Échouement du lougre chasse-marée LA BELLE ANGÈLE le 17 octobre 2017, en sortie de l'Aber Wrac'h - Rapport d'enquête

Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les événements de mer
Auteur secondaire
Résumé
Ce rapport du BEAmer porte sur le l'échouement du lougre chasse-marée LA BELLE ANGÈLE, le 17 octobre 2017. Cet accident a fait une victime. L'analyse porte sur l'échouement sur le plateau rocheux et le skipper emporté par une déferlante. Le BEAmer recommande : - de sensibiliser les skippers aux impératifs de préparation et d'organisation des navigations qu'ils ont à effectuer, notamment lorsque celles-ci ne sont pas routinières ; - de rappeler aux skippers, l'obligation de faire un briefing de sécurité avant le départ.
Editeur
BEAmer
Descripteur Urbamet
accident ; sécurité ; prévention des risques
Descripteur écoplanete
Thème
Transports
Texte intégral
Rapport d'enquête Échouement du lougre chasse-marée LA BELLE ANGÈLE le 17 octobre 2017, en sortie de l'Aber Wrac'h (une victime) Rapport publié : mai 2018 Rapport d'enquête Échouement du lougre chasse-marée LA BELLE ANGÈLE le 17 octobre 2017 en sortie de l'Aber Wrac'h (une victime) Page 1 sur 22 Page 2 sur 22 Avertissement Le présent rapport a été établi conformément aux dispositions du Code des transports, notamment ses articles L.1621-1 à L.1622-2 et R.1621-1 à R.1621-38 relatifs aux enquêtes techniques et aux enquêtes de sécurité après un événement de mer, un accident ou un incident de transport terrestre et portant les mesures de transposition de la directive 2009/18/CE établissant les principes fondamentaux régissant les enquêtes sur les accidents dans le secteur des transports maritimes ainsi qu'à celles du « Code pour la conduite des enquêtes sur les accidents » de l'Organisation Maritime Internationale (OMI), résolution MSC 255(84) publié par décret n° 2010-1577 du 16 décembre 2010. Il exprime les conclusions auxquelles sont parvenus les enquêteurs du BEAmer sur les circonstances et les causes de l'événement analysé et propose des recommandations de sécurité. Conformément aux dispositions susvisées, l'analyse de cet événement n'a pas été conduite de façon à établir ou attribuer des fautes à caractère pénal ou encore à évaluer des responsabilités individuelles ou collectives à caractère civil. Son seul objectif est d'améliorer la sécurité maritime et la prévention de la pollution par les navires et d'en tirer des enseignements susceptibles de prévenir de futurs sinistres du même type. En conséquence, l'utilisation de ce rapport à d'autres fins que la prévention pourrait conduire à des interprétations erronées. Pour information, la version officielle du rapport est la version française. La traduction en anglais lorsqu'elle est proposée se veut faciliter la lecture aux non-francophones. Page 3 sur 22 1 2 Résumé Informations factuelles 2.1 2.2 2.3 2.4 2.5 2.6 Contexte Navire Équipage Voyage Accident Intervention Page 5 Page Page Page Page Page Page Page Page Page Page Page Page 5 6 7 7 8 8 9 11 12 13 14 15 3 4 Exposé Analyse 4.1 4.2 L'échouement sur le plateau rocheux Le skipper emporté par une déferlante 5 6 7 Conclusions Recommandations Annexes A. B. C. D. E. F. Liste des abréviations Décision d'enquête Séquence des évènements Carte Photos Plan d'ensemble Page Page Page Page Page Page 17 18 19 20 21 22 Page 4 sur 22 1 Résumé Le 17 octobre 2017 bien avant l'aube, le lougre chasse-marée LA BELLE ANGÈLE appareille du port de l'Aber Wrac'h à destination de Concarneau. Le navire a effectué la première partie du voyage depuis Saint-Malo le 15 octobre et est resté à quai à l'Aber Wrac'h toute la journée du 16 octobre pour des raisons de condition météorologique et d'un état de la mer défavorable à une navigation. Au cours du chenalage, en sortie du port de l'Aber Wrac'h, le skipper a des doutes sur l'état de la mer à la sortie du chenal. Une confirmation de forte houle potentielle obtenue auprès du CROSS Corsen l'incite à faire demi-tour. Le demi-tour, effectué difficilement, rapproche dangereusement LA BELLE ANGÈLE des rochers où il s'échoue, drossé par la houle. Peu après le skipper est emporté à la mer par une déferlante qui balaie le pont. Il sera retrouvé décédé dans la matinée à proximité du navire. L'intervention de la SNSM coordonnée par le CROSS Corsen a permis le sauvetage des six personnes restées à bord et leur évacuation par hélicoptère. Le navire sera complètement détruit par les assauts de la mer lors des marées suivantes. 2 2.1 Informations factuelles Contexte L'association loi de 1901 LA BELLE ANGELE DU PAYS DES AVENS a été créée en 1991 dans le but de construire le lougre LA BELLE ANGÈLE, inspiré des plans du chasse-marée L'UTILE. Cette construction s'inscrivait dans le cadre du concours des bateaux des côtes de France organisé par la revue CHASSE MARÉE. Aujourd'hui, l'association est forte de 150 membres et gère 4 bateaux : LA BELLE ANGÈLE, le VEGA, misainier de 5 m, L'AUSTERLITZ, maquereautier de 6,80 m et le YANN YOUN, une Page 5 sur 22 chaloupe à deux mâts. Outre la gestion de ses bateaux, l'association organise des évènements liés au patrimoine maritime : la fête annuelle de LA BELLE ANGÈLE, à Pont-Aven au mois d'août, qui rassemble une cinquantaine de bateaux anciens, une exposition de photos, des stages découverte de charpente de marine en partenariat avec le lycée de Pont-Aven. La SAS BRETAGNE MARINE CROISIÈRES est une société qui propose des sorties en mer à bord de répliques de navires anciens l'ÉTOILE DU ROY et LE RENARD et de navires anciens l'ÉTOILE MOLÈNE et l'ÉTOILE DE FRANCE. Confrontée à des difficultés dans la gestion de l'exploitation touristique des navires traditionnels, l'association a confié LA BELLE ANGÈLE à la société ÉTOILE MARINE CROISIÈRES ancien nom de la société BRETAGNE MARINE CROISIÈRES avant sa reprise en 2016. LA BELLE ANGÈLE est affrétée coque nue par contrat de trois ans avec tacite reconduction. Le navire est mis à disposition gratuite par son propriétaire (l'association) et exploité par la société BRETAGNE MARINE CROISIÈRES, qui arme le navire de début avril à la mi-octobre, à partir du port de Saint-Malo. L'entretien courant est pris en charge par l'armateur et, par accord tacite, LA BELLE ANGÈLE participe à la fête éponyme à Pont-Aven chaque été et est désarmée hors saison dans ce port. Les membres de l'association peuvent embarquer gratuitement durant la saison s'ils sont à jour de leurs cotisations et s'il y a des places disponibles. Ils peuvent aussi embarquer durant les convoyages et durant la fête de LA BELLE ANGÈLE. 2.2 Navire LA BELLE ANGÈLE est un lougre chasse-marée, réplique à l'identique d'un navire de la fin du 19ème siècle ayant exercé le cabotage entre les différents ports de l'Atlantique et les Iles bretonnes. Il est en bois et a été construit par le chantier du Guip. Il est armé en navire de plaisance à utilisation commerciale (NUC) et possède un permis de navigation en 3ème catégorie en cours de validité le jour de l'accident (daté du 21 avril 2017). Il peut donc naviguer jusqu'à vingt milles de la terre la plus proche. Page 6 sur 22 Caractéristiques principales du navire : © Wikimedia Commons Immatriculation Longueur de coque Largeur Jauge brute Puissance du moteur Année de construction : CC791463 : 14,55 m : 4,58 m : 13 UMS : 81 kW : 1991 2.3 Equipage L'équipage au moment de l'accident est composé : du skipper / chef de bord, âgé de 43 ans, il était breveté Capitaine 200 voile et possédait tous les certificats STCW nécessaires à l'exercice de la fonction. Skipper en titre du RENARD (19 mètres), il avait un an et demi d'expérience comme chef de bord NUC et cinq ans comme équipier. La visite médicale du skipper est datée du 19 septembre 2016. Il était apte pour toutes fonctions et toutes navigations pendant 24 mois, du matelot / équipier, âgé de 49 ans, il est titulaire du certificat d'instruction nautique. Il a cinq ans d'expérience comme équipier. Il est également à jour de sa visite médicale d'aptitude datée du 3 mars 2017. Sont aussi à bord au moment de l'accident un passager embarqué par connaissance et quatre passagers membres de l'association dont trois ont une expérience du navire et de la navigation à la voile. Décision d'effectif : La décision d'effectif approuvée par l'administration des affaires maritimes le 4 mars 2016, prévoyait, pour les sorties à la mer d'une durée inférieure à 24 heures, un effectif minimum de deux marins et trois marins pour des sorties à la mer de 24 heures et plus. 2.4 Voyage Le voyage avait pour but le convoyage de LA BELLE ANGÈLE de Saint-Malo (port d'exploitation) vers Pont-Aven (port d'hivernage). Le navire a donc appareillé de Saint-Malo le dimanche 15 octobre à destination de Roscoff ou de l'Aber Wrac'h, suivant l'évolution de la météo, pour une Page 7 sur 22 arrivée fixée avant 20 heures. Un fort coup de vent étant prévu le lundi, c'est le port de l'Aber Wrac'h qui est choisi pour une journée d'escale. Le départ de l'Aber Wrac'h est décidé pour le mardi 17 octobre vers 5 heures pour le deuxième segment du voyage, qui devait se dérouler entre ce port et le port de Camaret ou de Concarneau, le port d'escale étant choisi en fonction de l'heure de la marée pour le passage dans le Raz de Sein afin de tenir compte des courants. Un balisage lumineux et deux alignements également lumineux sécurisent la navigation de nuit dans le chenal de l'Aber Wrac'h. LA BELLE ANGÈLE devait enfin rallier Pont-Aven en troisième partie de voyage. 2.5 Accident Le mardi 17 octobre à 05h49 (TU+2), LA BELLE ANGÈLE s'échoue sur un plateau rocheux à une encablure dans le nord-ouest de l'Ile de la Croix, alors qu'il chenale pour sortir de l'Aber Wrac'h. Le navire s'est échoué une heure après la pleine mer après avoir effectué un demi-tour pour rebrousser chemin. Le navire est échoué sur bâbord et une partie du bordé de coque est éventré. La barre, qui est une barre franche se manipulant à l'aide d'un palan, s'est cassée lors de l'échouement. Des déferlantes balaient alors le pont et le skipper est emporté à la mer et sera retrouvé décédé quelques heures plus tard. À la demande de l'autorité judiciaire, une autopsie a été effectuée. Le rapport d'autopsie conclue à un décès par noyade et souligne également la consommation de cannabis dans les heures ou les jours qui ont précédés l'accident. Les six autres personnes présentes à bord seront sauvées. LA BELLE ANGÈLE sera entièrement détruit lors des marées suivantes et des fragments d'épave seront retrouvés quelques jours après à Brignogan-Plages, à douze milles du lieu du naufrage. Les morceaux de l'épave restés sur les lieux ont étés récupérés par une société de renflouement. 2.6 Intervention Le mardi 17 octobre 2017 à 05h49 (TU+2), le CROSS Corsen reçoit un MAYDAY d'un navire se signalant dans les cailloux devant l'Aber Wrac'h. Page 8 sur 22 À 05h50, le canot tout-temps SNS064 est mis en alerte et appareille à 06h13. D'autres moyens sont engagés : l'hélicoptère DRAGON 29 de la sécurité civile, deux BLS (Bateaux Légers de Sauvetage) et deux véhicules pompiers VSAV. À 06h28, le SNS064 aperçoit le voilier LA BELLE ANGÈLE dans les rochers à proximité de l'Ile de la Croix. L'annexe pneumatique est mise à l'eau armée par deux plongeurs. En arrivant près du voilier, une vague déferlante oblige les plongeurs à sauter à l'eau et le canot pneumatique va s'échouer sur le plateau rocheux. Les deux plongeurs parviennent à monter à bord de LA BELLE ANGÈLE, ils dénombrent six personnes et apprennent que le skipper a disparu. À partir de 07h10, DRAGON 29 hélitreuille les naufragés deux par deux, pour les déposer sur la zone aménagée près du port de l'Aber Wrac'h où ils sont pris en charge par les équipes médicales. À 08h08, le SNS447 appareille pour aider le SNS064 dans la recherche du disparu. À 08h20, DRAGON 29, en fin de potentiel, quitte la zone et est remplacé par un hélicoptère NH90-CAIMAN de la Marine nationale. Tous les moyens disponibles effectuent alors des recherches pour retrouver le disparu. À 10h05, le SNS447 découvre la veste de quart rouge du skipper. À 10h45, le NH90 aperçoit une masse sombre, il met son plongeur à l'eau. À 10h56, le corps du skipper est à bord du SNS447 et le décès est constaté à 11h10 par le médecin. Le corps est alors pris en charge par l'officier de police judiciaire et tous les moyens ont liberté de manoeuvre et rallient leurs bases. 3 Exposé Le dimanche 15 octobre 2017 à 02h00 (TU+2), départ de Saint-Malo à destination de l'Aber Wrac'h. La navigation s'effectue à la voile et au moteur. Le skipper et le matelot se partagent le quart (3 heures chacun) et le seul passager présent aide aux manoeuvres. La traversée se déroule dans de bonnes conditions, le seul incident est la perte de la VHF portable tombée à la mer. Arrivé à l'Aber Wrac'h vers 20h30, le navire est amarré au ponton extérieur. Page 9 sur 22 Le lundi 16 octobre, jour de relâche au port où quatre autres passagers sont attendus dans l'après-midi. C'est la fin du passage de la tempête Ophélia et la mer est blanche d'écume dans le chenal. Régulièrement, le skipper consulte différentes applications de prévisions météorologiques sur son smartphone. Vers 17h00, le skipper rend visite à la capitainerie pour régler les formalités administratives et consulter le bulletin météo. Pendant ce temps les quatre passagers arrivés à l'Aber Wrac'h embarquent. La soirée est consacrée à la détente et le repas se prolonge jusqu'à minuit ; le skipper annonce dans la soirée son intention de partir le lendemain matin à 05h00 à destination de Concarneau. Le mardi 17 octobre, la pleine mer (coeff. 77) est à 04h39 et le lever du jour à 08h40, au petit matin il fait encore nuit noire. Le Sitrep (source Météo-France) indique : vent de sud force 2 (vitesse comprise entre 6 et 8 noeuds), mer 4 (agitée, hauteur des vagues de 1,25 à 2,50 mètres), visibilité 8 milles, température de la mer et de l'air 15°C. Le skipper prépare le navire à 04h00 et les amarres sont larguées à 05h00. Le skipper est à la barre, le matelot et deux passagers sont sur le pont et aident à la manoeuvre, le reste des passagers est dans le poste et prend son petit déjeuner. Immédiatement la grand-voile avec un ris et le foc sont hissés et le navire commence son chenalage au moteur vers la sortie de l'Aber Wrac'h. Le vent est insuffisant, seul le moteur assure la propulsion. Le navire tangue en prenant une grande houle de face, le skipper contacte le CROSS Corsen sur VHF canal 16 pour avoir une estimation de la houle à la sortie de l'Aber Wrac'h. Les prévisions indiquant une houle de 5 à 7 mètres, le skipper décide alors de faire demi-tour. Vers 05h40, la giration est entamée par la gauche. L'angle maximal de barre ne pouvant être obtenu avec les palans, le skipper se fait aider par le matelot et un passager pour pousser la barre en butée. Le demi-tour effectué, les personnes présentes sur le pont notent que le skipper semble incertain sur sa position et entendent la mer briser sur des rochers proches. Le passager situé à l'avant du navire aperçoit et signale des rochers droit devant. Un choc violent est ressenti, puis un deuxième et le navire s'échoue sur bâbord, cap au sud-est. À 05h49, le skipper lance un MAYDAY sur VHF canal 16 puis demande aux passagers de capeler leurs brassières. Les passagers s'équipent dans la cabine tandis que le skipper se Page 10 sur 22 dirige vers l'avant pour larguer un radeau de survie. Le skipper demande au matelot qui se tient plus sur l'arrière de lui fournir un couteau ; quand celui-ci relève la tête pour se diriger vers l'avant avec un couteau, le skipper a disparu. Les passagers se regroupent sur le pont et attendent les secours. La coque est éventrée et un réservoir de gasoil est écrasé. Du gasoil répandu sur le pont le rend glissant. LA BELLE ANGÈLE 4 Analyse La méthode retenue pour cette analyse est celle qui est préconisée par la Résolution A28 / Res 1075 de l'OMI « directives destinées à aider les enquêteurs à appliquer le code pour les enquêtes sur les accidents (Résolution MSC 255 (84)) ». Le BEAmer a en premier lieu établi la séquence des événements ayant entrainé les deux accidents, à savoir : 1. L'échouement sur le plateau rocheux ; 2. Le skipper emporté par une déferlante. Dans cette séquence, les événements dits perturbateurs (événements déterminants ayant entrainé l'accident et jugés significatifs et inappropriés) ont été identifiés. Ceux-ci ont été analysés en considérant les éléments naturels, matériels, humains et procéduraux afin d'identifier les facteurs ayant contribué à leur apparition ou ayant contribué à aggraver leurs conséquences. Page 11 sur 22 Parmi ces facteurs, ceux qui faisaient apparaître des problèmes de sécurité présentant des risques pour lesquels les défenses existantes étaient jugées inadéquates ou manquantes ont été mis en évidence (facteurs contributifs). Les facteurs sans influence sur le cours des événements ont été écartés, et seuls ceux qui pourraient, avec un degré appréciable, avoir pesé sur le déroulement des faits ont été retenus. 4.1 L'échouement sur le plateau rocheux Décision d'appareiller de nuit : Ni le skipper, ni le matelot et les passagers n'ont d'impératifs de date pour ramener le navire à Pont-Aven. L'escale d'une journée à l'Aber Wrac'h, pour laisser passer la tempête Ophelia, est une sage décision. La météo a été soigneusement scrutée pour envisager un départ le 17 octobre tôt le matin. Cependant, la potentialité d'une houle résiduelle aussi importante à cet endroit après le passage de la tempête n'a pas été soupçonnée avant le départ. L'appareillage effectué tôt le matin par une nuit sans lune n'a pas permis d'observer l'état réel de la mer. Le skipper se fiant semble-t-il uniquement à la prévision de la veille. La prise en compte tardive de l'état de la mer via une information donnée par le CROSS Corsen, alors qu'il est déjà dans le chenal, est le premier facteur contributif du premier accident. Décision de faire demi-tour trop près des roches des Îles de la Croix : Le skipper n'a pas l'habitude de fréquenter le port de l'Aber Wrac'h. La préparation du voyage en utilisant la documentation nautique n'a pas été effectuée. L'utilisation des alignements pour le chenalage aurait aidé le skipper dans sa navigation et le choix d'une zone plus favorable au demi-tour. L'absence de préparation de la navigation dans un chenal dont il n'est pas familier, alors que l'obscurité et l'incertitude sur l'état de la mer rendent celle-ci plus délicate, est le second facteur contributif du premier accident. L'attribution des rôles n'a pas été effectuée. Le skipper ne s'est pas déchargé de tâches particulières ; il est resté à la barre pendant tout le chenalage. L'utilisation de la VHF pour prendre la météo auprès du CROSS Corsen a sans doute détourné son attention de la navigation pendant un court moment. Page 12 sur 22 Les compétences présentes à bord n'ont pas été exploitées ; le skipper aurait pu confier la barre au matelot ou à un passager expérimenté pour se concentrer sur la navigation. Le traceur GPS est positionné dans le poste, sur la cloison murale de la table à carte. L'écran du GPS est de format 10x15 et est situé en contrebas du barreur à une distance d'environ 3 m. Dans ces conditions, un suivi suffisamment précis de la navigation n'est pas possible sans quitter la barre. © Association le chasse marée du pays des Avens GPS Table à carte La présence permanente du skipper à la barre et l'absence de répartition des rôles, alors que le navire est en eaux resserrées, est le troisième facteur contributif du premier accident. La combinaison de ces facteurs a conduit le skipper à une appréciation erronée de sa position et à effectuer un demi-tour trop près des roches des Îles de la Croix. Le briefing préalable au départ concernant la sécurité des passagers, la position et l'utilisation des matériels de sécurité n'a pas été effectué. 4.2 Le skipper emporté par une déferlante Après que LA BELLE ANGÈLE s'est échoué, le skipper a envoyé un MAYDAY, puis a demandé aux Page 13 sur 22 passagers de capeler leurs brassières. Le matelot s'occupe alors de larguer les radeaux arrière tandis que le skipper décide de se rendre sur l'avant pour y larguer le radeau de survie. Dans l'urgence, bien que les vagues déferlent sur le pont, il se dirige vers l'avant sans avoir capelé une brassière de sauvetage. L'absence de précautions prises par le skipper pour se rendre sur l'avant est un facteur contributif du deuxième accident. Par ailleurs, la décision de mettre les radeaux en oeuvre alors que le navire est échoué et que la mer déferle violemment n'est pas pertinente. 5 Conclusions Le lougre chasse-marée LA BELLE ANGÈLE a appareillé de l'Aber Wrac'h le 17 octobre tôt le matin par une nuit sans lune ne permettant pas d'observer l'état réel de la mer. En l'absence de préparation de la navigation dans le chenal le skipper n'a pas pu anticiper le choix d'une zone appropriée pour effectuer un demi-tour dans de bonnes conditions. La non répartition des rôles et la présence permanente du skipper à la barre, combiné à une lecture difficile du GPS, a conduit à une appréciation erronée de la position. Dans la précipitation, le skipper s'est rendu sur l'avant sans précautions particulières et a été emporté par une déferlante. Le navire est en perte totale et le skipper est décédé ; le matelot et les passagers ont été sauvés grâce à une intervention efficace des moyens de secours. Page 14 sur 22 6 Recommandations Le BEAmer recommande : À l'armement : 1. 2018-R-08 : de sensibiliser les skippers aux impératifs de préparation et d'organisation des navigations qu'ils ont à effectuer, notamment lorsque celles-ci ne sont pas routinières. 2. 2018-R-09 : de rappeler aux skippers, l'obligation de faire un briefing de sécurité avant le départ. Page 15 sur 22 Liste des annexes A. B. C. D. E. F. Liste des abréviations Décision d'enquête Séquence des évènements Carte Photos Plan d'ensemble Page 16 sur 22 Annexe A Liste des abréviations BEAmer BLS CROSS GPS : Bureau d'enquêtes sur les évènements de mer : Bateau Légers de Sauvetage : Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage : Global Positionning System MAYDAY : Message de détresse SNSM STCW UMS VFI VHF VSAV : Société Nationale de Sauvetage en Mer : Standards of Training, Certification and Watchkeeping for Seafarers : Universal Measurement System : Unité de jauge brute : Vêtement à Flottabilité Intégrée : Very High Frequency : Equipement radio fonctionnant sur très haute fréquence : Véhicule de Secours et d'Assistance Aux Victimes Page 17 sur 22 Annexe B Décision d'enquête Page 18 sur 22 Séquence des évènements Pas de planification de la navigation dans le chenal Pas de diistribution des rôles Traceur GPS peu visible par l'homme de barre Skipper à la barre Passage de la dépression Grosse houle résiduelle Mauvaise évaluation de l'état de la mer Mauvaise apréciation de la position Décision d'appareiller de nuit Tangage et roulis/ Contact CROSS pour la météo Décision demi tour trop près des cailloux La houle le pousse sur le récif Echouement Perte du navire Décision va à l'AV Absence de ligne de vie Skipper emporté par une déferlante Annexe C Page 19 sur 22 Skipper décède Annexe D Carte Page 20 sur 22 Annexe E Photos Page 21 sur 22 Annexe F Plan d'ensemble Page 22 sur 22 Ministère de la Transition écologique et solidaire Bureau d'enquêtes sur les évènements de mer Arche sud - 92055 La Défense cedex téléphone : +33 (0) 1 40 81 38 24 bea-mer@developpement-durable.gouv.fr www.bea-mer.developpement-durable.gouv.fr

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