Rapport d'enquête technique : naufrage du chalutier Toirette survenu le 28 mai 2012 en baie de Seine près de Grandcamp-Maisy (une victime)

Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes sur les événements de mer
Auteur secondaire
Résumé
Le présent rapport d'enquête technique a été établi conformément aux dispositions du Code des transports. Il porte sur le naufrage du chalutier Toirette survenu le 28 mai 2012 en baie de Seine près de Grandcamp-Maisy. Cet accident a fait une victime. Ce rapport expose les conclusions auxquelles sont parvenues les enquêteurs du BEAmer sur les circonstances et les causes de l'événement analysé et propose des recommandations de sécurité.
Editeur
BEAmer
Descripteur Urbamet
accident ; sécurité ; prévention des risques ; NAUFRAGE
Descripteur écoplanete
Thème
Transports
Texte intégral
Rapport d'enquête technique NAUFRAGE DU CHALUTIER TOIRETTE SURVENU LE 28 MAI 2012 EN BAIE DE SEINE PRÈS DE GRANDCAMP-MAISY (UNE VICTIME) Rapport publié : mai 2013 2 Rapport d'enquête technique NAUFRAGE TOIRETTE SURVENU LE 28 MAI 2012 EN BAIE DE SEINE PRÈS DE GRANDCAMP-MAISY (UNE VICTIME) DU CHALUTIER Page 1 sur 16 Page 2 sur 16 Avertissement Le présent rapport a été établi conformément aux dispositions du code des transports, notamment ses articles L1621-1 à L1622-2 et du décret n°.2004-85 du 26 janvier 2004 modifié relatifs aux enquêtes techniques après événement de mer, accident ou incident de transport terrestre, ainsi qu'à celles du « Code pour la conduite des enquêtes sur les accidents » de l'Organisation Maritime Internationale (OMI), résolution MSC 255(84). Il exprime les conclusions auxquelles sont parvenus les enquêteurs du les circonstances et les causes de l'événement analysé. Conformément aux dispositions susvisées, l'analyse de cet événement n'a pas été conduite de façon à établir ou attribuer des fautes à caractère pénal ou encore à évaluer des responsabilités individuelles ou collectives à caractère civil. Son seul objectif a été d'en tirer des enseignements susceptibles de prévenir de futurs sinistres du même type. En conséquence, l'utilisation de ce rapport à d'autres fins que la prévention pourrait conduire à des interprétations erronées. BEAmer sur Page 3 sur 16 PLAN DU RAPPORT 1 2 3 4 5 6 7 8 9 CIRCONSTANCES CONTEXTE NAVIRE ÉQUIPAGE CHRONOLOGIE ANALYSE CONSÉQUENCES SYNTHÈSE RECOMMANDATIONS Page Page Page Page Page Page Page Page Page 6 6 6 7 7 9 11 12 12 ANNEXES A. B. Décision d'enquête Carte Page 4 sur 16 Liste des abréviations BEAmer : Bureau d'enquêtes sur les évènements de mer : Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage : Système de localisation mondial (Global Positioning System) : Tonneaux de jauge : Vêtement à Flottabilité Intégrée CROSS GPS tx VFI Page 5 sur 16 1 CIRCONSTANCES Le matin du 28 mai 2012, le chalutier TOIRETTE quitte le port de Grandcamp-Maisy pour se rendre sur ses lieux de pêche en Baie de Seine. En début de soirée, il croche sur un ridain, chavire et coule. L'alerte est donnée par la balise de détresse. Les recherches permettent de sauver le matelot, récupéré par un navire de pêche, et évacué vers l'hôpital de Cherbourg. En revanche, le patron, aperçu pour la dernière fois dans la timonerie, disparait. Son corps sera retrouvé dans la passerelle du navire deux jours plus tard. 2 CONTEXTE Ce navire a exercé la pêche au chalut (seiche) et à la drague (praire) à Granville, puis à la palangre et à la drague (moule, coquille Saint-Jacques) à Saint-Vaast La Hougue. Il a été acquis par son actuel propriétaire il y a 20 ans. Le TOIRETTE exerce la pêche à la drague (coquille) ou au chalut de nuit. Il venait d'être équipé récemment d'un chalut de 10 mètres avec un bourrelet adapté au poisson plat de fond (sole, turbot, barbue, plie). Son entretien est particulièrement soigné, le dernier arrêt technique date d'avril 2012. 3 NAVIRE Navire de pêche en bois, armé en pêche côtière, construit au chantier DANIEL à Paimpol en 1972. Principales caractéristiques : Immatriculation Catégorie de navigation Genre de navigation : : : CN 162342 ; 3ème catégorie ; petite pêche, moins de 24 heures ; Page 6 sur 16 Longueur hors tout Largeur Jauge brute Franc bord Propulsion Réducteur Diamètre de l'hélice Lest Diamètre des fûnes Point de tire des fûnes Balise Sarsat Navicom : : : : : : : : : : : 9,95 m ; 3,90 m ; 10,39 UMS (8,24 tx) ; 390 mm ; 107 kW ; marque CUMMINS ; au ¼ ; 80 cm ; galets et ciment ; 14 mm ; à environ 1,50 mètre au-dessus du pont ; RLB-32 Cat I. 4 ÉQUIPAGE La décision d'effectif pour ce navire prévoit deux marins minimum. Le 28 mai 2012, sont à bord du TOIRETTE : - Un patron, âgé de 49 ans, titulaire d'un certificat d'apprentissage maritime pêche, d'un certificat de marin pêcheur qualifié, d'un permis de conduire les moteurs marins et d'un certificat de capacité. Il exerce la fonction de patron depuis 1996. Il décèdera lors de l'accident. - Un matelot âgé de 52 ans, titulaire d'un certificat de capacité. Par ailleurs, un autre matelot, âgé de 56 ans, embarqué administrativement sur le rôle, n'est pas présent. 5 CHRONOLOGIE Conditions météo et marée (SITREP) : Vent de nord-ouest 3 noeuds, mer 2, visibilité 12 milles, courant de marée faible. Page 7 sur 16 Heures locales TU+2 Le 28 mai 2012 à 18h05, le TOIRETTE quitte le port de Grancamp-Maisy pour se rendre sur les lieux de pêche, à proximité du banc du Cardonnet. Vers 20h47 (heure relevée sur l'horloge du bord), le TOIRETTE croche dans les ridains et chavire. À 20h54, la balise 406 MHz se déclenche par 49° 29' N et 001° 05'W. À 20h57, le CROSS Jobourg tente d'appeler le TOIRETTE sur différents émetteurs. À 21h03, le CROSS contacte l'armateur qui confirme que le navire est en mer. À 21h04, le CROSS réitère ses tentatives d'appel vers le TOIRETTE. À 21h10, le CROSS met en oeuvre l'hélicoptère GX de la Marine nationale. À 21h12, le CROSS a un contact avec le navire de pêche LE KEVIN, proche de la zone. À 21h14, le CROSS met en action la SNS 239 de Saint-Vaast La Hougue. Les navires de pêche VOX MARIS, LES COPAINS D'ABORD, AGATHE MARTIN et YUNA proposent leur aide. À 21h22, les navires de pêche YA PLUS K et HIPPOCAMPE se dirigent sur zone. À 21h39, le YA PLUS K récupère le matelot en état de choc, agrippé à une bouée couronne. À 21h41, la SNS 5053 PATRON MICHEL LE PRAEL appareille. L'hélicoptère GX, arrivé sur zone, signale de nombreux débris. À 22h02, LES COPAINS D'ABORD récupère la balise par 49°30,3' N et 001°02,04' W. À 22h12, la SNS 239 prend le matelot rescapé à son bord. À 22h26, hélitreuillage du matelot et évacuation vers l'hôpital Pasteur de Cherbourg. Les recherches se poursuivent jusqu'à 00h20, sans succès. Page 8 sur 16 Le lendemain, les recherches effectuées par la Gendarmerie maritime sont infructueuses. C'est un collègue du patron qui, à son initiative, effectue des recherches et détecte une épave au sondeur avec une irisation sur l'eau. Le surlendemain, les plongeurs retrouvent l'épave au point indiqué. Elle repose par 24 mètres, sur un fond sableux, en bon état, gîtée sur tribord, cap au 319, et les fûnes du chalut mélangées par trois fois au cap 159. Le bourrelet du chalut est ensablé dans un ridain de 2.mètres de haut et la ralingue flotte. Le patron sera retrouvé, coincé dans la passerelle. La balise donne la position 49° 29' N et 001° 05' W. Or, le navire coule par 49°29,304 N et 001°0340 W, soit un écart de position d'environ 1 mille, ce qui explique le temps mis pour retrouver l'épave. La balise du navire n'avait pas de GPS intégré. Après son déclenchement, une triangulation est effectuée par les satellites disponibles, ce qui explique l'erreur de position donnée par celle-ci. 6 ANALYSE La méthode retenue pour cette analyse est celle utilisée par le BEAmer pour l'ensemble de ses enquêtes, conformément au Code pour la conduite des enquêtes sur les accidents de l'Organisation Maritime Internationale (OMI), résolution MSC 255 (84). Les facteurs en cause ont été classés dans les catégories suivantes : facteurs naturels ; facteurs matériels ; facteurs humains ; autres facteurs. Dans chacune de ces catégories, les enquêteurs du BEAmer ont répertorié les facteurs possibles et tenté de les qualifier par rapport à leur caractère : certain ou hypothétique ; déterminant ou sous-jacent ; conjoncturel ou structurel ; aggravant ; Page 9 sur 16 avec pour objectif d'écarter, après examen, les facteurs sans influence sur le cours des événements et de ne retenir que ceux qui pourraient, avec un degré de probabilité appréciable, avoir pesé sur le déroulement des faits. Ils sont conscients, ce faisant, de ne pas répondre à toutes les questions suscitées par l'évènement. 6.1 Facteurs naturels La zone où a eu lieu l'accident comporte de nombreux obstacles sous-marins du fait du débarquement de 1944. En outre, le fond est tapissé de ridains de sable. Il apparaît que la croche a eu lieu dans l'un de ces ridains. Cette configuration du fond est fréquente dans la région et les professionnels y sont accoutumés. Par ailleurs, lors de l'évènement du 28 mai 2012, les conditions météorologiques, de marée, et la visibilité étaient excellentes. La nature du fond est un facteur contributif. 6.2 Facteurs matériels Le TOIRETTE est un petit chalutier de conception traditionnelle. Le point de tire des fûnes est à une hauteur raisonnable (1,50 m au dessus du pont). Le train de pêche ne paraît pas disproportionné au navire. L'hélice possède un diamètre conséquent et peut générer une poussée ayant une influence sur la stabilité dans certaines conditions de croche. Le franc bord est relativement faible (390 mm), mais réglementaire (égal au dixième de la largeur), et le livet de pont peut donc être engagé pour un angle de gîte peu important. Au total, les caractéristiques d'ensemble du navire font que celui-ci a des limites vite atteintes, face à certaines situations de croche avec effets dynamiques. Les caractéristiques d'ensemble du navire, eu égard au métier de chalutage pratiqué, constitue un facteur sous-jacent. Par ailleurs, le panneau de la cale à poisson était ouvert, ce qui a pu contribuer à l'accident et constitue un facteur aggravant. Page 10 sur 16 Le radeau, placé sur la passerelle, ne s'est pas gonflé. Le largueur hydrostatique, bien que récent, n'a pas fonctionné. Son non-déclenchement aurait pu être un facteur aggravant de l'accident. 6.3 Facteurs humains Les facteurs humains apparaissent importants dans cet accident. Il semble en effet que la croche soit intervenue lors d'une giration à grande vitesse. Le train de pêche a alors quitté le lit du ridain que le navire suivait et l'un des panneaux du chalut a alors croché dans une butte de sable. Les effets dynamiques, à un moment où le navire était en giration, donc déjà vulnérable, ont été tels que le navire a chaviré immédiatement. Le fait d'effectuer une giration à grande vitesse, en franchissant les ridains perpendiculairement, constitue le facteur déterminant de l'accident. 6.4 Autres facteurs La soudaineté de l'événement n'a pas permis à l'équipage de s'équiper d'une brassière. Le navire n'était pas en situation de manoeuvre du train de pêche, le patron et le matelot ne portaient donc pas de VFI. 7 CONSÉQUENCES Décès du patron et fort traumatisme du matelot qui était dans un état critique lors de sa récupération. Perte totale du navire. Page 11 sur 16 8 SYNTHÈSE Le chavirage du TOIRETTE est dû à des effets dynamiques lors d'une croche sur un ridain, combinée à une giration avec un navire ayant des capacités limitées en terme de stabilité. Le BEAmer souligne la similitude de cet accident avec des événements récents : ALGWASTRE et L'ALLELUIA en 2012, TERRE-NEUVE en 2011, JANEIRO et LE BATTANT en 2010, ESPOIR, PETITE MARGOT et KER AVEL en 2008. 9 RECOMMANDATIONS Le BEAmer rappelle : Aux patrons pratiquant les arts trainants : 1 2013-R-023 : de se méfier des effets dynamiques de la giration sur la stabilité et, dès lors, d'éviter les girations brutales à grande vitesse, dans les zones à risques de croche. Aux armateurs : 2 2013-R-024 : de doter leurs navires de balises équipées de GPS intégrés (différence de prix faible, de l'ordre de 200 euros). Le BEAmer recommande : À l'administration chargée de la sécurité des navires : 3 2013-R-25 : de réexaminer, en liaison avec les fabricants, la fiabilité des largueurs hydrostatiques. Page 12 sur 16 LISTE DES ANNEXES A. B. Décision d'enquête Carte Page 13 sur 16 Annexe A Décision d'enquête Page 14 sur 16 Annexe B Carte 49°30'N 49°27,5'N 49°25'N 49°22,5'N 001°10'W 001°00'W Page 15 sur 16 Page 16 sur 16 Ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie Bureau d'enquêtes sur les évènements de mer Tour Pascal B - 92055 La Défense cedex téléphone : +33 (0) 1 40 81 38 24 - télécopie : +33 (0) 1 40 81 38 42 www.beamer-france.org bea-mer@developpement-durable.gouv.fr

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