Programme (le) mer. Etat des lieux et enjeux de la recherche et de l'innovation en sciences marines.

VINCENT (Patrick) ; GAILL (Françoise)

Auteur moral
France. Commissariat général au développement durable
Auteur secondaire
Résumé
Le programme mer dresse un état des lieux de la recherche française en sciences marines. Il se compose des thématiques suivantes : - la connaissance du système mer ; - l'exploitation durable des ressources marines ; - la gestion de l'espace côtier marin - le programme d'action pour les Outre-mer français. Ce programme constitue une base de travail pour définir les orientations françaises au plan national et international.
Editeur
CGDD
Descripteur Urbamet
recherche ; innovation ; construction navale ; mer
Descripteur écoplanete
Thème
Transports
Texte intégral
COMMISSARIAT GÉNÉRAL AU DÉVELOPPEMENT DURABLE RéférenceS Novembre 2012 Le Programme Mer État des lieux et enjeux de la recherche et de l'innovation en sciences marines Direction de la recherche et de l'innovation www.developpement-durable.gouv.fr Collection « Références » de la Direction de la Recherche et de l'Innovation (DRI) du Commissariat Général au Développement Durable (CGDD) Titre du document : Directeur de la publication : Rédacteur en chef : Auteur(s) : Le Programme Mer Laurent Tapadinhas Sylvie Dreyfus Patrick Vincent (Ifremer), Bernard Kloareg (CNRS - Université Paris 6), et al., Groupe mer de l'Alliance Nationale de Recherche pour l'Environnement (AllEnvi) Françoise Gaill (CNRS ­ INEE) et al., Groupe de travail composé de personnalités qualifiées en tant qu'acteurs dans les domaines marins, maritimes et littoraux Patrick Vincent (Ifremer), Françoise Gaill (CNRS ­ INEE), Bernard Commere (MESR ­ DGRI), Alain Lagrange (MESR ­ DGRI), Laurent Bélanger (MEDDE ­ DRI), Quentin Gautier (MEDDE ­ DRI) Frédéric Ruysschaert (MEDDE ­ DRI), Stéphanie Geremy (MEDDE ­ DRI), Chantal Martin (Ifremer) et Hélène Parfait (Ifremer) 14/11/12 Coordination éditoriale : Maquette-réalisation : Date de publication : Photo de couverture : © Laurent Mignaux / METL-MEDDE Ce document n'engage que son ses auteurs et non les institutions auxquelles ils appartiennent. L'objet de cette diffusion est de stimuler le débat et d'appeler des commentaires et des critiques. Le Programme Mer Le Programme Mer : État des lieux et enjeux de la recherche et de l'innovation en sciences marines Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 1 RéférenceS | novembre 2012 2 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Remerciements Nous tenons à remercier l'ensemble des contributeurs au Programme Mer : Au titre de l'Alliance AllEnvi, et en particulier son groupe mer, qui a assuré la rédaction du document : Philippe Bertrand (CNRS), Thomas Changeux (IRD), Pierre Cochonat (Ifremer), Philippe Cury (IRD), Bruno David (CNRS), Jérôme Dyment (CNRS), Pierre Elie (IRSTEA), Laurence Eymard (CNRS), Yves Frénot (IPEV), Didier Gascuel (Agreenium), Pol Guennoc (BRGM), Eric Langlois (SHOM), Juliette Lambin (CNES), Hélène Leau (IPEV), Nadine Le Bris (Université Paris 6), Philippe Lemercier (Ifremer), Françoise Médale (INRA), Carlos Oliveros (BRGM), Yves-Marie Paulet (Université de Bretagne Occidentale), Walter Roest (Ifremer), Céline Roux (SHOM), Marie-Hélène Tusseau (Ifremer), et tout particulièrement Patrick Vincent (Ifremer) et Bernard Kloareg (Université Paris 6) qui ont coordonné la rédaction, Au titre du groupe de travail composé de personnalités qualifiées, au sein duquel ce document a été discuté : Anne-Marie Alayse (CGT, Ifremer), Patrick Baraona (Pôle mer PACA), Gérard Blanchard (Université de la Rochelle, Conférence des Présidents d'Université), Thomas Changeux (IRD), Pascale Delecluse (Météo-France), Philippe Ferlin (ministère en charge de l'Agriculture), Laure Fournier (Fondation Total), Yves Frénot (IPEV), Caroline Gamblin (Comité national des pêches), Claude-Anne Gauthier (Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité), Yves Guillam (SHOM), Maurice Héral (ANR), Didier Hoffschir (ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche), Patrick Moquay (Maire de Saint Pierre d'Oléron), Hervé Moulinier (Pôle Mer Bretagne), Claire Nouvian (Bloom association), Stéphane Pennanguer (Conseil Régional de Bretagne), Jean-Philippe Quitot (ministère en charge du développement durable, direction des Affaires Maritimes), Patricia Ricard (Fondation Ricard), Philippe Roch (SNCS-FSU, Université de Montpellier 2), Étienne Ruellan (CNRS, INSU), Michèle Tixier-Boichard (ministère en charge de la recherche), Agnès Vince (ministère en charge du Développement durable, direction de l'eau et de la biodiversité), Jean-Baptise de Francqueville (ministère en charge du développement durable, direction de la recherche et de l'innovation) invité au titre du secrétariat du CORICAN, Bernard Commere (ministère en charge de la recherche), Claire Hubert (ministère en charge du développement durable, direction de la recherche et de l'innovation) et Laurent Bélanger (ministère en charge du développement durable, direction de la recherche et de l'innovation) en tant que rapporteurs, et tout particulièrement Françoise Gaill (CNRS, INEE) qui a dirigé les travaux du groupe de travail. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 3 RéférenceS | novembre 2012 Préface Présente sur tous les océans par ses Outre-mer, la France possède l'une des premières façades maritimes et constitue le deuxième territoire maritime au niveau mondial, avec plus de 11 2 millions de km d'espaces placés sous sa juridiction, soit une superficie plus vaste que l'Europe. L'économie de la mer représente pour notre pays une valeur ajoutée de près de 22 milliards d'euros et génère plus de 300 000 emplois directs. Les perspectives sont encore mal connues pour toutes les activités concernées, qu'il s'agisse de transports, de tourisme, de pêche, d'aquaculture, d'exploitation des fonds, de ressources biologiques végétales ou d'énergies renouvelables. Forte de ces atouts, la France souhaite légitimement afficher une politique marine ambitieuse dans le domaine de la recherche et de l'innovation, tout en répondant aux exigences environnementales de notre planète aux ressources limitées et aux régulations fragiles. Relever ce double défi supposait la conception d'un programme de recherche et d'innovation permettant d'étayer les politiques publiques au travers d'un état des lieux des sciences marines et d'une analyse de leurs nécessaires évolutions, dans le cadre défini à la fois par la stratégie nationale de développement durable et par la stratégie nationale de recherche et d'innovation, qui a identifié l'urgence environnementale comme l'une de ses priorités. L'effort public de recherche marine civile est considérable. Près de 3500 scientifiques, ingénieurs et techniciens, s'y consacrent et disposent pour cela d'un budget de l'ordre de 400 millions d'euros. La France compte parmi les tout premiers pays européens par la qualité de ses travaux et par les infrastructures de recherche qu'elle met à disposition de la communauté scientifique, au premier rang desquelles figurent les navires océanographiques. Quelle stratégie de recherche et d'innovation convient-il de conduire pour construire une économie maritime durable, développer des usages de la mer accessibles à tous et valoriser des ressources encore largement inexplorées, tout en préservant la diversité du vivant et les écosystèmes ? Comment combler le déficit abyssal de nos connaissances de l'environnement marin et des écosystèmes qui le peuplent ? Voilà des questions majeures, qui se posent aussi bien aux scientifiques qu'à la société civile, et à ses représentants des secteurs économiques, élus, responsables d'associations et décideurs publics, tous concernés par l'évolution des espaces maritimes où ils travaillent, où ils vivent, où ils observent et étudient, et qu'ils aiment et respectent à ces différents titres. L'élaboration d'orientations stratégiques pour la recherche sur les milieux marins, permettant de traduire les ambitions françaises dans les domaines de la recherche et de l'innovation maritimes, est donc indispensable. Le « Programme Mer », établi à la demande des ministres respectivement chargés de la recherche et de l'environnement, est une première étape dans cette direction. L'Alliance AllEnvi, récemment créée pour coordonner les travaux des nombreux acteurs de la recherche environnementale, a été naturellement sollicitée. Elle a confié à son « groupe 4 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer mer » la rédaction de ce document, élaboré en étroite liaison avec un groupe de personnalités qualifiées dans les domaines marins, maritimes et littoraux. Ce travail a intégré, parmi d'autres éléments, les volets recherche et innovation des travaux du Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction Navale (CORICAN). Le programme Mer dresse ainsi un état des lieux de la recherche française en sciences marines et identifie aussi bien les enjeux en matière de connaissance scientifique que les axes stratégiques des politiques publiques concernées. S'il appelle encore des amendements et des compléments, il constitue un document de travail inédit à un double égard, par son caractère pluridisciplinaire et plurithématique, d'une part, et par sa vision partagée avec les parties prenantes aux espaces marins et littoraux, d'autre part. Le Programme Mer devrait ainsi nourrir les travaux du Conseil national de la mer et des littoraux en cours d'installation, et plus particulièrement les réflexions de son Comité spécialisé pour la recherche (COMER). Nous souhaitons que ces instances puissent tirer profit du travail mené par l'Alliance AllEnvi en lien avec des personnalités qualifiées, pour formuler des avis sur les besoins de recherche, enrichir le dialogue entre les acteurs de la société civile et le monde de la recherche et de l'enseignement supérieur, et contribuer ainsi à l'élaboration d'une stratégie de la mer et des littoraux dans laquelle la recherche joue un rôle moteur pour l'innovation. Les auteurs de ce programme souhaitent également que la France prenne toute sa part dans la définition d'une politique marine européenne ambitieuse, dans toutes ses déclinaisons. Ce programme mer constitue à cet égard une base de travail pour la participation française à l'initiative européenne de programmation conjointe « Des océans sains et productifs ». La recherche marine revêt des dimensions scientifique, environnementale, sociale, économique, technologique et industrielle. Elle mobilise toutes les disciplines portant sur l'environnement, le vivant, les interactions hommes-milieux et l'aménagement, et explore des sujets aussi variés que les matériaux, la diversité biologique, les biotechnologies, les technologies pour l'observation, l'exploration et l'exploitation durable des ressources, la gestion des espaces partagés, le développement des activités économiques et la préservation des écosystèmes et de la biodiversité. En conclusion, nous espérons que ce Programme Mer permettra à la recherche marine à la fois d'être encore plus fructueuse dans ses travaux et de se voir reconnaître un rôle stratégique pour contribuer à résoudre la difficile équation du développement humain sur notre unique Planète. Dominique DRON Commissaire générale au développement durable (MEDDE) Roger GENET Directeur général de la recherche et de l'innovation (MESR) Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 5 RéférenceS | novembre 2012 6 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Avant-propos Nous vivons depuis quelques années une période nouvelle, marquée par une prise de conscience plus claire et mieux partagée des enjeux relatifs aux richesses de la mer. Ce nouveau regard se fonde sur de multiples facteurs. Le premier tient au lien entre l'océan et le climat : l'océan, grand régulateur du climat, est aussi le milieu le plus affecté par les conséquences du changement climatique. L'habitat marin constitue un second facteur déterminant, tant comme réservoir d'une biodiversité encore largement méconnue, que comme producteur de services écosystémiques cruciaux pour les sociétés humaines. À cet égard, le foisonnement des réflexions autour de la raréfaction des ressources halieutiques souligne la nécessité d'inventer de nouveaux modes de régulation et des outils innovants qui intègrent une dimension bio-économique. L'intérêt croissant accordé aux énergies marines renouvelables et à l'exploitation des ressources minérales profondes est une autre raison de cette attention portée au milieu marin. Toutes les questions qui touchent à l'avenir de l'Humanité concernent ainsi les océans, qu'il s'agisse de préserver les écosystèmes, de lutter contre le changement climatique, de garantir la subsistance alimentaire ou de trouver de nouvelles ressources minérales et énergétiques. Par sa vocation de « Programmation » et de « Coordination de la recherche pour l'environnement », l'alliance AllEnvi était toute désignée pour élaborer un état des lieux et identifier les enjeux de recherche et d'innovation en sciences marines. La capitalisation des expertises des opérateurs de recherche réunis en son sein a permis d'élaborer, pour la première fois, une vision commune des questions posées par le domaine marin, avec plusieurs objectifs : accroître la connaissance du système mer et permettre à la France de mieux exploiter les ressources marines sur un mode durable et de mieux gérer l'espace marin côtier. La discussion du texte au sein d'un groupe de travail composé de personnalités qualifiées des domaines marins, maritimes et littoraux a permis d'aboutir à une vision partagée entre la communauté scientifique et les parties prenantes. La publication du Programme Mer couronne la ténacité de ces deux instances, qui ont su structurer la variété des thématiques couvertes par les sciences de la mer, pour identifier à la fois les enjeux de la recherche et les défis à relever pour notre pays compte tenu de sa situation maritime remarquable. Françoise GAILL présidente du groupe de travail François HOULLIER président d'AllEnvi Patrick VINCENT coordonnateur du groupe mer d'AllEnvi Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 7 RéférenceS | novembre 2012 Détail d'un spirobranche arbre de Noël, « Spirobranchus giganteus », filtrant l'eau. Pente externe, atoll de Fakarava, archipel des Tuamotu, Polynésie Française. © CNRS Photothèque / Thomas Vignaud 8 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Sommaire Résumé..................................................................................................................................................................... 11 Summary................................................................................................................................................................... 19 Introduction............................................................................................................................................................... 27 Pilier 1 : Connaissance du système « Mer ».............................................................................................................. 29 1. Contexte et Enjeux scientifiques.........................................................................................................................................29 2.Analyse stratégique du positionnement national..............................................................................................................37 Pilier 2 : Exploitation durable des ressources marines.............................................................................................. 41 1. Les enjeux majeurs.............................................................................................................................................................41 2. Les atouts et faiblesses de la communauté scientifique française dans le domaine des ressources aquatiques.........43 3. Thématiques scientifiques prioritaires...............................................................................................................................44 Pilier 3 : Gestion de l'espace côtier marin................................................................................................................. 51 1. Éléments de contexte..........................................................................................................................................................51 2. Les enjeux scientifiques de recherche dans l'appui aux politiques publiques...............................................................53 3. Les enjeux scientifiques opérationnels dans l'appui aux politiques publiques...............................................................54 Pilier 4 : Programme d'action pour l'Outre-mer français........................................................................................... 57 1. Contexte et enjeux scientifiques........................................................................................................................................57 2. Analyse stratégique du positionnement national.............................................................................................................59 3. Proposition d'actions Outre-mer.........................................................................................................................................64 De l'importance d'un Programme Mer pour le développement et la valorisation en sciences marines ...................67 1. L'importance de l'économie maritime...............................................................................................................................67 2. La recherche en sciences marines en lien avec l'économie maritime............................................................................68 3. L'évaluation de l'économie maritime................................................................................................................................68 4. Développer la valorisation économique des résultats de la recherche en sciences marines.........................................68 Axe transversal : Les grandes Infrastructures de Recherche et autres dispositifs transversaux .................................71 1. Enjeux scientifiques et sociétaux.......................................................................................................................................71 2. Infrastructures en sciences de la mer déjà disponibles dans le champ du groupe Mer d'AllEnvi..................................72 3. Autres dispositifs transversaux en sciences de la mer......................................................................................................75 4. Points forts, points faibles, menaces, opportunités ­ Analyse stratégique du positionnement national......................79 5. Recommandations...............................................................................................................................................................81 Axe transversal : Technologie et construction navale................................................................................................ 83 Technologie..............................................................................................................................................................................83 La construction navale.............................................................................................................................................................86 Annexes.................................................................................................................................................................... 93 Annexe 1 ­ Lettre de saisine...................................................................................................................................................93 Annexe 2 ­ Glossaire...............................................................................................................................................................95 Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 9 RéférenceS | novembre 2012 10 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Le Programme Mer : État des lieux et enjeux de la recherche et de l'innovation en sciences marines Résumé Contexte et objectif Le Livre bleu « stratégie nationale pour la mer et les océans » a réaffirmé en 2009 l'ambition de la France pour la connaissance, la protection et la gestion de son vaste espace maritime, source de richesse économique et écologique. Simultanément, la réponse à l'urgence environnementale et le développement des technologies vertes étaient retenus comme un axe de recherche prioritaire par la Stratégie nationale de recherche et d'innovation. Dans ce cadre, l'élaboration d'orientations stratégiques de recherche pour les milieux marins permettant de traduire les ambitions françaises dans les domaines de la recherche et de l'innovation marine, maritime et littorale est indispensable. Le présent document, demandé par les ministres en charge de la recherche et en charge de l'environnement, est une première étape dans cette direction. Le Programme Mer dresse un état des lieux de la recherche française sur les environnements marins et littoraux, leurs moyens d'étude et les développements technologiques qui s'y rattachent, et identifie les enjeux de connaissance et de politiques publiques correspondants. Ce document a été rédigé par l'Alliance pour l'Environnement (AllEnvi) en liaison étroite avec un groupe de personnalités qualifiées en tant qu'acteurs dans les domaines marins, maritimes et littoraux. Il a intégré, entre autres, les volets recherche et innovation des travaux du Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction Navale (CORICAN). Construit autour de quatre piliers thématiques : la connaissance du système mer, l'exploitation durable des ressources marines, la gestion de l'espace côtier marin et le programme d'action pour les Outre-mer français, ce programme aborde également deux axes transversaux dédiés aux grandes infrastructures de recherche et à la technologie et la construction navale. Le Programme Mer constituera ainsi une base de travail pour définir les orientations stratégiques françaises de la recherche en sciences marines au plan national et international. Il devrait alimenter les travaux du Conseil national de la mer et des littoraux en cours d'installation, et plus particulièrement de son Comité spécialisé pour la recherche (COMER), pour identifier les orientations de recherche de la Stratégie nationale pour la Mer et le Littoral. Ce document fournira également les bases des contributions françaises aux démarches stratégiques aux échelles européenne et internationale, telles que l'Initiative de programmation conjointe « Océans sains et productifs ». Pilier 1 ­ Connaissance du système "Mer" La connaissance du système mer, de son substratum géologique, de ses composantes hydrologiques, biotiques, abiotiques, des processus qui contribuent à l'émergence et au maintien de la biodiversité marine, des processus de transfert de matière, d'énergie et de biomasse entre ses principaux compartiments, sont des défis de connaissance majeurs tant pour la recherche fondamentale que pour la compréhension des services rendus par le domaine marin. En tant que système, l'océan est un régulateur et modérateur des fluctuations du climat. Les ressources minérales et énergétiques y constituent un enjeu stratégique. Les espèces marines représentent des richesses économiques considérables (pêches, aquaculture, substances bioactives, production d'énergie future...). Elles fournissent également des modèles pertinents en recherche fondamentale. L'océan apporte par ailleurs beaucoup au domaine culturel et récréatif. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 11 RéférenceS | novembre 2012 1. Contexte et enjeux scientifiques Dynamique interne de la Terre Elle s'exprime dans les structures qui caractérisent le plancher océanique telles que les dorsales, les zones de subduction, les volcans et plateaux sous-marins, les zones de fracture, les zones d'accumulation sédimentaire ou d'érosion sous-marine. Étudier la partie solide la plus externe du globe terrestre, y compris sous les mers, répond à la fois au besoin de connaître le fonctionnement fondamental du système terre et à deux enjeux sociétaux majeurs : 1) la prévention des risques naturels, en particulier pour les populations des îles et celles vivant sur le littoral ; 2) l'accès aux ressources minérales et énergétiques. La France qui possède la deuxième zone économique exclusive (ZEE) du monde ne peut négliger une telle question. Océan régulateur du climat La compréhension des fluctuations du climat et de la dynamique océanique à différentes échelles spatio-temporelles est devenue absolument nécessaire, non seulement en termes d'accroissement de connaissances, mais aussi pour répondre aux besoins économiques et sociaux d'anticipation des risques. Les changements globaux actuels ne peuvent être compris, et a fortiori modélisés, qu'en connaissant la réactivité et la capacité de régulation du système climatique global (dont l'océan fait partie). L`amélioration des modèles de climat nécessite donc de mieux comprendre les mécanismes sous-jacents, les rétroactions et effets de seuil et les forçages qui les induisent. L'objectif final est de mieux simuler, par des modèles globaux et régionaux, les fluctuations du climat, comme celles des circulations océaniques, pour une gamme d'échelles spatiales et temporelles de plus en plus étendues. Diversité et dynamique des environnements marins La compréhension du fonctionnement dans le temps et dans l'espace des écosystèmes marins, y compris leur composante microbienne, en lien avec les flux biogéochimiques, les chaînes trophiques et le changement global (température, acidification, contamination, destruction d'habitats...) est un défi pluridisciplinaire. Les enjeux sont de comprendre la productivité marine, sa variabilité dans l'espace et dans le temps, sa prévisibilité (et à terme celle des ressources biologiques), et ses relations complexes avec le CO2 atmosphérique, notamment dans le cas des systèmes incluant de grands réseaux trophiques souvent soumis à des pressions anthropiques variées. La diversité marine, des gènes aux écosystèmes La vie marine est extraordinairement variée, mais reste assez mal connue, et ses futurs possibles le sont encore moins. De l'ordre de 75 % des espèces marines reste ainsi à découvrir, et plusieurs « boîtes noires » (nématodes, bactéries, virus...) sont d'immenses réservoirs de biodiversité qu'il faut explorer. Par ailleurs, on ignore presque tout des services écosystémiques associés à cette biodiversité, alors que la question de leur préservation prendra une place de plus en plus importante dans les années qui viennent. La compréhension de ces fonctions est un enjeu majeur, non seulement pour notre connaissance du changement global, mais aussi pour une exploitation durable des ressources océaniques. Comprendre comment les organismes et les communautés réagissent face aux changements globaux suppose de traiter d'adaptation, d'acclimatation, de plasticité, tout comme d'aborder la question de la structuration spatiale de la biodiversité marine et des interactions biotiques dans un contexte de changement. Comprendre comment ces réseaux d'interaction répondent aux stress physico-chimiques multiples imposés par les activités humaines, en prenant en compte les rétroactions exercées sur cet environnement abiotique, est une base indispensable à toute stratégie de conservation ou de restauration. Ceci passe par le déploiement d'approches expérimentales et par le développement de modèles prédictifs et de scénarios. Les organismes marins contribuent par ailleurs à renseigner de grandes questions de biologie fondamentale telles que la régulation de la division cellulaire, l'évolution des patrons de développement, les bases moléculaires de l'immunité... L'émergence de nouveaux modèles biologiques permettant d'explorer des voies métaboliques originales ou les mécanismes conduisant à la multicellularité, doit se poursuivre. L'écologie théorique et les sciences de l'environnement bénéficient aussi largement des modèles offerts par la grande diversité des habitats et des communautés marines. Les services écosystémiques Les écosystèmes marins fournissent une très grande variété de services écosystémiques (de soutien, de régulation, 12 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer d'approvisionnement, ou culturels) dont l'appréciation nécessite de solliciter des disciplines très diverses (géosciences, océanographie, sciences de l'environnement, biologie, écologie, chimie, sociologie, économie...). Nos connaissances actuelles sont loin d'être suffisantes pour décider de manière argumentée d'actions à conduire ou de comportements à tenir qui permettent la persistance de ces services sur le long terme. Les équipes françaises ont encore peu investi ce champ de recherche, qui suscite de fortes attentes sociétales. Le développement des compétences dans ce domaine nécessite la mise en pratique d'une véritable interdisciplinarité, associant étude du fonctionnement des écosystèmes marins, sciences économiques et sciences sociales. Les interfaces et milieux remarquables Le système « Mer » est intégré au système « Terre » avec lequel il échange par plusieurs interfaces : par la surface (atmosphère, glace), par la côte et les milieux qui lui sont associés (estuaires, lagunes, canyons, etc.) et par le plancher océanique, également diversifié (petits fonds, plateaux, pentes, dorsales, plaines abyssales, etc.). Ces milieux sont des lieux de transfert d'énergie, de matière, de biomasse. Leur spécificité se traduit à la fois dans les processus qui peuvent s'y produire, et dans les écosystèmes qu'ils abritent, ce qui leur confère une vulnérabilité accrue. Le domaine côtier, où la pression anthropique est actuellement la plus forte, en est un cas singulier important, détaillé dans le pilier 3. Trois milieux méritent une attention particulière, car les connaissances fondamentales y sont encore lacunaires du fait de leur accès difficile ou de leur isolement. En domaine profond, les pressions anthropiques s'exercent de manière de plus en plus prégnante (pêcheries, exploitations pétrolières et minières, stockage de déchets...) sur des écosystèmes plus divers et complexes qu'on ne le pensait (marge, canyons, plaines, dorsales...) et dont le fonctionnement est lié à des dynamiques temporelles différentes de celles observées dans d'autres secteurs de l'océan. En domaine polaire, le changement climatique se manifeste de façon particulièrement rapide. Des perturbations importantes affectent l'ensemble des « équilibres », avec des rétroactions sur le climat global via la circulation océanique et atmosphérique et le niveau moyen des mers. Les environnements marins polaires abritent une biodiversité originale caractérisée par un endémisme élevé. Comment ferait-elle face à un réchauffement ? La disparition de la banquise boréale bouleverse des équilibres écologiques fondamentaux et soulève la question du basculement des équilibres écosystémiques. De plus, les recherches sur les adaptations physiologiques aux conditions des régions polaires ou des zones profondes sont d'un intérêt remarquable en biologie. En domaine insulaire tropical, où l'on trouve des écosystèmes particulièrement exposés comme les récifs coralliens ou les mangroves, on voit les effets du changement global s'exprimer violemment avec la multiplication des événements extrêmes face auxquels il importe d'identifier les modes de résilience. Les monts sous-marins, intermédiaires entre ces îles et le domaine profond restent aussi des environnements à explorer pour comprendre le fonctionnement des écosystèmes océaniques. Les moyens de l'approche intégrée : observation ­ expérimentation ­ simulation Dans tous les champs disciplinaires, la compréhension du système « Mer » repose pour beaucoup sur une simulation intégrée des processus. Décrire, comprendre et analyser les fluctuations aux différentes échelles spatio-temporelles requiert modélisation, assimilation de données, quantification des incertitudes et analyse des observations et simulations. De multiples méthodes d'observation, fixes ou dynamiques (hydroplaneurs, stations de fond, flotteurs ou flotteurs-profileurs, télédétection spatiale...) sont nécessaires pour étudier l'océan. La mutualisation des efforts d'observation est un enjeu important de la communauté scientifique. Les bases de données font partie intégrante du dispositif. Des réflexions sont en cours pour accroître la visibilité de ces bases, leur qualité et leur interopérabilité. En océanographie, le développement de l'océanographie opérationnelle a été une évolution majeure des 15 dernières années. Un exercice de prospective scientifique nationale démarrera en 2012 pour dégager une vision commune des enjeux et objectifs de recherche prioritaires pour la communauté ainsi qu'une stratégie de développement et de mise en oeuvre adaptée. Cet exercice s'appuiera sur une analyse de l'évolution prévisible des moyens de calcul, des ressources disponibles et des programmes internationaux. En ce qui concerne la biodiversité, des efforts importants de modélisation ont été initiés, notamment pour ce qui touche aux ressources halieutiques, mais ils demeurent encore parcellaires. Il reste à renforcer la recherche sur la modélisation et la scénarisation des dynamiques de la biodiversité ce qui requiert de relever les défis de la modélisation des systèmes complexes. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 13 RéférenceS | novembre 2012 2. Analyse stratégique du positionnement national La communauté française est bien positionnée au sein des programmes internationaux, qu'il s'agisse des cycles biogéochimiques et de leurs liens avec l'atmosphère, du côtier, du climat, de la paléoclimatologie, du domaine profond, ou de la biologie. Par ailleurs elle est assez bien structurée de par l'existence de programmes sectoriels. Toutefois, il n'existe pas à ce jour de programme national rassemblant l'ensemble des actions conduites. Sur certaines thématiques, par exemple l'acidification des océans, le leadership français est fragilisé par une masse sous-critique. L'océanographie opérationnelle nécessite un soutien institutionnel fort pour se transformer en un service quasi-public. Les infrastructures expérimentales pour l'écologie marine sont très clairement déficientes en France, laissant la communauté hors du jeu international. Le succès de la communauté des sciences de la Mer au Programme des Investissements d'Avenir constitue une opportunité importante, à articuler avec d'autres acteurs de l'océanographie nationale : ensemble des stations marines (notamment le réseau RESOMAR piloté par le CNRS), initiative Axe Mer Ouest (AMO), pôle marseillais... Les universités françaises impliquées dans les sciences marines auraient également avantage à s'organiser pour accroître leur poids dans la réflexion européenne en cours (IPCOcéans). Pilier 2 ­ Exploitation durable des ressources marines La ZEE française recèle des ressources considérables : ressources vivantes renouvelables exploitées par la pêche et l'aquaculture, ressources liées à la biodiversité valorisables grâce au développement des biotechnologies, et ressources non vivantes telles que métaux, minéraux et énergie qui présentent des potentiels de croissance très importants. Toutefois, la mise en valeur des richesses des océans est confrontée à une triple contrainte : 1) certaines ressources restent largement méconnues ; 2) leur exploitation doit prendre en compte les enjeux de durabilité écologique ; 3) l'internationalisation des marchés induit des contraintes de rentabilité économique extrêmement sévères. Dans ce contexte, comprendre le fonctionnement des écosystèmes marins, connaître leurs ressources vivantes ou non vivantes, déterminer les modes d'exploitation et de valorisation les plus efficaces et durables, et définir un cadre de gouvernance efficient pour l'exploitation durable des ressources marines sont les défis à relever. 1. Enjeux majeurs et thématiques scientifiques associées Demande alimentaire en produits de la mer Elle est en forte progression. La France importe 65 % des produits de la mer qu'elle consomme. L'avenir de la pêche comme celui de l'aquaculture passe par le développement de nouveaux modes d'exploitation et de gestion des ressources dans un cadre écosystémique. Une véritable mutation a débuté, les efforts de recherche pour l'accompagner doivent se poursuivre et s'intensifier. Le développement de l'approche écosystémique des pêches est désormais un impératif afin d'être en mesure d'évaluer, comprendre et anticiper l'impact de la pêche ; il convient pour cela de replacer la pêche au sein d'une vision plus large englobant l'ensemble des services rendus par les écosystèmes marins. Dans ce cadre, le développement de modèles et de scénarios est une priorité. Exploration et exploitation durable des ressources minérales et énergétiques Le domaine océanique est un réservoir de ressources minérales (granulats, nodules, amas sulfurés...) et énergétiques (pétrole et gaz, énergies marines renouvelables) dont toutes les richesses sont encore loin d'être connues. Les besoins croissants ouvrent un champ nouveau pour l'exploration des ressources sous-marines profondes, notamment pour les métaux. Cela passe par des programmes d'exploration axés sur une meilleure connaissance des gisements et de leurs processus de mise en place (circulation des fluides, interactions géo-biologiques, cycles biogéochimiques...). Plus spécifiquement pour les ressources pétrolières, cela requiert une connaissance de l'évolution des marges pour établir des bilans de transferts sédimentaires et comprendre les processus de dépôt. Une telle activité devra s'inscrire dans un contexte de durabilité ; l'enjeu environnemental intégrant protection de la biodiversité et résilience des sites sera majeur. 14 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Les promesses du développement des énergies marines renouvelables ne doivent pas faire oublier qu'une attention particulière soit portée aux impacts de ces installations sur les écosystèmes marins et en particulier la mégafaune (notamment mammifères marins et populations ichtyologiques). Valorisation de la biodiversité par l'aquaculture et les biotechnologies C'est également un secteur en devenir, avec de forts enjeux économiques. Il faut relever les défis de l'aquaculture en permettant son développement dans des conditions durables qui l'intègre aux écosystèmes. Il s'agit en particulier : de valoriser les coproduits de la pêche (et de l'aquaculture) avec l'extraction de molécules et de substances à forte valeur ajoutée ; de développer la production industrielle de molécules pharmacologiques et industrielles ; de produire et valoriser certaines biomasses végétales à des fins énergétiques ou agricoles... Les projets labellisés Projets d'Investissements d'Avenir, Greenstars, Idéalg ou Océanomics en sont des jalons. En termes de ressources génétiques, le potentiel d'organismes marins encore peu explorés apparaît particulièrement important. Durabilité des ressources marines biologiques et de leurs systèmes d'exploitation Les questions de durabilité écologique renvoient à des enjeux de connaissance et de compréhension du fonctionnement des écosystèmes marins, des impacts des activités anthropiques et des facteurs de résilience de ces écosystèmes. Cet enjeu répond à une exigence sociétale forte, traduite notamment dans deux directives-cadres européennes (DCE et surtout DCSMM). Ce cadre législatif européen impose notamment d'apprécier le bon état écologique (BEE) des écosystèmes marins et de définir les conditions de son maintien. La définition d'indicateurs de suivi du bon état écologique des milieux marins constitue un enjeu majeur pour la recherche. Par ailleurs, il est nécessaire de comprendre et d'anticiper les réponses démographiques ou fonctionnelles des populations marines exploitées, en réponse aux différentes facettes du changement global. Interactions entre ressources marines et changements globaux Les changements hydrodynamiques ou hydroclimatiques, ainsi que la modification des habitats, ont des répercussions qui sont encore mal anticipées. Les aires de répartition de nombreuses espèces se déplacent vers les pôles ; la production primaire et les transferts au sein des réseaux trophiques sont modifiés ; la diminution d'abondance des prédateurs accroît l'instabilité des écosystèmes ; l'acidification des eaux a des effets potentiellement ravageurs, notamment sur les récifs coralliens ; l'élévation du niveau de la mer modifie le trait de côte et impacte certains écosystèmes. Les recherches doivent donc concerner l'impact global des pressions anthropiques sur le fonctionnement des écosystèmes et sur la durabilité des ressources. Cette évaluation environnementale doit être intégrée dans un ensemble plus vaste prenant en compte les aspects économiques et sociaux du développement durable. Elle doit aboutir à la définition de modes de gestion et de gouvernance, qui sont eux-mêmes des objets de recherche en constante évolution. 2. Atouts et faiblesses de la communauté scientifique française Dans le domaine des ressources marines, la communauté scientifique est encore en émergence. Le dispositif de recherche reste sousdimensionné au regard notamment de la variété et l'importance des ressources, de la taille de la ZEE française à explorer, de la demande et de la complexité en terme d'échelles des questions à traiter et d'écosystèmes à comprendre. Toutefois, cette communauté bénéficie d'une large panoplie de dispositifs d'accès à la connaissance des ressources marines (navires océanographiques, laboratoires marins...) même si le suivi des ressources et des écosystèmes doit être renforcé. Des enjeux stratégiques spécifiques concernent l'exploitation des grands fonds. Pour les ressources minérales marines, un nouveau contexte politique et géostratégique national et international implique une réaction forte de la communauté scientifique dans le cadre d'une stratégie nationale pour l'exploration des grands fonds marins décidée lors du Comité Interministériel de la Mer de juin 2011. Pilier 3 ­ Gestion de l'espace côtier marin Les espaces côtiers marins constituent un lieu particulier d'interactions complexes et d'enjeux multiples entre activités de recherche et attentes sociétales. S'y croisent notamment des activités traditionnelles, des usages nouveaux, des pressions anthropiques constituant des menaces pour les écosystèmes. Les espaces côtiers marins sont au coeur de politiques publiques Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 15 RéférenceS | novembre 2012 qui s'élaborent au niveau national, européen et international en s'appuyant largement sur les résultats de la recherche. En retour, ces politiques accordent un rôle très important à la connaissance et à l'innovation. Les systèmes littoraux comptent parmi les milieux présentant les plus grands enjeux en matière de gestion des risques, de conservation de la biodiversité et de gestion des interactions hommes-milieux. Ils ont aussi une grande importance qualitative du fait de la diversité et de la haute variabilité spatiale des habitats littoraux (notamment sous l'influence directe des domaines continentaux connexes de nature très variée). Enfin et surtout, ce sont des lieux privilégiés des implantations humaines. Divers systèmes littoraux requièrent une attention et une responsabilité particulières de la part des institutions de recherche. Cette situation est justifiée par leur vulnérabilité combinée à l'importance des éventuels services écosystémiques qu'ils rendent, mais également par la très grande diversité biologique qu'ils abritent et le rôle de certains d'entre eux dans le fonctionnement des océans. Plusieurs types d'environnements fragiles doivent ainsi concentrer les efforts de recherche : les littoraux soumis à des risques physiques d'érosion et de submersion ; les zones d'embouchures (estuaires, lagunes, deltas...) particulièrement exposées aux risques chimiques, nucléaires, et écotoxicologiques issus des bassins versants, avec une attention particulière aux mangroves et aux herbiers ; les récifs coralliens qui ont une très grande extension et qui sont soumis, entre autres, au risque majeur de l'acidification des océans. L'identification et la caractérisation des pressions anthropiques et des vulnérabilités qu'elles installent dans les différentes composantes du milieu littoral constituent la première étape par laquelle la recherche apporte son appui aux politiques publiques. Certains des enjeux ont été décrits dans les piliers précédents, mais l'identification et la compréhension des vulnérabilités doivent permettre de proposer des indicateurs pertinents de l'état des milieux. La gestion des espaces côtiers marins pose des défis variés à la recherche. En premier lieu, les politiques publiques de gestion du littoral doivent être des politiques intégrées. L'ensemble des enjeux écologiques, sociaux, économiques et politiques du développement durable est en effet exacerbé dans les zones littorales. Les usages des milieux y sont particulièrement variés, tandis que les forçages environnementaux et anthropiques agissent à différentes échelles temporelles et spatiales. La situation d'interface entre des espaces côtiers suppose enfin de prendre en compte les conséquences en mer des politiques terrestres. La gestion du littoral doit donc s'appuyer sur une déclinaison territoriale des politiques publiques, notamment au travers d'outils tels que la gestion intégrée de la zone côtière (GIZC) et les aires marine protégées (AMP). Du fait de leurs spécificités, les espaces côtiers interrogent les modes traditionnels de gouvernance, et nécessitent la mise en oeuvre de démarches de co-construction, de gestion partagée et/ou adaptative basées sur la construction de compromis. L'analyse des déterminants de l'opinion publique, des jeux d'acteurs, l'évaluation des actions et des effets des politiques publiques y sont particulièrement importants. Ces enjeux complexes nécessitent la transposition du savoir scientifique vers le gestionnaire (transfert des idées et intégration des résultats de recherche pour l'élaboration et l'évolution des politiques publiques, sensibilisation et éducation à la complexité), et suscitent la montée en charge des demandes d'expertise et de « monitoring » qui questionnent la place de l'expert dans la prise de décision, dans le débat citoyen, ainsi que la collégialité de l'expertise. Il est nécessaire d'une part de mettre en place de dispositifs d'appui technique à l'interface des besoins et de la recherche, et d'autre part de mieux prendre en compte les connaissances empiriques des acteurs présents sur le milieu (pour établir les diagnostics, les scénarios de gestion, définir et mettre en oeuvre l'approche écosystémique...). Enfin, la protection des fragiles écosystèmes côtiers nécessite d'élaborer des indicateurs de suivi de l'état écologique des milieux, d'évaluer le coût de leur dégradation dans une logique d'évaluation des services écosystémiques (suivant l'approche du Millenium Ecosystem Assessment). Le développement de l'ingénierie environnementale, transversale aux groupes d'AllEnvi, est un enjeu de recherche et d'innovation crucial. Un enjeu central concerne la mobilisation des sciences humaines et sociales (homme nature société) et des sciences de la communication. En effet, une politique de l'environnement, en milieu côtier et littoral plus qu'ailleurs, doit se fonder, d'une part, 16 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer sur la concertation et, d'autre part, sur l'intégration de l'expertise scientifique. En appui à cette politique doit être mise en place une recherche pluridisciplinaire associant les sciences politiques, la sociologie, la géographie, la biologie et les sciences de l'environnement. Dans ce contexte, l'intégration de la communauté des sciences humaines et sociales, avec laquelle peu d'interactions ont eu lieu à ce jour, est une action à promouvoir énergiquement. Pilier 4 ­ Programme d'action pour les Outre-mer français Avec sa zone économique exclusive d'une superficie d'environ 11 millions de km , la France dispose du second espace maritime mondial. L'Outre-mer en représente la composante essentielle (près de 97 %) située dans les grands océans (Atlantique, Pacifique, Indien et Antarctique). 2 L'effectif total des personnels de recherche et d'enseignement supérieur en Outre-mer, toutes catégories confondues, dépasse légèrement 3600 personnes, soit environ 1,6 % du total des personnels employés par les universités et les opérateurs publics en France (source Observatoire des sciences et techniques, 2010). Cette présence est proportionnellement plus de deux fois moindre qu'en métropole puisque la population totale des territoires d'Outre-mer représente 4 % de la population française. Les enjeux environnementaux en Outre-mer marin sont globalement les mêmes que ceux déclinés dans les piliers précédents (biodiversité, changement global, pressions anthropiques, risques...). En revanche, leurs objets et lieux d'application changent, ainsi que le contexte économique, social et politique dans lequel ils se posent. Sur ces bases, la Stratégie territoriale pour les Outre-mer (STRATOM) recommande le développement d'infrastructures de recherche partagées précisant qu'un « consensus se dégage sur la mise en place et la pérennisation de grands observatoires de recherche, de collections et de bases de données ». Elle préconise de transposer le concept de grand observatoire développé dans le Pacifique Sud sur d'autres sites, notamment l'océan indien. Les régions d'Outre-mer sont considérées comme les « frontières actives » de l'Europe (statut spécifique de Régions UltraPériphériques). À ce titre, les actions de coopération scientifique internationale menées depuis une ROM contribuent, avec une forte visibilité, au rayonnement dans la région, de la France et de l'Europe, et donc de leur influence sur les pays de la zone. Le programme "Mer" propose le développement de deux options de recherche coordonnées à l'échelle régionale. Celle du Pacifique Sud, qui regroupe la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie Française, a vocation à s'appuyer sur un instrument de recherche préexistant, le Grand Observatoire du Pacifique Sud. La seconde, située dans l'Océan indien, regroupe La Réunion, Mayotte et les Îles Éparses avec les TAAF. Elle se singularise par la présence d'équipes de recherche suffisamment fournies pour atteindre une masse critique capable de positionner la France à l'échelon international. Dans ce contexte très favorable, l'université de La Réunion est à même d'apporter un support important aux démarches des organismes. Il reste maintenant à envisager la création d'une structure « chapeau » de type Grand observatoire comme recommandé dans la STRATOM. Ces deux opérations majeures pourront être complétées par deux programmes locaux thématiques : le chlordécone aux Antilles et l'approche systémique des pêches en Guyane. Axes transversaux Deux axes transversaux aux 4 piliers complètent le document : ­ ­ Grandes Infrastructures de Recherche et autres dispositifs transversaux en sciences de la Mer ; Technologie et construction navale. Ces axes correspondent à des actions structurantes des organismes et opérateurs : infrastructures de recherche, technologie (y compris les éléments réunis sous le pilotage du Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction Navale ­ CORICAN) et développement technologique. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 17 RéférenceS | novembre 2012 La France possède un dispositif très complet d'infrastructures de recherche et autres dispositifs transversaux en sciences de la Mer, qui la place en position de chef de file en Europe. Pour saisir les opportunités qui s'offrent, de nombreuses forces sont directement mobilisables, tout de suite ou à brève échéance (Investissements d'Avenir). De plus des synergies peuvent être mises en place entre les divers membres de l'Alliance AllEnvi, y compris au-delà du champ des sciences de la mer, ou avec d'autres Alliances. Les acteurs français sont donc en position de lancer une dynamique vertueuse pour que ces infrastructures de recherche contribuent de façon efficace à la SNRI dans tous les domaines des sciences de la mer. 18 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer The Marine Program : Inventory and challenges of research and innovation in marine sciences Summary Background and objective In 2009, the "National strategy for the sea and the oceans" Blue book reaffirmed France's ambition to know in depth, protect and manage its vast maritime area; a source of economic and ecological wealth. Simultaneously, the response to the environmental emergency and the development of green technologies were identified as a priority theme of research by the National Research and Innovation Strategy. Within this framework, the establishment of strategic orientations for research on marine environments to fulfill French ambitions in the fields of maritime research and innovation was essential. This document established as demanded by the secretaries of state of research and environment is a first step in this direction. The Marine Program presents an inventory of French research on marine and coastal environments, their means of study and the technological developments they sustain, and identifies key issues in terms of knowledge and public policy. This document has been written by the Alliance for the Environment (AllEnvi, a group of French research agencies), in close connection with stakeholders involved in the marine and coastal fields. The document is built around four themes: knowledge of the marine system, sustainable use of marine resources, management of the marine coastal area, and action program for the French overseas territories, completed by two transversal axes dedicated to large research infrastructures, and technology and shipbuilding. The Marine Program will thus represent a working basis to define French strategic orientations on a national and international scale. It should feed the works by the National council for the sea and seashore currently being established, and more particularly its Committee specialized in research (COMER), in order to identify the main orientations of research for the National Sea and Coastline Strategy. This document will also form the basis of French contributions to strategic approaches on a European and international scale, such as the Joint Programming Initiative "Healthy and Productive Oceans". Theme 1 ­ Knowledge of the "Sea" system The marine system, its geological substratum, its hydrological, biotic and abiotic components, the processes that contribute to the emergence and maintenance of marine biodiversity, and the processes of matter, energy and biomass transfer between its main compartments are the major points that need to be investigated, as much for fundamental research as for understanding services provided by the marine environment. As a system, the ocean regulates and moderates climate fluctuations. Its mineral and energy resources constitute a strategic challenge. Marine species represent considerable economic wealth (fishing, aquaculture, bioactive substances, future energy production, etc.). They also provide suitable models for fundamental research. Furthermore, the ocean offers much to the field of culture and recreation. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 19 RéférenceS | novembre 2012 1. Background and scientific challenges The Earth's internal dynamic This is expressed in the structures that characterize the ocean floor, such as ridges, subduction zones, volcanoes and deep-sea plateaux, fracture zones and areas of sediment accumulation or deep-sea erosion. Studying the outermost solid layer of the Earth, including under seas, meets both the need to understand the functioning of the Earth system and two major societal challenges: 1) the prevention of natural risks, in particular for populations living on islands or coastlines; 2) access to mineral and energy resources. With the second largest exclusive economic zone (EEZ) in the world, France cannot afford to ignore this issue. The ocean as climate regulator Understanding climate fluctuations and oceanic dynamics on different spatio-temporal scales has become absolutely essential, not only in terms of increasing fundamental knowledge, but also to meet economic and social needs to anticipate risks. Current global changes can only be understood and, more importantly, modeled if the reactivity and regulation capacity of the global climate system (of which the ocean is a part) are known. Improving climate models therefore requires better understanding of the underlying mechanisms, feedback and threshold effects, and the forcings that cause them. The ultimate goal is to better simulate climate fluctuations such as those of ocean circulation, for an increasingly extensive range of spatial and temporal scales, using global and regional models. Diversity and dynamics of marine environments Understanding the functions of marine ecosystems in time and space, including their microbial component, in relation to biogeochemical flows, trophic chains and global change (temperature, acidification, contamination, destruction of habitats, etc.), is a multidisciplinary challenge. The objectives are to understand marine productivity, its variability in space and time, its foreseeable nature (and eventually that of its biological resources), and its complex relationships with atmospheric CO2, particularly in the case of systems that include large trophic networks often subject to a variety of anthropic pressures. Marine diversity, ecosystem disturbance Marine life is extraordinarily varied, but remains fairly little-known and its possible futures even less so. Around 75% of marine species are still to be discovered, and several "black boxes" (nematodes, bacteria, viruses, etc.) are huge reservoirs of biodiversity that must be explored. Furthermore, almost all of the ecosystem services associated with this biodiversity are unknown, whilst the question of their preservation will be of increasing importance in the years to come. Understanding these functions is a major objective, not only for our knowledge of global change, but also for sustainable use of ocean resources. Understanding how organisms and communities react to global changes requires dealing with adaptation, acclimatisation and plasticity, as well as addressing the question of the spatial structure of marine biodiversity and biotic interactions in a context of change. Understanding how these interaction networks respond to the multiple physico-chemical stresses imposed by human activities, taking account of the feedback exerted on this abiotic environment, is an essential basis for any conservation or remediation strategy. This is achieved by deploying experimental approaches and developing predictive models and scenarios. Furthermore, marine organisms contribute to documenting major questions of fundamental biology such as the regulation of cell division, the evolution of development patterns, the molecular basis of immunity, etc. The emergence of new biological models used to explore original metabolic pathways or mechanisms leading to multicellularity must continue. Theoretical ecology and environmental sciences benefit as widely from the models offered by the wide diversity of marine habitats and communities. Ecosystem services Marine ecosystems provide a very wide variety of ecosystem services (support, regulation, provisioning and cultural) whose assessment requires the input of very diverse disciplines (geosciences, oceanography, environmental sciences, biology, ecology, chemistry, sociology, economics, etc.). Our current knowledge is far from sufficient to make an informed decision on the actions to conduct or the behaviors to adopt to allow these services to continue over the long term. 20 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer French teams have still invested little in this field of research, which raises high societal expectations. The development of skills in this field requires a genuine multi-disciplinary approach to be put into practice, combining the study of marine ecosystem functions, economic sciences and social sciences. Exceptional interfaces and environments The "Sea" system is integrated in the "Earth" system with which it exchanges via several interfaces: via the surface (atmosphere and ice), via the coast and the environments associated with it (estuaries, lagoons, canyons, etc.) and via the ocean floor, also diversified (shallows, plateaux, slopes, ridges, abyssal plains, etc.). These environments are places of energy, matter and biomass transfer. Their specificity lies both in the processes that can occur there and the ecosystems they harbour, which increases their vulnerability. The coastal environment, where anthropic pressure is currently the highest, is a singularly important case of this, detailed in theme 3. Three environments deserve particular attention because they remain poorly known due to the difficulty in accessing them or their isolation. In the deep ocean environment, anthropic pressures (fisheries, oil and mining operations, waste storage, etc.) are increasing on ecosystems more diverse and complex than we thought (margins, canyons, plains, ridges, etc.) and whose functions are linked to temporal dynamics that differ from those observed in other sectors of the ocean. In the polar environment, climate change is manifesting itself particularly rapidly. Significant disturbances affect all "balances", with feedback on the global climate via oceanic and atmospheric circulation and average sea level. Polar marine environments harbour an original biodiversity characterised by high endemism. How will it fare in the face of warming? The disappearance of the northern pack ice is upsetting fundamental ecological equilibria and raises the question of tipping the balance of ecosystems. In addition, research into physiological adaptations to conditions in Polar regions or deep ocean areas are of exceptional interest to biology. In the insular tropical environment, where particularly exposed ecosystems are found, such as coral reefs and mangroves, the effects of global change are expressed violently with the increase in extreme events, in the face of which it is important to identify modes of resilience. Deep-sea mountains, intermediate between these islands and the deep ocean environment, also remain to be explored to understand ocean ecosystem functions. Integrated approach : observation ­ experimentation ­ simulation In all disciplinary fields, understanding the "Marine" system relies for many on an integrated simulation of the processes. Describing, understanding and analysing the fluctuations on different spatio-temporal scales require modeling, data assimilation, quantification of uncertainties and analysis of observations and simulations. Multiple fixed and dynamic methods of observation (gliders, background stations, floats and profiling floats, spatial remote sensing, etc.) are required to study the ocean. Pooling observation work is an important challenge for the scientific community. Databases form an integral part of the approach. Discussions are in progress to increase the visibility, quality and interoperability of these databases. In oceanography, the development of operational oceanography has been a major advancement of the last 15 years. A national scientific foresight exercise will begin in 2012 to arrive at a shared vision of the priority research challenges and objectives for the community, as well as a suitable development and implementation strategy. This exercise will be based on an analysis of the foreseeable development of calculation techniques, available resources and international programs. With regard to biodiversity, significant work on modeling has been initiated, particularly in relation to halieutic resources, but it still remains fragmented. Research into establishing models and scenarios for the dynamics of biodiversity remains to be strengthened, which means rising to the challenges of modeling complex systems. 2. Strategic analysis of the national position The French community is well placed within international programs, whether relating to biogeochemical cycles and their links with the atmosphere, the coast, climate, paleoclimatology, the deep ocean environment or biology. Furthermore, it is fairly well structured due to the existence of sectoral programs. However, there is so far no national program bringing together all of the actions conducted. On certain topics, for example the acidification of oceans, French leadership is weakened by a sub-critical mass. Operational Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 21 RéférenceS | novembre 2012 oceanography requires strong institutional support to transform into a quasi-public service. Experimental infrastructures for marine ecology are clearly deficient in France, leaving the community out of the international game. The success of the marine sciences community in the "Investissements d'Avenir" program represents an important opportunity which need to be integrated with other stakeholders in national oceanography: all marine stations (in particular the RESOMAR network led by the CNRS), the Axe Mer Ouest (AMO) initiative, the Marseilles center, etc. French universities involved in marine sciences will also benefit from organising themselves to increase their weight in the European discussions in progress (JPI-Oceans). Theme 2 ­ Sustainable use of marine resources The French EEZ contains considerable resources: renewable living resources exploited by fishing and aquaculture, resources linked to biodiversity that have become valuable thanks to the development of biotechnologies, and non-living resources such as metals, minerals and energy which have very significant growth potential. However, economically exploiting the wealth of oceans faces a three-fold restriction: 1) some resources remain largely unknown; 2) their exploitation must take account of ecological sustainability; 3) the internationalisation of markets introduces extremely severe economic profitability constraints. The challenges to be met in this context are understanding marine ecosystem functions, knowing their living and non-living resources, determining the most effective and sustainable modes of exploitation and optimisation, and defining an efficient framework of governance for the sustainable use of marine resources. 1. Major challenges and associated scientific topics Food demand for marine products This is sharply increasing. France imports 65% of the marine products it consumes. The future of fishing and aquaculture relies on the development of new ways to exploit and manage resources within an ecosystem approach. Genuine change has begun, but research efforts on this matter must intensify. The development of the ecosystem approach to fishing is now essential if we are to be able to assess, understand and anticipate the impact of fishing; to achieve this, fishing must be placed within a wider vision encapsulating all services provided by marine ecosystems. In this context, the development of models and scenarios is a priority. Exploration and sustainable use of mineral and energy resources The ocean environment is a reservoir of mineral (aggregates, nodules, sulphide deposits, etc.) and energy resources (oil, gas and marine renewable energies) whose real potential is still far from being known. Growing demand opens a new field for the exploration of deep-sea resources, in particular metals. This is represented by exploration programmes focused on a better knowledge of the deposits and the processes through which they are formed (circulation of fluids, geobiological interactions, biogeochemical cycles, etc.). More specifically for oil resources, this requires knowledge of the evolution of continent margins to establish balances of sediment transfers and understand the deposit processes. Such an activity should occur within a context of sustainability; the environmental challenge including the protection of biodiversity and resilience of the sites will be major. The expected development of marine renewable energies must drive us to pay a particular attention to the impacts of these installations on marine ecosystems and in particular the megafauna (marine mammals and ichthyologic populations in particular). Economic exploitation of biodiversity through aquaculture and biotechnologies This is also an emerging sector, with high economic stakes. We must rise to the challenges of aquaculture by allowing it to develop in sustainable conditions which integrate it into ecosystems. In particular, this concerns: taking advantage of the by-products of fishing (and aquaculture) by extracting molecules and substances with high added value; developing the industrial production of pharmacological and industrial molecules; producing and promoting certain plant biomasses for energy or agricultural uses (projects certified "Projets d'Investissements d'Avenir", Greenstars, Idéalg and Océanomics are the milestones for this). In terms of genetic resources, the potential of marine organisms that have still been little explored appears to be particularly significant. 22 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Sustainability of marine biological resources and their systems of exploitation Questions of ecological sustainability return to the objectives of knowing and understanding marine ecosystem functions, the impacts of anthropic activities and the factors influencing the resilience of these ecosystems. This objective responds to a strong societal requirement, expressed in particular in two European framework directives (WFD and above all MSFD). This European legal framework notably requires the good ecological status of marine ecosystems to be assessed and the conditions for maintaining this status to be defined. The definition of indicators for monitoring the good ecological status of marine environments is a major challenge for research. Furthermore, it is necessary to understand and anticipate the demographic and functional responses of the exploited marine populations, in response to the different facets of global change. Interactions between marine resources and global changes Hydrodynamic and hydroclimatic changes, as well as the modification of habitats, have repercussions that are still poorly anticipated. The ranges of numerous species are moving towards the poles; primary production and transfers within trophic networks have been modified; the reduced abundance of predators is increasing the instability of ecosystems; the acidification of waters is having potentially devastating effects, particularly on coral reefs; the rising sea level is modifying the coastline and affecting some ecosystems. Research must therefore relate to the global impact of anthropic pressures on ecosystem functions and the sustainability of resources. This environmental assessment must be integrated into a wider context that includes the economic and social aspects of sustainable development. It must result in the definition of management and governance methods, which are themselves the subject of research in constant development. 2. Strengths and weaknesses of the French scientific community The scientific community is still emerging in the field of marine resources. Research remains under-proportioned in relation in particular to the variety and importance of the resources, the size of the French EEZ to be explored, the demand and the complexity in terms of scales of the questions to be addressed and ecosystems to be understood. However, this community benefits from a wide panoply of means of accessing knowledge of marine resources (oceanographic ships, marine laboratories, etc.), although the monitoring of resources and ecosystems must be strengthened. Specific strategic challenges relate to the exploitation of deep ocean floors. For marine mineral resources, the new national and international political and geostrategic context requires a strong reaction from the scientific community as part of a national strategy for the exploration of deep ocean floors agreed by the Interministerial Committee of the Sea in June 2011. Theme 3 ­ Management of the marine coastal area Marine coastal areas are a specific point of complex interactions and multiple challenges between research activities and societal expectations. Traditional activities, new usages, and anthropic pressures in particular come together, representing threats to ecosystems. Marine coastal areas are at the heart of public policies being established at national, European and international level, based largely on the results of research. In return, these policies grant a very important role to knowledge and innovation. Coastal systems are amongst the environments presenting the greatest challenges in terms of risk management, biodiversity conservation and management of interactions between humans and the environment. They are also of great qualitative importance due to the diversity and high spatial variability of coastal habitats (notably under the direct influence of associated continental environments of a highly varied nature). Finally but most importantly, these are favoured areas for human settlements. Various coastal systems require particular attention and responsibility from research institutions. This situation is justified by their vulnerability combined with the importance of potential ecosystem services they provide, but also by the very wide biological diversity they harbour and the role of some of them in the functioning of oceans. Several types of fragile environment must therefore be the focus of Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 23 RéférenceS | novembre 2012 research: coastlines subject to the physical risks of erosion and submersion; the mouths of estuaries, lagoons, deltas, etc. particularly exposed to chemical, nuclear and ecotoxicological risks originating from basin areas, with particular attention to mangroves and sea grass; coral reefs which have a very wide spread and are subject, among others, to the major risk of ocean acidification. The identification and characterisation of anthropic pressures and the vulnerabilities they cause in the different components of the coastal environment represent the first step through which research is providing its support to public policies. Some of the challenges have been described in the previous themes but the identification and comprehension of vulnerabilities must enable suitable indicators of the status of these environments to be proposed. The management of marine coastal areas poses various challenges to research. Firstly, public coastline management policies must be integrated policies. All of the ecological, social, economic and political challenges of sustainable development are effectively exacerbated in coastal areas. Use of the environments here is particularly varied, whilst environmental and anthropic forcings act on different temporal and spatial scales. The interface between coastal areas also requires consequences on the sea to be taken into account in land policies. Coastal management must therefore be based on a territorial breakdown of public policies, particularly through tools such as integrated coastal zone management (ICZM) and marine protected areas (MPA). Due to their special features, coastal areas bring into question the traditional methods of governance, and require the implementation of approaches of joint construction and shared and/or adaptive management based on the construction of compromises. The analysis of factors determining public opinion, the roles of stakeholders, the assessment of actions and the effects of public policies are particularly important to this. These complex challenges require scientific knowledge to be transferred to the managers (transfer of ideas and integration of the results of research for the establishment and development of public policies, awareness raising and education on the complexity), and prompt the increase in requests for assessment and monitoring that question the place of the expert in decision making and public debates, as well as the collegiality of the expertise. On the one hand it is necessary to implement systems of technical support at the interface of requirements and research, and on the other hand to better take account of the empirical knowledge of the stakeholders present in the environment (to establish diagnostics and management scenarios, define and implement the ecosystem approach, etc.). Finally, the protection of fragile coastal ecosystems requires indicators for monitoring the ecological status of the environments to be established and the cost of their degradation to be assessed within a system of assessing ecosystem services (according to the Millenium Ecosystem Assessment approach). The development of environmental engineering, which applies across the AllEnvi groups, is a crucial objective of research and innovation. A central challenge concerns the mobilisation of human and social sciences (humanity, nature, society) and communication sciences. Indeed, an environmental policy, in the coastal environment more than anywhere else, must be based both on consultation and the integration of scientific expertise. A multi-disciplinary approach combining political sciences, sociology, geography, biology and environmental sciences must be implemented in support of this policy. In this context, the integration of the human and social sciences community, with which few interactions have taken place to date, is an action to be energetically promoted. Theme 4 ­ Program of action for the French overseas territories With its exclusive economic zone covering approximately 11 million sq. km, France has the second largest maritime area in the world. The overseas territories represent its essential component (almost 97%) located in the large oceans (Atlantic, Pacific, Indian and Antarctic). The total number of research and higher education personnel in overseas territories, all categories combined, is just over 3,600 24 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer people, which is around 1.6% of the total staff employed by the universities and public operators in France (source: Observatoire des Sciences et des Techniques, 2010). This presence is proportionally less than half that in mainland France as the total population of overseas territories represents 4% of the French population. The marine environmental challenges of overseas territories are much the same as those discussed in the previous themes (biodiversity, global change, anthropic pressures, risks, etc.). However, the subjects and locations of their application change, as does the economic, social and political context in which they are posed. On this basis, the Territorial strategy for overseas territories (STRATOM) recommends developing shared research infrastructures, specifying that a "consensus is being reached on the implementation and sustainability of large research observatories, collections and databases". It recommends transferring the concept of large observatory developed in the South Pacific to other sites, particularly the Indian Ocean. Overseas regions are considered to be the "active frontiers" of Europe (specific status of outermost regions). Thus the cooperative international scientific actions conducted from an outermost region contribute, highly visibly, to the standing of France and Europe in the region and therefore their influence on the countries in that region. The Marine Program proposes the development of two research options coordinated on a regional scale. That of the South Pacific, which includes New Caledonia and French Polynesia, will be based on an existing research instrument, the Large Observatory in the South Pacific. The second, located in the Indian Ocean, brings together La Réunion, Mayotte and the Scattered Islands with the French Southern and Antarctic Territories. It is distinguished by the presence of sufficiently equipped research teams to reach a critical mass capable of placing France on an international level. In this highly favourable context, the University of La Réunion is able to offer significant support to the organisations' approaches. It now remains to consider the creation of an "umbrella" structure such as the Large Observatory recommended in the STRATOM. These two major operations may be complemented by two local topical programs: chlordecone in the Antilles and the systemic approach to fishing in Guyana. Transversal axes Two areas that apply across all four themes complete the document: · · Large Research Infrastructures and other transversal schemes in Marine sciences; Technology and shipbuilding. These areas correspond to organisations and operators structuring actions: research infrastructures, technology (including the items under the coordination of the Council for the Orientation of Research and Innovation in Shipbuilding ­ CORICAN) and technological development. France has a very comprehensive system of research infrastructures and other transversal schemes in Marine sciences, which places it in the leading position in Europe. To seize the opportunities that arise, numerous forces can be mobilised directly, either immediately or at short notice ("Investissements d'Avenir"). In addition, synergies can be put into place between the various members of the AllEnvi Alliance, including beyond the field of marine sciences and with other Alliances. French stakeholders are therefore in a position to launch a virtuous dynamic so that these research infrastructures effectively contribute to the National Research and Innovation Strategy in all fields of marine science. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 25 RéférenceS | novembre 2012 26 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Introduction Le Grenelle de la mer a posé, dans le livre bleu des engagements, le diagnostic d'un « besoin abyssal de connaissances ». Pour y répondre, le Comité Opérationnel (COMOP) Recherche et Innovation a recommandé de mener une réflexion permettant d'établir un « Programme mer » ayant pour vocation de rassembler dans un document unique une vision partagée émanant des membres de l'Alliance AllEnvi et devant contribuer à trois exercices : Bien que l'organisation du document ait été construite dans la logique de besoins de recherche sociaux et économiques, il convient ici de réaffirmer que les besoins de recherche fondamentale (vision à 5 ou 10 ans, ou plus) sont indissociables de ceux de la recherche aval (vision ciblée sur des objectifs précis, en général à moins de 5 ans), la seconde n'étant performante qu'en se nourrissant des résultats de la première. Par ailleurs, les objectifs de la recherche amont s'inspirent bien souvent, au moins en partie, des questionnements sociétaux. C'est donc l'ensemble du continuum qu'il faut considérer et soutenir afin d'obtenir une production de connaissances et des capacités d'expertises durables sur thématiques évoqués. Le groupe Mer de l'Alliance AllEnvi a adopté une méthode incrémentale de construction du programme Mer. Ainsi, au premier stade proposé dans ce document, le groupe s'est mobilisé pour assembler des éléments destinés à nourrir la prochaine Initiative de Programmation Conjointe à l'échelle européenne, dont le calendrier de mise en place et l'orientation vers la réponse à une série de besoins de nature sociétale semblaient s'approcher de près à ce qui peut constituer une première ébauche de programme Mer. Pour établir cette première itération, le groupe Mer s'est appuyé sur différentes prospectives européennes, nationales ou régionales. Le document est construit en quatre piliers thématiques, dont trois sous-tendent déjà le document de vision préliminaire de la contribution française à l'IPC-Océan. Il est en effet souhaitable que le contenu du programme Mer, puisse servir de base pour étoffer la contribution française à l'IPC. chacun des champs · L'élaboration des politiques publiques dans le domaine de la mer, notamment : ­ la Stratégie pour la mer et les littoraux (SML), prévue dans le code de l'environnement, dont le processus d'élaboration fait l'objet d'un projet de décret (et d'une première réunion interministérielle qui a eu lieu le 14 novembre 2011). C'est à ce titre que la proposition de Programme Mer sera présentée au Conseil national de la mer et des littoraux et son comité spécialisé pour la recherche (COMER) ; ­ au niveau européen, la politique maritime intégrée européenne, et ses déclinaisons dans les politiques sectorielles, notamment le futur fonds européen pour les affaires maritimes et la pêches (FEAMP, projet de règlement en cours d'élaboration) qui accorde un rôle essentiel à la connaissance et à l'innovation ; ­ au niveau mondial, les programmes scientifiques coordonnés sous l'égide des différentes instances de l'ONU (Forum global des océans, COI, etc.) · la contribution du groupe Mer d'AllEnvi à l'initiative de programmation conjointe (IPC) au niveau européen « Océans et mers sains et productifs » ; · Le pilier 1 porte sur la connaissance du système mer, de son substratum géologique, de ses composantes biotiques, abiotiques, des processus qui contribuent à l'émergence et au maintien de la biodiversité marine, des processus de transfert de matière, d'énergie et de biomasse entre ses principaux compartiments, pour accroître notre capacité à anticiper le rôle des mers et des océans dans les processus de régulation / amplification des changements climatiques planétaires et en retour pour mieux cerner comment les communautés changements. marines seront impactées par ces · plus généralement, la contribution d'AllEnvi à la préparation des programmes de travail du futur programme européen « Horizon 2020 » et à la programmation nationale de l'ANR ; · l'élaboration et la coordination de propositions françaises dans le cadre de programmes scientifiques internationaux, notamment ceux de l'Organisation des Nations unies (Forum global Sud, etc.) des Océans, Commission océanographique internationale, etc.), et régionaux (Communauté du Pacifique Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 27 RéférenceS | novembre 2012 · Le pilier 2 porte sur les connaissances nécessaires à l'exploitation durable et respectueuse de l'environnement des ressources marines. France en tête des nations européennes pour les sciences de la mer dans le prochain programme-cadre, si possible en occupant les divers secteurs concernés (infrastructures, formation, programmation, EIT...). Tant dans le secteur de la biologie marine que de la biotechnologie et de l'océanographie, la dimension européenne est la priorité majeure du groupe Mer, compte tenu du grand mouvement de structuration en cours, que ce soit au niveau des infrastructures de recherche (Integrated Infrastructures Initiatives ­ I3, European Strategy Forum for Research Infrastructures ­ ESFRI), de la programmatique (EraNets), des réflexions stratégiques (Marine Board, EuroMarine), ou du transfert des connaissances vers divers porteurs d'enjeux (MG4U). L'implication forte de la France dans l'IPBES · Le pilier 3 porte sur les connaissances des processus multiples et complexes affectant les zones côtières et littorales, et l'appui aux politiques publiques · Le pilier 4 est dédié à l'Outre-mer : il pose les enjeux scientifiques liés à l'exploitation durable des ressources et à l'environnement, présente une analyse stratégique de positionnement et formule des priorités d'actions. Le lecteur notera que le document n'est pas un simple assemblage de l'ensemble des éléments de prospective issus des réflexions de chaque membre du groupe Mer de l'alliance AllEnvi : une étape supplémentaire a en effet été franchie pour assurer une contribution à une programmation de recherches systémiques pour la mer. Les deux points transversaux correspondent aux actions structurantes des organismes et opérateurs : infrastructures de recherche, technologie (y compris les éléments réunis sous le pilotage du Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction Navale ­ CORICAN) et le développement technologique. L'une des ambitions du groupe Mer de l'alliance AllEnvi est de positionner la France en tête des nations européennes pour les sciences de la mer : la mise en oeuvre effective de la proposition de programme Mer, tant au niveau national qu'européen et international, fait partie des conditions de l'aboutissement de cette ambition. La proposition initiale doit maintenant être développée tant sur le plan thématique que sur celui de la mise en oeuvre. Plusieurs actions ont été initiées et doivent se développer au cours des années 2012 et 2013 : (Intergovernmental Science Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services) constitue un autre enjeu majeur à relever pour les recherches futures faites sur la biodiversité marine. Développer cette expertise constitue un véritable défi scientifique qui permettra de mieux structurer et positionner la recherche marine nationale autour de l'enjeu international que constitue le développement de scénarios prédictifs pour les écosystèmes marins et la mise en oeuvre de l'approche écosystémique. Au total la France apparaît très bien placée, en raison de la variété et de la complémentarité des compétences disponibles. Le Programme Investissements d'Avenir a reconnu ces capacités, en validant un ensemble très complet de programmes d'envergure en sciences de la Mer. Ces investissements devraient contribuer à maintenir notre pays parmi les chefs de file en Europe et au plan international. Les chapitres qui suivent donnent un exposé des enjeux, des forces et faiblesses, et des propositions thématiques formulées. · Réaliser un exercice de cartographie des recherches en cours dans les pays participants, y compris infrastructures de recherche et dispositifs d'observation de la mer et des océans ; · Définir une vision de la future structure de gouvernance et un agenda stratégique de recherche; · Assurer la complémentarité e avec la préparation concomitante du 8 PCRD. Par ailleurs, l'ambition du groupe Mer est de positionner la 28 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 1 : Connaissance du système « Mer » 1. Contexte et Enjeux scientifiques La connaissance du système mer, de ses composantes hydrologiques, hydrographiques, bathymétriques, biotiques, abiotiques, et des processus de transfert de matière, d'énergie, de biomasse entre ses principaux compartiments conditionne notre capacité à anticiper son rôle dans les processus de régulation/amplification des changements climatiques planétaires, et constitue par ailleurs un prérequis indispensable à l'exploitation durable de ses ressources et à sa gestion. De par une longue tradition de recherche sur ses différentes façades maritimes, comme dans les territoires d'Outre-mer (voir pilier 4), la France est bien positionnée dans les grands domaines de la recherche qui contribuent aux sciences de la mer : géosciences, sciences de l'environnement, écologie, biologie. Toutefois, pour anticiper les interrogations qui ne manqueront pas d'être soulevées par un recours à la mer et à ses ressources de plus en plus marqué dans les années à venir, il demeure nécessaire et urgent d'amplifier l'effort de recherche fondamentale. zones une baisse locale du niveau marin, associé à d'autres types de risques. La principale source d'incertitude dans les déterminations des variations locales des niveaux des mers est due à ce rebond et accessoirement au problème des systèmes de référence, ce qui requiert des recherches et des expertises dans les domaines de la géophysique et de la géodésie. En ce qui concerne le deuxième point, il demande un effort de recherche considérable, car c'est un domaine très peu exploré et mal connu sur lequel la compétition internationale est féroce et conditionnera certainement la compétitivité future des nations par l'accès possible aux ressources primaires (voir pilier 2). La France qui possède la deuxième ZEE du monde ne peut négliger une telle question. Cela passe par l'exploration du milieu par tous les moyens disponibles de la recherche, par l'observation des paramètres pertinents à différentes échelles spatiales et temporelles, par la modélisation et éventuellement, pour la partie « risques » par des mises en oeuvre opérationnelles dans des centres d'alerte, interconnectés aux niveaux régionaux et mondiaux. 1.2 Océan régulateur du climat et rétroactions- comprendre les processus physiques et biogéochimiques La compréhension des fluctuations du climat et de la dynamique océanique à différentes échelles spatio-temporelles est devenue absolument nécessaire, non seulement en termes d'accroissement de connaissances, mais pour répondre aux besoins économiques et sociaux d'anticipation des risques. Les changements globaux actuels ne peuvent être pleinement compris, et a fortiori modélisés, qu'en connaissant la réactivité et la capacité de régulation du système climatique global (dont l'océan fait partie), et en connaissant bien la « matrice » d'évolution naturelle sur laquelle s'exercent actuellement les changements d'origine anthropique. L'océan est un régulateur et modérateur des fluctuations du climat. La prévisibilité de l'évolution climatique à l'échelle décennale est pour l'essentiel fondée sur les variations de la circulation marine globale (boucles de circulation thermohaline). Pour mieux comprendre et mieux simuler, par des modèles globaux et régionaux, les fluctuations du climat comme celles des circulations océaniques et du milieu marin, pour une gamme d'échelles spatiales et temporelles de plus en plus étendues, les 1.1 Dynamique interne de la Terre Cette dynamique s'exprime dans les structures qui caractérisent le plancher océanique telles que les dorsales, les zones de subduction, les volcans et plateaux volcaniques sous-marins, les zones de fracture... Leur étude permet de mieux comprendre le fonctionnement de la machine Terre, son dynamisme et ses crises. Ces zones sont aussi caractérisées par de très nombreux séismes, parfois tsunamogéniques. Enfin, beaucoup de ces zones contiennent des ressources naturelles. Étudier la lithosphère (la partie solide la plus externe du globe terrestre) répond donc à la fois au besoin de connaître le fonctionnement fondamental du système terre et à deux enjeux sociétaux majeurs : 1) la prévention des risques naturels en particulier pour les populations des îles et celles vivant sur le littoral ; 2) les ressources minérales et énergétiques, enjeu par ailleurs éminemment stratégique. Pour le premier point, la connaissance de processus géologiques fondamentaux répond à la nécessité de réduire les incertitudes sur les parts respectives du climat global et de la tectonique régionale dans les mouvements relatifs du niveau marin local (paramètre critique pour tout ce qui concerne les activités humaines sur le littoral). Par exemple, le rebond isostatique post-glaciaire peut induire dans certaines Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 29 RéférenceS | novembre 2012 études de l'océan et de l'atmosphère à grande échelle sont de plus en plus indissociables de celles des processus et mécanismes physiques. Par exemple, l'évolution future des calottes polaires et du niveau des mers dépend fortement des processus côtiers se déroulant au bord des calottes ; la prévision de l'amplification du réchauffement global aux pôles et de la fonte de la banquise arctique nécessite de revoir la représentation de la rhéologie de la glace de mer dans les modèles ; l'estimation des phénomènes hydro-morphodynamiques dans le domaine littoral nécessite de comprendre la modification des régimes de houles et de circulation atmosphérique, et l'élévation du niveau de la mer... On peut encore citer les interactions écoulements/topographie à toutes les échelles, particulièrement importantes dans l'océan, car les variations de bathymétrie sont du même ordre de grandeur que la profondeur totale, ce qui pose des problèmes de représentation dans les modèles ; les échanges air-mer d'énergie et de masse (flux de chaleur, d'humidité et de quantité de mouvement) qui sont à l'origine du couplage entre l'océan et l'atmosphère, et sont en grande partie déterminés par la dynamique de la couche de mélange océanique et de la couche limite marine atmosphérique (problème de paramétrisation à l'échelle des phénomènes turbulents, ou méso-échelle) ; les routes et échelles de la dissipation des tourbillons géostrophiques conduisant à une grande incertitude dans le bilan d'énergie cinétique (la faible connaissance des processus mis en jeu rend difficile leur paramétrisation dans les modèles) ; les interactions entre les processus de méso-échelle et les circulations de plus grande échelle, dont il est essentiel de revisiter les processus et d'estimer le rôle dans les biais des modèles climatiques au niveau global (transport d'énergie) et local (e.g. rôle des tourbillons sur les erreurs systématiques des modèles couplés dans les bords orientaux des bassins tropicaux). 1.3 Diversité et dynamique des environnements marins La compréhension du fonctionnement dans le temps et dans l'espace des écosystèmes marins, y compris microbiens, en lien avec les flux biogéochimiques, les chaînes trophiques et le changement global (température, acidification, contamination, destruction d'habitats...) est un défi pluridisciplinaire. Les enjeux sont à la fois de comprendre la productivité marine, sa variabilité dans l'espace et dans le temps et sa prévisibilité (et à terme celle des ressources biologiques), et ceux du rôle de la vie marine et de sa complexité dans les interactions avec le CO atmosphérique (pompe biologique à carbone). Cet objectif 2 ne peut s'envisager que dans une optique résolument écosystémique, comprenant à la fois les habitats, dont la caractérisation se diversifie (stabilité de la colonne d'eau, caractéristiques bio-sédimentaires, fertilisation variable et via les relations biologiques (transferts de nature trophique, énergétique, voire génétique par prédation ou interactions durables entre les espèces). Notre compréhension actuelle des processus structurant les habitats met l'accent sur le continuum des échelles spatiales et temporelles caractéristiques, qui vont de l'heure à la saison, voire la décade, du centimètre à la région, pour des processus récurrents ou événementiels. Une telle diversité des échelles engendre une variabilité et une complexité que l'on est encore loin de maîtriser. Il faut d'une part cerner les propriétés émergentes qui naissent à chaque basculement d'échelle et, d'autre part, proposer des modèles qui les intègrent. Ainsi, l'importance de la réponse océanique (en termes de productivité, mais aussi de richesse spécifique) à cette variabilité, qui inclut le changement de climat, est très mal connue. Le fonctionnement des écosystèmes marins participe donc aux processus de régulation du climat, et répond également à son évolution, sans que nous en ayons encore une connaissance précise. différents processus, contaminations) et L'acidification et la contamination progressive des océans font par exemple partie des modifications attendues des habitats et de leur capacité à abriter des écosystèmes productifs, du fait du changement global. Plus récemment, en lien avec la révolution des approches génomiques, protéomiques et métabolomiques en biologie marine, est apparue la nécessité de prendre en compte la variabilité de la biodiversité fonctionnelle en réponse à la qualité de l'habitat, et de son impact rétroactif sur l'efficacité de la pompe biologique ou les transferts trophiques. Mise à l'eau d'une rosette bathysonde destinée au prélèvement d'eau de mer à différentes profondeurs. ©Ifremer/Olivier Dugornay Ce champ, très innovant, est à construire et recoupe l'ensemble des thématiques citées ci-dessus. La dynamique des upwellings tropicaux de façade ouest est un modèle privilégié pour avancer sur ces questions transversales, 30 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer car certains d'entre eux supportent les écosystèmes marins les plus productifs au monde tandis que d'autres restent pauvres. La compréhension des sources de cette variabilité et des variations attendue de leur fonctionnement sous l'effet du changement global est déterminante pour l'économie mondiale. 1.4 La diversité marine des gènes aux espèces Dans toute sa diversité, la vie marine est extraordinairement variée et elle contribue à des équilibres complexes. Pour autant, elle reste assez mal connue et ses futurs possibles le sont encore moins, tant pour qui elle-même lui sont que pour associés les services écosystémiques (régulation, pollutions, destruction ou fractionnement des habitats, déplacement d'espèces...) est essentiel. Il s'agit, pour le domaine marin, d'étendre nos connaissances en écophysiologie, phénologie, traits d'histoire de vie, plasticité phénotypique... de manière à aborder les questions d'adaptation, d'acclimatation, de flexibilité des espèces marines confrontées à des changements de différents ordres, y compris climatiques. Ceci suppose le développement d'approches expérimentales (et donc le déploiement de dispositifs in situ et ex-situ) et de modèles fonctionnels, à l'échelle des individus (métabolisme) comme à celle des communautés. À grande échelle spatiale, comment est structurée la biodiversité marine et comment cette structuration pourrait-elle être amenée à évoluer ? Répondre à ces questions suppose d'une part de bien cerner la dynamique des communautés marines et, d'autre part, d'être capable de développer des approches macroécologiques en faisant appel à des modèles et à l'élaboration de scénarios. Afin de contraindre les distributions actuelles pour connaître le potentiel d'installation (de migration) des espèces, tout comme apprécier les risques associés à des fragmentations d'aires ou de surexploitations locales, il faudra s'appuyer non seulement sur les modèles de niche disponibles, mais aussi être capable de les faire évoluer pour prendre en compte l'adaptabilité des organismes. Sur le plan de la biologie fondamentale, les organismes marins offrent des modèles biologiques essentiels (éponges, oursins, ascidies, amphioxus, roussette, etc.) pour renseigner de grandes questions telles que la régulation de la division cellulaire, la mise en place et l'évolution des patrons de développement, les bases de la réaction immunitaire, ou l'origine et le développement du système nerveux. Des modèles originaux récemment développés chez les macro- et micro-algues appartenant à plusieurs grands clades indépendants ont démontré leur intérêt. Ces recherches permettent d'explorer de façon innovante l'évolution des voies métaboliques, ou des mécanismes ayant permis l'acquisition de la multicellularité, à travers des phénomènes de symbioses ou de transfert latéral de gènes entre procaryotes et eucaryotes. La biotechnologie marine, ou biotechnologie bleue, qui s'appuie sur de telles avancées fondamentales représente un domaine en plein essor. approvisionnement...), alors même qu'ils prendront une place de plus en plus importante dans les années et décennies qui viennent. On peut estimer à 70 % à 80 % les espèces marines qui restent à découvrir: deux millions d'espèces pourraient peupler les océans. La généralisation amène la des techniques de très d'identification génétique découverte nombreuses espèces, y compris des espèces cryptiques dans des groupes pourtant supposés bien connus. Plusieurs « boîtes noires » sont d'immenses réservoirs de biodiversité (nématodes, radiolaires, bactéries, virus... ou encore symbiotes) dont l'exploration bénéficie des possibilités offertes par la métagénomique. Au-delà de leur inventaire, la compréhension de leurs fonctions est un enjeu majeur pour nourrir, non seulement notre connaissance du changement global, mais aussi une exploitation durable des ressources océaniques (cf. pilier 2). Cette étape permet aussi d'apprécier les relations de parenté entre espèces, leur dynamique évolutive et par là d'aborder les questions de phylogéographie et d'histoire de la biodiversité marine qui étayent notre compréhension de l'océan. Crevettes des profondeurs observées sur le site hydrothermal Rainbow lors d'une campagne océanographique menée par l'Ifremer au sud des Açores. ©Ifremer-Victor/Campagne Momareto 1.5 Les services écosystémiques Les services écosystémiques correspondent aux bénéfices que les écosystèmes fournissent à l'humanité. Ils sont classiquement rangés en quatre catégories principales (Millenium Ecosystem Comprendre la manière dont les organismes sont capables de faire face aux changements globaux (réchauffement climatique, Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 31 RéférenceS | novembre 2012 Assessment). Les services de soutien permettent à la vie de se maintenir sur Terre (e.g. grands cycles biogéochimiques, production primaire,...) et ils sont à la base des trois autres types de services: ceux de régulation (e.g. celle du climat ou des conditions d'acidité, de toxicité de l'environnement, etc..), d'approvisionnement (e.g. nourriture ou énergie) et les services culturels (e.g. zones récréatives). Les écosystèmes marins contribuent largement à ces quatre catégories. Brève typologie des services écosystémiques en domaine marin Services de soutien L'océan est directement impliqué dans divers grands cycles comme ceux du carbone, de l'oxygène, de l'eau, de l'azote, du phosphore... Il faut souligner que ce rôle s'apprécie aussi bien en terme de flux que de réservoir (e.g. le système océanique contient près de 50 fois plus de carbone que le réservoir atmosphérique). Ce qui est généralement mis en avant est que l'océan est le siège d'une part très importante de la pompe à carbone et de la production d'oxygène; on estime qu'il compte pour au moins 50% de cette fonction. L'autre facette de cette captation du carbone atmosphérique est également la production primaire de surface, qui soutient la plus grande part des réseaux trophiques marins et notamment la production de ressources exploitées par la pêche. L'océan est également le lieu de recyclage d'éléments chimiques essentiels à cette production de biomasse (azote, phosphore, silice, fer). Enfin les zones les plus productives, telles que les herbiers, les mangroves ou les récifs coralliens peuvent assurer d'autres fonctions en associant à cette ressource la structuration spatiale des habitats. Ces habitats sont des nurseries pour de nombreuses espèces animales qui sont parties prenantes comme support de services d'approvisionnement (pêches côtières) ou récréatifs (pêche touristique, plongée). Services de régulation Le rôle de l'océan dans la régulation climatique de la planète est largement attesté, notamment via les échanges océan-atmosphère (on retrouve ici son rôle de pompe à carbone). Via la production de sulfure de diméthyle (DMS), le phytoplancton contrôle aussi, au moins en partie, la formation des nuages qui couvrent l'océan et donc indirectement la température terrestre. Les zones humides côtières sont des remparts contre les inondations liées aux tempêtes ou tsunamis; elles participent au filtrage des eaux tant pour leur charge particulaire que pour les pollutions organiques. Les systèmes océaniques jouent également un rôle de tampon des modifications chimiques induites par les activités humaines telles que l'augmentation du CO2 atmosphérique, même si l'acidification des eaux de surface est déjà mesurable, ou les excès de fertilisants transportés vers la mer et les phénomènes d'anoxie qu'ils induisent. La transformation de composés organiques dans les écosystèmes marins atténue également l'accumulation de contaminants dans les chaînes trophiques, ou au contraire conduit à leur piégeage et leur enfouissement dans les sédiments comme dans le cas des métaux lourds. Services d'approvisionnement Ce sont les plus classiques. Ils correspondent notamment aux pêches et à l'aquaculture (plus d'un milliard d'hommes sur Terre dépendent des produits de la mer comme source de protéines). Mais la mer ne produit pas que des aliments. Ces dernières années, la diminution de la pluviosité dans des régions à forte densité urbaine a conduit à "extraire" l'eau douce de l'océan. Le développement des énergies marines renouvelables n'en est qu'aux prémisses: éolien en mer, hydrolien, énergie thermique marine, énergie de la houle... mais elles sont appelées à se développer. De nombreuses molécules d'intérêt sont extraites d'organismes marins qui, moins connus que les terrestres, sont porteurs d'innovations importantes (voir pilier 2). Services culturels Le tourisme des bords de mer est un secteur en pleine expansion depuis plus de 50 ans et il joue un rôle économique majeur dans de nombreux pays, notamment insulaires. Associés à cette demande touristique, on retrouve la pêche récréative, la plongée (e.g. sur les récifs coralliens), le nautisme... Certaines espèces sont devenues emblématiques des bénéfices spirituels ou esthétiques liés au domaine marin: les dauphins, tortues, ours polaires, baleines, coraux... Par ailleurs, dans de nombreuses populations côtières, des activités culturelles traditionnelles sont étroitement liées à la mer (e.g. l'oursinade en Provence). La `science participative', contribution citoyenne au suivi et l'étude de la biodiversité marine commence aussi à se développer à l'instar des réseaux formés autour de la biodiversité terrestre. La nécessité de fonder notre appréciation des services écosystémiques marins sur des bases scientifiques qui touchent des disciplines très diverses (géosciences, océanographie, sciences de l'environnement, biologie, écologie, chimie, sociologie, économie...) est avérée. Une récente revue des publications consacrées aux services écosystémiques (terrestres et marins) a montré que ces recherches sont surtout conduites aux États-Unis et en Chine ; 50 % des études viennent de 6 pays seulement dont la France n'est pas. Nos connaissances actuelles sont loin d'être suffisantes pour décider de manière argumentée d'actions à conduire ou de comportements à tenir qui permettent la persistance de ces services sur le long terme. Il apparaît important d'être en 32 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer capacité de traiter simultanément de plusieurs services interdisciplinaires. Seule cette émergence permettra de répondre à la demande sociale et d'ouvrir ainsi de nouvelles pistes de développement économique (l'aquaculture et les biotechnologies bleues en sont des exemples). 1.6 Les interfaces et milieux remarquables. Le système « Mer » n'est qu'une partie du système « Terre » avec lequel il échange par plusieurs interfaces : par la surface (atmosphère, glace), par la côte et les milieux particuliers qui lui sont associés (estuaires, lagunes, lagons, mangroves, etc.) et par le plancher sous-marin, continental et océanique qui possède lui aussi sa diversité (petits fonds, plateaux, pentes, sédiments, dorsales, abysses, monts sous-marins, etc.). Ces milieux de transition sont des lieux de transfert d'énergie, de matière, de biomasse et de gènes. Leur spécificité se traduit à la fois dans les processus qui peuvent s'y produire, et dans les écosystèmes qu'ils abritent, ce qui leur confère une vulnérabilité accrue. Le domaine côtier, où la pression anthropique est actuellement la plus forte, en est un exemple singulier, qui sera détaillé dans le pilier 3. Au sein du système « Mer », l'étude des interfaces entre grands domaines océaniques (côtier/hauturier, pélagique/benthique) constitue également des points importants pour la compréhension des écosystèmes marins. Tant les zones profondes de l'océan que les domaines polaires et insulaires tropicaux sont encore largement inconnus et sousexplorés du fait de leur éloignement et de leur accès difficile. Des questions particulières se posent dès lors que l'on s'adresse à des milieux extrêmes qui offrent l'opportunité d'étudier des mécanismes adaptatifs uniques et donc des voies physiologiques ou métaboliques originales. Les recherches sur les adaptations physiologiques aux conditions extrêmes des régions polaires ou des zones profondes sont d'un intérêt exceptionnel pour la biologie. Ainsi, les poissons et bactéries offrent une diversité de mécanismes enzymatiques à basse température qui enrichissent notre connaissance fondamentale et débouchent sur des applications biotechnologiques. Ainsi, les faunes associées aux évents hydrothermaux se développent à des extrêmes physiques et chimiques (températures très chaudes, salinité, pH, anoxie, sulfures...) Ces adaptations spécifiques reposent sur des systèmes de régulations géniques et métaboliques, voire sur des molécules originales qui pourraient être mieux exploitées (protéines antigel, enzymes thermostables...). écosystémiques et de leurs interactions et donc de questions complexes. Ce besoin de connaissance est d'autant plus nécessaire lorsque des services entrent en concurrence, voire en conflit (e.g. exploitation de ressources énergétiques versus zones récréatives; pêche versus nautisme; implantation d'infrastructure versus protection du littoral). Le risque est que le déficit de connaissances fondamentales et d'interdisciplinarité conduise à des simplifications outrancières et donc à des expertises et des prises de décision erronées. Le manque de recherches fondamentales sur la biodiversité, le fonctionnement des écosystèmes, l'économie de l'environnement... et d'interdisciplinarité véritable au cours des dernières décennies fait que la demande sociale a progressé plus vite que la connaissance scientifique. Nous nous trouvons aujourd'hui désarmés devant les interrogations de porteurs d'enjeux sur des aspects de mitigation, de « valeur » des écosystèmes, d'études d'impact, de restauration des environnements ou des stocks... La science peine à fournir des réponses robustes et rapides sans recherches supplémentaires. Il faut se mettre en position de compenser ce retard sous peine que certains prennent argument de cette absence ­ ou lenteur ­ de réponse pour se libérer de toute contrainte, agissant alors de manière intempestive sans souci des conséquences. En France peu d'équipes travaillent explicitement sur les services écosystémiques. Deux pistes doivent être suivies en priorité pour irriguer deux questionnements principaux, car l'enjeu est de pouvoir tisser un lien entre le fonctionnement des écosystèmes et les services rendus. La tâche est sans doute encore plus difficile en domaine marin. 1) Comment les écosystèmes marins fonctionnent-ils pour fournir des services ? La réponse passe par des dispositifs d'observation, de suivi à long terme et d'expérimentation (stations d'écologie expérimentale, mésocosmes, aquatrons, suivis en milieu naturel) et à une nécessaire convergence disciplinaire au sein des sciences de l'écologie et de l'environnement pour appréhender ces questions. 2) Quels sont le rôle et la valeur de ces services pour les sociétés ? La réponse passe par l'émergence d'une véritable interdisciplinarité qui peut être soutenue par des initiatives de programmation volontaristes et ciblées. Certaines sont en train de voir le jour (http://www.developpement-durable.gouv.fr), par exemple sur les questions de mitigation. On doit avoir la volonté de faire émerger un nouveau champ de recherches Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 33 RéférenceS | novembre 2012 déterminent les conditions de l'enfouissement de la matière organique, donc du piégeage à long terme du carbone sous cette forme. La compréhension de ces processus est déterminante pour l'amélioration des modèles climatiques généraux. En domaine insulaire tropical, où la biodiversité est toujours plus élevée qu'ailleurs, le réseau complexe des liens interspécifiques rend plus difficile toute prévision des effets du changement global sur les écosystèmes. Avec la présence d'espèces endémiques, d'écosystèmes côtiers coralliens, de Fumeurs noirs du site hydrothermal Ashadze (le plus profond du monde à 4200 mètres) observés lors de la campagne océanographique Serpentine menée par l'Ifremer sur la dorsale médio-atlantique. ©Ifremer-Victor/Campagne Serpentine mangroves, et de zones de basse altitude, ce domaine cumule les vulnérabilités au changement global. On observe déjà presque partout les effets de la pression anthropique, de l'augmentation de température, de l'acidification des eaux et de l'élévation du niveau marin. Maintenant, devant la multiplication des événements extrêmes (cyclones, épisodes de haute température, sécheresses prolongées ou pluies diluviennes...), il importe d'identifier les sources de résilience pour assurer le maintien de ces îles tropicales. À côté, comme un intermédiaire entre ces îles et le domaine profond, les monts sous marins océaniques sont des milieux originaux très mal connus, qui apparaissent essentiellement comme des éléments dynamique l'avenir. En domaine polaire, le changement climatique se manifeste de façon particulièrement rapide. Des perturbations importantes affectent l'ensemble des « équilibres », avec des rétroactions sur le climat global via la circulation océanique et atmosphérique et le niveau moyen des mers. Quel est l'impact du réchauffement de l'océan sur les grands glaciers de l'Antarctique et du Groenland ? Doit-on s'attendre à une augmentation du vêlage ou de la fonte à l'interface glaceocéan ? Risquons-nous de passer des points de basculement au-delà desquels la calotte deviendra instable et sera progressivement, mais irrévocablement, conduite à l'effondrement ? Quels impacts auront ce nouvel apport d'eau douce et le changement de géométrie côtière sur la circulation océanique et la formation d'eau profonde ? Actuellement les modèles sont incapables de représenter le déclin rapide de la banquise arctique, ni l'impact de la fonte des calottes sur les océans polaires qui sont pourtant de première importance aussi bien pour le fonctionnement de l'océan que pour la biodiversité. À terme, la diminution de la cryosphère marine et terrestre notamment en Arctique est susceptible de conduire le structurants du milieu pélagique. les lier Quelle aux est îles réellement leur influence ? Comment agissent-ils ? À quelle obéissent-ils ? Comment avoisinantes ? Voilà autant de questions importantes à traiter à En domaine profond, à l'heure où les pressions anthropiques s'y exercent de manière de plus en plus prégnante (pêcheries en eaux profondes, exploitations pétrolières et minières, stockage de déchets...), les connaissances fondamentales restent très lacunaires. On perçoit que les écosystèmes profonds sont beaucoup plus divers qu'on ne le pensait (marge, canyons, plaines, dorsales sont autant de contextes qui participent à cette diversité) et que leur fonctionnement ne répond pas aux pas de temps observés dans d'autres secteurs de l'océan. Ils peuvent être à la fois beaucoup plus stables (plaines abyssales par exemple) et beaucoup plus instables (caractère éphémère et imprévisible de l'activité hydrothermale). La science n'est pas encore en situation de répondre sur la vulnérabilité de ces systèmes ou sur leur capacité de résilience et ainsi de contribuer à leur préservation. Même les environnements abyssaux "ordinaires" restent largement inconnus. Plus loin encore, la zone hadale, au-delà des 5000m, et, dans l'épaisseur du plancher océanique, la biosphère dite "profonde" représente désormais une nouvelle frontière des connaissances. Les circulations hydrothermales profondes donnent lieu à des contrastes physico-chimiques importants et à une multitude de réactions chimiques près de l'interface eau-plancher océanique, sources d'éléments pour l'océan, de minéraux hydrothermaux, mais aussi d'énergie pour les microorganismes chemosynthétiques. Les fluides hydrothermaux, riches en hydrogène et méthane, doivent être explorés en tant que ressource énergétique potentielle pour nos sociétés. Il est nécessaire de déterminer les liens entre les différents flux d'énergie: tectonique, sédiment, les convection océanique qui de sédimentation, précoce amène l'activité l'oxygène au fond via la circulation, etc. À l'interface eauphénomènes et la macrobenthique diagenèse bactérienne 34 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer système climatique vers des points de non-retour. En raison des conditions très particulières qui y règnent, les environnements marins polaires abritent une biodiversité caractérisée par un taux d'endémisme élevé et, notamment dans les mers australes, par une forte originalité de leurs traits d'histoire de vie. Par quel cheminement évolutif la vie s'est-elle adaptée à des eaux très froides, éventuellement sous une couverture de glace permanente (le plateau continental antarctique abrite de nombreux « bouquets » d'espèces qui contribuent à l'endémisme austral) ? En contrepoint comment les organismes pourraient-ils faire face à un réchauffement ? Ces questions sont centrales et la comparaison des situations du Nord et du Sud permettra de les éclairer. En domaine insulaire tropical, où la biodiversité est toujours plus élevée qu'ailleurs, le réseau complexe des liens interspécifiques rend plus difficile toute prévision des effets du changement global sur les écosystèmes. Avec la présence d'espèces endémiques, d'écosystèmes côtiers coralliens, de mangroves, et de zones de basse altitude, ce domaine cumule les vulnérabilités au changement global. On observe déjà presque partout les effets de la pression anthropique, de l'augmentation de température, de l'acidification des eaux et de l'élévation du niveau marin. Maintenant, devant la multiplication des évènements extrêmes (cyclones, épisodes de haute température, sécheresses prolongées ou pluies diluviennes ..), il importe d'identifier les sources de résilience pour assurer le maintien de ces îles tropicales. À côté, comme un intermédiaire entre ces îles et le domaine profond, les monts sous marins océaniques sont des milieux originaux très mal connus, qui apparaissent essentiellement comme des éléments structurants du milieu pélagique. Quelle est réellement leur influence ? Comment agissent-ils ? À quelle dynamique obéissent-ils ? Comment les lier aux îles avoisinantes ? Voilà autant de questions importantes à traiter à l'avenir. Une priorité française de recherche sur l'Arctique a commencé à se structurer depuis environ 2 ans, qui implique les principaux organismes de recherche et agences concernés (CNRS, IFREMER, IPEV,...) en s'appuyant sur les laboratoires et centres de métropole et sur le laboratoire franco-canadien TAKUVIK (http://www.takuvik.ulaval.ca/). Il faut également citer ici la contribution de la France, encore limitée, à la base internationale de Ny-Alesund au Spitsberg, particulièrement adaptée à une approche des processus côtiers liés au changement climatique en Arctique. La France est encore peu mobilisée sur cette priorité en comparaison d'autres pays (Canada, Norvège, Allemagne, ...), qui disposent et investissent dans des moyens lourds d'accès logistique (brise-glace notamment), mais sa présence et son savoir-faire important dans les zones polaires antarctiques sont des atouts à valoriser dans le cadre de l'Arctique. Cette priorité arctique se fonde sur les questions scientifiques résumées ci-dessous dans leurs très grandes lignes. En comparaison du reste de la planète, l'Arctique est le siège de changements climatiques particulièrement marqués qui ont été clairement mis en évidence sur les dernières décennies et sont encore à l'oeuvre actuellement. Ces changements se manifestent de façon aiguë dans la diminution progressive de la banquise estivale qui, selon les prévisions des modèles de climat, devrait conduire à sa disparition quasi totale à une échéance de quelques décennies, voire moins si l'on anticipe des erreurs de prévision inhérente à ces modèles (Rapport AR5 du GIEC, 2007). La diminution des glaces ainsi que le recul du pergélisol sont susceptibles de conduire le système climatique arctique vers des « points de non-retour » qui pourraient avoir des impacts profonds sur le climat global au travers de rétroactions physiques et biogéochimiques mettant en jeu tous les compartiments du système climatique. En zone côtière arctique, le retrait de la couverture de glace de mer et les forts changements des apports terrigènes liés à la remobilisation des stocks sédimentaires, modifient drastiquement le fonctionnement de l'écosystème. L'ampleur et les conséquences de tels basculements restent actuellement profondément méconnues. Il s'agit d'étudier un système évoluant rapidement sous la pression anthropique, mais dont on connait mal l'état de référence initial et les liens très forts avec le climat global. L'approche ne peut donc être exclusivement « régionale », mais doit néanmoins être très intégrée dans la mesure où coexistent un milieu océanique contraint par les terres (notamment par le cycle hydrologique continental) et des surfaces continentales pénétrant dans l'océan au travers de larges marges qui sont particulièrement sensibles aux changements océaniques (instabilité des hydrates de méthane en conditions de réchauffement, dégel du pergélisol, élévation du niveau moyen des mers). En Arctique, une démarche structurée d'observation doit être rapidement initiée. 1.7 Les moyens de l'approche intégrée : observation ­ expérimentation ­ simulation. De multiples méthodes d'observation et d'expérimentation, fixes ou dynamiques (hydroplaneurs, stations de fond, instruments embarqués, flotteurs ou flotteurs-profileurs, caméras, télédétection spatiale, suivi assuré par des intervenants en immersion, etc.) permettent d'observer l'océan d'aujourd'hui. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 35 RéférenceS | novembre 2012 Mis en réseaux et assurés d'une pérennité (>10 ans), ces dispositifs, mis en oeuvre notamment par l'Ifremer, l'INSU, l'IRD et le SHOM, permettent de répondre à des questions scientifiques et d'alimenter la modélisation de processus complexes. Ils permettent d'enregistrer et de distinguer les impacts liés aux changements globaux et locaux, ce qui est l'un des objectifs majeurs de ces organismes au travers de services d'observation (ORE, SO notamment), souvent intégrés dans des réseaux internationaux (voir ci-dessous le chapitre dévolu aux infrastructures). Certains de ces dispositifs promeuvent aussi des acquisitions haute fréquence (de quelques heures à quelques minutes) afin de pouvoir saisir les effets d'événements extrêmes de courte durée (cyclones, tempêtes, crues,...). Enfin, des acquisitions en temps réel peuvent être réalisées pour certains paramètres à des fins de modélisation, prévision. Les réseaux de surveillance, conçus pour identifier des alertes, peuvent également être exploités pour des questions de recherche, lorsque le continuum recherche-expertise a été intégré dans leur conception. L'IRD est fortement impliqué dans différents dispositifs des pays de sud (étrangers et territoires des l'outre-mer français), opérés en partenariat avec les organismes nationaux (INSU, INEE, Ifremer, etc.) et étrangers (par exemple, réseau PIRATA associant le Brésil, la France et les USA). L'institut INEE a développé deux types d'outils spécifiquement adaptés aux recherches sur l'environnement et les anthroposystèmes: les Zones Ateliers (ZA) et les Observatoires Homme-Milieux (OHM). Une dizaine de zones-ateliers sont en place dont deux concernent en milieu marin (Antarctique et mer d'Iroise). Actuellement touristiques un projet d'OHM concerne sur le les littoral plages méditerranéen qui a été affecté par les implantations lourdes, notamment languedociennes. Pour les périodes plus anciennes (dernier million d'années), l'étude de l'enregistrement des conditions océaniques dans les sédiments marins (carottes sédimentaires) et des conditions atmosphériques dans les glaces, sont les principales voies d'approche de la variabilité naturelle de l'océan et du climat. La connaissance de ces fluctuations sur le temps long permet d'établir la ligne de base des tendances naturelles, référence indispensable sur laquelle greffer les incidences anthropiques. Pour des périodes encore plus anciennes du passé géologique de la planète, où géographie et climat étaient drastiquement différents, c'est l'ensemble du corpus disciplinaire des géosciences qui contribue à reconstituer la configuration et les régimes de fonctionnement des paléo-océans, y compris pour leur contenu paléobiologique. L'alliance AllEnvi a conduit un important travail d'évaluation, d'organisation et de mise en cohérence des dispositifs d'observation et d'expérimentation, dans le cadre des appels à projets SOERE 2010 et 2011, conduisant à la l'émergence ou à la consolidation de différents SOERE portant sur les domaines climatique, marin, littoral, de la biodiversité ou aux interfaces (CTDO2, ECOSCOPE, SONEL, TROPIQS, Trait de côte) en complément des TGIR (ICOS-IAGOS...), grands programmes (EMSO...) et infrastructures de recherche d'intérêt national (GIS GOPS, SA MERCATOR Océan, autres) préexistants. Les bases de données issues de ces différents types de réseaux font partie intégrante du dispositif. La mutualisation des efforts d'observation et de gestion des systèmes d'information est un enjeu important de la communauté scientifique. Des réflexions sont en cours entre les différents organismes (CNRS, Ifremer, CNES, IRD, SHOM, etc.) pour accroître la visibilité de ces bases, leur qualité et leur interopérabilité. Dans tous les domaines disciplinaires, la compréhension du système « Mer » repose pour beaucoup sur une simulation intégrée des processus à différentes échelles. Décrire, comprendre et analyser les fluctuations aux différentes échelles spatio-temporelles requiert un socle méthodologique solide et partagé permettant la modélisation, l'assimilation de données, la quantification des incertitudes et l'analyse des observations et simulations. Étant donné la complexification des méthodes et leur généralisation, il est primordial d'encourager le développement d'outils communautaires. Une stratégie nationale en modélisation existe depuis plus de 10 ans pour l'océan hauturier. Elle a conduit à un ensemble de codes pour la simulation de la physique et la biogéochimie marine, ainsi que les banquises. Ces codes sont rassemblés en France dans le système NEMO, outil de base de la modélisation opérationnelle réalisée par la société Mercator Océan (à laquelle participent plusieurs organismes de la communauté scientifique dont le CNRS, Ifremer, IRD, Météo-France et le SHOM), mais aussi outil de base, au niveau de la recherche, de la modélisation couplée du climat (outil européen). Les simulations d'échelle régionale sont effectuées avec d'autres modèles, et une réflexion est en cours pour faire converger les efforts, considérant que les différences entre catégories de modèles sont de plus en plus ténues. Pour représenter fidèlement les processus associés aux tourbillons, un maillage de fine résolution devient nécessaire dans des zones clef de l'océan (domaine côtier, zones de remontée d'eau froide et riche des bassins tropicaux, zones polaires). L'un des enjeux est de promouvoir des raffinements de maillage par emboîtement 36 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer de modèles, afin de permettre des simulations climatiques longues. Cette approche est également développée pour coupler modélisation côtière et hauturière. Dans les prochaines années, l'amélioration des modèles d'océan physique devrait permettre de représenter une grande partie du domaine côtier et la dynamique tourbillonnaire de l'océan avec un même modèle, grâce aux performances des moyens de calcul et à une connaissance fine et suivie des caractéristiques hydrographiques (bathymétrie, sédiments) du domaine côtier. Pour ce qui concerne le climat, la réduction des biais des modèles couplés est une priorité majeure, ainsi que l'évaluation des capacités de prévision à l'échelle décennale. suivants : · les observations in situ et spatiales essentielles pour le suivi de l'océan hauturier et côtier, physique et biogéochimique : collecte, traitement et distribution ; · la prochaine génération des outils de modélisation et méthodes d'assimilation de données pour une approche intégrée en océanographie physique et biogéochimique hauturière et côtière, · le couplage entre les systèmes océaniques hauturiers et côtiers, l'atmosphère et les apports continentaux. Cet exercice s'appuiera notamment sur une analyse de En ce qui concerne le volet « océanographie » de l'approche développée dans cette section du document, l'océanographie opérationnelle représente un axe d'évolution majeure de l'océanographie au cours des 15 dernières années. Elle fait désormais partie de la stratégie des principaux instituts océanographiques en Europe et dans le monde. La France a joué un rôle leader déterminant dans cette évolution, en établissant un lien bilatéral fructueux entre les recherches menées dans les laboratoires et la mise en oeuvre de systèmes opérationnels d'analyse et de prévision océanique. Les progrès réalisés par l'océanographie opérationnelle depuis 15 ans permettent aujourd'hui de revisiter le lien entre la recherche dite « amont » et les structures opérationnelles en place, de réaffirmer l'importance de ce lien dans un contexte fortement évolutif, et d'apporter des réponses actualisées aux questions suivantes : l'évolution prévisible des moyens de calcul, des ressources disponibles et des programmes internationaux qui concourent aux mêmes objectifs. En ce qui concerne la biodiversité, des efforts importants de modélisation ont été initiés, notamment pour ce qui touche aux ressources halieutiques, mais ils demeurent encore parcellaires. Il reste à renforcer et fédérer la recherche sur la modélisation et la scénarisation des dynamiques de la biodiversité ; en effet, la pertinence et la crédibilité de la recherche en biodiversité seront largement évaluées en fonction de la manière dont elle saura répondre aux attentes des décideurs de pouvoir disposer de scénarios sur sa dynamique future, à différentes échelles, intégrant la notion d'incertitude. Ceci requiert de relever les défis de la modélisation des systèmes complexes. · Quelles sont les priorités de recherche qui permettront d'enrichir la capacité de réponse de l'océanographie opérationnelle à la demande des utilisateurs ? 2.Analyse stratégique du positionnement national 2.1 Forces et faiblesses · Quels sont les chantiers majeurs à développer dans les prochaines années qui pourront bénéficier d'une synergie forte entre communautés scientifique et opérationnelle ? La France au sein des Programmes internationaux L'océan global constitue une priorité de plusieurs programmes internationaux. La communauté française y est très bien positionnée qu'il s'agisse des cycles biogéochimiques et de leurs liens avec l'atmosphère (IMBER, SOLAS, GEOTRACES...), de l'interface côtière (LOICZ), du climat (Programme Mondial de Recherche sur le Climat [WCRP] et ses principaux projets [CLIVAR, GEWEX, CLIC]), de la paléoclimatologie (IGBP-PAGES [International Geosphere-Biosphere Programme ­ Past Global Changes]), du domaine profond (EMSO), de la biologie ­ diversité génétique, interactions chimiques, processus évolutifs ­ dans le cadre d'EMBRC. Dans ce contexte, la reconnaissance dont bénéficie la · Comment l'océanographie opérationnelle peut-elle contribuer à la valorisation des travaux de recherche en océanographie ? · Quelles sont les attentes de la communauté scientifique visà-vis de l'océanographie opérationnelle au cours des 5 à 10 prochaines années ? Un exercice de prospective scientifique nationale démarrera en 2012 pour dégager une vision commune des enjeux et objectifs de rechercher prioritaires pour la communauté ainsi qu'une stratégie de développement et de mise en oeuvre adaptée. Les axes de la réflexion porteront notamment sur les sujets communauté française, notamment en biogéochimie, tient en partie à sa capacité à monter et soutenir des campagnes Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 37 RéférenceS | novembre 2012 océanographiques de grande envergure (programme infrastructures expérimentales pour l'écologie marine sont, quant à elles, très clairement déficientes en France, laissant la communauté hors du jeu international ; seul un engagement conséquent place. Le succès du Labex MER constitue une opportunité nationale importante, à articuler avec les autres acteurs majeurs de l'océanographie nationale : UPMC et ses stations marines, le réseau national des stations marines RESOMAR piloté par le CNRS, l'initiative Axe Mer Ouest (AMO) impliquant le grand ouest, le pôle marseillais, divers Labex impliquant des sciences de la mer (CORAIL, COTE...)... Enfin, la dizaine d'universités françaises qui contribuent à une part essentielle de la recherche marine française, et qui proposent une offre de formation « Mer » riche et diversifiée (master et doctorat) devront à l'avenir s'organiser et proposer une visibilité internationale de leurs actions. La cohésion nationale que le programme MER doit induire sur la recherche concernant le système mer, n'est qu'un objectif partiel. Cette action doit aussi permettre de porter une voix légitimée de la communauté nationale à l'international, principalement dans le cadre de la construction de l'Initiative de Programmation Conjointe (IPC) Océans. L'initiative européenne, dont l'objectif est de fédérer et soutenir les efforts nationaux afin de produire la connaissance scientifique à même de développer la stratégie marine et de mettre en place la directive stratégique, n'aboutira que si elle peut se fonder sur des états organisés autour de « programmes » nationaux. La formalisation de l'initiative de programmation conjointe européenne sur les océans constitue également une opportunité importante de structuration de la communauté, notamment par la constitution d'un groupe miroir actif. Une partie de sa reconnaissance tient à la capacité française à mobiliser des campagnes océanographiques significatives. Conforter ce leadership nécessite donc une capacité d'opérations à la mer maintenue, voire amplifiée (cf. chapitre infrastructures). L'opportunité Méditerranéenne. Berceau historique de nombreuses civilisations, la Méditerranée est une région d'intérêt géostratégique majeur dont les enjeux environnementaux, politiques et sociétaux sont considérables. Pourtant, cette région reste très vulnérable et son habitabilité future risque d'être compromise. En effet, risques sismiques et volcaniques, pollutions de l'air, de la mer, des eaux continentales et des sols, événements hydrométéorologiques ou éoliens intenses, sécheresse, feux, pénurie d'eau... sont autant de menaces qui pèsent sur la biodiversité des et structuré, territorialement et institutionnellement, permettrait à la France de reprendre GEOTRACES par exemple). Sur le sujet de l'acidification des océans, la France a occupé un rôle leader dans le projet européen EPOCA (European Project on OCean Acidification). Ce projet a été lancé en mai 2008 avec l'objectif d'étudier les conséquences biologiques, écologiques, biogéochimiques et sociales de l'acidification des océans. Il réunit plus de 100 chercheurs, de 31 institutions issues d'une dizaine de pays européens. La structuration nationale La communauté océanographique française est déjà assez structurée, notamment du fait de l'existence de programmes nationaux. On peut notamment citer les actions thématiques du CNRS, auxquelles contribuent de nombreux organismes : à l'INSU : EC2CO (dont le PNEC), LEFE (dont CYBER, IMAGO, GMMC), SYSTER, ALEAS & RISQUES, MARGES... ; à l'INEE les programmes sur les Îles éparses ; régionalement les LABEX MER, CORAIL, COTE... D'autre part, l'observation et la surveillance, qui nécessitent des moyens importants et pérennes, amènent progressivement les universités et les organismes nationaux à se concerter, voire à mutualiser leurs efforts (e.g. SOMLIT, CTDO2, ECOSCOPE, les réseaux de surveillance de l'Ifremer, GIS-GOPS, etc.). On peut également citer le réseau opérationnel REFMAR coordonné par le SHOM, référent national pour le niveau de la mer sur l'ensemble des zones sous juridiction française. Néanmoins, il n'existe pas à ce jour de programme « Mer » national rassemblant dans une même synergie l'ensemble des organismes concernés. L'Ifremer, institut national de recherche finalisée et le SHOM sont exclusivement dédiés au milieu marin et littoral, tandis que, sur un champ plus académique, la mer est depuis longtemps au coeur de fortes dynamiques au CNRS ou à l'IRD. Le potentiel de recherche française en Outre-mer sur des thématiques touchant au système « Mer » est quant à lui fragile et encore peu mis en réseau (universités émergentes, peu d'UMR, capacité de programmation très fortement influencée par le développement local). 2.2 Menaces et opportunités. Sur certaines thématiques, comme l'acidification, le leadership français est fragilisé par une masse sous-critique (cf. projet européen EPOCA, représentant une belle percée, mais à consolider). L'océanographie opérationnelle est également à un tournant de son existence, nécessitant un soutien institutionnel fort pour se transformer en un service quasi public. Les 38 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer écosystèmes continentaux et marins, sur l'accès aux ressources naturelles et sur les conditions de vie des populations de cette écorégion. Quels sont les risques naturels et anthropiques qui peuvent menacer les régions côtières ? Quelles sont les évolutions biogéochimiques qui s'opéreront au sein de la mer Méditerranée ? Quelle sera leur influence sur les écosystèmes marins et leur biodiversité ? Comment gérer les ressources halieutiques ? Ce sont autant de questions relevant des sciences de la mer qui sont notamment abordées dans le cadre du programme interdisciplinaire MISTRALS. Copiloté par le CNRS et l'IRD, avec la participation de onze institutions françaises, MISTRALS est un chantier décennal de recherche et d'observations systématiques, dédié à la compréhension du fonctionnement environnemental du bassin méditerranéen et de son évolution sous la pression des changements globaux de la planète. Il vise à coordonner à l'échelle du bassin méditerranéen et des pays limitrophes les programmes interdisciplinaires de recherche portant sur l'étude de l'atmosphère, de l'hydrosphère, de la lithosphère et des paléo-climats, mais également sur l'écologie des environnements et les sciences humaines et sociales. L'objectif de cette analyse interdisciplinaire est de parvenir à une meilleure compréhension et maîtrise des mécanismes influençant l'environnement et l'anthropisation de cette région afin d'anticiper son comportement sur le siècle à venir et de prédire l'évolution de ses conditions d'habitabilité. Les données obtenues dans le cadre de MISTRALS seront essentielles pour répondre aux interrogations des responsables politiques en matière de ressources et d'environnement et pour préconiser les mesures d'adaptation qui s'avèreront nécessaires. Au-delà des thématiques abordées par MISTRALS, la priorité de recherche en sciences de la Mer sur la Méditerranée pourrait être étendue, notamment en y intégrant davantage les aspects socio-économiques. En ce qui concerne l'Outre-mer, la constitution du Groupement d'intérêt scientifique GOPS, récemment inscrit comme infrastructure de recherche nationale, pourrait constituer une bonne opportunité de structuration de la communauté autour d'un nombre restreint d'objectifs thématiques à définir, en mettant à profit les implantations mixtes de l'IRD au Sud, à proximité de chantiers particulièrement propices à traiter les grandes questions du futur de l'océan. Une opération similaire est en cours de discussion pour l'océan Indien ce qui compléterait le dispositif dans une région où la France est très présente. Par ailleurs, le Labex CORAIL permet désormais de tisser un lien entre les secteurs tropicaux des trois principaux océans ; il représente une opportunité de coordination des recherches sur ces différents sites. Des atouts scientifiques majeurs sont identifiés, ils produiront leurs effets et donneront à la France la portée internationale qu'elle souhaite s'ils sont suffisamment soutenus. On doit citer une interpénétration très active des communautés disciplinaires de la biogéochimie et de la biodiversité et du fonctionnement des écosystèmes. Le défi de reproduction modélisée du fonctionnement des océans allant des contraintes physicochimiques aux ressources biologiques est un objectif envisageable ; la communauté intégrée, notamment autour des programmes nationaux de l'INSU abondés par de nombreux autres organismes, comme des projets soutenus dans le cadre des Investissements d'avenir en est la force. En biologie, la première révolution des « omiques » est en cours. Elle touche tous les compartiments de la biodiversité marine (benthos, pélagos, plancton, necton...), mais elle revêt un caractère particulier dans l'espace océanique en trois dimensions peuplé d' « invisible » jusqu'alors difficilement détectable et encore moins quantifiable. Les conditions d'une fécondation croisée de l'océanographie et de la biologie marine sont réunies par une appropriation commune d'outils et de méthodes. Le succès de ce rapprochement se mesurera à l'aune des concepts nouveaux qui en découleront. On peut faire le pari de ce succès si les communautés s'y engagent vraiment et surtout si les soutiens d'une interdisciplinarité effective sont au rendez-vous. Commensalisme : la crevette « Periclimenes Sagitiffer » vit abritée dans l'anémone « Anemonia viridis » © CNRS Photothèque/Yann Fontana Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 39 RéférenceS | novembre 2012 40 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 2 : Exploitation durable des ressources marines La ZEE Française recèle aujourd'hui des ressources marines considérables : des ressources vivantes renouvelables exploitées par la pêche et l'aquaculture, des ressources liées à la biodiversité qui sont de mieux en mieux valorisées grâce au développement des biotechnologies, et des ressources non vivantes telles que métaux, minéraux et énergie1 qui présentent des potentiels de croissance très importants. La demande pour ces ressources est en forte augmentation, poussant à une intensification de l'exploitation. Cependant la mise en valeur des richesses des océans est confrontée à une triple contrainte. D'une part, certaines ressources restent largement méconnues ; l'exploration et les développements technologiques nécessaires à leur valorisation sont plus que jamais à l'ordre du jour. D'autre part, leur exploitation ne peut être envisagée sans prendre en considération les enjeux de durabilité écologique ; la maîtrise des impacts de ces activités sur les ressources vivantes et les écosystèmes s'impose ainsi comme un pré requis. Enfin, l'internationalisation des marchés, particulièrement forte pour l'ensemble des produits concernés, induit des contraintes de rentabilité économique extrêmement sévères. valorisation les plus efficaces et durables, et définir un cadre de gouvernance efficient pour l'exploitation durable des ressources marines sont des défis majeurs pour la recherche. 1. Les enjeux majeurs Cinq enjeux majeurs pour la société et pour la recherche peuvent être identifiés, concernant l'exploitation des ressources aquatiques. · Partout dans le monde, la demande alimentaire en produits de la mer est en forte progression. La France importe 65 % des produits de la mer qu'elle consomme. La consommation annuelle moyenne est passée de 28,6 à 34,7 kg/habitant entre 1998 et 2010, stimulée tout à la fois par la baisse des prix des produits aquacoles, par la diversification de l'offre, par le développement de la restauration collective et par la recherche de produits de haute valeur nutritionnelle. Alors que dans les pays en développement les produits de la mer sont principalement consommés en tant que source de protéines, dans les pays occidentaux c'est leur richesse en omega 3 qui est prisée et devient un enjeu de santé publique, notamment pour la prévention des maladies cardio-vasculaires. Dans le même temps, la production de la pêche reste stable voire régresse en raison notamment d'une situation globale de surexploitation des ressources marines et de la mise en place de limitation de captures de certains stocks pour assurer l'atteinte du rendement maximal durable d'ici 2015. L'aquaculture, quant à elle, connaît un essor spectaculaire (+ 8 % par an au niveau mondial, au cours des 20 dernières années), mais cette croissance est réalisée en grande partie hors Europe, principalement en Asie. L'élevage aquacole reste modeste en Europe (4,5 % de la production mondiale) et a régressé en France au cours des dernières années. En La pince du ROV Victor 6000 (robot téléopéré de l'Ifremer) contenant une bouchée d'hydrate de gaz ©Ifremer-Victor/Campagne WACS 2011 conséquence la couverture de la demande repose largement sur des importations, contribuant fortement au déséquilibre de la balance commerciale. Dans le cas de l'aquaculture comme de Dans ce contexte, comprendre le fonctionnement des la pêche, l'exploitation des ressources vivantes aquatiques se heurte à des problèmes d'impact écologique et de durabilité des systèmes d'exploitation. Dès lors, l'avenir de la pêche comme celui de l'aquaculture passe par le développement de nouveaux modes d'exploitation et de gestion des ressources dans un cadre écosystémique. Une véritable mutation a débuté, écosystèmes marins, connaître leurs ressources vivantes ou non vivantes (voir Pilier 1), déterminer les modes d'exploitation et de 1 Bien que le développement des "nouvelles énergies" relève de l'alliance ANCRE, il est apparu indispensable d'intégrer ce volet développement durable au sein du programme MER, porté par AllEnvi. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 41 RéférenceS | novembre 2012 les efforts de recherche pour l'accompagner doivent se poursuivre et s'intensifier afin que pêche et aquaculture puissent produire de façon durable les ressources alimentaires répondant à la demande des consommateurs tout en assurant le bon état de santé des écosystèmes marins. · La valorisation de la biodiversité par les biotechnologies est également un secteur en devenir, avec de forts enjeux économiques. Il s'agit en particulier : de valoriser les coproduits de la pêche (et de l'aquaculture) avec l'extraction de molécules et de substances à forte valeur ajoutée ; de développer la production industrielle de molécules pharmacologiques et industrielles ; de produire et valoriser certaines biomasses végétales à des fins énergétiques ou agricoles... La révolution génomique donne désormais accès à l'ensemble des composants du vivant et ouvre de nouvelles perspectives en matière d'agronomie bleue (pour transposer en mer les concepts de l'agronomie terrestre, y compris les approches les plus modernes de la sélection génétique des espèces cultivées), de biotechnologie bleue (pour inventer de nouvelles façons d'utiliser les organismes marins, par exemple, la domestication des usines cellulaires) et de chimie bleue (pour développer de nouvelles bio-molécules marines et de nouveaux bio-procédés). Ici aussi l'accompagnement par la recherche et l'innovation technologique doit être au coeur des processus de développement de ces secteurs d'activité qui touchent aussi bien les domaines de l'alimentation, l'énergie, la santé et l'environnement. · L'exploration et l'exploitation des ressources minérales et énergétiques. Le domaine océanique est un réservoir de ressources minérales (granulats, nodules, amas sulfurés, encroûtements...) et énergétiques (pétrole et gaz, énergies marines renouvelables) dont toutes les richesses sont encore loin d'être connues. La mutation fondamentale des marchés mondiaux de matières premières touche l'ensemble des pays européens qui deviennent de plus en plus fortement dépendant d'importations de minéraux métalliques et de métaux dits stratégiques. Les besoins croissants ouvrent un champ nouveau pour l'exploration des ressources sousmarines profondes, notamment pour les métaux. Cela passe par la mise en place de programmes d'exploration axés sur la connaissance des fonds marins et une meilleure estimation des gisements dans le cadre d'une stratégie de développement durable des exploitations. Dans le domaine des ressources énergétiques, le développement des énergies marines renouvelables n'en est également qu'aux prémisses: ces énergies émergent comme un élément indispensable du bouquet énergétique national, notamment en Outre-mer. Éolien en mer, hydrolien, énergie thermique marine, énergie de la houle... Les potentiels sont immenses et la part du marin au sein de la production énergétique nationale devrait s'accroître très rapidement dans les années à venir, poussée par la demande et la nécessité de fournir des alternatives aux énergies « conventionnelles ». En raison du caractère nouveau de l'exploitation des énergies marines renouvelables et de leur potentiel de croissance très important, une attention particulière devrait être portée à l'amélioration des connaissances sur les impacts de ces installations sur les écosystèmes marins et en particulier la mégafaune (notamment mammifères marins et populations ichtyologiques). Les énergies « conventionnelles » resteront cependant la principale ressource pour plusieurs dizaines d'années, y compris à partir du gaz et pétrole qui restent à découvrir dans les nouvelles zones (comme le pétrole très profond). Leur exploitation durable, comme celle des matières premières minérales, impose d'étudier le fonctionnement et la résistance aux perturbations de ces environnements profonds. Photobioréacteur pour l'étude de la physiologie des algues au Laboratoire de Physiologie et Biotechnologie des Algues du Centre Ifremer de Nantes. ©Ifremer/Michel Gouillou · La durabilité écologique des systèmes d'exploitation des ressources marines est une exigence sociétale forte, traduite notamment qui dans deux avoir directives-cadres des répercussions européennes, devraient considérables dans les années à venir. La directive-cadre sur l'eau (DCE) vise ainsi au bon état écologique des eaux douces et des eaux de transition (estuaires et zones côtières) à l'horizon 2015, tandis que la directive-cadre stratégie pour le milieu marin (DCSMM) fixe comme impératif d'atteindre le 42 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer bon état écologique des écosystèmes marins en 2020. Cette seconde directive devrait avoir des répercussions sur la gestion de l'ensemble des activités anthropiques impactant le milieu marin, et notamment sur la gestion des différentes formes d'exploitation des ressources marines. La définition, l'évaluation et l'identification d'indicateurs de suivi du bon état écologique des milieux marins sont ainsi un enjeu majeur pour la recherche. Plus généralement, les questions de durabilité écologique renvoient à des enjeux de connaissance et de compréhension : du fonctionnement des écosystèmes marins, des processus d'impact des activités anthropiques et des facteurs de résilience ou de fragilité de ces écosystèmes. La 2. Les atouts et faiblesses de la communauté scientifique française dans le domaine des ressources aquatiques · Une communauté scientifique en émergence communauté dans scientifique le domaine française des est reconnue et diversifiée, souvent en position de leadership au niveau européen ressources aquatiques. Cependant le dispositif de recherche est sous dimensionné au regard notamment de la variété et l'importance des ressources, de la taille de la ZEE française à explorer et de la demande en ressources et de la complexité en terme d'échelles des questions à traiter et d'écosystèmes à comprendre. De plus, cette communauté est morcelée. Des animations et le soutien à des programmes favorisant l'interdisciplinarité permettraient de gagner en efficacité. Le maintien du leadership français passe aussi par une plus grande participation des scientifiques français aux comités scientifiques d'évaluation des stocks halieutiques tant au niveau européen (CIEM) que dans les organisations régionales de gestion des pêches (ORGP). On note une expertise de plus en plus forte des pays émergents pour la recherche dans le domaine des ressources aquatiques et, en parallèle, la concurrence pour l'accès aux ressources devient de plus en plus intense. Là encore une meilleure structuration du dispositif, notamment via le programme national MER, et une augmentation des forces sont nécessaires pour que la France conserve son leadership et accroisse son auto-approvisionnement. L'importance des sciences de l'environnement est de mieux en mieux reconnue. La communauté scientifique est de plus en plus fortement sollicitée par la société civile et les pouvoirs publics sur les questions de durabilité. Cependant, le dispositif actuel a une capacité insuffisante pour pouvoir répondre aux demandes en constante progression. Des partenariats recherche/acteurs socio-économiques ont été développés, mais ils demandent à être consolidés. De même, une approche concertée vers un diagnostic partagé de l'état des ressources entre acteurs et scientifiques doit continuer d'être soutenue. Cette communauté scientifique bénéficie d'une large panoplie de dispositifs d'accès à la connaissance des ressources marines (navires océanographiques, laboratoires marins...), mais le monitoring des ressources et des écosystèmes doit être renforcé. Les outils développés permettent d'assurer un continuum dans les approches de la biologie intégrative (génomique...) à la géologie. Il faut maintenant poursuivre leur exploitation jusqu'aux applications. Des compétences fortes · La compréhension des interactions entre ressources marines et changements globaux (changement climatique, surexploitation, destruction des habitats, etc.) représente un enjeu majeur pour la recherche comme pour la société. Les aires de répartition de nombreuses espèces se déplacent vers les pôles de manière relativement rapide ; la production primaire et les efficacités de transferts au sein des réseaux trophiques sont modifiées ; la diminution d'abondance des prédateurs augmente l'instabilité au sein des écosystèmes ; l'acidification des eaux a des effets ravageurs, notamment sur les récifs coralliens et sur les ressources qu'ils abritent ; l'élévation du niveau de la mer modifie le trait de côte et impacte fortement certains écosystèmes (îles, mangroves, milieux lagunaires ...), le réchauffement des eaux favorise l'émergence de nouveaux pathogènes ou leur virulence. Plus généralement, les changements hydrodynamiques ou hydroclimatiques, ainsi que la modification des habitats, peuvent avoir des répercussions qui sont encore mal anticipées. Des outils de modélisation multiéchelles spatio-temporelles doivent être encore développés. Les ressources vivantes sont évidemment les premières affectées, mais c'est plus globalement le fonctionnement et la résilience des écosystèmes, et donc leur capacité à supporter une exploitation anthropique de manière durable malgré les changements climatiques, qui sont en question. La recherche doit ici viser à anticiper les évolutions à venir, à identifier les écosystèmes fragiles, à définir des modes d'exploitation et de régulation adaptés à ce contexte d'environnement en forte évolution. Ces enjeux se situent au niveau mondial. Un des défis que le programme MER aura à relever est l'organisation de dispositifs permettant d'aborder les questions au niveau global (comment peut-on/doit-on les traiter ?) tout en conservant des liens avec les objectifs nationaux. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 43 RéférenceS | novembre 2012 existent également en matière de modélisation des ressources et des systèmes d'exploitation; mais il manque des observations pour nourrir les modèles et des méthodes d'intégration des modèles permettant d'évaluer les compromis entre objectifs écologiques, économiques et sociaux. scientifique, axés sur la connaissance géologique des mécanismes qui modèlent les fonds marins à différentes échelles spatio-temporelles, les processus en interactions géobiologiques et leur dynamique temporelle, la protection de la biodiversité et la résilience des sites. Une telle activité ne pourra s'inscrire que dans un contexte de durabilité, l'enjeu environnemental sera majeur. Les études de biologie des écosystèmes chimio-synthétiques profonds vont devenir, une composante majeure des travaux d'exploration des grands fonds parallèlement aux études géologiques. Il conviendra de développer l'étude de la variabilité spatio-temporelle de l'activité géologique, hydrologique et biologique à l'échelle d'une zone d'exploitation, par exemple transversalement à l'axe d'une ride océanique. La communauté scientifique nationale concernée est assez limitée, mais elle a su se rassembler dans différents GDR, UMRs et dans le Labex Mer. Elle a aussi montré sa capacité à engager des programmes de recherche en partenariat publicprivé et en se positionnant au niveau européen en coordonnant l'ERANET ERAMIN. Le développement de l'exploration profonde va nécessiter des progrès significatifs pour les techniques d'exploration. L'accès aux matières premières minérales engendre une concurrence internationale de plus en plus visible, y compris au niveau scientifique. · Des enjeux stratégiques pour l'exploitation durable des grands fonds La France dispose d'une capacité importante d'exploration et d'accès à de nouvelles ressources minérales à grande profondeur en mer, dont l'éventuelle exploitation future nécessite le développement de recherches pluridisciplinaires. Ainsi le Cimer de juin 2011 a mis en avant les ressources minérales profondes comme devant devenir un enjeu majeur et a mis l'accent sur la volonté de la France de promouvoir l'exploitation des grands fonds marins, en assurant qu'une "stratégie nationale" en la matière serait arrêtée. L'enjeu est de proposer une stratégie pour les dix prochaines années afin de positionner domaine la des recherche ressources géo-biologique minérales profonde, tout la en technologie et l'industrie française dans le tout nouveau profondes, s'inscrivant dans une perspective d'exploitation durable. 3. Thématiques scientifiques prioritaires Pour répondre aux enjeux, six thématiques scientifiques prioritaires sont proposées sur lesquelles les forces de recherche et la structuration du dispositif devront être centrées. 3.1 Comprendre la genèse et la durabilité des ressources marines Sulfures d'un site hydrothermal inactif à 3700 mètres de profondeur observé lors de la campagne océanographique Serpentine menée par l'Ifremer sur la dorsale médio-atlantique ©Ifremer-Victor/Campagne Serpentine Cette première thématique vise au développement de recherches fondamentales sur le fonctionnement des systèmes ou écosystèmes marins et sur les processus. Elle est largement développée dans le pilier 1 (ci-dessus) et s'articule en trois volets complémentaires. Les explorations scientifiques menées dans les grands fonds depuis une trentaine d'années ont permis d'identifier plusieurs processus géologiques et géochimiques conduisant à la · Processus géologiques et circulation des fluides. Au-delà de la connaissance des ressources marines en hydrocarbures dont l'importance ne cesse de s'accroître, les diverses explorations du milieu marin ont montré au cours des dernières décennies l'importance des fluides, de leurs volumes et de leur circulation et des échanges actuels ou passés dans le système mer. Cette connaissance doit encore être très significativement accrue à différentes échelles (quantification des volumes, échanges, processus et polymétalliques, encroûtements cobaltifères et sulfures hydrothermaux) , et à la genèse de ressources énergétiques potentielles originales (hydrates de méthane, hydrogène). Ces découvertes ouvrent de nouvelles frontières pour la recherche et l'identification de ressources minérales et énergétiques dans les océans. Il s'agit maintenant de conduire des programmes à forte valeur ajoutée concentration des métaux (Nodules 44 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer géométries des circulations, etc.) en particulier pour évaluer l'impact du changement climatique, de changements du milieu (déstabilisation des hydrates de méthane), etc. les écosystèmes marins (notamment ceux concernant la production d'énergie, la conservation de la biodiversité, la régulation du climat, l'épuration des eaux, le tourisme...). · Genèse et maintien de la biodiversité. La connaissance de la biodiversité doit se déployer selon trois axes complémentaires : 1) son inventaire raisonné (quelles entités prendre en compte, comment le faire) qui doit notamment aborder des compartiments jusqu'à présent ignorés ou peu accessibles (e.g Micro-, nano-, pico-plancton) ; 2) les processus qui président à son évolution à tous les pas de temps depuis ceux de la phylogénie jusqu'à celui de l'acclimatation des individus (émergence des phénotypes, adaptation, radiation...) ; 3) les patrons de sa structuration spatiale à toutes les échelles depuis celle des habitats jusqu'à celle des océans. L'ensemble de la démarche constitue l'un des éléments indispensables permettant de comprendre les écosystèmes, leur évolution, leur fonctionnement, leur résilience, l'impact des changements globaux, etc. Mise en oeuvre du chalut à bord du navire Ifremer Thalassa pour l'évaluation des ressources halieutiques en Manche Orientale et Mer du Nord. ©Ifremer/Olivier Dugornay/ Campagne IBTS · Fonctionnement des écosystèmes. Il s'agit ici d'analyser et comprendre les processus qui sont le fondement de la productivité des ressources marines vivantes et qui déterminent (au moins pour partie) leur variabilité spatio-temporelle et leur prédictibilité : processus de production primaire et de recyclage des détritus, couplage modèles de circulation océanique/modèle de production, modèles de flux d'énergie et déterminants de l'efficacité des transferts dans le réseau trophique, processus d'impact des pollutions organiques ou minérales sur les ressources vivantes (écotoxicologie)...Cette approche des grands cycles s'appuie également sur une connaissance accrue des grandes fonctions métaboliques des organismes. 3.2 Développer l'approche écosystémique des pêches Le développement de l'approche écosystémique des pêches (AEP) est un impératif aujourd'hui reconnu aussi bien par les institutions et structures en charge de la gestion des pêches que par les instituts de recherche impliqués dans le domaine. Cette approche vise un triple objectif. D'une part, il s'agit d'évaluer, comprendre et anticiper l'impact de la pêche non seulement sur les différentes ressources ciblées, mais plus globalement sur la biodiversité marine, sur le fonctionnement des écosystèmes et sur leurs propriétés de productivité, de stabilité, ou de résilience. D'autre part, et réciproquement, l'AEP doit permettre d'identifier et de quantifier les impacts sur les ressources halieutiques des autres activités anthropiques exercées en mer ou sur le littoral. Enfin, il convient de replacer l'activité de pêche au sein d'une vision plus large englobant l'ensemble des services rendus par Dans le cadre du programme national Mer, cette thématique sera abordée au travers de cinq volets complémentaires. · Comprendre et anticiper les réponses démographiques ou fonctionnelles des populations marines exploitées, en réponse aux différentes facettes de changement global, doit être une priorité de la recherche. Ceci passe en particulier par le développement de modèles de populations intégrant la variabilité individuelle et les (génétique, relations avec physiologie, l'habitat et comportement...) l'environnement. Ces modèles doivent notamment conduire à une meilleure compréhension des impacts de la pêche sur les ressources, mais également à mieux identifier et à anticiper les effets : du réchauffement climatique, des dégradations d'habitats, des invasions biologiques, des pollutions organiques côtières... · L'analyse des structures et relations trophiques et le développement de modèles de fonctionnement trophique sont une priorité de recherche. Les prédateurs marins (poissons, oiseaux, mammifères marins) jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes marins régulant le flux d'énergie à travers les chaînes alimentaires et le contrôle des espèces à des niveaux trophiques inférieurs. Malgré le rôle essentiel que jouent ces espèces dans les réseaux trophiques il subsiste beaucoup de lacunes concernant la biologie et l'écologie de ces prédateurs supérieurs, afin de mieux comprendre leurs interactions avec d'autres espèces et comment les écosystèmes marins peuvent être affectés par le déclin de leurs populations. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 45 RéférenceS | novembre 2012 · L'impact de la pêche sur les habitats et sur la biodiversité reste peu connu et doit faire l'objet d'une évaluation scientifique, en distinguant les effets de court terme des effets à moyen ou long terme. Il s'agira aussi de participer à la réflexion sur les pêcheries mixtes et la mise en place de plan de gestion à long terme pluri-spécifiques. Ces recherches doivent nourrir l'évaluation environnementale de l'ensemble des impacts écologiques des différentes flottilles de pêche (en même temps que de leur efficacité économique et sociale), dans l'optique du développement ou d'un renforcement d'une gestion des pêches s'appuyant sur une organisation par flottille. Elles doivent également se prolonger par un accompagnement de l'innovation en matière de développement d'engins de pêche plus sélectifs et ayant moins d'impact sur l'habitat. l'environnement sur la bonne santé et la résistance des poissons, utilisation dans la mesure du possible de biomolécules, éventuellement d'origine marine, exploitation de la diversité génétique, notamment de la variabilité individuelle, pour adapter les espèces aux contraintes et aux objectifs des élevages. Un effort particulier doit être réalisé pour mieux évaluer les impacts organique, réciproques chimique, élevages/écosystèmes (matières pathogènes...) et développer une approche écosystémique de l'aquaculture sur le modèle de l'approche écosystémique des pêches : impacts des pratiques d'élevage non seulement sur la production, mais aussi sur l'environnement, la biodiversité, et le fonctionnement des écosystèmes et les services rendus ; systèmes d'aquaculture multitrophiques intégrant une partie de la chaîne trophique en amont et en aval de l'élevage ; impacts des activités anthropiques exercées en mer ou sur le littoral, interactions avec les autres usages des ressources et des écosystèmes (usage de l'eau et des territoires). En particulier, la compréhension de la dynamique des occurrences de blooms phytoplanctoniques pour différents niveaux trophiques devient un enjeu de plus en plus prégnant avec le changement global. Cette question rejoint clairement celle, présente dans le pilier 1, de la compréhension des patrons de la biodiversité phytoplanctonique et constitue également un enjeu ultramarin majeur (cf. ciguaterra en Polynésie). · L'intégration de la biologie évolutive est une dimension nouvelle et essentielle de l'approche écosystémique des pêches. L'exploitation des ressources vivantes et plus généralement l'ensemble des pressions anthropiques sur le milieu marin exercent une pression de sélection dont les effets ont sans doute été sous-estimés jusqu'à présent. Il importe en particulier de comprendre comment cette pression de sélection peut modifier non seulement les traits d'histoire de vie des populations exploitées, mais également la composition spécifique des communautés écologiques, le fonctionnement des réseaux trophiques et les relations ou dynamiques hôtes/parasites. · Les modèles écosystémiques « end to end » permettront le développement de scénarios d'impacts et de gestion. Le développement de ces scénarios qui seront sollicités par l'IPBES permettra un approfondissement et une validation de ses modèles à des fins de prédiction et de gestion. Ainsi nous aurons besoin de modèles écosystémiques calibrés et validés qui intègreront les aspects écologiques, sociaux, économiques, et environnementaux. Ils permettront la quantification des interactions, mais aussi les choix, alternatives et arbitrages possibles entre les divers services écosystémiques. 3.3 Relever les défis de l'aquaculture et des Larve d'huître plate (2/10 de millimètres). ©Ifremer/Olivier Dugornay biotechnologies · Biotechnologies Le potentiel d'innovation détenu par les organismes marins, encore peu explorés et qui appartiennent à des lignées évolutives très originales, apparaît particulièrement important. De plus, les ressources génomiques sont désormais très significatives sur de nombreux organismes marins, une tendance qui s'accélère avec les nouvelles · Les défis de l'aquaculture. Il s'agit de développer la production en l'intégrant dans l'écosystème : alimentation des poissons et crustacés en limitant le recours aux ressources naturelles marines, gestion sanitaire des élevages par une meilleure compréhension de l'influence de la zootechnie, de l'alimentation et de 46 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer techniques de séquençage. Les approches de génomique fonctionnelle atteignent également un niveau comparable à celles mises au point pour les systèmes biologiques terrestres modèles. Le défi est d'utiliser ces nouveaux outils pour poursuivre l'étude des microorganismes, des plantes ou des animaux marins, développer des méthodes de culture ou d'élevage et de sélection de génotypes performants, puis de les valoriser dans différents domaines d'application comme la nutrition, la santé animale, végétale ou humaine et l'ingénierie (enzymes, protéines, biopolymères, biomatériaux). Le marché global des biotechnologies marines, de l'ordre de 3 milliards de dollars en 2010, est donc considéré comme présentant un important potentiel de croissance, de l'ordre de 4 à 5 % chaque année. 3.4 Connaître les ressources minérales et énergétiques intégrées permettant d'étudier les interactions entre fluides, roches et bactéries. · Les métaux profonds L'exploitation future des gisements de métaux nécessite une importante phase préalable d'exploration afin de mieux comprendre le fonctionnement des systèmes géodynamiques actifs qui contrôlent la circulation des fluides, et leur variabilité dans l'espace et le temps. Ces grands cycles géochimiques de mobilisation, transport et concentration des éléments contrôlent la formation des minéralisations, pour lesquelles les interactions géobiologiques métaux/bactéries (précipitation/ altération) sont des processus majeurs. L'impact de l'activité des communautés microbiennes sur leur environnement et sur les grands cycles biogéochimiques est également à prendre en compte. La compréhension du fonctionnement de ces écosystèmes profonds permettra d'évaluer leur résilience face aux perturbations anthropiques, et en particulier face à l'exploitation des ressources qu'ils abritent. Enfin, pour cette thématique comme pour d'autres, évaluer la variabilité naturelle des processus géologiques et biologiques sera l'un des grands enjeux des années à venir, pour avancer dans la compréhension des processus et pour prévoir leur évolution, voire leur surveillance en cas d'activité extractive. L'implantation d'observatoires fond de mer intégrant des solutions technologiques innovantes est l'un des défis à relever dans la cadre de la très grande infrastructure de recherche (TGIR) EMSO avec l'ensemble des partenaires nationaux et européens. · Les marges : flux de matière du littoral aux abysses Les dépôts sédimentaires constituent une archive unique des événements qui ont façonné la surface de la Terre (par exemple, climat, tectonique). Connaître la variabilité de ces processus de dépôts constitue un enjeu de connaissance primordial, où l'évolution de la structure profonde des marges doit être prise en compte pour établir les bilans de transfert sédimentaire multi-échelles. Les bassins sédimentaires ainsi créés sont aussi le lieu d'accumulation des hydrocarbures (huile et gaz), dont les hydrates de méthane qui constituent une grande réserve de ressources énergétiques, mais qui peuvent être également à l'origine de risques naturels (amplification de l'effet de serre et instabilité de pente) compte tenu de leur sensibilité aux variations de pression et de température. La connaissance des aléas liés à ces phénomènes d'instabilité passe par l'étude des activités sismiques, de la formation et dissociation d'hydrates de gaz, des instabilités de pente liées aux accumulations de sédiments et de la circulation océanique modifiant la distribution verticale et l'extension horizontale des masses d'eau (et des températures) au contact des sédiments. · Circulation des fluides, interactions géobiologiques et cycles biogéochimiques Les flux géochimiques et les circulations de fluides ont des implications directes sur les ressources énergétiques et minérales des grands fonds. De plus la présence d'eau est un facteur central pour la présence d'une activité microbienne au sein des enveloppes terrestres (sédiments, croûte, manteau). Cette activité microbienne est à la base des communautés biologiques originales basées sur la chimiosynthèse. Ces découvertes impliquent maintenant de mener des recherches Vers géants vivant par 2600 m de profondeur, près des sources hydrothermales, observés par le Robot téléopéré Victor 6000 ©Ifremer-Victor/Campagne Phare · Les énergies marines renouvelables Ce domaine d'avenir à des sera évidemment traité par pour la le participation consortiums industriels Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 47 RéférenceS | novembre 2012 développement de filières (hydrolien, houlomoteur, éolien flottant) dans le cadre des appels d'offres nationaux de l'Ademe et dans le cadre de la possible création de l'IEED France Energies Marines dans le cadre des investissements d'avenir. Mais le développement de ces activités qui se fera dans un contexte industriel, nécessitera une connaissance précise de tous les mécanismes d'interactions entre le milieu marin et les structures, les conditions environnementales (sédimentologiques, géotechniques et bio-fouling), les interactions fluide/structure (modélisation numérique et approche expérimentale). Le développement de ces activités nécessite également une prise en compte des interactions et de l'impact sur les autres activités historiquement présentes (déplacement de flottille, etc.). 3.5 Évaluer l'impact des pressions anthropiques sur les écosystèmes Les recherches précitées doivent être intégrées et complétées afin d'évaluer l'impact global des pressions anthropiques sur le fonctionnement des écosystèmes et sur la durabilité environnementale des ressources. · Définir les modes d'exploitation assurant le maintien du BEE Il ne suffit évidemment pas de mesurer le BEE, il faut en parallèle redéfinir les modes d'exploitation des ressources marines, et plus largement les modes de gestion ou de régulation des activités anthropiques impactant le milieu marin, avec l'objectif ­ la contrainte ­ d'atteindre ce BEE. À moyen terme, les implications de cette approche sont sans doute considérables et aujourd'hui sous-évaluées. Elle implique par exemple de gérer les pêches ou l'exploitation des ressources minérales, sur des objectifs de conservation de la biodiversité, ou de préservation de l'intégrité des fonds marins. Ceci suppose en particulier le développement de démarches scientifiques de type indicateurs, tableaux de bord... · Interactions entre impacts anthropiques Les impacts directs ou indirects de la pêche (sur les ressources, les réseaux trophiques et les habitats), les pollutions chimiques, organiques ou biologiques, engendrées en mer par l'ensemble des activités anthropiques marines ou terrestres, et les effets biogéochimiques ou hydrologiques du changement climatique interagissent, avec souvent de possibles effets de synergie/amplification, ou au contraire de compensation. L'analyse de ces interactions est un enjeu majeur, à la fois en terme de prévision, de mitigation ou d'adaptation. Elle doit en particulier s'appuyer sur la modélisation et l'observation in situ. 3.6 Développer des méthodes d'évaluation intégrée écologie/économie/social et définir des modes de gestion et de gouvernance plus efficients L'évaluation environnementale doit être intégrée dans un ensemble plus vaste prenant en compte les aspects économiques et sociaux du développement durable. Elle aboutit (ou doit aboutir) à la définition de modes de gestion et de gouvernance, qui sont eux-mêmes des objets de recherche en constante évolution. Les yeux d'une coquille Saint-Jacques. ©Ifremer/Olivier Dugornay · Définir et mesurer le bon état écologique (BEE) des écosystèmes marins est un engagement international lié à la directive-cadre européenne sur la stratégie pour le milieu marin (DCSMM). La définition des indicateurs liés aux différentes facettes du bon état écologique des écosystèmes marins (les « descripteurs » de la DCSMM) est en cours, mais des protocoles et systèmes d'observation devront ensuite être définis, mis en oeuvre et validés. Ce chantier de la DCSMM, impliquant des recherches pluridisciplinaires (de la biodiversité à l'évaluation des pollutions sonores), s'étalera donc sur plusieurs années en s'appuyant sur de fortes collaborations à l'échelle européenne. · Évaluation environnementale, économique et sociale des usages, à l'échelle des écosystèmes Cette évaluation requiert en particulier le développement d'indicateurs intégrés, d'approches multidimensionnelles, de méthodes de quantification (par exemple Analyse des Cycles de Vie appliquée aux modes de production...). En s'appuyant sur les écosystèmes­ qui sont des espaces d'intégration des 48 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer différents impacts anthropiques et des territoires d'interaction entre acteurs ou de mise en oeuvre de modes de gouvernance ­ il s'agit ici d'identifier et d'évaluer des compromis entre objectifs écologiques, économiques et sociaux. Il s'agit aussi d'anticiper de possibles synergies ou oppositions entre ces objectifs. · Couplage de modèles biologie/économie, modélisation des comportements des acteurs, et simulations de scénarios de gestion Dans le domaine de l'exploitation des ressources marines, le développement de modèles et d'outils d'aide à la gestion impose des une intégration pluridisciplinaire, et depuis le des fonctionnement des écosystèmes jusqu'à la prise en compte comportements d'acteurs notamment comportements d'adaptation en réponse à la fois au changement global et au changement des modes d'exploitation et de gestion de ressources eux-mêmes. Ces approches doivent notamment permettre de comprendre les dynamiques d'acteurs sous-jacentes et d'identifier les modes de gestion et de gouvernance efficients. · Soutien à la mise en place des Unités d'exploitation et de gestion concertées (UEGC) pour la mise en place d'un nouveau type gestion à long terme par pêcheries · Analyse et simulation des modes de gouvernance à l'aide de scénarios Le développement de scénarios de moyen et long terme (tel qu'envisagé notamment dans le cadre de l'IPBES) est également une approche à privilégier. Elle implique là aussi une intégration pluridisciplinaire sciences biologiques / sciences sociales et conduit notamment sur l'identification des modes de gouvernance les plus efficients. · Suivi de l'efficacité et de la contribution des AMP à la conservation de la biodiversité Enfin, notons que ces différents thèmes de recherche doivent être complétés par l'élaboration de stratégies de communication et de valorisation de la production scientifique dans le domaine marin, vers le grand public et les parties prenantes (en partenariat avec les structures existantes au niveau national). Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 49 RéférenceS | novembre 2012 50 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 3 : Gestion de l'espace côtier marin Les espaces côtiers et marins constituent un lieu particulier d'interactions complexes et d'enjeux multiples entre les activités de recherche et les attentes sociétales. Les espaces côtiers marins, lieux de rencontres d'activités traditionnelles, d'usages nouveaux, de pressions anthropiques constituant des menaces pour les écosystèmes, sont au coeur de politiques publiques qui s'élaborent au niveau national, européen et international en s'appuyant largement sur les résultats de la recherche. En retour, ces politiques accordent un rôle très important à la connaissance et à l'innovation. Par exemple la politique maritime qui s'élabore à l'échelle européenne, vise à développer une pêche et une aquaculture innovantes, compétitives et fondées sur les connaissances. De manière générale, les éléments de politique publique concernés peuvent se décliner à diverses échelles. S'il reste difficile de les recenser exhaustivement, le séminaire du groupe mer d'AllEnvi qui s'est tenu à Roscoff en juin 2011 a proposé une première vision d'ensemble et une méthode d'approche. Ces éléments méritent d'être discutés et développés plus largement avec la communauté des Sciences Humaines et Sociales, avec laquelle peu d'interactions ont eu lieu à ce jour, ce qui représente une faiblesse actuelle de l'expression du programme national Mer. La stratégie nationale pour la mer et le littoral s'appuiera sur des documents stratégiques de façade en métropole (dont les plans d'action pour le milieu marin pour la DCSMM) et de bassin en Outre-mer et visera à donner une vision d'ensemble et à améliore la cohérence des nombreux éléments du dispositif : chantier de la construction de sa politique maritime intégrée en métropole et dans l'Outre-mer. Au niveau européen, la mise en place progressive de directivescadres telles que la directive-cadre sur l'eau (DCE), la directivecadre « stratégie sur le milieu marin » (DCSMM), ou de nouveaux règlements tels que la Data Collection Framework pour la pêche suppose des activités à caractère opérationnel ; elle suppose aussi et induit des questionnements scientifiques permettant, par exemple, de mieux définir des indicateurs qui pourront être utilisés pour définir et décrire un bon état écologique. · Stratégie de créations d'AMP ; · Gestion des droits miniers (code minier) ; · Délimitations maritimes (ZEE, Extension du plateau continental) ; · Gestion côtière : aménagement, planification spatiale, trait de côte nécessitant un référentiel géographique du littoral dont une des composantes est la cartographie haute résolution continue terre-mer, concrétisée par le programme IGN-SHOM Litto3D (décision CIMER 2009) ; 1. Éléments de contexte Au niveau national, le comité interministériel de la mer (CIMer) a adopté le 08 décembre 2009, le Livre bleu de la stratégie nationale pour les mers et les océans a été élaboré notamment sur la base des travaux prospectifs du groupe Poséidon (2006) et des recommandations issues du Grenelle de la mer (2009). Il confirme que la zone côtière est un espace continu entre la terre et la mer pour la conduite des politiques publiques et réaffirme la nécessaire cohérence des actions menées sur terre et en mer. Il confirme également la mise en oeuvre de la planification stratégique des espaces maritimes, basée sur les principes de la gestion intégrée de la mer et des littoraux. En inscrivant la gestion intégrée de la mer et des littoraux dans son droit (Loi Grenelle 2), en installant une gouvernance renouvelée pour la mer et les littoraux, la France lance le vaste · Développement des énergies renouvelables marines ; · Réglementation nationale de la pêche professionnelle ; · Action de l'État en mer : dérive de polluants (POLMAR), PNAC (Plan National d'Adaptation au Changement Climatique), PSR (Plan Submersion Rapides), CENALT (Centre d'Alerte Tsunami de l'Atlantique), surveillance, garde-côte, etc. Au niveau mondial, la haute mer fait l'objet de conventions internationales, la plupart sous l'égide de l'ONU ou de ses organes subsidiaires, sur les ressources minérales, la biodiversité CDB, la pêche, le droit de la mer (UNCLOS), la délimitation des plateaux continentaux (CLPC commission pour la limitation du plateau continental). La France est partie prenante à de nombreuses conventions régionales : Atlantique Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 51 RéférenceS | novembre 2012 nord-est (OSPAR), Méditerranée (Barcelone), Baltique · Parmi les questions de recherche induites, on peut identifier, notamment : (Helcom) Nairobi (Carthagène...), organisations régionales de gestion des pêches dans l'Atlantique tropical, l'océan Indien, le Pacifique, les Caraïbes, etc. En termes de méthode, il semble essentiel de distinguer les défis posés à la recherche par la notion d'appui aux politiques publiques et les questions de recherche que peuvent induire ces politiques publiques. Certaines d'entre elles se croisent naturellement et mériteront un développement plus approfondi dans une étape à venir. Ainsi, parmi la liste des défis posés à la recherche, on peut mentionner (en dehors de questions prises en compte dans le cadre des autres piliers de l'IPC et non répétées ci-dessous) : · La prise en compte des "forçages" multiples : changements climatiques anthropiques et globaux, effets locaux, forçages · La notion de « services écosystémiques » : état de santé des écosystèmes, vulnérabilité, évaluation économique des services rendus au-delà des ressources exploitées (cf. MEA : Millenium Ecosystem Assessment), · L'ingénierie environnementale (transversal aux groupes AllEnvi), · L'analyse des déterminants de l'opinion publique, jeux d'acteurs, · les intégrations écologiques, sociales, économiques, politiques du développement, durable ; construction des compromis, aide à la décision publique, évaluation du coût de la dégradation (cf. services écosystémiques) ; · L'analyse des modes de gouvernance, co-construction, gestion partagée, gestion adaptative. La place de l'expertise dans les missions des organismes recherche, la reconnaissance et l'évaluation de ces activités, le pilotage de la recherche en soutien aux activités d'expertise sont aussi des questions qui devront être abordées. Une analyse de ce type de question suppose de réaliser le meilleur croisement entre les demandes liées aux enjeux de politiques publiques, les enjeux de connaissances amont et aval, et le niveau de reconnaissance des chercheurs ou des équipes sur ces champs. Elle suppose aussi de s'accorder sur des méthodologies de production de l'expertise (responsabilité, collégialité, etc.). La mobilisation des sciences humaines et sociales (homme nature société) et des sciences de la communication est un enjeu fort sur lequel une attention particulière devra être portée : méthodes d'évaluation des politiques publiques, modèles couplés ou intégrés écologie/économie/sociologie, droit (biodiversité et accès et partage des avantages), ethnologie (conflits d'usages). Une politique de l'environnement, en milieu côtier et littoral plus qu'ailleurs, doit se fonder sur la concertation d'une part et sur l'intégration de l'expertise scientifique d'autre part. En appui à cette politique, il doit être mis en place une recherche pluridisciplinaire associant les sciences politiques, la sociologie, la géographie, la biologie et les sciences de l'environnement. Elle doit ouvrir des pistes qui conduiront à une institutionnalisation du débat public, elle doit permettre l'analyse du fonctionnement des procédures et des dispositifs de participation, et alimenter des progrès dans le domaine de l'approche cognitive des processus de communication et d'information entre acteurs. · le caractère intégré des politiques, multi-usages, multiforçages ; · la déclinaison territoriale au moyen d'outils locaux (AMP, GIZC, autres) ; · l'intégration terre-mer : conséquence en mer des politiques et activités à terre ; · l'analyse des modes de gouvernance, la co-construction, la gestion partagée et/ou adaptative ; · la transposition du savoir scientifique vers le gestionnaire : transfert des idées et l'intégration des résultats de recherche pour l'élaboration et l'évolution des politiques publiques, la sensibilisation et l'éducation à la complexité, l'élaboration d'indicateurs ; · la montée en charge des demandes d'expertise et de « monitoring » ; · l'évaluation des actions et des effets des politiques publiques ; · la place de l'expert dans la prise de décision, dans le débat citoyen, la collégialité de l'expertise ; · plus généralement, la traduction de la connaissance en expertise ; · la mise en place de dispositifs d'appui technique (interface besoins et recherche). · la prise en compte des connaissances empiriques des acteurs présents sur le milieu (pour établir les diagnostics, les scénarios de gestion, définir et mettre en oeuvre l'approche écosystémique...). 52 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer 2. Les enjeux scientifiques de recherche dans l'appui aux politiques publiques L'usage durable des ressources marines vivantes ne peut se réaliser qu'à travers une approche écosystémique, et nécessite le développement de politiques publiques appuyées sur une connaissance populations et scientifique la intégrant du les problématiques des sociétales, la modélisation bioéconomique, la dynamique des connaissance fonctionnement écosystèmes marins. La régulation de l'accès à la ressource doit simultanément tendre à minimiser les conflits d'usages, à limiter la surexploitation en maintenant autant que possible la viabilité économique des entreprises du secteur. Très directement et de manière nouvelle, cette préoccupation s'est trouvée fortement liée à celle de la conservation et des usages non marchands de la ressource (pêche de loisir et écotourisme). Les aires marines protégées, en tant que nouvel outil de gestion, offrent les conditions expérimentales d'une évaluation des politiques publiques en ce domaine. En ce qui concerne les espèces protégées ou vulnérables, il s'agira de développer des actions de recherches visant une meilleure connaissance et la préservation des fonctionnalités de leurs habitats littoraux et côtiers. On pensera ici notamment aux espèces de poissons migrateurs amphihalins qu'elles soient exploitées ou non, à certains mammifères, etc. Vulnérabilités de la zone côtière Bien que les pressions anthropiques en mer soient moins intenses et souvent moins directes qu'à terre, elles prennent depuis plusieurs décennies une importance grandissante et elles touchent des environnements de plus en plus divers, y compris ceux qui sont les plus éloignés du cadre de vie de l'espèce humaine, comme les zones profondes ou polaires. Les principaux impacts liés aux activités humaines sont la surexploitation des ressources, les pertes d'habitats et de biodiversité, les espèces invasives et le parasitisme, la sur-fertilisation, l'imprégnation des milieux par les xénobiotiques, l'élévation du niveau moyen de la mer liée au réchauffement climatique global, l'érosion côtière ou, à l'inverse, les envasements et ensablements, enfin les risques de submersion souvent liés aux deux impacts précédents. En première ligne, les environnements littoraux subissent directement les effets d'une très forte concentration démographique (environ 60 % de la population mondiale réside à moins de 100 km des côtes): urbanisation, pollutions constantes ou saisonnières, présentant de larges gammes de toxicité, modifications quantitatives et qualitatives des transferts continentaux en raison de changements d'utilisation des sols des bassins versants, de modifications du relief (érosion ou accumulation sédimentaire locale accélérée), de la modification des conditions hydrauliques et des flux sédimentaires en raison des aménagements des cours d'eau et des zones côtières, portuaires et estuariennes, des exploitations de granulats... Toutes ces modifications, pour certaines amplifiées par les hautes densités de peuplement, affectent profondément et massivement le littoral dans sa partie continentale, mais aussi dans sa partie marine qui est par ailleurs directement touchée par des modifications du trait de côte, la destruction de zones d'habitat en petits fonds par des remblais et des empiètements qui les réduisent et les segmentent, le nautisme, les pêches côtières, les activités d'aquaculture... À l'échelle de la planète, les littoraux comptent pourtant parmi les milieux présentant les plus grands enjeux en matière de conservation de la biodiversité et de gestion des interactions hommes-milieux, comme l'atteste la liste des 34 points chauds mondiaux de biodiversité. La gestion des risques est un point particulièrement critique sur le littoral où se croisent divers aléas (sismique, océanologique, météorologique) et une vulnérabilité forte due à la présence humaine (populations et infrastructures, induisant éventuellement des risques secondaires, notamment chimiques et radioactifs). La France est, par exemple, un pays où l'aléa sismique est modéré en métropole (il est par contre important dans certains secteurs d'Outre-mer comme les Antilles), mais où la vulnérabilité sismique est forte. L'élévation du niveau moyen de la mer se traduit le plus souvent par des modifications des conditions d'érosion et d'accumulation qui influencent directement la morphologie du trait de côte. Le changement des régimes de tempêtes impacte également directement cette zone d'interface. L'évaluation des vulnérabilités environnementales et sociétales sur les zones littorales et côtières suppose donc de considérer à la fois la probabilité des aléas naturels, celle des aléas liés au changement climatique, celle des aléas liés aux activités humaines, et les dommages potentiels, directs et indirects, de ces aléas sur la population et les activités économiques. Il s'agit d'aller vers une modélisation des impacts possibles, pour laquelle la connaissance du contexte économique et social est également nécessaire. En matière de vulnérabilité côtière, l'océanographie opérationnelle constitue une pièce majeure du dispositif de recherche-expertise, permettant la prévision de l'état de l'environnement marin et côtier, tout en alimentant la recherche grâce à la possibilité de ré-analyses comparatives des jeux de données (mesures réelles in situ et simulations numériques). Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 53 RéférenceS | novembre 2012 activités pour qu'elles ne détériorent pas cet état, voire conduisent à son amélioration, doit également s'appuyer sur la compréhension des impacts de ces pressions. Cette compréhension est encore très lacunaire, car les pressions sont multiples, interactives, etc. Par exemple, l'effet des mélanges de contaminants à faibles doses est très mal connu, mais suspecté d'être plus important que la simple addition des effets de chaque substance (effet cocktail). Néanmoins, les écosystèmes Le robot voilier VAIMOS « Voilier Autonome Instrumenté de Mesures Océanographiques de Surface » utilise la force du vent et l'énergie solaire pour des missions de mesures et d'observations. ©Ifremer/Patrick Rousseaux affectés par cette imprégnation chimique subissent aussi généralement des dégradations physiques dont les conséquences sont encore plus radicales par la perte d'habitats fonctionnels. Rappelons aussi que la connaissance de la profondeur, notamment près des côtes, là où elle peut varier rapidement, reste un enjeu majeur au 21e siècle afin de mieux connaître et modéliser les interactions entre les phénomènes hydrodynamiques (comme les tsunamis par exemple) et la topographie des fonds. Dans ce contexte, les autorités publiques sont aujourd'hui en charge de définir des objectifs de qualité des espaces marins, de mettre en oeuvre des mesures appropriées de protection et/ou de reconquête des milieux et de développer des indicateurs des effets de ces politiques. Une telle politique environnementale, en milieu côtier et littoral particulièrement, doit se fonder sur la concertation d'une part et sur l'intégration de l'expertise scientifique d'autre part. La compréhension des impacts des activités humaines sur les milieux marins côtiers et littoraux permettra d'identifier des critères de qualité pour les différents indicateurs, ainsi que les pressions à faire décroître. Enfin, l'efficacité des politiques publiques demande à être évaluée a posteriori. Les modalités de cette évaluation ne sont pas triviales et devront reposer sur la compréhension des trajectoires des écosystèmes et de leur capacité de résilience. La dimension cinétique est ici fondamentale. Les couplages entre les modèles dynamiques et les autres processus essentiels dans le domaine côtier sont à développer, notamment la prise en compte des vagues et des interactions houle-courant, ou encore le couplage océan-atmosphère. Afin d'améliorer le couplage des modèles dynamiques avec les modèles sédimentaires, biogéochimiques et biologiques, il convient d'optimiser la représentation des échanges verticaux, notamment au niveau des couches limites de fond et de surface. Un meilleur interfaçage est nécessaire entre les modèles du domaine côtier, ceux des domaines plus au large et ceux du littoral, afin de quantifier les transferts de matière et d'énergie entre ces différents domaines. Enfin, des progrès en stratégie d'acquisition et d'assimilation de données in situ devront être accomplis du fait de la spécificité des observations du domaine côtier (radars haute fréquence pour les courants par exemple) et de leur faible densité au regard des échelles spatiales des processus dynamiques. La mise en place d'un service d'océanographie opérationnelle côtière (décision CIMER décembre 2009) devra être accompagnée d'un dialogue renforcé avec la communauté nationale des chercheurs en océanographie côtière et littorale. 3. Les enjeux scientifiques opérationnels dans l'appui aux politiques publiques L'identification et la caractérisation des pressions anthropiques et des vulnérabilités qu'elles installent dans les différentes composantes du milieu marin constituent la première étape par laquelle la recherche apporte son appui aux politiques publiques. Certains des enjeux ont été décrits dans les deux piliers précédents. L'identification et la compréhension des vulnérabilités doivent permettre de construire des indicateurs pertinents de l'état des milieux. Cependant, l'action du législateur, qui vise à réguler différentes L'Ifremer, le CNRS, l'IRD, le SHOM, le BRGM, le MNHN et les Universités investissent fortement sur ces différents sujets, au travers de leurs réseaux nationaux de surveillance et d'observation, au travers d'actions d'ampleur nationale ou internationale menées par des réseaux de laboratoires (comme RESOMAR), et des projets de recherche menés plus localement et l'axe 5 du LABEX MER porté par l'UBO. Il s'agit par exemple des risques liés à l'évolution physique du milieu littoral, aux impacts des événements extrêmes et du changement climatique, ou de la caractérisation et du suivi des écosystèmes marins (DCSMM), qui constituent des enjeux majeurs et font l'objet de nombreuses recherches collaboratives et 54 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer d'observations et études en appui aux politiques publiques, en métropole et en Outre-mer. La volonté est aujourd'hui, via des concertations nationales (comme celle précisément organisée dans le cadre de l'élaboration du programme Mer), ou interorganismes, de mettre en cohérence et en communication l'ensemble de dispositifs et centre de compétences afin de construire un système coordonné de recherche et d'expertise, susceptible d'agir à la fois sur le plan des recherches fondamentales nécessaires, que sur celui de l'appui aux politiques publiques. Modélisation côtière opérationnelle L'ambition d'un système de modélisation côtière opérationnel est de restituer, au travers de formalismes mathématiques et de méthodes numériques, le meilleur niveau de compréhension du fonctionnement de l'environnement (physique, chimique, sédimentaire et biologique) afin d'en prédire les évolutions sous la pression d'une combinaison de forçages. Il s'agit de coupler le modèle dynamique d'océan régional et côtier avec les modèles d'atmosphère, de vagues, de sédiments, les modèles biologiques, et les modèles littoraux (ces derniers ayant l'objectif de représenter les échelles plus fines dans les zones peu profondes affectées par le déferlement des vagues). Afin d'améliorer le couplage des modèles dynamiques avec les modèles sédimentaires, biogéochimiques et biologiques, il convient d'optimiser la représentation des échanges verticaux, notamment au niveau des couches limites de fond et de surface. Un meilleur interfaçage est nécessaire entre les modèles du domaine côtier, ceux des domaines plus au large et ceux du littoral, afin de quantifier les transferts de matière et d'énergie entre ces différents domaines. Enfin, des progrès en stratégie d'acquisition et d'assimilation de données in situ devront être accomplis du fait de la spécificité des observations du domaine côtier (radars haute fréquence pour les courants par exemple) et de leur faible densité au regard des échelles spatiales des processus dynamiques. La mise en place d'un service d'océanographie opérationnelle côtière (décision CIMER décembre 2009) devra s'accompagner d'un dialogue renforcé avec la communauté nationale des chercheurs en océanographie côtière et littorale. La prospective « océanographie opérationnelle » (voir pilier 1) sera l'occasion de mobiliser la communauté scientifique sur cette question. Régulations des activités maritimes Les activités développées dans l'espace marin, notamment celles qui sont en lien avec les nouveaux enjeux des énergies marines, nécessitent des données d'observation in situ pour la recherche et pour la sûreté maritime. Elles requièrent également que soient précisées leurs qualifications juridiques Observatoire socio-économique des activités maritimes À la manière des observatoires de l'environnement naturel, il est nécessaire informations de développer sont une observation à toute des activités de maritimes. La collecte, le stockage et la mise à disposition de ces indispensables politique planification des usages et de développement d'une économie maritime active. Ils doivent couvrir les champs de la pêche, de l'aquaculture, des usages récréatifs, de l'extraction, du transport et des énergies nouvelles. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 55 RéférenceS | novembre 2012 56 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 4 : Programme d'action pour l'Outre-mer français 1. Contexte et enjeux scientifiques Avec sa zone économique exclusive d'une superficie d'environ 11millions de km , la France dispose du second espace maritime 2 mondial. L'Outre-mer en représente la composante essentielle (près de 97 %), située dans les grands océans (Atlantique, Pacifique, Indien et Antarctique). Les états généraux de l'Outre-mer, les programmes de développement économique des collectivités, le Grenelle de l'environnement puis le Grenelle de la mer et le Conseil Interministériel de l'Outre-mer (CIOM) de novembre 2009 ont exprimé des attentes fortes et variées portées par la mer ainsi que l'objectif de promouvoir le développement endogène des régions et pays d'Outre-mer. L'Outre-mer offre à la France des opportunités et des responsabilités en matière de recherche et d'innovation. Dans le prolongement de la Stratégie nationale de recherche et d'innovation menée par le ministère chargé de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, il a été mené en 2010 une réflexion sur les « Stratégies territoriales pour les Outre-mer » (STRATOM) dans laquelle l'espace marin a pris une place prépondérante et qui a servi de support à cette partie du « Programme MER ». Les Outre-mer français s'inscrivent dans 5 cadres juridiques différents : · Les départements et régions d'Outre-mer, (DOM-ROM ou DROM) à statut équivalent aux départements et régions de métropole (Guadeloupe, Martinique ; Guyane, la Réunion et récemment Mayotte). Les DOM-ROM font partie de l'Union Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 57 RéférenceS | novembre 2012 européenne au titre des régions ultrapériphériques (RUP). alors qu'elle constitue un élément essentiel pour limiter les effets de l'érosion des sols, de la montée du niveau de la mer et de la pollution. C'est également une nourricerie pour de nombreuses espèces de poissons et de crustacés peuplant les eaux littorales, lagons et barrières coralliennes proches. La préservation de cette biodiversité passe par la mise en place d'aires marine protégées dont la conception et la gestion demandent un effort important de recherche sur la compréhension du fonctionnement des écosystèmes. · Les collectivités d'Outre-mer (COM) à statuts divers : Polynésie française (Pays d'Outre-mer), Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon (collectivité territoriale) et Wallis-et-Futuna (Territoire). Ces territoires n'appartiennent pas à l'UE. · La Nouvelle-Calédonie constitue une collectivité sui generis. · Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). En 2007, Les TAAF ont intégré un district supplémentaire : les îles Éparses (Bassas da India, Europa, îles Glorieuses, Juan de Nova, Tromelin). · L'île Clipperton, une propriété domaniale (donc privée) de l'État administrée par le ministre chargé de l'Outre-mer (donc le Ministère de l'Intérieur assisté d'un Secrétariat d'État). Le processus en cours, dans le cadre de l'ONU, pour l'extension des zones sous juridiction nationale (EXTRAPLAC) ouvre des perspectives nouvelles, mais seuls les DOM, les COM et la Nouvelle-Calédonie sont habités de manière permanente. Chaque Outre-mer présente des enjeux en matière de connaissance du système « mer », d'exploitation durable des ressources marines et de gestion de l'espace côtier. Nous ne les reprendrons pas à ce stade, car ils sont exposés dans les autres piliers. En revanche, la spécificité de l'Outre-mer vis-à-vis de la biodiversité, de la vulnérabilité à l'impact du changement global, des pressions anthropiques et des risques naturels mérite un exposé particulier. La biodiversité marine des Outre-mer est en effet L'impact du changement global, sur les écosystèmes marins d'Outre-mer, généralement insulaires, est bien plus sensible qu'en métropole. L'élévation de température, la montée et l'acidification des eaux modifient le fonctionnement des écosystèmes. Les blanchissements coralliens sont plus fréquents et on observe le changement du comportement des animaux avec des conséquences sur la biodiversité et les ressources exploitables. Il existe ici un fort besoin de recherche sur les scénarios à envisager, à court, moyen et long terme. Les pressions anthropiques vont continuer à se multiplier avec la croissance démographique (introduction d'espèces, urbanisation du littoral à la Réunion, industrie du nickel et du cobalt en Nouvelle-Calédonie, urbanisation du littoral et orpaillage en Guyane, déficiences dans la gestion et le traitement des déchets, agriculture et autres pressions humaines dans la Caraïbe, etc.). Les questionnements scientifiques correspondants couvrent le suivi, la compréhension et la modélisation des effets d'origine anthropique avec identification des pollutions majeures, évaluation des risques environnementaux et leurs conséquences sur la santé humaine ; avec une finalité qui est Holothurie ou concombre de mer « Stichopus variegatus » dans le lagon de Nouvelle-Calédonie. Photo réalisée dans le cadre du projet de recherche IBANOE dont l'objectif est d'identifier de nouveaux indicateurs des apports anthropiques (nutriments, métaux lourds) et du fonctionnement trophique du lagon Sud-Ouest de Nouvelle-Calédonie. © CNRS Photothèque ­ IRD / Erwan Amice exceptionnellement riche grâce à leur situation à proximité des « hot-spot » de biodiversité, dans le Sud-ouest de l'océan Indien, les Caraïbes et la Nouvelle-Calédonie. Cela explique que 80 % de la biodiversité française se trouve Outre-mer. Quatrième pays au monde par l'étendue de ses récifs coralliens, la France met en oeuvre depuis 1999 l'Initiative française pour les récifs coralliens (IFRECOR). En soutien, elle se doit de jouer un rôle exemplaire dans la recherche sur les récifs coralliens et les écosystèmes associés, notamment depuis l'inscription par l'UNESCO au patrimoine mondial d'une partie des récifs et lagons de Nouvelle-Calédonie. Dans le cadre des investissements d'avenir, un laboratoire d'excellence, LABEX CORAIL, rassemble la communauté des chercheurs français. La mangrove, un des écosystèmes littoraux majeurs de la zone tropicale, est menacée par une pression anthropique croissante 58 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer la préservation et la réhabilitation de la qualité de recherche dans l'objectif de coordonner les initiatives, mutualiser les dispositifs, renforcer la lisibilité, non seulement dans le domaine de la recherche, mais également dans ceux de la formation et de l'innovation qui lui sont étroitement liés. Concernant les moyens à la mer, la majorité de la flotte océanographique française a été réunie en 2011 dans une unité mixte de service (UMS-FOF) qui organise chaque année des appels d'offres de campagnes faisant l'objet d'une évaluation scientifique et d'une programmation unifiée. L'UMS-FOF mobilise les navires océanographiques de l'Ifremer, de l'IPEV, du CNRS et de l'IRD. Dans ces appels d'offres, le prépositionnement des navires en Outre-mer est régulier pour les navires de taille moyenne de l'IRD (Alis, basé en Nouvelle-Calédonie et Antea qui est susceptible d'intervenir dans l'Océan Indien et les Antilles), tandis que l'IPEV et l'Ifremer interviennent de manière plus occasionnelle avec des navires de grande taille (Marion-Dufresne II, Atalante,...). Par ailleurs, les bâtiments hydro- l'environnement littoral. Les risques naturels touchent les ROM-COM qui, par leur position géographique et leur contexte géologique, sont particulièrement sujets aux aléas de type météorologique (tempêtes, cyclones, inondations) et géologique (glissements de terrain, séismes, tsunamis, éruptions volcaniques ou érosion côtière). Ces risques font l'objet de travaux de recherche souvent conduits par les organismes nationaux (MétéoFrance, Shom, BRGM, IPG, IRD, Ifremer,...) et s'appuient sur des observatoires existants (volcans, séismes) ou en devenir comme les systèmes d'alerte aux tsunamis en océan Indien et dans les Caraïbes. 2. Analyse stratégique du positionnement national 2.1 La présence de la recherche française Outre-mer L'effectif total des personnels de recherche et d'enseignement supérieur, toutes catégories confondues, dépasse légèrement 3600 personnes, soit environ 1,6 % du total des personnels employés par les universités et opérateurs publics en France (source OST, 2010). Cette présence est bien moindre qu'en métropole. Pour mémoire, la population totale des territoires d'Outre-mer représente 4 % de la population française. Les infrastructures de recherche relèvent de trois catégories d'instruments : océanographiques opérés par le SHOM, effectuent régulièrement des levés bathymétriques et des campagnes de mesures océanographiques lors de leurs déploiements en Outre-mer et dans les espaces maritimes sous responsabilité française. Cependant, il existe un écart important entre les besoins de l'Outre-mer et les moyens disponibles. Plusieurs projets d'équipement, pour des bateaux de taille moyenne à faible, du type navire de station marine, sont en gestation. L'accès à des navires étrangers est possible dans le cadre des échanges de temps navire organisés par l'OFEG (Ocean Fleet Exchange Group), du programme européen Eurofleets, et pour des observateurs de l'État côtier sur les navires étrangers effectuant des recherches dans les eaux sous juridiction (ZEE). Des programmes internationaux associant des équipes de recherche françaises mobilisent régulièrement les flottes océanographiques étrangères dans les ZEE d'Outre-mer (Flotte sud-africaine dans le programme MESOBIO sur le Canal du Mozambique, Flotte japonaise dans les Mascareignes pour la recherche des zones de ponte des Anguilles, etc.). Enfin, il reste toujours le recours à des affrètements (cas de la campagne Marquise mobilisant un navire Néo-Zélandais). Plusieurs bases de données et collections sont alimentées par · quelques très grandes infrastructures : Cyclotron de l'océan Indien ; laboratoire P3 en Guyane et à La Réunion ; réseau d'antennes pour l'observation de l'environnement assiste par satellite en Guyane, Nouvelle-Calédonie et La Réunion ; Grand Observatoire du Pacifique Sud ; composante IRD et « tout océans » de la Flotte Océanographique Française, etc.; · plusieurs plates-formes d'observation et de mutualisation d'outils (santé ; climat ; risques naturels) ; · de nombreuses collections de ressources biologiques et des bibliothèques. La STRATOM recommande le développement d'infrastructures de recherche partagées précisant qu'un « consensus se dégage sur les équipes de recherche, la liste indicative ci-après n'est pas exhaustive : banque de microalgues des fonds marins (ARVAM, la Réunion), zoothèque et banque d'ADN à l'Université de la Réunion, collection et base de connaissance sur les coraux (IRD, MNHN, Université de la Réunion, ECOMAR, TIT biodiversité IFRECOR/MNHN et COREMO financés dans le cadre de l'IFRECOR), collection de microorganismes marins de Nouvelle-Calédonie, les bases Ifremer la mise en place et la pérennisation de grands observatoires de recherche, de collections et de bases de données ». Elle préconise de transposer le concept de grand observatoire développé dans le Pacifique Sud. Le Grand Observatoire du Pacifique Sud (GOPS), GIS créé en 2009 et qui fédère actuellement 17 établissements de Harmonie pour le Système d'Information Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 59 RéférenceS | novembre 2012 Halieutique (SIH) et Quadrige pour les données 2.3 Le rayonnement régional de la France depuis l'Outremer L'Outre-mer contribue pour une part importante à la position privilégiée de la France sur la scène internationale et à sa capacité d'influence. Ses caractéristiques, notamment marines, permettent à la France de siéger dans la plupart des instances internationales où elle est souvent doublement présente : au titre de la France elle-même (par sa présence dans la zone concernée), mais aussi comme membre de l'Union européenne. C'est le cas dans les commissions régionales des pêches (CCAMLR, IOTC, ICCAT, IATTC,...) ou bien dans les associations scientifiques (WIOMSA, PSA). environnementales, l'Observatoire thonier de l'IRD dans l'océan Indien et l'Atlantique tropical, etc. Le Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) a la garde des collections nationales d'histoire naturelle et, avec ses homologues internationaux, a en charge la coordination le référencement des espèces et la conservation des spécimens notamment les types. Les équipes locales revendiquent à juste titre la possibilité de disposer de collections locales de référence. L'articulation entre les deux exigences peut quelques fois être source de tensions. 2.2 L'Outre-mer français et l'Union européenne Les régions d'Outre-mer sont considérées comme les L'activité de recherche en général, et les sciences marines en particulier, doivent s'envisager à l'échelle internationale avec les pays de la zone, animés par l'intérêt partagé d'une bonne gestion des espaces marins. Ce sont des activités particulièrement propices au désenclavement des espaces ultramarins. Dans les démarches de coopération scientifique régionale, il faut considérer de manière distincte les pays les moins avancés et les puissances émergentes, ou déjà développées. Les organismes de recherche rassemblés dans l'alliance l'Agence ALLENVI mènent de différents Recherche programmes pour le internationaux, mais ils se sont accordés pour confier à Inter-établissement Développement (AIRD) une fonction spécifique d'aide et de soutien pour collaborer avec les pays du Sud. L'AIRD a donc un rôle particulier à jouer dans l'avenir à ce niveau. 2.4 Analyse globale du système de recherches marines Outre-mer Le tableau présenté pp. 62-63 présente les points forts et points faibles du système de recherche marin outre-mer. Il est à lire au regard des conditions particulières de chacune des collectivités d'Outre-mer et des évolutions les plus récentes (notamment en termes de structuration de la recherche) qui peuvent être résumées ainsi : Dans le Pacifique : « frontières actives » de l'Europe (statut spécifique de Régions Ultra-Périphériques ­ RUP). À ce titre, les actions de coopération scientifique internationale menées depuis une ROM contribuent, avec une forte visibilité, au rayonnement dans la région, de la France et de l'Europe, et donc de leur influence sur les pays de la zone. Plusieurs programmes européens traitent des sciences marines on été financés par différents instruments (FED de l'Ifremer pour la perliculture en Polynésie, RunSeaScience de l'IRD à La Réunion, PACE-Net de l'IRD dans la région Pacifique,...). Il faudrait cependant que les besoins en financement de la recherche, dans les ROM et COM, soient davantage pris en compte par l'U.E dans le futur. Ceci semble difficile sans une véritable stratégie de lobbying au niveau bruxellois. Elle devrait s'appuyer sur les acteurs scientifiques et institutionnels français concernés (universités, collectivités et organismes ultramarins et métropolitains), mais aussi sur les autres acteurs des pays membres européens concernés par leurs RUP (Portugal et Espagne) ou encore les pays européens possédant des liens étroits avec leurs PTOM (Danemark, Grande-Bretagne, Pays-Bas, France). Les thèmes scientifiques à promouvoir pourraient être des thèmes fédérateurs d'intérêt mondial (aires marines protégées, protection des récifs coralliens,...). La recherche nécessaire à l'application de la réglementation européenne dans les RUP a été un argument employé pour les eaux continentales et littorales (Directive-cadre sur l'eau) ou bien pour la gestion des ressources (Règlement sur la collecte des données de pêche). Malheureusement la Directive Cadre « Stratégie pour le Milieu Marin » (DCSMM) n'est pas directement applicable dans les RUP. · Il a été créé en 2009, au niveau régional Pacifique, un Grand Observatoire de l'environnement et de la biodiversité terrestre et marine du Pacifique Sud (GOPS) qui fédère la plupart des organismes français de recherche impliqués dans la zone. Vu l'importance des enjeux maritimes océaniens, les sciences marines sont abondamment représentées dans les structures du GOPS avec un programme scientifique structuré. · Le financement par l'Europe du réseau PACE-Net 60 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer rassemblant les scientifiques de la région va pouvoir servir de support pour le développement international du GOPS. vient de se terminer, a permis de montrer le dynamisme des acteurs locaux de sciences marines autour de projets communs de recherche réalisés à l'échelle régionale. · La Polynésie française dispose d'un immense espace marin, vers lequel elle se tourne résolument depuis la réalisation du programme ZEPOLYF mené dans les années 2000, les États généraux de l'Outre-mer ont confirmé la volonté politique d'intégrer l'espace marin dans la politique de développement. Le projet de création d'une UMR-EIO (UPF, IRD, Ifremer, ILM) traduit la volonté de structuration de la recherche locale sur les thématiques « biodiversité » et « insularité ». · La Réunion a fortement structuré sa politique de recherche et d'innovation, dans différents domaines avec par exemple l'OVPF (Volcanologie), le GIP CRVOI (maladies infectieuses), la CYROI (cyclotron) et le pôle de compétitivité Qualitropic. Pour l'instant, les sciences marines sont concernées uniquement pour partie par l'OSU-R porté par l'Université., mais l'élément fédérateur le plus important est le projet d'implantation commune des acteurs en sciences de la mer sur le site du Port. Soutenu depuis 2007 par le Conseil Régional sous différentes appellations, le financement CPER ne s'est toujours pas concrétisé, mais cela reste la première des priorités pour toute la communauté. · La Nouvelle-Calédonie dispose de ressources minérales terrestres (nickel et cobalt) donnant des moyens aux collectivités locales dans les politiques de recherche et d'innovation notamment dans l'objectif de préserver les milieux et leur biodiversité y compris marins. C'est dans ce contexte que se structure progressivement la recherche en NC avec notamment la création d'un COSRI-NC (comité de stratégie recherche et innovation) et d'un COST (Comité scientifique et technologique) aujourd'hui opérationnels et prémices à la création d'un Pôle de recherche et d'enseignement supérieur (PRESICA), regroupant les acteurs locaux de la recherche (IRD, Ifremer, BRGM et IAC) autour de l'Université de NouvelleCalédonie. L'innovation est soutenue de la par l'Agence de développement économique Nouvelle-Calédonie · Tout nouveau département, Mayotte accueille depuis 2010 un Parc naturel marin, le PNM, et compte développer une filière aquacole. Deux opportunités qui pourraient se traduire par la construction progressive d'une implantation commune aux acteurs de sciences marines. · Le Livre bleu Océan Indien, préparé par les services de l'État en décembre 2011, envisage le futur de la politique maritime de l'État français dans l'ensemble de l'OI. Il prévoit la création d'un Conseil maritime du sud de l'océan Indien, sorte de Conseil Économique et Social de l'OI, qui regrouperait l'ensemble des acteurs de la société. Sa déclinaison « Recherche » confirme la volonté de renforcer la coordination/structuration de la recherche française en sciences marines dans l'OI. Ils proposent la création d'un « Pôle Scientifique Mer Océan Indien » (PSMOI) pour rassembler les centres réunionnais et mahorais. Pour l'instant, les organismes intervenant dans la zone ne se sont pas exprimés officiellement, constituer mais le PSMOI d'un pourrait grand certainement observatoire. l'élément maritime (ADECAL). Les activités marines y sont représentées au travers de la pêche et de l'aquaculture. Observatoire sous-marin MICADO dans un lagon de Nouvelle-Calédonie. ©Ifremer/Gilles Hervé · Les TAAF administrent des territoires sans habitant permanent sur lesquels l'activité scientifique est prépondérante. Le GIP IPEV a été spécialement créé pour soutenir l'activité scientifique en Antarctique et dans les terres australes où sont implantées des stations de recherche. Le rattachement des îles Éparses aux TAAF offrent de nouvelles opportunités de recherche qui se sont concrétisées en 2011 par un Programme îles Éparses, qui a sélectionné des projets sur appel d'offres, où sont intervenus de nombreux organismes. Ce mode de fonctionnement est tout à fait adapté au monde de la recherche et devrait servir d'exemple pour l'avenir. Dans l'Océan Indien : · La STRATOM, publiée en 2011, recommande la transposition à l'Océan Indien d'une structure régionale de type Grand Observatoire comme le GOPS pour fédérer les acteurs de la recherche. Même si ce type de dispositif ne leur serait pas spécifiquement dédié, elles y auraient toute leur place, car elle représente un enjeu majeur de la recherche dans la région. · Le succès du projet européen REGPOT Run-Sea-Science, qui Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 61 RéférenceS | novembre 2012 Tableau : Forces et faiblesses du système de recherches marines outre-mer (analyse SWOT) Forces Structures Structures Faiblesses · · · · Des universités attractives sur des domaines émergents - Articulation forte en écologie et biodiversité tropicale avec 2 masters (UAG, Univ. Réunion), et débouchés locaux; Un observatoire structuré d'envergure internationale établi en Polynésie française, le CRIOBE, renforcé par la création en 2009 de l'Institut des récifs coralliens; Structuration en Nouvelle Calédonie avec la création des COST et COSRI; La création du « Pôle d'Excellence Mahorais » et la création du Parc Naturel Marin de Mayotte. · Manque de stations marines et de navires côtiers en outre-mer, manque de coordination entre acteurs locaux et nationaux, difficulté à mobiliser les infrastructures nationales (navires, moyens aériens), et à établir une vision pluriannuelle de la programmation des zones géographiques qui seront couvertes par les navires hauturiers. · · · Manque de visibilité de l'implication (situation et perspectives) de l'ultra-marin dans l'observatoire national de la biodiversité (Loi Grenelle 1 ­ article 25), ECOSCOPE, LIFEWATCH et GEOBON; Faible interopérabilité des bases de données; L'absence de stations d'observations sous-marines permettant d'acquérir des séries temporelles de données limite le progrès de la compréhension des processus fondamentaux de fonctionnement de la planète et de la connaissance et de la prévention des risques; Technique · · ORE implantés localement (coordination et évaluation désormais intégrées à l'Alliance Allenvi); Performances techniques et polyvalence des navires scientifiques hauturiers et régionaux portés par l'Ifremer, l'IPEV et l'IRD. · Difficulté à assurer la pérennité d'infrastructures pour créer et accueillir des collections locales. Gouvernance & coordination Des coordinations entre établissements et universités existantes ou en Gouvernance & coordination cours de structuration : · · · · Difficulté à mobiliser des équipes nationales sur des · · · · · · · · · · le rôle majeur de l'IPEV (coordination et agence de moyens) pour les mers australes ; le pôle biodiversité et écosystèmes hauturiers à la Réunion articulé avec le projet de « Pôle Mer Réunion »; des synergies identifiées entre Ifremer et IRD sur les ressources halieutiques ; Fédération de recherche EBS (Environnement Biodiversité Santé) à la Réunion; Bonne coordination locale et internationale avec l'IFRECOR, en synergie avec l'ICRI et le GDRI «Biodiversité des récifs coralliens»; Coordination renforcée par la création du Grand Observatoire de l'environnement et de la biodiversité terrestre et marine du Pacifique Sud (GOPS); Articulation recherche - acteurs locaux; bio-ressources marines locales, pêche et aquaculture, et toxicologie (ciguatera) potentielle sur les ressources naturelles, Programme ZONECO en Nouvelle-Calédonie, projet de pôle régional mer à la Réunion, cohérence entre orientations du CIOM et les activités de recherche sur les bio-ressources marines (en matière de valorisation, le point le plus fort porte sur l'aquaculture et l'halieutique). problématiques locales. Faible articulation du tripode recherche - enseignement supérieur perspectives locales (sauf la Réunion) Faible articulation entre acteurs des recherches marines et terrestres sur les problématiques littorales (pollutions, pressions anthropiques) à l'exception du DYNECAR (UAG) ; Articulation des problématiques marines avec les SHS et la santé quasi inexistantes (sauf toxicologie ­ ciguatera en PF avec l'Institut Louis Malardé et l'IRD et l'Institut Pasteur en NC et les études écosystémiques du CRIOBE) · Peu de recherche sur la gouvernance des pêches, la logistique pour la consommation, l'exportation des productions locales (pêche, aquaculture), la pêche de loisirs. Autres · · · · · Absence d'animateurs de réseau et manque de visibilité des équipes locales, difficulté à établir une vision complète des équipes et des projets, « Trou noir » de l'Eranet Biome. L'ultramarin est insuffisamment pris en compte dans le PCRD. Peu de projets ANR et européens portés par des équipes locales. Tissu économique trop réduit pour susciter des demandes structurées de travaux de recherche; aucun financeur n'a inscrit l'espace marin dans ses priorités. Ressources humaines (compétences) insuffisantes pour bénéficier des résultats de la recherche et participer à l'orientation et à l'observation ? Mobilisation insuffisante de l'AIRD (Agence inter-établissements de recherche pour le développement) sur l'espace marin outre-mer pour y mener des actions en coopération régionale. Autres · · Intérêt scientifique en sciences de la planète et de l'environnement (géosciences, climat, écologie et biodiversité) porté par les organismes nationaux et des collaborations internationales. Implication des organismes de recherche dans les programmes nationaux de cartographie pour l'extension du plateau continental (EXTRAPLAC). 62 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Opportunités Structures Menaces · Perspectives de création d'un « Pôle Mer » en Guyane (volonté du Conseil Régional). Technique Technique · Possibilités de coordination avec l'étranger et d'exploitation par les équipes françaises des données des campagnes scientifiques étrangères effectuées dans la ZEE française. · Manque de moyens logistiques pour l'accès à l'observation et à la surveillance de territoires éloignés (îles Eparses, PF etc.), menace accrue par la diminution des moyens disponibles des organismes de recherche nationaux, notamment pour la flotte. Gouvernance & coordination · Engagements du Grenelle de la mer et du CIMER : synergie des moyens à la mer et création fonction garde côte ; synergies Gouvernance & coordination recherche / programmes nationaux pour la cartographie, EXTRAPLAC, · Manque de coordination, risques de redondances et divergences entre l'exploration et l'exploitation des ressources minérales et initiatives et projets locaux et acteurs (équipes, projets, organismes) nationaux. Risque de dispersion de projets non coordonnés portant sur des thématiques similaires. énergétiques, création et extension de zones protégées (aires marines protégées); · · Partenariats : Communauté du Pacifique Sud pour la pêche hauturière (thonidés) et côtière; La volonté de l'Etat, affichée dans le Livre bleu Océan Indien, d'une structuration de la recherche française dans l'Océan Indien avec la création d'un PSMOI s'appuyant sur les futurs « Pôle d'excellence mahorais » et « Pôle Mer Réunion »; · Freins à la diffusion des données : faible reconnaissance des chercheurs qui les ont obtenues, crainte du pillage et d'utilisations concurrentes, confidentialité, droits d'auteur, conflits potentiels entre collections locales et collections nationales liées au manque de règles sur l'utilisation, la question de la mise en forme et la validité de la donnée. Faut-il fournir les données brutes ou des données élaborées etc.? · · La structuration en cours de la recherche en Nouvelle Calédonie avec la création du futur PRESICA; Coopération régionale dans le bassin de l'océan Indien (COI), et entre Nouvelle-Calédonie et Australie. Autres · Perspectives de développement économique local des ressources marines soutenues par les Etats généraux de l'outre-mer et les stratégies régionales d'innovation ; soutien politique à la Réunion et Polynésie française aux projets d'énergies marines ; Autres · · Risques naturels (volcaniques, sismiques, tsunamis, cyclones etc.) pouvant affecter les installations et observatoires dans les îles ; Piraterie dans l'océan Indien et le canal du Mozambique empêchant la réalisation de certaines campagnes scientifiques marines. · Initiative de l'INEE, du MOM et des TAAF sur les îles Eparses ; grandes expéditions biodiversité MNHN-IRD en Nouvelle-Calédonie après le Vanuatu et Madagascar. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 63 RéférenceS | novembre 2012 · Les Antilles font preuve de dynamisme en recherche et enseignement supérieur dans le domaine de la biodiversité des écosystèmes tropicaux et des mangroves, et ont développé des synergies entre les domaines terrestres et marins au sein du DYNECAR (EA 926 de l'UAG). coordination de la recherche à l'échelle régionale permettant d'ancrer les Outre-mer dans leur contexte international ainsi que (ii) des programmes thématiques dont certains pourront être menées sur un DOM ou PTOM spécifique pour lequel il pourrait y avoir un enjeu local majeur. Leur mise en oeuvre et les objectifs scientifiques devront répondre aux critères suivants : · La Guyane dispose d'un littoral riche de ressources biologiques (mangrove, monts sous-marins) et halieutiques potentielles dont la connaissance et l'exploitation méritent d'être développées et rationalisées pour accompagner le fort dynamisme démographique. Le besoin de connaissances sur le milieu marin en appui aux politiques publiques ne devrait pas manquer d'être amplifié si les perspectives d'un développement de l'exploitation de pétrole off-shore dans la ZEE guyanaise étaient confirmées. C'est dans ce contexte qu'il convient de prendre en compte la volonté de la collectivité de créer localement un « Pôle mer ». · Ils seront définis dans le temps et dans l'espace · Ils devront s'inscrire au sein des 3 piliers suivants : (i) contribuer à la connaissance et compréhension du système Mer ; (ii) contribuer à l'exploitation durable des ressources marines et (iii) contribuer à la gestion de l'espace côtier marin . · Ils devront aussi correspondre à des enjeux socioéconomiques importants avec une vision des objectifs qui sera partagée avec les collectivités concernées. · Le respect de ces piliers ne doit pas laisser de coté les aspects biodiversité, aléas-risques-vulnérabilité et surtout les sciences humaines et sociales dans leur dimension la plus large, de manière à couvrir la demande locale. · Les fonds devront pouvoir être mobilisables au niveau des principaux guichets de financement de la recherche (ANR, M.O.M., U.E., CPS, AFD, collectivités,...) · Des moyens humains seront mobilisables auprès des organismes concernés. · Ils nécessiteront une approche pluri-disciplinaire et pluriAquaculture de l'ombrine ocellée à la station Ifremer de Martinique. ©Ifremer/Olivier Dugornay organisme. 3.2 Options pour une coordination de la recherche à l'échelle régionale · Saint-Pierre et Miquelon reste aujourd'hui le « parent pauvre » avec une filière pêche moribonde. Seul l'Ifremer y est aujourd'hui implanté avec un agent permanent. Les actions menées localement, avec un appui fort assuré par les équipes métropolitaines, concernent l'halieutique (évaluation des stocks dans la perspective de la renégociation des accords de pêche avec le Canada) et le développement d'une filière aquacole (élevage du pétoncle géant). Il convient de souligner la réalisation en 2011 du dossier technique EXTRAPLAC, pour St-Pierre et Miquelon. La France dispose aujourd'hui du dossier technique en appui à une éventuelle demande officielle d'extension juridique de son plateau continental au large de SPM. 3.2.1 Région « Pacifique » : Cette région, regroupant la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie Française a vocation à s'appuyer sur un outil préexistant, le GIS-GOPS. Cette démarche, qui s'inscrit dans le long terme pourra évoluer en fonction des souhaits de ses membres. Dans le contexte actuel du financement de la recherche publique où le financement par projets remplace le récurent des organismes, le GOPS n'a pas été en capacité de mobiliser des fonds autres que ceux des budgets des organismes membres. 3. Proposition d'actions Outre-mer 3.1 Proposition de critères de définition des priorités : Il est proposé de sélectionner (i) des options pour une Le projet européen PACENET s'inscrit dans cette stratégie puisqu'il s'agit de faire émerger des priorités régionales qui devraient être ensuite reprises par l'U.E. et faire l'objet d'appels à projets « ciblés au niveau régional ». Ce projet n'est 64 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer pas exclusivement tourné vers les sciences de la mer, mais les réunions tenues jusqu'ici donnent une place importante à la biodiversité et à l'environnement marin. Il est donc proposé : Mayotte ; · intégration au niveau international dans la zone du sudouest de l'océan Indien ; Dans ce cadre, le Pôle Scientifique Mer Océan Indien (PSMOI) pourrait rassembler les acteurs des sciences marines impliqués : · De continuer à entretenir, au sein du GOPS, un projet scientifique et technique « MER » qui réponde aux différents critères cités ci-devant ; · Au sein de la future implantation commune du Port à La Réunion (Pôle Mer Réunion) ; · De s'organiser pour promouvoir ce projet auprès de l'ensemble des financeurs institutionnels dans un objectif de cofinancement par ces différents guichets ; · Au sein du projet d'implantation mahorais ; · Dans le programme « Îles Eparses » ; · Dans le projet européen RunSeaScience. La compétitivité des équipes en place leur permet de candidater sur les moyens communs de financement de la recherche type ANR, mais un projet scientifique spécifique aux sciences marines, comme il en à déjà été rédigé pour nourrir le projet d'implantation commune à La Réunion, ou bien pour construire le projet RunSeaScience, reste le meilleur moyen d'assurer une bonne représentation dans le futur Grand observatoire sous l'égide du PSMOI. 3.3 Programmes locaux thématiques : · De ne pas limiter cette démarche aux seuls bailleurs français et européens, mais de l'étendre aux institutions régionales (CPS) et aux autres partenaires potentiels de la zone (Australie, Nouvelle-Zélande, Japon, Fidji,...). 3.3.1 Chlordécone aux Antilles : Un « programme marin Chlordécone » identifié au sein du Programme National Chlordécone 2 pourrait fédérer de nombreux membres d'AllEnvi. Il conviendrait dans un premier temps Aquaculture du Platax au Centre Ifremer du Pacifique (Tahiti). ©Ifremer/Olivier Dugornay d'identifier le programme scientifique correspondant et d'en assurer la promotion auprès des bailleurs de fonds pour mobiliser les financements nécessaires, là aussi dans une logique de cofinancements. 3.2.2 Région « Océan Indien » : Cette région regroupant La Réunion, Mayotte et les Îles Éparses et TAAF se singularise par la présence d'équipes de recherche suffisamment fournies pour atteindre une masse critique capable de positionner la France à l'échelon international. Dans ce contexte très favorable, l'université de La Réunion est à même d'apporter un support important aux démarches des organismes. Il reste maintenant à envisager la création d'une structure « chapeau » de type Grand observatoire comme recommandé dans la STRATOM pour traiter, entre autres, les enjeux suivants : · pérennisation et mise en place des observatoires de recherche ; 3.3.2 Approche écosystémique des pêches en Guyane : La filière pêche est un enjeu majeur pour l'économie guyanaise. La durabilité de cette filière (pêche crevettière, pêche sous DCP, pêcheries démersales...) est très dépendante de l'évolution du milieu aussi sa connaissance, sa compréhension et la mise en place de mesures pertinentes de gestion de la ressource justifient la mise en place d'un programme de recherche écosystémique. Un tel programme scientifique pluri-disciplinaire et pluriorganismes justifierait de fédérer certains des membres d'AllEnvi au sein d'un « programme Mer », comme cela a été évoqué à l'occasion du séminaire « Mer » organisé, en septembre 2009, dans le cadre du Gis IRISTA. Compte tenu des interactions régionales, ce programme · prise en compte des Îles Éparses ; · conséquences géostratégiques liées à la départementalisation de Mayotte ; justifierait d'être promu et mis en oeuvre en collaboration avec les partenaires scientifiques brésiliens. · développement socio-économique de La Réunion et de Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 65 RéférenceS | novembre 2012 3.4 Mobilisation de l'AIRD Les travaux menés par la STRATOM ont mis en évidence l'intérêt scientifique et géostratégique de développer l'intégration régionale des Outre-mer par un renforcement des coopérations scientifiques avec les pays de la zone. Il existe localement des initiatives internationales en sciences marines menées par les organismes français associant les Outre-mer français comme les laboratoires mixtes internationaux de l'IRD (eg. le LMI ICEMASA en Afrique du Sud) où les groupements de recherche internationaux du CNRS (eg. GDRI Récifs Coralliens). Dans le cadre d'ALLENVI, l'Agence inter-établissements de recherche pour le développement (AIRD) est plus particulièrement chargée de traiter des actions à mener avec ces pays. Les deux grandes régions proposées, Pacifique et Océan Indien, ainsi que le projet d'un « programme Mer » en Guyane devraient permettre de mobiliser davantage l'AIRD pour développer des coopérations avec les PED et pays émergents potentiellement concernés, à savoir Brésil, Fidji, Madagascar, Afrique du Sud, Pays de la COI, etc. 66 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer De l'importance d'un Programme Mer pour le développement et la valorisation en sciences marines L'économie maritime pose un problème de définition et de périmètre qui s'est aplani à partir des années 1990 avec la diffusion d'études périodiques nationales (américaines, françaises, canadiennes, britanniques et autres) et des travaux européens sur le sujet. Des différences entre les diverses études demeurent, mais elles ne sont pas fondamentales. Pour fixer les idées, on peut s'appuyer sur la définition qu'en donne l'approche française. Depuis 1997, les rapports périodiques de l'Ifremer « Données économiques maritimes françaises » (DEMF) englobent dans l'économie maritime les ensembles suivants : transport maritime et avec le fluvial du Benelux prochainement. Ce point amène une remarque plus générale : il n'y a pas de lien simple entre économie maritime et localisation géographique. De nombreuses activités situées sur le littoral sont sans rapport avec le maritime ; inversement, des activités considérées comme maritimes peuvent être localisées loin de la mer : le fluvial, le manufacturier (équipement naval, construction nautique) et plusieurs types de services comme l'ingénierie offshore et l'assurance maritime. Notons enfin que le périmètre de l'économie maritime est influencé par la contrainte des statistiques disponibles. Un cas manifeste est celui des services bancaires : le financement des activités maritimes (construction de navires de pêche et de commerce, ports de pêche, de commerce et de plaisance) est peu renseigné et non pris en compte dans les DEMF bien que les banques françaises soient très présentes dans cette activité. · l'extraction des ressources vivantes et les activités aval : pêche (y compris algues), aquaculture, commerce et transformation des produits de la mer ; · l'extraction des ressources minérales et énergétiques : granulats marins, énergies marines, hydrocarbures offshore, énergies marines, mais aussi centrales électriques installées sur le littoral ; 1. L'importance de l'économie maritime D'après la définition donnée ci-dessus, l'économie maritime est d'une importance modeste pour un pays comme la France : de 1 à 1,5 % du produit intérieur brut et de l'emploi total. Elle est plus importante pour les pays très côtiers comme le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l'Italie et la Norvège. Elle croît évidemment en fonction de l'importance des ressources marines, comme les hydrocarbures pour le Royaume-Uni et les Pays-Bas. La liste des activités maritimes proposée plus haut illustre néanmoins la portée stratégique de l'économie maritime pour un pays côtier. Par exemple, les ressources offshore de minéraux et d'hydrocarbures jouent un rôle déterminant sur les marchés et la géopolitique des matières premières et de l'énergie ; le transport maritime constitue un facteur puissant de baisse des coûts des échanges mondiaux de marchandises, notamment des matières premières, et, par voie de conséquence, de l'intégration des marchés ; l'intermodalité et les interconnexions entre le transport maritime, le rail et le fluvial, actuellement débattues au niveau européen, influencent l'organisation même du transport en Europe ; le tourisme littoral constitue une part importante des dépenses de loisirs et une puissante incitation à sauvegarder le patrimoine naturel littoral ; l'état des eaux côtières est tributaire · l'industrie manufacturière et les services connexes : construction de navires civils, de navires de défense et de plaisance, équipement naval, réparation, démantèlement de navires, fabrication et pose de câbles sous-marins ; · les travaux publics maritimes et fluviaux, y c. le dragage des ports ; · un ensemble diversifié de services privés : parapétrolier et paragazier offshore (y compris construction de plateformes), tourisme littoral (hôtellerie, restauration, croisières, filière plaisance et sports nautiques, agences de voyages, musées, espaces de loisirs), transport maritime et fluvial (ports, flotte de commerce, assurance maritime) ; · les services publics : Marine nationale ; intervention de l'État en mer (sécurité, signalisation, sauvetage, éducation, sécurité sociale) ; protection de l'environnement marin ; recherche marine et océanographie opérationnelle. Comme indiqué ci-dessus, les DEMF prennent aussi en compte les travaux fluviaux et le transport fluvial de commerce. L'une des raisons tient à la croissance récente du transport fluvial conteneurisé et aux investissements de connexion avec le Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 67 RéférenceS | novembre 2012 des usages des bassins versants, et la gestion de ces eaux implique, en toute rigueur, celle de l'ensemble des activités amont : agriculture, industries, agglomérations urbaines. Ainsi, les liens sont déterminants entre activités maritimes et économies nationales. employés (de préférence en équivalents temps plein), exportations, rémunérations versées. Dans le cas du secteur public, on s'intéresse aux effectifs employés et aux budgets de fonctionnement et d'investissement ; certains sous-ensembles spécifiques de ces budgets sont mis en évidence (p.ex. sécurité, enseignement maritime). 2. La recherche en sciences marines en lien avec l'économie maritime La recherche marine ou plus exactement ses applications opérationnelles ont des liens avec les questions d'économie maritime, que la réglementation nationale et européenne met périodiquement en évidence. Par exemple : Pour fixer les idées, la mise à jour 2011 des DEMF estime la valeur ajoutée 2009 de l'économie à 22 milliards d'euros et l'emploi à 460 000 environ. Ces résultats indiquent une baisse par rapport à 2007 d'environ 20% pour la valeur ajoutée et 5% pour l'emploi. Le ralentissement économique depuis 2008 en est l'une des causes, mais l'importante révision des statistiques nationales en 2008 a pu jouer aussi. Le problème majeur auquel est confrontée l'élaboration du jeu d'indicateurs est que plusieurs secteurs de la nomenclature statistique nationale comprennent des sous-ensembles maritimes sans les distinguer : granulats marins, énergie marine, équipement naval, câbles sous-marins, assurance maritime, tourisme littoral. La mer n'est pas un critère qui structure la comptabilité nationale ; pour nombre de produits industriels, les applications au domaine maritime constituent un débouché commercial parmi d'autres. Dans de tels cas, la méthode consiste à estimer les indicateurs recherchés à partir de données des associations professionnelles ou d'autres sources. Le tourisme littoral pose des problèmes liés à la difficulté à distinguer le littoral dans les comptes du tourisme : le seul recours vient des enquêtes annuelles auprès des touristes sur leurs espaces géographiques de loisirs et de consommation. · dans le contexte de la baisse des stocks halieutiques visible depuis les années 1980, les avis annuels des biologistes sur les totaux admissibles de capture (TAC) et autres instruments de gestion s'accompagnent depuis quelques années, à la demande des autorités européennes, d'une évaluation des impacts économiques de ces mesures ; on passe d'une gestion purement biologique à une gestion bio-économique ; · la directive-cadre « stratégie pour le milieu marin » (DCSMM, 2008) vise le « bon état » des eaux marines à horizon 2020, ce qui suppose le déploiement de moyens scientifiques de mesure, de traitement et de contrôle ; mais la mobilisation d'un tel dispositif ainsi que les efforts de gestion des eaux et des usages posent des problèmes de coûts (pour quels gains à terme ?) ; aussi la directive prévoit-elle la réalisation d'une évaluation économique initiale des usages des eaux marines (article 8), dont le choix de méthode est laissé aux États membres ; · les composantes marines du GMES et les systèmes d'océanographie opérationnelle se heurtent à des contraintes de financement, et leur pertinence peut s'évaluer par la comparaison des coûts prévisibles et des bénéfices économiques potentiels ; cette question récurrente pose des problèmes de méthode, abordés dans un nombre encore modeste d'études et de projets de recherche. 4. Développer la valorisation économique des résultats de la recherche en sciences marines Le programme national Mer doit contribuer à la promotion d'actions de nature à favoriser le développement socioéconomique du monde maritime. Cela implique de mener, en s'appuyant sur les recherches scientifiques menées pour l'amélioration des connaissances dans les domaines cités, des actions de recherche et de développement technologique, orientées vers les enjeux 3. L'évaluation de l'économie maritime Dans la plupart des pays qui publient des études et élaborent des bases de données sur ce thème, l'économie maritime est évaluée par secteurs d'activités au moyen d'indicateurs mis à jour régulièrement : chiffre d'affaires, valeur ajoutée, effectifs industriels. La majorité des partenaires du programme national Mer s'appuient sur leurs ressources afin d'assurer tout ou partie des étapes de valorisation de leurs travaux. Leurs politiques de valorisation de la recherche leur sont propres. Cependant, le 68 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer paysage national de la valorisation est en pleine mutation. De nombreuses actions ont été impulsées afin de mettre en place une politique nationale forte par la création notamment de nouveaux acteurs permettant de mutualiser les efforts de valorisation à l'échelle régionale et nationale. Parmi eux nous comptons entre autres : les pôles de compétitivité, les SATT, les CVT et France Brevets. La majorité des partenaires du programme ont une articulation spécifique avec chacun de ces nouveaux acteurs. Les Pôles Mer représentent, avec leurs membres industriels, l'essentiel des activités économiques maritimes. Ils coopèrent, quand c'est justifié, avec de nombreux pôles technologiques dans l'objectif de contribuer à la construction de filières émergentes et d'instruire des projets structurants. Les pôles Mer sont donc des acteurs naturels et légitimes pour analyser les besoins prospectifs des secteurs industriels et soutenir des développements basés sur des projets coopératifs innovants. Les activités qui en découlent de l'amont vers l'aval : renforcement des compétences en gérant les activités de valorisation au plus près des laboratoires et de l'écosystème industriel, en lien avec les pôles de compétitivité. Les activités principales qui en découleront seront : · Financer les phases de maturation des inventions et de preuve de concept. · Assurer une prestation de services de valorisation auprès des acteurs locaux de la R&D qui créent la valeur ajoutée scientifique et technologique. Les Consortiums de Valorisation Thématique (CVT) auront pour rôle de proposer des services de valorisation à forte valeur ajoutée aux structures de valorisation sur des thématiques données (ex : analyse de portefeuille de propriété intellectuelle, veille...). Ces objectifs principaux seront : · Devenir le centre de ressources en intelligence économique commun aux membres du CVT, au service de multiples acteurs publics et privés, partenaires clés du CVT dans des champs sectoriels attractifs, · Une veille stratégique et d'intelligence économique afin d'identifier les secteurs clés et les technologies avancées sur lesquels il faut faire porter l'effort. · Mettre en place des analyses stratégiques en concertation avec les besoins de ses membres et de ses prospects, · Les recherches dans les technologies de base en support aux développements technologiques. Cette activité doit être menée en partenariat avec l'ensemble des organismes de recherche. · Fournir, en priorité à ses membres, mais aussi à des clients extérieurs, des analyses prospectives permettant d'identifier des domaines de recherche à fort potentiel de valorisation internationale. France Brevet détenu par l'état et la Caisse des Dépôts jouera le rôle d'intermédiaire entre les titulaires d'un brevet et les utilisateurs potentiels. Son objectif sera donc de faire se rencontrer l'offre et la demande. France Brevet sera un partenaire naturel des SATT et des CVT. Ces missions principales seront : · Les développements technologiques, afin de répondre aux besoins de la recherche scientifique en équipements lourds des grandes infrastructures de recherche. · L'élaboration et la conduite de projets technologiques en coopération avec les industriels du monde maritime. · Le transfert et la valorisation des résultats des recherches scientifiques et technologiques à la fois vers le secteur professionnel et aussi en soutien à l'action des politiques publiques par l'élaboration d'ouvrages de synthèse, de guides techniques ou l'élaboration de normes. · Favoriser la circulation des inventions en constituant un large portefeuille de droits de propriété intellectuelle issus de la recherche publique et privée en les réunissant en grappes technologiques · Les axes de développement technologique sont présentés dans l'axe transversal : l'instrumentation et le traitement du signal, activités les équipements les scientifiques, les la énergies pêche et renouvelables, les ressources énergétiques et minérales, les navales, biotechnologies, l'aquaculture, les aménagements côtiers, le génie écologique. Les SATT détenues majoritairement par la Caisse des Dépôts, des groupements universitaires et organismes de recherche présents dans les UMR, devront conduire à une plus forte professionnalisation de la valorisation de la recherche et à un · Organiser leur commercialisation sous forme de licences auprès des entreprises Afin d'assurer une meilleure valorisation de ses travaux, le programme national Mer pourra donc s'appuyer sur les ressources, en particulier humaines de ses partenaires, mais également sur les acteurs précités auxquels ils pourront faire appel. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 69 RéférenceS | novembre 2012 70 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Axe transversal : Les grandes Infrastructures de Recherche et autres dispositifs transversaux 1. Enjeux scientifiques et sociétaux Il est désormais admis par la plupart des acteurs de la recherche, en France et en Europe, que le développement des connaissances scientifiques dans quelque domaine que ce soit nécessite une programmation coordonnée des recherches, mais aussi le développement des capacités nécessaires à la mise en oeuvre de ces programmes, c'est-à-dire du capital humain et des infrastructures de haut niveau. L'évolution de la science moderne aboutit alors, lorsque c'est techniquement et scientifiquement possible, à mutualiser de plus en plus les grands équipements de recherche entre divers opérateurs d'un même pays, voire entre divers pays. Pour les sciences de l'environnement, les infrastructures de recherche (IR) répondent souvent à une double sollicitation, la recherche proprement dite et l'observation des milieux et écosystèmes. En sciences de la mer, la nécessité de disposer de grandes infrastructures de recherche est accrue par le fait que l'accès à ce milieu, qu'il soit côtier ou hauturier, n'est pas immédiat pour l'homme. Certains besoins d'équipements pour la recherche peuvent stimuler l'innovation en matière de construction navale, et les navires et engins de recherche scientifiques pourraient, dans une certaine mesure dès leur conception, porter des technologies innovantes et contribuer à en faire la démonstration. À ce titre une articulation avec le CORICAN (voir chapitre suivant) sera axe de progrès. pour des communautés scientifiques, fournis sur site unique ou de façon distribuée (avec une gouvernance commune), voire de façon virtuelle ou à distance (banques de données, expédition d'échantillons). Les utilisateurs de ces IR sont donc, en premier lieu, les chercheurs et ingénieurs qui contribuent à leur mise en oeuvre (« recherche résidente»). De plus en plus, toutefois, une variété de porteurs d'enjeux y accède de façon plus intermittente (« recherche accueillie »). En particulier, l'accès transnational se développe, soutenu par divers programmes européens ou internationaux. La compréhension du système océan, du fait de sa dimension, de sa nature internationale et des moyens requis pour y accéder passe en effet par la mise en place de collaborations et de coopérations nationales et internationales formelles. Ces coopérations se traduisent notamment par des programmes qui sont un cadre indispensable à une majorité de thématiques en recherche marine. Sur ce plan, la communauté française est très bien positionnée et structurée 3 dans les domaines 2 de l'océanographie hauturière et des relations climat-océans , de l'acidification de l'océan , de l'océanographie opérationnelle hauturière , 4 des 6 géosciences marines et des recherches 5 7 scientifiques et technologiques en domaine profond , de la paléocéanographie et de la biologie moléculaire . Elle est encore insuffisamment positionnée, bien qu'ayant beaucoup d'atouts et le leadership d'un projet européen , dans les domaines côtiers et littoraux. C'est donc un domaine auquel il conviendra d'accorder la plus grande attention, et pour lequel le cadre AllEnvi peut apporter une réelle plus-value. En aval de ces grands programmes, les moyens nécessaires au déploiement des recherches en sciences de la mer peuvent être classés en deux grands types: les premiers sont d'ordre institutionnel, ils sont très structurants et souvent génériques; les 8 2 Différents leaderships au sein des programmes-cadres internationaux IGBP (http://www.igbp.net/), SCOR (http://www.scor-int.org/), notamment dans les programmes IMBER, GEOTRACES et SOLAS. Pourquoi pas ? , navire amiral de la flotte océanographique de l'Ifremer. ©Ifremer/Michel Gouillou 3 4 5 6 7 Programme européen EPOCA, http://epoca-project.eu Programme européen MyOcean (http://www.myocean.eu ) Programme EMSO (http://www.emso-eu.org/management/ ) Programmes IGBP-PAGES (http://www.pages-igbp.org/) et sa partie marine IMAGES Infrastructure européenne de type « ESFRI » EMBRC (http://www.embrc.eu/ ) Programme européen de type I3 JERICO (http://www.jerico-fp7.eu/ ) La définition partagée des IR désigne des outils et des services 8 Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 71 RéférenceS | novembre 2012 seconds s'appuient sur les premiers et correspondent à des équipements permettant observation, expérimentation et archivage et ils peuvent être spécifiques et dédiés à un champ disciplinaire. Sous l'influence d'outils de politique scientifique très couvrant l'ensemble des zones économiques exclusives et de protection environnementale des pays de l'UE si nous voulons aboutir, pour la préservation de l'environnement marin, à des politiques publiques qui soient valables pour l'Union dans son ensemble (EMSO) ; une nécessité semblable au niveau de l'océan mondial (Euro-Argo) ; la nécessité de mettre le plus rapidement possible à la disposition des entreprises et des décideurs politiques les connaissances et données de la recherche marine et maritime, y compris au niveau de démonstrateurs (eg., GROOM), afin de faire décoller la « croissance bleue » en Europe, que ce soit au niveau de la fourniture de nouveaux produits, de procédés ou d'instruments. structurants mis en place par l'UE, le paysage des IR en science de la mer a beaucoup évolué en cinq ans. Les deux principaux instruments sont les programmes I3 (« Integrated Infrastructure Initiative ») et ESFRI (« European Strategy Forum for Research Infrastructures »), qui sont, respectivement, des mouvements d'intégration de noeuds pré-existants au sein d'infrastructures distribuées couvrant chacune un domaine particulier et une réflexion visant à construire, sous forme de site unique ou sous forme distribuée, les infrastructures jugées comme étant les plus stratégiques pour la recherche européenne pour les 25 prochaines années. La plupart des IR en sciences de la mer en France sont soit parties prenantes de programme I3 et/ou ESFRI (EuroArgo, Flotte Océanographique Française, Centre National de Ressources Biologiques Marines), soit engagés dans des programmes visant à les intégrer à des infrastructures paneuropéennes en préparation (observatoires, bases de données ...). Parmi les grands défis que souhaite relever l'Union 2. Infrastructures en sciences de la mer déjà disponibles dans le champ du groupe Mer d'AllEnvi Les sciences marines exigent des moyens logistiques et scientifiques importants (grands et très grands équipements ou TGIR), d'usage mutualisé, mis au service de communautés scientifiques de grande taille, qui sont gérés soit par l'un des organismes de l'Alliance, soit par une structure de gestion ad hoc mutualisée. Ces infrastructures sont soit des très grands instruments soit des centres de ressources (ressources biologiques, bases de données...). Leurs coûts de construction et d'exploitation sont tels qu'ils justifient des processus de financement pluriannuels, concertés au niveau national, et éventuellement européen ou international. Dans la plupart des cas, elles sont adossées à des communautés de chercheurs qui contribuent en permanence à leur amélioration. La gouvernance doit alors trouver, pour l'accès à ces infrastructures, un bon équilibre entre la recherche résidente et la recherche accueillie. Des comités de programme ont pour responsabilité de garantir un accès à tous sur la base de l'excellence scientifique. Une difficulté supplémentaire est de conjuguer la nécessité de garantir une certaine pérennité aux installations et de les maintenir à un niveau d'excellence technologique. Parmi les dépenses d'exploitation, en particulier dans le cas des infrastructures distribuées, il est donc à prévoir qu'une part croissante doit être consacrée à en maximiser à la fois l'accès et l'efficacité : dépenses d'animation, de gestion et de promotion de l'infrastructure; formation du personnel et des utilisateurs; transfert des connaissances vers les entreprises et les décideurs publics; recherches technologiques destinées à améliorer l'infrastructure; recherches "à risque" à effectuer avec les utilisateurs... La France est sans doute l'un des pays pour lequel ce type de dispositif est le plus complet. Quelques exemples parmi les plus européenne, la mise en accès des technologies les plus modernes et l'accroissement de la compétitivité sont des priorités. Les infrastructures de recherche sont considérées comme des outils essentiels pour atteindre ces objectifs. En effet, en tant qu'instruments de subsidiarité pour développer les connaissances, la cohésion, le transfert de connaissances et de technologies ainsi que la coopération internationale, elles constituent des pierres d'angle pour mettre en oeuvre la Stratégie de Lisbonne. Une vision clairement énoncée par les opérateurs de ces infrastructures et par les responsables européens est donc de focaliser les investissements majeurs en un nombre de points limité, ceci afin d'y attirer l'excellence scientifique et d'accroître la visibilité de la science européenne. Ces moteurs ont été illustrés, pour le cas particulier des sciences de la Mer, par les exemples suivants : l'évolution très rapide des connaissances et des technologies en sciences de la vie (par exemple, EMBRC, MésoAqua, AquaExcel, etc.) ; la nécessité sociétale d'exploiter davantage les ressources marines en nutrition, santé, matériaux et énergie, tout en préservant la qualité des écosystèmes (par exemple, MésoAqua, AquaExcel) ; la nécessité de mutualiser pour gagner en efficience, par exemple dans le management de la flotte océanographique européenne (Eurofleet); la nécessité de disposer d'observations 72 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer significatifs sont décrits ci-après. par la Commission Européenne à travers le financement de deux programmes successifs. L'INSU administre et est responsable financièrement du budget du consortium géré par une agence européenne de gestion, EMA. L'INSU gère aussi la contribution française au programme IODP allouée par le Ministère délégué à la Recherche et aux Nouvelles Technologies. 2.3 Autres TGIR D'autres TGIR ont un volet marin, mais contribuent plus marginalement aux sciences de la mer à proprement parler. C'est le cas du projet ANTARES (Astronomy with a neutrino telescope and abyss environmental research) mis en oeuvre par l'IN2P3 qui construit un détecteur de grande taille au fond de la mer Méditerranée (au large de Toulon). Le site Antares est l'opportunité de développer des instruments pour l'observation environnementale profonde en temps réel et/ou haute fréquence (géosciences, biologie, géochimie, bio-géochimie) et l'INSU et l'Ifremer sont associés à cette collaboration. C'est aussi le cas de RESIF-EPOS (Réseau sismologique français / European Plate Observing System) qui contribue au projet européen EPOS, actuellement en étude pour rejoindre les grandes infrastructures européennes de recherche (roadmap ESFRI). RESIF-EPOS sera constitué d'une antenne sismologique et géodésique multiéchelle pour la mesure des déformations permanentes et transitoires du sol français, qui pourront inclure certaines parties marines.Désormais, les grandes collections qui comptent des millions de spécimens biologiques ou paléontologiques, y compris d'origine marine, ont également acquis un statut de grande infrastructure (projet Recolnat). Enfin, l'IS-ENES est un projet d'infrastructure du réseau européen (ENES*), qui rassemble la communauté européenne en modélisation du climat et du système terre, travaillant sur la compréhension et la prévision du changement climatique, et fortement impliquée dans le GIEC. ISENES fournit à la communauté des services sur l'utilisation optimale des super calculateurs, des outils d'évaluation des modèles, sur l'accès aux résultats des simulations, et développe des prototypes de services climatiques concernant les impacts des changements à venir. 9 2.1 La Flotte océanographique française Au premier rang de ces moyens, aux côtés des bâtiments hydroocéanographiques opérés par le SHOM, se trouvent les navires, sous-marins et engins à la mer, désormais gérés en commun sous le nom de « Flotte océanographique française », unité mixte de service (UMS) créée en mars 2011 pour une durée initiale de quatre ans. Elle est soutenue par les quatre opérateurs de recherche que sont le CNRS, l'Ifremer, l'IPEV et l'IRD. La flotte compte sept navires hauturiers et six navires côtiers. Elle sera étendue en 2012 aux navires de plus petits gabarits des stations marines. Elle comprend également une panoplie d'engins sousmarins permettant d'explorer la colonne d'eau et les fonds marins jusqu'à plus de 6000 mètres sous la surface ainsi que des équipements lourds pour l'étude des sous-sols. Grâce au savoirfaire des équipes qui les gèrent et aux technologies spécifiquement développées, ces navires équipés constituent une référence mondiale. D'une manière plus générale, ce grand équipement contribue à l'exploration et à l'exploitation durable des fonds et des ressources marines vivantes, minérales et énergétiques encore largement méconnues. Cette structure permettra de répondre de façon coordonnée aux besoins croissants d'exploration de l'océan et d'optimiser l'usage des moyens de recherche en mer. Le ROV Victor 6000, robot téléopéré de l'Ifremer dédié à l'exploration de l'océan profond, jusqu'à 6000 mètres. ©Ifremer/Olivier Dugornay 2.2 Integrated Ocean Drilling Program / European Consortium for Ocean Drilling Research L'IODP est un programme international de forages océaniques. Les organismes de recherche de la quinzaine de pays européens ayant participé au programme international ODP ont décidé de rejoindre IODP sous la forme d'un consortium unique, ECORD, pour accroître la visibilité européenne. Cette initiative a été soutenue 9 ENES : European Network for Earth System Modelling Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 73 RéférenceS | novembre 2012 2.4 Les systèmes d'acquisition en continu Dans les domaines de l'océanographie physique et des géosciences, ces dispositifs prennent peu à peu le relais de certaines campagnes récurrentes. Le pari scientifique est que le volume et la régularité des données acquises automatiquement remplacent, au moins partiellement, ces campagnes, moyennant des traitements de données sophistiqués. Les principaux systèmes existants sont : focalise sur des modèles émergents qui complètent l'arbre du vivant et pour lesquels des ressources génomiques sont disponibles. L'environnement logistique de proximité va du séquençage des acides nucléiques à l'analyse des protéines (protéomique, structures 3-D) et, à brève échéance, celle des métabolites, en passant par la transcriptomique et l'imagerie, le tout soutenu par un fort potentiel en bio-informatique. En accélérant l'appropriation des approches de génomique dans l'ensemble de la communauté, cette infrastructure a vocation à servir tout le champ des sciences de la mer, y compris l'océanographie biologique et la bio-géochimie. EURO-ARGO Lancé en 2000 par la Commission océanographique intergouvernementale de l'Unesco (COI) et l'Organisation météorologique mondiale (OMM), le programme Argo a pour objectif de développer un réseau global de 3000 flotteurs profilants autonomes mesurant en temps réel la température et la salinité des océans des 2000 premiers mètres de l'océan. Argo est un élément essentiel du système global d'observation des océans mis en place pour suivre, comprendre et prévoir le rôle de l'océan sur le climat de la planète. Fin 2007, le projet a atteint son objectif initial avec 3000 flotteurs en opération. Argo est le fruit d'une coopération internationale remarquable et plus de 30 pays participent directement à la mise en place du réseau. Chaque année 800 à 900 de ces instruments sont mis à l'eau, soit le nombre nécessaire pour maintenir un réseau de 3000 flotteurs actifs compte tenu de leur durée de vie estimée à 4 ans. Argo est le premier réseau in situ global d'observation des océans en temps réel. Avec les observations des satellites, les données des flotteurs Argo sont la principale source · Les satellites d'observation de la terre (dont ceux prévus dans le cadre du programme européen GMES). Cette infrastructure n'est, là encore, pas propre aux sciences de la mer, mais les traitements de données appliqués pour la production de données marines le sont. · Les systèmes d'acquisition dérivants ou mobiles ; sous l'égide du projet mondial et emblématique ARGO, la collecte systématique de points de mesures de quelques paramètres physiques de l'océan s'est transformée en un service d'océanographie opérationnelle « in situ » mondial. Ce flux de données en continu contribue à alimenter les modèles prévisionnels qui font partie intégrante de la galaxie « océanographie opérationnelle ». Les composantes ARGO française et européenne sont labellisées TGIR. · Les systèmes d'acquisition en points fixes, comme, par exemple, le réseau permanent d'observation du niveau de la mer REFMAR coordonné par le SHOM ; les projets européens ESONET/EMSO visent à déployer des observatoires « fond de mer » multi-paramètres plutôt orientés géosciences. EMSO est labellisé TGIR au niveau national et européen. 2.5 Des infrastructures européennes ESFRI Des infrastructures telles que EMBRC, EUROARGO, EMSO, IS ENES sont labellisées au niveau européen. À titre d'exemple, donnons quelques éléments permettant de situer deux d'entre elles : EMBRC et EUROIARGO. d'information pour les chercheurs s'intéressant au climat et à l'océan, pour la prévision saisonnière et climatique ainsi que pour les centres d'analyse et de prévision océanique. Le Centre National de Ressources Biologiques Marines (EMBRC-France) Le Centre National de Ressources Biologiques Marines constitue le noeud français du « European Marine Biological Resource Center » (EMBRC), une infrastructure pan-européenne labellisée par ESFRI. La mission d'EMBRC-France est d'offrir à la communauté nationale l'accès, sur place ou par expédition, à une variété de modèles biologiques marins ainsi qu'un environnement technologique de haut niveau pour l'exploration fonctionnelle de ces modèles. EMBRC-France se Test de flotteurs Arvor (mesure de la température et de la salinité de l'eau) au bassin d'essais du Centre Ifremer Bretagne. ©Ifremer/Olivier Dugornay 74 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Euro-Argo est la contribution européenne au réseau international Argo. Euro-Argo a été labellisé en 2006 dans la première feuille de route ESFRI (European Strategy Forum on Research Infrastructures) comme infrastructure de recherche européenne. L'objectif principal est d'organiser les contributions des états membres afin de permettre à l'Europe de : l'accessibilité grâce à une meilleure interopérabilité des systèmes et une structure optimisée des bases de données géoréférencées. Il s'agit d'accroître la visibilité de ces bases (donc leur valorisation scientifique ou sociétale) et de promouvoir la traçabilité des données et les interopérabilités nécessaires (métadonnées, comme données elles-mêmes). C'est un enjeu intégrateur très important pour le programme mer. · Déployer, maintenir et opérer un réseau de 800 flotteurs. Cela demandera de déployer chaque année 250 flotteurs/an (durée de vie de 3 à 4 ans). · Fournir un service d'excellence aux communautés recherche (climat) et océanographie opérationnelle (GMES et son service marin). 3. Autres dispositifs transversaux en sciences de la mer 3.1 Les moyens institutionnels a) Les systèmes et réseaux d'observation Les systèmes et réseaux d'observation ont pour vocation d'acquérir des données environnementales au sens le plus large (biologiques, physiques, chimiques, sédimentaires, économiques ou sociales), sur des périodes de temps suffisamment longues (>10 ans) pour répondre à des questions scientifiques et alimenter la modélisation de processus complexes. Ils permettent d'enregistrer et de distinguer les impacts liés aux changements globaux et locaux. Certains de ces dispositifs promeuvent aussi des acquisitions haute fréquence (de quelques heures à quelques minutes) afin de pouvoir saisir les effets d'événements extrêmes de courte durée (cyclones, tempêtes, crues,...). Enfin, des acquisitions en temps réel peuvent être réalisées pour certains paramètres à des fins de modélisation, prévision. Plusieurs de ces dispositifs ont été labellisés soit par un Institut du CNRS, soit par le Ministère de la Recherche via l'alliance AllEnvi (SOERE). D'autres ont été mis en place à l'initiative de laboratoires. Il faut souligner que ces dispositifs incluent dans leur cahier des charges non seulement la mise en oeuvre des mesures in situ, mais aussi la validation et la mise à disposition des données. Certains, comme SOMLIT (service d'observation du milieu littoral), ont créé une base de données ad hoc et la gèrent. D'autres font appel à des centres de données plus avancés (qui peuvent être des laboratoires, des OSUs, ou la cellule multi-organismes CORIOLIS). À l'INSU comme à l'INEE, des réflexions sont en cours pour structurer le paysage des bases de données, notamment en sciences de la mer, en liaison avec les organismes partenaires (Ifremer, CNES, IRD...). Au SHOM, le projet INFRAGEOS vise à apporter un mode de gestion cohérent dans le but d'améliorer le traitement de l'information maritime et littorale, d'en faciliter Deux types d'outils sont spécifiquement adaptés aux recherches sur l'environnement et les anthroposystèmes: les Zones Ateliers (ZA) et les Observatoires Homme-Milieux (OHM) . 10 Pénétromètre Penfled, capable d'effectuer en mer profonde (jusqu'à 6000 mètres) des mesures géotechniques sur une profondeur d'investigation de 30 mètres. ©Ifremer/Olivier Dugornay Dans les domaines de la sismologie, de l'océanographie multidisciplinaire intégrée, côtière et littorale (qualité des eaux et des écosystèmes, dynamique du trait de côte) et de l'océanographie hauturière (physico-chimie, niveau moyen de la mer, courants, flux biogéochimiques), des services d'observation ont été développés par l'INSU, le plus souvent en partenariat avec d'autres organismes français (CNES, IFREMER, IRD, INEE...) ou internationaux. 11 · Les ZA forment un vaste réseau inter-organismes d'approches interdisciplinaires incluant notamment les sciences de la nature, les sciences de la vie, les sciences humaines et les sciences de l'ingénieur dans l'objectif de répondre à une question territoriale spécifique pouvant être élaborée en interaction avec les gestionnaires. Deux concernent les environnements marins. La ZA Antarctique (ZATA) couvre un vaste territoire qui s'étend de l'Antarctique (Terre Adélie) aux eaux subtropicales de l'océan Indien (îles Saint Paul et Amsterdam) en passant par les îles subantarctiques de l'archipel Crozet et des Kerguelen. Elle fédère des recherches sur les modifications de la biodiversité et 10 http://www.cnrs.fr/inee/outils/za.htm et http://www.za-inee.org/ 11 http://www.cnrs.fr/inee/outils/ohm.htm Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 75 RéférenceS | novembre 2012 du fonctionnement des écosystèmes sous la double influence des changements climatiques et des activités humaines. Le projet de ZA mer d'Iroise est centré sur l'interface terre-mer de la pointe bretonne et couvre des écosystèmes côtiers très diversifiés 12 3.2 Les équipements Considérées dans leur ensemble allant de la géologie, à l'océanographie, à la biologie, l'écologie, la sociologie et l'économie, les sciences de la mer requièrent des équipements diversifiés qui répondent à des besoins en exploration et observation (recueil de données), en expérimentation et analyse, en modélisation et en archivage. Leur spécificité prévaut surtout pour les tâches d'observation et d'exploration qui demandent des moyens adaptés au domaine marin. Elle est également réelle pour le volet expérimental qui se fait in . · Les OHM ont pour vocation de cerner les effets d'un événement perturbateur qui est venu déstabiliser un socioécosystème. Ils s'attachent ainsi à l'étude de modifications rapides sous l'angle écologique et sociologique. Actuellement un projet d'OHM concerne le littoral méditerranéen qui a été affecté par les implantations touristiques lourdes, notamment sur les plages languedociennes. b) Les laboratoires en réseaux Les réseaux de laboratoires constituent, en adossement aux programmes nationaux et internationaux, un moyen important de structuration des communautés scientifiques. Ces réseaux se structurent soit autour de grandes thématiques comme l'océanographie, soit autour de thèmes plus restreints, soit encore autour de projets ou d'infrastructures partagées. Nous ne pouvons pas ici en donner une liste exhaustive et ne citerons que les plus importants. natura ou dans des enceintes reproduisant au mieux les conditions naturelles. Ceci est également vrai pour la modélisation qui, notamment en océanographie, passe des outils conceptuels se démarquant de ceux du domaine terrestre. Seuls les équipements qui relèvent plus spécialement du domaine marin sont brièvement passés en revue ci-dessous. L'accès à des et séries il continues donc de données de variées est systèmes (géophysiques, indispensable physiques, faut chimiques, biologiques..) disposer d'observation intégrés qui impliquent aussi bien des moyens spatiaux que terrestres ou directement implantés dans l'océan et qui permettent des observations à long terme sur de vastes échelles spatiales. Parmi les défis des prochaines années, celui de la continuité des observations pose un double problème de moyens et d'organisation à l'échelle européenne. Afin d'assurer les impératifs liés à la mise en place des directives communautaires, il sera opportun d'accompagner les différents services de surveillance par une validation scientifique et technique, et les systèmes d'acquisition et de traitement de données adéquats. Valoriser l'acquisition de données, qu'elles soient de obtenues plus de manière automatique carottages, (utilisation dragages, satellitaire, par capteurs autonomes ou autre) ou par acquisition données classique (e.g. identification taxonomique, enquêtes sociologiques...), · Le réseau à large périmètre thématique des stations et observatoires marins (RESOMAR) l'ensemble des stations et laboratoires marins métropolitains et d'Outre-mer, dont la grande majorité est sous tutelle du CNRS et des universités, incluant des associations avec l'IRD, le MNHN, l'Ifremer, le CNES, et l'EPHE. Ce réseau regroupe ce qui relève des « stations marines » et il développe des actions dans divers champs thématiques de la biologie, de l'écologie et des sciences de la Terre (suivis de biodiversité, observation du littoral, évolution du trait de côte...). · Le réseau des Observatoires des Sciences de l'Univers (OSU). Les OSU ont pour missions principales l'observation environnementale à long terme, l'archivage de données, la mise à disposition de services d'analyse et de modélisation et la promotion d'actions de recherche transverses. Ils associent régionalement plusieurs unités de recherche et de service, permettant de mutualiser des moyens dans différents domaines (observations, bases de données, développements instrumentaux...). Plusieurs OSU sont concernés à des titres divers par les sciences de la mer. l'observation ou la collecte restera stratégique et se devra d'assurer la fiabilité et la mise à disposition des données, destinées à assurer le suivi et/ou la gestion de systèmes d'intérêt. a) Observation spatiale L'observation spatiale devient un outil essentiel des sciences de la mer qu'il s'agisse d'études altimétriques (dynamique), mais aussi météorologiques (vent et SST, estimations de la pluie en région tropicale, suivi des banquises), réflectance de surface (production primaire), de l'analyse de la couleur de l'océan, et depuis peu (encore au stade expérimental) de la radiométrie pour la salinité de surface. Le suivi satellitaire de systèmes de 12 La ZA mer d'Iroise bénéficiera des avancées du programme européen SPICOSA coordonné par une des équipes de la ZA. 76 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer mesures in situ vient compléter le dispositif, et jeter un pont entre physique de l'océan et écologie. Cette océanographie spatiale qui se développe depuis les années 1980 permet de documenter un domaine de plus en plus vaste pour les thématiques concernant les enveloppes fluides de la planète. La France, avec le CNES comme chef de file, et des implications fortes du CNRS, est très en pointe sur ces approches. Dans le domaine côtier, les recherches algorithmiques permettent d'accéder progressivement aux processus proches du littoral, qu'il s'agisse de circulation côtière ou de l'évolution de la matière organique. Par ailleurs, le besoin de nouveaux capteurs plus performants ou permettant d'accéder à de nouvelles variables du système reste indispensable. Il faudra favoriser l'émergence des techniques permettant, à partir des observations de la couleur de l'océan, de déterminer les groupes phyto-planctoniques, la distribution de taille des particules, substances dissoutes... développer un instrument exploitant un principe interférométrique et doppler afin de restituer à très haute résolution des informations altimétriques (topographie dynamique), cinématiques (vitesses et gradients en surface) et géométriques (rugosité) de la surface océanique, préparer l'après SMOS (Soil Moisture and Ocean Salinity) en cherchant à améliorer les techniques et algorithmiques qui permettront de poursuivre l'enregistrement de la détermination de la salinité des eaux de surface. dynamique du trait de côte. c) Observations in situ La connaissance de l'océan nécessite à la fois l'acquisition de données à l'échelle globale et à haute résolution. Toutes les données observables pertinentes ne peuvent être acquises depuis l'espace ou depuis la terre, que ce soit en géosciences, en physique ou en biologie. L'étude des processus nécessite des capteurs et systèmes de mesure ou d'observation spécifiques, mis en oeuvre sur des vecteurs appropriés (bouées, flotteurs autonomes ou guidés, navires, animaux) lors de campagnes, installés en des points définis sur le fond ou dans la colonne d'eau, ou dérivant à une profondeur choisie. Les équipements les plus classiques sont ceux déployés lors des missions océanographiques pour les prélèvements et les mesures (par carottage, chalutage, bouteilles, sondes et capteurs divers, etc.), les relevés photographiques, les enregistrements de paramètres... Ils s'appuient sur une logistique lourde, à commencer par la flotte évoquée ci-dessus et ils ne seront pas abordés ici. L'océan couvrant les deux tiers de la surface du globe, les divers réseaux globaux d'observations au sol sont aujourd'hui très mal répartis sur la surface terrestre (comme, par exemple, des observatoires sismologiques, bien que nombre de séismes aient leur épicentre en domaine marin). Un des défis majeurs du 21 e b) Observatoires à terre Les laboratoires "marins" implantés sur les grandes façades maritimes françaises, tout comme les installations d'Outre-mer (Pacifique, Océan Indien, Antilles, Terres australes et antarctiques...) font que la recherche française dispose d'un réseau exceptionnel de sites distribués dans tous les océans à des latitudes extrêmement variées. Les OSU occupent une place importante dans ce dispositif (voir ci-dessus), mais d'autres laboratoires non intégrés à des OSU, qui ont également des activités et des spécificités essentielles en sciences de la mer (Tahiti, Guadeloupe, La Réunion, Caen-Rouen, La Rochelle, Dinard, Concarneau, Anglet, Nice, Toulon), complètent le dispositif. Une mention spécifique doit être accordée aux installations des bases subantarctiques et antarctiques (IPEV). L'ensemble de ces dispositifs a notamment pour vocation de mener à bien des missions d'observation et de suivi locales, dans leur secteur d'implantation. Les explorations aéroportées locales complètent les missions des observatoires. Par exemple, le LIDAR altimétrique permet le suivi des zones émergées littorales et de l'estran et donc la siècle est donc d'instrumenter les océans pour y réaliser des observations pérennes en continu, intéressant aussi bien les champs de la Terre interne, que ceux de l'océanographie, de la bio-géochimie et de la biologie, avec si possible des dispositifs permettant la transmission en temps réel ou quasi réel de données à des centres opérationnels, en particulier depuis des régions ou zones difficiles d'accès (milieux profonds, zones polaires). L'installation d'observatoires de la surface au fond de mer (monitoring de sites), à la fois sur des zones géographiques ciblées où se produit un processus particulier ou à l'échelle de l'océan mondial, est en cours dans le cadre de programmes internationaux comme ARGOS ou EMSO. Mais, pour certains de ses aspects, ce déploiement est encore limité par des verrous technologiques qui restent à surmonter et qui doivent donc faire l'objet de recherches pluridisciplinaires. Les installations fond de mer (OBS pour Ocean Bottom Observatories) ou dans la colonne d'eau sont complétées par des appareils mobiles automatisés généralement mis en oeuvre à partir de navires. Ces instruments d'exploration sont les ROV (Remote Operated Vehicles) qui réalisent aussi bien des missions de mesure (complément direct des OBS) que des prélèvements Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 77 RéférenceS | novembre 2012 ou de l'imagerie et les AUV ( Automated Underwater Vehicles) qui peuvent être munis de multiples capteurs (température, salinité, sonars, dopplers...) et qui, dotés d'une centrale inertielle et complètement autonomes, effectuent des relevés le long de trajets prédéfinis. Là encore, des avancées technologiques pluridisciplinaires sont nécessaires et attendues. Le développement technologique des capteurs et des d) Systèmes expérimentaux De manière transversale aux différentes thématiques, la possibilité de réaliser et de multiplier diverses expériences, représentant au mieux les conditions environnementales au plus proche du réel, reste un challenge. Un effort, à l'échelle nationale doit être fait, afin de développer des systèmes capables de simuler, à des niveaux les plus réduits possibles, les conditions réelles du fonctionnement des éco- géosystèmes, susceptibles d'être transposés à l'échelle méso- et macrocosmique, sur les installations déjà développées à l'échelle nationale. Aussi, une approche de réduction d'échelle (downscaling) reste importante et doit être validée par des tests de remontée d'échelle (upscaling) afin d'assurer la transposition des résultats obtenus de l'échelle de l'expérience, à celle de l'écosystème réel. Actuellement, la réduction extrême de certains dispositifs permet d'envisager des expérimentations à l'échelle des unicellulaires (e.g. microfluidique) et ainsi d'aborder des processus totalement hors de portée il y a peu. Il faut également évoquer les mésocosmes immergés qui, à l'instar de ceux de Medimer (Sète), permettent un confinement de grandes masses d'eau (>2000 litres) et la simulation contrôlée de forçages, ce qui permet d'étudier les réponses des communautés pélagiques (virus, bactéries, producteurs primaires, secondaires, filtreurs, etc.) et de l'ensemble des réseaux trophiques à ces forçages. D'autres champs expérimentaux concernent la réalisation d'enceintes pressurisées qui permettent de simuler les conditions de température, pression, salinité, mélange gazeux des écosystèmes océaniques profonds, y compris les plus extrêmes (évents hydrothermaux). pouvoir Ces approches des progrès du plus expérimentales ouvrent une devront voie des bénéficier de enregistreurs (data loggers) ouvre de nouveaux champs d'investigation. Des priorités seront de développer de nouveaux capteurs (électro-chimiques in situ, d'adapter des capteurs optiques sur flotteurs/profileurs (chlorophylle, sels nutritifs...), de développer de nouvelles générations d'appareils optiques pour le comptage des particules inertes et vivantes. Dans l'étude des organismes marins, la miniaturisation des dispositifs et la mise au point de nano-micro-capteurs implantables sur, voire dans, les organismes révolutionnent l'écologie fonctionnelle, la physiologie... Afin de minimiser les effets sur les individus étudiés, la miniaturisation des capteurs et enregistreurs, accompagnée d'un accroissement des capacités d'acquisition et de stockage de données reste une priorité pour mieux comprendre comment, sans perturber les individus considérés, il est possible de suivre les besoins, les déplacements, des les comportements appuyée par pour ce comprendre type le fonctionnement de certaines espèces et communautés. L'étude écosystèmes, d'approche expérimentale permettra une collecte de données qui, en l'absence de toute intervention humaine, améliorera la compréhension de leur fonctionnement et celui des communautés étudiées. Les baisses de coût de ces instruments autorisent également des approches plus ambitieuses qui contribuent à renforcer considérablement la robustesse des résultats acquis. technologiques et se développer considérablement, car elles importante écosystèmes, compréhension des fonctionnement inaccessibles. 3.3 Les bases de données Dans le domaine des bases de données environnementales, les utilisateurs veulent pouvoir disposer de manière spontanée de toutes les données disponibles sur un sujet, sans présumer de leur « origine ». Il importe donc d'intégrer ces informations sans que la propriété intellectuelle du producteur de données ne soit spoliée. Le projet européen Seadatanet (http://www.seadatanet.org/) a montré que ce genre de mise notamment L'AUV Aster , engin autonome de reconnaissance et de surveillance des fonds marins ou de la colonne d'eau. ©Ifremer/Olivier Dugornay x en commun est possible, sans remettre en cause l'origine (c'est-à-dire le lieu de stockage) des données ; de plus l'informatique permet des regroupements thématiques de données interférents : une même donnée peut très bien 78 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer apparaître simultanément dans un portail « marin » et dans un autre à thématique distincte (environnement, zone géographique, etc.). La mise en réseau harmonisée des bases de données permet par ailleurs de respecter de manière homogène les Directives relatives à l'accès public aux données (Inspire, DCSMM, DCE...). En océanographie hauturière, les bases de données font déjà l'objet de deux centres de ressources importants. Le premier est la cellule interorganismes Coriolis à Brest (Ifremer, CNRS/INSU, CNES, Météo France, IRD, IPEV, SHOM) qui a pour mission de compiler, d'archiver et de diffuser les données nécessaires à l'océanographie opérationnelle (dont les produits sont élaborés par la société MERCATOR), mais dont la base sert aussi à la recherche. Le second est assuré par l'INSU et l'UPMC à la station marine de Villefranche-sur-mer et vise à regrouper l'ensemble des données de biogéochimie marine, qu'elles soient issues de systèmes d'observation ou de campagnes océanographiques. La base de Villefranche est interfacée avec Coriolis. En océanographie côtière, les données sont de natures plus hétérogènes, allant de simples paramètres physiques ou physicochimiques à des paramètres sédimentaires ou biologiques complexes. Des bases de données d'intérêt national ont déjà été développées comme celle du SOMLIT (service d'observation du milieu littoral, labellisé par l'INSU, auquel participent 8 stations marines), ou les bases de données taxonomiques Benthos et Pelagos au sein du réseau des stations et observatoires marins (RESOMAR). Ces bases sont, et seront, d'un grand intérêt, non seulement pour la recherche, mais aussi pour les travaux liés à la directive-cadre sur les milieux marins (DCSMM). D'autres bases de données hauturières et côtières existent. Il convient d'organiser le tout en un réseau cohérent et coordonné, ce qui est l'objet d'un travail interorganismes déjà en cours. Il est clair que les questions relatives aux bases de données et une amélioration et optimisation de leur structuration en réponse aux objectifs scientifiques à atteindre devront concerner l'ensemble des domaines non abordés de manière détaillée cidessus, tels que les géosciences, les données spatiales, etc. Dans le domaine de l'observation du milieu marin, les avancées à réaliser comprennent : · la conception, l'amélioration des systèmes d'observation (SO) (orientés vers les événements exceptionnels et vers les tendances à long terme) et leur déploiement sur des sites de référence en milieu profond et côtier sous forme de quelques chantiers emblématiques, fédérateurs, multidisciplinaires, reconnus et attractifs internationalement ; · l'amélioration continue des méthodes d'observation in situ non intrusive du comportement des organismes vivants marins (modèles biologiques ciblés et observation macroscopique des écosystèmes) ; · la production d'outils novateurs de traitement de l'information: (traitement du signal et des images pour télédétections électromagnétiques et acoustiques, traitement des séries temporelles des paramètres de l'océan et des images optiques et acoustiques) associés à l'amélioration des systèmes d'observation (flux important, très large base de données, temps réel) ; · la mise en réseau de SO hétérogènes pour une vision synoptique et synchrone du monde marin, en utilisant au mieux les interfaces standardisées de capteurs (adressage IP et registre de capteurs) ; · la promotion d'une approche systémique de la gestion et dissémination de la donnée marine ouverte et géoréférencée pour unifier/partager les développements des observatoires marins côtiers, profonds ou de surface. Il faut aussi souligner ici les nouvelles opportunités que vont représenter, à moyen terme, les sites d'essais d'énergies marines renouvelables, en tant que nouveaux sites d'observation. Par ailleurs, il apparaît que l'océanographie opérationnelle couvre la globalité des océans, mais avec un niveau de résolution qui ne permet pas de descendre à l'échelle côtière. La demande sociétale y est pourtant très importante, notamment dans sa composante environnementale. L'idée de déployer et fédérer un réseau d'acquisition de données automatisé ouvrant le domaine côtier fait son chemin au niveau européen (projet Jerico) et au niveau national (projet Fonce à concrétiser). Un effort particulier est en effet à produire sur ce secteur pour étendre à la côte les services de l'océanographie opérationnelle. De nombreuses réflexions récentes à l'échelle nationale ou européenne (Euromarine...) et des exemples concrets (campagne océanographique LOHAFEX, expédition Tara-Océans...) montrent 4. Points opportunités forts, ­ points Analyse faibles, menaces, du stratégique positionnement national Cette cartographie des infrastructures et dispositifs en sciences de la Mer en France suscite d'emblée les réflexions suivantes. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 79 RéférenceS | novembre 2012 qu'il y a désormais une convergence réelle entre les problématiques de l'océanographie biologique et de la biogéochimie marine et les approches de génomique structurelle, comparative et environnementale. Ces approches devraient aussi se généraliser en écologie marine fonctionnelle. Enfin, la connaissance des génomes de quelques espèces modèles et, donc, des voies métaboliques qu'elles utilisent devrait donner une forte impulsion aux recherches en écologie chimique marine et fournir des données nouvelles pour la modélisation des cycles biogéochimiques. Tout comme les autres structurations évoquées plus haut, les Centres de Ressources Biologiques (CRB) marins, qui fournissent à la communauté des sciences marines un environnement logistique de proximité en génomique et post-génomique, sont des outils essentiels pour développer les recherches aux interfaces entre la biologie, l'écologie marine, l'océanographie (physique, biogéochimie) et les géosciences marines (sédimentologie, sismologie, paléoclimatologie). De plus ces infrastructures sont autant de relais de proximité vers les IR nationales plus spécialisées dans ces approches (séquençage, phénotypage et génotypage, bio-informatique, biologie structurale...), ancrant ainsi encore davantage les sciences de la mer dans la biologie la plus moderne. Par contraste, les SHS marines constituent un parent pauvre dans notre dispositif national et ceci n'est pas compensé par les actions d'intégration en cours au niveau européen. C'est également le cas pour l'accès à des dispositifs d'écologie marine expérimentale. Enfin, au regard du très grand potentiel scientifique et d'innovation que représentent respectivement l'écologie chimique et la chimie écologique marines (Les océans, Le nouveau monde de la chimie durable. Dossier « Pour la Science », n° 73, octobre-décembre 2011), on peut regretter que ces disciplines ne soient pas suffisamment développées en France. Ceci est peut-être dû à l'insuffisante représentation des chimistes des substances naturelles dans les laboratoires marins ou, du moins, d'une prise en compte insuffisante des écosystèmes marins par cette communauté. D'une façon plus globale, le dispositif européen des IR en sciences de la Mer n'est pas totalement indemne du reproche de dispersion ou de duplication inutile. Il convient donc de s'interroger sur l'adéquation de la typologie des IR en regard des communautés scientifiques qu'elles servent, sur leur utilité réelle (mise en place d'indicateurs d'efficacité) et sur les possibilités de mutualisation accrue. Cet effort suppose, toutefois, que les mêmes examens critiques soient aussi effectués en dehors du champ des sciences de la mer, pour mettre un terme à de possibles rentes de situation et au maintien d'infrastructures devenues inadaptées. Dans ce contexte, plusieurs initiatives réfléchissent aux synergies qui pourraient résulter d'une meilleure coordination des IR marines entre elles : SEAS-ERA, MARCOM+, EMODNET, etc. L'objectif de ces forums ou actions de coordination est de faire émerger une vision globale des IR en sciences marines en Europe, pour défragmenter les communautés concernées par chaque grand domaine et dessiner des pistes pour augmenter la synergie entre ces diverses communautés. C'est également le cas d'EuroMarine, une action de coordination entre les trois Réseaux d'Excellence marins dans le 6e programme-cadre (EurOceans, Marbef, Marine Genomics Europe) et qui s'attaque au défi important d'intégration des diverses communautés en sciences de la mer. Ces réflexions en cours auront un impact sur les contours des IR en sciences de la mer, ne serait-ce que pour mieux prendre en compte la diversité des porteurs d'enjeux et les défis scientifiques, technologiques et industriels en France et en Europe. Au plan international, les nations marines et maritimes sont toutes confrontées aux mêmes défis quant au futur des leurs ZEE : bonne qualité environnementale de leurs eaux côtières et hauturières, sécurité de l'approvisionnement en ressources vivantes et minérales, durabilité des systèmes d'exploitation, mise au point de nouvelles technologies pour l'agronomie, la biotechnologie ou la chimie bleues, etc. Comme il est indiqué ci-dessus, le dispositif des IR en sciences de la mer en France couvre la quasi-totalité du champ des sciences de la mer, englobant la biologie évolutive, l'écologie marine, l'océanographie et les géosciences marines. C'est donc un réel atout pour nouer des programmes de coopération avec des pays qui n'ont pas un dispositif infrastructurel aussi complet et qui souhaitent l'améliorer (BRICS notamment). La question de la veille technologique et du dialogue avec la recherche privée est centrale, aucune entreprise n'ayant les moyens ou, du moins, la volonté d'entretenir sur le long terme des IR en sciences marines en France. Les IR en sciences marines peuvent s'appuyer sur l'atout que représentent les pôles de compétitivité, en particulier les Pôles Mer Bretagne et PACA, pour la diffusion des connaissances et des technologies vers les entreprises. Dans ce domaine, l'action de coordination « Marine Genomics for Users » (MG4U), qui s'emploie à définir une nouvelle méthode pour accélérer le transfert des nouvelles connaissances en génomique marine vers leurs utilisateurs potentiels (science, multiplicateurs, industrie, décideurs), peut constituer un modèle intéressant à terme. En effet, si l'on veut apporter une valeur ajoutée européenne au transfert de connaissances (qu'il faut distinguer du transfert de 80 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer technologies, nécessairement attaché aux détenteurs de la propriété intellectuelle), les infrastructures paneuropéennes devront être nécessairement mises à contribution. Enfin, il n'est pas exclu de rechercher des cofinancements entre la recherche et l'industrie pour certains investissements particuliers. L'une des principales menaces qui pèsent sur les IR en sciences de la mer (et sur les infrastructures de recherche en général) et celui de ruptures possibles dans leur pérennité. La vigilance doit donc être de mise sur la question du maintien de leur financement sur le long terme. En ce qui concerne le financement de l'accès aux IR, il est admis par tous aujourd'hui que les modèles économiques qui présupposent un accès gratuit pour les utilisateurs ne sauraient constituer qu'une infime minorité. On se dirige donc vers un modèle général dans lequel l'utilisateur prend en charge une partie du coût de l'accès, classiquement les coûts induits dans le cas de la recherche académique, qu'elle soit nationale, européenne ou internationale. De même, il importe de maintenir un niveau de financement suffisant pour effectuer les recherches et acquérir les équipements nécessaires pour éviter une obsolescence progressive des infrastructures. sont plus immédiatement perceptibles par le grand public. 5.1 Vers une meilleure synergie entre les IR en sciences de la Mer Une réflexion commune entre les opérateurs au sein des Alliances est une voie possible. Elle devrait viser notamment à établir des synergies entre les IR en sciences de la Mer, avec les IR des autres champs thématiques dans AllEnvi ou avec d'autres Alliances. Sous l'impulsion de la Fédération de Recherche sur la Biodiversité et du projet d'infrastructure ESFRI de bases de données sur la biodiversité (« LifeWatch »), des réflexions sont déjà en cours pour unifier au sein d'un même instrument (Ecoscope) les informations sur la biodiversité marine et la biodiversité terrestre. La réponse en cours à l'appel à projets européen sur l'initiative internationale GEO-BON procède de la même logique avec une contribution concertée des organismes via la FRB (projet A-Globe).De même, par delà les réflexions en cours sur les apports de la génomique au champ de l'écologie chimique terrestre et à celui de l'écologie chimique marine, deux spécialités traditionnellement disjointes en France, des synergies pourraient être recherchées au niveau des IR au sein d'AllEnvi (intégration de chimiothèques, formations communes...). 5.2 Bonnes pratiques Des bonnes pratiques communes sont sans doute également à mettre en place entre AllEnvi et Aviesan dans le cas des IR de typologie semblable, par exemple en agronomie et santé, d'une part, et biologie et écologie marines, d'autre part. Celles-ci pourraient tout d'abord consister, dans les réunions de coordination avec l'ANR, à convaincre l'Agence de la nécessité de financer, par le biais de dispositifs communs ­ et présentant donc la « granulométrie » requise ­ l'accès à ces IR ainsi que la recherche technologique nécessaire pour les maintenir à niveau. Il est aussi probable que des modèles économiques et des structures de gouvernance semblables peuvent être élaborés pour ces IR. De même, les géosciences sont présentes (même si ce n'est pas dans leur intégralité) dans au moins deux Alliances, AllEnvi et ANCRE. Un autre objectif devrait être donc de rétablir, au niveau des bases de données, la continuité terre-mer pour les géosciences. 5.3 Au niveau européen Au plan européen, les initiatives de programmation conjointe (IPC) en cours ont toutes reconnu l'importance des IR pour la programmation de la recherche. Réciproquement, les porteurs de ces IR savent qu'ils devront accompagner les priorités programmatiques des IPC. On se dirige donc vers des 5. Recommandations Au total, les enjeux liés aux recherches sur la mer et en mer n'ont sans doute jamais été aussi prégnants qu'aujourd'hui et la France dispose des infrastructures de recherche appropriées pour soutenir la quasi-totalité des recherches à mettre en oeuvre. Elle est aussi très bien placée, tant au niveau de la programmation que des infrastructures nécessaires, pour apporter une contribution majeure à l'Initiative de Programmation Conjointe « Heathy and Productive Seas and Oceans » (JPI « Oceans »). Les IR en sciences de la Mer vont donc occuper une place centrale dans le Programme National Mer qui doit conforter ce dispositif assez unique en Europe, en renforçant sa cohérence, sa cohésion et son efficacité. Le contexte budgétaire et la perspective de la remise à jour de la feuille de route française des Très Grandes Infrastructures de Recherche amènent cependant à s'interroger sur la faiblesse relative de la représentation des sciences de la mer parmi les TGIR. Les évaluations internationales et indépendantes effectuées dans le cadre du Programme Investissements d'Avenir ont pourtant montré l'excellence des compétences en France dans ce domaine. Le Programme Mer a donc avoir pour second objectif de convaincre les décideurs de l'importance des enjeux des sciences de la mer, qui passent trop souvent au second plan par rapport à des questions sociétales dont l'importance ou l'attrait Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 81 RéférenceS | novembre 2012 représentations réciproques dans les gouvernances des IR et des IPC. Par ailleurs, la dynamique d'intégration des IR va se poursuivre, sinon s'accélérer, dans tous les secteurs des sciences de la Mer, au plan national comme au plan européen. Une recommandation importante dans le cadre du programme Mer est donc que la France contribue résolument, par les biais de ses IR, aux feuilles de route européennes en sciences de la Mer, afin de peser ensuite de tout son poids sur la structuration de la recherche marine et maritime en Europe. Un des objectifs à atteindre est une co-construction des infrastructures entre les pays membres et l'Union européenneUnion européenne, visant en particulier à impliquer davantage l'Europe dans le financement e et la DG-RDT (Groupe d'experts pour les IR marines)pour convaincre les pays nouvellement intégrés à l'Union d'investir une proportion plus grande de leurs fonds structurels dans la construction d'IR. En conclusion, la France possède un dispositif très complet d'IR et autres dispositifs transversaux en sciences de la Mer, qui la place en position de chef de file en Europe. Pour saisir les opportunités qui s'offrent à nous, de nombreuses forces sont directement mobilisables, tout de suite ou à brève échéance (Investissements d'Avenir). De plus des synergies peuvent être mises en place entre les divers membres de l'Alliance AllEnvi, y compris au-delà du champ des sciences de la mer, ou avec d'autres Alliances. Nous sommes donc en position de lancer une dynamique vertueuse pour que ces infrastructures de recherche contribuent de façon efficace à la SNRI dans tous les domaines des sciences de la mer. des infrastructures qu'elle labellise. Des opportunités réelles dans ce sens devraient voir le jour dans le cadre du 8 Programme-Cadre (Horizon 2020). Il est bien établi que, pour les infrastructures distribuées au moins, les dépenses d'investissement dans chacun des noeuds sont à la charge des états membres. Notre pays doit cependant obtenir que la Commission fasse évoluer sa politique de financement des IR en Europe selon les lignes suivantes : · dans les programmes d'intégration (I3) ou de construction · (ESFRI) des infrastructures, subventionner la totalité des coûts de coordination dès lors que ceux-ci ont leur valeur ajoutée au niveau de l'Europe (mise en réseau, promotion, formation conjointe des personnels et des utilisateurs ­ en particulier dans des disciplines de plus en plus orphelines telles que la taxonomie, soutien au transfert de connaissances vers les utilisateurs publics et privés...) ; · prendre en charge les activités de recherches technologiques conjointes (investissements immatériels), et, en particulier au moment de la mise en route des IR, contribuer aux investissements matériels ; · augmenter les financements destinés à prendre en charge l'accès transnational aux infrastructures ; · enfin, permettre, dans une limite qui doit sans doute dépendre du secteur considéré, la prise en charge des visiteurs en provenance de l'extérieur de l'Europe. Ce dernier point a pour but de tenir du compte du fait que les IR constituent de très bons outils de coopération internationale, dans lesquels se nouent souvent des collaborations scientifiques sur le long terme. Cette remarque vaut aussi pour l'Europe communautaire. Elle prend un relief particulier dans le cas des politiques de convergence. Ainsi, des réflexions sont en cours entre la Conférence des Régions Périphériques Maritimes Mesure in situ des flux de carbone au sein d'un herbier de « Zostera marina » au large de l'île de Batz, Finistère. © CNRS Photothèque / Yann Fontana 82 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Axe transversal : Technologie et construction navale Technologie Il s'agit ici de proposer quelques éléments sur la technologie en complément des sujets abordés dans les piliers de recherche. La technologie est indissociable les d'une recherche 1. Instrumentation et traitement du signal L'instrumentation au sens large, la métrologie, aurait intérêt à s'insérer dans les axes des développements de la filière identifiée par le MEDDTL et le ministère de l'Industrie13. Les innovations principales pour l'instrumentation des milieux porteront sur : océanographique d'excellence ; développements technologiques nécessitent en effet des actions de recherche, sources de propositions en amont de la recherche, mais également sources de réponses aux besoins sociaux économiques et environnementaux. En cela, ils accompagnent souvent les avancées de la recherche marine et lui permettent de rester dans l'excellence. Le développement des secteurs économiques maritimes implique, par ailleurs, généralement des innovations technologiques Les différentes réflexions prospectives menées ces dernières années dans le domaine des sciences marines ont toutes abordé les vastes domaines du changement climatique, de l'environnement marin, des ressources vivantes, ressources minérales et énergétiques, de la flotte et des engins, et de manière générale l'acquisition et les bases de données, tous domaines qui entrent dans les piliers programmatiques décrits dans les chapitres précédents. · Développement de différentes technologies de capteurs : acoustique, optiques, magnétiques, biologiques et chimiques utilisation de la simulation et modélisation pour la conception de capteurs ; · Autonomie énergétique des capteurs ; · Capteurs intelligents, citons à titre d'exemple l'utilisation de capteurs optiques à base de cavité laser à fibre optique, véritable rupture technologique, permettant la réalisation d'antenne acoustique sous-marine très performante ; · Pour les capteurs biologiques et chimiques : les objectifs sont des mesures chimiques in situ et rapides à la place d'échantillonnage et de mesures en laboratoire. Les mesures de contaminants traces devraient être étudiées. Pour les mesures biologiques, une première de étape est le plus développement d'instrumentation laboratoire automatisée puis in situ. L'objectif est la quantification audelà de la simple détection de la présence d'espèces ; · Couplage télédétection (dont satellitaire) et in situ ; · Conception à coût objectif et éco-conception. Faibles coûts des capteurs ; · Mesures en continu : Les réseaux de capteurs et leur intégration Intégration des données dans des modélisations en particulier pour des prévisions, des alertes, etc. Station de surveillance environnementale MeDON immergée dans le Parc Marin d'Iroise. ©Ifremer/Olivier Dugornay Traitement des signaux temps réel, différé, stockage de données, etc. - Traitement des images dont couleur de l'eau 13 Réflexions et propositions réalisées dans le réseau des pôles Ecotechnologiques (dont les 2 Pôles Mer) et Cf.COSEI 13 01 2012 filière métrologie et instrumentation. Noter le Carnot PME : CAPTIVEN « Capteurs et données pour la qualité environnementale des eaux et des sols » porté par les Instituts Carnot Cemagref, Ifremer et BRGM. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 83 RéférenceS | novembre 2012 2. Équipements Pour améliorer la connaissance du milieu et des écosystèmes, il est nécessaire de disposer d'un certain nombre d'outils d'intervention sur ou sous la mer. Au-delà de la question des navires qui est examinée au titre de la TGIR Flotte, assurer la mise en oeuvre des capteurs nécessite de développer des engins mobiles autonomes ou télé-opérés. Il existe déjà un certain nombre d'équipements de ce type, mais leur coût ou leurs performances en matière d'autonomie ou de lancement et récupération à la mer reste à améliorer. On peut citer comme type de développement : satellites, les observatoires fond de mer... Il est vivement souhaité que la communauté scientifique utilise ces systèmes afin de contribuer aux références nécessaires au plan international. Des systèmes sont développés dans des technologies duales. Des applications potentielles existent pour la recherche scientifique. Quelques priorités · Pour la reconnaissance des habitats et des écosystèmes : imagerie 3D, portables sur de petits navires d'opportunité, systèmes automatisés (AUV, ROV). Orientation : données exploitées à coûts réduits. · Les ROV (Remote Operating Vehicle) · Les AUV (Automous Underwater Vehicle) avec des efforts sur la taille (mini voire micro), sur les charges utiles embarquables, l'autonomie (nouveau mode de propulsion, pile à combustible...), les logiciels de navigation et de planification de mission, · Cartographie des ressources minérales profondes (AUV à plus grande autonomie munis de capteurs géophysiques) · Adaptation et utilisation des technologies duales · Flotteurs et hydroplaneurs munis de capteurs chimiques et biologiques. L'accent serait mis en priorité sur la miniaturisation des capteurs. · · · · · Les hydroplaneurs, La coopération entre drones (AUV et hydroplaneurs) Les systèmes de mise à l'eau et récupération La transmission de données à haut débit Les télécommunications durcies marinisées · Conception de systèmes « non perdables » pour éviter des déchets sur les fonds marins. · Autonomie et communication durcie et haut débit hertzienne et sous marine Le HROV, robot pouvant être autonome ou téléguidé par fibre optique, en cours de développement au Centre Ifremer Méditerranée. ©Ifremer BOB, module destiné à la surveillance des sorties de bulles de gaz en fond de mer, en test au bassin d'essais du Centre Ifremer Bretagne. ©Ifremer/Olivier Dugornay 3. Systèmes Les systèmes résultent essentiellement d'une agrégation des capteurs, de leur traitement, des systèmes de communication, des vecteurs mobiles comme les AUV, hydroplaneurs, des contrôles-commandes associés, etc.. Ils peuvent aussi prendre en compte ou s'interfacer avec les très grandes infrastructures de recherche, les navires, les 4. Forces et faiblesses Les domaines technologiques au service des applications marines et littorales sont variés : systèmes de sécurité et de sûreté, ingénierie navale, énergies marines et sous marines, ressources minérales, ressources biologiques, génie côtier, services en environnement... Dans le domaine de la technologie, les laboratoires de 84 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer recherche jouent un rôle majeur. Le rôle des pôles de compétitivité est aussi très important dans l'émergence de projets fédérant les capacités des acteurs privés et publics. Ainsi, les Pôles Mer, à travers leur plus de 600 membres, ont fait émerger de nombreux projets sur des thèmes et programmes fédérateurs très variés (voir Tableau ci-dessous). Deux axes 5 thèmes · Sécurité et Sûreté Maritime · 10 programmes Protection Marine Prévention des risques environnementaux (voir environnement) Sécurité et sûreté Naval et Nautisme · Navire du futur · Ressources Énergétiques · · Développement durable Ressources Biologiques · · · Environnement et aménagement du littoral · · Offshore profond Energies renouvelables marines Pêche durable Aquaculture Durable Biotechnologies Bleues Gestion de l'eau en zone côtière Ports du futur Services pour la stratégie sur le milieu marin Dans la continuité de ces actions, des programmes sont en forte évolution : l'île du Levant qui comprendra une station 1300 m et une autre station 2400 ; Ces stations d'essais pourront disposer d'une puissance de plusieurs centaines de kW (jusqu'à 1 MW) et d'un flux de données bidirectionnelle (ombilical à fibres optiques). La conduite d'essais de courte ou longue durée en parallèle y sera possible. Cet outil sans équivalent devrait faciliter le développement de nouveaux équipements « profonds ». Dans le domaine des énergies renouvelables marines : L'IEED France Energie Marine a élaboré les axes technologiques nécessaires au développement des filières : éolien offshore, hydrolien, énergie thermique, etc. En ce qui concerne l'offshore profond : Les industriels français ont développé avec leur réseau de PME de hautes technologies beaucoup d'éléments dont les preuves de concept sont réalisées et qui pourraient servir de base aux scientifiques qui s'impliquent de plus en plus dans une approche systémique visant à une exploitation durable des ressources minérales. Ces développements pourront notamment s'appuyer sur la mise en place d'une plateforme mutualisée d'innovation Abyssea ; il s'agit d'un Centre d'Expertise et d'Essai Mer Profonde au large de Dans les domaines de l'environnement et de l'aménagement littoral : La mise en oeuvre des directives européennes telles que la DCE et la DCSMM notamment suggère de s'impliquer dans les développements technologiques associés aux sujets suivants : · Contaminants émergents : effets sur les écosystèmes · Sédiments contaminés : remise en suspension, conséquences, traitement in situ, dragage à impact minimum. · Traitement des eaux de ballasts Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 85 RéférenceS | novembre 2012 · Services et outils de prévision pour une meilleure gestion tels que les services aval à développer au titre du programme européen GMES notamment. · La préservation des écosystèmes, le génie écologique dont la restauration des milieux. Le champ des recherches est vaste, car il y a un manque de connaissance sur les indicateurs de qualité du milieu, les fonctions écologiques, la caractérisation des états écologiques, les matériaux éco-compatibles, les récifs artificiels, etc. une stratégie française à moyen et à long terme pour la recherche, le développement technologique notamment par la définition d'un programme industriel « Navire du futur » pour des navires plus économes en énergie, plus 14 propres, plus sûrs et plus intelligents . Le CORICAN (Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction et les Activités navales) a été installé le 17 mai 2011 sous la présidence de la Ministre chargée de l'Ecologie et du Ministre chargé de l'Industrie, de l'Energie et de l'Economie Numérique. Le CORICAN a été installé afin de : Recommandations : Bien que les compétences existent et se développent notamment avec l'aide des Pôles de compétitivité, il n'existe pas, à ce jour, de source de financement dédiée pour tous les développements technologiques contrairement à d'autres pays européens (Serpent au Royaume-Uni) ou aux USA. Depuis la disparition technologies du CEPM, le financement pétrolier notamment des pour l'offshore (environnemental, · Promouvoir l'effort de recherche et d'innovation dans la filière navale. Le CORICAN du fait d'une représentativité très large (industriels, chercheurs, écoles, pôles, État...) a toute légitimité pour assurer ce rôle. Il formulera également, dans cette optique, des propositions dans le domaine de l'organisation des centres d'expertise et d'essai et pour le financement de son programme « navire du futur ». exploitation, exploration, sécurité, etc..) n'existe plus et il en est de même au niveau européen. L'ANR ne possédant pas de programme de recherche technologique spécifique et le projet Thermie (au niveau européen) ayant été également arrêté il y a une dizaine d'années, la question des modes de financement de la composante technologique en soutien à la recherche en sciences marines pourra faire l'objet d'une réflexion plus approfondie. · Etablir un programme technologique « navire du futur : navire économe, propre, sûr et intelligent » couvrant les différents types de marines. Le but du CORICAN est de définir et faire mettre en oeuvre ce programme de recherche collaborative. Ce programme devra ensuite devenir « la » référence de travail auprès des grands financeurs de la recherche collaborative (Agences, Ministères), mais également nourrir les travaux des industriels et centres de recherche privés. La construction navale 1. Le Conseil d'orientation de la recherche et de l'innovation pour la construction et les activités navales (CORICAN) Les missions du CORICAN, porteur de la stratégie de recherche et d'innovation de la filière navale sont complémentaires des missions du CSF (Comité Stratégique de Filière), notamment en charge de la compétitivité de la filière. Les travaux de recherche et d'innovation relevant de la stratégie portée par le CORICAN doivent contribuer au développement de l'activité industrielle donc de l'emploi sur le sol français. Ils tiennent compte des initiatives nationales des principaux pays partenaires ou concurrents, ainsi que des programmes portés par l'Union européenne. Par ailleurs, le CORICAN inclut dans son périmètre les innovations que la filière navale pourrait développer au profit des technologies navales applicables aux activités offshore et aux Énergies Marines Renouvelables (EMR). Genèse et missions du CORICAN Parmi les sept engagements retenus par le Livre Bleu issu des tables rondes du Grenelle de la Mer, figure l'engagement suivant : « Engagement 130c : Instituer un Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction et les Activités Navales ­ CORICAN » Cet engagement a été confirmé par le Premier Ministre lors du Comité Interministériel de la Mer (CIMER) du 8 décembre 2009 qui a décidé la création d'un Conseil d'orientation de la Le programme d'action technologique « navire du futur » Le CORICAN a établi son programme technologique en 14 Communiqué de presse du CIMER du 8 décembre 2009 recherche et de l'innovation pour la construction et les activités navales (CORICAN) qui aura pour mission de définir 86 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer travaillant par le biais d'une double approche : générant probablement des applications à court terme, · approche par technologie, · approche par le biais de l'impact industriel. Classification des technologies par thèmes Les technologies proposées ont été regroupées suivant les 5 · Catégorie 4 : exploration de technologies de rupture susceptibles de déboucher sur des applications à plus long terme. thèmes prioritaires qui participent chacune dans leur domaine à la mise en oeuvre du Navire du futur, navire propre, économe, sûr et intelligent : · · · · · Efficacité énergétique, Eco-conception, Sécurité ­ Sûreté, Efficacité des opérations du navire, Compétitivité. À ces thèmes est venu s'ajouter le domaine « structures en mer », principalement lié aux technologies navales applicables aux plateformes offshore et énergies marines renouvelables (EMR). Classification des technologies par leur impact industriel Dans une approche stratégique concernant la recherche et l'innovation technologique, il est classique de classer les thèmes d'étude dans plusieurs catégories suivant leur impact industriel potentiel. En général, les critères utilisés sont : le marché visé et le caractère plus ou moins innovant du sujet traité. Dans le cas présent, compte tenu de l'extrême diversité des sujets identifiés, et afin de faciliter l'élaboration d'une politique raisonnée et optimale en matière d'investissement d'études et de recherches, on a réparti les technologies suivant les catégories suivantes suivant en cela la catégorisation du Boston Consulting Group. · Catégorie 1: amélioration par continuité de technologies existantes. Ce sont les domaines dans lesquels notre industrie possède déjà de sérieux atouts qui nous permettent d'accéder aujourd'hui à de bonnes parts de marché, et qu'il convient de cultiver pour préserver nos emplois à court terme dans le secteur, · Catégorie 2 : exploitation de niches technologiques particulières. Ce sont des sujets, qui, sans ouvrir des marchés considérables, permettent, principalement à des PME, de figurer en bonne place pour certaines applications spécifiques, · Catégorie 3 : exploration de technologies de rupture Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 87 RéférenceS | novembre 2012 2. Programme d'action technologique Une proposition de classification des technologies prioritaires est donnée ci-dessous. Elle est donc le résultat d'une approche croisée (technologie/impact industriel) 2.1 Catégorie 1 : amélioration par continuité de technologies Thèmes Catégorie 1 Efficacité énergétique Propulseurs et appendices, optimisation des architectures de propulsion; Maîtrise de la production et de l'utilisation de l'énergie à bord MASSON Marine CONVERTEAM JEUMONT ELECTRIC ECA ELECTRO-NAVALE SCHNEIDER ELECTRIC ALSTOM AREVA TA BERTIN D2M HUTCHINSON SEGULA ARIAMIS PRINCIPIA BUREAU MAURIC HT2 ARCHITECTE LEBEFAUDE SHIPSTUDIO SAFT NEXANS STX DGA Eco- conception Réduction des nuisances sonores, de l'impact du mouillage, du sillage et des rayonnements électromagnétiques; Traitement des déchets liquides et solides. DCNS STX BERTIN CNIM VEOLIA DGA Nécessaire à la lutte contre les émissions. Création de quelques centaines d'emplois de haut niveau. Maintien du leadership de l'industrie électrique française : enjeu de près de 100 000 emplois Maintien de la compétence de conception des navires donc indépendance nationale : enjeu de quelques dizaines de milliers d'emplois Technologies Acteurs français identifiés Emplois Sécurité ­ sûreté Sécurité des biens et des personnes SAGEM DGA SAGEM BUREAU VERITAS... Thème récurrent pouvant apporter des niches confortables en cas de succès Thèmes de la prochaine révolution sur le fonctionnement de la logistique et de l'évolution des carrières de marins : création potentielle de quelques milliers d'emplois de marins, de logisticiens. Peut par défaut entraîner le détournement des flux marchands des ports français : enjeu plusieurs milliers d'emplois et perte d'activité autour des ports. Efficacité des opérations du navire Monitoring Maintenance adaptative Assistance à distance Compétitivité Méthodes d'ingénierie innovantes Organisation compétitive adaptée à la CN Réalisation concourante Conception en réalité virtuelle Nouvelle technologie de soudage (chantier virtuel, supply chain virtuelle, géolocalisation des pièces, manutention) STX DCNS CLARTE ACB DGA Thème essentiel pour les grands chantiers français : enjeu de quelques milliers d'emplois et à défaut risque de perte d'activité des régions 88 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer 2.2 Catégorie 2 : exploitation de niches technologiques particulières Thèmes Catégorie 2 Efficacité énergétique Propulsion POD Stockage d'énergie CONVERTEAM DCNS MASSON MARINE SAFT BOLLORE CEA DGA Stockage d'énergie, un thème transversal avec des acteurs français impliqués : création de quelques centaines d'emplois Eco-conception Réduction des trainées hydrodynamique et aérodynamique (carènes, superstructures, allègement, revêtements) Matériaux Alimentation par le quai (cold ironing) Industrialisation de la pose de plates-formes reposant sur le fond Sécurité-sûreté Assistance aux opérateurs SAGEM MARINELEC Marine Nationale/DGA Maintien de compétence dans la conduite des navires. Peut aussi avoir une influence sur la formation des équipages ­ enjeu de quelques milliers d'emplois Efficacité des opérations du navire Equipages "au plus juste". Optimisation des routes. Déchargement IXSEA/Sodena, CLS, ACEBI HYDRALIFT-BLM, SAGEM, Cadden, Maxsea, Docsea... Marine Nationale/DGA DCNS STX IRT JULES VERNE CONVERTEAM NG2 DGA Correspond aussi à la compétence globale en terme de conception de navires. La création de sous systèmes peut permettre un export durable : enjeu quelques milliers d'emplois. Opportunité de prendre le leadership sur ce type d'équipement : création de quelques centaines d'emplois Technologies Acteurs français identifiés Emplois Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 89 RéférenceS | novembre 2012 2.3 Catégorie 3 : Technologies de rupture à court terme Thèmes Catégorie 3 Efficacité énergétique Technologies Application du GNL comme carburant Acteurs français identifiés GTT CRYOLOR BUREAU VERITAS IFP EN IFSTTAR GAZOCEAN CEGELEC ­ SOPRANO FMC SFZ SNECMA SNRI STX DGA Eco-conception Concept global de récupération d'énergie BERTIN SEGULA CEGELEC - SOPRANO SHERPA ING. Flotteurs pour éoliennes AXIMA VEOLIA STX Possibilité de création de nouvelles niches technologiques : quelques milliers d'emplois Emplois Création de la chaîne de distribution gaz et donc redistribution des emplois entre pétrole et gaz : quelques dizaines de milliers d'emplois de manière transverse mais que le secteur naval peut accompagner. Confirmation de la position de leader de GDF-SUEZ STX DCNS Sécurité-sûreté e-navigation Navigation intelligente (écopilot et gestion centralisée de la voie d'eau) Autoprotection Sécurité après accident (sauvetage....) Efficacité des opérations du navire Lutte anti-piraterie e-navigation Systèmes permettant de diminuer les risques et la gravité des accidents DCN Dans le cadre de l'ingénierie système, gestion de données à bord et à terre (cloud) au service de la prise de décision, DCN STX THALES Sociétés informatiques Compétitivité Nouvelle technologie d'assemblage : collage Robotisation du soudage Robotisation de la peinture Nouvelle technologie de contrôle non destructif STX DCNS DGA Aide au maintien des capacités de production de navires nécessaire à l'indépendance nationale STX THALES Sociétés informatiques SAGEM ASV Marine Nationale / DGA Préoccupation actuelle des armateurs : technologie créatrice de plusieurs milliers d'emplois. MARINELEC SAGEM CETMEF VNF Technologie indispensable au déploiement de la voie d'eau et à la lutte contre les gaz à effet de serre : concerne quelques milliers d'emplois 90 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer 2.4 Catégorie 4 : Technologies de rupture à long terme Thèmes Catégorie 4 Eco-conception Technologies Acteurs français identifiés Emplois Energie therm ique des mers STX DCNS Efficacité énergétique Sécurité-sûreté Sécurité passive après accident JLMD SYSTEM Nouveau concept dans la sécurité des navires. Création de quelques centaines d'emplois avec possibilité d'export. Efficacité des opérations du navire Concept de convoi fluvial VNF CFT CMR Concept de maintien en service des voies navigables Freycinet. Maintien des métiers de batellerie soit 1500 artisans. Compétitivité Bassin numérique Atelier comm uniquant STX DCNS IRT Jules Verne DGA Maintien des métiers de construction navale : quelques milliers d'emplois en jeu. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 91 RéférenceS | novembre 2012 2.5 Actions d'accompagnement nécessaires à la mise en oeuvre du programme « Navire du Futur » du CORICAN 2010, plus de 40 M pour la construction navale (hors EMR).Or, le besoin de financement collaboratif nécessaire à la mise en oeuvre du programme du CORICAN est compris entre 70 et 105 M entre 2012 et 2020. Une mobilisation de nouveaux financements est donc indispensable. Organisation nationale des compétences et des moyens d'essais La mise en réseau des centres d'expertise et d'essai est impérative compte tenu du cloisonnement excessif constaté. Ce cloisonnement nuit à la réactivité et à l'efficacité globale. Dans de nombreux cas, il existe des « goulots d'étranglement » qui ne permettent pas aux centres de répondre efficacement à la demande des industriels, qui en conséquence sont contraints de s'adresser à des établissements étrangers. Dans le cadre des travaux de concertation et d'optimisation conduits par le CORICAN, les centres de recherche et d'essai du domaine naval ont décidé de mettre en réseau leurs moyens. Cette mise en réseau doit concerner aussi bien les moyens matériels que les compétences. L'objectif est de mettre à disposition de la filière non seulement des installations d'essai, mais aussi un réseau d'experts afin de faciliter aussi bien la préparation que l'évaluation des projets d'innovation. Il est proposé de choisir l'IRT Jules Verne, en cours de constitution, comme point focal de ce réseau. Cette mise en réseau, pouvant conduire à des mises en commun de moyens pour remédier à certains « goulots d'étranglement » évoqués ci-dessus, est nécessaire pour aborder le contexte international, marqué par une concurrence très vive. Une cartographie des centres européens a été dressée, et les principes d'un positionnement stratégique ont été définis : concurrence assumée avec les Néerlandais de MARIN et les pays de l'Europe du Sud, coopération dans le domaine militaire avec le Royaume-Uni, alliance commerciale avec les centres de l'Europe du Nord exploitant certaines niches. Normalisation et réglementation L'arrivée des nouvelles technologies devra être préparée et anticipée par une évolution profonde du référentiel normatif et réglementaire au niveau international et national, faute de quoi les applications pratiques ne pourront pas voir le jour. Il est proposé que la France accentue sa participation à la refonte de ce référentiel, qui doit bien sûr faire l'objet d'un plan concerté au niveau de l'Union européenne. Huit domaines nécessitant des évolutions réglementaires ont été identifiés. Ils feront l'objet de fiches d'action réglementaire et sont résumés ci-après : Propulsion au GNL Navires de Pêche, Navire « intelligent », cycle de vie ­ Démantèlement, Navigation intérieure, énergies marines renouvelables (EMR), Véhicules marins non habités. Mobilisation des financements Les programmes de construction de navires sur le territoire français en 2010 ont mobilisé 400 M en matière de R+D+I (Recherche, Développement, Industrialisation), activité financée à hauteur de 95 %. En effet, dans le domaine naval, les séries sont limitées, et il arrive fréquemment que chaque exemplaire soit personnalisé pour le besoin du client, ce qui veut dire que pour presque tous les navires une nouvelle conception est à inventer... En R&D proprement dite, l'effort global de R&D « public + privé » a représenté en moyenne sur les années 2008 à 92 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Annexes Annexe 1 ­ Lettre de saisine Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 93 RéférenceS | novembre 2012 94 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Annexe 2 ­ Glossaire AMMA AFD AMP ANCRE CCAMLR CDB CIEM CLIC CLIVAR CNML COI COM COMER COREMO CRVOI Analyses Multidisciplinaires de la Mousson Africaine. Agence française de développement Aire marine protégée Alliance nationale de coordination de la recherche pour l'énergie Convention sur la conservation de la faune et de la flore marine de l'Antarctique convention sur la diversité biologique Conseil international pour l'exploration de la mer Climate and cryosphere Climate variability and predictability Conseil national de la mer et des littoraux Commission de l'océan Indien Collectivités d'Outre-mer Comité pour la recherche marine Coral Reef Monitoring Centre de recherche et de veille (sur les maladies émergentes) dans l'océan Indien CYROI DOM-ROM DYNECAR EC2CO EIT Cyclotron Réunion Océan Indien Départements et régions d'Outre-mer Dynamique des écosystèmes Caraïbes Ecosphère continentale et côtière European Institute of innovation and technology (Institut européen d'innovation et e technologie) EMSO EPOCA FEAMP GEWEX FED GDR GIEC GIZC GOPS GMMC European multidisciplinary seafloor observation European Project on OCean Acidification Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche Global energy and water cycle experiment Fonds européen de développement Groupement de recherche Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat Gestion Intégrée des zones côtières Grand Observatoire du Pacifique SUD Groupe mission Mercator Coriolis Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 95 RéférenceS | novembre 2012 IAC IATTC ICCAT (ou CICTA) IEED IGBP ILM IMBER INEE INSU IOTC (ou CTOI) IPBES Institut agronomique néo-calédonien Inter-american tropical tuna commission Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique Instituts d'excellence énergies décarbonées International Geosphere-Biosphere programme Institut Louis Malardé Integrated Marine Biogeochemistry and ecosystem research Institut écologie et environnement Institut National des Sciences de l'Univers Commission des thons de l'Océan indien Plate-forme intergouvernementale science-politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem services). IR LABEX LEFE LOICZ MG4U ORGP OST OSU-R OVPF PAGES PAS PNEC POLMAR PRESICA PTOM REFMAR RESOMAR SOLAS RUP SOMLIT STRATOM TIT Infrastructure de recherche Laboratoire d'excellence Les enveloppes fluides et l'environnement Land-Ocean interactions in the coastal zone Marine Genomics for users Organisations régionales de la gestion de la pêche Observatoire des sciences et techniques Observatoire des sciences de l'univers de Rennes Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise PAst Global changES Association scientifique du Pacifique Programme national environnement côtier Plan « pollution maritime » Pôle de recherche, d'enseignement supérieur et d'innovation calédonien Pays et territoire d'Outre-mer Réseau de références des observations marégraphiques Réseau des stations et observatoires marins Safety of life at sea Régions ultrapériphériques Service d'Observation en Milieu LIToral Stratégies territoriales pour les Outre-mer thème d'intérêt transversal 96 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer UAG UBO UMR UMS FOF UNCLOS Université des Antilles et de la Guyane Université Bretagne Occidentale Unité mixte de recherche unité mixte de service Flotte océanographique française United Nations Convention on the Law Of the Sea (La Convention des Nations unies sur le droit de la mer) UPF WCRP TAFF TGIR WIOMSA ZEE ZEPOLYF Université de Polynésie française World Climate Research programme Terres australes et antarctiques françaises Très grandes infrastructures de recherche Western Indian Ocean Marine Science Association Zone économique Exclusive Zone économique de Polynésie française Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 97 RéférenceS | novembre 2012 98 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Commissariat général au développement durable Direction de la recherche et de l'innovation Tour Voltaire 92 055 La Défense cedex Tél : 01.40.81.21.22 Retrouver cette publication sur le site : http://www.developpement-durable.gouv.fr/developpement-durable Le Programme Mer : état des lieux et enjeux de la recherche et de l'innovation en sciences marines Le Programme Mer dresse un état des lieux de la recherche française sur les environnements marins et littoraux, leurs moyens d'étude et les développements technologiques qui s'y rattachent, et identifie les enjeux de connaissance et de politiques publiques correspondants. Ce document a été rédigé à la demande des ministres chargés de la recherche et chargé de l'écologie par l'Alliance pour l'Environnement (AllEnvi), en liaison étroite avec un groupe de personnalités qualifiées en tant qu'acteurs dans les domaines marins, maritimes et littoraux. Construit autour de quatre piliers thématiques ­ la connaissance du système mer, l'exploitation durable des ressources marines, la gestion de l'espace côtier marin et le programme d'action pour les Outre-mer français ­ ce document aborde également deux axes transversaux dédiés aux grandes infrastructures de recherche et à la technologie et la construction navale. Le Programme Mer constituera ainsi une base de travail pour définir les orientations stratégiques françaises de la recherche en sciences marines au plan national et international. The Marine Program : inventory and challenges of research and innovation in the French marine sciences The Marine Program presents an inventory of French research on marine and coastal environments, their means of study and the technological developments they sustain, and identifies key issues in terms of knowledge and public policy. This document has been written by the Alliance for the Environment (AllEnvi, a group of French research agencies), in close connection with stakeholders involved in the marine and coastal fields. It is built around four themes ­ knowledge of the marine system, sustainable use of marine resources, management of the marine coastal area, and action program for the French overseas territories ­ completed by two transversal axes dedicated to large research infrastructures, and technology and shipbuilding. The Marine Program will thus represent a working basis to define French strategic orientations on a national and international scale. Dépôt légal : novembre 2012 ISSN : 2102-474X (ATTENTION: OPTION es approches génomiques, protéomiques et métabolomiques en biologie marine, est apparue la nécessité de prendre en compte la variabilité de la biodiversité fonctionnelle en réponse à la qualité de l'habitat, et de son impact rétroactif sur l'efficacité de la pompe biologique ou les transferts trophiques. Mise à l'eau d'une rosette bathysonde destinée au prélèvement d'eau de mer à différentes profondeurs. ©Ifremer/Olivier Dugornay Ce champ, très innovant, est à construire et recoupe l'ensemble des thématiques citées ci-dessus. La dynamique des upwellings tropicaux de façade ouest est un modèle privilégié pour avancer sur ces questions transversales, 30 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer car certains d'entre eux supportent les écosystèmes marins les plus productifs au monde tandis que d'autres restent pauvres. La compréhension des sources de cette variabilité et des variations attendue de leur fonctionnement sous l'effet du changement global est déterminante pour l'économie mondiale. 1.4 La diversité marine des gènes aux espèces Dans toute sa diversité, la vie marine est extraordinairement variée et elle contribue à des équilibres complexes. Pour autant, elle reste assez mal connue et ses futurs possibles le sont encore moins, tant pour qui elle-même lui sont que pour associés les services écosystémiques (régulation, pollutions, destruction ou fractionnement des habitats, déplacement d'espèces...) est essentiel. Il s'agit, pour le domaine marin, d'étendre nos connaissances en écophysiologie, phénologie, traits d'histoire de vie, plasticité phénotypique... de manière à aborder les questions d'adaptation, d'acclimatation, de flexibilité des espèces marines confrontées à des changements de différents ordres, y compris climatiques. Ceci suppose le développement d'approches expérimentales (et donc le déploiement de dispositifs in situ et ex-situ) et de modèles fonctionnels, à l'échelle des individus (métabolisme) comme à celle des communautés. À grande échelle spatiale, comment est structurée la biodiversité marine et comment cette structuration pourrait-elle être amenée à évoluer ? Répondre à ces questions suppose d'une part de bien cerner la dynamique des communautés marines et, d'autre part, d'être capable de développer des approches macroécologiques en faisant appel à des modèles et à l'élaboration de scénarios. Afin de contraindre les distributions actuelles pour connaître le potentiel d'installation (de migration) des espèces, tout comme apprécier les risques associés à des fragmentations d'aires ou de surexploitations locales, il faudra s'appuyer non seulement sur les modèles de niche disponibles, mais aussi être capable de les faire évoluer pour prendre en compte l'adaptabilité des organismes. Sur le plan de la biologie fondamentale, les organismes marins offrent des modèles biologiques essentiels (éponges, oursins, ascidies, amphioxus, roussette, etc.) pour renseigner de grandes questions telles que la régulation de la division cellulaire, la mise en place et l'évolution des patrons de développement, les bases de la réaction immunitaire, ou l'origine et le développement du système nerveux. Des modèles originaux récemment développés chez les macro- et micro-algues appartenant à plusieurs grands clades indépendants ont démontré leur intérêt. Ces recherches permettent d'explorer de façon innovante l'évolution des voies métaboliques, ou des mécanismes ayant permis l'acquisition de la multicellularité, à travers des phénomènes de symbioses ou de transfert latéral de gènes entre procaryotes et eucaryotes. La biotechnologie marine, ou biotechnologie bleue, qui s'appuie sur de telles avancées fondamentales représente un domaine en plein essor. approvisionnement...), alors même qu'ils prendront une place de plus en plus importante dans les années et décennies qui viennent. On peut estimer à 70 % à 80 % les espèces marines qui restent à découvrir: deux millions d'espèces pourraient peupler les océans. La généralisation amène la des techniques de très d'identification génétique découverte nombreuses espèces, y compris des espèces cryptiques dans des groupes pourtant supposés bien connus. Plusieurs « boîtes noires » sont d'immenses réservoirs de biodiversité (nématodes, radiolaires, bactéries, virus... ou encore symbiotes) dont l'exploration bénéficie des possibilités offertes par la métagénomique. Au-delà de leur inventaire, la compréhension de leurs fonctions est un enjeu majeur pour nourrir, non seulement notre connaissance du changement global, mais aussi une exploitation durable des ressources océaniques (cf. pilier 2). Cette étape permet aussi d'apprécier les relations de parenté entre espèces, leur dynamique évolutive et par là d'aborder les questions de phylogéographie et d'histoire de la biodiversité marine qui étayent notre compréhension de l'océan. Crevettes des profondeurs observées sur le site hydrothermal Rainbow lors d'une campagne océanographique menée par l'Ifremer au sud des Açores. ©Ifremer-Victor/Campagne Momareto 1.5 Les services écosystémiques Les services écosystémiques correspondent aux bénéfices que les écosystèmes fournissent à l'humanité. Ils sont classiquement rangés en quatre catégories principales (Millenium Ecosystem Comprendre la manière dont les organismes sont capables de faire face aux changements globaux (réchauffement climatique, Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 31 RéférenceS | novembre 2012 Assessment). Les services de soutien permettent à la vie de se maintenir sur Terre (e.g. grands cycles biogéochimiques, production primaire,...) et ils sont à la base des trois autres types de services: ceux de régulation (e.g. celle du climat ou des conditions d'acidité, de toxicité de l'environnement, etc..), d'approvisionnement (e.g. nourriture ou énergie) et les services culturels (e.g. zones récréatives). Les écosystèmes marins contribuent largement à ces quatre catégories. Brève typologie des services écosystémiques en domaine marin Services de soutien L'océan est directement impliqué dans divers grands cycles comme ceux du carbone, de l'oxygène, de l'eau, de l'azote, du phosphore... Il faut souligner que ce rôle s'apprécie aussi bien en terme de flux que de réservoir (e.g. le système océanique contient près de 50 fois plus de carbone que le réservoir atmosphérique). Ce qui est généralement mis en avant est que l'océan est le siège d'une part très importante de la pompe à carbone et de la production d'oxygène; on estime qu'il compte pour au moins 50% de cette fonction. L'autre facette de cette captation du carbone atmosphérique est également la production primaire de surface, qui soutient la plus grande part des réseaux trophiques marins et notamment la production de ressources exploitées par la pêche. L'océan est également le lieu de recyclage d'éléments chimiques essentiels à cette production de biomasse (azote, phosphore, silice, fer). Enfin les zones les plus productives, telles que les herbiers, les mangroves ou les récifs coralliens peuvent assurer d'autres fonctions en associant à cette ressource la structuration spatiale des habitats. Ces habitats sont des nurseries pour de nombreuses espèces animales qui sont parties prenantes comme support de services d'approvisionnement (pêches côtières) ou récréatifs (pêche touristique, plongée). Services de régulation Le rôle de l'océan dans la régulation climatique de la planète est largement attesté, notamment via les échanges océan-atmosphère (on retrouve ici son rôle de pompe à carbone). Via la production de sulfure de diméthyle (DMS), le phytoplancton contrôle aussi, au moins en partie, la formation des nuages qui couvrent l'océan et donc indirectement la température terrestre. Les zones humides côtières sont des remparts contre les inondations liées aux tempêtes ou tsunamis; elles participent au filtrage des eaux tant pour leur charge particulaire que pour les pollutions organiques. Les systèmes océaniques jouent également un rôle de tampon des modifications chimiques induites par les activités humaines telles que l'augmentation du CO2 atmosphérique, même si l'acidification des eaux de surface est déjà mesurable, ou les excès de fertilisants transportés vers la mer et les phénomènes d'anoxie qu'ils induisent. La transformation de composés organiques dans les écosystèmes marins atténue également l'accumulation de contaminants dans les chaînes trophiques, ou au contraire conduit à leur piégeage et leur enfouissement dans les sédiments comme dans le cas des métaux lourds. Services d'approvisionnement Ce sont les plus classiques. Ils correspondent notamment aux pêches et à l'aquaculture (plus d'un milliard d'hommes sur Terre dépendent des produits de la mer comme source de protéines). Mais la mer ne produit pas que des aliments. Ces dernières années, la diminution de la pluviosité dans des régions à forte densité urbaine a conduit à "extraire" l'eau douce de l'océan. Le développement des énergies marines renouvelables n'en est qu'aux prémisses: éolien en mer, hydrolien, énergie thermique marine, énergie de la houle... mais elles sont appelées à se développer. De nombreuses molécules d'intérêt sont extraites d'organismes marins qui, moins connus que les terrestres, sont porteurs d'innovations importantes (voir pilier 2). Services culturels Le tourisme des bords de mer est un secteur en pleine expansion depuis plus de 50 ans et il joue un rôle économique majeur dans de nombreux pays, notamment insulaires. Associés à cette demande touristique, on retrouve la pêche récréative, la plongée (e.g. sur les récifs coralliens), le nautisme... Certaines espèces sont devenues emblématiques des bénéfices spirituels ou esthétiques liés au domaine marin: les dauphins, tortues, ours polaires, baleines, coraux... Par ailleurs, dans de nombreuses populations côtières, des activités culturelles traditionnelles sont étroitement liées à la mer (e.g. l'oursinade en Provence). La `science participative', contribution citoyenne au suivi et l'étude de la biodiversité marine commence aussi à se développer à l'instar des réseaux formés autour de la biodiversité terrestre. La nécessité de fonder notre appréciation des services écosystémiques marins sur des bases scientifiques qui touchent des disciplines très diverses (géosciences, océanographie, sciences de l'environnement, biologie, écologie, chimie, sociologie, économie...) est avérée. Une récente revue des publications consacrées aux services écosystémiques (terrestres et marins) a montré que ces recherches sont surtout conduites aux États-Unis et en Chine ; 50 % des études viennent de 6 pays seulement dont la France n'est pas. Nos connaissances actuelles sont loin d'être suffisantes pour décider de manière argumentée d'actions à conduire ou de comportements à tenir qui permettent la persistance de ces services sur le long terme. Il apparaît important d'être en 32 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer capacité de traiter simultanément de plusieurs services interdisciplinaires. Seule cette émergence permettra de répondre à la demande sociale et d'ouvrir ainsi de nouvelles pistes de développement économique (l'aquaculture et les biotechnologies bleues en sont des exemples). 1.6 Les interfaces et milieux remarquables. Le système « Mer » n'est qu'une partie du système « Terre » avec lequel il échange par plusieurs interfaces : par la surface (atmosphère, glace), par la côte et les milieux particuliers qui lui sont associés (estuaires, lagunes, lagons, mangroves, etc.) et par le plancher sous-marin, continental et océanique qui possède lui aussi sa diversité (petits fonds, plateaux, pentes, sédiments, dorsales, abysses, monts sous-marins, etc.). Ces milieux de transition sont des lieux de transfert d'énergie, de matière, de biomasse et de gènes. Leur spécificité se traduit à la fois dans les processus qui peuvent s'y produire, et dans les écosystèmes qu'ils abritent, ce qui leur confère une vulnérabilité accrue. Le domaine côtier, où la pression anthropique est actuellement la plus forte, en est un exemple singulier, qui sera détaillé dans le pilier 3. Au sein du système « Mer », l'étude des interfaces entre grands domaines océaniques (côtier/hauturier, pélagique/benthique) constitue également des points importants pour la compréhension des écosystèmes marins. Tant les zones profondes de l'océan que les domaines polaires et insulaires tropicaux sont encore largement inconnus et sousexplorés du fait de leur éloignement et de leur accès difficile. Des questions particulières se posent dès lors que l'on s'adresse à des milieux extrêmes qui offrent l'opportunité d'étudier des mécanismes adaptatifs uniques et donc des voies physiologiques ou métaboliques originales. Les recherches sur les adaptations physiologiques aux conditions extrêmes des régions polaires ou des zones profondes sont d'un intérêt exceptionnel pour la biologie. Ainsi, les poissons et bactéries offrent une diversité de mécanismes enzymatiques à basse température qui enrichissent notre connaissance fondamentale et débouchent sur des applications biotechnologiques. Ainsi, les faunes associées aux évents hydrothermaux se développent à des extrêmes physiques et chimiques (températures très chaudes, salinité, pH, anoxie, sulfures...) Ces adaptations spécifiques reposent sur des systèmes de régulations géniques et métaboliques, voire sur des molécules originales qui pourraient être mieux exploitées (protéines antigel, enzymes thermostables...). écosystémiques et de leurs interactions et donc de questions complexes. Ce besoin de connaissance est d'autant plus nécessaire lorsque des services entrent en concurrence, voire en conflit (e.g. exploitation de ressources énergétiques versus zones récréatives; pêche versus nautisme; implantation d'infrastructure versus protection du littoral). Le risque est que le déficit de connaissances fondamentales et d'interdisciplinarité conduise à des simplifications outrancières et donc à des expertises et des prises de décision erronées. Le manque de recherches fondamentales sur la biodiversité, le fonctionnement des écosystèmes, l'économie de l'environnement... et d'interdisciplinarité véritable au cours des dernières décennies fait que la demande sociale a progressé plus vite que la connaissance scientifique. Nous nous trouvons aujourd'hui désarmés devant les interrogations de porteurs d'enjeux sur des aspects de mitigation, de « valeur » des écosystèmes, d'études d'impact, de restauration des environnements ou des stocks... La science peine à fournir des réponses robustes et rapides sans recherches supplémentaires. Il faut se mettre en position de compenser ce retard sous peine que certains prennent argument de cette absence ­ ou lenteur ­ de réponse pour se libérer de toute contrainte, agissant alors de manière intempestive sans souci des conséquences. En France peu d'équipes travaillent explicitement sur les services écosystémiques. Deux pistes doivent être suivies en priorité pour irriguer deux questionnements principaux, car l'enjeu est de pouvoir tisser un lien entre le fonctionnement des écosystèmes et les services rendus. La tâche est sans doute encore plus difficile en domaine marin. 1) Comment les écosystèmes marins fonctionnent-ils pour fournir des services ? La réponse passe par des dispositifs d'observation, de suivi à long terme et d'expérimentation (stations d'écologie expérimentale, mésocosmes, aquatrons, suivis en milieu naturel) et à une nécessaire convergence disciplinaire au sein des sciences de l'écologie et de l'environnement pour appréhender ces questions. 2) Quels sont le rôle et la valeur de ces services pour les sociétés ? La réponse passe par l'émergence d'une véritable interdisciplinarité qui peut être soutenue par des initiatives de programmation volontaristes et ciblées. Certaines sont en train de voir le jour (http://www.developpement-durable.gouv.fr), par exemple sur les questions de mitigation. On doit avoir la volonté de faire émerger un nouveau champ de recherches Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 33 RéférenceS | novembre 2012 déterminent les conditions de l'enfouissement de la matière organique, donc du piégeage à long terme du carbone sous cette forme. La compréhension de ces processus est déterminante pour l'amélioration des modèles climatiques généraux. En domaine insulaire tropical, où la biodiversité est toujours plus élevée qu'ailleurs, le réseau complexe des liens interspécifiques rend plus difficile toute prévision des effets du changement global sur les écosystèmes. Avec la présence d'espèces endémiques, d'écosystèmes côtiers coralliens, de Fumeurs noirs du site hydrothermal Ashadze (le plus profond du monde à 4200 mètres) observés lors de la campagne océanographique Serpentine menée par l'Ifremer sur la dorsale médio-atlantique. ©Ifremer-Victor/Campagne Serpentine mangroves, et de zones de basse altitude, ce domaine cumule les vulnérabilités au changement global. On observe déjà presque partout les effets de la pression anthropique, de l'augmentation de température, de l'acidification des eaux et de l'élévation du niveau marin. Maintenant, devant la multiplication des événements extrêmes (cyclones, épisodes de haute température, sécheresses prolongées ou pluies diluviennes...), il importe d'identifier les sources de résilience pour assurer le maintien de ces îles tropicales. À côté, comme un intermédiaire entre ces îles et le domaine profond, les monts sous marins océaniques sont des milieux originaux très mal connus, qui apparaissent essentiellement comme des éléments dynamique l'avenir. En domaine polaire, le changement climatique se manifeste de façon particulièrement rapide. Des perturbations importantes affectent l'ensemble des « équilibres », avec des rétroactions sur le climat global via la circulation océanique et atmosphérique et le niveau moyen des mers. Quel est l'impact du réchauffement de l'océan sur les grands glaciers de l'Antarctique et du Groenland ? Doit-on s'attendre à une augmentation du vêlage ou de la fonte à l'interface glaceocéan ? Risquons-nous de passer des points de basculement au-delà desquels la calotte deviendra instable et sera progressivement, mais irrévocablement, conduite à l'effondrement ? Quels impacts auront ce nouvel apport d'eau douce et le changement de géométrie côtière sur la circulation océanique et la formation d'eau profonde ? Actuellement les modèles sont incapables de représenter le déclin rapide de la banquise arctique, ni l'impact de la fonte des calottes sur les océans polaires qui sont pourtant de première importance aussi bien pour le fonctionnement de l'océan que pour la biodiversité. À terme, la diminution de la cryosphère marine et terrestre notamment en Arctique est susceptible de conduire le structurants du milieu pélagique. les lier Quelle aux est îles réellement leur influence ? Comment agissent-ils ? À quelle obéissent-ils ? Comment avoisinantes ? Voilà autant de questions importantes à traiter à En domaine profond, à l'heure où les pressions anthropiques s'y exercent de manière de plus en plus prégnante (pêcheries en eaux profondes, exploitations pétrolières et minières, stockage de déchets...), les connaissances fondamentales restent très lacunaires. On perçoit que les écosystèmes profonds sont beaucoup plus divers qu'on ne le pensait (marge, canyons, plaines, dorsales sont autant de contextes qui participent à cette diversité) et que leur fonctionnement ne répond pas aux pas de temps observés dans d'autres secteurs de l'océan. Ils peuvent être à la fois beaucoup plus stables (plaines abyssales par exemple) et beaucoup plus instables (caractère éphémère et imprévisible de l'activité hydrothermale). La science n'est pas encore en situation de répondre sur la vulnérabilité de ces systèmes ou sur leur capacité de résilience et ainsi de contribuer à leur préservation. Même les environnements abyssaux "ordinaires" restent largement inconnus. Plus loin encore, la zone hadale, au-delà des 5000m, et, dans l'épaisseur du plancher océanique, la biosphère dite "profonde" représente désormais une nouvelle frontière des connaissances. Les circulations hydrothermales profondes donnent lieu à des contrastes physico-chimiques importants et à une multitude de réactions chimiques près de l'interface eau-plancher océanique, sources d'éléments pour l'océan, de minéraux hydrothermaux, mais aussi d'énergie pour les microorganismes chemosynthétiques. Les fluides hydrothermaux, riches en hydrogène et méthane, doivent être explorés en tant que ressource énergétique potentielle pour nos sociétés. Il est nécessaire de déterminer les liens entre les différents flux d'énergie: tectonique, sédiment, les convection océanique qui de sédimentation, précoce amène l'activité l'oxygène au fond via la circulation, etc. À l'interface eauphénomènes et la macrobenthique diagenèse bactérienne 34 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer système climatique vers des points de non-retour. En raison des conditions très particulières qui y règnent, les environnements marins polaires abritent une biodiversité caractérisée par un taux d'endémisme élevé et, notamment dans les mers australes, par une forte originalité de leurs traits d'histoire de vie. Par quel cheminement évolutif la vie s'est-elle adaptée à des eaux très froides, éventuellement sous une couverture de glace permanente (le plateau continental antarctique abrite de nombreux « bouquets » d'espèces qui contribuent à l'endémisme austral) ? En contrepoint comment les organismes pourraient-ils faire face à un réchauffement ? Ces questions sont centrales et la comparaison des situations du Nord et du Sud permettra de les éclairer. En domaine insulaire tropical, où la biodiversité est toujours plus élevée qu'ailleurs, le réseau complexe des liens interspécifiques rend plus difficile toute prévision des effets du changement global sur les écosystèmes. Avec la présence d'espèces endémiques, d'écosystèmes côtiers coralliens, de mangroves, et de zones de basse altitude, ce domaine cumule les vulnérabilités au changement global. On observe déjà presque partout les effets de la pression anthropique, de l'augmentation de température, de l'acidification des eaux et de l'élévation du niveau marin. Maintenant, devant la multiplication des évènements extrêmes (cyclones, épisodes de haute température, sécheresses prolongées ou pluies diluviennes ..), il importe d'identifier les sources de résilience pour assurer le maintien de ces îles tropicales. À côté, comme un intermédiaire entre ces îles et le domaine profond, les monts sous marins océaniques sont des milieux originaux très mal connus, qui apparaissent essentiellement comme des éléments structurants du milieu pélagique. Quelle est réellement leur influence ? Comment agissent-ils ? À quelle dynamique obéissent-ils ? Comment les lier aux îles avoisinantes ? Voilà autant de questions importantes à traiter à l'avenir. Une priorité française de recherche sur l'Arctique a commencé à se structurer depuis environ 2 ans, qui implique les principaux organismes de recherche et agences concernés (CNRS, IFREMER, IPEV,...) en s'appuyant sur les laboratoires et centres de métropole et sur le laboratoire franco-canadien TAKUVIK (http://www.takuvik.ulaval.ca/). Il faut également citer ici la contribution de la France, encore limitée, à la base internationale de Ny-Alesund au Spitsberg, particulièrement adaptée à une approche des processus côtiers liés au changement climatique en Arctique. La France est encore peu mobilisée sur cette priorité en comparaison d'autres pays (Canada, Norvège, Allemagne, ...), qui disposent et investissent dans des moyens lourds d'accès logistique (brise-glace notamment), mais sa présence et son savoir-faire important dans les zones polaires antarctiques sont des atouts à valoriser dans le cadre de l'Arctique. Cette priorité arctique se fonde sur les questions scientifiques résumées ci-dessous dans leurs très grandes lignes. En comparaison du reste de la planète, l'Arctique est le siège de changements climatiques particulièrement marqués qui ont été clairement mis en évidence sur les dernières décennies et sont encore à l'oeuvre actuellement. Ces changements se manifestent de façon aiguë dans la diminution progressive de la banquise estivale qui, selon les prévisions des modèles de climat, devrait conduire à sa disparition quasi totale à une échéance de quelques décennies, voire moins si l'on anticipe des erreurs de prévision inhérente à ces modèles (Rapport AR5 du GIEC, 2007). La diminution des glaces ainsi que le recul du pergélisol sont susceptibles de conduire le système climatique arctique vers des « points de non-retour » qui pourraient avoir des impacts profonds sur le climat global au travers de rétroactions physiques et biogéochimiques mettant en jeu tous les compartiments du système climatique. En zone côtière arctique, le retrait de la couverture de glace de mer et les forts changements des apports terrigènes liés à la remobilisation des stocks sédimentaires, modifient drastiquement le fonctionnement de l'écosystème. L'ampleur et les conséquences de tels basculements restent actuellement profondément méconnues. Il s'agit d'étudier un système évoluant rapidement sous la pression anthropique, mais dont on connait mal l'état de référence initial et les liens très forts avec le climat global. L'approche ne peut donc être exclusivement « régionale », mais doit néanmoins être très intégrée dans la mesure où coexistent un milieu océanique contraint par les terres (notamment par le cycle hydrologique continental) et des surfaces continentales pénétrant dans l'océan au travers de larges marges qui sont particulièrement sensibles aux changements océaniques (instabilité des hydrates de méthane en conditions de réchauffement, dégel du pergélisol, élévation du niveau moyen des mers). En Arctique, une démarche structurée d'observation doit être rapidement initiée. 1.7 Les moyens de l'approche intégrée : observation ­ expérimentation ­ simulation. De multiples méthodes d'observation et d'expérimentation, fixes ou dynamiques (hydroplaneurs, stations de fond, instruments embarqués, flotteurs ou flotteurs-profileurs, caméras, télédétection spatiale, suivi assuré par des intervenants en immersion, etc.) permettent d'observer l'océan d'aujourd'hui. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 35 RéférenceS | novembre 2012 Mis en réseaux et assurés d'une pérennité (>10 ans), ces dispositifs, mis en oeuvre notamment par l'Ifremer, l'INSU, l'IRD et le SHOM, permettent de répondre à des questions scientifiques et d'alimenter la modélisation de processus complexes. Ils permettent d'enregistrer et de distinguer les impacts liés aux changements globaux et locaux, ce qui est l'un des objectifs majeurs de ces organismes au travers de services d'observation (ORE, SO notamment), souvent intégrés dans des réseaux internationaux (voir ci-dessous le chapitre dévolu aux infrastructures). Certains de ces dispositifs promeuvent aussi des acquisitions haute fréquence (de quelques heures à quelques minutes) afin de pouvoir saisir les effets d'événements extrêmes de courte durée (cyclones, tempêtes, crues,...). Enfin, des acquisitions en temps réel peuvent être réalisées pour certains paramètres à des fins de modélisation, prévision. Les réseaux de surveillance, conçus pour identifier des alertes, peuvent également être exploités pour des questions de recherche, lorsque le continuum recherche-expertise a été intégré dans leur conception. L'IRD est fortement impliqué dans différents dispositifs des pays de sud (étrangers et territoires des l'outre-mer français), opérés en partenariat avec les organismes nationaux (INSU, INEE, Ifremer, etc.) et étrangers (par exemple, réseau PIRATA associant le Brésil, la France et les USA). L'institut INEE a développé deux types d'outils spécifiquement adaptés aux recherches sur l'environnement et les anthroposystèmes: les Zones Ateliers (ZA) et les Observatoires Homme-Milieux (OHM). Une dizaine de zones-ateliers sont en place dont deux concernent en milieu marin (Antarctique et mer d'Iroise). Actuellement touristiques un projet d'OHM concerne sur le les littoral plages méditerranéen qui a été affecté par les implantations lourdes, notamment languedociennes. Pour les périodes plus anciennes (dernier million d'années), l'étude de l'enregistrement des conditions océaniques dans les sédiments marins (carottes sédimentaires) et des conditions atmosphériques dans les glaces, sont les principales voies d'approche de la variabilité naturelle de l'océan et du climat. La connaissance de ces fluctuations sur le temps long permet d'établir la ligne de base des tendances naturelles, référence indispensable sur laquelle greffer les incidences anthropiques. Pour des périodes encore plus anciennes du passé géologique de la planète, où géographie et climat étaient drastiquement différents, c'est l'ensemble du corpus disciplinaire des géosciences qui contribue à reconstituer la configuration et les régimes de fonctionnement des paléo-océans, y compris pour leur contenu paléobiologique. L'alliance AllEnvi a conduit un important travail d'évaluation, d'organisation et de mise en cohérence des dispositifs d'observation et d'expérimentation, dans le cadre des appels à projets SOERE 2010 et 2011, conduisant à la l'émergence ou à la consolidation de différents SOERE portant sur les domaines climatique, marin, littoral, de la biodiversité ou aux interfaces (CTDO2, ECOSCOPE, SONEL, TROPIQS, Trait de côte) en complément des TGIR (ICOS-IAGOS...), grands programmes (EMSO...) et infrastructures de recherche d'intérêt national (GIS GOPS, SA MERCATOR Océan, autres) préexistants. Les bases de données issues de ces différents types de réseaux font partie intégrante du dispositif. La mutualisation des efforts d'observation et de gestion des systèmes d'information est un enjeu important de la communauté scientifique. Des réflexions sont en cours entre les différents organismes (CNRS, Ifremer, CNES, IRD, SHOM, etc.) pour accroître la visibilité de ces bases, leur qualité et leur interopérabilité. Dans tous les domaines disciplinaires, la compréhension du système « Mer » repose pour beaucoup sur une simulation intégrée des processus à différentes échelles. Décrire, comprendre et analyser les fluctuations aux différentes échelles spatio-temporelles requiert un socle méthodologique solide et partagé permettant la modélisation, l'assimilation de données, la quantification des incertitudes et l'analyse des observations et simulations. Étant donné la complexification des méthodes et leur généralisation, il est primordial d'encourager le développement d'outils communautaires. Une stratégie nationale en modélisation existe depuis plus de 10 ans pour l'océan hauturier. Elle a conduit à un ensemble de codes pour la simulation de la physique et la biogéochimie marine, ainsi que les banquises. Ces codes sont rassemblés en France dans le système NEMO, outil de base de la modélisation opérationnelle réalisée par la société Mercator Océan (à laquelle participent plusieurs organismes de la communauté scientifique dont le CNRS, Ifremer, IRD, Météo-France et le SHOM), mais aussi outil de base, au niveau de la recherche, de la modélisation couplée du climat (outil européen). Les simulations d'échelle régionale sont effectuées avec d'autres modèles, et une réflexion est en cours pour faire converger les efforts, considérant que les différences entre catégories de modèles sont de plus en plus ténues. Pour représenter fidèlement les processus associés aux tourbillons, un maillage de fine résolution devient nécessaire dans des zones clef de l'océan (domaine côtier, zones de remontée d'eau froide et riche des bassins tropicaux, zones polaires). L'un des enjeux est de promouvoir des raffinements de maillage par emboîtement 36 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer de modèles, afin de permettre des simulations climatiques longues. Cette approche est également développée pour coupler modélisation côtière et hauturière. Dans les prochaines années, l'amélioration des modèles d'océan physique devrait permettre de représenter une grande partie du domaine côtier et la dynamique tourbillonnaire de l'océan avec un même modèle, grâce aux performances des moyens de calcul et à une connaissance fine et suivie des caractéristiques hydrographiques (bathymétrie, sédiments) du domaine côtier. Pour ce qui concerne le climat, la réduction des biais des modèles couplés est une priorité majeure, ainsi que l'évaluation des capacités de prévision à l'échelle décennale. suivants : · les observations in situ et spatiales essentielles pour le suivi de l'océan hauturier et côtier, physique et biogéochimique : collecte, traitement et distribution ; · la prochaine génération des outils de modélisation et méthodes d'assimilation de données pour une approche intégrée en océanographie physique et biogéochimique hauturière et côtière, · le couplage entre les systèmes océaniques hauturiers et côtiers, l'atmosphère et les apports continentaux. Cet exercice s'appuiera notamment sur une analyse de En ce qui concerne le volet « océanographie » de l'approche développée dans cette section du document, l'océanographie opérationnelle représente un axe d'évolution majeure de l'océanographie au cours des 15 dernières années. Elle fait désormais partie de la stratégie des principaux instituts océanographiques en Europe et dans le monde. La France a joué un rôle leader déterminant dans cette évolution, en établissant un lien bilatéral fructueux entre les recherches menées dans les laboratoires et la mise en oeuvre de systèmes opérationnels d'analyse et de prévision océanique. Les progrès réalisés par l'océanographie opérationnelle depuis 15 ans permettent aujourd'hui de revisiter le lien entre la recherche dite « amont » et les structures opérationnelles en place, de réaffirmer l'importance de ce lien dans un contexte fortement évolutif, et d'apporter des réponses actualisées aux questions suivantes : l'évolution prévisible des moyens de calcul, des ressources disponibles et des programmes internationaux qui concourent aux mêmes objectifs. En ce qui concerne la biodiversité, des efforts importants de modélisation ont été initiés, notamment pour ce qui touche aux ressources halieutiques, mais ils demeurent encore parcellaires. Il reste à renforcer et fédérer la recherche sur la modélisation et la scénarisation des dynamiques de la biodiversité ; en effet, la pertinence et la crédibilité de la recherche en biodiversité seront largement évaluées en fonction de la manière dont elle saura répondre aux attentes des décideurs de pouvoir disposer de scénarios sur sa dynamique future, à différentes échelles, intégrant la notion d'incertitude. Ceci requiert de relever les défis de la modélisation des systèmes complexes. · Quelles sont les priorités de recherche qui permettront d'enrichir la capacité de réponse de l'océanographie opérationnelle à la demande des utilisateurs ? 2.Analyse stratégique du positionnement national 2.1 Forces et faiblesses · Quels sont les chantiers majeurs à développer dans les prochaines années qui pourront bénéficier d'une synergie forte entre communautés scientifique et opérationnelle ? La France au sein des Programmes internationaux L'océan global constitue une priorité de plusieurs programmes internationaux. La communauté française y est très bien positionnée qu'il s'agisse des cycles biogéochimiques et de leurs liens avec l'atmosphère (IMBER, SOLAS, GEOTRACES...), de l'interface côtière (LOICZ), du climat (Programme Mondial de Recherche sur le Climat [WCRP] et ses principaux projets [CLIVAR, GEWEX, CLIC]), de la paléoclimatologie (IGBP-PAGES [International Geosphere-Biosphere Programme ­ Past Global Changes]), du domaine profond (EMSO), de la biologie ­ diversité génétique, interactions chimiques, processus évolutifs ­ dans le cadre d'EMBRC. Dans ce contexte, la reconnaissance dont bénéficie la · Comment l'océanographie opérationnelle peut-elle contribuer à la valorisation des travaux de recherche en océanographie ? · Quelles sont les attentes de la communauté scientifique visà-vis de l'océanographie opérationnelle au cours des 5 à 10 prochaines années ? Un exercice de prospective scientifique nationale démarrera en 2012 pour dégager une vision commune des enjeux et objectifs de rechercher prioritaires pour la communauté ainsi qu'une stratégie de développement et de mise en oeuvre adaptée. Les axes de la réflexion porteront notamment sur les sujets communauté française, notamment en biogéochimie, tient en partie à sa capacité à monter et soutenir des campagnes Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 37 RéférenceS | novembre 2012 océanographiques de grande envergure (programme infrastructures expérimentales pour l'écologie marine sont, quant à elles, très clairement déficientes en France, laissant la communauté hors du jeu international ; seul un engagement conséquent place. Le succès du Labex MER constitue une opportunité nationale importante, à articuler avec les autres acteurs majeurs de l'océanographie nationale : UPMC et ses stations marines, le réseau national des stations marines RESOMAR piloté par le CNRS, l'initiative Axe Mer Ouest (AMO) impliquant le grand ouest, le pôle marseillais, divers Labex impliquant des sciences de la mer (CORAIL, COTE...)... Enfin, la dizaine d'universités françaises qui contribuent à une part essentielle de la recherche marine française, et qui proposent une offre de formation « Mer » riche et diversifiée (master et doctorat) devront à l'avenir s'organiser et proposer une visibilité internationale de leurs actions. La cohésion nationale que le programme MER doit induire sur la recherche concernant le système mer, n'est qu'un objectif partiel. Cette action doit aussi permettre de porter une voix légitimée de la communauté nationale à l'international, principalement dans le cadre de la construction de l'Initiative de Programmation Conjointe (IPC) Océans. L'initiative européenne, dont l'objectif est de fédérer et soutenir les efforts nationaux afin de produire la connaissance scientifique à même de développer la stratégie marine et de mettre en place la directive stratégique, n'aboutira que si elle peut se fonder sur des états organisés autour de « programmes » nationaux. La formalisation de l'initiative de programmation conjointe européenne sur les océans constitue également une opportunité importante de structuration de la communauté, notamment par la constitution d'un groupe miroir actif. Une partie de sa reconnaissance tient à la capacité française à mobiliser des campagnes océanographiques significatives. Conforter ce leadership nécessite donc une capacité d'opérations à la mer maintenue, voire amplifiée (cf. chapitre infrastructures). L'opportunité Méditerranéenne. Berceau historique de nombreuses civilisations, la Méditerranée est une région d'intérêt géostratégique majeur dont les enjeux environnementaux, politiques et sociétaux sont considérables. Pourtant, cette région reste très vulnérable et son habitabilité future risque d'être compromise. En effet, risques sismiques et volcaniques, pollutions de l'air, de la mer, des eaux continentales et des sols, événements hydrométéorologiques ou éoliens intenses, sécheresse, feux, pénurie d'eau... sont autant de menaces qui pèsent sur la biodiversité des et structuré, territorialement et institutionnellement, permettrait à la France de reprendre GEOTRACES par exemple). Sur le sujet de l'acidification des océans, la France a occupé un rôle leader dans le projet européen EPOCA (European Project on OCean Acidification). Ce projet a été lancé en mai 2008 avec l'objectif d'étudier les conséquences biologiques, écologiques, biogéochimiques et sociales de l'acidification des océans. Il réunit plus de 100 chercheurs, de 31 institutions issues d'une dizaine de pays européens. La structuration nationale La communauté océanographique française est déjà assez structurée, notamment du fait de l'existence de programmes nationaux. On peut notamment citer les actions thématiques du CNRS, auxquelles contribuent de nombreux organismes : à l'INSU : EC2CO (dont le PNEC), LEFE (dont CYBER, IMAGO, GMMC), SYSTER, ALEAS & RISQUES, MARGES... ; à l'INEE les programmes sur les Îles éparses ; régionalement les LABEX MER, CORAIL, COTE... D'autre part, l'observation et la surveillance, qui nécessitent des moyens importants et pérennes, amènent progressivement les universités et les organismes nationaux à se concerter, voire à mutualiser leurs efforts (e.g. SOMLIT, CTDO2, ECOSCOPE, les réseaux de surveillance de l'Ifremer, GIS-GOPS, etc.). On peut également citer le réseau opérationnel REFMAR coordonné par le SHOM, référent national pour le niveau de la mer sur l'ensemble des zones sous juridiction française. Néanmoins, il n'existe pas à ce jour de programme « Mer » national rassemblant dans une même synergie l'ensemble des organismes concernés. L'Ifremer, institut national de recherche finalisée et le SHOM sont exclusivement dédiés au milieu marin et littoral, tandis que, sur un champ plus académique, la mer est depuis longtemps au coeur de fortes dynamiques au CNRS ou à l'IRD. Le potentiel de recherche française en Outre-mer sur des thématiques touchant au système « Mer » est quant à lui fragile et encore peu mis en réseau (universités émergentes, peu d'UMR, capacité de programmation très fortement influencée par le développement local). 2.2 Menaces et opportunités. Sur certaines thématiques, comme l'acidification, le leadership français est fragilisé par une masse sous-critique (cf. projet européen EPOCA, représentant une belle percée, mais à consolider). L'océanographie opérationnelle est également à un tournant de son existence, nécessitant un soutien institutionnel fort pour se transformer en un service quasi public. Les 38 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer écosystèmes continentaux et marins, sur l'accès aux ressources naturelles et sur les conditions de vie des populations de cette écorégion. Quels sont les risques naturels et anthropiques qui peuvent menacer les régions côtières ? Quelles sont les évolutions biogéochimiques qui s'opéreront au sein de la mer Méditerranée ? Quelle sera leur influence sur les écosystèmes marins et leur biodiversité ? Comment gérer les ressources halieutiques ? Ce sont autant de questions relevant des sciences de la mer qui sont notamment abordées dans le cadre du programme interdisciplinaire MISTRALS. Copiloté par le CNRS et l'IRD, avec la participation de onze institutions françaises, MISTRALS est un chantier décennal de recherche et d'observations systématiques, dédié à la compréhension du fonctionnement environnemental du bassin méditerranéen et de son évolution sous la pression des changements globaux de la planète. Il vise à coordonner à l'échelle du bassin méditerranéen et des pays limitrophes les programmes interdisciplinaires de recherche portant sur l'étude de l'atmosphère, de l'hydrosphère, de la lithosphère et des paléo-climats, mais également sur l'écologie des environnements et les sciences humaines et sociales. L'objectif de cette analyse interdisciplinaire est de parvenir à une meilleure compréhension et maîtrise des mécanismes influençant l'environnement et l'anthropisation de cette région afin d'anticiper son comportement sur le siècle à venir et de prédire l'évolution de ses conditions d'habitabilité. Les données obtenues dans le cadre de MISTRALS seront essentielles pour répondre aux interrogations des responsables politiques en matière de ressources et d'environnement et pour préconiser les mesures d'adaptation qui s'avèreront nécessaires. Au-delà des thématiques abordées par MISTRALS, la priorité de recherche en sciences de la Mer sur la Méditerranée pourrait être étendue, notamment en y intégrant davantage les aspects socio-économiques. En ce qui concerne l'Outre-mer, la constitution du Groupement d'intérêt scientifique GOPS, récemment inscrit comme infrastructure de recherche nationale, pourrait constituer une bonne opportunité de structuration de la communauté autour d'un nombre restreint d'objectifs thématiques à définir, en mettant à profit les implantations mixtes de l'IRD au Sud, à proximité de chantiers particulièrement propices à traiter les grandes questions du futur de l'océan. Une opération similaire est en cours de discussion pour l'océan Indien ce qui compléterait le dispositif dans une région où la France est très présente. Par ailleurs, le Labex CORAIL permet désormais de tisser un lien entre les secteurs tropicaux des trois principaux océans ; il représente une opportunité de coordination des recherches sur ces différents sites. Des atouts scientifiques majeurs sont identifiés, ils produiront leurs effets et donneront à la France la portée internationale qu'elle souhaite s'ils sont suffisamment soutenus. On doit citer une interpénétration très active des communautés disciplinaires de la biogéochimie et de la biodiversité et du fonctionnement des écosystèmes. Le défi de reproduction modélisée du fonctionnement des océans allant des contraintes physicochimiques aux ressources biologiques est un objectif envisageable ; la communauté intégrée, notamment autour des programmes nationaux de l'INSU abondés par de nombreux autres organismes, comme des projets soutenus dans le cadre des Investissements d'avenir en est la force. En biologie, la première révolution des « omiques » est en cours. Elle touche tous les compartiments de la biodiversité marine (benthos, pélagos, plancton, necton...), mais elle revêt un caractère particulier dans l'espace océanique en trois dimensions peuplé d' « invisible » jusqu'alors difficilement détectable et encore moins quantifiable. Les conditions d'une fécondation croisée de l'océanographie et de la biologie marine sont réunies par une appropriation commune d'outils et de méthodes. Le succès de ce rapprochement se mesurera à l'aune des concepts nouveaux qui en découleront. On peut faire le pari de ce succès si les communautés s'y engagent vraiment et surtout si les soutiens d'une interdisciplinarité effective sont au rendez-vous. Commensalisme : la crevette « Periclimenes Sagitiffer » vit abritée dans l'anémone « Anemonia viridis » © CNRS Photothèque/Yann Fontana Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 39 RéférenceS | novembre 2012 40 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 2 : Exploitation durable des ressources marines La ZEE Française recèle aujourd'hui des ressources marines considérables : des ressources vivantes renouvelables exploitées par la pêche et l'aquaculture, des ressources liées à la biodiversité qui sont de mieux en mieux valorisées grâce au développement des biotechnologies, et des ressources non vivantes telles que métaux, minéraux et énergie1 qui présentent des potentiels de croissance très importants. La demande pour ces ressources est en forte augmentation, poussant à une intensification de l'exploitation. Cependant la mise en valeur des richesses des océans est confrontée à une triple contrainte. D'une part, certaines ressources restent largement méconnues ; l'exploration et les développements technologiques nécessaires à leur valorisation sont plus que jamais à l'ordre du jour. D'autre part, leur exploitation ne peut être envisagée sans prendre en considération les enjeux de durabilité écologique ; la maîtrise des impacts de ces activités sur les ressources vivantes et les écosystèmes s'impose ainsi comme un pré requis. Enfin, l'internationalisation des marchés, particulièrement forte pour l'ensemble des produits concernés, induit des contraintes de rentabilité économique extrêmement sévères. valorisation les plus efficaces et durables, et définir un cadre de gouvernance efficient pour l'exploitation durable des ressources marines sont des défis majeurs pour la recherche. 1. Les enjeux majeurs Cinq enjeux majeurs pour la société et pour la recherche peuvent être identifiés, concernant l'exploitation des ressources aquatiques. · Partout dans le monde, la demande alimentaire en produits de la mer est en forte progression. La France importe 65 % des produits de la mer qu'elle consomme. La consommation annuelle moyenne est passée de 28,6 à 34,7 kg/habitant entre 1998 et 2010, stimulée tout à la fois par la baisse des prix des produits aquacoles, par la diversification de l'offre, par le développement de la restauration collective et par la recherche de produits de haute valeur nutritionnelle. Alors que dans les pays en développement les produits de la mer sont principalement consommés en tant que source de protéines, dans les pays occidentaux c'est leur richesse en omega 3 qui est prisée et devient un enjeu de santé publique, notamment pour la prévention des maladies cardio-vasculaires. Dans le même temps, la production de la pêche reste stable voire régresse en raison notamment d'une situation globale de surexploitation des ressources marines et de la mise en place de limitation de captures de certains stocks pour assurer l'atteinte du rendement maximal durable d'ici 2015. L'aquaculture, quant à elle, connaît un essor spectaculaire (+ 8 % par an au niveau mondial, au cours des 20 dernières années), mais cette croissance est réalisée en grande partie hors Europe, principalement en Asie. L'élevage aquacole reste modeste en Europe (4,5 % de la production mondiale) et a régressé en France au cours des dernières années. En La pince du ROV Victor 6000 (robot téléopéré de l'Ifremer) contenant une bouchée d'hydrate de gaz ©Ifremer-Victor/Campagne WACS 2011 conséquence la couverture de la demande repose largement sur des importations, contribuant fortement au déséquilibre de la balance commerciale. Dans le cas de l'aquaculture comme de Dans ce contexte, comprendre le fonctionnement des la pêche, l'exploitation des ressources vivantes aquatiques se heurte à des problèmes d'impact écologique et de durabilité des systèmes d'exploitation. Dès lors, l'avenir de la pêche comme celui de l'aquaculture passe par le développement de nouveaux modes d'exploitation et de gestion des ressources dans un cadre écosystémique. Une véritable mutation a débuté, écosystèmes marins, connaître leurs ressources vivantes ou non vivantes (voir Pilier 1), déterminer les modes d'exploitation et de 1 Bien que le développement des "nouvelles énergies" relève de l'alliance ANCRE, il est apparu indispensable d'intégrer ce volet développement durable au sein du programme MER, porté par AllEnvi. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 41 RéférenceS | novembre 2012 les efforts de recherche pour l'accompagner doivent se poursuivre et s'intensifier afin que pêche et aquaculture puissent produire de façon durable les ressources alimentaires répondant à la demande des consommateurs tout en assurant le bon état de santé des écosystèmes marins. · La valorisation de la biodiversité par les biotechnologies est également un secteur en devenir, avec de forts enjeux économiques. Il s'agit en particulier : de valoriser les coproduits de la pêche (et de l'aquaculture) avec l'extraction de molécules et de substances à forte valeur ajoutée ; de développer la production industrielle de molécules pharmacologiques et industrielles ; de produire et valoriser certaines biomasses végétales à des fins énergétiques ou agricoles... La révolution génomique donne désormais accès à l'ensemble des composants du vivant et ouvre de nouvelles perspectives en matière d'agronomie bleue (pour transposer en mer les concepts de l'agronomie terrestre, y compris les approches les plus modernes de la sélection génétique des espèces cultivées), de biotechnologie bleue (pour inventer de nouvelles façons d'utiliser les organismes marins, par exemple, la domestication des usines cellulaires) et de chimie bleue (pour développer de nouvelles bio-molécules marines et de nouveaux bio-procédés). Ici aussi l'accompagnement par la recherche et l'innovation technologique doit être au coeur des processus de développement de ces secteurs d'activité qui touchent aussi bien les domaines de l'alimentation, l'énergie, la santé et l'environnement. · L'exploration et l'exploitation des ressources minérales et énergétiques. Le domaine océanique est un réservoir de ressources minérales (granulats, nodules, amas sulfurés, encroûtements...) et énergétiques (pétrole et gaz, énergies marines renouvelables) dont toutes les richesses sont encore loin d'être connues. La mutation fondamentale des marchés mondiaux de matières premières touche l'ensemble des pays européens qui deviennent de plus en plus fortement dépendant d'importations de minéraux métalliques et de métaux dits stratégiques. Les besoins croissants ouvrent un champ nouveau pour l'exploration des ressources sousmarines profondes, notamment pour les métaux. Cela passe par la mise en place de programmes d'exploration axés sur la connaissance des fonds marins et une meilleure estimation des gisements dans le cadre d'une stratégie de développement durable des exploitations. Dans le domaine des ressources énergétiques, le développement des énergies marines renouvelables n'en est également qu'aux prémisses: ces énergies émergent comme un élément indispensable du bouquet énergétique national, notamment en Outre-mer. Éolien en mer, hydrolien, énergie thermique marine, énergie de la houle... Les potentiels sont immenses et la part du marin au sein de la production énergétique nationale devrait s'accroître très rapidement dans les années à venir, poussée par la demande et la nécessité de fournir des alternatives aux énergies « conventionnelles ». En raison du caractère nouveau de l'exploitation des énergies marines renouvelables et de leur potentiel de croissance très important, une attention particulière devrait être portée à l'amélioration des connaissances sur les impacts de ces installations sur les écosystèmes marins et en particulier la mégafaune (notamment mammifères marins et populations ichtyologiques). Les énergies « conventionnelles » resteront cependant la principale ressource pour plusieurs dizaines d'années, y compris à partir du gaz et pétrole qui restent à découvrir dans les nouvelles zones (comme le pétrole très profond). Leur exploitation durable, comme celle des matières premières minérales, impose d'étudier le fonctionnement et la résistance aux perturbations de ces environnements profonds. Photobioréacteur pour l'étude de la physiologie des algues au Laboratoire de Physiologie et Biotechnologie des Algues du Centre Ifremer de Nantes. ©Ifremer/Michel Gouillou · La durabilité écologique des systèmes d'exploitation des ressources marines est une exigence sociétale forte, traduite notamment qui dans deux avoir directives-cadres des répercussions européennes, devraient considérables dans les années à venir. La directive-cadre sur l'eau (DCE) vise ainsi au bon état écologique des eaux douces et des eaux de transition (estuaires et zones côtières) à l'horizon 2015, tandis que la directive-cadre stratégie pour le milieu marin (DCSMM) fixe comme impératif d'atteindre le 42 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer bon état écologique des écosystèmes marins en 2020. Cette seconde directive devrait avoir des répercussions sur la gestion de l'ensemble des activités anthropiques impactant le milieu marin, et notamment sur la gestion des différentes formes d'exploitation des ressources marines. La définition, l'évaluation et l'identification d'indicateurs de suivi du bon état écologique des milieux marins sont ainsi un enjeu majeur pour la recherche. Plus généralement, les questions de durabilité écologique renvoient à des enjeux de connaissance et de compréhension : du fonctionnement des écosystèmes marins, des processus d'impact des activités anthropiques et des facteurs de résilience ou de fragilité de ces écosystèmes. La 2. Les atouts et faiblesses de la communauté scientifique française dans le domaine des ressources aquatiques · Une communauté scientifique en émergence communauté dans scientifique le domaine française des est reconnue et diversifiée, souvent en position de leadership au niveau européen ressources aquatiques. Cependant le dispositif de recherche est sous dimensionné au regard notamment de la variété et l'importance des ressources, de la taille de la ZEE française à explorer et de la demande en ressources et de la complexité en terme d'échelles des questions à traiter et d'écosystèmes à comprendre. De plus, cette communauté est morcelée. Des animations et le soutien à des programmes favorisant l'interdisciplinarité permettraient de gagner en efficacité. Le maintien du leadership français passe aussi par une plus grande participation des scientifiques français aux comités scientifiques d'évaluation des stocks halieutiques tant au niveau européen (CIEM) que dans les organisations régionales de gestion des pêches (ORGP). On note une expertise de plus en plus forte des pays émergents pour la recherche dans le domaine des ressources aquatiques et, en parallèle, la concurrence pour l'accès aux ressources devient de plus en plus intense. Là encore une meilleure structuration du dispositif, notamment via le programme national MER, et une augmentation des forces sont nécessaires pour que la France conserve son leadership et accroisse son auto-approvisionnement. L'importance des sciences de l'environnement est de mieux en mieux reconnue. La communauté scientifique est de plus en plus fortement sollicitée par la société civile et les pouvoirs publics sur les questions de durabilité. Cependant, le dispositif actuel a une capacité insuffisante pour pouvoir répondre aux demandes en constante progression. Des partenariats recherche/acteurs socio-économiques ont été développés, mais ils demandent à être consolidés. De même, une approche concertée vers un diagnostic partagé de l'état des ressources entre acteurs et scientifiques doit continuer d'être soutenue. Cette communauté scientifique bénéficie d'une large panoplie de dispositifs d'accès à la connaissance des ressources marines (navires océanographiques, laboratoires marins...), mais le monitoring des ressources et des écosystèmes doit être renforcé. Les outils développés permettent d'assurer un continuum dans les approches de la biologie intégrative (génomique...) à la géologie. Il faut maintenant poursuivre leur exploitation jusqu'aux applications. Des compétences fortes · La compréhension des interactions entre ressources marines et changements globaux (changement climatique, surexploitation, destruction des habitats, etc.) représente un enjeu majeur pour la recherche comme pour la société. Les aires de répartition de nombreuses espèces se déplacent vers les pôles de manière relativement rapide ; la production primaire et les efficacités de transferts au sein des réseaux trophiques sont modifiées ; la diminution d'abondance des prédateurs augmente l'instabilité au sein des écosystèmes ; l'acidification des eaux a des effets ravageurs, notamment sur les récifs coralliens et sur les ressources qu'ils abritent ; l'élévation du niveau de la mer modifie le trait de côte et impacte fortement certains écosystèmes (îles, mangroves, milieux lagunaires ...), le réchauffement des eaux favorise l'émergence de nouveaux pathogènes ou leur virulence. Plus généralement, les changements hydrodynamiques ou hydroclimatiques, ainsi que la modification des habitats, peuvent avoir des répercussions qui sont encore mal anticipées. Des outils de modélisation multiéchelles spatio-temporelles doivent être encore développés. Les ressources vivantes sont évidemment les premières affectées, mais c'est plus globalement le fonctionnement et la résilience des écosystèmes, et donc leur capacité à supporter une exploitation anthropique de manière durable malgré les changements climatiques, qui sont en question. La recherche doit ici viser à anticiper les évolutions à venir, à identifier les écosystèmes fragiles, à définir des modes d'exploitation et de régulation adaptés à ce contexte d'environnement en forte évolution. Ces enjeux se situent au niveau mondial. Un des défis que le programme MER aura à relever est l'organisation de dispositifs permettant d'aborder les questions au niveau global (comment peut-on/doit-on les traiter ?) tout en conservant des liens avec les objectifs nationaux. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 43 RéférenceS | novembre 2012 existent également en matière de modélisation des ressources et des systèmes d'exploitation; mais il manque des observations pour nourrir les modèles et des méthodes d'intégration des modèles permettant d'évaluer les compromis entre objectifs écologiques, économiques et sociaux. scientifique, axés sur la connaissance géologique des mécanismes qui modèlent les fonds marins à différentes échelles spatio-temporelles, les processus en interactions géobiologiques et leur dynamique temporelle, la protection de la biodiversité et la résilience des sites. Une telle activité ne pourra s'inscrire que dans un contexte de durabilité, l'enjeu environnemental sera majeur. Les études de biologie des écosystèmes chimio-synthétiques profonds vont devenir, une composante majeure des travaux d'exploration des grands fonds parallèlement aux études géologiques. Il conviendra de développer l'étude de la variabilité spatio-temporelle de l'activité géologique, hydrologique et biologique à l'échelle d'une zone d'exploitation, par exemple transversalement à l'axe d'une ride océanique. La communauté scientifique nationale concernée est assez limitée, mais elle a su se rassembler dans différents GDR, UMRs et dans le Labex Mer. Elle a aussi montré sa capacité à engager des programmes de recherche en partenariat publicprivé et en se positionnant au niveau européen en coordonnant l'ERANET ERAMIN. Le développement de l'exploration profonde va nécessiter des progrès significatifs pour les techniques d'exploration. L'accès aux matières premières minérales engendre une concurrence internationale de plus en plus visible, y compris au niveau scientifique. · Des enjeux stratégiques pour l'exploitation durable des grands fonds La France dispose d'une capacité importante d'exploration et d'accès à de nouvelles ressources minérales à grande profondeur en mer, dont l'éventuelle exploitation future nécessite le développement de recherches pluridisciplinaires. Ainsi le Cimer de juin 2011 a mis en avant les ressources minérales profondes comme devant devenir un enjeu majeur et a mis l'accent sur la volonté de la France de promouvoir l'exploitation des grands fonds marins, en assurant qu'une "stratégie nationale" en la matière serait arrêtée. L'enjeu est de proposer une stratégie pour les dix prochaines années afin de positionner domaine la des recherche ressources géo-biologique minérales profonde, tout la en technologie et l'industrie française dans le tout nouveau profondes, s'inscrivant dans une perspective d'exploitation durable. 3. Thématiques scientifiques prioritaires Pour répondre aux enjeux, six thématiques scientifiques prioritaires sont proposées sur lesquelles les forces de recherche et la structuration du dispositif devront être centrées. 3.1 Comprendre la genèse et la durabilité des ressources marines Sulfures d'un site hydrothermal inactif à 3700 mètres de profondeur observé lors de la campagne océanographique Serpentine menée par l'Ifremer sur la dorsale médio-atlantique ©Ifremer-Victor/Campagne Serpentine Cette première thématique vise au développement de recherches fondamentales sur le fonctionnement des systèmes ou écosystèmes marins et sur les processus. Elle est largement développée dans le pilier 1 (ci-dessus) et s'articule en trois volets complémentaires. Les explorations scientifiques menées dans les grands fonds depuis une trentaine d'années ont permis d'identifier plusieurs processus géologiques et géochimiques conduisant à la · Processus géologiques et circulation des fluides. Au-delà de la connaissance des ressources marines en hydrocarbures dont l'importance ne cesse de s'accroître, les diverses explorations du milieu marin ont montré au cours des dernières décennies l'importance des fluides, de leurs volumes et de leur circulation et des échanges actuels ou passés dans le système mer. Cette connaissance doit encore être très significativement accrue à différentes échelles (quantification des volumes, échanges, processus et polymétalliques, encroûtements cobaltifères et sulfures hydrothermaux) , et à la genèse de ressources énergétiques potentielles originales (hydrates de méthane, hydrogène). Ces découvertes ouvrent de nouvelles frontières pour la recherche et l'identification de ressources minérales et énergétiques dans les océans. Il s'agit maintenant de conduire des programmes à forte valeur ajoutée concentration des métaux (Nodules 44 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer géométries des circulations, etc.) en particulier pour évaluer l'impact du changement climatique, de changements du milieu (déstabilisation des hydrates de méthane), etc. les écosystèmes marins (notamment ceux concernant la production d'énergie, la conservation de la biodiversité, la régulation du climat, l'épuration des eaux, le tourisme...). · Genèse et maintien de la biodiversité. La connaissance de la biodiversité doit se déployer selon trois axes complémentaires : 1) son inventaire raisonné (quelles entités prendre en compte, comment le faire) qui doit notamment aborder des compartiments jusqu'à présent ignorés ou peu accessibles (e.g Micro-, nano-, pico-plancton) ; 2) les processus qui président à son évolution à tous les pas de temps depuis ceux de la phylogénie jusqu'à celui de l'acclimatation des individus (émergence des phénotypes, adaptation, radiation...) ; 3) les patrons de sa structuration spatiale à toutes les échelles depuis celle des habitats jusqu'à celle des océans. L'ensemble de la démarche constitue l'un des éléments indispensables permettant de comprendre les écosystèmes, leur évolution, leur fonctionnement, leur résilience, l'impact des changements globaux, etc. Mise en oeuvre du chalut à bord du navire Ifremer Thalassa pour l'évaluation des ressources halieutiques en Manche Orientale et Mer du Nord. ©Ifremer/Olivier Dugornay/ Campagne IBTS · Fonctionnement des écosystèmes. Il s'agit ici d'analyser et comprendre les processus qui sont le fondement de la productivité des ressources marines vivantes et qui déterminent (au moins pour partie) leur variabilité spatio-temporelle et leur prédictibilité : processus de production primaire et de recyclage des détritus, couplage modèles de circulation océanique/modèle de production, modèles de flux d'énergie et déterminants de l'efficacité des transferts dans le réseau trophique, processus d'impact des pollutions organiques ou minérales sur les ressources vivantes (écotoxicologie)...Cette approche des grands cycles s'appuie également sur une connaissance accrue des grandes fonctions métaboliques des organismes. 3.2 Développer l'approche écosystémique des pêches Le développement de l'approche écosystémique des pêches (AEP) est un impératif aujourd'hui reconnu aussi bien par les institutions et structures en charge de la gestion des pêches que par les instituts de recherche impliqués dans le domaine. Cette approche vise un triple objectif. D'une part, il s'agit d'évaluer, comprendre et anticiper l'impact de la pêche non seulement sur les différentes ressources ciblées, mais plus globalement sur la biodiversité marine, sur le fonctionnement des écosystèmes et sur leurs propriétés de productivité, de stabilité, ou de résilience. D'autre part, et réciproquement, l'AEP doit permettre d'identifier et de quantifier les impacts sur les ressources halieutiques des autres activités anthropiques exercées en mer ou sur le littoral. Enfin, il convient de replacer l'activité de pêche au sein d'une vision plus large englobant l'ensemble des services rendus par Dans le cadre du programme national Mer, cette thématique sera abordée au travers de cinq volets complémentaires. · Comprendre et anticiper les réponses démographiques ou fonctionnelles des populations marines exploitées, en réponse aux différentes facettes de changement global, doit être une priorité de la recherche. Ceci passe en particulier par le développement de modèles de populations intégrant la variabilité individuelle et les (génétique, relations avec physiologie, l'habitat et comportement...) l'environnement. Ces modèles doivent notamment conduire à une meilleure compréhension des impacts de la pêche sur les ressources, mais également à mieux identifier et à anticiper les effets : du réchauffement climatique, des dégradations d'habitats, des invasions biologiques, des pollutions organiques côtières... · L'analyse des structures et relations trophiques et le développement de modèles de fonctionnement trophique sont une priorité de recherche. Les prédateurs marins (poissons, oiseaux, mammifères marins) jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes marins régulant le flux d'énergie à travers les chaînes alimentaires et le contrôle des espèces à des niveaux trophiques inférieurs. Malgré le rôle essentiel que jouent ces espèces dans les réseaux trophiques il subsiste beaucoup de lacunes concernant la biologie et l'écologie de ces prédateurs supérieurs, afin de mieux comprendre leurs interactions avec d'autres espèces et comment les écosystèmes marins peuvent être affectés par le déclin de leurs populations. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 45 RéférenceS | novembre 2012 · L'impact de la pêche sur les habitats et sur la biodiversité reste peu connu et doit faire l'objet d'une évaluation scientifique, en distinguant les effets de court terme des effets à moyen ou long terme. Il s'agira aussi de participer à la réflexion sur les pêcheries mixtes et la mise en place de plan de gestion à long terme pluri-spécifiques. Ces recherches doivent nourrir l'évaluation environnementale de l'ensemble des impacts écologiques des différentes flottilles de pêche (en même temps que de leur efficacité économique et sociale), dans l'optique du développement ou d'un renforcement d'une gestion des pêches s'appuyant sur une organisation par flottille. Elles doivent également se prolonger par un accompagnement de l'innovation en matière de développement d'engins de pêche plus sélectifs et ayant moins d'impact sur l'habitat. l'environnement sur la bonne santé et la résistance des poissons, utilisation dans la mesure du possible de biomolécules, éventuellement d'origine marine, exploitation de la diversité génétique, notamment de la variabilité individuelle, pour adapter les espèces aux contraintes et aux objectifs des élevages. Un effort particulier doit être réalisé pour mieux évaluer les impacts organique, réciproques chimique, élevages/écosystèmes (matières pathogènes...) et développer une approche écosystémique de l'aquaculture sur le modèle de l'approche écosystémique des pêches : impacts des pratiques d'élevage non seulement sur la production, mais aussi sur l'environnement, la biodiversité, et le fonctionnement des écosystèmes et les services rendus ; systèmes d'aquaculture multitrophiques intégrant une partie de la chaîne trophique en amont et en aval de l'élevage ; impacts des activités anthropiques exercées en mer ou sur le littoral, interactions avec les autres usages des ressources et des écosystèmes (usage de l'eau et des territoires). En particulier, la compréhension de la dynamique des occurrences de blooms phytoplanctoniques pour différents niveaux trophiques devient un enjeu de plus en plus prégnant avec le changement global. Cette question rejoint clairement celle, présente dans le pilier 1, de la compréhension des patrons de la biodiversité phytoplanctonique et constitue également un enjeu ultramarin majeur (cf. ciguaterra en Polynésie). · L'intégration de la biologie évolutive est une dimension nouvelle et essentielle de l'approche écosystémique des pêches. L'exploitation des ressources vivantes et plus généralement l'ensemble des pressions anthropiques sur le milieu marin exercent une pression de sélection dont les effets ont sans doute été sous-estimés jusqu'à présent. Il importe en particulier de comprendre comment cette pression de sélection peut modifier non seulement les traits d'histoire de vie des populations exploitées, mais également la composition spécifique des communautés écologiques, le fonctionnement des réseaux trophiques et les relations ou dynamiques hôtes/parasites. · Les modèles écosystémiques « end to end » permettront le développement de scénarios d'impacts et de gestion. Le développement de ces scénarios qui seront sollicités par l'IPBES permettra un approfondissement et une validation de ses modèles à des fins de prédiction et de gestion. Ainsi nous aurons besoin de modèles écosystémiques calibrés et validés qui intègreront les aspects écologiques, sociaux, économiques, et environnementaux. Ils permettront la quantification des interactions, mais aussi les choix, alternatives et arbitrages possibles entre les divers services écosystémiques. 3.3 Relever les défis de l'aquaculture et des Larve d'huître plate (2/10 de millimètres). ©Ifremer/Olivier Dugornay biotechnologies · Biotechnologies Le potentiel d'innovation détenu par les organismes marins, encore peu explorés et qui appartiennent à des lignées évolutives très originales, apparaît particulièrement important. De plus, les ressources génomiques sont désormais très significatives sur de nombreux organismes marins, une tendance qui s'accélère avec les nouvelles · Les défis de l'aquaculture. Il s'agit de développer la production en l'intégrant dans l'écosystème : alimentation des poissons et crustacés en limitant le recours aux ressources naturelles marines, gestion sanitaire des élevages par une meilleure compréhension de l'influence de la zootechnie, de l'alimentation et de 46 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer techniques de séquençage. Les approches de génomique fonctionnelle atteignent également un niveau comparable à celles mises au point pour les systèmes biologiques terrestres modèles. Le défi est d'utiliser ces nouveaux outils pour poursuivre l'étude des microorganismes, des plantes ou des animaux marins, développer des méthodes de culture ou d'élevage et de sélection de génotypes performants, puis de les valoriser dans différents domaines d'application comme la nutrition, la santé animale, végétale ou humaine et l'ingénierie (enzymes, protéines, biopolymères, biomatériaux). Le marché global des biotechnologies marines, de l'ordre de 3 milliards de dollars en 2010, est donc considéré comme présentant un important potentiel de croissance, de l'ordre de 4 à 5 % chaque année. 3.4 Connaître les ressources minérales et énergétiques intégrées permettant d'étudier les interactions entre fluides, roches et bactéries. · Les métaux profonds L'exploitation future des gisements de métaux nécessite une importante phase préalable d'exploration afin de mieux comprendre le fonctionnement des systèmes géodynamiques actifs qui contrôlent la circulation des fluides, et leur variabilité dans l'espace et le temps. Ces grands cycles géochimiques de mobilisation, transport et concentration des éléments contrôlent la formation des minéralisations, pour lesquelles les interactions géobiologiques métaux/bactéries (précipitation/ altération) sont des processus majeurs. L'impact de l'activité des communautés microbiennes sur leur environnement et sur les grands cycles biogéochimiques est également à prendre en compte. La compréhension du fonctionnement de ces écosystèmes profonds permettra d'évaluer leur résilience face aux perturbations anthropiques, et en particulier face à l'exploitation des ressources qu'ils abritent. Enfin, pour cette thématique comme pour d'autres, évaluer la variabilité naturelle des processus géologiques et biologiques sera l'un des grands enjeux des années à venir, pour avancer dans la compréhension des processus et pour prévoir leur évolution, voire leur surveillance en cas d'activité extractive. L'implantation d'observatoires fond de mer intégrant des solutions technologiques innovantes est l'un des défis à relever dans la cadre de la très grande infrastructure de recherche (TGIR) EMSO avec l'ensemble des partenaires nationaux et européens. · Les marges : flux de matière du littoral aux abysses Les dépôts sédimentaires constituent une archive unique des événements qui ont façonné la surface de la Terre (par exemple, climat, tectonique). Connaître la variabilité de ces processus de dépôts constitue un enjeu de connaissance primordial, où l'évolution de la structure profonde des marges doit être prise en compte pour établir les bilans de transfert sédimentaire multi-échelles. Les bassins sédimentaires ainsi créés sont aussi le lieu d'accumulation des hydrocarbures (huile et gaz), dont les hydrates de méthane qui constituent une grande réserve de ressources énergétiques, mais qui peuvent être également à l'origine de risques naturels (amplification de l'effet de serre et instabilité de pente) compte tenu de leur sensibilité aux variations de pression et de température. La connaissance des aléas liés à ces phénomènes d'instabilité passe par l'étude des activités sismiques, de la formation et dissociation d'hydrates de gaz, des instabilités de pente liées aux accumulations de sédiments et de la circulation océanique modifiant la distribution verticale et l'extension horizontale des masses d'eau (et des températures) au contact des sédiments. · Circulation des fluides, interactions géobiologiques et cycles biogéochimiques Les flux géochimiques et les circulations de fluides ont des implications directes sur les ressources énergétiques et minérales des grands fonds. De plus la présence d'eau est un facteur central pour la présence d'une activité microbienne au sein des enveloppes terrestres (sédiments, croûte, manteau). Cette activité microbienne est à la base des communautés biologiques originales basées sur la chimiosynthèse. Ces découvertes impliquent maintenant de mener des recherches Vers géants vivant par 2600 m de profondeur, près des sources hydrothermales, observés par le Robot téléopéré Victor 6000 ©Ifremer-Victor/Campagne Phare · Les énergies marines renouvelables Ce domaine d'avenir à des sera évidemment traité par pour la le participation consortiums industriels Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 47 RéférenceS | novembre 2012 développement de filières (hydrolien, houlomoteur, éolien flottant) dans le cadre des appels d'offres nationaux de l'Ademe et dans le cadre de la possible création de l'IEED France Energies Marines dans le cadre des investissements d'avenir. Mais le développement de ces activités qui se fera dans un contexte industriel, nécessitera une connaissance précise de tous les mécanismes d'interactions entre le milieu marin et les structures, les conditions environnementales (sédimentologiques, géotechniques et bio-fouling), les interactions fluide/structure (modélisation numérique et approche expérimentale). Le développement de ces activités nécessite également une prise en compte des interactions et de l'impact sur les autres activités historiquement présentes (déplacement de flottille, etc.). 3.5 Évaluer l'impact des pressions anthropiques sur les écosystèmes Les recherches précitées doivent être intégrées et complétées afin d'évaluer l'impact global des pressions anthropiques sur le fonctionnement des écosystèmes et sur la durabilité environnementale des ressources. · Définir les modes d'exploitation assurant le maintien du BEE Il ne suffit évidemment pas de mesurer le BEE, il faut en parallèle redéfinir les modes d'exploitation des ressources marines, et plus largement les modes de gestion ou de régulation des activités anthropiques impactant le milieu marin, avec l'objectif ­ la contrainte ­ d'atteindre ce BEE. À moyen terme, les implications de cette approche sont sans doute considérables et aujourd'hui sous-évaluées. Elle implique par exemple de gérer les pêches ou l'exploitation des ressources minérales, sur des objectifs de conservation de la biodiversité, ou de préservation de l'intégrité des fonds marins. Ceci suppose en particulier le développement de démarches scientifiques de type indicateurs, tableaux de bord... · Interactions entre impacts anthropiques Les impacts directs ou indirects de la pêche (sur les ressources, les réseaux trophiques et les habitats), les pollutions chimiques, organiques ou biologiques, engendrées en mer par l'ensemble des activités anthropiques marines ou terrestres, et les effets biogéochimiques ou hydrologiques du changement climatique interagissent, avec souvent de possibles effets de synergie/amplification, ou au contraire de compensation. L'analyse de ces interactions est un enjeu majeur, à la fois en terme de prévision, de mitigation ou d'adaptation. Elle doit en particulier s'appuyer sur la modélisation et l'observation in situ. 3.6 Développer des méthodes d'évaluation intégrée écologie/économie/social et définir des modes de gestion et de gouvernance plus efficients L'évaluation environnementale doit être intégrée dans un ensemble plus vaste prenant en compte les aspects économiques et sociaux du développement durable. Elle aboutit (ou doit aboutir) à la définition de modes de gestion et de gouvernance, qui sont eux-mêmes des objets de recherche en constante évolution. Les yeux d'une coquille Saint-Jacques. ©Ifremer/Olivier Dugornay · Définir et mesurer le bon état écologique (BEE) des écosystèmes marins est un engagement international lié à la directive-cadre européenne sur la stratégie pour le milieu marin (DCSMM). La définition des indicateurs liés aux différentes facettes du bon état écologique des écosystèmes marins (les « descripteurs » de la DCSMM) est en cours, mais des protocoles et systèmes d'observation devront ensuite être définis, mis en oeuvre et validés. Ce chantier de la DCSMM, impliquant des recherches pluridisciplinaires (de la biodiversité à l'évaluation des pollutions sonores), s'étalera donc sur plusieurs années en s'appuyant sur de fortes collaborations à l'échelle européenne. · Évaluation environnementale, économique et sociale des usages, à l'échelle des écosystèmes Cette évaluation requiert en particulier le développement d'indicateurs intégrés, d'approches multidimensionnelles, de méthodes de quantification (par exemple Analyse des Cycles de Vie appliquée aux modes de production...). En s'appuyant sur les écosystèmes­ qui sont des espaces d'intégration des 48 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer différents impacts anthropiques et des territoires d'interaction entre acteurs ou de mise en oeuvre de modes de gouvernance ­ il s'agit ici d'identifier et d'évaluer des compromis entre objectifs écologiques, économiques et sociaux. Il s'agit aussi d'anticiper de possibles synergies ou oppositions entre ces objectifs. · Couplage de modèles biologie/économie, modélisation des comportements des acteurs, et simulations de scénarios de gestion Dans le domaine de l'exploitation des ressources marines, le développement de modèles et d'outils d'aide à la gestion impose des une intégration pluridisciplinaire, et depuis le des fonctionnement des écosystèmes jusqu'à la prise en compte comportements d'acteurs notamment comportements d'adaptation en réponse à la fois au changement global et au changement des modes d'exploitation et de gestion de ressources eux-mêmes. Ces approches doivent notamment permettre de comprendre les dynamiques d'acteurs sous-jacentes et d'identifier les modes de gestion et de gouvernance efficients. · Soutien à la mise en place des Unités d'exploitation et de gestion concertées (UEGC) pour la mise en place d'un nouveau type gestion à long terme par pêcheries · Analyse et simulation des modes de gouvernance à l'aide de scénarios Le développement de scénarios de moyen et long terme (tel qu'envisagé notamment dans le cadre de l'IPBES) est également une approche à privilégier. Elle implique là aussi une intégration pluridisciplinaire sciences biologiques / sciences sociales et conduit notamment sur l'identification des modes de gouvernance les plus efficients. · Suivi de l'efficacité et de la contribution des AMP à la conservation de la biodiversité Enfin, notons que ces différents thèmes de recherche doivent être complétés par l'élaboration de stratégies de communication et de valorisation de la production scientifique dans le domaine marin, vers le grand public et les parties prenantes (en partenariat avec les structures existantes au niveau national). Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 49 RéférenceS | novembre 2012 50 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 3 : Gestion de l'espace côtier marin Les espaces côtiers et marins constituent un lieu particulier d'interactions complexes et d'enjeux multiples entre les activités de recherche et les attentes sociétales. Les espaces côtiers marins, lieux de rencontres d'activités traditionnelles, d'usages nouveaux, de pressions anthropiques constituant des menaces pour les écosystèmes, sont au coeur de politiques publiques qui s'élaborent au niveau national, européen et international en s'appuyant largement sur les résultats de la recherche. En retour, ces politiques accordent un rôle très important à la connaissance et à l'innovation. Par exemple la politique maritime qui s'élabore à l'échelle européenne, vise à développer une pêche et une aquaculture innovantes, compétitives et fondées sur les connaissances. De manière générale, les éléments de politique publique concernés peuvent se décliner à diverses échelles. S'il reste difficile de les recenser exhaustivement, le séminaire du groupe mer d'AllEnvi qui s'est tenu à Roscoff en juin 2011 a proposé une première vision d'ensemble et une méthode d'approche. Ces éléments méritent d'être discutés et développés plus largement avec la communauté des Sciences Humaines et Sociales, avec laquelle peu d'interactions ont eu lieu à ce jour, ce qui représente une faiblesse actuelle de l'expression du programme national Mer. La stratégie nationale pour la mer et le littoral s'appuiera sur des documents stratégiques de façade en métropole (dont les plans d'action pour le milieu marin pour la DCSMM) et de bassin en Outre-mer et visera à donner une vision d'ensemble et à améliore la cohérence des nombreux éléments du dispositif : chantier de la construction de sa politique maritime intégrée en métropole et dans l'Outre-mer. Au niveau européen, la mise en place progressive de directivescadres telles que la directive-cadre sur l'eau (DCE), la directivecadre « stratégie sur le milieu marin » (DCSMM), ou de nouveaux règlements tels que la Data Collection Framework pour la pêche suppose des activités à caractère opérationnel ; elle suppose aussi et induit des questionnements scientifiques permettant, par exemple, de mieux définir des indicateurs qui pourront être utilisés pour définir et décrire un bon état écologique. · Stratégie de créations d'AMP ; · Gestion des droits miniers (code minier) ; · Délimitations maritimes (ZEE, Extension du plateau continental) ; · Gestion côtière : aménagement, planification spatiale, trait de côte nécessitant un référentiel géographique du littoral dont une des composantes est la cartographie haute résolution continue terre-mer, concrétisée par le programme IGN-SHOM Litto3D (décision CIMER 2009) ; 1. Éléments de contexte Au niveau national, le comité interministériel de la mer (CIMer) a adopté le 08 décembre 2009, le Livre bleu de la stratégie nationale pour les mers et les océans a été élaboré notamment sur la base des travaux prospectifs du groupe Poséidon (2006) et des recommandations issues du Grenelle de la mer (2009). Il confirme que la zone côtière est un espace continu entre la terre et la mer pour la conduite des politiques publiques et réaffirme la nécessaire cohérence des actions menées sur terre et en mer. Il confirme également la mise en oeuvre de la planification stratégique des espaces maritimes, basée sur les principes de la gestion intégrée de la mer et des littoraux. En inscrivant la gestion intégrée de la mer et des littoraux dans son droit (Loi Grenelle 2), en installant une gouvernance renouvelée pour la mer et les littoraux, la France lance le vaste · Développement des énergies renouvelables marines ; · Réglementation nationale de la pêche professionnelle ; · Action de l'État en mer : dérive de polluants (POLMAR), PNAC (Plan National d'Adaptation au Changement Climatique), PSR (Plan Submersion Rapides), CENALT (Centre d'Alerte Tsunami de l'Atlantique), surveillance, garde-côte, etc. Au niveau mondial, la haute mer fait l'objet de conventions internationales, la plupart sous l'égide de l'ONU ou de ses organes subsidiaires, sur les ressources minérales, la biodiversité CDB, la pêche, le droit de la mer (UNCLOS), la délimitation des plateaux continentaux (CLPC commission pour la limitation du plateau continental). La France est partie prenante à de nombreuses conventions régionales : Atlantique Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 51 RéférenceS | novembre 2012 nord-est (OSPAR), Méditerranée (Barcelone), Baltique · Parmi les questions de recherche induites, on peut identifier, notamment : (Helcom) Nairobi (Carthagène...), organisations régionales de gestion des pêches dans l'Atlantique tropical, l'océan Indien, le Pacifique, les Caraïbes, etc. En termes de méthode, il semble essentiel de distinguer les défis posés à la recherche par la notion d'appui aux politiques publiques et les questions de recherche que peuvent induire ces politiques publiques. Certaines d'entre elles se croisent naturellement et mériteront un développement plus approfondi dans une étape à venir. Ainsi, parmi la liste des défis posés à la recherche, on peut mentionner (en dehors de questions prises en compte dans le cadre des autres piliers de l'IPC et non répétées ci-dessous) : · La prise en compte des "forçages" multiples : changements climatiques anthropiques et globaux, effets locaux, forçages · La notion de « services écosystémiques » : état de santé des écosystèmes, vulnérabilité, évaluation économique des services rendus au-delà des ressources exploitées (cf. MEA : Millenium Ecosystem Assessment), · L'ingénierie environnementale (transversal aux groupes AllEnvi), · L'analyse des déterminants de l'opinion publique, jeux d'acteurs, · les intégrations écologiques, sociales, économiques, politiques du développement, durable ; construction des compromis, aide à la décision publique, évaluation du coût de la dégradation (cf. services écosystémiques) ; · L'analyse des modes de gouvernance, co-construction, gestion partagée, gestion adaptative. La place de l'expertise dans les missions des organismes recherche, la reconnaissance et l'évaluation de ces activités, le pilotage de la recherche en soutien aux activités d'expertise sont aussi des questions qui devront être abordées. Une analyse de ce type de question suppose de réaliser le meilleur croisement entre les demandes liées aux enjeux de politiques publiques, les enjeux de connaissances amont et aval, et le niveau de reconnaissance des chercheurs ou des équipes sur ces champs. Elle suppose aussi de s'accorder sur des méthodologies de production de l'expertise (responsabilité, collégialité, etc.). La mobilisation des sciences humaines et sociales (homme nature société) et des sciences de la communication est un enjeu fort sur lequel une attention particulière devra être portée : méthodes d'évaluation des politiques publiques, modèles couplés ou intégrés écologie/économie/sociologie, droit (biodiversité et accès et partage des avantages), ethnologie (conflits d'usages). Une politique de l'environnement, en milieu côtier et littoral plus qu'ailleurs, doit se fonder sur la concertation d'une part et sur l'intégration de l'expertise scientifique d'autre part. En appui à cette politique, il doit être mis en place une recherche pluridisciplinaire associant les sciences politiques, la sociologie, la géographie, la biologie et les sciences de l'environnement. Elle doit ouvrir des pistes qui conduiront à une institutionnalisation du débat public, elle doit permettre l'analyse du fonctionnement des procédures et des dispositifs de participation, et alimenter des progrès dans le domaine de l'approche cognitive des processus de communication et d'information entre acteurs. · le caractère intégré des politiques, multi-usages, multiforçages ; · la déclinaison territoriale au moyen d'outils locaux (AMP, GIZC, autres) ; · l'intégration terre-mer : conséquence en mer des politiques et activités à terre ; · l'analyse des modes de gouvernance, la co-construction, la gestion partagée et/ou adaptative ; · la transposition du savoir scientifique vers le gestionnaire : transfert des idées et l'intégration des résultats de recherche pour l'élaboration et l'évolution des politiques publiques, la sensibilisation et l'éducation à la complexité, l'élaboration d'indicateurs ; · la montée en charge des demandes d'expertise et de « monitoring » ; · l'évaluation des actions et des effets des politiques publiques ; · la place de l'expert dans la prise de décision, dans le débat citoyen, la collégialité de l'expertise ; · plus généralement, la traduction de la connaissance en expertise ; · la mise en place de dispositifs d'appui technique (interface besoins et recherche). · la prise en compte des connaissances empiriques des acteurs présents sur le milieu (pour établir les diagnostics, les scénarios de gestion, définir et mettre en oeuvre l'approche écosystémique...). 52 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer 2. Les enjeux scientifiques de recherche dans l'appui aux politiques publiques L'usage durable des ressources marines vivantes ne peut se réaliser qu'à travers une approche écosystémique, et nécessite le développement de politiques publiques appuyées sur une connaissance populations et scientifique la intégrant du les problématiques des sociétales, la modélisation bioéconomique, la dynamique des connaissance fonctionnement écosystèmes marins. La régulation de l'accès à la ressource doit simultanément tendre à minimiser les conflits d'usages, à limiter la surexploitation en maintenant autant que possible la viabilité économique des entreprises du secteur. Très directement et de manière nouvelle, cette préoccupation s'est trouvée fortement liée à celle de la conservation et des usages non marchands de la ressource (pêche de loisir et écotourisme). Les aires marines protégées, en tant que nouvel outil de gestion, offrent les conditions expérimentales d'une évaluation des politiques publiques en ce domaine. En ce qui concerne les espèces protégées ou vulnérables, il s'agira de développer des actions de recherches visant une meilleure connaissance et la préservation des fonctionnalités de leurs habitats littoraux et côtiers. On pensera ici notamment aux espèces de poissons migrateurs amphihalins qu'elles soient exploitées ou non, à certains mammifères, etc. Vulnérabilités de la zone côtière Bien que les pressions anthropiques en mer soient moins intenses et souvent moins directes qu'à terre, elles prennent depuis plusieurs décennies une importance grandissante et elles touchent des environnements de plus en plus divers, y compris ceux qui sont les plus éloignés du cadre de vie de l'espèce humaine, comme les zones profondes ou polaires. Les principaux impacts liés aux activités humaines sont la surexploitation des ressources, les pertes d'habitats et de biodiversité, les espèces invasives et le parasitisme, la sur-fertilisation, l'imprégnation des milieux par les xénobiotiques, l'élévation du niveau moyen de la mer liée au réchauffement climatique global, l'érosion côtière ou, à l'inverse, les envasements et ensablements, enfin les risques de submersion souvent liés aux deux impacts précédents. En première ligne, les environnements littoraux subissent directement les effets d'une très forte concentration démographique (environ 60 % de la population mondiale réside à moins de 100 km des côtes): urbanisation, pollutions constantes ou saisonnières, présentant de larges gammes de toxicité, modifications quantitatives et qualitatives des transferts continentaux en raison de changements d'utilisation des sols des bassins versants, de modifications du relief (érosion ou accumulation sédimentaire locale accélérée), de la modification des conditions hydrauliques et des flux sédimentaires en raison des aménagements des cours d'eau et des zones côtières, portuaires et estuariennes, des exploitations de granulats... Toutes ces modifications, pour certaines amplifiées par les hautes densités de peuplement, affectent profondément et massivement le littoral dans sa partie continentale, mais aussi dans sa partie marine qui est par ailleurs directement touchée par des modifications du trait de côte, la destruction de zones d'habitat en petits fonds par des remblais et des empiètements qui les réduisent et les segmentent, le nautisme, les pêches côtières, les activités d'aquaculture... À l'échelle de la planète, les littoraux comptent pourtant parmi les milieux présentant les plus grands enjeux en matière de conservation de la biodiversité et de gestion des interactions hommes-milieux, comme l'atteste la liste des 34 points chauds mondiaux de biodiversité. La gestion des risques est un point particulièrement critique sur le littoral où se croisent divers aléas (sismique, océanologique, météorologique) et une vulnérabilité forte due à la présence humaine (populations et infrastructures, induisant éventuellement des risques secondaires, notamment chimiques et radioactifs). La France est, par exemple, un pays où l'aléa sismique est modéré en métropole (il est par contre important dans certains secteurs d'Outre-mer comme les Antilles), mais où la vulnérabilité sismique est forte. L'élévation du niveau moyen de la mer se traduit le plus souvent par des modifications des conditions d'érosion et d'accumulation qui influencent directement la morphologie du trait de côte. Le changement des régimes de tempêtes impacte également directement cette zone d'interface. L'évaluation des vulnérabilités environnementales et sociétales sur les zones littorales et côtières suppose donc de considérer à la fois la probabilité des aléas naturels, celle des aléas liés au changement climatique, celle des aléas liés aux activités humaines, et les dommages potentiels, directs et indirects, de ces aléas sur la population et les activités économiques. Il s'agit d'aller vers une modélisation des impacts possibles, pour laquelle la connaissance du contexte économique et social est également nécessaire. En matière de vulnérabilité côtière, l'océanographie opérationnelle constitue une pièce majeure du dispositif de recherche-expertise, permettant la prévision de l'état de l'environnement marin et côtier, tout en alimentant la recherche grâce à la possibilité de ré-analyses comparatives des jeux de données (mesures réelles in situ et simulations numériques). Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 53 RéférenceS | novembre 2012 activités pour qu'elles ne détériorent pas cet état, voire conduisent à son amélioration, doit également s'appuyer sur la compréhension des impacts de ces pressions. Cette compréhension est encore très lacunaire, car les pressions sont multiples, interactives, etc. Par exemple, l'effet des mélanges de contaminants à faibles doses est très mal connu, mais suspecté d'être plus important que la simple addition des effets de chaque substance (effet cocktail). Néanmoins, les écosystèmes Le robot voilier VAIMOS « Voilier Autonome Instrumenté de Mesures Océanographiques de Surface » utilise la force du vent et l'énergie solaire pour des missions de mesures et d'observations. ©Ifremer/Patrick Rousseaux affectés par cette imprégnation chimique subissent aussi généralement des dégradations physiques dont les conséquences sont encore plus radicales par la perte d'habitats fonctionnels. Rappelons aussi que la connaissance de la profondeur, notamment près des côtes, là où elle peut varier rapidement, reste un enjeu majeur au 21e siècle afin de mieux connaître et modéliser les interactions entre les phénomènes hydrodynamiques (comme les tsunamis par exemple) et la topographie des fonds. Dans ce contexte, les autorités publiques sont aujourd'hui en charge de définir des objectifs de qualité des espaces marins, de mettre en oeuvre des mesures appropriées de protection et/ou de reconquête des milieux et de développer des indicateurs des effets de ces politiques. Une telle politique environnementale, en milieu côtier et littoral particulièrement, doit se fonder sur la concertation d'une part et sur l'intégration de l'expertise scientifique d'autre part. La compréhension des impacts des activités humaines sur les milieux marins côtiers et littoraux permettra d'identifier des critères de qualité pour les différents indicateurs, ainsi que les pressions à faire décroître. Enfin, l'efficacité des politiques publiques demande à être évaluée a posteriori. Les modalités de cette évaluation ne sont pas triviales et devront reposer sur la compréhension des trajectoires des écosystèmes et de leur capacité de résilience. La dimension cinétique est ici fondamentale. Les couplages entre les modèles dynamiques et les autres processus essentiels dans le domaine côtier sont à développer, notamment la prise en compte des vagues et des interactions houle-courant, ou encore le couplage océan-atmosphère. Afin d'améliorer le couplage des modèles dynamiques avec les modèles sédimentaires, biogéochimiques et biologiques, il convient d'optimiser la représentation des échanges verticaux, notamment au niveau des couches limites de fond et de surface. Un meilleur interfaçage est nécessaire entre les modèles du domaine côtier, ceux des domaines plus au large et ceux du littoral, afin de quantifier les transferts de matière et d'énergie entre ces différents domaines. Enfin, des progrès en stratégie d'acquisition et d'assimilation de données in situ devront être accomplis du fait de la spécificité des observations du domaine côtier (radars haute fréquence pour les courants par exemple) et de leur faible densité au regard des échelles spatiales des processus dynamiques. La mise en place d'un service d'océanographie opérationnelle côtière (décision CIMER décembre 2009) devra être accompagnée d'un dialogue renforcé avec la communauté nationale des chercheurs en océanographie côtière et littorale. 3. Les enjeux scientifiques opérationnels dans l'appui aux politiques publiques L'identification et la caractérisation des pressions anthropiques et des vulnérabilités qu'elles installent dans les différentes composantes du milieu marin constituent la première étape par laquelle la recherche apporte son appui aux politiques publiques. Certains des enjeux ont été décrits dans les deux piliers précédents. L'identification et la compréhension des vulnérabilités doivent permettre de construire des indicateurs pertinents de l'état des milieux. Cependant, l'action du législateur, qui vise à réguler différentes L'Ifremer, le CNRS, l'IRD, le SHOM, le BRGM, le MNHN et les Universités investissent fortement sur ces différents sujets, au travers de leurs réseaux nationaux de surveillance et d'observation, au travers d'actions d'ampleur nationale ou internationale menées par des réseaux de laboratoires (comme RESOMAR), et des projets de recherche menés plus localement et l'axe 5 du LABEX MER porté par l'UBO. Il s'agit par exemple des risques liés à l'évolution physique du milieu littoral, aux impacts des événements extrêmes et du changement climatique, ou de la caractérisation et du suivi des écosystèmes marins (DCSMM), qui constituent des enjeux majeurs et font l'objet de nombreuses recherches collaboratives et 54 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer d'observations et études en appui aux politiques publiques, en métropole et en Outre-mer. La volonté est aujourd'hui, via des concertations nationales (comme celle précisément organisée dans le cadre de l'élaboration du programme Mer), ou interorganismes, de mettre en cohérence et en communication l'ensemble de dispositifs et centre de compétences afin de construire un système coordonné de recherche et d'expertise, susceptible d'agir à la fois sur le plan des recherches fondamentales nécessaires, que sur celui de l'appui aux politiques publiques. Modélisation côtière opérationnelle L'ambition d'un système de modélisation côtière opérationnel est de restituer, au travers de formalismes mathématiques et de méthodes numériques, le meilleur niveau de compréhension du fonctionnement de l'environnement (physique, chimique, sédimentaire et biologique) afin d'en prédire les évolutions sous la pression d'une combinaison de forçages. Il s'agit de coupler le modèle dynamique d'océan régional et côtier avec les modèles d'atmosphère, de vagues, de sédiments, les modèles biologiques, et les modèles littoraux (ces derniers ayant l'objectif de représenter les échelles plus fines dans les zones peu profondes affectées par le déferlement des vagues). Afin d'améliorer le couplage des modèles dynamiques avec les modèles sédimentaires, biogéochimiques et biologiques, il convient d'optimiser la représentation des échanges verticaux, notamment au niveau des couches limites de fond et de surface. Un meilleur interfaçage est nécessaire entre les modèles du domaine côtier, ceux des domaines plus au large et ceux du littoral, afin de quantifier les transferts de matière et d'énergie entre ces différents domaines. Enfin, des progrès en stratégie d'acquisition et d'assimilation de données in situ devront être accomplis du fait de la spécificité des observations du domaine côtier (radars haute fréquence pour les courants par exemple) et de leur faible densité au regard des échelles spatiales des processus dynamiques. La mise en place d'un service d'océanographie opérationnelle côtière (décision CIMER décembre 2009) devra s'accompagner d'un dialogue renforcé avec la communauté nationale des chercheurs en océanographie côtière et littorale. La prospective « océanographie opérationnelle » (voir pilier 1) sera l'occasion de mobiliser la communauté scientifique sur cette question. Régulations des activités maritimes Les activités développées dans l'espace marin, notamment celles qui sont en lien avec les nouveaux enjeux des énergies marines, nécessitent des données d'observation in situ pour la recherche et pour la sûreté maritime. Elles requièrent également que soient précisées leurs qualifications juridiques Observatoire socio-économique des activités maritimes À la manière des observatoires de l'environnement naturel, il est nécessaire informations de développer sont une observation à toute des activités de maritimes. La collecte, le stockage et la mise à disposition de ces indispensables politique planification des usages et de développement d'une économie maritime active. Ils doivent couvrir les champs de la pêche, de l'aquaculture, des usages récréatifs, de l'extraction, du transport et des énergies nouvelles. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 55 RéférenceS | novembre 2012 56 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 4 : Programme d'action pour l'Outre-mer français 1. Contexte et enjeux scientifiques Avec sa zone économique exclusive d'une superficie d'environ 11millions de km , la France dispose du second espace maritime 2 mondial. L'Outre-mer en représente la composante essentielle (près de 97 %), située dans les grands océans (Atlantique, Pacifique, Indien et Antarctique). Les états généraux de l'Outre-mer, les programmes de développement économique des collectivités, le Grenelle de l'environnement puis le Grenelle de la mer et le Conseil Interministériel de l'Outre-mer (CIOM) de novembre 2009 ont exprimé des attentes fortes et variées portées par la mer ainsi que l'objectif de promouvoir le développement endogène des régions et pays d'Outre-mer. L'Outre-mer offre à la France des opportunités et des responsabilités en matière de recherche et d'innovation. Dans le prolongement de la Stratégie nationale de recherche et d'innovation menée par le ministère chargé de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, il a été mené en 2010 une réflexion sur les « Stratégies territoriales pour les Outre-mer » (STRATOM) dans laquelle l'espace marin a pris une place prépondérante et qui a servi de support à cette partie du « Programme MER ». Les Outre-mer français s'inscrivent dans 5 cadres juridiques différents : · Les départements et régions d'Outre-mer, (DOM-ROM ou DROM) à statut équivalent aux départements et régions de métropole (Guadeloupe, Martinique ; Guyane, la Réunion et récemment Mayotte). Les DOM-ROM font partie de l'Union Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 57 RéférenceS | novembre 2012 européenne au titre des régions ultrapériphériques (RUP). alors qu'elle constitue un élément essentiel pour limiter les effets de l'érosion des sols, de la montée du niveau de la mer et de la pollution. C'est également une nourricerie pour de nombreuses espèces de poissons et de crustacés peuplant les eaux littorales, lagons et barrières coralliennes proches. La préservation de cette biodiversité passe par la mise en place d'aires marine protégées dont la conception et la gestion demandent un effort important de recherche sur la compréhension du fonctionnement des écosystèmes. · Les collectivités d'Outre-mer (COM) à statuts divers : Polynésie française (Pays d'Outre-mer), Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon (collectivité territoriale) et Wallis-et-Futuna (Territoire). Ces territoires n'appartiennent pas à l'UE. · La Nouvelle-Calédonie constitue une collectivité sui generis. · Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). En 2007, Les TAAF ont intégré un district supplémentaire : les îles Éparses (Bassas da India, Europa, îles Glorieuses, Juan de Nova, Tromelin). · L'île Clipperton, une propriété domaniale (donc privée) de l'État administrée par le ministre chargé de l'Outre-mer (donc le Ministère de l'Intérieur assisté d'un Secrétariat d'État). Le processus en cours, dans le cadre de l'ONU, pour l'extension des zones sous juridiction nationale (EXTRAPLAC) ouvre des perspectives nouvelles, mais seuls les DOM, les COM et la Nouvelle-Calédonie sont habités de manière permanente. Chaque Outre-mer présente des enjeux en matière de connaissance du système « mer », d'exploitation durable des ressources marines et de gestion de l'espace côtier. Nous ne les reprendrons pas à ce stade, car ils sont exposés dans les autres piliers. En revanche, la spécificité de l'Outre-mer vis-à-vis de la biodiversité, de la vulnérabilité à l'impact du changement global, des pressions anthropiques et des risques naturels mérite un exposé particulier. La biodiversité marine des Outre-mer est en effet L'impact du changement global, sur les écosystèmes marins d'Outre-mer, généralement insulaires, est bien plus sensible qu'en métropole. L'élévation de température, la montée et l'acidification des eaux modifient le fonctionnement des écosystèmes. Les blanchissements coralliens sont plus fréquents et on observe le changement du comportement des animaux avec des conséquences sur la biodiversité et les ressources exploitables. Il existe ici un fort besoin de recherche sur les scénarios à envisager, à court, moyen et long terme. Les pressions anthropiques vont continuer à se multiplier avec la croissance démographique (introduction d'espèces, urbanisation du littoral à la Réunion, industrie du nickel et du cobalt en Nouvelle-Calédonie, urbanisation du littoral et orpaillage en Guyane, déficiences dans la gestion et le traitement des déchets, agriculture et autres pressions humaines dans la Caraïbe, etc.). Les questionnements scientifiques correspondants couvrent le suivi, la compréhension et la modélisation des effets d'origine anthropique avec identification des pollutions majeures, évaluation des risques environnementaux et leurs conséquences sur la santé humaine ; avec une finalité qui est Holothurie ou concombre de mer « Stichopus variegatus » dans le lagon de Nouvelle-Calédonie. Photo réalisée dans le cadre du projet de recherche IBANOE dont l'objectif est d'identifier de nouveaux indicateurs des apports anthropiques (nutriments, métaux lourds) et du fonctionnement trophique du lagon Sud-Ouest de Nouvelle-Calédonie. © CNRS Photothèque ­ IRD / Erwan Amice exceptionnellement riche grâce à leur situation à proximité des « hot-spot » de biodiversité, dans le Sud-ouest de l'océan Indien, les Caraïbes et la Nouvelle-Calédonie. Cela explique que 80 % de la biodiversité française se trouve Outre-mer. Quatrième pays au monde par l'étendue de ses récifs coralliens, la France met en oeuvre depuis 1999 l'Initiative française pour les récifs coralliens (IFRECOR). En soutien, elle se doit de jouer un rôle exemplaire dans la recherche sur les récifs coralliens et les écosystèmes associés, notamment depuis l'inscription par l'UNESCO au patrimoine mondial d'une partie des récifs et lagons de Nouvelle-Calédonie. Dans le cadre des investissements d'avenir, un laboratoire d'excellence, LABEX CORAIL, rassemble la communauté des chercheurs français. La mangrove, un des écosystèmes littoraux majeurs de la zone tropicale, est menacée par une pression anthropique croissante 58 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer la préservation et la réhabilitation de la qualité de recherche dans l'objectif de coordonner les initiatives, mutualiser les dispositifs, renforcer la lisibilité, non seulement dans le domaine de la recherche, mais également dans ceux de la formation et de l'innovation qui lui sont étroitement liés. Concernant les moyens à la mer, la majorité de la flotte océanographique française a été réunie en 2011 dans une unité mixte de service (UMS-FOF) qui organise chaque année des appels d'offres de campagnes faisant l'objet d'une évaluation scientifique et d'une programmation unifiée. L'UMS-FOF mobilise les navires océanographiques de l'Ifremer, de l'IPEV, du CNRS et de l'IRD. Dans ces appels d'offres, le prépositionnement des navires en Outre-mer est régulier pour les navires de taille moyenne de l'IRD (Alis, basé en Nouvelle-Calédonie et Antea qui est susceptible d'intervenir dans l'Océan Indien et les Antilles), tandis que l'IPEV et l'Ifremer interviennent de manière plus occasionnelle avec des navires de grande taille (Marion-Dufresne II, Atalante,...). Par ailleurs, les bâtiments hydro- l'environnement littoral. Les risques naturels touchent les ROM-COM qui, par leur position géographique et leur contexte géologique, sont particulièrement sujets aux aléas de type météorologique (tempêtes, cyclones, inondations) et géologique (glissements de terrain, séismes, tsunamis, éruptions volcaniques ou érosion côtière). Ces risques font l'objet de travaux de recherche souvent conduits par les organismes nationaux (MétéoFrance, Shom, BRGM, IPG, IRD, Ifremer,...) et s'appuient sur des observatoires existants (volcans, séismes) ou en devenir comme les systèmes d'alerte aux tsunamis en océan Indien et dans les Caraïbes. 2. Analyse stratégique du positionnement national 2.1 La présence de la recherche française Outre-mer L'effectif total des personnels de recherche et d'enseignement supérieur, toutes catégories confondues, dépasse légèrement 3600 personnes, soit environ 1,6 % du total des personnels employés par les universités et opérateurs publics en France (source OST, 2010). Cette présence est bien moindre qu'en métropole. Pour mémoire, la population totale des territoires d'Outre-mer représente 4 % de la population française. Les infrastructures de recherche relèvent de trois catégories d'instruments : océanographiques opérés par le SHOM, effectuent régulièrement des levés bathymétriques et des campagnes de mesures océanographiques lors de leurs déploiements en Outre-mer et dans les espaces maritimes sous responsabilité française. Cependant, il existe un écart important entre les besoins de l'Outre-mer et les moyens disponibles. Plusieurs projets d'équipement, pour des bateaux de taille moyenne à faible, du type navire de station marine, sont en gestation. L'accès à des navires étrangers est possible dans le cadre des échanges de temps navire organisés par l'OFEG (Ocean Fleet Exchange Group), du programme européen Eurofleets, et pour des observateurs de l'État côtier sur les navires étrangers effectuant des recherches dans les eaux sous juridiction (ZEE). Des programmes internationaux associant des équipes de recherche françaises mobilisent régulièrement les flottes océanographiques étrangères dans les ZEE d'Outre-mer (Flotte sud-africaine dans le programme MESOBIO sur le Canal du Mozambique, Flotte japonaise dans les Mascareignes pour la recherche des zones de ponte des Anguilles, etc.). Enfin, il reste toujours le recours à des affrètements (cas de la campagne Marquise mobilisant un navire Néo-Zélandais). Plusieurs bases de données et collections sont alimentées par · quelques très grandes infrastructures : Cyclotron de l'océan Indien ; laboratoire P3 en Guyane et à La Réunion ; réseau d'antennes pour l'observation de l'environnement assiste par satellite en Guyane, Nouvelle-Calédonie et La Réunion ; Grand Observatoire du Pacifique Sud ; composante IRD et « tout océans » de la Flotte Océanographique Française, etc.; · plusieurs plates-formes d'observation et de mutualisation d'outils (santé ; climat ; risques naturels) ; · de nombreuses collections de ressources biologiques et des bibliothèques. La STRATOM recommande le développement d'infrastructures de recherche partagées précisant qu'un « consensus se dégage sur les équipes de recherche, la liste indicative ci-après n'est pas exhaustive : banque de microalgues des fonds marins (ARVAM, la Réunion), zoothèque et banque d'ADN à l'Université de la Réunion, collection et base de connaissance sur les coraux (IRD, MNHN, Université de la Réunion, ECOMAR, TIT biodiversité IFRECOR/MNHN et COREMO financés dans le cadre de l'IFRECOR), collection de microorganismes marins de Nouvelle-Calédonie, les bases Ifremer la mise en place et la pérennisation de grands observatoires de recherche, de collections et de bases de données ». Elle préconise de transposer le concept de grand observatoire développé dans le Pacifique Sud. Le Grand Observatoire du Pacifique Sud (GOPS), GIS créé en 2009 et qui fédère actuellement 17 établissements de Harmonie pour le Système d'Information Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 59 RéférenceS | novembre 2012 Halieutique (SIH) et Quadrige pour les données 2.3 Le rayonnement régional de la France depuis l'Outremer L'Outre-mer contribue pour une part importante à la position privilégiée de la France sur la scène internationale et à sa capacité d'influence. Ses caractéristiques, notamment marines, permettent à la France de siéger dans la plupart des instances internationales où elle est souvent doublement présente : au titre de la France elle-même (par sa présence dans la zone concernée), mais aussi comme membre de l'Union européenne. C'est le cas dans les commissions régionales des pêches (CCAMLR, IOTC, ICCAT, IATTC,...) ou bien dans les associations scientifiques (WIOMSA, PSA). environnementales, l'Observatoire thonier de l'IRD dans l'océan Indien et l'Atlantique tropical, etc. Le Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) a la garde des collections nationales d'histoire naturelle et, avec ses homologues internationaux, a en charge la coordination le référencement des espèces et la conservation des spécimens notamment les types. Les équipes locales revendiquent à juste titre la possibilité de disposer de collections locales de référence. L'articulation entre les deux exigences peut quelques fois être source de tensions. 2.2 L'Outre-mer français et l'Union européenne Les régions d'Outre-mer sont considérées comme les L'activité de recherche en général, et les sciences marines en particulier, doivent s'envisager à l'échelle internationale avec les pays de la zone, animés par l'intérêt partagé d'une bonne gestion des espaces marins. Ce sont des activités particulièrement propices au désenclavement des espaces ultramarins. Dans les démarches de coopération scientifique régionale, il faut considérer de manière distincte les pays les moins avancés et les puissances émergentes, ou déjà développées. Les organismes de recherche rassemblés dans l'alliance l'Agence ALLENVI mènent de différents Recherche programmes pour le internationaux, mais ils se sont accordés pour confier à Inter-établissement Développement (AIRD) une fonction spécifique d'aide et de soutien pour collaborer avec les pays du Sud. L'AIRD a donc un rôle particulier à jouer dans l'avenir à ce niveau. 2.4 Analyse globale du système de recherches marines Outre-mer Le tableau présenté pp. 62-63 présente les points forts et points faibles du système de recherche marin outre-mer. Il est à lire au regard des conditions particulières de chacune des collectivités d'Outre-mer et des évolutions les plus récentes (notamment en termes de structuration de la recherche) qui peuvent être résumées ainsi : Dans le Pacifique : « frontières actives » de l'Europe (statut spécifique de Régions Ultra-Périphériques ­ RUP). À ce titre, les actions de coopération scientifique internationale menées depuis une ROM contribuent, avec une forte visibilité, au rayonnement dans la région, de la France et de l'Europe, et donc de leur influence sur les pays de la zone. Plusieurs programmes européens traitent des sciences marines on été financés par différents instruments (FED de l'Ifremer pour la perliculture en Polynésie, RunSeaScience de l'IRD à La Réunion, PACE-Net de l'IRD dans la région Pacifique,...). Il faudrait cependant que les besoins en financement de la recherche, dans les ROM et COM, soient davantage pris en compte par l'U.E dans le futur. Ceci semble difficile sans une véritable stratégie de lobbying au niveau bruxellois. Elle devrait s'appuyer sur les acteurs scientifiques et institutionnels français concernés (universités, collectivités et organismes ultramarins et métropolitains), mais aussi sur les autres acteurs des pays membres européens concernés par leurs RUP (Portugal et Espagne) ou encore les pays européens possédant des liens étroits avec leurs PTOM (Danemark, Grande-Bretagne, Pays-Bas, France). Les thèmes scientifiques à promouvoir pourraient être des thèmes fédérateurs d'intérêt mondial (aires marines protégées, protection des récifs coralliens,...). La recherche nécessaire à l'application de la réglementation européenne dans les RUP a été un argument employé pour les eaux continentales et littorales (Directive-cadre sur l'eau) ou bien pour la gestion des ressources (Règlement sur la collecte des données de pêche). Malheureusement la Directive Cadre « Stratégie pour le Milieu Marin » (DCSMM) n'est pas directement applicable dans les RUP. · Il a été créé en 2009, au niveau régional Pacifique, un Grand Observatoire de l'environnement et de la biodiversité terrestre et marine du Pacifique Sud (GOPS) qui fédère la plupart des organismes français de recherche impliqués dans la zone. Vu l'importance des enjeux maritimes océaniens, les sciences marines sont abondamment représentées dans les structures du GOPS avec un programme scientifique structuré. · Le financement par l'Europe du réseau PACE-Net 60 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer rassemblant les scientifiques de la région va pouvoir servir de support pour le développement international du GOPS. vient de se terminer, a permis de montrer le dynamisme des acteurs locaux de sciences marines autour de projets communs de recherche réalisés à l'échelle régionale. · La Polynésie française dispose d'un immense espace marin, vers lequel elle se tourne résolument depuis la réalisation du programme ZEPOLYF mené dans les années 2000, les États généraux de l'Outre-mer ont confirmé la volonté politique d'intégrer l'espace marin dans la politique de développement. Le projet de création d'une UMR-EIO (UPF, IRD, Ifremer, ILM) traduit la volonté de structuration de la recherche locale sur les thématiques « biodiversité » et « insularité ». · La Réunion a fortement structuré sa politique de recherche et d'innovation, dans différents domaines avec par exemple l'OVPF (Volcanologie), le GIP CRVOI (maladies infectieuses), la CYROI (cyclotron) et le pôle de compétitivité Qualitropic. Pour l'instant, les sciences marines sont concernées uniquement pour partie par l'OSU-R porté par l'Université., mais l'élément fédérateur le plus important est le projet d'implantation commune des acteurs en sciences de la mer sur le site du Port. Soutenu depuis 2007 par le Conseil Régional sous différentes appellations, le financement CPER ne s'est toujours pas concrétisé, mais cela reste la première des priorités pour toute la communauté. · La Nouvelle-Calédonie dispose de ressources minérales terrestres (nickel et cobalt) donnant des moyens aux collectivités locales dans les politiques de recherche et d'innovation notamment dans l'objectif de préserver les milieux et leur biodiversité y compris marins. C'est dans ce contexte que se structure progressivement la recherche en NC avec notamment la création d'un COSRI-NC (comité de stratégie recherche et innovation) et d'un COST (Comité scientifique et technologique) aujourd'hui opérationnels et prémices à la création d'un Pôle de recherche et d'enseignement supérieur (PRESICA), regroupant les acteurs locaux de la recherche (IRD, Ifremer, BRGM et IAC) autour de l'Université de NouvelleCalédonie. L'innovation est soutenue de la par l'Agence de développement économique Nouvelle-Calédonie · Tout nouveau département, Mayotte accueille depuis 2010 un Parc naturel marin, le PNM, et compte développer une filière aquacole. Deux opportunités qui pourraient se traduire par la construction progressive d'une implantation commune aux acteurs de sciences marines. · Le Livre bleu Océan Indien, préparé par les services de l'État en décembre 2011, envisage le futur de la politique maritime de l'État français dans l'ensemble de l'OI. Il prévoit la création d'un Conseil maritime du sud de l'océan Indien, sorte de Conseil Économique et Social de l'OI, qui regrouperait l'ensemble des acteurs de la société. Sa déclinaison « Recherche » confirme la volonté de renforcer la coordination/structuration de la recherche française en sciences marines dans l'OI. Ils proposent la création d'un « Pôle Scientifique Mer Océan Indien » (PSMOI) pour rassembler les centres réunionnais et mahorais. Pour l'instant, les organismes intervenant dans la zone ne se sont pas exprimés officiellement, constituer mais le PSMOI d'un pourrait grand certainement observatoire. l'élément maritime (ADECAL). Les activités marines y sont représentées au travers de la pêche et de l'aquaculture. Observatoire sous-marin MICADO dans un lagon de Nouvelle-Calédonie. ©Ifremer/Gilles Hervé · Les TAAF administrent des territoires sans habitant permanent sur lesquels l'activité scientifique est prépondérante. Le GIP IPEV a été spécialement créé pour soutenir l'activité scientifique en Antarctique et dans les terres australes où sont implantées des stations de recherche. Le rattachement des îles Éparses aux TAAF offrent de nouvelles opportunités de recherche qui se sont concrétisées en 2011 par un Programme îles Éparses, qui a sélectionné des projets sur appel d'offres, où sont intervenus de nombreux organismes. Ce mode de fonctionnement est tout à fait adapté au monde de la recherche et devrait servir d'exemple pour l'avenir. Dans l'Océan Indien : · La STRATOM, publiée en 2011, recommande la transposition à l'Océan Indien d'une structure régionale de type Grand Observatoire comme le GOPS pour fédérer les acteurs de la recherche. Même si ce type de dispositif ne leur serait pas spécifiquement dédié, elles y auraient toute leur place, car elle représente un enjeu majeur de la recherche dans la région. · Le succès du projet européen REGPOT Run-Sea-Science, qui Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 61 RéférenceS | novembre 2012 Tableau : Forces et faiblesses du système de recherches marines outre-mer (analyse SWOT) Forces Structures Structures Faiblesses · · · · Des universités attractives sur des domaines émergents - Articulation forte en écologie et biodiversité tropicale avec 2 masters (UAG, Univ. Réunion), et débouchés locaux; Un observatoire structuré d'envergure internationale établi en Polynésie française, le CRIOBE, renforcé par la création en 2009 de l'Institut des récifs coralliens; Structuration en Nouvelle Calédonie avec la création des COST et COSRI; La création du « Pôle d'Excellence Mahorais » et la création du Parc Naturel Marin de Mayotte. · Manque de stations marines et de navires côtiers en outre-mer, manque de coordination entre acteurs locaux et nationaux, difficulté à mobiliser les infrastructures nationales (navires, moyens aériens), et à établir une vision pluriannuelle de la programmation des zones géographiques qui seront couvertes par les navires hauturiers. · · · Manque de visibilité de l'implication (situation et perspectives) de l'ultra-marin dans l'observatoire national de la biodiversité (Loi Grenelle 1 ­ article 25), ECOSCOPE, LIFEWATCH et GEOBON; Faible interopérabilité des bases de données; L'absence de stations d'observations sous-marines permettant d'acquérir des séries temporelles de données limite le progrès de la compréhension des processus fondamentaux de fonctionnement de la planète et de la connaissance et de la prévention des risques; Technique · · ORE implantés localement (coordination et évaluation désormais intégrées à l'Alliance Allenvi); Performances techniques et polyvalence des navires scientifiques hauturiers et régionaux portés par l'Ifremer, l'IPEV et l'IRD. · Difficulté à assurer la pérennité d'infrastructures pour créer et accueillir des collections locales. Gouvernance & coordination Des coordinations entre établissements et universités existantes ou en Gouvernance & coordination cours de structuration : · · · · Difficulté à mobiliser des équipes nationales sur des · · · · · · · · · · le rôle majeur de l'IPEV (coordination et agence de moyens) pour les mers australes ; le pôle biodiversité et écosystèmes hauturiers à la Réunion articulé avec le projet de « Pôle Mer Réunion »; des synergies identifiées entre Ifremer et IRD sur les ressources halieutiques ; Fédération de recherche EBS (Environnement Biodiversité Santé) à la Réunion; Bonne coordination locale et internationale avec l'IFRECOR, en synergie avec l'ICRI et le GDRI «Biodiversité des récifs coralliens»; Coordination renforcée par la création du Grand Observatoire de l'environnement et de la biodiversité terrestre et marine du Pacifique Sud (GOPS); Articulation recherche - acteurs locaux; bio-ressources marines locales, pêche et aquaculture, et toxicologie (ciguatera) potentielle sur les ressources naturelles, Programme ZONECO en Nouvelle-Calédonie, projet de pôle régional mer à la Réunion, cohérence entre orientations du CIOM et les activités de recherche sur les bio-ressources marines (en matière de valorisation, le point le plus fort porte sur l'aquaculture et l'halieutique). problématiques locales. Faible articulation du tripode recherche - enseignement supérieur perspectives locales (sauf la Réunion) Faible articulation entre acteurs des recherches marines et terrestres sur les problématiques littorales (pollutions, pressions anthropiques) à l'exception du DYNECAR (UAG) ; Articulation des problématiques marines avec les SHS et la santé quasi inexistantes (sauf toxicologie ­ ciguatera en PF avec l'Institut Louis Malardé et l'IRD et l'Institut Pasteur en NC et les études écosystémiques du CRIOBE) · Peu de recherche sur la gouvernance des pêches, la logistique pour la consommation, l'exportation des productions locales (pêche, aquaculture), la pêche de loisirs. Autres · · · · · Absence d'animateurs de réseau et manque de visibilité des équipes locales, difficulté à établir une vision complète des équipes et des projets, « Trou noir » de l'Eranet Biome. L'ultramarin est insuffisamment pris en compte dans le PCRD. Peu de projets ANR et européens portés par des équipes locales. Tissu économique trop réduit pour susciter des demandes structurées de travaux de recherche; aucun financeur n'a inscrit l'espace marin dans ses priorités. Ressources humaines (compétences) insuffisantes pour bénéficier des résultats de la recherche et participer à l'orientation et à l'observation ? Mobilisation insuffisante de l'AIRD (Agence inter-établissements de recherche pour le développement) sur l'espace marin outre-mer pour y mener des actions en coopération régionale. Autres · · Intérêt scientifique en sciences de la planète et de l'environnement (géosciences, climat, écologie et biodiversité) porté par les organismes nationaux et des collaborations internationales. Implication des organismes de recherche dans les programmes nationaux de cartographie pour l'extension du plateau continental (EXTRAPLAC). 62 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Opportunités Structures Menaces · Perspectives de création d'un « Pôle Mer » en Guyane (volonté du Conseil Régional). Technique Technique · Possibilités de coordination avec l'étranger et d'exploitation par les équipes françaises des données des campagnes scientifiques étrangères effectuées dans la ZEE française. · Manque de moyens logistiques pour l'accès à l'observation et à la surveillance de territoires éloignés (îles Eparses, PF etc.), menace accrue par la diminution des moyens disponibles des organismes de recherche nationaux, notamment pour la flotte. Gouvernance & coordination · Engagements du Grenelle de la mer et du CIMER : synergie des moyens à la mer et création fonction garde côte ; synergies Gouvernance & coordination recherche / programmes nationaux pour la cartographie, EXTRAPLAC, · Manque de coordination, risques de redondances et divergences entre l'exploration et l'exploitation des ressources minérales et initiatives et projets locaux et acteurs (équipes, projets, organismes) nationaux. Risque de dispersion de projets non coordonnés portant sur des thématiques similaires. énergétiques, création et extension de zones protégées (aires marines protégées); · · Partenariats : Communauté du Pacifique Sud pour la pêche hauturière (thonidés) et côtière; La volonté de l'Etat, affichée dans le Livre bleu Océan Indien, d'une structuration de la recherche française dans l'Océan Indien avec la création d'un PSMOI s'appuyant sur les futurs « Pôle d'excellence mahorais » et « Pôle Mer Réunion »; · Freins à la diffusion des données : faible reconnaissance des chercheurs qui les ont obtenues, crainte du pillage et d'utilisations concurrentes, confidentialité, droits d'auteur, conflits potentiels entre collections locales et collections nationales liées au manque de règles sur l'utilisation, la question de la mise en forme et la validité de la donnée. Faut-il fournir les données brutes ou des données élaborées etc.? · · La structuration en cours de la recherche en Nouvelle Calédonie avec la création du futur PRESICA; Coopération régionale dans le bassin de l'océan Indien (COI), et entre Nouvelle-Calédonie et Australie. Autres · Perspectives de développement économique local des ressources marines soutenues par les Etats généraux de l'outre-mer et les stratégies régionales d'innovation ; soutien politique à la Réunion et Polynésie française aux projets d'énergies marines ; Autres · · Risques naturels (volcaniques, sismiques, tsunamis, cyclones etc.) pouvant affecter les installations et observatoires dans les îles ; Piraterie dans l'océan Indien et le canal du Mozambique empêchant la réalisation de certaines campagnes scientifiques marines. · Initiative de l'INEE, du MOM et des TAAF sur les îles Eparses ; grandes expéditions biodiversité MNHN-IRD en Nouvelle-Calédonie après le Vanuatu et Madagascar. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 63 RéférenceS | novembre 2012 · Les Antilles font preuve de dynamisme en recherche et enseignement supérieur dans le domaine de la biodiversité des écosystèmes tropicaux et des mangroves, et ont développé des synergies entre les domaines terrestres et marins au sein du DYNECAR (EA 926 de l'UAG). coordination de la recherche à l'échelle régionale permettant d'ancrer les Outre-mer dans leur contexte international ainsi que (ii) des programmes thématiques dont certains pourront être menées sur un DOM ou PTOM spécifique pour lequel il pourrait y avoir un enjeu local majeur. Leur mise en oeuvre et les objectifs scientifiques devront répondre aux critères suivants : · La Guyane dispose d'un littoral riche de ressources biologiques (mangrove, monts sous-marins) et halieutiques potentielles dont la connaissance et l'exploitation méritent d'être développées et rationalisées pour accompagner le fort dynamisme démographique. Le besoin de connaissances sur le milieu marin en appui aux politiques publiques ne devrait pas manquer d'être amplifié si les perspectives d'un développement de l'exploitation de pétrole off-shore dans la ZEE guyanaise étaient confirmées. C'est dans ce contexte qu'il convient de prendre en compte la volonté de la collectivité de créer localement un « Pôle mer ». · Ils seront définis dans le temps et dans l'espace · Ils devront s'inscrire au sein des 3 piliers suivants : (i) contribuer à la connaissance et compréhension du système Mer ; (ii) contribuer à l'exploitation durable des ressources marines et (iii) contribuer à la gestion de l'espace côtier marin . · Ils devront aussi correspondre à des enjeux socioéconomiques importants avec une vision des objectifs qui sera partagée avec les collectivités concernées. · Le respect de ces piliers ne doit pas laisser de coté les aspects biodiversité, aléas-risques-vulnérabilité et surtout les sciences humaines et sociales dans leur dimension la plus large, de manière à couvrir la demande locale. · Les fonds devront pouvoir être mobilisables au niveau des principaux guichets de financement de la recherche (ANR, M.O.M., U.E., CPS, AFD, collectivités,...) · Des moyens humains seront mobilisables auprès des organismes concernés. · Ils nécessiteront une approche pluri-disciplinaire et pluriAquaculture de l'ombrine ocellée à la station Ifremer de Martinique. ©Ifremer/Olivier Dugornay organisme. 3.2 Options pour une coordination de la recherche à l'échelle régionale · Saint-Pierre et Miquelon reste aujourd'hui le « parent pauvre » avec une filière pêche moribonde. Seul l'Ifremer y est aujourd'hui implanté avec un agent permanent. Les actions menées localement, avec un appui fort assuré par les équipes métropolitaines, concernent l'halieutique (évaluation des stocks dans la perspective de la renégociation des accords de pêche avec le Canada) et le développement d'une filière aquacole (élevage du pétoncle géant). Il convient de souligner la réalisation en 2011 du dossier technique EXTRAPLAC, pour St-Pierre et Miquelon. La France dispose aujourd'hui du dossier technique en appui à une éventuelle demande officielle d'extension juridique de son plateau continental au large de SPM. 3.2.1 Région « Pacifique » : Cette région, regroupant la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie Française a vocation à s'appuyer sur un outil préexistant, le GIS-GOPS. Cette démarche, qui s'inscrit dans le long terme pourra évoluer en fonction des souhaits de ses membres. Dans le contexte actuel du financement de la recherche publique où le financement par projets remplace le récurent des organismes, le GOPS n'a pas été en capacité de mobiliser des fonds autres que ceux des budgets des organismes membres. 3. Proposition d'actions Outre-mer 3.1 Proposition de critères de définition des priorités : Il est proposé de sélectionner (i) des options pour une Le projet européen PACENET s'inscrit dans cette stratégie puisqu'il s'agit de faire émerger des priorités régionales qui devraient être ensuite reprises par l'U.E. et faire l'objet d'appels à projets « ciblés au niveau régional ». Ce projet n'est 64 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer pas exclusivement tourné vers les sciences de la mer, mais les réunions tenues jusqu'ici donnent une place importante à la biodiversité et à l'environnement marin. Il est donc proposé : Mayotte ; · intégration au niveau international dans la zone du sudouest de l'océan Indien ; Dans ce cadre, le Pôle Scientifique Mer Océan Indien (PSMOI) pourrait rassembler les acteurs des sciences marines impliqués : · De continuer à entretenir, au sein du GOPS, un projet scientifique et technique « MER » qui réponde aux différents critères cités ci-devant ; · Au sein de la future implantation commune du Port à La Réunion (Pôle Mer Réunion) ; · De s'organiser pour promouvoir ce projet auprès de l'ensemble des financeurs institutionnels dans un objectif de cofinancement par ces différents guichets ; · Au sein du projet d'implantation mahorais ; · Dans le programme « Îles Eparses » ; · Dans le projet européen RunSeaScience. La compétitivité des équipes en place leur permet de candidater sur les moyens communs de financement de la recherche type ANR, mais un projet scientifique spécifique aux sciences marines, comme il en à déjà été rédigé pour nourrir le projet d'implantation commune à La Réunion, ou bien pour construire le projet RunSeaScience, reste le meilleur moyen d'assurer une bonne représentation dans le futur Grand observatoire sous l'égide du PSMOI. 3.3 Programmes locaux thématiques : · De ne pas limiter cette démarche aux seuls bailleurs français et européens, mais de l'étendre aux institutions régionales (CPS) et aux autres partenaires potentiels de la zone (Australie, Nouvelle-Zélande, Japon, Fidji,...). 3.3.1 Chlordécone aux Antilles : Un « programme marin Chlordécone » identifié au sein du Programme National Chlordécone 2 pourrait fédérer de nombreux membres d'AllEnvi. Il conviendrait dans un premier temps Aquaculture du Platax au Centre Ifremer du Pacifique (Tahiti). ©Ifremer/Olivier Dugornay d'identifier le programme scientifique correspondant et d'en assurer la promotion auprès des bailleurs de fonds pour mobiliser les financements nécessaires, là aussi dans une logique de cofinancements. 3.2.2 Région « Océan Indien » : Cette région regroupant La Réunion, Mayotte et les Îles Éparses et TAAF se singularise par la présence d'équipes de recherche suffisamment fournies pour atteindre une masse critique capable de positionner la France à l'échelon international. Dans ce contexte très favorable, l'université de La Réunion est à même d'apporter un support important aux démarches des organismes. Il reste maintenant à envisager la création d'une structure « chapeau » de type Grand observatoire comme recommandé dans la STRATOM pour traiter, entre autres, les enjeux suivants : · pérennisation et mise en place des observatoires de recherche ; 3.3.2 Approche écosystémique des pêches en Guyane : La filière pêche est un enjeu majeur pour l'économie guyanaise. La durabilité de cette filière (pêche crevettière, pêche sous DCP, pêcheries démersales...) est très dépendante de l'évolution du milieu aussi sa connaissance, sa compréhension et la mise en place de mesures pertinentes de gestion de la ressource justifient la mise en place d'un programme de recherche écosystémique. Un tel programme scientifique pluri-disciplinaire et pluriorganismes justifierait de fédérer certains des membres d'AllEnvi au sein d'un « programme Mer », comme cela a été évoqué à l'occasion du séminaire « Mer » organisé, en septembre 2009, dans le cadre du Gis IRISTA. Compte tenu des interactions régionales, ce programme · prise en compte des Îles Éparses ; · conséquences géostratégiques liées à la départementalisation de Mayotte ; justifierait d'être promu et mis en oeuvre en collaboration avec les partenaires scientifiques brésiliens. · développement socio-économique de La Réunion et de Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 65 RéférenceS | novembre 2012 3.4 Mobilisation de l'AIRD Les travaux menés par la STRATOM ont mis en évidence l'intérêt scientifique et géostratégique de développer l'intégration régionale des Outre-mer par un renforcement des coopérations scientifiques avec les pays de la zone. Il existe localement des initiatives internationales en sciences marines menées par les organismes français associant les Outre-mer français comme les laboratoires mixtes internationaux de l'IRD (eg. le LMI ICEMASA en Afrique du Sud) où les groupements de recherche internationaux du CNRS (eg. GDRI Récifs Coralliens). Dans le cadre d'ALLENVI, l'Agence inter-établissements de recherche pour le développement (AIRD) est plus particulièrement chargée de traiter des actions à mener avec ces pays. Les deux grandes régions proposées, Pacifique et Océan Indien, ainsi que le projet d'un « programme Mer » en Guyane devraient permettre de mobiliser davantage l'AIRD pour développer des coopérations avec les PED et pays émergents potentiellement concernés, à savoir Brésil, Fidji, Madagascar, Afrique du Sud, Pays de la COI, etc. 66 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer De l'importance d'un Programme Mer pour le développement et la valorisation en sciences marines L'économie maritime pose un problème de définition et de périmètre qui s'est aplani à partir des années 1990 avec la diffusion d'études périodiques nationales (américaines, françaises, canadiennes, britanniques et autres) et des travaux européens sur le sujet. Des différences entre les diverses études demeurent, mais elles ne sont pas fondamentales. Pour fixer les idées, on peut s'appuyer sur la définition qu'en donne l'approche française. Depuis 1997, les rapports périodiques de l'Ifremer « Données économiques maritimes françaises » (DEMF) englobent dans l'économie maritime les ensembles suivants : transport maritime et avec le fluvial du Benelux prochainement. Ce point amène une remarque plus générale : il n'y a pas de lien simple entre économie maritime et localisation géographique. De nombreuses activités situées sur le littoral sont sans rapport avec le maritime ; inversement, des activités considérées comme maritimes peuvent être localisées loin de la mer : le fluvial, le manufacturier (équipement naval, construction nautique) et plusieurs types de services comme l'ingénierie offshore et l'assurance maritime. Notons enfin que le périmètre de l'économie maritime est influencé par la contrainte des statistiques disponibles. Un cas manifeste est celui des services bancaires : le financement des activités maritimes (construction de navires de pêche et de commerce, ports de pêche, de commerce et de plaisance) est peu renseigné et non pris en compte dans les DEMF bien que les banques françaises soient très présentes dans cette activité. · l'extraction des ressources vivantes et les activités aval : pêche (y compris algues), aquaculture, commerce et transformation des produits de la mer ; · l'extraction des ressources minérales et énergétiques : granulats marins, énergies marines, hydrocarbures offshore, énergies marines, mais aussi centrales électriques installées sur le littoral ; 1. L'importance de l'économie maritime D'après la définition donnée ci-dessus, l'économie maritime est d'une importance modeste pour un pays comme la France : de 1 à 1,5 % du produit intérieur brut et de l'emploi total. Elle est plus importante pour les pays très côtiers comme le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l'Italie et la Norvège. Elle croît évidemment en fonction de l'importance des ressources marines, comme les hydrocarbures pour le Royaume-Uni et les Pays-Bas. La liste des activités maritimes proposée plus haut illustre néanmoins la portée stratégique de l'économie maritime pour un pays côtier. Par exemple, les ressources offshore de minéraux et d'hydrocarbures jouent un rôle déterminant sur les marchés et la géopolitique des matières premières et de l'énergie ; le transport maritime constitue un facteur puissant de baisse des coûts des échanges mondiaux de marchandises, notamment des matières premières, et, par voie de conséquence, de l'intégration des marchés ; l'intermodalité et les interconnexions entre le transport maritime, le rail et le fluvial, actuellement débattues au niveau européen, influencent l'organisation même du transport en Europe ; le tourisme littoral constitue une part importante des dépenses de loisirs et une puissante incitation à sauvegarder le patrimoine naturel littoral ; l'état des eaux côtières est tributaire · l'industrie manufacturière et les services connexes : construction de navires civils, de navires de défense et de plaisance, équipement naval, réparation, démantèlement de navires, fabrication et pose de câbles sous-marins ; · les travaux publics maritimes et fluviaux, y c. le dragage des ports ; · un ensemble diversifié de services privés : parapétrolier et paragazier offshore (y compris construction de plateformes), tourisme littoral (hôtellerie, restauration, croisières, filière plaisance et sports nautiques, agences de voyages, musées, espaces de loisirs), transport maritime et fluvial (ports, flotte de commerce, assurance maritime) ; · les services publics : Marine nationale ; intervention de l'État en mer (sécurité, signalisation, sauvetage, éducation, sécurité sociale) ; protection de l'environnement marin ; recherche marine et océanographie opérationnelle. Comme indiqué ci-dessus, les DEMF prennent aussi en compte les travaux fluviaux et le transport fluvial de commerce. L'une des raisons tient à la croissance récente du transport fluvial conteneurisé et aux investissements de connexion avec le Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 67 RéférenceS | novembre 2012 des usages des bassins versants, et la gestion de ces eaux implique, en toute rigueur, celle de l'ensemble des activités amont : agriculture, industries, agglomérations urbaines. Ainsi, les liens sont déterminants entre activités maritimes et économies nationales. employés (de préférence en équivalents temps plein), exportations, rémunérations versées. Dans le cas du secteur public, on s'intéresse aux effectifs employés et aux budgets de fonctionnement et d'investissement ; certains sous-ensembles spécifiques de ces budgets sont mis en évidence (p.ex. sécurité, enseignement maritime). 2. La recherche en sciences marines en lien avec l'économie maritime La recherche marine ou plus exactement ses applications opérationnelles ont des liens avec les questions d'économie maritime, que la réglementation nationale et européenne met périodiquement en évidence. Par exemple : Pour fixer les idées, la mise à jour 2011 des DEMF estime la valeur ajoutée 2009 de l'économie à 22 milliards d'euros et l'emploi à 460 000 environ. Ces résultats indiquent une baisse par rapport à 2007 d'environ 20% pour la valeur ajoutée et 5% pour l'emploi. Le ralentissement économique depuis 2008 en est l'une des causes, mais l'importante révision des statistiques nationales en 2008 a pu jouer aussi. Le problème majeur auquel est confrontée l'élaboration du jeu d'indicateurs est que plusieurs secteurs de la nomenclature statistique nationale comprennent des sous-ensembles maritimes sans les distinguer : granulats marins, énergie marine, équipement naval, câbles sous-marins, assurance maritime, tourisme littoral. La mer n'est pas un critère qui structure la comptabilité nationale ; pour nombre de produits industriels, les applications au domaine maritime constituent un débouché commercial parmi d'autres. Dans de tels cas, la méthode consiste à estimer les indicateurs recherchés à partir de données des associations professionnelles ou d'autres sources. Le tourisme littoral pose des problèmes liés à la difficulté à distinguer le littoral dans les comptes du tourisme : le seul recours vient des enquêtes annuelles auprès des touristes sur leurs espaces géographiques de loisirs et de consommation. · dans le contexte de la baisse des stocks halieutiques visible depuis les années 1980, les avis annuels des biologistes sur les totaux admissibles de capture (TAC) et autres instruments de gestion s'accompagnent depuis quelques années, à la demande des autorités européennes, d'une évaluation des impacts économiques de ces mesures ; on passe d'une gestion purement biologique à une gestion bio-économique ; · la directive-cadre « stratégie pour le milieu marin » (DCSMM, 2008) vise le « bon état » des eaux marines à horizon 2020, ce qui suppose le déploiement de moyens scientifiques de mesure, de traitement et de contrôle ; mais la mobilisation d'un tel dispositif ainsi que les efforts de gestion des eaux et des usages posent des problèmes de coûts (pour quels gains à terme ?) ; aussi la directive prévoit-elle la réalisation d'une évaluation économique initiale des usages des eaux marines (article 8), dont le choix de méthode est laissé aux États membres ; · les composantes marines du GMES et les systèmes d'océanographie opérationnelle se heurtent à des contraintes de financement, et leur pertinence peut s'évaluer par la comparaison des coûts prévisibles et des bénéfices économiques potentiels ; cette question récurrente pose des problèmes de méthode, abordés dans un nombre encore modeste d'études et de projets de recherche. 4. Développer la valorisation économique des résultats de la recherche en sciences marines Le programme national Mer doit contribuer à la promotion d'actions de nature à favoriser le développement socioéconomique du monde maritime. Cela implique de mener, en s'appuyant sur les recherches scientifiques menées pour l'amélioration des connaissances dans les domaines cités, des actions de recherche et de développement technologique, orientées vers les enjeux 3. L'évaluation de l'économie maritime Dans la plupart des pays qui publient des études et élaborent des bases de données sur ce thème, l'économie maritime est évaluée par secteurs d'activités au moyen d'indicateurs mis à jour régulièrement : chiffre d'affaires, valeur ajoutée, effectifs industriels. La majorité des partenaires du programme national Mer s'appuient sur leurs ressources afin d'assurer tout ou partie des étapes de valorisation de leurs travaux. Leurs politiques de valorisation de la recherche leur sont propres. Cependant, le 68 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer paysage national de la valorisation est en pleine mutation. De nombreuses actions ont été impulsées afin de mettre en place une politique nationale forte par la création notamment de nouveaux acteurs permettant de mutualiser les efforts de valorisation à l'échelle régionale et nationale. Parmi eux nous comptons entre autres : les pôles de compétitivité, les SATT, les CVT et France Brevets. La majorité des partenaires du programme ont une articulation spécifique avec chacun de ces nouveaux acteurs. Les Pôles Mer représentent, avec leurs membres industriels, l'essentiel des activités économiques maritimes. Ils coopèrent, quand c'est justifié, avec de nombreux pôles technologiques dans l'objectif de contribuer à la construction de filières émergentes et d'instruire des projets structurants. Les pôles Mer sont donc des acteurs naturels et légitimes pour analyser les besoins prospectifs des secteurs industriels et soutenir des développements basés sur des projets coopératifs innovants. Les activités qui en découlent de l'amont vers l'aval : renforcement des compétences en gérant les activités de valorisation au plus près des laboratoires et de l'écosystème industriel, en lien avec les pôles de compétitivité. Les activités principales qui en découleront seront : · Financer les phases de maturation des inventions et de preuve de concept. · Assurer une prestation de services de valorisation auprès des acteurs locaux de la R&D qui créent la valeur ajoutée scientifique et technologique. Les Consortiums de Valorisation Thématique (CVT) auront pour rôle de proposer des services de valorisation à forte valeur ajoutée aux structures de valorisation sur des thématiques données (ex : analyse de portefeuille de propriété intellectuelle, veille...). Ces objectifs principaux seront : · Devenir le centre de ressources en intelligence économique commun aux membres du CVT, au service de multiples acteurs publics et privés, partenaires clés du CVT dans des champs sectoriels attractifs, · Une veille stratégique et d'intelligence économique afin d'identifier les secteurs clés et les technologies avancées sur lesquels il faut faire porter l'effort. · Mettre en place des analyses stratégiques en concertation avec les besoins de ses membres et de ses prospects, · Les recherches dans les technologies de base en support aux développements technologiques. Cette activité doit être menée en partenariat avec l'ensemble des organismes de recherche. · Fournir, en priorité à ses membres, mais aussi à des clients extérieurs, des analyses prospectives permettant d'identifier des domaines de recherche à fort potentiel de valorisation internationale. France Brevet détenu par l'état et la Caisse des Dépôts jouera le rôle d'intermédiaire entre les titulaires d'un brevet et les utilisateurs potentiels. Son objectif sera donc de faire se rencontrer l'offre et la demande. France Brevet sera un partenaire naturel des SATT et des CVT. Ces missions principales seront : · Les développements technologiques, afin de répondre aux besoins de la recherche scientifique en équipements lourds des grandes infrastructures de recherche. · L'élaboration et la conduite de projets technologiques en coopération avec les industriels du monde maritime. · Le transfert et la valorisation des résultats des recherches scientifiques et technologiques à la fois vers le secteur professionnel et aussi en soutien à l'action des politiques publiques par l'élaboration d'ouvrages de synthèse, de guides techniques ou l'élaboration de normes. · Favoriser la circulation des inventions en constituant un large portefeuille de droits de propriété intellectuelle issus de la recherche publique et privée en les réunissant en grappes technologiques · Les axes de développement technologique sont présentés dans l'axe transversal : l'instrumentation et le traitement du signal, activités les équipements les scientifiques, les la énergies pêche et renouvelables, les ressources énergétiques et minérales, les navales, biotechnologies, l'aquaculture, les aménagements côtiers, le génie écologique. Les SATT détenues majoritairement par la Caisse des Dépôts, des groupements universitaires et organismes de recherche présents dans les UMR, devront conduire à une plus forte professionnalisation de la valorisation de la recherche et à un · Organiser leur commercialisation sous forme de licences auprès des entreprises Afin d'assurer une meilleure valorisation de ses travaux, le programme national Mer pourra donc s'appuyer sur les ressources, en particulier humaines de ses partenaires, mais également sur les acteurs précités auxquels ils pourront faire appel. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 69 RéférenceS | novembre 2012 70 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Axe transversal : Les grandes Infrastructures de Recherche et autres dispositifs transversaux 1. Enjeux scientifiques et sociétaux Il est désormais admis par la plupart des acteurs de la recherche, en France et en Europe, que le développement des connaissances scientifiques dans quelque domaine que ce soit nécessite une programmation coordonnée des recherches, mais aussi le développement des capacités nécessaires à la mise en oeuvre de ces programmes, c'est-à-dire du capital humain et des infrastructures de haut niveau. L'évolution de la science moderne aboutit alors, lorsque c'est techniquement et scientifiquement possible, à mutualiser de plus en plus les grands équipements de recherche entre divers opérateurs d'un même pays, voire entre divers pays. Pour les sciences de l'environnement, les infrastructures de recherche (IR) répondent souvent à une double sollicitation, la recherche proprement dite et l'observation des milieux et écosystèmes. En sciences de la mer, la nécessité de disposer de grandes infrastructures de recherche est accrue par le fait que l'accès à ce milieu, qu'il soit côtier ou hauturier, n'est pas immédiat pour l'homme. Certains besoins d'équipements pour la recherche peuvent stimuler l'innovation en matière de construction navale, et les navires et engins de recherche scientifiques pourraient, dans une certaine mesure dès leur conception, porter des technologies innovantes et contribuer à en faire la démonstration. À ce titre une articulation avec le CORICAN (voir chapitre suivant) sera axe de progrès. pour des communautés scientifiques, fournis sur site unique ou de façon distribuée (avec une gouvernance commune), voire de façon virtuelle ou à distance (banques de données, expédition d'échantillons). Les utilisateurs de ces IR sont donc, en premier lieu, les chercheurs et ingénieurs qui contribuent à leur mise en oeuvre (« recherche résidente»). De plus en plus, toutefois, une variété de porteurs d'enjeux y accède de façon plus intermittente (« recherche accueillie »). En particulier, l'accès transnational se développe, soutenu par divers programmes européens ou internationaux. La compréhension du système océan, du fait de sa dimension, de sa nature internationale et des moyens requis pour y accéder passe en effet par la mise en place de collaborations et de coopérations nationales et internationales formelles. Ces coopérations se traduisent notamment par des programmes qui sont un cadre indispensable à une majorité de thématiques en recherche marine. Sur ce plan, la communauté française est très bien positionnée et structurée 3 dans les domaines 2 de l'océanographie hauturière et des relations climat-océans , de l'acidification de l'océan , de l'océanographie opérationnelle hauturière , 4 des 6 géosciences marines et des recherches 5 7 scientifiques et technologiques en domaine profond , de la paléocéanographie et de la biologie moléculaire . Elle est encore insuffisamment positionnée, bien qu'ayant beaucoup d'atouts et le leadership d'un projet européen , dans les domaines côtiers et littoraux. C'est donc un domaine auquel il conviendra d'accorder la plus grande attention, et pour lequel le cadre AllEnvi peut apporter une réelle plus-value. En aval de ces grands programmes, les moyens nécessaires au déploiement des recherches en sciences de la mer peuvent être classés en deux grands types: les premiers sont d'ordre institutionnel, ils sont très structurants et souvent génériques; les 8 2 Différents leaderships au sein des programmes-cadres internationaux IGBP (http://www.igbp.net/), SCOR (http://www.scor-int.org/), notamment dans les programmes IMBER, GEOTRACES et SOLAS. Pourquoi pas ? , navire amiral de la flotte océanographique de l'Ifremer. ©Ifremer/Michel Gouillou 3 4 5 6 7 Programme européen EPOCA, http://epoca-project.eu Programme européen MyOcean (http://www.myocean.eu ) Programme EMSO (http://www.emso-eu.org/management/ ) Programmes IGBP-PAGES (http://www.pages-igbp.org/) et sa partie marine IMAGES Infrastructure européenne de type « ESFRI » EMBRC (http://www.embrc.eu/ ) Programme européen de type I3 JERICO (http://www.jerico-fp7.eu/ ) La définition partagée des IR désigne des outils et des services 8 Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 71 RéférenceS | novembre 2012 seconds s'appuient sur les premiers et correspondent à des équipements permettant observation, expérimentation et archivage et ils peuvent être spécifiques et dédiés à un champ disciplinaire. Sous l'influence d'outils de politique scientifique très couvrant l'ensemble des zones économiques exclusives et de protection environnementale des pays de l'UE si nous voulons aboutir, pour la préservation de l'environnement marin, à des politiques publiques qui soient valables pour l'Union dans son ensemble (EMSO) ; une nécessité semblable au niveau de l'océan mondial (Euro-Argo) ; la nécessité de mettre le plus rapidement possible à la disposition des entreprises et des décideurs politiques les connaissances et données de la recherche marine et maritime, y compris au niveau de démonstrateurs (eg., GROOM), afin de faire décoller la « croissance bleue » en Europe, que ce soit au niveau de la fourniture de nouveaux produits, de procédés ou d'instruments. structurants mis en place par l'UE, le paysage des IR en science de la mer a beaucoup évolué en cinq ans. Les deux principaux instruments sont les programmes I3 (« Integrated Infrastructure Initiative ») et ESFRI (« European Strategy Forum for Research Infrastructures »), qui sont, respectivement, des mouvements d'intégration de noeuds pré-existants au sein d'infrastructures distribuées couvrant chacune un domaine particulier et une réflexion visant à construire, sous forme de site unique ou sous forme distribuée, les infrastructures jugées comme étant les plus stratégiques pour la recherche européenne pour les 25 prochaines années. La plupart des IR en sciences de la mer en France sont soit parties prenantes de programme I3 et/ou ESFRI (EuroArgo, Flotte Océanographique Française, Centre National de Ressources Biologiques Marines), soit engagés dans des programmes visant à les intégrer à des infrastructures paneuropéennes en préparation (observatoires, bases de données ...). Parmi les grands défis que souhaite relever l'Union 2. Infrastructures en sciences de la mer déjà disponibles dans le champ du groupe Mer d'AllEnvi Les sciences marines exigent des moyens logistiques et scientifiques importants (grands et très grands équipements ou TGIR), d'usage mutualisé, mis au service de communautés scientifiques de grande taille, qui sont gérés soit par l'un des organismes de l'Alliance, soit par une structure de gestion ad hoc mutualisée. Ces infrastructures sont soit des très grands instruments soit des centres de ressources (ressources biologiques, bases de données...). Leurs coûts de construction et d'exploitation sont tels qu'ils justifient des processus de financement pluriannuels, concertés au niveau national, et éventuellement européen ou international. Dans la plupart des cas, elles sont adossées à des communautés de chercheurs qui contribuent en permanence à leur amélioration. La gouvernance doit alors trouver, pour l'accès à ces infrastructures, un bon équilibre entre la recherche résidente et la recherche accueillie. Des comités de programme ont pour responsabilité de garantir un accès à tous sur la base de l'excellence scientifique. Une difficulté supplémentaire est de conjuguer la nécessité de garantir une certaine pérennité aux installations et de les maintenir à un niveau d'excellence technologique. Parmi les dépenses d'exploitation, en particulier dans le cas des infrastructures distribuées, il est donc à prévoir qu'une part croissante doit être consacrée à en maximiser à la fois l'accès et l'efficacité : dépenses d'animation, de gestion et de promotion de l'infrastructure; formation du personnel et des utilisateurs; transfert des connaissances vers les entreprises et les décideurs publics; recherches technologiques destinées à améliorer l'infrastructure; recherches "à risque" à effectuer avec les utilisateurs... La France est sans doute l'un des pays pour lequel ce type de dispositif est le plus complet. Quelques exemples parmi les plus européenne, la mise en accès des technologies les plus modernes et l'accroissement de la compétitivité sont des priorités. Les infrastructures de recherche sont considérées comme des outils essentiels pour atteindre ces objectifs. En effet, en tant qu'instruments de subsidiarité pour développer les connaissances, la cohésion, le transfert de connaissances et de technologies ainsi que la coopération internationale, elles constituent des pierres d'angle pour mettre en oeuvre la Stratégie de Lisbonne. Une vision clairement énoncée par les opérateurs de ces infrastructures et par les responsables européens est donc de focaliser les investissements majeurs en un nombre de points limité, ceci afin d'y attirer l'excellence scientifique et d'accroître la visibilité de la science européenne. Ces moteurs ont été illustrés, pour le cas particulier des sciences de la Mer, par les exemples suivants : l'évolution très rapide des connaissances et des technologies en sciences de la vie (par exemple, EMBRC, MésoAqua, AquaExcel, etc.) ; la nécessité sociétale d'exploiter davantage les ressources marines en nutrition, santé, matériaux et énergie, tout en préservant la qualité des écosystèmes (par exemple, MésoAqua, AquaExcel) ; la nécessité de mutualiser pour gagner en efficience, par exemple dans le management de la flotte océanographique européenne (Eurofleet); la nécessité de disposer d'observations 72 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer significatifs sont décrits ci-après. par la Commission Européenne à travers le financement de deux programmes successifs. L'INSU administre et est responsable financièrement du budget du consortium géré par une agence européenne de gestion, EMA. L'INSU gère aussi la contribution française au programme IODP allouée par le Ministère délégué à la Recherche et aux Nouvelles Technologies. 2.3 Autres TGIR D'autres TGIR ont un volet marin, mais contribuent plus marginalement aux sciences de la mer à proprement parler. C'est le cas du projet ANTARES (Astronomy with a neutrino telescope and abyss environmental research) mis en oeuvre par l'IN2P3 qui construit un détecteur de grande taille au fond de la mer Méditerranée (au large de Toulon). Le site Antares est l'opportunité de développer des instruments pour l'observation environnementale profonde en temps réel et/ou haute fréquence (géosciences, biologie, géochimie, bio-géochimie) et l'INSU et l'Ifremer sont associés à cette collaboration. C'est aussi le cas de RESIF-EPOS (Réseau sismologique français / European Plate Observing System) qui contribue au projet européen EPOS, actuellement en étude pour rejoindre les grandes infrastructures européennes de recherche (roadmap ESFRI). RESIF-EPOS sera constitué d'une antenne sismologique et géodésique multiéchelle pour la mesure des déformations permanentes et transitoires du sol français, qui pourront inclure certaines parties marines.Désormais, les grandes collections qui comptent des millions de spécimens biologiques ou paléontologiques, y compris d'origine marine, ont également acquis un statut de grande infrastructure (projet Recolnat). Enfin, l'IS-ENES est un projet d'infrastructure du réseau européen (ENES*), qui rassemble la communauté européenne en modélisation du climat et du système terre, travaillant sur la compréhension et la prévision du changement climatique, et fortement impliquée dans le GIEC. ISENES fournit à la communauté des services sur l'utilisation optimale des super calculateurs, des outils d'évaluation des modèles, sur l'accès aux résultats des simulations, et développe des prototypes de services climatiques concernant les impacts des changements à venir. 9 2.1 La Flotte océanographique française Au premier rang de ces moyens, aux côtés des bâtiments hydroocéanographiques opérés par le SHOM, se trouvent les navires, sous-marins et engins à la mer, désormais gérés en commun sous le nom de « Flotte océanographique française », unité mixte de service (UMS) créée en mars 2011 pour une durée initiale de quatre ans. Elle est soutenue par les quatre opérateurs de recherche que sont le CNRS, l'Ifremer, l'IPEV et l'IRD. La flotte compte sept navires hauturiers et six navires côtiers. Elle sera étendue en 2012 aux navires de plus petits gabarits des stations marines. Elle comprend également une panoplie d'engins sousmarins permettant d'explorer la colonne d'eau et les fonds marins jusqu'à plus de 6000 mètres sous la surface ainsi que des équipements lourds pour l'étude des sous-sols. Grâce au savoirfaire des équipes qui les gèrent et aux technologies spécifiquement développées, ces navires équipés constituent une référence mondiale. D'une manière plus générale, ce grand équipement contribue à l'exploration et à l'exploitation durable des fonds et des ressources marines vivantes, minérales et énergétiques encore largement méconnues. Cette structure permettra de répondre de façon coordonnée aux besoins croissants d'exploration de l'océan et d'optimiser l'usage des moyens de recherche en mer. Le ROV Victor 6000, robot téléopéré de l'Ifremer dédié à l'exploration de l'océan profond, jusqu'à 6000 mètres. ©Ifremer/Olivier Dugornay 2.2 Integrated Ocean Drilling Program / European Consortium for Ocean Drilling Research L'IODP est un programme international de forages océaniques. Les organismes de recherche de la quinzaine de pays européens ayant participé au programme international ODP ont décidé de rejoindre IODP sous la forme d'un consortium unique, ECORD, pour accroître la visibilité européenne. Cette initiative a été soutenue 9 ENES : European Network for Earth System Modelling Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 73 RéférenceS | novembre 2012 2.4 Les systèmes d'acquisition en continu Dans les domaines de l'océanographie physique et des géosciences, ces dispositifs prennent peu à peu le relais de certaines campagnes récurrentes. Le pari scientifique est que le volume et la régularité des données acquises automatiquement remplacent, au moins partiellement, ces campagnes, moyennant des traitements de données sophistiqués. Les principaux systèmes existants sont : focalise sur des modèles émergents qui complètent l'arbre du vivant et pour lesquels des ressources génomiques sont disponibles. L'environnement logistique de proximité va du séquençage des acides nucléiques à l'analyse des protéines (protéomique, structures 3-D) et, à brève échéance, celle des métabolites, en passant par la transcriptomique et l'imagerie, le tout soutenu par un fort potentiel en bio-informatique. En accélérant l'appropriation des approches de génomique dans l'ensemble de la communauté, cette infrastructure a vocation à servir tout le champ des sciences de la mer, y compris l'océanographie biologique et la bio-géochimie. EURO-ARGO Lancé en 2000 par la Commission océanographique intergouvernementale de l'Unesco (COI) et l'Organisation météorologique mondiale (OMM), le programme Argo a pour objectif de développer un réseau global de 3000 flotteurs profilants autonomes mesurant en temps réel la température et la salinité des océans des 2000 premiers mètres de l'océan. Argo est un élément essentiel du système global d'observation des océans mis en place pour suivre, comprendre et prévoir le rôle de l'océan sur le climat de la planète. Fin 2007, le projet a atteint son objectif initial avec 3000 flotteurs en opération. Argo est le fruit d'une coopération internationale remarquable et plus de 30 pays participent directement à la mise en place du réseau. Chaque année 800 à 900 de ces instruments sont mis à l'eau, soit le nombre nécessaire pour maintenir un réseau de 3000 flotteurs actifs compte tenu de leur durée de vie estimée à 4 ans. Argo est le premier réseau in situ global d'observation des océans en temps réel. Avec les observations des satellites, les données des flotteurs Argo sont la principale source · Les satellites d'observation de la terre (dont ceux prévus dans le cadre du programme européen GMES). Cette infrastructure n'est, là encore, pas propre aux sciences de la mer, mais les traitements de données appliqués pour la production de données marines le sont. · Les systèmes d'acquisition dérivants ou mobiles ; sous l'égide du projet mondial et emblématique ARGO, la collecte systématique de points de mesures de quelques paramètres physiques de l'océan s'est transformée en un service d'océanographie opérationnelle « in situ » mondial. Ce flux de données en continu contribue à alimenter les modèles prévisionnels qui font partie intégrante de la galaxie « océanographie opérationnelle ». Les composantes ARGO française et européenne sont labellisées TGIR. · Les systèmes d'acquisition en points fixes, comme, par exemple, le réseau permanent d'observation du niveau de la mer REFMAR coordonné par le SHOM ; les projets européens ESONET/EMSO visent à déployer des observatoires « fond de mer » multi-paramètres plutôt orientés géosciences. EMSO est labellisé TGIR au niveau national et européen. 2.5 Des infrastructures européennes ESFRI Des infrastructures telles que EMBRC, EUROARGO, EMSO, IS ENES sont labellisées au niveau européen. À titre d'exemple, donnons quelques éléments permettant de situer deux d'entre elles : EMBRC et EUROIARGO. d'information pour les chercheurs s'intéressant au climat et à l'océan, pour la prévision saisonnière et climatique ainsi que pour les centres d'analyse et de prévision océanique. Le Centre National de Ressources Biologiques Marines (EMBRC-France) Le Centre National de Ressources Biologiques Marines constitue le noeud français du « European Marine Biological Resource Center » (EMBRC), une infrastructure pan-européenne labellisée par ESFRI. La mission d'EMBRC-France est d'offrir à la communauté nationale l'accès, sur place ou par expédition, à une variété de modèles biologiques marins ainsi qu'un environnement technologique de haut niveau pour l'exploration fonctionnelle de ces modèles. EMBRC-France se Test de flotteurs Arvor (mesure de la température et de la salinité de l'eau) au bassin d'essais du Centre Ifremer Bretagne. ©Ifremer/Olivier Dugornay 74 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Euro-Argo est la contribution européenne au réseau international Argo. Euro-Argo a été labellisé en 2006 dans la première feuille de route ESFRI (European Strategy Forum on Research Infrastructures) comme infrastructure de recherche européenne. L'objectif principal est d'organiser les contributions des états membres afin de permettre à l'Europe de : l'accessibilité grâce à une meilleure interopérabilité des systèmes et une structure optimisée des bases de données géoréférencées. Il s'agit d'accroître la visibilité de ces bases (donc leur valorisation scientifique ou sociétale) et de promouvoir la traçabilité des données et les interopérabilités nécessaires (métadonnées, comme données elles-mêmes). C'est un enjeu intégrateur très important pour le programme mer. · Déployer, maintenir et opérer un réseau de 800 flotteurs. Cela demandera de déployer chaque année 250 flotteurs/an (durée de vie de 3 à 4 ans). · Fournir un service d'excellence aux communautés recherche (climat) et océanographie opérationnelle (GMES et son service marin). 3. Autres dispositifs transversaux en sciences de la mer 3.1 Les moyens institutionnels a) Les systèmes et réseaux d'observation Les systèmes et réseaux d'observation ont pour vocation d'acquérir des données environnementales au sens le plus large (biologiques, physiques, chimiques, sédimentaires, économiques ou sociales), sur des périodes de temps suffisamment longues (>10 ans) pour répondre à des questions scientifiques et alimenter la modélisation de processus complexes. Ils permettent d'enregistrer et de distinguer les impacts liés aux changements globaux et locaux. Certains de ces dispositifs promeuvent aussi des acquisitions haute fréquence (de quelques heures à quelques minutes) afin de pouvoir saisir les effets d'événements extrêmes de courte durée (cyclones, tempêtes, crues,...). Enfin, des acquisitions en temps réel peuvent être réalisées pour certains paramètres à des fins de modélisation, prévision. Plusieurs de ces dispositifs ont été labellisés soit par un Institut du CNRS, soit par le Ministère de la Recherche via l'alliance AllEnvi (SOERE). D'autres ont été mis en place à l'initiative de laboratoires. Il faut souligner que ces dispositifs incluent dans leur cahier des charges non seulement la mise en oeuvre des mesures in situ, mais aussi la validation et la mise à disposition des données. Certains, comme SOMLIT (service d'observation du milieu littoral), ont créé une base de données ad hoc et la gèrent. D'autres font appel à des centres de données plus avancés (qui peuvent être des laboratoires, des OSUs, ou la cellule multi-organismes CORIOLIS). À l'INSU comme à l'INEE, des réflexions sont en cours pour structurer le paysage des bases de données, notamment en sciences de la mer, en liaison avec les organismes partenaires (Ifremer, CNES, IRD...). Au SHOM, le projet INFRAGEOS vise à apporter un mode de gestion cohérent dans le but d'améliorer le traitement de l'information maritime et littorale, d'en faciliter Deux types d'outils sont spécifiquement adaptés aux recherches sur l'environnement et les anthroposystèmes: les Zones Ateliers (ZA) et les Observatoires Homme-Milieux (OHM) . 10 Pénétromètre Penfled, capable d'effectuer en mer profonde (jusqu'à 6000 mètres) des mesures géotechniques sur une profondeur d'investigation de 30 mètres. ©Ifremer/Olivier Dugornay Dans les domaines de la sismologie, de l'océanographie multidisciplinaire intégrée, côtière et littorale (qualité des eaux et des écosystèmes, dynamique du trait de côte) et de l'océanographie hauturière (physico-chimie, niveau moyen de la mer, courants, flux biogéochimiques), des services d'observation ont été développés par l'INSU, le plus souvent en partenariat avec d'autres organismes français (CNES, IFREMER, IRD, INEE...) ou internationaux. 11 · Les ZA forment un vaste réseau inter-organismes d'approches interdisciplinaires incluant notamment les sciences de la nature, les sciences de la vie, les sciences humaines et les sciences de l'ingénieur dans l'objectif de répondre à une question territoriale spécifique pouvant être élaborée en interaction avec les gestionnaires. Deux concernent les environnements marins. La ZA Antarctique (ZATA) couvre un vaste territoire qui s'étend de l'Antarctique (Terre Adélie) aux eaux subtropicales de l'océan Indien (îles Saint Paul et Amsterdam) en passant par les îles subantarctiques de l'archipel Crozet et des Kerguelen. Elle fédère des recherches sur les modifications de la biodiversité et 10 http://www.cnrs.fr/inee/outils/za.htm et http://www.za-inee.org/ 11 http://www.cnrs.fr/inee/outils/ohm.htm Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 75 RéférenceS | novembre 2012 du fonctionnement des écosystèmes sous la double influence des changements climatiques et des activités humaines. Le projet de ZA mer d'Iroise est centré sur l'interface terre-mer de la pointe bretonne et couvre des écosystèmes côtiers très diversifiés 12 3.2 Les équipements Considérées dans leur ensemble allant de la géologie, à l'océanographie, à la biologie, l'écologie, la sociologie et l'économie, les sciences de la mer requièrent des équipements diversifiés qui répondent à des besoins en exploration et observation (recueil de données), en expérimentation et analyse, en modélisation et en archivage. Leur spécificité prévaut surtout pour les tâches d'observation et d'exploration qui demandent des moyens adaptés au domaine marin. Elle est également réelle pour le volet expérimental qui se fait in . · Les OHM ont pour vocation de cerner les effets d'un événement perturbateur qui est venu déstabiliser un socioécosystème. Ils s'attachent ainsi à l'étude de modifications rapides sous l'angle écologique et sociologique. Actuellement un projet d'OHM concerne le littoral méditerranéen qui a été affecté par les implantations touristiques lourdes, notamment sur les plages languedociennes. b) Les laboratoires en réseaux Les réseaux de laboratoires constituent, en adossement aux programmes nationaux et internationaux, un moyen important de structuration des communautés scientifiques. Ces réseaux se structurent soit autour de grandes thématiques comme l'océanographie, soit autour de thèmes plus restreints, soit encore autour de projets ou d'infrastructures partagées. Nous ne pouvons pas ici en donner une liste exhaustive et ne citerons que les plus importants. natura ou dans des enceintes reproduisant au mieux les conditions naturelles. Ceci est également vrai pour la modélisation qui, notamment en océanographie, passe des outils conceptuels se démarquant de ceux du domaine terrestre. Seuls les équipements qui relèvent plus spécialement du domaine marin sont brièvement passés en revue ci-dessous. L'accès à des et séries il continues donc de données de variées est systèmes (géophysiques, indispensable physiques, faut chimiques, biologiques..) disposer d'observation intégrés qui impliquent aussi bien des moyens spatiaux que terrestres ou directement implantés dans l'océan et qui permettent des observations à long terme sur de vastes échelles spatiales. Parmi les défis des prochaines années, celui de la continuité des observations pose un double problème de moyens et d'organisation à l'échelle européenne. Afin d'assurer les impératifs liés à la mise en place des directives communautaires, il sera opportun d'accompagner les différents services de surveillance par une validation scientifique et technique, et les systèmes d'acquisition et de traitement de données adéquats. Valoriser l'acquisition de données, qu'elles soient de obtenues plus de manière automatique carottages, (utilisation dragages, satellitaire, par capteurs autonomes ou autre) ou par acquisition données classique (e.g. identification taxonomique, enquêtes sociologiques...), · Le réseau à large périmètre thématique des stations et observatoires marins (RESOMAR) l'ensemble des stations et laboratoires marins métropolitains et d'Outre-mer, dont la grande majorité est sous tutelle du CNRS et des universités, incluant des associations avec l'IRD, le MNHN, l'Ifremer, le CNES, et l'EPHE. Ce réseau regroupe ce qui relève des « stations marines » et il développe des actions dans divers champs thématiques de la biologie, de l'écologie et des sciences de la Terre (suivis de biodiversité, observation du littoral, évolution du trait de côte...). · Le réseau des Observatoires des Sciences de l'Univers (OSU). Les OSU ont pour missions principales l'observation environnementale à long terme, l'archivage de données, la mise à disposition de services d'analyse et de modélisation et la promotion d'actions de recherche transverses. Ils associent régionalement plusieurs unités de recherche et de service, permettant de mutualiser des moyens dans différents domaines (observations, bases de données, développements instrumentaux...). Plusieurs OSU sont concernés à des titres divers par les sciences de la mer. l'observation ou la collecte restera stratégique et se devra d'assurer la fiabilité et la mise à disposition des données, destinées à assurer le suivi et/ou la gestion de systèmes d'intérêt. a) Observation spatiale L'observation spatiale devient un outil essentiel des sciences de la mer qu'il s'agisse d'études altimétriques (dynamique), mais aussi météorologiques (vent et SST, estimations de la pluie en région tropicale, suivi des banquises), réflectance de surface (production primaire), de l'analyse de la couleur de l'océan, et depuis peu (encore au stade expérimental) de la radiométrie pour la salinité de surface. Le suivi satellitaire de systèmes de 12 La ZA mer d'Iroise bénéficiera des avancées du programme européen SPICOSA coordonné par une des équipes de la ZA. 76 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer mesures in situ vient compléter le dispositif, et jeter un pont entre physique de l'océan et écologie. Cette océanographie spatiale qui se développe depuis les années 1980 permet de documenter un domaine de plus en plus vaste pour les thématiques concernant les enveloppes fluides de la planète. La France, avec le CNES comme chef de file, et des implications fortes du CNRS, est très en pointe sur ces approches. Dans le domaine côtier, les recherches algorithmiques permettent d'accéder progressivement aux processus proches du littoral, qu'il s'agisse de circulation côtière ou de l'évolution de la matière organique. Par ailleurs, le besoin de nouveaux capteurs plus performants ou permettant d'accéder à de nouvelles variables du système reste indispensable. Il faudra favoriser l'émergence des techniques permettant, à partir des observations de la couleur de l'océan, de déterminer les groupes phyto-planctoniques, la distribution de taille des particules, substances dissoutes... développer un instrument exploitant un principe interférométrique et doppler afin de restituer à très haute résolution des informations altimétriques (topographie dynamique), cinématiques (vitesses et gradients en surface) et géométriques (rugosité) de la surface océanique, préparer l'après SMOS (Soil Moisture and Ocean Salinity) en cherchant à améliorer les techniques et algorithmiques qui permettront de poursuivre l'enregistrement de la détermination de la salinité des eaux de surface. dynamique du trait de côte. c) Observations in situ La connaissance de l'océan nécessite à la fois l'acquisition de données à l'échelle globale et à haute résolution. Toutes les données observables pertinentes ne peuvent être acquises depuis l'espace ou depuis la terre, que ce soit en géosciences, en physique ou en biologie. L'étude des processus nécessite des capteurs et systèmes de mesure ou d'observation spécifiques, mis en oeuvre sur des vecteurs appropriés (bouées, flotteurs autonomes ou guidés, navires, animaux) lors de campagnes, installés en des points définis sur le fond ou dans la colonne d'eau, ou dérivant à une profondeur choisie. Les équipements les plus classiques sont ceux déployés lors des missions océanographiques pour les prélèvements et les mesures (par carottage, chalutage, bouteilles, sondes et capteurs divers, etc.), les relevés photographiques, les enregistrements de paramètres... Ils s'appuient sur une logistique lourde, à commencer par la flotte évoquée ci-dessus et ils ne seront pas abordés ici. L'océan couvrant les deux tiers de la surface du globe, les divers réseaux globaux d'observations au sol sont aujourd'hui très mal répartis sur la surface terrestre (comme, par exemple, des observatoires sismologiques, bien que nombre de séismes aient leur épicentre en domaine marin). Un des défis majeurs du 21 e b) Observatoires à terre Les laboratoires "marins" implantés sur les grandes façades maritimes françaises, tout comme les installations d'Outre-mer (Pacifique, Océan Indien, Antilles, Terres australes et antarctiques...) font que la recherche française dispose d'un réseau exceptionnel de sites distribués dans tous les océans à des latitudes extrêmement variées. Les OSU occupent une place importante dans ce dispositif (voir ci-dessus), mais d'autres laboratoires non intégrés à des OSU, qui ont également des activités et des spécificités essentielles en sciences de la mer (Tahiti, Guadeloupe, La Réunion, Caen-Rouen, La Rochelle, Dinard, Concarneau, Anglet, Nice, Toulon), complètent le dispositif. Une mention spécifique doit être accordée aux installations des bases subantarctiques et antarctiques (IPEV). L'ensemble de ces dispositifs a notamment pour vocation de mener à bien des missions d'observation et de suivi locales, dans leur secteur d'implantation. Les explorations aéroportées locales complètent les missions des observatoires. Par exemple, le LIDAR altimétrique permet le suivi des zones émergées littorales et de l'estran et donc la siècle est donc d'instrumenter les océans pour y réaliser des observations pérennes en continu, intéressant aussi bien les champs de la Terre interne, que ceux de l'océanographie, de la bio-géochimie et de la biologie, avec si possible des dispositifs permettant la transmission en temps réel ou quasi réel de données à des centres opérationnels, en particulier depuis des régions ou zones difficiles d'accès (milieux profonds, zones polaires). L'installation d'observatoires de la surface au fond de mer (monitoring de sites), à la fois sur des zones géographiques ciblées où se produit un processus particulier ou à l'échelle de l'océan mondial, est en cours dans le cadre de programmes internationaux comme ARGOS ou EMSO. Mais, pour certains de ses aspects, ce déploiement est encore limité par des verrous technologiques qui restent à surmonter et qui doivent donc faire l'objet de recherches pluridisciplinaires. Les installations fond de mer (OBS pour Ocean Bottom Observatories) ou dans la colonne d'eau sont complétées par des appareils mobiles automatisés généralement mis en oeuvre à partir de navires. Ces instruments d'exploration sont les ROV (Remote Operated Vehicles) qui réalisent aussi bien des missions de mesure (complément direct des OBS) que des prélèvements Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 77 RéférenceS | novembre 2012 ou de l'imagerie et les AUV ( Automated Underwater Vehicles) qui peuvent être munis de multiples capteurs (température, salinité, sonars, dopplers...) et qui, dotés d'une centrale inertielle et complètement autonomes, effectuent des relevés le long de trajets prédéfinis. Là encore, des avancées technologiques pluridisciplinaires sont nécessaires et attendues. Le développement technologique des capteurs et des d) Systèmes expérimentaux De manière transversale aux différentes thématiques, la possibilité de réaliser et de multiplier diverses expériences, représentant au mieux les conditions environnementales au plus proche du réel, reste un challenge. Un effort, à l'échelle nationale doit être fait, afin de développer des systèmes capables de simuler, à des niveaux les plus réduits possibles, les conditions réelles du fonctionnement des éco- géosystèmes, susceptibles d'être transposés à l'échelle méso- et macrocosmique, sur les installations déjà développées à l'échelle nationale. Aussi, une approche de réduction d'échelle (downscaling) reste importante et doit être validée par des tests de remontée d'échelle (upscaling) afin d'assurer la transposition des résultats obtenus de l'échelle de l'expérience, à celle de l'écosystème réel. Actuellement, la réduction extrême de certains dispositifs permet d'envisager des expérimentations à l'échelle des unicellulaires (e.g. microfluidique) et ainsi d'aborder des processus totalement hors de portée il y a peu. Il faut également évoquer les mésocosmes immergés qui, à l'instar de ceux de Medimer (Sète), permettent un confinement de grandes masses d'eau (>2000 litres) et la simulation contrôlée de forçages, ce qui permet d'étudier les réponses des communautés pélagiques (virus, bactéries, producteurs primaires, secondaires, filtreurs, etc.) et de l'ensemble des réseaux trophiques à ces forçages. D'autres champs expérimentaux concernent la réalisation d'enceintes pressurisées qui permettent de simuler les conditions de température, pression, salinité, mélange gazeux des écosystèmes océaniques profonds, y compris les plus extrêmes (évents hydrothermaux). pouvoir Ces approches des progrès du plus expérimentales ouvrent une devront voie des bénéficier de enregistreurs (data loggers) ouvre de nouveaux champs d'investigation. Des priorités seront de développer de nouveaux capteurs (électro-chimiques in situ, d'adapter des capteurs optiques sur flotteurs/profileurs (chlorophylle, sels nutritifs...), de développer de nouvelles générations d'appareils optiques pour le comptage des particules inertes et vivantes. Dans l'étude des organismes marins, la miniaturisation des dispositifs et la mise au point de nano-micro-capteurs implantables sur, voire dans, les organismes révolutionnent l'écologie fonctionnelle, la physiologie... Afin de minimiser les effets sur les individus étudiés, la miniaturisation des capteurs et enregistreurs, accompagnée d'un accroissement des capacités d'acquisition et de stockage de données reste une priorité pour mieux comprendre comment, sans perturber les individus considérés, il est possible de suivre les besoins, les déplacements, des les comportements appuyée par pour ce comprendre type le fonctionnement de certaines espèces et communautés. L'étude écosystèmes, d'approche expérimentale permettra une collecte de données qui, en l'absence de toute intervention humaine, améliorera la compréhension de leur fonctionnement et celui des communautés étudiées. Les baisses de coût de ces instruments autorisent également des approches plus ambitieuses qui contribuent à renforcer considérablement la robustesse des résultats acquis. technologiques et se développer considérablement, car elles importante écosystèmes, compréhension des fonctionnement inaccessibles. 3.3 Les bases de données Dans le domaine des bases de données environnementales, les utilisateurs veulent pouvoir disposer de manière spontanée de toutes les données disponibles sur un sujet, sans présumer de leur « origine ». Il importe donc d'intégrer ces informations sans que la propriété intellectuelle du producteur de données ne soit spoliée. Le projet européen Seadatanet (http://www.seadatanet.org/) a montré que ce genre de mise notamment L'AUV Aster , engin autonome de reconnaissance et de surveillance des fonds marins ou de la colonne d'eau. ©Ifremer/Olivier Dugornay x en commun est possible, sans remettre en cause l'origine (c'est-à-dire le lieu de stockage) des données ; de plus l'informatique permet des regroupements thématiques de données interférents : une même donnée peut très bien 78 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer apparaître simultanément dans un portail « marin » et dans un autre à thématique distincte (environnement, zone géographique, etc.). La mise en réseau harmonisée des bases de données permet par ailleurs de respecter de manière homogène les Directives relatives à l'accès public aux données (Inspire, DCSMM, DCE...). En océanographie hauturière, les bases de données font déjà l'objet de deux centres de ressources importants. Le premier est la cellule interorganismes Coriolis à Brest (Ifremer, CNRS/INSU, CNES, Météo France, IRD, IPEV, SHOM) qui a pour mission de compiler, d'archiver et de diffuser les données nécessaires à l'océanographie opérationnelle (dont les produits sont élaborés par la société MERCATOR), mais dont la base sert aussi à la recherche. Le second est assuré par l'INSU et l'UPMC à la station marine de Villefranche-sur-mer et vise à regrouper l'ensemble des données de biogéochimie marine, qu'elles soient issues de systèmes d'observation ou de campagnes océanographiques. La base de Villefranche est interfacée avec Coriolis. En océanographie côtière, les données sont de natures plus hétérogènes, allant de simples paramètres physiques ou physicochimiques à des paramètres sédimentaires ou biologiques complexes. Des bases de données d'intérêt national ont déjà été développées comme celle du SOMLIT (service d'observation du milieu littoral, labellisé par l'INSU, auquel participent 8 stations marines), ou les bases de données taxonomiques Benthos et Pelagos au sein du réseau des stations et observatoires marins (RESOMAR). Ces bases sont, et seront, d'un grand intérêt, non seulement pour la recherche, mais aussi pour les travaux liés à la directive-cadre sur les milieux marins (DCSMM). D'autres bases de données hauturières et côtières existent. Il convient d'organiser le tout en un réseau cohérent et coordonné, ce qui est l'objet d'un travail interorganismes déjà en cours. Il est clair que les questions relatives aux bases de données et une amélioration et optimisation de leur structuration en réponse aux objectifs scientifiques à atteindre devront concerner l'ensemble des domaines non abordés de manière détaillée cidessus, tels que les géosciences, les données spatiales, etc. Dans le domaine de l'observation du milieu marin, les avancées à réaliser comprennent : · la conception, l'amélioration des systèmes d'observation (SO) (orientés vers les événements exceptionnels et vers les tendances à long terme) et leur déploiement sur des sites de référence en milieu profond et côtier sous forme de quelques chantiers emblématiques, fédérateurs, multidisciplinaires, reconnus et attractifs internationalement ; · l'amélioration continue des méthodes d'observation in situ non intrusive du comportement des organismes vivants marins (modèles biologiques ciblés et observation macroscopique des écosystèmes) ; · la production d'outils novateurs de traitement de l'information: (traitement du signal et des images pour télédétections électromagnétiques et acoustiques, traitement des séries temporelles des paramètres de l'océan et des images optiques et acoustiques) associés à l'amélioration des systèmes d'observation (flux important, très large base de données, temps réel) ; · la mise en réseau de SO hétérogènes pour une vision synoptique et synchrone du monde marin, en utilisant au mieux les interfaces standardisées de capteurs (adressage IP et registre de capteurs) ; · la promotion d'une approche systémique de la gestion et dissémination de la donnée marine ouverte et géoréférencée pour unifier/partager les développements des observatoires marins côtiers, profonds ou de surface. Il faut aussi souligner ici les nouvelles opportunités que vont représenter, à moyen terme, les sites d'essais d'énergies marines renouvelables, en tant que nouveaux sites d'observation. Par ailleurs, il apparaît que l'océanographie opérationnelle couvre la globalité des océans, mais avec un niveau de résolution qui ne permet pas de descendre à l'échelle côtière. La demande sociétale y est pourtant très importante, notamment dans sa composante environnementale. L'idée de déployer et fédérer un réseau d'acquisition de données automatisé ouvrant le domaine côtier fait son chemin au niveau européen (projet Jerico) et au niveau national (projet Fonce à concrétiser). Un effort particulier est en effet à produire sur ce secteur pour étendre à la côte les services de l'océanographie opérationnelle. De nombreuses réflexions récentes à l'échelle nationale ou européenne (Euromarine...) et des exemples concrets (campagne océanographique LOHAFEX, expédition Tara-Océans...) montrent 4. Points opportunités forts, ­ points Analyse faibles, menaces, du stratégique positionnement national Cette cartographie des infrastructures et dispositifs en sciences de la Mer en France suscite d'emblée les réflexions suivantes. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 79 RéférenceS | novembre 2012 qu'il y a désormais une convergence réelle entre les problématiques de l'océanographie biologique et de la biogéochimie marine et les approches de génomique structurelle, comparative et environnementale. Ces approches devraient aussi se généraliser en écologie marine fonctionnelle. Enfin, la connaissance des génomes de quelques espèces modèles et, donc, des voies métaboliques qu'elles utilisent devrait donner une forte impulsion aux recherches en écologie chimique marine et fournir des données nouvelles pour la modélisation des cycles biogéochimiques. Tout comme les autres structurations évoquées plus haut, les Centres de Ressources Biologiques (CRB) marins, qui fournissent à la communauté des sciences marines un environnement logistique de proximité en génomique et post-génomique, sont des outils essentiels pour développer les recherches aux interfaces entre la biologie, l'écologie marine, l'océanographie (physique, biogéochimie) et les géosciences marines (sédimentologie, sismologie, paléoclimatologie). De plus ces infrastructures sont autant de relais de proximité vers les IR nationales plus spécialisées dans ces approches (séquençage, phénotypage et génotypage, bio-informatique, biologie structurale...), ancrant ainsi encore davantage les sciences de la mer dans la biologie la plus moderne. Par contraste, les SHS marines constituent un parent pauvre dans notre dispositif national et ceci n'est pas compensé par les actions d'intégration en cours au niveau européen. C'est également le cas pour l'accès à des dispositifs d'écologie marine expérimentale. Enfin, au regard du très grand potentiel scientifique et d'innovation que représentent respectivement l'écologie chimique et la chimie écologique marines (Les océans, Le nouveau monde de la chimie durable. Dossier « Pour la Science », n° 73, octobre-décembre 2011), on peut regretter que ces disciplines ne soient pas suffisamment développées en France. Ceci est peut-être dû à l'insuffisante représentation des chimistes des substances naturelles dans les laboratoires marins ou, du moins, d'une prise en compte insuffisante des écosystèmes marins par cette communauté. D'une façon plus globale, le dispositif européen des IR en sciences de la Mer n'est pas totalement indemne du reproche de dispersion ou de duplication inutile. Il convient donc de s'interroger sur l'adéquation de la typologie des IR en regard des communautés scientifiques qu'elles servent, sur leur utilité réelle (mise en place d'indicateurs d'efficacité) et sur les possibilités de mutualisation accrue. Cet effort suppose, toutefois, que les mêmes examens critiques soient aussi effectués en dehors du champ des sciences de la mer, pour mettre un terme à de possibles rentes de situation et au maintien d'infrastructures devenues inadaptées. Dans ce contexte, plusieurs initiatives réfléchissent aux synergies qui pourraient résulter d'une meilleure coordination des IR marines entre elles : SEAS-ERA, MARCOM+, EMODNET, etc. L'objectif de ces forums ou actions de coordination est de faire émerger une vision globale des IR en sciences marines en Europe, pour défragmenter les communautés concernées par chaque grand domaine et dessiner des pistes pour augmenter la synergie entre ces diverses communautés. C'est également le cas d'EuroMarine, une action de coordination entre les trois Réseaux d'Excellence marins dans le 6e programme-cadre (EurOceans, Marbef, Marine Genomics Europe) et qui s'attaque au défi important d'intégration des diverses communautés en sciences de la mer. Ces réflexions en cours auront un impact sur les contours des IR en sciences de la mer, ne serait-ce que pour mieux prendre en compte la diversité des porteurs d'enjeux et les défis scientifiques, technologiques et industriels en France et en Europe. Au plan international, les nations marines et maritimes sont toutes confrontées aux mêmes défis quant au futur des leurs ZEE : bonne qualité environnementale de leurs eaux côtières et hauturières, sécurité de l'approvisionnement en ressources vivantes et minérales, durabilité des systèmes d'exploitation, mise au point de nouvelles technologies pour l'agronomie, la biotechnologie ou la chimie bleues, etc. Comme il est indiqué ci-dessus, le dispositif des IR en sciences de la mer en France couvre la quasi-totalité du champ des sciences de la mer, englobant la biologie évolutive, l'écologie marine, l'océanographie et les géosciences marines. C'est donc un réel atout pour nouer des programmes de coopération avec des pays qui n'ont pas un dispositif infrastructurel aussi complet et qui souhaitent l'améliorer (BRICS notamment). La question de la veille technologique et du dialogue avec la recherche privée est centrale, aucune entreprise n'ayant les moyens ou, du moins, la volonté d'entretenir sur le long terme des IR en sciences marines en France. Les IR en sciences marines peuvent s'appuyer sur l'atout que représentent les pôles de compétitivité, en particulier les Pôles Mer Bretagne et PACA, pour la diffusion des connaissances et des technologies vers les entreprises. Dans ce domaine, l'action de coordination « Marine Genomics for Users » (MG4U), qui s'emploie à définir une nouvelle méthode pour accélérer le transfert des nouvelles connaissances en génomique marine vers leurs utilisateurs potentiels (science, multiplicateurs, industrie, décideurs), peut constituer un modèle intéressant à terme. En effet, si l'on veut apporter une valeur ajoutée européenne au transfert de connaissances (qu'il faut distinguer du transfert de 80 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer technologies, nécessairement attaché aux détenteurs de la propriété intellectuelle), les infrastructures paneuropéennes devront être nécessairement mises à contribution. Enfin, il n'est pas exclu de rechercher des cofinancements entre la recherche et l'industrie pour certains investissements particuliers. L'une des principales menaces qui pèsent sur les IR en sciences de la mer (et sur les infrastructures de recherche en général) et celui de ruptures possibles dans leur pérennité. La vigilance doit donc être de mise sur la question du maintien de leur financement sur le long terme. En ce qui concerne le financement de l'accès aux IR, il est admis par tous aujourd'hui que les modèles économiques qui présupposent un accès gratuit pour les utilisateurs ne sauraient constituer qu'une infime minorité. On se dirige donc vers un modèle général dans lequel l'utilisateur prend en charge une partie du coût de l'accès, classiquement les coûts induits dans le cas de la recherche académique, qu'elle soit nationale, européenne ou internationale. De même, il importe de maintenir un niveau de financement suffisant pour effectuer les recherches et acquérir les équipements nécessaires pour éviter une obsolescence progressive des infrastructures. sont plus immédiatement perceptibles par le grand public. 5.1 Vers une meilleure synergie entre les IR en sciences de la Mer Une réflexion commune entre les opérateurs au sein des Alliances est une voie possible. Elle devrait viser notamment à établir des synergies entre les IR en sciences de la Mer, avec les IR des autres champs thématiques dans AllEnvi ou avec d'autres Alliances. Sous l'impulsion de la Fédération de Recherche sur la Biodiversité et du projet d'infrastructure ESFRI de bases de données sur la biodiversité (« LifeWatch »), des réflexions sont déjà en cours pour unifier au sein d'un même instrument (Ecoscope) les informations sur la biodiversité marine et la biodiversité terrestre. La réponse en cours à l'appel à projets européen sur l'initiative internationale GEO-BON procède de la même logique avec une contribution concertée des organismes via la FRB (projet A-Globe).De même, par delà les réflexions en cours sur les apports de la génomique au champ de l'écologie chimique terrestre et à celui de l'écologie chimique marine, deux spécialités traditionnellement disjointes en France, des synergies pourraient être recherchées au niveau des IR au sein d'AllEnvi (intégration de chimiothèques, formations communes...). 5.2 Bonnes pratiques Des bonnes pratiques communes sont sans doute également à mettre en place entre AllEnvi et Aviesan dans le cas des IR de typologie semblable, par exemple en agronomie et santé, d'une part, et biologie et écologie marines, d'autre part. Celles-ci pourraient tout d'abord consister, dans les réunions de coordination avec l'ANR, à convaincre l'Agence de la nécessité de financer, par le biais de dispositifs communs ­ et présentant donc la « granulométrie » requise ­ l'accès à ces IR ainsi que la recherche technologique nécessaire pour les maintenir à niveau. Il est aussi probable que des modèles économiques et des structures de gouvernance semblables peuvent être élaborés pour ces IR. De même, les géosciences sont présentes (même si ce n'est pas dans leur intégralité) dans au moins deux Alliances, AllEnvi et ANCRE. Un autre objectif devrait être donc de rétablir, au niveau des bases de données, la continuité terre-mer pour les géosciences. 5.3 Au niveau européen Au plan européen, les initiatives de programmation conjointe (IPC) en cours ont toutes reconnu l'importance des IR pour la programmation de la recherche. Réciproquement, les porteurs de ces IR savent qu'ils devront accompagner les priorités programmatiques des IPC. On se dirige donc vers des 5. Recommandations Au total, les enjeux liés aux recherches sur la mer et en mer n'ont sans doute jamais été aussi prégnants qu'aujourd'hui et la France dispose des infrastructures de recherche appropriées pour soutenir la quasi-totalité des recherches à mettre en oeuvre. Elle est aussi très bien placée, tant au niveau de la programmation que des infrastructures nécessaires, pour apporter une contribution majeure à l'Initiative de Programmation Conjointe « Heathy and Productive Seas and Oceans » (JPI « Oceans »). Les IR en sciences de la Mer vont donc occuper une place centrale dans le Programme National Mer qui doit conforter ce dispositif assez unique en Europe, en renforçant sa cohérence, sa cohésion et son efficacité. Le contexte budgétaire et la perspective de la remise à jour de la feuille de route française des Très Grandes Infrastructures de Recherche amènent cependant à s'interroger sur la faiblesse relative de la représentation des sciences de la mer parmi les TGIR. Les évaluations internationales et indépendantes effectuées dans le cadre du Programme Investissements d'Avenir ont pourtant montré l'excellence des compétences en France dans ce domaine. Le Programme Mer a donc avoir pour second objectif de convaincre les décideurs de l'importance des enjeux des sciences de la mer, qui passent trop souvent au second plan par rapport à des questions sociétales dont l'importance ou l'attrait Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 81 RéférenceS | novembre 2012 représentations réciproques dans les gouvernances des IR et des IPC. Par ailleurs, la dynamique d'intégration des IR va se poursuivre, sinon s'accélérer, dans tous les secteurs des sciences de la Mer, au plan national comme au plan européen. Une recommandation importante dans le cadre du programme Mer est donc que la France contribue résolument, par les biais de ses IR, aux feuilles de route européennes en sciences de la Mer, afin de peser ensuite de tout son poids sur la structuration de la recherche marine et maritime en Europe. Un des objectifs à atteindre est une co-construction des infrastructures entre les pays membres et l'Union européenneUnion européenne, visant en particulier à impliquer davantage l'Europe dans le financement e et la DG-RDT (Groupe d'experts pour les IR marines)pour convaincre les pays nouvellement intégrés à l'Union d'investir une proportion plus grande de leurs fonds structurels dans la construction d'IR. En conclusion, la France possède un dispositif très complet d'IR et autres dispositifs transversaux en sciences de la Mer, qui la place en position de chef de file en Europe. Pour saisir les opportunités qui s'offrent à nous, de nombreuses forces sont directement mobilisables, tout de suite ou à brève échéance (Investissements d'Avenir). De plus des synergies peuvent être mises en place entre les divers membres de l'Alliance AllEnvi, y compris au-delà du champ des sciences de la mer, ou avec d'autres Alliances. Nous sommes donc en position de lancer une dynamique vertueuse pour que ces infrastructures de recherche contribuent de façon efficace à la SNRI dans tous les domaines des sciences de la mer. des infrastructures qu'elle labellise. Des opportunités réelles dans ce sens devraient voir le jour dans le cadre du 8 Programme-Cadre (Horizon 2020). Il est bien établi que, pour les infrastructures distribuées au moins, les dépenses d'investissement dans chacun des noeuds sont à la charge des états membres. Notre pays doit cependant obtenir que la Commission fasse évoluer sa politique de financement des IR en Europe selon les lignes suivantes : · dans les programmes d'intégration (I3) ou de construction · (ESFRI) des infrastructures, subventionner la totalité des coûts de coordination dès lors que ceux-ci ont leur valeur ajoutée au niveau de l'Europe (mise en réseau, promotion, formation conjointe des personnels et des utilisateurs ­ en particulier dans des disciplines de plus en plus orphelines telles que la taxonomie, soutien au transfert de connaissances vers les utilisateurs publics et privés...) ; · prendre en charge les activités de recherches technologiques conjointes (investissements immatériels), et, en particulier au moment de la mise en route des IR, contribuer aux investissements matériels ; · augmenter les financements destinés à prendre en charge l'accès transnational aux infrastructures ; · enfin, permettre, dans une limite qui doit sans doute dépendre du secteur considéré, la prise en charge des visiteurs en provenance de l'extérieur de l'Europe. Ce dernier point a pour but de tenir du compte du fait que les IR constituent de très bons outils de coopération internationale, dans lesquels se nouent souvent des collaborations scientifiques sur le long terme. Cette remarque vaut aussi pour l'Europe communautaire. Elle prend un relief particulier dans le cas des politiques de convergence. Ainsi, des réflexions sont en cours entre la Conférence des Régions Périphériques Maritimes Mesure in situ des flux de carbone au sein d'un herbier de « Zostera marina » au large de l'île de Batz, Finistère. © CNRS Photothèque / Yann Fontana 82 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Axe transversal : Technologie et construction navale Technologie Il s'agit ici de proposer quelques éléments sur la technologie en complément des sujets abordés dans les piliers de recherche. La technologie est indissociable les d'une recherche 1. Instrumentation et traitement du signal L'instrumentation au sens large, la métrologie, aurait intérêt à s'insérer dans les axes des développements de la filière identifiée par le MEDDTL et le ministère de l'Industrie13. Les innovations principales pour l'instrumentation des milieux porteront sur : océanographique d'excellence ; développements technologiques nécessitent en effet des actions de recherche, sources de propositions en amont de la recherche, mais également sources de réponses aux besoins sociaux économiques et environnementaux. En cela, ils accompagnent souvent les avancées de la recherche marine et lui permettent de rester dans l'excellence. Le développement des secteurs économiques maritimes implique, par ailleurs, généralement des innovations technologiques Les différentes réflexions prospectives menées ces dernières années dans le domaine des sciences marines ont toutes abordé les vastes domaines du changement climatique, de l'environnement marin, des ressources vivantes, ressources minérales et énergétiques, de la flotte et des engins, et de manière générale l'acquisition et les bases de données, tous domaines qui entrent dans les piliers programmatiques décrits dans les chapitres précédents. · Développement de différentes technologies de capteurs : acoustique, optiques, magnétiques, biologiques et chimiques utilisation de la simulation et modélisation pour la conception de capteurs ; · Autonomie énergétique des capteurs ; · Capteurs intelligents, citons à titre d'exemple l'utilisation de capteurs optiques à base de cavité laser à fibre optique, véritable rupture technologique, permettant la réalisation d'antenne acoustique sous-marine très performante ; · Pour les capteurs biologiques et chimiques : les objectifs sont des mesures chimiques in situ et rapides à la place d'échantillonnage et de mesures en laboratoire. Les mesures de contaminants traces devraient être étudiées. Pour les mesures biologiques, une première de étape est le plus développement d'instrumentation laboratoire automatisée puis in situ. L'objectif est la quantification audelà de la simple détection de la présence d'espèces ; · Couplage télédétection (dont satellitaire) et in situ ; · Conception à coût objectif et éco-conception. Faibles coûts des capteurs ; · Mesures en continu : Les réseaux de capteurs et leur intégration Intégration des données dans des modélisations en particulier pour des prévisions, des alertes, etc. Station de surveillance environnementale MeDON immergée dans le Parc Marin d'Iroise. ©Ifremer/Olivier Dugornay Traitement des signaux temps réel, différé, stockage de données, etc. - Traitement des images dont couleur de l'eau 13 Réflexions et propositions réalisées dans le réseau des pôles Ecotechnologiques (dont les 2 Pôles Mer) et Cf.COSEI 13 01 2012 filière métrologie et instrumentation. Noter le Carnot PME : CAPTIVEN « Capteurs et données pour la qualité environnementale des eaux et des sols » porté par les Instituts Carnot Cemagref, Ifremer et BRGM. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 83 RéférenceS | novembre 2012 2. Équipements Pour améliorer la connaissance du milieu et des écosystèmes, il est nécessaire de disposer d'un certain nombre d'outils d'intervention sur ou sous la mer. Au-delà de la question des navires qui est examinée au titre de la TGIR Flotte, assurer la mise en oeuvre des capteurs nécessite de développer des engins mobiles autonomes ou télé-opérés. Il existe déjà un certain nombre d'équipements de ce type, mais leur coût ou leurs performances en matière d'autonomie ou de lancement et récupération à la mer reste à améliorer. On peut citer comme type de développement : satellites, les observatoires fond de mer... Il est vivement souhaité que la communauté scientifique utilise ces systèmes afin de contribuer aux références nécessaires au plan international. Des systèmes sont développés dans des technologies duales. Des applications potentielles existent pour la recherche scientifique. Quelques priorités · Pour la reconnaissance des habitats et des écosystèmes : imagerie 3D, portables sur de petits navires d'opportunité, systèmes automatisés (AUV, ROV). Orientation : données exploitées à coûts réduits. · Les ROV (Remote Operating Vehicle) · Les AUV (Automous Underwater Vehicle) avec des efforts sur la taille (mini voire micro), sur les charges utiles embarquables, l'autonomie (nouveau mode de propulsion, pile à combustible...), les logiciels de navigation et de planification de mission, · Cartographie des ressources minérales profondes (AUV à plus grande autonomie munis de capteurs géophysiques) · Adaptation et utilisation des technologies duales · Flotteurs et hydroplaneurs munis de capteurs chimiques et biologiques. L'accent serait mis en priorité sur la miniaturisation des capteurs. · · · · · Les hydroplaneurs, La coopération entre drones (AUV et hydroplaneurs) Les systèmes de mise à l'eau et récupération La transmission de données à haut débit Les télécommunications durcies marinisées · Conception de systèmes « non perdables » pour éviter des déchets sur les fonds marins. · Autonomie et communication durcie et haut débit hertzienne et sous marine Le HROV, robot pouvant être autonome ou téléguidé par fibre optique, en cours de développement au Centre Ifremer Méditerranée. ©Ifremer BOB, module destiné à la surveillance des sorties de bulles de gaz en fond de mer, en test au bassin d'essais du Centre Ifremer Bretagne. ©Ifremer/Olivier Dugornay 3. Systèmes Les systèmes résultent essentiellement d'une agrégation des capteurs, de leur traitement, des systèmes de communication, des vecteurs mobiles comme les AUV, hydroplaneurs, des contrôles-commandes associés, etc.. Ils peuvent aussi prendre en compte ou s'interfacer avec les très grandes infrastructures de recherche, les navires, les 4. Forces et faiblesses Les domaines technologiques au service des applications marines et littorales sont variés : systèmes de sécurité et de sûreté, ingénierie navale, énergies marines et sous marines, ressources minérales, ressources biologiques, génie côtier, services en environnement... Dans le domaine de la technologie, les laboratoires de 84 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer recherche jouent un rôle majeur. Le rôle des pôles de compétitivité est aussi très important dans l'émergence de projets fédérant les capacités des acteurs privés et publics. Ainsi, les Pôles Mer, à travers leur plus de 600 membres, ont fait émerger de nombreux projets sur des thèmes et programmes fédérateurs très variés (voir Tableau ci-dessous). Deux axes 5 thèmes · Sécurité et Sûreté Maritime · 10 programmes Protection Marine Prévention des risques environnementaux (voir environnement) Sécurité et sûreté Naval et Nautisme · Navire du futur · Ressources Énergétiques · · Développement durable Ressources Biologiques · · · Environnement et aménagement du littoral · · Offshore profond Energies renouvelables marines Pêche durable Aquaculture Durable Biotechnologies Bleues Gestion de l'eau en zone côtière Ports du futur Services pour la stratégie sur le milieu marin Dans la continuité de ces actions, des programmes sont en forte évolution : l'île du Levant qui comprendra une station 1300 m et une autre station 2400 ; Ces stations d'essais pourront disposer d'une puissance de plusieurs centaines de kW (jusqu'à 1 MW) et d'un flux de données bidirectionnelle (ombilical à fibres optiques). La conduite d'essais de courte ou longue durée en parallèle y sera possible. Cet outil sans équivalent devrait faciliter le développement de nouveaux équipements « profonds ». Dans le domaine des énergies renouvelables marines : L'IEED France Energie Marine a élaboré les axes technologiques nécessaires au développement des filières : éolien offshore, hydrolien, énergie thermique, etc. En ce qui concerne l'offshore profond : Les industriels français ont développé avec leur réseau de PME de hautes technologies beaucoup d'éléments dont les preuves de concept sont réalisées et qui pourraient servir de base aux scientifiques qui s'impliquent de plus en plus dans une approche systémique visant à une exploitation durable des ressources minérales. Ces développements pourront notamment s'appuyer sur la mise en place d'une plateforme mutualisée d'innovation Abyssea ; il s'agit d'un Centre d'Expertise et d'Essai Mer Profonde au large de Dans les domaines de l'environnement et de l'aménagement littoral : La mise en oeuvre des directives européennes telles que la DCE et la DCSMM notamment suggère de s'impliquer dans les développements technologiques associés aux sujets suivants : · Contaminants émergents : effets sur les écosystèmes · Sédiments contaminés : remise en suspension, conséquences, traitement in situ, dragage à impact minimum. · Traitement des eaux de ballasts Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 85 RéférenceS | novembre 2012 · Services et outils de prévision pour une meilleure gestion tels que les services aval à développer au titre du programme européen GMES notamment. · La préservation des écosystèmes, le génie écologique dont la restauration des milieux. Le champ des recherches est vaste, car il y a un manque de connaissance sur les indicateurs de qualité du milieu, les fonctions écologiques, la caractérisation des états écologiques, les matériaux éco-compatibles, les récifs artificiels, etc. une stratégie française à moyen et à long terme pour la recherche, le développement technologique notamment par la définition d'un programme industriel « Navire du futur » pour des navires plus économes en énergie, plus 14 propres, plus sûrs et plus intelligents . Le CORICAN (Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction et les Activités navales) a été installé le 17 mai 2011 sous la présidence de la Ministre chargée de l'Ecologie et du Ministre chargé de l'Industrie, de l'Energie et de l'Economie Numérique. Le CORICAN a été installé afin de : Recommandations : Bien que les compétences existent et se développent notamment avec l'aide des Pôles de compétitivité, il n'existe pas, à ce jour, de source de financement dédiée pour tous les développements technologiques contrairement à d'autres pays européens (Serpent au Royaume-Uni) ou aux USA. Depuis la disparition technologies du CEPM, le financement pétrolier notamment des pour l'offshore (environnemental, · Promouvoir l'effort de recherche et d'innovation dans la filière navale. Le CORICAN du fait d'une représentativité très large (industriels, chercheurs, écoles, pôles, État...) a toute légitimité pour assurer ce rôle. Il formulera également, dans cette optique, des propositions dans le domaine de l'organisation des centres d'expertise et d'essai et pour le financement de son programme « navire du futur ». exploitation, exploration, sécurité, etc..) n'existe plus et il en est de même au niveau européen. L'ANR ne possédant pas de programme de recherche technologique spécifique et le projet Thermie (au niveau européen) ayant été également arrêté il y a une dizaine d'années, la question des modes de financement de la composante technologique en soutien à la recherche en sciences marines pourra faire l'objet d'une réflexion plus approfondie. · Etablir un programme technologique « navire du futur : navire économe, propre, sûr et intelligent » couvrant les différents types de marines. Le but du CORICAN est de définir et faire mettre en oeuvre ce programme de recherche collaborative. Ce programme devra ensuite devenir « la » référence de travail auprès des grands financeurs de la recherche collaborative (Agences, Ministères), mais également nourrir les travaux des industriels et centres de recherche privés. La construction navale 1. Le Conseil d'orientation de la recherche et de l'innovation pour la construction et les activités navales (CORICAN) Les missions du CORICAN, porteur de la stratégie de recherche et d'innovation de la filière navale sont complémentaires des missions du CSF (Comité Stratégique de Filière), notamment en charge de la compétitivité de la filière. Les travaux de recherche et d'innovation relevant de la stratégie portée par le CORICAN doivent contribuer au développement de l'activité industrielle donc de l'emploi sur le sol français. Ils tiennent compte des initiatives nationales des principaux pays partenaires ou concurrents, ainsi que des programmes portés par l'Union européenne. Par ailleurs, le CORICAN inclut dans son périmètre les innovations que la filière navale pourrait développer au profit des technologies navales applicables aux activités offshore et aux Énergies Marines Renouvelables (EMR). Genèse et missions du CORICAN Parmi les sept engagements retenus par le Livre Bleu issu des tables rondes du Grenelle de la Mer, figure l'engagement suivant : « Engagement 130c : Instituer un Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction et les Activités Navales ­ CORICAN » Cet engagement a été confirmé par le Premier Ministre lors du Comité Interministériel de la Mer (CIMER) du 8 décembre 2009 qui a décidé la création d'un Conseil d'orientation de la Le programme d'action technologique « navire du futur » Le CORICAN a établi son programme technologique en 14 Communiqué de presse du CIMER du 8 décembre 2009 recherche et de l'innovation pour la construction et les activités navales (CORICAN) qui aura pour mission de définir 86 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer travaillant par le biais d'une double approche : générant probablement des applications à court terme, · approche par technologie, · approche par le biais de l'impact industriel. Classification des technologies par thèmes Les technologies proposées ont été regroupées suivant les 5 · Catégorie 4 : exploration de technologies de rupture susceptibles de déboucher sur des applications à plus long terme. thèmes prioritaires qui participent chacune dans leur domaine à la mise en oeuvre du Navire du futur, navire propre, économe, sûr et intelligent : · · · · · Efficacité énergétique, Eco-conception, Sécurité ­ Sûreté, Efficacité des opérations du navire, Compétitivité. À ces thèmes est venu s'ajouter le domaine « structures en mer », principalement lié aux technologies navales applicables aux plateformes offshore et énergies marines renouvelables (EMR). Classification des technologies par leur impact industriel Dans une approche stratégique concernant la recherche et l'innovation technologique, il est classique de classer les thèmes d'étude dans plusieurs catégories suivant leur impact industriel potentiel. En général, les critères utilisés sont : le marché visé et le caractère plus ou moins innovant du sujet traité. Dans le cas présent, compte tenu de l'extrême diversité des sujets identifiés, et afin de faciliter l'élaboration d'une politique raisonnée et optimale en matière d'investissement d'études et de recherches, on a réparti les technologies suivant les catégories suivantes suivant en cela la catégorisation du Boston Consulting Group. · Catégorie 1: amélioration par continuité de technologies existantes. Ce sont les domaines dans lesquels notre industrie possède déjà de sérieux atouts qui nous permettent d'accéder aujourd'hui à de bonnes parts de marché, et qu'il convient de cultiver pour préserver nos emplois à court terme dans le secteur, · Catégorie 2 : exploitation de niches technologiques particulières. Ce sont des sujets, qui, sans ouvrir des marchés considérables, permettent, principalement à des PME, de figurer en bonne place pour certaines applications spécifiques, · Catégorie 3 : exploration de technologies de rupture Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 87 RéférenceS | novembre 2012 2. Programme d'action technologique Une proposition de classification des technologies prioritaires est donnée ci-dessous. Elle est donc le résultat d'une approche croisée (technologie/impact industriel) 2.1 Catégorie 1 : amélioration par continuité de technologies Thèmes Catégorie 1 Efficacité énergétique Propulseurs et appendices, optimisation des architectures de propulsion; Maîtrise de la production et de l'utilisation de l'énergie à bord MASSON Marine CONVERTEAM JEUMONT ELECTRIC ECA ELECTRO-NAVALE SCHNEIDER ELECTRIC ALSTOM AREVA TA BERTIN D2M HUTCHINSON SEGULA ARIAMIS PRINCIPIA BUREAU MAURIC HT2 ARCHITECTE LEBEFAUDE SHIPSTUDIO SAFT NEXANS STX DGA Eco- conception Réduction des nuisances sonores, de l'impact du mouillage, du sillage et des rayonnements électromagnétiques; Traitement des déchets liquides et solides. DCNS STX BERTIN CNIM VEOLIA DGA Nécessaire à la lutte contre les émissions. Création de quelques centaines d'emplois de haut niveau. Maintien du leadership de l'industrie électrique française : enjeu de près de 100 000 emplois Maintien de la compétence de conception des navires donc indépendance nationale : enjeu de quelques dizaines de milliers d'emplois Technologies Acteurs français identifiés Emplois Sécurité ­ sûreté Sécurité des biens et des personnes SAGEM DGA SAGEM BUREAU VERITAS... Thème récurrent pouvant apporter des niches confortables en cas de succès Thèmes de la prochaine révolution sur le fonctionnement de la logistique et de l'évolution des carrières de marins : création potentielle de quelques milliers d'emplois de marins, de logisticiens. Peut par défaut entraîner le détournement des flux marchands des ports français : enjeu plusieurs milliers d'emplois et perte d'activité autour des ports. Efficacité des opérations du navire Monitoring Maintenance adaptative Assistance à distance Compétitivité Méthodes d'ingénierie innovantes Organisation compétitive adaptée à la CN Réalisation concourante Conception en réalité virtuelle Nouvelle technologie de soudage (chantier virtuel, supply chain virtuelle, géolocalisation des pièces, manutention) STX DCNS CLARTE ACB DGA Thème essentiel pour les grands chantiers français : enjeu de quelques milliers d'emplois et à défaut risque de perte d'activité des régions 88 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer 2.2 Catégorie 2 : exploitation de niches technologiques particulières Thèmes Catégorie 2 Efficacité énergétique Propulsion POD Stockage d'énergie CONVERTEAM DCNS MASSON MARINE SAFT BOLLORE CEA DGA Stockage d'énergie, un thème transversal avec des acteurs français impliqués : création de quelques centaines d'emplois Eco-conception Réduction des trainées hydrodynamique et aérodynamique (carènes, superstructures, allègement, revêtements) Matériaux Alimentation par le quai (cold ironing) Industrialisation de la pose de plates-formes reposant sur le fond Sécurité-sûreté Assistance aux opérateurs SAGEM MARINELEC Marine Nationale/DGA Maintien de compétence dans la conduite des navires. Peut aussi avoir une influence sur la formation des équipages ­ enjeu de quelques milliers d'emplois Efficacité des opérations du navire Equipages "au plus juste". Optimisation des routes. Déchargement IXSEA/Sodena, CLS, ACEBI HYDRALIFT-BLM, SAGEM, Cadden, Maxsea, Docsea... Marine Nationale/DGA DCNS STX IRT JULES VERNE CONVERTEAM NG2 DGA Correspond aussi à la compétence globale en terme de conception de navires. La création de sous systèmes peut permettre un export durable : enjeu quelques milliers d'emplois. Opportunité de prendre le leadership sur ce type d'équipement : création de quelques centaines d'emplois Technologies Acteurs français identifiés Emplois Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 89 RéférenceS | novembre 2012 2.3 Catégorie 3 : Technologies de rupture à court terme Thèmes Catégorie 3 Efficacité énergétique Technologies Application du GNL comme carburant Acteurs français identifiés GTT CRYOLOR BUREAU VERITAS IFP EN IFSTTAR GAZOCEAN CEGELEC ­ SOPRANO FMC SFZ SNECMA SNRI STX DGA Eco-conception Concept global de récupération d'énergie BERTIN SEGULA CEGELEC - SOPRANO SHERPA ING. Flotteurs pour éoliennes AXIMA VEOLIA STX Possibilité de création de nouvelles niches technologiques : quelques milliers d'emplois Emplois Création de la chaîne de distribution gaz et donc redistribution des emplois entre pétrole et gaz : quelques dizaines de milliers d'emplois de manière transverse mais que le secteur naval peut accompagner. Confirmation de la position de leader de GDF-SUEZ STX DCNS Sécurité-sûreté e-navigation Navigation intelligente (écopilot et gestion centralisée de la voie d'eau) Autoprotection Sécurité après accident (sauvetage....) Efficacité des opérations du navire Lutte anti-piraterie e-navigation Systèmes permettant de diminuer les risques et la gravité des accidents DCN Dans le cadre de l'ingénierie système, gestion de données à bord et à terre (cloud) au service de la prise de décision, DCN STX THALES Sociétés informatiques Compétitivité Nouvelle technologie d'assemblage : collage Robotisation du soudage Robotisation de la peinture Nouvelle technologie de contrôle non destructif STX DCNS DGA Aide au maintien des capacités de production de navires nécessaire à l'indépendance nationale STX THALES Sociétés informatiques SAGEM ASV Marine Nationale / DGA Préoccupation actuelle des armateurs : technologie créatrice de plusieurs milliers d'emplois. MARINELEC SAGEM CETMEF VNF Technologie indispensable au déploiement de la voie d'eau et à la lutte contre les gaz à effet de serre : concerne quelques milliers d'emplois 90 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer 2.4 Catégorie 4 : Technologies de rupture à long terme Thèmes Catégorie 4 Eco-conception Technologies Acteurs français identifiés Emplois Energie therm ique des mers STX DCNS Efficacité énergétique Sécurité-sûreté Sécurité passive après accident JLMD SYSTEM Nouveau concept dans la sécurité des navires. Création de quelques centaines d'emplois avec possibilité d'export. Efficacité des opérations du navire Concept de convoi fluvial VNF CFT CMR Concept de maintien en service des voies navigables Freycinet. Maintien des métiers de batellerie soit 1500 artisans. Compétitivité Bassin numérique Atelier comm uniquant STX DCNS IRT Jules Verne DGA Maintien des métiers de construction navale : quelques milliers d'emplois en jeu. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 91 RéférenceS | novembre 2012 2.5 Actions d'accompagnement nécessaires à la mise en oeuvre du programme « Navire du Futur » du CORICAN 2010, plus de 40 M pour la construction navale (hors EMR).Or, le besoin de financement collaboratif nécessaire à la mise en oeuvre du programme du CORICAN est compris entre 70 et 105 M entre 2012 et 2020. Une mobilisation de nouveaux financements est donc indispensable. Organisation nationale des compétences et des moyens d'essais La mise en réseau des centres d'expertise et d'essai est impérative compte tenu du cloisonnement excessif constaté. Ce cloisonnement nuit à la réactivité et à l'efficacité globale. Dans de nombreux cas, il existe des « goulots d'étranglement » qui ne permettent pas aux centres de répondre efficacement à la demande des industriels, qui en conséquence sont contraints de s'adresser à des établissements étrangers. Dans le cadre des travaux de concertation et d'optimisation conduits par le CORICAN, les centres de recherche et d'essai du domaine naval ont décidé de mettre en réseau leurs moyens. Cette mise en réseau doit concerner aussi bien les moyens matériels que les compétences. L'objectif est de mettre à disposition de la filière non seulement des installations d'essai, mais aussi un réseau d'experts afin de faciliter aussi bien la préparation que l'évaluation des projets d'innovation. Il est proposé de choisir l'IRT Jules Verne, en cours de constitution, comme point focal de ce réseau. Cette mise en réseau, pouvant conduire à des mises en commun de moyens pour remédier à certains « goulots d'étranglement » évoqués ci-dessus, est nécessaire pour aborder le contexte international, marqué par une concurrence très vive. Une cartographie des centres européens a été dressée, et les principes d'un positionnement stratégique ont été définis : concurrence assumée avec les Néerlandais de MARIN et les pays de l'Europe du Sud, coopération dans le domaine militaire avec le Royaume-Uni, alliance commerciale avec les centres de l'Europe du Nord exploitant certaines niches. Normalisation et réglementation L'arrivée des nouvelles technologies devra être préparée et anticipée par une évolution profonde du référentiel normatif et réglementaire au niveau international et national, faute de quoi les applications pratiques ne pourront pas voir le jour. Il est proposé que la France accentue sa participation à la refonte de ce référentiel, qui doit bien sûr faire l'objet d'un plan concerté au niveau de l'Union européenne. Huit domaines nécessitant des évolutions réglementaires ont été identifiés. Ils feront l'objet de fiches d'action réglementaire et sont résumés ci-après : Propulsion au GNL Navires de Pêche, Navire « intelligent », cycle de vie ­ Démantèlement, Navigation intérieure, énergies marines renouvelables (EMR), Véhicules marins non habités. Mobilisation des financements Les programmes de construction de navires sur le territoire français en 2010 ont mobilisé 400 M en matière de R+D+I (Recherche, Développement, Industrialisation), activité financée à hauteur de 95 %. En effet, dans le domaine naval, les séries sont limitées, et il arrive fréquemment que chaque exemplaire soit personnalisé pour le besoin du client, ce qui veut dire que pour presque tous les navires une nouvelle conception est à inventer... En R&D proprement dite, l'effort global de R&D « public + privé » a représenté en moyenne sur les années 2008 à 92 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Annexes Annexe 1 ­ Lettre de saisine Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 93 RéférenceS | novembre 2012 94 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Annexe 2 ­ Glossaire AMMA AFD AMP ANCRE CCAMLR CDB CIEM CLIC CLIVAR CNML COI COM COMER COREMO CRVOI Analyses Multidisciplinaires de la Mousson Africaine. Agence française de développement Aire marine protégée Alliance nationale de coordination de la recherche pour l'énergie Convention sur la conservation de la faune et de la flore marine de l'Antarctique convention sur la diversité biologique Conseil international pour l'exploration de la mer Climate and cryosphere Climate variability and predictability Conseil national de la mer et des littoraux Commission de l'océan Indien Collectivités d'Outre-mer Comité pour la recherche marine Coral Reef Monitoring Centre de recherche et de veille (sur les maladies émergentes) dans l'océan Indien CYROI DOM-ROM DYNECAR EC2CO EIT Cyclotron Réunion Océan Indien Départements et régions d'Outre-mer Dynamique des écosystèmes Caraïbes Ecosphère continentale et côtière European Institute of innovation and technology (Institut européen d'innovation et e technologie) EMSO EPOCA FEAMP GEWEX FED GDR GIEC GIZC GOPS GMMC European multidisciplinary seafloor observation European Project on OCean Acidification Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche Global energy and water cycle experiment Fonds européen de développement Groupement de recherche Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat Gestion Intégrée des zones côtières Grand Observatoire du Pacifique SUD Groupe mission Mercator Coriolis Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 95 RéférenceS | novembre 2012 IAC IATTC ICCAT (ou CICTA) IEED IGBP ILM IMBER INEE INSU IOTC (ou CTOI) IPBES Institut agronomique néo-calédonien Inter-american tropical tuna commission Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique Instituts d'excellence énergies décarbonées International Geosphere-Biosphere programme Institut Louis Malardé Integrated Marine Biogeochemistry and ecosystem research Institut écologie et environnement Institut National des Sciences de l'Univers Commission des thons de l'Océan indien Plate-forme intergouvernementale science-politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem services). IR LABEX LEFE LOICZ MG4U ORGP OST OSU-R OVPF PAGES PAS PNEC POLMAR PRESICA PTOM REFMAR RESOMAR SOLAS RUP SOMLIT STRATOM TIT Infrastructure de recherche Laboratoire d'excellence Les enveloppes fluides et l'environnement Land-Ocean interactions in the coastal zone Marine Genomics for users Organisations régionales de la gestion de la pêche Observatoire des sciences et techniques Observatoire des sciences de l'univers de Rennes Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise PAst Global changES Association scientifique du Pacifique Programme national environnement côtier Plan « pollution maritime » Pôle de recherche, d'enseignement supérieur et d'innovation calédonien Pays et territoire d'Outre-mer Réseau de références des observations marégraphiques Réseau des stations et observatoires marins Safety of life at sea Régions ultrapériphériques Service d'Observation en Milieu LIToral Stratégies territoriales pour les Outre-mer thème d'intérêt transversal 96 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer UAG UBO UMR UMS FOF UNCLOS Université des Antilles et de la Guyane Université Bretagne Occidentale Unité mixte de recherche unité mixte de service Flotte océanographique française United Nations Convention on the Law Of the Sea (La Convention des Nations unies sur le droit de la mer) UPF WCRP TAFF TGIR WIOMSA ZEE ZEPOLYF Université de Polynésie française World Climate Research programme Terres australes et antarctiques françaises Très grandes infrastructures de recherche Western Indian Ocean Marine Science Association Zone économique Exclusive Zone économique de Polynésie française Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 97 RéférenceS | novembre 2012 98 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Commissariat général au développement durable Direction de la recherche et de l'innovation Tour Voltaire 92 055 La Défense cedex Tél : 01.40.81.21.22 Retrouver cette publication sur le site : http://www.developpement-durable.gouv.fr/developpement-durable Le Programme Mer : état des lieux et enjeux de la recherche et de l'innovation en sciences marines Le Programme Mer dresse un état des lieux de la recherche française sur les environnements marins et littoraux, leurs moyens d'étude et les développements technologiques qui s'y rattachent, et identifie les enjeux de connaissance et de politiques publiques correspondants. Ce document a été rédigé à la demande des ministres chargés de la recherche et chargé de l'écologie par l'Alliance pour l'Environnement (AllEnvi), en liaison étroite avec un groupe de personnalités qualifiées en tant qu'acteurs dans les domaines marins, maritimes et littoraux. Construit autour de quatre piliers thématiques ­ la connaissance du système mer, l'exploitation durable des ressources marines, la gestion de l'espace côtier marin et le programme d'action pour les Outre-mer français ­ ce document aborde également deux axes transversaux dédiés aux grandes infrastructures de recherche et à la technologie et la construction navale. Le Programme Mer constituera ainsi une base de travail pour définir les orientations stratégiques françaises de la recherche en sciences marines au plan national et international. The Marine Program : inventory and challenges of research and innovation in the French marine sciences The Marine Program presents an inventory of French research on marine and coastal environments, their means of study and the technological developments they sustain, and identifies key issues in terms of knowledge and public policy. This document has been written by the Alliance for the Environment (AllEnvi, a group of French research agencies), in close connection with stakeholders involved in the marine and coastal fields. It is built around four themes ­ knowledge of the marine system, sustainable use of marine resources, management of the marine coastal area, and action program for the French overseas territories ­ completed by two transversal axes dedicated to large research infrastructures, and technology and shipbuilding. The Marine Program will thus represent a working basis to define French strategic orientations on a national and international scale. Dépôt légal : novembre 2012 ISSN : 2102-474X INVALIDE) (ATTENTION: OPTION té de l'habitat, et de son impact rétroactif sur l'efficacité de la pompe biologique ou les transferts trophiques. Mise à l'eau d'une rosette bathysonde destinée au prélèvement d'eau de mer à différentes profondeurs. ©Ifremer/Olivier Dugornay Ce champ, très innovant, est à construire et recoupe l'ensemble des thématiques citées ci-dessus. La dynamique des upwellings tropicaux de façade ouest est un modèle privilégié pour avancer sur ces questions transversales, 30 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer car certains d'entre eux supportent les écosystèmes marins les plus productifs au monde tandis que d'autres restent pauvres. La compréhension des sources de cette variabilité et des variations attendue de leur fonctionnement sous l'effet du changement global est déterminante pour l'économie mondiale. 1.4 La diversité marine des gènes aux espèces Dans toute sa diversité, la vie marine est extraordinairement variée et elle contribue à des équilibres complexes. Pour autant, elle reste assez mal connue et ses futurs possibles le sont encore moins, tant pour qui elle-même lui sont que pour associés les services écosystémiques (régulation, pollutions, destruction ou fractionnement des habitats, déplacement d'espèces...) est essentiel. Il s'agit, pour le domaine marin, d'étendre nos connaissances en écophysiologie, phénologie, traits d'histoire de vie, plasticité phénotypique... de manière à aborder les questions d'adaptation, d'acclimatation, de flexibilité des espèces marines confrontées à des changements de différents ordres, y compris climatiques. Ceci suppose le développement d'approches expérimentales (et donc le déploiement de dispositifs in situ et ex-situ) et de modèles fonctionnels, à l'échelle des individus (métabolisme) comme à celle des communautés. À grande échelle spatiale, comment est structurée la biodiversité marine et comment cette structuration pourrait-elle être amenée à évoluer ? Répondre à ces questions suppose d'une part de bien cerner la dynamique des communautés marines et, d'autre part, d'être capable de développer des approches macroécologiques en faisant appel à des modèles et à l'élaboration de scénarios. Afin de contraindre les distributions actuelles pour connaître le potentiel d'installation (de migration) des espèces, tout comme apprécier les risques associés à des fragmentations d'aires ou de surexploitations locales, il faudra s'appuyer non seulement sur les modèles de niche disponibles, mais aussi être capable de les faire évoluer pour prendre en compte l'adaptabilité des organismes. Sur le plan de la biologie fondamentale, les organismes marins offrent des modèles biologiques essentiels (éponges, oursins, ascidies, amphioxus, roussette, etc.) pour renseigner de grandes questions telles que la régulation de la division cellulaire, la mise en place et l'évolution des patrons de développement, les bases de la réaction immunitaire, ou l'origine et le développement du système nerveux. Des modèles originaux récemment développés chez les macro- et micro-algues appartenant à plusieurs grands clades indépendants ont démontré leur intérêt. Ces recherches permettent d'explorer de façon innovante l'évolution des voies métaboliques, ou des mécanismes ayant permis l'acquisition de la multicellularité, à travers des phénomènes de symbioses ou de transfert latéral de gènes entre procaryotes et eucaryotes. La biotechnologie marine, ou biotechnologie bleue, qui s'appuie sur de telles avancées fondamentales représente un domaine en plein essor. approvisionnement...), alors même qu'ils prendront une place de plus en plus importante dans les années et décennies qui viennent. On peut estimer à 70 % à 80 % les espèces marines qui restent à découvrir: deux millions d'espèces pourraient peupler les océans. La généralisation amène la des techniques de très d'identification génétique découverte nombreuses espèces, y compris des espèces cryptiques dans des groupes pourtant supposés bien connus. Plusieurs « boîtes noires » sont d'immenses réservoirs de biodiversité (nématodes, radiolaires, bactéries, virus... ou encore symbiotes) dont l'exploration bénéficie des possibilités offertes par la métagénomique. Au-delà de leur inventaire, la compréhension de leurs fonctions est un enjeu majeur pour nourrir, non seulement notre connaissance du changement global, mais aussi une exploitation durable des ressources océaniques (cf. pilier 2). Cette étape permet aussi d'apprécier les relations de parenté entre espèces, leur dynamique évolutive et par là d'aborder les questions de phylogéographie et d'histoire de la biodiversité marine qui étayent notre compréhension de l'océan. Crevettes des profondeurs observées sur le site hydrothermal Rainbow lors d'une campagne océanographique menée par l'Ifremer au sud des Açores. ©Ifremer-Victor/Campagne Momareto 1.5 Les services écosystémiques Les services écosystémiques correspondent aux bénéfices que les écosystèmes fournissent à l'humanité. Ils sont classiquement rangés en quatre catégories principales (Millenium Ecosystem Comprendre la manière dont les organismes sont capables de faire face aux changements globaux (réchauffement climatique, Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 31 RéférenceS | novembre 2012 Assessment). Les services de soutien permettent à la vie de se maintenir sur Terre (e.g. grands cycles biogéochimiques, production primaire,...) et ils sont à la base des trois autres types de services: ceux de régulation (e.g. celle du climat ou des conditions d'acidité, de toxicité de l'environnement, etc..), d'approvisionnement (e.g. nourriture ou énergie) et les services culturels (e.g. zones récréatives). Les écosystèmes marins contribuent largement à ces quatre catégories. Brève typologie des services écosystémiques en domaine marin Services de soutien L'océan est directement impliqué dans divers grands cycles comme ceux du carbone, de l'oxygène, de l'eau, de l'azote, du phosphore... Il faut souligner que ce rôle s'apprécie aussi bien en terme de flux que de réservoir (e.g. le système océanique contient près de 50 fois plus de carbone que le réservoir atmosphérique). Ce qui est généralement mis en avant est que l'océan est le siège d'une part très importante de la pompe à carbone et de la production d'oxygène; on estime qu'il compte pour au moins 50% de cette fonction. L'autre facette de cette captation du carbone atmosphérique est également la production primaire de surface, qui soutient la plus grande part des réseaux trophiques marins et notamment la production de ressources exploitées par la pêche. L'océan est également le lieu de recyclage d'éléments chimiques essentiels à cette production de biomasse (azote, phosphore, silice, fer). Enfin les zones les plus productives, telles que les herbiers, les mangroves ou les récifs coralliens peuvent assurer d'autres fonctions en associant à cette ressource la structuration spatiale des habitats. Ces habitats sont des nurseries pour de nombreuses espèces animales qui sont parties prenantes comme support de services d'approvisionnement (pêches côtières) ou récréatifs (pêche touristique, plongée). Services de régulation Le rôle de l'océan dans la régulation climatique de la planète est largement attesté, notamment via les échanges océan-atmosphère (on retrouve ici son rôle de pompe à carbone). Via la production de sulfure de diméthyle (DMS), le phytoplancton contrôle aussi, au moins en partie, la formation des nuages qui couvrent l'océan et donc indirectement la température terrestre. Les zones humides côtières sont des remparts contre les inondations liées aux tempêtes ou tsunamis; elles participent au filtrage des eaux tant pour leur charge particulaire que pour les pollutions organiques. Les systèmes océaniques jouent également un rôle de tampon des modifications chimiques induites par les activités humaines telles que l'augmentation du CO2 atmosphérique, même si l'acidification des eaux de surface est déjà mesurable, ou les excès de fertilisants transportés vers la mer et les phénomènes d'anoxie qu'ils induisent. La transformation de composés organiques dans les écosystèmes marins atténue également l'accumulation de contaminants dans les chaînes trophiques, ou au contraire conduit à leur piégeage et leur enfouissement dans les sédiments comme dans le cas des métaux lourds. Services d'approvisionnement Ce sont les plus classiques. Ils correspondent notamment aux pêches et à l'aquaculture (plus d'un milliard d'hommes sur Terre dépendent des produits de la mer comme source de protéines). Mais la mer ne produit pas que des aliments. Ces dernières années, la diminution de la pluviosité dans des régions à forte densité urbaine a conduit à "extraire" l'eau douce de l'océan. Le développement des énergies marines renouvelables n'en est qu'aux prémisses: éolien en mer, hydrolien, énergie thermique marine, énergie de la houle... mais elles sont appelées à se développer. De nombreuses molécules d'intérêt sont extraites d'organismes marins qui, moins connus que les terrestres, sont porteurs d'innovations importantes (voir pilier 2). Services culturels Le tourisme des bords de mer est un secteur en pleine expansion depuis plus de 50 ans et il joue un rôle économique majeur dans de nombreux pays, notamment insulaires. Associés à cette demande touristique, on retrouve la pêche récréative, la plongée (e.g. sur les récifs coralliens), le nautisme... Certaines espèces sont devenues emblématiques des bénéfices spirituels ou esthétiques liés au domaine marin: les dauphins, tortues, ours polaires, baleines, coraux... Par ailleurs, dans de nombreuses populations côtières, des activités culturelles traditionnelles sont étroitement liées à la mer (e.g. l'oursinade en Provence). La `science participative', contribution citoyenne au suivi et l'étude de la biodiversité marine commence aussi à se développer à l'instar des réseaux formés autour de la biodiversité terrestre. La nécessité de fonder notre appréciation des services écosystémiques marins sur des bases scientifiques qui touchent des disciplines très diverses (géosciences, océanographie, sciences de l'environnement, biologie, écologie, chimie, sociologie, économie...) est avérée. Une récente revue des publications consacrées aux services écosystémiques (terrestres et marins) a montré que ces recherches sont surtout conduites aux États-Unis et en Chine ; 50 % des études viennent de 6 pays seulement dont la France n'est pas. Nos connaissances actuelles sont loin d'être suffisantes pour décider de manière argumentée d'actions à conduire ou de comportements à tenir qui permettent la persistance de ces services sur le long terme. Il apparaît important d'être en 32 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer capacité de traiter simultanément de plusieurs services interdisciplinaires. Seule cette émergence permettra de répondre à la demande sociale et d'ouvrir ainsi de nouvelles pistes de développement économique (l'aquaculture et les biotechnologies bleues en sont des exemples). 1.6 Les interfaces et milieux remarquables. Le système « Mer » n'est qu'une partie du système « Terre » avec lequel il échange par plusieurs interfaces : par la surface (atmosphère, glace), par la côte et les milieux particuliers qui lui sont associés (estuaires, lagunes, lagons, mangroves, etc.) et par le plancher sous-marin, continental et océanique qui possède lui aussi sa diversité (petits fonds, plateaux, pentes, sédiments, dorsales, abysses, monts sous-marins, etc.). Ces milieux de transition sont des lieux de transfert d'énergie, de matière, de biomasse et de gènes. Leur spécificité se traduit à la fois dans les processus qui peuvent s'y produire, et dans les écosystèmes qu'ils abritent, ce qui leur confère une vulnérabilité accrue. Le domaine côtier, où la pression anthropique est actuellement la plus forte, en est un exemple singulier, qui sera détaillé dans le pilier 3. Au sein du système « Mer », l'étude des interfaces entre grands domaines océaniques (côtier/hauturier, pélagique/benthique) constitue également des points importants pour la compréhension des écosystèmes marins. Tant les zones profondes de l'océan que les domaines polaires et insulaires tropicaux sont encore largement inconnus et sousexplorés du fait de leur éloignement et de leur accès difficile. Des questions particulières se posent dès lors que l'on s'adresse à des milieux extrêmes qui offrent l'opportunité d'étudier des mécanismes adaptatifs uniques et donc des voies physiologiques ou métaboliques originales. Les recherches sur les adaptations physiologiques aux conditions extrêmes des régions polaires ou des zones profondes sont d'un intérêt exceptionnel pour la biologie. Ainsi, les poissons et bactéries offrent une diversité de mécanismes enzymatiques à basse température qui enrichissent notre connaissance fondamentale et débouchent sur des applications biotechnologiques. Ainsi, les faunes associées aux évents hydrothermaux se développent à des extrêmes physiques et chimiques (températures très chaudes, salinité, pH, anoxie, sulfures...) Ces adaptations spécifiques reposent sur des systèmes de régulations géniques et métaboliques, voire sur des molécules originales qui pourraient être mieux exploitées (protéines antigel, enzymes thermostables...). écosystémiques et de leurs interactions et donc de questions complexes. Ce besoin de connaissance est d'autant plus nécessaire lorsque des services entrent en concurrence, voire en conflit (e.g. exploitation de ressources énergétiques versus zones récréatives; pêche versus nautisme; implantation d'infrastructure versus protection du littoral). Le risque est que le déficit de connaissances fondamentales et d'interdisciplinarité conduise à des simplifications outrancières et donc à des expertises et des prises de décision erronées. Le manque de recherches fondamentales sur la biodiversité, le fonctionnement des écosystèmes, l'économie de l'environnement... et d'interdisciplinarité véritable au cours des dernières décennies fait que la demande sociale a progressé plus vite que la connaissance scientifique. Nous nous trouvons aujourd'hui désarmés devant les interrogations de porteurs d'enjeux sur des aspects de mitigation, de « valeur » des écosystèmes, d'études d'impact, de restauration des environnements ou des stocks... La science peine à fournir des réponses robustes et rapides sans recherches supplémentaires. Il faut se mettre en position de compenser ce retard sous peine que certains prennent argument de cette absence ­ ou lenteur ­ de réponse pour se libérer de toute contrainte, agissant alors de manière intempestive sans souci des conséquences. En France peu d'équipes travaillent explicitement sur les services écosystémiques. Deux pistes doivent être suivies en priorité pour irriguer deux questionnements principaux, car l'enjeu est de pouvoir tisser un lien entre le fonctionnement des écosystèmes et les services rendus. La tâche est sans doute encore plus difficile en domaine marin. 1) Comment les écosystèmes marins fonctionnent-ils pour fournir des services ? La réponse passe par des dispositifs d'observation, de suivi à long terme et d'expérimentation (stations d'écologie expérimentale, mésocosmes, aquatrons, suivis en milieu naturel) et à une nécessaire convergence disciplinaire au sein des sciences de l'écologie et de l'environnement pour appréhender ces questions. 2) Quels sont le rôle et la valeur de ces services pour les sociétés ? La réponse passe par l'émergence d'une véritable interdisciplinarité qui peut être soutenue par des initiatives de programmation volontaristes et ciblées. Certaines sont en train de voir le jour (http://www.developpement-durable.gouv.fr), par exemple sur les questions de mitigation. On doit avoir la volonté de faire émerger un nouveau champ de recherches Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 33 RéférenceS | novembre 2012 déterminent les conditions de l'enfouissement de la matière organique, donc du piégeage à long terme du carbone sous cette forme. La compréhension de ces processus est déterminante pour l'amélioration des modèles climatiques généraux. En domaine insulaire tropical, où la biodiversité est toujours plus élevée qu'ailleurs, le réseau complexe des liens interspécifiques rend plus difficile toute prévision des effets du changement global sur les écosystèmes. Avec la présence d'espèces endémiques, d'écosystèmes côtiers coralliens, de Fumeurs noirs du site hydrothermal Ashadze (le plus profond du monde à 4200 mètres) observés lors de la campagne océanographique Serpentine menée par l'Ifremer sur la dorsale médio-atlantique. ©Ifremer-Victor/Campagne Serpentine mangroves, et de zones de basse altitude, ce domaine cumule les vulnérabilités au changement global. On observe déjà presque partout les effets de la pression anthropique, de l'augmentation de température, de l'acidification des eaux et de l'élévation du niveau marin. Maintenant, devant la multiplication des événements extrêmes (cyclones, épisodes de haute température, sécheresses prolongées ou pluies diluviennes...), il importe d'identifier les sources de résilience pour assurer le maintien de ces îles tropicales. À côté, comme un intermédiaire entre ces îles et le domaine profond, les monts sous marins océaniques sont des milieux originaux très mal connus, qui apparaissent essentiellement comme des éléments dynamique l'avenir. En domaine polaire, le changement climatique se manifeste de façon particulièrement rapide. Des perturbations importantes affectent l'ensemble des « équilibres », avec des rétroactions sur le climat global via la circulation océanique et atmosphérique et le niveau moyen des mers. Quel est l'impact du réchauffement de l'océan sur les grands glaciers de l'Antarctique et du Groenland ? Doit-on s'attendre à une augmentation du vêlage ou de la fonte à l'interface glaceocéan ? Risquons-nous de passer des points de basculement au-delà desquels la calotte deviendra instable et sera progressivement, mais irrévocablement, conduite à l'effondrement ? Quels impacts auront ce nouvel apport d'eau douce et le changement de géométrie côtière sur la circulation océanique et la formation d'eau profonde ? Actuellement les modèles sont incapables de représenter le déclin rapide de la banquise arctique, ni l'impact de la fonte des calottes sur les océans polaires qui sont pourtant de première importance aussi bien pour le fonctionnement de l'océan que pour la biodiversité. À terme, la diminution de la cryosphère marine et terrestre notamment en Arctique est susceptible de conduire le structurants du milieu pélagique. les lier Quelle aux est îles réellement leur influence ? Comment agissent-ils ? À quelle obéissent-ils ? Comment avoisinantes ? Voilà autant de questions importantes à traiter à En domaine profond, à l'heure où les pressions anthropiques s'y exercent de manière de plus en plus prégnante (pêcheries en eaux profondes, exploitations pétrolières et minières, stockage de déchets...), les connaissances fondamentales restent très lacunaires. On perçoit que les écosystèmes profonds sont beaucoup plus divers qu'on ne le pensait (marge, canyons, plaines, dorsales sont autant de contextes qui participent à cette diversité) et que leur fonctionnement ne répond pas aux pas de temps observés dans d'autres secteurs de l'océan. Ils peuvent être à la fois beaucoup plus stables (plaines abyssales par exemple) et beaucoup plus instables (caractère éphémère et imprévisible de l'activité hydrothermale). La science n'est pas encore en situation de répondre sur la vulnérabilité de ces systèmes ou sur leur capacité de résilience et ainsi de contribuer à leur préservation. Même les environnements abyssaux "ordinaires" restent largement inconnus. Plus loin encore, la zone hadale, au-delà des 5000m, et, dans l'épaisseur du plancher océanique, la biosphère dite "profonde" représente désormais une nouvelle frontière des connaissances. Les circulations hydrothermales profondes donnent lieu à des contrastes physico-chimiques importants et à une multitude de réactions chimiques près de l'interface eau-plancher océanique, sources d'éléments pour l'océan, de minéraux hydrothermaux, mais aussi d'énergie pour les microorganismes chemosynthétiques. Les fluides hydrothermaux, riches en hydrogène et méthane, doivent être explorés en tant que ressource énergétique potentielle pour nos sociétés. Il est nécessaire de déterminer les liens entre les différents flux d'énergie: tectonique, sédiment, les convection océanique qui de sédimentation, précoce amène l'activité l'oxygène au fond via la circulation, etc. À l'interface eauphénomènes et la macrobenthique diagenèse bactérienne 34 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer système climatique vers des points de non-retour. En raison des conditions très particulières qui y règnent, les environnements marins polaires abritent une biodiversité caractérisée par un taux d'endémisme élevé et, notamment dans les mers australes, par une forte originalité de leurs traits d'histoire de vie. Par quel cheminement évolutif la vie s'est-elle adaptée à des eaux très froides, éventuellement sous une couverture de glace permanente (le plateau continental antarctique abrite de nombreux « bouquets » d'espèces qui contribuent à l'endémisme austral) ? En contrepoint comment les organismes pourraient-ils faire face à un réchauffement ? Ces questions sont centrales et la comparaison des situations du Nord et du Sud permettra de les éclairer. En domaine insulaire tropical, où la biodiversité est toujours plus élevée qu'ailleurs, le réseau complexe des liens interspécifiques rend plus difficile toute prévision des effets du changement global sur les écosystèmes. Avec la présence d'espèces endémiques, d'écosystèmes côtiers coralliens, de mangroves, et de zones de basse altitude, ce domaine cumule les vulnérabilités au changement global. On observe déjà presque partout les effets de la pression anthropique, de l'augmentation de température, de l'acidification des eaux et de l'élévation du niveau marin. Maintenant, devant la multiplication des évènements extrêmes (cyclones, épisodes de haute température, sécheresses prolongées ou pluies diluviennes ..), il importe d'identifier les sources de résilience pour assurer le maintien de ces îles tropicales. À côté, comme un intermédiaire entre ces îles et le domaine profond, les monts sous marins océaniques sont des milieux originaux très mal connus, qui apparaissent essentiellement comme des éléments structurants du milieu pélagique. Quelle est réellement leur influence ? Comment agissent-ils ? À quelle dynamique obéissent-ils ? Comment les lier aux îles avoisinantes ? Voilà autant de questions importantes à traiter à l'avenir. Une priorité française de recherche sur l'Arctique a commencé à se structurer depuis environ 2 ans, qui implique les principaux organismes de recherche et agences concernés (CNRS, IFREMER, IPEV,...) en s'appuyant sur les laboratoires et centres de métropole et sur le laboratoire franco-canadien TAKUVIK (http://www.takuvik.ulaval.ca/). Il faut également citer ici la contribution de la France, encore limitée, à la base internationale de Ny-Alesund au Spitsberg, particulièrement adaptée à une approche des processus côtiers liés au changement climatique en Arctique. La France est encore peu mobilisée sur cette priorité en comparaison d'autres pays (Canada, Norvège, Allemagne, ...), qui disposent et investissent dans des moyens lourds d'accès logistique (brise-glace notamment), mais sa présence et son savoir-faire important dans les zones polaires antarctiques sont des atouts à valoriser dans le cadre de l'Arctique. Cette priorité arctique se fonde sur les questions scientifiques résumées ci-dessous dans leurs très grandes lignes. En comparaison du reste de la planète, l'Arctique est le siège de changements climatiques particulièrement marqués qui ont été clairement mis en évidence sur les dernières décennies et sont encore à l'oeuvre actuellement. Ces changements se manifestent de façon aiguë dans la diminution progressive de la banquise estivale qui, selon les prévisions des modèles de climat, devrait conduire à sa disparition quasi totale à une échéance de quelques décennies, voire moins si l'on anticipe des erreurs de prévision inhérente à ces modèles (Rapport AR5 du GIEC, 2007). La diminution des glaces ainsi que le recul du pergélisol sont susceptibles de conduire le système climatique arctique vers des « points de non-retour » qui pourraient avoir des impacts profonds sur le climat global au travers de rétroactions physiques et biogéochimiques mettant en jeu tous les compartiments du système climatique. En zone côtière arctique, le retrait de la couverture de glace de mer et les forts changements des apports terrigènes liés à la remobilisation des stocks sédimentaires, modifient drastiquement le fonctionnement de l'écosystème. L'ampleur et les conséquences de tels basculements restent actuellement profondément méconnues. Il s'agit d'étudier un système évoluant rapidement sous la pression anthropique, mais dont on connait mal l'état de référence initial et les liens très forts avec le climat global. L'approche ne peut donc être exclusivement « régionale », mais doit néanmoins être très intégrée dans la mesure où coexistent un milieu océanique contraint par les terres (notamment par le cycle hydrologique continental) et des surfaces continentales pénétrant dans l'océan au travers de larges marges qui sont particulièrement sensibles aux changements océaniques (instabilité des hydrates de méthane en conditions de réchauffement, dégel du pergélisol, élévation du niveau moyen des mers). En Arctique, une démarche structurée d'observation doit être rapidement initiée. 1.7 Les moyens de l'approche intégrée : observation ­ expérimentation ­ simulation. De multiples méthodes d'observation et d'expérimentation, fixes ou dynamiques (hydroplaneurs, stations de fond, instruments embarqués, flotteurs ou flotteurs-profileurs, caméras, télédétection spatiale, suivi assuré par des intervenants en immersion, etc.) permettent d'observer l'océan d'aujourd'hui. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 35 RéférenceS | novembre 2012 Mis en réseaux et assurés d'une pérennité (>10 ans), ces dispositifs, mis en oeuvre notamment par l'Ifremer, l'INSU, l'IRD et le SHOM, permettent de répondre à des questions scientifiques et d'alimenter la modélisation de processus complexes. Ils permettent d'enregistrer et de distinguer les impacts liés aux changements globaux et locaux, ce qui est l'un des objectifs majeurs de ces organismes au travers de services d'observation (ORE, SO notamment), souvent intégrés dans des réseaux internationaux (voir ci-dessous le chapitre dévolu aux infrastructures). Certains de ces dispositifs promeuvent aussi des acquisitions haute fréquence (de quelques heures à quelques minutes) afin de pouvoir saisir les effets d'événements extrêmes de courte durée (cyclones, tempêtes, crues,...). Enfin, des acquisitions en temps réel peuvent être réalisées pour certains paramètres à des fins de modélisation, prévision. Les réseaux de surveillance, conçus pour identifier des alertes, peuvent également être exploités pour des questions de recherche, lorsque le continuum recherche-expertise a été intégré dans leur conception. L'IRD est fortement impliqué dans différents dispositifs des pays de sud (étrangers et territoires des l'outre-mer français), opérés en partenariat avec les organismes nationaux (INSU, INEE, Ifremer, etc.) et étrangers (par exemple, réseau PIRATA associant le Brésil, la France et les USA). L'institut INEE a développé deux types d'outils spécifiquement adaptés aux recherches sur l'environnement et les anthroposystèmes: les Zones Ateliers (ZA) et les Observatoires Homme-Milieux (OHM). Une dizaine de zones-ateliers sont en place dont deux concernent en milieu marin (Antarctique et mer d'Iroise). Actuellement touristiques un projet d'OHM concerne sur le les littoral plages méditerranéen qui a été affecté par les implantations lourdes, notamment languedociennes. Pour les périodes plus anciennes (dernier million d'années), l'étude de l'enregistrement des conditions océaniques dans les sédiments marins (carottes sédimentaires) et des conditions atmosphériques dans les glaces, sont les principales voies d'approche de la variabilité naturelle de l'océan et du climat. La connaissance de ces fluctuations sur le temps long permet d'établir la ligne de base des tendances naturelles, référence indispensable sur laquelle greffer les incidences anthropiques. Pour des périodes encore plus anciennes du passé géologique de la planète, où géographie et climat étaient drastiquement différents, c'est l'ensemble du corpus disciplinaire des géosciences qui contribue à reconstituer la configuration et les régimes de fonctionnement des paléo-océans, y compris pour leur contenu paléobiologique. L'alliance AllEnvi a conduit un important travail d'évaluation, d'organisation et de mise en cohérence des dispositifs d'observation et d'expérimentation, dans le cadre des appels à projets SOERE 2010 et 2011, conduisant à la l'émergence ou à la consolidation de différents SOERE portant sur les domaines climatique, marin, littoral, de la biodiversité ou aux interfaces (CTDO2, ECOSCOPE, SONEL, TROPIQS, Trait de côte) en complément des TGIR (ICOS-IAGOS...), grands programmes (EMSO...) et infrastructures de recherche d'intérêt national (GIS GOPS, SA MERCATOR Océan, autres) préexistants. Les bases de données issues de ces différents types de réseaux font partie intégrante du dispositif. La mutualisation des efforts d'observation et de gestion des systèmes d'information est un enjeu important de la communauté scientifique. Des réflexions sont en cours entre les différents organismes (CNRS, Ifremer, CNES, IRD, SHOM, etc.) pour accroître la visibilité de ces bases, leur qualité et leur interopérabilité. Dans tous les domaines disciplinaires, la compréhension du système « Mer » repose pour beaucoup sur une simulation intégrée des processus à différentes échelles. Décrire, comprendre et analyser les fluctuations aux différentes échelles spatio-temporelles requiert un socle méthodologique solide et partagé permettant la modélisation, l'assimilation de données, la quantification des incertitudes et l'analyse des observations et simulations. Étant donné la complexification des méthodes et leur généralisation, il est primordial d'encourager le développement d'outils communautaires. Une stratégie nationale en modélisation existe depuis plus de 10 ans pour l'océan hauturier. Elle a conduit à un ensemble de codes pour la simulation de la physique et la biogéochimie marine, ainsi que les banquises. Ces codes sont rassemblés en France dans le système NEMO, outil de base de la modélisation opérationnelle réalisée par la société Mercator Océan (à laquelle participent plusieurs organismes de la communauté scientifique dont le CNRS, Ifremer, IRD, Météo-France et le SHOM), mais aussi outil de base, au niveau de la recherche, de la modélisation couplée du climat (outil européen). Les simulations d'échelle régionale sont effectuées avec d'autres modèles, et une réflexion est en cours pour faire converger les efforts, considérant que les différences entre catégories de modèles sont de plus en plus ténues. Pour représenter fidèlement les processus associés aux tourbillons, un maillage de fine résolution devient nécessaire dans des zones clef de l'océan (domaine côtier, zones de remontée d'eau froide et riche des bassins tropicaux, zones polaires). L'un des enjeux est de promouvoir des raffinements de maillage par emboîtement 36 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer de modèles, afin de permettre des simulations climatiques longues. Cette approche est également développée pour coupler modélisation côtière et hauturière. Dans les prochaines années, l'amélioration des modèles d'océan physique devrait permettre de représenter une grande partie du domaine côtier et la dynamique tourbillonnaire de l'océan avec un même modèle, grâce aux performances des moyens de calcul et à une connaissance fine et suivie des caractéristiques hydrographiques (bathymétrie, sédiments) du domaine côtier. Pour ce qui concerne le climat, la réduction des biais des modèles couplés est une priorité majeure, ainsi que l'évaluation des capacités de prévision à l'échelle décennale. suivants : · les observations in situ et spatiales essentielles pour le suivi de l'océan hauturier et côtier, physique et biogéochimique : collecte, traitement et distribution ; · la prochaine génération des outils de modélisation et méthodes d'assimilation de données pour une approche intégrée en océanographie physique et biogéochimique hauturière et côtière, · le couplage entre les systèmes océaniques hauturiers et côtiers, l'atmosphère et les apports continentaux. Cet exercice s'appuiera notamment sur une analyse de En ce qui concerne le volet « océanographie » de l'approche développée dans cette section du document, l'océanographie opérationnelle représente un axe d'évolution majeure de l'océanographie au cours des 15 dernières années. Elle fait désormais partie de la stratégie des principaux instituts océanographiques en Europe et dans le monde. La France a joué un rôle leader déterminant dans cette évolution, en établissant un lien bilatéral fructueux entre les recherches menées dans les laboratoires et la mise en oeuvre de systèmes opérationnels d'analyse et de prévision océanique. Les progrès réalisés par l'océanographie opérationnelle depuis 15 ans permettent aujourd'hui de revisiter le lien entre la recherche dite « amont » et les structures opérationnelles en place, de réaffirmer l'importance de ce lien dans un contexte fortement évolutif, et d'apporter des réponses actualisées aux questions suivantes : l'évolution prévisible des moyens de calcul, des ressources disponibles et des programmes internationaux qui concourent aux mêmes objectifs. En ce qui concerne la biodiversité, des efforts importants de modélisation ont été initiés, notamment pour ce qui touche aux ressources halieutiques, mais ils demeurent encore parcellaires. Il reste à renforcer et fédérer la recherche sur la modélisation et la scénarisation des dynamiques de la biodiversité ; en effet, la pertinence et la crédibilité de la recherche en biodiversité seront largement évaluées en fonction de la manière dont elle saura répondre aux attentes des décideurs de pouvoir disposer de scénarios sur sa dynamique future, à différentes échelles, intégrant la notion d'incertitude. Ceci requiert de relever les défis de la modélisation des systèmes complexes. · Quelles sont les priorités de recherche qui permettront d'enrichir la capacité de réponse de l'océanographie opérationnelle à la demande des utilisateurs ? 2.Analyse stratégique du positionnement national 2.1 Forces et faiblesses · Quels sont les chantiers majeurs à développer dans les prochaines années qui pourront bénéficier d'une synergie forte entre communautés scientifique et opérationnelle ? La France au sein des Programmes internationaux L'océan global constitue une priorité de plusieurs programmes internationaux. La communauté française y est très bien positionnée qu'il s'agisse des cycles biogéochimiques et de leurs liens avec l'atmosphère (IMBER, SOLAS, GEOTRACES...), de l'interface côtière (LOICZ), du climat (Programme Mondial de Recherche sur le Climat [WCRP] et ses principaux projets [CLIVAR, GEWEX, CLIC]), de la paléoclimatologie (IGBP-PAGES [International Geosphere-Biosphere Programme ­ Past Global Changes]), du domaine profond (EMSO), de la biologie ­ diversité génétique, interactions chimiques, processus évolutifs ­ dans le cadre d'EMBRC. Dans ce contexte, la reconnaissance dont bénéficie la · Comment l'océanographie opérationnelle peut-elle contribuer à la valorisation des travaux de recherche en océanographie ? · Quelles sont les attentes de la communauté scientifique visà-vis de l'océanographie opérationnelle au cours des 5 à 10 prochaines années ? Un exercice de prospective scientifique nationale démarrera en 2012 pour dégager une vision commune des enjeux et objectifs de rechercher prioritaires pour la communauté ainsi qu'une stratégie de développement et de mise en oeuvre adaptée. Les axes de la réflexion porteront notamment sur les sujets communauté française, notamment en biogéochimie, tient en partie à sa capacité à monter et soutenir des campagnes Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 37 RéférenceS | novembre 2012 océanographiques de grande envergure (programme infrastructures expérimentales pour l'écologie marine sont, quant à elles, très clairement déficientes en France, laissant la communauté hors du jeu international ; seul un engagement conséquent place. Le succès du Labex MER constitue une opportunité nationale importante, à articuler avec les autres acteurs majeurs de l'océanographie nationale : UPMC et ses stations marines, le réseau national des stations marines RESOMAR piloté par le CNRS, l'initiative Axe Mer Ouest (AMO) impliquant le grand ouest, le pôle marseillais, divers Labex impliquant des sciences de la mer (CORAIL, COTE...)... Enfin, la dizaine d'universités françaises qui contribuent à une part essentielle de la recherche marine française, et qui proposent une offre de formation « Mer » riche et diversifiée (master et doctorat) devront à l'avenir s'organiser et proposer une visibilité internationale de leurs actions. La cohésion nationale que le programme MER doit induire sur la recherche concernant le système mer, n'est qu'un objectif partiel. Cette action doit aussi permettre de porter une voix légitimée de la communauté nationale à l'international, principalement dans le cadre de la construction de l'Initiative de Programmation Conjointe (IPC) Océans. L'initiative européenne, dont l'objectif est de fédérer et soutenir les efforts nationaux afin de produire la connaissance scientifique à même de développer la stratégie marine et de mettre en place la directive stratégique, n'aboutira que si elle peut se fonder sur des états organisés autour de « programmes » nationaux. La formalisation de l'initiative de programmation conjointe européenne sur les océans constitue également une opportunité importante de structuration de la communauté, notamment par la constitution d'un groupe miroir actif. Une partie de sa reconnaissance tient à la capacité française à mobiliser des campagnes océanographiques significatives. Conforter ce leadership nécessite donc une capacité d'opérations à la mer maintenue, voire amplifiée (cf. chapitre infrastructures). L'opportunité Méditerranéenne. Berceau historique de nombreuses civilisations, la Méditerranée est une région d'intérêt géostratégique majeur dont les enjeux environnementaux, politiques et sociétaux sont considérables. Pourtant, cette région reste très vulnérable et son habitabilité future risque d'être compromise. En effet, risques sismiques et volcaniques, pollutions de l'air, de la mer, des eaux continentales et des sols, événements hydrométéorologiques ou éoliens intenses, sécheresse, feux, pénurie d'eau... sont autant de menaces qui pèsent sur la biodiversité des et structuré, territorialement et institutionnellement, permettrait à la France de reprendre GEOTRACES par exemple). Sur le sujet de l'acidification des océans, la France a occupé un rôle leader dans le projet européen EPOCA (European Project on OCean Acidification). Ce projet a été lancé en mai 2008 avec l'objectif d'étudier les conséquences biologiques, écologiques, biogéochimiques et sociales de l'acidification des océans. Il réunit plus de 100 chercheurs, de 31 institutions issues d'une dizaine de pays européens. La structuration nationale La communauté océanographique française est déjà assez structurée, notamment du fait de l'existence de programmes nationaux. On peut notamment citer les actions thématiques du CNRS, auxquelles contribuent de nombreux organismes : à l'INSU : EC2CO (dont le PNEC), LEFE (dont CYBER, IMAGO, GMMC), SYSTER, ALEAS & RISQUES, MARGES... ; à l'INEE les programmes sur les Îles éparses ; régionalement les LABEX MER, CORAIL, COTE... D'autre part, l'observation et la surveillance, qui nécessitent des moyens importants et pérennes, amènent progressivement les universités et les organismes nationaux à se concerter, voire à mutualiser leurs efforts (e.g. SOMLIT, CTDO2, ECOSCOPE, les réseaux de surveillance de l'Ifremer, GIS-GOPS, etc.). On peut également citer le réseau opérationnel REFMAR coordonné par le SHOM, référent national pour le niveau de la mer sur l'ensemble des zones sous juridiction française. Néanmoins, il n'existe pas à ce jour de programme « Mer » national rassemblant dans une même synergie l'ensemble des organismes concernés. L'Ifremer, institut national de recherche finalisée et le SHOM sont exclusivement dédiés au milieu marin et littoral, tandis que, sur un champ plus académique, la mer est depuis longtemps au coeur de fortes dynamiques au CNRS ou à l'IRD. Le potentiel de recherche française en Outre-mer sur des thématiques touchant au système « Mer » est quant à lui fragile et encore peu mis en réseau (universités émergentes, peu d'UMR, capacité de programmation très fortement influencée par le développement local). 2.2 Menaces et opportunités. Sur certaines thématiques, comme l'acidification, le leadership français est fragilisé par une masse sous-critique (cf. projet européen EPOCA, représentant une belle percée, mais à consolider). L'océanographie opérationnelle est également à un tournant de son existence, nécessitant un soutien institutionnel fort pour se transformer en un service quasi public. Les 38 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer écosystèmes continentaux et marins, sur l'accès aux ressources naturelles et sur les conditions de vie des populations de cette écorégion. Quels sont les risques naturels et anthropiques qui peuvent menacer les régions côtières ? Quelles sont les évolutions biogéochimiques qui s'opéreront au sein de la mer Méditerranée ? Quelle sera leur influence sur les écosystèmes marins et leur biodiversité ? Comment gérer les ressources halieutiques ? Ce sont autant de questions relevant des sciences de la mer qui sont notamment abordées dans le cadre du programme interdisciplinaire MISTRALS. Copiloté par le CNRS et l'IRD, avec la participation de onze institutions françaises, MISTRALS est un chantier décennal de recherche et d'observations systématiques, dédié à la compréhension du fonctionnement environnemental du bassin méditerranéen et de son évolution sous la pression des changements globaux de la planète. Il vise à coordonner à l'échelle du bassin méditerranéen et des pays limitrophes les programmes interdisciplinaires de recherche portant sur l'étude de l'atmosphère, de l'hydrosphère, de la lithosphère et des paléo-climats, mais également sur l'écologie des environnements et les sciences humaines et sociales. L'objectif de cette analyse interdisciplinaire est de parvenir à une meilleure compréhension et maîtrise des mécanismes influençant l'environnement et l'anthropisation de cette région afin d'anticiper son comportement sur le siècle à venir et de prédire l'évolution de ses conditions d'habitabilité. Les données obtenues dans le cadre de MISTRALS seront essentielles pour répondre aux interrogations des responsables politiques en matière de ressources et d'environnement et pour préconiser les mesures d'adaptation qui s'avèreront nécessaires. Au-delà des thématiques abordées par MISTRALS, la priorité de recherche en sciences de la Mer sur la Méditerranée pourrait être étendue, notamment en y intégrant davantage les aspects socio-économiques. En ce qui concerne l'Outre-mer, la constitution du Groupement d'intérêt scientifique GOPS, récemment inscrit comme infrastructure de recherche nationale, pourrait constituer une bonne opportunité de structuration de la communauté autour d'un nombre restreint d'objectifs thématiques à définir, en mettant à profit les implantations mixtes de l'IRD au Sud, à proximité de chantiers particulièrement propices à traiter les grandes questions du futur de l'océan. Une opération similaire est en cours de discussion pour l'océan Indien ce qui compléterait le dispositif dans une région où la France est très présente. Par ailleurs, le Labex CORAIL permet désormais de tisser un lien entre les secteurs tropicaux des trois principaux océans ; il représente une opportunité de coordination des recherches sur ces différents sites. Des atouts scientifiques majeurs sont identifiés, ils produiront leurs effets et donneront à la France la portée internationale qu'elle souhaite s'ils sont suffisamment soutenus. On doit citer une interpénétration très active des communautés disciplinaires de la biogéochimie et de la biodiversité et du fonctionnement des écosystèmes. Le défi de reproduction modélisée du fonctionnement des océans allant des contraintes physicochimiques aux ressources biologiques est un objectif envisageable ; la communauté intégrée, notamment autour des programmes nationaux de l'INSU abondés par de nombreux autres organismes, comme des projets soutenus dans le cadre des Investissements d'avenir en est la force. En biologie, la première révolution des « omiques » est en cours. Elle touche tous les compartiments de la biodiversité marine (benthos, pélagos, plancton, necton...), mais elle revêt un caractère particulier dans l'espace océanique en trois dimensions peuplé d' « invisible » jusqu'alors difficilement détectable et encore moins quantifiable. Les conditions d'une fécondation croisée de l'océanographie et de la biologie marine sont réunies par une appropriation commune d'outils et de méthodes. Le succès de ce rapprochement se mesurera à l'aune des concepts nouveaux qui en découleront. On peut faire le pari de ce succès si les communautés s'y engagent vraiment et surtout si les soutiens d'une interdisciplinarité effective sont au rendez-vous. Commensalisme : la crevette « Periclimenes Sagitiffer » vit abritée dans l'anémone « Anemonia viridis » © CNRS Photothèque/Yann Fontana Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 39 RéférenceS | novembre 2012 40 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 2 : Exploitation durable des ressources marines La ZEE Française recèle aujourd'hui des ressources marines considérables : des ressources vivantes renouvelables exploitées par la pêche et l'aquaculture, des ressources liées à la biodiversité qui sont de mieux en mieux valorisées grâce au développement des biotechnologies, et des ressources non vivantes telles que métaux, minéraux et énergie1 qui présentent des potentiels de croissance très importants. La demande pour ces ressources est en forte augmentation, poussant à une intensification de l'exploitation. Cependant la mise en valeur des richesses des océans est confrontée à une triple contrainte. D'une part, certaines ressources restent largement méconnues ; l'exploration et les développements technologiques nécessaires à leur valorisation sont plus que jamais à l'ordre du jour. D'autre part, leur exploitation ne peut être envisagée sans prendre en considération les enjeux de durabilité écologique ; la maîtrise des impacts de ces activités sur les ressources vivantes et les écosystèmes s'impose ainsi comme un pré requis. Enfin, l'internationalisation des marchés, particulièrement forte pour l'ensemble des produits concernés, induit des contraintes de rentabilité économique extrêmement sévères. valorisation les plus efficaces et durables, et définir un cadre de gouvernance efficient pour l'exploitation durable des ressources marines sont des défis majeurs pour la recherche. 1. Les enjeux majeurs Cinq enjeux majeurs pour la société et pour la recherche peuvent être identifiés, concernant l'exploitation des ressources aquatiques. · Partout dans le monde, la demande alimentaire en produits de la mer est en forte progression. La France importe 65 % des produits de la mer qu'elle consomme. La consommation annuelle moyenne est passée de 28,6 à 34,7 kg/habitant entre 1998 et 2010, stimulée tout à la fois par la baisse des prix des produits aquacoles, par la diversification de l'offre, par le développement de la restauration collective et par la recherche de produits de haute valeur nutritionnelle. Alors que dans les pays en développement les produits de la mer sont principalement consommés en tant que source de protéines, dans les pays occidentaux c'est leur richesse en omega 3 qui est prisée et devient un enjeu de santé publique, notamment pour la prévention des maladies cardio-vasculaires. Dans le même temps, la production de la pêche reste stable voire régresse en raison notamment d'une situation globale de surexploitation des ressources marines et de la mise en place de limitation de captures de certains stocks pour assurer l'atteinte du rendement maximal durable d'ici 2015. L'aquaculture, quant à elle, connaît un essor spectaculaire (+ 8 % par an au niveau mondial, au cours des 20 dernières années), mais cette croissance est réalisée en grande partie hors Europe, principalement en Asie. L'élevage aquacole reste modeste en Europe (4,5 % de la production mondiale) et a régressé en France au cours des dernières années. En La pince du ROV Victor 6000 (robot téléopéré de l'Ifremer) contenant une bouchée d'hydrate de gaz ©Ifremer-Victor/Campagne WACS 2011 conséquence la couverture de la demande repose largement sur des importations, contribuant fortement au déséquilibre de la balance commerciale. Dans le cas de l'aquaculture comme de Dans ce contexte, comprendre le fonctionnement des la pêche, l'exploitation des ressources vivantes aquatiques se heurte à des problèmes d'impact écologique et de durabilité des systèmes d'exploitation. Dès lors, l'avenir de la pêche comme celui de l'aquaculture passe par le développement de nouveaux modes d'exploitation et de gestion des ressources dans un cadre écosystémique. Une véritable mutation a débuté, écosystèmes marins, connaître leurs ressources vivantes ou non vivantes (voir Pilier 1), déterminer les modes d'exploitation et de 1 Bien que le développement des "nouvelles énergies" relève de l'alliance ANCRE, il est apparu indispensable d'intégrer ce volet développement durable au sein du programme MER, porté par AllEnvi. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 41 RéférenceS | novembre 2012 les efforts de recherche pour l'accompagner doivent se poursuivre et s'intensifier afin que pêche et aquaculture puissent produire de façon durable les ressources alimentaires répondant à la demande des consommateurs tout en assurant le bon état de santé des écosystèmes marins. · La valorisation de la biodiversité par les biotechnologies est également un secteur en devenir, avec de forts enjeux économiques. Il s'agit en particulier : de valoriser les coproduits de la pêche (et de l'aquaculture) avec l'extraction de molécules et de substances à forte valeur ajoutée ; de développer la production industrielle de molécules pharmacologiques et industrielles ; de produire et valoriser certaines biomasses végétales à des fins énergétiques ou agricoles... La révolution génomique donne désormais accès à l'ensemble des composants du vivant et ouvre de nouvelles perspectives en matière d'agronomie bleue (pour transposer en mer les concepts de l'agronomie terrestre, y compris les approches les plus modernes de la sélection génétique des espèces cultivées), de biotechnologie bleue (pour inventer de nouvelles façons d'utiliser les organismes marins, par exemple, la domestication des usines cellulaires) et de chimie bleue (pour développer de nouvelles bio-molécules marines et de nouveaux bio-procédés). Ici aussi l'accompagnement par la recherche et l'innovation technologique doit être au coeur des processus de développement de ces secteurs d'activité qui touchent aussi bien les domaines de l'alimentation, l'énergie, la santé et l'environnement. · L'exploration et l'exploitation des ressources minérales et énergétiques. Le domaine océanique est un réservoir de ressources minérales (granulats, nodules, amas sulfurés, encroûtements...) et énergétiques (pétrole et gaz, énergies marines renouvelables) dont toutes les richesses sont encore loin d'être connues. La mutation fondamentale des marchés mondiaux de matières premières touche l'ensemble des pays européens qui deviennent de plus en plus fortement dépendant d'importations de minéraux métalliques et de métaux dits stratégiques. Les besoins croissants ouvrent un champ nouveau pour l'exploration des ressources sousmarines profondes, notamment pour les métaux. Cela passe par la mise en place de programmes d'exploration axés sur la connaissance des fonds marins et une meilleure estimation des gisements dans le cadre d'une stratégie de développement durable des exploitations. Dans le domaine des ressources énergétiques, le développement des énergies marines renouvelables n'en est également qu'aux prémisses: ces énergies émergent comme un élément indispensable du bouquet énergétique national, notamment en Outre-mer. Éolien en mer, hydrolien, énergie thermique marine, énergie de la houle... Les potentiels sont immenses et la part du marin au sein de la production énergétique nationale devrait s'accroître très rapidement dans les années à venir, poussée par la demande et la nécessité de fournir des alternatives aux énergies « conventionnelles ». En raison du caractère nouveau de l'exploitation des énergies marines renouvelables et de leur potentiel de croissance très important, une attention particulière devrait être portée à l'amélioration des connaissances sur les impacts de ces installations sur les écosystèmes marins et en particulier la mégafaune (notamment mammifères marins et populations ichtyologiques). Les énergies « conventionnelles » resteront cependant la principale ressource pour plusieurs dizaines d'années, y compris à partir du gaz et pétrole qui restent à découvrir dans les nouvelles zones (comme le pétrole très profond). Leur exploitation durable, comme celle des matières premières minérales, impose d'étudier le fonctionnement et la résistance aux perturbations de ces environnements profonds. Photobioréacteur pour l'étude de la physiologie des algues au Laboratoire de Physiologie et Biotechnologie des Algues du Centre Ifremer de Nantes. ©Ifremer/Michel Gouillou · La durabilité écologique des systèmes d'exploitation des ressources marines est une exigence sociétale forte, traduite notamment qui dans deux avoir directives-cadres des répercussions européennes, devraient considérables dans les années à venir. La directive-cadre sur l'eau (DCE) vise ainsi au bon état écologique des eaux douces et des eaux de transition (estuaires et zones côtières) à l'horizon 2015, tandis que la directive-cadre stratégie pour le milieu marin (DCSMM) fixe comme impératif d'atteindre le 42 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer bon état écologique des écosystèmes marins en 2020. Cette seconde directive devrait avoir des répercussions sur la gestion de l'ensemble des activités anthropiques impactant le milieu marin, et notamment sur la gestion des différentes formes d'exploitation des ressources marines. La définition, l'évaluation et l'identification d'indicateurs de suivi du bon état écologique des milieux marins sont ainsi un enjeu majeur pour la recherche. Plus généralement, les questions de durabilité écologique renvoient à des enjeux de connaissance et de compréhension : du fonctionnement des écosystèmes marins, des processus d'impact des activités anthropiques et des facteurs de résilience ou de fragilité de ces écosystèmes. La 2. Les atouts et faiblesses de la communauté scientifique française dans le domaine des ressources aquatiques · Une communauté scientifique en émergence communauté dans scientifique le domaine française des est reconnue et diversifiée, souvent en position de leadership au niveau européen ressources aquatiques. Cependant le dispositif de recherche est sous dimensionné au regard notamment de la variété et l'importance des ressources, de la taille de la ZEE française à explorer et de la demande en ressources et de la complexité en terme d'échelles des questions à traiter et d'écosystèmes à comprendre. De plus, cette communauté est morcelée. Des animations et le soutien à des programmes favorisant l'interdisciplinarité permettraient de gagner en efficacité. Le maintien du leadership français passe aussi par une plus grande participation des scientifiques français aux comités scientifiques d'évaluation des stocks halieutiques tant au niveau européen (CIEM) que dans les organisations régionales de gestion des pêches (ORGP). On note une expertise de plus en plus forte des pays émergents pour la recherche dans le domaine des ressources aquatiques et, en parallèle, la concurrence pour l'accès aux ressources devient de plus en plus intense. Là encore une meilleure structuration du dispositif, notamment via le programme national MER, et une augmentation des forces sont nécessaires pour que la France conserve son leadership et accroisse son auto-approvisionnement. L'importance des sciences de l'environnement est de mieux en mieux reconnue. La communauté scientifique est de plus en plus fortement sollicitée par la société civile et les pouvoirs publics sur les questions de durabilité. Cependant, le dispositif actuel a une capacité insuffisante pour pouvoir répondre aux demandes en constante progression. Des partenariats recherche/acteurs socio-économiques ont été développés, mais ils demandent à être consolidés. De même, une approche concertée vers un diagnostic partagé de l'état des ressources entre acteurs et scientifiques doit continuer d'être soutenue. Cette communauté scientifique bénéficie d'une large panoplie de dispositifs d'accès à la connaissance des ressources marines (navires océanographiques, laboratoires marins...), mais le monitoring des ressources et des écosystèmes doit être renforcé. Les outils développés permettent d'assurer un continuum dans les approches de la biologie intégrative (génomique...) à la géologie. Il faut maintenant poursuivre leur exploitation jusqu'aux applications. Des compétences fortes · La compréhension des interactions entre ressources marines et changements globaux (changement climatique, surexploitation, destruction des habitats, etc.) représente un enjeu majeur pour la recherche comme pour la société. Les aires de répartition de nombreuses espèces se déplacent vers les pôles de manière relativement rapide ; la production primaire et les efficacités de transferts au sein des réseaux trophiques sont modifiées ; la diminution d'abondance des prédateurs augmente l'instabilité au sein des écosystèmes ; l'acidification des eaux a des effets ravageurs, notamment sur les récifs coralliens et sur les ressources qu'ils abritent ; l'élévation du niveau de la mer modifie le trait de côte et impacte fortement certains écosystèmes (îles, mangroves, milieux lagunaires ...), le réchauffement des eaux favorise l'émergence de nouveaux pathogènes ou leur virulence. Plus généralement, les changements hydrodynamiques ou hydroclimatiques, ainsi que la modification des habitats, peuvent avoir des répercussions qui sont encore mal anticipées. Des outils de modélisation multiéchelles spatio-temporelles doivent être encore développés. Les ressources vivantes sont évidemment les premières affectées, mais c'est plus globalement le fonctionnement et la résilience des écosystèmes, et donc leur capacité à supporter une exploitation anthropique de manière durable malgré les changements climatiques, qui sont en question. La recherche doit ici viser à anticiper les évolutions à venir, à identifier les écosystèmes fragiles, à définir des modes d'exploitation et de régulation adaptés à ce contexte d'environnement en forte évolution. Ces enjeux se situent au niveau mondial. Un des défis que le programme MER aura à relever est l'organisation de dispositifs permettant d'aborder les questions au niveau global (comment peut-on/doit-on les traiter ?) tout en conservant des liens avec les objectifs nationaux. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 43 RéférenceS | novembre 2012 existent également en matière de modélisation des ressources et des systèmes d'exploitation; mais il manque des observations pour nourrir les modèles et des méthodes d'intégration des modèles permettant d'évaluer les compromis entre objectifs écologiques, économiques et sociaux. scientifique, axés sur la connaissance géologique des mécanismes qui modèlent les fonds marins à différentes échelles spatio-temporelles, les processus en interactions géobiologiques et leur dynamique temporelle, la protection de la biodiversité et la résilience des sites. Une telle activité ne pourra s'inscrire que dans un contexte de durabilité, l'enjeu environnemental sera majeur. Les études de biologie des écosystèmes chimio-synthétiques profonds vont devenir, une composante majeure des travaux d'exploration des grands fonds parallèlement aux études géologiques. Il conviendra de développer l'étude de la variabilité spatio-temporelle de l'activité géologique, hydrologique et biologique à l'échelle d'une zone d'exploitation, par exemple transversalement à l'axe d'une ride océanique. La communauté scientifique nationale concernée est assez limitée, mais elle a su se rassembler dans différents GDR, UMRs et dans le Labex Mer. Elle a aussi montré sa capacité à engager des programmes de recherche en partenariat publicprivé et en se positionnant au niveau européen en coordonnant l'ERANET ERAMIN. Le développement de l'exploration profonde va nécessiter des progrès significatifs pour les techniques d'exploration. L'accès aux matières premières minérales engendre une concurrence internationale de plus en plus visible, y compris au niveau scientifique. · Des enjeux stratégiques pour l'exploitation durable des grands fonds La France dispose d'une capacité importante d'exploration et d'accès à de nouvelles ressources minérales à grande profondeur en mer, dont l'éventuelle exploitation future nécessite le développement de recherches pluridisciplinaires. Ainsi le Cimer de juin 2011 a mis en avant les ressources minérales profondes comme devant devenir un enjeu majeur et a mis l'accent sur la volonté de la France de promouvoir l'exploitation des grands fonds marins, en assurant qu'une "stratégie nationale" en la matière serait arrêtée. L'enjeu est de proposer une stratégie pour les dix prochaines années afin de positionner domaine la des recherche ressources géo-biologique minérales profonde, tout la en technologie et l'industrie française dans le tout nouveau profondes, s'inscrivant dans une perspective d'exploitation durable. 3. Thématiques scientifiques prioritaires Pour répondre aux enjeux, six thématiques scientifiques prioritaires sont proposées sur lesquelles les forces de recherche et la structuration du dispositif devront être centrées. 3.1 Comprendre la genèse et la durabilité des ressources marines Sulfures d'un site hydrothermal inactif à 3700 mètres de profondeur observé lors de la campagne océanographique Serpentine menée par l'Ifremer sur la dorsale médio-atlantique ©Ifremer-Victor/Campagne Serpentine Cette première thématique vise au développement de recherches fondamentales sur le fonctionnement des systèmes ou écosystèmes marins et sur les processus. Elle est largement développée dans le pilier 1 (ci-dessus) et s'articule en trois volets complémentaires. Les explorations scientifiques menées dans les grands fonds depuis une trentaine d'années ont permis d'identifier plusieurs processus géologiques et géochimiques conduisant à la · Processus géologiques et circulation des fluides. Au-delà de la connaissance des ressources marines en hydrocarbures dont l'importance ne cesse de s'accroître, les diverses explorations du milieu marin ont montré au cours des dernières décennies l'importance des fluides, de leurs volumes et de leur circulation et des échanges actuels ou passés dans le système mer. Cette connaissance doit encore être très significativement accrue à différentes échelles (quantification des volumes, échanges, processus et polymétalliques, encroûtements cobaltifères et sulfures hydrothermaux) , et à la genèse de ressources énergétiques potentielles originales (hydrates de méthane, hydrogène). Ces découvertes ouvrent de nouvelles frontières pour la recherche et l'identification de ressources minérales et énergétiques dans les océans. Il s'agit maintenant de conduire des programmes à forte valeur ajoutée concentration des métaux (Nodules 44 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer géométries des circulations, etc.) en particulier pour évaluer l'impact du changement climatique, de changements du milieu (déstabilisation des hydrates de méthane), etc. les écosystèmes marins (notamment ceux concernant la production d'énergie, la conservation de la biodiversité, la régulation du climat, l'épuration des eaux, le tourisme...). · Genèse et maintien de la biodiversité. La connaissance de la biodiversité doit se déployer selon trois axes complémentaires : 1) son inventaire raisonné (quelles entités prendre en compte, comment le faire) qui doit notamment aborder des compartiments jusqu'à présent ignorés ou peu accessibles (e.g Micro-, nano-, pico-plancton) ; 2) les processus qui président à son évolution à tous les pas de temps depuis ceux de la phylogénie jusqu'à celui de l'acclimatation des individus (émergence des phénotypes, adaptation, radiation...) ; 3) les patrons de sa structuration spatiale à toutes les échelles depuis celle des habitats jusqu'à celle des océans. L'ensemble de la démarche constitue l'un des éléments indispensables permettant de comprendre les écosystèmes, leur évolution, leur fonctionnement, leur résilience, l'impact des changements globaux, etc. Mise en oeuvre du chalut à bord du navire Ifremer Thalassa pour l'évaluation des ressources halieutiques en Manche Orientale et Mer du Nord. ©Ifremer/Olivier Dugornay/ Campagne IBTS · Fonctionnement des écosystèmes. Il s'agit ici d'analyser et comprendre les processus qui sont le fondement de la productivité des ressources marines vivantes et qui déterminent (au moins pour partie) leur variabilité spatio-temporelle et leur prédictibilité : processus de production primaire et de recyclage des détritus, couplage modèles de circulation océanique/modèle de production, modèles de flux d'énergie et déterminants de l'efficacité des transferts dans le réseau trophique, processus d'impact des pollutions organiques ou minérales sur les ressources vivantes (écotoxicologie)...Cette approche des grands cycles s'appuie également sur une connaissance accrue des grandes fonctions métaboliques des organismes. 3.2 Développer l'approche écosystémique des pêches Le développement de l'approche écosystémique des pêches (AEP) est un impératif aujourd'hui reconnu aussi bien par les institutions et structures en charge de la gestion des pêches que par les instituts de recherche impliqués dans le domaine. Cette approche vise un triple objectif. D'une part, il s'agit d'évaluer, comprendre et anticiper l'impact de la pêche non seulement sur les différentes ressources ciblées, mais plus globalement sur la biodiversité marine, sur le fonctionnement des écosystèmes et sur leurs propriétés de productivité, de stabilité, ou de résilience. D'autre part, et réciproquement, l'AEP doit permettre d'identifier et de quantifier les impacts sur les ressources halieutiques des autres activités anthropiques exercées en mer ou sur le littoral. Enfin, il convient de replacer l'activité de pêche au sein d'une vision plus large englobant l'ensemble des services rendus par Dans le cadre du programme national Mer, cette thématique sera abordée au travers de cinq volets complémentaires. · Comprendre et anticiper les réponses démographiques ou fonctionnelles des populations marines exploitées, en réponse aux différentes facettes de changement global, doit être une priorité de la recherche. Ceci passe en particulier par le développement de modèles de populations intégrant la variabilité individuelle et les (génétique, relations avec physiologie, l'habitat et comportement...) l'environnement. Ces modèles doivent notamment conduire à une meilleure compréhension des impacts de la pêche sur les ressources, mais également à mieux identifier et à anticiper les effets : du réchauffement climatique, des dégradations d'habitats, des invasions biologiques, des pollutions organiques côtières... · L'analyse des structures et relations trophiques et le développement de modèles de fonctionnement trophique sont une priorité de recherche. Les prédateurs marins (poissons, oiseaux, mammifères marins) jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes marins régulant le flux d'énergie à travers les chaînes alimentaires et le contrôle des espèces à des niveaux trophiques inférieurs. Malgré le rôle essentiel que jouent ces espèces dans les réseaux trophiques il subsiste beaucoup de lacunes concernant la biologie et l'écologie de ces prédateurs supérieurs, afin de mieux comprendre leurs interactions avec d'autres espèces et comment les écosystèmes marins peuvent être affectés par le déclin de leurs populations. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 45 RéférenceS | novembre 2012 · L'impact de la pêche sur les habitats et sur la biodiversité reste peu connu et doit faire l'objet d'une évaluation scientifique, en distinguant les effets de court terme des effets à moyen ou long terme. Il s'agira aussi de participer à la réflexion sur les pêcheries mixtes et la mise en place de plan de gestion à long terme pluri-spécifiques. Ces recherches doivent nourrir l'évaluation environnementale de l'ensemble des impacts écologiques des différentes flottilles de pêche (en même temps que de leur efficacité économique et sociale), dans l'optique du développement ou d'un renforcement d'une gestion des pêches s'appuyant sur une organisation par flottille. Elles doivent également se prolonger par un accompagnement de l'innovation en matière de développement d'engins de pêche plus sélectifs et ayant moins d'impact sur l'habitat. l'environnement sur la bonne santé et la résistance des poissons, utilisation dans la mesure du possible de biomolécules, éventuellement d'origine marine, exploitation de la diversité génétique, notamment de la variabilité individuelle, pour adapter les espèces aux contraintes et aux objectifs des élevages. Un effort particulier doit être réalisé pour mieux évaluer les impacts organique, réciproques chimique, élevages/écosystèmes (matières pathogènes...) et développer une approche écosystémique de l'aquaculture sur le modèle de l'approche écosystémique des pêches : impacts des pratiques d'élevage non seulement sur la production, mais aussi sur l'environnement, la biodiversité, et le fonctionnement des écosystèmes et les services rendus ; systèmes d'aquaculture multitrophiques intégrant une partie de la chaîne trophique en amont et en aval de l'élevage ; impacts des activités anthropiques exercées en mer ou sur le littoral, interactions avec les autres usages des ressources et des écosystèmes (usage de l'eau et des territoires). En particulier, la compréhension de la dynamique des occurrences de blooms phytoplanctoniques pour différents niveaux trophiques devient un enjeu de plus en plus prégnant avec le changement global. Cette question rejoint clairement celle, présente dans le pilier 1, de la compréhension des patrons de la biodiversité phytoplanctonique et constitue également un enjeu ultramarin majeur (cf. ciguaterra en Polynésie). · L'intégration de la biologie évolutive est une dimension nouvelle et essentielle de l'approche écosystémique des pêches. L'exploitation des ressources vivantes et plus généralement l'ensemble des pressions anthropiques sur le milieu marin exercent une pression de sélection dont les effets ont sans doute été sous-estimés jusqu'à présent. Il importe en particulier de comprendre comment cette pression de sélection peut modifier non seulement les traits d'histoire de vie des populations exploitées, mais également la composition spécifique des communautés écologiques, le fonctionnement des réseaux trophiques et les relations ou dynamiques hôtes/parasites. · Les modèles écosystémiques « end to end » permettront le développement de scénarios d'impacts et de gestion. Le développement de ces scénarios qui seront sollicités par l'IPBES permettra un approfondissement et une validation de ses modèles à des fins de prédiction et de gestion. Ainsi nous aurons besoin de modèles écosystémiques calibrés et validés qui intègreront les aspects écologiques, sociaux, économiques, et environnementaux. Ils permettront la quantification des interactions, mais aussi les choix, alternatives et arbitrages possibles entre les divers services écosystémiques. 3.3 Relever les défis de l'aquaculture et des Larve d'huître plate (2/10 de millimètres). ©Ifremer/Olivier Dugornay biotechnologies · Biotechnologies Le potentiel d'innovation détenu par les organismes marins, encore peu explorés et qui appartiennent à des lignées évolutives très originales, apparaît particulièrement important. De plus, les ressources génomiques sont désormais très significatives sur de nombreux organismes marins, une tendance qui s'accélère avec les nouvelles · Les défis de l'aquaculture. Il s'agit de développer la production en l'intégrant dans l'écosystème : alimentation des poissons et crustacés en limitant le recours aux ressources naturelles marines, gestion sanitaire des élevages par une meilleure compréhension de l'influence de la zootechnie, de l'alimentation et de 46 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer techniques de séquençage. Les approches de génomique fonctionnelle atteignent également un niveau comparable à celles mises au point pour les systèmes biologiques terrestres modèles. Le défi est d'utiliser ces nouveaux outils pour poursuivre l'étude des microorganismes, des plantes ou des animaux marins, développer des méthodes de culture ou d'élevage et de sélection de génotypes performants, puis de les valoriser dans différents domaines d'application comme la nutrition, la santé animale, végétale ou humaine et l'ingénierie (enzymes, protéines, biopolymères, biomatériaux). Le marché global des biotechnologies marines, de l'ordre de 3 milliards de dollars en 2010, est donc considéré comme présentant un important potentiel de croissance, de l'ordre de 4 à 5 % chaque année. 3.4 Connaître les ressources minérales et énergétiques intégrées permettant d'étudier les interactions entre fluides, roches et bactéries. · Les métaux profonds L'exploitation future des gisements de métaux nécessite une importante phase préalable d'exploration afin de mieux comprendre le fonctionnement des systèmes géodynamiques actifs qui contrôlent la circulation des fluides, et leur variabilité dans l'espace et le temps. Ces grands cycles géochimiques de mobilisation, transport et concentration des éléments contrôlent la formation des minéralisations, pour lesquelles les interactions géobiologiques métaux/bactéries (précipitation/ altération) sont des processus majeurs. L'impact de l'activité des communautés microbiennes sur leur environnement et sur les grands cycles biogéochimiques est également à prendre en compte. La compréhension du fonctionnement de ces écosystèmes profonds permettra d'évaluer leur résilience face aux perturbations anthropiques, et en particulier face à l'exploitation des ressources qu'ils abritent. Enfin, pour cette thématique comme pour d'autres, évaluer la variabilité naturelle des processus géologiques et biologiques sera l'un des grands enjeux des années à venir, pour avancer dans la compréhension des processus et pour prévoir leur évolution, voire leur surveillance en cas d'activité extractive. L'implantation d'observatoires fond de mer intégrant des solutions technologiques innovantes est l'un des défis à relever dans la cadre de la très grande infrastructure de recherche (TGIR) EMSO avec l'ensemble des partenaires nationaux et européens. · Les marges : flux de matière du littoral aux abysses Les dépôts sédimentaires constituent une archive unique des événements qui ont façonné la surface de la Terre (par exemple, climat, tectonique). Connaître la variabilité de ces processus de dépôts constitue un enjeu de connaissance primordial, où l'évolution de la structure profonde des marges doit être prise en compte pour établir les bilans de transfert sédimentaire multi-échelles. Les bassins sédimentaires ainsi créés sont aussi le lieu d'accumulation des hydrocarbures (huile et gaz), dont les hydrates de méthane qui constituent une grande réserve de ressources énergétiques, mais qui peuvent être également à l'origine de risques naturels (amplification de l'effet de serre et instabilité de pente) compte tenu de leur sensibilité aux variations de pression et de température. La connaissance des aléas liés à ces phénomènes d'instabilité passe par l'étude des activités sismiques, de la formation et dissociation d'hydrates de gaz, des instabilités de pente liées aux accumulations de sédiments et de la circulation océanique modifiant la distribution verticale et l'extension horizontale des masses d'eau (et des températures) au contact des sédiments. · Circulation des fluides, interactions géobiologiques et cycles biogéochimiques Les flux géochimiques et les circulations de fluides ont des implications directes sur les ressources énergétiques et minérales des grands fonds. De plus la présence d'eau est un facteur central pour la présence d'une activité microbienne au sein des enveloppes terrestres (sédiments, croûte, manteau). Cette activité microbienne est à la base des communautés biologiques originales basées sur la chimiosynthèse. Ces découvertes impliquent maintenant de mener des recherches Vers géants vivant par 2600 m de profondeur, près des sources hydrothermales, observés par le Robot téléopéré Victor 6000 ©Ifremer-Victor/Campagne Phare · Les énergies marines renouvelables Ce domaine d'avenir à des sera évidemment traité par pour la le participation consortiums industriels Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 47 RéférenceS | novembre 2012 développement de filières (hydrolien, houlomoteur, éolien flottant) dans le cadre des appels d'offres nationaux de l'Ademe et dans le cadre de la possible création de l'IEED France Energies Marines dans le cadre des investissements d'avenir. Mais le développement de ces activités qui se fera dans un contexte industriel, nécessitera une connaissance précise de tous les mécanismes d'interactions entre le milieu marin et les structures, les conditions environnementales (sédimentologiques, géotechniques et bio-fouling), les interactions fluide/structure (modélisation numérique et approche expérimentale). Le développement de ces activités nécessite également une prise en compte des interactions et de l'impact sur les autres activités historiquement présentes (déplacement de flottille, etc.). 3.5 Évaluer l'impact des pressions anthropiques sur les écosystèmes Les recherches précitées doivent être intégrées et complétées afin d'évaluer l'impact global des pressions anthropiques sur le fonctionnement des écosystèmes et sur la durabilité environnementale des ressources. · Définir les modes d'exploitation assurant le maintien du BEE Il ne suffit évidemment pas de mesurer le BEE, il faut en parallèle redéfinir les modes d'exploitation des ressources marines, et plus largement les modes de gestion ou de régulation des activités anthropiques impactant le milieu marin, avec l'objectif ­ la contrainte ­ d'atteindre ce BEE. À moyen terme, les implications de cette approche sont sans doute considérables et aujourd'hui sous-évaluées. Elle implique par exemple de gérer les pêches ou l'exploitation des ressources minérales, sur des objectifs de conservation de la biodiversité, ou de préservation de l'intégrité des fonds marins. Ceci suppose en particulier le développement de démarches scientifiques de type indicateurs, tableaux de bord... · Interactions entre impacts anthropiques Les impacts directs ou indirects de la pêche (sur les ressources, les réseaux trophiques et les habitats), les pollutions chimiques, organiques ou biologiques, engendrées en mer par l'ensemble des activités anthropiques marines ou terrestres, et les effets biogéochimiques ou hydrologiques du changement climatique interagissent, avec souvent de possibles effets de synergie/amplification, ou au contraire de compensation. L'analyse de ces interactions est un enjeu majeur, à la fois en terme de prévision, de mitigation ou d'adaptation. Elle doit en particulier s'appuyer sur la modélisation et l'observation in situ. 3.6 Développer des méthodes d'évaluation intégrée écologie/économie/social et définir des modes de gestion et de gouvernance plus efficients L'évaluation environnementale doit être intégrée dans un ensemble plus vaste prenant en compte les aspects économiques et sociaux du développement durable. Elle aboutit (ou doit aboutir) à la définition de modes de gestion et de gouvernance, qui sont eux-mêmes des objets de recherche en constante évolution. Les yeux d'une coquille Saint-Jacques. ©Ifremer/Olivier Dugornay · Définir et mesurer le bon état écologique (BEE) des écosystèmes marins est un engagement international lié à la directive-cadre européenne sur la stratégie pour le milieu marin (DCSMM). La définition des indicateurs liés aux différentes facettes du bon état écologique des écosystèmes marins (les « descripteurs » de la DCSMM) est en cours, mais des protocoles et systèmes d'observation devront ensuite être définis, mis en oeuvre et validés. Ce chantier de la DCSMM, impliquant des recherches pluridisciplinaires (de la biodiversité à l'évaluation des pollutions sonores), s'étalera donc sur plusieurs années en s'appuyant sur de fortes collaborations à l'échelle européenne. · Évaluation environnementale, économique et sociale des usages, à l'échelle des écosystèmes Cette évaluation requiert en particulier le développement d'indicateurs intégrés, d'approches multidimensionnelles, de méthodes de quantification (par exemple Analyse des Cycles de Vie appliquée aux modes de production...). En s'appuyant sur les écosystèmes­ qui sont des espaces d'intégration des 48 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer différents impacts anthropiques et des territoires d'interaction entre acteurs ou de mise en oeuvre de modes de gouvernance ­ il s'agit ici d'identifier et d'évaluer des compromis entre objectifs écologiques, économiques et sociaux. Il s'agit aussi d'anticiper de possibles synergies ou oppositions entre ces objectifs. · Couplage de modèles biologie/économie, modélisation des comportements des acteurs, et simulations de scénarios de gestion Dans le domaine de l'exploitation des ressources marines, le développement de modèles et d'outils d'aide à la gestion impose des une intégration pluridisciplinaire, et depuis le des fonctionnement des écosystèmes jusqu'à la prise en compte comportements d'acteurs notamment comportements d'adaptation en réponse à la fois au changement global et au changement des modes d'exploitation et de gestion de ressources eux-mêmes. Ces approches doivent notamment permettre de comprendre les dynamiques d'acteurs sous-jacentes et d'identifier les modes de gestion et de gouvernance efficients. · Soutien à la mise en place des Unités d'exploitation et de gestion concertées (UEGC) pour la mise en place d'un nouveau type gestion à long terme par pêcheries · Analyse et simulation des modes de gouvernance à l'aide de scénarios Le développement de scénarios de moyen et long terme (tel qu'envisagé notamment dans le cadre de l'IPBES) est également une approche à privilégier. Elle implique là aussi une intégration pluridisciplinaire sciences biologiques / sciences sociales et conduit notamment sur l'identification des modes de gouvernance les plus efficients. · Suivi de l'efficacité et de la contribution des AMP à la conservation de la biodiversité Enfin, notons que ces différents thèmes de recherche doivent être complétés par l'élaboration de stratégies de communication et de valorisation de la production scientifique dans le domaine marin, vers le grand public et les parties prenantes (en partenariat avec les structures existantes au niveau national). Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 49 RéférenceS | novembre 2012 50 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 3 : Gestion de l'espace côtier marin Les espaces côtiers et marins constituent un lieu particulier d'interactions complexes et d'enjeux multiples entre les activités de recherche et les attentes sociétales. Les espaces côtiers marins, lieux de rencontres d'activités traditionnelles, d'usages nouveaux, de pressions anthropiques constituant des menaces pour les écosystèmes, sont au coeur de politiques publiques qui s'élaborent au niveau national, européen et international en s'appuyant largement sur les résultats de la recherche. En retour, ces politiques accordent un rôle très important à la connaissance et à l'innovation. Par exemple la politique maritime qui s'élabore à l'échelle européenne, vise à développer une pêche et une aquaculture innovantes, compétitives et fondées sur les connaissances. De manière générale, les éléments de politique publique concernés peuvent se décliner à diverses échelles. S'il reste difficile de les recenser exhaustivement, le séminaire du groupe mer d'AllEnvi qui s'est tenu à Roscoff en juin 2011 a proposé une première vision d'ensemble et une méthode d'approche. Ces éléments méritent d'être discutés et développés plus largement avec la communauté des Sciences Humaines et Sociales, avec laquelle peu d'interactions ont eu lieu à ce jour, ce qui représente une faiblesse actuelle de l'expression du programme national Mer. La stratégie nationale pour la mer et le littoral s'appuiera sur des documents stratégiques de façade en métropole (dont les plans d'action pour le milieu marin pour la DCSMM) et de bassin en Outre-mer et visera à donner une vision d'ensemble et à améliore la cohérence des nombreux éléments du dispositif : chantier de la construction de sa politique maritime intégrée en métropole et dans l'Outre-mer. Au niveau européen, la mise en place progressive de directivescadres telles que la directive-cadre sur l'eau (DCE), la directivecadre « stratégie sur le milieu marin » (DCSMM), ou de nouveaux règlements tels que la Data Collection Framework pour la pêche suppose des activités à caractère opérationnel ; elle suppose aussi et induit des questionnements scientifiques permettant, par exemple, de mieux définir des indicateurs qui pourront être utilisés pour définir et décrire un bon état écologique. · Stratégie de créations d'AMP ; · Gestion des droits miniers (code minier) ; · Délimitations maritimes (ZEE, Extension du plateau continental) ; · Gestion côtière : aménagement, planification spatiale, trait de côte nécessitant un référentiel géographique du littoral dont une des composantes est la cartographie haute résolution continue terre-mer, concrétisée par le programme IGN-SHOM Litto3D (décision CIMER 2009) ; 1. Éléments de contexte Au niveau national, le comité interministériel de la mer (CIMer) a adopté le 08 décembre 2009, le Livre bleu de la stratégie nationale pour les mers et les océans a été élaboré notamment sur la base des travaux prospectifs du groupe Poséidon (2006) et des recommandations issues du Grenelle de la mer (2009). Il confirme que la zone côtière est un espace continu entre la terre et la mer pour la conduite des politiques publiques et réaffirme la nécessaire cohérence des actions menées sur terre et en mer. Il confirme également la mise en oeuvre de la planification stratégique des espaces maritimes, basée sur les principes de la gestion intégrée de la mer et des littoraux. En inscrivant la gestion intégrée de la mer et des littoraux dans son droit (Loi Grenelle 2), en installant une gouvernance renouvelée pour la mer et les littoraux, la France lance le vaste · Développement des énergies renouvelables marines ; · Réglementation nationale de la pêche professionnelle ; · Action de l'État en mer : dérive de polluants (POLMAR), PNAC (Plan National d'Adaptation au Changement Climatique), PSR (Plan Submersion Rapides), CENALT (Centre d'Alerte Tsunami de l'Atlantique), surveillance, garde-côte, etc. Au niveau mondial, la haute mer fait l'objet de conventions internationales, la plupart sous l'égide de l'ONU ou de ses organes subsidiaires, sur les ressources minérales, la biodiversité CDB, la pêche, le droit de la mer (UNCLOS), la délimitation des plateaux continentaux (CLPC commission pour la limitation du plateau continental). La France est partie prenante à de nombreuses conventions régionales : Atlantique Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 51 RéférenceS | novembre 2012 nord-est (OSPAR), Méditerranée (Barcelone), Baltique · Parmi les questions de recherche induites, on peut identifier, notamment : (Helcom) Nairobi (Carthagène...), organisations régionales de gestion des pêches dans l'Atlantique tropical, l'océan Indien, le Pacifique, les Caraïbes, etc. En termes de méthode, il semble essentiel de distinguer les défis posés à la recherche par la notion d'appui aux politiques publiques et les questions de recherche que peuvent induire ces politiques publiques. Certaines d'entre elles se croisent naturellement et mériteront un développement plus approfondi dans une étape à venir. Ainsi, parmi la liste des défis posés à la recherche, on peut mentionner (en dehors de questions prises en compte dans le cadre des autres piliers de l'IPC et non répétées ci-dessous) : · La prise en compte des "forçages" multiples : changements climatiques anthropiques et globaux, effets locaux, forçages · La notion de « services écosystémiques » : état de santé des écosystèmes, vulnérabilité, évaluation économique des services rendus au-delà des ressources exploitées (cf. MEA : Millenium Ecosystem Assessment), · L'ingénierie environnementale (transversal aux groupes AllEnvi), · L'analyse des déterminants de l'opinion publique, jeux d'acteurs, · les intégrations écologiques, sociales, économiques, politiques du développement, durable ; construction des compromis, aide à la décision publique, évaluation du coût de la dégradation (cf. services écosystémiques) ; · L'analyse des modes de gouvernance, co-construction, gestion partagée, gestion adaptative. La place de l'expertise dans les missions des organismes recherche, la reconnaissance et l'évaluation de ces activités, le pilotage de la recherche en soutien aux activités d'expertise sont aussi des questions qui devront être abordées. Une analyse de ce type de question suppose de réaliser le meilleur croisement entre les demandes liées aux enjeux de politiques publiques, les enjeux de connaissances amont et aval, et le niveau de reconnaissance des chercheurs ou des équipes sur ces champs. Elle suppose aussi de s'accorder sur des méthodologies de production de l'expertise (responsabilité, collégialité, etc.). La mobilisation des sciences humaines et sociales (homme nature société) et des sciences de la communication est un enjeu fort sur lequel une attention particulière devra être portée : méthodes d'évaluation des politiques publiques, modèles couplés ou intégrés écologie/économie/sociologie, droit (biodiversité et accès et partage des avantages), ethnologie (conflits d'usages). Une politique de l'environnement, en milieu côtier et littoral plus qu'ailleurs, doit se fonder sur la concertation d'une part et sur l'intégration de l'expertise scientifique d'autre part. En appui à cette politique, il doit être mis en place une recherche pluridisciplinaire associant les sciences politiques, la sociologie, la géographie, la biologie et les sciences de l'environnement. Elle doit ouvrir des pistes qui conduiront à une institutionnalisation du débat public, elle doit permettre l'analyse du fonctionnement des procédures et des dispositifs de participation, et alimenter des progrès dans le domaine de l'approche cognitive des processus de communication et d'information entre acteurs. · le caractère intégré des politiques, multi-usages, multiforçages ; · la déclinaison territoriale au moyen d'outils locaux (AMP, GIZC, autres) ; · l'intégration terre-mer : conséquence en mer des politiques et activités à terre ; · l'analyse des modes de gouvernance, la co-construction, la gestion partagée et/ou adaptative ; · la transposition du savoir scientifique vers le gestionnaire : transfert des idées et l'intégration des résultats de recherche pour l'élaboration et l'évolution des politiques publiques, la sensibilisation et l'éducation à la complexité, l'élaboration d'indicateurs ; · la montée en charge des demandes d'expertise et de « monitoring » ; · l'évaluation des actions et des effets des politiques publiques ; · la place de l'expert dans la prise de décision, dans le débat citoyen, la collégialité de l'expertise ; · plus généralement, la traduction de la connaissance en expertise ; · la mise en place de dispositifs d'appui technique (interface besoins et recherche). · la prise en compte des connaissances empiriques des acteurs présents sur le milieu (pour établir les diagnostics, les scénarios de gestion, définir et mettre en oeuvre l'approche écosystémique...). 52 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer 2. Les enjeux scientifiques de recherche dans l'appui aux politiques publiques L'usage durable des ressources marines vivantes ne peut se réaliser qu'à travers une approche écosystémique, et nécessite le développement de politiques publiques appuyées sur une connaissance populations et scientifique la intégrant du les problématiques des sociétales, la modélisation bioéconomique, la dynamique des connaissance fonctionnement écosystèmes marins. La régulation de l'accès à la ressource doit simultanément tendre à minimiser les conflits d'usages, à limiter la surexploitation en maintenant autant que possible la viabilité économique des entreprises du secteur. Très directement et de manière nouvelle, cette préoccupation s'est trouvée fortement liée à celle de la conservation et des usages non marchands de la ressource (pêche de loisir et écotourisme). Les aires marines protégées, en tant que nouvel outil de gestion, offrent les conditions expérimentales d'une évaluation des politiques publiques en ce domaine. En ce qui concerne les espèces protégées ou vulnérables, il s'agira de développer des actions de recherches visant une meilleure connaissance et la préservation des fonctionnalités de leurs habitats littoraux et côtiers. On pensera ici notamment aux espèces de poissons migrateurs amphihalins qu'elles soient exploitées ou non, à certains mammifères, etc. Vulnérabilités de la zone côtière Bien que les pressions anthropiques en mer soient moins intenses et souvent moins directes qu'à terre, elles prennent depuis plusieurs décennies une importance grandissante et elles touchent des environnements de plus en plus divers, y compris ceux qui sont les plus éloignés du cadre de vie de l'espèce humaine, comme les zones profondes ou polaires. Les principaux impacts liés aux activités humaines sont la surexploitation des ressources, les pertes d'habitats et de biodiversité, les espèces invasives et le parasitisme, la sur-fertilisation, l'imprégnation des milieux par les xénobiotiques, l'élévation du niveau moyen de la mer liée au réchauffement climatique global, l'érosion côtière ou, à l'inverse, les envasements et ensablements, enfin les risques de submersion souvent liés aux deux impacts précédents. En première ligne, les environnements littoraux subissent directement les effets d'une très forte concentration démographique (environ 60 % de la population mondiale réside à moins de 100 km des côtes): urbanisation, pollutions constantes ou saisonnières, présentant de larges gammes de toxicité, modifications quantitatives et qualitatives des transferts continentaux en raison de changements d'utilisation des sols des bassins versants, de modifications du relief (érosion ou accumulation sédimentaire locale accélérée), de la modification des conditions hydrauliques et des flux sédimentaires en raison des aménagements des cours d'eau et des zones côtières, portuaires et estuariennes, des exploitations de granulats... Toutes ces modifications, pour certaines amplifiées par les hautes densités de peuplement, affectent profondément et massivement le littoral dans sa partie continentale, mais aussi dans sa partie marine qui est par ailleurs directement touchée par des modifications du trait de côte, la destruction de zones d'habitat en petits fonds par des remblais et des empiètements qui les réduisent et les segmentent, le nautisme, les pêches côtières, les activités d'aquaculture... À l'échelle de la planète, les littoraux comptent pourtant parmi les milieux présentant les plus grands enjeux en matière de conservation de la biodiversité et de gestion des interactions hommes-milieux, comme l'atteste la liste des 34 points chauds mondiaux de biodiversité. La gestion des risques est un point particulièrement critique sur le littoral où se croisent divers aléas (sismique, océanologique, météorologique) et une vulnérabilité forte due à la présence humaine (populations et infrastructures, induisant éventuellement des risques secondaires, notamment chimiques et radioactifs). La France est, par exemple, un pays où l'aléa sismique est modéré en métropole (il est par contre important dans certains secteurs d'Outre-mer comme les Antilles), mais où la vulnérabilité sismique est forte. L'élévation du niveau moyen de la mer se traduit le plus souvent par des modifications des conditions d'érosion et d'accumulation qui influencent directement la morphologie du trait de côte. Le changement des régimes de tempêtes impacte également directement cette zone d'interface. L'évaluation des vulnérabilités environnementales et sociétales sur les zones littorales et côtières suppose donc de considérer à la fois la probabilité des aléas naturels, celle des aléas liés au changement climatique, celle des aléas liés aux activités humaines, et les dommages potentiels, directs et indirects, de ces aléas sur la population et les activités économiques. Il s'agit d'aller vers une modélisation des impacts possibles, pour laquelle la connaissance du contexte économique et social est également nécessaire. En matière de vulnérabilité côtière, l'océanographie opérationnelle constitue une pièce majeure du dispositif de recherche-expertise, permettant la prévision de l'état de l'environnement marin et côtier, tout en alimentant la recherche grâce à la possibilité de ré-analyses comparatives des jeux de données (mesures réelles in situ et simulations numériques). Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 53 RéférenceS | novembre 2012 activités pour qu'elles ne détériorent pas cet état, voire conduisent à son amélioration, doit également s'appuyer sur la compréhension des impacts de ces pressions. Cette compréhension est encore très lacunaire, car les pressions sont multiples, interactives, etc. Par exemple, l'effet des mélanges de contaminants à faibles doses est très mal connu, mais suspecté d'être plus important que la simple addition des effets de chaque substance (effet cocktail). Néanmoins, les écosystèmes Le robot voilier VAIMOS « Voilier Autonome Instrumenté de Mesures Océanographiques de Surface » utilise la force du vent et l'énergie solaire pour des missions de mesures et d'observations. ©Ifremer/Patrick Rousseaux affectés par cette imprégnation chimique subissent aussi généralement des dégradations physiques dont les conséquences sont encore plus radicales par la perte d'habitats fonctionnels. Rappelons aussi que la connaissance de la profondeur, notamment près des côtes, là où elle peut varier rapidement, reste un enjeu majeur au 21e siècle afin de mieux connaître et modéliser les interactions entre les phénomènes hydrodynamiques (comme les tsunamis par exemple) et la topographie des fonds. Dans ce contexte, les autorités publiques sont aujourd'hui en charge de définir des objectifs de qualité des espaces marins, de mettre en oeuvre des mesures appropriées de protection et/ou de reconquête des milieux et de développer des indicateurs des effets de ces politiques. Une telle politique environnementale, en milieu côtier et littoral particulièrement, doit se fonder sur la concertation d'une part et sur l'intégration de l'expertise scientifique d'autre part. La compréhension des impacts des activités humaines sur les milieux marins côtiers et littoraux permettra d'identifier des critères de qualité pour les différents indicateurs, ainsi que les pressions à faire décroître. Enfin, l'efficacité des politiques publiques demande à être évaluée a posteriori. Les modalités de cette évaluation ne sont pas triviales et devront reposer sur la compréhension des trajectoires des écosystèmes et de leur capacité de résilience. La dimension cinétique est ici fondamentale. Les couplages entre les modèles dynamiques et les autres processus essentiels dans le domaine côtier sont à développer, notamment la prise en compte des vagues et des interactions houle-courant, ou encore le couplage océan-atmosphère. Afin d'améliorer le couplage des modèles dynamiques avec les modèles sédimentaires, biogéochimiques et biologiques, il convient d'optimiser la représentation des échanges verticaux, notamment au niveau des couches limites de fond et de surface. Un meilleur interfaçage est nécessaire entre les modèles du domaine côtier, ceux des domaines plus au large et ceux du littoral, afin de quantifier les transferts de matière et d'énergie entre ces différents domaines. Enfin, des progrès en stratégie d'acquisition et d'assimilation de données in situ devront être accomplis du fait de la spécificité des observations du domaine côtier (radars haute fréquence pour les courants par exemple) et de leur faible densité au regard des échelles spatiales des processus dynamiques. La mise en place d'un service d'océanographie opérationnelle côtière (décision CIMER décembre 2009) devra être accompagnée d'un dialogue renforcé avec la communauté nationale des chercheurs en océanographie côtière et littorale. 3. Les enjeux scientifiques opérationnels dans l'appui aux politiques publiques L'identification et la caractérisation des pressions anthropiques et des vulnérabilités qu'elles installent dans les différentes composantes du milieu marin constituent la première étape par laquelle la recherche apporte son appui aux politiques publiques. Certains des enjeux ont été décrits dans les deux piliers précédents. L'identification et la compréhension des vulnérabilités doivent permettre de construire des indicateurs pertinents de l'état des milieux. Cependant, l'action du législateur, qui vise à réguler différentes L'Ifremer, le CNRS, l'IRD, le SHOM, le BRGM, le MNHN et les Universités investissent fortement sur ces différents sujets, au travers de leurs réseaux nationaux de surveillance et d'observation, au travers d'actions d'ampleur nationale ou internationale menées par des réseaux de laboratoires (comme RESOMAR), et des projets de recherche menés plus localement et l'axe 5 du LABEX MER porté par l'UBO. Il s'agit par exemple des risques liés à l'évolution physique du milieu littoral, aux impacts des événements extrêmes et du changement climatique, ou de la caractérisation et du suivi des écosystèmes marins (DCSMM), qui constituent des enjeux majeurs et font l'objet de nombreuses recherches collaboratives et 54 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer d'observations et études en appui aux politiques publiques, en métropole et en Outre-mer. La volonté est aujourd'hui, via des concertations nationales (comme celle précisément organisée dans le cadre de l'élaboration du programme Mer), ou interorganismes, de mettre en cohérence et en communication l'ensemble de dispositifs et centre de compétences afin de construire un système coordonné de recherche et d'expertise, susceptible d'agir à la fois sur le plan des recherches fondamentales nécessaires, que sur celui de l'appui aux politiques publiques. Modélisation côtière opérationnelle L'ambition d'un système de modélisation côtière opérationnel est de restituer, au travers de formalismes mathématiques et de méthodes numériques, le meilleur niveau de compréhension du fonctionnement de l'environnement (physique, chimique, sédimentaire et biologique) afin d'en prédire les évolutions sous la pression d'une combinaison de forçages. Il s'agit de coupler le modèle dynamique d'océan régional et côtier avec les modèles d'atmosphère, de vagues, de sédiments, les modèles biologiques, et les modèles littoraux (ces derniers ayant l'objectif de représenter les échelles plus fines dans les zones peu profondes affectées par le déferlement des vagues). Afin d'améliorer le couplage des modèles dynamiques avec les modèles sédimentaires, biogéochimiques et biologiques, il convient d'optimiser la représentation des échanges verticaux, notamment au niveau des couches limites de fond et de surface. Un meilleur interfaçage est nécessaire entre les modèles du domaine côtier, ceux des domaines plus au large et ceux du littoral, afin de quantifier les transferts de matière et d'énergie entre ces différents domaines. Enfin, des progrès en stratégie d'acquisition et d'assimilation de données in situ devront être accomplis du fait de la spécificité des observations du domaine côtier (radars haute fréquence pour les courants par exemple) et de leur faible densité au regard des échelles spatiales des processus dynamiques. La mise en place d'un service d'océanographie opérationnelle côtière (décision CIMER décembre 2009) devra s'accompagner d'un dialogue renforcé avec la communauté nationale des chercheurs en océanographie côtière et littorale. La prospective « océanographie opérationnelle » (voir pilier 1) sera l'occasion de mobiliser la communauté scientifique sur cette question. Régulations des activités maritimes Les activités développées dans l'espace marin, notamment celles qui sont en lien avec les nouveaux enjeux des énergies marines, nécessitent des données d'observation in situ pour la recherche et pour la sûreté maritime. Elles requièrent également que soient précisées leurs qualifications juridiques Observatoire socio-économique des activités maritimes À la manière des observatoires de l'environnement naturel, il est nécessaire informations de développer sont une observation à toute des activités de maritimes. La collecte, le stockage et la mise à disposition de ces indispensables politique planification des usages et de développement d'une économie maritime active. Ils doivent couvrir les champs de la pêche, de l'aquaculture, des usages récréatifs, de l'extraction, du transport et des énergies nouvelles. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 55 RéférenceS | novembre 2012 56 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Pilier 4 : Programme d'action pour l'Outre-mer français 1. Contexte et enjeux scientifiques Avec sa zone économique exclusive d'une superficie d'environ 11millions de km , la France dispose du second espace maritime 2 mondial. L'Outre-mer en représente la composante essentielle (près de 97 %), située dans les grands océans (Atlantique, Pacifique, Indien et Antarctique). Les états généraux de l'Outre-mer, les programmes de développement économique des collectivités, le Grenelle de l'environnement puis le Grenelle de la mer et le Conseil Interministériel de l'Outre-mer (CIOM) de novembre 2009 ont exprimé des attentes fortes et variées portées par la mer ainsi que l'objectif de promouvoir le développement endogène des régions et pays d'Outre-mer. L'Outre-mer offre à la France des opportunités et des responsabilités en matière de recherche et d'innovation. Dans le prolongement de la Stratégie nationale de recherche et d'innovation menée par le ministère chargé de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, il a été mené en 2010 une réflexion sur les « Stratégies territoriales pour les Outre-mer » (STRATOM) dans laquelle l'espace marin a pris une place prépondérante et qui a servi de support à cette partie du « Programme MER ». Les Outre-mer français s'inscrivent dans 5 cadres juridiques différents : · Les départements et régions d'Outre-mer, (DOM-ROM ou DROM) à statut équivalent aux départements et régions de métropole (Guadeloupe, Martinique ; Guyane, la Réunion et récemment Mayotte). Les DOM-ROM font partie de l'Union Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 57 RéférenceS | novembre 2012 européenne au titre des régions ultrapériphériques (RUP). alors qu'elle constitue un élément essentiel pour limiter les effets de l'érosion des sols, de la montée du niveau de la mer et de la pollution. C'est également une nourricerie pour de nombreuses espèces de poissons et de crustacés peuplant les eaux littorales, lagons et barrières coralliennes proches. La préservation de cette biodiversité passe par la mise en place d'aires marine protégées dont la conception et la gestion demandent un effort important de recherche sur la compréhension du fonctionnement des écosystèmes. · Les collectivités d'Outre-mer (COM) à statuts divers : Polynésie française (Pays d'Outre-mer), Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon (collectivité territoriale) et Wallis-et-Futuna (Territoire). Ces territoires n'appartiennent pas à l'UE. · La Nouvelle-Calédonie constitue une collectivité sui generis. · Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). En 2007, Les TAAF ont intégré un district supplémentaire : les îles Éparses (Bassas da India, Europa, îles Glorieuses, Juan de Nova, Tromelin). · L'île Clipperton, une propriété domaniale (donc privée) de l'État administrée par le ministre chargé de l'Outre-mer (donc le Ministère de l'Intérieur assisté d'un Secrétariat d'État). Le processus en cours, dans le cadre de l'ONU, pour l'extension des zones sous juridiction nationale (EXTRAPLAC) ouvre des perspectives nouvelles, mais seuls les DOM, les COM et la Nouvelle-Calédonie sont habités de manière permanente. Chaque Outre-mer présente des enjeux en matière de connaissance du système « mer », d'exploitation durable des ressources marines et de gestion de l'espace côtier. Nous ne les reprendrons pas à ce stade, car ils sont exposés dans les autres piliers. En revanche, la spécificité de l'Outre-mer vis-à-vis de la biodiversité, de la vulnérabilité à l'impact du changement global, des pressions anthropiques et des risques naturels mérite un exposé particulier. La biodiversité marine des Outre-mer est en effet L'impact du changement global, sur les écosystèmes marins d'Outre-mer, généralement insulaires, est bien plus sensible qu'en métropole. L'élévation de température, la montée et l'acidification des eaux modifient le fonctionnement des écosystèmes. Les blanchissements coralliens sont plus fréquents et on observe le changement du comportement des animaux avec des conséquences sur la biodiversité et les ressources exploitables. Il existe ici un fort besoin de recherche sur les scénarios à envisager, à court, moyen et long terme. Les pressions anthropiques vont continuer à se multiplier avec la croissance démographique (introduction d'espèces, urbanisation du littoral à la Réunion, industrie du nickel et du cobalt en Nouvelle-Calédonie, urbanisation du littoral et orpaillage en Guyane, déficiences dans la gestion et le traitement des déchets, agriculture et autres pressions humaines dans la Caraïbe, etc.). Les questionnements scientifiques correspondants couvrent le suivi, la compréhension et la modélisation des effets d'origine anthropique avec identification des pollutions majeures, évaluation des risques environnementaux et leurs conséquences sur la santé humaine ; avec une finalité qui est Holothurie ou concombre de mer « Stichopus variegatus » dans le lagon de Nouvelle-Calédonie. Photo réalisée dans le cadre du projet de recherche IBANOE dont l'objectif est d'identifier de nouveaux indicateurs des apports anthropiques (nutriments, métaux lourds) et du fonctionnement trophique du lagon Sud-Ouest de Nouvelle-Calédonie. © CNRS Photothèque ­ IRD / Erwan Amice exceptionnellement riche grâce à leur situation à proximité des « hot-spot » de biodiversité, dans le Sud-ouest de l'océan Indien, les Caraïbes et la Nouvelle-Calédonie. Cela explique que 80 % de la biodiversité française se trouve Outre-mer. Quatrième pays au monde par l'étendue de ses récifs coralliens, la France met en oeuvre depuis 1999 l'Initiative française pour les récifs coralliens (IFRECOR). En soutien, elle se doit de jouer un rôle exemplaire dans la recherche sur les récifs coralliens et les écosystèmes associés, notamment depuis l'inscription par l'UNESCO au patrimoine mondial d'une partie des récifs et lagons de Nouvelle-Calédonie. Dans le cadre des investissements d'avenir, un laboratoire d'excellence, LABEX CORAIL, rassemble la communauté des chercheurs français. La mangrove, un des écosystèmes littoraux majeurs de la zone tropicale, est menacée par une pression anthropique croissante 58 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer la préservation et la réhabilitation de la qualité de recherche dans l'objectif de coordonner les initiatives, mutualiser les dispositifs, renforcer la lisibilité, non seulement dans le domaine de la recherche, mais également dans ceux de la formation et de l'innovation qui lui sont étroitement liés. Concernant les moyens à la mer, la majorité de la flotte océanographique française a été réunie en 2011 dans une unité mixte de service (UMS-FOF) qui organise chaque année des appels d'offres de campagnes faisant l'objet d'une évaluation scientifique et d'une programmation unifiée. L'UMS-FOF mobilise les navires océanographiques de l'Ifremer, de l'IPEV, du CNRS et de l'IRD. Dans ces appels d'offres, le prépositionnement des navires en Outre-mer est régulier pour les navires de taille moyenne de l'IRD (Alis, basé en Nouvelle-Calédonie et Antea qui est susceptible d'intervenir dans l'Océan Indien et les Antilles), tandis que l'IPEV et l'Ifremer interviennent de manière plus occasionnelle avec des navires de grande taille (Marion-Dufresne II, Atalante,...). Par ailleurs, les bâtiments hydro- l'environnement littoral. Les risques naturels touchent les ROM-COM qui, par leur position géographique et leur contexte géologique, sont particulièrement sujets aux aléas de type météorologique (tempêtes, cyclones, inondations) et géologique (glissements de terrain, séismes, tsunamis, éruptions volcaniques ou érosion côtière). Ces risques font l'objet de travaux de recherche souvent conduits par les organismes nationaux (MétéoFrance, Shom, BRGM, IPG, IRD, Ifremer,...) et s'appuient sur des observatoires existants (volcans, séismes) ou en devenir comme les systèmes d'alerte aux tsunamis en océan Indien et dans les Caraïbes. 2. Analyse stratégique du positionnement national 2.1 La présence de la recherche française Outre-mer L'effectif total des personnels de recherche et d'enseignement supérieur, toutes catégories confondues, dépasse légèrement 3600 personnes, soit environ 1,6 % du total des personnels employés par les universités et opérateurs publics en France (source OST, 2010). Cette présence est bien moindre qu'en métropole. Pour mémoire, la population totale des territoires d'Outre-mer représente 4 % de la population française. Les infrastructures de recherche relèvent de trois catégories d'instruments : océanographiques opérés par le SHOM, effectuent régulièrement des levés bathymétriques et des campagnes de mesures océanographiques lors de leurs déploiements en Outre-mer et dans les espaces maritimes sous responsabilité française. Cependant, il existe un écart important entre les besoins de l'Outre-mer et les moyens disponibles. Plusieurs projets d'équipement, pour des bateaux de taille moyenne à faible, du type navire de station marine, sont en gestation. L'accès à des navires étrangers est possible dans le cadre des échanges de temps navire organisés par l'OFEG (Ocean Fleet Exchange Group), du programme européen Eurofleets, et pour des observateurs de l'État côtier sur les navires étrangers effectuant des recherches dans les eaux sous juridiction (ZEE). Des programmes internationaux associant des équipes de recherche françaises mobilisent régulièrement les flottes océanographiques étrangères dans les ZEE d'Outre-mer (Flotte sud-africaine dans le programme MESOBIO sur le Canal du Mozambique, Flotte japonaise dans les Mascareignes pour la recherche des zones de ponte des Anguilles, etc.). Enfin, il reste toujours le recours à des affrètements (cas de la campagne Marquise mobilisant un navire Néo-Zélandais). Plusieurs bases de données et collections sont alimentées par · quelques très grandes infrastructures : Cyclotron de l'océan Indien ; laboratoire P3 en Guyane et à La Réunion ; réseau d'antennes pour l'observation de l'environnement assiste par satellite en Guyane, Nouvelle-Calédonie et La Réunion ; Grand Observatoire du Pacifique Sud ; composante IRD et « tout océans » de la Flotte Océanographique Française, etc.; · plusieurs plates-formes d'observation et de mutualisation d'outils (santé ; climat ; risques naturels) ; · de nombreuses collections de ressources biologiques et des bibliothèques. La STRATOM recommande le développement d'infrastructures de recherche partagées précisant qu'un « consensus se dégage sur les équipes de recherche, la liste indicative ci-après n'est pas exhaustive : banque de microalgues des fonds marins (ARVAM, la Réunion), zoothèque et banque d'ADN à l'Université de la Réunion, collection et base de connaissance sur les coraux (IRD, MNHN, Université de la Réunion, ECOMAR, TIT biodiversité IFRECOR/MNHN et COREMO financés dans le cadre de l'IFRECOR), collection de microorganismes marins de Nouvelle-Calédonie, les bases Ifremer la mise en place et la pérennisation de grands observatoires de recherche, de collections et de bases de données ». Elle préconise de transposer le concept de grand observatoire développé dans le Pacifique Sud. Le Grand Observatoire du Pacifique Sud (GOPS), GIS créé en 2009 et qui fédère actuellement 17 établissements de Harmonie pour le Système d'Information Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 59 RéférenceS | novembre 2012 Halieutique (SIH) et Quadrige pour les données 2.3 Le rayonnement régional de la France depuis l'Outremer L'Outre-mer contribue pour une part importante à la position privilégiée de la France sur la scène internationale et à sa capacité d'influence. Ses caractéristiques, notamment marines, permettent à la France de siéger dans la plupart des instances internationales où elle est souvent doublement présente : au titre de la France elle-même (par sa présence dans la zone concernée), mais aussi comme membre de l'Union européenne. C'est le cas dans les commissions régionales des pêches (CCAMLR, IOTC, ICCAT, IATTC,...) ou bien dans les associations scientifiques (WIOMSA, PSA). environnementales, l'Observatoire thonier de l'IRD dans l'océan Indien et l'Atlantique tropical, etc. Le Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) a la garde des collections nationales d'histoire naturelle et, avec ses homologues internationaux, a en charge la coordination le référencement des espèces et la conservation des spécimens notamment les types. Les équipes locales revendiquent à juste titre la possibilité de disposer de collections locales de référence. L'articulation entre les deux exigences peut quelques fois être source de tensions. 2.2 L'Outre-mer français et l'Union européenne Les régions d'Outre-mer sont considérées comme les L'activité de recherche en général, et les sciences marines en particulier, doivent s'envisager à l'échelle internationale avec les pays de la zone, animés par l'intérêt partagé d'une bonne gestion des espaces marins. Ce sont des activités particulièrement propices au désenclavement des espaces ultramarins. Dans les démarches de coopération scientifique régionale, il faut considérer de manière distincte les pays les moins avancés et les puissances émergentes, ou déjà développées. Les organismes de recherche rassemblés dans l'alliance l'Agence ALLENVI mènent de différents Recherche programmes pour le internationaux, mais ils se sont accordés pour confier à Inter-établissement Développement (AIRD) une fonction spécifique d'aide et de soutien pour collaborer avec les pays du Sud. L'AIRD a donc un rôle particulier à jouer dans l'avenir à ce niveau. 2.4 Analyse globale du système de recherches marines Outre-mer Le tableau présenté pp. 62-63 présente les points forts et points faibles du système de recherche marin outre-mer. Il est à lire au regard des conditions particulières de chacune des collectivités d'Outre-mer et des évolutions les plus récentes (notamment en termes de structuration de la recherche) qui peuvent être résumées ainsi : Dans le Pacifique : « frontières actives » de l'Europe (statut spécifique de Régions Ultra-Périphériques ­ RUP). À ce titre, les actions de coopération scientifique internationale menées depuis une ROM contribuent, avec une forte visibilité, au rayonnement dans la région, de la France et de l'Europe, et donc de leur influence sur les pays de la zone. Plusieurs programmes européens traitent des sciences marines on été financés par différents instruments (FED de l'Ifremer pour la perliculture en Polynésie, RunSeaScience de l'IRD à La Réunion, PACE-Net de l'IRD dans la région Pacifique,...). Il faudrait cependant que les besoins en financement de la recherche, dans les ROM et COM, soient davantage pris en compte par l'U.E dans le futur. Ceci semble difficile sans une véritable stratégie de lobbying au niveau bruxellois. Elle devrait s'appuyer sur les acteurs scientifiques et institutionnels français concernés (universités, collectivités et organismes ultramarins et métropolitains), mais aussi sur les autres acteurs des pays membres européens concernés par leurs RUP (Portugal et Espagne) ou encore les pays européens possédant des liens étroits avec leurs PTOM (Danemark, Grande-Bretagne, Pays-Bas, France). Les thèmes scientifiques à promouvoir pourraient être des thèmes fédérateurs d'intérêt mondial (aires marines protégées, protection des récifs coralliens,...). La recherche nécessaire à l'application de la réglementation européenne dans les RUP a été un argument employé pour les eaux continentales et littorales (Directive-cadre sur l'eau) ou bien pour la gestion des ressources (Règlement sur la collecte des données de pêche). Malheureusement la Directive Cadre « Stratégie pour le Milieu Marin » (DCSMM) n'est pas directement applicable dans les RUP. · Il a été créé en 2009, au niveau régional Pacifique, un Grand Observatoire de l'environnement et de la biodiversité terrestre et marine du Pacifique Sud (GOPS) qui fédère la plupart des organismes français de recherche impliqués dans la zone. Vu l'importance des enjeux maritimes océaniens, les sciences marines sont abondamment représentées dans les structures du GOPS avec un programme scientifique structuré. · Le financement par l'Europe du réseau PACE-Net 60 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer rassemblant les scientifiques de la région va pouvoir servir de support pour le développement international du GOPS. vient de se terminer, a permis de montrer le dynamisme des acteurs locaux de sciences marines autour de projets communs de recherche réalisés à l'échelle régionale. · La Polynésie française dispose d'un immense espace marin, vers lequel elle se tourne résolument depuis la réalisation du programme ZEPOLYF mené dans les années 2000, les États généraux de l'Outre-mer ont confirmé la volonté politique d'intégrer l'espace marin dans la politique de développement. Le projet de création d'une UMR-EIO (UPF, IRD, Ifremer, ILM) traduit la volonté de structuration de la recherche locale sur les thématiques « biodiversité » et « insularité ». · La Réunion a fortement structuré sa politique de recherche et d'innovation, dans différents domaines avec par exemple l'OVPF (Volcanologie), le GIP CRVOI (maladies infectieuses), la CYROI (cyclotron) et le pôle de compétitivité Qualitropic. Pour l'instant, les sciences marines sont concernées uniquement pour partie par l'OSU-R porté par l'Université., mais l'élément fédérateur le plus important est le projet d'implantation commune des acteurs en sciences de la mer sur le site du Port. Soutenu depuis 2007 par le Conseil Régional sous différentes appellations, le financement CPER ne s'est toujours pas concrétisé, mais cela reste la première des priorités pour toute la communauté. · La Nouvelle-Calédonie dispose de ressources minérales terrestres (nickel et cobalt) donnant des moyens aux collectivités locales dans les politiques de recherche et d'innovation notamment dans l'objectif de préserver les milieux et leur biodiversité y compris marins. C'est dans ce contexte que se structure progressivement la recherche en NC avec notamment la création d'un COSRI-NC (comité de stratégie recherche et innovation) et d'un COST (Comité scientifique et technologique) aujourd'hui opérationnels et prémices à la création d'un Pôle de recherche et d'enseignement supérieur (PRESICA), regroupant les acteurs locaux de la recherche (IRD, Ifremer, BRGM et IAC) autour de l'Université de NouvelleCalédonie. L'innovation est soutenue de la par l'Agence de développement économique Nouvelle-Calédonie · Tout nouveau département, Mayotte accueille depuis 2010 un Parc naturel marin, le PNM, et compte développer une filière aquacole. Deux opportunités qui pourraient se traduire par la construction progressive d'une implantation commune aux acteurs de sciences marines. · Le Livre bleu Océan Indien, préparé par les services de l'État en décembre 2011, envisage le futur de la politique maritime de l'État français dans l'ensemble de l'OI. Il prévoit la création d'un Conseil maritime du sud de l'océan Indien, sorte de Conseil Économique et Social de l'OI, qui regrouperait l'ensemble des acteurs de la société. Sa déclinaison « Recherche » confirme la volonté de renforcer la coordination/structuration de la recherche française en sciences marines dans l'OI. Ils proposent la création d'un « Pôle Scientifique Mer Océan Indien » (PSMOI) pour rassembler les centres réunionnais et mahorais. Pour l'instant, les organismes intervenant dans la zone ne se sont pas exprimés officiellement, constituer mais le PSMOI d'un pourrait grand certainement observatoire. l'élément maritime (ADECAL). Les activités marines y sont représentées au travers de la pêche et de l'aquaculture. Observatoire sous-marin MICADO dans un lagon de Nouvelle-Calédonie. ©Ifremer/Gilles Hervé · Les TAAF administrent des territoires sans habitant permanent sur lesquels l'activité scientifique est prépondérante. Le GIP IPEV a été spécialement créé pour soutenir l'activité scientifique en Antarctique et dans les terres australes où sont implantées des stations de recherche. Le rattachement des îles Éparses aux TAAF offrent de nouvelles opportunités de recherche qui se sont concrétisées en 2011 par un Programme îles Éparses, qui a sélectionné des projets sur appel d'offres, où sont intervenus de nombreux organismes. Ce mode de fonctionnement est tout à fait adapté au monde de la recherche et devrait servir d'exemple pour l'avenir. Dans l'Océan Indien : · La STRATOM, publiée en 2011, recommande la transposition à l'Océan Indien d'une structure régionale de type Grand Observatoire comme le GOPS pour fédérer les acteurs de la recherche. Même si ce type de dispositif ne leur serait pas spécifiquement dédié, elles y auraient toute leur place, car elle représente un enjeu majeur de la recherche dans la région. · Le succès du projet européen REGPOT Run-Sea-Science, qui Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 61 RéférenceS | novembre 2012 Tableau : Forces et faiblesses du système de recherches marines outre-mer (analyse SWOT) Forces Structures Structures Faiblesses · · · · Des universités attractives sur des domaines émergents - Articulation forte en écologie et biodiversité tropicale avec 2 masters (UAG, Univ. Réunion), et débouchés locaux; Un observatoire structuré d'envergure internationale établi en Polynésie française, le CRIOBE, renforcé par la création en 2009 de l'Institut des récifs coralliens; Structuration en Nouvelle Calédonie avec la création des COST et COSRI; La création du « Pôle d'Excellence Mahorais » et la création du Parc Naturel Marin de Mayotte. · Manque de stations marines et de navires côtiers en outre-mer, manque de coordination entre acteurs locaux et nationaux, difficulté à mobiliser les infrastructures nationales (navires, moyens aériens), et à établir une vision pluriannuelle de la programmation des zones géographiques qui seront couvertes par les navires hauturiers. · · · Manque de visibilité de l'implication (situation et perspectives) de l'ultra-marin dans l'observatoire national de la biodiversité (Loi Grenelle 1 ­ article 25), ECOSCOPE, LIFEWATCH et GEOBON; Faible interopérabilité des bases de données; L'absence de stations d'observations sous-marines permettant d'acquérir des séries temporelles de données limite le progrès de la compréhension des processus fondamentaux de fonctionnement de la planète et de la connaissance et de la prévention des risques; Technique · · ORE implantés localement (coordination et évaluation désormais intégrées à l'Alliance Allenvi); Performances techniques et polyvalence des navires scientifiques hauturiers et régionaux portés par l'Ifremer, l'IPEV et l'IRD. · Difficulté à assurer la pérennité d'infrastructures pour créer et accueillir des collections locales. Gouvernance & coordination Des coordinations entre établissements et universités existantes ou en Gouvernance & coordination cours de structuration : · · · · Difficulté à mobiliser des équipes nationales sur des · · · · · · · · · · le rôle majeur de l'IPEV (coordination et agence de moyens) pour les mers australes ; le pôle biodiversité et écosystèmes hauturiers à la Réunion articulé avec le projet de « Pôle Mer Réunion »; des synergies identifiées entre Ifremer et IRD sur les ressources halieutiques ; Fédération de recherche EBS (Environnement Biodiversité Santé) à la Réunion; Bonne coordination locale et internationale avec l'IFRECOR, en synergie avec l'ICRI et le GDRI «Biodiversité des récifs coralliens»; Coordination renforcée par la création du Grand Observatoire de l'environnement et de la biodiversité terrestre et marine du Pacifique Sud (GOPS); Articulation recherche - acteurs locaux; bio-ressources marines locales, pêche et aquaculture, et toxicologie (ciguatera) potentielle sur les ressources naturelles, Programme ZONECO en Nouvelle-Calédonie, projet de pôle régional mer à la Réunion, cohérence entre orientations du CIOM et les activités de recherche sur les bio-ressources marines (en matière de valorisation, le point le plus fort porte sur l'aquaculture et l'halieutique). problématiques locales. Faible articulation du tripode recherche - enseignement supérieur perspectives locales (sauf la Réunion) Faible articulation entre acteurs des recherches marines et terrestres sur les problématiques littorales (pollutions, pressions anthropiques) à l'exception du DYNECAR (UAG) ; Articulation des problématiques marines avec les SHS et la santé quasi inexistantes (sauf toxicologie ­ ciguatera en PF avec l'Institut Louis Malardé et l'IRD et l'Institut Pasteur en NC et les études écosystémiques du CRIOBE) · Peu de recherche sur la gouvernance des pêches, la logistique pour la consommation, l'exportation des productions locales (pêche, aquaculture), la pêche de loisirs. Autres · · · · · Absence d'animateurs de réseau et manque de visibilité des équipes locales, difficulté à établir une vision complète des équipes et des projets, « Trou noir » de l'Eranet Biome. L'ultramarin est insuffisamment pris en compte dans le PCRD. Peu de projets ANR et européens portés par des équipes locales. Tissu économique trop réduit pour susciter des demandes structurées de travaux de recherche; aucun financeur n'a inscrit l'espace marin dans ses priorités. Ressources humaines (compétences) insuffisantes pour bénéficier des résultats de la recherche et participer à l'orientation et à l'observation ? Mobilisation insuffisante de l'AIRD (Agence inter-établissements de recherche pour le développement) sur l'espace marin outre-mer pour y mener des actions en coopération régionale. Autres · · Intérêt scientifique en sciences de la planète et de l'environnement (géosciences, climat, écologie et biodiversité) porté par les organismes nationaux et des collaborations internationales. Implication des organismes de recherche dans les programmes nationaux de cartographie pour l'extension du plateau continental (EXTRAPLAC). 62 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Opportunités Structures Menaces · Perspectives de création d'un « Pôle Mer » en Guyane (volonté du Conseil Régional). Technique Technique · Possibilités de coordination avec l'étranger et d'exploitation par les équipes françaises des données des campagnes scientifiques étrangères effectuées dans la ZEE française. · Manque de moyens logistiques pour l'accès à l'observation et à la surveillance de territoires éloignés (îles Eparses, PF etc.), menace accrue par la diminution des moyens disponibles des organismes de recherche nationaux, notamment pour la flotte. Gouvernance & coordination · Engagements du Grenelle de la mer et du CIMER : synergie des moyens à la mer et création fonction garde côte ; synergies Gouvernance & coordination recherche / programmes nationaux pour la cartographie, EXTRAPLAC, · Manque de coordination, risques de redondances et divergences entre l'exploration et l'exploitation des ressources minérales et initiatives et projets locaux et acteurs (équipes, projets, organismes) nationaux. Risque de dispersion de projets non coordonnés portant sur des thématiques similaires. énergétiques, création et extension de zones protégées (aires marines protégées); · · Partenariats : Communauté du Pacifique Sud pour la pêche hauturière (thonidés) et côtière; La volonté de l'Etat, affichée dans le Livre bleu Océan Indien, d'une structuration de la recherche française dans l'Océan Indien avec la création d'un PSMOI s'appuyant sur les futurs « Pôle d'excellence mahorais » et « Pôle Mer Réunion »; · Freins à la diffusion des données : faible reconnaissance des chercheurs qui les ont obtenues, crainte du pillage et d'utilisations concurrentes, confidentialité, droits d'auteur, conflits potentiels entre collections locales et collections nationales liées au manque de règles sur l'utilisation, la question de la mise en forme et la validité de la donnée. Faut-il fournir les données brutes ou des données élaborées etc.? · · La structuration en cours de la recherche en Nouvelle Calédonie avec la création du futur PRESICA; Coopération régionale dans le bassin de l'océan Indien (COI), et entre Nouvelle-Calédonie et Australie. Autres · Perspectives de développement économique local des ressources marines soutenues par les Etats généraux de l'outre-mer et les stratégies régionales d'innovation ; soutien politique à la Réunion et Polynésie française aux projets d'énergies marines ; Autres · · Risques naturels (volcaniques, sismiques, tsunamis, cyclones etc.) pouvant affecter les installations et observatoires dans les îles ; Piraterie dans l'océan Indien et le canal du Mozambique empêchant la réalisation de certaines campagnes scientifiques marines. · Initiative de l'INEE, du MOM et des TAAF sur les îles Eparses ; grandes expéditions biodiversité MNHN-IRD en Nouvelle-Calédonie après le Vanuatu et Madagascar. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 63 RéférenceS | novembre 2012 · Les Antilles font preuve de dynamisme en recherche et enseignement supérieur dans le domaine de la biodiversité des écosystèmes tropicaux et des mangroves, et ont développé des synergies entre les domaines terrestres et marins au sein du DYNECAR (EA 926 de l'UAG). coordination de la recherche à l'échelle régionale permettant d'ancrer les Outre-mer dans leur contexte international ainsi que (ii) des programmes thématiques dont certains pourront être menées sur un DOM ou PTOM spécifique pour lequel il pourrait y avoir un enjeu local majeur. Leur mise en oeuvre et les objectifs scientifiques devront répondre aux critères suivants : · La Guyane dispose d'un littoral riche de ressources biologiques (mangrove, monts sous-marins) et halieutiques potentielles dont la connaissance et l'exploitation méritent d'être développées et rationalisées pour accompagner le fort dynamisme démographique. Le besoin de connaissances sur le milieu marin en appui aux politiques publiques ne devrait pas manquer d'être amplifié si les perspectives d'un développement de l'exploitation de pétrole off-shore dans la ZEE guyanaise étaient confirmées. C'est dans ce contexte qu'il convient de prendre en compte la volonté de la collectivité de créer localement un « Pôle mer ». · Ils seront définis dans le temps et dans l'espace · Ils devront s'inscrire au sein des 3 piliers suivants : (i) contribuer à la connaissance et compréhension du système Mer ; (ii) contribuer à l'exploitation durable des ressources marines et (iii) contribuer à la gestion de l'espace côtier marin . · Ils devront aussi correspondre à des enjeux socioéconomiques importants avec une vision des objectifs qui sera partagée avec les collectivités concernées. · Le respect de ces piliers ne doit pas laisser de coté les aspects biodiversité, aléas-risques-vulnérabilité et surtout les sciences humaines et sociales dans leur dimension la plus large, de manière à couvrir la demande locale. · Les fonds devront pouvoir être mobilisables au niveau des principaux guichets de financement de la recherche (ANR, M.O.M., U.E., CPS, AFD, collectivités,...) · Des moyens humains seront mobilisables auprès des organismes concernés. · Ils nécessiteront une approche pluri-disciplinaire et pluriAquaculture de l'ombrine ocellée à la station Ifremer de Martinique. ©Ifremer/Olivier Dugornay organisme. 3.2 Options pour une coordination de la recherche à l'échelle régionale · Saint-Pierre et Miquelon reste aujourd'hui le « parent pauvre » avec une filière pêche moribonde. Seul l'Ifremer y est aujourd'hui implanté avec un agent permanent. Les actions menées localement, avec un appui fort assuré par les équipes métropolitaines, concernent l'halieutique (évaluation des stocks dans la perspective de la renégociation des accords de pêche avec le Canada) et le développement d'une filière aquacole (élevage du pétoncle géant). Il convient de souligner la réalisation en 2011 du dossier technique EXTRAPLAC, pour St-Pierre et Miquelon. La France dispose aujourd'hui du dossier technique en appui à une éventuelle demande officielle d'extension juridique de son plateau continental au large de SPM. 3.2.1 Région « Pacifique » : Cette région, regroupant la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie Française a vocation à s'appuyer sur un outil préexistant, le GIS-GOPS. Cette démarche, qui s'inscrit dans le long terme pourra évoluer en fonction des souhaits de ses membres. Dans le contexte actuel du financement de la recherche publique où le financement par projets remplace le récurent des organismes, le GOPS n'a pas été en capacité de mobiliser des fonds autres que ceux des budgets des organismes membres. 3. Proposition d'actions Outre-mer 3.1 Proposition de critères de définition des priorités : Il est proposé de sélectionner (i) des options pour une Le projet européen PACENET s'inscrit dans cette stratégie puisqu'il s'agit de faire émerger des priorités régionales qui devraient être ensuite reprises par l'U.E. et faire l'objet d'appels à projets « ciblés au niveau régional ». Ce projet n'est 64 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer pas exclusivement tourné vers les sciences de la mer, mais les réunions tenues jusqu'ici donnent une place importante à la biodiversité et à l'environnement marin. Il est donc proposé : Mayotte ; · intégration au niveau international dans la zone du sudouest de l'océan Indien ; Dans ce cadre, le Pôle Scientifique Mer Océan Indien (PSMOI) pourrait rassembler les acteurs des sciences marines impliqués : · De continuer à entretenir, au sein du GOPS, un projet scientifique et technique « MER » qui réponde aux différents critères cités ci-devant ; · Au sein de la future implantation commune du Port à La Réunion (Pôle Mer Réunion) ; · De s'organiser pour promouvoir ce projet auprès de l'ensemble des financeurs institutionnels dans un objectif de cofinancement par ces différents guichets ; · Au sein du projet d'implantation mahorais ; · Dans le programme « Îles Eparses » ; · Dans le projet européen RunSeaScience. La compétitivité des équipes en place leur permet de candidater sur les moyens communs de financement de la recherche type ANR, mais un projet scientifique spécifique aux sciences marines, comme il en à déjà été rédigé pour nourrir le projet d'implantation commune à La Réunion, ou bien pour construire le projet RunSeaScience, reste le meilleur moyen d'assurer une bonne représentation dans le futur Grand observatoire sous l'égide du PSMOI. 3.3 Programmes locaux thématiques : · De ne pas limiter cette démarche aux seuls bailleurs français et européens, mais de l'étendre aux institutions régionales (CPS) et aux autres partenaires potentiels de la zone (Australie, Nouvelle-Zélande, Japon, Fidji,...). 3.3.1 Chlordécone aux Antilles : Un « programme marin Chlordécone » identifié au sein du Programme National Chlordécone 2 pourrait fédérer de nombreux membres d'AllEnvi. Il conviendrait dans un premier temps Aquaculture du Platax au Centre Ifremer du Pacifique (Tahiti). ©Ifremer/Olivier Dugornay d'identifier le programme scientifique correspondant et d'en assurer la promotion auprès des bailleurs de fonds pour mobiliser les financements nécessaires, là aussi dans une logique de cofinancements. 3.2.2 Région « Océan Indien » : Cette région regroupant La Réunion, Mayotte et les Îles Éparses et TAAF se singularise par la présence d'équipes de recherche suffisamment fournies pour atteindre une masse critique capable de positionner la France à l'échelon international. Dans ce contexte très favorable, l'université de La Réunion est à même d'apporter un support important aux démarches des organismes. Il reste maintenant à envisager la création d'une structure « chapeau » de type Grand observatoire comme recommandé dans la STRATOM pour traiter, entre autres, les enjeux suivants : · pérennisation et mise en place des observatoires de recherche ; 3.3.2 Approche écosystémique des pêches en Guyane : La filière pêche est un enjeu majeur pour l'économie guyanaise. La durabilité de cette filière (pêche crevettière, pêche sous DCP, pêcheries démersales...) est très dépendante de l'évolution du milieu aussi sa connaissance, sa compréhension et la mise en place de mesures pertinentes de gestion de la ressource justifient la mise en place d'un programme de recherche écosystémique. Un tel programme scientifique pluri-disciplinaire et pluriorganismes justifierait de fédérer certains des membres d'AllEnvi au sein d'un « programme Mer », comme cela a été évoqué à l'occasion du séminaire « Mer » organisé, en septembre 2009, dans le cadre du Gis IRISTA. Compte tenu des interactions régionales, ce programme · prise en compte des Îles Éparses ; · conséquences géostratégiques liées à la départementalisation de Mayotte ; justifierait d'être promu et mis en oeuvre en collaboration avec les partenaires scientifiques brésiliens. · développement socio-économique de La Réunion et de Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 65 RéférenceS | novembre 2012 3.4 Mobilisation de l'AIRD Les travaux menés par la STRATOM ont mis en évidence l'intérêt scientifique et géostratégique de développer l'intégration régionale des Outre-mer par un renforcement des coopérations scientifiques avec les pays de la zone. Il existe localement des initiatives internationales en sciences marines menées par les organismes français associant les Outre-mer français comme les laboratoires mixtes internationaux de l'IRD (eg. le LMI ICEMASA en Afrique du Sud) où les groupements de recherche internationaux du CNRS (eg. GDRI Récifs Coralliens). Dans le cadre d'ALLENVI, l'Agence inter-établissements de recherche pour le développement (AIRD) est plus particulièrement chargée de traiter des actions à mener avec ces pays. Les deux grandes régions proposées, Pacifique et Océan Indien, ainsi que le projet d'un « programme Mer » en Guyane devraient permettre de mobiliser davantage l'AIRD pour développer des coopérations avec les PED et pays émergents potentiellement concernés, à savoir Brésil, Fidji, Madagascar, Afrique du Sud, Pays de la COI, etc. 66 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer De l'importance d'un Programme Mer pour le développement et la valorisation en sciences marines L'économie maritime pose un problème de définition et de périmètre qui s'est aplani à partir des années 1990 avec la diffusion d'études périodiques nationales (américaines, françaises, canadiennes, britanniques et autres) et des travaux européens sur le sujet. Des différences entre les diverses études demeurent, mais elles ne sont pas fondamentales. Pour fixer les idées, on peut s'appuyer sur la définition qu'en donne l'approche française. Depuis 1997, les rapports périodiques de l'Ifremer « Données économiques maritimes françaises » (DEMF) englobent dans l'économie maritime les ensembles suivants : transport maritime et avec le fluvial du Benelux prochainement. Ce point amène une remarque plus générale : il n'y a pas de lien simple entre économie maritime et localisation géographique. De nombreuses activités situées sur le littoral sont sans rapport avec le maritime ; inversement, des activités considérées comme maritimes peuvent être localisées loin de la mer : le fluvial, le manufacturier (équipement naval, construction nautique) et plusieurs types de services comme l'ingénierie offshore et l'assurance maritime. Notons enfin que le périmètre de l'économie maritime est influencé par la contrainte des statistiques disponibles. Un cas manifeste est celui des services bancaires : le financement des activités maritimes (construction de navires de pêche et de commerce, ports de pêche, de commerce et de plaisance) est peu renseigné et non pris en compte dans les DEMF bien que les banques françaises soient très présentes dans cette activité. · l'extraction des ressources vivantes et les activités aval : pêche (y compris algues), aquaculture, commerce et transformation des produits de la mer ; · l'extraction des ressources minérales et énergétiques : granulats marins, énergies marines, hydrocarbures offshore, énergies marines, mais aussi centrales électriques installées sur le littoral ; 1. L'importance de l'économie maritime D'après la définition donnée ci-dessus, l'économie maritime est d'une importance modeste pour un pays comme la France : de 1 à 1,5 % du produit intérieur brut et de l'emploi total. Elle est plus importante pour les pays très côtiers comme le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l'Italie et la Norvège. Elle croît évidemment en fonction de l'importance des ressources marines, comme les hydrocarbures pour le Royaume-Uni et les Pays-Bas. La liste des activités maritimes proposée plus haut illustre néanmoins la portée stratégique de l'économie maritime pour un pays côtier. Par exemple, les ressources offshore de minéraux et d'hydrocarbures jouent un rôle déterminant sur les marchés et la géopolitique des matières premières et de l'énergie ; le transport maritime constitue un facteur puissant de baisse des coûts des échanges mondiaux de marchandises, notamment des matières premières, et, par voie de conséquence, de l'intégration des marchés ; l'intermodalité et les interconnexions entre le transport maritime, le rail et le fluvial, actuellement débattues au niveau européen, influencent l'organisation même du transport en Europe ; le tourisme littoral constitue une part importante des dépenses de loisirs et une puissante incitation à sauvegarder le patrimoine naturel littoral ; l'état des eaux côtières est tributaire · l'industrie manufacturière et les services connexes : construction de navires civils, de navires de défense et de plaisance, équipement naval, réparation, démantèlement de navires, fabrication et pose de câbles sous-marins ; · les travaux publics maritimes et fluviaux, y c. le dragage des ports ; · un ensemble diversifié de services privés : parapétrolier et paragazier offshore (y compris construction de plateformes), tourisme littoral (hôtellerie, restauration, croisières, filière plaisance et sports nautiques, agences de voyages, musées, espaces de loisirs), transport maritime et fluvial (ports, flotte de commerce, assurance maritime) ; · les services publics : Marine nationale ; intervention de l'État en mer (sécurité, signalisation, sauvetage, éducation, sécurité sociale) ; protection de l'environnement marin ; recherche marine et océanographie opérationnelle. Comme indiqué ci-dessus, les DEMF prennent aussi en compte les travaux fluviaux et le transport fluvial de commerce. L'une des raisons tient à la croissance récente du transport fluvial conteneurisé et aux investissements de connexion avec le Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 67 RéférenceS | novembre 2012 des usages des bassins versants, et la gestion de ces eaux implique, en toute rigueur, celle de l'ensemble des activités amont : agriculture, industries, agglomérations urbaines. Ainsi, les liens sont déterminants entre activités maritimes et économies nationales. employés (de préférence en équivalents temps plein), exportations, rémunérations versées. Dans le cas du secteur public, on s'intéresse aux effectifs employés et aux budgets de fonctionnement et d'investissement ; certains sous-ensembles spécifiques de ces budgets sont mis en évidence (p.ex. sécurité, enseignement maritime). 2. La recherche en sciences marines en lien avec l'économie maritime La recherche marine ou plus exactement ses applications opérationnelles ont des liens avec les questions d'économie maritime, que la réglementation nationale et européenne met périodiquement en évidence. Par exemple : Pour fixer les idées, la mise à jour 2011 des DEMF estime la valeur ajoutée 2009 de l'économie à 22 milliards d'euros et l'emploi à 460 000 environ. Ces résultats indiquent une baisse par rapport à 2007 d'environ 20% pour la valeur ajoutée et 5% pour l'emploi. Le ralentissement économique depuis 2008 en est l'une des causes, mais l'importante révision des statistiques nationales en 2008 a pu jouer aussi. Le problème majeur auquel est confrontée l'élaboration du jeu d'indicateurs est que plusieurs secteurs de la nomenclature statistique nationale comprennent des sous-ensembles maritimes sans les distinguer : granulats marins, énergie marine, équipement naval, câbles sous-marins, assurance maritime, tourisme littoral. La mer n'est pas un critère qui structure la comptabilité nationale ; pour nombre de produits industriels, les applications au domaine maritime constituent un débouché commercial parmi d'autres. Dans de tels cas, la méthode consiste à estimer les indicateurs recherchés à partir de données des associations professionnelles ou d'autres sources. Le tourisme littoral pose des problèmes liés à la difficulté à distinguer le littoral dans les comptes du tourisme : le seul recours vient des enquêtes annuelles auprès des touristes sur leurs espaces géographiques de loisirs et de consommation. · dans le contexte de la baisse des stocks halieutiques visible depuis les années 1980, les avis annuels des biologistes sur les totaux admissibles de capture (TAC) et autres instruments de gestion s'accompagnent depuis quelques années, à la demande des autorités européennes, d'une évaluation des impacts économiques de ces mesures ; on passe d'une gestion purement biologique à une gestion bio-économique ; · la directive-cadre « stratégie pour le milieu marin » (DCSMM, 2008) vise le « bon état » des eaux marines à horizon 2020, ce qui suppose le déploiement de moyens scientifiques de mesure, de traitement et de contrôle ; mais la mobilisation d'un tel dispositif ainsi que les efforts de gestion des eaux et des usages posent des problèmes de coûts (pour quels gains à terme ?) ; aussi la directive prévoit-elle la réalisation d'une évaluation économique initiale des usages des eaux marines (article 8), dont le choix de méthode est laissé aux États membres ; · les composantes marines du GMES et les systèmes d'océanographie opérationnelle se heurtent à des contraintes de financement, et leur pertinence peut s'évaluer par la comparaison des coûts prévisibles et des bénéfices économiques potentiels ; cette question récurrente pose des problèmes de méthode, abordés dans un nombre encore modeste d'études et de projets de recherche. 4. Développer la valorisation économique des résultats de la recherche en sciences marines Le programme national Mer doit contribuer à la promotion d'actions de nature à favoriser le développement socioéconomique du monde maritime. Cela implique de mener, en s'appuyant sur les recherches scientifiques menées pour l'amélioration des connaissances dans les domaines cités, des actions de recherche et de développement technologique, orientées vers les enjeux 3. L'évaluation de l'économie maritime Dans la plupart des pays qui publient des études et élaborent des bases de données sur ce thème, l'économie maritime est évaluée par secteurs d'activités au moyen d'indicateurs mis à jour régulièrement : chiffre d'affaires, valeur ajoutée, effectifs industriels. La majorité des partenaires du programme national Mer s'appuient sur leurs ressources afin d'assurer tout ou partie des étapes de valorisation de leurs travaux. Leurs politiques de valorisation de la recherche leur sont propres. Cependant, le 68 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer paysage national de la valorisation est en pleine mutation. De nombreuses actions ont été impulsées afin de mettre en place une politique nationale forte par la création notamment de nouveaux acteurs permettant de mutualiser les efforts de valorisation à l'échelle régionale et nationale. Parmi eux nous comptons entre autres : les pôles de compétitivité, les SATT, les CVT et France Brevets. La majorité des partenaires du programme ont une articulation spécifique avec chacun de ces nouveaux acteurs. Les Pôles Mer représentent, avec leurs membres industriels, l'essentiel des activités économiques maritimes. Ils coopèrent, quand c'est justifié, avec de nombreux pôles technologiques dans l'objectif de contribuer à la construction de filières émergentes et d'instruire des projets structurants. Les pôles Mer sont donc des acteurs naturels et légitimes pour analyser les besoins prospectifs des secteurs industriels et soutenir des développements basés sur des projets coopératifs innovants. Les activités qui en découlent de l'amont vers l'aval : renforcement des compétences en gérant les activités de valorisation au plus près des laboratoires et de l'écosystème industriel, en lien avec les pôles de compétitivité. Les activités principales qui en découleront seront : · Financer les phases de maturation des inventions et de preuve de concept. · Assurer une prestation de services de valorisation auprès des acteurs locaux de la R&D qui créent la valeur ajoutée scientifique et technologique. Les Consortiums de Valorisation Thématique (CVT) auront pour rôle de proposer des services de valorisation à forte valeur ajoutée aux structures de valorisation sur des thématiques données (ex : analyse de portefeuille de propriété intellectuelle, veille...). Ces objectifs principaux seront : · Devenir le centre de ressources en intelligence économique commun aux membres du CVT, au service de multiples acteurs publics et privés, partenaires clés du CVT dans des champs sectoriels attractifs, · Une veille stratégique et d'intelligence économique afin d'identifier les secteurs clés et les technologies avancées sur lesquels il faut faire porter l'effort. · Mettre en place des analyses stratégiques en concertation avec les besoins de ses membres et de ses prospects, · Les recherches dans les technologies de base en support aux développements technologiques. Cette activité doit être menée en partenariat avec l'ensemble des organismes de recherche. · Fournir, en priorité à ses membres, mais aussi à des clients extérieurs, des analyses prospectives permettant d'identifier des domaines de recherche à fort potentiel de valorisation internationale. France Brevet détenu par l'état et la Caisse des Dépôts jouera le rôle d'intermédiaire entre les titulaires d'un brevet et les utilisateurs potentiels. Son objectif sera donc de faire se rencontrer l'offre et la demande. France Brevet sera un partenaire naturel des SATT et des CVT. Ces missions principales seront : · Les développements technologiques, afin de répondre aux besoins de la recherche scientifique en équipements lourds des grandes infrastructures de recherche. · L'élaboration et la conduite de projets technologiques en coopération avec les industriels du monde maritime. · Le transfert et la valorisation des résultats des recherches scientifiques et technologiques à la fois vers le secteur professionnel et aussi en soutien à l'action des politiques publiques par l'élaboration d'ouvrages de synthèse, de guides techniques ou l'élaboration de normes. · Favoriser la circulation des inventions en constituant un large portefeuille de droits de propriété intellectuelle issus de la recherche publique et privée en les réunissant en grappes technologiques · Les axes de développement technologique sont présentés dans l'axe transversal : l'instrumentation et le traitement du signal, activités les équipements les scientifiques, les la énergies pêche et renouvelables, les ressources énergétiques et minérales, les navales, biotechnologies, l'aquaculture, les aménagements côtiers, le génie écologique. Les SATT détenues majoritairement par la Caisse des Dépôts, des groupements universitaires et organismes de recherche présents dans les UMR, devront conduire à une plus forte professionnalisation de la valorisation de la recherche et à un · Organiser leur commercialisation sous forme de licences auprès des entreprises Afin d'assurer une meilleure valorisation de ses travaux, le programme national Mer pourra donc s'appuyer sur les ressources, en particulier humaines de ses partenaires, mais également sur les acteurs précités auxquels ils pourront faire appel. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 69 RéférenceS | novembre 2012 70 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Axe transversal : Les grandes Infrastructures de Recherche et autres dispositifs transversaux 1. Enjeux scientifiques et sociétaux Il est désormais admis par la plupart des acteurs de la recherche, en France et en Europe, que le développement des connaissances scientifiques dans quelque domaine que ce soit nécessite une programmation coordonnée des recherches, mais aussi le développement des capacités nécessaires à la mise en oeuvre de ces programmes, c'est-à-dire du capital humain et des infrastructures de haut niveau. L'évolution de la science moderne aboutit alors, lorsque c'est techniquement et scientifiquement possible, à mutualiser de plus en plus les grands équipements de recherche entre divers opérateurs d'un même pays, voire entre divers pays. Pour les sciences de l'environnement, les infrastructures de recherche (IR) répondent souvent à une double sollicitation, la recherche proprement dite et l'observation des milieux et écosystèmes. En sciences de la mer, la nécessité de disposer de grandes infrastructures de recherche est accrue par le fait que l'accès à ce milieu, qu'il soit côtier ou hauturier, n'est pas immédiat pour l'homme. Certains besoins d'équipements pour la recherche peuvent stimuler l'innovation en matière de construction navale, et les navires et engins de recherche scientifiques pourraient, dans une certaine mesure dès leur conception, porter des technologies innovantes et contribuer à en faire la démonstration. À ce titre une articulation avec le CORICAN (voir chapitre suivant) sera axe de progrès. pour des communautés scientifiques, fournis sur site unique ou de façon distribuée (avec une gouvernance commune), voire de façon virtuelle ou à distance (banques de données, expédition d'échantillons). Les utilisateurs de ces IR sont donc, en premier lieu, les chercheurs et ingénieurs qui contribuent à leur mise en oeuvre (« recherche résidente»). De plus en plus, toutefois, une variété de porteurs d'enjeux y accède de façon plus intermittente (« recherche accueillie »). En particulier, l'accès transnational se développe, soutenu par divers programmes européens ou internationaux. La compréhension du système océan, du fait de sa dimension, de sa nature internationale et des moyens requis pour y accéder passe en effet par la mise en place de collaborations et de coopérations nationales et internationales formelles. Ces coopérations se traduisent notamment par des programmes qui sont un cadre indispensable à une majorité de thématiques en recherche marine. Sur ce plan, la communauté française est très bien positionnée et structurée 3 dans les domaines 2 de l'océanographie hauturière et des relations climat-océans , de l'acidification de l'océan , de l'océanographie opérationnelle hauturière , 4 des 6 géosciences marines et des recherches 5 7 scientifiques et technologiques en domaine profond , de la paléocéanographie et de la biologie moléculaire . Elle est encore insuffisamment positionnée, bien qu'ayant beaucoup d'atouts et le leadership d'un projet européen , dans les domaines côtiers et littoraux. C'est donc un domaine auquel il conviendra d'accorder la plus grande attention, et pour lequel le cadre AllEnvi peut apporter une réelle plus-value. En aval de ces grands programmes, les moyens nécessaires au déploiement des recherches en sciences de la mer peuvent être classés en deux grands types: les premiers sont d'ordre institutionnel, ils sont très structurants et souvent génériques; les 8 2 Différents leaderships au sein des programmes-cadres internationaux IGBP (http://www.igbp.net/), SCOR (http://www.scor-int.org/), notamment dans les programmes IMBER, GEOTRACES et SOLAS. Pourquoi pas ? , navire amiral de la flotte océanographique de l'Ifremer. ©Ifremer/Michel Gouillou 3 4 5 6 7 Programme européen EPOCA, http://epoca-project.eu Programme européen MyOcean (http://www.myocean.eu ) Programme EMSO (http://www.emso-eu.org/management/ ) Programmes IGBP-PAGES (http://www.pages-igbp.org/) et sa partie marine IMAGES Infrastructure européenne de type « ESFRI » EMBRC (http://www.embrc.eu/ ) Programme européen de type I3 JERICO (http://www.jerico-fp7.eu/ ) La définition partagée des IR désigne des outils et des services 8 Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 71 RéférenceS | novembre 2012 seconds s'appuient sur les premiers et correspondent à des équipements permettant observation, expérimentation et archivage et ils peuvent être spécifiques et dédiés à un champ disciplinaire. Sous l'influence d'outils de politique scientifique très couvrant l'ensemble des zones économiques exclusives et de protection environnementale des pays de l'UE si nous voulons aboutir, pour la préservation de l'environnement marin, à des politiques publiques qui soient valables pour l'Union dans son ensemble (EMSO) ; une nécessité semblable au niveau de l'océan mondial (Euro-Argo) ; la nécessité de mettre le plus rapidement possible à la disposition des entreprises et des décideurs politiques les connaissances et données de la recherche marine et maritime, y compris au niveau de démonstrateurs (eg., GROOM), afin de faire décoller la « croissance bleue » en Europe, que ce soit au niveau de la fourniture de nouveaux produits, de procédés ou d'instruments. structurants mis en place par l'UE, le paysage des IR en science de la mer a beaucoup évolué en cinq ans. Les deux principaux instruments sont les programmes I3 (« Integrated Infrastructure Initiative ») et ESFRI (« European Strategy Forum for Research Infrastructures »), qui sont, respectivement, des mouvements d'intégration de noeuds pré-existants au sein d'infrastructures distribuées couvrant chacune un domaine particulier et une réflexion visant à construire, sous forme de site unique ou sous forme distribuée, les infrastructures jugées comme étant les plus stratégiques pour la recherche européenne pour les 25 prochaines années. La plupart des IR en sciences de la mer en France sont soit parties prenantes de programme I3 et/ou ESFRI (EuroArgo, Flotte Océanographique Française, Centre National de Ressources Biologiques Marines), soit engagés dans des programmes visant à les intégrer à des infrastructures paneuropéennes en préparation (observatoires, bases de données ...). Parmi les grands défis que souhaite relever l'Union 2. Infrastructures en sciences de la mer déjà disponibles dans le champ du groupe Mer d'AllEnvi Les sciences marines exigent des moyens logistiques et scientifiques importants (grands et très grands équipements ou TGIR), d'usage mutualisé, mis au service de communautés scientifiques de grande taille, qui sont gérés soit par l'un des organismes de l'Alliance, soit par une structure de gestion ad hoc mutualisée. Ces infrastructures sont soit des très grands instruments soit des centres de ressources (ressources biologiques, bases de données...). Leurs coûts de construction et d'exploitation sont tels qu'ils justifient des processus de financement pluriannuels, concertés au niveau national, et éventuellement européen ou international. Dans la plupart des cas, elles sont adossées à des communautés de chercheurs qui contribuent en permanence à leur amélioration. La gouvernance doit alors trouver, pour l'accès à ces infrastructures, un bon équilibre entre la recherche résidente et la recherche accueillie. Des comités de programme ont pour responsabilité de garantir un accès à tous sur la base de l'excellence scientifique. Une difficulté supplémentaire est de conjuguer la nécessité de garantir une certaine pérennité aux installations et de les maintenir à un niveau d'excellence technologique. Parmi les dépenses d'exploitation, en particulier dans le cas des infrastructures distribuées, il est donc à prévoir qu'une part croissante doit être consacrée à en maximiser à la fois l'accès et l'efficacité : dépenses d'animation, de gestion et de promotion de l'infrastructure; formation du personnel et des utilisateurs; transfert des connaissances vers les entreprises et les décideurs publics; recherches technologiques destinées à améliorer l'infrastructure; recherches "à risque" à effectuer avec les utilisateurs... La France est sans doute l'un des pays pour lequel ce type de dispositif est le plus complet. Quelques exemples parmi les plus européenne, la mise en accès des technologies les plus modernes et l'accroissement de la compétitivité sont des priorités. Les infrastructures de recherche sont considérées comme des outils essentiels pour atteindre ces objectifs. En effet, en tant qu'instruments de subsidiarité pour développer les connaissances, la cohésion, le transfert de connaissances et de technologies ainsi que la coopération internationale, elles constituent des pierres d'angle pour mettre en oeuvre la Stratégie de Lisbonne. Une vision clairement énoncée par les opérateurs de ces infrastructures et par les responsables européens est donc de focaliser les investissements majeurs en un nombre de points limité, ceci afin d'y attirer l'excellence scientifique et d'accroître la visibilité de la science européenne. Ces moteurs ont été illustrés, pour le cas particulier des sciences de la Mer, par les exemples suivants : l'évolution très rapide des connaissances et des technologies en sciences de la vie (par exemple, EMBRC, MésoAqua, AquaExcel, etc.) ; la nécessité sociétale d'exploiter davantage les ressources marines en nutrition, santé, matériaux et énergie, tout en préservant la qualité des écosystèmes (par exemple, MésoAqua, AquaExcel) ; la nécessité de mutualiser pour gagner en efficience, par exemple dans le management de la flotte océanographique européenne (Eurofleet); la nécessité de disposer d'observations 72 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer significatifs sont décrits ci-après. par la Commission Européenne à travers le financement de deux programmes successifs. L'INSU administre et est responsable financièrement du budget du consortium géré par une agence européenne de gestion, EMA. L'INSU gère aussi la contribution française au programme IODP allouée par le Ministère délégué à la Recherche et aux Nouvelles Technologies. 2.3 Autres TGIR D'autres TGIR ont un volet marin, mais contribuent plus marginalement aux sciences de la mer à proprement parler. C'est le cas du projet ANTARES (Astronomy with a neutrino telescope and abyss environmental research) mis en oeuvre par l'IN2P3 qui construit un détecteur de grande taille au fond de la mer Méditerranée (au large de Toulon). Le site Antares est l'opportunité de développer des instruments pour l'observation environnementale profonde en temps réel et/ou haute fréquence (géosciences, biologie, géochimie, bio-géochimie) et l'INSU et l'Ifremer sont associés à cette collaboration. C'est aussi le cas de RESIF-EPOS (Réseau sismologique français / European Plate Observing System) qui contribue au projet européen EPOS, actuellement en étude pour rejoindre les grandes infrastructures européennes de recherche (roadmap ESFRI). RESIF-EPOS sera constitué d'une antenne sismologique et géodésique multiéchelle pour la mesure des déformations permanentes et transitoires du sol français, qui pourront inclure certaines parties marines.Désormais, les grandes collections qui comptent des millions de spécimens biologiques ou paléontologiques, y compris d'origine marine, ont également acquis un statut de grande infrastructure (projet Recolnat). Enfin, l'IS-ENES est un projet d'infrastructure du réseau européen (ENES*), qui rassemble la communauté européenne en modélisation du climat et du système terre, travaillant sur la compréhension et la prévision du changement climatique, et fortement impliquée dans le GIEC. ISENES fournit à la communauté des services sur l'utilisation optimale des super calculateurs, des outils d'évaluation des modèles, sur l'accès aux résultats des simulations, et développe des prototypes de services climatiques concernant les impacts des changements à venir. 9 2.1 La Flotte océanographique française Au premier rang de ces moyens, aux côtés des bâtiments hydroocéanographiques opérés par le SHOM, se trouvent les navires, sous-marins et engins à la mer, désormais gérés en commun sous le nom de « Flotte océanographique française », unité mixte de service (UMS) créée en mars 2011 pour une durée initiale de quatre ans. Elle est soutenue par les quatre opérateurs de recherche que sont le CNRS, l'Ifremer, l'IPEV et l'IRD. La flotte compte sept navires hauturiers et six navires côtiers. Elle sera étendue en 2012 aux navires de plus petits gabarits des stations marines. Elle comprend également une panoplie d'engins sousmarins permettant d'explorer la colonne d'eau et les fonds marins jusqu'à plus de 6000 mètres sous la surface ainsi que des équipements lourds pour l'étude des sous-sols. Grâce au savoirfaire des équipes qui les gèrent et aux technologies spécifiquement développées, ces navires équipés constituent une référence mondiale. D'une manière plus générale, ce grand équipement contribue à l'exploration et à l'exploitation durable des fonds et des ressources marines vivantes, minérales et énergétiques encore largement méconnues. Cette structure permettra de répondre de façon coordonnée aux besoins croissants d'exploration de l'océan et d'optimiser l'usage des moyens de recherche en mer. Le ROV Victor 6000, robot téléopéré de l'Ifremer dédié à l'exploration de l'océan profond, jusqu'à 6000 mètres. ©Ifremer/Olivier Dugornay 2.2 Integrated Ocean Drilling Program / European Consortium for Ocean Drilling Research L'IODP est un programme international de forages océaniques. Les organismes de recherche de la quinzaine de pays européens ayant participé au programme international ODP ont décidé de rejoindre IODP sous la forme d'un consortium unique, ECORD, pour accroître la visibilité européenne. Cette initiative a été soutenue 9 ENES : European Network for Earth System Modelling Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 73 RéférenceS | novembre 2012 2.4 Les systèmes d'acquisition en continu Dans les domaines de l'océanographie physique et des géosciences, ces dispositifs prennent peu à peu le relais de certaines campagnes récurrentes. Le pari scientifique est que le volume et la régularité des données acquises automatiquement remplacent, au moins partiellement, ces campagnes, moyennant des traitements de données sophistiqués. Les principaux systèmes existants sont : focalise sur des modèles émergents qui complètent l'arbre du vivant et pour lesquels des ressources génomiques sont disponibles. L'environnement logistique de proximité va du séquençage des acides nucléiques à l'analyse des protéines (protéomique, structures 3-D) et, à brève échéance, celle des métabolites, en passant par la transcriptomique et l'imagerie, le tout soutenu par un fort potentiel en bio-informatique. En accélérant l'appropriation des approches de génomique dans l'ensemble de la communauté, cette infrastructure a vocation à servir tout le champ des sciences de la mer, y compris l'océanographie biologique et la bio-géochimie. EURO-ARGO Lancé en 2000 par la Commission océanographique intergouvernementale de l'Unesco (COI) et l'Organisation météorologique mondiale (OMM), le programme Argo a pour objectif de développer un réseau global de 3000 flotteurs profilants autonomes mesurant en temps réel la température et la salinité des océans des 2000 premiers mètres de l'océan. Argo est un élément essentiel du système global d'observation des océans mis en place pour suivre, comprendre et prévoir le rôle de l'océan sur le climat de la planète. Fin 2007, le projet a atteint son objectif initial avec 3000 flotteurs en opération. Argo est le fruit d'une coopération internationale remarquable et plus de 30 pays participent directement à la mise en place du réseau. Chaque année 800 à 900 de ces instruments sont mis à l'eau, soit le nombre nécessaire pour maintenir un réseau de 3000 flotteurs actifs compte tenu de leur durée de vie estimée à 4 ans. Argo est le premier réseau in situ global d'observation des océans en temps réel. Avec les observations des satellites, les données des flotteurs Argo sont la principale source · Les satellites d'observation de la terre (dont ceux prévus dans le cadre du programme européen GMES). Cette infrastructure n'est, là encore, pas propre aux sciences de la mer, mais les traitements de données appliqués pour la production de données marines le sont. · Les systèmes d'acquisition dérivants ou mobiles ; sous l'égide du projet mondial et emblématique ARGO, la collecte systématique de points de mesures de quelques paramètres physiques de l'océan s'est transformée en un service d'océanographie opérationnelle « in situ » mondial. Ce flux de données en continu contribue à alimenter les modèles prévisionnels qui font partie intégrante de la galaxie « océanographie opérationnelle ». Les composantes ARGO française et européenne sont labellisées TGIR. · Les systèmes d'acquisition en points fixes, comme, par exemple, le réseau permanent d'observation du niveau de la mer REFMAR coordonné par le SHOM ; les projets européens ESONET/EMSO visent à déployer des observatoires « fond de mer » multi-paramètres plutôt orientés géosciences. EMSO est labellisé TGIR au niveau national et européen. 2.5 Des infrastructures européennes ESFRI Des infrastructures telles que EMBRC, EUROARGO, EMSO, IS ENES sont labellisées au niveau européen. À titre d'exemple, donnons quelques éléments permettant de situer deux d'entre elles : EMBRC et EUROIARGO. d'information pour les chercheurs s'intéressant au climat et à l'océan, pour la prévision saisonnière et climatique ainsi que pour les centres d'analyse et de prévision océanique. Le Centre National de Ressources Biologiques Marines (EMBRC-France) Le Centre National de Ressources Biologiques Marines constitue le noeud français du « European Marine Biological Resource Center » (EMBRC), une infrastructure pan-européenne labellisée par ESFRI. La mission d'EMBRC-France est d'offrir à la communauté nationale l'accès, sur place ou par expédition, à une variété de modèles biologiques marins ainsi qu'un environnement technologique de haut niveau pour l'exploration fonctionnelle de ces modèles. EMBRC-France se Test de flotteurs Arvor (mesure de la température et de la salinité de l'eau) au bassin d'essais du Centre Ifremer Bretagne. ©Ifremer/Olivier Dugornay 74 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Euro-Argo est la contribution européenne au réseau international Argo. Euro-Argo a été labellisé en 2006 dans la première feuille de route ESFRI (European Strategy Forum on Research Infrastructures) comme infrastructure de recherche européenne. L'objectif principal est d'organiser les contributions des états membres afin de permettre à l'Europe de : l'accessibilité grâce à une meilleure interopérabilité des systèmes et une structure optimisée des bases de données géoréférencées. Il s'agit d'accroître la visibilité de ces bases (donc leur valorisation scientifique ou sociétale) et de promouvoir la traçabilité des données et les interopérabilités nécessaires (métadonnées, comme données elles-mêmes). C'est un enjeu intégrateur très important pour le programme mer. · Déployer, maintenir et opérer un réseau de 800 flotteurs. Cela demandera de déployer chaque année 250 flotteurs/an (durée de vie de 3 à 4 ans). · Fournir un service d'excellence aux communautés recherche (climat) et océanographie opérationnelle (GMES et son service marin). 3. Autres dispositifs transversaux en sciences de la mer 3.1 Les moyens institutionnels a) Les systèmes et réseaux d'observation Les systèmes et réseaux d'observation ont pour vocation d'acquérir des données environnementales au sens le plus large (biologiques, physiques, chimiques, sédimentaires, économiques ou sociales), sur des périodes de temps suffisamment longues (>10 ans) pour répondre à des questions scientifiques et alimenter la modélisation de processus complexes. Ils permettent d'enregistrer et de distinguer les impacts liés aux changements globaux et locaux. Certains de ces dispositifs promeuvent aussi des acquisitions haute fréquence (de quelques heures à quelques minutes) afin de pouvoir saisir les effets d'événements extrêmes de courte durée (cyclones, tempêtes, crues,...). Enfin, des acquisitions en temps réel peuvent être réalisées pour certains paramètres à des fins de modélisation, prévision. Plusieurs de ces dispositifs ont été labellisés soit par un Institut du CNRS, soit par le Ministère de la Recherche via l'alliance AllEnvi (SOERE). D'autres ont été mis en place à l'initiative de laboratoires. Il faut souligner que ces dispositifs incluent dans leur cahier des charges non seulement la mise en oeuvre des mesures in situ, mais aussi la validation et la mise à disposition des données. Certains, comme SOMLIT (service d'observation du milieu littoral), ont créé une base de données ad hoc et la gèrent. D'autres font appel à des centres de données plus avancés (qui peuvent être des laboratoires, des OSUs, ou la cellule multi-organismes CORIOLIS). À l'INSU comme à l'INEE, des réflexions sont en cours pour structurer le paysage des bases de données, notamment en sciences de la mer, en liaison avec les organismes partenaires (Ifremer, CNES, IRD...). Au SHOM, le projet INFRAGEOS vise à apporter un mode de gestion cohérent dans le but d'améliorer le traitement de l'information maritime et littorale, d'en faciliter Deux types d'outils sont spécifiquement adaptés aux recherches sur l'environnement et les anthroposystèmes: les Zones Ateliers (ZA) et les Observatoires Homme-Milieux (OHM) . 10 Pénétromètre Penfled, capable d'effectuer en mer profonde (jusqu'à 6000 mètres) des mesures géotechniques sur une profondeur d'investigation de 30 mètres. ©Ifremer/Olivier Dugornay Dans les domaines de la sismologie, de l'océanographie multidisciplinaire intégrée, côtière et littorale (qualité des eaux et des écosystèmes, dynamique du trait de côte) et de l'océanographie hauturière (physico-chimie, niveau moyen de la mer, courants, flux biogéochimiques), des services d'observation ont été développés par l'INSU, le plus souvent en partenariat avec d'autres organismes français (CNES, IFREMER, IRD, INEE...) ou internationaux. 11 · Les ZA forment un vaste réseau inter-organismes d'approches interdisciplinaires incluant notamment les sciences de la nature, les sciences de la vie, les sciences humaines et les sciences de l'ingénieur dans l'objectif de répondre à une question territoriale spécifique pouvant être élaborée en interaction avec les gestionnaires. Deux concernent les environnements marins. La ZA Antarctique (ZATA) couvre un vaste territoire qui s'étend de l'Antarctique (Terre Adélie) aux eaux subtropicales de l'océan Indien (îles Saint Paul et Amsterdam) en passant par les îles subantarctiques de l'archipel Crozet et des Kerguelen. Elle fédère des recherches sur les modifications de la biodiversité et 10 http://www.cnrs.fr/inee/outils/za.htm et http://www.za-inee.org/ 11 http://www.cnrs.fr/inee/outils/ohm.htm Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 75 RéférenceS | novembre 2012 du fonctionnement des écosystèmes sous la double influence des changements climatiques et des activités humaines. Le projet de ZA mer d'Iroise est centré sur l'interface terre-mer de la pointe bretonne et couvre des écosystèmes côtiers très diversifiés 12 3.2 Les équipements Considérées dans leur ensemble allant de la géologie, à l'océanographie, à la biologie, l'écologie, la sociologie et l'économie, les sciences de la mer requièrent des équipements diversifiés qui répondent à des besoins en exploration et observation (recueil de données), en expérimentation et analyse, en modélisation et en archivage. Leur spécificité prévaut surtout pour les tâches d'observation et d'exploration qui demandent des moyens adaptés au domaine marin. Elle est également réelle pour le volet expérimental qui se fait in . · Les OHM ont pour vocation de cerner les effets d'un événement perturbateur qui est venu déstabiliser un socioécosystème. Ils s'attachent ainsi à l'étude de modifications rapides sous l'angle écologique et sociologique. Actuellement un projet d'OHM concerne le littoral méditerranéen qui a été affecté par les implantations touristiques lourdes, notamment sur les plages languedociennes. b) Les laboratoires en réseaux Les réseaux de laboratoires constituent, en adossement aux programmes nationaux et internationaux, un moyen important de structuration des communautés scientifiques. Ces réseaux se structurent soit autour de grandes thématiques comme l'océanographie, soit autour de thèmes plus restreints, soit encore autour de projets ou d'infrastructures partagées. Nous ne pouvons pas ici en donner une liste exhaustive et ne citerons que les plus importants. natura ou dans des enceintes reproduisant au mieux les conditions naturelles. Ceci est également vrai pour la modélisation qui, notamment en océanographie, passe des outils conceptuels se démarquant de ceux du domaine terrestre. Seuls les équipements qui relèvent plus spécialement du domaine marin sont brièvement passés en revue ci-dessous. L'accès à des et séries il continues donc de données de variées est systèmes (géophysiques, indispensable physiques, faut chimiques, biologiques..) disposer d'observation intégrés qui impliquent aussi bien des moyens spatiaux que terrestres ou directement implantés dans l'océan et qui permettent des observations à long terme sur de vastes échelles spatiales. Parmi les défis des prochaines années, celui de la continuité des observations pose un double problème de moyens et d'organisation à l'échelle européenne. Afin d'assurer les impératifs liés à la mise en place des directives communautaires, il sera opportun d'accompagner les différents services de surveillance par une validation scientifique et technique, et les systèmes d'acquisition et de traitement de données adéquats. Valoriser l'acquisition de données, qu'elles soient de obtenues plus de manière automatique carottages, (utilisation dragages, satellitaire, par capteurs autonomes ou autre) ou par acquisition données classique (e.g. identification taxonomique, enquêtes sociologiques...), · Le réseau à large périmètre thématique des stations et observatoires marins (RESOMAR) l'ensemble des stations et laboratoires marins métropolitains et d'Outre-mer, dont la grande majorité est sous tutelle du CNRS et des universités, incluant des associations avec l'IRD, le MNHN, l'Ifremer, le CNES, et l'EPHE. Ce réseau regroupe ce qui relève des « stations marines » et il développe des actions dans divers champs thématiques de la biologie, de l'écologie et des sciences de la Terre (suivis de biodiversité, observation du littoral, évolution du trait de côte...). · Le réseau des Observatoires des Sciences de l'Univers (OSU). Les OSU ont pour missions principales l'observation environnementale à long terme, l'archivage de données, la mise à disposition de services d'analyse et de modélisation et la promotion d'actions de recherche transverses. Ils associent régionalement plusieurs unités de recherche et de service, permettant de mutualiser des moyens dans différents domaines (observations, bases de données, développements instrumentaux...). Plusieurs OSU sont concernés à des titres divers par les sciences de la mer. l'observation ou la collecte restera stratégique et se devra d'assurer la fiabilité et la mise à disposition des données, destinées à assurer le suivi et/ou la gestion de systèmes d'intérêt. a) Observation spatiale L'observation spatiale devient un outil essentiel des sciences de la mer qu'il s'agisse d'études altimétriques (dynamique), mais aussi météorologiques (vent et SST, estimations de la pluie en région tropicale, suivi des banquises), réflectance de surface (production primaire), de l'analyse de la couleur de l'océan, et depuis peu (encore au stade expérimental) de la radiométrie pour la salinité de surface. Le suivi satellitaire de systèmes de 12 La ZA mer d'Iroise bénéficiera des avancées du programme européen SPICOSA coordonné par une des équipes de la ZA. 76 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer mesures in situ vient compléter le dispositif, et jeter un pont entre physique de l'océan et écologie. Cette océanographie spatiale qui se développe depuis les années 1980 permet de documenter un domaine de plus en plus vaste pour les thématiques concernant les enveloppes fluides de la planète. La France, avec le CNES comme chef de file, et des implications fortes du CNRS, est très en pointe sur ces approches. Dans le domaine côtier, les recherches algorithmiques permettent d'accéder progressivement aux processus proches du littoral, qu'il s'agisse de circulation côtière ou de l'évolution de la matière organique. Par ailleurs, le besoin de nouveaux capteurs plus performants ou permettant d'accéder à de nouvelles variables du système reste indispensable. Il faudra favoriser l'émergence des techniques permettant, à partir des observations de la couleur de l'océan, de déterminer les groupes phyto-planctoniques, la distribution de taille des particules, substances dissoutes... développer un instrument exploitant un principe interférométrique et doppler afin de restituer à très haute résolution des informations altimétriques (topographie dynamique), cinématiques (vitesses et gradients en surface) et géométriques (rugosité) de la surface océanique, préparer l'après SMOS (Soil Moisture and Ocean Salinity) en cherchant à améliorer les techniques et algorithmiques qui permettront de poursuivre l'enregistrement de la détermination de la salinité des eaux de surface. dynamique du trait de côte. c) Observations in situ La connaissance de l'océan nécessite à la fois l'acquisition de données à l'échelle globale et à haute résolution. Toutes les données observables pertinentes ne peuvent être acquises depuis l'espace ou depuis la terre, que ce soit en géosciences, en physique ou en biologie. L'étude des processus nécessite des capteurs et systèmes de mesure ou d'observation spécifiques, mis en oeuvre sur des vecteurs appropriés (bouées, flotteurs autonomes ou guidés, navires, animaux) lors de campagnes, installés en des points définis sur le fond ou dans la colonne d'eau, ou dérivant à une profondeur choisie. Les équipements les plus classiques sont ceux déployés lors des missions océanographiques pour les prélèvements et les mesures (par carottage, chalutage, bouteilles, sondes et capteurs divers, etc.), les relevés photographiques, les enregistrements de paramètres... Ils s'appuient sur une logistique lourde, à commencer par la flotte évoquée ci-dessus et ils ne seront pas abordés ici. L'océan couvrant les deux tiers de la surface du globe, les divers réseaux globaux d'observations au sol sont aujourd'hui très mal répartis sur la surface terrestre (comme, par exemple, des observatoires sismologiques, bien que nombre de séismes aient leur épicentre en domaine marin). Un des défis majeurs du 21 e b) Observatoires à terre Les laboratoires "marins" implantés sur les grandes façades maritimes françaises, tout comme les installations d'Outre-mer (Pacifique, Océan Indien, Antilles, Terres australes et antarctiques...) font que la recherche française dispose d'un réseau exceptionnel de sites distribués dans tous les océans à des latitudes extrêmement variées. Les OSU occupent une place importante dans ce dispositif (voir ci-dessus), mais d'autres laboratoires non intégrés à des OSU, qui ont également des activités et des spécificités essentielles en sciences de la mer (Tahiti, Guadeloupe, La Réunion, Caen-Rouen, La Rochelle, Dinard, Concarneau, Anglet, Nice, Toulon), complètent le dispositif. Une mention spécifique doit être accordée aux installations des bases subantarctiques et antarctiques (IPEV). L'ensemble de ces dispositifs a notamment pour vocation de mener à bien des missions d'observation et de suivi locales, dans leur secteur d'implantation. Les explorations aéroportées locales complètent les missions des observatoires. Par exemple, le LIDAR altimétrique permet le suivi des zones émergées littorales et de l'estran et donc la siècle est donc d'instrumenter les océans pour y réaliser des observations pérennes en continu, intéressant aussi bien les champs de la Terre interne, que ceux de l'océanographie, de la bio-géochimie et de la biologie, avec si possible des dispositifs permettant la transmission en temps réel ou quasi réel de données à des centres opérationnels, en particulier depuis des régions ou zones difficiles d'accès (milieux profonds, zones polaires). L'installation d'observatoires de la surface au fond de mer (monitoring de sites), à la fois sur des zones géographiques ciblées où se produit un processus particulier ou à l'échelle de l'océan mondial, est en cours dans le cadre de programmes internationaux comme ARGOS ou EMSO. Mais, pour certains de ses aspects, ce déploiement est encore limité par des verrous technologiques qui restent à surmonter et qui doivent donc faire l'objet de recherches pluridisciplinaires. Les installations fond de mer (OBS pour Ocean Bottom Observatories) ou dans la colonne d'eau sont complétées par des appareils mobiles automatisés généralement mis en oeuvre à partir de navires. Ces instruments d'exploration sont les ROV (Remote Operated Vehicles) qui réalisent aussi bien des missions de mesure (complément direct des OBS) que des prélèvements Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 77 RéférenceS | novembre 2012 ou de l'imagerie et les AUV ( Automated Underwater Vehicles) qui peuvent être munis de multiples capteurs (température, salinité, sonars, dopplers...) et qui, dotés d'une centrale inertielle et complètement autonomes, effectuent des relevés le long de trajets prédéfinis. Là encore, des avancées technologiques pluridisciplinaires sont nécessaires et attendues. Le développement technologique des capteurs et des d) Systèmes expérimentaux De manière transversale aux différentes thématiques, la possibilité de réaliser et de multiplier diverses expériences, représentant au mieux les conditions environnementales au plus proche du réel, reste un challenge. Un effort, à l'échelle nationale doit être fait, afin de développer des systèmes capables de simuler, à des niveaux les plus réduits possibles, les conditions réelles du fonctionnement des éco- géosystèmes, susceptibles d'être transposés à l'échelle méso- et macrocosmique, sur les installations déjà développées à l'échelle nationale. Aussi, une approche de réduction d'échelle (downscaling) reste importante et doit être validée par des tests de remontée d'échelle (upscaling) afin d'assurer la transposition des résultats obtenus de l'échelle de l'expérience, à celle de l'écosystème réel. Actuellement, la réduction extrême de certains dispositifs permet d'envisager des expérimentations à l'échelle des unicellulaires (e.g. microfluidique) et ainsi d'aborder des processus totalement hors de portée il y a peu. Il faut également évoquer les mésocosmes immergés qui, à l'instar de ceux de Medimer (Sète), permettent un confinement de grandes masses d'eau (>2000 litres) et la simulation contrôlée de forçages, ce qui permet d'étudier les réponses des communautés pélagiques (virus, bactéries, producteurs primaires, secondaires, filtreurs, etc.) et de l'ensemble des réseaux trophiques à ces forçages. D'autres champs expérimentaux concernent la réalisation d'enceintes pressurisées qui permettent de simuler les conditions de température, pression, salinité, mélange gazeux des écosystèmes océaniques profonds, y compris les plus extrêmes (évents hydrothermaux). pouvoir Ces approches des progrès du plus expérimentales ouvrent une devront voie des bénéficier de enregistreurs (data loggers) ouvre de nouveaux champs d'investigation. Des priorités seront de développer de nouveaux capteurs (électro-chimiques in situ, d'adapter des capteurs optiques sur flotteurs/profileurs (chlorophylle, sels nutritifs...), de développer de nouvelles générations d'appareils optiques pour le comptage des particules inertes et vivantes. Dans l'étude des organismes marins, la miniaturisation des dispositifs et la mise au point de nano-micro-capteurs implantables sur, voire dans, les organismes révolutionnent l'écologie fonctionnelle, la physiologie... Afin de minimiser les effets sur les individus étudiés, la miniaturisation des capteurs et enregistreurs, accompagnée d'un accroissement des capacités d'acquisition et de stockage de données reste une priorité pour mieux comprendre comment, sans perturber les individus considérés, il est possible de suivre les besoins, les déplacements, des les comportements appuyée par pour ce comprendre type le fonctionnement de certaines espèces et communautés. L'étude écosystèmes, d'approche expérimentale permettra une collecte de données qui, en l'absence de toute intervention humaine, améliorera la compréhension de leur fonctionnement et celui des communautés étudiées. Les baisses de coût de ces instruments autorisent également des approches plus ambitieuses qui contribuent à renforcer considérablement la robustesse des résultats acquis. technologiques et se développer considérablement, car elles importante écosystèmes, compréhension des fonctionnement inaccessibles. 3.3 Les bases de données Dans le domaine des bases de données environnementales, les utilisateurs veulent pouvoir disposer de manière spontanée de toutes les données disponibles sur un sujet, sans présumer de leur « origine ». Il importe donc d'intégrer ces informations sans que la propriété intellectuelle du producteur de données ne soit spoliée. Le projet européen Seadatanet (http://www.seadatanet.org/) a montré que ce genre de mise notamment L'AUV Aster , engin autonome de reconnaissance et de surveillance des fonds marins ou de la colonne d'eau. ©Ifremer/Olivier Dugornay x en commun est possible, sans remettre en cause l'origine (c'est-à-dire le lieu de stockage) des données ; de plus l'informatique permet des regroupements thématiques de données interférents : une même donnée peut très bien 78 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer apparaître simultanément dans un portail « marin » et dans un autre à thématique distincte (environnement, zone géographique, etc.). La mise en réseau harmonisée des bases de données permet par ailleurs de respecter de manière homogène les Directives relatives à l'accès public aux données (Inspire, DCSMM, DCE...). En océanographie hauturière, les bases de données font déjà l'objet de deux centres de ressources importants. Le premier est la cellule interorganismes Coriolis à Brest (Ifremer, CNRS/INSU, CNES, Météo France, IRD, IPEV, SHOM) qui a pour mission de compiler, d'archiver et de diffuser les données nécessaires à l'océanographie opérationnelle (dont les produits sont élaborés par la société MERCATOR), mais dont la base sert aussi à la recherche. Le second est assuré par l'INSU et l'UPMC à la station marine de Villefranche-sur-mer et vise à regrouper l'ensemble des données de biogéochimie marine, qu'elles soient issues de systèmes d'observation ou de campagnes océanographiques. La base de Villefranche est interfacée avec Coriolis. En océanographie côtière, les données sont de natures plus hétérogènes, allant de simples paramètres physiques ou physicochimiques à des paramètres sédimentaires ou biologiques complexes. Des bases de données d'intérêt national ont déjà été développées comme celle du SOMLIT (service d'observation du milieu littoral, labellisé par l'INSU, auquel participent 8 stations marines), ou les bases de données taxonomiques Benthos et Pelagos au sein du réseau des stations et observatoires marins (RESOMAR). Ces bases sont, et seront, d'un grand intérêt, non seulement pour la recherche, mais aussi pour les travaux liés à la directive-cadre sur les milieux marins (DCSMM). D'autres bases de données hauturières et côtières existent. Il convient d'organiser le tout en un réseau cohérent et coordonné, ce qui est l'objet d'un travail interorganismes déjà en cours. Il est clair que les questions relatives aux bases de données et une amélioration et optimisation de leur structuration en réponse aux objectifs scientifiques à atteindre devront concerner l'ensemble des domaines non abordés de manière détaillée cidessus, tels que les géosciences, les données spatiales, etc. Dans le domaine de l'observation du milieu marin, les avancées à réaliser comprennent : · la conception, l'amélioration des systèmes d'observation (SO) (orientés vers les événements exceptionnels et vers les tendances à long terme) et leur déploiement sur des sites de référence en milieu profond et côtier sous forme de quelques chantiers emblématiques, fédérateurs, multidisciplinaires, reconnus et attractifs internationalement ; · l'amélioration continue des méthodes d'observation in situ non intrusive du comportement des organismes vivants marins (modèles biologiques ciblés et observation macroscopique des écosystèmes) ; · la production d'outils novateurs de traitement de l'information: (traitement du signal et des images pour télédétections électromagnétiques et acoustiques, traitement des séries temporelles des paramètres de l'océan et des images optiques et acoustiques) associés à l'amélioration des systèmes d'observation (flux important, très large base de données, temps réel) ; · la mise en réseau de SO hétérogènes pour une vision synoptique et synchrone du monde marin, en utilisant au mieux les interfaces standardisées de capteurs (adressage IP et registre de capteurs) ; · la promotion d'une approche systémique de la gestion et dissémination de la donnée marine ouverte et géoréférencée pour unifier/partager les développements des observatoires marins côtiers, profonds ou de surface. Il faut aussi souligner ici les nouvelles opportunités que vont représenter, à moyen terme, les sites d'essais d'énergies marines renouvelables, en tant que nouveaux sites d'observation. Par ailleurs, il apparaît que l'océanographie opérationnelle couvre la globalité des océans, mais avec un niveau de résolution qui ne permet pas de descendre à l'échelle côtière. La demande sociétale y est pourtant très importante, notamment dans sa composante environnementale. L'idée de déployer et fédérer un réseau d'acquisition de données automatisé ouvrant le domaine côtier fait son chemin au niveau européen (projet Jerico) et au niveau national (projet Fonce à concrétiser). Un effort particulier est en effet à produire sur ce secteur pour étendre à la côte les services de l'océanographie opérationnelle. De nombreuses réflexions récentes à l'échelle nationale ou européenne (Euromarine...) et des exemples concrets (campagne océanographique LOHAFEX, expédition Tara-Océans...) montrent 4. Points opportunités forts, ­ points Analyse faibles, menaces, du stratégique positionnement national Cette cartographie des infrastructures et dispositifs en sciences de la Mer en France suscite d'emblée les réflexions suivantes. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 79 RéférenceS | novembre 2012 qu'il y a désormais une convergence réelle entre les problématiques de l'océanographie biologique et de la biogéochimie marine et les approches de génomique structurelle, comparative et environnementale. Ces approches devraient aussi se généraliser en écologie marine fonctionnelle. Enfin, la connaissance des génomes de quelques espèces modèles et, donc, des voies métaboliques qu'elles utilisent devrait donner une forte impulsion aux recherches en écologie chimique marine et fournir des données nouvelles pour la modélisation des cycles biogéochimiques. Tout comme les autres structurations évoquées plus haut, les Centres de Ressources Biologiques (CRB) marins, qui fournissent à la communauté des sciences marines un environnement logistique de proximité en génomique et post-génomique, sont des outils essentiels pour développer les recherches aux interfaces entre la biologie, l'écologie marine, l'océanographie (physique, biogéochimie) et les géosciences marines (sédimentologie, sismologie, paléoclimatologie). De plus ces infrastructures sont autant de relais de proximité vers les IR nationales plus spécialisées dans ces approches (séquençage, phénotypage et génotypage, bio-informatique, biologie structurale...), ancrant ainsi encore davantage les sciences de la mer dans la biologie la plus moderne. Par contraste, les SHS marines constituent un parent pauvre dans notre dispositif national et ceci n'est pas compensé par les actions d'intégration en cours au niveau européen. C'est également le cas pour l'accès à des dispositifs d'écologie marine expérimentale. Enfin, au regard du très grand potentiel scientifique et d'innovation que représentent respectivement l'écologie chimique et la chimie écologique marines (Les océans, Le nouveau monde de la chimie durable. Dossier « Pour la Science », n° 73, octobre-décembre 2011), on peut regretter que ces disciplines ne soient pas suffisamment développées en France. Ceci est peut-être dû à l'insuffisante représentation des chimistes des substances naturelles dans les laboratoires marins ou, du moins, d'une prise en compte insuffisante des écosystèmes marins par cette communauté. D'une façon plus globale, le dispositif européen des IR en sciences de la Mer n'est pas totalement indemne du reproche de dispersion ou de duplication inutile. Il convient donc de s'interroger sur l'adéquation de la typologie des IR en regard des communautés scientifiques qu'elles servent, sur leur utilité réelle (mise en place d'indicateurs d'efficacité) et sur les possibilités de mutualisation accrue. Cet effort suppose, toutefois, que les mêmes examens critiques soient aussi effectués en dehors du champ des sciences de la mer, pour mettre un terme à de possibles rentes de situation et au maintien d'infrastructures devenues inadaptées. Dans ce contexte, plusieurs initiatives réfléchissent aux synergies qui pourraient résulter d'une meilleure coordination des IR marines entre elles : SEAS-ERA, MARCOM+, EMODNET, etc. L'objectif de ces forums ou actions de coordination est de faire émerger une vision globale des IR en sciences marines en Europe, pour défragmenter les communautés concernées par chaque grand domaine et dessiner des pistes pour augmenter la synergie entre ces diverses communautés. C'est également le cas d'EuroMarine, une action de coordination entre les trois Réseaux d'Excellence marins dans le 6e programme-cadre (EurOceans, Marbef, Marine Genomics Europe) et qui s'attaque au défi important d'intégration des diverses communautés en sciences de la mer. Ces réflexions en cours auront un impact sur les contours des IR en sciences de la mer, ne serait-ce que pour mieux prendre en compte la diversité des porteurs d'enjeux et les défis scientifiques, technologiques et industriels en France et en Europe. Au plan international, les nations marines et maritimes sont toutes confrontées aux mêmes défis quant au futur des leurs ZEE : bonne qualité environnementale de leurs eaux côtières et hauturières, sécurité de l'approvisionnement en ressources vivantes et minérales, durabilité des systèmes d'exploitation, mise au point de nouvelles technologies pour l'agronomie, la biotechnologie ou la chimie bleues, etc. Comme il est indiqué ci-dessus, le dispositif des IR en sciences de la mer en France couvre la quasi-totalité du champ des sciences de la mer, englobant la biologie évolutive, l'écologie marine, l'océanographie et les géosciences marines. C'est donc un réel atout pour nouer des programmes de coopération avec des pays qui n'ont pas un dispositif infrastructurel aussi complet et qui souhaitent l'améliorer (BRICS notamment). La question de la veille technologique et du dialogue avec la recherche privée est centrale, aucune entreprise n'ayant les moyens ou, du moins, la volonté d'entretenir sur le long terme des IR en sciences marines en France. Les IR en sciences marines peuvent s'appuyer sur l'atout que représentent les pôles de compétitivité, en particulier les Pôles Mer Bretagne et PACA, pour la diffusion des connaissances et des technologies vers les entreprises. Dans ce domaine, l'action de coordination « Marine Genomics for Users » (MG4U), qui s'emploie à définir une nouvelle méthode pour accélérer le transfert des nouvelles connaissances en génomique marine vers leurs utilisateurs potentiels (science, multiplicateurs, industrie, décideurs), peut constituer un modèle intéressant à terme. En effet, si l'on veut apporter une valeur ajoutée européenne au transfert de connaissances (qu'il faut distinguer du transfert de 80 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer technologies, nécessairement attaché aux détenteurs de la propriété intellectuelle), les infrastructures paneuropéennes devront être nécessairement mises à contribution. Enfin, il n'est pas exclu de rechercher des cofinancements entre la recherche et l'industrie pour certains investissements particuliers. L'une des principales menaces qui pèsent sur les IR en sciences de la mer (et sur les infrastructures de recherche en général) et celui de ruptures possibles dans leur pérennité. La vigilance doit donc être de mise sur la question du maintien de leur financement sur le long terme. En ce qui concerne le financement de l'accès aux IR, il est admis par tous aujourd'hui que les modèles économiques qui présupposent un accès gratuit pour les utilisateurs ne sauraient constituer qu'une infime minorité. On se dirige donc vers un modèle général dans lequel l'utilisateur prend en charge une partie du coût de l'accès, classiquement les coûts induits dans le cas de la recherche académique, qu'elle soit nationale, européenne ou internationale. De même, il importe de maintenir un niveau de financement suffisant pour effectuer les recherches et acquérir les équipements nécessaires pour éviter une obsolescence progressive des infrastructures. sont plus immédiatement perceptibles par le grand public. 5.1 Vers une meilleure synergie entre les IR en sciences de la Mer Une réflexion commune entre les opérateurs au sein des Alliances est une voie possible. Elle devrait viser notamment à établir des synergies entre les IR en sciences de la Mer, avec les IR des autres champs thématiques dans AllEnvi ou avec d'autres Alliances. Sous l'impulsion de la Fédération de Recherche sur la Biodiversité et du projet d'infrastructure ESFRI de bases de données sur la biodiversité (« LifeWatch »), des réflexions sont déjà en cours pour unifier au sein d'un même instrument (Ecoscope) les informations sur la biodiversité marine et la biodiversité terrestre. La réponse en cours à l'appel à projets européen sur l'initiative internationale GEO-BON procède de la même logique avec une contribution concertée des organismes via la FRB (projet A-Globe).De même, par delà les réflexions en cours sur les apports de la génomique au champ de l'écologie chimique terrestre et à celui de l'écologie chimique marine, deux spécialités traditionnellement disjointes en France, des synergies pourraient être recherchées au niveau des IR au sein d'AllEnvi (intégration de chimiothèques, formations communes...). 5.2 Bonnes pratiques Des bonnes pratiques communes sont sans doute également à mettre en place entre AllEnvi et Aviesan dans le cas des IR de typologie semblable, par exemple en agronomie et santé, d'une part, et biologie et écologie marines, d'autre part. Celles-ci pourraient tout d'abord consister, dans les réunions de coordination avec l'ANR, à convaincre l'Agence de la nécessité de financer, par le biais de dispositifs communs ­ et présentant donc la « granulométrie » requise ­ l'accès à ces IR ainsi que la recherche technologique nécessaire pour les maintenir à niveau. Il est aussi probable que des modèles économiques et des structures de gouvernance semblables peuvent être élaborés pour ces IR. De même, les géosciences sont présentes (même si ce n'est pas dans leur intégralité) dans au moins deux Alliances, AllEnvi et ANCRE. Un autre objectif devrait être donc de rétablir, au niveau des bases de données, la continuité terre-mer pour les géosciences. 5.3 Au niveau européen Au plan européen, les initiatives de programmation conjointe (IPC) en cours ont toutes reconnu l'importance des IR pour la programmation de la recherche. Réciproquement, les porteurs de ces IR savent qu'ils devront accompagner les priorités programmatiques des IPC. On se dirige donc vers des 5. Recommandations Au total, les enjeux liés aux recherches sur la mer et en mer n'ont sans doute jamais été aussi prégnants qu'aujourd'hui et la France dispose des infrastructures de recherche appropriées pour soutenir la quasi-totalité des recherches à mettre en oeuvre. Elle est aussi très bien placée, tant au niveau de la programmation que des infrastructures nécessaires, pour apporter une contribution majeure à l'Initiative de Programmation Conjointe « Heathy and Productive Seas and Oceans » (JPI « Oceans »). Les IR en sciences de la Mer vont donc occuper une place centrale dans le Programme National Mer qui doit conforter ce dispositif assez unique en Europe, en renforçant sa cohérence, sa cohésion et son efficacité. Le contexte budgétaire et la perspective de la remise à jour de la feuille de route française des Très Grandes Infrastructures de Recherche amènent cependant à s'interroger sur la faiblesse relative de la représentation des sciences de la mer parmi les TGIR. Les évaluations internationales et indépendantes effectuées dans le cadre du Programme Investissements d'Avenir ont pourtant montré l'excellence des compétences en France dans ce domaine. Le Programme Mer a donc avoir pour second objectif de convaincre les décideurs de l'importance des enjeux des sciences de la mer, qui passent trop souvent au second plan par rapport à des questions sociétales dont l'importance ou l'attrait Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 81 RéférenceS | novembre 2012 représentations réciproques dans les gouvernances des IR et des IPC. Par ailleurs, la dynamique d'intégration des IR va se poursuivre, sinon s'accélérer, dans tous les secteurs des sciences de la Mer, au plan national comme au plan européen. Une recommandation importante dans le cadre du programme Mer est donc que la France contribue résolument, par les biais de ses IR, aux feuilles de route européennes en sciences de la Mer, afin de peser ensuite de tout son poids sur la structuration de la recherche marine et maritime en Europe. Un des objectifs à atteindre est une co-construction des infrastructures entre les pays membres et l'Union européenneUnion européenne, visant en particulier à impliquer davantage l'Europe dans le financement e et la DG-RDT (Groupe d'experts pour les IR marines)pour convaincre les pays nouvellement intégrés à l'Union d'investir une proportion plus grande de leurs fonds structurels dans la construction d'IR. En conclusion, la France possède un dispositif très complet d'IR et autres dispositifs transversaux en sciences de la Mer, qui la place en position de chef de file en Europe. Pour saisir les opportunités qui s'offrent à nous, de nombreuses forces sont directement mobilisables, tout de suite ou à brève échéance (Investissements d'Avenir). De plus des synergies peuvent être mises en place entre les divers membres de l'Alliance AllEnvi, y compris au-delà du champ des sciences de la mer, ou avec d'autres Alliances. Nous sommes donc en position de lancer une dynamique vertueuse pour que ces infrastructures de recherche contribuent de façon efficace à la SNRI dans tous les domaines des sciences de la mer. des infrastructures qu'elle labellise. Des opportunités réelles dans ce sens devraient voir le jour dans le cadre du 8 Programme-Cadre (Horizon 2020). Il est bien établi que, pour les infrastructures distribuées au moins, les dépenses d'investissement dans chacun des noeuds sont à la charge des états membres. Notre pays doit cependant obtenir que la Commission fasse évoluer sa politique de financement des IR en Europe selon les lignes suivantes : · dans les programmes d'intégration (I3) ou de construction · (ESFRI) des infrastructures, subventionner la totalité des coûts de coordination dès lors que ceux-ci ont leur valeur ajoutée au niveau de l'Europe (mise en réseau, promotion, formation conjointe des personnels et des utilisateurs ­ en particulier dans des disciplines de plus en plus orphelines telles que la taxonomie, soutien au transfert de connaissances vers les utilisateurs publics et privés...) ; · prendre en charge les activités de recherches technologiques conjointes (investissements immatériels), et, en particulier au moment de la mise en route des IR, contribuer aux investissements matériels ; · augmenter les financements destinés à prendre en charge l'accès transnational aux infrastructures ; · enfin, permettre, dans une limite qui doit sans doute dépendre du secteur considéré, la prise en charge des visiteurs en provenance de l'extérieur de l'Europe. Ce dernier point a pour but de tenir du compte du fait que les IR constituent de très bons outils de coopération internationale, dans lesquels se nouent souvent des collaborations scientifiques sur le long terme. Cette remarque vaut aussi pour l'Europe communautaire. Elle prend un relief particulier dans le cas des politiques de convergence. Ainsi, des réflexions sont en cours entre la Conférence des Régions Périphériques Maritimes Mesure in situ des flux de carbone au sein d'un herbier de « Zostera marina » au large de l'île de Batz, Finistère. © CNRS Photothèque / Yann Fontana 82 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Axe transversal : Technologie et construction navale Technologie Il s'agit ici de proposer quelques éléments sur la technologie en complément des sujets abordés dans les piliers de recherche. La technologie est indissociable les d'une recherche 1. Instrumentation et traitement du signal L'instrumentation au sens large, la métrologie, aurait intérêt à s'insérer dans les axes des développements de la filière identifiée par le MEDDTL et le ministère de l'Industrie13. Les innovations principales pour l'instrumentation des milieux porteront sur : océanographique d'excellence ; développements technologiques nécessitent en effet des actions de recherche, sources de propositions en amont de la recherche, mais également sources de réponses aux besoins sociaux économiques et environnementaux. En cela, ils accompagnent souvent les avancées de la recherche marine et lui permettent de rester dans l'excellence. Le développement des secteurs économiques maritimes implique, par ailleurs, généralement des innovations technologiques Les différentes réflexions prospectives menées ces dernières années dans le domaine des sciences marines ont toutes abordé les vastes domaines du changement climatique, de l'environnement marin, des ressources vivantes, ressources minérales et énergétiques, de la flotte et des engins, et de manière générale l'acquisition et les bases de données, tous domaines qui entrent dans les piliers programmatiques décrits dans les chapitres précédents. · Développement de différentes technologies de capteurs : acoustique, optiques, magnétiques, biologiques et chimiques utilisation de la simulation et modélisation pour la conception de capteurs ; · Autonomie énergétique des capteurs ; · Capteurs intelligents, citons à titre d'exemple l'utilisation de capteurs optiques à base de cavité laser à fibre optique, véritable rupture technologique, permettant la réalisation d'antenne acoustique sous-marine très performante ; · Pour les capteurs biologiques et chimiques : les objectifs sont des mesures chimiques in situ et rapides à la place d'échantillonnage et de mesures en laboratoire. Les mesures de contaminants traces devraient être étudiées. Pour les mesures biologiques, une première de étape est le plus développement d'instrumentation laboratoire automatisée puis in situ. L'objectif est la quantification audelà de la simple détection de la présence d'espèces ; · Couplage télédétection (dont satellitaire) et in situ ; · Conception à coût objectif et éco-conception. Faibles coûts des capteurs ; · Mesures en continu : Les réseaux de capteurs et leur intégration Intégration des données dans des modélisations en particulier pour des prévisions, des alertes, etc. Station de surveillance environnementale MeDON immergée dans le Parc Marin d'Iroise. ©Ifremer/Olivier Dugornay Traitement des signaux temps réel, différé, stockage de données, etc. - Traitement des images dont couleur de l'eau 13 Réflexions et propositions réalisées dans le réseau des pôles Ecotechnologiques (dont les 2 Pôles Mer) et Cf.COSEI 13 01 2012 filière métrologie et instrumentation. Noter le Carnot PME : CAPTIVEN « Capteurs et données pour la qualité environnementale des eaux et des sols » porté par les Instituts Carnot Cemagref, Ifremer et BRGM. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 83 RéférenceS | novembre 2012 2. Équipements Pour améliorer la connaissance du milieu et des écosystèmes, il est nécessaire de disposer d'un certain nombre d'outils d'intervention sur ou sous la mer. Au-delà de la question des navires qui est examinée au titre de la TGIR Flotte, assurer la mise en oeuvre des capteurs nécessite de développer des engins mobiles autonomes ou télé-opérés. Il existe déjà un certain nombre d'équipements de ce type, mais leur coût ou leurs performances en matière d'autonomie ou de lancement et récupération à la mer reste à améliorer. On peut citer comme type de développement : satellites, les observatoires fond de mer... Il est vivement souhaité que la communauté scientifique utilise ces systèmes afin de contribuer aux références nécessaires au plan international. Des systèmes sont développés dans des technologies duales. Des applications potentielles existent pour la recherche scientifique. Quelques priorités · Pour la reconnaissance des habitats et des écosystèmes : imagerie 3D, portables sur de petits navires d'opportunité, systèmes automatisés (AUV, ROV). Orientation : données exploitées à coûts réduits. · Les ROV (Remote Operating Vehicle) · Les AUV (Automous Underwater Vehicle) avec des efforts sur la taille (mini voire micro), sur les charges utiles embarquables, l'autonomie (nouveau mode de propulsion, pile à combustible...), les logiciels de navigation et de planification de mission, · Cartographie des ressources minérales profondes (AUV à plus grande autonomie munis de capteurs géophysiques) · Adaptation et utilisation des technologies duales · Flotteurs et hydroplaneurs munis de capteurs chimiques et biologiques. L'accent serait mis en priorité sur la miniaturisation des capteurs. · · · · · Les hydroplaneurs, La coopération entre drones (AUV et hydroplaneurs) Les systèmes de mise à l'eau et récupération La transmission de données à haut débit Les télécommunications durcies marinisées · Conception de systèmes « non perdables » pour éviter des déchets sur les fonds marins. · Autonomie et communication durcie et haut débit hertzienne et sous marine Le HROV, robot pouvant être autonome ou téléguidé par fibre optique, en cours de développement au Centre Ifremer Méditerranée. ©Ifremer BOB, module destiné à la surveillance des sorties de bulles de gaz en fond de mer, en test au bassin d'essais du Centre Ifremer Bretagne. ©Ifremer/Olivier Dugornay 3. Systèmes Les systèmes résultent essentiellement d'une agrégation des capteurs, de leur traitement, des systèmes de communication, des vecteurs mobiles comme les AUV, hydroplaneurs, des contrôles-commandes associés, etc.. Ils peuvent aussi prendre en compte ou s'interfacer avec les très grandes infrastructures de recherche, les navires, les 4. Forces et faiblesses Les domaines technologiques au service des applications marines et littorales sont variés : systèmes de sécurité et de sûreté, ingénierie navale, énergies marines et sous marines, ressources minérales, ressources biologiques, génie côtier, services en environnement... Dans le domaine de la technologie, les laboratoires de 84 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer recherche jouent un rôle majeur. Le rôle des pôles de compétitivité est aussi très important dans l'émergence de projets fédérant les capacités des acteurs privés et publics. Ainsi, les Pôles Mer, à travers leur plus de 600 membres, ont fait émerger de nombreux projets sur des thèmes et programmes fédérateurs très variés (voir Tableau ci-dessous). Deux axes 5 thèmes · Sécurité et Sûreté Maritime · 10 programmes Protection Marine Prévention des risques environnementaux (voir environnement) Sécurité et sûreté Naval et Nautisme · Navire du futur · Ressources Énergétiques · · Développement durable Ressources Biologiques · · · Environnement et aménagement du littoral · · Offshore profond Energies renouvelables marines Pêche durable Aquaculture Durable Biotechnologies Bleues Gestion de l'eau en zone côtière Ports du futur Services pour la stratégie sur le milieu marin Dans la continuité de ces actions, des programmes sont en forte évolution : l'île du Levant qui comprendra une station 1300 m et une autre station 2400 ; Ces stations d'essais pourront disposer d'une puissance de plusieurs centaines de kW (jusqu'à 1 MW) et d'un flux de données bidirectionnelle (ombilical à fibres optiques). La conduite d'essais de courte ou longue durée en parallèle y sera possible. Cet outil sans équivalent devrait faciliter le développement de nouveaux équipements « profonds ». Dans le domaine des énergies renouvelables marines : L'IEED France Energie Marine a élaboré les axes technologiques nécessaires au développement des filières : éolien offshore, hydrolien, énergie thermique, etc. En ce qui concerne l'offshore profond : Les industriels français ont développé avec leur réseau de PME de hautes technologies beaucoup d'éléments dont les preuves de concept sont réalisées et qui pourraient servir de base aux scientifiques qui s'impliquent de plus en plus dans une approche systémique visant à une exploitation durable des ressources minérales. Ces développements pourront notamment s'appuyer sur la mise en place d'une plateforme mutualisée d'innovation Abyssea ; il s'agit d'un Centre d'Expertise et d'Essai Mer Profonde au large de Dans les domaines de l'environnement et de l'aménagement littoral : La mise en oeuvre des directives européennes telles que la DCE et la DCSMM notamment suggère de s'impliquer dans les développements technologiques associés aux sujets suivants : · Contaminants émergents : effets sur les écosystèmes · Sédiments contaminés : remise en suspension, conséquences, traitement in situ, dragage à impact minimum. · Traitement des eaux de ballasts Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 85 RéférenceS | novembre 2012 · Services et outils de prévision pour une meilleure gestion tels que les services aval à développer au titre du programme européen GMES notamment. · La préservation des écosystèmes, le génie écologique dont la restauration des milieux. Le champ des recherches est vaste, car il y a un manque de connaissance sur les indicateurs de qualité du milieu, les fonctions écologiques, la caractérisation des états écologiques, les matériaux éco-compatibles, les récifs artificiels, etc. une stratégie française à moyen et à long terme pour la recherche, le développement technologique notamment par la définition d'un programme industriel « Navire du futur » pour des navires plus économes en énergie, plus 14 propres, plus sûrs et plus intelligents . Le CORICAN (Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction et les Activités navales) a été installé le 17 mai 2011 sous la présidence de la Ministre chargée de l'Ecologie et du Ministre chargé de l'Industrie, de l'Energie et de l'Economie Numérique. Le CORICAN a été installé afin de : Recommandations : Bien que les compétences existent et se développent notamment avec l'aide des Pôles de compétitivité, il n'existe pas, à ce jour, de source de financement dédiée pour tous les développements technologiques contrairement à d'autres pays européens (Serpent au Royaume-Uni) ou aux USA. Depuis la disparition technologies du CEPM, le financement pétrolier notamment des pour l'offshore (environnemental, · Promouvoir l'effort de recherche et d'innovation dans la filière navale. Le CORICAN du fait d'une représentativité très large (industriels, chercheurs, écoles, pôles, État...) a toute légitimité pour assurer ce rôle. Il formulera également, dans cette optique, des propositions dans le domaine de l'organisation des centres d'expertise et d'essai et pour le financement de son programme « navire du futur ». exploitation, exploration, sécurité, etc..) n'existe plus et il en est de même au niveau européen. L'ANR ne possédant pas de programme de recherche technologique spécifique et le projet Thermie (au niveau européen) ayant été également arrêté il y a une dizaine d'années, la question des modes de financement de la composante technologique en soutien à la recherche en sciences marines pourra faire l'objet d'une réflexion plus approfondie. · Etablir un programme technologique « navire du futur : navire économe, propre, sûr et intelligent » couvrant les différents types de marines. Le but du CORICAN est de définir et faire mettre en oeuvre ce programme de recherche collaborative. Ce programme devra ensuite devenir « la » référence de travail auprès des grands financeurs de la recherche collaborative (Agences, Ministères), mais également nourrir les travaux des industriels et centres de recherche privés. La construction navale 1. Le Conseil d'orientation de la recherche et de l'innovation pour la construction et les activités navales (CORICAN) Les missions du CORICAN, porteur de la stratégie de recherche et d'innovation de la filière navale sont complémentaires des missions du CSF (Comité Stratégique de Filière), notamment en charge de la compétitivité de la filière. Les travaux de recherche et d'innovation relevant de la stratégie portée par le CORICAN doivent contribuer au développement de l'activité industrielle donc de l'emploi sur le sol français. Ils tiennent compte des initiatives nationales des principaux pays partenaires ou concurrents, ainsi que des programmes portés par l'Union européenne. Par ailleurs, le CORICAN inclut dans son périmètre les innovations que la filière navale pourrait développer au profit des technologies navales applicables aux activités offshore et aux Énergies Marines Renouvelables (EMR). Genèse et missions du CORICAN Parmi les sept engagements retenus par le Livre Bleu issu des tables rondes du Grenelle de la Mer, figure l'engagement suivant : « Engagement 130c : Instituer un Conseil d'Orientation de la Recherche et de l'Innovation pour la Construction et les Activités Navales ­ CORICAN » Cet engagement a été confirmé par le Premier Ministre lors du Comité Interministériel de la Mer (CIMER) du 8 décembre 2009 qui a décidé la création d'un Conseil d'orientation de la Le programme d'action technologique « navire du futur » Le CORICAN a établi son programme technologique en 14 Communiqué de presse du CIMER du 8 décembre 2009 recherche et de l'innovation pour la construction et les activités navales (CORICAN) qui aura pour mission de définir 86 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer travaillant par le biais d'une double approche : générant probablement des applications à court terme, · approche par technologie, · approche par le biais de l'impact industriel. Classification des technologies par thèmes Les technologies proposées ont été regroupées suivant les 5 · Catégorie 4 : exploration de technologies de rupture susceptibles de déboucher sur des applications à plus long terme. thèmes prioritaires qui participent chacune dans leur domaine à la mise en oeuvre du Navire du futur, navire propre, économe, sûr et intelligent : · · · · · Efficacité énergétique, Eco-conception, Sécurité ­ Sûreté, Efficacité des opérations du navire, Compétitivité. À ces thèmes est venu s'ajouter le domaine « structures en mer », principalement lié aux technologies navales applicables aux plateformes offshore et énergies marines renouvelables (EMR). Classification des technologies par leur impact industriel Dans une approche stratégique concernant la recherche et l'innovation technologique, il est classique de classer les thèmes d'étude dans plusieurs catégories suivant leur impact industriel potentiel. En général, les critères utilisés sont : le marché visé et le caractère plus ou moins innovant du sujet traité. Dans le cas présent, compte tenu de l'extrême diversité des sujets identifiés, et afin de faciliter l'élaboration d'une politique raisonnée et optimale en matière d'investissement d'études et de recherches, on a réparti les technologies suivant les catégories suivantes suivant en cela la catégorisation du Boston Consulting Group. · Catégorie 1: amélioration par continuité de technologies existantes. Ce sont les domaines dans lesquels notre industrie possède déjà de sérieux atouts qui nous permettent d'accéder aujourd'hui à de bonnes parts de marché, et qu'il convient de cultiver pour préserver nos emplois à court terme dans le secteur, · Catégorie 2 : exploitation de niches technologiques particulières. Ce sont des sujets, qui, sans ouvrir des marchés considérables, permettent, principalement à des PME, de figurer en bonne place pour certaines applications spécifiques, · Catégorie 3 : exploration de technologies de rupture Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 87 RéférenceS | novembre 2012 2. Programme d'action technologique Une proposition de classification des technologies prioritaires est donnée ci-dessous. Elle est donc le résultat d'une approche croisée (technologie/impact industriel) 2.1 Catégorie 1 : amélioration par continuité de technologies Thèmes Catégorie 1 Efficacité énergétique Propulseurs et appendices, optimisation des architectures de propulsion; Maîtrise de la production et de l'utilisation de l'énergie à bord MASSON Marine CONVERTEAM JEUMONT ELECTRIC ECA ELECTRO-NAVALE SCHNEIDER ELECTRIC ALSTOM AREVA TA BERTIN D2M HUTCHINSON SEGULA ARIAMIS PRINCIPIA BUREAU MAURIC HT2 ARCHITECTE LEBEFAUDE SHIPSTUDIO SAFT NEXANS STX DGA Eco- conception Réduction des nuisances sonores, de l'impact du mouillage, du sillage et des rayonnements électromagnétiques; Traitement des déchets liquides et solides. DCNS STX BERTIN CNIM VEOLIA DGA Nécessaire à la lutte contre les émissions. Création de quelques centaines d'emplois de haut niveau. Maintien du leadership de l'industrie électrique française : enjeu de près de 100 000 emplois Maintien de la compétence de conception des navires donc indépendance nationale : enjeu de quelques dizaines de milliers d'emplois Technologies Acteurs français identifiés Emplois Sécurité ­ sûreté Sécurité des biens et des personnes SAGEM DGA SAGEM BUREAU VERITAS... Thème récurrent pouvant apporter des niches confortables en cas de succès Thèmes de la prochaine révolution sur le fonctionnement de la logistique et de l'évolution des carrières de marins : création potentielle de quelques milliers d'emplois de marins, de logisticiens. Peut par défaut entraîner le détournement des flux marchands des ports français : enjeu plusieurs milliers d'emplois et perte d'activité autour des ports. Efficacité des opérations du navire Monitoring Maintenance adaptative Assistance à distance Compétitivité Méthodes d'ingénierie innovantes Organisation compétitive adaptée à la CN Réalisation concourante Conception en réalité virtuelle Nouvelle technologie de soudage (chantier virtuel, supply chain virtuelle, géolocalisation des pièces, manutention) STX DCNS CLARTE ACB DGA Thème essentiel pour les grands chantiers français : enjeu de quelques milliers d'emplois et à défaut risque de perte d'activité des régions 88 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer 2.2 Catégorie 2 : exploitation de niches technologiques particulières Thèmes Catégorie 2 Efficacité énergétique Propulsion POD Stockage d'énergie CONVERTEAM DCNS MASSON MARINE SAFT BOLLORE CEA DGA Stockage d'énergie, un thème transversal avec des acteurs français impliqués : création de quelques centaines d'emplois Eco-conception Réduction des trainées hydrodynamique et aérodynamique (carènes, superstructures, allègement, revêtements) Matériaux Alimentation par le quai (cold ironing) Industrialisation de la pose de plates-formes reposant sur le fond Sécurité-sûreté Assistance aux opérateurs SAGEM MARINELEC Marine Nationale/DGA Maintien de compétence dans la conduite des navires. Peut aussi avoir une influence sur la formation des équipages ­ enjeu de quelques milliers d'emplois Efficacité des opérations du navire Equipages "au plus juste". Optimisation des routes. Déchargement IXSEA/Sodena, CLS, ACEBI HYDRALIFT-BLM, SAGEM, Cadden, Maxsea, Docsea... Marine Nationale/DGA DCNS STX IRT JULES VERNE CONVERTEAM NG2 DGA Correspond aussi à la compétence globale en terme de conception de navires. La création de sous systèmes peut permettre un export durable : enjeu quelques milliers d'emplois. Opportunité de prendre le leadership sur ce type d'équipement : création de quelques centaines d'emplois Technologies Acteurs français identifiés Emplois Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 89 RéférenceS | novembre 2012 2.3 Catégorie 3 : Technologies de rupture à court terme Thèmes Catégorie 3 Efficacité énergétique Technologies Application du GNL comme carburant Acteurs français identifiés GTT CRYOLOR BUREAU VERITAS IFP EN IFSTTAR GAZOCEAN CEGELEC ­ SOPRANO FMC SFZ SNECMA SNRI STX DGA Eco-conception Concept global de récupération d'énergie BERTIN SEGULA CEGELEC - SOPRANO SHERPA ING. Flotteurs pour éoliennes AXIMA VEOLIA STX Possibilité de création de nouvelles niches technologiques : quelques milliers d'emplois Emplois Création de la chaîne de distribution gaz et donc redistribution des emplois entre pétrole et gaz : quelques dizaines de milliers d'emplois de manière transverse mais que le secteur naval peut accompagner. Confirmation de la position de leader de GDF-SUEZ STX DCNS Sécurité-sûreté e-navigation Navigation intelligente (écopilot et gestion centralisée de la voie d'eau) Autoprotection Sécurité après accident (sauvetage....) Efficacité des opérations du navire Lutte anti-piraterie e-navigation Systèmes permettant de diminuer les risques et la gravité des accidents DCN Dans le cadre de l'ingénierie système, gestion de données à bord et à terre (cloud) au service de la prise de décision, DCN STX THALES Sociétés informatiques Compétitivité Nouvelle technologie d'assemblage : collage Robotisation du soudage Robotisation de la peinture Nouvelle technologie de contrôle non destructif STX DCNS DGA Aide au maintien des capacités de production de navires nécessaire à l'indépendance nationale STX THALES Sociétés informatiques SAGEM ASV Marine Nationale / DGA Préoccupation actuelle des armateurs : technologie créatrice de plusieurs milliers d'emplois. MARINELEC SAGEM CETMEF VNF Technologie indispensable au déploiement de la voie d'eau et à la lutte contre les gaz à effet de serre : concerne quelques milliers d'emplois 90 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer 2.4 Catégorie 4 : Technologies de rupture à long terme Thèmes Catégorie 4 Eco-conception Technologies Acteurs français identifiés Emplois Energie therm ique des mers STX DCNS Efficacité énergétique Sécurité-sûreté Sécurité passive après accident JLMD SYSTEM Nouveau concept dans la sécurité des navires. Création de quelques centaines d'emplois avec possibilité d'export. Efficacité des opérations du navire Concept de convoi fluvial VNF CFT CMR Concept de maintien en service des voies navigables Freycinet. Maintien des métiers de batellerie soit 1500 artisans. Compétitivité Bassin numérique Atelier comm uniquant STX DCNS IRT Jules Verne DGA Maintien des métiers de construction navale : quelques milliers d'emplois en jeu. Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 91 RéférenceS | novembre 2012 2.5 Actions d'accompagnement nécessaires à la mise en oeuvre du programme « Navire du Futur » du CORICAN 2010, plus de 40 M pour la construction navale (hors EMR).Or, le besoin de financement collaboratif nécessaire à la mise en oeuvre du programme du CORICAN est compris entre 70 et 105 M entre 2012 et 2020. Une mobilisation de nouveaux financements est donc indispensable. Organisation nationale des compétences et des moyens d'essais La mise en réseau des centres d'expertise et d'essai est impérative compte tenu du cloisonnement excessif constaté. Ce cloisonnement nuit à la réactivité et à l'efficacité globale. Dans de nombreux cas, il existe des « goulots d'étranglement » qui ne permettent pas aux centres de répondre efficacement à la demande des industriels, qui en conséquence sont contraints de s'adresser à des établissements étrangers. Dans le cadre des travaux de concertation et d'optimisation conduits par le CORICAN, les centres de recherche et d'essai du domaine naval ont décidé de mettre en réseau leurs moyens. Cette mise en réseau doit concerner aussi bien les moyens matériels que les compétences. L'objectif est de mettre à disposition de la filière non seulement des installations d'essai, mais aussi un réseau d'experts afin de faciliter aussi bien la préparation que l'évaluation des projets d'innovation. Il est proposé de choisir l'IRT Jules Verne, en cours de constitution, comme point focal de ce réseau. Cette mise en réseau, pouvant conduire à des mises en commun de moyens pour remédier à certains « goulots d'étranglement » évoqués ci-dessus, est nécessaire pour aborder le contexte international, marqué par une concurrence très vive. Une cartographie des centres européens a été dressée, et les principes d'un positionnement stratégique ont été définis : concurrence assumée avec les Néerlandais de MARIN et les pays de l'Europe du Sud, coopération dans le domaine militaire avec le Royaume-Uni, alliance commerciale avec les centres de l'Europe du Nord exploitant certaines niches. Normalisation et réglementation L'arrivée des nouvelles technologies devra être préparée et anticipée par une évolution profonde du référentiel normatif et réglementaire au niveau international et national, faute de quoi les applications pratiques ne pourront pas voir le jour. Il est proposé que la France accentue sa participation à la refonte de ce référentiel, qui doit bien sûr faire l'objet d'un plan concerté au niveau de l'Union européenne. Huit domaines nécessitant des évolutions réglementaires ont été identifiés. Ils feront l'objet de fiches d'action réglementaire et sont résumés ci-après : Propulsion au GNL Navires de Pêche, Navire « intelligent », cycle de vie ­ Démantèlement, Navigation intérieure, énergies marines renouvelables (EMR), Véhicules marins non habités. Mobilisation des financements Les programmes de construction de navires sur le territoire français en 2010 ont mobilisé 400 M en matière de R+D+I (Recherche, Développement, Industrialisation), activité financée à hauteur de 95 %. En effet, dans le domaine naval, les séries sont limitées, et il arrive fréquemment que chaque exemplaire soit personnalisé pour le besoin du client, ce qui veut dire que pour presque tous les navires une nouvelle conception est à inventer... En R&D proprement dite, l'effort global de R&D « public + privé » a représenté en moyenne sur les années 2008 à 92 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Annexes Annexe 1 ­ Lettre de saisine Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 93 RéférenceS | novembre 2012 94 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer Annexe 2 ­ Glossaire AMMA AFD AMP ANCRE CCAMLR CDB CIEM CLIC CLIVAR CNML COI COM COMER COREMO CRVOI Analyses Multidisciplinaires de la Mousson Africaine. Agence française de développement Aire marine protégée Alliance nationale de coordination de la recherche pour l'énergie Convention sur la conservation de la faune et de la flore marine de l'Antarctique convention sur la diversité biologique Conseil international pour l'exploration de la mer Climate and cryosphere Climate variability and predictability Conseil national de la mer et des littoraux Commission de l'océan Indien Collectivités d'Outre-mer Comité pour la recherche marine Coral Reef Monitoring Centre de recherche et de veille (sur les maladies émergentes) dans l'océan Indien CYROI DOM-ROM DYNECAR EC2CO EIT Cyclotron Réunion Océan Indien Départements et régions d'Outre-mer Dynamique des écosystèmes Caraïbes Ecosphère continentale et côtière European Institute of innovation and technology (Institut européen d'innovation et e technologie) EMSO EPOCA FEAMP GEWEX FED GDR GIEC GIZC GOPS GMMC European multidisciplinary seafloor observation European Project on OCean Acidification Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche Global energy and water cycle experiment Fonds européen de développement Groupement de recherche Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat Gestion Intégrée des zones côtières Grand Observatoire du Pacifique SUD Groupe mission Mercator Coriolis Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 95 RéférenceS | novembre 2012 IAC IATTC ICCAT (ou CICTA) IEED IGBP ILM IMBER INEE INSU IOTC (ou CTOI) IPBES Institut agronomique néo-calédonien Inter-american tropical tuna commission Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique Instituts d'excellence énergies décarbonées International Geosphere-Biosphere programme Institut Louis Malardé Integrated Marine Biogeochemistry and ecosystem research Institut écologie et environnement Institut National des Sciences de l'Univers Commission des thons de l'Océan indien Plate-forme intergouvernementale science-politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem services). IR LABEX LEFE LOICZ MG4U ORGP OST OSU-R OVPF PAGES PAS PNEC POLMAR PRESICA PTOM REFMAR RESOMAR SOLAS RUP SOMLIT STRATOM TIT Infrastructure de recherche Laboratoire d'excellence Les enveloppes fluides et l'environnement Land-Ocean interactions in the coastal zone Marine Genomics for users Organisations régionales de la gestion de la pêche Observatoire des sciences et techniques Observatoire des sciences de l'univers de Rennes Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise PAst Global changES Association scientifique du Pacifique Programme national environnement côtier Plan « pollution maritime » Pôle de recherche, d'enseignement supérieur et d'innovation calédonien Pays et territoire d'Outre-mer Réseau de références des observations marégraphiques Réseau des stations et observatoires marins Safety of life at sea Régions ultrapériphériques Service d'Observation en Milieu LIToral Stratégies territoriales pour les Outre-mer thème d'intérêt transversal 96 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Le Programme Mer UAG UBO UMR UMS FOF UNCLOS Université des Antilles et de la Guyane Université Bretagne Occidentale Unité mixte de recherche unité mixte de service Flotte océanographique française United Nations Convention on the Law Of the Sea (La Convention des Nations unies sur le droit de la mer) UPF WCRP TAFF TGIR WIOMSA ZEE ZEPOLYF Université de Polynésie française World Climate Research programme Terres australes et antarctiques françaises Très grandes infrastructures de recherche Western Indian Ocean Marine Science Association Zone économique Exclusive Zone économique de Polynésie française Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation | 97 RéférenceS | novembre 2012 98 | Commissariat général au développement durable ­ Direction de la recherche et de l'innovation Commissariat général au développement durable Direction de la recherche et de l'innovation Tour Voltaire 92 055 La Défense cedex Tél : 01.40.81.21.22 Retrouver cette publication sur le site : http://www.developpement-durable.gouv.fr/developpement-durable Le Programme Mer : état des lieux et enjeux de la recherche et de l'innovation en sciences marines Le Programme Mer dresse un état des lieux de la recherche française sur les environnements marins et littoraux, leurs moyens d'étude et les développements technologiques qui s'y rattachent, et identifie les enjeux de connaissance et de politiques publiques correspondants. Ce document a été rédigé à la demande des ministres chargés de la recherche et chargé de l'écologie par l'Alliance pour l'Environnement (AllEnvi), en liaison étroite avec un groupe de personnalités qualifiées en tant qu'acteurs dans les domaines marins, maritimes et littoraux. Construit autour de quatre piliers thématiques ­ la connaissance du système mer, l'exploitation durable des ressources marines, la gestion de l'espace côtier marin et le programme d'action pour les Outre-mer français ­ ce document aborde également deux axes transversaux dédiés aux grandes infrastructures de recherche et à la technologie et la construction navale. Le Programme Mer constituera ainsi une base de travail pour définir les orientations stratégiques françaises de la recherche en sciences marines au plan national et international. The Marine Program : inventory and challenges of research and innovation in the French marine sciences The Marine Program presents an inventory of French research on marine and coastal environments, their means of study and the technological developments they sustain, and identifies key issues in terms of knowledge and public policy. This document has been written by the Alliance for the Environment (AllEnvi, a group of French research agencies), in close connection with stakeholders involved in the marine and coastal fields. It is built around four themes ­ knowledge of the marine system, sustainable use of marine resources, management of the marine coastal area, and action program for the French overseas territories ­ completed by two transversal axes dedicated to large research infrastructures, and technology and shipbuilding. The Marine Program will thus represent a working basis to define French strategic orientations on a national and international scale. Dépôt légal : novembre 2012 ISSN : 2102-474X INVALIDE)

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