Rapport d'enquête technique : disparition d'un marin embarqué sur le navire Massabielle survenu le 27 avril 2005 à l'ouest de Guernesey
Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les événements de mer
Auteur secondaire
Résumé
Le présent rapport d'enquête technique a été établi conformément aux dispositions du Code des transports. Il porte sur la disparition d'un marin embarqué sur le navire de pêche Massabielle survenue le 27 avril 2005 à l'ouest de Guernesey. Ce rapport expose les conclusions auxquelles sont parvenues les enquêteurs du BEAmer sur les circonstances et les causes de l'événement analysé et propose des recommandations de sécurité.
Editeur
BEAmer
Descripteur Urbamet
accident
;sécurité
;prévention des risques
Descripteur écoplanete
Thème
Transports
Texte intégral
Rapport d'enquête technique
MASSABIELLE
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Rapport d'enquête technique
DISPARITION
D'UN MARIN EMBARQUE SUR LE NAVIRE
MASSABIELLE
SURVENU LE 27 AVRIL 2005 A L'OUEST DE GUERNESEY
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Avertissement
Le présent rapport a été établi conformément aux dispositions du titre III de la loi n° 2002-3 du 3 janvier 2002 et du décret n° 2004-85 d u 26 janvier 2004 relatifs aux enquêtes techniques après événement de mer, accident ou incident de transport terrestre, ainsi qu'à celles du "Code pour la conduite des enquêtes sur les accidents et incidents de mer" Résolutions n° 849 (20) et A 884 (21) de l'Organisati on Maritime Internationale (OMI) des A 27/11/97 et 25/11/99.
Il exprime les conclusions auxquelles sont parvenus les enquêteurs du sur les circonstances et les causes de l'événement analysé.
BEAmer
Conformément aux dispositions susvisées, l'analyse de cet événement n'a pas été conduite de façon à établir ou attribuer des fautes à caractère pénal ou encore à évaluer des responsabilités individuelles ou collectives à caractère civil. Son seul objectif a été d'en tirer des enseignements susceptibles de prévenir de futurs sinistres du même type. En conséquence, l'utilisation de ce rapport à d'autres fins que la prévention pourrait conduire à des interprétations erronées.
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PLAN DU RAPPORT
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CIRCONSTANCES CONTEXTE NAVIRE EQUIPAGE CHRONOLOGIE FACTEURS DU SINISTRE RECOMMANDATIONS
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ANNEXES
· Décision d'enquête · Dossier navire · Cartographie · Dossier météorologique
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Liste des abréviations
CROSS GM kW OMI SITREP SNS SNSM TU tx VFI VHF
: : : : : : : : : : :
Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage Distance Métacentrique Kilowatt Organisation Maritime Internationale SITuation REPort Société Nationale de Sauvetage Société Nationale de Sauvetage en Mer Temps Universel Tonneaux Vêtement à Flotabilité Intégrée Radio Très Haute Fréquence (Very high frequency)
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CIRCONSTANCES
Dans la nuit du 26 au 27 avril 2005, le MASSABIELLE est en pêche à la coquille Saint-
Jacques à l'Ouest de Guernesey ; lors des opérations de virage des engins et de l'embarquement d'une drague, un des matelots perd l'équilibre et tombe à la mer. La manoeuvre effectuée par le patron pour tenter de le repêcher s'avère vaine ; les recherches entreprises sitôt l'alerte donnée sont demeurées infructueuses.
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CONTEXTE
Le MASSABIELLE est un navire de pêche artisanale appartenant en totalité à un armateur
de Granville qui a confié le commandement de cette unité à l'un de ses fils. Immatriculé à Cherbourg sous le n° 338276, le navir e est armé à la pêche côtière et pratique alternativement la pêche au chalut de fond et la drague des coquilles Saint-Jacques sur les gisements de la Manche Ouest, à partir du mois d'octobre, jusqu'à la fin avril.
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NAVIRE
le MASSABIELLE est un navire à coque en bois, construit en 1976, dont les principales
caractéristiques sont les suivantes :
Longueur hors tout Largeur Creux Jauge brute
: : : :
15,20 m ; 5,14 m ; 2,28 m ; 29,96 Tx.
Il est propulsé par un moteur diesel d'une puissance de 243 kW. Au moment des faits, le navire était à jour de ses visites réglementaires. La dernière visite annuelle de sécurité avait été effectuée le 17 septembre 2004, à l'issue de laquelle le permis de navigation en 3ème catégorie avait été renouvelé (validité jusqu'au 16 septembre 2005).
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Le MASSABIELLE avait à bord 3 dragues à bâton (dites « dragues anglaises » ou « dragues à roulettes »), le matériel de pêche au chalut (filets et panneaux) ayant été débarqué.
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EQUIPAGE
Le MASSABIELLE est armé par un équipage de 3 hommes. Le patron, âgé de 31 ans est titulaire des certificats de capacité (1997), de motoriste
à la pêche (1996) et du certificat restreint d'opérateur (2004). Il a commencé à exercer la fonction de patron de ce navire à partir de juillet 2004. Les deux matelots, âgés de 36 et 29 ans sont titulaires respectivement du certificat de capacité (1988) et du certificat d'initiation nautique (2002). Les trois hommes étaient à jour de leur visite médicale d'aptitude. La décision d'effectif, présentée le 16 mai 2002 par l'armateur et visée par les Affaires Maritimes, prescrivait un équipage de trois hommes pour la pêche au chalut, et de quatre pour le draguage des coquilles Saint-Jacques. Selon le patron, il était cependant fréquent, en fin de campagne des coquilles SaintJacques, que l'équipage soit ramené à trois hommes, notamment à cause de difficultés locales de recrutement.
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CHRONOLOGIE DES EVENEMENTS
Lundi 25 avril 2005 : le MASSABIELLE appareille de Port en Bessin, afin de pêcher la coquille Saint-Jacques sur la zone des Hanois (dans l'Ouest de l'île de Guernesey). 12h15 : les dragues sont mises à l'eau. Le navire remorque trois dragues à bâton à une vitesse comprise entre 2 et 2,5 noeuds. Chaque trait dure environ 1 heure 40 ; les dragues sont alors virées et vidées sur le pont puis refilées pour le trait suivant. Pendant le trait, les matelots trient et rangent les coquilles du trait précédent, le patron
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restant aux commandes du navire dans la passerelle ; ce rythme d'activité est maintenu sans discontinuer.
Mercredi 27 avril À 00h15 : (il s'agit du 18ème trait), le patron vire la première des trois dragues, les deux autres étant encore à l'eau ; les opérations de virage puis de vidage des sacs requièrent la présence sur le pont du patron qui doit alors quitter la passerelle. Un des matelots se trouve aux commandes des treuils, le deuxième ayant pour tâche de fixer le croc à la chaîne qui permet de soulever les poches de la drague pour les vider (voir schémas faits par le Centre de Sécurité). En voulant effectuer cette opération, le matelot prend appui sur le bâton de la drague et se penche par dessus la lisse pour prendre la chaîne ; à cet instant, la drague, alourdie par les roches contenues dans les sacs, et qui ne semble pas retenue, repart en arrière entraînant à la mer le matelot qui ne peut se dégager. Selon les témoins, lorsque le corps du matelot réapparait à la surface après que la drague ait été revirée, celui-ci semble inanimé la face dans l'eau. Le patron remonte à la passerelle et met le moteur en arrière pour tenter de s'en rapprocher, malgré le risque de prendre un câble dans l'hélice, mais le corps disparaît dans l'obscurité. L'alerte est donnée par le patron, sur la voie 16 de la VHF, au CROSS Jobourg qui fait déclencher les recherches par tous les moyens nautiques et aériens (navires sur zone, frégate allemande, vedette de sauvetage de Guernesey, vedette SNSM de Loguivy, vedette des douanes, hélicoptère Dauphin, avion Falcon). À 12h30 les recherches sont interrompues sans que le corps du marin ait été retrouvé. À 13h00 : le MASSABIELLE rentre à Granville.
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DETERMINATION & DISCUSSION FACTEURS DU SINISTRE
La méthode retenue pour cette détermination a été celle utilisée par le
DES
BEAmer
pour
l'ensemble de ses enquêtes, conformément à la résolution OMI A849-20 modifiée par la résolution A884-21. Les facteurs en cause ont été classés dans les catégories suivantes :
facteurs naturels ; facteurs matériels ; facteur humain. Dans chacune de ces catégories, les enquêteurs du possibles et tenté de les qualifier par rapport à leur caractère :
BEAmer
ont répertorié les facteurs
certain, probable ou hypothétique ; déterminant ou aggravant ; conjoncturel ou structurel ; avec pour objectif d'écarter, après examen, les facteurs sans influence sur le cours des événements et de ne retenir que ceux qui pourraient, avec un degré de probabilité appréciable, avoir pesé sur le déroulement des faits. Ils sont conscients, ce faisant, de ne pas répondre à toutes les questions suscitées par ce sinistre. Leur objectif étant d'éviter le renouvellement de ce type d'accident, ils ont privilégié, sans aucun a priori, l'analyse inductive des facteurs qui avaient, par leur caractère structurel, un risque de récurrence notable.
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Facteurs naturels
Durant la nuit du 26 au 27 avril, la météo sur zone était relativement clémente, le vent de Sud-Ouest force 4 et la mer peu agitée. Par conséquent, les contraintes naturelles ne sont pas retenues comme facteur déterminant.
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6.2
Facteurs matériels
Le MASSABIELLE n'a pas subi d'avaries, aucun appareil n'est tombé en panne et il n'y a pas eu de rupture de chaîne, de câble ou de cordage... au niveau des engins de pêche. Il en ressort que l'accident n'est pas imputable à une cause matérielle.
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Facteur humain
Même alourdie par la présence de cailloux dans les sacs, la drague remontée à bord n'aurait normalement pas dû repartir à la mer. Il semble avoir eu, au cours de la manoeuvre du train de pêche, une erreur ou une faute d'inattention qui constituerait un facteur déterminant de l'accident. Le fait que le matelot disparu soit monté de lui-même sur la drague en se penchant pour mettre le croc sur la chaîne de vidage, alors que ses collègues lui ont crié de dégager lorsqu'elle est repartie, constitue un facteur aggravant. Cette pratique serait assez fréquente avec ce type de drague. D'autre part, comme indiqué ci-dessus, l'effectif du navire aurait dû être de quatre hommes, la durée des séjours à la mer étant par ailleurs limitée à 24 heures. Or, l'accident s'est produit lors du 18ème trait à la 36ème heure de pêche, soit 48 heures après le départ de Port en Bessin. Il est clair qu'avec un équipage réduit à trois hommes et un temps de pêche dépassant largement les 24 heures, la fatigue constitue un autre facteur aggravant de l'accident, les temps de sommeil, extrêmements brefs, ne pouvant être pris que durant les traits, une fois terminé le tri du trait précédent. Après la chute à la mer du matelot, avec seulement deux hommes, dont le patron à la passerelle pour la manoeuvre et pour donner l'alerte, la récupération de la victime devenait difficile. Concernant l'effectif, deux remarques : - La décision d'effectif du MASSABIELLE, datant du 16 mai 2002, n'était signée que de l'armateur ; néanmoins, le patron actuel, ayant pris ses fonctions en 2004, a dû, ou aurait dû, en avoir connaissance.
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- Cette décision indique que le navire est armé à la « petite pêche » (ce qui justifie la limitation à 24 heures des séjours à la mer). Mais, le 18 septembre 2002, l'armateur a fait modifier le mode d'armement en passant en « pêche côtière », ce qui permet des marées de 96 heures ; l'actuel patron se fondant sur cette modification en a déduit qu'il pouvait rester plus de 24 heures à la mer. Deux autres points sont enfin à retenir : - L'absence de la bouée couronne munie d'un feu à retournement, qui aurait pu être jetée immédiatement à la mer dès la chute du matelot (la présence à bord de ce matériel avait pourtant été notée lors de la visite annuelle du 17 septembre 2004). Cela ne semble pas avoir eu d'influence dans le cas présent mais cela aurait pu être important, notamment si la vitesse avait été supérieure ou la visibilité différente. - Le fait que la victime ne portait pas de VFI. Même si leur absence n'est pas directement à l'origine de l'accident, l'utilisation de ces deux équipements aurait probablement pu en limiter les conséquences.
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7.1
RECOMMANDATIONS
D'autres accidents du même type ayant eu lieu, le
BEAmer
a lancé une étude sur ce
mode de pêche. Il recommande aux organisations professionnelles concernées de contribuer pleinement à sa réalisation et après publication de l'étude à la recherche de solutions appropriées.
7.2
Une nouvelle fois, le
BEAmer
a constaté que l'équipage ne portait pas de vêtement à
flottabilité intégrée (VFI). A nouveau, il en recommande avec insistance leur utilisation à la mer.
7.3
Le
BEAmer
rappelle l'utilité des dispositifs de sauvetage embarqués tels que les bouées
couronnes munies de feu à retournement et recommande leur utilisation systématique et effective.
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7.4
En ce qui concerne les effectifs, le
BEAmer
rappelle qu'il y a lieu de s'assurer que les
décisions sont à jour, et qu'elles sont effectivement respectées. Toute mutation de propriété, changement de mode d'armement, de patron, visite de sécurité devrait donner lieu à une vérification de ce point, l'attention des patrons est attirée sur leur responsabilité à cet égard.
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LISTE DES ANNEXES
A. B. C. D.
Décision d'enquête Dossier navire Cartographie Dossier météorologique
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Annexe A
Décision d'enquête
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Bureau d'enquêtes sur les événements de mer
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Annexe B
Dossier navire
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Annexe C
Cartographie
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Annexe D
Dossier Météorologique
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Ministère des Transports, de l'Equipement, du Tourisme et de la Mer
Bureau d'enquêtes sur les évènements de mer
Tour Pascal B 92055 LA DEFENSE CEDEX T : + 33 (0) 140 813 824 / F : +33 (0) 140 813 842 Bea-Mer@equipement.gouv.fr www.beamer-france.org