Rapport d'enquête technique sur la collision entre un train express régional et un véhicule léger survenue le 15 janvier 2021 sur le passage à niveau n° 44 à Péronnas (01)

Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre
Auteur secondaire
Résumé
<p align="justify" style="margin-bottom: 0cm; line-height: 100%"><font face="Liberation Serif, serif"><font size="2" style="font-size: 11pt">Le vendredi 15 janvier 2021,, un TER en provenance de Lyon et à destination de Bourg-en-Bresse percute un véhicule léger sur le passage à niveau (PN) n°44 sur la commune de Péronnas. La seule occupante du véhicule est décédée sur le coup. A l'issue de son enquête le BEA-TT n'a pu déterminer avec certitude les raisons pour lesquelles le véhicule s'est retrouvé piégé sur la voie ferrée alors que le passage à niveau était fermé. Il recommandera, bien qu'aucun élément ne vienne mettre en cause le passage à niveau, d'améliorer la configuration de ce dernier ainsi que de ses abords, et de sensibiliser les agents à prioriser certaines actions lots de la conduite de trains.. </font></font></p>
Descripteur Urbamet
accident ; enquête ; mouvement naturel ; train
Descripteur écoplanete
Thème
Transports
Texte intégral
RAPPORT D?ENQUÊTE TECHNIQUE sur la collision entre un train express régional et un véhicule léger survenue le 15 janvier 2021 sur le passage à niveau n° 44 à Péronnas (01) Mars 2023 Avertissement L?enquête technique faisant l?objet du présent rapport est réalisée dans le cadre des articles L.1621-1 à 1622-2 et R.1621-1 à 1621-26 du Code des transports relatifs, notamment, aux enquêtes techniques après accident ou incident de transport terrestre. Cette enquête a pour seul objet de prévenir de futurs accidents. Sans préjudice, le cas échéant, de l?enquête judiciaire qui peut être ouverte, elle consiste à collecter et analyser les informations utiles, à déterminer les circonstances et les causes certaines ou possibles de l?évènement, de l?accident ou de l?incident et, s?il y a lieu, à établir des recommandations de sécurité. Elle ne vise pas à déterminer des responsabilités. En conséquence, l?utilisation de ce rapport à d?autres fins que la prévention pourrait conduire à des interprétations erronées. Glossaire ? AGC: Autorail à Grande Capacité ? ATESS: Acquisition et Traitement des Évènements de Sécurité en Statique; dispositif enregistreur équipant les motrices ferroviaires ? CD01: Conseil Départemental de l?Ain ? FU: Freinage d?Urgence ? INPN: Instance Nationale des Passages à Niveau ? PK: Point Kilométrique ? PL: Poids Lourd ? PN: Passage à Niveau ? PR: Point Repère ? PSN: Programme de Sécurisation National [des PN] ? RD: Route Départementale ? SAL 2: Passage à niveau à Signalisation Automatique Lumineuse et sonore complété de deux demi- barrières automatiques ? SAR: Signal d?Alerte Radio [du train] ? TER: Train Express Régional ? TGV: Train à Grande Vitesse ? VL: Véhicule Léger Bordereau documentaire Organisme auteur: Bureau d?Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre (BEA-TT) Titre du document: Rapport d?enquête technique sur la collision entre un train express régional et un véhicule léger survenue le 15 janvier 2021 sur le passage à niveau n° 44 à Péronnas(01) Affaire n° BEATT-2021_01 N°ISRN: EQ-BEAT--23-03--FR Proposition de mots-clés: passage à niveau, collision Synthèse Le vendredi 15 janvier 2021, à 14h07, le train express régional (TER) n° 889474 en provenance de Lyon et à destination de Bourg-en-Bresse a percuté un véhicule léger (VL) sur le passage à niveau (PN) n° 44 sur la commune de Péronnas dans le département de l?Ain. Ce PN est équipé d?une signalisation automatique lumineuse et sonore avec deux demi-barrières. Le TER, qui circulait au moment du choc à la vitesse de 134km/h, n?a pas déraillé. Parmi les 146 occupants du train, aucun n?a été blessé. La conductrice du VL, qui était dans son véhicule au moment du choc, est décédée sur le coup. La cause directe de l?accident est la présence du véhicule léger sur les voies ferrées au moment de l?arrivée du train. Les investigations conduites dans l?enquête judiciaire n?ont pas permis d?identifier des éléments étayant l?hypothèse que la collision découle d?un acte volontaire de la part de la conductrice du VL. Le BEA-TT considère qu?au moment de la collision, la demi-barrière du passage à niveau du côté de l?approche du VL était probablement en position basse au contact du coffre du véhicule. Les dégâts très importants sur le VL n?ont pas permis, à la date de publication de ce rapport, de récupérer des données dans l?électronique de bord afin de préciser la cinématique du VL avant la collision. Les seules traces laissées par le VL sur la chaussée se situent au niveau de la voie ferrée et sont consécutives au choc. Malgré l?absence de certitudes dans l?enchaînement des évènements, le BEA-TT est amené à proposer quatre recommandations de nature à améliorer la sécurité. Le BEA-TT estime que pourraient être améliorées la gestion des priorités entre les usagers routiers, les conditions géométriques d?approche et de franchissement des voies ferrées ainsi que la visibilité sur les équipements du PN et en particulier sur le feu rouge clignotant situé à droite. Trois recommandations sont formulées en ce sens. Le BEA-TT formule également une recommandation sur la sensibilisation des agents de conduite vis-à-vis des enjeux d?initialisation de la radio sol-train notamment à proximité des PN. 1 SOMMAIRE SYNTHÈSE....................................................................................................................................1 1 - LES CONSTATS IMMÉDIATS ET L?ENGAGEMENT DE L?ENQUÊTE.................................4 1.1 - Les circonstances de l?accident........................................................................................4 1.2 - Le bilan humain et le bilan matériel..................................................................................6 1.3 - L?engagement et l?organisation de l?enquête....................................................................6 2 - LE CONTEXTE DE L?ACCIDENT...........................................................................................7 2.1 - Les conditions météorologiques.......................................................................................7 2.2 - La route communale «chemin de Monternoz»...............................................................7 2.2.1 - Les caractéristiques générales du chemin de Monternoz......................................................................7 2.2.2 - Les caractéristiques géométriques de cette route..................................................................................8 2.2.3 - Les circulations sur cette route..............................................................................................................9 2.3 - La ligne ferroviaire de Lyon à Bourg-en-Bresse.............................................................10 2.4 - Le passage à niveau n°44.............................................................................................11 2.4.1 - Les caractéristiques générales du passage à niveau...........................................................................11 2.4.2 - L?approche du PN n°44 par la route et la signalisation routière...........................................................12 2.4.3 - L?approche du PN n° 44 par la voie ferrée...........................................................................................15 2.4.4 - Les autres équipements du PN n°44...................................................................................................16 2.4.5 - Le fonctionnement théorique du PN n°44 à l?approche d?un train provenant de Servas-Lent..............16 2.4.6 - Les incidents et accidents identifiés sur le PN n°44 depuis 2016........................................................16 3 - LE COMPTE RENDU DES INVESTIGATIONS EFFECTUÉES...........................................18 3.1 - L?état des lieux après l?accident......................................................................................18 3.2 - Les résumés des témoignages.......................................................................................19 3.2.1 - Le conducteur du train accidenté.........................................................................................................19 3.2.2 - Les premiers arrivants sur les lieux......................................................................................................20 3.2.3 - Les proches et collègues de la conductrice du VL...............................................................................20 3.2.4 - Les passagers du train express régional impliqué dans l?accident.......................................................20 3.3 - Le véhicule léger et sa conductrice................................................................................20 3.3.1 - Les caractéristiques du véhicule léger.................................................................................................20 3.3.2 - Les dégâts occasionnés au véhicule léger...........................................................................................21 3.3.3 - La conductrice du véhicule léger..........................................................................................................23 3.3.4 - Le trajet d?approche du véhicule léger.................................................................................................24 3.3.5 - L?analyse des calculateurs du véhicule léger.......................................................................................24 3.4 - Le train et son conducteur..............................................................................................25 3.4.1 - Le matériel roulant ferroviaire impliqué................................................................................................25 3.4.2 - Les dégâts occasionnés au train suite à la collision.............................................................................26 3.4.3 - Le conducteur du train......................................................................................................................... 27 3.4.4 - Le trajet d?approche du train................................................................................................................27 3.4.5 - L?analyse des données de l?enregistreur des paramètres de conduite.................................................28 3.4.6 - L?analyse des enregistrements de vidéoprotection...............................................................................29 3.5 - L?analyse du passage à niveau et des dégâts occasionnés..........................................30 3.5.1 - Rappel du fonctionnement nominal d?une demi-barrière......................................................................30 3.5.2 - Les constatations après l?accident.......................................................................................................31 3.6 - L?approfondissement des investigations sur la trajectoire du VL...................................33 3.6.1 - Le sens de circulation du VL en approche du PN.................................................................................33 3.6.2 - La trajectoire du VL avant la collision avec le train...............................................................................33 3.6.3 - Le choc entre le TER et le VL..............................................................................................................36 3.6.4 - Le choc entre le VL et les installations du PN......................................................................................37 3.6.5 - La trajectoire du VL après les collisions avec le TER puis avec le PN.................................................39 4 - LE DÉROULEMENT DE L?ACCIDENT ET L?INTERVENTION DES SECOURS.................40 5 - L?ANALYSE DES CAUSES ET DES FACTEURS ASSOCIÉS, LES ORIENTATIONS PRÉVENTIVES.............................................................................................................................41 5.1 - La gestion des priorités entre usagers routiers au droit du PN......................................42 5.2 - La visibilité sur les équipements du PN..........................................................................43 5.3 - Le réglage de la radio sol-train.......................................................................................44 6 - LES RECOMMANDATIONS..................................................................................................46 ANNEXES....................................................................................................................................47 Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête.............................................................................48 Annexe 2: Règlement général de protection des données....................................................49 1 - Les constats immédiats et l?engagement de l?enquête 1.1 - Les circonstances de l?accident Le vendredi 15 janvier 2021, à 14h07, le train express régional (TER) n° 889474 en provenance de Lyon et à destination de Bourg-en-Bresse, avec 146 personnes à bord, a percuté un véhicule léger sur le passage à niveau n°44 situé sur la commune de Péronnas dans le département de l?Ain. Figure 1: plan de situation de l?accident, à l?échelle de la région carte Géoportail-IGN, légende BEA-TT Figure 2: plan de situation de l?accident, à l?échelle de la commune carte Géoportail-IGN, légende BEA-TT 4 Figure 3: plan de situation de l?accident, vue aérienne vue aérienne Géoportail-IGN, légendée BEA-TT Figure 4: le véhicule léger, le passage à niveau et l?avant du train après l?accident et les opérations de désincarcération de la victime photos Police nationale 5 1.2 - Le bilan humain et le bilan matériel La conductrice du VL est décédée sur le coup. Son véhicule a été totalement détruit, plusieurs éléments, dont le moteur, ont été dissociés du châssis qui a été projeté à plusieurs dizaines de mètres du passage à niveau. Le véhicule a effectué au moins un tonneau dans sa trajectoire post-collision. L?agent de conduite du train n?a pas été physiquement blessé mais a subi un choc psychologique important. Le train a été endommagé principalement au niveau de la motrice en tête. Des éléments de carrosserie et mécaniques ont été détruits. Le train n?a toutefois pas déraillé et a pu être rapatrié à l?aide d?un engin moteur de secours vers Bourg-en-Bresse. Les installations du passage à niveau ont été endommagées essentiellement du côté est. En particulier, une demi-barrière et son mécanisme ont été arrachés, des câbles électriques et d?autres équipements du passage à niveau ou de la voie ferrée ont été détruits. De nombreux débris, parfois de masse importante, comme le moteur du véhicule léger, ont été projetés sur les terrains des riverains, sur la route ou contre un bâtiment, sans provoquer de blessure humaine. La circulation ferroviaire a été totalement interrompue sur la ligne à voie unique. Elle a été rétablie le lendemain samedi 16 janvier 2021 à vitesse normale. 1.3 - L?engagement et l?organisation de l?enquête Au vu des circonstances de cet accident, le directeur du bureau d?enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) a ouvert le 18 janvier 2021 une enquête technique en application des articles L. 1621-1 à L. 1622-2 et R. 1621-1 à R. 1621-26 du code des transports. Les enquêteurs du BEA-TT ont contacté les autorités judiciaires. Ils se sont rendus sur place et ont rencontré les enquêteurs de la Police nationale, les représentants de SNCFRéseau, gestionnaire de l?infrastructure ferroviaire, et ceux de la mairie de Péronnas, gestionnaire de l?infrastructure routière. Ils ont examiné l?épave du véhicule léger accidenté ainsi que les équipements du passage à niveau heurté. Ils ont recueilli le témoignage de l?agent de conduite du train impliqué. Ils ont disposé de l?ensemble des pièces et documents nécessaires à leurs analyses, notamment le dossier de l?enquête de flagrance diligentée par le procureur de la République et menée par le commissariat de Bourg-en-Bresse. 6 2 - Le contexte de l?accident 2.1 - Les conditions météorologiques Le vendredi 15 janvier 2021 était une journée pluvieuse, avec une température de 2°C au moment de l?accident d?après Météo-France. Des averses se produisaient, la couche nuageuse recouvrait entièrement le ciel, de légers flocons de neige tombaient au sol mais fondaient en arrivant sur la route. Au moment de la collision, les infrastructures routières et ferroviaires étaient humides. Aucun phénomène de brouillard n?a été observé au moment de l?accident. La vitesse du vent était de l?ordre de 10à 20km/h. 2.2 - La route communale «chemin de Monternoz» 2.2.1 - Les caractéristiques générales du chemin de Monternoz Le PN est situé hors agglomération, sur le territoire de Péronnas. La route communale qui croise le PN n° 44 est le chemin de Monternoz. L?environnement proche du PN est constitué de zones boisées, de terres agricoles, d?une exploitation agricole et de quelques habitations. Figure 5: identification de l?environnement proche du PN fond de plan IGN-Géoportail et légende BEA-TT L?autorité détentrice du pouvoir de police de la circulation, qui fixe la vitesse maximale autorisée, est la maire de Péronnas. Cette vitesse était, au moment de l?accident, de 80km/h dans les deux sens de circulation. 7 2.2.2 - Les caractéristiques géométriques de cette route Cette route est bidirectionnelle et possède une largeur de 6,15m en section courante, qui se réduit à 4,30m sur le passage à niveau. La longueur de traversée du PN par la route est de 7mètres. Aucun régime d?alternat pour régler les priorités n?est en place. Sur le PN n°44, la faible largeur de la route et sa géométrie en amont du PN ne permet pas à deux véhicules de se croiser aisément. De chaque côté d?approche du passage à niveau, la route comporte un virage prononcé. Figure 6: illustration du tracé en plan de la route aux environs du PN n°44 vue aérienne IGN-Géoportail légendée par le BEA-TT Figure 7: modélisation de l?environnement du PN source BEA-TT Figure 8: identification des conditions de franchissement du PN source Police 8 La dernière figure représente une prise de vue par drone. Pour que le VL reste dans sa voie au moment du virage, celui-ci doit être franchi à très basse vitesse. La majorité des usagers observés par les enquêteurs du BEA-TT prennent le virage en débordant sur l?autre voie en approche du PN, et se retrouvent au centre de la route au moment de le franchir. Le profil en long de la route au passage à niveau sur les 100 derniers mètres, dans le sens de circulation de l?est vers l?ouest, est très peu marqué avec une pente moyenne en descente de 1%. La dénivellation sur le PN n° 44 n?apparaît pas significative. Ce passage à niveau n?était pas classé comme PN à franchissement difficile. Nota: Les pointillés jaunes sur la figure suivante ont été ajoutés pour matérialiser le bord de chaussée et le profil de la route, ils ne sont pas présents sur le terrain. Figure 9: illustration du profil en long de la route au droit du PN n°44 photo et légende BEA-TT 2.2.3 - Les circulations sur cette route Les catégories des véhicules empruntant cet axe sont très variées. Des véhicules légers croisent des poids lourds ou encore des engins agricoles. Les derniers comptages disponibles réalisés en décembre 2012 indiquent des valeurs de 1624veh/j, dont 5% de trafic PL, soit près de 80 véhicules lourds par jour. Les enquêteurs du BEA-TT ont pu constater des situations dans lesquelles des usagers étaient amenés à déborder sur l?autre voie à l?approche du passage à niveau, ainsi que des conflits de priorité au niveau du PN entre deux usagers arrivant en sens opposés. Photo prise dans le sens du VL accidenté Photo prise dans le sens opposé Figure 10: illustrations de deux catégories de véhicules empruntant le PN n°44 photos BEA-TT 9 Cette route de desserte locale supporte, en l?absence d?un axe de contournement dans le sud de l?agglomération de Bourg-en-Bresse, un trafic important et, d?après les acteurs locaux interrogés, des vitesses pratiquées élevées. Cette route assure la continuité entre, à l?ouest, des axes pénétrants l?agglomération de Bourg-en-Bresse, comme la RD117 et laRD 1083 et, à l?est, des axes pénétrants comme la RD1075 ou de contournement de l?agglomération comme la RD 117A. Figure 11: illustration de quelques axes routiers majeurs de l?agglomération fond de plan IGN-Géoportail et légende BEA-TT 2.3 - La ligne ferroviaire de Lyon à Bourg-en-Bresse La ligne ferroviaire n°886000 relie Lyon- Saint-Clair à Bourg-en- Bresse en desservant Villars-les-Dombes. Cette ligne comporte deux voies dans sa partie sud et une voie unique banalisée entre Villars-les-Dombes et Bourg-en-Bresse. Seule la partie sud de la ligne, aux alentours de Lyon, est électrifiée. Le trafic supporté par cette ligne est composé de trains de voyageurs TER locaux. Figure 12: illustrations de la ligne ferroviaire n° 886 000 fond de carte IGN-Géoportail ? légende BEA-TT 10 Les communications entre les trains et les agents circulation de SNCFRéseau utilisent un système de radio sol-train de technologie GSM-R (Global System for Mobile communication for Railway) indépendant des réseaux publics de téléphonie mobile pour les zones proches de Lyon et de Bourg-en-Bresse. Pour les autres zones de la ligne, l?agent de conduite du train bénéficie des informations transmises par un téléphone mobile professionnel selon la technologie du GSM-GFU (Global System for Mobile/Groupe Fermé d?Utilisateur). D?après la réglementation du gestionnaire des infrastructures ferroviaires «Sur certaines lignes non équipées de la radio sol-train, il peut être mis en place une liaison téléphonique utilisant le réseau GSM public exploité en groupe fermé d?utilisateurs (GSM-GFU). Cet outil permet une mise en oeuvre plus rapide des mesures de protection et, dans certains cas, constitue le seul moyen susceptible d?arrêter un train en cas de danger imminent ou potentiel pour les circulations ferroviaires.» 2.4 - Le passage à niveau n°44 2.4.1 - Les caractéristiques générales du passage à niveau Le PN n°44 est un passage à niveau automatique classé en 1e catégorie (passages à niveau publics ouverts à la circulation de l?ensemble des usagers de la route, munis de barrières ou de demi-barrières) par arrêté préfectoral. Il est situé au point kilométrique (PK) 61,121 entre les gares de Servas-Lent, située environ à 5km au sud du PN, et celle de Bourg-en-Bresse située environ 4km au nord du PN. En application du programme d?actions pour le traitement de la sécurité des passages à niveau décidé par le Gouvernement en 2008, le PN n°44 a fait l?objet d?un diagnostic de sécurité en date du 5 février 2020. Ce diagnostic, réalisé en commun par la commune de Péronnas et SNCFRéseau signalait: ? «[?] des destructions de clôtures sont constatées, du fait de leur accrochage par des sorties de route, principalement dans le sens ouest-est ;» [?] ? «en raison de la configuration de la route, les feux du PN sont visibles trop tardivement,» [?] ? «la visibilité dans le sens 1 (ouest-est) pourrait être améliorée à l?approche. La commune a acquis la parcelle [?] et va couper les arbres gênants, la visibilité va s?en trouver nettement améliorée [?].» Selon les valeurs de trafic indiquées dans ce compte rendu, le nombre moyen de circulations ferroviaires est de 26 par jour. Le moment de circulation du PN1, qui constitue l?un des indicateurs permettant de caractériser le niveau de risque associé au PN est de 42224. Au moment de l?accident, ce PN ne figurait pas sur la liste2 des 153inscrits au programme de sécurisation national (PSN), établie par l?instance de coordination de la politique nationale d?amélioration de la sécurité des passages à niveau (INPN). 1 Le moment de circulation est le produit arithmétique du nombre moyen journalier, calculé sur l?année, des circulations ferroviaires par le nombre moyen journalier des circulations routières également calculé sur l?année (cf. article 8 de l?arrêté du 18 mars 1991). 2 Cette liste peut être téléchargée sur le site internet du ministère des transports. 11 2.4.2 - L?approche du PN n°44 par la route et la signalisation routière Dans les deux sens de circulation, la signalisation verticale du passage à niveau est conforme aux dispositions réglementaires3. Le marquage axial est de couleur blanche et de type discontinu. Par contre, aucun marquage de rive n?est présent, quel que soit le sens de circulation. Approche par l?ouest Approche par l?est (sens de circulation du VL accidenté) Figure 13: approche du PN n°44 par la route (le VL accidenté arrivait par l?est) photos à 150 m, à 100 m, à 50 m et à 25 m du PN prises après accident par le BEA-TT 3 Arrêté du 18 mars 1991 modifié relatif au classement, à la réglementation et à l?équipement des passages à niveau, arrêté du 24 novembre 1967 modifié relatif à la signalisation des routes et autoroutes et instruction interministérielle sur la signalisation routière du 22 octobre 1963 modifiée. 12 Dans chaque sens de circulation, le PN n°44 est annoncé aux usagers routiers: - 150 m en amont par un panneau de danger de type A7 (passage à niveau muni de barrières)4, avec d?une balise de présignalisation de type J10 à trois bandes; - 100 m en amont par un panneau de danger de type A1c (succession de virages dont le premier est à droite), avec d?une balise de présignalisation de type J10 à deux bandes; - 50 m en amont par une balise de présignalisation de type J10 à une bande. Les enquêteurs du BEA-TT ont pu mesurer sur le terrain ces distances. 150 m en amont 100 m en amont 50 m en amont Figure 14: signalisation verticale dans le sens est-ouest, en approche du PN n°44 photos BEA-TT La route croise à angle droit la voie ferrée, après un virage serré à droite. Figure 15: photo illustrant les positions des deux feux situé à l?est du PN, soit ceux concernés par le VL accidenté image initiale Police nationale, légendée BEA-TT 4 Selon les dispositions de l?article 34-1 de l?IISR, «le panneau A7 peut être complété par un panonceau portant l?inscription «SIGNAL AUTOMATIQUE» en lettres de 0,10m noires sur fond blanc», les enquêteurs du BEA-TT ont constaté l?absence de ces deux panonceaux, alors que d?après des images disponibles sur Internet et prises en mai 2019, ils étaient alors présents. 13 Le PN n°44 possède un système de signalisation automatique lumineuse et sonore, avec quatre feux rouges clignotants, et deux demi-barrières (SAL 2). Lors de l?enquête technique conduite par le BEA-TT sur l?accident du 14 octobre 2017 entre un autocar et un train de voyageurs au PNn°25 de Millas, des investigations5 ont été conduites et une recommandation6 a déjà été adressée sur le sujet des feux rouges clignotants équipant un PN. La réglementation sur la signalisation routière (notamment l?article 7 de l?arrêté du 24novembre 1967 et les articles 8, 34-1 et 109-4 de l?instruction interministérielle sur la signalisation routière du 22 octobre 1963 modifié) précise que: - [?] les signaux sont normalement implantés du côté droit de la chaussée dans le sens de circulation[?]. - le feu R24 doit être composé d?un feu circulaire rouge clignotant, d?un diamètre minimum de 160mm, inscrit dans un fond de couleur sombre formant contraste et doit disposer d?une visière limitant l?éclairement du feu par le soleil. Ce qui est le cas des feux du PNn°44. - un deuxième signal R24 peut être implanté, en synchronisme ou en alternance avec le premier, placé sur la gauche de la route soit au-delà de la voie ferrée sur l?envers du signal opposé, soit, lorsque les conditions locales l?exigent, en deçà de la voie ferrée sur un support indépendant, de manière que les conducteurs approchant du PN puissent, autant que possible, voir au moins un feu quelle que soit la position de leur véhicule. Ce qui est le cas au PN n°44. - un signal lumineux de circulation doit être implanté à une hauteur comprise entre 1,80m et 2,60m et orienté pour être vu des usagers auxquels il est destiné. Il est rappelé également que lorsqu?elle n?est pas matérialisée sur la chaussée, la ligne d?effet des signaux destinés aux véhicules se situe dans un plan perpendiculaire à l?axe de la voie et passant par les feux. Pour le PN n°44 (voir illustration ci-dessus), la ligne d?effet des feux n?est pas matérialisée sur la chaussée, ceci implique que le feu rouge clignotant de droite doit être visible des usagers jusqu?à la position qui se trouve être au droit de ce signal. La visibilité sur le feu rouge clignotant de gauche est dépourvue d?obstacle au moins sur quasiment les 100 derniers mètres avant le PN. La visibilité sur le feu rouge de droite est beaucoup plus faible, de l?ordre de moins d?une dizaine de mètres. Or, la position haute par rapport à la chaussée et les orientations des feux ayant pour point de visée un point éloigné d?environ 50 m en amont du PN peuvent réduire leur perception pour un usager arrivant à proximité immédiate de la demi-barrière. La visibilité sur certains équipements du PN (demi-barrière baissée, feu rouge clignotant à droite) était diminuée par la configuration géométrique des lieux, notamment à cause d?une approche parallèle aux voies ferrées et à la présence d?une armoire métallique (voir le chapitre sur les recommandations). 5 Le rapport d?enquête est disponible sur le site internet du BEA-TT, https://www.bea-tt.developpement- durable.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_beatt_2017-06.pdf 6 Recommandation adressée à la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer: «Établir, en coordination avec SNCF Réseau et la DSR, un référentiel technique fixant des performances et une procédure d?évaluation de la conformité des équipements des passages à niveau, tels que prévus par la réglementation routière relative à la qualification des équipements routiers, ainsi que des règles de mise en service et d?implantation en fonction de leurs caractéristiques et des contraintes de l?environnement». 14 https://www.bea-tt.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_beatt_2017-06.pdf https://www.bea-tt.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_beatt_2017-06.pdf 2.4.3 - L?approche du PN n° 44 par la voie ferrée En provenance de la gare de Servas-Lent, la voie ferrée comporte une longue ligne droite, la majorité du temps bordée de végétation, qui assure par temps clair une visibilité de quasiment 1800 m sur le PN n°44. À la vitesse de 140km/h, vitesse maximale pour ce type de matériel roulant sur cette ligne, cette distance est parcourue en 46 secondes, soit un délai supérieur au délai de fermeture du passage à niveau de 25 secondes. Figure 16: vue vers le PN depuis la voie ferrée dans le sens de circulation du TER, à une distance d?environ 200m photo et légende BEA-TT Figure 17: vue vers le PN depuis la voie ferrée dans le sens de circulation du TER, à une distance d?environ 20 m photo Police nationale prise par drone 15 2.4.4 - Les autres équipements du PN n°44 Le PN n°44 est muni de deux sonneries non atténuées qui s?arrêtent de tinter au moment où les lisses des demi-barrières sont basses. Il comporte un téléphone d?alarme en cas d?urgence situé côté est par rapport à la voie ferrée. Il ne comportait pas, le jour de l?accident, de système de vidéosurveillance ou de télésurveillance. Un système de télésurveillance a été implanté suite à l?accident. 2.4.5 - Le fonctionnement théorique du PN n°44 à l?approche d?un train provenant de Servas-Lent. D?après les documents fournis par SNCF Réseau, dans le sens de circulation et sur la voie empruntée par le train impliqué dans l?accident, le déclenchement de la fermeture du passage à niveau se fait par le franchissement des détecteurs «pédales d?annonce» situés à environ 972mètres en amont du PN. Le délai d?annonce7 est de 25secondes pour un train roulant à la vitesse maximale autorisée, 140 km/h, alors que le délai minimal réglementaire pour un PN à SAL 2 est de 20secondes8. Les enquêteurs du BEA-TT ont effectué des observations, quelques jours après l?accident, sur le fonctionnement du passage à niveau réparé et remis en service lors de plusieurs passages de trains. Ils ont pu constater qu?à partir du moment où les feux rouges s?allument et clignotent et que les sonneries s?activent, il faut environ 7secondes pour que les demi-barrières commencent à s?abaisser. Il faut environ 10secondes de plus pour qu?elles atteignent leur position basse. Il reste un peu moins de 10secondes, une fois les barrières fermées, avant le passage de la tête du train au niveau du PNn°44. Ces valeurs mesurées sur le terrain sont cohérentes avec les valeurs théoriquement prévues et réglementaires. 2.4.6 - Les incidents et accidents identifiés sur le PN n°44 depuis 2016 En janvier 2016, un automobiliste contacte SNCF Réseau suite à une fermeture intempestive du PN. Le dérangement n?est pas constaté par l?agent SNCF Réseau sur place, qui reprend la temporisation d?une des pédales d?annonce. Les tests réalisés indiquent que le PN est fonctionnel. En mars 2018, lors d?une tournée de contrôle des installations, un isolement défectueux est identifié. Des câbles d?alimentation et une batterie 8V sont remplacés. Le PN est testé puis est déclaré fonctionnel. En août 2018, un usager routier signale une fermeture intempestive du PN. À l?arrivée de l?agent SNCF Réseau, le dérangement a disparu. L?hypothèse d?un acte de malveillance sur une pédale d?annonce est retenue. Le PN est fonctionnel. Des riverains ont indiqué que peu de temps avant l?accident, des personnes étaient venues effectuer des travaux au PN n° 44. SNCF Réseau est intervenu deux jours avant l?accident pour résoudre un problème de liaison électrique entre un capteur de voie et la guérite du PN. Les tests réalisés par SNCF Réseau après les réparations avaient été 7 Le délai d?annonce est le temps entre le début de la séquence de fermeture, comprenant l?allumage des feux rouges clignotants et l?activation de la sonnerie, et l?arrivée effective de la tête de train sur le PN. 8 Délai fixé réglementairement par l?article 10 de l?arrêté du 18 mars 1991 modifié. 16 concluants. Le BEA-TT considère donc d?après ces éléments que cette intervention ne présente pas de lien avec l?accident étudié dans ce rapport. À la suite de l?accident mortel objet du présent rapport, SNCF Réseau a implanté des dispositifs d?enregistrement du fonctionnement de certains actionneurs du PN, notamment l?allumage des feux ou de la sonnerie, ainsi que du bon positionnement des barrières du PN n° 44. Un an après l?accident étudié, le 5 janvier 2022, une collision s?est produite au PN n°44 entre un véhicule arrêté sur les voies ferrées et un TER reliant Bourg-en-Bresse à Lyon. L?enquête judiciaire a conclu à un acte suicidaire, notamment parce que la victime, conductrice du véhicule léger avait indiqué ses intentions. Le 10 mars 2022, un usager signale que les barrières se ferment mais que les feux routiers ne clignotent pas. SNCF Réseau identifie la source du dysfonctionnement. Des câbles électriques du PN avaient été altérés par les travaux réalisés sur la voie quelques semaines auparavant. 17 3 - Le compte rendu des investigations effectuées 3.1 - L?état des lieux après l?accident Le train circulant du sud vers le nord est arrêté, sans avoir déraillé, peu après le PN suivant, à plus de 680mètres du lieu de la collision. La météo est pluvieuse, les températures fraîches et les infrastructures sont décrites comme humides par les intervenants. Aucun phénomène de brouillard n?est observé. Le véhicule léger est retourné, sur le toit, projeté à plus de 50mètres au nord-est du PN. La victime, conductrice du VL, est incarcérée dans son véhicule et est décédée. Des équipements du PN sont détruits et projetés côté est, notamment une demi-barrière et son mécanisme, ainsi qu?une armoire métallique. La signalétique relative au caractère cassable des barrières est absente. L?analyse des photos prises par les premiers intervenants amène les enquêteurs du BEA-TT à conclure qu?il n?y avait pas de trace de pneumatique suite à une manoeuvre de freinage avec blocage des roues, ou de dérapage du véhicule sur la chaussée ou sur les accotements. Les traces des pneumatiques relevées sur la terre correspondent aux véhicules des secours et non pas au VL. Des traces de frottement sont présentes sur les bordures blanches au droit du PN. Un examen de plusieurs images d?archives montre que des traces étaient déjà présentes en 2018 et 2019. Les enquêteurs du BEA-TT n?ont pas pu établir de lien entre des traces et l?accident étudié dans le présent rapport. Figure 18: photo illustrant les positions finales du VL et du TER après le choc image initiale Police nationale, légendée BEA-TT 18 3.2 - Les résumés des témoignages Les résumés des témoignages sont établis par les enquêteurs techniques sur la base des déclarations orales ou écrites dont ils ont eu connaissance. Ils ne retiennent que les éléments qui paraissent utiles pour éclairer la compréhension et l?analyse des événements et pour formuler des recommandations. Il peut exister des divergences entre les différentes déclarations ou entre ces déclarations et des constats ou des analyses présentés par ailleurs. 3.2.1 - Le conducteur du train accidenté Le conducteur du TER indique que le début du voyage s?est déroulé sans incident particulier. Il avait conduit plus tôt dans la matinée le même matériel, dans un trajet entre Bourg-en-Bresse et Lyon, sur cette même ligne ferroviaire dans l?autre sens de circulation. Lors de ce trajet précédent, il décrit une situation dans laquelle un usager routier aurait franchi les voies ferrées sur un passage à niveau alors que celui-ci était en train de se fermer. Il indique rencontrer régulièrement cette situation. Il explique que son train peut fonctionner soit en énergie électrique, soit en énergie thermique. L?alimentation électrique de la ligne entre Lyon et Bourg-en-Bresse s?interrompt au nord de Lyon. En approche finale de Bourg-en-Bresse, le train fonctionne en énergie thermique. Il indique également que la ligne ferroviaire n?est pas totalement couverte par le GSM-R de la radio sol-train. Ainsi, le conducteur éteint l?équipement du train au nord de Lyon et le remet en fonctionnement en arrivant à Bourg-en-Bresse. Entre les deux, il possède un téléphone mobile professionnel pour communiquer et recevoir les alertes. Pour réaliser la remise en marche de l?équipement à bord du train, le conducteur doit entrer des informations dans l?interface homme-machine (IHM) de la radio, située sur son pupitre de commande. L?action dure au total moins d?une minute et mobilise son regard et son attention. Après avoir quitté la gare de Servas-Lent à l?heure, il explique que son train circule en respectant la limitation de vitesse de 140km/h. Malgré la petite chute de flocons de neige, il indique que la visibilité est correcte. À l?approche du PN n°44 de Péronnas, il initialise la radio via son IHM. Lorsqu?il lève les yeux, il aperçoit brièvement un véhicule arrêté sur les voies ferrées au niveau du PN n°44. Concentré sur le véhicule arrêté, il ne se souvient pas avoir distingué, compte tenu de la position et de l?orientation des feux, ni les feux rouges du PN clignoter, ni la position des demi-barrières. Il déclenche le freinage d?urgence, le train percute la voiture et la projette sur la droite des voies ferrées. Le train ne déraille pas, le conducteur lance l?alerte radio et l?alerte lumineuse pour prévenir les autres circulations ferroviaires de l?arrêt immédiat nécessaire. Son train s?arrête en aval du PN suivant (le n°45). Il appelle alors l?agent circulation de SNCF Réseau pour l?informer de l?accident et pour que les circulations ferroviaires soient arrêtées. Aidé par des personnels SNCF en voyage dans le train et par le contrôleur du train, il vérifie que les passagers ne sont pas blessés et se rend ensuite au PN n°44. Arrivé sur les lieux, il est pris en charge par les forces de l?ordre et les secours pour les premières auditions et les dépistages d?alcool et de produits stupéfiants. Ces dépistages se sont révélés négatifs. 19 3.2.2 - Les premiers arrivants sur les lieux Les personnes habitant à proximité du PN ont indiqué n?avoir vu ni les instants précédant la collision, ni la collision en elle-même. Ils indiquent par ailleurs avoir entendu le bruit de la collision et avoir observé qu?une demi-barrière du passage à niveau était en position basse au moment de la découverte des lieux peu de temps après le choc. Les premiers secours et les premiers arrivants de SNCF Réseau confirment une situation dans laquelle la moitié ouest des équipements du PN sont en fonctionnement avec une demi-barrière basse et un feu rouge allumé. De l?autre côté, la demi-barrière, son mécanisme et plusieurs équipements du PN sont détruits, les feux côté droit sont éteints alors que celui côté gauche fonctionne. 3.2.3 - Les proches et collègues de la conductrice du VL L?ensemble des personnes entendues lors des investigations judiciaires, qu?elles soient issues de l?entourage familial ou professionnel de la victime, ont indiqué qu?il n?y avait pas à leur connaissance d?éléments particuliers qui les amèneraient à considérer comme solide l?hypothèse d?un acte volontaire suicidaire. 3.2.4 - Les passagers du train express régional impliqué dans l?accident Ni le contrôleur ni aucun des passagers à bord du train n?ont pu apporter des éléments permettant d?éclairer les circonstances de l?accident. 3.3 - Le véhicule léger et sa conductrice 3.3.1 - Les caractéristiques du véhicule léger Le VL impliqué est de marque BMW, de modèle 420d et de couleur blanche. Il s?agit d?un cabriolet, dans la finition Sport, mis en circulation pour la première fois en juillet2015. Le véhicule possédait deux portes et pouvait transporter quatre personnes y compris le conducteur. D?une longueur totale de 4,63m, d?une largeur totale de 1,82m, d?une hauteur nominale de 1,38m et d?une masse en charge maximale techniquement admissible de 2160 kg, il était muni d?un moteur diesel d?une cylindrée de 1995cm³ développant environ 190 chevaux, transmis aux seules roues arrière par une boîte automatique à 8 rapports et des palettes au volant pour le mode séquentiel. Il était doté de série de plusieurs équipements de sécurité tels l?ABS9, l?ESP/ESC10, l?antipatinage11 et de coussins gonflables de sécurité frontaux et latéraux. Figure 19: Photos d?une BMW série 4 cabriolet similaire à celle impliquée dans l?accident, mais avec son toit replié. source site internet BMW 9 Système d?anti blocage des freins. 10 Système électronique de stabilité, agissant sur les freins ou le moteur en cas de dérapage. 11 Système qui agit sur les freins pour éviter la perte d?adhérence des roues. 20 Les enquêteurs du BEA-TT ont eu accès à un historique des actions d?entretien régulier du véhicule. Au moment de l?accident, celui-ci avait parcouru 193384km en un peu plus de cinq ans. Les derniers passages dans un garage de la marque dataient d?avril 2019 (kilométrage de 149440km) et de novembre 2018 (134900km). L?exploitation des données enregistrées dans la clé de contact du véhicule fait ressortir des alertes antérieures à l?accident concernant le système de freinage et la pression des pneumatiques. Toutefois, ce véhicule possédait un contrôle technique valide à la date de l?accident, avec une prochaine visite à réaliser avant le 22 juillet 2021. 3.3.2 - Les dégâts occasionnés au véhicule léger Aucune expertise technique dans le cadre de l?enquête judiciaire sur le véhicule n?a été réalisée. Le VL est entièrement détruit. Plusieurs éléments de carrosserie, d?équipement ainsi que le moteur se sont désolidarisés du véhicule suite au choc. Le pare-brise a été emporté par la motrice du train. Le véhicule était positionné sur le toit au moment de l?arrivée des secours, qui l?ont ensuite remis sur ses roues pour procéder à la désincarcération de la victime. Les principales observations sur l?épave, réalisées par les enquêteurs du BEA-TT à partir des photos de l?intervention des secours et quelques jours après l?accident sur le lieu de stockage du véhicule, font état d?un côté avant gauche du véhicule fortement déformé, comparativement à la partie arrière du véhicule ou encore au côté droit de celui-ci. La roue avant gauche s?est désolidarisée du reste du véhicule, comme la roue arrière droite. Enfin, le châssis côté gauche est significativement enfoncé. Figure 20: côté gauche du véhicule après les opérations de désincarcération de la victime photo Police nationale, légendée BEA-TT 21 Figure 21: côté droit du véhicule après les opérations de désincarcération de la victime photo Police nationale, légendée BEA-TT L?examen des roues et des pneumatiques fait ressortirqu?une paire de pneumatiques hiver, de type (225/45 R18, Pirelli SOTTOZERO, 3PMSF, M+S12) était montée sur les roues avant. Une paire de pneumatiques été (225/45 R18, Pirelli) était montée sur les roues arrière qui sont motrices. L?usure de ces pneumatiques n?avait pas atteint les témoins indiquant un remplacement nécessaire. La roue avant gauche possède un impact significatif sur une partie de la jante, côté extérieur, qui dénote un choc ponctuel et important. Le pneu arrière droit concentre les traces de ripage les plus significatives ainsi qu?une déchirure profonde. 12 Les marquages 3PMSF (Three peak snow flake) et M+S (Mud and Snow) sont apposés par le manufacturier, après des tests normalisés pour le premier et sur déclaration pour le second, pour indiquer des performances des pneumatiques adaptées à des conditions hivernales. 22 L?examen de la portière droite permet d?identifier des dégâts horizontaux sous forme de deux intrusions rectilignes et parallèles, distantes de l?ordre de 60mm. Figure 23: Examen de la portière droite photo BEA-TT La ceinture de sécurité de la victime était attachée au moment de l?arrivée des secours. Les équipements de sécurité, dont les coussins gonflables et les arceaux à déclenchement pyrotechnique, se sont activés. 3.3.3 - La conductrice du véhicule léger La conductrice était la principale utilisatrice du véhicule qui appartenait à un membre de sa famille. Elle était titulaire d?un permis de conduire de catégorie B, ayant passé sa période probatoire, valide au moment de l?accident. Elle connaissait le véhicule et connaissait également l?itinéraire qu?elle empruntait très régulièrement ces derniers mois. L?accident s?est produit après sa journée de travail, qui se terminait habituellement en fin de matinée, alors qu?elle regagnait son domicile. Quelques minutes avant l?accident, elle était en communication téléphonique avec un membre de sa famille. L?analyse des télécommunications dans l?enquête judiciaire n?ont mis en évidence aucun appel ou aucune consultation de site internet au moment et peu de temps avant la collision. Les éléments présentés ci-après proviennent de l?analyse des informations médicales de la conductrice par le médecin rattaché au BEA-TT, dans les conditions définies par les articles L. 1621-14, L. 1621-15 et R. 1621-18 du Code des transports. 23 AVG: pneu hiver AVD: pneu hiver ARG: pneu été ARD: pneu été Figure 22: examen des roues et des pneumatiques photo et légende BEA-TT L?autopsie de la conductrice n?a pas identifié d?autre cause de son décès que celles liées à la violente collision avec le TER. Les dépistages d?alcoolémie et de consommation de produits stupéfiants effectués post mortem se sont révélés négatifs. L?analyse toxicologique réalisée post mortem a identifié la présence dans l?organisme de la conductrice de principes actifs d?un médicament délivré sur ordonnance. La conductrice suivait en effet un traitement médicamenteux qui, bien que débuté depuis plusieurs semaines, pouvait induire des effets secondaires au taux mesuré au-delà de l?intervalle thérapeutique. Selon la fiche du médicament consultable sur le site internet du ministère de la santé «Un endormissement soudain pendant les activités quotidiennes, dans certains cas sans prodromes, a été rapporté dans quelques cas peu fréquents. Les patients doivent être informés de la possibilité de survenue de ces effets et ils doivent être avertis de se montrer prudents lors de la conduite automobile ou l'utilisation des machines pendant le traitement [?]. Les patients ayant présenté une somnolence ou des accès de sommeil d?apparition soudaine ne doivent pas conduire de véhicules ou utiliser des machines.». Ce médicament peut influer sur la conduite automobile en particulier en raison des risques d?hypotension, de somnolence. Ces effets indésirables seraient de nature à diminuer la réactivité de la conductrice confrontée à la fermeture de la barrière et l?amener à s?arrêter sur les rails. Il peut influer défavorablement sur le contrôle des impulsions, mais aucun cas lors de la conduite d?un véhicule routier n?a été rapporté aux autorités du médicament. Dans une telle hypothèse, la conductrice aurait pu choisir de franchir le seuil de la première barrière sans être en mesure de franchir la suivante. Du point de vue des constatations sur les lieux de l?accident, aucun indice ne vient cependant étayer l?hypothèse d?une mauvaise manoeuvre dans le dernier virage avant le PN, pourtant géométriquement difficile. Une cause d?accident liée au traitement médical suivi par la victime reste, à ce stade, hypothétique. Les investigations de l?enquête judiciaire n?ont mis en évidence aucun élément suggérant que la collision aurait pu résulter d?un acte volontaire de la part de la conductrice. 3.3.4 - Le trajet d?approche du véhicule léger L?enquête judiciaire a établi que la conductrice du VL a quitté son lieu de travail, situé à quelques kilomètres du passage à niveau peu de temps avant la collision. Elle rentrait chez elle, par un itinéraire qu?elle empruntait régulièrement et d?une longueur d?environ 50km. 3.3.5 - L?analyse des calculateurs du véhicule léger Le VL a subi un choc très violent, la quasi-totalité des principaux équipements électroniques pouvant contenir des informations ont été détruits. Plusieurs éléments récupérés par les enquêteurs ont été soumis à des experts. Seul un composant d?un calculateur secondaire pourrait contenir des informations relatives à la vitesse du VL ou au fonctionnement de son moteur au moment de la collision. Malheureusement, l?état des dégâts sur ce calculateur a compliqué et hypothéqué la récupération d?éventuelles données. Les échanges entre le BEA-TT et l?équipementier qui a fabriqué le calculateur n?ont pas, au moment de la publication de ce rapport, permis de vérifier que les données sont récupérables et exploitables. 24 3.4 - Le train et son conducteur 3.4.1 - Le matériel roulant ferroviaire impliqué Le train express régional n° 889474, constitué de deux motrices B 81515 en tête au moment de la collision et B 81516 en queue encadrant une remorque, est une rame automotrice tri-caisses de type BGC 81500. Fabriquée par le constructeur Bombardier et mise en service en 2004, cette rame, comme toutes celles assurant le service voyageur TER de cette ligne, est exploitée par l?entreprise ferroviaire SNCF Voyageurs. Ce train peut fonctionner en énergie électrique ou en énergie thermique comme sur la section de ligne concernée par l?accident. D?une masse totale de 125tonnes et d?une longueur totale de 57,4mètres, ce train comporte quatre bogies13. Les opérations de maintenance sur cette rame ont été réalisées conformément au référentiel ferroviaire de SNCF Voyageurs. Cette rame était entretenue par les agents du Technicentre SNCF de Lyon-Vaise. Figure 24: vue arrière du train accidenté photo Police nationale Le matin avant l?accident, la rame avait effectué un trajet entre Bourg-en-Bresse et Lyon. L?agent de conduite disposait d?une tablette positionnée sur le tableau de bord dans la cabine de conduite, qui lui indiquait notamment son horaire et la liste des gares à desservir. La rame comportait un outil d?enregistrement des évènements de conduite qui a pu être exploité. 13 Un bogie est un ensemble de 2 essieux et comporte donc 4 roues. 25 3.4.2 - Les dégâts occasionnés au train suite à la collision La collision initiale avec le véhicule léger s?est produite à l?avant du train, entraînant d?importants dégâts sur son attelage automatique ainsi que sur l?avant de la motrice et divers éléments mécaniques, de carrosserie ou électriques. Sur le côté gauche du train, hormis l?avant de la motrice de tête, aucun dommage particulier n?a été relevé. Sur le côté droit quelques impacts secondaires sont présents au niveau de la carrosserie, probablement résultant de la projection de pièces du véhicule léger ou du ballast sur la rame. Au niveau de la motrice de tête, les dégâts suivants ont notamment été relevés par la SNCF après l?accident. «L?attelage automatique est cassé et fendu sous la corne de guidage» «Les tampons sont légèrement déformés de chaque côté» «Les éléments de carénage sont fendus et pendent de chaque côté de la rame» «Sur le côté droit un amortisseur hydraulique longitudinal a été touché et plié» Figure 25: principaux dégâts observés sur le train photos SNCF L?état du train après la collision a permis à celui-ci de rejoindre à l?aide d?un engin moteur de secours et à faible vitesse la gare de Bourg-en-Bresse. Les réparations et les tests conduits sur le train après l?accident n?ont pas identifié d?indice pouvant conduire à l?élaboration d?un scénario d?accident en lien avec un éventuel dysfonctionnement du matériel roulant ferroviaire. 26 3.4.3 - Le conducteur du train Le conducteur du TER exerçait cette activité et connaissait cette ligne ferroviaire ainsi que le matériel impliqué dans l?accident depuis plus de 20 ans. Il était titulaire des autorisations de conduite obligatoires pour ce type de matériel ferroviaire sur cette ligne. Il a pris son service à 6heures le jour de l?accident. Il a effectué un premier trajet de Bourg-en-Bresse à Lyon avec ce matériel. Il réalisait le retour de Lyon à Bourg-en- Bresse. Sa journée s?est terminée à 18h30 après son audition au commissariat de police de Bourg-en-Bresse. Les dépistages relatifs à l?alcoolémie et à la prise de produits stupéfiants auxquels il a été soumis se sont révélés négatifs. L?analyse des télécommunications dans l?enquête judiciaire n?ont mis en évidence aucun appel ou aucune consultation de site internet au moment et peu de temps avant la collision. 3.4.4 - Le trajet d?approche du train Le jour de l?accident, le train a quitté aux heures programmées la gare de Lyon-Vaise à 12h52 et la gare de Servas-Lent à 14h07, situé à moins de cinq kilomètres au sud- ouest du PN n°44. Aucune autre gare ne devait être desservie par le train jusqu?à son terminus à Bourg-en-Bresse. Avant l?accident, le trajet s?est normalement déroulé selon l?agent de conduite. Figure 26: illustration de la localisation de l?accident dans le trajet du train n° 889 474 fond de plan Géoportail-IGN, légendé BEA-TT 27 3.4.5 - L?analyse des données de l?enregistreur des paramètres de conduite Le poste de conduite du TER n° 889474 comporte un outil d?enregistrement des paramètres de conduite14 qui a pu être exploité. Cet outil enregistre des évènements qui sont localisés avec une résolution spatiale de 10 mètres et avec une résolution temporelle de 2 secondes. Compte tenu de la vitesse d?approche du train, de l?ordre de 140km/h, la résolution en distance de 10 m permet de reconstituer la chronologie des évènements avec une précision supérieure à celle issue de la résolution temporelle. En effet, à 140km/h, le train parcourt plus de 77 mètres en deux secondes. C?est donc par une analyse des distances enregistrées que le BEA-TT a reconstitué la succession des évènements. L?enquête de police a relevé qu?après l?accident, l?avant du train s?est arrêté à une distance de 685 mètres au-delà du PN n°44 soit au PK 61+806. Compte tenu de cette donnée, les éléments disponibles dans l?enregistreur ATESS permettent d?établir la séquence exposée ci-après. Les distances indiquées sont comptées de l?avant du train à l?axe de la chaussée routière traversant le PN. Les valeurs sont négatives lorsque le train est en amont de ce point de référence, et positives au-delà. Distance au PN n°44 Horodate Évènement - 4500m 14h 07min 00s Départ de la gare de Servas-Lent. En circulation La vitesse d?approche du PN n°44 est de 139km/h (pour une vitesse maximale autorisée de 140km/h). - 740m 14h 09min 24s Arrêt de l?effort de traction. - 10m 14h 09min 44s Le manipulateur de traction est placé en position «freinage électrique». 0m 14h 09min 44s Passage au droit du PN n°44 à une vitesse entre 136 et 132km/h. + 40m 14h 09min 46s Le freinage d?urgence du train est déclenché. La vitesse du train est de 132km/h. + 340m 14h 09min 54s Le signal d?alerte radio est émis par le train. + 360m 14h 09min 54s Le signal d?alerte lumineux est émis par le train. + 685m 14h 10min 18s Arrêt de la rame. Le freinage d?urgence du train a donc permis un arrêt 32secondes après son activation et sur une distance de 645mètres. Cette distance est cohérente à celles observées usuellement sur les rames du même type avec une infrastructure humide. 14 l?outil Acquisition et Traitement des Évènements de Sécurité en Statique (ATESS) permet d?étudier a posteriori les principaux paramètres de la rame et de la conduite afin de comprendre les évènements qui ont été susceptibles de compromettre la sécurité. 28 Figure 27: commandes du train et évolution de sa vitesse en fonction de la distance parcourue graphe construit par le BEA-TT à partir des données extraites du train Le freinage d?urgence a été enregistré peu de temps après le franchissement du PNn°44 par le train, qui était alors freiné depuis 50 mètres par son système de freinage électrique. Ces données doivent être interprétées en gardant à l?esprit le fait que le matériel roulant, à partir de la commande du déclenchement du freinage d?urgence par l?agent de conduite, a besoin d?un temps de mise en action de l?ordre d?une seconde avant que les freins n?atteignent leur performance maximale de freinage. Aucun enregistrement de commande du sifflet du train n?est présent dans le système ATESS, que ce soit en approche du PN ou au droit du PN. Le BEA-TT rappelle que sur ces matériels roulants, l?activation du freinage d?urgence n?entraîne pas la mise en route du sifflet du train. L?agent de conduite ne se souvient pas avoir eu le temps d?activer le sifflet du train avant la collision. Le BEA-TT tire donc de l?analyse de cet enregistrement qu?aucun coup de sifflet du train n?a été déclenché avant le choc et que le train a heurté quasiment à pleine vitesse le VL. Le freinage d?urgence du train n?a été actif qu?après la collision, en résultat d?une commande de déclenchement au plus tôt au niveau du PN. 3.4.6 - L?analyse des enregistrements de vidéoprotection La rame n?est équipée ni d?un système de vidéoprotection à l?intérieur de l?espace voyageurs ni d?une caméra frontale qui aurait permis de visualiser les conditions d?approche du PN n° 44 par le train. Le BEA-TT rappelle tout l?intérêt qu?aurait la présence d?un équipement d?enregistrement des images de la voie devant le train pour améliorer la compréhension de l?enchaînement des évènements. 29 3.5 - L?analyse du passage à niveau et des dégâts occasionnés 3.5.1 - Rappel du fonctionnement nominal d?une demi-barrière La figure suivante présente les divers équipements d?une demi-barrière. Figure 28: schéma de principe d?une demi-barrière en position fermée source BEA-TT Les demi-barrières du PN n°44 ne comportent pas de prolongateur compte tenu de la faible largeur de la route à cet endroit. La lisse est constituée de fibres de verre entrelacées recouvertes de peinture blanche. Elle comporte un film rétro-réfléchissant composé de bandes de longueurs de 250mm de couleur alternativement rouge et blanche sur ses faces avant et arrière. En position abaissée, le bord inférieur de la lisse remplacée après l?accident a été mesuré à une hauteur de 79cm par rapport à la route. La lisse est fixée sur un support solidaire d?un axe de rotation entraîné par un moteur électrique. Ce moteur permet l?abaissement et le relevage de la demi-barrière. Un ou des contrepoids équilibrent l?ensemble. Ils sont ajustés pour qu?une force verticale vers le haut d?une valeur de 5daN15 appliquée à une distance de trois mètres par rapport à l?axe de rotation soit nécessaire pour soulever la lisse. Cette lisse est conçue pour être déformée voire cassée facilement par un véhicule en détresse. Pour cela, les prescriptions relatives à cet équipement indiquent une valeur d?effort transversal à son extrémité de 80daN (+ ou ? 15daN) au-delà de laquelle la lisse doit se plier sans pouvoir revenir dans sa position initiale16. À partir d?une situation dans laquelle les demi-barrières sont ouvertes, l?absence d?alimentation électrique du moteur de la demi-barrière entraîne l?abaissement de la lisse. Si elles sont horizontales, la coupure d?alimentation entraînera un maintien dans une position basse des demi-barrières. 15 Une force de 5daN correspond au poids d?une masse d?environ 5kg. 16 Cette valeur d?effort est facilement atteignable pour un véhicule de la masse du VL accidenté. 30 3.5.2 - Les constatations après l?accident ? Côté ouest La lisse de la demi-barrière côté ouest du PN n°44 était intègre et en position basse. Elle ne présentait pas de déformation ou d?impact visible. Le feu rouge côté ouest à droite était allumé. Celui côté gauche, situé après la voie ferrée, était éteint. Figure 29: photo du côté ouest du PN prise peu après l?accident photo Police nationale légendée BEA-TT ? Côté est, sens d?approche du VL Côté est, la demi-barrière, son mécanisme et le fût ont été emportés dans le sens de la marche du train et vers l?extérieur de la voie ferrée. Une armoire métallique contenant des agrès de sécurité et des câbles électriques a été détruite. La lisse est pliée à plusieurs endroits mais est toujours reliée à son support. Son support a été déformé, et le contrepoids s?est détaché de son support. Le BEA-TT observe que la lisse s?est «enroulée» autour du moteur et qu?un contrepoids s?est détaché au moment des mouvements post-collision. Le support métallique du contrepoids a été plié de 90° suivant un axe parallèle à l?axe de la lisse. 31 Figure 30: photo de la demi-barrière et de l?armoire métallique heurtées lors de l?accident photo Police nationale légendée BEA-TT Le fût portant le mécanisme de la demi-barrière est détruit, tout comme l?ensemble des câbles électriques qui traversaient le fût pour alimenter entre autres le moteur et certains feux rouges clignotants. Figure 31: photo de l?emplacement initial du fût et de l?armoire métallique après la collision photo Police nationale légendée BEA-TT 32 Le feu rouge côté est à gauche de la route est allumé. Le feu rouge situé à droite de la route et avant la voie ferrée est éteint. Figure 32: photo du côté est du PN prise peu après l?accident photo Police nationale légendée BEA-TT 3.6 - L?approfondissement des investigations sur la trajectoire du VL 3.6.1 - Le sens de circulation du VL en approche du PN Deux éléments viennent renforcer l?hypothèse d?une circulation du VL depuis l?est vers l?ouest. Tout d?abord, le trajet de la conductrice a démarré quelques minutes avant l?accident depuis son lieu de travail, situé au nord-est du PN n° 44 et avait pour destination son domicile, pour lequel l?itinéraire le plus direct passait par le PN d?est en ouest. Sauf en cas de demi-tour sans raison identifiée, le trajet prévisionnel devait s?effectuer en traversant le PN de l?est vers l?ouest. Les principales déformations du véhicule suite au choc se situent côté gauche, surtout à l?avant. Ceci correspond à un sens de circulation d?est en ouest. Le témoignage de l?agent de conduite du train n?a pas apporté d?éléments définitifs sur le sens de circulation du véhicule, d?autant plus que le VL y est décrit comme étant à l?arrêt sur les voies ferrées. Compte tenu de ces éléments, le BEA-TT considère que le VL circulait de l?est vers l?ouest du PN n° 44. 3.6.2 - La trajectoire du VL avant la collision avec le train Les premières constatations réalisées par les forces de l?ordre font état de l?absence de traces de freinage ou de dérapage sur la chaussée, dans le dernier virage ou en approche du PN n°44. Aucun impact n?a été relevé ni sur le mur du terrain des riverains ni sur la clôture à proximité du virage précédant le PN. La lisse de la demi-barrière heurtée par le VL suite au choc avec le train porte de nombreux impacts et des pliures, mais il est impossible d?indiquer à ce stade si certains d?entre eux avaient été faits avant la collision du VL avec le train. 33 L?illustration ci-après permet de visualiser à l?échelle le VL impliqué et la lisse de la demi-barrière, représentée par un rectangle noir et rouge, positionnée à une hauteur de 79cm par rapport au sol. Figure 33: photo de l?appréciation des hauteurs de l?avant du VL et de la lisse de la demi-barrière fermée schéma BEA-TT La reconstitution judiciaire menée avec un véhicule similaire a permis de considérer comme incohérente l?hypothèse d?un passage en chicane de la demi-barrière basse, à la lumière de la position du début des traces laissées sur le platelage par les pneumatiques du VL au moment du choc. Il apparaît géométriquement impossible à ce véhicule d?effectuer un passage en chicane et d?atteindre cette position sans heurter une des demi-barrières basses. Figure 34: photos de la reconstitution d?un passage en chicane avec un véhicule similaire photos Police nationale légende BEA-TT 34 De plus, les empreintes des pneumatiques retrouvées sur les accotements de la route à proximité du PN ne correspondent pas aux pneumatiques montés sur le VL accidenté, mais à ceux équipant des camions des pompiers. La mise en place d?un véhicule similaire a permis de positionner le VL témoin à l?endroit où commencent les traces de ripage relevées sur le platelage. Il est apparu que dans cette position, considérée par le BEA-TT comme la position du VL avant le choc TER/VL, il était possible que la lisse de la demi-barrière côté est s?abaisse quasi horizontalement, en se plaçant sur l?arrière du coffre du VL. Figure 35: photo de l?appréciation du point de contact entre la lisse abaissée et le VL photo Police nationale légendée BEA-TT Figure 36: photo aérienne de l?appréciation du point de contact entre la lisse abaissée et le VL photo Police nationale légendée BEA-TT Notons que dans cette position, le VL ne touche pas la demi-barrière côté ouest, ce qui correspond avec l?état d?intégrité de la lisse de cette demi-barrière observée après l?accident. 35 3.6.3 - Le choc entre le TER et le VL L?analyse des traces de ripage laissées sur le platelage et la chaussée, ainsi que les dégâts sur le VL et le TER permettent de reconstituer ce qui s?est passé au moment du choc entre le TER et le VL. Figure 37: identification des points de localisation des roues du VL au moment du choc photo Police nationale Figure 38: reconstitution de la position du VL à partir de ces positions, avec un véhicule similaire photo Police nationale Une représentation de la séquence d?accident a été construite en trois dimensions par le BEA-TT. Cette représentation a nécessité la saisie des dimensions des véhicules et de l?environnement, avec des imprécisions inhérentes à toute modélisation. L?objectif des images présentées ci-après est principalement illustratif et ne saurait constituer des affirmations définitives du BEA-TT, notamment sur les conditions d?approche du VL, du heurt ou encore du fonctionnement effectif des équipements du passage à niveau au moment de l?accident. Le véhicule a été heurté par le train sur sa partie avant gauche. L?attelage et les tampons avant de la motrice du TER ont heurté le VL au-dessus de son centre de gravité. Ceci a entraîné une sollicitation forte des roues situés à droite de la voiture. La roue avant gauche du VL, directement percutée par le TER, a subi un choc important et s?est probablement rapidement détaché du reste de la voiture. 36 3.6.4 - Le choc entre le VL et les installations du PN ? La trajectoire du VL après le choc avec le train Les différentes traces de ripages des pneumatiques relevées sur la scène de la collision sont visibles sur la figure ci-après. Leur tracé permet de positionner les roues du VL au moment du choc, et de reconstituer sa trajectoire dans les premiers instants qui ont suivi cette collision avec le train pour se terminer au moment de la collision entre le VL et les installations du PN. Figure 39: localisation des traces de ripage de pneumatiques et de détérioration du platelage, colorisées en violet pour une meilleure identification photo Police nationale, légende BEA-TT Les traces laissées au sol soulignent un mouvement de rotation du VL par rapport à un axe vertical après le choc. Le choc s?est produit non loin du moteur du véhicule, soit à l?avant du centre de gravité du VL. Le VL a eu un mouvement composé d?une part d?une translation dans la direction de déplacement du train mais aussi un mouvement de rotation dans le sens horaire. Dans le prolongement des traces de ripage, l?impact identifié sur le massif de fondation met en lumière un point dur dans la trajectoire du VL, qui a pu avoir comme conséquence une détérioration importante de la roue arrière droite mais aussi engendrer le déséquilibre du VL et favoriser la survenance de tonneaux de ce véhicule. 37 ? Les dégâts sur le VL nous renseignent sur l?état du PN au moment de la collision L?analyse du BEA-TT s?est concentrée sur la compréhension de la genèse des traces identifiées sur la portière droite du VL, particulièrement des deux profonds sillons distants de 60mm. Figure 40: repositionnement de la portière accidentée photographiée par rapport au VL schéma et photo BEA-TT La figure ci-après identifie les principales dimensions des équipements du passage à niveau qui ont été heurtés par la voiture suite à sa collision avec le TER. Figure 41: caractéristiques dimensionnelles du PN, en mm schéma de principe BEA-TT L?analyse des différentes dimensions des pièces composant le mécanisme du PN permet au BEA-TT de considérer que les dégâts en forme de deux saignées parallèles, horizontales et distantes de 60mm sur la porte avant du VL ont probablement été créés par les extrémités des deux boulons d?attache du contrepoids sur son support. La différence de hauteur mesurée de 60mm sur la porte résulte d?une position des deux boulons avec un angle de 14° par rapport à l?horizontale (voir schéma suivant). Dans ce scénario, la demi-barrière ne peut donc pas être relevée au moment de la collision, puisque la différence de hauteur entre les deux boulons serait de l?ordre de 250mm, ce qui ne correspond pas aux traces retrouvées sur la portière du VL. 38 Figure 42: position des équipements du PN en violet pour générer deux points saillants distants d?une hauteur de 60mm par rotation du mécanisme initialement en position basse (en noir) schéma BEA-TT Le BEA-TT considère comme probable que le véhicule, heurté par le TER, a été projeté vers le mécanisme de la barrière, entraînant la déformation de la lisse et possiblement une rotation d?un peu plus d?une dizaine de degrés de l?ensemble support. À noter que la lisse au moment du choc reposait probablement sur le coffre arrière de la voiture (cf.figures 35 et 36), et donc était déjà légèrement relevée. La destruction de ces boulons, d?après leur absence sur les photos du support de la barrière prises après l?accident, peut étayer l?hypothèse qu?ils ont été directement heurtés par le VL avec une forte énergie. 3.6.5 - La trajectoire du VL après les collisions avec le TER puis avec le PN Le véhicule continue sa trajectoire en heurtant l?armoire métallique du PN, puis en se déplaçant sur l?accotement routier, effectuant au moins un tonneau. Plusieurs éléments du véhicule sont éjectés, parfois à plusieurs dizaines de mètres de celui-ci, contre un bâtiment à proximité ou sur la route pour le moteur. Le VL s?immobilise finalement, retourné sur le toit, au bord de la route. Son moteur est projeté encore plus loin, tout comme le volant du véhicule et des éléments de carrosserie. 39 4 - Le déroulement de l?accident et l?intervention des secours Le vendredi 15 janvier 2021, peu avant 14h, une jeune femme quitte son travail et commence son trajet de retour vers son domicile à bord d?un véhicule BMW cabriolet dont elle est la conductrice habituelle. Après quelques kilomètres, elle circule sur le chemin de Monternoz, route communale hors agglomération située sur la commune de Péronnas. La chaussée est humide, le ciel est nuageux et de petits flocons tombent sur la route mais la neige ne tient pas. Le TER n°889474 en provenance de Lyon et à destination de Bourg-en-Bresse, circule à l?heure avec 146 personnes à bord. L?agent de conduite, habitué de la ligne et possédant toutes les autorisations pour conduire ce train, manipule l?interface homme-machine de la radio sol-train afin de se reconnecter au réseau radio à proximité de Bourg-en-Bresse. Pendant ces opérations qui se déroulent peu de temps avant d?arriver au PN n°44, son regard et son attention sont portés sur l?IHM. A 14h07, alors que le train arrive à proximité immédiate du PN n°44, l?agent de conduite aperçoit le VL sur les voies. Il n?a pas le temps de déclencher le sifflet du train. Le choc survient alors que le train roule à 134km/h. La voiture est projetée sur le côté droit, heurte des équipements du passage à niveau, effectue au moins un tonneau et termine sur le toit. La conductrice est incarcérée dans son véhicule, elle est tuée sur le coup. Le train après un freinage d?urgence s?arrête plus de 600 mètres en aval du PN n°44. Le train n?a pas déraillé. Aucun des passagers n?est blessé. Les premiers arrivants sont des habitants vivant à proximité du PN. Les secours appelés à 14h11, arrivent rapidement sur les lieux à 14h24, avec les forces de l?ordre et les équipes de SNCF Réseau. Au total, près de 19 véhicules provenant de 14 centres d?incendie et de secours sont mobilisés. Les voyageurs présents dans le train sont évacués et terminent leur voyage par autocar. Le passage à niveau dans sa partie ouest est intact, la demi-barrière est en position basse et le feu rouge côté droit fonctionne. Du côté est, certains équipements dont la demi-barrière et son support sont détruits. Le feu rouge situé à gauche fonctionne, tandis que celui à droite, privé d?alimentation électrique à cause des câbles arrachés, est éteint. La désincarcération de la victime permet de constater qu?elle portait sa ceinture de sécurité, et que les dispositifs pyrotechniques de protection de la voiture se sont déclenchés. Le train est remisé à la gare de Bourg-en-Bresse. La voie ferrée est réparée et la circulation ferroviaire sur cette voie unique reprend le lendemain matin à vitesse nominale. 40 5 - L?analyse des causes et des facteurs associés, les orientations préventives Le BEA-TT considère que la survenue d?un endormissement ou d?un malaise chez la conductrice du VL aurait conduit, dans le cadre des configurations sinueuses de la route d?approche du PN, à un tout droit du véhicule dans le mur du riverain. Or les seules traces des pneumatiques observés se situent sur le platelage du PN, par conséquent elles indiquent que le virage a été bien abordé par le VL. Une éventuelle altération des capacités de conduite de la conductrice liée à son traitement médical, dont le principe actif a été retrouvé en dose thérapeutique dans son organisme, ne peut toutefois pas être écartée. Cette altération n?aurait alors pas entraîné une perte de contrôle dans le virage, mais possiblement une moindre perception de la fermeture du PN, en particulier des feux et des barrières. Parmi les autres hypothèses telles une panne mécanique du véhicule, une perte de contrôle du véhicule dans des circonstances d?une chaussée mouillée ou encore des difficultés de franchissement du PN alors qu?un autre usager arrivait en face, aucune ne se détache par un éventuel indice relevé sur le terrain, dans les témoignages ou à l?issue des investigations menées. À son entrée sur le PN, le VL a pu s?arrêter sur la voie ferrée avant que les barrières ne s?abaissent, mais cette hypothèse semble peu probable. Dans un scénario alternatif avec une diminution de la vigilance ou de l?attention de la conductrice, le VL, lors de son mouvement de franchissement du PN (cf. figure 33), a pu soulever la lisse de la demi-barrière fermée, qui serait ensuite retombée sur le coffre du VL. Surprise, voire constatant la demi-barrière du sens opposé en position horizontale devant elle, la conductrice aurait alors freiné sur le PN. À cet instant, la sonnerie ne retentissait plus. L?analyse des données résiduelles présentes dans un calculateur secondaire du VL, non terminée au moment de la publication du présent rapport, pourrait contribuer à privilégier l?un ou l?autre des scénarios. Après le choc entre le VL et le train, les traces laissées par les boulons de fixation du contrepoids de la barrière sur la portière droite du VL permettent de considérer que le support de la lisse a légèrement tourné autour de son axe de rotation par rapport à la position horizontale. Le scénario le plus probable selon le BEA-TT réside dans l?action du VL projeté sur la lisse de la demi-barrière et sur le mécanisme du PN. Malgré l?absence de certitudes dans l?identification de l?enchaînement des évènements et des causes de l?accident, le BEA-TT est amené à proposer quatre recommandations dans une approche préventive d?amélioration de la sécurité. Le BEA-TT estime que pourraient être améliorées la gestion des priorités entre les usagers routiers, les conditions géométriques d?approche et de franchissement de la voie ferrée ainsi que la visibilité sur les équipements du PN et en particulier sur le feu rouge clignotant situé à droite. Le BEA-TT recommande une sensibilisation des agents de conduite sur les enjeux d?initialisation de la radio sol-train notamment à proximité des passages à niveau. 41 5.1 - La gestion des priorités entre usagers routiers au droit du PN Plusieurs situations de conflits entre usagers routiers ont été observées lors des visites sur les lieux. Des usagers arrivant par l?est, comme le VL impliqué dans l?accident, ont découvert au dernier moment des usagers arrivant en face, par l?ouest. Ces derniers étaient masqués par la végétation et par la sinuosité de la route. Les conséquences ont pu être des arrêts intempestifs sur la voie ferrée, le temps que les usagers s?accordent sur l?ordre de passage. Le PN n°45, situé quelques centaines de mètres au nord du PN n°44 comporte un régime de priorité signalé par des panneaux implantés en bord de route, alors même que les routes d?accès ne possèdent pas les contraintes géométriques de celles du PN n°44. Figure 43: photo du PN n° 45 avec ses panneaux de priorité source Google Maps Compte tenu du volume de trafic et à la configuration d?approche du PN n°44, sinueuse et offrant une visibilité réduite, et bien que ce facteur n?ait pas a priori joué de rôle dans l?accident objet du présent rapport d?enquête, le BEA-TT émet la recommandation suivante: Recommandation R1 adressée à la Ville de Péronnas: Réglementer et signaler en avertissement et en position les règles de priorité entre les usagers routiers franchissant le PN n° 44. Étudier, en associant SNCF Réseau: 1) l?augmentation de la largeur de la route au droit du PN n° 44; 2) l?augmentation des rayons des derniers virages routiers d?approche sur ce PN, afin de diminuer l?angle de franchissement de la route pour améliorer la visibilité sur la voie ferrée. 42 5.2 - La visibilité sur les équipements du PN Dans l?approche par l?ouest du PN n°44, la présence de végétaux associée au dernier virage à droite menant au PN conduisent à réduire les capacités de perception du PN. Figure 44: photo des masques à la visibilité lors de l?approche du PN n° 44 par l?ouest source BEA-TT Compte tenu du volume de trafic et de la configuration d?approche du PN, sinueuse et offrant une visibilité réduite, et bien que ce facteur n?ait pas a priori joué de rôle dans cet accident, le BEA-TT émet la recommandation suivante: Recommandation R2 adressée à la Ville de Péronnas: Dans le sens d?approche du PN n°44 par l?ouest, dégager la visibilité sur les équipements du PN en procédant ou faisant procéder à l?abattage de la végétation présente à proximité du dernier virage puis en assurant un entretien régulier des accotements. L?amélioration de l?identification de la présence du PN par les usagers de la route peut également, au-delà du travail sur la visibilité des équipements du PN, être traitée par la mise en place sur la chaussée d?équipements sonores ou vibratoires et par une réduction de la vitesse. Ces choix et les caractéristiques d?implantation reviennent à la Ville de Péronnas. Dans l?approche par l?est du PN n°44, ce qui était le cas du véhicule impliqué, la route longe la voie ferrée pour finalement tourner au niveau du PN. La visibilité sur le feu rouge clignotant situé à gauche est assurée. Par contre, l?usager routier pouvait être amené à découvrir tardivement le feu rouge à droite, ainsi que la demi-barrière baissée. Ces deux éléments étant masqués en partie par une armoire métallique du PN. Suite à l?accident, SNCF réseau a réaménagé le côté est du PN, notamment en supprimant l?imposante armoire métallique. Recommandation R3 adressée à SNCF Réseau: Dans le sens d?approche du PN n°44 par l?est, compte tenu des travaux réalisés depuis l?accident et des projets d?aménagements du PN, modifier le cas échéant l?orientation du feu rouge clignotant de droite pour qu?il puisse être vu jusqu?au droit de celui-ci. 43 5.3 - Le réglage de la radio sol-train Dans son témoignage, l?agent de conduite du train a indiqué que dans les instants précédant la collision, il initialisait la radio sol-train en manipulant l?interface homme-machine positionnée dans la cabine de conduite. En relevant les yeux vers la voie ferrée, il a aperçu le PN n° 44 et le VL devant son train. Cette action s?explique par le fait que lors d?un trajet entre Lyon et Bourg-en-Bresse, l?agent de conduite doit éteindre la radio en sortant de Lyon, puisque la majorité de la voie ferrée n?est pas couverte par le réseau radio GSM-R. En arrivant à Bourg-en-Bresse, il doit rallumer cet équipement et le paramétrer pour la nouvelle zone de transmission. Cette tâche ne bénéficie d?aucune facilité, il doit donc entrer successivement plusieurs informations tels le numéro du train ou encore le canal radio choisi; ces nombres peuvent d?ailleurs changer pendant un trajet ferroviaire. Son objectif est que le système radio soit opérationnel avant d?approcher de la gare de Bourg-en-Bresse afin de porter toute son attention sur les nombreux signaux et équipements ferroviaires. La configuration actuelle de cet équipement et son positionnement contraignent l?agent de conduite à quitter des yeux la voie ferrée pour réaliser ces actions qui peuvent durer près d?une minute. Sur l?emploi de la radio et le positionnement de l?interface homme-machine, les services de SNCF Voyageurs questionnés précisent que les fonctionnalités de la radio sol-train sont définies par le gestionnaire des infrastructures SNCF Réseau et que l?aménagement du poste de conduite est réalisé par Alstom, après consultation des différents services métier de la SNCF dans les domaines relatifs à la traction et au matériel. Figure 45: exemple de localisation de l?interface homme-machine de la radio sol-train source BEA-TT La conduite d?un train réclame de la part de l?agent de conduite une vigilance obligatoire au niveau des signaux de bord de voie et de certains équipements de l?infrastructure comme les aiguillages, mais il n?est pas expressément tenu de regarder tout le temps devant lui en dehors de ces zones particulières, contrairement à un conducteur de véhicule routier ou même de tramway, qui se déplacent «à vue». Selon un référentiel17 de l?EPSF relatif à la sécurité des circulations, «(?) le conducteur doit, dans la mesure où la conduite du train le lui permet, observer la voie et la caténaire. Il doit être prêt à ralentir ou à s?arrêter selon les circonstances ou les signaux qui pourraient lui être faits. 17 Référentiels EPSF ? recommandations ? sécurité des circulations, conduite des trains, 05/06/2016, dans l?article 402 «observation de voie» 44 L?observation de la voie a pour but: [?] - de déceler la présence éventuelle d?obstacles; [?]». Le BEA-TT ne peut pas affirmer que la mobilisation de l?agent de conduite sur son IHM constitue un facteur de l?accident étudié, puisque la cinématique du véhicule routier reste largement inconnue avant le choc. Toutefois, les PN restent des lieux à risques pour la sécurité des circulations ferroviaires et routières. C?est pourquoi, dans un objectif général de sécurité, le BEA-TT formule la recommandation suivante: Recommandation R4 adressée à l?ensemble des entreprises ferroviaires: Sensibiliser les agents de conduite à la priorité qui doit être donnée, lorsque les conditions le permettent, d?initialiser la radio sol-train et plus généralement de réaliser les actions qui leur imposent de quitter la voie et la caténaire des yeux, en dehors de zones géographiques présentant des passages à niveau, ou tout autre facteur de risque notoire. Lors de la conception ou du reconditionnement des matériels, prendre en compte l?objectif de réduire les durées des actions pendant lesquelles l?agent de conduite n?est plus en mesure d?observer la voie et la caténaire. 45 6 - Les recommandations Recommandation R1 adressée à la Ville de Péronnas: Réglementer et signaler en avertissement et en position les règles de priorité entre les usagers routiers franchissant le PN n° 44. Étudier, en associant SNCF Réseau: 1) l?augmentation de la largeur de la route au droit du PN n° 44; 2) l?augmentation des rayons des derniers virages routiers d?approche sur ce PN, afin de diminuer l?angle de franchissement de la route pour améliorer la visibilité sur la voie ferrée. Recommandation R2 adressée à la Ville de Péronnas: Dans le sens d?approche du PN n°44 par l?ouest, dégager la visibilité sur les équipements du passage à niveau en procédant ou faisant procéder à l?abattage de la végétation actuellement présente à proximité du dernier virage puis en assurant un entretien régulier des accotements. Recommandation R3 adressée à SNCF Réseau: Dans le sens d?approche du PN n°44 par l?est, compte tenu des travaux réalisés depuis l?accident et des projets d?aménagements du PN, modifier le cas échéant l?orientation du feu rouge clignotant de droite pour qu?il puisse être vu jusqu?au droit de celui-ci. Recommandation R4 adressée à l?ensemble des entreprises ferroviaires: Sensibiliser les agents de conduite à la priorité qui doit être donnée, lorsque les conditions le permettent, d?initialiser la radio sol-train et plus généralement de réaliser les actions qui leur imposent de quitter la voie et la caténaire des yeux, en dehors de zones géographiques présentant des passages à niveau, ou tout autre facteur de risque notoire. Lors de la conception ou du reconditionnement des matériels, prendre en compte l?objectif de réduire les durées des actions pendant lesquelles l?agent de conduite n?est plus en mesure d?observer la voie et la caténaire. 46 ANNEXES Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête Annexe 2: Règlement général de protection des données 47 Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête 48 Annexe 2: Règlement général de protection des données Le bureau d?enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) est investi d?une mission de service public dont la finalité est la réalisation de rapports sur les accidents afin d?améliorer la sécurité des transports terrestres (articles L. 1621-1 et 1621-2 du code des transports, voir la page de présentation de l?organisme). Pour remplir cette mission, les personnes chargées de l?enquête, agents du BEA-TT habilités ainsi que d?éventuels enquêteurs extérieurs spécialement commissionnés, peuvent rencontrer toute personne impliquée dans un accident de transport terrestre (articles L. 1621-14) et recueillir toute donnée utile. Ils traitent alors les données recueillies dans le cadre de l?enquête dont ils ont la responsabilité uniquement pour la seule finalité prédéfinie en garantissant la confidentialité des données à caractère personnel. Les rapports d?enquêtes sont publiés sans le nom des personnes et ne font état que des informations nécessaires à la détermination des circonstances et des causes de l?accident. Les données personnelles sont conservées pour une durée de 4 années à compter de la publication du rapport d?enquête, elles sont ensuite détruites. Le traitement «Enquête accident BEA-TT» est mis en oeuvre sous la responsabilité du BEA-TT relevant du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (MTECT). Le MTECT s?engagent à ce que les traitements de données à caractère personnel dont il est le responsable de traitement soient mis en oeuvre conformément au règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l?égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (ci-après, «règlement général sur la protection des données» ou RGPD) et à la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l?informatique, aux fichiers et aux libertés. Les personnes concernées par le traitement, conformément à la législation en vigueur, peuvent exercer leurs droits auprès du responsable de traitement: droit d?accès aux données, droit de rectification, droit à la limitation, droit d?opposition. Pour toute information ou exercice de vos droits, vous pouvez contacter: 1- Le responsable de traitement, qui peut être contacté à l?adresse suivante: - à l?adresse: bea-tt@developpement-durable.gouv.fr - ou par courrier (avec copie de votre pièce d?identité en cas d?exercice de vos droits) à l?adresse suivante: Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires A l?attention du directeur du BEA-TT Grande Arche - Paroi Sud, 29e étage, 92055 LA DEFENSE Cedex 2- Le délégué à la protection des données(DPD) du MTECT: - à l?adresse suivante: dpd.daj.sg@developpement-durable.gouv.fr; - ou par courrier (avec copie de votre pièce d?identité en cas d?exercice de vos droits) à l?adresse suivante: Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires A l?attention du Délégué à la protection des données SG/DAJ/AJAG1-2 92055 La Défense cedex Vous avez également la possibilité d?adresser une réclamation relative aux traitements mis en oeuvre à la Commission nationale informatique et libertés(3 Place de Fontenoy - TSA 80715 - 75334 PARIS CEDEX 07). 49 Bureaud?Enquêtessur lesAccidentsdeTransport Terrestre ? GrandeArche -Paroi Sud 92055LaDéfensecedex Téléphone : 01 40 81 21 83 bea-tt@developpement-durable.gouv.fr www.bea-tt.developpement-durable.gouv.fr  Synthèse  1 - Les constats immédiats et l?engagement de l?enquête  1.1 - Les circonstances de l?accident  1.2 - Le bilan humain et le bilan matériel  1.3 - L?engagement et l?organisation de l?enquête  2 - Le contexte de l?accident  2.1 - Les conditions météorologiques  2.2 - La route communale «chemin de Monternoz»  2.2.1 - Les caractéristiques générales du chemin de Monternoz  2.2.2 - Les caractéristiques géométriques de cette route  2.2.3 - Les circulations sur cette route  2.3 - La ligne ferroviaire de Lyon à Bourg-en-Bresse  2.4 - Le passage à niveau n°44  2.4.1 - Les caractéristiques générales du passage à niveau  2.4.2 - L?approche du PN n°44 par la route et la signalisation routière  2.4.3 - L?approche du PN n° 44 par la voie ferrée  2.4.4 - Les autres équipements du PN n°44  2.4.5 - Le fonctionnement théorique du PN n°44 à l?approche d?un train provenant de Servas-Lent.  2.4.6 - Les incidents et accidents identifiés sur le PN n°44 depuis 2016  3 - Le compte rendu des investigations effectuées  3.1 - L?état des lieux après l?accident  3.2 - Les résumés des témoignages  3.2.1 - Le conducteur du train accidenté  3.2.2 - Les premiers arrivants sur les lieux  3.2.3 - Les proches et collègues de la conductrice du VL  3.2.4 - Les passagers du train express régional impliqué dans l?accident  3.3 - Le véhicule léger et sa conductrice  3.3.1 - Les caractéristiques du véhicule léger  3.3.2 - Les dégâts occasionnés au véhicule léger  3.3.3 - La conductrice du véhicule léger  3.3.4 - Le trajet d?approche du véhicule léger  3.3.5 - L?analyse des calculateurs du véhicule léger  3.4 - Le train et son conducteur  3.4.1 - Le matériel roulant ferroviaire impliqué  3.4.2 - Les dégâts occasionnés au train suite à la collision  3.4.3 - Le conducteur du train  3.4.4 - Le trajet d?approche du train  3.4.5 - L?analyse des données de l?enregistreur des paramètres de conduite  3.4.6 - L?analyse des enregistrements de vidéoprotection  3.5 - L?analyse du passage à niveau et des dégâts occasionnés  3.5.1 - Rappel du fonctionnement nominal d?une demi-barrière  3.5.2 - Les constatations après l?accident  3.6 - L?approfondissement des investigations sur la trajectoire du VL  3.6.1 - Le sens de circulation du VL en approche du PN  3.6.2 - La trajectoire du VL avant la collision avec le train  3.6.3 - Le choc entre le TER et le VL  3.6.4 - Le choc entre le VL et les installations du PN  3.6.5 - La trajectoire du VL après les collisions avec le TER puis avec le PN  4 - Le déroulement de l?accident et l?intervention des secours  5 - L?analyse des causes et des facteurs associés, les orientations préventives  5.1 - La gestion des priorités entre usagers routiers au droit du PN  5.2 - La visibilité sur les équipements du PN  5.3 - Le réglage de la radio sol-train  6 - Les recommandations  ANNEXES  Annexe 1: Décision d?ouverture d?enquête  Annexe 2: Règlement général de protection des données

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