Rapport d'enquête technique sur l'accostage brutal d'un train en gare de Versailles Rive Gauche survenu le 13 août 2007

Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre
Auteur secondaire
Résumé
Le lundi 13 août 2007 à 10h27, un train Transilien assurant la mission Paris-Invalides / Versailles Rive Gauche percute le heurtoir de la voie 3 de la gare de Versailles Rive Gauche à la vitesse de 6 km/h. Aucun blessé n'est à déplorer, ni parmi les voyageurs, ni pour le conducteur ou d'autres agents SNCF. L'accident a causé des dégâts matériels aux installations fixes et au matériel roulant.
Editeur
BEATT
Descripteur Urbamet
accident ; sécurité ; train ; trafic de voyageurs ; transport de personnes ; ACCOSTAGE
Descripteur écoplanete
collision
Thème
Transports
Texte intégral
BEA-TT Bureau d'Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre les rapports Rapport d'enquête technique sur l'accostage brutal du train 141 280 en gare de Versailles Rive Gauche survenu le 13 août 2007 mars 2008 Conseil Général des Ponts et Chaussées Le 28 mars 2008 Bureau d'Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre Affaire n°BEATT-2007-013 Rapport d'enquête technique sur l'accostage brutal du train 141 280 en gare de Versailles Rive Gauche survenu le 13 août 2007 1 Bordereau documentaire Organisme (s) commanditaire (s) : Ministère de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement durables ; MEDAD Organisme (s) auteur (s) : Bureau d'Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre ; BEA-TT Titre du document : rapport d'enquête technique sur l'accostage brutal du train 141 280 en gare de Versailles Rive Gauche survenu le 13 août 2007 N°ISRN : EQ-BEATT--08-2--FR Proposition de mots-clés : transport ferroviaire, heurtoir, hypovigilance 2 Avertissement L'enquête technique faisant l'objet du présent rapport est réalisée dans le cadre du titre III de la loi n°2002-3 du 3 janvier 2002 et du décret n°2004-85 du 26 janvier 2004, relatifs aux enquêtes techniques après accident ou incident de transport terrestre. Cette enquête a pour seul objet de prévenir de futurs accidents, en déterminant les circonstances et les causes de l'évènement analysé et en établissant les recommandations de sécurité utiles. Elle ne vise pas à déterminer des responsabilités. 3 Sommaire Glossaire...................................................................................................... 7 Résumé........................................................................................................ 9 1- Engagement de l'enquête.....................................................................11 2- Constats immédiats et engagement de l'enquête............................... 13 2.1- Circonstances de l'accident.............................................................................. 13 2.2- Secours............................................................................................................. 13 2.3- Pertes humaines, personnes blessées, dégâts matériels................................... 13 2.4- Conséquences exploitation.............................................................................. 13 2.5- Organisation de l'enquête.................................................................................14 3- Eléments de contexte............................................................................15 3.1- La gare de Versailles Rive Gauche..................................................................15 3.2- Le matériel roulant Z2N...................................................................................15 3.2.1- Les systèmes de sécurité du matériel roulant..................................................................15 3.2.2- Le système de freinage des rames Z2N...........................................................................15 3.3- Le conducteur...................................................................................................16 3.3.1- La carrière du conducteur............................................................................................... 16 3.3.2- Journées de service assurées les 12 et 13 août par le conducteur................................... 16 4- Compte-rendu des investigations........................................................19 4.1- Déclarations du conducteur............................................................................. 19 4.2- Constatations médicales...................................................................................19 4.3- Analyse des enregistrements............................................................................19 4.4- Etat de la rame après le choc............................................................................20 4.5- Etat de la commande du train en cabine de conduite.......................................21 4.6- Fonctionnement du frein de la rame................................................................ 21 4.7- Enregistrement de la vidéosurveillance........................................................... 22 4.8- Témoignage du conducteur attendant en gare de Versailles Rive Gauche..... 22 4.9- Etats de service du conducteur........................................................................ 22 4.10- Avis de l'encadrement de proximité du conducteur.......................................24 4.11- Avis du médecin d'établissement...................................................................24 4.12- Le foyer des roulants de Versailles Rive Gauche..........................................24 4.13- Mesures prises à la suite de l'accident........................................................... 25 5- Compte-rendu final de la chaîne des évènements............................. 27 6- Analyse et orientations préventives.................................................... 29 5 6.1- La défaillance humaine.................................................................................... 29 6.2- Atténuation des conséquences d'un choc contre le heurtoir............................ 29 7- Conclusions........................................................................................... 31 7.1- Identification des causes et facteurs ayant concouru à l'accident....................31 7.1.1- Cause directe...................................................................................................................31 7.1.2- Facteurs ayant influencé la gravité de l'accident.............................................................31 7.2- Rappel des recommandations.......................................................................... 31 ANNEXES................................................................................................. 33 Annexe 1 : Décision d'ouverture d'enquête.............................................................35 Annexe 2 : La ligne C sur le parcours Paris-Invalides ­ Versailles Rive Gauche..36 Annexe 3 : Choc contre le heurtoir de la voie 3..................................................... 37 Annexe 4 : Le bogie avant de la motrice 8912 repose sur le quai.......................... 38 Annexe 5 : Pupitre de conduite Z8912....................................................................39 6 Glossaire KVB (contrôle de vitesse par balise) : système de contrôle de vitesse des trains devant garantir l'arrêt des circulations ferroviaires avant les signaux d'arrêt fermés (ou en tout état de cause avant le point protégé) et devant garantir le respect des vitesses limites permanentes ou temporaires imposées par la signalisation ou par le livret de la marche des trains. 7 Résumé Le lundi 13 août 2007 à 10h27, le train Transilien n° 141 280 assurant la mission ParisInvalides / Versailles Rive Gauche percute le heurtoir de la voie 3 de la gare de Versailles Rive Gauche à la vitesse de 6 km/h. Aucun blessé n'est à déplorer, ni parmi les voyageurs, ni pour le conducteur ou d'autres agents SNCF. L'accident a causé des dégâts matériels aux installations fixes et au matériel roulant. Alors que le conducteur effectue la séquence de ralentissement de son train pour l'arrivée en gare de Versailles Rive Gauche, son attention est inhibée par deux endormissements qui lui font perdre la maîtrise de sa conduite. Le conducteur ne peut empêcher son train de percuter le heurtoir de fond de voie. La cause directe de cet accident apparaît être l'endormissement irrépressible du conducteur au moment de l'accostage du train. Cette cause laisse supposer l'existence d'une dette de sommeil la nuit précédant la journée de service considérée ; l'origine de cette dette de sommeil n'est pas établie avec certitude. L'analyse de cet évènement conduit à renouveler deux recommandations déjà formulées dans un rapport précédent du BEA-TT, relativement au matériel roulant (seuil de vitesse de déblocage des portes des rames Z2N) et à l'infrastructure (étude d'un système d'amortissement des trains qui viendraient heurter le fond des voies en impasse). 9 1- Engagement de l'enquête Le lundi 13 août 2007 à 10h27, le train Transilien n° 141 280 assurant la mission ParisInvalides / Versailles Rive Gauche percute le heurtoir de la voie 3 de la gare de Versailles Rive Gauche à la vitesse de 6 km/h.. Aucun blessé n'est à déplorer, ni parmi les voyageurs, ni pour le conducteur ou d'autres agents SNCF. L'accident a causé des dégâts matériels aux installations fixes et au matériel roulant. L'accident aurait pu être grave dans des circonstances légèrement différentes, ce qui a conduit à une décision d'engagement d'une enquête technique (annexe 1) par le directeur du BEA-TT, conformément à l'article 19-2 de la directive européenne 2004/49 CE. L'enquête technique est réalisée dans le cadre défini par la loi n° 2002-3 du 3 janvier 2002 et le décret n° 2004-85 du 26 janvier 2004. 11 2- Constats immédiats et engagement de l'enquête 2.1- Circonstances de l'accident Le train 141 280 assure la mission Paris-Invalides (09h56) / Versailles Rive Gauche (10h27) le lundi 13 août 2007. Cette mission (annexe 2) comporte dix gares intermédiaires et se termine à Versailles Rive Gauche qui est une gare en cul-de-sac. Ce train est constitué d'une rame de deux éléments automoteurs à deux niveaux (type « Z2N »), gérée et maintenue par l'unité de production Matériel des Ardoines (appartenant à l'Etablissement Industriel de Maintenance du Matériel de Paris Rive Gauche). Le train 141 280 part de son origine Paris-Invalides avec deux minutes de retard mais, dès le départ Champ de Mars, le retard est résorbé. L'ensemble des arrêts de la mission est effectué correctement, y compris le dernier arrêt à Porchefontaine, si bien que le train est en mesure d'arriver à son terminus Versailles Rive Gauche à l'heure, soit 10h27. L'entrée en gare s'effectue en respectant la séquence de ralentissement réglementaire, mais au lieu d'effectuer le freinage final pour assurer le dernier arrêt, le train continue de rouler et vient percuter le heurtoir de la voie 3 à une vitesse approximative de 6 km/h. Le heurtoir de cette voie 3, constitué d'un assemblage triangulaire de barres supportant des tampons, bascule en arrière et soulève l'avant de la motrice qui est déviée de sa trajectoire rectiligne vers la droite et vient terminer sa course, en reposant les essieux du bogie avant de la motrice sur le bitume du quai, tordant les panneaux d'information positionnés en bout de quai (photos des annexes 3 et 4). Cette décélération finale du train sur environ deux mètres peut être assimilée à un arrêt en douceur pour lequel les voyageurs ne ressentent aucun effet. L'examen de la bande d'enregistrement du système de vidéosurveillance montre que le train arrive à quai portes fermées ; un instant après l'arrêt final, les portes s'ouvrent d'où descendent les voyageurs, dont un certain nombre de touristes, de la façon la plus normale. Aucun des voyageurs n'a subi de choc dû à cet arrêt. L'arrêt anormal de la motrice a causé quelques déformations de caisse : la porte d'accès du conducteur - au demeurant indemne - s'est coincée, empêchant celui-ci de sortir de sa cabine. 2.2- Secours L'agent circulation de Versailles Rive Gauche appelle les pompiers à 10h34, qui arrivent sur place à 10h38. Ceux-ci libèrent le conducteur de sa cabine de conduite en décoinçant la porte d'accès. Aucune autre intervention ne s'est avérée nécessaire. 2.3- Pertes humaines, personnes blessées, dégâts matériels Le conducteur et les voyageurs du train sont indemnes ; il n'y a pas non plus à déplorer de victimes parmi le personnel en gare ou parmi d'éventuels voyageurs attendant sur le quai. Seuls des dégâts matériels sont enregistrés : motrice de tête n° 8912 avariée (bogie choqué, câbles et tuyauterie arrachés et tordus, coffres d'appareillage enfoncés...), heurtoir de la voie 3 cassé, voie 3 endommagée sur quatre mètres (traverses cassées), câbles de signalisation écrasés, bord du quai 2 cassé ainsi que le mobilier urbain en bout de quai, marquise et garde au corps tordus. 2.4- Conséquences exploitation La gare de Versailles Rive Gauche a été fermée au trafic le 13 août après l'accident, jusqu'au soir, pour permettre les opérations de relevage du train accidenté et son évacuation. La clientèle s'est reportée sur les autres gares de Versailles. 13 2.5- Organisation de l'enquête L'enquêteur technique a pu examiner le site de l'accident peu après sa survenue et le matériel roulant. Postérieurement à l'accident, l'enquêteur a pu s'entretenir avec le conducteur concerné et sa hiérarchie ainsi que le médecin d'établissement ; il a organisé les essais de fonctionnement sur le matériel roulant et a examiné le foyer des roulants de la gare de Versailles Rive Gauche en soirée. 14 3- Eléments de contexte 3.1- La gare de Versailles Rive Gauche La gare de Versailles Rive Gauche, en cul-de-sac, comporte trois quais voyageurs et cinq voies d'accès. Foyer des roulants Souterrain de ST Martin V2 Quai voyageurs V6 V5 V4 Lieu V3 V2 V1 Porchefontaine Paris V1 Jonction croisée pk 17,250 17,350 Balise KVB Quai voyageurs Quai voyageurs de l'accident 17,606 17,583 23m Gare de Versailles Rive Gauche En provenance de la voie 2, le train 141 280 a été reçu en gare voie 3. 3.2- Le matériel roulant Z2N Il s'agit d'automotrices électriques à deux niveaux : deux remorques encadrées par deux caisses motrices disposant aussi d'espaces voyageurs. La capacité en charge normale d'un élément « 4 caisses » est de 1 064 voyageurs. Le 13 août 2007, le train 141 280 était constitué de deux éléments de chacun quatre caisses, soit huit caisses voyageurs au total. La composition du train est la suivante, depuis le heurtoir côté Versailles puis en déroulant vers Paris : élément 56B (motrice 8912, remorque 35 708, remorque 25 638, motrice 8911), élément 17C (motrice 5634, remorque 35 700, remorque 25 607, motrice 5633). 3.2.1- Les systèmes de sécurité du matériel roulant Les rames Z2N disposent des équipements de sécurité suivants : centrales tachymétriques type ATEC 150, répétition optique des signaux, contrôle de vitesse par balise, asservissement traction-freinage (automatisme supprimant automatiquement l'effort moteur si le conducteur omet de le faire alors qu'il déclenche un freinage), radio sol-train, veille automatique avec contrôle du maintien d'appui, signal d'alerte lumineux, signal d'alerte radio. 3.2.2- Le système de freinage des rames Z2N Les motrices sont équipées d'un système de freinage qui conjugue le frein électrique et le frein pneumatique assuré par des semelles en métal fritté à haut coefficient de frottement capable d'assurer la totalité de la performance de freinage demandée à chaque motrice. Afin de réduire la consommation d'énergie, le freinage des motrices est assuré en priorité en freinage électrique. En l'absence de réception d'ordre électrique, le freinage de chaque bogie moteur est assuré pneumatiquement à partir de la conduite générale d'air comprimé. Les remorques disposent d'un équipement de freinage à friction qui associe des freins à 15 disques calés sur les axes d'essieux et des semelles s'appliquant sur les roues. Le freinage des remorques, uniquement pneumatique, est piloté par la pression d'air de la conduite générale. La commande des différents équipements de freinage s'effectue à l'aide d'un manipulateur de frein de type analogique. Ce manipulateur agit simultanément sur les deux commandes électriques et pneumatiques, le principe étant d'exploiter au maximum le frein électrique des motrices. 3.3- Le conducteur 3.3.1- La carrière du conducteur L'agent concerné a commencé sa carrière à la SNCF en 1989 comme ouvrier qualifié à l'Etablissement Industriel du Matériel de Romilly (Aube), muni de son CAP de mécanicien d'entretien et d'une formation complémentaire « automatismes industriels ». Estimant que la vie d'atelier ne lui assure pas de déroulement de carrière suffisant, l'agent concerné s'oriente en 1999 vers le métier de conducteur de trains. Il obtient sa mutation à l'Etablissement Matériel et Traction de Paris-Est (EMT de Paris-Est), où il subit ses premières formations à la conduite. Il exerce ses premières activités de conduite comme « conducteur de manoeuvre » en effectuant des remontes de rames voyageurs vides entre Paris-Est, Noisy et le chantier de l'Ourcq. En mars 2003, l'agent concerné obtient le grade de conducteur ; il est autorisé à conduire les trains transiliens sur les lignes Paris-Meaux et Paris-Tournan et sur les engins BB 16 500, BB 17 000 , Z2N et Z 22 500 (rames dites « MI2N » assurant le service de la ligne « Eole »). L'agent habitant officiellement Troyes, revient à son domicile habituellement quand son emploi du temps professionnel le lui permet, sinon il couche au foyer des roulants de Paris-La Villette. Pendant six mois, de novembre 2005 à fin avril 2006, l'agent se place en disponibilité de son activité de conduite des trains pour bénéficier d'une formation « AGECIF » à temps complet de « réalisateur de film ». En mai 2006, l'agent reprend son activité de conduite des trains, en subissant au préalable un contrôle des connaissances et des pratiques de la conduite à l'EMT de Paris-Est. En juin 2006, l'agent est détaché de son établissement d'origine pour être utilisé, à la conduite des trains, à l'Etablissement Traction de Paris Rive Gauche (ET-PRG), au sein de l'Unité de Production Brétigny. Il continue de conduire des trains transiliens. En juin 2007, l'agent concerné, toujours placé administrativement en situation de détaché de l'EMT de Paris-Est, est muté à l'Unité de Production de Versailles (même établissement ET PRG). Depuis qu'il exerce son activité de conduite à l'Etablissement Traction de Paris Rive Gauche, il a élu domicile à Paris et, en fonction de son roulement de travail, dort dans le foyer des roulants prévu au roulement. 3.3.2- Journées de service assurées les 12 et 13 août par le conducteur L'agent concerné, après avoir accompli sa journée de service le samedi 04 août 2007, est en repos et congé pendant sept jours jusqu'au samedi 11 août. Il reprend son service le dimanche 12 août 2007, selon le service suivant : 14h20 : prise de service à l'UP Versailles Chantiers. De là, il se rend à pied à la gare de Versailles Rive Gauche et emprunte comme voyageur un train transilien se rendant à la station « Invalides ». Il conduit ensuite les trains suivants : 16 Train assuré train 147 230 en voyageur train 148 946 train 147 958 train 148 962 départ 15.41 « Invalides » 17.30 « Invalides » 18.40 « SQY » 19.30 « Invalides » arrivée 16.12 « Versailles RG » « Invalides » 18.06 « Saint Quentin en Yvelines (SQY) » 19.17 « Invalides » 20.06 « SQY » avec forcement d'un élément en deux éléments et essais de frein. 20.37 « Chaville » 20.57 « Versailles RG » 21.00 « Versailles RG » train 149 958 en voyageur fin de service 20.27 « SQY » Cette journée de reprise de service comportait une charge de travail normale. Le roulement d'utilisation de l'agent prévoit qu'il doive dormir au foyer des roulants de Versailles Rive Gauche, compte tenu de la prise de service matinale prévue le lendemain lundi 13 août. 05h20 : prise de service en gare de Versailles Rive Gauche. De là, le conducteur se rend à la gare de Massy-Palaiseau en taxi où il est prévu qu'il arrive à 05h53. Il effectue la préparation courante de la rame qu'il doit conduire ; puis il effectue les parcours suivants : Train assuré train 143 560 train 142 157 train 141 170 en autobus train 141 280 train 142 291 en voyageur 09.56 « Invalides » 10.50 « Versailles RG » départ 06.33 « Massy Palaiseau » 07.21 « Paris-Austerlitz banlieue » 08.02 « Pont de Rungis » arrivée 07.12 « Paris-Austerlitz banlieue ». 07.45 « Pont de Rungis » 08.27 « Paris-Austerlitz banlieue ». « Invalides ». 10.27 « Versailles RG ». 11.20 « Invalides ». Fin de service 12.08 à Versailles Chantiers. L'accident s'est produit au train 141 280 à l'arrivée à Versailles Rive Gauche. 17 4- Compte-rendu des investigations 4.1- Déclarations du conducteur Le conducteur a déclaré avoir pris son service à 05h20. Il s'est rendu comme prévu en gare de Massy-Palaiseau en taxi pour assurer son premier train au départ de cette gare. Selon ce conducteur, les trains qu'il a conduits depuis le début de matinée n'ont pas présenté d'anomalies. Pour le parcours Paris-Invalides / Versailles Rive Gauche (train n° 141 280), tout se passe normalement, y compris l'avant dernier arrêt de Porchefontaine. Avant l'arrivée en gare de Versailles Rive Gauche, le conducteur respecte la vitesse limite de 60 km/h et freine son train ; à ce moment là, le conducteur est victime d'une première absence (il a laissé trop ralentir son train avant d'aborder le quai de gare) et déclare réagir à 200 mètres du heurtoir alors qu'il roule à 10 km/h. Il a déclaré aux enquêteurs de la SNCF parvenus sur les lieux quelques temps après, qu'il s'était endormi, ce qu'il a aussi consigné dans sa déclaration écrite. Il desserre alors les freins et retractionne jusqu'à 15 km/h, et s'endort à nouveau pour se réveiller 10 mètres avant le heurtoir. Le conducteur indique avoir commandé à ce moment-là le freinage d'urgence, sans parvenir à s'arrêter avant le heurtoir (les actions sur le freinage d'urgence ne sont pas enregistrée sur ce type de matériel). Le conducteur explique que la journée de travail qu'il a assuré la veille s'est terminée à 21 heures à Versailles Rive Gauche. Il a dormi sur place (repos hors résidence « RHR ») au foyer des roulants, son repos étant réduit à 8h20. (selon le référentiel RH 0077, le repos hors résidence peut être réduit à 8 heures une fois par 3 grandes périodes de travail consécutives). Il a eu du mal à s'endormir, le foyer étant situé « au ras des voies et des aiguilles », sachant que le dernier train arrive à Versailles RG à 00h56 et que vers 04h30, les premières rames sont préparées (préparation courante) pour le nouveau service quotidien à assurer. En conclusion, le conducteur affirme avoir mal dormi. 4.2- Constatations médicales Les tests de dépistage d'alcoolémie et de prise de stupéfiants se sont révélés négatifs. 4.3- Analyse des enregistrements La reconstitution de la marche du train s'effectue à partir de l'examen de la bande graphique, de l'enregistreur embarqué des paramètres du système KVB. De Paris-Invalides à Versailles Rive Gauche, aucun dépassement de la vitesse autorisée n'est constaté. Le conducteur utilise le système de « vitesse imposée » pour optimiser sa marche. Les arrêts ne font pas apparaître de manipulations excessives ou irrationnelles du manipulateur de freinage laissant supposer une hypovigilance du conducteur. Le parcours final peut se représenter de la façon suivante, sous forme d'un grossissement de la bande graphique : 19 vitesse train 90 80 70 60 50 40 30 20 10 78 vitesse (km/h) 50 45 40 35 30 25 20 36 15 12 10 5 21 7 6 points kilométriques (pk) 17,547 17,606 17,479 17,391 17,587 17,513 bal. sortie 17,443 voie 3 17,300 17,400 17,500 17,600 49 (60 km/h maximum) 45 10 6 14,465 17,007 (C3) 17,000 17,191 balise bidirectionnelle 17,100 17,200 Porchefontaine Versailles RG De Porchefontaine à Versailles, dernière étape de la mission, la première accélération amène la vitesse du train au niveau de 78 km/h. Le conducteur coupe ensuite la traction et roule sur l'erre environ 50 mètres. Puis le conducteur commande le freinage par une petite dépression au manipulateur (p = 0,6 bar) afin de respecter une limitation permanente de vitesse à 60 km/h qui commence au carré 3 de Versailles Rive Gauche, ce signal étant le dernier rencontré avant le heurtoir. En augmentant la dépression de la conduite générale d'air comprimé à 0,8 bar 50 mètres avant le début des quais, la vitesse du train se réduit à 40 km/h. Alors que le train a déjà abordé le quai, 127 mètres avant le heurtoir, la vitesse s'est réduite à 6 km/h. Le conducteur effectue alors une reprise de traction qui remonte la vitesse 34 mètres plus loin à 12 km/h. Un nouveau serrage des freins permet de passer à moins de 10 km/h au droit de la dernière balise KVB (pk de cette dernière balise KVB = 17,583) ; le conducteur desserre à nouveau les freins, puis les met à nouveau en action peu avant le heurtoir, où le choc a lieu à 6 km/h. 4.4- Etat de la rame après le choc Frein de la rame : deux heures après le choc, les voyants de frein sont au rouge (indication freins serrés), sauf le bogie avant de la motrice de tête 8912 (voyant vert « état desserré »), le deuxième bogie de la motrice de queue 8911 (voyant vert) et le bogie avant de la remorque n° 25 607 (voyant vert). Le bogie avant de la motrice de tête est celui qui a percuté le heurtoir, sa tuyauterie d'air comprimé a été arrachée, occasionnant de ce fait la vidange de l'air comprimé du circuit bogie et son desserrage. Les robinets d'isolement du frein de chaque véhicule sont tous sur 20 position « en service ». Une vérification en atelier a été effectuée pour diagnostiquer l'état réel de fonctionnement du frein (hormis le bogie de tête de la motrice 8912). Les conclusions sont présentées au paragraphe 4.5 ci-après. Signalements sur carnets de bord : aucune annotation ne fait état d'anomalies corrélées avec l'accident. Maintenance : le planning de réalisation des opérations de maintenances a été respecté ; la traçabilité de ces opérations ne révèle pas d'anomalie particulière. 4.5- Etat de la commande du train en cabine de conduite L'observation de la position des différents organes de commande de la cabine de conduite après l'accident a montré : le manipulateur de frein « TM 606 » en position « serrage à fond », le bouton poussoir d'urgence « BP urg » enfoncé, le manipulateur de sens de marche sur la position zéro, le manipulateur de traction sur la position zéro, la clé du pantographe sur la position zéro et la pantographe abaissé, le manipulateur du frein de secours en position normale (desserré), la boite à leviers verrouillée, les disrupteurs de la batterie, des feux avant et de l'anti-enrayage déclenchés, les différents interrupteurs des organes de sécurité en position normale et leur plombage effectif, le plombage de l'enregistreur de vitesse effectif. Les organes de commande des trois autres cabines de conduite ont présenté une situation normale hormis le déclenchement de deux disrupteurs de batterie. Une vue partielle de la cabine de conduite figure en annexe 5. 4.6- Fonctionnement du frein de la rame Le fonctionnement du frein de la rame a été testé à son dépôt titulaire, l'Etablissement industriel de maintenance du matériel de Paris Rive Gauche, Unité de Production des Ardoines. Le programme de vérification a été le suivant : réalisation de l'essai de frein à agent seul (EFAS), comme a dû le réaliser le conducteur lors de la prise de service le matin avec son engin, examen des deux bogies trouvés desserrés le jour de l'accident (deux heures après le choc), vérification du bouton poussoir d'urgence (BP URG) : était-il enfoncé lors du premier examen de la cabine de conduite ? L'essai de frein a montré un fonctionnement normal du frein de la rame. Pour la réalisation de cet essai, le frein du bogie avant de la motrice 8912 a été isolé du fait de sa détérioration (tuyauterie arrachée, bloc d'appareillage détruit). Le restant des autres bogies a montré un comportement normal, y compris le deuxième bogie de la motrice 8911 et le bogie avant de la 21 remorque 25 607. Le fait que ces bogies aient été trouvés desserrés deux heures après le choc s'explique par le fait que la conduite principale d'air (CP) sous la motrice 8912 ayant été écrasée, le restant de la CP du train n'était plus alimenté en air et qu'il n'y avait donc plus de compensation des fuites des réservoirs auxiliaires de chacun des véhicules par l'air en provenance de la CP. Sur une durée plus longue, c'est l'ensemble des bogies de la rame qui se serait desserré. La hauteur de tige du bouton poussoir d'urgence a été mesurée : « BP urg » levé et « BP urg » enfoncé ; ces mesures ont été comparées à la vue du pupitre de conduite prise le 13 août après l'accident : le bouton poussoir d'urgence a bien été enfoncé (cf photo de l'annexe 5), mais il n'est pas possible d'affirmer par qui puisqu'il n'y a pas d'enregistrement. 4.7- Enregistrement de la vidéosurveillance La gare de Versailles Rive Gauche est équipée de caméras de vidéosurveillance des quais voyageurs ; l'arrivée du train 141 280 a pu ainsi être visionnée. La vision des images est assez grossière, néanmoins l'impression visuelle montre une rame rentrant en gare avec un très faible ralentissement, puis la motrice avant entre en contact avec le heurtoir, le fait basculer, monte à la verticale sur ce heurtoir en se déportant vers le quai, puis s'immobilise par les deux roues droites s'appuyant directement sur le quai, tordant en la circonstance le mobilier urbain. Dès l'arrêt obtenu, les portes de la rame s'ouvrent et un flot de voyageurs en sort de la façon la plus normale ; aucune secousse n'a été ressentie par les voyageurs, et ceux-ci marchent sur le quai comme si de rien n'était. En passant au niveau de la motrice de tête, certains voyageurs sont ébahis de voir cette motrice « grimpée » sur le quai. 4.8- Témoignage du conducteur attendant en gare de Versailles Rive Gauche En fond de gare, le conducteur devant assurer le train 142 289 partant à 10h35 de Versailles Rive Gauche a vu le train 141 280 arriver. Ce conducteur a déclaré voir arriver « un peu vite » le train 141 280 sur le heurtoir de le voie 3. 4.9- Etats de service du conducteur Tout conducteur est autorisé à exercer son activité professionnelle dès lors qu'il a reçu son habilitation. Pour le conducteur concerné, la dernière habilitation a été remise le 1er janvier 2005. Le perfectionnement du conducteur à la pratique de la conduite s'opère : lors des journées de « formation continue collective » (généralement plusieurs par an), lors des accompagnements en cabine de conduite par le dirigeant de proximité (cadre transport traction « CTT »). Les réactions de conduite sont consignées par les CTT selon deux familles de pratiques : les pratiques professionnelles observables en situation (PPOS) et les procédures rares (PR). Le conducteur concerné a ainsi été accompagné les 09/06/2005, 19/08/2005, 20/09/2005, 29/12/2005, 20/08/2006, 13/12/2006 et 22/04/2007. En outre, les évènements « conduite » vécus par le conducteur sont enregistrés dans une base de retour d'expérience. Le tableau suivant récapitule les principaux écarts de sécurité enregistrés pour ce conducteur : 22 date Unité de Production Paris-La-Villette Evènement Signal « coupez courant » non respecté Signal « coupez-courant » non respecté. Commentaires Après l'arrêt du Raincy, tractionne jusqu'à 50 km/h puis marche sur l'erre et oublie d'ouvrir le disjoncteur. Omission d'ouverture du disjoncteur au panneau d'exécution. En sortie de zone « coupez courant » a refermé prématurément le disjoncteur. Dépassement de la vitesse autorisée (80 km/h) au départ du Raincy. Le sectionnement électrique a été oublié par l'agent. Dépassement (< 15 km/h) de la vitesse autorisée. Dépassement de vitesse supérieur à 15 km/h. 28/04/2003 07/05/2003 29/07/2003 18/01/2004 24/05/2004 15/06/2004 27/09/2004 07/12/2004 11/12/2004 26/02/2005 12/03/2005 29/03/2005 18/04/2005 21/06/2005 22/09/2005 28/08/2006 22/11/2006 25/01/2007 22/06/2007 13/08/2007 Paris-La Villette Non respect des règles de Paris-La Villette traction électrique Paris-La-Villette Paris-La-Villette Déclenchement du FU par le KVB Non respect du « coupezcourant ». Paris-La-Villette FU déclenché par le KVB Paris-La-Villette FU déclenché par le KVB Paris-La-Villette Mauvaise exécution d'arrêt Paris-La-Villette Mauvaise exécution d'arrêt Paris-La-Villette Signal « coupez courant » non respecté Oubli d'ouvrir le disjoncteur au panneau d'exécution Dépassement de vitesse sur limitation temporaire de vitesse. Paris-La-Villette Mauvaise exécution d'arrêt Voitures hors quai. Paris-La-Villette FU déclenché par le KVB Paris-La-Villette Non respect de la marche à Lors d'une reprise de vitesse après vue anomalie de signalisation Non respect du signal « coupez courant » FU déclenché par le KVB FU déclenché par le KVB FU déclenché FU déclenché par la veille automatique Arrêt mal exécuté Dépassement de vitesse > 15 km/h. Dépassement de vitesse < 15 km/h. Dépassement de vitesse < 15 km/h. Le conducteur n'a pas réarmé à temps le système de veille. Choc contre le heurtoir. Paris-La-Villette Omission d'arrêt Paris-La-Villette Brétigny Brétigny Brétigny Brétigny Versailles RG En regard des résultats nationaux, cette performance médiocre se révèle être très en dessous de la moyenne des conducteurs de la SNCF. 23 4.10- Avis de l'encadrement de proximité du conducteur Selon le cadre-traction de l'EMT de Paris-Est qui a eu le conducteur concerné dans son équipe, il n'a pas été noté de difficultés d'éveillage, ni d'apparition d'hypovigilance lors de ses accompagnements en ligne. Les événements « conduite » notés ci-dessus à l'établissement de ParisLa-Villette ont été commentés à l'enquêteur. Pour ce cadre traction, le comportement du conducteur concerné jugé lors des quelques accompagnements en ligne réalisés s'est révélé être dans la moyenne de l'équipe. Selon le cadre-traction de l'Unité de Production de Brétigny qui a eu le conducteur concerné dans son équipe, la qualité du travail de ce conducteur, jugée aussi au travers des quelques accompagnements en ligne réalisés, se situe aussi dans la moyenne des autres conducteurs de son équipe. Ces deux dirigeants de proximité évoquent certaines situations qui peuvent aujourd'hui se présenter : une baisse de vigilance si un conducteur en action reçoit un appel téléphonique (téléphone portable), qui peut faire baisser ponctuellement son attention ; cette situation n'est pas décelable de l'extérieur et il faut noter que, hormis les cas dédiés à la sécurité de l'exploitation ferroviaire, pendant les phases de conduite, le téléphone doit être sur « hors service » ou maintenu en mode messagerie. Son utilisation doit se faire à l'arrêt, selon l'article E.31.02 du « référentiel conducteur de ligne » TT-515. Le Directeur d'établissement a noté que le conducteur n'a pas demandé à être relevé de son travail car il n'avait pas pris conscience de sa forte baisse de vigilance. Le conducteur lui aurait déclaré avoir été, au moment d'arriver en gare de Versailles Rive Gauche, victime des premiers signes d'endormissement. 4.11- Avis du médecin d'établissement Selon le médecin d'établissement en charge de cet agent, celui-ci présente un état de santé normal, n'est pas touché par des contre-indications médicales. Ce médecin ne peut pas déclarer que ce conducteur est médicalement inapte. Toujours selon ce médecin, il n'a pas d'explication sur les causes de cet endormissement, hormis que l'agent a eu probablement une dette de sommeil ce jour-là compte tenu de sa courte nuit, selon les déclarations du conducteur. A l'égard du foyer des roulants de Versailles Rive Gauche, le médecin estime qu'il ne peut pas être considéré comme bruyant, mais que le bâtiment tremble quand un train entre ou sort de la gare. 4.12- Le foyer des roulants de Versailles Rive Gauche Le foyer des roulants a l'aspect d'une grosse maison, comporte 13 chambres et des pièces communes (réfectoire, toilettes, douches, salle de lecture) et est situé en bordure des voies, côté voies 5 et 6 (les voies les moins utilisées). L'espace constitué par le faisceau des voies de gare et la gare proprement dite est bordé sur trois côtés par des immeubles d'habitation qui font partie d'un ensemble urbain résidentiel. Ce foyer comporte un rez-de-chaussée et un étage, une seule chambre ayant vue sur la cour opposée aux voies. Le conducteur a dormi dans la chambre 11, au premier étage, cette chambre donnant sur les voies ; depuis son affectation à l'UP de Versailles, ce conducteur avait eu l'occasion de dormir deux fois dans ce foyer. En dehors de la circulation des trains, aucun bruit extérieur n'est perceptible dans l'espace intérieur de la gare et du foyer ; la rumeur de la circulation automobile de l'avenue voisine est 24 étouffée par la façade de la gare. Le bruit de roulement des trains est réduit du fait de leur faible vitesse : arrivée en vitesse décroissante de 10 km/h à zéro ou inversement, départ des trains où la vitesse limite sur les aiguilles de sortie est de 60 km/h ou de 30 km/h suivant l'itinéraire emprunté. En outre, les rames Z2N ont un roulement très silencieux sur voie courante du fait que les roues sont freinée par des semelles de frein en matériaux composites (contrairement aux roues freinées par des semelles fonte). Lors des départs ou arrivées de trains, le seul bruit émergent provient du passage des roues sur les joints de rail et les coeurs d'aiguille. En outre, le déclenchement des valves d'échappement des compresseurs d'air des trains est perceptible parmi le niveau sonore ambiant très réduit. Circulations ferroviaires ayant eu lieu après le couchage du conducteur, le soir du 12 août 2007 : Arrivée à Versailles RG 21 h 26 21 h 56 22 h 26 22 h 56 23 h 26 23 h 56 00 h 56 -idem-idem-idem-idem--------------------------------------------------------------------------------------Départ de Versailles RG environ 10 minutes après Après 21 heures, il y a donc eu 12 circulations ferroviaires entrantes et sortantes. Le cahier de réclamations du foyer, ouvert depuis le 28 décembre 2004, ne mentionne aucune réclamation relative au bruit ambiant (les seules réclamations portent sur le nettoyage, l'approvisionnement en café...). De façon plus significative, l'examen des procès verbaux des CHSCT (comités d'hygiène et de sécurité) des deux établissements dont les agents utilisent ce foyer (Etablissement Traction de PRG et Etablissement commercial trains de Paris-Montparnasse), depuis le début de 2006 jusqu'à ce jour, ne fait apparaître aucune question posée relative au niveau sonore de ce foyer. Concernant l'existence d'un tel foyer des roulants à Versailles, le maintien de son activité est souhaité par les agents qui ont recours à ses services. 4.13- Mesures prises à la suite de l'accident Quelques jours après l'accident, l'Etablissement Traction de Paris Rive Gauche a édité une note d'une page, intitulée « les brèves de l'ET PRG », à l'intention de tout le personnel. Cette note écarte l'hypothèse d'une défaillance du système de freinage évoquée par certains articles parus dans la presse locale et rappelle à tous les conducteurs que leur métier nécessite une vigilance de tous les instants. Cette note a été transmise pour information à la Direction de la Traction ainsi qu'aux autres établissements traction de la SNCF. 25 5- Compte-rendu final de la chaîne des évènements Après avoir passé une semaine de repos-congés, le conducteur concerné reprend son service sur la section de ligne du RER C « Invalides »-Versailles Rive Gauche, le dimanche 12 août 2007 à 14h20. Son service se termine en gare de Versailles Rive Gauche à 21 heures. Ayant eu le temps de dîner en absorbant un casse-croûte pendant un intermède en gare de « Invalides », le conducteur se rend dès sa fin de service au foyer des roulants situé en bord des voies de la gare en cul-de-sac de Versailles RG. Compte tenu de l'heure matinale de réveil prévu pour la journée du lendemain, il décide de se coucher sans délai, aux alentours de 21h15. C'est la troisième fois qu'il utilise ce foyer depuis son affectation à l'unité de production de Versailles, en juin de cette année. Les arrivées et départs de trains en gare de Versailles Rive Gauche, une douzaine de trains circulant à basse vitesse, l'empêchent, selon lui, de s'endormir. Se réveillant le lendemain entre 4 heures et 5 heures le matin pour se présenter à sa prise de service de 5h20, le conducteur a donc eu un sommeil de courte durée ; selon ses déclarations à l'enquêteur, si son sommeil a été court, il a été profond. En se réveillant, il se sentait tout à fait apte à prendre son travail. Les trains qu'il conduit entre Massy-Palaiseau, Paris-Austerlitz, Pont de Rungis, ParisAusterlitz ne donnent lieu à aucune difficultés. Alors qu'il assure le train « Invalides »-Versailles Rive Gauche, après avoir effectué l'avant dernier arrêt à Porchefontaine de façon tout à fait normale, au moment de rentrer en gare de Versailles, le conducteur traverse une première période courte d'endormissement à la suite de laquelle il se rend compte subitement, en abordant le quai, qu'il se trouve à une vitesse trop faible (l'indicateur de vitesse indique 6 km/h) ; il n'est pas conscient sur l'instant de cette « absence », et, craignant que les voyageurs ouvrent les portes (déblocage des portes si la vitesse du train passe sous le seuil de 6 km/h), il tractionne à nouveau. La vitesse de son train remonte à 12 km/h alors qu'il longe le quai d'arrivée. Immédiatement après cette action de commande de la traction, le conducteur plonge dans une phase d'endormissement irrépressible. Peu avant d'entrer en contact avec les heurtoirs de fin de voie ou par le bruit et le choc du contact, le conducteur a un sursaut de réveil, place son manipulateur de frein en serrage à fond et enfonce le bouton poussoir d'urgence. La motrice de la rame fait basculer le heurtoir, d'une conception ancienne, se cabre en montant sur le heurtoir, pivote sur la droite et s'immobilise en posant les roues droites du bogie avant sur le bord du quai. L'arrêt de la rame a finalement été progressif, si bien qu'aucun voyageur n'a eu à subir de décélération importante ni ne s'est rendu compte d'une anomalie. Le conducteur a déclaré aux enquêteurs de la SNCF parvenus sur les lieux quelques temps après, qu'il s'était endormi, ce qu'il a aussi consigné dans sa déclaration écrite. Reconnaissant son état de sommeil au moment où il aurait dû commander son freinage final, il prit conscience que la première absence dont il fut victime (quand il avait laissé trop ralentir son train avant d'aborder le quai de gare) était aussi un envahissement de sommeil et non une simple « absence ». 27 6- Analyse et orientations préventives 6.1- La défaillance humaine Le conducteur concerné a été victime d'une hypovigilance caractérisée dont il a été conscient a posteriori. Différents facteurs susceptibles d'éclairer l'apparition de cette hypovigilance ont été examinés et sont rappelés ci-dessous : antécédents relevés dans le retour d'expérience : il n'a pas été identifié dans la carrière vécue par ce conducteur de cas d'endormissement semblable, avis médical : le suivi de santé du conducteur n'a pas mis en évidence de faiblesse devant entraîner une telle hypovigilance, roulement d'utilisation : le conducteur venait de bénéficier d'une semaine d'absence pour congés. Sa première journée de reprise le dimanche s'est faite selon un horaire quasiment de jour (fin de service à 21h00), le repos hors résidence : quoique « réduit », ce repos devait lui permettre de dormir sur une amplitude (21h30 ­ 04h30), soit sept heures de sommeil, ce qui est acceptable, le foyer des roulants de Versailles Rive Gauche : bien que situé en bord des voies, la faible vitesse de circulation des trains dans cette zone, le roulement silencieux des rames Z2N font qu'il ne peut être considéré comme bruyant. Pour confirmer cette situation, le quartier d'habitations qui entoure la gare (et se trouve quasiment dans la même ambiance sonore que le foyer des roulants) n'a pas fait l'objet de plaintes de la part des riverains. Lors de sa prise de service le matin du lundi 13 août, même si le conducteur se sentait en bonne forme, il commençait sa journée de travail avec une dette de sommeil. L'activité de conduite ne requérant que peu de force physique, la conduite d'un mode de transport guidé étant malgré tout monotone, la dette de sommeil a développé sa conséquence cinq heures et demie plus tard sous forme d'un envahissement brutal et irrépressible du sommeil. Le conducteur n'a pas pu, s'il avait pu prendre conscience de l'emprise progressive d'un malaise, déclencher le freinage d'urgence puis demander de l'aide et se faire relever. En outre, la constante de temps (60 secondes) du système de veille automatique n'aurait pas pu agir car l'évènement s'est déroulé sur une période largement inférieure à la minute. La cause précise de l'endormissement et de la formation de la dette de sommeil qui a pu le provoquer n'a donc pas été déterminée. Il n'existe pas à ce jour de remède permettant de prévenir ce genre d'hypovigilance que nous pouvons considérer comme un cas isolé. La procédure applicable dans un tel cas est que l'agent bénéficie des examens médicaux et psychologiques adaptés à ce genre de situation. Si ces examens ne révèlent aucune contre indication de principe, la hiérarchie du conducteur aura seule à se prononcer sur la reprise de l'activité conduite des trains de cet agent. En cas de décision favorable, il serait proposé à cet agent un service progressif associé à une surveillance médicale spéciale et, au plan « métier », un « plan d'action personnalisé » avec le suivi associé. 6.2- Atténuation des conséquences d'un choc contre le heurtoir Une défaillance humaine comme celle identifiée dans le cas présent ne peut pas être totalement exclue dans le futur ; il est pertinent d'en atténuer les conséquences si un tel événement 29 se produit à nouveau. Cette atténuation des conséquences d'un arrêt de train manqué sur voie en impasse a déjà été citée lors d'un précédent rapport d'enquête du BEA-TT (accostage brutal du train 117 120 en gare de Paris-Est le 05 avril 2007). Le conducteur du train 141 280 a expliqué les raisons de sa reprise de traction lorsqu'il s'est trouvé en début de quai à la vitesse de 6 km/h : c'est la vitesse au dessous de laquelle les portes voyageurs se débloquent et permettent aux voyageurs de descendre d'eux-mêmes du train alors que celui-ci n'est pas encore arrêté. Il a donc redonné une impulsion de traction qui, finalement, par l'arrêt non maîtrisé, a provoqué l'enfoncement par le train du heurtoir de fond de voie. L'accostage final d'un train dans une voie en impasse constitue une phase délicate que le conducteur doit maîtriser en respectant une fourchette de vitesse réduite ; une grande attention est nécessaire lors de cette phase de conduite. Recommandation R1 (SNCF) : sur les matériels automoteurs Z2N, étudier la faisabilité de réduire le seuil de vitesse en deçà duquel les portes d'accès voyageurs se débloquent avant l'arrêt du train. Si la faisabilité est avérée, modifier l'ensemble du parc des automoteurs Z2N. Bien que le choc contre le heurtoir se soit produit à 6 km/h, les voyageurs sont sortis du train indemnes et n'ont ressenti aucune secousse. Cette situation exceptionnellement favorable est due à la décélération modeste du train, qui a été répartie sur une distance d'arrêt de deux mètres après le contact avec le heurtoir, en même temps que la « prise d'altitude » de la motrice consommait une partie de l'énergie cinétique de la rame au moment du contact contre ce heurtoir. L'énergie cinétique du train a été absorbée sur ces deux mètres, à la fois par la déformation et la dislocation du heurtoir, et par le soulèvement de l'avant de la locomotive pris dans le basculement du heurtoir. Ces deux mécanismes d'absorption ont eu un effet fortuitement favorable, mais n'avaient sans doute pas été anticipés dans le cadre d'une réflexion sur l'absorption d'un choc d'accostage brutal. Ils auraient pu avoir des conséquences sérieuses si des personnes avaient été présentes à proximité immédiate du heurtoir. Cette situation est à comparer encore avec l'accident de Paris-Est du 5 avril 2007, où le choc d'une rame Z2N, certes beaucoup plus chargée, contre des heurtoirs en béton, à 4,5 km/h a provoqué 57 blessés. La cinématique d'arrêt du train nous amène à confirmer et compléter la recommandation émise sur ce sujet à l'occasion de l'enquête concernant l'accident de Paris-Est : Recommandation R2 (SNCF, RFF) : étudier pour les voies des gares en impasse réceptionnant des trains constitués de rames Z2N, la pertinence et la faisabilité de dispositions techniques permettant, soit de prévenir un choc de heurtoir, soit de minimiser ses conséquences envers les personnes se trouvant à bord du train ou sur le quai. Il conviendrait ainsi d'évaluer et de comparer les effets bénéfiques induits par la mise en place : d'un dispositif amortisseur destiné à ralentir un train risquant de rentrer en contact avec le heurtoir, et/ou d'une ultime balise de contrôle de vitesse (à distance convenue du heurtoir et contrôlant aux environs de 4 km/h) pour provoquer un ralentissement supplémentaire du train, voire son arrêt. 30 7- Conclusions 7.1- Identification des causes et facteurs ayant concouru à l'accident 7.1.1- Cause directe Dans cet accident, les facteurs techniques sont hors de causes (infrastructure, matériel roulant). La cause directe immédiate paraît être l'endormissement irrépressible du conducteur au moment de l'accostage du train. Une dette de sommeil la nuit précédant la journée de service considérée est vraisemblablement à l'origine de cet endormissement incontrôlable ; la cause de cette dette de sommeil n'est pas établie avec certitude. 7.1.2- Facteurs ayant influencé la gravité de l'accident Le comportement au choc du heurtoir s'est traduit par son basculement et la montée de la motrice sur le quai, et donc un risque potentiel pour des personnes se trouvant à proximité. 7.2- Rappel des recommandations Cet accident confirme deux recommandations déjà émises en d'autres circonstances par le BEA-TT, relativement au matériel roulant (seuil de vitesse pour le déblocage des portes du train) et à l'infrastructure (amortissement d'un éventuel choc d'un train chargé de voyageurs entrant en contact avec les heurtoirs d'une voie en cul-de-sac). Recommandation R1 (SNCF) : sur les matériels automoteurs Z2N, étudier la faisabilité de réduire le seuil de vitesse en deçà duquel les portes d'accès voyageurs se débloquent avant l'arrêt du train. Si la faisabilité est avérée, modifier l'ensemble du parc des automoteurs Z2N. Recommandation R2 (SNCF, RFF) : étudier pour les voies des gares en impasse réceptionnant des trains constitués de rames Z2N, la pertinence et la faisabilité de dispositions techniques permettant, soit de prévenir un choc de heurtoir, soit de minimiser ses conséquences envers les personnes se trouvant à bord du train ou sur le quai. Il conviendrait ainsi d'évaluer et de comparer les effets bénéfiques induits par la mise en place : d'un dispositif amortisseur destiné à ralentir un train risquant de rentrer en contact avec le heurtoir, et/ou d'une ultime balise de contrôle de vitesse (à distance convenue du heurtoir et contrôlant aux environs de 4 km/h) pour provoquer un ralentissement supplémentaire du train, voire son arrêt. 31 ANNEXES Annexe 1 : décision d'ouverture d'enquête. Annexe 2 : la ligne du RER C sur le parcours Paris-Invalides / Versailles Rive Gauche. Annexe 3 : choc du train contre le heurtoir de la voie 3. Annexe 4 : le bogie avant de la motrice 8912 repose sur le quai. Annexe 5 : le pupitre de conduite après l'accident. 33 Annexe 1 : Décision d'ouverture d'enquête 35 Annexe 2 : La ligne C sur le parcours Paris-Invalides ­ Versailles Rive Gauche 36 Annexe 3 : Choc contre le heurtoir de la voie 3 37 Annexe 4 : Le bogie avant de la motrice 8912 repose sur le quai 38 Annexe 5 : Pupitre de conduite Z8912 Poste de conduite après l'accident ­ 13/08/2007 Bouton poussoir d'urgence enfoncé 39 BEA-TT Bureau d'Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre Tour Pascal B 92055 La Défense cedex téléphone : 33 (0) 1 40 81 21 83 télécopie : 33 (0) 1 40 81 21 50 mèl : Cgpc.Beatt@equipement.gouv.fr web : www.bea-tt.equipement.gouv.fr

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