Rapport d'investigation préliminaire : Jean Ricciardi

Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les événements de mer
Auteur secondaire
Résumé
Le présent rapport d'investigation préliminaire a été établi par le bureau d'enquête sur les événements de Mer (BEAmer). Il porte sur l'échouement et le naufrage du chalutier Jean Ricciardi survenu le 19 juillet 2011 à Sète.
Editeur
BEAmer
Descripteur Urbamet
accident ; sécurité ; prévention
Descripteur écoplanete
Thème
Transports
Texte intégral
Rapport d'investigation préliminaire 2 ÉCHOUEMENT ET NAUFRAGE DU CHALUTIER JEAN RICCIARDI SURVENU LE 19 JUILLET 2011 À SÈTE LE NAVIRE LES FAITS Le chalutier JEAN RICCIARDI appareille de Sète le 19 juillet 2011 à 05h15 avec trois hommes à bord. Le départ se trouve différé du fait du retard du patron. Après avoir emprunté la passe Ouest, le chalutier fait route au Sud pendant environ 10.minutes à 7 noeuds. La météo est mauvaise : mer de Sud force 4, vent du 170 pour 19 noeuds, nébulosité 8/8 (météo relevée par le sémaphore). Chalutier pêche arrière en acier, superstructures en alliage d'aluminium, construit en 2004 en Espagne. Longueur HT : 24,90 m ; Jauge brute : 99,50 Tx ; Propulsion : un moteur Caterpillar 3512 TAA1D, bridé à 316 kW. Énergie électrique : - un alternateur attelé à la ligne d'arbre : 100 KVA, 380 V 152 A ; - un groupe électrogène : Volvo Penta, D5A TA, 100 KVA, 380V, 152 A ; - deux jeux de batteries 24 V de démarrage MP/GE dans le compartiment machine (180Ah) ; - un jeu de batteries de secours 24 V pont supérieur (290Ah) ; - un jeu de batteries SMDSM 24 V pont supérieur (290Ah). L'ÉQUIPAGE Trois membres d'équipage : - un patron mécanicien, âgé de 42 ans, propriétaire embarqué (capacitaire et motoriste à la pêche) ; - deux matelots portés au rôle. Les matelots n'ont ni qualification, ni dispense de formation professionnelle régulièrement délivrée. Vers 06h00, le chalutier connaît simultanément plusieurs dysfonctionnements : perte de la commande du pas d'hélice, débrayage du réducteur, arrêt du moteur principal et du groupe électrogène. Le patron tente de redémarrer le groupe électrogène « à la lueur de son téléphone portable », sans succès. Remonté en passerelle, il tente de mettre en oeuvre l'énergie de secours. Vers 06h08, il appelle avec son téléphone portable le patron du chalutier GEORGES LUCIEN dont il sait l'appareillage imminent (le patron a également déclaré que la VHF fixe ne fonctionnait plus non plus). À 06h10, le GEORGES LUCIEN appelle le sémaphore de Sète sur VHF 16 et l'informe de la situation du JEAN RICCIARDI. À 06h15, le CROSS La Garde est alerté par le sémaphore. À 06h17, le canot de la SNS 062 de Sète est engagé par le CROSS La Garde pour sauvetage et assistance. À 06h21, diffusion d'un MAYDAY RELAY par le CROSS La garde. Pendant ce temps, le GEORGES LUCIEN tente, à trois reprises, de passer une remorque au JEAN RICCIARDI malgré l'état de la mer et la proximité des rochers. La pilotine de Sète se rend sur zone. À 06h26, le JEAN RICCIARDI est drossé sur les rochers, à l'aplomb du bar panoramique « L'AmeriK Club », à proximité du théâtre de la mer. Le chalutier tosse lourdement sur bâbord. À 06h40, l'embarcation semi-rigide des sapeurspompiers est engagée par le CROSS Méditerranée et le CODIS, sur demande de la SNSM. À 06h58, la remorque de la SNS 062 est passée, le JEAN RICCIARDI est remis à flot, cap au Sud et au Sud-Est afin de dégager les navires de la zone dangereuse. Le chalutier à une voie d'eau dans le compartiment machine et commence à gîter sur bâbord. À 07h35, le patron du chalutier et les pompiers évacuent le JEAN RICCIARDI qui sombre. À 07h42, la remorque est coupée par la SNS.062. Le chalutier sombre, l'étrave à la verticale, par des fonds sableux de 17 mètres, à la position 43°23.49 N - 003°43.93 E. CONSÉQUENCES Les trois marins sont sauvés grâce à l'intervention de la SNS 062 qui a réussi à déséchouer le JEAN RICCIARDI. En effet, il était impossible de quitter le navire sans prendre de risques importants tant qu'il était drossé sur les rochers. Chalutier naufragé par 17 mètres de fonds. Pollution par hydrocarbures légers (gazole, huile moteur, huile hydraulique). Arrêté de mise en demeure de renflouer l'épave pris par le Préfecture Maritime de Toulon. Tentative de renflouement infructueuse le 1ier.août 2011. Nouvelle tentative ultérieure, réussie, le 14.septembre 2011. Le navire renfloué présente d'importants dégâts, notamment un écrasement de la passerelle, une coque déformée et enfoncée. À 07h09, le CROSS Méditerranée demande l'intervention de l'hélicoptère de la sécurité civile (hélitreuillage éventuel de l'équipage). À 07h10, le déséchouement puis le remorquage permettent l'évacuation des deux matelots à l'aide du canot de sauvetage du bord puis du semi-rigide des pompiers. Le chalutier, toujours en remorque s'enfonce davantage. OBSERVATIONS Les chronologies du CROSS Méditerranée, du sémaphore et du patron mécanicien du JEAN RICCIARDI diffèrent. À 07h30, tentative infructueuse d'envoi d'une motopompe de la SNS 062 vers le chalutier avec l'aide des plongeurs pompiers. Compte tenu des installations réglementaires présentes à bord de ce chalutier conforme à la division 226 en matière d'installations machines et d'installations électriques, la probabilité de survenance d'une telle série de pannes est faible, d'autant plus que le navire était suréquipé en tableaux d'alarmes, notamment pour la propulsion, la production électrique (alarme basse tension batteries), y compris l'alimentation de la station radio. L'enchaînement des pannes décrites par le patron n'est pas, à l'heure actuelle, expliqué. Par ailleurs, la présence à bord de ce navire de 24,90 m, d'un patron mécanicien (motoriste 250.kW) et de deux matelots sans qualification, est insuffisante pour gérer une situation de crise, notamment liée à la propulsion ou à l'énergie électrique durant laquelle le patron mécanicien ne peux pas être en passerelle et en machine simultanément. CONCLUSION L'enchaînement des avaries, avec en plus l'absence totale d'éclairage de secours, fait penser à une défaillance du circuit 24 de secours, alimentant les chaînes de sécurité des moteurs. Toutefois, l'état du navire et notamment l'écrasement de la passerelle de navigation, la durée de l'immersion de l'épave et l'état du compartiment machine, peuvent difficilement permettre d'autres investigations techniques susceptibles de valider cette hypothèse. La dérive du navire, privé de propulsion, n'a pas été enrayée par une tentative de mouillage (quasi impossible dans les conditions de mer, avec l'équipage de trois hommes et le mode de saisissage de l'ancre sur le pont) ou de largage des panneaux (lesquels étaient au poste de mer, et n'auraient pu être mis à l'eau à temps). La perte de propulsion et d'énergie, combinée avec la position du navire au vent des roches et les conditions météorologiques, sont à l'origine de cet accident. Les faits paraissant suffisamment établis, le BEAmer n'ouvre pas d'enquête de sécurité maritime. ENSEIGNEMENTS Un navire de cette complexité devrait embarquer un mécanicien titulaire du brevet requis, en sus du patron. Les alertes doivent être transmises en appliquant les procédures du SMDSM. L'un des matelots devrait être titulaire du CRO, afin d'être capable d'assister le patron pour les radiocommunications dans le cadre du SMDSM. Le mécanicien doit connaître et maîtriser l'ensemble des appareils et circuits du bord, notamment ceux de secours. Ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie Bureau d'enquêtes sur les évènements de mer Tour Voltaire - 92055 La Défense cedex téléphone : +33 (0) 1 40 81 38 24 - télécopie : +33 (0) 1 40 81 38 42 www.beamer-france.org bea-mer@developpement-durable.gouv.fr

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