Enjeux (les) écologiques et fonciers en Camargue
LAVOUX, Thierry ;SCHMIT, Philippe ;SIMON, Gilbert ;ROBINET, Olivier
Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
Auteur secondaire
Résumé
<div>L'espace géographique couvert par la Camargue comprend l'ensemble de la réserve de biosphère soit, la « Grande Camargue » entre les deux bras du Rhône et la « Petite Camargue » à l'ouest du petit Rhône. Sur le plan foncier, une politique active d'acquisition est menée depuis plusieurs années par le CELRL et par le département des Bouches-du-Rhône au titre des espaces naturels sensibles. Le rapport analyse les enjeux de cette zone, identifie les acteurs fonciers et l'évolution des différents secteurs d'activités afin de permettre aux pouvoirs publics de passer d'une logique d'achat par opportunité à une stratégie cohérente d'acquisition fondée sur une logique d'avenir. Sur un territoire où les jeux d'acteurs semblent désormais équilibrés mais dont la gouvernance globale devrait être renforcée, il suggère à terme le renforcement des liens entre les deux Camargue et, dans le court terme, la nomination d'un interlocuteur spécifique du Parc et de la réserve de biosphère au sein de la DREAL PACA. L'analyse du marché foncier le conduit également à recommander le plus grand discernement dans les achats et à proposer la mise en oeuvre d'autres outils que l'acquisition.</div>
Editeur
CGEDD
Descripteur Urbamet
écologie
;écosystème
;activité économique
;réserve de la biosphère
;activité agricole
;élevage
;culture
;acquisition
;réserve foncière
;politique foncière
;marché foncier
;impact
;aménagement du territoire
;milieu naturel
;stratégie
;protection de la nature
;aménagement du littoral
;zone humide
Descripteur écoplanete
Thème
Environnement - Paysage
;Foncier - Propriété
Texte intégral
N°007488-01
Juillet 2011
Les enjeux écologiques et fonciers en Camargue
CONSEIL GÉNÉRAL DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
Rapport n° 00748801
Les enjeux écologiques et fonciers en Camargue
établi par
Thierry LAVOUX - Olivier ROBINET - Philippe SCHMIT - Gilbert SIMON
Membres permanents du CGEDD
Juillet 2011
Sommaire
Résumé....................................................................................................................3 Introduction.............................................................................................................7 1. État des lieux.......................................................................................................9
1.1 Les conditions initiales.................................................................................................9 1.2 L'aménagement au fil des siècles................................................................................9 1.3 La nature encore très présente..................................................................................10 1.4 L'évolution de l'occupation du sol et les impératifs contradictoires.............................13 1.5 Les risques naturels (inondations et submersions)....................................................15 1.6 La gestion de l'eau et sa qualité.................................................................................16
2. Les activités économiques en Camargue et les impacts sur le foncier......19
2.1 Le rôle et la place de l'agriculture...............................................................................19 2.1.1 La riziculture n'entre pas en contradiction avec la protection des milieux naturels....................................................................................................................19 2.2 Les activités d'élevage...............................................................................................21 2.2.1 Le soutien à l'agriculture camarguaise : les mesures agro-environnementales territorialisées...........................................................................................................23 2.3 Les activités cynégétiques.........................................................................................24 2.4 La place du tourisme..................................................................................................26 2.5 La convention de revitalisation CSM-État et les projets de développement urbain . . .31 2.6 Le développement du Grand Port Maritime de Marseille et ses répercussions..........34
3. Les enjeux de la conservation.........................................................................35
3.1 Le maintien de déséquilibres contrôlés entre eaux douces et eaux salées................35 3.2 La préservation de formations végétales typiques.....................................................35 3.3 Une abondance d'espèces exigeantes sur la qualité des milieux ..............................36 3.4 La mise à profit des propriétés publiques pour donner la priorité à la nature.............37 3.5 La continuité écologique entre Camargue Gardoise, Delta du Rhône, Marais du Vigueirat et Crau .............................................................................................................37
4. Les réponses des acteurs................................................................................39
4.1 Les protections légales..............................................................................................39 4.2 Les désignations internationales................................................................................41 4.3 Le PNRC et sa gouvernance.....................................................................................43
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4.4 Les acquisitions publiques.........................................................................................46 4.4.1 L'intervention du Conservatoire du littoral dans le cadre du protocole signé en 2009 avec les Salins du Midi....................................................................................47 4.4.2 L'intervention foncière de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse (RMC) sur les zones humides.............................................................................................49 4.4.3 La réserve foncière des établissements publics fonciers (EPF).....................51 4.5 Les autres outils d'intervention...................................................................................52 4.5.1 Les mesures compensatoires........................................................................52 4.5.2 Le mécénat....................................................................................................55 4.5.3 Les servitudes conventionnelles....................................................................56
5. Conclusions et propositions...........................................................................59
5.1. Un territoire où les jeux d'acteurs semblent désormais équilibrés.............................59 5.2 Mais dont la gouvernance globale doit être renforcée................................................60 5.3. Le foncier : les acquisitions doivent se faire avec discernement ..............................61 5.4 D'autres outils que l'acquisition peuvent-ils être mis en oeuvre ?...............................63
Annexes..............................................................................................................67
1. Lettre de mission ..............................................................................................69 2. Liste des personnes rencontrées....................................................................71 3. Les Mesures agroenvironnementales dans le PNRC de 2008 à 2010...........75 4. Les projets d'urbanisation connus et/ou déposés.........................................77 5. Glossaire des sigles et acronymes..................................................................79 6. Liste des recommandations............................................................................81
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Résumé
La ministre de l'écologie et du développement durable a chargé le CGEDD de réfléchir « à une stratégie cohérente d'acquisition foncière en Camargue fondée sur une logique d'avenir » en analysant les enjeux écologiques, en identifiant les acteurs fonciers et l'évolution des différents secteurs d'activité sur ce territoire emblématique aux plans naturel et paysager. Après s'être rendue à plusieurs reprises en Camargue pour écouter les acteurs, la mission a pu constater que ce territoire n'était pas qu'un grand espace naturel connu des scientifiques du monde entier. L'équilibre auquel il est parvenu résulte des multiples compromis que les différents acteurs ont su trouver au fil des ans. Désormais, les acteurs camarguais se retrouvent dans des instances, à l'instar du Parc naturel régional ou du Symadrem1 où le dialogue sur l'avenir de leur territoire porte des germes prometteurs. La mission suggère à terme le renforcement des liens entre les deux Camargue : une concertation entre les préfets des deux départements concernés pourrait s'avérer particulièrement judicieuse pour ne pas ériger les limites administratives en obstacle à la gestion unitaire de la réserve de biosphère. Dans le court terme, la mission recommande de nommer un interlocuteur spécifique du Parc et de la réserve de biosphère au sein de la DREAL PACA. L'analyse du marché foncier conduit la mission à suggérer que les achats du Conservatoire du littoral se réalisent avec le plus de discernement possible sachant que les acquisitions des terrains des Salins du Midi ont lourdement pesé sur ses capacités d'intervention vers des zones littorales plus menacées ou plus intéressantes au plan écologique. Bien sûr, d'autres acteurs (EPF, fondations, agence de l'eau) pourraient être sollicités qui accompagneraient le Conservatoire, mais est-il raisonnable d'investir dans des achats fonciers réalisés à des prix supérieurs à ceux du marché pour des terrains de toute façon inconstructibles ? Pour la mission, l'intervention du Conservatoire ne se justifierait, en général, que dans l'une des deux situations suivantes : d'une part si les terrains préemptables sont sous une quelconque menace d'urbanisation ou de développement économique contradictoire avec les équilibres écologiques ou bien pour éviter une mise en vente par découpe éventuelle (cas de l'étang du Lairan). Ceci ne signifie pas que l'action des pouvoirs publics doit se réduire a minimum en Camargue. Par exemple, la fréquentation anarchique des plages de Piémanson et Beauduc nécessite une politique concertée de l'État et des collectivités : la mission plaide pour un projet global alliant la mobilité des touristes entre les plages et le village de Salin-de-Giraud avec une conception écologique de l'urbanisme et de l'habitat comme il est acté dans la Charte du PNRC.
1
Syndicat mixte interrégional d'aménagement des digues du delta du Rhône et de la mer.
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Par ailleurs, la mission estime qu'il est souvent moins onéreux comme alternative à l'acquisition en pleine propriété que le Conservatoire (ou tout autre instance publique) conventionne avec un propriétaire privé qui souhaite poursuivre son activité le fait de ne pas modifier les niveaux d'eau, de ne pas édifier de bâtiments ou, tout simplement de ne pas modifier des façons culturales satisfaisantes au plan écologique. Dès lors, elle est d'avis que le Conservatoire étudie de façon systématique la faisabilité de la servitude conventionnelle environnementale. Enfin, dans la perspective d'une application efficace du protocole GIZC (Gestion Intégrée des Zones Côtière) de la Convention de Barcelone, la mission recommande la généralisation de la démarche GIZC sur l'ensemble du littoral camarguais.
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Introduction
L'intérêt écologique et paysager de la réserve de biosphère de Camargue2 n'est pas à démontrer. Sur ce territoire emblématique d'une nature et d'un littoral encore sauvages, plus de soixante-dix kilomètres non urbanisés en méditerranée !, s'emboitent souvent harmonieusement des activités aussi diverses que la la protection de la biodiversité, la saliculture, l'élevage de taureaux et de chevaux, la riziculture, la chasse et le tourisme. Les espaces les plus proches du littoral comme les lagunes font l'objet depuis une dizaine d'années d'une politique d'acquisition dont les acteurs premiers sont le Conservatoire du littoral et dans une moindre mesure les collectivités locales. Le rythme de ces acquisitions s'est accéléré à la fin des années 2000 lorsque des terrains appartenant à la Compagnie des Salins du Midi (CSM) ont été mis en vente. Plus de 5 000 ha ont été acquis par le Conservatoire dans le cadre d'un protocole courant de 2007 à 2011 et au delà pour les modalités de gestion. Ces achats ont été réalisés grâce également aux concours financiers du ministère de l'Écologie, de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse (RMC) et du département des Bouchesdu-Rhône. Mais, au total, ces engagements vont lourdement affecter le budget du Conservatoire du Littoral et obérer ses capacités d'acquisition d'autres sites jusqu'en 2014. Les terrains acquis, autrefois dédiés à la récolte de sel impliquent désormais d'autres gestionnaires comme le Parc Naturel Régional de Camargue (PNRC) ou les collectivités locales avec des engagements financiers et des méthodes de gestion parfois complexes à mettre en place. Outre les acteurs traditionnels de l'acquisition foncière sur fonds publics déjà cités, l'on perçoit l'intérêt d'investisseurs souhaitant constituer des réserves de chasse ou perpétuer l'activité agricole tandis que des maîtres d'ouvrage opérant à proximité et désirant compenser par des mesures écologiques la destruction de milieux similaires constituent un vivier d'acheteurs potentiels. D'autres acteurs encore, tels les fondations, celle de Luc Hoffman est la plus connue 3, pourraient se montrer intéressés par l'achat d'espaces naturels en Camargue. La lettre de commande de la ministre de l'écologie portait, entre autres, sur l'hypothèse d'un passage d'une logique d'achat par opportunité à une véritable stratégie cohérente d'acquisition qui tienne compte des enjeux écologiques de la Camargue et des logiques d'acteurs qui y sont à l'oeuvre.
2
L'espace géographique couvert par la Camargue comprend l'ensemble de la réserve de biosphère c'est à dire la « Grande Camargue » ou « Ile de Camargue » située entre les deux bras du Rhône et la « Petite Camargue » (ou « Camargue gardoise ») située à l'ouest du petit Rhône. La fondation MAVA s'est déjà portée acquéreur de terrains proches de ceux de la Tour du Valat.
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C'est dans ce contexte qu'a opéré la mission du CGEDD composée de quatre de ses membres permanents : Messieurs Thierry LAVOUX, Olivier ROBINET, Philippe SCHMIT et Gilbert SIMON qui se sont rendus en Camargue à quatre reprises entre janvier et mars 2011. La mission a rencontré l'ensemble des acteurs socio-professionnels, élus, associations, services de l'État, responsables du PNRC, délégués du Conservatoire du Littoral, scientifiques, opérant dans la réserve de biosphère. Elle a, par ailleurs, enrichi ses appréciations par la lecture de nombreux documents sur la Camargue qui est depuis longtemps un sujet presque inépuisable d'études, d'analyses et d'enquêtes menées par toutes les disciplines.
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1. État des lieux
1.1 Les conditions initiales
La Camargue se situe à la rencontre des eaux douces du Rhône et des eaux salées de la Méditerranée. Son histoire moderne remonte à environ 10 000 ans (avant, le Rhône n'avait pas entrepris de construire son delta et se jetait dans la Méditerranée beaucoup plus à l'ouest ; et plus avant encore les variations considérables qu'a connu le niveau des mers empêchent toute comparaison utile). Le Rhône a bâti son delta actuel en apportant des sédiments et en remblayant progressivement la mer pendant des milliers d'années. La Camargue se caractérisait alors par des engraissements considérables (au Moyen-Âge, le trait de côte était nettement plus au nord qu'aujourd'hui et l'étang du Vaccarès faisait encore partie de la Méditerranée). Les bras du Rhône se modifiaient au fil du temps et des grandes crues. La faible altitude du delta combinée avec les poussées de la mer et les inondations du fleuve aboutissaient à une mosaïque d'habitats naturels en perpétuelle évolution, avec deux constantes : un régime hydraulique typiquement méditerranéen, comportant des pics de sécheresse à la fin du printemps et en été. Et une salinité qui allait croissant à proximité de la côte.
1.2 L'aménagement au fil des siècles
L'exploitation de la Camargue par l'homme est très ancienne. Bien avant l'époque romaine, des agriculteurs et des pasteurs vivaient le long des bras du fleuve et déjà tentaient de se protéger contre les débordements en élevant des bourrelets de terre, embryons des premières digues. Ils ne pouvaient rien évidemment contre les grandes crues. Le début des endiguements plus conséquents date d'avant la guerre de Cent Ans mais ils n'empêchaient toujours pas la divagation du fleuve et l'apparition ou la disparition de bras dont la trace est toujours visible. C'est la grande crue de 1856 qui a déclenché le processus moderne de protection contre les eaux, à la fois du fleuve et de la Méditerranée. La construction de la digue à la mer qui barre le sud de la Camargue a débuté en 1859. Celle du système de digues qui enserrent le grand et le petit Rhône en 1869. Cette époque a marqué la fin définitive des divagations du Rhône et a fixé les deux bras du delta dans leur état actuel. Après la dernière crue exceptionnelle de 2003, le Plan Rhône de 2005 a prévu un rehaussement et un renforcement des ouvrages. Ces digues "millénales" de Tarascon à la mer sont destinées à diminuer d'un facteur trente le volume d'eau déversé en Camargue par une crue équivalente à celle de 1856 (environ 14 000m3/seconde à Tarascon).
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Une population de 110 000 personnes vivant dans le grand delta sera ainsi mise à l'abri des plus importants dommages économiques causés par les crues du Rhône. Avec l'endiguement, l'évolution des spéculations agricoles a profondément modifié le visage de la Camargue et impacté ses habitats naturels. La forêt a progressivement disparu, et avec elle les cervidés dès le XVème siècle - alors que le loup s'est maintenu jusqu'au XIXème. La vigne a occupé de grandes superficies après la crise du phylloxéra, puis a disparu du delta. L'apparition du riz a conduit à une modification spectaculaire de la gestion de l'eau douce. Sur les pâtures, les moutons ont cédé la place aux bovins et aux chevaux. Et le développement (puis la récente régression) de l'exploitation du sel a fortement façonné le tiers sud-est du delta. La quasi totalité des grandes propriétés publiques de Camargue sont d'anciennes terres des Salins du Midi. Enfin, les barrages sur l'ensemble du cours du Rhône (comme celui de Vallabrègues près de Tarascon) ont fait presque disparaître les apports de limon, et le trait de côte, qui avait progressé au détriment de la mer pendant des milliers d'années, recule désormais, d'autant plus que le niveau de la mer s'élève de 2 à 5 mm par an. De son côté "l'île de Camargue" s'enfonce d'environ 1mm par an.
1.3 La nature encore très présente
La Camargue est célèbre pour ses flamants roses, ses chevaux blancs, ses taureaux, mais aussi pour les espaces naturels si particuliers qu'ils occupent et parcourent : étangs et marais doux ou saumâtres, bordés de roselières ou de jonchaies, grandes « prairies » sur lesquelles on n'identifie pas toujours les salicornes, dunes, plages, mais aussi grandes cultures, boisements le long des routes et des bras du Rhône. Elle est le refuge de dizaines de milliers d'oiseaux même s'ils ne se laissent pas toujours voir.
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Cette biodiversité est en outre source de multiples services rendus, dans le domaine alimentaire (riziculture, céréales, élevage bovin, pêche), par le recyclage des nutriments et en purifiant l'eau, dans le tourisme et les activités de loisir, ou encore pour l'exploitation des roseaux (90% des chaumes français proviennent de Camargue). La Camargue est-elle pour autant en bonne santé sur le plan écologique ? La biodiversité a subi des évolutions notables en fonction de la colonisation humaine : si les grands mammifères (cerfs, loups, castors), avaient disparu à la fin du XIXème siècle, c'est avec l'endiguement du delta pour contenir les crues du Rhône et les incursions de la mer à cette période, puis le développement subséquent de l'industrie du sel et l'intensification agricole au XXème siècle que la biodiversité a été totalement remodelée. Les zones humides qui subsistent ont tendance à perdre une partie de leur spécificité méditerranéenne, puisque la riziculture conduit à inverser le cycle de l'eau douce dans le delta. En effet, les besoins importants en eau de la riziculture conduisent au rejet d'eau douce dans le delta en grande quantité au printemps et en été à l'inverse du cycle naturel, caractérisé par une sècheresse estivale. Par ailleurs, l'exploitation du sel a créé d'importantes surfaces d'eau salée peu profondes riches en ressources alimentaires pour les oiseaux limicoles. De même, la disparition de la vigne a entrainé la disparition du lièvre dans le delta (alors qu'il est encore présent en Camargue gardoise où la viticulture s'est maintenue).
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En même temps que progressent les étangs d'eau peu salée et les roselières, les sansouires et les mares temporaires régressent. La fragmentation de l'espace se poursuit également, tant par les chemins que par l'urbanisation et les aménagements qui pressent la nature autour d'Arles, autour d'Aigues-Mortes, des Saintes-Maries de la Mer, de Salin-de-Giraud et surtout de Port-Saint-Louis-du-Rhône et Fos-sur-Mer. Les grandes propriétés privées ont tendance à être morcelées, ce qui a des conséquences sur la gestion de l'eau. La qualité de cette dernière est sujette à bien des interrogations, puisque la Camargue est le réceptacle des pollutions du Rhône, auxquelles s'ajoutent les intrants de l'agriculture intensive. La perte globale d'espaces naturels se poursuit. Elle s'est très fortement ralentie entre les deux bras du Rhône, mais elle a continué tant à l'Ouest (Camargue gardoise) qu'à l'Est (du fait notamment du développement de Fos-sur-Mer et du Grand Port de Marseille). La stabilité constatée depuis les années 70 dans le delta proprement dit ne doit pas faire oublier que près de 50% des zones humides camarguaises ont disparu depuis 1950. Au total, si on constate une évolution favorable de la richesse de biodiversité (mesurée par l'indice « planète vivante ») depuis 1970, cela a surtout profité aux espèces d'eau douce et en particulier aux oiseaux (qui ont par ailleurs bénéficié de mesures spéciales de conservation au niveau national). On assiste ainsi à une banalisation de l'écosystème camarguais qui tend à ressembler aux autres zones humides continentales. De nombreuses espèces régressent (oiseaux macro-insectivores, amphibiens, reptiles, lapins ...) sans que les causalités soient toujours totalement élucidées. Pour les peuplements de poissons, l'évolution est caractérisée par le développement d'espèces exogènes (1/3 des peuplements d'eau douce) et une grande fluctuation du nombre d'espèces dans les lagunes en fonction des variations de salinité. La connaissance en matière d'algues et d'invertébrés n'est pas au même niveau que celle des vertébrés et ne permet pas de porter un jugement sur l'évolution des dernières décennies. Du point de vue de la biodiversité, il est donc très difficile de tirer un bilan. Un indice biodiversité fondé essentiellement sur des espèces bien connues et bien suivies aura tendance à évoluer de façon positive. Il faut également tenir compte dans ce bilan de l'apparition de nouvelles espèces, certaines par suite des protections légales et de la reconquête des milieux qu'elles occupaient autrefois (comme la talève sultane), d'autres en raison du réchauffement climatique comme le coucou geai, mais beaucoup dites invasives du fait d'introductions involontaires par l'homme ou ses activités : nombreux poissons, écrevisses, artémias américains, ragondins, jussies... Aucune comptabilité ne peut faire la balance entre la disparition de l'esturgeon au XXème siècle, l'installation de la cigogne blanche comme nicheuse et l'expansion favorisée par l'homme de l'emblématique flamant rose. Malgré tout, certains gestionnaires d'espaces naturels semblent penser que le "statu quo" n'est pas si mauvais que cela par comparaison avec les menaces qu'ils ont connues et celles qui pourraient se concrétiser.
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La Camargue d'aujourd'hui est ainsi devenue "un espace sécurisé à la fois pour les humains et pour les écosystèmes" (Tour du Valat). Cet équilibre fragile pousse chacun des acteurs à redouter toute évolution, et à figer un modèle dont on sait qu'il fonctionne et permet la cohabitation de nombreux intérêts. C'est un paradoxe s'agissant d'un milieu à l'origine caractérisé par son extrême instabilité.
1.4 L'évolution contradictoires
de
l'occupation du sol
et les
impératifs
Carte des principales occupations des sols sur le périmètre de la réserve de biosphère de Camargue Jusqu'à l'achèvement des digues au milieu du 19è siècle, la Camargue était essentiellement soumise aux aléas naturels des crues du Rhône et aux intrusions marines. L'agriculture y était concentrée sur les bourrelets alluvionnaires formés par les fluctuations du cours du Rhône. La période qui a suivi, caractérisée par une relative sécurité face aux risques d'inondation a vu le développement de la viticulture puis, à partir du dernier conflit mondial, de la riziculture. La culture du riz fut d'abord pratiquée pour dessaler les terres et les préparer à porter d'autres récoltes mais les surfaces se sont rapidement étendues pour faire face à la forte demande en produits alimentaires de l'après-guerre. Ainsi, les surfaces sont passées de mille à 30 000 ha entre 1946 et 1964 suivi d'une relative régression pour atteindre un minimum de 8 000 ha au début des années 1980, pour reprendre ensuite avec la revalorisation des primes PAC. Cette extension s'est faite aux dépens des milieux naturels qui sont passés en 60 ans des 2/3 à la moitié de la surface du delta.
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Activité millénaire dans la partie laguno-marine de la Camargue (la production date de l'époque romaine à Aigues-Mortes), la saliculture a subi un bouleversement majeur avec l'installation en 1895 par la société Solvay d'une importante unité de production de soude caustique. L'agglomération de Salin-de-Giraud est créée ex-nihilo pour accueillir les installations industrielles et la main d'oeuvre. Les terres agricoles de basse Camargue sont rachetées et transformées en marais salants. De même, la compagnie des salins du Midi, crée en 1856 à Montpellier rachète progressivement les basses terres autour d'Aigues-Mortes pour y installer une production industrielle de sel. À la fin du 19è siècle, l'extraction industrielle du sel représente 30 000 ha en basse Camargue, avec des besoins en eau orthogonaux de ceux des riziculteurs : alors que ces derniers ont besoin de grandes quantités d'eau douce au printemps et en été, la saliculture procède de l'intrusion d'eau de mer au printemps et sa concentration progressive avant sa récolte du sel. Les conflits d'intérêts entre saliniers et riziculteurs se cristallisent autour du Vaccares et des étangs inférieurs à l'interface entre les deux systèmes d'exploitation. Ce conflit est arbitré en 1909 par la Cour d'appel d'Aix-enProvence en faveur des premiers avec une interdiction faite aux propriétaires de déverser les eaux d'irrigation dans l'étang du Vaccares. La réserve nationale de Camargue est créée en 1927 sur des terrains appartenant aux Salins du Midi et confiée à la future SNPN pour gérer ce territoire tampon dans le but de protection de la faune et de la flore. Au total, les milieux naturels ont fortement régressé au cours des soixante dernières années au profit des salins et de la riziculture. Cette tendance s'est toutefois inversée au cours des dernières années avec les acquisitions massives opérées par les opérateurs publics et en particulier le Conservatoire du littoral. Actuellement, les propriétés publiques et d'intérêts publics (Conservatoire du littoral, Conseil général 13, Fondation Tour du Valat, Communes des Saintes-Maries de la Mer et d'Arles) représentent plus de 30 000 ha soit près de 40% de la surface du delta. À l'échelle du périmètre de la réserve de biosphère l'occupation de l'espace était le suivant en 2009 :
· · ·
62 000 ha de surfaces agricoles (dont 24 000 pour la riziculture et 11 000 ha de milieux humides pâturés pour l'élevage bovin et les chevaux Camargue), 20 000 ha de milieux salins, 78 000 ha de milieux naturels dont la moitié d'étangs et de lagunes.
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1.5 Les risques naturels (inondations et submersions)
Avant son endiguement total, le delta était soumis aux inondations du Rhône et de la mer. Si cette dynamique a été en grande partie figée depuis, et remplacée par les fluctuations liées aux irrigations, elle n'a pas totalement empêché des inondations. Dans la période récente, les plus notables ont été celles de 1993 et 1994 qui ont entrainé, suite à la rupture des digues, la submersion totale d'un tiers du delta et l'inondation de 450 maisons. Ces crues ont eu pour effet de remettre en cause la gestion privée des digues par les propriétaires terriens qui existait depuis plus d'un siècle et la création en 1999 du syndicat mixte d'aménagement des digues du Rhône et de la mer (SYMADREM). Les crues de 2003, qui ont épargné le delta mais inondé des milliers d'hectares au nord d'Arles et en Camargue gardoise ont conduit à l'extension des compétences du SYMADREM jusqu'à Beaucaire au nord et à la rive droite du petit Rhône. Un préfet de bassin a également été désigné, ayant pour mission de mettre en place une stratégie globale de risque d'inondation du Rhône et de ses affluents et l'élaboration d'un plan Rhône. Celui-ci prévoit pour la période 2007-2013 un programme de sécurisation par l'installation de digues résistantes à la surverse pour éviter les brèches lors des crues exceptionnelles du Rhône et des ouvrages de protection d'Arles.
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Cette meilleure gestion administrative des phénomènes de crues et d'entretien des digues ne doit cependant pas minimiser le risque lié à l'augmentation de la fréquence des fortes crues du Rhône (7 des 16 plus fortes crues du Rhône depuis 150 ans se sont produites dans les vingt dernières années). Le risque de submersion marine est une autre composante de l'équation camarguaise : en effet, la construction du delta est récente (fin de la dernière période glaciaire) et a été en grande partie favorisée par les activités de défrichement du bassin versant du Rhône depuis le Moyen-Âge qui ont entrainé une forte érosion des sols et le dépôt progressif de ces sédiments dans le delta de Camargue. Cette construction de la Camargue durant le dernier millénaire est illustrée par l'avancée du trait de côte au droit d'Aigues-Mortes, citée portuaire médiévale maintenant distante de 6 km de la mer. Cette dynamique de construction du delta s'est inversée depuis un siècle avec les campagnes de reboisement sur le bassin versant du Rhône et la construction de nombreux barrages hydro-électriques qui eut pour effet de réduire la charge sédimentaire parvenant à l'estuaire du Rhône. Ce phénomène, qui entraine un enfoncement du delta, conjugué à l'élévation globale du niveau de la mer a eu pour conséquence une élévation relative du niveau de la mer de 22 cm en un siècle et la perte de 450 ha dans le delta. Les effets de cette évolution sont sensibles avec un recul de 10 à 15 m par an du trait de côte sur les deux tiers du littoral camarguais, sans que les mesures anti-érosives mises en place aient apporté de solutions durables satisfaisantes. En prenant les prévisions moyennes du dernier rapport du GIEC, c'est une élévation relative de la mer de 30 à 60 cm qui est attendue d'ici la fin du siècle ce qui, compte tenu de la topographie, menace de submersion (ou de poldérisation) la moitié basse du delta. La Camargue est classée au niveau 3 (territoire très exposé au phénomène d'érosion) par le programme européen Eurosion.
1.6 La gestion de l'eau et sa qualité
L'endiguement du Rhône et la construction de la digue à la mer ont entrainé une artificialisation du fonctionnement de l'hydrologie camarguaise : plus de 90% des sols du delta reçoivent de manière artificielle et contrôlée les eaux douces du fleuve et salées de la mer. Des centaines de km de canalisations constituent 18 réseaux d'irrigation et 13 de pompage répartis en sous-bassins gérés principalement par des Associations Syndicales Autorisées (ASA). Les flux hydriques sont caractérisés par un apport massif d'eau au printemps et en été pour les besoins de l'activité agricole et salicole et un écrêtage des eaux en excès du delta vers la mer en hiver. Ce système atteint actuellement ses limites avec le tassement du delta et l'élévation du niveau marin qui entraine un niveau d'eau dans les étangs inférieurs au niveau de la mer, plus de 200 jours par an empêchant du même coup l'évacuation gravitaire de l'eau vers la mer. De plus, compte tenu de l'évaporation très importante, l'ouverture des pertuis entraine une sur-salure incompatible avec la survie de nombreuses espèces de poissons. L'introduction de plus d'eau douce dans les étangs centraux se heurte quant à elle à la qualité des eaux de drainage des cultures fortement polluées par des pesticides et celle des eaux du Rhône.
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L'amélioration de la qualité des eaux de la Camargue est désormais un thème majeur de la nouvelle charte du PNRC qui vient d'être approuvée. Elle concerne des polluants d'origine exogène (pollution atmosphérique de la zone industrielle de Fossur-Mer ou par les eaux du Rhône) ou endogène par les pesticides agricoles. Par les fertilisants et les traitements phytosanitaires, l'agriculture camarguaise constitue la principale source d'apport en azote, phosphore et substances chimiques. Parmi elles, 90% des substances retrouvées proviennent de la riziculture et en particulier les désherbants, sans qu'on puisse prédire actuellement l'impact à long terme de ces substances sur les organismes vivants. Avec 300 à 400 millions de m3 d'eau du Rhône introduite en Camargue par an, de nombreux éléments dissous, polluants entre autres, pénètrent dans le delta, que ce soit des métaux lourds qui ont tendance à la bio-accumulation tout au long de la chaîne alimentaire, des polluants organiques ou des PCB. Le Système d'Évaluation des Cours d'eau, indicateur synthétique mesuré sur le Rhône en Arles depuis 1981, indique une qualité médiocre pour les matières azotées et mauvaise pour les matières organiques et oxydables, les particules en suspension et les micro-polluants minéraux sur bryophytes. Par arrêté préfectoral, la pêche est interdite depuis 2007 dans le grand Rhône suite à la mesure de taux de PCB dans la chair de poissons supérieurs aux normes en vigueur. D'autres mesures ont confirmé la contamination de l'ensemble du fleuve en aval de Lyon. En petite Camargue, des mesures directes dans les lagunes réalisées depuis 2000 sur 19 paramètres dans la colonne d'eau, les sédiments et la végétation, donnent un indicateur global « Qualité de l'eau des lagunes » classé comme très mauvais. En Grande Camargue, il n'y a pas eu de suivi régulier au niveau global et seules des mesures ponctuelles ont été effectuées notamment par la réserve nationale de Camargue. Dans le Vaccares, des mesures indirectes par bio-accumulation donnent des concentrations en métaux lourds dans les anguilles largement supérieures à celles observées dans l'étang de Berre : 60 % d'entre elles avaient des concentrations en mercure les rendant impropres à la consommation humaine. Des études écotoxicologies plus récentes montrent des fluctuations des charges en pesticides dans les poissons du Vaccares avec toutefois une tendance à régresser et des liens probables entre les niveaux de pollutions par pesticides, et la forte prévalence de pathologies dont des tumeurs cancéreuses. En conclusion, si on constate une nette amélioration de la qualité des eaux du Rhône depuis 25 ans, au moins pour les polluants "classiques" (métaux lourds, azote, phosphates), les pesticides agricoles restent en revanche un problème important et peut-être croissant dans le delta au même titre que les polluants organiques persistants (PCB notamment mais aussi organochlorés) dont on ne connait pas bien la cinétique dans l'écosystème deltaïque.
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2. Les activités économiques en Camargue et les impacts sur le foncier
2.1 Le rôle et la place de l'agriculture
La Camargue est connue pour la qualité de ses milieux humides et leur intérêt écologique. Son origine deltaïque a produit des paysages marqués par l'horizontalité, l'eau et le sel. Malgré la densification des réseaux de digues et de canaux, la répartition des principaux milieux qui structurent la paysage depuis le XIXème siècle n'a pas été grandement modifiée. Les parcelles agricoles, après le développement puis le recul de la riziculture dans les années 1970, se cantonnent toujours sur les bourrelets alluviaux et les parties hautes. Aucun des grands projets de colmatage du XIX ème siècle n'ayant été réalisé (Dervieux et al., 2002), les dépressions sont encore actuellement occupées par des zones humides.
2.1.1 La riziculture n'entre pas en contradiction avec la protection des milieux naturels C'est seulement depuis la seconde guerre mondiale et sous l'impulsion du plan Marshall, que la culture du riz s'est développée à grande échelle (même si elle est apparue en Camargue au XIIIème siècle). Son rôle essentiel était de lutter contre le sel présent dans le proche sous-sol et ainsi de préparer les terres pour d'autres cultures dites « sèches ». Pour la culture du riz entre avril et fin septembre, on doit introduire un volume d'eau douce considérable dans le delta au moment où les précipitations deviennent moins importantes et surtout où l'évaporation augmente et peut dépasser des valeurs de 5 cm par jour entre juin et août. La nécessité de disposer d'eau douce a accéléré la mise en place d'équipements hydrauliques spécifiques (canaux, endiguements, pompes) pour l'alimentation des milieux naturels humides au printemps et en été, selon les objectifs des activités humaines. Cette artificialisation de l'hydrologie camarguaise a aussi pour conséquence d'accroître ou maintenir des populations d'oiseaux d'eau tout au long de l'année, à des fins cynégétiques ou naturalistes. Avec des modalités qui peuvent diverger (Aznar et al., 2003), les buts recherchés restent proches : augmenter les ressources alimentaires et maintenir l'eau dans les plans d'eau pour les rendre attrayants en toutes saisons en fonction des besoins de l'avifaune, séjour migratoire, reproduction, hivernage.
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La riziculture en Camargue est de type intensif irrigué avec semis direct, c'est-à-dire sans repiquage, abandonné depuis le milieu des années 1960. On se trouve dans des conditions bio-climatiques contraignantes pour cette culture annuelle4: le vent et les températures froides de l'hiver ajoutent aux difficultés de la culture. Après la récolte, qui se termine généralement en octobre, on brûle les pailles et on déchaume au « cover crop »5 dès que l'état du sol le permet. À la fin de l'hiver, on laboure ou on griffonne les terres à une profondeur qui n'excède pas 20 cm, puis on nivelle le sol avec une lame asservie par un rayon laser. Le sol est fertilisé avec un engrais complet, enfoui à l'aide d'une herse rotative équipée d'un rouleau, qui permet de réaliser le lit de semence. Enfin, on creuse des rigoles afin de mieux réguler l'irrigation et le drainage des parcelles. On procède à la mise en eau et on commence les semis dès le 20 avril. Les variétés cultivées sont majoritairement à grains longs. Les doses de semis varient de 200 à 240 kg/ha. Après le semis, la gestion de l'eau dans la parcelle a un rôle déterminant pour la conduite de la culture. Elle consiste à alterner assèchement et remise en eau en fonction du climat, de l'état du peuplement et des interventions culturales. En cours de culture, les riziculteurs pratiquent des désherbages, apportent des engrais azotés et interviennent selon les besoins contre les attaques d'insectes. La récolte, qui débute mi-septembre, est réalisée avec une moissonneuse-batteuse équipée pour intervenir sur des sols humides. L'impulsion donnée à la riziculture camarguaise pour répondre à la crise alimentaire a permis d'enregistrer jusqu'à 32 500 ha de surfaces emblavées en riz en 1962 dans le delta du Rhône. Toutefois, très vite, les coûts de production élevés et les faibles rendements moyens obtenus en France ont fait baisser les surfaces dès lors que le prix du riz a été fixé au niveau européen après 1962. La riziculture ne représentait plus que 4 400 ha en 1981 dans le périmètre de l'Indication Géographique Protégée, IGP, montrant ainsi la fragilité agronomique et économique de cette spécialité agricole du delta. Depuis, le plan de relance qui a débuté en 1985, les surfaces en riz se stabilisent autour de 20 000 ha (en rotation avec un tiers de blé dur) situées pour les deux-tiers dans les Bouches-duRhône et pour un autre tiers dans le Gard. Une IGP existe depuis juin 2000 mais ne concerne pas la totalité du riz camarguais (65% dans les Bouches-du-Rhône). Aux dires des professionnels, la riziculture a dû composer avec les fortes contraintes locales, tout en faisant face à de fortes contraintes conjoncturelles, qui exigent des exploitations qu'elles soient toujours plus performantes. Or, les faibles rendements (6 tonnes/ha dans les meilleures années), les coûts de production (1 906 /an, répartis entre 958 de charges opérationnelles et 948 de charges de structures) et les prix pratiqués (160 ou 214 /tonne, soit 160/Tx6T/ha=960/ha ou 214/Tx6T/ha = 1284/ha, (données 2002 source : Syndicat des riziculteurs) pénalisent fortement cette activité au regard des autres grandes régions rizicoles européennes. La culture du riz est fortement aidée dans le cadre des aides relevant du premier pilier de la PAC : les DPU se montent à environ 500/ha avec une aide spécifique de l'ordre de 400/ha.
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En climat tropicalhumide, on arrive à faire généralement deux récoltes par an, parfois trois comme au Vietnam, dans le Delta du Mékong. Machine agricole qui sert principalement à ameublir la terre et à déchaumer.
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Aujourd'hui, si le résultat courant des exploitations (159 /ha) pour le riz est inférieur à celui du blé dur (167 /ha), il doit pourtant rester au coeur du fonctionnement de l'exploitation agricole, car le riz, faute de pouvoir trouver des cultures de remplacement, doit rester la tête d'assolement, pour dessaler les terres et les rendre aptes à d'autres cultures céréalières ou fourragères. La culture du riz introduit entre 400 et 500 millions de mètres cubes d'eau douce, dont 150 à 200 millions alimentent les milieux naturels (marais, étangs ...). Mais le caractère saisonnier de l'activité rizicole, donc des entrées d'eau douce à l'intérieur du delta, conduit à une atténuation des rythmes naturels en minimisant la période sèche que devrait connaître le delta en été. Ainsi, le risque de perdre le caractère temporaire sec de certains milieux humides du delta, s'ils sont connectés de trop près à l'agro-système rizicole, existe toujours : il convient de s'assurer que l'équilibre est bien maintenu. L'avenir de la riziculture est donc étroitement lié aux aides relevant du premier pilier de la PAC. Pour les milieux naturels, cette activité est porteuse d'avantages par la gestion des arrivées d'eau douce et des équilibres subtiles qui s'opèrent avec les remontées de sel. La présence d'espèces inféodées à l'écologie de la zone située en aval du delta : pourtour de l'étang du Vaccarès et le Vaccarès lui-même, est liée aujourd'hui à la riziculture. Cela étant, comme le signale la Charte6 du Parc Naturel régional de Camargue (PNRC) : " Par la fertilisation et les traitements phytosanitaires, l'agriculture de Camargue constitue la principale source d'apport en azote, phosphore et substances chimiques et leurs produits de dégradation. L'impact des concentrations de ces produits sur les organismes vivants dans les écosystèmes camarguais reste largement méconnu ". La pollution des étangs de Camargue est principalement due aux traitements phytosanitaires (lutte contre les mauvaises herbes et les ennemis des cultures dans le delta) et les niveaux d'exposition du système sont loin d'être négligeables. Le bruit de fond reste important et une des questions qui se pose est l'impact à long terme des concentrations sur les organismes vivants. À condition que les riziculteurs utilisent de manière raisonnée les produits phytosanitaires et qu'ils s'engagent davantage dans la conduite biologique de leurs exploitations (seulement 5% de la riziculture est en « bio »), la mission estime que l'activité rizicole est compatible avec le maintien voire la restauration du bon état écologique du delta et que en conséquence, les aides publiques en faveur de cette filière peuvent être maintenues après la réforme de la PAC. Et sous réserve d'études plus poussées, la riziculture semble moins antagoniste de la conservation des espaces naturels au sud du delta que le maraîchage à grande échelle qui risquerait de s'y substituer.
2.2 Les activités d'élevage
L'élevage en Camargue se caractérise par au moins deux « figures » emblématiques : le taureau et le cheval.
6
Charte du PNRC, 2011, page 70.
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L'élevage de taureaux de Camargue se réalise en mode extensif7 en extérieur toute l'année avec des pâturages en parcours et prairies (sansouires, marais). Leur utilisation pour les travaux agricoles a été abandonnée il y a longtemps (avant 1830) au profit de la production de viande puis, à partir du milieu du XIXème siècle, pour les jeux taurins. Comme les chevaux, les taureaux sont également devenus un symbole de la Camargue et leur utilisation pour les manifestations taurines (courses camarguaises, ferrades, abrivados8...) se développe. Les animaux sont sélectionnés en fonction de leur aptitude pour ces jeux taurins, et ceux qui ne répondent pas aux critères recherchés par l'éleveur sont destinés à la boucherie. En 2005, on dénombrait 5 400 bêtes sur le territoire du PNR de Camargue, dont 70 % de taureaux Camargue dits aussi « Raço di Biòu » (répartis dans 20 élevages) et 30 % de taureaux de Combat (répartis dans 12 élevages) (Anne Vadon, PNRC, com. pers.). La viande commercialisée a fait l'objet de valorisations nouvelles : depuis 1996, la viande de taureau (races de Camargue, de Combat et hybrides) fait l'objet d'une Appellation d'Origine contrôlée (AOC taureau de Camargue), et depuis fin 2001, au niveau européen, d'une Appellation d'Origine Protégée (AOP taureaux de Camargue). En 2005, 28 élevages sur 32 sont en AOC sur le territoire du PNRC, dont 16 élevages Camargue (80% des élevages Camargue du Parc), et 12 élevages de Combat, soit la totalité (Source : Syndicat de défense et de promotion de la viande AOC taureau de Camargue). Cet élevage joue un rôle environnemental de premier ordre puisqu'il influence l'évolution de la dynamique végétale des milieux naturels : chevaux et taureaux limitent l'accroissement de certaines espèces végétales, et utilisent de grands ensembles de végétation composés d'une mosaïque d'habitats juxtaposés et interconnectés. Cette activité est, comme dans le cas de la riziculture mais dans une moindre mesure, dépendante des aides publiques. Ainsi, environ un tiers des revenus d'une manade type vient des courses, un autre tiers de l'agritourisme et le dernier tiers des aides publique (24% du premier pilier de la PAC et 10% du volet agroenvironnemental du deuxième pilier)9. Quant à l'élevage équin, celui-ci est très ancien en Camargue. Autrefois utilisé pour le travail de la terre ou pour mener les taureaux, le cheval de Camargue est devenu un des symboles du delta dans les années 1950. Depuis, son élevage s'est étendu à des fins touristiques, ce qui a causé un accroissement du cheptel. Les activités touristiques équestres se sont multipliées. En 1978, la race de cheval Camargue est officiellement reconnue (stud-book). Les effectifs actuels des reproducteurs reconnus, à l'échelle nationale, sont de l'ordre de 700 poulinières (juments naisseuses) et une centaine d'étalons. Le nombre de chevaux camarguais oscille, selon les sources et le périmètre de leur localisation entre 2000 et 3000 têtes.
7 8 9
0,51UGB/ha. Arrivée des taureaux en ville. D'après la présidente de l'association Bovins 13.
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2.2.1 Le soutien à l'agriculture camarguaise : les mesures agroenvironnementales territorialisées Les mesures agro-environnementales territorialisées s'inscrivent dans le dispositif de développement rural du fond européen FEADER pour la période 2007-2013. Elles remplacent les contrats territoriaux d'exploitation (CTE) et les contrats d'agriculture durable(CAD). Comme pour ces anciens contrats, les engagements sont souscrits pour 5 ans. Ces mesures, co-financées par l'État et l'Europe, permettent de rémunérer les agriculteurs qui s'engagent à respecter certaines pratiques les plus respectueuses de l'environnement, en compensant les manques à gagner correspondants. Cette évolution des pratiques agricoles à travers la panoplie des MAET sur des territoires à fort enjeu environnemental vise essentiellement à préserver ou rétablir la qualité de l'eau et à limiter la dégradation de la biodiversité. Les MAET permettent ainsi de répondre correctement à des menaces localisées ou de préserver des ressources remarquables, en priorité dans les sites NATURA 2000 et les bassins versants prioritaires définis au titre de la directive cadre sur l'eau (DCE). Elles peuvent également être mises en oeuvre sur d'autres zones à enjeux spécifiques : biodiversité remarquable (haies, forêts, plans d'eau, fossés, mares) hors zone NATURA 2000 (érosion, paysage, défense contre les incendies,...). Elles font parties d'un dispositif plus large comprenant la PHAE2 (prime herbagère agro-environnementale 2) qui vise à encourager les agriculteurs à maintenir leurs surfaces en herbe, c'est-à-dire leurs prairies et à limiter l'apport d'engrais. De fait, une MAET correspond à un cumul d'engagements unitaires ; chaque engagement correspondant à un cahier des charges. Pour les mesures qui concernent le couvert herbacé, viennent s'ajouter au « socle » commun, la PHAE 2, d'éventuels autres engagements dont les montants s'additionnent : une MAET est donc construite "à la carte" (PHAE2 = engagement1+engagement 2 +...) en fonction des milieux sur lesquels elle s'applique, du degré de protection désiré et du souhait des agriculteurs. En Camargue, les zones Natura 2000 couvrent environ 100 000 ha dont la partie exploitable est éligible aux MAET. Le Syndicat mixte de petite Camargue pour la Camargue gardoise et le PNRC pour la grande Camargue sont les deux animateurs du programme MAET. Un bilan réalisé sur les trois dernières années 2008-2010 montre un intérêt marqué pour ce type de mesures par les exploitants des deux territoires. Au sein du territoire du syndicat mixte Camargue gardoise, 22 contrats ont été signés entre 2008 et 2010 sur 950 ha et 9,5 km de linéaire pour un total de 825 000. Dans le périmètre du PNR Camargue pour la même période, les contrats signés ont concerné 1 422 ha pour l'élevage et environ 5 000 ha pour l'agriculture avec des engagements de plus de 2,1 millions 10:
10
Source PNRC 2011.
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Un calcul11 portant sur les communes de Camargue (Arles, Port-Saint-Louis-du-Rhône, Saintes-Maries-de-la-Mer) des Bouches-du-Rhône pour l'année 2009 indique que le montant annuel alloué aux MAET s'est monté à 920 k sans compter la Prime herbagère agroenvironnementale12 (PHAE2) d'un montant maximal de 76 /ha qui s'est appliquée sur 4 649 ha pour une dépense de 240 k. L'addition de ces deux types d'aides atteint 1,16 million soit environ 45/ha/an pour les prairies et les grandes cultures. Les aides PAC (2010) sont plus importantes : elles concernent les surfaces en blé dur (environ 5 000 ha) pour un total de 1,55 million les surfaces en riz (11 684 ha) pour un montant estimé13 de 1,12 million , le cheptel bovin (primes vaches allaitantesPMTVA) et le cheptel ovin (aide ovine-AO) pour 1,6 million . En résumé, le total des aides du premier pilier de la PAC se montent à environ 4,3 millions pour la grande Camargue auxquels il faut ajouter les aides du deuxième pilier et les MAEt pour 1, 16 M (valeur 2009). La mission estime qu'une étude soit spécifiquement consacrée à l'évolution des impacts des aides publiques à l'agriculture camarguaise de façon à les diriger vers des modes culturaux les moins agressifs pour les écosystèmes.
2.3 Les activités cynégétiques
La Camargue est célèbre pour sa richesse en avifaune qui concerne à la fois des espèces vulnérables et des espèces remarquables pour leur intérêt cynégétique. Deux habitats naturels dominants apparaissent déterminants pour une gestion intégrant un objectif de protection de l'avifaune : les marais hélophytes14 ou roselières et les marais à hydrophytes ou herbiers aquatiques. Ils subissent une forte pression anthropique par un accroissement des aménagements et de la gestion hydrauliques. Cette gestion de l'eau influe sur le développement de la végétation, et par la même, sur les potentialités d'accueil des habitats pour l'avifaune. En tant que zone humide d'importance internationale (site Ramsar), la Camargue attire de nombreux oiseaux d'eau (par ex. 120 à 180.000 canards et foulques hivernants ; cf. § « Faune »), ce qui contribue à son attrait cynégétique. Mais le gibier de terre (sanglier, lapin, faisan...) est également très recherché. Au-delà de la chasse que peut pratiquer tout propriétaire (avec sa famille, ses amis...) sur son propre domaine, la Camargue présente d'après Mathevet (2004 ) quatre types de chasse :
11 12
Source : DDTM 13.
La PHAE2 vise à encourager un grand nombre d'éleveurs à maintenir leurs surfaces en herbe, en particulier dans les zones menacées de déprise agricole et de recourir à des pratiques favorables à l'environnement. La PHAE2 s'appuie sur un chargement optimal établi au vu des caractéristiques locales, sur des éléments de biodiversité et sur une gestion économe en fertilisants et herbicides. 13 DPU de 420/ha et aide découplée de 500/ha.
14
Une plante est dite hélophyte lorsqu'elle est enracinée sous l'eau, mais avec des tiges, des fleurs et des feuilles aériennes.
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La chasse communale : cette chasse fonctionne grâce à une cotisation à l'association de chasse de la localité qui donne le droit à l'accès à un territoire de chasse, composé de terrains publics ou privés, loués par l'association. Il existait, en 1999, 20 sociétés de chasse englobant 5000 personnes environ soit 4/5ème de l'effectif total des chasseurs (Tamisier et Dehorter, 1999). La chasse privée : le droit de chasse est loué directement au propriétaire ou à un actionnaire principal appelé Président de chasse ou Actionnaire principal, qui sous-loue à un certain nombre d'actionnaires (un « fusil » se négocie entre 10 000 et 20 000 euros). La chasse peut ainsi devenir un complément de revenu important pour le propriétaire, assurant un apport annuel d'environ 200 euros par hectare. Ce type de chasse concerne la plupart des propriétés privées. La chasse commerciale : appelée aussi chasse à la journée, ce type de chasse est apparu dans les années 70 et il a diminué dans les années 90. Deux chasses de ce type ont été recensées lors d'une l'enquête en 1999 (une en Petite Camargue et une sur le Plan du Bourg), et l'on en comptait 4 en 2004. La chasse relationnelle ou d'affaires : elle est réservée aux invités du propriétaire du lieu de chasse. On en comptait moins de 5 dans les années 1970 ; elle se sont fortement développés pour atteindre le nombre de 39 en 1999.
Ajoutons qu'il y a également des domaines privés où ne s'exerce actuellement plus de chasse. Les enjeux économiques et sociaux de la chasse en Camargue ont été analysés par Mathevet (2004). Il faut souligner que les pratiques cynégétiques rémunérées constituent en Camargue une incitation financière forte au maintien de certaines zones humides, qui pourraient être sinon pour partie converties en terres agricoles. La gestion de l'eau est déterminante pour la pratique de la chasse. Elle conditionne la qualité des milieux naturels et la quantité de gibier d'eau. Il faut en effet réaliser un délicat équilibre entre l'eau douce qui favorise les gites et l'eau plus salée ou plus profonde. L'idéal, notamment pour les canards de surface, est de maintenir 10 à 30 cm d'eau dans les marais toute l'année. En été, hors période de chasse, le maintien d'un tel niveau permet d'assurer une meilleure protection des jeunes oiseaux qui se défendent mieux contre leurs prédateurs dans 20cm d'eau. La gestion des niveaux d'eau est assurée par une gestion parcellisée avec un endiguement sur les domaines dédiés à la chasse privée. Mais, en dehors de ces terrains, la chasse occupe les mêmes espaces que d'autres activités (pâturage, roselières) ce qui peut occasionner des conflits. Dans certains cas, la mise en eau annuelle précoce des zones humides qui permet la chasse aux canards dès l'ouverture de la saison peut entraîner la dégradation d'habitats nécessitant un assec estival plus ou moins régulier. Selon les scientifiques de la Tour du Valat, « la pratique d'une chasse raisonnable est compatible avec la préservation des zones humides ». Ils reconnaissent « par ailleurs que l'activité cynégétique a jusqu'à présent contribué en partie à leur conservation. Elle est une activité traditionnelle susceptible de s'inscrire dans une valorisation et un usage viable des zones humides, et peut par ailleurs contribuer à la diversification des activités des exploitations agricoles et ainsi au développement durable des zones humides ».
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Il faut relever, en outre, que le développement des marais de chasse aux dépens de la SAU est « dû au besoin de certains exploitants de s'assurer un revenu régulier face aux mutations économiques de l'agriculture camarguaise par nature incertaines puisque dépendant de facteurs exogènes. L'importance de la rente cynégétique entraîne alors une intensification des interventions de gestion des marais de chasse pour augmenter l'attractivité du marais pour les canards en tentant de maintenir le milieu ouvert.(...). L'enjeu environnemental qui en découle est de tenter de concilier la conservation des zones humides et le développement d'une activité économique dont la contribution financière à l'exploitation agricole permet de préserver des espaces naturels indispensables aux oiseaux d'eau »15. Notons enfin qu'à côté de la chasse perdure un degré de braconnage qui est loin d'être négligeable en Camargue. Outre les prélèvements relativement importants que ces activités légales ou non exercent sur certaines espèces d'oiseaux, le fait que la présence de l'homme soit souvent assimilée à un grand danger contrarie l'utilisation optimale de l'ensemble des milieux naturels camarguais.
2.4 La place du tourisme
Le tourisme en Camargue, un potentiel à organiser Le tourisme en Camargue remonte au milieu du XIXème siècle et s'est poursuivi au milieu du XXème siècle compte tenu de l'intérêt croissant du public pour les espaces littoraux et par ce mélange entre espaces naturels et territoires conquis notamment pour la riziculture et les manades devenues toutes deux emblématiques. En Camargue, le tourisme de masse est officiellement proscrit, compte tenu des enjeux écologiques et des difficultés d'accès aux plages. Toutefois, son absence d'organisation a conduit à des pratiques non contrôlées. Par ailleurs, le développement d'un tourisme naturaliste est possible et souhaitable. La question des flux touristiques en Camargue n'a pas fait l'objet de travaux suffisants pour bien en connaître l'ampleur. Ceci explique en partie l'absence de politiques volontaristes. Et pourtant, l'INSEE précise pour les Bouches-du-Rhône16 que « la Camargue est proportionnellement le plus important fournisseur d'emplois touristiques dans le département au regard de l'emploi total, en basse et haute saison 17 ».
15
Raphaël MATHEVET « L'approche multi-agents comme outil de simulation de la gestion des marais de chasse dans les exploitations agricoles camarguaises » Colloque SMAGET 1998.
« L'emploi direct lié à la fréquentation touristique dans la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, rapports d'études, CRT PACA, INSEE PACA, région PACA, sept 2011 ».
16
17
(entre 16 et 20 % en moyenne chaque année de l'emploi touristique des Bouches-du-Rhône).
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Les capacités d'accueil La grande Camargue voit le nombre d'hôtels et la capacité d'accueil se réduire depuis quelques années. Ses établissements sont en moyenne de capacités inférieures à ceux implantés dans le département des Bouches-du-Rhône (capacité moyenne 27 chambres contre 38 en moyenne départementale). En Grande Camargue, ils sont localisés essentiellement sur deux sites, Les SaintesMaries-de-la-Mer (7257 lits) d'une part, Arles (6083 lits situés à proximité du centre urbain) d'autre part. En Camargue gardoise, les principales capacités sont situées au Grau-du-Roi et plus partiellement à Aigues-Mortes ; elles totalisent 23 826 lits (contre 13 413 en Grande Camargue) et près de 65 % des capacités totales. Une part non négligeable des capacités d'accueil est constituée par l'hôtellerie de plein air (894 places par camping contre 453 en moyenne départementale). Capacité en places Grande Camargue (13) 4 880 392 6 255 1 076 376 434 13 413 Petite Camargue (30) 1 640 3 516 17 010 1 150 110 0 23 826 Total
Hôtels (lits) Résidences de tourisme (lits) Camping (lits) Meublés (pers) Chambres d'hôtes, gîtes étape (pers) Divers Total capacités (pers à raison chambres à 2 pers)18
6 520 3 908 23 265 2 226 486 434 36 839
NB : la grande Camargue rassemble, dans ce tableau, les communes d'Arles, des Saintes-Maries de la Mer et de Port-Saint-Louis-du-Rhône. La petite Camargue comprend Le Grau du Roi, Saint-Gilles et Aigues-Mortes.
Rappel méthodologique - selon la direction du tourisme, il convient d'appliquer les ratios suivants pour convertir les données de base : hôtels homologués et chambres d'hôtes (lits = nombre de chambresx2), campings (3 lits par emplacement), gîtes, meublés de tourisme (4 lits par chambre ou gîte) et pour les résidences secondaires (5 lits en moyenne).
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Les résidences secondaires représentaient en 2007 21 982 habitations soit 109 910 lits (sources Insee) : Arles 867, Les Saintes-Maries de la Mer 1759, Port-Saint-Louisdu-Rhône 291, Le Grau du Roi 18207, Aigues-Mortes 776, Saint-Gilles 82. Là encore, la petite Camargue constitue le territoire privilégié d'accueil puisqu'il totalise près de 87 % des capacités. Le PNRC recense de son côté 276 lits d'hébergement rural, situant ainsi les capacités à un niveau très inférieur aux besoins19. 15 manades présentes sur le territoire de Grande Camargue accueillent du public sur les 210 recensées par le PNRC. L'une d'entre elles propose un gîte rural, quelques unes ont une capacité de restauration, mais la grande majorité situent leurs activités dans le cadre de circuits ou de « journées camarguaises ». En Camargue gardoise, une seule manade présente ce type de prestations. Il faut également compter sur plus d'une trentaine de centres équestres qui participent également à la découverte touristique des milieux. Le parc naturel régional s'est engagé dans le cadre de sa nouvelle charte dans un processus en vue de la signature de la « Charte européenne du tourisme durable dans les espaces » qui reprend les priorités énoncées par l'Union Mondiale pour la Nature UICN, « des Parcs pour la vie » et de la Charte mondiale du tourisme durable adoptée en 1995 à Lanzarote (Espagne). Les sites d'Aigues-Mortes et du Grau du Roi dans le Gard constituent pour la Camargue des portes d'entrée intéressantes. La fréquentation des remparts et de l'église Notre Dame des Sablons à Aigues-Mortes à hauteur chacun de 150 000 visiteurs par an situe la commune au 3ème rang départemental pour les monuments visités (Le Pont du Gard reçoit 1 312 000 visiteurs et les Arènes de Nîmes 295 000 visiteurs). L'amphithéâtre d'Arles bénéficie d' une fréquentation comparable (157 000). La Camargue peut elle faire naître un tourisme naturaliste ? Un certain nombre d'acteurs en paraissent convaincus comme la réserve naturelle qui cherche à promouvoir des circuits naturalistes ou le Parc Naturel Régional de Camargue dont le Centre d'Information situé au lieudit Ginès aux Saintes-Maries de la mer connaît un grand succès. La fréquentation des centres ouverts au public en témoigne : 20 000 visiteurs au Musée de la Camargue, 15 000 au site de la Capelière (site d'accueil de la Réserve Nationale), 20 000 visiteurs au marais du Vigueirat et 10 000 à celui de la Palissade. C'est aussi le cas du parc ornithologique du Pont de Gau qui accueille en moyenne près de 100 000 visiteurs/an. Le centre d'information de la réserve nationale fait également l'objet d'une fréquentation soutenue. La maison du Parc Naturel Régional de Camargue fermée en 2007 vient de faire l'objet d'une étude en vue de sa prochaine réouverture. L'objectif de fréquentation se situe autour de 40 000 visiteurs/an.
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(étude « Évaluation de l'offre touristique et des activités induites par le tourisme en Camargue », Tourisme Environnement Conseils, Juillet 2006, 107 p).
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Le PNRC dispose d'une étude réalisée en 2005/2006 auprès d'un millier de touristes. La durée moyenne de séjour des visiteurs est faible, inférieure à 3 jours pour 63 % d'entre eux. Elle s'explique en partie par le nombre réduit de structures d'accueil alors que les distances à parcourir pour découvrir la Camargue sont grandes. L'autre enseignement de cette enquête est l'importance qu'attachent ces visiteurs à leur présence au sein d'un parc (choix important ou très important pour 82 % des visiteurs). L'importante pratique de la randonnée traduit également une forme déjà développée de tourisme naturaliste. Celui-ci dispose d'autres atouts qu'exploitent de nombreuses sociétés commerciales situées dans le Gard. Elle proposent des balades à cheval, en 4x4, en quad ou même des safaris photos sur le territoire de Grande Camargue. La diversité des offres témoigne de l'engouement du public (près de 856 000 visiteurs fréquentaient en 2009 dans le Gard des sites naturels ou insolites, grottes et parcs animaliers selon le CDT 30), souvent peu regardant sur les conséquences pour l'environnement de certaines pratiques. Le tourisme balnéaire de masse y est anarchique et dépourvu des infrastructures indispensables. La Camargue accueille un tourisme important malgré des conditions d'accès réduites (notamment en Grande Camargue). Le Grau-du-Roi, Aigues-Mortes et les SaintesMaries de la mer disposent de capacités d'hébergement et des infrastructures dédiées au tourisme. La commune d'Arles intra-muros bénéficie d'atouts exceptionnels qui fondent une grande partie de l'économie de la commune sur le tourisme. Toutefois, l'accès aux plages n'est possible en Grande Camargue que par le hameau de Salin de Giraud (commune d'Arles) d'une part, et par la traversée des Saintes-Maries de la mer d'autre part. Deux plages focalisent particulièrement l'attention : Beauduc où un phénomène de cabanisation a été constaté et Piémanson. Cette dernière reçoit un public considérable pendant la période estivale. Cet afflux massif de touristes qui y résident est un fait exceptionnel à mettre en relation avec l'éloignement des zones d'hébergement puisque le hameau de Salin-de-Giraud, à la capacité déjà réduite est à plus de dix kilomètres. Ce tourisme sauvage puisqu'il se situe directement sur le domaine public maritime n'est pas sans poser d'importants problèmes d'hygiène et de sécurité. Piémanson La plage de Piémanson située sur la commune d'Arles s'étend sur une dizaine de kilomètres. Le dénombrement des occupants de cette vaste étendue est difficile, mais le chiffre de quelques milliers de véhicules restant plusieurs semaines, voire plusieurs mois est régulièrement avancé. (Les estimations évoquent entre 10 et 20.000 estivants quotidiens présents avec leurs véhicules, en principe interdits). Ce lieu accessible après une longue traversée sur la digue entre les marais donne un sentiment de bout du monde.
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La pratique touristique n'y est pas organisée (la plage est entre autres fréquentée par des naturistes) de sorte qu'à la fin de l'été les détritus et immondices qui jonchent le sol sont, comme la pratique estivale des quads sur les dunes ou des rodéos, incompatibles avec les prescriptions environnementales de la directive Natura 2000 (protection des zones de nidification des laro-limicoles, des zones secondaires d'alimentation des Barges à queue noire, des zones de nidification et d'alimentation des hérons arboricoles). Par ailleurs, ce site exposé aux aléas maritimes ne saurait être évacué dans de bonnes conditions en cas d'alerte. La mission considère (voir recommandations) que la sécurité publique y est menacée. Elle préconise la modification des conditions de son exploitation à court terme afin d'instaurer une pratique conforme à la protection des biens naturels et des individus. Le projet de réorganisation de la fréquentation de la plage de Piémanson a été inscrit dans la nouvelle charte du PNRC, il nécessitera une action concertée entre la commune et l'État. Beauduc Intégrée dans un vaste ensemble de 3139 ha acquis par le CELRL en mai 2010, la plage de Beauduc est située également sur la commune d'Arles à 17 km du hameau de Salin de Giraud. La plage, très prisée des surfeurs, s'étale sur une douzaine de kilomètres. Elle a fait l'objet d'un phénomène de cabanisation que les autorités locales n'ont pas véritablement cherché à combattre. Ces habitations seraient environ 500. Pourtant, ce lieu de mouillage où les pêcheurs séjournaient de temps à autres à la fin du XVIIIème siècle a connu une urbanisation rampante depuis les années 1950. Ces constructions et aménagements ont été partiellement réalisés sur le domaine public maritime. Ces habitats concernaient en premier lieu une population arlésienne à la recherche d'une plage peu prisée des touristes. Dans les années 1980, la médiatisation de ce lieu encore préservé a conduit à une « mondanisation » dont l'ethnologue Laurence NICOLAS a décrit les étapes dans un livre très argumenté20. La population fréquentant ce lieu en toute illégalité s'est instaurée en « communitas » qui exercent dans les faits un pouvoir de pression sur les autorités d'autant plus réticentes à mettre en oeuvre les pouvoirs de police sur le DPM que l'essentiel des membres de la communitas résident en Arles ou dans les communes limitrophes. Quelques destructions avaient été ordonnées en 2004 et exécutées. Elles concernaient 17 cabanes sur les 101 ayant fait l'objet d'un contentieux et de jugements définitifs. Depuis, l'État s'est abstenu d'intervenir. La Directive Territoriale d'Aménagement de 2007 prescrit la « libération du Domaine Public Maritime des occupations sans autorisation ». Pour la mission, l'action de l'État pour réduire le phénomène de cabanisation devrait se poursuivre.
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Beauduc, l'Utopie des gratte-plage, Ethnographie d'une communauté de cabaniers sur le littoral camarguais, Arles, juin 2008, 400 p.
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Ces deux territoires ont été identifiés dans la DTA de 2007 par l'usage qui en est fait : « deux catégories d'occupation, qui ont fait perdre aux espaces remarquables dans lesquels elles se sont développées leur caractère naturel » et la directive de souhaiter « un projet global de gestion de la fréquentation et de l'occupation du littoral camarguais ».
2.5 La convention de revitalisation CSM-État et les projets de développement urbain
La baisse d'activité touchant depuis 2007 la Compagnie des Salins du Midi a conduit au plan de restructuration de la production de sel sur les deux sites camarguais de l'entreprise. Dans ce cadre, une convention de revitalisation a été signée par le groupe salinier et par l'État représenté par le sous préfet d'Arles le 4 août 2008 en application de l'actuel article L1233-61 du code du travail. Elle incarne le volet de redynamisation économique du site de Salin-de-Giraud où 68 emplois ont été supprimés en 2008. L'objet de la convention vise à éviter ou limiter les licenciements, mais illustre particulièrement dans le cas présent la recherche de diversification du groupe. À cet effet, celui-ci a fait intégrer dans la convention deux des objectifs localisés d'une part au hameau de Salin-de-Giraud - la création d'une cité lacustre- et au hameau du Faraman d'autre part - la réhabilitation de bâtiments. La convention prévoit une somme de 107 525 utilisable notamment dans les domaines du tourisme, du commerce et de l'artisanat. C'est dans ce cadre que la Compagnie a choisi de concentrer les moyens sur les deux projets précités. Le premier est mentionné comme pouvant « à terme créer 2 à 3 000 emplois, le second une vingtaine d'emplois ». Le projet de cité lacustre consiste en un important aménagement touristique tandis que le second, la réhabilitation du hameau de Faraman, permettrait de régulariser des constructions déjà bâties et d'envisager leur conversion partielle dans le domaine touristique. La convention cible ses moyens financiers sur un projet de parc résidentiel de loisir à vocation équestre couplé avec un camping et un centre équestre. Elle est devenue caduque au 31 décembre 2009, mais les actions engagées devraient pouvoir être financées si elles étaient réalisées dans des délais raisonnables. Aigues-Mortes : la thalassothérapie et le sel pour vecteur touristique La compagnie des Salins du Midi poursuit sa stratégie de diversification. Elle a élaboré dans ce cadre un projet de thalassothérapie situé à Aigues-Mortes (initialement mené en 1998 avec le groupe dermatologique Pierre FABRE). L'objectif est l'ouverture d'un centre de soins et de remise en forme axé sur les vertus du sel (tant sur le plan thérapeutique cf sites de la Mer Morte que pour ses effets de bien être). Au delà de l'intérêt d'une valorisation de son foncier sur une superficie de 20 ha (dont 15 ha de vignes), le groupe estime que ce projet permet de retravailler le lien entre le sel et le territoire.
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Le projet de construction de ce centre a fait l'objet d'une étude de faisabilité. Les services de l'État ont récemment demandé au maître d'ouvrage une étude d'impact dans la mesure où cette implantation se situe au milieu des marais salants et en limite de zone Natura 2000. Le plan d'occupation des sols d'Aigues-Mortes a déjà été modifié pour permettre la réalisation de l'opération. Une nouvelle révision du PLU a été annoncée pour adapter le document au projet dont le montant d'investissement est estimé aujourd'hui à quelque 30 millions d'euros. Cette opération a reçu l'aval de la collectivité régionale qui l'a classée au titre de ses 10 projets d'avenir. La commune d'Aigues-Mortes s'inscrit positivement dans cette stratégie qui trouve son prolongement dans la démarche de reconnaissance au titre d'une opération « Grand site » du patrimoine naturel et architectural de ce secteur. La Compagnie des salins du midi a prévu dans les prochaines années la réalisation d'un parcours touristique, avec pour étape le musée du sel, dont le départ se situera aux remparts d'Aigues-Mortes. Un projet assez comparable est également évoqué en Grande Camargue sous l'appellation de « route du sel ». Il est porté par le PNRC et vise à relier « les éléments du patrimoine matériel liés au sel (les mas, le salin, les monuments, l'église de Barcarin, Solvay...) ».
À Salin-de-Giraud, une déprise foncière et économique, un besoin de revitalisation Il n'est pas inutile de rappeler la situation particulière du hameau d'Arles, Salin-deGiraud (2.160 habitants en 2006, situé à 40 km d'Arles intra-muros). Celui-ci accueille deux sites de productions industrielles, de sel avec la Compagnie des Salins du Midi d'une part et chimique avec l'entreprise Solvay. Pour y loger leurs salariés, les entreprises ont aménagé une partie du hameau sous la forme de corons. La réduction d'activité de ces deux entreprises a contraint le hameau à devenir pour l'essentiel une cité dortoir. Le désinvestissement tant industriel que public marque aujourd'hui ce hameau d'Arles qui bénéficie d'une situation très favorable à son positionnement comme site d'accueil touristique. Plusieurs tentatives très modestes ont vu le jour dans ce cadre. Récemment à l'initiative d'une valorisation de ses actifs, la Compagnie des Salins du Midi a recherché des maîtres d'oeuvre capables de l'aider à développer un complexe touristique. Cette orientation paraît particulièrement judicieuse à la mission sous réserve d'un emploi prioritaire des terrains délaissés par la SDM dans le hameau dont la dépollution devrait être préalablement réalisée. Il conviendrait, en effet, de ne pas faciliter un développement touristique du village sur des espaces encore naturels alors que la logique de densification et de reconstruction de la ville sur la ville doit être explorée en premier lieu (cf les projets d'urbanisation à Salin-de-Giraud présentés à l'annexe 4 du présent rapport). Dans tous les cas, compte tenu de la situation de ce hameau, la production d'un projet global (activités économiques, reconversion des sites existants, développements économique et urbain, valorisation des espaces naturels) s'impose. Le PNRC en a fait l'un des objectifs de sa nouvelle charte « Accompagner la reconversion du site de
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Salin-de-Giraud par un projet de développement exemplaire » (p179 de la nouvelle Charte). Les pistes que le parc se propose d'explorer sont basées sur la « valorisation des ressources locales (sel, aquaculture, tourisme de nature et de découverte...) ». Ces actions devraient être le coeur de la charte de développement durable de Salinde-Giraud que le PNRC se propose d'accompagner. Par ailleurs, les nouvelles dispositions sur les zones inondables en cours d'instruction à la DDTM des Bouches-du-Rhône ne permettent pas d'envisager une urbanisation conséquente de ce hameau. Il y a même lieu de se demander si les zones actuellement encore urbanisables dans le PLU d'Arles concernant ce secteur ont encore vocation à l'être compte tenu de l'aléa désormais pris en compte et des textes parlementaires sur le risque de submersion actuellement en discussion au Parlement. Ce risque est aujourd'hui particulièrement ressenti par les acteurs de l'hydraulique. Le SYMADREM présidé par la maire d'Arles a approuvé, le 14 décembre 2010, son « Programme de sécurisation des ouvrages de protection contre les crues du Rhône du barrage de Vallabrèges à la Mer ». Celui-ci envisage la création d'une digue de protection rapprochée au sud de Salin-de-Giraud, digue de 2ème niveau afin de protéger le centre urbain du hameau de l'aléa de la crue de 1856. Mais ce programme n'intègre pas encore les nouvelles caractéristiques des zones inondables et le phénomène déjà constaté d'élévation du niveau de la mer qu'il convient désormais de prendre en compte. L'avenir de Salin-de-Giraud est au centre de nombreux débats locaux. La procédure menée par l'Association pour Salin Commune visant à ériger le hameau en commune autonome d'Arles a fait l'objet d'un arrêté préfectoral de refus de ce détachement le 6 décembre 2007. Le contentieux contre cet arrêté a donné lieu à un jugement confirmatif rendu par le Tribunal administratif de Marseille le 5 octobre 2010. Mais l'affaire est pendante devant la Cour administrative d'appel. Cette situation, atypique à l'heure où les communes concentrent une partie de leur énergie à se regrouper, justifie le besoin pour l'État d'être partie prenante d'un projet qualitatif pour ce hameau, éventuellement dans le cadre des ateliers nationaux du MEDDTL. Cette démarche est d'autant plus nécessaire que de nombreux projets privés ont été déposés dans ce secteur : parcs photovoltaïques, projets de résidences de tourisme, de lotissements d'habitation ou d'implantation d'un camping. La mission estime qu'un traitement de cette zone conforme à la DTA permettrait d'interdire l'accès des plages aux véhicules motorisés. Ceux-ci pourraient être partiellement contenus à Salin-de-Giraud. Ce hameau aurait alors vocation à assurer l'hébergement d'une partie des touristes en leur offrant les aménités indispensables. Un mode de circulation douce et/ou un transport collectif électrique aurai(en)t vocation à transporter les touristes jusqu'aux plages. Ainsi, la vocation et l'avenir de Salin-deGiraud et de ses habitants seraient axés sur l'économie touristique justifiant pour le hameau un renouvellement urbain accompagné. La DDTM envisage de confier au CETE une mission spécifique permettant d'expertiser les conditions d'élaboration d'un nouveau projet de rénovation/réorientation de Salin-de-Giraud.
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2.6 Le développement du Grand Port Maritime de Marseille et ses répercussions
Jouxtant la rive gauche du Rhône, le domaine de Fos-sur-Mer du Grand Port Maritime de Marseille (GPMM) qui s'étend sur plus de 26 000 ha constitue la plus vaste zone portuaire d'Europe. Créé dans les années 1960 pour compléter le port historique situé dans le centre ville de Marseille, il regroupe sur un même site des activités portuaires, de stockage, de transformation et de distribution. Aux terminaux pétroliers, gaziers, sont associés des raffineries, des usines pétrochimiques, des centres de stockage d'hydrocarbures et des oléoducs et gazoducs. Le terminal minéralier permet de fournir les hauts fourneaux situés sur le site, alors que l'activité conteneurs est en lien direct avec la zone de traitement Fos distriport, Gravelleau et les centres logistiques de La Feuillane. L'extraordinaire développement du fret maritime par conteneur en provenance d'extrême-Orient a relativement peu profité au GPMM faute d'investissements adéquats dans le passé. C'est la raison pour laquelle le projet stratégique 2009-2013 prévoit de faire porter la majorité des ses 600 Meuros d'investissements sur le volet conteneurs et sa logistique. L'objectif affiché est d'arriver à 5 millions de conteneurs EVP en 2020 (pour 950 000 actuellement) tout en développant l'offre logistique multimodale. Cela passe par un doublement des quais (Fos-sur-Mer 3-4XL) et les désenclavements routiers et ferroviaires des bassins ouest, mais aussi par la réalisation d'une liaison fluviale entre les terminaux à conteneurs et le canal du Rhône à Fos-sur-Mer. Ce dernier projet est source de conflit avec les associations locales de protection de la nature car il prévoit le percement du canal à travers les salins de Caban, zone naturelle de très grande valeur écologique. Le site, classé en ZICO et en ZNIEFF II, constitue en effet un site important au plan européen pour la conservation de quatre espèces d'oiseaux, plusieurs espèces d'amphibiens et de plantes à fleurs protégées, mais aussi cinq espèces au moins de plantes aquatiques patrimoniales dont certaines (notamment Tolypella salina et Riella helicophylla) sont des endémiques locales menacées d'extinction. La richesse faunistique et floristique exceptionnelle de ce site et sa valeur patrimoniale rendent juridiquement très fragile sa destruction et sa compensation sous forme d'achats de terrains en Camargue comme cela est envisagé par le GPMM. Des solutions alternatives doivent être recherchées par le GPMM en lien avec les parties prenantes pour préserver ce site patrimonial sans obérer les capacités d'extensions de l'activité portuaire. Ce point est traité plus en détail au paragraphe 4.5.1 sur les mesures compensatoires.
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3. Les enjeux de la conservation
3.1 Le maintien de déséquilibres contrôlés entre eaux douces et eaux salées
Le fonctionnement "naturel" du grand écosystème camarguais est à jamais perdu. Toutefois, les forces qui peuvent contribuer à provoquer ponctuellement les ruptures et les modifications de milieux qui ont fait la spécificité de la Camargue sont toujours présentes : le Rhône et ses crues, la mer et ses tempêtes, le vent, le sel. Mais le contrôle par l'homme de la circulation des eaux par ses ouvrages et ses pompes, l'occupation des sols par les villes, les infrastructures et l'agriculture autour des derniers espaces naturels rendent impossible les déplacements de milieux et leur reconstitution spontanée en de nouveaux lieux. C'est donc à l'homme qu'il appartient de veiller à perpétuer les déséquilibres successifs entre les apports d'eau douce et les apports d'eau salée qui ont façonné les paysages et la vie sauvage de la Camargue. Déséquilibres contrôlés car si malgré la résilience de ces milieux il n'est pas souhaitable que trop d'eau douce ou trop de sel occupent la majeure partie de la Camargue pendant une longue période, il ne s'agit pas non plus de photographier la carte des milieux naturels et d'en figer l'évolution. Rappelons que l'étang du Vaccarès connaît de grandes variations du degré de salinité de ses eaux : il était de 5 g/litre entre 1970 et 1980 (et jugé trop "doux" par les scientifiques à l'époque), de plus de 30g/litre en 1984 donc quasiment équivalent à la mer, pour retomber à 15 entre 2000 et 2004.
3.2 La préservation de formations végétales typiques
Ces formations ont longtemps reculé devant l'agriculture. Elles semblent globalement stabilisées en superficie depuis quelque temps. La Camargue est une mosaïque de milieux qui se complètent et ont tous leurs richesses propres. La plus ou moins grande présence de sel dans la terre et dans l'eau commande généralement la formation et l'évolution de ces associations végétales. Les roselières ont tendance à progresser avec les déversements d'eau douce et la gestion des étangs pour la chasse. Les jonchaies, en eau légèrement saumatre, sembles stables. Plus typiques d'une zone humide littorale méditerranéenne sont les sansouires. Ce sont des terres imperméables bordant les lagunes, marquées par des remontées de sel sur lesquelles poussent des végétaux adaptés comme les salicornes (mais aussi les soudes, obiones et saladelles). Les conditions de vie y sont difficiles, les plantes capables de résister au sel abritent de nombreux oiseaux nicheurs comme l'oedicnème criard, le gravelot à collier interrompu ou l'alouette des champs. Et des migrateurs comme la plupart des échassiers. Après avoir régressé devant la mise en pâture et les roselières, les sansouires semblent moins menacées mais leur maintien ou leur reconstitution doit demeurer une priorité partout où c'est possible.
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Enfin, les pelouses naturelles et les mares temporaires sont les deux milieux qui ont le plus souffert de l'exploitation moderne de la Camargue au point de quasiment disparaître. Leur restauration notamment sur les terrains publics s'impose. Ainsi, même si la « gestion » des propriétés acquises par le Conservatoire du Littoral ou d'autres acteurs public peut être légère en terme de personnel par tranche de 1000 hectares, des interventions ponctuelles précises par exemple pour recréer et maintenir ce réseau de mares seront sans doute indispensables.
3.3 Une abondance d'espèces exigeantes sur la qualité des milieux
Les 26 habitats naturels d'intérêt communautaire de la réserve de biosphère accueillent 5700 espèces recensées soit 1/5 de la flore, les ¾ des espèces d'oiseaux mais aussi la moitié des espèces de libellules et de poissons d'eau douce recensés en France. Ce sont aussi 553 espèces animales ou végétales d'intérêt patrimonial inscrites dans des textes de protection ou des conventions internationales, dont 11 menacées. La Camargue constitue à l'échelle de l'Europe et même du paléarctique occidental une étape essentielle pour de nombreuses espèces d'oiseaux migrateurs, et une zone majeure pour l'hivernage comme pour la nidification. C'est en particulier pour la France le principal site d'hivernage des canards (avec plus de 150 000 individus) et des oiseaux d'eau coloniaux. Nul ne conteste l'exceptionnelle richesse de la biodiversité de ces lieux, qui bénéficient de la reconnaissance officielle qui s'attache à des protections nationales et internationales scientifiquement bien étayées. Il convient de prêter une attention particulière aux espèces non invasives qui sont directement inféodées à chacun des milieux qui constituent la Camargue. Il est certes intéressant de noter la présence de castors, de cistudes d'Europe ou de grues. De se pencher sur le recul du lapin ou sur la prolifération du sanglier. Mais il faut surtout veiller au maintien, dans la capacité d'accueil des milieux, de toutes les espèces qui sont particulièrement peu capables de se reproduire, de faire étape ou d'hiverner ailleurs, à commencer par celles qui sont dépendantes des milieux saumatres. La Camargue est un lieu de reproduction unique dans notre pays pour la glaréole à collier ou le flamant rose. Elle abrite presque tous les échassiers de France, elle accueille la quasi totalité des espèces de canards migrateurs. Un inventaire de l'état des populations de crustacés, mollusques, insectes, vers, plantes et algues qui vivent en Camargue doit être effectué et si possible régulièrement actualisé. L'abondance de poissons comme l'athérine ou l'anguille et au contraire la moindre présence de poissons plus inféodés aux seules eaux douces serait également un indicateur de bonne santé. Le retour de plantes rares comme les salicaires, la cresse de Crête, la pullicaire de Sicile témoignerait de la reconstitution de mares temporaires.
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Notons que beaucoup de ces espèces exigent de grandes surfaces d'un même habitat, ce qui plaide pour de vastes propriétés publiques ou privées.
3.4 La mise à profit des propriétés publiques pour donner la priorité à la nature
La plupart des milieux intéressants peuvent parfaitement être gérés par des propriétaires privés à des fins lucratives : ainsi sur les sansouires on peut chasser et pratiquer l'élevage extensif. Toutefois, les propriétés publiques présentent un intérêt particulier puisqu'elles ne sont pas tributaires, dans le choix de leurs actes de gestion, d'autres impératifs que celui d'assurer les meilleures conditions de développement puis de maintien d'une biodiversité exceptionnelle. Il va de soi que ces propriétés ne seront pas touchées par des opérations de démoustication, si dommageables pour la faune. Elles pourront supporter des mécanismes de remise en communication des terres avec la mer ou le fleuve, et même si une gestion de l'eau à travers un ensemble de pompes et de vannes s'avère indispensable, cette gestion devra limiter les effets de "l'inversion" des apports d'eau douce et se rapprocher de l'hydrologie méditerranéenne naturelle. Grâce aux grandes surfaces en jeu, les propriétés publiques pourront conserver un certain potentiel d'évolution à la nature et offrir des possibilités de reconstitution des milieux les plus rares comme les pelouses et les mares. Enfin, même si ces activités contribuent par ailleurs sur des terrains privés à maintenir en l'état des milieux naturels intéressants, la chasse et le tourisme mal encadré devraient être bannis des terrains publics pour rendre pleinement à la nature un espace de respiration et de tranquillité absolue dont beaucoup d'espèces ont besoin.
3.5 La continuité écologique entre Camargue Gardoise, Delta du Rhône, Marais du Vigueirat et Crau
Dans l'esprit des "trames" vertes et bleues mises à l'honneur par le Grenelle de l'environnement, et en allant au delà des classiques "corridors écologiques", on doit souhaiter que d'Aigues-Mortes à Fos-sur-Mer, des Saintes-Maries de la Mer à SaintMartin-de-Crau, des espaces naturels protégés et bien gérés assurent le rétablissement dans le sud de la France d'un ensemble unique comprenant quasiment tous les milieux méditerranéens qui prévalaient a proximité du littoral avant son occupation par l'homme. En incluant les Alpilles dans ce bouquet d'espaces exceptionnels on ajoute même la moyenne montagne, les rochers et la forêt méditerranéenne.
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4. Les réponses des acteurs
4.1 Les protections légales
Le droit de l'urbanisme Directive territoriale d'aménagement (DTA) La directive territoriale d'aménagement des Bouches-du-Rhône qui couvre la grande Camargue date du 12 mai 2007. Elle définit les enjeux camarguais notamment de la façon suivante : « il importe sur ce territoire de protéger les milieux, gérer la fréquentation et maîtriser l'extension de l'urbanisation ». La DTA de 2007 précise certaines des dispositions spécifiques applicables au littoral camarguais non sans avoir mentionné, concernant la fréquentation anarchique et massive des plages : « l'absence d'arrière-plage préservée de tout aménagement important par l'activité des salins et la protection de zones humides a favorisé cette pratique... ». Puis, l'État indique sa priorité « maîtriser l'accès de la plage aux véhicules et sa fréquentation. Des dispositifs de maîtrise de la circulation devront être mis en place de manière à la limiter aux espaces du littoral qui peuvent la supporter ». Le document indique, par ailleurs, les principes d'action : « libération du DPM des occupations sans autorisation, définition de principes d'aménagement et de gestion de ces espaces, afin de substituer une fréquentation anarchique et préjudiciable pour les milieux une fréquentation respectueuse de l'environnement et des conditions sanitaires et de sécurité, la prise en compte des risques naturels, notamment le risque inondation et de submersion marine, pour l'évolution de ce secteur ». Les schémas de cohérence territoriale (SCOT) Le Schéma de cohérence territorial du Pays d'Arles ( 27 communes, 157 109 habitants en 2008) est en cours d'élaboration depuis le 13 juin 2006. Son diagnostic a été approuvé en septembre 2008. Celui-ci sera prochainement réactualisé tandis que le syndicat mixte poursuit son travail d'élaboration du SCOT (phase PADD). La structure porteuse comprend entre autres les communes d'Arles et des Saintes-Maries de la Mer, mais pas Port-Saint-Louis-du-Rhône qui définit son SCOT dans le cadre du syndicat d'agglomération nouvelle de l'Ouest de l'étang de Berre. Les questions foncières ont été appréhendées comme importantes. Cela a motivé le syndicat de Pays à lancer une étude de stratégie foncière actuellement en cours. Les échanges entre élus dans le cadre du projet de SCOT du Pays d'Arles ont contribué à cartographier une zone représentant 104 ha (intitulé site P1) en extension de Salin-de-Giraud et conditionné par la reconversion des marais salants. Toutefois, les travaux du SCOT sont actuellement à l'arrêt. Le préfet des Bouches-du-Rhône vient de proposer l'élargissement du périmètre de ce SCOT. Le SCOT Ouest Étang de Berre (9 communes, 166 766 habitants en 2008). Il comprend deux intercommunalités dont le SAN Ouest-Provence. Celui-ci englobe Port Saint-Louis-du-Rhône. Il élabore actuellement son PADD (première version en octobre 2009).
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Le SCOT Sud Gard (79 communes, 258 000 habitants) a été approuvé le 7 juin 2007. Il définit le bi-pôle Le Grau-du-Roi/Aigues-Mortes comme un pôle de développement secondaire21. Le DOG du SCOT prévoit un maillage de la petite Camargue en « axes de découverte à valoriser ». Il prescrit par ailleurs « d'être particulièrement vigilant visà-vis des extensions des hameaux existants...qui seront mesurées et particulièrement soignées sur le plan de leur insertion dans l'environnement ». Le SCOT prévoit expressément au Grau-du-Roi le renouvellement du parc d'hébergement touristique mais aussi la promotion de nouvelles formes d'accueil bien intégrées dans les milieux urbains et d'une manière plus générale en Petite Camargue de renforcer le tourisme fluvial et maritime et de « favoriser l'attrait touristique des espaces naturels remarquables et la découverte de leurs paysages, de leur faune ou de leur flore par le développement de sites ou d'itinéraires de promenades aménagés, de points d'observation et de secteurs d'accueil adaptés ». Il organise une petite Camargue scindée en une partie Ouest dédiée au tourisme de masse encore appelé à croître (construction de 1000 logements prévus à l'échéance 2015) et une partie Est plus axée sur un développement d'un tourisme lié à la nature et aux paysages. Plans locaux d'urbanisme et plans d'occupation des sols (PLU/POS) La commune d'Arles est doté d'un POS mis en révision en novembre 2004. Si le PADD n'a pas encore été arrêté, la raison réside en partie dans le débat instauré entre les édiles et les services de l'État sur la prise en compte du risque d'inondation. La commune des Saintes-Maries de la Mer a arrêté son projet de PLU le 26 mars 2009. Depuis, elle s'est vue notifier par un nouveau « porté à connaissance » l'aléa retenu au titre de la submersion marine qui se veut très restrictif quant aux espaces encore urbanisables. La commune de Port-Saint-Louis-du-Rhône dispose d'un POS qui devrait prochainement être révisé pour tenir compte de l'aléa inondations. Le document d'urbanisme d'Arles prévoit à Salin-de-Giraud plusieurs zones d'urbanisation future de superficies égales entre les espaces dédiés à l'habitat et ceux consacrés à l'activité économique. Le tableau présenté en annexe récapitule les projets en cours ou envisagés sur ce hameau qui constitue un vrai enjeu. En Camargue gardoise, si le PLU d'Aigues-Mortes a été approuvé le 31 juillet 2003, il a été mis en révision après les élections municipales de 2008. La révision a été engagée, le diagnostic approuvé. Le nouveau PLU devrait prendre en compte l'évolution du zonage sur le site envisagé pour le projet de centre de thalassothérapie. L'actuel document d'urbanisme ne permettrait pas sa construction. Le Grau-du-Roi dispose d'un PLU en cours d'élaboration depuis 2003. Le projet a été présenté en octobre 2010 et devrait être approuvé avant l'été 2011. La commune de Saint-Gilles élabore son PLU depuis 2006.
Le SCOT définit ainsi un pôle secondaire : dans le respect des contraintes hydrauliques, renforcement des fonctions urbaines (activités commerciales et de services) et renforcement des activités existantes.
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Risque inondation et urbanisme Les services de l'État ont présenté à la commune d'Arles une proposition de zonage en vue de l'élaboration du PPRI. Ils souhaitaient mettre en oeuvre ce document par anticipation. Ce dernier achoppe aujourd'hui sur la délimitation des espaces potentiellement urbanisables. Port Saint-Louis-du-Rhône a de son côté reçu la notification du nouvel aléa débordement du Rhône en juillet 2010. Le croisement de ces règlementations ne permet qu'une urbanisation très limitée aux « franges de Salin-de-Giraud et de Mas Thibert sur la commune d'Arles, sur le centre ville des Saintes-Maries de la Mer et du hameau de Pioch Badet ». Il interdit toute construction ailleurs sauf cas des zones agricoles en aléa modéré. Par ailleurs en Camargue gardoise, les spécificités relatives à la prévention des submersions marines n'ont pas encore été présentées aux communes. Seules les dispositions générales ont fait l'objet en août 201022 d' « un porté à connaissance ». Aucune carte n'a été transmise aux communes pour matérialiser les nouvelles contraintes. Plusieurs PPRI en cours d'élaboration concernent la Camargue et notamment le PPRI du Rhône (Aigues-Mortes, Saint-Gilles, Le-Grau-du-Roi...). Les aléas ont été récemment transmis aux communes. Une situation comparable est rencontrée par la commune de Saint-Laurent-d'Aigouze puisque le PPRI Basse Plaine et Camargue gardoise auquel elle appartient est à l'instruction depuis 2008. L'établissement de nouveaux documents liés à la prévention du risque conduit à restreindre les aires urbanisables et probablement dans certains cas à les supprimer. Si la DTA, dans les Bouches-du-Rhône, a contribué à clarifier les enjeux du territoire de la Grande Camargue, l'absence de vision d'ensemble entre Grande et Petite Camargue conduit à des initiatives désordonnées alors que la notion d'espaces remarquables justifie un traitement coordonné des politiques publiques.
4.2 Les désignations internationales
Au moins 14 statuts de protection (aux dispositions plus ou moins contraignantes) se superposent partiellement sur le périmètre de l'écosystème Camargue : la réserve de biosphère de Camargue (delta du Rhône), les sites Ramsar de Camargue et de petite Camargue, le parc naturel régional, la réserve nationale de Camargue, la réserve naturelle régionale, les sites NATURA 2000 de petite Camargue, de Camargue, et des marais entre Crau et Grand Rhône, les terrains du Conservatoire du littoral et de la Fondation Tour du Vallat, les espaces naturels sensibles du CG 13 et 34, la réserve de chasse marine, le périmètre d'intervention du syndicat mixte de protection et de gestion de la Camargue gardoise, le grand site de France de la Camargue gardoise, les arrêtés de protection de biotope etc.
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Lettre du préfet des Bouches-du-Rhône aux maires le 20 août 2010 définissant le nouvel aléa à 2,50 m NGF.
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Créé en 1971 par l'UNESCO, le programme MAB (Man and Biosphere) vise à classer des réserves de biosphère mettant en oeuvre un programme de développement économique et social basé sur la conservation et la valorisation des ressources naturelles. La réserve de biosphère de Camargue crée en 1977 et élargie depuis, épouse les contours du delta du Rhône, des plaines au nord d'Arles aux communes de Fos-sur-Mer à l'est et du Grau-du-Roi à l'est, à cheval sur les régions PACA et Languedoc Roussillon et les départements des Bouches-du-Rhône, du Gard et de l'Hérault. Elle est constituée de trois zones centrales de 25 000 ha centrées sur l'étang de Vaccarès, l'embouchure du Grand Rhône et les marais du Vigueirat, où la priorité est donnée à la conservation, la recherche scientifique et la sensibilisation du public. Une zone tampon de 136 500 ha (dont 32 000 ha en mer), dévolue aux activités écologiquement viable couvre le reste du delta et la partie peu urbanisée de la Camargue gardoise et de la zone du marais du Vigueirat et des étangs d'Arles. Ce territoire est entouré d'une zone de transition de 33 000 ha incluant également la zone urbanisée des salins de Giraud, constituant une interface avec les trames urbaines. La responsabilité de la gestion de la réserve est dévolue au PNRC pour la partie PACA et au Syndicat mixte pour la protection et la gestion de la Camargue gardoise. La France a adhéré en 1986 à la Convention relative aux zones humides d'importance internationales dite Convention de Ramsar : 36 sites sont classés en France dont les sites de la Camargue (85 000 ha classés en 1986) et la petite Camargue (37 000ha, 1996). Les critères de classement sont liés à l'importance de ces sites pour la conservation d'espèces en danger ou d'une proportion significative de population d'une espèce (d'oiseaux principalement) ou encore pour le rôle que jouent ces zones pour le maintien d'activités économiques durables pour les populations locales. La désignation d'un site Ramsar ne constitue pas une protection règlementaire en soi mais une reconnaissance internationale de la valeur d'un site. La directive européenne 92/43/CEE dite « Habitats, faune, flore » vise à protéger la biodiversité dans les états membres notamment par la constitution d'un réseau écologique Natura 2000 constitué d'habitats prioritaires protégés dans chacune des régions biogéographiques de l'Union. Concernant la Camargue, ont été inscrits les sites :
de Camargue (113 529ha y compris une partie marine), superposée au périmètre du Parc Naturel Régional, de Petite Camargue (34 559ha) dans la partie gardoise, des marais entre Crau et grand Rhône (7 234ha), auxquels s'ajoutent deux sites fluviaux (Rhône aval et Petit Rhône).
Sur ces sites, il incombe aux états membres de garantir la préservation de ces habitats et des espèces de faune et de flore qui le composent au moyen d'un document d'objectifs. Ces DOCOB qui ont valeur de plan de gestion sont en cours de rédaction par le PNRC pour un début de mise en oeuvre prévu en 2012.
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5 autres titres internationaux reconnaissent le statut unique de la Camargue : diplôme européen et réserve biogénétique du Conseil de l'Europe, aire protégée au titre des conventions de Barcelone, de Bonn et de Berne.
4.3 Le PNRC et sa gouvernance
Même si les premières mesures de protection de la nature datent de la création de la réserve nationale de Camargue en 1927, cela ne concernait qu'un territoire restreint, limitrophe de l'étang du Vaccarès, sans moyens de gestion sur les principaux paramètres influençant l'écologie du milieu et en particulier l'eau. Dans les années 1960, le développement du pôle industriel de Fos-sur-Mer à l'est et du pôle touristique de La Grande-Motte à l'ouest menace le delta du Rhône et rend nécessaire de protéger un espace naturel déjà reconnu mondialement. La création d'un parc national23 est écartée au profit d'un parc naturel régional, dont le concept, élaboré en 1966 pour notamment équiper les grandes métropoles régionales en aires naturelles de détente, et qui paraît le mieux à même de réaliser une rupture urbaine sur le littoral en plein développement. Le PNR de Camargue est créé en 1970 avec toutefois, face à la pression des propriétaires terriens, des aménagements notables concédés par l'État au statut général des PNR : fait unique, la structure de gestion est une fondation privée dont le conseil d'administration est composé d'une majorité de représentants des intérêts locaux et en particulier le Comité des propriétaires camarguais. Ainsi dès sa création, le Parc naturel régional est placé sous le signe d'un rapport de force entre les intérêts locaux et ceux de la collectivité régionale et de l'État. Cette gouvernance particulière s'est maintenue jusqu'aux années 2000 où elle a été remise en cause par les habitants du delta en même temps que la gestion privée de l'eau. Malgré la résistance des propriétaires, la fondation privée est remplacée en 2002 par un groupement d'intérêt public dans lequel la majorité des sièges revient aux collectivités locales. Le GIP ayant été annulé en 2004 par le Conseil d'État à la suite de recours juridiques, il est remplacé par un syndicat mixte, sur le modèle de ce qui est pratiqué dans les autres PNR (mais avec toutefois une représentation des propriétaires privés) et verrouillé par une loi spécifique votée en 2007. La présidence du syndicat mixte est actuellement assurée par le maire d'Arles après l'avoir été par le président de la région PACA. La gouvernance du parc enfin stabilisée, la nouvelle charte est mise en chantier et validée (décret n° 2011-177 du 15 fé vrier 2011). Celle-ci, d'une durée de 12 ans, prévoit l'extension du PNRC à une partie de la commune de Port-Saint-Louis.
23
NB : l'hypothèse de la création d'un parc national, qui pourrait revenir à l'esprit puisque cet outil a été mentionné pour les zones humides dans le cadre de la négociation du « Grenelle », n'a jamais été évoquée par les interlocuteurs de la mission. Même si beaucoup reconnaissent à la Camargue un statut proche de celui d'un parc national, celui-ci ne semble pas approprié compte tenu de la complexité des problèmes posés au sein de ce territoire en dehors des noyaux durs inhabités et en partie bien protégés dans le sud du delta. En outre, il est probable que la (ré)ouverture de ce dossier dans cet espace où les acteurs sont sortis d'une série de crises qui ont laissé des traces, retarderait la recherche de solutions concrètes aux questions qui ont été posées à la mission, et en particulier celle du foncier.
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La charte 2010-2022 a pour principales ambitions de : 1- gérer le complexe deltaïque en intégrant les changements climatiques, 2- orienter les évolutions des activités en faveur de la biodiversité, 3- Renforcer la solidarité territoriale, la cohésion sociale et améliorer le cadre de vie, 4- Partager la connaissance et ouvrir sur les coopérations méditerranéennes.
Les ambitions de la charte 2010-2022
1. gérer le complexe deltaïque en intégrant les changements climatiques · en améliorant l'organisation de la gestion de l'eau (extension du périmètre d'intervention du Parc et clarification du rôle et organisation des moyens des ASA) · en recherchant un fonctionnement plus proche des cycles naturels : amélioration des martelières et canaux d'assainissement pour éviter des déversements dans les étangs, augmentation des capacités des pertuis maritimes recréant une variabilité dans les submersions et dans la salinité des milieux · en intégrant la dynamique littorale et les risques de submersion par un suivi scientifique, la restauration du cordon littoral et la poursuite du programme d'acquisition des terrains par le CEL · en réduisant l'impact des inondations notamment par l'aménagement des digues résistantes à la surverse et des zones de ressuyage des terres pour faire face aux crues cinquantenales · en améliorant la qualité des eaux et des milieux aquatiques par la mise en place d'un réseau de surveillance et le contrôle des pollutions agricoles (MAET et canaux d'assainissement) 2. orienter les évolutions des activités en faveur de la biodiversité · conserver les espaces naturels remarquables et leurs interconnexions (création de réserves nationales, régionales et marines, d'espaces boisés classés, acquisitions foncières, etc.) · restaurer les milieux naturels et les corridors écologiques dégradés (dunes littorales, salins désaffectés, plantation de haies vives le long des canaux etc.) · conserver les habitats et les espèces prioritaires d'intérêt communautaire (cistude d'Europe, grand rhinolophe, flamant rose ...) · gérer les espèces envahissantes (y compris la coordination des luttes anti-moustiques) · pérenniser les activités favorables à la biodiversité (élevage extensif, exploitation des roselières, chasse durable, pêche responsable etc.) · améliorer les pratiques agricoles et promouvoir des pratiques culturales plus favorables à l'environnement · développer un tourisme durable et faire respecter les espaces naturels sensibles 3. Renforcer la solidarité territoriale, la cohésion sociale et améliorer le cadre de vie · promouvoir la diversité culturelle · renforcer la participation des habitants à la gouvernance du Parc et · renforcer la qualité paysagère et le cadre de vie (accompagner la reconversion du site salins de Giraud en un projet de développement exemplaire) 4. Partager la connaissance et ouvrir sur les coopérations méditerranéennes · faire de l'observatoire de Camargue l'outil de référence du delta · améliorer la cohérence des politiques publiques à l'échelle du delta bio-géographique
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Parmi les engagements de l'État dans la charte, il faut mentionner outre les soutiens habituels aux initiatives du Parc, à partager les données et soutenir la recherche scientifique :
- veiller à la mise en oeuvre du contrat de delta et élaborer le plan de prévention des risques maritimes - favoriser l'acquisition par le conservatoire du littoral de terrains. Accompagnement technique des projets de restauration pilote du littoral et favoriser la coopération entre les deux régions. - mise en place par l'agence de l'eau RMC d'un suivi scientifique du bon état écologique du delta - suivi et contrôle des communes pour la mise en place de l'assainissement urbain et suivi des PCB - soutien aux actions de conservation des milieux (charte forestière, forêts alluviales, APB, réserve marine, rédaction et mise en oeuvre DOCOB Natura 2000...) et des espèces prioritaires - mise en place par le CEL d'une stratégie d'intervention foncière avec le PNR et les gestionnaires d'espaces naturels basée sur une analyse multicritères des enjeux et associer le PNRC à la gestion des terrains acquis - collaboration des services de police de l'environnement avec les agents assermentés des espaces protégées - promotion à travers des contrats Natura 2000 et MAE des pratiques culturales diminuant l'impact sur l'environnement (réduction des pesticides, développement de l'agriculture biologique ...) - accompagner le Parc dans la définition d'aménagements pertinents pour maîtriser les accès et les usages des zones littorales marines et des plages menacées de fortes fréquentations - surveiller le DPM et le libérer des occupations sans autorisations, contrôler le braconnage - prise en compte du Plan Rhône et de la DTA dans les documents d'urbanisme et veiller à la cohérence des projets d'aménagement d'infrastructures de transport avec la charte - accompagner la réorganisation de la fréquentation sur la plage de Piémanson - contribuer à la charte paysagère et la rédaction de prescriptions architecturales par le PNRC - prendre en compte la biodiversité dans les projets d'aménagement structurants - soutenir les programmes de recherche (IFREMER, CEL), l'observatoire de Camargue, l'éducation et l'information environnementale et encourager les actions innovantes de coopération...
Le PNRC, de l'aveu de quasiment tous les interlocuteurs, apparaît comme le seul acteur crédible pour marier des objectifs de la protection de la nature et des axes de développement économique -d'autant plus qu'il est également chargé d'assurer le bon fonctionnement de la réserve de biosphère dans les Bouches-du-Rhône. N'apparaissant pas comme un organisme régalien détenteur de moyens directement contraignants (même s'il détient une capacité d'influence fondée sur ses connaissances), il dispose aujourd'hui de bons atouts pour s'ériger en point focal de toutes les politiques qui contribueront à assurer la préservation de la biodiversité en Camargue.
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Comme le parc n'a pas vocation à arbitrer des conflits éventuels et qu'il n'exerce pas de compétence sur une partie importante de la Camargue située dans le département du Gard, il ne peut à lui seul incarner « la gouvernance de la Camargue ». Il est donc particulièrement important que l'État respecte les engagements qu'il a pris auprès de lui et veille à une similitude de l'interprétation et du respect des lois sur l'ensemble du territoire de la réserve de biosphère en attendant un rapprochement des gestionnaires...
4.4 Les acquisitions publiques
Les communes, les départements, le Conservatoire du Littoral ont compétence pour acquérir des terrains afin d' assurer une conservation durable du patrimoine qu'ils représentent. Ainsi, les 10 communes du delta totalisent 4378 ha de territoires acquis dans cet objectif. Sur les terrains communaux sont maintenues le plus souvent des activités liées à l'exploitation des ressources naturelles (coupe du roseau et chasse dans les marais, élevage extensif de taureaux et de chevaux, pêche en étang ...). Les départements des Bouches-du-Rhône procèdent par le biais de la Taxe Départementale des Espaces Naturels Sensibles (TDENS : environ 4 M chaque année) à l'acquisition de domaines afin de les soustraire à toute spéculation foncière. Ainsi, le Département des Bouches-du-Rhône à lui seul a acquis plus de 3 500 ha de propriété en Camargue dont le complexe des étangs de Consécanière et des Impériaux24. Le Conservatoire du Littoral, établissement public, a dans ses missions la protection des milieux littoraux par l'acquisition foncière de territoires dans un but de protection et d'ouverture maîtrisée au public. Ses critères de choix de terrains à acquérir sont motivés par le risque d'urbanisation, de parcellisation ou par l'artificialisation (par exemple le comblement des zones humides).L'intervention foncière peut avoir lieu également si le site s'est dégradé et nécessite une réhabilitation rapide ou si le site est fermé au public alors qu'il mériterait d'être ouvert à tous. Dans le delta du Rhône, le Conservatoire du Littoral possède un ensemble de sites représentant une surface de plus de 25 000 ha, y compris les 13 118 ha de la réserve nationale de Vacarès depuis 2008, soit environ 18 % de la superficie de la réserve de biosphère. La gestion des propriétés acquises par le conservatoire est confiée aux communes où à des organismes reconnus compétents en matière de gestion d'espaces naturels. Certains sont, avec ou sans structure d'accueil, ouverts au public comme le Vigueirat (960 ha), le Domaine de la Palissade (702 ha), le Boucanet .
24
En 2010, ce département était propriétaire de 16 000 ha, soit 3,2% de sa superficie.
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4.4.1 L'intervention du Conservatoire du littoral dans le cadre du protocole signé en 2009 avec les Salins du Midi Les acquisitions publiques réalisées en Camargue représentent un total d'environ 30 000 ha dont la majorité est détenue par le Conservatoire du Littoral. L'étang du
Vaccarès compte à lui seul pour 13 118 ha. Un quart du territoire camarguais est ainsi durablement protégé par l'action conjointe de cet opérateur et des collectivités territoriales (Conseils généraux et communes) sans compter celle de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse qui a été fortement mobilisée lors de l'achat des terrains appartenant à la Compagnie des Salins du Midi en 2009. Il fallait, en effet, intervenir à hauteur de 45 millions pour acheter une première tranche de 5 100 ha mise en vente par la CSM au prix de 0,88 /m² avec un étalement des paiements s'étageant entre 2010 et 2013.
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Le financement s'est établi de la façon suivante :
Conservatoire du littoral.......................... 15M dont 5M au titre du FEDER Ministère de l'écologie............................ 10M Agence de l'eau........................................9M Grand Port Maritime de Marseille.............8M Conseil général 13...................................3M
Resteraient à acquérir, aux termes du protocole signé entre la CSM et le Conservatoire du Littoral un peu plus de 500 ha en 2011. Ce « tour de table » implique le Grand Port Maritime de Marseille (GPMM) pour une somme de 8 millions dans le cadre d'un processus de compensation pour la destruction de 300 ha environ de marais (le « Caban Nord ») situés dans son emprise. Le GPMM devait en effet utiliser l'opportunité de la vente des terrains des Salins du Midi aux titres des mesures compensatoires liées à l'aménagement de la darse 2 (creusement d'un chenal d'accès au canal de Fos-sur-Mer et aménagement à terme de l'ensemble de la zone (projet FOS 4XL)). Or, comme la mission a pu le vérifier sur place, la zone dite Caban Nord présente des caractéristiques écologiques telles que les mesures compensatoires envisagées ne seront probablement pas suffisantes pour en autoriser l'aménagement. Ceci reflète en partie la fragilité du montage financier pour ces acquisitions de terrains. Quoique intéressantes de par leur situation littorale les zones utilisées pour la saliculture n'étaient pas convoitées pour des usages qui auraient mis en question l'intégrité patrimoniale de la Camargue. Aussi, peut-on s'interroger sur la décision qui aura conduit le Conservatoire à acheter l'ensemble de ces surfaces puisque les strates de protection qui s'y superposent (Natura 2000, zonages CU, risques de submersion25), sans parler de la difficulté à gérer les niveaux d'eau après l'arrêt de l'activité et à trouver des gestionnaires efficaces sont autant d'obstacles placés sur sa route. L'assèchement des moyens d'intervention du Conservatoire lui aura interdit par ailleurs de se porter acquéreur des 2 500 ha des lagunes du Lairan situées dans le Gard et mises en vente également par la CSM pendant la même période. Les collectivités auraient pu se porter acquéreur de ce terrain mis à prix 25 M en lieu et place du Conservatoire en utilisant la TDENS. Mais les élus du Languedoc-Roussillon au conseil de rivages Méditerranée ont souhaité préserver l'option d'un maintien de l'intégrité du périmètre industriel actuel. Ils ont estimé qu'il était impossible que de l'argent public soit dépensé pour casser une partie de l'outil de production des Salins, subventionner de fait les suppressions d'emploi en résultant, enrichir les actionnaires de la compagnie et participer à son démantèlement. Cependant, le groupe Salins a poursuivi la mise en vente en proposant un allotissement et en définitive deux des quatre lots ont trouvé des acquéreurs privés, intéressés par ces terrains pour leur utilisation à des fins cynégétiques. Pour les deux lots d'une surface totale de 1 000 ha qui restent en vente, le Conservatoire du Littoral n'a ni les moyens, ni le désir de se porter acquéreur dans la mesure où l'intérêt de parcelles plus petites apparait avec moins d'évidence.
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Il existe des PPRI prescrits pour Saintes-Maries de la Mer, Arles, Port-Saint-Louis-du-Rhône qui seront complétés par un arrêté sur les risque inondation par débordement du Rhône et submersion marine.
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Il faut noter qu'à chaque fois qu'un terrain est mis en vente dans le territoire camarguais, il y a de façon quasi automatique l'idée d'un appel au Conservatoire. D'autres propriétés pourraient être mises à la vente dans les mois ou années à venir dans la réserve de biosphère dans des zones de préemption du Conservatoire ou de celle des collectivités. Faut-il que le Conservatoire intervienne à tout coup et à tout prix ? Cette question sera examinée dans la partie consacrée aux recommandations, mais, en première analyse, l'absence de menaces d'urbanisation ou d'artificialisation dues à la difficulté de passer outre l'empilage des protections réglementaires et internationales ou bien même de trouver des projets de développement qui compromettraient, de par leur nature, l'environnement et les équilibres existants entre les usages agricoles, récréatifs et naturalistes, plaide pour recommander la plus grande prudence dans la stratégie foncière du Conservatoire. 4.4.2 L'intervention foncière de l'agence de Méditerranée-Corse (RMC) sur les zones humides l'eau Rhône-
En février 2010, la secrétaire d'État à l'écologie avait présenté le plan national d'actions pour la sauvegarde des zones humides qui prévoyait de mobiliser 20 millions en 3 ans pour financer 29 actions, et pour lancer un parc national situé en zone humide de même que 6 nouveaux sites Ramsar. La maîtrise foncière est clairement un levier de ce plan qui, à la suite du Grenelle de l'environnement mettait en avant l'objectif de 20 000 ha de zones humides à acquérir au niveau national. Cet objectif s'est traduit au sein des contrats d'objectifs des agences de l'eau. Pour l'agence de l'eau RMC, l'acquisition de 1 663 ha a été actée dans son contrat d'objectif. L'agence de l'eau RMC a financé 73 opérations d'acquisition foncière pour un montant d'autorisations de programme de 21 millions . La surface acquise au titre du 9ème programme d'action par le Conservatoire du littoral auprès de la CSM, comme il a été mentionné plus haut aura été financée par l'agence à hauteur de 13,5 millions (9 millions pour Galabert et Beauduc en 2009 et 3,964 millions pour les autres terrains des Salins en 2007). Le taux de participation (subvention au Conservatoire) s'établit à 21 %. À noter que l'agence RMC a signé un accord-cadre avec la SAFER de PACA qui réalise une veille sur les transactions de vente pouvant constituer une opportunité de préservation de zones humides. En effet, la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (Grenelle 2) dispose que les acquisitions concernant des terres admissibles au paiement unique des aides agricoles (DPU) le sont par le biais du droit de préemption des SAFER sur proposition de l'agence de l'eau. L'acquisition directe des zones humides par l'agence, si elle est rendue possible par la loi, (voir l'encadré ci-dessous) peut susciter des interrogations au sein de l'établissement ainsi que parmi ses partenaires sur le terrain, résumées ainsi par l'agence de l'eau RMC elle-même26:
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« Stratégie d'intervention pour l'acquisition foncière des zones humides », Commission relative au milieu naturel aquatique Rhône -Méditerranée, Séance du 29 mars 2011.
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Article L213-8-2 du Code de l'environnement Créé par LOI n° 2010-788 du 12 juillet 2010 - art. 133 L'agence de l'eau mène, outre les missions définies à l'article L. 213-8-1, une politique foncière de sauvegarde des zones humides approuvée par le comité de bassin. À ce titre, elle peut attribuer des aides à l'acquisition par des conservatoires régionaux d'espaces naturels, par des collectivités territoriales, leurs groupements ou des établissements publics de parcelles composant ces zones. L'agence de l'eau peut acquérir ou faire acquérir des parcelles dans les zones humides à des fins de lutte contre l'artificialisation des sols et de valorisation, notamment agricole.
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le positionnement de l'agence auprès des autres acheteurs potentiels que sont les collectivités et les Conservatoires, qui risquent de se retirer en proposant que l'agence réalise elle-même l'achat, ce qui leur permet d'éviter les difficultés liées à l'opération ; la perturbation du marché foncier local par l'arrivée d'un opérateur ayant des possibilités financières élevées et une faible expérience du marché local ; les critères de choix des terrains sur lesquels l'agence devrait intervenir ; quels partenariats avec les opérateurs fonciers habituels ?
En interne, les questions posées portent sur l'exercice d'un métier entièrement nouveau pour une agence de l'eau : comment conduire l'acquisition et comment gérer les terrains acquis ? Pour obtenir des éléments de réponse à ces questions, il faut que l'agence procède à un audit de ses conditions potentielles d'intervention, en saisissant une ou plusieurs opportunités d'acquisitions permettant de réduire au maximum les inconvénients cités ci-dessus, comme des zones humides à fort enjeu, pour lesquelles l'acquisition est nécessaire pour assurer leur sauvegarde ou leur restauration, et sur lesquelles il n'y a pas de maître d'ouvrage susceptibles d'intervenir. L'agence de l'eau, en exprimant ces réserves, vient souligner que le métier d'opérateur foncier ne se décrète pas, et, qu'en effet, une stratégie concertée avec des partenaires-professionnels du foncier ne peut qu'être bienvenue.
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Carte des acquisitions du sud-est Camargue (PNRC)
4.4.3 La réserve foncière des établissements publics fonciers (EPF) Le rôle des Établissements publics fonciers consiste à acquérir des propriétés bâties et non bâties à la demande de l'État, des collectivités territoriales,ou d'établissements publics tels que les chambres de commerce et d'industrie, permettant à ces partenaires de réaliser à terme leurs projets d'aménagement. Les objectifs essentiels sont, d'une part, d'assurer la disponibilité des biens au moment opportun, sans apport financier de la part de la collectivité pendant la durée de la réserve foncière, de faciliter ainsi la préparation du projet d'aménagement, d'autre part, de préserver de bonnes conditions de négociation et de mener une action régulatrice sur le marché foncier. Dans le Var, l'EPF PACA s'est déjà porté acquéreur d'un terrain préempté par la SAFER pour le compte du Conservatoire du littoral. Le portage aura duré trois ans, le temps que le budget de l'établissement permette l'achat. Sa priorité d'intervention se situe dans le secteur du renouvellement urbain et la densification. Dès qu'il y a
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extension urbaine, il faut envisager des mesures compensatoires mais, selon l'EPF, les terrains de la CSM ne se prêtent pas à l'expression de mesures compensatoires puisque les menaces d'artificialisation sont quasiment nulles. Pourtant, l'EPF PACA, dans son programme prioritaire d'intervention, identifie un axe 7 « La protection des espaces naturels remarquables »27 et notamment ceux « menacés par le développement urbain ou la fréquentation incontrôlée du public ». La mission considère que cet outil peut se révéler utile en cas de nouvelles cessions massives de foncier. L'EPF serait alors en mesure de permettre l'étalement des acquisitions par le Conservatoire du Littoral en fonction de ses capacités budgétaires. Ce modus operandi est compatible avec l'axe 728. Toutefois, si les EPF sont placés sous la tutelle du préfet de région, la décision relève d'un conseil d'administration composé d'une majorité d'élus locaux. L'EPF Languedoc-Roussillon avait arrêté en 2009 en accord avec le délégué régional du Conservatoire du Littoral une série acquisitions-relais pour des terrains situés en petite Camargue. Le protocole avait été présenté et validé au bureau de l'EPF avant que le président de l'époque n'en décide l'ajournement. L'axe 3 du PPI qui représente environ 7,5 % de ses priorités budgétaires l'autorise en effet à pratiquer l'acquisition d'espaces naturels remarquables.
4.5 Les autres outils d'intervention
4.5.1 Les mesures compensatoires Lorsqu'un la réalisation d'un projet porte atteinte à l'environnement et si le maître d'ouvrage n'est pas en mesure d'éviter, et de réduire ses impacts, des mesures de compensation doivent être proposées dans le cadre de l'évaluation environnementale. Le code de l'environnement se réfère à la notion de mesures compensatoires dans divers cas : - En matière d'étude d'impact29 : les travaux et aménagements qui y sont soumis doivent prévoir, « le cas échéant, les principales mesures destinées à éviter, réduire et si possible compenser les effets négatifs importants du projet ». Plus précisément, l'étude comprend « les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ».
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Le PPR indique notamment « L'EPF poursuivra notamment son partenariat avec le Conservatoire du littoral, pour la sauvegarde des derniers espaces naturels littoraux en PACA, en intervenant principalement sur des sites charnières entre espaces naturels et espaces urbanisables afin de fixer définitivement les limites de l'urbanisation », PPI p 49.
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dont le texte détaillé rappelle « l'EPF n'a pas vocation à conserver les biens acquis car à l'issue d'une durée limitée de portage il doit revendre ces biens aux acteurs concernés par la mise en oeuvre du projet définitif et la gestion ultérieure de ces espaces ».
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Articles L. 122-1, L. 122-3 et R. 122-3 du code de l'environnement.
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En ce qui concerne l'évaluation des incidences des programmes et projets soumis à autorisation ou approbation en sites Natura 2000 au titre de la Directive n° 92/43/CEE du 21 mai 1992 dite Directive Habitats : « Le dossier d'évaluation d'incidences, établi par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage, comprend : [...]Lorsque, malgré les mesures prévues au II (mesures de nature à supprimer ou réduire ces effets dommageables), le programme ou projet peut avoir des effets notables dommageables sur l'état de conservation des habitats naturels et des espèces qui ont justifié la désignation du ou des sites, le dossier d'évaluation expose en outre : 1° les raisons pour lesquelles il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et les éléments qui permettent de justifier la réalisation du programme ou projet dans les conditions prévues aux III ou IV de l'article L. 414-4 ; 2°- les mesures que le maître d'ouvrage ou le pétitionnaire envisage, en cas de réalisation du programme ou projet, pour compenser les effets dommageables que les mesures prévues au II ne peuvent supprimer, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes »30. De même, « Lorsqu'une évaluation conclut à une atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000 et en l'absence de solutions alternatives, l'autorité compétente peut donner son accord pour des raisons impératives d'intérêt public majeur. Dans ce cas, elle s'assure que des mesures compensatoires sont prises pour maintenir la cohérence globale du réseau Natura 2000. Ces mesures compensatoires sont à la charge de l'autorité qui a approuvé le document de planification ou du bénéficiaire du programme ou projet d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations, de la manifestation ou de l'intervention. La Commission européenne en est tenue informée »31. C'est dans ce cadre réglementaire que la question s'est posée de recourir à l'acquisition foncière en Camargue pour compenser des atteintes à des sites de grande valeur écologique 7 localisés dans le périmètre du Grand Port Maritime de Marseille(GPMM)32. Il s'agit d'anciens salins classés en Zone de Protection Spéciale au titre de la Directive Oiseaux (voir aussi le chapitre 2.5 du rapport). Plusieurs inventaires réalisés depuis 2008 ont d'autre part mis en évidence leur importance exceptionnelle à l'échelle européenne pour la conservation des habitats, de la flore et de la faune, avec notamment la présence de plusieurs habitats prioritaires de la Directive Habitats et la redécouverte d'espèces végétales endémiques de l'ouest du Bassin méditerranéen que l'on croyait disparues du territoire national. Le GPPM a été sollicité pour participer à l'achat des terrains des Salins du Midi en 2009 à hauteur de 8 millions soit un peu moins de l'équivalent de 1 000 ha de lagunes au prix (très élevé par rapport au marché) de 0,9 /m²33.
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Article R. 414-21 du code de l'environnement. Article L. 414-4 VII du code de l'environnement. Il s'agit de creuser un chenal et d 'aménager la majeure partie des 650 ha de la lagune « Caban Nord ». À noter que sur un site à enjeux majeurs le ratio de compensation est compris en 5 et 10 (DREAL PACA).
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La mobilisation des associations a remis en question ce processus de compensation qui se heurte à la difficulté de mettre en oeuvre le principe d'équivalence. En effet, les espèces protégées qui seraient détruites au cas où l'aménagement se réaliserait n'existent pas dans les terrains de la CSM rachetés par le Conservatoire du littoral, avec le concours financier de différents opérateurs dont le GPMM. Au-delà de ce cas spécifique, existe-t-il des cas où l'acquisition foncière de terrains mis en vente en Camargue pourraient être utilisés à des fins de compensation écologique ? Par exemple, un maître d'ouvrage concerné par l'obligation de recourir à des mesures compensatoires achèterait en pleine propriété des terrains dans lesquels se trouvent les espèces à valeur patrimoniale équivalentes à celles impactées par son projet, ou bien, par l'effet d'une servitude conventionnelle sur le même type de zone s'assurerait ainsi de leur préservation. La mission a entendu la CDC Biodiversité exposer son expérience de création d'un terrain de 357 ha de coussouls dans la plaine de Crau en 2009. Ce terrain peut être aujourd'hui utilisé pour des mesures compensatoires dans le cadre d'un projet dont les impacts seraient dommageables au même type d'habitat. La maîtrise foncière et la vocation écologique pérennisée de la zone permettent d'attribuer des « crédits « biodiversité » aux maitres d'ouvrage qui en font l'acquisition, avec l'assurance d'un suivi scientifique. Cette pratique couramment utilisée aux États-Unis reste rare en France. La difficulté d'une telle démarche repose sur la mise en oeuvre du principe d'additionnalité : il s'agit, en effet, d'éviter de compenser les destructions d'habitat avec des terrains qui ne sont pas menacés. Dans le cas de la Crau, il y a eu création d'un nouvel habitat spécifique dans cette zone steppique très rare en France, puisque antérieurement aux travaux d'ingénierie écologique, il y avait un verger de pêchers. Aujourd'hui, il ne semble pas que les opérations de compensation passant par de la simple acquisition foncière soient réalisables en Camargue, en tout cas, sans y avoir identifié en préalable les priorités d'action reliées à des menaces potentielles. Cependant, l'acquisition par le Conservatoire du Littoral de terrains non menacés mais qui s'accompagnerait d'une réhabilitation des milieux pourrait éventuellement être utilisée dans le cadre de mesures compensatoires à condition que l'achat concerne des zones convoitées risquant de changer d'usage et, partant de remettre en question leur pérennité écologique. La mission estime cependant que ce genre d'opération ne peut être qu'exceptionnelle tant est difficile à démontrer l'additionnalité de la réhabilitation écologique qui se borne souvent à répondre à la « non gestion » d'un terrain par de l'ingénierie écologique légère.
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4.5.2 Le mécénat34 Le mécénat est souvent invoqué dès lors qu'il s'agit de trouver des financements pour assurer la protection d'espaces de valeur. Dans le cas de la Camargue, il peut s'agir de trouver des moyens financiers supplémentaires pour procéder à des acquisitions foncières. Mais, compte-tenu des valeurs estimées des domaines à acquérir, ce ne sont pas les dizaines de milliers d'euros que les fondations d'entreprises sont habituées à financer qui sont à la hauteur des enjeux. En réalité, ce sont plusieurs millions d'euros qu'il convient de mobiliser, dans le cadre d'accords de partenariat pluriannuels, dans la mesure où les entreprises ou une fondation d'entreprises préfèrent inscrire leurs opérations de parrainage dans la durée. Par ailleurs, il convient de garder à l'esprit que les entreprises ne s'engagent pas à fonds perdus. Il ne faut pas confondre philanthropie individuelle et mécénat d'entreprise. Au risque d'être accusée d'abus de bien social, l'entreprise doit avoir intérêt à agir. D'où la question des avantages que l'entreprise peut tirer d'un soutien à l'acquisition de propriétés camarguaises au profit du Conservatoire du Littoral ou d'une quelconque collectivité publique ? Parmi les mécènes susceptibles d'intervenir appartiennent à la catégorie des « grands donateurs », deux cas de figure se présentent : des mécènes privés agissant en nom propre. Le cas classique est celui d'un propriétaire qui fait en sorte qu'après lui son domaine soit définitivement consacré à la conservation de la nature. On peut citer celui d'une autre zone humide importante de France, le lac de Grandlieu en Loire-Atlantique (6000 ha), dont la majeure partie a été donnée à l'État par Jean-Paul GUERLAIN, constituée en réserve nationale naturelle, est gérée par la SNPN comme le Vaccarès et à été versée au patrimoine du Conservatoire du Littoral. Mais ce type de démarche, relativement rare en France s'agissant de grandes superficies, n'est possible qu'en cas d'appropriation individuelle préalable par un ami de la nature. des entreprises ou fondations d'entreprise. Elles sont peu nombreuses à pouvoir intervenir pour de tels montants. Citons la fondation Total qui a signé deux conventions successives de trois ans de 8 M chacune avec la Fondation du Patrimoine pour la protection du patrimoine industriel (période 2006/2011). En tout état de cause, ce type de démarche obéit à des règles. Par exemple, pour qu'il ait un sens, le mécénat doit s'inscrire dans une véritable stratégie clairement affichée par les pouvoirs publics. Il s'agirait de faire dans le domaine de la protection de l'environnement et de la biodiversité ce qui s'accomplit de façon de plus en plus fréquente, avec succès, dans le domaine culturel pour la protection de « Trésors nationaux » en faisant largement appel au mécénat privé35.
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Cette partie a été rédigée avec l'aide de M. Dominique LEGRAIN, ancien Inspecteur général au Service d'Inspection Générale de l'Environnement (SIGE) du ministère de l'écologie. Exemple des « Trois Grâces » de Cranach (4M) dont l'acquisition a été faite par Le Louvre en collectant des dons de particuliers et d'entreprises.
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Ceci aurait pour conséquence de valoriser la Camargue au titre de « Patrimoine national », labellisation pouvant correspondre à la notion de « Trésor national » prévue par la loi pour les éléments du patrimoine culturel. Cette démarche nécessite une implication forte du Gouvernement et, accessoirement la mise en place d'une cellule opérationnelle dédiée pour suivre un dossier de cette ampleur. Bien sûr, il s'agit d'apprécier les avantages que pourrait recevoir le mécène, entreprise ou fondation d'entreprise. On peut penser en termes de gain de notoriété venant d'une forte reconnaissance des pouvoirs publics dans le cadre d'une opération de dimension nationale. On peut également imaginer que le mécène puisse bénéficier d'avantages liés à l'acquisition elle-même : jouissance de bâtiments, par exemple, sur le domaine acquis au profit du Conservatoire du Littoral CL ou d'une collectivité publique, dans le cadre d'un bail de longue durée pour des réceptions de prestige, des évènements culturels, ... 4.5.3 Les servitudes conventionnelles Le concept d'appropriation publique des espaces menacés ou fortement convoités est bien reçu par l'opinion publique, mais les répercussions financières et les aléas de gestion sont tels qu'il convient de ne pas sous-estimer les limites d'une politique de préservation du littoral entièrement fondée sur la maîtrise foncière. Ceci est corroboré par le fait que les communes littorales sont assez réticentes à recevoir en pleine propriété des espaces dont il est entendu qu'ils resteront en l'état. Ainsi, s'explique le faible appétit des collectivités locales pour accepter la cession de 9/10e d'une propriété contre une autorisation de construire sur 1/10e de l'espace (Article L.130-2 à 130-4 du Code de l'Urbanisme) et pour gérer les espaces acquis par le Conservatoire du littoral. La servitude conventionnelle environnementale repose sur un mécanisme simple. Un vendeur et un acquéreur conviennent qu'une disposition particulière (l'interdiction d'édifier un bâtiment ou de changer l'affectation des sols) frappant un terrain soit inscrite aux hypothèques. Dans ce cas, il y a un fonds dominant (celui qui édicte la servitude) et celui qui l'accepte (le fonds servant)36. Est-il possible d'introduire dans la politique de protection du littoral du Conservatoire le principe de l'utilisation des servitudes conventionnelles ? Le Conservatoire du Littoral, soucieux d'une gestion économe de son budget pourrait dans certains cas devenir titulaire de servitude à condition que le terrain « fonds servant » se trouve en contiguïté du fonds qu'il détient et que la servitude n'introduise pas d'obligations positives. Autrement dit, si le Conservatoire du littoral ne se contente pas d'acheter une servitude non aedificandi sur un domaine agricole mais qu'il oblige à maintenir un type d'activité qui ne compromette pas la préservation de la zone, il doit faire apparaître ces obligations comme des « accessoires » distincts de la servitude37.
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Articles 637 et 638 du Code Civil.
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Il semble que dans de nombreux cas, le Conservatoire pourrait constituer des servitudes conventionnelle de droit privé portant sur les seuls éléments que la puissance publique entend acquérir à des fins de protection, par exemple la nonconstructibilité, limitant ainsi les coûts d'acquisition et de gestion. Deux conditions s'attachent à la mise en place de servitudes conventionnelles : d'abord, et de façon évidente, que le propriétaire du terrain souhaite continuer son activité, le plus souvent, de nature agricole, ensuite que la rédaction de l'énoncé de la servitude soit réalisée par des notaires connaissant ces mécanismes. Cette suggestion trouverait une sécurité juridique supplémentaire si l'article 637 du code civil était complété par la phrase suivante : « la servitude peut être une charge de gestion environnementale imposée à un fonds par la volonté de l'homme, ainsi qu'il est dit à l'article 686. ». L'article 686 du code civil étant lui-même complété par la phrase suivante : « Il est permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés ou en faveur de leurs propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu néanmoins que les services établis ne soient imposés ni à la personne, ni en faveur de la personne, mais seulement à un fonds et pour un fonds ou pour la gestion ou la conservation d'un espace naturel, et pourvu que ces services n'aient d'ailleurs rien de contraire à l'ordre public » 38.
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L'essentiel de ce qu'il faut savoir sur les servitudes conventionnelles a été écrit par Max FALQUE dès les années 80 : voir en particulier « les servitudes conventionnelles, un outil de maîtrise foncière et de gestion des espaces littoraux » CERL, SOMI, décembre 1980. Voir : rapport au Ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables présenté par le Sénateur Paul RAOULT - COMOP Trame Verte et bleue, mars 2008.
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5. Conclusions et propositions
5.1. Un territoire où les jeux d'acteurs semblent désormais équilibrés
La Camargue aujourd'hui se révèle encore telle qu'elle était hier : un écosystème largement anthropisé reposant sur un appareillage hydraulique sophistiqué générant des niveaux d'eau fruit d'un compromis historique entre les saliniers, les riziculteurs, les éleveurs, les chasseurs et les naturalistes, voire les professionnels du tourisme. Est-ce l'idéal ? A-t-on atteint un équilibre satisfaisant entre tous les acteurs et, pour tout dire, se trouve-t-on dans ce territoire dans une dynamique de développement durable ? Répondre à cette question reviendrait à mesurer (mais comment en vérité ?) les fines articulations entre les trois dimensions de la durabilité, soeurs rivales d'un type de développement souhaitable. La mission a retenu que ce territoire n'est ni tout à fait naturel, ni tout à fait une « terre sauvage ». Les crues de 1993 et 1994 puis en 200339 ont rappelé, s'il en était besoin, la fragilité de la Camargue. De « milieu naturel menacé de risques humains, le delta a basculé dans la représentation d'un milieu humain menacé de risques naturels »40 ce qui a déclenché en 2005 un « plan Rhône », similaire au plan Loire. La Camargue est donc bien sous la surveillance des acteurs administratifs et, qui plus est, son agriculture bénéficie de nombreuses aides de la PAC au titre du « premier pilier» (aides à la riziculture) et du « deuxième pilier » (les mesures agroenvironnementales) qui maintiennent et soutiennent des exploitations économiquement fragiles. Il s'agit donc bien d'un territoire à l'évidente naturalité, mais dont les tenants et aboutissants relèvent également d'une évidente « humanité ». Les propriétaires fonciers qui depuis longtemps disaient pouvoir assumer à eux seuls la gouvernance de la Camargue se sont vus progressivement contraints de partager leur autorité avec les collectivités locales. Les comités de propriétaires qui assuraient la «pérennité »41 de la Camargue se sont progressivement vus dépossédés de leurs responsabilités uniques pour finalement les partager au sein de « syndicats mixtes » (syndicat mixte de gestion des digues-Symadrem, syndicat mixte du parc naturel régional-PNRC,...). Comme réponse très progressivement apportée à la nécessité d'une gestion bien comprise de la grande diversité des activités, il aura fallu presque vingt ans pour y parvenir, les acteurs camarguais se retrouvent dans des instances où le dialogue sur l'avenir du territoire porte des germes prometteurs.
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En octobre 1993, 13 000 ha de « l'ile de Camargue » ont été submergés sur une hauteur moyenne de un mètre. En 2003, c'est au tour de la camargue gardoise d'être inondée. Bernard PICON, « L'espace et le temps en Camargue », Actes Sud 2008. Voir la Fondation qui a longtemps abrité le parc naturel régional avant le GIP en 2002 et le PNRC en 2007.
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5.2 Mais dont la gouvernance globale doit être renforcée
Il n'existe pas à ce jour de structure de gestion unique ni même de réelle coordination entre les deux gestionnaires de la réserve de Biosphère Camargue. La mission n'a pas constaté de volonté manifeste de rapprochement entre les élus des deux Camargue qui affichent leurs différences culturelles. Excepté au sein du SYMADREM, chargé de la gestion des eaux, aucune instance d'échange, de concertation ou de partage d'information n'existe entre le syndicat mixte chargé de la gestion des milieux naturels gardois et le PNRC, centré sur la Grande Camargue. La culture taurine à l'ouest du petit Rhône favorise la protection des zones humides mais le handicap à une gestion commune peut s'expliquer par les particularités de la Camargue gardoise : petites parcelles et communes pratiquant l'étalement urbain (Aigues-Mortes et Grau-du-Roi). Cependant, la stabilisation du PNRC puis son renforcement devraient être sérieusement pris en compte. L'intégration des conséquences de la réforme territoriale en cours visant au rapprochement puis à la fusion de structures répondant aux mêmes finalités serait un atout pour le Parc. Une concertation entre les préfets des deux départements concernés pourrait s'avérer particulièrement judicieuse pour ne pas ériger les limites administratives en obstacle à la gestion unitaire de la réserve de biosphère. Le renforcement des outils de gestion de la réserve de biosphère qui couvre l'ensemble de l'écosystème Camargue, notamment à travers son observatoire, serait de nature à développer une culture commune entre les gestionnaires, préalable indispensable à une gestion unifiée. L'État doit bien entendu continuer de jouer les « bons offices » entre les différentes formes d'organisation locale. Le fait qu'il se soit fortement impliqué dans l'adhésion à la Charte du PNR qui, de facto s'est installé comme la seule structure capable d'une part d'agréger les visions parfois contradictoires des acteurs territoriaux et de gommer, d'autre part, les susceptibilités restantes, semble un gage de sa respectabilité. Outre ce rôle de médiation, voire d'arbitrage, l'État doit par ailleurs être en mesure de respecter ses engagements (par ailleurs prévus dans la charte) notamment en matière de respect des règles d'urbanisme et d'implication des services de police de l'environnement et de sécurité publique. Les spécificités propres à ce territoire d'exception qu'est la Camargue nécessitent d'avoir une approche coordonnée des différents services de l'État. Recommandation Pour soutenir son action auprès du PNRC dans le cadre de la mise en oeuvre de la charte et favoriser une plus grande coordination entre les gestionnaires de petite et grande Camargue, la mission suggère que soit nommé un interlocuteur spécifique du PNRC et de la réserve de biosphère au sein de la DREAL PACA.
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5.3. Le foncier : les acquisitions doivent se faire avec discernement
La mission a observé de façon approfondie l'évolution du « marché » foncier, notamment en bordure littorale. La Compagnie des Salins du Midi, pour des raisons économiques a mis en vente en 2007 plusieurs milliers d'hectares dédiés jusqu'alors à la saliculture. Le Conservatoire du littoral s'est trouvé dans l'obligation d'acheter des surfaces qui n'avaient pas toutes un intérêt écologique avéré (on pense, ici, aux tables salantes) ou qui ne faisaient pas l'objet de menaces de dégradation liées à des projets d' aménagement ou d'urbanisation. Ces zones soumises à risques de submersion sont, de plus, protégées au titre de nombreuses réglementations relevant du code de l'environnement. Dès lors, les quelques 58 millions engagés depuis 2008 par le Conservatoire avec l'appui financier des collectivités, du ministère de l'écologie, de l'agence de l'eau etc ont lourdement pesé sur ses capacités d'intervention vers des zones littorales plus menacées ou plus intéressantes au plan écologique. Par ailleurs, les caractéristiques physiques de ces terres interdit tout usage agricole. Leur vocation serait nécessairement naturelle ou cynégétique. Leur conservation en l'état actuel résulte pour partie d'importants travaux réguliers de consolidation de la digue à la mer. Compte tenu du contexte environnemental et réglementaire, la plupart des terrains utilisés pour la saliculture ne se trouvent pas dans un champ très concurrentiel du marché foncier. Qui plus est, le financement inscrit dans le protocole qui court jusqu'en 2014 n'est pas bouclé à ce jour en raison de la grande difficulté à ratifier le processus de compensation écologique lié au développement de « Fos 4XL » souhaité par le Grand Port Maritime de Marseille (cf supra). Les acteurs intervenant sur le foncier pourraient naturellement être mobilisés pour permettre des acquisitions publiques en Camargue dans les années à venir si d'autres terrains appartenant à la CSM venaient à se libérer : on pense ici aux deux établissements publics fonciers (PACA et Languedoc-Roussillon), à l'agence de l'eau RMC ou au Conseil Général des Bouches-du-Rhône , voire à la fondation MAVA. Mais, le jeu en vaut-il la chandelle sachant qu'une fois les achats fonciers réalisés (à des prix excédant ceux du marché pour des terrains inconstructibles), il reste à trouver des gestionnaires fiables, prêts à endosser les frais inhérents à un entretien nécessaire à l'ouverture au public et au respect des objectifs écologiques poursuivis42 ? Propriétaire dans la partie PACA de 23 500 ha et prochainement de 27 000 ha, soit 18% des 143 500 ha du delta du Rhône, il est possible que le Conservatoire du LittoralL soit sollicité pour acquérir d'autres propriétés , soit dans le cadre de la poursuite du désengagement des Salins du Midi soit parce que des cessions notamment agricoles interviennent de façon régulière43 dans ce territoire.
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L'étang du Vaisseau (Salin-de-Giraud) qui devrait être acquis par le CERL auprès de la CSM nécessiterait 200k annuels et 4ETP pour son entretien. Selon la SAFER 13, les propriétés changent de main en moyenne tous les 25 ans.
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Pour la mission, l'intervention du Conservatoire du littoral ne trouverait sa justification que dans l'une des deux situations suivantes : d'une part si les terrains préemptables font l'objet de menaces d'urbanisation ou de développement économique dirimant pour la pérennité de l'écosystème. Ou bien, d'autre part, pour éviter l'éventuelle mise en vente par découpe, comme cela a été le cas lors de la vente de l'étang du Lairan dans la Camargue gardoise. À l'opposé, la montée du niveau de la mer à l'horizon du siècle comprise entre 0,44 m et 1,4 m44 suggère d'adopter une attitude prudente pour d'éventuelles acquisitions de zones submersibles ou inondables 45 dans cette partie du territoire national. Recommandation Les acquisitions du Conservatoire du littoral devraient s'inscrire dans une approche stratégique reposant sur une analyse combinée de la valeur écologique propre et en lien avec le reste de l'écosystème des terrains mis en vente mais aussi d'une analyse des menaces et du risque à ne rien faire. Dans ce cadre, les acquisitions ne devraient porter que sur des zones menacées par des projets de développement, pour éventuellement faire pièce à une trop grande parcellisation des propriétés ou sur des terrains de grande valeur écologiques et afin d'établir une continuité avec des terrains déjà acquis (en particulier, les parcelles autour du Vacarès). Si la mission recommande qu'une politique d'acquisition publique soit envisagée avec prudence à l'avenir, elle n'exclut pas pour autant une intervention particulière sur les terrains jouxtant le hameau de Salin-de-Giraud si ceux-ci venaient à être mis en vente par la CSM. Plusieurs problèmes affectent en effet ce territoire. D'abord, l'inondabilité qui conduit à délimiter la partie constructible à la partie déjà urbanisée du hameau en utilisant des espaces pouvant être considérés comme des dents creuses. Ensuite, la zonation « Natura 2000 » qui oblige un maître d'ouvrage à produire une étude d'incidences ciblée sur les habitats et espèces des sites concernés avec des mesures compensatoires à la clé peu évidentes à réaliser. Des projets de réhabilitation du hameau pour, in fine, le reconvertir à des fins touristiques ne peut, selon la mission, s'envisager indépendamment de la prise en compte d'une fréquentation, pour l'heure, anarchique des plages de Piémanson et Beauduc qui justifie une action concertée de l'État et des collectivités. Recommandation Un projet global alliant des modes de transport doux permettant la mobilité des touristes entre les plages et le hameau et une conception écologique de l'habitat semble prometteur comme été acté dans la Charte du PNRC46. La mission estime qu'il pourrait s'insérer dans la convention de revitalisation CSM-État révisée à la lumière d'objectifs explicites de développement durable.
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Selon une estimation réalisée en 2011, non encore reprise par le GIEC. En simplifiant à l'extrême, est-il nécessaire d'acheter à grand prix des millions de m3 d'eau salée ?.
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5.4 D'autres outils que l'acquisition peuvent-ils être mis en oeuvre ?
Compte tenu du contexte budgétaire actuel, la mission s'inscrit donc dans le cadre d'une stratégie d'acquisition plutôt parcimonieuse et prudente de la part du Conservatoire du Littoral. Toutefois, la mission ne récuse pas une autre stratégie plus volontariste. Celle-ci allierait à la fois une volonté de soutenir par principe l'acquisition du patrimoine naturel grâce notamment à l'intervention de l'EPF PACA sur les terrains de la CSM, s'il advenait qu'ils se libèrent dans les années à venir. Ces acquisitions seraient conduites sur une durée assez courte (pas plus de quelques années), le temps que le Conservatoire du littoral retrouve sa capacité d'intervention financière. Par ailleurs, des mécanismes de servitudes conventionnelles pourraient être mises en jeu par le Conservatoire du Littoral sur des terrains jouxtant ses acquisitions. La mission est convaincue qu'il est souvent moins onéreux, comme alternative à l'acquisition foncière, de conventionner avec un propriétaire privé qui souhaite poursuivre son activité, le plus souvent agricole, le fait de ne pas modifier les niveaux d'eau, de ne pas édifier de bâtiments ou, tout simplement de ne pas modifier des façons culturales satisfaisantes du point de vue de l'environnement. La mission est d'avis que de façon systématique le Conservatoire du Littoral étudie la faisabilité de servitudes conventionnelles environnementales47 dès lors qu'une vente de terrains se profile. Recommandation Examiner la mise en oeuvre des servitudes conventionnelles environnementales en lieu et place de l'acquisition en pleine propriété à chaque fois que cela est possible (volonté du propriétaire de poursuivre son activité). La mission a évoqué le mécénat et les mesures compensatoires comme supports d'une politique d'acquisition qui ne se substituerait nécessairement pas à celle menée par les opérateurs publics, mais, qui viendrait en éventuel complément. Si le mécénat semble en théorie une piste prometteuse, ce ne peut-être que dans le cadre d'une ambition et d'une visibilité de la Camargue beaucoup plus accentuées qu'aujourd'hui. Des partenaires de prestige ne seraient, en effet, réellement intéressés par le mécénat qu'au prix d'un retour d'image d'envergure qui, de facto, nécessiterait que ce territoire naturel de renommée internationale qu'est la Camargue soit considéré
46
« L'État s'engage à accompagner une démarche en vue d'une requalification des constructions hors du domaine public maritime situées au hameau des Sablons, en tenant compte de l'ensemble des enjeux de la zone(...). Il accompagne le Parc dans la mise en oeuvre du projet de réorganistaion de la fréquentation de la plage de Piémanson ». Le mot servitude revêt une signification tellement négative qu'il conviendrait d'utiliser un autre vocabulaire : pourquoi ne pas les appeler « facilités environnementales » ?
47
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à l'égal des « Trésors nationaux » pour lesquels des dispositions fiscales48 avantageuses sont prévues.
Recommandation Même s'il est difficile de transposer purement et simplement ces avantages fiscaux à des espaces naturels, peu susceptibles de partir à l'étranger, la mission estime néanmoins utile de réfléchir à des aménagements fiscaux pour des éléments de patrimoine naturel de valeur exceptionnelle, pouvant subir des destructions ou des altérations irréversibles. En ce qui concerne le recours à des mécanismes de compensation écologiques, la mission reste dubitative sur leur utilisation généralisée pour l'acquisition de foncier en Camargue. La mission entend rappeler que la compensation ne peut se justifier qu'au travers du principe d'additionnalité : il n'y aurait aucun sens à faire acheter par des maîtres d'ouvrage des terrains non menacés pour compenser la perte d'écosystèmes remarquables du fait de leur aménagement. Dès lors, il faudra en préalable déterminer les zones à acquérir prioritairement en raison des menaces dont elles seraient l'objet avant d'envisager leur financement par des compensations. Vers une gestion intégrée de la zone côtière de la Camargue Après les inondations de 2003, un Plan Rhône piloté par le préfet coordonnateur de bassin Rhône-Méditerranée-Corse, préfet de la région Rhône-Alpes, a été mis en place, mais il ne comporte pas de volet littoral ni de plan de gestion des pertuis de Camargue afin de réguler et d'évacuer les eaux du Rhône et du Petit Rhône. Pour sa définition et son pilotage, le plan associe l'ensemble des acteurs impliqués dans la gestion du Rhône, services de l'État, collectivités territoriales et associations. Avec ce type de concertation multi-acteurs, qui existe également au sein du Parc naturel Régional, mais hors la présence de l'État, s'amorce ou pourrait s'amorcer une démarche de « Gestion intégrée des zones côtières » (GIZC) avec d'autant plus de pertinence que le Protocole GIZC à la Convention de Barcelone est entrée en vigueur le 24 mars 201149. Il s'agit du premier outil de droit international entièrement et exclusivement consacrée à la GIZC que la France est désormais tenue de mettre en oeuvre.
48
Article 238 bis O A du CGI. Achat de « trésors nationaux » menacés de quitter le territoire national et réduction d'impôt sur les sociétés égale à 90% des versements effectués. Suite à la ratification par six de ses quinze signataires : France, Slovénie, Albanie, Espagne, Union Européenne et Syrie.
49
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La mission entend souligner tout l'intérêt d'une démarche dont les principes généraux trouvent un terrain d'application idéal en Camargue. En effet, outre la gouvernance basée sur la participation au processus de décision des populations et parties prenantes de la société civile (article 6-d) et la coordination institutionnelle intersectorielle des administrations et pouvoirs régionaux et locaux sur les zones côtières (article 6-e) prônées par le Protocole et qui sont les moyens d'action, l'objectif est de « prendre en compte la richesse biologique, la dynamique et le fonctionnement naturels de la zone intertidale ainsi que la complémentarité et l'interdépendance entre la partie marine et la partie terrestre formant une entité unique » (article 6-a) En addition, le Protocole souligne que l'intégration des différents systèmes ( hydrauliques, écologiques, socio-économiques et culturels) devrait permettre de ne pas dépasser la capacité de charge de la zone côtière et de prévenir les effets négatifs des catastrophes naturelles. Le Protocole avance clairement (article 7) que la GIZC repose sur la coordination institutionnelle y compris entre les diverses autorités compétentes pour les parties maritime et terrestre. Enfin, les parties s'engagent à élaborer ou renforcer une stratégie nationale de gestion intégrée des zones côtières qui, à partir d'un diagnostic partagé, fixe des objectifs et détermine des priorités, identifie les écosystèmes côtiers nécessitant une gestion (article 18). L'évaluation environnementale stratégique des plans et programmes est conduite en tenant compte des impacts cumulatifs sur les zones côtières (article 19)50. Pour résumer, l'application du Protocole GIZC trouve tout son sens non seulement sur l'ensemble des zones côtières, mais singulièrement sur le littoral camarguais puisque toutes les variables « écosystémiques » y sont présentes et notamment les parties prenantes ( par exemple les différents syndicats mixtes : Symadrem, PNRC,...) et l'État, réunis autour d'enjeux explicitement au coeur de la démarche GIZC : prévention des risques, protection des zones humides, utilisation durable des ressources naturelles, intégration des activités économiques dans l'écosystème, etc... L'objectif inhérent à la mise en place de cette démarche serait, dans un premier temps de faire évoluer les règles de gouvernance et accroître la représentativité des participants aux organes de discussion et de décision de même que de favoriser l'apprentissage des acteurs de la gestion de l'eau et du littoral à la complexité du fonctionnement du système et de ses perspectives d'évolution. Le Parc Naturel régional de Camargue a lancé trois exercices de GIZC en 2008 51 dont un consacré à la gestion durable des tellines (coquillages pêchés sur le littoral camarguais) qui a permis des avancées intéressantes en établissant un diagnostic partagé avec les pêcheurs et en se prononçant pour des actions inscrites dans le contrat de delta.
50 51
Cette disposition existe déjà dans le droit communautaire : directive « plans-programmes » 2001/42.
La dynamique littorale et les risques côtiers, la maîtrise de la fréquentation côtière et la gestion durable
du stock de tellines (coquillage lamellibranche).
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Recommandation La mission suggère la généralisation de la démarche GIZC à l'ensemble du littoral camarguais pour servir de référence à la mise en oeuvre des politiques relatives au littoral et notamment du volet mer des SCOT52 et permettre ainsi une application du Protocole exemplaire.
52
Article R.122-3 du CU : "dans une perspective de gestion intégrée de la zone côtière, les vocations des différents secteurs de l'espace maritime, les conditions de la compatibilité entre les différents usages de ces derniers, et les conséquences qui en résultent pour l'utilisation des diverses parties du littoral qui sont liées à cet espace".
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Annexes
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1. Lettre de mission
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2. Liste des personnes rencontrées
Noms
ARMAND
Prénoms
Jean-Claude
Organismes
Conservatoire du Littoral
Fonctions
Délégué Régional Languedoc-Roussillon Directeur immobilier
Dates de rencontres
9/02
BALOSSIER
Jacques
Compagnie des Salins du Midi et des Salines de l'Est Cabinet MEDDTL CPRN/CGEDD/MEDDTL
9/02
BANEL BARTHOD
Eric Christian
Conseiller technique Ancien sous-directeur de la S/dir Espaces naturels (DEB/DGALN/MEDDTL) Chargé de mission Président Député de la Somme
21/12/2010 2/12/2010
BAYEN BIGNON
Philippe Jérôme
DDTM 13 Conservatoire du Littoral
13/01/2011 2/03
CALET
François
Syndicat des riziculteurs de Camargue Association Bovins 13 FNGDS
Président
10/03
CALLET
Marie-Pierre
Pdte Bovins13 représentante PACA à la FNGDS Sous-préfet Maire Directeur
8/03
CASTOLDI CHASSAING COLCOMBET
Pierre Rolland Yves
Sous-préfecture d'Arles Saintes-Maries-de-la-Mer Conservatoire du Littoral
11/01/2011 12/01/2011 20/12/2010 et 01/04/2011 26/01
COULET
Eric
Réserve naturelle nationale de Camargue Conservatoire du littoral délégation régionale PACA Union Régionale Vie et Nature Agence Régionale pour l'Environnement, Conseil Régional PACA
Directeur
DE LA GUERINIERE
Bénédicte
Chargée de mission
12/01/2011
DE STEPHANO
Nathalie
Directrice
9/03
DEPLATS
Christian
Conseiller Régional ancien délégué régional PACA du Conservatoire du littoral Ecologue
26/01
DEVEZE
Magali
Grand Port Maritime de Marseille Syndicat mixte de la Camargue Gardoise Conseil Général du Gard
9/03
DENAT
Jean
Président Vice Président Chargé de mission
8/02 par téléphone
ESTEVE
Roger
Conservatoire du littoral délégation régionale PACA
Direction de l'eau environnement et aménagement rural - Conseil Général du Gard
12/01/2011
EUDES
Xavier
Directeur
8/02
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Noms
Prénoms
Organismes
Fonctions
Dates de rencontres
9/03
FALQUE FOUCHIER
Max François
Juriste-consultant Conservatoire du littoral délégation régionale PACA Agence de l'Eau RhôneMéditerranée-Corse CGEDD (MEDDTL) Délégué régional
12/01/2011
FOURNIER
Gabrielle
Déléguée Méditerranée -Corse Membre de la 2è section, administrateur des Grands Ports de Marseille Directeur-adjoint
26/01
GENEVOIS
René
3/02
GERARD
Bernard
Conservatoire du Littoral
6/01/2011 (par téléphone) et 01/04/2011
GERARD
Jacky
Conseil Général des Bouches-du-Rhône Association NASICCA Grand Port Maritime de Marseille
Maire de Saint-Cannat, vice pdt du CG13 Directeur Chef du département environnement et aménagement Représentant de la chambre d'agriculture Propriétaire du domaine de Fielouse
25/01
GIRARD GRINO
Cyrille Jean-Marc
9/03 9/03
GROSSI
Alain
Propriétaire privé
5/04
HEMERY
Gaël
Parc Naturel Régional de Camargue Fondation Tour du Valat DDTM 13
Chef des projet
12/01/2011
JALBERT KRUGER
Jean Didier
Directeur général Directeur
26/01 13/01/2011 et 09/03/2011 1/04 1/01/2011
LECLERC LEFEUVRE
Anne-Sophie Cyrille
Conservatoire du Littoral Bureau intégration de la biodiversité dans les territoires (SDEN/DEB/DGALN) _
Stagiaire ENPC Chef de bureau
LEGRAIN
Dominique
Ancien Directeur adjoint du Conservatoire du Littoral et membre de l'IGE Membre permanent CGAAER ancien DDAF 13 Producteur, collecteur et négociant en riz Producteur Chef du service environnement Directeur
24/03
LEGROUX
Jean-Paul
Conseil Général de l'Alimentation, de l'Agriculture et des Espaces Ruraux (MAAPRAT) Riziculteur
1/02
MADAR
MAILLET MARTIN
Pascal
10/03
Bertrand Emmanuel
Riziculteur DDTM 13
10/03 13/01/2011
OLIVRY
Didier
Parc naturel Régional de Camargue DGALN/DEB
12/01/2011 et 04/05/2011 16/12/2010
PAYEN
Christelle
Chargée de mission
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Noms
Prénoms
Organismes
Fonctions
Dates de rencontres
10/03 1/04 8/02
PELLETIER PELTIER REGAD
Patrick Michel Jacques
SAFER Bouches-du-Rhône Conservatoire du Littoral DREAL LanguedocRoussillon DREAL PACA /SBEP DREAL PACA Parc naturel Régional de Camargue SYMADREM Conseil Général des Bouches-du-Rhône
Directeur Directeur adjoint Chef de service biodiversité , eau, paysage Chargé de mission Directeur Maire d'Arles, Pdt du PNRC, Pdt du SYMADREM Vice Pdt du CG13 Directeur Directeur
ROLLAND ROY SCHIAVETTI
Robin Laurent Hervé
12/01/2011 12/01/2011 25/01
SEGONDS SOLDAÏNI
Jean-Pierre Pierre-Louis
DDTM du Gard Établissement Public Foncier PACA Grand Port Maritime de Marseille DREAL LanguedocRoussillon Fondation Tour du Valat CDC-Bio DGALN/DEB Bureau du littoral et du domaine public maritime naturel (S/dir
9/02 13/01/2011
SPAZZI
Renaud
Directeur de l'aménagement Directrice
9/03
STEINFELDER
Mauricette
8/02
TARIS THIEVENT THIRY UHL
Jean-Paul Philippe Emmanuel Frédéric
Président Directeur Chargé de mission Chef de bureau
26/01 16/03 16/12/2010 16/12/2010
LMM/DEB/DGALN/MEDDTL)
VAN MIGOM VARDON
Karin Pascal
Sous- préfecture d'Arles DDTM 13
Chargée de mission Directeur-adjoint
11/01/2011 13/01/2011 et 9/03/2011 21/12/2010 9/02 12/01/2011
VAUTERIN VERDIER VIANET
Patrick Yvan Régis
Cabinet MEDDTL Conseil Général du Gard Parc naturel Régional de Camargue SD littoral et milieux marins (DEB/DGALN/MEDDTL)
Conseiller Vice président Directeur-adjoint
VINCE
Agnès
Sous-directrice
16/12/2010
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3. Les Mesures agroenvironnementales dans le PNRC de 2008 à 2010
Année 2008
Élevage : 866 ha souscrits pour 434 840 sur 5 ans Pâturage très extensif sur mosaïque de milieux (HE1) : 126 ha Pâturage extensif sur terre humide haute (HE2) : 388 ha Pâturage sur prairies irriguées (HE3) : 46 ha Pâturage extensif en marais (HE4) : 441 ha Agriculture : 4 704 ha pour 880 156 sur 5 ans Gestion de l'eau dans les rizières (GC1) : 4 651 ha Utilisation de pièges à pyrale (GC2) : 53 ha
Année 2009
Élevage : 512 ha souscrits pour 244 985 sur 5 ans Pâturage très extensif sur mosaïque de milieux (HE1) : 29 ha Pâturage extensif sur terre humide haute (HE2) : 260 ha Pâturage extensif en marais (HE4) : 223 ha Agriculture : 118 ha pour 21 830 sur 5 ans et 133,5 km linéaires souscrits pour 1 102 190 sur 5 ans Gestion de l'eau dans les rizières (GC1) : 4 651 ha Utilisation de pièges à pyrale (GC2) : 53 ha Entretien des fossés des 2 côtés (FO1) : 66 223 m Entretien des fossés d'1 seul côté (FO2) : 63 139 m Entretien des haies des 2 côtés (HA1) : 1 640 m Entretien des haies d'1 seul côté (HA2) : 2 560 m
Année 2010
Élevage : 44 ha souscrits pour 25 300 sur 5 ans Pâturage très extensif sur mosaïque de milieux (HE1) : 44 ha Agriculture : 453 ha pour 83 805 sur 5 ans et 4,8 km linéaires souscrits pour 40 774 sur 5 ans Gestion de l'eau dans les rizières (GC1) : 453 ha Entretien des fossés des 2 côtés (FO1) : 2 405 m Entretien des fossés d'1 seul côté (FO2) : 2 392 m
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4. Les projets d'urbanisation connus et/ou déposés
Objets
Maîtres d'ouvrages
Superficies et sites concernés 11 ha Salin-deGiraud 8,5 ha Salin-deGiraud
Observations
États des instructions
Incidences sur les zones urbanisées des hameaux Extension immédiate de la zone urbanisée
Parc photovoltaïque
Solaire direct
Gênerait l'emprise du pont envisagé par le CG 13 Projet de 61 bungalows, 36 logements collectifs, bâtiment d'accueil et commerces Déposés fin 2010 à l'instruction à la DDTM13
Refus du préfet le 26 juin 2009, en cours de relance
Résidence de tourisme
Pierre de Provence
Permis de construire signé le 5 juin 2009, contesté, investigations complémentaires en cours En cours de procédure loi sur l'eau (autorisation)
Extension immédiate de la zone urbanisée
Parcs photovoltaïques
EDFEnergies Nouvelles et CN'Air
Sur tables salantes abandonnée s par les SDM Salin-deGiraud 250 ha pour EDF ? 170 ha pour CNR ?
Modification du POS indispensable et risque inondation très important, loi littoral et Natura 2000 très contraignants N'est pas inscrit à la prochaine modification du POS d'Arles (évaluation environnementale nécessaire)
projet totalement en dehors du hameau, ce qui pose question par rapport à la loi littoral
Habitations 106 villas dont une partie en accession sociale
Urban Coop
Salin-deGiraud 3 ha
Constructions sur pilotis
Dossier en cours de validation Permis délivré en 2007, sans suite au contrôle de légalité. Projet non soumis à la loi sur l'eau (en dessous des seuils) Les travaux ont démarré, quelques villas construites, mais opération qui rencontre des difficultés de commercialisation.
Bonne insertion dans le tissu urbain (dent creuse)
Lotissement « Les Mouettes »
Participation Limited
Ex Salin du Midi
4,7 ha Salin-deGiraud
Aménagement de 85 lots par la société Hectare SA en cours de réalisation
Permis d'aménager délivré. Travaux interrompus en raison d'une pollution, l'aménagement se situant sur une ancienne déchetterie non autorisée.
Extension immédiate de la zone urbanisée
lotissement
SA SEGI Le Clos des Vanelles
4,3 ha Salin-deGiraud
Création de 33 lots résidentiels et 2 macro-lots situés en zone humide et en zone Natura 2000
Contentieux en cours à l'initiative de la ville d'Arles qui projetait la réalisation d'un camping destiné aux touristes fréquentant la plage de Piémanson Le permis tacite en date du 28/01/2010 délivré à SA SEGI, a été suspendu par ordonnance du TA de Marseille en date du 03/11/2010. Projet en négociation dans le cadre du PNRC
Extension immédiate de la zone urbanisée
Habitation ? (projet n°6)
Compagnie des Salins du Midi
100 ha Salin-deGiraud Salin-deGiraud, plage de Piémanson
Extension « démesurée » du hameau Pas d'incidence directe (plage à 10 km du hameau). Besoin induit d'un camping sur le
Aménagement d'un parking
Projet en cours d'élaboration (phase de programmation)
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hameau, en réponse à la fin de l'occupation sauvage de la plage Parc photovoltaïque 94 ha Salinde- Giraud Situation au nord de Salinde-Giraud Contraire à la charte du PNRC Centre d'hébergement pour enfants Centre de thalassothérapie Salins du Midi Hameau de Faraman Phare de Faraman Pas de suite dans l'immédiat néant Certificat d'urbanisme négatif en mars 2009
20 ha commune d'AiguesMortes
Négociation en cours pour trouver une solution acceptable
Étude d'impact demandée
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5. Glossaire des sigles et acronymes
Acronymes CDC CELRL CETE CSM DDTM DOG DPM DPU EVP GIEC GIZC IGP MAET PAC PADD Caisse des dépôts et consignations Conservatoire de l'Espace Littoral et des Rivages Lacustres Centre d'étude technique de l'Equipement Compagnie des Salins du Midi Direction départementale des territoires et de la mer Document d'orientations générales (partie du SCOT) Domaine public maritime Droits à paiement unique équivalent vingt pieds Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat Gestion intégrée des zones côtières indication géographique protégée Mesure agro-environnementale (et territoriale ) Politique agricole commune projet d'aménagement et de développement durable Significations
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Acronymes PCB Polychlorobiphényle
Significations
PHAE PNRC POS PPRI RMC SAFER
Prime Herbagère Agro-Environnementale Parc Naturel Régional de Camargue Plan d'occupation des sols Plan de prévention du risque inondations Agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural
SAN SNPN
Syndicat d'agglomération nouvelle Société nationale de protection de la nature
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6. Liste des recommandations
Pour soutenir son action auprès du PNRC dans le cadre de la mise en oeuvre de la charte et favoriser une plus grande coordination entre les gestionnaires de petite et grande Camargue, la mission suggère que soit nommé un interlocuteur spécifique du PNRC et de la réserve de biosphère au sein de la DREAL PACA. ...........................60 Les acquisitions du Conservatoire du littoral devraient s'inscrire dans une approche stratégique reposant sur une analyse combinée de la valeur écologique propre et en lien avec le reste de l'écosystème des terrains mis en vente mais aussi d'une analyse des menaces et du risque à ne rien faire. Dans ce cadre, les acquisitions ne devraient porter que sur des zones menacées par des projets de développement, pour éventuellement faire pièce à une trop grande parcellisation des propriétés ou sur des terrains de grande valeur écologiques et afin d'établir une continuité avec des terrains déjà acquis (en particulier, les parcelles autour du Vacarès). ......................62 Un projet global alliant des modes de transport doux permettant la mobilité des touristes entre les plages et le hameau et une conception écologique de l'habitat semble prometteur comme été acté dans la Charte du PNRC. La mission estime qu'il pourrait s'insérer dans la convention de revitalisation CSM-État révisée à la lumière d'objectifs explicites de développement durable. ......................................................62 Examiner la mise en oeuvre des servitudes conventionnelles environnementales en lieu et place de l'acquisition en pleine propriété à chaque fois que cela est possible (volonté du propriétaire de poursuivre son activité). .................................................63 Même s'il est difficile de transposer purement et simplement ces avantages fiscaux à des espaces naturels, peu susceptibles de partir à l'étranger, la mission estime néanmoins utile de réfléchir à des aménagements fiscaux pour des éléments de patrimoine naturel de valeur exceptionnelle, pouvant subir des destructions ou des altérations irréversibles. ............................................................................................64 La mission suggère la généralisation de la démarche GIZC à l'ensemble du littoral camarguais pour servir de référence à la mise en oeuvre des politiques relatives au littoral et notamment du volet mer des SCOT et permettre ainsi une application du Protocole exemplaire. ...............................................................................................66
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Conseil général de l'Environnement et du Développement durable 7e section secrétariat général bureau Rapports et Documentation
Tour Pascal B - 92055 La Défense cedex Tél. (33) 01 40 81 68 12/45
www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr
(ATTENTION: OPTION . Il interdit toute construction ailleurs sauf cas des zones agricoles en aléa modéré. Par ailleurs en Camargue gardoise, les spécificités relatives à la prévention des submersions marines n'ont pas encore été présentées aux communes. Seules les dispositions générales ont fait l'objet en août 201022 d' « un porté à connaissance ». Aucune carte n'a été transmise aux communes pour matérialiser les nouvelles contraintes. Plusieurs PPRI en cours d'élaboration concernent la Camargue et notamment le PPRI du Rhône (Aigues-Mortes, Saint-Gilles, Le-Grau-du-Roi...). Les aléas ont été récemment transmis aux communes. Une situation comparable est rencontrée par la commune de Saint-Laurent-d'Aigouze puisque le PPRI Basse Plaine et Camargue gardoise auquel elle appartient est à l'instruction depuis 2008. L'établissement de nouveaux documents liés à la prévention du risque conduit à restreindre les aires urbanisables et probablement dans certains cas à les supprimer. Si la DTA, dans les Bouches-du-Rhône, a contribué à clarifier les enjeux du territoire de la Grande Camargue, l'absence de vision d'ensemble entre Grande et Petite Camargue conduit à des initiatives désordonnées alors que la notion d'espaces remarquables justifie un traitement coordonné des politiques publiques.
4.2 Les désignations internationales
Au moins 14 statuts de protection (aux dispositions plus ou moins contraignantes) se superposent partiellement sur le périmètre de l'écosystème Camargue : la réserve de biosphère de Camargue (delta du Rhône), les sites Ramsar de Camargue et de petite Camargue, le parc naturel régional, la réserve nationale de Camargue, la réserve naturelle régionale, les sites NATURA 2000 de petite Camargue, de Camargue, et des marais entre Crau et Grand Rhône, les terrains du Conservatoire du littoral et de la Fondation Tour du Vallat, les espaces naturels sensibles du CG 13 et 34, la réserve de chasse marine, le périmètre d'intervention du syndicat mixte de protection et de gestion de la Camargue gardoise, le grand site de France de la Camargue gardoise, les arrêtés de protection de biotope etc.
22
Lettre du préfet des Bouches-du-Rhône aux maires le 20 août 2010 définissant le nouvel aléa à 2,50 m NGF.
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Les enjeux écologiques et fonciers en Camargue
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Créé en 1971 par l'UNESCO, le programme MAB (Man and Biosphere) vise à classer des réserves de biosphère mettant en oeuvre un programme de développement économique et social basé sur la conservation et la valorisation des ressources naturelles. La réserve de biosphère de Camargue crée en 1977 et élargie depuis, épouse les contours du delta du Rhône, des plaines au nord d'Arles aux communes de Fos-sur-Mer à l'est et du Grau-du-Roi à l'est, à cheval sur les régions PACA et Languedoc Roussillon et les départements des Bouches-du-Rhône, du Gard et de l'Hérault. Elle est constituée de trois zones centrales de 25 000 ha centrées sur l'étang de Vaccarès, l'embouchure du Grand Rhône et les marais du Vigueirat, où la priorité est donnée à la conservation, la recherche scientifique et la sensibilisation du public. Une zone tampon de 136 500 ha (dont 32 000 ha en mer), dévolue aux activités écologiquement viable couvre le reste du delta et la partie peu urbanisée de la Camargue gardoise et de la zone du marais du Vigueirat et des étangs d'Arles. Ce territoire est entouré d'une zone de transition de 33 000 ha incluant également la zone urbanisée des salins de Giraud, constituant une interface avec les trames urbaines. La responsabilité de la gestion de la réserve est dévolue au PNRC pour la partie PACA et au Syndicat mixte pour la protection et la gestion de la Camargue gardoise. La France a adhéré en 1986 à la Convention relative aux zones humides d'importance internationales dite Convention de Ramsar : 36 sites sont classés en France dont les sites de la Camargue (85 000 ha classés en 1986) et la petite Camargue (37 000ha, 1996). Les critères de classement sont liés à l'importance de ces sites pour la conservation d'espèces en danger ou d'une proportion significative de population d'une espèce (d'oiseaux principalement) ou encore pour le rôle que jouent ces zones pour le maintien d'activités économiques durables pour les populations locales. La désignation d'un site Ramsar ne constitue pas une protection règlementaire en soi mais une reconnaissance internationale de la valeur d'un site. La directive européenne 92/43/CEE dite « Habitats, faune, flore » vise à protéger la biodiversité dans les états membres notamment par la constitution d'un réseau écologique Natura 2000 constitué d'habitats prioritaires protégés dans chacune des régions biogéographiques de l'Union. Concernant la Camargue, ont été inscrits les sites :
de Camargue (113 529ha y compris une partie marine), superposée au périmètre du Parc Naturel Régional, de Petite Camargue (34 559ha) dans la partie gardoise, des marais entre Crau et grand Rhône (7 234ha), auxquels s'ajoutent deux sites fluviaux (Rhône aval et Petit Rhône).
Sur ces sites, il incombe aux états membres de garantir la préservation de ces habitats et des espèces de faune et de flore qui le composent au moyen d'un document d'objectifs. Ces DOCOB qui ont valeur de plan de gestion sont en cours de rédaction par le PNRC pour un début de mise en oeuvre prévu en 2012.
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5 autres titres internationaux reconnaissent le statut unique de la Camargue : diplôme européen et réserve biogénétique du Conseil de l'Europe, aire protégée au titre des conventions de Barcelone, de Bonn et de Berne.
4.3 Le PNRC et sa gouvernance
Même si les premières mesures de protection de la nature datent de la création de la réserve nationale de Camargue en 1927, cela ne concernait qu'un territoire restreint, limitrophe de l'étang du Vaccarès, sans moyens de gestion sur les principaux paramètres influençant l'écologie du milieu et en particulier l'eau. Dans les années 1960, le développement du pôle industriel de Fos-sur-Mer à l'est et du pôle touristique de La Grande-Motte à l'ouest menace le delta du Rhône et rend nécessaire de protéger un espace naturel déjà reconnu mondialement. La création d'un parc national23 est écartée au profit d'un parc naturel régional, dont le concept, élaboré en 1966 pour notamment équiper les grandes métropoles régionales en aires naturelles de détente, et qui paraît le mieux à même de réaliser une rupture urbaine sur le littoral en plein développement. Le PNR de Camargue est créé en 1970 avec toutefois, face à la pression des propriétaires terriens, des aménagements notables concédés par l'État au statut général des PNR : fait unique, la structure de gestion est une fondation privée dont le conseil d'administration est composé d'une majorité de représentants des intérêts locaux et en particulier le Comité des propriétaires camarguais. Ainsi dès sa création, le Parc naturel régional est placé sous le signe d'un rapport de force entre les intérêts locaux et ceux de la collectivité régionale et de l'État. Cette gouvernance particulière s'est maintenue jusqu'aux années 2000 où elle a été remise en cause par les habitants du delta en même temps que la gestion privée de l'eau. Malgré la résistance des propriétaires, la fondation privée est remplacée en 2002 par un groupement d'intérêt public dans lequel la majorité des sièges revient aux collectivités locales. Le GIP ayant été annulé en 2004 par le Conseil d'État à la suite de recours juridiques, il est remplacé par un syndicat mixte, sur le modèle de ce qui est pratiqué dans les autres PNR (mais avec toutefois une représentation des propriétaires privés) et verrouillé par une loi spécifique votée en 2007. La présidence du syndicat mixte est actuellement assurée par le maire d'Arles après l'avoir été par le président de la région PACA. La gouvernance du parc enfin stabilisée, la nouvelle charte est mise en chantier et validée (décret n° 2011-177 du 15 fé vrier 2011). Celle-ci, d'une durée de 12 ans, prévoit l'extension du PNRC à une partie de la commune de Port-Saint-Louis.
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NB : l'hypothèse de la création d'un parc national, qui pourrait revenir à l'esprit puisque cet outil a été mentionné pour les zones humides dans le cadre de la négociation du « Grenelle », n'a jamais été évoquée par les interlocuteurs de la mission. Même si beaucoup reconnaissent à la Camargue un statut proche de celui d'un parc national, celui-ci ne semble pas approprié compte tenu de la complexité des problèmes posés au sein de ce territoire en dehors des noyaux durs inhabités et en partie bien protégés dans le sud du delta. En outre, il est probable que la (ré)ouverture de ce dossier dans cet espace où les acteurs sont sortis d'une série de crises qui ont laissé des traces, retarderait la recherche de solutions concrètes aux questions qui ont été posées à la mission, et en particulier celle du foncier.
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La charte 2010-2022 a pour principales ambitions de : 1- gérer le complexe deltaïque en intégrant les changements climatiques, 2- orienter les évolutions des activités en faveur de la biodiversité, 3- Renforcer la solidarité territoriale, la cohésion sociale et améliorer le cadre de vie, 4- Partager la connaissance et ouvrir sur les coopérations méditerranéennes.
Les ambitions de la charte 2010-2022
1. gérer le complexe deltaïque en intégrant les changements climatiques · en améliorant l'organisation de la gestion de l'eau (extension du périmètre d'intervention du Parc et clarification du rôle et organisation des moyens des ASA) · en recherchant un fonctionnement plus proche des cycles naturels : amélioration des martelières et canaux d'assainissement pour éviter des déversements dans les étangs, augmentation des capacités des pertuis maritimes recréant une variabilité dans les submersions et dans la salinité des milieux · en intégrant la dynamique littorale et les risques de submersion par un suivi scientifique, la restauration du cordon littoral et la poursuite du programme d'acquisition des terrains par le CEL · en réduisant l'impact des inondations notamment par l'aménagement des digues résistantes à la surverse et des zones de ressuyage des terres pour faire face aux crues cinquantenales · en améliorant la qualité des eaux et des milieux aquatiques par la mise en place d'un réseau de surveillance et le contrôle des pollutions agricoles (MAET et canaux d'assainissement) 2. orienter les évolutions des activités en faveur de la biodiversité · conserver les espaces naturels remarquables et leurs interconnexions (création de réserves nationales, régionales et marines, d'espaces boisés classés, acquisitions foncières, etc.) · restaurer les milieux naturels et les corridors écologiques dégradés (dunes littorales, salins désaffectés, plantation de haies vives le long des canaux etc.) · conserver les habitats et les espèces prioritaires d'intérêt communautaire (cistude d'Europe, grand rhinolophe, flamant rose ...) · gérer les espèces envahissantes (y compris la coordination des luttes anti-moustiques) · pérenniser les activités favorables à la biodiversité (élevage extensif, exploitation des roselières, chasse durable, pêche responsable etc.) · améliorer les pratiques agricoles et promouvoir des pratiques culturales plus favorables à l'environnement · développer un tourisme durable et faire respecter les espaces naturels sensibles 3. Renforcer la solidarité territoriale, la cohésion sociale et améliorer le cadre de vie · promouvoir la diversité culturelle · renforcer la participation des habitants à la gouvernance du Parc et · renforcer la qualité paysagère et le cadre de vie (accompagner la reconversion du site salins de Giraud en un projet de développement exemplaire) 4. Partager la connaissance et ouvrir sur les coopérations méditerranéennes · faire de l'observatoire de Camargue l'outil de référence du delta · améliorer la cohérence des politiques publiques à l'échelle du delta bio-géographique
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Parmi les engagements de l'État dans la charte, il faut mentionner outre les soutiens habituels aux initiatives du Parc, à partager les données et soutenir la recherche scientifique :
- veiller à la mise en oeuvre du contrat de delta et élaborer le plan de prévention des risques maritimes - favoriser l'acquisition par le conservatoire du littoral de terrains. Accompagnement technique des projets de restauration pilote du littoral et favoriser la coopération entre les deux régions. - mise en place par l'agence de l'eau RMC d'un suivi scientifique du bon état écologique du delta - suivi et contrôle des communes pour la mise en place de l'assainissement urbain et suivi des PCB - soutien aux actions de conservation des milieux (charte forestière, forêts alluviales, APB, réserve marine, rédaction et mise en oeuvre DOCOB Natura 2000...) et des espèces prioritaires - mise en place par le CEL d'une stratégie d'intervention foncière avec le PNR et les gestionnaires d'espaces naturels basée sur une analyse multicritères des enjeux et associer le PNRC à la gestion des terrains acquis - collaboration des services de police de l'environnement avec les agents assermentés des espaces protégées - promotion à travers des contrats Natura 2000 et MAE des pratiques culturales diminuant l'impact sur l'environnement (réduction des pesticides, développement de l'agriculture biologique ...) - accompagner le Parc dans la définition d'aménagements pertinents pour maîtriser les accès et les usages des zones littorales marines et des plages menacées de fortes fréquentations - surveiller le DPM et le libérer des occupations sans autorisations, contrôler le braconnage - prise en compte du Plan Rhône et de la DTA dans les documents d'urbanisme et veiller à la cohérence des projets d'aménagement d'infrastructures de transport avec la charte - accompagner la réorganisation de la fréquentation sur la plage de Piémanson - contribuer à la charte paysagère et la rédaction de prescriptions architecturales par le PNRC - prendre en compte la biodiversité dans les projets d'aménagement structurants - soutenir les programmes de recherche (IFREMER, CEL), l'observatoire de Camargue, l'éducation et l'information environnementale et encourager les actions innovantes de coopération...
Le PNRC, de l'aveu de quasiment tous les interlocuteurs, apparaît comme le seul acteur crédible pour marier des objectifs de la protection de la nature et des axes de développement économique -d'autant plus qu'il est également chargé d'assurer le bon fonctionnement de la réserve de biosphère dans les Bouches-du-Rhône. N'apparaissant pas comme un organisme régalien détenteur de moyens directement contraignants (même s'il détient une capacité d'influence fondée sur ses connaissances), il dispose aujourd'hui de bons atouts pour s'ériger en point focal de toutes les politiques qui contribueront à assurer la préservation de la biodiversité en Camargue.
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Comme le parc n'a pas vocation à arbitrer des conflits éventuels et qu'il n'exerce pas de compétence sur une partie importante de la Camargue située dans le département du Gard, il ne peut à lui seul incarner « la gouvernance de la Camargue ». Il est donc particulièrement important que l'État respecte les engagements qu'il a pris auprès de lui et veille à une similitude de l'interprétation et du respect des lois sur l'ensemble du territoire de la réserve de biosphère en attendant un rapprochement des gestionnaires...
4.4 Les acquisitions publiques
Les communes, les départements, le Conservatoire du Littoral ont compétence pour acquérir des terrains afin d' assurer une conservation durable du patrimoine qu'ils représentent. Ainsi, les 10 communes du delta totalisent 4378 ha de territoires acquis dans cet objectif. Sur les terrains communaux sont maintenues le plus souvent des activités liées à l'exploitation des ressources naturelles (coupe du roseau et chasse dans les marais, élevage extensif de taureaux et de chevaux, pêche en étang ...). Les départements des Bouches-du-Rhône procèdent par le biais de la Taxe Départementale des Espaces Naturels Sensibles (TDENS : environ 4 M chaque année) à l'acquisition de domaines afin de les soustraire à toute spéculation foncière. Ainsi, le Département des Bouches-du-Rhône à lui seul a acquis plus de 3 500 ha de propriété en Camargue dont le complexe des étangs de Consécanière et des Impériaux24. Le Conservatoire du Littoral, établissement public, a dans ses missions la protection des milieux littoraux par l'acquisition foncière de territoires dans un but de protection et d'ouverture maîtrisée au public. Ses critères de choix de terrains à acquérir sont motivés par le risque d'urbanisation, de parcellisation ou par l'artificialisation (par exemple le comblement des zones humides).L'intervention foncière peut avoir lieu également si le site s'est dégradé et nécessite une réhabilitation rapide ou si le site est fermé au public alors qu'il mériterait d'être ouvert à tous. Dans le delta du Rhône, le Conservatoire du Littoral possède un ensemble de sites représentant une surface de plus de 25 000 ha, y compris les 13 118 ha de la réserve nationale de Vacarès depuis 2008, soit environ 18 % de la superficie de la réserve de biosphère. La gestion des propriétés acquises par le conservatoire est confiée aux communes où à des organismes reconnus compétents en matière de gestion d'espaces naturels. Certains sont, avec ou sans structure d'accueil, ouverts au public comme le Vigueirat (960 ha), le Domaine de la Palissade (702 ha), le Boucanet .
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En 2010, ce département était propriétaire de 16 000 ha, soit 3,2% de sa superficie.
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4.4.1 L'intervention du Conservatoire du littoral dans le cadre du protocole signé en 2009 avec les Salins du Midi Les acquisitions publiques réalisées en Camargue représentent un total d'environ 30 000 ha dont la majorité est détenue par le Conservatoire du Littoral. L'étang du
Vaccarès compte à lui seul pour 13 118 ha. Un quart du territoire camarguais est ainsi durablement protégé par l'action conjointe de cet opérateur et des collectivités territoriales (Conseils généraux et communes) sans compter celle de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse qui a été fortement mobilisée lors de l'achat des terrains appartenant à la Compagnie des Salins du Midi en 2009. Il fallait, en effet, intervenir à hauteur de 45 millions pour acheter une première tranche de 5 100 ha mise en vente par la CSM au prix de 0,88 /m² avec un étalement des paiements s'étageant entre 2010 et 2013.
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Le financement s'est établi de la façon suivante :
Conservatoire du littoral.......................... 15M dont 5M au titre du FEDER Ministère de l'écologie............................ 10M Agence de l'eau........................................9M Grand Port Maritime de Marseille.............8M Conseil général 13...................................3M
Resteraient à acquérir, aux termes du protocole signé entre la CSM et le Conservatoire du Littoral un peu plus de 500 ha en 2011. Ce « tour de table » implique le Grand Port Maritime de Marseille (GPMM) pour une somme de 8 millions dans le cadre d'un processus de compensation pour la destruction de 300 ha environ de marais (le « Caban Nord ») situés dans son emprise. Le GPMM devait en effet utiliser l'opportunité de la vente des terrains des Salins du Midi aux titres des mesures compensatoires liées à l'aménagement de la darse 2 (creusement d'un chenal d'accès au canal de Fos-sur-Mer et aménagement à terme de l'ensemble de la zone (projet FOS 4XL)). Or, comme la mission a pu le vérifier sur place, la zone dite Caban Nord présente des caractéristiques écologiques telles que les mesures compensatoires envisagées ne seront probablement pas suffisantes pour en autoriser l'aménagement. Ceci reflète en partie la fragilité du montage financier pour ces acquisitions de terrains. Quoique intéressantes de par leur situation littorale les zones utilisées pour la saliculture n'étaient pas convoitées pour des usages qui auraient mis en question l'intégrité patrimoniale de la Camargue. Aussi, peut-on s'interroger sur la décision qui aura conduit le Conservatoire à acheter l'ensemble de ces surfaces puisque les strates de protection qui s'y superposent (Natura 2000, zonages CU, risques de submersion25), sans parler de la difficulté à gérer les niveaux d'eau après l'arrêt de l'activité et à trouver des gestionnaires efficaces sont autant d'obstacles placés sur sa route. L'assèchement des moyens d'intervention du Conservatoire lui aura interdit par ailleurs de se porter acquéreur des 2 500 ha des lagunes du Lairan situées dans le Gard et mises en vente également par la CSM pendant la même période. Les collectivités auraient pu se porter acquéreur de ce terrain mis à prix 25 M en lieu et place du Conservatoire en utilisant la TDENS. Mais les élus du Languedoc-Roussillon au conseil de rivages Méditerranée ont souhaité préserver l'option d'un maintien de l'intégrité du périmètre industriel actuel. Ils ont estimé qu'il était impossible que de l'argent public soit dépensé pour casser une partie de l'outil de production des Salins, subventionner de fait les suppressions d'emploi en résultant, enrichir les actionnaires de la compagnie et participer à son démantèlement. Cependant, le groupe Salins a poursuivi la mise en vente en proposant un allotissement et en définitive deux des quatre lots ont trouvé des acquéreurs privés, intéressés par ces terrains pour leur utilisation à des fins cynégétiques. Pour les deux lots d'une surface totale de 1 000 ha qui restent en vente, le Conservatoire du Littoral n'a ni les moyens, ni le désir de se porter acquéreur dans la mesure où l'intérêt de parcelles plus petites apparait avec moins d'évidence.
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Il existe des PPRI prescrits pour Saintes-Maries de la Mer, Arles, Port-Saint-Louis-du-Rhône qui seront complétés par un arrêté sur les risque inondation par débordement du Rhône et submersion marine.
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Il faut noter qu'à chaque fois qu'un terrain est mis en vente dans le territoire camarguais, il y a de façon quasi automatique l'idée d'un appel au Conservatoire. D'autres propriétés pourraient être mises à la vente dans les mois ou années à venir dans la réserve de biosphère dans des zones de préemption du Conservatoire ou de celle des collectivités. Faut-il que le Conservatoire intervienne à tout coup et à tout prix ? Cette question sera examinée dans la partie consacrée aux recommandations, mais, en première analyse, l'absence de menaces d'urbanisation ou d'artificialisation dues à la difficulté de passer outre l'empilage des protections réglementaires et internationales ou bien même de trouver des projets de développement qui compromettraient, de par leur nature, l'environnement et les équilibres existants entre les usages agricoles, récréatifs et naturalistes, plaide pour recommander la plus grande prudence dans la stratégie foncière du Conservatoire. 4.4.2 L'intervention foncière de l'agence de Méditerranée-Corse (RMC) sur les zones humides l'eau Rhône-
En février 2010, la secrétaire d'État à l'écologie avait présenté le plan national d'actions pour la sauvegarde des zones humides qui prévoyait de mobiliser 20 millions en 3 ans pour financer 29 actions, et pour lancer un parc national situé en zone humide de même que 6 nouveaux sites Ramsar. La maîtrise foncière est clairement un levier de ce plan qui, à la suite du Grenelle de l'environnement mettait en avant l'objectif de 20 000 ha de zones humides à acquérir au niveau national. Cet objectif s'est traduit au sein des contrats d'objectifs des agences de l'eau. Pour l'agence de l'eau RMC, l'acquisition de 1 663 ha a été actée dans son contrat d'objectif. L'agence de l'eau RMC a financé 73 opérations d'acquisition foncière pour un montant d'autorisations de programme de 21 millions . La surface acquise au titre du 9ème programme d'action par le Conservatoire du littoral auprès de la CSM, comme il a été mentionné plus haut aura été financée par l'agence à hauteur de 13,5 millions (9 millions pour Galabert et Beauduc en 2009 et 3,964 millions pour les autres terrains des Salins en 2007). Le taux de participation (subvention au Conservatoire) s'établit à 21 %. À noter que l'agence RMC a signé un accord-cadre avec la SAFER de PACA qui réalise une veille sur les transactions de vente pouvant constituer une opportunité de préservation de zones humides. En effet, la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (Grenelle 2) dispose que les acquisitions concernant des terres admissibles au paiement unique des aides agricoles (DPU) le sont par le biais du droit de préemption des SAFER sur proposition de l'agence de l'eau. L'acquisition directe des zones humides par l'agence, si elle est rendue possible par la loi, (voir l'encadré ci-dessous) peut susciter des interrogations au sein de l'établissement ainsi que parmi ses partenaires sur le terrain, résumées ainsi par l'agence de l'eau RMC elle-même26:
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« Stratégie d'intervention pour l'acquisition foncière des zones humides », Commission relative au milieu naturel aquatique Rhône -Méditerranée, Séance du 29 mars 2011.
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Article L213-8-2 du Code de l'environnement Créé par LOI n° 2010-788 du 12 juillet 2010 - art. 133 L'agence de l'eau mène, outre les missions définies à l'article L. 213-8-1, une politique foncière de sauvegarde des zones humides approuvée par le comité de bassin. À ce titre, elle peut attribuer des aides à l'acquisition par des conservatoires régionaux d'espaces naturels, par des collectivités territoriales, leurs groupements ou des établissements publics de parcelles composant ces zones. L'agence de l'eau peut acquérir ou faire acquérir des parcelles dans les zones humides à des fins de lutte contre l'artificialisation des sols et de valorisation, notamment agricole.
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le positionnement de l'agence auprès des autres acheteurs potentiels que sont les collectivités et les Conservatoires, qui risquent de se retirer en proposant que l'agence réalise elle-même l'achat, ce qui leur permet d'éviter les difficultés liées à l'opération ; la perturbation du marché foncier local par l'arrivée d'un opérateur ayant des possibilités financières élevées et une faible expérience du marché local ; les critères de choix des terrains sur lesquels l'agence devrait intervenir ; quels partenariats avec les opérateurs fonciers habituels ?
En interne, les questions posées portent sur l'exercice d'un métier entièrement nouveau pour une agence de l'eau : comment conduire l'acquisition et comment gérer les terrains acquis ? Pour obtenir des éléments de réponse à ces questions, il faut que l'agence procède à un audit de ses conditions potentielles d'intervention, en saisissant une ou plusieurs opportunités d'acquisitions permettant de réduire au maximum les inconvénients cités ci-dessus, comme des zones humides à fort enjeu, pour lesquelles l'acquisition est nécessaire pour assurer leur sauvegarde ou leur restauration, et sur lesquelles il n'y a pas de maître d'ouvrage susceptibles d'intervenir. L'agence de l'eau, en exprimant ces réserves, vient souligner que le métier d'opérateur foncier ne se décrète pas, et, qu'en effet, une stratégie concertée avec des partenaires-professionnels du foncier ne peut qu'être bienvenue.
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Carte des acquisitions du sud-est Camargue (PNRC)
4.4.3 La réserve foncière des établissements publics fonciers (EPF) Le rôle des Établissements publics fonciers consiste à acquérir des propriétés bâties et non bâties à la demande de l'État, des collectivités territoriales,ou d'établissements publics tels que les chambres de commerce et d'industrie, permettant à ces partenaires de réaliser à terme leurs projets d'aménagement. Les objectifs essentiels sont, d'une part, d'assurer la disponibilité des biens au moment opportun, sans apport financier de la part de la collectivité pendant la durée de la réserve foncière, de faciliter ainsi la préparation du projet d'aménagement, d'autre part, de préserver de bonnes conditions de négociation et de mener une action régulatrice sur le marché foncier. Dans le Var, l'EPF PACA s'est déjà porté acquéreur d'un terrain préempté par la SAFER pour le compte du Conservatoire du littoral. Le portage aura duré trois ans, le temps que le budget de l'établissement permette l'achat. Sa priorité d'intervention se situe dans le secteur du renouvellement urbain et la densification. Dès qu'il y a
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extension urbaine, il faut envisager des mesures compensatoires mais, selon l'EPF, les terrains de la CSM ne se prêtent pas à l'expression de mesures compensatoires puisque les menaces d'artificialisation sont quasiment nulles. Pourtant, l'EPF PACA, dans son programme prioritaire d'intervention, identifie un axe 7 « La protection des espaces naturels remarquables »27 et notamment ceux « menacés par le développement urbain ou la fréquentation incontrôlée du public ». La mission considère que cet outil peut se révéler utile en cas de nouvelles cessions massives de foncier. L'EPF serait alors en mesure de permettre l'étalement des acquisitions par le Conservatoire du Littoral en fonction de ses capacités budgétaires. Ce modus operandi est compatible avec l'axe 728. Toutefois, si les EPF sont placés sous la tutelle du préfet de région, la décision relève d'un conseil d'administration composé d'une majorité d'élus locaux. L'EPF Languedoc-Roussillon avait arrêté en 2009 en accord avec le délégué régional du Conservatoire du Littoral une série acquisitions-relais pour des terrains situés en petite Camargue. Le protocole avait été présenté et validé au bureau de l'EPF avant que le président de l'époque n'en décide l'ajournement. L'axe 3 du PPI qui représente environ 7,5 % de ses priorités budgétaires l'autorise en effet à pratiquer l'acquisition d'espaces naturels remarquables.
4.5 Les autres outils d'intervention
4.5.1 Les mesures compensatoires Lorsqu'un la réalisation d'un projet porte atteinte à l'environnement et si le maître d'ouvrage n'est pas en mesure d'éviter, et de réduire ses impacts, des mesures de compensation doivent être proposées dans le cadre de l'évaluation environnementale. Le code de l'environnement se réfère à la notion de mesures compensatoires dans divers cas : - En matière d'étude d'impact29 : les travaux et aménagements qui y sont soumis doivent prévoir, « le cas échéant, les principales mesures destinées à éviter, réduire et si possible compenser les effets négatifs importants du projet ». Plus précisément, l'étude comprend « les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ».
27
Le PPR indique notamment « L'EPF poursuivra notamment son partenariat avec le Conservatoire du littoral, pour la sauvegarde des derniers espaces naturels littoraux en PACA, en intervenant principalement sur des sites charnières entre espaces naturels et espaces urbanisables afin de fixer définitivement les limites de l'urbanisation », PPI p 49.
28
dont le texte détaillé rappelle « l'EPF n'a pas vocation à conserver les biens acquis car à l'issue d'une durée limitée de portage il doit revendre ces biens aux acteurs concernés par la mise en oeuvre du projet définitif et la gestion ultérieure de ces espaces ».
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Articles L. 122-1, L. 122-3 et R. 122-3 du code de l'environnement.
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En ce qui concerne l'évaluation des incidences des programmes et projets soumis à autorisation ou approbation en sites Natura 2000 au titre de la Directive n° 92/43/CEE du 21 mai 1992 dite Directive Habitats : « Le dossier d'évaluation d'incidences, établi par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage, comprend : [...]Lorsque, malgré les mesures prévues au II (mesures de nature à supprimer ou réduire ces effets dommageables), le programme ou projet peut avoir des effets notables dommageables sur l'état de conservation des habitats naturels et des espèces qui ont justifié la désignation du ou des sites, le dossier d'évaluation expose en outre : 1° les raisons pour lesquelles il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et les éléments qui permettent de justifier la réalisation du programme ou projet dans les conditions prévues aux III ou IV de l'article L. 414-4 ; 2°- les mesures que le maître d'ouvrage ou le pétitionnaire envisage, en cas de réalisation du programme ou projet, pour compenser les effets dommageables que les mesures prévues au II ne peuvent supprimer, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes »30. De même, « Lorsqu'une évaluation conclut à une atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000 et en l'absence de solutions alternatives, l'autorité compétente peut donner son accord pour des raisons impératives d'intérêt public majeur. Dans ce cas, elle s'assure que des mesures compensatoires sont prises pour maintenir la cohérence globale du réseau Natura 2000. Ces mesures compensatoires sont à la charge de l'autorité qui a approuvé le document de planification ou du bénéficiaire du programme ou projet d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations, de la manifestation ou de l'intervention. La Commission européenne en est tenue informée »31. C'est dans ce cadre réglementaire que la question s'est posée de recourir à l'acquisition foncière en Camargue pour compenser des atteintes à des sites de grande valeur écologique 7 localisés dans le périmètre du Grand Port Maritime de Marseille(GPMM)32. Il s'agit d'anciens salins classés en Zone de Protection Spéciale au titre de la Directive Oiseaux (voir aussi le chapitre 2.5 du rapport). Plusieurs inventaires réalisés depuis 2008 ont d'autre part mis en évidence leur importance exceptionnelle à l'échelle européenne pour la conservation des habitats, de la flore et de la faune, avec notamment la présence de plusieurs habitats prioritaires de la Directive Habitats et la redécouverte d'espèces végétales endémiques de l'ouest du Bassin méditerranéen que l'on croyait disparues du territoire national. Le GPPM a été sollicité pour participer à l'achat des terrains des Salins du Midi en 2009 à hauteur de 8 millions soit un peu moins de l'équivalent de 1 000 ha de lagunes au prix (très élevé par rapport au marché) de 0,9 /m²33.
30 31 32
Article R. 414-21 du code de l'environnement. Article L. 414-4 VII du code de l'environnement. Il s'agit de creuser un chenal et d 'aménager la majeure partie des 650 ha de la lagune « Caban Nord ». À noter que sur un site à enjeux majeurs le ratio de compensation est compris en 5 et 10 (DREAL PACA).
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La mobilisation des associations a remis en question ce processus de compensation qui se heurte à la difficulté de mettre en oeuvre le principe d'équivalence. En effet, les espèces protégées qui seraient détruites au cas où l'aménagement se réaliserait n'existent pas dans les terrains de la CSM rachetés par le Conservatoire du littoral, avec le concours financier de différents opérateurs dont le GPMM. Au-delà de ce cas spécifique, existe-t-il des cas où l'acquisition foncière de terrains mis en vente en Camargue pourraient être utilisés à des fins de compensation écologique ? Par exemple, un maître d'ouvrage concerné par l'obligation de recourir à des mesures compensatoires achèterait en pleine propriété des terrains dans lesquels se trouvent les espèces à valeur patrimoniale équivalentes à celles impactées par son projet, ou bien, par l'effet d'une servitude conventionnelle sur le même type de zone s'assurerait ainsi de leur préservation. La mission a entendu la CDC Biodiversité exposer son expérience de création d'un terrain de 357 ha de coussouls dans la plaine de Crau en 2009. Ce terrain peut être aujourd'hui utilisé pour des mesures compensatoires dans le cadre d'un projet dont les impacts seraient dommageables au même type d'habitat. La maîtrise foncière et la vocation écologique pérennisée de la zone permettent d'attribuer des « crédits « biodiversité » aux maitres d'ouvrage qui en font l'acquisition, avec l'assurance d'un suivi scientifique. Cette pratique couramment utilisée aux États-Unis reste rare en France. La difficulté d'une telle démarche repose sur la mise en oeuvre du principe d'additionnalité : il s'agit, en effet, d'éviter de compenser les destructions d'habitat avec des terrains qui ne sont pas menacés. Dans le cas de la Crau, il y a eu création d'un nouvel habitat spécifique dans cette zone steppique très rare en France, puisque antérieurement aux travaux d'ingénierie écologique, il y avait un verger de pêchers. Aujourd'hui, il ne semble pas que les opérations de compensation passant par de la simple acquisition foncière soient réalisables en Camargue, en tout cas, sans y avoir identifié en préalable les priorités d'action reliées à des menaces potentielles. Cependant, l'acquisition par le Conservatoire du Littoral de terrains non menacés mais qui s'accompagnerait d'une réhabilitation des milieux pourrait éventuellement être utilisée dans le cadre de mesures compensatoires à condition que l'achat concerne des zones convoitées risquant de changer d'usage et, partant de remettre en question leur pérennité écologique. La mission estime cependant que ce genre d'opération ne peut être qu'exceptionnelle tant est difficile à démontrer l'additionnalité de la réhabilitation écologique qui se borne souvent à répondre à la « non gestion » d'un terrain par de l'ingénierie écologique légère.
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4.5.2 Le mécénat34 Le mécénat est souvent invoqué dès lors qu'il s'agit de trouver des financements pour assurer la protection d'espaces de valeur. Dans le cas de la Camargue, il peut s'agir de trouver des moyens financiers supplémentaires pour procéder à des acquisitions foncières. Mais, compte-tenu des valeurs estimées des domaines à acquérir, ce ne sont pas les dizaines de milliers d'euros que les fondations d'entreprises sont habituées à financer qui sont à la hauteur des enjeux. En réalité, ce sont plusieurs millions d'euros qu'il convient de mobiliser, dans le cadre d'accords de partenariat pluriannuels, dans la mesure où les entreprises ou une fondation d'entreprises préfèrent inscrire leurs opérations de parrainage dans la durée. Par ailleurs, il convient de garder à l'esprit que les entreprises ne s'engagent pas à fonds perdus. Il ne faut pas confondre philanthropie individuelle et mécénat d'entreprise. Au risque d'être accusée d'abus de bien social, l'entreprise doit avoir intérêt à agir. D'où la question des avantages que l'entreprise peut tirer d'un soutien à l'acquisition de propriétés camarguaises au profit du Conservatoire du Littoral ou d'une quelconque collectivité publique ? Parmi les mécènes susceptibles d'intervenir appartiennent à la catégorie des « grands donateurs », deux cas de figure se présentent : des mécènes privés agissant en nom propre. Le cas classique est celui d'un propriétaire qui fait en sorte qu'après lui son domaine soit définitivement consacré à la conservation de la nature. On peut citer celui d'une autre zone humide importante de France, le lac de Grandlieu en Loire-Atlantique (6000 ha), dont la majeure partie a été donnée à l'État par Jean-Paul GUERLAIN, constituée en réserve nationale naturelle, est gérée par la SNPN comme le Vaccarès et à été versée au patrimoine du Conservatoire du Littoral. Mais ce type de démarche, relativement rare en France s'agissant de grandes superficies, n'est possible qu'en cas d'appropriation individuelle préalable par un ami de la nature. des entreprises ou fondations d'entreprise. Elles sont peu nombreuses à pouvoir intervenir pour de tels montants. Citons la fondation Total qui a signé deux conventions successives de trois ans de 8 M chacune avec la Fondation du Patrimoine pour la protection du patrimoine industriel (période 2006/2011). En tout état de cause, ce type de démarche obéit à des règles. Par exemple, pour qu'il ait un sens, le mécénat doit s'inscrire dans une véritable stratégie clairement affichée par les pouvoirs publics. Il s'agirait de faire dans le domaine de la protection de l'environnement et de la biodiversité ce qui s'accomplit de façon de plus en plus fréquente, avec succès, dans le domaine culturel pour la protection de « Trésors nationaux » en faisant largement appel au mécénat privé35.
34
Cette partie a été rédigée avec l'aide de M. Dominique LEGRAIN, ancien Inspecteur général au Service d'Inspection Générale de l'Environnement (SIGE) du ministère de l'écologie. Exemple des « Trois Grâces » de Cranach (4M) dont l'acquisition a été faite par Le Louvre en collectant des dons de particuliers et d'entreprises.
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Ceci aurait pour conséquence de valoriser la Camargue au titre de « Patrimoine national », labellisation pouvant correspondre à la notion de « Trésor national » prévue par la loi pour les éléments du patrimoine culturel. Cette démarche nécessite une implication forte du Gouvernement et, accessoirement la mise en place d'une cellule opérationnelle dédiée pour suivre un dossier de cette ampleur. Bien sûr, il s'agit d'apprécier les avantages que pourrait recevoir le mécène, entreprise ou fondation d'entreprise. On peut penser en termes de gain de notoriété venant d'une forte reconnaissance des pouvoirs publics dans le cadre d'une opération de dimension nationale. On peut également imaginer que le mécène puisse bénéficier d'avantages liés à l'acquisition elle-même : jouissance de bâtiments, par exemple, sur le domaine acquis au profit du Conservatoire du Littoral CL ou d'une collectivité publique, dans le cadre d'un bail de longue durée pour des réceptions de prestige, des évènements culturels, ... 4.5.3 Les servitudes conventionnelles Le concept d'appropriation publique des espaces menacés ou fortement convoités est bien reçu par l'opinion publique, mais les répercussions financières et les aléas de gestion sont tels qu'il convient de ne pas sous-estimer les limites d'une politique de préservation du littoral entièrement fondée sur la maîtrise foncière. Ceci est corroboré par le fait que les communes littorales sont assez réticentes à recevoir en pleine propriété des espaces dont il est entendu qu'ils resteront en l'état. Ainsi, s'explique le faible appétit des collectivités locales pour accepter la cession de 9/10e d'une propriété contre une autorisation de construire sur 1/10e de l'espace (Article L.130-2 à 130-4 du Code de l'Urbanisme) et pour gérer les espaces acquis par le Conservatoire du littoral. La servitude conventionnelle environnementale repose sur un mécanisme simple. Un vendeur et un acquéreur conviennent qu'une disposition particulière (l'interdiction d'édifier un bâtiment ou de changer l'affectation des sols) frappant un terrain soit inscrite aux hypothèques. Dans ce cas, il y a un fonds dominant (celui qui édicte la servitude) et celui qui l'accepte (le fonds servant)36. Est-il possible d'introduire dans la politique de protection du littoral du Conservatoire le principe de l'utilisation des servitudes conventionnelles ? Le Conservatoire du Littoral, soucieux d'une gestion économe de son budget pourrait dans certains cas devenir titulaire de servitude à condition que le terrain « fonds servant » se trouve en contiguïté du fonds qu'il détient et que la servitude n'introduise pas d'obligations positives. Autrement dit, si le Conservatoire du littoral ne se contente pas d'acheter une servitude non aedificandi sur un domaine agricole mais qu'il oblige à maintenir un type d'activité qui ne compromette pas la préservation de la zone, il doit faire apparaître ces obligations comme des « accessoires » distincts de la servitude37.
36
Articles 637 et 638 du Code Civil.
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Il semble que dans de nombreux cas, le Conservatoire pourrait constituer des servitudes conventionnelle de droit privé portant sur les seuls éléments que la puissance publique entend acquérir à des fins de protection, par exemple la nonconstructibilité, limitant ainsi les coûts d'acquisition et de gestion. Deux conditions s'attachent à la mise en place de servitudes conventionnelles : d'abord, et de façon évidente, que le propriétaire du terrain souhaite continuer son activité, le plus souvent, de nature agricole, ensuite que la rédaction de l'énoncé de la servitude soit réalisée par des notaires connaissant ces mécanismes. Cette suggestion trouverait une sécurité juridique supplémentaire si l'article 637 du code civil était complété par la phrase suivante : « la servitude peut être une charge de gestion environnementale imposée à un fonds par la volonté de l'homme, ainsi qu'il est dit à l'article 686. ». L'article 686 du code civil étant lui-même complété par la phrase suivante : « Il est permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés ou en faveur de leurs propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu néanmoins que les services établis ne soient imposés ni à la personne, ni en faveur de la personne, mais seulement à un fonds et pour un fonds ou pour la gestion ou la conservation d'un espace naturel, et pourvu que ces services n'aient d'ailleurs rien de contraire à l'ordre public » 38.
37
L'essentiel de ce qu'il faut savoir sur les servitudes conventionnelles a été écrit par Max FALQUE dès les années 80 : voir en particulier « les servitudes conventionnelles, un outil de maîtrise foncière et de gestion des espaces littoraux » CERL, SOMI, décembre 1980. Voir : rapport au Ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables présenté par le Sénateur Paul RAOULT - COMOP Trame Verte et bleue, mars 2008.
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5. Conclusions et propositions
5.1. Un territoire où les jeux d'acteurs semblent désormais équilibrés
La Camargue aujourd'hui se révèle encore telle qu'elle était hier : un écosystème largement anthropisé reposant sur un appareillage hydraulique sophistiqué générant des niveaux d'eau fruit d'un compromis historique entre les saliniers, les riziculteurs, les éleveurs, les chasseurs et les naturalistes, voire les professionnels du tourisme. Est-ce l'idéal ? A-t-on atteint un équilibre satisfaisant entre tous les acteurs et, pour tout dire, se trouve-t-on dans ce territoire dans une dynamique de développement durable ? Répondre à cette question reviendrait à mesurer (mais comment en vérité ?) les fines articulations entre les trois dimensions de la durabilité, soeurs rivales d'un type de développement souhaitable. La mission a retenu que ce territoire n'est ni tout à fait naturel, ni tout à fait une « terre sauvage ». Les crues de 1993 et 1994 puis en 200339 ont rappelé, s'il en était besoin, la fragilité de la Camargue. De « milieu naturel menacé de risques humains, le delta a basculé dans la représentation d'un milieu humain menacé de risques naturels »40 ce qui a déclenché en 2005 un « plan Rhône », similaire au plan Loire. La Camargue est donc bien sous la surveillance des acteurs administratifs et, qui plus est, son agriculture bénéficie de nombreuses aides de la PAC au titre du « premier pilier» (aides à la riziculture) et du « deuxième pilier » (les mesures agroenvironnementales) qui maintiennent et soutiennent des exploitations économiquement fragiles. Il s'agit donc bien d'un territoire à l'évidente naturalité, mais dont les tenants et aboutissants relèvent également d'une évidente « humanité ». Les propriétaires fonciers qui depuis longtemps disaient pouvoir assumer à eux seuls la gouvernance de la Camargue se sont vus progressivement contraints de partager leur autorité avec les collectivités locales. Les comités de propriétaires qui assuraient la «pérennité »41 de la Camargue se sont progressivement vus dépossédés de leurs responsabilités uniques pour finalement les partager au sein de « syndicats mixtes » (syndicat mixte de gestion des digues-Symadrem, syndicat mixte du parc naturel régional-PNRC,...). Comme réponse très progressivement apportée à la nécessité d'une gestion bien comprise de la grande diversité des activités, il aura fallu presque vingt ans pour y parvenir, les acteurs camarguais se retrouvent dans des instances où le dialogue sur l'avenir du territoire porte des germes prometteurs.
39
En octobre 1993, 13 000 ha de « l'ile de Camargue » ont été submergés sur une hauteur moyenne de un mètre. En 2003, c'est au tour de la camargue gardoise d'être inondée. Bernard PICON, « L'espace et le temps en Camargue », Actes Sud 2008. Voir la Fondation qui a longtemps abrité le parc naturel régional avant le GIP en 2002 et le PNRC en 2007.
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5.2 Mais dont la gouvernance globale doit être renforcée
Il n'existe pas à ce jour de structure de gestion unique ni même de réelle coordination entre les deux gestionnaires de la réserve de Biosphère Camargue. La mission n'a pas constaté de volonté manifeste de rapprochement entre les élus des deux Camargue qui affichent leurs différences culturelles. Excepté au sein du SYMADREM, chargé de la gestion des eaux, aucune instance d'échange, de concertation ou de partage d'information n'existe entre le syndicat mixte chargé de la gestion des milieux naturels gardois et le PNRC, centré sur la Grande Camargue. La culture taurine à l'ouest du petit Rhône favorise la protection des zones humides mais le handicap à une gestion commune peut s'expliquer par les particularités de la Camargue gardoise : petites parcelles et communes pratiquant l'étalement urbain (Aigues-Mortes et Grau-du-Roi). Cependant, la stabilisation du PNRC puis son renforcement devraient être sérieusement pris en compte. L'intégration des conséquences de la réforme territoriale en cours visant au rapprochement puis à la fusion de structures répondant aux mêmes finalités serait un atout pour le Parc. Une concertation entre les préfets des deux départements concernés pourrait s'avérer particulièrement judicieuse pour ne pas ériger les limites administratives en obstacle à la gestion unitaire de la réserve de biosphère. Le renforcement des outils de gestion de la réserve de biosphère qui couvre l'ensemble de l'écosystème Camargue, notamment à travers son observatoire, serait de nature à développer une culture commune entre les gestionnaires, préalable indispensable à une gestion unifiée. L'État doit bien entendu continuer de jouer les « bons offices » entre les différentes formes d'organisation locale. Le fait qu'il se soit fortement impliqué dans l'adhésion à la Charte du PNR qui, de facto s'est installé comme la seule structure capable d'une part d'agréger les visions parfois contradictoires des acteurs territoriaux et de gommer, d'autre part, les susceptibilités restantes, semble un gage de sa respectabilité. Outre ce rôle de médiation, voire d'arbitrage, l'État doit par ailleurs être en mesure de respecter ses engagements (par ailleurs prévus dans la charte) notamment en matière de respect des règles d'urbanisme et d'implication des services de police de l'environnement et de sécurité publique. Les spécificités propres à ce territoire d'exception qu'est la Camargue nécessitent d'avoir une approche coordonnée des différents services de l'État. Recommandation Pour soutenir son action auprès du PNRC dans le cadre de la mise en oeuvre de la charte et favoriser une plus grande coordination entre les gestionnaires de petite et grande Camargue, la mission suggère que soit nommé un interlocuteur spécifique du PNRC et de la réserve de biosphère au sein de la DREAL PACA.
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5.3. Le foncier : les acquisitions doivent se faire avec discernement
La mission a observé de façon approfondie l'évolution du « marché » foncier, notamment en bordure littorale. La Compagnie des Salins du Midi, pour des raisons économiques a mis en vente en 2007 plusieurs milliers d'hectares dédiés jusqu'alors à la saliculture. Le Conservatoire du littoral s'est trouvé dans l'obligation d'acheter des surfaces qui n'avaient pas toutes un intérêt écologique avéré (on pense, ici, aux tables salantes) ou qui ne faisaient pas l'objet de menaces de dégradation liées à des projets d' aménagement ou d'urbanisation. Ces zones soumises à risques de submersion sont, de plus, protégées au titre de nombreuses réglementations relevant du code de l'environnement. Dès lors, les quelques 58 millions engagés depuis 2008 par le Conservatoire avec l'appui financier des collectivités, du ministère de l'écologie, de l'agence de l'eau etc ont lourdement pesé sur ses capacités d'intervention vers des zones littorales plus menacées ou plus intéressantes au plan écologique. Par ailleurs, les caractéristiques physiques de ces terres interdit tout usage agricole. Leur vocation serait nécessairement naturelle ou cynégétique. Leur conservation en l'état actuel résulte pour partie d'importants travaux réguliers de consolidation de la digue à la mer. Compte tenu du contexte environnemental et réglementaire, la plupart des terrains utilisés pour la saliculture ne se trouvent pas dans un champ très concurrentiel du marché foncier. Qui plus est, le financement inscrit dans le protocole qui court jusqu'en 2014 n'est pas bouclé à ce jour en raison de la grande difficulté à ratifier le processus de compensation écologique lié au développement de « Fos 4XL » souhaité par le Grand Port Maritime de Marseille (cf supra). Les acteurs intervenant sur le foncier pourraient naturellement être mobilisés pour permettre des acquisitions publiques en Camargue dans les années à venir si d'autres terrains appartenant à la CSM venaient à se libérer : on pense ici aux deux établissements publics fonciers (PACA et Languedoc-Roussillon), à l'agence de l'eau RMC ou au Conseil Général des Bouches-du-Rhône , voire à la fondation MAVA. Mais, le jeu en vaut-il la chandelle sachant qu'une fois les achats fonciers réalisés (à des prix excédant ceux du marché pour des terrains inconstructibles), il reste à trouver des gestionnaires fiables, prêts à endosser les frais inhérents à un entretien nécessaire à l'ouverture au public et au respect des objectifs écologiques poursuivis42 ? Propriétaire dans la partie PACA de 23 500 ha et prochainement de 27 000 ha, soit 18% des 143 500 ha du delta du Rhône, il est possible que le Conservatoire du LittoralL soit sollicité pour acquérir d'autres propriétés , soit dans le cadre de la poursuite du désengagement des Salins du Midi soit parce que des cessions notamment agricoles interviennent de façon régulière43 dans ce territoire.
42
L'étang du Vaisseau (Salin-de-Giraud) qui devrait être acquis par le CERL auprès de la CSM nécessiterait 200k annuels et 4ETP pour son entretien. Selon la SAFER 13, les propriétés changent de main en moyenne tous les 25 ans.
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Pour la mission, l'intervention du Conservatoire du littoral ne trouverait sa justification que dans l'une des deux situations suivantes : d'une part si les terrains préemptables font l'objet de menaces d'urbanisation ou de développement économique dirimant pour la pérennité de l'écosystème. Ou bien, d'autre part, pour éviter l'éventuelle mise en vente par découpe, comme cela a été le cas lors de la vente de l'étang du Lairan dans la Camargue gardoise. À l'opposé, la montée du niveau de la mer à l'horizon du siècle comprise entre 0,44 m et 1,4 m44 suggère d'adopter une attitude prudente pour d'éventuelles acquisitions de zones submersibles ou inondables 45 dans cette partie du territoire national. Recommandation Les acquisitions du Conservatoire du littoral devraient s'inscrire dans une approche stratégique reposant sur une analyse combinée de la valeur écologique propre et en lien avec le reste de l'écosystème des terrains mis en vente mais aussi d'une analyse des menaces et du risque à ne rien faire. Dans ce cadre, les acquisitions ne devraient porter que sur des zones menacées par des projets de développement, pour éventuellement faire pièce à une trop grande parcellisation des propriétés ou sur des terrains de grande valeur écologiques et afin d'établir une continuité avec des terrains déjà acquis (en particulier, les parcelles autour du Vacarès). Si la mission recommande qu'une politique d'acquisition publique soit envisagée avec prudence à l'avenir, elle n'exclut pas pour autant une intervention particulière sur les terrains jouxtant le hameau de Salin-de-Giraud si ceux-ci venaient à être mis en vente par la CSM. Plusieurs problèmes affectent en effet ce territoire. D'abord, l'inondabilité qui conduit à délimiter la partie constructible à la partie déjà urbanisée du hameau en utilisant des espaces pouvant être considérés comme des dents creuses. Ensuite, la zonation « Natura 2000 » qui oblige un maître d'ouvrage à produire une étude d'incidences ciblée sur les habitats et espèces des sites concernés avec des mesures compensatoires à la clé peu évidentes à réaliser. Des projets de réhabilitation du hameau pour, in fine, le reconvertir à des fins touristiques ne peut, selon la mission, s'envisager indépendamment de la prise en compte d'une fréquentation, pour l'heure, anarchique des plages de Piémanson et Beauduc qui justifie une action concertée de l'État et des collectivités. Recommandation Un projet global alliant des modes de transport doux permettant la mobilité des touristes entre les plages et le hameau et une conception écologique de l'habitat semble prometteur comme été acté dans la Charte du PNRC46. La mission estime qu'il pourrait s'insérer dans la convention de revitalisation CSM-État révisée à la lumière d'objectifs explicites de développement durable.
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Selon une estimation réalisée en 2011, non encore reprise par le GIEC. En simplifiant à l'extrême, est-il nécessaire d'acheter à grand prix des millions de m3 d'eau salée ?.
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5.4 D'autres outils que l'acquisition peuvent-ils être mis en oeuvre ?
Compte tenu du contexte budgétaire actuel, la mission s'inscrit donc dans le cadre d'une stratégie d'acquisition plutôt parcimonieuse et prudente de la part du Conservatoire du Littoral. Toutefois, la mission ne récuse pas une autre stratégie plus volontariste. Celle-ci allierait à la fois une volonté de soutenir par principe l'acquisition du patrimoine naturel grâce notamment à l'intervention de l'EPF PACA sur les terrains de la CSM, s'il advenait qu'ils se libèrent dans les années à venir. Ces acquisitions seraient conduites sur une durée assez courte (pas plus de quelques années), le temps que le Conservatoire du littoral retrouve sa capacité d'intervention financière. Par ailleurs, des mécanismes de servitudes conventionnelles pourraient être mises en jeu par le Conservatoire du Littoral sur des terrains jouxtant ses acquisitions. La mission est convaincue qu'il est souvent moins onéreux, comme alternative à l'acquisition foncière, de conventionner avec un propriétaire privé qui souhaite poursuivre son activité, le plus souvent agricole, le fait de ne pas modifier les niveaux d'eau, de ne pas édifier de bâtiments ou, tout simplement de ne pas modifier des façons culturales satisfaisantes du point de vue de l'environnement. La mission est d'avis que de façon systématique le Conservatoire du Littoral étudie la faisabilité de servitudes conventionnelles environnementales47 dès lors qu'une vente de terrains se profile. Recommandation Examiner la mise en oeuvre des servitudes conventionnelles environnementales en lieu et place de l'acquisition en pleine propriété à chaque fois que cela est possible (volonté du propriétaire de poursuivre son activité). La mission a évoqué le mécénat et les mesures compensatoires comme supports d'une politique d'acquisition qui ne se substituerait nécessairement pas à celle menée par les opérateurs publics, mais, qui viendrait en éventuel complément. Si le mécénat semble en théorie une piste prometteuse, ce ne peut-être que dans le cadre d'une ambition et d'une visibilité de la Camargue beaucoup plus accentuées qu'aujourd'hui. Des partenaires de prestige ne seraient, en effet, réellement intéressés par le mécénat qu'au prix d'un retour d'image d'envergure qui, de facto, nécessiterait que ce territoire naturel de renommée internationale qu'est la Camargue soit considéré
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« L'État s'engage à accompagner une démarche en vue d'une requalification des constructions hors du domaine public maritime situées au hameau des Sablons, en tenant compte de l'ensemble des enjeux de la zone(...). Il accompagne le Parc dans la mise en oeuvre du projet de réorganistaion de la fréquentation de la plage de Piémanson ». Le mot servitude revêt une signification tellement négative qu'il conviendrait d'utiliser un autre vocabulaire : pourquoi ne pas les appeler « facilités environnementales » ?
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à l'égal des « Trésors nationaux » pour lesquels des dispositions fiscales48 avantageuses sont prévues.
Recommandation Même s'il est difficile de transposer purement et simplement ces avantages fiscaux à des espaces naturels, peu susceptibles de partir à l'étranger, la mission estime néanmoins utile de réfléchir à des aménagements fiscaux pour des éléments de patrimoine naturel de valeur exceptionnelle, pouvant subir des destructions ou des altérations irréversibles. En ce qui concerne le recours à des mécanismes de compensation écologiques, la mission reste dubitative sur leur utilisation généralisée pour l'acquisition de foncier en Camargue. La mission entend rappeler que la compensation ne peut se justifier qu'au travers du principe d'additionnalité : il n'y aurait aucun sens à faire acheter par des maîtres d'ouvrage des terrains non menacés pour compenser la perte d'écosystèmes remarquables du fait de leur aménagement. Dès lors, il faudra en préalable déterminer les zones à acquérir prioritairement en raison des menaces dont elles seraient l'objet avant d'envisager leur financement par des compensations. Vers une gestion intégrée de la zone côtière de la Camargue Après les inondations de 2003, un Plan Rhône piloté par le préfet coordonnateur de bassin Rhône-Méditerranée-Corse, préfet de la région Rhône-Alpes, a été mis en place, mais il ne comporte pas de volet littoral ni de plan de gestion des pertuis de Camargue afin de réguler et d'évacuer les eaux du Rhône et du Petit Rhône. Pour sa définition et son pilotage, le plan associe l'ensemble des acteurs impliqués dans la gestion du Rhône, services de l'État, collectivités territoriales et associations. Avec ce type de concertation multi-acteurs, qui existe également au sein du Parc naturel Régional, mais hors la présence de l'État, s'amorce ou pourrait s'amorcer une démarche de « Gestion intégrée des zones côtières » (GIZC) avec d'autant plus de pertinence que le Protocole GIZC à la Convention de Barcelone est entrée en vigueur le 24 mars 201149. Il s'agit du premier outil de droit international entièrement et exclusivement consacrée à la GIZC que la France est désormais tenue de mettre en oeuvre.
48
Article 238 bis O A du CGI. Achat de « trésors nationaux » menacés de quitter le territoire national et réduction d'impôt sur les sociétés égale à 90% des versements effectués. Suite à la ratification par six de ses quinze signataires : France, Slovénie, Albanie, Espagne, Union Européenne et Syrie.
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La mission entend souligner tout l'intérêt d'une démarche dont les principes généraux trouvent un terrain d'application idéal en Camargue. En effet, outre la gouvernance basée sur la participation au processus de décision des populations et parties prenantes de la société civile (article 6-d) et la coordination institutionnelle intersectorielle des administrations et pouvoirs régionaux et locaux sur les zones côtières (article 6-e) prônées par le Protocole et qui sont les moyens d'action, l'objectif est de « prendre en compte la richesse biologique, la dynamique et le fonctionnement naturels de la zone intertidale ainsi que la complémentarité et l'interdépendance entre la partie marine et la partie terrestre formant une entité unique » (article 6-a) En addition, le Protocole souligne que l'intégration des différents systèmes ( hydrauliques, écologiques, socio-économiques et culturels) devrait permettre de ne pas dépasser la capacité de charge de la zone côtière et de prévenir les effets négatifs des catastrophes naturelles. Le Protocole avance clairement (article 7) que la GIZC repose sur la coordination institutionnelle y compris entre les diverses autorités compétentes pour les parties maritime et terrestre. Enfin, les parties s'engagent à élaborer ou renforcer une stratégie nationale de gestion intégrée des zones côtières qui, à partir d'un diagnostic partagé, fixe des objectifs et détermine des priorités, identifie les écosystèmes côtiers nécessitant une gestion (article 18). L'évaluation environnementale stratégique des plans et programmes est conduite en tenant compte des impacts cumulatifs sur les zones côtières (article 19)50. Pour résumer, l'application du Protocole GIZC trouve tout son sens non seulement sur l'ensemble des zones côtières, mais singulièrement sur le littoral camarguais puisque toutes les variables « écosystémiques » y sont présentes et notamment les parties prenantes ( par exemple les différents syndicats mixtes : Symadrem, PNRC,...) et l'État, réunis autour d'enjeux explicitement au coeur de la démarche GIZC : prévention des risques, protection des zones humides, utilisation durable des ressources naturelles, intégration des activités économiques dans l'écosystème, etc... L'objectif inhérent à la mise en place de cette démarche serait, dans un premier temps de faire évoluer les règles de gouvernance et accroître la représentativité des participants aux organes de discussion et de décision de même que de favoriser l'apprentissage des acteurs de la gestion de l'eau et du littoral à la complexité du fonctionnement du système et de ses perspectives d'évolution. Le Parc Naturel régional de Camargue a lancé trois exercices de GIZC en 2008 51 dont un consacré à la gestion durable des tellines (coquillages pêchés sur le littoral camarguais) qui a permis des avancées intéressantes en établissant un diagnostic partagé avec les pêcheurs et en se prononçant pour des actions inscrites dans le contrat de delta.
50 51
Cette disposition existe déjà dans le droit communautaire : directive « plans-programmes » 2001/42.
La dynamique littorale et les risques côtiers, la maîtrise de la fréquentation côtière et la gestion durable
du stock de tellines (coquillage lamellibranche).
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Recommandation La mission suggère la généralisation de la démarche GIZC à l'ensemble du littoral camarguais pour servir de référence à la mise en oeuvre des politiques relatives au littoral et notamment du volet mer des SCOT52 et permettre ainsi une application du Protocole exemplaire.
52
Article R.122-3 du CU : "dans une perspective de gestion intégrée de la zone côtière, les vocations des différents secteurs de l'espace maritime, les conditions de la compatibilité entre les différents usages de ces derniers, et les conséquences qui en résultent pour l'utilisation des diverses parties du littoral qui sont liées à cet espace".
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Annexes
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1. Lettre de mission
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2. Liste des personnes rencontrées
Noms
ARMAND
Prénoms
Jean-Claude
Organismes
Conservatoire du Littoral
Fonctions
Délégué Régional Languedoc-Roussillon Directeur immobilier
Dates de rencontres
9/02
BALOSSIER
Jacques
Compagnie des Salins du Midi et des Salines de l'Est Cabinet MEDDTL CPRN/CGEDD/MEDDTL
9/02
BANEL BARTHOD
Eric Christian
Conseiller technique Ancien sous-directeur de la S/dir Espaces naturels (DEB/DGALN/MEDDTL) Chargé de mission Président Député de la Somme
21/12/2010 2/12/2010
BAYEN BIGNON
Philippe Jérôme
DDTM 13 Conservatoire du Littoral
13/01/2011 2/03
CALET
François
Syndicat des riziculteurs de Camargue Association Bovins 13 FNGDS
Président
10/03
CALLET
Marie-Pierre
Pdte Bovins13 représentante PACA à la FNGDS Sous-préfet Maire Directeur
8/03
CASTOLDI CHASSAING COLCOMBET
Pierre Rolland Yves
Sous-préfecture d'Arles Saintes-Maries-de-la-Mer Conservatoire du Littoral
11/01/2011 12/01/2011 20/12/2010 et 01/04/2011 26/01
COULET
Eric
Réserve naturelle nationale de Camargue Conservatoire du littoral délégation régionale PACA Union Régionale Vie et Nature Agence Régionale pour l'Environnement, Conseil Régional PACA
Directeur
DE LA GUERINIERE
Bénédicte
Chargée de mission
12/01/2011
DE STEPHANO
Nathalie
Directrice
9/03
DEPLATS
Christian
Conseiller Régional ancien délégué régional PACA du Conservatoire du littoral Ecologue
26/01
DEVEZE
Magali
Grand Port Maritime de Marseille Syndicat mixte de la Camargue Gardoise Conseil Général du Gard
9/03
DENAT
Jean
Président Vice Président Chargé de mission
8/02 par téléphone
ESTEVE
Roger
Conservatoire du littoral délégation régionale PACA
Direction de l'eau environnement et aménagement rural - Conseil Général du Gard
12/01/2011
EUDES
Xavier
Directeur
8/02
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Noms
Prénoms
Organismes
Fonctions
Dates de rencontres
9/03
FALQUE FOUCHIER
Max François
Juriste-consultant Conservatoire du littoral délégation régionale PACA Agence de l'Eau RhôneMéditerranée-Corse CGEDD (MEDDTL) Délégué régional
12/01/2011
FOURNIER
Gabrielle
Déléguée Méditerranée -Corse Membre de la 2è section, administrateur des Grands Ports de Marseille Directeur-adjoint
26/01
GENEVOIS
René
3/02
GERARD
Bernard
Conservatoire du Littoral
6/01/2011 (par téléphone) et 01/04/2011
GERARD
Jacky
Conseil Général des Bouches-du-Rhône Association NASICCA Grand Port Maritime de Marseille
Maire de Saint-Cannat, vice pdt du CG13 Directeur Chef du département environnement et aménagement Représentant de la chambre d'agriculture Propriétaire du domaine de Fielouse
25/01
GIRARD GRINO
Cyrille Jean-Marc
9/03 9/03
GROSSI
Alain
Propriétaire privé
5/04
HEMERY
Gaël
Parc Naturel Régional de Camargue Fondation Tour du Valat DDTM 13
Chef des projet
12/01/2011
JALBERT KRUGER
Jean Didier
Directeur général Directeur
26/01 13/01/2011 et 09/03/2011 1/04 1/01/2011
LECLERC LEFEUVRE
Anne-Sophie Cyrille
Conservatoire du Littoral Bureau intégration de la biodiversité dans les territoires (SDEN/DEB/DGALN) _
Stagiaire ENPC Chef de bureau
LEGRAIN
Dominique
Ancien Directeur adjoint du Conservatoire du Littoral et membre de l'IGE Membre permanent CGAAER ancien DDAF 13 Producteur, collecteur et négociant en riz Producteur Chef du service environnement Directeur
24/03
LEGROUX
Jean-Paul
Conseil Général de l'Alimentation, de l'Agriculture et des Espaces Ruraux (MAAPRAT) Riziculteur
1/02
MADAR
MAILLET MARTIN
Pascal
10/03
Bertrand Emmanuel
Riziculteur DDTM 13
10/03 13/01/2011
OLIVRY
Didier
Parc naturel Régional de Camargue DGALN/DEB
12/01/2011 et 04/05/2011 16/12/2010
PAYEN
Christelle
Chargée de mission
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Noms
Prénoms
Organismes
Fonctions
Dates de rencontres
10/03 1/04 8/02
PELLETIER PELTIER REGAD
Patrick Michel Jacques
SAFER Bouches-du-Rhône Conservatoire du Littoral DREAL LanguedocRoussillon DREAL PACA /SBEP DREAL PACA Parc naturel Régional de Camargue SYMADREM Conseil Général des Bouches-du-Rhône
Directeur Directeur adjoint Chef de service biodiversité , eau, paysage Chargé de mission Directeur Maire d'Arles, Pdt du PNRC, Pdt du SYMADREM Vice Pdt du CG13 Directeur Directeur
ROLLAND ROY SCHIAVETTI
Robin Laurent Hervé
12/01/2011 12/01/2011 25/01
SEGONDS SOLDAÏNI
Jean-Pierre Pierre-Louis
DDTM du Gard Établissement Public Foncier PACA Grand Port Maritime de Marseille DREAL LanguedocRoussillon Fondation Tour du Valat CDC-Bio DGALN/DEB Bureau du littoral et du domaine public maritime naturel (S/dir
9/02 13/01/2011
SPAZZI
Renaud
Directeur de l'aménagement Directrice
9/03
STEINFELDER
Mauricette
8/02
TARIS THIEVENT THIRY UHL
Jean-Paul Philippe Emmanuel Frédéric
Président Directeur Chargé de mission Chef de bureau
26/01 16/03 16/12/2010 16/12/2010
LMM/DEB/DGALN/MEDDTL)
VAN MIGOM VARDON
Karin Pascal
Sous- préfecture d'Arles DDTM 13
Chargée de mission Directeur-adjoint
11/01/2011 13/01/2011 et 9/03/2011 21/12/2010 9/02 12/01/2011
VAUTERIN VERDIER VIANET
Patrick Yvan Régis
Cabinet MEDDTL Conseil Général du Gard Parc naturel Régional de Camargue SD littoral et milieux marins (DEB/DGALN/MEDDTL)
Conseiller Vice président Directeur-adjoint
VINCE
Agnès
Sous-directrice
16/12/2010
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3. Les Mesures agroenvironnementales dans le PNRC de 2008 à 2010
Année 2008
Élevage : 866 ha souscrits pour 434 840 sur 5 ans Pâturage très extensif sur mosaïque de milieux (HE1) : 126 ha Pâturage extensif sur terre humide haute (HE2) : 388 ha Pâturage sur prairies irriguées (HE3) : 46 ha Pâturage extensif en marais (HE4) : 441 ha Agriculture : 4 704 ha pour 880 156 sur 5 ans Gestion de l'eau dans les rizières (GC1) : 4 651 ha Utilisation de pièges à pyrale (GC2) : 53 ha
Année 2009
Élevage : 512 ha souscrits pour 244 985 sur 5 ans Pâturage très extensif sur mosaïque de milieux (HE1) : 29 ha Pâturage extensif sur terre humide haute (HE2) : 260 ha Pâturage extensif en marais (HE4) : 223 ha Agriculture : 118 ha pour 21 830 sur 5 ans et 133,5 km linéaires souscrits pour 1 102 190 sur 5 ans Gestion de l'eau dans les rizières (GC1) : 4 651 ha Utilisation de pièges à pyrale (GC2) : 53 ha Entretien des fossés des 2 côtés (FO1) : 66 223 m Entretien des fossés d'1 seul côté (FO2) : 63 139 m Entretien des haies des 2 côtés (HA1) : 1 640 m Entretien des haies d'1 seul côté (HA2) : 2 560 m
Année 2010
Élevage : 44 ha souscrits pour 25 300 sur 5 ans Pâturage très extensif sur mosaïque de milieux (HE1) : 44 ha Agriculture : 453 ha pour 83 805 sur 5 ans et 4,8 km linéaires souscrits pour 40 774 sur 5 ans Gestion de l'eau dans les rizières (GC1) : 453 ha Entretien des fossés des 2 côtés (FO1) : 2 405 m Entretien des fossés d'1 seul côté (FO2) : 2 392 m
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4. Les projets d'urbanisation connus et/ou déposés
Objets
Maîtres d'ouvrages
Superficies et sites concernés 11 ha Salin-deGiraud 8,5 ha Salin-deGiraud
Observations
États des instructions
Incidences sur les zones urbanisées des hameaux Extension immédiate de la zone urbanisée
Parc photovoltaïque
Solaire direct
Gênerait l'emprise du pont envisagé par le CG 13 Projet de 61 bungalows, 36 logements collectifs, bâtiment d'accueil et commerces Déposés fin 2010 à l'instruction à la DDTM13
Refus du préfet le 26 juin 2009, en cours de relance
Résidence de tourisme
Pierre de Provence
Permis de construire signé le 5 juin 2009, contesté, investigations complémentaires en cours En cours de procédure loi sur l'eau (autorisation)
Extension immédiate de la zone urbanisée
Parcs photovoltaïques
EDFEnergies Nouvelles et CN'Air
Sur tables salantes abandonnée s par les SDM Salin-deGiraud 250 ha pour EDF ? 170 ha pour CNR ?
Modification du POS indispensable et risque inondation très important, loi littoral et Natura 2000 très contraignants N'est pas inscrit à la prochaine modification du POS d'Arles (évaluation environnementale nécessaire)
projet totalement en dehors du hameau, ce qui pose question par rapport à la loi littoral
Habitations 106 villas dont une partie en accession sociale
Urban Coop
Salin-deGiraud 3 ha
Constructions sur pilotis
Dossier en cours de validation Permis délivré en 2007, sans suite au contrôle de légalité. Projet non soumis à la loi sur l'eau (en dessous des seuils) Les travaux ont démarré, quelques villas construites, mais opération qui rencontre des difficultés de commercialisation.
Bonne insertion dans le tissu urbain (dent creuse)
Lotissement « Les Mouettes »
Participation Limited
Ex Salin du Midi
4,7 ha Salin-deGiraud
Aménagement de 85 lots par la société Hectare SA en cours de réalisation
Permis d'aménager délivré. Travaux interrompus en raison d'une pollution, l'aménagement se situant sur une ancienne déchetterie non autorisée.
Extension immédiate de la zone urbanisée
lotissement
SA SEGI Le Clos des Vanelles
4,3 ha Salin-deGiraud
Création de 33 lots résidentiels et 2 macro-lots situés en zone humide et en zone Natura 2000
Contentieux en cours à l'initiative de la ville d'Arles qui projetait la réalisation d'un camping destiné aux touristes fréquentant la plage de Piémanson Le permis tacite en date du 28/01/2010 délivré à SA SEGI, a été suspendu par ordonnance du TA de Marseille en date du 03/11/2010. Projet en négociation dans le cadre du PNRC
Extension immédiate de la zone urbanisée
Habitation ? (projet n°6)
Compagnie des Salins du Midi
100 ha Salin-deGiraud Salin-deGiraud, plage de Piémanson
Extension « démesurée » du hameau Pas d'incidence directe (plage à 10 km du hameau). Besoin induit d'un camping sur le
Aménagement d'un parking
Projet en cours d'élaboration (phase de programmation)
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hameau, en réponse à la fin de l'occupation sauvage de la plage Parc photovoltaïque 94 ha Salinde- Giraud Situation au nord de Salinde-Giraud Contraire à la charte du PNRC Centre d'hébergement pour enfants Centre de thalassothérapie Salins du Midi Hameau de Faraman Phare de Faraman Pas de suite dans l'immédiat néant Certificat d'urbanisme négatif en mars 2009
20 ha commune d'AiguesMortes
Négociation en cours pour trouver une solution acceptable
Étude d'impact demandée
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5. Glossaire des sigles et acronymes
Acronymes CDC CELRL CETE CSM DDTM DOG DPM DPU EVP GIEC GIZC IGP MAET PAC PADD Caisse des dépôts et consignations Conservatoire de l'Espace Littoral et des Rivages Lacustres Centre d'étude technique de l'Equipement Compagnie des Salins du Midi Direction départementale des territoires et de la mer Document d'orientations générales (partie du SCOT) Domaine public maritime Droits à paiement unique équivalent vingt pieds Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat Gestion intégrée des zones côtières indication géographique protégée Mesure agro-environnementale (et territoriale ) Politique agricole commune projet d'aménagement et de développement durable Significations
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Acronymes PCB Polychlorobiphényle
Significations
PHAE PNRC POS PPRI RMC SAFER
Prime Herbagère Agro-Environnementale Parc Naturel Régional de Camargue Plan d'occupation des sols Plan de prévention du risque inondations Agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural
SAN SNPN
Syndicat d'agglomération nouvelle Société nationale de protection de la nature
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6. Liste des recommandations
Pour soutenir son action auprès du PNRC dans le cadre de la mise en oeuvre de la charte et favoriser une plus grande coordination entre les gestionnaires de petite et grande Camargue, la mission suggère que soit nommé un interlocuteur spécifique du PNRC et de la réserve de biosphère au sein de la DREAL PACA. ...........................60 Les acquisitions du Conservatoire du littoral devraient s'inscrire dans une approche stratégique reposant sur une analyse combinée de la valeur écologique propre et en lien avec le reste de l'écosystème des terrains mis en vente mais aussi d'une analyse des menaces et du risque à ne rien faire. Dans ce cadre, les acquisitions ne devraient porter que sur des zones menacées par des projets de développement, pour éventuellement faire pièce à une trop grande parcellisation des propriétés ou sur des terrains de grande valeur écologiques et afin d'établir une continuité avec des terrains déjà acquis (en particulier, les parcelles autour du Vacarès). ......................62 Un projet global alliant des modes de transport doux permettant la mobilité des touristes entre les plages et le hameau et une conception écologique de l'habitat semble prometteur comme été acté dans la Charte du PNRC. La mission estime qu'il pourrait s'insérer dans la convention de revitalisation CSM-État révisée à la lumière d'objectifs explicites de développement durable. ......................................................62 Examiner la mise en oeuvre des servitudes conventionnelles environnementales en lieu et place de l'acquisition en pleine propriété à chaque fois que cela est possible (volonté du propriétaire de poursuivre son activité). .................................................63 Même s'il est difficile de transposer purement et simplement ces avantages fiscaux à des espaces naturels, peu susceptibles de partir à l'étranger, la mission estime néanmoins utile de réfléchir à des aménagements fiscaux pour des éléments de patrimoine naturel de valeur exceptionnelle, pouvant subir des destructions ou des altérations irréversibles. ............................................................................................64 La mission suggère la généralisation de la démarche GIZC à l'ensemble du littoral camarguais pour servir de référence à la mise en oeuvre des politiques relatives au littoral et notamment du volet mer des SCOT et permettre ainsi une application du Protocole exemplaire. ...............................................................................................66
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Conseil général de l'Environnement et du Développement durable 7e section secrétariat général bureau Rapports et Documentation
Tour Pascal B - 92055 La Défense cedex Tél. (33) 01 40 81 68 12/45
www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr
INVALIDE) (ATTENTION: OPTION t pas encore été présentées aux communes. Seules les dispositions générales ont fait l'objet en août 201022 d' « un porté à connaissance ». Aucune carte n'a été transmise aux communes pour matérialiser les nouvelles contraintes. Plusieurs PPRI en cours d'élaboration concernent la Camargue et notamment le PPRI du Rhône (Aigues-Mortes, Saint-Gilles, Le-Grau-du-Roi...). Les aléas ont été récemment transmis aux communes. Une situation comparable est rencontrée par la commune de Saint-Laurent-d'Aigouze puisque le PPRI Basse Plaine et Camargue gardoise auquel elle appartient est à l'instruction depuis 2008. L'établissement de nouveaux documents liés à la prévention du risque conduit à restreindre les aires urbanisables et probablement dans certains cas à les supprimer. Si la DTA, dans les Bouches-du-Rhône, a contribué à clarifier les enjeux du territoire de la Grande Camargue, l'absence de vision d'ensemble entre Grande et Petite Camargue conduit à des initiatives désordonnées alors que la notion d'espaces remarquables justifie un traitement coordonné des politiques publiques.
4.2 Les désignations internationales
Au moins 14 statuts de protection (aux dispositions plus ou moins contraignantes) se superposent partiellement sur le périmètre de l'écosystème Camargue : la réserve de biosphère de Camargue (delta du Rhône), les sites Ramsar de Camargue et de petite Camargue, le parc naturel régional, la réserve nationale de Camargue, la réserve naturelle régionale, les sites NATURA 2000 de petite Camargue, de Camargue, et des marais entre Crau et Grand Rhône, les terrains du Conservatoire du littoral et de la Fondation Tour du Vallat, les espaces naturels sensibles du CG 13 et 34, la réserve de chasse marine, le périmètre d'intervention du syndicat mixte de protection et de gestion de la Camargue gardoise, le grand site de France de la Camargue gardoise, les arrêtés de protection de biotope etc.
22
Lettre du préfet des Bouches-du-Rhône aux maires le 20 août 2010 définissant le nouvel aléa à 2,50 m NGF.
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Créé en 1971 par l'UNESCO, le programme MAB (Man and Biosphere) vise à classer des réserves de biosphère mettant en oeuvre un programme de développement économique et social basé sur la conservation et la valorisation des ressources naturelles. La réserve de biosphère de Camargue crée en 1977 et élargie depuis, épouse les contours du delta du Rhône, des plaines au nord d'Arles aux communes de Fos-sur-Mer à l'est et du Grau-du-Roi à l'est, à cheval sur les régions PACA et Languedoc Roussillon et les départements des Bouches-du-Rhône, du Gard et de l'Hérault. Elle est constituée de trois zones centrales de 25 000 ha centrées sur l'étang de Vaccarès, l'embouchure du Grand Rhône et les marais du Vigueirat, où la priorité est donnée à la conservation, la recherche scientifique et la sensibilisation du public. Une zone tampon de 136 500 ha (dont 32 000 ha en mer), dévolue aux activités écologiquement viable couvre le reste du delta et la partie peu urbanisée de la Camargue gardoise et de la zone du marais du Vigueirat et des étangs d'Arles. Ce territoire est entouré d'une zone de transition de 33 000 ha incluant également la zone urbanisée des salins de Giraud, constituant une interface avec les trames urbaines. La responsabilité de la gestion de la réserve est dévolue au PNRC pour la partie PACA et au Syndicat mixte pour la protection et la gestion de la Camargue gardoise. La France a adhéré en 1986 à la Convention relative aux zones humides d'importance internationales dite Convention de Ramsar : 36 sites sont classés en France dont les sites de la Camargue (85 000 ha classés en 1986) et la petite Camargue (37 000ha, 1996). Les critères de classement sont liés à l'importance de ces sites pour la conservation d'espèces en danger ou d'une proportion significative de population d'une espèce (d'oiseaux principalement) ou encore pour le rôle que jouent ces zones pour le maintien d'activités économiques durables pour les populations locales. La désignation d'un site Ramsar ne constitue pas une protection règlementaire en soi mais une reconnaissance internationale de la valeur d'un site. La directive européenne 92/43/CEE dite « Habitats, faune, flore » vise à protéger la biodiversité dans les états membres notamment par la constitution d'un réseau écologique Natura 2000 constitué d'habitats prioritaires protégés dans chacune des régions biogéographiques de l'Union. Concernant la Camargue, ont été inscrits les sites :
de Camargue (113 529ha y compris une partie marine), superposée au périmètre du Parc Naturel Régional, de Petite Camargue (34 559ha) dans la partie gardoise, des marais entre Crau et grand Rhône (7 234ha), auxquels s'ajoutent deux sites fluviaux (Rhône aval et Petit Rhône).
Sur ces sites, il incombe aux états membres de garantir la préservation de ces habitats et des espèces de faune et de flore qui le composent au moyen d'un document d'objectifs. Ces DOCOB qui ont valeur de plan de gestion sont en cours de rédaction par le PNRC pour un début de mise en oeuvre prévu en 2012.
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5 autres titres internationaux reconnaissent le statut unique de la Camargue : diplôme européen et réserve biogénétique du Conseil de l'Europe, aire protégée au titre des conventions de Barcelone, de Bonn et de Berne.
4.3 Le PNRC et sa gouvernance
Même si les premières mesures de protection de la nature datent de la création de la réserve nationale de Camargue en 1927, cela ne concernait qu'un territoire restreint, limitrophe de l'étang du Vaccarès, sans moyens de gestion sur les principaux paramètres influençant l'écologie du milieu et en particulier l'eau. Dans les années 1960, le développement du pôle industriel de Fos-sur-Mer à l'est et du pôle touristique de La Grande-Motte à l'ouest menace le delta du Rhône et rend nécessaire de protéger un espace naturel déjà reconnu mondialement. La création d'un parc national23 est écartée au profit d'un parc naturel régional, dont le concept, élaboré en 1966 pour notamment équiper les grandes métropoles régionales en aires naturelles de détente, et qui paraît le mieux à même de réaliser une rupture urbaine sur le littoral en plein développement. Le PNR de Camargue est créé en 1970 avec toutefois, face à la pression des propriétaires terriens, des aménagements notables concédés par l'État au statut général des PNR : fait unique, la structure de gestion est une fondation privée dont le conseil d'administration est composé d'une majorité de représentants des intérêts locaux et en particulier le Comité des propriétaires camarguais. Ainsi dès sa création, le Parc naturel régional est placé sous le signe d'un rapport de force entre les intérêts locaux et ceux de la collectivité régionale et de l'État. Cette gouvernance particulière s'est maintenue jusqu'aux années 2000 où elle a été remise en cause par les habitants du delta en même temps que la gestion privée de l'eau. Malgré la résistance des propriétaires, la fondation privée est remplacée en 2002 par un groupement d'intérêt public dans lequel la majorité des sièges revient aux collectivités locales. Le GIP ayant été annulé en 2004 par le Conseil d'État à la suite de recours juridiques, il est remplacé par un syndicat mixte, sur le modèle de ce qui est pratiqué dans les autres PNR (mais avec toutefois une représentation des propriétaires privés) et verrouillé par une loi spécifique votée en 2007. La présidence du syndicat mixte est actuellement assurée par le maire d'Arles après l'avoir été par le président de la région PACA. La gouvernance du parc enfin stabilisée, la nouvelle charte est mise en chantier et validée (décret n° 2011-177 du 15 fé vrier 2011). Celle-ci, d'une durée de 12 ans, prévoit l'extension du PNRC à une partie de la commune de Port-Saint-Louis.
23
NB : l'hypothèse de la création d'un parc national, qui pourrait revenir à l'esprit puisque cet outil a été mentionné pour les zones humides dans le cadre de la négociation du « Grenelle », n'a jamais été évoquée par les interlocuteurs de la mission. Même si beaucoup reconnaissent à la Camargue un statut proche de celui d'un parc national, celui-ci ne semble pas approprié compte tenu de la complexité des problèmes posés au sein de ce territoire en dehors des noyaux durs inhabités et en partie bien protégés dans le sud du delta. En outre, il est probable que la (ré)ouverture de ce dossier dans cet espace où les acteurs sont sortis d'une série de crises qui ont laissé des traces, retarderait la recherche de solutions concrètes aux questions qui ont été posées à la mission, et en particulier celle du foncier.
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Les enjeux écologiques et fonciers en Camargue
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La charte 2010-2022 a pour principales ambitions de : 1- gérer le complexe deltaïque en intégrant les changements climatiques, 2- orienter les évolutions des activités en faveur de la biodiversité, 3- Renforcer la solidarité territoriale, la cohésion sociale et améliorer le cadre de vie, 4- Partager la connaissance et ouvrir sur les coopérations méditerranéennes.
Les ambitions de la charte 2010-2022
1. gérer le complexe deltaïque en intégrant les changements climatiques · en améliorant l'organisation de la gestion de l'eau (extension du périmètre d'intervention du Parc et clarification du rôle et organisation des moyens des ASA) · en recherchant un fonctionnement plus proche des cycles naturels : amélioration des martelières et canaux d'assainissement pour éviter des déversements dans les étangs, augmentation des capacités des pertuis maritimes recréant une variabilité dans les submersions et dans la salinité des milieux · en intégrant la dynamique littorale et les risques de submersion par un suivi scientifique, la restauration du cordon littoral et la poursuite du programme d'acquisition des terrains par le CEL · en réduisant l'impact des inondations notamment par l'aménagement des digues résistantes à la surverse et des zones de ressuyage des terres pour faire face aux crues cinquantenales · en améliorant la qualité des eaux et des milieux aquatiques par la mise en place d'un réseau de surveillance et le contrôle des pollutions agricoles (MAET et canaux d'assainissement) 2. orienter les évolutions des activités en faveur de la biodiversité · conserver les espaces naturels remarquables et leurs interconnexions (création de réserves nationales, régionales et marines, d'espaces boisés classés, acquisitions foncières, etc.) · restaurer les milieux naturels et les corridors écologiques dégradés (dunes littorales, salins désaffectés, plantation de haies vives le long des canaux etc.) · conserver les habitats et les espèces prioritaires d'intérêt communautaire (cistude d'Europe, grand rhinolophe, flamant rose ...) · gérer les espèces envahissantes (y compris la coordination des luttes anti-moustiques) · pérenniser les activités favorables à la biodiversité (élevage extensif, exploitation des roselières, chasse durable, pêche responsable etc.) · améliorer les pratiques agricoles et promouvoir des pratiques culturales plus favorables à l'environnement · développer un tourisme durable et faire respecter les espaces naturels sensibles 3. Renforcer la solidarité territoriale, la cohésion sociale et améliorer le cadre de vie · promouvoir la diversité culturelle · renforcer la participation des habitants à la gouvernance du Parc et · renforcer la qualité paysagère et le cadre de vie (accompagner la reconversion du site salins de Giraud en un projet de développement exemplaire) 4. Partager la connaissance et ouvrir sur les coopérations méditerranéennes · faire de l'observatoire de Camargue l'outil de référence du delta · améliorer la cohérence des politiques publiques à l'échelle du delta bio-géographique
Rapport n° 007488-01
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Parmi les engagements de l'État dans la charte, il faut mentionner outre les soutiens habituels aux initiatives du Parc, à partager les données et soutenir la recherche scientifique :
- veiller à la mise en oeuvre du contrat de delta et élaborer le plan de prévention des risques maritimes - favoriser l'acquisition par le conservatoire du littoral de terrains. Accompagnement technique des projets de restauration pilote du littoral et favoriser la coopération entre les deux régions. - mise en place par l'agence de l'eau RMC d'un suivi scientifique du bon état écologique du delta - suivi et contrôle des communes pour la mise en place de l'assainissement urbain et suivi des PCB - soutien aux actions de conservation des milieux (charte forestière, forêts alluviales, APB, réserve marine, rédaction et mise en oeuvre DOCOB Natura 2000...) et des espèces prioritaires - mise en place par le CEL d'une stratégie d'intervention foncière avec le PNR et les gestionnaires d'espaces naturels basée sur une analyse multicritères des enjeux et associer le PNRC à la gestion des terrains acquis - collaboration des services de police de l'environnement avec les agents assermentés des espaces protégées - promotion à travers des contrats Natura 2000 et MAE des pratiques culturales diminuant l'impact sur l'environnement (réduction des pesticides, développement de l'agriculture biologique ...) - accompagner le Parc dans la définition d'aménagements pertinents pour maîtriser les accès et les usages des zones littorales marines et des plages menacées de fortes fréquentations - surveiller le DPM et le libérer des occupations sans autorisations, contrôler le braconnage - prise en compte du Plan Rhône et de la DTA dans les documents d'urbanisme et veiller à la cohérence des projets d'aménagement d'infrastructures de transport avec la charte - accompagner la réorganisation de la fréquentation sur la plage de Piémanson - contribuer à la charte paysagère et la rédaction de prescriptions architecturales par le PNRC - prendre en compte la biodiversité dans les projets d'aménagement structurants - soutenir les programmes de recherche (IFREMER, CEL), l'observatoire de Camargue, l'éducation et l'information environnementale et encourager les actions innovantes de coopération...
Le PNRC, de l'aveu de quasiment tous les interlocuteurs, apparaît comme le seul acteur crédible pour marier des objectifs de la protection de la nature et des axes de développement économique -d'autant plus qu'il est également chargé d'assurer le bon fonctionnement de la réserve de biosphère dans les Bouches-du-Rhône. N'apparaissant pas comme un organisme régalien détenteur de moyens directement contraignants (même s'il détient une capacité d'influence fondée sur ses connaissances), il dispose aujourd'hui de bons atouts pour s'ériger en point focal de toutes les politiques qui contribueront à assurer la préservation de la biodiversité en Camargue.
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Comme le parc n'a pas vocation à arbitrer des conflits éventuels et qu'il n'exerce pas de compétence sur une partie importante de la Camargue située dans le département du Gard, il ne peut à lui seul incarner « la gouvernance de la Camargue ». Il est donc particulièrement important que l'État respecte les engagements qu'il a pris auprès de lui et veille à une similitude de l'interprétation et du respect des lois sur l'ensemble du territoire de la réserve de biosphère en attendant un rapprochement des gestionnaires...
4.4 Les acquisitions publiques
Les communes, les départements, le Conservatoire du Littoral ont compétence pour acquérir des terrains afin d' assurer une conservation durable du patrimoine qu'ils représentent. Ainsi, les 10 communes du delta totalisent 4378 ha de territoires acquis dans cet objectif. Sur les terrains communaux sont maintenues le plus souvent des activités liées à l'exploitation des ressources naturelles (coupe du roseau et chasse dans les marais, élevage extensif de taureaux et de chevaux, pêche en étang ...). Les départements des Bouches-du-Rhône procèdent par le biais de la Taxe Départementale des Espaces Naturels Sensibles (TDENS : environ 4 M chaque année) à l'acquisition de domaines afin de les soustraire à toute spéculation foncière. Ainsi, le Département des Bouches-du-Rhône à lui seul a acquis plus de 3 500 ha de propriété en Camargue dont le complexe des étangs de Consécanière et des Impériaux24. Le Conservatoire du Littoral, établissement public, a dans ses missions la protection des milieux littoraux par l'acquisition foncière de territoires dans un but de protection et d'ouverture maîtrisée au public. Ses critères de choix de terrains à acquérir sont motivés par le risque d'urbanisation, de parcellisation ou par l'artificialisation (par exemple le comblement des zones humides).L'intervention foncière peut avoir lieu également si le site s'est dégradé et nécessite une réhabilitation rapide ou si le site est fermé au public alors qu'il mériterait d'être ouvert à tous. Dans le delta du Rhône, le Conservatoire du Littoral possède un ensemble de sites représentant une surface de plus de 25 000 ha, y compris les 13 118 ha de la réserve nationale de Vacarès depuis 2008, soit environ 18 % de la superficie de la réserve de biosphère. La gestion des propriétés acquises par le conservatoire est confiée aux communes où à des organismes reconnus compétents en matière de gestion d'espaces naturels. Certains sont, avec ou sans structure d'accueil, ouverts au public comme le Vigueirat (960 ha), le Domaine de la Palissade (702 ha), le Boucanet .
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En 2010, ce département était propriétaire de 16 000 ha, soit 3,2% de sa superficie.
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4.4.1 L'intervention du Conservatoire du littoral dans le cadre du protocole signé en 2009 avec les Salins du Midi Les acquisitions publiques réalisées en Camargue représentent un total d'environ 30 000 ha dont la majorité est détenue par le Conservatoire du Littoral. L'étang du
Vaccarès compte à lui seul pour 13 118 ha. Un quart du territoire camarguais est ainsi durablement protégé par l'action conjointe de cet opérateur et des collectivités territoriales (Conseils généraux et communes) sans compter celle de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse qui a été fortement mobilisée lors de l'achat des terrains appartenant à la Compagnie des Salins du Midi en 2009. Il fallait, en effet, intervenir à hauteur de 45 millions pour acheter une première tranche de 5 100 ha mise en vente par la CSM au prix de 0,88 /m² avec un étalement des paiements s'étageant entre 2010 et 2013.
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Le financement s'est établi de la façon suivante :
Conservatoire du littoral.......................... 15M dont 5M au titre du FEDER Ministère de l'écologie............................ 10M Agence de l'eau........................................9M Grand Port Maritime de Marseille.............8M Conseil général 13...................................3M
Resteraient à acquérir, aux termes du protocole signé entre la CSM et le Conservatoire du Littoral un peu plus de 500 ha en 2011. Ce « tour de table » implique le Grand Port Maritime de Marseille (GPMM) pour une somme de 8 millions dans le cadre d'un processus de compensation pour la destruction de 300 ha environ de marais (le « Caban Nord ») situés dans son emprise. Le GPMM devait en effet utiliser l'opportunité de la vente des terrains des Salins du Midi aux titres des mesures compensatoires liées à l'aménagement de la darse 2 (creusement d'un chenal d'accès au canal de Fos-sur-Mer et aménagement à terme de l'ensemble de la zone (projet FOS 4XL)). Or, comme la mission a pu le vérifier sur place, la zone dite Caban Nord présente des caractéristiques écologiques telles que les mesures compensatoires envisagées ne seront probablement pas suffisantes pour en autoriser l'aménagement. Ceci reflète en partie la fragilité du montage financier pour ces acquisitions de terrains. Quoique intéressantes de par leur situation littorale les zones utilisées pour la saliculture n'étaient pas convoitées pour des usages qui auraient mis en question l'intégrité patrimoniale de la Camargue. Aussi, peut-on s'interroger sur la décision qui aura conduit le Conservatoire à acheter l'ensemble de ces surfaces puisque les strates de protection qui s'y superposent (Natura 2000, zonages CU, risques de submersion25), sans parler de la difficulté à gérer les niveaux d'eau après l'arrêt de l'activité et à trouver des gestionnaires efficaces sont autant d'obstacles placés sur sa route. L'assèchement des moyens d'intervention du Conservatoire lui aura interdit par ailleurs de se porter acquéreur des 2 500 ha des lagunes du Lairan situées dans le Gard et mises en vente également par la CSM pendant la même période. Les collectivités auraient pu se porter acquéreur de ce terrain mis à prix 25 M en lieu et place du Conservatoire en utilisant la TDENS. Mais les élus du Languedoc-Roussillon au conseil de rivages Méditerranée ont souhaité préserver l'option d'un maintien de l'intégrité du périmètre industriel actuel. Ils ont estimé qu'il était impossible que de l'argent public soit dépensé pour casser une partie de l'outil de production des Salins, subventionner de fait les suppressions d'emploi en résultant, enrichir les actionnaires de la compagnie et participer à son démantèlement. Cependant, le groupe Salins a poursuivi la mise en vente en proposant un allotissement et en définitive deux des quatre lots ont trouvé des acquéreurs privés, intéressés par ces terrains pour leur utilisation à des fins cynégétiques. Pour les deux lots d'une surface totale de 1 000 ha qui restent en vente, le Conservatoire du Littoral n'a ni les moyens, ni le désir de se porter acquéreur dans la mesure où l'intérêt de parcelles plus petites apparait avec moins d'évidence.
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Il existe des PPRI prescrits pour Saintes-Maries de la Mer, Arles, Port-Saint-Louis-du-Rhône qui seront complétés par un arrêté sur les risque inondation par débordement du Rhône et submersion marine.
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Il faut noter qu'à chaque fois qu'un terrain est mis en vente dans le territoire camarguais, il y a de façon quasi automatique l'idée d'un appel au Conservatoire. D'autres propriétés pourraient être mises à la vente dans les mois ou années à venir dans la réserve de biosphère dans des zones de préemption du Conservatoire ou de celle des collectivités. Faut-il que le Conservatoire intervienne à tout coup et à tout prix ? Cette question sera examinée dans la partie consacrée aux recommandations, mais, en première analyse, l'absence de menaces d'urbanisation ou d'artificialisation dues à la difficulté de passer outre l'empilage des protections réglementaires et internationales ou bien même de trouver des projets de développement qui compromettraient, de par leur nature, l'environnement et les équilibres existants entre les usages agricoles, récréatifs et naturalistes, plaide pour recommander la plus grande prudence dans la stratégie foncière du Conservatoire. 4.4.2 L'intervention foncière de l'agence de Méditerranée-Corse (RMC) sur les zones humides l'eau Rhône-
En février 2010, la secrétaire d'État à l'écologie avait présenté le plan national d'actions pour la sauvegarde des zones humides qui prévoyait de mobiliser 20 millions en 3 ans pour financer 29 actions, et pour lancer un parc national situé en zone humide de même que 6 nouveaux sites Ramsar. La maîtrise foncière est clairement un levier de ce plan qui, à la suite du Grenelle de l'environnement mettait en avant l'objectif de 20 000 ha de zones humides à acquérir au niveau national. Cet objectif s'est traduit au sein des contrats d'objectifs des agences de l'eau. Pour l'agence de l'eau RMC, l'acquisition de 1 663 ha a été actée dans son contrat d'objectif. L'agence de l'eau RMC a financé 73 opérations d'acquisition foncière pour un montant d'autorisations de programme de 21 millions . La surface acquise au titre du 9ème programme d'action par le Conservatoire du littoral auprès de la CSM, comme il a été mentionné plus haut aura été financée par l'agence à hauteur de 13,5 millions (9 millions pour Galabert et Beauduc en 2009 et 3,964 millions pour les autres terrains des Salins en 2007). Le taux de participation (subvention au Conservatoire) s'établit à 21 %. À noter que l'agence RMC a signé un accord-cadre avec la SAFER de PACA qui réalise une veille sur les transactions de vente pouvant constituer une opportunité de préservation de zones humides. En effet, la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (Grenelle 2) dispose que les acquisitions concernant des terres admissibles au paiement unique des aides agricoles (DPU) le sont par le biais du droit de préemption des SAFER sur proposition de l'agence de l'eau. L'acquisition directe des zones humides par l'agence, si elle est rendue possible par la loi, (voir l'encadré ci-dessous) peut susciter des interrogations au sein de l'établissement ainsi que parmi ses partenaires sur le terrain, résumées ainsi par l'agence de l'eau RMC elle-même26:
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« Stratégie d'intervention pour l'acquisition foncière des zones humides », Commission relative au milieu naturel aquatique Rhône -Méditerranée, Séance du 29 mars 2011.
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Article L213-8-2 du Code de l'environnement Créé par LOI n° 2010-788 du 12 juillet 2010 - art. 133 L'agence de l'eau mène, outre les missions définies à l'article L. 213-8-1, une politique foncière de sauvegarde des zones humides approuvée par le comité de bassin. À ce titre, elle peut attribuer des aides à l'acquisition par des conservatoires régionaux d'espaces naturels, par des collectivités territoriales, leurs groupements ou des établissements publics de parcelles composant ces zones. L'agence de l'eau peut acquérir ou faire acquérir des parcelles dans les zones humides à des fins de lutte contre l'artificialisation des sols et de valorisation, notamment agricole.
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le positionnement de l'agence auprès des autres acheteurs potentiels que sont les collectivités et les Conservatoires, qui risquent de se retirer en proposant que l'agence réalise elle-même l'achat, ce qui leur permet d'éviter les difficultés liées à l'opération ; la perturbation du marché foncier local par l'arrivée d'un opérateur ayant des possibilités financières élevées et une faible expérience du marché local ; les critères de choix des terrains sur lesquels l'agence devrait intervenir ; quels partenariats avec les opérateurs fonciers habituels ?
En interne, les questions posées portent sur l'exercice d'un métier entièrement nouveau pour une agence de l'eau : comment conduire l'acquisition et comment gérer les terrains acquis ? Pour obtenir des éléments de réponse à ces questions, il faut que l'agence procède à un audit de ses conditions potentielles d'intervention, en saisissant une ou plusieurs opportunités d'acquisitions permettant de réduire au maximum les inconvénients cités ci-dessus, comme des zones humides à fort enjeu, pour lesquelles l'acquisition est nécessaire pour assurer leur sauvegarde ou leur restauration, et sur lesquelles il n'y a pas de maître d'ouvrage susceptibles d'intervenir. L'agence de l'eau, en exprimant ces réserves, vient souligner que le métier d'opérateur foncier ne se décrète pas, et, qu'en effet, une stratégie concertée avec des partenaires-professionnels du foncier ne peut qu'être bienvenue.
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Carte des acquisitions du sud-est Camargue (PNRC)
4.4.3 La réserve foncière des établissements publics fonciers (EPF) Le rôle des Établissements publics fonciers consiste à acquérir des propriétés bâties et non bâties à la demande de l'État, des collectivités territoriales,ou d'établissements publics tels que les chambres de commerce et d'industrie, permettant à ces partenaires de réaliser à terme leurs projets d'aménagement. Les objectifs essentiels sont, d'une part, d'assurer la disponibilité des biens au moment opportun, sans apport financier de la part de la collectivité pendant la durée de la réserve foncière, de faciliter ainsi la préparation du projet d'aménagement, d'autre part, de préserver de bonnes conditions de négociation et de mener une action régulatrice sur le marché foncier. Dans le Var, l'EPF PACA s'est déjà porté acquéreur d'un terrain préempté par la SAFER pour le compte du Conservatoire du littoral. Le portage aura duré trois ans, le temps que le budget de l'établissement permette l'achat. Sa priorité d'intervention se situe dans le secteur du renouvellement urbain et la densification. Dès qu'il y a
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extension urbaine, il faut envisager des mesures compensatoires mais, selon l'EPF, les terrains de la CSM ne se prêtent pas à l'expression de mesures compensatoires puisque les menaces d'artificialisation sont quasiment nulles. Pourtant, l'EPF PACA, dans son programme prioritaire d'intervention, identifie un axe 7 « La protection des espaces naturels remarquables »27 et notamment ceux « menacés par le développement urbain ou la fréquentation incontrôlée du public ». La mission considère que cet outil peut se révéler utile en cas de nouvelles cessions massives de foncier. L'EPF serait alors en mesure de permettre l'étalement des acquisitions par le Conservatoire du Littoral en fonction de ses capacités budgétaires. Ce modus operandi est compatible avec l'axe 728. Toutefois, si les EPF sont placés sous la tutelle du préfet de région, la décision relève d'un conseil d'administration composé d'une majorité d'élus locaux. L'EPF Languedoc-Roussillon avait arrêté en 2009 en accord avec le délégué régional du Conservatoire du Littoral une série acquisitions-relais pour des terrains situés en petite Camargue. Le protocole avait été présenté et validé au bureau de l'EPF avant que le président de l'époque n'en décide l'ajournement. L'axe 3 du PPI qui représente environ 7,5 % de ses priorités budgétaires l'autorise en effet à pratiquer l'acquisition d'espaces naturels remarquables.
4.5 Les autres outils d'intervention
4.5.1 Les mesures compensatoires Lorsqu'un la réalisation d'un projet porte atteinte à l'environnement et si le maître d'ouvrage n'est pas en mesure d'éviter, et de réduire ses impacts, des mesures de compensation doivent être proposées dans le cadre de l'évaluation environnementale. Le code de l'environnement se réfère à la notion de mesures compensatoires dans divers cas : - En matière d'étude d'impact29 : les travaux et aménagements qui y sont soumis doivent prévoir, « le cas échéant, les principales mesures destinées à éviter, réduire et si possible compenser les effets négatifs importants du projet ». Plus précisément, l'étude comprend « les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ».
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Le PPR indique notamment « L'EPF poursuivra notamment son partenariat avec le Conservatoire du littoral, pour la sauvegarde des derniers espaces naturels littoraux en PACA, en intervenant principalement sur des sites charnières entre espaces naturels et espaces urbanisables afin de fixer définitivement les limites de l'urbanisation », PPI p 49.
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dont le texte détaillé rappelle « l'EPF n'a pas vocation à conserver les biens acquis car à l'issue d'une durée limitée de portage il doit revendre ces biens aux acteurs concernés par la mise en oeuvre du projet définitif et la gestion ultérieure de ces espaces ».
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Articles L. 122-1, L. 122-3 et R. 122-3 du code de l'environnement.
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En ce qui concerne l'évaluation des incidences des programmes et projets soumis à autorisation ou approbation en sites Natura 2000 au titre de la Directive n° 92/43/CEE du 21 mai 1992 dite Directive Habitats : « Le dossier d'évaluation d'incidences, établi par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage, comprend : [...]Lorsque, malgré les mesures prévues au II (mesures de nature à supprimer ou réduire ces effets dommageables), le programme ou projet peut avoir des effets notables dommageables sur l'état de conservation des habitats naturels et des espèces qui ont justifié la désignation du ou des sites, le dossier d'évaluation expose en outre : 1° les raisons pour lesquelles il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et les éléments qui permettent de justifier la réalisation du programme ou projet dans les conditions prévues aux III ou IV de l'article L. 414-4 ; 2°- les mesures que le maître d'ouvrage ou le pétitionnaire envisage, en cas de réalisation du programme ou projet, pour compenser les effets dommageables que les mesures prévues au II ne peuvent supprimer, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes »30. De même, « Lorsqu'une évaluation conclut à une atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000 et en l'absence de solutions alternatives, l'autorité compétente peut donner son accord pour des raisons impératives d'intérêt public majeur. Dans ce cas, elle s'assure que des mesures compensatoires sont prises pour maintenir la cohérence globale du réseau Natura 2000. Ces mesures compensatoires sont à la charge de l'autorité qui a approuvé le document de planification ou du bénéficiaire du programme ou projet d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations, de la manifestation ou de l'intervention. La Commission européenne en est tenue informée »31. C'est dans ce cadre réglementaire que la question s'est posée de recourir à l'acquisition foncière en Camargue pour compenser des atteintes à des sites de grande valeur écologique 7 localisés dans le périmètre du Grand Port Maritime de Marseille(GPMM)32. Il s'agit d'anciens salins classés en Zone de Protection Spéciale au titre de la Directive Oiseaux (voir aussi le chapitre 2.5 du rapport). Plusieurs inventaires réalisés depuis 2008 ont d'autre part mis en évidence leur importance exceptionnelle à l'échelle européenne pour la conservation des habitats, de la flore et de la faune, avec notamment la présence de plusieurs habitats prioritaires de la Directive Habitats et la redécouverte d'espèces végétales endémiques de l'ouest du Bassin méditerranéen que l'on croyait disparues du territoire national. Le GPPM a été sollicité pour participer à l'achat des terrains des Salins du Midi en 2009 à hauteur de 8 millions soit un peu moins de l'équivalent de 1 000 ha de lagunes au prix (très élevé par rapport au marché) de 0,9 /m²33.
30 31 32
Article R. 414-21 du code de l'environnement. Article L. 414-4 VII du code de l'environnement. Il s'agit de creuser un chenal et d 'aménager la majeure partie des 650 ha de la lagune « Caban Nord ». À noter que sur un site à enjeux majeurs le ratio de compensation est compris en 5 et 10 (DREAL PACA).
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La mobilisation des associations a remis en question ce processus de compensation qui se heurte à la difficulté de mettre en oeuvre le principe d'équivalence. En effet, les espèces protégées qui seraient détruites au cas où l'aménagement se réaliserait n'existent pas dans les terrains de la CSM rachetés par le Conservatoire du littoral, avec le concours financier de différents opérateurs dont le GPMM. Au-delà de ce cas spécifique, existe-t-il des cas où l'acquisition foncière de terrains mis en vente en Camargue pourraient être utilisés à des fins de compensation écologique ? Par exemple, un maître d'ouvrage concerné par l'obligation de recourir à des mesures compensatoires achèterait en pleine propriété des terrains dans lesquels se trouvent les espèces à valeur patrimoniale équivalentes à celles impactées par son projet, ou bien, par l'effet d'une servitude conventionnelle sur le même type de zone s'assurerait ainsi de leur préservation. La mission a entendu la CDC Biodiversité exposer son expérience de création d'un terrain de 357 ha de coussouls dans la plaine de Crau en 2009. Ce terrain peut être aujourd'hui utilisé pour des mesures compensatoires dans le cadre d'un projet dont les impacts seraient dommageables au même type d'habitat. La maîtrise foncière et la vocation écologique pérennisée de la zone permettent d'attribuer des « crédits « biodiversité » aux maitres d'ouvrage qui en font l'acquisition, avec l'assurance d'un suivi scientifique. Cette pratique couramment utilisée aux États-Unis reste rare en France. La difficulté d'une telle démarche repose sur la mise en oeuvre du principe d'additionnalité : il s'agit, en effet, d'éviter de compenser les destructions d'habitat avec des terrains qui ne sont pas menacés. Dans le cas de la Crau, il y a eu création d'un nouvel habitat spécifique dans cette zone steppique très rare en France, puisque antérieurement aux travaux d'ingénierie écologique, il y avait un verger de pêchers. Aujourd'hui, il ne semble pas que les opérations de compensation passant par de la simple acquisition foncière soient réalisables en Camargue, en tout cas, sans y avoir identifié en préalable les priorités d'action reliées à des menaces potentielles. Cependant, l'acquisition par le Conservatoire du Littoral de terrains non menacés mais qui s'accompagnerait d'une réhabilitation des milieux pourrait éventuellement être utilisée dans le cadre de mesures compensatoires à condition que l'achat concerne des zones convoitées risquant de changer d'usage et, partant de remettre en question leur pérennité écologique. La mission estime cependant que ce genre d'opération ne peut être qu'exceptionnelle tant est difficile à démontrer l'additionnalité de la réhabilitation écologique qui se borne souvent à répondre à la « non gestion » d'un terrain par de l'ingénierie écologique légère.
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4.5.2 Le mécénat34 Le mécénat est souvent invoqué dès lors qu'il s'agit de trouver des financements pour assurer la protection d'espaces de valeur. Dans le cas de la Camargue, il peut s'agir de trouver des moyens financiers supplémentaires pour procéder à des acquisitions foncières. Mais, compte-tenu des valeurs estimées des domaines à acquérir, ce ne sont pas les dizaines de milliers d'euros que les fondations d'entreprises sont habituées à financer qui sont à la hauteur des enjeux. En réalité, ce sont plusieurs millions d'euros qu'il convient de mobiliser, dans le cadre d'accords de partenariat pluriannuels, dans la mesure où les entreprises ou une fondation d'entreprises préfèrent inscrire leurs opérations de parrainage dans la durée. Par ailleurs, il convient de garder à l'esprit que les entreprises ne s'engagent pas à fonds perdus. Il ne faut pas confondre philanthropie individuelle et mécénat d'entreprise. Au risque d'être accusée d'abus de bien social, l'entreprise doit avoir intérêt à agir. D'où la question des avantages que l'entreprise peut tirer d'un soutien à l'acquisition de propriétés camarguaises au profit du Conservatoire du Littoral ou d'une quelconque collectivité publique ? Parmi les mécènes susceptibles d'intervenir appartiennent à la catégorie des « grands donateurs », deux cas de figure se présentent : des mécènes privés agissant en nom propre. Le cas classique est celui d'un propriétaire qui fait en sorte qu'après lui son domaine soit définitivement consacré à la conservation de la nature. On peut citer celui d'une autre zone humide importante de France, le lac de Grandlieu en Loire-Atlantique (6000 ha), dont la majeure partie a été donnée à l'État par Jean-Paul GUERLAIN, constituée en réserve nationale naturelle, est gérée par la SNPN comme le Vaccarès et à été versée au patrimoine du Conservatoire du Littoral. Mais ce type de démarche, relativement rare en France s'agissant de grandes superficies, n'est possible qu'en cas d'appropriation individuelle préalable par un ami de la nature. des entreprises ou fondations d'entreprise. Elles sont peu nombreuses à pouvoir intervenir pour de tels montants. Citons la fondation Total qui a signé deux conventions successives de trois ans de 8 M chacune avec la Fondation du Patrimoine pour la protection du patrimoine industriel (période 2006/2011). En tout état de cause, ce type de démarche obéit à des règles. Par exemple, pour qu'il ait un sens, le mécénat doit s'inscrire dans une véritable stratégie clairement affichée par les pouvoirs publics. Il s'agirait de faire dans le domaine de la protection de l'environnement et de la biodiversité ce qui s'accomplit de façon de plus en plus fréquente, avec succès, dans le domaine culturel pour la protection de « Trésors nationaux » en faisant largement appel au mécénat privé35.
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Cette partie a été rédigée avec l'aide de M. Dominique LEGRAIN, ancien Inspecteur général au Service d'Inspection Générale de l'Environnement (SIGE) du ministère de l'écologie. Exemple des « Trois Grâces » de Cranach (4M) dont l'acquisition a été faite par Le Louvre en collectant des dons de particuliers et d'entreprises.
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Ceci aurait pour conséquence de valoriser la Camargue au titre de « Patrimoine national », labellisation pouvant correspondre à la notion de « Trésor national » prévue par la loi pour les éléments du patrimoine culturel. Cette démarche nécessite une implication forte du Gouvernement et, accessoirement la mise en place d'une cellule opérationnelle dédiée pour suivre un dossier de cette ampleur. Bien sûr, il s'agit d'apprécier les avantages que pourrait recevoir le mécène, entreprise ou fondation d'entreprise. On peut penser en termes de gain de notoriété venant d'une forte reconnaissance des pouvoirs publics dans le cadre d'une opération de dimension nationale. On peut également imaginer que le mécène puisse bénéficier d'avantages liés à l'acquisition elle-même : jouissance de bâtiments, par exemple, sur le domaine acquis au profit du Conservatoire du Littoral CL ou d'une collectivité publique, dans le cadre d'un bail de longue durée pour des réceptions de prestige, des évènements culturels, ... 4.5.3 Les servitudes conventionnelles Le concept d'appropriation publique des espaces menacés ou fortement convoités est bien reçu par l'opinion publique, mais les répercussions financières et les aléas de gestion sont tels qu'il convient de ne pas sous-estimer les limites d'une politique de préservation du littoral entièrement fondée sur la maîtrise foncière. Ceci est corroboré par le fait que les communes littorales sont assez réticentes à recevoir en pleine propriété des espaces dont il est entendu qu'ils resteront en l'état. Ainsi, s'explique le faible appétit des collectivités locales pour accepter la cession de 9/10e d'une propriété contre une autorisation de construire sur 1/10e de l'espace (Article L.130-2 à 130-4 du Code de l'Urbanisme) et pour gérer les espaces acquis par le Conservatoire du littoral. La servitude conventionnelle environnementale repose sur un mécanisme simple. Un vendeur et un acquéreur conviennent qu'une disposition particulière (l'interdiction d'édifier un bâtiment ou de changer l'affectation des sols) frappant un terrain soit inscrite aux hypothèques. Dans ce cas, il y a un fonds dominant (celui qui édicte la servitude) et celui qui l'accepte (le fonds servant)36. Est-il possible d'introduire dans la politique de protection du littoral du Conservatoire le principe de l'utilisation des servitudes conventionnelles ? Le Conservatoire du Littoral, soucieux d'une gestion économe de son budget pourrait dans certains cas devenir titulaire de servitude à condition que le terrain « fonds servant » se trouve en contiguïté du fonds qu'il détient et que la servitude n'introduise pas d'obligations positives. Autrement dit, si le Conservatoire du littoral ne se contente pas d'acheter une servitude non aedificandi sur un domaine agricole mais qu'il oblige à maintenir un type d'activité qui ne compromette pas la préservation de la zone, il doit faire apparaître ces obligations comme des « accessoires » distincts de la servitude37.
36
Articles 637 et 638 du Code Civil.
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Il semble que dans de nombreux cas, le Conservatoire pourrait constituer des servitudes conventionnelle de droit privé portant sur les seuls éléments que la puissance publique entend acquérir à des fins de protection, par exemple la nonconstructibilité, limitant ainsi les coûts d'acquisition et de gestion. Deux conditions s'attachent à la mise en place de servitudes conventionnelles : d'abord, et de façon évidente, que le propriétaire du terrain souhaite continuer son activité, le plus souvent, de nature agricole, ensuite que la rédaction de l'énoncé de la servitude soit réalisée par des notaires connaissant ces mécanismes. Cette suggestion trouverait une sécurité juridique supplémentaire si l'article 637 du code civil était complété par la phrase suivante : « la servitude peut être une charge de gestion environnementale imposée à un fonds par la volonté de l'homme, ainsi qu'il est dit à l'article 686. ». L'article 686 du code civil étant lui-même complété par la phrase suivante : « Il est permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés ou en faveur de leurs propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu néanmoins que les services établis ne soient imposés ni à la personne, ni en faveur de la personne, mais seulement à un fonds et pour un fonds ou pour la gestion ou la conservation d'un espace naturel, et pourvu que ces services n'aient d'ailleurs rien de contraire à l'ordre public » 38.
37
L'essentiel de ce qu'il faut savoir sur les servitudes conventionnelles a été écrit par Max FALQUE dès les années 80 : voir en particulier « les servitudes conventionnelles, un outil de maîtrise foncière et de gestion des espaces littoraux » CERL, SOMI, décembre 1980. Voir : rapport au Ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables présenté par le Sénateur Paul RAOULT - COMOP Trame Verte et bleue, mars 2008.
38
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5. Conclusions et propositions
5.1. Un territoire où les jeux d'acteurs semblent désormais équilibrés
La Camargue aujourd'hui se révèle encore telle qu'elle était hier : un écosystème largement anthropisé reposant sur un appareillage hydraulique sophistiqué générant des niveaux d'eau fruit d'un compromis historique entre les saliniers, les riziculteurs, les éleveurs, les chasseurs et les naturalistes, voire les professionnels du tourisme. Est-ce l'idéal ? A-t-on atteint un équilibre satisfaisant entre tous les acteurs et, pour tout dire, se trouve-t-on dans ce territoire dans une dynamique de développement durable ? Répondre à cette question reviendrait à mesurer (mais comment en vérité ?) les fines articulations entre les trois dimensions de la durabilité, soeurs rivales d'un type de développement souhaitable. La mission a retenu que ce territoire n'est ni tout à fait naturel, ni tout à fait une « terre sauvage ». Les crues de 1993 et 1994 puis en 200339 ont rappelé, s'il en était besoin, la fragilité de la Camargue. De « milieu naturel menacé de risques humains, le delta a basculé dans la représentation d'un milieu humain menacé de risques naturels »40 ce qui a déclenché en 2005 un « plan Rhône », similaire au plan Loire. La Camargue est donc bien sous la surveillance des acteurs administratifs et, qui plus est, son agriculture bénéficie de nombreuses aides de la PAC au titre du « premier pilier» (aides à la riziculture) et du « deuxième pilier » (les mesures agroenvironnementales) qui maintiennent et soutiennent des exploitations économiquement fragiles. Il s'agit donc bien d'un territoire à l'évidente naturalité, mais dont les tenants et aboutissants relèvent également d'une évidente « humanité ». Les propriétaires fonciers qui depuis longtemps disaient pouvoir assumer à eux seuls la gouvernance de la Camargue se sont vus progressivement contraints de partager leur autorité avec les collectivités locales. Les comités de propriétaires qui assuraient la «pérennité »41 de la Camargue se sont progressivement vus dépossédés de leurs responsabilités uniques pour finalement les partager au sein de « syndicats mixtes » (syndicat mixte de gestion des digues-Symadrem, syndicat mixte du parc naturel régional-PNRC,...). Comme réponse très progressivement apportée à la nécessité d'une gestion bien comprise de la grande diversité des activités, il aura fallu presque vingt ans pour y parvenir, les acteurs camarguais se retrouvent dans des instances où le dialogue sur l'avenir du territoire porte des germes prometteurs.
39
En octobre 1993, 13 000 ha de « l'ile de Camargue » ont été submergés sur une hauteur moyenne de un mètre. En 2003, c'est au tour de la camargue gardoise d'être inondée. Bernard PICON, « L'espace et le temps en Camargue », Actes Sud 2008. Voir la Fondation qui a longtemps abrité le parc naturel régional avant le GIP en 2002 et le PNRC en 2007.
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5.2 Mais dont la gouvernance globale doit être renforcée
Il n'existe pas à ce jour de structure de gestion unique ni même de réelle coordination entre les deux gestionnaires de la réserve de Biosphère Camargue. La mission n'a pas constaté de volonté manifeste de rapprochement entre les élus des deux Camargue qui affichent leurs différences culturelles. Excepté au sein du SYMADREM, chargé de la gestion des eaux, aucune instance d'échange, de concertation ou de partage d'information n'existe entre le syndicat mixte chargé de la gestion des milieux naturels gardois et le PNRC, centré sur la Grande Camargue. La culture taurine à l'ouest du petit Rhône favorise la protection des zones humides mais le handicap à une gestion commune peut s'expliquer par les particularités de la Camargue gardoise : petites parcelles et communes pratiquant l'étalement urbain (Aigues-Mortes et Grau-du-Roi). Cependant, la stabilisation du PNRC puis son renforcement devraient être sérieusement pris en compte. L'intégration des conséquences de la réforme territoriale en cours visant au rapprochement puis à la fusion de structures répondant aux mêmes finalités serait un atout pour le Parc. Une concertation entre les préfets des deux départements concernés pourrait s'avérer particulièrement judicieuse pour ne pas ériger les limites administratives en obstacle à la gestion unitaire de la réserve de biosphère. Le renforcement des outils de gestion de la réserve de biosphère qui couvre l'ensemble de l'écosystème Camargue, notamment à travers son observatoire, serait de nature à développer une culture commune entre les gestionnaires, préalable indispensable à une gestion unifiée. L'État doit bien entendu continuer de jouer les « bons offices » entre les différentes formes d'organisation locale. Le fait qu'il se soit fortement impliqué dans l'adhésion à la Charte du PNR qui, de facto s'est installé comme la seule structure capable d'une part d'agréger les visions parfois contradictoires des acteurs territoriaux et de gommer, d'autre part, les susceptibilités restantes, semble un gage de sa respectabilité. Outre ce rôle de médiation, voire d'arbitrage, l'État doit par ailleurs être en mesure de respecter ses engagements (par ailleurs prévus dans la charte) notamment en matière de respect des règles d'urbanisme et d'implication des services de police de l'environnement et de sécurité publique. Les spécificités propres à ce territoire d'exception qu'est la Camargue nécessitent d'avoir une approche coordonnée des différents services de l'État. Recommandation Pour soutenir son action auprès du PNRC dans le cadre de la mise en oeuvre de la charte et favoriser une plus grande coordination entre les gestionnaires de petite et grande Camargue, la mission suggère que soit nommé un interlocuteur spécifique du PNRC et de la réserve de biosphère au sein de la DREAL PACA.
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5.3. Le foncier : les acquisitions doivent se faire avec discernement
La mission a observé de façon approfondie l'évolution du « marché » foncier, notamment en bordure littorale. La Compagnie des Salins du Midi, pour des raisons économiques a mis en vente en 2007 plusieurs milliers d'hectares dédiés jusqu'alors à la saliculture. Le Conservatoire du littoral s'est trouvé dans l'obligation d'acheter des surfaces qui n'avaient pas toutes un intérêt écologique avéré (on pense, ici, aux tables salantes) ou qui ne faisaient pas l'objet de menaces de dégradation liées à des projets d' aménagement ou d'urbanisation. Ces zones soumises à risques de submersion sont, de plus, protégées au titre de nombreuses réglementations relevant du code de l'environnement. Dès lors, les quelques 58 millions engagés depuis 2008 par le Conservatoire avec l'appui financier des collectivités, du ministère de l'écologie, de l'agence de l'eau etc ont lourdement pesé sur ses capacités d'intervention vers des zones littorales plus menacées ou plus intéressantes au plan écologique. Par ailleurs, les caractéristiques physiques de ces terres interdit tout usage agricole. Leur vocation serait nécessairement naturelle ou cynégétique. Leur conservation en l'état actuel résulte pour partie d'importants travaux réguliers de consolidation de la digue à la mer. Compte tenu du contexte environnemental et réglementaire, la plupart des terrains utilisés pour la saliculture ne se trouvent pas dans un champ très concurrentiel du marché foncier. Qui plus est, le financement inscrit dans le protocole qui court jusqu'en 2014 n'est pas bouclé à ce jour en raison de la grande difficulté à ratifier le processus de compensation écologique lié au développement de « Fos 4XL » souhaité par le Grand Port Maritime de Marseille (cf supra). Les acteurs intervenant sur le foncier pourraient naturellement être mobilisés pour permettre des acquisitions publiques en Camargue dans les années à venir si d'autres terrains appartenant à la CSM venaient à se libérer : on pense ici aux deux établissements publics fonciers (PACA et Languedoc-Roussillon), à l'agence de l'eau RMC ou au Conseil Général des Bouches-du-Rhône , voire à la fondation MAVA. Mais, le jeu en vaut-il la chandelle sachant qu'une fois les achats fonciers réalisés (à des prix excédant ceux du marché pour des terrains inconstructibles), il reste à trouver des gestionnaires fiables, prêts à endosser les frais inhérents à un entretien nécessaire à l'ouverture au public et au respect des objectifs écologiques poursuivis42 ? Propriétaire dans la partie PACA de 23 500 ha et prochainement de 27 000 ha, soit 18% des 143 500 ha du delta du Rhône, il est possible que le Conservatoire du LittoralL soit sollicité pour acquérir d'autres propriétés , soit dans le cadre de la poursuite du désengagement des Salins du Midi soit parce que des cessions notamment agricoles interviennent de façon régulière43 dans ce territoire.
42
L'étang du Vaisseau (Salin-de-Giraud) qui devrait être acquis par le CERL auprès de la CSM nécessiterait 200k annuels et 4ETP pour son entretien. Selon la SAFER 13, les propriétés changent de main en moyenne tous les 25 ans.
43
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Pour la mission, l'intervention du Conservatoire du littoral ne trouverait sa justification que dans l'une des deux situations suivantes : d'une part si les terrains préemptables font l'objet de menaces d'urbanisation ou de développement économique dirimant pour la pérennité de l'écosystème. Ou bien, d'autre part, pour éviter l'éventuelle mise en vente par découpe, comme cela a été le cas lors de la vente de l'étang du Lairan dans la Camargue gardoise. À l'opposé, la montée du niveau de la mer à l'horizon du siècle comprise entre 0,44 m et 1,4 m44 suggère d'adopter une attitude prudente pour d'éventuelles acquisitions de zones submersibles ou inondables 45 dans cette partie du territoire national. Recommandation Les acquisitions du Conservatoire du littoral devraient s'inscrire dans une approche stratégique reposant sur une analyse combinée de la valeur écologique propre et en lien avec le reste de l'écosystème des terrains mis en vente mais aussi d'une analyse des menaces et du risque à ne rien faire. Dans ce cadre, les acquisitions ne devraient porter que sur des zones menacées par des projets de développement, pour éventuellement faire pièce à une trop grande parcellisation des propriétés ou sur des terrains de grande valeur écologiques et afin d'établir une continuité avec des terrains déjà acquis (en particulier, les parcelles autour du Vacarès). Si la mission recommande qu'une politique d'acquisition publique soit envisagée avec prudence à l'avenir, elle n'exclut pas pour autant une intervention particulière sur les terrains jouxtant le hameau de Salin-de-Giraud si ceux-ci venaient à être mis en vente par la CSM. Plusieurs problèmes affectent en effet ce territoire. D'abord, l'inondabilité qui conduit à délimiter la partie constructible à la partie déjà urbanisée du hameau en utilisant des espaces pouvant être considérés comme des dents creuses. Ensuite, la zonation « Natura 2000 » qui oblige un maître d'ouvrage à produire une étude d'incidences ciblée sur les habitats et espèces des sites concernés avec des mesures compensatoires à la clé peu évidentes à réaliser. Des projets de réhabilitation du hameau pour, in fine, le reconvertir à des fins touristiques ne peut, selon la mission, s'envisager indépendamment de la prise en compte d'une fréquentation, pour l'heure, anarchique des plages de Piémanson et Beauduc qui justifie une action concertée de l'État et des collectivités. Recommandation Un projet global alliant des modes de transport doux permettant la mobilité des touristes entre les plages et le hameau et une conception écologique de l'habitat semble prometteur comme été acté dans la Charte du PNRC46. La mission estime qu'il pourrait s'insérer dans la convention de revitalisation CSM-État révisée à la lumière d'objectifs explicites de développement durable.
44
Selon une estimation réalisée en 2011, non encore reprise par le GIEC. En simplifiant à l'extrême, est-il nécessaire d'acheter à grand prix des millions de m3 d'eau salée ?.
45
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5.4 D'autres outils que l'acquisition peuvent-ils être mis en oeuvre ?
Compte tenu du contexte budgétaire actuel, la mission s'inscrit donc dans le cadre d'une stratégie d'acquisition plutôt parcimonieuse et prudente de la part du Conservatoire du Littoral. Toutefois, la mission ne récuse pas une autre stratégie plus volontariste. Celle-ci allierait à la fois une volonté de soutenir par principe l'acquisition du patrimoine naturel grâce notamment à l'intervention de l'EPF PACA sur les terrains de la CSM, s'il advenait qu'ils se libèrent dans les années à venir. Ces acquisitions seraient conduites sur une durée assez courte (pas plus de quelques années), le temps que le Conservatoire du littoral retrouve sa capacité d'intervention financière. Par ailleurs, des mécanismes de servitudes conventionnelles pourraient être mises en jeu par le Conservatoire du Littoral sur des terrains jouxtant ses acquisitions. La mission est convaincue qu'il est souvent moins onéreux, comme alternative à l'acquisition foncière, de conventionner avec un propriétaire privé qui souhaite poursuivre son activité, le plus souvent agricole, le fait de ne pas modifier les niveaux d'eau, de ne pas édifier de bâtiments ou, tout simplement de ne pas modifier des façons culturales satisfaisantes du point de vue de l'environnement. La mission est d'avis que de façon systématique le Conservatoire du Littoral étudie la faisabilité de servitudes conventionnelles environnementales47 dès lors qu'une vente de terrains se profile. Recommandation Examiner la mise en oeuvre des servitudes conventionnelles environnementales en lieu et place de l'acquisition en pleine propriété à chaque fois que cela est possible (volonté du propriétaire de poursuivre son activité). La mission a évoqué le mécénat et les mesures compensatoires comme supports d'une politique d'acquisition qui ne se substituerait nécessairement pas à celle menée par les opérateurs publics, mais, qui viendrait en éventuel complément. Si le mécénat semble en théorie une piste prometteuse, ce ne peut-être que dans le cadre d'une ambition et d'une visibilité de la Camargue beaucoup plus accentuées qu'aujourd'hui. Des partenaires de prestige ne seraient, en effet, réellement intéressés par le mécénat qu'au prix d'un retour d'image d'envergure qui, de facto, nécessiterait que ce territoire naturel de renommée internationale qu'est la Camargue soit considéré
46
« L'État s'engage à accompagner une démarche en vue d'une requalification des constructions hors du domaine public maritime situées au hameau des Sablons, en tenant compte de l'ensemble des enjeux de la zone(...). Il accompagne le Parc dans la mise en oeuvre du projet de réorganistaion de la fréquentation de la plage de Piémanson ». Le mot servitude revêt une signification tellement négative qu'il conviendrait d'utiliser un autre vocabulaire : pourquoi ne pas les appeler « facilités environnementales » ?
47
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à l'égal des « Trésors nationaux » pour lesquels des dispositions fiscales48 avantageuses sont prévues.
Recommandation Même s'il est difficile de transposer purement et simplement ces avantages fiscaux à des espaces naturels, peu susceptibles de partir à l'étranger, la mission estime néanmoins utile de réfléchir à des aménagements fiscaux pour des éléments de patrimoine naturel de valeur exceptionnelle, pouvant subir des destructions ou des altérations irréversibles. En ce qui concerne le recours à des mécanismes de compensation écologiques, la mission reste dubitative sur leur utilisation généralisée pour l'acquisition de foncier en Camargue. La mission entend rappeler que la compensation ne peut se justifier qu'au travers du principe d'additionnalité : il n'y aurait aucun sens à faire acheter par des maîtres d'ouvrage des terrains non menacés pour compenser la perte d'écosystèmes remarquables du fait de leur aménagement. Dès lors, il faudra en préalable déterminer les zones à acquérir prioritairement en raison des menaces dont elles seraient l'objet avant d'envisager leur financement par des compensations. Vers une gestion intégrée de la zone côtière de la Camargue Après les inondations de 2003, un Plan Rhône piloté par le préfet coordonnateur de bassin Rhône-Méditerranée-Corse, préfet de la région Rhône-Alpes, a été mis en place, mais il ne comporte pas de volet littoral ni de plan de gestion des pertuis de Camargue afin de réguler et d'évacuer les eaux du Rhône et du Petit Rhône. Pour sa définition et son pilotage, le plan associe l'ensemble des acteurs impliqués dans la gestion du Rhône, services de l'État, collectivités territoriales et associations. Avec ce type de concertation multi-acteurs, qui existe également au sein du Parc naturel Régional, mais hors la présence de l'État, s'amorce ou pourrait s'amorcer une démarche de « Gestion intégrée des zones côtières » (GIZC) avec d'autant plus de pertinence que le Protocole GIZC à la Convention de Barcelone est entrée en vigueur le 24 mars 201149. Il s'agit du premier outil de droit international entièrement et exclusivement consacrée à la GIZC que la France est désormais tenue de mettre en oeuvre.
48
Article 238 bis O A du CGI. Achat de « trésors nationaux » menacés de quitter le territoire national et réduction d'impôt sur les sociétés égale à 90% des versements effectués. Suite à la ratification par six de ses quinze signataires : France, Slovénie, Albanie, Espagne, Union Européenne et Syrie.
49
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La mission entend souligner tout l'intérêt d'une démarche dont les principes généraux trouvent un terrain d'application idéal en Camargue. En effet, outre la gouvernance basée sur la participation au processus de décision des populations et parties prenantes de la société civile (article 6-d) et la coordination institutionnelle intersectorielle des administrations et pouvoirs régionaux et locaux sur les zones côtières (article 6-e) prônées par le Protocole et qui sont les moyens d'action, l'objectif est de « prendre en compte la richesse biologique, la dynamique et le fonctionnement naturels de la zone intertidale ainsi que la complémentarité et l'interdépendance entre la partie marine et la partie terrestre formant une entité unique » (article 6-a) En addition, le Protocole souligne que l'intégration des différents systèmes ( hydrauliques, écologiques, socio-économiques et culturels) devrait permettre de ne pas dépasser la capacité de charge de la zone côtière et de prévenir les effets négatifs des catastrophes naturelles. Le Protocole avance clairement (article 7) que la GIZC repose sur la coordination institutionnelle y compris entre les diverses autorités compétentes pour les parties maritime et terrestre. Enfin, les parties s'engagent à élaborer ou renforcer une stratégie nationale de gestion intégrée des zones côtières qui, à partir d'un diagnostic partagé, fixe des objectifs et détermine des priorités, identifie les écosystèmes côtiers nécessitant une gestion (article 18). L'évaluation environnementale stratégique des plans et programmes est conduite en tenant compte des impacts cumulatifs sur les zones côtières (article 19)50. Pour résumer, l'application du Protocole GIZC trouve tout son sens non seulement sur l'ensemble des zones côtières, mais singulièrement sur le littoral camarguais puisque toutes les variables « écosystémiques » y sont présentes et notamment les parties prenantes ( par exemple les différents syndicats mixtes : Symadrem, PNRC,...) et l'État, réunis autour d'enjeux explicitement au coeur de la démarche GIZC : prévention des risques, protection des zones humides, utilisation durable des ressources naturelles, intégration des activités économiques dans l'écosystème, etc... L'objectif inhérent à la mise en place de cette démarche serait, dans un premier temps de faire évoluer les règles de gouvernance et accroître la représentativité des participants aux organes de discussion et de décision de même que de favoriser l'apprentissage des acteurs de la gestion de l'eau et du littoral à la complexité du fonctionnement du système et de ses perspectives d'évolution. Le Parc Naturel régional de Camargue a lancé trois exercices de GIZC en 2008 51 dont un consacré à la gestion durable des tellines (coquillages pêchés sur le littoral camarguais) qui a permis des avancées intéressantes en établissant un diagnostic partagé avec les pêcheurs et en se prononçant pour des actions inscrites dans le contrat de delta.
50 51
Cette disposition existe déjà dans le droit communautaire : directive « plans-programmes » 2001/42.
La dynamique littorale et les risques côtiers, la maîtrise de la fréquentation côtière et la gestion durable
du stock de tellines (coquillage lamellibranche).
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Recommandation La mission suggère la généralisation de la démarche GIZC à l'ensemble du littoral camarguais pour servir de référence à la mise en oeuvre des politiques relatives au littoral et notamment du volet mer des SCOT52 et permettre ainsi une application du Protocole exemplaire.
52
Article R.122-3 du CU : "dans une perspective de gestion intégrée de la zone côtière, les vocations des différents secteurs de l'espace maritime, les conditions de la compatibilité entre les différents usages de ces derniers, et les conséquences qui en résultent pour l'utilisation des diverses parties du littoral qui sont liées à cet espace".
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Annexes
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1. Lettre de mission
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2. Liste des personnes rencontrées
Noms
ARMAND
Prénoms
Jean-Claude
Organismes
Conservatoire du Littoral
Fonctions
Délégué Régional Languedoc-Roussillon Directeur immobilier
Dates de rencontres
9/02
BALOSSIER
Jacques
Compagnie des Salins du Midi et des Salines de l'Est Cabinet MEDDTL CPRN/CGEDD/MEDDTL
9/02
BANEL BARTHOD
Eric Christian
Conseiller technique Ancien sous-directeur de la S/dir Espaces naturels (DEB/DGALN/MEDDTL) Chargé de mission Président Député de la Somme
21/12/2010 2/12/2010
BAYEN BIGNON
Philippe Jérôme
DDTM 13 Conservatoire du Littoral
13/01/2011 2/03
CALET
François
Syndicat des riziculteurs de Camargue Association Bovins 13 FNGDS
Président
10/03
CALLET
Marie-Pierre
Pdte Bovins13 représentante PACA à la FNGDS Sous-préfet Maire Directeur
8/03
CASTOLDI CHASSAING COLCOMBET
Pierre Rolland Yves
Sous-préfecture d'Arles Saintes-Maries-de-la-Mer Conservatoire du Littoral
11/01/2011 12/01/2011 20/12/2010 et 01/04/2011 26/01
COULET
Eric
Réserve naturelle nationale de Camargue Conservatoire du littoral délégation régionale PACA Union Régionale Vie et Nature Agence Régionale pour l'Environnement, Conseil Régional PACA
Directeur
DE LA GUERINIERE
Bénédicte
Chargée de mission
12/01/2011
DE STEPHANO
Nathalie
Directrice
9/03
DEPLATS
Christian
Conseiller Régional ancien délégué régional PACA du Conservatoire du littoral Ecologue
26/01
DEVEZE
Magali
Grand Port Maritime de Marseille Syndicat mixte de la Camargue Gardoise Conseil Général du Gard
9/03
DENAT
Jean
Président Vice Président Chargé de mission
8/02 par téléphone
ESTEVE
Roger
Conservatoire du littoral délégation régionale PACA
Direction de l'eau environnement et aménagement rural - Conseil Général du Gard
12/01/2011
EUDES
Xavier
Directeur
8/02
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Noms
Prénoms
Organismes
Fonctions
Dates de rencontres
9/03
FALQUE FOUCHIER
Max François
Juriste-consultant Conservatoire du littoral délégation régionale PACA Agence de l'Eau RhôneMéditerranée-Corse CGEDD (MEDDTL) Délégué régional
12/01/2011
FOURNIER
Gabrielle
Déléguée Méditerranée -Corse Membre de la 2è section, administrateur des Grands Ports de Marseille Directeur-adjoint
26/01
GENEVOIS
René
3/02
GERARD
Bernard
Conservatoire du Littoral
6/01/2011 (par téléphone) et 01/04/2011
GERARD
Jacky
Conseil Général des Bouches-du-Rhône Association NASICCA Grand Port Maritime de Marseille
Maire de Saint-Cannat, vice pdt du CG13 Directeur Chef du département environnement et aménagement Représentant de la chambre d'agriculture Propriétaire du domaine de Fielouse
25/01
GIRARD GRINO
Cyrille Jean-Marc
9/03 9/03
GROSSI
Alain
Propriétaire privé
5/04
HEMERY
Gaël
Parc Naturel Régional de Camargue Fondation Tour du Valat DDTM 13
Chef des projet
12/01/2011
JALBERT KRUGER
Jean Didier
Directeur général Directeur
26/01 13/01/2011 et 09/03/2011 1/04 1/01/2011
LECLERC LEFEUVRE
Anne-Sophie Cyrille
Conservatoire du Littoral Bureau intégration de la biodiversité dans les territoires (SDEN/DEB/DGALN) _
Stagiaire ENPC Chef de bureau
LEGRAIN
Dominique
Ancien Directeur adjoint du Conservatoire du Littoral et membre de l'IGE Membre permanent CGAAER ancien DDAF 13 Producteur, collecteur et négociant en riz Producteur Chef du service environnement Directeur
24/03
LEGROUX
Jean-Paul
Conseil Général de l'Alimentation, de l'Agriculture et des Espaces Ruraux (MAAPRAT) Riziculteur
1/02
MADAR
MAILLET MARTIN
Pascal
10/03
Bertrand Emmanuel
Riziculteur DDTM 13
10/03 13/01/2011
OLIVRY
Didier
Parc naturel Régional de Camargue DGALN/DEB
12/01/2011 et 04/05/2011 16/12/2010
PAYEN
Christelle
Chargée de mission
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Noms
Prénoms
Organismes
Fonctions
Dates de rencontres
10/03 1/04 8/02
PELLETIER PELTIER REGAD
Patrick Michel Jacques
SAFER Bouches-du-Rhône Conservatoire du Littoral DREAL LanguedocRoussillon DREAL PACA /SBEP DREAL PACA Parc naturel Régional de Camargue SYMADREM Conseil Général des Bouches-du-Rhône
Directeur Directeur adjoint Chef de service biodiversité , eau, paysage Chargé de mission Directeur Maire d'Arles, Pdt du PNRC, Pdt du SYMADREM Vice Pdt du CG13 Directeur Directeur
ROLLAND ROY SCHIAVETTI
Robin Laurent Hervé
12/01/2011 12/01/2011 25/01
SEGONDS SOLDAÏNI
Jean-Pierre Pierre-Louis
DDTM du Gard Établissement Public Foncier PACA Grand Port Maritime de Marseille DREAL LanguedocRoussillon Fondation Tour du Valat CDC-Bio DGALN/DEB Bureau du littoral et du domaine public maritime naturel (S/dir
9/02 13/01/2011
SPAZZI
Renaud
Directeur de l'aménagement Directrice
9/03
STEINFELDER
Mauricette
8/02
TARIS THIEVENT THIRY UHL
Jean-Paul Philippe Emmanuel Frédéric
Président Directeur Chargé de mission Chef de bureau
26/01 16/03 16/12/2010 16/12/2010
LMM/DEB/DGALN/MEDDTL)
VAN MIGOM VARDON
Karin Pascal
Sous- préfecture d'Arles DDTM 13
Chargée de mission Directeur-adjoint
11/01/2011 13/01/2011 et 9/03/2011 21/12/2010 9/02 12/01/2011
VAUTERIN VERDIER VIANET
Patrick Yvan Régis
Cabinet MEDDTL Conseil Général du Gard Parc naturel Régional de Camargue SD littoral et milieux marins (DEB/DGALN/MEDDTL)
Conseiller Vice président Directeur-adjoint
VINCE
Agnès
Sous-directrice
16/12/2010
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Les enjeux écologiques et fonciers en Camargue
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3. Les Mesures agroenvironnementales dans le PNRC de 2008 à 2010
Année 2008
Élevage : 866 ha souscrits pour 434 840 sur 5 ans Pâturage très extensif sur mosaïque de milieux (HE1) : 126 ha Pâturage extensif sur terre humide haute (HE2) : 388 ha Pâturage sur prairies irriguées (HE3) : 46 ha Pâturage extensif en marais (HE4) : 441 ha Agriculture : 4 704 ha pour 880 156 sur 5 ans Gestion de l'eau dans les rizières (GC1) : 4 651 ha Utilisation de pièges à pyrale (GC2) : 53 ha
Année 2009
Élevage : 512 ha souscrits pour 244 985 sur 5 ans Pâturage très extensif sur mosaïque de milieux (HE1) : 29 ha Pâturage extensif sur terre humide haute (HE2) : 260 ha Pâturage extensif en marais (HE4) : 223 ha Agriculture : 118 ha pour 21 830 sur 5 ans et 133,5 km linéaires souscrits pour 1 102 190 sur 5 ans Gestion de l'eau dans les rizières (GC1) : 4 651 ha Utilisation de pièges à pyrale (GC2) : 53 ha Entretien des fossés des 2 côtés (FO1) : 66 223 m Entretien des fossés d'1 seul côté (FO2) : 63 139 m Entretien des haies des 2 côtés (HA1) : 1 640 m Entretien des haies d'1 seul côté (HA2) : 2 560 m
Année 2010
Élevage : 44 ha souscrits pour 25 300 sur 5 ans Pâturage très extensif sur mosaïque de milieux (HE1) : 44 ha Agriculture : 453 ha pour 83 805 sur 5 ans et 4,8 km linéaires souscrits pour 40 774 sur 5 ans Gestion de l'eau dans les rizières (GC1) : 453 ha Entretien des fossés des 2 côtés (FO1) : 2 405 m Entretien des fossés d'1 seul côté (FO2) : 2 392 m
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4. Les projets d'urbanisation connus et/ou déposés
Objets
Maîtres d'ouvrages
Superficies et sites concernés 11 ha Salin-deGiraud 8,5 ha Salin-deGiraud
Observations
États des instructions
Incidences sur les zones urbanisées des hameaux Extension immédiate de la zone urbanisée
Parc photovoltaïque
Solaire direct
Gênerait l'emprise du pont envisagé par le CG 13 Projet de 61 bungalows, 36 logements collectifs, bâtiment d'accueil et commerces Déposés fin 2010 à l'instruction à la DDTM13
Refus du préfet le 26 juin 2009, en cours de relance
Résidence de tourisme
Pierre de Provence
Permis de construire signé le 5 juin 2009, contesté, investigations complémentaires en cours En cours de procédure loi sur l'eau (autorisation)
Extension immédiate de la zone urbanisée
Parcs photovoltaïques
EDFEnergies Nouvelles et CN'Air
Sur tables salantes abandonnée s par les SDM Salin-deGiraud 250 ha pour EDF ? 170 ha pour CNR ?
Modification du POS indispensable et risque inondation très important, loi littoral et Natura 2000 très contraignants N'est pas inscrit à la prochaine modification du POS d'Arles (évaluation environnementale nécessaire)
projet totalement en dehors du hameau, ce qui pose question par rapport à la loi littoral
Habitations 106 villas dont une partie en accession sociale
Urban Coop
Salin-deGiraud 3 ha
Constructions sur pilotis
Dossier en cours de validation Permis délivré en 2007, sans suite au contrôle de légalité. Projet non soumis à la loi sur l'eau (en dessous des seuils) Les travaux ont démarré, quelques villas construites, mais opération qui rencontre des difficultés de commercialisation.
Bonne insertion dans le tissu urbain (dent creuse)
Lotissement « Les Mouettes »
Participation Limited
Ex Salin du Midi
4,7 ha Salin-deGiraud
Aménagement de 85 lots par la société Hectare SA en cours de réalisation
Permis d'aménager délivré. Travaux interrompus en raison d'une pollution, l'aménagement se situant sur une ancienne déchetterie non autorisée.
Extension immédiate de la zone urbanisée
lotissement
SA SEGI Le Clos des Vanelles
4,3 ha Salin-deGiraud
Création de 33 lots résidentiels et 2 macro-lots situés en zone humide et en zone Natura 2000
Contentieux en cours à l'initiative de la ville d'Arles qui projetait la réalisation d'un camping destiné aux touristes fréquentant la plage de Piémanson Le permis tacite en date du 28/01/2010 délivré à SA SEGI, a été suspendu par ordonnance du TA de Marseille en date du 03/11/2010. Projet en négociation dans le cadre du PNRC
Extension immédiate de la zone urbanisée
Habitation ? (projet n°6)
Compagnie des Salins du Midi
100 ha Salin-deGiraud Salin-deGiraud, plage de Piémanson
Extension « démesurée » du hameau Pas d'incidence directe (plage à 10 km du hameau). Besoin induit d'un camping sur le
Aménagement d'un parking
Projet en cours d'élaboration (phase de programmation)
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hameau, en réponse à la fin de l'occupation sauvage de la plage Parc photovoltaïque 94 ha Salinde- Giraud Situation au nord de Salinde-Giraud Contraire à la charte du PNRC Centre d'hébergement pour enfants Centre de thalassothérapie Salins du Midi Hameau de Faraman Phare de Faraman Pas de suite dans l'immédiat néant Certificat d'urbanisme négatif en mars 2009
20 ha commune d'AiguesMortes
Négociation en cours pour trouver une solution acceptable
Étude d'impact demandée
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5. Glossaire des sigles et acronymes
Acronymes CDC CELRL CETE CSM DDTM DOG DPM DPU EVP GIEC GIZC IGP MAET PAC PADD Caisse des dépôts et consignations Conservatoire de l'Espace Littoral et des Rivages Lacustres Centre d'étude technique de l'Equipement Compagnie des Salins du Midi Direction départementale des territoires et de la mer Document d'orientations générales (partie du SCOT) Domaine public maritime Droits à paiement unique équivalent vingt pieds Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat Gestion intégrée des zones côtières indication géographique protégée Mesure agro-environnementale (et territoriale ) Politique agricole commune projet d'aménagement et de développement durable Significations
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Acronymes PCB Polychlorobiphényle
Significations
PHAE PNRC POS PPRI RMC SAFER
Prime Herbagère Agro-Environnementale Parc Naturel Régional de Camargue Plan d'occupation des sols Plan de prévention du risque inondations Agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural
SAN SNPN
Syndicat d'agglomération nouvelle Société nationale de protection de la nature
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6. Liste des recommandations
Pour soutenir son action auprès du PNRC dans le cadre de la mise en oeuvre de la charte et favoriser une plus grande coordination entre les gestionnaires de petite et grande Camargue, la mission suggère que soit nommé un interlocuteur spécifique du PNRC et de la réserve de biosphère au sein de la DREAL PACA. ...........................60 Les acquisitions du Conservatoire du littoral devraient s'inscrire dans une approche stratégique reposant sur une analyse combinée de la valeur écologique propre et en lien avec le reste de l'écosystème des terrains mis en vente mais aussi d'une analyse des menaces et du risque à ne rien faire. Dans ce cadre, les acquisitions ne devraient porter que sur des zones menacées par des projets de développement, pour éventuellement faire pièce à une trop grande parcellisation des propriétés ou sur des terrains de grande valeur écologiques et afin d'établir une continuité avec des terrains déjà acquis (en particulier, les parcelles autour du Vacarès). ......................62 Un projet global alliant des modes de transport doux permettant la mobilité des touristes entre les plages et le hameau et une conception écologique de l'habitat semble prometteur comme été acté dans la Charte du PNRC. La mission estime qu'il pourrait s'insérer dans la convention de revitalisation CSM-État révisée à la lumière d'objectifs explicites de développement durable. ......................................................62 Examiner la mise en oeuvre des servitudes conventionnelles environnementales en lieu et place de l'acquisition en pleine propriété à chaque fois que cela est possible (volonté du propriétaire de poursuivre son activité). .................................................63 Même s'il est difficile de transposer purement et simplement ces avantages fiscaux à des espaces naturels, peu susceptibles de partir à l'étranger, la mission estime néanmoins utile de réfléchir à des aménagements fiscaux pour des éléments de patrimoine naturel de valeur exceptionnelle, pouvant subir des destructions ou des altérations irréversibles. ............................................................................................64 La mission suggère la généralisation de la démarche GIZC à l'ensemble du littoral camarguais pour servir de référence à la mise en oeuvre des politiques relatives au littoral et notamment du volet mer des SCOT et permettre ainsi une application du Protocole exemplaire. ...............................................................................................66
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Conseil général de l'Environnement et du Développement durable 7e section secrétariat général bureau Rapports et Documentation
Tour Pascal B - 92055 La Défense cedex Tél. (33) 01 40 81 68 12/45
www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr
INVALIDE)