Rapport d'enquête technique : naufrage du navire à passagers Gourinis survenu le 30 avril 2007 au large de la presqu'île de Quiberon

Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les événements de mer
Auteur secondaire
Résumé
Le présent rapport d'enquête technique a été établi conformément aux dispositions du Code des transports. Il porte sur le naufrage du navire à passagers Gourinis survenu le 30 avril 2007 au large de la presqu'île de Quiberon. Ce rapport expose les conclusions auxquelles sont parvenues les enquêteurs du BEAmer sur les circonstances et les causes de l'événement analysé et propose des recommandations de sécurité.
Editeur
BEAmer
Descripteur Urbamet
accident ; sécurité ; prévention des risques ; NAUFRAGE
Descripteur écoplanete
Thème
Transports
Texte intégral
Rapport d'enquête technique GOURINIS 2 Rapport d'enquête technique NAUFRAGE DU NAVIRE A PASSAGERS GOURINIS SURVENU LE 30 AVRIL 2007 AU LARGE DE LA PRESQU'ÎLE DE QUIBERON Page 1 sur 28 Page 2 sur 28 Avertissement Le présent rapport a été établi conformément aux dispositions du titre III de la loi n°.2002-3 du 3 janvier 2002 et du décret n°.2004-85 du 26 janvier 2004 relatifs aux enquêtes techniques après événement de mer, accident ou incident de transport terrestre, ainsi qu'à celles du "Code pour la conduite des enquêtes sur les accidents et incidents de mer" Résolutions n°.A.849(20) et A.884 (21) de l'Organisation Maritime Internationale (OMI) des 27/11/97 et 25/11/99. Il exprime les conclusions auxquelles sont parvenus les enquêteurs du sur les circonstances et les causes de l'événement analysé. Conformément aux dispositions susvisées, l'analyse de cet événement n'a pas été conduite de façon à établir ou attribuer des fautes à caractère pénal ou encore à évaluer des responsabilités individuelles ou collectives à caractère civil. Son seul objectif a été d'en tirer des enseignements susceptibles de prévenir de futurs sinistres du même type. En conséquence, l'utilisation de ce rapport à d'autres fins que la prévention pourrait conduire à des interprétations erronées. BEAmer Page 3 sur 28 PLAN DU RAPPORT 1 2 3 4 5 CIRCONSTANCES NAVIRE ÉQUIPAGE CHRONOLOGIE FACTEURS DU SINISTRE 5.1 Facteurs naturels 5.2 Facteurs matériels 5.3 Facteur Humain Page Page Page Page Page Page 6 6 7 7 9 9 Page 10 Page 10 Page 11 Page 12 6 7 MESURES PRISES RECOMMANDATIONS ANNEXES A. Décision d'enquête B. Dossier photographique C. Cartographie Page 4 sur 28 Liste des abréviations BEAmer CROSS GPS RIPAM VHF : : : : : Bureau d'enquêtes sur les évènements de mer Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage Système de navigation par satellites (Global Positioning System) Règlement International de Prévention des Abordages en Mer Très hautes fréquences (Very High Frequency) Page 5 sur 28 1 CIRCONSTANCES Le lundi 30 avril 2007, le navire à passagers GOURINIS appareille du port de l'île de Houat à 12h10 avec 29 passagers pour rallier Port Maria à Quiberon. Le capitaine décide d'emprunter le Chenal dit des « Pêcheurs ». A environ 12h30, le navire talonne sur le récif « Des Trois Pierres » marqué par une tourelle Cardinale Nord. Une voie d'eau importante s'étant déclarée dans le compartiment machine, le capitaine prend la décision de faire évacuer le navire en utilisant les moyens de sauvetage du bord. A 12h54, l'ensemble des passagers est évacué et recueilli sain et sauf par les moyens de secours. Le GOURINIS dérive et sombre définitivement vers 16h30 dans les parages de « La.Teignouse ». 2 NAVIRE Le GOURINIS est un navire à passagers, propriété du Conseil Général du Morbihan, armé par la Société Morbihannaise de Navigation. Il a été construit en 1979 dans un chantier norvégien et francisé en 1987. Il s'agit d'un catamaran à coque en aluminium dont les principales caractéristiques sont les suivantes : Longueur hors tout Largeur Creux : : : 25,38 mètres ; 9,28 mètres ; 3,49 mètres ; 1,45 mètre ; 2 mètres environ ; 190. Tirant d'eau (milieu) : Tirant d'eau AR Jauge brute : : Il est propulsé par deux moteurs diesel d'une puissance unitaire de 845 kilowatts. Page 6 sur 28 Le permis de navigation en 3ème catégorie pour un maximum de 194 passagers a été renouvelé le 19 septembre 2006 (validité jusqu'au 14 septembre 2007) à l'issue de la visite annuelle effectuée le 15 septembre 2006. Le GOURINIS est équipé de 2 radars, d'un GPS (sans table traçante), d'un sondeur, d'un compas de route et de 3 postes radio VHF. Toutes les alarmes sont à la passerelle ; il n'y a pas de quart à la machine. 3 EQUIPAGE Le GOURINIS est armé par un équipage de 4 personnes : - Le capitaine, âgé de 50 ans, est titulaire du brevet de capitaine 3000 obtenu en 2002. Il s'agit d'un marin expérimenté qui exerce sur les navires de transport à passagers depuis plus de 10 ans. - Le chef mécanicien, âgé de 42 ans, est titulaire du brevet de chef mécanicien 3000, obtenu en 2002. - Deux matelots disposant des titres de qualification requis pour ce genre de navigation. 4 CHRONOLOGIE DES EVENEMENTS Le lundi 30 Avril 2007, à 12h10, le GOURINIS appareille du port de l'île de Houat avec 29 passagers à bord, pour se rendre à Quiberon. Les conditions météorologiques sont bonnes (vent quasi-nul - mer calme), avec toutefois un risque de brume susceptible de compromettre la visibilité. La basse mer étant à 11h00 (coefficient de 75), la traversée se fait en début de flot. Le navire fait route à environ 18/19 noeuds. Le Capitaine emprunte le chenal dit « Des Pêcheurs ». Dès la sortie du port, il met le cap sur la tourelle cardinale Sud « Er Pondeu » en contournant « La. Chaussée de Béniguet » par le Nord. Page 7 sur 28 En arrivant par le travers de la balise précitée, la brume tombe, la visibilité n'est plus que d'une dizaine de mètres, le capitaine réduit sa vitesse à 13/14 noeuds. Il laisse la balise « Er Pondeu » sur son tribord et vient chercher le Nord de la balise des « Trois Pierres » qu'il laisse par bâbord. Vers 12h30, au moment où il effectue sa giration pour venir chercher la tourelle le « Four » cardinale Sud, le navire talonne sur une tête de roche du haut-fond des « Trois Pierres ». Une voie d'eau importante se déclare immédiatement au niveau du compartiment machine tribord ; le chef mécanicien, descendu immédiatement, constate qu'étant donné la rapidité de l'envahissement, il ne peut mettre en oeuvre les moyens d'assèchement. A 12h45, le capitaine alerte le CROSS Étel de l'accident. A 12h54, il fait procéder à l'évacuation du navire. Celle-ci s'effectue en bon ordre, en moins de 15 minutes, à l'aide du dispositif d'évacuation en mer et des radeaux sous la conduite de l'équipage. A 13h02, l'ensemble des passagers et l'équipage du GOURINIS sont recueillis sains et sauf par les moyens présents sur zone. Le GOURINIS s'enfonce progressivement par l'arrière et dérive vers le Plateau de « La.Teignouse ». A 16h32, il s'immobilise et sombre définitivement. Une entreprise sera chargée, après une mise en demeure du Préfet Maritime, de tenter de renflouer l'épave. Cette tentative échouera en raison du mauvais temps. Le navire sera découpé ultérieurement. Page 8 sur 28 5 DETERMINATION & DISCUSSION DES FACTEURS DU SINISTRE La méthode retenue pour cette détermination a été celle utilisée par le BEAmer pour l'ensemble de ses enquêtes, conformément à la résolution OMI A.849 (20) modifiée par la résolution A.884 (21). Les facteurs en cause ont été classés dans les catégories suivantes : · · · facteurs naturels ; facteurs matériels ; facteur humain. BEAmer Dans chacune de ces catégories, les enquêteurs du ont répertorié les facteurs possibles et tenté de les qualifier par rapport à leur caractère : · · · certain, probable ou hypothétique ; déterminant ou aggravant ; conjoncturel ou structurel ; avec pour objectif d'écarter, après examen, les facteurs sans influence sur le cours des événements et de ne retenir que ceux qui pourraient, avec un degré de probabilité appréciable, avoir pesé sur le déroulement des faits. Ils sont conscients, ce faisant, de ne pas répondre à toutes les questions suscitées par ce sinistre. Leur objectif étant d'éviter le renouvellement de ce type d'accident, ils ont privilégié, sans aucun a priori, l'analyse inductive des facteurs qui avaient, par leur caractère structurel, un risque de récurrence notable. 5.1 Facteurs naturels Les conditions météorologiques sont bonnes (vent du 160 force 2, mer 2). Toutefois, des bouchons de brume occasionnels peuvent rendre la visibilité quasi-nulle par instants. C'est ce qui se produit au moment où le GOURINIS se trouve dans la partie la plus délicate du chenal (faible largeur, peu de profondeur en raison de l'heure de la marée) et où il doit modifier sa route pour rejoindre la balise du « Four ». Page 9 sur 28 Les enquêteurs ont retenu l'absence de visibilité comme facteur certain et aggravant de l'accident. 5.2 Facteurs matériels Aucun élément ni défaillance matérielle des appareils de navigation ne sont à l'origine de l'accident. Pour expliquer l'évènement, le capitaine souligne l'extrême sensibilité de la commande de barre électrique (tiller) qui, selon lui, a amplifié l'effet de giration et conduit le navire sur la tête de roche des « Trois Pierres ». Lors de la visite annuelle du 15 septembre 2006, il avait été prescrit l'embarquement d'une motopompe de manière permanente sous huit jours, motivé par un mauvais fonctionnement croisé bâbord / tribord du système d'assèchement du navire. Le jour de l'accident, cette pompe n'était pas à bord. Selon les enquêteurs, cela n'a sans doute pas eu d'incidence dans le cas considéré du fait de l'importance de la brèche, mais aurait pu s'avérer essentiel dans d'autres cas de figure. 5.3 Facteur humain L'accident du GOURINIS résulte du cumul de plusieurs facteurs liés à la navigation : La route du chenal des « Pêcheurs » n'est pas reconnue par les instructions nautiques qui recommandent d'éviter les passages de « La Teignouse » et du « Béniguet » par temps bouché ou incertain. Elle présente d'importantes difficultés de navigation dues à l'étroitesse des passages, la présence des hautsfonds et la quasi impossibilité de mouillages d'urgence. Néanmoins, l'utilisation de cette route est quasi-systématique de la part des capitaines. Ces derniers motivent leur choix, d'une part par un gain de temps et d'autre part par le souci de privilégier le confort des passagers, car il permet de bénéficier de l'abri de « La Chaussée de Béniguet » qui protège contre une houle venant du large. La décision d'emprunter cette route une heure et demie après la basse mer, alors qu'il y a sur zone des nappes de brume, est apparue aux enquêteurs comme un facteur déterminant. Il convient en outre de noter l'absence de houle ce jour là. Page 10 sur 28 - Dans ces conditions, la vitesse élevée du GOURINIS, alors que la visibilité avait brusquement diminué et qu'il franchissait une zone délicate, a constitué un facteur aggravant. Une vitesse plus faible aurait été plus conforme au RIPAM, en particulier à sa règle 19, et aurait sans doute pu amoindrir l'impact du choc et limiter l'importance de la voie d'eau. - La sensibilité de la commande électrique de barre à laquelle fait allusion le capitaine est probablement le facteur déclenchant du sinistre. Toutefois, embarqué à bord de ce navire depuis plusieurs mois, celui-ci aurait dû en tenir compte et ne pas entamer son évolution en étant si près des hauts-fonds des « Trois Pierres ». - En tout état de cause, de l'avis des enquêteurs, l'utilisation de cette route est à déconseiller pour les navires transportant des passagers. 6 MESURES PRISES Postérieurement à l'accident, des recommandations, tirées de l'expérience des capitaines pratiquant la ligne, ont été édictées par l'Armement assurant à l'époque l'exploitation de la ligne : ne pas emprunter le chenal secondaire par visibilité inférieure à 0,5 mille et, de ce fait, emprunter le chenal principal en période estivale, ou aller à Port-Haliguen au lieu de Port-Maria en période hivernale, le navire n'étant pas habilité à naviguer en zone B (division 223) ; au delà de force 7 WSW établi, privilégier l'arrivée du navire à Port-Haliguen, tant pour la sécurité du navire que pour le confort des passagers. Cette décision doit être prise dès le départ d'Hoëdic afin d'informer les passagers et d'organiser l'arrivée. Il est toutefois précisé que par mauvais temps (mer forte mais praticable), le chenal principal qui passe sur les hauts fonds lève une mer plus dangereuse que dans le chenal secondaire, mieux abrité, donc plus confortable ; les deux tourelles n'étant pas éclairées la nuit, la pose de bandes réfléchissantes fluorescentes permettraient de les identifier plus facilement. Page 11 sur 28 7 RECOMMANDATIONS L' accident du GOURINIS, survenu par beau temps, n'a pas eu de conséquences en terme de vies humaines étant donné le nombre peu élevé de passagers et le très bon comportement de l'équipage postérieurement à l'accident. Néanmoins, avec des circonstances météorologiques plus défavorables et 194.passagers à bord, cet accident aurait pu prendre un tour plus dramatique. Le BEAmer recommande : Aux Armements assurant la ligne : 7.1 De veiller par une instruction interne à la compagnie, ou toute autre disposition, à ce que leurs capitaines soient toujours en mesure de choisir la route la plus sûre. L'exploitant de la ligne ayant changé depuis le 1er janvier 2008, le BEA recommande au nouvel armateur de prendre en compte les observations relatives au choix des routes et du port de destination, telles qu'elles figurent au point 6 du présent rapport. Aux capitaines : 7.2 De veiller à adapter en toutes circonstances la conduite de leur navire aux conditions rencontrées (veille, vitesse). Page 12 sur 28 Liste des annexes A. B. C. Décision d'enquête Dossier photographique Cartographie Page 13 sur 28 Annexe A Décision d'enquête Page 14 sur 28 Page 15 sur 28 Annexe B Dossier photographique Page 16 sur 28 12h54 : déclenchement des toboggans et des radeaux de sauvetage. Vue du toboggan permettant l'évacuation des passagers et des deux radeaux de sauvetage. Page 17 sur 28 Vue tribord du navire se remplissant d'eau, le radeau tribord est toujours vide. L'évacuation n'est pas terminée. La balise « Er Pondeu » est en arrière plan. Le navire dérive vers la tourelle de « La Teignouse ». Page 18 sur 28 Vue du GOURINIS à la dérive. Le navire se rapproche de la zone rocheuse de « La Teignouse ». Page 19 sur 28 Le canot de sauvetage de Quiberon est à proximité du GOURINIS qui s'enfonce progressivement par l'arrière. GOURINIS en train de couler. Page 20 sur 28 Une partie des passagers est récupérée par l'équipage d'un catamaran de plaisance. Page 21 sur 28 Hélice et arbre tordu lors du passage sur les roches des Trois Pierres. Page 22 sur 28 Annexe C Cartographie Page 23 sur 28 Page 24 sur 28 Le 30 avril 2007 à 12h30, le GOURINIS talonne sur la roche dite Les Trois Pierres et sombre vers 16h30. Page 25 sur 28 Page 26 sur 28 Page 27 sur 28 Page 28 sur 28 Ministère des Transports, de l'Energie, du Développement durable l'Equipement, du Tourisme et de la Mer Ministère de l'Ecologie, et de l'Aménagement du territoire Bureau d'enquêtes sur les évènements de mer Tour Pascal B sur les évènements de mer Bureau d'enquêtes 92055 LA DEFENSE CEDEX T : + 33 (0) 140 813 824 / F : +33 (0) 140 813 842 Bea-Mer@equipement.gouv.fr Tour Pascal B - 92055 La Défense cedex www.beamer-france.org téléphone : +33 (0) 1 40 81 38 24 - télécopie : +33 (0) 1 40 81 38 42 www.beamer-france.org bea-mer@developpement-durable.gouv.fr

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