Engrillagement (l') en Sologne : synthèse des effets et propositions. Appui au préfet de la Région Centre-Val de Loire

STEVENS, Dominique ; REFFAY, Michel

Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable ; France. Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">La mission a accompagné le préfet de région Centre-Val de Loire dans la préparation de la conciliation qu'il entend mener sur les questions d'engrillagement. Elle a rencontré l'ensemble des acteurs usagers de la nature, chasseurs, propriétaires, associations, forestiers, parlementaires, élus locaux, établissement public pour recueillir leurs observations ; ainsi qu'un certain nombre de responsables nationaux, pour se forger une opinion sous différents angles : biodiversité, gestion des risques sanitaires, droit de la chasse, droit de propriété, urbanisme, production forestière, protection des cultures, éthique de la chasse... tant la question des clôtures croise de thématiques diverses. Le rapport aborde les questions d'engrillagement dans leur diversité de nature et d'effets par thématique. Il décrit les impacts sur les continuités écologiques, la biodiversité, les risques sanitaires, la chasse et l'éthique, ainsi que les questions de nourrissage, de sur-densité et de maîtrise des populations, d'illégalité de pratiques et d'artificialisation des milieux, d'image et de potentiel touristique. Sont formulées sept recommandations, fondées sur des propositions de modifications législatives ou réglementaires, qui relèvent du droit de l'urbanisme tel qu'il pourrait être mis en oeuvre en Sologne, mais aussi de dispositions nationales encadrant la chasse et la fiscalité des espaces boisés, étant entendu que l'engrillagement impacte déjà d'autres régions. La mission a assuré le 24 juin 2019, à la faveur d'un second comité de pilotage à la préfecture de région, un retour d'éléments opérationnels au préfet et à ses services. Enfin, elle appelle l'attention des commanditaires sur : l'urgence de la mise en oeuvre de dispositions nouvelles ; le fait que la Sologne est une région naturelle très concernée par l'engrillagement, mais qu'elle n'est certainement pas la seule ; les aménagements législatifs et réglementaires nationaux que la mission suggère, dépassant la question solognote. La mission formule le voeu que cette démarche de progrès puisse être partagée par tous, car elle va dans l'intérêt des chasseurs, des propriétaires, des promeneurs et d'une façon générale, elle s'inscrit au service de la valorisation et de l'identité de la région Centre-Val de Loire et de la Sologne.</div>
Editeur
CGEDD ; CGAAER
Descripteur Urbamet
espace boisé ; urbanisme réglementaire ; propriétaire ; propriété ; droit de l'urbanisme ; paysagisme
Descripteur écoplanete
biodiversité
Thème
Foncier - Propriété ; Cadre juridique ; Environnement - Paysage
Texte intégral
MINISTÈRE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET SOLIDAIRE MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE ET DE L'ALIMENTATION Appui au préfet de la Région Centre-Val de Loire Rapport CGEDD n° 012818-01, CGAAER n° 19062 P U B établi par Dominique STEVENS (CGEDD) Michel REFFAY (CGAAER) LI Août 2019 É L'engrillagement en Sologne : synthèse des effets et propositions PUBLIÉ Les auteurs attestent qu'aucun des éléments de leurs activités passées ou présentes n'a affecté leur impartialité dans la rédaction de ce rapport Statut de communication Préparatoire à une décision administrative Non communicable Communicable (données confidentielles occultées) Communicable PUBLIÉ PUBLIÉ Sommaire Résumé............................................................................................................................................. 4 Introduction................................................................................................................................... 7 1. L'engrillagement en Sologne : quelle réalité ?.................................................................8 1.1. Une atteinte à l'identité de la Sologne : contexte historique et conjoncturel....................8 1.2. Estimation du développement de l'engrillagement....................................................................9 1.2.1. L'enquête clôture et la cartographie établie par Yves Froissart en 2011................10 1.2.2. Les données de l'ONCFS mises à jour en juin 2019............................................................11 1.3. Quelles définitions des clôtures et de l'engrillagement ?.......................................................12 1.3.1. Les différentes destinations des clôtures................................................................................12 1.3.2. Le droit de propriété constitue un totem...............................................................................12 1.3.3. La clôture et le droit de l'urbanisme........................................................................................12 1.3.4. Les clôtures doivent respecter certaines règles..................................................................13 1.3.5. Les clôtures en matière agricole et forestière......................................................................14 1.3.6. Les clôtures et la chasse................................................................................................................ 14 2. Positions des acteurs............................................................................................................. 16 2.1. Leur diversité........................................................................................................................................... 16 2.2. Synthèse des avis des acteurs............................................................................................................16 3. Analyse des enjeux, synthèse des effets connus de l'engrillagement et pistes de progrès........................................................................................................................................... 18 3.1. Les principaux constats de la mission...........................................................................................18 3.2. Biodiversité, continuités écologiques et clôtures......................................................................19 3.2.1. La biodiversité dans les différents documents de cadrage.............................................19 3.2.2. Les clôtures altèrent le libre parcours des grands mammifères..................................22 3.2.3. Les clôtures hermétiques perturbent les impératifs biologiques................................23 3.3. Enclos, surpeuplement et cycles de la forêt.................................................................................24 3.3.1. Un objectif cynégétique difficilement compatible avec la gestion et la fiscalité forestière.......................................................................................................................................................... 24 3.3.2. Des indicateurs de gestion durable doivent être intégrés au PRFB............................25 3.4. Engrillagement et questions sanitaires.........................................................................................25 L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 1/68 PUBLIÉ 3.4.1. Engrillagement, introduction de grand gibier et risques...............................................26 3.4.2. Introduction d'animaux : un suivi partiellement défaillant qui progresse.............28 3.4.3. Une connaissance des enclos très imparfaite.......................................................................29 3.4.4. Une solution : interdire l'introduction de grand gibier dans l'espace naturel......30 3.5. Chasse et éthique.................................................................................................................................... 31 3.5.1. Une incontestable situation de pléthore................................................................................31 3.5.2. Rompre avec l'exception des enclos hermétiques au droit commun de la chasse 32 3.5.3. Le nourrissage, l'artificialisation du milieu et la surdensité.........................................33 3.5.4. Des densités animales non contrôlées et parfois illégales..............................................35 3.5.5. L'interdiction de la chasse en espaces hermétiques clos est simple et efficace......35 3.5.6. Chasse, transparence, information et communication....................................................36 3.6. Urbanisme et aménagement du territoire solognot.................................................................37 3.6.1. Le non-respect des règles en matière d'urbanisme est flagrant..................................37 3.6.2. Poser et faire appliquer un cadre en utilisant tout le potentiel des textes..............38 3.6.3. Faciliter les décisions des collectivités grâce à des modèles de clôtures..................38 3.6.4. Les communes responsables de la libre circulation sur les chemins ruraux..........39 3.7. Des clôtures nécessaires : agriculture, forêt, sécurité routière...........................................40 3.8. Modifier la fiscalité pour défavoriser l'engrillagement...........................................................41 3.9. Promouvoir le patrimoine naturel solognot avec des clôtures perméables...................42 4. Pistes de progrès : synthèses des propositions............................................................45 Conclusion.................................................................................................................................... 46 Annexes......................................................................................................................................... 47 1. Lettre de mission.................................................................................................................... 48 2. Liste des personnes rencontrées....................................................................................... 50 3. Glossaire des sigles et acronymes..................................................................................... 53 4. Quelques données en matière d'épidémiologie...........................................................55 5. La loi wallonne........................................................................................................................ 56 Circulaire n° 2 719 du 19 novembre 2013 relative à l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés...........................................................................56 L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 2/68 PUBLIÉ 6. Dispositions applicables dans les enclos et parcs de chasse....................................64 7. Analyse de la rétroactivité de la loi................................................................................... 65 8. État de la contamination Peste porcine africaine dans l'Union européenne (source UE juillet 2019)............................................................................................................ 67 9. Bibliographie........................................................................................................................... 68 L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 3/68 PUBLIÉ Résumé Conformément à la commande qui lui a été délivrée par trois ministres, la mission a accompagné le préfet de région Centre-Val de Loire dans la préparation de la conciliation qu'il entend mener sur les questions d'engrillagement. Dans un délai très court, la mission a rencontré l'ensemble des acteurs usagers de la nature, chasseurs, propriétaires, associations, forestiers, parlementaires, élus locaux, établissement public pour recueillir leurs observations. La mission s'est également livrée à un examen de la bibliographie existante et a rencontré un certain nombre de responsables nationaux, pour se forger une opinion sous différents angles thématiques : biodiversité, gestion des risques sanitaires, droit de la chasse, droit de propriété, urbanisme, production forestière, protection des cultures, éthique de la chasse... tant la question des clôtures croise de thématiques diverses. Le présent rapport aborde les questions d'engrillagement dans leur diversité de nature et d'effets par thématique. Ce travail décrit les impacts sur les continuités écologiques, la biodiversité, les risques sanitaires, la chasse et l'éthique, ainsi que les questions de nourrissage, de sur-densité et de maîtrise des populations, d'illégalité de pratiques et d'artificialisation des milieux, d'image et de potentiel touristique. Les missionnaires formulent sept recommandations, fondées sur des propositions de modifications législatives ou réglementaires, qui relèvent du droit de l'urbanisme tel qu'il pourrait être mis en oeuvre en Sologne, mais aussi de dispositions nationales encadrant la chasse et la fiscalité des espaces boisés, étant entendu que l'engrillagement impacte déjà d'autres régions. Les plus significatives visent : · l'extension du droit commun de la chasse à l'ensemble des territoires sur lesquels la chasse est pratiquée (unicité de la réglementation de la chasse et accès aux enclos « cynégétiques à des fins de contrôles) ; · l'encadrement, voire la suppression de l'agrainage, de l'affouragement, de l'introduction d'animaux dans le milieu naturel ; · l'interdiction de la chasse dans les enclos hermétiques, à l'exemple de la Wallonie ; · la mise en place, dans le cadre des préconisations du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) en cours d'élaboration, de modèles de clôtures plus perméables et acceptables par les usagers, acteurs et représentants solognots. La mission a assuré le 24 juin 2019, à la faveur d'un second comité de pilotage (le premier ayant eu lieu le 22 mai 2019) à la préfecture de région, un retour d'éléments opérationnels au préfet et à ses services. Enfin, la mission appelle l'attention des commanditaires sur : · l'urgence de la mise en oeuvre de dispositions nouvelles ; · le fait que la Sologne est une région naturelle très concernée par l'engrillagement, mais qu'elle n'est certainement pas la seule (nord-est, Landes...) ; à l'évidence, la question posée par la Sologne concerne -à terme- de nombreux territoires et sera regardée avec attention ; · les aménagements législatifs et réglementaires nationaux que la mission suggère, dépassant la question solognote. La mission, comme le préfet, les parlementaires et les élus rencontrés, comme la quasi-totalité des acteurs interviewés, formule le voeu que cette démarche de progrès puisse être partagée par tous, car L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 4/68 PUBLIÉ elle va dans l'intérêt des chasseurs, des propriétaires, des promeneurs et d'une façon générale, elle s'inscrit au service de la valorisation et de l'identité de la région Centre-Val de Loire et de la Sologne. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 5/68 PUBLIÉ Liste des recommandations Recommandation 1. Interdire (sauf exception) toute introduction de grand gibier dans l'espace naturel. À défaut, cette mesure peut être recommandée lors de l'élaboration des schémas départementaux de gestion cynégétique (Ministres ou Préfets)........................................................................................................................................... 31 Recommandation 2. Étendre le droit commun de la chasse à l'ensemble des territoires sur lesquels on chasse et permettre l'accès à des fins de contrôle par les agents habilités, à tout l'espace naturel chassé ou non, y compris les enclos et sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques (Ministres, Parlementaires)............................................................................. 33 Recommandation 3. Interdire l'agrainage et l'affouragement sous toutes ses formes et en tout lieu de l'espace naturel soumis à la pratique de la chasse ; à défaut, un renforcement des conditions exigées en SDGC en zone libre et une interdiction totale de l'agrainage et de l'affouragement en enclos constituent des voies de progrès (Ministres ou préfets)............................................................................... 34 Recommandation 4. Interdire la chasse dans les enclos hermétiques à toute la faune sauvage, sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques, et raffermir la lutte contre les poses illégales de grillages, prenant notamment la forme de nasses à gibier (Préfets, procureurs, ONCFS)............................................................................................................................................ 36 Recommandation 5. Rendre obligatoire, dans le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), les prescriptions concernant les caractéristiques des clôtures incluant la procédure de déclaration préalable à leur édification et profiter de son élaboration pour progresser sur l'établissement de modèles (préfet de région et conseil régional). ........................................................................................................................................................... 39 Recommandation 6. Augmenter la fiscalité foncière et immobilière sur les espaces hermétiquement engrillagés en appliquant aux propriétés rurales closes une forte majoration de la taxe sur le foncier non bâti (multiplication par trois ou cinq, disposition à voter en loi de finances) et, d'autre part, en supprimant les réductions des droits de mutation des propriétés forestières et de l'impôt sur la fiscalité immobilière obtenus avec un certificat de gestion durable, sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques (Ministres)..................................................................................................................................... 42 Recommandation 7. Créer un label « Chasse naturelle de Sologne » (préfet de région et conseil régional)....................................................................................................... 43 L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 6/68 PUBLIÉ Introduction Par lettre datée du 26 avril 2019 (annexe 1), les ministres de la transition écologique et solidaire, de l'agriculture et de l'alimentation, la secrétaire d'État auprès du ministre d'État ont demandé au conseil général de l'environnement et du développement durable et au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux, d'appuyer le préfet de région Centre-Val de Loire dans sa mission de conciliation relative aux effets de l'engrillagement des propriétés forestières en Sologne. Ces éléments permettront au préfet de mener une concertation sur des données objectivées et à l'échelle de cette zone recoupant plusieurs départements. Après un premier comité de pilotage régional et à partir d'une liste de personnalités établie dans cette instance, la mission a auditionné 44 personnes représentant associations, structures, propriétaires, parlementaires et élus locaux entre mi-mai et le début de l'été. La mission a procédé à l'analyse de nombreux textes et études sur le sujet de l'engrillagement et des clôtures en Sologne. La mission a retenu une double approche basée à la fois sur la réaction des acteurs et sur une vision par grands thèmes. Le présent rapport constitue un document de synthèse, à destination du préfet de la région CentreVal de Loire pour nourrir la concertation souhaitée. Il présente et analyse les enjeux et les effets de l'engrillagement sur le fonctionnement écologique de la Sologne, puis envisage des pistes de progrès par grands axes sous forme de recommandations d'ordre législatif, réglementaire ou conventionnel. Couloir de clôtures à Yvoy-Le-Marron, photographie des auteurs L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 7/68 PUBLIÉ 1. L'engrillagement en Sologne : quelle réalité ? « La clôture vient physiquement bloquer l'homme et l'animal, mais elle vient également se dresser à l'encontre des valeurs intrinsèques que certains associent à la nature et ainsi leur ôter la possibilité de penser la nature comme ils le souhaiteraient »1. « La Sologne, espace perçu comme « naturel » par bien des citadins, mais majoritairement privé, est l'exemple magistral de la parcellisation du foncier, puisqu'en Brenne, le phénomène des enclos s'appelle désormais « solognisation ». 2 1.1. Une atteinte à l'identité de la Sologne : contexte historique et conjoncturel Plusieurs élus et associations de la région Centre-Val de Loire ont attiré l'attention du Président de la République et des ministres chargés de l'écologie et de l'agriculture sur la question de l'engrillagement en Sologne, en soulignant ses effets négatifs en matière de tourisme, de paysage, sur les continuités écologiques et sur les risques sanitaires concernant la faune sauvage et domestique. De nombreuses études de terrain, mémoires, thèses ont abordé cette thématique, ainsi que de nombreux articles parus dans « le Petit Solognot » en 2012, des films et documentaires dont la mission a pris connaissance. Le sujet n'est pas récent puisque déjà, en juillet 1991, le syndicat mixte de la Sologne émettait la motion suivante : « Les clôtures : - constituent un problème envers la circulation du grand gibier ; - enlaidissent le paysage et nuisent à l'image de la Sologne et son développement touristique ; - détériorent la qualité cynégétique des populations (chasse)» ; Déjà, le souhait de mesures d'accompagnement, notamment fiscales, en complément d'éléments réglementaires existants était exprimé ainsi qu'une prise en compte du «caractère d'agrément» des terrains clôturés lors de la révision des évaluations cadastrales. Vingt ans plus tard, en 2011, le syndicat mixte du pays Grande Sologne a animé une concertation, cette fois à une échelle bien plus vaste que son territoire propre. En effet, il occupe une position centrale en zone naturelle Sologne. Par ailleurs, il est le seul pays dont le territoire soit uniquement solognot. La « zone Natura 2000 » de Sologne, est la plus vaste au plan européen avec 350 000 hectares. Son comité de pilotage est assuré par le Pays de Sologne attestant du rôle clé de ce dernier. Cette concertation a conduit à la production du rapport d'Yves Froissart, dont les constats et propositions sont plus que jamais d'actualité. Des extraits ou citations, qui nourrissent la réflexion, 3 sont cités dans le présent rapport. Plus récemment, le conseil régional Centre-Val de Loire a adopté le 20 décembre 2018 un amendement proposé dans le cadre du Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), réglementant strictement la construction de clôtures autour des propriétés. Désormais, elles devront respecter une hauteur maximale d'1,20 m, laisser un espace de 30 cm minimum au-dessus du sol et devront être exclusivement construites à l'aide de matériaux 1 Comment l'engrillagement en Sologne questionne-t-il les valeurs associées à la forêt ? Recherche exploratoire sur l'interaction homme-nature dans le contexte de la propriété privée, Juliette Mouche, AgroParisTech 2013. Approche ethnologique des enclos d'élevage du grand gibier et des parcs de tir, Goergen, P. (1993) Ministère de l'environnement. 2 3 « Faire face aux engrillagements en milieu naturel, agricole et forestier en Grande Sologne », Étude ­ Concertation, Janvier- juillet 2011, Yves Froissart. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 8/68 PUBLIÉ naturels. Cette démarche conduite par François Bonneau, président de la région Centre-Val de Loire et appuyée par Guillaume Peltier, député du Loir-et-Cher, est considérée par certains comme un facteur d'accélération d'une course à l'engrillagement, avant que ne soit adopté ce schéma. Le débat qui a eu lieu et qui dure encore, sur le fait de clore ou non, implique une analyse plus globale de ses conséquences aux plans économique, environnemental, social. La Sologne est une vaste zone naturelle, de la dimension de deux tiers d'un département français, répartie sur trois départements, le Loir-et-Cher, le Loiret et le Cher. Le contexte économique, environnemental et social en Sologne est perçu par la plupart des interlocuteurs, y compris les propriétaires, comme en pleine évolution. Les activités traditionnelles sont perçues comme en recul économique, qu'il s'agisse de la forêt, de l'agriculture, de la pisciculture ou même localement, de la chasse. Les activités économiques qui pourraient devenir «structurantes» pour le territoire ont de la peine à décoller, comme le tourisme de nature, malgré les interventions des pouvoirs publics et des acteurs privés. La déprise des cultures, de la pisciculture et de l'élevage d'une part et l'évolution d'une chasse du «petit gibier» vers celle du «grand gibier» d'autre part, constituent des changements profonds qui modifient le territoire : fermeture, appauvrissement du paysage et transformation des types de chasse. Dans ce contexte, la proximité de Paris, l'attrait de la nature et de la chasse, l'envie de consolider de grandes propriétés, contribuent à maintenir la valeur du foncier à un niveau élevé d'où le verbatim : « le foncier solognot ne connaît pas la crise ». 1.2. Estimation du développement de l'engrillagement En parcourant la Sologne durant un mois, la mission a été frappée par l'importance du linéaire de clôtures présent et constaté de nombreux chantiers en cours. Les éléments tangibles à disposition de la mission pour dénombrer les clôtures sont les suivants : · L'enquête clôture et la cartographie établie par Yves Froissart en 2011 4 ; · Les données de l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) mises à jour en juin 2019. 4 Étude - concertation réalisée à la demande du Syndicat mixte du Pays de Grande Sologne. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 9/68 PUBLIÉ 1.2.1. L'enquête clôture et la cartographie établie par Yves Froissart en 2011 Cartographie des clôtures en 2011, Y. Froissart L'enquête clôture et la cartographie établie par Yves Froissart en 2011 permet de visualiser l'ampleur du phénomène. Un lecteur averti peut se reporter à l'intégralité du rapport d'étude-concertation 5 pour découvrir la cartographie détaillée réalisée par grands secteurs géographiques. Inventaire des clôtures en Grande Sologne en 2011, Y. Froissart 5 « Faire face aux engrillagements en milieu naturel, agricole et forestier en Grande Sologne », Étude ­ Concertation, Janvier- juillet 2011,Yves Froissart L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 10/68 PUBLIÉ Ainsi, l'auteur dénombrait 670 km de clôtures visibles à partir du domaine public (non comprises les clôtures qui longent l'autoroute A71, ni celles qui séparent deux propriétés, ni celles à l'intérieur de propriétés closes) sur le territoire du Pays de Grande Sologne. Ce résultat était obtenu après enquête auprès des mairies du Pays (25 communes répondantes) et avec la contribution du centre régional de la propriété forestière (CRPF). A noter que ce dernier ne prend en compte pour son inventaire, que les clôtures d'une hauteur d'1 mètre ou plus, visibles depuis la route. Il s'agit en conséquence clairement d'un chiffre minimal. 1.2.2. Les données de l'ONCFS mises à jour en juin 2019 L'ONCFS a procédé à une mise à jour des données d'engrillagement en juin 2019. Dans le département du Loir-et-Cher, « 1 500 c'est "au bas mot" le nombre de kilomètres de grillages que l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) enregistrera une fois ses derniers relevés actualisés en Sologne du Loir-et-Cher. Parmi les communes les plus "engrillagées", le service cite Lamotte-Beuvron, Chaon, Chaumont-sur-Tharonne, Yvoy-le-Marron ou encore Saint-Viâtre ».6 Nombre de clôtures Loiret Cher Loir-et-Cher Étude Y. Froissard 2011 (Grande Sologne) 531 202 846 421 Linéaire cartographié en km 1242 633 1200 597 Inventaire des clôtures dans les départements solognots, ONCFS 2019 Cette estimation conduit à plus de 3 000 km de linéaire. Malgré la qualité des travaux effectués, la mission n'a pu évaluer l'évolution importante de l'implantation des clôtures en Sologne qu'à minima. Aussi il paraît essentiel que les inventaires des linéaires de clôtures soient réactualisés et confortés en permanence pour mieux connaître l'évolution positive ou négative, notamment à partir des déclarations préalables de travaux et des autorisations accordées, des constats des services compétents en la matière, ainsi que de la connaissance des clôtures supprimées. Ces cartes doivent être mises à disposition du public, des collectivités et des services de l'État concernés, à fins d'information et de bonne gestion. La mission propose qu'un inventaire cartographique permanent et actualisé des clôtures par grand type soit assuré avec du personnel dédié et compétent en système d'information géographique (SIG) au sein d'un des organismes suivants : office français de la biodiversité (OFB), direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF), Conseil régional, agence régionale de la biodiversité (ARB), avec la participation des associations locales. 6 La Sologne malade des grillages ? Une enquête de la Nouvelle République à lire dans l'édition de Loir-et-Cher du journal du mercredi 22 novembre 2017 L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 11/68 PUBLIÉ 1.3. Quelles définitions des clôtures et de l'engrillagement ? 1.3.1. Les différentes destinations des clôtures Les clôtures ont pour objet : - de matérialiser la propriété, - d'assurer la sécurité en se protégeant de la pénétration humaine, - de permettre une protection temporaire des régénérations forestières, - de protéger les cultures contre les dégâts, essentiellement du grand gibier, - de parquer le bétail, - de contribuer à un objectif cynégétique : enclos, parcs de chasse, élevage. 1.3.2. Le droit de propriété constitue un totem Comme le rappelle l'article 544 du code civil : « La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements »7. Selon l'article 647 du code civil, « Tout propriétaire peut clore son héritage, sauf l'exception portée en l'article 682 ». (l'article 682 prévoit une exception pour accès à un territoire enclavé). Contrairement à ce qui peut parfois être allégué, le droit de se clore n'est pas un droit absolu. Le principe et les modalités de la clôture ne sont pas à la discrétion du propriétaire. Ainsi certains types de clôtures constituent un abus de droit touchant aux libertés fondamentales (usus/fructus/abusus), diminuent la destination universelle des biens, réduisent la liberté de circulation des personnes , ou peuvent provoquer un trouble anormal de voisinage, qui, dans certains cas, constituent un préjudice matériel et certain, malgré les notions d'antériorité (seuil d'anormalité et nuisances avérées). 1.3.3. La clôture et le droit de l'urbanisme Curieusement, on ne trouve pas de textes officiels récents qui qualifient ce que l'on peut considérer comme « clôtures » : C'est une circulaire ancienne du ministère de l'équipement (25 juillet 1986) qui définit : « une clôture peut être constituée de murs, quelle qu'en soit la hauteur, de portes, de portails, d'ouvrages à claire-voie en treillis, de pieux, de palissades, d'ouvrages métalliques, grilles, herses, barbelés » Elle peut aussi être constituée de haies vives et de fossés ». Selon une circulaire plus ancienne du même ministère (21 août 1978) : « une clôture est ce qui sert à enclore un espace, le plus souvent à séparer deux propriétés : propriété privée et domaine public ou deux propriétés privées. Elle est alors élevée en limite séparative des deux propriétés ». « Ne constitue pas en revanche une clôture au sens du code de l'urbanisme, un ouvrage destiné à séparer différentes parties d'une même unité foncière en fonction de l'utilisation par le même propriétaire de chacune d'elles ... à l'inverse, un ouvrage séparant plusieurs parcelles d'une même unité foncière mais dont les droits sont mis en oeuvre par différents utilisateurs (par contrat de bail ou autres...) constitue une clôture au sens du code de l'urbanisme ». 7 Thèse de Laurent Millet : Contribution à l'étude des fonctions sociale et écologique au droit de propriété : enquête sur le caractère sacré de ce droit énoncé dans la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, université Panthéon-Sorbonne, paris I, 2015. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 12/68 PUBLIÉ 1.3.4. Les clôtures doivent respecter certaines règles Le code de l'urbanisme et son application dans les plans locaux d'urbanisme (PLU) donne le pouvoir aux communes « d'imposer des règles sur la nature des clôtures et d'obligations de déclaration au préalable de travaux pour toute nouvelle édification de clôtures (à l'exception des clôtures agricoles et forestières) » (Froissart, 2013). Enfin, de nouveaux outils de réglementation des clôtures pourraient voir le jour à travers les schémas de cohérence territoriale (SCOT) institués en 2007. Depuis janvier 2007, toute commune, qu'elle dispose d'un document d'urbanisme ou non, peut décider, par simple délibération, de rendre obligatoire la déclaration préalable de travaux pour toute nouvelle édification de clôture, selon l'article R. 421-12 du code de l'urbanisme, alinéa d) ainsi rédigé : « Doit être précédée d'une déclaration préalable l'édification d'une clôture située : (...) d) Dans une commune ou partie de commune où le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme a décidé de soumettre les clôtures à déclaration... » Cette règle vient compléter la règle de l'alinéa c) du même article qui concerne les communes titulaires d'un PLU dans un secteur délimité par le plan local d'urbanisme en application du 7° de l'article L. 123-1. S'agissant des communes dotées d'un PLU, elles ont compétence pour définir des règles en ce qui concerne les clôtures. Ce 7° de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme cité au point précédent, dans sa dernière version de janvier 2010 définit que le règlement d'un PLU « peut : (...) identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les quartiers, îlots, immeubles, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique ou écologique et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur protection ». Pour ce qui concerne les communes d'un territoire ne disposant pas de document d'urbanisme, la loi dite « Grenelle II » du 12 juillet 2010, définit un certain nombre de règles d'urbanisme qui prennent place notamment dans les « schémas de cohérence territoriale » (SCoT). Ainsi, le code de l'Urbanisme issu de cette loi définit par son article L. 122-1-6 : « Le document d'orientation et d'objectifs peut, par secteur, définir des normes de qualité urbaine, architecturale et paysagère applicables en l'absence de plan local d'urbanisme ou de document d'urbanisme en tenant lieu. ». Ainsi, toute commune, dès lors qu'une règle concernant les clôtures est édictée dans un SCOT, est tenue d'appliquer celle-ci : · soit en application d'un PLU qui doit -au nom de la règle de « compatibilité » avec le SCOT qui s'impose à lui- adopter la règle définie par ce SCOT ; · soit en l'absence de PLU, la commune est alors tenue d'adopter la règle définie dans le SCOT (les modalités exactes sont alors à préciser). Cette règle est importante, car elle rend solidaires l'ensemble des communes d'un SCOT du fait qu'elles ont la même exigence à l'égard des clôtures. Les auteurs du PLU ont la faculté d'imposer pour les clôtures «des caractéristiques permettant de préserver ou remettre en état les continuités écologiques». Les communes sont enfin habilitées à fixer des modèles de clôtures. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 13/68 PUBLIÉ 1.3.5. Les clôtures en matière agricole et forestière Pour les clôtures agricoles et forestières, l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme indique : « Sont dispensées de toute formalité au titre du présent code, en raison de leur nature ou de leur très faible importance, sauf lorsqu'ils sont implantés dans un secteur sauvegardé dont le périmètre a été délimité ou dans un site classé (...) g) Les clôtures, en dehors des cas prévus à l'article R. 421-12, ainsi que les clôtures nécessaires à l'activité agricole ou forestière » On peut trouver par ailleurs dans l'article L. 311-1 du code rural la définition de ce qu'est une «activité agricole». En ce qui concerne l'activité forestière, les acteurs régionaux de la forêt reconnaissent qu'elle ne justifie de clôture qu'aux premiers stades de régénération d'une parcelle (qui durent moins de dix ans) et lorsque la densité élevée de cervidés le nécessite. Ainsi, ni les haies vives ou les fossés, ni les clôtures agricoles et forestières ne sont concernés par la déclaration préalable obligatoire de travaux ; ces dernières ne font pas l'objet de définitions précises au plan législatif ou réglementaire de ce qu'elles doivent être, sinon par le fait de leur utilité en rapport avec l'activité effectivement agricole ou forestière sur la parcelle concernée et leur caractère « amovible ». Elles sont cependant soumises à l'obligation de respecter les règles d'urbanisme, dont le retrait. Les caractéristiques principales des éléments physiques d'une clôture en milieu naturel, agricole, forestier sont sa hauteur, la présence de grillage enterré à la base ou non, ou seulement de fils, la présence ou non de barbelés, la dimension et la forme des mailles du grillage, la nature des poteaux (en bois ou autres matériaux), l'électrification ou non, son caractère pérenne ou au contraire provisoire. A cela peuvent s'ajouter d'autres critères comme l'éloignement du bord d'une route ou le doublement par une haie vive par exemple. Ces exemples sont évoqués pour suggérer une caractérisation qui pourra être retenue (modèles) en matière de règles d'urbanisme. 1.3.6. Les clôtures et la chasse L'enclos cynégétique résulte de la survivance d'une exception. Dès 1790, les enclos bénéficiaient d'une protection pénale contre les actes de chasse sur autrui (protection de la propriété privée). Mais, l'émergence des enclos était aussi fondée sur la protection des récoltes avoisinantes (actions de chasse contenues par une clôture). En 1844, à des fins de protection du gibier, les règles dérogatoires au temps de chasse sont limitées aux enclos. Le législateur cherchait déjà à contenir le plus possible les avantages accordés aux enclos mais cela était jugé délicat, car ils bénéficiaient de la protection du domicile et donc limitait les contrôles (nous reviendrons sur cette interprétation du droit plus loin). En 1885, un projet de loi supprimant le « privilège des enclos » n'est repoussé par le Sénat que par 10 voix de majorité. En 1924, la clôture est définie comme devant être infranchissable par l'homme et le gibier à poil. En 1976, la dispense du permis de chasser disparaît et seule la chasse en tous temps du gibier à poil et des oiseaux d'élevage demeure (l'annexe 6 liste les nombreuses règles auxquelles les enclos cynégétiques peuvent déroger, comparés aux parcs de chasse). L'histoire montre ainsi que la protection originelle visant uniquement la protection du domicile s'est élargie au profit de la construction des enceintes "grillagées" à des fins cynégétiques. En définitive comme le souligne Colas-Belcour dans son ouvrage la chasse et le droit (p.275, 15 ed.), "l'évolution historique montre que le but n'a jamais été de constituer des "zones franches de toute réglementation cynégétique" mais seulement de protéger la propriété et les récoltes et pragmatiquement de ne pas imposer des règles difficiles à contrôler. La démarche constante au cours de l'histoire a été de faire gagner le droit commun cynégétique et la protection de la faune. On doit garder ces éléments en mémoire pour éviter les contresens au sujet des enclos". L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 14/68 PUBLIÉ Le tableau suivant rappelle les principales caractéristiques des espaces clos rencontrés : Types d'espace clos Enclos cynégétique Définitions Il fait l'objet d'une définition légale : clôture totalement hermétique (mur ou grillage de 2 mètres doublé de grillage enterré) attenant à une habitation. Art. L. 424-3 C. Env. Droit de chasse spécifique très favorable par rapport au droit commun (cf annexe 6) Parc de chasse Élevage Définition juridique « par défaut » : tout ce qui n'est pas un enclos ci-dessus ou un élevage cidessous. Droit de chasse commun La notion d'élevage repose sur un critère de densité au sein de l'enceinte : 1 (grand) animal à l'ha. (Art. 4 des arrêtés du 20 août 2009 et du 8 février 2010) « Lorsqu'un enclos au sens du I de l'article L. 424-3 du code de l'environnement ou un parc de chasse accueille plus d'un animal par hectare, il constitue un établissement d'élevage ». Ainsi la loi définit des «enclos cynégétiques» par l'article L. 424-3 du code de l'environnement (2005), auxquels sont associés des droits et devoirs : ce sont des enclos « attenants à une habitation et entourés d'une clôture continue et constante faisant obstacle à toute communication avec les héritages voisins et empêchant complètement le passage de ce gibier et celui de l'homme ». Ces enclos -dès lors qu'ils sont en conformité avec les dispositions ci-dessus- bénéficient d'un certain nombre d'aménagements au droit commun de la chasse (cf. annexe 6). Mais certains enclos prétendus cynégétiques présentent une non-conformité (absence d'habitation ou défaut de fermeture ...) subtilité qui conduit par défaut à des «parcs de chasse» définis par la police de la chasse (ONCFS) comme des «enclos non-conformes à l'article L. 424-3 du code de l'environnement » mais ils présentent néanmoins une «clôture infranchissable par les mammifères et l'homme sur la quasi-totalité du périmètre ». Ainsi, ils constituent des zones « hermétiques » (à noter qu'un homme placé sur cette zone de passage libre, ou des artifices temporaires comme la pose de bandes rubalises ou autre dispositif voyant, permettent d'éviter le franchissement par les animaux pendant la chasse). Ces espaces ne constituent pas des enclos « cynégétiques » et ne bénéficient pas des droits y afférents, ils constituent bien des parcs de chasse « hermétiques » au moins de façon temporaire. En résumé, les « façons de clôturer» sont très variables et s'inscrivent dans une logique d'usage. Elles sont peu définies, mais peuvent l'être au travers des documents d'urbanisme. Schématiquement deux catégories de clôtures apparaissent : · Elles peuvent prendre la forme de « clôtures » (2 mètres environ, doublées sur la partie basse de 50 cm de grillage à mailles fines enterrés), hermétiques, empêchant la vue et le passage de toute faune et de l'homme. · Elles peuvent prendre la forme de « petites barrières » matérialisant la propriété, franchissables. Elles ne coupent pas la vue et rendent possible dans une certaine mesure, la circulation de la petite et de la grande faune sauvage. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 15/68 PUBLIÉ 2. Positions des acteurs 2.1. Leur diversité Sur proposition du préfet de région Centre-Val de Loire, les acteurs dont la liste se trouve en annexe 2 ont été auditionnés : associations, représentants de chasseurs de chasseurs, représentants de la profession agricole, propriétaires, représentants des acteurs forestiers, élus locaux, parlementaires. 2.2. Synthèse des avis des acteurs La synthèse des avis des acteurs mérite deux observations : · l'ensemble de nos interlocuteurs a fait montre d'un véritable attachement à la « région de Sologne » et ont tous manifesté une volonté de progrès, voire une certaine concorde ; · tous nos interlocuteurs sont opposés aux grands grillages hermétiques, qui coupent la vue, qui coupent la circulation des petits animaux comme des grands, qui isolent finalement leurs propriétaires d'une identité solognote ouverte, d'un tourisme qui va en souffrir et d'une forme de vivre ensemble qui s'en trouve affectée. Dans les arguments mis en avant et émanant des parties, sont souvent et très majoritairement cités : · l'identité solognote qui se trouve profondément affectée par ce territoire morcelé de grillages qui coupent la vue, · la circulation de la faune qui se trouve totalement entravée et de façon croissante au fur et à mesure que les enclos hermétiques sont érigés ; · l'artificialisation du milieu solognot qui résulte de ce mitage par le grillage. La mission note la contrariété d'une grande majorité des chasseurs, exaspérés par la perte de valeur cynégétique qui résulte de l'entrave à la circulation des animaux ; · l'existence de zones de chasses manquant totalement d'éthique (lâcher, agrainage, couloir de circulations, « abattage » massif) , dont les pratiques sont amplifiées par des rumeurs pas toujours sans fondements ; · le désarroi des promeneurs devant le linéaire de chemins bordés de hautes clôtures, voire de bâches plastiques ou de talus, qui désormais s'offrent à eux inexorablement dans certaines zones ; · l'incapacité d'un certain nombre d'élus locaux de résister à des propriétaires évidemment importants pour leur commune ; · les élus, qui ont manifestement besoin de textes nationaux et régionaux pour soutenir des démarches territoriales d'amélioration ; · et bien sûr les services de l'État qui, chacun tentant de faire de son mieux, dans la limite de ce que leur permettent un droit paradoxal en matière de chasse du grand gibier, des interprétations bien frileuses du droit de propriété, des fichiers que l'on garde pour soi, des procédures de contrôle quelquefois bien timides. Autant d'ingrédients qui accompagnent une dérive silencieuse, pendant que chaque jour l'engrillagement progresse d'autant plus que certains propriétaires craignent qu'il soit restreint. Au final, les avis des personnes rencontrées convergent tous : · vers une suppression de l'engrillagement hermétique de type enclos. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 16/68 PUBLIÉ · pour condamner l'introduction de grand gibier et le nourrissage qui leur paraissent inutiles, alors que la Sologne connaît des tableaux de sangliers, hors enclos et parcs, déjà très élevés et en forte croissance (voir partie chasse et éthique). C'est la raison pour laquelle la suppression de la chasse en enclos au profit de la chasse en parc délimité par de « petites barrières » recueille une quasi-unanimité. Bien sûr, la mission a rencontré quelques nuances dans les propos. Par exemple le droit de propriété est évidemment un point sensible, comme la fiscalité liée à la gestion forestière, comme la peur d'affaiblir l'économie cynégétique. La mission a noté les propos sans doute plus vifs du côté des promeneurs. Certains chasseurs sont plus prudents et manifestent une inquiétude lorsqu'on touche aux équilibres des espèces chassées et notamment au sanglier, qui est considéré comme l'espèce justifiant un important volume de prise de permis de chasser chaque année. Mais les acteurs s'accordent sur la nécessité de faire bouger les lignes et de progresser. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 17/68 PUBLIÉ 3. Analyse des enjeux, synthèse des effets connus de l'engrillagement et pistes de progrès La commande délivrée à la mission ne concerne pas seulement l'engrillagement lié à la pratique du tir en enclos et parcs cynégétiques en France et en Sologne. Elle intègre également la non application des règles en matière d'implantation des clôtures sur tout le territoire solognot. Pour articuler sa réflexion, la mission a retenu une double approche, par acteurs que nous venons d'évoquer et par grands thèmes. Sont présentés dans les axes suivants la synthèse des effets connus et des pistes de progrès : biodiversité, gestion forestière, sanitaire, chasse et éthique, urbanisme, mesures fiscales, communication. Ainsi, la concertation souhaitée par les ministres doit permettre un accord des parties, une délibération d'ensemble pour la mise en oeuvre cohérente des différents documents stratégiques en Sologne. 3.1. Les principaux constats de la mission De façon synthétique, la mission constate : · une fermeture de l'espace qui dégrade la qualité paysagère, la valeur patrimoniale et la fonctionnalité de toute la Sologne et nuit à son image et à sa perception par la société ; · une appropriation renforcée de l'espace et un frein à l'exercice de la police de l'environnement, par une déviance du droit des enclos créant des zones de non-droit (en entravant les contrôles) où la gestion « cynégétique » est littéralement aberrante ; · un risque sanitaire potentiellement important lié à l'introduction d'animaux, un cloisonnement des populations, une fragmentation des habitats, une surpopulation manifeste de certains enclos et parcs, sans contrôle vétérinaire ; populations animales elles-mêmes, les types de chasse pratiqués et indirectement les habitats naturels (les clôtures hermétiques fragmentent les habitats de cortèges importants de la faune sauvage, ainsi que leurs impératifs biologiques : nutrition, reproduction , déplacement ) ; · une entrave à la libre circulation des grands animaux sauvages avec les conséquences sur les · des problèmes de sécurité routière induits par la canalisation des grands animaux du fait des clôtures, avec une sur accidentologie ; · des dégâts dus au gibier concentrés sur les propriétés non closes ; · une mise en péril de l'état forestier en présence de surpopulation de suidés et cervidés ; · des installations de miradors et postes de tir mettant en danger les usagers des voies publiques . Au sein des collectivités publiques, la question des clôtures est débattue depuis des années en Sologne. Les clôtures, aux exceptions près que prévoit la loi pour celles nécessaires à la gestion agricole, forestière ou la sécurité, lorsqu'elles dépassent une certaine hauteur, ou lorsqu'elles sont constituées de matériaux inadéquats, sont jugées nuisibles en raison des divers enjeux évoqués. Les hauteurs, types ou la nature des clôtures prévues dans les PLU ne sont pas respectés dans de nombreux cas. Il est patent de constater des détournements nombreux des prescriptions, par exemple des clôtures doublées de plastiques à 2 m de hauteur ou des doubles clôtures, ou encore des travaux effectués sans déclaration préalable, la création de merlons, buttes de terres, l'obstruction des fossés, la création de digues d'étang, mais également l'aliénation de chemins L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 18/68 PUBLIÉ ruraux dont la libre circulation n'est pas assurée (installation de passages canadiens entravant le passage de chevaux, enfants et faune sauvage), ou déplacés sans justifications ni autorisations. Il est relevé des complaisances patentes ou de l'inaction de la part de quelques maires. 3.2. Biodiversité, continuités écologiques et clôtures Les effets des clôtures sur l'environnement au sens de l'écologie des habitats et des espèces ne sont pas toujours bien cernés. La protection et le rétablissement des continuités écologiques constituent pourtant des enjeux très importants, dans le contexte actuel de fragmentation des habitats naturels et d'évolution du climat. 3.2.1. La biodiversité dans les différents documents de cadrage « Les règles actuelles de l'urbanisme concernant les clôtures s'appuient de fait sur les aspects paysagers. Or l'impact direct et indirect des clôtures sur la faune, la flore, les habitats naturels... est non moins essentiel que celui sur le paysage et il concerne toutes les clôtures, y compris celles qui sont non visibles du domaine public. Une bonne connaissance de ces impacts écologiques des clôtures et la traduction de ceux-ci en orientations d'urbanisme est un élément important à aborder au bon niveau politique, par exemple national, à l'exemple de ce qui a été fait en Wallonie ».8 3.2.1.1. Le schéma régional de cohérence écologique La région Centre-Val de Loire s'est dotée en 2011 d'une première stratégie régionale pour la Biodiversité (SRB). Elle s'est concrétisée par la réalisation du schéma régional de cohérence écologique (SRCE, 2014) qui a vocation à être intégré dans le SRADDET ; par la réalisation de trames vertes et bleues (TVB) à l'échelle des territoires de projets (pays et agglomérations / métropoles) et et par le déploiement de l'inventaire de la Biodiversité communale (IBC). Le schéma régional de cohérence écologique (SRCE) constitue la déclinaison régionale des trames vertes et bleues paneuropéennes et nationales, visant à préserver et restaurer les continuités écologiques pour lutter contre l'érosion de la biodiversité. Ainsi le SRCE, finalisé en 2013, fournit une cartographie à l'échelle du 1/100 000e du réseau écologique régional. Il s'appuie sur dix sous-trames, correspondant aux milieux naturels et seminaturels les plus importants sur le plan écologique pour la région. Le réseau écologique régional distingue trois grands continuums, dont celui des milieux boisés/forestiers, impactés par la présence de clôtures hermétiques. 3.2.1.2. La trame verte et bleue Précisée à une échelle plus locale, la TVB Sologne, datant de janvier 2014, identifie trois enjeux : · la conservation des réservoirs de biodiversité et des corridors associés, · la conciliation des infrastructures linéaires avec le maintien des corridors dans le secteur de Salbris, · la conciliation des clôtures avec le maintien des corridors dans les secteurs autour de Montrieux-en-Sologne, Yvoy-le-Marron. 8 « Faire face aux engrillagements en milieu naturel, agricole et forestier en Grande Sologne », Étude ­ Concertation, Janvier- juillet 2011, Yves Froissart. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 19/68 PUBLIÉ D'une façon plus générale, l'enjeu n° 3 ci-dessus aborde clairement les questions de circulation des animaux. La « conciliation entre le maintien des corridors et l'engrillagement » est déclinée en objectifs : · « raisonner l'engrillagement pour faciliter le déplacement des animaux ; proposer des outils incitant à une limitation des engrillagements ou de leur hauteur, rechercher des solutions alternatives » ; · « sensibiliser les élus aux impacts de l'engrillagement par rapport à la TVB, développer le porter à connaissance ; développer une politique commune des élus sur l'engrillagement sur leurs territoires » ; · « mieux connaître la localisation des engrillagements et leurs impacts sur les espèces, affiner et tenir à jour la connaissance des engrillagements existants ». 3.2.1.3. Les atlas des paysages L'atlas des paysages du Loir-et-Cher, consulté par la mission, traite des paysages forestiers de Sologne. Il mentionne ainsi : « La chasse est reine en Grande Sologne et les paysages forestiers sont marqués par cette activité : les lisières enherbées, parfois semées de « cultures à gibiers », accompagnent les routes et participent à la valorisation de la traversée de la forêt, tandis que les longues allées forestières, utilisées comme couloirs de tir, créent des perspectives et incitent à la promenade. Des postes de tirs perchés, construits en bois, jalonnent les lisières. Cependant, d'autres signes de l'importance de la chasse peuvent être perçus de manière plus problématique : les grillages, venant clore de vastes propriétés pouvant aller jusqu'à 1 500 hectares, sont les symptômes récents d'une économie spécifique. Le grand gibier, dont la présence repose en partie sur l'élevage, se croise désormais davantage à l'intérieur de chasses grillagées. De nombreux élevages alimentent les bois en gibier, contrebalançant une surexploitation des ressources cynégétiques et causant un déséquilibre important au sein de la forêt, tant du point de vue écologique qu'économique ». 3.2.1.4. Le SRADDET La loi portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) donne au schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) un caractère opposable et le place au sommet de la hiérarchie des documents de planification territoriale tout en étant soumis au respect, à la compatibilité ou à la prise en compte des documents qui lui sont supérieurs comme les projets d'intérêt général (PIG), le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) ou encore le plan de gestion des risques d'inondation (PGRI). Néanmoins et pour permettre au SRADDET de mieux faire appliquer les principes d'aménagement et de développement durable, mais également de mettre en oeuvre un certain nombre d'actions importantes, notamment dans les schémas de cohérence territoriale (SCoT) et à défaut dans les plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi), la loi a adapté le niveau d'opposabilité dans les différentes parties du SRADDET, ainsi : · les objectifs qui détaillent la stratégie régionale doivent être « pris en compte » dans les documents de rang inférieur au SRADDET, ce qui signifie que ces documents doivent s'articuler avec les objectifs du SRADDET et ne pas s'écarter des orientations fondamentales formulées au travers de ses objectifs ; les règles générales, qui sont un des outils pour la mise en oeuvre des objectifs, s'inscrivent dans un rapport de « compatibilité » avec les documents de rang inférieur, ce qui signifie que L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 20/68 · PUBLIÉ ces derniers ne peuvent prendre des dispositions allant à l'encontre ou remettant en cause ces règles générales. Au plan opérationnel, il est ainsi possible de prévoir des dispositions et recommandations dans les documents de planification et d'urbanisme : plantations de haies, réhabilitation de zones humides, mesures de lutte contre l'engrillagement des milieux boisés qui présente des effets néfastes tant pour la biodiversité que pour l'activité touristique, en particulier en Sologne... Il s'agira aussi de prendre en compte, dans les documents de planification, le réseau écologique régional tel que défini dans le SRCE, dont la cartographie à l'échelle du 1/100 000 se trouve en annexe du SRADDET, mais aussi les trames vertes et bleues et les autres éléments de connaissance locale (inventaires de biodiversité communaux...). En dehors des objectifs cités, Le SRADDET Centre-Val de Loire reprend une ambition déjà exprimée de faire de la région la première région française à biodiversité positive à l'horizon 2020. Dans ce contexte et en l'absence de leviers d'action notable du SRADDET vis-à-vis de la pollution diffuse, la réduction de la consommation d'espace et « la règle 39 » relative à la fonctionnalité des réservoirs de biodiversité et des corridors écologiques constituent les éléments saillants du schéma. Si le dispositif comporte des règles opérationnelles, leur portée d'ensemble semble néanmoins très restreinte en renvoyant aux SCOT le soin de « déterminer les dispositions nécessaires » à la préservation de la trame verte et bleue et des sites Natura 2000 et de « rédiger des dispositions applicables aux PLUi » pour les préserver de toute occupation ou utilisation du sol qui remettrait en cause leur fonctionnalité. Une de ces dispositions pourrait porter sur la lutte contre l'engrillagement des milieux boisés en Sologne. A ce stade de rédaction du SRADDET, les recommandations quant aux clôtures, dont nous avons pris connaissance, sont trop imprécises : « Dans les secteurs identifiés dans les documents de planification territoriale au titre de la prise en compte de la sous-trame des milieux boisés, des dispositions quant à l'engrillagement en forêt peuvent être prises. Celles-ci pourront par exemple soumettre l'édification de clôtures à déclaration préalable et imposer des caractéristiques techniques aux systèmes à mailles fines (à titre indicatif : pose entre 20 et 40 cm au-dessus de la surface du sol et hauteur maximale de 1,20 mètre). Pour les clôtures dont l'objectif est la délimitation ou la protection d'une propriété, ils visent à favoriser des dispositifs permettant le passage de la petite faune. Pour les clôtures pleines (murs, murets, palissades...) ou à mailles fines et sur une longueur de plus de 10 mètres, il s'agirait de créer des points de passage en ménageant des ouvertures au niveau du sol d'environ 20 × 20 cm tous les 10 mètres. Pour les clôtures destinées à simplement empêcher le franchissement des personnes, on favorisera des systèmes à mailles larges ou non jointifs ». Aussi la mission proposera, dans la partie dédiée à l'urbanisme et à l'aménagement du territoire Solognot, des pistes de prescriptions applicables au territoire. Les avis de la société civile recueillis à l'occasion de l'enquête publique sur le projet de SRADDET en cours seront à prendre en compte pour affiner les prescriptions. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 21/68 PUBLIÉ Une enquête publique portant sur le SRADDET qui ne laisse pas indifférent -entrefilet extrait du « Petit Solognot » du 27 mai 2019 3.2.1.5. Les PLU Les schémas de cohérence territoriaux (SCoT) et les plans locaux d'urbanisme, éventuellement intercommunaux (PLU et PLUi) comportent, en sus des orientations d'aménagement urbain, un objectif de protection des milieux naturels, de préservation de la biodiversité, des écosystèmes, des espaces verts, une réelle volonté de préservation et de remise en bon état des continuités écologiques (L. 101-2, L. 141-1 et L. 151-1 du code de l'urbanisme). Ces textes prévoient que « les auteurs du plan local d'urbanisme ont la faculté d'imposer pour les clôtures des caractéristiques permettant de préserver ou remettre en état les continuités écologiques, afin de contribuer à la qualité du cadre de vie, assurer un équilibre entre les espaces construits et les espaces libres et répondre aux enjeux environnementaux. Le règlement peut, s'agissant du traitement des espaces non bâtis, imposer pour les clôtures des caractéristiques permettant de préserver ou remettre en état les continuités écologiques ou de faciliter l'écoulement des eaux ». 3.2.2. Les clôtures altèrent le libre parcours des grands mammifères Les clôtures participent à la fragmentation des habitats, notamment forestiers, très présents en Sologne. L'effet environnemental direct des clôtures, le plus notoire sur l'environnement, s'exerce sur les possibilités de déplacements des grands animaux sauvages, favorisent leur densité, induisent du piétinement, limitent l'apport de nutriments aux sols, accroissent la dégradation du couvert forestier et la prédation directe sur de nombreuses espèces. Les grands cervidés ont été plus particulièrement étudiés, notamment la fragmentation des habitats de la faune sauvage par l'ONCFS 9, le centre d'étude du machinisme agricole et du génie rural des eaux et forêts (CEMAGREF), devenu institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA) produisant l'étude « DYSPERSE » avec un partenariat scientifique diversifié. « En Sologne, dans le massif du Cosson, une étude réalisée entre 2005-2009 avec le soutien du Pays de Grande Sologne et d'un programme européen Leader + a permis d'évaluer les impacts passés et actuels des populations de cerfs sur le renouvellement des peuplements forestiers à partir de photos aériennes. 9 Étude sur le problème de circulation des cerfs dans le Loiret compte-tenu de la segmentation du paysage, Luc Barbier, ONCFS, décembre 2010. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 22/68 PUBLIÉ Ce massif de 35 000 hectares présente des populations très élevées de cerfs et de sangliers qui empêche la forêt de se régénérer. Depuis, un groupe de travail a été constitué pour permettre une meilleure gestion des populations dans un contexte compliqué par la limite entre deux départements (45 et 41). Sur l'ensemble de la Sologne on constate : · une cristallisation des problèmes de relations entre ongulés et forêt ; · beaucoup de grandes propriétés orientées vers la chasse n'ont pas le sens de cet équilibre ongulés / forêt, dont il faut reconnaître qu'il est complexe. Les domaines vitaux des animaux sont très vastes, s'il est impossible de les gérer à l'échelle d'une seule propriété, il est nécessaire de les gérer collectivement. La situation actuelle est largement artificialisée et l'on observe des concentrations locales d'animaux « contre nature ». Les effets au plan génétique, sanitaire, sur la qualité physique des animaux et sur la biodiversité en général sont nombreux. Il y a consensus dans les milieux de la recherche sur le fait que les populations doivent pouvoir se débrouiller toutes seules, en l'absence d'apport artificiel de nourriture. Il faut faire des choix de gestion durable ».10 Concernant l'équilibre forêt-gibier, « Il faut rechercher un équilibre durable qui permet la régénération des forêts sans engrillagement, c'est un équilibre dynamique... C'est un choix du propriétaire : veut-il une gestion plutôt faune ou plutôt forêt ? Il faut dans tous les cas éviter les engrillagements qui sont une catastrophe qui limite la circulation de la grande faune sauvage... Éviter les engrillagements périphériques autour de la forêt. Le cerf est un animal de steppe qui a été repoussé en forêt et celle-ci ne doit pas être pour lui un ghetto... cela transmute les dégâts agricoles indemnisés en dégâts forestiers pas indemnisés... Autoriser uniquement les engrillagements de protection localisés aux secteurs fragiles , cultures, ou plantations forestières... »11 Ainsi, tous les auteurs reconnaissent qu'une augmentation de la fragmentation des espaces naturels contribue à l'appauvrissement de l'écosystème forestier et impacte l'écologie des ongulés sauvages. En contradiction avec les objectifs de la trame verte et bleue, comme le montre la récente étude DYSPERSE, ces cloisonnements des populations induisent un appauvrissement génétique et modifient le comportement des animaux qui ont tendance à s'installer dans les zones partiellement clôturées où ils trouvent tranquillité et refuge, jusqu'à ce qu'ils soient chassés. 3.2.3. Les clôtures hermétiques perturbent les impératifs biologiques Les clôtures hermétiques (incluant des grilles à mailles fines en parties basses) affectent également le déplacement et la prise en compte d'autres impératifs biologiques que sont l'alimentation et la reproduction d'autres espèces, notamment la survie des chevrillards et des faons par séparation en raison de clôtures, mais aussi la circulation de toute la petite faune. La situation d'autres mammifères tels des lagomorphes (lapin de garenne autrefois très abondant en Sologne, lièvre d'Europe présent en espace forestier), des insectivores (notamment hérissons), des rongeurs, des carnivores, des batraciens et reptiles mérite d'être étudiée, car elle peut être préoccupante pour le maintien en équilibre de ces populations. 10 Philippe Ballon Irstea de Nogent sur Vernisson (Loiret), Unité de Recherche « écosystèmes forestiers et Y. Froissart. Jean-Marie Ballu, corédacteur du « rapport Puech » sur l'évolution des politiques forestières. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 23/68 11 PUBLIÉ Soixante-sept espèces d'oiseaux de Sologne, nicheuses au sol, près du sol ou près de l'eau, sont susceptibles d'être impactées négativement par des surdensités de grands animaux du fait du dérangement, du piétinement, de la prédation du sanglier, avec perte de leur habitat naturel ou par la suppression de la végétation protectrice des nids (liste réalisée par Yves Froissart et présentée dans l'étude précitée). La prédation par les sangliers en surpopulation met ainsi en péril toutes les naissances au sol (oiseaux, mammifères, batraciens)12 . « Dans le contexte très particulier de la Sologne, où l'engouement pour le sanglier domine, la pression cynégétique peut devenir problématique lorsque les étangs ne constituent plus que des supports pour entretenir du gibier d'élevage et voient la fréquence de leur vidange ainsi que de leur mise en assec s'espacer, au détriment de l'entretien des habitats. Ou encore quand les saulaies qui envahissent puis remplacent les ceintures de végétation aquatique ne sont plus perçues par le chasseur que comme des refuges bienvenus pour les sangliers, oubliant la perte des sites de nidification que cela représente pour l'avifaune ».13 Le secteur aquacole n'est d'ailleurs en rien préservé de ces prédations, qui induiraient la régression des salamandres (emblème du département du Loir-et-Cher), affecteraient les pontes de Cistude d'Europe (espèce en statut défavorable). Enfin la pisciculture, traditionnellement présente en Sologne, peut être également impactée par la prédation de suidés en surdensités. Ainsi, les enclos s'opposent au respect des objectifs de la TVB et du SRCE, mais c'est bien toute la faune qui subit un appauvrissement. La présence de clôtures hermétiques doit être ponctuée, comme en matière d'aménagements routiers, de l'édification de passages à faune disposés à espacement régulier pour répondre aux impératifs biologiques des espèces animales. 3.3. Enclos, surpeuplement et cycles de la forêt Les clôtures hermétiques affectent directement la gestion forestière de l'enclos, y compris celle de propriétaires voisins et compromettent la rentabilité économique du secteur forestier. 3.3.1. Un objectif cynégétique difficilement compatible avec la gestion et la fiscalité forestière a) Ce que dit le code forestier : Art. L. 121-4 : les documents de politique forestière mentionnés à l'article L. 122-2 traduisent, de manière adaptée aux spécificités respectives des bois et forêts relevant du régime forestier ou appartenant à des particuliers, les objectifs d'une gestion durable des bois et forêts tendant à garantir leur diversité biologique, leur productivité, leur capacité de régénération, leur vitalité et leur capacité à satisfaire, actuellement et pour l'avenir, leurs fonctions économique, écologique et sociale pertinentes sans causer de préjudices à d'autres écosystèmes, b) Ce que dit le code de l'environnement : Le bon équilibre sylvo-cynégétique, tel que défini à l'Art. L. 425-4 du code de l'environnement, doit assurer la régénération des peuplements forestiers dans des conditions économiques satisfaisantes pour le propriétaire dans le territoire concerné. Il prend en compte les principes définis aux L. 112-1, L. 121-1 à L. 121-5 du code forestier, ainsi que les dispositions des orientations régionales forestières. 12 Étude FDC 41 sur la prédation des nids de Fuligule milouin par les sangliers. Dans un contexte de déprise piscicole, la chasse peut-elle jouer un rôle complémentaire voire alternatif pour la préservation de l'écosystème étang ? Sylvain Richer et al, ONCFS L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 24/68 13 PUBLIÉ c) ce qui découle du code général des impôts : Les abattements possibles dans le cadre des donations, successions et ISF sont justifiés par le long cycle de production de la forêt. Ils concernent l'exonération des droits de mutation et l'exonération partielle de l'ISF. En bénéficier, c'est prendre l'engagement d'assurer la pérennité de la forêt sur le long terme et donc ne pas mettre en cause l'état boisé par une densité trop forte d'ongulés. 14 En raison d'une surdensité d'ongulés, les objectifs de bonne gestion durable de la forêt, fixés dans le plan simple de gestion, peuvent être compromis ou inaccessibles. Le contrat devrait, dans ce cas, être invalidé par le CRFP et l'État (déchéance prononcée par les services fiscaux après signalement par les DDT) et ne plus ouvrir au bénéfice d'abattements fiscaux. 3.3.2. Des indicateurs de gestion durable doivent être intégrés au PRFB Le programme régional forêt bois (PRFB) de la région Centre-Val de Loire constitue la déclinaison régionale, en application de l'article L. 122 1 du code forestier, du plan national forêt bois (PNFB). Il a été élaboré par la direction régionale de l'agriculture, de l'alimentation et de la forêt en concertation avec le conseil régional, les services de l'État et les acteurs de la filière forêt bois réunis au sein de la commission régionale de la forêt et du bois mentionnée à l'article L. 113-2 du nouveau code forestier. Il est structuré autour de quatre axes stratégiques : améliorer la gestion de la forêt, garantir un approvisionnement pérenne et compétitif de la filière bois, développer les marchés et accompagner le développement des entreprises, dynamiser la communication. L'évaluation environnementale, menée conjointement à l'élaboration du programme, a permis une meilleure intégration de la dimension environnementale dans l'ensemble du document. L'autorité environnementale, dans son avis du 27 juin 2019, « recommande... de préciser les montants budgétés ou contractualisés des principales aides publiques existantes, en rappelant les éventuelles règles d'écoconditionnalité, d'inclure un ou plusieurs indicateurs illustrant la qualité de la gestion durable et multifonctionnelle de la forêt ». Il devrait être recommandé de ne pas installer de clôtures non franchissables par le grand gibier en périmètre de propriété. Elles limitent les échanges de population, entravant la libre circulation de la faune sauvage, favorisent les fortes concentrations d'animaux et accentuent les dégâts. Les clôtures temporaires protégeant la régénération forestière sur des espaces restreints ne sont pas à remettre en cause. Cette pratique, bien gérée par la grande majorité des propriétaires forestiers, participe à la bonne réalisation des plans simples de gestion, lesquels incluent la pose et le retrait. La mission propose d'instaurer, dans le suivi du PRFB Centre-Val de Loire, des indicateurs de suivi portant sur le linéaire de clôtures hermétiques pérennes, la densité d'ongulés et l'état du peuplement forestier. 3.4. Engrillagement et questions sanitaires Questionnée sur la question sanitaire et son rapport avec l'engrillagement, la direction générale de l'alimentation du ministère de l'agriculture (DGAl) est loin d'établir un lien direct entre la question de l'engrillagement et l'aggravation des préoccupations sanitaires. 14 Brochure « L'un ne va pas sans l'autre », Forêt et cervidés, codirigée par CRPF et FRC, Mars 2014. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 25/68 PUBLIÉ En effet, pour des spécialistes des questions sanitaires, le principe de confinement des animaux conduit à la limitation de leurs déplacements et de leur contact avec la faune libre, donc de facto limite les contaminations. Les exemples accréditant ce principe sont nombreux, le plus prédominant et le plus actuel est sans doute celui qui prévaut actuellement en matière de protection contre la peste porcine africaine (PPA) qui a conduit les autorités sanitaires à ériger des engrillagements et un zonage leur permettant de circonscrire -jusqu'à présent avec succès- l'épidémie. Ce principe traite de la question du « risque de première espèce ». Si on pousse ce principe plus loin et que l'on considère qu'un secteur donné se trouve être contaminé par une introduction d'animaux, que celle-ci soit volontaire, involontaire, contrôlée, ou même frauduleuse, on constate alors que la limitation de déplacement des animaux et donc, d'une certaine manière, les engrillagements, conduiraient également dans ce cas à une limitation de la propagation et de l'épidémie. Il convient donc d'associer la notion d'engrillagement et celle d'augmentation des risques sanitaires avec prudence. Il est également entendu que l'engrillagement favorisant la promiscuité des animaux augmenterait les risques. Or, les animaux sauvages et le sanglier en particulier connaissent des densités moyennes très élevées en France, surtout des densités territoriales « instantanées » pas très différentes d'un point de vue sanitaire selon que l'animal vit en milieu confiné ou en milieu ouvert. (Le caractère grégaire de l'animal qui vit en compagnie favorise les contacts « groin a groin » quelles que soient les modalités de détention). Une fois ces points de raisonnement établis, il n'y a donc qu'un cas de figure sensible : celui de la réintroduction d'animaux dans les parcs ou enclos de chasse. Il peut être réalisé à partir d'animaux de trois origines différentes : un élevage en France, un élevage dans l'union européenne ou un élevage dans un pays tiers. Ces trois cas différents méritent d'être examinés. Il convient également d'intégrer, comme le font certains de nos interlocuteurs rencontrés ou comme l'évoquent certaines productions écrites, le cas de pratiques frauduleuses attestées par l'ONCFS qui font courir un risque considérable. Pour autant, la mission suggère de faire preuve de bon sens en la matière. Il ne faut pas croire ou laisser croire qu'il n'y aurait pas de réintroduction d'animaux dans la nature, s'il n'y avait pas de parc ou enclos de chasse. Car il est malheureusement probable, voire prouvé, que la tentation soit grande de procéder, ici ou là, à des réintroductions frauduleuses. L'administration n'a pas traité de façon préférentielle cette situation. En revanche il est essentiel, comme le souhaitent les commanditaires de ce travail, d'envisager des mesures concrètes, simples et efficaces et peut-être pédagogiques ou pénales, pour décourager ces errements. Participent de ce principe : le respect de la déclaration à la direction départementale des territoires (DDT) par les détenteurs d'enclos, l'accès des autorités (départementales, cynégétiques et sanitaires) aux fichiers ad hoc comme le fichier TRACE, la surveillance du territoire, l'information des acteurs, l'établissement et l'entretien d'une vie de réseau, l'exploitation ciblée du renseignement et d'une façon générale la remise en place d'hommes sur le terrain. Ces mesures constituent des gammes de solutions complémentaires de l'action réglementaire. 3.4.1. Engrillagement, introduction de grand gibier et risques Suite à l'épisode de PPA en Belgique, toute importation de sanglier (sus scrofa), issu du milieu naturel, est interdite qu'il provienne de l'UE ou des pays tiers. En revanche les introductions provenant de France et d'élevage de l'UE sont autorisées et possibles. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 26/68 PUBLIÉ Pour ce qui est de l'introduction de sangliers en France, elle est : · possible depuis un élevage français, moyennant notification du mouvement auprès d'une base de données (« Base de Données nationale Porc : dite BD Porcs dans le tableau ci-dessous») ; · possible depuis les États membres (EM) si les sangliers proviennent d'un élevage et moyennant un certificat sanitaire (TRACES européen certificat dématérialisé) ; · possible depuis les pays tiers s'ils ont un certificat sanitaire international en cours de validité par l' UE pour le pays d'origine : situation rare : 4 pays agréés seulement : Canada, USA ...). A noter que de nombreux pays de l'est de l'UE ne sont pas sous statut indemne de PPA. Concernant les modes de contamination, qu'il s'agisse de fièvre aphteuse ou de PPA, trois sources de contamination sont prises en compte très sérieusement par les autorités sanitaires françaises : · l'introduction de sangliers en provenance des « pays de l'Est » (cf. annexe 8 carte zone PPA indemnes UE) ; · la consommation de restes de repas sur des aires d'autoroutes par des animaux sauvages ; · un transfert à la faveur de manoeuvres militaires communes de force de l'OTAN sur le territoire belge qui ont favorisé le transit des hommes et de différents consommables. Il n'existe pas de vaccin pour la PPA, la seule solution est le confinement : c'est la solution sanitaire15. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que le sujet sensible du point de vue sanitaire réside en l'introduction sur le territoire d'animaux non déclarés et d'une façon plus spécifique de sangliers. Situations d'introductions (source DGAL) SANGLIERS CERVIDÉS France à France Volume d'échange important intra Inconnu France (BD Porcs non investigué) 379 élevages de sangliers 295 sangliers en 2017 1 seul enclos déclarant en France (prov. Hongrie & Pologne) au 1er juillet 2019 de 2014 à ce jour : Belgique : 348 Allemagne : 22 Pologne : 847 Lettonie : 3 Tchèque : 4 Pays Bas : 53 Espagne : 3 Portugal : 1 Soit environ : 1 300 Aucun UE à France (éléments issus du logiciel TRACES) Pays Tiers à France (non UE) Aucun 15 La réussite de telles procédure est attestée par un épisode de PPA connue en Tchéquie en avril 2017 jugulé -grâce à ces mesures de confinement pour retrouver le statut « indemne ». (Pour en savoir plus https://www.plateformeesa.fr/ ASF Tchéquie). L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 27/68 PUBLIÉ Les introductions officielles de sangliers provenant d'États membres de l'Union européenne sont, d'une part très peu nombreuses (295 sangliers en 2017), d'autre part semblent mal renseignées, puisqu'elles ne le sont que par un seul déclarant en France. Enfin, elles proviennent essentiellement de Hongrie et de Pologne qui constituent en effet des zones à risques. Les importations de cerfs restent modestes (environ 250 animaux / an) essentiellement en provenance de Pologne. Les importations de pays tiers sont officiellement à zéro. La nature ne saurait suffire à procurer des tableaux de chasse en enclos et parcs, réputés importants, dont la mission rappelle qu'ils ne sont de surcroît pas comptabilisés dans les publications du réseau ongulés de l'ONCFS. Des réponses fournies par les trois DDT interrogées (dont le Loir-et-Cher qui a interdit les lâchers et surtout le Loiret et le Cher qui les suivent et les répertorient), la mission induit que la majeure partie des approvisionnements officiels des enclos et parcs est assurée à partir de sangliers provenant d'élevages français, d'autant plus avec le contexte de peste porcine. Il est cependant certain que les importations illégales existent (attesté par l'ONCFS). Cette opacité partielle fait courir un risque considérable à l'ensemble du dispositif sanitaire français. Or en matière sanitaire, le risque ne résulte précisément pas du nombre d'animaux, mais de l'existence d'une pratique à risques. D'autres maladies porcines présentent un danger certain que nous ne développons pas ici (voir annexe 4). 3.4.2. Introduction d'animaux : un suivi partiellement défaillant qui progresse Aussi la mission manifeste son inquiétude sur la prise de risques inhérente à l'importation de gibier sauvage d'élevage et de repeuplement. Elle rappelle que dans l'Union européenne les mouvements d'animaux, dont les ongulés sauvages, sont suivis grâce à la mise en oeuvre d'un certificat dématérialisé appelée TRACES (trade control and expert system). Le fonctionnement de ce système d'information est basé sur la genèse d'un message d'alerte destinée aux entités d'administration vétérinaire destinataires des animaux. En France les directions départementales de protection des populations (DDPP ou DDCSPP) sont destinataires de ces alertes. Chaque opérateur receveur d'animaux est aussi tenu de déclarer ces opérations d'introduction à la DDT qui de surcroît doit recueillir l'avis de la fédération départementale des chasseurs. À noter que les DDT ne disposeraient pas d'accès à TRACES, l'ONCFS non plus jusqu'à très récemment. À ce stade, les seuls éléments disponibles conduisent à évaluer l'importation légale de sanglier à 13 000 en 200316. Ce chiffre ancien donne une estimation des besoins en quelque sorte. La confrontation de ce chiffre à ceux à notre disposition figurant sur le fichier TRACES montre une quasi disparition de l'importation légale. Il est vraisemblablement sous-estimé. Pour consolider cette hypothèse, un avis publié par l'ANSES en 2014 dressait du reste un bilan sans concession des carences constatées en la matière dont nous portons un extrait complet ci-dessous : « ... ces exemples montrent que les échanges au sein de l'UE ou l'importation en provenance de pays tiers de gibier vivant, légaux ou illégaux, ne sont pas dénuées de risques sanitaires qui, au-delà de l'introduction d'agents pathogènes exotiques sur le territoire français, soulèvent plus largement le problème du contrôle sanitaire de la filière du gibier de repeuplement impliquant des élevages, des parcs et enclos de chasse dont l'étanchéité est d'ailleurs loin d'être garantie. (Saint-Andrieux et al., 2012). Ces risques apparaissent d'autant plus grands que les données d'introduction de gibier dans TRACES semblent incomplètes et très parcellaires (Anses 2014) et que la vérification de la conformité 16 Thien Aubert cité par Ars dans ANSES bulletin épidémiologique N° 66 page 49. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 28/68 PUBLIÉ des certificats sanitaires à l'introduction n'est pas effective dans la plupart des services administratifs au niveau départemental, faute de temps, de priorité par un défaut de perception des risques ou de moyens. L'application de la réglementation et le renforcement des contrôles, ainsi que la mise au point d'outils de détection des pathogènes, fiables utilisables facilement sur le grand gibier en particulier, représentent un futur défi pour les autorités et les instituts sanitaires». 3.4.3. Une connaissance des enclos très imparfaite La déclaration de l'existence des enclos et des parcs doit être faite auprès de la DDT, mais il convient que l'ensemble des services de l'État ait accès à l'ensemble des informations. Si la DDT qui instruit le dossier doit être informée de l'existence de l'enclos, les services départementaux chargés des questions de sécurité sanitaire doivent également y avoir accès pour faciliter les contrôles ainsi que l'ONCFS chargé de l'inspection et de la police de l'environnement. Il existe un fichier départemental sur cette base déclarative, qui semble bien rempli dans les trois départements solognots, sans que la mission soit en mesure d'attester leur exactitude et ni surtout leur exhaustivité. Ce fichier doit servir de base commune à des contrôles effectifs des enclos et des parcs, la mise à jour et le suivi des emplacements et de la cartographie correspondante, y compris dans la nouvelle définition proposée (voir partie chasse et éthique). Au final, la mission entend souligner que l'étanchéité « apparente » des enclos hermétiques -telle qu'elle est appréciée par des agents assermentés de l 'État- peut constituer une garantie du caractère « instantanément » hermétique d'un enclos, mais ne saurait suffire à exclure toute entrée / sortie réelle d'aucun animal notamment porteur d'une pathologie. Les importations de sangliers sont vraisemblablement sous estimées sans que la mission puisse en qualifier l'ampleur. L'ONCFS et la direction générale de l'alimentation (DGAL), conscients de ces difficultés, ont récemment entrepris un travail de fond pour progresser dans le domaine sanitaire, incarné par le recrutement d'un agent vétérinaire assurant désormais le lien police-sanitaire au sein de l'Office. Un travail sur le respect des instructions de demandes d'autorisation d'introduction de grand gibier dans le milieu naturel 17 est réalisé, reprécisant bien le rôle de chaque entité administrative : 1) DDT(M) du lieu de lâcher : instruction de la demande 2) DDCSPP : contrôle du respect des conditions sanitaires 3) ONCFS : contrôles de terrain 4) Fédérations des chasseurs : sensibilisation 5) Sanctions (pour mémoire) Interrogé à ce propos, l'ONCFS indique avoir mis en place avec la DGAL une série d'actions pour améliorer la situation concernant : · les mouvements d'animaux à but cynégétique (qu'ils soient français ou transfrontaliers, mouvements de sortie ou d'entrée incluant un accès de l'ONCFS à TRACES); · Les contrôles et enquêtes dans les structures concernées (élevages, parcs et enclos de chasse) : soit par le biais des plans de contrôle (programmation) soit en suivi judiciaire ; · Les évolutions des schémas départementaux de gestion cynégétique (SDGC), qui doivent intégrer des préoccupations sanitaires (évolution du C.Env) et comporter des prescriptions 17 Circulaire du 25 septembre 2018 (MTES). L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 29/68 PUBLIÉ concernant les lâchers d'animaux. C'est à ce titre que le nouveau SDGC 41 est intéressant, puisqu'il a interdit toute possibilité de lâcher de gibier (aucune réaction lors de l'enquête publique) ; · l'intervention dans les parcs et enclos en cas de suspicions (abattage total). Le dossier relatif à la gestion des déchets de chasse, pose une question « épineuse » qui concerne également les territoires clos. Le bon sens commanderait que tous ces éléments se conjuguent au sein du plan national de maîtrise du sanglier (PNMS) qui est sous l'autorité du ministère de la transition écologique et solidaire (MTES). 3.4.4. Une solution : interdire l'introduction de grand gibier dans l'espace naturel Les introductions de sangliers provenant d'élevage français semblent bien suivies par les DDT. Elles ne posent pas de problème sanitaire en première analyse. Pour autant, comme la mission le rappelle (voir 3.5. Chasse et éthique), rien ne saurait justifier de continuer à oeuvrer dans le sens de l'augmentation de populations des sangliers déjà pléthoriques (nourrissage, introduction d'animaux, tableaux de chasse excessifs...). De surcroît, l'existence avérée d'introductions illégales, non suivies par définition, couvre de suspicion l'ensemble des échanges, directs ou indirects, y compris ceux apparemment normaux. Aussi, les éléments sanitaires ci-dessus consolident la nécessité d'aller plus loin pour éviter des risques sanitaires avérés (voir annexe 8 : carte de la contamination PPA dans l'UE) , considérables pour les populations de faune sauvage de l'espace naturel, mais aussi pour l'ensemble de la filière porcine française. Certaines fédérations départementales des chasseurs (FDC) conscientes de ce risque ont du reste interdit toute introduction au moyen de leur SDGC validé par le préfet (Loir-et-Cher) . La mission propose que désormais toute introduction de grand gibier dans le milieu naturel soit interdite. Les ministres chargés de l'écologie et de l'agriculture, au titre de l'intérêt général, disposent de toute légitimité pour mettre en place une telle mesure. La meilleure solution juridique de mise en oeuvre de cette mesure consisterait en la modification de l'article L. 424-11 de C. Env. Sa rédaction actuelle est la suivante : « L'introduction dans le milieu naturel de grand gibier et de lapins et le prélèvement dans le milieu naturel d'animaux vivants d'espèces dont la chasse est autorisée sont soumis à autorisation préfectorale, dans des conditions et selon des modalités fixées par un arrêté conjoint du ministre chargé de la chasse et du ministre chargé de l'agriculture ». La nouvelle rédaction donnant une dimension générique à l'ensemble du territoire à la mesure proposée pourrait être la suivante : « L'introduction dans le milieu naturel de grand gibier et de lapins et le prélèvement dans le milieu naturel d'animaux vivants d'espèces dont la chasse est autorisée sont interdits, sauf exceptions autorisées dans des conditions et selon des modalités fixées par un arrêté conjoint du ministre chargé de la chasse et du ministre chargé de l'agriculture ». L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 30/68 PUBLIÉ Recommandation 1. Interdire (sauf exception) toute introduction de grand gibier dans l'espace naturel. À défaut, cette mesure peut être recommandée lors de l'élaboration des schémas départementaux de gestion cynégétique (Ministres ou Préfets). 3.5. Chasse et éthique Il est délicat d'aborder les questions de chasse et d'éthique : ce sont des notions relatives selon les individus, les communautés auxquelles on s'adresse et l'époque. C'est la raison pour laquelle la mission entend aborder ce sujet sur une base factuelle. 3.5.1. Une incontestable situation de pléthore Evolution des tableaux de chasse nationaux des trois espèces principales (source ONCFS, lettre réseau ongulés sauvages 22/01/2018) 1976 1991 2015 2016 Progression an 4 % 3 % 4 % 1 Progression 25 ans (X) 4,1 (X) 2,9 (X) 4,6 Cerf Chevreuil sangliers 1 976 7 222 63 205 15 163 199 323 152 354 59 026 562 012 666 933 61 412 579 111 693 613 Évolution du tableau de chasse sangliers sur les 3 départements solognots (source ONCFS base de données réseau ongulés ONCFS 2019) L'inquiétude provient de densités anormalement élevées de sangliers et de la progression continue des tableaux, ainsi d'ailleurs que des dégâts aux cultures. Les prélèvements très importants en témoignent ; « 25 000 sangliers ont été tués en 2012 en Sologne. Dans les trois départements, le prélèvement moyen a été de 10,9 animaux/hectare (à comparer aux 3,5 au plan national) » 18. 18 Political ecology des engrillagements de Sologne : tentative de défragmentation du paysage écologique, politique et disciplinaire, Marie CARRELET, 2016. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 31/68 PUBLIÉ 3.5.2. Rompre avec l'exception des enclos hermétiques au droit commun de la chasse Comme évoqué précédemment (circulation de la faune, densité relevant réglementairement du statut d'élevage, risques à l'introduction d'animaux, éthique de la chasse, non soumission aux contrôles), de nombreux éléments s'opposent et rien ne justifie la pratique de la chasse en enclos hermétiques. Aussi, la loi peut revoir les dispositions touchant au privilège de l'enclos traité par l'article L. 423-3 du code de l'environnement. Rédaction actuelle : « Toutefois, le propriétaire ou possesseur peut, en tout temps, chasser ou faire chasser le gibier à poil dans ses possessions attenantes à une habitation et entourées d'une clôture continue et constante faisant obstacle à toute communication avec les héritages voisins et empêchant complètement le passage de ce gibier et celui de l'homme ». Dans ce cas, les dispositions des articles L. 425-4 à L. 425-15 ne sont pas applicables au gibier à poil et la participation aux frais d'indemnisation des dégâts de gibier prévue à l'article L. 426-5 n'est pas due. Dans l'hypothèse où la pratique de la chasse en enclos serait conservée (ce point fait l'objet de recommandations spécifiques figurant en 3.5.5.) la mission propose alors a minima d'étendre le droit commun de la chasse d'une part (pratique de l'activité, calendriers, financements des dégâts etc..) et l'accessibilité aux contrôles d'autre part à l'ensemble du milieu naturel -y compris aux enclos-. Cet objectif peut être atteint par la suppression des deux premiers alinéas du L. 423-3 du code de l'environnement mentionnés ci-dessus. Cette extension du droit commun pourrait s'envisager autour du motif impérieux sanitaire (contrôler l'intérieur de l'enclos) ou environnemental (en relation avec la Charte de l'environnement) face à une atteinte à la propriété privée (à distinguer du domicile sacralisé). Ainsi, le droit commun serait applicable aux enclos (Les questions relatives à la rétroactivité de la loi sont portées en annexe 7). Il reste à pouvoir contrôler son application. De ce point de vue, la jurisprudence a jusqu'à présent limité le droit d'accès des agents chargés du contrôle. Cette interprétation reposait sur le fait que l'on étendait à l'ensemble de l'enclos la protection due à l'habitation, conférant par conséquent un caractère sacralisé à l'ensemble dudit enclos. Aussi la protection du domicile pourrait être invoquée comme un frein à cette disparition. Si chacun peut comprendre la légitimité d'un enclos de quelques ha autour d'un domicile, la majorité dépasse cependant largement ces surfaces. Ainsi, au regard de certaines superficies d'enclos et de la facilité "à s'engrillager" permise par le code de l'urbanisme, la notion originelle d'enclos cynégétique à connu une évidente dérive. A noter que certains procureurs (département du Cher en particulier) procèdent depuis peu à une interprétation différente, envisageant un accès (encore limité) à ces enclos, revenant sur l'interprétation traditionnelle décrite ci-dessus. Au final, pour la mission, l'extension du droit commun de la chasse sur tout le territoire national y compris aux enclos, dans l'ensemble des prérogatives de ce droit (chasse, dégâts etc..), constitue une nécessité élémentaire. Trois nouveaux alinéas sont nécessaires à l'établissement complet de ces nouvelles dispositions. Ils portent sur : · la définition des enclos ; · leur accessibilité aux autorités chargées du contrôle ; · et l'établissement d'une liste dérogatoire pour certains enclos patrimoniaux, clos de murs, qui portent une dimension historique particulière, comme le domaine national de Chambord. Les articles mettant en oeuvre de telles dispositions sont proposés ci-dessous. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 32/68 PUBLIÉ L'article supprimé valant définition de l'enclos cynégétique, il convient de définir l'enclos dans un nouvel article. « l'enclos est défini comme toutes possessions entourées d'une clôture continue et constante faisant obstacle à toute communication avec les héritages voisins et empêchant complètement le passage de la faune et celui de l'homme ». Ajout d'un article permettant le contrôle des activités liées à la chasse dans les enclos : « Sur leurs possessions à l'exception du domicile, les propriétaires, possesseurs ou leur ayant droit sont tenus d'en laisser l'accès, à tout moment, aux fonctionnaires et agents chargés des contrôles prévus à l'article L. 170 ­ 1 et aux officiers et agents mentionnés à l'article L 172 ­ 1 du présent code dès lors qu'ils exercent une activité soumise au présent titre ». Mise en place de dispositions dérogatoires pour des établissements comportant une dimension patrimoniale et historique : « Pour des raisons patrimoniales et historiques, certains enclos peuvent déroger à certaines des dispositions du droit commun de la chasse. La liste de ces enclos et des dispositions concernées sont définis par arrêté conjoint des ministres chargés de l'environnement et de l'agriculture ». En résumé, la mission formule la recommandation suivante : Recommandation 2. Étendre le droit commun de la chasse à l'ensemble des territoires sur lesquels on chasse et permettre l'accès à des fins de contrôle par les agents habilités, à tout l'espace naturel chassé ou non, y compris les enclos et sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques (Ministres, Parlementaires). 3.5.3. Le nourrissage, l'artificialisation du milieu et la surdensité La chasse en enclos peut se pratiquer « sous réserve de ne pas avoir une densité d'animaux telle que cela s'apparente à un élevage et si l'animal vit de manière totalement autonome à l'état sauvage dans l'enclos, sans qu'intervienne le propriétaire à quelque titre que ce soit » rappelle l'ONCFS. La mission note un amendement du Sénat du 19/04/19 étudié sans suite par la commission mixte du 24 juin 2019 sur l'agrainage ne permettant qu'un agrainage dissuasif. Mais le nourrissage et l'agrainage concourent à l'artificialisation des milieux et des espèces sauvages. Il est fortement contestable s'agissant de la gestion d'espèces pléthoriques dont la démographie semble parfois hors de contrôle. Dans l'état actuel du droit l'article L. 425 dispose que : « L'agrainage et l'affouragement sont autorisés dans des conditions définies par le schéma départemental de gestion cynégétique ». Ce sujet est ainsi géré par les SDGC. En l'absence de résultats probants, l'État devrait prévoir des dispositions plus contraignantes lui permettant de « resserrer les possibilités » voire « d'interdire » l'agrainage. En effet, les pratiques qui résultent des dispositions actuelles posent encore manifestement problème (dégâts de gibiers aux cultures grandissants, progression numérique de l'espèce sangliers). Il est de surcroît bien évident que la pratique de l'agrainage en enclos entérine une artificialisation ultime d'un territoire hermétique, en sur-densité par rapport aux capacités de nourrissage du milieu. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 33/68 PUBLIÉ Ces pratiques, même encadrées, cachent une réalité très crue : l'agrainage nourrit les animaux et favorise le développement des suidés, dont la productivité, notamment des femelles est désormais précoce (lien poids / puberté) et la reproduction pratiquement continue tout au long de l'année. Dans ces conditions, la mission considère que quatre attitudes sont possibles pour améliorer la situation, de la plus souple à la plus directive. Elles figurent ci-dessous. La première consiste à rester « à droit constant » en demandant au préfet (circulaire ministres) de restreindre au maximum les possibilités d'agrainage proposées par les FDC au travers des SDGC validés par le préfet. En effet, les résultats actuels sont manifestement peu efficaces au regard des dégâts de gibiers aux cultures agricoles (rapport de mission parlementaire du député Perea et du sénateur Cardoux Mars 2019) et aux tableaux de chasse sangliers en augmentation constante. L'agrainage sert parfois aussi à attirer et tenir le gibier sur son territoire, au détriment de son voisin (grillage virtuel). La seconde possibilité consiste -en complément de celle ci-dessus- à interdire tout agrainage ou affouragement dans l'ensemble des enclos, ne serait ce que pour maintenir des densités d'animaux compatibles avec un couvert forestier en bon état. Cette mise en oeuvre suppose la modification de l'article L. 425. La rédaction modifiée pourrait être la suivante : « L'agrainage et l'affouragement sont interdits. Toutefois, à l'exception des enclos tels que définis à l'article XXX dans lesquels il demeure interdit, l'agrainage peut être autorisé dans des conditions définies par le schéma départemental de gestion cynégétique ». La troisième possibilité consiste à simplement interdire tout agrainage en France, sauf en période de sensibilité des denrées agricoles d'une durée courte (1 mois) pour des quantités / hectares limitées précisées par le SDGC. Cette mise en oeuvre suppose la modification de l'article L. 425. La rédaction modifiée pourrait être la suivante : « L'agrainage et l'affouragement sont interdits. Toutefois ils peuvent être autorisés dans des conditions définies par le schéma départemental de gestion cynégétique qui ne peuvent en aucun cas excéder au total un mois de durée chaque année en période de sensibilité des principales denrées agricoles du territoire concerné par les dégâts de grand gibier». Quatrièmement : l'interdiction totale. La mission considère que la pratique de l'agrainage est en contradiction avec la gestion de sureffectifs massifs de l'espèce sanglier et qu'il est préférable de proscrire totalement cette pratique, dont la mise en oeuvre délictueuse sera par voie de conséquence d'autant plus contrôlable que des dispositions complexes et trop variables à l'intérieur et entre départements auront été proscrites. Cette interdiction peut facilement être mise en oeuvre en matière de droit par modification de l'article de loi L. 425-4 ci-dessus : « L'agrainage et l'affouragement sont interdits en tout temps sur l'ensemble des territoires soumis à la chasse. ». Recommandation 3. Interdire l'agrainage et l'affouragement sous toutes ses formes et en tout lieu de l'espace naturel soumis à la pratique de la chasse ; à défaut, un renforcement des conditions exigées en SDGC en zone libre et une interdiction totale de l'agrainage et de l'affouragement en enclos constituent des voies de progrès (Ministres ou préfets). L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 34/68 PUBLIÉ 3.5.4. Des densités animales non contrôlées et parfois illégales Parfois les enclos ou parcs s'apparentent à des élevages non déclarés, au regard des densités d'animaux présents. A titre d'exemple, rappelons l'épisode sanitaire de 2012 concernant un parc de chasse en France justifiant l'abattage total des animaux du parc par les autorités. Ce parc de chasse constitué d'un enclos de 379 ha supportait 521 ongulés répertoriés présents (241 cervidés, 280 sangliers). Leur contrôle est -jusqu'à présent- rendu compliqué pour ne pas dire impossible, par une interprétation discutable de l'extension du domicile à l'ensemble de l'enclos (évoquée précédemment). Pourtant, en vertu de l'arrêté ministériel du 20 août 2009, pour le sanglier « Lorsque qu'un enclos cynégétique accueille plus d'un animal (ongulé) par hectare, il constitue un établissement d'élevage, de vente ou de transit de sangliers et se trouve obligatoirement soumis à la réglementation des élevages ». Tout acte de chasse y est alors interdit. Ainsi dans un enclos cynégétique, un animal serait res nullius19 sauf en cas de densités à l'ha qui sont celles d'un établissement d'élevage : le gibier devient res propria. La Haute Cour dans l'arrêt cité (Chambre criminelle du 30 janvier 1992 90-85.403) souligne les multiples éléments matériels permettant de confirmer que, par principe, dans un enclos cynégétique, l'animal est res nullius, sauf dans le cas où la densité à l'ha (de sanglier ou de cervidés) est telle que l'on bascule dans l'établissement d'élevage ou d'éléments conduisant à faire glisser le statut de l'animal de res nullius vers celui de res propria20. La mission considère qu'il y a lieu de revoir la pratique du contrôle et ses conditions, sans qu'il soit nécessaire de revoir le droit, mais déjà simplement par une meilleure coordination des actions des services de l'État en liaison avec les procureurs. À droit constant, la mission suggère des opérations de contrôle renforcées, avec des moyens mutualisés pour constituer des éléments de preuve pour objectiver les surpopulations de grands animaux. En complément, une expérimentation permettant le comptage hivernal par drone faciliterait la recherche d'infractions et le déroulement des procédures. 3.5.5. L'interdiction de la chasse en espaces hermétiques clos est simple et efficace La loi wallonne a traité le sujet de façon argumentée. Elle valorise la chasse durable, la fonctionnalité des écosystèmes, la prise en compte des impératifs biologiques des espèces (reproduction, nutrition, déplacement) et tient compte du fait que la chasse se déroule en espace naturel (voir annexe 5 loi wallonne). S'agissant du droit français, il est patent pour la mission que les enclos cynégétiques ne sont pas en conformité avec la loi 2012-325 du 7 mars 2012 dite loi chasse dont l'article premier dispose que : « La gestion durable du patrimoine faunique et de ses habitats est d'intérêt général. La pratique de la chasse, activité à caractère environnemental, culturel, social et économique, participe à cette gestion et contribue à l'équilibre entre le gibier, les milieux et les activités humaines en assurant un véritable équilibre agro-sylvo-cynégétique. » En France, certains services de l'État font observer qu'il existe de nombreuses clôtures non « enclosantes » (linéaires, ou formant un coin ou « une nasse ») qui ne peuvent relever d'un enclos ou d'un élevage, quand bien même leur géométrie ou leur accumulation tend à confiner les animaux. Ainsi, un inventaire des engrillagements effectué par l'ONCFS 18, de 2006 à 2009, a recensé près de 200 km de linéaires non-enclosants. Ces « nasses » peuvent toutefois être contrôlées et verbalisées. Certains dispositifs comportent des systèmes anti-retour permettant le seul passage entrant de l'animal. La mission considère qu'il faut en cette matière lutter avec pugnacité. Ces faits peuvent être 19 Res nullius : (« la chose de personne » : expression latine utilisée en droit civil, qui désigne une chose sans maître, qui n'a pas de propriétaire mais est appropriable. Res propria : Chose qui a un propriétaire légal. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 35/68 20 PUBLIÉ verbalisés au titre de l'article 9 de l'arrêté du 1 er août 1986 interdisant tout matériel pour favoriser la capture. La mission propose une nouvelle définition des enclos cynégétiques par l'article L. 424-3. Cette fois, il ne s'agit plus de définir un enclos au sens strict (herméticité totale « apparente ») comme dans la rédaction actuelle, mais de définir à partir de quels indicateurs objectif, le dispositif d'engrillagement fait entrer le territoire dans la catégorie des « enclos, non chassables ». L'idée poursuivie par la mission consiste à redéfinir les critères qui constituent de façon formelle le nouveau statut d'enclos. L'objectif est que le propriétaire aménage son « ex enclos » selon la formule « des petites barrières » telles qu'elles résulteront des règles d'urbanisme sur le périmètre de l'ancien enclos, (exception limitée à la sécurité routière) pour que ce territoire retrouve ses fonctionnalités naturelles et retrouve son statut « chassable ». L'ancienne définition de l'enclos de l'article L. 423-3 du code de l'environnement est à supprimer (comme au chapitre 3.5.2. du présent rapport), car il ne s'agit pas de modifier la fermeture de quelques mètres d'enceinte. Il convient en effet de poser -dans une nouvelle définition des enclosdes critères conduisant au classement « enclos » interdit de chasse. Cet objectif est atteint par ajout de l'article ci-dessous. Nouvelle définition de l'enclos conduisant à interdiction de la chasse : « L'enclos est défini comme toute possession attenant ou non à une habitation et entourée même très partiellement , d'une clôture continue et constante faisant obstacle à toute communication avec les héritages voisins et empêchant complètement le passage de la faune et celui de l'homme, sur tout ou partie du périmètre ou à l'intérieur de ladite possession . Toute action de chasse au grand gibier y est interdite ». Comme indiqué au 3.5.2 du présent rapport (extension du droit commun ) il conviendra de prévoir les exceptions pour les domaines à caractère patrimonial. Recommandation 4. Interdire la chasse dans les enclos hermétiques à toute la faune sauvage, sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques, et raffermir la lutte contre les poses illégales de grillages, prenant notamment la forme de nasses à gibier (Préfets, procureurs, ONCFS). 3.5.6. Chasse, transparence, information et communication La mission a recueilli les propos, voire les positions d'une cinquantaine d'acteurs. Elle a constaté une convergence sur une grande partie des propositions qu'elle forme. Elle a aussi recueilli un avis unanime sur le caractère désastreux de la persistance et du développement des pratiques de chasse en enclos hermétiques (au sens de l'actuelle définition) au sein du monde de la chasse, en matière de communication. La grande majorité des chasseurs sait et connaît des domaines de chasse totalement ouverts, lieux modestes ou de grande notoriété sur lesquels ils ont pu passer des moments de passion absolue. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 36/68 PUBLIÉ Une acceptation des engrillagements de plus en plus décriée, y compris au sein des chasseurs et des propriétaires. La mission considère qu'il serait salutaire pour le monde de la chasse et valorisant pour ses pratiquants d'accompagner et de s'engager -y compris avec les propriétaires d'enclos et de parc de chasse- vers une pratique moins artificialisée, plus respectueuse des équilibres, recourant à des clôtures d'ampleur modeste permettant une circulation de la faune sauvage, dessinant des paysages plus sereins, ne coupant pas la vue, mais matérialisant malgré tout la propriété privée, en assurant en définitive une vision du territoire plus naturelle et plus conforme à l'identité solognote. A noter également que la Sologne n'est que le laboratoire de cette évolution qui concerne la chasse dans son ensemble. Ce contexte est favorable au rappel des règles, lois et règlements en matière de chasse : préfets, DDT, DDCSPP, ONCFS et FDC, FNC, FRC, associations, par tous moyens adaptés. 3.6. Urbanisme et aménagement du territoire solognot 3.6.1. Le non-respect des règles en matière d'urbanisme est flagrant Une définition précise des clôtures est nécessaire pour éviter des détournements, dont quelques exemples parmi d'autres figurent ci-dessous. Deux communes (Neung sur Beuvron, Chaumont-sur-Tharonne) ne se sont pas opposées, pour des raisons diverses, à des propriétaires qui ont édifié des clôtures d'une hauteur supérieure à celle prévue dans le document d'urbanisme. Le PLU de Chaumont-sur-Tharonne préconise des clôtures en limite de propriété à 1,20 m. Des propriétaires ont implanté leur clôture à 5 m en retrait de la route à 2m de hauteur et contourné ainsi la règle. Deux autres communes de Sologne ont engagé des actions en justice contre des propriétaires ayant contrevenu aux règles des clôtures définies dans leur document d'urbanisme. Il s'agit de Ménestreau-en-Villette, qui a été déboutée pour des motifs de forme semble-t-il et de La Ferté St Aubin, qui a eu gain de cause. Certaines communes ont eu gain de cause en vertu d'un « article 11 » du document d'urbanisme. C'est le cas de trois d'entre elles (Orçay, Vouzon, Theillay). Un propriétaire a consenti à l'édification à un niveau moindre que prévu ou au rabattement d'une clôture à 1,20 mètre de hauteur, sur une base initiale envisagée d'une hauteur supérieure, ou à renoncer à clore (dans le cas d'un projet de vente de propriété « clôturée »). Une seule commune du Pays de grande Sologne n'a pas prévu d'article "clôtures" (Vernou-enSologne). Elle a néanmoins décidé de l'obligation de déclaration préalable de travaux pour l'édification d'une clôture, laquelle n'a pas été respectée. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 37/68 PUBLIÉ 3.6.2. Poser et faire appliquer un cadre en utilisant tout le potentiel des textes « Contrairement à ce qui peut parfois être allégué, le droit de se clore n'est pas un droit absolu. Le principe et les modalités de la clôture ne sont pas à la discrétion du propriétaire ». Comme mentionné au chapitre 1.3.3. et 1.3.4. dans le cadre du droit des sols, le conseil municipal d'une commune peut rendre obligatoire une « déclaration préalable » pour l'édification de toute clôture y compris en espaces non bâtis : « 2° Imposer des caractéristiques pour les clôtures ». 21 Comme l'a indiqué Yves Froissart en 2011, « la sensibilité des communes du Pays de Grande Sologne aux questions de l'engrillagement est globalement forte, avec pour preuve le fait que sur les 18 communes ayant un document d'urbanisme début 2011 (sur un total de 28 communes), 17 ont adopté une règle concernant les clôtures en milieu naturel, agricole et forestier, fixant, comme la loi le prévoit, des éléments concernant la qualité, la hauteur, les matériaux utilisés pour les clôtures. » L'article L. 151-23 du code de l'urbanisme prévoit que le règlement du PLU peut délimiter des secteurs « à protéger pour des motifs d'ordre écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation ». La partie réglementaire explicite notamment les outils disponibles : · L'article R. 151-43 permet aux collectivités de « délimiter les espaces et secteurs contribuant aux continuités écologiques et définir des règles nécessaires à leur maintien ou à leur remise en état », règles au sein desquelles pourrait figurer des prescriptions sur l'édification de clôtures, comme une obligation de laisser régulièrement des espaces non clôturés, prescrire des baies ouvertes ». · L'article R. 421-12 prévoit et une procédure de déclaration préalable pour l'édification d'une clôture située dans un secteur ainsi délimité au PLU, hormis les exceptions régénération forestières et clôtures agricoles, lesquelles doivent être temporaires. · Par ailleurs, les communes n'ayant pas de document d'urbanisme peuvent décider de rendre obligatoire la déclaration de travaux, sans avoir d'éléments juridiques à opposer à un propriétaire en cas de désaccord sur les caractéristiques de la clôture (anciennement, par suite d'un arrêté préfectoral, depuis 2007, une simple délibération communale suffit). Aussi la mobilisation des règles d'urbanisme peut être effective dans toute la Sologne. 3.6.3. Faciliter les décisions des collectivités grâce à des modèles de clôtures Les communes et les collectivités disposent de tous les outils nécessaires à l'élaboration d'une politique en matière de clôture, mais celle-ci suppose une coordination sans faille. Il convient que soient pris en compte les avis des personnes publiques associées, notamment à l'occasion de l'enquête publique du SRADDET. Dans le cadre de son élaboration, il importe que l'État et la région Centre-Val de Loire, agissant de concert, chacun dans ses attributions, prescrivent les types de clôtures, eu égard aux intérêts majeurs que constituent la valeur patrimoniale des paysages, des continuités écologiques et leurs multifonctionnalités. Plusieurs maires de communes dotées d'un document d'urbanisme prévoyant des mesures de régulation des clôtures ont indiqué que leur position serait renforcée dans la mesure où des plaintes s'exprimeraient à l'encontre des clôtures par des citoyens, individuellement, ou par le biais d'associations. Une «veille citoyenne» s'est constituée avec les trois associations rencontrées, regroupant plus de 1 500 adhérents, car il semble encore que de nombreuses clôtures soient édifiées 21 Thèse de Laurent Millet « sur le droit de se clore ». L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 38/68 PUBLIÉ sans déclaration de travaux, là où celle-ci est requise (du fait d'un document d'urbanisme ou par délibération communale). Une communication visant à constituer une «opinion publique» éclairée est un point important d'une démarche où les citoyens sont encouragés à donner leur opinion. Définir le plus grand dénominateur commun des clôtures en Sologne et faciliter les décisions des collectivités en leur fournissant des modèles de décision adaptés à la diversité des situations, tout en assurant la cohérence des règles applicables sur l'ensemble de la Sologne, trace une voie que la mission propose de privilégier. A l'occasion de la rédaction du SRADDET, il est important d'établir un cahier des charges, une norme claire et précise, définissant la notion de clôture perméable, acceptable et précisant les distances de retrait par rapport aux voies publiques et privées et aux propriétés des tiers. Cette démarche doit permettre d'informer les collectivités sur toutes les possibilités ouvertes par le droit de l'urbanisme en matière de limitation et de contrôle des clôtures et les inciter à faire le nécessaire dans les SCOT, PLUi, PLU. Il est proposé qu'État et collectivités organisent rapidement des ateliers productifs pour : · décider d'une position solognote homogène sur les clôtures, avec un plus grand dénominateur commun, ce qui accroîtrait l'effet de visibilité politique de l'action ; · s'accorder en matière de hauteur, de typologie, de matériaux utilisés, de positionnement par rapport aux voies publiques et privées, permettant à la fois de matérialiser la propriété et d'assurer la perméabilité pour la faune sauvage ; · définir les types de clôtures et leurs justifications, les critères d'évaluation, la pertinence, la réévaluation périodique et les clauses de revoyures ; · prévoir un délai de mise en conformité des clôtures existantes au regard de règles nouvelles. Ainsi une même règle concernant les clôtures sera effective pour l'ensemble des SCOT solognots. Recommandation 5. Rendre obligatoire, dans le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), les prescriptions concernant les caractéristiques des clôtures incluant la procédure de déclaration préalable à leur édification et profiter de son élaboration pour progresser sur l'établissement de modèles (préfet de région et conseil régional). 3.6.4. Les communes responsables de la libre circulation sur les chemins ruraux Les cheminements humains, à des fins de tourisme et randonnée, sont aussi à prendre en compte ; en effet, la préservation de la qualité des paysages constitue un enjeu largement intégré dans le SRADDET qui dispose une règle visant à «préserver et valoriser le patrimoine architectural, urbain et paysager dans les plans et programmes ». L'attention portée à cet aspect paraît d'autant plus utile que ce patrimoine est un facteur essentiel de l'attractivité de la région. Les clôtures font fuir le tourisme local et résidentiel. Elles le concentrent de surcroît sur des zones ouvertes. Les associations de randonneurs expriment depuis longtemps avec vigueur leur opposition aux clôtures, pour des raisons essentiellement paysagères, notamment le long des chemins publics communaux, parfois de part et d'autre du chemin. Les pouvoirs publics ont investi fortement pour créer, dynamiser des circuits de randonnées pédestres, équestres et à vélo . Cet effort est mis à mal. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 39/68 PUBLIÉ Les grilles canadiennes (photographie ci-dessous) constituent une autre pomme de discorde. Les communes ont le pouvoir d'autoriser ou d'interdire ces grilles sur les chemins communaux et ruraux. Ces grilles sont jugées dangereuses par les randonneurs équestres, le cheval refuse l'obstacle. Elles peuvent constituer aussi un obstacle pour les cyclistes peu expérimentés. Leur autorisation par la commune est une acceptation implicite donnée au propriétaire qui souhaite poser une clôture perpendiculairement au chemin, de part et d'autre de la grille canadienne. La mission a effectivement constaté l'existence de chemins ruraux appropriés ou dont la libre circulation n'est plus assurée suite à l'installation de passages canadiens entravant le passage de chevaux, des enfants et de la faune sauvage, ou déplacés sans justifications ni autorisations, témoignant des complaisances ou de non actions de la part de maires. Les communes doivent être incitées à rouvrir des chemins appropriés et à faire supprimer des barrières canadiennes, dont l'autorisation est par nature révocable. Exemple de barrière canadienne sur chemins ruraux (photographie des auteurs) 3.7. Des clôtures nécessaires : agriculture, forêt, sécurité routière La mission rappelle que la clôture peut être utile, voire nécessaire, dans un certain nombre de cas, appelant des justifications précises au moment de son édification. Pour les productions agricoles et forestières, la présence de clôtures peut être nécessaire pour protéger de façon permanente ou temporaire une zone, face à la pénétration du gibier et aux dégâts qu'il peut commettre. La régénération forestière justifie aussi pleinement des protections au moment notamment des régénérations comme évoqué au chapitre 1.3.1. du présent rapport. Il peut aussi s'agir de parquer des animaux d'élevage dans un périmètre. Dans ce cas les clôtures filaires sont suffisantes. Le choix du type de clôture pour ces activités, est a priori « libre » en Sologne, sous réserve qu'elles soient temporaires (pour les forêts) et qu'elles puissent se situer à une certaine distance des bords de route. En matière de sécurité routière, les clôtures bordant les routes peuvent être utiles mais parfois constituer un piège pour les animaux qui s'y engagent. Un véhicule qui survient peut affoler ces animaux qui ne trouvent pas d'issue et peut susciter de leur part des comportements imprévisibles et accidentogènes. De même, mais dans une moindre mesure, une clôture unilatérale à une route peut produire le même effet pour des animaux qui tentent de franchir une route au moment de l'arrivée d'un véhicule. L'extrémité d'une clôture linéaire longeant une route peut également devenir L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 40/68 PUBLIÉ un lieu privilégié de passage d'animaux. Il est vrai que de tels emplacements, localisés, sont bien connus et souvent indiqués par des panneaux routiers. Ceci n'empêche pourtant pas les accidents. Enfin, à l'inverse, une route passante peut devenir dangereuse un jour de chasse, du fait du passage du gibier et des chiens. Plusieurs propriétaires interrogés ont indiqué l'intérêt pour eux d'une clôture même peu élevée (de l'ordre d' 1 m) qui facilite l'arrêt des chiens.22 L'aménagement par le propriétaire d'un dégagement de 2 à 3 mètres à partir du fossé (l'idéal serait un positionnement des clôtures à 5 mètres de la route) conforterait le volet sécurité et visibilité. Ce terre-plein peut permettre également au propriétaire forestier de constituer une zone temporaire de stockage de bois. Dans les territoires fortement segmentés, les passages de cervidés se concentrent sur les seules zones encore ouvertes qui deviennent donc des zones accidentogènes. Plusieurs idées peuvent être émises : · créer une bande dégagée suffisamment large de part et d'autre de la route, ce qui permet aux automobilistes et aux animaux de voir et d'être vus (voir ci-dessus) ; · aménager des passages protégés pour animaux, associés à un radar détectant les animaux et clignotant pour avertir les conducteurs avec un panneautage (installés avec efficacité dans le département de l'Isère) ; · poser des réflecteurs en limite de chaussée, orientés vers les enceintes boisées; ils ont été testés avec succès (l'éclat des phares renvoyé dissuade les animaux de traverser). La mission propose de réduire l'effet d'obstacle des clôtures à la circulation des animaux en installant des dispositifs adaptés. De telles réflexions, relatives au type de clôtures et aux fonctionnalités recherchées, peuvent nourrir le débat territorial préalable à l'établissement des documents d'urbanisme. 3.8. Modifier la fiscalité pour défavoriser l'engrillagement Clore une propriété est un droit, mais rien ne s'oppose à ce que cette formalisation matérielle, parfois excessive, de l'appropriation d'un terrain soit prise en compte par la fiscalité foncière. Ceci est tout particulièrement vrai lorsque cette clôture permet au propriétaire de s'affranchir des règles communes, comme c'est le cas pour les enclos cynégétiques, mais aussi d'entraver le contrôle de la loi en étendant physiquement la protection domiciliaire bien au-delà des seuls bâtiments d'habitation. L'enclos se traduit par un tableau cynégétique renforcé, qui semble donner de la valeur à l'activité de chasse, dans des conditions très défavorables à la naturalité et à la durabilité du milieu mettant notamment en danger l'état forestier. Pour favoriser le retour à une situation écartant le grillage hermétique, diverses dispositions fiscales pourraient être ajustées et être décidées par les collectivités locales en direct. Normalement, la valeur locative forfaitaire d'une parcelle non bâtie close est plus élevée que celle d'une parcelle sans clôture, du fait du classement de la parcelle dans un groupe de nature de cultures23 plus imposé (groupe 13 est plus élevée que celle d'une parcelle sans clôture « bois d'agrément » ou groupe 11 « terrains spécialement aménagés en vue de la chasse »). Mais cette majoration n'est pas toujours très élevée, ni connue et mise en oeuvre par les commissions communales des impôts fonciers. 22 Trans-Formation Consultants/Y. Froissart Janvier-Juillet 2011 Pays Grande Sologne. Étude Concertation « Faire face aux engrillagements ». Voir au Bulletin officiel des Finances publiques l'annexe « Tableau de classification des natures de culture ou de propriété et leurs groupes pour l'établissement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) ». L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 41/68 23 PUBLIÉ Aussi, appliquer aux propriétés rurales closes une forte majoration de la taxe sur le foncier non bâti (multiplication par trois ou cinq) serait à la fois une façon de mieux tenir compte de la valeur économique plus importante de la propriété et de rendre plus coûteux l'engrillagement, qu'il soit de convenance ou pour constituer un enclos cynégétique. De la même façon, la sur-densification des populations de grands mammifères chassables à l'intérieur des enclos amène souvent une désertification végétale voire une déforestation de surfaces qui ont bénéficié des avantages fiscaux24 liés à l'état boisé. Aussi, la mission propose de retirer le certificat « Monichon » pour toutes les surfaces encloses qui ne répondent plus aux critères de gestion durable (surfaces déboisées par le surpâturage ou pour les équipements de chasse, surfaces encore boisées mais impossibles à régénérer du fait du la pression du gibier) considérant qu'il s'agit d'une simple application de la loi. Recommandation 6. Augmenter la fiscalité foncière et immobilière sur les espaces hermétiquement engrillagés en appliquant aux propriétés rurales closes une forte majoration de la taxe sur le foncier non bâti (multiplication par trois ou cinq, disposition à voter en loi de finances) et, d'autre part, en supprimant les réductions des droits de mutation des propriétés forestières et de l'impôt sur la fiscalité immobilière obtenus avec un certificat de gestion durable, sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques (Ministres). 3.9. Promouvoir le patrimoine naturel solognot avec des clôtures perméables Différentes pistes non exploitées par la mission pourraient être envisagées : · la médiatisation de retrait volontaire de clôtures par certains propriétaires ouverts à cette démarche. Un tel retrait volontaire serait assuré d'un impact médiatique ; · la mobilisation de fonds (ENS / fondation pour les habitats de la faune sauvage / fonds biodiversité FNC FDC) pour accompagner ces retraits (sous condition par exemple de propriété modeste ou très morcelée) ; · la prolongation de cette politique volontariste, résultat de consensus locaux, départementaux ou régional, dans le cadre plus élargi « de l'implantation d'éléments linéaires naturels denses (tels que haies d'épineux) permettant le passage des animaux et limitant les intrusions humaines »25 ; · la création un label « CHASSE NATURELLE DE SOLOGNE » qui aurait vocation à promouvoir la chasse du grand gibier en espace libre ou sous « petites barrières » conformes aux documents d'urbanisme. 24 Ces avantages, prévus par les articles 793 et 976 du code général des impôts, sont obtenus grâce à un certificat (dit « Monichon ») établi par la DDT, et attestant que la propriété peut, du fait d'une gestion durable de ses peuplements forestiers, bénéficier d'une exonération des trois quarts de l'impôt sur la fortune immobilière (IF) ou des droits de mutation à titre onéreux. En contrepartie, les bois et forêts ayant bénéficié de cette réduction doivent, pendant trente ans, être gérés selon des garanties de gestion durable, que le propriétaire s'engage, pour lui-même et ses ayants-cause, à respecter. Mission parlementaire relative à la régulation des populations de grand gibier et à la réduction de leurs dégâts, A Perea, JN Cardoux. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 42/68 25 PUBLIÉ Recommandation 7. Créer un label « Chasse naturelle de Sologne » (préfet de région et conseil régional). L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 43/68 PUBLIÉ PUBLIÉ 4. Pistes de progrès : synthèses des propositions ACTION FAIBLE PRATIQUE DE LA CHASSE MOYENNE FORTE Interdire de la chasse en enclos Interdire l'agrainage sur l'ensemble du territoire Reclasser les enclos en élevage en cas de dépassement de densité Raffermir les instructions aux préfets Renforcer la limitation de l'agrainage en SDGC Étendre le droit commun de la chasse à tout territoire chassé Supprimer l'agrainage dans tout enclos ou parc NOURRISSAGE AGRAINAGE INTRODUCTION GRAND GIBIER Interdire toute introduction de grand gibier sur le territoire soumis à la chasse Rappeler les règles avant l'ouverture de la chasse Mettre en commun les fichiers entre les services de l'État Contrôler régulièrement l'ensemble de l'intérieur des parcs et enclos Recourir à l'ensemble des agents de contrôle pour appuyer les maires en cas de difficulté Mise en place d'un label « Chasse naturelle de Sologne » accroître fortement les taxes sur le foncier non bâti des enclos hermétiques RENFORCEMENT DES CONTRÔLES notamment sanitaires RÈGLES D'URBANISME Accompagner les élus dans le renforcement du lien SRADDET SCOT PLUI PLU Établir les principes de perméabilité et les types de clôture acceptés pour être conforme COMMUNICATION SÉCURITÉ Valorisation médiatique des actions volontaires de désengrillagement pour passer à « de petites barrières » Imposer les « petites barrières » comme indicateur de gestion durable des propriétés sous PGS Revenir sur les réductions fiscales liées aux propriétés encloses DOMAINE FINANCIER Ministres Préfets élus locaux L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 45/68 PUBLIÉ Conclusion Tout concourt à démontrer que les enclos hermétiques ou l'utilisation de grillages imperméables à la faune sauvage sont un non-sens cynégétique, présentent des non-conformités en matière de droit de l'environnement, de droit de l'urbanisme ou de droit rural et échappent partiellement au contrôle des élus et de l'État sur des interprétations juridiques discutables. Ces pratiques d'accaparement ou de perturbation de l'espace naturel et de l'espace public ne sont plus acceptables. Après les usagers, elles heurtent désormais les élus locaux et les parlementaires de toute sensibilité politique en Sologne ainsi que les chasseurs eux-mêmes. Les arguments naturalistes, cynégétiques, sanitaires, forestiers, paysagers, sociétaux et d'une façon générale l'artificialisation des milieux qui en résulte devraient conduire à un raffermissement législatif, du reste en cours. La mission considère que le bon sens doit permettre de progresser collectivement vers des pratiques plus respectueuses de l'éthique, de la naturalité de la chasse et du respect du bien commun et des biens collectifs. La Sologne, dans son ensemble, fait preuve d'une concorde certaine. Elle entend mettre en place des dispositions en matière d'urbanisme permettant de tels progrès, en associant toutes les parties, mais ne saurait assumer seule les transitions qui imposent d'indispensables modifications nationales, notamment en matière de droit de la chasse et de son contrôle. Michel REFFAY Dominique STEVENS Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 46/68 PUBLIÉ Annexes L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 47/68 PUBLIÉ 1. Lettre de mission L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 48/68 PUBLIÉ L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 49/68 PUBLIÉ 2. Liste des personnes rencontrées Nom Prénom MINISTRES / PARLEMENTAIRES CARDOUX PELTIER CORMIER-BOULIGEON PRINCE Jean-Noël Guillaume François Jean-Paul AUTRES ELUS 12/06 à Régions de France 282 boulevard saint germain paris 7e Sénateur du Loiret Député du Loir-et-Cher Député du Cher Sénateur du Loir-et-Cher 17/06 à Sully/Loire 12/06 Paris (AN) 17/06 à Bourges 17/06 à la Ferté Saint Cyr Fonction Rendez vous pris BONNEAU François Président du Conseil régional PERRUCHOT LAUNAY BIOULAC (*) Nicolas Jacques Pascal Président du Conseil départemental du Loir11/06 Paris et-Cher Directeur Aménagement Rural et Environnement Président du Pays de Grande Sologne, maire de Lamotte-Beuvron (*)représenté par Adeline Kanengieser, directrice du Pays, Alain Delarbre, maire adjoint de Millancay, Nathalie Fosnon, responsable urbanisme Lamotte 07/06 (téléphone et courriels) 04/06 à Lamotte GOUBERT de CAUVILLE Pascal Présidente communauté de communes Sauldre Sologne Présidente communauté de communes Villages de la Forêt 06/06 à Chaumont/ Tharonne 19/06 à Argent/ Sauldre 18/06 à Neuvy/Baran geon RENIER Laurence JENNEAU Ghislaine RE PRESENTANTS DES CHASSEURS VUITTON Hubert-Louis Président de la FDC41 et de la FRC Centre- 13/06 à Paris Val de Loire (FNC) 11/06 à l'APCA RE PRESENTANTS DE LA PROFESSION AGRICOLE NOYAU Philippe Président Chambre régionale d'agriculture L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 50/68 PUBLIÉ REPRESENTANTS DES ACTEURS FORESTIERS DE COURCY et PESME Alain et Xavier Président et directeur du CRPF Vice-Président en charge de la région Centre-Val de Loire Présidente de l'Union régionale des syndicats de propriétaires forestiers sylviculteurs Président du syndicat des propriétaires forestiers du Loiret Délégué territorial ONF 20/06 à Orléans 12/06 Paris 20/06 à Orléans Contact par courriel 18/06 à Lamotte 17/06 à Nancay 04/06 à Lamotte 15/05 à Brinon/sauldr e 16/05 à Yvoy-lemarron 23/05 à SainteMontaine DE GRESSOT DE DREUZY DUCOS Florence Philippe Yves PROPRIETAIRES PRIVES DIVISIA et CHEVALLIER MONOT Bernard et Hubert Gérard ASSOCIATIONS Président et administrateur du comité central agricole de Sologne Propriétaire privé REGENT LOUIS Emmanuel Raymond et Marie Sologne Nature Environnement Amis des Chemins de Sologne Chasseurs, promeneurs et faune libre en Sologne Associations des chasseurs et amis de la Sologne contre son engrillagement CAMUS Sébastien BERNARDIN Jean-François EXPERTS MARTIN-LALANDE Patrice 05/06 Ex-député et président du Pays de Grande téléphone et Sologne 13/06 Paris (AN) Réalisateur 03/06 (téléphone) VANIER Nicolas AUCANTE Pierre FROISSART DE REDON BEDARIDA Yves Louis Gérard Membre de la société pour la protection des 23/05 à paysages et de l'esthétique de la France + Yvoy-leMembre CDNPS41 + Membre du CA de la Marron Maison du Braconnage Consultant Pays de Grande Sologne et 03/06 étude DYSPERSE (téléphone) élu à Romorantin, Maître de conférences 05/06 en Environnement et Droit de (télephone) l'Environnement à AgroParisTech président de l'Association nationale des 28/06/19 chasseurs de grand gibier L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 51/68 PUBLIÉ SERVICES DE L'ETAT FERRIER CARPENTIER PEYRAT QUIRIN PRIMOT DURAND Catherine Myriam Marie Bénédicte René Pierre Benoit Préfète du Cher, accompagnée de Maxime 19/06 à GUENOT adjoint DDT18 et Gérald Perreault Préfecture SD ONCFS) Adjointe au S/directeur de la santé et de la 21/O5 DGAL protection animale PARIS 21/O5 DGAL Cheffe du bureau de la santé animale PARIS 21/O5 DGAL Chef de mission Peste porcine Africaine PARIS Chef du bureau de l'identification et du 24/O5 DGAL contrôle des mouvements PARIS Epidémiologiste à l'unité d'épidémiologie du 24/O5 ANSES laboratoire de santé animale de Maison Alfort M.ALFORT Epidémiologiste à l'unité d'épidémiologie du 24/O5 laboratoire de santé animale de Maison ANSES Alfort M.ALFORT Conseiller technique police sanitaire USAF / 11/06 tél et DRE ONCFS é-mail Echanges resp. Service jridique Direction Police courriels et ONCFS é-mail BOSHIROLI VAN DE WIELE LANDELLE Maria Laura Anne Philippe L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 52/68 PUBLIÉ 3. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme ARB ANSES BD Porcs CC CCAS CEMAGREF DREAL DRAAF DGAL DDT (M) DDCSPP ELO FDC FNC FRC ha. IBC IRSTEA JORF MTES NOTRe ONCFS OFB PLU (i) POS Signification Agence Régionale de la Biodiversité Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, Base de données nationale porc Communauté de communes Comité Central Agricole de la Sologne Centre national du machinisme agricole, du génie rural des eaux et forêts Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt Direction générale de l'alimentation Direction départementale des territoires (et de la mer) Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations European Landowners Organisation Fédération départementale des chasseurs Fédération nationale des chasseurs Fédération régionale des chasseurs Hectares Inventaire de la biodiversité communale Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture Journal officiel de la République française Ministère de la Transition écologique et solidaire Nouvelle organisation territoriale de la République (Loi) Office national de la Chasse et de la Faune sauvage Office français de la biodiversité Plan local d'urbanisme (Intercommunal) Plan d'occupation des sols L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 53/68 PUBLIÉ Acronyme PGRI PPA PNMS PGS SRADDET SIG SCoT SRB SRCE SDAGE SDGC TVB TRACES UE Signification Plan de gestion des risques d'inondation Peste porcine africaine Plan national de maîtrise du sanglier Pays de Grande Sologne Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires Système d'information géographique Schéma de cohérence territoriale Stratégie régionale pour la biodiversité Schéma régional de cohérence écologique Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Schéma départemental de gestion cynégétique Trame verte et bleue Trade control and expert system Union européenne L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 54/68 PUBLIÉ 4. Quelques données en matière d'épidémiologie Les épidémiologistes soulignent le caractère sécurisant de l'engrillagement pour se prémunir et pour circonscrire les différentes maladies susceptibles d'affecter le grand gibier. Si la peste porcine africaine (PPA) est souvent mentionnée comme le risque viral le plus dangereux, il convient également de mentionner la peste porcine classique (PPC), la tuberculose, la trichyllose, voire la brucellose, la maladie d'Aujesky. Une description plus complète de ces maladies est disponible sur la plate-forme d'épidémiologie surveillance (ESA) de la direction générale de l'alimentation. S'il ne nous revient pas de détailler les éléments relatifs aux pathologies des sangliers et des cervidés, certaines de ces maladies méritent cependant un court focus. La PPA mérite une attention particulière compte tenu du risque considérable qu'elle présente pour l'ensemble des élevages de suidés. La PPA est portée par un virus extrêmement virulent qui engage définitivement le pronostic vital de l'animal, pour lequel il n'existe pas de vaccin à l'heure actuelle. Elle toucherait indifféremment porcs et sangliers. Le virus tue vite : en trois jours en général voire quelques jours de plus; il est extrêmement résistant y compris dans les cadavres et les produits transformés. La tuberculose mérite également une mention particulière -a contrario de la PPA- elle est susceptible d'être portée par des animaux différents (sangliers, cervidés, renards, blaireaux ...). La tuberculose ne tue pas, il peut y avoir des porteurs sains. Son diagnostic peut être porté sur la base d'un test sérologique avec réponse sous une semaine. Rappelons à cet égard l'épisode de 2012 d'épidémies tuberculeuses résultant d'un sanglier échappé d'un parc de chasse de la Marne qui a conduit à l'abattage total des animaux du parc. À titre d'illustration, ce parc de chasse constituée d'un enclos de 379 ha supportait 521 ongulés répertoriés présents (241 cervidés, 280 sangliers). A noter les effectifs largement supérieurs à la norme qui conduisent au statut d'élevage.. Les études sérologiques conduites à l'issue de l'abattage mettaient en évidence une prévalence apparente en tuberculose qualifiée de non négligeable (7,3 %) chez les sangliers et nulle chez les cervidés. L'étude des souches de tuberculose présentes suggérait une origine extérieure aux souches de tuberculose habituellement présentes ou entrées en France. L'étude réalisée en 2007 concluait d'ailleurs sur le caractère indigent des bases réglementaires existantes en matière de suivi des enclos de chasse. Il convient également de mentionner la fièvre aphteuse dont l'Union européenne est indemne ; elle constitue cependant un risque que la mission entend mentionner dans la mesure où elle est extrêmement présente en Turquie, ce pays détenant une sous-espèce de sanglier dit « Attila » particulièrement prisée par les chasseurs européens (sujet de très grande taille de 200-250 kg) qui pourrait motiver des introductions illégales. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 55/68 PUBLIÉ 5. La loi wallonne Circulaire n° 2 719 du 19 novembre 2013 relative à l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés. 1. Objet de la circulaire La présente circulaire a pour objet de fournir aux agents du Département de la Nature et des Forêts (DNF), ainsi qu'à ceux de l'Unité anti-braconnage (UAB) du Département de la Police et des Contrôles (DPC), un commentaire explicatif et des directives concernant l'interdiction légale de la chasse du grand gibier dans les territoires clôturés. Les dispositions de la législation sur la chasse qui organisent cette interdiction ont fait au fil du temps l'objet d'interprétations en sens divers et, pendant très longtemps, d'un certain attentisme au niveau de leur application sur le terrain. Cette situation est notamment due aux recours introduits au Conseil d'État en 1999 par certains propriétaires privés et des associations défendant leurs intérêts [1] et à l'adoption en octobre 2000 d'une circulaire ministérielle [2] controversée quant à l'interprétation donnée par celle-ci à la définition du territoire clôturé. Il importe aujourd'hui que l'ensemble des agents chargés de la police de la chasse aient la même compréhension de ces dispositions légales et adoptent vis-à-vis de celles-ci la même attitude concernant leur application sur le terrain. Cela n'enlève évidemment rien au fait que l'interprétation de ces dispositions revient en définitive aux parquets et tribunaux. 2. Références légales et jurisprudentielles 2.1. Références légales - loi du 28 février 1882 sur la chasse : * article 1er, § 1er, 10°, inséré par l'article 1er du décret du 14 juillet 1994 (Moniteur belge du 28 septembre 1994); * article 2ter, inséré par l'article 10 du décret précité; - arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 déterminant la hauteur des clôtures visées à l'article 2ter, alinéa 2, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse (Moniteur belge du 10 juillet 1999). 2.2. Références jurisprudentielles - jugement du 18 octobre 2006 du tribunal de première instance de Verviers, 10e chambre correctionnelle : - arrêt n° 198.192 du 24 novembre 2009 du Conseil d'Etat; - arrêt du 4 octobre 2011 de la cour d'appel de Liège, 4e chambre correctionnelle; - arrêt du 22 février 2012 de la Cour de Cassation. 3. Rappel du contexte Comme tous les êtres vivants, les grands gibiers doivent disposer de nourriture pour s'alimenter, de couvert pour s'abriter et de partenaires en nombre suffisant pour assurer leur descendance. L'espace nécessaire à un individu pour satisfaire l'ensemble de ses besoins constitue ce que l'on appelle son domaine vital. Suivant les espèces, l'individu le partagera en totalité, pas du tout, ou en partie avec des représentants de sa propre espèce. Ce partage peut être permanent ou saisonnier, exclusif d'un sexe ou d'une classe d'âge ou non. Chez l'espèce chevreuil, le domaine vital d'un individu est de quelques dizaines d'hectares au plus. Chez l'espèce cerf, ce domaine vital est de 700 à 1 500 ha pour une biche et de 1 500 à 5 000 ha, voire davantage, pour un cerf. Chez l'espèce sanglier, le domaine vital est de 500 à 5 000 ha pour les L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 56/68 PUBLIÉ femelles et de 1 500 à 10 000 ha pour les mâles. Il s'agit là d'ordres de grandeur donnés à titre purement indicatif, la taille des domaines vitaux pouvant s'écarter de ces chiffres en fonction notamment de la richesse du milieu ou de la quiétude. Le développement inévitable de l'urbanisation et des voies de communication a exercé au fil du temps une pression sur le domaine vital des animaux grands gibiers. Ceux-ci ne peuvent parfois plus satisfaire leurs besoins alimentaires qu'en surexploitant les ressources disponibles à l'intérieur de la forêt, laquelle constitue aujourd'hui la majeure partie de leurs domaines vitaux. Le phénomène s'est accentué ces dernières décennies avec l'accroissement considérable des populations de grand gibier et la pénétration du public en forêt qui a mis à mal la quiétude des animaux. Constatant que cette situation est encore accentuée localement par la présence en forêt de multiples clôtures entravant le déplacement des grands gibiers entre territoires de chasse [3], le législateur wallon a souhaité agir à ce niveau à l'occasion de l'adoption du décret du 14 juillet 1994 modifiant la loi sur la chasse du 28 février 1882. 4. Commentaires des dispositions légales 4.1. Article 1er, § 1er, 10° et article 2ter, alinéa 1er, de la loi sur la chasse Afin d'encourager le démantèlement des clôtures dans les territoires de chasse, le législateur wallon a donc décidé d'interdire la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés [4] (cf. article 2ter de la loi sur la chasse, alinéa 1er) et il a défini le territoire clôturé comme suit : « tout territoire ou partie de territoire délimité de manière permanente ou temporaire par un ou plusieurs obstacles empêchant le libre parcours de toute espèce de grand gibier » (cf. article 1er, § 1er, 10°, de la loi sur la chasse). Commentaire : Il importe de rappeler que ce qui est sanctionné c'est le fait de chasser le grand gibier à l'intérieur d'un territoire clôturé et donc de poser un acte de chasse. La définition de l'acte de chasse est large et est reprise dans l'article 1er, § 1er, de la loi sur la chasse du 28 février 1882 "L'action consistant à capturer ou tuer un gibier, de même que celle consistant à le rechercher ou le poursuivre à ces fins". Les règles de la complicité et de la corréité (co-auteur) sont applicables : peuvent donc être sanctionnés non seulement le chasseur sensu stricto, mais également tous ceux qui collaborent à l'acte de chasse (traqueurs, organisateurs de la battue, qui ont parfaitement connaissance du fait qu'ils pratiquent la chasse sur un territoire clôturé). Celui qui a édifié la clôture n'est pas nécessairement coupable de l'infraction; il ne peut être déclaré tel, que s'il est établi qu'il a sciemment édifié cette clôture pour faciliter la chasse et retenir le gibier dans le territoire visé. Quant à la définition du territoire clôturé énoncée à l'article 1er, § 1er, 10°, de la loi sur la chasse, elle appelle les commentaires suivants : a) la notion de « libre parcours » implique que le grand gibier doit pouvoir se déplacer en tout temps et sans contrainte inutile pour pouvoir rejoindre directement les endroits où il pourrait s'alimenter, s'abriter et se reproduire. En effet, suivant la définition du territoire clôturé, des obstacles même temporaires entrent en ligne de compte pour déterminer le caractère « clôturé » d'un territoire [5]. Par ailleurs, nul besoin que le territoire soit entièrement clos pour être considéré comme clôturé, puisque la définition fait référence au cas d'un territoire en partie délimité par un ou plusieurs obstacles. Du reste, l'existence possible, suivant la définition, de plusieurs obstacles implique aussi une éventuelle interruption entre ceux-ci [6]. Cela étant, un obstacle de quelques mètres voire de quelques dizaines de mètres ne gêne guère le déplacement des grands gibiers. Inversement, une ouverture de quelques mètres dans une clôture de L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 57/68 PUBLIÉ plusieurs centaines de mètres n'enlève pas grand-chose au fait que cette clôture gêne incontestablement le grand gibier au niveau de ses déplacements. L'obstacle doit donc être significatif, en sorte qu'il paraît cohérent de ne pas prendre a priori en considération l'existence d'une clôture d'une longueur inférieure à 300 mètres et distante, de tout autre tronçon de clôture, d'une longueur minimale de 100 mètres. Une clôture d'une longueur inférieure à 300 mètres peut toutefois être considérée comme un obstacle au libre parcours du grand gibier : - si elle n'existait pas à la date de la signature de la présente circulaire, ou si elle a été (ré)allongée (ou remontée à plus d' 1,20 m) après cette date; - si elle fait l'objet d'une plainte du titulaire du droit de chasse voisin qui estime que telle qu'elle est installée et en raison de la configuration des lieux, cette clôture n'a d'autre but que d'empêcher les animaux de pénétrer sur sa chasse; b) il suffit que le libre parcours d'une seule espèce de grand gibier [7] soit entravé d'une manière ou d'une autre pour que le territoire soit considéré comme clôturé et, partant, que la chasse de tous les grands gibiers y soit interdite; c) la définition du territoire clôturé ne précise pas la nature des obstacles empêchant le libre parcours du grand gibier. C'est donc une question de fait, à apprécier sur le terrain au cas par cas [8]. Mais ce n'est aussi qu'une question de fait. En effet, l'intention importe peu : l'objectif poursuivi par l'existence de la clôture ne doit donc pas nécessairement être celui d'entraver la libre circulation du gibier. Ainsi, la clôture ne doit pas nécessairement être dressée par le chasseur ou à la demande du chasseur : elle peut être le fait de tiers en concertation ou non avec le chasseur. Par conséquent, s'il y a dans les faits entrave à la libre circulation du grand gibier, le territoire est clôturé au sens de la loi sur la chasse. 4.2. Article 2ter, alinéa 2, de la loi sur la chasse et arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 déterminant la hauteur des clôtures visée par l'article 2ter, alinéa 2, de la loi sur la chasse. L'article 2ter, alinéa 1er, de la loi énonce une règle générale (l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés). Le législateur wallon a toutefois prévu une dérogation à cette règle générale en précisant que les territoires ou parties de territoire délimités uniquement par des clôtures installées pour la sécurité des personnes ou pour la protection des cultures et le maintien du bétail, n'étaient pas concernés par cette interdiction de la chasse au grand gibier (cf. article 2ter de la loi sur la chasse, alinéa 2). En d'autres termes, le législateur wallon a reconnu que le maintien (ou l'installation) de ces clôtures pouvait être indispensable dans certaines circonstances et prenait alors le pas sur la nécessité d'assurer le libre parcours du grand gibier. Dans ce cadre, il a habilité le Gouvernement à fixer la hauteur des clôtures concernées, compte tenu des objectifs - sécurité, protection des cultures ou maintien du bétail - que leur maintien (ou leur installation) entendait poursuivre. Cette hauteur a été fixée par le Gouvernement à 1,20 m maximum pour la protection des cultures et le maintien du bétail et à 5 m maximum pour la sécurité des personnes (cf. arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999, article 1er). Commentaire : En fixant une hauteur maximale de 1,20 m pour les clôtures de protection des cultures, le Gouvernement de l'époque a clairement indiqué que le maintien ou l'installation de ces clôtures ne se justifiait véritablement que pour éviter les seuls dégâts de sangliers. Pour ce qui concerne les clôtures assurant la sécurité des personnes, diverses situations peuvent être prises en considération : clôtures entourant des installations militaires, clôtures entourant des carrières, clôtures situées le L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 58/68 PUBLIÉ long d'autoroutes,... Le Gouvernement n'avait au départ pas jugé utile de fixer formellement une hauteur maximale pour ce type de clôture. C'est pour répondre à une objection du Conseil d'Etat qu'il l'a finalement fixée arbitrairement à 5 m. Pour bénéficier de la non-application de l'interdiction de chasser le grand gibier prévue par l'alinéa 2 de l'article 2ter de la loi sur la chasse, il faut que l'installation de la clôture se justifie par une raison objective - la protection des cultures par exemple - la hauteur seule n'étant pas suffisante en soi. Le simple fait pour une clôture délimitant un territoire - ou une partie de territoire - de ne pas avoir une hauteur de plus de 1,2 m ne signifie donc pas pour autant qu'elle ne pose aucun problème. Cela reviendrait à admettre qu'elle est censée jouer d'office un rôle de protection des cultures ou de maintien du bétail. Or si une clôture de 1,2 m de haut [9], placée le long d'une plaine, est effectivement à considérer comme une clôture de protection, la même clôture installée au sein d'un massif boisé, où elle ne sert qu'à délimiter le territoire de chasse en tentant d'y maintenir les sangliers, ne l'est assurément plus. 4.3. Article 8 de la loi sur la chasse L'article 8 prohibe notamment l'utilisation d'engins propres à faciliter la prise ou la destruction du gibier. Cette disposition est pratiquement aussi ancienne que la loi sur la chasse. Dans certaines circonstances particulières, une clôture peut éventuellement être qualifiée d'engin prohibé par l'article 8. Commentaire : Les clôtures peuvent être qualifiées d'engins au sens de l'article 8 de la loi uniquement lorsqu'elles servent véritablement et intentionnellement à « guider » le gibier traqué vers un passage obligé où il sera aisé de le tirer (principe de "l'entonnoir"). De telles clôtures sont généralement installées à dessein par le titulaire de droit de chasse lui-même. Par contre, une simple clôture délimitant un territoire de chasse (ou une partie de territoire de chasse) ne constitue pas en soi un engin au sens de l'article 8 de la loi sur la chasse, au motif que cette clôture jouerait un rôle en vue de retenir le gibier sur le territoire de chasse. La présence d'une clôture à proximité de certains postes de tir ne pose pas non plus de problème vis-à-vis de cet article 8. Par ailleurs, dans la mesure où le service exige lui-même l'enlèvement de tronçons de clôtures non justifiés par la protection des plaines, le maintien du bétail ou la sécurité des personnes, il ne saurait être question pour lui d'exiger aussi l'interdiction de postage à proximité des ouvertures créées. Comme le précise l'arrêt du 4 octobre 2011 de la 4e chambre correctionnelle de la cour d'appel de Liège, si la volonté du législateur avait été de considérer d'office les clôtures comme engins au sens de l'article 8, le législateur n'aurait pas manqué de compléter en conséquence la loi sur la chasse en y mentionnant expressément les clôtures, au même titre que les filets, lacets, pièges à mâchoires, bricoles et appâts empoisonnés ou non. Afin que l'ensemble des agents chargés de la police de la chasse adoptent une attitude commune visà-vis de l'application des dispositions légales commentées sous le point 4, les directives suivantes sont adoptées. 5. Directives 5.1. Quant à la méthode Afin de déterminer si un territoire donné est visé par l'interdiction de la chasse au grand gibier prévue par l'article 2ter de la loi sur la chasse, on adoptera la grille d'analyse suivante, sans inverser l'ordre des questions qu'il y a lieu de se poser : Première question : Le territoire de chasse est-il clôturé au sens de la loi sur la chasse ? Autrement dit, y-a-t-il une entrave à la libre circulation d'un grand gibier ou de plusieurs grands gibiers comme indiqué plus haut (point 4.2.1.) ? Comme indiqué également plus haut, cette entrave doit être significative par rapport au territoire concerné. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 59/68 PUBLIÉ Deuxième question : S'il y a effectivement entrave à la libre circulation, l'obstacle ou les obstacles peuvent-ils s'expliquer par : - soit la sécurité des personnes ? - soit la protection des cultures ? - soit le maintien du bétail ? Troisième question : Si la réponse à la deuxième question est positive, la hauteur maximale fixée par le Gouvernement, à savoir 1,20 m pour la protection des cultures et le maintien du bétail et 5 m pour la sécurité des personnes est-elle respectée ? Si les réponses aux 2e et 3e questions sont positives, les conditions nécessaires au constat de l'infraction ne sont pas réunies. Par contre, ces conditions sont réunies si la réponse à l'une des deux dernières questions est négative. La règle générale étant la sanction de l'entrave, en cas de doute quant à une réponse positive à la deuxième question, logiquement, c'est l'interdiction qui prime. Afin de lever au maximum le doute, les précisions suivantes sont apportées : Sécurité publique : Les clôtures qui sont installées le long des routes à l'initiative ou avec l'accord du gestionnaire de la voirie en vue d'assurer la sécurité publique constituent un obstacle au libre parcours du grand gibier, mais ne doivent pas entrer en ligne de compte pour déterminer si on se trouve en présence d'un territoire clôturé dans lequel la chasse au grand gibier doit être interdite [10]. Il en est généralement de même pour les clôtures installées autour de certains domaines par leurs gestionnaires en vue d'empêcher l'accès des personnes pour des raisons de sécurité (on songe ici en particulier aux domaines de la Défense nationale et aux zones de carrières...). Protection des cultures : Les clôtures de protection des cultures doivent être installées en lisière des massifs forestiers ou à proximité de la lisière. On doit cependant raisonnablement admettre qu'un chasseur installe une clôture de protection des plaines, qui ne suivrait pas exactement le contour de la lisière mais couperait parfois au court à travers certaines excroissances boisées s'avançant en plaine et ce pour des raisons d'économie évidentes. Par ailleurs, on doit également raisonnablement admettre qu'un chasseur, dont le territoire de chasse ne se trouve pas immédiatement en contact avec la plaine, mais qui a déjà été appelé dans le passé à devoir indemniser des dégâts importants de grand gibier à la plaine toute proche (et les a effectivement indemnisés), puisse installer une clôture de protection de la plaine sur son territoire si son voisin, dont le territoire est en contact direct avec la plaine, persiste à ne pas prendre des mesures de préventions efficaces contre ces dégâts, telle l'installation d'une clôture de protection efficace et réglementaire entre le bois et la plaine. Ceci ne porte pas préjudice au droit de ce voisin de contester le bien-fondé du défaut de prévoyance qui lui serait ainsi reproché et d'exiger par conséquent l'enlèvement de la clôture qui n'a pas sa raison d'être à ses yeux. Dans le cas particulier d'un territoire de chasse qui comporte en son sein (et donc pas en périphérie) un enclos, qui peut être justifié ou non par la nécessité de mettre des plants ou des arbres à l'abri de la dent du gibier, la chasse au grand gibier reste autorisée sur le territoire en dehors de cet enclos dans lequel elle est interdite. Évidemment, il doit être constaté qu'il y a nécessité de protéger une L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 60/68 PUBLIÉ véritable plantation et écarter tout subterfuge consistant à intégrer cet enclos dans un dispositif destiné manifestement à clôturer le territoire. 5.2. Quant aux conséquences de l'illégalité constatée Première période : priorité à la prévention et donc à l'avertissement Certains titulaires du droit de chasse ont pu estimer à tort que leur territoire n'était pas considéré comme clôturé. En effet, pendant plusieurs années, les agents chargés de la police de la chasse ne sont pas ou sont peu intervenus en vue de faire respecter l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés depuis son entrée en vigueur le 1er juillet 2000, notamment pour les raisons invoquées au point 1 (circulaire interprétative contestée et recours introduits au niveau du Conseil d'Etat). Compte tenu de cette situation, la plupart des titulaires du droit de chasse dont les territoires sont à considérer comme clôturés en ont été informés par le DNF lors des deux dernières saisons de chasse et il leur a été demandé d'enlever ou de rabaisser leurs clôtures, de manière à au moins ne plus se trouver à terme dans une situation infractionnelle comparable à celle qui a donné lieu au Jugement de la cour d'appel de Liège du 4 octobre 2011, confirmé par l'arrêt de la Cour de Cassation du 22 février 2012. Moyennant accord de leur part sur un programme de démantèlement des clôtures, procès-verbal n'a pas été dressé. Cette démarche d'avertissement sera encore poursuivie cette année vis-à-vis des titulaires de droit de chasse concernés qui n'auraient pas encore été identifiés ou qui se trouveraient dans une situation non conforme aux directives contenues dans la présente circulaire, malgré une première adaptation de leurs clôtures pour éviter de se trouver dans une situation infractionnelle comparable à celle qui fait l'objet de la jurisprudence précitée. Pour le 1er mai 2014 au plus tard, il leur sera demandé d'enlever ou d'abaisser toute clôture constituant un obstacle significatif au libre parcours du grand gibier, obstacle pour lequel le bénéfice de l'application de la dérogation prévue par l'article 2ter, alinéa 2, de la loi sur la chasse ne peut être invoqué. En cas de divergences de vue entre le titulaire de droit de chasse et le directeur des services extérieurs quant à l'obligation de démonter ou d'enlever une clôture le litige est porté à la connaissance de l'inspecteur général du DNF qui prendra la décision. Il sera signalé à ces titulaires de droit de chasse qu'à défaut de pouvoir s'exécuter, les propriétaires pouvant en effet toujours s'opposer à l'enlèvement ou au rabaissement des clôtures, ils n'auront d'autre choix, pour réguler le grand gibier, que de solliciter des autorisations de destruction en application des articles 28 à 31 de l'arrêté du Gouvernement wallon du 18 octobre 2002 permettant la destruction de certaines espèces gibiers. Il sera rappelé à ce propos que des autorisations en application des articles 28 à 31 ne peuvent être accordées, entre autres conditions, que si des dégâts importants sont observés ou sont à craindre (preuve à apporter par le demandeur) et à la condition que le grand gibier n'ait pas été nourri en période de chasse [11] (cf. art. 2 de l'arrêté du Gouvernement wallon du 18 octobre 2002). Par ailleurs, sous peine de couvrir une chasse déguisée, de telles autorisations de destruction ne seront jamais accordées de façon récurrente, chaque année. Les bénéficiaires de ces autorisations de destruction seront dès lors explicitement encouragés à prélever les plus d'animaux possible pour être à l'abri un certain temps au moins de problèmes importants de dégâts. Deuxième période : répression systématique A partir du 1er mai 2014, il y aura verbalisation systématique avec transmission au Parquet. Le verbalisant aura le double souci : - de bien décrire la situation de fait, en suivant la grille d'analyse proposée au point 5.1. De rares titulaires de droit de chasse se sont parfois retranchés derrière des justifications assez grossières L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 61/68 PUBLIÉ [12] pour contester l'existence de l'infraction. Quel que soit le subterfuge qui serait le cas échéant invoqué, le procès-verbal devra bien faire ressortir la volonté de détourner l'esprit de la législation ; - d'identifier les personnes coupables du délit, étant principalement l'organisateur de la chasse, ainsi que le chasseur en situation de chasse ayant parfaitement conscience de chasser le grand gibier dans un territoire clôturé. En effet, toute infraction requiert non seulement un élément matériel, mais aussi un élément moral. Le relevé des postes de battues par rapport aux clôtures ou le plan des battues indiquant l'emplacement des clôtures peuvent être d'une grande utilité pour démontrer que le chasseur avait parfaitement conscience de chasser dans un territoire clôturé. 6. Disposition finale La circulaire ministérielle n° 2.650 du 12 octobre 2000 relative à la définition du « territoire clôturé » visée à l'article 1er, § 1er, 10°, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse, à l'arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 déterminant la hauteur des clôtures visées à l'article 2ter, alinéa 2, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse et à l'arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 modifiant l'arrêté du Gouvernement wallon du 13 juillet 1995 permettant la destruction de certaines espèces gibier et fixant les conditions de destruction de grand gibier dans les territoires clôturés visés à l'article 2ter, alinéa 1er, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse, est formellement abrogée. _______ Notes [1] Le Conseil d'État a statué sur ces recours après plus de dix ans de procédure (cf. arrêt n° 198.192 du 24 novembre 2009). [2] Circulaire du 12 octobre 2000 du Ministre J. Happart (Moniteur belge du 7 novembre 2000), laquelle avait été soumise au Gouvernement wallon qui avait marqué son accord sur celle-ci uniquement pour une période temporaire (jusqu'au 30 juin 2001), comme l'indique la décision du Gouvernement de l'époque. [3] Territoires de chasse dont les étendues sont généralement bien inférieures à celles des domaines vitaux d'un cerf ou d'un sanglier. [4] Cette interdiction qui ne concerne bien que le grand gibier est entrée en vigueur le 1er juillet 2000. La chasse du petit gibier, du gibier d'eau et de l'autre gibier reste donc bien autorisée. [5] Par exemple, le fait, lors des jours de chasse, d'ouvrir les barrières au niveau des points d'entrée dans un territoire de chasse ceinturé par une clôture ne supprime en rien le caractère clôturé de ce territoire; il en est de même si une portion de clôture est enlevée ou si une clôture électrique est mise hors tension au moment de la chasse. [6] L'arrêt du 4 octobre 2011 de la 4e chambre correctionnelle de la cour d'appel de Liège confirme sans équivoque cette interprétation, précisant en outre que la circulaire ministérielle du 12 octobre 2000 était contraire à la loi. [7] "empêchant le libre parcours de toute espèce de grand gibier" signifie "empêchant le libre parcours de n'importe quelle espèce de grand gibier". [8] Par exemple, une clôture de 1,3 m de type agricole, composée habituellement de 3 à 5 fils superposés et visant à délimiter une propriété privée, notamment pour dissuader les promeneurs d'y pénétrer, n'empêche pas le passage d'un animal grand gibier, quelle que soit l'espèce. Elle ne constitue dès lors pas un obstacle au sens de la définition de l'article 1er, § 1er, 10° de la loi sur la chasse. Par contre, un passage canadien correspond bien à cette notion d'obstacle empêchant le libre parcours du grand gibier. [9] Voire nettement moins : 2 fils électriques, le premier à 20 cm du sol et le second à 50 cm du sol suffisent déjà à entraver le libre parcours du sanglier. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 62/68 PUBLIÉ [10] Il est effectivement important que ce soit à l'initiative de ce gestionnaire car comme l'indique le jugement précité du 4 octobre 2011, la protection des personnes ne justifie pas l'installation d'une clôture le long de n'importe quelle route, à défaut de quoi il n'existerait finalement plus nulle part la possibilité d'assurer un certain libre parcours du grand gibier. [11] C'est-à-dire une absence totale de nourrissage si du sanglier est présent, puisque la chasse au sanglier est ouverte toute l'année. [12] Exemples : * le titulaire de droit de chasse parvient à démontrer que la clôture litigieuse est en réalité installée sur une longue bande de terrain où il n'aurait pas le droit de chasse (mais qu'il chassait évidemment avant son interpellation...). À cet égard, on relèvera que dans le jugement précité du 4 octobre 2011, le juge a estimé que "la pose d'une clôture par un voisin ne peut causer dommage à autrui qui pourrait exiger l'enlèvement, voire réclamer des dommages et intérêts"... * le titulaire de droit de chasse complète la clôture litigieuse pour délimiter une étroite parcelle dans laquelle il prétend tout à coup protéger la régénération forestière. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 63/68 PUBLIÉ 6. Dispositions applicables dans les enclos et parcs de chasse L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 64/68 PUBLIÉ 7. Analyse de la rétroactivité de la loi S'agissant de la rétroactivité de la loi, il convient de rappeler que l e principe de non-rétroactivité n'est en règle générale pas opposable à la loi, qui peut autoriser l'application d'une réglementation nouvelle aux situations en cours, y compris aux situations contractuelles. L'article 2 du code civil, aux termes duquel : « La loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif » peut être écarté par la loi, ainsi que le rappelle l'article L. 221-4 du code des relations entre le public et l'administration. Cette faculté dont jouit le législateur ne peut cependant être mise en oeuvre qu'en considération d'un motif d'intérêt général suffisant et sous réserve de ne pas priver de garanties légales des exigences constitutionnelles (CC, n° 98-404 DC du 18 décembre 1998, cons. 5 ; n° 2001-456 DC du 27 décembre 2001, cons. 21) ou de ne pas porter atteinte aux « situations légalement acquises » (CC, n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005, cons. 45 ; n° 2007-550 DC du 27 février 2007, cons. 4). Le Conseil constitutionnel a fait évoluer sa jurisprudence dans le sens d'une protection accrue de la sécurité juridique, en jugeant désormais que le législateur « ne saurait, sans motif d'intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations » (CC, n° 2013-682 DC du 19 décembre 2013, cons. 14). Le Conseil d'État juge en outre, au regard des stipulations de l'article 6, § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que l'intervention rétroactive du législateur au profit de l'État doit reposer sur d'impérieux motifs d'intérêt général et, au regard des stipulations de l'article 1 er du premier protocole additionnel a cette convention, qu'un juste équilibre doit être ménagé entre l'atteinte aux droits découlant de lois en vigueur et les motifs d'intérêt général susceptibles de la justifier (CE, Ass., 27 mai 2005, Provin, n° 277975 ; Sect., 8 avril 2009, Association Alcaly et autres, n° 290604 ; Plén., 9 mai 2012, Ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique c/société EPI, n° 308996). Au final, la démarche de suppression des 2 alinéas pourrait s'envisager autour du motif impérieux sanitaire (risque de diffusion de peste porcine africaine), ou environnemental (en relation avec la Charte de l'environnement) face à une atteinte à la propriété privée (à distinguer du domicile sacralisé).26 26 Réalisé avec le concours de la direction de la police de l'ONCFS L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 65/68 PUBLIÉ PUBLIÉ 8. État de la contamination Peste porcine africaine dans l'Union européenne (source UE juillet 2019) partie 1 : zone de surveillance partie 2 : maladie limitée à la faune sauvage partie 3 : maladie affectant la faune sauvage et les animaux domestiques partie 4 : cas de la Sardaigne L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 67/68 PUBLIÉ 9. Bibliographie BARBIER, L. (décembre 2010). Étude sur le problème de la circulation des cerfs dans le Loiret compte tenu de la segmentation du paysage, ONCFS. BOIZARD, P ; CINOTTI, B (juin 2019). Rapport sur l'Exercice de la police de l'eau et de la nature dans les services déconcentrés et les opérateurs de l'État, CGEDD. CARRELET, M. (2016). Des engrillagements de Sologne : tentative de défragmentation du paysage écologique, politique et disciplinaire. CRPF et FRC, Centre ­ Val de Loire, (mars 2014). Brochure « L'un ne va pas sans l'autre », Forêt et cervidés. FROISSART, Y. La France clôture ses milieux naturels, peut-on lutter ? dans Espaces naturels, n°37 GOERGEN, P. (1993). Approche ethnologique des enclos d'élevage du grand gibier et des parcs de tir, Ministère de l'environnement. MILLET, L. Thèse : Contribution à l'étude des fonctions sociale et écologique au droit de propriété : enquête sur le caractère sacré de ce droit énoncé dans la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, université Panthéon-Sorbonne, paris I, 2015. MOUCHE, J. (2013). Comment l'engrillagement en Sologne questionne-t'il les valeurs associées à la forêt ? Recherche exploratoire sur l'interaction homme-nature dans le contexte de la propriété privée, Agro Paris Tech. PEREA, A ; CARDOUX, JN (mars 2019). Mission parlementaire relative à la régulation des populations de grand gibier et à la réduction de leurs dégâts. RICHER, S et Al. (2016). Dans un contexte de déprise piscicole, la chasse peut-elle jouer un rôle complémentaire voire alternatif pour la préservation de l'écosystème étang ?, revue faune sauvage, ONCFS. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 68/68 PUBLIÉ (ATTENTION: OPTION le schéma départemental de gestion cynégétique ». La troisième possibilité consiste à simplement interdire tout agrainage en France, sauf en période de sensibilité des denrées agricoles d'une durée courte (1 mois) pour des quantités / hectares limitées précisées par le SDGC. Cette mise en oeuvre suppose la modification de l'article L. 425. La rédaction modifiée pourrait être la suivante : « L'agrainage et l'affouragement sont interdits. Toutefois ils peuvent être autorisés dans des conditions définies par le schéma départemental de gestion cynégétique qui ne peuvent en aucun cas excéder au total un mois de durée chaque année en période de sensibilité des principales denrées agricoles du territoire concerné par les dégâts de grand gibier». Quatrièmement : l'interdiction totale. La mission considère que la pratique de l'agrainage est en contradiction avec la gestion de sureffectifs massifs de l'espèce sanglier et qu'il est préférable de proscrire totalement cette pratique, dont la mise en oeuvre délictueuse sera par voie de conséquence d'autant plus contrôlable que des dispositions complexes et trop variables à l'intérieur et entre départements auront été proscrites. Cette interdiction peut facilement être mise en oeuvre en matière de droit par modification de l'article de loi L. 425-4 ci-dessus : « L'agrainage et l'affouragement sont interdits en tout temps sur l'ensemble des territoires soumis à la chasse. ». Recommandation 3. Interdire l'agrainage et l'affouragement sous toutes ses formes et en tout lieu de l'espace naturel soumis à la pratique de la chasse ; à défaut, un renforcement des conditions exigées en SDGC en zone libre et une interdiction totale de l'agrainage et de l'affouragement en enclos constituent des voies de progrès (Ministres ou préfets). L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 34/68 PUBLIÉ 3.5.4. Des densités animales non contrôlées et parfois illégales Parfois les enclos ou parcs s'apparentent à des élevages non déclarés, au regard des densités d'animaux présents. A titre d'exemple, rappelons l'épisode sanitaire de 2012 concernant un parc de chasse en France justifiant l'abattage total des animaux du parc par les autorités. Ce parc de chasse constitué d'un enclos de 379 ha supportait 521 ongulés répertoriés présents (241 cervidés, 280 sangliers). Leur contrôle est -jusqu'à présent- rendu compliqué pour ne pas dire impossible, par une interprétation discutable de l'extension du domicile à l'ensemble de l'enclos (évoquée précédemment). Pourtant, en vertu de l'arrêté ministériel du 20 août 2009, pour le sanglier « Lorsque qu'un enclos cynégétique accueille plus d'un animal (ongulé) par hectare, il constitue un établissement d'élevage, de vente ou de transit de sangliers et se trouve obligatoirement soumis à la réglementation des élevages ». Tout acte de chasse y est alors interdit. Ainsi dans un enclos cynégétique, un animal serait res nullius19 sauf en cas de densités à l'ha qui sont celles d'un établissement d'élevage : le gibier devient res propria. La Haute Cour dans l'arrêt cité (Chambre criminelle du 30 janvier 1992 90-85.403) souligne les multiples éléments matériels permettant de confirmer que, par principe, dans un enclos cynégétique, l'animal est res nullius, sauf dans le cas où la densité à l'ha (de sanglier ou de cervidés) est telle que l'on bascule dans l'établissement d'élevage ou d'éléments conduisant à faire glisser le statut de l'animal de res nullius vers celui de res propria20. La mission considère qu'il y a lieu de revoir la pratique du contrôle et ses conditions, sans qu'il soit nécessaire de revoir le droit, mais déjà simplement par une meilleure coordination des actions des services de l'État en liaison avec les procureurs. À droit constant, la mission suggère des opérations de contrôle renforcées, avec des moyens mutualisés pour constituer des éléments de preuve pour objectiver les surpopulations de grands animaux. En complément, une expérimentation permettant le comptage hivernal par drone faciliterait la recherche d'infractions et le déroulement des procédures. 3.5.5. L'interdiction de la chasse en espaces hermétiques clos est simple et efficace La loi wallonne a traité le sujet de façon argumentée. Elle valorise la chasse durable, la fonctionnalité des écosystèmes, la prise en compte des impératifs biologiques des espèces (reproduction, nutrition, déplacement) et tient compte du fait que la chasse se déroule en espace naturel (voir annexe 5 loi wallonne). S'agissant du droit français, il est patent pour la mission que les enclos cynégétiques ne sont pas en conformité avec la loi 2012-325 du 7 mars 2012 dite loi chasse dont l'article premier dispose que : « La gestion durable du patrimoine faunique et de ses habitats est d'intérêt général. La pratique de la chasse, activité à caractère environnemental, culturel, social et économique, participe à cette gestion et contribue à l'équilibre entre le gibier, les milieux et les activités humaines en assurant un véritable équilibre agro-sylvo-cynégétique. » En France, certains services de l'État font observer qu'il existe de nombreuses clôtures non « enclosantes » (linéaires, ou formant un coin ou « une nasse ») qui ne peuvent relever d'un enclos ou d'un élevage, quand bien même leur géométrie ou leur accumulation tend à confiner les animaux. Ainsi, un inventaire des engrillagements effectué par l'ONCFS 18, de 2006 à 2009, a recensé près de 200 km de linéaires non-enclosants. Ces « nasses » peuvent toutefois être contrôlées et verbalisées. Certains dispositifs comportent des systèmes anti-retour permettant le seul passage entrant de l'animal. La mission considère qu'il faut en cette matière lutter avec pugnacité. Ces faits peuvent être 19 Res nullius : (« la chose de personne » : expression latine utilisée en droit civil, qui désigne une chose sans maître, qui n'a pas de propriétaire mais est appropriable. Res propria : Chose qui a un propriétaire légal. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 35/68 20 PUBLIÉ verbalisés au titre de l'article 9 de l'arrêté du 1 er août 1986 interdisant tout matériel pour favoriser la capture. La mission propose une nouvelle définition des enclos cynégétiques par l'article L. 424-3. Cette fois, il ne s'agit plus de définir un enclos au sens strict (herméticité totale « apparente ») comme dans la rédaction actuelle, mais de définir à partir de quels indicateurs objectif, le dispositif d'engrillagement fait entrer le territoire dans la catégorie des « enclos, non chassables ». L'idée poursuivie par la mission consiste à redéfinir les critères qui constituent de façon formelle le nouveau statut d'enclos. L'objectif est que le propriétaire aménage son « ex enclos » selon la formule « des petites barrières » telles qu'elles résulteront des règles d'urbanisme sur le périmètre de l'ancien enclos, (exception limitée à la sécurité routière) pour que ce territoire retrouve ses fonctionnalités naturelles et retrouve son statut « chassable ». L'ancienne définition de l'enclos de l'article L. 423-3 du code de l'environnement est à supprimer (comme au chapitre 3.5.2. du présent rapport), car il ne s'agit pas de modifier la fermeture de quelques mètres d'enceinte. Il convient en effet de poser -dans une nouvelle définition des enclosdes critères conduisant au classement « enclos » interdit de chasse. Cet objectif est atteint par ajout de l'article ci-dessous. Nouvelle définition de l'enclos conduisant à interdiction de la chasse : « L'enclos est défini comme toute possession attenant ou non à une habitation et entourée même très partiellement , d'une clôture continue et constante faisant obstacle à toute communication avec les héritages voisins et empêchant complètement le passage de la faune et celui de l'homme, sur tout ou partie du périmètre ou à l'intérieur de ladite possession . Toute action de chasse au grand gibier y est interdite ». Comme indiqué au 3.5.2 du présent rapport (extension du droit commun ) il conviendra de prévoir les exceptions pour les domaines à caractère patrimonial. Recommandation 4. Interdire la chasse dans les enclos hermétiques à toute la faune sauvage, sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques, et raffermir la lutte contre les poses illégales de grillages, prenant notamment la forme de nasses à gibier (Préfets, procureurs, ONCFS). 3.5.6. Chasse, transparence, information et communication La mission a recueilli les propos, voire les positions d'une cinquantaine d'acteurs. Elle a constaté une convergence sur une grande partie des propositions qu'elle forme. Elle a aussi recueilli un avis unanime sur le caractère désastreux de la persistance et du développement des pratiques de chasse en enclos hermétiques (au sens de l'actuelle définition) au sein du monde de la chasse, en matière de communication. La grande majorité des chasseurs sait et connaît des domaines de chasse totalement ouverts, lieux modestes ou de grande notoriété sur lesquels ils ont pu passer des moments de passion absolue. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 36/68 PUBLIÉ Une acceptation des engrillagements de plus en plus décriée, y compris au sein des chasseurs et des propriétaires. La mission considère qu'il serait salutaire pour le monde de la chasse et valorisant pour ses pratiquants d'accompagner et de s'engager -y compris avec les propriétaires d'enclos et de parc de chasse- vers une pratique moins artificialisée, plus respectueuse des équilibres, recourant à des clôtures d'ampleur modeste permettant une circulation de la faune sauvage, dessinant des paysages plus sereins, ne coupant pas la vue, mais matérialisant malgré tout la propriété privée, en assurant en définitive une vision du territoire plus naturelle et plus conforme à l'identité solognote. A noter également que la Sologne n'est que le laboratoire de cette évolution qui concerne la chasse dans son ensemble. Ce contexte est favorable au rappel des règles, lois et règlements en matière de chasse : préfets, DDT, DDCSPP, ONCFS et FDC, FNC, FRC, associations, par tous moyens adaptés. 3.6. Urbanisme et aménagement du territoire solognot 3.6.1. Le non-respect des règles en matière d'urbanisme est flagrant Une définition précise des clôtures est nécessaire pour éviter des détournements, dont quelques exemples parmi d'autres figurent ci-dessous. Deux communes (Neung sur Beuvron, Chaumont-sur-Tharonne) ne se sont pas opposées, pour des raisons diverses, à des propriétaires qui ont édifié des clôtures d'une hauteur supérieure à celle prévue dans le document d'urbanisme. Le PLU de Chaumont-sur-Tharonne préconise des clôtures en limite de propriété à 1,20 m. Des propriétaires ont implanté leur clôture à 5 m en retrait de la route à 2m de hauteur et contourné ainsi la règle. Deux autres communes de Sologne ont engagé des actions en justice contre des propriétaires ayant contrevenu aux règles des clôtures définies dans leur document d'urbanisme. Il s'agit de Ménestreau-en-Villette, qui a été déboutée pour des motifs de forme semble-t-il et de La Ferté St Aubin, qui a eu gain de cause. Certaines communes ont eu gain de cause en vertu d'un « article 11 » du document d'urbanisme. C'est le cas de trois d'entre elles (Orçay, Vouzon, Theillay). Un propriétaire a consenti à l'édification à un niveau moindre que prévu ou au rabattement d'une clôture à 1,20 mètre de hauteur, sur une base initiale envisagée d'une hauteur supérieure, ou à renoncer à clore (dans le cas d'un projet de vente de propriété « clôturée »). Une seule commune du Pays de grande Sologne n'a pas prévu d'article "clôtures" (Vernou-enSologne). Elle a néanmoins décidé de l'obligation de déclaration préalable de travaux pour l'édification d'une clôture, laquelle n'a pas été respectée. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 37/68 PUBLIÉ 3.6.2. Poser et faire appliquer un cadre en utilisant tout le potentiel des textes « Contrairement à ce qui peut parfois être allégué, le droit de se clore n'est pas un droit absolu. Le principe et les modalités de la clôture ne sont pas à la discrétion du propriétaire ». Comme mentionné au chapitre 1.3.3. et 1.3.4. dans le cadre du droit des sols, le conseil municipal d'une commune peut rendre obligatoire une « déclaration préalable » pour l'édification de toute clôture y compris en espaces non bâtis : « 2° Imposer des caractéristiques pour les clôtures ». 21 Comme l'a indiqué Yves Froissart en 2011, « la sensibilité des communes du Pays de Grande Sologne aux questions de l'engrillagement est globalement forte, avec pour preuve le fait que sur les 18 communes ayant un document d'urbanisme début 2011 (sur un total de 28 communes), 17 ont adopté une règle concernant les clôtures en milieu naturel, agricole et forestier, fixant, comme la loi le prévoit, des éléments concernant la qualité, la hauteur, les matériaux utilisés pour les clôtures. » L'article L. 151-23 du code de l'urbanisme prévoit que le règlement du PLU peut délimiter des secteurs « à protéger pour des motifs d'ordre écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation ». La partie réglementaire explicite notamment les outils disponibles : · L'article R. 151-43 permet aux collectivités de « délimiter les espaces et secteurs contribuant aux continuités écologiques et définir des règles nécessaires à leur maintien ou à leur remise en état », règles au sein desquelles pourrait figurer des prescriptions sur l'édification de clôtures, comme une obligation de laisser régulièrement des espaces non clôturés, prescrire des baies ouvertes ». · L'article R. 421-12 prévoit et une procédure de déclaration préalable pour l'édification d'une clôture située dans un secteur ainsi délimité au PLU, hormis les exceptions régénération forestières et clôtures agricoles, lesquelles doivent être temporaires. · Par ailleurs, les communes n'ayant pas de document d'urbanisme peuvent décider de rendre obligatoire la déclaration de travaux, sans avoir d'éléments juridiques à opposer à un propriétaire en cas de désaccord sur les caractéristiques de la clôture (anciennement, par suite d'un arrêté préfectoral, depuis 2007, une simple délibération communale suffit). Aussi la mobilisation des règles d'urbanisme peut être effective dans toute la Sologne. 3.6.3. Faciliter les décisions des collectivités grâce à des modèles de clôtures Les communes et les collectivités disposent de tous les outils nécessaires à l'élaboration d'une politique en matière de clôture, mais celle-ci suppose une coordination sans faille. Il convient que soient pris en compte les avis des personnes publiques associées, notamment à l'occasion de l'enquête publique du SRADDET. Dans le cadre de son élaboration, il importe que l'État et la région Centre-Val de Loire, agissant de concert, chacun dans ses attributions, prescrivent les types de clôtures, eu égard aux intérêts majeurs que constituent la valeur patrimoniale des paysages, des continuités écologiques et leurs multifonctionnalités. Plusieurs maires de communes dotées d'un document d'urbanisme prévoyant des mesures de régulation des clôtures ont indiqué que leur position serait renforcée dans la mesure où des plaintes s'exprimeraient à l'encontre des clôtures par des citoyens, individuellement, ou par le biais d'associations. Une «veille citoyenne» s'est constituée avec les trois associations rencontrées, regroupant plus de 1 500 adhérents, car il semble encore que de nombreuses clôtures soient édifiées 21 Thèse de Laurent Millet « sur le droit de se clore ». L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 38/68 PUBLIÉ sans déclaration de travaux, là où celle-ci est requise (du fait d'un document d'urbanisme ou par délibération communale). Une communication visant à constituer une «opinion publique» éclairée est un point important d'une démarche où les citoyens sont encouragés à donner leur opinion. Définir le plus grand dénominateur commun des clôtures en Sologne et faciliter les décisions des collectivités en leur fournissant des modèles de décision adaptés à la diversité des situations, tout en assurant la cohérence des règles applicables sur l'ensemble de la Sologne, trace une voie que la mission propose de privilégier. A l'occasion de la rédaction du SRADDET, il est important d'établir un cahier des charges, une norme claire et précise, définissant la notion de clôture perméable, acceptable et précisant les distances de retrait par rapport aux voies publiques et privées et aux propriétés des tiers. Cette démarche doit permettre d'informer les collectivités sur toutes les possibilités ouvertes par le droit de l'urbanisme en matière de limitation et de contrôle des clôtures et les inciter à faire le nécessaire dans les SCOT, PLUi, PLU. Il est proposé qu'État et collectivités organisent rapidement des ateliers productifs pour : · décider d'une position solognote homogène sur les clôtures, avec un plus grand dénominateur commun, ce qui accroîtrait l'effet de visibilité politique de l'action ; · s'accorder en matière de hauteur, de typologie, de matériaux utilisés, de positionnement par rapport aux voies publiques et privées, permettant à la fois de matérialiser la propriété et d'assurer la perméabilité pour la faune sauvage ; · définir les types de clôtures et leurs justifications, les critères d'évaluation, la pertinence, la réévaluation périodique et les clauses de revoyures ; · prévoir un délai de mise en conformité des clôtures existantes au regard de règles nouvelles. Ainsi une même règle concernant les clôtures sera effective pour l'ensemble des SCOT solognots. Recommandation 5. Rendre obligatoire, dans le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), les prescriptions concernant les caractéristiques des clôtures incluant la procédure de déclaration préalable à leur édification et profiter de son élaboration pour progresser sur l'établissement de modèles (préfet de région et conseil régional). 3.6.4. Les communes responsables de la libre circulation sur les chemins ruraux Les cheminements humains, à des fins de tourisme et randonnée, sont aussi à prendre en compte ; en effet, la préservation de la qualité des paysages constitue un enjeu largement intégré dans le SRADDET qui dispose une règle visant à «préserver et valoriser le patrimoine architectural, urbain et paysager dans les plans et programmes ». L'attention portée à cet aspect paraît d'autant plus utile que ce patrimoine est un facteur essentiel de l'attractivité de la région. Les clôtures font fuir le tourisme local et résidentiel. Elles le concentrent de surcroît sur des zones ouvertes. Les associations de randonneurs expriment depuis longtemps avec vigueur leur opposition aux clôtures, pour des raisons essentiellement paysagères, notamment le long des chemins publics communaux, parfois de part et d'autre du chemin. Les pouvoirs publics ont investi fortement pour créer, dynamiser des circuits de randonnées pédestres, équestres et à vélo . Cet effort est mis à mal. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 39/68 PUBLIÉ Les grilles canadiennes (photographie ci-dessous) constituent une autre pomme de discorde. Les communes ont le pouvoir d'autoriser ou d'interdire ces grilles sur les chemins communaux et ruraux. Ces grilles sont jugées dangereuses par les randonneurs équestres, le cheval refuse l'obstacle. Elles peuvent constituer aussi un obstacle pour les cyclistes peu expérimentés. Leur autorisation par la commune est une acceptation implicite donnée au propriétaire qui souhaite poser une clôture perpendiculairement au chemin, de part et d'autre de la grille canadienne. La mission a effectivement constaté l'existence de chemins ruraux appropriés ou dont la libre circulation n'est plus assurée suite à l'installation de passages canadiens entravant le passage de chevaux, des enfants et de la faune sauvage, ou déplacés sans justifications ni autorisations, témoignant des complaisances ou de non actions de la part de maires. Les communes doivent être incitées à rouvrir des chemins appropriés et à faire supprimer des barrières canadiennes, dont l'autorisation est par nature révocable. Exemple de barrière canadienne sur chemins ruraux (photographie des auteurs) 3.7. Des clôtures nécessaires : agriculture, forêt, sécurité routière La mission rappelle que la clôture peut être utile, voire nécessaire, dans un certain nombre de cas, appelant des justifications précises au moment de son édification. Pour les productions agricoles et forestières, la présence de clôtures peut être nécessaire pour protéger de façon permanente ou temporaire une zone, face à la pénétration du gibier et aux dégâts qu'il peut commettre. La régénération forestière justifie aussi pleinement des protections au moment notamment des régénérations comme évoqué au chapitre 1.3.1. du présent rapport. Il peut aussi s'agir de parquer des animaux d'élevage dans un périmètre. Dans ce cas les clôtures filaires sont suffisantes. Le choix du type de clôture pour ces activités, est a priori « libre » en Sologne, sous réserve qu'elles soient temporaires (pour les forêts) et qu'elles puissent se situer à une certaine distance des bords de route. En matière de sécurité routière, les clôtures bordant les routes peuvent être utiles mais parfois constituer un piège pour les animaux qui s'y engagent. Un véhicule qui survient peut affoler ces animaux qui ne trouvent pas d'issue et peut susciter de leur part des comportements imprévisibles et accidentogènes. De même, mais dans une moindre mesure, une clôture unilatérale à une route peut produire le même effet pour des animaux qui tentent de franchir une route au moment de l'arrivée d'un véhicule. L'extrémité d'une clôture linéaire longeant une route peut également devenir L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 40/68 PUBLIÉ un lieu privilégié de passage d'animaux. Il est vrai que de tels emplacements, localisés, sont bien connus et souvent indiqués par des panneaux routiers. Ceci n'empêche pourtant pas les accidents. Enfin, à l'inverse, une route passante peut devenir dangereuse un jour de chasse, du fait du passage du gibier et des chiens. Plusieurs propriétaires interrogés ont indiqué l'intérêt pour eux d'une clôture même peu élevée (de l'ordre d' 1 m) qui facilite l'arrêt des chiens.22 L'aménagement par le propriétaire d'un dégagement de 2 à 3 mètres à partir du fossé (l'idéal serait un positionnement des clôtures à 5 mètres de la route) conforterait le volet sécurité et visibilité. Ce terre-plein peut permettre également au propriétaire forestier de constituer une zone temporaire de stockage de bois. Dans les territoires fortement segmentés, les passages de cervidés se concentrent sur les seules zones encore ouvertes qui deviennent donc des zones accidentogènes. Plusieurs idées peuvent être émises : · créer une bande dégagée suffisamment large de part et d'autre de la route, ce qui permet aux automobilistes et aux animaux de voir et d'être vus (voir ci-dessus) ; · aménager des passages protégés pour animaux, associés à un radar détectant les animaux et clignotant pour avertir les conducteurs avec un panneautage (installés avec efficacité dans le département de l'Isère) ; · poser des réflecteurs en limite de chaussée, orientés vers les enceintes boisées; ils ont été testés avec succès (l'éclat des phares renvoyé dissuade les animaux de traverser). La mission propose de réduire l'effet d'obstacle des clôtures à la circulation des animaux en installant des dispositifs adaptés. De telles réflexions, relatives au type de clôtures et aux fonctionnalités recherchées, peuvent nourrir le débat territorial préalable à l'établissement des documents d'urbanisme. 3.8. Modifier la fiscalité pour défavoriser l'engrillagement Clore une propriété est un droit, mais rien ne s'oppose à ce que cette formalisation matérielle, parfois excessive, de l'appropriation d'un terrain soit prise en compte par la fiscalité foncière. Ceci est tout particulièrement vrai lorsque cette clôture permet au propriétaire de s'affranchir des règles communes, comme c'est le cas pour les enclos cynégétiques, mais aussi d'entraver le contrôle de la loi en étendant physiquement la protection domiciliaire bien au-delà des seuls bâtiments d'habitation. L'enclos se traduit par un tableau cynégétique renforcé, qui semble donner de la valeur à l'activité de chasse, dans des conditions très défavorables à la naturalité et à la durabilité du milieu mettant notamment en danger l'état forestier. Pour favoriser le retour à une situation écartant le grillage hermétique, diverses dispositions fiscales pourraient être ajustées et être décidées par les collectivités locales en direct. Normalement, la valeur locative forfaitaire d'une parcelle non bâtie close est plus élevée que celle d'une parcelle sans clôture, du fait du classement de la parcelle dans un groupe de nature de cultures23 plus imposé (groupe 13 est plus élevée que celle d'une parcelle sans clôture « bois d'agrément » ou groupe 11 « terrains spécialement aménagés en vue de la chasse »). Mais cette majoration n'est pas toujours très élevée, ni connue et mise en oeuvre par les commissions communales des impôts fonciers. 22 Trans-Formation Consultants/Y. Froissart Janvier-Juillet 2011 Pays Grande Sologne. Étude Concertation « Faire face aux engrillagements ». Voir au Bulletin officiel des Finances publiques l'annexe « Tableau de classification des natures de culture ou de propriété et leurs groupes pour l'établissement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) ». L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 41/68 23 PUBLIÉ Aussi, appliquer aux propriétés rurales closes une forte majoration de la taxe sur le foncier non bâti (multiplication par trois ou cinq) serait à la fois une façon de mieux tenir compte de la valeur économique plus importante de la propriété et de rendre plus coûteux l'engrillagement, qu'il soit de convenance ou pour constituer un enclos cynégétique. De la même façon, la sur-densification des populations de grands mammifères chassables à l'intérieur des enclos amène souvent une désertification végétale voire une déforestation de surfaces qui ont bénéficié des avantages fiscaux24 liés à l'état boisé. Aussi, la mission propose de retirer le certificat « Monichon » pour toutes les surfaces encloses qui ne répondent plus aux critères de gestion durable (surfaces déboisées par le surpâturage ou pour les équipements de chasse, surfaces encore boisées mais impossibles à régénérer du fait du la pression du gibier) considérant qu'il s'agit d'une simple application de la loi. Recommandation 6. Augmenter la fiscalité foncière et immobilière sur les espaces hermétiquement engrillagés en appliquant aux propriétés rurales closes une forte majoration de la taxe sur le foncier non bâti (multiplication par trois ou cinq, disposition à voter en loi de finances) et, d'autre part, en supprimant les réductions des droits de mutation des propriétés forestières et de l'impôt sur la fiscalité immobilière obtenus avec un certificat de gestion durable, sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques (Ministres). 3.9. Promouvoir le patrimoine naturel solognot avec des clôtures perméables Différentes pistes non exploitées par la mission pourraient être envisagées : · la médiatisation de retrait volontaire de clôtures par certains propriétaires ouverts à cette démarche. Un tel retrait volontaire serait assuré d'un impact médiatique ; · la mobilisation de fonds (ENS / fondation pour les habitats de la faune sauvage / fonds biodiversité FNC FDC) pour accompagner ces retraits (sous condition par exemple de propriété modeste ou très morcelée) ; · la prolongation de cette politique volontariste, résultat de consensus locaux, départementaux ou régional, dans le cadre plus élargi « de l'implantation d'éléments linéaires naturels denses (tels que haies d'épineux) permettant le passage des animaux et limitant les intrusions humaines »25 ; · la création un label « CHASSE NATURELLE DE SOLOGNE » qui aurait vocation à promouvoir la chasse du grand gibier en espace libre ou sous « petites barrières » conformes aux documents d'urbanisme. 24 Ces avantages, prévus par les articles 793 et 976 du code général des impôts, sont obtenus grâce à un certificat (dit « Monichon ») établi par la DDT, et attestant que la propriété peut, du fait d'une gestion durable de ses peuplements forestiers, bénéficier d'une exonération des trois quarts de l'impôt sur la fortune immobilière (IF) ou des droits de mutation à titre onéreux. En contrepartie, les bois et forêts ayant bénéficié de cette réduction doivent, pendant trente ans, être gérés selon des garanties de gestion durable, que le propriétaire s'engage, pour lui-même et ses ayants-cause, à respecter. Mission parlementaire relative à la régulation des populations de grand gibier et à la réduction de leurs dégâts, A Perea, JN Cardoux. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 42/68 25 PUBLIÉ Recommandation 7. Créer un label « Chasse naturelle de Sologne » (préfet de région et conseil régional). L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 43/68 PUBLIÉ PUBLIÉ 4. Pistes de progrès : synthèses des propositions ACTION FAIBLE PRATIQUE DE LA CHASSE MOYENNE FORTE Interdire de la chasse en enclos Interdire l'agrainage sur l'ensemble du territoire Reclasser les enclos en élevage en cas de dépassement de densité Raffermir les instructions aux préfets Renforcer la limitation de l'agrainage en SDGC Étendre le droit commun de la chasse à tout territoire chassé Supprimer l'agrainage dans tout enclos ou parc NOURRISSAGE AGRAINAGE INTRODUCTION GRAND GIBIER Interdire toute introduction de grand gibier sur le territoire soumis à la chasse Rappeler les règles avant l'ouverture de la chasse Mettre en commun les fichiers entre les services de l'État Contrôler régulièrement l'ensemble de l'intérieur des parcs et enclos Recourir à l'ensemble des agents de contrôle pour appuyer les maires en cas de difficulté Mise en place d'un label « Chasse naturelle de Sologne » accroître fortement les taxes sur le foncier non bâti des enclos hermétiques RENFORCEMENT DES CONTRÔLES notamment sanitaires RÈGLES D'URBANISME Accompagner les élus dans le renforcement du lien SRADDET SCOT PLUI PLU Établir les principes de perméabilité et les types de clôture acceptés pour être conforme COMMUNICATION SÉCURITÉ Valorisation médiatique des actions volontaires de désengrillagement pour passer à « de petites barrières » Imposer les « petites barrières » comme indicateur de gestion durable des propriétés sous PGS Revenir sur les réductions fiscales liées aux propriétés encloses DOMAINE FINANCIER Ministres Préfets élus locaux L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 45/68 PUBLIÉ Conclusion Tout concourt à démontrer que les enclos hermétiques ou l'utilisation de grillages imperméables à la faune sauvage sont un non-sens cynégétique, présentent des non-conformités en matière de droit de l'environnement, de droit de l'urbanisme ou de droit rural et échappent partiellement au contrôle des élus et de l'État sur des interprétations juridiques discutables. Ces pratiques d'accaparement ou de perturbation de l'espace naturel et de l'espace public ne sont plus acceptables. Après les usagers, elles heurtent désormais les élus locaux et les parlementaires de toute sensibilité politique en Sologne ainsi que les chasseurs eux-mêmes. Les arguments naturalistes, cynégétiques, sanitaires, forestiers, paysagers, sociétaux et d'une façon générale l'artificialisation des milieux qui en résulte devraient conduire à un raffermissement législatif, du reste en cours. La mission considère que le bon sens doit permettre de progresser collectivement vers des pratiques plus respectueuses de l'éthique, de la naturalité de la chasse et du respect du bien commun et des biens collectifs. La Sologne, dans son ensemble, fait preuve d'une concorde certaine. Elle entend mettre en place des dispositions en matière d'urbanisme permettant de tels progrès, en associant toutes les parties, mais ne saurait assumer seule les transitions qui imposent d'indispensables modifications nationales, notamment en matière de droit de la chasse et de son contrôle. Michel REFFAY Dominique STEVENS Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 46/68 PUBLIÉ Annexes L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 47/68 PUBLIÉ 1. Lettre de mission L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 48/68 PUBLIÉ L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 49/68 PUBLIÉ 2. Liste des personnes rencontrées Nom Prénom MINISTRES / PARLEMENTAIRES CARDOUX PELTIER CORMIER-BOULIGEON PRINCE Jean-Noël Guillaume François Jean-Paul AUTRES ELUS 12/06 à Régions de France 282 boulevard saint germain paris 7e Sénateur du Loiret Député du Loir-et-Cher Député du Cher Sénateur du Loir-et-Cher 17/06 à Sully/Loire 12/06 Paris (AN) 17/06 à Bourges 17/06 à la Ferté Saint Cyr Fonction Rendez vous pris BONNEAU François Président du Conseil régional PERRUCHOT LAUNAY BIOULAC (*) Nicolas Jacques Pascal Président du Conseil départemental du Loir11/06 Paris et-Cher Directeur Aménagement Rural et Environnement Président du Pays de Grande Sologne, maire de Lamotte-Beuvron (*)représenté par Adeline Kanengieser, directrice du Pays, Alain Delarbre, maire adjoint de Millancay, Nathalie Fosnon, responsable urbanisme Lamotte 07/06 (téléphone et courriels) 04/06 à Lamotte GOUBERT de CAUVILLE Pascal Présidente communauté de communes Sauldre Sologne Présidente communauté de communes Villages de la Forêt 06/06 à Chaumont/ Tharonne 19/06 à Argent/ Sauldre 18/06 à Neuvy/Baran geon RENIER Laurence JENNEAU Ghislaine RE PRESENTANTS DES CHASSEURS VUITTON Hubert-Louis Président de la FDC41 et de la FRC Centre- 13/06 à Paris Val de Loire (FNC) 11/06 à l'APCA RE PRESENTANTS DE LA PROFESSION AGRICOLE NOYAU Philippe Président Chambre régionale d'agriculture L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 50/68 PUBLIÉ REPRESENTANTS DES ACTEURS FORESTIERS DE COURCY et PESME Alain et Xavier Président et directeur du CRPF Vice-Président en charge de la région Centre-Val de Loire Présidente de l'Union régionale des syndicats de propriétaires forestiers sylviculteurs Président du syndicat des propriétaires forestiers du Loiret Délégué territorial ONF 20/06 à Orléans 12/06 Paris 20/06 à Orléans Contact par courriel 18/06 à Lamotte 17/06 à Nancay 04/06 à Lamotte 15/05 à Brinon/sauldr e 16/05 à Yvoy-lemarron 23/05 à SainteMontaine DE GRESSOT DE DREUZY DUCOS Florence Philippe Yves PROPRIETAIRES PRIVES DIVISIA et CHEVALLIER MONOT Bernard et Hubert Gérard ASSOCIATIONS Président et administrateur du comité central agricole de Sologne Propriétaire privé REGENT LOUIS Emmanuel Raymond et Marie Sologne Nature Environnement Amis des Chemins de Sologne Chasseurs, promeneurs et faune libre en Sologne Associations des chasseurs et amis de la Sologne contre son engrillagement CAMUS Sébastien BERNARDIN Jean-François EXPERTS MARTIN-LALANDE Patrice 05/06 Ex-député et président du Pays de Grande téléphone et Sologne 13/06 Paris (AN) Réalisateur 03/06 (téléphone) VANIER Nicolas AUCANTE Pierre FROISSART DE REDON BEDARIDA Yves Louis Gérard Membre de la société pour la protection des 23/05 à paysages et de l'esthétique de la France + Yvoy-leMembre CDNPS41 + Membre du CA de la Marron Maison du Braconnage Consultant Pays de Grande Sologne et 03/06 étude DYSPERSE (téléphone) élu à Romorantin, Maître de conférences 05/06 en Environnement et Droit de (télephone) l'Environnement à AgroParisTech président de l'Association nationale des 28/06/19 chasseurs de grand gibier L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 51/68 PUBLIÉ SERVICES DE L'ETAT FERRIER CARPENTIER PEYRAT QUIRIN PRIMOT DURAND Catherine Myriam Marie Bénédicte René Pierre Benoit Préfète du Cher, accompagnée de Maxime 19/06 à GUENOT adjoint DDT18 et Gérald Perreault Préfecture SD ONCFS) Adjointe au S/directeur de la santé et de la 21/O5 DGAL protection animale PARIS 21/O5 DGAL Cheffe du bureau de la santé animale PARIS 21/O5 DGAL Chef de mission Peste porcine Africaine PARIS Chef du bureau de l'identification et du 24/O5 DGAL contrôle des mouvements PARIS Epidémiologiste à l'unité d'épidémiologie du 24/O5 ANSES laboratoire de santé animale de Maison Alfort M.ALFORT Epidémiologiste à l'unité d'épidémiologie du 24/O5 laboratoire de santé animale de Maison ANSES Alfort M.ALFORT Conseiller technique police sanitaire USAF / 11/06 tél et DRE ONCFS é-mail Echanges resp. Service jridique Direction Police courriels et ONCFS é-mail BOSHIROLI VAN DE WIELE LANDELLE Maria Laura Anne Philippe L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 52/68 PUBLIÉ 3. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme ARB ANSES BD Porcs CC CCAS CEMAGREF DREAL DRAAF DGAL DDT (M) DDCSPP ELO FDC FNC FRC ha. IBC IRSTEA JORF MTES NOTRe ONCFS OFB PLU (i) POS Signification Agence Régionale de la Biodiversité Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, Base de données nationale porc Communauté de communes Comité Central Agricole de la Sologne Centre national du machinisme agricole, du génie rural des eaux et forêts Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt Direction générale de l'alimentation Direction départementale des territoires (et de la mer) Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations European Landowners Organisation Fédération départementale des chasseurs Fédération nationale des chasseurs Fédération régionale des chasseurs Hectares Inventaire de la biodiversité communale Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture Journal officiel de la République française Ministère de la Transition écologique et solidaire Nouvelle organisation territoriale de la République (Loi) Office national de la Chasse et de la Faune sauvage Office français de la biodiversité Plan local d'urbanisme (Intercommunal) Plan d'occupation des sols L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 53/68 PUBLIÉ Acronyme PGRI PPA PNMS PGS SRADDET SIG SCoT SRB SRCE SDAGE SDGC TVB TRACES UE Signification Plan de gestion des risques d'inondation Peste porcine africaine Plan national de maîtrise du sanglier Pays de Grande Sologne Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires Système d'information géographique Schéma de cohérence territoriale Stratégie régionale pour la biodiversité Schéma régional de cohérence écologique Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Schéma départemental de gestion cynégétique Trame verte et bleue Trade control and expert system Union européenne L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 54/68 PUBLIÉ 4. Quelques données en matière d'épidémiologie Les épidémiologistes soulignent le caractère sécurisant de l'engrillagement pour se prémunir et pour circonscrire les différentes maladies susceptibles d'affecter le grand gibier. Si la peste porcine africaine (PPA) est souvent mentionnée comme le risque viral le plus dangereux, il convient également de mentionner la peste porcine classique (PPC), la tuberculose, la trichyllose, voire la brucellose, la maladie d'Aujesky. Une description plus complète de ces maladies est disponible sur la plate-forme d'épidémiologie surveillance (ESA) de la direction générale de l'alimentation. S'il ne nous revient pas de détailler les éléments relatifs aux pathologies des sangliers et des cervidés, certaines de ces maladies méritent cependant un court focus. La PPA mérite une attention particulière compte tenu du risque considérable qu'elle présente pour l'ensemble des élevages de suidés. La PPA est portée par un virus extrêmement virulent qui engage définitivement le pronostic vital de l'animal, pour lequel il n'existe pas de vaccin à l'heure actuelle. Elle toucherait indifféremment porcs et sangliers. Le virus tue vite : en trois jours en général voire quelques jours de plus; il est extrêmement résistant y compris dans les cadavres et les produits transformés. La tuberculose mérite également une mention particulière -a contrario de la PPA- elle est susceptible d'être portée par des animaux différents (sangliers, cervidés, renards, blaireaux ...). La tuberculose ne tue pas, il peut y avoir des porteurs sains. Son diagnostic peut être porté sur la base d'un test sérologique avec réponse sous une semaine. Rappelons à cet égard l'épisode de 2012 d'épidémies tuberculeuses résultant d'un sanglier échappé d'un parc de chasse de la Marne qui a conduit à l'abattage total des animaux du parc. À titre d'illustration, ce parc de chasse constituée d'un enclos de 379 ha supportait 521 ongulés répertoriés présents (241 cervidés, 280 sangliers). A noter les effectifs largement supérieurs à la norme qui conduisent au statut d'élevage.. Les études sérologiques conduites à l'issue de l'abattage mettaient en évidence une prévalence apparente en tuberculose qualifiée de non négligeable (7,3 %) chez les sangliers et nulle chez les cervidés. L'étude des souches de tuberculose présentes suggérait une origine extérieure aux souches de tuberculose habituellement présentes ou entrées en France. L'étude réalisée en 2007 concluait d'ailleurs sur le caractère indigent des bases réglementaires existantes en matière de suivi des enclos de chasse. Il convient également de mentionner la fièvre aphteuse dont l'Union européenne est indemne ; elle constitue cependant un risque que la mission entend mentionner dans la mesure où elle est extrêmement présente en Turquie, ce pays détenant une sous-espèce de sanglier dit « Attila » particulièrement prisée par les chasseurs européens (sujet de très grande taille de 200-250 kg) qui pourrait motiver des introductions illégales. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 55/68 PUBLIÉ 5. La loi wallonne Circulaire n° 2 719 du 19 novembre 2013 relative à l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés. 1. Objet de la circulaire La présente circulaire a pour objet de fournir aux agents du Département de la Nature et des Forêts (DNF), ainsi qu'à ceux de l'Unité anti-braconnage (UAB) du Département de la Police et des Contrôles (DPC), un commentaire explicatif et des directives concernant l'interdiction légale de la chasse du grand gibier dans les territoires clôturés. Les dispositions de la législation sur la chasse qui organisent cette interdiction ont fait au fil du temps l'objet d'interprétations en sens divers et, pendant très longtemps, d'un certain attentisme au niveau de leur application sur le terrain. Cette situation est notamment due aux recours introduits au Conseil d'État en 1999 par certains propriétaires privés et des associations défendant leurs intérêts [1] et à l'adoption en octobre 2000 d'une circulaire ministérielle [2] controversée quant à l'interprétation donnée par celle-ci à la définition du territoire clôturé. Il importe aujourd'hui que l'ensemble des agents chargés de la police de la chasse aient la même compréhension de ces dispositions légales et adoptent vis-à-vis de celles-ci la même attitude concernant leur application sur le terrain. Cela n'enlève évidemment rien au fait que l'interprétation de ces dispositions revient en définitive aux parquets et tribunaux. 2. Références légales et jurisprudentielles 2.1. Références légales - loi du 28 février 1882 sur la chasse : * article 1er, § 1er, 10°, inséré par l'article 1er du décret du 14 juillet 1994 (Moniteur belge du 28 septembre 1994); * article 2ter, inséré par l'article 10 du décret précité; - arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 déterminant la hauteur des clôtures visées à l'article 2ter, alinéa 2, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse (Moniteur belge du 10 juillet 1999). 2.2. Références jurisprudentielles - jugement du 18 octobre 2006 du tribunal de première instance de Verviers, 10e chambre correctionnelle : - arrêt n° 198.192 du 24 novembre 2009 du Conseil d'Etat; - arrêt du 4 octobre 2011 de la cour d'appel de Liège, 4e chambre correctionnelle; - arrêt du 22 février 2012 de la Cour de Cassation. 3. Rappel du contexte Comme tous les êtres vivants, les grands gibiers doivent disposer de nourriture pour s'alimenter, de couvert pour s'abriter et de partenaires en nombre suffisant pour assurer leur descendance. L'espace nécessaire à un individu pour satisfaire l'ensemble de ses besoins constitue ce que l'on appelle son domaine vital. Suivant les espèces, l'individu le partagera en totalité, pas du tout, ou en partie avec des représentants de sa propre espèce. Ce partage peut être permanent ou saisonnier, exclusif d'un sexe ou d'une classe d'âge ou non. Chez l'espèce chevreuil, le domaine vital d'un individu est de quelques dizaines d'hectares au plus. Chez l'espèce cerf, ce domaine vital est de 700 à 1 500 ha pour une biche et de 1 500 à 5 000 ha, voire davantage, pour un cerf. Chez l'espèce sanglier, le domaine vital est de 500 à 5 000 ha pour les L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 56/68 PUBLIÉ femelles et de 1 500 à 10 000 ha pour les mâles. Il s'agit là d'ordres de grandeur donnés à titre purement indicatif, la taille des domaines vitaux pouvant s'écarter de ces chiffres en fonction notamment de la richesse du milieu ou de la quiétude. Le développement inévitable de l'urbanisation et des voies de communication a exercé au fil du temps une pression sur le domaine vital des animaux grands gibiers. Ceux-ci ne peuvent parfois plus satisfaire leurs besoins alimentaires qu'en surexploitant les ressources disponibles à l'intérieur de la forêt, laquelle constitue aujourd'hui la majeure partie de leurs domaines vitaux. Le phénomène s'est accentué ces dernières décennies avec l'accroissement considérable des populations de grand gibier et la pénétration du public en forêt qui a mis à mal la quiétude des animaux. Constatant que cette situation est encore accentuée localement par la présence en forêt de multiples clôtures entravant le déplacement des grands gibiers entre territoires de chasse [3], le législateur wallon a souhaité agir à ce niveau à l'occasion de l'adoption du décret du 14 juillet 1994 modifiant la loi sur la chasse du 28 février 1882. 4. Commentaires des dispositions légales 4.1. Article 1er, § 1er, 10° et article 2ter, alinéa 1er, de la loi sur la chasse Afin d'encourager le démantèlement des clôtures dans les territoires de chasse, le législateur wallon a donc décidé d'interdire la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés [4] (cf. article 2ter de la loi sur la chasse, alinéa 1er) et il a défini le territoire clôturé comme suit : « tout territoire ou partie de territoire délimité de manière permanente ou temporaire par un ou plusieurs obstacles empêchant le libre parcours de toute espèce de grand gibier » (cf. article 1er, § 1er, 10°, de la loi sur la chasse). Commentaire : Il importe de rappeler que ce qui est sanctionné c'est le fait de chasser le grand gibier à l'intérieur d'un territoire clôturé et donc de poser un acte de chasse. La définition de l'acte de chasse est large et est reprise dans l'article 1er, § 1er, de la loi sur la chasse du 28 février 1882 "L'action consistant à capturer ou tuer un gibier, de même que celle consistant à le rechercher ou le poursuivre à ces fins". Les règles de la complicité et de la corréité (co-auteur) sont applicables : peuvent donc être sanctionnés non seulement le chasseur sensu stricto, mais également tous ceux qui collaborent à l'acte de chasse (traqueurs, organisateurs de la battue, qui ont parfaitement connaissance du fait qu'ils pratiquent la chasse sur un territoire clôturé). Celui qui a édifié la clôture n'est pas nécessairement coupable de l'infraction; il ne peut être déclaré tel, que s'il est établi qu'il a sciemment édifié cette clôture pour faciliter la chasse et retenir le gibier dans le territoire visé. Quant à la définition du territoire clôturé énoncée à l'article 1er, § 1er, 10°, de la loi sur la chasse, elle appelle les commentaires suivants : a) la notion de « libre parcours » implique que le grand gibier doit pouvoir se déplacer en tout temps et sans contrainte inutile pour pouvoir rejoindre directement les endroits où il pourrait s'alimenter, s'abriter et se reproduire. En effet, suivant la définition du territoire clôturé, des obstacles même temporaires entrent en ligne de compte pour déterminer le caractère « clôturé » d'un territoire [5]. Par ailleurs, nul besoin que le territoire soit entièrement clos pour être considéré comme clôturé, puisque la définition fait référence au cas d'un territoire en partie délimité par un ou plusieurs obstacles. Du reste, l'existence possible, suivant la définition, de plusieurs obstacles implique aussi une éventuelle interruption entre ceux-ci [6]. Cela étant, un obstacle de quelques mètres voire de quelques dizaines de mètres ne gêne guère le déplacement des grands gibiers. Inversement, une ouverture de quelques mètres dans une clôture de L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 57/68 PUBLIÉ plusieurs centaines de mètres n'enlève pas grand-chose au fait que cette clôture gêne incontestablement le grand gibier au niveau de ses déplacements. L'obstacle doit donc être significatif, en sorte qu'il paraît cohérent de ne pas prendre a priori en considération l'existence d'une clôture d'une longueur inférieure à 300 mètres et distante, de tout autre tronçon de clôture, d'une longueur minimale de 100 mètres. Une clôture d'une longueur inférieure à 300 mètres peut toutefois être considérée comme un obstacle au libre parcours du grand gibier : - si elle n'existait pas à la date de la signature de la présente circulaire, ou si elle a été (ré)allongée (ou remontée à plus d' 1,20 m) après cette date; - si elle fait l'objet d'une plainte du titulaire du droit de chasse voisin qui estime que telle qu'elle est installée et en raison de la configuration des lieux, cette clôture n'a d'autre but que d'empêcher les animaux de pénétrer sur sa chasse; b) il suffit que le libre parcours d'une seule espèce de grand gibier [7] soit entravé d'une manière ou d'une autre pour que le territoire soit considéré comme clôturé et, partant, que la chasse de tous les grands gibiers y soit interdite; c) la définition du territoire clôturé ne précise pas la nature des obstacles empêchant le libre parcours du grand gibier. C'est donc une question de fait, à apprécier sur le terrain au cas par cas [8]. Mais ce n'est aussi qu'une question de fait. En effet, l'intention importe peu : l'objectif poursuivi par l'existence de la clôture ne doit donc pas nécessairement être celui d'entraver la libre circulation du gibier. Ainsi, la clôture ne doit pas nécessairement être dressée par le chasseur ou à la demande du chasseur : elle peut être le fait de tiers en concertation ou non avec le chasseur. Par conséquent, s'il y a dans les faits entrave à la libre circulation du grand gibier, le territoire est clôturé au sens de la loi sur la chasse. 4.2. Article 2ter, alinéa 2, de la loi sur la chasse et arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 déterminant la hauteur des clôtures visée par l'article 2ter, alinéa 2, de la loi sur la chasse. L'article 2ter, alinéa 1er, de la loi énonce une règle générale (l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés). Le législateur wallon a toutefois prévu une dérogation à cette règle générale en précisant que les territoires ou parties de territoire délimités uniquement par des clôtures installées pour la sécurité des personnes ou pour la protection des cultures et le maintien du bétail, n'étaient pas concernés par cette interdiction de la chasse au grand gibier (cf. article 2ter de la loi sur la chasse, alinéa 2). En d'autres termes, le législateur wallon a reconnu que le maintien (ou l'installation) de ces clôtures pouvait être indispensable dans certaines circonstances et prenait alors le pas sur la nécessité d'assurer le libre parcours du grand gibier. Dans ce cadre, il a habilité le Gouvernement à fixer la hauteur des clôtures concernées, compte tenu des objectifs - sécurité, protection des cultures ou maintien du bétail - que leur maintien (ou leur installation) entendait poursuivre. Cette hauteur a été fixée par le Gouvernement à 1,20 m maximum pour la protection des cultures et le maintien du bétail et à 5 m maximum pour la sécurité des personnes (cf. arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999, article 1er). Commentaire : En fixant une hauteur maximale de 1,20 m pour les clôtures de protection des cultures, le Gouvernement de l'époque a clairement indiqué que le maintien ou l'installation de ces clôtures ne se justifiait véritablement que pour éviter les seuls dégâts de sangliers. Pour ce qui concerne les clôtures assurant la sécurité des personnes, diverses situations peuvent être prises en considération : clôtures entourant des installations militaires, clôtures entourant des carrières, clôtures situées le L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 58/68 PUBLIÉ long d'autoroutes,... Le Gouvernement n'avait au départ pas jugé utile de fixer formellement une hauteur maximale pour ce type de clôture. C'est pour répondre à une objection du Conseil d'Etat qu'il l'a finalement fixée arbitrairement à 5 m. Pour bénéficier de la non-application de l'interdiction de chasser le grand gibier prévue par l'alinéa 2 de l'article 2ter de la loi sur la chasse, il faut que l'installation de la clôture se justifie par une raison objective - la protection des cultures par exemple - la hauteur seule n'étant pas suffisante en soi. Le simple fait pour une clôture délimitant un territoire - ou une partie de territoire - de ne pas avoir une hauteur de plus de 1,2 m ne signifie donc pas pour autant qu'elle ne pose aucun problème. Cela reviendrait à admettre qu'elle est censée jouer d'office un rôle de protection des cultures ou de maintien du bétail. Or si une clôture de 1,2 m de haut [9], placée le long d'une plaine, est effectivement à considérer comme une clôture de protection, la même clôture installée au sein d'un massif boisé, où elle ne sert qu'à délimiter le territoire de chasse en tentant d'y maintenir les sangliers, ne l'est assurément plus. 4.3. Article 8 de la loi sur la chasse L'article 8 prohibe notamment l'utilisation d'engins propres à faciliter la prise ou la destruction du gibier. Cette disposition est pratiquement aussi ancienne que la loi sur la chasse. Dans certaines circonstances particulières, une clôture peut éventuellement être qualifiée d'engin prohibé par l'article 8. Commentaire : Les clôtures peuvent être qualifiées d'engins au sens de l'article 8 de la loi uniquement lorsqu'elles servent véritablement et intentionnellement à « guider » le gibier traqué vers un passage obligé où il sera aisé de le tirer (principe de "l'entonnoir"). De telles clôtures sont généralement installées à dessein par le titulaire de droit de chasse lui-même. Par contre, une simple clôture délimitant un territoire de chasse (ou une partie de territoire de chasse) ne constitue pas en soi un engin au sens de l'article 8 de la loi sur la chasse, au motif que cette clôture jouerait un rôle en vue de retenir le gibier sur le territoire de chasse. La présence d'une clôture à proximité de certains postes de tir ne pose pas non plus de problème vis-à-vis de cet article 8. Par ailleurs, dans la mesure où le service exige lui-même l'enlèvement de tronçons de clôtures non justifiés par la protection des plaines, le maintien du bétail ou la sécurité des personnes, il ne saurait être question pour lui d'exiger aussi l'interdiction de postage à proximité des ouvertures créées. Comme le précise l'arrêt du 4 octobre 2011 de la 4e chambre correctionnelle de la cour d'appel de Liège, si la volonté du législateur avait été de considérer d'office les clôtures comme engins au sens de l'article 8, le législateur n'aurait pas manqué de compléter en conséquence la loi sur la chasse en y mentionnant expressément les clôtures, au même titre que les filets, lacets, pièges à mâchoires, bricoles et appâts empoisonnés ou non. Afin que l'ensemble des agents chargés de la police de la chasse adoptent une attitude commune visà-vis de l'application des dispositions légales commentées sous le point 4, les directives suivantes sont adoptées. 5. Directives 5.1. Quant à la méthode Afin de déterminer si un territoire donné est visé par l'interdiction de la chasse au grand gibier prévue par l'article 2ter de la loi sur la chasse, on adoptera la grille d'analyse suivante, sans inverser l'ordre des questions qu'il y a lieu de se poser : Première question : Le territoire de chasse est-il clôturé au sens de la loi sur la chasse ? Autrement dit, y-a-t-il une entrave à la libre circulation d'un grand gibier ou de plusieurs grands gibiers comme indiqué plus haut (point 4.2.1.) ? Comme indiqué également plus haut, cette entrave doit être significative par rapport au territoire concerné. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 59/68 PUBLIÉ Deuxième question : S'il y a effectivement entrave à la libre circulation, l'obstacle ou les obstacles peuvent-ils s'expliquer par : - soit la sécurité des personnes ? - soit la protection des cultures ? - soit le maintien du bétail ? Troisième question : Si la réponse à la deuxième question est positive, la hauteur maximale fixée par le Gouvernement, à savoir 1,20 m pour la protection des cultures et le maintien du bétail et 5 m pour la sécurité des personnes est-elle respectée ? Si les réponses aux 2e et 3e questions sont positives, les conditions nécessaires au constat de l'infraction ne sont pas réunies. Par contre, ces conditions sont réunies si la réponse à l'une des deux dernières questions est négative. La règle générale étant la sanction de l'entrave, en cas de doute quant à une réponse positive à la deuxième question, logiquement, c'est l'interdiction qui prime. Afin de lever au maximum le doute, les précisions suivantes sont apportées : Sécurité publique : Les clôtures qui sont installées le long des routes à l'initiative ou avec l'accord du gestionnaire de la voirie en vue d'assurer la sécurité publique constituent un obstacle au libre parcours du grand gibier, mais ne doivent pas entrer en ligne de compte pour déterminer si on se trouve en présence d'un territoire clôturé dans lequel la chasse au grand gibier doit être interdite [10]. Il en est généralement de même pour les clôtures installées autour de certains domaines par leurs gestionnaires en vue d'empêcher l'accès des personnes pour des raisons de sécurité (on songe ici en particulier aux domaines de la Défense nationale et aux zones de carrières...). Protection des cultures : Les clôtures de protection des cultures doivent être installées en lisière des massifs forestiers ou à proximité de la lisière. On doit cependant raisonnablement admettre qu'un chasseur installe une clôture de protection des plaines, qui ne suivrait pas exactement le contour de la lisière mais couperait parfois au court à travers certaines excroissances boisées s'avançant en plaine et ce pour des raisons d'économie évidentes. Par ailleurs, on doit également raisonnablement admettre qu'un chasseur, dont le territoire de chasse ne se trouve pas immédiatement en contact avec la plaine, mais qui a déjà été appelé dans le passé à devoir indemniser des dégâts importants de grand gibier à la plaine toute proche (et les a effectivement indemnisés), puisse installer une clôture de protection de la plaine sur son territoire si son voisin, dont le territoire est en contact direct avec la plaine, persiste à ne pas prendre des mesures de préventions efficaces contre ces dégâts, telle l'installation d'une clôture de protection efficace et réglementaire entre le bois et la plaine. Ceci ne porte pas préjudice au droit de ce voisin de contester le bien-fondé du défaut de prévoyance qui lui serait ainsi reproché et d'exiger par conséquent l'enlèvement de la clôture qui n'a pas sa raison d'être à ses yeux. Dans le cas particulier d'un territoire de chasse qui comporte en son sein (et donc pas en périphérie) un enclos, qui peut être justifié ou non par la nécessité de mettre des plants ou des arbres à l'abri de la dent du gibier, la chasse au grand gibier reste autorisée sur le territoire en dehors de cet enclos dans lequel elle est interdite. Évidemment, il doit être constaté qu'il y a nécessité de protéger une L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 60/68 PUBLIÉ véritable plantation et écarter tout subterfuge consistant à intégrer cet enclos dans un dispositif destiné manifestement à clôturer le territoire. 5.2. Quant aux conséquences de l'illégalité constatée Première période : priorité à la prévention et donc à l'avertissement Certains titulaires du droit de chasse ont pu estimer à tort que leur territoire n'était pas considéré comme clôturé. En effet, pendant plusieurs années, les agents chargés de la police de la chasse ne sont pas ou sont peu intervenus en vue de faire respecter l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés depuis son entrée en vigueur le 1er juillet 2000, notamment pour les raisons invoquées au point 1 (circulaire interprétative contestée et recours introduits au niveau du Conseil d'Etat). Compte tenu de cette situation, la plupart des titulaires du droit de chasse dont les territoires sont à considérer comme clôturés en ont été informés par le DNF lors des deux dernières saisons de chasse et il leur a été demandé d'enlever ou de rabaisser leurs clôtures, de manière à au moins ne plus se trouver à terme dans une situation infractionnelle comparable à celle qui a donné lieu au Jugement de la cour d'appel de Liège du 4 octobre 2011, confirmé par l'arrêt de la Cour de Cassation du 22 février 2012. Moyennant accord de leur part sur un programme de démantèlement des clôtures, procès-verbal n'a pas été dressé. Cette démarche d'avertissement sera encore poursuivie cette année vis-à-vis des titulaires de droit de chasse concernés qui n'auraient pas encore été identifiés ou qui se trouveraient dans une situation non conforme aux directives contenues dans la présente circulaire, malgré une première adaptation de leurs clôtures pour éviter de se trouver dans une situation infractionnelle comparable à celle qui fait l'objet de la jurisprudence précitée. Pour le 1er mai 2014 au plus tard, il leur sera demandé d'enlever ou d'abaisser toute clôture constituant un obstacle significatif au libre parcours du grand gibier, obstacle pour lequel le bénéfice de l'application de la dérogation prévue par l'article 2ter, alinéa 2, de la loi sur la chasse ne peut être invoqué. En cas de divergences de vue entre le titulaire de droit de chasse et le directeur des services extérieurs quant à l'obligation de démonter ou d'enlever une clôture le litige est porté à la connaissance de l'inspecteur général du DNF qui prendra la décision. Il sera signalé à ces titulaires de droit de chasse qu'à défaut de pouvoir s'exécuter, les propriétaires pouvant en effet toujours s'opposer à l'enlèvement ou au rabaissement des clôtures, ils n'auront d'autre choix, pour réguler le grand gibier, que de solliciter des autorisations de destruction en application des articles 28 à 31 de l'arrêté du Gouvernement wallon du 18 octobre 2002 permettant la destruction de certaines espèces gibiers. Il sera rappelé à ce propos que des autorisations en application des articles 28 à 31 ne peuvent être accordées, entre autres conditions, que si des dégâts importants sont observés ou sont à craindre (preuve à apporter par le demandeur) et à la condition que le grand gibier n'ait pas été nourri en période de chasse [11] (cf. art. 2 de l'arrêté du Gouvernement wallon du 18 octobre 2002). Par ailleurs, sous peine de couvrir une chasse déguisée, de telles autorisations de destruction ne seront jamais accordées de façon récurrente, chaque année. Les bénéficiaires de ces autorisations de destruction seront dès lors explicitement encouragés à prélever les plus d'animaux possible pour être à l'abri un certain temps au moins de problèmes importants de dégâts. Deuxième période : répression systématique A partir du 1er mai 2014, il y aura verbalisation systématique avec transmission au Parquet. Le verbalisant aura le double souci : - de bien décrire la situation de fait, en suivant la grille d'analyse proposée au point 5.1. De rares titulaires de droit de chasse se sont parfois retranchés derrière des justifications assez grossières L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 61/68 PUBLIÉ [12] pour contester l'existence de l'infraction. Quel que soit le subterfuge qui serait le cas échéant invoqué, le procès-verbal devra bien faire ressortir la volonté de détourner l'esprit de la législation ; - d'identifier les personnes coupables du délit, étant principalement l'organisateur de la chasse, ainsi que le chasseur en situation de chasse ayant parfaitement conscience de chasser le grand gibier dans un territoire clôturé. En effet, toute infraction requiert non seulement un élément matériel, mais aussi un élément moral. Le relevé des postes de battues par rapport aux clôtures ou le plan des battues indiquant l'emplacement des clôtures peuvent être d'une grande utilité pour démontrer que le chasseur avait parfaitement conscience de chasser dans un territoire clôturé. 6. Disposition finale La circulaire ministérielle n° 2.650 du 12 octobre 2000 relative à la définition du « territoire clôturé » visée à l'article 1er, § 1er, 10°, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse, à l'arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 déterminant la hauteur des clôtures visées à l'article 2ter, alinéa 2, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse et à l'arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 modifiant l'arrêté du Gouvernement wallon du 13 juillet 1995 permettant la destruction de certaines espèces gibier et fixant les conditions de destruction de grand gibier dans les territoires clôturés visés à l'article 2ter, alinéa 1er, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse, est formellement abrogée. _______ Notes [1] Le Conseil d'État a statué sur ces recours après plus de dix ans de procédure (cf. arrêt n° 198.192 du 24 novembre 2009). [2] Circulaire du 12 octobre 2000 du Ministre J. Happart (Moniteur belge du 7 novembre 2000), laquelle avait été soumise au Gouvernement wallon qui avait marqué son accord sur celle-ci uniquement pour une période temporaire (jusqu'au 30 juin 2001), comme l'indique la décision du Gouvernement de l'époque. [3] Territoires de chasse dont les étendues sont généralement bien inférieures à celles des domaines vitaux d'un cerf ou d'un sanglier. [4] Cette interdiction qui ne concerne bien que le grand gibier est entrée en vigueur le 1er juillet 2000. La chasse du petit gibier, du gibier d'eau et de l'autre gibier reste donc bien autorisée. [5] Par exemple, le fait, lors des jours de chasse, d'ouvrir les barrières au niveau des points d'entrée dans un territoire de chasse ceinturé par une clôture ne supprime en rien le caractère clôturé de ce territoire; il en est de même si une portion de clôture est enlevée ou si une clôture électrique est mise hors tension au moment de la chasse. [6] L'arrêt du 4 octobre 2011 de la 4e chambre correctionnelle de la cour d'appel de Liège confirme sans équivoque cette interprétation, précisant en outre que la circulaire ministérielle du 12 octobre 2000 était contraire à la loi. [7] "empêchant le libre parcours de toute espèce de grand gibier" signifie "empêchant le libre parcours de n'importe quelle espèce de grand gibier". [8] Par exemple, une clôture de 1,3 m de type agricole, composée habituellement de 3 à 5 fils superposés et visant à délimiter une propriété privée, notamment pour dissuader les promeneurs d'y pénétrer, n'empêche pas le passage d'un animal grand gibier, quelle que soit l'espèce. Elle ne constitue dès lors pas un obstacle au sens de la définition de l'article 1er, § 1er, 10° de la loi sur la chasse. Par contre, un passage canadien correspond bien à cette notion d'obstacle empêchant le libre parcours du grand gibier. [9] Voire nettement moins : 2 fils électriques, le premier à 20 cm du sol et le second à 50 cm du sol suffisent déjà à entraver le libre parcours du sanglier. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 62/68 PUBLIÉ [10] Il est effectivement important que ce soit à l'initiative de ce gestionnaire car comme l'indique le jugement précité du 4 octobre 2011, la protection des personnes ne justifie pas l'installation d'une clôture le long de n'importe quelle route, à défaut de quoi il n'existerait finalement plus nulle part la possibilité d'assurer un certain libre parcours du grand gibier. [11] C'est-à-dire une absence totale de nourrissage si du sanglier est présent, puisque la chasse au sanglier est ouverte toute l'année. [12] Exemples : * le titulaire de droit de chasse parvient à démontrer que la clôture litigieuse est en réalité installée sur une longue bande de terrain où il n'aurait pas le droit de chasse (mais qu'il chassait évidemment avant son interpellation...). À cet égard, on relèvera que dans le jugement précité du 4 octobre 2011, le juge a estimé que "la pose d'une clôture par un voisin ne peut causer dommage à autrui qui pourrait exiger l'enlèvement, voire réclamer des dommages et intérêts"... * le titulaire de droit de chasse complète la clôture litigieuse pour délimiter une étroite parcelle dans laquelle il prétend tout à coup protéger la régénération forestière. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 63/68 PUBLIÉ 6. Dispositions applicables dans les enclos et parcs de chasse L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 64/68 PUBLIÉ 7. Analyse de la rétroactivité de la loi S'agissant de la rétroactivité de la loi, il convient de rappeler que l e principe de non-rétroactivité n'est en règle générale pas opposable à la loi, qui peut autoriser l'application d'une réglementation nouvelle aux situations en cours, y compris aux situations contractuelles. L'article 2 du code civil, aux termes duquel : « La loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif » peut être écarté par la loi, ainsi que le rappelle l'article L. 221-4 du code des relations entre le public et l'administration. Cette faculté dont jouit le législateur ne peut cependant être mise en oeuvre qu'en considération d'un motif d'intérêt général suffisant et sous réserve de ne pas priver de garanties légales des exigences constitutionnelles (CC, n° 98-404 DC du 18 décembre 1998, cons. 5 ; n° 2001-456 DC du 27 décembre 2001, cons. 21) ou de ne pas porter atteinte aux « situations légalement acquises » (CC, n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005, cons. 45 ; n° 2007-550 DC du 27 février 2007, cons. 4). Le Conseil constitutionnel a fait évoluer sa jurisprudence dans le sens d'une protection accrue de la sécurité juridique, en jugeant désormais que le législateur « ne saurait, sans motif d'intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations » (CC, n° 2013-682 DC du 19 décembre 2013, cons. 14). Le Conseil d'État juge en outre, au regard des stipulations de l'article 6, § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que l'intervention rétroactive du législateur au profit de l'État doit reposer sur d'impérieux motifs d'intérêt général et, au regard des stipulations de l'article 1 er du premier protocole additionnel a cette convention, qu'un juste équilibre doit être ménagé entre l'atteinte aux droits découlant de lois en vigueur et les motifs d'intérêt général susceptibles de la justifier (CE, Ass., 27 mai 2005, Provin, n° 277975 ; Sect., 8 avril 2009, Association Alcaly et autres, n° 290604 ; Plén., 9 mai 2012, Ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique c/société EPI, n° 308996). Au final, la démarche de suppression des 2 alinéas pourrait s'envisager autour du motif impérieux sanitaire (risque de diffusion de peste porcine africaine), ou environnemental (en relation avec la Charte de l'environnement) face à une atteinte à la propriété privée (à distinguer du domicile sacralisé).26 26 Réalisé avec le concours de la direction de la police de l'ONCFS L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 65/68 PUBLIÉ PUBLIÉ 8. État de la contamination Peste porcine africaine dans l'Union européenne (source UE juillet 2019) partie 1 : zone de surveillance partie 2 : maladie limitée à la faune sauvage partie 3 : maladie affectant la faune sauvage et les animaux domestiques partie 4 : cas de la Sardaigne L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 67/68 PUBLIÉ 9. Bibliographie BARBIER, L. (décembre 2010). Étude sur le problème de la circulation des cerfs dans le Loiret compte tenu de la segmentation du paysage, ONCFS. BOIZARD, P ; CINOTTI, B (juin 2019). Rapport sur l'Exercice de la police de l'eau et de la nature dans les services déconcentrés et les opérateurs de l'État, CGEDD. CARRELET, M. (2016). Des engrillagements de Sologne : tentative de défragmentation du paysage écologique, politique et disciplinaire. CRPF et FRC, Centre ­ Val de Loire, (mars 2014). Brochure « L'un ne va pas sans l'autre », Forêt et cervidés. FROISSART, Y. La France clôture ses milieux naturels, peut-on lutter ? dans Espaces naturels, n°37 GOERGEN, P. (1993). Approche ethnologique des enclos d'élevage du grand gibier et des parcs de tir, Ministère de l'environnement. MILLET, L. Thèse : Contribution à l'étude des fonctions sociale et écologique au droit de propriété : enquête sur le caractère sacré de ce droit énoncé dans la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, université Panthéon-Sorbonne, paris I, 2015. MOUCHE, J. (2013). Comment l'engrillagement en Sologne questionne-t'il les valeurs associées à la forêt ? Recherche exploratoire sur l'interaction homme-nature dans le contexte de la propriété privée, Agro Paris Tech. PEREA, A ; CARDOUX, JN (mars 2019). Mission parlementaire relative à la régulation des populations de grand gibier et à la réduction de leurs dégâts. RICHER, S et Al. (2016). Dans un contexte de déprise piscicole, la chasse peut-elle jouer un rôle complémentaire voire alternatif pour la préservation de l'écosystème étang ?, revue faune sauvage, ONCFS. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 68/68 PUBLIÉ INVALIDE) (ATTENTION: OPTION une durée courte (1 mois) pour des quantités / hectares limitées précisées par le SDGC. Cette mise en oeuvre suppose la modification de l'article L. 425. La rédaction modifiée pourrait être la suivante : « L'agrainage et l'affouragement sont interdits. Toutefois ils peuvent être autorisés dans des conditions définies par le schéma départemental de gestion cynégétique qui ne peuvent en aucun cas excéder au total un mois de durée chaque année en période de sensibilité des principales denrées agricoles du territoire concerné par les dégâts de grand gibier». Quatrièmement : l'interdiction totale. La mission considère que la pratique de l'agrainage est en contradiction avec la gestion de sureffectifs massifs de l'espèce sanglier et qu'il est préférable de proscrire totalement cette pratique, dont la mise en oeuvre délictueuse sera par voie de conséquence d'autant plus contrôlable que des dispositions complexes et trop variables à l'intérieur et entre départements auront été proscrites. Cette interdiction peut facilement être mise en oeuvre en matière de droit par modification de l'article de loi L. 425-4 ci-dessus : « L'agrainage et l'affouragement sont interdits en tout temps sur l'ensemble des territoires soumis à la chasse. ». Recommandation 3. Interdire l'agrainage et l'affouragement sous toutes ses formes et en tout lieu de l'espace naturel soumis à la pratique de la chasse ; à défaut, un renforcement des conditions exigées en SDGC en zone libre et une interdiction totale de l'agrainage et de l'affouragement en enclos constituent des voies de progrès (Ministres ou préfets). L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 34/68 PUBLIÉ 3.5.4. Des densités animales non contrôlées et parfois illégales Parfois les enclos ou parcs s'apparentent à des élevages non déclarés, au regard des densités d'animaux présents. A titre d'exemple, rappelons l'épisode sanitaire de 2012 concernant un parc de chasse en France justifiant l'abattage total des animaux du parc par les autorités. Ce parc de chasse constitué d'un enclos de 379 ha supportait 521 ongulés répertoriés présents (241 cervidés, 280 sangliers). Leur contrôle est -jusqu'à présent- rendu compliqué pour ne pas dire impossible, par une interprétation discutable de l'extension du domicile à l'ensemble de l'enclos (évoquée précédemment). Pourtant, en vertu de l'arrêté ministériel du 20 août 2009, pour le sanglier « Lorsque qu'un enclos cynégétique accueille plus d'un animal (ongulé) par hectare, il constitue un établissement d'élevage, de vente ou de transit de sangliers et se trouve obligatoirement soumis à la réglementation des élevages ». Tout acte de chasse y est alors interdit. Ainsi dans un enclos cynégétique, un animal serait res nullius19 sauf en cas de densités à l'ha qui sont celles d'un établissement d'élevage : le gibier devient res propria. La Haute Cour dans l'arrêt cité (Chambre criminelle du 30 janvier 1992 90-85.403) souligne les multiples éléments matériels permettant de confirmer que, par principe, dans un enclos cynégétique, l'animal est res nullius, sauf dans le cas où la densité à l'ha (de sanglier ou de cervidés) est telle que l'on bascule dans l'établissement d'élevage ou d'éléments conduisant à faire glisser le statut de l'animal de res nullius vers celui de res propria20. La mission considère qu'il y a lieu de revoir la pratique du contrôle et ses conditions, sans qu'il soit nécessaire de revoir le droit, mais déjà simplement par une meilleure coordination des actions des services de l'État en liaison avec les procureurs. À droit constant, la mission suggère des opérations de contrôle renforcées, avec des moyens mutualisés pour constituer des éléments de preuve pour objectiver les surpopulations de grands animaux. En complément, une expérimentation permettant le comptage hivernal par drone faciliterait la recherche d'infractions et le déroulement des procédures. 3.5.5. L'interdiction de la chasse en espaces hermétiques clos est simple et efficace La loi wallonne a traité le sujet de façon argumentée. Elle valorise la chasse durable, la fonctionnalité des écosystèmes, la prise en compte des impératifs biologiques des espèces (reproduction, nutrition, déplacement) et tient compte du fait que la chasse se déroule en espace naturel (voir annexe 5 loi wallonne). S'agissant du droit français, il est patent pour la mission que les enclos cynégétiques ne sont pas en conformité avec la loi 2012-325 du 7 mars 2012 dite loi chasse dont l'article premier dispose que : « La gestion durable du patrimoine faunique et de ses habitats est d'intérêt général. La pratique de la chasse, activité à caractère environnemental, culturel, social et économique, participe à cette gestion et contribue à l'équilibre entre le gibier, les milieux et les activités humaines en assurant un véritable équilibre agro-sylvo-cynégétique. » En France, certains services de l'État font observer qu'il existe de nombreuses clôtures non « enclosantes » (linéaires, ou formant un coin ou « une nasse ») qui ne peuvent relever d'un enclos ou d'un élevage, quand bien même leur géométrie ou leur accumulation tend à confiner les animaux. Ainsi, un inventaire des engrillagements effectué par l'ONCFS 18, de 2006 à 2009, a recensé près de 200 km de linéaires non-enclosants. Ces « nasses » peuvent toutefois être contrôlées et verbalisées. Certains dispositifs comportent des systèmes anti-retour permettant le seul passage entrant de l'animal. La mission considère qu'il faut en cette matière lutter avec pugnacité. Ces faits peuvent être 19 Res nullius : (« la chose de personne » : expression latine utilisée en droit civil, qui désigne une chose sans maître, qui n'a pas de propriétaire mais est appropriable. Res propria : Chose qui a un propriétaire légal. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 35/68 20 PUBLIÉ verbalisés au titre de l'article 9 de l'arrêté du 1 er août 1986 interdisant tout matériel pour favoriser la capture. La mission propose une nouvelle définition des enclos cynégétiques par l'article L. 424-3. Cette fois, il ne s'agit plus de définir un enclos au sens strict (herméticité totale « apparente ») comme dans la rédaction actuelle, mais de définir à partir de quels indicateurs objectif, le dispositif d'engrillagement fait entrer le territoire dans la catégorie des « enclos, non chassables ». L'idée poursuivie par la mission consiste à redéfinir les critères qui constituent de façon formelle le nouveau statut d'enclos. L'objectif est que le propriétaire aménage son « ex enclos » selon la formule « des petites barrières » telles qu'elles résulteront des règles d'urbanisme sur le périmètre de l'ancien enclos, (exception limitée à la sécurité routière) pour que ce territoire retrouve ses fonctionnalités naturelles et retrouve son statut « chassable ». L'ancienne définition de l'enclos de l'article L. 423-3 du code de l'environnement est à supprimer (comme au chapitre 3.5.2. du présent rapport), car il ne s'agit pas de modifier la fermeture de quelques mètres d'enceinte. Il convient en effet de poser -dans une nouvelle définition des enclosdes critères conduisant au classement « enclos » interdit de chasse. Cet objectif est atteint par ajout de l'article ci-dessous. Nouvelle définition de l'enclos conduisant à interdiction de la chasse : « L'enclos est défini comme toute possession attenant ou non à une habitation et entourée même très partiellement , d'une clôture continue et constante faisant obstacle à toute communication avec les héritages voisins et empêchant complètement le passage de la faune et celui de l'homme, sur tout ou partie du périmètre ou à l'intérieur de ladite possession . Toute action de chasse au grand gibier y est interdite ». Comme indiqué au 3.5.2 du présent rapport (extension du droit commun ) il conviendra de prévoir les exceptions pour les domaines à caractère patrimonial. Recommandation 4. Interdire la chasse dans les enclos hermétiques à toute la faune sauvage, sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques, et raffermir la lutte contre les poses illégales de grillages, prenant notamment la forme de nasses à gibier (Préfets, procureurs, ONCFS). 3.5.6. Chasse, transparence, information et communication La mission a recueilli les propos, voire les positions d'une cinquantaine d'acteurs. Elle a constaté une convergence sur une grande partie des propositions qu'elle forme. Elle a aussi recueilli un avis unanime sur le caractère désastreux de la persistance et du développement des pratiques de chasse en enclos hermétiques (au sens de l'actuelle définition) au sein du monde de la chasse, en matière de communication. La grande majorité des chasseurs sait et connaît des domaines de chasse totalement ouverts, lieux modestes ou de grande notoriété sur lesquels ils ont pu passer des moments de passion absolue. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 36/68 PUBLIÉ Une acceptation des engrillagements de plus en plus décriée, y compris au sein des chasseurs et des propriétaires. La mission considère qu'il serait salutaire pour le monde de la chasse et valorisant pour ses pratiquants d'accompagner et de s'engager -y compris avec les propriétaires d'enclos et de parc de chasse- vers une pratique moins artificialisée, plus respectueuse des équilibres, recourant à des clôtures d'ampleur modeste permettant une circulation de la faune sauvage, dessinant des paysages plus sereins, ne coupant pas la vue, mais matérialisant malgré tout la propriété privée, en assurant en définitive une vision du territoire plus naturelle et plus conforme à l'identité solognote. A noter également que la Sologne n'est que le laboratoire de cette évolution qui concerne la chasse dans son ensemble. Ce contexte est favorable au rappel des règles, lois et règlements en matière de chasse : préfets, DDT, DDCSPP, ONCFS et FDC, FNC, FRC, associations, par tous moyens adaptés. 3.6. Urbanisme et aménagement du territoire solognot 3.6.1. Le non-respect des règles en matière d'urbanisme est flagrant Une définition précise des clôtures est nécessaire pour éviter des détournements, dont quelques exemples parmi d'autres figurent ci-dessous. Deux communes (Neung sur Beuvron, Chaumont-sur-Tharonne) ne se sont pas opposées, pour des raisons diverses, à des propriétaires qui ont édifié des clôtures d'une hauteur supérieure à celle prévue dans le document d'urbanisme. Le PLU de Chaumont-sur-Tharonne préconise des clôtures en limite de propriété à 1,20 m. Des propriétaires ont implanté leur clôture à 5 m en retrait de la route à 2m de hauteur et contourné ainsi la règle. Deux autres communes de Sologne ont engagé des actions en justice contre des propriétaires ayant contrevenu aux règles des clôtures définies dans leur document d'urbanisme. Il s'agit de Ménestreau-en-Villette, qui a été déboutée pour des motifs de forme semble-t-il et de La Ferté St Aubin, qui a eu gain de cause. Certaines communes ont eu gain de cause en vertu d'un « article 11 » du document d'urbanisme. C'est le cas de trois d'entre elles (Orçay, Vouzon, Theillay). Un propriétaire a consenti à l'édification à un niveau moindre que prévu ou au rabattement d'une clôture à 1,20 mètre de hauteur, sur une base initiale envisagée d'une hauteur supérieure, ou à renoncer à clore (dans le cas d'un projet de vente de propriété « clôturée »). Une seule commune du Pays de grande Sologne n'a pas prévu d'article "clôtures" (Vernou-enSologne). Elle a néanmoins décidé de l'obligation de déclaration préalable de travaux pour l'édification d'une clôture, laquelle n'a pas été respectée. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 37/68 PUBLIÉ 3.6.2. Poser et faire appliquer un cadre en utilisant tout le potentiel des textes « Contrairement à ce qui peut parfois être allégué, le droit de se clore n'est pas un droit absolu. Le principe et les modalités de la clôture ne sont pas à la discrétion du propriétaire ». Comme mentionné au chapitre 1.3.3. et 1.3.4. dans le cadre du droit des sols, le conseil municipal d'une commune peut rendre obligatoire une « déclaration préalable » pour l'édification de toute clôture y compris en espaces non bâtis : « 2° Imposer des caractéristiques pour les clôtures ». 21 Comme l'a indiqué Yves Froissart en 2011, « la sensibilité des communes du Pays de Grande Sologne aux questions de l'engrillagement est globalement forte, avec pour preuve le fait que sur les 18 communes ayant un document d'urbanisme début 2011 (sur un total de 28 communes), 17 ont adopté une règle concernant les clôtures en milieu naturel, agricole et forestier, fixant, comme la loi le prévoit, des éléments concernant la qualité, la hauteur, les matériaux utilisés pour les clôtures. » L'article L. 151-23 du code de l'urbanisme prévoit que le règlement du PLU peut délimiter des secteurs « à protéger pour des motifs d'ordre écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation ». La partie réglementaire explicite notamment les outils disponibles : · L'article R. 151-43 permet aux collectivités de « délimiter les espaces et secteurs contribuant aux continuités écologiques et définir des règles nécessaires à leur maintien ou à leur remise en état », règles au sein desquelles pourrait figurer des prescriptions sur l'édification de clôtures, comme une obligation de laisser régulièrement des espaces non clôturés, prescrire des baies ouvertes ». · L'article R. 421-12 prévoit et une procédure de déclaration préalable pour l'édification d'une clôture située dans un secteur ainsi délimité au PLU, hormis les exceptions régénération forestières et clôtures agricoles, lesquelles doivent être temporaires. · Par ailleurs, les communes n'ayant pas de document d'urbanisme peuvent décider de rendre obligatoire la déclaration de travaux, sans avoir d'éléments juridiques à opposer à un propriétaire en cas de désaccord sur les caractéristiques de la clôture (anciennement, par suite d'un arrêté préfectoral, depuis 2007, une simple délibération communale suffit). Aussi la mobilisation des règles d'urbanisme peut être effective dans toute la Sologne. 3.6.3. Faciliter les décisions des collectivités grâce à des modèles de clôtures Les communes et les collectivités disposent de tous les outils nécessaires à l'élaboration d'une politique en matière de clôture, mais celle-ci suppose une coordination sans faille. Il convient que soient pris en compte les avis des personnes publiques associées, notamment à l'occasion de l'enquête publique du SRADDET. Dans le cadre de son élaboration, il importe que l'État et la région Centre-Val de Loire, agissant de concert, chacun dans ses attributions, prescrivent les types de clôtures, eu égard aux intérêts majeurs que constituent la valeur patrimoniale des paysages, des continuités écologiques et leurs multifonctionnalités. Plusieurs maires de communes dotées d'un document d'urbanisme prévoyant des mesures de régulation des clôtures ont indiqué que leur position serait renforcée dans la mesure où des plaintes s'exprimeraient à l'encontre des clôtures par des citoyens, individuellement, ou par le biais d'associations. Une «veille citoyenne» s'est constituée avec les trois associations rencontrées, regroupant plus de 1 500 adhérents, car il semble encore que de nombreuses clôtures soient édifiées 21 Thèse de Laurent Millet « sur le droit de se clore ». L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 38/68 PUBLIÉ sans déclaration de travaux, là où celle-ci est requise (du fait d'un document d'urbanisme ou par délibération communale). Une communication visant à constituer une «opinion publique» éclairée est un point important d'une démarche où les citoyens sont encouragés à donner leur opinion. Définir le plus grand dénominateur commun des clôtures en Sologne et faciliter les décisions des collectivités en leur fournissant des modèles de décision adaptés à la diversité des situations, tout en assurant la cohérence des règles applicables sur l'ensemble de la Sologne, trace une voie que la mission propose de privilégier. A l'occasion de la rédaction du SRADDET, il est important d'établir un cahier des charges, une norme claire et précise, définissant la notion de clôture perméable, acceptable et précisant les distances de retrait par rapport aux voies publiques et privées et aux propriétés des tiers. Cette démarche doit permettre d'informer les collectivités sur toutes les possibilités ouvertes par le droit de l'urbanisme en matière de limitation et de contrôle des clôtures et les inciter à faire le nécessaire dans les SCOT, PLUi, PLU. Il est proposé qu'État et collectivités organisent rapidement des ateliers productifs pour : · décider d'une position solognote homogène sur les clôtures, avec un plus grand dénominateur commun, ce qui accroîtrait l'effet de visibilité politique de l'action ; · s'accorder en matière de hauteur, de typologie, de matériaux utilisés, de positionnement par rapport aux voies publiques et privées, permettant à la fois de matérialiser la propriété et d'assurer la perméabilité pour la faune sauvage ; · définir les types de clôtures et leurs justifications, les critères d'évaluation, la pertinence, la réévaluation périodique et les clauses de revoyures ; · prévoir un délai de mise en conformité des clôtures existantes au regard de règles nouvelles. Ainsi une même règle concernant les clôtures sera effective pour l'ensemble des SCOT solognots. Recommandation 5. Rendre obligatoire, dans le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), les prescriptions concernant les caractéristiques des clôtures incluant la procédure de déclaration préalable à leur édification et profiter de son élaboration pour progresser sur l'établissement de modèles (préfet de région et conseil régional). 3.6.4. Les communes responsables de la libre circulation sur les chemins ruraux Les cheminements humains, à des fins de tourisme et randonnée, sont aussi à prendre en compte ; en effet, la préservation de la qualité des paysages constitue un enjeu largement intégré dans le SRADDET qui dispose une règle visant à «préserver et valoriser le patrimoine architectural, urbain et paysager dans les plans et programmes ». L'attention portée à cet aspect paraît d'autant plus utile que ce patrimoine est un facteur essentiel de l'attractivité de la région. Les clôtures font fuir le tourisme local et résidentiel. Elles le concentrent de surcroît sur des zones ouvertes. Les associations de randonneurs expriment depuis longtemps avec vigueur leur opposition aux clôtures, pour des raisons essentiellement paysagères, notamment le long des chemins publics communaux, parfois de part et d'autre du chemin. Les pouvoirs publics ont investi fortement pour créer, dynamiser des circuits de randonnées pédestres, équestres et à vélo . Cet effort est mis à mal. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 39/68 PUBLIÉ Les grilles canadiennes (photographie ci-dessous) constituent une autre pomme de discorde. Les communes ont le pouvoir d'autoriser ou d'interdire ces grilles sur les chemins communaux et ruraux. Ces grilles sont jugées dangereuses par les randonneurs équestres, le cheval refuse l'obstacle. Elles peuvent constituer aussi un obstacle pour les cyclistes peu expérimentés. Leur autorisation par la commune est une acceptation implicite donnée au propriétaire qui souhaite poser une clôture perpendiculairement au chemin, de part et d'autre de la grille canadienne. La mission a effectivement constaté l'existence de chemins ruraux appropriés ou dont la libre circulation n'est plus assurée suite à l'installation de passages canadiens entravant le passage de chevaux, des enfants et de la faune sauvage, ou déplacés sans justifications ni autorisations, témoignant des complaisances ou de non actions de la part de maires. Les communes doivent être incitées à rouvrir des chemins appropriés et à faire supprimer des barrières canadiennes, dont l'autorisation est par nature révocable. Exemple de barrière canadienne sur chemins ruraux (photographie des auteurs) 3.7. Des clôtures nécessaires : agriculture, forêt, sécurité routière La mission rappelle que la clôture peut être utile, voire nécessaire, dans un certain nombre de cas, appelant des justifications précises au moment de son édification. Pour les productions agricoles et forestières, la présence de clôtures peut être nécessaire pour protéger de façon permanente ou temporaire une zone, face à la pénétration du gibier et aux dégâts qu'il peut commettre. La régénération forestière justifie aussi pleinement des protections au moment notamment des régénérations comme évoqué au chapitre 1.3.1. du présent rapport. Il peut aussi s'agir de parquer des animaux d'élevage dans un périmètre. Dans ce cas les clôtures filaires sont suffisantes. Le choix du type de clôture pour ces activités, est a priori « libre » en Sologne, sous réserve qu'elles soient temporaires (pour les forêts) et qu'elles puissent se situer à une certaine distance des bords de route. En matière de sécurité routière, les clôtures bordant les routes peuvent être utiles mais parfois constituer un piège pour les animaux qui s'y engagent. Un véhicule qui survient peut affoler ces animaux qui ne trouvent pas d'issue et peut susciter de leur part des comportements imprévisibles et accidentogènes. De même, mais dans une moindre mesure, une clôture unilatérale à une route peut produire le même effet pour des animaux qui tentent de franchir une route au moment de l'arrivée d'un véhicule. L'extrémité d'une clôture linéaire longeant une route peut également devenir L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 40/68 PUBLIÉ un lieu privilégié de passage d'animaux. Il est vrai que de tels emplacements, localisés, sont bien connus et souvent indiqués par des panneaux routiers. Ceci n'empêche pourtant pas les accidents. Enfin, à l'inverse, une route passante peut devenir dangereuse un jour de chasse, du fait du passage du gibier et des chiens. Plusieurs propriétaires interrogés ont indiqué l'intérêt pour eux d'une clôture même peu élevée (de l'ordre d' 1 m) qui facilite l'arrêt des chiens.22 L'aménagement par le propriétaire d'un dégagement de 2 à 3 mètres à partir du fossé (l'idéal serait un positionnement des clôtures à 5 mètres de la route) conforterait le volet sécurité et visibilité. Ce terre-plein peut permettre également au propriétaire forestier de constituer une zone temporaire de stockage de bois. Dans les territoires fortement segmentés, les passages de cervidés se concentrent sur les seules zones encore ouvertes qui deviennent donc des zones accidentogènes. Plusieurs idées peuvent être émises : · créer une bande dégagée suffisamment large de part et d'autre de la route, ce qui permet aux automobilistes et aux animaux de voir et d'être vus (voir ci-dessus) ; · aménager des passages protégés pour animaux, associés à un radar détectant les animaux et clignotant pour avertir les conducteurs avec un panneautage (installés avec efficacité dans le département de l'Isère) ; · poser des réflecteurs en limite de chaussée, orientés vers les enceintes boisées; ils ont été testés avec succès (l'éclat des phares renvoyé dissuade les animaux de traverser). La mission propose de réduire l'effet d'obstacle des clôtures à la circulation des animaux en installant des dispositifs adaptés. De telles réflexions, relatives au type de clôtures et aux fonctionnalités recherchées, peuvent nourrir le débat territorial préalable à l'établissement des documents d'urbanisme. 3.8. Modifier la fiscalité pour défavoriser l'engrillagement Clore une propriété est un droit, mais rien ne s'oppose à ce que cette formalisation matérielle, parfois excessive, de l'appropriation d'un terrain soit prise en compte par la fiscalité foncière. Ceci est tout particulièrement vrai lorsque cette clôture permet au propriétaire de s'affranchir des règles communes, comme c'est le cas pour les enclos cynégétiques, mais aussi d'entraver le contrôle de la loi en étendant physiquement la protection domiciliaire bien au-delà des seuls bâtiments d'habitation. L'enclos se traduit par un tableau cynégétique renforcé, qui semble donner de la valeur à l'activité de chasse, dans des conditions très défavorables à la naturalité et à la durabilité du milieu mettant notamment en danger l'état forestier. Pour favoriser le retour à une situation écartant le grillage hermétique, diverses dispositions fiscales pourraient être ajustées et être décidées par les collectivités locales en direct. Normalement, la valeur locative forfaitaire d'une parcelle non bâtie close est plus élevée que celle d'une parcelle sans clôture, du fait du classement de la parcelle dans un groupe de nature de cultures23 plus imposé (groupe 13 est plus élevée que celle d'une parcelle sans clôture « bois d'agrément » ou groupe 11 « terrains spécialement aménagés en vue de la chasse »). Mais cette majoration n'est pas toujours très élevée, ni connue et mise en oeuvre par les commissions communales des impôts fonciers. 22 Trans-Formation Consultants/Y. Froissart Janvier-Juillet 2011 Pays Grande Sologne. Étude Concertation « Faire face aux engrillagements ». Voir au Bulletin officiel des Finances publiques l'annexe « Tableau de classification des natures de culture ou de propriété et leurs groupes pour l'établissement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) ». L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 41/68 23 PUBLIÉ Aussi, appliquer aux propriétés rurales closes une forte majoration de la taxe sur le foncier non bâti (multiplication par trois ou cinq) serait à la fois une façon de mieux tenir compte de la valeur économique plus importante de la propriété et de rendre plus coûteux l'engrillagement, qu'il soit de convenance ou pour constituer un enclos cynégétique. De la même façon, la sur-densification des populations de grands mammifères chassables à l'intérieur des enclos amène souvent une désertification végétale voire une déforestation de surfaces qui ont bénéficié des avantages fiscaux24 liés à l'état boisé. Aussi, la mission propose de retirer le certificat « Monichon » pour toutes les surfaces encloses qui ne répondent plus aux critères de gestion durable (surfaces déboisées par le surpâturage ou pour les équipements de chasse, surfaces encore boisées mais impossibles à régénérer du fait du la pression du gibier) considérant qu'il s'agit d'une simple application de la loi. Recommandation 6. Augmenter la fiscalité foncière et immobilière sur les espaces hermétiquement engrillagés en appliquant aux propriétés rurales closes une forte majoration de la taxe sur le foncier non bâti (multiplication par trois ou cinq, disposition à voter en loi de finances) et, d'autre part, en supprimant les réductions des droits de mutation des propriétés forestières et de l'impôt sur la fiscalité immobilière obtenus avec un certificat de gestion durable, sous réserve de dispositions dérogatoires liées à des raisons patrimoniales ou historiques (Ministres). 3.9. Promouvoir le patrimoine naturel solognot avec des clôtures perméables Différentes pistes non exploitées par la mission pourraient être envisagées : · la médiatisation de retrait volontaire de clôtures par certains propriétaires ouverts à cette démarche. Un tel retrait volontaire serait assuré d'un impact médiatique ; · la mobilisation de fonds (ENS / fondation pour les habitats de la faune sauvage / fonds biodiversité FNC FDC) pour accompagner ces retraits (sous condition par exemple de propriété modeste ou très morcelée) ; · la prolongation de cette politique volontariste, résultat de consensus locaux, départementaux ou régional, dans le cadre plus élargi « de l'implantation d'éléments linéaires naturels denses (tels que haies d'épineux) permettant le passage des animaux et limitant les intrusions humaines »25 ; · la création un label « CHASSE NATURELLE DE SOLOGNE » qui aurait vocation à promouvoir la chasse du grand gibier en espace libre ou sous « petites barrières » conformes aux documents d'urbanisme. 24 Ces avantages, prévus par les articles 793 et 976 du code général des impôts, sont obtenus grâce à un certificat (dit « Monichon ») établi par la DDT, et attestant que la propriété peut, du fait d'une gestion durable de ses peuplements forestiers, bénéficier d'une exonération des trois quarts de l'impôt sur la fortune immobilière (IF) ou des droits de mutation à titre onéreux. En contrepartie, les bois et forêts ayant bénéficié de cette réduction doivent, pendant trente ans, être gérés selon des garanties de gestion durable, que le propriétaire s'engage, pour lui-même et ses ayants-cause, à respecter. Mission parlementaire relative à la régulation des populations de grand gibier et à la réduction de leurs dégâts, A Perea, JN Cardoux. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 42/68 25 PUBLIÉ Recommandation 7. Créer un label « Chasse naturelle de Sologne » (préfet de région et conseil régional). L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 43/68 PUBLIÉ PUBLIÉ 4. Pistes de progrès : synthèses des propositions ACTION FAIBLE PRATIQUE DE LA CHASSE MOYENNE FORTE Interdire de la chasse en enclos Interdire l'agrainage sur l'ensemble du territoire Reclasser les enclos en élevage en cas de dépassement de densité Raffermir les instructions aux préfets Renforcer la limitation de l'agrainage en SDGC Étendre le droit commun de la chasse à tout territoire chassé Supprimer l'agrainage dans tout enclos ou parc NOURRISSAGE AGRAINAGE INTRODUCTION GRAND GIBIER Interdire toute introduction de grand gibier sur le territoire soumis à la chasse Rappeler les règles avant l'ouverture de la chasse Mettre en commun les fichiers entre les services de l'État Contrôler régulièrement l'ensemble de l'intérieur des parcs et enclos Recourir à l'ensemble des agents de contrôle pour appuyer les maires en cas de difficulté Mise en place d'un label « Chasse naturelle de Sologne » accroître fortement les taxes sur le foncier non bâti des enclos hermétiques RENFORCEMENT DES CONTRÔLES notamment sanitaires RÈGLES D'URBANISME Accompagner les élus dans le renforcement du lien SRADDET SCOT PLUI PLU Établir les principes de perméabilité et les types de clôture acceptés pour être conforme COMMUNICATION SÉCURITÉ Valorisation médiatique des actions volontaires de désengrillagement pour passer à « de petites barrières » Imposer les « petites barrières » comme indicateur de gestion durable des propriétés sous PGS Revenir sur les réductions fiscales liées aux propriétés encloses DOMAINE FINANCIER Ministres Préfets élus locaux L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 45/68 PUBLIÉ Conclusion Tout concourt à démontrer que les enclos hermétiques ou l'utilisation de grillages imperméables à la faune sauvage sont un non-sens cynégétique, présentent des non-conformités en matière de droit de l'environnement, de droit de l'urbanisme ou de droit rural et échappent partiellement au contrôle des élus et de l'État sur des interprétations juridiques discutables. Ces pratiques d'accaparement ou de perturbation de l'espace naturel et de l'espace public ne sont plus acceptables. Après les usagers, elles heurtent désormais les élus locaux et les parlementaires de toute sensibilité politique en Sologne ainsi que les chasseurs eux-mêmes. Les arguments naturalistes, cynégétiques, sanitaires, forestiers, paysagers, sociétaux et d'une façon générale l'artificialisation des milieux qui en résulte devraient conduire à un raffermissement législatif, du reste en cours. La mission considère que le bon sens doit permettre de progresser collectivement vers des pratiques plus respectueuses de l'éthique, de la naturalité de la chasse et du respect du bien commun et des biens collectifs. La Sologne, dans son ensemble, fait preuve d'une concorde certaine. Elle entend mettre en place des dispositions en matière d'urbanisme permettant de tels progrès, en associant toutes les parties, mais ne saurait assumer seule les transitions qui imposent d'indispensables modifications nationales, notamment en matière de droit de la chasse et de son contrôle. Michel REFFAY Dominique STEVENS Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 46/68 PUBLIÉ Annexes L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 47/68 PUBLIÉ 1. Lettre de mission L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 48/68 PUBLIÉ L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 49/68 PUBLIÉ 2. Liste des personnes rencontrées Nom Prénom MINISTRES / PARLEMENTAIRES CARDOUX PELTIER CORMIER-BOULIGEON PRINCE Jean-Noël Guillaume François Jean-Paul AUTRES ELUS 12/06 à Régions de France 282 boulevard saint germain paris 7e Sénateur du Loiret Député du Loir-et-Cher Député du Cher Sénateur du Loir-et-Cher 17/06 à Sully/Loire 12/06 Paris (AN) 17/06 à Bourges 17/06 à la Ferté Saint Cyr Fonction Rendez vous pris BONNEAU François Président du Conseil régional PERRUCHOT LAUNAY BIOULAC (*) Nicolas Jacques Pascal Président du Conseil départemental du Loir11/06 Paris et-Cher Directeur Aménagement Rural et Environnement Président du Pays de Grande Sologne, maire de Lamotte-Beuvron (*)représenté par Adeline Kanengieser, directrice du Pays, Alain Delarbre, maire adjoint de Millancay, Nathalie Fosnon, responsable urbanisme Lamotte 07/06 (téléphone et courriels) 04/06 à Lamotte GOUBERT de CAUVILLE Pascal Présidente communauté de communes Sauldre Sologne Présidente communauté de communes Villages de la Forêt 06/06 à Chaumont/ Tharonne 19/06 à Argent/ Sauldre 18/06 à Neuvy/Baran geon RENIER Laurence JENNEAU Ghislaine RE PRESENTANTS DES CHASSEURS VUITTON Hubert-Louis Président de la FDC41 et de la FRC Centre- 13/06 à Paris Val de Loire (FNC) 11/06 à l'APCA RE PRESENTANTS DE LA PROFESSION AGRICOLE NOYAU Philippe Président Chambre régionale d'agriculture L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 50/68 PUBLIÉ REPRESENTANTS DES ACTEURS FORESTIERS DE COURCY et PESME Alain et Xavier Président et directeur du CRPF Vice-Président en charge de la région Centre-Val de Loire Présidente de l'Union régionale des syndicats de propriétaires forestiers sylviculteurs Président du syndicat des propriétaires forestiers du Loiret Délégué territorial ONF 20/06 à Orléans 12/06 Paris 20/06 à Orléans Contact par courriel 18/06 à Lamotte 17/06 à Nancay 04/06 à Lamotte 15/05 à Brinon/sauldr e 16/05 à Yvoy-lemarron 23/05 à SainteMontaine DE GRESSOT DE DREUZY DUCOS Florence Philippe Yves PROPRIETAIRES PRIVES DIVISIA et CHEVALLIER MONOT Bernard et Hubert Gérard ASSOCIATIONS Président et administrateur du comité central agricole de Sologne Propriétaire privé REGENT LOUIS Emmanuel Raymond et Marie Sologne Nature Environnement Amis des Chemins de Sologne Chasseurs, promeneurs et faune libre en Sologne Associations des chasseurs et amis de la Sologne contre son engrillagement CAMUS Sébastien BERNARDIN Jean-François EXPERTS MARTIN-LALANDE Patrice 05/06 Ex-député et président du Pays de Grande téléphone et Sologne 13/06 Paris (AN) Réalisateur 03/06 (téléphone) VANIER Nicolas AUCANTE Pierre FROISSART DE REDON BEDARIDA Yves Louis Gérard Membre de la société pour la protection des 23/05 à paysages et de l'esthétique de la France + Yvoy-leMembre CDNPS41 + Membre du CA de la Marron Maison du Braconnage Consultant Pays de Grande Sologne et 03/06 étude DYSPERSE (téléphone) élu à Romorantin, Maître de conférences 05/06 en Environnement et Droit de (télephone) l'Environnement à AgroParisTech président de l'Association nationale des 28/06/19 chasseurs de grand gibier L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 51/68 PUBLIÉ SERVICES DE L'ETAT FERRIER CARPENTIER PEYRAT QUIRIN PRIMOT DURAND Catherine Myriam Marie Bénédicte René Pierre Benoit Préfète du Cher, accompagnée de Maxime 19/06 à GUENOT adjoint DDT18 et Gérald Perreault Préfecture SD ONCFS) Adjointe au S/directeur de la santé et de la 21/O5 DGAL protection animale PARIS 21/O5 DGAL Cheffe du bureau de la santé animale PARIS 21/O5 DGAL Chef de mission Peste porcine Africaine PARIS Chef du bureau de l'identification et du 24/O5 DGAL contrôle des mouvements PARIS Epidémiologiste à l'unité d'épidémiologie du 24/O5 ANSES laboratoire de santé animale de Maison Alfort M.ALFORT Epidémiologiste à l'unité d'épidémiologie du 24/O5 laboratoire de santé animale de Maison ANSES Alfort M.ALFORT Conseiller technique police sanitaire USAF / 11/06 tél et DRE ONCFS é-mail Echanges resp. Service jridique Direction Police courriels et ONCFS é-mail BOSHIROLI VAN DE WIELE LANDELLE Maria Laura Anne Philippe L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 52/68 PUBLIÉ 3. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme ARB ANSES BD Porcs CC CCAS CEMAGREF DREAL DRAAF DGAL DDT (M) DDCSPP ELO FDC FNC FRC ha. IBC IRSTEA JORF MTES NOTRe ONCFS OFB PLU (i) POS Signification Agence Régionale de la Biodiversité Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, Base de données nationale porc Communauté de communes Comité Central Agricole de la Sologne Centre national du machinisme agricole, du génie rural des eaux et forêts Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt Direction générale de l'alimentation Direction départementale des territoires (et de la mer) Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations European Landowners Organisation Fédération départementale des chasseurs Fédération nationale des chasseurs Fédération régionale des chasseurs Hectares Inventaire de la biodiversité communale Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture Journal officiel de la République française Ministère de la Transition écologique et solidaire Nouvelle organisation territoriale de la République (Loi) Office national de la Chasse et de la Faune sauvage Office français de la biodiversité Plan local d'urbanisme (Intercommunal) Plan d'occupation des sols L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 53/68 PUBLIÉ Acronyme PGRI PPA PNMS PGS SRADDET SIG SCoT SRB SRCE SDAGE SDGC TVB TRACES UE Signification Plan de gestion des risques d'inondation Peste porcine africaine Plan national de maîtrise du sanglier Pays de Grande Sologne Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires Système d'information géographique Schéma de cohérence territoriale Stratégie régionale pour la biodiversité Schéma régional de cohérence écologique Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Schéma départemental de gestion cynégétique Trame verte et bleue Trade control and expert system Union européenne L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 54/68 PUBLIÉ 4. Quelques données en matière d'épidémiologie Les épidémiologistes soulignent le caractère sécurisant de l'engrillagement pour se prémunir et pour circonscrire les différentes maladies susceptibles d'affecter le grand gibier. Si la peste porcine africaine (PPA) est souvent mentionnée comme le risque viral le plus dangereux, il convient également de mentionner la peste porcine classique (PPC), la tuberculose, la trichyllose, voire la brucellose, la maladie d'Aujesky. Une description plus complète de ces maladies est disponible sur la plate-forme d'épidémiologie surveillance (ESA) de la direction générale de l'alimentation. S'il ne nous revient pas de détailler les éléments relatifs aux pathologies des sangliers et des cervidés, certaines de ces maladies méritent cependant un court focus. La PPA mérite une attention particulière compte tenu du risque considérable qu'elle présente pour l'ensemble des élevages de suidés. La PPA est portée par un virus extrêmement virulent qui engage définitivement le pronostic vital de l'animal, pour lequel il n'existe pas de vaccin à l'heure actuelle. Elle toucherait indifféremment porcs et sangliers. Le virus tue vite : en trois jours en général voire quelques jours de plus; il est extrêmement résistant y compris dans les cadavres et les produits transformés. La tuberculose mérite également une mention particulière -a contrario de la PPA- elle est susceptible d'être portée par des animaux différents (sangliers, cervidés, renards, blaireaux ...). La tuberculose ne tue pas, il peut y avoir des porteurs sains. Son diagnostic peut être porté sur la base d'un test sérologique avec réponse sous une semaine. Rappelons à cet égard l'épisode de 2012 d'épidémies tuberculeuses résultant d'un sanglier échappé d'un parc de chasse de la Marne qui a conduit à l'abattage total des animaux du parc. À titre d'illustration, ce parc de chasse constituée d'un enclos de 379 ha supportait 521 ongulés répertoriés présents (241 cervidés, 280 sangliers). A noter les effectifs largement supérieurs à la norme qui conduisent au statut d'élevage.. Les études sérologiques conduites à l'issue de l'abattage mettaient en évidence une prévalence apparente en tuberculose qualifiée de non négligeable (7,3 %) chez les sangliers et nulle chez les cervidés. L'étude des souches de tuberculose présentes suggérait une origine extérieure aux souches de tuberculose habituellement présentes ou entrées en France. L'étude réalisée en 2007 concluait d'ailleurs sur le caractère indigent des bases réglementaires existantes en matière de suivi des enclos de chasse. Il convient également de mentionner la fièvre aphteuse dont l'Union européenne est indemne ; elle constitue cependant un risque que la mission entend mentionner dans la mesure où elle est extrêmement présente en Turquie, ce pays détenant une sous-espèce de sanglier dit « Attila » particulièrement prisée par les chasseurs européens (sujet de très grande taille de 200-250 kg) qui pourrait motiver des introductions illégales. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 55/68 PUBLIÉ 5. La loi wallonne Circulaire n° 2 719 du 19 novembre 2013 relative à l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés. 1. Objet de la circulaire La présente circulaire a pour objet de fournir aux agents du Département de la Nature et des Forêts (DNF), ainsi qu'à ceux de l'Unité anti-braconnage (UAB) du Département de la Police et des Contrôles (DPC), un commentaire explicatif et des directives concernant l'interdiction légale de la chasse du grand gibier dans les territoires clôturés. Les dispositions de la législation sur la chasse qui organisent cette interdiction ont fait au fil du temps l'objet d'interprétations en sens divers et, pendant très longtemps, d'un certain attentisme au niveau de leur application sur le terrain. Cette situation est notamment due aux recours introduits au Conseil d'État en 1999 par certains propriétaires privés et des associations défendant leurs intérêts [1] et à l'adoption en octobre 2000 d'une circulaire ministérielle [2] controversée quant à l'interprétation donnée par celle-ci à la définition du territoire clôturé. Il importe aujourd'hui que l'ensemble des agents chargés de la police de la chasse aient la même compréhension de ces dispositions légales et adoptent vis-à-vis de celles-ci la même attitude concernant leur application sur le terrain. Cela n'enlève évidemment rien au fait que l'interprétation de ces dispositions revient en définitive aux parquets et tribunaux. 2. Références légales et jurisprudentielles 2.1. Références légales - loi du 28 février 1882 sur la chasse : * article 1er, § 1er, 10°, inséré par l'article 1er du décret du 14 juillet 1994 (Moniteur belge du 28 septembre 1994); * article 2ter, inséré par l'article 10 du décret précité; - arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 déterminant la hauteur des clôtures visées à l'article 2ter, alinéa 2, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse (Moniteur belge du 10 juillet 1999). 2.2. Références jurisprudentielles - jugement du 18 octobre 2006 du tribunal de première instance de Verviers, 10e chambre correctionnelle : - arrêt n° 198.192 du 24 novembre 2009 du Conseil d'Etat; - arrêt du 4 octobre 2011 de la cour d'appel de Liège, 4e chambre correctionnelle; - arrêt du 22 février 2012 de la Cour de Cassation. 3. Rappel du contexte Comme tous les êtres vivants, les grands gibiers doivent disposer de nourriture pour s'alimenter, de couvert pour s'abriter et de partenaires en nombre suffisant pour assurer leur descendance. L'espace nécessaire à un individu pour satisfaire l'ensemble de ses besoins constitue ce que l'on appelle son domaine vital. Suivant les espèces, l'individu le partagera en totalité, pas du tout, ou en partie avec des représentants de sa propre espèce. Ce partage peut être permanent ou saisonnier, exclusif d'un sexe ou d'une classe d'âge ou non. Chez l'espèce chevreuil, le domaine vital d'un individu est de quelques dizaines d'hectares au plus. Chez l'espèce cerf, ce domaine vital est de 700 à 1 500 ha pour une biche et de 1 500 à 5 000 ha, voire davantage, pour un cerf. Chez l'espèce sanglier, le domaine vital est de 500 à 5 000 ha pour les L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 56/68 PUBLIÉ femelles et de 1 500 à 10 000 ha pour les mâles. Il s'agit là d'ordres de grandeur donnés à titre purement indicatif, la taille des domaines vitaux pouvant s'écarter de ces chiffres en fonction notamment de la richesse du milieu ou de la quiétude. Le développement inévitable de l'urbanisation et des voies de communication a exercé au fil du temps une pression sur le domaine vital des animaux grands gibiers. Ceux-ci ne peuvent parfois plus satisfaire leurs besoins alimentaires qu'en surexploitant les ressources disponibles à l'intérieur de la forêt, laquelle constitue aujourd'hui la majeure partie de leurs domaines vitaux. Le phénomène s'est accentué ces dernières décennies avec l'accroissement considérable des populations de grand gibier et la pénétration du public en forêt qui a mis à mal la quiétude des animaux. Constatant que cette situation est encore accentuée localement par la présence en forêt de multiples clôtures entravant le déplacement des grands gibiers entre territoires de chasse [3], le législateur wallon a souhaité agir à ce niveau à l'occasion de l'adoption du décret du 14 juillet 1994 modifiant la loi sur la chasse du 28 février 1882. 4. Commentaires des dispositions légales 4.1. Article 1er, § 1er, 10° et article 2ter, alinéa 1er, de la loi sur la chasse Afin d'encourager le démantèlement des clôtures dans les territoires de chasse, le législateur wallon a donc décidé d'interdire la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés [4] (cf. article 2ter de la loi sur la chasse, alinéa 1er) et il a défini le territoire clôturé comme suit : « tout territoire ou partie de territoire délimité de manière permanente ou temporaire par un ou plusieurs obstacles empêchant le libre parcours de toute espèce de grand gibier » (cf. article 1er, § 1er, 10°, de la loi sur la chasse). Commentaire : Il importe de rappeler que ce qui est sanctionné c'est le fait de chasser le grand gibier à l'intérieur d'un territoire clôturé et donc de poser un acte de chasse. La définition de l'acte de chasse est large et est reprise dans l'article 1er, § 1er, de la loi sur la chasse du 28 février 1882 "L'action consistant à capturer ou tuer un gibier, de même que celle consistant à le rechercher ou le poursuivre à ces fins". Les règles de la complicité et de la corréité (co-auteur) sont applicables : peuvent donc être sanctionnés non seulement le chasseur sensu stricto, mais également tous ceux qui collaborent à l'acte de chasse (traqueurs, organisateurs de la battue, qui ont parfaitement connaissance du fait qu'ils pratiquent la chasse sur un territoire clôturé). Celui qui a édifié la clôture n'est pas nécessairement coupable de l'infraction; il ne peut être déclaré tel, que s'il est établi qu'il a sciemment édifié cette clôture pour faciliter la chasse et retenir le gibier dans le territoire visé. Quant à la définition du territoire clôturé énoncée à l'article 1er, § 1er, 10°, de la loi sur la chasse, elle appelle les commentaires suivants : a) la notion de « libre parcours » implique que le grand gibier doit pouvoir se déplacer en tout temps et sans contrainte inutile pour pouvoir rejoindre directement les endroits où il pourrait s'alimenter, s'abriter et se reproduire. En effet, suivant la définition du territoire clôturé, des obstacles même temporaires entrent en ligne de compte pour déterminer le caractère « clôturé » d'un territoire [5]. Par ailleurs, nul besoin que le territoire soit entièrement clos pour être considéré comme clôturé, puisque la définition fait référence au cas d'un territoire en partie délimité par un ou plusieurs obstacles. Du reste, l'existence possible, suivant la définition, de plusieurs obstacles implique aussi une éventuelle interruption entre ceux-ci [6]. Cela étant, un obstacle de quelques mètres voire de quelques dizaines de mètres ne gêne guère le déplacement des grands gibiers. Inversement, une ouverture de quelques mètres dans une clôture de L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 57/68 PUBLIÉ plusieurs centaines de mètres n'enlève pas grand-chose au fait que cette clôture gêne incontestablement le grand gibier au niveau de ses déplacements. L'obstacle doit donc être significatif, en sorte qu'il paraît cohérent de ne pas prendre a priori en considération l'existence d'une clôture d'une longueur inférieure à 300 mètres et distante, de tout autre tronçon de clôture, d'une longueur minimale de 100 mètres. Une clôture d'une longueur inférieure à 300 mètres peut toutefois être considérée comme un obstacle au libre parcours du grand gibier : - si elle n'existait pas à la date de la signature de la présente circulaire, ou si elle a été (ré)allongée (ou remontée à plus d' 1,20 m) après cette date; - si elle fait l'objet d'une plainte du titulaire du droit de chasse voisin qui estime que telle qu'elle est installée et en raison de la configuration des lieux, cette clôture n'a d'autre but que d'empêcher les animaux de pénétrer sur sa chasse; b) il suffit que le libre parcours d'une seule espèce de grand gibier [7] soit entravé d'une manière ou d'une autre pour que le territoire soit considéré comme clôturé et, partant, que la chasse de tous les grands gibiers y soit interdite; c) la définition du territoire clôturé ne précise pas la nature des obstacles empêchant le libre parcours du grand gibier. C'est donc une question de fait, à apprécier sur le terrain au cas par cas [8]. Mais ce n'est aussi qu'une question de fait. En effet, l'intention importe peu : l'objectif poursuivi par l'existence de la clôture ne doit donc pas nécessairement être celui d'entraver la libre circulation du gibier. Ainsi, la clôture ne doit pas nécessairement être dressée par le chasseur ou à la demande du chasseur : elle peut être le fait de tiers en concertation ou non avec le chasseur. Par conséquent, s'il y a dans les faits entrave à la libre circulation du grand gibier, le territoire est clôturé au sens de la loi sur la chasse. 4.2. Article 2ter, alinéa 2, de la loi sur la chasse et arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 déterminant la hauteur des clôtures visée par l'article 2ter, alinéa 2, de la loi sur la chasse. L'article 2ter, alinéa 1er, de la loi énonce une règle générale (l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés). Le législateur wallon a toutefois prévu une dérogation à cette règle générale en précisant que les territoires ou parties de territoire délimités uniquement par des clôtures installées pour la sécurité des personnes ou pour la protection des cultures et le maintien du bétail, n'étaient pas concernés par cette interdiction de la chasse au grand gibier (cf. article 2ter de la loi sur la chasse, alinéa 2). En d'autres termes, le législateur wallon a reconnu que le maintien (ou l'installation) de ces clôtures pouvait être indispensable dans certaines circonstances et prenait alors le pas sur la nécessité d'assurer le libre parcours du grand gibier. Dans ce cadre, il a habilité le Gouvernement à fixer la hauteur des clôtures concernées, compte tenu des objectifs - sécurité, protection des cultures ou maintien du bétail - que leur maintien (ou leur installation) entendait poursuivre. Cette hauteur a été fixée par le Gouvernement à 1,20 m maximum pour la protection des cultures et le maintien du bétail et à 5 m maximum pour la sécurité des personnes (cf. arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999, article 1er). Commentaire : En fixant une hauteur maximale de 1,20 m pour les clôtures de protection des cultures, le Gouvernement de l'époque a clairement indiqué que le maintien ou l'installation de ces clôtures ne se justifiait véritablement que pour éviter les seuls dégâts de sangliers. Pour ce qui concerne les clôtures assurant la sécurité des personnes, diverses situations peuvent être prises en considération : clôtures entourant des installations militaires, clôtures entourant des carrières, clôtures situées le L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 58/68 PUBLIÉ long d'autoroutes,... Le Gouvernement n'avait au départ pas jugé utile de fixer formellement une hauteur maximale pour ce type de clôture. C'est pour répondre à une objection du Conseil d'Etat qu'il l'a finalement fixée arbitrairement à 5 m. Pour bénéficier de la non-application de l'interdiction de chasser le grand gibier prévue par l'alinéa 2 de l'article 2ter de la loi sur la chasse, il faut que l'installation de la clôture se justifie par une raison objective - la protection des cultures par exemple - la hauteur seule n'étant pas suffisante en soi. Le simple fait pour une clôture délimitant un territoire - ou une partie de territoire - de ne pas avoir une hauteur de plus de 1,2 m ne signifie donc pas pour autant qu'elle ne pose aucun problème. Cela reviendrait à admettre qu'elle est censée jouer d'office un rôle de protection des cultures ou de maintien du bétail. Or si une clôture de 1,2 m de haut [9], placée le long d'une plaine, est effectivement à considérer comme une clôture de protection, la même clôture installée au sein d'un massif boisé, où elle ne sert qu'à délimiter le territoire de chasse en tentant d'y maintenir les sangliers, ne l'est assurément plus. 4.3. Article 8 de la loi sur la chasse L'article 8 prohibe notamment l'utilisation d'engins propres à faciliter la prise ou la destruction du gibier. Cette disposition est pratiquement aussi ancienne que la loi sur la chasse. Dans certaines circonstances particulières, une clôture peut éventuellement être qualifiée d'engin prohibé par l'article 8. Commentaire : Les clôtures peuvent être qualifiées d'engins au sens de l'article 8 de la loi uniquement lorsqu'elles servent véritablement et intentionnellement à « guider » le gibier traqué vers un passage obligé où il sera aisé de le tirer (principe de "l'entonnoir"). De telles clôtures sont généralement installées à dessein par le titulaire de droit de chasse lui-même. Par contre, une simple clôture délimitant un territoire de chasse (ou une partie de territoire de chasse) ne constitue pas en soi un engin au sens de l'article 8 de la loi sur la chasse, au motif que cette clôture jouerait un rôle en vue de retenir le gibier sur le territoire de chasse. La présence d'une clôture à proximité de certains postes de tir ne pose pas non plus de problème vis-à-vis de cet article 8. Par ailleurs, dans la mesure où le service exige lui-même l'enlèvement de tronçons de clôtures non justifiés par la protection des plaines, le maintien du bétail ou la sécurité des personnes, il ne saurait être question pour lui d'exiger aussi l'interdiction de postage à proximité des ouvertures créées. Comme le précise l'arrêt du 4 octobre 2011 de la 4e chambre correctionnelle de la cour d'appel de Liège, si la volonté du législateur avait été de considérer d'office les clôtures comme engins au sens de l'article 8, le législateur n'aurait pas manqué de compléter en conséquence la loi sur la chasse en y mentionnant expressément les clôtures, au même titre que les filets, lacets, pièges à mâchoires, bricoles et appâts empoisonnés ou non. Afin que l'ensemble des agents chargés de la police de la chasse adoptent une attitude commune visà-vis de l'application des dispositions légales commentées sous le point 4, les directives suivantes sont adoptées. 5. Directives 5.1. Quant à la méthode Afin de déterminer si un territoire donné est visé par l'interdiction de la chasse au grand gibier prévue par l'article 2ter de la loi sur la chasse, on adoptera la grille d'analyse suivante, sans inverser l'ordre des questions qu'il y a lieu de se poser : Première question : Le territoire de chasse est-il clôturé au sens de la loi sur la chasse ? Autrement dit, y-a-t-il une entrave à la libre circulation d'un grand gibier ou de plusieurs grands gibiers comme indiqué plus haut (point 4.2.1.) ? Comme indiqué également plus haut, cette entrave doit être significative par rapport au territoire concerné. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 59/68 PUBLIÉ Deuxième question : S'il y a effectivement entrave à la libre circulation, l'obstacle ou les obstacles peuvent-ils s'expliquer par : - soit la sécurité des personnes ? - soit la protection des cultures ? - soit le maintien du bétail ? Troisième question : Si la réponse à la deuxième question est positive, la hauteur maximale fixée par le Gouvernement, à savoir 1,20 m pour la protection des cultures et le maintien du bétail et 5 m pour la sécurité des personnes est-elle respectée ? Si les réponses aux 2e et 3e questions sont positives, les conditions nécessaires au constat de l'infraction ne sont pas réunies. Par contre, ces conditions sont réunies si la réponse à l'une des deux dernières questions est négative. La règle générale étant la sanction de l'entrave, en cas de doute quant à une réponse positive à la deuxième question, logiquement, c'est l'interdiction qui prime. Afin de lever au maximum le doute, les précisions suivantes sont apportées : Sécurité publique : Les clôtures qui sont installées le long des routes à l'initiative ou avec l'accord du gestionnaire de la voirie en vue d'assurer la sécurité publique constituent un obstacle au libre parcours du grand gibier, mais ne doivent pas entrer en ligne de compte pour déterminer si on se trouve en présence d'un territoire clôturé dans lequel la chasse au grand gibier doit être interdite [10]. Il en est généralement de même pour les clôtures installées autour de certains domaines par leurs gestionnaires en vue d'empêcher l'accès des personnes pour des raisons de sécurité (on songe ici en particulier aux domaines de la Défense nationale et aux zones de carrières...). Protection des cultures : Les clôtures de protection des cultures doivent être installées en lisière des massifs forestiers ou à proximité de la lisière. On doit cependant raisonnablement admettre qu'un chasseur installe une clôture de protection des plaines, qui ne suivrait pas exactement le contour de la lisière mais couperait parfois au court à travers certaines excroissances boisées s'avançant en plaine et ce pour des raisons d'économie évidentes. Par ailleurs, on doit également raisonnablement admettre qu'un chasseur, dont le territoire de chasse ne se trouve pas immédiatement en contact avec la plaine, mais qui a déjà été appelé dans le passé à devoir indemniser des dégâts importants de grand gibier à la plaine toute proche (et les a effectivement indemnisés), puisse installer une clôture de protection de la plaine sur son territoire si son voisin, dont le territoire est en contact direct avec la plaine, persiste à ne pas prendre des mesures de préventions efficaces contre ces dégâts, telle l'installation d'une clôture de protection efficace et réglementaire entre le bois et la plaine. Ceci ne porte pas préjudice au droit de ce voisin de contester le bien-fondé du défaut de prévoyance qui lui serait ainsi reproché et d'exiger par conséquent l'enlèvement de la clôture qui n'a pas sa raison d'être à ses yeux. Dans le cas particulier d'un territoire de chasse qui comporte en son sein (et donc pas en périphérie) un enclos, qui peut être justifié ou non par la nécessité de mettre des plants ou des arbres à l'abri de la dent du gibier, la chasse au grand gibier reste autorisée sur le territoire en dehors de cet enclos dans lequel elle est interdite. Évidemment, il doit être constaté qu'il y a nécessité de protéger une L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 60/68 PUBLIÉ véritable plantation et écarter tout subterfuge consistant à intégrer cet enclos dans un dispositif destiné manifestement à clôturer le territoire. 5.2. Quant aux conséquences de l'illégalité constatée Première période : priorité à la prévention et donc à l'avertissement Certains titulaires du droit de chasse ont pu estimer à tort que leur territoire n'était pas considéré comme clôturé. En effet, pendant plusieurs années, les agents chargés de la police de la chasse ne sont pas ou sont peu intervenus en vue de faire respecter l'interdiction de la chasse au grand gibier dans les territoires clôturés depuis son entrée en vigueur le 1er juillet 2000, notamment pour les raisons invoquées au point 1 (circulaire interprétative contestée et recours introduits au niveau du Conseil d'Etat). Compte tenu de cette situation, la plupart des titulaires du droit de chasse dont les territoires sont à considérer comme clôturés en ont été informés par le DNF lors des deux dernières saisons de chasse et il leur a été demandé d'enlever ou de rabaisser leurs clôtures, de manière à au moins ne plus se trouver à terme dans une situation infractionnelle comparable à celle qui a donné lieu au Jugement de la cour d'appel de Liège du 4 octobre 2011, confirmé par l'arrêt de la Cour de Cassation du 22 février 2012. Moyennant accord de leur part sur un programme de démantèlement des clôtures, procès-verbal n'a pas été dressé. Cette démarche d'avertissement sera encore poursuivie cette année vis-à-vis des titulaires de droit de chasse concernés qui n'auraient pas encore été identifiés ou qui se trouveraient dans une situation non conforme aux directives contenues dans la présente circulaire, malgré une première adaptation de leurs clôtures pour éviter de se trouver dans une situation infractionnelle comparable à celle qui fait l'objet de la jurisprudence précitée. Pour le 1er mai 2014 au plus tard, il leur sera demandé d'enlever ou d'abaisser toute clôture constituant un obstacle significatif au libre parcours du grand gibier, obstacle pour lequel le bénéfice de l'application de la dérogation prévue par l'article 2ter, alinéa 2, de la loi sur la chasse ne peut être invoqué. En cas de divergences de vue entre le titulaire de droit de chasse et le directeur des services extérieurs quant à l'obligation de démonter ou d'enlever une clôture le litige est porté à la connaissance de l'inspecteur général du DNF qui prendra la décision. Il sera signalé à ces titulaires de droit de chasse qu'à défaut de pouvoir s'exécuter, les propriétaires pouvant en effet toujours s'opposer à l'enlèvement ou au rabaissement des clôtures, ils n'auront d'autre choix, pour réguler le grand gibier, que de solliciter des autorisations de destruction en application des articles 28 à 31 de l'arrêté du Gouvernement wallon du 18 octobre 2002 permettant la destruction de certaines espèces gibiers. Il sera rappelé à ce propos que des autorisations en application des articles 28 à 31 ne peuvent être accordées, entre autres conditions, que si des dégâts importants sont observés ou sont à craindre (preuve à apporter par le demandeur) et à la condition que le grand gibier n'ait pas été nourri en période de chasse [11] (cf. art. 2 de l'arrêté du Gouvernement wallon du 18 octobre 2002). Par ailleurs, sous peine de couvrir une chasse déguisée, de telles autorisations de destruction ne seront jamais accordées de façon récurrente, chaque année. Les bénéficiaires de ces autorisations de destruction seront dès lors explicitement encouragés à prélever les plus d'animaux possible pour être à l'abri un certain temps au moins de problèmes importants de dégâts. Deuxième période : répression systématique A partir du 1er mai 2014, il y aura verbalisation systématique avec transmission au Parquet. Le verbalisant aura le double souci : - de bien décrire la situation de fait, en suivant la grille d'analyse proposée au point 5.1. De rares titulaires de droit de chasse se sont parfois retranchés derrière des justifications assez grossières L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 61/68 PUBLIÉ [12] pour contester l'existence de l'infraction. Quel que soit le subterfuge qui serait le cas échéant invoqué, le procès-verbal devra bien faire ressortir la volonté de détourner l'esprit de la législation ; - d'identifier les personnes coupables du délit, étant principalement l'organisateur de la chasse, ainsi que le chasseur en situation de chasse ayant parfaitement conscience de chasser le grand gibier dans un territoire clôturé. En effet, toute infraction requiert non seulement un élément matériel, mais aussi un élément moral. Le relevé des postes de battues par rapport aux clôtures ou le plan des battues indiquant l'emplacement des clôtures peuvent être d'une grande utilité pour démontrer que le chasseur avait parfaitement conscience de chasser dans un territoire clôturé. 6. Disposition finale La circulaire ministérielle n° 2.650 du 12 octobre 2000 relative à la définition du « territoire clôturé » visée à l'article 1er, § 1er, 10°, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse, à l'arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 déterminant la hauteur des clôtures visées à l'article 2ter, alinéa 2, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse et à l'arrêté du Gouvernement wallon du 3 juin 1999 modifiant l'arrêté du Gouvernement wallon du 13 juillet 1995 permettant la destruction de certaines espèces gibier et fixant les conditions de destruction de grand gibier dans les territoires clôturés visés à l'article 2ter, alinéa 1er, de la loi du 28 février 1882 sur la chasse, est formellement abrogée. _______ Notes [1] Le Conseil d'État a statué sur ces recours après plus de dix ans de procédure (cf. arrêt n° 198.192 du 24 novembre 2009). [2] Circulaire du 12 octobre 2000 du Ministre J. Happart (Moniteur belge du 7 novembre 2000), laquelle avait été soumise au Gouvernement wallon qui avait marqué son accord sur celle-ci uniquement pour une période temporaire (jusqu'au 30 juin 2001), comme l'indique la décision du Gouvernement de l'époque. [3] Territoires de chasse dont les étendues sont généralement bien inférieures à celles des domaines vitaux d'un cerf ou d'un sanglier. [4] Cette interdiction qui ne concerne bien que le grand gibier est entrée en vigueur le 1er juillet 2000. La chasse du petit gibier, du gibier d'eau et de l'autre gibier reste donc bien autorisée. [5] Par exemple, le fait, lors des jours de chasse, d'ouvrir les barrières au niveau des points d'entrée dans un territoire de chasse ceinturé par une clôture ne supprime en rien le caractère clôturé de ce territoire; il en est de même si une portion de clôture est enlevée ou si une clôture électrique est mise hors tension au moment de la chasse. [6] L'arrêt du 4 octobre 2011 de la 4e chambre correctionnelle de la cour d'appel de Liège confirme sans équivoque cette interprétation, précisant en outre que la circulaire ministérielle du 12 octobre 2000 était contraire à la loi. [7] "empêchant le libre parcours de toute espèce de grand gibier" signifie "empêchant le libre parcours de n'importe quelle espèce de grand gibier". [8] Par exemple, une clôture de 1,3 m de type agricole, composée habituellement de 3 à 5 fils superposés et visant à délimiter une propriété privée, notamment pour dissuader les promeneurs d'y pénétrer, n'empêche pas le passage d'un animal grand gibier, quelle que soit l'espèce. Elle ne constitue dès lors pas un obstacle au sens de la définition de l'article 1er, § 1er, 10° de la loi sur la chasse. Par contre, un passage canadien correspond bien à cette notion d'obstacle empêchant le libre parcours du grand gibier. [9] Voire nettement moins : 2 fils électriques, le premier à 20 cm du sol et le second à 50 cm du sol suffisent déjà à entraver le libre parcours du sanglier. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 62/68 PUBLIÉ [10] Il est effectivement important que ce soit à l'initiative de ce gestionnaire car comme l'indique le jugement précité du 4 octobre 2011, la protection des personnes ne justifie pas l'installation d'une clôture le long de n'importe quelle route, à défaut de quoi il n'existerait finalement plus nulle part la possibilité d'assurer un certain libre parcours du grand gibier. [11] C'est-à-dire une absence totale de nourrissage si du sanglier est présent, puisque la chasse au sanglier est ouverte toute l'année. [12] Exemples : * le titulaire de droit de chasse parvient à démontrer que la clôture litigieuse est en réalité installée sur une longue bande de terrain où il n'aurait pas le droit de chasse (mais qu'il chassait évidemment avant son interpellation...). À cet égard, on relèvera que dans le jugement précité du 4 octobre 2011, le juge a estimé que "la pose d'une clôture par un voisin ne peut causer dommage à autrui qui pourrait exiger l'enlèvement, voire réclamer des dommages et intérêts"... * le titulaire de droit de chasse complète la clôture litigieuse pour délimiter une étroite parcelle dans laquelle il prétend tout à coup protéger la régénération forestière. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 63/68 PUBLIÉ 6. Dispositions applicables dans les enclos et parcs de chasse L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 64/68 PUBLIÉ 7. Analyse de la rétroactivité de la loi S'agissant de la rétroactivité de la loi, il convient de rappeler que l e principe de non-rétroactivité n'est en règle générale pas opposable à la loi, qui peut autoriser l'application d'une réglementation nouvelle aux situations en cours, y compris aux situations contractuelles. L'article 2 du code civil, aux termes duquel : « La loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif » peut être écarté par la loi, ainsi que le rappelle l'article L. 221-4 du code des relations entre le public et l'administration. Cette faculté dont jouit le législateur ne peut cependant être mise en oeuvre qu'en considération d'un motif d'intérêt général suffisant et sous réserve de ne pas priver de garanties légales des exigences constitutionnelles (CC, n° 98-404 DC du 18 décembre 1998, cons. 5 ; n° 2001-456 DC du 27 décembre 2001, cons. 21) ou de ne pas porter atteinte aux « situations légalement acquises » (CC, n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005, cons. 45 ; n° 2007-550 DC du 27 février 2007, cons. 4). Le Conseil constitutionnel a fait évoluer sa jurisprudence dans le sens d'une protection accrue de la sécurité juridique, en jugeant désormais que le législateur « ne saurait, sans motif d'intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations » (CC, n° 2013-682 DC du 19 décembre 2013, cons. 14). Le Conseil d'État juge en outre, au regard des stipulations de l'article 6, § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que l'intervention rétroactive du législateur au profit de l'État doit reposer sur d'impérieux motifs d'intérêt général et, au regard des stipulations de l'article 1 er du premier protocole additionnel a cette convention, qu'un juste équilibre doit être ménagé entre l'atteinte aux droits découlant de lois en vigueur et les motifs d'intérêt général susceptibles de la justifier (CE, Ass., 27 mai 2005, Provin, n° 277975 ; Sect., 8 avril 2009, Association Alcaly et autres, n° 290604 ; Plén., 9 mai 2012, Ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique c/société EPI, n° 308996). Au final, la démarche de suppression des 2 alinéas pourrait s'envisager autour du motif impérieux sanitaire (risque de diffusion de peste porcine africaine), ou environnemental (en relation avec la Charte de l'environnement) face à une atteinte à la propriété privée (à distinguer du domicile sacralisé).26 26 Réalisé avec le concours de la direction de la police de l'ONCFS L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 65/68 PUBLIÉ PUBLIÉ 8. État de la contamination Peste porcine africaine dans l'Union européenne (source UE juillet 2019) partie 1 : zone de surveillance partie 2 : maladie limitée à la faune sauvage partie 3 : maladie affectant la faune sauvage et les animaux domestiques partie 4 : cas de la Sardaigne L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 67/68 PUBLIÉ 9. Bibliographie BARBIER, L. (décembre 2010). Étude sur le problème de la circulation des cerfs dans le Loiret compte tenu de la segmentation du paysage, ONCFS. BOIZARD, P ; CINOTTI, B (juin 2019). Rapport sur l'Exercice de la police de l'eau et de la nature dans les services déconcentrés et les opérateurs de l'État, CGEDD. CARRELET, M. (2016). Des engrillagements de Sologne : tentative de défragmentation du paysage écologique, politique et disciplinaire. CRPF et FRC, Centre ­ Val de Loire, (mars 2014). Brochure « L'un ne va pas sans l'autre », Forêt et cervidés. FROISSART, Y. La France clôture ses milieux naturels, peut-on lutter ? dans Espaces naturels, n°37 GOERGEN, P. (1993). Approche ethnologique des enclos d'élevage du grand gibier et des parcs de tir, Ministère de l'environnement. MILLET, L. Thèse : Contribution à l'étude des fonctions sociale et écologique au droit de propriété : enquête sur le caractère sacré de ce droit énoncé dans la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, université Panthéon-Sorbonne, paris I, 2015. MOUCHE, J. (2013). Comment l'engrillagement en Sologne questionne-t'il les valeurs associées à la forêt ? Recherche exploratoire sur l'interaction homme-nature dans le contexte de la propriété privée, Agro Paris Tech. PEREA, A ; CARDOUX, JN (mars 2019). Mission parlementaire relative à la régulation des populations de grand gibier et à la réduction de leurs dégâts. RICHER, S et Al. (2016). Dans un contexte de déprise piscicole, la chasse peut-elle jouer un rôle complémentaire voire alternatif pour la préservation de l'écosystème étang ?, revue faune sauvage, ONCFS. L'engrillagement en Sologne: synthèse des effets et propositions Page 68/68 PUBLIÉ INVALIDE)

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