Rapport d'enquête technique sur l'accident entre un cycliste et un camion survenu le 17 août 2015 au carrefour entre les rues de Bruxelles et de Douai à Paris 9e

Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre
Auteur secondaire
Résumé
Ce document est un rapport technique du BEATT (Bureau d'Enquête sur les Accidents de Transport Terrestre). Il porte sur l'accident entre un cycliste et un camion survenu le 17 août 2015 au carrefour entre les rues de Bruxelles et de Douai à Paris dans le neuvième arrondisement. Après avoir dressé un constat matériel et humain, ainsi que le contexte de l'accident, il présente le compte-rendu des investigations effectuées. Il analyse ensuite le déroulement de l'accident et des secours puis les causes et facteurs associés ainsi que les orientations préventives. Il expose enfin ses conclusions et recommandations.
Editeur
BEATT
Descripteur Urbamet
accident ; sécurité ; prévention des risques ; poids lourd ; angle mort ; CYCLISTE
Descripteur écoplanete
Thème
Transports
Texte intégral
RAPPORT D'ENQUÊTE TECHNIQUE sur l'accident entre un cycliste et un camion survenu le 17 août 2015 au carrefour entre les rues de Bruxelles et de Douai à Paris 9e Août 2017 Ministère de la Transition écologique et solidaire www.ecologique-solidaire.gouv.fr Bureau d'Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre Affaire n° BEATT-2015-008 Rapport d'enquête technique sur l'accident entre un cycliste et un camion survenu le 17 août 2015 au carrefour entre les rues de Bruxelles et de Douai à Paris 9e Bordereau documentaire Organisme commanditaire : Ministère de la Transition écologique et solidaire (MTES) Organisme auteur : Bureau d'Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre (BEA-TT) Titre du document : Rapport d'enquête technique sur l'accident entre un cycliste et un camion survenu le 17 août 2015 au carrefour entre les rues de Bruxelles et de Douai à Paris 9e N° ISRN : EQ-BEAT--17-7--FR Proposition de mots-clés : angle mort, rétroviseur, antéviseur, cycliste Avertissement L'enquête technique faisant l'objet du présent rapport est réalisée dans le cadre des articles L. 1621-1 à 1622-2 et R. 1621-1 à 1621-26 du code des transports relatifs, notamment, aux enquêtes techniques après accident ou incident de transport terrestre. Cette enquête a pour seul objet de prévenir de futurs accidents, en déterminant les circonstances et les causes de l'événement analysé et en établissant les recommandations de sécurité utiles. Elle ne vise pas à déterminer des responsabilités. En conséquence, l'utilisation de ce rapport à d'autres fins que la prévention pourrait conduire à des interprétations erronées. SOMMAIRE GLOSSAIRE...................................................................................................................................9 RÉSUMÉ.......................................................................................................................................11 1 - CONSTATS IMMÉDIATS ET ENGAGEMENT DE L'ENQUÊTE............................................13 1.1 - Les circonstances de l'accident.......................................................................................13 1.2 - Le bilan humain................................................................................................................13 1.3 - L'engagement et l'organisation de l'enquête...................................................................13 2 - CONTEXTE DE L'ACCIDENT................................................................................................15 2.1 - L'infrastructure routière....................................................................................................15 2.2 - Les conditions météorologiques......................................................................................17 2.3 - L'accidentologie des cyclistes..........................................................................................17 2.4 - La sensibilisation des usagers au risque lié à l'« angle mort ».......................................18 3 - COMPTE RENDU DES INVESTIGATIONS EFFECTUÉES..................................................19 3.1 - L'état des lieux après l'accident.......................................................................................19 3.2 - Le résumé des témoignages............................................................................................19 3.2.1 -Le témoignage du conducteur du camion (A) impliqué dans l'accident................................................19 3.3 - La conductrice du cycle....................................................................................................20 3.4 - Le cycle (B)......................................................................................................................20 3.4.1 -Les caractéristiques techniques du cycle (B)........................................................................................ 20 3.4.2 -L'examen du cycle (B) après l'accident................................................................................................. 20 3.5 - Le conducteur du poids lourd...........................................................................................21 3.5.1 -Expérience et conditions d'emploi........................................................................................................ 21 3.5.2 -Activité dans la période précédant l'accident........................................................................................21 3.5.3 -Dépistage de l'alcoolémie et de la consommation de stupéfiants.........................................................21 3.6 - Le camion (A)...................................................................................................................21 3.6.1 -Le transporteur et l'organisation du transport.......................................................................................21 3.6.2 -Les caractéristiques techniques du camion impliqué dans l'accident (A).............................................21 3.6.3 -Les systèmes de vision indirecte (rétroviseurs/antéviseur) du camion (A)...........................................26 3.7 - L'analyse des enregistrements........................................................................................29 3.7.1 -L'exploitation de la vidéo enregistrée par la caméra de vidéo-protection..............................................29 3.7.2 -L'analyse des données enregistrées par le chronotachygraphe...........................................................32 4 - ANALYSE DU DÉROULEMENT DE L'ACCIDENT ET DES SECOURS...............................35 4.1 - Le déroulement de l'accident...........................................................................................35 4.2 - L'intervention des secours...............................................................................................35 5 - ANALYSE DES CAUSES ET FACTEURS ASSOCIÉS, ORIENTATIONS PRÉVENTIVES. .37 5.1 - Le schéma des causes et des facteurs associés............................................................37 5.2 - Les orientations préventives............................................................................................38 5.2.1 -La visibilité des usagers vulnérables par les conducteurs de poids lourds, en particulier en agglomération................................................................................................................................................. 38 5.2.2 -Les conditions d'aménagement spécifique aux cyclistes des carrefours à feux en agglomération.......40 5.2.3 -Le comportement des cyclistes vis-à-vis du risque lié aux angles morts des véhicules lourds.............40 6 - CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS.........................................................................43 ANNEXE : décision d'ouverture d'enquête..............................................................................45 Glossaire CEREMA : Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement FCO : Formation Continue Obligatoire FIMO : Formation Initiale Minimum Obligatoire ONISR : Observatoire National Interministériel de la Sécurité Routière Vélib' : Système de vélos en libre service mis en place par la Mairie de Paris 9 Résumé Le 17 août 2015, vers 8h42, un camion est arrêté rue de Douai (Paris 9 e arrondissement) au feu tricolore, au rouge, du carrefour entre les rues de Douai et de Bruxelles. Il redémarre au feu vert et en tournant à droite pour emprunter la rue de Bruxelles, percute une cycliste se trouvant sur son côté avant droit. La cycliste qui circulait dans le même sens que le camion et poursuivait sa route tout droit, chute au sol sous le choc et se retrouve sous les roues du camion qui s'immobilise au milieu du carrefour. La cause principale de cet accident est la non-visibilité de la cycliste par le conducteur du camion. Le conducteur n'a pas pu détecter la présence de la cycliste avant et pendant sa manoeuvre, soit parce qu'il n'a pas vérifié ses angles morts pendant sa manoeuvre de tourne-à-droite, soit parce que les rétroviseurs de son camion étaient mal réglés. La cycliste n'a pas non plus anticipé la manoeuvre du camion en tourne-à-droite. Un autre facteur de l'accident est le départ quasi concomitant de la cycliste et du camion au feu vert faisant que la cycliste a été quasi immédiatement percutée par le camion au moment où il engageait son tourne-à-droite. En conséquence, le BEA-TT émet les recommandations suivantes : Recommandation R1 à la Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) : Adapter les programmes FIMO et FCO dans l'objectif de mieux sensibiliser les conducteurs de poids lourds aux risques liés aux angles morts vis-à-vis des usagers vulnérables. Le programme de formation devra notamment insister sur la nécessité pour les conducteurs de regarder, avant et pendant l'exécution d'une manoeuvre de changement de direction, dans tous les rétroviseurs/antéviseurs utiles. Enfin, l'obligation des conducteurs de poids lourds de systématiquement vérifier avant le départ le bon réglage de l'ensemble des rétroviseurs/antéviseurs devra également être rappelée. Recommandation R2 à la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et aux principaux fabricants de poids lourds : DGEC : Dans le cadre de la révision du règlement CEE-ONU n° 46 relatif à l'homologation des systèmes de vision indirecte, proposer que l'ensemble des rétroviseurs installés, côtés conducteur et passager, puissent être réglés par le conducteur depuis sa position de conduite. Principaux fabricants de poids lourds : Dans l'attente, promouvoir et développer des systèmes de réglage du rétroviseur d'accostage et de l'antéviseur depuis le poste de conduite ainsi que tout autre système permettant d'améliorer la vision latérale depuis le poste de conduite, comme par exemple une vitre dans la partie basse de la portière. 11 Recommandation R3 à la mairie de Paris : Étudier la pertinence d'aménager systématiquement des sas vélo au pied de feux tricolores à proximité desquels se trouve une station de vélos en libre-service ou une aire réservée au stationnement des vélos, y compris sans bande d'accès. Recommandation R4 à la mairie de Paris, la préfecture de police de Paris et la Délégation à la sécurité routière (DSR) : Renforcer les actions de sensibilisation des cyclistes vis-à-vis de leur vulnérabilité particulière liée aux angles morts des véhicules lourds. Par ailleurs, le BEA-TT invite la DGEC, les fabricants de poids lourds et les équipementiers, à encourager, promouvoir et développer sur les poids lourds des systèmes « anti-angle mort » tels que des systèmes de détections actifs à l'intention des conducteurs de poids lourds (type capteurs avec signaux d'alerte visuels et sonores détectant la présence d'usagers vulnérables) et des systèmes d'alerte à l'intention des usagers vulnérables (type signaux d'alerte sonores, par exemple quand le conducteur de poids lourd actionne son clignotant droit). À titre d'exemple, un système actif d'aide à la conduite tel que le « Blind Spot Information System » dont un projet de règlement CEE-ONU a été présenté par l'Allemagne en 2017 pourrait remplir la fonction d'information du conducteur sur les angles morts. 12 1 - Constats immédiats et engagement de l'enquête 1.1 Les circonstances de l'accident Le 17 août 2015, vers 8h42, un camion est arrêté rue de Douai (Paris 9 e arrondissement) au feu tricolore, au rouge, au carrefour entre les rues de Douai et de Bruxelles. Il redémarre au feu vert et en tournant à droite pour emprunter la rue de Bruxelles, percute une cycliste se trouvant sur son côté avant droit. La cycliste qui circulait dans le même sens que le camion et poursuivait sa route tout droit, chute au sol sous le choc et se retrouve sous les roues du camion qui s'immobilise au milieu du carrefour. Figure 1 : Lieu de l'accident dans le 9e arrondissement de Paris 1.2 - Le bilan humain Cet accident a coûté la vie à la cycliste. 1.3 - L'engagement et l'organisation de l'enquête Au vu des circonstances de cet accident, le directeur du bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) a ouvert, le 19 août 2015, une enquête technique en application des dispositions des articles L. 1621-1 à L. 1622-2 du code des transports. 13 Les enquêteurs du BEA-TT se sont rendus sur les lieux. Ils ont rencontré le magistrat et les services de police en charge de l'enquête judiciaire. Ils ont également eu accès au dossier de procédure judiciaire et aux documents administratifs et techniques nécessaires à leurs analyses. Ils ont pu examiner le camion impliqué dans l'accident et vérifier les champs de vision de ses rétroviseurs/antéviseur. 14 2 - Contexte de l'accident 2.1 L'infrastructure routière L'accident a eu lieu dans le 9e arrondissement de Paris au niveau du carrefour entre la rue de Douai et la rue de Bruxelles. Ces deux rues ont le statut de voie communale. Ce carrefour est régulé par des feux tricolores et des feux piétons. Les feux sont synchronisés et étaient en état de fonctionnement au moment de l'accident. Le carrefour est quasiment plan. La rue de Douai est à sens unique de circulation et relie la rue Jean-Baptiste Pigalle au boulevard de Clichy. En amont du croisement avec la rue de Bruxelles, sa largeur est de 7,20 m et elle est composée (de la gauche vers la droite par rapport au sens de circulation générale) : d'une voie de circulation réservée aux cyclistes (bande cyclable) en sens inverse de la circulation générale d'une largeur d'environ 1,40 m ; d'une voie de circulation générale d'environ 4 m de large ; d'une station d'emplacements réservée aux cycles « Vélib' » d'une largeur d'1,80 m. La chaussée est bordée de chaque côté par un trottoir. Figure 2 : Vue de la rue de Douai en amont du feu à proximité duquel se trouvaient à l'arrêt le camion et la cycliste 15 À l'intersection entre la rue de Douai et la rue de Bruxelles, la circulation à sens unique rue de Douai est gérée par des feux tricolores de type R11v doublés, montés sur un poteau à droite du sens de circulation général. Figure 3 : Signalisation lumineuse verticale de la rue de Douai au carrefour avec la rue de Bruxelles Un panonceau du type M12a est présent sur le même poteau pour les tourne-à-droite vélos. Cette signalisation donne l'autorisation de franchissement au feu rouge par les cyclistes pour effectuer une manoeuvre de tourne-à-droite. Figure 4 : Panonceau M12a pour les tourne-à-droite vélos Aucun sas à vélo, au sens de l'article R. 415-15 du code de la route, n'existe devant le feu rue de Douai le jour de l'accident. 16 La vitesse maximale réglementaire rue de Douai est de 30 km/h, rappelée par un marquage au sol « 30 » au niveau du carrefour avec la rue Blanche. De la gauche vers la droite dans le sens de circulation du camion, la rue de Bruxelles comporte une voie à sens unique, d'une largeur d'environ 2,6 m en entrée avec une bande cyclable de quelques mètres de longueur avec un sens de circulation opposé à celle de la circulation des véhicules motorisés et d'une largeur d'environ 1 m. Dans cette rue, la vitesse maximale autorisée est de 50 km/h. Figure 5 : Vue de l'entrée de la rue de Bruxelles depuis le carrefour avec la rue de Douai 2.2 - Les conditions météorologiques Le dernier relevé, avant l'accident, de la station météorologique la plus proche, celle de Paris-Montsouris, située à environ 7 kilomètres du lieu de l'accident, a été établi le 17 août 2015 à 8 heures. Il fait état d'une température de 15,8 °C, d'une absence de précipitations, d'un ciel dégagé, d'une bonne visibilité et d'un vent venant du nord de 7 km/h. Le 17 août 2015, le soleil s'est levé à 6h50. Au moment de l'accident, il faisait jour et la chaussée était sèche. Les conditions météorologiques n'étaient donc pas défavorables au moment de l'accident. 2.3 - L'accidentologie des cyclistes D'après le bilan sécurité routière annuel établi par l'ONISR*, 149 cyclistes ont été tués en 2015 dans un accident de la route pour 4429 accidents corporels. Entre 2000 et 2010, le nombre de cyclistes tués a diminué de 46 % (soit 6 % par an en moyenne) pour un usage relativement stable (augmentation dans les villes, baisse en périphérie et stabilisation hors agglomération). * Terme figurant dans le glossaire 17 Les agglomérations concentrent 83 % des accidents impliquant un cycliste mais 44 % de leur mortalité, du fait de la moindre vitesse des véhicules. À Paris, depuis 2008, le nombre de cyclistes tués est stable avec moins de 5 tués par an. Le nombre de blessés également avec environ 600-700 blessés par an. 2.4 - La sensibilisation des usagers au risque lié à l'« angle mort » De multiples actions de sensibilisation à destination des piétons et cyclistes ont été menées, notamment par la Mairie de Paris, la préfecture de police de Paris et des associations de cyclistes. Parmi ces actions, des animations « angle mort » grandeur nature ont été organisées : l'angle mort étant défini comme un espace situé autour d'un véhicule qui n'est pas visible depuis le poste de conduite. Des autocollants « Danger angle mort » ont été apposés sur les véhicules lourds de la ville (benne de propreté, poids lourds de logistique, véhicules de voirie...). Des dépliants pour les conducteurs d'utilitaires et de poids lourds ont été également réalisés et distribués ainsi que des dépliants à destination des cyclistes indiquant les bonnes pratiques à adopter en termes de sécurité. La RATP émet également des dépliants et des campagnes de prévention par rapport aux angles morts des bus. La sécurité des cyclistes à Paris fait donc l'objet d'actions régulières de sensibilisation et de prévention de la part de l'ensemble des acteurs concernés. Le risque lié aux « angles morts » y est abordé de manière précise et concrète. 18 3 - Compte rendu des investigations effectuées 3.1 L'état des lieux après l'accident Le camion est immobilisé dans le virage reliant la rue de Douai à la rue de Bruxelles en tourne-à-droite. Le Vélib' est sous l'avant droit du camion. Une trace de « ripage » d'une longueur de 4,60 m est présente sous le camion du premier au troisième essieu. 3.2 - Le résumé des témoignages Les résumés des témoignages sont établis par les enquêteurs techniques sur la base des déclarations orales ou écrites dont ils ont eu connaissance. Ils ne retiennent que les éléments qui paraissent utiles pour éclairer la compréhension et l'analyse des événements et pour formuler des recommandations. Il peut exister des divergences entre les différentes déclarations ou entre ces déclarations et des constats ou analyses présentés par ailleurs. 3.2.1 - Le témoignage du conducteur du camion (A) impliqué dans l'accident À l'occasion de l'arrêt de (A) au feu rouge, le conducteur affirme avoir actionné son clignotant droit et regardé dans ses rétroviseurs, d'abord celui de droite, puis celui du « pare-brise » et pour finir celui de gauche. Il affirme également « ne pas avoir vérifié ses angles morts avant de redémarrer et avoir seulement regardé ses rétroviseurs ». Lorsqu'il était à l'arrêt, « son regard était porté sur le feu tricolore qui était rouge afin de savoir lorsqu'il pourrait redémarrer ». Au moment de l'accident, « ses deux vitres étaient fermées et il n'a entendu aucun bruit extérieur ». Sa radio était allumée « de façon normale, sans excès ». Au bout de quelques instants après avoir démarré au feu vert, il a senti « comme une bosse sur son côté droit au niveau de la deuxième roue ». Il s'est arrêté pendant « environ 3 secondes après le choc » puis a redémarré. Le conducteur pense que suite au choc, il a relâché la pédale d'accélérateur, ce qui a fait « tomber » une vitesse puis il a « réaccéléré » pour empêcher que (A) ne recule du fait de la légère pente. Quand il a vu une personne, en face de lui, lui hurler « arrête, arrête », il a immédiatement arrêté son camion, mis le « frein de parc » et est descendu de sa cabine pour voir en dessous de son véhicule. Il est ensuite remonté dans le camion pour couper le contact. Le conducteur conduit le véhicule (A) depuis fin 2011. Ce véhicule lui a été « attribué directement » et il en est le « seul chauffeur ». Les samedi et dimanche avant l'accident, il n'a pas travaillé. Le jour de l'accident, il a commencé à 6h10min et a pris le camion à 7h45min à Méry-sur-Oise dans le Val-d'Oise. 19 3.3 - La conductrice du cycle La conductrice du cycle est une femme âgée de 35 ans. 3.4 - Le cycle (B) 3.4.1 - Les caractéristiques techniques du cycle (B) Le cycle « Vélib' » est de couleur gris métallisé équipé d'un avertisseur sonore de type « sonnette » en état de fonctionnement. Son poids est de 22,4 kg. Le cycle (B) est équipé de dispositifs réflectorisants (deux catadioptres de couleur orange sur les rayons de la roue avant et de la roue arrière). Il possède également un dispositif lumineux à l'avant (lampe à éclairage blanc mue par une dynamo). Un catadioptre blanc est apposé sur l'avant du guidon et un anneau en matière réflectorisante de couleur blanche entoure le feu avant du cycle. Les roues avant et arrière sont cerclées d'une bande réflectorisante blanche. Deux catadioptres équipent chaque pédale vers l'avant et l'arrière du cycle. Un dispositif lumineux de couleur rouge est apposé sur le garde-boue arrière, animé par une dynamo. (B) est équipé de freins avant et arrière, en état de fonctionnement au moment de l'accident. Un panier est présent au-dessus de la roue avant. 3.4.2 - L'examen du cycle (B) après l'accident (B) présente de multiples rayures dans son ensemble. La roue avant est voilée, le panier est endommagé. Les poignées gauche et droite sont ripées et tordues. Figure 6 : Vue de (B) après l'accident 20 3.5 - Le conducteur du poids lourd 3.5.1 - Expérience et conditions d'emploi Le conducteur du poids lourd est un homme âgé de 57 ans, titulaire depuis 1993 d'un permis de conduire (C) autorisant la conduite des véhicules affectés au transport de marchandises ou de matériel dont le poids total autorisé en charge (PTAC) est supérieur à 7,5 tonnes qui était en cours de validité au moment de l'accident. Ses permis (C) et (CE) sont valides jusqu'au 9 juin 2018. Il est employé en Contrat à Durée Indéterminée (CDI) à temps complet depuis 1994 par une entreprise située dans le Val-d'Oise au sein de laquelle il exerce la profession de conducteur poids lourds et pour le compte de laquelle il réalise des livraisons à Paris et en région parisienne. Le conducteur bénéficiait d'une attestation d'exercice d'une activité de conduite à titre professionnel de véhicule pour la conduite desquels un permis C, EC, D ou ED est requis. Cette attestation mentionnait un exercice de l'activité de conduite depuis 1994. Le conducteur avait suivi une Formation Continue Obligatoire (FCO) pour le transport de marchandises en janvier 2014. Sa carte conducteur était valide le jour de l'accident et avait pour échéance de validité août 2016. 3.5.2 - Activité dans la période précédant l'accident Le jour de l'accident, il a commencé à 6h10min et a commencé à conduire le véhicule (A) à 7h42min à Méry-sur-Oise dans le Val-d'Oise dans les locaux de l'entreprise qui l'emploie. 3.5.3 - Dépistage de l'alcoolémie et de la consommation de stupéfiants Les dépistages de l'alcoolémie et de la consommation de stupéfiants auxquels ce conducteur a été soumis, se sont révélés négatifs. 3.6 - Le camion (A) 3.6.1 - Le transporteur et l'organisation du transport Le véhicule (A) est utilisé par une entreprise de travaux publics et sert à charger/décharger des matériaux de chantier. Cette entreprise est exempte de la licence de transport car elle agit en son compte propre pour le transport de marchandises sur les chantiers. Le véhicule (A), au moment de l'accident, se rendait rue des Martyrs à Paris 9 e pour aller charger des matériaux. 3.6.2 - Les caractéristiques techniques du camion impliqué dans l'accident (A) Le véhicule (A) impliqué dans l'accident est un camion benne de marque DAF et de type/variante/version AD 85 7 G1 N/50. Sa désignation commerciale est FAD CF85. 21 Son PTAC est de 32 tonnes et son poids à vide de 17 tonnes. Il comporte 2 places assises et quatre essieux. Il appartient à la catégorie internationale de véhicules N3. Sa longueur est de 6,95 m et sa largeur de 2,54 m. Ses deux essieux avant sont directeurs. La garde au sol à l'avant du véhicule est d'environ 44 cm. La hauteur du bord inférieur du pare-brise par rapport au sol est de 2,06 m environ et celle du bord supérieur de 2,80 m. Le véhicule a fait l'objet d'une réception par type nationale en version châssis-cabine en 2011. Il a été livré en version châssis-cabine et carrossé en camion benne en décembre 2011 par un carrossier installé dans le Val-d'Oise. (A) est également équipé d'une grue hydraulique de chargement et de déchargement de matériaux de chantier. Le véhicule (A) a été immatriculé la première fois le 28 décembre 2011 et était utilisé par une société de travaux publics installée dans le Val-d'Oise. Le véhicule faisait l'objet d'un crédit-bail de 4 ans contractée par cette même société. (A) dispose de deux indicateurs de changement de direction (clignotants) à l'avant, groupés avec les feux de croisement, de deux autres à l'arrière également groupés avec les feux de croisement, et enfin de deux latéraux indépendants. (A) a fait l'objet d'un contrôle technique favorable le 5 janvier 2015 valide jusqu'au 5 janvier 2016. Au moment de l'accident, (A) n'avait aucun chargement et avait un kilométrage de 157 433 km. Figure 7 : Vue du côté gauche de (A) après l'accident 22 Le véhicule (A) est équipé des rétroviseurs extérieurs suivants : 2 rétroviseurs principaux : un à gauche côté conducteur et un à droite côté passager ; 2 rétroviseurs « grand angle » : un à gauche côté conducteur et un à droite côté passager. Ces deux rétroviseurs sont situés sous les rétroviseurs principaux et fixés à la carrosserie par le même support ; 1 rétroviseur dit « antéviseur », situé côté passager en haut devant le pare-brise ; 1 rétroviseur dit « d'accostage », en haut devant le vitrage de la porte du côté passager. Figure 8 : Vue des rétroviseurs extérieurs du véhicule (A) impliqué dans l'accident Figure 9 : Hauteurs par rapport au sol (rétroviseurs, pare-chocs avant, pare-brise) 23 Figure 10 : Antéviseur du véhicule (A) côté passager avec champ de vision au sol Figure 11 : Rétroviseur d'accostage du véhicule (A) côté passager avec champ de vision au sol 24 Figure 12 : Rétroviseur principal du véhicule (A) côté passager avec champ de vision au sol Figure 13 : Rétroviseur « grand angle » du véhicule (A) côté passager avec champ de vision au sol 25 Les rétroviseurs principaux et « grand angle » sont réglables depuis le poste de conduite. Les commandes sont électriques et sont constituées de boutons positionnés sur la porte conducteur. L'antéviseur et le rétroviseur d'accostage ne sont pas réglables depuis le poste de conduite. Pour les régler, il faut être à deux personnes : une au poste de conduite pour vérifier le champ de vision et une autre à l'extérieur du véhicule pour les « régler à la main ». Compte tenu de la hauteur de ces rétroviseur/antéviseur (supérieure à 2,5 m), cette dernière personne doit utiliser un dispositif lui permettant d'accéder aux rétroviseur/antéviseur (escabeau). Un conducteur seul ne peut donc les régler. Figure 14 : Commandes de réglages des rétroviseurs principaux et grand angle 3.6.3 - Les systèmes de vision indirecte (rétroviseurs/antéviseur) du camion (A) Les rétroviseurs du camion (A) respectent les prescriptions techniques de la directive 2003/97/CE qui regroupe « rétroviseurs/antéviseurs » en plusieurs classes : Classe I pour les rétroviseurs intérieurs ; Classe II et III pour les rétroviseurs extérieurs dits « principaux » ; Classe IV pour les rétroviseurs extérieurs dits « grand angle » ; Classe V pour les rétroviseurs extérieurs dits « d'accostage » ; Classe VI pour les « antéviseurs ». Selon cette directive, pour un véhicule de catégorie internationale N3, catégorie à laquelle appartient le véhicule (A) impliqué dans l'accident : les rétroviseurs intérieurs (Classe I) sont facultatifs (pas de prescriptions pour le champ de vision). Le camion (A) n'en disposait pas. les rétroviseurs principaux de grande dimension (classe II) sont obligatoires avec un du côté conducteur et un du côté du passager. Le champ de vision minimal au sol (sur une surface plane) de ces rétroviseurs principaux est également précisé (voir figure suivante). 26 Figure 15 : Champ de vision des rétroviseurs principaux de la classe II les rétroviseurs « grand angle » (classe IV) sont obligatoires avec un du côté conducteur et un du côté du passager. Le champ de vision minimal au sol (sur une surface plane) de ces rétroviseurs « grand angle » est également précisé (voir figure suivante). Figure 16 : Champ de vision des rétroviseurs « grand angle » de la classe IV 27 les rétroviseurs d'accostage (classe V) sont obligatoires (un du côté du passager) et facultatifs (un du côté du conducteur). Ces deux rétroviseurs doivent être montés à au moins 2 m du sol. Le champ de vision minimal au sol (sur une surface plane) de ces rétroviseurs d'accostage est également précisé (voir figure suivante). Figure 17 : Champ de vision du rétroviseur « d'accostage » de la classe V les antéviseurs (classe VI), ou rétroviseurs frontaux, sont obligatoires et doivent être montés à au moins 2 m du sol. Ils peuvent être remplacés par un autre dispositif de vision indirecte tel qu'une caméra-moniteur. Le champ de vision minimal au sol (sur une surface plane) de ces antéviseurs est également précisé (voir figure suivante). Figure 18 : Champ de vision d'un antéviseur de la classe VI 28 3.7 - L'analyse des enregistrements 3.7.1 - L'exploitation de la vidéo enregistrée par la caméra de vidéo-protection Une vidéo de l'accident a été enregistrée par une caméra de vidéo-protection de la Ville de Paris. L'analyse de cette vidéo permet d'établir les faits exposés ci-après. Une personne récupère un Vélib' rue de Douai à la station Vélib'. Elle ne porte pas de gilet jaune fluorescent. Cette personne se trouve alors sur le côté droit du camion (A) à hauteur de sa cabine. Le véhicule (A) est à l'arrêt et empiète légèrement sur la bande cyclable (probablement pour faciliter sa future giration à droite). Le clignotant droit de (A) est activé. La cycliste retire le Vélib' dos au véhicule (A), ne pouvant ainsi pas distinguer le clignotant droit de (A) activé. En vision directe, le conducteur de (A) ne peut distinguer (B) du fait de la hauteur des vitrages (vitre de la portière latérale droite et pare-brise). 29 En revanche, en vision indirecte, le conducteur de (B) aurait pu distinguer (A) via le rétroviseur d'accostage (si ce dernier était bien réglé). Figure 19 : Cycliste (B) dans le champ de vision du rétroviseur d'accostage de (A) au moment du retrait du Vélib Environ 6 secondes après avoir retiré le Vélib' de la station, la cycliste se met en position en pied de feu avec les deux mains sur le guidon, prête à avancer. La cycliste est à l'arrêt avec les deux mains sur le guidon du Vélib. Elle se trouve à l'avant droit du véhicule (A). En vision directe, le conducteur de (A) ne peut toujours pas distinguer (B) du fait de la hauteur des vitrages (vitre de la portière latérale droite et pare-brise). 30 En revanche, en vision indirecte, le conducteur de (B) aurait pu distinguer (A) via l'antéviseur (si ce dernier était bien réglé). Figure 20 : Cycliste (B) dans le champ de vision de l'antéviseur de (A) À T0 : La cycliste démarre au feu vert. (A) démarre quasi concomitamment. En vision directe, le conducteur de (A) peut très difficilement distinguer (B). En vision indirecte, (B) est à la limite du champ de vision de l'antéviseur. 31 À environ T0 + 3s : (A) engage son virage à droite et percute la cycliste au niveau de son avant-droit. À environ T0 + 7s : Après avoir percuté (B), (A) s'arrête une première fois. (A) recule alors très légèrement et à environ T0 + 16s, il s'immobilise définitivement. 3.7.2 - L'analyse des données enregistrées par le chronotachygraphe Le conducteur a effectué ses derniers repos les 15 et 16 août 2016. Le 17 août 2015, jour de l'accident, le conducteur du véhicule (A) a débuté sa première période de conduite à 7h42min jusqu'à 8h13min puis, après une courte période de travail, a poursuivi une autre période de conduite de 8h16min à 8h42min. Figure 21 : Activité du conducteur de (A) dans les heures précédant l'accident 32 D'après l'analyse de l'enregistrement de la vitesse du camion (A) : Entre environ 8h 41min 33s et 8h 41min 47s : le véhicule (A) est à l'arrêt au feu rouge. À environ 8h 41min 47s : (A) démarre ; À environ 8h 41min 50s : (A) atteint une vitesse de 9 km/h et percute (B) ; À environ 8h 41min 54s : (A) s'immobilise une première fois ; À environ 8h 41min 58s : (A) redémarre ; À environ 8h 42min 01s : (A) atteint une vitesse de 4 km/h ; À environ 8h 42min 03s : (A) s'immobilise définitivement. Figure 22 : Diagramme de vitesse de (A) dans les secondes précédant l'accident 33 4 - Analyse du déroulement de l'accident et des secours 4.1 Le déroulement de l'accident (A) est à l'arrêt au feu rouge rue de Douai. Le conducteur de (A) actionne son clignotant droit en vue de tourner à droite vers la rue de Bruxelles. (B) est à l'arrêt sur la droite de (A). Lorsque le feu passe au vert, (A) et (B) avancent. (B) commence à avancer environ une seconde avant (A). (A) engage son virage à droite sans percevoir (B) sur sa droite. (A) percute (B) sur son côté droit. (B) chute au sol et passe sous les roues de l'essieu avant de (A) avec le Vélib'. 4.2 - L'intervention des secours L'accident est survenu vers 8h42. Le commissariat de police du 9e arrondissement intervient quelques minutes après l'accident. Un véhicule des sapeurs-pompiers de la Caserne Blanche arrive sur les lieux à 8h50, puis ceux de la caserne Boursault suivi d'un véhicule de la caserne de Château Landon. Les pompiers ont fait appel à l'ambulance de réanimation de la caserne Champerret. 35 5 - Analyse des causes et facteurs associés, orientations préventives 5.1 Le schéma des causes et des facteurs associés Figure 23 : Arbre des causes et des facteurs associés 37 5.2 - Les orientations préventives Cette analyse conduit le BEA-TT à rechercher des orientations préventives dans les domaines suivants : la visibilité des usagers vulnérables par les conducteurs de poids lourds, en particulier en agglomération ; les conditions d'aménagement spécifique aux cyclistes des carrefours à feux en agglomération. 5.2.1 - La visibilité des usagers vulnérables par les conducteurs de poids lourds, en particulier en agglomération Comme illustré au chapitre 3.7.1, le conducteur de (A) ne pouvait à aucun moment percevoir (B) en vision directe. En effet, la hauteur (environ 2 m) des vitrages de (A), notamment celle du pare-brise, ne permettait pas cette vision directe. À noter également que le jour de l'accident, aucun sas vélo n'était implanté au niveau du feu. Si un sas vélo avait existé, le conducteur de (A) aurait en effet pu distinguer (B) devant lui en vision directe. En vision indirecte, la perception de (B) de (A) était possible avec des rétroviseurs bien réglés. Entre le moment où (B) retire le vélo de la station Vélib' et le moment où il est à l'arrêt au feu rouge à l'avant droit de (A), (B) était en effet successivement dans le champ de vision du rétroviseur d'accostage et ensuite dans celui de l'antéviseur. Le conducteur de (A), alors à l'arrêt, aurait pu percevoir (B) via ces rétroviseurs. La raison très probable pour laquelle il ne l'a pas perçu est qu'il n'a pas regardé dans ces rétroviseurs au moment où (B) se trouvait dans leurs champs de vision respectifs. Le conducteur de (A) affirme avoir regardé dans tous ses rétroviseurs de droite à gauche. Il est possible que celui-ci ait réalisé ce « balayage » alors que la cycliste n'avait pas encore retiré le Vélib de la station. Une autre raison possible est un réglage approximatif des rétroviseurs, en particulier du rétroviseur d'accostage et/ou de l'antéviseur dont le réglage ne peut se faire directement depuis le poste de conduite. Pendant sa manoeuvre de tourne-à-droite, le conducteur de (A) a très probablement regardé devant lui pour engager correctement son véhicule dans un virage très serré. Cette vision vers l'avant ne lui permettait pas de percevoir (B) en vision directe. Pour percevoir (B), il aurait fallu que le conducteur de (A) regarde successivement et alternativement devant lui et dans l'antéviseur. Ce « balayage visuel » est difficile et contraignant, en particulier lors de la conduite de véhicules lourds dans des zones urbaines denses. Néanmoins, il s'avère indispensable pour éviter tout accident avec un usager vulnérable, que ce soit avec un cycliste, un deux-roues motorisé ou un piéton. Cette attitude est également nécessaire au vu de l'exigence fixée par l'article R. 412-6 I du code de la route (modifié par le décret n° 2008-754 du 30 juillet 2008) qui précise : « Tout véhicule en mouvement ou tout ensemble de véhicules en mouvement doit avoir un conducteur. Celui-ci doit, à tout moment, adopter un comportement prudent et respectueux envers les autres usagers des voies ouvertes à la circulation. Il doit notamment faire preuve d'une prudence accrue à l'égard des usagers les plus vulnérables. » 38 Dans la formation permis poids lourd (C, CE notamment), dans le chapitre « Règles de circulation et de signalisation », il est indiqué que pour changer de direction en sécurité, il faut anticiper la position des autres usagers, en particulier les deux-roues dans les angles morts. Le conducteur aurait pu anticiper la présence d'un deux-roues compte tenu de la présence de la station Vélib'. En termes de « conduite préventive », la FIMO précise qu'il faut faire très attention, principalement en agglomération lors des changements de trajectoire car les deux-roues sont souvent cachés par les angles morts de la carrosserie. Dans la FCO, il est rappelé qu'avant de se rabattre à droite, il faut contrôler la présence éventuelle d'un deux-roues. À l'occasion de ces formations, la présentation des risques liés aux angles morts et la procédure de vérification dans les rétroviseurs lors d'un changement de direction est essentielle et mérite une attention toute particulière, en particulier pour la conduite en agglomération. Or la formation dispensée lors des FIMO et FCO pourrait être améliorée. Ce renforcement de formation pourrait notamment s'appuyer sur les outils pédagogiques produits par le CEREMA relatifs à la prévention des accidents entre poids lourds en milieu urbain et modes actifs piétons et cyclistes (http://www.certu-catalogue.fr/valise-formationpour-la-prevention-des-accidents-entre-poids-lourds-en-milieu-urbain-et-modes-actifspietons-et-cyclistes.html). Au vu de ces éléments, le BEA-TT formule donc les recommandations suivantes : Recommandation R1 à la Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) : Adapter les programmes FIMO et FCO dans l'objectif de mieux sensibiliser les conducteurs de poids lourds aux risques liés aux angles morts vis-à-vis des usagers vulnérables. Le programme de formation devra notamment insister sur la nécessité pour les conducteurs de regarder, avant et pendant l'exécution d'une manoeuvre de changement de direction, dans tous les rétroviseurs/antéviseurs utiles. Enfin, l'obligation des conducteurs de poids lourds de systématiquement vérifier avant le départ le bon réglage de l'ensemble des rétroviseurs/antéviseurs devra également être rappelée. Recommandation R2 à la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et aux principaux fabricants de poids lourds : DGEC : Dans le cadre de la révision du règlement CEE-ONU n° 46 relatif à l'homologation des systèmes de vision indirecte, proposer que l'ensemble des rétroviseurs installés, côtés conducteur et passager, puissent être réglés par le conducteur depuis sa position de conduite. Principaux fabricants de poids lourds : Dans l'attente, promouvoir et développer des systèmes de réglage du rétroviseur d'accostage et de l'antéviseur depuis le poste de conduite ainsi que tout autre système permettant d'améliorer la vision latérale depuis le poste de conduite, comme par exemple une vitre dans la partie basse de la portière. 39 Par ailleurs, le BEA-TT invite la DGEC, les fabricants de poids lourds et les équipementiers, à encourager, promouvoir et développer sur les poids lourds des systèmes « anti-angle mort » tels que des systèmes de détections actifs à l'intention des conducteurs de poids lourds (type capteurs avec signaux d'alerte visuels et sonores détectant la présence d'usagers vulnérables) et des systèmes d'alerte à l'intention des usagers vulnérables (type signaux d'alerte sonores, par exemple quand le conducteur de poids lourd actionne son clignotant droit). À titre d'exemple, un système actif d'aide à la conduite tel que le « Blind Spot Information System » dont un projet de règlement CEE-ONU a été présenté par l'Allemagne en 2017 pourrait remplir la fonction d'information du conducteur sur les angles morts. 5.2.2 - Les conditions d'aménagement spécifique aux cyclistes des carrefours à feux en agglomération La cycliste (B) n'a pas anticipé le mouvement de tourne-à-droite de (A), mouvement prévisible car le conducteur de (A) avait actionné son clignotant droit alors qu'il était à l'arrêt au feu et que (B) n'avait pas encore retiré le vélo de la station Vélib'. (B) aurait pu anticiper ce mouvement car le clignotant « principal » groupé avec le feu de croisement était actionné, ainsi que son répétiteur latéral droit. (B) n'a pas distingué ces clignotants, probablement parce qu'il a retiré le vélo de la station dos à (A) pour ensuite se mettre en quelques secondes à l'arrêt au feu à l'avant droit de (A). Lors de ce mouvement, (B) n'a ainsi jamais été face à la carrosserie de (A). La raison évidente de la collision entre (A) et (B) est que (A) et (B) ont démarré quasi concomitamment au feu vert avec (B) engageant quasi immédiatement son tourne-àdroite. L'accident aurait donc pu être évité si (B) avait démarré quelques secondes avant (A) faisant qu'il ne se serait pas trouvé à proximité immédiate de (A) lors de son tourne-àdroite. Ceci aurait pu être possible grâce à l'aménagement d'un sas vélo, qui aurait très probablement permis à la cycliste d'être vue en vision directe par le conducteur du camion mais également lui aurait permis de démarrer avant le camion et ainsi ne pas se trouver sur sa trajectoire de tourne-à-droite quasi immédiatement après que le feu a viré au vert. Au vu de ces éléments, le BEA-TT formule donc la recommandation suivante : Recommandation R3 à la mairie de Paris : Étudier la pertinence d'aménager systématiquement des sas vélo au pied de feux tricolores à proximité desquels se trouve une station de vélos en libre-service ou une aire réservée au stationnement des vélos, y compris sans bande d'accès. 5.2.3 - Le comportement des cyclistes vis-à-vis du risque lié aux angles morts des véhicules lourds Un comportement adapté de l'ensemble des usagers, tel que le prescrit le code de la route, est à la base d'une amélioration de la sécurité routière. Le risque lié aux angles morts des véhicules lourds ne concerne pas uniquement les conducteurs de véhicules lourds (voir chapitre 5.2.1) mais également les cyclistes. Il apparaît donc aussi important de continuer à informer et sensibiliser ces derniers. 40 En conséquence, le BEA-TT formule la recommandation suivante : Recommandation R4 à la mairie de Paris, la préfecture de police de Paris et la Délégation à la sécurité routière (DSR) : Renforcer les actions de sensibilisation des cyclistes vis-à-vis de leur vulnérabilité particulière liée aux angles morts des véhicules lourds. 41 6 - Conclusions et recommandations Au regard des éléments exposés au chapitre précédent, le BEA-TT émet les recommandations suivantes : Recommandation R1 à la Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) : Adapter les programmes FIMO et FCO dans l'objectif de mieux sensibiliser les conducteurs de poids lourds aux risques liés aux angles morts vis-à-vis des usagers vulnérables. Le programme de formation devra notamment insister sur la nécessité pour les conducteurs de regarder, avant et pendant l'exécution d'une manoeuvre de changement de direction, dans tous les rétroviseurs/antéviseurs utiles. Enfin, l'obligation des conducteurs de poids lourds de systématiquement vérifier avant le départ le bon réglage de l'ensemble des rétroviseurs/antéviseurs devra également être rappelée. Recommandation R2 à la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et aux principaux fabricants de poids lourds : DGEC : Dans le cadre de la révision du règlement CEE-ONU n°46 relatif à l'homologation des systèmes de vision indirecte, proposer que l'ensemble des rétroviseurs installés, côtés conducteur et passager, puissent être réglés par le conducteur depuis sa position de conduite. Principaux fabricants de poids lourds : Dans l'attente, promouvoir et développer des systèmes de réglage du rétroviseur d'accostage et de l'antéviseur depuis le poste de conduite ainsi que tout autre système permettant d'améliorer la vision latérale depuis le poste de conduite, comme par exemple une vitre dans la partie basse de la portière. Par ailleurs, le BEA-TT invite la DGEC, les fabricants de poids lourds et les équipementiers, à encourager, promouvoir et développer sur les poids lourds des systèmes « anti-angle mort » tels que des systèmes de détections actifs à l'intention des conducteurs de poids lourds (type capteurs avec signaux d'alerte visuels et sonores détectant la présence d'usagers vulnérables) et des systèmes d'alerte à l'intention des usagers vulnérables (type signaux d'alerte sonores, par exemple quand le conducteur de poids lourd actionne son clignotant droit). A titre d'exemple, un système actif d'aide à la conduite tel que le « Blind Spot Information System » dont un projet de règlement CEE-ONU a été présenté par l'Allemagne en 2017 pourrait remplir la fonction d'information du conducteur sur les angles morts. Recommandation R3 à la mairie de Paris : Étudier la pertinence d'aménager systématiquement des sas vélo au pied de feux tricolores à proximité desquels se trouve une station de vélos en libre-service ou une aire réservée au stationnement des vélos, y compris sans bande d'accès. Recommandation R4 à la mairie de Paris, la préfecture de police de Paris et la Délégation à la sécurité routière (DSR) : Renforcer les actions de sensibilisation des cyclistes vis-à-vis de leur vulnérabilité particulière liée aux angles morts des véhicules lourds. 43 ANNEXE : Décision d'ouverture d'enquête 45 Bureau d'Enquêtes sur les Accidents de T ransport T errestre · Grande Arche - Paroi Sud 92055 La Défense cedex Téléphone : 01 40 81 21 83 Télécopie : 01 40 81 21 50 bea-tt@developpement-durable.gouv.fr www.bea-tt.developpement-durable.gouv.fr

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