Rapport d'enquête technique sur l'explosion d'un silo de luzerne sur le site Cristal Union situé sur la commune de Bazancourt (51), site classé ICPE à autorisation
Auteur moral
France. Bureau d'enquêtes et d'analyses sur les risques industriels
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">
;<p class="MsoNormal" style="text-align:justify">Rapport de l'enquête réalisée par le BEA-RI sur l'explosion d'un silo de luzerne survenue au sein du site Cristal Union situé à Bazancourt (51) le 7 janvier 2023 (site classé ICPE à autorisation). Cet accident permet de tirer plusieurs enseignements de sécurité en matière de réactivité de la luzerne à l'eau, de phénomène de "bâtissage", de limite du transilage pour réguler la température, de cinétique du phénomène d'auto-échauffement et de montée en température de la cellule, d'évolution du feu au sein de la cellule béton, et de procédure d'intervention sur un feu de silo, ce dernier étant partiellement détruit. A l'issue de l'enquête, le BEA-RI émet des recommandations à l'attention de l'exploitant.<o:p></o:p></p>
;</div>
Editeur
BEA-RI
Descripteur Urbamet
explosion
;enquête
;incendie
Descripteur écoplanete
installation classée
;stockage
Thème
Ressources - Nuisances
Texte intégral
Inspection générale de l?environnement
et du développement durable
Bureau d?Enquêtes et d?Analyses
sur les Risques Industriels
Rapport d?enquête
Sur l?explosion d?un silo de
luzerne survenu au sein du site
Cristal Union situé à Bazancourt
(51) le 7 janvier 2023
Rapport d?enquête sur l?explosion d?un silo de luzerne sur le site Cristal Union situé à Bazancourt (51)
N° MTE-BEARI-2024-001
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Bordereau documentaire
Organisme auteur : Bureau d?enquêtes et d?analyses sur les risques industriels (BEA-RI)
Titre du document : Rapport d?enquête technique sur l?explosion d?un silo de luzerne sur le site Cristal
Union situé sur la commune de Bazancourt (51), site classé ICPE à autorisation
N° : MTE-BEARI-2024-001
Date du rapport : 15/02/2024
Proposition de mots-clés : explosion, luzerne, pellets, silo, transilage?
Rapport d?enquête sur l?explosion d?un silo de luzerne sur le site Cristal Union situé à Bazancourt (51)
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Avertissement
L?enquête technique faisant l?objet du présent rapport est réalisée dans le cadre des articles L. 501-1 à L.
501-19 du Code de l?Environnement.
Cette enquête a pour seul objet de prévenir de futurs accidents. Sans préjudice, le cas échéant, de
l?enquête judiciaire qui peut être ouverte, elle consiste à collecter et analyser les informations utiles, à
déterminer les circonstances et les causes certaines ou possibles de l?évènement, de l?accident ou de
l?incident et, s?il y a lieu, à établir des recommandations de sécurité. Elle ne vise pas à déterminer des
responsabilités.
En conséquence, l?utilisation de ce rapport à d?autres fins que la prévention pourrait conduire à des
interprétations erronées.
Au titre de ce rapport on entend par :
- Cause de l?accident : toute action ou événement de nature technique ou organisationnelle, volontaire
ou involontaire, active ou passive, ayant conduit à la survenance de l?accident. Elle peut être établie par
les éléments collectés lors de l?enquête, ou supposée de manière indirecte. Dans ce cas le rapport
d?enquête le précise explicitement.
- Facteur contributif : élément qui, sans être déterminant, a pu jouer un rôle dans la survenance ou dans
l?aggravation de l?accident.
- Enseignement de sécurité : élément de retour d?expérience tiré de l?analyse de l?évènement. Il peut
s?agir de pratiques à développer car de nature à éviter ou limiter les conséquences d?un accident, ou à
éviter car pouvant favoriser la survenance de l?accident ou aggraver ses conséquences.
- Recommandation de sécurité : proposition d?amélioration de la sécurité formulée par le BEA-RI, sur la
base des informations rassemblées dans le cadre de l?enquête de sécurité, en vue de prévenir des
accidents ou des incidents. Cette recommandation est adressée, au moment de la parution du rapport
définitif, à une personne physique ou morale qui dispose de deux mois à réception, pour faire part au
BEA des suites qu?elle entend y donner. La réponse est publiée sur le site du BEARI.
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Synthèse
Le samedi 7 janvier 2023 vers 8h40, alors qu'aucune opération de transfert n'est en cours au sein du silo
de stockage de pellets de luzerne de la société Cristal Union, située à Bazancourt (51), une cellule
considérée comme vide, explose. L?explosion est suivie d'un incendie interne au silo qui durera plusieurs
jours.
L?enquête a permis de mettre en évidence que les pellets de la cellule présentaient une sensibilité à
l'auto-échauffement et une aptitude inhabituelle à s?agglomérer contre les parois de la cellule de
stockage.
À l?issue des dernières opérations de transilage1 le 9 décembre, soit presque un mois avant l?événement,
l?exploitant pense disposer d?une cellule vide alors que de la luzerne est encore présente sur les parois
de cette dernière.
Le matin du 7 janvier, des plaques de luzerne se détachent de la paroi et chutent en fond de cellule,
libérant de la poussière et des gaz de pyrolyse. La matière qui s?est auto-échauffée de manière
significative s'embrase au contact de l?oxygène, permettant de constituer un mélange explosif. Cette
inflammation, qui se produit probablement en partie basse de la cellule, pousse une partie des
poussières et des gaz qui sont éjectés en partie haute par la trappe de remplissage. Le front de flamme
progresse, accélère dans la cellule et la fait exploser à son sommet sans propagation aux cellules
adjacentes.
Cet accident permet de tirer plusieurs enseignements de sécurité en matière de réactivité de la luzerne
à l?eau, de phénomène de "bâtissage", de limite du transilage pour réguler la température, de cinétique
du phénomène d?auto-échauffement et de montée en température de la cellule, d?évolution du feu au
sein de la cellule béton, et de procédure d'intervention sur un feu de silo, ce dernier étant partiellement
détruit.
Par ailleurs, le BEA-RI recommande à l?exploitant de :
? Évaluer l?impact en termes de risques industriels de la recrudescence des périodes de fortes
chaleurs dans un contexte de changement climatique, sur le mode d?exploitation, en
réinterrogeant les pratiques : gamme de filières employées, mode de stockage (silos "cathédrale"
ou silos plats), mode de refroidissement (transilage ou air réfrigéré sec) ;
? Renforcer la surveillance des cellules pour identifier au plus tôt le risque d?auto-échauffement
par une surveillance du monoxyde de carbone (CO) et un meilleur suivi des paramètres
(températures et concentrations en CO) dans les cellules y compris durant les heures non
ouvrées ;
? Tenir compte du retour d'expérience de l'accident pour améliorer l'efficacité des évents des
cellules dans le cadre de la reconstruction ;
? Élaborer une stratégie de prévention et de gestion du risque d?auto-échauffement en recourant
si besoin à des procédés de refroidissement et d?inertage ;
? Disposer d?une procédure d'intervention et de vidange des silos en cas d?incendie de cellule,
intègre ou non ;
1 Opération consistant à transférer le produit d'une cellule à une autre.
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? Réduire le risque lié à la présence de bâtissage en adaptant la conception de ces cellules ou en
élaborant des méthodes de détection et de nettoyage pour éliminer les amas de pellets et de
poussières sur les parois du silo ;
? Intégrer cette notion de bâtissage dans les termes employés en gestion de crise pour éviter tout
risque de confusion entre une cellule vide et une cellule dont les parois comportent encore des
amas de luzerne.
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Sommaire
I. Rappel sur l?enquête de sécurité .............................................................................................................. 8
II. Constats immédiats et engagement de l?enquête ............................................................................... 8
II.1 Les circonstances de l?accident ........................................................................................................................... 8
II.2 Le bilan de l?accident ............................................................................................................................................ 8
II.3 Les mesures prises après l?accident .................................................................................................................... 9
II.4 L?engagement et l?organisation de l?enquête ..................................................................................................10
III. Contextualisation ...................................................................................................................................... 10
III.1 L?entreprise ............................................................................................................................................................10
III.2 L?installation ..........................................................................................................................................................12
III.2.1 Le site .................................................................................................................................................. 12
III.2.2 Le silo .................................................................................................................................................. 14
IV. Déroulement de l?évènement ................................................................................................................. 15
IV.1 Déclenchement de l?évènement .......................................................................................................................15
IV.2 L?intervention des secours publics ...................................................................................................................16
V. Compte-rendu des investigations menées........................................................................................... 17
V.1 Reconnaissance de terrain ..................................................................................................................................17
V.2 Éléments relatifs à la réglementation des installations classées ..................................................................17
V.3 L'examen des pellets de luzerne impliqués dans l'accident .........................................................................17
V.4 Le phénomène de "bâtissage" ...........................................................................................................................19
V.5 L'examen des courbes de températures ..........................................................................................................19
V.6 Expertise de l?Ineris ..............................................................................................................................................21
VI. Conclusions sur le scénario de l?événement ........................................................................................ 22
VI.1 Scénario ................................................................................................................................................................ 22
VI.2 Facteurs ayant joué un rôle dans la survenue de l?explosion et ses conséquences ............................... 25
VI.2.1 Une mauvaise qualité de luzerne ................................................................................................... 25
VI.2.2 Le "bâtissage", un phénomène aux conséquences sous-estimées ............................................ 25
VI.2.3 L'absence de mesures de lutte contre le bâtissage .................................................................... 25
VI.2.4 L'absence de surveillance ou de transmission de l'alarme au moment des faits.................... 25
VI.2.5 Les moyens externes mobilisés ...................................................................................................... 26
VI.2.6 Surface de décharge ou d'évents .................................................................................................. 27
VI.2.7 La tenue des silos en terme de nettoyage .................................................................................... 27
VII. Enseignements de sécurité ...................................................................................................................... 28
VII.1 La réactivité de la luzerne à l?eau .................................................................................................................... 28
VII.2 Le phénomène de "bâtissage" ........................................................................................................................ 28
VII.3 Les limites du transilage pour réguler la température................................................................................ 28
VII.4 La cinétique du phénomène ........................................................................................................................... 29
VII.5 L'évolution du feu au sein de la cellule béton ............................................................................................. 29
VII.6 Procédure d'intervention sur un feu de silo ..................................................................................................31
VII.7 La notion de cellule vide ...................................................................................................................................31
VIII. Recommandations de sécurité ............................................................................................................. 32
VIII.1 À destination de l?exploitant .......................................................................................................................... 32
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Annexe I : Rapport de l?INERIS - Appui technique de l?INERIS en réponse de la saisine du BEA-RI suite à
l'explosion du 07 janvier 2023 dans un silo de stockage de la société CRISTAL UNION sur son site de
Bazancourt (51) INERIS - 222994 - 2778825 - v1.0 ......................................................................................... 33
Annexe II : Courbes commentées des températures dans la cellule 20 ................................................... 34
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Rapport d?enquête
Sur l?explosion d?un silo de luzerne sur le site Cristal Union
situé sur la commune de Bazancourt (51)
I. Rappel sur l?enquête de sécurité
L?enquête technique faisant l?objet du présent rapport est réalisée dans le cadre des articles L. 501-1 à L.
501-19 du Code de l?Environnement. Cette enquête a pour seul objet de prévenir de futurs accidents.
Sans préjudice, le cas échéant, de l?enquête judiciaire qui peut être ouverte, elle consiste à collecter et
analyser les informations utiles, à déterminer les circonstances et les causes certaines ou possibles de
l?évènement, de l?accident ou de l?incident et, s?il y a lieu, à établir des recommandations de sécurités.
Elle ne vise pas à déterminer des responsabilités. En conséquence, l?utilisation de ce rapport à d?autres
fins que la prévention pourrait conduire à des interprétations erronées.
II. Constats immédiats et engagement de l?enquête
II.1 Les circonstances de l?accident
Le samedi 7 janvier 2023 vers 8h40, alors qu'aucune opération de transfert n'est en cours au sein du silo
de stockage de pellets de luzerne de la société Cristal Union à Bazancourt (51), une cellule théoriquement
vide, explose.
Le souffle de l?explosion s?échappe par le haut du silo, provoque la rupture de la dalle en béton
supérieure et projette de nombreux débris sur plusieurs dizaines de mètres. Cette explosion est suivie
d'un incendie interne au silo qui durera plusieurs jours.
II.2 Le bilan de l?accident
L'explosion ne s'est pas propagée au reste de l'installation.
Elle a détruit une partie de la dalle supérieure des cellules et le bâtiment en structure légère situés en
partie haute du silo, ainsi que les appareils de manutention de type bande transporteuse. De
nombreuses projections de béton et de bardages métalliques ont également été retrouvés sur plusieurs
dizaines de mètres autour de la cellule ayant explosé.
Le dispositif de sécurité avec toiture éventable a permis de concentrer les dégâts sur la partie supérieure
de l?installation.
La sécurisation du bâtiment situé en partie haute du silo, composé d?une toiture en tôle ondulée et
d?IPN, a été réalisée au moyen d?une grue privée de 90m.
La ligne SNCF reliant Reims (51) et Charleville (08), et passant à moins de 50 mètres de la structure, a été
fermée durant plus de 24 heures, ce qui a provoqué l?ouverture de la salle de crise territoriale de la SNCF,
et l?adaptation du plan de transport.
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Aucun ouvrier n?étant présent sur la zone au moment de l?accident, personne n?a été blessé, et le fait
que l?accident se soit produit le week-end a certainement contribué à éviter des atteintes sur les
personnels et/ou sous-traitants travaillant sur le site.
Aucune pollution n?a été constatée.
II.3 Les mesures prises après l?accident
À la suite de l?accident, l?installation a été consignée et mise en sécurité dans l?attente notamment
d?inspections ultérieures.
80 tonnes de luzerne ont brûlé et deux cellules situées à proximité de la cellule impactée, contenant
1550 tonnes de luzerne au total, seront vidées dans les heures suivant le début du sinistre, et déplacées
vers la plateforme de stockage du site.
Le préfet de la Marne a pris un arrêté de mesures d?urgence le 7 janvier 2023 afin d?ordonner à
l?exploitant de mettre en oeuvre les mesures nécessaires permettant d?éviter un phénomène d?auto-
inflammation et/ou d?explosion des produits stockés.
Dans le cadre de la gestion de crise qui a duré plusieurs jours, l'exploitant a, sous la direction de l?autorité
préfectorale, engagé plusieurs actions de sécurisation :
? Des moyens importants de levage ont dû être mobilisés pour sécuriser le bâtiment et pour
procéder à l'évacuation des déchets ;
? Un bureau d'étude structure a été mandaté pour évaluer la stabilité bâtimentaire des cellules
endommagées et en particulier pour étudier la bonne tenue de la cellule à l'incendie ;
? Une sonde de température a été positionnée en partie basse du silo, au niveau du cône de
vidange, afin de surveiller la descente de la température à l?intérieur de la cellule. Celle-ci sera
vidangée près d?un mois après l?accident, le lundi 6 février, une fois la température permettant
cette opération, atteinte.
Photographie 2 : Vue du silo (Source :
Cristal Union)
Photographie 1 : Vue de la partie supérieure du silo béton (Source : Cristal Union)
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II.4 L?engagement et l?organisation de l?enquête
Au vu des circonstances et du contexte de l?accident, le directeur du bureau d?enquêtes et d?analyses
sur les risques industriels (BEA-RI) a décidé l?ouverture d?une enquête technique après en avoir informé
le directeur général de la prévention des risques.
Les enquêteurs du BEA-RI se sont rendus sur place le jeudi 26 janvier 2023. Ils ont rencontré les
représentants de la coopérative Cristal Union et de l?inspection des installations classées.
Ils ont recueilli les témoignages ou déclarations écrites des acteurs impliqués dans l?évènement et dans
sa gestion. Ils ont eu, consécutivement à ces entretiens et aux réunions techniques organisées par la
suite, communication des pièces et documents nécessaires à leur enquête.
III. Contextualisation
III.1 L?entreprise
Cristal Union est une entreprise spécialisée dans la fabrication de sucre née en janvier 2000 de la fusion
de quatre coopératives sucrières : Arcis (10), Bazancourt (51), Corbeilles (45) et Éclaron (52).
Elle produit quatre grandes familles de produits :
? Sucre alimentaire pour la consommation individuelle et pour l?industrie ;
? Alcool utilisé en parfumerie et cosmétique, dans l?alimentaire pour la production de spiritueux,
dans l?industrie, ou en pharmacie pour les désinfectants ;
? Bioéthanol : utilisé dans les carburants, il est incorporé dans l?essence E5, E10 ou encore le
Superéthanol E85 ;
? Alimentation animale : la coopérative utilise les produits issus de la transformation de la
betterave (pulpes humides ou déshydratées), la luzerne et les drêches de blé pour produire des
aliments à haute valeur nutritive pour l?élevage.
Ces produits sont fabriqués au sein des 13 sites de production dédiés en fonction des spécificités de
chaque site.
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Carte 1 : Implantations du groupe Cristal Union
L'entreprise coopérative revendique la place de leader européen pour la fourniture de sucre à l'industrie
agroalimentaire et la fourniture d'alcool pour le secteur du cosmétique et de la pharmacie.
Figure 1 : Illustration groupe Cristal Union
Figure 2 : illustration de la filière de production de la luzerne et le positionnement de Cristal Union
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III.2 L?installation
III.2.1 Le site
Le site de Cristal Union au sein duquel s'est produit l'accident fait partie de la plate-forme industrielle
de Bazancourt-Pomacle dédiée à la transformation et au raffinage de produits agricoles. Cette plate-
forme voit transiter annuellement 1 million de tonnes de blé et traite 2,5 millions de tonnes de betterave.
Elle emploie 1200 personnes (+800 emplois indirects). Le site existe depuis 1946.
Cristal Union y détient une sucrerie d'une capacité de traitement de 23.000 t de betteraves / jour pour
une production de 1.700 t de sucre / jour ce qui permet de produire annuellement :
? Production annuelle de sucre : 175.000 t
? Conditionnement sucre : 60.000 t
? Déshydratation de pulpes de betterave et luzerne : 130.000 t
? Vinasses concentrées : 40.000 t
L'accident a concerné l'activité de fabrication d'aliment pour bétail à base de luzerne.
Une fois récoltée, la luzerne subit plusieurs étapes de transformation afin d'être conditionnée sous la
forme de granulés. Ces étapes de transformation sont présentées sur le schéma ci-dessous.
Au cours du procédé, l'exploitant suit plusieurs paramètres qui permettent de caractériser la qualité du
produit, dont particulièrement les taux de durabilité, d'humidité et de protéines.
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Figure 3 : illustration des étapes de fabrication des granulés de luzerne (source : site Internet Desialis).
Nota : Sur le site de Bazancourt, Cristal Union n'a pas recours au conditionnement sous balle.
1. La luzerne est coupée et subit un premier préfanage aux champs, ce qui permettra de diminuer l?utilisation des tambours
sécheurs et de limiter la consommation d?énergie ;
2. La déshydratation de la luzerne se poursuit ensuite au moyen de tambours sécheurs ;
3. La luzerne est broyée puis elle est pressée à sec afin de la transformer en granulés.
Les granulés sortent à 80°C de la presse et passent dans un refroidisseur comprenant plusieurs étages dans lesquels de l?air
circule pour les refroidir. En partie basse, il est possible d?ajouter un groupe froid qui peut accélérer le refroidissement, ce
qui est le cas chez Cristal union.
Lorsque les pellets atteignent une température de 20°C, il est alors possible de les ensiler.
4. La luzerne déshydratée est stockée généralement soit en silos plats soit en silos verticaux. Le site de Bazancourt a recours
aux deux modes de stockage dans des proportions assez comparables : 24 000m3 de capacité de stockage en silos plats et
29 000 m3 de capacité de stockage en silos verticaux.
La luzerne fait partie de la famille des protéagineux.
Utilisé en alimentation animale, elle subit d?abord une déshydratation pour parvenir à un taux de 11%
d'humidité. A ce stade, elle possède une faculté à réagir à l'humidité (1% d'humidité conduit à une
augmentation de 10°C de température). Sa température d?auto-échauffement est située entre 300 et
350°C.
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Photographie 1 : Pellets de luzerne (source : site internet Cristal Union)
III.2.2 Le silo
L'accident s'est produit dans le silo vertical béton composé de 15 cellules et de 6 as de carreaux (espaces
interstitiels formés par quatre cellules, numérotés C4, C5, C9, C10, C17 et C18 sur la figure 5). Les cellules
atteignent une hauteur de 41,90 m. Elles sont surmontées d'une galerie qui abrite des convoyeurs de
type bande transporteuse qui permettent le remplissage des cellules. L'ensemble du bâtiment atteint
une hauteur de près de 48 m.
La cellule impliquée dans l'accident est la cellule 20 située en position centrale du pignon sud du silo.
Figure 4 : Plan et vues du silo (photographie 4). La cellule 20 est signalée en rouge (Source : Cristal Union)
Chaque cellule est remplie en partie supérieure par une trappe qui reste ouverte lorsque la cellule est
vide. Chaque cellule est équipée d'une sonde thermométrique multipoints installée en son centre qui
permet de disposer d'un suivi de la température des pellets de luzerne sur la totalité de la hauteur de
stockage. Chaque cellule dispose de 12 capteurs, ce qui représente environ un capteur tous les 2 à 3 m.
Photographie 2
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L'ensemble des informations est transmis en temps réel en salle de commande. Depuis ce poste, un
opérateur assure la supervision de l'ensemble des opérations liées à la gestion des stocks : gestion des
approvisionnements et des expéditions, supervision des températures des cellules et réalisation des
opérations de transilage décidées lorsque les températures internes des silos le nécessitent en
application des procédures internes prévues à cet effet.
En terme de plage horaire de surveillance, un opérateur n?est présent en salle de commande que
pendant les heures de fonctionnement du silo soit de 7h30 à 17h30. En dehors de cette plage, les
informations ne sont pas transmises à une télésurveillance.
IV. Déroulement de l?évènement
IV.1 Déclenchement de l?évènement
Le samedi 7 janvier, le silo de stockage de luzerne est à l'arrêt. Aucune opération de transfert ou de
transilage n'est en cours. Six cellules sont déclarées vides, les autres cellules contiennent de quelques
dizaines à plusieurs centaines de tonnes de produit. Les niveaux de remplissage sont résumés sur le
schéma ci-dessous.
Dans la nuit du 6 au 7 janvier, une augmentation significative de la température est détectée par les
sondes de la cellule 20 alors que celle-ci est réputée vide depuis plusieurs jours. En l'absence de
transmission automatique, l'information n'est pas traitée. Le 7 janvier à 8h40, les enregistrements issus
de la vidéosurveillance d'un site voisin montrent très distinctement qu'un phénomène se produit dans
la cellule qui a pour conséquence l'émission verticale d'un important panache de poussières. Celui-ci
s'enflamme dans la seconde qui suit son apparition et produit une explosion qui détruit le plancher
béton au droit des cellules 14 à 21. La partie supérieure du silo, constituée de bardages métalliques et
qui abrite le convoyeur à bande servant au remplissage, est entièrement détruite.
Figure 5 : Quantités de pellets de luzerne contenues dans les
cellules au moment de l'accident (Source : Cristal Union)
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IV.2 L?intervention des secours publics
L'appel de l'exploitant est réceptionné à 9h20 par les sapeurs-pompiers.
À leur arrivée, les services de secours constatent que :
? L'explosion a détruit le silo dans sa partie supérieure, rendant le bardage restant, instable et
dangereux pour l'intervention ;
? Le silo comporte 15 cellules et 6 as de carreau dont les niveaux de remplissage sont variables,
contenant exclusivement de la luzerne ;
? Les dégâts sont principalement localisés en partie haute du silo, au niveau des cellules situées en
pignon sud ;
? De nombreux débris ont été projetés dans les environs du silo ;
? Des fumées blanches d'une température de l'ordre de 200°C témoignent de la présence d'un
foyer résiduel au sein d'une ou plusieurs cellules ;
? Une incohérence entre l'incendie en cours et les informations communiquées dans un premier
temps qui font état d'une cellule vide. Dans un second temps, les services de secours seront
informés que la cellule contenait plusieurs dizaines de tonnes de luzerne qui s'étaient
accumulées sur les parois du silo.
Compte-tenu de la situation, la circulation sur la ligne ferroviaire a été interrompue en raison du risque
résiduel généré par l?état des silos et en l'absence de levée de doute sur la présence de projections de
débris sur la voie ferrée.
L?intervention des services de secours s?est déroulée sur plusieurs jours et a porté notamment sur la
sécurisation de la voie ferrée et l?évacuation de la luzerne des cellules adjacentes (Environ 1500 tonnes
de produit seront sorties des cellules 16 et 21 puis transférées dans deux hangars situés sur le site. 750
tonnes supplémentaires seront évacuées de la cellule 15 le lundi matin).
La sécurisation de la partie supérieure du silo a nécessité le recours à une entreprise disposant de moyens
de grutage adaptés pour travailler à une telle hauteur dans la mesure où le plancher supérieur des cellules
était détruit.
L'opération de vidange des cellules commencera le samedi 7/01 à 16h00 et se poursuivra jusqu'au
dimanche 8/01. Seule la cellule 20 ne sera pas vidée en raison de la présence de matière incandescente
et de la formation d'une voute au niveau du cône de vidange. L'exploitant sera chargé de maintenir une
surveillance de la température de la cellule pendant plusieurs jours dans l?attente que les conditions
favorables à sa vidange soient réunies (cf. partie VI-5).
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V. Compte-rendu des investigations menées
V.1 Reconnaissance de terrain
Les enquêteurs techniques du BEA-RI se sont rendus sur le site de la société Cristal Union le jeudi 26
janvier 2023 après avoir échangé avec l?inspection des installations classées à la DREAL Grand Est et
contacté des représentants du SDIS2 de la Marne.
La visite de terrain a permis de visualiser les installations impliquées dans la séquence accidentelle et de
comprendre le fonctionnement de ces dernières.
La visite a également permis de prendre connaissance de la politique de prévention des accidents, de
l?organisation mise en place en terme de gestion de la sécurité et plus spécifiquement en lien avec l?objet
de l?enquête. Elle a également permis d'échanger sur les conditions d'intervention des services de
secours et sur les éventuelles difficultés générées par cette intervention.
V.2 Éléments relatifs à la réglementation des installations classées
Le silo de stockage exploité par la société Cristal Union est situé sur la plateforme industrielle de
Bazancourt-Pomacle. Compte tenu de la présence de la voie ferrée, reliant Reims (51) et Charleville (08),
dans un rayon de moins de 50m, le site a été référencé comme silo à enjeux très importants.
V.3 L'examen des pellets de luzerne impliqués dans l'accident
Les pellets de luzerne qui étaient stockés dans la cellule 20 ont été produits en juin 2022. Les
informations issues des contrôles qualité montrent sur cette période un taux de matière sèche moyen
de 90 % conforme aux productions antérieures. En revanche, en terme de durabilité (propriété du pellet
à tenir aux sollicitations mécaniques et aux frottements provoqués par leur manutention), les résultats
obtenus sur cette période sont notablement inférieurs aux objectifs de qualité de production fixé à 85
%. Ils ont donc comme caractéristique de produire plus de poussières qu'à l'accoutumée.
2 Service départemental d?incendie et de secours
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Graphique 1 : Durabilité3 (en %) de la luzerne lors des campagnes de juin et de novembre sur les années 2020, 2021 et 2022 pour les
lignes 1 et 2 de production. La campagne de 2022 se distingue par sa durabilité inférieure aux objectifs qualité fixés à 85 % (matérialisé
par la zone grisée).
Depuis l'accident, l'exploitant semble être parvenu à rétablir la qualité de sa production. Les raisons de
ces mauvaises performances en matière de durabilité sont potentiellement multifactorielles :
? Les conditions météorologiques caniculaires qui ont précédé les récoltes ont conduit à produire
une luzerne possédant peu de feuilles et donc, au final, de moins bonne tenue ;
? La mise en service de nouvelles installations de séchage et de refroidissement qui ont nécessité
des phases de réglage ;
? Enfin, l'exploitant n'utilise qu'un niveau de compression pour la fabrication de ces pellets, ce qui
limite la possibilité d'adapter le procédé de fabrication en cas de dérive dans la qualité de ces
derniers.
3 La durabilité est une grandeur qui permet de caractériser la tenue mécanique du granulé aux forces de chocs et de friction
occasionnées lors de sa manipulation. Elle est calculée en application d?une procédure interne et correspond au rapport de poids
de granule mesuré avant et après passage dans un durabilimètre.
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V.4 Le phénomène de "bâtissage"
L'explosion s'est produite dans une cellule déclarée vide dans un premier temps mais contenant malgré
tout une quantité importante de pellets. Cette situation contradictoire a été rendue possible par
l'accumulation de produit sur les parois du silo, désignée par l'exploitant sous le terme de "bâtissage".
Ce phénomène est la résultante de plusieurs facteurs :
- Le frottement des pellets sur la paroi béton ;
- La pression des pellets sur la paroi. De manière
contre-intuitive, dans un silo élancé4, le poids des
pellets s'exerce, au sein des couches de pellets
inférieures, de manière radiale, favorisant le
compactage des pellets et des poussières situées
en périphérie contre la paroi. Ce mécanisme de
propagation transversale des forces au sein d'un
matériau granulaire est à l'origine de l'effet de
voûte5 ;
- La présence plus importante de poussières liée à la
durabilité médiocre confère aux granulés une
meilleure capacité à se compacter et à prendre en
masse ;
- L'humidité peut également jouer un rôle aggravant
mais l'étude de l'accident de Bazancourt n'a pas
mis en évidence de circonstances particulières sur
ce point.
V.5 L'examen des courbes de températures
Une fois produit, les pellets de luzerne ont été stockés de juin à septembre 2022 dans un silo plat exploité
par Cristal Union, dans les environs de Bazancourt. L'exploitant nous a signalé avoir rencontré durant
ces semaines de stockage des problèmes d'élévation de température. C'est en partie en vue de simplifier
leur surveillance, leur manutention et leur maintien en température que la décision a été prise d'ensiler
ces pellets à Bazancourt.
L'annexe I du présent rapport est un graphique commenté des températures mesurées par les capteurs
au sein de la cellule 20 au cours des mois qui ont précédé l'accident.
4 Avec un rapport hauteur/diamètre égal à 4, le silo de Bazancourt entre dans la catégorie des silos élancés selon la définition de
la norme NF EN 1991-4 - Mai 2007
5 Mécanisme mis en évidence par H. A. Janssen en 1895 puis développé par John William Strutt Rayleigh en 1906 pour expliquer
la loi de pression dans les silos à grains.
Figure 6 : Illustration du phénomène de "bâtissage"
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Graphique 2 : Courbes des températures de la cellule 20 et de la température extérieure du 18 octobre au 7 janvier (Présentées en
annexe I du présent rapport).
Jusqu'au 27 novembre, on constate des températures assez homogènes sur la hauteur du silo, comprise
dans un gradient de 5 degrés (Capteur 8 : 31,40°C, capteur 7 : 26,70°C). Deux capteurs (capteurs 1 et 2
situés au bas de la cellule) affichent des températures proches ou légèrement au-dessus du premier seuil
d'alerte défini par la procédure (seuil d'alerte 35°C)6. À partir du 27 novembre, des opérations
d'expédition sont opérées (les capteurs mis à l'air libre mesurent une baisse de température). Les
mouvements de pellets permettent de diminuer la quantité stockée dans le silo et de faire passer la
température du capteur 2 en-dessous des 30 °C. Deux nouvelles opérations de vidange de la cellule sont
réalisées les 5 et 7 décembre. Elles s'accompagnent d'une nouvelle baisse de température au niveau du
capteur 2. On constate toutefois que l'absence de mouvement de pellets dans le silo du 2 au 5 décembre
et les 7 et 8 décembre s'accompagne d'une élévation rapide de la température du capteur 2 (+20°C et
+16,3°C). Ces augmentations montrent que le mouvement de pellets par transilage ne permet de réduire
que temporairement la température et laisse supposer la persistance de pellets et de points chauds à
hauteur des sondes 1 et 2 probablement en périphérie du silo.
6 Dans son rapport, l?Ineris confirme que La luzerne est sujette à l?auto-échauffement lors de son stockage. Un stockage de luzerne
d?une hauteur de 16 m a une température critique d?auto-échauffement de l?ordre de 40°C
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L'exploitant nous indique avoir stoppé les expéditions le 8/12 en raison de températures trop élevées.
Le reste des pellets, soit 132 tonnes, est alors expédié vers le "boisseau route" en vue de la méthanisation
des granulés. À compter de cette date, la cellule est réputée vide.
Entre le 9 et le 19/12, les températures renvoyées par les sondes sont homogènes et assez basses, entre
14°C et 7°C, compte tenu des températures extérieures. À partir du 20/12, les sondes mesurent une
élévation globale de la température interne de la cellule de +8°C que l'on peut assez facilement corréler
à l'augmentation de la température extérieure (+20°C).
V.6 Expertise de l?INERIS
Dans le cadre de l?enquête, le BEA-RI a eu recours à l?expertise de l?INERIS pour :
? Évaluer la réactivité de la luzerne à l?auto-échauffement : bibliographie de l?INERIS, historique et
essais de caractérisation de l?inflammabilité d?un échantillon de luzerne, qui a été fourni par
l?industriel ;
? Reconstituer un mécanisme accidentel dans la cellule qui soit cohérent avec les observations
constatées (jets de poussières, rupture de la dalle béton, puis explosion secondaire horizontale
en tête), en essayant de discriminer les hypothèses d'une inflammation de poussières ou de gaz ;
? Partager des mesures de prévention du risque d?auto-échauffement et de prévention des effets
de voûte et de bâtissage sur les parois.
Graphique 3 : Zoom des courbes de températures pour les périodes du 2 au 5 décembre et du 7 au 8 décembre. Consécutivement
aux opérations de vidange, les températures mesurées aux capteurs 1 et 2 diminuent. Mais rapidement, elles augmentent à
nouveau, laissant supposer que des points chauds persistent dans des zones où le pellet est moins mobile.
0,00
10,00
20,00
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Capteur 1
Capteur 2
Capteur 3
Capteur 4
Capteur 5
Capteur 6
Capteur 7
Capteur 8
Capteur 9
Capteur 10
Capteur 11
Capteur 12
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Les pellets nécessaires aux expertises ont été fournis par Cristal Union à la demande du BEA-RI. Ne
disposant plus des pellets de qualité comparable à ceux impliqués dans l'accident, et après échange
avec le BEA-RI, Cristal Union a fourni les pellets qui présentaient une durabilité conforme à l'objectif
qualité de production.
Le rapport rendu par l?institut en réponse à ces différents points est annexé au présent rapport.
Le BEA-RI s?est appuyé sur les principaux éléments de conclusion qui ont été intégrés dans le rapport.
VI. Conclusions sur le scénario de l?événement
VI.1 Scénario
Le BEA-RI s'est intéressé aux caractéristiques des pellets stockés et à leurs conditions de stockage. Les
informations communiquées ont permis de mettre en évidence que les pellets de la cellule 20
présentaient une sensibilité à l'auto-échauffement. En procédant à la vidange complète de la cellule le
9 décembre, l'exploitant pensait avoir écarté les risques liés à ce phénomène.
Durant les jours qui suivent la vidange de la cellule, l'exploitant procède à des opérations de piquetage
qui consistent à tenter de décoller les amas de pellets de luzerne et de poussière qui ont adhéré aux
parois de la cellule. Ce travail est réalisé à l'aide d'une barre d'une longueur de 3m. Ce moyen est
insuffisant pour traiter le phénomène qui a pris des proportions inhabituelles (5 m de hauteur et
plusieurs dizaines de cm d'épaisseur).
Le 30/12, la sonde 1 renvoie une élévation de température de près de 6°C qui ne sera plus mesurée le
4/01. La cellule étant réputée W vide X, cette élévation n'alerte pas l'exploitant. Des moyens d?inertage à
l?azote sont présents sur le site de Bazancourt mais ne seront pas utilisés à cette occasion.
Vers 23h le vendredi 6 janvier, toutes les sondes mesurent une élévation rapide de température. Cette
dernière sera de l'ordre de 28°C en 12 heures, au cours de la nuit du vendredi 6 au samedi 7 janvier 2023.
Cette élévation de température est la conséquence de l'auto-échauffement des amas de pellets de
luzerne et de poussières accumulés sur les parois de la cellule.
En l'absence de report d'alarme, l'information n'est disponible qu'au niveau du tableau de contrôle du
silo dont le poste est vacant pendant le week-end.
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Situation de la cellule le 6/01 matin : en
raison d'un phénomène de bâtissage, les
parois de la cellule sont recouvertes
d'une épaisseur significative de pellets de
luzerne et de poussière.
Au cours de la journée du 6/01, des points
chauds se forment dans la couche de
pellets. En s'auto-échauffant, des gaz de
pyrolyse peuvent s?être produits.
Le 7/01 vers 8h40, des plaques de
luzerne et de poussières tombent dans
le fond du cône de la cellule en libérant
un nuage de poussières et des gaz de
pyrolyse produits par l'auto-
échauffement des pellets. Dans le
même temps, les points chauds mis à
l'air libre enflamment le mélange de
poussières et de gaz en fond de silo.
Figure 7 : Démarrage de la séquence accidentelle
Vers 8h40, le samedi 7 janvier, les plaques de luzerne se détachent de la paroi et chutent en fond de
cellule, libérant de la poussière et des gaz de pyrolyse. La matière auto-échauffée s'embrase permettant
au mélange, constitué d'air, de poussières et de gaz, de s'enflammer7. Cette inflammation, qui se produit
probablement en partie basse de la cellule, pousse une partie des poussières et des gaz qui sont éjectés
en partie haute par la trappe de remplissage. Le front de flamme progresse, accélère dans la cellule et
la fait exploser à son sommet. L'explosion est dirigée vers le pignon sud du silo, ce qui évite la
propagation de l'explosion aux cellules adjacentes.
7 L?INERIS précise dans son rapport que "L?hypothèse d?une explosion d?un grand volume inflammable composé uniquement de
gaz de pyrolyse mélangés à l?air paraît peu crédible, étant donné la faible réactivité constatée pour ce mélange. La possibilité
qu?une inflammation d?un mélange gaz de pyrolyse / air déclenche une explosion de poussières est possible. Mais il est aussi
possible que la mise en suspension de la poussière soit due au débâtissage de la luzerne, et non à une explosion des gaz de pyrolyse.
Dans ce cas, le débâtissage aurait mis en contact la poussière de luzerne avec des particules rendues incandescentes par un
phénomène d?auto-échauffement en cours."
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Photographie 3 : Expulsion de la poussière
par la trappe de remplissage
Photographie 4 : Inflammation qui
entraîne la destruction de la galerie
technique supérieure et le soulèvement
de la dalle.
Photographie 5 : Projection des débris
L'explosion est donc la conséquence de l'inflammation d'un mélange de poussières dû à un auto-
échauffement et, en moindre proportion, de gaz de pyrolyse dans la cellule 20, rendu possible par la
présence en quantité importante de pellets de luzerne et de poussières sur les parois de la cellule.
Figure 8 : Chronogramme des évènements marquants en amont de l?incident (Source : BEA-RI)
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VI.2 Facteurs ayant joué un rôle dans la survenue de l?explosion et ses
conséquences
Sans être la cause première de l?accident, les éléments suivants ont, du point de vue du BEA-RI, joué un
rôle soit positif soit négatif dans la séquence accidentelle.
VI.2.1 Une mauvaise qualité de luzerne
Les investigations conduisent à relever l?influence de la qualité8 des granulés de luzerne qui ont été
impliqués dans l?accident. Pour des raisons externes (conditions météorologiques exceptionnelles) et
internes (un seul modèle de filière et un seul taux de compression possible possédés par Cristal Union
qui ne permettent pas de tenir compte des différentes qualités de luzerne, nouvelle installation de
refroidissement, conditions de séchage), la durabilité du granulé était en deçà des objectifs attendus. Il
s?agissait donc d?un granulé qui avait une propension à produire plus de fines qu?à l?accoutumée.
VI.2.2 Le "bâtissage", un phénomène aux conséquences sous-estimées
La présence des amas de pellets sur les parois est un phénomène qui avait déjà été constaté mais dans
des proportions moindres que celles qui ont précédé l'accident du 7 janvier. L'exploitant nous a indiqué
le traiter lors des opérations de remplissage par la chute de nouveaux pellets contribuant à décoller
ceux, plus anciens, restés collés sur la paroi. La présence de bâtissage dans la cellule 20 avait bien été
identifiée et quelques tentatives de décrochage avaient été menées. Néanmoins, à aucun moment
l'exploitant n'a envisagé que leur présence en grande quantité puisse être à l'origine d'un accident
important au sein de son installation.
VI.2.3 L'absence de mesures de lutte contre le bâtissage
Les silos n'étaient pas équipés de système pour limiter ce phénomène d'accumulation de produit sur les
parois (pose de résine, système d'aide à l'écoulement, ?) et l'exploitant ne disposait pas de procédure
d'intervention pour éliminer ces dépôts à l'intérieur de la cellule.
VI.2.4 L'absence de surveillance ou de transmission de l'alarme au moment des faits
Les cellules de stockage de luzerne sont équipées de sonde thermométriques au centre de la cellule qui
permettent de connaître la température de la luzerne stockée à différentes hauteurs de la cellule. Une
cellule compte 12 sondes ce qui représente une sonde tous les 3 mètres environ. Ces températures sont
renvoyées vers le tableau de contrôle supervisé par un opérateur. Des alertes sont pré-programmées de
sorte à signaler les dépassements de seuils. Lorsque la température du silo augmente, l'opérateur
procède au transilage de la cellule en application de la procédure établie à cet effet.
Dans le cas de l'accident, les capteurs de température de la cellule 20 montrent une soudaine élévation
de température la veille de l'accident, mais, en l'absence de personnel présent et de report d'alarme,
8 La notion de qualité s?entend ici sur le seul critère de la durabilité, c?est-à-dire la tenue mécanique du granulé aux sollicitations
auxquelles sont soumises les granulés lors de leur manipulation ou leur stockage. Elle ne porte pas sur les propriétés nutritives ou
sanitaires de l?aliment.
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cette élévation n'entraînera aucune action corrective. Comme le souligne l?INERIS dans son rapport9,
l?absence de moyen de mesure de la teneur en CO n?a pas permis d?identifier le phénomène plus tôt.
Il faut enfin ajouter qu'en l'absence de procédure qui aurait permis de gérer cette situation sans mettre
en danger des opérateurs (montée en température d'un silo vide où toute opération de transilage est
par définition inopérante), l'absence de report a probablement permis, involontairement, de limiter le
nombre de personnes présentes au moment de l'explosion.
Graphique 4 : Courbes de températures mesurées par les sondes à l'intérieur de la cellule 20 réputée vide. En bleu clair figure
également la température extérieure. L?élévation de température est rapide.
VI.2.5 Les moyens externes mobilisés
La gestion de cet évènement a nécessité le recours à des moyens ou des compétences exceptionnelles
dans des délais rapides.
Durant la gestion de crise, des moyens de percement ont été nécessaires pour procéder à des ouvertures
en partie basse des cellules afin de vidanger la luzerne encore présente dans les cellules adjacentes à la
cellule 20.
Sur le plan matériel, pour sécuriser les installations après l'explosion et réduire le risque de sur-accident
(risque de propagation de l'incendie, l'envol ou la chute de débris), il a fallu que l'exploitant mobilise des
moyens de manutention (sauterelle, brise roche, engin de levage) pour évacuer la luzerne encore
présente et prévenir le risque de chute de bardage ou de dalle béton.
Sur le plan humain, les pompiers ont fait appel à un sapeur-pompier expert en risques agricoles et agro-
alimentaires, notamment en matière d?incendie dans les silos. L'exploitant a recouru à un bureau d'étude
structure pour évaluer l'état de l'édifice détruit par l'explosion et thermiquement sollicité par le foyer
couvant au sein de la cellule 20.
9 Partie 3.4.1 et 3.4.2 du rapport Ineris porté en annexe I
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VI.2.6 Surface de décharge ou d'évents
L'examen des plans du silo a permis d'établir que les cellules étaient équipées de surfaces de décharge
afin idéalement de protéger l'intégrité des cellules à défaut d'éviter leur éclatement. Le mode de
réalisation de ces surfaces demeure imprécis en raison des différences constatées entre les différentes
versions de plan (plan architecte, plan de réalisation, plan de ferraillage). Il n'en demeure pas moins que
les surfaces éventables ont joué leur rôle en limitant la surpression à l'intérieur de la cellule. En revanche,
elles ont été insuffisantes pour éviter la destruction du plancher supérieur et l'endommagement des
cellules et as de carreaux adjacents. Les calculs conduits par l?INERIS concluent à ce sujet :
? "Que la dalle fragilisée était insuffisamment dimensionnée pour empêcher la rupture des dalles non
fragilisées en cas d?explosion primaire dans la cellule ;
? Qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts observés et, bien qu?il soit
difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule, qu?il n?y a pas de contradiction
entre un scénario d?inflammation en fond de cellule et les dégâts constatés."
Figure 9 : Plan des silos mentionnant les prédalles soufflables
Graphique 5 : illustration des pressions de rupture. Pth est la
pression théorique dans le cas d'un évent "idéal" : le plancher et
la cellule restent intactes ; Pred est la pression réduite du fait de
la présence des évents : la cellule est préservée mais pas le
plancher ; Pression est la pression sans dispositif de décharge, la
pression dépasse la pression max admissible de la cellule.
VI.2.7 La tenue des silos en terme de nettoyage
La société Cristal Union a mis en place un protocole de tenue et de nettoyage des silos afin d?éliminer
régulièrement les amas de poussières générés par le produit stocké.
L'état de propreté a certainement contribué à limiter ou éviter des effets dominos qui auraient pu être
provoqués par la mise en suspension et l'inflammation de matières combustibles complémentaires.
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VII. Enseignements de sécurité
VII.1 La réactivité de la luzerne à l?eau
L?Ineris rappelle dans son rapport que "la luzerne est une substance combustible et réactive à l?oxydation
chimique. Elle est sujette à des phénomènes d?auto-échauffement qui correspondent à une oxydation de
la luzerne par l?oxygène de l?air (feu couvant à combustion lente) ou initialement activés par une activité
de fermentation biologique ayant atteint une teneur en humidité supérieure à 25 % de la luzerne". Ce
phénomène de montée en température a même été constaté sur un véhicule des services de secours de
retour de l?intervention et sur lequel s?étaient formés des dépôts de luzerne mouillée.
VII.2 Le phénomène de "bâtissage"
Les matériaux granulaires peuvent, en fonction de leurs caractéristiques et de leurs conditions de
stockage, s'accumuler progressivement dans des zones où le matériau reste immobile sous l?effet des
pressions statiques et des faibles vitesses d'écoulement. L?opération de transilage du silo n'arrive alors
pas à résorber ces points d'accumulation de matériaux. Cette matière immobile peut être sujette à des
phénomènes d'auto-échauffement qui peuvent générer des situations de danger et aller jusqu'à
l'explosion des cellules.
VII.3 Les limites du transilage pour réguler la température
Il convient tout d?abord de rappeler que pour être efficace, le transilage ne doit être opéré que lorsque
les conditions de température sont favorables. L?INERIS rappelle que le transilage ne peut être efficace
que si la différence de température entre la matière et l?air ambiant est significatif (de l?ordre de la dizaine
de degrés) pour assurer une fonction de transfert de calories. C?est pour cette raison qu?il peut être
recommandé de l?opérer la nuit. Ces conditions de température n?étaient pas réunies durant l?été 2022.
En outre, du fait de l'écoulement en "cheminée" des matériaux granulaires, les pellets de luzerne et les
poussières situés dans la zone de matière immobile ne sont pas remaniés. Leur maintien en place facilite
l'apparition de zones d'auto-échauffement et provoque la montée en température plus rapide des
pellets fraichement arrivés qui se retrouvent au contact de ces zones. Lorsque la totalité de la matière
mobile est évacuée, le transilage ne peut pas avoir d'effet sur l'échauffement de la matière immobile.
L?action sur les points chauds qui s?y trouvent ne peut donc se faire qu?au moyen d?une purge des zones
où le bâtissage s?est formé ou d?une action d?inertage10.
10 "Action sur la mesure de la température de la luzerne et sur la mesure du taux de CO" rapport INERIS - 222994 - 2778825 - v1.0
en annexe I.
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Figure 10 : Un point chaud se forme dans le
silo.
Figure 11 : L'exploitant procède à la
vidange du silo. Les pellets situés en zone
de matière mobile s'écoulent. Les autres
demeurent.
Figure 12 : Les nouveaux pellets
descendus des couches supérieures
s'échauffent au contact du point chaud.
VII.4 La cinétique du phénomène
Les dernières opérations de vidange de la cellule 20 ont eu lieu le 12/12. L'explosion s'est produite 4
semaines plus tard. La présence de dépôt de produit disposant des propriétés d'auto-échauffement sur
la paroi d'une cellule ne doit pas être considérée comme une situation à risque dès lors qu'elle est
constatée suffisamment tôt et que des actions sont entreprises pour y remédier. Toutefois, le
phénomène d'auto-échauffement, une fois initié, a conduit à l'explosion de la cellule en 24h. Une cellule
dans laquelle un phénomène de bâtissage a été identifié et au sein de laquelle une élévation de
température est constatée doit être considérée comme dangereuse. Des actions peuvent être engagées
si elles ne conduisent pas à exposer des personnels tel que l?inertage de la cellule.
VII.5 L'évolution du feu au sein de la cellule béton
Une fois l'explosion survenue, le stock de granulés de luzerne présent dans la cellule est entré en
combustion. En l'absence d'information précise sur la quantité présente dans la cellule, l'exploitation
des images des caméras thermiques peuvent donner une indication sur la quantité présente en partant
de l'hypothèse que la température maximale est atteinte en surface du tas de luzerne en combustion.
Cette hypothèse nous amène à estimer un volume de 120 m3 soit une quantité de 78 tonnes de granulés.
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Photographie 6 : les deux images réalisées à la caméra thermique (à gauche et au milieu) permettent de visualiser la quantité de luzerne
encore présente dans le cône, cette quantité est représentée sur le schéma de droite.
En l'absence de solution d'extinction (destruction du plancher haut du silo rendant impossible
l'utilisation de confinement à l'azote ; réactivité de la luzerne déshydratée à l'humidité rendant l'emploi
d'eau impossible), le choix a été fait de laisser le foyer s'éteindre de lui-même.
Pour ce faire, une surveillance thermographique a été mise en place et une expertise béton a été menée
pour vérifier la bonne tenue structurelle du silo en dépit des températures atteintes lors de la
combustion de la luzerne.
Graphique 6 : Courbe de la température prise à la sonde thermique placé au niveau du cône de vidange
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Cette surveillance permet d'avoir une idée précise de la décroissance de la température à l'intérieur du
silo. Le 16 janvier, soit 10 jours après l'explosion, la température au sommet du cône dépassait
légèrement les 900°C. Le 2 février, la température interne avoisinait les 20°C soit une diminution
approximative de 50°C par jour pour une quantité théorique de 80t de granulés de luzerne.
VII.6 Procédure d'intervention sur un feu de silo
Les circonstances particulières de cet accident ont notablement contraint les services de secours et
l'exploitant dans le choix de la stratégie d'intervention (réactivité à l'eau, absence de possibilité
d'inertage du fait de la perte d'intégrité de la cellule).
La solution retenue a nécessité des moyens humains et matériels importants que l'exploitant est parvenu
à mobiliser dans des délais contraints. Le fait toutefois de disposer de procédures d'intervention et de
vidange des silos en situation de crise permet de gagner du temps lors de la survenue d'une situation
accidentelle de ce type11.
VII.7 La notion de cellule vide
La description imprécise d?une situation initiale peut générer des incompréhensions préjudiciables à la
gestion de la crise. Au cours de cet accident, l?exploitant a indiqué dans un premier temps que les
cellules étaient "vides" aux services de secours alors que la cellule contenait plusieurs dizaines de tonnes
de luzerne qui s'étaient accumulées sur les parois du silo. La cellule était vide du point de vue de
l?exploitant mais partiellement remplie pour les services de secours. Il y a donc lieu de distinguer une
cellule totalement vide aux parois propres ou lisses et une cellule vide dont les parois présentent des
amas de luzerne.
11 Le BEA-RI a déjà eu l'occasion d'émettre cette recommandation dans le cadre de l'enquête N° MTE-BEARI-2023-001 sur l'incendie
d'un silo de plaquettes forestières.
Rapport d?enquête sur l?explosion d?un silo de luzerne sur le site Cristal Union situé à Bazancourt (51)
N° MTE-BEARI-2024-001
P a g e 32 | 35
VIII. Recommandations de sécurité
VIII.1 À destination de l?exploitant
? Évaluer l?impact en termes de risques industriels de la recrudescence des périodes de fortes
chaleurs dans un contexte de changement climatique, sur le mode d?exploitation, en
réinterrogeant les pratiques : gamme de filières employées, mode de stockage (silos "cathédrale"
ou silos plats), mode de refroidissement (transilage ou air réfrigéré sec) ;
? Renforcer la surveillance des cellules pour identifier au plus tôt le risque d?auto-échauffement
par une surveillance du monoxyde de carbone (CO) et un meilleur suivi des paramètres
(températures et concentrations en CO) dans les cellules y compris durant les heures non
ouvrées ;
? Tenir compte du retour d'expérience de l'accident pour améliorer l'efficacité des évents des
cellules dans le cadre de la reconstruction ;
? Élaborer une stratégie de prévention et de gestion du risque d?auto-échauffement en recourant
si besoin à des procédés de refroidissement et d?inertage ;
? Disposer d?une procédure d'intervention et de vidange des silos en cas d?incendie de cellule,
intègre ou non ;
? Réduire le risque lié à la présence de bâtissage en adaptant la conception de ces cellules ou en
élaborant des méthodes de détection et de nettoyage pour éliminer les amas de pellets et de
poussières sur les parois du silo ;
? Intégrer cette notion de bâtissage dans les termes employés en gestion de crise pour éviter tout
risque de confusion entre une cellule vide et une cellule dont les parois comportent encore des
amas de luzerne.
Rapport d?enquête sur l?explosion d?un silo de luzerne sur le site Cristal Union situé à Bazancourt (51)
N° MTE-BEARI-2024-001
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Annexe I : Rapport de l?INERIS - Appui technique de l?INERIS en réponse
de la saisine du BEA-RI suite à l'explosion du 07 janvier 2023 dans un silo
de stockage de la société CRISTAL UNION sur son site de Bazancourt (51)
INERIS - 222994 - 2778825 - v1.0
Rapport d?enquête sur l?explosion d?un silo de luzerne sur le site Cristal Union situé à Bazancourt (51)
N° MTE-BEARI-2024-001
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Capteur 2
Capteur 3
Capteur 4
Capteur 5
Capteur 6
Capteur 7
Capteur 8
Capteur 9
Capteur 10
Capteur 11
Capteur 12
temp ext
Depuis le 7/ présence de granulés de la cellule 20 en provenance de la Bettinger.
Constat d'une hause progressive de la température notamment sur capteur 2
Capteur 12 (capteur supéreur) à
l'air libre, ou peu recouvert
Expédition des granulés. Abaissement du
niveau de luzerne dans le silos et mise à
l'air des sondes 10 à 3 que traduisent les
chutes de températures
12/12 transilage vers boisseau route
vidange complète mais paroie non lisse
Annexe II : Courbes commentées des températures dans la cellule 20
Température assez homogène sur la hauteur du
silo comprise dans un gradient de 5 degrés
(Capteur 8 : 31,40°C, capteur 7 : 26,70°C)
2 capteurs singuliers : Capteur 1 : 34,70°C,
Capteur 2 : 37,00°C
Expéditions
Le 8/12 arrêt des expéditions en raison de la
hausse de température
Piquetage
Vre que j?ai
Ineris - 222994 - 2778825 - v1.0
04/12/2023
Appui technique de l?Ineris en réponse de la
saisine BEA RI suite à l'explosion du
06 janvier 2023 dans un silo de stockage de la
société CRISTAL-UNION sur son site de
Bazancourt (51)
(ID Modèle = 454913)
Ineris - 222994 - 2778825 - v1.0
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PRÉAMBULE
Le présent document a été réalisé au titre de la mission d?appui aux pouvoirs publics confiée à l?Ineris,
en vertu des dispositions de l?article R131-36 du Code de l?environnement.
La responsabilité de l'Ineris ne peut pas être engagée, directement ou indirectement, du fait
d?inexactitudes, d?omissions ou d?erreurs ou tous faits équivalents relatifs aux informations utilisées.
L?exactitude de ce document doit être appréciée en fonction des connaissances disponibles et objectives
et, le cas échéant, de la réglementation en vigueur à la date d?établissement du document. Par
conséquent, l?Ineris ne peut pas être tenu responsable en raison de l?évolution de ces éléments
postérieurement à cette date. La mission ne comporte aucune obligation pour l?Ineris d?actualiser ce
document après cette date.
Au vu de ses missions qui lui incombent, l'Ineris, n?est pas décideur. Les avis, recommandations,
préconisations ou équivalent qui seraient proposés par l?Ineris dans le cadre des missions qui lui sont
confiées, ont uniquement pour objectif de conseiller le décideur dans sa prise de décision. Par
conséquent, la responsabilité de l'Ineris ne peut pas se substituer à celle du décideur qui est donc
notamment seul responsable des interprétations qu?il pourrait réaliser sur la base de ce document. Tout
destinataire du document utilisera les résultats qui y sont inclus intégralement ou sinon de manière
objective. L?utilisation du document sous forme d'extraits ou de notes de synthèse s?effectuera également
sous la seule et entière responsabilité de ce destinataire. Il en est de même pour toute autre modification
qui y serait apportée. L'Ineris dégage également toute responsabilité pour chaque utilisation du
document en dehors de l?objet de la mission.
Nom de la Direction en charge du rapport : DIRECTION GENERALE
Rédaction : CANDE RAPHAEL; LECOCQ GUILLAUME; EVANNO SEBASTIEN
Vérification : STOUVENEL MICKAEL; LEPRETTE EMMANUEL; LE-ROUX BENJAMIN; CHAUMETTE
SYLVAIN
Approbation : Document approuvé le 04/12/2023 par PIQUETTE BERNARD
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Table des matières
1 Introduction ...................................................................................................................................... 5
1.1 Déontologie.............................................................................................................................. 5
1.2 Contexte .................................................................................................................................. 5
2 Description succincte du silo accidenté et des circonstances de l?accident ................................... 6
2.1 Description générale du silo de stockage ................................................................................ 6
2.2 Circonstances des événements du 6 janvier 2023.................................................................. 7
2.3 Principaux dégâts dans le silo ................................................................................................. 7
3 Analyse de l?Ineris ........................................................................................................................... 9
3.1 Essais de caractérisation de l?inflammabilité d?un échantillon de luzerne fourni par l?industriel
CRISTAL-Union ................................................................................................................................... 9
3.2 Reconstitution du mécanisme accidentel dans la cellule ...................................................... 13
3.2.1 Examen et discrimination entre les hypothèses d?une inflammation de poussière de luzerne
et d?une inflammation de gaz de pyrolyse ..................................................................................... 13
3.2.2 Détermination de la cohérence entre l?inflammation en fond de cellule et les observations
constatées ..................................................................................................................................... 16
3.2.3 Détermination globale de l?énergie d?explosion produite et de la quantité de poussière mise
en jeu 25
3.4 Revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur la gestion de l?auto-
échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois ........................... 26
3.4.1 Retour d?expérience et phénomènes dangereux associés aux installations de mise en
oeuvre de luzerne .......................................................................................................................... 26
3.4.2 Revue des recommandations sur la gestion d?auto-échauffement. .................................. 28
4 Conclusions ................................................................................................................................... 34
5 Annexes ......................................................................................................................................... 37
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Résumé
Ce rapport a pour objet de répondre à une sollicitation du BEA-RI faite à l?Ineris le 15/05/2023 (cf. saisine
du BEA-RI en annexe 1). Celle-ci concerne l'enquête sur l'explosion accidentelle du
06 janvier 2023 dans un silo de stockage de la société CRISTAL-UNION sur son site de Bazancourt
(51).
L?objet de ce rapport consiste à répondre aux questions posées par le BEA-RI relatives à :
l?évaluation de la réactivité de la luzerne à l?auto-échauffement :
o Réaliser des essais de caractérisation de l?inflammabilité d?un échantillon de luzerne fourni
par l?industriel.
la reconstitution du mécanisme accidentel dans la cellule :
o Déterminer la cohérence entre l?inflammation en fond de cellule et les observations
constatées,
o Déterminer l?énergie de l?explosion,
o Évaluer les quantités de poussière ou de gaz de pyrolyse mises en jeu et examiner les
hypothèses d'une inflammation de poussières ou de gaz.
La réalisation d?une revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur la
gestion de l?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois.
Pour citer ce document :
Institut National de l?Environnement Industriel et des Risques, Saisine BEA RI suite à l'explosion du 6
janvier 2023 au sein d?un silo de stockage de la société CRISTAL-UNION sur son site de Bazancourt
(51), Verneuil-en-Halatte : Ineris - 222994 - 2778825 - v1.0, 04/12/2023.
Mots-clés :
Auto-échauffement, Bazancourt, BEA-RI, combustible, déontologie, explosion, ICPE, poussière,
pulvérulent, saisine, silo, stockage.
Glossaire :
ATD / ATG : Analyse thermique différentielle couplée à une analyse thermogravimétrique.
ATEX : Atmosphère explosible ou Atmosphère explosive.
BEA-RI : Bureau d'enquêtes et d'analyses - Risques industriels.
ICPE : Installation classée pour l?environnement.
Ineris : Institut national de l?environnement industriel et des risques.
INRS : Institut National de Recherche et de Sécurité.
TAI : Température d?auto-inflammation.
TMI : Température Minimale d?inflammation.
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1 Introduction
1.1 Déontologie
Durant ces 5 dernières années, l?Ineris n?a réalisé qu?une seule prestation pour le groupe Cristal Union
et ce pour un autre site que le site de Bazancourt (51) et sur un autre type de silo.
À noter que l?Ineris a réalisé, avant ces 5 dernières années, des études de dangers pour le site de
Bazancourt (51) qui ne couvraient pas les silos incriminés dans l?accident qui s?est produit le 06/01/2023.
1.2 Contexte
Une explosion s?est produite le 6 janvier 2023 dans un silo de stockage de luzerne d?un site industrie l
(ICPE soumise à autorisation) situé à Bazancourt (51) et exploité par la société
CRISTAL-UNION. Le silo de stockage de luzerne est constitué d?un ensemble de 15 cellules
cylindriques béton verticales identiques accolées. La cellule impliquée dans l?explosion a la forme d?un
cylindre de 40 m de haut et 8 m de diamètre. Les principaux dégâts ont été relevés au niveau supérieur
du silo.
Le BEA-RI a décidé le 10 janvier 2023 d?ouvrir une enquête sur l?accident et a souhaité mobiliser
l?expertise de l'Ineris (via une lettre de saisine du 15/05/2023 présentée en Annexe 1) pour :
Évaluer la réactivité de la luzerne à l?auto-échauffement :
o Réaliser des essais de caractérisation de l?inflammabilité d?un échantillon de luzerne fourni
par l?industriel.
Reconstituer le mécanisme accidentel dans la cellule :
o Déterminer la cohérence entre l?inflammation en fond de cellule et les observations
constatées (jet de poussière, rupture dalle béton, puis explosion secondaire horizontale en
tête),
o Déterminer globalement l?énergie d?explosion produite,
o Examiner les hypothèses d'une inflammation de poussières ou de gaz et évaluer les
quantités de poussière ou de gaz de pyrolyse mises en jeu.
Réaliser une revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur la gestion
de l?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois.
Cette expertise s?est notamment appuyée sur des essais en laboratoire selon des protocoles qui ont été
présentés aux enquêteurs. Ces essais ont été réalisés à partir des échantillons définis par le BEA-RI et
expédiés à l'Ineris par l?industriel.
Durant la réalisation de cette expertise confiée à l?Ineris, des échanges réguliers ont été menés entre le
BEA-RI et l?Ineris :
- un échange téléphonique le 10 janvier 2021,
- une réponse par courriel le 06 mars 2023 de l?Ineris au courriel du 1er Mars 2023 des premiers
éléments reçus par le BEA RI,
- une réunion en visioconférence entre le BEA-RI et l?Ineris le 06 mars 2023 et le 20 mars 2023
validant la saisine du BEA-RI auprès de l?Ineris,
- des documents techniques reçus par le BEA-RI par courriels les 01 mars 2023, 14 mars 2023,
20 mars 2023 et 07 avril 2023,
- des échanges téléphoniques et des réunions en visioconférence réguliers.
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2 Description succincte du silo accidenté et des circonstances
de l?accident
Les descriptions présentées dans ce chapitre résultent des échanges avec le BEA-RI et sont basées
sur les documents transmis par le Bureau, l?Ineris ne s?étant pas rendu sur place et n?ayant pas échangé
directement avec l?industriel.
2.1 Description générale du silo de stockage
Le silo concerné par l?accident est un silo de stockage en béton armé de 50 m de long (incluant la tour
de manutention) et 25 m de large, composé de 15 cellules cylindriques verticales avec base conique
disposées en 5 rangées de 3 cellules, tel que présenté sur la vue satellite en Figure 1, de 8 as de
carreau, d?une tour de manutention située à une des extrémités du silo, d?une galerie sur cellules et de
trois galeries sous cellules (une galerie par rangée de cellules).
Figure 1 : Vue satellite du silo (à gauche et vue en coupe transversale du silo (à droite)
Chaque cellule mesure 40 m de haut (dont 4 m de haut pour la base conique), avec un diamètre de
8 m, tel que présenté à la figure 1.
La galerie sur cellules est une structure composée d?une charpente métallique et de bardages
métalliques en façade et en toiture. Elle est équipée de 2 transporteurs à bande qui alimentent les
15 cellules.
Chaque galerie sous cellules est équipée d?un transporteur à bande chargé de récupérer le contenu
des cellules de la rangée correspondante.
La cellule dans laquelle s?est produit l?accident est située à l?extrémité opposée à la tour de manutention,
au centre de sa rangée, et est référencée C20 dans le plan de masse en Figure 2. Elle est encadrée,
sur sa rangée, par les cellules C19 et C21.
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Figure 2 : Plan de masse du silo, la cellule C20 étant entourée par un cercle bleu
2.2 Circonstances des événements du 6 janvier 2023
Le 6 janvier 2023, jour de l?accident, de la luzerne était présente en faible quantité dans la cellule C20.
En effet, la cellule avait été vidangée au cours du mois de décembre, mais une inhabituelle épaisseur
de granulés et de poussières restait agglomérée sur sa paroi, selon les déclarations de l'exploitant.
Ainsi, les jours précédant l?accident, un bâtissage de luzerne de quelques mètres de haut avait été
observé sur les parois latérales de la cellule C20 selon les informations fournis par l?industriel.
La veille de l?accident :
- Du granulé de luzerne avait été repassé par le haut de la cellule afin d?abattre le dépôt de poussière
au niveau des parois. Cette tentative n'a cependant pas fonctionné ;
- En fin de poste, le produit était à température ambiante d?après une grappe de sondes sur l?axe de
la cellule.
Le jour de l?accident, au matin :
- Une montée en température est relevée par les différents capteurs en amont de l?accident (dernières
températures relevées : de l?ordre de 50 °C) ;
- Un débâtissage de la luzerne se serait produit, suivi par une explosion.
2.3 Principaux dégâts dans le silo
D?après les différentes informations (notamment photographiques) transmises par CRISTAL-UNION
(mails du 20/03/2023 et du 07/04/2023 du BEA-RI), les principaux dégâts relevés se situent en partie
haute du silo, au niveau du plancher et de la galerie sur cellules.
Les photographies post-accidentelles prises avant le retrait des éléments de bardages en toiture et en
façade de la galerie métallique sur cellules, comme celles présentées en Figure 3, montrent des
éléments de bardages déformés de manière irréversible et des fixations arrachées, principalement au
niveau de la cellule C20.
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Figure 3 : Prise de vue du sommet du silo après l?accident du 6 janvier 2023 et avant le retrait
des éléments de bardages de la galerie sur cellules [photo transmise par le BEA-RI]
Les photographies post-accidentelles prises après retrait des éléments de bardages de la galerie sur
cellules ont également montré que le plancher sur la cellule accidentée C20 et sur les cellules voisines
C19 et C21 présentait des dégâts importants avec de nombreuses fissures et ruptures. Les éléments
de dalles semblent s'être soulevés et être retombés sur place.
Figure 4 : Prise de vue du sommet du silo après l?accident du 06 janvier 2023 et le retrait
des éléments de bardages de la galerie sur cellules [photo transmise par le BEA-RI]
Cellule C20 Cellule C19 Cellule C21
Cellule C20
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3 Analyse de l?Ineris
Pour répondre aux questions posées par la saisine du BEA-RI du 15/05/2023 (cf. Annexe 1), l?analyse
de l?Ineris a été réalisée en trois étapes :
? Étape n°1 : Évaluer la réactivité de la luzerne à l?auto-échauffement ;
? Étape n°2 : Reconstituer le mécanisme accidentel dans la cellule ;
? Étape n°3 : Réaliser une revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur
la gestion d?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois.
Chacune de ces étapes sont traitées et détaillées ci-après.
3.1 Essais de caractérisation de l?inflammabilité d?un échantillon de luzerne
fourni par l?industriel CRISTAL-Union
L?échantillon fourni par la société CRISTAL-UNION a été réceptionné dans les laboratoires à l?Ineris le
05/04/2023 et a été identifié de la façon suivante :
- référence CRISTAL-UNION « Luzerne » - référence Ineris 23AM101 (cf. Figure 5).
Figure 5 : Vue des trois sacs contenant l?échantillon CRISTAL-UNION « Luzerne » -
référence Ineris 23AM101
Les résultats des essais sont reportés ci-après (Tableau 1)
Les résultats des mesures d?essais sont présentés en Annexe 2.
La description des essais est présentée en Annexe 3.
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Essai
(Référentiel)
Échantillon Réf. CRISTAL-UNION
« Luzerne » -
référence Ineris 23AM101
Observation / Commentaire / Interprétation /
Conclusion
Granulométrie
mécanique
> 1 mm : 96,4 %
1 mm ? 500 µm : 2 %
500 µm ? 315 µm : 0,5 %
<315 µm : 1,1 %
Fond : 0 %.
L?échantillon présente peu de fines pulvérulentes
combustibles (1,6 % < 500 µm) sujettes à la
formation d?ATEX poussière en cas de mise en
suspension dans l?air. Par contre, cet échantillon
contient une forte quantité de matière non
pulvérulentes combustibles (98,4 % > 500 µm) peu
sujettes à la formation d?ATEX poussière en cas de
mise en suspension dans l?air.
Remarque Ineris : La question se pose si
l?échantillon testé contenant très peu de fines est
réellement représentatif de la luzerne présente
dans le silo avant l?explosion du 06/01/2023, car sur
la base des vidéos de l?explosion du silo transmises
par la société CRISTAL UNION, on aperçoit des
fines en quantité non négligeable.
Taux d?humidité 8,41 % L?échantillon présente un faible taux d?humidité.
Teneur de
friabilité
Essai au tambour de friabilité :
- Moyenne de friabilité : 0,28 %
Granulométrie de l?échantillon après
passage dans le Tambour de friabilité :
> 1 mm : 88,7 %
1 mm ? 500 µm : 4,3 %
500 µm ? 315 µm : 2,1 %
315 µm ? 180 µm : 1,8 %
180 µm ? 100 µm : 1,6 %
100 µm ? 63 µm : 0,7 %
63 µm ? 40 µm : 0,5 %
40 µm ? 32 µm : 0,3 %
Fond : 0 %.
L?échantillon présente une faible propension à la
friabilité.
Teneur
d?abrasion
Essai au tambour d?abrasion :
- Moyenne d?abrasion : 0,66 %
Granulométrie de l?échantillon après
passage dans le tambour d?abrasion :
> 1 mm : 87,9 %
1 mm ? 500 µm : 4,8 %
500 µm ? 315 µm : 2,1 %
315 µm ? 180 µm : 1,9 %
180 µm ? 100 µm : 1,5 %
100 µm ? 63 µm : 0,8 %
63 µm ? 40 µm : 0,6 %
40 µm ? 32 µm : 0,4 %
Fond : 0 %.
L?échantillon présente une faible propension à
l?abrasion.
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Essai
(Référentiel)
Échantillon Réf. CRISTAL-UNION
« Luzerne » -
référence Ineris 23AM101
Observation / Commentaire / Interprétation /
Conclusion
ATD/ATG
(ASTM E 2550)
- Une perte de masse relative égale à
70 % environ entre la Température
ambiante et 350°C puis une perte de
masse relative égale à 20 % environ
entre 350°C et 780°C. Perte de masse
de 90 % à la fin de l?essai ;
- Un pic endothermique entre la
température ambiante et 280°C
associée à une perte de masse de 10
% (perte de l?humidité de l?échantillon) ;
- Un pic exothermique initié à environ
290°C et s?étalant jusqu?environ 770°C.
La température du témoin pour laquelle
l?écart de température entre
l?échantillon et le témoin dépasse 50°C
est de 316°C. La température maximale
atteinte par l?échantillon lors de ce
phénomène est de 150°C environ. La
perte de masse correspondant à cette
exothermie est égale à
80 % environ ;
- A 770°C, la perte de masse de
l?échantillon est de 90 %.
Cet échantillon est combustible et possède une
réactivité moyenne vis-à-vis de l?oxy-réactivité.
Si le produit est stocké à haute température ou
conditionné dans des stockages de grande taille,
l?essai doit être complété par un essai d?auto-
échauffement visant à déterminer le domaine de la
taille critique en fonction de la température à partir
duquel un risque d?auto-inflammation existe.
Essais d?auto-
échauffement en
étuves
isothermes
(norme NF EN
15188 : 2020)
Températures critiques expérimentales :
? Cube de 125 cm3 : 174 - 172°C ;
? Cube de 214 cm3 : 167 - 165°C ;
? Cube de 616 cm3 : 160 - 157°C ;
? Cube de 1 000 cm3 : 152 - 150°C.
L?échantillon Réf. CRISTAL-UNION « Luzerne » -
référence Ineris 23AM101 est considéré comme
moyennement réactif au phénomène d?auto-
échauffement :
o Un stockage de cet échantillon d?une hauteur
de 60 m a une température critique d?auto-
échauffement de 20°C ;
o Un stockage de cet échantillon d?une hauteur
de 20 m a une température critique d?auto-
échauffement de 40°C ;
o Un stockage de cet échantillon d?une hauteur
de 10 m a une température critique d?auto-
échauffement de 50°C ;
o Un stockage de cet échantillon d?une hauteur
de 6 m a une température critique d?auto-
échauffement de 60°C ;
o Un stockage de cet échantillon d?une hauteur
de 3 m a une température critique d?auto-
échauffement de 70°C ;
o Un stockage de cet échantillon d?une hauteur
de 2 m a une température critique d?auto-
échauffement de 80°C.
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Essai
(Référentiel)
Échantillon Réf. CRISTAL-UNION
« Luzerne » -
référence Ineris 23AM101
Observation / Commentaire / Interprétation /
Conclusion
Essai en four
tubulaire de
150°C à 400°C
sous balayage
d?air sur un
échantillon de
luzerne.
Essai en four
tubulaire et
dosage des gaz
en ligne par
µGC/TCD
L?essai a été réalisé entre 149 °C et 412 °C
avec une montée régulière en température
à 1,15 °C/min pendant 3h50.
Prise d?essai de 3,12 g et masse résiduelle
après essais de 0,28 g.
Perte de masse : 91%.
- Composition des gaz de pyrolyse pour
une plage de 150°C ? 300°C :
? H2 : 0,002 mg/g ;
? CO2 : 332 mg/g ;
? CH4 : 1,03 mg/g ;
? CO : 40,9 mg/g ;
? Ethane : 0,07 mg/g ;
? Propane : 0,19 mg/g ;
? n-Hexane : 0,55 mg/g.
- Composition des gaz de pyrolyse pour
une plage de 300°C ? 400°C :
? H2 : 0,97 mg/g ;
? CO2 : 691 mg/g ;
? CH4 : 29,8 mg/g ;
? CO : 33,5 mg/g ;
? Ethane : 2,43 mg/g ;
? Propane : 1,71 mg/g ;
n-Hexane : 0,18 mg/g.
Les analyses ont montré deux pics d?émissions :
- le premier entre 150°C et 300°C avec un
maximum aux alentours de 220°C ;
- le deuxième entre 300°C et 400°C avec un
maximum aux alentours de 320°C.
Les résultats correspondent, pour chaque plage de
température, à la somme des quantités mesurées
rapportée à la prise d?essai.
D?autres composés organiques ont été détectés
(pics présents entre l?éthane et le
n-butane), mais n?ont pas pu être identifiés.
A noter que la décomposition de luzerne par
pyrolyse (notamment par un processus d?auto-
inflammation (150°C ? 400°C), les principaux gaz
de décomposition sont en majorité le CO2 et CO et
de deuxième ordre du méthane, puis des composés
minoritaires (Ethane, Propane,
n Butane, H2).
Ces résultats menés par l?Ineris sont cohérents
avec les travaux de Boateng
(Pyrolysis of energy crops including alfalfa stems,
redd canarygrass, and eastern gamagrass. A. A.
Boateng et al. Fuel 85 (2006) 2450-2457)1 qui
montrent que les gaz de décomposition dégagés
par des cultures énergétiques, y compris les tiges
de luzerne, l'alpiste rouge et le gamagrass de l'Est
sont majoritairement le CO2, CO, puis des
hydrocarbures (CH4, Ethane, Propane, n-Butane).
Tableau 1 : Récapitulatif des résultats d'essais réalisés sur l?échantillon
Réf. CRISTAL-UNION « Luzerne » - référence Ineris 23AM101
1 https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0016236106001578
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0016236106001578
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3.2 Reconstitution du mécanisme accidentel dans la cellule
Ce chapitre apporte les éléments de réponse à la question n°2 de la saisine du BEA-RI relative à la
reconstitution du mécanisme accidentel dans la cellule, et en particulier :
- Examiner les hypothèses d'une inflammation de poussières ou de gaz ;
- Déterminer la cohérence entre l?inflammation en fond de cellule et les observations constatées (jet
de poussière, rupture dalle béton, puis explosion secondaire horizontale en tête),
- Déterminer globalement l?énergie d?explosion produite et évaluation des quantités de poussière ou
de gaz de pyrolyse mises en jeu ;
Ce chapitre apporte aussi un élément de réponse à la question complémentaire du BEA-RI en date du
23 juin 2023 relative au dimensionnement de la dalle fragilisée faisant office de surface soufflable.
3.2.1 Examen et discrimination entre les hypothèses d?une inflammation de poussière
de luzerne et d?une inflammation de gaz de pyrolyse
Le chapitre suivant vise, au travers une analyse de la réactivité des nuages inflammables supposées,
à discriminer entre deux hypothèses d?explosion : explosion de gaz de pyrolyse ou explosion de
poussière de luzerne.
3.2.1.1 Hypothèses sur la composition du gaz de pyrolyse de la luzerne
L?Ineris a réalisé des essais en four tubulaire sur l?échantillon CRISTAL-UNION « Luzerne » (référence
Ineris 23AM101) qui permettent de déterminer la composition des gaz de pyrolyse. Les compositions
massiques affichées dans le Tableau 1 sont normalisées et converties en compositions molaires. Les
valeurs obtenues sont indiquées dans le Tableau 2 ci-dessous, et comparées aux deux compositions
déterminées par Boateng et al.2,
Plage de
température
de test
Composition molaire des gaz (% v/v)
CO2 CO Total
Hydrocarbures
H2
Echantillon CRISTAL UNION 150-300°C 83 16 1 0
300-400°C 81 6 10 3
Mélange 1 (Boateng) 60 20 20 -
Mélange 2 (Boateng) 80 5 15 -
Tableau 2 : Compositions molaires des échantillons CRISTAL UNION comparées
aux résultats de Boateng et al.
Ces gaz sont émis à plusieurs centaines de degrés Celsius. En cas de mélange de ces gaz avec l?air
ambiant du silo, un mélange inflammable peut être obtenu. Pour un mélange constitué de manière
adiabatique, une température de plusieurs centaines de degrés, inférieure à la température d?émission
des gaz de pyrolyse, peut être attendue. Des phénomènes de pertes thermiques au niveau des parois
contribuent à faire chuter cette température.
2 A.A. Boateng et al. (2006) Pyrolysis of energy crops including alfafa stems, reed canarygrass an eastern
gamagrass. Fuel 85
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Il est difficile de quantifier théoriquement la température finale du mélange inflammable. Rappelons tout
de même que la température d?ambiance du silo mesurée avant explosion est de l?ordre de 40°C. Il
paraît raisonnable de se baser sur cette valeur pour les calculs à suivre.
Avec l?outil open-source CANTERA, on peut calculer certaines propriétés fondamentales de combustion
de ces mélanges dans l?air. On suppose pour ces calculs que les mélanges sont en proportions
stoechiométriques afin de maximiser les effets de l?explosion. On suppose également que les mélanges
inflammables sont à pression atmosphérique et à 20°C avant inflammation.
Plage de
température
de test
Pression finale
adiabatique à
volume constant
(bar)
Vitesse de
flamme
laminaire
(cm/s)
Taux
d?expansion
thermique (-)
Echantillon CRISTAL
UNION
150-300°C 4,3 0,2 3,7
300-400°C 5,8 1,5 4,9
Mélange 1 (Boateng) 8,0 18 6,6
Mélange 2 (Boateng) 7,01 4 5,8
Tableau 2 : Propriétés explosives des échantillons CRISTAL UNION comparées
aux résultats de Boateng et al.
Il apparaît que les gaz de pyrolyse émis par les échantillons CRISTAL UNION sont très peu réactifs en
raison de la proportion très importante de gaz inerte (plus de 80% de CO2) si l?on en juge par la vitesse
de flamme calculée.
Si l?on admet que l?essai en four tubulaire est représentatif du phénomène d?auto-échauffement dans le
silo, alors l?hypothèse d?une explosion de gaz de pyrolyse dans le silo, sans contribution de la poussière
de luzerne, paraît très improbable, compte tenu de la très faible réactivité de ces gaz.
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3.2.1.2 Hypothèses de modélisation de la réactivité des poussières
G.E.A. Andrews a obtenu les données suivantes pour caractériser la réactivité des poussières via des
essais en tube de Hartmann.
Matériau d(0.5)
Concentration
Injectée (g/m3)
Pmax/Pi
Kst
(bar.m/s)
Masse
brûlée
(%)
Conc.
corrigée
(g/m3)
Richesse
équivalente
Vitesse de
flamme
turbulente St
(m/s)
Vitesse de
flamme
laminaire
Sl
(m/s)
Coquilles de
pistaches
55,37 739 9,29 81,8 63,4 469 2,41 3,69 0,1
Coquilles de
pignons de
pin
46,88 742 8,9 61,3 58,4 433 2,62 3,87 0,11
Lait en
poudre
92,49 687 8,73 70,8 49,6 342 2,14 6,45 0,18
Farine à
biscuit
16,14 728 9,4 143 81,6 594 2,25 10,14 0,27
Farine de
maïs
14,05 741 9,2 157,1 73,9 547 2,58 12,09 0,33
Noix 44,96 745 9,38 97,7 66,2 493 2,77 4,1 0,14
Charbon
Kellingley
51,86 738 7,87 74,8 38,1 281 2,23 1,24 0,04
Tableau 3 : Caractéristiques de réactivité de combustion de poussières combustibles3
Le paramètre Kst est d?une valeur moyenne de 110 bar.m/s pour des fines de luzerne4. D?après le
tableau ci-dessus, par analogie avec d?autres poussières d?origine agricole, une vitesse de flamme
laminaire de l?ordre de 15 cm/s peut être retenue pour caractériser la réactivité de la luzerne. Cette
valeur est plus de10 fois supérieure à la vitesse de flamme des gaz de pyrolyse si l?on se base sur les
essais réalisés en four tubulaire sur les échantillons CRISTAL UNION.
3.2.1.3 Synthèse
L?hypothèse d?une explosion d?un grand volume inflammable composé uniquement de gaz de
pyrolyse mélangés à l?air paraît peu crédible, étant donné la faible réactivité constatée pour ce
mélange. La possibilité qu?une inflammation d?un mélange gaz de pyrolyse / air déclenche une
explosion de poussière est possible. Mais il est aussi possible que la mise en suspension de la
poussière soit due au débâtissage de la luzerne, et non à une explosion des gaz de pyrolyse.
Dans ce cas, le débâtissage aurait mis en contact la poussière de luzerne avec des particules
rendues incandescentes par un phénomène d?auto-échauffement en cours.
Dans la suite, on conserve l?hypothèse que les effets de pression dans le silo sont
essentiellement expliqués par une explosion de poussière occupant tout ou partie du volume
intérieur du silo.
3 CISAP6 Paper 56 Bologna, Italy, April 14-16, 2014.
H. Sattar et al. (2014) Turbulent flame speeds and laminar burning velocities using the ISO 1 m3 dust explosion
method. Chemical Engineering Transactions 36
4 Valeur moyenne issue de la base de données expérimentale de l?Ineris
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3.2.2 Détermination de la cohérence entre l?inflammation en fond de cellule et les
observations constatées
Afin de déterminer la cohérence entre l?inflammation en fond de cellule et les observations constatées,
l?Ineris a, dans un premier temps, analysé l?enregistrement des caméras de surveillance des sites
voisins. Puis, dans un second temps, au regard des dégâts observés, l?Institut a estimé les pressions
de rupture de différents éléments constitutifs de la cellule et comparé ces valeurs aux résultats de
modélisations d?explosion primaire en cellule C20.
3.2.2.1 Enregistrements des caméras de surveillance de sites industriels voisins
Les images ci-dessous, transmises par le BEA-RI, sont tirées d?une caméra de surveillance d?un site
industriel voisin.
Figure 6 : Photos de l?accident prises par une caméra de surveillance d?un site industriel voisin,
à quelques instants d?intervalle [photo transmise par le BEA-RI]
Des poussières sont émises au sommet du silo sous forme de jet d?abord verticalement puis
horizontalement. Cette séquence dure quelques secondes. Aucune flamme n?est visible sur le film. Ces
éléments mettent en avant une absence d?explosion secondaire.
3.2.2.2 Estimation de la pression de rupture de divers éléments
L?objectif dans ce paragraphe est de déterminer le degré de confinement de l?explosion en estimant la
pression de rupture à l?explosion de divers éléments endommagés ou non dans la cellule accidentée
C20. La rupture des éléments est évaluée sur la base des plans et photographies transmis à l?Ineris.
Les principes généraux de tenue aux explosions sont issus du référentiel Ineris5 de calcul aux actions
accidentelles. Étant données les nombreuses incertitudes résiduelles, l?Ineris retient le principe suivant
pour l?analyse :
? Des pressions minimales sont retenues pour les composants totalement endommagés ;
? Une fourchette de pression est retenue pour les éléments ayant subi des déformations
plastiques ;
? Des pressions maximales sont retenues pour les composants n?ayant pas subi de déformation.
On considère des matériaux classiques pour l?acier et le béton. Il est important de noter que le
comportement dynamique n?est pas considéré ici et qu?il peut influencer les niveaux de pression retenus.
En effet, on considère que le comportement des éléments est quasi-statique, ce qui est équivalent à
considérer une montée en pression lente et un temps d?application de la surpression long par rapport à
la fréquence de vibration des éléments retenus.
5 INERIS, La résistance des structures aux actions accidentelles, 2002 (disponible sur www.ineris.fr)
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3.2.2.2.1 Description détaillée du silo de stockage
Afin de déterminer la pression de rupture à l?explosion de divers éléments endommagés ou non dans
la cellule C20, l?Ineris a, tout d?abord, caractérisé de manière détaillée (dimensions et matériaux), sur la
base des documents qui lui ont été transmis, le silo et ses éléments constitutifs jugés pertinents.
Pour rappel, le silo accidenté est un silo de stockage en béton armé de 50 m de long (incluant la tour
de manutention) et 25 m de large, composé de 15 cellules cylindriques verticales avec base conique
disposées en 5 rangées de 3 cellules et de 8 as de carreau. Chaque cellule mesure 40 m de haut (dont
4 m pour la base conique), avec un diamètre de 8 m et une épaisseur de paroi de 17 cm.
Concernant le plancher sur cellules et as de carreau du silo, il est composé de dalles en béton armé de
14 cm d?épaisseur, reposant sur des poutres en béton armé et sur les parois des cellules, tel qu?indiqué
Figure 7. Notons la présence de deux poutres, référencées N754 et N755, reliant, respectivement, la
cellule C20 à la C21 et la C20 à la C19.
Figure 7 : Disposition des poutres en béton armé (en rouge) sur lesquelles reposent les dalles
du plancher sur cellules
Le plancher sur chaque cellule se compose de plusieurs dalles dont l?une est fragilisée afin de faire
office de surface soufflable visant à garantir l?intégrité du reste de la structure en cas d?explosion.
La dalle fragilisée faisant office de surface soufflable de la cellule C20 accidentée est située au centre
du plancher sur cellule, comme indiqué Figure 8. En l?absence de plus de détails, il est impossible de
savoir avec certitude si cette dalle est simplement posée ou fixée sur 2 ou 4 côtés aux autres dalles du
plancher. Les deux hypothèses seront considérées dans la suite de ce rapport.
Poutre N755
Poutre N754
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Figure 8 : Disposition des dalles de la cellule C20 accidentée, avec la dalle fragilisée faisant office
de surface soufflable au centre
Il convient de noter que les dispositions des dalles sur cellules indiquées Figure 7 et Figure 8 ne sont
pas les mêmes. Après analyse des photographies transmises à l?Ineris et en prenant en compte les
dates de réalisation des plans, l?Institut considère pour la suite de l?analyse le plan de Figure 8, plus
récent (en date du 13 juillet 1989, contre 4 juillet 1989 pour le plan Figure 7).
3.2.2.2.2 Description des principaux dégâts du silo
Conformément au principe retenu par l?Ineris pour réaliser l?analyse de la pression de rupture de divers
éléments, une analyse des dégâts a été menée sur la base des photographies et documents transmis
afin de déterminer les composants totalement endommagés, ceux ayant subi des déformations
plastiques et, enfin, ceux n?ayant pas subi de déformation.
Pour rappel, d?après les différentes informations (notamment photographiques) transmises par le BEA-
RI à l?Ineris, les dégâts relevés se situent en partie haute du silo, au niveau du plancher et de la galerie
sur cellules. La tour de manutention, le fût des différentes cellules et la partie basse du silo, au niveau
de la galerie sous cellules, ne sembleraient pas présenter de dégâts visuels particuliers.
Les photographies post-accidentelles prises après retrait des éléments de bardages de la galerie sur
cellules ont montré que le plancher sur la cellule accidentée C20 et sur les cellules C19 et C21 voisines
présentait des dégâts importants avec de nombreuses fissurations et ruptures. Les éléments de dalles
semblent s'être soulevés et être retombés sur place. Les lignes de fissuration du plancher sur cellules
supposées par l?Ineris après analyse des documents lui ayant été transmis sont représentées sur la
Figure 10 ci-dessous. Les poutres N754 et N755, sur lesquelles reposent ces éléments de plancher, se
sont rompues au niveau de leurs liaisons avec les cellules C19, C20 et C21. À noter qu?il ne semble
pas y avoir eu de projection des dalles de toiture.
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Figure 9 : Prise de vue du sommet du silo après l?accident du 6 janvier 2023 et le retrait des éléments
de bardages de la galerie sur cellules
Figure 10 : Lignes de fissuration du plancher sur la cellule C20 ? Lignes rouges : les lignes
de fissurations supposées par l?Ineris ; rectangle bleu : positionnement de la dalle fragilisée faisant
office de surface soufflable ; rond rouge : point de rupture des poutres N754 et N755
(liaison entre les poutres et la cellule C20)
3.2.2.2.3 Estimation des pressions de rupture de divers éléments constitutifs du silo
Sur la base des analyses présentées ci-dessus, l?Ineris a évalué la pression de rupture à l?explosion de
différents éléments constitutifs jugés pertinents du silo. Ces estimations sont présentées au Tableau 4.
Cellule C20 Cellule C19 Cellule C21
Cellule C20 Cellule C19 Cellule C21
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Élément Dimensions
(mm)
Pression de rupture
estimée
Information sur la
pression appliquée
Fût en béton armé de la cellule (pas
de dégâts constatés)
36 000 en
hauteur x
8 000 en
diamètre x 170
en épaisseur
1 bar Inférieure à 1 bar
Dalle n°7
dite
« fragilisée »
(rupture de
la dalle)
Hypothèse : dalle
supposée simplement
posée 3 000 x 2 550 x
140
35 mbar
Supérieure à
35 mbar
Hypothèse : dalle
supposée fixée sur
2 ou 4 côtés
Entre 100 et 250
mbar
Supérieure à
100 mbar
Dalles dites « non fragilisées » ayant
rompu (rupture des dalles) ? (autres
dalles)
2525 en
largeur x 140
Entre 100 et 250
mbar
Supérieure à
100 mbar
Tableau 4 : Niveaux de surpression estimés pour certains éléments de la cellule C20
3.2.2.3 Modélisation d?une explosion primaire en cellule C20 avec inflammation du fond de cellule
Suite à une demande du BEA-RI en date du 23 juin 2023, l?Ineris a, tout d?abord, étudié si, en cas
d?explosion primaire en cellule C20, la dalle dite « fragilisée » du plancher de la cellule, considérée
comme seule surface soufflable, était dimensionnée afin de garantir l?intégrité structurelle du reste de
la cellule (fût en béton armé et dalles « non fragilisée).
L?Ineris a, ensuite, mené une analyse afin d?étudier si une explosion primaire en cellule C20 avec
inflammation en fond de cellule était cohérente avec les dégâts observés.
3.2.2.3.1 Modélisation d?une explosion primaire en cellule C20 avec comme seule surface soufflable
la dalle fragilisée
Un premier calcul a été réalisé à l?aide du logiciel EFFEX (présenté en annexe 4) afin d?évaluer si, en
cas d?explosion primaire en cellule C20, la dalle dite « fragilisée » était correctement dimensionnée afin
de garantir l?intégrité structurelle du reste de la cellule (fût en béton armé et dalles « non fragilisée).
Pour ce faire, l?Ineris a évalué la pression résiduelle dans ce volume en considérant, comme seule
surface soufflable, la dalle fragilisée. Cette valeur a ensuite été comparée avec les ordres de grandeurs
de pressions de rupture des autres dalles du plancher présentées dans le Tableau 4.
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Les caractéristiques bâtimentaires considérées dans la modélisation sont les suivantes :
Localisation Dimensions Matériaux
Fût en béton armé de la cellule Hauteur : 36 m / Diamètre :
8 m
Béton armé
Dalle n°7 dite « fragilisée » Longueur : 3 m / Largeur :
2,55 m
Épaisseur : 0,14 m
Béton armé
Surface : 7,50 m² / Périmètre :
11 m
Dalles dites « non fragilisées » Largeur : 2,525 m / Épaisseur :
0,14 m
Béton armé
Surface ouverte permanant Surface : 0,75 m² -
Tableau 5 : Caractéristiques bâtimentaires de la cellule C20
Deux hypothèses ont été considérées et étudiées pour la pression de rupture des dalles « fragilisées »
dont la masse surfacique a été estimé à 350 kg/m3 :
- Cas dalle fragilisée simplement posée : 35 mbar ;
- Cas dalle fragilisée fixée sur 2 ou 4 côtés : entre 100 et 250 mbar.
Considérant une inflammation en fond de cellule, les hypothèses complémentaires suivantes ont, par
ailleurs, été considérées :
- Longueur de propagation de flamme : 40 m ;
- Taux d?expansion thermique : 5 ;
- Vitesse de flamme turbulente : 2 m/s.
À noter que les valeurs de taux d?expansion thermique et de vitesse de flamme dépendent des
caractéristiques de l?atmosphère inflammable à l?origine de l?explosion. Dans le cas de l?accident du
6 janvier 2023, et comme détaillé au chapitre 3.2.1, on retient l?hypothèse que c?est une explosion de
poussière qui génère les effets de pression observés. Rappelons qu?il n?est pas exclu que la mise en
suspension des poussières, prérequis nécessaire à leur explosion, puisse provenir d?une explosion de
gaz de pyrolyse.
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Les profils temporels de pression calculés dans la cellule sont les suivants.
Figure 11 : Profils temporels de pression résiduelle dans le volume de la cellule pour une explosion
primaire en ne considérant que la rupture de la dalle fragilisée
D?après la Figure 11, les pressions résiduelles obtenues dans le volume de la cellule sont les suivantes :
- Hypothèse dalle fragilisée simplement posée (pression d?ouverture fixée à 35 mbar) : pression
résiduelle dans la cellule de l?ordre de 200 mbar ;
- Hypothèse dalle fragilisée fixée sur 2 ou 4 côtés (pression d?ouverture comprise entre 100 et
250 mbar) : pression résiduelle comprise entre 210 mbar et 285 mbar.
Les valeurs de pressions résiduelles obtenues pour les différentes hypothèses en termes de pressions
d?ouverture de la dalle fragilisée sont donc du même ordre de grandeur. Elles s?avèrent, par ailleurs, du
même ordre de grandeur que les valeurs de tenue des dalles non fragilisées présentées dans
le Tableau 4.
Ainsi, si le dimensionnement de la dalle soufflable a permis d?éviter la rupture de la paroi verticale de la
cellule lors d?une explosion interne, il semble, à lui seul, insuffisant pour empêcher la rupture des autres
dalles.
3.2.2.3.2 Modélisation d?une explosion primaire en cellule C20 : cohérence entre une inflammation en
fond de cellule et les dégâts observés
Une modélisation d?explosion primaire en cellule C20 a été réalisée à l?aide du logiciel EFFEX, les
valeurs de pressions résiduelles obtenues étant, ensuite, comparées aux valeurs de pression de rupture
estimées présentées dans le Tableau 4.
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Les caractéristiques bâtimentaires considérées dans la modélisation sont les suivantes :
Localisation Dimensions Matériaux Prupt6 Masse
surfacique
kg/m²
Fût en béton
armé de la
cellule C20
Hauteur : 36 m
Diamètre : 8 m
Béton armé > 1 bar -
Dalle n°7 dite
« fragilisée »
Longueur : 3 m
Largeur : 2,55 m
Épaisseur : 0,14 m
Béton armé :
Surface : 7,50 m²
Périmètre : 11 m
Entre 100 et 250 mbar 350
Dalles dites
« non
fragilisées »
Largeur : 2,525 m
Épaisseur : 0,14 m
Béton armé :
Surface : 20 m²
Périmètre : 39 m
Entre 100 et 250 mbar 350
Surface ouverte
permanant
Surface : 0,75 m² - - -
Tableau 6 : Caractéristiques bâtimentaires de la cellule C20, en considérant la rupture des dalles
non fragilisées
L?ensemble des parois sont considérées dans cette modélisation comme potentiellement soufflables
avec, comme pression de rupture, les pressions rappelées dans le tableau ci-dessus.
Considérant une inflammation en fond de cellule, les hypothèses complémentaires suivantes ont, par
ailleurs, été considérées :
- Longueur de propagation de flamme : 40 m ;
- Taux d?expansion thermique : 5 ;
- Vitesse de flamme turbulente : 2 m/s.
Les valeurs de taux d?expansion thermique et de vitesse de flamme dépendent des caractéristiques de
l?atmosphère inflammable à l?origine de l?explosion. Dans le cas de l?accident du 6 janvier 2023, et
comme détaillé au chapitre 3.2.1, on retient l?hypothèse que c?est une explosion de poussière qui génère
les effets de pression observés. Rappelons qu?il n?est pas exclu que la mise en suspension des
poussières, prérequis nécessaire à leur explosion, puisse provenir d?une explosion de gaz de pyrolyse.
Les profils temporels de pression calculés dans la cellule sont les suivants.
6 Valeurs issues du Tableau 4
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Figure 12 : Profils temporels de pression résiduelle dans le volume de la cellule pour une explosion
primaire en considérant une rupture des mêmes dalles que lors de l?accident
D?après la Figure 12, les pressions résiduelles obtenues dans le volume de la cellule sont de l?ordre de
170 mbar à 260 mbar. Ces pressions sont supérieures aux pressions de tenue de la dalle fragilisée et
des autres dalles ayant rompu lors de l?accident du 6 janvier 2023, et dont les valeurs sont présentées
dans le Tableau 4, tout en restant du même ordre de grandeur. Elles restent, par ailleurs, inférieures à
la pression de tenue du fût en béton armé de la cellule.
Ces modélisations indiquent qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts
observés. Par ailleurs, bien qu?il soit difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule,
elles montrent également qu?il n?y a pas de contradiction entre un scénario d?inflammation en fond de
cellule et les dégâts constatés.
Remarque : les valeurs indiquées ci-dessus (de pression de rupture, de pression résiduelle dans le
volume suite à l?explosion, etc.) sont à considérer comme des ordres de grandeur et se présentent
comme tels. En effet, les plans étant incomplets ou, parfois, contradictoires, nous avons dû émettre des
hypothèses concernant les caractéristiques des différentes dalles de la cellule (sur les ferraillages, sur
certaines dimensions, etc.).
3.2.2.3.3 Conclusion des différentes modélisations effectuées
Les différentes modélisations réalisées indiquent :
? Que la dalle fragilisée était insuffisamment dimensionnée pour empêcher la rupture des
dalles non fragilisée en cas d?explosion primaire dans la cellule ;
? Qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts observés et,
bien qu?il soit difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule, qu?il
n?y a pas de contradiction entre un scénario d?inflammation en fond de cellule et les
dégâts constatés.
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3.2.3 Détermination globale de l?énergie d?explosion produite et de la quantité de
poussière mise en jeu
L?énergie de l?explosion peut être estimée sur la base des calculs EFFEX menés en partie précédente,
dans le paragraphe 3.2.2.3.2. Pour parvenir à la pression maximale d?explosion, il est nécessaire de
brûler une masse d?atmosphère inflammable minimale de l?ordre de 200 kg. L?énergie de combustion
peut être estimée par l?expression suivante, tirée du rapport Omega sur les explosions de poussières7 :
?????? = ???0( ? ? 1)
En assimilant le mélange inflammable à de l?air, on a ??=1004 J/kg/K. Pour ?0 = 300? et ? = 5, on
obtient ??????=1,2 MJ/kg. Ainsi, l?énergie globale d?explosion conduisant au niveau de pression
résiduelle évaluée précédemment dans la cellule C20 et associée au niveau de dégâts constatés
est au minimum de l?ordre de 240 MJ.
En faisant l?hypothèse d?une concentration de poussière de 0,5 kg/m3, ce qui représente le maximum
de réactivité pour des poussières d?origine agricole et peu denses comme la luzerne, cette énergie mise
en jeu correspond à environ 60 kg de poussière en suspension, ce qui est très peu par rapport à la taille
du silo (seulement 6 % du volume du silo). Toutefois il s?agit d?une valeur minimale, la quantité de
poussière mise en jeu dans l?explosion pourrait être beaucoup plus élevée.
Le fait qu?il n?y ait aucune flamme visible à l?extérieur, alors que l?inflammation s?est vraisemblablement
produite au fond du silo donc loin des évents, suggère que l?atmosphère explosive ne remplissait pas
la totalité du silo. A titre indicatif, une atmosphère explosive remplissant la moitié du silo correspondrait
à 500 kg de poussière en suspension, soit un dépôt de poussière de l?ordre de 1 mm uniformément
réparti sur la paroi du silo8. Donc, même s?il est difficile de déterminer précisément la quantité de
poussière impliquée dans l?explosion, on peut conclure qu?une quantité assez faible, de l?ordre de
quelques dizaines de kg, était suffisante pour produire les effets observés, mais que la quantité
réellement présente était certainement largement plus importante.
7 C. Proust (2006) Rapport Omega 21 : Explosion de poussières. Phénoménologie et modélisation des effets.
Téléchargeable sur www.ineris.fr
8 Hypothèse de calcul : surface interne du silo 1000 m3, densité de la luzerne en poudre non compactée 500 kg/m3.
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3.4 Revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur
la gestion de l?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de
bâtissage sur les parois
Ce chapitre apporte les éléments de réponse à la question n°3 de la saisine du BEA-RI relative à la
revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur la gestion d?auto-échauffement
et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois.
Après des sollicitations et contacts auprès des céréaliers et pré-information auprès du
BEA-RI, l?Ineris n?a pas reçu de confirmation de rendez-vous de la profession pour échanger sur ses
bonnes pratiques de la gestion d?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage
sur les parois. Ainsi, l?Ineris a exprimé auprès du BEA-RI ne pas avoir pu collecter des informations pour
pouvoir répondre spécifiquement sur la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois,
ce qui a été accepté par le BEA-RI.
3.4.1 Retour d?expérience et phénomènes dangereux associés aux installations de
mise en oeuvre de luzerne
Depuis de nombreuses années, les activités de culture et de production animales9 représentent près de
10 % de l?accidentologie française des ICPE recensée par le BARPI.
Entre 2009 et 2021, l?étude de 1 259 événements des secteurs de la culture et production animale (hors
sites agroalimentaires et méthanisation agricole) révèle deux phénomènes dangereux récurrents :
l?incendie (85 % des évènements) et les rejets de matières dangereuses et/ou polluantes (23,2 % des
évènements) ; et de façon moindres les explosions (3,6 % des évènements) et autres typologies10
(5,9 % des évènements). L?analyse des perturbations et causes profondes permet au BARPI d?en tirer
des enseignements et de rappeler certaines bonnes pratiques.
9 Accidentologie dans les activités de culture et production animale - La référence du retour d'expérience sur
accidents technologiques (developpement-durable.gouv.fr)
10 Notamment des asphyxies d?animaux, des accidents de personnes, mortels ou avec blessures, des inondations.
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/synthese/accidentologie-dans-les-activites-de-culture-et-production-animale/
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/synthese/accidentologie-dans-les-activites-de-culture-et-production-animale/
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L?interrogation de la base ARIA du BARPI sur l?accidentologie associée à la luzerne11 recense
81 événements, notamment :
- Incendie d?installations de fabrication de pellets de luzerne,
- Incendie de stockage de balles de luzerne,
- Incendie suivi d?une explosion dans une installation de déshydratation de luzerne,
- Incendie silo de stockage de pellets de luzerne,
- Incendie dans un cyclone de séchage de balles de luzerne,
- Auto-échauffement puis Incendie d?un entrepôt de stockage de luzerne,
- Incendie au niveau d'un refroidisseur sur une ligne de granulation d'une usine de granulés
de luzerne,
- Auto-échauffement puis incendie de granulés de luzerne stockés dans une cellule de silo,
- Etc.
La luzerne brute contient environ 15 à 20 % d?humidité, environ 30 % de cellulose, environ 30 % de
protéine (M.A.T. : Matière Azotée Totale), environ 10 % de matières grasses et de vitamines et
d?éléments minéraux et autres traces de constituants divers.
La luzerne déshydratée contient environ 10 % d?humidité, environ 30 % de cellulose, environ
30 % de protéine (M.A.T. : Matière Azotée Totale), environ 15 % de matières grasses et de vitamines
et d?éléments minéraux et autres traces de constituants divers.
Le retour d?expérience met en évidence de nombreux départs de feu au niveau des stockages de
luzerne. Ceux-ci proviennent notamment de phénomènes d?auto-échauffement de luzerne ou bien de
l?introduction de particules incandescentes lors du séchage, provoquant une inflammation.
Le retour d?expérience (Incendie d?un silo de granulés de luzerne à Saint Ouen l?Aumône, février 1998)
sur des feux dans des installations de stockage de produits agroalimentaires montre que les
conséquences en termes de flux thermiques restent a priori limitées12.
Les principaux constituants du panache de fumées d?incendie peu ventilé de stockage en silo de luzerne
sont le CO, le CO2, des COV et de la vapeur d?eau et possiblement de l?ammoniac dû à la décomposition
thermique des matières azotées totales.
Les émanations gazeuses liées à la combustion incomplète peuvent être toxiques en champ proche
(distance de l?ordre de 100 m), notamment à cause de la présence de concentrations de CO, de CO2,
des COV et en ammoniac dans le panache de fumées.
D?après les informations et le retour d?expérience identifié par l?Ineris sur la réactivité de la luzerne, le
retour d?expérience de différentes installations de stockage, de fabrication, de séchage et de
déshydratation de luzerne permet de présenter le constat suivant :
- Prise de conscience des professionnels que ces activités présentent un risque d?incendie et
d?explosion,
- Recrudescence de l?accidentologie liée à l?incendie de stockage de luzerne notamment en période
estivale où la température de l?air élevée peut activer la cinétique d?auto-échauffement.
11 https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/?s=luzerne&fwp_recherche=luzerne&fwp_paged=2
12 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Tome 1.
https://www.calameo.com/read/005148363a294056c31ef
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/?s=luzerne&fwp_recherche=luzerne&fwp_paged=2
https://www.calameo.com/read/005148363a294056c31ef
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Les installations de stockage de luzerne peuvent présenter des risques d?incendie et d?explosion :
- en marche normale,
- durant les phases transitoires de démarrage et d?arrêt,
- en période d?arrêt proprement dit,
- en cas de dysfonctionnement.
En ce qui concerne la réactivité de solides combustibles tels que la luzerne en phase de stockage,
deux principaux phénomènes sont envisagés13, 14 :
- un phénomène d?explosion de poussière lors du chargement gravitaire ou pneumatique de silos de
stockage,
- un phénomène d?auto-échauffement correspondant à une oxydation de la luzerne par l?oxygène de
l?air (feu couvant à combustion lente) ou initialement activité par une activité de fermentation
biologique par une teneur en humidité supérieure à 25 % de la luzerne :
o un feu qui couve peut se poursuivre pendant une longue période avant d'être détecté,
o la détection précoce nécessite une mesure fiable de la teneur en CO à des teneurs faibles
(quelques centaines de ppm),
o la propagation du noyau de pyrolyse est lent et préférentiellement vers le bas du silo
(possibilité d?entrée d?air via la vanne de vidange non étanche),
o la migration vers la partie supérieure des gaz de pyrolyse est lente.
Les incidents survenus depuis la mise en service des installations de stockage de luzerne concernent
des aspects d?auto-échauffement.
Cela s?explique pour les raisons multiples suivantes :
- la luzerne est une substance combustible et est réactive à l?oxydation chimique. Les températures
de la luzerne dans les silos de stockage peuvent dépasser les températures critiques d?auto-
échauffement du fait des dimensions de stockage des silos de luzerne,
- des phénomènes de fermentation biologique (liée à un défaut qualité du produit par une teneur en
humidité élevée ou une introduction accidentelle d?eau de pluie ou d?eau de lavage dans les silos)
peuvent augmenter la température de la luzerne jusqu?à 75°C environ et passer le relais au
phénomène d?auto-échauffement du produit et faciliter ainsi l?atteinte de sa température critique,
- le système de détection de CO dans les silos de stockage doit être suffisamment précoce pour
détecter convenablement un phénomène d?auto-échauffement : de plus, les orifices de vidange des
silos (vis planétaires, écluse rotative de vidange) doivent être étanches au passage de l?air afin de
limiter les entrées d?air et ainsi limiter les démarrages d?auto-échauffement dans la partie inférieure
des silos.
3.4.2 Revue des recommandations sur la gestion d?auto-échauffement.
Les techniques d?intervention relative aux installations de stockage de grains en cas d?explosion de
poussières et d?incendie sont bien connues à la lumière du retour d?expérience et sont définies au § IV
du guide de référence rédigé par les céréaliers15.
13 Méthodes pour l?évaluation et la prévention des risques incidentels (DRA 35 ? rapport Omega11) Connaissance
des phénomènes d?auto-échauffement des solides combustibles
(N°Ref INERIS DRA ? 2005 ? 46055 Février 2005) : http://www.ineris.fr/centredoc/omega11web.pdf.
14 Safety aspects of solid biomass: Storage, transportation and feeding, Jaap Koppejan, IEA ? Bioenergy Task 32.
15 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Les principaux éléments à
appréhender en cas de situations accidentelles. Tome 2. https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
http://www.ineris.fr/centredoc/omega11web.pdf
https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
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La gestion de la prévention et de la protection du risque d?auto-échauffement avancé ou
d?auto-inflammation des silos de stockage peut s?appuyer sur les principes suivants :
- Optimiser la mise en place de la surveillance de la concentration de la teneur en CO dans les ciels
gazeux des silos de stockage et utiliser avec parcimonie le transilage ;
- Favoriser le suivi de la mesure de concentration de CO dans le ciel de chaque silo de stockage, ou
par défaut, par groupe de silo (actuellement les ciels des silos de stockage communiquent entre
eux et cela constitue un volume d?air qui aurait un effet de dilution de la concentration de CO en cas
de début d?auto-échauffement dans un silo) ;
- S?appuyer sur les caractéristiques de suivi de la teneur en CO et en température indiquées dans le
Tableau 6 ci-après pour la gestion de la prévention des phénomènes d?auto-échauffement et en
cas de nécessité privilégier la vidange au plus tôt du silo en cas de suspicion ;
- Envisager de pouvoir inerter les ciels des silos de stockage par un gaz inerte.
3.4.2.1 Action sur la mesure de la température de la luzerne et sur la mesure du taux de CO
En termes de bonnes pratiques de prévention de phénomène d?auto-échauffement notamment dans
des silos de stockage, il convient de piloter l?activation de l?inertage du ciel gazeux du silo de
stockage :
- assurer le suivi de l?élévation de la concentration de CO (tout en s?assurant que la plage de mesure
de CO soit entre 0 et 5 000 ppm) puis il convient de poursuivre la stratégie de lutte par un cycle
d?inertage en fond du silo. La mesure du taux de CO dans le ciel du silo permet de connaître la
présence et l'évolution d?un phénomène d?auto-échauffement de luzerne (plus le taux de CO dans
le ciel gazeux est élevé, plus l?évolution du feu est importante) et de prévenir le risque encouru par
les intervenants, le personnel et la population,
- assurer le suivi de la température (sonde de température avec une plage de mesure de 0°C à
500°C) de la luzerne dans la partie supérieure et la partie inférieure du silo, zones où des entrées
d?air sont possibles (partie ciel gazeux du silo et circuit de vidange en partie basse où des vannes
de vidange ne sont pas systématiquement étanches),
- utiliser les données des sondes de température réparties dans le stockage notamment à 1 m
au-dessous du niveau supérieur du niveau du combustible et à 1 m au-dessus du fond du stockage
(au-dessus de la zone de vidange) car les arrivées d'air se font à ces deux niveaux. Des sondes de
température situées à différents niveaux peuvent renseigner notamment au début du sinistre sur le
volume de produit en combustion et sur l'étendue de la combustion dans le volume (cartographie
du sinistre). Néanmoins, la luzerne étant un bon isolant thermique, celles-ci ne renseignent vraiment
que sur une distance d?environ 50 cm et surtout au début du sinistre. Par exemple, une guirlande
de quatre sondes de température actuellement réparties dans l?axe des silos ne permet pas de
fiabiliser la détection d?auto-échauffement et d?auto-inflammation dans les silos,
- assurer un plan de maintenance préventive et corrective des sondes CO et des sondes de
température situées dans le silo de stockage de luzerne ; le ciel de silo de stockage doit être équipé
d?un système de détection CO avec une gamme de mesure de 0 ppm à 10 000 ppm pour que le
CO issu du phénomène d?auto-échauffement soit mieux détecté,
- mettre en place des vannes de vidange en partie inférieure du silo afin de maîtriser des entrées
d?air (notamment en cas de vent, etc.) pouvant migrer dans le silo et favoriser des phénomènes
d?auto-échauffement de luzerne,
- utiliser une caméra infra-rouge mobile pour visualiser la zone de combustion du silo la plus chaude
et pour suivre l'évolution de cette zone en phase d?auto-échauffement avancé ou en phase d?auto-
combustion.
L?inertage est fonction de la teneur en CO et du seuil de température dans l?enceinte de stockage. Les
seuils et actions de sécurité sont indiqués dans le Tableau 6 suivant.
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Seuil CO (ppm)
Seuil de température de la luzerne
(°C)
Action de sécurité
Silo de stockage de luzerne
Seuil 1 :
Tp < 50°C
et
CO = 250 ppm
Alarme en supervision, arrêt de l?alimentation du silo et
suivi par l?opérateur de l?évolution des capteurs Tp et CO.
Seuil 2 :
Tp > 55°C
et
250 ppm < CO < 500 ppm
Alarme en supervision et appel hiérarchie et arrêt de
l?alimentation du silo.
Lancement manuel en supervision de l?inertage en partie
basse et dans le ciel gazeux du silo et suivi de l?inertage.
Si inertage efficace (Tp et CO stable) : Interdire la poursuite
du remplissage du silo et prévoir la vidange du silo.
Si inertage non efficace, vidange du silo dans les bennes
sous silo.
Seuil 3 :
Tp > 60°C
et
CO > 500 ppm
Alarme en supervision et arrêt de l?alimentation du silo de
stockage.
Lancement automatique de l?inertage en partie basse et
dans le ciel gazeux du silo et suivi de l?inertage.
Si inertage efficace (Tp et CO stable) : Interdire la poursuite
du remplissage du silo et prévoir la vidange du silo.
Si inertage non efficace, vidange du silo dans les bennes
sous silo et arrosage (en cas d?extraction sous silo
inefficace).
Seuil 4 :
Tp > 70°C
et
CO > 1 000 ppm
Prévenir la hiérarchie.
Vidange interdite.
Appel des pompiers.
Utiliser une caméra infra-rouge mobile pour visualiser la
zone de combustion la plus chaude du silo et pour suivre
l'évolution de cette zone.
Tableau 6 : Seuils et actions de sécurité liés à l?inertage de silo de stockage de luzerne
3.4.2.2 Action sur le transilage
Un cycle de transilage16 permet d?évacuer les calories générées par un phénomène d?auto-
échauffement naissant par un échange thermique avec l?air ambiant (par effet de ventilation de l?air via
une opération de transilage) mais n?est cependant pas efficace pour maîtriser un phénomène d?auto-
inflammation d?où l?importance de définir et de rédiger des tendances d?augmentation des valeurs en
CO et en température (ces critères de suivi des seuils dynamiques ne sont pas indiqués dans les
consignes écrites).
Le transilage ne peut être efficace si la différence de température entre la matière et l?air ambiant est
significatif (de l?ordre de la dizaine de degré) pour assurer une fonction de transfert de calorie. Le
transilage est une mesure de prévention principalement et historiquement utilisée dans la filière
céréalière (notamment du transilage en période nocturne).
16https://www.arvalis-
infos.fr/file/galleryelement/pj/fd/18/bd/af/stockage_n7_novembre_6615522081049930827.pdf
https://www.arvalis-infos.fr/file/galleryelement/pj/fd/18/bd/af/stockage_n7_novembre_6615522081049930827.pdf
https://www.arvalis-infos.fr/file/galleryelement/pj/fd/18/bd/af/stockage_n7_novembre_6615522081049930827.pdf
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Un système de refroidisseur type échangeur thermique pourrait être utilisé en amont de l?alimentation
du silo de transfert pour s?assurer que la luzerne soit suffisamment refroidie lors de son passage dans
un tel refroidisseur.
L?inertage17 est une mesure de prévention de formation d?atmosphère explosive air / poussière
pulvérulente et une mesure de lutte contre un auto-échauffement avancé / auto-inflammation d?un
stockage de luzerne.
Action sur l?inertage des silos de stockage
A priori, l?inertage est une solution technique lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : Feu à
coeur de silo de stockage et cellule de stockage fermée et étanche.
L?inertage consiste à injecter un gaz inerte (dioxyde de carbone ou azote) pour évacuer l?oxygène
disponible et les calories produites par l?incendie. L?objectif de l?inertage, est à la fois de stopper le feu
en le privant de comburant, et de prévenir le risque d?explosion. L?extinction d?un sinistre par injection
de gaz inerte dans les cellules concerne des produits tels que les céréales, la luzerne, les produits oléo-
protéagineux, etc.18
En préalable à la mise en oeuvre de l?inertage, les conditions suivantes doivent en général être
remplies :
- Le silo doit être suffisamment étanche même si des fuites résiduelles comme celles pouvant être
produites au voisinage des évents sont acceptables,
- Les points d?injection doivent être facilement accessibles et l?ensemble de la masse doit pouvoir
être balayé.
Important : L?ensemble de ces conditions doivent être réunies préalablement à tout sinistre où
l?exploitant doit disposer des procédures adaptées pour permettre une mise en oeuvre rapide et efficace
de ces mesures.
Le silo doit être suffisamment étanche (c?est à dire que le silo doit être suffisamment fermé) pour assurer
un inertage efficace
En cas de prise d?air dans le silo, celui-ci doit être colmaté le mieux possible (vérifier régulièrement
l?étanchéité de la vis planétaire en fond du silo béton).
Les silos fermés doivent être équipés pour l?injection efficace de l?azote. Les points d'injection doivent
être facilement accessibles et l'ensemble de la masse doit pouvoir être balayé.
Important : L?ensemble de ces conditions doivent être réunies préalablement à tout sinistre où
l?exploitant doit disposer des procédures adaptées pour permettre une mise en oeuvre rapide et efficace
de ces mesures.
La température à l'intérieur du silo doit pouvoir être contrôlée à demeure par des sondes de température
afin de suivre l'évolution de la combustion chimique.
La mesure de la teneur du CO dans le ciel du silo doit être assurée afin de contrôler l'évolution de
l'incendie avec du matériel adapté.
La mesure de la teneur en O2 dans le ciel du silo doit être assurée pour évaluer le risque d'explosion et
vérifier l'efficacité de l'inertage (pour que le ciel gazeux soit protégé contre le risque d?explosion le taux
d?oxygène doit être à 5 %).
17 Rapport technique (FD CEN/TR 15281 : Janvier 2023) sur la prévention et la protection contre les ATEX ? Guide
de l?inertage pour la prévention des explosions
18 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Les principaux éléments à
appréhender en cas de situations accidentelles. Tome 2. https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
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En termes de stratégie de lutte contre l?incendie de silos de stockage de luzerne, la mise en oeuvre de
l?inertage doit respecter un certain nombre de consignes19 :
- Prévoir à l'avance des piquages afin de pouvoir injecter le gaz inerte à distance sans intervention
directe sur l'appareil pendant l'incident. Le gaz doit être introduit le plus rapidement possible sans
mettre la poussière en suspension,
- Prévoir une quantité de gaz inerte suffisante avec un système d?inertage correctement dimensionné
tel indiqué dans des normes en vigueur ou documents techniques en vigueur20 21. Pour les
installations à haut risque, il faut prévoir un premier stockage opérationnel (de l?ordre de la dizaine
de m3 d?azote liquide) sur le site à tout moment pour inerter rapidement. On peut passer des accords
avec un fournisseur local de gaz inerte pour un approvisionnement rapide afin de maintenir
l'atmosphère inerte après épuisement du stock initial,
- Établir des seuils d'alarmes au point de vue échauffement, et des consignes d'intervention. Le
déclenchement du système d'inertage doit être néanmoins manuel,
- Éviter d?injecter du gaz inerte à l?état liquide pour limiter les risques électrostatiques, le givrage et
une expansion rapide du liquide,
- Avoir la possibilité d'isoler l'installation par silo afin de pouvoir suivre de façon précise la teneur en
CO dans le ciel de chaque silo : Chaque silo devant être le plus étanche possible pour limiter la
consommation du gaz inerte. Par défaut de pouvoir suivre la teneur en CO dans le ciel de chaque
silo, il est possible de suivre la teneur de la concentration du CO par ilot de quelques silos,
- Mesurer la teneur en O2 et en CO dans le ciel du silo pendant la phase d?inertage du ciel gazeux
du silo. Il n'est pas nécessaire d'installer un détecteur à demeure, mais il faut avoir la possibilité de
suivre l'évolution du taux d'oxygène en cas d'inertage,
- Inerter d'abord le ciel du silo pour éliminer le risque d'explosion, dans la masse du dépôt pour arrêter
la combustion. Lorsqu'on injecte le gaz inerte dans la masse, on chasse les gaz de pyrolyse
(inflammables dans le ciel). A noter que l'inertage peut arrêter l'évolution d'un feu couvant mais
n'agit pas toujours sur la température de la poussière ; la réaction peut redémarrer dès que
l'oxygène est introduit dans le système (pour lutter contre les feux couvants, le taux d?oxygène doit
être si possible inférieur à 5%). L?inertage à l?azote doit être injecté en deux points distincts :
o l?inertage du ciel du silo doit être réalisé en 1er en début d?opération afin de s?assurer que la
teneur en O2 n?atteigne pas 5 % (ceci pour éviter la formation d?une ATEX air / CO dans le ciel
du silo). La quantité d?azote à prévoir est de l'ordre de 1 Nm3 N2/m3 du volume du ciel utile du
silo22 ;
o puis, à la base du silo pour balayer l'ensemble de la masse stockée (l?opération d?inertage doit
débuter par une injection dans le ciel du silo puis dans le bas afin de compenser le tirage
thermique et éviter ainsi les entrées d'air dans le silo).
Lorsque l'injection d'azote dans le bas du silo aura commencé (seulement après avoir assuré l?inertage
dans le ciel du silo), il faudra probablement attendre quelques jours avant qu?un effet d'extinction puisse
être observé.
19 Connaître et faire face aux risqué des organismes stockeurs de la filière agricole. Tome 2 : Les principaux
éléments à appréhender en cas de situations incidentelles (Direction de la Sécurité Civile, COOP de France,
Groupama, INERIS, Fédération du Négoce Agricole, Synacomex).
20 NF EN ISO 20024 (Mars 2020) : Biocombustibles solides (Manutention et stockage en toute sécurité des granulés
de biocombustibles solides dans des applications commerciales et industrielles)
21 CEN/TR 15281 (2006) : Atmosphères explosibles - Guide de l'inertage pour la prévention des explosions (norme
actuellement en cours de révision Afnor/S66A)
22 Compléments du guide de l?état de l?art : Annexe B « Les procédures d?intervention dans les silos », INERIS
2008 (version 3).
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NB 1 : À titre indicatif, un débit d?injection de 5 à 10 kg N2/m2/heure23 à condition que le matériau à
préserver présente une porosité apparente de 50 %. Il est en outre possible d'augmenter le débit
d'injection (au moins pendant la phase initiale), la vitesse de remplissage augmentera en conséquence.
NB 2 24 : Lors d?un sinistre incendie « classique », l?eau se révèle généralement être l?agent d?extinction
le plus adéquat. Or, au regard du risque spécifique au phénomène d?auto-échauffement avancé / auto-
inflammation que présente l?activité de stockage de luzerne, cette eau pourra, en cas d?utilisation
excessive, représenter une problématique majeure voire irréversible (augmentation du poids en cellule
et risque d?éclatement du silo, manutention difficile, inertage éventuel délicat, etc.).
L?utilisation de l?eau pour maîtriser un sinistre ne devra être envisagée que dans le cadre de l?extinction
d?un feu directement accessible sur le produit. Dans ce cas précis, l?eau ne devra être utilisée qu?en très
faible quantité par jet diffusé sur le grain. En revanche, lors d?un feu au coeur dans un silo de stockage,
l?eau sera, à priori, à proscrire pour l?extinction.
Il convient alors d?utiliser de préférence de la mousse (moyen ou haut foisonnement) comme agent
d?extinction pour des phénomènes d?auto-combustion de luzerne dans les silos de stockage et de
transfert. De plus, il est recommandé d?équiper chaque silo de stockage ou de transfert d?un système
de canalisation (colonne sèche, ou autres dispositifs) permettant de faciliter l?injection de mousse en
cas de nécessité dans les silos de stockage et de transfert.
23 Silo Fires : Fire extinguishing and preventive and preparatory measures, Henry Persson, MSB (Swedish Civil
Contingencies Agency), MSB586 - July 2013.
24 https://www.calameo.com/books/005148363603d7ef959a8
https://www.calameo.com/books/005148363603d7ef959a8
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4 Conclusions
L?Ineris a apporté un appui technique en réponse de la saisine du BEA-RI du 15/05/2023 suite à
l'explosion du 06 janvier 2023 au sein d?un silo de stockage de la société CRISTAL-UNION sur son site
de Bazancourt (51) :
? Étape n°1 : Évaluer la réactivité de la luzerne à l?auto-échauffement :
De l?analyse des données indiquées au Tableau 1 et au Tableau 2, l?Ineris a apporté une évaluation
bibliographique et expérimentale sur la réactivité de la luzerne :
- La luzerne sous forme pulvérulente, est une substance combustible pulvérulente et possède une
réactivité élevée vis-à-vis de l?oxy-réactivité avec un pic exothermique en essai ATD/ATG pour
lequel la température à laquelle l?écart de température entre l?échantillon et le témoin atteint 50°C
est inférieure à 250°C avec une perte de masse de 90 % environ et est moyennement à peu sensible
aux phénomènes électrostatiques ;
- La luzerne sous forme pulvérulente, est une substance susceptible de générer une ATEX en cas
de mise en suspension dans l?air (transport par gravité ou par transfert pneumatique) pour une limite
inférieure d?inflammabilité moyenne de 50 g/m3, avec une violence d?explosion de classe
d?explosion de poussière St1 (Pmax = 4 à 6 bar et Kst = 50 à 100 bar.m.s-1) ;
- La luzerne est sujette à l?auto-échauffement lors de son stockage. Un stockage de luzerne d?une
hauteur de 16 m a une température critique d?auto-échauffement de l?ordre de 40°C ;
- La luzerne sous forme pulvérulente est susceptible pour apport de source d?inflammation active de
s?auto-enflammer à l?état de nuage (TAInuage de l?ordre de 360°C) ou en dépôt de matière de 5 mm
d?épaisseur (TMI couche 5mm de l?ordre de 155°C). La Directive Européenne ATEX 2014/34/UE
préconise que les températures de surface des parties d?appareils doivent, pour éviter
l?inflammation des poussières en suspension, être nettement inférieures à la température
d?inflammation du mélange d?air avec des poussières prévisibles. La formule issue de la norme
CEI 60079-14 :2013 (disposition 5.6.3.2) permet de calculer la température maximale de surface
de l'équipement en degrés Celsius du mélange poussière/air considéré, lorsque soumis à la
méthode d'essai conformément à la norme CEI 60079- 0, suivant la relation suivante :
Minima (Tmax ? 2/3 TMInuage et TMAX = TMIcouche ? 75 K).
Pour la luzerne, cela signifie que la température en surface du silo ne doit pas dépasser 80°C.
? Étape n°2 : Reconstituer le mécanisme accidentel dans la cellule :
Il s?agissait, plus spécifiquement, pour l?Ineris de :
- Déterminer la cohérence entre l?inflammation en fond de cellule et les observations constatées. Les
différentes modélisations EFFEX réalisées en considérant différentes hypothèses ont permis de
conclure qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts observés et
que bien qu?il soit difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule, il n?y
a pas de contradiction entre un scénario d?inflammation en fond de cellule et les dégâts
constatés ;
- Déterminer globalement l?énergie d?explosion produite. L?énergie globale d?explosion estimée est
au minimum de l?ordre de 240 MJ.
examiner les hypothèses d'une inflammation de poussières ou de gaz et évaluer les quantités de
poussière ou de gaz de pyrolyse mises en jeu.
L?hypothèse d?une explosion d?un grand volume inflammable composé uniquement de gaz de
pyrolyse mélangés à l?air paraît peu crédible, étant donné la faible réactivité constatée pour ce
mélange. La possibilité qu?une inflammation d?un mélange gaz de pyrolyse / air déclenche une
explosion de poussière est possible. Mais il est aussi possible que la mise en suspension de la
poussière soit due au débâtissage de la luzerne, et non à une explosion des gaz de pyrolyse. Dans
ce cas, le débâtissage aurait mis en contact la poussière de luzerne avec des particules rendues
incandescentes par un phénomène d?auto-échauffement en cours.
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Même s?il est difficile de déterminer précisément la quantité de poussière impliquée dans
l?explosion, on peut conclure à partir de l?estimation de l?énergie globale d?explosion et d?autres
constations, qu?une quantité assez faible, de l?ordre de quelques dizaines de kg, était suffisante
pour produire les effets observés, mais que la quantité réellement présente était certainement
largement plus importante.
? Étape n°3 : Réaliser une revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers
sur la gestion de l?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur
les parois :
NB : Après des sollicitations et contacts auprès des céréaliers et pré-information auprès du
BEA-RI, l?Ineris n?a pas reçu de confirmation de rendez-vous de la profession pour échanger sur leurs
bonnes pratiques sur la gestion d?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage
sur les parois. Ainsi, l?Ineris a exprimé auprès du BEA-RI ne pas avoir pu collecter des informations pour
pouvoir répondre spécifiquement sur la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois,
ce qui a été accepté par le BEA-RI.
En ce qui concerne la réactivité de solides combustibles tels que la luzerne en phase de stockage,
deux principaux phénomènes sont envisagés :
- un phénomène d?explosion de poussière lors du chargement gravitaire ou pneumatique de silos de
stockage,
- un phénomène d?auto-échauffement correspondant à une oxydation de la luzerne par l?oxygène de
l?air (feu couvant à combustion lente) ou initialement activité par une activité de fermentation
biologique par une teneur en humidité supérieure à 25 % de la luzerne :
o la luzerne est une substance combustible et est réactive à l?oxydation chimique. Les
températures de la luzerne dans les silos de stockage peuvent dépasser les températures
critiques d?auto-échauffement du fait des dimensions de stockage des silos de luzerne,
o des phénomènes de fermentation biologique (liée à un défaut qualité du produit par une
teneur en humidité élevée ou une introduction accidentelle d?eau de pluie ou d?eau de
lavage dans les silos) peuvent augmenter la température de la luzerne jusqu?à 75°C environ
et passer le relais au phénomène d?auto-échauffement du produit et faciliter ainsi l?atteinte
de sa température critique,
o le système de détection de CO dans les silos de stockage doit être suffisamment précoce
pour détecter convenablement un phénomène d?auto-échauffement : de plus, les orifices
de vidange des silos (vis planétaires, écluse rotative de vidange) doivent être étanches au
passage de l?air afin de limiter les entrées d?air et ainsi limiter les démarrages d?auto-
échauffement dans la partie inférieure des silos.
- Les techniques d?intervention relative aux installations de stockage de grains en cas d?explosion de
poussières et d?incendie sont bien connues à la lumière du retour d?expérience et sont définies au
§ IV du guide de référence rédigé par les céréaliers25.La gestion de la prévention et de la protection
du risque d?auto-échauffement avancé ou d?auto-inflammation des silos de stockage peut s?appuyer
sur les principes suivants :
o Optimiser la mise en place de la surveillance de la concentration de la teneur en CO dans
les ciels gazeux des silos de stockage et utiliser avec parcimonie le transilage ;
25 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Les principaux éléments à
appréhender en cas de situations accidentelles. Tome 2. https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
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o Favoriser le suivi de la mesure de concentration de CO dans le ciel de chaque silo de
stockage, ou par défaut, par groupe de silo (actuellement les ciels des silos de stockage
communiquent entre eux et cela constitue un volume d?air qui aurait un effet de dilution de
la concentration de CO en cas de début d?auto-échauffement dans un silo) ;
o S?appuyer sur les caractéristiques de suivi de la teneur en CO et en température indiquées
dans le Tableau 6 pour la gestion de la prévention des phénomènes d?auto-échauffement
et en cas de nécessité privilégier la vidange au plus tôt du silo en cas de suspicion ;
o Envisager de pouvoir inerter les ciels des silos de stockage par un gaz inerte.
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5 Annexes
Liste des annexes :
- Annexe 1 : Lettre de saisine du BEA-RI du 15/05/2023 (1 page) ;
- Annexe 2 : Résultats des mesures d?essais (9 pages) ;
- Annexe 3 : Description des essais (5 pages) ;
- Annexe 4 : Présentation de l?outil de calcul phénoménologique EFFEX (3 pages).
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ANNEXE 1
-
Lettre de saisine du BEA-RI
du 15/05/2023
1 page
Inspection générale de l?environnement
et du développement durable
Bureau d?Enquêtes et d?Analyses
sur les risques industriels
Mél : bea-ri@developpement-durable.gouv.fr
Tour Sequoia
1, place Carpeaux ,La Défense 6
92055 LA DÉFENSE CEDEX
http://www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr/bea-ri-r549.html
,
o
o
o
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ANNEXE 2
-
Résultats des mesures d?essais
9 pages
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Résultats Échantillon Réf. CRISTAL UNION «Luzerne»-référence Ineris 23AM101
Figure A1 : Évolution du taux d?humidité en fonction du temps de l?échantillon Ineris 23AM101
(105°C pendant 90 min)
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Figure A2 : Essai de caractérisation de friabilité et d'abrasion de l?échantillon Ineris 23AM101
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Figure A3 : Analyse ATD-ATG de l?ambiante à 800°C de l?échantillon Ineris 23AM101
Figure A4 : Courbe d?extrapolation selon la méthode Frank-Kameneskii des résultats
des essais en étuve isotherme de l?échantillon Ineris 23AM10123AM101
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Figure A5 : Essai en four tubulaire de 150°C à 400°C sous balayage d?air
sur l?échantillon Ineris 23AM101
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ANNEXE 3
-
Description des essais
5 pages
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Répartition granulométrique par tamisage mécanique
PRINCIPE
Le tamisage consiste à mesurer le poids d?un échantillon soumis à essai retenu par les toiles de mailles
de tamis calibrés. Chaque tamis est superposé par taille de maille décroissante selon une progression
mathématique. Le poids d?échantillon retenu (refus de tamis) peut alors être connu et permet d?obtenir
le pourcentage de refus pour chaque diamètre de maille par rapport au poids total de produit.
MODE OPERATOIRE
L?opération consiste à tamiser 100 g d?échantillon sur une table vibrante pendant 30 minutes avec des
tamis (grilles à maille carrée) de diamètre différents (1000, 500, 315, 180, 100, 63, 40 et 32 ?m).
Les refus récoltés sur chaque tamis sont pesés sur une balance.
Détermination du taux d?humidité
DISPOSITIF D?ESSAI
L?analyse est conduite à l?aide d?un dessiccateur thermique HX204, qui fait appel à une technologie
halogène qui permet un chauffage rapide et un contrôle précis de la température. Le dessiccateur
thermique est équipé d'une cellule de pesée MonoBloc et d'un récepteur de charge suspendu haute
performance, avec une résolution de 0,1 mg maximum. Les courbes de séchage permettent de
visualiser l'évolution de la mesure à l'écran. Les graphiques de contrôle affichent la tendance du taux
d'humidité en continu (résolution de 0,001 % TH et répétabilité de 0,01 % pour un échantillon de 10 g).
MODE OPERATOIRE
L?échantillon est réparti dans une coupelle en aluminium elle-même déposée dans le dessiccateur
thermique et séché à l?aide d?une lampe halogène à une température de 105°C pendant 90 minutes.
Le taux d?humidité est calculé par pesée différentielle au cours du séchage et suivi en continu.
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Caractérisation de la friabilité et de l'abrasion d?une poudre
ou d?un comprimé
DISPOSITIF D?ESSAI
Les systèmes particulaires sont classés selon leurs propriétés de taille, forme, porosité inter et
intra-particulaire.
Deux grandes catégories sont distinguées :
- Poudre cohésive,
- Poudre à écoulement libre.
Le mélange des poudres est fortement dépendant des propriétés d?écoulement des constituants, elles-
mêmes liées directement aux caractéristiques des poudres, telles que :
- Distribution granulométrique,
- Cohésion,
- Taux d?humidité
- Formes et propriétés de surface des particules
- Densité apparente et tassée,
- Les forces de Van Der Waals,
- Les charges électrostatiques,
- La friabilité impacte par exemple le choix du mélangeur (mélangeur convectif, cuve tournante?)
car la formation de poussières peut se révéler gênante dans plusieurs procédés.
La friabilité décrit la tendance des particules à se désintégrer sous l?effet des contraintes mécaniques
d?abrasion et d?attrition. Les petites particules ainsi formées modifient les propriétés d?usage de la
poudre (masse volumique du lit, coulabilité, propriété d?instantanéité?). Pour les agglomérats, on
parlera de résistance mécanique : elle dépend en particulier de la nature et de la consolidation des
ponts établis entre les particules durant l?agglomération. Plusieurs techniques sont employées pour
mesurer la friabilité des poudres (Bemrose et Bridgwater, 1987 ; Yan et Barbosa-Canovas, 2001 ;
Utsumi et al., 2001). Elles consistent, en général, à soumettre la poudre à des chocs mécaniques
(vibrations) dans un appareil spécifique pendant un temps donné.
L'un des critères de test de la résistance mécanique des comprimés et des noyaux est le test de friabilité
et d'abrasion. Au cours du processus d'enrobage, de transport et d'emballage, le comprimé perd un peu
de poids.
Le tambour de friabilité a été conçu pour tester la résistance au roulement et aux chocs des comprimés.
Une fracture prématurée ou un signe d'usure sur les bords indique que ces comprimés peuvent ne pas
résister aux rigueurs du transport. Le tambour d'abrasion permet d?effectuer des essais d'abrasion sur
l'attrition (usure) des comprimés causée par le frottement du produit pendant le transport.
Pour mesurer la perte de poids, les échantillons sont comptés et pesés. Ensuite, le test de friabilité est
effectué. Les échantillons sont culbutés à chaque tour du tambour de l'instrument de test de friabilité.
Une fois le test de friabilité terminé, les échantillons doivent être dépoussiérés et pesés à nouveau. La
différence de poids avant et après le test est déterminée comme étant la friabilité ; elle ne doit
généralement pas dépasser 1 %. Les comprimés d'un poids supérieur à 650 mg, les échantillons d'un
diamètre supérieur ou de forme irrégulière sont testés alors que l'instrument est soulevé d'un côté à
l'aide de pieds pliables jusqu'à un angle de 10 %.
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Analyse Thermique Différentielle et Thermique Gravimétrique
PRINCIPE
L'Analyse Thermique Différentielle et l?Analyse Thermique Gravimétrique permettent l'étude simultanée
des comportements thermodynamiques des matériaux.
Le principe de l'Analyse Thermique Différentielle consiste à suivre l?évolution de la différence de
température (?T) entre l?échantillon étudié et une référence inerte, c?est-à-dire dépourvu d?effets
thermiques dans le domaine de température étudié. L?Analyse Thermique Gravimétrique permet de
mesurer les variations de masse (?m) d'un échantillon au cours de son chauffage.
MODE OPERATOIRE
Un échantillon du produit à examiner, placé dans une nacelle en toile métallique identique à celle du
témoin, est introduit dans un four à température ambiante, dont on élève progressivement la
température à la vitesse de 5°C/min (rampe de température variable de 0,5°C/min à 5°C/min, plage de
température variable de l?ambiante à 800°C).
La variation de masse de l?échantillon placé dans le four est suivie à l?aide d?un module de pesée
électronique en fonction du temps. Les températures de l?échantillon (TE) et d?une substance inerte
choisie comme référence (TR) sont également enregistrées en fonction du temps. Les dispositions
adoptées permettent de préchauffer le courant d?air de balayage (440 Nl/h) à la même température que
le four (Figure B1).
Figure B1 : Schéma général de l?ATD/ATG
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Dans ces conditions, en comparant les températures de l?échantillon (TE) et de la substance inerte
choisie comme référence (TR), il est possible de mettre facilement en évidence de façon semi-
quantitative tout phénomène endo ou exothermique qui pourrait se produire au cours du chauffage.
L?emballement d?une réaction d?oxydation est pris en compte dès lors que la différence ?T entre
l?échantillon et la référence est égale ou supérieur à 50°C. Ceci permet d?enregistrer seulement les
réactions exothermiques franches sans tenir compte des faibles différences de températures entre
l?échantillon et le témoin pouvant s?expliquer par une conductivité thermique élevée de l?échantillon, une
réaction d?oxydation ne s?accompagnant pas d?une élévation de température susceptible de présenter
un danger, etc...
Les valeurs de température de la substance de référence au début de l?emballement d?une réaction
d?oxydation permettent de :
? définir le danger du produit testé vis-à-vis du risque d?auto-échauffement,
? de hiérarchiser l?oxy-réactivité de différents échantillons afin de procéder à des essais
complémentaires sur l?échantillon représentant le plus de risque d?auto-échauffement.
Un échantillon est considéré comme ayant une réactivité élevée vis-à-vis de l?oxy-réactivité lorsque la
température du témoin, pour un ?T = 50°C, est inférieure ou égale à 250°C. L?essai doit être complété
par un essai d?auto-échauffement visant à déterminer le domaine de la taille critique en fonction de la
température à partir duquel un risque d?auto-inflammation existe.
La réactivité est moyenne lorsque la valeur de la température témoin, pour un ?T = 50°C, est comprise
entre 250°C et 400°C. L?essai d?auto-échauffement n?est à réaliser que pour des stockages de grande
taille à température ambiante ou une utilisation du produit à des températures élevées.
L?oxyréactivtié d?un échantillon est faible lorsque la valeur de la température témoin, pour un ?T = 50°C
est supérieure à 400°C.
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Essais d?auto-échauffement en étuves isothermes (EN 15188)
PRINCIPE
L?essai consiste à déterminer la température critique d'auto-inflammation de volumes cubiques
croissants d'un combustible solide. Lorsque le volume des récipients cubiques augmente, la
température minimale d'auto-inflammation diminue et il est possible en théorie d'extrapoler jusqu'à un
volume de stockage plus important.
MODE OPERATOIRE
Pour cela, les échantillons sont placés à température ambiante dans des récipients de forme cubique
dont les parois sont formées par une toile métallique à mailles suffisamment fines pour éviter le
tamisage, mais qui ne freinent pas la diffusion d'oxygène. Le récipient est ensuite introduit à pression
atmosphérique dans une étuve isotherme ventilée à air chaud régulée à une température donnée. A
l'aide d'un thermocouple placé au centre de l'échantillon, on observe si la température de l'échantillon
se stabilise à la température de l?étuve, ou si elle s?élève rapidement.
Un nouvel essai est ensuite effectué à une température plus élevée ou plus basse suivant le résultat de
l?essai précédent, de façon à encadrer à 5°C près la température de l'étuve qui conduit à un auto-
échauffement de l?échantillon. Cette température est appelée température critique d'auto-échauffement.
En réalisant des essais sur différents volumes, il est possible de corréler la température d?auto-
échauffement à la dimension du stockage. En effet, les résultats des essais de stockage en étuve
isotherme peuvent être corrélés par une loi mathématique s?appuyant sur la théorie de l'auto-
échauffement pour des dimensions plus importantes que celles étudiées expérimentalement et/ou pour
des formes différentes. Ce calcul d'extrapolation fait appel notamment à l'hypothèse d'une libre diffusion
de l'oxygène de l'air dans le dépôt et à l'échange thermique par conduction dans le matériau. La
dimension critique est déterminée pour un stockage de forme cubique cylindrique ou plan. En effet, le
calcul intègre un facteur dépendant de la forme du stockage.
Essai en four tubulaire de 150°C à 400°C sous balayage d?air
Le four tubulaire de l'Ineris permet d'étudier, sous atmosphère contrôlée, la dégradation thermique
d?échantillons solides ou liquides. Les gaz et les particules émis lors de la combustion sont piégés et
analysés. [Norme de référence : NF X 70-100-2].
Cf Fiche Ineris :
https://prestations.ineris.fr/fr/solutions-thematiques/substances-produits/proprietes-
dangers/caracterisation-degradation-thermique
https://prestations.ineris.fr/fr/solutions-thematiques/substances-produits/proprietes-dangers/caracterisation-degradation-thermique
https://prestations.ineris.fr/fr/solutions-thematiques/substances-produits/proprietes-dangers/caracterisation-degradation-thermique
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ANNEXE 4
-
Présentation de l?outil de calcul
phénoménologique EFFEX
3 pages
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Présentation de l?outil de calcul phénoménologique EFFEX
L?explosion de de gaz ou de poussières, confinée ou partiellement confinée, peut être modélisée avec
l?outil phénoménologique EFFEX. Il permet de calculer la montée en pression dans le confinement en
prenant en compte la réactivité du mélange inflammable gazeux, la géométrie et la présence
d?ouvertures permanentes.
La situation courante correspond à une fuite de gaz inflammable dans un espace confiné ou
partiellement confiné.
Un mélange inflammable peut être formé dans un espace confiné. Sa taille, sa composition et son
agitation interne (turbulence) dépendent du type de fuite et des caractéristiques géométriques du
confinement. Si une source d?inflammation est située dans la zone inflammable du nuage, celui-ci
s?allume et une flamme se propage depuis le point d?inflammation. La figure 10 ci-après montre le
développement de la flamme dans le confinement.
C1 : Développement de la flamme dans le confinement
La flamme se développe sphériquement autour du point d?inflammation. Sur son chemin, la flamme
transforme les gaz frais en gaz brûlés chauds. Leur température typique est comprise entre 1 000°C et
2 000°C, ce qui aboutit à une large expansion des gaz brûlés.
L?excédent de volume produit par unité de temps est proportionnel à :
- La surface de flamme,
- Le taux de combustion soit la consommation volumique par unité de temps des gaz frais par
élément de surface de flamme. La dimension de ce paramètre est une vitesse et cette dernière
est souvent appelée vitesse de combustion.
- Le taux d?expansion thermique.
Cette production de gaz brûlés est responsable de la montée en pression dans le confinement. La
vitesse de montée en pression augmente quand ces trois paramètres augmentent.
Le taux d?expansion thermique est une propriété du mélange gazeux qui peut être prédite. Il dépend
uniquement du dégagement de chaleur lié à la réaction de combustion. Il peut être exprimé par
application de la première loi de thermodynamique :
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? =
?0
??
?
??
?0
=
??????
??. ?0
+ 1
Où :
- ?Hcomb est l?enthalpie de réaction (combustion) à T0 par unité de masse du mélange gazeux.
- T0 et Tb sont respectivement les températures des gaz frais et des gaz brûlés pour une réaction
adiabatique
- ?0 et ?b sont respectivement les masses volumiques des gaz frais et gaz brûlés.
- cp est la capacité calorifique massique moyenne du mélange de gaz brûlés.
C?est un paramètre intrinsèque qui dépend uniquement de la composition du mélange et non pas de la
façon dont la flamme se propage. Sa valeur est comprise entre 5 et 8 pour des hydrocarbures typiques
mélangés à l?air.
La vitesse de combustion dépend à la fois de la nature du mélange et de la vitesse à laquelle la chaleur
est transférée des gaz brûlés aux gaz frais. En effet, les produits de combustion transmettent la chaleur
aux gaz frais par diffusion thermique. La combustion peut être décrite par les lois thermocinétiques de
type lois d?Arrhenius. Leur paramétrage dépend uniquement des propriétés intrinsèques du mélange
tout comme la vitesse de combustion, aussi connue comme la vitesse de flamme laminaire, Slad. Cette
dernière dépend de la concentration en produit inflammable au sein du nuage. Pour un gaz, cette vitesse
est maximale pour un mélange en proportions stoechiométriques et décroit dès lors qu?on se rapproche
des limites du domaine d?inflammabilité.
Les mécanismes de turbulence, toujours présents, ont un impact favorable sur la diffusion de la chaleur
vers les gaz frais et augmente la vitesse de flamme. La surface de flamme subit des changements
durant sa propagation. Dans un volume relativement allongé, et en cas d?inflammation centrale, la
flamme se développe initialement sphériquement jusqu?à atteinte des parois. A leur contact, des
portions de surface de flamme disparaissent et restent deux éléments de flamme séparés se propageant
dans des directions opposées. Le front de flamme peut également devenir cellulaire ou courbés vers
les gaz brûlés sous l?effet des instabilités de Darrieus-Landau. L?allongement du confinement peut jouer
sur ces effets physiques.
Dans tous les cas, la surface de flamme maximale dépend des dimensions du confinement et
particulièrement de sa section transverse.
C2 : Schéma représentant les mécanismes de turbulence
L?évolution de pression dans le confinement est considérée homogène et uniquement liée à l?expansion
des produits de combustion. Cette hypothèse forte est valide si le taux d?allongement du confinement
(ratio entre la longueur de confinement et son diamètre hydraulique) est inférieur à 20.
Injection d?air
Tourbillon
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Sur son trajet, la flame convertit les gaz frais en gaz brûlés. On suppose également que ces deux zones
évoluent de manière isentropique. Avec une loi d?état des gaz parfaits, les principales équations
s?écrivent :
d/dt[?P(t)]/?P(t) = ?.Qfl(t) /V
Qfl(t) = St.Af(t).(?-1).T0/T
Où
? ?P(t) est la surpression interne à l?instant tis the internal overpressure at the time t.
? St est la vitesse de flamme turbulente.
? Qfl(t) est le taux de production de volume en excès lié à la conversion des gaz frais en gaz
brûlés.
? V est le volume d?enceinte.
? T est la température des gaz frais à l?instant t.
? Af(t) est la surface de flame à l?instant t.
? ? est le ratio des capacités calorifiques.
Le confinement peut être ouvert à l?atmosphère à travers des ouvertures permanentes ou créées par
l?explosion si la pression interne, liée à la production de gaz brulés dépasse la pression de rupture. Dans
ce cas, une ouverture est progressivement créée par la poussée de la surface fragile hors de son point
d?accroche. Le taux d?ouverture est limité par les effets d?inertie. Dans EFFEX, une équation prenant en
compte la balistique est résolue afin de quantifier l?évolution temporelle de l?ouverture de la surface. Un
paramètre clé pour quantifier les effets d?inertie est la surface massique de la surface fragile. Il peut être
évalué comme le produit de la masse volumique de l?élément et de son épaisseur.
Lorsque le confinement est ouvert à l?atmosphère, le débit de fuite à l?extérieur est non nul et s?écrit :
Qfuite(t)= -Cd.As.f[?P(t)]
Où
? Qfuite(t) est le débit volumique à travers les orifices.
? Cd est le coefficient de décharge.
? As est la surface des orifices.
? f[?P(t)] est une fonction qui dépend de la différence entre la pression interne et la pression
externe. Elle rend compte des effets de compressibilité de l?air. (Pour des faibles écarts de
pression, f[?P(t)] =?(2.?P/?)).
Institut national de l?environnement industriel et des risques
Parc technologique Alata ? BP 2 ? F-60550 Verneuil-en-Halatte
03 44 55 66 77 ? ineris@ineris.fr ? www.ineris.fr
mailto:ineris@ineris.fr
http://www.ineris.fr/
P a g e 35 | 35
Bureau d?enquêtes et d?Analyses
sur les Risques Industriels
MTE / IGEDD / BEA-RI
Tour Séquoïa
92055 La Défense Cedex
+33 1 40 81 21 22
bea-ri.igedd@developpement-durable.gouv.fr
https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/bea-ri-r549.html
(ATTENTION: OPTION es en béton armé et sur les parois des cellules, tel qu?indiqué
Figure 7. Notons la présence de deux poutres, référencées N754 et N755, reliant, respectivement, la
cellule C20 à la C21 et la C20 à la C19.
Figure 7 : Disposition des poutres en béton armé (en rouge) sur lesquelles reposent les dalles
du plancher sur cellules
Le plancher sur chaque cellule se compose de plusieurs dalles dont l?une est fragilisée afin de faire
office de surface soufflable visant à garantir l?intégrité du reste de la structure en cas d?explosion.
La dalle fragilisée faisant office de surface soufflable de la cellule C20 accidentée est située au centre
du plancher sur cellule, comme indiqué Figure 8. En l?absence de plus de détails, il est impossible de
savoir avec certitude si cette dalle est simplement posée ou fixée sur 2 ou 4 côtés aux autres dalles du
plancher. Les deux hypothèses seront considérées dans la suite de ce rapport.
Poutre N755
Poutre N754
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Figure 8 : Disposition des dalles de la cellule C20 accidentée, avec la dalle fragilisée faisant office
de surface soufflable au centre
Il convient de noter que les dispositions des dalles sur cellules indiquées Figure 7 et Figure 8 ne sont
pas les mêmes. Après analyse des photographies transmises à l?Ineris et en prenant en compte les
dates de réalisation des plans, l?Institut considère pour la suite de l?analyse le plan de Figure 8, plus
récent (en date du 13 juillet 1989, contre 4 juillet 1989 pour le plan Figure 7).
3.2.2.2.2 Description des principaux dégâts du silo
Conformément au principe retenu par l?Ineris pour réaliser l?analyse de la pression de rupture de divers
éléments, une analyse des dégâts a été menée sur la base des photographies et documents transmis
afin de déterminer les composants totalement endommagés, ceux ayant subi des déformations
plastiques et, enfin, ceux n?ayant pas subi de déformation.
Pour rappel, d?après les différentes informations (notamment photographiques) transmises par le BEA-
RI à l?Ineris, les dégâts relevés se situent en partie haute du silo, au niveau du plancher et de la galerie
sur cellules. La tour de manutention, le fût des différentes cellules et la partie basse du silo, au niveau
de la galerie sous cellules, ne sembleraient pas présenter de dégâts visuels particuliers.
Les photographies post-accidentelles prises après retrait des éléments de bardages de la galerie sur
cellules ont montré que le plancher sur la cellule accidentée C20 et sur les cellules C19 et C21 voisines
présentait des dégâts importants avec de nombreuses fissurations et ruptures. Les éléments de dalles
semblent s'être soulevés et être retombés sur place. Les lignes de fissuration du plancher sur cellules
supposées par l?Ineris après analyse des documents lui ayant été transmis sont représentées sur la
Figure 10 ci-dessous. Les poutres N754 et N755, sur lesquelles reposent ces éléments de plancher, se
sont rompues au niveau de leurs liaisons avec les cellules C19, C20 et C21. À noter qu?il ne semble
pas y avoir eu de projection des dalles de toiture.
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Figure 9 : Prise de vue du sommet du silo après l?accident du 6 janvier 2023 et le retrait des éléments
de bardages de la galerie sur cellules
Figure 10 : Lignes de fissuration du plancher sur la cellule C20 ? Lignes rouges : les lignes
de fissurations supposées par l?Ineris ; rectangle bleu : positionnement de la dalle fragilisée faisant
office de surface soufflable ; rond rouge : point de rupture des poutres N754 et N755
(liaison entre les poutres et la cellule C20)
3.2.2.2.3 Estimation des pressions de rupture de divers éléments constitutifs du silo
Sur la base des analyses présentées ci-dessus, l?Ineris a évalué la pression de rupture à l?explosion de
différents éléments constitutifs jugés pertinents du silo. Ces estimations sont présentées au Tableau 4.
Cellule C20 Cellule C19 Cellule C21
Cellule C20 Cellule C19 Cellule C21
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Élément Dimensions
(mm)
Pression de rupture
estimée
Information sur la
pression appliquée
Fût en béton armé de la cellule (pas
de dégâts constatés)
36 000 en
hauteur x
8 000 en
diamètre x 170
en épaisseur
1 bar Inférieure à 1 bar
Dalle n°7
dite
« fragilisée »
(rupture de
la dalle)
Hypothèse : dalle
supposée simplement
posée 3 000 x 2 550 x
140
35 mbar
Supérieure à
35 mbar
Hypothèse : dalle
supposée fixée sur
2 ou 4 côtés
Entre 100 et 250
mbar
Supérieure à
100 mbar
Dalles dites « non fragilisées » ayant
rompu (rupture des dalles) ? (autres
dalles)
2525 en
largeur x 140
Entre 100 et 250
mbar
Supérieure à
100 mbar
Tableau 4 : Niveaux de surpression estimés pour certains éléments de la cellule C20
3.2.2.3 Modélisation d?une explosion primaire en cellule C20 avec inflammation du fond de cellule
Suite à une demande du BEA-RI en date du 23 juin 2023, l?Ineris a, tout d?abord, étudié si, en cas
d?explosion primaire en cellule C20, la dalle dite « fragilisée » du plancher de la cellule, considérée
comme seule surface soufflable, était dimensionnée afin de garantir l?intégrité structurelle du reste de
la cellule (fût en béton armé et dalles « non fragilisée).
L?Ineris a, ensuite, mené une analyse afin d?étudier si une explosion primaire en cellule C20 avec
inflammation en fond de cellule était cohérente avec les dégâts observés.
3.2.2.3.1 Modélisation d?une explosion primaire en cellule C20 avec comme seule surface soufflable
la dalle fragilisée
Un premier calcul a été réalisé à l?aide du logiciel EFFEX (présenté en annexe 4) afin d?évaluer si, en
cas d?explosion primaire en cellule C20, la dalle dite « fragilisée » était correctement dimensionnée afin
de garantir l?intégrité structurelle du reste de la cellule (fût en béton armé et dalles « non fragilisée).
Pour ce faire, l?Ineris a évalué la pression résiduelle dans ce volume en considérant, comme seule
surface soufflable, la dalle fragilisée. Cette valeur a ensuite été comparée avec les ordres de grandeurs
de pressions de rupture des autres dalles du plancher présentées dans le Tableau 4.
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Les caractéristiques bâtimentaires considérées dans la modélisation sont les suivantes :
Localisation Dimensions Matériaux
Fût en béton armé de la cellule Hauteur : 36 m / Diamètre :
8 m
Béton armé
Dalle n°7 dite « fragilisée » Longueur : 3 m / Largeur :
2,55 m
Épaisseur : 0,14 m
Béton armé
Surface : 7,50 m² / Périmètre :
11 m
Dalles dites « non fragilisées » Largeur : 2,525 m / Épaisseur :
0,14 m
Béton armé
Surface ouverte permanant Surface : 0,75 m² -
Tableau 5 : Caractéristiques bâtimentaires de la cellule C20
Deux hypothèses ont été considérées et étudiées pour la pression de rupture des dalles « fragilisées »
dont la masse surfacique a été estimé à 350 kg/m3 :
- Cas dalle fragilisée simplement posée : 35 mbar ;
- Cas dalle fragilisée fixée sur 2 ou 4 côtés : entre 100 et 250 mbar.
Considérant une inflammation en fond de cellule, les hypothèses complémentaires suivantes ont, par
ailleurs, été considérées :
- Longueur de propagation de flamme : 40 m ;
- Taux d?expansion thermique : 5 ;
- Vitesse de flamme turbulente : 2 m/s.
À noter que les valeurs de taux d?expansion thermique et de vitesse de flamme dépendent des
caractéristiques de l?atmosphère inflammable à l?origine de l?explosion. Dans le cas de l?accident du
6 janvier 2023, et comme détaillé au chapitre 3.2.1, on retient l?hypothèse que c?est une explosion de
poussière qui génère les effets de pression observés. Rappelons qu?il n?est pas exclu que la mise en
suspension des poussières, prérequis nécessaire à leur explosion, puisse provenir d?une explosion de
gaz de pyrolyse.
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Les profils temporels de pression calculés dans la cellule sont les suivants.
Figure 11 : Profils temporels de pression résiduelle dans le volume de la cellule pour une explosion
primaire en ne considérant que la rupture de la dalle fragilisée
D?après la Figure 11, les pressions résiduelles obtenues dans le volume de la cellule sont les suivantes :
- Hypothèse dalle fragilisée simplement posée (pression d?ouverture fixée à 35 mbar) : pression
résiduelle dans la cellule de l?ordre de 200 mbar ;
- Hypothèse dalle fragilisée fixée sur 2 ou 4 côtés (pression d?ouverture comprise entre 100 et
250 mbar) : pression résiduelle comprise entre 210 mbar et 285 mbar.
Les valeurs de pressions résiduelles obtenues pour les différentes hypothèses en termes de pressions
d?ouverture de la dalle fragilisée sont donc du même ordre de grandeur. Elles s?avèrent, par ailleurs, du
même ordre de grandeur que les valeurs de tenue des dalles non fragilisées présentées dans
le Tableau 4.
Ainsi, si le dimensionnement de la dalle soufflable a permis d?éviter la rupture de la paroi verticale de la
cellule lors d?une explosion interne, il semble, à lui seul, insuffisant pour empêcher la rupture des autres
dalles.
3.2.2.3.2 Modélisation d?une explosion primaire en cellule C20 : cohérence entre une inflammation en
fond de cellule et les dégâts observés
Une modélisation d?explosion primaire en cellule C20 a été réalisée à l?aide du logiciel EFFEX, les
valeurs de pressions résiduelles obtenues étant, ensuite, comparées aux valeurs de pression de rupture
estimées présentées dans le Tableau 4.
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Les caractéristiques bâtimentaires considérées dans la modélisation sont les suivantes :
Localisation Dimensions Matériaux Prupt6 Masse
surfacique
kg/m²
Fût en béton
armé de la
cellule C20
Hauteur : 36 m
Diamètre : 8 m
Béton armé > 1 bar -
Dalle n°7 dite
« fragilisée »
Longueur : 3 m
Largeur : 2,55 m
Épaisseur : 0,14 m
Béton armé :
Surface : 7,50 m²
Périmètre : 11 m
Entre 100 et 250 mbar 350
Dalles dites
« non
fragilisées »
Largeur : 2,525 m
Épaisseur : 0,14 m
Béton armé :
Surface : 20 m²
Périmètre : 39 m
Entre 100 et 250 mbar 350
Surface ouverte
permanant
Surface : 0,75 m² - - -
Tableau 6 : Caractéristiques bâtimentaires de la cellule C20, en considérant la rupture des dalles
non fragilisées
L?ensemble des parois sont considérées dans cette modélisation comme potentiellement soufflables
avec, comme pression de rupture, les pressions rappelées dans le tableau ci-dessus.
Considérant une inflammation en fond de cellule, les hypothèses complémentaires suivantes ont, par
ailleurs, été considérées :
- Longueur de propagation de flamme : 40 m ;
- Taux d?expansion thermique : 5 ;
- Vitesse de flamme turbulente : 2 m/s.
Les valeurs de taux d?expansion thermique et de vitesse de flamme dépendent des caractéristiques de
l?atmosphère inflammable à l?origine de l?explosion. Dans le cas de l?accident du 6 janvier 2023, et
comme détaillé au chapitre 3.2.1, on retient l?hypothèse que c?est une explosion de poussière qui génère
les effets de pression observés. Rappelons qu?il n?est pas exclu que la mise en suspension des
poussières, prérequis nécessaire à leur explosion, puisse provenir d?une explosion de gaz de pyrolyse.
Les profils temporels de pression calculés dans la cellule sont les suivants.
6 Valeurs issues du Tableau 4
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Figure 12 : Profils temporels de pression résiduelle dans le volume de la cellule pour une explosion
primaire en considérant une rupture des mêmes dalles que lors de l?accident
D?après la Figure 12, les pressions résiduelles obtenues dans le volume de la cellule sont de l?ordre de
170 mbar à 260 mbar. Ces pressions sont supérieures aux pressions de tenue de la dalle fragilisée et
des autres dalles ayant rompu lors de l?accident du 6 janvier 2023, et dont les valeurs sont présentées
dans le Tableau 4, tout en restant du même ordre de grandeur. Elles restent, par ailleurs, inférieures à
la pression de tenue du fût en béton armé de la cellule.
Ces modélisations indiquent qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts
observés. Par ailleurs, bien qu?il soit difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule,
elles montrent également qu?il n?y a pas de contradiction entre un scénario d?inflammation en fond de
cellule et les dégâts constatés.
Remarque : les valeurs indiquées ci-dessus (de pression de rupture, de pression résiduelle dans le
volume suite à l?explosion, etc.) sont à considérer comme des ordres de grandeur et se présentent
comme tels. En effet, les plans étant incomplets ou, parfois, contradictoires, nous avons dû émettre des
hypothèses concernant les caractéristiques des différentes dalles de la cellule (sur les ferraillages, sur
certaines dimensions, etc.).
3.2.2.3.3 Conclusion des différentes modélisations effectuées
Les différentes modélisations réalisées indiquent :
? Que la dalle fragilisée était insuffisamment dimensionnée pour empêcher la rupture des
dalles non fragilisée en cas d?explosion primaire dans la cellule ;
? Qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts observés et,
bien qu?il soit difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule, qu?il
n?y a pas de contradiction entre un scénario d?inflammation en fond de cellule et les
dégâts constatés.
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3.2.3 Détermination globale de l?énergie d?explosion produite et de la quantité de
poussière mise en jeu
L?énergie de l?explosion peut être estimée sur la base des calculs EFFEX menés en partie précédente,
dans le paragraphe 3.2.2.3.2. Pour parvenir à la pression maximale d?explosion, il est nécessaire de
brûler une masse d?atmosphère inflammable minimale de l?ordre de 200 kg. L?énergie de combustion
peut être estimée par l?expression suivante, tirée du rapport Omega sur les explosions de poussières7 :
?????? = ???0( ? ? 1)
En assimilant le mélange inflammable à de l?air, on a ??=1004 J/kg/K. Pour ?0 = 300? et ? = 5, on
obtient ??????=1,2 MJ/kg. Ainsi, l?énergie globale d?explosion conduisant au niveau de pression
résiduelle évaluée précédemment dans la cellule C20 et associée au niveau de dégâts constatés
est au minimum de l?ordre de 240 MJ.
En faisant l?hypothèse d?une concentration de poussière de 0,5 kg/m3, ce qui représente le maximum
de réactivité pour des poussières d?origine agricole et peu denses comme la luzerne, cette énergie mise
en jeu correspond à environ 60 kg de poussière en suspension, ce qui est très peu par rapport à la taille
du silo (seulement 6 % du volume du silo). Toutefois il s?agit d?une valeur minimale, la quantité de
poussière mise en jeu dans l?explosion pourrait être beaucoup plus élevée.
Le fait qu?il n?y ait aucune flamme visible à l?extérieur, alors que l?inflammation s?est vraisemblablement
produite au fond du silo donc loin des évents, suggère que l?atmosphère explosive ne remplissait pas
la totalité du silo. A titre indicatif, une atmosphère explosive remplissant la moitié du silo correspondrait
à 500 kg de poussière en suspension, soit un dépôt de poussière de l?ordre de 1 mm uniformément
réparti sur la paroi du silo8. Donc, même s?il est difficile de déterminer précisément la quantité de
poussière impliquée dans l?explosion, on peut conclure qu?une quantité assez faible, de l?ordre de
quelques dizaines de kg, était suffisante pour produire les effets observés, mais que la quantité
réellement présente était certainement largement plus importante.
7 C. Proust (2006) Rapport Omega 21 : Explosion de poussières. Phénoménologie et modélisation des effets.
Téléchargeable sur www.ineris.fr
8 Hypothèse de calcul : surface interne du silo 1000 m3, densité de la luzerne en poudre non compactée 500 kg/m3.
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3.4 Revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur
la gestion de l?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de
bâtissage sur les parois
Ce chapitre apporte les éléments de réponse à la question n°3 de la saisine du BEA-RI relative à la
revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur la gestion d?auto-échauffement
et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois.
Après des sollicitations et contacts auprès des céréaliers et pré-information auprès du
BEA-RI, l?Ineris n?a pas reçu de confirmation de rendez-vous de la profession pour échanger sur ses
bonnes pratiques de la gestion d?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage
sur les parois. Ainsi, l?Ineris a exprimé auprès du BEA-RI ne pas avoir pu collecter des informations pour
pouvoir répondre spécifiquement sur la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois,
ce qui a été accepté par le BEA-RI.
3.4.1 Retour d?expérience et phénomènes dangereux associés aux installations de
mise en oeuvre de luzerne
Depuis de nombreuses années, les activités de culture et de production animales9 représentent près de
10 % de l?accidentologie française des ICPE recensée par le BARPI.
Entre 2009 et 2021, l?étude de 1 259 événements des secteurs de la culture et production animale (hors
sites agroalimentaires et méthanisation agricole) révèle deux phénomènes dangereux récurrents :
l?incendie (85 % des évènements) et les rejets de matières dangereuses et/ou polluantes (23,2 % des
évènements) ; et de façon moindres les explosions (3,6 % des évènements) et autres typologies10
(5,9 % des évènements). L?analyse des perturbations et causes profondes permet au BARPI d?en tirer
des enseignements et de rappeler certaines bonnes pratiques.
9 Accidentologie dans les activités de culture et production animale - La référence du retour d'expérience sur
accidents technologiques (developpement-durable.gouv.fr)
10 Notamment des asphyxies d?animaux, des accidents de personnes, mortels ou avec blessures, des inondations.
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/synthese/accidentologie-dans-les-activites-de-culture-et-production-animale/
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/synthese/accidentologie-dans-les-activites-de-culture-et-production-animale/
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L?interrogation de la base ARIA du BARPI sur l?accidentologie associée à la luzerne11 recense
81 événements, notamment :
- Incendie d?installations de fabrication de pellets de luzerne,
- Incendie de stockage de balles de luzerne,
- Incendie suivi d?une explosion dans une installation de déshydratation de luzerne,
- Incendie silo de stockage de pellets de luzerne,
- Incendie dans un cyclone de séchage de balles de luzerne,
- Auto-échauffement puis Incendie d?un entrepôt de stockage de luzerne,
- Incendie au niveau d'un refroidisseur sur une ligne de granulation d'une usine de granulés
de luzerne,
- Auto-échauffement puis incendie de granulés de luzerne stockés dans une cellule de silo,
- Etc.
La luzerne brute contient environ 15 à 20 % d?humidité, environ 30 % de cellulose, environ 30 % de
protéine (M.A.T. : Matière Azotée Totale), environ 10 % de matières grasses et de vitamines et
d?éléments minéraux et autres traces de constituants divers.
La luzerne déshydratée contient environ 10 % d?humidité, environ 30 % de cellulose, environ
30 % de protéine (M.A.T. : Matière Azotée Totale), environ 15 % de matières grasses et de vitamines
et d?éléments minéraux et autres traces de constituants divers.
Le retour d?expérience met en évidence de nombreux départs de feu au niveau des stockages de
luzerne. Ceux-ci proviennent notamment de phénomènes d?auto-échauffement de luzerne ou bien de
l?introduction de particules incandescentes lors du séchage, provoquant une inflammation.
Le retour d?expérience (Incendie d?un silo de granulés de luzerne à Saint Ouen l?Aumône, février 1998)
sur des feux dans des installations de stockage de produits agroalimentaires montre que les
conséquences en termes de flux thermiques restent a priori limitées12.
Les principaux constituants du panache de fumées d?incendie peu ventilé de stockage en silo de luzerne
sont le CO, le CO2, des COV et de la vapeur d?eau et possiblement de l?ammoniac dû à la décomposition
thermique des matières azotées totales.
Les émanations gazeuses liées à la combustion incomplète peuvent être toxiques en champ proche
(distance de l?ordre de 100 m), notamment à cause de la présence de concentrations de CO, de CO2,
des COV et en ammoniac dans le panache de fumées.
D?après les informations et le retour d?expérience identifié par l?Ineris sur la réactivité de la luzerne, le
retour d?expérience de différentes installations de stockage, de fabrication, de séchage et de
déshydratation de luzerne permet de présenter le constat suivant :
- Prise de conscience des professionnels que ces activités présentent un risque d?incendie et
d?explosion,
- Recrudescence de l?accidentologie liée à l?incendie de stockage de luzerne notamment en période
estivale où la température de l?air élevée peut activer la cinétique d?auto-échauffement.
11 https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/?s=luzerne&fwp_recherche=luzerne&fwp_paged=2
12 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Tome 1.
https://www.calameo.com/read/005148363a294056c31ef
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/?s=luzerne&fwp_recherche=luzerne&fwp_paged=2
https://www.calameo.com/read/005148363a294056c31ef
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Les installations de stockage de luzerne peuvent présenter des risques d?incendie et d?explosion :
- en marche normale,
- durant les phases transitoires de démarrage et d?arrêt,
- en période d?arrêt proprement dit,
- en cas de dysfonctionnement.
En ce qui concerne la réactivité de solides combustibles tels que la luzerne en phase de stockage,
deux principaux phénomènes sont envisagés13, 14 :
- un phénomène d?explosion de poussière lors du chargement gravitaire ou pneumatique de silos de
stockage,
- un phénomène d?auto-échauffement correspondant à une oxydation de la luzerne par l?oxygène de
l?air (feu couvant à combustion lente) ou initialement activité par une activité de fermentation
biologique par une teneur en humidité supérieure à 25 % de la luzerne :
o un feu qui couve peut se poursuivre pendant une longue période avant d'être détecté,
o la détection précoce nécessite une mesure fiable de la teneur en CO à des teneurs faibles
(quelques centaines de ppm),
o la propagation du noyau de pyrolyse est lent et préférentiellement vers le bas du silo
(possibilité d?entrée d?air via la vanne de vidange non étanche),
o la migration vers la partie supérieure des gaz de pyrolyse est lente.
Les incidents survenus depuis la mise en service des installations de stockage de luzerne concernent
des aspects d?auto-échauffement.
Cela s?explique pour les raisons multiples suivantes :
- la luzerne est une substance combustible et est réactive à l?oxydation chimique. Les températures
de la luzerne dans les silos de stockage peuvent dépasser les températures critiques d?auto-
échauffement du fait des dimensions de stockage des silos de luzerne,
- des phénomènes de fermentation biologique (liée à un défaut qualité du produit par une teneur en
humidité élevée ou une introduction accidentelle d?eau de pluie ou d?eau de lavage dans les silos)
peuvent augmenter la température de la luzerne jusqu?à 75°C environ et passer le relais au
phénomène d?auto-échauffement du produit et faciliter ainsi l?atteinte de sa température critique,
- le système de détection de CO dans les silos de stockage doit être suffisamment précoce pour
détecter convenablement un phénomène d?auto-échauffement : de plus, les orifices de vidange des
silos (vis planétaires, écluse rotative de vidange) doivent être étanches au passage de l?air afin de
limiter les entrées d?air et ainsi limiter les démarrages d?auto-échauffement dans la partie inférieure
des silos.
3.4.2 Revue des recommandations sur la gestion d?auto-échauffement.
Les techniques d?intervention relative aux installations de stockage de grains en cas d?explosion de
poussières et d?incendie sont bien connues à la lumière du retour d?expérience et sont définies au § IV
du guide de référence rédigé par les céréaliers15.
13 Méthodes pour l?évaluation et la prévention des risques incidentels (DRA 35 ? rapport Omega11) Connaissance
des phénomènes d?auto-échauffement des solides combustibles
(N°Ref INERIS DRA ? 2005 ? 46055 Février 2005) : http://www.ineris.fr/centredoc/omega11web.pdf.
14 Safety aspects of solid biomass: Storage, transportation and feeding, Jaap Koppejan, IEA ? Bioenergy Task 32.
15 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Les principaux éléments à
appréhender en cas de situations accidentelles. Tome 2. https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
http://www.ineris.fr/centredoc/omega11web.pdf
https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
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La gestion de la prévention et de la protection du risque d?auto-échauffement avancé ou
d?auto-inflammation des silos de stockage peut s?appuyer sur les principes suivants :
- Optimiser la mise en place de la surveillance de la concentration de la teneur en CO dans les ciels
gazeux des silos de stockage et utiliser avec parcimonie le transilage ;
- Favoriser le suivi de la mesure de concentration de CO dans le ciel de chaque silo de stockage, ou
par défaut, par groupe de silo (actuellement les ciels des silos de stockage communiquent entre
eux et cela constitue un volume d?air qui aurait un effet de dilution de la concentration de CO en cas
de début d?auto-échauffement dans un silo) ;
- S?appuyer sur les caractéristiques de suivi de la teneur en CO et en température indiquées dans le
Tableau 6 ci-après pour la gestion de la prévention des phénomènes d?auto-échauffement et en
cas de nécessité privilégier la vidange au plus tôt du silo en cas de suspicion ;
- Envisager de pouvoir inerter les ciels des silos de stockage par un gaz inerte.
3.4.2.1 Action sur la mesure de la température de la luzerne et sur la mesure du taux de CO
En termes de bonnes pratiques de prévention de phénomène d?auto-échauffement notamment dans
des silos de stockage, il convient de piloter l?activation de l?inertage du ciel gazeux du silo de
stockage :
- assurer le suivi de l?élévation de la concentration de CO (tout en s?assurant que la plage de mesure
de CO soit entre 0 et 5 000 ppm) puis il convient de poursuivre la stratégie de lutte par un cycle
d?inertage en fond du silo. La mesure du taux de CO dans le ciel du silo permet de connaître la
présence et l'évolution d?un phénomène d?auto-échauffement de luzerne (plus le taux de CO dans
le ciel gazeux est élevé, plus l?évolution du feu est importante) et de prévenir le risque encouru par
les intervenants, le personnel et la population,
- assurer le suivi de la température (sonde de température avec une plage de mesure de 0°C à
500°C) de la luzerne dans la partie supérieure et la partie inférieure du silo, zones où des entrées
d?air sont possibles (partie ciel gazeux du silo et circuit de vidange en partie basse où des vannes
de vidange ne sont pas systématiquement étanches),
- utiliser les données des sondes de température réparties dans le stockage notamment à 1 m
au-dessous du niveau supérieur du niveau du combustible et à 1 m au-dessus du fond du stockage
(au-dessus de la zone de vidange) car les arrivées d'air se font à ces deux niveaux. Des sondes de
température situées à différents niveaux peuvent renseigner notamment au début du sinistre sur le
volume de produit en combustion et sur l'étendue de la combustion dans le volume (cartographie
du sinistre). Néanmoins, la luzerne étant un bon isolant thermique, celles-ci ne renseignent vraiment
que sur une distance d?environ 50 cm et surtout au début du sinistre. Par exemple, une guirlande
de quatre sondes de température actuellement réparties dans l?axe des silos ne permet pas de
fiabiliser la détection d?auto-échauffement et d?auto-inflammation dans les silos,
- assurer un plan de maintenance préventive et corrective des sondes CO et des sondes de
température situées dans le silo de stockage de luzerne ; le ciel de silo de stockage doit être équipé
d?un système de détection CO avec une gamme de mesure de 0 ppm à 10 000 ppm pour que le
CO issu du phénomène d?auto-échauffement soit mieux détecté,
- mettre en place des vannes de vidange en partie inférieure du silo afin de maîtriser des entrées
d?air (notamment en cas de vent, etc.) pouvant migrer dans le silo et favoriser des phénomènes
d?auto-échauffement de luzerne,
- utiliser une caméra infra-rouge mobile pour visualiser la zone de combustion du silo la plus chaude
et pour suivre l'évolution de cette zone en phase d?auto-échauffement avancé ou en phase d?auto-
combustion.
L?inertage est fonction de la teneur en CO et du seuil de température dans l?enceinte de stockage. Les
seuils et actions de sécurité sont indiqués dans le Tableau 6 suivant.
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Seuil CO (ppm)
Seuil de température de la luzerne
(°C)
Action de sécurité
Silo de stockage de luzerne
Seuil 1 :
Tp < 50°C
et
CO = 250 ppm
Alarme en supervision, arrêt de l?alimentation du silo et
suivi par l?opérateur de l?évolution des capteurs Tp et CO.
Seuil 2 :
Tp > 55°C
et
250 ppm < CO < 500 ppm
Alarme en supervision et appel hiérarchie et arrêt de
l?alimentation du silo.
Lancement manuel en supervision de l?inertage en partie
basse et dans le ciel gazeux du silo et suivi de l?inertage.
Si inertage efficace (Tp et CO stable) : Interdire la poursuite
du remplissage du silo et prévoir la vidange du silo.
Si inertage non efficace, vidange du silo dans les bennes
sous silo.
Seuil 3 :
Tp > 60°C
et
CO > 500 ppm
Alarme en supervision et arrêt de l?alimentation du silo de
stockage.
Lancement automatique de l?inertage en partie basse et
dans le ciel gazeux du silo et suivi de l?inertage.
Si inertage efficace (Tp et CO stable) : Interdire la poursuite
du remplissage du silo et prévoir la vidange du silo.
Si inertage non efficace, vidange du silo dans les bennes
sous silo et arrosage (en cas d?extraction sous silo
inefficace).
Seuil 4 :
Tp > 70°C
et
CO > 1 000 ppm
Prévenir la hiérarchie.
Vidange interdite.
Appel des pompiers.
Utiliser une caméra infra-rouge mobile pour visualiser la
zone de combustion la plus chaude du silo et pour suivre
l'évolution de cette zone.
Tableau 6 : Seuils et actions de sécurité liés à l?inertage de silo de stockage de luzerne
3.4.2.2 Action sur le transilage
Un cycle de transilage16 permet d?évacuer les calories générées par un phénomène d?auto-
échauffement naissant par un échange thermique avec l?air ambiant (par effet de ventilation de l?air via
une opération de transilage) mais n?est cependant pas efficace pour maîtriser un phénomène d?auto-
inflammation d?où l?importance de définir et de rédiger des tendances d?augmentation des valeurs en
CO et en température (ces critères de suivi des seuils dynamiques ne sont pas indiqués dans les
consignes écrites).
Le transilage ne peut être efficace si la différence de température entre la matière et l?air ambiant est
significatif (de l?ordre de la dizaine de degré) pour assurer une fonction de transfert de calorie. Le
transilage est une mesure de prévention principalement et historiquement utilisée dans la filière
céréalière (notamment du transilage en période nocturne).
16https://www.arvalis-
infos.fr/file/galleryelement/pj/fd/18/bd/af/stockage_n7_novembre_6615522081049930827.pdf
https://www.arvalis-infos.fr/file/galleryelement/pj/fd/18/bd/af/stockage_n7_novembre_6615522081049930827.pdf
https://www.arvalis-infos.fr/file/galleryelement/pj/fd/18/bd/af/stockage_n7_novembre_6615522081049930827.pdf
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Un système de refroidisseur type échangeur thermique pourrait être utilisé en amont de l?alimentation
du silo de transfert pour s?assurer que la luzerne soit suffisamment refroidie lors de son passage dans
un tel refroidisseur.
L?inertage17 est une mesure de prévention de formation d?atmosphère explosive air / poussière
pulvérulente et une mesure de lutte contre un auto-échauffement avancé / auto-inflammation d?un
stockage de luzerne.
Action sur l?inertage des silos de stockage
A priori, l?inertage est une solution technique lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : Feu à
coeur de silo de stockage et cellule de stockage fermée et étanche.
L?inertage consiste à injecter un gaz inerte (dioxyde de carbone ou azote) pour évacuer l?oxygène
disponible et les calories produites par l?incendie. L?objectif de l?inertage, est à la fois de stopper le feu
en le privant de comburant, et de prévenir le risque d?explosion. L?extinction d?un sinistre par injection
de gaz inerte dans les cellules concerne des produits tels que les céréales, la luzerne, les produits oléo-
protéagineux, etc.18
En préalable à la mise en oeuvre de l?inertage, les conditions suivantes doivent en général être
remplies :
- Le silo doit être suffisamment étanche même si des fuites résiduelles comme celles pouvant être
produites au voisinage des évents sont acceptables,
- Les points d?injection doivent être facilement accessibles et l?ensemble de la masse doit pouvoir
être balayé.
Important : L?ensemble de ces conditions doivent être réunies préalablement à tout sinistre où
l?exploitant doit disposer des procédures adaptées pour permettre une mise en oeuvre rapide et efficace
de ces mesures.
Le silo doit être suffisamment étanche (c?est à dire que le silo doit être suffisamment fermé) pour assurer
un inertage efficace
En cas de prise d?air dans le silo, celui-ci doit être colmaté le mieux possible (vérifier régulièrement
l?étanchéité de la vis planétaire en fond du silo béton).
Les silos fermés doivent être équipés pour l?injection efficace de l?azote. Les points d'injection doivent
être facilement accessibles et l'ensemble de la masse doit pouvoir être balayé.
Important : L?ensemble de ces conditions doivent être réunies préalablement à tout sinistre où
l?exploitant doit disposer des procédures adaptées pour permettre une mise en oeuvre rapide et efficace
de ces mesures.
La température à l'intérieur du silo doit pouvoir être contrôlée à demeure par des sondes de température
afin de suivre l'évolution de la combustion chimique.
La mesure de la teneur du CO dans le ciel du silo doit être assurée afin de contrôler l'évolution de
l'incendie avec du matériel adapté.
La mesure de la teneur en O2 dans le ciel du silo doit être assurée pour évaluer le risque d'explosion et
vérifier l'efficacité de l'inertage (pour que le ciel gazeux soit protégé contre le risque d?explosion le taux
d?oxygène doit être à 5 %).
17 Rapport technique (FD CEN/TR 15281 : Janvier 2023) sur la prévention et la protection contre les ATEX ? Guide
de l?inertage pour la prévention des explosions
18 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Les principaux éléments à
appréhender en cas de situations accidentelles. Tome 2. https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
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En termes de stratégie de lutte contre l?incendie de silos de stockage de luzerne, la mise en oeuvre de
l?inertage doit respecter un certain nombre de consignes19 :
- Prévoir à l'avance des piquages afin de pouvoir injecter le gaz inerte à distance sans intervention
directe sur l'appareil pendant l'incident. Le gaz doit être introduit le plus rapidement possible sans
mettre la poussière en suspension,
- Prévoir une quantité de gaz inerte suffisante avec un système d?inertage correctement dimensionné
tel indiqué dans des normes en vigueur ou documents techniques en vigueur20 21. Pour les
installations à haut risque, il faut prévoir un premier stockage opérationnel (de l?ordre de la dizaine
de m3 d?azote liquide) sur le site à tout moment pour inerter rapidement. On peut passer des accords
avec un fournisseur local de gaz inerte pour un approvisionnement rapide afin de maintenir
l'atmosphère inerte après épuisement du stock initial,
- Établir des seuils d'alarmes au point de vue échauffement, et des consignes d'intervention. Le
déclenchement du système d'inertage doit être néanmoins manuel,
- Éviter d?injecter du gaz inerte à l?état liquide pour limiter les risques électrostatiques, le givrage et
une expansion rapide du liquide,
- Avoir la possibilité d'isoler l'installation par silo afin de pouvoir suivre de façon précise la teneur en
CO dans le ciel de chaque silo : Chaque silo devant être le plus étanche possible pour limiter la
consommation du gaz inerte. Par défaut de pouvoir suivre la teneur en CO dans le ciel de chaque
silo, il est possible de suivre la teneur de la concentration du CO par ilot de quelques silos,
- Mesurer la teneur en O2 et en CO dans le ciel du silo pendant la phase d?inertage du ciel gazeux
du silo. Il n'est pas nécessaire d'installer un détecteur à demeure, mais il faut avoir la possibilité de
suivre l'évolution du taux d'oxygène en cas d'inertage,
- Inerter d'abord le ciel du silo pour éliminer le risque d'explosion, dans la masse du dépôt pour arrêter
la combustion. Lorsqu'on injecte le gaz inerte dans la masse, on chasse les gaz de pyrolyse
(inflammables dans le ciel). A noter que l'inertage peut arrêter l'évolution d'un feu couvant mais
n'agit pas toujours sur la température de la poussière ; la réaction peut redémarrer dès que
l'oxygène est introduit dans le système (pour lutter contre les feux couvants, le taux d?oxygène doit
être si possible inférieur à 5%). L?inertage à l?azote doit être injecté en deux points distincts :
o l?inertage du ciel du silo doit être réalisé en 1er en début d?opération afin de s?assurer que la
teneur en O2 n?atteigne pas 5 % (ceci pour éviter la formation d?une ATEX air / CO dans le ciel
du silo). La quantité d?azote à prévoir est de l'ordre de 1 Nm3 N2/m3 du volume du ciel utile du
silo22 ;
o puis, à la base du silo pour balayer l'ensemble de la masse stockée (l?opération d?inertage doit
débuter par une injection dans le ciel du silo puis dans le bas afin de compenser le tirage
thermique et éviter ainsi les entrées d'air dans le silo).
Lorsque l'injection d'azote dans le bas du silo aura commencé (seulement après avoir assuré l?inertage
dans le ciel du silo), il faudra probablement attendre quelques jours avant qu?un effet d'extinction puisse
être observé.
19 Connaître et faire face aux risqué des organismes stockeurs de la filière agricole. Tome 2 : Les principaux
éléments à appréhender en cas de situations incidentelles (Direction de la Sécurité Civile, COOP de France,
Groupama, INERIS, Fédération du Négoce Agricole, Synacomex).
20 NF EN ISO 20024 (Mars 2020) : Biocombustibles solides (Manutention et stockage en toute sécurité des granulés
de biocombustibles solides dans des applications commerciales et industrielles)
21 CEN/TR 15281 (2006) : Atmosphères explosibles - Guide de l'inertage pour la prévention des explosions (norme
actuellement en cours de révision Afnor/S66A)
22 Compléments du guide de l?état de l?art : Annexe B « Les procédures d?intervention dans les silos », INERIS
2008 (version 3).
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NB 1 : À titre indicatif, un débit d?injection de 5 à 10 kg N2/m2/heure23 à condition que le matériau à
préserver présente une porosité apparente de 50 %. Il est en outre possible d'augmenter le débit
d'injection (au moins pendant la phase initiale), la vitesse de remplissage augmentera en conséquence.
NB 2 24 : Lors d?un sinistre incendie « classique », l?eau se révèle généralement être l?agent d?extinction
le plus adéquat. Or, au regard du risque spécifique au phénomène d?auto-échauffement avancé / auto-
inflammation que présente l?activité de stockage de luzerne, cette eau pourra, en cas d?utilisation
excessive, représenter une problématique majeure voire irréversible (augmentation du poids en cellule
et risque d?éclatement du silo, manutention difficile, inertage éventuel délicat, etc.).
L?utilisation de l?eau pour maîtriser un sinistre ne devra être envisagée que dans le cadre de l?extinction
d?un feu directement accessible sur le produit. Dans ce cas précis, l?eau ne devra être utilisée qu?en très
faible quantité par jet diffusé sur le grain. En revanche, lors d?un feu au coeur dans un silo de stockage,
l?eau sera, à priori, à proscrire pour l?extinction.
Il convient alors d?utiliser de préférence de la mousse (moyen ou haut foisonnement) comme agent
d?extinction pour des phénomènes d?auto-combustion de luzerne dans les silos de stockage et de
transfert. De plus, il est recommandé d?équiper chaque silo de stockage ou de transfert d?un système
de canalisation (colonne sèche, ou autres dispositifs) permettant de faciliter l?injection de mousse en
cas de nécessité dans les silos de stockage et de transfert.
23 Silo Fires : Fire extinguishing and preventive and preparatory measures, Henry Persson, MSB (Swedish Civil
Contingencies Agency), MSB586 - July 2013.
24 https://www.calameo.com/books/005148363603d7ef959a8
https://www.calameo.com/books/005148363603d7ef959a8
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4 Conclusions
L?Ineris a apporté un appui technique en réponse de la saisine du BEA-RI du 15/05/2023 suite à
l'explosion du 06 janvier 2023 au sein d?un silo de stockage de la société CRISTAL-UNION sur son site
de Bazancourt (51) :
? Étape n°1 : Évaluer la réactivité de la luzerne à l?auto-échauffement :
De l?analyse des données indiquées au Tableau 1 et au Tableau 2, l?Ineris a apporté une évaluation
bibliographique et expérimentale sur la réactivité de la luzerne :
- La luzerne sous forme pulvérulente, est une substance combustible pulvérulente et possède une
réactivité élevée vis-à-vis de l?oxy-réactivité avec un pic exothermique en essai ATD/ATG pour
lequel la température à laquelle l?écart de température entre l?échantillon et le témoin atteint 50°C
est inférieure à 250°C avec une perte de masse de 90 % environ et est moyennement à peu sensible
aux phénomènes électrostatiques ;
- La luzerne sous forme pulvérulente, est une substance susceptible de générer une ATEX en cas
de mise en suspension dans l?air (transport par gravité ou par transfert pneumatique) pour une limite
inférieure d?inflammabilité moyenne de 50 g/m3, avec une violence d?explosion de classe
d?explosion de poussière St1 (Pmax = 4 à 6 bar et Kst = 50 à 100 bar.m.s-1) ;
- La luzerne est sujette à l?auto-échauffement lors de son stockage. Un stockage de luzerne d?une
hauteur de 16 m a une température critique d?auto-échauffement de l?ordre de 40°C ;
- La luzerne sous forme pulvérulente est susceptible pour apport de source d?inflammation active de
s?auto-enflammer à l?état de nuage (TAInuage de l?ordre de 360°C) ou en dépôt de matière de 5 mm
d?épaisseur (TMI couche 5mm de l?ordre de 155°C). La Directive Européenne ATEX 2014/34/UE
préconise que les températures de surface des parties d?appareils doivent, pour éviter
l?inflammation des poussières en suspension, être nettement inférieures à la température
d?inflammation du mélange d?air avec des poussières prévisibles. La formule issue de la norme
CEI 60079-14 :2013 (disposition 5.6.3.2) permet de calculer la température maximale de surface
de l'équipement en degrés Celsius du mélange poussière/air considéré, lorsque soumis à la
méthode d'essai conformément à la norme CEI 60079- 0, suivant la relation suivante :
Minima (Tmax ? 2/3 TMInuage et TMAX = TMIcouche ? 75 K).
Pour la luzerne, cela signifie que la température en surface du silo ne doit pas dépasser 80°C.
? Étape n°2 : Reconstituer le mécanisme accidentel dans la cellule :
Il s?agissait, plus spécifiquement, pour l?Ineris de :
- Déterminer la cohérence entre l?inflammation en fond de cellule et les observations constatées. Les
différentes modélisations EFFEX réalisées en considérant différentes hypothèses ont permis de
conclure qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts observés et
que bien qu?il soit difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule, il n?y
a pas de contradiction entre un scénario d?inflammation en fond de cellule et les dégâts
constatés ;
- Déterminer globalement l?énergie d?explosion produite. L?énergie globale d?explosion estimée est
au minimum de l?ordre de 240 MJ.
examiner les hypothèses d'une inflammation de poussières ou de gaz et évaluer les quantités de
poussière ou de gaz de pyrolyse mises en jeu.
L?hypothèse d?une explosion d?un grand volume inflammable composé uniquement de gaz de
pyrolyse mélangés à l?air paraît peu crédible, étant donné la faible réactivité constatée pour ce
mélange. La possibilité qu?une inflammation d?un mélange gaz de pyrolyse / air déclenche une
explosion de poussière est possible. Mais il est aussi possible que la mise en suspension de la
poussière soit due au débâtissage de la luzerne, et non à une explosion des gaz de pyrolyse. Dans
ce cas, le débâtissage aurait mis en contact la poussière de luzerne avec des particules rendues
incandescentes par un phénomène d?auto-échauffement en cours.
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Même s?il est difficile de déterminer précisément la quantité de poussière impliquée dans
l?explosion, on peut conclure à partir de l?estimation de l?énergie globale d?explosion et d?autres
constations, qu?une quantité assez faible, de l?ordre de quelques dizaines de kg, était suffisante
pour produire les effets observés, mais que la quantité réellement présente était certainement
largement plus importante.
? Étape n°3 : Réaliser une revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers
sur la gestion de l?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur
les parois :
NB : Après des sollicitations et contacts auprès des céréaliers et pré-information auprès du
BEA-RI, l?Ineris n?a pas reçu de confirmation de rendez-vous de la profession pour échanger sur leurs
bonnes pratiques sur la gestion d?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage
sur les parois. Ainsi, l?Ineris a exprimé auprès du BEA-RI ne pas avoir pu collecter des informations pour
pouvoir répondre spécifiquement sur la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois,
ce qui a été accepté par le BEA-RI.
En ce qui concerne la réactivité de solides combustibles tels que la luzerne en phase de stockage,
deux principaux phénomènes sont envisagés :
- un phénomène d?explosion de poussière lors du chargement gravitaire ou pneumatique de silos de
stockage,
- un phénomène d?auto-échauffement correspondant à une oxydation de la luzerne par l?oxygène de
l?air (feu couvant à combustion lente) ou initialement activité par une activité de fermentation
biologique par une teneur en humidité supérieure à 25 % de la luzerne :
o la luzerne est une substance combustible et est réactive à l?oxydation chimique. Les
températures de la luzerne dans les silos de stockage peuvent dépasser les températures
critiques d?auto-échauffement du fait des dimensions de stockage des silos de luzerne,
o des phénomènes de fermentation biologique (liée à un défaut qualité du produit par une
teneur en humidité élevée ou une introduction accidentelle d?eau de pluie ou d?eau de
lavage dans les silos) peuvent augmenter la température de la luzerne jusqu?à 75°C environ
et passer le relais au phénomène d?auto-échauffement du produit et faciliter ainsi l?atteinte
de sa température critique,
o le système de détection de CO dans les silos de stockage doit être suffisamment précoce
pour détecter convenablement un phénomène d?auto-échauffement : de plus, les orifices
de vidange des silos (vis planétaires, écluse rotative de vidange) doivent être étanches au
passage de l?air afin de limiter les entrées d?air et ainsi limiter les démarrages d?auto-
échauffement dans la partie inférieure des silos.
- Les techniques d?intervention relative aux installations de stockage de grains en cas d?explosion de
poussières et d?incendie sont bien connues à la lumière du retour d?expérience et sont définies au
§ IV du guide de référence rédigé par les céréaliers25.La gestion de la prévention et de la protection
du risque d?auto-échauffement avancé ou d?auto-inflammation des silos de stockage peut s?appuyer
sur les principes suivants :
o Optimiser la mise en place de la surveillance de la concentration de la teneur en CO dans
les ciels gazeux des silos de stockage et utiliser avec parcimonie le transilage ;
25 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Les principaux éléments à
appréhender en cas de situations accidentelles. Tome 2. https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
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o Favoriser le suivi de la mesure de concentration de CO dans le ciel de chaque silo de
stockage, ou par défaut, par groupe de silo (actuellement les ciels des silos de stockage
communiquent entre eux et cela constitue un volume d?air qui aurait un effet de dilution de
la concentration de CO en cas de début d?auto-échauffement dans un silo) ;
o S?appuyer sur les caractéristiques de suivi de la teneur en CO et en température indiquées
dans le Tableau 6 pour la gestion de la prévention des phénomènes d?auto-échauffement
et en cas de nécessité privilégier la vidange au plus tôt du silo en cas de suspicion ;
o Envisager de pouvoir inerter les ciels des silos de stockage par un gaz inerte.
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5 Annexes
Liste des annexes :
- Annexe 1 : Lettre de saisine du BEA-RI du 15/05/2023 (1 page) ;
- Annexe 2 : Résultats des mesures d?essais (9 pages) ;
- Annexe 3 : Description des essais (5 pages) ;
- Annexe 4 : Présentation de l?outil de calcul phénoménologique EFFEX (3 pages).
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ANNEXE 1
-
Lettre de saisine du BEA-RI
du 15/05/2023
1 page
Inspection générale de l?environnement
et du développement durable
Bureau d?Enquêtes et d?Analyses
sur les risques industriels
Mél : bea-ri@developpement-durable.gouv.fr
Tour Sequoia
1, place Carpeaux ,La Défense 6
92055 LA DÉFENSE CEDEX
http://www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr/bea-ri-r549.html
,
o
o
o
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ANNEXE 2
-
Résultats des mesures d?essais
9 pages
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Résultats Échantillon Réf. CRISTAL UNION «Luzerne»-référence Ineris 23AM101
Figure A1 : Évolution du taux d?humidité en fonction du temps de l?échantillon Ineris 23AM101
(105°C pendant 90 min)
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Figure A2 : Essai de caractérisation de friabilité et d'abrasion de l?échantillon Ineris 23AM101
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Figure A3 : Analyse ATD-ATG de l?ambiante à 800°C de l?échantillon Ineris 23AM101
Figure A4 : Courbe d?extrapolation selon la méthode Frank-Kameneskii des résultats
des essais en étuve isotherme de l?échantillon Ineris 23AM10123AM101
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Figure A5 : Essai en four tubulaire de 150°C à 400°C sous balayage d?air
sur l?échantillon Ineris 23AM101
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ANNEXE 3
-
Description des essais
5 pages
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Répartition granulométrique par tamisage mécanique
PRINCIPE
Le tamisage consiste à mesurer le poids d?un échantillon soumis à essai retenu par les toiles de mailles
de tamis calibrés. Chaque tamis est superposé par taille de maille décroissante selon une progression
mathématique. Le poids d?échantillon retenu (refus de tamis) peut alors être connu et permet d?obtenir
le pourcentage de refus pour chaque diamètre de maille par rapport au poids total de produit.
MODE OPERATOIRE
L?opération consiste à tamiser 100 g d?échantillon sur une table vibrante pendant 30 minutes avec des
tamis (grilles à maille carrée) de diamètre différents (1000, 500, 315, 180, 100, 63, 40 et 32 ?m).
Les refus récoltés sur chaque tamis sont pesés sur une balance.
Détermination du taux d?humidité
DISPOSITIF D?ESSAI
L?analyse est conduite à l?aide d?un dessiccateur thermique HX204, qui fait appel à une technologie
halogène qui permet un chauffage rapide et un contrôle précis de la température. Le dessiccateur
thermique est équipé d'une cellule de pesée MonoBloc et d'un récepteur de charge suspendu haute
performance, avec une résolution de 0,1 mg maximum. Les courbes de séchage permettent de
visualiser l'évolution de la mesure à l'écran. Les graphiques de contrôle affichent la tendance du taux
d'humidité en continu (résolution de 0,001 % TH et répétabilité de 0,01 % pour un échantillon de 10 g).
MODE OPERATOIRE
L?échantillon est réparti dans une coupelle en aluminium elle-même déposée dans le dessiccateur
thermique et séché à l?aide d?une lampe halogène à une température de 105°C pendant 90 minutes.
Le taux d?humidité est calculé par pesée différentielle au cours du séchage et suivi en continu.
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Caractérisation de la friabilité et de l'abrasion d?une poudre
ou d?un comprimé
DISPOSITIF D?ESSAI
Les systèmes particulaires sont classés selon leurs propriétés de taille, forme, porosité inter et
intra-particulaire.
Deux grandes catégories sont distinguées :
- Poudre cohésive,
- Poudre à écoulement libre.
Le mélange des poudres est fortement dépendant des propriétés d?écoulement des constituants, elles-
mêmes liées directement aux caractéristiques des poudres, telles que :
- Distribution granulométrique,
- Cohésion,
- Taux d?humidité
- Formes et propriétés de surface des particules
- Densité apparente et tassée,
- Les forces de Van Der Waals,
- Les charges électrostatiques,
- La friabilité impacte par exemple le choix du mélangeur (mélangeur convectif, cuve tournante?)
car la formation de poussières peut se révéler gênante dans plusieurs procédés.
La friabilité décrit la tendance des particules à se désintégrer sous l?effet des contraintes mécaniques
d?abrasion et d?attrition. Les petites particules ainsi formées modifient les propriétés d?usage de la
poudre (masse volumique du lit, coulabilité, propriété d?instantanéité?). Pour les agglomérats, on
parlera de résistance mécanique : elle dépend en particulier de la nature et de la consolidation des
ponts établis entre les particules durant l?agglomération. Plusieurs techniques sont employées pour
mesurer la friabilité des poudres (Bemrose et Bridgwater, 1987 ; Yan et Barbosa-Canovas, 2001 ;
Utsumi et al., 2001). Elles consistent, en général, à soumettre la poudre à des chocs mécaniques
(vibrations) dans un appareil spécifique pendant un temps donné.
L'un des critères de test de la résistance mécanique des comprimés et des noyaux est le test de friabilité
et d'abrasion. Au cours du processus d'enrobage, de transport et d'emballage, le comprimé perd un peu
de poids.
Le tambour de friabilité a été conçu pour tester la résistance au roulement et aux chocs des comprimés.
Une fracture prématurée ou un signe d'usure sur les bords indique que ces comprimés peuvent ne pas
résister aux rigueurs du transport. Le tambour d'abrasion permet d?effectuer des essais d'abrasion sur
l'attrition (usure) des comprimés causée par le frottement du produit pendant le transport.
Pour mesurer la perte de poids, les échantillons sont comptés et pesés. Ensuite, le test de friabilité est
effectué. Les échantillons sont culbutés à chaque tour du tambour de l'instrument de test de friabilité.
Une fois le test de friabilité terminé, les échantillons doivent être dépoussiérés et pesés à nouveau. La
différence de poids avant et après le test est déterminée comme étant la friabilité ; elle ne doit
généralement pas dépasser 1 %. Les comprimés d'un poids supérieur à 650 mg, les échantillons d'un
diamètre supérieur ou de forme irrégulière sont testés alors que l'instrument est soulevé d'un côté à
l'aide de pieds pliables jusqu'à un angle de 10 %.
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Analyse Thermique Différentielle et Thermique Gravimétrique
PRINCIPE
L'Analyse Thermique Différentielle et l?Analyse Thermique Gravimétrique permettent l'étude simultanée
des comportements thermodynamiques des matériaux.
Le principe de l'Analyse Thermique Différentielle consiste à suivre l?évolution de la différence de
température (?T) entre l?échantillon étudié et une référence inerte, c?est-à-dire dépourvu d?effets
thermiques dans le domaine de température étudié. L?Analyse Thermique Gravimétrique permet de
mesurer les variations de masse (?m) d'un échantillon au cours de son chauffage.
MODE OPERATOIRE
Un échantillon du produit à examiner, placé dans une nacelle en toile métallique identique à celle du
témoin, est introduit dans un four à température ambiante, dont on élève progressivement la
température à la vitesse de 5°C/min (rampe de température variable de 0,5°C/min à 5°C/min, plage de
température variable de l?ambiante à 800°C).
La variation de masse de l?échantillon placé dans le four est suivie à l?aide d?un module de pesée
électronique en fonction du temps. Les températures de l?échantillon (TE) et d?une substance inerte
choisie comme référence (TR) sont également enregistrées en fonction du temps. Les dispositions
adoptées permettent de préchauffer le courant d?air de balayage (440 Nl/h) à la même température que
le four (Figure B1).
Figure B1 : Schéma général de l?ATD/ATG
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Dans ces conditions, en comparant les températures de l?échantillon (TE) et de la substance inerte
choisie comme référence (TR), il est possible de mettre facilement en évidence de façon semi-
quantitative tout phénomène endo ou exothermique qui pourrait se produire au cours du chauffage.
L?emballement d?une réaction d?oxydation est pris en compte dès lors que la différence ?T entre
l?échantillon et la référence est égale ou supérieur à 50°C. Ceci permet d?enregistrer seulement les
réactions exothermiques franches sans tenir compte des faibles différences de températures entre
l?échantillon et le témoin pouvant s?expliquer par une conductivité thermique élevée de l?échantillon, une
réaction d?oxydation ne s?accompagnant pas d?une élévation de température susceptible de présenter
un danger, etc...
Les valeurs de température de la substance de référence au début de l?emballement d?une réaction
d?oxydation permettent de :
? définir le danger du produit testé vis-à-vis du risque d?auto-échauffement,
? de hiérarchiser l?oxy-réactivité de différents échantillons afin de procéder à des essais
complémentaires sur l?échantillon représentant le plus de risque d?auto-échauffement.
Un échantillon est considéré comme ayant une réactivité élevée vis-à-vis de l?oxy-réactivité lorsque la
température du témoin, pour un ?T = 50°C, est inférieure ou égale à 250°C. L?essai doit être complété
par un essai d?auto-échauffement visant à déterminer le domaine de la taille critique en fonction de la
température à partir duquel un risque d?auto-inflammation existe.
La réactivité est moyenne lorsque la valeur de la température témoin, pour un ?T = 50°C, est comprise
entre 250°C et 400°C. L?essai d?auto-échauffement n?est à réaliser que pour des stockages de grande
taille à température ambiante ou une utilisation du produit à des températures élevées.
L?oxyréactivtié d?un échantillon est faible lorsque la valeur de la température témoin, pour un ?T = 50°C
est supérieure à 400°C.
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Essais d?auto-échauffement en étuves isothermes (EN 15188)
PRINCIPE
L?essai consiste à déterminer la température critique d'auto-inflammation de volumes cubiques
croissants d'un combustible solide. Lorsque le volume des récipients cubiques augmente, la
température minimale d'auto-inflammation diminue et il est possible en théorie d'extrapoler jusqu'à un
volume de stockage plus important.
MODE OPERATOIRE
Pour cela, les échantillons sont placés à température ambiante dans des récipients de forme cubique
dont les parois sont formées par une toile métallique à mailles suffisamment fines pour éviter le
tamisage, mais qui ne freinent pas la diffusion d'oxygène. Le récipient est ensuite introduit à pression
atmosphérique dans une étuve isotherme ventilée à air chaud régulée à une température donnée. A
l'aide d'un thermocouple placé au centre de l'échantillon, on observe si la température de l'échantillon
se stabilise à la température de l?étuve, ou si elle s?élève rapidement.
Un nouvel essai est ensuite effectué à une température plus élevée ou plus basse suivant le résultat de
l?essai précédent, de façon à encadrer à 5°C près la température de l'étuve qui conduit à un auto-
échauffement de l?échantillon. Cette température est appelée température critique d'auto-échauffement.
En réalisant des essais sur différents volumes, il est possible de corréler la température d?auto-
échauffement à la dimension du stockage. En effet, les résultats des essais de stockage en étuve
isotherme peuvent être corrélés par une loi mathématique s?appuyant sur la théorie de l'auto-
échauffement pour des dimensions plus importantes que celles étudiées expérimentalement et/ou pour
des formes différentes. Ce calcul d'extrapolation fait appel notamment à l'hypothèse d'une libre diffusion
de l'oxygène de l'air dans le dépôt et à l'échange thermique par conduction dans le matériau. La
dimension critique est déterminée pour un stockage de forme cubique cylindrique ou plan. En effet, le
calcul intègre un facteur dépendant de la forme du stockage.
Essai en four tubulaire de 150°C à 400°C sous balayage d?air
Le four tubulaire de l'Ineris permet d'étudier, sous atmosphère contrôlée, la dégradation thermique
d?échantillons solides ou liquides. Les gaz et les particules émis lors de la combustion sont piégés et
analysés. [Norme de référence : NF X 70-100-2].
Cf Fiche Ineris :
https://prestations.ineris.fr/fr/solutions-thematiques/substances-produits/proprietes-
dangers/caracterisation-degradation-thermique
https://prestations.ineris.fr/fr/solutions-thematiques/substances-produits/proprietes-dangers/caracterisation-degradation-thermique
https://prestations.ineris.fr/fr/solutions-thematiques/substances-produits/proprietes-dangers/caracterisation-degradation-thermique
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ANNEXE 4
-
Présentation de l?outil de calcul
phénoménologique EFFEX
3 pages
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Présentation de l?outil de calcul phénoménologique EFFEX
L?explosion de de gaz ou de poussières, confinée ou partiellement confinée, peut être modélisée avec
l?outil phénoménologique EFFEX. Il permet de calculer la montée en pression dans le confinement en
prenant en compte la réactivité du mélange inflammable gazeux, la géométrie et la présence
d?ouvertures permanentes.
La situation courante correspond à une fuite de gaz inflammable dans un espace confiné ou
partiellement confiné.
Un mélange inflammable peut être formé dans un espace confiné. Sa taille, sa composition et son
agitation interne (turbulence) dépendent du type de fuite et des caractéristiques géométriques du
confinement. Si une source d?inflammation est située dans la zone inflammable du nuage, celui-ci
s?allume et une flamme se propage depuis le point d?inflammation. La figure 10 ci-après montre le
développement de la flamme dans le confinement.
C1 : Développement de la flamme dans le confinement
La flamme se développe sphériquement autour du point d?inflammation. Sur son chemin, la flamme
transforme les gaz frais en gaz brûlés chauds. Leur température typique est comprise entre 1 000°C et
2 000°C, ce qui aboutit à une large expansion des gaz brûlés.
L?excédent de volume produit par unité de temps est proportionnel à :
- La surface de flamme,
- Le taux de combustion soit la consommation volumique par unité de temps des gaz frais par
élément de surface de flamme. La dimension de ce paramètre est une vitesse et cette dernière
est souvent appelée vitesse de combustion.
- Le taux d?expansion thermique.
Cette production de gaz brûlés est responsable de la montée en pression dans le confinement. La
vitesse de montée en pression augmente quand ces trois paramètres augmentent.
Le taux d?expansion thermique est une propriété du mélange gazeux qui peut être prédite. Il dépend
uniquement du dégagement de chaleur lié à la réaction de combustion. Il peut être exprimé par
application de la première loi de thermodynamique :
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? =
?0
??
?
??
?0
=
??????
??. ?0
+ 1
Où :
- ?Hcomb est l?enthalpie de réaction (combustion) à T0 par unité de masse du mélange gazeux.
- T0 et Tb sont respectivement les températures des gaz frais et des gaz brûlés pour une réaction
adiabatique
- ?0 et ?b sont respectivement les masses volumiques des gaz frais et gaz brûlés.
- cp est la capacité calorifique massique moyenne du mélange de gaz brûlés.
C?est un paramètre intrinsèque qui dépend uniquement de la composition du mélange et non pas de la
façon dont la flamme se propage. Sa valeur est comprise entre 5 et 8 pour des hydrocarbures typiques
mélangés à l?air.
La vitesse de combustion dépend à la fois de la nature du mélange et de la vitesse à laquelle la chaleur
est transférée des gaz brûlés aux gaz frais. En effet, les produits de combustion transmettent la chaleur
aux gaz frais par diffusion thermique. La combustion peut être décrite par les lois thermocinétiques de
type lois d?Arrhenius. Leur paramétrage dépend uniquement des propriétés intrinsèques du mélange
tout comme la vitesse de combustion, aussi connue comme la vitesse de flamme laminaire, Slad. Cette
dernière dépend de la concentration en produit inflammable au sein du nuage. Pour un gaz, cette vitesse
est maximale pour un mélange en proportions stoechiométriques et décroit dès lors qu?on se rapproche
des limites du domaine d?inflammabilité.
Les mécanismes de turbulence, toujours présents, ont un impact favorable sur la diffusion de la chaleur
vers les gaz frais et augmente la vitesse de flamme. La surface de flamme subit des changements
durant sa propagation. Dans un volume relativement allongé, et en cas d?inflammation centrale, la
flamme se développe initialement sphériquement jusqu?à atteinte des parois. A leur contact, des
portions de surface de flamme disparaissent et restent deux éléments de flamme séparés se propageant
dans des directions opposées. Le front de flamme peut également devenir cellulaire ou courbés vers
les gaz brûlés sous l?effet des instabilités de Darrieus-Landau. L?allongement du confinement peut jouer
sur ces effets physiques.
Dans tous les cas, la surface de flamme maximale dépend des dimensions du confinement et
particulièrement de sa section transverse.
C2 : Schéma représentant les mécanismes de turbulence
L?évolution de pression dans le confinement est considérée homogène et uniquement liée à l?expansion
des produits de combustion. Cette hypothèse forte est valide si le taux d?allongement du confinement
(ratio entre la longueur de confinement et son diamètre hydraulique) est inférieur à 20.
Injection d?air
Tourbillon
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Sur son trajet, la flame convertit les gaz frais en gaz brûlés. On suppose également que ces deux zones
évoluent de manière isentropique. Avec une loi d?état des gaz parfaits, les principales équations
s?écrivent :
d/dt[?P(t)]/?P(t) = ?.Qfl(t) /V
Qfl(t) = St.Af(t).(?-1).T0/T
Où
? ?P(t) est la surpression interne à l?instant tis the internal overpressure at the time t.
? St est la vitesse de flamme turbulente.
? Qfl(t) est le taux de production de volume en excès lié à la conversion des gaz frais en gaz
brûlés.
? V est le volume d?enceinte.
? T est la température des gaz frais à l?instant t.
? Af(t) est la surface de flame à l?instant t.
? ? est le ratio des capacités calorifiques.
Le confinement peut être ouvert à l?atmosphère à travers des ouvertures permanentes ou créées par
l?explosion si la pression interne, liée à la production de gaz brulés dépasse la pression de rupture. Dans
ce cas, une ouverture est progressivement créée par la poussée de la surface fragile hors de son point
d?accroche. Le taux d?ouverture est limité par les effets d?inertie. Dans EFFEX, une équation prenant en
compte la balistique est résolue afin de quantifier l?évolution temporelle de l?ouverture de la surface. Un
paramètre clé pour quantifier les effets d?inertie est la surface massique de la surface fragile. Il peut être
évalué comme le produit de la masse volumique de l?élément et de son épaisseur.
Lorsque le confinement est ouvert à l?atmosphère, le débit de fuite à l?extérieur est non nul et s?écrit :
Qfuite(t)= -Cd.As.f[?P(t)]
Où
? Qfuite(t) est le débit volumique à travers les orifices.
? Cd est le coefficient de décharge.
? As est la surface des orifices.
? f[?P(t)] est une fonction qui dépend de la différence entre la pression interne et la pression
externe. Elle rend compte des effets de compressibilité de l?air. (Pour des faibles écarts de
pression, f[?P(t)] =?(2.?P/?)).
Institut national de l?environnement industriel et des risques
Parc technologique Alata ? BP 2 ? F-60550 Verneuil-en-Halatte
03 44 55 66 77 ? ineris@ineris.fr ? www.ineris.fr
mailto:ineris@ineris.fr
http://www.ineris.fr/
P a g e 35 | 35
Bureau d?enquêtes et d?Analyses
sur les Risques Industriels
MTE / IGEDD / BEA-RI
Tour Séquoïa
92055 La Défense Cedex
+33 1 40 81 21 22
bea-ri.igedd@developpement-durable.gouv.fr
https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/bea-ri-r549.html
INVALIDE) (ATTENTION: OPTION C20 à la C19.
Figure 7 : Disposition des poutres en béton armé (en rouge) sur lesquelles reposent les dalles
du plancher sur cellules
Le plancher sur chaque cellule se compose de plusieurs dalles dont l?une est fragilisée afin de faire
office de surface soufflable visant à garantir l?intégrité du reste de la structure en cas d?explosion.
La dalle fragilisée faisant office de surface soufflable de la cellule C20 accidentée est située au centre
du plancher sur cellule, comme indiqué Figure 8. En l?absence de plus de détails, il est impossible de
savoir avec certitude si cette dalle est simplement posée ou fixée sur 2 ou 4 côtés aux autres dalles du
plancher. Les deux hypothèses seront considérées dans la suite de ce rapport.
Poutre N755
Poutre N754
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Figure 8 : Disposition des dalles de la cellule C20 accidentée, avec la dalle fragilisée faisant office
de surface soufflable au centre
Il convient de noter que les dispositions des dalles sur cellules indiquées Figure 7 et Figure 8 ne sont
pas les mêmes. Après analyse des photographies transmises à l?Ineris et en prenant en compte les
dates de réalisation des plans, l?Institut considère pour la suite de l?analyse le plan de Figure 8, plus
récent (en date du 13 juillet 1989, contre 4 juillet 1989 pour le plan Figure 7).
3.2.2.2.2 Description des principaux dégâts du silo
Conformément au principe retenu par l?Ineris pour réaliser l?analyse de la pression de rupture de divers
éléments, une analyse des dégâts a été menée sur la base des photographies et documents transmis
afin de déterminer les composants totalement endommagés, ceux ayant subi des déformations
plastiques et, enfin, ceux n?ayant pas subi de déformation.
Pour rappel, d?après les différentes informations (notamment photographiques) transmises par le BEA-
RI à l?Ineris, les dégâts relevés se situent en partie haute du silo, au niveau du plancher et de la galerie
sur cellules. La tour de manutention, le fût des différentes cellules et la partie basse du silo, au niveau
de la galerie sous cellules, ne sembleraient pas présenter de dégâts visuels particuliers.
Les photographies post-accidentelles prises après retrait des éléments de bardages de la galerie sur
cellules ont montré que le plancher sur la cellule accidentée C20 et sur les cellules C19 et C21 voisines
présentait des dégâts importants avec de nombreuses fissurations et ruptures. Les éléments de dalles
semblent s'être soulevés et être retombés sur place. Les lignes de fissuration du plancher sur cellules
supposées par l?Ineris après analyse des documents lui ayant été transmis sont représentées sur la
Figure 10 ci-dessous. Les poutres N754 et N755, sur lesquelles reposent ces éléments de plancher, se
sont rompues au niveau de leurs liaisons avec les cellules C19, C20 et C21. À noter qu?il ne semble
pas y avoir eu de projection des dalles de toiture.
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Figure 9 : Prise de vue du sommet du silo après l?accident du 6 janvier 2023 et le retrait des éléments
de bardages de la galerie sur cellules
Figure 10 : Lignes de fissuration du plancher sur la cellule C20 ? Lignes rouges : les lignes
de fissurations supposées par l?Ineris ; rectangle bleu : positionnement de la dalle fragilisée faisant
office de surface soufflable ; rond rouge : point de rupture des poutres N754 et N755
(liaison entre les poutres et la cellule C20)
3.2.2.2.3 Estimation des pressions de rupture de divers éléments constitutifs du silo
Sur la base des analyses présentées ci-dessus, l?Ineris a évalué la pression de rupture à l?explosion de
différents éléments constitutifs jugés pertinents du silo. Ces estimations sont présentées au Tableau 4.
Cellule C20 Cellule C19 Cellule C21
Cellule C20 Cellule C19 Cellule C21
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Élément Dimensions
(mm)
Pression de rupture
estimée
Information sur la
pression appliquée
Fût en béton armé de la cellule (pas
de dégâts constatés)
36 000 en
hauteur x
8 000 en
diamètre x 170
en épaisseur
1 bar Inférieure à 1 bar
Dalle n°7
dite
« fragilisée »
(rupture de
la dalle)
Hypothèse : dalle
supposée simplement
posée 3 000 x 2 550 x
140
35 mbar
Supérieure à
35 mbar
Hypothèse : dalle
supposée fixée sur
2 ou 4 côtés
Entre 100 et 250
mbar
Supérieure à
100 mbar
Dalles dites « non fragilisées » ayant
rompu (rupture des dalles) ? (autres
dalles)
2525 en
largeur x 140
Entre 100 et 250
mbar
Supérieure à
100 mbar
Tableau 4 : Niveaux de surpression estimés pour certains éléments de la cellule C20
3.2.2.3 Modélisation d?une explosion primaire en cellule C20 avec inflammation du fond de cellule
Suite à une demande du BEA-RI en date du 23 juin 2023, l?Ineris a, tout d?abord, étudié si, en cas
d?explosion primaire en cellule C20, la dalle dite « fragilisée » du plancher de la cellule, considérée
comme seule surface soufflable, était dimensionnée afin de garantir l?intégrité structurelle du reste de
la cellule (fût en béton armé et dalles « non fragilisée).
L?Ineris a, ensuite, mené une analyse afin d?étudier si une explosion primaire en cellule C20 avec
inflammation en fond de cellule était cohérente avec les dégâts observés.
3.2.2.3.1 Modélisation d?une explosion primaire en cellule C20 avec comme seule surface soufflable
la dalle fragilisée
Un premier calcul a été réalisé à l?aide du logiciel EFFEX (présenté en annexe 4) afin d?évaluer si, en
cas d?explosion primaire en cellule C20, la dalle dite « fragilisée » était correctement dimensionnée afin
de garantir l?intégrité structurelle du reste de la cellule (fût en béton armé et dalles « non fragilisée).
Pour ce faire, l?Ineris a évalué la pression résiduelle dans ce volume en considérant, comme seule
surface soufflable, la dalle fragilisée. Cette valeur a ensuite été comparée avec les ordres de grandeurs
de pressions de rupture des autres dalles du plancher présentées dans le Tableau 4.
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Les caractéristiques bâtimentaires considérées dans la modélisation sont les suivantes :
Localisation Dimensions Matériaux
Fût en béton armé de la cellule Hauteur : 36 m / Diamètre :
8 m
Béton armé
Dalle n°7 dite « fragilisée » Longueur : 3 m / Largeur :
2,55 m
Épaisseur : 0,14 m
Béton armé
Surface : 7,50 m² / Périmètre :
11 m
Dalles dites « non fragilisées » Largeur : 2,525 m / Épaisseur :
0,14 m
Béton armé
Surface ouverte permanant Surface : 0,75 m² -
Tableau 5 : Caractéristiques bâtimentaires de la cellule C20
Deux hypothèses ont été considérées et étudiées pour la pression de rupture des dalles « fragilisées »
dont la masse surfacique a été estimé à 350 kg/m3 :
- Cas dalle fragilisée simplement posée : 35 mbar ;
- Cas dalle fragilisée fixée sur 2 ou 4 côtés : entre 100 et 250 mbar.
Considérant une inflammation en fond de cellule, les hypothèses complémentaires suivantes ont, par
ailleurs, été considérées :
- Longueur de propagation de flamme : 40 m ;
- Taux d?expansion thermique : 5 ;
- Vitesse de flamme turbulente : 2 m/s.
À noter que les valeurs de taux d?expansion thermique et de vitesse de flamme dépendent des
caractéristiques de l?atmosphère inflammable à l?origine de l?explosion. Dans le cas de l?accident du
6 janvier 2023, et comme détaillé au chapitre 3.2.1, on retient l?hypothèse que c?est une explosion de
poussière qui génère les effets de pression observés. Rappelons qu?il n?est pas exclu que la mise en
suspension des poussières, prérequis nécessaire à leur explosion, puisse provenir d?une explosion de
gaz de pyrolyse.
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Les profils temporels de pression calculés dans la cellule sont les suivants.
Figure 11 : Profils temporels de pression résiduelle dans le volume de la cellule pour une explosion
primaire en ne considérant que la rupture de la dalle fragilisée
D?après la Figure 11, les pressions résiduelles obtenues dans le volume de la cellule sont les suivantes :
- Hypothèse dalle fragilisée simplement posée (pression d?ouverture fixée à 35 mbar) : pression
résiduelle dans la cellule de l?ordre de 200 mbar ;
- Hypothèse dalle fragilisée fixée sur 2 ou 4 côtés (pression d?ouverture comprise entre 100 et
250 mbar) : pression résiduelle comprise entre 210 mbar et 285 mbar.
Les valeurs de pressions résiduelles obtenues pour les différentes hypothèses en termes de pressions
d?ouverture de la dalle fragilisée sont donc du même ordre de grandeur. Elles s?avèrent, par ailleurs, du
même ordre de grandeur que les valeurs de tenue des dalles non fragilisées présentées dans
le Tableau 4.
Ainsi, si le dimensionnement de la dalle soufflable a permis d?éviter la rupture de la paroi verticale de la
cellule lors d?une explosion interne, il semble, à lui seul, insuffisant pour empêcher la rupture des autres
dalles.
3.2.2.3.2 Modélisation d?une explosion primaire en cellule C20 : cohérence entre une inflammation en
fond de cellule et les dégâts observés
Une modélisation d?explosion primaire en cellule C20 a été réalisée à l?aide du logiciel EFFEX, les
valeurs de pressions résiduelles obtenues étant, ensuite, comparées aux valeurs de pression de rupture
estimées présentées dans le Tableau 4.
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Les caractéristiques bâtimentaires considérées dans la modélisation sont les suivantes :
Localisation Dimensions Matériaux Prupt6 Masse
surfacique
kg/m²
Fût en béton
armé de la
cellule C20
Hauteur : 36 m
Diamètre : 8 m
Béton armé > 1 bar -
Dalle n°7 dite
« fragilisée »
Longueur : 3 m
Largeur : 2,55 m
Épaisseur : 0,14 m
Béton armé :
Surface : 7,50 m²
Périmètre : 11 m
Entre 100 et 250 mbar 350
Dalles dites
« non
fragilisées »
Largeur : 2,525 m
Épaisseur : 0,14 m
Béton armé :
Surface : 20 m²
Périmètre : 39 m
Entre 100 et 250 mbar 350
Surface ouverte
permanant
Surface : 0,75 m² - - -
Tableau 6 : Caractéristiques bâtimentaires de la cellule C20, en considérant la rupture des dalles
non fragilisées
L?ensemble des parois sont considérées dans cette modélisation comme potentiellement soufflables
avec, comme pression de rupture, les pressions rappelées dans le tableau ci-dessus.
Considérant une inflammation en fond de cellule, les hypothèses complémentaires suivantes ont, par
ailleurs, été considérées :
- Longueur de propagation de flamme : 40 m ;
- Taux d?expansion thermique : 5 ;
- Vitesse de flamme turbulente : 2 m/s.
Les valeurs de taux d?expansion thermique et de vitesse de flamme dépendent des caractéristiques de
l?atmosphère inflammable à l?origine de l?explosion. Dans le cas de l?accident du 6 janvier 2023, et
comme détaillé au chapitre 3.2.1, on retient l?hypothèse que c?est une explosion de poussière qui génère
les effets de pression observés. Rappelons qu?il n?est pas exclu que la mise en suspension des
poussières, prérequis nécessaire à leur explosion, puisse provenir d?une explosion de gaz de pyrolyse.
Les profils temporels de pression calculés dans la cellule sont les suivants.
6 Valeurs issues du Tableau 4
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Figure 12 : Profils temporels de pression résiduelle dans le volume de la cellule pour une explosion
primaire en considérant une rupture des mêmes dalles que lors de l?accident
D?après la Figure 12, les pressions résiduelles obtenues dans le volume de la cellule sont de l?ordre de
170 mbar à 260 mbar. Ces pressions sont supérieures aux pressions de tenue de la dalle fragilisée et
des autres dalles ayant rompu lors de l?accident du 6 janvier 2023, et dont les valeurs sont présentées
dans le Tableau 4, tout en restant du même ordre de grandeur. Elles restent, par ailleurs, inférieures à
la pression de tenue du fût en béton armé de la cellule.
Ces modélisations indiquent qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts
observés. Par ailleurs, bien qu?il soit difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule,
elles montrent également qu?il n?y a pas de contradiction entre un scénario d?inflammation en fond de
cellule et les dégâts constatés.
Remarque : les valeurs indiquées ci-dessus (de pression de rupture, de pression résiduelle dans le
volume suite à l?explosion, etc.) sont à considérer comme des ordres de grandeur et se présentent
comme tels. En effet, les plans étant incomplets ou, parfois, contradictoires, nous avons dû émettre des
hypothèses concernant les caractéristiques des différentes dalles de la cellule (sur les ferraillages, sur
certaines dimensions, etc.).
3.2.2.3.3 Conclusion des différentes modélisations effectuées
Les différentes modélisations réalisées indiquent :
? Que la dalle fragilisée était insuffisamment dimensionnée pour empêcher la rupture des
dalles non fragilisée en cas d?explosion primaire dans la cellule ;
? Qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts observés et,
bien qu?il soit difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule, qu?il
n?y a pas de contradiction entre un scénario d?inflammation en fond de cellule et les
dégâts constatés.
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3.2.3 Détermination globale de l?énergie d?explosion produite et de la quantité de
poussière mise en jeu
L?énergie de l?explosion peut être estimée sur la base des calculs EFFEX menés en partie précédente,
dans le paragraphe 3.2.2.3.2. Pour parvenir à la pression maximale d?explosion, il est nécessaire de
brûler une masse d?atmosphère inflammable minimale de l?ordre de 200 kg. L?énergie de combustion
peut être estimée par l?expression suivante, tirée du rapport Omega sur les explosions de poussières7 :
?????? = ???0( ? ? 1)
En assimilant le mélange inflammable à de l?air, on a ??=1004 J/kg/K. Pour ?0 = 300? et ? = 5, on
obtient ??????=1,2 MJ/kg. Ainsi, l?énergie globale d?explosion conduisant au niveau de pression
résiduelle évaluée précédemment dans la cellule C20 et associée au niveau de dégâts constatés
est au minimum de l?ordre de 240 MJ.
En faisant l?hypothèse d?une concentration de poussière de 0,5 kg/m3, ce qui représente le maximum
de réactivité pour des poussières d?origine agricole et peu denses comme la luzerne, cette énergie mise
en jeu correspond à environ 60 kg de poussière en suspension, ce qui est très peu par rapport à la taille
du silo (seulement 6 % du volume du silo). Toutefois il s?agit d?une valeur minimale, la quantité de
poussière mise en jeu dans l?explosion pourrait être beaucoup plus élevée.
Le fait qu?il n?y ait aucune flamme visible à l?extérieur, alors que l?inflammation s?est vraisemblablement
produite au fond du silo donc loin des évents, suggère que l?atmosphère explosive ne remplissait pas
la totalité du silo. A titre indicatif, une atmosphère explosive remplissant la moitié du silo correspondrait
à 500 kg de poussière en suspension, soit un dépôt de poussière de l?ordre de 1 mm uniformément
réparti sur la paroi du silo8. Donc, même s?il est difficile de déterminer précisément la quantité de
poussière impliquée dans l?explosion, on peut conclure qu?une quantité assez faible, de l?ordre de
quelques dizaines de kg, était suffisante pour produire les effets observés, mais que la quantité
réellement présente était certainement largement plus importante.
7 C. Proust (2006) Rapport Omega 21 : Explosion de poussières. Phénoménologie et modélisation des effets.
Téléchargeable sur www.ineris.fr
8 Hypothèse de calcul : surface interne du silo 1000 m3, densité de la luzerne en poudre non compactée 500 kg/m3.
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3.4 Revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur
la gestion de l?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de
bâtissage sur les parois
Ce chapitre apporte les éléments de réponse à la question n°3 de la saisine du BEA-RI relative à la
revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers sur la gestion d?auto-échauffement
et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois.
Après des sollicitations et contacts auprès des céréaliers et pré-information auprès du
BEA-RI, l?Ineris n?a pas reçu de confirmation de rendez-vous de la profession pour échanger sur ses
bonnes pratiques de la gestion d?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage
sur les parois. Ainsi, l?Ineris a exprimé auprès du BEA-RI ne pas avoir pu collecter des informations pour
pouvoir répondre spécifiquement sur la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois,
ce qui a été accepté par le BEA-RI.
3.4.1 Retour d?expérience et phénomènes dangereux associés aux installations de
mise en oeuvre de luzerne
Depuis de nombreuses années, les activités de culture et de production animales9 représentent près de
10 % de l?accidentologie française des ICPE recensée par le BARPI.
Entre 2009 et 2021, l?étude de 1 259 événements des secteurs de la culture et production animale (hors
sites agroalimentaires et méthanisation agricole) révèle deux phénomènes dangereux récurrents :
l?incendie (85 % des évènements) et les rejets de matières dangereuses et/ou polluantes (23,2 % des
évènements) ; et de façon moindres les explosions (3,6 % des évènements) et autres typologies10
(5,9 % des évènements). L?analyse des perturbations et causes profondes permet au BARPI d?en tirer
des enseignements et de rappeler certaines bonnes pratiques.
9 Accidentologie dans les activités de culture et production animale - La référence du retour d'expérience sur
accidents technologiques (developpement-durable.gouv.fr)
10 Notamment des asphyxies d?animaux, des accidents de personnes, mortels ou avec blessures, des inondations.
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/synthese/accidentologie-dans-les-activites-de-culture-et-production-animale/
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/synthese/accidentologie-dans-les-activites-de-culture-et-production-animale/
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L?interrogation de la base ARIA du BARPI sur l?accidentologie associée à la luzerne11 recense
81 événements, notamment :
- Incendie d?installations de fabrication de pellets de luzerne,
- Incendie de stockage de balles de luzerne,
- Incendie suivi d?une explosion dans une installation de déshydratation de luzerne,
- Incendie silo de stockage de pellets de luzerne,
- Incendie dans un cyclone de séchage de balles de luzerne,
- Auto-échauffement puis Incendie d?un entrepôt de stockage de luzerne,
- Incendie au niveau d'un refroidisseur sur une ligne de granulation d'une usine de granulés
de luzerne,
- Auto-échauffement puis incendie de granulés de luzerne stockés dans une cellule de silo,
- Etc.
La luzerne brute contient environ 15 à 20 % d?humidité, environ 30 % de cellulose, environ 30 % de
protéine (M.A.T. : Matière Azotée Totale), environ 10 % de matières grasses et de vitamines et
d?éléments minéraux et autres traces de constituants divers.
La luzerne déshydratée contient environ 10 % d?humidité, environ 30 % de cellulose, environ
30 % de protéine (M.A.T. : Matière Azotée Totale), environ 15 % de matières grasses et de vitamines
et d?éléments minéraux et autres traces de constituants divers.
Le retour d?expérience met en évidence de nombreux départs de feu au niveau des stockages de
luzerne. Ceux-ci proviennent notamment de phénomènes d?auto-échauffement de luzerne ou bien de
l?introduction de particules incandescentes lors du séchage, provoquant une inflammation.
Le retour d?expérience (Incendie d?un silo de granulés de luzerne à Saint Ouen l?Aumône, février 1998)
sur des feux dans des installations de stockage de produits agroalimentaires montre que les
conséquences en termes de flux thermiques restent a priori limitées12.
Les principaux constituants du panache de fumées d?incendie peu ventilé de stockage en silo de luzerne
sont le CO, le CO2, des COV et de la vapeur d?eau et possiblement de l?ammoniac dû à la décomposition
thermique des matières azotées totales.
Les émanations gazeuses liées à la combustion incomplète peuvent être toxiques en champ proche
(distance de l?ordre de 100 m), notamment à cause de la présence de concentrations de CO, de CO2,
des COV et en ammoniac dans le panache de fumées.
D?après les informations et le retour d?expérience identifié par l?Ineris sur la réactivité de la luzerne, le
retour d?expérience de différentes installations de stockage, de fabrication, de séchage et de
déshydratation de luzerne permet de présenter le constat suivant :
- Prise de conscience des professionnels que ces activités présentent un risque d?incendie et
d?explosion,
- Recrudescence de l?accidentologie liée à l?incendie de stockage de luzerne notamment en période
estivale où la température de l?air élevée peut activer la cinétique d?auto-échauffement.
11 https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/?s=luzerne&fwp_recherche=luzerne&fwp_paged=2
12 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Tome 1.
https://www.calameo.com/read/005148363a294056c31ef
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/?s=luzerne&fwp_recherche=luzerne&fwp_paged=2
https://www.calameo.com/read/005148363a294056c31ef
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Les installations de stockage de luzerne peuvent présenter des risques d?incendie et d?explosion :
- en marche normale,
- durant les phases transitoires de démarrage et d?arrêt,
- en période d?arrêt proprement dit,
- en cas de dysfonctionnement.
En ce qui concerne la réactivité de solides combustibles tels que la luzerne en phase de stockage,
deux principaux phénomènes sont envisagés13, 14 :
- un phénomène d?explosion de poussière lors du chargement gravitaire ou pneumatique de silos de
stockage,
- un phénomène d?auto-échauffement correspondant à une oxydation de la luzerne par l?oxygène de
l?air (feu couvant à combustion lente) ou initialement activité par une activité de fermentation
biologique par une teneur en humidité supérieure à 25 % de la luzerne :
o un feu qui couve peut se poursuivre pendant une longue période avant d'être détecté,
o la détection précoce nécessite une mesure fiable de la teneur en CO à des teneurs faibles
(quelques centaines de ppm),
o la propagation du noyau de pyrolyse est lent et préférentiellement vers le bas du silo
(possibilité d?entrée d?air via la vanne de vidange non étanche),
o la migration vers la partie supérieure des gaz de pyrolyse est lente.
Les incidents survenus depuis la mise en service des installations de stockage de luzerne concernent
des aspects d?auto-échauffement.
Cela s?explique pour les raisons multiples suivantes :
- la luzerne est une substance combustible et est réactive à l?oxydation chimique. Les températures
de la luzerne dans les silos de stockage peuvent dépasser les températures critiques d?auto-
échauffement du fait des dimensions de stockage des silos de luzerne,
- des phénomènes de fermentation biologique (liée à un défaut qualité du produit par une teneur en
humidité élevée ou une introduction accidentelle d?eau de pluie ou d?eau de lavage dans les silos)
peuvent augmenter la température de la luzerne jusqu?à 75°C environ et passer le relais au
phénomène d?auto-échauffement du produit et faciliter ainsi l?atteinte de sa température critique,
- le système de détection de CO dans les silos de stockage doit être suffisamment précoce pour
détecter convenablement un phénomène d?auto-échauffement : de plus, les orifices de vidange des
silos (vis planétaires, écluse rotative de vidange) doivent être étanches au passage de l?air afin de
limiter les entrées d?air et ainsi limiter les démarrages d?auto-échauffement dans la partie inférieure
des silos.
3.4.2 Revue des recommandations sur la gestion d?auto-échauffement.
Les techniques d?intervention relative aux installations de stockage de grains en cas d?explosion de
poussières et d?incendie sont bien connues à la lumière du retour d?expérience et sont définies au § IV
du guide de référence rédigé par les céréaliers15.
13 Méthodes pour l?évaluation et la prévention des risques incidentels (DRA 35 ? rapport Omega11) Connaissance
des phénomènes d?auto-échauffement des solides combustibles
(N°Ref INERIS DRA ? 2005 ? 46055 Février 2005) : http://www.ineris.fr/centredoc/omega11web.pdf.
14 Safety aspects of solid biomass: Storage, transportation and feeding, Jaap Koppejan, IEA ? Bioenergy Task 32.
15 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Les principaux éléments à
appréhender en cas de situations accidentelles. Tome 2. https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
http://www.ineris.fr/centredoc/omega11web.pdf
https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
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La gestion de la prévention et de la protection du risque d?auto-échauffement avancé ou
d?auto-inflammation des silos de stockage peut s?appuyer sur les principes suivants :
- Optimiser la mise en place de la surveillance de la concentration de la teneur en CO dans les ciels
gazeux des silos de stockage et utiliser avec parcimonie le transilage ;
- Favoriser le suivi de la mesure de concentration de CO dans le ciel de chaque silo de stockage, ou
par défaut, par groupe de silo (actuellement les ciels des silos de stockage communiquent entre
eux et cela constitue un volume d?air qui aurait un effet de dilution de la concentration de CO en cas
de début d?auto-échauffement dans un silo) ;
- S?appuyer sur les caractéristiques de suivi de la teneur en CO et en température indiquées dans le
Tableau 6 ci-après pour la gestion de la prévention des phénomènes d?auto-échauffement et en
cas de nécessité privilégier la vidange au plus tôt du silo en cas de suspicion ;
- Envisager de pouvoir inerter les ciels des silos de stockage par un gaz inerte.
3.4.2.1 Action sur la mesure de la température de la luzerne et sur la mesure du taux de CO
En termes de bonnes pratiques de prévention de phénomène d?auto-échauffement notamment dans
des silos de stockage, il convient de piloter l?activation de l?inertage du ciel gazeux du silo de
stockage :
- assurer le suivi de l?élévation de la concentration de CO (tout en s?assurant que la plage de mesure
de CO soit entre 0 et 5 000 ppm) puis il convient de poursuivre la stratégie de lutte par un cycle
d?inertage en fond du silo. La mesure du taux de CO dans le ciel du silo permet de connaître la
présence et l'évolution d?un phénomène d?auto-échauffement de luzerne (plus le taux de CO dans
le ciel gazeux est élevé, plus l?évolution du feu est importante) et de prévenir le risque encouru par
les intervenants, le personnel et la population,
- assurer le suivi de la température (sonde de température avec une plage de mesure de 0°C à
500°C) de la luzerne dans la partie supérieure et la partie inférieure du silo, zones où des entrées
d?air sont possibles (partie ciel gazeux du silo et circuit de vidange en partie basse où des vannes
de vidange ne sont pas systématiquement étanches),
- utiliser les données des sondes de température réparties dans le stockage notamment à 1 m
au-dessous du niveau supérieur du niveau du combustible et à 1 m au-dessus du fond du stockage
(au-dessus de la zone de vidange) car les arrivées d'air se font à ces deux niveaux. Des sondes de
température situées à différents niveaux peuvent renseigner notamment au début du sinistre sur le
volume de produit en combustion et sur l'étendue de la combustion dans le volume (cartographie
du sinistre). Néanmoins, la luzerne étant un bon isolant thermique, celles-ci ne renseignent vraiment
que sur une distance d?environ 50 cm et surtout au début du sinistre. Par exemple, une guirlande
de quatre sondes de température actuellement réparties dans l?axe des silos ne permet pas de
fiabiliser la détection d?auto-échauffement et d?auto-inflammation dans les silos,
- assurer un plan de maintenance préventive et corrective des sondes CO et des sondes de
température situées dans le silo de stockage de luzerne ; le ciel de silo de stockage doit être équipé
d?un système de détection CO avec une gamme de mesure de 0 ppm à 10 000 ppm pour que le
CO issu du phénomène d?auto-échauffement soit mieux détecté,
- mettre en place des vannes de vidange en partie inférieure du silo afin de maîtriser des entrées
d?air (notamment en cas de vent, etc.) pouvant migrer dans le silo et favoriser des phénomènes
d?auto-échauffement de luzerne,
- utiliser une caméra infra-rouge mobile pour visualiser la zone de combustion du silo la plus chaude
et pour suivre l'évolution de cette zone en phase d?auto-échauffement avancé ou en phase d?auto-
combustion.
L?inertage est fonction de la teneur en CO et du seuil de température dans l?enceinte de stockage. Les
seuils et actions de sécurité sont indiqués dans le Tableau 6 suivant.
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Seuil CO (ppm)
Seuil de température de la luzerne
(°C)
Action de sécurité
Silo de stockage de luzerne
Seuil 1 :
Tp < 50°C
et
CO = 250 ppm
Alarme en supervision, arrêt de l?alimentation du silo et
suivi par l?opérateur de l?évolution des capteurs Tp et CO.
Seuil 2 :
Tp > 55°C
et
250 ppm < CO < 500 ppm
Alarme en supervision et appel hiérarchie et arrêt de
l?alimentation du silo.
Lancement manuel en supervision de l?inertage en partie
basse et dans le ciel gazeux du silo et suivi de l?inertage.
Si inertage efficace (Tp et CO stable) : Interdire la poursuite
du remplissage du silo et prévoir la vidange du silo.
Si inertage non efficace, vidange du silo dans les bennes
sous silo.
Seuil 3 :
Tp > 60°C
et
CO > 500 ppm
Alarme en supervision et arrêt de l?alimentation du silo de
stockage.
Lancement automatique de l?inertage en partie basse et
dans le ciel gazeux du silo et suivi de l?inertage.
Si inertage efficace (Tp et CO stable) : Interdire la poursuite
du remplissage du silo et prévoir la vidange du silo.
Si inertage non efficace, vidange du silo dans les bennes
sous silo et arrosage (en cas d?extraction sous silo
inefficace).
Seuil 4 :
Tp > 70°C
et
CO > 1 000 ppm
Prévenir la hiérarchie.
Vidange interdite.
Appel des pompiers.
Utiliser une caméra infra-rouge mobile pour visualiser la
zone de combustion la plus chaude du silo et pour suivre
l'évolution de cette zone.
Tableau 6 : Seuils et actions de sécurité liés à l?inertage de silo de stockage de luzerne
3.4.2.2 Action sur le transilage
Un cycle de transilage16 permet d?évacuer les calories générées par un phénomène d?auto-
échauffement naissant par un échange thermique avec l?air ambiant (par effet de ventilation de l?air via
une opération de transilage) mais n?est cependant pas efficace pour maîtriser un phénomène d?auto-
inflammation d?où l?importance de définir et de rédiger des tendances d?augmentation des valeurs en
CO et en température (ces critères de suivi des seuils dynamiques ne sont pas indiqués dans les
consignes écrites).
Le transilage ne peut être efficace si la différence de température entre la matière et l?air ambiant est
significatif (de l?ordre de la dizaine de degré) pour assurer une fonction de transfert de calorie. Le
transilage est une mesure de prévention principalement et historiquement utilisée dans la filière
céréalière (notamment du transilage en période nocturne).
16https://www.arvalis-
infos.fr/file/galleryelement/pj/fd/18/bd/af/stockage_n7_novembre_6615522081049930827.pdf
https://www.arvalis-infos.fr/file/galleryelement/pj/fd/18/bd/af/stockage_n7_novembre_6615522081049930827.pdf
https://www.arvalis-infos.fr/file/galleryelement/pj/fd/18/bd/af/stockage_n7_novembre_6615522081049930827.pdf
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Un système de refroidisseur type échangeur thermique pourrait être utilisé en amont de l?alimentation
du silo de transfert pour s?assurer que la luzerne soit suffisamment refroidie lors de son passage dans
un tel refroidisseur.
L?inertage17 est une mesure de prévention de formation d?atmosphère explosive air / poussière
pulvérulente et une mesure de lutte contre un auto-échauffement avancé / auto-inflammation d?un
stockage de luzerne.
Action sur l?inertage des silos de stockage
A priori, l?inertage est une solution technique lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : Feu à
coeur de silo de stockage et cellule de stockage fermée et étanche.
L?inertage consiste à injecter un gaz inerte (dioxyde de carbone ou azote) pour évacuer l?oxygène
disponible et les calories produites par l?incendie. L?objectif de l?inertage, est à la fois de stopper le feu
en le privant de comburant, et de prévenir le risque d?explosion. L?extinction d?un sinistre par injection
de gaz inerte dans les cellules concerne des produits tels que les céréales, la luzerne, les produits oléo-
protéagineux, etc.18
En préalable à la mise en oeuvre de l?inertage, les conditions suivantes doivent en général être
remplies :
- Le silo doit être suffisamment étanche même si des fuites résiduelles comme celles pouvant être
produites au voisinage des évents sont acceptables,
- Les points d?injection doivent être facilement accessibles et l?ensemble de la masse doit pouvoir
être balayé.
Important : L?ensemble de ces conditions doivent être réunies préalablement à tout sinistre où
l?exploitant doit disposer des procédures adaptées pour permettre une mise en oeuvre rapide et efficace
de ces mesures.
Le silo doit être suffisamment étanche (c?est à dire que le silo doit être suffisamment fermé) pour assurer
un inertage efficace
En cas de prise d?air dans le silo, celui-ci doit être colmaté le mieux possible (vérifier régulièrement
l?étanchéité de la vis planétaire en fond du silo béton).
Les silos fermés doivent être équipés pour l?injection efficace de l?azote. Les points d'injection doivent
être facilement accessibles et l'ensemble de la masse doit pouvoir être balayé.
Important : L?ensemble de ces conditions doivent être réunies préalablement à tout sinistre où
l?exploitant doit disposer des procédures adaptées pour permettre une mise en oeuvre rapide et efficace
de ces mesures.
La température à l'intérieur du silo doit pouvoir être contrôlée à demeure par des sondes de température
afin de suivre l'évolution de la combustion chimique.
La mesure de la teneur du CO dans le ciel du silo doit être assurée afin de contrôler l'évolution de
l'incendie avec du matériel adapté.
La mesure de la teneur en O2 dans le ciel du silo doit être assurée pour évaluer le risque d'explosion et
vérifier l'efficacité de l'inertage (pour que le ciel gazeux soit protégé contre le risque d?explosion le taux
d?oxygène doit être à 5 %).
17 Rapport technique (FD CEN/TR 15281 : Janvier 2023) sur la prévention et la protection contre les ATEX ? Guide
de l?inertage pour la prévention des explosions
18 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Les principaux éléments à
appréhender en cas de situations accidentelles. Tome 2. https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
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En termes de stratégie de lutte contre l?incendie de silos de stockage de luzerne, la mise en oeuvre de
l?inertage doit respecter un certain nombre de consignes19 :
- Prévoir à l'avance des piquages afin de pouvoir injecter le gaz inerte à distance sans intervention
directe sur l'appareil pendant l'incident. Le gaz doit être introduit le plus rapidement possible sans
mettre la poussière en suspension,
- Prévoir une quantité de gaz inerte suffisante avec un système d?inertage correctement dimensionné
tel indiqué dans des normes en vigueur ou documents techniques en vigueur20 21. Pour les
installations à haut risque, il faut prévoir un premier stockage opérationnel (de l?ordre de la dizaine
de m3 d?azote liquide) sur le site à tout moment pour inerter rapidement. On peut passer des accords
avec un fournisseur local de gaz inerte pour un approvisionnement rapide afin de maintenir
l'atmosphère inerte après épuisement du stock initial,
- Établir des seuils d'alarmes au point de vue échauffement, et des consignes d'intervention. Le
déclenchement du système d'inertage doit être néanmoins manuel,
- Éviter d?injecter du gaz inerte à l?état liquide pour limiter les risques électrostatiques, le givrage et
une expansion rapide du liquide,
- Avoir la possibilité d'isoler l'installation par silo afin de pouvoir suivre de façon précise la teneur en
CO dans le ciel de chaque silo : Chaque silo devant être le plus étanche possible pour limiter la
consommation du gaz inerte. Par défaut de pouvoir suivre la teneur en CO dans le ciel de chaque
silo, il est possible de suivre la teneur de la concentration du CO par ilot de quelques silos,
- Mesurer la teneur en O2 et en CO dans le ciel du silo pendant la phase d?inertage du ciel gazeux
du silo. Il n'est pas nécessaire d'installer un détecteur à demeure, mais il faut avoir la possibilité de
suivre l'évolution du taux d'oxygène en cas d'inertage,
- Inerter d'abord le ciel du silo pour éliminer le risque d'explosion, dans la masse du dépôt pour arrêter
la combustion. Lorsqu'on injecte le gaz inerte dans la masse, on chasse les gaz de pyrolyse
(inflammables dans le ciel). A noter que l'inertage peut arrêter l'évolution d'un feu couvant mais
n'agit pas toujours sur la température de la poussière ; la réaction peut redémarrer dès que
l'oxygène est introduit dans le système (pour lutter contre les feux couvants, le taux d?oxygène doit
être si possible inférieur à 5%). L?inertage à l?azote doit être injecté en deux points distincts :
o l?inertage du ciel du silo doit être réalisé en 1er en début d?opération afin de s?assurer que la
teneur en O2 n?atteigne pas 5 % (ceci pour éviter la formation d?une ATEX air / CO dans le ciel
du silo). La quantité d?azote à prévoir est de l'ordre de 1 Nm3 N2/m3 du volume du ciel utile du
silo22 ;
o puis, à la base du silo pour balayer l'ensemble de la masse stockée (l?opération d?inertage doit
débuter par une injection dans le ciel du silo puis dans le bas afin de compenser le tirage
thermique et éviter ainsi les entrées d'air dans le silo).
Lorsque l'injection d'azote dans le bas du silo aura commencé (seulement après avoir assuré l?inertage
dans le ciel du silo), il faudra probablement attendre quelques jours avant qu?un effet d'extinction puisse
être observé.
19 Connaître et faire face aux risqué des organismes stockeurs de la filière agricole. Tome 2 : Les principaux
éléments à appréhender en cas de situations incidentelles (Direction de la Sécurité Civile, COOP de France,
Groupama, INERIS, Fédération du Négoce Agricole, Synacomex).
20 NF EN ISO 20024 (Mars 2020) : Biocombustibles solides (Manutention et stockage en toute sécurité des granulés
de biocombustibles solides dans des applications commerciales et industrielles)
21 CEN/TR 15281 (2006) : Atmosphères explosibles - Guide de l'inertage pour la prévention des explosions (norme
actuellement en cours de révision Afnor/S66A)
22 Compléments du guide de l?état de l?art : Annexe B « Les procédures d?intervention dans les silos », INERIS
2008 (version 3).
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NB 1 : À titre indicatif, un débit d?injection de 5 à 10 kg N2/m2/heure23 à condition que le matériau à
préserver présente une porosité apparente de 50 %. Il est en outre possible d'augmenter le débit
d'injection (au moins pendant la phase initiale), la vitesse de remplissage augmentera en conséquence.
NB 2 24 : Lors d?un sinistre incendie « classique », l?eau se révèle généralement être l?agent d?extinction
le plus adéquat. Or, au regard du risque spécifique au phénomène d?auto-échauffement avancé / auto-
inflammation que présente l?activité de stockage de luzerne, cette eau pourra, en cas d?utilisation
excessive, représenter une problématique majeure voire irréversible (augmentation du poids en cellule
et risque d?éclatement du silo, manutention difficile, inertage éventuel délicat, etc.).
L?utilisation de l?eau pour maîtriser un sinistre ne devra être envisagée que dans le cadre de l?extinction
d?un feu directement accessible sur le produit. Dans ce cas précis, l?eau ne devra être utilisée qu?en très
faible quantité par jet diffusé sur le grain. En revanche, lors d?un feu au coeur dans un silo de stockage,
l?eau sera, à priori, à proscrire pour l?extinction.
Il convient alors d?utiliser de préférence de la mousse (moyen ou haut foisonnement) comme agent
d?extinction pour des phénomènes d?auto-combustion de luzerne dans les silos de stockage et de
transfert. De plus, il est recommandé d?équiper chaque silo de stockage ou de transfert d?un système
de canalisation (colonne sèche, ou autres dispositifs) permettant de faciliter l?injection de mousse en
cas de nécessité dans les silos de stockage et de transfert.
23 Silo Fires : Fire extinguishing and preventive and preparatory measures, Henry Persson, MSB (Swedish Civil
Contingencies Agency), MSB586 - July 2013.
24 https://www.calameo.com/books/005148363603d7ef959a8
https://www.calameo.com/books/005148363603d7ef959a8
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4 Conclusions
L?Ineris a apporté un appui technique en réponse de la saisine du BEA-RI du 15/05/2023 suite à
l'explosion du 06 janvier 2023 au sein d?un silo de stockage de la société CRISTAL-UNION sur son site
de Bazancourt (51) :
? Étape n°1 : Évaluer la réactivité de la luzerne à l?auto-échauffement :
De l?analyse des données indiquées au Tableau 1 et au Tableau 2, l?Ineris a apporté une évaluation
bibliographique et expérimentale sur la réactivité de la luzerne :
- La luzerne sous forme pulvérulente, est une substance combustible pulvérulente et possède une
réactivité élevée vis-à-vis de l?oxy-réactivité avec un pic exothermique en essai ATD/ATG pour
lequel la température à laquelle l?écart de température entre l?échantillon et le témoin atteint 50°C
est inférieure à 250°C avec une perte de masse de 90 % environ et est moyennement à peu sensible
aux phénomènes électrostatiques ;
- La luzerne sous forme pulvérulente, est une substance susceptible de générer une ATEX en cas
de mise en suspension dans l?air (transport par gravité ou par transfert pneumatique) pour une limite
inférieure d?inflammabilité moyenne de 50 g/m3, avec une violence d?explosion de classe
d?explosion de poussière St1 (Pmax = 4 à 6 bar et Kst = 50 à 100 bar.m.s-1) ;
- La luzerne est sujette à l?auto-échauffement lors de son stockage. Un stockage de luzerne d?une
hauteur de 16 m a une température critique d?auto-échauffement de l?ordre de 40°C ;
- La luzerne sous forme pulvérulente est susceptible pour apport de source d?inflammation active de
s?auto-enflammer à l?état de nuage (TAInuage de l?ordre de 360°C) ou en dépôt de matière de 5 mm
d?épaisseur (TMI couche 5mm de l?ordre de 155°C). La Directive Européenne ATEX 2014/34/UE
préconise que les températures de surface des parties d?appareils doivent, pour éviter
l?inflammation des poussières en suspension, être nettement inférieures à la température
d?inflammation du mélange d?air avec des poussières prévisibles. La formule issue de la norme
CEI 60079-14 :2013 (disposition 5.6.3.2) permet de calculer la température maximale de surface
de l'équipement en degrés Celsius du mélange poussière/air considéré, lorsque soumis à la
méthode d'essai conformément à la norme CEI 60079- 0, suivant la relation suivante :
Minima (Tmax ? 2/3 TMInuage et TMAX = TMIcouche ? 75 K).
Pour la luzerne, cela signifie que la température en surface du silo ne doit pas dépasser 80°C.
? Étape n°2 : Reconstituer le mécanisme accidentel dans la cellule :
Il s?agissait, plus spécifiquement, pour l?Ineris de :
- Déterminer la cohérence entre l?inflammation en fond de cellule et les observations constatées. Les
différentes modélisations EFFEX réalisées en considérant différentes hypothèses ont permis de
conclure qu?une explosion primaire en cellule C20 est cohérente avec les dégâts observés et
que bien qu?il soit difficile de déterminer le lieu de l?inflammation au sein de la cellule, il n?y
a pas de contradiction entre un scénario d?inflammation en fond de cellule et les dégâts
constatés ;
- Déterminer globalement l?énergie d?explosion produite. L?énergie globale d?explosion estimée est
au minimum de l?ordre de 240 MJ.
examiner les hypothèses d'une inflammation de poussières ou de gaz et évaluer les quantités de
poussière ou de gaz de pyrolyse mises en jeu.
L?hypothèse d?une explosion d?un grand volume inflammable composé uniquement de gaz de
pyrolyse mélangés à l?air paraît peu crédible, étant donné la faible réactivité constatée pour ce
mélange. La possibilité qu?une inflammation d?un mélange gaz de pyrolyse / air déclenche une
explosion de poussière est possible. Mais il est aussi possible que la mise en suspension de la
poussière soit due au débâtissage de la luzerne, et non à une explosion des gaz de pyrolyse. Dans
ce cas, le débâtissage aurait mis en contact la poussière de luzerne avec des particules rendues
incandescentes par un phénomène d?auto-échauffement en cours.
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Même s?il est difficile de déterminer précisément la quantité de poussière impliquée dans
l?explosion, on peut conclure à partir de l?estimation de l?énergie globale d?explosion et d?autres
constations, qu?une quantité assez faible, de l?ordre de quelques dizaines de kg, était suffisante
pour produire les effets observés, mais que la quantité réellement présente était certainement
largement plus importante.
? Étape n°3 : Réaliser une revue des recommandations inspirées de l?expérience des céréaliers
sur la gestion de l?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur
les parois :
NB : Après des sollicitations et contacts auprès des céréaliers et pré-information auprès du
BEA-RI, l?Ineris n?a pas reçu de confirmation de rendez-vous de la profession pour échanger sur leurs
bonnes pratiques sur la gestion d?auto-échauffement et la prévention des effets de voûte et de bâtissage
sur les parois. Ainsi, l?Ineris a exprimé auprès du BEA-RI ne pas avoir pu collecter des informations pour
pouvoir répondre spécifiquement sur la prévention des effets de voûte et de bâtissage sur les parois,
ce qui a été accepté par le BEA-RI.
En ce qui concerne la réactivité de solides combustibles tels que la luzerne en phase de stockage,
deux principaux phénomènes sont envisagés :
- un phénomène d?explosion de poussière lors du chargement gravitaire ou pneumatique de silos de
stockage,
- un phénomène d?auto-échauffement correspondant à une oxydation de la luzerne par l?oxygène de
l?air (feu couvant à combustion lente) ou initialement activité par une activité de fermentation
biologique par une teneur en humidité supérieure à 25 % de la luzerne :
o la luzerne est une substance combustible et est réactive à l?oxydation chimique. Les
températures de la luzerne dans les silos de stockage peuvent dépasser les températures
critiques d?auto-échauffement du fait des dimensions de stockage des silos de luzerne,
o des phénomènes de fermentation biologique (liée à un défaut qualité du produit par une
teneur en humidité élevée ou une introduction accidentelle d?eau de pluie ou d?eau de
lavage dans les silos) peuvent augmenter la température de la luzerne jusqu?à 75°C environ
et passer le relais au phénomène d?auto-échauffement du produit et faciliter ainsi l?atteinte
de sa température critique,
o le système de détection de CO dans les silos de stockage doit être suffisamment précoce
pour détecter convenablement un phénomène d?auto-échauffement : de plus, les orifices
de vidange des silos (vis planétaires, écluse rotative de vidange) doivent être étanches au
passage de l?air afin de limiter les entrées d?air et ainsi limiter les démarrages d?auto-
échauffement dans la partie inférieure des silos.
- Les techniques d?intervention relative aux installations de stockage de grains en cas d?explosion de
poussières et d?incendie sont bien connues à la lumière du retour d?expérience et sont définies au
§ IV du guide de référence rédigé par les céréaliers25.La gestion de la prévention et de la protection
du risque d?auto-échauffement avancé ou d?auto-inflammation des silos de stockage peut s?appuyer
sur les principes suivants :
o Optimiser la mise en place de la surveillance de la concentration de la teneur en CO dans
les ciels gazeux des silos de stockage et utiliser avec parcimonie le transilage ;
25 Connaître et faire face au risque aux risques des organismes stockeurs agricoles. Les principaux éléments à
appréhender en cas de situations accidentelles. Tome 2. https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
https://www.calameo.com/read/00632687737edc9d1e5e9
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o Favoriser le suivi de la mesure de concentration de CO dans le ciel de chaque silo de
stockage, ou par défaut, par groupe de silo (actuellement les ciels des silos de stockage
communiquent entre eux et cela constitue un volume d?air qui aurait un effet de dilution de
la concentration de CO en cas de début d?auto-échauffement dans un silo) ;
o S?appuyer sur les caractéristiques de suivi de la teneur en CO et en température indiquées
dans le Tableau 6 pour la gestion de la prévention des phénomènes d?auto-échauffement
et en cas de nécessité privilégier la vidange au plus tôt du silo en cas de suspicion ;
o Envisager de pouvoir inerter les ciels des silos de stockage par un gaz inerte.
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5 Annexes
Liste des annexes :
- Annexe 1 : Lettre de saisine du BEA-RI du 15/05/2023 (1 page) ;
- Annexe 2 : Résultats des mesures d?essais (9 pages) ;
- Annexe 3 : Description des essais (5 pages) ;
- Annexe 4 : Présentation de l?outil de calcul phénoménologique EFFEX (3 pages).
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ANNEXE 1
-
Lettre de saisine du BEA-RI
du 15/05/2023
1 page
Inspection générale de l?environnement
et du développement durable
Bureau d?Enquêtes et d?Analyses
sur les risques industriels
Mél : bea-ri@developpement-durable.gouv.fr
Tour Sequoia
1, place Carpeaux ,La Défense 6
92055 LA DÉFENSE CEDEX
http://www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr/bea-ri-r549.html
,
o
o
o
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ANNEXE 2
-
Résultats des mesures d?essais
9 pages
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Résultats Échantillon Réf. CRISTAL UNION «Luzerne»-référence Ineris 23AM101
Figure A1 : Évolution du taux d?humidité en fonction du temps de l?échantillon Ineris 23AM101
(105°C pendant 90 min)
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Figure A2 : Essai de caractérisation de friabilité et d'abrasion de l?échantillon Ineris 23AM101
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Figure A3 : Analyse ATD-ATG de l?ambiante à 800°C de l?échantillon Ineris 23AM101
Figure A4 : Courbe d?extrapolation selon la méthode Frank-Kameneskii des résultats
des essais en étuve isotherme de l?échantillon Ineris 23AM10123AM101
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Figure A5 : Essai en four tubulaire de 150°C à 400°C sous balayage d?air
sur l?échantillon Ineris 23AM101
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ANNEXE 3
-
Description des essais
5 pages
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Répartition granulométrique par tamisage mécanique
PRINCIPE
Le tamisage consiste à mesurer le poids d?un échantillon soumis à essai retenu par les toiles de mailles
de tamis calibrés. Chaque tamis est superposé par taille de maille décroissante selon une progression
mathématique. Le poids d?échantillon retenu (refus de tamis) peut alors être connu et permet d?obtenir
le pourcentage de refus pour chaque diamètre de maille par rapport au poids total de produit.
MODE OPERATOIRE
L?opération consiste à tamiser 100 g d?échantillon sur une table vibrante pendant 30 minutes avec des
tamis (grilles à maille carrée) de diamètre différents (1000, 500, 315, 180, 100, 63, 40 et 32 ?m).
Les refus récoltés sur chaque tamis sont pesés sur une balance.
Détermination du taux d?humidité
DISPOSITIF D?ESSAI
L?analyse est conduite à l?aide d?un dessiccateur thermique HX204, qui fait appel à une technologie
halogène qui permet un chauffage rapide et un contrôle précis de la température. Le dessiccateur
thermique est équipé d'une cellule de pesée MonoBloc et d'un récepteur de charge suspendu haute
performance, avec une résolution de 0,1 mg maximum. Les courbes de séchage permettent de
visualiser l'évolution de la mesure à l'écran. Les graphiques de contrôle affichent la tendance du taux
d'humidité en continu (résolution de 0,001 % TH et répétabilité de 0,01 % pour un échantillon de 10 g).
MODE OPERATOIRE
L?échantillon est réparti dans une coupelle en aluminium elle-même déposée dans le dessiccateur
thermique et séché à l?aide d?une lampe halogène à une température de 105°C pendant 90 minutes.
Le taux d?humidité est calculé par pesée différentielle au cours du séchage et suivi en continu.
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Caractérisation de la friabilité et de l'abrasion d?une poudre
ou d?un comprimé
DISPOSITIF D?ESSAI
Les systèmes particulaires sont classés selon leurs propriétés de taille, forme, porosité inter et
intra-particulaire.
Deux grandes catégories sont distinguées :
- Poudre cohésive,
- Poudre à écoulement libre.
Le mélange des poudres est fortement dépendant des propriétés d?écoulement des constituants, elles-
mêmes liées directement aux caractéristiques des poudres, telles que :
- Distribution granulométrique,
- Cohésion,
- Taux d?humidité
- Formes et propriétés de surface des particules
- Densité apparente et tassée,
- Les forces de Van Der Waals,
- Les charges électrostatiques,
- La friabilité impacte par exemple le choix du mélangeur (mélangeur convectif, cuve tournante?)
car la formation de poussières peut se révéler gênante dans plusieurs procédés.
La friabilité décrit la tendance des particules à se désintégrer sous l?effet des contraintes mécaniques
d?abrasion et d?attrition. Les petites particules ainsi formées modifient les propriétés d?usage de la
poudre (masse volumique du lit, coulabilité, propriété d?instantanéité?). Pour les agglomérats, on
parlera de résistance mécanique : elle dépend en particulier de la nature et de la consolidation des
ponts établis entre les particules durant l?agglomération. Plusieurs techniques sont employées pour
mesurer la friabilité des poudres (Bemrose et Bridgwater, 1987 ; Yan et Barbosa-Canovas, 2001 ;
Utsumi et al., 2001). Elles consistent, en général, à soumettre la poudre à des chocs mécaniques
(vibrations) dans un appareil spécifique pendant un temps donné.
L'un des critères de test de la résistance mécanique des comprimés et des noyaux est le test de friabilité
et d'abrasion. Au cours du processus d'enrobage, de transport et d'emballage, le comprimé perd un peu
de poids.
Le tambour de friabilité a été conçu pour tester la résistance au roulement et aux chocs des comprimés.
Une fracture prématurée ou un signe d'usure sur les bords indique que ces comprimés peuvent ne pas
résister aux rigueurs du transport. Le tambour d'abrasion permet d?effectuer des essais d'abrasion sur
l'attrition (usure) des comprimés causée par le frottement du produit pendant le transport.
Pour mesurer la perte de poids, les échantillons sont comptés et pesés. Ensuite, le test de friabilité est
effectué. Les échantillons sont culbutés à chaque tour du tambour de l'instrument de test de friabilité.
Une fois le test de friabilité terminé, les échantillons doivent être dépoussiérés et pesés à nouveau. La
différence de poids avant et après le test est déterminée comme étant la friabilité ; elle ne doit
généralement pas dépasser 1 %. Les comprimés d'un poids supérieur à 650 mg, les échantillons d'un
diamètre supérieur ou de forme irrégulière sont testés alors que l'instrument est soulevé d'un côté à
l'aide de pieds pliables jusqu'à un angle de 10 %.
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Analyse Thermique Différentielle et Thermique Gravimétrique
PRINCIPE
L'Analyse Thermique Différentielle et l?Analyse Thermique Gravimétrique permettent l'étude simultanée
des comportements thermodynamiques des matériaux.
Le principe de l'Analyse Thermique Différentielle consiste à suivre l?évolution de la différence de
température (?T) entre l?échantillon étudié et une référence inerte, c?est-à-dire dépourvu d?effets
thermiques dans le domaine de température étudié. L?Analyse Thermique Gravimétrique permet de
mesurer les variations de masse (?m) d'un échantillon au cours de son chauffage.
MODE OPERATOIRE
Un échantillon du produit à examiner, placé dans une nacelle en toile métallique identique à celle du
témoin, est introduit dans un four à température ambiante, dont on élève progressivement la
température à la vitesse de 5°C/min (rampe de température variable de 0,5°C/min à 5°C/min, plage de
température variable de l?ambiante à 800°C).
La variation de masse de l?échantillon placé dans le four est suivie à l?aide d?un module de pesée
électronique en fonction du temps. Les températures de l?échantillon (TE) et d?une substance inerte
choisie comme référence (TR) sont également enregistrées en fonction du temps. Les dispositions
adoptées permettent de préchauffer le courant d?air de balayage (440 Nl/h) à la même température que
le four (Figure B1).
Figure B1 : Schéma général de l?ATD/ATG
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Dans ces conditions, en comparant les températures de l?échantillon (TE) et de la substance inerte
choisie comme référence (TR), il est possible de mettre facilement en évidence de façon semi-
quantitative tout phénomène endo ou exothermique qui pourrait se produire au cours du chauffage.
L?emballement d?une réaction d?oxydation est pris en compte dès lors que la différence ?T entre
l?échantillon et la référence est égale ou supérieur à 50°C. Ceci permet d?enregistrer seulement les
réactions exothermiques franches sans tenir compte des faibles différences de températures entre
l?échantillon et le témoin pouvant s?expliquer par une conductivité thermique élevée de l?échantillon, une
réaction d?oxydation ne s?accompagnant pas d?une élévation de température susceptible de présenter
un danger, etc...
Les valeurs de température de la substance de référence au début de l?emballement d?une réaction
d?oxydation permettent de :
? définir le danger du produit testé vis-à-vis du risque d?auto-échauffement,
? de hiérarchiser l?oxy-réactivité de différents échantillons afin de procéder à des essais
complémentaires sur l?échantillon représentant le plus de risque d?auto-échauffement.
Un échantillon est considéré comme ayant une réactivité élevée vis-à-vis de l?oxy-réactivité lorsque la
température du témoin, pour un ?T = 50°C, est inférieure ou égale à 250°C. L?essai doit être complété
par un essai d?auto-échauffement visant à déterminer le domaine de la taille critique en fonction de la
température à partir duquel un risque d?auto-inflammation existe.
La réactivité est moyenne lorsque la valeur de la température témoin, pour un ?T = 50°C, est comprise
entre 250°C et 400°C. L?essai d?auto-échauffement n?est à réaliser que pour des stockages de grande
taille à température ambiante ou une utilisation du produit à des températures élevées.
L?oxyréactivtié d?un échantillon est faible lorsque la valeur de la température témoin, pour un ?T = 50°C
est supérieure à 400°C.
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Essais d?auto-échauffement en étuves isothermes (EN 15188)
PRINCIPE
L?essai consiste à déterminer la température critique d'auto-inflammation de volumes cubiques
croissants d'un combustible solide. Lorsque le volume des récipients cubiques augmente, la
température minimale d'auto-inflammation diminue et il est possible en théorie d'extrapoler jusqu'à un
volume de stockage plus important.
MODE OPERATOIRE
Pour cela, les échantillons sont placés à température ambiante dans des récipients de forme cubique
dont les parois sont formées par une toile métallique à mailles suffisamment fines pour éviter le
tamisage, mais qui ne freinent pas la diffusion d'oxygène. Le récipient est ensuite introduit à pression
atmosphérique dans une étuve isotherme ventilée à air chaud régulée à une température donnée. A
l'aide d'un thermocouple placé au centre de l'échantillon, on observe si la température de l'échantillon
se stabilise à la température de l?étuve, ou si elle s?élève rapidement.
Un nouvel essai est ensuite effectué à une température plus élevée ou plus basse suivant le résultat de
l?essai précédent, de façon à encadrer à 5°C près la température de l'étuve qui conduit à un auto-
échauffement de l?échantillon. Cette température est appelée température critique d'auto-échauffement.
En réalisant des essais sur différents volumes, il est possible de corréler la température d?auto-
échauffement à la dimension du stockage. En effet, les résultats des essais de stockage en étuve
isotherme peuvent être corrélés par une loi mathématique s?appuyant sur la théorie de l'auto-
échauffement pour des dimensions plus importantes que celles étudiées expérimentalement et/ou pour
des formes différentes. Ce calcul d'extrapolation fait appel notamment à l'hypothèse d'une libre diffusion
de l'oxygène de l'air dans le dépôt et à l'échange thermique par conduction dans le matériau. La
dimension critique est déterminée pour un stockage de forme cubique cylindrique ou plan. En effet, le
calcul intègre un facteur dépendant de la forme du stockage.
Essai en four tubulaire de 150°C à 400°C sous balayage d?air
Le four tubulaire de l'Ineris permet d'étudier, sous atmosphère contrôlée, la dégradation thermique
d?échantillons solides ou liquides. Les gaz et les particules émis lors de la combustion sont piégés et
analysés. [Norme de référence : NF X 70-100-2].
Cf Fiche Ineris :
https://prestations.ineris.fr/fr/solutions-thematiques/substances-produits/proprietes-
dangers/caracterisation-degradation-thermique
https://prestations.ineris.fr/fr/solutions-thematiques/substances-produits/proprietes-dangers/caracterisation-degradation-thermique
https://prestations.ineris.fr/fr/solutions-thematiques/substances-produits/proprietes-dangers/caracterisation-degradation-thermique
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ANNEXE 4
-
Présentation de l?outil de calcul
phénoménologique EFFEX
3 pages
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Présentation de l?outil de calcul phénoménologique EFFEX
L?explosion de de gaz ou de poussières, confinée ou partiellement confinée, peut être modélisée avec
l?outil phénoménologique EFFEX. Il permet de calculer la montée en pression dans le confinement en
prenant en compte la réactivité du mélange inflammable gazeux, la géométrie et la présence
d?ouvertures permanentes.
La situation courante correspond à une fuite de gaz inflammable dans un espace confiné ou
partiellement confiné.
Un mélange inflammable peut être formé dans un espace confiné. Sa taille, sa composition et son
agitation interne (turbulence) dépendent du type de fuite et des caractéristiques géométriques du
confinement. Si une source d?inflammation est située dans la zone inflammable du nuage, celui-ci
s?allume et une flamme se propage depuis le point d?inflammation. La figure 10 ci-après montre le
développement de la flamme dans le confinement.
C1 : Développement de la flamme dans le confinement
La flamme se développe sphériquement autour du point d?inflammation. Sur son chemin, la flamme
transforme les gaz frais en gaz brûlés chauds. Leur température typique est comprise entre 1 000°C et
2 000°C, ce qui aboutit à une large expansion des gaz brûlés.
L?excédent de volume produit par unité de temps est proportionnel à :
- La surface de flamme,
- Le taux de combustion soit la consommation volumique par unité de temps des gaz frais par
élément de surface de flamme. La dimension de ce paramètre est une vitesse et cette dernière
est souvent appelée vitesse de combustion.
- Le taux d?expansion thermique.
Cette production de gaz brûlés est responsable de la montée en pression dans le confinement. La
vitesse de montée en pression augmente quand ces trois paramètres augmentent.
Le taux d?expansion thermique est une propriété du mélange gazeux qui peut être prédite. Il dépend
uniquement du dégagement de chaleur lié à la réaction de combustion. Il peut être exprimé par
application de la première loi de thermodynamique :
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? =
?0
??
?
??
?0
=
??????
??. ?0
+ 1
Où :
- ?Hcomb est l?enthalpie de réaction (combustion) à T0 par unité de masse du mélange gazeux.
- T0 et Tb sont respectivement les températures des gaz frais et des gaz brûlés pour une réaction
adiabatique
- ?0 et ?b sont respectivement les masses volumiques des gaz frais et gaz brûlés.
- cp est la capacité calorifique massique moyenne du mélange de gaz brûlés.
C?est un paramètre intrinsèque qui dépend uniquement de la composition du mélange et non pas de la
façon dont la flamme se propage. Sa valeur est comprise entre 5 et 8 pour des hydrocarbures typiques
mélangés à l?air.
La vitesse de combustion dépend à la fois de la nature du mélange et de la vitesse à laquelle la chaleur
est transférée des gaz brûlés aux gaz frais. En effet, les produits de combustion transmettent la chaleur
aux gaz frais par diffusion thermique. La combustion peut être décrite par les lois thermocinétiques de
type lois d?Arrhenius. Leur paramétrage dépend uniquement des propriétés intrinsèques du mélange
tout comme la vitesse de combustion, aussi connue comme la vitesse de flamme laminaire, Slad. Cette
dernière dépend de la concentration en produit inflammable au sein du nuage. Pour un gaz, cette vitesse
est maximale pour un mélange en proportions stoechiométriques et décroit dès lors qu?on se rapproche
des limites du domaine d?inflammabilité.
Les mécanismes de turbulence, toujours présents, ont un impact favorable sur la diffusion de la chaleur
vers les gaz frais et augmente la vitesse de flamme. La surface de flamme subit des changements
durant sa propagation. Dans un volume relativement allongé, et en cas d?inflammation centrale, la
flamme se développe initialement sphériquement jusqu?à atteinte des parois. A leur contact, des
portions de surface de flamme disparaissent et restent deux éléments de flamme séparés se propageant
dans des directions opposées. Le front de flamme peut également devenir cellulaire ou courbés vers
les gaz brûlés sous l?effet des instabilités de Darrieus-Landau. L?allongement du confinement peut jouer
sur ces effets physiques.
Dans tous les cas, la surface de flamme maximale dépend des dimensions du confinement et
particulièrement de sa section transverse.
C2 : Schéma représentant les mécanismes de turbulence
L?évolution de pression dans le confinement est considérée homogène et uniquement liée à l?expansion
des produits de combustion. Cette hypothèse forte est valide si le taux d?allongement du confinement
(ratio entre la longueur de confinement et son diamètre hydraulique) est inférieur à 20.
Injection d?air
Tourbillon
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Sur son trajet, la flame convertit les gaz frais en gaz brûlés. On suppose également que ces deux zones
évoluent de manière isentropique. Avec une loi d?état des gaz parfaits, les principales équations
s?écrivent :
d/dt[?P(t)]/?P(t) = ?.Qfl(t) /V
Qfl(t) = St.Af(t).(?-1).T0/T
Où
? ?P(t) est la surpression interne à l?instant tis the internal overpressure at the time t.
? St est la vitesse de flamme turbulente.
? Qfl(t) est le taux de production de volume en excès lié à la conversion des gaz frais en gaz
brûlés.
? V est le volume d?enceinte.
? T est la température des gaz frais à l?instant t.
? Af(t) est la surface de flame à l?instant t.
? ? est le ratio des capacités calorifiques.
Le confinement peut être ouvert à l?atmosphère à travers des ouvertures permanentes ou créées par
l?explosion si la pression interne, liée à la production de gaz brulés dépasse la pression de rupture. Dans
ce cas, une ouverture est progressivement créée par la poussée de la surface fragile hors de son point
d?accroche. Le taux d?ouverture est limité par les effets d?inertie. Dans EFFEX, une équation prenant en
compte la balistique est résolue afin de quantifier l?évolution temporelle de l?ouverture de la surface. Un
paramètre clé pour quantifier les effets d?inertie est la surface massique de la surface fragile. Il peut être
évalué comme le produit de la masse volumique de l?élément et de son épaisseur.
Lorsque le confinement est ouvert à l?atmosphère, le débit de fuite à l?extérieur est non nul et s?écrit :
Qfuite(t)= -Cd.As.f[?P(t)]
Où
? Qfuite(t) est le débit volumique à travers les orifices.
? Cd est le coefficient de décharge.
? As est la surface des orifices.
? f[?P(t)] est une fonction qui dépend de la différence entre la pression interne et la pression
externe. Elle rend compte des effets de compressibilité de l?air. (Pour des faibles écarts de
pression, f[?P(t)] =?(2.?P/?)).
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