Abordage du CSL Virginia par l'Ulysse le 7 octobre 2018, au large du cap Corse : rapport d'enquête
Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les événements de mer
Auteur secondaire
Résumé
Le 7 octobre 2018, l'ULYSSE (pavillon tunisien) percute violemment le CSL VIRGINIA (pavillon chypriote) par le travers tribord. Les deux navires restent encastrés. L'accident ne fait ni victime, ni blessé mais génère une pollution de l'ordre de 520 m3, le CSL VIRGINIA ayant perdu la majeure partie du fuel contenue dans une soute à combustible.<br />L'enquête a été réalisée conjointement avec les bureaux d'enquête de Chypre, Italie et Tunisie. Des recommandations ont été émises.
Editeur
BEAmer
Descripteur Urbamet
accident
;pollution de l'eau
;fuel
;surveillance
;sécurité
Descripteur écoplanete
collision
Thème
Transports
Texte intégral
Rapport d'enquête Marine investigation report
Abordage du CSL VIRGINIA par l'ULYSSE le 7 octobre 2018, au large du cap Corse
Collision CSL VIRGINIA struck by ULYSSE on 7 October 2018, off cap Corse
en coopération avec Chypre, l'Italie et la Tunisie
Rapport publié : juillet 2019
Avertissement
L'enquête est réalisée conjointement avec les bureaux d'enquête de : Chypre, Italie et Tunisie. Des équipes mixtes France-Tunisie se sont rendues en Tunisie sur l'ULYSSE et au sémaphore du cap Corse. L'équipe française seule s'est rendue à bord du CSL VIRGINIA, devenu VIRGIN STAR. Lors d'une réunion entre les bureaux accidents parties à l'enquête, il a été décidé que la France rédigerait le rapport.
Le présent rapport a été établi conformément aux dispositions du Code des transports, notamment ses articles L.1621-1 à L.1622-2 et R.1621-1 à R.1621-38 relatifs aux enquêtes techniques et aux enquêtes de sécurité après un événement de mer, un accident ou un incident de transport terrestre et portant les mesures de transposition de la directive 2009/18/CE établissant les principes fondamentaux régissant les enquêtes sur les accidents dans le secteur des transports maritimes ainsi qu'à celles du « Code pour la conduite des enquêtes sur les accidents » de l'Organisation Maritime Internationale (OMI), et du décret n° 2010-1577 du 16 décembre 2010 portant publication de la résolution MSC 255(84) adoptée le 16 mai 2008. Il exprime les conclusions auxquelles sont parvenus les enquêteurs du sécurité. Conformément aux dispositions susvisées, l'analyse de cet événement n'a pas été conduite de façon à établir ou attribuer des fautes à caractère pénal ou encore à évaluer des responsabilités individuelles ou collectives à caractère civil. Son seul objectif est d'améliorer la sécurité maritime et la prévention de la pollution par les navires et d'en tirer des enseignements susceptibles de prévenir de futurs sinistres du même type. En conséquence, l'utilisation de ce rapport à d'autres fins que la prévention pourrait conduire à des interprétations erronées.
BEAmer
sur les
circonstances et les causes de l'événement analysé et propose des recommandations de
Pour information, la version officielle du rapport est la version française. La traduction en anglais lorsqu'elle est proposée se veut faciliter la lecture aux non-francophones.
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Résumé Informations factuelles 2.1 2.2 2.3 2.4 2.5 Contexte Navires Équipages Accident Intervention
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Exposé Analyse 4.1 L'abordage
5 6 7 9
Conclusions Enseignements Recommandations Annexes A. B. C. Liste des abréviations Décision d'enquête Navires
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Résumé
Le 7 octobre 2018, au lever du jour, le navire roulier ULYSSE navigue à 19 noeuds en direction de Radès (Tunis). Il doit passer par le DST du canal de Corse et suit sa route habituelle. À une quinzaine de milles du nord du cap Corse se trouve mouillé le porte-conteneurs CSL VIRGINIA à 11 milles de la zone de précaution du DST du canal de Corse. À 07h02, l'ULYSSE percute violemment le CSL VIRGINIA par le travers tribord. Les deux navires restent encastrés. L'accident ne fait ni victime ni blessé mais génère une pollution de l'ordre de 520 m3, le CSL VIRGINIA ayant perdu la majeure partie du fuel contenue dans une soute à combustible. La nappe de pollution se répand et atteint la côte, le littoral varois en particulier. D'importants moyens de lutte antipollution sont déployés. Désencastré après quelques jours, le navire ULYSSE a rejoint la Tunisie pour débarquer sa cargaison et y être réparé. Le CSL VIRGINIA a rejoint la Turquie, après avoir changé de nom et de pavillon.
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2.1
Informations factuelles
Contexte
Appartenant à la compagnie d'État tunisienne COTUNAV, le navire roulier ULYSSE effectue la liaison Gênes - Tunis. La traversée dure environ 24h. Le porte-conteneurs CSL VIRGINIA, après être passé au chantier à Gênes est lège (sans chargement), en attente d'affrètement.
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2.2
Navires
2.2.1 ULYSSE
© Pascal Bredel MarineTraffic.com
N° OMI Jauge brute Jauge nette Type de navire Indicatif d'appel MMSI Pavillon Port d'attache Constructeur Date de livraison Longueur hors tout Longueur entre pp Largeur hors membre Tirant d'eau d'été Port en lourd Déplacement maximal Déplacement lège Creux
: : : : : : : : : : : : : : : : : :
9142459 Londres 1969 17907 5372 roulier (cargo roulier) TSMU 672248000 tunisien La Goulette Schichau Seebeckwerft (Allemagne) 02/07/1997 161,5 m 146 m 25,80 m 6,018 m 5914 t 14004 t (1.025 t/m3) 8120 t au pont principal : 7,70 m - au pont cabine 14,20 m
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Capacité passagers Capacité garage
: :
100 personnes 128 remorques
Le navire est équipé de deux radars, un bande X (longueur d'onde 3 cm, plus adapté à la navigation côtière du fait d'une image plus fine, mais portant moins loin que le bande S) et un bande S (longueur d'onde 10 cm, destiné plutôt à la navigation au large avec une meilleure portée). Le radar bande X a une image instable, il est hors service. L'ULYSSE est géré par la compagnie d'État tunisienne COTUNAV qui arme six rouliers sur les lignes Tunisie-France, Tunisie-Italie. Le navire est inspecté annuellement au titre du contrôle par l'État du port. La dernière inspection au titre du MoU de Paris a été effectuée à Marseille le 25 octobre 2017 et a enregistré huit déficiences relatives à la sécurité incendie, à l'exploitation des engins de sauvetage et au volet social.
2.2.2 CSL VIRGINIA
Photo : site compagnie Cyprus Sea Lines SA
N° OMI Jauge brute Jauge nette Type de navire MMSI Pavillon Port d'attache
: : : : : : :
9289568 Londres 1969 54592 34532 porte-conteneurs 636019009 chypriote Limassol
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Constructeur Date de livraison Longueur hors tout Longueur entre pp Largeur hors membre Tirant d'eau d'été Port en lourd Déplacement maximal Déplacement lège Capacité
: : : : : : : : : :
Hyundai Samho Heavy Industries Co.Ltd 02/06/2005 294,16 m 283,20 m 22,10 m 13,65 m 66644 t 87832 t (1.025 t/m3) 21189 t 5039 EVP
Le CSL VIRGINIA appartient à la « Duraven Shipping Company Ltd of Cyprus » et est géré techniquement par la « Cyprus Sea Lines Co Ltd », qui gère de nombreux portes-conteneurs et vraquiers. Le navire a été régulièrement inspecté au titre du contrôle par l'État du port ; peu de déficiences sont relevées. La dernière inspection du 08 septembre 2018 effectuée à Gênes relève trois déficiences dans le domaine documentaire et social (certificat MLC et enregistrement des heures de repos).
2.3
Équipages
2.3.1 ULYSSE
L'équipage est composé de marins tunisiens. Au moment de l'accident, l'équipage est de trenteneuf personnes dont huit membres du personnel restaurant. Des officiers sont embarqués en surnuméraire pour renforcer l'équipage en raison de l'inventaire annuel en cours, effectué par six commissaires aux comptes présents à bord pour quelques jours. Le capitaine est âgé de quarante et un ans. Il est breveté capitaine de 1 ère classe depuis 2003. Il est capitaine à la COTUNAV depuis mars 2016. Il est embarqué à bord de l' ULYSSE depuis le 24 septembre 2018. L'officier de quart est âgé de vingt-neuf ans. Non permanent, il est embarqué sous contrat temporaire, régulièrement renouvelé par la COTUNAV. Il navigue depuis juillet 2015 comme
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lieutenant à la COTUNAV. Il est embarqué à bord de l'ULYSSE depuis le 17 mai 2018 (quatre mois trois semaines de bord). Il a fait une demande de débarquement un mois avant l'accident. Son remplaçant est à bord, cependant aucune date de débarquement ne lui a été communiquée. L'équipage était momentanément renforcé pour l'inventaire en cours, dans le personnel de renfort se trouvait son remplaçant, embarqué le 1er octobre 2019. Le matelot de veille est âgé de trente-huit ans. Il a navigué à la pêche, puis a intégré la COTUNAV le 10 décembre 2009. Il est embarqué à bord de l'ULYSSE depuis le 28 juin, et effectue le quart de 04h à 08h et 16h à 20h depuis un mois. Il est le timonier chargé de prendre la barre lors des manoeuvres. Les marins tunisiens ont indiqué être à jour de leur visite d'aptitude médicale.
2.3.2 CSL VIRGINIA
L'équipage est composé de vingt-quatre marins dont cinq élèves, tous sont philippins. Le capitaine, de quart au moment de l'abordage, est âgé de quarante ans, il navigue depuis 2003. Il exerce la fonction de capitaine depuis 2013, et est embarqué à bord du CSL VIRGINIA depuis février 2018 (neuf mois de bord). C'est son premier embarquement sur ce navire. La relève était proche, les embarquements durant habituellement neuf mois.
2.4
Accident
L'accident s'est produit au nord du cap Corse, à 11 milles de l'entrée dans la zone de précaution1 du DST du cap Corse et 16,5 milles dans l'axe ouest de l'entrée du DST. Le lieu de l'accident se trouve en particulier sur la route Gênes - canal de Corse et à la limite du parc naturel marin du cap Corse et de l'Agriate. Le CSL VIRGINIA est au mouillage, ligne de mouillage tribord à l'eau, cap presque à l'ouest, au 263° selon les données enregistrées dans le VDR au moment de l'accident. L'ULYSSE aborde le CSL VIRGINIA par le travers tribord sous un angle presque perpendiculaire au niveau des baies 23-25. Sous l'effet du choc et de la surpression, le fuel contenu dans la soute à combustible 3 tribord est projeté dans la cale du CSL VIRGINIA ainsi que sur l'avant de l'ULYSSE jusqu'à atteindre ses vitres de passerelle.
1
Zone de précaution : zone de convergence des navires entrant et sortant du dispositif de séparation de trafic (DST)
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La soute se vide très rapidement ; en quelques minutes la majeure partie du fuel contenu dans la soute à combustible est déversée en mer. CSL VIRGINIA au mouillage
Limite eaux territoriales
carte : SHOM
2.5
Intervention
Après l'accident, le carburant d'une soute se répand en mer. Des navires français et italiens sont engagés dans le remorquage et la lutte antipollution. Le plan RAMOGEPOL (plan d'intervention pour la lutte contre les pollutions marines accidentelles en Méditerranée) est activé avec le plan Orsec, volet maritime. Un barrage antipollution autour de la brèche du CSL VIRGINIA est mis en place.
2.5.1 Désincarcération de l'ULYSSE
Le 8 octobre 2018, à la suite des conseils du salvage master des Abeilles, de l'équipe d'évaluation et d'intervention, des capitaines du JASON et de l'ABEILLE FLANDRE, trois tentatives sont réalisées. L'ULYSSE « recule » mais reste en partie encastré dans le CSL VIRGINIA.
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Le 9 octobre 2018, nouvelle tentative sans succès. Le 11 octobre 2018, désincarcération à 21h30 (heure locale), sans intervention des remorqueurs.
2.5.2 Moyens de lutte contre la pollution engagés au large
Un dispositif très important est mis en place, jusqu'à 41 navires et 13 aéronefs sont intervenus. Le 7 octobre 2018, chargement et appareillage de l'AILETTE et du JASON - Appareillage de trois moyens spécialisés italiens. L'utilisation de dispersants est écartée en raison du type d'hydrocarbure (fuel lourd). Le 8 octobre 2018, début de la lutte antipollution avec l'intervention du JASON, de l'AILETTE, du remorqueur ALTAGNA, ainsi que pour l'Italie du BONASSOLA, du KORAL et du NOS TAURUS en vue du confinement de la pollution et récupération. Le 9 octobre 2018, ralliement du BREZZAMARE de l'AESM. Le 11 octobre 2018, ralliement du remorqueur RABLÉ. La météo se dégrade, ce qui restreint la lutte. Le 12 octobre 2018, ralliement de l'UGO CASA italien. Le 13 octobre 2018, ralliement du remorqueur CHAMBON BORA et du drone du commando Kieffer. Le 14 octobre 2018, ralliement des remorqueurs TAAPE, VB CRAU et VB RHÔNE. Le 16 octobre 2018, premières arrivées de boulettes sur les côtes varoises Remplacement progressif des moyens hauturiers par des moyens côtiers. Jusqu'au 12 novembre 2018, lutte en zone côtière.
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Exposé
Heures en TU + 2 (heure locale française) Météo (source météo-France) : - Vent du : 281° force 3 - État de la mer : 3 (peu agitée) - Bonne visibilité : 10 milles marins - Température de l'air : 19°C - Température de l'eau : 18°C - Heure du lever du soleil 07h26, début de l'aube 06h58. Le 23 septembre 2018, le CSL VIRGINIA appareille de Gênes sans destination précise. Il reste à la dérive au sud de Gênes en attente d'ordres pendant une journée. Le 24 septembre 2018, le CSL VIRGINIA reçoit l'ordre de la compagnie de se rendre au nord du cap Corse pour y mouiller. La position de mouillage a été choisie par la compagnie. Le 25 septembre 2018 vers 1h du matin, le CSL VIRGINIA mouille son ancre tribord et met 10 maillons à l'eau (représentant 270 mètres de chaîne). À la position 43° 14,8' N / 009° 28,5' E, à une quinzaine de milles au nord du cap Corse. Il allume ses feux de pont et de mouillage. La profondeur sous la quille est de l'ordre de 100 à 120 m. Le 25 septembre 2018 deux heures après le mouillage, le CSL VIRGINIA reçoit l'appel du sémaphore du cap Corse qui l'interroge sur ses intentions. Le CSL VIRGINIA indique qu'il est mouillé, qu'il n'a pas d'avarie. En début d'après-midi le CSL VIRGINIA est contacté à nouveau et indique qu'il restera à cette position pour une durée indéterminée. Le 1er octobre 2018, le CSL VIRGINIA laisse filer un maillon de plus en raison des conditions météorologiques. Il a 11 maillons à l'eau (environ 302 mètres de chaîne). Il reste mouillé à cette position jusqu'à l'abordage. Le diamètre de sa zone d'évitement est de l'ordre de 1000 mètres (longueur de la chaîne plus celle du navire). Le 7 octobre 2018, l'ULYSSE appareille de Gênes à 02h55. Après avoir participé à la manoeuvre, le lieutenant prenant le quart à 04h00 (heure bord TU+1) peut rejoindre sa cabine pour se reposer pendant une heure. À 03h18, l'ULYSSE est en route libre au cap 161°. À 04h00, sur le CSL VIRGINIA, le capitaine prend le quart.
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À 05h05, sur l'ULYSSE, le lieutenant prend le quart (ce qui correspond à 4h05 de l'heure bord de l'Ulysse en TU+1). À 05h10, sur l'ULYSSE, le lieutenant est rejoint par son matelot qui est en retard de quelques minutes. À 05h54, sur l'ULYSSE, le radar bande S fait apparaître l'écho du CSL VIRGINIA. Pendant le quart l'officier fait des allers et venues en passerelle, examinant son téléphone portable, à la recherche du réseau téléphonique. Écho du CSL VIRGINIA
À 06h12, étant en approche des eaux territoriales françaises, l'ULYSSE reçoit l'appel du sémaphore du cap Corse. L'officier de quart y répond promptement. Vers 06h25, le timonier de l'ULYSSE quitte la passerelle avec l'accord de l'officier de quart qui, sans se retourner, lui confirme d'y aller d'un signe de la main. À cet instant, l'officier de quart est au téléphone portable, occupé par une communication privée. Il est assis dans le fauteuil tribord, en face de l'ECDIS et du radar bande X qui ne fonctionne pas. Vers 06h45, l'officier de quart sur l'ULYSSE pense avoir aperçu le CSL VIRGINIA sur l'ECDIS : il indique voir le CSL VIRGINIA cap à l'ouest, mais ne note pas la vitesse nulle.
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Vers 6h50, à bord du CSL VIRGINIA, le commandant passe un appel téléphonique privé de son téléphone mobile. Le radar bande X est sur stand-by. Le cap vrai (gyrocompas) enregistré par le VDR du CSL VIRGINIA est à peu près constant proche du 262. À 6h53, à bord de l'ULYSSE le radar acquiert automatiquement l'écho du CSL VIRGINIA. Le CPA est nul. Il affiche « collision warning ». Données AIS du CSL VIRGINIA
Écho du CSL VIRGINIA
Collision Warning
Vers 06h55, l'officier de l'ULYSSE, se rend à la table à carte, située sur l'arrière de la passerelle tribord derrière des rideaux fermés et opaques, pour y remplir le journal de bord et porter sur la carte marine un point GPS, comme chaque heure. Vers 07h00, le capitaine du CSL VIRGINIA remplit le cahier de positions qui se trouve sur un pupitre sur le côté bâbord de la passerelle. À 07h02'46'', l'ULYSSE aborde par le travers tribord le CSL VIRGINIA, presqu'à angle droit au centre du navire, à la position 43°14',9 N / 9°28',7 E.
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À 07h04'32'', le capitaine du CSL VIRGINIA met en fonction le radar bande X (qui était en standby), puis déclenche l'alarme générale. À 07h05'05'', appel VHF canal 16 du CSL VIRGINIA par l'ULYSSE. Les capitaines échangent sur leur situation respective. Le capitaine de l'ULYSSE décide de ne rien tenter et de rester encastré pour limiter les fuites de fuel. Sur les deux navires, les capitaines rassemblent l'équipage et ordonnent une évaluation des dommages. Le chef mécanicien du CSL VIRGINIA se rend au PC machine pour vider la soute à combustible touchée, il dispose le circuit pour faire un transfert par gravité, mais la brèche est très importante, il voit le niveau de la soute à combustible diminuer rapidement. Seule une faible quantité, quelques dizaines de mètres cubes, a pu être transférée.
Photo : préfecture maritime de la Méditerranée
Les jours suivants, plusieurs tentatives de désincarcération sont effectuées sans succès avec l'aide de remorqueurs. La désincarcération n'est que partielle. Avec la houle, sous l'effet continu des mouvements, les deux navires se séparent finalement le 11 octobre 2018 vers 21h45 sans intervention extérieure. Les deux navires restent à flot. Le navire ULYSSE, dont l'étrave est endommagée au-dessus de la ligne de flottaison, rejoint la Tunisie le lendemain sans assistance.
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Photos de l'avant de l'ULYSSE (source BEAmer)
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Photos CSL VIRGINIA (source BEAmer)
Le 23 octobre 2018 à 18h30, le navire CSL VIRGINIA appareille du nord du cap Corse, initialement pour le port de Constana (Roumanie), escorté par l'ABEILLE FLANDRE, jusqu'à la sortie des eaux sous juridiction française. Le navire change de destination et de pavillon au cours du voyage ; il prend le pavillon libérien, il est renommé VIRGIN STAR et rejoint un chantier en Turquie où il arrive le 2 novembre 2018.
4
Analyse
La méthode retenue pour cette analyse est celle qui est préconisée par la Résolution A28 / Res 1075 de l'OMI « directives destinées à aider les enquêteurs à appliquer le code pour les enquêtes sur les accidents (Résolution MSC 255 (84)) ». Le BEAmer a établi la séquence des événements ayant entraîné l'accident, à savoir : L'abordage
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Dans cette séquence, les événements dits perturbateurs (événements déterminants ayant entraîné les accidents et jugés significatifs) ont été identifiés. Ceux-ci ont été analysés en considérant les éléments naturels, matériels, humains et procéduraux afin d'identifier les facteurs ayant contribué à leur apparition ou ayant contribué à aggraver leurs conséquences. Parmi ces facteurs, ceux qui faisaient apparaître des problèmes de sécurité présentant des risques pour lesquels les défenses existantes étaient jugées inadéquates ou manquantes ont été mis en évidence (facteurs contributifs). Les facteurs sans influence sur le cours des événements ont été écartés, et seuls ceux qui pourraient, avec un degré appréciable, avoir pesé sur le déroulement des faits ont été retenus.
4.1
L'abordage
4.1.1 Veille à bord des navires ULYSSE
À bord de l'ULYSSE le quart est mené à deux la nuit, un veilleur qui effectue une veille visuelle et un lieutenant qui effectue également une veille visuelle complétée par des aides à la navigation, notamment deux radars, dont le bande X non fonctionnel maintenu éteint. L'AIS est interfacé aux radars ainsi qu'à l'ECDIS. Le radar sur bâbord est le bande S, changé récemment. Le matelot se tient habituellement près des vitres sur bâbord alors que le lieutenant est souvent dans un fauteuil côté tribord. Le lieutenant a devant lui, bien visibles, le radar bande X éteint et l'ECDIS. Il ne voit pas en revanche le radar bande S à bâbord, depuis sa position assise. Le fauteuil étant bas il ne peut, de cette place, effectuer une veille visuelle efficace. Ce fauteuil trop bas paraît bien peu adapté à la tenue du quart s'il est utilisé régulièrement. Une des deux paires de jumelles est défectueuse. L'officier de quart n'a pas connaissance de ce fait ; la veille visuelle semble donc peu pratiquée par ce dernier.
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Siège de l'officier de quart sur td
Radar non fonctionnel
Radar en fonction sur bd
Le radar bande S dispose d'alarmes sonores et visuelles. Celles-ci sont modifiées sur décision du capitaine seulement, selon une procédure bord. Cependant le mot de passe verrouillant les changements de paramètres est connu de tous depuis le changement du radar, et l'alarme sonore est désactivée. La procédure attachée à la gestion des paramètres du radar semble peu maîtrisée par les officiers. Pendant le quart de 04 à 08h le timonier effectue habituellement une ronde dans les garages ; la ronde dure entre 35 et 45 minutes en fonction de la quantité de fret embarqué. À partir du moment où le timonier s'absente pour faire la ronde, le lieutenant se retrouve seul à la passerelle pour faire le quart. À 06h25 le timonier indique à l'officier qu'il descend faire la ronde. Le CSL VIRGINIA n'a pas été détecté par le timonier. L'officier se trouve à ce moment dans le fauteuil sur tribord en conversation téléphonique privée sur son mobile ; d'un geste, il fait signe au timonier qu'il peut s'absenter pour effectuer la ronde de sécurité. Il n'y a pas d'échange sur la situation surface entre les deux hommes. À ce moment l'officier reste seul devant un radar éteint, sans voir la ligne d'horizon et entièrement accaparé par son téléphone. Par la suite, il continuera à utiliser son téléphone pour « chatter », pendant une durée indéterminée. De fait, la seule veille qu'il puisse effectuer de son siège est une veille sur l'ECDIS avec les données AIS.
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Conformément à la réglementation SOLAS, la passerelle dispose d'un système d'alarme de quart à la passerelle de navigation (BNWAS, Bridge Navigational Watch Alarm System - surnommé souvent « homme mort »). La convention SOLAS prévoit, SOLAS V-19, « Le système de quart à la passerelle de navigation doit être en service lorsque le navire fait route en mer ». Cependant celui-ci n'est pas activé, y compris lorsque l'officier de quart se retrouve seul à la passerelle. Le CSL VIRGINIA avait ses feux de pont allumés et a été détecté par le radar plus d'une heure avant l'accident. Il était donc aisément détectable tant à la vue qu'au radar. Il apparaît aussi sur l'ECDIS. Avant que le timonier ne s'absente pour faire sa ronde de sécurité, la situation environnante n'a pas fait l'objet d'une évaluation visuelle ou radar par l'officier. Le bon usage veut que le timonier puisse s'absenter de la passerelle seulement si la situation ne présente pas de risque, et après un échange, même bref, avec l'officier de quart. Il n'y a pas eu de conversation au cours du quart entre le timonier et l'officier. Sur des navires d'autres compagnies, la ronde se fait souvent au changement de quart. Cela permet de limiter la veille par l'officier de quart seul, le timonier montant ou descendant effectuant la ronde. À 06h45 l'officier de quart croit noter la présence du CSL VIRGINIA sur l'ECDIS, cap à l'ouest, le navire étant droit devant, il estime qu'il ne représente pas un danger, étant traversier, car il ne relève pas que la vitesse du CSL VIRGINIA est nulle. Le cap du CSL.VIRGINIA indiqué par l'enregistrement VDR tourne autour du 262° soit perpendiculairement à la route de l'ULYSSE. La route fond du CSL VIRGINIA indiquée sur le radar de l'ULYSSE est du 337 (COG). La route fond indique le déplacement réel du navire sur le fond. Au mouillage le navire tourne autour d'un point fixe (la position de l'ancre) sous l'effet du vent et du courant, cette valeur n'est pas significative si elle est mesurée sur un laps de temps court. Une telle route fond, si elle avait été observée, aurait pu amener l'officier à s'interroger sur sa lecture de l'ECDIS et la cohérence des informations. Elle faisait alors du CSL VIRGINIA un navire contre-bordier en route de collision. En résumé, une des informations donne le navire en cap traversier, l'autre en route contre-bordier, la vitesse du CSL VIRGINIA étant nulle dans tous les cas. L'utilisation des seules données AIS en anticollision n'est pas adaptée, comme le précise la résolution de l'organisation maritime internationale A.1106(29), dans ses paragraphes 40 à 44. Celle-ci précise en particulier :
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« 40 Il est reconnu que l'AIS pourrait être utilisé comme aide pour un dispositif anti-abordage et il se pourrait que, un jour ou l'autre, cette application soit recommandée. 41 Néanmoins, les renseignements AIS peuvent simplement être utilisés pour faciliter la prise de décisions en vue d'éviter les abordages. Lorsque l'AIS est utilisé en mode navire-navire pour éviter les abordages, il faudrait tenir compte des mises en garde suivantes : .1 l'AIS est une source supplémentaire de renseignements de navigation. Il ne remplace pas des systèmes de navigation comme le système de poursuite des cibles radar ou le STM mais constitue un système d'appoint ; .2 et l'utilisation d'un AIS ne dispense pas l'officier de quart de l'obligation de satisfaire à tout moment au Règlement pour prévenir les abordages en mer, en particulier la règle 7, lorsqu'il doit déterminer s'il existe un risque d'abordage. 42 L'utilisateur ne devrait pas s'en remettre uniquement à l'AIS pour obtenir des renseignements ; il devrait se servir de toutes les informations disponibles en matière de sécurité. » L'officier de quart a déclaré s'être rendu à la table à carte vers 07h00 comme à chaque heure ronde pour y porter le point GPS. Lorsque le navire se rapproche de la côte, l'officier indique faire un point toutes les demi-heures. À ce moment-là, le CSL.VIRGINIA est tout proche. Il est impossible de ne pas le voir d'un simple coup d'oeil à l'extérieur, droit devant, avec ses feux de pont allumés. La table à carte est entourée de rideaux occultants pour ne pas gêner la veille; de nuit, rideaux tirés, depuis la table à carte, l'officier est coupé visuellement du monde extérieur. Avant le choc entre les deux navires, l'enregistrement VDR ne fait apparaître aucune tentative de manoeuvre. Il n'y a pas eu de changement d'allure machine, ni de modification de cap ou d'ordre particulier à la barre pour tenter d'éviter l'abordage. Cela amène à la conclusion que le CSL VIRGINIA n'a été détecté par l'officier qu'au moment du choc ou peut-être à peine quelques secondes avant, en sortant de la table à carte. Avec une bonne visibilité et les aides à la navigation, en particulier le radar, l'officier avait à sa disposition largement à temps toutes les informations pour éviter l'abordage. De ce constat, il ressort que la veille a été très insuffisante voire non effectuée pendant une longue période précédant l'abordage.
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L'officier est à bord depuis presque cinq mois. Les officiers sous contrat à durée indéterminée ont des embarquements d'une durée maximale de trois mois. Pour les marins non titularisés, cas de cet officier, la durée maximale est repoussée à six mois. Étant donné le rythme à bord des ferries, et le manque d'information sur sa date de débarquement, des tensions familiales ont pu le conduire à un relâchement et provoquer le manque d'implication dans la fonction lors du quart. Il n'est pas exclu que l'officier se soit endormi au moment de l'accident, ce qui aurait pu fournir une explication très plausible du défaut de veille. Cependant, il est important de relever que son témoignage, seule information disponible sur son activité à la passerelle au moment où il était seul, ne va pas en ce sens : L'officier indique qu'il est resté éveillé. Dans tous les cas, que ce soit par l'utilisation du téléphone, l'assoupissement ou en raison d'un autre facteur, la veille n'a pas été assurée pendant un laps de temps important. Dans la séquence des événements ayant conduit à l'accident, le défaut de veille à bord de l'ULYSSE est l'événement perturbateur. L'usage du téléphone avec le défaut de suivi des procédures concernant le réglage des alarmes du radar et l'utilisation de « l'homme mort » en sont les facteurs contributifs. Dans une moindre mesure, la présence d'un radar non fonctionnel et un siège trop bas ne permettant pas de voir la ligne d'horizon sont également des facteurs contributifs.
CSL VIRGINIA
Le navire étant au mouillage, un seul officier effectue la veille (le capitaine est de quart seul au moment de l'abordage). À l'ancre, les feux de mouillage sont allumés. En outre, selon les témoignages, comme il est d'usage, les feux de pont sont également allumés, afin de rendre le navire très visible de loin et d'être identifié comme n'étant pas en route. La nuit, les feux de pont génèrent une pollution lumineuse qui gêne la veille visuelle depuis la passerelle du navire qui les a allumés. L'appréciation de la situation surface est parfois plus pertinente en consultant le radar. Le radar bande X est celui que le capitaine a indiqué utiliser. Au moment de l'accident ce radar est sur stand-by, il est mis en émission deux minutes après l'abordage. Le radar avait été configuré avec une zone de garde d'un mille. L'entrée d'un navire dans cette zone faisait émettre une alerte sonore par deux bips. Mais le radar étant sur stand-by, il n'y a pas eu d'alerte émise.
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Au regard de la vitesse de navires en transit, les enquêteurs estiment qu'au cours des 13 jours de mouillage le CSL VIRGINIA a été exposé à plusieurs situations rapprochées, voir ci-dessous les extraits des routes AIS des navires (source AESM). Ainsi des navires sont passés à moins de 0,3 mille du CSL VIRGINIA. Dès le 26 septembre 2018, par exemple, deux navires en transit sont passés à environ 0,2 mille et 0,4 mille. La convention COLREG précise dans sa règle 10 - dispositifs de séparation de trafic, « g) Les navires doivent éviter, dans toute la mesure du possible, de mouiller à l'intérieur d'un dispositif de séparation du trafic ou dans des zones proches de ses extrémités ». Il n'y a pas de définition précise des « zones proches de ses extrémités », cette appréciation doit se faire en fonction de bien des facteurs. Dans ces facteurs, on peut citer de façon non limitative : la météo, la configuration du DST, les fonds, les approches, la longueur de chaîne... Dans le cas présent, le CSL VIRGINIA était à 15 milles de l'entrée du DST, ce qui ne semble pas proche ; mais le DST a créé un phénomène de convergence des routes de navigation pour le passage par le canal de Corse, et en conséquence concentré les navires dans le secteur de la zone de mouillage du CSL VIRGINIA. La veille de l'accident, le CARTHAGE, autre navire de la compagnie COTUNAV a changé de route pour l'éviter en passant malgré tout à proximité du CSL VIRGINIA (environ 0,2'). Extraction des routes AIS autour du CSL VIRGINIA pendant son mouillage. La partie centrale représente les positions successives du CSL VIRGINIA qui évite sur sa chaîne, les distances approximatives de passage sont indiquées en mille marin.
Source : Agence européenne de sécurité maritime (European Maritime Safety Agency - Integrated Maritime Services)
CSL VIRGINIA au mouillage
25 septembre 2018
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27 septembre 2018
28 septembre 2018
29 septembre 2018
30 septembre 2018
5 octobre 2018 6 octobre 2018
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Ces situations rapprochées qui ont amené certains navires à manoeuvrer, auraient pu alerter le CSL VIRGINIA sur la position particulière du point de mouillage et conduire, soit à effectuer une veille plus attentive, soit à envisager un changement de mouillage. Cependant ces situations très rapprochées et potentiellement dangereuses n'ont pas été relevées par le capitaine du CSL VIRGINIA. Une dizaine de minutes avant l'abordage, le capitaine passe un appel téléphonique privé depuis son mobile. Il est alors sur le côté bâbord de la passerelle, à proximité du pupitre où se trouve le journal sur lequel sont notées les positions à chaque heure ronde. L'ULYSSE est en route de collision sur tribord. L'ULYSSE pouvait difficilement être détecté visuellement très tôt en raison de la pollution lumineuse combinée à la position du capitaine, et le manque d'attention de ce dernier. Dans le même temps le radar bande X était sur stand-by. Le capitaine indique avoir vu l'ULYSSE arriver sur lui dans les derniers instants avant le choc, trop tard pour tenter quoi que ce soit ; il n'y a aucune action entreprise (appel VHF, lampe à éclats, corne de brume...) avant l'abordage. La veille était inadaptée sur le CSL VIRGINIA au regard du trafic environnant dans cette zone de haute mer. Les navires évoluaient à proximité du CSL VIRGINIA en route libre et donc à pleine vitesse, contrairement au trafic d'une zone de mouillage répertoriée où les navires manoeuvrent avec prudence, à vitesse réduite, pour entrer et sortir de celle-ci. Le CSL VIRGINIA n'était pas en mesure d'effectuer une manoeuvre d'évitement. En effet, un préavis de 30 minutes pour démarrer la machine était nécessaire et onze maillons de chaîne restaient à virer, nécessitant environ 45 minutes. Pour autant, la veille de la situation de surface pouvait servir à détecter un navire dangereux afin d'alerter ce dernier pour qu'il s'écarte.
Réglementation
En ce qui concerne la veille à bord des navires, le règlement international pour prévenir les abordages en mer (COLREG 72), établit les obligations suivantes : Règle 5 « Tout navire doit en permanence assurer une veille visuelle et auditive appropriée, en utilisant également tous les moyens disponibles qui sont adaptés aux circonstances et conditions existantes, de manière à permettre une pleine appréciation de la situation et du risque d'abordage. »
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Sur aucun des deux navires cette règle n'a été appliquée. Sur l'ULYSSE il n'y a eu ni veille visuelle ni veille radar par l'officier de quart pendant une durée approximative d'une heure. Sur le CSL VIRGINIA la veille radar a fait défaut alors que l'efficacité de la veille visuelle était limitée par les feux de pont allumés. Règle 7 « a) Tout navire doit utiliser tous les moyens disponibles qui sont adaptés aux circonstances et conditions existantes pour déterminer s'il existe un risque d'abordage. S'il y a doute quant au risque d'abordage, on doit considérer que ce risque existe. b) S'il y a à bord un équipement radar en état de marche, on doit l'utiliser de façon appropriée en recourant, en particulier, au balayage à longue portée afin de déceler à l'avance un risque d'abordage, ainsi qu'au « plotting » radar ou à toute autre observation systématique équivalente des objets détectés. c) On doit éviter de tirer des conclusions de renseignements insuffisants, notamment de renseignements radar insuffisants. d) L'évaluation d'un risque d'abordage doit notamment tenir compte des considérations suivantes : 1) il y a risque d'abordage si le relèvement au compas d'un navire qui s'approche ne change pas de manière appréciable ; 2) un tel risque peut parfois exister même si l'on observe une variation appréciable du relèvement, particulièrement lorsque l'on s'approche d'un très grand navire, d'un train de remorque ou d'un navire qui est à courte distance. » Aucun navire n'a détecté l'autre en dépit des aides à la navigation disponibles à bord des deux navires ; les articles 7a) et 7b) n'étant pas suivis comme il se doit avant l'abordage. Le navire au mouillage n'est pas dispensé de veille, même si son action pour prévenir un abordage se limite à tenter d'alerter l'autre navire. La convention COLREG n'établit pas le navire au mouillage comme étant navire privilégié.
4.1.2 Évaluation du risque ULYSSE
L'ULYSSE est sur une ligne d'allers et retours réguliers. L'officier de quart, à bord depuis plus de quatre mois, est certainement pris par la routine. Il n'a pas croisé jusqu'à présent de navire au mouillage sur sa route habituelle, la présence à cette position du CSL VIRGINIA au mouillage est inattendue.
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Il a sous-estimé le risque en ne faisant pas de suivi régulier de la situation, tant visuel qu'en utilisant le radar. Cette sous-estimation du risque l'a conduit à libérer le veilleur sans vérifier ni échanger avec ce dernier. De même il a négligé la veille au profit de la recherche du réseau téléphonique, puis d'appel et de « chat » durant son quart. Il est assis dans un fauteuil trop bas pour la veille visuelle, devant un radar éteint. Il regarde trop brièvement l'ECDIS et en tire une conclusion fausse issue des données AIS lues de façon partielle. L'officier indique ne pas avoir eu une soirée fatigante ou avoir fait d'excès la veille de l'accident. La matinée à Gênes a été chargée : La veille il s'est reposé de 08h00 à 10h30. Il a dû réceptionner les vivres et gérer les formalités police et douanes dans la matinée vers 10h30 jusqu'à 12h00. Ensuite il a eu quatorze heures de repos consécutives : Il a été au repos jusqu'à l'appel au poste de manoeuvre un peu avant le départ du navire vers 02h00 (le jour suivant). Après le déjeuner, il a dormi de 13h00 à 18h00, ensuite il a diné et a profité de son temps libre pour se distraire. Il ressent une fatigue générale. Il a indiqué qu'il ne s'était pas endormi au moment où il était seul à la passerelle. Cependant, on ne peut exclure qu'il ait été, à un moment donné, plus ou moins dans un état de somnolence. Il a participé à la manoeuvre de départ pour rejoindre sa cabine vers 03h00 du matin. Il se repose une heure sans dormir avant de se lever et prendre le quart à 04h00 (05h00 pour ce rapport rédigé en TU+2). Au moment de l'accident il aura dormi trois heures plus cinq heures au cours des dernières vingt-quatre heures. La fatigue accumulée par la durée de l'embarquement, et le poids de la routine, ont certainement contribué à altérer son jugement vis-à-vis des risques alentours lors de ce quart. Des préoccupations familiales et personnelles ont pu également amplifier le phénomène. Les éléments ci-dessus conduisent à conclure que la compagnie (bureaux à terre et navire) a une culture de la sécurité inadéquate. Les conditions sont alors réunies pour que la collision avec un navire au mouillage soit possible. La racine des causes de l'accident est donc liée à la culture de la sécurité de la compagnie à laquelle vient s'ajouter des facteurs plus individuels (officier de quart).
CSL VIRGINIA
Le 24 septembre, le CSL VIRGINIA reçoit ordre de la compagnie de se rendre au nord du cap Corse pour y mouiller. L'emplacement du mouillage est désigné par la compagnie sans consultation du capitaine. La position de mouillage n'était pas illégale.
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Le capitaine ne remet pas en cause ce choix de point de mouillage. Selon l'information du sémaphore du cap Corse, c'est la première fois qu'un navire est observé mouillé à cette position. Situé dans les eaux internationales, à une quinzaine de milles du cap Corse, le mouillage se trouve sur un petit plateau de quelques milles. La profondeur augmente brutalement aux abords du plateau. Même si la compagnie indique que le capitaine a une expérience significative du mouillage dans de grandes hauteurs d'eau, les fonds y demeurent importants pour un mouillage, de l'ordre de 100 mètres et plus. Le plateau se situe dans l'axe, côté ouest, de l'entrée du dispositif de séparation de trafic du canal de Corse, sur la route des ferries en particulier et à proximité de routes est-ouest. La zone est également fréquentée par des navires de pêche. D'un point de vue praticité, elle se trouve loin de toute possibilité de ravitaillement. Pourtant à une trentaine de milles se trouvait un mouillage sûr et abrité. Pour un mouillage qui devait durer, effectuer un trajet de deux heures supplémentaires pour prendre un mouillage plus sûr, abrité et permettant d'avitailler facilement le cas échéant, ne semblait pas une forte contrainte. Quand il y a la possibilité de faire autrement aisément, il n'est pas d'usage de mouiller en pleine mer sans le moindre abri et sur des fonds qui imposent de sortir une si grande longueur de chaîne. En outre, si l'ancre vient à chasser, celle-ci peut être entraînée sur des fonds beaucoup plus importants où le mouillage devient impossible. Le risque de perdre la ligne de mouillage n'est pas négligeable, celle-ci partant en pendant, entrainée dans les profondeurs. L'endroit pouvait avoir de l'intérêt en permettant au navire de partir dans toutes les directions sans contrainte de régulation par un État côtier ou risque de contrôle, en revanche, sur une base d'analyse purement nautique, il est bien peu probable qu'un capitaine expérimenté choisisse une position de mouillage comme celle désignée par la compagnie au CSL VIRGINIA. Étant donné que le navire n'est pas manoeuvrant, la veille au mouillage est habituellement moins soutenue qu'en navigation, ceci est particulièrement vrai dans une zone de mouillage identifiée comme telle. La bonne tenue du mouillage sur onze maillons a rassuré l'équipage et un sentiment de confiance s'est installé au cours des 13 jours. Cependant, dans cette zone de haute mer, l'analyse de risque nautique lié aux navires en route a fait défaut ou était perfectible, d'une part dans le choix de l'emplacement du mouillage, puis ensuite dans le suivi de la situation surface, compte tenu de l'emplacement.
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Le mouillage est encadré par deux fiches ISM2 à bord du navire. La procédure requiert en particulier de maintenir une veille adaptée et de suivre étroitement l'approche d'autres navires. Après 13 jours de mouillage, et en dépit de grands navires passant à proximité immédiate à pleine vitesse, la veille ne fait pas l'objet d'une attention particulière. La procédure ISM n'est pas suivie durant le quart pendant lequel s'est produit l'abordage. Le bord n'a pas relevé que les navires passant à proximité immédiate à la vitesse de la route libre constituaient un danger potentiel à suivre avec attention. Il n'a donc pas adapté son comportement ou remis en cause la position du mouillage. Sur l'usage du radar, d'une part celui-ci est en stand-by, d'autre part, la zone de garde est trop restreinte : la zone de garde d'un mille ne laisse pas assez de temps à l'officier de quart pour réagir. Avec une zone de garde d'un mille cela ne laisse que trois minutes pour évaluer la situation d'un navire filant à 19 noeuds comme l'ULYSSE pour tenter d'entrer en contact et l'alerter. Une telle zone de garde ne paraît pas adaptée pour avoir le temps d'alerter un navire qui serait potentiellement dangereux en route libre à grande vitesse. Un navire au mouillage affichant les marques et feux de mouillage s'attend à ce que les navires en route y prennent garde selon les bons usages maritimes. Compte tenu du fait que pendant les 13 jours au mouillage des navires se sont approchés à des faibles distances comprises entre 0,2 et 0,4 mille, une veille attentive aurait pu conduire à alerter les navires qui s'approchaient dangereusement. Seule une tentative pour attirer l'attention de l'autre navire était possible, sans garantie de réponse de sa part. À partir du moment où il faut entre 30 et 45 minutes pour lever l'ancre et appareiller, il n'y avait pas d'échappatoire pour parer un navire s'approchant à 19 noeuds. La sous-estimation du risque de collision à cette position de mouillage est un facteur contributif de l'accident.
Sémaphore et CROSS
Le CSL VIRGINIA a mouillé sans en informer préalablement le sémaphore ou le CROSS. Il s'agit d'un mouillage en haute mer non soumis à autorisation. Le sémaphore détecte le CSL VIRGINIA immobile et le contacte peu après qu'il ait mouillé.
2
International Safety Management, système de gestion des procédures de sécurité à bord d'un navire
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Le CROSS ne s'oppose pas au mouillage. En effet, le navire se trouve au-delà de la mer territoriale française limitée à 12 milles, dans une zone sans réglementation internationale spécifique. La zone de précaution d'entrée dans le dispositif de séparation de trafic commence plus au sud. Par ailleurs, le CROSS n'est en charge d'aucune mission de surveillance radar ; il ne dispose d'ailleurs d'aucun poste ni de personnel dédié à cette mission. Le DST du canal de Corse n'est pas un VTS3. En d'autres termes, le CROSS n'a pas fonction de VTS, il n'y a pas de suivi systématisé dans la zone dont il a la charge. Sur la position même du mouillage, le sémaphore est confronté à une situation inédite. Cette position de mouillage n'a jamais été utilisée à sa connaissance. Sans recul et sans cadre réglementaire sur cette position au-delà des eaux territoriales, l'attention du CSL VIRGINIA n'est pas attirée sur la singularité de son choix de mouillage. Il n'est pas invité à prendre de précautions. Une fois au mouillage, le CSL VIRGINIA n'a pas fait l'objet de suivi particulier. Quarante-cinq minutes avant l'abordage, le sémaphore entre en contact avec l'ULYSSE, la réponse de l'officier de quart est rapide et normale, sans indice de défaut de veille qui aurait pu attirer l'attention du sémaphore. Aucune information nautique n'est diffusée vers l'ULYSSE concernant le CSL VIRGINIA à l'occasion de cet échange VHF de routine. Au moment de la collision, le sémaphore du cap Corse suivait et communiquait par VHF avec un autre navire qui évoluait dans la zone du DST.
5
Conclusions
L'abordage le 7 octobre à 7h02 est la conséquence d'un défaut de veille majeur sur l'ULYSSE, combiné à une position de mouillage légale mais peu judicieuse et sans surveillance attentive du trafic environnant par le CSL VIRGINIA. À bord de l'ULYSSE, le défaut de veille repose sur un manque d'implication de l'officier de quart avant l'abordage. Le défaut de veille n'a pu être pallié par le timonier, parti faire une ronde et absent de la passerelle.
3
VTS Vessel Trafic Services, Service du Trafic Maritime service mis en place par une autorité compétente dans le but d'améliorer la sécurité et l'efficacité du trafic maritime et de protéger l'environnement. Le service devrait être capable d'avoir une interaction avec le trafic et de réagir aux situations qui apparaissent en matière de trafic dans la zone du STM. Résolution de l'OMI A.857(20)
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Dans la position de veille adoptée, assis à tribord face à un radar hors service, placé juste devant lui, l'officier de quart a été privé d'informations lui permettant d'appréhender la situation. Cependant, l'utilisation de l'autre radar sur bâbord, en marche, lui aurait fourni tous les éléments permettant de juger de la situation critique. De plus, sa position de veille, trop basse, ne permettait pas de voir correctement l'horizon. La veille et les procédures afférentes sur les deux navires ont été peu ou pas respectées. La convention COLREG n'a pas été appliquée comme il se devait. L'élément humain est le facteur prépondérant à l'origine de l'accident, avec un manque d'appréciation des responsabilités liées à la fonction de chef de quart. Un phénomène de lassitude, liée à la durée des embarquements, a certainement joué un rôle sur l'implication des officiers de quart des deux navires. L'usage personnel du téléphone mobile a primé, à bord des deux navires, sur l'exercice de la fonction de chef de quart, entraînant un défaut de suivi de la situation surface. Par ailleurs, la zone se situant en haute mer, il n'y pas eu d'information délivrée aux navires transitant à proximité du point de mouillage inhabituel choisi par le CSL VIRGINIA.
6
1.
Enseignements
2019-E-09 : L'usage du téléphone mobile peut accaparer totalement l'officier de
quart en le détournant de la veille. 2. 3. 2019-E-10 2019-E-11 : La convention COLREG n'exonère pas de faire la veille au mouillage. : La consultation des seules données AIS n'est pas adaptée pour
l'anticollision, ses conditions d'utilisation étant clairement énoncées par la résolution OMI A1106(29). 4. 2019-E-12 : Un mouillage non réglementé et non interdit en haute mer n'est pas
pour autant adéquat. En effet, les routes et le trafic maritimes doivent être pris en compte lors du choix d'un point de mouillage en haute mer en dehors des zones réglementées, en particulier à proximité de dispositif de séparation du trafic.
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7
Le
Recommandations
BEAmer,
le Marine Accident and Incident Investigation Committee de la République de
Chypre (MAIC), le bureau d'enquêtes techniques après événement de mer italien (Direzione Generale per le Investigationi Ferroviare e Maritime), le bureau d'enquêtes et des accidents tunisien recommandent : À l'armement de l'ULYSSE : 1. 2019-R-06 : de reconsidérer, à la lumière du retour d'expérience sur cet accident, les
procédures du système de management de la qualité (code ISM) relatives à la veille passerelle à bord des navires de la compagnie. 2. 2019-R-07 : de faire respecter l'application des procédures d'utilisation des alarmes
des radars et du BNWAS. 3. 2019-R-08 : d'établir les conditions dans lesquelles la ronde de sécurité peut être
effectuée par le timonier.
À l'armement du CSL VIRGINIA : 4. 2019-R-09 : à la lumière de cet événement, d'effectuer un retour d'expérience et
d'informer les navires de la flotte et les autorités du pavillon des conclusions de l'étude. 5. 2019-R-10 : de laisser aux capitaines, en liaison avec la compagnie, le choix de la
position de mouillage (avec mise en oeuvre de la procédure bord « Anchoring & anchor watch checklist n°05 »).
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Marine investigation report
Collision CSL VIRGINIA struck by ULYSSE on 7 October 2018, off cap Corse
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Note
The investigation had been carried out jointly with investigation boards from: Cyprus, Italy and Tunisia. French-Tunisian joint teams came on board ULYSSE in Tunisia and visited cap Corse signal tower. The French team went alone on board CSL VIRGINIA, now VIRGIN STAR. During a meeting between casualties investigation bodies involved, it was decided that France would write the report.
This report has been drawn up according to the provisions of Transportation Code, specially clauses L.1621-1 to L.1622-2 and R.1621-1 to R.1621-38 relating to technical and safety investigations after marine casualties and terrestrial accidents or incidents and concerning the implementation of directive 2009/18/CE on the investigation of accidents in the maritime transport sector and in compliance with the «Code for the Investigation of Marine Casualties and Accidents» laid out in Resolution MSC 255 (84) adopted by the International Maritime Organization (IMO) on 16 May 2008 and published by decree n°.2010-1577 on 16 December 2010. It sets out the conclusions reached by the investigators of the
BEAmer
on the circumstances and
causes of the accident under investigation and proposes safety recommendations. In compliance with the above mentioned provisions, the analysis of this incident has not been carried out in order to determine or apportion criminal responsibility nor to assess individual or collective liability. Its sole purpose is to improve maritime safety and the prevention of maritime pollution by ships. The use of this report for other purposes could therefore lead to erroneous interpretations. For your information, the official version of the report is written in French language. The courtesy translation in English language is to facilitate the reading of this report to those who are not French speakers.
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1 2
Summary Factual information 2.1 2.2 2.3 2.4 2.5 Background Vessels Crews Marine casualty information Emergency response
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35
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35 36 38 39 40 42 47 48 60 61 62
3 4
Narrative Analysis 4.1 The collision
5 6 7 9
Conclusions Learnings Recommendations Appendices A. B. C. Abbreviation list Investigation decision Vessels
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63 64 65
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1
Summary
On 7 October 2018, at dawn, the Ro-Ro vessel ULYSSE was heading at 19 knots to Radès (Tunis). She had to travel through Corsica Channel TSS and was following her usual courses. At about fifteen nautical miles north of cap Corse, at 11 nautical miles from the Corsica Channel TSS precautionary area, was the container ship CSL VIRGINIA riding at anchor. At 07.02 am, ULYSSE struck violently CSL VIRGINIA on her starboard beam. Both vessels remained stuck. There were no fatalities or injuries but an oil pollution of about 520 cubic metre had been reported, as CSL VIRGINIA had lost most of the fuel oil contained in a fuel tank. The oil slick had spread and reached the coastline, Var beaches particularly. Significant antipollution means had been operated. Pulled apart after a few days, the vessel ULYSSE sailed to Tunisia to unload her cargo and to be repaired there. CSL VIRGINIA sailed to Turkey, after having changed her name and flag.
2
2.1
Factual information
Background
The Ro-Ro Vessel ULYSSE belongs to the Tunisian state company COTUNAV, sails on the Genoa - Tunis route. The crossing lasts about 24 hours. The crew is Tunisian. The container ship CSL VIRGINIA, after a maintenance period at a shipyard in Genoa was light (without cargo), waiting for a charter contract.
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2.2
Vessels
2.2.1 ULYSSE
© Pascal Bredel MarineTraffic.com
IMO Number Gross tonnage Net tonnage Vessel type Call sign MMSI Flag Port of registry Shipyard Date of delivery Length overall Length BP Moulded breadth Summer draught Deadweight Load displacement Light displacement Depth
: : : : : : : : : : : : : : : : : :
9142459 London 1969 17907 5372 Ro-Ro vessel TSMU 672248000 Tunisian La Goulette Schichau Seebeckwerft Germany 02/07/1997 161.5 m 146 m 25.80 m 6.018 m 5914 metric tons 14004 mt (1.025 t/m3) 8120 mt at main deck : 7.70 m - at accommodation deck 14.20 m
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Passenger capacity Garage capacity
: :
100 persons 128 trailers
The vessel is fitted with two radars, one X band (three centimetre wavelength more appropriate for coastal navigation due to a more accurate picture, but with a shorter range than a S band radar) and a S band (ten centimetre wavelength, more appropriate for offshore navigation with a better range). The X band radar was out of order as it had an unstable image. ULYSSE is managed by the Tunisian state company COTUNAV which owns six Ro-Ro vessels sailing on Tunisia-France and Tunisia-Italy routes. The vessel is subjected to an annual port state control. The last Paris MoU inspection had been carried out at Marseille on 25 October 2017 and eight deficiencies were recorded related to fire safety, lifesaving equipment operation and social aspect.
2.2.2 CSL VIRGINIA
Photo credit: Cyprus Sea Lines SA website
IMO Number Gross tonnage Net tonnage Vessel type MMSI Flag Port of registry
: : : : : : :
9289568 London 1969 54592 34532 Container Ship 636019009 Cyprus Limassol
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Shipyard Date of delivery Length overall Length BP Moulded breadth Summer draught Deadweight Load displacement Light displacement Capacity
: : : : : : : : : :
Hyundai Samho Heavy Industries Co.Ltd 02/06/2005 294.16 m 283.20 m 22.10 m 13.65 m 66644 mt 87832 mt (1.025 t/m3) 21189 mt 5039 TEU
CSL VIRGINIA is owned by Duraven Shipping Company Ltd of Cyprus and technically managed by Cyprus Sea Lines Co Ltd which also manages several container and bulk carrier ships.
The vessel had port state control inspections on a regular basis; few deficiencies had been identified. The last inspection carried out on 8 September 2018 at Genoa pointed out three deficiencies in the documentary field and social aspect (MLC certificate and hours of rest records).
2.3
Crews
2.3.1 ULYSSE
At the time of the accident, the crew was made of thirty-nine Tunisians eight of whom were members of the catering staff. Supernumerary officers had joined the ship in order to reinforce the crew for the ongoing annual inventory, carried out by par 6 auditors for a few days on board. The master was forty-one years old. He has been holding the first class captain diploma since 2003. He has been in a master position at COTUNAV since March 2016. He has joined ULYSSE since 24 September 2018. The officer of the watch, was twenty-nine years old. Non-permanent, he had a temporary contract, regularly renewed by COTUNAV. He has been on a sea-going service as a second mate at COTUNAV since July 2015. He has joined ULYSSE since 17 May 2018 (four months and
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three weeks aboard). He requested to be paid off one month before the accident. His relief had joined the vessel, however no date of discharge has been provided to him. Among the supernumerary officers temporarily on board to reinforce the crew for the inventory, was the relief of the officer of the watch who joined the vessel on 1st October. The look-out deckhand, was thirty-eight years old. Former fisherman, he has joined COTUNAV on 10 December 2009. He joined ULYSSE on 28 June, and has been on watch from 4.00 am to 8.00 am and from 4.00 pm to 8.00 pm for one month. He was the helmsman in charge of the wheel during manoeuvres. Tunisian sailors declared to have up to date medical visit certificates.
2.3.2 CSL VIRGINIA
The crew was made of twenty-four sailors, five of whom cadets, all Filipinos. The master, on watch at the time of the collision, was forty years old, he has been in sea-going service since 2003. He has been in a master position since 2013, and joined CSL VIRGINIA on February 2018 (nine months aboard). It was his first posting on board this vessel. The relief was imminent, as sea-going appointments are usually nine month long.
2.4
Marine casualty information
The accident took place in the north of cap Corse, at 11 nautical miles from the entrance of the cap Corse TSS precautionary area4 and at 16.5 nautical miles from the TSS entrance on the western route. The location of the accident is specifically on the Genoa - Corsica Channel route and at the edge of the cap Corse and Agriate marine nature park. CSL VIRGINIA was at anchor, starboard mooring line in the water, roughly heading west, 263° according to the data recorded by the VDR at the moment of the accident. ULYSSE made contact with CSL VIRGINIA on her starboard beam nearly perpendicularly at bays 23-25. As a consequence of the shock and the over pressure, the fuel-oil contained in the fuel tank 3 starboard was thrown in CSL VIRGINIA hold as well as on the bow of ULYSSE even reaching her bridge windows.
4
Precautionary area : convergence area of the vessels sailing in or out of the Traffic Separation Scheme (TSS)
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The tank emptied very quickly; in just a few minutes most of the fuel-oil contained in the fuel tank was discharged to the sea. CSL VIRGINIA at anchor
Limit of territorial waters
Chart credit: SHOM
2.5
Emergency response
After the accident, fuel-oil from a tank leaked to the sea. French and Italian vessels have been operated for towage and oil-pollution fight. RAMOGEPOL plan (contingency plan to fight marine accidental pollutions in the Mediterranean Sea) was activated together with the maritime aspect of Orsec plan. A pollution response boom had been deployed around the CSL VIRGINIA breach.
2.5.1 Freeing ULYSSE
On 8 October 2018, following the advice given by Abeilles salvage master, EEI (French navy assessment and emergency response team), masters of JASON and ABEILLE FLANDRE, three attempts had been made. ULYSSE « backed » but remained partly connected to CSL VIRGINIA.
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On 9 October 2018, new unsuccessful attempt. On 11 October 2018, separation at 9.30 pm (local time), without tugs help.
2.5.2 Pollution response means operated offshore
A significant number of marine counter pollution assets were operated, up to 41 vessels and 13 aircrafts were involved. On 7 October 2018, loading then departure of AILETTE and JASON - Sailing of three Italian dedicated assets. The use of dispersant was discarded because of the hydrocarbon type (heavy fuel oil). On 8 October 2018, beginning of the counter pollution fight involving JASON, AILETTE, the tug ALTAGNA, as well as for Italian means BONASSOLA, KORAL and NOS TAURUS in order to contain pollution and to recover it. On 9 October 2018, BREZZAMARE from EMSA joined the operation. On 11 October 2018, the tug RABLÉ joined the operation. Weather conditions were deteriorating, which was impacting the fighting conditions. On 12 October 2018, the Italian vessel UGO CASA joined the operation. On 13 October 2018, the tug CHAMBON BORA and Commando Kieffer (French navy Special Forces) drone joined the operation. On 14 October 2018, tugs TAAPE, VB CRAU and VB RHÔNE joined the operation. On 16 October 2018, first landing of tar balls on Var shores - progressive substitution of offshore means by coastal assets. Until 12 November 2018, fight in coastal area.
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3
Narrative
All hours in French local time, UTC + 2 Weather conditions (source Météo-France): Wind from 281° force 3 Sea state 3 (slight) Good visibility: 10 nautical miles Temperature of the air: 19°C Temperature of the sea: 18°C Sunrise at 7.26 am, dawn at 6.58 am. On 23 September 2018, CSL VIRGINIA sailed from Genoa, without any specific destination. She had been drifting in the south of Genoa, waiting for directions, for one day. On 24 September 2018, CSL VIRGINIA was ordered by her company to head to the north of cap Corse and cast anchor there. The anchoring position had been chosen by the company. On 25 September 2018 around 1.00 am, CSL VIRGINIA cast her starboard anchor and put 10 shackles in the water (that is 270 metres of chain). At position 43° 14.8' N / 009° 28.5' E, at about fifteen nautical miles north from cap Corse. She switched on her deck and anchor lights. The depth of water beneath the keel was about 100 to 120 m. On 25 September 2018 two hours after she was anchored, CSL VIRGINIA was called by cap Corse signal tower which questioned her about her intentions. CSL VIRGINIA answered that she was at anchor with no failure. At the beginning of the afternoon CSL VIRGINIA was contacted again and she informed that she was to stay at this position for an indefinite period. On 1st October 2018, CSL VIRGINIA paid out one more shackle owing to weather conditions. 11 shackles were in the water (about 302 metres of chain). She remained anchored at this position until the collision. The diameter of her swinging area was of about 1000 metres (length of the chain plus length of the vessel). On 7 October 2018, ULYSSE sailed from Genoa at 2.55 am. After having participated in the manoeuvre, the second mate, due to take the watch over at 4.00 am (time in use aboard UTC+1), retired to his cabin to rest for one hour. At 3.18 am, ULYSSE was full away, heading 161°. At 4.00 am, aboard CSL VIRGINIA, the master took over the watch.
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At 5.05 am, aboard ULYSSE, the second mate took over the watch (at this moment time on board ULYSSE was 4.05 am). At 5.10 am, on board ULYSSE, the second mate was joined by his deckhand who was a few minutes late. At 5.54 am, on board ULYSSE, the S band radar showed CSL VIRGINIA echo. During his watch the officer was walking back and forth on the bridge, checking his mobile phone, searching a mobile phone network. CSL VIRGINIA radar echo
At 6.12 am, as she was approaching French territorial waters, ULYSSE was called by cap Corse signal tower. The officer of the watch answered promptly. Around 6.25 am, ULYSSE helmsman left the bridge with the permission of the officer of the watch who, without a look back, confirmed him that he could go by a hand signal. At this instant, the officer of the watch was on the mobile phone, kept busy with a personal communication. He was sitting on the starboard armchair, facing the ECDIS and the X band radar which was out of order. Around 6.45 am, the officer on board ULYSSE thought he had noticed CSL VIRGINIA on the ECDIS display: he reported seeing CSL VIRGINIA heading west, but didn't notice a zero speed.
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Around 6.50 am, on board CSL VIRGINIA, the master was making a personal call on his mobile phone. The X band radar was on stand-by. The true heading (gyro-compass) recorded by CSL VIRGINIA VDR was almost steady and close to 262°. At 6.53 am, on board ULYSSE the radar acquired automatically CSL VIRGINIA echo. The CPA was zero. A « collision warning » was displayed. CSL VIRGINIA AIS data
CSL VIRGINIA echo
Collision Warning
Around 6.55 am, ULYSSE officer of the watch went to the chart table, located aft of the bridge on starboard behind closed and opaque curtains, to fill the logbook and to plot a GPS point on the marine chart, as every hour. Around 7.00 am, CSL VIRGINIA master was filling the position logbook which was found on a pulpit located on the port side of the bridge. At 7.02.46 am, ULYSSE collided CSL VIRGINIA on her port beam almost perpendicularly amidships, at position 43°14'.9 N / 9°28'.7 E.
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At 7.04.32 am, CSL VIRGINIA master switched on the X band radar (which was on stand-by), then sounded the general alarm. At 7.05.05 am, VHF channel 16 call from ULYSSE to CSL VIRGINIA. The masters exchanged on their respective situation. ULYSSE master decided not to undertake any attempt and to remain connected in order to limit fuel-oil leaks. On board both vessels, the masters mustered the crew and gave orders for a damage assessment. CSL VIRGINIA chief engineer went to the engine control room in order to empty the damaged fuel tank, he set the circuit for a gravity transfer, but the breach was very important, he saw the level of the fuel tank dropping quickly. Only a small quantity, a few dozens of cubic metres, were transferred.
Credit : préfecture maritime de la Méditerranée
On the following days, several separation attempts with the assistance of tugs were unsuccessful. The separation was only partial. Thanks to the swell, as a result of the continuous movements, both vessels eventually separated on 11 October around 9.45 pm without external intervention. Both vessels remained afloat. The vessel ULYSSE, whose bow was damaged above the water line, sailed back to Tunisia on the day after without assistance.
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ULYSSE (credit BEAmer)
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CSL VIRGINIA (credit BEAmer)
On 23 October at 6.30 pm, the vessel CSL VIRGINIA sailed from the north of cap Corse, bound at first to the port of Constanta (Romani), escorted by ABEILLE FLANDRE, until she left waters under French jurisdiction. The vessel changed destination and flag during the voyage; she passed under the Liberian flag, she was renamed VIRGIN STAR and sailed to a shipyard in Turkey where she arrived on 2 November.
4
Analysis
The method selected for this analysis is the method recommended by IMO A28 / Res 1075 «guidelines to assist investigators in the implementation of the casualty investigation code (Resolution MSC 255(84)) ».
BEAmer
has at first drawn the sequence of events which caused the casualty namely:
The collision
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In this sequence, the so-called disrupting events (causal events resulting in the casualty and assessed as significant) have been identified. These events have been analysed with regard to human, organizational, environmental, and technical factors in order to identify factors having contributed to their occurrence or having contributed to worsen their consequences. Among these factors, those raising safety issues presenting risks for which existing defences were assessed inadequate or missing have been pointed out (contributing factors). Factors without influence on the course of events have been disregarded, and only those which could, to an appreciable extend, have had an impact on the course of events have been retained.
4.1
The collision
4.1.1 Look-out on board the vessels ULYSSE
On board ULYSSE the watch is carried out by two crewmembers at night, a deckhand for the visual look-out and an officer who carries out also a visual look-out supplemented by navigational aids, specifically two radars, including the X band, out of order, which was switched off. AIS is interfaced with radars as well as ECDIS. The radar on the port side is the S band, recently replaced. The deckhand usually stands close to the windows on the port side while the officer is often seated on an armchair on the starboard side. The X band radar, switched off, and the ECDIS display are easily visible in front of the officer. On the other hand, he cannot see, from his seated position, the S band radar on the port side. As the armchair is low he cannot, from this position, carry out an efficient visual look-out. This too low armchair is poorly appropriate for watch keeping if used on a regular basis. One of the two pairs of binoculars is defective. The officer of the watch was not aware of this fact; therefore the visual look-out seems to be very seldom carried out by the latter.
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Officer of the watch armchair on Std
Out of order radar
Radar in operation on port
The S band radar is fitted with audible and visual alarms. These alarm settings can be modified only by a master's decision, according to a procedure proper to this vessel. However the password locking changes to settings is known by everyone since the radar has been changed, and the audible alarm was inhibited. It appears that the radar settings management procedure was not mastered by the officers. During the watch from 4.00 to 8.00 am the helmsman usually carries out a patrol in the garages; the patrol lasts between 35 to 45 minutes depending on the amount of cargo aboard. From the moment the helmsman is gone on a patrol, the officer is alone on the bridge to keep the watch. At 6.25 am the helmsman informed the officer that he was going down for the patrol. CSL VIRGINIA has not been detected by the helmsman. The officer was at this moment seated in the starboard armchair, on a personal mobile phone call; by a hand signal, he gestured to the helmsman that he could go for the safety patrol. There was no exchange about the surface situation between them. At this moment the officer was alone in front of a switched off radar, unable to see the sea-line and fully occupied on his phone. Thereafter, he has continued to use his phone to « chat », during an indefinite time. Actually, the only watch he could carry out seated there was to monitor the ECDIS with AIS data.
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According to SOLAS regulation, the bridge is fitted with a Bridge Navigational Watch Alarm System (BNWAS - widely known as « dead man »). SOLAS convention provides, SOLAS V-19, «The bridge navigational watch alarm system shall be in operation whenever the ship is underway at sea». However it was not activated, even when the officer of the watch was alone on the bridge. CSL VIRGINIA had her deck lights lit and had been detected by the radar more than one hour before the accident. She was therefore easily detectable both visually and on radar. She was also displayed on the ECDIS. Before the helmsman went for his safety patrol, the surface situation had not been subjected to a visual or radar assessment by the officer. The good practice is that the helmsman can leave the bridge only if the situation is clear, and after an exchange, even brief, with the officer of the watch. There was no conversation during the watch between the helmsman and the officer. Aboard vessels from other companies, the patrol is often carried out at the watchkeeping relief. This allows to reduce the duration of watch carried out by the officer of the watch alone, the helmsman taking up or going off carrying the patrol out. At 6.45 am the officer of the watch believed to have noted the presence of CSL VIRGINIA on the ECDIS, heading west, and as the vessel was crossing right ahead, he considered that she was not a danger, because he did not notice that CSL VIRGINIA speed was zero. CSL VIRGINIA course recorded by the VDR was about 262° i.e. perpendicular to ULYSSE course. CSL VIRGINIA course on the ground displayed on ULYSSE radar was 337° (COG). The course on the ground indicates the reel displacement of the vessel over the ground. At anchor the vessel swings around a fix point (the anchor position) by the effects of wind and current, this value is not relevant if it is measured in a short period of time. Such a course on the ground, if it had been observed, should have led the officer to question himself about his interpretation of the information got from ECDIS and its consistency. CSL VIRGINIA was then a passing ship heading for collision. In summary, one of the pieces of information indicates a crossing vessel, another indicates a passing vessel, CSL VIRGINIA speed being zero in any case.
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The use of AIS data solely for collision avoidance is not appropriate, as stipulated in the international maritime organisation resolution A.1106 (29), in paragraphs 40 to 44. It is specified in particular: « 40 The potential of AIS as an assistance for anti-collision device is recognized and AIS may be recommended as such a device in due time. 41 Nevertheless, AIS information may merely be used to assist in collision avoidance decision-making. When using the AIS in the ship-to-ship mode for anti-collision purposes, the following cautionary points should be borne in mind: .1 .. AIS is an additional source of navigational information. It does not replace, but supports, navigational systems such as radar target-tracking and VTS; and .2 the use of AIS does not negate the responsibility of the OOW to comply at all times with the Collision Regulations, particularly rule 7 when determining whether risk of collisions exists. 42 The user should not rely on AIS as the sole information system, but should make use of all safetyrelevant information available. » The officer of the watch declared he went to the chart table around 7.00 am as every hour, on the hour, to plot the GPS position. When the vessel gets closer to the coast, the officer indicates to take position fixes every half-hours. At this moment, CSL VIRGINIA was very close. Looking out, it was impossible not to see her at a glance, right ahead, with her deck lights lit. The chart table is surrounded by screening curtains in order to avoid disturbing the watch; at night, curtain closed, from the chart table, the officer is "visually" cut off from the outside world. Before the shock between both vessels, the VDR recording shows no manoeuvre attempt. There had been no engine speed change, no course alteration or particular order to the wheel to try to avoid collision. This leads to the conclusion that CSL VIRGINIA had been detected by the officer only at the moment of the shock or maybe only seconds before when he left the chart table. With a good visibility and navigational aids, particularly the radar, the officer had well in time a full set of information to avoid collision. From this analysis, it emerges that the look-out had been insufficient even non-existent during a long period before the collision. The officer has been aboard for almost five months. The officers with open-ended contracts
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have maximum sea-going periods of three months. For untenured sailors, as in the case of this officer, the maximum length is increased up to six months. Considering the pace on board ferries, and the lack of information about his paid-off date, family tensions could have led him to complacency and cause a lack of involvement in his function during watch. It is not excluded that the officer fell asleep at the time of the accident, which could have provided a very plausible explanation for the lack of look-out. However, it is important to note that his testimony, the only available information about his activity at the bridge when he was alone, indicates the opposite: The officer testified that he stayed awake. In any case, whether through the use of the phone, drowsiness or due to another factor, a proper look-out had not been maintained for a significant period of time. In the sequence of events leading to the accident, the failure to keep the look-out on board ULYSSE is the disrupting event. The use of the phone together with the failure to observe the procedures regarding the radar alarm settings and the use of the « dead man » are the contributing factors. To a lesser extent, the presence of a radar out of order and an armchair so low that it is impossible to see the sea-line are also contributing factors.
CSL VIRGINIA
As the vessel was at anchor, solely one officer was keeping the watch (the master was on watch, alone, at the time of the contact). At anchor, anchor lights were lit. Moreover, according to testimonies, deck lights were also lit, as is customary, in order to make the vessel more visible by far and to be identified as not being underway. At night, deck lights cause a light pollution which impede the visual look-out from the bridge of the vessel that has lit them. It is sometimes more convenient to use the radar for the surface situation assessment. The master has reported that he was using the X band radar. At the moment of the accident this radar was on stand-by, it had been switched on two minutes after the contact. The radar had been set with a one nautical mile guard zone. When a vessel enters this zone, a two beeps audible warning is triggered. But as the radar was on stand-by, no warning had been sounded.
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Regarding the speed of crossing vessels, the investigators assess that during these 13 days at anchor CSL VIRGINIA faced several close-quarters situations, see below extracts of AIS tracks of vessels reported by IMS from EMSA. Thus vessels passed by CSL VIRGINIA at less than 0.3 nautical mile. As soon as 26 September, for example, two vessels transiting sailed at about 0.2 nautical mile and 0.4 nautical mile. COLREG convention stipulates in its rule 10 - traffic separation scheme, « g) A vessel shall as far as practicable avoid anchoring in a traffic separation scheme or in areas near its terminations. » Currently there is no precise definition of « areas near its terminations », this assessment has to be carried out considering many factors. These include, but are not limited to: weather conditions, TSS layout, bottoms, approaches, length of chain... In this case CSL VIRGINIA was 15 miles away the entrance of the TSS which doesn't appear to be so close, but the TSS has created a phenomenon of convergence of the navigation routes passing through the Corsica TSS and consequently concentrated the density of the vessels in the sector of the anchorage of CSL VIRGINIA. On the eve of the accident, CARTHAGE, another vessel from the COTUNAV Company altered course to avoid her, even so sailing very close from CSL VIRGINIA (about 0.2 nautical mile).
Retrival of AIS tracks around CSL VIRGINIA while at anchor. The central part represents CSL VIRGINIA successive positions, swinging on her line, approximate passing distances are labelled in nautical mile.
Source : European Maritime Safety Agency
CSL VIRGINIA at anchor
25 September 2018
26 September 2018
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28 September 2018
29 September 2018
30 September 2018
5 October 2018 6 October 2018
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These close-quarters situations which have led some vessels to manoeuvre, should have warned CSL VIRGINIA on the particular position of her anchoring point and led, either to carry out a more proper look-out, or to consider moving to another anchorage. However these potentially dangerous close-quarters situations have not been noticed by CSL VIRGINIA master. A dozen minutes before the contact, the master was making a personal call on his mobile phone. He was then on the port side of the bridge, near the pulpit where is the logbook on which the positions are written every hour, at the hour. ULYSSE was heading for collision on starboard. ULYSSE was difficult to be visually detected very early because of the light pollution combined with the position of the master, and the lack of attention of the latter. In the meantime the X band radar was on stand-by. The master told he saw ULYSSE heading to him in the final instants before the shock, too late to try anything; no action had been undertaken (VHF call, flashing light, fog horn...) before the collision. The look-out was inappropriate on board CSL VIRGINIA considering the local traffic in this offshore area. Vessels were proceeding in the vicinity of CSL VIRGINIA at full sea speed, contrary to the traffic in a listed anchorage where vessels manoeuvre with caution, at reduced speed, to enter or depart it. CSL VIRGINIA was not in position to carry out an avoidance manoeuvre, as a 30 minute notice was necessary before starting the machine and as eleven shackles of chain were to heave up, needing about 45 minutes. Nevertheless, the surface situation watch could help to detect dangerous vessel in order to warn the latter and urge her to give way.
Regulation
Regarding the look-out on board vessels, the international regulations for preventing collisions at sea (COLREG 72), sets out the following obligations: Rule 5 « Every vessel shall at all times maintain a proper look-out by sight and hearing as well as by all available means appropriate in the prevailing circumstances and conditions so as to make a full appraisal of the situation and or the risk of collision. »
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Neither vessel applied this rule. Aboard ULYSSE there had been neither visual look-out nor radar watch by the officer of the watch for approximately one hour. Aboard CSL VIRGINIA the radar watch was lacking even though the efficiency of the visual look-out was impaired by the brightness of the deck lights. Rule 7 « a) Every vessel shall use all available means appropriate to the prevailing circumstances and conditions to determine if risk of collision exists. If there is any doubt such risk shall be deemed to exist. b) Proper use shall be made of radar equipment if fitted and operational, including long-range scanning to obtain early warning of risk of collision and radar plotting or equivalent systematic observations of detected objects. c) Assumptions shall not be made on the basis of scanty information, especially scanty radar information. d) In determining if risk of collision exists the following considerations shall be among those taken into account: 1) Such risk shall be deemed to exist if the compass bearing of an approaching vessel does not appreciably change. 2) Such risk may sometimes exist even when an appreciable bearing change is evident, particularly when approaching a very large vessel or a tow or when approaching a vessel at close range. » Neither vessel detected the other despite navigational aids available on board both vessels; as articles 7a) and 7b) were not applied as it should before the contact. The vessel at anchor is not exempted from carrying out a look-out, even if her action to prevent a collision is limited to try to warn the other vessel. COLREG convention does not give vessel at anchor a stand-on vessel status.
4.1.2 Risk assessment ULYSSE
ULYSSE is operated on a regular round trip service. The officer of the watch, on board for more than four months, was certainly caught by routine. So far, he has never passed a vessel at anchor on his usual route, the presence of CSL VIRGINIA at anchor at this location was unanticipated.
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He had underestimated the risk as he did not carry out a regular monitoring of the situation, visually or using the radar. This underestimation of the risk led him to let the deckhand go without check or exchange with the latter. Likewise he neglected the look-out in favour of the search for a mobile phone network, then calls and chats during his watchkeeping period. He was seated in an armchair too low for the visual look-out, in front of a switched-off radar. He had a too short look on the ECDIS and drawn an incorrect conclusion based on AIS data used incomprehensively. The officer said that he did not have a tiring evening or overindulge on the eve of the accident. The morning in Genoa has been busy: on the previous day he rested from 8.00 am to 10.30 am. He had to receive food and to deal with police and customs formalities in the morning from around 10.30 am to 12.00 am. Then he had fourteen consecutive hours of rest: He has been at rest until the call for stations a little before the departure of the ship, around 2.00 am. After lunch, he slept from 1.00 to 6.00 pm, then had dinner and enjoyed his free time for entertainment. He was feeling a general tiredness. He declared he wasn't asleep during the time he was alone on the bridge. However, it is not to exclude that he may have been more or less in a state of drowsiness. He participated in the departure manoeuvre and joined his cabin around 3.00 am. He had been resting without sleeping for one hour before getting up and taking over the watch at 4.00 am (ULYSSE time, 5.00 for the narrative in UTC+2). At the moment of the accident he had been sleeping for 3 plus 5 hours during the last twenty-four hours. The accumulated fatigue due to the length of the sea-going period, and the influence of routine, have certainly contributed to impair his judgement regarding surrounding risks during this watch. Family and personal worries could have also exacerbate the problem. The above elements lead to the conclusion that the Company (Head Office and ship) safety culture is inadequate. The conditions were therefore met to make possible a collision with a vessel riding at anchor. The root cause of the accident is thus related to the Company (Head Office and ship) safety culture associated with the officer of the watch individual factors.
CSL VIRGINIA
On 24 Septembre, CSL VIRGINIA was ordered by the company to go and cast anchor in the north of cap Corse. The location of the anchoring point had been designated by the company without consultation with the master. The anchoring position was not illegal.
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The master did not call into question this choice of the anchoring point. According to the records of cap Corse signal tower, it was the first time that a vessel has been observed anchored at this position. Located in the international waters, at about fifteen nautical miles from cap Corse, the anchorage is over a few mile wide little plateau. The depth increases sharply on the edge of the plateau. Even if the Company indicates that the master had significant experience of anchoring in deep water, the depth of around hundred metres and more is quite important for an anchorage. The plateau is aligned with the entrance of the Corse Channel Traffic Separation Scheme, on its western side, particularly on the ferries route and in the vicinity of east-west routes. This zone is also a fishing area. Regarding the practicality, it is far from any possibility to get supplies. Yet at about thirty nautical miles was a safe and sheltered anchorage. Sailing two more hours to get to a safer, sheltered anchorage, where to stay for a long period and allowing to get supplies if necessary, should not appear to be a significant constraint. When there is an opportunity to make easily a better choice, it is not usual to cast anchor without any shelter over bottoms which require to put such a large length of chain in the water. Moreover, should the anchor drag, this one could be dredged toward deeper area where anchoring becomes impossible. The risk to lose the mooring line is not negligible, this one hanging off could be pulled down by the weight towards the depths. The location could be considered as interesting as the vessel could sail in any direction with no co-ordination constraint from a state or risk of state control; on the other hand, based on a strictly nautical analysis, it is highly unlikely that an experienced master would choose an anchoring point like the one designated to CSL VIRGINIA by her company. Given that the vessel is not manoeuvrable, the watch at anchor is usually less sustained than during navigation, this is particularly true in an anchorage identified as such. The good holding of the anchor with an eleven shackle line reassured the crew and a sense of confidence grew up during these 13 days. However, in this deep sea area, the nautical risk analysis related to vessels underway was lacking or was perfectible, at first for the choice of the anchoring location, then in the monitoring of the surface situation, considering the location. The anchoring is regulated by two ISM5 sheets aboard the vessel. The procedure (two check lists) requires in particular to keep an appropriate look-out and to monitor strictly the approach of
5
International Safety Management
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other vessels. After 13 days at anchor, and despite large vessels passing in close quarters at full sea speed, the look-out was not given special attention. The ISM procedure was not applied during the watch in the course of which the collision occurred. The staff did not realize that the vessels sailing in close proximity at full sea speed would constitute a potential safety hazard to be monitored with attention. They did not adjust their practice or call into question the anchoring position. About the use of the radar, on one hand it was on stand-by. On the other hand, the guard zone was too narrow: a one nautical mile guard zone does not give adequate time for the officer of the watch to react. A one nautical mile guard zone gives only three minutes to assess the situation of a vessel travelling at a speed of nineteen knots as ULYSSE to try to make contact and warn her. Such a guard zone appears to be inappropriate to give time to warn a vessel travelling at full sea speed that could be potentially dangerous. A vessel at anchor displaying proper anchor lights and shapes, expects passing vessels to watch out for her as good seamanship dictates. Given the fact that during 13 days at anchor vessels passed at short distance from 0.2 to 0.4 NM, it is assumed, that a proper look-out should have led to raise dangerously approaching vessels awareness. An attempt to raise the other vessel awareness was the only possibility, without any guarantee of reaction. As 30 to 45 minutes were necessary to weight anchor and get underway, there was no loophole for collision avoidance with a vessel approaching at 19 knots. The under-estimation of the risk of collision at this anchorage is a contributing factor of the accident.
Signal tower and MRCC
CSL VIRGINIA cast anchor without informing the signal tower or the MRCC beforehand, as it is a deep sea anchorage not subject to authorisation. The signal house detected CSL VIRGINIA motionless and contacted her soon after she was at anchor. The MRCC had no objection to the anchorage. Actually, the vessel was outside the French territorial waters limited to 12 nautical miles, in a zone without specific international regulation. The traffic separation scheme entrance precautionary area is located further south.
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In addition, the MRCC is not in charge of any radar monitoring mission; it has, by the way, no equipment or staff dedicated to this mission. The Corsica Channel TSS is not a VTS6. In other words, the MRCC does not stand in for a VTS, there is no systematized monitoring of its area of responsibility. About the position of the anchorage itself, the signal house staff was facing an unprecedented situation. As far as he knows, this position of anchoring has never been used. Without any hindsight and without a regulatory framework about this position outside the territorial waters, the attention of CSL VIRGINIA was not drawn to the peculiarity of her choice of an anchorage. She was not invited to take precautions. Once at anchor, CSL VIRGINIA was not subjected to a particular monitoring. Forty-five minutes before the collision, the signal house made contact with ULYSSE, the answer of the officer of the watch had been fast and normal, with no clue of a lack of look-out which could have drawn the attention of the signal house staff. No nautical information was transmitted to ULYSSE concerning CSL VIRGINIA on the occasion of this routine VHF exchange. At the moment of the collision, cap Corse signal house was monitoring and in communication via VHF with another vessel that was sailing in the TSS zone.
5
Conclusions
The collision on 7 October at 7.02 am is the consequence of a major lack of look-out on board ULYSSE, combined with legal but an unwise anchoring position and a lack of attentive traffic monitoring from CSL VIRGINIA. On board ULYSSE, the lack of look-out was caused by the lack of involvement of the officer of the watch before the collision. The lack of look-out could not be compensated by the helmsman, gone for a patrol and thus absent from the bridge. In the watch position taken, seated on starboard facing an out-of-order radar, located just in front of him, the officer of the watch was deprived of information enabling him to assess the situation.
6
VTS: Vessel Trafic Services - a service implemented by a Competent Authority, designed to improve the safety and efficiency of vessel traffic and to protect the environment. The service should have the capability to interact with the traffic and to respond to traffic situations developing in the VTS area. IMO resolution A.857(20).
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However, the use of the other radar on port side, switched on, would have provided all the data for him to assess a critical situation. Moreover his watch position, too low, did not allow him to see correctly the sea-line. There was little or no enforcement of watch related procedures aboard both vessels. COLREG convention was not properly implemented. The human component was the major factor causing the accident, with a lack of appreciation of the responsibilities related to the officer of the watch position. A boredom factor, related to the length of sea-going periods, has certainly had an effect on the involvement of the officers of the watch on board both vessels. On board both vessels, the use of mobile phone for personal concerns took precedence over the officer of the watch duties, leading to a lack of surface situation monitoring. In addition, as it was a deep sea area, no information was delivered to the vessels transiting in the vicinity of the unusual point of mooring chosen by CSL VIRGINIA.
6
1.
Learnings
2019-E-09: The use of a mobile phone can fully monopolise the officer of the watch and turn him away from the look-out.
2.
2019-E-10: COLREG convention does not exempt from organising the look-out at anchor.
3.
2019-E-11: Checking solely AIS data is not appropriate for collision avoidance, its conditions of use are clearly stated in IMO A1106 (29) resolution.
4.
2019-E-12: A non-regulated and not prohibited deep-sea anchorage is not for all that convenient. Actually, maritime routes and traffic should be taken into account for the choice of a deep-sea anchorage outside the regulated areas, particularly in the vicinity of a traffic separation scheme.
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Recommendations
BEAmer, Cyprus Republic Marine Accident and Incident Investigation Committee (MAIC), Direzione Generale per le Investigationi Ferroviare e Maritime (Marine Casualty Investigation Central Board (IT/MCIB), and bureau d'enquête et des accidents tunisien (Tunisian accident and investigation board) recommend: To ULYSSE owner: 1. 2019-R-06: to reconsider, in the light of the experience feedback on this accident, the procedures of the safety management system (ISM code) related to the bridge look-out on board vessels of the company. 2. 3. 2019-R-07: to enforce the procedures related to the use of radar alarms and BNWAS. 2019-R-08: to establish the conditions under which the safety patrol can be carried out by the helmsman.
To CSL VIRGINIA owner: 4. 2019-R-09: to establish a feedback in the light of this event, and to inform the vessels of the fleet and the flag authorities of the conclusions of the study. 5. 2019-R-10: to leave to masters' appreciation, in liaison with the company, the choice of the anchoring position (implementing the vessel procedure « Anchoring & anchor watch checklist n°05 »).
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Annexe A Appendix A
Liste des abréviations Abbreviation list
AESM / EMSA : Agence Européenne pour la Sécurité Maritime / European Maritime Safety Agency AIS BEAmer
: Automatic Identification System / Système d'identification automatique : Bureau d'enquêtes sur les événements de mer French marine casualty investigation bureau : Bridge Navigational Watch Alarm System / Système d'alarme de quart à la passerelle : Course over Ground / Route fond : Collision Regulations / Règlement international pour prévenir les abordages en mer : Dispositif de Séparation du Trafic / Traffic Separation Scheme : Electronic Charts Display Information System / Système de visualisation des cartes électroniques et d'information. : Équivalent Vingt Pieds / Twenty Foot Equivalent Unit : International Safety Management / Code international de gestion de la sécurité : Memorandum of Understanding : Organisation Maritime Internationale / International Maritime Organization : Safety Of Life At Sea / Convention internationale sur la Sauvegarde de la vie humaine en mer : Voyage Data Recorder / Enregistreur de Données du Voyage : Vessel Traffic Services / Service du Trafic Maritime
BNWAS
COG COLREG DST / TSS ECDIS
EVP / TEU ISM MoU OMI / IMO SOLAS
VDR VTS / STM
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Annexe / Appendix B Décision d'enquête / Investigation decision
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Annexe C Appendix C
Navires Vessels
ULYSSE (credit BEAmer)
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CSL VIRGINIA (credit BEAmer)
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Ministère de la Transition écologique et solidaire
Bureau d'enquêtes sur les évènements de mer
Arche sud - 92055 La Défense cedex téléphone : +33 (0) 1 40 81 38 24 bea-mer@developpement-durable.gouv.fr www.bea-mer.developpement-durable.gouv.fr