Développement des véhicules autonomes : orientations stratégiques pour l'action publique
IDRAC, Anne-Marie
Auteur moral
Auteur secondaire
Résumé
Ce rapport constitue le cadre stratégique dans lequel s'inscrira l'action de l'État pour le développement des véhicules automatisés ou autonomes. Il aborde ainsi de façon complète l'ensemble des questions que soulève le développement des véhicules autonomes. Il présente une série de dix actions prioritaires visant à faciliter l'émergence et le développement de ces technologies, à aider la filière française à se positionner sur ce marché particulièrement porteur, mais aussi à relever le défi de la sécurité et de l'acceptabilité de ces innovations (cyber-sécurité, protection des données personnelles, enregistreur de données à bord, données produites par le véhicule automatisé).
Descripteur Urbamet
action politique
;méthodologie du projet
;innovation
;expérimentation
;sécurité
;cybersécurité
Descripteur écoplanete
réglementation
;traitement de données
;base de données
Thème
Transports
Texte intégral
Orientations stratégiques pour l'action publique
DÉVELOPPEMENT DES VÉHICULES AUTONOMES
Mai 2018
2
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
3
Extraits du discours de Monsieur Emmanuel MACRON, Président de la République sur l'Intelligence Artificielle Paris Collège de France Jeudi 29 mars 2018 [...] Je veux prendre un exemple, expliquer en quoi l'Etat peut justement, sur ce cadre régulatoire, pleinement accompagner l'innovation. C'est l'exemple de la voiture autonome [...] Je considère que c'est une bataille essentielle [...]. La France est une grande nation automobile, nous y avons notre rôle historique [...]. D'ici 2022, un cadre de régulation permettant la circulation des véhicules autonomes sera mis en place. En bout de chaîne, j'ai la volonté de poser au plus vite le cadre d'homologation des véhicules autonomes, en mobilisant à la fois la puissance publique et le secteur privé. Parce que précisément, ce mouvement des véhicules autonomes exige une courbe d'apprentissage, nous financerons un programme national d'expérimentation en impliquant les territoires, les constructeurs et les équipementiers. Et donc nous aurons très rapidement des expérimentations sur des territoires, qui seront volontaires, en en définissant le cadre juridique d'exception, et je souhaite que nous puissions mettre autour de la table l'ensemble de ces acteurs nationaux pour travailler sur des sujets que sont, justement, les bases de données de tests, la cartographie [...]. Nous avons, en la matière, une stratégie française qui va donc se déployer, mais qui doit très rapidement devenir une stratégie franco-allemande et une stratégie européenne [...] Si nous voulons garder l'équilibre européen et la capacité à réguler qui est la nôtre, il faut absolument construire ce cadre de régulation [...].
NB : extraits de la transcription du discours, seul le prononcé fait foi
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
4
Avant-propos
Le document ci-après constitue la cadre stratégique dans lequel s'inscrira tl'action de l'Etat pour le développement des véhicules autonomes à échéance 2020 à 2022. Sa publication constitue, après de larges consultations, le premier aboutissement de la mission qui m'a été confiée par lettre des Ministres de l'intérieur, de l'économie et des finances, des transports et du Secrétaire d'Etat chargé du Numérique en date du 24 novembre 2017 Cette action volontariste est transverse, non seulement en raison de son caractère interministériel, mais parce qu'elle revêt trois dimensions :
Le développement des véhicules autonomes recouvre d'abord des évolutions technologiques et industrielles : progressivement mais rapidement, et dans des situations de plus en plus variées (les « cas d'usage »), il devient possible de confier en sécurité à des outils et systèmes une part croissante des fonctions complexes de conduite de véhicules terrestres.
o
Ces innovations concernent les véhicules particuliers, mais aussi les véhicules de type navettes de transport collectif, et la logistique. Leur développement est l'une des missions identifiées pour la filière automobile par le Conseil National de l'Industrie. L'objectif est de faciliter l'émergence, puis le déploiement, de technologies innovantes en matière d'autonomie de conduite ; pour cela d'accompagner, à leur rythme les progrès technologiques proposés par les industriels, en s'assurant d'un haut niveau de sécurité : il n'y aura pas de confiance dans les nouveaux usages sans sécurité À ce stade, il s'agit encore d'expérimentations, comme dans la plupart des pays, mais les pouvoirs publics ont d'ores et déjà pris en compte les possibles circulations en vraie grandeur dans certains cas d'usages tels par exemple la circulation sur autoroute, en embouteillage, ou sur itinéraires dédiés. La France fera ainsi évoluer autant et aussi rapidement que nécessaire, et compte tenu des cadres internationaux et européens, tant les réglementations techniques fondant l'homologation des véhicules, que les règles de circulation et de conduite.
o
o
o
Ensuite, l'arrivée de véhicules autonomes n'est pas dissociable des évolutions tendant à des mobilités plus propres, plus accessibles, et plus connectées soutenues par des acteurs publics et privés.
o
Les Assises Nationales de la Mobilité portées par la Ministre chargée des transports Elisabeth Borne ont révélé l'ampleur des mutations en cours et à venir, concernant tant les besoins sociaux et territoriaux que les politiques à conduire pour y répondre.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
5
o
L'objectif est de tirer pleinement parti des potentialités des véhicules autonomes en matière de mobilités rénovées. Les systèmes sans conducteur révèlent de nouvelles opportunités de développement des offres de services, sur certains segments de la demande -dans le temps ou dans l'espace ; associés à de nouvelles formes d'auto-partage ou de transport à la demande, ils peuvent aussi modifier les limites entre transport individuel et collectif. Il est vraisemblable que des offres de service concernant les mobilités partagées, avec des niveaux d'autonomie plus élevés, se déploieront plus tôt que les pratiques individuelles. Les pouvoirs publics faciliteront l'émergence de nouvelles offres, notamment de nouveaux modes de gestion des flottes de véhicules, au rythme des évolutions de modèles socio-économiques promus par les opérateurs de mobilité, et des politiques conduites par les collectivités. Qu'il s'agisse de véhicules destinés à des usages privés ou collectifs, les ressources financières disponibles au niveau national - tels les leviers du Grand Plan d'investissement et du Programme d'investissements d'avenir, - ou au niveau européen seront mobilisées pour accélérer et coordonner les expérimentations correspondant à l'état actuel des besoins de développement.
o
o
o
Enfin, c'est tout l'écosystème des mobilités qui va devoir s'adapter : il n'est pas besoin à ce stade, compte tenu de l'état des évolutions technologiques, de résoudre l'ensemble des questions soulevées par l'arrivée progressive de véhicules autonomes sur nos routes et dans nos villes.
o
Toutefois, le document anticipe en posant les bases de travaux à poursuivre dans plusieurs domaines importants : en matière d'assurances et de responsabilité, d'infrastructures et d'équipements dans les différents territoires, de données, d'emplois et de compétences... Les questions éthiques devront aussi être abordées, et globalement celles de l'acceptabilité de ces nouveaux systèmes, non seulement par leurs utilisateurs mais par les autres usagers des voies de circulations et des espaces publics.
o
Le cadre stratégique présenté ci-après vise à adresser l'ensemble de ces enjeux. Il constituera le socle de l'action de l'Etat en faveur du développement des véhicules autonomes. Il sera amené à évoluer en fonction de l'évolution des besoins, pour que le développement des véhicules autonomes se fasse au service de la mobilité de nos citoyens et de nos territoires, et s'appuie sur les acteurs de cette transformation, entreprises, laboratoires et collectivités territoriales. Anne-Marie IDRAC Ancienne Ministre Haute responsable pour la stratégie de développement du véhicule autonome
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
6
Sommaire
1. Résumé exécutif................................................................................................................................ 9 2. Contexte, objectifs et portée du document....................................................................................... 13 3. Introduction et état des lieux........................................................................................................... 15 3.1. Développement de l'automatisation, lien avec la connexion du véhicule .................................15 3.2. Eléments de définition pour la conception des politiques publiques......................................... 18 3.3. Eléments prospectifs................................................................................................................. 20 3.4. Impacts attendus ou visés, enjeux de connaissance................................................................... 22 3.5. Cadre international existant et principaux enjeux d'évolution.................................................. 25 3.5.1. Réglementation internationale de la circulation routière et des véhicules ..........................25 3.6. Coopérations bilatérales............................................................................................................ 30 4. Orientations stratégiques pour l'action publique.............................................................................. 31 4.1. Synthèse des attentes et principes d'action publique................................................................. 31 4.2. Cadre législatif et réglementaire............................................................................................... 38 4.2.1. Développement des cas d'usage et évolution des règles relatives à la conduite .................38 4.2.2. Enjeux de responsabilité.................................................................................................... 39 4.2.3. Formation et information du conducteur............................................................................ 41 4.2.4. Identification des véhicules................................................................................................ 43 4.2.5. Evolution de la réglementation technique et de l'homologation des véhicules ..................43 4.2.6. Cadre spécifique aux transports publics automatisés......................................................... 47 4.2.7. Enjeux d'interopérabilité et de coordination de la supervision...........................................48 4.3. Expérimentations, innovation, recherche.................................................................................. 49 4.3.1. Expérimentations............................................................................................................... 49 4.3.2. Principaux enjeux de recherche scientifique...................................................................... 54 4.3.3. Priorités de recherche à l'appui des politiques publiques................................................... 56 4.3.4. Modalités de soutien à l'innovation................................................................................... 58 4.4. Aspects numériques et données................................................................................................ 60 4.4.1. Cyber-sécurité.................................................................................................................... 60 4.4.2. Protection des données personnelles.................................................................................. 62 4.4.3. Enregistreur de données à bord.......................................................................................... 65 4.4.4. Données produites par le véhicule automatisé................................................................... 67 4.5. Liens avec l'infrastructure, connectivité, cartographie .............................................................. 71 4.5.1. Identification des domaines d'emploi sur les réseaux routiers ...........................................71 4.5.2. Liens avec les enjeux du véhicule connecté....................................................................... 72 4.5.3. Développement de la cartographie numérique de précision............................................... 76 4.6. Aspects économiques et sociétaux, gouvernance, cadres de travail ..........................................79 4.6.1. Enjeux industriels et d'emploi........................................................................................... 79 4.6.2. Enjeux d'acceptabilité........................................................................................................ 80 4.6.3. Gouvernance et cadres de travail....................................................................................... 81 5. Récapitulatif des actions.................................................................................................................. 84 Annexe : Synthèse des retours des consultations.................................................................................. 89 Annexe : Expérimentations : besoins d'évaluation des cas d'usage et de leur sécurité.........................93
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
7
1. Résumé exécutif Le développement du véhicule automatisé ou autonome représente un enjeu considérable pour les politiques des transports et de sécurité, notamment de sécurité routière, et l'industrie française. Plus précisément, les enjeux stratégiques identifiés par l'Etat sont de plusieurs ordres : usages et territoires : il s'agit de s'assurer de l'adéquation des services permis par l'automatisation, avec les besoins des citoyens et des territoires et notamment de tirer pleinement parti des potentialités des véhicules autonomes en matière de mobilités. Associés à de nouvelles formes d'auto-partage ou de transport à la demande, ils peuvent aussi modifier les limites entre transport individuel et collectif. Il importe de favoriser l'émergence de nouveaux modèles économiques et tout en assurant la cohérence de ces services avec les politiques de mobilité locales et les capacités à déployer des infrastructures adaptées au véhicule autonome ; sécurité : il s'agit de s'assurer que les systèmes développés sont conformes aux attentes de sécurité individuelles et sociétales, tant sur la sécurité routière que sur la cyber-sécurité ou encore la protection des données individuelles. La construction de systèmes de validation robustes est une priorité ; acceptabilité : elle est une condition sine qua non du développement du véhicule automatisé. Elle ne doit pas être considérée comme acquise : outre les enjeux de sécurité et d'adéquation aux usages, d'autres effets de l'automatisation conditionnent l'acceptabilité : impacts sur les mobilités et leur empreinte environnementale, emploi, équité territoriale... compétitivité et emploi : au plan technologique et industriel, il s'agit que le développement des véhicules autonomes bénéficient à nos filières innovantes. Il s'agit donc, par un contexte favorable à l'expérimentation, de favoriser le développement et la maîtrise de nombreuses technologies, en termes de détection, de traitement des données, de localisation, d'algorithmique, et de s'assurer de retombées positives sur l'activité de nos territoires ; coopération européenne et internationale : le contexte international se caractérise à la fois par une concurrence aigüe entre acteurs industriels et territoires, et le développement de coopérations actives entre Etats, en vue d'assurer un développement sûr de ces technologies, et le bon fonctionnement des marchés. Par ailleurs, la France est soumise au respect de règles internationales relatives à la circulation routière et à la réglementation technique des véhicules. Il est nécessaire de tenir compte de ce cadre international, pour qu'il ne soit pas une contrainte, mais, grâce notamment à la coopération européenne, une force pour le développement de technologies sûres et interopérables correspondant aux attentes de nos citoyens. l'Europe constitue un cadre privilégié pour élaborer le cadre de déploiement des véhicules autonomes, compte-tenu du marché concerné et des besoins d'interopérabilité ; ce cadre doit s'élaborer dans le respect du principe de subsidiarité, notamment pour définir les usages répondant aux attentes des territoires, et l'insertion de la conduite autonome dans les politiques de mobilité ; dans ce contexte, apparaissent particulièrement importants :
-
-
-
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
8 o
l'élaboration, au niveau européen, au besoin de façon transitoire par rapport à la réglementation au niveau de l'ONU, d'une réglementation technique des véhicules garantissant leur sécurité et des procédures d'homologation transparentes et efficaces ; le financement d'un programme européen de recherche-innovationexpérimentation-pré-déploiement, en associant étroitement les autorités publiques (gestionnaires routiers, autorités de sécurité routière, autorités de cybersécurité) à son pilotage ; l'élaboration d'un cadre européen relatif aux échanges des données produites par le véhicule en lien avec son environnement de conduite, afin de concilier les besoins des acteurs extérieurs au véhicule, les exigences de sécurité des données et d'intégrité des véhicules, le respect de principe de concurrence, et l'interopérabilité des données.
o
o
Ce document présente le cadre stratégique dans lequel s'inscrira l'action de l'Etat pour accompagner le développement des véhicules automatisés ou autonomes, par un cadre sécurisé, en tenant compte de l'évolution du cadre international et des besoins des territoires. L'objectif est également d'aider les entreprises françaises à se positionner favorablement sur les nouveaux marchés de services et de technologies liés au véhicule autonome. Pour ce faire, la France s'engage dans un développement maîtrisé et responsable du véhicule automatisé, fondé sur les principes suivants : - Progressivité de l'approche, fondée sur l'expérience (« learning by doing ») - Prééminence des enjeux de sécurité routière et de cybersécurité - Vigilance sur les impacts sur la mobilité, l'environnement et l'acceptabilité - Importance de l'expérimentation pour évaluer les impacts et les risques, en passant rapidement à des projets de grande échelle - Ouverture sur tous les cas d'usage - Coopération étroite entre autorités publiques et industriels pour élaborer un cadre réglementaire étayé par l'analyse des impacts et des risques et intégrer les enjeux d'emplois - Importance de la coopération européenne, notamment en matière d'homologation et d'interopérabilité des systèmes, et de financement de la recherche et de l'innovation.
Au niveau législatif et réglementaire, il s'agit d'abord de définir un cadre solide pour les expérimentations, notamment en termes de responsabilités, afin de couvrir la diversité des cas d'usage à tester. Il s'agit ensuite de préparer l'arrivée à maturité technologique des véhicules hautement automatisés, attendue pour les années 2020-2025, notamment en termes de règles de conduite, de régime de responsabilités, et de formation à la conduite. Le cadre de validation de la sécurité de ces systèmes doit être préparé dès maintenant, et notamment méthodes et outils de validation. Ce cadre de validation conjuguera, pour les différents cas d'usage, des éléments relevant du niveau ONU, du niveau européen, et du niveau national. La France considère que ce sujet est prioritaire et qu'il doit relever de la coconstruction avec les acteurs industriels, appuyé sur l'expérimentation.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
9
Le soutien public à l'innovation et l'expérimentation doit encourager le développement des systèmes et des cas d'usage en concourant à un socle partagé de connaissances et de méthodes d'évaluation et de validation du point de vue de la pertinence économique et sociale, de leur acceptabilité et de leur sécurité. Le développement de l'infrastructure numérique et la connectivité des réseaux routiers, peut constituer un facteur d'accélération du développement du véhicule autonome. L'évolution des technologies, notamment l'arrivée de la 5G, conduit à privilégier une approche incrémentale, fondée sur les technologies les plus matures (ITS-G5) et les réseaux les plus pertinents pour justifier des investissements en connectivité dans les territoires. Les échanges de données du véhicule autonome et connecté constituent un levier-clé pour créer de la valeur par le développement de services liés à la mobilité. Le cadre contractuel et, si besoin, règlementaire, devra contribuer à faciliter ces échanges de données, tout en étant respectant le cadre de protection des données personnelles et les exigences de cybersécurité. L'élaboration d'un cadre national tiendra compte du cadre européen, en évolution. L'animation de l'éco-système doit conjuguer, outre des compétences techniques diverses, des visions et des contributions d'acteurs très divers, au-delà de la filière automobile : services de transports, gestionnaires d'infrastructures, industries routière, des télécommunications, du numérique, de l'assurance, autorités publiques nationales et locales, le tout en assurant la transversalité entre modes de transports. Actions prioritaires Sur la base de ces principes, ce document propose des actions publiques, dont les principales sont les suivantes : 1. Construire le cadre permettant, d'ici 2020 à 2022, la circulation en France de voitures particulières, de véhicules de transport public, et de véhicules de transport de marchandises hautement automatisés. Si besoin le code de la route, les règles de responsabilité, la formation à la conduite seront adaptés. 2. Etablir un cadre national de validation des systèmes de transports publics automatisés et, au niveau européen et international (CEE-ONU), une réglementation technique et un cadre d'homologation spécifiques au véhicule autonome. 3. Intégrer dans la réglementation technique les enjeux de cybersécurité, et développer l'analyse de la menace, dans le cadre d'un groupe de travail conjoint Etat acteurs industriels. 4. Définir, sous l'animation de l'État, les règles de mise en commun des données, outils et méthodes d'évaluation et de validation des systèmes, afin de favoriser les économies d'échelle et les synergies entre acteurs pour l'accumulation de la connaissance, dans le respect des contraintes industrielles et commerciales de ces acteurs. 5. Structurer un programme national d'expérimentation, tous cas d'usage confondus (véhicule particulier, transports publics, fret et logistique), impliquant les filières industrielles et les territoires, et permettant de développer les outils de validation des systèmes. Le Programme d'investissement d'avenir (PIA) sera mobilisé pour soutenir cette démarche et maintenir le soutien financier de l'Etat (200 M déjà financés dans le cadre de différents appels à projets).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
10
6. Construire d'ici 2019 un cadre favorable aux échanges des données produites par les véhicules, permettant de contribuer d'une part à la sécurité routière, à la gestion des trafics et à l'entretien des infrastructures, d'autre part au développement de services à la mobilité. 7. Préparer un ou des plans de déploiement de la connectivité des infrastructures, notamment par l'analyse de la pertinence des différentes technologies aux cas d'usage et aux réseaux routiers concernés. 8. Encourager et accompagner le développement de la cartographie numérique de précision, notamment en mutualisant certains besoins de positionnement relatif et de validation. 9. Mettre en place un suivi des perceptions individuelles et sociales et de l'acceptabilité du véhicule autonome pour identifier les questions critiques, y compris éthiques. 10. Réaliser une analyse détaillée de l'impact du développement du véhicule autonome sur les besoins en emplois et en compétences.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
11
2. Contexte, objectifs et portée du document
Le développement du véhicule automatisé représente un enjeu considérable pour les politiques des transports et de sécurité, notamment de sécurité routière, et pour l'industrie automobile. Ce secteur constitue le deuxième employeur de France. Les évolutions technologiques permettent d'offrir des fonctionnalités de délégation de conduite de plus en plus performantes dans les véhicules. Les fonctionnalités et les domaines d'application offerts sont très divers, et concernent autant les véhicules particuliers, que les véhicules de transports collectifs, ou le transport de fret. Le développement du véhicule automatisé est susceptible de présenter des impacts majeurs sur les transports et la mobilité, en premier lieu en termes de sécurité. En termes énergétiques, le gisement d'efficacité apparaît très important. Le véhicule autonome devrait permettre une fluidification du trafic routier, en accroissant considérablement l'efficacité des mesures de régulation dynamique du trafic. Le véhicule autonome devrait également impacter fortement la mobilité urbaine, les frontières entre le véhicule individuel, le taxi ou VTC et les transports en commun s'estompant. Une telle évolution conduira à revoir les fondements des politiques de déplacements urbains. Les véhicules automatisés pourraient révolutionner non seulement les politiques de transport et de mobilité, voire d'aménagement du territoire et de gestion urbaine, mais également, dès aujourd'hui, le positionnement des segments industriels et notamment ceux de la construction automobile et de l'industrie routière face aux industriels des télécommunications, du multimédia et, plus largement de l'innovation « servicielle ». Ainsi, l'automatisation, combinée avec le développement de la connectivité des véhicules, est susceptible de modifier fondamentalement les chaînes de valeur dans le monde des transports, autour des questions de partage et de valorisation des données. Cette « révolution » s'accompagnera de phénomènes qui modifient le rôle de tous les acteurs, font évoluer les usages et déplacent l'emploi, représentant ainsi un enjeu de premier plan. Ces innovations, qui ont connu une forte accélération ces dernières années, font l'objet, en France comme dans la plupart des pays, d'une politique d'expérimentation permettant, en synthèse, de s'assurer qu'elles répondent aux exigences de sécurité routière et d'acceptabilité et concourent aux objectifs de mobilité durable. Au delà de cette étape nécessaire d'expérimentation, ces innovations appellent d'ores et déjà à examiner ou réexaminer un certain nombre d'actions publiques, notamment concernant : les règles de conduite la réglementation technique et les règles d'homologation des véhicules les règles de responsabilité (notamment conducteur / constructeur) les modalités de formation à la conduite et la réglementation du permis de conduire la recherche publique et les modalités de soutien à l'innovation l'exploitation des infrastructures et la gestion des espaces urbains
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
12
la régulation de l'économie des données, substrat de la production de services de plus en plus diversifiés et à forte valeur ajoutée, l'action des corps de contrôle, en tant que futures utilisateurs de ces véhicules autonomes et connectés, mais aussi en tant qu'enquêteurs sur ces dits véhicules.
De plus, ces innovations appellent une vigilance particulière en matière de cybersécurité et de protection des données individuelles, motivant une approche dès la conception de ces enjeux. Les registres d'action publique concernent, selon les cas : le niveau international, notamment au niveau ONU pour la réglementation de la conduite et des véhicules, le niveau européen, cadre privilégié d'intervention en matière d'interopérabilité des systèmes, le niveau national, ou le niveau régional ou local, notamment en termes de gestion des infrastructures et d'organisation des transports.
Dans son rapport d'avril 2017 sur le développement du véhicule automatisé, la mission du Conseil général de l'environnement et du développement durable et de l'Inspection générale de l'administration recommande que « [....] le gouvernement français, à l'instar de plusieurs de ses homologues à l'étranger (Etats-Unis, Allemagne, Royaume-Uni), adopte rapidement un document d'orientation générale définissant les objectifs poursuivis, le calendrier et les mesures d'accompagnement, venant en complément de la NFI. Ce travail doit trouver son prolongement dans les négociations internationales (à Bruxelles et à Genève) [...]». Ce document a été élaboré dans le cadre du groupe de pilotage mis en place par les quatre principales directions d'administration centrale françaises concernées1, en s'appuyant notamment sur les travaux de la task-force technique sur les cas d'usage, mise en place par ces administrations. Les orientations stratégiques décrites ci-dessous, tout en s'appuyant sur des éléments prospectifs à moyen-long terme, visent essentiellement les leviers d'action publique à mobiliser d'ici 2022. Le rythme des innovations et des évolutions du contexte international dans ce domaine, justifie que ces orientations stratégiques soient mises à jour en 2020. Ce document a été soumis à la consultation des acteurs concernés. Les principaux éléments issus de cette consultation sont présentés en annexe.
1
Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), direction générale des entreprises (DGE), délégation à la sécurité routière (DSR).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
13
3. Introduction et état des lieux 3.1. Développement de l'automatisation, lien avec la connexion du véhicule
La mise en place en 2014 d'un comité de pilotage du plan « véhicule autonome » de la Nouvelle France Industrielle (NFI)2 a permis l'élaboration d'une feuille de route pour les trois groupes usages (véhicule particulier, système de transport public autonome et véhicule industriel), avec des cas d'usages prioritaires à développer. Plus précisément, ces travaux ont identifié trois principaux domaines d'application (véhicule particulier, transport public, fret et logistique) et trois principaux horizons (2020 ; 2030 ; > 2030) pour le développement des applications du véhicule automatisé, en fonction du degré de complexité des technologies, de la valeur d'usage et du degré de complexité des environnements de circulation : Véhicule autonome particulier
2
https://www.economie.gouv.fr/nouvelle-france-industrielle/accueil
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
14
Système de transport public autonome
- Création de nouvelles dessertes complémentaires : - Rabattement-diffusion à partir des gares pour les premiers et derniers kilomètres, dans une zone peu dense. - Desserte fine d'un territoire limité, avec points d'arrêt, permettant d'enrichir la desserte d'un quartier, d'une zone d'activité, d'un pôle hospitalier, d'un pôle touristique... - Desserte en zone péri-urbaine, activable à la demande ou régulier, permettant de desservir différents générateurs de trafic sur un territoire élargi pré-défini. Renfort des dessertes existantes : - Transport de nuit par renforcement de l'amplitude et des fréquences. - Adaptation de la capacité au besoin, par renforcement d'une ligne existante par la connexion d'un peloton modulaire de véhicules autonomes, adaptables en fonction des passagers. Véhicule autonome industriel
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
15
Les applications potentielles dans le domaine des transports collectifs se sont précisées, autour des notions de création de dessertes complémentaires ou de renforcement des dessertes existantes. Les projets de recherche et d'expérimentation ou les développements industriels, permettent d'identifier les domaines d'application actuellement les plus actifs : - conduite de véhicule particulier sur autoroute fluide - conduite de véhicule particulier en situation de forte congestion (vitesse < 30 km/h) - valet de parking pour véhicule particulier - véhicule de transport collectif de taille réduite (6 à 10 passagers) en environnement relativement sécurisé (y compris par des vitesses limites de circulation réduites) - véhicules d'emport de charges lourdes en environnement maîtrisé (ports, mines) - véhicules de gestion des flux dans les centres ou zones logistiques - conduite de poids lourds en convois. La connectivité des véhicules entre eux (V2V) et avec l'infrastructure (V2I, I2V) se développe parallèlement à cette évolution. Si l'automatisation peut exister sans connectivité (ce qui sera probablement le cas de la première génération de véhicules automatisés commercialisés), et la connectivité peut exister sans automatisation (à travers des interfaces hommes machine transmettant l'information), les deux sujets devraient converger à moyen terme, l'un s'appuyant sur l'autre pour se développer. L'apport attendu de la connectivité à l'automatisation se situe principalement dans l'enrichissement des fonctions de perception autonome du véhicule par la connexion, notamment pour les situations critiques pour lesquelles les besoins de perception ou de préalerte renvoient à des distances supérieures à la capacité des capteurs (environ 100 à 200 m dans l'état actuel des technologies) : ces situations critiques peuvent concerner notamment les événements de circulation inopinés (accidents, présence de piétons sur les voies, chantiers, interventions d'urgence, conditions météorologiques). La connexion peut apporter une aide aux véhicules automatisés pour mieux percevoir leur environnement et les aider à s'assurer qu'ils circulent dans les domaines d'emploi pour lesquels la délégation de conduite a été spécifiée. Il apparaît également que les capteurs pourront, dans les environnements d'usage mixtes et/ou complexes, être complétés par une localisation et une cartographie performantes, voire à des systèmes de capteurs propres aux infrastructures. Ainsi, sans même aller jusqu'à l'asservissement de fonctions d'automatisation à la connexion qui relève d'une logique de fusion de données et qui est encore au stade de la recherche, la connexion pourrait dès les prochaines années répondre à une logique d'alerte sur l'adéquation des conditions de circulation aux fonctions de délégation de conduite. Un autre intérêt du lien entre automatisation et connexion réside dans la remontée de données de perception du véhicule aux autres véhicules et gestionnaires d'infrastructures, pour reconstituer de façon collaborative une perception élargie de l'environnement de conduite, permettant la fourniture d'informations ou d'alertes sur la sécurité routière et les trafics à l'ensemble des usagers de la route. Au total, le lien entre automatisation et connexion participe au développement de la gestion coordonnée ou collaborative des trafics, avec une application majeure en milieu urbain pour ce qui concerne les transports collectifs.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
16
3.2. Eléments de définition pour la conception des politiques publiques
Les définitions permettant de caractériser les assistants à la conduite puis le véhicule automatisé, ont historiquement porté sur les fonctions ou mouvements du véhicule concernés par l'automatisation (exemples : mouvements longitudinaux ; accélération et freinage ; mouvements latéraux : changements de direction et, partant, de voie). Au-delà, la principale notion permettant de caractériser l'automatisation est portée par la notion de cas d'usage. Les cas d'usage sont schématiquement définis par trois dimensions : - les fonctions de conduite (ex : direction, freinage) déléguées au conducteur et le mode d'activation / désactivation de cette délégation de conduite - le domaine d'emploi (ex : route à chaussées séparées ou non, vitesse contextuelle) et conditions de circulation (visibilité, présence de travaux, densité du trafic...) - le niveau d'automatisation, qui caractérise principalement la répartition attendue des tâches de conduite par, respectivement, le conducteur et le véhicule. En France, la nomenclature des niveaux d'automatisation du Plan industriel véhicule autonome (2014), est issue de la nomenclature SAE (Society of Automotive Engineers). Ces niveaux d'automatisation sont précisés dans le tableau ci-dessous :
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
17
Niveau d'automatisation
Caractérisation des niveaux d'automatisation Eléments contrôlés Activité de surveillance Situations limites
Le système ne prend en charge ni le contrôle Niv 0 : Pas longitudinal, ni le contrôle Pas de tâche contrôlée. d'automatisation latéral. Ceux-ci sont effectués par le conducteur. Niv 1 : Assisté
Pas applicable.
Niv 2 : Automatisation partielle
Niv 3 : Automatisation conditionnelle
Le système n'est pas capable de Le système prend en charge Le conducteur doit détecter les limites de l'ensemble de le contrôle longitudinal ou surveiller le système en ses capacités. Ceci est de la le contrôle latéral. permanence. responsabilité du conducteur. Le conducteur doit Le système prend en Lorsque le système identifie ses surveiller le système en compte simultanément le limites, le conducteur doit être en permanence. Les activités contrôle longitudinal et mesure de reprendre le contrôle du non liées à la conduite ne latéral. véhicule. sont pas permises. Le système identifie la limite de ses performances, cependant il n'est pas capable de ramener seul le système Le conducteur n'a pas à dans un état de risque minimum pour Le système prend en surveiller le système en toutes les situations. En conséquence, compte simultanément le permanence. Les activités le conducteur doit être en mesure de contrôle longitudinal et non liées à la conduite reprendre le contrôle du véhicule dans latéral. sont permises de manière un laps de temps déterminé. Les limitée. situations d'urgence peuvent être prises en compte par le système, à condition qu'il puisse être relayé par un conducteur humain. Le conducteur n'a pas à surveiller le système en Le système prend en permanence. Les activités compte simultanément le non liées à la conduite contrôle longitudinal et sont permises en latéral. permanence durant le cas d'usage. Le système identifie la limite de ses performances et peut automatiquement faire face à toute situation survenant lors du cas d'usage. A l'issue du cas d'urgence, le conducteur doit être en mesure de reprendre le contrôle du véhicule.
Niv 4 : Automatisation haute
Niv 5 : Automatisation complète
Le système identifie la limite de ses Le système prend en performances et peut compte simultanément le Le conducteur n'est pas automatiquement faire face à toute contrôle longitudinal et requis. situation survenant lors du trajet latéral. complet.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
18
Eléments de synthèse et d'orientation La notion de cas d'usage est centrale pour asseoir les politiques publiques et la réglementation du véhicule automatisé : elle permet d'identifier les briques technologiques à développer, les acteurs concernés, et surtout les enjeux de sécurité, notamment routière et d'exploitation des réseaux attachés à chaque type de cas d'usage. Ces enjeux sont spécifiques aux trois dimensions de définition des cas d'usage : fonctions de conduite déléguées, domaine d'emploi et conditions de circulation, niveau d'automatisation.
3.3. Eléments prospectifs
En termes prospectifs, les acteurs et diverses sources bibliographiques disponibles considèrent, schématiquement, trois principales phases : - d'ici 2020-2025 : poursuite d'innovations incrémentales avec augmentation du nombre de fonctions de conduite pouvant être déléguées au conducteur et élargissement progressif des environnements d'usage ; - autour de 2030-2050 : atteinte du degré d'autonomie quasi-totale en tout environnement d'usage ; - au-delà de 2050 : baisses de prix et incorporation progressive dans les flottes de véhicules en circulation. Les échéances présentées par les différentes études apparaissent sensibles non seulement au rythme du progrès technique, mais aussi à l'acceptabilité sociale de ces technologies, notamment en termes de sécurité. La conjonction d'un progrès technique rapide et d'une bonne acceptabilité pourraient rapprocher fortement les échéances de généralisation de ces systèmes. A l'inverse, des freins liés à l'acceptabilité pourraient ralentir le décollage de ces marchés. L'automatisation se développe de façon incrémentale, avec une augmentation du nombre de fonctions de conduite pouvant être déléguées au conducteur et un élargissement progressif des environnements d'usage. Ce développement pourrait ainsi, schématiquement, combiner trois trajectoires : - le développement progressif du niveau d'automatisation, prolongeant l'assistance à la conduite, principalement pour les véhicules particuliers sur autoroute ; - le développement de l'automatisation déjà élevée, depuis des zones fermées ou fortement sécurisées, vers des environnements de circulation mixtes et / ou plus ouverts : c'est cette trajectoire que semble prendre le développement des transports collectifs automatisés, et que pourrait prendre le développement de la logistique automatisée ; - passer progressivement à des vitesses plus élevées d'utilisation des véhicules disposant de fonctions automatisées. L'extension du valet-parking pourrait par exemple relever de cette logique, en passant d'une vitesse très faible aujourd'hui à des vitesses un peu plus élevées quand le véhicule « ira chercher » sa place tout seul dans un parking, par exemple.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
19
Automatisation élevée, zones de circulation complexe, vitesse plus élevée
Zones de circulation sécurisées
Vitesse réduite Automatisation réduite
Ces trajectoires devraient à terme se rejoindre pour conduire à des niveaux d'automatisation élevés en environnements de circulation diversifiés et complexes. Ce développement incrémental peut néanmoins être rapide : si les travaux prospectifs considéraient jusqu'à peu que l'autonomie quasi-totale en tout environnement d'usage apparaîtrait entre 2030 et 2050, on peut s'attendre maintenant à une disponibilité au cours des 10 prochaines années. Le développement de l'automatisation pourrait également accélérer l'évolution vers une conception de la mobilité comme un service, relativement indépendant du mode de transport utilisé, et des enjeux de possession des véhicules. Cette convergence pourrait ainsi aboutir vers un produit qui se situe à l'intersection entre le véhicule personnel et le transport public. De façon prospective et qualitative, les études s'accordent à considérer que le paysage industriel va être profondément affecté, comme le laissent déjà penser les signes avant-coureurs actuels, par une interpénétration croissante de l'industrie automobile, des équipements informatiques, du logiciel, des télécommunications et des médias. Ainsi, le développement du véhicule connecté puis autonome, va faciliter l'innovation de services à partir des véhicules et de la donnée qu'ils produisent. Ceci va modifier le positionnement des segments industriels concernés : construction automobile, transports publics, industrie routière, services de mobilité et de loisirs, télécommunications, Internet et multimédia. Il est cependant difficile d'anticiper où les centres de maîtrise de cette nouvelle filière vont se déplacer La maîtrise de la donnée sera certes un enjeu fort. Mais d'autres maîtrises resteront déterminantes. Ainsi, l'automatisation se fonde sur un système d'interactions entre un véhicule, un conducteur, d'autres véhicules, et une infrastructure : la maîtrise des enjeux de sûreté de fonctionnement constitue un enjeu majeur qui est à la base de la confiance des usagers. Les conditions de développement de l'automatisation dépendront également des choix des autorités organisatrices de la mobilité et gestionnaires de réseaux routiers, en termes de cas d'usage, d'équipement des infrastructures et la validation des systèmes.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
20
Eléments de synthèse Les éléments prospectifs suggèrent des développements de l'automatisation étape par étape en allant vers un niveau d'automatisation de plus en plus élevé dans des situations de circulation de plus en plus complexes à vitesse élevée. Le niveau d'automatisation le plus élevé pourrait être atteint dans les 10 prochaines années, mais cette projection reste incertaine, et très dépendante des conditions d'acceptabilité sociale de ces technologies. Quel que soit sur l'horizon d'automatisation complète, la logique incrémentale et progressive, qui semble quasi-certaine, justifie une approche de l'action publique et de la réglementation s'appuyant sur l'expérience accumulée par le développement des applications ou cas d'usages concrets, en fonction de leurs spécificités. Il convient également de se projeter dans des scenarii de long terme dans lesquels l'automatisation se sera généralisée. Dans ce contexte, les travaux de l'atelier prospectif, mis en place en mai 2017, seront poursuivis pour construire collectivement des scenarii et alimenter les politiques publiques de mobilité et d'aménagement des territoires comme celles en lien avec ces dernières.
3.4. Impacts attendus ou visés, enjeux de connaissance
La sécurité routière constitue l'enjeu majeur sur lequel le véhicule automatisé est attendu, en réduisant potentiellement les risques d'occurrence des collisions avec les autres véhicules, voire avec des usagers vulnérables. Ces impacts de sécurité routière emportent largement l'acceptabilité du public. Pour autant, au-delà des résultats attachés à des expérimentations particulières, l'impact global sur la sécurité apparaît encore peu documenté. En particulier, la modification des tâches de conduite et des interfaces hommes-machine pourrait générer un syndrome d'excès de confiance, conduisant à une sous-reprise en main du véhicule pour les niveaux d'automatisation intermédiaires. De plus, la phase de cohabitation entre véhicules classiques et véhicules automatisés, entre véhicules autonomes de conception et de générations différentes, pourrait poser des questions spécifiques de sécurité. Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu'une partie des usagers de la route, de surcroît les plus vulnérables, échappera à cette automatisation : piétons, cyclistes et très largement les deuxroues motorisés pour lesquels seule une meilleure détection par les autres véhicules motorisés pourra être envisagée. L'impact de l'automatisation des véhicules sur la fluidité des trafics apparaît potentiellement fort, grâce à une meilleure coordination des vitesses dans les flux. Il est envisageable également d'accroître considérablement l'efficacité des mesures de régulation dynamique. Cependant, ces impacts potentiels apparaissent dépendre fortement du degré de mixité des flux entre différents types de véhicules, et du taux de pénétration des véhicules automatisés. Certains travaux laissent penser qu'un faible taux de pénétration (de l'ordre de 10%) suffirait à fluidifier l'ensemble des flux, d'autres travaux établissent un seuil de pénétration de 50% à
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
21
75% pour observer ces effets. Certains travaux mettent en avant un impact potentiellement négatif de l'interaction de comportements de conduite très hétérogènes entre véhicules automatisés et véhicules non automatisés, notamment en milieu urbain ou péri-urbain, ou encore en milieu rural. Les impacts environnementaux sont potentiellement très importants. Les véhicules automatisés, qu'ils soient destinés au transport de personnes ou de marchandises, pourront permettre des conduites et des optimisations de circulations ou de parcours plus respectueuses de l'environnement. De plus, ces technologies se développeront en même temps que les nouvelles motorisations alternatives. Les effets bénéfiques sur la sécurité pourraient indirectement permettre de réduire le poids des véhicules, mais ces effets pourraient être masqués par la montée en gamme des véhicules. Surtout, un enjeu majeur du développement des véhicules automatisé réside dans la synergie possible avec le développement de l'usage partagé des véhicules, et la fourniture de services de transports collectifs aux interstices du transport public urbain « massifié » (rabattements sur les gares, desserte des zones peu denses, services en heures creuses) ou en zones rurales. L'optimisation de l'usage des véhicules éventuellement exploités dans le cadre de services collectifs, pourrait ainsi contribuer massivement à la réduction de la dépense énergétique dans la mesure où elle n'induirait pas de sur-mobilité. L'impact sur la demande de mobilité et le partage modal est lui-même potentiellement majeur, mais incertain. Le véhicule automatisé pourrait, dans ses différentes applications, favoriser la mobilité des personnes qui aujourd'hui n'ont pas accès à la mobilité individuelle, comme les personnes âgées ou les personnes à mobilité réduite. Au-delà, le paramètre déterminant porte sur l'utilisation, donc la valeur du temps dégagé par la disponibilité du conducteur et la réduction de la congestion. Certains travaux de recherche évaluent la baisse de la valeur ressentie du temps de parcours à -50% voire -80%. Ainsi, l'amélioration du confort de conduite devrait améliorer significativement l'attractivité du mode automobile (individuel), en soi et par rapport aux transports collectifs. Par conséquent, cette amélioration pourrait générer une augmentation de la congestion pour les trajets pendulaires domicile-travail et/ou un renforcement de l'étalement urbain. On peut se poser la question de savoir si le développement des fonctions de valet-parking n'aura pas un impact sur l'offre de stationnement, ce qui pourrait là aussi constituer un élément supplémentaire de recours au mode individuel de déplacement, avec donc le risque d'engendrer une augmentation des trajets à vide, au moment où l'auto-partage est promu. Les applications du véhicule automatisé dans le domaine du fret et de la logistique pourraient modifier radicalement l'efficacité de la chaîne logistique, notamment en milieu urbain. Cependant, ces applications sont encore insuffisamment prévisibles pour disposer d'une vision des impacts, en dehors du « truck platooning » pour lequel le gain énergétique est maintenant bien documenté (et dépend fortement de l'inter-distance entre véhicules). Enfin, le développement du véhicule automatisé aura des impacts majeurs en termes d'emploi et de qualifications. Cet impact nécessite cependant d'être évalué dans une approche globale
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
22
qui couvre sur le système productif (automobile, équipements), les services, l'exploitation des systèmes de transports, etc... Les freins au développement du véhicule autonome doivent être pris en compte et analysés soigneusement dans les phases de déploiement. En particulier, dans les zones rurales, se posera la question de la voirie routière et de sa lisibilité, et donc de la possible utilisation ou pas des fonctions d'automatisation en toute sécurité et, à terme, de leur utilité. Par ailleurs, si d'un côté la population vieillissante, de nos sociétés européennes notamment, pourra espérer retrouver parfois une mobilité individuelle perdue, il n'en demeure pas moins que devront être évalués attentivement les besoins de cette population en informations précises sur les fonctions automatisées équipant leurs véhicules et leur bonne adaptation à la conduite de véhicules partiellement automatisés. Eléments de synthèse Si les bénéfices attendus en termes de sécurité routière, de gestion des réseaux et d'accès à la mobilité sont probablement globalement positifs, une incertitude demeure quant à l'amplitude de ces effets et leurs conditions de réalisation. De plus, des effets négatifs en lien avec l'amélioration de l'attractivité du véhicule individuel sont possibles. Ces effets négatifs ne sont pas de nature à contraindre l'évolution technologique ni les choix de cas d'usage ou de services par les acteurs des marchés mais doivent faire l'objet d'une vigilance des pouvoirs publics. Il convient de poursuivre l'amélioration des connaissances, en s'appuyant sur le suivi des expérimentations et en priorisant la recherche. Les orientations dans ces deux domaines sont détaillées dans les parties suivantes. Par ailleurs, il apparaît utile de développer des outils spécifiques de suivi du développement du véhicule automatisé en termes de suivi de l'accidentalité sur l'ensemble du territoire national, qui devra être adapté pour progressivement pouvoir identifier les accidents pouvant receler un facteur lié à l'automatisation ou la connexion.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
23
3.5. Cadre international existant et principaux enjeux d'évolution
3.5.1. Réglementation internationale de la circulation routière et des véhicules Deux éléments majeurs du cadre réglementaire du véhicule automatisé relèvent du niveau international, et notamment de l'ONU (Commission économique pour l'Europe CEEONU) : les règles de circulation routière et la réglementation technique des véhicules. Les conventions internationales sur la circulation routière de Genève (1949) et de Vienne (1968) constituent les bases des codes de la route dans la plupart des pays du monde. Elles traitent entre-autres du rôle du conducteur, de ses tâches et de l'ensemble des règles de circulation. « Toujours plus désireuses de faciliter la circulation routière internationale et d'accroître la sécurité sur les routes, les Parties Contractantes s'efforcent d'adopter des règles de plus en plus uniformes ». C'est la raison d'être de la Convention de Vienne de 1968, dont le WP 1 ou forum mondial de la sécurité routière de l'ONU, est compétent pour l'adapter périodiquement, en fonction des besoins, comme l'évolution technologique automobile ou la mise en oeuvre de nouvelles règles de formation du conducteur, par exemple, et plus généralement, en fonction des impératifs liés à la sécurité routière. En effet, au-delà de l'harmonisation des règles, de la facilitation de la mobilité transfrontalière et de la prise en compte des nécessités évidentes liées au marché automobile mondial, la priorité de ces Conventions reste la sécurité routière et son amélioration constante. L'évolution technologique, d'abord des assistants à la conduite, puis de l'automatisation de plus en plus poussée de certaines tâches de conduite, a nécessité de faire évoluer ce texte international. Un amendement destiné à traiter des dispositifs d'aide ou d'assistance à la conduite est entré en vigueur le 23 mars 2016. Cet amendement traite d'équipements et/ou de dispositifs techniques embarqués dans les véhicules, d'ores et déjà homologués et inscrits dans les Accords internationaux relatifs à la réglementation technique des véhicules qui sont aussi des instruments juridiques de la CEE-ONU.
Encadré: réglementation internationale de la conduite Les pays signataires de la Convention de Vienne ou Parties Contractantes se doivent de disposer d'une réglementation sur la circulation routière en phase avec cette Convention. L'évolution technique de ces dernières années dans la sécurité des véhicules automobiles a nécessité de faire évoluer ce texte. L'amendement entré en vigueur le 23 mars 2016 était destiné à traiter et à inclure dans l'article 8 de ladite Convention (rôle du conducteur), la possibilité pour le conducteur d'être aidé dans la réalisation des tâches de conduite et dans le contrôle du véhicule, par des systèmes d'aide à la conduite. Cet ajout d'un paragraphe 5 bis à l'article 8 de la Convention, a fait l'objet d'interprétations différentes d'un pays à l'autre, d'un constructeur automobile à l'autre, d'un équipementier à l'autre. Selon certaines interprétations, aucune automatisation de fonctions de conduite ne peut être comprise dans cet amendement ; pour d'autres, ceci est envisageable dès l'instant que la décision finale d'engager telle tâche de conduite reste du niveau du conducteur.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
24
Il a donc été convenu de clarifier la compréhension de ce texte, afin qu'elle soit la même, validée par chacune de ces parties contractantes. Le groupe informel d'experts sur la conduite automatisée au sein du WP 1 de la CEEONU, en s'appuyant sur la connaissance technologique du domaine, et en tenant compte de l'impact positif attendu de l'automatisation en matière de sécurité routière, a dégagé un consensus selon lequel il importe que les Parties Contractantes à la Convention de Genève ou de Vienne aient une lecture commune de la notion « du conducteur en contrôle du véhicule », quel que soit le degré d'automatisation de la tâche de conduite, pour autant que la décision finale « de faire » revient à l'humain, y compris quand le système prend en charge la conduite pour un certain temps, mais appelle le conducteur à la reprise en tant que de besoin. Les travaux du groupe ont également dégagé un consensus selon lequel la conduite totalement autonome n'est couverte par aucune des deux Conventions, amendée ou pas. Or, l'autonomie totale apparaît d'ores et déjà tout à fait envisageable à court terme pour des navettes de transport public de personnes, d'où la nécessité de travailler à l'élaboration d'un texte couvrant le domaine de l'automatisation totale, en parallèle avec la tâche consistant à préciser la lecture de l'amendement pour les cas d'automatisation partielle. La lecture de l'amendement de la Convention récemment entré en vigueur, conduit à dire qu'il couvre, outre les aides à la conduite, certaines fonctions automatisées de conduite, dès lors que ces fonctions sont incluses dans les Règlements techniques de la réglementation technique des véhicules. Le principe fondamental prévu à l'article 8 (§6) de la Convention, selon lequel le conducteur doit éviter toute autre activité que la conduite, est réaffirmé. Toutefois, lorsque des systèmes automatisés de conduite sont en fonction, ce principe peut être envisagé différemment, sous deux conditions : · · · · ces activités n'empêchent pas le conducteur de répondre à toute requête du système demandant au conducteur de reprendre la main, ces activités restent conformes auxdites fonctions automatisées et à l'usage qui en est prescrit. d'un document d'orientation sur les fonctions d'automatisation en général, décrivant ce qui serait nécessaire pour des fonctions de conduite hautement automatisées, voire d'autonomie totale ; d'un document de discussion sur la fonction de parking par télécommande qui pose la question essentielle du conducteur situé hors du véhicule.
La CEE-ONU a engagé la rédaction :
La réglementation technique des véhicules est également élaborée, au niveau international, par la CEE-ONU (WP29). Elle recouvre, à ce stade 140 règlements en vigueur dont certains traitent de l'automatisation de fonctions du véhicule. En pratique, c'est actuellement, le Règlement 79, relatif aux équipements de direction des véhicules, qui traite des principaux enjeux de l'automatisation. La réglementation technique des véhicules applicable en Europe est reprise des réglementations élaborées dans le cadre de la CEE-ONU, qui sont d'application obligatoire en homologation européenne. Eléments de synthèse et d'orientation Deux composantes essentielles du cadre réglementaire du véhicule automatisé relèvent du niveau international (CEE-ONU) : les règles de conduite et la réglementation technique des véhicules, ce qui se justifie par la nécessité pour l'industrie de disposer d'un minimum d'harmonisation sur des marchés qui sont d'échelle mondiale. La France souhaite que les règles de conduite et la réglementation des véhicules, qui sont, pour le véhicule automatisé, intimement liées, soient élaborées dans le cadre de la CEEONU et s'adaptent pour permettre le développement du véhicule automatisé dans le respect des exigences de sécurité routière.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
25
Il importe de préserver le caractère multilatéral de ce cadre, sans quoi l'on risque d'inciter à la fragmentation des approches et des marchés. Pour autant, ce processus d'élaboration et de validation à la CEE-ONU est un processus très long, au regard du rythme de déploiement anticipé. Ainsi, se pose la question d'un régime transitoire de portée européenne, à l'initiative de la Commission, permettant de définir le cadre d'homologation des véhicules automatisés à plus court terme qu'au sein de la CEE-ONU. La France sera attentive à ce que la règlementation technique ne soit pas un facteur bloquant pour la compétitivité de son industrie. La partie relative à l'évolution de la réglementation technique des véhicules ci-après précise les propositions et les attentes de la France en la matière. Action européenne L'action européenne dans ce domaine a mobilisé, jusqu'à présent, trois principaux registres : dans le cadre de la directive 2010/40 : spécification des services d'information prioritaires pour les objectifs de sécurité routière, de gestion des réseaux, et de développement de l'intermodalité, sous forme de points d'accès nationaux aux données ; dans le cadre des projets pilotes financés par le mécanisme d'interconnexion européen (Connecting Europe Facility CEF) : développement de spécifications fonctionnelles et techniques des cas d'usage ou des services ; dans le cadre d'un dialogue entre acteurs (C-ITS platform) : identification des politiques publiques à mettre à l'agenda européen.
Depuis 2016, l'action européenne se situe dans une logique de convergence entre automatisation et connexion du véhicule, illustrée ci-dessous.
Dans cette perspective, trois principaux cadres de travail ont été mis en place :
les travaux de GEAR 2030, portés par la DG GROW, qui ont notamment pour objet de proposer des recommandations réglementaires pour le développement du véhicule autonome et connecté ainsi que des recommandations pour mieux orienter et adapter les dispositifs de financement aux sujets spécifiques du véhicule autonome et connecté ;
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
26
les travaux dans le domaine des systèmes de transports intelligents coopératifs (C-ITS), portés par la DG Move, au travers de projets pilotes, de la plateforme C-ITS réunissant les acteurs concernés, et du projet de règlement délégué de la directive 2010/40. Ces travaux comportent deux volets, l'un centré sur différents aspects des C-ITS en préparation du règlement délégué (sécurité, données à caractère personnel et respect de la vie privée, évaluation de la conformité...), l'autre faisant le lien entre automatisation et connexion, dans des domaines comme le milieu urbain, la gestion de trafic améliorée ou l'apport de l'infrastructure à l'automatisation. Ces travaux s'appuient eux-mêmes sur les retours des projets de déploiement pilotes de C-ITS, fédérés dans la C-Roads Platform, qui doit également apporter des prescriptions pour l'interopérabilité de ces systèmes en Europe ; les travaux réunissant les acteurs de l'automobile et des télécommunications, sous l'égide de la DG Connect, qui ont pour objet principal d'évaluer et de promouvoir l'apport des communications cellulaires aux cas d'usage de véhicule automatisé et connectée.
Par ailleurs, de nombreux projets de recherche européens ont contribué au développement de cas d'usage, de prototypes, d'expérimentations, de méthodes d'évaluation et de spécifications en matière d'interopérabilité et de sécurité des systèmes. L'action européenne en matière de développement du véhicule automatisé et connecté est particulièrement importante : - dans le domaine de l'homologation des véhicules, pour s'assurer que les exigences de sécurité routière et fonctionnelle sont appliquées de façon homogène en Europe ; - dans le domaine de l'accès et de l'échange des données, pour assurer l'interopérabilité des services et des interfaces, en garantissant la sécurité et le respect de la vie privée. L'expérimentation puis le déploiement de ces applications, cas d'usages ou services, relèvent des initiatives des acteurs industriels et des acteurs publics locaux ou nationaux, que l'action européenne doit faciliter, sans s'y substituer ni les prescrire. Dans ce contexte, les divers travaux européens présenteront d'autant plus d'intérêt pour le développement de l'automatisation et de la connexion des véhicules que : leur articulation et leur calendrier seront clairs pour les acteurs publics et privés, et que les instances concernées mettront en place une coopération efficace ; l'approche partira des besoins réels du véhicule automatisé, pour chercher les meilleures solutions pour y répondre, plutôt que de solutions prédéfinies ; les spécifications seront partagées entre acteurs et projets ; les enjeux de sécurité routière, de sécurité et d'interopérabilité des systèmes seront adressés en priorité, et s'appuieront sur les enseignements de ces projets.
C'est pourquoi il apparaît important que l'action européenne se dote, dès 2018, d'une feuille de route listant les actions européennes prioritaires à entreprendre, en s'appuyant sur la stratégie du 30 novembre 2016 sur les systèmes coopératifs (C-ITS), sur les conclusions de la plateforme C-ITS phase 2, sur les travaux de GEAR 2030, et sur les enseignements généraux des projets pilotes et des expérimentations.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
27
L'automatisation des fonctions de conduite emporte des enjeux majeurs de sécurité routière et d'harmonisation des règles sur les marchés, qui nécessitent une implication européenne. Cet élément est perçu comme primordial par les constructeurs automobiles, soucieux de conditions de marché suffisamment harmonisées. Il en est ainsi notamment du besoin de définir les fonctionnalités de l'interface homme-machine, le rôle de l'humain, ce qu'il doit savoir et savoir faire, à quel moment et comment. A terme, ce dossier devrait relever d'une approche harmonisée dans l'Union européenne, mais aussi au niveau mondial. Pour porter ce dossier au sein de l'UE et garantir un minimum d'harmonisation, des évolutions de la directive européenne 2006/126/CE relative au permis de conduire devront être envisagées. Enfin, l'évaluation de l'apport possible de la 5G à l'automatisation, dans le cadre de la stratégie européenne sur la 5G de 2016, doit partir des besoins du véhicule et, au-delà, de la mobilité, en fonction des cas d'usages, de leurs domaines d'emploi et des besoins de connectivité qui leurs sont spécifiques, en tenant compte des technologies matures et dont le déploiement a été entamé (notamment l'ITS G5). Eléments de synthèse et d'orientation Depuis 2010, l'Europe s'est mobilisée sur les systèmes de transports intelligents, avec la Directive ITS de 2010, qui traitait principalement de questions d'interopérabilité, mais qui a permis aussi de dégager des visions partagées entre acteurs publics et privés sur les cas d'usage prioritaires du véhicule connecté (travaux de la plateforme C-ITS phase 1). La Commission européenne travaille à une stratégie coordonnée, attendue pour la fin du premier semestre. D'ores et déjà, dans l'attente de ce document, les attentes vis-à-vis de l'action européenne en faveur du développement du véhicule autonome et connecté, peuvent s'articuler autour des considérations suivantes : L'harmonisation européenne est primordiale pour ce qui touche à l'interopérabilité des systèmes et aux exigences communes de sécurité, notamment en matière d'homologation des véhicules. La subsidiarité doit être conservée pour ce qui touche aux priorités de cas d'usage et à la place des services de mobilité automatisée et connectée dans les politiques de déplacements, la gestion des réseaux et l'équipement des infrastructures ; Le partage d'expériences est utile en matière d'expérimentation et de connaissance des impacts, dans le respect de l'innovation (et souvent du secret) industriels et des priorités locales de politiques des transports, mais de mettre en commun les principaux enseignements, et repérer les manques en termes d'évaluation ; L'encouragement d'expérimentations et de projets pilotes en partie mutualisés entre acteurs, justifie des financements européens, selon des modalités et une gouvernance à définir, dans laquelle il importe que les autorités publiques, nationales et locales, soient bien représentées pour exprimer les attentes en matière de cas d'usage d'une part, de sécurité d'autre part ;
-
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
28
-
-
-
L'option doit être envisagée dans laquelle l'Europe élabore une cadre de réglementation technique des véhicules à son niveau, de manière à suppléer, de manière transitoire, à l'absence de cadre réglementaire au niveau de la CEE-ONU, dont il convient de préserver, à terme, le caractère multilatéral des travaux ; Les modalités techniques d'échanges de données issues du véhicule autonome et connecté entre acteurs, publics et privés, auxquels l'accès à ces données serait possible, devraient viser à être transposables ou interopérables d'un pays à l'autre, afin notamment d'assurer la fluidité transfrontières ; Les questions de responsabilité, qui se rapporteraient à la responsabilité des produits, méritent d'être examinées au niveau européen.
3.6. Coopérations bilatérales
La France a engagé des coopérations bilatérales ou tri-latérales avec différents pays, répondant à différents objectifs : avec l'Allemagne, depuis avril 2016, à laquelle s'est ajouté le Luxembourg en septembre 2016, nous visons à avoir une compréhension commune des enjeux réglementaires et de l'acceptabilité ; l'approche est de tester ensemble les questions d'interopérabilité ou de continuité transfrontière des cas d'usage (véhicule particulier pour commencer) ; notamment la continuité transfrontière du fonctionnement des capteurs, de la connectivité des véhicules, mais aussi les questions économiques et juridiques soulevées par des modèles tri-nationaux d'échanges de données, et les enjeux tri-nationaux comparés en terme d'acceptabilité, de perception et de comportements ; avec les Etats-Unis, un séminaire annuel permet d'échanger depuis octobre 2015 sur les priorités nationales et locales de cas d'usage, et les méthodes et résultats de leur évaluation ; avec la Suède, la coopération lancée en octobre 2017 porte sur les domaines d'emploi de l'automatisation pour le transport de marchandises, sur la question de la supervision des navettes, ainsi que sur les enjeux d'acceptabilité et de comportements de mobilité pour le véhicule particulier ; avec la Finlande, compte-tenu de l'avance de ce pays en matière d'ouverture des données, les échanges mis en place en août 2017 portent sur les aspects économiques et juridiques de l'échange de données ; des échanges avec le Japon et la Corée permettent d'échanger sur les priorités de la politique d'expérimentation.
-
-
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
29
4. Orientations stratégiques pour l'action publique 4.1. Synthèse des attentes et principes d'action publique
Les présentes orientations pour l'action publique visent à fournir des éléments permettant d'accompagner le développement du véhicule autonome dans une période charnière caractérisée par : - le passage d'une logique centrée sur l'expérimentation, à une période de déploiement ; la diversification des secteurs industriels et serviciels concernés ; la montée en charge d'une politique européenne sur la conduite autonome et connectée.
Ces orientations s'inscrivent dans l'élaboration de la Stratégie des mobilités et de la Loi d'Orientation des Mobilités, faisant suite à la large consultation des acteurs menées pendant les Assises nationales de la mobilité. Les orientations stratégiques décrites ci-dessous, tout en s'appuyant sur des éléments prospectifs à moyen-long terme, visent essentiellement les leviers d'action publique à mobiliser d'ici 2022. Le rythme des innovations et des évolutions du contexte international dans ce domaine, justifie que ces orientations stratégiques soient mises à jour en 2020.
Liens avec les attentes et orientations issues des Assises nationales de la mobilité préparatoires à la Loi d'orientation des Mobilités
Lancées en septembre 2017 par Elisabeth Borne, ministre chargée des transports, les Assises nationales de la mobilité se sont déroulées jusqu'en décembre 2017. Cette grande consultation s'est adressée à tous les acteurs du territoire et a permis de préparer la Loi d'orientation des mobilités, présentée au premier semestre 2018. Réparties sur trois mois, de septembre à décembre 2017, les Assises nationales de la mobilité visaient à identifier les besoins et les attentes prioritaires de tous les citoyens autour de la mobilité en accordant une attention particulière aux transports de la vie quotidienne, aux zones rurales et périurbaines. Pour cela, usagers, collectivités, opérateurs, acteurs économiques et ONG de l'ensemble du territoire ont été conviés à participer et à faire émerger de nouvelles solutions. Ces Assises ont donné lieu à plus de 60 réunions dans les territoires ; plus de 2 500 propositions et 25 000 votes sur la plateforme participative ; des apports d'expertise de près de 600 spécialistes de tous horizons et près de 200 cahiers d'acteurs. Les questions d'automatisation ont été abordées plus particulièrement dans le groupe « mobilité plus connectée » (cf. ci-dessous), mais ont également donné lieu à des contributions dans le cadre des Ateliers de l'Innovation et, plus généralement, sur l'ensemble des échanges relatives aux nouvelles mobilités, aux mobilités propres, à la gouvernance. Ceci illustre bien le fait que le développement du véhicule autonome concerne une grande partie des politiques de mobilité, et l'ensemble des acteurs concernés.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
30
Les attentes exprimées au cours des Assises nationales de la mobilité font notamment apparaître combien la révolution numérique va modifier les façons de se déplacer et redistribuer les chaînes de valeur. Dans ce contexte, la frontière entre transport public et mobilité individuelle s'estompe. Cette révolution numérique suscite également des interrogations sur les fractures sociales et territoriales qu'elle pourrait amplifier. Ainsi, les Assises ont souligné l'importance de l'accès à la mobilité comme facteur d'insertion économique et sociale, en tout premier lieu en termes d'accès à l'emploi. Les Assises ont également souligné le besoin de réponses adaptées aux problématiques des différents territoires : - les zones urbaines qui ont su développer des offres de transports publics mais restent confrontées à une congestion automobile qui s'aggrave ; et en recherche de solutions aux quartiers politiques de la ville à leur périphérie ; - les zones périurbaines où l'habitat s'est diffusé pendant que les emplois se recentraient dans les coeurs de villes, avec une dégradation des conditions de déplacements pour le travail, l'accès aux lieux d'études ou aux services ; - les zones rurales, souvent dépourvues d'offres et pour lesquelles l'enjeu reste de sortir de l'enclavement. Pour ce qui concerne plus spécifiquement le développement du numérique et, en son sein, de l'automatisation, les Assises ont fait émerger les orientations suivantes, ainsi que les propositions d'action présentées en encadré ci-dessous : Accélérer l'accès à des données de mobilité de qualité afin que tout opérateur public ou privé puisse les exploiter pour mieux exposer l'offre de transport public et favoriser son utilisation par les acteurs du territoire mais aussi par des voyageurs (professionnels ou pour leurs loisirs) ; faciliter la combinaison entre cette offre et les autres offres : nouvelles mobilités, mobilités partagées et actives ; développer de nouveaux services de mobilité pour les usagers et en assurer la pleine diffusion dans les territoires en particuliers en zones rurales et périurbaines. Réguler cette ouverture et les conditions de réutilisation afin de pallier les situations monopolistiques et de s'assurer que les services de mobilité développés profitent à l'ensemble du territoire français. Réaffirmer l'importance de privilégier les formats de données et les briques logicielles non propriétaires pour optimiser les coûts de développement et de maintenance pour les acteurs publics grâce à l'élaboration de communs numériques pour la mobilité. Se doter d'outils de régulation techniques et économiques adaptés au numérique et des compétences pour réussir la transformation numérique des acteurs publics et privés. Renouer avec une culture de l'expérimentation et de la prise de risque pour tester des solutions innovantes et partager les retours d'expérience afin de pouvoir passer plus rapidement des prototypes à des processus industriels.
-
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
31
Encadré : recommandations d'actions du groupe « Mobilités plus connectées » des Assises de la Mobilité pour accompagner le déploiement des véhicules autonomes et connectés
-
adapter les dispositions du code de la route en matière d'attention du conducteur et de supervision des véhicules. élargir les expérimentations : convois de poids lourds ou utilisation de voies réservées. donner un statut d'intérêt général conféré à certaines données, pour certains usages (sécurité routière, gestion des trafics et des infrastructures). garantir l'accès aux données du véhicule à tous les acteurs : assureurs (accidentologie), réparateurs et vendeurs de pièces détachées, énergéticiens (smart charging), corps de contrôle. rendre obligatoire l'information des usagers à la prise en main des véhicules et instituer un droit à la connaissance des fonctionnalités et à la maîtrise des mises à jour logicielles pour les propriétaires des véhicules. à l'occasion de la mise en oeuvre du règlement général sur la protection des données, insister sur le consentement éclairé des automobilistes à la collecte et à la transmission des données de leur véhicule qui ne sont pas des données d'intérêt général soit de manière générique soit au cas par cas suivant les usages (ainsi que le proposent certains constructeurs étrangers). mettre en place un programme national quinquennal d'innovation-recherche-expérimentation ; appel à projets, processus de labellisation des expérimentations au regard des objectifs nationaux d'accumulation des connaissances (à relier aux mesures concernant l'expérimentation et les innovations dans le domaine des nouvelles mobilités et à la promotion des territoires et initiatives pilotes, mutualiser grâce à des standards communs, les démarches des acteurs de la cartographie qui travaillent à des « jumeaux numériques » de l'infrastructure physique et de « modèle numérique » des gestionnaires routiers et des concepteurs d'infrastructures pour accompagner le déploiement des véhicules autonomes. rendre obligatoire pour tout véhicule disposant d'un dispositif de délégation de conduite d'un « enregistreur de données relatives à un accident » (EDRA). À noter que cette proposition peut être redondante avec les propositions garantissant l'accès aux données et notamment à celles d'intérêt général du véhicule (sécurité routière). mettre en place une politique fiscale incitative pour faciliter l'équipement du parc roulant (connecter les véhicules actuels) (incitation fiscale sous forme d'abattement forfaitaire couvrant les frais d'équipement d'un boîtier connecté (pour les particuliers) ; baisse de la TVA pour les prestations d'installation sur le parc roulant (pour les garagistes) ; baisse de la fiscalité pour les flottes d'entreprises qui acceptent de s'équiper). mettre en place d'autres mesures incitatives pour faciliter l'équipement du parc roulant (connecter les véhicules actuels) : campagne institutionnelle pour sensibiliser les usagers ; - équipement des flottes publiques (état, collectivités) ; favoriser l'éco-conduite et la « sécu-conduite » via des expérimentations : inciter les métropoles à déployer des dispositifs de « péage positifs ». développer et harmoniser des méthodes d'évaluation des infrastructures (chaussée, signalisation horizontale et verticale, systèmes de communication, camera et lidar...) pour les véhicules autonomes et connectés.
-
-
-
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
32
Liens avec les stratégies des acteurs industriels et des services Les présentes orientations sur le véhicule automatisé s'articulent avec le programme « véhicule autonome » de la solution « mobilité écologique » de la NFI. Elles portent principalement sur le cadre réglementaire, en lien avec les politiques de sécurité routière et de mobilité durable ; le programme « véhicule autonome » de la NFI permet quant à lui de définir la stratégie de développement industriel en matière de véhicule autonome. Ces deux volets (cadre d'action publique ; stratégie industrielle) sont conçus comme devant se compléter et se conforter l'un l'autre.
Les orientations stratégiques dans le domaine du véhicule automatisé s'articulent avec les travaux menés par les acteurs dans le cadre de la plateforme « Mobilité 3.0 ». Cette plateforme d'échanges entre acteurs des transports intelligents vise à définir des stratégies communes et des feuilles de route permettant l'émergence de solutions innovantes, aisément réplicables à l'échelon national et européen, et à porter l'offre française à l'international. Cette plateforme, mise en place en mai 2017, permettra ainsi de repérer, évaluer, diffuser, et faire partager les expériences et projets des solutions concrètes et innovantes de mobilité intégrant une dimension d'automatisation. En tenant compte des travaux de la NFI, le Conseil national de l'Industrie du 20 novembre dernier a fait du véhicule autonome un axe prioritaire de relance de la politique industrielle de la France. La filière va notamment renouveler sa feuille de route de recherche et d'innovation, évaluer l'impact sur l'emploi et les compétences, et proposer un programme national structuré d'expérimentations, qui permette aussi de préparer les futures réglementations, notamment du point de vue de la sécurité des systèmes.
Encadré : axes de mobilisation des industriels pour le développement du véhicule autonome Conseil national de l'Industrie 20 novembre 2017 Les acteurs français doivent pouvoir lancer dès 2018 des expérimentations à grande échelle, à la fois pour les véhicules particuliers et pour les transports en commun. Les acteurs français doivent également se mobiliser pour développer les applications de l'automatisation dans le fret et la logistique. Le Conseil national de l'industrie mandate le Conseil supérieur de la filière automobile pour :
-
mettre à jour la feuille de route technologique partagée entre les membres du CSF, visant à favoriser la coopération entre acteurs autour d'initiatives structurantes et à identifier les grands défis susceptibles de procurer, au terme d'investissements en R&D ciblés, une avance technologique aux acteurs de la filière et à leurs partenaires dans le secteur des infrastructures ; proposer un programme d'expérimentations, autour de priorités partagées avec les autorités publiques, dans un cadre permettant la mutualisation des retours d'expérience ; compléter et finaliser l'analyse prospective détaillée de l'impact du développement du véhicule autonome sur les besoins en emplois et en compétences, élaborer des préconisations sur les métiers en tension, en mutation ou en forte croissance ; analyser les enjeux de normalisation au niveau européen et international.
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
33
Liens avec les orientations en faveur de la mobilité propre Les orientations stratégiques dans le domaine du véhicule automatisé s'intègrent dans les orientations en matière de mobilité propre, notamment celles du Plan climat du 6 juillet 2017, de la stratégie de mobilité propre du 28 octobre 2016, et de la stratégie nationale bas carbone du 18 novembre 2015. Les principales orientations en faveur de la mobilité propre concernent la maîtrise de la demande de mobilité ; le développement des véhicules à faibles émissions de polluants et de gaz à effet de serre ; le développement du marché des carburants alternatifs et le déploiement des infrastructures correspondantes ; l'optimisation du fonctionnement des véhicules et des réseaux existants ; l'amélioration des reports modaux et le développement des modes de transports collaboratifs. Le développement du véhicule autonome peut contribuer à l'ensemble de ces leviers d'action. Les liens de l'automatisation avec l'électro-mobilité se développeront dans un contexte où le véhicule intelligent sera connecté aux autres véhicules mais également à une infrastructure plus intelligente. Cette interaction permettra de développer de nouveaux services. L'infrastructure pourra ainsi apporter des informations facilitant la mobilité, éventuellement en visant, selon les politiques locales, certaines motorisations : information en temps réel sur la localisation des places de parking disponibles, les infrastructures de distribution de carburant (essence, H2, Gaz, électricité ...) leur localisation, leur état et leur tarif, gestion des voies, tarification de l'usage de la voirie. De façon plus spécifique, un véhicule autonome pourra permettre un équilibrage automatique de la charge dans un système de véhicule en auto-partage, et favoriser pour celui-ci l'utilisation des véhicules électriques : possibilité de retour vers des points mutualisés de recharge rapide ou lente, sans nécessité de les déployer sur les voiries, relais de véhicules pour les trajets les plus longs, incompatibles avec l'autonomie d'un véhicule unique. Le développement des services de mobilité attachés à l'automatisation est susceptible de favoriser l'usage partagé des véhicules. Le développement des transports collectifs est susceptible de bénéficier de la complémentarité avec les services de transport à la demande ou de transports moins massifiés apportés par le véhicule autonome, notamment dans les zones peu denses, rurales ou péri-urbaines, et/ou pour les besoins de rabattement vers les transports collectifs massifiés. Enfin, l'incorporation du progrès technologique rapide sur l'automatisation dans les flottes de véhicules, pourrait bénéficier d'un renouvellement accéléré rendu nécessaire pour satisfaire aux objectifs 2040 sur le parc de véhicule.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
34
Retours des consultations L'élaboration du présent document a donné lieu à une large concertation auprès des acteurs concernés par les enjeux du véhicule autonome. Deux phases de consultation d'un mois ont été menées, en octobre 2017 et en décembre 2017. Ces deux phases ont principalement mis en avant le besoin d'une approche systémique, centrée sur les usages, et associant l'ensemble des acteurs et compétences nécessaires au développement de ces usages. Les principaux retours de ces consultations sont résumés en annexe. Principes généraux d'action publique Les moteurs du développement du véhicule automatisé sont divers : évolutions technologiques, besoins et perceptions des usagers, attentes des gestionnaires de réseaux et des autorités organisatrices de la mobilité, convergences possibles avec d'autres technologies (connexion du véhicule, cartographie et positionnement, drones, « smartphone »), développement de services de mobilité intégrés, etc. Pour que l'action publique puisse efficacement accompagner ce développement, il importe qu'elle soit en capacité d'anticiper ces évolutions en s'assurant notamment que les risques de ces développements en termes de sécurité routière, de sécurité des systèmes, de sûreté, de cybersécurité et de protection des données personnelles sont identifiés, évalués et maîtrisés. Il faut en effet pouvoir s'assurer d'un haut niveau de sécurité, avant l'entrée sur le marché de tels véhicules, pour l'acceptabilité commerciale mais aussi sociale : tout incident ou accident ou malveillance lié à des mises en circulation prématurées serait pénalisant pour l'ensemble du nos secteurs économiques nationaux. Compte-tenu des éléments ci-dessus, et des attentes exprimées par les différents acteurs, les principes suivants guident l'action publique pour accompagner le développement du véhicule autonome. L'intégration dans les politiques de mobilité, à l'échelle des territoires concernés : Le développement du véhicule autonome présente des impacts majeurs sur la mobilité. Il va diversifier l'offre potentielle de services de mobilité, et participer à estomper encore plus la frontière entre véhicule individuel et transport collectif, et à découpler encore plus la possession et l'usage des modes de transports. Il convient que les politiques de mobilité intègrent le véhicule autonome comme un des paramètres de la mobilité et un des leviers d'action disponibles. Il convient en particulier d'exploiter au mieux les potentialités en termes de gestion des réseaux et la gestion du trafic, pour optimiser la capacité des infrastructures. Il convient aussi d'exploiter au mieux les complémentarités avec les modes massifiés, notamment en termes de rabattement ou de transport à la demande. Le véhicule autonome constitue une opportunité pour satisfaire des demandes non satisfaites, notamment de desserte fine en péri-urbain ou en rural. La progressivité de l'approche : il faut s'assurer, dans le cadre de partenariats publicsprivés ad'hoc, notamment par des expérimentations et l'analyse fine des risques potentiels, que les performances de sécurité attendues sont bien au rendez-vous ; pour être efficace, cette approche doit se concentrer sur les cas d'usage pré-matures, proches d'une éventuelle mise sur le marché : un rythme d'action raisonnable à viser ici est de pouvoir développer la « doctrine de sécurité » de ces cas d'usage environ 3 ans avant leur mise sur le marché prévisible dans les feuilles de route technologiques
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
35
-
La co-élaboration : la concertation doit s'exercer à tous niveaux, national, européen et international, que si l'on souhaite que cette révolution technologique, bénéfique à bien des égards, en tout cas au plan de la sécurité routière, soit une réussite. En pratique, les cas d'usages, leurs spécifications, leurs conditions de déploiement, leur évaluation, relèvent de plus en plus clairement d'un coopération étroite entre acteurs industriels et publics, et au sein de ceci, d'autorités portant des objectifs de sécurité routière, de cybersécurité, de gestion des réseaux routiers, d'organisation de la mobilité, et de sûreté ; il importe notamment de s'assurer que ces développements s'intègrent dans les politiques de mobilité durable et de gestion des réseaux routiers, notamment au niveau local ; Le suivi des impacts, des attitudes, des perceptions et des comportements : les véhicules automatisés et leurs applications constituent des « biens d'expérience », dont la valeur sociale ne peut s'apprécier qu'à l'usage. Les modifications de comportements, au premier rang desquels les attitudes de conduite et les choix de mobilité, vont s'adapter à ces nouveaux systèmes, et cette adaptation constitue un des ressorts de leur efficacité. Enfin, la perception sociale constitue à la fois un facteur-clé du succès et un élément de vigilance, particulièrement vulnérable à des incidents compte-tenu de l'exposition médiatique du sujet.
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
36
4.2. Cadre législatif et réglementaire
4.2.1. Développement des cas d'usage et évolution des règles relatives à la conduite L'objectif stratégique visé est de permettre la circulation, d'ici 2020 à 2022 selon les cas d'usage : - de voitures particulières de niveau SAE3, i.e. dont les fonctions de conduite sont, dans des circonstances choisies par le conducteur si les conditions de circulation le permettent, totalement déléguées au véhicule, - de voitures particulières de niveau SAE4, i.e. dont les fonctions de conduite sont, dans un domaine d'emploi prédéfini par le constructeur du véhicule, totalement déléguées au véhicule, - de véhicules de transport public de personnes hautement automatisés, i.e. dont les fonctions de conduite sont, sur des parcours prédéfinis, totalement déléguées au véhicule, sans conducteur à bord, sous la supervision d'un système d'exploitation, - de véhicules de transport de marchandises automatisés, i.e. dont les fonctions de conduite sont, dans un domaine d'emploi prédéfini par le constructeur du véhicule, totalement déléguées au véhicule Les conditions de circulation sur la voie publique des véhicules concernés devront garantir un niveau de sécurité routière au moins équivalent aux véhicules comparables non dotés de systèmes de délégation de conduite. Ces orientations stratégiques vont nécessiter des adaptations du code de la route et la définition d'un régime de responsabilité précisant les tâches et les responsabilités respectives du conducteur, du système automatisé, incluant éventuellement la supervision, des gestionnaires ou exploitants d'infrastructures et des constructeurs de véhicules et équipementiers. Les adaptations devront être cohérentes avec l'évolution des conventions internationales relatives à la conduite. Eléments de synthèse et orientations stratégiques L'objectif stratégique visé est de permettre, d'ici 2022, la circulation en France de voitures particulières de niveau SAE3 et SAE4, de véhicules de transport public de personnes hautement automatisés, et de véhicules de transport de marchandises automatisés. Des dispositions législatives seront proposées dans le cadre de la Loi d'orientation des Mobilités pour répondre à cet objectif. Cet objectif nécessite en particulier d'adapter le code de la route et les règles de responsabilité, en fonction des cas d'usage et de leurs domaines d'emploi. Les adaptations du code de la route aux fins de permettre la circulation de véhicules hautement automatisés, seront préparées dans le cadre d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur, associant notamment les Ministères de la Justice, des Transports et de l'Industrie, en concertation avec tous les acteurs concernés, et qui rendra son rapport de propositions au plus tard fin 2018.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
37
Ces adaptations tiendront compte des réflexions sur l'évolution des règles de circulation aujourd'hui menée à la CEE-ONU (WP1), auxquelles la France a adhéré. Dans ce cadre, la France participera activement à l'élaboration des documents de la CEEONU relatifs à l'interprétation des conventions existantes pour certains cas d'usage ; au traitement de la fonction de parking par télécommande ; et aux besoins d'évolutions pour des fonctions de conduite hautement automatisées, voire d'autonomie totale. Pour ce qui concerne l'évolution des Conventions de Vienne et de Genève, la France examinera, avec ses partenaires, quelle est la bonne lecture des Conventions elles-mêmes, sous réserve que les principes juridiques qu'elles contiennent soient respectés. Lorsque le droit l'exige, il sera nécessaire de proposer les amendements nécessaires à la Convention de Vienne pour adapter la réglementation relative au comportement du conducteur, aux dispositions contenues dans les Règlements techniques de la CEE-ONU.
4.2.2. Enjeux de responsabilité En matière de responsabilité civile, la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, dite loi Badinter, instaure un régime de responsabilité sans faute permettant une indemnisation certaine et rapide des victimes (dommages corporels ou matériels). Le conducteur n'est pas défini ; c'est le propriétaire du véhicule qui est présumé gardien. Ce régime exclusif de responsabilité est couplé à un régime assurantiel, fondé sur une obligation d'assurance couvrant cette responsabilité civile (articles L. 211-1 et suivants du code des assurances). Ce dispositif national, particulièrement protecteur, garantit aux victimes d'être indemnisées par l'assureur du véhicule impliqué (sauf en cas de faute inexcusable ou intentionnelle), qui pourra dans un second temps intenter une action contre l'auteur du dommage. La législation existante assure, en toutes circonstances, la solvabilité de l'auteur des dommages. Ce double régime semble pouvoir s'appliquer aux véhicules automatisés, même sans aucun conducteur à bord. L'absence de conducteur ou de maîtrise par un conducteur est ainsi indifférente, tant pour l'application du régime de responsabilité que pour l'obligation d'assurance de responsabilité civile. L'indemnisation des victimes demeurerait fondée sur la notion d'implication du véhicule automatisée, indépendamment de l'existence d'un conducteur ou de sa faute. Après l'indemnisation, un examen au cas par cas permettrait d'établir toutes les responsabilités (constructeur, équipementier, fournisseur du logiciel, autres véhicules, infrastructures...). Il s'agirait notamment de résoudre la question d'un éventuel défaut ou d'une éventuelle défaillance du produit, c'est-à-dire du système automatisé, et donc de la responsabilité du constructeur, du concepteur de l'équipement, ou du fournisseur de logiciel ou de tout autre intervenant dans cette automatisation. En ce qui concerne la responsabilité pénale du conducteur et au fur et à mesure que les fonctions d'automatisation des tâches de conduite se développeront dans les véhicules, il apparaît important de distinguer deux situations :
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
38
Les cas où le conducteur doit toujours rester au contrôle du véhicule en utilisant certaines fonctions automatisées de conduite, et doit être en mesure de reprendre la main à tout moment, aucune réforme ne paraît nécessaire ; Les cas (futurs pour des véhicules totalement automatisés) où le conducteur peut ne surveiller aucunement la route. Eléments de synthèse et d'orientation
Le régime de responsabilité civile issu de la Loi dite « Badinter » et le cadre assurantiel fondé sur une obligation d'assurance couvrant cette responsabilité semblent à même de traiter, sans modification à cet effet, des cas d'automatisation, y compris d'automatisation totale. Instaurée dans l'intérêt des victimes et leur garantissant une indemnisation certaine et rapide, la législation actuelle ne constitue pas un frein au développement des véhicules automatisés. En termes de responsabilité pénale, il convient d'examiner : S'il y a lieu de prévoir, par dérogation aux textes législatifs ou réglementaires existants, des règles spécifiques dans le code de la route pour les véhicules pouvant circuler sans conducteur (prévoyant notamment la non applicabilité de tel ou tel article du code de la route). - Comment traiter des systèmes fortement automatisés dans lesquels pourront apparaître de longues périodes de temps pendant lesquelles le "conducteur" se reposera sur le système, et qui posera la question de la responsabilité, notamment en termes de reprise en main, pour concilier le fait que le conducteur est en tout état de cause responsable pénalement alors qu'il fait confiance au système quasiment tout le temps. Dans la perspective de permettre le déploiement de véhicules hautement automatisés à l'horizon 2020 à 2022, le régime de responsabilité sera adapté en fonction des évolutions du rôle respectif du conducteur et du système automatisé pour les cas d'usage correspondants. Ces adaptations seront proposées, concomitamment aux évolutions du code de la route correspondantes, dans le cadre du groupe de travail piloté par le Ministère de l'intérieur, associant notamment les Ministères de la Justice, des Transports et de l'Industrie. Dans l'immédiat, afin de permettre le développement des expérimentations dérogeant aux dispositions du code de la route, la Loi d'orientation des mobilités proposera un cadre de responsabilité adapté à la spécificité des expérimentations, et notamment à l'engagement du responsable de l'expérimentation, titulaire de l'autorisation, à en assurer la sécurité. Les magistrats des juridictions, les experts judiciaires et les officiers de police judiciaire seront sensibilisés aux enjeux de responsabilité qui seront générés par le développement et la mise en circulation des véhicules autonomes.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
39
4.2.3. Formation et information du conducteur Le conducteur devra encore remplir un certain nombre de conditions avant d'être autorisé à s'asseoir derrière le volant : d'abord, celle d'être titulaire de la catégorie de permis de conduire correspondant au véhicule, d'être en bon état de santé, de ne pas être sous l'influence de substances psychoactives comme l'alcool, les drogues ou les médicaments, etc. L'humain qui conduit aujourd'hui un véhicule doit donc être formé, et sa formation doit avoir été validée par un examen favorable du permis de conduire, ainsi qu'être apte à conduire, physiquement et mentalement. Dès lors qu'il s'agira d'un véhicule à délégation partielle, voire quasi-totale de conduite, ces conditions devront continuer à être satisfaites. En effet, même en présence de fonctions hautement automatisées de conduite, le conducteur doit rester à même de répondre à une ou des sollicitations du système lui demandant de reprendre le contrôle du véhicule, pour un certain nombre de raisons. Concernant la formation des conducteurs, et notamment celle des jeunes conducteurs, en âge de passer les épreuves de l'examen du permis de conduire, il faut envisager dès maintenant d'adapter les contenus de la formation et, donc, ceux des examens du permis de conduire. Ainsi, au niveau national, un groupe de travail sur le sujet est à créer rapidement au sein de la DSR, pour traiter de ces questions et échanger avec les autres ministères concernés, en vue de dégager une doctrine nationale qui sera ensuite portée au niveau européen. Il faut en effet garder en tête que ce travail devra également être engagé au niveau européen : en effet, les conditions de délivrance des permis de conduire relèvent de la compétence de l'Union européenne et, plus précisément, des dispositions contenues dans la directive 2006/126/CE du Conseil et du Parlement européen du 20 décembre 2006, relative au permis de conduire. On devrait pouvoir s'attendre à ce que la Commission européenne, en particulier la DG MOVE, son Unité sécurité routière, prenne ses responsabilités en la matière. Se posent et se poseront également d'autres questions devant cette évolution inévitable des conditions dans lesquelles un véhicule sera à terme conduit et contrôlé par l'humain : - en situation d'expérimentation de divers véhicules à délégation partielle de conduite, il convient que les « essayeurs », en général des ingénieurs ou des techniciens, soient à même de garantir la sécurité parfaite du véhicule, notamment vis-à-vis des autres usagers de la route. Etant eux-mêmes « essayeurs », ils connaissent parfaitement bien les systèmes techniques automatisés qu'ils testent, mais ils doivent bien évidemment être capables de reprendre la main en cas de nécessité, voire d'extrême nécessité, et tout au long de l'expérimentation faire en sorte que, quel que soit « ce qui » conduit le véhicule, ce dernier évolue dans la circulation de manière harmonieuse et sans surprendre quiconque. Nul doute que la mise en oeuvre de ces différents points ne permet pas de se dispenser d'une sorte de formation spécifique qui peut être menée bien sûr au sein même de la société qui réalise cette expérimentation ; - des véhicules disposant de fonctions automatisées de conduite seront de plus en plus souvent proposés à la vente à des particuliers ; il convient de s'interroger sur la façon dont les acheteurs de ce type de véhicules vont utiliser harmonieusement et sans danger les nouvelles technologies à leur disposition. Cette question est encore plus cruciale pour ceux qui ont l'habitude de louer des véhicules, car ils ont à prendre en charge un véhicule qu'ils ne connaissent pas, souvent de dernière génération, précisément celui qui est équipé des technologies les plus récentes. Une information sur le type de technique et son fonctionnement devrait être faite aux conducteurs : quelle est cette technologie, quand est-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
40
elle disponible, comment s'utilise-t-elle, quel est exactement le partage des tâches de conduite entre le conducteur et le système, quelles actions concrètes et précises reste-t-il à réaliser au conducteur qui les utilise ? - Cette information pourrait notamment devrait figurer par écrit dans le manuel qui accompagne le véhicule ou sur le site internet de la marque et du type de véhicule en cause. Il faut également réfléchir à l'information qui devrait être donnée lors de la prise en mains du véhicule neuf. L'utilisation de vidéos explicatives, pédagogiques et « ludiques » qui apparaissent d'ores et déjà sur le marché pourrait être recommandée et systématisée, en étant mise gracieusement à la disposition de l'acheteur, via une application pour téléphone portable par exemple. Cette information pourrait participer de la confiance dans ces nouveaux systèmes ; - Il convient également de tenir compte de ce que tous les véhicules ne seront pas instantanément équipés de ces nouvelles technologies et que devront cohabiter des véhicules « anciens » et « nouveaux ». De plus, certains usagers de la route ne seront pas automatisés ou connectés, comme les utilisateurs de deux-roues motorisés, les cyclistes et les piétons ; l'information évoquée ci-dessus devra aussi être mise à leur disposition, afin qu'en tant qu'usagers partageant le même espace routier, ils comprennent les réactions de ces « nouveaux » véhicules, dont le comportement est susceptible de les surprendre par rapport à celui des véhicules entièrement « conduits et contrôlés humainement ». Ce travail général d'information, de réflexion et de formation sur l'utilisation de ces nouvelles technologies, de remise en question de notre façon de conduire et de nous déplacer en voiture ou en camion ou encore en autocar, est une tâche qui doit être accomplie collectivement : pouvoirs publics, professionnels automobiles, professionnels de la formation, inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière, associations, psychologues experts en conduite automobile, notamment mais pas seulement : c'est toute la société civile en général qui est concernée et qui doit être interpellée sur ce sujet qui va révolutionner nos comportements de mobilité et de partage de l'espace public routier. Les formations à la conduite de véhicules autonomes et à usage professionnel devront être aussi adaptées. Eléments de synthèse et d'orientation Les besoins d'évolution de la formation à la conduite feront l'objet de propositions d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur, d'ici fin 2018. La Loi d'orientation des mobilités établira le principe d'une information des conducteurs sur les principales fonctionnalités d'automatisation, leurs domaines d'emplois et leurs limites, lors de l'acquisition d'un véhicule neuf.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
41
4.2.4. Identification des véhicules L'identification des véhicules automatisés, i.e. le fait de les rendre visibles ou repérables par les autres usagers ou acteurs de la route, soulève des enjeux en matière de gestion des interactions - civilités ou incivilités entre usagers, et partant d'efficacité de la gestion des trafics. Cette identification soulève également des questions de protection desdits véhicules contre la malveillance. Cette identification emporte des enjeux importants en termes de contrôle par les forces de l'ordre (ex : faut-il signaler un véhicule équipé de fonctions automatisées de conduite de manière visible de l'extérieur, dès lors que ces fonctions sont activées ?). Cela peut sembler nécessaire, si le conducteur a été autorisé à effectuer d'autres tâches que la conduite pendant le temps où le système « conduit » et jusqu'à ce qu'il lui demande de reprendre la main, ou encore que lui-même souhaite conduire. En effet, l'enjeu pour les forces de l'ordre est d'être à même de distinguer le conducteur qui « peut » faire autre chose de celui qui ne le « peut » pas, donc de ne pas verbaliser le premier, mais le deuxième. Reste que l'identification ouvre des questions d'acceptabilité. Eléments de synthèse et d'orientation La question importante de l'opportunité et des éventuelles modalités d'identification des véhicules automatisés renvoie à des enjeux divers (gestion de trafic, contrôle des règles de conduite, malveillance, cybersécurité, acceptabilité). Les enjeux sont à la fois techniques, juridiques et sociétaux. Ces questions nécessitent un approfondissement spécifique notamment pour la période transitoire durant laquelle coexisteront des véhicules à conduite humaine et d'autres autonomes.
4.2.5. Evolution de la réglementation technique et de l'homologation des véhicules Dans le cadre des travaux sur l'évolution de la réglementation technique des véhicules au sein de la CEE-ONU de Genève, c'est actuellement, le Règlement 79 (cf. encadré ci-dessous), relatif uniquement aux équipements de direction des véhicules, qui traite des principaux enjeux de l'automatisation. Ce règlement autorisait jusqu'en 2017 le contrôle automatique de la commande de direction par le véhicule uniquement jusqu'à 10 km/h. Cette prescription était suffisante pour homologuer des systèmes de parking automatique, mais ne permettait pas l'homologation des projets des constructeurs visant à diriger le véhicule automatiquement sur voies rapides ou en situation de bouchons, puis à terme dans toutes les situations.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
42
Encadré : aperçu des travaux d'évolution du règlement 79 Les travaux engagés au sein du WP29 de la CEE-ONU conduisent à aborder séquentiellement les degrés d'automatisation de plus en plus élevés, classés en 5 catégories : A : manoeuvres < 10km/h, y compris le parking piloté à distance (exemple park assist) B : maintien dans la voie B 1 : assistance, le conducteur doit garder ses mains sur le volant (exemple : lane keeping assist ) B 2 : délégation, le conducteur peut lâcher les mains du volant (exemple : lane guidance) C : changement de voie (initié par le conducteur) : le conducteur décide de changer de voie, et demande au système de le faire D : changement de voie (validé par le conducteur) : le système propose de changer de voie, le conducteur valide et le système opère E : B2 + changement de voie automatique : délégation du maintien dans la voie et du changement de voie totalement automatique.
Dans ces travaux, la France est attachée notamment à ce que, d'une part les moyens d'interface Homme Machine (IHM) soient le plus harmonisé (standardisé), et d'autre part que des obligations de suivi (« monitoring ») du conducteur soient définies de façon cohérente avec les exigences d'attention du conducteur qui ont été définies de façon spécifique à chaque cas d'usage, et en particulier, chaque niveau d'automatisation. Ainsi, la France est attachée à ce que, au moins dans un premier temps, les prescriptions techniques emportent des obligations de surveiller le conducteur pour s'assurer que celui-ci est disponible et capable de reprendre la main de manière sûre quand le véhicule va le lui demander. A terme et à la lueur de l'expérience, cette assertion méritera d'être évaluée et, le cas échéant, allégée. La France est également attachée à ce que des manoeuvres de risque minimal ou des procédures d'urgence soient disponibles et réglementées, le cas échéant, notamment pour traiter de l'ensemble des situations où le système ne peut plus fonctionner tout seul et que le conducteur ne reprend pas la main, ou en cas d'événements soudains. Au-delà du règlement R79 portant sur la direction, il importe d'inscrire l'évolution de la réglementation technique internationale dans un nouveau cadre permettant de passer d'une approche par « module » (ex : direction-latéral ; freinage-accélération-longitudinal ; champ de vision) à une approche « système » et de prendre en compte notamment : - le besoin de distinguer les différents types de cas d'usage dans l'approche, et notamment les niveaux d'automatisation et les domaines d'emploi ou conditions de circulation ; - le besoin de prendre en compte le caractère apprenant de ces systèmes ; - le besoin d'élargir progressivement la réglementation technique aux enjeux de connectivité du véhicule.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
43
Encadré : approche de réglementations technique « horizontale » des véhicules autonomes Pour cette nouvelle approche de réglementation technique des véhicules, dite « réglementation horizontale », qui permettra d'homologuer les véhicules avec un cadre plus adapté que le cadre actuel, la France propose les principes suivants : 1. nécessité de décrire le cas d'usage de façon suffisamment détaillée, dans les principales dimensions suivantes : fonctions de conduite déléguées mécanismes d'activation / désactivation / transition domaines d'emploi et conditions de circulation limites répartition des tâches attendues entre le système et le conducteur, en référence aux niveaux d'automatisation SAE manoeuvres de risque minimal et d'urgence, et articulation logique en fonction de l'arbre des événements redoutés (ceci suppose notamment de décrire d'une part les arbitrages éthiques sous-jacents aux logigrammes de manoeuvres d'urgence et d'autre part les délimitations des niveaux de responsabilité entre le conducteur et les fonctions de délégation de conduite) ; fonctionnalités des interfaces homme-machine, notamment en termes de surveillance de l'attention du conducteur ; d'information et d'alerte du conducteur sur l'état de délégation de conduite et les conditions critiques de circulation ; de demandes de reprise en main nécessité de distinguer les cas d'usage en deux principales catégories : environnements de circulation ouverts et complexes d'un côté ; parcours de circulation pré-définis et dont la sécurisation est maîtrisable pour le cas d'usage concerné nécessité d'analyser les situations de conduite et les événements les plus critiques potentiellement rencontrés par le véhicule en termes de sécurité routière, ainsi que de sûreté, afin d'asseoir des obligations proportionnées de gestion de ces situations critiques ; nécessité de proportionner les exigences de gestion des situations critiques, y compris les manoeuvres de risque minimal et les manoeuvres d'urgence, en quatre principaux niveaux, en fonction de leur criticité : existence d'un dispositif (ou d'une procédure ou d'une manoeuvre) de gestion de la situation critique description fonctionnelle du dispositif de gestion de la situation critique existence de fonctionnalités requises pour la gestion de la situation critique niveau de performance requis pour la gestion de la situation critique certification ou validation du dispositif de gestion de la situation critique. nécessité d'adapter les processus de validation en fonction de l'objet : analyse de risque (ou situation critique) ; exigences plus ou moins fortes vis-à-vis des mesures de gestion des situations critiques, cas d'usage ; nécessité de développer des jeux de tests par simulation là où ils sont pertinents ; nécessité de développer des dispositifs de validation à l'usage, au-delà de la mise sur le marché, notamment pour les systèmes apprenants et soumis à des mises à jour.
-
-
2. 3.
4.
5.
6. 7.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
44
En termes d'homologation, sur la base de cette approche, chaque type de véhicule muni d'un ensemble de fonctionnalités automatisées pourra être homologué par une autorité de réception, sur la base d'un rapport d'un service notifié, qui aura procédé à toutes les vérifications nécessaires adaptées à l'ensemble des fonctionnalités embarquées (vérification documentaire, essais de simulations, essais physiques ; évaluation de conformité décloisonnée et systémique). Le processus de délivrance de l'homologation européenne du véhicule se fera comme actuellement selon les principes érigés par les directives ou règlements cadre européens, pour tous les aspects non-automatisés du véhicule (ceintures de sécurité, éclairage, vitrage, ...), en incorporant l'homologation dédiée aux fonctionnalités automatisées ci-dessus. Enfin, le cadre national existant, notamment le livre troisième ("Le Véhicule") du code de la route et ses arrêtés d'application, devra être revu afin de s'assurer de l'adéquation entre les nouvelles prescriptions techniques éditées à Genève et rendues obligatoires par Bruxelles, et celles déjà présentes dans le code de la route, que ce soit au niveau des dispositions techniques des véhicules, de leur réception et homologation, de leur immatriculation et de leur contrôle technique, et devra être adapté en conséquence le cas échéant. Eléments de synthèse et d'orientation La réglementation technique des véhicules est élaborée, au niveau international, par la CEEONU. Le cadre européen fixe de son côté les modalités d'homologation (« réception ») en vue de la mise sur la marché des véhicules, en reprenant l'obligation de respect de certains règlements techniques relevant de la CEE-ONU. Il importe d'inscrire l'évolution de la réglementation technique internationale dans un nouveau cadre permettant de passer d'une approche par module à une approche système. C'est l'objet de la proposition française de « réglementation horizontale » présentée en juin 2017 à la CEE-ONU. Cette proposition permettrait notamment de traiter la diversité des cas d'usage qui se profilent, en les distinguant en deux principales catégories : environnements de circulation ouverts et complexes d'un côté ; parcours de circulation pré-définis et dont la sécurisation est maîtrisable pour le cas d'usage concerné. Cette approche permettrait de développer des analyses de risques par cas d'usage et ainsi de spécifier et de proportionner les exigences, notamment les manoeuvres d'urgence, en fonction de la criticité des situations de risques. Cette approche permettrait d'adapter le processus de validation en fonction du risque et de la réponse apportée par le système, par des tests, des simulations, ou en les combinant. Dans l'attente d'une nouvelle approche « horizontale », la réglementation technique des véhicules doit poursuivre son adaptation au développement du véhicule automatisé, afin de l'accompagner tout en s'assurant du respect des exigences de sécurité routière. Dans les révisions engagées (règlement R 79), la France demandera à ce que les exigences sur les fonctions d'automatisation, le suivi de l'attention du conducteur et les manoeuvres d'urgence et de sécurité, garantissent la sécurité routière tout en étant proportionnées au degré d'automatisation. La France demandera à ce que des exigences soient développées dans la réglementation technique internationale, afin que les véhicules dont les systèmes de conduite sont totalement délégués au véhicule, soient dotés de la capacité d'appliquer un ordre d'arrêt par les forces de l'ordre, et ce en toute sécurité.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
45
Le nouveau cadre de réglementation et de validation technique des fonctions automatisées d'un véhicule doit être élaboré à la CEE-ONU à Genève. Il importe de préserver le caractère multilatéral de ce cadre, sans quoi l'on risque d'inciter à la fragmentation des approches et des marchés. Pour autant, ce processus d'élaboration et de validation à la CEE-ONU est un processus très long (plusieurs années), au regard du rythme de déploiement. Ainsi, se pose la question d'un régime transitoire de portée européenne, à l'initiative de la Commission, permettant de définir le cadre de réglementation technique et d'homologation des véhicules automatisés à plus court terme qu'au sein de la CEE-ONU.
4.2.6. Cadre spécifique aux transports publics automatisés La dynamique de l'innovation dans le secteur des transports publics automatisés conduit à penser qu'il convient d'anticiper le passage d'une logique d'expérimentation au développement de services. Il est probable que, dans une logique incrémentale et d'apprentissage, les cas d'usage de la navette se développent d'abord sur des environnements de circulation relativement sécurisés connus (tels qu'on l'a observé jusqu'à lors dans les projets de recherche et d'expérimentation), pour, progressivement passer de « quasi-sites propres » à des parcours moins sécurisés (flux mixtes et carrefours ; changements de voie pour l'évitement), pour aller éventuellement vers des parcours non fixes. Les services identifiés dans le cadre de la NFI laissent penser que la « taille » du véhicule, telle qu'on la connaît actuellement (environ 12 personnes), sera appelée à se diversifier ainsi que la nature des parcours (sites propres / sites ouverts), pour couvrir un spectre plus large, allant du véhicule partagé autonome pour les demandes les plus atomisées, à des bus capacitaires. Les niveaux d'automatisation visés sont supérieurs à ce qui est visé pour le véhicule particulier, en visant dès maintenant les niveaux 4 et 5. Les travaux de réglementation de l'automatisation menés à la CEE-ONU ne répondent pas aux enjeux de développement du transport public automatisé, qui apparaît rapide sur des domaines d'emploi relativement sécurisés.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
46
Eléments de synthèse et d'orientation La dynamique de développement du transport public automatisé conduit à considérer deux orientations stratégiques au niveau national pour accompagner le marché : L'élaboration d'un cadre réglementaire fixant les prescriptions de sécurité du véhicule de type « navette » (9 à 16 places, dont au moins 4 places assises), ainsi que les conditions de circulation de ces véhicules lorsqu'ils sont automatisés (cette catégorie de véhicule se distinguant des catégories M2 ou M3 destinées au transport de personnes et soumises à la réglementation internationale et l'homologation européenne). L'élaboration d'un référentiel d'évaluation de la sécurité des parcours des navettes, lorsque ces parcours sont fixes, en s'appuyant sur une analyse des situations critiques de circulation des navettes automatisées en milieu urbain et sur les expérimentations.
-
Ces deux éléments permettront de mettre en place un régime d'homologation des véhicules concernés, et un régime de validation des parcours et conditions de circulation des véhicules.
4.2.7. Enjeux d'interopérabilité et de coordination de la supervision Le développement de l'automatisation va s'accompagner d'un développement de la gestion coordonnée de flottes de véhicules, probablement divers dans leurs caractéristiques techniques, leurs degrés d'automatisation, leurs fonctions et leurs domaines d'emploi. La supervision va, en parallèle, se développer pour les transports publics automatisés, mais aussi, sous certaines formes, pour le véhicule individuel et la logistique. Ces deux tendances (supervision et coordination de flottes), va poser des questions d'interopérabilité, de coordination voire de « partage » de la supervision entre acteurs, incluant des gestionnaires de flottes, des opérateurs de transports publics, des gestionnaires d'infrastructures, des gestionnaires d'espaces de type parking. Il s'agira ici de concilier la maîtrise des enjeux critiques de sécurité et de sûreté, et le soucis de ne pas créer des barrières à l'entrée ou des phénomènes de « bloked in » dans lesquels des opérateurs détiendraient, au travers de la supervision, un pouvoir monopolistique défavorable au développement des technologies et des services. Eléments de synthèse et d'orientation Une mission d'étude et de concertation sur les enjeux fonctionnels, techniques et économiques de l'interopérabilité et de coordination de la supervision flottes de véhicules automatisés, sera lancée, pilotée par le Ministère chargé des transports, associant les acteurs de la NFI et les collectivités locales.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
47
4.3. Expérimentations, innovation, recherche
4.3.1. Expérimentations En application de l'article 37 de la loi n° 2015-992 du 7 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, et afin de permettre la circulation sur la voie publique de véhicules à délégation partielle ou totale de conduite à des fins expérimentales, l'ordonnance n° 2016-1057 du 3 août 2016 relative à l'expérimentation de véhicules à délégation de conduite sur les voies publiques indique que : - La circulation à des fins expérimentales d'un véhicule à délégation partielle ou totale de conduite sur une voie ouverte à la circulation publique est subordonnée à la délivrance d'une autorisation destinée à assurer la sécurité du déroulement de l'expérimentation. - L'autorisation est accordée par le ministre chargé des transports après avis du ministre de l'intérieur, s'il y a lieu après avis du gestionnaire de la voirie, de l'autorité compétente en matière de la police de la circulation et de l'autorité organisatrice des transports concernés. - Les conditions de délivrance de l'autorisation et les modalités de sa mise en oeuvre sont précisées par décret en Conseil d'Etat. Lors de la préparation de ce décret, il est apparut nécessaire de concilier le besoin d'un cadre juridique solide et la possibilité d'innover, notamment en allant vers des niveaux d'automatisation de plus en plus élevés, où les obligations d'attention du conducteur pourraient être relâchées. L'automatisation doit en effet permettre et gérer en toute sécurité une moindre attention du conducteur. L'expérimentation doit donc pouvoir évaluer le lien entre différents niveaux ou fonctions d'automatisation fonctions, et les comportements du conducteur. Or, l'attention du conducteur est un élément structurant du code de la Route (article R 412-6 du code de la route : « Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent »). Afin de pouvoir, au cours d'expérimentations, déroger aux obligations d'attention du conducteur, il importe que cette dérogation soit accompagnée de dispositions législatives en matière de responsabilité. Afin de concilier au mieux le besoin d'un cadre juridique sécurisant, et le besoin de ne pas freiner les expérimentations, le cadre législatif sera adapté en 2018, afin de prévoir les dispositions nécessaires, pour des expérimentations, dans des conditions sécurisées, avec possibilité d'inattention du conducteur ou d'absence du conducteur. Au 1er janvier 2018, les principales caractéristiques et les principaux enseignements des expérimentations sont les suivants :
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
48
Encadré : synthèse des retours d'expérimentations Nombre et typologie d'expérimentation De fin 2014 à fin 2017, 51 décisions d'autorisation de délivrance exceptionnelle de certificats d'immatriculation « W garage » dans le cadre d'expérimentation de véhicules à délégation de conduite ont été délivrées. Parmi ces décisions, 26 concernent des voitures particulières (dont 11 en milieu urbain complexe), 15 concernent des navettes urbaines et 10 sont des décisions modificatives afin d'étendre la durée de validité, le périmètre géographique ou le nombre de véhicules concernés par l'expérimentation. Depuis mi-2016 une augmentation significative du nombre de demandes d'expérimentation de navettes autonomes est observée. Synthèse des retours d'expérience 30 bilans ont été reçus par l'administration et sept réunions sur les retours d'expérience ont été organisées depuis fin 2014. Ces retours d'expérimentation sont positifs. À ce jour, aucun accident matériel ou corporel n'a eu lieu lors des roulages (près de 100 000 km au total). Des incidents de plusieurs sortes ont cependant été rencontrés. En effet, les véhicules à délégation de conduite ne gèrent pas encore toutes les situations de conduite. Les problèmes peuvent provenir de l'environnement dans lequel le véhicule évolue (zones de travaux ou de péage, passage de trois voies à deux voies, brouillard épais, objet sur la voie...) mais aussi du comportement des autres usagers (non respect des distances de sécurité, queues de poisson, stationnement sur la bande d'arrêt d'urgence en cas de ralentissement de la circulation au niveau d'une sortie d'autoroute...). Les expérimentations ont permis aux constructeurs d'acquérir de nombreuses données de conduite et d'améliorer les algorithmes de conduite autonome. Ainsi, les véhicules expérimentés à l'heure actuelle sont capables de gérer beaucoup plus de situations et d'événements que ceux expérimentés il y a deux ans. De plus, les démonstrations de navettes autonomes ont permis de présenter ce concept au grand public. D'une manière générale, les retours des personnes ayant testé les prototypes sont enthousiastes. Les meilleures synergies avec les autorités de police doivent être trouvées lors des expérimentations.
La mise au point technique des voitures particulières autonomes sur route à chaussées séparées étant en grande partie effectuée, les constructeurs souhaitent passer à la seconde phase des expérimentations de véhicule à délégation de conduite : les tests de l'usage de ces véhicules avec des conducteurs non-experts. Ainsi, des expérimentations ont été ou sont en cours d'autorisation afin de faire circuler des véhicules en mode délégué avec des conducteurs non-experts à la place du conducteur. La responsabilité de la conduite est alors transférée au passager avant, un conducteur expert disposant de doubles commandes afin de pouvoir reprendre le contrôle du véhicule en cas de problème. Il est probable qu'au cours de l'année 2018 les constructeurs souhaitent tester la conduite déléguée, soit sans surveillance de conducteur expert, soit avec une supervision à distance, le « conducteur » étant alors hors du véhicule lors des roulages. Ce mode de conduite est envisagé pour les voitures particulières (tests avec un panel de clients) et pour les navettes urbaines (transport de personnes sans conducteur). Un projet de Loi proposera dès 2018 un cadre de responsabilité permettant de conduire de telles expérimentations.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
49
Eléments de synthèse et d'orientation L'expérimentation constitue une étape incontournable pour passer de la recherchedéveloppement à la mise en oeuvre des systèmes de conduite automatisée, et pour s'assurer qu'ils répondent aux exigences de sécurité, notamment de sécurité routière et de sûreté, ainsi que d'acceptabilité sociale. Cette phase d'expérimentation peut également, en complément des travaux de recherche ou des études de comportements, fournir des éléments utiles sur les attitudes de conduite et de mobilité. Il importe que les expérimentations ne se limitent pas aux aspects technologiques, mais concernent prioritairement les usages, qu'elles doivent contribuer à explorer, évaluer et affiner. Cette approche par les usages doit couvrir l'ensemble des territoires (urbains, périurbains, ruraux). Cette approche par les usages doit notamment permettre d'adresser, au-delà de la sécurité des systèmes, l'acceptabilité, les modèles économiques, les impacts sur la mobilité, l'emploi, les compétences. Les futures expérimentations doivent être structurées autour de priorités communes des acteurs français, et de la production d'un « bien commun » de connaissances objectivées pour la validation des systèmes. L'approche nationale doit ainsi conjuguer : - des orientations nationales, sur les cas d'usages et les impacts qui semblent les plus importants à évaluer pour les pouvoirs publics ; - un cadre de financement, en conjuguant au mieux les divers leviers du programme d'investissement d'avenir ; - un engagement de la filière à mettre en commun certaines « briques » des expérimentations, tout en respectant les initiatives industrielles et territoriales qui favorisent l'innovation : Plus précisément : - Au niveau législatif, un cadre de responsabilité sera proposé, permettant des expérimentations dans des conditions pouvant déroger aux obligations du code de la route. - Un document d'orientation présentera les attentes prioritaires des autorités publiques en termes d'expérimentations (cf. encadré ci-dessous et document détaillé joint). - Des règles de mise en commun des données, outils et méthodes d'évaluation et de validation des systèmes seront définies, sous l'animation de l'État, afin de favoriser les économies d'échelle et les synergies entre acteurs pour l'accumulation de la connaissance, dans le respect des contraintes industrielles et commerciales de ces acteurs. - Le programme d'investissements d'avenir (PIA) sera mobilisé pour financer des projets collaboratifs permettant de produire, à partir d'un programme structuré expérimentations, des méthodes et des outils de validation des systèmes, du point de vue de leurs usages et de leur sécurité, dans des configurations variées. - Les industriels ont été invités à proposer une approche structurée des expérimentations, dans le cadre des travaux de la NFI et du Conseil national de l'industrie : la filière élabore une proposition de programme national d'expérimentations-validation (cf. ci-dessous).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
50
Encadré : orientation des expérimentations du point de vue des politiques publiques. Les expérimentations dans le domaine de la logistique urbaine pourraient utilement se développer, comptetenu des potentielles applications et du besoin d'évaluer, outre les impacts sur la sécurité, les enjeux sur la gestion des flux et des circulations urbaines ; ces expérimentations devraient permettre d'évaluer les comportements des conducteurs professionnels et les éventuelles évolutions possibles des métiers des chauffeurs. Les expérimentations de navettes automatisées devraient permettre d'évaluer les enjeux critiques de circulation et d'alimenter un référentiel d'analyse de sécurité des parcours. Elles devraient également permettre d'évaluer les enjeux critiques de régulation des flux et de supervision. Elles devraient également permettre d'évaluer les comportements des conducteurs professionnels et les éventuelles évolutions possibles des métiers des chauffeurs. Les expérimentations du véhicule particulier automatisé devraient porter une attention particulière aux transitions (délégation et reprise de contrôle), aux fonctionnalités des interfaces homme-machine et au suivi de l'attention du conducteur ; elles devraient permettre d'évaluer la dynamique d'apprentissage des fonctionnalités par les conducteurs. Les expérimentations du véhicule particulier devraient contribuer à l'évaluation de l'impact sur la consommation de carburant. Les expérimentations du véhicule particulier pourraient utilement contribuer à l'évaluation de la perception du temps passé en mode de conduite délégué, et, partant, aux choix de déplacement et de mode de transport. En site fermé si besoin, il importe d'évaluer les apports possibles de la connectivité à la sécurité sur certaines situations critiques de cas d'usage, tant pour le véhicule particulier que pour les navettes et la logistique urbaine Les expérimentations devraient permettre des évaluations conjointes des véhicules et de l'infrastructure, y compris par l'expérimentation d'équipements de la route encore non-homologués. Les expérimentations devraient permettre de préfigurer l'élaboration d'un référentiel de d'adéquation des infrastructures, y compris de leur signalisation, à la conduite autonome. Les expérimentations devraient permettre de définir des référentiels partagés définissant les amers de localisation, de tester l'adéquation des jeux de donnés cartographiques à ces référentiels, et d'expérimenter une plateforme d'intégration, de fusion et de redistribution en temps réel de données géographiques de sources multiples.
-
-
-
-
L'encadré ci-dessous présente les orientations préliminaires des acteurs de la NFI en vue d'un programme national collaboratif d'expérimentations concourant à la validation des systèmes automatisés, et faisant écho aux attentes ci-dessus.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
51
Encadré : programme national expérimentation pilotes validation Eléments préliminaires L'objectif général est de construire un socle de connaissances, de méthodes et d'outils partagés entre les acteurs publics et privés, pour la démonstration de la sécurité et l'évaluation des systèmes de mobilité autonome. La construction de ce socle de connaissances s'appuiera sur des expérimentations et démonstrations à grande échelle sur des cas d'usage sélectionnés. Le plan Nouvelle France industrielle Véhicule Autonome lancé en 2013 a identifié les barrières au déploiement et a créé les conditions d'un déploiement concerté entre acteurs privés et Pouvoirs Publics, conditions également discutées aux niveaux européen et mondial. Le déploiement de la mobilité et des véhicules autonomes sûrs nécessite prioritairement : de concevoir des systèmes automatisés performants, fonctionnellement sûrs et moins faillibles que des conducteurs humains, d'en valider et d'en éprouver le fonctionnement avant de les commercialiser, d'apporter les éléments de preuve de la validation aux autorités en charge de réguler le déploiement par une évolution de la réglementation technique pour l'homologation des systèmes autonomes véhicules et infrastructures, et un élargissement des autorisations permettant la circulation des véhicules sur des lieux qualifiés et des cas d'usages diversifiés, d'établir les règles d'observation et de traitement des retours d'expérience pour évaluer les bénéfices de la mobilité autonome : gains en sécurité routière, bonne acceptabilité sociale, utilité, impacts sur l'emploi, etc.
L'enjeu est d'étudier et de tester la viabilité de la conduite et de la mobilité autonome en tant que moyen de trans port sûr et efficace. L'objectif général est de construire un socle de connaissances, de méthodes et d'outils partagés entre les acteurs publics et privés, pour la démonstration de la sécurité et l'évaluation des systèmes de mobilité autonome. La construction de ce socle de connaissances s'appuiera sur des expérimentations et démonstration à grande échelle sur des cas d'usage sélectionnés. Dans ce cadre, les objectifs pourraient être de : Construire le référentiel de situations critiques pour les cas d'usages sélectionnés, couvrant les transports individuels et les transports collectifs, Définir les méthodes et outils de validation et de démonstration de la sécurité, basés sur les situations critiques des cas d'usages, Préparer et mettre à disposition les infrastructures physiques et numériques nécessaires à la mise en oeuvre des expérimentations, en situation réelle d'exploitation, Identifier et formaliser les gains de performances, de sécurité et de services apportés par les infrastructures, dans une approche système intégrant véhicules et infrastructures, Evaluer l'acceptabilité, l'utilité, l'utilisabilité et l'usage la conduite et de la mobilité autonome par les usagers potentiels, ainsi que les bénéfices sociétaux attendus (sécurité routière, émissions, fluidité du trafic économie). Coordonner et mettre en oeuvre un plan d'expérimentation national basé sur des méthodologies partagées, permettant de caractériser les sites d'expérimentation, de collecter et capitaliser les données et résultats attendus, Construire et mettre en oeuvre un plan de sensibilisation et de communication pour accompagner le déploie ment de la conduite et de la mobilité autonome auprès des usagers et de l'ensemble des différentes parties prenantes.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
52
Les livrables pourraient être les suivants : Base commune de scénarios critiques et ses critères de définition, Environnement de simulation définissant des interfaces standardisées avec les différents moyens de simula tion spécifiques, Méthode et outils de validation de la sécurité et de l'acceptabilité, Référentiel de sûreté de fonctionnement, Référentiel de la sécurité routière Mise à niveau des infrastructures physiques et numériques sur les sites pilotes des expérimentations, Formulation des besoins d'évolution des infrastructures différenciés selon les scénarios de déploiement, Expérimentations grande échelle sur des sites pilotes Démonstration de sécurité dans le cadre des expérimentations, en incluant les modes dégradés, Retours d'Expérience partagés, Evaluations de l'acceptabilité y compris auprès des autres usagers de la route (hiérarchisation des freins à l'acceptation des véhicules autonomes, leviers pour une meilleure acceptation, conception des véhicules, critères de définition des parcours, recommandations...), Etudes d'impact (environnement, économique, social, sociétal ...).
4.3.2. Principaux enjeux de recherche scientifique Le véhicule autonome et connecté (VAC) est un sujet très complexe ; tout d'abord, parce qu'il ne définit pas une problématique unique mais qu'il englobe un ensemble de problèmes et soulève des questions de nature différente, tant technologique que scientifique. Ensuite, parce que les évolutions futures ne s'obtiendront pas nécessairement en raffinant les techniques et les procédés actuels mais parfois en inventant de nouveaux concepts et de nouveaux modèles tant pour la conception, la fabrication que l'exploitation du VAC. Ce caractère potentiellement disruptif implique la mobilisation d'acteurs issus de mondes différents : bien entendu, les départements R&D des entreprises, mais également les laboratoires du monde académique au sein des universités et des écoles ainsi que des organismes de recherche (exemple : CNRS, INRIA, IFSTTAR...). L'arrivée de nouveaux acteurs, qui n'appartiennent pas à l'industrie automobile « classique » mais sont issus du monde numérique, constitue un autre point saillant du développement du VAC. L'informatique et le traitement des données irriguent désormais toutes les problématiques, ce qui explique l'irruption de ces entreprises jusque-là extérieures à ce secteur. La recherche en sciences du numérique est donc, de facto, devenue incontournable pour espérer exister sur ce marché. La recherche travaille sur le sujet du VAC depuis des décennies ( exemple le projet Praxitèle de 1991 regroupait des laboratoires de recherche et des entreprises et a donné lieu à des expérimentations dans un contexte réel, en première mondiale). La France dispose d'atouts certains en termes de qualité et de diversité des recherches et des formations dans ce domaine : recherche pour imaginer et concevoir les nouveaux concepts et modèles, formation pour produire les futurs ingénieurs et doctorants qui sauront les transformer en produits et services innovants au sein des entreprises.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
53
Comme l'a clairement démontré le récent rapport de la commission villani sur l'intelligence artificielle, et les mesures associées annoncées par le président de la république le 29 mars 2018, notre pays doit être capable de mobiliser l'ensemble de ses forces s'il veut devenir un acteur reconnu au niveau international. Parmi les thématiques mentionnées dans le présent rapport villani, on peut mentionner, de façon non exhaustive, quelques axes qui nécessitent un travail important de recherche. · Les logiciels : ils sont au coeur du contrôle du vac ; s'assurer qu'ils répondent aux spécifications de leurs concepteurs et garantir leur fiabilité est donc crucial pour disposer de véhicules acceptés par les futurs utilisateurs. Ce sujet est un des points forts de la recherche en sciences du numérique française qui a su appliquer ses résultats par exemple pour valider les systèmes logiciels utilisés pour l'aviation et l'aérospatial. La cybersécurité : devenue une question centrale pour beaucoup d'entreprises, elle est évidemment cruciale pour le vac. Respecter des réglementations et des recommandations est nécessaire mais pas suffisant. Les auteurs d'actes malveillants innovent eux aussi en permanence et il est obligatoire de connaitre et d'analyser leurs attaques ainsi que de les anticiper afin de concevoir des parades pertinentes. C'est là encore une thématique particulièrement développée par les chercheurs de notre pays. Les interfaces humain-machine (ihm) : elles constituent le point d'entrée pour que les conducteurs puissent disposer des services proposés ; de leur qualité dépendra l'acceptation et le choix d'un véhicule. Il est donc nécessaire de travailler avec des scientifiques experts de ce domaine pour concevoir (notamment en impliquant les futurs utilisateurs dans des séances de co-design), prototyper et finalement évaluer (toujours avec un échantillon représentatif des usagers) et valider les futures ihm. Plus globalement, il faut également prendre en compte les facteurs humains dans l'expérience utilisateur (ux) et notamment les aspects liés au vieillissement de la population ; ces sujets sont étudiés par les chercheurs depuis longtemps, il convient donc d'exploiter leurs résultats.
·
·
·
La modélisation et la simulation : comme tout objet complexe, le vac pose des problèmes qu'un esprit humain seul ne peut plus résoudre ; il est donc indispensable de modéliser et de simuler numériquement cet objet pour le concevoir, le fabriquer, le vendre ou le réparer. Plus globalement, il est également nécessaire d'étudier ses interactions avec le réseau routier, les autres conducteurs et l'environnement en général. Ces étapes de modélisation et de simulation reposent sur des compétences en mathématiques appliquées (analyse numérique) et en informatique (programmation hpc) qui sont très importantes au sein du monde académique. La législation : le présent rapport mentionne à de nombreuses reprises l'importance d'adapter et de développer la législation concernant le vac. Pour atteindre cet objectif de façon satisfaisante, une collaboration entre juristes, ingénieurs et chercheurs s'impose de façon à suggérer des lois qui prennent en compte les évolutions prévues et/ou attendues. Ce type de rapprochement existe déjà dans d'autres domaines comme la législation sur le respect de la confidentialité des données à caractère personnel.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
54
Eléments de synthèse et d'orientation Le développement du VAC renvoie à des questions très complexes du point de vue de la recherche. Pour se donner une chance d'apporter des réponses concurrentielles face aux acteurs internationaux, qu'ils soient historiques ou émergents, il importe de mobiliser des ressources de recherche en associant des équipes de R&D des entreprises, et le terreau très actif au sein du monde académique (universités, écoles, organismes de recherche). Ces collaborations existent déjà en partie et ont donné d'excellents résultats, il convient de les renforcer et d'en créer de nouvelles pour relever les défis technologiques et scientifiques. Pour cela, il importe de mettre en oeuvre des incitations et des soutiens à des programmes de recherche associant ingénieurs et chercheurs, sans négliger le financement de recherches scientifiques plus amont, indispensables pour imaginer les nouveaux concepts et modèles sources des futures innovations.
4.3.3. Priorités de recherche à l'appui des politiques publiques De façons plus précise, les priorités pour la recherche (en amont des expérimentations et/ou pendant celles-ci) à l'appui des politiques publiques doivent prendre en compte les enjeux prioritaires liés à la sécurité routière et des systèmes. La recherche doit également affiner progressivement la connaissance des impacts, des comportements, et de l'acceptabilité, et d'explorer plus avant les enjeux pour la sécurité routière et l'exploitation des réseaux et services de transports, du lien entre automatisation, connectivité et cartographie numérique. Ces enjeux sont illustrés ci-dessous par des thématiques de recherche, selon deux axes : - Thématiques de recherche au titre des principaux enjeux de politique publique - Points d'attention particuliers au sein des priorités de recherche identifiées par les acteurs industriels Thématiques prioritaires de recherche pour les politiques publiques Impacts de la conduite automatisée sur les trafics et leur fluidité : méthodes de gestion de trafic intégrant le véhicule automatisé ; subordination des fonctions de délégation de conduite à la gestion de trafic ; gestion de trafic coopérative ou décentralisée aux véhicules automatisés ; potentialités de la ségrégation des trafics ; Facteurs humains de conduite et de sécurité routière : enjeux de reprise de contrôle et d'attention ; scenarii de reprise en main de la conduite en cas d'événement imprévu ; Impacts et exigences de la conduite automatisée sur les compétences ; évolutions à long terme des compétences de conduite ; besoins de formation initiale et de mise à niveau des conducteurs ; Impacts sur l'emploi et les métiers Impacts sur la demande de transports et les choix modaux, les valeurs de possession des véhicules et la mobilité partagée ; Impacts sur l'efficacité (y compris environnementale) de la chaîne logistique ; Impacts sur les émissions polluantes et de GES (y compris modifications de la demande) ;
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
55
-
Méthodes de test adaptées aux enjeux de la conduite automatisée, dont systèmes apprenants ; développement des outils de simulation ; évaluation du domaine de pertinence de la simulation pour la validation des systèmes Déterminants de l'acceptabilité individuelle et collective de l'automatisation ; Catégorisation des domaines d'emploi du véhicule automatisé : paramètres d'infrastructures et de trafic ; référentiels partagés de caractérisation des réseaux Utilisation des données du véhicule automatisé pour la connaissance de l'infrastructure et des trafics ; Modèles économiques, impacts sur différentes catégories d'acteurs (insiders / outsiders) ; Impacts sur les corps de contrôle.
Points d'attention particuliers au sein des priorités de recherche industrielles Perception : acquisition, fusion et interprétation des données Amélioration des performances des fonctions de perception (notamment sur les usagers vulnérables); Diagnostic et évaluation en temps réel des fonctions de perception ; Comportements dynamiques des autres véhicules Comportements malveillants d'autres conducteurs ou usagers de la route Apports de la connexion à l'automatisation : capacités comparées et exigences de qualité des différentes technologies (dont ITS-G5, 4G, LTE-V2X, 5G) Reconnaissance des limites du domaine d'emploi
Algorithmes de planification et de décision - Analyse de scénarios de trafic complexes ; - Représentation d'interprétations naturalistiques du code de la route - Méthodes de négociation et de décisions pour planifier une trajectoire prenant en compte les trajectoires des autres usagers de la route, les contraintes de risque, de consommation et de confort ; - Adapter la prise de décision en fonction des usages locaux, du contexte routier... Localisation - Cartographie dynamique garantissant l'autonomie de conduite hors connexion pour une mise en situation de sécurité ; - Amélioration de la précision par l'apport de la cartographie haute définition. Correspondance entre localisation par satellite et connaissance de l'environnement à priori. Interfaces homme-machine - Fournitures d'interfaces claires permettant de renforcer la confiance et l'efficacité perçue dans le système afin de garantir l'acceptabilité a priori et à l'usage ; - Fonctionnalités des interfaces homme-machine (IHM) (visuelles, sonores, haptiques) : exigences de reconnaissance simple, mémorisable et transférable - Monitoring de l'attention : capacités à apprécier les différents états de vigilance et la capacité à prendre la main ; - IHM adaptées à maintenir ou re-mobiliser l'attention et la vigilance du conducteur - Efficacité et qualité de la reprise en main grâce à des informations simples sur la situation de conduite.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
56
Sûreté de fonctionnement - Signalement des défaillances au conducteur - Capacité du conducteur à gérer les défaillances - Actes malveillants - Cybersécurité Systèmes apprenants machine learning - Nouvelles approches ou méthodes de validation / certification Supervision - Supervision et exploitation centralisée des flottes de navettes automatisées - Systèmes de supervision décentralisés Eléments de synthèse et d'orientation A l'appui des politiques publiques, les priorités de recherche concernent principalement les impacts sur la sécurité, la fluidité, la mobilité, l'environnement ; l'acceptabilité ; l'impact sur l'emploi et les compétences ; le facteur humain ; les interfaces homme-machine, les gestes de conduite et la gestion des transitions automatisation reprise en main ; les méthodes et outils de validation des systèmes ; le développement de la simulation ; la supervision.
4.3.4. Modalités de soutien à l'innovation La majorité des technologies nécessaires à la mise sur la route des premiers véhicules automatisés sont disponibles. Toutefois, ces technologies issues de laboratoires nécessitent une adaptation au monde de l'automobile. Elles doivent être rendues plus robustes et pour cela de nombreux essais sur route ouverte son nécessaire. Par ailleurs, le coût de ces technologies doit diminuer afin de se rapprocher des standards de coût de l'industrie automobile. Pour franchir les étapes vers une automatisation complète du véhicule, des efforts importants de R&D restent nécessaires avec un objectif fiabilité/coût propre à l'automobile, notamment dans les domaines des capteurs, des calculateurs et des logiciels, en particulier dans le développement des algorithmes de reconnaissance et de prise de décision.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
57
En France, plusieurs dispositifs d'accompagnement ont été mis en place par l'État en collaboration avec les industriels et les instituts de recherche : - Des outils « collectifs » avec par exemple l'ITE Vedecom et l'IRT SystemX qui reçoivent des financements issus du Programme d'Investissement d'Avenir (PIA) pour mener des programmes de recherche sur des technologies clés du véhicule autonome, ne relevant pas du domaine compétitif. Les industriels sont incités à participer à ces différents projets sur un modèle de co-investissement public/privé (1 euro venant de l'Etat étant obligatoirement compensé par 1 euro venant des industriels) ; - Des dispositifs de soutien, qui permettent de financer des projets de R&D portés par les acteurs privés, notamment le programme « véhicule du futur » du PIA opéré par l'ADEME ou dans le cadre de projets collaboratifs, le Fond Unique Interministériel (FUI) et les PSPC. Au total, ce soutien et la coordination des acteurs industriels au sein de la NFI s'est traduite par plus de 40 expérimentations ou démonstrations autorisées sur route ouverte en France pour tous types d'usages (autoroutier, urbain et péri-urbain), pour les véhicules particuliers et le transport public. Des expérimentations ont également été lancées sur site privé pour des systèmes de transport public ne nécessitant pas d'autorisation ; et plus de 200 millions d'euros de projets financés dans le cadre de différents appels à projets (FUI, action « Véhicule du futur » du PIA, PIAVE...). Les cahiers des charges de ces différents guichets de soutien sont établis en cohérence avec les différentes actions de l'état et notamment avec la feuille de route définis dans le cadre de la solution de la Nouvelle France Industrielle. Eléments de synthèse et d'orientation Il importe que les dispositifs de soutien à l'innovation, et notamment dans le cadre du programme des investissements d'avenir (PIA), permettent de mieux accompagner, par des appels à projets ciblés, le développement de l'automatisation, en aval de la R&D et en amont des expérimentations (typiquement : passage du TRL niveau 6 au TRL niveau 8). Ces appels à projets, ciblés sur la problématique de l'automatisation des transports, devraient être ouverts aux différents domaines d'usage (véhicule particulier, transports publics, fret et logistique) et intégrer les diverses dimensions de l'automatisation (technologies des véhicules, liens avec l'infrastructure, insertion dans le trafic et son exploitation, supervision, connectivité, cartographie et localisation, intégration dans les « bouquets » de service de mobilité). Ces appels à projets devraient permettre des projets collaboratifs entre les acteurs concernés (industriels de l'automobile, des télécommunications et des services multimedia, transporteurs, gestionnaires d'infrastructures, autorités organisatrices de transports, chargeurs et logisticiens).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
58
4.4. Aspects numériques et données
4.4.1. Cyber-sécurité Situation actuelle / bilan Les véhicules automobiles utilisent toujours plus de systèmes informatiques pour contrôler et commander les fonctions « premières » comme la motorisation, le freinage ou le changement de direction, ainsi que pour fournir de nouveaux services « secondaires » comme la navigation, l'assistance ou « l'infodivertissement ». Cette numérisation inéluctable permet trois évolutions majeures du secteur de l'automobile : une motorisation plus respectueuse de l'environnement, une automatisation partielle ou totale des fonctions de conduite et l'apport de nouveaux services. Tous les nouveaux véhicules seront connectés en 2018, a minima du fait de l'adoption obligatoire du dispositif eCall (appel d'urgence). Mais ces connexions seront très prochainement plurielles avec de nombreuses parties prenantes (constructeurs, équipementiers, centres de service (assureurs, assistance...), gestionnaire d'infrastructure, puissance publique...), créant ainsi des écosystèmes numériques complexes et difficiles à maîtriser. Cela multiplie les possibilités d'attaques informatiques qui pourront impacter directement la sûreté de fonctionnement du véhicule. La conception technique des véhicules automobiles est régie par de la réglementation et par des normes :
·
La réglementation technique découle des travaux du forum mondial de l'harmonisation des règlements concernant les véhicules, aussi appelé WP.29, sis à Genève et rattaché à l'Organisation des Nations-Unies. La directive 2007/46/CE établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur (homologation) dans l'Union européenne reprend en effet en grande partie les conclusions de ces travaux. Concernant la prise en compte de la cyber-sécurité, le WP.29 a initié des travaux en 2017. Les normes quant à elles, ne sont pas systématiquement reprises dans la réglementation. Elles constituent néanmoins l'état de l'art et sont généralement adoptées par l'ensemble des acteurs du domaine. La norme qui fait autorité en matière de sûreté de fonctionnement, l'ISO 26262, ne traite pas du sujet de la cyber-sécurité (malveillance). Aussi une nouvelle norme relative à la cyber-sécurité des véhicules à moteur est en cours d'élaboration, l'ISO 21434.
·
Par ailleurs, le cadre réglementaire relatif à la sécurisation des systèmes d'information des opérateurs d'importance vitale3ou des futurs opérateurs de services essentiels 4, ne répond que partiellement aux besoins de sécurisation des activités de transport. En effet ces deux initiatives réglementaires concernent essentiellement les infrastructures critiques et font généralement fi des systèmes embarqués sur les véhicules.
3 4
Article 22 de la Loi de programmation militaire 2014-2019 Directive 2016/1148 sur la sécurité des réseaux et des systèmes d'information
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
59
À ce jour, il n'existe donc pas d'exigence de nature à réduire le risque liés à la cyber-sécurité notamment dans le processus de réception communautaire par type des véhicules (aussi appelée homologation). Notons toutefois que, pour la première fois, le cadre réglementaire national relatif aux expérimentations sur la voie publique de véhicules à délégation partielle ou totale de conduite introduit dans l'instruction des demandes d'autorisation un volet de « cyber-sécurité ».
Orientations possibles
La cyber-sécurité n'a pas pour finalité de freiner l'innovation et la numérisation croissante observée dans le secteur automobile. Cependant face à une menace plus aiguë il convient de respecter et de promouvoir des préceptes qui ont fait leurs preuves en la matière. On peut citer :
· ·
·
·
· ·
·
·
Développer une culture de gestion des risques basée sur des analyses de risques régulièrement mises à jour. Faire un audit de conformité et des tests d'intrusion avant toute mise en circulation d'un nouveau type de véhicule. Ceci pourrait constituer un nouveau chapitre dans le processus de réception communautaire par type (homologation) des véhicules. Intégrer la cyber-sécurité dans tout le cycle de développement des nouveaux produits. Adopter le principe de sécurisation dès la conception pour les logiciels comme pour les matériels (composants, dispositifs, véhicule). Ceci permettra à l'ensemble des parties prenantes de mieux sécuriser les architectures et les réseaux en s'appuyant notamment sur la défense en profondeur (isolation des fonctions critiques), le filtrage des flux, le chiffrement des flux... Imposer des objectifs de sécurité opérationnelle (supervision, détection et gestion des incidents) pour détecter et prévenir les attaques informatiques. Journaliser les événements informatiques en vue d'une analyse approfondie le cas échéant. Adopter une approche holistique en intégrant les infrastructures routières, de télécommunication et débarquées dans le champ d'analyse. Promouvoir, s'ils existent, des composants labellisés (certifiés ou qualifiés par l'ANSSI). Par exemple pour la « passerelle » ou pour les unités de commande électronique (Electronic Control Units ou ECU) des véhicules. Maitriser la sécurité numérique tout au long du cycle de vie du véhicule et de son écosystème, au travers notamment le maintien en condition de sécurité, via des mises à jour de sécurité des véhicules5. Imposer un mode dégradé/manuel en cas de problèmes liés à la cyber-sécurité, ou a minima l'analyse de son opportunité.
Lors des assises de la mobilité, le groupe de travail « Pour des mobilités plus sûres » a proposé la création d'un observatoire de la sûreté des transports dont l'une des fonctions viserait à étudier les questions de cyber-sécurité afférentes au véhicule autonome et connecté. Les questions de cyber-sécurité seraient abordées sous un angle stratégique incluant l'ensemble des acteurs et des représentants des utilisateurs. Ce groupe participerait ainsi au développement du véhicule autonome.
5
Attention toutefois, ces mises à jour multiplient les possibilités de compromission des systèmes et doivent donc être particulièrement maîtrisées.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
60
Éléments de synthèse et d'orientation Il n'y aura pas de confiance dans les nouveaux usages du véhicule automatisé et autonome sans la prise en compte de la cyber-sécurité. En outre la singularité du risque numérique ne doit pas conduire à le traiter de manière singulière. De ce fait, il est suggéré :
· · ·
par le biais du WP.29, de modifier la réglementation technique pour introduire des exigences de nature « cyber », intervenant dès la conception des nouveaux véhicules ; de faire converger les approches normatives relatives à la sûreté de fonctionnement avec celles relatives à la cyber-sécurité ; de peser sur la récente proposition de la Commission européenne relative à un schéma européen de certification en matière de cyber-sécurité qui permettra d'offrir un cadre d'évaluation du niveau de sécurité des produits et des systèmes. La France dispose déjà d'une expertise en la matière qui nécessite d'être adaptée aux systèmes complexes, comme un véhicule connecté ; de mettre en place, idéalement au niveau européen, une structure d'échange dédiée au secteur automobile sur l'état de la menace et les réponses à apporter aux cyber-attaques ; de développer la culture en matière de cyber-sécurité auprès de l'ensemble des acteurs des filières.
· ·
4.4.2. Protection des données personnelles Le développement des véhicules automatisés implique une amplification des capacités de communication, que cela soit avec les infrastructures, avec les autres véhicules ou avec les prestataires de services (maintenance, diagnostic, assurance personnalisée, guidage, etc.). Ces échanges d'informations de plus en plus importants posent de nouvelles questions. En effet, certaines données sont révélatrices de la façon de conduire des automobilistes, de leurs habitudes de vie (endroits fréquentés, horaires, musique écoutées, etc.) ou encore de potentielles infractions au code de la route. En France, la loi Informatique et Libertés est depuis 1978 la réglementation applicable à la protection des données à caractère personnel. En mai 2018, le Règlement général sur la protection des données (« RGPD ») entrera en application et offrira un cadre unifié de protection des données des personnes au sein de l'Union européenne. D'application directe, ce règlement renforce les droits des individus, introduit de nouveaux droits (droit à la portabilité, droits à l'effacement, etc.), responsabilise les acteurs traitant les données personnelles et accroît les pouvoirs de régulation des autorités de protections des données. La Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (« CNIL »), soucieuse de favoriser les écosystèmes d'innovation tout en assurant la protection des données personnelles des usagers de l'automobile, a élaboré en concertation avec les acteurs du secteur de la filière automobile, les entreprises innovantes du secteur des assurances et des télécoms, et les autorités publiques un « pack de conformité » dédié aux véhicules connectés. Ce pack propose des lignes directrices pour une utilisation responsable des données dans les
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
61
prochaines générations de voitures, conforme à la loi Informatique et Libertés et au RGPD. L'enjeu est d'intégrer la dimension « protection des données personnelles » dès la phase de conception des produits et d'assurer la transparence et le contrôle par les personnes de leurs données conditionnant la confiance des utilisateurs. Au niveau européen, le G29, le groupe des « CNIL » européennes, a été sollicité par la plateforme C-ITS pour contribuer aux travaux sur les aspects de protection des données à caractère personnel et sur le respect de la vie privée. Il convient de se poser collectivement la question de comment assurer le respect des normes de protection des données qui sont donc fixées au niveau européen. Éléments de synthèse et d'orientation Toutes les données qui peuvent être rattachées à une personne physique identifiée ou identifiable, notamment via le numéro de la plaque d'immatriculation ou le numéro de série du véhicule sont des données à caractère personnel protégées par la loi Informatique et Libertés et le Règlement général sur la protection des données (RGPD). Le pack de conformité « véhicules connectés » piloté par la CNIL vise à sensibiliser les acteurs économiques du secteur automobile sur les principes de transparence et de loyauté de la collecte, qui impliquent a minima une information des personnes concernées, voire le recueil de leur consentement. Une approche de protection des données dès la conception (« privacy by design ») doit être privilégiée. Les travaux relatifs à l'accès aux données du véhicule présentés ci-après intégreront dès l'amont les exigences du RGPD. L'approche du « privacy by design » pourra également se traduire utilement par la mise en place d'outils facilement paramétrables permettant à l'utilisateur d'exprimer de façon simple et claire ses choix en matière de maîtrise de ses données et des traitements qu'il autorisera à en faire.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
62
4.4.3. Enregistreur de données à bord Pour établir les différentes responsabilités dans le cas d'un sinistre de véhicule autonome, il sera nécessaire de pouvoir examiner la scène en détail. Notamment il faudra établir : - si le mode autonome était enclenché ; - s'il fonctionnait dans les domaines d'utilisation définis par le constructeur ; - si la faute est imputable à une réaction du véhicule automatisé ou liée à une faute d'un autre automobiliste ; - si le véhicule a bien respecté les prescriptions du code de la route ; - etc ... Afin de pouvoir récupérer ces différentes informations, la présence d'un enregistreur de données d'accidents (EDR) à bord du véhicule, dédié à cet effet, semble indispensable. Les obligations de présence à bord de ces équipements, la durée d'enregistrement et de conservation des données, ainsi que le type et le format qu'elles devront prendre, devront être définis de manière internationale dans les réglementations techniques d'homologation (CEEONU WP29). Dans un contexte plus général de sécurité routière, la France a déjà montré sa volonté de voir déployer les EDR dans tous les véhicules neufs. Ces systèmes n'ont nullement vocation à dresser l'historique des déplacements des conducteurs, mais seulement à mieux connaître les événements techniques précédant de quelques secondes un accident. Les études accidentologiques devraient gagner en précision, dès lors que la vitesse, les accélérations et/ou décélérations, ainsi que la trajectoire du véhicule dans les secondes précédant l'accident, peuvent être connues et analysées. La Commission européenne a fait réaliser une étude sur l'EDR en 2014. L'objectif de cette étude était d'aider la Commission à décider si l'installation d'EDR dans tous les véhicules ou certaines catégories de véhicules [poids lourds, les véhicules utilitaires légers, les autobus et les autocars, et les voitures particulières (à usage privé et commercial)] pourrait entraîner une amélioration de la sécurité routière ou d'autres conséquences possibles justifiant les coûts associés à l'adoption de mesures dans la législation européenne. L'enregistreur de données à bord dédié au véhicule autonome, que l'on désigne par le terme ADDR (autonomous driving data recorder) a vocation à enregistrer les données permettant de définir les actions du conducteur et du système de délégation de conduite au moment d'un accident. Une réglementation technique internationale au niveau de la CEE-ONU est en préparation pour rendre obligatoire et définir l'ADDR pour les systèmes de délégation de conduite niveau SAE3 et plus. La Commission envisage d'introduire une obligation d'un EDR pour les véhicules légers (voitures et camionnettes) dans son projet de révision du règlement général de sécurité des véhicules, prévu pour 2018. Un tel déploiement devrait par la même occasion traiter des problématiques liées à la conduite déléguée, pour laquelle il est essentiel de savoir si, à l'instant t, le véhicule était « conduit » par le système automatisé seul ou partiellement, donc en collaboration avec le conducteur, ou encore totalement pris en charge par le conducteur.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
63
Dans le cadre de la gestion d'un sinistre automobile impliquant un véhicule automatisé, les données générées par ces équipements peuvent également permettre de faciliter, après l'indemnisation des victimes, la recherche des responsabilités pour les recours subrogatoires nécessaires contre le(s) responsable(s) de l'accident. Il importera que les forces de l'ordre puissent disposer de systèmes d'information interopérables avec les futurs EDR afin d'accéder aux données à valeur judiciaire en cas d'accident.
Éléments de synthèse et d'orientation Dans un contexte général de sécurité routière, la France soutient le déploiement des enregistreurs de données d'accidents (EDR) dans tous les véhicules neufs, destinés uniquement à mieux connaître les événements techniques précédant de quelques secondes un accident. Le développement de l'automatisation renforce ce besoin. Dans ce contexte, la France soutien le principe de l'enregistrement des données de conduite autonome (ADDR) pour les systèmes de délégation de conduite de niveau SAE3 et plus. Les obligations de présence à bord de ces équipements, la durée d'enregistrement et de conservation des données, ainsi que le type et le format qu'elles devront prendre, devront être définis de manière internationale dans les réglementations techniques d'homologation (CEEONU WP29), ou à défaut par la Commission européenne. De plus, le déploiement des EDR étant dépendant d'une action au niveau de l'UE, la France s'emploie à agir auprès de la Commission européenne afin qu'elle fasse rapidement une proposition législative en la matière. La Loi d'orientation des mobilités fixera les règles d'accès aux données de ces équipements, dès lors qu'ils seront disponibles à bord, pour les besoins d'investigation et d'enquête des forces de l'ordre qui devront disposer des moyens adéquats et, le cas échéant, d'expertise assurantielle sur les accidents.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
64
4.4.4. Données produites par le véhicule automatisé Les nouveaux usages et les services produits à partir des données issues des véhicules voient leur potentiel démultiplié par l'apparition de la connectivité des véhicules. L'automatisation, avec ses fonctionnalités d'observation de l'environnement du véhicule, va encore augmenter ce potentiel. La richesse de ces données et la possibilité d'un recueil à distance et, dans certains cas, en temps quasi-réel, créent la possibilité de la conception d'une multitude de nouveaux services pour les usagers des transports (pouvant permettre des gains de sécurité et un renforcement des mesures de prévention, une amélioration de l'expérience du déplacement, une optimisation de l'organisation du déplacement ; ou une réduction des coûts) mais aussi au secteur automobile, aux gestionnaires routiers, à l'industrie routière, au secteur des assurances (développement des offres d'assurance comportementale de type « Pay as you drive ») et, audelà, à toutes les activités économiques liées aux usages de transports (tourisme, commerce, loisirs, etc....). Les enjeux liés aux conditions d'accès à ces données recouvrent plusieurs dimensions : - interopérabilité ou interfaces d'échanges ; - protection et conservation des données à caractère personnel ; - sécurisation des données ou cybersécurité ; - responsabilité de la production et du traitement des données ; - droits d'accès aux données et mise en oeuvre opérationnelle du droit à la portabilité des données personnelles prévu à l'article 20 du RGPD ; - enjeux économiques et concurrentiels - liens avec les politiques publiques, notamment de sécurité routière et de gestion des réseaux et des déplacements. Ces enjeux dépassent largement le contexte national et sont, au moins pour la dimension d'interopérabilité, de portée européenne. La directive 2010/40/EU fournit un premier cadre : - en définissant les règles d'accès aux données pour la fourniture de services d'information sur les actions prioritaires : information de sécurité routière en temps réel, information routière, information déplacement, information parking, eCall. - en identifiant comme domaine d'action européenne prioritaire le lien entre le véhicule et les infrastructures de transport pour l'élaboration et l'utilisation de spécifications et de normes. Concernant l'accès aux données véhicules, le rapport de janvier 2016 de la plateforme C-ITS (Platform for the Deployment of Cooperative Intelligent Transport Systems in the European Union) recommande d'adopter cinq principes : - Le consentement de l'usager avant de rendre l'accès et l'usage possibles des données de son véhicule à des fournisseurs de services ; - Une concurrence juste et non faussée entre tous les fournisseurs de service ; - Le respect des enjeux de vie privée de l'usager et la sécurité des données de son véhicule ; - Les services utilisant les données des véhicules ne doivent par remettre en cause la sécurité de fonctionnement du véhicule - Favoriser un accès standardisé pour favoriser l'interopérabilité entre les différentes applications
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
65
Les constructeurs automobiles européens réunis au sein de l'ACEA ont proposé en décembre 2016 des principes d'accès différenciés en fonction de quatre types de données : Sécurité routière : · accès aux données anonymisées sur une base réciproque entre autorités publiques et constructeurs · accès contractuel (B2B) pour les acteurs privés Services multi-fournisseurs (ex : information parking, reconnaissance de la signalisation) · accès contractuel (B2B) entre acteurs Services personnalisés au conducteur (ex : « pay as you drive ») · accès aux données personnelles, dans le cadre d'un service identifié pour lequel le conducteur a spécifiquement donné son accord Données commerciales et de suivi des composants des véhicules · pas d'accès par des tiers
-
Au niveau européen, les questions d'interopérabilité et de sécurité devraient être abordées dans un règlement délégué de la Directive 2010/40 sur les ITS. Compte-tenu du cadre européen existant, il apparaît important de clarifier maintenant les principes sur deux autres volets majeurs de la problématique : - enjeux économiques et concurrentiels - appui aux politiques publiques S'agissant de l'appui aux politiques publiques, on peut illustrer l'apport des données du véhicule de la façon suivante : certaines données fournissent de l'information sur des événements inopinés ou imprévus affectant la sécurité routière (incidents, accidents, conditions météorologiques exceptionnelles). Il est difficile de collecter ces données via d'autres sources ; les informations qui en sont issues sont classiquement considérées comme relevant d'une mission d'intérêt général (de sécurité) sans coût pour l'usager ; certaines données participent à la connaissance du trafic, et peuvent venir en complément ou en substitution de données produites par les gestionnaires routiers (débit, vitesse) pour la gestion du trafic : sur cet aspect, se mêlent des services marchands (information routière privée) et non marchands (gestion de trafic, information routière publique) ; l'information routière recèle elle-même des enjeux de politique publique dans la mesure où les comportements qui en sont issus peuvent affecter les politiques de gestion de trafic, de sécurité ou de mobilité (exemple des re-routages sous-optimaux ou dangereux) ; certaines données fournissent de l'information sur la consistance (géométrie, équipements...) et l'état du patrimoine des réseaux d'infrastructures, utilisables ensuite d'une part par les gestionnaires pour la gestion de leur patrimoine, d'autre part pour améliorer les performances des véhicules en matière de localisation et perception de son environnement ; cet axe ou groupe de données s'apparente, par certains aspects, à la production d'une base cartographique approfondie et détaillée, qui, en termes économiques, peut se rapprocher d'un bien public.
-
-
Les Assises de la Mobilité ont exprimé des attentes fortes en matière d'accès aux données produites par le véhicule automatisé et connecté. Ces attentes sont prises en compte dans le cadre de la préparation de la Loi d'orientation des mobilités.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
66
Ainsi, les données des véhicules ainsi que des dispositifs de navigation embarqués, représentent de forts enjeux pour les personnes en charge de la gestion du trafic routier, de l'entretien et de l'exploitation des infrastructures routières, de la préservation de la sécurité routière. Il convient d'assurer un accès aux données des véhicules aux personnes chargées d'une mission de service public, dans l'exercice de ces missions, dans le respect des dispositions du Règlement général sur la protection des données, et en limitant strictement les données et les utilisations concernées aux seules données qui sont nécessaires à la gestion du trafic routier, à l'entretien et l'exploitation des infrastructures routières, à la préservation de la sécurité routière. Par ailleurs, les données des véhicules et des services de navigation embarqués sont potentiellement source de création de services et de valeur ajoutée, et ce d'autant plus qu'elles peuvent être intégrées à un cadre plus large de données de mobilité (autres modes) ou fusionnées avec des données hors mobilité. A ce stade, les domaines dans lesquels des attentes d'accès semblent s'être cristallisées sont la réparation automobile ; l'assurance et l'expertise automobile ; les services s'appuyant sur la gestion de flottes ; les services d'information et de billetique multimodales intégrés dans le concept de « mobility as a service », notamment dans les zones où le véhicule routier reste un support essentiel de la mobilité et permet de développer les usages partagés et le rabattement vers les transports massifiés. Une étude et une concertation nationales ont été lancées en France en 2017 pour proposer différentes options pour la définition des droits et modalités d'accès aux différents types de données, en tenant compte du fonctionnement des marchés concernés, du cadre général du droit de la concurrence et de la protection des données Il conviendra d'adopter une approche équilibrée, qui permette aux acteurs produisant ces données, de les valoriser et d'en améliorer en continu la qualité, et la possibilité pour des acteurs tiers, de créer de nouveaux services, le tout dans le respect des dispositions du RGPD. L'approche française qui sera issue de la Loi d'orientation des Mobilités doit être articulée avec les travaux européens, et notamment la stratégie européenne sur la conduite automatisée et connectée prévue pour mai 2018. En particulier, au niveau européen, une task-force publicprivé a été mise en place en mai 2017, afin d'étudier les architectures définissant le rôle des différents acteurs dans la production, qualification, et transmission des données liées à la sécurité routière, à la gestion des incidents, d'entretien des infrastructures et de gestion de trafic.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
67
Eléments de synthèse et d'orientation Les conditions d'accès aux données du véhicule constituent un élément clé du développement du véhicule autonome et connecté et des services qui peuvent s'y attacher. Ces conditions d'accès, et d'échange avec les données de l'infrastructure, sont déterminantes pour les autorités et gestionnaires routiers pour améliorer la gestion des réseaux routiers et de la sécurité routière. Les aspects d'interopérabilité et d'interfaces, de sécurité, et de protection de la vie personnelle étant abordés dans des cadres spécifiques, il importe maintenant de clarifier les conditions économiques et concurrentielles d'accès à ces données, en tenant compte des spécificités des différents acteurs de la chaîne de valeur, notamment des gestionnaires et autorités publiques. Ceci nécessite de définir des conditions-cadre d'accès, en distinguant les types de données ou de services d'information en fonction des besoins de politique publique des transports et de sécurité routière d'une part, des enjeux concurrentiels d'autre part, le tout dans le respect des dispositions en matière de protection des données individuelles. La Loi d'orientation des Mobilités fournira un cadre pour les échanges de données au sein de l'éco-système des utilisations de données liées au véhicule automatisé et connecté. La France s'attachera à ce que le cadre français soit cohérent avec les modalités organisationnelles et techniques d'échanges de données destinées à assurer l'interopérabilité et le respect des règles de concurrence au niveau européen.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
68
4.5. Liens avec l'infrastructure, connectivité, cartographie
4.5.1. Identification des domaines d'emploi sur les réseaux routiers La définition des domaines d'emploi des fonctionnalités automatisées constitue un socle pour les développements technologiques et serviciels, et pour construire une approche réglementaire adaptée à la diversité des cas d'usages. Les paramètres définissant les domaines d'emploi ne se résument pas à une configuration d'infrastructure, mais incluent également les conditions de trafic ou météorologiques. Sur le seul volet de la configuration de l'infrastructure, les capacités de fonctionner en mode automatisé sont, à infrastructure égale, très variables d'un modèle de véhicule à l'autre, car elles sont fonctions des types de capteurs et de leurs capacités, des algorithmes de reconstitution de lignes, de l'intelligence embarquée, des conditions de reprise en main par le conducteur. Par ailleurs, à véhicule donné, il est techniquement impossible pour un gestionnaire d'infrastructure routière de garantir, par exemple, un niveau minimum de contraste de la signalisation horizontale atteint à tout instant. L'usure de la signalisation horizontale est fonction du nombre de passages de roues et des conditions météorologiques et le moment où il passera sous un certain seuil est donc imprévisible. Ainsi, même avec des moyens financiers infinis, il est impossible de garantir que le véhicule automatisés ne trouvera jamais une signalisation horizontale effacée sur plusieurs dizaines de mètres suite à un événement impromptu (accident, intempéries, ...). Il est donc clair qu'il doit revenir au véhicule de décider, sur la base de ses systèmes d'observation, de positionnement, de connectivité et de supervision, s'il est dans son domaine d'emploi, et qu'il soit capable de reconnaître la nécessité d'une reprise en main par le conducteur, ou la supervision déportée. Il n'appartient donc pas aux autorités publiques, et plus particulièrement aux gestionnaires routiers, de proposer des niveaux de service ni une labellisation de certaines portions d'infrastructure « ouvertes à la conduite automatisée ». Pour autant, il pourrait être d'un intérêt commun à l'ensemble des acteurs, de développer un travail partagé de caractérisation des réseaux, en fonction de leur géométrie, des attributs nominaux de signalisation, des conditions de trafic et d'accidentologie, permettant notamment aux différents cas d'usage de définir leurs domaines d'emploi sur une base commune, et, audelà, de fonder un référentiel commun d'analyse de sécurité pour certains cas d'usage. Par ailleurs, l'infrastructure elle-même peut fournir des informations qui facilitent cette décision par le véhicule, grâce à des informations transmises par la connectivité du véhicule, en s'appuyant le cas échéant sur des amers visibles par les capteurs du véhicule et précisément localisés. Plus particulièrement, pour les cas d'usage sur autoroute, les travaux de la NFI ont identifié des configurations-clés où un tel apport serait particulièrement intéressant : il en est ainsi par exemple des configurations de chantier et de l'approche des péages.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
69
Eléments de synthèse et d'orientation Il doit revenir au véhicule de reconnaître, avec l'appui de ses capteurs, et éventuellement de sa connectivité, de sa cartographie et de sa supervision, s'il est dans son domaine d'emploi et d'adapter en conséquence les modes de délégation de conduite. L'infrastructure peut fournir des informations qui facilitent cette décision par le véhicule, en combinant de façon efficace la signalisation, la connectivité et la cartographie numérique. Les travaux entre gestionnaires routiers, constructeurs automobiles, industries de la route, pour identifier ces informations, leurs modalités de transmission et éventuellement la localisation d'amers connectés (cf. ci-dessous sur la cartographie), en commençant par les configurations de chantier sur autoroute et d'approche des péages. Deux objectifs seront identifiés comme prioritaires : la détection du chantier ou du péage pour la reprise en main, le franchissement automatisé de ces zones (correspondant au passage au niveau 4 SAE). Le lien sera fait avec les travaux sur la connectivité et le projet SCOOP@F et ses suites (cf ci-dessous sur le véhicule connecté). Cette approche sera ensuite étendue à d'autres cas d'usage, à commencer par les transports publics, en intégrant la notion de site propre ou semi-protégé.
4.5.2. Liens avec les enjeux du véhicule connecté L'apport de la connectivité à l'automatisation fait l'objet d'un intérêt croissant de la part des acteurs industriels et des autorités publiques, même si les deux domaines ont pour l'instant évolué de façon relativement indépendante. Les véhicules automatisés se repèrent en croisant une perception de l'environnement (signalisation horizontale, dispositifs de retenue, signalisation verticale) par capteurs natifs (caméras, radars, lidars) et un repérage satellitaire lié à une cartographie embarquée. Les capteurs actuellement ont une portée maximale de 100 à 200 m, ce qui apparaît insuffisant pour l'anticipation de certaines situations ou certains événements critiques affectant la sécurité routière (accidents, personnes, encombres sur les voies, évolutions du nombre de voies, échangeurs complexes, zones de travaux, péages, ralentissements brisques ou bouchons, conditions météorologiques et d'adhérence). Pour élargir et affiner l'horizon de perception du véhicule, deux compléments aux capteurs présentent un intérêt potentiel majeur : - la connectivité du véhicule (à l'infrastructure, aux autres véhicules, ou au réseau cellulaire) ; - une cartographie de haute définition.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
70
Ces compléments permettent d'enrichir le modèle de perception et d'asseoir dans un premier temps, des procédures d'alerte du conducteur et des demandes de reprises en main. Ultérieurement, il est envisageable, selon la qualité (latence, fiabilité, précision) de ces données, que l'asservissement du véhicule s'appuie aussi sur ces compléments, permettant alors d'aborder ces situations ou événements critiques en mode automatisé. L'apport potentiel de la cartographie et les orientations pour l'action publique sont présentées ci-après. S'agissant de la connectivité, l'apport attendu se situe schématiquement : - dans l'enrichissement des fonctions de perception autonome du véhicule (sensing) par la connexion (recieving), - dans l'enrichissement des données remontées par le véhicule par des données de perception (sensing) Cet enrichissement des fonctions de perception, et leur sécurisation, peu s'appliquer à divers cas d'usage, en milieu urbain, comme en milieu interurbain ou rural. Il est donc susceptible de bénéficier à l'ensemble des territoires. La France a adopté en 2014 une action publique volontariste de développement des systèmes coopératifs (C-ITS) véhicules-infrastructures et véhicules-véhicules, dans l'objectif d'améliorer la sécurité routière, en particulier la sécurité des agents d'exploitation, et la gestion des trafics. Ces systèmes présentent de nombreux bénéfices en tant que tels, indépendamment d'un couplage éventuel avec des fonctionnalités automatisées : améliorer la sécurité routière et la sécurité des agents d'exploitation : permettre aux véhicules de "parler" entre eux et à l'infrastructure en échangeant des données de base sur la sécurité est susceptible d'éviter de nombreux accidents. De plus, grâce aux informations I2V sur les chantiers, les interventions suite à accident, la viabilité hivernale, etc. Ces données, mises directement à la disposition du conducteur dans son véhicule, devraient permettre une réduction du nombre d'accidents parmi les agents d'exploitation. rendre la gestion de trafic plus efficace et contribuer aux réductions d'émissions : grâce à la collecte de données par les véhicules et/ou l'infrastructure, les C-ITS permettent une meilleure gestion et une meilleure efficacité de l'information routière en temps réel. Ceci contribuera par ricochet à la réduction des émissions du système de transport. De plus, avec l'apparition de la possibilité de croiser des informations relatives aux parcs relais (emplacement, disponibilité de places de stationnement...) avec des informations relatives aux systèmes de transport (comme les emplacements des gares ferroviaires, des arrêts de bus ou des pôles multimodaux), ils permettront la création de nouveaux services multimodaux pour une mobilité durable (comme le covoiturage dynamique). optimiser les coûts de gestion de l'infrastructure, préparer le véhicule du futur et développer de nouveaux services : le déploiement interopérable et intégré de C-ITS participe d'une logique d'optimisation des coûts relatifs à la sécurité routière et la gestion des infrastructures existantes, tout en offrant de nouveaux services dont les modèles économiques doivent encore être testés, s'en trouvera améliorée. Le développement des C-ITS représente un potentiel significatif de création d'emploi en Europe.
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
71
L'approche française consiste principalement, au travers de la conception et du déploiement de cas d'usage, à : - identifier les priorités du point de vue de la sécurité routière et de la gestion des infrastructures, pour l'ensemble des cas d'usage et des domaines et territoires d'emploi ; - identifier les besoins d'interopérabilité et de sécurité des échanges d'information ; - spécifier, développer et tester, puis déployer des systèmes répondant à ces besoins ; - évaluer les impacts de ces cas d'usage en termes de comportements des usagers et, partant, de sécurité routière et de gestion des trafics ; - étudier les potentielles répercussions pour la sûreté des transports. L'approche se fonde sur des déploiements pilotes, en grandeur réelle. Cette approche française tient compte des priorités de cas d'usage identifiés au niveau européen, dans les actions prioritaires et règlements délégués de la directive sur les transports intelligents (Directive 2010/40) d'une part, dans la stratégie de développement des systèmes coopératifs du 30 novembre 2016 d'autre part (COM (2016) 266). L'approche française élargit progressivement les cas d'usage, en abordant les cas d'usage urbains, les cas d'usage de fret, et le lien entre connexion et automatisation (cf. ci-après).
Encadré : Projets de déploiement pilote des systèmes coopératifs (C-ITS) en France dans le contexte européen SCOOP@F est un projet de déploiement pilote de systèmes de transport intelligents coopératifs, c'est-à-dire basés sur l'échange d'informations entre véhicules et entre le véhicule et la route. Les véhicules sont équipés de capteurs qui détectent des événements (route glissante, choc, freinage brusque...) et d'unités embarquées qui transmettent l'information aux véhicules en amont ainsi qu'au gestionnaire via des unités bord de route. Le gestionnaire peut aussi transmettre des informations (chantiers...) aux unités embarquées dans les véhicules. Le projet rassemble de nombreux partenaires publics et privés autour du MTES qui en assure la coordination : des collectivités locales, des gestionnaires routiers, les constructeurs automobiles PSA et Renault, des universités et des centres de recherche, un opérateur télécom, un fournisseur de services de sécurité... SCOOP@F vise à déployer 3000 véhicules sur 2000 km de routes répartis en cinq sites : Ile-de-France, A4, Isère, rocade de Bordeaux et Bretagne. Ces sites sont caractérisés par une grande diversité de types de routes (autoroutes, axes structurants de métropole, routes bidirectionnelles interurbaines et locales). La technologie employée est de type wifi (ITS G5). Les véhicules Renault et PSA sont aujourd'hui en vente et l'évaluation des impacts (sécurité routière, congestion, socio-économie, sureté, etc.) va démarrer. Le projet travaille également sur l'expérimentation d'une technologie hybride ITS G5/cellulaire. Deux projets fils ont été lancés en 2016 : C-Roads France et InterCor. Ils se basent sur cette technologie hybride. C-Roads France vise à étendre la couverture géographique de SCOOP@F dans le Nord-Est, le Centre-Est, en Bretagne et à Bordeaux, et à développer de nouveaux services dans deux catégories : - services urbains et à l'interface urbain/interurbain : information sur le passage des feux au vert, information sur les transports en commun, etc. - services au trafic de transit : information sur les services disponibles sur les aires, itinéraires conseillés, etc. InterCor rassemble 4 pays : France, Belgique, Pays-Bas, Royaume-Uni. La partie française consiste en une extension de SCOOP@F dans les Hauts-de-France. Il développera également de nouveaux services dans la logistique : information sur les places de stationnement poids lourds, optimisation de l'accès aux ports, etc.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
72
Eléments de synthèse et d'orientation Il importe de mieux apprécier l'apport possible de la connectivité à l'automatisation dans une approche technologiquement neutre entre technologies de communication (ITS-G5 ; 4G ; LTE-V2X ; 5G). Les travaux engagés en 2017 sur le lien automatisation-connexion seront poursuivis, notamment dans la perspective de l'évaluation des apports possibles vis-à-vis de la 5G et, le cas échéant, des exigences associées : - en s'appuyant sur des cas d'usage concrets et sur les situations critiques, i.e. celles dans lesquelles la perception du véhicule par ses capteurs peut présenter des limites du point de vue de la sécurité routière ; - en analysant les apports de la connectivité et/ou de la cartographie de précision dans une approche fonctionnelle et performantielle (besoins de latence, précision, fiabilité, couverture, rafraîchissement, mise à jour) ; - en faisant le lien avec les spécifications des services prioritaires développés dans le cadre des projets de systèmes coopératifs (C-ITS) (projets SCOOP@F, InterCor et C-Roads France). - en traitant prioritairement les cas d'usage de conduite sur autoroute, puis des transports urbains, puis de la gestion des intersections. Les gestionnaires routiers seront invités à réfléchir à un plan de déploiement de la connectivité, basée sur les technologies matures à ce jour. Pour alimenter cette réflexion, un document méthodologique présentant notamment les cas d'usage, leurs domaines d'emploi possible et le type de connectivité concerné, sera mis à disposition, et publié. En parallèle, une étude sera lancée afin d'évaluer la pertinence socio-économique de la couverture de différentes sections-types du réseau routier en différentes technologies de connectivité, sur la base de cas d'usage de véhicule connecté et de véhicule automatisé+connecté. Cette étude inclura, outre les technologies matures, la perspective de la 5G, en tenant compte de son niveau de qualité prévisible (latence, précision, fiabilité, couverture). La technologie LTE-V2X sera abordée dans la mesure de la disponibilité d'informations précises sur les cas d'usage couverts et la qualité de la connexion.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
73
4.5.3. Développement de la cartographie numérique de précision Le véhicule automatisé possède schématiquement trois sources d'information lui permettant à la fois de se repérer, d'interagir voire de communiquer avec son environnement : Les capteurs : multiples dans leur nombre et leurs caractéristiques, ils sont les yeux du véhicule, lui permettant de détecter son environnement. Les capteurs sont aujourd'hui la principale source d'information des véhicules automatisés. Les technologies des capteurs connaissent en revanche des limites de portée (de l'ordre de la centaine de mètres), mais également de détection (par exemple détection d'un panneau caché derrière un convoi de poids lourds). La connectivité : qu'elle soit entre véhicules (V2V) ou entre infrastructure et véhicule (I2V), elle permet au véhicule d'interagir avec l'environnement dans une logique d'information et d'optimisation de la conduite. La cartographie : intégrée dans le véhicule et/ou téléchargée à l'avancement, la cartographie peut intervenir comme support majeur de la conduite automatisée en complément des capteurs et de la connectivité. Elle semble pouvoir se décliner en deux types, pouvant être assimilés à deux couches : o une Cartographie Spatiale Haute Définition pouvant contenir des informations précises sur la géométrie de la route (longitudinales et latérales), sur la signalisation routière, ou encore des amers visuels géolocalisés permettant au véhicule de se localiser avec précision ; o une Cartographie Dynamique Temporelle pouvant contenir des informations de trafic, de conditions météorologiques, la signalisation d'accidents ou de travaux, la présence de piétons ou d'animaux. La conception des dispositifs de guidage pour les véhicules autonomes, est confrontée aux limites technologiques des capteurs embarqués, en termes de champ de vision et de précision. La cartographie de haute définition présente ainsi, en lien avec la connectivité du véhicule, des potentialités importantes pour compléter, élargir et affiner l'horizon de perception du véhicule. La cartographie numérique de précision présente, en lien avec la connectivité du véhicule, des potentialités importantes pour élargir et affiner l'horizon de perception du véhicule. Ceci peut être utile à plusieurs titres : - compléter les informations collectées par les capteurs, voire prendre le relais de ceux-ci dans certains cas : dysfonctionnement des capteurs (masque lié aux intempéries par exemple), capteurs en dehors de leur domaine de pertinence (marquage effacé par exemple), ou encore redondance de la cartographie par rapport aux capteurs en vue d'améliorer la sûreté de fonctionnement, - permettre une meilleure anticipation par les véhicules de certains événements. Cependant, la cartographie numérique de précision est confrontée à des limites technologiques (précision, temps de latence, sécurité, etc), ou sécuritaires (propriété, origine
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
74
et certification des données, intrusions, etc). Les constructeurs sont face à une balance capteurs/cartographie dans la conception des véhicules : de nombreux capteurs peuvent permettre de se passer d'une cartographie de précision, et vice versa. La pertinence de la cartographie pour le premier point (compléter les informations collectées par les capteurs) est très liée aux choix du constructeur pour le système d'automatisation. Pour le deuxième point (permettre une meilleure anticipation du véhicule), la cartographie permet d'offrir un environnement de perception dépassant les possibilités des capteurs. En fonction du rôle de la cartographie pour le véhicule automatisé (vis-à-vis des capteurs et d'autres sources d'informations via la connectivité), du niveau d'automatisation souhaité, du degré d'anticipation des événements souhaité, les exigences vis-à-vis de cette cartographie peuvent différer. Ainsi, différents niveaux de cartographie peuvent correspondre à différents besoins du véhicule automatisé, notamment : - la cartographie pour le choix d'itinéraire du véhicule (qui existe depuis longtemps), - le positionnement longitudinal / latéral fin (décimétrique) par rapport à l'infrastructure, - le positionnement et la vitesse par rapport aux autres véhicules, la connaissance de la signalisation routière, des conditions météorologiques, des événements inopinés, etc. Au fur et à mesure du développement du véhicule autonome et de l'extension de son domaine d'emploi, la cartographie numérique de précision tend à prendre une importance croissante. Il importe de mieux apprécier cet apport possible par : - l'identification des situations ou événements les plus critiques rencontrés par le véhicule autonome dans lesquels la connectivité et la cartographie de précision pourraient améliorer la perception élargie du véhicule ; - les besoins fonctionnels de cartographie afférents (y compris sa précision et son rythme de mise à jour). La redondance qui sera probablement nécessaire entre les positionnements par les capteurs, par la connectivité et par le géo-positionnement, va rendre nécessaire de faire correspondre ces différentes « couches » de localisation, ce qui renvoie à la notion d'amer ou point de repère prioritaire, assurant que la localisation sur une « couche » correspond bien à celle d'une autre « couche ». Ces amers vont constituer l'armature de la cartographie de précision, leur localisation présente des enjeux majeurs pour les gestionnaires routiers, et leur éventuel équipement en connectivité présente des enjeux majeurs pour ces gestionnaires et l'industrie. La définition d'une doctrine partagée d'implantation, de localisation, de cartographie et d'équipement en connectivité de certains amers, présente un enjeu majeur pour l'ensemble des acteurs.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
75
Eléments de synthèse et d'orientation La cartographie de précision dynamique, en lien avec la connectivité du véhicule, pourrait utilement améliorer les capacités de perception du véhicule autonome, en particulier pour aborder des situations critiques de sécurité routière. Les priorités de cartographie du réseau routier correspondantes doivent être établies, en fonction de ces enjeux de sécurité routière. En particulier, les amers ou points de repère prioritaires pour améliorer la reconstitution de l'environnement du véhicule, et son positionnement relatif doivent également être définis, de façon partagée entre acteurs. Ces travaux seront conduits dans le cadre d'un partenariat avec l'Institut géographique national (IGN), en s'appuyant si besoin sur une expérimentation de cartographie de précision sur un site de dimension réduite, a priori fermé, permettant d'évaluer les apports en termes de reconstitution de l'environnement du véhicule. Il importe également, si l'utilisation automatique de l'information cartographique de précision se développe pour les véhicules autonomes, de concevoir une forme de validation de cette information, qui pourrait prendre plusieurs formes, éventuellement complémentaires : - Définir une architecture portant sur les rôles attendus des différents acteurs dans la production, la qualification et la validation de l'information cartographique de précision, sur les modalités de contractualisation afférents, notamment en termes d'actualité, de qualité et de responsabilité. - Mettre en place une « autorité de réception » en charge d'homologuer la couche cartographique des fonctionnalités embarquées. - Mettre en place un entrepôt commun et indépendant des données dynamiques qui décrivent les infrastructures routières, permettant leur rediffusion en continu à tous les systèmes ITS via les moyens de connectivité. L'opportunité et les modalités de mise en place une ou l'autre des actions ci-dessus seront évaluées avec l'IGN.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
76
4.6. Aspects économiques et sociétaux, gouvernance, cadres de travail
4.6.1. Enjeux industriels et d'emploi Face à une révolution technologique majeure qui apparaît inéluctable, l'action publique doit anticiper et créer les conditions pour que cette évolution soit créatrice d'emploi, notamment en préparant les conversions nécessaires. L'impact sur l'emploi concerne potentiellement un très grand nombre d'activités, pas uniquement dans les transports, qui comporte 700 000 emplois mais également dans l'industrie (500 000 emplois au sein de la filière automobile par exemple). Le développement de l'automatisation va probablement conduire à des transferts de qualifications et d'emploi, avec des opportunités de créer de nouveaux emplois et de nouvelles compétences, probablement plus qualifiées, à l'interface des transports et du numérique. Les enjeux en terme d'emplois et de compétence sont majeurs et ont été identifiés comme tels par le Gouvernement et la plupart des acteurs, en France comme dans d'autres pays. D'ores et déjà, des réflexions ont été engagées par les opérateurs de transports publics, réunis au sein de la Nouvelle France industrielle, sur les nouvelles compétences liées à la supervision et à l'accompagnement dans les navettes automatisées. Au-delà, le gouvernement (Conseil National de l'Industrie du 20 novembre) a d'ores et déjà demandé à la filière industrielle d'identifier les impacts sur les emplois et les compétences. Sur la base d'un premier rapport, attendu au premier semestre 2018, il s'agira de travailler avec le système éducatif et de formation pour s'assurer qu'il anticipe bien ces évolutions. Eléments de synthèse et d'orientation Les enjeux en termes d'emplois apparaissent majeurs et doivent être anticipés, en visant notamment à identifier les nouveaux emplois et les nouvelles compétences. Les acteurs économiques sont invités à être partie prenante de cet effort d'anticipation. Sur la base du rapport de la filière sur les perspectives d'emploi et de compétence, un travail sera conduit avec les ministères en charge de l'éducation et de la formation professionnelle, afin de s'assurer que le système éducatif et de formation professionnelle, intègre bien les besoins d'évolution des métiers et des compétences.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
77
4.6.2. Enjeux d'acceptabilité L'acceptabilité des systèmes d'automatisation constitue une condition sine qua non de leur développement. L'acceptabilité mérite une attention particulière et ne doit pas être considérée comme acquise. Les études et enquêtes disponibles mettent en lumière diverses formes de résistance au changement que provoque l'apparition du véhicule automatisé, notamment le sentiment d'être un bon conducteur, en opposition aux gains de sécurité que pourrait apporter l'autonomisation des véhicules ou la crainte de n'avoir aucun contrôle sur le véhicule lors de déplacements. On observe dores et déjà un défaut de familiarisation avec les technologies de délégation de conduite voire une absence complète de connaissance, ce qui laisse présager de difficultés à s'approprier des systèmes encore plus complexes, surtout lorsque les transitions entre phases de conduite et la phase de délégation seront nombreuses et variées. Certains points de vue considèrent prioritaire l'appropriation de ces systèmes par les usagers majoritairement jeunes et habitués aux nouvelles technologies, pour rendre le véhicule automatisé visible et permettre ainsi sa diffusion dans la société par effet de réseau de notoriété. L'acceptabilité doit concerner la société de façon beaucoup plus large. La population vieillissante de nos sociétés européennes notamment, pourra espérer retrouver parfois une mobilité individuelle perdue, mais ceci suppose d'évaluer attentivement les besoins de cette population en informations précises sur les fonctions automatisées équipant leurs véhicules et leur bonne adaptation à la conduite de véhicules partiellement automatisés. Les impacts des systèmes automatisés sur la mobilité, l'environnement, l'organisation des territoires et, surtout, l'emploi, constituent des déterminants majeurs de l'acceptabilité. Les questions de cybersécurité et de protection de la vie privée sont naturellement majeures en termes d'acceptabilité. Les conditions de cohabitation entre véhicules automatisés et non automatisés seront également déterminantes pour l'acceptabilité (cf. ci-dessous les questions induites en termes d'identification des véhicules).
Encadré : identification des véhicules autonomes, enjeux de sécurité et d'acceptabilité L'identification des véhicules automatisés, i.e. le fait de les rendre visibles ou repérables par les autres usagers ou acteurs de la route, soulève des enjeux en matière de gestion des interactions - civilités ou incivilités entre usagers, et partant d'efficacité de la gestion des trafics. Cette identification soulève également des questions de protection desdits véhicules contre la malveillance. Cette identification emporte des enjeux importants en termes de contrôle par les forces de l'ordre (ex : faut-il signaler un véhicule équipé de fonctions automatisées de conduite de manière visible de l'extérieur, dès lors que ces fonctions sont activées ?). Cela peut sembler nécessaire, si le conducteur a été autorisé à effectuer d'autres tâches que la conduite pendant le temps où le système « conduit » et jusqu'à ce qu'il lui demande de reprendre la main, ou encore que lui-même souhaite conduire. En effet, l'enjeu pour les forces de l'ordre est d'être à même de distinguer le conducteur qui « peut » faire autre chose de celui qui ne le « peut » pas, donc de ne pas verbaliser le premier, mais le deuxième. Reste que l'identification ouvre des questions d'acceptabilité.
Enfin, il importe que les processus d'élaboration de la réglementation (notamment la réglementation des règles de conduite et de sécurité des véhicules), soient transparents et associent les usagers, dans une forme appropriée, tant au niveau local, national qu'international. Le Conseil National de la Sécurité Routière doit être encouragé, à ce titre, à être force de proposition auprès du gouvernement.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
78
Eléments de synthèse et d'orientation L'acceptabilité du véhicule automatisé conditionne son développement, et ne doit pas être considérée comme acquise. L'ensemble des acteurs publics et privés doivent y contribuer, par les différents leviers dont ils disposent, notamment la réglementation, les expérimentations, la recherche et les études sur les comportements, ainsi que de la communication. Un séminaire de réflexion et d'échanges sur l'acceptabilité sera mis en place pour, dans un premier temps, identifier les enjeux prioritaires et les freins individuels et sociaux à l'acceptabilité du véhicule automatisé, et les éventuelles questions éthiques sous-jacentes ; elle pourra ensuite fournir des recommandations pour traiter ces enjeux et ces freins. Pour assurer un suivi et une veille sur les perceptions, les attitudes et les comportements : il est nécessaire de mettre en place un dispositif national d'étude et de suivi sous forme d'enquêtes régulières auprès des conducteurs et usagers de la route, confrontés ou non aux premiers développements de la conduite autonome ; le champ de ces études et enquêtes doit principalement couvrir : les perceptions et comportements d'interactions avec les autres usagers de la route ; la perception du temps passé en conduite autonome ; le choix de véhicule et de mode (y compris partagé). Cet « observatoire » des perceptions et de l'acceptabilité, aurait avantage à être mutualisé à l'échelle internationale. 4.6.3. Gouvernance et cadres de travail Pour conduire les travaux relatifs aux divers aspects du développement du véhicule automatisé, un certain nombre d'instances de travail spécialisées ont été mises en place au niveau national. Au niveau des administrations, les travaux sont organisés autour de quatre instances : Le « groupe des 4DGs », qui réunit les directions concernées au premier chef par les enjeux du véhicule automatisé : direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, direction générale de l'énergie et du climat, direction générale des entreprises, délégation à la sécurité routière. Ce groupe s'appuie sur un groupe des « sherpas ». Il assure une coordination stratégique d'ensemble, définit des priorités communes et identifie si besoin des sujets d'arbitrage. Ce groupe a piloté la rédaction du présent document. Le groupe « inter-administrations » définit et met en oeuvre le cadre réglementaire relatif aux expérimentations. Il instruit les demandes d'autorisation et suit les expérimentations. La « task-force cas d'usage » assure la préparation technique des positions prises dans les instances internationales, principalement sur l'évolution de la réglementation technique des véhicules. Elle pilote des travaux d'évaluation de la criticité des cas d'usage, du point de vue de la sécurité routière, de la gestion des infrastructures et de la mobilité. Elle a développé pour cela, avec l'appui de l'IFSTTAR, une première méthodologie permettant de prioriser les enjeux de sécurité routière des interactions entre le véhicule automatisé, l'infrastructure, le trafic et les conditions de circulation, afin de définir les points de vigilance pour l'évolution de la réglementation technique, des tests et de l'homologation.
-
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
79
Au niveau industriel, les travaux s'organisent principalement au sein de la solution « mobilité écologique » de la Nouvelle France Industrielle (NFI), notamment au sein de son programme « Véhicule Autonome », qui a mis en place trois groupes de travail spécialisées respectivement sur le véhicule particulier, les systèmes de transport public automatisés, le véhicule industriel. Ces instances définissent les priorités de cas d'usage en fonction de la maturité des technologies et de la demande des marchés, et identifient les « verrous » techniques et réglementaires à traiter pour permettre le développement de ces cas d'usage, ainsi que les priorités technologiques et de R&D. Le mandat du CNI de novembre 2017 va appeler la mise en place d'un groupe dédié aux questions d'emploi et de compétences. Les industriels et les administrations coopèrent étroitement, à trois niveaux principaux : · · · Le comité de pilotage de la NFI dans lequel l'administration est représentée par la DGE, qui fait le lien global avec les travaux des industriels. Certains sous-groupes de la NFI, notamment ceux traitant des liens avec les infrastructures de transports. La « task-force » élargie, qui permet l'échange entre acteurs industriels et publics sur l'analyse de sécurité des cas d'usage, et les positions à tenir en matière d'évolution de la réglementation et de l'homologation des véhicules.
En complément des structures existantes, il importe que les collectivités locales, dont les politiques publiques seront largement affectées par le développement du véhicule automatisé, soient associées aux réflexions et à l'élaboration des politiques publiques correspondantes. Plus particulièrement, il importe de structurer des échanges autour de deux axes : · le partage d'expériences entre gestionnaires routiers sur les enjeux de la conduite autonome et connectée ; il s'agit de construire une doctrine sur les besoins et apports de la conduite autonome et connectée vis-à-vis de l'infrastructure ; le partage d'expériences entre autorités organisatrices de la mobilité sur le développement des services de transports publics automatisés ; il s'agit ici de doter la maîtrise d'ouvrage, l'achat et la délégation de service publics, des compétences, sur les enjeux liés aux usages, à l'interopérabilité, à l'intégration dans les politiques de mobilité et les politiques urbaines ; ce cadre de travail, dont le pilotage reste à préciser, devra s'articuler avec les travaux sur le cadre réglementaire et de validation de sécurité des systèmes de transports publics automatisés mentionnés ci-dessus.
·
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
80
Eléments de synthèse et d'orientation Les instances et les travaux engagés depuis 2014 permettent de renforcer la coordination de l'action publique et la coopération avec les acteurs industriels, conditions essentielles pour le développement de l'automatisation et l'élaboration de solides positions à l'international. Le besoin de renforcer encore cette coordination a été souligné, compte-tenu de l'accélération du déploiement des technologies d'automatisation et du calendrier européen et international. Pour ce faire, il est proposé : De mettre en place une structure d'échange entre gestionnaires routiers, en vue de partager les enjeux de la conduite autonome et connectée ; De mettre en place une plateforme de partage d'expériences et de doctrine pour l'exercice de la maîtrise d'ouvrage, de la délégation de service et de l'achat public de services de transports publics automatisés, entre autorités organisatrices de la mobilité ; D'accélérer les travaux relatifs à l'automatisation du fret et de la logistique, en relançant le groupe NFI qui y est consacrée et en associant plus étroitement les logisticiens et les chargeurs ; De poursuivre les travaux pré-réglementaires par cas d'usage, en priorité en vue d'établir le cadre réglementaire des transports publics automatisés, en intensifiant les échanges entre les acteurs industriels (NFI) et les services de l'Etat sur les thématiques de la réglementation, de l'homologation, des tests et moyens d'essai et de la simulation, et en lien avec le programme national d'expérimentation validation préparé dans le cadre de la NFI.
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
81
5. Récapitulatif des actions
Cadre législatif et réglementaire Dans l'objectif de permettre, d'ici 2020 à 2022, la circulation en France de voitures particulières de niveau SAE3 et SAE4, de véhicules de transport public de personnes hautement automatisés, et de véhicules de transport de marchandises automatisés, l'adaptation du code de la route et les règles de responsabilité correspondantes, sera préparée dans le cadre d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur, en lien avec les Ministères de la Justice, des Transports et de l'Industrie, en concertation avec tous les acteurs concernés, et qui rendra ses propositions au plus tard fin 2018 (échéance visée : T 4-2018). Les besoins d'évolution de la formation à la conduite feront l'objet de propositions d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur (échéance visée : T42018).
Dans le cadre de la Loi d'orientation des mobilités, sera proposé le principe d'une
information des conducteurs sur les principales fonctionnalités d'automatisation, leurs domaines d'emplois et leurs limites, lors de l'acquisition d'un véhicule neuf (échéance visée : T4- 2018).
La France poursuivra la promotion, au sein de la CEE-ONU, de la nouvelle approche
de réglementation technique des véhicules qu'elle a présentée en 2017, permettant de passer d'une approche par module à une approche « systèmes » (« réglementation horizontale ») (échéance visée : 2018 et au-delà).
Dans l'attente de l'élaboration d'une telle réglementation « horizontale », la France
demandera que les exigences sur les fonctions d'automatisation, le suivi de l'attention du conducteur et les manoeuvres d'urgence et de sécurité, garantissent la sécurité routière tout en étant proportionnées au degré d'automatisation ; La France demandera à ce que des exigences soient développées dans la réglementation technique internationale, afin que les véhicules dont les systèmes de conduite sont totalement délégués au véhicule, soient dotés de la capacité de s'identifier pour les forces de l'ordre, lorsqu'ils sont en mode totalement autonome (échéance visée : 2018 et audelà).
Un cadre réglementaire national pour les transports publics automatisés sera mis en
place, incluant la réglementation et le cadre d'homologation au niveau national des véhicules de type « navette » et un référentiel d'évaluation de la sécurité des parcours (échéance visée : T4- 2018). Pour alimenter et orienter les travaux nationaux, européens et de la CEE-ONU sur la réglementation technique et l'homologation, le gouvernement s'appuiera sur les travaux menés avec les partenaires de la NFI et en particulier dans le cadre du programme national expérimentation-validation attendu pour 2018 ; en particulier, des documents méthodologiques publics seront tirés de ces travaux et mis à disposition des acteurs.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
82 Une mission d'étude et de concertation sur les enjeux techniques et économiques de
l'interopérabilité et de la coordination de la supervision flottes de véhicules automatisés, sera lancée (échéance visée : T4- 2018).
La France poursuivra sa forte implication dans la rédaction des documents visant à
une compréhension commune et partagée du contenu existant des Conventions internationales (CEE-ONU) relatives à la circulation routière ou des documents préparant les évolutions et les modifications nécessaires de ces mêmes Conventions internationales (échéance visée : T4- 2018).
La France examinera, dans un cadre européen, l'opportunité d'un régime transitoire de
portée européenne permettant de définir le cadre de réglementation technique et d'homologation des véhicules automatisés à plus court terme qu'au sein de la CEEONU (échéance visée : T3-2018).
Au niveau européen, la France poursuivra sa forte implication dans l'élaboration d'une
stratégie commue, en particulier sur les questions d'interopérabilité technique et fonctionnelle des systèmes, et sur le financement de la recherche, de l'innovation et des premières étapes d'expérimentation et de pré-déploiement (échéance visée : 2018 et au-delà). Expérimentations, innovation, recherche La stratégie nationale d'expérimentation se traduira par :
des orientations nationales, sur les cas d'usages et les impacts prioritaires du point
de vue des politiques publiques (échéance visée : T1-2018) ;
un cadre de financement, en conjuguant au mieux les divers leviers du programme
d'investissement d'avenir (échéance visée : T2-2018) ;
un engagement de la filière à mettre en commun certaines « briques » des
expérimentations, tout en respectant les initiatives industrielles et territoriales qui favorisent l'innovation (échéance visée : T2-2018). Sous l'animation de l'État, des règles de mise en commun des données, outils et méthodes d'évaluation et de validation des systèmes, seront définies, afin de favoriser les économies d'échelle et les synergies entre acteurs pour l'accumulation de la connaissance, dans le respect des contraintes industrielles et commerciales de ces acteurs.
Au niveau législatif, un cadre de responsabilité sera proposé pour permettre de
conduire des expérimentations dérogeant aux obligations du conducteur prévues par le code de la route (échéance visée : T2-2018).
Les priorités de recherche à l'appui des politiques publiques, concernent
principalement les impacts sur la sécurité, la fluidité, la mobilité, l'environnement, l'emploi et les compétences ; l'acceptabilité ; le facteur humain, les interfaces hommemachine, les gestes de conduite et la gestion des transitions ; les méthodes et outils de validation des systèmes ; le développement de la simulation ; la supervision (échéance visée : T1-2018).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
83
Données En termes de protection des données personnelles, le cadre d'échanges des données du véhicule autonome et connecté devra être conforme aux dispositions du règlement général de la protection des données (RGPD).
En termes de cyber-sécurité, une structure d'échange dédiée au secteur automobile et
des mobilités sur l'état de la menace et les réponses à apporter aux cyber-attaques sera mise en place (échéance visée : T4-2018).
La Loi d'orientation des Mobilités cadrera les conditions d'accès aux données du véhi-
cule, respectivement pour les missions de service public (sécurité routière, gestion de trafic, exploitation du patrimoine d'infrastructures), d'investigation et d'enquêtes sur les accidents, et pour les activités économiques dont le développement dépend de certaines données produites à bord des véhicules (échéance visée : T2-2018).
La France s'attachera à ce que le cadre français soit cohérent avec les modalités orga-
nisationnelles et techniques d'échanges de données, destinées à assurer l'interopérabilité au niveau européen (2018 et au-delà).
Liens avec l'infrastructure, connectivité, cartographie numérique
Le principe est affirmé selon lequel le véhicule automatisé devra reconnaître s'il est
dans son domaine d'emploi et adapter en conséquence les modes de délégation de conduite ; ceci n'exclue pas que l'infrastructure, et sa connectivité, ainsi que la cartographie de précision, apportent des informations utiles pour compléter la vision des capteurs. Les gestionnaires routiers seront invités à réfléchir à un plan de déploiement de la connectivité, basée sur les technologies matures à ce jour.
Une étude sera lancée afin d'évaluer la pertinence de la couverture de différentes sec-
tions-types du réseau routier en différentes technologies de connectivité (incluant la 5G), pour les besoins du cas d'usage de véhicule connecté et du véhicule automatisé et connecté (échéance visée : T4 - 2018).
Les priorités de cartographie du réseau routier pour le véhicule autonome seront éta-
blies, en particulier les amers prioritaires pour améliorer la reconstitution de l'environnement du véhicule, et son positionnement, y compris par la connectivité, en lien avec l'IGN (échéance visée : T3-2018).
Les modalités de validation de l'information cartographique pour les besoins du véhi-
cule autonome seront étudiées, en lien avec l'IGN (échéance visée : T3-2018).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
84
Aspects économiques et sociétaux, gouvernance, cadres de travail
L'Etat et les acteurs économiques s'attacheront à anticiper l'évolution des métiers et
de compétences ; sur la base du rapport de la filière, un travail sera conduit avec les ministères en charge de l'éducation et de la formation professionnelle, afin de s'assurer que le système éducatif et de formation professionnelle, intègre bien les besoins anticipés (échéance visée : T4-2018).
Un séminaire de réflexion et d'échanges sur l'acceptabilité sera mis en place pour,
dans un premier temps, identifier les questions et les enjeux, y compris éthiques (échéance visée : 2018 et au-delà).
Les travaux de l'atelier prospectif, mis en place en mai 2017, seront poursuivis pour
construire collectivement des scenarii et alimenter les politiques publiques de mobilité et d'aménagement des territoires (échéance visée : 2018 et au-delà).
Un observatoire des perceptions et de l'acceptabilité sera mis en place, sous forme
d'enquêtes régulières auprès des conducteurs et usagers de la route (échéance visée : 2018 et au-delà).
Des instances de concertation entre gestionnaires routiers d'une part, entre autorités
organisatrices de la mobilité d'autre part, sur les enjeux du véhicule autonome et connecté seront mises en place (échéance visée : T3-2018) ; ces instances aborderont notamment les questions de connectivité et de cartographie du réseau. Une plateforme de partage d'expériences et de doctrine pour l'exercice de la maîtrise d'ouvrage, de la délégation de service et de l'achat public de services de transports publics automatisés, entre autorités organisatrices de la mobilité sera mise en place (échéance visée : T4-2018).
Les travaux relatifs aux cas d'usage d'automatisation du fret et de la logistique, seront
réactivés, en associant plus étroitement les logisticiens et les chargeurs (échéance visée : T2-2018).
Les travaux pré-réglementaires par cas d'usage seront poursuivis, en priorité en vue
d'établir le cadre réglementaire des transports publics automatisés, en intensifiant les échanges avec les acteurs industriels (NFI) (échéance visée : 2018 et au-delà).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
85
ANNEXES
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
86
Annexe : Synthèse des retours des consultations
1ère consultation (octobre novembre 2017) Principes généraux, gouvernance, pilotage · Intégrer les véhicules autonomes à un système global de mobilité, encourager les usages partagés · Renforcer le rôle des autorités organisatrices de mobilité dans la mise en oeuvre des offres utilisant des véhicules autonomes · Confier à l'IDDRIM l'instance de concertation avec l'État, les représentants des collectivités locales et les constructeurs · Tirer le programme NFI « Véhicule Industriel Autonome » (VIA) par les opérateurs de transport · Développer le mix passagers marchandises pour optimiser les systèmes urbains Evolution des règles de conduite / responsabilités / formation · Expliciter (plutôt qu'interpréter) les conventions CEE-ONU · Modifier le code de la route pour permettre la circulation des premières fonctions de conduite autonome sur voies à chaussées séparées dans un premier temps dès 2020 · Modifier la notion de conducteur personne physique (art. 1 de la convention de Vienne), et de contrôle, afin de permettre la supervision à distance · Clarifier la responsabilité pendant les phases de transition et de manoeuvres d'urgence · Re-travailler précisément les notions relatives au conducteur / chauffeur : rôles et responsabilités, place physique, formation (initiale, continue), permis associé Réglementation technique / validation / homologation · Développer une approche réglementaire technique à court terme pour les systèmes à automatisation totale, en parallèle de celle traitant le cas des fonctions d'automatisation partielle · Développer un approche matricielle de la réglementation permettant de combiner les cas d'usage, les typologies d'environnements / de voirie, les conditions de circulation, les risques associés · Mettre en place rapidement le cadre réglementaire systèmes de transports publics (élargi > navette 9-16 places) ; ne pas attendre la CEE-ONU ; développer, dès 2018, une réglementation technique pour l'ensemble des véhicules (véhicules particuliers utilisés à des fins de transport public, navettes de moyenne capacité, autobus) en priorisant les nouveaux usages ; · Développer une approche « système » qui intègre dans l'homologation les véhicules mais aussi, les infrastructures physiques et numériques, la supervision, etc ; · Créer un dispositif de standardisation des modalités de reprise en main
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
87
· · ·
Viser l'harmonisation (européenne) des principes fonctionnels de l'interface hommemachine Privilégier une réglementation européenne en matière d'interopérabilité Développer la simulation et la validation numériques
Expérimentations · Construire un plan d'expérimentation sur la base des scénarios d'usages prioritaires · Mettre en place une dotation budgétaire pluriannuelle spécifique à l'expérimentation, notamment dans le cadre du PIA ou de dispositifs spécifiques, pour soutenir les efforts de R&D de la filière automobile ; · Mettre en place, dès 2018, un plan de financement des expérimentations incluant les mises à niveau des infrastructures ; · Prévoir un véritable pouvoir d'initiative des autorités organisatrices de transport pour les expérimentations · Mettre en place une caractérisation des sites d'expérimentations sur routes ouvertes différenciée par cas d'usage et labelliser les expérimentations · Intégrer les équipements et la signalisation comme objets d'expérimentations · Définir et tester dans le cadre des expérimentations, les principes de gouvernance de la gestion de la donnée et le système de stockage et de traitement associé · Développer une méthodologie et des critères d'évaluation des expérimentations · Définir le « bien commun » des enseignements d'expérimentations à partager · Mettre en oeuvre des indicateurs de performance communs pour tirer les enseignements · Accélérer le processus de délivrance des autorisations Infrastructures et connectivité · Intégrer l'impact des véhicules autonomes dès la conception des infrastructures · Piloter le déploiement des infrastructures permettant la conduite autonome, · Développer une démarche de hiérarchisation des réseaux à partir de l'usage, y compris induite par le véhicule automatisé, et dans une logique d'itinéraires prioritaires ; définir des niveaux de service · Caractériser, améliorer et harmoniser la signalisation · Evaluer les apports possibles de la 5G
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
88
2ème consultation (décembre 2017 janvier 2018) Cas d'usages, domaines d'emploi, régulation et homologation · Inclure les drones volants dans la stratégie ; · Réduire la transition consacrée aux niveaux 2 et 3 ; · Donner aux véhicules traditionnels la capacité à devenir robotisés/autonomes ; · Fluidifier l'homologation de véhicules composés de systèmes issus de fournisseurs différents ; · Développer une offre industrielle d'autopilot non centrée uniquement sur l'automobile ; · Permettre le développement de la dronification de véhicules pour favoriser l'émergence de nouveaux services comme le valet parking (prise de contrôle temporaire du véhicule) ; · Ouvrir l'accès aux infrastructures (parking, aire de stationnement...), dont le monopole est réservé aux entreprises gestionnaires, à des prestataires de services qui offrent la possibilité de prise de commande à distance des véhicules sur ces infrastructures. Expérimentations, évaluation et méthodes de validation · Définir une méthode pour qualifier / évaluer des expérimentations et déploiements des véhicules autonomes, s'appuyant sur la capitalisation des expériences ; · Intégrer des évaluations conjointes des véhicules et de l'infrastructure (place des cartes haute-définition pour le guidage, évaluation intégrée caméra-marquage, travaux et repositionnement des marquages et autres équipements de la route) ; · Caractériser la robustesse du guidage en conditions météorologiques dégradées ; · Traiter l'explicabilité du comportement des véhicules autonomes et connectés ; · Évaluer le processus énergétique du « berceau à la tombe ». · Autoriser des expérimentations d'équipements de la route encore non-homologués ; · Établir le niveau de performance des infrastructures de signalisation grâce à des expérimentations permettant ainsi un état des lieux du patrimoine routier ; · Tester : · pour le véhicule particulier : les comportements de conducteurs pour ce qui concerne la reprise de contrôle, et la dynamique d'apprentissage des fonctionnalités ; · pour les transports publics ou partagés : l'adéquation des services aux besoins ; · pour le fret : les comportements des conducteurs professionnels et les éventuelles évolutions possibles des métiers des chauffeurs ; · Tester la conformité des jeux de donnés cartographiques aux standards communs ; · Expérimenter une plateforme d'intégration, de fusion et de redistribution en temps réel de données géographiques de sources multiples.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
89
Localisation, signalisation, amers · Approfondir la notion d'amer de positionnement et le rôle de la signalisation ; · Identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision des amers fixes sur les parcours des navettes ; · Étudier les solutions alternatives à la perte de signal GPS au regard de la verticalité de certaines zones urbaines denses. · Identifier un acteur chargé de : l'entretien et de la diffusion de données géographiques relatives aux infrastructures routières ; l'expertise qui lie les technologies de géolocalisation et la sécurité routière ; la création d'un entrepôt de données dynamiques (décrivant les infrastructures routières) commun et indépendant. Connectivité de l'infrastructure · Accélérer les déploiements des dispositifs ITS G5 ; · Viser la connectivité performante et totale des infrastructures routières. Règles de conduite, responsabilité · Légiférer sur les conséquences pénales d'une action délibérée visant à altérer ou tromper les capteurs ; · Modifier le code de la route pour permettre la circulation des premières fonctions de conduite en peletonnage (platooning) par conducteur humain ; · Statuer sur les données réellement nécessaires pour établir les différentes responsabilités. Formation, compétences · Favoriser, y compris fiscalement, la formation par simulateur ; · Préparer la reconversion de l'éducation routière ; · Aborder la problématique sociale liée au devenir des conducteurs. Organisation des acteurs, gouvernance · Mettre en place une équipe pour co-construire dans une démarche collective les briques nécessaires et non compétitives (les communs) : certification, normes et standards, moyens de validation de l'autopilot, ... ; · Monter un projet industriel éventuellement finançable en partie par le PIA ; · Favoriser le développement de nouveaux écosystèmes locaux et sécurisés qui interagiront par consensus local, en dehors de structures de supervision ; · Imposer de l'open data sur les véhicules et les infrastructures afin de permettre l'émergence de ces écosystèmes locaux ; · Encourager la création d'instituts et de filières spécialisées pour les besoins à venir.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
90
Annexe : Expérimentations : besoins d'évaluation des cas d'usage et de leur sécurité
1. Eléments de contexte L'expérimentation constitue une étape incontournable pour passer de la recherchedéveloppement à la mise en oeuvre des systèmes de conduite automatisée, pour s'assurer qu'ils répondent aux exigences de sécurité routière, et pour compléter les travaux de recherche ou d'étude sur les impacts, notamment sur la mobilité et l'environnement, les perceptions l'acceptabilité. La France s'est dotée d'un cadre d'expérimentation ouvert à tous les cas d'usage (véhicules particuliers, transports collectifs, fret et logistique). En application de l'article 37 de la loi n° 2015-992 du 7 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, l'ordonnance n° 2016-1057 du 3 août 2016 et ses textes d'application, fixent les conditions des autorisations, destinées à assurer la sécurité du déroulement de l'expérimentation. La quarantaine d'expérimentations réalisées sur voie publique en France, a permis aux constructeurs d'acquérir de nombreuses données de conduite et d'améliorer les algorithmes de conduite automatisée. Ainsi, les véhicules expérimentés à l'heure actuelle sont capables de gérer beaucoup plus de situations et d'évènements que ceux expérimentés il y a deux ans. Les démonstrations de navettes autonomes ont permis de présenter ce concept au public. Les années 2017 2018 marquent le passage à l'expérimentation de la conduite déléguée, soit sans surveillance de conducteur expert, soit avec une supervision à distance, pour les voitures particulières (tests avec un panel de clients, véhicule partagé autonome) et pour les navettes urbaines (transport de personnes sans conducteur). Ces nouveaux types d'expérimentations permettent d'enrichir la connaissance sur les interfaces véhicule-conducteur, les comportements de conduite et les processus d'apprentissage, et plus largement, les comportements de mobilité et l'acceptabilité. Les enseignements de ces nouveaux types d'expérimentations sont donc particulièrement précieux tant pour la réglementation technique que pour les questions d'information-formation des conducteurs. Les années 2017-2018 marquent aussi l'intérêt croissant pour les apports de la connectivité du véhicule à certaines fonctions d'automatisations dans certaines situations. Les travaux en cours au niveau national, européen et international (CEE-ONU) mettent en lumière l'importance de développer des analyses de risques, partagées entre autorités publiques (autorités routières et de sécurité routière), prenant en compte la diversité des cas d'usage, et notamment des environnements de conduite, ainsi que les interactions et interfaces entre le conducteur et le système d'automatisation. Ces travaux font également apparaître l'importance croissante de la connectivité comme apport possible aux fonctions d'automatisation.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
91
2. Objectifs généraux et transverses aux cas d'usage Il importe que les expérimentations : - participent à la démarche d'accumulation de connaissances ; - proposent un objet précis à évaluer en termes technologiques, fonctionnels, d'impact, de comportement ou d'acceptabilité ; - alimentent les travaux techniques sur les méthodes d'analyses de risques des cas d'usage et de leurs situations critiques dont défaillances des systèmes, tolérance aux fautes, capacité d'autodiagnostic... ; - fournissent des enseignements sur les besoins d'information / sensibilisation / formation des conducteurs. Il importe que les expérimentations permettent d'évaluer les comportements des conducteurs dans des niveaux de délégation élevés (3 puis 4), et notamment les reprises de contrôle des véhicules et/ou le fonctionnement des manoeuvres de risque minimal, dans des conditions de circulation à la fois diverses, mais de criticité faible du point de vue de la sécurité routière. Il importe d'évaluer les apports possibles de la connectivité à la sécurité des fonctions d'automatisation sur certaines situations critiques de cas d'usage, tant pour le véhicule particulier que pour les navettes et la logistique urbaine. Cette évaluation doit se faire en site fermé si la criticité des situations l'exige du point de vue de la sécurité routière. En termes de cartographie et de localisation, les expérimentations peuvent contribuer à identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision (à l'échelle décimétrique) des amers. Certaines expérimentations pourraient utilement évaluer les enjeux et les besoins de redondance entre le positionnement local par les capteurs du véhicule, et le positionnement satellite. En milieu urbain, les scenarii de relocalisation sur des amers locaux après pertes de signal GPS, pourraient utilement être testés. On rappelle enfin que les expérimentations devront satisfaire aux exigences de suivi et d'évaluation (cf. annexe), notamment en termes de comportement des conducteurs, d'interactions entre les véhicules et les autres usagers de la route, et de consommation énergétique. Évaluer la pertinence de la remontée, l'intégration, la fusion et la diffusion de ces informations et leur interopérabilité contrôlées dans un unique système de référence. En termes de signalisation, des réflexions peuvent être engagées pour des expérimentations dédiées aux équipements encore non homologués, notamment pour évaluer : - l'apport d'une connectivité locale via des équipements de signalisation, dynamiques ou statiques, actifs ou passifs, pour contribuer à la redondance, l'amélioration de la sécurité et la perception étendue notamment pour les usagers vulnérables ; - la signalisation verticale et horizontale utilisée comme amers de la route, parmi d'autres permettant à la carte dynamique de valider la position du véhicule.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
92
3. Cas d'usage, fonctionnalité et impacts a. Véhicule particulier Le développement des fonctions d'automatisation sur le véhicule particulier dérive principalement des stratégies des constructeurs dans un marché mondial fortement concurrentiel. Cette dynamique ne rend pas nécessaire que les autorités publiques expriment des priorités sur des cas d'usages précis, mais plutôt sur leurs impacts ou enjeux de sécurité routière et d'acceptabilité, qui sont détaillés ci-après. Les autorités publiques escomptent néanmoins, en termes de cas d'usage, et au vu des développements technologiques en cours, que les utilisations du véhicule particulier en dehors des voies à chaussées séparées, vont voir les expérimentations se multiplier, notamment aux accès ou réseaux d'approche des sections autoroutières, et en milieu urbain dense, dans ce dernier cas avec une logique de véhicule partagé. Concernant plus particulièrement les apports possibles de la connectivité aux fonctions d'automatisation, les cas d'usage de sécurité routière sont prioritaires pour évaluer les performances, domaines d'emplois et complémentarités entre technologies de connectivité (ITS-G5, LTE-V2X, 5G). En termes de cartographie et de localisation, les expérimentations peuvent contribuer à identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision (à l'échelle décimétrique) des amers fixes sur les infrastructures (par exemple, sur autoroutes : ouvrages d'art, barrières de péage, zones d'insertion / sortie. Certaines expérimentations pourraient utilement évaluer les enjeux et les besoins de redondance entre le positionnement local par les capteurs du véhicule sur les attributs de la chaussée, et le positionnement satellite. Les expérimentations du véhicule particulier automatisé devraient porter une attention particulière aux transitions (délégation et reprise de contrôle), aux fonctionnalités des interfaces homme-machine et au suivi de l'attention du conducteur ; en particulier en vue de l'élaboration de la réglementation technique de la CEE-ONU : évaluation des temps et des performances de reprise en main en fonction des alertes ou demandes du système en SAE 3 et 4 évaluation des stratégies et des performances des manoeuvres de risque minimale effectuées par le système en SAE 3 comparaison des comportements des conducteurs issus de différentes IHM en vue de dégager des possibles besoins de standardisation de certaines fonctions critiques de ces IHM
Les expérimentations doivent pouvoir contribuer à documenter l'attitude des autres conducteurs : - lors du déclenchement des manoeuvres automatisées - lors des manoeuvres avortées - lors des manoeuvres d'urgence.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
93
Les expérimentations du véhicule particulier pourraient également utilement contribuer à l'évaluation de la perception du temps passé en mode de conduite délégué, et, partant, aux choix de déplacement et de mode de transport. L'exemple de l'expérimentation « naturalistique » de Göteborg peut fournir une référence utile. En vue de mieux connaître les enjeux d'information et de formation, les expérimentations du véhicule particulier avec conducteurs non professionnels, devraient pouvoir (tout en conservant le minimum de formation préalable au déroulement en toute sécurité de l'expérimentation), permettre de documenter la dynamique d'apprentissage des conducteurs des fonctionnalités, domaines d'emploi et performances des fonctions d'automatisation (ex : dans les premières heures ou jours, puis dans les semaines ou mois de conduite suivants) et les interactions avec les autres usagers de la route. b. Transports publics ou partagés Le développement des services de transports publics ou partagés automatisés constitue une priorité du point de vue des autorités publiques. Il s'agit d'accélérer le passage à des déploiements en vraie grandeur, intégrés dans l'offre de transports public des autorités organisatrices. Au vu des développements observés à fin 2017 et des travaux du groupe « transports publics » de la Nouvelle France Industrielle, les attentes vis-à-vis des expérimentations sont principalement les suivantes : En milieu urbain dense, et sur des parcours principalement séparés des flux de circulation, il importe d'évaluer les enjeux critiques de sécurité routière sur parcours en partie protégés (événement critiques redoutés et réponses apportées) afin d'alimenter un référentiel d'analyse de sécurité des parcours ; ce référentiel, produit par les autorités publiques en concertation avec le groupe « transports publics » de la Nouvelle France Industrielle, est destiné à permettre à terme aux autorités organisatrices de déployer des services en s'appuyant sur des règles de l'art du point de vue de la sécurité. Ces expérimentations devront en particulier permettre d'évaluer : les enjeux de sécurité et les réponses à apporter pour la gestion des intersections, les réactions des autres usagers, véhicules particuliers et usagers vulnérables, dans les zones de mixité des flux ou en cas d'intrusion inopinée en zone de flux séparés, les manoeuvres d'évitement par contournement des obstacles
Il importe également d'évaluer les performances en termes de sécurité des systèmes de supervision à distance des navettes de niveau d'automatisation équivalent SAE 4 ou 5, afin de permettre progressivement les expérimentations sur voie publique des systèmes de navettes sans aucune personne à bord mais avec superviseur à distance. Il apparaît utile, au vu des développements actuels, de tester les fonctionnalités de supervision à distance, notamment : remise en mouvement après arrêt inopiné gestion des flux entrants / sortants de passagers régulation entre navettes et avec d'autres transports publics sur voies réservés
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
94
En zone périurbaine ou rurale, à ce stade, l'enjeu apparaît de deux ordres : Gestion de la demande diffuse par mutualisation partielle des parcours en temps réel : il s'agit là d'explorer les possibilités d'adapter les parcours en temps réel, à véhicule de capacité donnée, en fonction des convergences d'origines / destinations et de créneaux de déplacements (concept de « taxi collectif ») ; ces expérimentations pourraient être conduites sur des territoires délimités, avec points d'arrêts prédéterminés, de type zone d'activité ou universitaire, en pelotonnage avec ou sans conducteur humain ; Desserte de pôles excentrés en milieu rural, à partir d'une gare ferroviaire ou routière, ou d'un point d'arrêt de bus ou car sur une ligne de trafic massifié : il s'agit là de tester, par étapes, des fonctionnalités de circulation en trafic mixte, sur des réseaux à faible circulation, avec des différentiels de vitesse potentiellement élevés, et des intersections, ainsi que l'insertion dans les zones d'accès aux gares ferroviaires ou routières.
-
En termes de cartographie et de localisation, les expérimentations peuvent contribuer à identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision (à l'échelle décimétrique) des amers fixes sur les parcours de circulation des navettes (exemple : feux de circulation, quais d'embarquement / débarquement, configuration précise des intersections et de leur signalisation). En milieu urbain, les scenarii de relocalisation sur des amers locaux après pertes de signal GPS, pourraient utilement être testés. En termes de modèle économique, il est utile de repenser la question du coût et d'expérimenter de nouvelles tarifications (à l'usage) afin de définir le consentement des usagers à payer pour ces nouveaux services. Par ailleurs, l'amélioration des capacités de perception des environnements de nuit par les systèmes automatisés, constitue un enjeu pour le développement des transports publics par renforcement de l'amplitude et des fréquences. c. Fret et logistique De façon générale, les cas d'usages apparaissent moins clairement définis dans le fret et la logistique, que dans le véhicule particulier et le transport public. On pressent néanmoins, à ce stade, des potentialités offertes par : - les engins-livreurs en milieu urbain dense : un des enjeux de l'évaluation de ces cas d'usage est porte sur les interactions avec une multiplicité d'autres usagers sur des parcours mixtes, à la fois sur la voie publique et sur les trottoirs, en zone ouverte à la circulation et en zone piétonnière ; - l'automatisation de certaines tâches de conduite du PL sur voies à chaussées séparées, en prolongement des assistants à la conduite, à l'instar des fonctions développées sur le véhicule particulier ; - la circulation de VUL sur des parcours fixes et partiellement séparés des flux de circulation en milieu urbain, en parallèle ou en « interstices » des parcours de navettes : dans ce cas, les enjeux d'évaluation de sécurité des parcours apparaissent similaires à ceux des navettes, modulo la spécificité des problématiques d'embarquement / débarquement des marchandises par rapport aux passagers.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
95
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
DICOM-DGITM/B/18029 Mai 2018
(ATTENTION: OPTION périodes de temps pendant lesquelles le "conducteur" se reposera sur le système, et qui posera la question de la responsabilité, notamment en termes de reprise en main, pour concilier le fait que le conducteur est en tout état de cause responsable pénalement alors qu'il fait confiance au système quasiment tout le temps. Dans la perspective de permettre le déploiement de véhicules hautement automatisés à l'horizon 2020 à 2022, le régime de responsabilité sera adapté en fonction des évolutions du rôle respectif du conducteur et du système automatisé pour les cas d'usage correspondants. Ces adaptations seront proposées, concomitamment aux évolutions du code de la route correspondantes, dans le cadre du groupe de travail piloté par le Ministère de l'intérieur, associant notamment les Ministères de la Justice, des Transports et de l'Industrie. Dans l'immédiat, afin de permettre le développement des expérimentations dérogeant aux dispositions du code de la route, la Loi d'orientation des mobilités proposera un cadre de responsabilité adapté à la spécificité des expérimentations, et notamment à l'engagement du responsable de l'expérimentation, titulaire de l'autorisation, à en assurer la sécurité. Les magistrats des juridictions, les experts judiciaires et les officiers de police judiciaire seront sensibilisés aux enjeux de responsabilité qui seront générés par le développement et la mise en circulation des véhicules autonomes.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
39
4.2.3. Formation et information du conducteur Le conducteur devra encore remplir un certain nombre de conditions avant d'être autorisé à s'asseoir derrière le volant : d'abord, celle d'être titulaire de la catégorie de permis de conduire correspondant au véhicule, d'être en bon état de santé, de ne pas être sous l'influence de substances psychoactives comme l'alcool, les drogues ou les médicaments, etc. L'humain qui conduit aujourd'hui un véhicule doit donc être formé, et sa formation doit avoir été validée par un examen favorable du permis de conduire, ainsi qu'être apte à conduire, physiquement et mentalement. Dès lors qu'il s'agira d'un véhicule à délégation partielle, voire quasi-totale de conduite, ces conditions devront continuer à être satisfaites. En effet, même en présence de fonctions hautement automatisées de conduite, le conducteur doit rester à même de répondre à une ou des sollicitations du système lui demandant de reprendre le contrôle du véhicule, pour un certain nombre de raisons. Concernant la formation des conducteurs, et notamment celle des jeunes conducteurs, en âge de passer les épreuves de l'examen du permis de conduire, il faut envisager dès maintenant d'adapter les contenus de la formation et, donc, ceux des examens du permis de conduire. Ainsi, au niveau national, un groupe de travail sur le sujet est à créer rapidement au sein de la DSR, pour traiter de ces questions et échanger avec les autres ministères concernés, en vue de dégager une doctrine nationale qui sera ensuite portée au niveau européen. Il faut en effet garder en tête que ce travail devra également être engagé au niveau européen : en effet, les conditions de délivrance des permis de conduire relèvent de la compétence de l'Union européenne et, plus précisément, des dispositions contenues dans la directive 2006/126/CE du Conseil et du Parlement européen du 20 décembre 2006, relative au permis de conduire. On devrait pouvoir s'attendre à ce que la Commission européenne, en particulier la DG MOVE, son Unité sécurité routière, prenne ses responsabilités en la matière. Se posent et se poseront également d'autres questions devant cette évolution inévitable des conditions dans lesquelles un véhicule sera à terme conduit et contrôlé par l'humain : - en situation d'expérimentation de divers véhicules à délégation partielle de conduite, il convient que les « essayeurs », en général des ingénieurs ou des techniciens, soient à même de garantir la sécurité parfaite du véhicule, notamment vis-à-vis des autres usagers de la route. Etant eux-mêmes « essayeurs », ils connaissent parfaitement bien les systèmes techniques automatisés qu'ils testent, mais ils doivent bien évidemment être capables de reprendre la main en cas de nécessité, voire d'extrême nécessité, et tout au long de l'expérimentation faire en sorte que, quel que soit « ce qui » conduit le véhicule, ce dernier évolue dans la circulation de manière harmonieuse et sans surprendre quiconque. Nul doute que la mise en oeuvre de ces différents points ne permet pas de se dispenser d'une sorte de formation spécifique qui peut être menée bien sûr au sein même de la société qui réalise cette expérimentation ; - des véhicules disposant de fonctions automatisées de conduite seront de plus en plus souvent proposés à la vente à des particuliers ; il convient de s'interroger sur la façon dont les acheteurs de ce type de véhicules vont utiliser harmonieusement et sans danger les nouvelles technologies à leur disposition. Cette question est encore plus cruciale pour ceux qui ont l'habitude de louer des véhicules, car ils ont à prendre en charge un véhicule qu'ils ne connaissent pas, souvent de dernière génération, précisément celui qui est équipé des technologies les plus récentes. Une information sur le type de technique et son fonctionnement devrait être faite aux conducteurs : quelle est cette technologie, quand est-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
40
elle disponible, comment s'utilise-t-elle, quel est exactement le partage des tâches de conduite entre le conducteur et le système, quelles actions concrètes et précises reste-t-il à réaliser au conducteur qui les utilise ? - Cette information pourrait notamment devrait figurer par écrit dans le manuel qui accompagne le véhicule ou sur le site internet de la marque et du type de véhicule en cause. Il faut également réfléchir à l'information qui devrait être donnée lors de la prise en mains du véhicule neuf. L'utilisation de vidéos explicatives, pédagogiques et « ludiques » qui apparaissent d'ores et déjà sur le marché pourrait être recommandée et systématisée, en étant mise gracieusement à la disposition de l'acheteur, via une application pour téléphone portable par exemple. Cette information pourrait participer de la confiance dans ces nouveaux systèmes ; - Il convient également de tenir compte de ce que tous les véhicules ne seront pas instantanément équipés de ces nouvelles technologies et que devront cohabiter des véhicules « anciens » et « nouveaux ». De plus, certains usagers de la route ne seront pas automatisés ou connectés, comme les utilisateurs de deux-roues motorisés, les cyclistes et les piétons ; l'information évoquée ci-dessus devra aussi être mise à leur disposition, afin qu'en tant qu'usagers partageant le même espace routier, ils comprennent les réactions de ces « nouveaux » véhicules, dont le comportement est susceptible de les surprendre par rapport à celui des véhicules entièrement « conduits et contrôlés humainement ». Ce travail général d'information, de réflexion et de formation sur l'utilisation de ces nouvelles technologies, de remise en question de notre façon de conduire et de nous déplacer en voiture ou en camion ou encore en autocar, est une tâche qui doit être accomplie collectivement : pouvoirs publics, professionnels automobiles, professionnels de la formation, inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière, associations, psychologues experts en conduite automobile, notamment mais pas seulement : c'est toute la société civile en général qui est concernée et qui doit être interpellée sur ce sujet qui va révolutionner nos comportements de mobilité et de partage de l'espace public routier. Les formations à la conduite de véhicules autonomes et à usage professionnel devront être aussi adaptées. Eléments de synthèse et d'orientation Les besoins d'évolution de la formation à la conduite feront l'objet de propositions d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur, d'ici fin 2018. La Loi d'orientation des mobilités établira le principe d'une information des conducteurs sur les principales fonctionnalités d'automatisation, leurs domaines d'emplois et leurs limites, lors de l'acquisition d'un véhicule neuf.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
41
4.2.4. Identification des véhicules L'identification des véhicules automatisés, i.e. le fait de les rendre visibles ou repérables par les autres usagers ou acteurs de la route, soulève des enjeux en matière de gestion des interactions - civilités ou incivilités entre usagers, et partant d'efficacité de la gestion des trafics. Cette identification soulève également des questions de protection desdits véhicules contre la malveillance. Cette identification emporte des enjeux importants en termes de contrôle par les forces de l'ordre (ex : faut-il signaler un véhicule équipé de fonctions automatisées de conduite de manière visible de l'extérieur, dès lors que ces fonctions sont activées ?). Cela peut sembler nécessaire, si le conducteur a été autorisé à effectuer d'autres tâches que la conduite pendant le temps où le système « conduit » et jusqu'à ce qu'il lui demande de reprendre la main, ou encore que lui-même souhaite conduire. En effet, l'enjeu pour les forces de l'ordre est d'être à même de distinguer le conducteur qui « peut » faire autre chose de celui qui ne le « peut » pas, donc de ne pas verbaliser le premier, mais le deuxième. Reste que l'identification ouvre des questions d'acceptabilité. Eléments de synthèse et d'orientation La question importante de l'opportunité et des éventuelles modalités d'identification des véhicules automatisés renvoie à des enjeux divers (gestion de trafic, contrôle des règles de conduite, malveillance, cybersécurité, acceptabilité). Les enjeux sont à la fois techniques, juridiques et sociétaux. Ces questions nécessitent un approfondissement spécifique notamment pour la période transitoire durant laquelle coexisteront des véhicules à conduite humaine et d'autres autonomes.
4.2.5. Evolution de la réglementation technique et de l'homologation des véhicules Dans le cadre des travaux sur l'évolution de la réglementation technique des véhicules au sein de la CEE-ONU de Genève, c'est actuellement, le Règlement 79 (cf. encadré ci-dessous), relatif uniquement aux équipements de direction des véhicules, qui traite des principaux enjeux de l'automatisation. Ce règlement autorisait jusqu'en 2017 le contrôle automatique de la commande de direction par le véhicule uniquement jusqu'à 10 km/h. Cette prescription était suffisante pour homologuer des systèmes de parking automatique, mais ne permettait pas l'homologation des projets des constructeurs visant à diriger le véhicule automatiquement sur voies rapides ou en situation de bouchons, puis à terme dans toutes les situations.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
42
Encadré : aperçu des travaux d'évolution du règlement 79 Les travaux engagés au sein du WP29 de la CEE-ONU conduisent à aborder séquentiellement les degrés d'automatisation de plus en plus élevés, classés en 5 catégories : A : manoeuvres < 10km/h, y compris le parking piloté à distance (exemple park assist) B : maintien dans la voie B 1 : assistance, le conducteur doit garder ses mains sur le volant (exemple : lane keeping assist ) B 2 : délégation, le conducteur peut lâcher les mains du volant (exemple : lane guidance) C : changement de voie (initié par le conducteur) : le conducteur décide de changer de voie, et demande au système de le faire D : changement de voie (validé par le conducteur) : le système propose de changer de voie, le conducteur valide et le système opère E : B2 + changement de voie automatique : délégation du maintien dans la voie et du changement de voie totalement automatique.
Dans ces travaux, la France est attachée notamment à ce que, d'une part les moyens d'interface Homme Machine (IHM) soient le plus harmonisé (standardisé), et d'autre part que des obligations de suivi (« monitoring ») du conducteur soient définies de façon cohérente avec les exigences d'attention du conducteur qui ont été définies de façon spécifique à chaque cas d'usage, et en particulier, chaque niveau d'automatisation. Ainsi, la France est attachée à ce que, au moins dans un premier temps, les prescriptions techniques emportent des obligations de surveiller le conducteur pour s'assurer que celui-ci est disponible et capable de reprendre la main de manière sûre quand le véhicule va le lui demander. A terme et à la lueur de l'expérience, cette assertion méritera d'être évaluée et, le cas échéant, allégée. La France est également attachée à ce que des manoeuvres de risque minimal ou des procédures d'urgence soient disponibles et réglementées, le cas échéant, notamment pour traiter de l'ensemble des situations où le système ne peut plus fonctionner tout seul et que le conducteur ne reprend pas la main, ou en cas d'événements soudains. Au-delà du règlement R79 portant sur la direction, il importe d'inscrire l'évolution de la réglementation technique internationale dans un nouveau cadre permettant de passer d'une approche par « module » (ex : direction-latéral ; freinage-accélération-longitudinal ; champ de vision) à une approche « système » et de prendre en compte notamment : - le besoin de distinguer les différents types de cas d'usage dans l'approche, et notamment les niveaux d'automatisation et les domaines d'emploi ou conditions de circulation ; - le besoin de prendre en compte le caractère apprenant de ces systèmes ; - le besoin d'élargir progressivement la réglementation technique aux enjeux de connectivité du véhicule.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
43
Encadré : approche de réglementations technique « horizontale » des véhicules autonomes Pour cette nouvelle approche de réglementation technique des véhicules, dite « réglementation horizontale », qui permettra d'homologuer les véhicules avec un cadre plus adapté que le cadre actuel, la France propose les principes suivants : 1. nécessité de décrire le cas d'usage de façon suffisamment détaillée, dans les principales dimensions suivantes : fonctions de conduite déléguées mécanismes d'activation / désactivation / transition domaines d'emploi et conditions de circulation limites répartition des tâches attendues entre le système et le conducteur, en référence aux niveaux d'automatisation SAE manoeuvres de risque minimal et d'urgence, et articulation logique en fonction de l'arbre des événements redoutés (ceci suppose notamment de décrire d'une part les arbitrages éthiques sous-jacents aux logigrammes de manoeuvres d'urgence et d'autre part les délimitations des niveaux de responsabilité entre le conducteur et les fonctions de délégation de conduite) ; fonctionnalités des interfaces homme-machine, notamment en termes de surveillance de l'attention du conducteur ; d'information et d'alerte du conducteur sur l'état de délégation de conduite et les conditions critiques de circulation ; de demandes de reprise en main nécessité de distinguer les cas d'usage en deux principales catégories : environnements de circulation ouverts et complexes d'un côté ; parcours de circulation pré-définis et dont la sécurisation est maîtrisable pour le cas d'usage concerné nécessité d'analyser les situations de conduite et les événements les plus critiques potentiellement rencontrés par le véhicule en termes de sécurité routière, ainsi que de sûreté, afin d'asseoir des obligations proportionnées de gestion de ces situations critiques ; nécessité de proportionner les exigences de gestion des situations critiques, y compris les manoeuvres de risque minimal et les manoeuvres d'urgence, en quatre principaux niveaux, en fonction de leur criticité : existence d'un dispositif (ou d'une procédure ou d'une manoeuvre) de gestion de la situation critique description fonctionnelle du dispositif de gestion de la situation critique existence de fonctionnalités requises pour la gestion de la situation critique niveau de performance requis pour la gestion de la situation critique certification ou validation du dispositif de gestion de la situation critique. nécessité d'adapter les processus de validation en fonction de l'objet : analyse de risque (ou situation critique) ; exigences plus ou moins fortes vis-à-vis des mesures de gestion des situations critiques, cas d'usage ; nécessité de développer des jeux de tests par simulation là où ils sont pertinents ; nécessité de développer des dispositifs de validation à l'usage, au-delà de la mise sur le marché, notamment pour les systèmes apprenants et soumis à des mises à jour.
-
-
2. 3.
4.
5.
6. 7.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
44
En termes d'homologation, sur la base de cette approche, chaque type de véhicule muni d'un ensemble de fonctionnalités automatisées pourra être homologué par une autorité de réception, sur la base d'un rapport d'un service notifié, qui aura procédé à toutes les vérifications nécessaires adaptées à l'ensemble des fonctionnalités embarquées (vérification documentaire, essais de simulations, essais physiques ; évaluation de conformité décloisonnée et systémique). Le processus de délivrance de l'homologation européenne du véhicule se fera comme actuellement selon les principes érigés par les directives ou règlements cadre européens, pour tous les aspects non-automatisés du véhicule (ceintures de sécurité, éclairage, vitrage, ...), en incorporant l'homologation dédiée aux fonctionnalités automatisées ci-dessus. Enfin, le cadre national existant, notamment le livre troisième ("Le Véhicule") du code de la route et ses arrêtés d'application, devra être revu afin de s'assurer de l'adéquation entre les nouvelles prescriptions techniques éditées à Genève et rendues obligatoires par Bruxelles, et celles déjà présentes dans le code de la route, que ce soit au niveau des dispositions techniques des véhicules, de leur réception et homologation, de leur immatriculation et de leur contrôle technique, et devra être adapté en conséquence le cas échéant. Eléments de synthèse et d'orientation La réglementation technique des véhicules est élaborée, au niveau international, par la CEEONU. Le cadre européen fixe de son côté les modalités d'homologation (« réception ») en vue de la mise sur la marché des véhicules, en reprenant l'obligation de respect de certains règlements techniques relevant de la CEE-ONU. Il importe d'inscrire l'évolution de la réglementation technique internationale dans un nouveau cadre permettant de passer d'une approche par module à une approche système. C'est l'objet de la proposition française de « réglementation horizontale » présentée en juin 2017 à la CEE-ONU. Cette proposition permettrait notamment de traiter la diversité des cas d'usage qui se profilent, en les distinguant en deux principales catégories : environnements de circulation ouverts et complexes d'un côté ; parcours de circulation pré-définis et dont la sécurisation est maîtrisable pour le cas d'usage concerné. Cette approche permettrait de développer des analyses de risques par cas d'usage et ainsi de spécifier et de proportionner les exigences, notamment les manoeuvres d'urgence, en fonction de la criticité des situations de risques. Cette approche permettrait d'adapter le processus de validation en fonction du risque et de la réponse apportée par le système, par des tests, des simulations, ou en les combinant. Dans l'attente d'une nouvelle approche « horizontale », la réglementation technique des véhicules doit poursuivre son adaptation au développement du véhicule automatisé, afin de l'accompagner tout en s'assurant du respect des exigences de sécurité routière. Dans les révisions engagées (règlement R 79), la France demandera à ce que les exigences sur les fonctions d'automatisation, le suivi de l'attention du conducteur et les manoeuvres d'urgence et de sécurité, garantissent la sécurité routière tout en étant proportionnées au degré d'automatisation. La France demandera à ce que des exigences soient développées dans la réglementation technique internationale, afin que les véhicules dont les systèmes de conduite sont totalement délégués au véhicule, soient dotés de la capacité d'appliquer un ordre d'arrêt par les forces de l'ordre, et ce en toute sécurité.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
45
Le nouveau cadre de réglementation et de validation technique des fonctions automatisées d'un véhicule doit être élaboré à la CEE-ONU à Genève. Il importe de préserver le caractère multilatéral de ce cadre, sans quoi l'on risque d'inciter à la fragmentation des approches et des marchés. Pour autant, ce processus d'élaboration et de validation à la CEE-ONU est un processus très long (plusieurs années), au regard du rythme de déploiement. Ainsi, se pose la question d'un régime transitoire de portée européenne, à l'initiative de la Commission, permettant de définir le cadre de réglementation technique et d'homologation des véhicules automatisés à plus court terme qu'au sein de la CEE-ONU.
4.2.6. Cadre spécifique aux transports publics automatisés La dynamique de l'innovation dans le secteur des transports publics automatisés conduit à penser qu'il convient d'anticiper le passage d'une logique d'expérimentation au développement de services. Il est probable que, dans une logique incrémentale et d'apprentissage, les cas d'usage de la navette se développent d'abord sur des environnements de circulation relativement sécurisés connus (tels qu'on l'a observé jusqu'à lors dans les projets de recherche et d'expérimentation), pour, progressivement passer de « quasi-sites propres » à des parcours moins sécurisés (flux mixtes et carrefours ; changements de voie pour l'évitement), pour aller éventuellement vers des parcours non fixes. Les services identifiés dans le cadre de la NFI laissent penser que la « taille » du véhicule, telle qu'on la connaît actuellement (environ 12 personnes), sera appelée à se diversifier ainsi que la nature des parcours (sites propres / sites ouverts), pour couvrir un spectre plus large, allant du véhicule partagé autonome pour les demandes les plus atomisées, à des bus capacitaires. Les niveaux d'automatisation visés sont supérieurs à ce qui est visé pour le véhicule particulier, en visant dès maintenant les niveaux 4 et 5. Les travaux de réglementation de l'automatisation menés à la CEE-ONU ne répondent pas aux enjeux de développement du transport public automatisé, qui apparaît rapide sur des domaines d'emploi relativement sécurisés.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
46
Eléments de synthèse et d'orientation La dynamique de développement du transport public automatisé conduit à considérer deux orientations stratégiques au niveau national pour accompagner le marché : L'élaboration d'un cadre réglementaire fixant les prescriptions de sécurité du véhicule de type « navette » (9 à 16 places, dont au moins 4 places assises), ainsi que les conditions de circulation de ces véhicules lorsqu'ils sont automatisés (cette catégorie de véhicule se distinguant des catégories M2 ou M3 destinées au transport de personnes et soumises à la réglementation internationale et l'homologation européenne). L'élaboration d'un référentiel d'évaluation de la sécurité des parcours des navettes, lorsque ces parcours sont fixes, en s'appuyant sur une analyse des situations critiques de circulation des navettes automatisées en milieu urbain et sur les expérimentations.
-
Ces deux éléments permettront de mettre en place un régime d'homologation des véhicules concernés, et un régime de validation des parcours et conditions de circulation des véhicules.
4.2.7. Enjeux d'interopérabilité et de coordination de la supervision Le développement de l'automatisation va s'accompagner d'un développement de la gestion coordonnée de flottes de véhicules, probablement divers dans leurs caractéristiques techniques, leurs degrés d'automatisation, leurs fonctions et leurs domaines d'emploi. La supervision va, en parallèle, se développer pour les transports publics automatisés, mais aussi, sous certaines formes, pour le véhicule individuel et la logistique. Ces deux tendances (supervision et coordination de flottes), va poser des questions d'interopérabilité, de coordination voire de « partage » de la supervision entre acteurs, incluant des gestionnaires de flottes, des opérateurs de transports publics, des gestionnaires d'infrastructures, des gestionnaires d'espaces de type parking. Il s'agira ici de concilier la maîtrise des enjeux critiques de sécurité et de sûreté, et le soucis de ne pas créer des barrières à l'entrée ou des phénomènes de « bloked in » dans lesquels des opérateurs détiendraient, au travers de la supervision, un pouvoir monopolistique défavorable au développement des technologies et des services. Eléments de synthèse et d'orientation Une mission d'étude et de concertation sur les enjeux fonctionnels, techniques et économiques de l'interopérabilité et de coordination de la supervision flottes de véhicules automatisés, sera lancée, pilotée par le Ministère chargé des transports, associant les acteurs de la NFI et les collectivités locales.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
47
4.3. Expérimentations, innovation, recherche
4.3.1. Expérimentations En application de l'article 37 de la loi n° 2015-992 du 7 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, et afin de permettre la circulation sur la voie publique de véhicules à délégation partielle ou totale de conduite à des fins expérimentales, l'ordonnance n° 2016-1057 du 3 août 2016 relative à l'expérimentation de véhicules à délégation de conduite sur les voies publiques indique que : - La circulation à des fins expérimentales d'un véhicule à délégation partielle ou totale de conduite sur une voie ouverte à la circulation publique est subordonnée à la délivrance d'une autorisation destinée à assurer la sécurité du déroulement de l'expérimentation. - L'autorisation est accordée par le ministre chargé des transports après avis du ministre de l'intérieur, s'il y a lieu après avis du gestionnaire de la voirie, de l'autorité compétente en matière de la police de la circulation et de l'autorité organisatrice des transports concernés. - Les conditions de délivrance de l'autorisation et les modalités de sa mise en oeuvre sont précisées par décret en Conseil d'Etat. Lors de la préparation de ce décret, il est apparut nécessaire de concilier le besoin d'un cadre juridique solide et la possibilité d'innover, notamment en allant vers des niveaux d'automatisation de plus en plus élevés, où les obligations d'attention du conducteur pourraient être relâchées. L'automatisation doit en effet permettre et gérer en toute sécurité une moindre attention du conducteur. L'expérimentation doit donc pouvoir évaluer le lien entre différents niveaux ou fonctions d'automatisation fonctions, et les comportements du conducteur. Or, l'attention du conducteur est un élément structurant du code de la Route (article R 412-6 du code de la route : « Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent »). Afin de pouvoir, au cours d'expérimentations, déroger aux obligations d'attention du conducteur, il importe que cette dérogation soit accompagnée de dispositions législatives en matière de responsabilité. Afin de concilier au mieux le besoin d'un cadre juridique sécurisant, et le besoin de ne pas freiner les expérimentations, le cadre législatif sera adapté en 2018, afin de prévoir les dispositions nécessaires, pour des expérimentations, dans des conditions sécurisées, avec possibilité d'inattention du conducteur ou d'absence du conducteur. Au 1er janvier 2018, les principales caractéristiques et les principaux enseignements des expérimentations sont les suivants :
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
48
Encadré : synthèse des retours d'expérimentations Nombre et typologie d'expérimentation De fin 2014 à fin 2017, 51 décisions d'autorisation de délivrance exceptionnelle de certificats d'immatriculation « W garage » dans le cadre d'expérimentation de véhicules à délégation de conduite ont été délivrées. Parmi ces décisions, 26 concernent des voitures particulières (dont 11 en milieu urbain complexe), 15 concernent des navettes urbaines et 10 sont des décisions modificatives afin d'étendre la durée de validité, le périmètre géographique ou le nombre de véhicules concernés par l'expérimentation. Depuis mi-2016 une augmentation significative du nombre de demandes d'expérimentation de navettes autonomes est observée. Synthèse des retours d'expérience 30 bilans ont été reçus par l'administration et sept réunions sur les retours d'expérience ont été organisées depuis fin 2014. Ces retours d'expérimentation sont positifs. À ce jour, aucun accident matériel ou corporel n'a eu lieu lors des roulages (près de 100 000 km au total). Des incidents de plusieurs sortes ont cependant été rencontrés. En effet, les véhicules à délégation de conduite ne gèrent pas encore toutes les situations de conduite. Les problèmes peuvent provenir de l'environnement dans lequel le véhicule évolue (zones de travaux ou de péage, passage de trois voies à deux voies, brouillard épais, objet sur la voie...) mais aussi du comportement des autres usagers (non respect des distances de sécurité, queues de poisson, stationnement sur la bande d'arrêt d'urgence en cas de ralentissement de la circulation au niveau d'une sortie d'autoroute...). Les expérimentations ont permis aux constructeurs d'acquérir de nombreuses données de conduite et d'améliorer les algorithmes de conduite autonome. Ainsi, les véhicules expérimentés à l'heure actuelle sont capables de gérer beaucoup plus de situations et d'événements que ceux expérimentés il y a deux ans. De plus, les démonstrations de navettes autonomes ont permis de présenter ce concept au grand public. D'une manière générale, les retours des personnes ayant testé les prototypes sont enthousiastes. Les meilleures synergies avec les autorités de police doivent être trouvées lors des expérimentations.
La mise au point technique des voitures particulières autonomes sur route à chaussées séparées étant en grande partie effectuée, les constructeurs souhaitent passer à la seconde phase des expérimentations de véhicule à délégation de conduite : les tests de l'usage de ces véhicules avec des conducteurs non-experts. Ainsi, des expérimentations ont été ou sont en cours d'autorisation afin de faire circuler des véhicules en mode délégué avec des conducteurs non-experts à la place du conducteur. La responsabilité de la conduite est alors transférée au passager avant, un conducteur expert disposant de doubles commandes afin de pouvoir reprendre le contrôle du véhicule en cas de problème. Il est probable qu'au cours de l'année 2018 les constructeurs souhaitent tester la conduite déléguée, soit sans surveillance de conducteur expert, soit avec une supervision à distance, le « conducteur » étant alors hors du véhicule lors des roulages. Ce mode de conduite est envisagé pour les voitures particulières (tests avec un panel de clients) et pour les navettes urbaines (transport de personnes sans conducteur). Un projet de Loi proposera dès 2018 un cadre de responsabilité permettant de conduire de telles expérimentations.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
49
Eléments de synthèse et d'orientation L'expérimentation constitue une étape incontournable pour passer de la recherchedéveloppement à la mise en oeuvre des systèmes de conduite automatisée, et pour s'assurer qu'ils répondent aux exigences de sécurité, notamment de sécurité routière et de sûreté, ainsi que d'acceptabilité sociale. Cette phase d'expérimentation peut également, en complément des travaux de recherche ou des études de comportements, fournir des éléments utiles sur les attitudes de conduite et de mobilité. Il importe que les expérimentations ne se limitent pas aux aspects technologiques, mais concernent prioritairement les usages, qu'elles doivent contribuer à explorer, évaluer et affiner. Cette approche par les usages doit couvrir l'ensemble des territoires (urbains, périurbains, ruraux). Cette approche par les usages doit notamment permettre d'adresser, au-delà de la sécurité des systèmes, l'acceptabilité, les modèles économiques, les impacts sur la mobilité, l'emploi, les compétences. Les futures expérimentations doivent être structurées autour de priorités communes des acteurs français, et de la production d'un « bien commun » de connaissances objectivées pour la validation des systèmes. L'approche nationale doit ainsi conjuguer : - des orientations nationales, sur les cas d'usages et les impacts qui semblent les plus importants à évaluer pour les pouvoirs publics ; - un cadre de financement, en conjuguant au mieux les divers leviers du programme d'investissement d'avenir ; - un engagement de la filière à mettre en commun certaines « briques » des expérimentations, tout en respectant les initiatives industrielles et territoriales qui favorisent l'innovation : Plus précisément : - Au niveau législatif, un cadre de responsabilité sera proposé, permettant des expérimentations dans des conditions pouvant déroger aux obligations du code de la route. - Un document d'orientation présentera les attentes prioritaires des autorités publiques en termes d'expérimentations (cf. encadré ci-dessous et document détaillé joint). - Des règles de mise en commun des données, outils et méthodes d'évaluation et de validation des systèmes seront définies, sous l'animation de l'État, afin de favoriser les économies d'échelle et les synergies entre acteurs pour l'accumulation de la connaissance, dans le respect des contraintes industrielles et commerciales de ces acteurs. - Le programme d'investissements d'avenir (PIA) sera mobilisé pour financer des projets collaboratifs permettant de produire, à partir d'un programme structuré expérimentations, des méthodes et des outils de validation des systèmes, du point de vue de leurs usages et de leur sécurité, dans des configurations variées. - Les industriels ont été invités à proposer une approche structurée des expérimentations, dans le cadre des travaux de la NFI et du Conseil national de l'industrie : la filière élabore une proposition de programme national d'expérimentations-validation (cf. ci-dessous).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
50
Encadré : orientation des expérimentations du point de vue des politiques publiques. Les expérimentations dans le domaine de la logistique urbaine pourraient utilement se développer, comptetenu des potentielles applications et du besoin d'évaluer, outre les impacts sur la sécurité, les enjeux sur la gestion des flux et des circulations urbaines ; ces expérimentations devraient permettre d'évaluer les comportements des conducteurs professionnels et les éventuelles évolutions possibles des métiers des chauffeurs. Les expérimentations de navettes automatisées devraient permettre d'évaluer les enjeux critiques de circulation et d'alimenter un référentiel d'analyse de sécurité des parcours. Elles devraient également permettre d'évaluer les enjeux critiques de régulation des flux et de supervision. Elles devraient également permettre d'évaluer les comportements des conducteurs professionnels et les éventuelles évolutions possibles des métiers des chauffeurs. Les expérimentations du véhicule particulier automatisé devraient porter une attention particulière aux transitions (délégation et reprise de contrôle), aux fonctionnalités des interfaces homme-machine et au suivi de l'attention du conducteur ; elles devraient permettre d'évaluer la dynamique d'apprentissage des fonctionnalités par les conducteurs. Les expérimentations du véhicule particulier devraient contribuer à l'évaluation de l'impact sur la consommation de carburant. Les expérimentations du véhicule particulier pourraient utilement contribuer à l'évaluation de la perception du temps passé en mode de conduite délégué, et, partant, aux choix de déplacement et de mode de transport. En site fermé si besoin, il importe d'évaluer les apports possibles de la connectivité à la sécurité sur certaines situations critiques de cas d'usage, tant pour le véhicule particulier que pour les navettes et la logistique urbaine Les expérimentations devraient permettre des évaluations conjointes des véhicules et de l'infrastructure, y compris par l'expérimentation d'équipements de la route encore non-homologués. Les expérimentations devraient permettre de préfigurer l'élaboration d'un référentiel de d'adéquation des infrastructures, y compris de leur signalisation, à la conduite autonome. Les expérimentations devraient permettre de définir des référentiels partagés définissant les amers de localisation, de tester l'adéquation des jeux de donnés cartographiques à ces référentiels, et d'expérimenter une plateforme d'intégration, de fusion et de redistribution en temps réel de données géographiques de sources multiples.
-
-
-
-
L'encadré ci-dessous présente les orientations préliminaires des acteurs de la NFI en vue d'un programme national collaboratif d'expérimentations concourant à la validation des systèmes automatisés, et faisant écho aux attentes ci-dessus.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
51
Encadré : programme national expérimentation pilotes validation Eléments préliminaires L'objectif général est de construire un socle de connaissances, de méthodes et d'outils partagés entre les acteurs publics et privés, pour la démonstration de la sécurité et l'évaluation des systèmes de mobilité autonome. La construction de ce socle de connaissances s'appuiera sur des expérimentations et démonstrations à grande échelle sur des cas d'usage sélectionnés. Le plan Nouvelle France industrielle Véhicule Autonome lancé en 2013 a identifié les barrières au déploiement et a créé les conditions d'un déploiement concerté entre acteurs privés et Pouvoirs Publics, conditions également discutées aux niveaux européen et mondial. Le déploiement de la mobilité et des véhicules autonomes sûrs nécessite prioritairement : de concevoir des systèmes automatisés performants, fonctionnellement sûrs et moins faillibles que des conducteurs humains, d'en valider et d'en éprouver le fonctionnement avant de les commercialiser, d'apporter les éléments de preuve de la validation aux autorités en charge de réguler le déploiement par une évolution de la réglementation technique pour l'homologation des systèmes autonomes véhicules et infrastructures, et un élargissement des autorisations permettant la circulation des véhicules sur des lieux qualifiés et des cas d'usages diversifiés, d'établir les règles d'observation et de traitement des retours d'expérience pour évaluer les bénéfices de la mobilité autonome : gains en sécurité routière, bonne acceptabilité sociale, utilité, impacts sur l'emploi, etc.
L'enjeu est d'étudier et de tester la viabilité de la conduite et de la mobilité autonome en tant que moyen de trans port sûr et efficace. L'objectif général est de construire un socle de connaissances, de méthodes et d'outils partagés entre les acteurs publics et privés, pour la démonstration de la sécurité et l'évaluation des systèmes de mobilité autonome. La construction de ce socle de connaissances s'appuiera sur des expérimentations et démonstration à grande échelle sur des cas d'usage sélectionnés. Dans ce cadre, les objectifs pourraient être de : Construire le référentiel de situations critiques pour les cas d'usages sélectionnés, couvrant les transports individuels et les transports collectifs, Définir les méthodes et outils de validation et de démonstration de la sécurité, basés sur les situations critiques des cas d'usages, Préparer et mettre à disposition les infrastructures physiques et numériques nécessaires à la mise en oeuvre des expérimentations, en situation réelle d'exploitation, Identifier et formaliser les gains de performances, de sécurité et de services apportés par les infrastructures, dans une approche système intégrant véhicules et infrastructures, Evaluer l'acceptabilité, l'utilité, l'utilisabilité et l'usage la conduite et de la mobilité autonome par les usagers potentiels, ainsi que les bénéfices sociétaux attendus (sécurité routière, émissions, fluidité du trafic économie). Coordonner et mettre en oeuvre un plan d'expérimentation national basé sur des méthodologies partagées, permettant de caractériser les sites d'expérimentation, de collecter et capitaliser les données et résultats attendus, Construire et mettre en oeuvre un plan de sensibilisation et de communication pour accompagner le déploie ment de la conduite et de la mobilité autonome auprès des usagers et de l'ensemble des différentes parties prenantes.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
52
Les livrables pourraient être les suivants : Base commune de scénarios critiques et ses critères de définition, Environnement de simulation définissant des interfaces standardisées avec les différents moyens de simula tion spécifiques, Méthode et outils de validation de la sécurité et de l'acceptabilité, Référentiel de sûreté de fonctionnement, Référentiel de la sécurité routière Mise à niveau des infrastructures physiques et numériques sur les sites pilotes des expérimentations, Formulation des besoins d'évolution des infrastructures différenciés selon les scénarios de déploiement, Expérimentations grande échelle sur des sites pilotes Démonstration de sécurité dans le cadre des expérimentations, en incluant les modes dégradés, Retours d'Expérience partagés, Evaluations de l'acceptabilité y compris auprès des autres usagers de la route (hiérarchisation des freins à l'acceptation des véhicules autonomes, leviers pour une meilleure acceptation, conception des véhicules, critères de définition des parcours, recommandations...), Etudes d'impact (environnement, économique, social, sociétal ...).
4.3.2. Principaux enjeux de recherche scientifique Le véhicule autonome et connecté (VAC) est un sujet très complexe ; tout d'abord, parce qu'il ne définit pas une problématique unique mais qu'il englobe un ensemble de problèmes et soulève des questions de nature différente, tant technologique que scientifique. Ensuite, parce que les évolutions futures ne s'obtiendront pas nécessairement en raffinant les techniques et les procédés actuels mais parfois en inventant de nouveaux concepts et de nouveaux modèles tant pour la conception, la fabrication que l'exploitation du VAC. Ce caractère potentiellement disruptif implique la mobilisation d'acteurs issus de mondes différents : bien entendu, les départements R&D des entreprises, mais également les laboratoires du monde académique au sein des universités et des écoles ainsi que des organismes de recherche (exemple : CNRS, INRIA, IFSTTAR...). L'arrivée de nouveaux acteurs, qui n'appartiennent pas à l'industrie automobile « classique » mais sont issus du monde numérique, constitue un autre point saillant du développement du VAC. L'informatique et le traitement des données irriguent désormais toutes les problématiques, ce qui explique l'irruption de ces entreprises jusque-là extérieures à ce secteur. La recherche en sciences du numérique est donc, de facto, devenue incontournable pour espérer exister sur ce marché. La recherche travaille sur le sujet du VAC depuis des décennies ( exemple le projet Praxitèle de 1991 regroupait des laboratoires de recherche et des entreprises et a donné lieu à des expérimentations dans un contexte réel, en première mondiale). La France dispose d'atouts certains en termes de qualité et de diversité des recherches et des formations dans ce domaine : recherche pour imaginer et concevoir les nouveaux concepts et modèles, formation pour produire les futurs ingénieurs et doctorants qui sauront les transformer en produits et services innovants au sein des entreprises.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
53
Comme l'a clairement démontré le récent rapport de la commission villani sur l'intelligence artificielle, et les mesures associées annoncées par le président de la république le 29 mars 2018, notre pays doit être capable de mobiliser l'ensemble de ses forces s'il veut devenir un acteur reconnu au niveau international. Parmi les thématiques mentionnées dans le présent rapport villani, on peut mentionner, de façon non exhaustive, quelques axes qui nécessitent un travail important de recherche. · Les logiciels : ils sont au coeur du contrôle du vac ; s'assurer qu'ils répondent aux spécifications de leurs concepteurs et garantir leur fiabilité est donc crucial pour disposer de véhicules acceptés par les futurs utilisateurs. Ce sujet est un des points forts de la recherche en sciences du numérique française qui a su appliquer ses résultats par exemple pour valider les systèmes logiciels utilisés pour l'aviation et l'aérospatial. La cybersécurité : devenue une question centrale pour beaucoup d'entreprises, elle est évidemment cruciale pour le vac. Respecter des réglementations et des recommandations est nécessaire mais pas suffisant. Les auteurs d'actes malveillants innovent eux aussi en permanence et il est obligatoire de connaitre et d'analyser leurs attaques ainsi que de les anticiper afin de concevoir des parades pertinentes. C'est là encore une thématique particulièrement développée par les chercheurs de notre pays. Les interfaces humain-machine (ihm) : elles constituent le point d'entrée pour que les conducteurs puissent disposer des services proposés ; de leur qualité dépendra l'acceptation et le choix d'un véhicule. Il est donc nécessaire de travailler avec des scientifiques experts de ce domaine pour concevoir (notamment en impliquant les futurs utilisateurs dans des séances de co-design), prototyper et finalement évaluer (toujours avec un échantillon représentatif des usagers) et valider les futures ihm. Plus globalement, il faut également prendre en compte les facteurs humains dans l'expérience utilisateur (ux) et notamment les aspects liés au vieillissement de la population ; ces sujets sont étudiés par les chercheurs depuis longtemps, il convient donc d'exploiter leurs résultats.
·
·
·
La modélisation et la simulation : comme tout objet complexe, le vac pose des problèmes qu'un esprit humain seul ne peut plus résoudre ; il est donc indispensable de modéliser et de simuler numériquement cet objet pour le concevoir, le fabriquer, le vendre ou le réparer. Plus globalement, il est également nécessaire d'étudier ses interactions avec le réseau routier, les autres conducteurs et l'environnement en général. Ces étapes de modélisation et de simulation reposent sur des compétences en mathématiques appliquées (analyse numérique) et en informatique (programmation hpc) qui sont très importantes au sein du monde académique. La législation : le présent rapport mentionne à de nombreuses reprises l'importance d'adapter et de développer la législation concernant le vac. Pour atteindre cet objectif de façon satisfaisante, une collaboration entre juristes, ingénieurs et chercheurs s'impose de façon à suggérer des lois qui prennent en compte les évolutions prévues et/ou attendues. Ce type de rapprochement existe déjà dans d'autres domaines comme la législation sur le respect de la confidentialité des données à caractère personnel.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
54
Eléments de synthèse et d'orientation Le développement du VAC renvoie à des questions très complexes du point de vue de la recherche. Pour se donner une chance d'apporter des réponses concurrentielles face aux acteurs internationaux, qu'ils soient historiques ou émergents, il importe de mobiliser des ressources de recherche en associant des équipes de R&D des entreprises, et le terreau très actif au sein du monde académique (universités, écoles, organismes de recherche). Ces collaborations existent déjà en partie et ont donné d'excellents résultats, il convient de les renforcer et d'en créer de nouvelles pour relever les défis technologiques et scientifiques. Pour cela, il importe de mettre en oeuvre des incitations et des soutiens à des programmes de recherche associant ingénieurs et chercheurs, sans négliger le financement de recherches scientifiques plus amont, indispensables pour imaginer les nouveaux concepts et modèles sources des futures innovations.
4.3.3. Priorités de recherche à l'appui des politiques publiques De façons plus précise, les priorités pour la recherche (en amont des expérimentations et/ou pendant celles-ci) à l'appui des politiques publiques doivent prendre en compte les enjeux prioritaires liés à la sécurité routière et des systèmes. La recherche doit également affiner progressivement la connaissance des impacts, des comportements, et de l'acceptabilité, et d'explorer plus avant les enjeux pour la sécurité routière et l'exploitation des réseaux et services de transports, du lien entre automatisation, connectivité et cartographie numérique. Ces enjeux sont illustrés ci-dessous par des thématiques de recherche, selon deux axes : - Thématiques de recherche au titre des principaux enjeux de politique publique - Points d'attention particuliers au sein des priorités de recherche identifiées par les acteurs industriels Thématiques prioritaires de recherche pour les politiques publiques Impacts de la conduite automatisée sur les trafics et leur fluidité : méthodes de gestion de trafic intégrant le véhicule automatisé ; subordination des fonctions de délégation de conduite à la gestion de trafic ; gestion de trafic coopérative ou décentralisée aux véhicules automatisés ; potentialités de la ségrégation des trafics ; Facteurs humains de conduite et de sécurité routière : enjeux de reprise de contrôle et d'attention ; scenarii de reprise en main de la conduite en cas d'événement imprévu ; Impacts et exigences de la conduite automatisée sur les compétences ; évolutions à long terme des compétences de conduite ; besoins de formation initiale et de mise à niveau des conducteurs ; Impacts sur l'emploi et les métiers Impacts sur la demande de transports et les choix modaux, les valeurs de possession des véhicules et la mobilité partagée ; Impacts sur l'efficacité (y compris environnementale) de la chaîne logistique ; Impacts sur les émissions polluantes et de GES (y compris modifications de la demande) ;
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
55
-
Méthodes de test adaptées aux enjeux de la conduite automatisée, dont systèmes apprenants ; développement des outils de simulation ; évaluation du domaine de pertinence de la simulation pour la validation des systèmes Déterminants de l'acceptabilité individuelle et collective de l'automatisation ; Catégorisation des domaines d'emploi du véhicule automatisé : paramètres d'infrastructures et de trafic ; référentiels partagés de caractérisation des réseaux Utilisation des données du véhicule automatisé pour la connaissance de l'infrastructure et des trafics ; Modèles économiques, impacts sur différentes catégories d'acteurs (insiders / outsiders) ; Impacts sur les corps de contrôle.
Points d'attention particuliers au sein des priorités de recherche industrielles Perception : acquisition, fusion et interprétation des données Amélioration des performances des fonctions de perception (notamment sur les usagers vulnérables); Diagnostic et évaluation en temps réel des fonctions de perception ; Comportements dynamiques des autres véhicules Comportements malveillants d'autres conducteurs ou usagers de la route Apports de la connexion à l'automatisation : capacités comparées et exigences de qualité des différentes technologies (dont ITS-G5, 4G, LTE-V2X, 5G) Reconnaissance des limites du domaine d'emploi
Algorithmes de planification et de décision - Analyse de scénarios de trafic complexes ; - Représentation d'interprétations naturalistiques du code de la route - Méthodes de négociation et de décisions pour planifier une trajectoire prenant en compte les trajectoires des autres usagers de la route, les contraintes de risque, de consommation et de confort ; - Adapter la prise de décision en fonction des usages locaux, du contexte routier... Localisation - Cartographie dynamique garantissant l'autonomie de conduite hors connexion pour une mise en situation de sécurité ; - Amélioration de la précision par l'apport de la cartographie haute définition. Correspondance entre localisation par satellite et connaissance de l'environnement à priori. Interfaces homme-machine - Fournitures d'interfaces claires permettant de renforcer la confiance et l'efficacité perçue dans le système afin de garantir l'acceptabilité a priori et à l'usage ; - Fonctionnalités des interfaces homme-machine (IHM) (visuelles, sonores, haptiques) : exigences de reconnaissance simple, mémorisable et transférable - Monitoring de l'attention : capacités à apprécier les différents états de vigilance et la capacité à prendre la main ; - IHM adaptées à maintenir ou re-mobiliser l'attention et la vigilance du conducteur - Efficacité et qualité de la reprise en main grâce à des informations simples sur la situation de conduite.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
56
Sûreté de fonctionnement - Signalement des défaillances au conducteur - Capacité du conducteur à gérer les défaillances - Actes malveillants - Cybersécurité Systèmes apprenants machine learning - Nouvelles approches ou méthodes de validation / certification Supervision - Supervision et exploitation centralisée des flottes de navettes automatisées - Systèmes de supervision décentralisés Eléments de synthèse et d'orientation A l'appui des politiques publiques, les priorités de recherche concernent principalement les impacts sur la sécurité, la fluidité, la mobilité, l'environnement ; l'acceptabilité ; l'impact sur l'emploi et les compétences ; le facteur humain ; les interfaces homme-machine, les gestes de conduite et la gestion des transitions automatisation reprise en main ; les méthodes et outils de validation des systèmes ; le développement de la simulation ; la supervision.
4.3.4. Modalités de soutien à l'innovation La majorité des technologies nécessaires à la mise sur la route des premiers véhicules automatisés sont disponibles. Toutefois, ces technologies issues de laboratoires nécessitent une adaptation au monde de l'automobile. Elles doivent être rendues plus robustes et pour cela de nombreux essais sur route ouverte son nécessaire. Par ailleurs, le coût de ces technologies doit diminuer afin de se rapprocher des standards de coût de l'industrie automobile. Pour franchir les étapes vers une automatisation complète du véhicule, des efforts importants de R&D restent nécessaires avec un objectif fiabilité/coût propre à l'automobile, notamment dans les domaines des capteurs, des calculateurs et des logiciels, en particulier dans le développement des algorithmes de reconnaissance et de prise de décision.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
57
En France, plusieurs dispositifs d'accompagnement ont été mis en place par l'État en collaboration avec les industriels et les instituts de recherche : - Des outils « collectifs » avec par exemple l'ITE Vedecom et l'IRT SystemX qui reçoivent des financements issus du Programme d'Investissement d'Avenir (PIA) pour mener des programmes de recherche sur des technologies clés du véhicule autonome, ne relevant pas du domaine compétitif. Les industriels sont incités à participer à ces différents projets sur un modèle de co-investissement public/privé (1 euro venant de l'Etat étant obligatoirement compensé par 1 euro venant des industriels) ; - Des dispositifs de soutien, qui permettent de financer des projets de R&D portés par les acteurs privés, notamment le programme « véhicule du futur » du PIA opéré par l'ADEME ou dans le cadre de projets collaboratifs, le Fond Unique Interministériel (FUI) et les PSPC. Au total, ce soutien et la coordination des acteurs industriels au sein de la NFI s'est traduite par plus de 40 expérimentations ou démonstrations autorisées sur route ouverte en France pour tous types d'usages (autoroutier, urbain et péri-urbain), pour les véhicules particuliers et le transport public. Des expérimentations ont également été lancées sur site privé pour des systèmes de transport public ne nécessitant pas d'autorisation ; et plus de 200 millions d'euros de projets financés dans le cadre de différents appels à projets (FUI, action « Véhicule du futur » du PIA, PIAVE...). Les cahiers des charges de ces différents guichets de soutien sont établis en cohérence avec les différentes actions de l'état et notamment avec la feuille de route définis dans le cadre de la solution de la Nouvelle France Industrielle. Eléments de synthèse et d'orientation Il importe que les dispositifs de soutien à l'innovation, et notamment dans le cadre du programme des investissements d'avenir (PIA), permettent de mieux accompagner, par des appels à projets ciblés, le développement de l'automatisation, en aval de la R&D et en amont des expérimentations (typiquement : passage du TRL niveau 6 au TRL niveau 8). Ces appels à projets, ciblés sur la problématique de l'automatisation des transports, devraient être ouverts aux différents domaines d'usage (véhicule particulier, transports publics, fret et logistique) et intégrer les diverses dimensions de l'automatisation (technologies des véhicules, liens avec l'infrastructure, insertion dans le trafic et son exploitation, supervision, connectivité, cartographie et localisation, intégration dans les « bouquets » de service de mobilité). Ces appels à projets devraient permettre des projets collaboratifs entre les acteurs concernés (industriels de l'automobile, des télécommunications et des services multimedia, transporteurs, gestionnaires d'infrastructures, autorités organisatrices de transports, chargeurs et logisticiens).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
58
4.4. Aspects numériques et données
4.4.1. Cyber-sécurité Situation actuelle / bilan Les véhicules automobiles utilisent toujours plus de systèmes informatiques pour contrôler et commander les fonctions « premières » comme la motorisation, le freinage ou le changement de direction, ainsi que pour fournir de nouveaux services « secondaires » comme la navigation, l'assistance ou « l'infodivertissement ». Cette numérisation inéluctable permet trois évolutions majeures du secteur de l'automobile : une motorisation plus respectueuse de l'environnement, une automatisation partielle ou totale des fonctions de conduite et l'apport de nouveaux services. Tous les nouveaux véhicules seront connectés en 2018, a minima du fait de l'adoption obligatoire du dispositif eCall (appel d'urgence). Mais ces connexions seront très prochainement plurielles avec de nombreuses parties prenantes (constructeurs, équipementiers, centres de service (assureurs, assistance...), gestionnaire d'infrastructure, puissance publique...), créant ainsi des écosystèmes numériques complexes et difficiles à maîtriser. Cela multiplie les possibilités d'attaques informatiques qui pourront impacter directement la sûreté de fonctionnement du véhicule. La conception technique des véhicules automobiles est régie par de la réglementation et par des normes :
·
La réglementation technique découle des travaux du forum mondial de l'harmonisation des règlements concernant les véhicules, aussi appelé WP.29, sis à Genève et rattaché à l'Organisation des Nations-Unies. La directive 2007/46/CE établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur (homologation) dans l'Union européenne reprend en effet en grande partie les conclusions de ces travaux. Concernant la prise en compte de la cyber-sécurité, le WP.29 a initié des travaux en 2017. Les normes quant à elles, ne sont pas systématiquement reprises dans la réglementation. Elles constituent néanmoins l'état de l'art et sont généralement adoptées par l'ensemble des acteurs du domaine. La norme qui fait autorité en matière de sûreté de fonctionnement, l'ISO 26262, ne traite pas du sujet de la cyber-sécurité (malveillance). Aussi une nouvelle norme relative à la cyber-sécurité des véhicules à moteur est en cours d'élaboration, l'ISO 21434.
·
Par ailleurs, le cadre réglementaire relatif à la sécurisation des systèmes d'information des opérateurs d'importance vitale3ou des futurs opérateurs de services essentiels 4, ne répond que partiellement aux besoins de sécurisation des activités de transport. En effet ces deux initiatives réglementaires concernent essentiellement les infrastructures critiques et font généralement fi des systèmes embarqués sur les véhicules.
3 4
Article 22 de la Loi de programmation militaire 2014-2019 Directive 2016/1148 sur la sécurité des réseaux et des systèmes d'information
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
59
À ce jour, il n'existe donc pas d'exigence de nature à réduire le risque liés à la cyber-sécurité notamment dans le processus de réception communautaire par type des véhicules (aussi appelée homologation). Notons toutefois que, pour la première fois, le cadre réglementaire national relatif aux expérimentations sur la voie publique de véhicules à délégation partielle ou totale de conduite introduit dans l'instruction des demandes d'autorisation un volet de « cyber-sécurité ».
Orientations possibles
La cyber-sécurité n'a pas pour finalité de freiner l'innovation et la numérisation croissante observée dans le secteur automobile. Cependant face à une menace plus aiguë il convient de respecter et de promouvoir des préceptes qui ont fait leurs preuves en la matière. On peut citer :
· ·
·
·
· ·
·
·
Développer une culture de gestion des risques basée sur des analyses de risques régulièrement mises à jour. Faire un audit de conformité et des tests d'intrusion avant toute mise en circulation d'un nouveau type de véhicule. Ceci pourrait constituer un nouveau chapitre dans le processus de réception communautaire par type (homologation) des véhicules. Intégrer la cyber-sécurité dans tout le cycle de développement des nouveaux produits. Adopter le principe de sécurisation dès la conception pour les logiciels comme pour les matériels (composants, dispositifs, véhicule). Ceci permettra à l'ensemble des parties prenantes de mieux sécuriser les architectures et les réseaux en s'appuyant notamment sur la défense en profondeur (isolation des fonctions critiques), le filtrage des flux, le chiffrement des flux... Imposer des objectifs de sécurité opérationnelle (supervision, détection et gestion des incidents) pour détecter et prévenir les attaques informatiques. Journaliser les événements informatiques en vue d'une analyse approfondie le cas échéant. Adopter une approche holistique en intégrant les infrastructures routières, de télécommunication et débarquées dans le champ d'analyse. Promouvoir, s'ils existent, des composants labellisés (certifiés ou qualifiés par l'ANSSI). Par exemple pour la « passerelle » ou pour les unités de commande électronique (Electronic Control Units ou ECU) des véhicules. Maitriser la sécurité numérique tout au long du cycle de vie du véhicule et de son écosystème, au travers notamment le maintien en condition de sécurité, via des mises à jour de sécurité des véhicules5. Imposer un mode dégradé/manuel en cas de problèmes liés à la cyber-sécurité, ou a minima l'analyse de son opportunité.
Lors des assises de la mobilité, le groupe de travail « Pour des mobilités plus sûres » a proposé la création d'un observatoire de la sûreté des transports dont l'une des fonctions viserait à étudier les questions de cyber-sécurité afférentes au véhicule autonome et connecté. Les questions de cyber-sécurité seraient abordées sous un angle stratégique incluant l'ensemble des acteurs et des représentants des utilisateurs. Ce groupe participerait ainsi au développement du véhicule autonome.
5
Attention toutefois, ces mises à jour multiplient les possibilités de compromission des systèmes et doivent donc être particulièrement maîtrisées.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
60
Éléments de synthèse et d'orientation Il n'y aura pas de confiance dans les nouveaux usages du véhicule automatisé et autonome sans la prise en compte de la cyber-sécurité. En outre la singularité du risque numérique ne doit pas conduire à le traiter de manière singulière. De ce fait, il est suggéré :
· · ·
par le biais du WP.29, de modifier la réglementation technique pour introduire des exigences de nature « cyber », intervenant dès la conception des nouveaux véhicules ; de faire converger les approches normatives relatives à la sûreté de fonctionnement avec celles relatives à la cyber-sécurité ; de peser sur la récente proposition de la Commission européenne relative à un schéma européen de certification en matière de cyber-sécurité qui permettra d'offrir un cadre d'évaluation du niveau de sécurité des produits et des systèmes. La France dispose déjà d'une expertise en la matière qui nécessite d'être adaptée aux systèmes complexes, comme un véhicule connecté ; de mettre en place, idéalement au niveau européen, une structure d'échange dédiée au secteur automobile sur l'état de la menace et les réponses à apporter aux cyber-attaques ; de développer la culture en matière de cyber-sécurité auprès de l'ensemble des acteurs des filières.
· ·
4.4.2. Protection des données personnelles Le développement des véhicules automatisés implique une amplification des capacités de communication, que cela soit avec les infrastructures, avec les autres véhicules ou avec les prestataires de services (maintenance, diagnostic, assurance personnalisée, guidage, etc.). Ces échanges d'informations de plus en plus importants posent de nouvelles questions. En effet, certaines données sont révélatrices de la façon de conduire des automobilistes, de leurs habitudes de vie (endroits fréquentés, horaires, musique écoutées, etc.) ou encore de potentielles infractions au code de la route. En France, la loi Informatique et Libertés est depuis 1978 la réglementation applicable à la protection des données à caractère personnel. En mai 2018, le Règlement général sur la protection des données (« RGPD ») entrera en application et offrira un cadre unifié de protection des données des personnes au sein de l'Union européenne. D'application directe, ce règlement renforce les droits des individus, introduit de nouveaux droits (droit à la portabilité, droits à l'effacement, etc.), responsabilise les acteurs traitant les données personnelles et accroît les pouvoirs de régulation des autorités de protections des données. La Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (« CNIL »), soucieuse de favoriser les écosystèmes d'innovation tout en assurant la protection des données personnelles des usagers de l'automobile, a élaboré en concertation avec les acteurs du secteur de la filière automobile, les entreprises innovantes du secteur des assurances et des télécoms, et les autorités publiques un « pack de conformité » dédié aux véhicules connectés. Ce pack propose des lignes directrices pour une utilisation responsable des données dans les
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
61
prochaines générations de voitures, conforme à la loi Informatique et Libertés et au RGPD. L'enjeu est d'intégrer la dimension « protection des données personnelles » dès la phase de conception des produits et d'assurer la transparence et le contrôle par les personnes de leurs données conditionnant la confiance des utilisateurs. Au niveau européen, le G29, le groupe des « CNIL » européennes, a été sollicité par la plateforme C-ITS pour contribuer aux travaux sur les aspects de protection des données à caractère personnel et sur le respect de la vie privée. Il convient de se poser collectivement la question de comment assurer le respect des normes de protection des données qui sont donc fixées au niveau européen. Éléments de synthèse et d'orientation Toutes les données qui peuvent être rattachées à une personne physique identifiée ou identifiable, notamment via le numéro de la plaque d'immatriculation ou le numéro de série du véhicule sont des données à caractère personnel protégées par la loi Informatique et Libertés et le Règlement général sur la protection des données (RGPD). Le pack de conformité « véhicules connectés » piloté par la CNIL vise à sensibiliser les acteurs économiques du secteur automobile sur les principes de transparence et de loyauté de la collecte, qui impliquent a minima une information des personnes concernées, voire le recueil de leur consentement. Une approche de protection des données dès la conception (« privacy by design ») doit être privilégiée. Les travaux relatifs à l'accès aux données du véhicule présentés ci-après intégreront dès l'amont les exigences du RGPD. L'approche du « privacy by design » pourra également se traduire utilement par la mise en place d'outils facilement paramétrables permettant à l'utilisateur d'exprimer de façon simple et claire ses choix en matière de maîtrise de ses données et des traitements qu'il autorisera à en faire.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
62
4.4.3. Enregistreur de données à bord Pour établir les différentes responsabilités dans le cas d'un sinistre de véhicule autonome, il sera nécessaire de pouvoir examiner la scène en détail. Notamment il faudra établir : - si le mode autonome était enclenché ; - s'il fonctionnait dans les domaines d'utilisation définis par le constructeur ; - si la faute est imputable à une réaction du véhicule automatisé ou liée à une faute d'un autre automobiliste ; - si le véhicule a bien respecté les prescriptions du code de la route ; - etc ... Afin de pouvoir récupérer ces différentes informations, la présence d'un enregistreur de données d'accidents (EDR) à bord du véhicule, dédié à cet effet, semble indispensable. Les obligations de présence à bord de ces équipements, la durée d'enregistrement et de conservation des données, ainsi que le type et le format qu'elles devront prendre, devront être définis de manière internationale dans les réglementations techniques d'homologation (CEEONU WP29). Dans un contexte plus général de sécurité routière, la France a déjà montré sa volonté de voir déployer les EDR dans tous les véhicules neufs. Ces systèmes n'ont nullement vocation à dresser l'historique des déplacements des conducteurs, mais seulement à mieux connaître les événements techniques précédant de quelques secondes un accident. Les études accidentologiques devraient gagner en précision, dès lors que la vitesse, les accélérations et/ou décélérations, ainsi que la trajectoire du véhicule dans les secondes précédant l'accident, peuvent être connues et analysées. La Commission européenne a fait réaliser une étude sur l'EDR en 2014. L'objectif de cette étude était d'aider la Commission à décider si l'installation d'EDR dans tous les véhicules ou certaines catégories de véhicules [poids lourds, les véhicules utilitaires légers, les autobus et les autocars, et les voitures particulières (à usage privé et commercial)] pourrait entraîner une amélioration de la sécurité routière ou d'autres conséquences possibles justifiant les coûts associés à l'adoption de mesures dans la législation européenne. L'enregistreur de données à bord dédié au véhicule autonome, que l'on désigne par le terme ADDR (autonomous driving data recorder) a vocation à enregistrer les données permettant de définir les actions du conducteur et du système de délégation de conduite au moment d'un accident. Une réglementation technique internationale au niveau de la CEE-ONU est en préparation pour rendre obligatoire et définir l'ADDR pour les systèmes de délégation de conduite niveau SAE3 et plus. La Commission envisage d'introduire une obligation d'un EDR pour les véhicules légers (voitures et camionnettes) dans son projet de révision du règlement général de sécurité des véhicules, prévu pour 2018. Un tel déploiement devrait par la même occasion traiter des problématiques liées à la conduite déléguée, pour laquelle il est essentiel de savoir si, à l'instant t, le véhicule était « conduit » par le système automatisé seul ou partiellement, donc en collaboration avec le conducteur, ou encore totalement pris en charge par le conducteur.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
63
Dans le cadre de la gestion d'un sinistre automobile impliquant un véhicule automatisé, les données générées par ces équipements peuvent également permettre de faciliter, après l'indemnisation des victimes, la recherche des responsabilités pour les recours subrogatoires nécessaires contre le(s) responsable(s) de l'accident. Il importera que les forces de l'ordre puissent disposer de systèmes d'information interopérables avec les futurs EDR afin d'accéder aux données à valeur judiciaire en cas d'accident.
Éléments de synthèse et d'orientation Dans un contexte général de sécurité routière, la France soutient le déploiement des enregistreurs de données d'accidents (EDR) dans tous les véhicules neufs, destinés uniquement à mieux connaître les événements techniques précédant de quelques secondes un accident. Le développement de l'automatisation renforce ce besoin. Dans ce contexte, la France soutien le principe de l'enregistrement des données de conduite autonome (ADDR) pour les systèmes de délégation de conduite de niveau SAE3 et plus. Les obligations de présence à bord de ces équipements, la durée d'enregistrement et de conservation des données, ainsi que le type et le format qu'elles devront prendre, devront être définis de manière internationale dans les réglementations techniques d'homologation (CEEONU WP29), ou à défaut par la Commission européenne. De plus, le déploiement des EDR étant dépendant d'une action au niveau de l'UE, la France s'emploie à agir auprès de la Commission européenne afin qu'elle fasse rapidement une proposition législative en la matière. La Loi d'orientation des mobilités fixera les règles d'accès aux données de ces équipements, dès lors qu'ils seront disponibles à bord, pour les besoins d'investigation et d'enquête des forces de l'ordre qui devront disposer des moyens adéquats et, le cas échéant, d'expertise assurantielle sur les accidents.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
64
4.4.4. Données produites par le véhicule automatisé Les nouveaux usages et les services produits à partir des données issues des véhicules voient leur potentiel démultiplié par l'apparition de la connectivité des véhicules. L'automatisation, avec ses fonctionnalités d'observation de l'environnement du véhicule, va encore augmenter ce potentiel. La richesse de ces données et la possibilité d'un recueil à distance et, dans certains cas, en temps quasi-réel, créent la possibilité de la conception d'une multitude de nouveaux services pour les usagers des transports (pouvant permettre des gains de sécurité et un renforcement des mesures de prévention, une amélioration de l'expérience du déplacement, une optimisation de l'organisation du déplacement ; ou une réduction des coûts) mais aussi au secteur automobile, aux gestionnaires routiers, à l'industrie routière, au secteur des assurances (développement des offres d'assurance comportementale de type « Pay as you drive ») et, audelà, à toutes les activités économiques liées aux usages de transports (tourisme, commerce, loisirs, etc....). Les enjeux liés aux conditions d'accès à ces données recouvrent plusieurs dimensions : - interopérabilité ou interfaces d'échanges ; - protection et conservation des données à caractère personnel ; - sécurisation des données ou cybersécurité ; - responsabilité de la production et du traitement des données ; - droits d'accès aux données et mise en oeuvre opérationnelle du droit à la portabilité des données personnelles prévu à l'article 20 du RGPD ; - enjeux économiques et concurrentiels - liens avec les politiques publiques, notamment de sécurité routière et de gestion des réseaux et des déplacements. Ces enjeux dépassent largement le contexte national et sont, au moins pour la dimension d'interopérabilité, de portée européenne. La directive 2010/40/EU fournit un premier cadre : - en définissant les règles d'accès aux données pour la fourniture de services d'information sur les actions prioritaires : information de sécurité routière en temps réel, information routière, information déplacement, information parking, eCall. - en identifiant comme domaine d'action européenne prioritaire le lien entre le véhicule et les infrastructures de transport pour l'élaboration et l'utilisation de spécifications et de normes. Concernant l'accès aux données véhicules, le rapport de janvier 2016 de la plateforme C-ITS (Platform for the Deployment of Cooperative Intelligent Transport Systems in the European Union) recommande d'adopter cinq principes : - Le consentement de l'usager avant de rendre l'accès et l'usage possibles des données de son véhicule à des fournisseurs de services ; - Une concurrence juste et non faussée entre tous les fournisseurs de service ; - Le respect des enjeux de vie privée de l'usager et la sécurité des données de son véhicule ; - Les services utilisant les données des véhicules ne doivent par remettre en cause la sécurité de fonctionnement du véhicule - Favoriser un accès standardisé pour favoriser l'interopérabilité entre les différentes applications
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
65
Les constructeurs automobiles européens réunis au sein de l'ACEA ont proposé en décembre 2016 des principes d'accès différenciés en fonction de quatre types de données : Sécurité routière : · accès aux données anonymisées sur une base réciproque entre autorités publiques et constructeurs · accès contractuel (B2B) pour les acteurs privés Services multi-fournisseurs (ex : information parking, reconnaissance de la signalisation) · accès contractuel (B2B) entre acteurs Services personnalisés au conducteur (ex : « pay as you drive ») · accès aux données personnelles, dans le cadre d'un service identifié pour lequel le conducteur a spécifiquement donné son accord Données commerciales et de suivi des composants des véhicules · pas d'accès par des tiers
-
Au niveau européen, les questions d'interopérabilité et de sécurité devraient être abordées dans un règlement délégué de la Directive 2010/40 sur les ITS. Compte-tenu du cadre européen existant, il apparaît important de clarifier maintenant les principes sur deux autres volets majeurs de la problématique : - enjeux économiques et concurrentiels - appui aux politiques publiques S'agissant de l'appui aux politiques publiques, on peut illustrer l'apport des données du véhicule de la façon suivante : certaines données fournissent de l'information sur des événements inopinés ou imprévus affectant la sécurité routière (incidents, accidents, conditions météorologiques exceptionnelles). Il est difficile de collecter ces données via d'autres sources ; les informations qui en sont issues sont classiquement considérées comme relevant d'une mission d'intérêt général (de sécurité) sans coût pour l'usager ; certaines données participent à la connaissance du trafic, et peuvent venir en complément ou en substitution de données produites par les gestionnaires routiers (débit, vitesse) pour la gestion du trafic : sur cet aspect, se mêlent des services marchands (information routière privée) et non marchands (gestion de trafic, information routière publique) ; l'information routière recèle elle-même des enjeux de politique publique dans la mesure où les comportements qui en sont issus peuvent affecter les politiques de gestion de trafic, de sécurité ou de mobilité (exemple des re-routages sous-optimaux ou dangereux) ; certaines données fournissent de l'information sur la consistance (géométrie, équipements...) et l'état du patrimoine des réseaux d'infrastructures, utilisables ensuite d'une part par les gestionnaires pour la gestion de leur patrimoine, d'autre part pour améliorer les performances des véhicules en matière de localisation et perception de son environnement ; cet axe ou groupe de données s'apparente, par certains aspects, à la production d'une base cartographique approfondie et détaillée, qui, en termes économiques, peut se rapprocher d'un bien public.
-
-
Les Assises de la Mobilité ont exprimé des attentes fortes en matière d'accès aux données produites par le véhicule automatisé et connecté. Ces attentes sont prises en compte dans le cadre de la préparation de la Loi d'orientation des mobilités.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
66
Ainsi, les données des véhicules ainsi que des dispositifs de navigation embarqués, représentent de forts enjeux pour les personnes en charge de la gestion du trafic routier, de l'entretien et de l'exploitation des infrastructures routières, de la préservation de la sécurité routière. Il convient d'assurer un accès aux données des véhicules aux personnes chargées d'une mission de service public, dans l'exercice de ces missions, dans le respect des dispositions du Règlement général sur la protection des données, et en limitant strictement les données et les utilisations concernées aux seules données qui sont nécessaires à la gestion du trafic routier, à l'entretien et l'exploitation des infrastructures routières, à la préservation de la sécurité routière. Par ailleurs, les données des véhicules et des services de navigation embarqués sont potentiellement source de création de services et de valeur ajoutée, et ce d'autant plus qu'elles peuvent être intégrées à un cadre plus large de données de mobilité (autres modes) ou fusionnées avec des données hors mobilité. A ce stade, les domaines dans lesquels des attentes d'accès semblent s'être cristallisées sont la réparation automobile ; l'assurance et l'expertise automobile ; les services s'appuyant sur la gestion de flottes ; les services d'information et de billetique multimodales intégrés dans le concept de « mobility as a service », notamment dans les zones où le véhicule routier reste un support essentiel de la mobilité et permet de développer les usages partagés et le rabattement vers les transports massifiés. Une étude et une concertation nationales ont été lancées en France en 2017 pour proposer différentes options pour la définition des droits et modalités d'accès aux différents types de données, en tenant compte du fonctionnement des marchés concernés, du cadre général du droit de la concurrence et de la protection des données Il conviendra d'adopter une approche équilibrée, qui permette aux acteurs produisant ces données, de les valoriser et d'en améliorer en continu la qualité, et la possibilité pour des acteurs tiers, de créer de nouveaux services, le tout dans le respect des dispositions du RGPD. L'approche française qui sera issue de la Loi d'orientation des Mobilités doit être articulée avec les travaux européens, et notamment la stratégie européenne sur la conduite automatisée et connectée prévue pour mai 2018. En particulier, au niveau européen, une task-force publicprivé a été mise en place en mai 2017, afin d'étudier les architectures définissant le rôle des différents acteurs dans la production, qualification, et transmission des données liées à la sécurité routière, à la gestion des incidents, d'entretien des infrastructures et de gestion de trafic.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
67
Eléments de synthèse et d'orientation Les conditions d'accès aux données du véhicule constituent un élément clé du développement du véhicule autonome et connecté et des services qui peuvent s'y attacher. Ces conditions d'accès, et d'échange avec les données de l'infrastructure, sont déterminantes pour les autorités et gestionnaires routiers pour améliorer la gestion des réseaux routiers et de la sécurité routière. Les aspects d'interopérabilité et d'interfaces, de sécurité, et de protection de la vie personnelle étant abordés dans des cadres spécifiques, il importe maintenant de clarifier les conditions économiques et concurrentielles d'accès à ces données, en tenant compte des spécificités des différents acteurs de la chaîne de valeur, notamment des gestionnaires et autorités publiques. Ceci nécessite de définir des conditions-cadre d'accès, en distinguant les types de données ou de services d'information en fonction des besoins de politique publique des transports et de sécurité routière d'une part, des enjeux concurrentiels d'autre part, le tout dans le respect des dispositions en matière de protection des données individuelles. La Loi d'orientation des Mobilités fournira un cadre pour les échanges de données au sein de l'éco-système des utilisations de données liées au véhicule automatisé et connecté. La France s'attachera à ce que le cadre français soit cohérent avec les modalités organisationnelles et techniques d'échanges de données destinées à assurer l'interopérabilité et le respect des règles de concurrence au niveau européen.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
68
4.5. Liens avec l'infrastructure, connectivité, cartographie
4.5.1. Identification des domaines d'emploi sur les réseaux routiers La définition des domaines d'emploi des fonctionnalités automatisées constitue un socle pour les développements technologiques et serviciels, et pour construire une approche réglementaire adaptée à la diversité des cas d'usages. Les paramètres définissant les domaines d'emploi ne se résument pas à une configuration d'infrastructure, mais incluent également les conditions de trafic ou météorologiques. Sur le seul volet de la configuration de l'infrastructure, les capacités de fonctionner en mode automatisé sont, à infrastructure égale, très variables d'un modèle de véhicule à l'autre, car elles sont fonctions des types de capteurs et de leurs capacités, des algorithmes de reconstitution de lignes, de l'intelligence embarquée, des conditions de reprise en main par le conducteur. Par ailleurs, à véhicule donné, il est techniquement impossible pour un gestionnaire d'infrastructure routière de garantir, par exemple, un niveau minimum de contraste de la signalisation horizontale atteint à tout instant. L'usure de la signalisation horizontale est fonction du nombre de passages de roues et des conditions météorologiques et le moment où il passera sous un certain seuil est donc imprévisible. Ainsi, même avec des moyens financiers infinis, il est impossible de garantir que le véhicule automatisés ne trouvera jamais une signalisation horizontale effacée sur plusieurs dizaines de mètres suite à un événement impromptu (accident, intempéries, ...). Il est donc clair qu'il doit revenir au véhicule de décider, sur la base de ses systèmes d'observation, de positionnement, de connectivité et de supervision, s'il est dans son domaine d'emploi, et qu'il soit capable de reconnaître la nécessité d'une reprise en main par le conducteur, ou la supervision déportée. Il n'appartient donc pas aux autorités publiques, et plus particulièrement aux gestionnaires routiers, de proposer des niveaux de service ni une labellisation de certaines portions d'infrastructure « ouvertes à la conduite automatisée ». Pour autant, il pourrait être d'un intérêt commun à l'ensemble des acteurs, de développer un travail partagé de caractérisation des réseaux, en fonction de leur géométrie, des attributs nominaux de signalisation, des conditions de trafic et d'accidentologie, permettant notamment aux différents cas d'usage de définir leurs domaines d'emploi sur une base commune, et, audelà, de fonder un référentiel commun d'analyse de sécurité pour certains cas d'usage. Par ailleurs, l'infrastructure elle-même peut fournir des informations qui facilitent cette décision par le véhicule, grâce à des informations transmises par la connectivité du véhicule, en s'appuyant le cas échéant sur des amers visibles par les capteurs du véhicule et précisément localisés. Plus particulièrement, pour les cas d'usage sur autoroute, les travaux de la NFI ont identifié des configurations-clés où un tel apport serait particulièrement intéressant : il en est ainsi par exemple des configurations de chantier et de l'approche des péages.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
69
Eléments de synthèse et d'orientation Il doit revenir au véhicule de reconnaître, avec l'appui de ses capteurs, et éventuellement de sa connectivité, de sa cartographie et de sa supervision, s'il est dans son domaine d'emploi et d'adapter en conséquence les modes de délégation de conduite. L'infrastructure peut fournir des informations qui facilitent cette décision par le véhicule, en combinant de façon efficace la signalisation, la connectivité et la cartographie numérique. Les travaux entre gestionnaires routiers, constructeurs automobiles, industries de la route, pour identifier ces informations, leurs modalités de transmission et éventuellement la localisation d'amers connectés (cf. ci-dessous sur la cartographie), en commençant par les configurations de chantier sur autoroute et d'approche des péages. Deux objectifs seront identifiés comme prioritaires : la détection du chantier ou du péage pour la reprise en main, le franchissement automatisé de ces zones (correspondant au passage au niveau 4 SAE). Le lien sera fait avec les travaux sur la connectivité et le projet SCOOP@F et ses suites (cf ci-dessous sur le véhicule connecté). Cette approche sera ensuite étendue à d'autres cas d'usage, à commencer par les transports publics, en intégrant la notion de site propre ou semi-protégé.
4.5.2. Liens avec les enjeux du véhicule connecté L'apport de la connectivité à l'automatisation fait l'objet d'un intérêt croissant de la part des acteurs industriels et des autorités publiques, même si les deux domaines ont pour l'instant évolué de façon relativement indépendante. Les véhicules automatisés se repèrent en croisant une perception de l'environnement (signalisation horizontale, dispositifs de retenue, signalisation verticale) par capteurs natifs (caméras, radars, lidars) et un repérage satellitaire lié à une cartographie embarquée. Les capteurs actuellement ont une portée maximale de 100 à 200 m, ce qui apparaît insuffisant pour l'anticipation de certaines situations ou certains événements critiques affectant la sécurité routière (accidents, personnes, encombres sur les voies, évolutions du nombre de voies, échangeurs complexes, zones de travaux, péages, ralentissements brisques ou bouchons, conditions météorologiques et d'adhérence). Pour élargir et affiner l'horizon de perception du véhicule, deux compléments aux capteurs présentent un intérêt potentiel majeur : - la connectivité du véhicule (à l'infrastructure, aux autres véhicules, ou au réseau cellulaire) ; - une cartographie de haute définition.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
70
Ces compléments permettent d'enrichir le modèle de perception et d'asseoir dans un premier temps, des procédures d'alerte du conducteur et des demandes de reprises en main. Ultérieurement, il est envisageable, selon la qualité (latence, fiabilité, précision) de ces données, que l'asservissement du véhicule s'appuie aussi sur ces compléments, permettant alors d'aborder ces situations ou événements critiques en mode automatisé. L'apport potentiel de la cartographie et les orientations pour l'action publique sont présentées ci-après. S'agissant de la connectivité, l'apport attendu se situe schématiquement : - dans l'enrichissement des fonctions de perception autonome du véhicule (sensing) par la connexion (recieving), - dans l'enrichissement des données remontées par le véhicule par des données de perception (sensing) Cet enrichissement des fonctions de perception, et leur sécurisation, peu s'appliquer à divers cas d'usage, en milieu urbain, comme en milieu interurbain ou rural. Il est donc susceptible de bénéficier à l'ensemble des territoires. La France a adopté en 2014 une action publique volontariste de développement des systèmes coopératifs (C-ITS) véhicules-infrastructures et véhicules-véhicules, dans l'objectif d'améliorer la sécurité routière, en particulier la sécurité des agents d'exploitation, et la gestion des trafics. Ces systèmes présentent de nombreux bénéfices en tant que tels, indépendamment d'un couplage éventuel avec des fonctionnalités automatisées : améliorer la sécurité routière et la sécurité des agents d'exploitation : permettre aux véhicules de "parler" entre eux et à l'infrastructure en échangeant des données de base sur la sécurité est susceptible d'éviter de nombreux accidents. De plus, grâce aux informations I2V sur les chantiers, les interventions suite à accident, la viabilité hivernale, etc. Ces données, mises directement à la disposition du conducteur dans son véhicule, devraient permettre une réduction du nombre d'accidents parmi les agents d'exploitation. rendre la gestion de trafic plus efficace et contribuer aux réductions d'émissions : grâce à la collecte de données par les véhicules et/ou l'infrastructure, les C-ITS permettent une meilleure gestion et une meilleure efficacité de l'information routière en temps réel. Ceci contribuera par ricochet à la réduction des émissions du système de transport. De plus, avec l'apparition de la possibilité de croiser des informations relatives aux parcs relais (emplacement, disponibilité de places de stationnement...) avec des informations relatives aux systèmes de transport (comme les emplacements des gares ferroviaires, des arrêts de bus ou des pôles multimodaux), ils permettront la création de nouveaux services multimodaux pour une mobilité durable (comme le covoiturage dynamique). optimiser les coûts de gestion de l'infrastructure, préparer le véhicule du futur et développer de nouveaux services : le déploiement interopérable et intégré de C-ITS participe d'une logique d'optimisation des coûts relatifs à la sécurité routière et la gestion des infrastructures existantes, tout en offrant de nouveaux services dont les modèles économiques doivent encore être testés, s'en trouvera améliorée. Le développement des C-ITS représente un potentiel significatif de création d'emploi en Europe.
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
71
L'approche française consiste principalement, au travers de la conception et du déploiement de cas d'usage, à : - identifier les priorités du point de vue de la sécurité routière et de la gestion des infrastructures, pour l'ensemble des cas d'usage et des domaines et territoires d'emploi ; - identifier les besoins d'interopérabilité et de sécurité des échanges d'information ; - spécifier, développer et tester, puis déployer des systèmes répondant à ces besoins ; - évaluer les impacts de ces cas d'usage en termes de comportements des usagers et, partant, de sécurité routière et de gestion des trafics ; - étudier les potentielles répercussions pour la sûreté des transports. L'approche se fonde sur des déploiements pilotes, en grandeur réelle. Cette approche française tient compte des priorités de cas d'usage identifiés au niveau européen, dans les actions prioritaires et règlements délégués de la directive sur les transports intelligents (Directive 2010/40) d'une part, dans la stratégie de développement des systèmes coopératifs du 30 novembre 2016 d'autre part (COM (2016) 266). L'approche française élargit progressivement les cas d'usage, en abordant les cas d'usage urbains, les cas d'usage de fret, et le lien entre connexion et automatisation (cf. ci-après).
Encadré : Projets de déploiement pilote des systèmes coopératifs (C-ITS) en France dans le contexte européen SCOOP@F est un projet de déploiement pilote de systèmes de transport intelligents coopératifs, c'est-à-dire basés sur l'échange d'informations entre véhicules et entre le véhicule et la route. Les véhicules sont équipés de capteurs qui détectent des événements (route glissante, choc, freinage brusque...) et d'unités embarquées qui transmettent l'information aux véhicules en amont ainsi qu'au gestionnaire via des unités bord de route. Le gestionnaire peut aussi transmettre des informations (chantiers...) aux unités embarquées dans les véhicules. Le projet rassemble de nombreux partenaires publics et privés autour du MTES qui en assure la coordination : des collectivités locales, des gestionnaires routiers, les constructeurs automobiles PSA et Renault, des universités et des centres de recherche, un opérateur télécom, un fournisseur de services de sécurité... SCOOP@F vise à déployer 3000 véhicules sur 2000 km de routes répartis en cinq sites : Ile-de-France, A4, Isère, rocade de Bordeaux et Bretagne. Ces sites sont caractérisés par une grande diversité de types de routes (autoroutes, axes structurants de métropole, routes bidirectionnelles interurbaines et locales). La technologie employée est de type wifi (ITS G5). Les véhicules Renault et PSA sont aujourd'hui en vente et l'évaluation des impacts (sécurité routière, congestion, socio-économie, sureté, etc.) va démarrer. Le projet travaille également sur l'expérimentation d'une technologie hybride ITS G5/cellulaire. Deux projets fils ont été lancés en 2016 : C-Roads France et InterCor. Ils se basent sur cette technologie hybride. C-Roads France vise à étendre la couverture géographique de SCOOP@F dans le Nord-Est, le Centre-Est, en Bretagne et à Bordeaux, et à développer de nouveaux services dans deux catégories : - services urbains et à l'interface urbain/interurbain : information sur le passage des feux au vert, information sur les transports en commun, etc. - services au trafic de transit : information sur les services disponibles sur les aires, itinéraires conseillés, etc. InterCor rassemble 4 pays : France, Belgique, Pays-Bas, Royaume-Uni. La partie française consiste en une extension de SCOOP@F dans les Hauts-de-France. Il développera également de nouveaux services dans la logistique : information sur les places de stationnement poids lourds, optimisation de l'accès aux ports, etc.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
72
Eléments de synthèse et d'orientation Il importe de mieux apprécier l'apport possible de la connectivité à l'automatisation dans une approche technologiquement neutre entre technologies de communication (ITS-G5 ; 4G ; LTE-V2X ; 5G). Les travaux engagés en 2017 sur le lien automatisation-connexion seront poursuivis, notamment dans la perspective de l'évaluation des apports possibles vis-à-vis de la 5G et, le cas échéant, des exigences associées : - en s'appuyant sur des cas d'usage concrets et sur les situations critiques, i.e. celles dans lesquelles la perception du véhicule par ses capteurs peut présenter des limites du point de vue de la sécurité routière ; - en analysant les apports de la connectivité et/ou de la cartographie de précision dans une approche fonctionnelle et performantielle (besoins de latence, précision, fiabilité, couverture, rafraîchissement, mise à jour) ; - en faisant le lien avec les spécifications des services prioritaires développés dans le cadre des projets de systèmes coopératifs (C-ITS) (projets SCOOP@F, InterCor et C-Roads France). - en traitant prioritairement les cas d'usage de conduite sur autoroute, puis des transports urbains, puis de la gestion des intersections. Les gestionnaires routiers seront invités à réfléchir à un plan de déploiement de la connectivité, basée sur les technologies matures à ce jour. Pour alimenter cette réflexion, un document méthodologique présentant notamment les cas d'usage, leurs domaines d'emploi possible et le type de connectivité concerné, sera mis à disposition, et publié. En parallèle, une étude sera lancée afin d'évaluer la pertinence socio-économique de la couverture de différentes sections-types du réseau routier en différentes technologies de connectivité, sur la base de cas d'usage de véhicule connecté et de véhicule automatisé+connecté. Cette étude inclura, outre les technologies matures, la perspective de la 5G, en tenant compte de son niveau de qualité prévisible (latence, précision, fiabilité, couverture). La technologie LTE-V2X sera abordée dans la mesure de la disponibilité d'informations précises sur les cas d'usage couverts et la qualité de la connexion.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
73
4.5.3. Développement de la cartographie numérique de précision Le véhicule automatisé possède schématiquement trois sources d'information lui permettant à la fois de se repérer, d'interagir voire de communiquer avec son environnement : Les capteurs : multiples dans leur nombre et leurs caractéristiques, ils sont les yeux du véhicule, lui permettant de détecter son environnement. Les capteurs sont aujourd'hui la principale source d'information des véhicules automatisés. Les technologies des capteurs connaissent en revanche des limites de portée (de l'ordre de la centaine de mètres), mais également de détection (par exemple détection d'un panneau caché derrière un convoi de poids lourds). La connectivité : qu'elle soit entre véhicules (V2V) ou entre infrastructure et véhicule (I2V), elle permet au véhicule d'interagir avec l'environnement dans une logique d'information et d'optimisation de la conduite. La cartographie : intégrée dans le véhicule et/ou téléchargée à l'avancement, la cartographie peut intervenir comme support majeur de la conduite automatisée en complément des capteurs et de la connectivité. Elle semble pouvoir se décliner en deux types, pouvant être assimilés à deux couches : o une Cartographie Spatiale Haute Définition pouvant contenir des informations précises sur la géométrie de la route (longitudinales et latérales), sur la signalisation routière, ou encore des amers visuels géolocalisés permettant au véhicule de se localiser avec précision ; o une Cartographie Dynamique Temporelle pouvant contenir des informations de trafic, de conditions météorologiques, la signalisation d'accidents ou de travaux, la présence de piétons ou d'animaux. La conception des dispositifs de guidage pour les véhicules autonomes, est confrontée aux limites technologiques des capteurs embarqués, en termes de champ de vision et de précision. La cartographie de haute définition présente ainsi, en lien avec la connectivité du véhicule, des potentialités importantes pour compléter, élargir et affiner l'horizon de perception du véhicule. La cartographie numérique de précision présente, en lien avec la connectivité du véhicule, des potentialités importantes pour élargir et affiner l'horizon de perception du véhicule. Ceci peut être utile à plusieurs titres : - compléter les informations collectées par les capteurs, voire prendre le relais de ceux-ci dans certains cas : dysfonctionnement des capteurs (masque lié aux intempéries par exemple), capteurs en dehors de leur domaine de pertinence (marquage effacé par exemple), ou encore redondance de la cartographie par rapport aux capteurs en vue d'améliorer la sûreté de fonctionnement, - permettre une meilleure anticipation par les véhicules de certains événements. Cependant, la cartographie numérique de précision est confrontée à des limites technologiques (précision, temps de latence, sécurité, etc), ou sécuritaires (propriété, origine
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
74
et certification des données, intrusions, etc). Les constructeurs sont face à une balance capteurs/cartographie dans la conception des véhicules : de nombreux capteurs peuvent permettre de se passer d'une cartographie de précision, et vice versa. La pertinence de la cartographie pour le premier point (compléter les informations collectées par les capteurs) est très liée aux choix du constructeur pour le système d'automatisation. Pour le deuxième point (permettre une meilleure anticipation du véhicule), la cartographie permet d'offrir un environnement de perception dépassant les possibilités des capteurs. En fonction du rôle de la cartographie pour le véhicule automatisé (vis-à-vis des capteurs et d'autres sources d'informations via la connectivité), du niveau d'automatisation souhaité, du degré d'anticipation des événements souhaité, les exigences vis-à-vis de cette cartographie peuvent différer. Ainsi, différents niveaux de cartographie peuvent correspondre à différents besoins du véhicule automatisé, notamment : - la cartographie pour le choix d'itinéraire du véhicule (qui existe depuis longtemps), - le positionnement longitudinal / latéral fin (décimétrique) par rapport à l'infrastructure, - le positionnement et la vitesse par rapport aux autres véhicules, la connaissance de la signalisation routière, des conditions météorologiques, des événements inopinés, etc. Au fur et à mesure du développement du véhicule autonome et de l'extension de son domaine d'emploi, la cartographie numérique de précision tend à prendre une importance croissante. Il importe de mieux apprécier cet apport possible par : - l'identification des situations ou événements les plus critiques rencontrés par le véhicule autonome dans lesquels la connectivité et la cartographie de précision pourraient améliorer la perception élargie du véhicule ; - les besoins fonctionnels de cartographie afférents (y compris sa précision et son rythme de mise à jour). La redondance qui sera probablement nécessaire entre les positionnements par les capteurs, par la connectivité et par le géo-positionnement, va rendre nécessaire de faire correspondre ces différentes « couches » de localisation, ce qui renvoie à la notion d'amer ou point de repère prioritaire, assurant que la localisation sur une « couche » correspond bien à celle d'une autre « couche ». Ces amers vont constituer l'armature de la cartographie de précision, leur localisation présente des enjeux majeurs pour les gestionnaires routiers, et leur éventuel équipement en connectivité présente des enjeux majeurs pour ces gestionnaires et l'industrie. La définition d'une doctrine partagée d'implantation, de localisation, de cartographie et d'équipement en connectivité de certains amers, présente un enjeu majeur pour l'ensemble des acteurs.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
75
Eléments de synthèse et d'orientation La cartographie de précision dynamique, en lien avec la connectivité du véhicule, pourrait utilement améliorer les capacités de perception du véhicule autonome, en particulier pour aborder des situations critiques de sécurité routière. Les priorités de cartographie du réseau routier correspondantes doivent être établies, en fonction de ces enjeux de sécurité routière. En particulier, les amers ou points de repère prioritaires pour améliorer la reconstitution de l'environnement du véhicule, et son positionnement relatif doivent également être définis, de façon partagée entre acteurs. Ces travaux seront conduits dans le cadre d'un partenariat avec l'Institut géographique national (IGN), en s'appuyant si besoin sur une expérimentation de cartographie de précision sur un site de dimension réduite, a priori fermé, permettant d'évaluer les apports en termes de reconstitution de l'environnement du véhicule. Il importe également, si l'utilisation automatique de l'information cartographique de précision se développe pour les véhicules autonomes, de concevoir une forme de validation de cette information, qui pourrait prendre plusieurs formes, éventuellement complémentaires : - Définir une architecture portant sur les rôles attendus des différents acteurs dans la production, la qualification et la validation de l'information cartographique de précision, sur les modalités de contractualisation afférents, notamment en termes d'actualité, de qualité et de responsabilité. - Mettre en place une « autorité de réception » en charge d'homologuer la couche cartographique des fonctionnalités embarquées. - Mettre en place un entrepôt commun et indépendant des données dynamiques qui décrivent les infrastructures routières, permettant leur rediffusion en continu à tous les systèmes ITS via les moyens de connectivité. L'opportunité et les modalités de mise en place une ou l'autre des actions ci-dessus seront évaluées avec l'IGN.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
76
4.6. Aspects économiques et sociétaux, gouvernance, cadres de travail
4.6.1. Enjeux industriels et d'emploi Face à une révolution technologique majeure qui apparaît inéluctable, l'action publique doit anticiper et créer les conditions pour que cette évolution soit créatrice d'emploi, notamment en préparant les conversions nécessaires. L'impact sur l'emploi concerne potentiellement un très grand nombre d'activités, pas uniquement dans les transports, qui comporte 700 000 emplois mais également dans l'industrie (500 000 emplois au sein de la filière automobile par exemple). Le développement de l'automatisation va probablement conduire à des transferts de qualifications et d'emploi, avec des opportunités de créer de nouveaux emplois et de nouvelles compétences, probablement plus qualifiées, à l'interface des transports et du numérique. Les enjeux en terme d'emplois et de compétence sont majeurs et ont été identifiés comme tels par le Gouvernement et la plupart des acteurs, en France comme dans d'autres pays. D'ores et déjà, des réflexions ont été engagées par les opérateurs de transports publics, réunis au sein de la Nouvelle France industrielle, sur les nouvelles compétences liées à la supervision et à l'accompagnement dans les navettes automatisées. Au-delà, le gouvernement (Conseil National de l'Industrie du 20 novembre) a d'ores et déjà demandé à la filière industrielle d'identifier les impacts sur les emplois et les compétences. Sur la base d'un premier rapport, attendu au premier semestre 2018, il s'agira de travailler avec le système éducatif et de formation pour s'assurer qu'il anticipe bien ces évolutions. Eléments de synthèse et d'orientation Les enjeux en termes d'emplois apparaissent majeurs et doivent être anticipés, en visant notamment à identifier les nouveaux emplois et les nouvelles compétences. Les acteurs économiques sont invités à être partie prenante de cet effort d'anticipation. Sur la base du rapport de la filière sur les perspectives d'emploi et de compétence, un travail sera conduit avec les ministères en charge de l'éducation et de la formation professionnelle, afin de s'assurer que le système éducatif et de formation professionnelle, intègre bien les besoins d'évolution des métiers et des compétences.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
77
4.6.2. Enjeux d'acceptabilité L'acceptabilité des systèmes d'automatisation constitue une condition sine qua non de leur développement. L'acceptabilité mérite une attention particulière et ne doit pas être considérée comme acquise. Les études et enquêtes disponibles mettent en lumière diverses formes de résistance au changement que provoque l'apparition du véhicule automatisé, notamment le sentiment d'être un bon conducteur, en opposition aux gains de sécurité que pourrait apporter l'autonomisation des véhicules ou la crainte de n'avoir aucun contrôle sur le véhicule lors de déplacements. On observe dores et déjà un défaut de familiarisation avec les technologies de délégation de conduite voire une absence complète de connaissance, ce qui laisse présager de difficultés à s'approprier des systèmes encore plus complexes, surtout lorsque les transitions entre phases de conduite et la phase de délégation seront nombreuses et variées. Certains points de vue considèrent prioritaire l'appropriation de ces systèmes par les usagers majoritairement jeunes et habitués aux nouvelles technologies, pour rendre le véhicule automatisé visible et permettre ainsi sa diffusion dans la société par effet de réseau de notoriété. L'acceptabilité doit concerner la société de façon beaucoup plus large. La population vieillissante de nos sociétés européennes notamment, pourra espérer retrouver parfois une mobilité individuelle perdue, mais ceci suppose d'évaluer attentivement les besoins de cette population en informations précises sur les fonctions automatisées équipant leurs véhicules et leur bonne adaptation à la conduite de véhicules partiellement automatisés. Les impacts des systèmes automatisés sur la mobilité, l'environnement, l'organisation des territoires et, surtout, l'emploi, constituent des déterminants majeurs de l'acceptabilité. Les questions de cybersécurité et de protection de la vie privée sont naturellement majeures en termes d'acceptabilité. Les conditions de cohabitation entre véhicules automatisés et non automatisés seront également déterminantes pour l'acceptabilité (cf. ci-dessous les questions induites en termes d'identification des véhicules).
Encadré : identification des véhicules autonomes, enjeux de sécurité et d'acceptabilité L'identification des véhicules automatisés, i.e. le fait de les rendre visibles ou repérables par les autres usagers ou acteurs de la route, soulève des enjeux en matière de gestion des interactions - civilités ou incivilités entre usagers, et partant d'efficacité de la gestion des trafics. Cette identification soulève également des questions de protection desdits véhicules contre la malveillance. Cette identification emporte des enjeux importants en termes de contrôle par les forces de l'ordre (ex : faut-il signaler un véhicule équipé de fonctions automatisées de conduite de manière visible de l'extérieur, dès lors que ces fonctions sont activées ?). Cela peut sembler nécessaire, si le conducteur a été autorisé à effectuer d'autres tâches que la conduite pendant le temps où le système « conduit » et jusqu'à ce qu'il lui demande de reprendre la main, ou encore que lui-même souhaite conduire. En effet, l'enjeu pour les forces de l'ordre est d'être à même de distinguer le conducteur qui « peut » faire autre chose de celui qui ne le « peut » pas, donc de ne pas verbaliser le premier, mais le deuxième. Reste que l'identification ouvre des questions d'acceptabilité.
Enfin, il importe que les processus d'élaboration de la réglementation (notamment la réglementation des règles de conduite et de sécurité des véhicules), soient transparents et associent les usagers, dans une forme appropriée, tant au niveau local, national qu'international. Le Conseil National de la Sécurité Routière doit être encouragé, à ce titre, à être force de proposition auprès du gouvernement.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
78
Eléments de synthèse et d'orientation L'acceptabilité du véhicule automatisé conditionne son développement, et ne doit pas être considérée comme acquise. L'ensemble des acteurs publics et privés doivent y contribuer, par les différents leviers dont ils disposent, notamment la réglementation, les expérimentations, la recherche et les études sur les comportements, ainsi que de la communication. Un séminaire de réflexion et d'échanges sur l'acceptabilité sera mis en place pour, dans un premier temps, identifier les enjeux prioritaires et les freins individuels et sociaux à l'acceptabilité du véhicule automatisé, et les éventuelles questions éthiques sous-jacentes ; elle pourra ensuite fournir des recommandations pour traiter ces enjeux et ces freins. Pour assurer un suivi et une veille sur les perceptions, les attitudes et les comportements : il est nécessaire de mettre en place un dispositif national d'étude et de suivi sous forme d'enquêtes régulières auprès des conducteurs et usagers de la route, confrontés ou non aux premiers développements de la conduite autonome ; le champ de ces études et enquêtes doit principalement couvrir : les perceptions et comportements d'interactions avec les autres usagers de la route ; la perception du temps passé en conduite autonome ; le choix de véhicule et de mode (y compris partagé). Cet « observatoire » des perceptions et de l'acceptabilité, aurait avantage à être mutualisé à l'échelle internationale. 4.6.3. Gouvernance et cadres de travail Pour conduire les travaux relatifs aux divers aspects du développement du véhicule automatisé, un certain nombre d'instances de travail spécialisées ont été mises en place au niveau national. Au niveau des administrations, les travaux sont organisés autour de quatre instances : Le « groupe des 4DGs », qui réunit les directions concernées au premier chef par les enjeux du véhicule automatisé : direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, direction générale de l'énergie et du climat, direction générale des entreprises, délégation à la sécurité routière. Ce groupe s'appuie sur un groupe des « sherpas ». Il assure une coordination stratégique d'ensemble, définit des priorités communes et identifie si besoin des sujets d'arbitrage. Ce groupe a piloté la rédaction du présent document. Le groupe « inter-administrations » définit et met en oeuvre le cadre réglementaire relatif aux expérimentations. Il instruit les demandes d'autorisation et suit les expérimentations. La « task-force cas d'usage » assure la préparation technique des positions prises dans les instances internationales, principalement sur l'évolution de la réglementation technique des véhicules. Elle pilote des travaux d'évaluation de la criticité des cas d'usage, du point de vue de la sécurité routière, de la gestion des infrastructures et de la mobilité. Elle a développé pour cela, avec l'appui de l'IFSTTAR, une première méthodologie permettant de prioriser les enjeux de sécurité routière des interactions entre le véhicule automatisé, l'infrastructure, le trafic et les conditions de circulation, afin de définir les points de vigilance pour l'évolution de la réglementation technique, des tests et de l'homologation.
-
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
79
Au niveau industriel, les travaux s'organisent principalement au sein de la solution « mobilité écologique » de la Nouvelle France Industrielle (NFI), notamment au sein de son programme « Véhicule Autonome », qui a mis en place trois groupes de travail spécialisées respectivement sur le véhicule particulier, les systèmes de transport public automatisés, le véhicule industriel. Ces instances définissent les priorités de cas d'usage en fonction de la maturité des technologies et de la demande des marchés, et identifient les « verrous » techniques et réglementaires à traiter pour permettre le développement de ces cas d'usage, ainsi que les priorités technologiques et de R&D. Le mandat du CNI de novembre 2017 va appeler la mise en place d'un groupe dédié aux questions d'emploi et de compétences. Les industriels et les administrations coopèrent étroitement, à trois niveaux principaux : · · · Le comité de pilotage de la NFI dans lequel l'administration est représentée par la DGE, qui fait le lien global avec les travaux des industriels. Certains sous-groupes de la NFI, notamment ceux traitant des liens avec les infrastructures de transports. La « task-force » élargie, qui permet l'échange entre acteurs industriels et publics sur l'analyse de sécurité des cas d'usage, et les positions à tenir en matière d'évolution de la réglementation et de l'homologation des véhicules.
En complément des structures existantes, il importe que les collectivités locales, dont les politiques publiques seront largement affectées par le développement du véhicule automatisé, soient associées aux réflexions et à l'élaboration des politiques publiques correspondantes. Plus particulièrement, il importe de structurer des échanges autour de deux axes : · le partage d'expériences entre gestionnaires routiers sur les enjeux de la conduite autonome et connectée ; il s'agit de construire une doctrine sur les besoins et apports de la conduite autonome et connectée vis-à-vis de l'infrastructure ; le partage d'expériences entre autorités organisatrices de la mobilité sur le développement des services de transports publics automatisés ; il s'agit ici de doter la maîtrise d'ouvrage, l'achat et la délégation de service publics, des compétences, sur les enjeux liés aux usages, à l'interopérabilité, à l'intégration dans les politiques de mobilité et les politiques urbaines ; ce cadre de travail, dont le pilotage reste à préciser, devra s'articuler avec les travaux sur le cadre réglementaire et de validation de sécurité des systèmes de transports publics automatisés mentionnés ci-dessus.
·
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
80
Eléments de synthèse et d'orientation Les instances et les travaux engagés depuis 2014 permettent de renforcer la coordination de l'action publique et la coopération avec les acteurs industriels, conditions essentielles pour le développement de l'automatisation et l'élaboration de solides positions à l'international. Le besoin de renforcer encore cette coordination a été souligné, compte-tenu de l'accélération du déploiement des technologies d'automatisation et du calendrier européen et international. Pour ce faire, il est proposé : De mettre en place une structure d'échange entre gestionnaires routiers, en vue de partager les enjeux de la conduite autonome et connectée ; De mettre en place une plateforme de partage d'expériences et de doctrine pour l'exercice de la maîtrise d'ouvrage, de la délégation de service et de l'achat public de services de transports publics automatisés, entre autorités organisatrices de la mobilité ; D'accélérer les travaux relatifs à l'automatisation du fret et de la logistique, en relançant le groupe NFI qui y est consacrée et en associant plus étroitement les logisticiens et les chargeurs ; De poursuivre les travaux pré-réglementaires par cas d'usage, en priorité en vue d'établir le cadre réglementaire des transports publics automatisés, en intensifiant les échanges entre les acteurs industriels (NFI) et les services de l'Etat sur les thématiques de la réglementation, de l'homologation, des tests et moyens d'essai et de la simulation, et en lien avec le programme national d'expérimentation validation préparé dans le cadre de la NFI.
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
81
5. Récapitulatif des actions
Cadre législatif et réglementaire Dans l'objectif de permettre, d'ici 2020 à 2022, la circulation en France de voitures particulières de niveau SAE3 et SAE4, de véhicules de transport public de personnes hautement automatisés, et de véhicules de transport de marchandises automatisés, l'adaptation du code de la route et les règles de responsabilité correspondantes, sera préparée dans le cadre d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur, en lien avec les Ministères de la Justice, des Transports et de l'Industrie, en concertation avec tous les acteurs concernés, et qui rendra ses propositions au plus tard fin 2018 (échéance visée : T 4-2018). Les besoins d'évolution de la formation à la conduite feront l'objet de propositions d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur (échéance visée : T42018).
Dans le cadre de la Loi d'orientation des mobilités, sera proposé le principe d'une
information des conducteurs sur les principales fonctionnalités d'automatisation, leurs domaines d'emplois et leurs limites, lors de l'acquisition d'un véhicule neuf (échéance visée : T4- 2018).
La France poursuivra la promotion, au sein de la CEE-ONU, de la nouvelle approche
de réglementation technique des véhicules qu'elle a présentée en 2017, permettant de passer d'une approche par module à une approche « systèmes » (« réglementation horizontale ») (échéance visée : 2018 et au-delà).
Dans l'attente de l'élaboration d'une telle réglementation « horizontale », la France
demandera que les exigences sur les fonctions d'automatisation, le suivi de l'attention du conducteur et les manoeuvres d'urgence et de sécurité, garantissent la sécurité routière tout en étant proportionnées au degré d'automatisation ; La France demandera à ce que des exigences soient développées dans la réglementation technique internationale, afin que les véhicules dont les systèmes de conduite sont totalement délégués au véhicule, soient dotés de la capacité de s'identifier pour les forces de l'ordre, lorsqu'ils sont en mode totalement autonome (échéance visée : 2018 et audelà).
Un cadre réglementaire national pour les transports publics automatisés sera mis en
place, incluant la réglementation et le cadre d'homologation au niveau national des véhicules de type « navette » et un référentiel d'évaluation de la sécurité des parcours (échéance visée : T4- 2018). Pour alimenter et orienter les travaux nationaux, européens et de la CEE-ONU sur la réglementation technique et l'homologation, le gouvernement s'appuiera sur les travaux menés avec les partenaires de la NFI et en particulier dans le cadre du programme national expérimentation-validation attendu pour 2018 ; en particulier, des documents méthodologiques publics seront tirés de ces travaux et mis à disposition des acteurs.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
82 Une mission d'étude et de concertation sur les enjeux techniques et économiques de
l'interopérabilité et de la coordination de la supervision flottes de véhicules automatisés, sera lancée (échéance visée : T4- 2018).
La France poursuivra sa forte implication dans la rédaction des documents visant à
une compréhension commune et partagée du contenu existant des Conventions internationales (CEE-ONU) relatives à la circulation routière ou des documents préparant les évolutions et les modifications nécessaires de ces mêmes Conventions internationales (échéance visée : T4- 2018).
La France examinera, dans un cadre européen, l'opportunité d'un régime transitoire de
portée européenne permettant de définir le cadre de réglementation technique et d'homologation des véhicules automatisés à plus court terme qu'au sein de la CEEONU (échéance visée : T3-2018).
Au niveau européen, la France poursuivra sa forte implication dans l'élaboration d'une
stratégie commue, en particulier sur les questions d'interopérabilité technique et fonctionnelle des systèmes, et sur le financement de la recherche, de l'innovation et des premières étapes d'expérimentation et de pré-déploiement (échéance visée : 2018 et au-delà). Expérimentations, innovation, recherche La stratégie nationale d'expérimentation se traduira par :
des orientations nationales, sur les cas d'usages et les impacts prioritaires du point
de vue des politiques publiques (échéance visée : T1-2018) ;
un cadre de financement, en conjuguant au mieux les divers leviers du programme
d'investissement d'avenir (échéance visée : T2-2018) ;
un engagement de la filière à mettre en commun certaines « briques » des
expérimentations, tout en respectant les initiatives industrielles et territoriales qui favorisent l'innovation (échéance visée : T2-2018). Sous l'animation de l'État, des règles de mise en commun des données, outils et méthodes d'évaluation et de validation des systèmes, seront définies, afin de favoriser les économies d'échelle et les synergies entre acteurs pour l'accumulation de la connaissance, dans le respect des contraintes industrielles et commerciales de ces acteurs.
Au niveau législatif, un cadre de responsabilité sera proposé pour permettre de
conduire des expérimentations dérogeant aux obligations du conducteur prévues par le code de la route (échéance visée : T2-2018).
Les priorités de recherche à l'appui des politiques publiques, concernent
principalement les impacts sur la sécurité, la fluidité, la mobilité, l'environnement, l'emploi et les compétences ; l'acceptabilité ; le facteur humain, les interfaces hommemachine, les gestes de conduite et la gestion des transitions ; les méthodes et outils de validation des systèmes ; le développement de la simulation ; la supervision (échéance visée : T1-2018).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
83
Données En termes de protection des données personnelles, le cadre d'échanges des données du véhicule autonome et connecté devra être conforme aux dispositions du règlement général de la protection des données (RGPD).
En termes de cyber-sécurité, une structure d'échange dédiée au secteur automobile et
des mobilités sur l'état de la menace et les réponses à apporter aux cyber-attaques sera mise en place (échéance visée : T4-2018).
La Loi d'orientation des Mobilités cadrera les conditions d'accès aux données du véhi-
cule, respectivement pour les missions de service public (sécurité routière, gestion de trafic, exploitation du patrimoine d'infrastructures), d'investigation et d'enquêtes sur les accidents, et pour les activités économiques dont le développement dépend de certaines données produites à bord des véhicules (échéance visée : T2-2018).
La France s'attachera à ce que le cadre français soit cohérent avec les modalités orga-
nisationnelles et techniques d'échanges de données, destinées à assurer l'interopérabilité au niveau européen (2018 et au-delà).
Liens avec l'infrastructure, connectivité, cartographie numérique
Le principe est affirmé selon lequel le véhicule automatisé devra reconnaître s'il est
dans son domaine d'emploi et adapter en conséquence les modes de délégation de conduite ; ceci n'exclue pas que l'infrastructure, et sa connectivité, ainsi que la cartographie de précision, apportent des informations utiles pour compléter la vision des capteurs. Les gestionnaires routiers seront invités à réfléchir à un plan de déploiement de la connectivité, basée sur les technologies matures à ce jour.
Une étude sera lancée afin d'évaluer la pertinence de la couverture de différentes sec-
tions-types du réseau routier en différentes technologies de connectivité (incluant la 5G), pour les besoins du cas d'usage de véhicule connecté et du véhicule automatisé et connecté (échéance visée : T4 - 2018).
Les priorités de cartographie du réseau routier pour le véhicule autonome seront éta-
blies, en particulier les amers prioritaires pour améliorer la reconstitution de l'environnement du véhicule, et son positionnement, y compris par la connectivité, en lien avec l'IGN (échéance visée : T3-2018).
Les modalités de validation de l'information cartographique pour les besoins du véhi-
cule autonome seront étudiées, en lien avec l'IGN (échéance visée : T3-2018).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
84
Aspects économiques et sociétaux, gouvernance, cadres de travail
L'Etat et les acteurs économiques s'attacheront à anticiper l'évolution des métiers et
de compétences ; sur la base du rapport de la filière, un travail sera conduit avec les ministères en charge de l'éducation et de la formation professionnelle, afin de s'assurer que le système éducatif et de formation professionnelle, intègre bien les besoins anticipés (échéance visée : T4-2018).
Un séminaire de réflexion et d'échanges sur l'acceptabilité sera mis en place pour,
dans un premier temps, identifier les questions et les enjeux, y compris éthiques (échéance visée : 2018 et au-delà).
Les travaux de l'atelier prospectif, mis en place en mai 2017, seront poursuivis pour
construire collectivement des scenarii et alimenter les politiques publiques de mobilité et d'aménagement des territoires (échéance visée : 2018 et au-delà).
Un observatoire des perceptions et de l'acceptabilité sera mis en place, sous forme
d'enquêtes régulières auprès des conducteurs et usagers de la route (échéance visée : 2018 et au-delà).
Des instances de concertation entre gestionnaires routiers d'une part, entre autorités
organisatrices de la mobilité d'autre part, sur les enjeux du véhicule autonome et connecté seront mises en place (échéance visée : T3-2018) ; ces instances aborderont notamment les questions de connectivité et de cartographie du réseau. Une plateforme de partage d'expériences et de doctrine pour l'exercice de la maîtrise d'ouvrage, de la délégation de service et de l'achat public de services de transports publics automatisés, entre autorités organisatrices de la mobilité sera mise en place (échéance visée : T4-2018).
Les travaux relatifs aux cas d'usage d'automatisation du fret et de la logistique, seront
réactivés, en associant plus étroitement les logisticiens et les chargeurs (échéance visée : T2-2018).
Les travaux pré-réglementaires par cas d'usage seront poursuivis, en priorité en vue
d'établir le cadre réglementaire des transports publics automatisés, en intensifiant les échanges avec les acteurs industriels (NFI) (échéance visée : 2018 et au-delà).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
85
ANNEXES
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
86
Annexe : Synthèse des retours des consultations
1ère consultation (octobre novembre 2017) Principes généraux, gouvernance, pilotage · Intégrer les véhicules autonomes à un système global de mobilité, encourager les usages partagés · Renforcer le rôle des autorités organisatrices de mobilité dans la mise en oeuvre des offres utilisant des véhicules autonomes · Confier à l'IDDRIM l'instance de concertation avec l'État, les représentants des collectivités locales et les constructeurs · Tirer le programme NFI « Véhicule Industriel Autonome » (VIA) par les opérateurs de transport · Développer le mix passagers marchandises pour optimiser les systèmes urbains Evolution des règles de conduite / responsabilités / formation · Expliciter (plutôt qu'interpréter) les conventions CEE-ONU · Modifier le code de la route pour permettre la circulation des premières fonctions de conduite autonome sur voies à chaussées séparées dans un premier temps dès 2020 · Modifier la notion de conducteur personne physique (art. 1 de la convention de Vienne), et de contrôle, afin de permettre la supervision à distance · Clarifier la responsabilité pendant les phases de transition et de manoeuvres d'urgence · Re-travailler précisément les notions relatives au conducteur / chauffeur : rôles et responsabilités, place physique, formation (initiale, continue), permis associé Réglementation technique / validation / homologation · Développer une approche réglementaire technique à court terme pour les systèmes à automatisation totale, en parallèle de celle traitant le cas des fonctions d'automatisation partielle · Développer un approche matricielle de la réglementation permettant de combiner les cas d'usage, les typologies d'environnements / de voirie, les conditions de circulation, les risques associés · Mettre en place rapidement le cadre réglementaire systèmes de transports publics (élargi > navette 9-16 places) ; ne pas attendre la CEE-ONU ; développer, dès 2018, une réglementation technique pour l'ensemble des véhicules (véhicules particuliers utilisés à des fins de transport public, navettes de moyenne capacité, autobus) en priorisant les nouveaux usages ; · Développer une approche « système » qui intègre dans l'homologation les véhicules mais aussi, les infrastructures physiques et numériques, la supervision, etc ; · Créer un dispositif de standardisation des modalités de reprise en main
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
87
· · ·
Viser l'harmonisation (européenne) des principes fonctionnels de l'interface hommemachine Privilégier une réglementation européenne en matière d'interopérabilité Développer la simulation et la validation numériques
Expérimentations · Construire un plan d'expérimentation sur la base des scénarios d'usages prioritaires · Mettre en place une dotation budgétaire pluriannuelle spécifique à l'expérimentation, notamment dans le cadre du PIA ou de dispositifs spécifiques, pour soutenir les efforts de R&D de la filière automobile ; · Mettre en place, dès 2018, un plan de financement des expérimentations incluant les mises à niveau des infrastructures ; · Prévoir un véritable pouvoir d'initiative des autorités organisatrices de transport pour les expérimentations · Mettre en place une caractérisation des sites d'expérimentations sur routes ouvertes différenciée par cas d'usage et labelliser les expérimentations · Intégrer les équipements et la signalisation comme objets d'expérimentations · Définir et tester dans le cadre des expérimentations, les principes de gouvernance de la gestion de la donnée et le système de stockage et de traitement associé · Développer une méthodologie et des critères d'évaluation des expérimentations · Définir le « bien commun » des enseignements d'expérimentations à partager · Mettre en oeuvre des indicateurs de performance communs pour tirer les enseignements · Accélérer le processus de délivrance des autorisations Infrastructures et connectivité · Intégrer l'impact des véhicules autonomes dès la conception des infrastructures · Piloter le déploiement des infrastructures permettant la conduite autonome, · Développer une démarche de hiérarchisation des réseaux à partir de l'usage, y compris induite par le véhicule automatisé, et dans une logique d'itinéraires prioritaires ; définir des niveaux de service · Caractériser, améliorer et harmoniser la signalisation · Evaluer les apports possibles de la 5G
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
88
2ème consultation (décembre 2017 janvier 2018) Cas d'usages, domaines d'emploi, régulation et homologation · Inclure les drones volants dans la stratégie ; · Réduire la transition consacrée aux niveaux 2 et 3 ; · Donner aux véhicules traditionnels la capacité à devenir robotisés/autonomes ; · Fluidifier l'homologation de véhicules composés de systèmes issus de fournisseurs différents ; · Développer une offre industrielle d'autopilot non centrée uniquement sur l'automobile ; · Permettre le développement de la dronification de véhicules pour favoriser l'émergence de nouveaux services comme le valet parking (prise de contrôle temporaire du véhicule) ; · Ouvrir l'accès aux infrastructures (parking, aire de stationnement...), dont le monopole est réservé aux entreprises gestionnaires, à des prestataires de services qui offrent la possibilité de prise de commande à distance des véhicules sur ces infrastructures. Expérimentations, évaluation et méthodes de validation · Définir une méthode pour qualifier / évaluer des expérimentations et déploiements des véhicules autonomes, s'appuyant sur la capitalisation des expériences ; · Intégrer des évaluations conjointes des véhicules et de l'infrastructure (place des cartes haute-définition pour le guidage, évaluation intégrée caméra-marquage, travaux et repositionnement des marquages et autres équipements de la route) ; · Caractériser la robustesse du guidage en conditions météorologiques dégradées ; · Traiter l'explicabilité du comportement des véhicules autonomes et connectés ; · Évaluer le processus énergétique du « berceau à la tombe ». · Autoriser des expérimentations d'équipements de la route encore non-homologués ; · Établir le niveau de performance des infrastructures de signalisation grâce à des expérimentations permettant ainsi un état des lieux du patrimoine routier ; · Tester : · pour le véhicule particulier : les comportements de conducteurs pour ce qui concerne la reprise de contrôle, et la dynamique d'apprentissage des fonctionnalités ; · pour les transports publics ou partagés : l'adéquation des services aux besoins ; · pour le fret : les comportements des conducteurs professionnels et les éventuelles évolutions possibles des métiers des chauffeurs ; · Tester la conformité des jeux de donnés cartographiques aux standards communs ; · Expérimenter une plateforme d'intégration, de fusion et de redistribution en temps réel de données géographiques de sources multiples.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
89
Localisation, signalisation, amers · Approfondir la notion d'amer de positionnement et le rôle de la signalisation ; · Identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision des amers fixes sur les parcours des navettes ; · Étudier les solutions alternatives à la perte de signal GPS au regard de la verticalité de certaines zones urbaines denses. · Identifier un acteur chargé de : l'entretien et de la diffusion de données géographiques relatives aux infrastructures routières ; l'expertise qui lie les technologies de géolocalisation et la sécurité routière ; la création d'un entrepôt de données dynamiques (décrivant les infrastructures routières) commun et indépendant. Connectivité de l'infrastructure · Accélérer les déploiements des dispositifs ITS G5 ; · Viser la connectivité performante et totale des infrastructures routières. Règles de conduite, responsabilité · Légiférer sur les conséquences pénales d'une action délibérée visant à altérer ou tromper les capteurs ; · Modifier le code de la route pour permettre la circulation des premières fonctions de conduite en peletonnage (platooning) par conducteur humain ; · Statuer sur les données réellement nécessaires pour établir les différentes responsabilités. Formation, compétences · Favoriser, y compris fiscalement, la formation par simulateur ; · Préparer la reconversion de l'éducation routière ; · Aborder la problématique sociale liée au devenir des conducteurs. Organisation des acteurs, gouvernance · Mettre en place une équipe pour co-construire dans une démarche collective les briques nécessaires et non compétitives (les communs) : certification, normes et standards, moyens de validation de l'autopilot, ... ; · Monter un projet industriel éventuellement finançable en partie par le PIA ; · Favoriser le développement de nouveaux écosystèmes locaux et sécurisés qui interagiront par consensus local, en dehors de structures de supervision ; · Imposer de l'open data sur les véhicules et les infrastructures afin de permettre l'émergence de ces écosystèmes locaux ; · Encourager la création d'instituts et de filières spécialisées pour les besoins à venir.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
90
Annexe : Expérimentations : besoins d'évaluation des cas d'usage et de leur sécurité
1. Eléments de contexte L'expérimentation constitue une étape incontournable pour passer de la recherchedéveloppement à la mise en oeuvre des systèmes de conduite automatisée, pour s'assurer qu'ils répondent aux exigences de sécurité routière, et pour compléter les travaux de recherche ou d'étude sur les impacts, notamment sur la mobilité et l'environnement, les perceptions l'acceptabilité. La France s'est dotée d'un cadre d'expérimentation ouvert à tous les cas d'usage (véhicules particuliers, transports collectifs, fret et logistique). En application de l'article 37 de la loi n° 2015-992 du 7 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, l'ordonnance n° 2016-1057 du 3 août 2016 et ses textes d'application, fixent les conditions des autorisations, destinées à assurer la sécurité du déroulement de l'expérimentation. La quarantaine d'expérimentations réalisées sur voie publique en France, a permis aux constructeurs d'acquérir de nombreuses données de conduite et d'améliorer les algorithmes de conduite automatisée. Ainsi, les véhicules expérimentés à l'heure actuelle sont capables de gérer beaucoup plus de situations et d'évènements que ceux expérimentés il y a deux ans. Les démonstrations de navettes autonomes ont permis de présenter ce concept au public. Les années 2017 2018 marquent le passage à l'expérimentation de la conduite déléguée, soit sans surveillance de conducteur expert, soit avec une supervision à distance, pour les voitures particulières (tests avec un panel de clients, véhicule partagé autonome) et pour les navettes urbaines (transport de personnes sans conducteur). Ces nouveaux types d'expérimentations permettent d'enrichir la connaissance sur les interfaces véhicule-conducteur, les comportements de conduite et les processus d'apprentissage, et plus largement, les comportements de mobilité et l'acceptabilité. Les enseignements de ces nouveaux types d'expérimentations sont donc particulièrement précieux tant pour la réglementation technique que pour les questions d'information-formation des conducteurs. Les années 2017-2018 marquent aussi l'intérêt croissant pour les apports de la connectivité du véhicule à certaines fonctions d'automatisations dans certaines situations. Les travaux en cours au niveau national, européen et international (CEE-ONU) mettent en lumière l'importance de développer des analyses de risques, partagées entre autorités publiques (autorités routières et de sécurité routière), prenant en compte la diversité des cas d'usage, et notamment des environnements de conduite, ainsi que les interactions et interfaces entre le conducteur et le système d'automatisation. Ces travaux font également apparaître l'importance croissante de la connectivité comme apport possible aux fonctions d'automatisation.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
91
2. Objectifs généraux et transverses aux cas d'usage Il importe que les expérimentations : - participent à la démarche d'accumulation de connaissances ; - proposent un objet précis à évaluer en termes technologiques, fonctionnels, d'impact, de comportement ou d'acceptabilité ; - alimentent les travaux techniques sur les méthodes d'analyses de risques des cas d'usage et de leurs situations critiques dont défaillances des systèmes, tolérance aux fautes, capacité d'autodiagnostic... ; - fournissent des enseignements sur les besoins d'information / sensibilisation / formation des conducteurs. Il importe que les expérimentations permettent d'évaluer les comportements des conducteurs dans des niveaux de délégation élevés (3 puis 4), et notamment les reprises de contrôle des véhicules et/ou le fonctionnement des manoeuvres de risque minimal, dans des conditions de circulation à la fois diverses, mais de criticité faible du point de vue de la sécurité routière. Il importe d'évaluer les apports possibles de la connectivité à la sécurité des fonctions d'automatisation sur certaines situations critiques de cas d'usage, tant pour le véhicule particulier que pour les navettes et la logistique urbaine. Cette évaluation doit se faire en site fermé si la criticité des situations l'exige du point de vue de la sécurité routière. En termes de cartographie et de localisation, les expérimentations peuvent contribuer à identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision (à l'échelle décimétrique) des amers. Certaines expérimentations pourraient utilement évaluer les enjeux et les besoins de redondance entre le positionnement local par les capteurs du véhicule, et le positionnement satellite. En milieu urbain, les scenarii de relocalisation sur des amers locaux après pertes de signal GPS, pourraient utilement être testés. On rappelle enfin que les expérimentations devront satisfaire aux exigences de suivi et d'évaluation (cf. annexe), notamment en termes de comportement des conducteurs, d'interactions entre les véhicules et les autres usagers de la route, et de consommation énergétique. Évaluer la pertinence de la remontée, l'intégration, la fusion et la diffusion de ces informations et leur interopérabilité contrôlées dans un unique système de référence. En termes de signalisation, des réflexions peuvent être engagées pour des expérimentations dédiées aux équipements encore non homologués, notamment pour évaluer : - l'apport d'une connectivité locale via des équipements de signalisation, dynamiques ou statiques, actifs ou passifs, pour contribuer à la redondance, l'amélioration de la sécurité et la perception étendue notamment pour les usagers vulnérables ; - la signalisation verticale et horizontale utilisée comme amers de la route, parmi d'autres permettant à la carte dynamique de valider la position du véhicule.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
92
3. Cas d'usage, fonctionnalité et impacts a. Véhicule particulier Le développement des fonctions d'automatisation sur le véhicule particulier dérive principalement des stratégies des constructeurs dans un marché mondial fortement concurrentiel. Cette dynamique ne rend pas nécessaire que les autorités publiques expriment des priorités sur des cas d'usages précis, mais plutôt sur leurs impacts ou enjeux de sécurité routière et d'acceptabilité, qui sont détaillés ci-après. Les autorités publiques escomptent néanmoins, en termes de cas d'usage, et au vu des développements technologiques en cours, que les utilisations du véhicule particulier en dehors des voies à chaussées séparées, vont voir les expérimentations se multiplier, notamment aux accès ou réseaux d'approche des sections autoroutières, et en milieu urbain dense, dans ce dernier cas avec une logique de véhicule partagé. Concernant plus particulièrement les apports possibles de la connectivité aux fonctions d'automatisation, les cas d'usage de sécurité routière sont prioritaires pour évaluer les performances, domaines d'emplois et complémentarités entre technologies de connectivité (ITS-G5, LTE-V2X, 5G). En termes de cartographie et de localisation, les expérimentations peuvent contribuer à identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision (à l'échelle décimétrique) des amers fixes sur les infrastructures (par exemple, sur autoroutes : ouvrages d'art, barrières de péage, zones d'insertion / sortie. Certaines expérimentations pourraient utilement évaluer les enjeux et les besoins de redondance entre le positionnement local par les capteurs du véhicule sur les attributs de la chaussée, et le positionnement satellite. Les expérimentations du véhicule particulier automatisé devraient porter une attention particulière aux transitions (délégation et reprise de contrôle), aux fonctionnalités des interfaces homme-machine et au suivi de l'attention du conducteur ; en particulier en vue de l'élaboration de la réglementation technique de la CEE-ONU : évaluation des temps et des performances de reprise en main en fonction des alertes ou demandes du système en SAE 3 et 4 évaluation des stratégies et des performances des manoeuvres de risque minimale effectuées par le système en SAE 3 comparaison des comportements des conducteurs issus de différentes IHM en vue de dégager des possibles besoins de standardisation de certaines fonctions critiques de ces IHM
Les expérimentations doivent pouvoir contribuer à documenter l'attitude des autres conducteurs : - lors du déclenchement des manoeuvres automatisées - lors des manoeuvres avortées - lors des manoeuvres d'urgence.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
93
Les expérimentations du véhicule particulier pourraient également utilement contribuer à l'évaluation de la perception du temps passé en mode de conduite délégué, et, partant, aux choix de déplacement et de mode de transport. L'exemple de l'expérimentation « naturalistique » de Göteborg peut fournir une référence utile. En vue de mieux connaître les enjeux d'information et de formation, les expérimentations du véhicule particulier avec conducteurs non professionnels, devraient pouvoir (tout en conservant le minimum de formation préalable au déroulement en toute sécurité de l'expérimentation), permettre de documenter la dynamique d'apprentissage des conducteurs des fonctionnalités, domaines d'emploi et performances des fonctions d'automatisation (ex : dans les premières heures ou jours, puis dans les semaines ou mois de conduite suivants) et les interactions avec les autres usagers de la route. b. Transports publics ou partagés Le développement des services de transports publics ou partagés automatisés constitue une priorité du point de vue des autorités publiques. Il s'agit d'accélérer le passage à des déploiements en vraie grandeur, intégrés dans l'offre de transports public des autorités organisatrices. Au vu des développements observés à fin 2017 et des travaux du groupe « transports publics » de la Nouvelle France Industrielle, les attentes vis-à-vis des expérimentations sont principalement les suivantes : En milieu urbain dense, et sur des parcours principalement séparés des flux de circulation, il importe d'évaluer les enjeux critiques de sécurité routière sur parcours en partie protégés (événement critiques redoutés et réponses apportées) afin d'alimenter un référentiel d'analyse de sécurité des parcours ; ce référentiel, produit par les autorités publiques en concertation avec le groupe « transports publics » de la Nouvelle France Industrielle, est destiné à permettre à terme aux autorités organisatrices de déployer des services en s'appuyant sur des règles de l'art du point de vue de la sécurité. Ces expérimentations devront en particulier permettre d'évaluer : les enjeux de sécurité et les réponses à apporter pour la gestion des intersections, les réactions des autres usagers, véhicules particuliers et usagers vulnérables, dans les zones de mixité des flux ou en cas d'intrusion inopinée en zone de flux séparés, les manoeuvres d'évitement par contournement des obstacles
Il importe également d'évaluer les performances en termes de sécurité des systèmes de supervision à distance des navettes de niveau d'automatisation équivalent SAE 4 ou 5, afin de permettre progressivement les expérimentations sur voie publique des systèmes de navettes sans aucune personne à bord mais avec superviseur à distance. Il apparaît utile, au vu des développements actuels, de tester les fonctionnalités de supervision à distance, notamment : remise en mouvement après arrêt inopiné gestion des flux entrants / sortants de passagers régulation entre navettes et avec d'autres transports publics sur voies réservés
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
94
En zone périurbaine ou rurale, à ce stade, l'enjeu apparaît de deux ordres : Gestion de la demande diffuse par mutualisation partielle des parcours en temps réel : il s'agit là d'explorer les possibilités d'adapter les parcours en temps réel, à véhicule de capacité donnée, en fonction des convergences d'origines / destinations et de créneaux de déplacements (concept de « taxi collectif ») ; ces expérimentations pourraient être conduites sur des territoires délimités, avec points d'arrêts prédéterminés, de type zone d'activité ou universitaire, en pelotonnage avec ou sans conducteur humain ; Desserte de pôles excentrés en milieu rural, à partir d'une gare ferroviaire ou routière, ou d'un point d'arrêt de bus ou car sur une ligne de trafic massifié : il s'agit là de tester, par étapes, des fonctionnalités de circulation en trafic mixte, sur des réseaux à faible circulation, avec des différentiels de vitesse potentiellement élevés, et des intersections, ainsi que l'insertion dans les zones d'accès aux gares ferroviaires ou routières.
-
En termes de cartographie et de localisation, les expérimentations peuvent contribuer à identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision (à l'échelle décimétrique) des amers fixes sur les parcours de circulation des navettes (exemple : feux de circulation, quais d'embarquement / débarquement, configuration précise des intersections et de leur signalisation). En milieu urbain, les scenarii de relocalisation sur des amers locaux après pertes de signal GPS, pourraient utilement être testés. En termes de modèle économique, il est utile de repenser la question du coût et d'expérimenter de nouvelles tarifications (à l'usage) afin de définir le consentement des usagers à payer pour ces nouveaux services. Par ailleurs, l'amélioration des capacités de perception des environnements de nuit par les systèmes automatisés, constitue un enjeu pour le développement des transports publics par renforcement de l'amplitude et des fréquences. c. Fret et logistique De façon générale, les cas d'usages apparaissent moins clairement définis dans le fret et la logistique, que dans le véhicule particulier et le transport public. On pressent néanmoins, à ce stade, des potentialités offertes par : - les engins-livreurs en milieu urbain dense : un des enjeux de l'évaluation de ces cas d'usage est porte sur les interactions avec une multiplicité d'autres usagers sur des parcours mixtes, à la fois sur la voie publique et sur les trottoirs, en zone ouverte à la circulation et en zone piétonnière ; - l'automatisation de certaines tâches de conduite du PL sur voies à chaussées séparées, en prolongement des assistants à la conduite, à l'instar des fonctions développées sur le véhicule particulier ; - la circulation de VUL sur des parcours fixes et partiellement séparés des flux de circulation en milieu urbain, en parallèle ou en « interstices » des parcours de navettes : dans ce cas, les enjeux d'évaluation de sécurité des parcours apparaissent similaires à ceux des navettes, modulo la spécificité des problématiques d'embarquement / débarquement des marchandises par rapport aux passagers.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
95
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
DICOM-DGITM/B/18029 Mai 2018
INVALIDE) (ATTENTION: OPTION fait que le conducteur est en tout état de cause responsable pénalement alors qu'il fait confiance au système quasiment tout le temps. Dans la perspective de permettre le déploiement de véhicules hautement automatisés à l'horizon 2020 à 2022, le régime de responsabilité sera adapté en fonction des évolutions du rôle respectif du conducteur et du système automatisé pour les cas d'usage correspondants. Ces adaptations seront proposées, concomitamment aux évolutions du code de la route correspondantes, dans le cadre du groupe de travail piloté par le Ministère de l'intérieur, associant notamment les Ministères de la Justice, des Transports et de l'Industrie. Dans l'immédiat, afin de permettre le développement des expérimentations dérogeant aux dispositions du code de la route, la Loi d'orientation des mobilités proposera un cadre de responsabilité adapté à la spécificité des expérimentations, et notamment à l'engagement du responsable de l'expérimentation, titulaire de l'autorisation, à en assurer la sécurité. Les magistrats des juridictions, les experts judiciaires et les officiers de police judiciaire seront sensibilisés aux enjeux de responsabilité qui seront générés par le développement et la mise en circulation des véhicules autonomes.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
39
4.2.3. Formation et information du conducteur Le conducteur devra encore remplir un certain nombre de conditions avant d'être autorisé à s'asseoir derrière le volant : d'abord, celle d'être titulaire de la catégorie de permis de conduire correspondant au véhicule, d'être en bon état de santé, de ne pas être sous l'influence de substances psychoactives comme l'alcool, les drogues ou les médicaments, etc. L'humain qui conduit aujourd'hui un véhicule doit donc être formé, et sa formation doit avoir été validée par un examen favorable du permis de conduire, ainsi qu'être apte à conduire, physiquement et mentalement. Dès lors qu'il s'agira d'un véhicule à délégation partielle, voire quasi-totale de conduite, ces conditions devront continuer à être satisfaites. En effet, même en présence de fonctions hautement automatisées de conduite, le conducteur doit rester à même de répondre à une ou des sollicitations du système lui demandant de reprendre le contrôle du véhicule, pour un certain nombre de raisons. Concernant la formation des conducteurs, et notamment celle des jeunes conducteurs, en âge de passer les épreuves de l'examen du permis de conduire, il faut envisager dès maintenant d'adapter les contenus de la formation et, donc, ceux des examens du permis de conduire. Ainsi, au niveau national, un groupe de travail sur le sujet est à créer rapidement au sein de la DSR, pour traiter de ces questions et échanger avec les autres ministères concernés, en vue de dégager une doctrine nationale qui sera ensuite portée au niveau européen. Il faut en effet garder en tête que ce travail devra également être engagé au niveau européen : en effet, les conditions de délivrance des permis de conduire relèvent de la compétence de l'Union européenne et, plus précisément, des dispositions contenues dans la directive 2006/126/CE du Conseil et du Parlement européen du 20 décembre 2006, relative au permis de conduire. On devrait pouvoir s'attendre à ce que la Commission européenne, en particulier la DG MOVE, son Unité sécurité routière, prenne ses responsabilités en la matière. Se posent et se poseront également d'autres questions devant cette évolution inévitable des conditions dans lesquelles un véhicule sera à terme conduit et contrôlé par l'humain : - en situation d'expérimentation de divers véhicules à délégation partielle de conduite, il convient que les « essayeurs », en général des ingénieurs ou des techniciens, soient à même de garantir la sécurité parfaite du véhicule, notamment vis-à-vis des autres usagers de la route. Etant eux-mêmes « essayeurs », ils connaissent parfaitement bien les systèmes techniques automatisés qu'ils testent, mais ils doivent bien évidemment être capables de reprendre la main en cas de nécessité, voire d'extrême nécessité, et tout au long de l'expérimentation faire en sorte que, quel que soit « ce qui » conduit le véhicule, ce dernier évolue dans la circulation de manière harmonieuse et sans surprendre quiconque. Nul doute que la mise en oeuvre de ces différents points ne permet pas de se dispenser d'une sorte de formation spécifique qui peut être menée bien sûr au sein même de la société qui réalise cette expérimentation ; - des véhicules disposant de fonctions automatisées de conduite seront de plus en plus souvent proposés à la vente à des particuliers ; il convient de s'interroger sur la façon dont les acheteurs de ce type de véhicules vont utiliser harmonieusement et sans danger les nouvelles technologies à leur disposition. Cette question est encore plus cruciale pour ceux qui ont l'habitude de louer des véhicules, car ils ont à prendre en charge un véhicule qu'ils ne connaissent pas, souvent de dernière génération, précisément celui qui est équipé des technologies les plus récentes. Une information sur le type de technique et son fonctionnement devrait être faite aux conducteurs : quelle est cette technologie, quand est-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
40
elle disponible, comment s'utilise-t-elle, quel est exactement le partage des tâches de conduite entre le conducteur et le système, quelles actions concrètes et précises reste-t-il à réaliser au conducteur qui les utilise ? - Cette information pourrait notamment devrait figurer par écrit dans le manuel qui accompagne le véhicule ou sur le site internet de la marque et du type de véhicule en cause. Il faut également réfléchir à l'information qui devrait être donnée lors de la prise en mains du véhicule neuf. L'utilisation de vidéos explicatives, pédagogiques et « ludiques » qui apparaissent d'ores et déjà sur le marché pourrait être recommandée et systématisée, en étant mise gracieusement à la disposition de l'acheteur, via une application pour téléphone portable par exemple. Cette information pourrait participer de la confiance dans ces nouveaux systèmes ; - Il convient également de tenir compte de ce que tous les véhicules ne seront pas instantanément équipés de ces nouvelles technologies et que devront cohabiter des véhicules « anciens » et « nouveaux ». De plus, certains usagers de la route ne seront pas automatisés ou connectés, comme les utilisateurs de deux-roues motorisés, les cyclistes et les piétons ; l'information évoquée ci-dessus devra aussi être mise à leur disposition, afin qu'en tant qu'usagers partageant le même espace routier, ils comprennent les réactions de ces « nouveaux » véhicules, dont le comportement est susceptible de les surprendre par rapport à celui des véhicules entièrement « conduits et contrôlés humainement ». Ce travail général d'information, de réflexion et de formation sur l'utilisation de ces nouvelles technologies, de remise en question de notre façon de conduire et de nous déplacer en voiture ou en camion ou encore en autocar, est une tâche qui doit être accomplie collectivement : pouvoirs publics, professionnels automobiles, professionnels de la formation, inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière, associations, psychologues experts en conduite automobile, notamment mais pas seulement : c'est toute la société civile en général qui est concernée et qui doit être interpellée sur ce sujet qui va révolutionner nos comportements de mobilité et de partage de l'espace public routier. Les formations à la conduite de véhicules autonomes et à usage professionnel devront être aussi adaptées. Eléments de synthèse et d'orientation Les besoins d'évolution de la formation à la conduite feront l'objet de propositions d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur, d'ici fin 2018. La Loi d'orientation des mobilités établira le principe d'une information des conducteurs sur les principales fonctionnalités d'automatisation, leurs domaines d'emplois et leurs limites, lors de l'acquisition d'un véhicule neuf.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
41
4.2.4. Identification des véhicules L'identification des véhicules automatisés, i.e. le fait de les rendre visibles ou repérables par les autres usagers ou acteurs de la route, soulève des enjeux en matière de gestion des interactions - civilités ou incivilités entre usagers, et partant d'efficacité de la gestion des trafics. Cette identification soulève également des questions de protection desdits véhicules contre la malveillance. Cette identification emporte des enjeux importants en termes de contrôle par les forces de l'ordre (ex : faut-il signaler un véhicule équipé de fonctions automatisées de conduite de manière visible de l'extérieur, dès lors que ces fonctions sont activées ?). Cela peut sembler nécessaire, si le conducteur a été autorisé à effectuer d'autres tâches que la conduite pendant le temps où le système « conduit » et jusqu'à ce qu'il lui demande de reprendre la main, ou encore que lui-même souhaite conduire. En effet, l'enjeu pour les forces de l'ordre est d'être à même de distinguer le conducteur qui « peut » faire autre chose de celui qui ne le « peut » pas, donc de ne pas verbaliser le premier, mais le deuxième. Reste que l'identification ouvre des questions d'acceptabilité. Eléments de synthèse et d'orientation La question importante de l'opportunité et des éventuelles modalités d'identification des véhicules automatisés renvoie à des enjeux divers (gestion de trafic, contrôle des règles de conduite, malveillance, cybersécurité, acceptabilité). Les enjeux sont à la fois techniques, juridiques et sociétaux. Ces questions nécessitent un approfondissement spécifique notamment pour la période transitoire durant laquelle coexisteront des véhicules à conduite humaine et d'autres autonomes.
4.2.5. Evolution de la réglementation technique et de l'homologation des véhicules Dans le cadre des travaux sur l'évolution de la réglementation technique des véhicules au sein de la CEE-ONU de Genève, c'est actuellement, le Règlement 79 (cf. encadré ci-dessous), relatif uniquement aux équipements de direction des véhicules, qui traite des principaux enjeux de l'automatisation. Ce règlement autorisait jusqu'en 2017 le contrôle automatique de la commande de direction par le véhicule uniquement jusqu'à 10 km/h. Cette prescription était suffisante pour homologuer des systèmes de parking automatique, mais ne permettait pas l'homologation des projets des constructeurs visant à diriger le véhicule automatiquement sur voies rapides ou en situation de bouchons, puis à terme dans toutes les situations.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
42
Encadré : aperçu des travaux d'évolution du règlement 79 Les travaux engagés au sein du WP29 de la CEE-ONU conduisent à aborder séquentiellement les degrés d'automatisation de plus en plus élevés, classés en 5 catégories : A : manoeuvres < 10km/h, y compris le parking piloté à distance (exemple park assist) B : maintien dans la voie B 1 : assistance, le conducteur doit garder ses mains sur le volant (exemple : lane keeping assist ) B 2 : délégation, le conducteur peut lâcher les mains du volant (exemple : lane guidance) C : changement de voie (initié par le conducteur) : le conducteur décide de changer de voie, et demande au système de le faire D : changement de voie (validé par le conducteur) : le système propose de changer de voie, le conducteur valide et le système opère E : B2 + changement de voie automatique : délégation du maintien dans la voie et du changement de voie totalement automatique.
Dans ces travaux, la France est attachée notamment à ce que, d'une part les moyens d'interface Homme Machine (IHM) soient le plus harmonisé (standardisé), et d'autre part que des obligations de suivi (« monitoring ») du conducteur soient définies de façon cohérente avec les exigences d'attention du conducteur qui ont été définies de façon spécifique à chaque cas d'usage, et en particulier, chaque niveau d'automatisation. Ainsi, la France est attachée à ce que, au moins dans un premier temps, les prescriptions techniques emportent des obligations de surveiller le conducteur pour s'assurer que celui-ci est disponible et capable de reprendre la main de manière sûre quand le véhicule va le lui demander. A terme et à la lueur de l'expérience, cette assertion méritera d'être évaluée et, le cas échéant, allégée. La France est également attachée à ce que des manoeuvres de risque minimal ou des procédures d'urgence soient disponibles et réglementées, le cas échéant, notamment pour traiter de l'ensemble des situations où le système ne peut plus fonctionner tout seul et que le conducteur ne reprend pas la main, ou en cas d'événements soudains. Au-delà du règlement R79 portant sur la direction, il importe d'inscrire l'évolution de la réglementation technique internationale dans un nouveau cadre permettant de passer d'une approche par « module » (ex : direction-latéral ; freinage-accélération-longitudinal ; champ de vision) à une approche « système » et de prendre en compte notamment : - le besoin de distinguer les différents types de cas d'usage dans l'approche, et notamment les niveaux d'automatisation et les domaines d'emploi ou conditions de circulation ; - le besoin de prendre en compte le caractère apprenant de ces systèmes ; - le besoin d'élargir progressivement la réglementation technique aux enjeux de connectivité du véhicule.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
43
Encadré : approche de réglementations technique « horizontale » des véhicules autonomes Pour cette nouvelle approche de réglementation technique des véhicules, dite « réglementation horizontale », qui permettra d'homologuer les véhicules avec un cadre plus adapté que le cadre actuel, la France propose les principes suivants : 1. nécessité de décrire le cas d'usage de façon suffisamment détaillée, dans les principales dimensions suivantes : fonctions de conduite déléguées mécanismes d'activation / désactivation / transition domaines d'emploi et conditions de circulation limites répartition des tâches attendues entre le système et le conducteur, en référence aux niveaux d'automatisation SAE manoeuvres de risque minimal et d'urgence, et articulation logique en fonction de l'arbre des événements redoutés (ceci suppose notamment de décrire d'une part les arbitrages éthiques sous-jacents aux logigrammes de manoeuvres d'urgence et d'autre part les délimitations des niveaux de responsabilité entre le conducteur et les fonctions de délégation de conduite) ; fonctionnalités des interfaces homme-machine, notamment en termes de surveillance de l'attention du conducteur ; d'information et d'alerte du conducteur sur l'état de délégation de conduite et les conditions critiques de circulation ; de demandes de reprise en main nécessité de distinguer les cas d'usage en deux principales catégories : environnements de circulation ouverts et complexes d'un côté ; parcours de circulation pré-définis et dont la sécurisation est maîtrisable pour le cas d'usage concerné nécessité d'analyser les situations de conduite et les événements les plus critiques potentiellement rencontrés par le véhicule en termes de sécurité routière, ainsi que de sûreté, afin d'asseoir des obligations proportionnées de gestion de ces situations critiques ; nécessité de proportionner les exigences de gestion des situations critiques, y compris les manoeuvres de risque minimal et les manoeuvres d'urgence, en quatre principaux niveaux, en fonction de leur criticité : existence d'un dispositif (ou d'une procédure ou d'une manoeuvre) de gestion de la situation critique description fonctionnelle du dispositif de gestion de la situation critique existence de fonctionnalités requises pour la gestion de la situation critique niveau de performance requis pour la gestion de la situation critique certification ou validation du dispositif de gestion de la situation critique. nécessité d'adapter les processus de validation en fonction de l'objet : analyse de risque (ou situation critique) ; exigences plus ou moins fortes vis-à-vis des mesures de gestion des situations critiques, cas d'usage ; nécessité de développer des jeux de tests par simulation là où ils sont pertinents ; nécessité de développer des dispositifs de validation à l'usage, au-delà de la mise sur le marché, notamment pour les systèmes apprenants et soumis à des mises à jour.
-
-
2. 3.
4.
5.
6. 7.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
44
En termes d'homologation, sur la base de cette approche, chaque type de véhicule muni d'un ensemble de fonctionnalités automatisées pourra être homologué par une autorité de réception, sur la base d'un rapport d'un service notifié, qui aura procédé à toutes les vérifications nécessaires adaptées à l'ensemble des fonctionnalités embarquées (vérification documentaire, essais de simulations, essais physiques ; évaluation de conformité décloisonnée et systémique). Le processus de délivrance de l'homologation européenne du véhicule se fera comme actuellement selon les principes érigés par les directives ou règlements cadre européens, pour tous les aspects non-automatisés du véhicule (ceintures de sécurité, éclairage, vitrage, ...), en incorporant l'homologation dédiée aux fonctionnalités automatisées ci-dessus. Enfin, le cadre national existant, notamment le livre troisième ("Le Véhicule") du code de la route et ses arrêtés d'application, devra être revu afin de s'assurer de l'adéquation entre les nouvelles prescriptions techniques éditées à Genève et rendues obligatoires par Bruxelles, et celles déjà présentes dans le code de la route, que ce soit au niveau des dispositions techniques des véhicules, de leur réception et homologation, de leur immatriculation et de leur contrôle technique, et devra être adapté en conséquence le cas échéant. Eléments de synthèse et d'orientation La réglementation technique des véhicules est élaborée, au niveau international, par la CEEONU. Le cadre européen fixe de son côté les modalités d'homologation (« réception ») en vue de la mise sur la marché des véhicules, en reprenant l'obligation de respect de certains règlements techniques relevant de la CEE-ONU. Il importe d'inscrire l'évolution de la réglementation technique internationale dans un nouveau cadre permettant de passer d'une approche par module à une approche système. C'est l'objet de la proposition française de « réglementation horizontale » présentée en juin 2017 à la CEE-ONU. Cette proposition permettrait notamment de traiter la diversité des cas d'usage qui se profilent, en les distinguant en deux principales catégories : environnements de circulation ouverts et complexes d'un côté ; parcours de circulation pré-définis et dont la sécurisation est maîtrisable pour le cas d'usage concerné. Cette approche permettrait de développer des analyses de risques par cas d'usage et ainsi de spécifier et de proportionner les exigences, notamment les manoeuvres d'urgence, en fonction de la criticité des situations de risques. Cette approche permettrait d'adapter le processus de validation en fonction du risque et de la réponse apportée par le système, par des tests, des simulations, ou en les combinant. Dans l'attente d'une nouvelle approche « horizontale », la réglementation technique des véhicules doit poursuivre son adaptation au développement du véhicule automatisé, afin de l'accompagner tout en s'assurant du respect des exigences de sécurité routière. Dans les révisions engagées (règlement R 79), la France demandera à ce que les exigences sur les fonctions d'automatisation, le suivi de l'attention du conducteur et les manoeuvres d'urgence et de sécurité, garantissent la sécurité routière tout en étant proportionnées au degré d'automatisation. La France demandera à ce que des exigences soient développées dans la réglementation technique internationale, afin que les véhicules dont les systèmes de conduite sont totalement délégués au véhicule, soient dotés de la capacité d'appliquer un ordre d'arrêt par les forces de l'ordre, et ce en toute sécurité.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
45
Le nouveau cadre de réglementation et de validation technique des fonctions automatisées d'un véhicule doit être élaboré à la CEE-ONU à Genève. Il importe de préserver le caractère multilatéral de ce cadre, sans quoi l'on risque d'inciter à la fragmentation des approches et des marchés. Pour autant, ce processus d'élaboration et de validation à la CEE-ONU est un processus très long (plusieurs années), au regard du rythme de déploiement. Ainsi, se pose la question d'un régime transitoire de portée européenne, à l'initiative de la Commission, permettant de définir le cadre de réglementation technique et d'homologation des véhicules automatisés à plus court terme qu'au sein de la CEE-ONU.
4.2.6. Cadre spécifique aux transports publics automatisés La dynamique de l'innovation dans le secteur des transports publics automatisés conduit à penser qu'il convient d'anticiper le passage d'une logique d'expérimentation au développement de services. Il est probable que, dans une logique incrémentale et d'apprentissage, les cas d'usage de la navette se développent d'abord sur des environnements de circulation relativement sécurisés connus (tels qu'on l'a observé jusqu'à lors dans les projets de recherche et d'expérimentation), pour, progressivement passer de « quasi-sites propres » à des parcours moins sécurisés (flux mixtes et carrefours ; changements de voie pour l'évitement), pour aller éventuellement vers des parcours non fixes. Les services identifiés dans le cadre de la NFI laissent penser que la « taille » du véhicule, telle qu'on la connaît actuellement (environ 12 personnes), sera appelée à se diversifier ainsi que la nature des parcours (sites propres / sites ouverts), pour couvrir un spectre plus large, allant du véhicule partagé autonome pour les demandes les plus atomisées, à des bus capacitaires. Les niveaux d'automatisation visés sont supérieurs à ce qui est visé pour le véhicule particulier, en visant dès maintenant les niveaux 4 et 5. Les travaux de réglementation de l'automatisation menés à la CEE-ONU ne répondent pas aux enjeux de développement du transport public automatisé, qui apparaît rapide sur des domaines d'emploi relativement sécurisés.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
46
Eléments de synthèse et d'orientation La dynamique de développement du transport public automatisé conduit à considérer deux orientations stratégiques au niveau national pour accompagner le marché : L'élaboration d'un cadre réglementaire fixant les prescriptions de sécurité du véhicule de type « navette » (9 à 16 places, dont au moins 4 places assises), ainsi que les conditions de circulation de ces véhicules lorsqu'ils sont automatisés (cette catégorie de véhicule se distinguant des catégories M2 ou M3 destinées au transport de personnes et soumises à la réglementation internationale et l'homologation européenne). L'élaboration d'un référentiel d'évaluation de la sécurité des parcours des navettes, lorsque ces parcours sont fixes, en s'appuyant sur une analyse des situations critiques de circulation des navettes automatisées en milieu urbain et sur les expérimentations.
-
Ces deux éléments permettront de mettre en place un régime d'homologation des véhicules concernés, et un régime de validation des parcours et conditions de circulation des véhicules.
4.2.7. Enjeux d'interopérabilité et de coordination de la supervision Le développement de l'automatisation va s'accompagner d'un développement de la gestion coordonnée de flottes de véhicules, probablement divers dans leurs caractéristiques techniques, leurs degrés d'automatisation, leurs fonctions et leurs domaines d'emploi. La supervision va, en parallèle, se développer pour les transports publics automatisés, mais aussi, sous certaines formes, pour le véhicule individuel et la logistique. Ces deux tendances (supervision et coordination de flottes), va poser des questions d'interopérabilité, de coordination voire de « partage » de la supervision entre acteurs, incluant des gestionnaires de flottes, des opérateurs de transports publics, des gestionnaires d'infrastructures, des gestionnaires d'espaces de type parking. Il s'agira ici de concilier la maîtrise des enjeux critiques de sécurité et de sûreté, et le soucis de ne pas créer des barrières à l'entrée ou des phénomènes de « bloked in » dans lesquels des opérateurs détiendraient, au travers de la supervision, un pouvoir monopolistique défavorable au développement des technologies et des services. Eléments de synthèse et d'orientation Une mission d'étude et de concertation sur les enjeux fonctionnels, techniques et économiques de l'interopérabilité et de coordination de la supervision flottes de véhicules automatisés, sera lancée, pilotée par le Ministère chargé des transports, associant les acteurs de la NFI et les collectivités locales.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
47
4.3. Expérimentations, innovation, recherche
4.3.1. Expérimentations En application de l'article 37 de la loi n° 2015-992 du 7 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, et afin de permettre la circulation sur la voie publique de véhicules à délégation partielle ou totale de conduite à des fins expérimentales, l'ordonnance n° 2016-1057 du 3 août 2016 relative à l'expérimentation de véhicules à délégation de conduite sur les voies publiques indique que : - La circulation à des fins expérimentales d'un véhicule à délégation partielle ou totale de conduite sur une voie ouverte à la circulation publique est subordonnée à la délivrance d'une autorisation destinée à assurer la sécurité du déroulement de l'expérimentation. - L'autorisation est accordée par le ministre chargé des transports après avis du ministre de l'intérieur, s'il y a lieu après avis du gestionnaire de la voirie, de l'autorité compétente en matière de la police de la circulation et de l'autorité organisatrice des transports concernés. - Les conditions de délivrance de l'autorisation et les modalités de sa mise en oeuvre sont précisées par décret en Conseil d'Etat. Lors de la préparation de ce décret, il est apparut nécessaire de concilier le besoin d'un cadre juridique solide et la possibilité d'innover, notamment en allant vers des niveaux d'automatisation de plus en plus élevés, où les obligations d'attention du conducteur pourraient être relâchées. L'automatisation doit en effet permettre et gérer en toute sécurité une moindre attention du conducteur. L'expérimentation doit donc pouvoir évaluer le lien entre différents niveaux ou fonctions d'automatisation fonctions, et les comportements du conducteur. Or, l'attention du conducteur est un élément structurant du code de la Route (article R 412-6 du code de la route : « Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent »). Afin de pouvoir, au cours d'expérimentations, déroger aux obligations d'attention du conducteur, il importe que cette dérogation soit accompagnée de dispositions législatives en matière de responsabilité. Afin de concilier au mieux le besoin d'un cadre juridique sécurisant, et le besoin de ne pas freiner les expérimentations, le cadre législatif sera adapté en 2018, afin de prévoir les dispositions nécessaires, pour des expérimentations, dans des conditions sécurisées, avec possibilité d'inattention du conducteur ou d'absence du conducteur. Au 1er janvier 2018, les principales caractéristiques et les principaux enseignements des expérimentations sont les suivants :
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
48
Encadré : synthèse des retours d'expérimentations Nombre et typologie d'expérimentation De fin 2014 à fin 2017, 51 décisions d'autorisation de délivrance exceptionnelle de certificats d'immatriculation « W garage » dans le cadre d'expérimentation de véhicules à délégation de conduite ont été délivrées. Parmi ces décisions, 26 concernent des voitures particulières (dont 11 en milieu urbain complexe), 15 concernent des navettes urbaines et 10 sont des décisions modificatives afin d'étendre la durée de validité, le périmètre géographique ou le nombre de véhicules concernés par l'expérimentation. Depuis mi-2016 une augmentation significative du nombre de demandes d'expérimentation de navettes autonomes est observée. Synthèse des retours d'expérience 30 bilans ont été reçus par l'administration et sept réunions sur les retours d'expérience ont été organisées depuis fin 2014. Ces retours d'expérimentation sont positifs. À ce jour, aucun accident matériel ou corporel n'a eu lieu lors des roulages (près de 100 000 km au total). Des incidents de plusieurs sortes ont cependant été rencontrés. En effet, les véhicules à délégation de conduite ne gèrent pas encore toutes les situations de conduite. Les problèmes peuvent provenir de l'environnement dans lequel le véhicule évolue (zones de travaux ou de péage, passage de trois voies à deux voies, brouillard épais, objet sur la voie...) mais aussi du comportement des autres usagers (non respect des distances de sécurité, queues de poisson, stationnement sur la bande d'arrêt d'urgence en cas de ralentissement de la circulation au niveau d'une sortie d'autoroute...). Les expérimentations ont permis aux constructeurs d'acquérir de nombreuses données de conduite et d'améliorer les algorithmes de conduite autonome. Ainsi, les véhicules expérimentés à l'heure actuelle sont capables de gérer beaucoup plus de situations et d'événements que ceux expérimentés il y a deux ans. De plus, les démonstrations de navettes autonomes ont permis de présenter ce concept au grand public. D'une manière générale, les retours des personnes ayant testé les prototypes sont enthousiastes. Les meilleures synergies avec les autorités de police doivent être trouvées lors des expérimentations.
La mise au point technique des voitures particulières autonomes sur route à chaussées séparées étant en grande partie effectuée, les constructeurs souhaitent passer à la seconde phase des expérimentations de véhicule à délégation de conduite : les tests de l'usage de ces véhicules avec des conducteurs non-experts. Ainsi, des expérimentations ont été ou sont en cours d'autorisation afin de faire circuler des véhicules en mode délégué avec des conducteurs non-experts à la place du conducteur. La responsabilité de la conduite est alors transférée au passager avant, un conducteur expert disposant de doubles commandes afin de pouvoir reprendre le contrôle du véhicule en cas de problème. Il est probable qu'au cours de l'année 2018 les constructeurs souhaitent tester la conduite déléguée, soit sans surveillance de conducteur expert, soit avec une supervision à distance, le « conducteur » étant alors hors du véhicule lors des roulages. Ce mode de conduite est envisagé pour les voitures particulières (tests avec un panel de clients) et pour les navettes urbaines (transport de personnes sans conducteur). Un projet de Loi proposera dès 2018 un cadre de responsabilité permettant de conduire de telles expérimentations.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
49
Eléments de synthèse et d'orientation L'expérimentation constitue une étape incontournable pour passer de la recherchedéveloppement à la mise en oeuvre des systèmes de conduite automatisée, et pour s'assurer qu'ils répondent aux exigences de sécurité, notamment de sécurité routière et de sûreté, ainsi que d'acceptabilité sociale. Cette phase d'expérimentation peut également, en complément des travaux de recherche ou des études de comportements, fournir des éléments utiles sur les attitudes de conduite et de mobilité. Il importe que les expérimentations ne se limitent pas aux aspects technologiques, mais concernent prioritairement les usages, qu'elles doivent contribuer à explorer, évaluer et affiner. Cette approche par les usages doit couvrir l'ensemble des territoires (urbains, périurbains, ruraux). Cette approche par les usages doit notamment permettre d'adresser, au-delà de la sécurité des systèmes, l'acceptabilité, les modèles économiques, les impacts sur la mobilité, l'emploi, les compétences. Les futures expérimentations doivent être structurées autour de priorités communes des acteurs français, et de la production d'un « bien commun » de connaissances objectivées pour la validation des systèmes. L'approche nationale doit ainsi conjuguer : - des orientations nationales, sur les cas d'usages et les impacts qui semblent les plus importants à évaluer pour les pouvoirs publics ; - un cadre de financement, en conjuguant au mieux les divers leviers du programme d'investissement d'avenir ; - un engagement de la filière à mettre en commun certaines « briques » des expérimentations, tout en respectant les initiatives industrielles et territoriales qui favorisent l'innovation : Plus précisément : - Au niveau législatif, un cadre de responsabilité sera proposé, permettant des expérimentations dans des conditions pouvant déroger aux obligations du code de la route. - Un document d'orientation présentera les attentes prioritaires des autorités publiques en termes d'expérimentations (cf. encadré ci-dessous et document détaillé joint). - Des règles de mise en commun des données, outils et méthodes d'évaluation et de validation des systèmes seront définies, sous l'animation de l'État, afin de favoriser les économies d'échelle et les synergies entre acteurs pour l'accumulation de la connaissance, dans le respect des contraintes industrielles et commerciales de ces acteurs. - Le programme d'investissements d'avenir (PIA) sera mobilisé pour financer des projets collaboratifs permettant de produire, à partir d'un programme structuré expérimentations, des méthodes et des outils de validation des systèmes, du point de vue de leurs usages et de leur sécurité, dans des configurations variées. - Les industriels ont été invités à proposer une approche structurée des expérimentations, dans le cadre des travaux de la NFI et du Conseil national de l'industrie : la filière élabore une proposition de programme national d'expérimentations-validation (cf. ci-dessous).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
50
Encadré : orientation des expérimentations du point de vue des politiques publiques. Les expérimentations dans le domaine de la logistique urbaine pourraient utilement se développer, comptetenu des potentielles applications et du besoin d'évaluer, outre les impacts sur la sécurité, les enjeux sur la gestion des flux et des circulations urbaines ; ces expérimentations devraient permettre d'évaluer les comportements des conducteurs professionnels et les éventuelles évolutions possibles des métiers des chauffeurs. Les expérimentations de navettes automatisées devraient permettre d'évaluer les enjeux critiques de circulation et d'alimenter un référentiel d'analyse de sécurité des parcours. Elles devraient également permettre d'évaluer les enjeux critiques de régulation des flux et de supervision. Elles devraient également permettre d'évaluer les comportements des conducteurs professionnels et les éventuelles évolutions possibles des métiers des chauffeurs. Les expérimentations du véhicule particulier automatisé devraient porter une attention particulière aux transitions (délégation et reprise de contrôle), aux fonctionnalités des interfaces homme-machine et au suivi de l'attention du conducteur ; elles devraient permettre d'évaluer la dynamique d'apprentissage des fonctionnalités par les conducteurs. Les expérimentations du véhicule particulier devraient contribuer à l'évaluation de l'impact sur la consommation de carburant. Les expérimentations du véhicule particulier pourraient utilement contribuer à l'évaluation de la perception du temps passé en mode de conduite délégué, et, partant, aux choix de déplacement et de mode de transport. En site fermé si besoin, il importe d'évaluer les apports possibles de la connectivité à la sécurité sur certaines situations critiques de cas d'usage, tant pour le véhicule particulier que pour les navettes et la logistique urbaine Les expérimentations devraient permettre des évaluations conjointes des véhicules et de l'infrastructure, y compris par l'expérimentation d'équipements de la route encore non-homologués. Les expérimentations devraient permettre de préfigurer l'élaboration d'un référentiel de d'adéquation des infrastructures, y compris de leur signalisation, à la conduite autonome. Les expérimentations devraient permettre de définir des référentiels partagés définissant les amers de localisation, de tester l'adéquation des jeux de donnés cartographiques à ces référentiels, et d'expérimenter une plateforme d'intégration, de fusion et de redistribution en temps réel de données géographiques de sources multiples.
-
-
-
-
L'encadré ci-dessous présente les orientations préliminaires des acteurs de la NFI en vue d'un programme national collaboratif d'expérimentations concourant à la validation des systèmes automatisés, et faisant écho aux attentes ci-dessus.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
51
Encadré : programme national expérimentation pilotes validation Eléments préliminaires L'objectif général est de construire un socle de connaissances, de méthodes et d'outils partagés entre les acteurs publics et privés, pour la démonstration de la sécurité et l'évaluation des systèmes de mobilité autonome. La construction de ce socle de connaissances s'appuiera sur des expérimentations et démonstrations à grande échelle sur des cas d'usage sélectionnés. Le plan Nouvelle France industrielle Véhicule Autonome lancé en 2013 a identifié les barrières au déploiement et a créé les conditions d'un déploiement concerté entre acteurs privés et Pouvoirs Publics, conditions également discutées aux niveaux européen et mondial. Le déploiement de la mobilité et des véhicules autonomes sûrs nécessite prioritairement : de concevoir des systèmes automatisés performants, fonctionnellement sûrs et moins faillibles que des conducteurs humains, d'en valider et d'en éprouver le fonctionnement avant de les commercialiser, d'apporter les éléments de preuve de la validation aux autorités en charge de réguler le déploiement par une évolution de la réglementation technique pour l'homologation des systèmes autonomes véhicules et infrastructures, et un élargissement des autorisations permettant la circulation des véhicules sur des lieux qualifiés et des cas d'usages diversifiés, d'établir les règles d'observation et de traitement des retours d'expérience pour évaluer les bénéfices de la mobilité autonome : gains en sécurité routière, bonne acceptabilité sociale, utilité, impacts sur l'emploi, etc.
L'enjeu est d'étudier et de tester la viabilité de la conduite et de la mobilité autonome en tant que moyen de trans port sûr et efficace. L'objectif général est de construire un socle de connaissances, de méthodes et d'outils partagés entre les acteurs publics et privés, pour la démonstration de la sécurité et l'évaluation des systèmes de mobilité autonome. La construction de ce socle de connaissances s'appuiera sur des expérimentations et démonstration à grande échelle sur des cas d'usage sélectionnés. Dans ce cadre, les objectifs pourraient être de : Construire le référentiel de situations critiques pour les cas d'usages sélectionnés, couvrant les transports individuels et les transports collectifs, Définir les méthodes et outils de validation et de démonstration de la sécurité, basés sur les situations critiques des cas d'usages, Préparer et mettre à disposition les infrastructures physiques et numériques nécessaires à la mise en oeuvre des expérimentations, en situation réelle d'exploitation, Identifier et formaliser les gains de performances, de sécurité et de services apportés par les infrastructures, dans une approche système intégrant véhicules et infrastructures, Evaluer l'acceptabilité, l'utilité, l'utilisabilité et l'usage la conduite et de la mobilité autonome par les usagers potentiels, ainsi que les bénéfices sociétaux attendus (sécurité routière, émissions, fluidité du trafic économie). Coordonner et mettre en oeuvre un plan d'expérimentation national basé sur des méthodologies partagées, permettant de caractériser les sites d'expérimentation, de collecter et capitaliser les données et résultats attendus, Construire et mettre en oeuvre un plan de sensibilisation et de communication pour accompagner le déploie ment de la conduite et de la mobilité autonome auprès des usagers et de l'ensemble des différentes parties prenantes.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
52
Les livrables pourraient être les suivants : Base commune de scénarios critiques et ses critères de définition, Environnement de simulation définissant des interfaces standardisées avec les différents moyens de simula tion spécifiques, Méthode et outils de validation de la sécurité et de l'acceptabilité, Référentiel de sûreté de fonctionnement, Référentiel de la sécurité routière Mise à niveau des infrastructures physiques et numériques sur les sites pilotes des expérimentations, Formulation des besoins d'évolution des infrastructures différenciés selon les scénarios de déploiement, Expérimentations grande échelle sur des sites pilotes Démonstration de sécurité dans le cadre des expérimentations, en incluant les modes dégradés, Retours d'Expérience partagés, Evaluations de l'acceptabilité y compris auprès des autres usagers de la route (hiérarchisation des freins à l'acceptation des véhicules autonomes, leviers pour une meilleure acceptation, conception des véhicules, critères de définition des parcours, recommandations...), Etudes d'impact (environnement, économique, social, sociétal ...).
4.3.2. Principaux enjeux de recherche scientifique Le véhicule autonome et connecté (VAC) est un sujet très complexe ; tout d'abord, parce qu'il ne définit pas une problématique unique mais qu'il englobe un ensemble de problèmes et soulève des questions de nature différente, tant technologique que scientifique. Ensuite, parce que les évolutions futures ne s'obtiendront pas nécessairement en raffinant les techniques et les procédés actuels mais parfois en inventant de nouveaux concepts et de nouveaux modèles tant pour la conception, la fabrication que l'exploitation du VAC. Ce caractère potentiellement disruptif implique la mobilisation d'acteurs issus de mondes différents : bien entendu, les départements R&D des entreprises, mais également les laboratoires du monde académique au sein des universités et des écoles ainsi que des organismes de recherche (exemple : CNRS, INRIA, IFSTTAR...). L'arrivée de nouveaux acteurs, qui n'appartiennent pas à l'industrie automobile « classique » mais sont issus du monde numérique, constitue un autre point saillant du développement du VAC. L'informatique et le traitement des données irriguent désormais toutes les problématiques, ce qui explique l'irruption de ces entreprises jusque-là extérieures à ce secteur. La recherche en sciences du numérique est donc, de facto, devenue incontournable pour espérer exister sur ce marché. La recherche travaille sur le sujet du VAC depuis des décennies ( exemple le projet Praxitèle de 1991 regroupait des laboratoires de recherche et des entreprises et a donné lieu à des expérimentations dans un contexte réel, en première mondiale). La France dispose d'atouts certains en termes de qualité et de diversité des recherches et des formations dans ce domaine : recherche pour imaginer et concevoir les nouveaux concepts et modèles, formation pour produire les futurs ingénieurs et doctorants qui sauront les transformer en produits et services innovants au sein des entreprises.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
53
Comme l'a clairement démontré le récent rapport de la commission villani sur l'intelligence artificielle, et les mesures associées annoncées par le président de la république le 29 mars 2018, notre pays doit être capable de mobiliser l'ensemble de ses forces s'il veut devenir un acteur reconnu au niveau international. Parmi les thématiques mentionnées dans le présent rapport villani, on peut mentionner, de façon non exhaustive, quelques axes qui nécessitent un travail important de recherche. · Les logiciels : ils sont au coeur du contrôle du vac ; s'assurer qu'ils répondent aux spécifications de leurs concepteurs et garantir leur fiabilité est donc crucial pour disposer de véhicules acceptés par les futurs utilisateurs. Ce sujet est un des points forts de la recherche en sciences du numérique française qui a su appliquer ses résultats par exemple pour valider les systèmes logiciels utilisés pour l'aviation et l'aérospatial. La cybersécurité : devenue une question centrale pour beaucoup d'entreprises, elle est évidemment cruciale pour le vac. Respecter des réglementations et des recommandations est nécessaire mais pas suffisant. Les auteurs d'actes malveillants innovent eux aussi en permanence et il est obligatoire de connaitre et d'analyser leurs attaques ainsi que de les anticiper afin de concevoir des parades pertinentes. C'est là encore une thématique particulièrement développée par les chercheurs de notre pays. Les interfaces humain-machine (ihm) : elles constituent le point d'entrée pour que les conducteurs puissent disposer des services proposés ; de leur qualité dépendra l'acceptation et le choix d'un véhicule. Il est donc nécessaire de travailler avec des scientifiques experts de ce domaine pour concevoir (notamment en impliquant les futurs utilisateurs dans des séances de co-design), prototyper et finalement évaluer (toujours avec un échantillon représentatif des usagers) et valider les futures ihm. Plus globalement, il faut également prendre en compte les facteurs humains dans l'expérience utilisateur (ux) et notamment les aspects liés au vieillissement de la population ; ces sujets sont étudiés par les chercheurs depuis longtemps, il convient donc d'exploiter leurs résultats.
·
·
·
La modélisation et la simulation : comme tout objet complexe, le vac pose des problèmes qu'un esprit humain seul ne peut plus résoudre ; il est donc indispensable de modéliser et de simuler numériquement cet objet pour le concevoir, le fabriquer, le vendre ou le réparer. Plus globalement, il est également nécessaire d'étudier ses interactions avec le réseau routier, les autres conducteurs et l'environnement en général. Ces étapes de modélisation et de simulation reposent sur des compétences en mathématiques appliquées (analyse numérique) et en informatique (programmation hpc) qui sont très importantes au sein du monde académique. La législation : le présent rapport mentionne à de nombreuses reprises l'importance d'adapter et de développer la législation concernant le vac. Pour atteindre cet objectif de façon satisfaisante, une collaboration entre juristes, ingénieurs et chercheurs s'impose de façon à suggérer des lois qui prennent en compte les évolutions prévues et/ou attendues. Ce type de rapprochement existe déjà dans d'autres domaines comme la législation sur le respect de la confidentialité des données à caractère personnel.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
54
Eléments de synthèse et d'orientation Le développement du VAC renvoie à des questions très complexes du point de vue de la recherche. Pour se donner une chance d'apporter des réponses concurrentielles face aux acteurs internationaux, qu'ils soient historiques ou émergents, il importe de mobiliser des ressources de recherche en associant des équipes de R&D des entreprises, et le terreau très actif au sein du monde académique (universités, écoles, organismes de recherche). Ces collaborations existent déjà en partie et ont donné d'excellents résultats, il convient de les renforcer et d'en créer de nouvelles pour relever les défis technologiques et scientifiques. Pour cela, il importe de mettre en oeuvre des incitations et des soutiens à des programmes de recherche associant ingénieurs et chercheurs, sans négliger le financement de recherches scientifiques plus amont, indispensables pour imaginer les nouveaux concepts et modèles sources des futures innovations.
4.3.3. Priorités de recherche à l'appui des politiques publiques De façons plus précise, les priorités pour la recherche (en amont des expérimentations et/ou pendant celles-ci) à l'appui des politiques publiques doivent prendre en compte les enjeux prioritaires liés à la sécurité routière et des systèmes. La recherche doit également affiner progressivement la connaissance des impacts, des comportements, et de l'acceptabilité, et d'explorer plus avant les enjeux pour la sécurité routière et l'exploitation des réseaux et services de transports, du lien entre automatisation, connectivité et cartographie numérique. Ces enjeux sont illustrés ci-dessous par des thématiques de recherche, selon deux axes : - Thématiques de recherche au titre des principaux enjeux de politique publique - Points d'attention particuliers au sein des priorités de recherche identifiées par les acteurs industriels Thématiques prioritaires de recherche pour les politiques publiques Impacts de la conduite automatisée sur les trafics et leur fluidité : méthodes de gestion de trafic intégrant le véhicule automatisé ; subordination des fonctions de délégation de conduite à la gestion de trafic ; gestion de trafic coopérative ou décentralisée aux véhicules automatisés ; potentialités de la ségrégation des trafics ; Facteurs humains de conduite et de sécurité routière : enjeux de reprise de contrôle et d'attention ; scenarii de reprise en main de la conduite en cas d'événement imprévu ; Impacts et exigences de la conduite automatisée sur les compétences ; évolutions à long terme des compétences de conduite ; besoins de formation initiale et de mise à niveau des conducteurs ; Impacts sur l'emploi et les métiers Impacts sur la demande de transports et les choix modaux, les valeurs de possession des véhicules et la mobilité partagée ; Impacts sur l'efficacité (y compris environnementale) de la chaîne logistique ; Impacts sur les émissions polluantes et de GES (y compris modifications de la demande) ;
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
55
-
Méthodes de test adaptées aux enjeux de la conduite automatisée, dont systèmes apprenants ; développement des outils de simulation ; évaluation du domaine de pertinence de la simulation pour la validation des systèmes Déterminants de l'acceptabilité individuelle et collective de l'automatisation ; Catégorisation des domaines d'emploi du véhicule automatisé : paramètres d'infrastructures et de trafic ; référentiels partagés de caractérisation des réseaux Utilisation des données du véhicule automatisé pour la connaissance de l'infrastructure et des trafics ; Modèles économiques, impacts sur différentes catégories d'acteurs (insiders / outsiders) ; Impacts sur les corps de contrôle.
Points d'attention particuliers au sein des priorités de recherche industrielles Perception : acquisition, fusion et interprétation des données Amélioration des performances des fonctions de perception (notamment sur les usagers vulnérables); Diagnostic et évaluation en temps réel des fonctions de perception ; Comportements dynamiques des autres véhicules Comportements malveillants d'autres conducteurs ou usagers de la route Apports de la connexion à l'automatisation : capacités comparées et exigences de qualité des différentes technologies (dont ITS-G5, 4G, LTE-V2X, 5G) Reconnaissance des limites du domaine d'emploi
Algorithmes de planification et de décision - Analyse de scénarios de trafic complexes ; - Représentation d'interprétations naturalistiques du code de la route - Méthodes de négociation et de décisions pour planifier une trajectoire prenant en compte les trajectoires des autres usagers de la route, les contraintes de risque, de consommation et de confort ; - Adapter la prise de décision en fonction des usages locaux, du contexte routier... Localisation - Cartographie dynamique garantissant l'autonomie de conduite hors connexion pour une mise en situation de sécurité ; - Amélioration de la précision par l'apport de la cartographie haute définition. Correspondance entre localisation par satellite et connaissance de l'environnement à priori. Interfaces homme-machine - Fournitures d'interfaces claires permettant de renforcer la confiance et l'efficacité perçue dans le système afin de garantir l'acceptabilité a priori et à l'usage ; - Fonctionnalités des interfaces homme-machine (IHM) (visuelles, sonores, haptiques) : exigences de reconnaissance simple, mémorisable et transférable - Monitoring de l'attention : capacités à apprécier les différents états de vigilance et la capacité à prendre la main ; - IHM adaptées à maintenir ou re-mobiliser l'attention et la vigilance du conducteur - Efficacité et qualité de la reprise en main grâce à des informations simples sur la situation de conduite.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
56
Sûreté de fonctionnement - Signalement des défaillances au conducteur - Capacité du conducteur à gérer les défaillances - Actes malveillants - Cybersécurité Systèmes apprenants machine learning - Nouvelles approches ou méthodes de validation / certification Supervision - Supervision et exploitation centralisée des flottes de navettes automatisées - Systèmes de supervision décentralisés Eléments de synthèse et d'orientation A l'appui des politiques publiques, les priorités de recherche concernent principalement les impacts sur la sécurité, la fluidité, la mobilité, l'environnement ; l'acceptabilité ; l'impact sur l'emploi et les compétences ; le facteur humain ; les interfaces homme-machine, les gestes de conduite et la gestion des transitions automatisation reprise en main ; les méthodes et outils de validation des systèmes ; le développement de la simulation ; la supervision.
4.3.4. Modalités de soutien à l'innovation La majorité des technologies nécessaires à la mise sur la route des premiers véhicules automatisés sont disponibles. Toutefois, ces technologies issues de laboratoires nécessitent une adaptation au monde de l'automobile. Elles doivent être rendues plus robustes et pour cela de nombreux essais sur route ouverte son nécessaire. Par ailleurs, le coût de ces technologies doit diminuer afin de se rapprocher des standards de coût de l'industrie automobile. Pour franchir les étapes vers une automatisation complète du véhicule, des efforts importants de R&D restent nécessaires avec un objectif fiabilité/coût propre à l'automobile, notamment dans les domaines des capteurs, des calculateurs et des logiciels, en particulier dans le développement des algorithmes de reconnaissance et de prise de décision.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
57
En France, plusieurs dispositifs d'accompagnement ont été mis en place par l'État en collaboration avec les industriels et les instituts de recherche : - Des outils « collectifs » avec par exemple l'ITE Vedecom et l'IRT SystemX qui reçoivent des financements issus du Programme d'Investissement d'Avenir (PIA) pour mener des programmes de recherche sur des technologies clés du véhicule autonome, ne relevant pas du domaine compétitif. Les industriels sont incités à participer à ces différents projets sur un modèle de co-investissement public/privé (1 euro venant de l'Etat étant obligatoirement compensé par 1 euro venant des industriels) ; - Des dispositifs de soutien, qui permettent de financer des projets de R&D portés par les acteurs privés, notamment le programme « véhicule du futur » du PIA opéré par l'ADEME ou dans le cadre de projets collaboratifs, le Fond Unique Interministériel (FUI) et les PSPC. Au total, ce soutien et la coordination des acteurs industriels au sein de la NFI s'est traduite par plus de 40 expérimentations ou démonstrations autorisées sur route ouverte en France pour tous types d'usages (autoroutier, urbain et péri-urbain), pour les véhicules particuliers et le transport public. Des expérimentations ont également été lancées sur site privé pour des systèmes de transport public ne nécessitant pas d'autorisation ; et plus de 200 millions d'euros de projets financés dans le cadre de différents appels à projets (FUI, action « Véhicule du futur » du PIA, PIAVE...). Les cahiers des charges de ces différents guichets de soutien sont établis en cohérence avec les différentes actions de l'état et notamment avec la feuille de route définis dans le cadre de la solution de la Nouvelle France Industrielle. Eléments de synthèse et d'orientation Il importe que les dispositifs de soutien à l'innovation, et notamment dans le cadre du programme des investissements d'avenir (PIA), permettent de mieux accompagner, par des appels à projets ciblés, le développement de l'automatisation, en aval de la R&D et en amont des expérimentations (typiquement : passage du TRL niveau 6 au TRL niveau 8). Ces appels à projets, ciblés sur la problématique de l'automatisation des transports, devraient être ouverts aux différents domaines d'usage (véhicule particulier, transports publics, fret et logistique) et intégrer les diverses dimensions de l'automatisation (technologies des véhicules, liens avec l'infrastructure, insertion dans le trafic et son exploitation, supervision, connectivité, cartographie et localisation, intégration dans les « bouquets » de service de mobilité). Ces appels à projets devraient permettre des projets collaboratifs entre les acteurs concernés (industriels de l'automobile, des télécommunications et des services multimedia, transporteurs, gestionnaires d'infrastructures, autorités organisatrices de transports, chargeurs et logisticiens).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
58
4.4. Aspects numériques et données
4.4.1. Cyber-sécurité Situation actuelle / bilan Les véhicules automobiles utilisent toujours plus de systèmes informatiques pour contrôler et commander les fonctions « premières » comme la motorisation, le freinage ou le changement de direction, ainsi que pour fournir de nouveaux services « secondaires » comme la navigation, l'assistance ou « l'infodivertissement ». Cette numérisation inéluctable permet trois évolutions majeures du secteur de l'automobile : une motorisation plus respectueuse de l'environnement, une automatisation partielle ou totale des fonctions de conduite et l'apport de nouveaux services. Tous les nouveaux véhicules seront connectés en 2018, a minima du fait de l'adoption obligatoire du dispositif eCall (appel d'urgence). Mais ces connexions seront très prochainement plurielles avec de nombreuses parties prenantes (constructeurs, équipementiers, centres de service (assureurs, assistance...), gestionnaire d'infrastructure, puissance publique...), créant ainsi des écosystèmes numériques complexes et difficiles à maîtriser. Cela multiplie les possibilités d'attaques informatiques qui pourront impacter directement la sûreté de fonctionnement du véhicule. La conception technique des véhicules automobiles est régie par de la réglementation et par des normes :
·
La réglementation technique découle des travaux du forum mondial de l'harmonisation des règlements concernant les véhicules, aussi appelé WP.29, sis à Genève et rattaché à l'Organisation des Nations-Unies. La directive 2007/46/CE établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur (homologation) dans l'Union européenne reprend en effet en grande partie les conclusions de ces travaux. Concernant la prise en compte de la cyber-sécurité, le WP.29 a initié des travaux en 2017. Les normes quant à elles, ne sont pas systématiquement reprises dans la réglementation. Elles constituent néanmoins l'état de l'art et sont généralement adoptées par l'ensemble des acteurs du domaine. La norme qui fait autorité en matière de sûreté de fonctionnement, l'ISO 26262, ne traite pas du sujet de la cyber-sécurité (malveillance). Aussi une nouvelle norme relative à la cyber-sécurité des véhicules à moteur est en cours d'élaboration, l'ISO 21434.
·
Par ailleurs, le cadre réglementaire relatif à la sécurisation des systèmes d'information des opérateurs d'importance vitale3ou des futurs opérateurs de services essentiels 4, ne répond que partiellement aux besoins de sécurisation des activités de transport. En effet ces deux initiatives réglementaires concernent essentiellement les infrastructures critiques et font généralement fi des systèmes embarqués sur les véhicules.
3 4
Article 22 de la Loi de programmation militaire 2014-2019 Directive 2016/1148 sur la sécurité des réseaux et des systèmes d'information
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
59
À ce jour, il n'existe donc pas d'exigence de nature à réduire le risque liés à la cyber-sécurité notamment dans le processus de réception communautaire par type des véhicules (aussi appelée homologation). Notons toutefois que, pour la première fois, le cadre réglementaire national relatif aux expérimentations sur la voie publique de véhicules à délégation partielle ou totale de conduite introduit dans l'instruction des demandes d'autorisation un volet de « cyber-sécurité ».
Orientations possibles
La cyber-sécurité n'a pas pour finalité de freiner l'innovation et la numérisation croissante observée dans le secteur automobile. Cependant face à une menace plus aiguë il convient de respecter et de promouvoir des préceptes qui ont fait leurs preuves en la matière. On peut citer :
· ·
·
·
· ·
·
·
Développer une culture de gestion des risques basée sur des analyses de risques régulièrement mises à jour. Faire un audit de conformité et des tests d'intrusion avant toute mise en circulation d'un nouveau type de véhicule. Ceci pourrait constituer un nouveau chapitre dans le processus de réception communautaire par type (homologation) des véhicules. Intégrer la cyber-sécurité dans tout le cycle de développement des nouveaux produits. Adopter le principe de sécurisation dès la conception pour les logiciels comme pour les matériels (composants, dispositifs, véhicule). Ceci permettra à l'ensemble des parties prenantes de mieux sécuriser les architectures et les réseaux en s'appuyant notamment sur la défense en profondeur (isolation des fonctions critiques), le filtrage des flux, le chiffrement des flux... Imposer des objectifs de sécurité opérationnelle (supervision, détection et gestion des incidents) pour détecter et prévenir les attaques informatiques. Journaliser les événements informatiques en vue d'une analyse approfondie le cas échéant. Adopter une approche holistique en intégrant les infrastructures routières, de télécommunication et débarquées dans le champ d'analyse. Promouvoir, s'ils existent, des composants labellisés (certifiés ou qualifiés par l'ANSSI). Par exemple pour la « passerelle » ou pour les unités de commande électronique (Electronic Control Units ou ECU) des véhicules. Maitriser la sécurité numérique tout au long du cycle de vie du véhicule et de son écosystème, au travers notamment le maintien en condition de sécurité, via des mises à jour de sécurité des véhicules5. Imposer un mode dégradé/manuel en cas de problèmes liés à la cyber-sécurité, ou a minima l'analyse de son opportunité.
Lors des assises de la mobilité, le groupe de travail « Pour des mobilités plus sûres » a proposé la création d'un observatoire de la sûreté des transports dont l'une des fonctions viserait à étudier les questions de cyber-sécurité afférentes au véhicule autonome et connecté. Les questions de cyber-sécurité seraient abordées sous un angle stratégique incluant l'ensemble des acteurs et des représentants des utilisateurs. Ce groupe participerait ainsi au développement du véhicule autonome.
5
Attention toutefois, ces mises à jour multiplient les possibilités de compromission des systèmes et doivent donc être particulièrement maîtrisées.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
60
Éléments de synthèse et d'orientation Il n'y aura pas de confiance dans les nouveaux usages du véhicule automatisé et autonome sans la prise en compte de la cyber-sécurité. En outre la singularité du risque numérique ne doit pas conduire à le traiter de manière singulière. De ce fait, il est suggéré :
· · ·
par le biais du WP.29, de modifier la réglementation technique pour introduire des exigences de nature « cyber », intervenant dès la conception des nouveaux véhicules ; de faire converger les approches normatives relatives à la sûreté de fonctionnement avec celles relatives à la cyber-sécurité ; de peser sur la récente proposition de la Commission européenne relative à un schéma européen de certification en matière de cyber-sécurité qui permettra d'offrir un cadre d'évaluation du niveau de sécurité des produits et des systèmes. La France dispose déjà d'une expertise en la matière qui nécessite d'être adaptée aux systèmes complexes, comme un véhicule connecté ; de mettre en place, idéalement au niveau européen, une structure d'échange dédiée au secteur automobile sur l'état de la menace et les réponses à apporter aux cyber-attaques ; de développer la culture en matière de cyber-sécurité auprès de l'ensemble des acteurs des filières.
· ·
4.4.2. Protection des données personnelles Le développement des véhicules automatisés implique une amplification des capacités de communication, que cela soit avec les infrastructures, avec les autres véhicules ou avec les prestataires de services (maintenance, diagnostic, assurance personnalisée, guidage, etc.). Ces échanges d'informations de plus en plus importants posent de nouvelles questions. En effet, certaines données sont révélatrices de la façon de conduire des automobilistes, de leurs habitudes de vie (endroits fréquentés, horaires, musique écoutées, etc.) ou encore de potentielles infractions au code de la route. En France, la loi Informatique et Libertés est depuis 1978 la réglementation applicable à la protection des données à caractère personnel. En mai 2018, le Règlement général sur la protection des données (« RGPD ») entrera en application et offrira un cadre unifié de protection des données des personnes au sein de l'Union européenne. D'application directe, ce règlement renforce les droits des individus, introduit de nouveaux droits (droit à la portabilité, droits à l'effacement, etc.), responsabilise les acteurs traitant les données personnelles et accroît les pouvoirs de régulation des autorités de protections des données. La Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (« CNIL »), soucieuse de favoriser les écosystèmes d'innovation tout en assurant la protection des données personnelles des usagers de l'automobile, a élaboré en concertation avec les acteurs du secteur de la filière automobile, les entreprises innovantes du secteur des assurances et des télécoms, et les autorités publiques un « pack de conformité » dédié aux véhicules connectés. Ce pack propose des lignes directrices pour une utilisation responsable des données dans les
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
61
prochaines générations de voitures, conforme à la loi Informatique et Libertés et au RGPD. L'enjeu est d'intégrer la dimension « protection des données personnelles » dès la phase de conception des produits et d'assurer la transparence et le contrôle par les personnes de leurs données conditionnant la confiance des utilisateurs. Au niveau européen, le G29, le groupe des « CNIL » européennes, a été sollicité par la plateforme C-ITS pour contribuer aux travaux sur les aspects de protection des données à caractère personnel et sur le respect de la vie privée. Il convient de se poser collectivement la question de comment assurer le respect des normes de protection des données qui sont donc fixées au niveau européen. Éléments de synthèse et d'orientation Toutes les données qui peuvent être rattachées à une personne physique identifiée ou identifiable, notamment via le numéro de la plaque d'immatriculation ou le numéro de série du véhicule sont des données à caractère personnel protégées par la loi Informatique et Libertés et le Règlement général sur la protection des données (RGPD). Le pack de conformité « véhicules connectés » piloté par la CNIL vise à sensibiliser les acteurs économiques du secteur automobile sur les principes de transparence et de loyauté de la collecte, qui impliquent a minima une information des personnes concernées, voire le recueil de leur consentement. Une approche de protection des données dès la conception (« privacy by design ») doit être privilégiée. Les travaux relatifs à l'accès aux données du véhicule présentés ci-après intégreront dès l'amont les exigences du RGPD. L'approche du « privacy by design » pourra également se traduire utilement par la mise en place d'outils facilement paramétrables permettant à l'utilisateur d'exprimer de façon simple et claire ses choix en matière de maîtrise de ses données et des traitements qu'il autorisera à en faire.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
62
4.4.3. Enregistreur de données à bord Pour établir les différentes responsabilités dans le cas d'un sinistre de véhicule autonome, il sera nécessaire de pouvoir examiner la scène en détail. Notamment il faudra établir : - si le mode autonome était enclenché ; - s'il fonctionnait dans les domaines d'utilisation définis par le constructeur ; - si la faute est imputable à une réaction du véhicule automatisé ou liée à une faute d'un autre automobiliste ; - si le véhicule a bien respecté les prescriptions du code de la route ; - etc ... Afin de pouvoir récupérer ces différentes informations, la présence d'un enregistreur de données d'accidents (EDR) à bord du véhicule, dédié à cet effet, semble indispensable. Les obligations de présence à bord de ces équipements, la durée d'enregistrement et de conservation des données, ainsi que le type et le format qu'elles devront prendre, devront être définis de manière internationale dans les réglementations techniques d'homologation (CEEONU WP29). Dans un contexte plus général de sécurité routière, la France a déjà montré sa volonté de voir déployer les EDR dans tous les véhicules neufs. Ces systèmes n'ont nullement vocation à dresser l'historique des déplacements des conducteurs, mais seulement à mieux connaître les événements techniques précédant de quelques secondes un accident. Les études accidentologiques devraient gagner en précision, dès lors que la vitesse, les accélérations et/ou décélérations, ainsi que la trajectoire du véhicule dans les secondes précédant l'accident, peuvent être connues et analysées. La Commission européenne a fait réaliser une étude sur l'EDR en 2014. L'objectif de cette étude était d'aider la Commission à décider si l'installation d'EDR dans tous les véhicules ou certaines catégories de véhicules [poids lourds, les véhicules utilitaires légers, les autobus et les autocars, et les voitures particulières (à usage privé et commercial)] pourrait entraîner une amélioration de la sécurité routière ou d'autres conséquences possibles justifiant les coûts associés à l'adoption de mesures dans la législation européenne. L'enregistreur de données à bord dédié au véhicule autonome, que l'on désigne par le terme ADDR (autonomous driving data recorder) a vocation à enregistrer les données permettant de définir les actions du conducteur et du système de délégation de conduite au moment d'un accident. Une réglementation technique internationale au niveau de la CEE-ONU est en préparation pour rendre obligatoire et définir l'ADDR pour les systèmes de délégation de conduite niveau SAE3 et plus. La Commission envisage d'introduire une obligation d'un EDR pour les véhicules légers (voitures et camionnettes) dans son projet de révision du règlement général de sécurité des véhicules, prévu pour 2018. Un tel déploiement devrait par la même occasion traiter des problématiques liées à la conduite déléguée, pour laquelle il est essentiel de savoir si, à l'instant t, le véhicule était « conduit » par le système automatisé seul ou partiellement, donc en collaboration avec le conducteur, ou encore totalement pris en charge par le conducteur.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
63
Dans le cadre de la gestion d'un sinistre automobile impliquant un véhicule automatisé, les données générées par ces équipements peuvent également permettre de faciliter, après l'indemnisation des victimes, la recherche des responsabilités pour les recours subrogatoires nécessaires contre le(s) responsable(s) de l'accident. Il importera que les forces de l'ordre puissent disposer de systèmes d'information interopérables avec les futurs EDR afin d'accéder aux données à valeur judiciaire en cas d'accident.
Éléments de synthèse et d'orientation Dans un contexte général de sécurité routière, la France soutient le déploiement des enregistreurs de données d'accidents (EDR) dans tous les véhicules neufs, destinés uniquement à mieux connaître les événements techniques précédant de quelques secondes un accident. Le développement de l'automatisation renforce ce besoin. Dans ce contexte, la France soutien le principe de l'enregistrement des données de conduite autonome (ADDR) pour les systèmes de délégation de conduite de niveau SAE3 et plus. Les obligations de présence à bord de ces équipements, la durée d'enregistrement et de conservation des données, ainsi que le type et le format qu'elles devront prendre, devront être définis de manière internationale dans les réglementations techniques d'homologation (CEEONU WP29), ou à défaut par la Commission européenne. De plus, le déploiement des EDR étant dépendant d'une action au niveau de l'UE, la France s'emploie à agir auprès de la Commission européenne afin qu'elle fasse rapidement une proposition législative en la matière. La Loi d'orientation des mobilités fixera les règles d'accès aux données de ces équipements, dès lors qu'ils seront disponibles à bord, pour les besoins d'investigation et d'enquête des forces de l'ordre qui devront disposer des moyens adéquats et, le cas échéant, d'expertise assurantielle sur les accidents.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
64
4.4.4. Données produites par le véhicule automatisé Les nouveaux usages et les services produits à partir des données issues des véhicules voient leur potentiel démultiplié par l'apparition de la connectivité des véhicules. L'automatisation, avec ses fonctionnalités d'observation de l'environnement du véhicule, va encore augmenter ce potentiel. La richesse de ces données et la possibilité d'un recueil à distance et, dans certains cas, en temps quasi-réel, créent la possibilité de la conception d'une multitude de nouveaux services pour les usagers des transports (pouvant permettre des gains de sécurité et un renforcement des mesures de prévention, une amélioration de l'expérience du déplacement, une optimisation de l'organisation du déplacement ; ou une réduction des coûts) mais aussi au secteur automobile, aux gestionnaires routiers, à l'industrie routière, au secteur des assurances (développement des offres d'assurance comportementale de type « Pay as you drive ») et, audelà, à toutes les activités économiques liées aux usages de transports (tourisme, commerce, loisirs, etc....). Les enjeux liés aux conditions d'accès à ces données recouvrent plusieurs dimensions : - interopérabilité ou interfaces d'échanges ; - protection et conservation des données à caractère personnel ; - sécurisation des données ou cybersécurité ; - responsabilité de la production et du traitement des données ; - droits d'accès aux données et mise en oeuvre opérationnelle du droit à la portabilité des données personnelles prévu à l'article 20 du RGPD ; - enjeux économiques et concurrentiels - liens avec les politiques publiques, notamment de sécurité routière et de gestion des réseaux et des déplacements. Ces enjeux dépassent largement le contexte national et sont, au moins pour la dimension d'interopérabilité, de portée européenne. La directive 2010/40/EU fournit un premier cadre : - en définissant les règles d'accès aux données pour la fourniture de services d'information sur les actions prioritaires : information de sécurité routière en temps réel, information routière, information déplacement, information parking, eCall. - en identifiant comme domaine d'action européenne prioritaire le lien entre le véhicule et les infrastructures de transport pour l'élaboration et l'utilisation de spécifications et de normes. Concernant l'accès aux données véhicules, le rapport de janvier 2016 de la plateforme C-ITS (Platform for the Deployment of Cooperative Intelligent Transport Systems in the European Union) recommande d'adopter cinq principes : - Le consentement de l'usager avant de rendre l'accès et l'usage possibles des données de son véhicule à des fournisseurs de services ; - Une concurrence juste et non faussée entre tous les fournisseurs de service ; - Le respect des enjeux de vie privée de l'usager et la sécurité des données de son véhicule ; - Les services utilisant les données des véhicules ne doivent par remettre en cause la sécurité de fonctionnement du véhicule - Favoriser un accès standardisé pour favoriser l'interopérabilité entre les différentes applications
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
65
Les constructeurs automobiles européens réunis au sein de l'ACEA ont proposé en décembre 2016 des principes d'accès différenciés en fonction de quatre types de données : Sécurité routière : · accès aux données anonymisées sur une base réciproque entre autorités publiques et constructeurs · accès contractuel (B2B) pour les acteurs privés Services multi-fournisseurs (ex : information parking, reconnaissance de la signalisation) · accès contractuel (B2B) entre acteurs Services personnalisés au conducteur (ex : « pay as you drive ») · accès aux données personnelles, dans le cadre d'un service identifié pour lequel le conducteur a spécifiquement donné son accord Données commerciales et de suivi des composants des véhicules · pas d'accès par des tiers
-
Au niveau européen, les questions d'interopérabilité et de sécurité devraient être abordées dans un règlement délégué de la Directive 2010/40 sur les ITS. Compte-tenu du cadre européen existant, il apparaît important de clarifier maintenant les principes sur deux autres volets majeurs de la problématique : - enjeux économiques et concurrentiels - appui aux politiques publiques S'agissant de l'appui aux politiques publiques, on peut illustrer l'apport des données du véhicule de la façon suivante : certaines données fournissent de l'information sur des événements inopinés ou imprévus affectant la sécurité routière (incidents, accidents, conditions météorologiques exceptionnelles). Il est difficile de collecter ces données via d'autres sources ; les informations qui en sont issues sont classiquement considérées comme relevant d'une mission d'intérêt général (de sécurité) sans coût pour l'usager ; certaines données participent à la connaissance du trafic, et peuvent venir en complément ou en substitution de données produites par les gestionnaires routiers (débit, vitesse) pour la gestion du trafic : sur cet aspect, se mêlent des services marchands (information routière privée) et non marchands (gestion de trafic, information routière publique) ; l'information routière recèle elle-même des enjeux de politique publique dans la mesure où les comportements qui en sont issus peuvent affecter les politiques de gestion de trafic, de sécurité ou de mobilité (exemple des re-routages sous-optimaux ou dangereux) ; certaines données fournissent de l'information sur la consistance (géométrie, équipements...) et l'état du patrimoine des réseaux d'infrastructures, utilisables ensuite d'une part par les gestionnaires pour la gestion de leur patrimoine, d'autre part pour améliorer les performances des véhicules en matière de localisation et perception de son environnement ; cet axe ou groupe de données s'apparente, par certains aspects, à la production d'une base cartographique approfondie et détaillée, qui, en termes économiques, peut se rapprocher d'un bien public.
-
-
Les Assises de la Mobilité ont exprimé des attentes fortes en matière d'accès aux données produites par le véhicule automatisé et connecté. Ces attentes sont prises en compte dans le cadre de la préparation de la Loi d'orientation des mobilités.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
66
Ainsi, les données des véhicules ainsi que des dispositifs de navigation embarqués, représentent de forts enjeux pour les personnes en charge de la gestion du trafic routier, de l'entretien et de l'exploitation des infrastructures routières, de la préservation de la sécurité routière. Il convient d'assurer un accès aux données des véhicules aux personnes chargées d'une mission de service public, dans l'exercice de ces missions, dans le respect des dispositions du Règlement général sur la protection des données, et en limitant strictement les données et les utilisations concernées aux seules données qui sont nécessaires à la gestion du trafic routier, à l'entretien et l'exploitation des infrastructures routières, à la préservation de la sécurité routière. Par ailleurs, les données des véhicules et des services de navigation embarqués sont potentiellement source de création de services et de valeur ajoutée, et ce d'autant plus qu'elles peuvent être intégrées à un cadre plus large de données de mobilité (autres modes) ou fusionnées avec des données hors mobilité. A ce stade, les domaines dans lesquels des attentes d'accès semblent s'être cristallisées sont la réparation automobile ; l'assurance et l'expertise automobile ; les services s'appuyant sur la gestion de flottes ; les services d'information et de billetique multimodales intégrés dans le concept de « mobility as a service », notamment dans les zones où le véhicule routier reste un support essentiel de la mobilité et permet de développer les usages partagés et le rabattement vers les transports massifiés. Une étude et une concertation nationales ont été lancées en France en 2017 pour proposer différentes options pour la définition des droits et modalités d'accès aux différents types de données, en tenant compte du fonctionnement des marchés concernés, du cadre général du droit de la concurrence et de la protection des données Il conviendra d'adopter une approche équilibrée, qui permette aux acteurs produisant ces données, de les valoriser et d'en améliorer en continu la qualité, et la possibilité pour des acteurs tiers, de créer de nouveaux services, le tout dans le respect des dispositions du RGPD. L'approche française qui sera issue de la Loi d'orientation des Mobilités doit être articulée avec les travaux européens, et notamment la stratégie européenne sur la conduite automatisée et connectée prévue pour mai 2018. En particulier, au niveau européen, une task-force publicprivé a été mise en place en mai 2017, afin d'étudier les architectures définissant le rôle des différents acteurs dans la production, qualification, et transmission des données liées à la sécurité routière, à la gestion des incidents, d'entretien des infrastructures et de gestion de trafic.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
67
Eléments de synthèse et d'orientation Les conditions d'accès aux données du véhicule constituent un élément clé du développement du véhicule autonome et connecté et des services qui peuvent s'y attacher. Ces conditions d'accès, et d'échange avec les données de l'infrastructure, sont déterminantes pour les autorités et gestionnaires routiers pour améliorer la gestion des réseaux routiers et de la sécurité routière. Les aspects d'interopérabilité et d'interfaces, de sécurité, et de protection de la vie personnelle étant abordés dans des cadres spécifiques, il importe maintenant de clarifier les conditions économiques et concurrentielles d'accès à ces données, en tenant compte des spécificités des différents acteurs de la chaîne de valeur, notamment des gestionnaires et autorités publiques. Ceci nécessite de définir des conditions-cadre d'accès, en distinguant les types de données ou de services d'information en fonction des besoins de politique publique des transports et de sécurité routière d'une part, des enjeux concurrentiels d'autre part, le tout dans le respect des dispositions en matière de protection des données individuelles. La Loi d'orientation des Mobilités fournira un cadre pour les échanges de données au sein de l'éco-système des utilisations de données liées au véhicule automatisé et connecté. La France s'attachera à ce que le cadre français soit cohérent avec les modalités organisationnelles et techniques d'échanges de données destinées à assurer l'interopérabilité et le respect des règles de concurrence au niveau européen.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
68
4.5. Liens avec l'infrastructure, connectivité, cartographie
4.5.1. Identification des domaines d'emploi sur les réseaux routiers La définition des domaines d'emploi des fonctionnalités automatisées constitue un socle pour les développements technologiques et serviciels, et pour construire une approche réglementaire adaptée à la diversité des cas d'usages. Les paramètres définissant les domaines d'emploi ne se résument pas à une configuration d'infrastructure, mais incluent également les conditions de trafic ou météorologiques. Sur le seul volet de la configuration de l'infrastructure, les capacités de fonctionner en mode automatisé sont, à infrastructure égale, très variables d'un modèle de véhicule à l'autre, car elles sont fonctions des types de capteurs et de leurs capacités, des algorithmes de reconstitution de lignes, de l'intelligence embarquée, des conditions de reprise en main par le conducteur. Par ailleurs, à véhicule donné, il est techniquement impossible pour un gestionnaire d'infrastructure routière de garantir, par exemple, un niveau minimum de contraste de la signalisation horizontale atteint à tout instant. L'usure de la signalisation horizontale est fonction du nombre de passages de roues et des conditions météorologiques et le moment où il passera sous un certain seuil est donc imprévisible. Ainsi, même avec des moyens financiers infinis, il est impossible de garantir que le véhicule automatisés ne trouvera jamais une signalisation horizontale effacée sur plusieurs dizaines de mètres suite à un événement impromptu (accident, intempéries, ...). Il est donc clair qu'il doit revenir au véhicule de décider, sur la base de ses systèmes d'observation, de positionnement, de connectivité et de supervision, s'il est dans son domaine d'emploi, et qu'il soit capable de reconnaître la nécessité d'une reprise en main par le conducteur, ou la supervision déportée. Il n'appartient donc pas aux autorités publiques, et plus particulièrement aux gestionnaires routiers, de proposer des niveaux de service ni une labellisation de certaines portions d'infrastructure « ouvertes à la conduite automatisée ». Pour autant, il pourrait être d'un intérêt commun à l'ensemble des acteurs, de développer un travail partagé de caractérisation des réseaux, en fonction de leur géométrie, des attributs nominaux de signalisation, des conditions de trafic et d'accidentologie, permettant notamment aux différents cas d'usage de définir leurs domaines d'emploi sur une base commune, et, audelà, de fonder un référentiel commun d'analyse de sécurité pour certains cas d'usage. Par ailleurs, l'infrastructure elle-même peut fournir des informations qui facilitent cette décision par le véhicule, grâce à des informations transmises par la connectivité du véhicule, en s'appuyant le cas échéant sur des amers visibles par les capteurs du véhicule et précisément localisés. Plus particulièrement, pour les cas d'usage sur autoroute, les travaux de la NFI ont identifié des configurations-clés où un tel apport serait particulièrement intéressant : il en est ainsi par exemple des configurations de chantier et de l'approche des péages.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
69
Eléments de synthèse et d'orientation Il doit revenir au véhicule de reconnaître, avec l'appui de ses capteurs, et éventuellement de sa connectivité, de sa cartographie et de sa supervision, s'il est dans son domaine d'emploi et d'adapter en conséquence les modes de délégation de conduite. L'infrastructure peut fournir des informations qui facilitent cette décision par le véhicule, en combinant de façon efficace la signalisation, la connectivité et la cartographie numérique. Les travaux entre gestionnaires routiers, constructeurs automobiles, industries de la route, pour identifier ces informations, leurs modalités de transmission et éventuellement la localisation d'amers connectés (cf. ci-dessous sur la cartographie), en commençant par les configurations de chantier sur autoroute et d'approche des péages. Deux objectifs seront identifiés comme prioritaires : la détection du chantier ou du péage pour la reprise en main, le franchissement automatisé de ces zones (correspondant au passage au niveau 4 SAE). Le lien sera fait avec les travaux sur la connectivité et le projet SCOOP@F et ses suites (cf ci-dessous sur le véhicule connecté). Cette approche sera ensuite étendue à d'autres cas d'usage, à commencer par les transports publics, en intégrant la notion de site propre ou semi-protégé.
4.5.2. Liens avec les enjeux du véhicule connecté L'apport de la connectivité à l'automatisation fait l'objet d'un intérêt croissant de la part des acteurs industriels et des autorités publiques, même si les deux domaines ont pour l'instant évolué de façon relativement indépendante. Les véhicules automatisés se repèrent en croisant une perception de l'environnement (signalisation horizontale, dispositifs de retenue, signalisation verticale) par capteurs natifs (caméras, radars, lidars) et un repérage satellitaire lié à une cartographie embarquée. Les capteurs actuellement ont une portée maximale de 100 à 200 m, ce qui apparaît insuffisant pour l'anticipation de certaines situations ou certains événements critiques affectant la sécurité routière (accidents, personnes, encombres sur les voies, évolutions du nombre de voies, échangeurs complexes, zones de travaux, péages, ralentissements brisques ou bouchons, conditions météorologiques et d'adhérence). Pour élargir et affiner l'horizon de perception du véhicule, deux compléments aux capteurs présentent un intérêt potentiel majeur : - la connectivité du véhicule (à l'infrastructure, aux autres véhicules, ou au réseau cellulaire) ; - une cartographie de haute définition.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
70
Ces compléments permettent d'enrichir le modèle de perception et d'asseoir dans un premier temps, des procédures d'alerte du conducteur et des demandes de reprises en main. Ultérieurement, il est envisageable, selon la qualité (latence, fiabilité, précision) de ces données, que l'asservissement du véhicule s'appuie aussi sur ces compléments, permettant alors d'aborder ces situations ou événements critiques en mode automatisé. L'apport potentiel de la cartographie et les orientations pour l'action publique sont présentées ci-après. S'agissant de la connectivité, l'apport attendu se situe schématiquement : - dans l'enrichissement des fonctions de perception autonome du véhicule (sensing) par la connexion (recieving), - dans l'enrichissement des données remontées par le véhicule par des données de perception (sensing) Cet enrichissement des fonctions de perception, et leur sécurisation, peu s'appliquer à divers cas d'usage, en milieu urbain, comme en milieu interurbain ou rural. Il est donc susceptible de bénéficier à l'ensemble des territoires. La France a adopté en 2014 une action publique volontariste de développement des systèmes coopératifs (C-ITS) véhicules-infrastructures et véhicules-véhicules, dans l'objectif d'améliorer la sécurité routière, en particulier la sécurité des agents d'exploitation, et la gestion des trafics. Ces systèmes présentent de nombreux bénéfices en tant que tels, indépendamment d'un couplage éventuel avec des fonctionnalités automatisées : améliorer la sécurité routière et la sécurité des agents d'exploitation : permettre aux véhicules de "parler" entre eux et à l'infrastructure en échangeant des données de base sur la sécurité est susceptible d'éviter de nombreux accidents. De plus, grâce aux informations I2V sur les chantiers, les interventions suite à accident, la viabilité hivernale, etc. Ces données, mises directement à la disposition du conducteur dans son véhicule, devraient permettre une réduction du nombre d'accidents parmi les agents d'exploitation. rendre la gestion de trafic plus efficace et contribuer aux réductions d'émissions : grâce à la collecte de données par les véhicules et/ou l'infrastructure, les C-ITS permettent une meilleure gestion et une meilleure efficacité de l'information routière en temps réel. Ceci contribuera par ricochet à la réduction des émissions du système de transport. De plus, avec l'apparition de la possibilité de croiser des informations relatives aux parcs relais (emplacement, disponibilité de places de stationnement...) avec des informations relatives aux systèmes de transport (comme les emplacements des gares ferroviaires, des arrêts de bus ou des pôles multimodaux), ils permettront la création de nouveaux services multimodaux pour une mobilité durable (comme le covoiturage dynamique). optimiser les coûts de gestion de l'infrastructure, préparer le véhicule du futur et développer de nouveaux services : le déploiement interopérable et intégré de C-ITS participe d'une logique d'optimisation des coûts relatifs à la sécurité routière et la gestion des infrastructures existantes, tout en offrant de nouveaux services dont les modèles économiques doivent encore être testés, s'en trouvera améliorée. Le développement des C-ITS représente un potentiel significatif de création d'emploi en Europe.
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
71
L'approche française consiste principalement, au travers de la conception et du déploiement de cas d'usage, à : - identifier les priorités du point de vue de la sécurité routière et de la gestion des infrastructures, pour l'ensemble des cas d'usage et des domaines et territoires d'emploi ; - identifier les besoins d'interopérabilité et de sécurité des échanges d'information ; - spécifier, développer et tester, puis déployer des systèmes répondant à ces besoins ; - évaluer les impacts de ces cas d'usage en termes de comportements des usagers et, partant, de sécurité routière et de gestion des trafics ; - étudier les potentielles répercussions pour la sûreté des transports. L'approche se fonde sur des déploiements pilotes, en grandeur réelle. Cette approche française tient compte des priorités de cas d'usage identifiés au niveau européen, dans les actions prioritaires et règlements délégués de la directive sur les transports intelligents (Directive 2010/40) d'une part, dans la stratégie de développement des systèmes coopératifs du 30 novembre 2016 d'autre part (COM (2016) 266). L'approche française élargit progressivement les cas d'usage, en abordant les cas d'usage urbains, les cas d'usage de fret, et le lien entre connexion et automatisation (cf. ci-après).
Encadré : Projets de déploiement pilote des systèmes coopératifs (C-ITS) en France dans le contexte européen SCOOP@F est un projet de déploiement pilote de systèmes de transport intelligents coopératifs, c'est-à-dire basés sur l'échange d'informations entre véhicules et entre le véhicule et la route. Les véhicules sont équipés de capteurs qui détectent des événements (route glissante, choc, freinage brusque...) et d'unités embarquées qui transmettent l'information aux véhicules en amont ainsi qu'au gestionnaire via des unités bord de route. Le gestionnaire peut aussi transmettre des informations (chantiers...) aux unités embarquées dans les véhicules. Le projet rassemble de nombreux partenaires publics et privés autour du MTES qui en assure la coordination : des collectivités locales, des gestionnaires routiers, les constructeurs automobiles PSA et Renault, des universités et des centres de recherche, un opérateur télécom, un fournisseur de services de sécurité... SCOOP@F vise à déployer 3000 véhicules sur 2000 km de routes répartis en cinq sites : Ile-de-France, A4, Isère, rocade de Bordeaux et Bretagne. Ces sites sont caractérisés par une grande diversité de types de routes (autoroutes, axes structurants de métropole, routes bidirectionnelles interurbaines et locales). La technologie employée est de type wifi (ITS G5). Les véhicules Renault et PSA sont aujourd'hui en vente et l'évaluation des impacts (sécurité routière, congestion, socio-économie, sureté, etc.) va démarrer. Le projet travaille également sur l'expérimentation d'une technologie hybride ITS G5/cellulaire. Deux projets fils ont été lancés en 2016 : C-Roads France et InterCor. Ils se basent sur cette technologie hybride. C-Roads France vise à étendre la couverture géographique de SCOOP@F dans le Nord-Est, le Centre-Est, en Bretagne et à Bordeaux, et à développer de nouveaux services dans deux catégories : - services urbains et à l'interface urbain/interurbain : information sur le passage des feux au vert, information sur les transports en commun, etc. - services au trafic de transit : information sur les services disponibles sur les aires, itinéraires conseillés, etc. InterCor rassemble 4 pays : France, Belgique, Pays-Bas, Royaume-Uni. La partie française consiste en une extension de SCOOP@F dans les Hauts-de-France. Il développera également de nouveaux services dans la logistique : information sur les places de stationnement poids lourds, optimisation de l'accès aux ports, etc.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
72
Eléments de synthèse et d'orientation Il importe de mieux apprécier l'apport possible de la connectivité à l'automatisation dans une approche technologiquement neutre entre technologies de communication (ITS-G5 ; 4G ; LTE-V2X ; 5G). Les travaux engagés en 2017 sur le lien automatisation-connexion seront poursuivis, notamment dans la perspective de l'évaluation des apports possibles vis-à-vis de la 5G et, le cas échéant, des exigences associées : - en s'appuyant sur des cas d'usage concrets et sur les situations critiques, i.e. celles dans lesquelles la perception du véhicule par ses capteurs peut présenter des limites du point de vue de la sécurité routière ; - en analysant les apports de la connectivité et/ou de la cartographie de précision dans une approche fonctionnelle et performantielle (besoins de latence, précision, fiabilité, couverture, rafraîchissement, mise à jour) ; - en faisant le lien avec les spécifications des services prioritaires développés dans le cadre des projets de systèmes coopératifs (C-ITS) (projets SCOOP@F, InterCor et C-Roads France). - en traitant prioritairement les cas d'usage de conduite sur autoroute, puis des transports urbains, puis de la gestion des intersections. Les gestionnaires routiers seront invités à réfléchir à un plan de déploiement de la connectivité, basée sur les technologies matures à ce jour. Pour alimenter cette réflexion, un document méthodologique présentant notamment les cas d'usage, leurs domaines d'emploi possible et le type de connectivité concerné, sera mis à disposition, et publié. En parallèle, une étude sera lancée afin d'évaluer la pertinence socio-économique de la couverture de différentes sections-types du réseau routier en différentes technologies de connectivité, sur la base de cas d'usage de véhicule connecté et de véhicule automatisé+connecté. Cette étude inclura, outre les technologies matures, la perspective de la 5G, en tenant compte de son niveau de qualité prévisible (latence, précision, fiabilité, couverture). La technologie LTE-V2X sera abordée dans la mesure de la disponibilité d'informations précises sur les cas d'usage couverts et la qualité de la connexion.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
73
4.5.3. Développement de la cartographie numérique de précision Le véhicule automatisé possède schématiquement trois sources d'information lui permettant à la fois de se repérer, d'interagir voire de communiquer avec son environnement : Les capteurs : multiples dans leur nombre et leurs caractéristiques, ils sont les yeux du véhicule, lui permettant de détecter son environnement. Les capteurs sont aujourd'hui la principale source d'information des véhicules automatisés. Les technologies des capteurs connaissent en revanche des limites de portée (de l'ordre de la centaine de mètres), mais également de détection (par exemple détection d'un panneau caché derrière un convoi de poids lourds). La connectivité : qu'elle soit entre véhicules (V2V) ou entre infrastructure et véhicule (I2V), elle permet au véhicule d'interagir avec l'environnement dans une logique d'information et d'optimisation de la conduite. La cartographie : intégrée dans le véhicule et/ou téléchargée à l'avancement, la cartographie peut intervenir comme support majeur de la conduite automatisée en complément des capteurs et de la connectivité. Elle semble pouvoir se décliner en deux types, pouvant être assimilés à deux couches : o une Cartographie Spatiale Haute Définition pouvant contenir des informations précises sur la géométrie de la route (longitudinales et latérales), sur la signalisation routière, ou encore des amers visuels géolocalisés permettant au véhicule de se localiser avec précision ; o une Cartographie Dynamique Temporelle pouvant contenir des informations de trafic, de conditions météorologiques, la signalisation d'accidents ou de travaux, la présence de piétons ou d'animaux. La conception des dispositifs de guidage pour les véhicules autonomes, est confrontée aux limites technologiques des capteurs embarqués, en termes de champ de vision et de précision. La cartographie de haute définition présente ainsi, en lien avec la connectivité du véhicule, des potentialités importantes pour compléter, élargir et affiner l'horizon de perception du véhicule. La cartographie numérique de précision présente, en lien avec la connectivité du véhicule, des potentialités importantes pour élargir et affiner l'horizon de perception du véhicule. Ceci peut être utile à plusieurs titres : - compléter les informations collectées par les capteurs, voire prendre le relais de ceux-ci dans certains cas : dysfonctionnement des capteurs (masque lié aux intempéries par exemple), capteurs en dehors de leur domaine de pertinence (marquage effacé par exemple), ou encore redondance de la cartographie par rapport aux capteurs en vue d'améliorer la sûreté de fonctionnement, - permettre une meilleure anticipation par les véhicules de certains événements. Cependant, la cartographie numérique de précision est confrontée à des limites technologiques (précision, temps de latence, sécurité, etc), ou sécuritaires (propriété, origine
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
74
et certification des données, intrusions, etc). Les constructeurs sont face à une balance capteurs/cartographie dans la conception des véhicules : de nombreux capteurs peuvent permettre de se passer d'une cartographie de précision, et vice versa. La pertinence de la cartographie pour le premier point (compléter les informations collectées par les capteurs) est très liée aux choix du constructeur pour le système d'automatisation. Pour le deuxième point (permettre une meilleure anticipation du véhicule), la cartographie permet d'offrir un environnement de perception dépassant les possibilités des capteurs. En fonction du rôle de la cartographie pour le véhicule automatisé (vis-à-vis des capteurs et d'autres sources d'informations via la connectivité), du niveau d'automatisation souhaité, du degré d'anticipation des événements souhaité, les exigences vis-à-vis de cette cartographie peuvent différer. Ainsi, différents niveaux de cartographie peuvent correspondre à différents besoins du véhicule automatisé, notamment : - la cartographie pour le choix d'itinéraire du véhicule (qui existe depuis longtemps), - le positionnement longitudinal / latéral fin (décimétrique) par rapport à l'infrastructure, - le positionnement et la vitesse par rapport aux autres véhicules, la connaissance de la signalisation routière, des conditions météorologiques, des événements inopinés, etc. Au fur et à mesure du développement du véhicule autonome et de l'extension de son domaine d'emploi, la cartographie numérique de précision tend à prendre une importance croissante. Il importe de mieux apprécier cet apport possible par : - l'identification des situations ou événements les plus critiques rencontrés par le véhicule autonome dans lesquels la connectivité et la cartographie de précision pourraient améliorer la perception élargie du véhicule ; - les besoins fonctionnels de cartographie afférents (y compris sa précision et son rythme de mise à jour). La redondance qui sera probablement nécessaire entre les positionnements par les capteurs, par la connectivité et par le géo-positionnement, va rendre nécessaire de faire correspondre ces différentes « couches » de localisation, ce qui renvoie à la notion d'amer ou point de repère prioritaire, assurant que la localisation sur une « couche » correspond bien à celle d'une autre « couche ». Ces amers vont constituer l'armature de la cartographie de précision, leur localisation présente des enjeux majeurs pour les gestionnaires routiers, et leur éventuel équipement en connectivité présente des enjeux majeurs pour ces gestionnaires et l'industrie. La définition d'une doctrine partagée d'implantation, de localisation, de cartographie et d'équipement en connectivité de certains amers, présente un enjeu majeur pour l'ensemble des acteurs.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
75
Eléments de synthèse et d'orientation La cartographie de précision dynamique, en lien avec la connectivité du véhicule, pourrait utilement améliorer les capacités de perception du véhicule autonome, en particulier pour aborder des situations critiques de sécurité routière. Les priorités de cartographie du réseau routier correspondantes doivent être établies, en fonction de ces enjeux de sécurité routière. En particulier, les amers ou points de repère prioritaires pour améliorer la reconstitution de l'environnement du véhicule, et son positionnement relatif doivent également être définis, de façon partagée entre acteurs. Ces travaux seront conduits dans le cadre d'un partenariat avec l'Institut géographique national (IGN), en s'appuyant si besoin sur une expérimentation de cartographie de précision sur un site de dimension réduite, a priori fermé, permettant d'évaluer les apports en termes de reconstitution de l'environnement du véhicule. Il importe également, si l'utilisation automatique de l'information cartographique de précision se développe pour les véhicules autonomes, de concevoir une forme de validation de cette information, qui pourrait prendre plusieurs formes, éventuellement complémentaires : - Définir une architecture portant sur les rôles attendus des différents acteurs dans la production, la qualification et la validation de l'information cartographique de précision, sur les modalités de contractualisation afférents, notamment en termes d'actualité, de qualité et de responsabilité. - Mettre en place une « autorité de réception » en charge d'homologuer la couche cartographique des fonctionnalités embarquées. - Mettre en place un entrepôt commun et indépendant des données dynamiques qui décrivent les infrastructures routières, permettant leur rediffusion en continu à tous les systèmes ITS via les moyens de connectivité. L'opportunité et les modalités de mise en place une ou l'autre des actions ci-dessus seront évaluées avec l'IGN.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
76
4.6. Aspects économiques et sociétaux, gouvernance, cadres de travail
4.6.1. Enjeux industriels et d'emploi Face à une révolution technologique majeure qui apparaît inéluctable, l'action publique doit anticiper et créer les conditions pour que cette évolution soit créatrice d'emploi, notamment en préparant les conversions nécessaires. L'impact sur l'emploi concerne potentiellement un très grand nombre d'activités, pas uniquement dans les transports, qui comporte 700 000 emplois mais également dans l'industrie (500 000 emplois au sein de la filière automobile par exemple). Le développement de l'automatisation va probablement conduire à des transferts de qualifications et d'emploi, avec des opportunités de créer de nouveaux emplois et de nouvelles compétences, probablement plus qualifiées, à l'interface des transports et du numérique. Les enjeux en terme d'emplois et de compétence sont majeurs et ont été identifiés comme tels par le Gouvernement et la plupart des acteurs, en France comme dans d'autres pays. D'ores et déjà, des réflexions ont été engagées par les opérateurs de transports publics, réunis au sein de la Nouvelle France industrielle, sur les nouvelles compétences liées à la supervision et à l'accompagnement dans les navettes automatisées. Au-delà, le gouvernement (Conseil National de l'Industrie du 20 novembre) a d'ores et déjà demandé à la filière industrielle d'identifier les impacts sur les emplois et les compétences. Sur la base d'un premier rapport, attendu au premier semestre 2018, il s'agira de travailler avec le système éducatif et de formation pour s'assurer qu'il anticipe bien ces évolutions. Eléments de synthèse et d'orientation Les enjeux en termes d'emplois apparaissent majeurs et doivent être anticipés, en visant notamment à identifier les nouveaux emplois et les nouvelles compétences. Les acteurs économiques sont invités à être partie prenante de cet effort d'anticipation. Sur la base du rapport de la filière sur les perspectives d'emploi et de compétence, un travail sera conduit avec les ministères en charge de l'éducation et de la formation professionnelle, afin de s'assurer que le système éducatif et de formation professionnelle, intègre bien les besoins d'évolution des métiers et des compétences.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
77
4.6.2. Enjeux d'acceptabilité L'acceptabilité des systèmes d'automatisation constitue une condition sine qua non de leur développement. L'acceptabilité mérite une attention particulière et ne doit pas être considérée comme acquise. Les études et enquêtes disponibles mettent en lumière diverses formes de résistance au changement que provoque l'apparition du véhicule automatisé, notamment le sentiment d'être un bon conducteur, en opposition aux gains de sécurité que pourrait apporter l'autonomisation des véhicules ou la crainte de n'avoir aucun contrôle sur le véhicule lors de déplacements. On observe dores et déjà un défaut de familiarisation avec les technologies de délégation de conduite voire une absence complète de connaissance, ce qui laisse présager de difficultés à s'approprier des systèmes encore plus complexes, surtout lorsque les transitions entre phases de conduite et la phase de délégation seront nombreuses et variées. Certains points de vue considèrent prioritaire l'appropriation de ces systèmes par les usagers majoritairement jeunes et habitués aux nouvelles technologies, pour rendre le véhicule automatisé visible et permettre ainsi sa diffusion dans la société par effet de réseau de notoriété. L'acceptabilité doit concerner la société de façon beaucoup plus large. La population vieillissante de nos sociétés européennes notamment, pourra espérer retrouver parfois une mobilité individuelle perdue, mais ceci suppose d'évaluer attentivement les besoins de cette population en informations précises sur les fonctions automatisées équipant leurs véhicules et leur bonne adaptation à la conduite de véhicules partiellement automatisés. Les impacts des systèmes automatisés sur la mobilité, l'environnement, l'organisation des territoires et, surtout, l'emploi, constituent des déterminants majeurs de l'acceptabilité. Les questions de cybersécurité et de protection de la vie privée sont naturellement majeures en termes d'acceptabilité. Les conditions de cohabitation entre véhicules automatisés et non automatisés seront également déterminantes pour l'acceptabilité (cf. ci-dessous les questions induites en termes d'identification des véhicules).
Encadré : identification des véhicules autonomes, enjeux de sécurité et d'acceptabilité L'identification des véhicules automatisés, i.e. le fait de les rendre visibles ou repérables par les autres usagers ou acteurs de la route, soulève des enjeux en matière de gestion des interactions - civilités ou incivilités entre usagers, et partant d'efficacité de la gestion des trafics. Cette identification soulève également des questions de protection desdits véhicules contre la malveillance. Cette identification emporte des enjeux importants en termes de contrôle par les forces de l'ordre (ex : faut-il signaler un véhicule équipé de fonctions automatisées de conduite de manière visible de l'extérieur, dès lors que ces fonctions sont activées ?). Cela peut sembler nécessaire, si le conducteur a été autorisé à effectuer d'autres tâches que la conduite pendant le temps où le système « conduit » et jusqu'à ce qu'il lui demande de reprendre la main, ou encore que lui-même souhaite conduire. En effet, l'enjeu pour les forces de l'ordre est d'être à même de distinguer le conducteur qui « peut » faire autre chose de celui qui ne le « peut » pas, donc de ne pas verbaliser le premier, mais le deuxième. Reste que l'identification ouvre des questions d'acceptabilité.
Enfin, il importe que les processus d'élaboration de la réglementation (notamment la réglementation des règles de conduite et de sécurité des véhicules), soient transparents et associent les usagers, dans une forme appropriée, tant au niveau local, national qu'international. Le Conseil National de la Sécurité Routière doit être encouragé, à ce titre, à être force de proposition auprès du gouvernement.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
78
Eléments de synthèse et d'orientation L'acceptabilité du véhicule automatisé conditionne son développement, et ne doit pas être considérée comme acquise. L'ensemble des acteurs publics et privés doivent y contribuer, par les différents leviers dont ils disposent, notamment la réglementation, les expérimentations, la recherche et les études sur les comportements, ainsi que de la communication. Un séminaire de réflexion et d'échanges sur l'acceptabilité sera mis en place pour, dans un premier temps, identifier les enjeux prioritaires et les freins individuels et sociaux à l'acceptabilité du véhicule automatisé, et les éventuelles questions éthiques sous-jacentes ; elle pourra ensuite fournir des recommandations pour traiter ces enjeux et ces freins. Pour assurer un suivi et une veille sur les perceptions, les attitudes et les comportements : il est nécessaire de mettre en place un dispositif national d'étude et de suivi sous forme d'enquêtes régulières auprès des conducteurs et usagers de la route, confrontés ou non aux premiers développements de la conduite autonome ; le champ de ces études et enquêtes doit principalement couvrir : les perceptions et comportements d'interactions avec les autres usagers de la route ; la perception du temps passé en conduite autonome ; le choix de véhicule et de mode (y compris partagé). Cet « observatoire » des perceptions et de l'acceptabilité, aurait avantage à être mutualisé à l'échelle internationale. 4.6.3. Gouvernance et cadres de travail Pour conduire les travaux relatifs aux divers aspects du développement du véhicule automatisé, un certain nombre d'instances de travail spécialisées ont été mises en place au niveau national. Au niveau des administrations, les travaux sont organisés autour de quatre instances : Le « groupe des 4DGs », qui réunit les directions concernées au premier chef par les enjeux du véhicule automatisé : direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, direction générale de l'énergie et du climat, direction générale des entreprises, délégation à la sécurité routière. Ce groupe s'appuie sur un groupe des « sherpas ». Il assure une coordination stratégique d'ensemble, définit des priorités communes et identifie si besoin des sujets d'arbitrage. Ce groupe a piloté la rédaction du présent document. Le groupe « inter-administrations » définit et met en oeuvre le cadre réglementaire relatif aux expérimentations. Il instruit les demandes d'autorisation et suit les expérimentations. La « task-force cas d'usage » assure la préparation technique des positions prises dans les instances internationales, principalement sur l'évolution de la réglementation technique des véhicules. Elle pilote des travaux d'évaluation de la criticité des cas d'usage, du point de vue de la sécurité routière, de la gestion des infrastructures et de la mobilité. Elle a développé pour cela, avec l'appui de l'IFSTTAR, une première méthodologie permettant de prioriser les enjeux de sécurité routière des interactions entre le véhicule automatisé, l'infrastructure, le trafic et les conditions de circulation, afin de définir les points de vigilance pour l'évolution de la réglementation technique, des tests et de l'homologation.
-
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
79
Au niveau industriel, les travaux s'organisent principalement au sein de la solution « mobilité écologique » de la Nouvelle France Industrielle (NFI), notamment au sein de son programme « Véhicule Autonome », qui a mis en place trois groupes de travail spécialisées respectivement sur le véhicule particulier, les systèmes de transport public automatisés, le véhicule industriel. Ces instances définissent les priorités de cas d'usage en fonction de la maturité des technologies et de la demande des marchés, et identifient les « verrous » techniques et réglementaires à traiter pour permettre le développement de ces cas d'usage, ainsi que les priorités technologiques et de R&D. Le mandat du CNI de novembre 2017 va appeler la mise en place d'un groupe dédié aux questions d'emploi et de compétences. Les industriels et les administrations coopèrent étroitement, à trois niveaux principaux : · · · Le comité de pilotage de la NFI dans lequel l'administration est représentée par la DGE, qui fait le lien global avec les travaux des industriels. Certains sous-groupes de la NFI, notamment ceux traitant des liens avec les infrastructures de transports. La « task-force » élargie, qui permet l'échange entre acteurs industriels et publics sur l'analyse de sécurité des cas d'usage, et les positions à tenir en matière d'évolution de la réglementation et de l'homologation des véhicules.
En complément des structures existantes, il importe que les collectivités locales, dont les politiques publiques seront largement affectées par le développement du véhicule automatisé, soient associées aux réflexions et à l'élaboration des politiques publiques correspondantes. Plus particulièrement, il importe de structurer des échanges autour de deux axes : · le partage d'expériences entre gestionnaires routiers sur les enjeux de la conduite autonome et connectée ; il s'agit de construire une doctrine sur les besoins et apports de la conduite autonome et connectée vis-à-vis de l'infrastructure ; le partage d'expériences entre autorités organisatrices de la mobilité sur le développement des services de transports publics automatisés ; il s'agit ici de doter la maîtrise d'ouvrage, l'achat et la délégation de service publics, des compétences, sur les enjeux liés aux usages, à l'interopérabilité, à l'intégration dans les politiques de mobilité et les politiques urbaines ; ce cadre de travail, dont le pilotage reste à préciser, devra s'articuler avec les travaux sur le cadre réglementaire et de validation de sécurité des systèmes de transports publics automatisés mentionnés ci-dessus.
·
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
80
Eléments de synthèse et d'orientation Les instances et les travaux engagés depuis 2014 permettent de renforcer la coordination de l'action publique et la coopération avec les acteurs industriels, conditions essentielles pour le développement de l'automatisation et l'élaboration de solides positions à l'international. Le besoin de renforcer encore cette coordination a été souligné, compte-tenu de l'accélération du déploiement des technologies d'automatisation et du calendrier européen et international. Pour ce faire, il est proposé : De mettre en place une structure d'échange entre gestionnaires routiers, en vue de partager les enjeux de la conduite autonome et connectée ; De mettre en place une plateforme de partage d'expériences et de doctrine pour l'exercice de la maîtrise d'ouvrage, de la délégation de service et de l'achat public de services de transports publics automatisés, entre autorités organisatrices de la mobilité ; D'accélérer les travaux relatifs à l'automatisation du fret et de la logistique, en relançant le groupe NFI qui y est consacrée et en associant plus étroitement les logisticiens et les chargeurs ; De poursuivre les travaux pré-réglementaires par cas d'usage, en priorité en vue d'établir le cadre réglementaire des transports publics automatisés, en intensifiant les échanges entre les acteurs industriels (NFI) et les services de l'Etat sur les thématiques de la réglementation, de l'homologation, des tests et moyens d'essai et de la simulation, et en lien avec le programme national d'expérimentation validation préparé dans le cadre de la NFI.
-
-
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
81
5. Récapitulatif des actions
Cadre législatif et réglementaire Dans l'objectif de permettre, d'ici 2020 à 2022, la circulation en France de voitures particulières de niveau SAE3 et SAE4, de véhicules de transport public de personnes hautement automatisés, et de véhicules de transport de marchandises automatisés, l'adaptation du code de la route et les règles de responsabilité correspondantes, sera préparée dans le cadre d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur, en lien avec les Ministères de la Justice, des Transports et de l'Industrie, en concertation avec tous les acteurs concernés, et qui rendra ses propositions au plus tard fin 2018 (échéance visée : T 4-2018). Les besoins d'évolution de la formation à la conduite feront l'objet de propositions d'un groupe de travail piloté par le Ministère de l'Intérieur (échéance visée : T42018).
Dans le cadre de la Loi d'orientation des mobilités, sera proposé le principe d'une
information des conducteurs sur les principales fonctionnalités d'automatisation, leurs domaines d'emplois et leurs limites, lors de l'acquisition d'un véhicule neuf (échéance visée : T4- 2018).
La France poursuivra la promotion, au sein de la CEE-ONU, de la nouvelle approche
de réglementation technique des véhicules qu'elle a présentée en 2017, permettant de passer d'une approche par module à une approche « systèmes » (« réglementation horizontale ») (échéance visée : 2018 et au-delà).
Dans l'attente de l'élaboration d'une telle réglementation « horizontale », la France
demandera que les exigences sur les fonctions d'automatisation, le suivi de l'attention du conducteur et les manoeuvres d'urgence et de sécurité, garantissent la sécurité routière tout en étant proportionnées au degré d'automatisation ; La France demandera à ce que des exigences soient développées dans la réglementation technique internationale, afin que les véhicules dont les systèmes de conduite sont totalement délégués au véhicule, soient dotés de la capacité de s'identifier pour les forces de l'ordre, lorsqu'ils sont en mode totalement autonome (échéance visée : 2018 et audelà).
Un cadre réglementaire national pour les transports publics automatisés sera mis en
place, incluant la réglementation et le cadre d'homologation au niveau national des véhicules de type « navette » et un référentiel d'évaluation de la sécurité des parcours (échéance visée : T4- 2018). Pour alimenter et orienter les travaux nationaux, européens et de la CEE-ONU sur la réglementation technique et l'homologation, le gouvernement s'appuiera sur les travaux menés avec les partenaires de la NFI et en particulier dans le cadre du programme national expérimentation-validation attendu pour 2018 ; en particulier, des documents méthodologiques publics seront tirés de ces travaux et mis à disposition des acteurs.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
82 Une mission d'étude et de concertation sur les enjeux techniques et économiques de
l'interopérabilité et de la coordination de la supervision flottes de véhicules automatisés, sera lancée (échéance visée : T4- 2018).
La France poursuivra sa forte implication dans la rédaction des documents visant à
une compréhension commune et partagée du contenu existant des Conventions internationales (CEE-ONU) relatives à la circulation routière ou des documents préparant les évolutions et les modifications nécessaires de ces mêmes Conventions internationales (échéance visée : T4- 2018).
La France examinera, dans un cadre européen, l'opportunité d'un régime transitoire de
portée européenne permettant de définir le cadre de réglementation technique et d'homologation des véhicules automatisés à plus court terme qu'au sein de la CEEONU (échéance visée : T3-2018).
Au niveau européen, la France poursuivra sa forte implication dans l'élaboration d'une
stratégie commue, en particulier sur les questions d'interopérabilité technique et fonctionnelle des systèmes, et sur le financement de la recherche, de l'innovation et des premières étapes d'expérimentation et de pré-déploiement (échéance visée : 2018 et au-delà). Expérimentations, innovation, recherche La stratégie nationale d'expérimentation se traduira par :
des orientations nationales, sur les cas d'usages et les impacts prioritaires du point
de vue des politiques publiques (échéance visée : T1-2018) ;
un cadre de financement, en conjuguant au mieux les divers leviers du programme
d'investissement d'avenir (échéance visée : T2-2018) ;
un engagement de la filière à mettre en commun certaines « briques » des
expérimentations, tout en respectant les initiatives industrielles et territoriales qui favorisent l'innovation (échéance visée : T2-2018). Sous l'animation de l'État, des règles de mise en commun des données, outils et méthodes d'évaluation et de validation des systèmes, seront définies, afin de favoriser les économies d'échelle et les synergies entre acteurs pour l'accumulation de la connaissance, dans le respect des contraintes industrielles et commerciales de ces acteurs.
Au niveau législatif, un cadre de responsabilité sera proposé pour permettre de
conduire des expérimentations dérogeant aux obligations du conducteur prévues par le code de la route (échéance visée : T2-2018).
Les priorités de recherche à l'appui des politiques publiques, concernent
principalement les impacts sur la sécurité, la fluidité, la mobilité, l'environnement, l'emploi et les compétences ; l'acceptabilité ; le facteur humain, les interfaces hommemachine, les gestes de conduite et la gestion des transitions ; les méthodes et outils de validation des systèmes ; le développement de la simulation ; la supervision (échéance visée : T1-2018).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
83
Données En termes de protection des données personnelles, le cadre d'échanges des données du véhicule autonome et connecté devra être conforme aux dispositions du règlement général de la protection des données (RGPD).
En termes de cyber-sécurité, une structure d'échange dédiée au secteur automobile et
des mobilités sur l'état de la menace et les réponses à apporter aux cyber-attaques sera mise en place (échéance visée : T4-2018).
La Loi d'orientation des Mobilités cadrera les conditions d'accès aux données du véhi-
cule, respectivement pour les missions de service public (sécurité routière, gestion de trafic, exploitation du patrimoine d'infrastructures), d'investigation et d'enquêtes sur les accidents, et pour les activités économiques dont le développement dépend de certaines données produites à bord des véhicules (échéance visée : T2-2018).
La France s'attachera à ce que le cadre français soit cohérent avec les modalités orga-
nisationnelles et techniques d'échanges de données, destinées à assurer l'interopérabilité au niveau européen (2018 et au-delà).
Liens avec l'infrastructure, connectivité, cartographie numérique
Le principe est affirmé selon lequel le véhicule automatisé devra reconnaître s'il est
dans son domaine d'emploi et adapter en conséquence les modes de délégation de conduite ; ceci n'exclue pas que l'infrastructure, et sa connectivité, ainsi que la cartographie de précision, apportent des informations utiles pour compléter la vision des capteurs. Les gestionnaires routiers seront invités à réfléchir à un plan de déploiement de la connectivité, basée sur les technologies matures à ce jour.
Une étude sera lancée afin d'évaluer la pertinence de la couverture de différentes sec-
tions-types du réseau routier en différentes technologies de connectivité (incluant la 5G), pour les besoins du cas d'usage de véhicule connecté et du véhicule automatisé et connecté (échéance visée : T4 - 2018).
Les priorités de cartographie du réseau routier pour le véhicule autonome seront éta-
blies, en particulier les amers prioritaires pour améliorer la reconstitution de l'environnement du véhicule, et son positionnement, y compris par la connectivité, en lien avec l'IGN (échéance visée : T3-2018).
Les modalités de validation de l'information cartographique pour les besoins du véhi-
cule autonome seront étudiées, en lien avec l'IGN (échéance visée : T3-2018).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
84
Aspects économiques et sociétaux, gouvernance, cadres de travail
L'Etat et les acteurs économiques s'attacheront à anticiper l'évolution des métiers et
de compétences ; sur la base du rapport de la filière, un travail sera conduit avec les ministères en charge de l'éducation et de la formation professionnelle, afin de s'assurer que le système éducatif et de formation professionnelle, intègre bien les besoins anticipés (échéance visée : T4-2018).
Un séminaire de réflexion et d'échanges sur l'acceptabilité sera mis en place pour,
dans un premier temps, identifier les questions et les enjeux, y compris éthiques (échéance visée : 2018 et au-delà).
Les travaux de l'atelier prospectif, mis en place en mai 2017, seront poursuivis pour
construire collectivement des scenarii et alimenter les politiques publiques de mobilité et d'aménagement des territoires (échéance visée : 2018 et au-delà).
Un observatoire des perceptions et de l'acceptabilité sera mis en place, sous forme
d'enquêtes régulières auprès des conducteurs et usagers de la route (échéance visée : 2018 et au-delà).
Des instances de concertation entre gestionnaires routiers d'une part, entre autorités
organisatrices de la mobilité d'autre part, sur les enjeux du véhicule autonome et connecté seront mises en place (échéance visée : T3-2018) ; ces instances aborderont notamment les questions de connectivité et de cartographie du réseau. Une plateforme de partage d'expériences et de doctrine pour l'exercice de la maîtrise d'ouvrage, de la délégation de service et de l'achat public de services de transports publics automatisés, entre autorités organisatrices de la mobilité sera mise en place (échéance visée : T4-2018).
Les travaux relatifs aux cas d'usage d'automatisation du fret et de la logistique, seront
réactivés, en associant plus étroitement les logisticiens et les chargeurs (échéance visée : T2-2018).
Les travaux pré-réglementaires par cas d'usage seront poursuivis, en priorité en vue
d'établir le cadre réglementaire des transports publics automatisés, en intensifiant les échanges avec les acteurs industriels (NFI) (échéance visée : 2018 et au-delà).
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
85
ANNEXES
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
86
Annexe : Synthèse des retours des consultations
1ère consultation (octobre novembre 2017) Principes généraux, gouvernance, pilotage · Intégrer les véhicules autonomes à un système global de mobilité, encourager les usages partagés · Renforcer le rôle des autorités organisatrices de mobilité dans la mise en oeuvre des offres utilisant des véhicules autonomes · Confier à l'IDDRIM l'instance de concertation avec l'État, les représentants des collectivités locales et les constructeurs · Tirer le programme NFI « Véhicule Industriel Autonome » (VIA) par les opérateurs de transport · Développer le mix passagers marchandises pour optimiser les systèmes urbains Evolution des règles de conduite / responsabilités / formation · Expliciter (plutôt qu'interpréter) les conventions CEE-ONU · Modifier le code de la route pour permettre la circulation des premières fonctions de conduite autonome sur voies à chaussées séparées dans un premier temps dès 2020 · Modifier la notion de conducteur personne physique (art. 1 de la convention de Vienne), et de contrôle, afin de permettre la supervision à distance · Clarifier la responsabilité pendant les phases de transition et de manoeuvres d'urgence · Re-travailler précisément les notions relatives au conducteur / chauffeur : rôles et responsabilités, place physique, formation (initiale, continue), permis associé Réglementation technique / validation / homologation · Développer une approche réglementaire technique à court terme pour les systèmes à automatisation totale, en parallèle de celle traitant le cas des fonctions d'automatisation partielle · Développer un approche matricielle de la réglementation permettant de combiner les cas d'usage, les typologies d'environnements / de voirie, les conditions de circulation, les risques associés · Mettre en place rapidement le cadre réglementaire systèmes de transports publics (élargi > navette 9-16 places) ; ne pas attendre la CEE-ONU ; développer, dès 2018, une réglementation technique pour l'ensemble des véhicules (véhicules particuliers utilisés à des fins de transport public, navettes de moyenne capacité, autobus) en priorisant les nouveaux usages ; · Développer une approche « système » qui intègre dans l'homologation les véhicules mais aussi, les infrastructures physiques et numériques, la supervision, etc ; · Créer un dispositif de standardisation des modalités de reprise en main
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
87
· · ·
Viser l'harmonisation (européenne) des principes fonctionnels de l'interface hommemachine Privilégier une réglementation européenne en matière d'interopérabilité Développer la simulation et la validation numériques
Expérimentations · Construire un plan d'expérimentation sur la base des scénarios d'usages prioritaires · Mettre en place une dotation budgétaire pluriannuelle spécifique à l'expérimentation, notamment dans le cadre du PIA ou de dispositifs spécifiques, pour soutenir les efforts de R&D de la filière automobile ; · Mettre en place, dès 2018, un plan de financement des expérimentations incluant les mises à niveau des infrastructures ; · Prévoir un véritable pouvoir d'initiative des autorités organisatrices de transport pour les expérimentations · Mettre en place une caractérisation des sites d'expérimentations sur routes ouvertes différenciée par cas d'usage et labelliser les expérimentations · Intégrer les équipements et la signalisation comme objets d'expérimentations · Définir et tester dans le cadre des expérimentations, les principes de gouvernance de la gestion de la donnée et le système de stockage et de traitement associé · Développer une méthodologie et des critères d'évaluation des expérimentations · Définir le « bien commun » des enseignements d'expérimentations à partager · Mettre en oeuvre des indicateurs de performance communs pour tirer les enseignements · Accélérer le processus de délivrance des autorisations Infrastructures et connectivité · Intégrer l'impact des véhicules autonomes dès la conception des infrastructures · Piloter le déploiement des infrastructures permettant la conduite autonome, · Développer une démarche de hiérarchisation des réseaux à partir de l'usage, y compris induite par le véhicule automatisé, et dans une logique d'itinéraires prioritaires ; définir des niveaux de service · Caractériser, améliorer et harmoniser la signalisation · Evaluer les apports possibles de la 5G
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
88
2ème consultation (décembre 2017 janvier 2018) Cas d'usages, domaines d'emploi, régulation et homologation · Inclure les drones volants dans la stratégie ; · Réduire la transition consacrée aux niveaux 2 et 3 ; · Donner aux véhicules traditionnels la capacité à devenir robotisés/autonomes ; · Fluidifier l'homologation de véhicules composés de systèmes issus de fournisseurs différents ; · Développer une offre industrielle d'autopilot non centrée uniquement sur l'automobile ; · Permettre le développement de la dronification de véhicules pour favoriser l'émergence de nouveaux services comme le valet parking (prise de contrôle temporaire du véhicule) ; · Ouvrir l'accès aux infrastructures (parking, aire de stationnement...), dont le monopole est réservé aux entreprises gestionnaires, à des prestataires de services qui offrent la possibilité de prise de commande à distance des véhicules sur ces infrastructures. Expérimentations, évaluation et méthodes de validation · Définir une méthode pour qualifier / évaluer des expérimentations et déploiements des véhicules autonomes, s'appuyant sur la capitalisation des expériences ; · Intégrer des évaluations conjointes des véhicules et de l'infrastructure (place des cartes haute-définition pour le guidage, évaluation intégrée caméra-marquage, travaux et repositionnement des marquages et autres équipements de la route) ; · Caractériser la robustesse du guidage en conditions météorologiques dégradées ; · Traiter l'explicabilité du comportement des véhicules autonomes et connectés ; · Évaluer le processus énergétique du « berceau à la tombe ». · Autoriser des expérimentations d'équipements de la route encore non-homologués ; · Établir le niveau de performance des infrastructures de signalisation grâce à des expérimentations permettant ainsi un état des lieux du patrimoine routier ; · Tester : · pour le véhicule particulier : les comportements de conducteurs pour ce qui concerne la reprise de contrôle, et la dynamique d'apprentissage des fonctionnalités ; · pour les transports publics ou partagés : l'adéquation des services aux besoins ; · pour le fret : les comportements des conducteurs professionnels et les éventuelles évolutions possibles des métiers des chauffeurs ; · Tester la conformité des jeux de donnés cartographiques aux standards communs ; · Expérimenter une plateforme d'intégration, de fusion et de redistribution en temps réel de données géographiques de sources multiples.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
89
Localisation, signalisation, amers · Approfondir la notion d'amer de positionnement et le rôle de la signalisation ; · Identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision des amers fixes sur les parcours des navettes ; · Étudier les solutions alternatives à la perte de signal GPS au regard de la verticalité de certaines zones urbaines denses. · Identifier un acteur chargé de : l'entretien et de la diffusion de données géographiques relatives aux infrastructures routières ; l'expertise qui lie les technologies de géolocalisation et la sécurité routière ; la création d'un entrepôt de données dynamiques (décrivant les infrastructures routières) commun et indépendant. Connectivité de l'infrastructure · Accélérer les déploiements des dispositifs ITS G5 ; · Viser la connectivité performante et totale des infrastructures routières. Règles de conduite, responsabilité · Légiférer sur les conséquences pénales d'une action délibérée visant à altérer ou tromper les capteurs ; · Modifier le code de la route pour permettre la circulation des premières fonctions de conduite en peletonnage (platooning) par conducteur humain ; · Statuer sur les données réellement nécessaires pour établir les différentes responsabilités. Formation, compétences · Favoriser, y compris fiscalement, la formation par simulateur ; · Préparer la reconversion de l'éducation routière ; · Aborder la problématique sociale liée au devenir des conducteurs. Organisation des acteurs, gouvernance · Mettre en place une équipe pour co-construire dans une démarche collective les briques nécessaires et non compétitives (les communs) : certification, normes et standards, moyens de validation de l'autopilot, ... ; · Monter un projet industriel éventuellement finançable en partie par le PIA ; · Favoriser le développement de nouveaux écosystèmes locaux et sécurisés qui interagiront par consensus local, en dehors de structures de supervision ; · Imposer de l'open data sur les véhicules et les infrastructures afin de permettre l'émergence de ces écosystèmes locaux ; · Encourager la création d'instituts et de filières spécialisées pour les besoins à venir.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
90
Annexe : Expérimentations : besoins d'évaluation des cas d'usage et de leur sécurité
1. Eléments de contexte L'expérimentation constitue une étape incontournable pour passer de la recherchedéveloppement à la mise en oeuvre des systèmes de conduite automatisée, pour s'assurer qu'ils répondent aux exigences de sécurité routière, et pour compléter les travaux de recherche ou d'étude sur les impacts, notamment sur la mobilité et l'environnement, les perceptions l'acceptabilité. La France s'est dotée d'un cadre d'expérimentation ouvert à tous les cas d'usage (véhicules particuliers, transports collectifs, fret et logistique). En application de l'article 37 de la loi n° 2015-992 du 7 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, l'ordonnance n° 2016-1057 du 3 août 2016 et ses textes d'application, fixent les conditions des autorisations, destinées à assurer la sécurité du déroulement de l'expérimentation. La quarantaine d'expérimentations réalisées sur voie publique en France, a permis aux constructeurs d'acquérir de nombreuses données de conduite et d'améliorer les algorithmes de conduite automatisée. Ainsi, les véhicules expérimentés à l'heure actuelle sont capables de gérer beaucoup plus de situations et d'évènements que ceux expérimentés il y a deux ans. Les démonstrations de navettes autonomes ont permis de présenter ce concept au public. Les années 2017 2018 marquent le passage à l'expérimentation de la conduite déléguée, soit sans surveillance de conducteur expert, soit avec une supervision à distance, pour les voitures particulières (tests avec un panel de clients, véhicule partagé autonome) et pour les navettes urbaines (transport de personnes sans conducteur). Ces nouveaux types d'expérimentations permettent d'enrichir la connaissance sur les interfaces véhicule-conducteur, les comportements de conduite et les processus d'apprentissage, et plus largement, les comportements de mobilité et l'acceptabilité. Les enseignements de ces nouveaux types d'expérimentations sont donc particulièrement précieux tant pour la réglementation technique que pour les questions d'information-formation des conducteurs. Les années 2017-2018 marquent aussi l'intérêt croissant pour les apports de la connectivité du véhicule à certaines fonctions d'automatisations dans certaines situations. Les travaux en cours au niveau national, européen et international (CEE-ONU) mettent en lumière l'importance de développer des analyses de risques, partagées entre autorités publiques (autorités routières et de sécurité routière), prenant en compte la diversité des cas d'usage, et notamment des environnements de conduite, ainsi que les interactions et interfaces entre le conducteur et le système d'automatisation. Ces travaux font également apparaître l'importance croissante de la connectivité comme apport possible aux fonctions d'automatisation.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
91
2. Objectifs généraux et transverses aux cas d'usage Il importe que les expérimentations : - participent à la démarche d'accumulation de connaissances ; - proposent un objet précis à évaluer en termes technologiques, fonctionnels, d'impact, de comportement ou d'acceptabilité ; - alimentent les travaux techniques sur les méthodes d'analyses de risques des cas d'usage et de leurs situations critiques dont défaillances des systèmes, tolérance aux fautes, capacité d'autodiagnostic... ; - fournissent des enseignements sur les besoins d'information / sensibilisation / formation des conducteurs. Il importe que les expérimentations permettent d'évaluer les comportements des conducteurs dans des niveaux de délégation élevés (3 puis 4), et notamment les reprises de contrôle des véhicules et/ou le fonctionnement des manoeuvres de risque minimal, dans des conditions de circulation à la fois diverses, mais de criticité faible du point de vue de la sécurité routière. Il importe d'évaluer les apports possibles de la connectivité à la sécurité des fonctions d'automatisation sur certaines situations critiques de cas d'usage, tant pour le véhicule particulier que pour les navettes et la logistique urbaine. Cette évaluation doit se faire en site fermé si la criticité des situations l'exige du point de vue de la sécurité routière. En termes de cartographie et de localisation, les expérimentations peuvent contribuer à identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision (à l'échelle décimétrique) des amers. Certaines expérimentations pourraient utilement évaluer les enjeux et les besoins de redondance entre le positionnement local par les capteurs du véhicule, et le positionnement satellite. En milieu urbain, les scenarii de relocalisation sur des amers locaux après pertes de signal GPS, pourraient utilement être testés. On rappelle enfin que les expérimentations devront satisfaire aux exigences de suivi et d'évaluation (cf. annexe), notamment en termes de comportement des conducteurs, d'interactions entre les véhicules et les autres usagers de la route, et de consommation énergétique. Évaluer la pertinence de la remontée, l'intégration, la fusion et la diffusion de ces informations et leur interopérabilité contrôlées dans un unique système de référence. En termes de signalisation, des réflexions peuvent être engagées pour des expérimentations dédiées aux équipements encore non homologués, notamment pour évaluer : - l'apport d'une connectivité locale via des équipements de signalisation, dynamiques ou statiques, actifs ou passifs, pour contribuer à la redondance, l'amélioration de la sécurité et la perception étendue notamment pour les usagers vulnérables ; - la signalisation verticale et horizontale utilisée comme amers de la route, parmi d'autres permettant à la carte dynamique de valider la position du véhicule.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
92
3. Cas d'usage, fonctionnalité et impacts a. Véhicule particulier Le développement des fonctions d'automatisation sur le véhicule particulier dérive principalement des stratégies des constructeurs dans un marché mondial fortement concurrentiel. Cette dynamique ne rend pas nécessaire que les autorités publiques expriment des priorités sur des cas d'usages précis, mais plutôt sur leurs impacts ou enjeux de sécurité routière et d'acceptabilité, qui sont détaillés ci-après. Les autorités publiques escomptent néanmoins, en termes de cas d'usage, et au vu des développements technologiques en cours, que les utilisations du véhicule particulier en dehors des voies à chaussées séparées, vont voir les expérimentations se multiplier, notamment aux accès ou réseaux d'approche des sections autoroutières, et en milieu urbain dense, dans ce dernier cas avec une logique de véhicule partagé. Concernant plus particulièrement les apports possibles de la connectivité aux fonctions d'automatisation, les cas d'usage de sécurité routière sont prioritaires pour évaluer les performances, domaines d'emplois et complémentarités entre technologies de connectivité (ITS-G5, LTE-V2X, 5G). En termes de cartographie et de localisation, les expérimentations peuvent contribuer à identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision (à l'échelle décimétrique) des amers fixes sur les infrastructures (par exemple, sur autoroutes : ouvrages d'art, barrières de péage, zones d'insertion / sortie. Certaines expérimentations pourraient utilement évaluer les enjeux et les besoins de redondance entre le positionnement local par les capteurs du véhicule sur les attributs de la chaussée, et le positionnement satellite. Les expérimentations du véhicule particulier automatisé devraient porter une attention particulière aux transitions (délégation et reprise de contrôle), aux fonctionnalités des interfaces homme-machine et au suivi de l'attention du conducteur ; en particulier en vue de l'élaboration de la réglementation technique de la CEE-ONU : évaluation des temps et des performances de reprise en main en fonction des alertes ou demandes du système en SAE 3 et 4 évaluation des stratégies et des performances des manoeuvres de risque minimale effectuées par le système en SAE 3 comparaison des comportements des conducteurs issus de différentes IHM en vue de dégager des possibles besoins de standardisation de certaines fonctions critiques de ces IHM
Les expérimentations doivent pouvoir contribuer à documenter l'attitude des autres conducteurs : - lors du déclenchement des manoeuvres automatisées - lors des manoeuvres avortées - lors des manoeuvres d'urgence.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
93
Les expérimentations du véhicule particulier pourraient également utilement contribuer à l'évaluation de la perception du temps passé en mode de conduite délégué, et, partant, aux choix de déplacement et de mode de transport. L'exemple de l'expérimentation « naturalistique » de Göteborg peut fournir une référence utile. En vue de mieux connaître les enjeux d'information et de formation, les expérimentations du véhicule particulier avec conducteurs non professionnels, devraient pouvoir (tout en conservant le minimum de formation préalable au déroulement en toute sécurité de l'expérimentation), permettre de documenter la dynamique d'apprentissage des conducteurs des fonctionnalités, domaines d'emploi et performances des fonctions d'automatisation (ex : dans les premières heures ou jours, puis dans les semaines ou mois de conduite suivants) et les interactions avec les autres usagers de la route. b. Transports publics ou partagés Le développement des services de transports publics ou partagés automatisés constitue une priorité du point de vue des autorités publiques. Il s'agit d'accélérer le passage à des déploiements en vraie grandeur, intégrés dans l'offre de transports public des autorités organisatrices. Au vu des développements observés à fin 2017 et des travaux du groupe « transports publics » de la Nouvelle France Industrielle, les attentes vis-à-vis des expérimentations sont principalement les suivantes : En milieu urbain dense, et sur des parcours principalement séparés des flux de circulation, il importe d'évaluer les enjeux critiques de sécurité routière sur parcours en partie protégés (événement critiques redoutés et réponses apportées) afin d'alimenter un référentiel d'analyse de sécurité des parcours ; ce référentiel, produit par les autorités publiques en concertation avec le groupe « transports publics » de la Nouvelle France Industrielle, est destiné à permettre à terme aux autorités organisatrices de déployer des services en s'appuyant sur des règles de l'art du point de vue de la sécurité. Ces expérimentations devront en particulier permettre d'évaluer : les enjeux de sécurité et les réponses à apporter pour la gestion des intersections, les réactions des autres usagers, véhicules particuliers et usagers vulnérables, dans les zones de mixité des flux ou en cas d'intrusion inopinée en zone de flux séparés, les manoeuvres d'évitement par contournement des obstacles
Il importe également d'évaluer les performances en termes de sécurité des systèmes de supervision à distance des navettes de niveau d'automatisation équivalent SAE 4 ou 5, afin de permettre progressivement les expérimentations sur voie publique des systèmes de navettes sans aucune personne à bord mais avec superviseur à distance. Il apparaît utile, au vu des développements actuels, de tester les fonctionnalités de supervision à distance, notamment : remise en mouvement après arrêt inopiné gestion des flux entrants / sortants de passagers régulation entre navettes et avec d'autres transports publics sur voies réservés
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
94
En zone périurbaine ou rurale, à ce stade, l'enjeu apparaît de deux ordres : Gestion de la demande diffuse par mutualisation partielle des parcours en temps réel : il s'agit là d'explorer les possibilités d'adapter les parcours en temps réel, à véhicule de capacité donnée, en fonction des convergences d'origines / destinations et de créneaux de déplacements (concept de « taxi collectif ») ; ces expérimentations pourraient être conduites sur des territoires délimités, avec points d'arrêts prédéterminés, de type zone d'activité ou universitaire, en pelotonnage avec ou sans conducteur humain ; Desserte de pôles excentrés en milieu rural, à partir d'une gare ferroviaire ou routière, ou d'un point d'arrêt de bus ou car sur une ligne de trafic massifié : il s'agit là de tester, par étapes, des fonctionnalités de circulation en trafic mixte, sur des réseaux à faible circulation, avec des différentiels de vitesse potentiellement élevés, et des intersections, ainsi que l'insertion dans les zones d'accès aux gares ferroviaires ou routières.
-
En termes de cartographie et de localisation, les expérimentations peuvent contribuer à identifier les besoins prioritaires de cartographie de précision (à l'échelle décimétrique) des amers fixes sur les parcours de circulation des navettes (exemple : feux de circulation, quais d'embarquement / débarquement, configuration précise des intersections et de leur signalisation). En milieu urbain, les scenarii de relocalisation sur des amers locaux après pertes de signal GPS, pourraient utilement être testés. En termes de modèle économique, il est utile de repenser la question du coût et d'expérimenter de nouvelles tarifications (à l'usage) afin de définir le consentement des usagers à payer pour ces nouveaux services. Par ailleurs, l'amélioration des capacités de perception des environnements de nuit par les systèmes automatisés, constitue un enjeu pour le développement des transports publics par renforcement de l'amplitude et des fréquences. c. Fret et logistique De façon générale, les cas d'usages apparaissent moins clairement définis dans le fret et la logistique, que dans le véhicule particulier et le transport public. On pressent néanmoins, à ce stade, des potentialités offertes par : - les engins-livreurs en milieu urbain dense : un des enjeux de l'évaluation de ces cas d'usage est porte sur les interactions avec une multiplicité d'autres usagers sur des parcours mixtes, à la fois sur la voie publique et sur les trottoirs, en zone ouverte à la circulation et en zone piétonnière ; - l'automatisation de certaines tâches de conduite du PL sur voies à chaussées séparées, en prolongement des assistants à la conduite, à l'instar des fonctions développées sur le véhicule particulier ; - la circulation de VUL sur des parcours fixes et partiellement séparés des flux de circulation en milieu urbain, en parallèle ou en « interstices » des parcours de navettes : dans ce cas, les enjeux d'évaluation de sécurité des parcours apparaissent similaires à ceux des navettes, modulo la spécificité des problématiques d'embarquement / débarquement des marchandises par rapport aux passagers.
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
95
Développement du véhicule automatisé Orientations stratégiques pour l'action publique
DICOM-DGITM/B/18029 Mai 2018
INVALIDE)