mobilisation et l?accompagnement technique et financier auprès
des parties prenantes doivent être accrus et partagés entre les différents
financeurs.
Les conseillers régionaux délégués et les services de la Région ont
identifié la prévention comme la priorité pour répondre aux enjeux
environnementaux de la gestion des déchets et j?ai traduit cette priorité
régionale en actes en impliquant fortement sur le sujet l?ensemble des
acteurs (collectivités, entreprises et associations) : élaboration d?une
feuille de route déchets, lancement en 2022 de conventions avec les EPCI
pour accompagner la réalisation des programmes locaux de prévention
des déchets ménagers et assimilés (PLPDMA), lancement en 2022 d?un
nouvel appel à projets pour les EPCI avec un axe prévention?
2. L?amélioration de la collecte des données permettra
de clarifier l?atteinte des objectifs
La Région Nouvelle-Aquitaine est déjà pleinement mobilisée et prête
à jouer un rôle encore plus important en matière de consolidation des
données relatives aux déchets. En effet, la Région, avec son observatoire
des déchets porté par l?AREC (Agence Régionale Évaluation
environnement et Climat) enquête déjà les intercommunalités à
compétence Déchets. La confiance instaurée avec les collectivités nous
permet d?avoir une remontée des données effectives et un suivi des
évolutions sans difficulté dans la remontée de ces informations régionales.
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200 COUR DES COMPTES
Je partage avec la Cour :
- le besoin de simplifier et d?uniformiser les informations transmises
par les EPCI à l?échelle nationale en s?assurant notamment que les
bases de calcul soient identiques afin de faciliter une comparaison des
indicateurs à l?échelle nationale ;
- la proposition de compiler les différents documents ou plan nationaux.
Cela permettrait de faciliter la compréhension et l?appropriation des
objectifs à atteindre pour les territoires et de les mettre en cohérence
avec les documents cadres régionaux.
3. Inciter les filières à responsabilité élargie du producteur (REP)
à améliorer le suivi, amélioration du tri et la prévention
Je constate ces dernières années une multiplication du nombre de
filières à responsabilité élargie du producteur (REP). Je m?interroge sur
l?efficacité de ces dispositifs, la visibilité et le suivi des filières REP, la
multiplicité des interlocuteurs pour les collectivités et les besoins
spécifiques de point de collecte notamment dans les déchetteries.
Les éco-organismes des filières REP doivent améliorer le suivi des
tonnages et le tri sur les sites de collecte.
En outre, je partage votre proposition concernant la nécessité
d?augmenter la participation aux efforts de prévention à travers le
financement d?actions à fort impact sur les flux collectés. Dans la mesure
où l?éco-conception doit être une priorité pour nos entreprises, comme j?ai
souhaité l?intégrer dans le nouveau SRDEII de la Région, les dispositifs
incitatifs et prescriptifs doivent être renforcés et le financement par les
filières REP massifié.
4. Une nécessaire distinction entre planification et programmation
Si la Région peut en sa qualité de planificateur et d?animateur
faciliter les coopérations et l?émergence de solutions partagées, il me
semble important de rappeler que les collectivités en charge du traitement
restent les seules décisionnaires. La Région planifie mais ne peut pas
programmer la réalisation des installations. Ainsi la Région joue d?ores et
déjà un rôle clef pour faciliter les synergies locales dans la programmation
des équipements de gestion des déchets et ce en tenant compte des
disparités géographiques, historiques et/ou des spécificités locales. Ce
travail se fait dans le respect du principe de libre administration,
d?absence de tutelle et donc des choix locaux des intercommunalités qui
restent pleinement décisionnaires en matière de programmation des
équipements.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 201
En outre, il me semble important de rappeler que ce sont les services
de l?État qui restent compétents sur la délivrance des autorisations
relatives aux installations classées pour la protection de l?environnement
(ICPE) pour les EPCI à compétence Déchets. Afin de s?assurer de la
compatibilité avec le volet Déchets du SRADDET, l?État saisit la Région,
qui ensuite émet un avis (opposabilité du plan), qui n?engage pas l?État
dans sa décision finale. Ainsi, la compétence régionale en matière de
prévention et de gestion des déchets est essentielle, mais sa portée peut
s?en voir limitée du fait de la multiplicité des acteurs concernés et de leurs
différentes compétences. Les étapes successives de décentralisation et de
transfert de compétences ont amené à cette multiplicité des acteurs qui
nécessite désormais une coordination de ceux-ci afin de s?assurer de la
complémentarité et de la pertinence des actions.
5. Une plus forte mobilisation des Régions qui se heurte à la limitation
des moyens octroyés
L?échelle régionale paraît être la plus pertinente pour la
programmation et la coordination des investissements pour les
installations de traitement à travers le SRADDET et le dialogue entre
l?État, la Région et les EPCI. La cour appelle de ses voeux dans sa synthèse
à un renforcement du rôle de « financeur » des Régions. Si je partage le
principe de renforcement de la compétence de la Région sur le financement
des grands équipements structurants régionaux, notamment pour faciliter
la « cohérence territoriale », l?opérationnalité d?une telle proposition se
heurte à l?absence de moyens alloués aux Régions. En effet, je vous
rappelle que le transfert de la compétence planification des déchets des
Départements auprès de la Région Nouvelle-Aquitaine s?est réalisé sans
moyen. La recommandation d?une plus grande mobilisation de la Région
en matière de financement doit donc s?accompagner d?une réflexion plus
globale sur son financement. Les recommandations de la Cour en matière
de financement portent sur l?échelon intercommunal et les spécificités
littorales uniquement ; elles gagneraient donc à être complétées par des
propositions pour l?échelon régional.
Le principe de pollueur payeur a bien guidé l?instauration de la
Taxe Générale sur les Activités Polluantes pour les déchets s?appliquant
aux installations de traitement des déchets, mais le fruit de cette taxe
revient au budget de l?État et à son agence l?ADEME et nullement aux
Régions. Il en va de même pour les éco-contributions des filières REP, dont
les ressources reviennent aux éco-organismes et nullement aux Régions
malgré leur compétence en matière de développement économique.
Enfin, je tiens à vous témoigner du travail mené par les conseillers
régionaux et les agents de la Région Nouvelle-Aquitaine sur le sujet de la
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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202 COUR DES COMPTES
prévention et de la réduction des déchets, et de mon engagement à le
poursuivre.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL
PROVENCE-ALPES-CÔTE D?AZUR
Par courrier en date du 28 juillet 2022, vous m?avez communiqué le
projet de rapport public thématique intitulé « Prévention, collecte et
traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser » que la Cour
propose de publier prochainement avec les réponses des destinataires
intéressés conformément aux articles L 143-8 et R. 143-13 du Code des
juridictions financières. Je vous en remercie.
L?objet du rapport est de réexaminer la pertinence et l?efficience de
la politique de prévention et de gestion des déchets.
La Région Provence-Alpes-Côte d?Azur a été consultée, en mars
2022, sur un extrait du rapport d?observations provisoires relatif à
l?enquête nationale que la Cour des comptes et les Chambres régionales
des comptes ont mené sur les déchets ménagers et assimilés en vue du futur
rapport public thématique.
La Cour des comptes appelle les Régions à « jouer pleinement leur
rôle de planificateur, d?animateur voire de financeur, afin de garantir la
mise en oeuvre effective des objectifs arrêtés dans leurs plans. » Elle pointe
une « programmation à renforcer » et des plans régionaux qui demeurent
insuffisamment précis et contraignants sur les investissements et qui ne «
s?avèrent pas à la hauteur des défis à relever. » Elle précise que le « niveau
régional serait le plus pertinent pour organiser une programmation et une
coordination optimales des investissements. »
Le Plan régional de prévention et de gestion des déchets de la région
Provence-Alpes-Côte d?Azur a été approuvé le 26 juin 2019, puis intégré
au Schéma régional d?aménagement, de développement durable et
d?égalité des territoires et abrogé le 16 octobre 2021.
Le Schéma régional d?aménagement, de développement durable et
d?égalité des territoires de la région Provence-Alpes-Côte d?Azur a été
arrêté par le Préfet le 15 octobre 2019. Celui-ci comporte un volet
« planification régionale des déchets » qui est opposable à toutes les
décisions publiques prises en matière de déchets, d?autorisations
environnementales ou d?installations classées pour la protection de
l?environnement. Pour une localisation des équipements adaptée aux
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 203
contextes des collectivités, le Schéma régional d?aménagement, de
développement durable et d?égalité des territoires de la région Provence
Alpes-Côte d?Azur a fixé trois règles pour permettre aux acteurs
compétents en matière de prévention et de gestion des déchets de
spatialiser les besoins en équipements en fonction d?état des lieux
territoriaux et dans leurs documents d?urbanisme.
Conformément à l?article L1111-9 du Code général des collectivités
territoriales, la Région, en tant que chef de file dans les questions
environnementales, exerce pleinement son rôle de planificateur, de
coordinateur et d?animateur des projets structurants en matière de
prévention et de gestion des déchets. Cependant, outre la définition des
besoins en équipements par bassin de vie, une évaluation économique,
présentée lors de la phase d?enquête publique, mentionnait 700 M¤
d?investissements nécessaires pour atteindre les objectifs.
Aussi un transfert partiel ou total du « Fonds économie circulaire
», actuellement géré par l?ADEME, aux Régions est nécessaire afin de leur
permettre d?accompagner efficacement les projets sur le territoire et
mettre en oeuvre les objectifs de la planification.
En effet, il conviendrait que la Région puisse disposer de
l?autonomie d?emploi des crédits pour mettre en oeuvre la planification et
accompagner les territoires en adéquation avec les priorités soulignées
par la planification régionale. Par exemple, les critères actuels
d?intervention de l?ADEME ne permettent pas de soutenir des opérations
de mise aux normes réglementaires alors même que certaines régions sont
en retard sur le sujet. Or les délégations ne peuvent se faire que sur la base
des critères d?intervention de l?ADEME. La mise en place de critères
d?intervention régionalisés et adaptés aux besoins propres des territoires
semble nécessaire pour permettre de financer davantage les équipements
structurants et indispensables à la réalisation des objectifs régionaux et
nationaux.
En matière de planification de la gestion des déchets, expressément
prévue à l?article R541-16 du Code de l?environnement, la Région travaille
en étroite collaboration avec les services de l?État sur les dossiers de
demande d?autorisation environnementale en matière d?Installations de
stockage des déchets non dangereux et d?Unités de valorisation
énergétique. La Région formule des avis sur les dossiers de demande
d?autorisation environnementale au titre des collectivités intéressées par
le projet au regard des incidences environnementales. Ces avis arrivent
après l?enquête publique et servent aux services de l?État pour rédiger les
arrêtés préfectoraux. Le Code de l?environnement ne prévoit pas
explicitement une saisine de la Région au titre de sa compétence «
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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204 COUR DES COMPTES
planification » et en amont de l?enquête publique durant notamment la
phase d?instruction des dossiers par les services de l?État. Un
éclaircissement sur ce point permettrait de renforcer le rôle du
planificateur.
Par ailleurs, la Région propose une meilleure articulation entre le
Code général des collectivités territoriales (volet Schéma régional
d?aménagement, de développement durable et d?égalité des territoires) et
le Code de l?environnement (volet plan régional de prévention et de gestion
des déchets) pour assurer une meilleure lisibilité des obligations
législatives et réglementaires qui incombent aux Régions et aux EPCI.
Mes services se tiennent à votre disposition pour vous fournir des
informations plus détaillées sur les actions et travaux en cours.
MADAME LA MAIRE DE PARIS
Par courrier du 20 juillet dernier, vous m?avez transmis le rapport
public thématique intitulé Prévention, collecte et traitement des déchets :
une ambition à concrétiser.
Je souhaite vous apporter des précisions concernant l?encart
consacré à l?action de la Ville de Paris pour la collecte de déchets
organiques. La tonalité globale de cet encart peut en effet laisser à penser
que la Ville aurait revu ses ambitions à la baisse, notamment au regard du
rythme de déploiement de la collecte séparative en porte-à-porte.
Je tiens à souligner que la situation est toute autre, la Ville ayant au
contraire multiplié les vecteurs de collecte dans les immeubles et dans
l?espace public, afin de permettre à tous les Parisiens de trier leurs déchets
alimentaires, en maximiser la collecte et ainsi la valorisation.
Comme vous le savez, la Ville de Paris a ouvert le chemin en matière
de collecte séparative des déchets alimentaires et ce, plus de cinq ans avant
que la loi ne la rende obligatoire au 1er janvier 2024. La Ville collecte ainsi
en porte-à-porte 350 000 habitants des 2ème, 12ème et 19ème
arrondissements. Suite à l?arrêt de cette collecte pendant le premier
confinement, nous l?avons relancée à travers des actions de sensibilisation
et la distribution aux habitants de kits et de sacs leur permettant de trier
leurs déchets alimentaires.
Afin de répondre aux besoins et usages différents des habitants et
professionnels, nous déployons également différentes solutions de tri, dont
des bornes d?apport dit « volontaire ». Nous avons équipé la soixantaine
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 205
de marchés alimentaires de bacs dans lesquels les Parisiens peuvent
apporter leurs déchets alimentaires et tous les marchés seront équipés en
bacs fixes à partir de cette rentrée. En complément, sera ajouté un module
dédié aux déchets alimentaires aux stations Trilib?, qui étaient au nombre
de 340 au 1er septembre 2022 et seront 500 au terme de leur déploiement.
Nous avons aussi augmenté l?installation de bacs à composts (plus
de 1 000 à ce jour) et soutenons la mise en oeuvre de solutions innovantes
de compostage. Un appel à projet « compostage de proximité » a été lancé
l?été dernier et les premiers projets, dont certains semi-industriels, seront
cofinancés par la Ville. Nous avons enfin distribué plus de 5 600
lombricomposteurs.
Par ailleurs, la Ville collecte les déchets alimentaires d?une grande
partie des écoles et des restaurants administratifs parisiens. A partir de
2024, la totalité des restaurants, écoles, collèges et crèches sera collectée.
Entre 2020 et 2021, les déchets collectés ont ainsi connu une forte
augmentation de plus de 26 %.
La Ville poursuivra ses efforts pour déployer ces dispositifs jusqu?en
2024, date de l?obligation légale de tri à la source, dans le souci permanent
de proposer à tous les Parisiens et à proximité de chez eux, une solution
simple de tri de leurs déchets alimentaires, permettant une collecte efficace
au coût le plus maîtrisé possible. Le moment venu, nous pourrons partager
avec la Cour et nos homologues une évaluation précise de l?efficience des
différents modes de collecte.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DU SYNDICAT MIXTE
DÉPARTEMENTAL EN CHARGE D'ÉTUDES
ET DU TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS
ET ASSIMILÉS DE LA VENDÉE (TRIVALIS)
Suite à la lecture du rapport public : « Prévention, collecte et
traitement des déchets Ménagers : une ambition à concrétiser », je
souhaite réagir en tant que Président de Trivalis, syndicat public de
traitement des déchets de la Vendée, qui couvre depuis 2003 l?ensemble du
territoire départemental pour une population DGF de plus de
800 000 habitants.
Je tiens d?abord à saluer votre initiative de rédiger ce rapport qui met
en avant la complexité de la gestion des déchets et l?importance de ce
service dans la vie quotidienne de nos concitoyens. Les déchets ont souvent
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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206 COUR DES COMPTES
été considérés à tort comme le « parent pauvre » de la transition
écologique.
Je souhaite malgré tout apporter des éléments complémentaires et des
précisions sur trois sujets particuliers évoqués dans votre rapport, et pour
lesquels Trivalis a parfois été cité.
Une stratégie nationale basée sur des objectifs de résultats
plutôt que de moyens
Vous évoquez dans le rapport,, la nécessité pour le traitement des
déchets de gagner en cohérence, en indiquant en préambule sur la partie
des biodéchets : « Les difficultés techniques, financières et sociales pour
parvenir à un meilleur tri et à une valorisation des biodéchets devront être
levées au cas par cas, en fonction des spécificités locales , aucune solution
n?apparaissant uniformément applicable, ce qui explique que le législateur
n?ait pas à ce jour préconisé une solution unique pour tous les territoires ».
Je vous rejoins parfaitement sur ce constat, que le territoire français
n?est pas uniforme et que le législateur ne devrait pas exclure ou
préconiser des moyens de traitement des déchets mais plutôt des objectifs
de résultats : respect de seuils, de qualité, objectif de collecte, des tonnages
maximum ou minimum?
Pour reprendre l?exemple des biodéchets (mais ce constat est hélas
extensible à d?autres matières), il ne faut pas penser que toutes les
collectivités ont attendu la loi AGEC pour s?intéresser aux biodéchets et
au tri à la source.
À titre d?exemple, depuis 2003, c?est plus de 160 000 composteurs
individuels qui ont été distribués aux ménages vendéens pour détourner la
matière fermentescible des ordures ménagères. Ce choix ancien de
détournement amont des biodéchets est une des raisons, avec la redevance
incitative (j?y reviendrai) et l?extension des consignes de tri dès 2017, qui
explique une baisse de 118 kg/an/hab d?Ordures Ménagères résiduelles
(OMr) en Vendée depuis 2003, en passant de 260 kg/an/hab. à 142
kg/an/hab. en 2021.
La collecte en porte à porte des biodéchets, promue fortement par le
ministère de la transition écologique, pourra s?effectuer peut-être
ponctuellement sur des territoires denses. En revanche, c?est une absurdité
économique et environnementale en zone rurale.
Il n?en demeure pas moins que malgré une politique forte de
détournement en amont de biodéchets par le compostage individuel, le
compostage collectif et la collecte en porte à porte sur certains secteurs, il
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 207
restera encore de l?organique dans les OMr, sans doute entre 20 % et 30
% si on se réfère à certains exemples allemands de villes qui ont mis en
place la collecte de biodéchets depuis plus 25 ans. C?est pour cette raison
que le choix du législateur que vous évoque, de remise en cause du tri-
mécano-biologique (TMB) n?est pas pertinente. Le Tri-Compostage est un
moyen complémentaire de la politique des biodéchets.
Le législateur a remis en cause un moyen, alors qu?il aurait dû fixer
un objectif de résultats. Il aurait été plus cohérent de définir des nouveaux
seuils de qualité pour valider un compost issu de Tri-Compostage.
Rappelons d?ailleurs que plus 95 % des composts de TMB produits en
France respectent très facilement à la NFU 44-051. C?est la même norme
imposée au compost de biodéchets.
Cette obligation de résultats aurait permis à des territoires ruraux de
développer une technique qui valide les obligations environnementales et
répond à une demande locale d?économie circulaire puisque la production
de compost de TMB est reprise intégralement par des agriculteurs locaux.
L?importance de la matière organique que vous citez dans votre
rapport, incite à trouver des solutions tous azimuts pour éviter qu?elle ne
se retrouve dans un trou ou dans un four. Au lieu d?opposer les moyens de
captation sans argumentation scientifique, le législateur devrait favoriser
la complémentarité des techniques afin de pallier la diminution drastique
de l?élevage qui génère donc moins de matière organique pour
l?agriculture. Cette situation est encore aggravée aujourd?hui par la
guerre en Ukraine et la crise énergétique qui limitent fortement la
production d?amendement pour les sols.
Tarification incitative, l?État doit soutenir les territoires
qui ont fait ce choix
Vous évoquez à juste raison l?importance de la tarification incitative
comme levier d?action sur la réduction des déchets. Dans le rapport vous
mettez en exergue la complexité de la tarification incitative qui ralentit sa
diffusion.
Également, vous soulignez que les espoirs de voir 15 millions
d?habitants concernés par la tarification incitative en 2020, puis 25
millions en 2025, ont été rapidement déçus puisque seulement 6 millions
d?habitants étaient concernés en France en 2019.
J?ai été surpris que la Vendée n?ait pas été citée en exemple dans votre
rapport, puisqu?en 2019, 60 % de la population vendéenne étaient à la
REOMI, et presque 75 % en 2023. Cela signifie que pour une population
INSEE de 685 642 habitants en 2019, donc environ 411 000 habitants à la
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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208 COUR DES COMPTES
REOMI, les vendéens représentaient 6,85 % des Français à la tarification
incitative, alors que le département ne pesait en 2019 que 1 % de la
population française.
Je pense donc, qu?au-delà de la complexité, une volonté politique forte
est nécessaire. Cette dernière peut être incitée et récompensée par un
bonus ou un dégrèvement qui viennent soutenir les collectivités qui
s?investissent dans cette direction.
Il pourrait y avoir par exemple une baisse de la TGAP ciblée sur les
territoires leaders en ce domaine. Cette orientation rejoint votre
recommandation n°6 en page 63.
L?implication dans l?économie circulaire est un risque assumé
qu?il faut défendre
Vous citez en page 102 de votre rapport l?exemple de Trivalis qui fait
évoluer un de ses TMB en ajoutant une unité de préparation de CSR. Vous
soulignez : « Ce procédé étant désormais proscrit (il s?agit du Tri
Compostage) pour produire du compost, les collectivités sont contraintes
de réorienter les flux de déchets vers la seule méthanisation et vers la
production de combustibles solides de récupération, sans certitude de
pouvoir rentabiliser les équipements associés à ce nouveau procédé de
valorisation ».
Je souhaite d?abord préciser que l?interdiction de la production de
compost par Tri-Compostage ne sera active qu?en 2027, si la loi AGEC
n?est pas modifiée. Par ailleurs, indiquer que les flux de déchets sont
réorientés vers la production de CSR est une erreur. Les flux concernés
par la production de CSR dans un TMB sont les refus primaires, donc les
flux qui n?étaient pas valorisés mais enfouis. La production de CSR
n?intervient donc pas sur la matière organique qui continue à être
valorisée en compost normé.
Il ne s?agit donc pas d?une réorientation de flux mais d?une nouvelle
valorisation de flux existant. Je rappelle que la fabrication de CSR a
comme finalité la fabrication d?un combustible, mais qu?au préalable va
être extrait de ces refus tout ce qui peut être « valorisé matière » : ferraille,
aluminium, certains plastiques?
Le choix de Trivalis d?une unité de préparation de CSR accolée à une
unité de Tri-Compostage d?OMr, est sans doute la meilleure chaine de
valorisation des déchets existante aujourd?hui en France, bien plus qu?un
incinérateur urbain ou l?enfouissement brut. C?est d?ailleurs pour cette
raison que l?on ne parle plus de TMB mais d?UVEOr pour Unité de
Valorisation Énergétique et Organique.
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 209
Vous évoquez « l?incertitude de pouvoir rentabiliser les équipements
associés? », rappelons que ce choix cherche d?abord à respecter la loi.
D?abord la loi TEPCV de 2015 qui exige une valorisation énergétique
(donc CSR) de 70 % des déchets ultimes mis à l?enfouissement mais aussi
de la loi AGEC de 2020 qui fixe des objectifs de réduction de
l?enfouissement très importants dans des délais très courts.
Si la prévention comme vous le rappelez souvent dans le rapport est
un axe à développer fortement, et je vous rejoins parfaitement sur ce point,
il ne faut pas nier que ces changements de comportement s?effectueront
dans un temps long alors que le législateur a fixé des objectifs de réduction
ambitieux dans un temps court. En complément, je précise que les grands
principes de changement de comportement peuvent être balayés très
rapidement, comme lors de la pandémie de covid, où l?emballage sanitaire
est devenu la norme et qu?il a fallu que les équipements de traitement soient
en pleine capacité. La cohérence de la stratégie nationale, évoquée dans
le premier point, doit aussi s?inscrire dans une temporalité acceptable avec
la capacité de revoyure en fonction des situations de crise.
Le choix de la production de CSR en Vendée, avec ce facteur risque de
rentabilité que vous soulignez, s?inscrit aussi dans un principe d?économie
circulaire de territoire puisque l?objectif est que ce produit alimente une
chaudière industrielle de proximité dont l?enquête publique est en cours.
Cette nécessité de favoriser l?économie circulaire, soulignée à
plusieurs reprises dans votre rapport, implique le soutien des initiatives
locales en acceptant une part de risque. D?ailleurs, la rentabilité
financière de la gestion des déchets est un concept limité. Il s?agit plutôt
d?une maîtrise de l?évolution des coûts en améliorant la qualité
environnementale.
Pour conclure, je souhaite vraiment qu?il puisse exister au niveau
national une réelle stratégie de gestion et de valorisation des déchets. Cette
stratégie doit fixer des objectifs de résultats cohérents et scientifiques, sans
dogmatisme.
Les collectivités locales sous l?égide des plans régionaux ont la
capacité d?assurer de manière opérationnelle l?atteinte de ces objectifs,
mais avec une liberté d?adaptation des moyens en fonction de la
particularité des territoires. Je suis d?accord avec vous, sur la nécessité
que les collectivités se réunissent et massifient leurs actions pour atteindre
les objectifs. Certaines comme Trivalis, l?ont déjà effectué.
Il est indispensable que l?État soutiennent les collectivités qui
fournissent des efforts, celles qui se sont emparées des sujets en évoluant
vers le caractère incitatif du financement de la gestion des déchets, celles
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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210 COUR DES COMPTES
qui évoluent vers une économie circulaire concrète et anticipent des choix
de prévention et de meilleure valorisation matière.
Enfin, la situation actuelle de crise des matières premières et de
l?énergie, doit être un accélérateur pour faire de nos déchets des
ressources. De nombreuses initiatives locales et publiques vont dans ce
sens, il est nécessaire de faciliter leur développement.
À ce titre une vigilance particulière devra être portée sur le
développement massif des REP. Il ne faudrait pas que l?intention bénéfique
du principe de pollueur payeur masque un dessaisissement du service
public des déchets et une réorientation des recettes uniquement vers les
entreprises privées gestionnaires des REP.
En espérant avoir contribué à l?éclairage de certains aspects du
rapport et instauré une vision plus positive des évolutions à venir, je vous
prie d?agréer, Monsieur le Premier Président, l?expression de ma haute
considération.
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE L?ASSOCIATION AMORCE
A propos d?AMORCE
Rassemblant plus de 1000 adhérents pour plus de 60 millions
d?habitants représentés, AMORCE constitue le premier réseau français
d?information, de partage d?expériences et d?accompagnement des
collectivités (communes, intercommunalités, conseils départementaux,
conseils régionaux) et autres acteurs locaux (entreprises, associations,
fédérations professionnelles) en matière de politiques Énergie-Climat des
territoires (maîtrise de l?énergie, lutte contre la précarité énergétique,
production d?énergie décentralisée, distribution d?énergie, planification),
de gestion territoriale des déchets (planification, prévention, collecte,
valorisation, traitement des déchets) et de gestion de l?eau.
Objet de la consultation
Une nouvelle enquête de la Cour des Comptes intitulée? Prévention,
collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser?
a abouti à la production d?un projet rapport public thématique soumis à
l?avis d?AMORCE avant publication définitive. Cette enquête intervient 10
ans après le précédent rapport thématique de septembre 2011, complété
Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - septembre 2022
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS 211
par un rapport de suivi inséré au rapport public annuel de 2014 de la Cour
des Comptes intitulé ?La gestion des déchets ménagers, des progrès
inégaux au regard des enjeux environnementaux?. Des travaux avaient été
également consacrés aux éco-organismes insérés aux rapports publics
annuels de 2016 (Les éco-organismes : un dispositif original à consolider)
et 2020 (Les éco-organismes : une performance à confirmer, une
régulation à renforcer) de la Cour des Comptes. Ce nouveau rapport est
basé sur 51 contrôles des Cours Régionales des Comptes et des échanges
avec les administrations centrales, l?ADEME, CITEO, l?AMF, ELIPSO, la
FNADE, UFC que Choisir, Zéro Waste France et AMORCE lors de 2
auditions en 2022.
Avis d?AMORCE validé lors du Conseil d?Administration du
7 Septembre 2022.
Le rapport pointe le retard pris par la France dans l?atteinte des
objectifs nationaux et européens et formule des recommandations pour
améliorer l?organisation et le financement de la gestion des déchets. Pour
AMORCE, il ressort au premier plan une absence criante de
l?accompagnement de l?État en matière de gestion des déchets, qui ne joue
notamment pas son rôle de régulateur auprès des éco-organismes pour
mieux affecter les soutiens perçus auprès des metteurs sur le marché vers
les collectivités. In fine, le citoyen se retrouve toujours à devoir supporter
une grande partie du coût de gestion des déchets.
Au niveau de la comparaison des performances européennes, les
calculs ne sont pas homogènes d'un pays à l'autre car l?Europe ne disposait
pas, avant la Directive déchets de 2018, d?une méthode de mesure
uniforme. Chaque pays proposait des méthodes de calcul qui lui sont
propres : par exemple, dans le domaine du tri des emballages ménagers,
la France ne comptabilise comme recyclé que les matières effectivement
remises sur le marché, déduction faite des refus de tri, alors que
l?Allemagne comptabilise tous les tonnages entrant en centre de tri soit un
écart dans les comptes de 17% en faveur de cette dernière à tonnages
entrants égaux. Une tentative, non encore aboutie, d?harmonisation des
calculs réalisée par un groupe d?experts au niveau Européen montre que
la France se situe effectivement plutôt dans la moyenne des pays
Européens. A noter que, malgré les travaux de refonte de l?observatoire
national de suivi des déchets piloté par l?ADEME et entamés depuis près
de 2 ans, les collectivités ne disposent toujours pas de la méthode officielle
de calcul de l?objectif de préparation ou recyclage des déchets introduit
par l?Ordonnance n° 2020-920 du 29 juillet 2020 et nécessaire au pilotage
du SPGD (indicateur européen également).
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212 COUR DES COMPTES
Il est par ailleurs mis en avant que ni la programmation nationale,
ni les PRPGD (insuffisamment précis et contraignants sur les
investissements), ni les PLPDMA ne sont à la hauteur des défis à relever :
il est proposé dans le rapport d?améliorer la planification par une
unification de la programmation nationale et l?adoption d'un programme
de mise en oeuvre spécifique par EPCI. AMORCE partage le même
constat : le planificateur ne met pas en place les moyens de ses objectifs,
avec les mêmes objectifs et la même échéance. Les régions doivent jouer
pleinement leur rôle de planificateur, d'animateur voir de financeur (pour
surmonter effectivement les difficultés d'amortissement) pour garantir la
mise en oeuvre des objectifs et une répartition territoriale cohérente des
équipements structurants. Pour aller plus loin dans la démarche jusqu?à
l?échelon territorial, AMORCE préconise de décliner les objectifs et
actions pour les atteindre dans un plan intercommunal, avec un dialogue
équilibré intercommunalités - régions. Il semble par ailleurs nécessaire de
réfléchir à un financement en permettant que les régions perçoivent une
part de la recette de TGAP et puissent établir un dispositif d'aide adapté
qui correspond à l'application du PRPGD. Le simple transfert d?une partie
du fonds Économie Circulaire vers les régions ne permet en effet pas aux
régions de piloter ce fonds en fonction des priorités identifiées au PRPGD.
La création d?une composante locale de la TGAP (défalquée du montant
de la TGAP nationale) permettrait également de donner des moyens
financiers aux territoires en charge du SPGD.
Pour le dispositif de suivi des plans à améliorer avec des indicateurs
annuels pertinents et synthétiques, le rapport préconise de publier d?ici
2024 un tableau de bord annuel du SPGD à l?échelle nationale produits
par les observatoires régionaux à partir de comptes-rendus simplifiés et
par type d'EPCI avec 6 indicateurs clés, complété par un tableau de bord
des filières REP selon le même principe et par chaque éco-organisme
regroupant les principales données utiles. AMORCE est favorable à des
indicateurs de pilotage pertinents et communs à l?ensemble des échelons -
à définir conjointement avec les acteurs du déchets - mais qui doivent
comporter des indicateurs amont en lien avec les mises sur le marché. A
noter que le travail de refonte de l?Observatoire des déchets cité ci-avant
piloté par l?ADEME n?a pas abouti pour l?instant (en tout cas non transmis
aux parties prenantes) à une meilleure visibilité sur les indicateurs
pertinents à retenir ni pour le moment à la définition d?une méthode
harmonisée de calcul des indicateurs nationaux manquants. Le rapport de
la Cour des Comptes envisage également de simplifier le rapport annuel
sur le prix et la qualité du SPGD d?ici 2024 autour de ces 6 indicateurs
associés aux coûts de gestion des déchets à l'habitant : AMORCE y est
favorable.
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Au niveau du retard pris en matière de prévention des déchets, pour
AMORCE la responsabilité en revient principalement aux metteurs sur le
marché qui n'ont pas respecté les objectifs fixés par l'État. En effet, à
l'exception du compostage de proximité qui dépend d'une politique
ambitieuse de tri source des biodéchets (cf. point ci-après), les actions de
prévention d'une collectivité sont nécessaires mais impactent peu la baisse
des tonnages. Elles dépendent davantage des évolutions de consommation
et des metteurs sur le marché qu'il s'agirait pour AMORCE de contraindre
davantage. La Cour des comptes propose par ailleurs de rendre
obligatoire, quand le PLPDMA est élaboré par un syndicat de traitement,
une déclinaison territoriale.
Quant au financement complexe de la gestion des déchets dont en
particulier la recommandation de la Cour des Comptes de favoriser la
tarification incitative en allégeant son coût pour les EPCI grâce à un
financement complémentaire porté à 80% des coûts sur les premiers
exercices, Il faut pour AMORCE se poser en réalité deux questions :
? Quel type de signal prix ou autre forme d?incitation ou de dissuasion
financière ou fiscal faut-il développer et sur quel acteur, pour que les
citoyens contribuent davantage par leur comportement d?achat,
d?utilisation, de réparation, de tri au respect des objectifs de
prévention, de réemploi, de collecte sélective et de tri à la source, de
recyclage et de valorisation des déchets ménagers et assimilés ? Cela
impose inéluctablement d?évaluer l?efficacité de signaux prix portant sur
le prix du produit, la fiscalité locale des déchets, la fiscalité nationale de
la gestion des déchets. La réflexion sur les mesures et dispositifs
incitatifs en faveur de la réduction des déchets ne doit pas porter
uniquement sur les usagers du service public mais sur l?ensemble des
acteurs qui peuvent favoriser l?action des citoyens en faveur des
objectifs de la France en matière d?économie circulaire (prévention-
réutilisation, recyclage, réduction de l?enfouissement), à chaque étape
du cycle de vie d?un produit (de sa conception, son achat, son utilisation
et sa fin de vie) :
? Le citoyen consommateur : qui doit être informé et incité dans ses
actes de consommation avec des mesures portant sur la taxation
amont (REP généralisée), la TVA, des logiques de bonus/malus et
leur information grand public dans le cadre des filières REP.
? Le citoyen usager du service public : qui doit comprendre en tant
qu?utilisateur du SPGD l?impact de son geste de tri sur les coûts et
être intéressé à la prévention et au tri la source efficace de ses
déchets avec des mesures incitatives. Cette seule approche permet
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214 COUR DES COMPTES
d'améliorer le geste de tri mais ne modifie pas les habitudes de
consommation. Il est donc nécessaire d'agir sur toute la chaîne.
? Le citoyen contribuable : qui, en tant que financeur d?une partie des
services, doit appréhender le coût de la gestion des déchets et son
mode de financement avec des mesures portant sur l?affichage, la
compréhension et la lisibilité des taxes TGAP/TVA, des recettes et
de la fiscalité locale (TEOM, REOM).
? Comment doit se répartir le financement de la gestion de la gestion des
déchets ou plus largement la boucle d?économie circulaire au regard
des responsabilités de chacun des acteurs de la chaîne d?économie
circulaire (collectivités via la fiscalité locale, metteurs sur le marché
via les REP, acteurs économiques du recyclage et de la valorisation via
les prix de reprise et recette de valorisation, État via les aides de
l?ADEME issues des recettes de TGAP (bien que non affectées) ? À
noter que la TGAP doit être revue dans sa trajectoire pour qu'elle soit
incitative (aujourd'hui sa trajectoire ne permet pas les investissements
des collectivités pourtant nécessaires). Il s?agit par ailleurs, d?une
fiscalité écologique dont le principe même est d?inciter à la prévention
des déchets, au recyclage et à la limitation de l?élimination. Il est donc
nécessaire de la rendre incitative. Sur ce sujet, AMORCE défend depuis
de nombreuses années des évolutions de cette fiscalité (minoration du
montant pour les collectivités performantes, franchise de TGAP sur le
gisement sur lequel les collectivités ne peuvent agir...).
Sur la proposition d?instaurer une surtaxe à la taxe de séjour avec
produit affecté aux actions de prévention et gestion déchets : cette mesure
est intéressante mais si elle est clairement insuffisante
pour AMORCE. Une plus grande réflexion sur le financement et sa
dimension locale devrait être menée (notamment TGAP localisée).
Le tri à la source des biodéchets est souligné comme étant à juste
titre un enjeu majeur pour les territoires. Cependant, au regard du retard
de déploiement pris au niveau national, AMORCE préconise de modifier
la date de mise en oeuvre de l?obligation de sorte à ce que la date butoir du
31 décembre 2023 ne soit plus une obligation de généralisation mais une
obligation d?étude de faisabilité sous peine de ne plus pouvoir bénéficier
des aides de l?ADEME à échéance de l?obligation de tri à la source des
biodéchets prévu au 31 décembre 2023 et qui serait alors reportée au 31
décembre 2025. AMORCE demande également un renforcement du
dispositif financier pour garantir l'absence de surcoûts à la collectivité (cf.
études ADEME et FNADE/CME) et accélérer le déploiement dans des
conditions financières acceptables. Le nouveau système de financement et
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d?aides pour l'accélération du développement du tri à la source des
biodéchets peut s?appuyer sur les propositions suivantes :
- Affecter jusqu?en 2025, la totalité des recettes de la TGAP afin
d?augmenter de 300 millions d?euros le fonds Économie Circulaire en
particulier au profit des solutions de tri à la source des biodéchets,
permettant d?assurer une aide de 90% pour les études de faisabilité et
de 100% sur les investissements de compostage de proximité (dont
compostage individuel non soutenu actuellement), de pré-collecte, de
collecte et de valorisation des biodéchets jusqu?au 31 décembre 2025,
permettant de compenser les surcoûts,
- Introduire une modulation de TGAP de 30 euros la tonne éliminée
d?OMR (soit environ 10 euros par habitant) pour les collectivités qui
ont mis en place le tri à la source des biodéchets,
- Permettre l?application d?un taux de TVA réduit aux matières
fermentescibles d?origine résiduaire,
- Créer un système de bonus à l?usage de matières fertilisantes issues
des biodéchets dans les sols ou instaurer des quotas à l?usage
d?engrais chimiques pour les producteurs de denrées et produits
alimentaires bruts (céréales, légumes, fruits) à hauteur des parts de
marchés des produits agro-alimentaires,
AMORCE demande également une modification du cadre
réglementaire pour :
- Revoir la réglementation sur les conditions de traitement et
l?interdiction de mélanger des biodéchets avec d?autres déchets
n?ayant pas fait l?objet d?un même tri,
- Clarifier de manière opérationnelle les conditions de limitations de la
fraction organique des déchets dans les ordures ménagères
résiduelles à éliminer.
Au niveau des matières revendues aux filières de recyclage qui se
diversifient et subissent de fortes variations de cours, la Cour des Comptes
préconise que les collectivités volontaires puissent choisir de confier cette
mission commerciale aux éco-organismes, sous condition de suivi
rigoureux des obligations qui leur sont fixées dans les cahiers des charges.
AMORCE s?oppose au choix de confier la revente de matières
commerciales aux éco-organismes car les REP financent déjà mal les
collectivités locales alors qu'elles essaient de reprendre la main sur les
matériaux qui ont plus de valeur. Les collectivités ont besoin de ces
reventes matières pour compenser le manque de soutien des éco-
organismes. La seule condition acceptable du transfert de la revente
matière serait un financement à plus de 80% des coûts par la REP.
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Enfin au niveau des enjeux industriels prioritaires qui doivent être
mieux intégrés au plan national :
? sur le volet de la plasturgie, avec les difficultés de traitement des
plastiques dues à leur diversité et la cible de généralisation de l?ECT fin
2022 qui n?est pas atteinte : AMORCE appelle à ne pas se focaliser que
sur les emballages ménagers qui représentent 1MT sur 4MT de
plastiques mais sur l?ensemble des plastiques (4MT) et à réaliser un
inventaire des résines et des installations capables de les traiter.
? sur la place de la valorisation énergétique des déchets : pour AMORCE
elle doit être réaffirmée, dans le respect de la hiérarchie des modes de
traitement, en tant source d?énergie renouvelable produite localement et
issue de déchets non recyclables constituant un potentiel de valeur qui
mérite d?être mieux exploité. Elle participe à l?autonomie de la France
sur le plan énergétique.
En résumé pour AMORCE il s?agit donc avant tout de :
? Renforcer l?efficacité de la planification écologique et rééquilibrer le
financement de la gestion des déchets.
? Réaffirmer la nécessité de faire évoluer et de renforcer les outils de
planification de l?État et des collectivités en faveur de l?atteinte des
objectifs nationaux en unifiant les objectifs et les échéances ainsi que les
indicateurs de suivi communs et en adoptant un programme de mise en
oeuvre spécifique par EPCI pour dialoguer avec les PRPGD.
? Demander une affectation financière plus efficace pour mettre en oeuvre
la planification territoriale avec un signal prix fort en amont au niveau
des metteurs sur le marché impactant les habitudes de consommation,
au niveau intermédiaire avec les modulations des filières REP et la
tarification incitative appliquée aux usagers et en aval via la TGAP,
pour la rendre plus incitative (minoration à la performance des
collectivités) et pour redistribuer son produit en faveur
d?investissements pour la transition écologique dans les territoires.
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Sommaire
Procédures et méthodes
Synthèse
Récapitulatif des recommandations
Introduction
Chapitre I Une réduction des déchets contrariée par un pilotage insuffisant
I - Le volume élevé de déchets produits
II - Des acteurs insuffisamment coordonnés
III - Un dispositif de suivi toujours défaillant
IV - Un financement peu lisible et trop faiblement incitatif
Chapitre II Le dispositif opérationnel : une transformation à accélérer vers l?économie circulaire
I - La prévention : priorité officielle, mais parent pauvre de la gestion des déchets
II - La collecte : peu de progrès sur les enjeux prioritaires
III - Le traitement : une coûteuse modernisation à entreprendre
Conclusion générale
Liste des abréviations
Annexes
Annexe n° 1 : présentation de l?échantillon des contrôles réalisés par la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC)
Annexe n° 2 : le suivi des recommandations des juridictions financières sur les déchets ménagers
Annexe n° 3 : les Plans Régionaux de Prévention et de Gestion des Déchets (PRPGD
Annexe n° 4 : les indicateurs internationaux
Annexe n° 5 : les indicateurs du service public des déchets
Annexe n° 6 : les indicateurs des filières à responsabilité élargie du producteur (REP)
Annexe n° 7 : comparaisons internationales
Annexe n° 8 : les déchets en matière plastique
Annexe n° 9 : comparatif entre les différentes modalités de financement du service public
Annexe n° 10 : les conséquences de la crise sanitaire sur la gestion des déchets
Réponses des administrations et des organismes concernés
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