Loup (le) et les activités d'élevage : comparaison européenne dans le cadre du plan national d'actions 2018/2023
BOISSEAUX, Thierry ;STÉFANINI-MEYRIGNAC, Odile ;DEMOLIS, Christian ;VALLANCE, Michel
Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
;France. Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">La mission s'est intéressée au suivi biologique du loup et aux stratégies de prévention des attaques pratiqués dans quelques pays européens, afin d'améliorer la coexistence de l'espèce et de l'élevage en France - coexistence complexe dans tous les pays visités (Suisse, Italie, Espagne, Allemagne et Pologne), à l'exception de la Pologne comptant peu d'élevage ovin -. Les populations de loups se sont développées ces dernières années, ainsi que les attaques sur les troupeaux (ovins, mais aussi bovins), d'où des tensions de plus en plus vives, non seulement dans les zones avec présence ancienne du loup mais aussi là où il est présent de plus longue date. Les demandes d'une évolution de son statut de protection (au titre de la directive Habitats faune flore et de la convention de Berne) se multiplient. Aucun système de protection n'est infaillible, tant le loup est capable de s'y adapter ou de le contourner. Des dégâts subsisteront, même si les pays visités montrent que leur limitation est tout à fait possible. Trois caractéristiques constatées par la mission se dégagent de la comparaison conduite : la France détient de très loin les records du nombre de dommages (en valeur absolue ou rapportés au nombre de loups), du coût public de la protection, et du montant des indemnisations de dommages. Cette situation surprend nombre des interlocuteurs rencontrés et conduit à s'interroger sur l'efficience du système mis en place au fil des ans par notre pays. L'appui à la protection est beaucoup moins généreux dans les pays visités, lié à l'absence de mobilisation des budgets nécessaires mais aussi au fait que seuls les investissements ou les surcoûts par rapport à une activité hors présence du loup sont pris en compte, sans financement des bergers ou aide-bergers. L'appui à la protection est également plus exigeant dans la mesure où la mise en place effective des mesures décidées est partout contrôlée sur le terrain. L'indemnisation publique des dommages, lorsqu'elle existe, est toujours conditionnée à la mise en place de mesures de protection. Lorsqu'elle n'existe pas, les éleveurs ont la possibilité de recourir de façon volontaire à un système d'assurance privé, parfois en partie subventionné.Tout se passe donc comme si l'implication de l'éleveur et sa responsabilité dans la mise en place d'une protection efficace, étaient déterminantes pour minorer les dommages et leur coût public. Selon les principes d'implication et de responsabilité, il serait intéressant de réfléchir, dans le cadre de la révision en cours de la politique agricole commune, à faire évoluer notre système en instaurant un versement d'aides forfaitaires liées à la présence du loup et incluant une composante « dommages ». Une telle évolution devrait s'accompagner de la mise en place d'une gestion plus volontariste de la population lupine française, tout en suivant de près son bon état de conservation pour lequel la France a pris des engagements européens et internationaux. Plusieurs des pays visités se sont montrés intéressés par « l'exemple français » en matière de tirs létaux que de nombreux interlocuteurs considèrent comme un moyen de prévention complémentaire des dommages. Dans l'optique de faire bénéficier l'Europe de l'expérience acquise par la France, de sécuriser juridiquement son approche, et d'aller vers la mise en place d'une gestion adaptative de l'espèce, géographiquement différenciée, la mission recommande que la France s'implique dans le travail de révision en cours du guide interprétatif de la directive Habitats. La mission recommande qu'une série de mesures soit prise pour limiter le phénomène d'hybridation loup/chien au minimum bien que faible en France, et de génotyper tous les loups entrant dans les nombreux (une soixantaine) parcs à loups français. La communication autour du loup orientée vers la question même de sa coexistence avec les activités humaines, et souvent plus proche du terrain, paraît la plus féconde à la mission. Elle recommande la création d'un « observatoire national de la cohabitation du loup et des activités humaines » confié à un acteur tiers, accepté par l'ensemble des acteurs du sujet. Enfin, la mission encourage l'État à innover : en impliquant davantage les Régions dans les prises de décision concernant le loup afin de mieux les adapter aux contextes locaux ; en réfléchissant à organiser une conférence citoyenne sur la place du loup dans notre pays pour l'aider à éclairer les décisions futures.</div>
Editeur
CGEDD
;CGAAER
Descripteur Urbamet
planification
Descripteur écoplanete
loup
;production animale et élevage
;plan d'action
;prévention des risques
;comparaison internationale
;mesure de protection
;indemnisation
Thème
Ressources - Nuisances
Texte intégral
MINISTÈRE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET SOLIDAIRE
MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE ET DE L'ALIMENTATION
Rapport CGEDD n° 012414-01, CGAAER n° 18097 établi par
P
U
Thierry Boisseaux et Odile Stefanini-Meyrignac (CGEDD) Christian Démolis et Michel Vallance (CGAAER)
B
Mai 2019
LI
Le loup et les activités d'élevage : comparaison européenne dans le cadre du plan national d'actions 2018/2023
É
Les auteurs attestent qu'aucun des éléments de leurs activités passées ou présentes n'a affecté leur impartialité dans la rédaction de ce rapport
Statut de communication
Préparatoire à une décision administrative Non communicable Communicable (données confidentielles occultées) Communicable
PUBLIÉ
Sommaire
Résumé.....................................................................................................................4 Liste des recommandations...................................................................................7 Introduction..............................................................................................................9
Commande....................................................................................................................... 9 Contexte français............................................................................................................. 9 Enjeu.............................................................................................................................. 10 Méthode......................................................................................................................... 10
1. La coexistence entre le loup et l'élevage en Europe apparaît de plus en plus comme un challenge.......................................................................................12
1.1. Des populations de loups globalement en croissance et qui ont tendance à coloniser de nouveaux territoires.....................................................................................12 1.2. Des dégâts croissants, mais partout très inférieurs à ceux constatés en France....14 1.3. Des systèmes d'aide à la protection et d'indemnisation des dégâts moins généreux qu'en France et généralement conditionnés....................................................................15 1.4. Une insatisfaction du monde de l'élevage largement répandue..............................16 1.5. Des interrogations croissantes sur la protection de l'espèce et les tirs létaux qui exacerbent les divergences entre mondes rural et urbain...............................................16
2. Des dispositifs de suivi biologique variables en fonction des moyens et objectifs de chaque pays........................................................................................18
2.1. Une finesse d'estimation variable d'un pays à l'autre..............................................18 2.2. Le bon état de conservation de l'espèce progresse mais devrait être précisé.........22 2.2.1. Le bon état de conservation progresse globalement.....................................22 2.2.2. L'évaluation du bon état de conservation est cependant complexe..............23 2.2.3. Un suivi à l'échelle européenne, encore insuffisant à ce jour, est indispensable pour mieux apprécier la viabilité de l'espèce à cette échelle.............25 2.3. En France, la méthode de suivi biologique doit être différenciée entre front de colonisation et territoire où l'espèce est installée.............................................................25 2.3.1. Le loup peut, potentiellement, s'installer sur l'ensemble du territoire, et il semble peu réaliste d'imaginer empêcher cette évolution........................................25 2.3.2. Utiliser le nombre de meutes fournit une estimation suffisamment précise du nombre de loups installés dans une zone de présence permanente.......................27 2.3.3. Le suivi fin du front de colonisation doit devenir la priorité............................27 2.4. Hybrides loups/chiens, loups captifs, des clarifications indispensables, même si l'enjeu est aujourd'hui mineur sur la coexistence entre le loup et l'élevage.....................28 2.4.1. Méthode génétique de détection des hybrides et de quantification du phénomène.............................................................................................................. 29
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2.4.2. Problèmes posés par la présence d'hybrides dans la nature........................30 2.4.3. La protection de l'espèce impose de prendre en compte les hybrides dans le suivi et la gestion.....................................................................................................31
3. Des mesures de protection et de prévention très variables d'un contexte à l'autre.........................................................................................................................33
3.1. Il n'existe pas de solution technique unique qui garantisse l'absence de dommages, mais une palette de moyens à étudier, moduler et adapter en fonction des contextes....33 3.1.1. La mise en oeuvre du triptyque clôtures/chiens de protection/bergers pour assurer une protection efficace est appréhendée de façon différente dans les pays ................................................................................................................................. 33 3.1.2. La question de la qualité des chiens de protection et de leurs filières, se pose partout où ils sont utilisés.........................................................................................35 3.1.3. L'attention à porter aux clôtures a été soulignée dans l'ensemble des pays visités....................................................................................................................... 37 3.1.4. La taille des troupeaux conditionne largement l'efficacité de leur protection. 37 3.1.5. La formation des éleveurs et bergers au diagnostic de vulnérabilité est essentielle................................................................................................................ 37 3.1.6. Un conseil technique personnalisé, pluridisciplinaire et adapté à chaque situation apporte une plus-value indiscutable..........................................................38 3.1.7. Une protection durablement efficace ne s'avère possible qu'avec l'engagement des éleveurs accompagnés par les organisations professionnelles agricoles.................................................................................................................. 39 3.2. La maîtrise des dommages n'a pas de lien direct avec le montant des aides et des indemnités versées aux éleveurs....................................................................................40 3.2.1. La mise en oeuvre effective des mesures de protection, lorsqu'elle est aidée, doit être contrôlée sur le terrain...............................................................................40 3.2.2. L'indemnisation des dommages est conditionnée à la mise en oeuvre effective de mesures de protection, raisonnées grâce à une analyse de vulnérabilité ................................................................................................................................. 41 3.2.3. En France, une réflexion s'impose quant aux modes de financement des mesures de protection et des indemnisations, dans le contexte de la future politique agricole commune....................................................................................................42 3.2.4. En France, il est nécessaire de se projeter à moyen terme pour ne pas dissuader les éleveurs bovins de se protéger..........................................................44 3.2.5. En France, il est nécessaire de s'interroger sur la définition des zones non protégeables............................................................................................................ 44 3.3. Le recours aux tirs létaux de défense, encore peu utilisés en Europe, peut être d'autant plus simplifié que l'état de conservation de l'espèce progresse.........................45 3.3.1. Les tirs létaux sont peu pratiqués.................................................................45 3.3.2. Il importe de sécuriser juridiquement le recours aux tirs vis-à -vis du droit international............................................................................................................. 46 3.3.3. Dans le cadre juridique actuel, renforcer en France la réactivité, la pertinence et l'efficacité des tirs comme moyen de prévention en synergie avec les mesures de protection passive....................................................................................................47
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3.3.4. Dans le contexte de forte progression démographique de l'espèce, il importe désormais d'évoluer vers une gestion adaptative de l'espèce permettant un meilleur pilotage par les dégâts.............................................................................................49
4. La complexité de la coexistence loup - activités humaines requiert une communication équilibrée, basée sur des informations solides et partagées.51
4.1. En Europe, des exemples intéressants qui, bien qu'insuffisamment aboutis, peuvent inspirer la France............................................................................................................. 51 4.2. En France, il y aurait un intérêt à mettre en place une politique de communication impliquant l'ensemble des acteurs...................................................................................54 4.2.1. Définir un objectif de communication commun entre les principaux protagonistes serait l'idéal........................................................................................54 4.2.2. Le partage d'une base d'informations communes, validées et factuelles est indispensable........................................................................................................... 54 4.2.3. Vers la création d'un « observatoire de la coexistence entre le loup et les activités humaines », autonome et mandaté de façon paritaire ?............................55
Conclusion..............................................................................................................56 Annexes..................................................................................................................57 1. Lettre de mission...............................................................................................58 2. Fiches pays.........................................................................................................60
2.1. Le Piémont italien, protection forte du loup, unités d'élevage de taille restreinte et accent mis sur le gardiennage.........................................................................................60 2.2. En Suisse, une gestion pragmatique fondée sur une priorité donnée à l'élevage ; le tir du loup intégré comme prévention..............................................................................62 2.3. La Castille et Léon, siège de la population lupine la plus nombreuse d'Europe en présence d'un élevage abondant ; la base de la prévention est le « mâtin d'Espagne ». 65 2.4. En Allemagne, entre la Pologne et les pays baltes, le seuil des 500 loups a été franchi avec peu de dégâts. Les ovins sont parqués en terrain le plus souvent dégagé et la clôture électrique est le moyen de protection numéro un............................................69 2.5. En Pologne, une population de loups importante, strictement protégée, mais un élevage ovin très restreint...............................................................................................72
3. Liste des personnes rencontrées....................................................................74 4. Lettre des commissaires européens à l'environnement et à l'agriculture en date du 11 février 2019............................................................................................78 5. Éléments de méthode sur l'évaluation de la viabilité de la population de loups en France.......................................................................................................81 6. Glossaire des sigles et acronymes..................................................................82
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Résumé
Le présent rapport, réalisé à la demande des ministres en charge de l'agriculture et de l'environnement, s'est intéressé au suivi biologique du loup et aux stratégies de prévention des attaques pratiqués dans quelques pays européens, afin d'en tirer des enseignements susceptibles d'améliorer la coexistence de l'espèce et de l'élevage en France. Cette coexistence est complexe dans tous les pays visités (Suisse, Italie, Espagne, Allemagne et Pologne), à l'exception notable de la Pologne qui compte peu d'élevage ovin. Les populations de loups se développent, parfois très fortement, ces dernières années, de même que les attaques sur les troupeaux. Celles-ci ne se limitent plus aux ovins, mais concernent aussi les bovins, de façon significative et croissante en Espagne, de façon plus sporadique mais inquiétante en Italie et en Allemagne. Face à cette évolution, les tensions se font de plus en plus vives, non seulement dans les zones où le loup a fait récemment son retour, mais aussi là où il est présent de plus longue date. Dès lors, les demandes d'une évolution de son statut de protection (au titre de la directive Habitats faune flore et de la convention de Berne) se multiplient. * Les pays visités ont mis en place des systèmes d'aide à la protection des troupeaux dont les modalités financières, le conseil associé et les techniques préconisées, varient largement d'un pays à l'autre, mais aussi au sein même des pays organisés sur un mode largement décentralisé (quatre sur cinq). Ainsi, loin d'un modèle uniforme ou d'une solution technique « miracle », les pays ou régions modulent très différemment chacune des composantes du triptyque bergers/chiens/clôtures dans des approches qui peuvent apparaître parfois contradictoires d'un endroit à l'autre. L'adaptation au contexte local (celui de l'exploitation, de la zone de pâturage, de l'estive) est en tout état de cause prépondérant. Est également essentiel l'engagement de l'éleveur, avec l'appui de structures de conseil, indispensable pour trouver les solutions durablement efficaces. Deux caractéristiques se dégagent en revanche partout : le berger fait indissociablement partie de l'activité d'élevage, ce qui exclut l'octroi d'aides, liées à la présence du loup, pour son financement ; un troupeau doit être limité en taille pour pouvoir être bien suivi et protégé de façon efficace, la limite maximale ne dépassant pas les 800 à 1 000 têtes, et la moyenne étant beaucoup plus faible dans tous les pays visités (300 à 600 têtes). La question de la qualité des chiens de protection, donc l'organisation de leur filière de production, y compris sa traçabilité, est un des points clef, même si on ne compte pas sur eux de la même façon dans tous les pays. C'est une condition et un des gages d'efficacité majeurs des mesures de protection. Il est clair pour tous les interlocuteurs rencontrés qu'aucun système de protection n'est infaillible, tant le loup est capable de s'y adapter ou de le contourner. Il faut donc avoir conscience que des dégâts subsisteront, même si les pays visités montrent que leur limitation est tout à fait possible. * La mission a été frappée par trois caractéristiques qui se dégagent de la comparaison qu'elle a conduite : la France détient de très loin les records du nombre de dommages (en valeur absolue ou rapportés au nombre de loups), du coût public de la protection et du montant des indemnisations de dommages. Cette situation surprend nombre des
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interlocuteurs rencontrés et conduit à s'interroger sur l'efficience du système mis en place au fil des ans par notre pays. L'appui à la protection est beaucoup moins généreux dans les pays visités. Cela tient parfois à l'absence de mobilisation des budgets nécessaires. Mais, cela semble surtout lié au fait que seuls les investissements ou les surcoûts par rapport à une activité hors présence du loup sont pris en compte, d'où l'exclusion du financement des bergers ou aide-bergers. L'appui à la protection est également plus exigeant dans la mesure où la mise en place effective des mesures décidées est partout contrôlée sur le terrain. L'indemnisation publique des dommages, lorsqu'elle existe, est toujours conditionnée à la mise en place de mesures de protection. Lorsqu'elle n'existe pas, les éleveurs ont la possibilité de recourir de façon volontaire à un système d'assurance privé, parfois en partie subventionné. Tout se passe donc comme si l'implication de l'éleveur - qui dispose d'une grande liberté pour choisir ou adapter ses modalités de protection - et sa responsabilité dans la mise en place d'une protection efficace, étaient déterminantes pour minorer, de façon significative les dommages et leur coût public. Selon les mêmes principes d'implication et de responsabilité, il serait intéressant de réfléchir, dans le cadre de la révision en cours de la politique agricole commune, à faire évoluer notre système en instaurant un versement d'aides forfaitaires liées à la présence du loup et incluant une composante « dommages ». * Une telle évolution devrait s'accompagner de la mise en place d'une gestion plus volontariste de la population lupine française, tout en suivant de près son bon état de conservation pour lequel la France a pris des engagements européens et internationaux, les deux n'étant pas incompatibles. Plusieurs des pays visités se sont montrés intéressés par « l'exemple français » en matière de tirs létaux que de nombreux interlocuteurs considèrent comme un moyen de prévention complémentaire des dommages. La France a, depuis plusieurs années, beaucoup plus recours aux tirs que les autres pays visités qui l'utilisent de façon très exceptionnelle pour certains, pas du tout pour d'autres. Cela n'a pas empêché la solide installation du loup dans le quart sud-est du pays, ni la dynamique de son expansion en cours. Le recours à ces tirs devrait pouvoir être simplifié et accru, comme moyen de prévention mais aussi d'éducation du loup, et sur la base du concept de défense utilisé actuellement. Dans l'optique de faire bénéficier l'Europe de l'expérience qu'elle a acquise, de sécuriser juridiquement son approche, et dans celle d'aller à terme vers la mise en place d'une gestion adaptative de l'espèce, géographiquement différenciée par exemple selon l'importance de la présence de l'élevage, la mission recommande que la France s'implique dans le travail de révision en cours du guide interprétatif de la directive Habitats qui conditionne sa souplesse d'interprétation. * Notre pays a mis en place un système de suivi biologique de l'espèce, reconnu mais coûteux, alors que la plupart des pays visités se contentent de données plus rudimentaires, mais suffisantes au vu des objectifs qu'ils poursuivent. Si ce système présente un grand intérêt pendant la phase de colonisation d'une zone donnée, il peut sans aucun doute être simplifié dans les zones de présence plus anciennes. En revanche, il paraît indispensable que l'accent soit mis davantage sur les fronts de colonisation et sur les échanges d'individus avec les sous-populations des pays limitrophes, afin de préciser la dimension génétique du bon état de conservation. Mais aussi, qu'une approche prospective, autant scientifique qu'économique et
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sociologique, soit conduite sur la future expansion du loup en France, en lien avec la gestion adaptative qu'il conviendrait de mettre en place. Même si en France, le phénomène d'hybridation loup/chien est faible et du même ordre de grandeur que dans les régions européennes visitées, la mission recommande qu'une série de mesures soit prise pour limiter le phénomène au minimum. Il s'agit, après avoir déterminé de manière claire sur la base des travaux scientifiques les plus récents la frontière génétique entre loup et hybride, d'appliquer systématiquement la détection des hybrides aux indices en provenance du front de colonisation, d'interdire l'élevage, l'importation, le commerce et la détention des races de chien hybrides de loups, et enfin de génotyper tous les loups entrant dans les nombreux (une soixantaine) parcs à loups français. * La communication autour du loup est abordée de façon variable selon les pays visités avec deux approches : l'une que l'on pourrait décrire comme visant avant tout à convaincre « envers et contre tout » que le loup a sa place dans nos écosystèmes, l'autre plus orientée vers la question même de sa coexistence avec les activités humaines, et souvent plus proche du terrain. Cette deuxième option paraît la plus féconde à la mission. Elle propose la création d'un « groupe communication » issu des comités départementaux du loup et appuyé par un professionnel de la médiation, et recommande la création d'un « observatoire national de la cohabitation du loup et des activités humaines » confié à un acteur tiers, accepté par l'ensemble des acteurs du sujet. * Enfin, la mission encourage l'État à innover : en impliquant davantage les Régions dans les prises de décision concernant le loup afin de mieux les adapter aux contextes locaux ; en réfléchissant à organiser une conférence citoyenne sur la place du loup dans notre pays pour l'aider à éclairer les décisions futures.
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Liste des recommandations
1. Recommandation (MTES, ONCFS) : contribuer à l'harmonisation européenne des méthodes de génotypage par séquençage de l'ADN et engager des travaux scientifiques sur la question de la viabilité génétique, dans l'objectif de mieux évaluer le bon état de conservation de la population lupine...................................................................................25 2. Recommandation (MTES, ONCFS) : abandonner la méthode « capture marquage recapture » dans la zone alpine, en se limitant à l'inventaire des meutes. Concentrer les efforts, notamment d'analyses génétiques, sur le front de colonisation, en faisant preuve de réactivité et en diffusant les résultats en temps réel.............................................................................28 3. Recommandation (MAA, MTES) : engager une démarche auprès de la commission européenne pour que la détermination scientifique de la frontière entre loup et hybride « loup-chien » puisse être transférée dans le guide d'interprétation de la convention de Berne et de la directive Habitats, voire dans les règles d'application de la convention CITES en Europe..............................................................................................................30 4. Recommandation (MAA, MTES) : sur les fronts de colonisation, effectuer systématiquement la recherche d'hybrides à partir de l'analyse des indices génétiques collectés (y compris les morsures sur bétail).....31 5. Recommandation (MAA) : interdire en France l'élevage, l'importation, le commerce et la détention des races hybrides de loup/chien de Sarloos et chien-loup tchécoslovaque, au titre des chiens dangereux et éliminer au titre de la convention de Berne, ceux qui seraient capturés en divagation et mis en fourrière........................................................................32 6. Recommandation (MAA) : accélérer la structuration de la filière chiens de protection par un réel travail de sélection, incluant les tests comportementaux vis-à -vis de l'homme, en lien étroit avec la centrale canine et les professionnels, et engager une réflexion visant, à terme, à ne financer que des chiens sélectionnés et testés.....................................36 7. Recommandation (MAA, MTES) : créer au sein des directions départementales des territoires, un poste de référent loup, en particulier dans les départements de front de colonisation, et oeuvrer ainsi à la création des conditions d'une mobilisation coordonnée des acteurs......39 8. Recommandation (MAA, MTES) : mettre en place sans tarder un contrôle, unique (conditionnalité, ASP) et sur le terrain, des mesures de protection.........................................................................................................41
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9. Recommandation (MAA, MTES) : mandater les experts français engagés dans la négociation visant à définir le nouveau règlement agricole européen, afin que celui-ci permette l'adoption d'un régime d'aide forfaitaire dans les zones de présence permanente du loup.........44 10. Recommandation (MAA, MTES) : fixer un mandat précis aux experts français participant aux travaux de réécriture du guide interprétatif de la directive Habitats faune flore concernant la protection des espèces annoncés par les commissaires européens à l'environnement et à l'agriculture pour 2019, avec pour objectif de permettre, dans un cadre dérogatoire précisé, de sécuriser juridiquement le recours aux différentes modalités de tirs létaux sur le loup...........................................47 11. Recommandation (MAA, MTES) : favoriser la création d'un « observatoire national de la coexistence du loup et des activités humaines », confié à un acteur tiers disposant d'une autonomie suffisante par rapport à l'ensemble des acteurs du sujet et travaillant sur la base d'un mandat d'un « groupe de travail communication » issu des groupes loup départementaux.......................................................................55
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Introduction
Commande
Les ministres en charge de l'agriculture et de l'écologie ont confié au conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) une mission de parangonnage sur la gestion du loup dans divers pays européens. Elle intervient dans le cadre de la mise en oeuvre du plan d'action 2018/2023 sur le loup et les activités d'élevage, dont l'objectif est d'améliorer les conditions de cohabitation de l'espèce avec les activités humaines. Le plan vise ainsi, non seulement une meilleure maîtrise de la prédation, mais aussi l'apaisement des controverses et des oppositions entre acteurs, qui nuisent à l'émergence de solutions partagées. Dans ce contexte, il a été demandé à la mission de se pencher, lors de cette comparaison européenne, sur les mesures de prévention des attaques (plus particulièrement celles relatives à la protection des troupeaux et à l'effarouchement du loup), sur les types de suivi biologique de l'espèce incluant la question du contrôle des loups en captivité, ainsi que celle du suivi et de la gestion du phénomène d'hybridation loup/chien. La mission devait, sur la base de ses constats et analyses, formuler des recommandations sur ces différents volets de la gestion du loup en France et sur la communication autour de tous ces sujets, afin de faciliter la mise en oeuvre du plan 2018/2023. Il est enfin précisé que « la mission pourra formuler des recommandations sur d'autres éléments qu'il lui semblerait utile d'appréhender pour assurer une mise en oeuvre optimale des dispositifs de suivi du loup en France ».
Contexte français
La mission est intervenue dans un contexte de forte expansion numérique de l'espèce en France, laquelle renforce sa présence dans les premières zones colonisées (Alpes principalement, où l'on compte désormais plus de 70 meutes) et s'installe en même temps sur des portions croissantes du territoire national. Cette croissance nette, qui atteint le taux annuel de 20 % sur les 5 dernières années, témoigne de la dynamique soutenue d'une population lupine de plus en plus solidement installée dans notre pays. Celui-ci compte, à la fin de l'été 2018, 85 zones de présence permanente (ZPP) et 72 meutes (contre respectivement 74 et 57 à la fin de l'hiver 2017-2018). 960 communes sont désormais concernées, la moitié connaissant une présence régulière de l'espèce. En France, le loup est une espèce strictement protégée (arrêté du 23 avril 2007). Il est inscrit à l'annexe IV de la directive européenne « Habitats, faune, flore » (HFF) et à ce titre considéré comme « nécessitant une protection stricte ». Il est également inscrit à l'annexe II (« espèce de faune strictement protégée ») de la convention de Berne, dont la France est Partie. Ces régimes de protection n'interdisent pas le tir de loups. Ceux-ci ne peuvent cependant être pratiqués, qu'à titre dérogatoire, si aucune solution « raisonnable » de protection des activités humaines ne peut être mise en place et si ces prélèvements ne remettent pas en cause le bon état de conservation de l'espèce. Le respect des conditions dérogatoires a déjà fait l'objet de recours de la part d'associations environnementalistes.
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En 2016, le ministère en charge de l'écologie a commandé au museum national d'histoire naturelle (MNHN) et à l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) une « expertise scientifique collective sur le devenir de la population de loups en France ». Celle-ci a montré, sans surprise, que la viabilité de l'espèce est liée à son effectif et à son taux de croissance démographique. Les scientifiques ont calculé qu'au-delà d'une mortalité (toutes causes confondues) de 34 %, la population de loups décroîtrait. Elle a pointé que « l'état actuel (effectifs et croissance) de la population en France semble garantir cette viabilité démographique ». D'après le même travail, la viabilité génétique du loup en France nécessiterait en revanche un effectif beaucoup plus large, estimé à 2 500 individus sexuellement mâtures. L'échelle géographique à laquelle les effectifs doivent être appréciés pour prendre en compte cette métapopulation peut être élargie, à condition que les pays partageant une sous-population (Italie, France et Suisse par exemple) s'accordent sur un suivi et une gestion commune. Les dommages causés à l'élevage par le loup sont en progression constante, ainsi que le montant des aides financières accordées aux éleveurs pour protéger leurs troupeaux et le montant des indemnisations pour compenser les dégâts causés par le loup. Le cumul des aides atteint annuellement près de 25 millions d'euros et celui des indemnisations plus de 3,5 millions d'euros pour 12 000 animaux d'élevage tués. Quoi qu'il en soit, la progression du loup en France s'opère dans un contexte d'acceptation sociale très relative dans les zones rurales concernées. Là où le loup arrive, il suscite de grandes appréhensions dans le monde de l'élevage qui sait qu'il sera confronté à des difficultés importantes, du fait de la prédation que le loup exercera inévitablement et de la menace que cela fait peser sur son équilibre économique. Là où il est présent depuis de nombreuses années, et malgré les mesures de protection très largement adoptées désormais, son acceptation demeure très difficile et la prédation reste élevée, avec des secteurs qui concentrent les dégâts. Ainsi, en régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur, la moitié des dégâts et indemnisations concerne 10 % des unités pastorales, les causes de cette concentration nécessitant certainement une expertise plus approfondie.
Enjeu
Le plan d'action sur le loup et les activités d'élevage 2018-2023 résulte d'un long processus de concertation et de négociation. Il recherche un équilibre entre préservation de la biodiversité et protection des élevages. Les ministres en charge de l'écologie et de l'agriculture ont annoncé lors de sa mise en route, que certains aspects de celui-ci seraient amenés à évoluer lorsque le seuil des 500 loups serait atteint, ce qui est déjà le cas. La mission a donc travaillé dans cette perspective d'évolution. Méthode La mission a conduit son travail de comparaison avec une double préoccupation, celle de savoir comment mieux limiter les effets de la prédation grâce à des mesures de protection adaptées, et économes ; celle bien sûr de chercher à s'assurer, par un suivi adéquat et compte tenu des mesures de prévention et de protection adoptées que le loup se trouve dans un bon état de conservation, conformément aux engagements internationaux de la France. Après avoir affiné sa connaissance du contexte français et européen, la mission a décidé de choisir un nombre limité de pays susceptibles d'éclairer ses recommandations, en retenant deux principes, d'une part comparer ce qui est comparable, et donc prendre en compte l'importance des cheptels, des systèmes de
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production, de la structuration du paysage, de l'implantation effective de meutes de loups, etc. ; d'autre part de retenir des pays ayant des positions contrastées sur la gestion de la population de loups. Son choix, nécessairement limité, s'est porté sur la Suisse, l'Italie (visitées en octobre et en novembre 2018) l'Espagne, l'Allemagne et la Pologne (visitées en décembre 2018 et janvier 2019), en veillant à rencontrer principalement les administrations (nationales ou régionales) en charge de la question du loup, les acteurs sur lesquels elles s'appuient pour le suivi et la gestion du loup et des éleveurs confrontés à la présence du prédateur.
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1. La coexistence entre le loup et l'élevage en Europe apparaît de plus en plus comme un challenge
La mission est parfaitement consciente des risques qu'il y aurait à établir des généralités, forcément simplistes, à partir des situations diverses qu'elle a rencontrées lors de ses déplacements. Sur un sujet où il est partout difficile d'obtenir des données chiffrées fiables, et où des affirmations contradictoires ne sont pas rares (et bien souvent peu étayées), tirer des conclusions définitives est périlleux. Quelques lignes de force se dégagent cependant clairement du travail de comparaison objet de cette mission, qu'il a semblé utile de présenter en préambule de ce rapport. Au-delà de ces constats généraux, importants pour bien resituer les enjeux, on trouvera en annexe des fiches détaillées par pays et l'on reviendra sur ces comparaisons au début des parties 2, 3 et 4 sur le suivi de l'espèce, sur les dispositifs de prévention des attaques et sur la communication autour de la gestion du loup. Il est apparu à la mission que la France fait largement référence pour le suivi de sa population de loups. En revanche, beaucoup se montrent incrédules sur l'importance et la croissance des dégâts, ainsi que sur les budgets en prévention comme en compensation. Notre pays intrigue et intéresse également sur l'importance du recours aux tirs létaux. Enfin, dans quatre des cinq pays visités, les régions (« Cantons » en Suisse, « Regioni » en Italie, « Comunidades autonomas » en Espagne et « Länder » en Allemagne) sont directement responsables de la mise en oeuvre des mesures de gestion du loup et de sa coexistence avec les activités humaines. Si ce découpage complique la compilation de données à l'échelle du pays, il permet aussi une gestion plus ancrée dans les territoires et mieux adaptée à leurs caractéristiques respectives.
1.1. Des populations de loups globalement en croissance et qui ont tendance à coloniser de nouveaux territoires
La première chose qui frappe après avoir visité les cinq pays choisis pour ce travail, c'est l'importance de la croissance des populations de loups, comparable à celle que l'on connaît en France, ces dernières années. C'est tout particulièrement le cas dans la partie nord de l'Italie, dans et le long des Alpes italiennes, dans la partie nord-est de l'Allemagne, de la Saxe au Schleswig-Holstein. C'est aussi le cas dans la partie sud et à l'ouest de la communauté de Castille et Léon qui abrite 60 % de la population espagnole. Le scenario est souvent le même : après avoir fortement décliné (Espagne) ou disparu (Allemagne, Alpes italiennes, France) dans la première moitié du vingtième siècle, la tendance s'est inversée à partir des années 1970 sous la double influence, variable selon les cas, de territoires plus accueillants pour le loup (déprise agricole ; augmentation des ongulés sauvages), et de dispositions de protection de l'espèce. Dans une lettre adressée le 11 février 2019 à leurs homologues des États membres (voir annexe 4), les commissaires européens à l'agriculture et à l'environnement soulignent d'ailleurs cette dynamique de recolonisation de plusieurs des populations de loup en Europe. Dans les pays visités par la mission, trois populations de loups européens sont concernées : la population italo-alpine (Alpes italiennes, Suisse et France), la population ibérique (Espagne) et la population germano-polonaise (Allemagne et Pologne). Le phénomène de forte croissance et d'expansion géographique importante constaté en France n'est donc pas un phénomène isolé.
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Quelques graphiques suffisent à illustrer cette proximité de situations : Allemagne :
Illustration 1: Évolution du nombre de meutes et de couples ainsi que du nombre de dommages. Source : Ambassade de France en Allemagne et Centre fédéral de documentation et de conseil sur le loup (DBBW).
Castille et Léon (Espagne) :
Illustration 2: Résultats des recensements décennaux de 1998, 2001 et 2013 - Nombre de meutes. Source (Gouvernement de Castille et Léon)
Illustration 3: Évolution du nombre d'attaques en Castille et Léon. En bleu (total), en orange (zone nord chassable), en vert (zone sud protégée). Source : gouvernement de Castille et Léon
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Italie (Alpes)
Illustration 4: Évolution du nombre de meutes et de couples reproducteurs dans les Alpes italienne. En vert, région Piémont. Source : projet LIFE WolfAlps http:/www.lifewolfalps.eu/download/
D'autres zones connaissent des évolutions moins spectaculaires voire étonnantes. La Suisse ne compte en effet que 3 ou 4 meutes, pour moins d'une cinquantaine de spécimens, mais s'attend à une croissance forte ces prochaines années, compte tenu de l'augmentation des populations en Italie et en France. Le Pays-Basque espagnol quant à lui reste très peu peuplé de loups malgré la proximité immédiate de la population la plus importante d'Espagne, et au sud du pays, en Andalousie, aucune preuve de présence de loup n'a été identifiée depuis plusieurs années, faisant supposer une disparition de l'espèce en Sierra Morena.
1.2. Des dégâts croissants, mais partout très inférieurs à ceux constatés en France
La France est le pays en Europe qui concentre le plus de dommages consécutifs aux attaques de loups. Que ce soit en valeur absolue (environ 12 000 animaux indemnisés) ou en nombre d'animaux domestiques consommés rapportés au nombre de loups présents sur le territoire, notre pays se démarque clairement de ses voisins en la matière. Quelques données, non exhaustives, illustrent cette situation :
(Rq : chiffres 2018 communiqués à la mission et arrondis) Surface approximative (km2) Nombre d'ovins Nombre de loups Nombre d'attaques Nombres d'animaux indemnisés Régions Provence Alpes Côte d'Azur et exRhône Alpes 75 000 Castille et Léon (Espagne) 94 000 Saxe (Allemagne) 18 500 40 000 Suisse
1 000 000 500 3 300 11 100
3 000 000 1 400 2 000 3 000
134 000 150 90 250
400 000 (dont les 2/3 en estive) 50 120 250
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Le nombre d'attaques dépend du nombre de loups présents sur un territoire, mais aussi de l'importance numérique du troupeau ovin, des modes d'élevage pratiqués (extensif ou intensif...), du nombre de proies sauvages disponibles, de la configuration du paysage et des dispositifs de protection mis en oeuvre. La principale proie domestique du loup reste le mouton (et accessoirement les chèvres). Certains pays connaissent cependant des prédations croissantes sur les bovins. C'est tout particulièrement le cas en Castille et Léon, où 60 % des dommages concernent désormais des bovins. L'Allemagne et l'Italie sont, de leur côté, confrontées à l'apparition de quelques meutes qui « se spécialisent » sur les bovins. La question de la compréhension des écarts sera traitée plus complètement au 3.2.2.
1.3. Des systèmes d'aide à la protection et d'indemnisation des dégâts moins généreux qu'en France et généralement conditionnés
La France, à l'image de l'Allemagne et de la Suisse, apparaît comme un pays qui a mis au fil des ans un système d'aide à la protection et d'indemnisation des dégâts parmi les plus complets et les mieux rodés. Il est en outre, en dehors de la Suisse 1, le plus généreux des pays visités.
(Rq : chiffres 2018 communiqués à la mission et arrondis) Coût public de la protection (Millions d') Coût public des indemnisations (Millions d') Population de loups France Castille et León Allemagne Suisse
25
pas d'aide spécialisée 0,9
1,3
3
3,5
0,2
0,1
500
1.600
600
50
En Italie et en Espagne, la mission n'a pas réussi à obtenir des chiffres détaillés et consolidés au niveau national, sur les coûts des mesures de protection ou sur les montants cumulés des indemnisations. Leur évolution dans le temps a, de plus, été soumise à des changements de systèmes, certains d'entre eux ayant été testés quelques années seulement dans le cadre de projets non pérennes (LIFE notamment). Dans ces deux pays, il a été indiqué à la mission que des budgets très faibles sont consacrés par les régions, comme par l'État central, aux aides à la prévention et que l'indemnisation relève principalement du système d'assurance. Beaucoup d'éleveurs renoncent alors à s'assurer, soit par manque d'information, soit parce que le système leur paraît trop contraignant pour un bénéfice insuffisant. La qualité de la protection qu'ils mettent en place est dès lors déterminante s'ils veulent limiter les dégâts. En Allemagne comme en Suisse, l'indemnisation des dommages est conditionnée à la mise en place effective de mesures de protection. Les aides à la protection sont limitées jusqu'ici aux investissements (achat de clôtures, de chiens, etc.), voire aux seuls surcoûts par rapport aux besoins « hors loup » de l'exploitation. Cela est également le cas dans certaines communautés autonomes d'Espagne,
1
Qui, hors Union européenne, subventionne son agriculture de 75 à 80 %.
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Enfin, les aides à l'embauche de bergers ou d'aides bergers ne sont prises en compte nulle part, cette activité étant considérée comme indissociablement liée à l'activité d'élevage.
1.4. Une insatisfaction du monde de l'élevage largement répandue
La vision quelque peu « idyllique » qui voudrait que dans les pays où le loup a toujours été présent, la coexistence avec les activités d'élevage est exempte de conflits, s'avère dans les faits éloignée de la réalité. En Italie et en Espagne, pays d'où le loup n'a pas disparu au XXe siècle, la mission a pu se rendre compte que la situation peut être qualifiée de conflictuelle dans les zones de recolonisation récente, sans pour autant être sereine dans celles dont le loup était resté présent. En Allemagne, la forte augmentation des effectifs de loups, comme celle des dégâts, génère des insatisfactions croissantes des éleveurs. En Suisse, où l'élevage fait, plus que partout ailleurs, partie intégrante de l'identité nationale, la sensibilité dans les cantons les plus concernés est à vif. Seule peut-être parmi les pays visités, la Pologne semble faire exception, mais il est vrai que s'il elle abrite l'une des populations européennes les plus nombreuses de loups (plus de 2 000), elle ne compte en revanche que 260 000 ovins pour une surface totale d'un peu plus de 300 000 km². Partout, la plupart des éleveurs subissent la présence du loup, celle-ci venant compliquer leur tâche, exiger d'eux plus de travail et fragiliser, par les surcoûts qu'elle génère, l'équilibre économique de leur activité. Il est frappant de constater que la mise en place d'aides économiques à la protection des troupeaux et l'indemnisation des dommages, si elles sont bienvenues, ne suffisent pas à apaiser une insatisfaction et une incompréhension qui tendent à croître. Plus largement en Europe, cet état de fait s'est clairement exprimé lors de la conférence interparlementaire («Gestion du loup en Europe et problématique de prédation»), organisée en mai 2018 par les députés européens Michel Dantin et José Bové, en présence du commissaire européen à l'environnement, aux affaires maritimes et à la pêche, M. Karmenu Vella.
1.5. Des interrogations croissantes sur la protection de l'espèce et les tirs létaux qui exacerbent les divergences entre mondes rural et urbain
Le développement désormais très rapide de la population de loups dans plusieurs pays, la croissance des dommages aux troupeaux ainsi que des coûts associés (protection et indemnisation), poussent plusieurs pays, ou régions pour les pays organisés sur un mode fédéral, à souhaiter un assouplissement du statut de protection de l'espèce permettant un recours accru aux tirs létaux, tout en assurant le bon état de conservation de l'espèce. La Suisse a ainsi demandé officiellement en août 2018 que le loup passe de l'annexe II (protection stricte, sauf dérogation) à l'annexe III (espèce protégée, mais pouvant être régulée, si son état de conservation est favorable) de la convention de Berne et menace de quitter cette convention, si cela n'est pas accepté. En Espagne, où le loup est inscrit à l'annexe III de la même convention, des partis ou élus de plusieurs communautés autonomes demandent que le loup, inscrit à l'annexe IV de la directive HFF (protection stricte, sauf dérogation) au nord du fleuve Duero, soit désormais inscrit à son annexe V (prélèvement dans la nature et exploitation sont susceptibles de faire l'objet de mesures de gestion). La même demande émane de plusieurs régions italiennes : Lombardie, Vénétie, provinces de Trente et de Bolzano qui veulent avoir
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en outre la liberté d'organiser les tirs. Le ministre de l'environnement italien a cependant annoncé fin février 2019, que la possibilité de recourir à des tirs sélectifs, un temps envisagée, serait exclue du nouveau plan national italien sur le loup proposé à l'approbation de la conférence État-Régions. En Allemagne, le Land de Basse-Saxe a présenté le 12 octobre 2018 au Bundesrat (représentation des 16 Länder allemands) une proposition de résolution visant à revoir la loi qui a transposé la directive « Habitats, faune, flore » (HFF) dans le droit allemand, afin de pouvoir utiliser toute la souplesse dérogatoire que permet la directive en matière de tir. Il est intéressant de constater que le projet de résolution conseille au gouvernement allemand de s'informer auprès de la France sur la manière dont elle gère ce dossier. Si la question de l'efficacité d'un recours accru aux tirs létaux, très peu utilisés à ce jour, n'est pas tranchée, de nombreux interlocuteurs rencontrés, y compris dans certains milieux de protection de la nature, considèrent qu'il est désormais indispensable de pouvoir le faire plus facilement, pour diminuer la pression de prédation, comme pour diminuer les tensions au sein du monde de l'élevage. Le tir est dès lors considéré comme un des moyens de prévention qu'il peut être utile de mettre en oeuvre, soit pour « signifier » au loup, espèce très adaptable, capable d'apprentissage et de transmission des apprentissages au sein de la meute, qu'il doit « se méfier », soit pour éliminer des loups, voire des meutes, dont le comportement est jugé « déviant ». Sont par exemple concernés les loups et/ou meutes qui commencent à se spécialiser sur les bovins (Espagne ou Italie) ou ceux qui apprennent à franchir les clôtures (Suisse). Ces souhaits d'évolution font souvent l'objet de l'opposition farouche de nombreuses associations de protection de la nature, celles-ci étant généralement considérées comme les porte-paroles d'un monde urbain peu sensible aux problèmes des ruraux. En Espagne et en Italie par exemple, des manifestations de portée nationale et fortement suivies, sont régulièrement organisées à Madrid et à Rome pour la protection du loup. En Castille et Léon, le plan loup a été définitivement annulé par la justice, à la toute fin 2018, à la demande d'une association opposée au tir du loup, ainsi que les quotas de chasse prévus au nord du fleuve Duero (où l'espèce est pourtant classée cynégétique). Enfin, si des loups sont parfois considérés comme « déviants », certains considèrent que les éleveurs qui ne protègent pas leurs troupeaux (ou le font mal), incitent le loup à se spécialiser sur des proies domestiques. Les incompréhensions sont, on le voit, encore loin d'être levées. Conscients de ce contexte, et alors que de nombreux parlementaires européens souhaiteraient que la commission réfléchisse à une évolution du statut de protection du loup, les commissaires européens à l'environnement et à l'agriculture ont jugé utile de préciser dans leur courrier du 11 février 2019 cité plus haut (voir annexe 4), que la remise à jour, courant 2019, du guide interprétatif pour la mise en oeuvre des dispositions relatives à la protection des espèces permettrait d'expliciter la flexibilité de la directive HFF s'agissant du recours aux dérogations. Ils ne se placent donc pas dans la perspective d'une modification de la directive ou du statut de protection de l'espèce, mais conseillent en revanche aux États membres d'utiliser toutes les souplesses de celle-ci.
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2. Des dispositifs de suivi biologique variables en fonction des moyens et objectifs de chaque pays
2.1. Une finesse d'estimation variable d'un pays à l'autre
Les pays objets de la présente comparaison privilégient selon les cas soit l'estimation de l'effectif total de la population de loups présente dans le pays, ce qui nécessite le recours à des analyses génétiques nombreuses, soit l'estimation du nombre de meutes présentes ainsi que leur localisation approximative. Une meute se définit par la présence, sur un secteur donné, de loups des deux sexes sur deux années consécutives, avec l'évidence d'une reproduction (ou tout groupe sédentarisé de trois individus). Elle est repérée et suivie à l'aide d'observations visuelles, de pièges photographiques, le recours à des hurlements provoqués, etc. et par la collecte d'indices biologiques, sans recourir aux analyses génétiques.
Il n'est pas inutile de rappeler qu'en France, le suivi national de la population de loups est assuré par l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), lequel anime (et participe à ) un réseau de 3 500 observateurs formés2 (gardes, chasseurs, membres d'associations de protection de la nature, etc.). Ces derniers collectent, de manière opportuniste ou le long de transects, les indices de présence du loup (observation visuelle, traces, hurlements, prédation, indices biologiques3, etc.), qui sont validés4 et analysés par l'ONCFS. L'analyse génétique de l'ADN 5 mitochondrial extrait des indices biologiques permet de déterminer l'espèce et la lignée6. L'analyse de l'ADN nucléaire permet quant à elle de caractériser l'individu. C'est ce dernier type d'analyse qui est utilisé pour le calcul des effectifs par la méthode dite « CaptureMarquage-Recapture » (CMR). Ces analyses donnent différents niveaux d'information sur :
·
la répartition des loups en France (avec une zone historique : les Alpes, et trois zones de colonisation : Occitanie, Bourgogne Franche-Comté, Grand est) ; leur présence7 occasionnelle ou permanente. Les zones de présence permanente (ZPP) font l'objet d'un suivi hivernal (les traces permettant de connaître la taille du groupe) et d'un suivi estival (les hurlements provoqués confirmant ou infirmant l'existence d'une reproduction). C'est grâce à ces indications que l'on peut dire si on est bien en présence d'une meute, ou simplement d'un groupe/couple non reproducteur ; leur effectif.
·
·
2
3 4 5 6 7
Sur le front de colonisation, seuls les Services départementaux de l'ONCFS assurent ce rôle d'observateur. Actuellement, le réseau d'observateurs ne compte que 3 % d'agriculteurs-éleveurs. Si on veut améliorer l'acceptabilité par cette profession des chiffres avancés, il conviendrait de mieux les impliquer, en utilisant tous les relais possibles dans le monde pastoral. Poils, excréments, urine, sang, tissus (indices utilisés pour l'analyse génétique). En 2017, 1330 fiches ont été validées sur 2700 reçues. Acide désoxyribonucléique. La lignée Italo-alpine se caractérise par la présence de l'haplotype W22. Unité de surface actuelle : la commune (prochainement le standard international, soit un carré de 10km X 10km).
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Ce dernier point fait l'objet de deux approches :
·
l'EMR (effectif minimum retenu), établi sur la base d'indices (observation, traces, hurlement, etc.), qui sert à déterminer l'effectif plancher de la population ; la CMR, reposant sur l'analyse génétique d'échantillons8, qui donne une estimation statistique (avec une erreur relative de plus ou moins 10 % pour environ un millier d'échantillons récoltés annuellement aujourd'hui) de l'effectif de la population. L'application de cette méthode devient toutefois de plus en plus coûteuse au fur et à mesure de l'expansion géographique de l'espèce et de l'accroissement des effectifs de loups.
·
Les résultats sont publiés une fois par an. Actuellement, on recense 85 ZPP et 72 meutes et un effectif « sortie hiver » supérieur à 500 individus.
En Suisse, la fondation KORA travaille de façon très étroite avec les cantons sur le suivi des populations de loup. Le recueil des indices de présence (excréments, poils, urine, salive sur proie, photos provenant de pièges-photos 9, etc.) est assuré par les gardes chasse, de façon exclusivement opportuniste, contrairement à la France qui utilise un mix d'indices récoltés de façon opportuniste ou organisée le long de transects. Des analyses génétiques systématiques sont réalisées à l'université de Lausanne10. Il ne s'agit pas de CMR (l'effectif est trop faible), mais simplement de permettre de déterminer le nombre minimum de loups. Suite à la demande des cantons, le nombre d'analyses réalisées a plus que doublé (passage de 350-400 à 600-1 000 échantillons par an). Alors que la première meute s'est formée en 2012, on ne recense actuellement que 3 ou 4 meutes (environ 50 individus au total). Contrairement à la France, c'est l'ensemble de la Suisse qui est en phase de colonisation par le loup. En Italie, l'effectif de la population italienne de loups a atteint son plus bas niveau (estimé à environ 100 individus) dans les années 1970. C'est à la fin des années 1990, que les véritables premières opérations de dénombrement ont débuté. La plupart du temps, celles-ci sont encadrées par l'Institut Supérieur pour la Protection et Recherche Environnementale (ISPRA), avec l'appui d'universitaires régionaux. Les analyses génétiques réalisées dans ce cadre avaient alors un but essentiellement scientifique (mouvements migratoires, hybridation 11, etc.). Ces études étaient généralement localisées dans des parcs nationaux, ou sur certains sites expérimentaux 12. C'est sur ces bases fragmentaires, que la population lupine a été estimée à 400-500 individus, à la fin des années 1990. À la même époque (1999), les premiers suivis par CMR ont été menés par Francesca Marucco dans le Piémont. Le programme européen LIFE WOLFALPS (2007-2013), a
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12
Coût approximatif : 150 k. Un réseau de 300 pièges-photographiques sert à la fois au suivi du loup et du lynx. Département d'écologie et évolution (Luca FUMAGALLI). Par endroit, on a pu dénombrer quasiment autant de chiens errants que de loups ! Avec un taux d'hybridation qui atteint 30 % dans la province de Grosseto (Braschi et Boitani- 2013 ; Gallo et al2015). Bologne ; Emilia-Romagna ; Salto-Cicolano (Rieti).
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mobilisé 500 observateurs13 en Italie, et donné des résultats plus précis sur l'état de la population dans les Alpes (12 000 km²) que dans les Apennins (80 000 km2). Dans le cadre de la préparation du nouveau « programme national loup », 150 experts ont été consultés pour estimer le nombre de ZPP, et donner des chiffres sur le nombre de loups présents dans les Apennins. En l'absence de suivi méthodologique, cette estimation s'est faite sur la base de cinq paramètres synthétiques 14. Cela a donné inévitablement des résultats avec une grande marge d'incertitude15, et donc conduit le ministère de l'environnement à mandater l'ISPRA pour piloter, hors Piémont, un inventaire national (en cours). En 2016, l'effectif de la population de loups était estimé entre 1 100 et 2 500 individus, dont 293 dans les Alpes (46 meutes et 5 couples). Globalement, la population serait en expansion16, tout particulièrement dans les Alpes17. En Espagne, la structure en charge de la surveillance nationale des populations de loups est le Ministère de la transition écologique, mais depuis 1991, les communautés autonomes18 sont également impliquées dans ce suivi. Malgré tout, un recensement national, coordonné par le ministère, est réalisé tous les 10 ans. Il compile les résultats de chaque communauté autonome. Le recensement 2012/2014 est le premier réalisé de manière coordonnée sur tout le pays 19. Le long de transects prédéfinis (20-40 km par zone de 10 X 10 km), un certain nombre d'observations sont faites deux à trois fois par an (de juin à septembre), avec une collecte associée de tous types d'indices20 (on recourt également aux pièges photographiques). Le but est de calculer des indices kilométriques d'abondance (IKA), et d'identifier des secteurs de forte densité afin de recenser et localiser 21 les meutes. L'organisation de l'ensemble des opérations et le traitement des données sont confiés à une entreprise privée22, le tout supervisé par un comité scientifique régional. Depuis 2014, une base de données (INFOLOBO), gérée par le même prestataire et alimentée en continu, est accessible aux seuls agents habilités. Par ailleurs, des recherches d'indices orientées peuvent être diligentées en fonction de besoins ponctuels (ex : suspicion de présence d'une nouvelle meute...). Quelques analyses génétiques ont commencé à y être incorporées. Enfin, un premier travail de recherche a été récemment conduit (sur un territoire de 4 400 km²) avec l'utilisation de la méthode CMR. L'Espagne compte actuellement
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18 19
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Pour l'essentiel, des professionnels de l'environnement. Surface du territoire analysé , surface moyenne occupée par une meute, nombre moyen de loups par meute, distance entre meutes, pourcentage de loups solitaires. Indice de confiance : 50 %. Le taux de mortalité est estimé globalement à 15-20 %. Le braconnage représenterait 30 % de la mortalité (et l'empoisonnement : 15 %). Dans le Piémont, 33 meutes étaient identifiées en 2017, contre 5 en 2001, soit une augmentation annuelle un peu inférieure à 15 %. Au nombre de 17, elles sont le premier niveau de subdivision territoriale du royaume d'Espagne. En Castille et Léon : mobilisation de 700 personnes (pour près de 100 000 km²), principalement des agents de terrain du gouvernement régional. Y compris des hurlements provoqués. Sur un quadrillage 10 km X 10 km. Entreprise « Consultora de recursos naturales ».
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environ 300 meutes23 (1 500-2 700 individus), dont 191 en Castille y Léon 24. La population serait globalement en légère25 progression (250 meutes en 2007). La partie portugaise de la population ibérique de loups serait stable, voire en légère baisse.
En Allemagne, la structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup est le DBBW (centre fédéral de documentation et de conseil sur le loup), qui rassemble et présente l'ensemble des données régionales (effectifs et dégâts). Un contrat de collaboration le lie à plusieurs instituts (dont LUPUS, Institut Senckenberg, Institut Leibnitz26). La qualité des données collectées par les Länder est très dépendante des moyens (très variables) que chacun d'entre eux consacre à ce sujet. La procédure de collecte des indices (5 400 indices/an, dont 3 200 photos) est standardisée au niveau national27. La collecte n'est pas réservée à des observateurs formés, mais ouverte à tous les citoyens. Ces données servent à établir des cartes de « présence/absence », selon un quadrillage de 10 km X 10 km, qui sont ensuite mises à la disposition du public sur le site « dbb-wolf.de » (voir 4.1.). Des échanges scientifiques sur les méthodes de suivi se font avec la Pologne, la Tchéquie et les pays scandinaves (plutôt qu'avec les pays de l'arc alpin). Aucune CMR n'est effectuée pour l'instant. Seuls quelques suivis génétiques des populations ont été pratiqués, pour des études spécifiques (liens de parenté entre meutes ; hybridations28 loup-chien ; mouvements migratoires ; etc.). Des échanges récents de données génétiques ont eu lieu avec la Pologne, le Danemark, les Pays-Bas, et l'Autriche. L'Allemagne recense aujourd'hui 73 meutes29 et 20 couples. Cette population est en forte progression (+ 30 % par an). Malgré la pression exercée par les élus, aucun chiffre n'est produit sur l'effectif de cette population, dont l'ordre de grandeur numérique est comparable à celui de la population française de loups. Enfin, en Pologne, le suivi des populations de loups est assuré au niveau national par la direction de l'environnement (du ministère du même nom). En l'absence de véritable inventaire, ce service se contente de collecter (sans contrôle...) des données lui provenant de sources variées (instituts, associations, etc.). D'après ces chiffres, la population aurait été stable sur la période 2005-2011, mais en forte progression depuis. En 2007-2008, il a été décidé d'organiser un suivi hivernal dans trois sites distincts, selon la méthode des transects. En 2014, l'expérience a été élargie à sept sites supplémentaires, et en 2017 ont débuté les premières opérations CMR. La faible quantité de neige dans ces régions n'a pas permis une collecte 30 optimale des
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Lignée dite « Ibérique ». 162 meutes (en augmentation) au nord du fleuve Duero (zone chassée) et 29 au sud (stable), en zone protégée ; soit entre 900 et 1 600 loups. Tout le nord du Duero est chassé, et dans les réserves de chasse régionales d'Asturie, il est possible de tirer jusqu'à 50 % de la population estimée. Voir 4.1. pour plus de détails. Critères transfrontaliers SCALP (Lynx) ou WAG (Loup). Deux cas recensés pour toute l'Allemagne, en 2003 et 2017. Appartenant principalement à la population « germano-polonaise ». Par une entreprise privée (20 experts), faute d'une bonne volonté des forestiers (qui s'estiment trop mal payés).
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échantillons31, mais d'ores et déjà ces premières mesures mettent en évidence une forte sur-estimation de la population jusque-là , avec environ 1 000 individus recensés pour 2 500 estimés auparavant ! Rien n'est entrepris pour l'instant au sujet du dénombrement des meutes.
2.2. Le bon état de conservation de l'espèce progresse mais devrait être précisé 2.2.1. Le bon état de conservation progresse globalement
Une étude (août 2018) réalisée pour le compte du parlement européen32 présente la position de l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) au sujet du bon état de conservation du loup en Europe 33. Cette organisation estime que les populations de loups se développent fortement dans les Alpes, en Allemagne, Pologne, Scandinavie, et Espagne. Cette progression serait moins marquée sur la péninsule italienne et en Finlande. En revanche, dans les Balkans et les Carpates, les importantes populations de loups connaîtraient une démographie stable. Ce qui fait dire à l'UICN que l'avenir du loup serait potentiellement menacé en Italie (hors Alpes), Espagne34 et Finlande. Et il serait encore vulnérable dans les Alpes, en Allemagne, Norvège et Suède. La plate-forme WISO35, a publié en mars 2016, un document recommandant une gestion internationale coordonnée du loup dans les Alpes. De l'avis des experts consultés dans ce cadre, le statut de conservation favorable du loup serait assuré avec 125 meutes sur l'ensemble de l'arc alpin, dont 39 en Italie (46 meutes actuellement), 39 en Autriche36 (une vingtaine de loups recensés aujourd'hui), 26 en France (plus de 70 meutes actuellement), et 17 en Suisse (3 meutes seulement en ce moment). Si l'on s'en tient à cette expertise, le loup serait dans une situation favorable dans les Alpes françaises et italiennes, mais son état de conservation serait menacé en Autriche et Suisse. Ce qui est certain, c'est qu'en France le loup étend résolument son aire de répartition, et se développe très rapidement (+ 30 % avant tirs). Il est d'ailleurs probable qu'en arrivant dans des régions plus clémentes, le taux de mortalité des louveteaux dans leur première année, actuellement de 40 %, passe à 20-30 % comme constaté en Saxe. Cela aurait donc pour conséquence un accroissement encore plus fort des effectifs de loups dans les prochaines années.
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Sur 880 échantillons prélevés, seuls 40 % d'entre eux étaient utilisables. « The revival of wolves and other large predators and its impact on farmers and their livelihood in rural regions of Europe » - travail piloté par John Linnel du Norwegian Institute for nature research. Population estimée à 12 000 loups, dont 80 % dans les Alpes, en Espagne, Allemagne, Pologne, et Scandinavie. La mission a noté une progression de la population de loups en Espagne plus faible que celle annoncée par l'UICN (laquelle semble toutefois peu optimiste sur le développement du loup dans ce pays). Plateforme « Grands carnivores, ongulés sauvages et sociétés » de la Convention alpine, regroupant un ensemble de spécialistes « grande faune » des pays de l'arc alpin. Premiers loups observés durant l'été 2016 ; 15 loups recensés deux ans plus tard (Source : FERUS).
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2.2.2. L'évaluation du bon état de conservation est cependant complexe
L'évaluation périodique du bon état de conservation a pour but de renseigner les attendus des articles 1 et 16 de la directive HFF en matière de caractérisation du statut de conservation. L'article 1 précise que : "l'état de conservation" sera considéré comme "favorable" (ECF), lorsque :
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« Les données relatives à la dynamique de la population de l'espèce en question indiquent que cette espèce continue, et est susceptible de continuer à long terme, à constituer un élément viable des habitats naturels auxquels elle appartient ; l'aire de répartition naturelle de l'espèce ne diminue ni ne risque de diminuer dans un avenir prévisible ; il existe et il continuera probablement d'exister un habitat suffisamment étendu pour que ses populations se maintiennent à long terme ».
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Les États Membres doivent chercher à atteindre l'ECF des populations qui sont en totalité ou en partie à l'intérieur des frontières nationales (il n'est pas précisé que l'ECF puisse être évalué à un niveau supra-national). Dans le cas du loup, on peut démontrer facilement que les deux derniers critères sont atteints, au vu des tendances observées ces dernières années (cf. ci-après), et compte-tenu du comportement ubiquiste de l'espèce. Ceci est plus délicat pour la viabilité de l'espèce. Cette dernière notion recouvre deux aspects, correspondant chacun à un seuil d'effectif :
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la viabilité démographique : seuil au-delà duquel tout risque d'extinction est écarté; la viabilité génétique : assurant une diversité génétique suffisamment vaste, pour permettre son adaptation ;
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Il est admis au sein de la communauté scientifique que l'effectif répondant au deuxième critère est environ dix fois plus important que l'effectif assurant la viabilité démographique. Les calculs effectués lors de l'expertise confiée au MNHN et à l'ONCFS en 2016 (mentionnée en introduction de ce rapport), ont conduit à retenir, avec l'hypothèse la plus prudente, un seuil de viabilité démographique à 500 individus (voir annexe 5), seuil atteint fin 2018. La notion de viabilité à très long terme sous-entend également la préservation d'un nombre suffisant d'animaux dits génétiquement efficaces. Cette question est complexe, car la connectivité spatiale de l'espèce détermine les modalités d'immigration et de colonisation en provenance de populations extérieures à la France et notamment la vitesse avec laquelle ces échanges se produisent. Les flux génétiques entre France et Italie existent, mais sont modérés 37 (ils sont par contre faibles entre Apennins et Alpes italiennes). Cette connexion génétique devrait s'enrichir très prochainement d'une nouvelle connexion avec les populations centre européennes et dinariques. Ce contexte génétique est donc a priori plus favorable que celui de la population scandinave, confrontée à une importante dépression de
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2,5 migrants par génération, soit tous les 4-5 ans.
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consanguinité due à trop peu d'individus fondateurs et à un taux d'immigration très réduit38 en provenance de la population russo-finlandaise. À la lecture de la carte ci-dessous, on note que la France sera, tôt ou tard, au carrefour de trois populations : italienne, ibérique, et germano-polonaise, voire balte.
Illustration 5: Distribution géographique du loup en Europe  Extrait de http://ec.europa.eu/environment/nature/conservation/spe cies/carnivores/conservation_status.htm
S'appuyant sur la littérature scientifique internationale, le groupe d'experts a conclu : « Il est impossible d'estimer directement la viabilité démo-génétique39 (à 50-100 ans) d'une population animale à l'échelle d'un territoire aussi grand que la France métropolitaine. Les connaissances générales sur le fonctionnement des populations permettent néanmoins de donner un ordre de grandeur qui correspond à un effectif minimal à atteindre, de l'ordre de 2 500 à 5 000 individus matures sexuellement. ». Toutefois, la question de l'échelle géographique à laquelle ces effectifs doivent être considérés n'est pas complètement résolue. Dans la mesure où les populations sont interconnectées (pour former une méta-population), il semblerait assez logique que cet objectif soit visé à une échelle transfrontalière. La mission propose que la France prenne une initiative pour qu'une telle approche soit privilégiée par la commission européenne. Elle rappelle que cette question est essentielle pour éviter tout contentieux au sujet des tirs de prélèvement (voir 3.3.2.), comme constaté actuellement en Espagne.
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Un migrant toutes les deux générations, soit tous les 8-10 ans. Combinaison de la viabilité démographique et de la viabilité génétique.
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2.2.3. Un suivi à l'échelle européenne, encore insuffisant à ce jour, est indispensable pour mieux apprécier la viabilité de l'espèce à cette échelle
Tous les pays ont une base de données génétiques constituée des identifications individuelles sur échantillon d'ADN. L'ADN mitochondrial, simple à analyser 40, a surtout pour intérêt d'assigner chaque loup à sa lignée maternelle, soit balte, soit dinarique, soit italienne, soit ibérique et donc de connaître les événements de connexion entre sous populations (événements rares pour l'instant et très importants pour l'avenir génétique de la population européenne). Elle peut permettre aussi de caractériser des individus aberrants, vraisemblablement issus de captivité ou de races hybrides domestiques (voir 2.4.). Le polymorphisme génétique de l'ADN nucléaire qui permet, quant à lui de distinguer un à un tous les individus, est étudié sur un sous-ensemble commun de sites de marquage dits "microsatellites" (à haut pouvoir séparateur). Malheureusement, contrairement à l'ADN mitochondrial, il n'est pas rangé dans un "dictionnaire" unique : chaque laboratoire ayant sa propre nomenclature pour désigner un même loup. Or, l'échange de données de suivi individuel (connaissance des migrations transfrontalières de loup) et le renforcement du suivi de la génétique des populations 41 à l'échelle européenne, nécessite que les pays européens passent à d'autres méthodes d'analyse, livrant cette-fois la lecture complète des séquences d'ADN, pour parvenir à une nomenclature européenne unique42. 1. Recommandation (MTES, ONCFS) : contribuer à l'harmonisation européenne des méthodes de génotypage par séquençage de l'ADN et engager des travaux scientifiques sur la question de la viabilité génétique, dans l'objectif de mieux évaluer le bon état de conservation de la population lupine.
2.3. En France, la méthode de suivi biologique doit être différenciée entre front de colonisation et territoire où l'espèce est installée 2.3.1. Le loup peut, potentiellement, s'installer sur l'ensemble du territoire, et il semble peu réaliste d'imaginer empêcher cette évolution
Jusqu'à ces dernières années, le loup s'est limité aux Alpes, où il trouve à la fois tranquillité (faible urbanisation, en dehors des vallées) et ressource alimentaire abondante (ongulés sauvages et ovins43). Pendant longtemps, on a pensé que sa progression à l'ouest et au nord serait freinée, voire bloquée, par des obstacles naturels tels que les fleuves (Rhône) ou des infrastructures importantes comme les autoroutes ou les voies ferrées. Le constat a rapidement été fait que ces obstacles
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Il existe une méthodologie uniforme qui permet notamment pour les loups italiens de distinguer à 100 % les loups et hybrides d'avec les chiens. Y compris concernant d'éventuels "foyers d'hybridation", toujours possibles en phase de colonisation. Une initiative en ce sens avait été proposée par le laboratoire de référence suisse de l'université de Lausanne aux français, aux italiens et aux slovènes. L'ONCFS a rencontré alors des difficultés avec le LECA de Grenoble (CNRS), partisan de ce type d'analyse, mais qui n'était plus titulaire du marché public d'analyse génétique des échantillons. Les Alpes comptent 1,5 millions d'ovins, dont la moitié dans les Alpes françaises !
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n'étaient pas infranchissables pour les loups « éclaireurs », et que rien ne semble maintenant empêcher la progression de ce grand carnivore sur l'ensemble du territoire, d'ici quelques années, le long de corridors forestiers disposant d'une abondante population d'ongulés sauvages. Il existe différents modèles de distribution géographique du loup. La tentation de projeter leurs résultats dans le futur est donc grande, mais cette proposition dépend également du degré d'incertitude attachée aux estimations, incertitude qui se propage en s'amplifiant à chaque itération de projection. Ces modèles ne sont donc pas d'une grande fiabilité pour prédire la dispersion d'une population au-delà de quelques années. Par ailleurs, il est tout aussi certain que, si dans un premier temps, le loup privilégie les secteurs les plus reculés pour être tranquille, tôt ou tard, il se rapprochera des hameaux, des villages, puis des villes (voir l'abattage d'un loup à Bormes-lesMimosas, le 14 février 2019). À ce stade, la question de la prise en compte du risque pour l'homme, même s'il semble très limité, se posera inévitablement. Cette question est d'ailleurs déjà prise en compte, sans tabou, dans certains pays plus densément peuplés comme l'Allemagne44 ou la Suisse. Le suivi de l'expansion des populations de loups en Europe, couplé à des suivis plus précis par radio-tracking, ont bien démontré que les barrières naturelles (chaînes montagneuses, grands fleuve, etc.) ou artificielles (zones très urbanisées, infrastructures routières ou ferroviaire, etc.), ne constituaient pas des barrières infranchissables pour les loups. Tout au plus, ces éléments freinent-ils son expansion, mais en aucun cas ne la stoppent. Si à ces handicaps s'ajoute une forte pression de tir (légal ou illégal) et/ou d'empoisonnement (etc.), comme c'est probablement le cas dans diverses zones en Europe, cela peut conduire à retarder fortement la formation de meutes. Sauf à recourir à l'empoisonnement (qui a causé la disparition du loup en France), il est donc vain de croire qu'il est possible d'empêcher le loup de coloniser de nouveaux territoires. De même que, sans prélèvement par tir, le loup est toujours susceptible de se développer encore davantage sur les territoires où il est déjà bien installé, comme les Alpes. Dans la cadre du projet LIFE « WOLFALPS » (déjà mentionné), une étude a été menée en septembre 2017 pour tenter de prédire, en fonction de la connaissance des habitats favorables, et à l'aide des modèles de dynamique des populations, le niveau de saturation théorique sur les Alpes. Selon ce calcul, les Alpes françaises seraient susceptibles d'accueillir entre 150 et 167 meutes, soit le double du nombre actuel. Même si l'on peut toujours mettre en doute les modèles utilisés (ceux utilisés en Allemagne sur l'extension du loup depuis la Pologne, se sont révélés faux dans les faits45), il semblerait que l'accroissement de la population de loups dans les Alpes soit donc loin d'être terminé. D'ailleurs l'ONCFS fait régulièrement le même constat lorsque de nouvelles meutes viennent s'intercaler entre plusieurs meutes qui paraissent pourtant déjà bien assez proches l'une de l'autre. Pour autant, il ne semble pas à la mission que ces constats scientifiques doivent nécessairement entraîner l'adoption comme but ultime de la gestion de ce grand prédateur, ni une densification de la présence déjà très importante de l'espèce dans les Alpes et la Provence, où les enjeux du pastoralisme sont tout aussi cruciaux, ni une colonisation uniforme de tout le territoire national. Ces constats doivent permettre simplement de se fixer des objectifs réalistes à moyen terme et de déterminer les bonnes mesures de gestion pour y parvenir.
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Un cas de morsure au bras a été signalé à la mission (personne promenant son chien). Communication orale à la mission par les autorités allemandes.
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2.3.2. Utiliser le nombre de meutes fournit une estimation suffisamment précise du nombre de loups installés dans une zone de présence permanente
Aucun des pays visités par la mission ne met autant de moyens et de technique que la France pour suivre la démographie du loup. La méthode CMR est utilisée par peu de pays (voir 2.1.), car elle est à la fois coûteuse et exigeante sur le plan scientifique. Par cette méthode, il faut bien réaliser que l'on connaît le pedigree génétique du tiers des loups français, ce qui peut apparaître comme un « luxe ». Si cette méthode a eu sa raison d'être pour connaître précisément la façon dont se déroulait la colonisation des Alpes, elle a dorénavant moins de sens dans cette zone que l'on peut qualifier d' « historique ». Un certain nombre de pays visités par la mission (Espagne, Allemagne, Suisse) se limitent au comptage des meutes pour suivre la dynamique des populations de loups. Du nombre de meutes, on peut déduire si besoin, l'effectif, sur la base d'un coefficient de conversion de 846 (incluant les individus disperseurs, en dehors des meutes ). Il est largement considéré dans les pays visités que le nombre de meutes est également assez bien corrélé avec l'évolution de l'aire de présence permanente de l'espèce. Mais faire référence à l'effectif n'a pas forcément de sens, l'unité de compte d'une population de loups pouvant tout à fait être exclusivement la meute. Cela conduirait à abandonner le pilotage du plafond de tirs par la seule référence à un effectif national estimé par la méthode CMR, en tenant également compte de la répartition de la population sur le territoire et de son bon état de conservation (voir 3.3.4.).
2.3.3. Le suivi fin du front de colonisation doit devenir la priorité
Quel que soit le dispositif de suivi, il y a deux finalités importantes pour tous les pays, d'une part le nombre de meutes installées et leur répartition géographique qui permet de suivre l'évolution des effectifs nationaux, d'autre part l'avancée du front de colonisation. Sur le front de colonisation, le premier indice de présence du loup est généralement la manifestation de dommages aux animaux domestiques 47 ou à la faune sauvage. En conséquence, ces indices doivent être exploités et contrôlés avec davantage de diligence que dans la zone de présence habituelle. Pratiqué de manière exhaustive, le typage génétique sur écouvillon de la morsure principale (taux de succès 50%, d'après tous les laboratoires interrogés) peut apporter de nombreux renseignements : confirmer qu'il s'agit d'un loup, d'un individu d'une autre sous-population (étrangère ou captive), d'un hybride ou d'un chien, identifier les sexes, dénombrer les individus distincts présents sur une nouvelle zone. La datation permet de reconstituer des trajectoires de colonisation. Cette méthode peut permettre d'approcher l'estimation du nombre de loups "solitaires" (hors meutes) et de prendre sans retard les décisions de gestion qui s'imposent particulièrement en matière de prévention et de limitation des dommages. Les individus hybrides tout comme les individus ou groupes qui apparaîtraient spécialisés dans la prédation de faune domestique devraient ainsi être empêchés au plus vite de créer une meute sur un front de colonisation48.
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Source ONCFS ; intervalle de confiance à 95 % CI = [6.53-10.14]. Selon la documentation rapportée par la mission, les morsures de loup sur bétail domestique auraient des aspects bien plus variés que la "prise à la gorge" retenue de manière exclusive par les services chargés des constats.
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Il importe également que les résultats provenant de méthodes d'analyse partagées soient diffusés rapidement, faute de quoi, certains acteurs continueront d'entretenir la confusion avec des informations douteuses et non validées49. Le suivi du front de colonisation revêt une priorité supérieure au suivi des effectifs sur l'ensemble de la population. Il doit concentrer les moyens nécessaires, notamment en matière d'analyse ADN, sur les morsures et autres indices (poils, crottes). Les résultats doivent parvenir avec un délai court (inférieur à deux mois) et être diffusés rapidement et largement (voir 4.2.2.), tout retard dans la diffusion de l'information étant contreproductif. 2. Recommandation (MTES, ONCFS) : abandonner la méthode « capture marquage recapture » dans la zone alpine, en se limitant à l'inventaire des meutes. Concentrer les efforts, notamment d'analyses génétiques, sur le front de colonisation, en faisant preuve de réactivité et en diffusant les résultats en temps réel.
2.4. Hybrides loups/chiens, loups captifs, des clarifications indispensables, même si l'enjeu est aujourd'hui mineur sur la coexistence entre le loup et l'élevage
Le loup et le chien forment la même espèce (Canis lupus), et sont interféconds. Leur patrimoine génétique a seulement divergé de manière progressive avec la domestication du chien, quand les éleveurs du néolithique ont commencé à éloigner les loups de leurs propres troupeaux, puis de manière plus importante avec la création des multiples races d'élevage à partir du XVIe siècle. De ce fait, les dernières glaciations ont joué un rôle important il y a 10 000 ans, en isolant pour ce qui concerne l'Europe des petites populations de loups dans les différentes péninsules qui leur ont servi de refuge climatique au Sud : Espagne, Italie, Grèce. Il est probable que les populations abondantes du nord de l'Europe soient originaires de refuges glaciaires situés en Asie centrale. Cette histoire récente permet de distinguer des lignées géographiques, reconnaissables par l'ADN mitochondrial (cytotype), transmis maternellement, sans recombinaisons. Suite à sa quasi-extinction au milieu du XX e siècle, le loup italien présente un cytotype unique jamais trouvé chez le chien. Cela permet de le distinguer de manière absolue dans les Alpes occidentales d'éventuels hybrides accidentels ou provoqués dans le sens mâle loup X femelle chien ainsi que de tous les descendants de croisements de loin en loin dans ce sens. Des chiens mâles peuvent se reproduire plus facilement avec des louves. Les hybrides correspondants présentent alors le même cytotype que le loup. Ils peuvent cependant en être différenciés par leur ADN nucléaire qui, du fait des nombreuses sélections récurrentes effectuées chez le chien pour obtenir quantité de races, présente des combinaisons très différentes sur des sites alléliques particuliers (microsatellites). Avec des millions de chiens pour quelques milliers de loups, le risque d'hybridation entre les deux sous-espèces (introgression de gènes sélectionnés du chien, dans le patrimoine « sauvage » du loup) est réel.
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Voir par exemple le cas relaté par le numéro 26 d'Infolo up : « un seul loup très mobile, exploitant
un très vaste territoire à cheval sur 3 départements (Meurthe et Moselle, Meuse, Vosges) et générant un volume de dommages 4 fois plus important que la moyenne constatée sur les autres zones de présence permanente de l'espèce (près de 500 victimes en 2018) ».
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La connaissance des méthodes et de la précision à attendre doit conduire à écarter les résultats de certains laboratoires.
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2.4.1. Méthode génétique de détection des hybrides et de quantification du phénomène
Il existe des méthodes génétiques fiables pour identifier ces hybrides loup/chien par des algorithmes de calcul de la probabilité d'affectation à l'espèce loup, basés sur un panel de marqueurs variables du génotype nucléaire, présents chez le chien comme chez le loup, mais avec des fréquences très éloignées comme, par exemple 0,05 chez le chien50, contre 0,4551 chez le loup, ou encore 0,27 chez le chien et 0,02 chez le loup. La méthode va permettre de sortir en 2019 deux publications scientifiques indépendantes sur ce sujet, sur la totalité des échantillons suisses d'une part, et sur la totalité des échantillons français d'autre part, traités par les responsables des laboratoires de référence en charge de ces analyses. Le laboratoire allemand FORGEN qui a travaillé sur des échantillons français fournis par des éleveurs et sur des échantillons du parc à loups du Gévaudan, ne trouve que des individus qu'il appelle "hybrides", mais refuse de communiquer sa méthode d'analyse et ses résultats sur le Gévaudan. Ce laboratoire peut avoir raison sur le fait qu'il n'y a pas plus de loups "purs" que de chiens "purs", puisque le chien (Canis lupus familiaris) provient génétiquement du loup (Canis lupus) et donc, la population de loup est constituée à 100 % d'hybrides, en quelque sorte. Mais il n'est pas crédible, car il se refuse à donner, pour un échantillon soumis à l'aveugle, une probabilité individuelle d'appartenance à l'une ou l'autre des deux sous-espèces, et qui soit vraisemblable, en comparaison des probabilités données par le laboratoire français ou le laboratoire suisse de référence. Quant au « taux populationnel d'hybridation », affiché par FORGEN à 100 %, il n'a pas de sens. En effet, la méthode statistique utilisée, tant dans la publication française que dans la publication suisse, permet de différencier clairement les individus hybrides à 25 % (1 backcross loup) et 50 % (F1, F252), en les séparant nettement, c'est-à -dire sans recouvrement de probabilité avec les "purs" 53. Dans ces conditions, il suffit donc d'appeler « taux populationnel d'hybridation » la proportion des individus d'un échantillon représentatif ayant une probabilité54 de moins de 90 % d'être affectés à l'espèce loup. Sur ces bases, la population lupine, de retour dans les Alpes depuis les années 1990, présente un taux actuel d'hybridation très faible, compris entre 2 % et 8 %55. La mission estime que les dernières publications scientifiques permettent au ministère de l'agriculture et de l'alimentation (MAA) et au ministère de la transition écologique et solidaire (MTES) de confirmer la validité d'une méthode de détermination génétique des hybrides et d'oeuvrer à une définition européenne du taux d'hybridation populationnel basée sur un seuil de probabilité réaliste.
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Fréquence dans la population de chiens de toutes races(ADN othèque nationale). Fréquence dans la population italienne de loup (ADN de tissus prélevés sur spécimen de loup avéré) 1ère et 2e générations. Ayant plus de 90 % de probabilité d'appartenance au loup. Calculée sur un jeu de marqueurs standards idoine. L'étude suisse a analysé 115 individus et détecté 2 hybrides "nets" et 5 hybrides à faible probabilité. L'étude française (non encore publiée) a analysé 130 individus parmi lesquels 2 hybrides "nets" et 8 hybrides possibles, que l'on peut confondre, génétiquement, avec des loups véritables.
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3. Recommandation (MAA, MTES) : engager une démarche auprès de la commission européenne pour que la détermination scientifique de la frontière entre loup et hybride « loup-chien » puisse être transférée dans le guide d'interprétation de la convention de Berne et de la directive Habitats, voire dans les règles d'application de la convention CITES en Europe. Il s'agit là d'un préalable important pour pouvoir interdire la circulation et le commerce d'hybrides de loups (voir 2.4.3.).
2.4.2. Problèmes posés par la présence d'hybrides dans la nature
La présence d'hybrides de loup en nature ou en détention comme "chiens" domestiques pose une série de problèmes pour la protection, la gestion et le suivi du loup :
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confusion56 dans les indices de présence, visuels, génétiques ; responsabilité de prédation, voire d'attaques sur l'homme, anomalies du front de colonisation (cas du loup dans le Béarn à l'été 2018) ; surnombre dû à des lâchers intempestifs ou des évasions57 ; introgression génétique potentiellement dommageable, notamment sur le plan sanitaire, mais aussi du fait du comportement envers l'homme et de la perte du contrôle social de la reproduction (loups alpha). La première cause est l'élevage de certaines races hybrides comme chiens de compagnie (chien de Sarloos, chien-loup tchécoslovaque) dont les maîtres se débarrassent ou qui faussent compagnie à leurs détenteurs58. Le livre officiel des origines françaises (LOOF) qui recense les reproducteurs dont les propriétaires ont fait confirmer le pedigree indique, pour la seule année 2016, 489 inscriptions de chien-loup tchécoslovaque et 153 de chien-loups de Sarloos potentiellement reproducteurs. Sur les 5 dernières années, le registre national d'identification des animaux domestiques (ICAD) dénombre 600 à 900 naissances de ces 2 races par année civile, pucés, donc placés chez des propriétaires en France. Si on prête à ces chiens une espérance de vie moyenne de 7 ans, il y aurait donc plus de 5 000 "chiens hybrides de loup" détenus comme animal domestique, et prêtant à confusion avec l'espèce protégée.
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Diverses causes peuvent expliquer la présence d'hybridation loup-chien :
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Le chien de Sarloos a pour origine un croisement chien X louve et montre donc un cytotype de loup (héritage maternel). On estime que 5 000 croisements chiens X loups sont aux mains de détenteurs privés et que près de 600 loups captifs de races exotiques - Sibérie, Canada, Mongolie, Arctique  sont dans de nombreux enclos ou "parcs à loups" ayant chaque année une reproduction ; 2 loups à cytotype "balte" ont été repérés en 2017 à proximité d'un parc à loups dont la clôture avait été intentionnellement cisaillée un an auparavant. Faute de fichier génétique il n'a pas été possible de faire taire la rumeur d'une évasion. Ils peuvent aussi être impliqués dans des dégâts aux animaux d'élevage et étendre le phénomène d'hybridation avec des louves erratiques du front de colonisation.
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Année
2014 2015 2016 2017 2018
Chien-loup tchécoslovaque
711 693 577 464 460
Chien-loup de Sarloos
160 183 197 201 122
Nombre d'immatriculations de chiens hybrides de loup en France recensées par l'ICAD
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La deuxième cause de présence d'hybrides loup-chien est l'hybridation dans la nature. Jusqu'ici tous les hybrides loup/chien identifiés à l'intérieur du domaine de meutes de loups (majoritairement post mortem, ou sur de bonnes photos) 59 présentent le cytotype du loup italien et sont donc nécessairement issus de croisement (mâle chien ou hybride X femelle loup). Ce type de croisement furtif échappe au contrôle social de la meute, car il peut passer inaperçu si la louve alpha est impliquée. Il peut donner naissance à une nouvelle meute (cas observé en Italie centrale) ou avoir lieu au sein d'une meute existante. Tous les degrés d'hybridation peuvent donc être rencontrés par la suite, le taux d'hybridation individuel étant décroissant au fur et à mesure que le nombre d'individus augmente avec les générations qui nous séparent de l'événement fondateur (phénomène de dilution). Il peut cependant y avoir maintien d'un taux individuel d'hybridation élevé lorsque de tels événements se produisent sur un front de colonisation, ou si la probabilité de rencontre (mâle chien/louve alpha) est importante, donnant lieu à des hybridations récurrentes (comme en Italie centrale, où les meutes de chiens errants sont nombreuses et se rencontrent sur des décharges sauvages).
4. Recommandation (MAA, MTES) : sur les fronts de colonisation, effectuer systématiquement la recherche d'hybrides à partir de l'analyse des indices génétiques collectés (y compris les morsures sur bétail). La mission retient des entretiens qu'elle a conduits, que les laboratoires sont à même de donner une réponse dans un délai d'environ quatre semaines et qu'il faut s'attacher de ne pas allonger ce délai.
2.4.3. La protection de l'espèce impose de prendre en compte les hybrides dans le suivi et la gestion.
Plusieurs pays visités s'inquiètent de la menace de l'hybridation involontaire et non souhaitée des populations de loups par le chien. Ce phénomène est particulièrement redouté dans les pays où d'abondants effectifs de chiens errants vivent en meute à l'état sauvage (Italie centrale, Grèce, Bulgarie). En Espagne, la population relictuelle de loups d'Andalousie s'est avérée entièrement hybridée dans les dernières années précédant sa disparition (2013). Après avoir interrogé le groupe d'experts LCIE (Large Carnivore Initiative for Europe) le Comité permanent de la Convention de Berne a émis, fin 2014, la recommandation 173 sur les croisements entre loups gris et chiens domestiques indiquant que : 1) des mesures doivent être prises pour prévenir et limiter les croisements entre les loups et les chiens et le cas échéant des dispositions efficaces pour réduire
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Selon une étude récente du Dr. Fumagalli de l'université de Lausanne.
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les chiens errants et divagants, et interdire la détention d'hybrides de ces deux sous-espèces comme animaux de compagnie ; 2) le suivi et le repérage des loups hybrides doit être mené afin de veiller à leur élimination ; 3) la destruction d'un individu hybride (par exemple sur faune captive, après piégeage pour un programme scientifique, ou par tir sur un front de colonisation) doit être réservée à l'administration ou à ses organes délégués, et doit être effectuée après qu'un niveau élevé d'hybridation ait été confirmé par son analyse génétique ; 4) les méthodes létales de retrait des animaux hybrides ne doivent pas entraîner de possibilité de confusion au détriment du loup (principe de précaution). Cependant, la recommandation ne dit pas ce qui définit génétiquement la frontière entre les hybrides qu'il faut éliminer et, les loups "à peu près purs" qu'il faut conserver. Devant cette menace de l'hybridation, la Suisse et l'Italie envisagent de suivre la recommandation 173, en interdisant l'introduction, l'élevage et le commerce, des races de chien-loup tchécoslovaque et de chien de Sarloos. Et en sus, pour l'Italie, en donnant aux communes les moyens de mettre en oeuvre la législation sur la divagation des chiens, capture, stérilisation, sanctions et élimination des meutes de chiens errants. En Suisse, l'ordonnance sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages, a placé tous les hybrides d'animaux sauvages et domestiques (assimilés à des animaux sauvages depuis 2008) sur la liste des espèces animales non indigènes dont l'importation et la détention sont soumises à autorisation. 5. Recommandation (MAA) : interdire en France l'élevage, l'importation, le commerce et la détention des races hybrides de loup/chien de Sarloos et chien-loup tchécoslovaque, au titre des chiens dangereux et éliminer au titre de la convention de Berne, ceux qui seraient capturés en divagation et mis en fourrière. Enfin, la France est le seul des pays visités par la mission a contenir un grand nombre de "parcs à loups" ou établissements privés détenant des loups captifs. Un inventaire en cours, à la demande du Préfet coordonnateur du Plan Loup en a déjà recensé 50, hébergeant près de 600 spécimens. La mission rappelle l'importance que cet inventaire, ainsi que le génotypage de tous les loups captifs présents dans ces centres, soit mené rapidement à terme. Ce génotypage devrait à l'avenir être généralisé à tous les nouveaux loups de ces parcs. Des échantillons génétiques surnuméraires doivent être stockés par l'administration pour des analyses ultérieures (en cas de changement de méthodes génétiques). Les surplus de naissance des parcs à loup, s'ils ne peuvent pas être légalement confiés à un autre détenteur (en suivant les procédures CITES) peuvent en revanche être euthanasiés par un vétérinaire dressant constat. La mission conseille que cette règle soit rappelée aux directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) en charge des contrôles de ces établissements.
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3. Des mesures de protection et de prévention très variables d'un contexte à l'autre
Les pays visités n'ont rapporté à la mission aucun élément concernant les mesures d'effarouchement. Cela ne signifie pas qu'aucune expérience en la matière n'existe. Mais l'effarouchement n'y est, en tout état de cause, pas considéré comme un moyen efficace de prévention avec une espèce aussi adaptable et apte à déjouer rapidement ce type de dispositifs. Les spécialistes italiens rencontrés, pourtant très protecteurs, les considèrent quant à eux inefficaces.
3.1. Il n'existe pas de solution technique unique qui garantisse l'absence de dommages, mais une palette de moyens à étudier, moduler et adapter en fonction des contextes 3.1.1. La mise en oeuvre du triptyque clôtures/chiens de protection/bergers pour assurer une protection efficace est appréhendée de façon différente dans les pays
Tous les pays reconnaissent que les mesures de protection sont nécessaires, mais n'assureront jamais une protection à 100 % des troupeaux. Le triptyque clôtures/chiens de protection/ bergers est connu de l'ensemble des pays, mais l'ordre d'importance accordée à chacun d'eux, le soutien financier, comme le soutien technique à la conception de la mise en oeuvre effective, sont très variables d'un pays à l'autre. La mission a également noté qu'aucun des pays visités ne fait du gardiennage une mesure de protection fondamentale et soutenue financièrement.
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En Suisse, les chiens de protection et les clôtures électrifiées sont considérés comme des moyens efficaces dont la mise en place est aidée financièrement (90 % du budget global de protection est consacré aux chiens de protectionachat et entretien- et 10 % aux clôtures, dont seul le surcoût éventuel lié au loup est pris en charge). La conception de la mise en oeuvre est aidée par le technicien pastoral du canton, si celle-ci s'avère difficile, puis contrôlée. Depuis peu, l'association AGRIDEA, en lien étroit avec les techniciens pastoraux des cantons, fait un suivi des clôtures qui sont financées, incluant conseil technique approfondi (puissance de l'électrification, mise à la terre) et contrôle. Cela enrichit la connaissance du terrain et permet la réalisation de documents de vulgarisation60 très précis à destination des éleveurs. Lorsque le troupeau est regroupé pour la nuit, il est sous la garde des chiens, sans que le berger dorme forcément à proximité. En Italie-région Piémont, les trois volets du triptyque sont présents. Seule la détention des chiens de protection et la mise en place de clôtures électrifiées de 1,2 mètres de haut sont financées dans le cadre du PDR (programme de développement rural). La conception de la mise en oeuvre a été accompagnée par les vétérinaires privés jusqu'en 2012, mais cette expérience, considérée
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AGRIDEA se dédie au développement de l'agriculture et de l'espace rural. Sur le loup, il est conventionné avec le gouvernement fédéral. https://www.agridea.ch/fr/publications/publications/developpement-rural/protection-destroupeaux/clotures-de-protection-contre-le-loup/
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comme très positive par les acteurs rencontrés, s'est arrêtée faute de moyens. La protection des troupeaux bovins est considérée comme plus compliquée, mais non impossible. Un travail est en cours sur l'adaptation des mesures de protection aux troupeaux bovins, axé sur le regroupement des animaux pendant la pâture.
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En Espagne (province de Castille et Léon), un « plan régional loup » prévoit l'élaboration d'un catalogue de bonnes pratiques agricoles en zone à loups (techniques de clôtures pour protéger les moutons, les génisses, les vaches et les veaux) et des aides qui favorisent leur adoption en fonction des disponibilités budgétaires et de ce qui est envisagé dans le programme communautaire FEADER61. Les missionnés ont compris qu'à ce jour, faute de disponibilités budgétaires, la mise en oeuvre des moyens de protection n'est accompagnée ni techniquement, ni financièrement. Les éleveurs rencontrés se protègent cependant. Dans les territoires où le loup n'a jamais disparu (Nord du Duero), le gardiennage de jour est une pratique qui n'a jamais été abandonnée. Le chien est le moyen considéré comme le plus efficace et particulièrement la présence en nombre de mâtins d'Espagne, sans pour autant que cette pratique soit adoptée par tous les éleveurs62. La situation est différente dans les territoires où le loup avait disparu et revient récemment (sud du Duero). Le gardiennage ne se pratique plus et les éleveurs, surtout de bovins, ont souvent un statut de double-actifs se rendant très peu sur leurs exploitations, n'ayant pas ou peu recours aux chiens de protection (impossibilité de les nourrir tous les jours). C'est particulièrement pour ces zones que sont expérimentées des systèmes de clôtures permettant de protéger les veaux, tout en les laissant accessibles à leur mère (voir fiche Espagne en annexe 2).
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En Allemagne, le financement des bergers ne fait pas partie des mesures de protection des troupeaux (ces derniers étant nuit et jour dans des parcs clôturés). Les clôtures électrifiées sont donc la base de la protection et leur mise en place est aidée financièrement. La Saxe finance, depuis 2019, à 100 % l'investissement dans les clôtures après avoir longtemps soutenu à hauteur de 60 % seulement. L'utilisation de chiens (Berger des Abruzzes, mâtin d'Espagne, Berger des Pyrénées), dont seul l'achat est financé, est une mesure de protection qui est assez peu mise en place par les éleveurs63. La mission a rencontré trois éleveurs, dont un refusait d'avoir des chiens. Ceux qui font le choix des chiens, fonctionnent avec des meutes dont l'importance est proportionnelle à la taille du troupeau. L'utilisation des chiens n'est pas une condition obligatoire pour que l'éleveur soit indemnisé en cas d'attaque. Ce
Fonds européen d'aménagement et de développement de l'espace rural. La mission a visité une exploitation de 1 800 brebis à viande produisant 5 000 agneaux de lait. Le troupeau est en permanence divisé entre brebis prêtes à naître, ainsi que les allaitantes, maintenues en bâtiment (environ 800) et agnelles/ brebis vides ou en début de gestation (environ 1 000) qui paissent sur des parcours (plus de 1 000 ha). Le troupeau est accompagné la journée par un berger et environ 15 mâtins. La nuit, le troupeau est regroupé dans un enclos de barrières mobiles (déplacé tous les jours de quelques dizaines de mètres, durée de la manoeuvre 1 heure), gardé par la meute de chiens. Il y a 1 enclos pour chaque 200 ha de parcours. À l'inverse, la mission a rencontré un éleveur, de 200 vaches allaitantes, élevées en plein air, mettant bas dehors et nourrissant leurs veaux jusqu'à 6 mois, qui refuse d'avoir des chiens. Cet éleveur a souligné la nécessité de choisir une race d'animaux d'élevage (raza alistano-sanabresa) sachant défendre son veau (association de 50 éleveurs soutenus par la Région de Zamora pour la conservation génétique de cette race rustique: 150 /an par vache).
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Seulement 15 % des éleveurs professionnels en Saxe ont recours aux chiens de protection, bien qu'une directive fédérale conseille, sans l'imposer, un minimum de 3 chiens par troupeau.
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Land a également expérimenté une brigade mobile composée d'un berger et de deux chiens en cas d'attaques importantes. Peu d'éleveurs ont souhaité faire appel à elle. Il propose aussi un renfort de chiens de protection en cas d'urgence. Les éleveurs ont plus souvent recours à cette dernière proposition.
3.1.2. La question de la qualité des chiens de protection et de leurs filières, se pose partout où ils sont utilisés.
Le chien de protection64 est considéré par la plupart des pays comme un moyen efficace de protection, à condition d'avoir un nombre de chiens en rapport avec la taille du troupeau (deux chiens pour 150-200 brebis, et un chien supplémentaire par tranche de 200 brebis supplémentaires). Mais les conceptions d'obtention d'un bon chien sont très différentes et chacun prétend détenir la vérité. Les éleveurs, quant à eux, ne l'utilisent pas de façon systématique, et ce dans tous les pays, évoquant les problèmes induits par sa présence : trouble de voisinage, cohabitation difficile avec les touristes et avec les chasseurs, conséquences en termes de responsabilité qu'ils estiment lourdes à assumer. C'est la Suisse qui a réalisé le travail de structuration de la filière chien le plus abouti. Elle a délégué la sélection des chiens, leur dressage, leur agrément, et enfin la formation des agriculteurs à leur utilisation, à une association d'éleveurs ovins et de formateurs financée par le ministère de l'environnement. Tous les chiens naissent et sont élevés chez des éleveurs d'animaux dits « de rente ». Les chiens font l'objet de tests à 15 mois (attitude vis-à -vis des promeneurs et vis-à -vis de chiens intrus) avant leur mise en place chez un éleveur qui en a exprimé la demande auprès du canton, et dont la demande a été acceptée. Les chiens qui ne réussissent pas le test sont euthanasiés. L'éducation du chien est considérée comme un point essentiel. L'accompagnement des nouveaux détenteurs, qui reçoivent des chiens adultes formés, est aussi considéré fondamental, avec une formation avant l'intégration du chien dans le troupeau, puis son suivi ensuite. La sélection des chiens (pour la reproduction) est basée sur un contrôle répété des qualités au travail, enregistré dans une base de données. Ce travail de structuration de la filière canine est un choix fort du ministère de l'environnement, sans doute facilité par la faible taille de la population canine65. La sélection effectuée permet au gouvernement suisse de prendre systématiquement la défense des éleveurs en cas de plainte contre un chien de protection (conflits avec les usagers de la montagne) et jusqu'à présent, de gagner. La loi suisse précise que ces chiens peuvent se trouver en montagne auprès d'un troupeau sans être sous la garde de leur maître (berger facultatif). Aucun des autres pays visités n'a fait un travail similaire. En Espagne, une association nationale enregistre chaque année les chiots, mais aucun test d'aptitude à la protection n'est réalisé. Elle part en effet du postulat que la capacité des chiens à défendre le troupeau est fixée génétiquement (contrairement au Berger des Pyrénées, le Mâtin d'Espagne66 a toujours connu le loup). Des analyses
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Sur la question, on se reportera utilement au rapport CGEDD-CGAER de juin 2010 « Évaluation de la situation relative à l'utilisation des chiens de protection des troupeaux contre la prédation » dont l'essentiel des conclusions restent d'actualité. Actuellement, environ 280 chiens de protection officiellement reconnus travaillent en Suisse et 100 sont « en formation ». Tout comme le Berger des Abruzzes et le Berger d'Anatolie.
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phylo-génétiques sur les races de chiens de défense, publiées dans des revues scientifiques, ont été présentés à la mission. De ce fait, l'éducation du chien n'est pas jugée essentielle, mais il a été souligné l'importance d'avoir des meutes mélangeant des jeunes chiens et des chiens plus âgés, la meute étant le lieu de l'éducation. En Allemagne, il existe une fédération d'éleveurs de chiens en Brandebourg, qui dispose de moyens importants, et qui assure le dressage par ses adhérents. En Italie, après avoir commencé à structurer une filière chien, le travail n'a pu être mené à terme et l'attention des missionnés a été attirée sur le constat de la perte de contrôle de la qualité des chiens. En France, plus de 3 600 chiens bénéficient du « forfait chien de protection » prévu par instruction technique67. Leur achat et leur entretien font donc l'objet de soutiens financiers importants. L'État a mandaté l'IDELE (institut de l'élevage) pour constituer un réseau technique68 chien de protection en charge de la formation des éleveurs qui souhaitent intégrer un chien dans leur troupeau, mais à ce jour aucun travail concernant la sélection des chiens de protection n'est réalisé et très peu de chiens sont testés (58 chiens69), alors que le test de comportement du chien au travail, mis au point par la centrale canine, existe depuis 2010. Son financement est d'ailleurs prévu par la même instruction technique. Les référents IDELE et les techniciens chiens de la Pastorale pyrénéenne ne sont pas testeurs agréés par la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF), tel que le prévoit l'instruction technique. Concrètement un seul testeur de la Centrale canine réalise les tests pour l'ensemble du territoire métropolitain. Ce travail de connaissance des lignées, de sélection et de tests comportementaux vis-à -vis de l'homme et d'attachement défensif au troupeau est un préalable au déploiement des actions de formation vers les éleveurs, au risque de perdre en efficacité70. C'est la compétence de la centrale canine. Par ailleurs, la mission juge que le recours quasi-exclusif au Berger des Pyrénées (prioritairement sélectionné, en l'absence de loup depuis 70 ans, pour sa docilité) n'est pas à lui seul un gage d'efficacité. Elle estime donc que le travail de sélection doit aussi porter sur les autres races de chiens de protection, en encourageant des programmes de coopération avec l'Italie et l'Espagne. La mission a identifié des associations d'éleveurs ovins capables de fournir des sources génétiques sélectionnées dans plusieurs pays visités. Elle suggère que la centrale canine soit mandatée pour s'en rapprocher. 6. Recommandation (MAA) : accélérer la structuration de la filière chiens de protection par un réel travail de sélection, incluant les tests comportementaux visà -vis de l'homme, en lien étroit avec la centrale canine et les professionnels, et engager une réflexion visant, à terme, à ne financer que des chiens sélectionnés et testés.
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Instruction DGPE/SPDE/2018-124. À ce jour, le réseau est constitué de 6 référents nationaux et de 10 relais locaux, tous éleveurs et d'une animatrice. Chiffre de la centrale canine. Former des éleveurs qui ont déjà acquis un mauvais chien présente des intérêts très limités.
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3.1.3. L'attention à porter aux clôtures a été soulignée dans l'ensemble des pays visités
Comme indiqué en 3.1.1. :
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la Saxe fait des clôtures la seule mesure de protection indispensable pour prétendre à indemnisation en cas d'attaque. La mission a visité trois exploitations de plaine et son attention a été attirée sur l'aspect pratique de la réalisation à savoir le nombre de fils, la hauteur des fils et la puissance de l'électrification ; la Suisse accorde aussi beaucoup d'importance à cet aspect et produit des documents d'aides à la mise en place insistant sur tous les risques de dysfonctionnement, notamment celui d'électrification insuffisante. AGRIDEA note qu'en estive la réalisation systématique des parcs de nuit n'est cependant pas toujours possible, mais que le regroupement l'est, sous la surveillance de la meute de chiens ; l'Espagne conduit au niveau national une réflexion sur les clôtures et sur des enclos spécifiques71.
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3.1.4. La taille des troupeaux conditionne largement l'efficacité de leur protection
Quels que soient les moyens de protection utilisés, la mission fait le constat que les pays visités considèrent que la taille des troupeaux est un facteur qui influe largement sur la capacité qu'a l'éleveur à se protéger efficacement. L'association AGRIDEA (Suisse) considère qu'au-dessus de 5 chiens, la meute de chiens dysfonctionne, ce qui impose de limiter la taille du troupeau à 700-1 000 brebis. Au-delà de la question du fonctionnement de la meute de chiens, le constat est fait qu'il y a une taille maximum du troupeau sous la conduite d'un seul berger à ne pas dépasser pour garantir un gardiennage efficace 72, tant pour la protection vis-à -vis du loup que pour celle de la capacité d'un seul homme à bien soigner l'ensemble des animaux. Dans tous les pays visités, la taille maximum des troupeaux est très inférieure à ce qu'on trouve en France. Des maximums de 3 000 à 5 000 animaux ne sont pas rares en France, alors que très peu de troupeaux dépassent les 1 000 unités sous la conduite d'un seul berger dans les pays visités. La réflexion sur la future politique agricole commune (PAC) peut être le bon moment de mener une réflexion quant aux risques liés à l'accroissement de la taille des troupeaux et des surfaces par unité de travail humain (UTH). Ce point sera développé en 3.2.3.
3.1.5. La formation des éleveurs et bergers au diagnostic de vulnérabilité est essentielle
Les pays visités partagent le constat de la nécessité de mieux former les agriculteurs, mais aussi les bergers.
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L'éleveur rencontré utilise pour la nuit des barrières mobiles articulées type barrières urbaines permettent un déplacement facile des parcs et remédiant aux inconvénients de type risque sanitaire. Là encore l'exploitation était située sur un plateau. Tant par le berger que par les chiens.
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L'Italie a souligné qu'elle n'avait pas d'école de bergers et que cela constituait un manque. Il existe en revanche, une association de bergers qui essaie d'améliorer les compétences des éleveurs concernant la mise en place des méthodes préventives de protection. En Suisse, la formation initiale des bergers est possible depuis 2009, au sein de trois écoles d'agriculture. Celle-ci est complétée par une formation continue organisée par AGRIDEA, consistant à réunir, une fois tous les deux ans, tous les bergers sur une exploitation professionnelle. Pour ce qui est des éleveurs, une formation collective est obligatoire au moment de l'achat de chiens, suivie d'un accompagnement individuel sur l'exploitation. En Espagne, le manque de formation des bergers à la gestion d'une meute de chiens a été souligné, mais cela est en partie compensé par le fait que l'association nationale (évoquée au 3.1.2.) fait un suivi-accompagnement de tous les chiens qui ont un pedigree. Cet aspect formation, tant des éleveurs que des bergers, a été aussi souligné par de nombreux acteurs rencontrés sur le territoire métropolitain, évoquant l'absence de formation des bergers à la maîtrise des techniques de protection (en particulier la conduite d'une meute de chiens de protection). La mission déplore également l'absence de formation initiale des jeunes éleveurs aux techniques de protection, ainsi que l'insuffisante formation continue des éleveurs73. La mission propose à la direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) du ministère de l'agriculture et de l'alimentation qu'elle intègre dans les programmes de formation de brevet professionnel des responsables d'exploitations agricoles les aspects protection des troupeaux vis-à -vis des prédateurs et oeuvre à l'écriture d'un cahier des charges national du métier de berger qui intègre la présence des prédateurs et les conséquences pour le pastoralisme, cahier des charges qui devra être pris en compte par l'ensemble des responsables de formation. Cette proposition rejoint celle de la récente mission concernant les mesures d'accompagnement des éleveurs confrontés à la prédation de l'ours74.
3.1.6. Un conseil technique personnalisé, pluridisciplinaire et adapté à chaque situation apporte une plus-value indiscutable
La Suisse a conçu un accompagnement individualisé des éleveurs, soit qui achètent un chien, soit qui rencontrent des difficultés dans la mise en place des clôtures. Le rôle du canton et de ses techniciens pastoraux est fondamental. Les techniciens pastoraux travaillent en lien étroit avec les deux associations mandatées par l'OFEV (AGRIDEA et « Chiens de protection des troupeaux Suisse »). La pluridisciplinarité des approches est donc un élément essentiel dans la production du conseil à l'éleveur. De plus, comme évoqué au 3.1.1., le conseil s'accompagne ensuite d'un contrôle. Le Piémont italien a fait ce choix de l'accompagnement individuel pour l'analyse de vulnérabilité et la mise en oeuvre des mesures de protection jusqu'en 2012, mais, faute de crédits, a dû l'abandonner à regret. Nos interlocuteurs ont insisté sur l'importance de l'observation de terrain (analyse au cas par cas) et du facteur temps, essentiels, tant pour l'expérimentation que la mise en oeuvre effective des techniques de protection appropriées. Avec le nouveau projet LIFE (en cours de préparation), le
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La consultation des offres de formation des chambres d'agriculture PACA et Rhône-Alpes ont confirmé qu'aucune offre de formation à la gestion des troupeaux en présence de prédateurs n'était proposée. « Propositions d'évolution des mesures d'accompagnement aux éleveurs confrontés à la prédation de l'ours et aux difficultés économiques du pastoralisme » - CGEDD/CGAAER - Septembre 2018.
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Piémont italien ambitionne de remettre en place cet accompagnement en s'appuyant notamment, sur les vétérinaires sanitaires et sur des équipes locales. Notre attention a été attirée sur le fait que lorsque le loup arrive dans de nouveaux espaces, le temps d'adaptation de l'éleveur est important (20 ans) d'où la nécessité d'anticiper ce changement de comportement sur les fronts de colonisation, là où les éleveurs ont perdu depuis longtemps l'habitude de vivre avec le loup. En Saxe, l'importance du conseil a été soulignée et ce Land a fait le choix d'avoir six conseillers dont la mission est de visiter et de conseiller les éleveurs à propos des mesures de protection (et aussi de faire les constats de dommages). Dans les trois exemples cités, il s'agit donc de conseil au cas par cas, chez l'exploitant, en allant dans le détail de la mise en oeuvre des mesures de protection. En Suisse, l'approche pluridisciplinaire est déjà présente. En Piémont italien, c'est en projet. En France, dans les zones colonisées de longue date, les fédérations pastorales ont la compétence pour ce travail d'accompagnement. Le centre d'études et de réalisations pastorales alpes méditerranée (CERPAM) a réalisé de nombreux diagnostics de vulnérabilité à l'échelle territoriale comme à l'échelle d'une exploitation, suite à des sollicitations de celles-ci. Ce sont les diagnostics à l'échelle de l'exploitation ou de l'estive qui présentent le plus grand intérêt, s'ils sont bien faits, c'est-à -dire s'ils s'intéressent au détail de la mise en oeuvre des mesures de protection. Sur les fronts de colonisation, peu d'acteurs ont la capacité immédiate de réaliser cet accompagnement fin. Il s'agit, territoire par territoire, de construire cette compétence en s'appuyant sur la diversité des acteurs présents : acteurs du développement agricole, mouvement d'éducation populaire comme les centres d'initiative pour valoriser l'agriculture et le milieu rural (CIVAM), association d'utilisateurs de chiens, référents nationaux et locaux de l'IDELE, techniciens chiens de la pastorale pyrénéenne, ONCFS, etc. Cette même démarche peut être aussi intéressante pour des territoires où le loup est solidement installé et où les acteurs professionnels se sont peu engagés dans la réalisation des diagnostics de vulnérabilité. Cette construction de compétence départementale et partagée pourrait être confiée à un référent loup au sein de la DDT qui pourrait, en outre, être chargé de l'animation du comité local loup, du contrôle de l'effectivité de la mise en oeuvre des mesures de protection, de la connaissance du contexte des attaques. 7. Recommandation (MAA, MTES) : créer au sein des directions départementales des territoires, un poste de référent loup, en particulier dans les départements de front de colonisation, et oeuvrer ainsi à la création des conditions d'une mobilisation coordonnée des acteurs.
3.1.7. Une protection durablement efficace ne s'avère possible qu'avec l'engagement des éleveurs accompagnés par les organisations professionnelles agricoles
Tous les pays visités font le constat de la non-acceptation croissante des éleveurs vis-à vis du loup, la comprennent, mais insistent sur :
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la nécessaire implication de l'éleveur dans la réalisation du diagnostic de vulnérabilité de son exploitation, en amont de la mise en oeuvre effective des mesures de protection ;
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l'indispensable engagement des éleveurs dans la réflexion et la mise en oeuvre des mesures de protection. Les pays font part de difficultés plus importantes (résistance au changement) de la part des éleveurs double-actifs, voire non professionnels (Suisse, Allemagne75, Espagne) ; l'indispensable accompagnement des éleveurs particulièrement par les chambres d'agriculture ; par les OPA, tout
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le temps long, nécessaire à l'adaptation au changement.
Pour la France, il y a de ce fait un réel intérêt à réfléchir à la manière dont peuvent être accompagnés les éleveurs sur les fronts de colonisation, dont les exploitations sont inéligibles au dispositif d'accompagnement technique, tel que prévu dans l'action 1.4 du plan national, dans la mesure où ils ne sont ni en cercle 1, ni en cercle 2. Ce constat rejoint la recommandation précédente.
3.2. La maîtrise des dommages n'a pas de lien direct avec le montant des aides et des indemnités versées aux éleveurs
Comme indiqué en 1.2 et 1.3, la mission n'a pas observé, en France, le bienfait évident que les aides attribuées (tant pour la mise en oeuvre des mesures de protection que pour les indemnisations) pouvaient avoir sur une meilleure maîtrise des dommages. Malgré les sommes investies, les dommages continuent d'augmenter. L'essentiel des propositions, qui figurent dans les paragraphes suivants, vise à améliorer cette situation et à rendre ces financements efficaces. Les propositions sont bien entendu nourries des constats faits dans les pays visités.
3.2.1. La mise en oeuvre effective des mesures de protection, lorsqu'elle est aidée, doit être contrôlée sur le terrain
La mission fait le constat que dans certains pays visités (Suisse et Allemagne notamment) le contrôle est une opération sur le terrain qui tient à la fois du conseil et du contrôle proprement dit. Si cette double posture peut être source de difficulté de positionnement pour le contrôleur, elle présente l'intérêt de proposer un accompagnement individuel dont on a vu l'importance en 3.1.5., puis de s'intéresser à la réalité de la bonne mise en oeuvre et ce dans le détail76. Pour mettre un terme à cette ambiguïté de positionnement des conseilleurs-contrôleurs, la Suisse envisage que les gardes faunes des cantons qui font les constats de dommages, fassent aussi le constat de la mise en place effective des mesures de protection. Pour la mission, ce contrôle sur le terrain est essentiel : il permet de s'assurer de la mise en place effective des moyens de protection, de se donner la possibilité d'objectiver le discours (trop souvent entendu) de l'inutilité des mesures de protection faute d'efficacité, et de progresser dans l'art de leur mise en oeuvre.
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À noter qu'en Suisse comme en Allemagne, la part d'éleveurs double actif est importante : 90 % de double actif pour les éleveurs suisses de moutons, 80 % des attaques en Allemagne ont lieu chez des éleveurs qui pratiquent l'élevage comme hobby. Par exemple la pose des clôtures avec le nombre de fils nécessaires et la bonne électrification, le nombre de chiens effectivement en estive et non pas celui de chiens achetés, etc.
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La mission est parfaitement consciente qu'en France, les mesures de protection, quand elles bénéficient de soutien financier, font déjà l'objet de contrôle de l'organisme payeur qu'est l'agence de services et de paiement (ASP), mais ce contrôle, le plus souvent réalisé sur facture sans aller sur le terrain, n'est pas suffisant. Le plan national d'actions sur le loup et les activités d'élevage prévoit une action 1.12 visant à s'assurer que les mesures de protection sont mises en oeuvre selon le dispositif contractuel de protection des troupeaux, en vue de garantir leur efficacité au niveau attendu. L'idéal serait que les difficultés récurrentes de mise en oeuvre mises en évidence lors des contrôles (inopinés, sans lien avec les attaques) puissent ensuite faire l'objet d'une analyse, afin d'alimenter judicieusement l'observatoire de l'efficacité des mesures de protection des troupeaux prévu dans l'action 1.3. La mission attire l'attention du MAA et du MTES sur la nécessité de fusionner le contrôle lié à la conditionnalité des indemnisations et le contrôle aujourd'hui réalisé par l'ASP. 8. Recommandation (MAA, MTES) : mettre en place sans tarder un contrôle, unique (conditionnalité, ASP) et sur le terrain, des mesures de protection. La mission rappelle la nécessité de la mise en place rapide du groupe de travail prévu à la mesure 1.12 du plan national et de l'observatoire de l'efficacité des mesures de protection qui devra s'enrichir par une analyse qualitative des difficultés et des défauts le plus souvent rencontrés lors des contrôles.
3.2.2. L'indemnisation des dommages est conditionnée à la mise en oeuvre effective de mesures de protection, raisonnées grâce à une analyse de vulnérabilité
Seules la Suisse et l'Allemagne ont un système comparable à celui de la France avec une indemnisation conditionnée à la mise en oeuvre effective des mesures de protection. Le montant moyen de l'indemnisation varie entre 200 et 400 /brebis77. C'est la Suisse qui est la plus généreuse, suivie de la France. Suisse et Allemagne conseillent les éleveurs en amont sur les mesures de protection et contrôlent la réalité de leur mise en oeuvre. Comme évoqué en 1.3., le Piémont italien et la province de Castille et Léon ont fait le choix d'un système assurantiel par ailleurs moins généreux (120 euros/brebis pour la Castille Léon). Les éleveurs n'y adhèrent que très partiellement, ce qui n'est pas sans poser souci pour le recensement réel des dommages 78. En Espagne, le ministère de la transition écologique subventionne le système assurantiel, avec en outre une prise en charge par la communauté autonome concernée, de tout ou partie de la franchise par sinistre. Les dommages ne sont indemnisés par l'assureur, que si les mesures de protection sont mises en oeuvre. L'expertise de vulnérabilité n'est plus réalisée dans ces deux territoires, faute de financement. Elle l'a été provisoirement, grâce à des programmes LIFE. En Espagne, le ministère de la transition écologique réfléchit en outre à la mise en place d'un fonds mutualisé alimenté par les éleveurs et partiellement abondé par l'État, pour compenser les dommages.
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Les deux chiffres sont des ordres de grandeur. À plusieurs reprises, les interlocuteurs ont évoqué la non fiabilité des chiffres des dommages suite à la mise en place du système assurantiel.
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Comme indiqué dans en 1.2., la mission s'est interrogée sur l'importance des dégâts en France et tout particulièrement sur les raisons de la concentration des attaques sur un petit nombre d'unités : vulnérabilité plus importante des estives ? Taille trop importante des troupeaux ? Impossibilité de les protéger ? Non volonté de les protéger ? Mauvaise qualité de la mise en oeuvre des mesures de protection ? Une comparaison fine des facteurs explicatifs des vulnérabilités différentes entre les pays visités ne peut relever que d'un travail de recherche. L'énormité des écarts constatés doit néanmoins conduire à s'interroger sur ce qui apparaît à beaucoup des interlocuteurs rencontrés comme une spécificité française qu'ils ont du mal à s'expliquer. Une consultation des statistiques d'attaques en zone pastorale de l'ex-région RhôneAlpes et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur sur la période 2013-2017 montre que 50 % des 8 685 attaques recensées se concentrent sur 10 % seulement des unités pastorales. Dans le Var, 10 unités pastorales concentrent la moitié des attaques, 33 pour le département des Alpes-Maritimes. La mission estime que notre pays gagnerait beaucoup à analyser en détail et sans tabou (vulnérabilité, type de conduite des troupeaux, qualité des mesures de protections et de leur mise en oeuvre...) cette anomalie qui influe de manière très négative sur l'ensemble de la gestion du loup en France.
3.2.3. En France, une réflexion s'impose quant aux modes de financement des mesures de protection et des indemnisations, dans le contexte de la future politique agricole commune
La mission ne nie pas la difficulté de la mise en oeuvre des mesures de protection et le travail supplémentaire que celle-ci occasionne aux éleveurs quand le loup arrive sur un territoire. Elle est, de plus, bien consciente du stress engendré par les attaques. Elle considère, au vu des exemples probants qui lui ont été présentés au cours de ses visites, que ce risque, ou cette contrainte naturelle, doit être évaluée par un diagnostic de vulnérabilité. L'éleveur doit s'approprier ce diagnostic dans la mesure où la vulnérabilité du territoire évolue dans le temps et où il est nécessaire de remettre à jour régulièrement ce diagnostic. Le premier doit être élaboré de façon pluridisciplinaire, en associant divers compétences : zootechniques, pastorales, naturalistes, sur le dressage de chiens... et nécessite un travail de coordination, rôle du référent DDT. La mission considère que ce temps d'appropriation est long et que l'État doit donc concentrer son appui sur l'adoption par les éleveurs, des mesures de protection. En 2017 sur les 23,34 millions consacrés aux mesures de protection, un peu plus de 39 % étaient consacrés au gardiennage hors salarié, 43 % au gardiennage salarié, 10,5 % aux investissements matériels, 7 % aux chiens de protection et à peine à 0,04 % aux diagnostics de vulnérabilité. La répartition entre ces différents postes interroge la mission qui regrette un faible appui aux diagnostics de vulnérabilité, pour un soutien fort au gardiennage hors salarié qui relève pourtant du métier classique de l'éleveur (en présence ou en absence de loup). La mission préconise donc que l'investissement de l'État soit mis en priorité sur les diagnostics de vulnérabilité élaborés de façon pluridisciplinaire, sur les investissements en clôture et leur entretien, ainsi que sur la sélection des chiens de protection. Elle estime, comme cela est largement admis dans tous les pays visités, que le gardiennage fait partie du travail normal de l'éleveur.
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Partant des constats que le système des aides ne contribue que peu à la diminution des dommages et que l'efficacité des mesures est fortement dépendante de l'engagement des éleveurs, la mission s'est interrogée sur l'intérêt d'une aide forfaitaire globale plafonnée79. Celle-ci viserait à remettre l'éleveur au centre des décisions sur les mesures de protection les plus adaptées à son cas, mais aussi à le responsabiliser. L'aide serait versée après réalisation du diagnostic de vulnérabilité, et devrait être remboursée si les mesures de protection qui en découlent ne sont pas mises en oeuvre (en zone considérée comme protégeable). Deux scénarios sont alors envisageables concernant les indemnisations, selon la zone où l'éleveur subit les dégâts :
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en front de colonisation, une indemnisation après constat (incluant prélèvement génétique sur blessure) , sous condition d'un réel engagement de l'éleveur dans la réalisation du diagnostic de vulnérabilité de son exploitation. Cet engagement devrait se traduire par la mise en place effective de mesures de protection dans les deux ans qui suivent la réalisation du diagnostic ; en zone de présence permanente (ZPP) :
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soit une indemnisation qui pourrait être intégrée à l'aide forfaitaire globale pour la mise en oeuvre des mesures de protection ci-dessus définie, et être basée sur un indicateur de menace défini par les diagnostics de vulnérabilité et un facteur d'échelle (nombre de jours d'estive) ; soit un arrêt des indemnisations (droit commun des autres prédateurs soumis à régulation, mustélidés, renard, ou non régulés, buse, rapaces), sauf dans le cas d'un événement exceptionnel (dérochement par exemple).
Il s'agit de marquer ainsi que la stratégie française est de prioriser la prévention des dommages. Enfin, pour les éleveurs des zones non protégeables définies à partir des diagnostics de vulnérabilité, une réflexion pourrait être menée sur la mise en place, soit d'un système assurantiel, soit d'un fonds mutualisé. La proposition de règlement du parlement européen et du conseil établissant des règles régissant l'aide aux plans stratégiques devant être établis par les États membres dans le cadre de la politique agricole commune (PAC), parue le 1 er juin 2018, donne en partie le cadre de la réflexion concernant la future PAC. La mission considère que c'est le bon moment pour démarrer une réflexion concernant le soutien à moyen terme des éleveurs confrontés à la prédation. Les articles 65 concernant les engagements en matière d'environnement et de climat et autres engagements en matière de gestion (mesures agro-environnementales et climatiques), 68 (investissements) et 70 (outils de gestion du risque) du chapitre 4 du dit règlement ouvrent des possibilités différentes qui méritent d'être étudiées quant à leur impact sur l'élevage dans les secteurs colonisés par le loup. Les articles 65 et 68 ouvrent la possibilité du forfait. Cette possibilité a déjà été activée pour le soutien actuel aux mesures dites d'entretien au sein des mesures de protection à savoir gardiennage et entretien des chiens. Elle ne l'a pas été pour le soutien aux investissements (clôtures, achat de chien). Dans un souci de simplification administrative pour l'éleveur, la question se pose d'élargir la mesure 65 aux investissements et d'aller vers une aide forfaitaire globale incluant un montant d'indemnisation forfaitaire.
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Par exemple, en fonction (inversement proportionnelle) du nombre de brebis par UTH (cf paragraphe 3.1.4) afin d'inciter à diminuer la taille des troupeaux afin de pouvoir les protéger de façon beaucoup plus efficace.
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9. Recommandation (MAA, MTES) : mandater les experts français engagés dans la négociation visant à définir le nouveau règlement agricole européen, afin que celui-ci permette l'adoption d'un régime d'aide forfaitaire dans les zones de présence permanente du loup. Cela permettrait de mettre en place un système plus simple, reconnaissant la capacité de l'éleveur à ajuster les mesures de protection à sa situation, mais aussi plus responsabilisant. Une telle évolution devrait s'accompagner d'une pression de tir accrue sur l'espèce, rendue possible par les progrès de son bon état de conservation en France (voir 3.3.).
3.2.4. En France, il est nécessaire de se projeter à moyen terme pour ne pas dissuader les éleveurs bovins de se protéger
La question de la prédation sur bovins se pose de façon croissante (cf. 1.1.). La mission a constaté que l'Espagne est confrontée de façon importante à la prédation sur bovins. L'Italie et l'Allemagne ont fait part de meutes se spécialisant sur les bovins. Il importe donc que la France se prépare à cette éventualité. Aujourd'hui, celle-ci a fait le choix de considérer les troupeaux bovins comme non protégeables et ce sans aucune analyse de vulnérabilité des territoires impliqués. Or, certains fronts de colonisation sont concernés par la présence d'élevages ovins, mais aussi d'élevages bovins. Déclarer les troupeaux bovins non protégeables, sans élaborer de diagnostics de vulnérabilité, revient à ne pas inciter les éleveurs à raisonner la faisabilité ou non de la mise en oeuvre des mesures de protection. C'est aussi prendre le risque à moyen terme de générer des meutes qui se spécialisent sur les troupeaux bovins, les éleveurs d'ovins s'étant eux protégés. Par ailleurs, sur certains fronts de colonisation les éleveurs sont déjà confrontés aux dégâts de gibier (sangliers, cervidés), avec une nécessaire réflexion sur la protection, non seulement des cultures, mais aussi des prairies. Il en découle un vrai intérêt à réfléchir à la mise en défends de l'ensemble de l'exploitation vis-à vis des prédateurs, comme du gibier, avec une réflexion approfondie au sujet des clôtures.
3.2.5. En France, il est nécessaire de s'interroger sur la définition des zones non protégeables
Avec un raisonnement similaire à celui tenu pour les troupeaux de bovins, la mission estime qu'une zone ne doit être déclarée difficilement protégeable (ZDP) que suite à la réalisation d'un diagnostic de vulnérabilité approfondi. Déclarer tout un territoire en ZDP sans réalisation de diagnostics de vulnérabilité présente différents risques : celui d'accorder l'autorisation du tir de défense et celui d'ouvrir le droit aux indemnités sans qu'il y ait la moindre réflexion sur la protection, ce qui ne manquerait pas de conduire à des contentieux avec les associations de protection de la nature. Par ailleurs, comme on peut le remarquer dans les prises de position des parties prenantes à l'occasion des réunions du groupe national loup, introduire des inégalités de traitement des éleveurs entre zones géographiques n'est pas bien perçu et doit être solidement étayé.
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Ceci n'exclut cependant pas, de l'avis de la mission, de diversifier la pression de régulation du prédateur selon les régions où sa présence pose moins de problèmes (zones de polyculture, forêts, etc.) et celles où elle accentue des difficultés économiques et de développement déjà aiguës.
3.3. Le recours aux tirs létaux de défense, encore peu utilisés en Europe, peut être d'autant plus simplifié que l'état de conservation de l'espèce progresse
La mission considère le tir des loups 80 comme un moyen à part entière de prévention des dégâts. Le prélèvement d'individus par tir s'inscrit pour le moment dans un cadre dérogatoire qui en fait la dernière extrémité (au cas où aucune autre mesure satisfaisante ne peut être mise en oeuvre pour limiter les "dommages"). Il semble cependant clair à de nombreux spécialistes, que cette approche trop restrictive a enhardi les loups et encouragé le développement de la prédation sur les troupeaux considérés comme ressource alimentaire "de confort". Dans la mise en place d'un cadre de protection stricte, des paramètres très importants de l'éthologie du loup ont ainsi été négligés. Le loup est une espèce « rusée » et « prudente », mais qui a toujours cherché à approcher l'homme. C'est sans doute pour cela que c'est la première espèce sauvage à avoir été domestiquée dès la préhistoire. Aidé par son statut de protection, le loup a naturellement tendance à côtoyer l'homme de plus en plus près, sans recevoir de signaux négatifs qui renforceraient sa prudence. Au moment où le bon état de conservation progresse et que, du fait de la forte hausse simultanée des effectifs de loup présents en France et plus généralement en Europe, la régulation numérique de l'espèce par des quotas de tirs létaux est souhaitée par un nombre croissant d'acteurs des pays visités (voir 1.5.), la mission considère important d'attirer l'attention sur le bénéfice que pourrait apporter le renforcement de tirs de défense, à proximité immédiate des troupeaux, de préférence à des tirs de prélèvement non ciblés. Il s'agit prioritairement de rechercher un bénéfice éthologique, en renforçant la prudence naturelle du loup, en modifiant son comportement de chasse ; ce qui revient à "réinitialiser" l'instinct sauvage du grand prédateur. Un effet de synergie est ainsi espéré avec les mesures de protection "passives".
3.3.1. Les tirs létaux sont peu pratiqués
Parmi les pays visités, seules l'Espagne et la Suisse prélèvent régulièrement des loups de manière légale. En Espagne, il faut préciser que ces tirs, réalisés par des chasseurs (jusqu'à 200/an), s'effectuaient au Nord du Duero, sur une population de plus de 2 000 loups (la plus dense d'Europe), non soumise à une protection totale par la directive HFF et la Convention de Berne. Le tir du loup en chasse guidée dans les "Réserves de Faune" constitue une recette81 touristique importante pour des zones isolées, au même titre que les trophées de cerf. En revanche, en Suisse, c'est la doctrine du Ministère fédéral chargé du loup (OFEV) qui, en concertation avec l'échelon politique cantonal, a institué sur une base temporaire, le tir des loups, 5 ans après son apparition sur le territoire helvétique, en
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En France, il est actuellement défini par l'arrêté du 19 février 2018 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do? cidTexte=JORFTEXT000036619326&dateTexte=&categorieLien=id Lors des enchères pour l'adjudication des lots de chasse, il n'est pas rare d'atteindre 12 à 14 000 pour avoir le droit de tirer un loup !
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accord avec le texte de la Convention de Berne 82. Ce sont exclusivement des "garde faune" cantonaux qui réalisent les tirs (bilan : 23 tués sur 115 loups ayant été identifiés sur le sol suisse, depuis 1998). L'État fédéral refuse d'envisager l'armement des bergers. Le tir de défense, limité au périmètre des alpages, peut être déclenché sur un "loup problématique" (solitaire) identifié par le suivi des dégâts et le monitoring génétique. La régulation numérique peut s'exercer par prélèvement de 50 % des juvéniles d'une meute trop spécialisée sur les moutons (meute "déviante"). Dans les deux cas, l'objectif des tirs est de détourner le prédateur des animaux d'élevage et de lui conserver sa "timidité" atavique. L'Allemagne et notamment le Land de Basse Saxe 83, envisage une extension des possibilités de tir, notamment pour éloigner les loups "téméraires" des zones habitées, mais aussi pour réguler une expansion numérique beaucoup plus rapide qu'anticipée sur des parties sensibles de son territoire (zones de plaine industrielle très habitées, zones humides de pâturage ovin non clôturé, marais, polders, etc.).
3.3.2. Il importe de sécuriser juridiquement le recours aux tirs vis-à -vis du droit international
Pour l'instant, hormis le cas de l'Espagne au Nord du Duero 84, tous les pays, y compris la France, s'appuient sur des autorisations de tir de destruction au cas par cas, basées sur l'intensité des dommages, la mise en place de mesures de protection passive (cercle 1) ou l'absence d'autre solution satisfaisante (cercle 2 et front). De plus, dans certains pays (Castille et Léon par exemple), l'interprétation des textes par le juge administratif limite sérieusement la marge d'action de la communauté autonome. Non envisagée par les pays dépourvus de loups (qui ont dès lors facilement admis qu'il soit placé dans l'Annexe IV), la régulation numérique de l'espèce s'invite à l'ordre du jour plus rapidement que prévu compte tenu du doublement des effectifs constaté entre 2014 et 2018. Sans évolution des textes, les États impuissants à juguler la nouvelle dynamique de l'espèce, s'exposeront inéluctablement à la recrudescence des destructions illicites. Et contrairement à la chasse, dont le paradoxe est de maintenir durablement les populations d'espèces sur lesquelles elle est pratiquée (voir sanglier, cervidés, tétraslyre), ces méthodes illégales peuvent conduire à l'extermination du loup. L'Allemagne réfléchit à appuyer ses mesures de régulation sur la transposition de l'alinéa 1-e de l'Art.16 de la directive85. Sa formulation semble en effet convenir pour des mesures de régulation fondées sur la chasse en quotas limités. Il s'agirait aussi de pouvoir maintenir des zones "sans loup", en évitant l'installation de meutes, pour des raisons de sécurité des personnes notamment86. Cet alinéa de la directive est transposé en droit français, par le biais du protocole des tirs de prélèvement renforcés, liés à la période de chasse et déconnectés de la période de présence des troupeaux.
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Les conditions à remplir et les règles de décision ont été stabilisées, proche du système français, 10 ans plus tard. Projet de résolution du 12/10/2018 présentée au Bundesrat. Qui correspond au cas des pays de l'Est et des Balkans-loup classé en Annexe V de la Directive HFF. Permettre, dans des conditions strictement précisées, le prélèvement sur une base sélective et en quantité limitée, la conservation ou tout autre exploitation judicieuse de certaines espèces protégées (animales ou végétales)en petit nombre. L'Allemagne a été le théâtre en 2018, de la 1 ère attaque d'un loup sur l'homme en Europe, depuis 1945.
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La Suisse souhaite une évolution dans le cadre de la Convention de Berne dont le texte a été repris mot à mot par la directive HFF pour ce qui concerne les possibilités de dérogation à la protection intégrale. Elle avance trois arguments : 1) le succès du plan de sauvegarde du loup qui se trouve désormais hors de menace sur l'ensemble du territoire européen ; 2) la hausse prévisible et insupportable du coût des moyens de protection au vu de la hausse des effectifs et de la répartition géographique ; 3) la facilité accordée, il y a 40 ans, aux pays signataires de la Convention de Berne et qui abritaient déjà des populations conséquentes de loup européen, en les autorisant à continuer de le gérer en dehors d'un cadre de protection totale (soit comme gibier, soit autrement). Elle considère que cette dérogation devrait aujourd'hui être concédée, par parallélisme des formes, aux pays qui accueillent le retour du loup, une fois dépassé un cap démographique à définir (sorte de "point de non-retour", dont sans doute la situation de 2019 est assez voisine). L'Autriche et l'Allemagne envisagent de la soutenir auprès du Comité permanent. C'est le même paradoxe, à l'intérieur de ses propres frontières, que l'Espagne met en avant ; la segmentation "Nord du Duero/Sud du Duero" a été mise en place pour protéger à l'époque la population relictuelle d'Andalousie aujourd'hui disparue. La population de loup du Sud du Duero n'est autre que l'extension géographique de la population chassable du Nord du Duero, et donc toute discrimination juridique paraît aujourd'hui totalement incongrue. Pour l'Espagne, la logique voudrait aujourd'hui que le loup passe de l'annexe IV à l'annexe V de la directive HFF87. En raison du fort tabou que cela représente, la démarche allemande, qui ne nécessite pas de modification de la directive, peut s'avérer plus pragmatique, à condition d'oeuvrer de concert, dans le cadre d'une nouvelle rédaction en cours du guide interprétatif de la directive. 10.Recommandation (MAA, MTES) : fixer un mandat précis aux experts français participant aux travaux de réécriture du guide interprétatif de la directive Habitats faune flore concernant la protection des espèces annoncés par les commissaires européens à l'environnement et à l'agriculture pour 2019, avec pour objectif de permettre, dans un cadre dérogatoire précisé, de sécuriser juridiquement le recours aux différentes modalités de tirs létaux sur le loup. La mission considère par ailleurs qu'il serait utile de viser parallèlement la réévaluation du positionnement du loup comme espèce protégée à l'aune de sa répartition et de sa situation démographique actuelle (effectifs et rythme d'accroissement), afin de ne retenir, dans les textes internationaux s'appliquant à la France, que des mesures de protection mieux proportionnées à l'objectif de protection de l'espèce.
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Elle considère en effet logiquement que l'espèce étant, sur son territoire, sortie d'un état de menace « critique », elle devrait logiquement quitter le statut de protection stricte prévu par la directive pour les espèces en danger critique de disparition. Il faudrait sinon étendre le régime de protection stricte à toutes les espèces !
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3.3.3. Dans le cadre juridique actuel, renforcer en France la réactivité, la pertinence et l'efficacité des tirs comme moyen de prévention en synergie avec les mesures de protection passive
La conception française des tirs de défense, simple ou renforcée, auprès d'un troupeau régulièrement attaqué par le loup se rapproche du concept suisse, dans son idée. Par contre, elle s'en éloigne dans la mise en oeuvre, faute de réactivité suffisante. Concernant les tirs de défense simple, la réactivité est garantie puisque 53 % des éleveurs ayant souscrit des mesures de protection des troupeaux disposent d'autorisations individuelles délivrées par le préfet de département, valables 5 ans ; ces autorisations n'étant pas suspendues quand le quota annuel est atteint. En pratique, très peu de tirs de défense simple sont fructueux (quelques unités par an pour plus de 1 000 autorisations). Cette mesure de bon sens et rassurante a donc un impact limité. Les tirs de défense renforcée sont en revanche beaucoup plus efficaces, grâce à la coordination entre tireurs et l'utilisation de matériel à visée infra rouge. Pour qu'ils soient mis en oeuvre, il faut soit mobiliser la brigade ONCFS (délai d'une à deux semaines), soit organiser une opération sous le contrôle d'un lieutenant de louveterie local, avec des personnes habilitées et disponibles. Or, bien souvent après ce délai, les meutes ou loups solitaires incriminées ont changé de secteur. Pour être vraiment efficace comme mesure de prévention des dommages, dans un nouveau contexte de pression démographique du loup, cette procédure de premier rang opérationnel devrait être accélérée (avec un double impact sur les niveaux de dégâts, via la modification du comportement des meutes et via les effectifs du prédateur). Il serait également utile de créer un « tir de défense simple élargie », pour les zones de forte concentration des dégâts et les ZDP, mobilisable immédiatement par l'éleveur autorisé, mais limité à 3, voire 5 tireurs.
Répartition des différentes modalités de tir en France
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En matière de régulation, les tirs de prélèvement simples ou renforcés sont des tirs sans lien de proximité du troupeau, et qui ont l'inconvénient de ne pas cibler les comportements nuisibles du loup et ne sont donc d'aucun remède immédiat pour la prévention des dommages. Ils peuvent même déstructurer une meute, si un dominant est tué, ce qui entraînera davantage de risque de dommages à court terme sur la faune domestique (prédation opportuniste). De fait, ce sont les tirs de régulation renforcée (tir en opération de chasse au grand gibier) qui sont pratiqués sur quelques secteurs à forte densité de loups du Sud des Alpes. Réalisés comme c'est le cas en fin d'année civile, ils peuvent contribuer partiellement à une gestion adaptative vers laquelle la mission considère souhaitable de se diriger (voir 3.3.4.). Il faudrait répartir le quota au moins entre deux groupes de départements, ceux de la zone "dense" (Sud des Alpes) et ceux comportant une ZDP, voire une zone d'exclusion sur laquelle l'objectif serait d'éviter l'installation de meutes. Pour optimiser les opérations de régulation, il faut s'appuyer spatialement sur le dispositif mis en place par les préfets et l'ONCFS avec la louveterie. La mission propose que chaque préfet de département où le loup est présent crée une équipe de louvetiers, spécialistes du loup, réquisitionnables par l'administration et chargés d'exécuter, avec réactivité, les tirs de défense renforcée. Leur sujétion et leurs déplacements seraient défrayés sur les crédits de prévention des dommages. Ils devraient pouvoir utiliser la lunette de tir à visée thermique, tout comme la brigade ONCFS. Les éleveurs resteraient bien sûr, quant à eux, porteurs de l'autorisation de tir de défense simple. Les autres modalités de régulation du loup, prélèvement renforcé notamment, seraient déclenchées en fin d'année civile, en rapport avec des objectifs stratégiques de régulation ou de ralentissement de la colonisation (ZDP) débattus régionalement.
3.3.4. Dans le contexte de forte progression démographique de l'espèce, il importe désormais d'évoluer vers une gestion adaptative de l'espèce permettant un meilleur pilotage par les dégâts
Seule la France a mis en place, dans le respect de ses engagements internationaux et du droit européen, une forme de régulation quantitative des loups avec différents degrés d'intervention, y compris le droit pour les bergers de défendre eux-mêmes leur bien avec un fusil. Pour autant, elle se trouve face à un risque élevé de perte de contrôle de la progression numérique et spatiale de l'espèce qui pourrait conduire à un nouveau doublement dans 4 à 5 ans risquant d'entraîner une explosion encore plus importante du coût des moyens de protection et d'indemnisation tout en renforçant les conflits déjà nombreux. L'idéal serait de ne plus piloter par rapport à l'effectif, avec un seuil bas (minimum 500 loups), sans aucune limite supérieure, mais par rapport à un plafond haut correspondant à un nombre objectif de meutes (à débattre et à répartir spatialement). Ce nombre devrait être également corrélé à des objectifs de maîtrise des dégâts ou autres objectifs locaux d'équilibre des écosystèmes, de sécurité, etc. Les tirs létaux pourraient alors être effectués dans les meilleures conditions d'efficacité, avec au départ un plafond de prélèvement "non bloquant" que l'on peut
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estimer au double du plafond actuel. Ce plafond serait diminué sitôt que les indicateurs de suivi de la population témoigneraient 2 années de suite d'une stagnation démographique. De cette façon, l'expansion de la population serait sous contrôle de la puissance publique, en accord avec les objectifs patrimoniaux poursuivis région géographique par région géographique. Dans le cas d'une gestion adaptative, le nombre de loups pouvant être éliminés sur une année ne se mesure pas à l'unité près. Si l'on estime la population à 500 loups (+ ou - 50) et un accroissement annuel potentiel de +100 loups (+ ou  10), il apparaît que l'unité de compte est la dizaine et surtout que l'écart minimum entre une stratégie assumée d'augmentation des effectifs et une stratégie visant à arrêter sa progression est d'au moins 50 unités. La gestion adaptative aurait le mérite de la différenciation, c'est-à -dire d'un pilotage démographique fondé sur un objectif à atteindre, notamment en fonction de la place que l'on souhaite accorder à l'élevage :
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là où l'on souhaite "retirer" des meutes, il faut augmenter le quota de loups à tuer, jusqu'à ce que le nombre de loups diminue ; ailleurs, où l'objectif en nombre de meutes n'est pas atteint, le nombre de prélèvement doit permettre une progression démographique et doit être baissé si besoin.
·
La mission propose que la France se dirige sans tarder vers la mise en place d'une gestion adaptative du loup en France en s'appuyant sur la nouvelle version, en cours de préparation, du guide interprétatif de la directive Habitats faune flore.
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4. La complexité de la coexistence loup - activités humaines requiert une communication équilibrée, basée sur des informations solides et partagées
Les dispositions relatives à la communication dans les pays visités par la mission sont assez hétérogènes et aucun pays n'évite la polémique. En France, où la faisabilité même d'une coexistence est souvent questionnée, la mission considère que ce sujet mérite, loin des affirmations simplistes, angéliques ou catastrophistes, une véritable politique de communication.
4.1. En Europe, des exemples intéressants qui, bien qu'insuffisamment aboutis, peuvent inspirer la France
Dans tous les pays visités, les controverses sont importantes et récurrentes, souvent amplifiées ou déformées par des media en quête de sensationnel, ou plus ou moins instrumentalisées par un camp ou un autre. La mission a recueilli beaucoup de témoignages en ce sens. La question de l'information objective du public et des messages que l'on souhaite véhiculer est donc une préoccupation générale. Parmi les pays visités, l'Allemagne, qui connaît un phénomène de recolonisation par le loup très comparable à celui de la France, se démarque. Sa communication s'articule de façon complémentaire entre le niveau fédéral et le niveau des Länder de façon à toucher un large public et à être aussi incarnée que possible au niveau local. Elle a également recours à un partage des rôles intéressant entre acteurs publics et acteurs extérieurs à l'État (fédéral ou Land), mais reconnus, notamment pour la production d'informations. Enfin, les messages sont cohérents et clairs en réaffirmant d'une part les engagements internationaux et européens du pays au sujet de la protection de l'espèce et de son état de conservation favorable, sans nier les difficultés que le retour du loup pose aux éleveurs qui sont aidés en conséquence. Au niveau fédéral, le ministère de l'environnement et l'Agence pour la protection de la nature ont externalisé, tout en le finançant et le supervisant, un « Centre de documentation et de conseil sur les loups » (DBBW). Confié au « Senckenberg Museum für Naturkunde Görlitz » qui le gère et en assure la coordination, il est alimenté par les données de trois organismes indépendants : le Leibnitz Institute für Zoo und Wildtierforschung (données sur les loups morts, régime alimentaire...), l'Institut LUPUS (qui coordonne le suivi biologique et la recherche sur le loup en Saxe) et du laboratoire de l'Institut de recherche Senckenberg, laboratoire de référence pour les recherches génétiques sur le loup et le lynx en Allemagne. Le DBBW apporte son conseil au gouvernement fédéral et à ceux des Länder pour la gestion du loup. Il est chargé de compiler annuellement l'information relative à la situation du loup en Allemagne (état des populations, dommages, mesures de prévention, dédommagements...).
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Le DBBW met à disposition du public, via son site internet 88, un grand nombre de données : biologie de l'animal, statut de protection, méthodologie et résultats de l'évaluation des populations, cartes sur la présence de l'espèce en Allemagne, dans chacun des Länder, données sur chaque meute, progression de la colonisation par territoire, données issues de la génétique, liste des loups abattus, coûts des mesures de protection et des indemnisations... La présentation est attractive, claire et factuelle. Enfin, pour chaque Land, le site donne accès à son plan loup et à son ou ses sites spécialisés. Dans le cas de la Saxe, il s'agit d'une part du site du ministère saxon de l'environnement (informations de base et renvoi au site ci-après décrit), d'autre part du site du « bureau de contact sur le loup » en Saxe, créé dès 2004 par le gouvernement saxon. Le « Kontaktbüro » se présente comme « le bureau d'information officiel pour la population, les médias et les autorités sur le loup ». Son site précise : « Les informations issues de la surveillance (collecte de données scientifiques) et de la protection des troupeaux sont collectées par ce bureau, préparées pour le public et rendues accessibles ou activement annoncées. Notre but est d'informer la population de manière opportune et objective et de fournir des informations factuelles sur le loup ». Une des missions « pilier » du Kontaktbüro est d'apporter de l'information aux éleveurs (sur le loup, sa présence, son comportement... ; sur les moyens de protection, les aides disponibles, les indemnisations...). Il est intéressant de noter que le site propose beaucoup de contacts personnels (téléphone ou mail), afin que les éleveurs, ou toute personne, puissent s'informer en direct. Les personnes interrogées par la mission en Saxe ont insisté sur l'importance, dans la politique de communication du Land, de ces interlocuteurs joignables par téléphone. Le Kontaktbüro envisage d'ailleurs d'avoir des correspondants dans chacune des communes de Saxe, plutôt qu'ils soient tous regroupés sur son siège, à l'est du Land, afin de se rapprocher encore plus des besoins de la population dans ce domaine. La Suisse a adopté un positionnement un peu différent, sans doute dicté par l'importance culturelle de la place de l'élevage dans ce pays. Le volet information de son plan d'action indique que : « Les cantons et l'OFEV coordonnent leurs politiques d'information et fournissent des informations objectives sur le loup, les problèmes qu'il pose et les solutions envisageables ». La question de la coexistence et de ses moyens apparaît ainsi centrale dans la préoccupation suisse.
88
https://www.dbb-wolf.de/
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L'OFEV a également recours à l'externalisation (qu'il finance) pour gérer une partie de la communication et de l'information sur le loup au niveau fédéral :
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la collecte et la présentation des informations relatives au suivi de l'espèce sont confiées à une fondation ad hoc, Le Kora89, qui se définit comme suit : « Le KORA enquête sur l'écologie des carnivores et suit l'évolution de leur population. Nous observons également les interactions des prédateurs avec un paysage anthropisé afin de développer les bases d'une coexistence sans conflit entre les grands prédateurs et les humains ». Son site regroupe de façon assez détaillée l'information disponible sur la présence et le développement du loup en Suisse, sur les analyses génétiques effectuées chaque année, sur les dégâts constatés en temps quasi réel, etc. ; le volet cohabitation avec l'élevage est confié à une association, AGRIDEA, qui se définit comme faisant « partie intégrante du système de connaissances agricoles constitué notamment par la recherche, la formation, la vulgarisation, la pratique et l'administration ». AGRIDEA a développé un site spécifique, remarquable (et une newsletter associée), pour le monde agricole baptisé « Protection des troupeaux »90 qui fournit une information très détaillée et d'ordre technique aux éleveurs et bergers sur toutes les mesures techniques et dispositions administratives relatives à la protection.
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L'Italie et l'Espagne de leur côté ont une communication qui est apparue à la mission moins structurée et plus axée sur la volonté de mieux faire connaître le loup, sa biologie, son éthologie, son développement, et de convaincre qu'il est utile et qu'il a sa place dans les régions concernées, malgré les dommages qu'il crée aux activités d'élevage. Elle semble en outre peu articulée avec le niveau local. En Italie, le projet LIFE Wolfalps (2013-2018, 6 millions d'euros), piloté par le Parco Naturale Alpi Marittime à la tête de 12 partenaires des régions alpines de l'Italie et de la Slovénie, a été consacré à 50 % à la communication. Le projet suivant, qui devrait inclure des partenaires français, devrait se consacrer beaucoup plus directement à la recherche de solutions techniques pour diminuer la prédation, et aux façons de diminuer les coûts et la quantité de travail associés aux moyens de prévention. Preuve s'il en est de l'importance de ce volet. En Espagne, comme en Italie, l'outil « parc à loups » est considéré également important, en termes de communication, toujours principalement pour mieux faire connaître et accepter le loup91. Dans les deux cas, « Centre du loup ibérique » en Espagne et « Centre faunistique hommes et loups » en Italie92, il a été choisi de ne présenter au public que des loups locaux (population ibérique ou population italoalpine) dans un milieu aussi naturel et proche que possible de celui fréquenté par l'animal dans ces deux pays. Il est intéressant que la Saxe ait fait au contraire le choix de ne pas faire de parc à loups. Elle considère en effet qu'un tel investissement est trop consommateur de moyens et surtout trop artificiel, alors que la priorité consiste pour la population à savoir cohabiter avec un animal présent dans le milieu naturel et qu'elle peut être amenée à croiser.
89 90 91 92
https://www.kora.ch/ http://www.protectiondestroupeaux.ch/fr/ Même si la difficile coexistence avec les troupeaux est abordée dans les deux parcs visités. http://www.centrodellobo.es/ et http://www.turismoentracque.it/vivere/uomini-e-lupi/
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4.2. En France, il y aurait un intérêt à mettre en place une politique de communication impliquant l'ensemble des acteurs
La mission rappelle que la communication est censée produire des éléments de discours à des fins précises, pour appuyer une thèse, aider à l'atteinte d'un objectif. Elle doit avoir comme base la production d'informations, c'est-à -dire d'éléments vérifiés et reconnus valides par tous les acteurs. Celle-ci ne doit pas être confondue avec la gouvernance (groupe national, groupes départementaux...), ni avec les actions de formation des éleveurs et/ou bergers, même si elle doit pouvoir être utile à l'une comme aux autres.
4.2.1. Définir un objectif de communication commun entre les principaux protagonistes serait l'idéal
S'il s'agit de communiquer sur la coexistence entre le loup et les activités humaines, au premier rang desquelles l'élevage, il convient d'impliquer dans l'élaboration de cette politique de communication l'ensemble des parties prenantes : État, élus locaux, organisations de professionnels agricoles, associations de protection de la nature. La mission conseille également d'impliquer les professionnels du tourisme et des sports de nature. Il importe en premier lieu, que ces acteurs définissent ensemble l'objectif de cette communication commune et les messages dont ils souhaitent que cette communication soit porteuse. Du point de vue de la mission, il s'agit de proscrire toute « communication prosélyte » pour ou contre le loup, sujet dépassé, mais bien de regarder la réalité en face, celle d'un équilibre complexe, et sans doute fragile, à atteindre. La mission propose la constitution un « groupe de travail communication », composé de membres de groupes loup départementaux, réunis sous la supervision d'un médiateur professionnel agréé par le groupe national loup, avec pour objectif d'élaborer une politique de communication commune sur la coexistence du loup et des activités humaines. La mission est consciente de la difficulté d'un tel travail. Elle pense néanmoins, qu'une relative méconnaissance des acteurs les uns envers les autres et des perceptions souvent biaisées du monde rural par le monde urbain (et vice-versa), compliquent sérieusement la recherche de solutions pragmatiques. Une telle démarche peut contribuer à dépasser ces clivages. Elle suppose que celle-ci intervienne, dans le cadre d'une affirmation décomplexée des engagements internationaux et européens de la France, mais aussi d'une clarification de la notion de « bon état de conservation de l'espèce » et de la vision prospective correspondante de la présence du loup sur le territoire national.
4.2.2. Le partage d'une base d'informations communes, validées et factuelles est indispensable
Au-delà de la méconnaissance des uns par les autres, une partie des controverses actuelles ou du traitement médiatique approximatif de la question, est parfois alimentée par une suspicion sur les informations disponibles ou sur le temps nécessaire pour leur partage.
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De gros progrès ont néanmoins été faits dans ce domaine ces dernières années et beaucoup d'informations sont désormais accessibles, principalement sur le site de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Auvergne Rhône-Alpes (AuRA) et sur celui de l'ONCFS, l'une et l'autre diffusant en outre des lettres d'informations régulières aux contenus denses. Pour autant, la présentation des informations via les deux sites internet cités plus haut, apparaît peu attractive dans sa forme et assez peu didactique, avec des tableaux de données parfois difficiles à déchiffrer. Ceci peut contribuer à entretenir l'idée que l'on ne facilite pas la mise à disposition du public de cette information. Très récemment (le 20 février 2019), l'ONCFS a lancé un nouveau site dédié aux informations sur le loup www.loupfrance.fr. Un réel effort de présentation a été fait. L'essentiel du contenu reprend les informations déjà disponibles sur le site institutionnel de l'ONCFS, mais la présentation qui en est faite ici est à la fois claire et attractive, ce qui constitue une évolution très positive. La mission considère qu'il y aurait un intérêt, à partir d'une telle base, à disposer d'un lieu de regroupement de toute l'information relative à la présence du loup en France et à sa coexistence avec les activités d'élevage. Une première étape pourrait ainsi consister à enrichir ce site des informations présentes sur le site de la DREAL AuRA, en les présentant dans le même esprit que le site actuel. Le plan national d'action (PNA) 2018-2023 prévoit d'ailleurs la création (dans le cadre de l'action 6.1) d'un « centre de ressources sur le loup ainsi que sur ses interactions avec le pastoralisme et l'environnement »93. Il convient de le mettre en place sans tarder.
4.2.3. Vers la création d'un « observatoire de la coexistence entre le loup et les activités humaines », autonome et mandaté de façon paritaire ?
La mission considère cependant qu'il serait utile que les acteurs se fixent une ambition plus large, afin d'aller au-delà de cette simple mise en commun de l'information. Le PNA prévoit d'ailleurs (p. 81) qu'une expérimentation soit conduite avec la création d'un « média particulier (site Internet, newsletter périodique, ou articulation des deux) dont le pilotage éditorial serait assuré de façon paritaire par les représentants des éleveurs et des représentants des APN ». 11.Recommandation (MAA, MTES) : favoriser la création d'un « observatoire national de la coexistence du loup et des activités humaines », confié à un acteur tiers disposant d'une autonomie suffisante par rapport à l'ensemble des acteurs du sujet et travaillant sur la base d'un mandat d'un « groupe de travail communication » issu des groupes loup départementaux.. Un tel observatoire aurait vocation à présenter en temps réel et de façon transparente, factuelle et accessible à un large public, l'ensemble des informations disponibles sur le sujet complexe de la coexistence du loup et des activités d'élevage (suivi biologique, éthologie, dommages, moyens de préventions, interventions sur l'espèce, bonnes pratiques, intérêt écologique, conséquences économiques, etc.). Il pourrait s'appuyer autant que de besoin sur le conseil scientifique du PNA pour la validation ou la vulgarisation des données issues de la recherche.
93
« Cette plateforme aura en particulier pour but de rassembler des données relatives à la situation du loup en France, aux études scientifiques réalisées et en cours, à des informations sur le loup et sur les mesures de protection, à des bonnes pratiques en matière de coexistence entre l'homme et le prédateur, à des transferts d'expériences nationales ou internationales. » PNA 2018-2023 p. 81.
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Conclusion
Les solutions techniques et financières, importantes, sont longuement débattues dans ce rapport. Elles ne répondront cependant pas à toutes les questions soulevées par le retour du loup en France. L'expansion rapide de l'espèce concerne désormais des zones telles que le Massif Central, région d'élevage prédominant, l'Aquitaine et l'Occitanie, deux fois plus denses en moutons que les Alpes et la région Provence-Alpes Côte d'Azur, avec de plus, des troupeaux bovins en élevage extensif de plein air, cibles potentielle des loups. Une proportion croissante du monde de l'élevage va donc être concernée par cette évolution. Ceci devrait conduire, du point de vue de la mission, à reconsidérer les modalités de suivi de la population lupine, de protection des troupeaux, de prévention des attaques par le recours aux tirs, mais aussi les moyens alloués aux actions correspondantes. Cela oblige aussi à se poser la question de la place que l'on souhaite accorder au loup, son bon état de conservation étant désormais largement assuré. Au-delà des recommandations formulées, la mission encourage l'État à innover dans deux directions. Tout d'abord, à l'heure où la plupart des acteurs souhaitent que les décisions se prennent au plus près du terrain, la question de la gouvernance mérite d'être examinée à nouveau. Le groupe national loup est essentiel comme instance de suivi du plan national d'actions 2018-2023 et comme lieu de dialogue entre les différents acteurs. La mission a, cependant, fait le constat que le rôle joué par les gouvernements régionaux des pays visités, en concertation étroite avec l'administration centrale et dans le respect des engagements européens ou internationaux, permet une meilleure prise en compte des particularités locales. Elle considère qu'il serait essentiel que les régions françaises, compétentes dans plusieurs domaines clef tels que la formation, le développement économique, la gestion des fonds européens, la biodiversité, puissent être associées plus étroitement à la réflexion et aux décisions. Il s'agit en effet de réfléchir, territoire par territoire, au type d'agriculture et plus largement d'activités humaines que l'on souhaite, avec leurs conséquences en termes de biodiversité, de paysage, de filières économiques, de formation des femmes et des hommes. Enfin, à l'heure où la fracture entre monde urbain et monde rural est exacerbée et où, malgré la méconnaissance fréquente de l'ensemble des enjeux, les acteurs expriment des positions très tranchées, l'idée d'engager un vrai dialogue sociétal semble pertinente. Il pourrait prendre la forme d'une conférence citoyenne qui serait de nature à aider à légitimer les décisions à prendre sur un sujet complexe et sensible. Thierry Boisseaux Christian Démolis Odile Stefanini-Meyrignac Michel Vallance
Ingénieur général Ingénieur général Ingénieure générale Ingénieur général des ponts, des eaux des ponts, des eaux des ponts, des eaux des ponts, des eaux et des forêts et des forêts et des forêts et des forêts
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Annexes
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1. Lettre de mission
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2. Fiches pays
2.1. Le Piémont italien, protection forte du loup, unités d'élevage de taille restreinte et accent mis sur le gardiennage
Verbatim : « le loup ne tue pas les moutons, il sélectionne les bergers ». FICHE Piémont (Italie) Éléments de contexte
Les Alpes italiennes, où le loup avait disparu au XX e siècle, contrairement aux Apennins où il a toujours été présent, sont en cours de recolonisation par le loup dans des proportions similaires à la France. La présence ovine y est cependant beaucoup moins importante avec une majorité de troupeaux de petite taille et en général regroupés tous les soirs pour la traite. Les budgets publics pour la prévention sont restreints et inconstants. Le système d'indemnisation des victimes ne fonctionne pas correctement, ce qui rend les statistiques de dégâts sans doute sous-estimées. Le tir légal du loup reste prohibé, mais de nombreux témoignages font état d'un braconnage important.
Carte d'identité Piémont
Superficie : 25 402 km² ; Sous-population concernée : italo-alpine Nombre de meutes/ loups : 33 meutes / environ 195 loups Statut du loup :
· ·
protégé par la convention Berne (espèce strictement protégée  annexe II) protégé par la directive Habitats
Mortalité loup : 15 à 20 % liée au braconnage-accidents de la route Nombre d'éleveurs/têtes ovins/têtes bovins : Élevage bovin très majoritaire (à plus de 80 % en alpage), environ 120 000 ovins, surtout troupeaux laitiers de taille moyenne de 300 têtes). Il a été indiqué à la mission que certains troupeaux à viande, de grande taille, seraient laissés en estive sans surveillance, ce qui permet de recevoir des primes PAC, sans se préoccuper de pertes liées au loup. Nombre de victimes :
· ·
mal connu depuis la mise en place du système assurantiel l'indemnisation des dommages 350 à 400 déclarées Région Piémont Ministère de l'environnement et de la protection du territoire et de la mer (MATTM) et son bras armé, l'ISPRA
Administrations en charge de la gestion :
· ·
Existence ou non d'un plan national loup : plan national loup sur 10 ans, nouveau plan en cours de discussion depuis 2017 et non encore validé par les régions fin 2018.
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finalité : guider la conservation et la gestion du loup par une approche intégrée, f ournir des orientations pour le rôle de l'Italie dans la coordination avec les pays de l'ensemble de la région alpine. objectifs de prévention du braconnage et des empoisonnements, de lutte contre les chiens errants et l'hybridation, de prévention des conflits, de gouvernance et de
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FICHE Piémont (Italie)
régulation par le tir, ce dernier faisant l'objet de débat entre les régions. Indemnisations des dégâts : système assurantiel depuis 2012. Constat par les vétérinaires de l'ASL (autorité sanitaire locale) jugé non satisfaisant par le projet Life Wolfalps. Les vétérinaires n'arrivent pas à se déplacer dans les 48 h, ce qui conduit à une sous-déclaration des dommages alors que le nombre de meutes progresse.
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup :
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Suivi par un réseau d'acteurs (services forestiers, agents des parcs, chasseurs - 500 personnes) sur la base de transects définis et à partir d'enquêtes de terrain opportunistes utilisant les techniques suivantes : recherche de traces dans la neige, excréments, poils ; pièges photos ; écoute des hurlements provoqué. Existence grâce au Projet Life wolfalps d'un manuel de poche « Instructions pour la collecte de signes de présence de loups dans les Alpes », de formations à la fois théoriques et sur le terrain, dispensées aux nouveaux observateurs (plus de 200).
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Estimation par la méthode CMR.
Analyses génétiques : Réalisées par un laboratoire américain (Piémont) et divers laboratoires italiens (reste de l'Italie). Pas de centralisation des données : existence d'une base de données piémontaise, pas de base de données italienne. Ambition de disposer d'une telle base inscrite dans le plan national loup.
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Mesures de protection (les mesures d'effarouchement sont jugées inefficaces) :
Financées par le PDR, mesure 10 (paiements agro-climatiques-environnementaux) et mesure 4 (investissements en actifs corporels : financement à 100 % de l'achat des chiens et des clôtures). Plafonnement à 5 000 /exploitation (moyenne entre 4 000 et 4 500 ). Enveloppe globale insuffisante : 300 k région/Europe) 3 volets : gardiennage continu du bétail, chiens, confinement nocturne avec clôtures électrifiées d'au moins 1,20 mètre de haut. Mise en oeuvre réfléchie au cas par cas jusqu'en 2012 avec un appui par un vétérinaire privé (un par province avec rôle d'accompagnement soit 8). Arrêt de l'accompagnement depuis 2012 faute de moyens. Projet de relancer cet accompagnement individuel dans le cadre du nouveau programme LIFE avec les vétérinaires des autorités sanitaires locales. Dans le cadre du projet Life Wolfalps 2013-2018, réalisation d'une enquête sur les dommages causés par le loup avec analyse de la vulnérabilité des systèmes d'exploitation suivie de réunions avec les régions / les éleveurs. Résultats dans la base de données. Conclusion en matière de pratiques agricoles dans l'annexe concernant les lignes directrices pour la gestion du loup avec distinction selon le type d'élevage (ovins / caprins et bovins). Protection des troupeaux bovins plus compliquée mais possible.
Loups en captivité et hybrides chien/loup
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Loups captifs : pas de mention dans le plan national loup. Existence d'un parc (visité) à Entracque (parc naturel des Alpes Maritimes) avec 4 ou 5 loups (aucune reproduction depuis sa mise en place). Loups hybrides : développement important du sujet dans l'annexe FRE9-01 (lignes
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FICHE Piémont (Italie)
directrices pour la gestion du loup dans les alpes italiennes) avec référence à un document établi en 2015 (directives pour la gestion de l'hybridation entre le loup et le chien-Bocci et al). Expériences de capture des hybrides nécessitant un accord de l'ISPRA, de stérilisation puis soit de relâcher dans la nature soit de rétention dans des installations agréées. L'Italie centrale, source d'émigration du loup italien vers les Alpes où le taux d'hybridation est inférieur à 10 %, est très concernée (très fort taux constaté sur quelques meutes). Le nouveau plan loup souhaite interdire la détention comme chien domestique du chien-loup tchécoslovaque et du chien de Sarloos.
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2.2. En Suisse, une gestion pragmatique fondée sur une priorité donnée à l'élevage ; le tir du loup intégré comme prévention
FICHE Suisse Éléments de contexte
La Suisse connaît depuis la fin des années 1990 le retour du loup (en provenance d'Italie et de France) alors que celui-ci avait totalement disparu au XX e siècle. L'importance de l'élevage dans la culture et l'identité suisses a conduit ce pays à adopter une stratégie assumée de limitation de l'expansion du loup, ce qui le conduit à questionner la convention de Berne. Les cantons ont un pouvoir d'initiative sur les tirs létaux. Parallèlement la protection des troupeaux est prise en charge très rigoureusement, tant dans les moyens d'aide que dans les moyens de conseil et de contrôle. Dans un contexte d'alpage en saison estivale et de troupeaux de petite taille, les dégâts constatés pour 3 à 4 meutes présentes sont moins intensifs qu'en France du fait d'un moins grand nombre de victimes par attaque. Enfin, les témoignages de braconnage dans certains cantons ne sont pas rares.
Carte d'identité
Superficie : 41 285 km² Nombre de meutes/ loups : 3 ou 4 meutes / environ 50 loups Statut du loup : protégé par la convention Berne (espèce strictement protégée  annexe II) ; protégé par l'ordonnance fédérale sur la chasse et la protection des mammifères et des oiseaux sauvages (OchP), modifiée substantiellement en 2012, 2013 et 2015 pour les mesures de protection et la régulation du loup. Nombre d'éleveurs/têtes ovins/têtes bovins :
· ·
8 000 éleveurs de moutons dont 90 % de doubles actifs ; · 400 000 moutons dont la 1/2 est estivée ; taille moyenne des troupeaux montant en estive : 500 têtes ; · 700 000 vaches. Nombre de victimes : environ 250 animaux de rente (ovins en majorité - pas d'attaque sur bovins).
·
Administrations en charge de la gestion : · office fédéral de l'environnement (OFEV) ; · cantons. Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup : groupe de travail national grands prédateurs ; · associations / fondation (KORA pour le suivi de population, AGRIDEA pour la mise en oeuvre des mesures de protection, « Chiens de protection des troupeaux Suisse » pour l'agrément des chiens et la formation des éleveurs). Existence ou non d'un plan national loup : plan national loup (dernière version 2016) avec objectifs de protection du loup, d'information du public, de gestion des conflits avec l'ensemble des acteurs, de maintien de l'activité d'élevage, de définition de critères autorisant le tir.
·
Indemnisations des dégâts : 80 % par l'OFEV et 20 % par les cantons (environ 100 k/an).
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FICHE Suisse Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : la fondation KORA travaille de façon très étroite avec les cantons qui recueillent tous les indices de présence du loup grâce à une démarche dite « opportuniste » avec :
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des prélèvements d'échantillons dans la salive récoltée sur des animaux de rente ou sauvages qui ont été prédatés par le loup ou dans des crottes / poils / urines recueillies dans la nature ;
des photos provenant de pièges photographiques ou directement de personnes ayant rencontré un loup. Établissement tous les trimestres par la KORA d'un rapport sur la situation du loup en Suisse.
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Analyses génétiques réalisées à l'université de Lausanne (département d'écologie et évolution dirigé par Luca Fumagalli) permettant de déterminer le nombre minimum de loups en Suisse. Suite à la demande des cantons, le nombre d'analyses réalisées a plus que doublé (passage de 350-400 à 600-1000 échantillons par an). Actualités sur méthodes d'analyse : le département d'écologie et d'évolution de l'université de Lausanne a, par deux fois, pris une initiative en faveur d'une collaboration inter-laboratoires tout d'abord pour constituer une population de référence unique, puis pour passer de concert à de nouvelles techniques d'analyses. Faute de réponse, le laboratoire de l'université de Lausanne a abandonné l'ambition d'avoir un échantillon de référence et changé de méthodes d'analyses pour améliorer le génotypage de microsatellites en adoptant le séquençage à haut débit (HTS). Vient d'être publié un article scientifique sur le taux d'hybridation loup X chien des 115 individus de la base de données suisse : « Two decades of non-invasive genetic monitoring of the grey wolves recolonizing the Alps support very limited dog introgression » - Scientific Reports volume 9, Article number148 (2019).
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Prévues par la directive du 9 octobre 2017. Coût annuel de 3 millions d'euros. Choix de l'OFEV :
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encourager financièrement les mesures de protection de façon à ce qu'elles soient supportables pour les agriculteurs. Les mesures concernent : la réalisation par le canton du plan de pâturage (diagnostic de vulnérabilité des unités pastorales) ; l'élevage /éducation de chiens de protection de troupeaux enregistrés officiellement ou à l'importation d'individus issus d'une association d'élevage reconnue ; la détention à l'année de chiens de troupeau ; l'électrification des clôtures ; l'entretien et au contrôle quotidien des clôtures dans des conditions difficiles ; la création d'un enclos de nuit ; l'acquisition par le canton de kits d'urgence protection des troupeaux permettant de faire face à une présence soudaine du prédateur. conditionner les indemnisations à la mise en oeuvre effective des mesures de protection ; considérer les tirs comme une mesure éducative de prévention venant compléter les mesures de protection.
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Rôle des cantons : définir les mesures de protection des troupeaux qu'ils jugent nécessaires, appropriées et raisonnables et pour cela :
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informer les agriculteurs se situant dans un secteur exposé aux risques de prédation,
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FICHE Suisse
sur la présence et les mouvements des prédateurs ;
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conseiller sur les mesures appropriées (le conseil se base d'une part sur la réalisation d'un plan de pâture (diagnostic) par le technicien pastoral du canton analysant le risque de prédation et classant les estives en 4 catégories : difficiles à protéger, protégeables avec adaptation au niveau gestion, protégeables avec les moyens existants, déjà protégées et d'autre part par une visite individuelle de l'exploitation en présence de l'agriculteur si la situation nécessite une adaptation complexe).
La mise en oeuvre des mesures de la responsabilité de l'agriculteur qui bénéficie de visites « conseil-contrôle » du technicien pastoral et d'un salarié de l'association AGRIDEA. Le contrôle est par contre obligatoire dès lors qu'il y a attaque et que celle-ci doit être imputée pour calculer le contingent de tir. Soutien parallèle de l'office fédéral de l'agriculture (OFAG) structure en charge du soutien à l'agriculture (paiements directs, contributions au paysage...) qui facilite la mise en oeuvre des mesures de protection des troupeaux. Par exemple différenciation de la contribution relative à l'estivage des moutons selon le type de conduite (non plafonné) : - 400 francs suisses (FS) par UGB pour une estive gardée en permanence par un berger ou pour des moutons parqués protégés par un chien de protection officiellement enregistré ; - 320 FS par UGB pour des moutons estivés en pâturage tournant non protégés par un chien de protection ; - 120 FS par UGB pour un estivage dans un pâturage permanent. Tirs de loup : envisageables dans des conditions très encadrées par l'ordonnance du 29 février 1988 sur la chasse et la protection des mammifères et des oiseaux sauvages (autorisation accordée au niveau cantonal pour le tir d'un loup, au niveau fédéral pour le tir d'une meute) lorsque les individus causent des dégâts considérables. Des mesures raisonnables pour protéger les troupeaux doivent avoir été prises en amont. Sur 115 spécimens de loup identifiés génétiquement en Suisse depuis sa réapparition, 23 ont été tués (légalement ou non). Réflexions en cours concernant la régulation : modification de l'ordonnance donnant aux cantons la possibilité, après avoir consulté l'OFEV, compétent en la matière, de désamorcer en amont les conflits entre les exigences de certaines espèces protégées et les intérêts de la population par des interventions régulatrices préventives, tout en restant dans l'esprit de la convention de Berne.
Loups en captivité et hybrides chien/loup
Les deux sujets ne sont pas sensibles.
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Parcs à loup : un seul parc avec 4-5 loups de la sous-population balte, identifiés génétiquement. Hybrides : des travaux récents de Lucas Fumagalli démontre le très faible taux d'hybridation (< 2%). Une réflexion est en cours concernant l'interdiction de posséder des chiens hybrides de loup comme races de chiens domestiques.
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2.3. La Castille et Léon, siège de la population lupine la plus nombreuse d'Europe en présence d'un élevage abondant ; la base de la prévention est le « Mâtin d'Espagne »
FICHE Castille et Léon (Espagne) Éléments de contexte
L'Espagne a toujours conservé une population importante de loups, même si celui-ci était classé comme « espèce nuisible » jusqu'en 1971. Le changement de statut de l'espèce (différencié selon les zones du pays) a permis une nouvelle dynamique de colonisation qui fait de l'Espagne le pays d'Europe qui détient une des plus grandes populations de loups. Si la cohabitation avec l'élevage est correcte dans les zones où le loup a toujours été présent, la recolonisation récente du sud du Duero pose d'importants problèmes principalement avec l'élevage extensif de bovins viande, non gardés et de plus en plus attaqués (60 % des victimes désormais, en forte croissance). La conduite de troupeaux ovins sur toute l'année en parcours ouverts "méditerranéens" pose moins de problèmes lorsqu'elle est associée à un gardiennage humain et à la protection de chiens bergers (Mâtin d'Espagne) en nombre suffisant. Les éleveurs ont peu recours au système assurantiel en vigueur pour l'indemnisation des dégâts, ce qui conduit probablement à une sous-estimation des dommages.
Carte d'identité
Superficie : Castilla y León, 94 226 km² , 26 hab./km² ; Espagne, 505 911 km², 97 hab./ km² Sous-population de loups concernée : ibérique (Canis lupus signatus) Nombre de meutes/ loups : 191 meutes, 162 au nord du fleuve Duero et 29 (doublement en 15 ans) au sud (estimation 2018). Recensement 2012/2014, 179 meutes - entre 900 et 1600 loups (Espagne entière : 297 meutes  entre 1500 et 2700 loups - disparu en Sierra Morena  présence rare en Catalogne de loups d'origine italo-alpine). Statut du loup : classé nuisible jusqu'en 1971 ; espèce cynégétique ensuite, convention de Berne ratifiée en 1986, sous réserve que le loup (en Espagne) soit inscrit à l'annexe 3 (espèce protégée, peut être régulée si état de conservation favorable), · transposition, dans le droit espagnol, de la directive européenne HFF (1995/1997) : au nord du fleuve Duero, loup inscrit à l'annexe V (chasse possible) ; au sud du Duero, loup inscrit à l'annexe IV (protection stricte avec dérogations possibles), · chaque communauté autonome est néanmoins compétente pour déterminer le statut précis de l'espèce sur son territoire (cynégétique, protégée, soumis à plan de gestion, régime général des espèces sauvages...). Nombre de têtes ovins / caprins et bovins et taille moyenne des troupeaux :
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3 200 000 ovins et caprins - 1 300 000 bovins, taille moyenne des troupeaux : 60 têtes pour les bovins, 250 pour les ovins, élevage essentiellement extensif.
Nombre de victimes : 2 000 attaques causant 3 000 victimes dont 60 % de bovins ; 15 % des attaques au Nord du Duero, 85 % au sud (inversement proportionnel à la présence du loup). Chiffres inférieurs à la réalité, les éleveurs ne déclarant pas systématiquement les dégâts. Attaques en forte croissance sur le front de colonisation. Administrations en charge de la gestion :
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au niveau national, seul le ministère de la transition écologique est compétent ; il
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FICHE Castille et Léon (Espagne)
assure principalement une fonction de coordination,
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la gestion réelle relève de la responsabilité des autorités régionales (l'Espagne compte 17 « communautés autonomes »).
Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup : chaque communauté autonome s'organise comme elle le souhaite ; la coordination État central / Régions s'organise autour d'un groupe de travail entre techniciens, d'un comité technique avec des responsables de rang supérieur puis entre directeurs généraux (ministères central et régionaux) et enfin entre ministres central et régionaux. En Castille et Léon, création en 2017 d'une « table du loup » regroupant les divers secteurs socio-économiques concernés pour un échange de points de vue au moins une fois par an. Existence ou non d'un plan national loup : pas de plan national mais une « stratégie pour la conservation et la gestion du loup en Espagne » de 2004/2005 (en cours de révision), censée être déclinée par des plans de gestion élaborés par chaque communauté autonome. Plan de gestion de Castille et Léon (2016) : vise à assurer l'état de conservation favorable du loup tout en contrôlant la population d'une espèce qui génère des conflits, à défendre l'élevage extensif, établir un espace de dialogue « la table ronde du loup » et acquérir une meilleure connaissance et un suivi plus scientifique de la population de loup en Castille et Léon. Attaqué en justice par une association environnementale, il a été annulé en première instance en février 2018, puis annulé définitivement par le tribunal suprême fin décembre de la même année. Est principalement en cause la possibilité de chasser le loup au nord du Duero. Indemnisations des dégâts : Pour l'ensemble de l'Espagne, pas d'indemnisation directe par l'État central. En Castille et Léon, pas d'indemnisation directe par la communauté autonome (sauf sur des terrains gérés par l'administration comme les zones de chasse appelées « réserves de chasse » en Espagne. Possibilité pour les éleveurs de recourir à un système d'assurance, subventionné par le ministère central, avec en outre prise en charge par la communauté autonome de tout ou partie de la franchise par sinistre avec paiement sous 25 jours. Beaucoup d'éleveurs renoncent à souscrire une telle assurance (méconnaissance, complications...). Barème d'indemnisation par ovin : 120 . Le budget indemnisations est passé de 850 k en 2017 à 1,8 M en 2018 pour 4 200 têtes (essentiellement des bovins). Réflexion en cours sur la mise en place d'un fonds mutualisé alimenté par les éleveurs et partiellement abondé par l'État pour compenser les dommages.
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : ministère de la transition écologique. Cependant, depuis 1991, transfert de la plupart des compétences aux communautés autonomes, chargées, chacune en ce qui la concerne, du suivi biologique de l'espèce. Difficulté d'avoir un panorama précis à l'échelle nationale. Un recensement national, coordonné par le ministère tous les 10 ans, compile les résultats des recensements de chaque communauté autonome. Le recensement 2012/2014 est le premier réalisé de manière coordonnée sur tout le pays. Il a été basé sur l'évaluation du nombre de meutes, sur leur distribution et sur leur niveau de reproduction. En Castille et Léon : mobilisation de 700 personnes (pour près de 100 000 km²), principalement agents de terrain du gouvernement régional. Quadrillage du territoire en unités de 10X10 km. Utilisation de transects, de points d'observation, de hurlements provoqués, pièges photographiques, ainsi que tous types d'indices collectés directement ou indirectement (attaques comprises). L'organisation de l'ensemble et le traitement des données sont externalisés (entreprise « Consultora de recursos naturales » - http://www.crnaturales.com/) et supervisés par un comité scientifique régional. Depuis 2014, alimentation en continu d'une base de données (INFOLOBO), gérée par le même prestataire et accessible aux seuls agents de la région habilités à partir de fiches d'observation/récolte d'indices. De nombreuses données sont récoltées « au fil de l'eau ». En fonction de besoins ponctuels (besoin d'informations sur telle ou telle meute, suspicion de
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FICHE Castille et Léon (Espagne)
présence d'une nouvelle meute...), des recherches d'indices orientées sont effectuées. Quelques analyses génétiques ont commencé à y être incorporées. Un premier travail de recherche, sur un territoire de 4 378 km², a été récemment conduit, combinant l'utilisation d'un modèle de capture / recapture spatial et des analyses génétiques ( https://www.nature.com/articles/s41598-018-20675-9 ).
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Le mâtin d'Espagne est le mode principal de protection des troupeaux ovins en parcours libre sur des grandes surfaces de plateaux plus ou moins enforestés et embroussaillés. 100 000 mâtins sont « en service » pour toute l'Espagne. Très importante production de chiots avec échanges entre les éleveurs (brassage génétique). Il a été dit à la mission qu'au moins 1 000 chiots/an de bonne souche pourraient être exportés pour la France. Aucun appui financier n'existe au niveau national pour aider les éleveurs à adopter des moyens de protection. Des recommandations / suggestions techniques sont consultables sur le site internet du ministère de l'écologie : https://www.miteco.gob.es/es/biodiversidad/temas/conservacion-de-especies/especiessilvestres/ce-silvestres-interacciones-medidas.aspx Protection des ovins/caprins : (1) - regroupement nocturne « traditionnel » avec adjonction, autour du parc nocturne, d'une clôture électrifiée de 1,80 à 2 m de hauteur formée de 6 à 8 fils de 2 mm de diamètre de plus en plus rapprochés vers le bas ou de filets de 1,80 à 2 m de hauteur. Électrification via batterie rechargée par un panneau solaire avec 9,2 kV de voltage de sortie. Coût investissement estimé : 850 pour une exploitation moyenne ; (2) - utilisation de 2 chiens de protection par groupe de 100 animaux, soit 6 à 8 chiens pour 1 000 ovins. Coût : 500 pour l'achat d'un chien et 300 /an pour son entretien. Protection des veaux allaitants : création d'enclos de regroupement des veaux (20 à 25 veaux par demi hectare) avec (1) - clôture maillée résistante de 2 à 2,5 m de hauteur et enterrée de 0,5 à 1 m de profondeur ; (2) - électrification (contre le loup et contre les vaches) avec deux fils, l'un à l'extérieur à 0,25/0,3 m de hauteur, l'autre à l'intérieur à 0,6/0,9 cm de hauteur et électrification à 9kV ; (3)  2 systèmes d'accès (sas) sélectifs qui laissent passer les vaches, mais pas les veaux. L'enclos doit être équipé d'un abreuvoir, d'une mangeoire et d'un abri. Coût approximatif : 12 000 pour une exploitation moyenne. Protection des génisses : système similaire à celui décrit ci-dessus avec une seule porte qui peut être programmée pour s'ouvrir le matin et se fermer le soir, les génisses étant rentrées pendant la nuit. Coût approximatif : 6 000 pour une superficie de 0,5 ha abritant 15 à 20 génisses. Protection des bovins adultes : utilisation de chiens de garde de race « mâtin d'Espagne ». Nécessité de 2 à 4 chiens par groupe de 100 animaux. Les chiens peuvent être équipés de colliers (« de carlancas ») afin de les protéger contre des morsures au cou par le loup. Coût : 500 pour l'achat d'un chien et 300 /an pour son entretien.
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Chaque communauté autonome peut décider d'apporter un appui financier pour des moyens de protection, mais peu le font de manière régulière à ce jour. Ces aides, quand elles existent, sont limitées aux surcoûts liés à la présence du loup, limitées aux investissements et plafonnées. En Castille et Léon, le plan de gestion du loup prévoyait cette possibilité.
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FICHE Castille et Léon (Espagne)
Tirs de loups : Les tirs létaux sont clairement considérés comme un des moyens de prévention des dommages. La stratégie pour la conservation et la gestion du loup en Espagne de 2005 indique que la chasse (au nord du fleuve Duero) est un moyen d'atteindre les objectifs de taille et de répartition géographique de la population de loups tout en garantissant un état de conservation favorable des populations. Elle est prévue dans le cadre de plan d'aménagement cynégétique avec établissement de quotas de tirs zone par zone. Elle peut permettre une valorisation économique importante (jusqu'à 12 000 à 14 000 /loup tué). En Castille et Léon, au nord du Duero, les quotas sont limités à 10 % de la population estimée (par le nombre de meutes). Ils peuvent atteindre 18 % dans des zones qui subissent de fortes attaques (si des moyens de prévention sont mis en place) ou être diminués, voire réduits à zéro, si le bon état de conservation de l'espèce est menacé. Au sud du Duero, le tir de loups ne peut être confié qu'à des agents de la communauté autonome ou sous leur supervision stricte, et effectué conformément aux dispositions nationales pour les espèces protégées (par exemple dans le cas de dommages trop importants au bétail).
Loups en captivité et hybrides chien/loup
La question des hybrides chiens/loups et des loups en captivité n'est pas un sujet sensible en Espagne. Le pays compte peu de centres hébergeant des loups captifs. Leur ouverture est soumise à autorisation. Les loups détenus doivent être identifiés et marqués. Les chiens errants ne portant aucun signe d'identification doivent être éliminés. Le phénomène d'hybridation est considéré comme rare. Des résultats publiés en 2012 sur un échantillon de 200 individus a montré que 4 % d'entre eux étaient des hybrides. Le phénomène avait été identifié comme plus important en Andalousie où la population de loups était très réduite, mais il semble que la population lupine andalouse soit désormais éteinte. Lorsqu'il est avéré qu'un individu est un hybride, il peut être éliminé, ce qui reste cependant très théorique.
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2.4. En Allemagne, le seuil des 500 loups a été franchi avec peu de dégâts. Les ovins sont parqués en terrain le plus souvent dégagé et la clôture électrique est le moyen de protection numéro un
FICHE Saxe (Allemagne) Éléments de contexte
L'essentiel des loups se situe au Nord de l'Allemagne, récemment recolonisée alors que la population lupine avait disparu de ce pays au XX e siècle. Cette zone, relativement plane, présente un contexte d'élevage en enclos de pâturage, à l'année, jour et nuit en été, avec déplacement régulier des clôtures. La taille habituelle des troupeaux atteint quelques centaines de bêtes. Une grande rigueur est apportée à l'étanchéité des clôtures, condition nécessaire pour être indemnisé. Les chiens de défense, optionnels, sont retenus par certains éleveurs, encore peu nombreux, comme garantie supplémentaire. Avec 600 loups présents, le très faible niveau de dégâts constaté atteste de l'efficacité du système de protection mis en place. Cependant, le surcroît de travail pour les éleveurs (lié notamment au déplacement des clôtures), le danger perpétuel que fait courir le loup aux élevages au fur et à mesure que la population de loups augmente, entraînent une montée de la contestation et une demande de recours simplifié à des tirs létaux.
Carte d'identité
Superficie : 357 000 km² (Saxe : 18 400 km²) Population de loups concernée : germano-polonaise principalement (nord et est du pays) Nombre de meutes/ loups : 1ère meute en 2000. 2018 : 73 meutes + 30 couples (18 meutes + 4 couples en Saxe), soit 500 à 600 loups. Évolution : + 30 % par an. Statut de protection du loup :
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international : convention de Berne (espèce strictement protégée  annexe II), et convention de Washington (annexe II) ; UE : règlement européen 338/97 (annexe A), directive HFF : annexes II et IV, art 12 et 16 (16.1 sans le « e ») ; fédéral : loi de protection de la nature (BnatSchG, paragraphe 7, alinéa 2 et 43, paragraphe 44) ; régional : droit régional de la chasse (Annexe 2) ; l'état de conservation du loup serait atteint pour un effectif de 1 000 loups adultes (rapports UE et UICN). 1 200 000 ovins en Allemagne ; 134 000 en Saxe (+ 12 000 caprins) ; Saxe : 1 000 éleveurs amateurs + 70 professionnels (taille des troupeaux : 500600 têtes).
Nombre d'ovins et éleveurs :
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Nombre de victimes : 1ers dégâts en 2002. En 2018 :1 790 victimes (87 % ovins-caprins ; 3 % bovins) ; 232 en Saxe. Une meute en Basse-Saxe spécialisée sur des bovins adultes. Administrations en charge de la gestion : la protection des troupeaux est traitée au niveau fédéral ; la gestion du loup au niveau des Länder.
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Administrations fédérales : ministère fédéral de l'environnement (BMU) ; office fédéral pour la protection de la nature (BFN) ; ministère fédéral de l'agriculture (BMEL) ;
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FICHE Saxe (Allemagne)
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Saxe : ministère régional de l'environnement et de l'agriculture (SMUL). Ministères séparés dans certains autres Länder. centre fédéral de documentation et de conseil sur le loup (DBBW) ; centre LUPUS ; Institut Leibniz, Institut Senckenberg (génétique). absence de comité loup au niveau fédéral ; Saxe : 2 groupes de travail (éleveurs / ministère et chasseurs / protecteurs de la nature) ; Saxe : la chambre d'agriculture de Saxe conseille les éleveurs sur le loup.
Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup :
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Existence ou non d'un plan national loup :
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plan fédéral datant de 2014 ; Le Bundesrat demande en ce moment au gouvernement fédéral de transposer l'intégralité de l'article 16.1, de fournir un bilan annuel de l'état de conservation, d'introduire une prime aux animaux de pâturage et/ou d'entretien du paysage, et de mettre en place avec les Länder, un centre national de protection des troupeaux ; Saxe : 1er plan de gestion en 2009 ; révision en cours (discussion sur la régulation avec les fédérations agricoles). conditionnées, depuis 2013, au fait d'avoir mis en place une clôture électrique, avec ou sans chien (pas de tradition avec berger). 6 employés de l'État (les vétérinaires ont refusé de le faire), répartis par circonscription, réalisent les constats et dispensent des conseils. Quelques prélèvements génétiques sont pratiqués en cas de doute ; montant total des indemnisations: 0,2 M pour toute l'Allemagne (2017) ; Saxe : seulement 7 600 /an (200 par brebis ; bouc, sur facture) ; 80 % des dégâts concernent des éleveurs amateurs qui ne réclament pas d'indemnisation.
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Indemnisations des dégâts (Saxe) :
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : le DBBV rassemble et présente l'ensemble des données régionales (effectifs et dégâts). Un contrat de collaboration le lie avec plusieurs instituts (dont LUPUS, Institut SENCKENBERG, Institut de Leibzig). Structure commune pour tous les Länder, mais grande différence de moyens entre Länder. Méthode : procédure de collecte standardisée au niveau national : critères transfrontaliers SCALP (Lynx) ou WAG (Loup). N'importe qui peut collecter des indices. 5 400 indices/an (dont 3 200 photos). Carte (présence/absence) quadrillage 10 kmX10 km. Données mises à la disposition du public sur le site « dbb-wolf.de », y compris la localisation des attaques et leur nombre. Analyses génétiques : Pas de CMR pratiquée. Quelques suivis génétiques des populations, en particulier pour déterminer les liens de parenté entre meutes ou d'éventuelles hybridations loup/chien (2 cas recensés pour toute l'Allemagne, en 2003 et 2017) et déceler des mouvements migratoires. 4 000 échantillons analysés depuis 2000  résultats sous 4 à 5 semaines. Un laboratoire de référence : l'institut SENCKENBERG. Échanges récents de données génétiques avec la Pologne, le Danemark, les Pays-Bas, et l'Autriche. Actualités sur méthodes d'analyse : les élus souhaiteraient connaître un nombre de loups (impossible à estimer avec les techniques actuelles). Aucun chiffre volontairement avancé à ce sujet (uniquement, un nombre de meutes ; critère qui est jugé suffisant).
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FICHE Saxe (Allemagne)
Échanges scientifiques avec Pologne, Tchéquie, pays scandinaves, Danemark, Pays-Bas et Autriche (plutôt qu'avec les autres pays de l'arc alpin)
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Traditionnellement pas de bergers. Clôtures électriques (2,5-3,5 kV) de 90 cm (en renforcement du grillage classique, non électrifié, qui existait avant l'arrivée du loup) ; voire 120 cm dans les cas les plus critiques (si cela ne suffit pas : demande de tir). En Saxe (absence de transhumance), les animaux ne sont pas rentrés le soir en été. Beaucoup de pâturage tournant avec filets mobiles (électrifiés) déplacés au fur à mesure. Une directive fédérale fixe un minimum 3 chiens par troupeau. Dans les faits, encore peu de chiens utilisés (seulement 15 % des élevages professionnels en Saxe). Races les plus courantes : Berger des Abruzzes, Berger des Pyrénées, mâtin d'Espagne. Apprentissage et certification assurée entre bergers. Dans le Brandebourg, il existe une fédération des éleveurs de chiens de protection (pas d'aide publique à l'entretien des chiens). Un bon chien de protection peut coûter 5 000 Aides : 80 % de l'investissement par le Land (bientôt 100 % avec UE). Environ 300 000 par an d'aides en Saxe, 1,3 M pour toute l'Allemagne (2016). Tirs de loup : envisageables en théorie dès l'instant qu'un « loup à problèmes » est identifié. Tir par un chasseur agréé. Dans les faits : un seul tir en Saxe (aucun en Brandebourg). En 2018, le tir d'une meute posant des problèmes depuis 3 ans (sautant les clôtures) a été empêché suite à un recours juridique. Réflexions en cours concernant la régulation : Depuis 2 ans, demande à l'UE d'autoriser une régulation ; refus de l'UE de modifier le règlement ; solution à trouver en Allemagne (l'État doit présenter un rapport juridico-scientifique prouvant que la population est bien au minimum viable). Interventions régulatrices préventives : néant, mais souhaitée par certains à la suite de plusieurs cas de rencontre avec les loups en zone urbaine : Dresde, Brandebourg.
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2.5. En Pologne, une population de loups importante, strictement protégée, mais un élevage ovin très restreint
FICHE Pologne Éléments de contexte
La Pologne dans son ensemble a toujours vécu avec le loup, mais celui-ci était fortement persécuté jusqu'à la chute du régime communiste. Il est strictement protégé depuis 1998, ce qui a conduit à une forte progression de ses effectifs. Les dommages sont en hausse malgré la place très marginale de l'élevage ovin/caprin en Pologne. Peu de moyens de protection ont été mis en place à ce jour, dans un contexte (climat, topographie, modes d'élevage...) très proche de celui de l'Allemagne. Si la protection du loup est largement plébiscitée par la population polonaise dans son ensemble, qui en conçoit une fierté, il n'y a pas de consensus entre les ministères en charge de l'environnement et de l'agriculture, notamment sur la question d'une éventuelle régulation de l'espèce.
Carte d'identité
Superficie :312 679 km² Nombre de meutes/ loups : 2 390 (estimations 2017) répartis en 3 sous-populations : Balte (500 stable), Carpatique (1 000 stable), germano-polonaise (600 en hausse). Doublement depuis l'instauration d'une protection stricte (1998) Statut du loup : · exclu nommément de la convention Berne, en annexe V de la directive HFF ;
·
autrefois chassable, protection stricte depuis 1998, protégé par la loi du 16 avril 2004 sur la protection de la nature (État polonais responsable, financièrement, des dégâts). Art. 126 du Nature Conservation Act et Règlement du 12/10/2011 pour les mesures de protection/prévention.
Importance de l'élevage : têtes ovins / têtes bovins : · moins de 250 000 chèvres et moutons ;
·
6 millions de bovins.
Nombre de victimes : · environ 2 000 victimes indemnisées (180 k/an), ovins en majorité.
·
quelques attaques sur bovins (9 %).
En Pologne le loup ne représente que 3 à 4 % des indemnisations liées à la faune protégée (5 M/an), le principal responsable est le castor. Administrations en charge de la gestion : · direction générale de la protection de l'environnement (GDOS), sous tutelle du ministère chargé de l'environnement (les directions régionales effectuent les constats de dommages) ;
·
inspectorat général de la protection de l'environnement (GIOS) chargé du suivi des populations.
Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup : · association (nationale mais non financée par l'État) « Loup » qui fait des comptages et fournit de l'information sur internet (cartes, statistiques de suivi, etc.). S'intéresse également à la pacification des conflits loup-homme. Existence ou non d'un plan national loup : Non
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FICHE Pologne
Indemnisation des dégâts : par l'État polonais, après constat d'expertise. À partir de 2019 l'indemnisation sera conditionnée à la présence de mesures de protection (en conformité avec la réglementation européenne sur les aides d'État). Impératif de ne pas avoir de troupeaux dehors la nuit sans chiens de protection.
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
La Pologne essaie de converger avec les méthodologies allemandes de suivi, mais cet objectif n'est pas atteint pour l'instant. Les recensements sont annuels depuis 1999, basés sur des indices kilométriques d'abondance (IKA), réalisés par des agents forestiers d'État ou de parcs nationaux. Ils donnent des estimations discutées au niveau des districts avec les chasseurs et les scientifiques. L'aire de répartition géographique ne pose pas de problème. L'estimation numérique en revanche, manque de fiabilité : trop haute pour les naturalistes, trop basse pour les chasseurs. Une méthode solide, utilisant la génétique et les statistiques (CMR comme en France) a été mise en place pour 2017-2020. Les premiers résultats, pas encore validés, ne sont pas disponibles début 2019. Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : · Inspectorat Général de la Protection de l'Environnement (GIOS) ;
·
pas de collaboration officielle avec l'Association nationale « Loup » (indépendante) qui fait ses propres suivis. Collaboration en revanche sur le repérage de l'hybridation loup-chien.
Analyses génétiques : elles ont débuté en 2016 avec un financement de l'UE. Réalisées sur 10 zones échantillon (type forêt de Bieloweza) permettant de déterminer le nombre de loups par la technique CMR. (900 échantillons récoltés, 40 % de génotypes exploitables). Très forte incertitude relative, car les résultats sont très hétérogènes (Bieloweza : 80 génotypes différents qui donneraient une densité -peu vraisemblable- de 9 loups/100 km2). Par ailleurs, des analyses sont menées pour détecter l'hybridation (par exemple sur des portées de louveteaux). Présence assez abondante de chiens errants ensauvagés (quelques milliers) qui attaquent également les ovins.
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Une période d'apprentissage et de conseil aux éleveurs a débuté récemment, avec un apport de financement sur les investissements : électrification des clôtures (achetées et fournies par l'État), achat de chiens de protection (à 100 %). Seulement quelques centaines de milliers d'euros ont été dépensés en 2018 (pour la part nationale). La principale inquiétude concerne les dangers pour l'homme, avec de plus en plus de signalements de loups en zone habitée. Un premier cas de morsure est survenu en 2018 (depuis 1945), comme en Allemagne, ayant déclenché une très vaste campagne d'information par le ministère de l'environnement, pour rassurer (beaucoup de rumeurs se sont mises à circuler). Le loup a néanmoins une image très positive en Pologne. Tirs de loup : Seul un très petit nombre de dérogations pour le tir du loup sont délivrées chaque année par le ministère, avant tout pour des motifs de sécurité publique. 1 seul tireur autorisé (chasseur).
Année 2016 2017 2018 Nombre de dérogations 3 2 9 Nombre maximum d'individus à prélever 5 4 27 Prélèvement réalisé 1 3 8
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FICHE Pologne
Pas de recours des associations mais certaines comme le WWF demandent à participer à la prise de décision. Réflexions en cours concernant la régulation : le ministère de l'environnement ne voit pas la nécessité d'une régulation par tir, il ne croit pas que le loup puisse « exploser » en Pologne et pense qu'il s'auto-régulera de lui-même par rapport aux proies sauvages disponibles (il fait très peu de tort pour l'instant à l'élevage, 4 % de son régime alimentaire). Le ministère de l'agriculture et les représentants agricoles, sont d'un tout autre avis et en conflit avec lui sur cette question. Les chasseurs ont comme objectif le retour du loup dans les espèces chassables.
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3. Liste des personnes rencontrées
(En cas d'entretiens multiples n'est mentionnée que la première date de rencontre ; + Participation à la réunion du groupe national loup et activités d'élevage du 24 septembre 2018 ; * entretien téléphonique ou par visioconférence) La mission remercie tout particulièrement les conseillers agricoles des ambassades de France en Allemagne et en Pologne pour leur appui (notes de synthèse sur le sujet et aide à l'identification de contacts dans ces deux pays).
Pays
Nom
Prénom
Institution
Gfonction
Date entretien
Allemagne Adams Allemagne Blanke Allemagne Blazer Allemagne Brizay* Allemagne Gehrmann Allemagne Gröger Allemagne Keiser Allemagne Kieslich Allemagne Kittel Allemagne Klose Allemagne Leinfelder Allemagne Reinhardt Allemagne Tankert Allemagne Tiesmeyer Allemagne Uhlemann Allemagne Walther Allemagne Wiedmer Espagne AgustÃn Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne AymerichHuyghues Ballesteros Cornejo Barreñada Sanz Doadrio Villarejo GarcÃa DomÃnguez GonzálezQuirós Hernández Palacios López-Bao Losada Palenzuela Muñoz
Gerhard Philipp Sandra Arnaud Claudia Thomas Imke Frank Melanie Siegfried Rasso Ilka Bern Annika Manfred Regina Uwe Noriega Miguel José Manuel Enrique José Ignacio Francisco Pablo Orencio
Ministère fédéral de l'environnement, de la protection de la nature, de la construction et de la sûreté nucléaire Ministère fédéral de l'environnement, de la protection de la nature, de la construction et de la sûreté nucléaire Agence fédérale pour la protection de la nature Ambassade de France en Allemagne Ministère fédéral de l'alimentation et de l'agriculture Ministère régional de Saxe pour l'agriculture et l'environnement
Chef d'unité N13  protection des espèces Unité protection des espèces Cheffe du service II 1.1  protection des espèces zoologiques Conseiller agricole Directrice  diversité biologique et brevets biologiques Chef de la division des aires protégées, de la protection des biotopes et des espèces Département juridique
14/01/19 14/01/19 14/01/19 20/12/19 14/01/19 16/01/19 16/01/19 15/01/19 16/01/19 15/01/19 14/01/19 16/01/19 16/01/19 14/01/19 15/01/19 15/01/19 15/01/19 13/12/18 11/12/18 14/12/18 12/12/18 11/12/18 11/12/18 12/12/18 12/12/18 12/12/18 11/12/18 13/12/18
Ministère régional de Saxe pour l'agriculture et l'environnement Exploitation ovine (Saxe) Eleveur ovin Ministère régional de Saxe pour Département de la protection des l'agriculture et l'environnement espèces Exploitation ovine (Saxe) Eleveur ovin Ministère fédéral de l'environnement, de Unité protection des espèces  la protection de la nature, de la membre du groupe « Large construction et de la sûreté nucléaire Carnivore Initiative » Institut LUPUS pour le suivi et la Co-directrice et biologiste recherche sur le loup en Allemagne Ministère régional de Saxe pour Responsable de la protection des l'agriculture et l'environnement espèces Agence fédérale pour la protection de la Génétique et biologie évolutive nature Association paysanne de Saxe Directeur général Association des éleveurs ovins de Saxe Référente élevage et gardiennage Exploitation ovine (Saxe) Conseil régional (Junta) de Castille et Léon Ministerio para la transición ecológica Eleveur ovin Responsable du loup
Sudirector general de biodiversidad y medio natural GanaderÃa Pascualalin S.C. Exploitation Eleveur ovins ovine (Castille et Léon) Conseil régional (Junta) de Castille et Membre du service de la chasse et Léon de la pêche Museo Nacional de ciencias naturales Sous-directeur Ministerio para la transición ecológica Principauté des Asturies Principado de Asturias Asistencia técnica  Subdirección general de biodiversidad y medio natural Biologiste Chef du service de la chasse et la pêche Chercheur en biologie de la conservation Asistencia técnica  Subdirección general de biodiversidad y medio natural Sous-directeur du milieu naturel
José Vincente Universdad de Oviedo Sofia Javier Ministerio para la transición ecológica Conseil régional (Junta) de Castille et Léon
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Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne France France
Muñoz Igualda Jaime Palacios MarÃa Jesus Palacios Albert Jesus Puente Oscar Cabrerizo Rodriguez Arturo Javier Silos Rojas Hidalgo Eva Santos Redin ArnautouPages Arpin Pablo Elisabeth Isabelle
Ministerio para la transición ecológica
France France France France France France France France France France France
Barjol Barsacq Bigot Borelli Bouffartigue Bouillon Bové Cosme Dantin* Daumergue Delduc
Jean-Louis Elizabeth Cécile Jean-Marc Bertrand Stéphane José Maria Michel Nathan Paul
Asistencia técnica  Subdirección general de biodiversidad y medio natural Conseil régional (Junta) d'Extremadura Directora de Infonatur Conseil régional (Junta) de Castille et Directeur du centre du loup Léon ibérique de Castille et Léon GanadrÃa Puente  Exploitation bovine Eleveur bovins (Castille et Léon) Agence pour l'environnement et l'eau Plan de recuperación del lobo en d'Andalousie AndalucÃa Agence pour l'environnement et l'eau Life Lobo AndalucÃa d'Andalousie Conseil régional (Junta) de Castille et Service territorial de Léon l'environnement de Zamorra DDCSPP Lozère Technicienne santé et protection animales IRSTEA Responsable de l'équipe BIOSES au sein du laboratoire écosystèmes et sociétés en montagne Ministère de l'agriculture et de Membre permanent CGAAER l'alimentation Préfecture Auvergne-Rhône-Alpes Conseillère diplomatique Préfecture des Hautes-Alpes Préfète IPRA/Fondation Jean-Marc Landry Co-responsable du projet CanOvis Races de France Préfecture Auvergne-Rhône-Alpes Parlement européen Minsitère de l'agriculture et de l'alimentation Parlement européen IRSTEA MTES Technicienne Préfet coordonnateur du plan national d'action sur le loup Député Cheffe du bureau coordination du développement rural Député Assistant-ingénieur de recherche au laboratoire écosystèmes et sociétés en montagne Directeur général de l'aménagement, du logement et de la nature Directeur Préfet en mission auprès du préfet de région Unité prédateurs et animaux déprédateurs Chef de projets Lieutenant de louveterie Directeur de cabinet Directeur adjoint Chargée de mission biodiversité Président Référente nationale protection des troupeaux et pastoralisme Chef de la mission coordination des expertises collectives, des enseignements et des publications de l'UMS Patrimoine naturel Chargé de mission faune Chargé de mission nationale loup, lynx Président de la commission chiens de protection
11/12/18 12/12/18 13/12/18 14/12/18 12/12/18 12/12/18 12/12/18 06/11/18 03/10/18
27/02/19 01/10/18 02/10/18 28/11/18 28/02/19 01/10/18 07/11/18 21/03/19 10/10/18 03/10/18 05/10/18
France France France France France France France France France France France
Dimanche Doublet Duchamp Ducreux Favre Félix Garde Goussot Grossan Guillon Haffner
Marc Xavier Christophe Barbara René Denis Laurent Anne Christian Véronique Patrick
Centre d'études et de réalisations pastorales Alpes-Méditerranée Préfecture Auvergne-Rhône-Alpes ONCFS Institut de l'élevage DREAL Auvergne-Rhône-Alpes Centre d'études et de réalisations pastorales Alpes-Méditerranée Parc naturel régional du Queyras Parc naturel régional du Queyras DRAF Auvergne-Rhône-Alpes MNHN-AFB
28/02/19 01/10/18 02/10/18 19/12/18 28/02/19 21/11/18 28/02/19 02/10/18 02/10/18 21/11/18 12/09/18
France France France
Imberdis Jean Kerihuel
Ludovic Nicolas Jean Paul
Parc national des Ecrins ONCFS Centrale canine
02/10/18 06/09/18 28/02/19
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France France France France France France France France France France France France France France France France France France
Lachenal Lacouture Larbouret Legile Locqueville Macchi Marchive Massucci Matera Mathieu Metral Meyrueix Missant Morizot Noars Olivier Papouin Perret
Yves Anne Patricia Anne Bruno Sylvain Ginette Mario Joseph Jean-Marc Mathieu Xavier Fleur-Marie Baptiste Françoise Thierry Matthieu Michel
Institut de l'élevage
Ministère de l'agriculture et de l'alimentation Parc national des Cévennes DRAF Auvergne-Rhône-Alpes Parc à loups du Gévaudan Centrale canine Parc à loups du Gévaudan DREAL Auvergne-Rhône-Alpes DREAL DDCSPP Lozère Société centrale canine Université Aix-Marseille DREAL Auvergne-Rhône-Alpes Préfecture Lozère MTES MTES
Référent national chiens de protection (et agriculteur) Assistante parlementaire Cheffe du bureau changement climatique et biodiversité Directrice Directeur adjoint Capacitaire loups Médecin généraliste retraitée Membre de la commission chiens de protection Directeur Secrétaire technique loup Chef de l'unité loup Adjoint au chef de service santé et protection animales-environnement Cheffe de projets santé et ressources génétiques Enseignant-chercheur Directrice Secrétaire général Sous-directeur de la protection et de la restauration des écosystèmes terrestres Chargé de mission auprès du sous-directeur de la protection et de la restauration des écosystèmes terrestres Chef de la brigade mobile d'intervention Directeur Délégué régional AuvergneRhône-Alpes Capacitaire cerfs Président Chef de mission (biodiversité et services écosystémiques) au CGDD Éleveur Directrice Directeur de la recherche et de l'expertise Directeur adjoint Éleveur Directeur de l'expertise et de l'UMS Patrimoine naturel Eleveurs Directeur Directeur de recherche Étudiante en Master 1, écologie et biologie des populations Directeur général Directeur Directeur adjoint Chargée de mission pour l'ours, le loup et le lynx
19/12/18 07/11/18 21/03/19 07/11/18 21/11/18 06/11/18 07/11/18 28/02/19 06/11/18 21/11/18 01/10/18 06/11/18 28/02/19 28/11/18 21/11/18 06/11/18 11/09/18 17/09/18
France France France France France France France France France France France France France France France France France France France France
Pisi Poirson Poyet
Christophe Jean-Michel Patrick
ONCFS DDCSPP Lozère ONCFS Parc à loups du Gévaudan ANTAGENE MTES
01/10/18 06/11/18 06/09/18 06/11/18 24/09/18 12/09/18 07/11/18 02/10/18 06/09/18 23/10/18 07/11/18 12/09/18 19/12/18 01/10/18 19/12/18 11/09/18 06/09/18 28/02/19 01/10/18 01/08/18
Prucca-Macchi Audrey Queney Rayé Reversat Rivat Rousset Scheyer Scoquart Siblet Sibuet Sinoir Taberlet Taysse Thibault Varlet Vauterin Vebr Guillaume Gilles Laurent Valérie Guillaume
Parc naturel régional du Queyras ONCFS
Laurent Parc national du Mercantour Jean-Paul Jean-Philippe MNHN-AFB Mylène et Nicolas Michel Pierre Laura Olivier André Patrick Marianne Bergerie des Moyes DRAAF Laboratoire d'écologie Alpine Université de Poitiers ONCFS Centrale canine DREAL MTES
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France France France France France France Italie Italie Italie Italie Italie Italie Italie Pologne Pologne Pologne Pologne Pologne Pologne Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse/ France
Vedel Vidal Viret Wils-Morel Wurteisen Zinsstag Baracco Borgna Canavese Cerra Marucco Menzano Salsatto Ciszak Ginalski Le Gal Lieder Romanowski
Sylvain Isabelle Christophe Christine Fabrice Georges Michele Irene Giuseppe Marina Francesca Ariana Paolo Bozena Andrzej MarieChristine Ewa Jakub
Direction départementale des territoires Directeur Parc national des Ecrins Chef du service aménagement et ingénierie financière Parc National du Mercantour Directeur Préfecture Lozère Préfète Parc naturel régional du Queyras Technicien écopastoralisme Parc national des Cévennes Président de la commission agricole Eleveur ovin Parco Naturale Alpi Marittime Responsable communication projet LIFE Loup Parco Naturale Alpi Marittime Directeur Région Piémont Secteur biodiversité et aires naturelles Parco Naturale Alpi Marittime Responsable projet LIFE loup Vétérinaire Parco Naturale Alpi Marittime Président Ambassade de France en Pologne Attachés agricole Direction générale pour la protection de Directeur adjoint du département l'environnement de la gestion de la nature Ambassade de France en Pologne Conseillère agricole Pologne, Hongrie, Estonie, Lettonie, Lituanie Parlement polonais Direction générale pour la protection de l'environnement Inspection générale de la protection de l'environnement Office fédéral de l'environnement Office fédéral de l'environnement Parc animalier Juraparc  Vallorbe Université de Lausanne KORA KORA AGRIDEA Office fédéral de l'environnement Association suisse des chiens de protection des troupeaux KORA IPRA/Fondation Jean-Marc Landry Députée Chef d'unité au département de la gestion de la nature Spécialiste pour le suivi des ressources naturelles Suppléant du chef de la section faune sauvage et biodiversité en forêt Section faune sauvage et biodiversité en forêt Responsable du parc Directeur du laboratoire de biologie de la conservation Suivi des grands carnivores Suivi des grands carnivores Chef de groupe protection des troupeaux et agriculture de montagne Section faune sauvage et biodiversité en forêt Président Suivi des grands carnivores Directeur et directeur de recherches
02/10/18 02/10/18 23/10/18 06/11/18 02/10/18 07/11/18 22/11/18 23/11/18 23/11/18 22/11/18 23/11/18 22/11/18 22/11/18 17/01/19 17/01/19 17/01/19 17/01/19 17/01/19 17/01/19 25/10/18 25/10/18 25/10/18 24/10/18 24/10/18 24/10/18 28/11/18 25/10/18 25/10/18 24/10/18 28/11/18
Zajczkowska Monika Baumann Bourquin Coelho Fumagalli Kunz Manz Mettler Pewsner Pfister Zimmermann Landry Martin Nicolas Paulo Luca Florin Ralph Daniel Mirjam Ueli Fridolin Jean-Marc
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4. Lettre des commissaires européens à l'environnement et à l'agriculture en date du 11 février 2019
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5. Éléments de méthode sur l'évaluation de la viabilité de la population de loups en France
Lors de la préparation du Plan National Loup (PNL) 2018-2023, une expertise (mentionnée en introduction de ce rapport) a été commandée au MNHN et à l'ONCFS sur ce point précis. Or, à cette époque, après deux années de stabilisation de l'effectif (2014-2016), l'ONCFS indiquait qu'il n'était pas possible sur le plan statistique de distinguer lequel des deux modèles utilisables (« à croissance freinée94 » ou « à croissance exponentielle95 ») décrivait le mieux l'évolution observée des effectifs. Or, le calcul de l'effectif minimum viable est très dépendant de ce modèle. Ainsi en France, le taux de croissance modélisé sur la période 1995-2016 sous un régime considéré « exponentiel » correspondrait à un effectif plancher d'environ 50 loups pour respecter un risque d'extinction de 10 % sur un horizon de 100 ans. Le modèle « exponentiel » correspond à une dynamique avec peu de contraintes de prélèvements et surtout une poursuite de colonisation de l'espèce supposée identique à celle observée dans les Alpes. Par contre, si on modélise la dynamique observée sous un régime de « croissance freinée » (tenant ainsi compte de la stabilisation des effectifs entre 2014 et 2016), l'effectif plancher de viabilité est de 100 à 125 individus pour un même seuil de risque. Un taux de croissance correspondant à une population stable, donnerait quant à lui un seuil minimum de 400 à 500 animaux pour éviter un risque d'extinction de 10 % à l'horizon de 100 ans.
94 95
5 % de croissance par an. 12 % de croissance par an.
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6. Glossaire des sigles et acronymes
Acronyme ADN APN ASP CERPAM CGAAER CGEDD CITES CIVAM CMR CNRS DBBW DDCSPP DDT DEB DGALN DGER DRAAF DREAL ECF EMR HFF ICAD IDELE IKA ISPRA LCIE LECA LOOF MAA MNHN MTES OFEV ONCFS ONF OPA PAC PDR PNA UICN UTH WISO ZDP ZPP Signification Acide désoxyribonucléique Association de protection de la nature Agence de services et de paiement Centre d'études et de réalisations pastorales alpes méditerranée Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux Conseil général de l'environnement et du développement durable Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction Centre d'initiative pour valoriser l'agriculture et le milieu rural Capture, marquage, recapture Centre national de la recherche scientifique Centre fédéral de documentation et de conseil sur le loup Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations Direction départementale des territoires Direction de l'eau et de la biodiversité Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature Direction générale de l'enseignement et de la recherche Direction départementale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Etat de conservation favorable Effectif minimum retenu Habitats, faune, flore (directive) Identification des carnivores domestiques Institut de l'élevage Indice kilométrique d'abondance Institut supérieur pour la protection et la recherche environnementale Large carnivore initiative for Europe Laboratoire d'écologie alpine Livre officiel des origines françaises Ministère de l'agriculture et de l'alimentation Museum national d'histoire naturelle Ministère de la transition écologique et solidaire Office fédéral de l'environnement Office national de la chasse et de la faune sauvage Office national des forêts Organisation professionnelle agricole Politique agricole commune Programme de développement rural Plan national d'action Union internationale pour la conservation de la nature Unité de travail humain Grands carnivores, ongulés sauvages et sociétés (plateforme) Zone difficilement protégeable Zone de présence permanente
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Site internet du CGEDD : « Les derniers rapports »
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(ATTENTION: OPTION ¨s de 600 spécimens. La mission rappelle l'importance que cet inventaire, ainsi que le génotypage de tous les loups captifs présents dans ces centres, soit mené rapidement à terme. Ce génotypage devrait à l'avenir être généralisé à tous les nouveaux loups de ces parcs. Des échantillons génétiques surnuméraires doivent être stockés par l'administration pour des analyses ultérieures (en cas de changement de méthodes génétiques). Les surplus de naissance des parcs à loup, s'ils ne peuvent pas être légalement confiés à un autre détenteur (en suivant les procédures CITES) peuvent en revanche être euthanasiés par un vétérinaire dressant constat. La mission conseille que cette règle soit rappelée aux directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) en charge des contrôles de ces établissements.
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3. Des mesures de protection et de prévention très variables d'un contexte à l'autre
Les pays visités n'ont rapporté à la mission aucun élément concernant les mesures d'effarouchement. Cela ne signifie pas qu'aucune expérience en la matière n'existe. Mais l'effarouchement n'y est, en tout état de cause, pas considéré comme un moyen efficace de prévention avec une espèce aussi adaptable et apte à déjouer rapidement ce type de dispositifs. Les spécialistes italiens rencontrés, pourtant très protecteurs, les considèrent quant à eux inefficaces.
3.1. Il n'existe pas de solution technique unique qui garantisse l'absence de dommages, mais une palette de moyens à étudier, moduler et adapter en fonction des contextes 3.1.1. La mise en oeuvre du triptyque clôtures/chiens de protection/bergers pour assurer une protection efficace est appréhendée de façon différente dans les pays
Tous les pays reconnaissent que les mesures de protection sont nécessaires, mais n'assureront jamais une protection à 100 % des troupeaux. Le triptyque clôtures/chiens de protection/ bergers est connu de l'ensemble des pays, mais l'ordre d'importance accordée à chacun d'eux, le soutien financier, comme le soutien technique à la conception de la mise en oeuvre effective, sont très variables d'un pays à l'autre. La mission a également noté qu'aucun des pays visités ne fait du gardiennage une mesure de protection fondamentale et soutenue financièrement.
·
En Suisse, les chiens de protection et les clôtures électrifiées sont considérés comme des moyens efficaces dont la mise en place est aidée financièrement (90 % du budget global de protection est consacré aux chiens de protectionachat et entretien- et 10 % aux clôtures, dont seul le surcoût éventuel lié au loup est pris en charge). La conception de la mise en oeuvre est aidée par le technicien pastoral du canton, si celle-ci s'avère difficile, puis contrôlée. Depuis peu, l'association AGRIDEA, en lien étroit avec les techniciens pastoraux des cantons, fait un suivi des clôtures qui sont financées, incluant conseil technique approfondi (puissance de l'électrification, mise à la terre) et contrôle. Cela enrichit la connaissance du terrain et permet la réalisation de documents de vulgarisation60 très précis à destination des éleveurs. Lorsque le troupeau est regroupé pour la nuit, il est sous la garde des chiens, sans que le berger dorme forcément à proximité. En Italie-région Piémont, les trois volets du triptyque sont présents. Seule la détention des chiens de protection et la mise en place de clôtures électrifiées de 1,2 mètres de haut sont financées dans le cadre du PDR (programme de développement rural). La conception de la mise en oeuvre a été accompagnée par les vétérinaires privés jusqu'en 2012, mais cette expérience, considérée
·
60
AGRIDEA se dédie au développement de l'agriculture et de l'espace rural. Sur le loup, il est conventionné avec le gouvernement fédéral. https://www.agridea.ch/fr/publications/publications/developpement-rural/protection-destroupeaux/clotures-de-protection-contre-le-loup/
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comme très positive par les acteurs rencontrés, s'est arrêtée faute de moyens. La protection des troupeaux bovins est considérée comme plus compliquée, mais non impossible. Un travail est en cours sur l'adaptation des mesures de protection aux troupeaux bovins, axé sur le regroupement des animaux pendant la pâture.
·
En Espagne (province de Castille et Léon), un « plan régional loup » prévoit l'élaboration d'un catalogue de bonnes pratiques agricoles en zone à loups (techniques de clôtures pour protéger les moutons, les génisses, les vaches et les veaux) et des aides qui favorisent leur adoption en fonction des disponibilités budgétaires et de ce qui est envisagé dans le programme communautaire FEADER61. Les missionnés ont compris qu'à ce jour, faute de disponibilités budgétaires, la mise en oeuvre des moyens de protection n'est accompagnée ni techniquement, ni financièrement. Les éleveurs rencontrés se protègent cependant. Dans les territoires où le loup n'a jamais disparu (Nord du Duero), le gardiennage de jour est une pratique qui n'a jamais été abandonnée. Le chien est le moyen considéré comme le plus efficace et particulièrement la présence en nombre de mâtins d'Espagne, sans pour autant que cette pratique soit adoptée par tous les éleveurs62. La situation est différente dans les territoires où le loup avait disparu et revient récemment (sud du Duero). Le gardiennage ne se pratique plus et les éleveurs, surtout de bovins, ont souvent un statut de double-actifs se rendant très peu sur leurs exploitations, n'ayant pas ou peu recours aux chiens de protection (impossibilité de les nourrir tous les jours). C'est particulièrement pour ces zones que sont expérimentées des systèmes de clôtures permettant de protéger les veaux, tout en les laissant accessibles à leur mère (voir fiche Espagne en annexe 2).
·
En Allemagne, le financement des bergers ne fait pas partie des mesures de protection des troupeaux (ces derniers étant nuit et jour dans des parcs clôturés). Les clôtures électrifiées sont donc la base de la protection et leur mise en place est aidée financièrement. La Saxe finance, depuis 2019, à 100 % l'investissement dans les clôtures après avoir longtemps soutenu à hauteur de 60 % seulement. L'utilisation de chiens (Berger des Abruzzes, mâtin d'Espagne, Berger des Pyrénées), dont seul l'achat est financé, est une mesure de protection qui est assez peu mise en place par les éleveurs63. La mission a rencontré trois éleveurs, dont un refusait d'avoir des chiens. Ceux qui font le choix des chiens, fonctionnent avec des meutes dont l'importance est proportionnelle à la taille du troupeau. L'utilisation des chiens n'est pas une condition obligatoire pour que l'éleveur soit indemnisé en cas d'attaque. Ce
Fonds européen d'aménagement et de développement de l'espace rural. La mission a visité une exploitation de 1 800 brebis à viande produisant 5 000 agneaux de lait. Le troupeau est en permanence divisé entre brebis prêtes à naître, ainsi que les allaitantes, maintenues en bâtiment (environ 800) et agnelles/ brebis vides ou en début de gestation (environ 1 000) qui paissent sur des parcours (plus de 1 000 ha). Le troupeau est accompagné la journée par un berger et environ 15 mâtins. La nuit, le troupeau est regroupé dans un enclos de barrières mobiles (déplacé tous les jours de quelques dizaines de mètres, durée de la manoeuvre 1 heure), gardé par la meute de chiens. Il y a 1 enclos pour chaque 200 ha de parcours. À l'inverse, la mission a rencontré un éleveur, de 200 vaches allaitantes, élevées en plein air, mettant bas dehors et nourrissant leurs veaux jusqu'à 6 mois, qui refuse d'avoir des chiens. Cet éleveur a souligné la nécessité de choisir une race d'animaux d'élevage (raza alistano-sanabresa) sachant défendre son veau (association de 50 éleveurs soutenus par la Région de Zamora pour la conservation génétique de cette race rustique: 150 /an par vache).
61 62 63
Seulement 15 % des éleveurs professionnels en Saxe ont recours aux chiens de protection, bien qu'une directive fédérale conseille, sans l'imposer, un minimum de 3 chiens par troupeau.
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Land a également expérimenté une brigade mobile composée d'un berger et de deux chiens en cas d'attaques importantes. Peu d'éleveurs ont souhaité faire appel à elle. Il propose aussi un renfort de chiens de protection en cas d'urgence. Les éleveurs ont plus souvent recours à cette dernière proposition.
3.1.2. La question de la qualité des chiens de protection et de leurs filières, se pose partout où ils sont utilisés.
Le chien de protection64 est considéré par la plupart des pays comme un moyen efficace de protection, à condition d'avoir un nombre de chiens en rapport avec la taille du troupeau (deux chiens pour 150-200 brebis, et un chien supplémentaire par tranche de 200 brebis supplémentaires). Mais les conceptions d'obtention d'un bon chien sont très différentes et chacun prétend détenir la vérité. Les éleveurs, quant à eux, ne l'utilisent pas de façon systématique, et ce dans tous les pays, évoquant les problèmes induits par sa présence : trouble de voisinage, cohabitation difficile avec les touristes et avec les chasseurs, conséquences en termes de responsabilité qu'ils estiment lourdes à assumer. C'est la Suisse qui a réalisé le travail de structuration de la filière chien le plus abouti. Elle a délégué la sélection des chiens, leur dressage, leur agrément, et enfin la formation des agriculteurs à leur utilisation, à une association d'éleveurs ovins et de formateurs financée par le ministère de l'environnement. Tous les chiens naissent et sont élevés chez des éleveurs d'animaux dits « de rente ». Les chiens font l'objet de tests à 15 mois (attitude vis-à -vis des promeneurs et vis-à -vis de chiens intrus) avant leur mise en place chez un éleveur qui en a exprimé la demande auprès du canton, et dont la demande a été acceptée. Les chiens qui ne réussissent pas le test sont euthanasiés. L'éducation du chien est considérée comme un point essentiel. L'accompagnement des nouveaux détenteurs, qui reçoivent des chiens adultes formés, est aussi considéré fondamental, avec une formation avant l'intégration du chien dans le troupeau, puis son suivi ensuite. La sélection des chiens (pour la reproduction) est basée sur un contrôle répété des qualités au travail, enregistré dans une base de données. Ce travail de structuration de la filière canine est un choix fort du ministère de l'environnement, sans doute facilité par la faible taille de la population canine65. La sélection effectuée permet au gouvernement suisse de prendre systématiquement la défense des éleveurs en cas de plainte contre un chien de protection (conflits avec les usagers de la montagne) et jusqu'à présent, de gagner. La loi suisse précise que ces chiens peuvent se trouver en montagne auprès d'un troupeau sans être sous la garde de leur maître (berger facultatif). Aucun des autres pays visités n'a fait un travail similaire. En Espagne, une association nationale enregistre chaque année les chiots, mais aucun test d'aptitude à la protection n'est réalisé. Elle part en effet du postulat que la capacité des chiens à défendre le troupeau est fixée génétiquement (contrairement au Berger des Pyrénées, le Mâtin d'Espagne66 a toujours connu le loup). Des analyses
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Sur la question, on se reportera utilement au rapport CGEDD-CGAER de juin 2010 « Évaluation de la situation relative à l'utilisation des chiens de protection des troupeaux contre la prédation » dont l'essentiel des conclusions restent d'actualité. Actuellement, environ 280 chiens de protection officiellement reconnus travaillent en Suisse et 100 sont « en formation ». Tout comme le Berger des Abruzzes et le Berger d'Anatolie.
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phylo-génétiques sur les races de chiens de défense, publiées dans des revues scientifiques, ont été présentés à la mission. De ce fait, l'éducation du chien n'est pas jugée essentielle, mais il a été souligné l'importance d'avoir des meutes mélangeant des jeunes chiens et des chiens plus âgés, la meute étant le lieu de l'éducation. En Allemagne, il existe une fédération d'éleveurs de chiens en Brandebourg, qui dispose de moyens importants, et qui assure le dressage par ses adhérents. En Italie, après avoir commencé à structurer une filière chien, le travail n'a pu être mené à terme et l'attention des missionnés a été attirée sur le constat de la perte de contrôle de la qualité des chiens. En France, plus de 3 600 chiens bénéficient du « forfait chien de protection » prévu par instruction technique67. Leur achat et leur entretien font donc l'objet de soutiens financiers importants. L'État a mandaté l'IDELE (institut de l'élevage) pour constituer un réseau technique68 chien de protection en charge de la formation des éleveurs qui souhaitent intégrer un chien dans leur troupeau, mais à ce jour aucun travail concernant la sélection des chiens de protection n'est réalisé et très peu de chiens sont testés (58 chiens69), alors que le test de comportement du chien au travail, mis au point par la centrale canine, existe depuis 2010. Son financement est d'ailleurs prévu par la même instruction technique. Les référents IDELE et les techniciens chiens de la Pastorale pyrénéenne ne sont pas testeurs agréés par la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF), tel que le prévoit l'instruction technique. Concrètement un seul testeur de la Centrale canine réalise les tests pour l'ensemble du territoire métropolitain. Ce travail de connaissance des lignées, de sélection et de tests comportementaux vis-à -vis de l'homme et d'attachement défensif au troupeau est un préalable au déploiement des actions de formation vers les éleveurs, au risque de perdre en efficacité70. C'est la compétence de la centrale canine. Par ailleurs, la mission juge que le recours quasi-exclusif au Berger des Pyrénées (prioritairement sélectionné, en l'absence de loup depuis 70 ans, pour sa docilité) n'est pas à lui seul un gage d'efficacité. Elle estime donc que le travail de sélection doit aussi porter sur les autres races de chiens de protection, en encourageant des programmes de coopération avec l'Italie et l'Espagne. La mission a identifié des associations d'éleveurs ovins capables de fournir des sources génétiques sélectionnées dans plusieurs pays visités. Elle suggère que la centrale canine soit mandatée pour s'en rapprocher. 6. Recommandation (MAA) : accélérer la structuration de la filière chiens de protection par un réel travail de sélection, incluant les tests comportementaux visà -vis de l'homme, en lien étroit avec la centrale canine et les professionnels, et engager une réflexion visant, à terme, à ne financer que des chiens sélectionnés et testés.
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Instruction DGPE/SPDE/2018-124. À ce jour, le réseau est constitué de 6 référents nationaux et de 10 relais locaux, tous éleveurs et d'une animatrice. Chiffre de la centrale canine. Former des éleveurs qui ont déjà acquis un mauvais chien présente des intérêts très limités.
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3.1.3. L'attention à porter aux clôtures a été soulignée dans l'ensemble des pays visités
Comme indiqué en 3.1.1. :
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la Saxe fait des clôtures la seule mesure de protection indispensable pour prétendre à indemnisation en cas d'attaque. La mission a visité trois exploitations de plaine et son attention a été attirée sur l'aspect pratique de la réalisation à savoir le nombre de fils, la hauteur des fils et la puissance de l'électrification ; la Suisse accorde aussi beaucoup d'importance à cet aspect et produit des documents d'aides à la mise en place insistant sur tous les risques de dysfonctionnement, notamment celui d'électrification insuffisante. AGRIDEA note qu'en estive la réalisation systématique des parcs de nuit n'est cependant pas toujours possible, mais que le regroupement l'est, sous la surveillance de la meute de chiens ; l'Espagne conduit au niveau national une réflexion sur les clôtures et sur des enclos spécifiques71.
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3.1.4. La taille des troupeaux conditionne largement l'efficacité de leur protection
Quels que soient les moyens de protection utilisés, la mission fait le constat que les pays visités considèrent que la taille des troupeaux est un facteur qui influe largement sur la capacité qu'a l'éleveur à se protéger efficacement. L'association AGRIDEA (Suisse) considère qu'au-dessus de 5 chiens, la meute de chiens dysfonctionne, ce qui impose de limiter la taille du troupeau à 700-1 000 brebis. Au-delà de la question du fonctionnement de la meute de chiens, le constat est fait qu'il y a une taille maximum du troupeau sous la conduite d'un seul berger à ne pas dépasser pour garantir un gardiennage efficace 72, tant pour la protection vis-à -vis du loup que pour celle de la capacité d'un seul homme à bien soigner l'ensemble des animaux. Dans tous les pays visités, la taille maximum des troupeaux est très inférieure à ce qu'on trouve en France. Des maximums de 3 000 à 5 000 animaux ne sont pas rares en France, alors que très peu de troupeaux dépassent les 1 000 unités sous la conduite d'un seul berger dans les pays visités. La réflexion sur la future politique agricole commune (PAC) peut être le bon moment de mener une réflexion quant aux risques liés à l'accroissement de la taille des troupeaux et des surfaces par unité de travail humain (UTH). Ce point sera développé en 3.2.3.
3.1.5. La formation des éleveurs et bergers au diagnostic de vulnérabilité est essentielle
Les pays visités partagent le constat de la nécessité de mieux former les agriculteurs, mais aussi les bergers.
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L'éleveur rencontré utilise pour la nuit des barrières mobiles articulées type barrières urbaines permettent un déplacement facile des parcs et remédiant aux inconvénients de type risque sanitaire. Là encore l'exploitation était située sur un plateau. Tant par le berger que par les chiens.
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L'Italie a souligné qu'elle n'avait pas d'école de bergers et que cela constituait un manque. Il existe en revanche, une association de bergers qui essaie d'améliorer les compétences des éleveurs concernant la mise en place des méthodes préventives de protection. En Suisse, la formation initiale des bergers est possible depuis 2009, au sein de trois écoles d'agriculture. Celle-ci est complétée par une formation continue organisée par AGRIDEA, consistant à réunir, une fois tous les deux ans, tous les bergers sur une exploitation professionnelle. Pour ce qui est des éleveurs, une formation collective est obligatoire au moment de l'achat de chiens, suivie d'un accompagnement individuel sur l'exploitation. En Espagne, le manque de formation des bergers à la gestion d'une meute de chiens a été souligné, mais cela est en partie compensé par le fait que l'association nationale (évoquée au 3.1.2.) fait un suivi-accompagnement de tous les chiens qui ont un pedigree. Cet aspect formation, tant des éleveurs que des bergers, a été aussi souligné par de nombreux acteurs rencontrés sur le territoire métropolitain, évoquant l'absence de formation des bergers à la maîtrise des techniques de protection (en particulier la conduite d'une meute de chiens de protection). La mission déplore également l'absence de formation initiale des jeunes éleveurs aux techniques de protection, ainsi que l'insuffisante formation continue des éleveurs73. La mission propose à la direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) du ministère de l'agriculture et de l'alimentation qu'elle intègre dans les programmes de formation de brevet professionnel des responsables d'exploitations agricoles les aspects protection des troupeaux vis-à -vis des prédateurs et oeuvre à l'écriture d'un cahier des charges national du métier de berger qui intègre la présence des prédateurs et les conséquences pour le pastoralisme, cahier des charges qui devra être pris en compte par l'ensemble des responsables de formation. Cette proposition rejoint celle de la récente mission concernant les mesures d'accompagnement des éleveurs confrontés à la prédation de l'ours74.
3.1.6. Un conseil technique personnalisé, pluridisciplinaire et adapté à chaque situation apporte une plus-value indiscutable
La Suisse a conçu un accompagnement individualisé des éleveurs, soit qui achètent un chien, soit qui rencontrent des difficultés dans la mise en place des clôtures. Le rôle du canton et de ses techniciens pastoraux est fondamental. Les techniciens pastoraux travaillent en lien étroit avec les deux associations mandatées par l'OFEV (AGRIDEA et « Chiens de protection des troupeaux Suisse »). La pluridisciplinarité des approches est donc un élément essentiel dans la production du conseil à l'éleveur. De plus, comme évoqué au 3.1.1., le conseil s'accompagne ensuite d'un contrôle. Le Piémont italien a fait ce choix de l'accompagnement individuel pour l'analyse de vulnérabilité et la mise en oeuvre des mesures de protection jusqu'en 2012, mais, faute de crédits, a dû l'abandonner à regret. Nos interlocuteurs ont insisté sur l'importance de l'observation de terrain (analyse au cas par cas) et du facteur temps, essentiels, tant pour l'expérimentation que la mise en oeuvre effective des techniques de protection appropriées. Avec le nouveau projet LIFE (en cours de préparation), le
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La consultation des offres de formation des chambres d'agriculture PACA et Rhône-Alpes ont confirmé qu'aucune offre de formation à la gestion des troupeaux en présence de prédateurs n'était proposée. « Propositions d'évolution des mesures d'accompagnement aux éleveurs confrontés à la prédation de l'ours et aux difficultés économiques du pastoralisme » - CGEDD/CGAAER - Septembre 2018.
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Piémont italien ambitionne de remettre en place cet accompagnement en s'appuyant notamment, sur les vétérinaires sanitaires et sur des équipes locales. Notre attention a été attirée sur le fait que lorsque le loup arrive dans de nouveaux espaces, le temps d'adaptation de l'éleveur est important (20 ans) d'où la nécessité d'anticiper ce changement de comportement sur les fronts de colonisation, là où les éleveurs ont perdu depuis longtemps l'habitude de vivre avec le loup. En Saxe, l'importance du conseil a été soulignée et ce Land a fait le choix d'avoir six conseillers dont la mission est de visiter et de conseiller les éleveurs à propos des mesures de protection (et aussi de faire les constats de dommages). Dans les trois exemples cités, il s'agit donc de conseil au cas par cas, chez l'exploitant, en allant dans le détail de la mise en oeuvre des mesures de protection. En Suisse, l'approche pluridisciplinaire est déjà présente. En Piémont italien, c'est en projet. En France, dans les zones colonisées de longue date, les fédérations pastorales ont la compétence pour ce travail d'accompagnement. Le centre d'études et de réalisations pastorales alpes méditerranée (CERPAM) a réalisé de nombreux diagnostics de vulnérabilité à l'échelle territoriale comme à l'échelle d'une exploitation, suite à des sollicitations de celles-ci. Ce sont les diagnostics à l'échelle de l'exploitation ou de l'estive qui présentent le plus grand intérêt, s'ils sont bien faits, c'est-à -dire s'ils s'intéressent au détail de la mise en oeuvre des mesures de protection. Sur les fronts de colonisation, peu d'acteurs ont la capacité immédiate de réaliser cet accompagnement fin. Il s'agit, territoire par territoire, de construire cette compétence en s'appuyant sur la diversité des acteurs présents : acteurs du développement agricole, mouvement d'éducation populaire comme les centres d'initiative pour valoriser l'agriculture et le milieu rural (CIVAM), association d'utilisateurs de chiens, référents nationaux et locaux de l'IDELE, techniciens chiens de la pastorale pyrénéenne, ONCFS, etc. Cette même démarche peut être aussi intéressante pour des territoires où le loup est solidement installé et où les acteurs professionnels se sont peu engagés dans la réalisation des diagnostics de vulnérabilité. Cette construction de compétence départementale et partagée pourrait être confiée à un référent loup au sein de la DDT qui pourrait, en outre, être chargé de l'animation du comité local loup, du contrôle de l'effectivité de la mise en oeuvre des mesures de protection, de la connaissance du contexte des attaques. 7. Recommandation (MAA, MTES) : créer au sein des directions départementales des territoires, un poste de référent loup, en particulier dans les départements de front de colonisation, et oeuvrer ainsi à la création des conditions d'une mobilisation coordonnée des acteurs.
3.1.7. Une protection durablement efficace ne s'avère possible qu'avec l'engagement des éleveurs accompagnés par les organisations professionnelles agricoles
Tous les pays visités font le constat de la non-acceptation croissante des éleveurs vis-à vis du loup, la comprennent, mais insistent sur :
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la nécessaire implication de l'éleveur dans la réalisation du diagnostic de vulnérabilité de son exploitation, en amont de la mise en oeuvre effective des mesures de protection ;
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l'indispensable engagement des éleveurs dans la réflexion et la mise en oeuvre des mesures de protection. Les pays font part de difficultés plus importantes (résistance au changement) de la part des éleveurs double-actifs, voire non professionnels (Suisse, Allemagne75, Espagne) ; l'indispensable accompagnement des éleveurs particulièrement par les chambres d'agriculture ; par les OPA, tout
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le temps long, nécessaire à l'adaptation au changement.
Pour la France, il y a de ce fait un réel intérêt à réfléchir à la manière dont peuvent être accompagnés les éleveurs sur les fronts de colonisation, dont les exploitations sont inéligibles au dispositif d'accompagnement technique, tel que prévu dans l'action 1.4 du plan national, dans la mesure où ils ne sont ni en cercle 1, ni en cercle 2. Ce constat rejoint la recommandation précédente.
3.2. La maîtrise des dommages n'a pas de lien direct avec le montant des aides et des indemnités versées aux éleveurs
Comme indiqué en 1.2 et 1.3, la mission n'a pas observé, en France, le bienfait évident que les aides attribuées (tant pour la mise en oeuvre des mesures de protection que pour les indemnisations) pouvaient avoir sur une meilleure maîtrise des dommages. Malgré les sommes investies, les dommages continuent d'augmenter. L'essentiel des propositions, qui figurent dans les paragraphes suivants, vise à améliorer cette situation et à rendre ces financements efficaces. Les propositions sont bien entendu nourries des constats faits dans les pays visités.
3.2.1. La mise en oeuvre effective des mesures de protection, lorsqu'elle est aidée, doit être contrôlée sur le terrain
La mission fait le constat que dans certains pays visités (Suisse et Allemagne notamment) le contrôle est une opération sur le terrain qui tient à la fois du conseil et du contrôle proprement dit. Si cette double posture peut être source de difficulté de positionnement pour le contrôleur, elle présente l'intérêt de proposer un accompagnement individuel dont on a vu l'importance en 3.1.5., puis de s'intéresser à la réalité de la bonne mise en oeuvre et ce dans le détail76. Pour mettre un terme à cette ambiguïté de positionnement des conseilleurs-contrôleurs, la Suisse envisage que les gardes faunes des cantons qui font les constats de dommages, fassent aussi le constat de la mise en place effective des mesures de protection. Pour la mission, ce contrôle sur le terrain est essentiel : il permet de s'assurer de la mise en place effective des moyens de protection, de se donner la possibilité d'objectiver le discours (trop souvent entendu) de l'inutilité des mesures de protection faute d'efficacité, et de progresser dans l'art de leur mise en oeuvre.
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À noter qu'en Suisse comme en Allemagne, la part d'éleveurs double actif est importante : 90 % de double actif pour les éleveurs suisses de moutons, 80 % des attaques en Allemagne ont lieu chez des éleveurs qui pratiquent l'élevage comme hobby. Par exemple la pose des clôtures avec le nombre de fils nécessaires et la bonne électrification, le nombre de chiens effectivement en estive et non pas celui de chiens achetés, etc.
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La mission est parfaitement consciente qu'en France, les mesures de protection, quand elles bénéficient de soutien financier, font déjà l'objet de contrôle de l'organisme payeur qu'est l'agence de services et de paiement (ASP), mais ce contrôle, le plus souvent réalisé sur facture sans aller sur le terrain, n'est pas suffisant. Le plan national d'actions sur le loup et les activités d'élevage prévoit une action 1.12 visant à s'assurer que les mesures de protection sont mises en oeuvre selon le dispositif contractuel de protection des troupeaux, en vue de garantir leur efficacité au niveau attendu. L'idéal serait que les difficultés récurrentes de mise en oeuvre mises en évidence lors des contrôles (inopinés, sans lien avec les attaques) puissent ensuite faire l'objet d'une analyse, afin d'alimenter judicieusement l'observatoire de l'efficacité des mesures de protection des troupeaux prévu dans l'action 1.3. La mission attire l'attention du MAA et du MTES sur la nécessité de fusionner le contrôle lié à la conditionnalité des indemnisations et le contrôle aujourd'hui réalisé par l'ASP. 8. Recommandation (MAA, MTES) : mettre en place sans tarder un contrôle, unique (conditionnalité, ASP) et sur le terrain, des mesures de protection. La mission rappelle la nécessité de la mise en place rapide du groupe de travail prévu à la mesure 1.12 du plan national et de l'observatoire de l'efficacité des mesures de protection qui devra s'enrichir par une analyse qualitative des difficultés et des défauts le plus souvent rencontrés lors des contrôles.
3.2.2. L'indemnisation des dommages est conditionnée à la mise en oeuvre effective de mesures de protection, raisonnées grâce à une analyse de vulnérabilité
Seules la Suisse et l'Allemagne ont un système comparable à celui de la France avec une indemnisation conditionnée à la mise en oeuvre effective des mesures de protection. Le montant moyen de l'indemnisation varie entre 200 et 400 /brebis77. C'est la Suisse qui est la plus généreuse, suivie de la France. Suisse et Allemagne conseillent les éleveurs en amont sur les mesures de protection et contrôlent la réalité de leur mise en oeuvre. Comme évoqué en 1.3., le Piémont italien et la province de Castille et Léon ont fait le choix d'un système assurantiel par ailleurs moins généreux (120 euros/brebis pour la Castille Léon). Les éleveurs n'y adhèrent que très partiellement, ce qui n'est pas sans poser souci pour le recensement réel des dommages 78. En Espagne, le ministère de la transition écologique subventionne le système assurantiel, avec en outre une prise en charge par la communauté autonome concernée, de tout ou partie de la franchise par sinistre. Les dommages ne sont indemnisés par l'assureur, que si les mesures de protection sont mises en oeuvre. L'expertise de vulnérabilité n'est plus réalisée dans ces deux territoires, faute de financement. Elle l'a été provisoirement, grâce à des programmes LIFE. En Espagne, le ministère de la transition écologique réfléchit en outre à la mise en place d'un fonds mutualisé alimenté par les éleveurs et partiellement abondé par l'État, pour compenser les dommages.
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Les deux chiffres sont des ordres de grandeur. À plusieurs reprises, les interlocuteurs ont évoqué la non fiabilité des chiffres des dommages suite à la mise en place du système assurantiel.
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Comme indiqué dans en 1.2., la mission s'est interrogée sur l'importance des dégâts en France et tout particulièrement sur les raisons de la concentration des attaques sur un petit nombre d'unités : vulnérabilité plus importante des estives ? Taille trop importante des troupeaux ? Impossibilité de les protéger ? Non volonté de les protéger ? Mauvaise qualité de la mise en oeuvre des mesures de protection ? Une comparaison fine des facteurs explicatifs des vulnérabilités différentes entre les pays visités ne peut relever que d'un travail de recherche. L'énormité des écarts constatés doit néanmoins conduire à s'interroger sur ce qui apparaît à beaucoup des interlocuteurs rencontrés comme une spécificité française qu'ils ont du mal à s'expliquer. Une consultation des statistiques d'attaques en zone pastorale de l'ex-région RhôneAlpes et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur sur la période 2013-2017 montre que 50 % des 8 685 attaques recensées se concentrent sur 10 % seulement des unités pastorales. Dans le Var, 10 unités pastorales concentrent la moitié des attaques, 33 pour le département des Alpes-Maritimes. La mission estime que notre pays gagnerait beaucoup à analyser en détail et sans tabou (vulnérabilité, type de conduite des troupeaux, qualité des mesures de protections et de leur mise en oeuvre...) cette anomalie qui influe de manière très négative sur l'ensemble de la gestion du loup en France.
3.2.3. En France, une réflexion s'impose quant aux modes de financement des mesures de protection et des indemnisations, dans le contexte de la future politique agricole commune
La mission ne nie pas la difficulté de la mise en oeuvre des mesures de protection et le travail supplémentaire que celle-ci occasionne aux éleveurs quand le loup arrive sur un territoire. Elle est, de plus, bien consciente du stress engendré par les attaques. Elle considère, au vu des exemples probants qui lui ont été présentés au cours de ses visites, que ce risque, ou cette contrainte naturelle, doit être évaluée par un diagnostic de vulnérabilité. L'éleveur doit s'approprier ce diagnostic dans la mesure où la vulnérabilité du territoire évolue dans le temps et où il est nécessaire de remettre à jour régulièrement ce diagnostic. Le premier doit être élaboré de façon pluridisciplinaire, en associant divers compétences : zootechniques, pastorales, naturalistes, sur le dressage de chiens... et nécessite un travail de coordination, rôle du référent DDT. La mission considère que ce temps d'appropriation est long et que l'État doit donc concentrer son appui sur l'adoption par les éleveurs, des mesures de protection. En 2017 sur les 23,34 millions consacrés aux mesures de protection, un peu plus de 39 % étaient consacrés au gardiennage hors salarié, 43 % au gardiennage salarié, 10,5 % aux investissements matériels, 7 % aux chiens de protection et à peine à 0,04 % aux diagnostics de vulnérabilité. La répartition entre ces différents postes interroge la mission qui regrette un faible appui aux diagnostics de vulnérabilité, pour un soutien fort au gardiennage hors salarié qui relève pourtant du métier classique de l'éleveur (en présence ou en absence de loup). La mission préconise donc que l'investissement de l'État soit mis en priorité sur les diagnostics de vulnérabilité élaborés de façon pluridisciplinaire, sur les investissements en clôture et leur entretien, ainsi que sur la sélection des chiens de protection. Elle estime, comme cela est largement admis dans tous les pays visités, que le gardiennage fait partie du travail normal de l'éleveur.
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Partant des constats que le système des aides ne contribue que peu à la diminution des dommages et que l'efficacité des mesures est fortement dépendante de l'engagement des éleveurs, la mission s'est interrogée sur l'intérêt d'une aide forfaitaire globale plafonnée79. Celle-ci viserait à remettre l'éleveur au centre des décisions sur les mesures de protection les plus adaptées à son cas, mais aussi à le responsabiliser. L'aide serait versée après réalisation du diagnostic de vulnérabilité, et devrait être remboursée si les mesures de protection qui en découlent ne sont pas mises en oeuvre (en zone considérée comme protégeable). Deux scénarios sont alors envisageables concernant les indemnisations, selon la zone où l'éleveur subit les dégâts :
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en front de colonisation, une indemnisation après constat (incluant prélèvement génétique sur blessure) , sous condition d'un réel engagement de l'éleveur dans la réalisation du diagnostic de vulnérabilité de son exploitation. Cet engagement devrait se traduire par la mise en place effective de mesures de protection dans les deux ans qui suivent la réalisation du diagnostic ; en zone de présence permanente (ZPP) :
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soit une indemnisation qui pourrait être intégrée à l'aide forfaitaire globale pour la mise en oeuvre des mesures de protection ci-dessus définie, et être basée sur un indicateur de menace défini par les diagnostics de vulnérabilité et un facteur d'échelle (nombre de jours d'estive) ; soit un arrêt des indemnisations (droit commun des autres prédateurs soumis à régulation, mustélidés, renard, ou non régulés, buse, rapaces), sauf dans le cas d'un événement exceptionnel (dérochement par exemple).
Il s'agit de marquer ainsi que la stratégie française est de prioriser la prévention des dommages. Enfin, pour les éleveurs des zones non protégeables définies à partir des diagnostics de vulnérabilité, une réflexion pourrait être menée sur la mise en place, soit d'un système assurantiel, soit d'un fonds mutualisé. La proposition de règlement du parlement européen et du conseil établissant des règles régissant l'aide aux plans stratégiques devant être établis par les États membres dans le cadre de la politique agricole commune (PAC), parue le 1 er juin 2018, donne en partie le cadre de la réflexion concernant la future PAC. La mission considère que c'est le bon moment pour démarrer une réflexion concernant le soutien à moyen terme des éleveurs confrontés à la prédation. Les articles 65 concernant les engagements en matière d'environnement et de climat et autres engagements en matière de gestion (mesures agro-environnementales et climatiques), 68 (investissements) et 70 (outils de gestion du risque) du chapitre 4 du dit règlement ouvrent des possibilités différentes qui méritent d'être étudiées quant à leur impact sur l'élevage dans les secteurs colonisés par le loup. Les articles 65 et 68 ouvrent la possibilité du forfait. Cette possibilité a déjà été activée pour le soutien actuel aux mesures dites d'entretien au sein des mesures de protection à savoir gardiennage et entretien des chiens. Elle ne l'a pas été pour le soutien aux investissements (clôtures, achat de chien). Dans un souci de simplification administrative pour l'éleveur, la question se pose d'élargir la mesure 65 aux investissements et d'aller vers une aide forfaitaire globale incluant un montant d'indemnisation forfaitaire.
79
Par exemple, en fonction (inversement proportionnelle) du nombre de brebis par UTH (cf paragraphe 3.1.4) afin d'inciter à diminuer la taille des troupeaux afin de pouvoir les protéger de façon beaucoup plus efficace.
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9. Recommandation (MAA, MTES) : mandater les experts français engagés dans la négociation visant à définir le nouveau règlement agricole européen, afin que celui-ci permette l'adoption d'un régime d'aide forfaitaire dans les zones de présence permanente du loup. Cela permettrait de mettre en place un système plus simple, reconnaissant la capacité de l'éleveur à ajuster les mesures de protection à sa situation, mais aussi plus responsabilisant. Une telle évolution devrait s'accompagner d'une pression de tir accrue sur l'espèce, rendue possible par les progrès de son bon état de conservation en France (voir 3.3.).
3.2.4. En France, il est nécessaire de se projeter à moyen terme pour ne pas dissuader les éleveurs bovins de se protéger
La question de la prédation sur bovins se pose de façon croissante (cf. 1.1.). La mission a constaté que l'Espagne est confrontée de façon importante à la prédation sur bovins. L'Italie et l'Allemagne ont fait part de meutes se spécialisant sur les bovins. Il importe donc que la France se prépare à cette éventualité. Aujourd'hui, celle-ci a fait le choix de considérer les troupeaux bovins comme non protégeables et ce sans aucune analyse de vulnérabilité des territoires impliqués. Or, certains fronts de colonisation sont concernés par la présence d'élevages ovins, mais aussi d'élevages bovins. Déclarer les troupeaux bovins non protégeables, sans élaborer de diagnostics de vulnérabilité, revient à ne pas inciter les éleveurs à raisonner la faisabilité ou non de la mise en oeuvre des mesures de protection. C'est aussi prendre le risque à moyen terme de générer des meutes qui se spécialisent sur les troupeaux bovins, les éleveurs d'ovins s'étant eux protégés. Par ailleurs, sur certains fronts de colonisation les éleveurs sont déjà confrontés aux dégâts de gibier (sangliers, cervidés), avec une nécessaire réflexion sur la protection, non seulement des cultures, mais aussi des prairies. Il en découle un vrai intérêt à réfléchir à la mise en défends de l'ensemble de l'exploitation vis-à vis des prédateurs, comme du gibier, avec une réflexion approfondie au sujet des clôtures.
3.2.5. En France, il est nécessaire de s'interroger sur la définition des zones non protégeables
Avec un raisonnement similaire à celui tenu pour les troupeaux de bovins, la mission estime qu'une zone ne doit être déclarée difficilement protégeable (ZDP) que suite à la réalisation d'un diagnostic de vulnérabilité approfondi. Déclarer tout un territoire en ZDP sans réalisation de diagnostics de vulnérabilité présente différents risques : celui d'accorder l'autorisation du tir de défense et celui d'ouvrir le droit aux indemnités sans qu'il y ait la moindre réflexion sur la protection, ce qui ne manquerait pas de conduire à des contentieux avec les associations de protection de la nature. Par ailleurs, comme on peut le remarquer dans les prises de position des parties prenantes à l'occasion des réunions du groupe national loup, introduire des inégalités de traitement des éleveurs entre zones géographiques n'est pas bien perçu et doit être solidement étayé.
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Ceci n'exclut cependant pas, de l'avis de la mission, de diversifier la pression de régulation du prédateur selon les régions où sa présence pose moins de problèmes (zones de polyculture, forêts, etc.) et celles où elle accentue des difficultés économiques et de développement déjà aiguës.
3.3. Le recours aux tirs létaux de défense, encore peu utilisés en Europe, peut être d'autant plus simplifié que l'état de conservation de l'espèce progresse
La mission considère le tir des loups 80 comme un moyen à part entière de prévention des dégâts. Le prélèvement d'individus par tir s'inscrit pour le moment dans un cadre dérogatoire qui en fait la dernière extrémité (au cas où aucune autre mesure satisfaisante ne peut être mise en oeuvre pour limiter les "dommages"). Il semble cependant clair à de nombreux spécialistes, que cette approche trop restrictive a enhardi les loups et encouragé le développement de la prédation sur les troupeaux considérés comme ressource alimentaire "de confort". Dans la mise en place d'un cadre de protection stricte, des paramètres très importants de l'éthologie du loup ont ainsi été négligés. Le loup est une espèce « rusée » et « prudente », mais qui a toujours cherché à approcher l'homme. C'est sans doute pour cela que c'est la première espèce sauvage à avoir été domestiquée dès la préhistoire. Aidé par son statut de protection, le loup a naturellement tendance à côtoyer l'homme de plus en plus près, sans recevoir de signaux négatifs qui renforceraient sa prudence. Au moment où le bon état de conservation progresse et que, du fait de la forte hausse simultanée des effectifs de loup présents en France et plus généralement en Europe, la régulation numérique de l'espèce par des quotas de tirs létaux est souhaitée par un nombre croissant d'acteurs des pays visités (voir 1.5.), la mission considère important d'attirer l'attention sur le bénéfice que pourrait apporter le renforcement de tirs de défense, à proximité immédiate des troupeaux, de préférence à des tirs de prélèvement non ciblés. Il s'agit prioritairement de rechercher un bénéfice éthologique, en renforçant la prudence naturelle du loup, en modifiant son comportement de chasse ; ce qui revient à "réinitialiser" l'instinct sauvage du grand prédateur. Un effet de synergie est ainsi espéré avec les mesures de protection "passives".
3.3.1. Les tirs létaux sont peu pratiqués
Parmi les pays visités, seules l'Espagne et la Suisse prélèvent régulièrement des loups de manière légale. En Espagne, il faut préciser que ces tirs, réalisés par des chasseurs (jusqu'à 200/an), s'effectuaient au Nord du Duero, sur une population de plus de 2 000 loups (la plus dense d'Europe), non soumise à une protection totale par la directive HFF et la Convention de Berne. Le tir du loup en chasse guidée dans les "Réserves de Faune" constitue une recette81 touristique importante pour des zones isolées, au même titre que les trophées de cerf. En revanche, en Suisse, c'est la doctrine du Ministère fédéral chargé du loup (OFEV) qui, en concertation avec l'échelon politique cantonal, a institué sur une base temporaire, le tir des loups, 5 ans après son apparition sur le territoire helvétique, en
80
81
En France, il est actuellement défini par l'arrêté du 19 février 2018 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do? cidTexte=JORFTEXT000036619326&dateTexte=&categorieLien=id Lors des enchères pour l'adjudication des lots de chasse, il n'est pas rare d'atteindre 12 à 14 000 pour avoir le droit de tirer un loup !
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accord avec le texte de la Convention de Berne 82. Ce sont exclusivement des "garde faune" cantonaux qui réalisent les tirs (bilan : 23 tués sur 115 loups ayant été identifiés sur le sol suisse, depuis 1998). L'État fédéral refuse d'envisager l'armement des bergers. Le tir de défense, limité au périmètre des alpages, peut être déclenché sur un "loup problématique" (solitaire) identifié par le suivi des dégâts et le monitoring génétique. La régulation numérique peut s'exercer par prélèvement de 50 % des juvéniles d'une meute trop spécialisée sur les moutons (meute "déviante"). Dans les deux cas, l'objectif des tirs est de détourner le prédateur des animaux d'élevage et de lui conserver sa "timidité" atavique. L'Allemagne et notamment le Land de Basse Saxe 83, envisage une extension des possibilités de tir, notamment pour éloigner les loups "téméraires" des zones habitées, mais aussi pour réguler une expansion numérique beaucoup plus rapide qu'anticipée sur des parties sensibles de son territoire (zones de plaine industrielle très habitées, zones humides de pâturage ovin non clôturé, marais, polders, etc.).
3.3.2. Il importe de sécuriser juridiquement le recours aux tirs vis-à -vis du droit international
Pour l'instant, hormis le cas de l'Espagne au Nord du Duero 84, tous les pays, y compris la France, s'appuient sur des autorisations de tir de destruction au cas par cas, basées sur l'intensité des dommages, la mise en place de mesures de protection passive (cercle 1) ou l'absence d'autre solution satisfaisante (cercle 2 et front). De plus, dans certains pays (Castille et Léon par exemple), l'interprétation des textes par le juge administratif limite sérieusement la marge d'action de la communauté autonome. Non envisagée par les pays dépourvus de loups (qui ont dès lors facilement admis qu'il soit placé dans l'Annexe IV), la régulation numérique de l'espèce s'invite à l'ordre du jour plus rapidement que prévu compte tenu du doublement des effectifs constaté entre 2014 et 2018. Sans évolution des textes, les États impuissants à juguler la nouvelle dynamique de l'espèce, s'exposeront inéluctablement à la recrudescence des destructions illicites. Et contrairement à la chasse, dont le paradoxe est de maintenir durablement les populations d'espèces sur lesquelles elle est pratiquée (voir sanglier, cervidés, tétraslyre), ces méthodes illégales peuvent conduire à l'extermination du loup. L'Allemagne réfléchit à appuyer ses mesures de régulation sur la transposition de l'alinéa 1-e de l'Art.16 de la directive85. Sa formulation semble en effet convenir pour des mesures de régulation fondées sur la chasse en quotas limités. Il s'agirait aussi de pouvoir maintenir des zones "sans loup", en évitant l'installation de meutes, pour des raisons de sécurité des personnes notamment86. Cet alinéa de la directive est transposé en droit français, par le biais du protocole des tirs de prélèvement renforcés, liés à la période de chasse et déconnectés de la période de présence des troupeaux.
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Les conditions à remplir et les règles de décision ont été stabilisées, proche du système français, 10 ans plus tard. Projet de résolution du 12/10/2018 présentée au Bundesrat. Qui correspond au cas des pays de l'Est et des Balkans-loup classé en Annexe V de la Directive HFF. Permettre, dans des conditions strictement précisées, le prélèvement sur une base sélective et en quantité limitée, la conservation ou tout autre exploitation judicieuse de certaines espèces protégées (animales ou végétales)en petit nombre. L'Allemagne a été le théâtre en 2018, de la 1 ère attaque d'un loup sur l'homme en Europe, depuis 1945.
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La Suisse souhaite une évolution dans le cadre de la Convention de Berne dont le texte a été repris mot à mot par la directive HFF pour ce qui concerne les possibilités de dérogation à la protection intégrale. Elle avance trois arguments : 1) le succès du plan de sauvegarde du loup qui se trouve désormais hors de menace sur l'ensemble du territoire européen ; 2) la hausse prévisible et insupportable du coût des moyens de protection au vu de la hausse des effectifs et de la répartition géographique ; 3) la facilité accordée, il y a 40 ans, aux pays signataires de la Convention de Berne et qui abritaient déjà des populations conséquentes de loup européen, en les autorisant à continuer de le gérer en dehors d'un cadre de protection totale (soit comme gibier, soit autrement). Elle considère que cette dérogation devrait aujourd'hui être concédée, par parallélisme des formes, aux pays qui accueillent le retour du loup, une fois dépassé un cap démographique à définir (sorte de "point de non-retour", dont sans doute la situation de 2019 est assez voisine). L'Autriche et l'Allemagne envisagent de la soutenir auprès du Comité permanent. C'est le même paradoxe, à l'intérieur de ses propres frontières, que l'Espagne met en avant ; la segmentation "Nord du Duero/Sud du Duero" a été mise en place pour protéger à l'époque la population relictuelle d'Andalousie aujourd'hui disparue. La population de loup du Sud du Duero n'est autre que l'extension géographique de la population chassable du Nord du Duero, et donc toute discrimination juridique paraît aujourd'hui totalement incongrue. Pour l'Espagne, la logique voudrait aujourd'hui que le loup passe de l'annexe IV à l'annexe V de la directive HFF87. En raison du fort tabou que cela représente, la démarche allemande, qui ne nécessite pas de modification de la directive, peut s'avérer plus pragmatique, à condition d'oeuvrer de concert, dans le cadre d'une nouvelle rédaction en cours du guide interprétatif de la directive. 10.Recommandation (MAA, MTES) : fixer un mandat précis aux experts français participant aux travaux de réécriture du guide interprétatif de la directive Habitats faune flore concernant la protection des espèces annoncés par les commissaires européens à l'environnement et à l'agriculture pour 2019, avec pour objectif de permettre, dans un cadre dérogatoire précisé, de sécuriser juridiquement le recours aux différentes modalités de tirs létaux sur le loup. La mission considère par ailleurs qu'il serait utile de viser parallèlement la réévaluation du positionnement du loup comme espèce protégée à l'aune de sa répartition et de sa situation démographique actuelle (effectifs et rythme d'accroissement), afin de ne retenir, dans les textes internationaux s'appliquant à la France, que des mesures de protection mieux proportionnées à l'objectif de protection de l'espèce.
87
Elle considère en effet logiquement que l'espèce étant, sur son territoire, sortie d'un état de menace « critique », elle devrait logiquement quitter le statut de protection stricte prévu par la directive pour les espèces en danger critique de disparition. Il faudrait sinon étendre le régime de protection stricte à toutes les espèces !
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3.3.3. Dans le cadre juridique actuel, renforcer en France la réactivité, la pertinence et l'efficacité des tirs comme moyen de prévention en synergie avec les mesures de protection passive
La conception française des tirs de défense, simple ou renforcée, auprès d'un troupeau régulièrement attaqué par le loup se rapproche du concept suisse, dans son idée. Par contre, elle s'en éloigne dans la mise en oeuvre, faute de réactivité suffisante. Concernant les tirs de défense simple, la réactivité est garantie puisque 53 % des éleveurs ayant souscrit des mesures de protection des troupeaux disposent d'autorisations individuelles délivrées par le préfet de département, valables 5 ans ; ces autorisations n'étant pas suspendues quand le quota annuel est atteint. En pratique, très peu de tirs de défense simple sont fructueux (quelques unités par an pour plus de 1 000 autorisations). Cette mesure de bon sens et rassurante a donc un impact limité. Les tirs de défense renforcée sont en revanche beaucoup plus efficaces, grâce à la coordination entre tireurs et l'utilisation de matériel à visée infra rouge. Pour qu'ils soient mis en oeuvre, il faut soit mobiliser la brigade ONCFS (délai d'une à deux semaines), soit organiser une opération sous le contrôle d'un lieutenant de louveterie local, avec des personnes habilitées et disponibles. Or, bien souvent après ce délai, les meutes ou loups solitaires incriminées ont changé de secteur. Pour être vraiment efficace comme mesure de prévention des dommages, dans un nouveau contexte de pression démographique du loup, cette procédure de premier rang opérationnel devrait être accélérée (avec un double impact sur les niveaux de dégâts, via la modification du comportement des meutes et via les effectifs du prédateur). Il serait également utile de créer un « tir de défense simple élargie », pour les zones de forte concentration des dégâts et les ZDP, mobilisable immédiatement par l'éleveur autorisé, mais limité à 3, voire 5 tireurs.
Répartition des différentes modalités de tir en France
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En matière de régulation, les tirs de prélèvement simples ou renforcés sont des tirs sans lien de proximité du troupeau, et qui ont l'inconvénient de ne pas cibler les comportements nuisibles du loup et ne sont donc d'aucun remède immédiat pour la prévention des dommages. Ils peuvent même déstructurer une meute, si un dominant est tué, ce qui entraînera davantage de risque de dommages à court terme sur la faune domestique (prédation opportuniste). De fait, ce sont les tirs de régulation renforcée (tir en opération de chasse au grand gibier) qui sont pratiqués sur quelques secteurs à forte densité de loups du Sud des Alpes. Réalisés comme c'est le cas en fin d'année civile, ils peuvent contribuer partiellement à une gestion adaptative vers laquelle la mission considère souhaitable de se diriger (voir 3.3.4.). Il faudrait répartir le quota au moins entre deux groupes de départements, ceux de la zone "dense" (Sud des Alpes) et ceux comportant une ZDP, voire une zone d'exclusion sur laquelle l'objectif serait d'éviter l'installation de meutes. Pour optimiser les opérations de régulation, il faut s'appuyer spatialement sur le dispositif mis en place par les préfets et l'ONCFS avec la louveterie. La mission propose que chaque préfet de département où le loup est présent crée une équipe de louvetiers, spécialistes du loup, réquisitionnables par l'administration et chargés d'exécuter, avec réactivité, les tirs de défense renforcée. Leur sujétion et leurs déplacements seraient défrayés sur les crédits de prévention des dommages. Ils devraient pouvoir utiliser la lunette de tir à visée thermique, tout comme la brigade ONCFS. Les éleveurs resteraient bien sûr, quant à eux, porteurs de l'autorisation de tir de défense simple. Les autres modalités de régulation du loup, prélèvement renforcé notamment, seraient déclenchées en fin d'année civile, en rapport avec des objectifs stratégiques de régulation ou de ralentissement de la colonisation (ZDP) débattus régionalement.
3.3.4. Dans le contexte de forte progression démographique de l'espèce, il importe désormais d'évoluer vers une gestion adaptative de l'espèce permettant un meilleur pilotage par les dégâts
Seule la France a mis en place, dans le respect de ses engagements internationaux et du droit européen, une forme de régulation quantitative des loups avec différents degrés d'intervention, y compris le droit pour les bergers de défendre eux-mêmes leur bien avec un fusil. Pour autant, elle se trouve face à un risque élevé de perte de contrôle de la progression numérique et spatiale de l'espèce qui pourrait conduire à un nouveau doublement dans 4 à 5 ans risquant d'entraîner une explosion encore plus importante du coût des moyens de protection et d'indemnisation tout en renforçant les conflits déjà nombreux. L'idéal serait de ne plus piloter par rapport à l'effectif, avec un seuil bas (minimum 500 loups), sans aucune limite supérieure, mais par rapport à un plafond haut correspondant à un nombre objectif de meutes (à débattre et à répartir spatialement). Ce nombre devrait être également corrélé à des objectifs de maîtrise des dégâts ou autres objectifs locaux d'équilibre des écosystèmes, de sécurité, etc. Les tirs létaux pourraient alors être effectués dans les meilleures conditions d'efficacité, avec au départ un plafond de prélèvement "non bloquant" que l'on peut
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estimer au double du plafond actuel. Ce plafond serait diminué sitôt que les indicateurs de suivi de la population témoigneraient 2 années de suite d'une stagnation démographique. De cette façon, l'expansion de la population serait sous contrôle de la puissance publique, en accord avec les objectifs patrimoniaux poursuivis région géographique par région géographique. Dans le cas d'une gestion adaptative, le nombre de loups pouvant être éliminés sur une année ne se mesure pas à l'unité près. Si l'on estime la population à 500 loups (+ ou - 50) et un accroissement annuel potentiel de +100 loups (+ ou  10), il apparaît que l'unité de compte est la dizaine et surtout que l'écart minimum entre une stratégie assumée d'augmentation des effectifs et une stratégie visant à arrêter sa progression est d'au moins 50 unités. La gestion adaptative aurait le mérite de la différenciation, c'est-à -dire d'un pilotage démographique fondé sur un objectif à atteindre, notamment en fonction de la place que l'on souhaite accorder à l'élevage :
·
là où l'on souhaite "retirer" des meutes, il faut augmenter le quota de loups à tuer, jusqu'à ce que le nombre de loups diminue ; ailleurs, où l'objectif en nombre de meutes n'est pas atteint, le nombre de prélèvement doit permettre une progression démographique et doit être baissé si besoin.
·
La mission propose que la France se dirige sans tarder vers la mise en place d'une gestion adaptative du loup en France en s'appuyant sur la nouvelle version, en cours de préparation, du guide interprétatif de la directive Habitats faune flore.
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4. La complexité de la coexistence loup - activités humaines requiert une communication équilibrée, basée sur des informations solides et partagées
Les dispositions relatives à la communication dans les pays visités par la mission sont assez hétérogènes et aucun pays n'évite la polémique. En France, où la faisabilité même d'une coexistence est souvent questionnée, la mission considère que ce sujet mérite, loin des affirmations simplistes, angéliques ou catastrophistes, une véritable politique de communication.
4.1. En Europe, des exemples intéressants qui, bien qu'insuffisamment aboutis, peuvent inspirer la France
Dans tous les pays visités, les controverses sont importantes et récurrentes, souvent amplifiées ou déformées par des media en quête de sensationnel, ou plus ou moins instrumentalisées par un camp ou un autre. La mission a recueilli beaucoup de témoignages en ce sens. La question de l'information objective du public et des messages que l'on souhaite véhiculer est donc une préoccupation générale. Parmi les pays visités, l'Allemagne, qui connaît un phénomène de recolonisation par le loup très comparable à celui de la France, se démarque. Sa communication s'articule de façon complémentaire entre le niveau fédéral et le niveau des Länder de façon à toucher un large public et à être aussi incarnée que possible au niveau local. Elle a également recours à un partage des rôles intéressant entre acteurs publics et acteurs extérieurs à l'État (fédéral ou Land), mais reconnus, notamment pour la production d'informations. Enfin, les messages sont cohérents et clairs en réaffirmant d'une part les engagements internationaux et européens du pays au sujet de la protection de l'espèce et de son état de conservation favorable, sans nier les difficultés que le retour du loup pose aux éleveurs qui sont aidés en conséquence. Au niveau fédéral, le ministère de l'environnement et l'Agence pour la protection de la nature ont externalisé, tout en le finançant et le supervisant, un « Centre de documentation et de conseil sur les loups » (DBBW). Confié au « Senckenberg Museum für Naturkunde Görlitz » qui le gère et en assure la coordination, il est alimenté par les données de trois organismes indépendants : le Leibnitz Institute für Zoo und Wildtierforschung (données sur les loups morts, régime alimentaire...), l'Institut LUPUS (qui coordonne le suivi biologique et la recherche sur le loup en Saxe) et du laboratoire de l'Institut de recherche Senckenberg, laboratoire de référence pour les recherches génétiques sur le loup et le lynx en Allemagne. Le DBBW apporte son conseil au gouvernement fédéral et à ceux des Länder pour la gestion du loup. Il est chargé de compiler annuellement l'information relative à la situation du loup en Allemagne (état des populations, dommages, mesures de prévention, dédommagements...).
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Le DBBW met à disposition du public, via son site internet 88, un grand nombre de données : biologie de l'animal, statut de protection, méthodologie et résultats de l'évaluation des populations, cartes sur la présence de l'espèce en Allemagne, dans chacun des Länder, données sur chaque meute, progression de la colonisation par territoire, données issues de la génétique, liste des loups abattus, coûts des mesures de protection et des indemnisations... La présentation est attractive, claire et factuelle. Enfin, pour chaque Land, le site donne accès à son plan loup et à son ou ses sites spécialisés. Dans le cas de la Saxe, il s'agit d'une part du site du ministère saxon de l'environnement (informations de base et renvoi au site ci-après décrit), d'autre part du site du « bureau de contact sur le loup » en Saxe, créé dès 2004 par le gouvernement saxon. Le « Kontaktbüro » se présente comme « le bureau d'information officiel pour la population, les médias et les autorités sur le loup ». Son site précise : « Les informations issues de la surveillance (collecte de données scientifiques) et de la protection des troupeaux sont collectées par ce bureau, préparées pour le public et rendues accessibles ou activement annoncées. Notre but est d'informer la population de manière opportune et objective et de fournir des informations factuelles sur le loup ». Une des missions « pilier » du Kontaktbüro est d'apporter de l'information aux éleveurs (sur le loup, sa présence, son comportement... ; sur les moyens de protection, les aides disponibles, les indemnisations...). Il est intéressant de noter que le site propose beaucoup de contacts personnels (téléphone ou mail), afin que les éleveurs, ou toute personne, puissent s'informer en direct. Les personnes interrogées par la mission en Saxe ont insisté sur l'importance, dans la politique de communication du Land, de ces interlocuteurs joignables par téléphone. Le Kontaktbüro envisage d'ailleurs d'avoir des correspondants dans chacune des communes de Saxe, plutôt qu'ils soient tous regroupés sur son siège, à l'est du Land, afin de se rapprocher encore plus des besoins de la population dans ce domaine. La Suisse a adopté un positionnement un peu différent, sans doute dicté par l'importance culturelle de la place de l'élevage dans ce pays. Le volet information de son plan d'action indique que : « Les cantons et l'OFEV coordonnent leurs politiques d'information et fournissent des informations objectives sur le loup, les problèmes qu'il pose et les solutions envisageables ». La question de la coexistence et de ses moyens apparaît ainsi centrale dans la préoccupation suisse.
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https://www.dbb-wolf.de/
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L'OFEV a également recours à l'externalisation (qu'il finance) pour gérer une partie de la communication et de l'information sur le loup au niveau fédéral :
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la collecte et la présentation des informations relatives au suivi de l'espèce sont confiées à une fondation ad hoc, Le Kora89, qui se définit comme suit : « Le KORA enquête sur l'écologie des carnivores et suit l'évolution de leur population. Nous observons également les interactions des prédateurs avec un paysage anthropisé afin de développer les bases d'une coexistence sans conflit entre les grands prédateurs et les humains ». Son site regroupe de façon assez détaillée l'information disponible sur la présence et le développement du loup en Suisse, sur les analyses génétiques effectuées chaque année, sur les dégâts constatés en temps quasi réel, etc. ; le volet cohabitation avec l'élevage est confié à une association, AGRIDEA, qui se définit comme faisant « partie intégrante du système de connaissances agricoles constitué notamment par la recherche, la formation, la vulgarisation, la pratique et l'administration ». AGRIDEA a développé un site spécifique, remarquable (et une newsletter associée), pour le monde agricole baptisé « Protection des troupeaux »90 qui fournit une information très détaillée et d'ordre technique aux éleveurs et bergers sur toutes les mesures techniques et dispositions administratives relatives à la protection.
·
L'Italie et l'Espagne de leur côté ont une communication qui est apparue à la mission moins structurée et plus axée sur la volonté de mieux faire connaître le loup, sa biologie, son éthologie, son développement, et de convaincre qu'il est utile et qu'il a sa place dans les régions concernées, malgré les dommages qu'il crée aux activités d'élevage. Elle semble en outre peu articulée avec le niveau local. En Italie, le projet LIFE Wolfalps (2013-2018, 6 millions d'euros), piloté par le Parco Naturale Alpi Marittime à la tête de 12 partenaires des régions alpines de l'Italie et de la Slovénie, a été consacré à 50 % à la communication. Le projet suivant, qui devrait inclure des partenaires français, devrait se consacrer beaucoup plus directement à la recherche de solutions techniques pour diminuer la prédation, et aux façons de diminuer les coûts et la quantité de travail associés aux moyens de prévention. Preuve s'il en est de l'importance de ce volet. En Espagne, comme en Italie, l'outil « parc à loups » est considéré également important, en termes de communication, toujours principalement pour mieux faire connaître et accepter le loup91. Dans les deux cas, « Centre du loup ibérique » en Espagne et « Centre faunistique hommes et loups » en Italie92, il a été choisi de ne présenter au public que des loups locaux (population ibérique ou population italoalpine) dans un milieu aussi naturel et proche que possible de celui fréquenté par l'animal dans ces deux pays. Il est intéressant que la Saxe ait fait au contraire le choix de ne pas faire de parc à loups. Elle considère en effet qu'un tel investissement est trop consommateur de moyens et surtout trop artificiel, alors que la priorité consiste pour la population à savoir cohabiter avec un animal présent dans le milieu naturel et qu'elle peut être amenée à croiser.
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https://www.kora.ch/ http://www.protectiondestroupeaux.ch/fr/ Même si la difficile coexistence avec les troupeaux est abordée dans les deux parcs visités. http://www.centrodellobo.es/ et http://www.turismoentracque.it/vivere/uomini-e-lupi/
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4.2. En France, il y aurait un intérêt à mettre en place une politique de communication impliquant l'ensemble des acteurs
La mission rappelle que la communication est censée produire des éléments de discours à des fins précises, pour appuyer une thèse, aider à l'atteinte d'un objectif. Elle doit avoir comme base la production d'informations, c'est-à -dire d'éléments vérifiés et reconnus valides par tous les acteurs. Celle-ci ne doit pas être confondue avec la gouvernance (groupe national, groupes départementaux...), ni avec les actions de formation des éleveurs et/ou bergers, même si elle doit pouvoir être utile à l'une comme aux autres.
4.2.1. Définir un objectif de communication commun entre les principaux protagonistes serait l'idéal
S'il s'agit de communiquer sur la coexistence entre le loup et les activités humaines, au premier rang desquelles l'élevage, il convient d'impliquer dans l'élaboration de cette politique de communication l'ensemble des parties prenantes : État, élus locaux, organisations de professionnels agricoles, associations de protection de la nature. La mission conseille également d'impliquer les professionnels du tourisme et des sports de nature. Il importe en premier lieu, que ces acteurs définissent ensemble l'objectif de cette communication commune et les messages dont ils souhaitent que cette communication soit porteuse. Du point de vue de la mission, il s'agit de proscrire toute « communication prosélyte » pour ou contre le loup, sujet dépassé, mais bien de regarder la réalité en face, celle d'un équilibre complexe, et sans doute fragile, à atteindre. La mission propose la constitution un « groupe de travail communication », composé de membres de groupes loup départementaux, réunis sous la supervision d'un médiateur professionnel agréé par le groupe national loup, avec pour objectif d'élaborer une politique de communication commune sur la coexistence du loup et des activités humaines. La mission est consciente de la difficulté d'un tel travail. Elle pense néanmoins, qu'une relative méconnaissance des acteurs les uns envers les autres et des perceptions souvent biaisées du monde rural par le monde urbain (et vice-versa), compliquent sérieusement la recherche de solutions pragmatiques. Une telle démarche peut contribuer à dépasser ces clivages. Elle suppose que celle-ci intervienne, dans le cadre d'une affirmation décomplexée des engagements internationaux et européens de la France, mais aussi d'une clarification de la notion de « bon état de conservation de l'espèce » et de la vision prospective correspondante de la présence du loup sur le territoire national.
4.2.2. Le partage d'une base d'informations communes, validées et factuelles est indispensable
Au-delà de la méconnaissance des uns par les autres, une partie des controverses actuelles ou du traitement médiatique approximatif de la question, est parfois alimentée par une suspicion sur les informations disponibles ou sur le temps nécessaire pour leur partage.
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De gros progrès ont néanmoins été faits dans ce domaine ces dernières années et beaucoup d'informations sont désormais accessibles, principalement sur le site de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Auvergne Rhône-Alpes (AuRA) et sur celui de l'ONCFS, l'une et l'autre diffusant en outre des lettres d'informations régulières aux contenus denses. Pour autant, la présentation des informations via les deux sites internet cités plus haut, apparaît peu attractive dans sa forme et assez peu didactique, avec des tableaux de données parfois difficiles à déchiffrer. Ceci peut contribuer à entretenir l'idée que l'on ne facilite pas la mise à disposition du public de cette information. Très récemment (le 20 février 2019), l'ONCFS a lancé un nouveau site dédié aux informations sur le loup www.loupfrance.fr. Un réel effort de présentation a été fait. L'essentiel du contenu reprend les informations déjà disponibles sur le site institutionnel de l'ONCFS, mais la présentation qui en est faite ici est à la fois claire et attractive, ce qui constitue une évolution très positive. La mission considère qu'il y aurait un intérêt, à partir d'une telle base, à disposer d'un lieu de regroupement de toute l'information relative à la présence du loup en France et à sa coexistence avec les activités d'élevage. Une première étape pourrait ainsi consister à enrichir ce site des informations présentes sur le site de la DREAL AuRA, en les présentant dans le même esprit que le site actuel. Le plan national d'action (PNA) 2018-2023 prévoit d'ailleurs la création (dans le cadre de l'action 6.1) d'un « centre de ressources sur le loup ainsi que sur ses interactions avec le pastoralisme et l'environnement »93. Il convient de le mettre en place sans tarder.
4.2.3. Vers la création d'un « observatoire de la coexistence entre le loup et les activités humaines », autonome et mandaté de façon paritaire ?
La mission considère cependant qu'il serait utile que les acteurs se fixent une ambition plus large, afin d'aller au-delà de cette simple mise en commun de l'information. Le PNA prévoit d'ailleurs (p. 81) qu'une expérimentation soit conduite avec la création d'un « média particulier (site Internet, newsletter périodique, ou articulation des deux) dont le pilotage éditorial serait assuré de façon paritaire par les représentants des éleveurs et des représentants des APN ». 11.Recommandation (MAA, MTES) : favoriser la création d'un « observatoire national de la coexistence du loup et des activités humaines », confié à un acteur tiers disposant d'une autonomie suffisante par rapport à l'ensemble des acteurs du sujet et travaillant sur la base d'un mandat d'un « groupe de travail communication » issu des groupes loup départementaux.. Un tel observatoire aurait vocation à présenter en temps réel et de façon transparente, factuelle et accessible à un large public, l'ensemble des informations disponibles sur le sujet complexe de la coexistence du loup et des activités d'élevage (suivi biologique, éthologie, dommages, moyens de préventions, interventions sur l'espèce, bonnes pratiques, intérêt écologique, conséquences économiques, etc.). Il pourrait s'appuyer autant que de besoin sur le conseil scientifique du PNA pour la validation ou la vulgarisation des données issues de la recherche.
93
« Cette plateforme aura en particulier pour but de rassembler des données relatives à la situation du loup en France, aux études scientifiques réalisées et en cours, à des informations sur le loup et sur les mesures de protection, à des bonnes pratiques en matière de coexistence entre l'homme et le prédateur, à des transferts d'expériences nationales ou internationales. » PNA 2018-2023 p. 81.
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Conclusion
Les solutions techniques et financières, importantes, sont longuement débattues dans ce rapport. Elles ne répondront cependant pas à toutes les questions soulevées par le retour du loup en France. L'expansion rapide de l'espèce concerne désormais des zones telles que le Massif Central, région d'élevage prédominant, l'Aquitaine et l'Occitanie, deux fois plus denses en moutons que les Alpes et la région Provence-Alpes Côte d'Azur, avec de plus, des troupeaux bovins en élevage extensif de plein air, cibles potentielle des loups. Une proportion croissante du monde de l'élevage va donc être concernée par cette évolution. Ceci devrait conduire, du point de vue de la mission, à reconsidérer les modalités de suivi de la population lupine, de protection des troupeaux, de prévention des attaques par le recours aux tirs, mais aussi les moyens alloués aux actions correspondantes. Cela oblige aussi à se poser la question de la place que l'on souhaite accorder au loup, son bon état de conservation étant désormais largement assuré. Au-delà des recommandations formulées, la mission encourage l'État à innover dans deux directions. Tout d'abord, à l'heure où la plupart des acteurs souhaitent que les décisions se prennent au plus près du terrain, la question de la gouvernance mérite d'être examinée à nouveau. Le groupe national loup est essentiel comme instance de suivi du plan national d'actions 2018-2023 et comme lieu de dialogue entre les différents acteurs. La mission a, cependant, fait le constat que le rôle joué par les gouvernements régionaux des pays visités, en concertation étroite avec l'administration centrale et dans le respect des engagements européens ou internationaux, permet une meilleure prise en compte des particularités locales. Elle considère qu'il serait essentiel que les régions françaises, compétentes dans plusieurs domaines clef tels que la formation, le développement économique, la gestion des fonds européens, la biodiversité, puissent être associées plus étroitement à la réflexion et aux décisions. Il s'agit en effet de réfléchir, territoire par territoire, au type d'agriculture et plus largement d'activités humaines que l'on souhaite, avec leurs conséquences en termes de biodiversité, de paysage, de filières économiques, de formation des femmes et des hommes. Enfin, à l'heure où la fracture entre monde urbain et monde rural est exacerbée et où, malgré la méconnaissance fréquente de l'ensemble des enjeux, les acteurs expriment des positions très tranchées, l'idée d'engager un vrai dialogue sociétal semble pertinente. Il pourrait prendre la forme d'une conférence citoyenne qui serait de nature à aider à légitimer les décisions à prendre sur un sujet complexe et sensible. Thierry Boisseaux Christian Démolis Odile Stefanini-Meyrignac Michel Vallance
Ingénieur général Ingénieur général Ingénieure générale Ingénieur général des ponts, des eaux des ponts, des eaux des ponts, des eaux des ponts, des eaux et des forêts et des forêts et des forêts et des forêts
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Annexes
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1. Lettre de mission
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2. Fiches pays
2.1. Le Piémont italien, protection forte du loup, unités d'élevage de taille restreinte et accent mis sur le gardiennage
Verbatim : « le loup ne tue pas les moutons, il sélectionne les bergers ». FICHE Piémont (Italie) Éléments de contexte
Les Alpes italiennes, où le loup avait disparu au XX e siècle, contrairement aux Apennins où il a toujours été présent, sont en cours de recolonisation par le loup dans des proportions similaires à la France. La présence ovine y est cependant beaucoup moins importante avec une majorité de troupeaux de petite taille et en général regroupés tous les soirs pour la traite. Les budgets publics pour la prévention sont restreints et inconstants. Le système d'indemnisation des victimes ne fonctionne pas correctement, ce qui rend les statistiques de dégâts sans doute sous-estimées. Le tir légal du loup reste prohibé, mais de nombreux témoignages font état d'un braconnage important.
Carte d'identité Piémont
Superficie : 25 402 km² ; Sous-population concernée : italo-alpine Nombre de meutes/ loups : 33 meutes / environ 195 loups Statut du loup :
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protégé par la convention Berne (espèce strictement protégée  annexe II) protégé par la directive Habitats
Mortalité loup : 15 à 20 % liée au braconnage-accidents de la route Nombre d'éleveurs/têtes ovins/têtes bovins : Élevage bovin très majoritaire (à plus de 80 % en alpage), environ 120 000 ovins, surtout troupeaux laitiers de taille moyenne de 300 têtes). Il a été indiqué à la mission que certains troupeaux à viande, de grande taille, seraient laissés en estive sans surveillance, ce qui permet de recevoir des primes PAC, sans se préoccuper de pertes liées au loup. Nombre de victimes :
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mal connu depuis la mise en place du système assurantiel l'indemnisation des dommages 350 à 400 déclarées Région Piémont Ministère de l'environnement et de la protection du territoire et de la mer (MATTM) et son bras armé, l'ISPRA
Administrations en charge de la gestion :
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Existence ou non d'un plan national loup : plan national loup sur 10 ans, nouveau plan en cours de discussion depuis 2017 et non encore validé par les régions fin 2018.
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finalité : guider la conservation et la gestion du loup par une approche intégrée, f ournir des orientations pour le rôle de l'Italie dans la coordination avec les pays de l'ensemble de la région alpine. objectifs de prévention du braconnage et des empoisonnements, de lutte contre les chiens errants et l'hybridation, de prévention des conflits, de gouvernance et de
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FICHE Piémont (Italie)
régulation par le tir, ce dernier faisant l'objet de débat entre les régions. Indemnisations des dégâts : système assurantiel depuis 2012. Constat par les vétérinaires de l'ASL (autorité sanitaire locale) jugé non satisfaisant par le projet Life Wolfalps. Les vétérinaires n'arrivent pas à se déplacer dans les 48 h, ce qui conduit à une sous-déclaration des dommages alors que le nombre de meutes progresse.
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup :
·
Suivi par un réseau d'acteurs (services forestiers, agents des parcs, chasseurs - 500 personnes) sur la base de transects définis et à partir d'enquêtes de terrain opportunistes utilisant les techniques suivantes : recherche de traces dans la neige, excréments, poils ; pièges photos ; écoute des hurlements provoqué. Existence grâce au Projet Life wolfalps d'un manuel de poche « Instructions pour la collecte de signes de présence de loups dans les Alpes », de formations à la fois théoriques et sur le terrain, dispensées aux nouveaux observateurs (plus de 200).
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Estimation par la méthode CMR.
Analyses génétiques : Réalisées par un laboratoire américain (Piémont) et divers laboratoires italiens (reste de l'Italie). Pas de centralisation des données : existence d'une base de données piémontaise, pas de base de données italienne. Ambition de disposer d'une telle base inscrite dans le plan national loup.
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Mesures de protection (les mesures d'effarouchement sont jugées inefficaces) :
Financées par le PDR, mesure 10 (paiements agro-climatiques-environnementaux) et mesure 4 (investissements en actifs corporels : financement à 100 % de l'achat des chiens et des clôtures). Plafonnement à 5 000 /exploitation (moyenne entre 4 000 et 4 500 ). Enveloppe globale insuffisante : 300 k région/Europe) 3 volets : gardiennage continu du bétail, chiens, confinement nocturne avec clôtures électrifiées d'au moins 1,20 mètre de haut. Mise en oeuvre réfléchie au cas par cas jusqu'en 2012 avec un appui par un vétérinaire privé (un par province avec rôle d'accompagnement soit 8). Arrêt de l'accompagnement depuis 2012 faute de moyens. Projet de relancer cet accompagnement individuel dans le cadre du nouveau programme LIFE avec les vétérinaires des autorités sanitaires locales. Dans le cadre du projet Life Wolfalps 2013-2018, réalisation d'une enquête sur les dommages causés par le loup avec analyse de la vulnérabilité des systèmes d'exploitation suivie de réunions avec les régions / les éleveurs. Résultats dans la base de données. Conclusion en matière de pratiques agricoles dans l'annexe concernant les lignes directrices pour la gestion du loup avec distinction selon le type d'élevage (ovins / caprins et bovins). Protection des troupeaux bovins plus compliquée mais possible.
Loups en captivité et hybrides chien/loup
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Loups captifs : pas de mention dans le plan national loup. Existence d'un parc (visité) à Entracque (parc naturel des Alpes Maritimes) avec 4 ou 5 loups (aucune reproduction depuis sa mise en place). Loups hybrides : développement important du sujet dans l'annexe FRE9-01 (lignes
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FICHE Piémont (Italie)
directrices pour la gestion du loup dans les alpes italiennes) avec référence à un document établi en 2015 (directives pour la gestion de l'hybridation entre le loup et le chien-Bocci et al). Expériences de capture des hybrides nécessitant un accord de l'ISPRA, de stérilisation puis soit de relâcher dans la nature soit de rétention dans des installations agréées. L'Italie centrale, source d'émigration du loup italien vers les Alpes où le taux d'hybridation est inférieur à 10 %, est très concernée (très fort taux constaté sur quelques meutes). Le nouveau plan loup souhaite interdire la détention comme chien domestique du chien-loup tchécoslovaque et du chien de Sarloos.
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2.2. En Suisse, une gestion pragmatique fondée sur une priorité donnée à l'élevage ; le tir du loup intégré comme prévention
FICHE Suisse Éléments de contexte
La Suisse connaît depuis la fin des années 1990 le retour du loup (en provenance d'Italie et de France) alors que celui-ci avait totalement disparu au XX e siècle. L'importance de l'élevage dans la culture et l'identité suisses a conduit ce pays à adopter une stratégie assumée de limitation de l'expansion du loup, ce qui le conduit à questionner la convention de Berne. Les cantons ont un pouvoir d'initiative sur les tirs létaux. Parallèlement la protection des troupeaux est prise en charge très rigoureusement, tant dans les moyens d'aide que dans les moyens de conseil et de contrôle. Dans un contexte d'alpage en saison estivale et de troupeaux de petite taille, les dégâts constatés pour 3 à 4 meutes présentes sont moins intensifs qu'en France du fait d'un moins grand nombre de victimes par attaque. Enfin, les témoignages de braconnage dans certains cantons ne sont pas rares.
Carte d'identité
Superficie : 41 285 km² Nombre de meutes/ loups : 3 ou 4 meutes / environ 50 loups Statut du loup : protégé par la convention Berne (espèce strictement protégée  annexe II) ; protégé par l'ordonnance fédérale sur la chasse et la protection des mammifères et des oiseaux sauvages (OchP), modifiée substantiellement en 2012, 2013 et 2015 pour les mesures de protection et la régulation du loup. Nombre d'éleveurs/têtes ovins/têtes bovins :
· ·
8 000 éleveurs de moutons dont 90 % de doubles actifs ; · 400 000 moutons dont la 1/2 est estivée ; taille moyenne des troupeaux montant en estive : 500 têtes ; · 700 000 vaches. Nombre de victimes : environ 250 animaux de rente (ovins en majorité - pas d'attaque sur bovins).
·
Administrations en charge de la gestion : · office fédéral de l'environnement (OFEV) ; · cantons. Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup : groupe de travail national grands prédateurs ; · associations / fondation (KORA pour le suivi de population, AGRIDEA pour la mise en oeuvre des mesures de protection, « Chiens de protection des troupeaux Suisse » pour l'agrément des chiens et la formation des éleveurs). Existence ou non d'un plan national loup : plan national loup (dernière version 2016) avec objectifs de protection du loup, d'information du public, de gestion des conflits avec l'ensemble des acteurs, de maintien de l'activité d'élevage, de définition de critères autorisant le tir.
·
Indemnisations des dégâts : 80 % par l'OFEV et 20 % par les cantons (environ 100 k/an).
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FICHE Suisse Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : la fondation KORA travaille de façon très étroite avec les cantons qui recueillent tous les indices de présence du loup grâce à une démarche dite « opportuniste » avec :
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des prélèvements d'échantillons dans la salive récoltée sur des animaux de rente ou sauvages qui ont été prédatés par le loup ou dans des crottes / poils / urines recueillies dans la nature ;
des photos provenant de pièges photographiques ou directement de personnes ayant rencontré un loup. Établissement tous les trimestres par la KORA d'un rapport sur la situation du loup en Suisse.
·
Analyses génétiques réalisées à l'université de Lausanne (département d'écologie et évolution dirigé par Luca Fumagalli) permettant de déterminer le nombre minimum de loups en Suisse. Suite à la demande des cantons, le nombre d'analyses réalisées a plus que doublé (passage de 350-400 à 600-1000 échantillons par an). Actualités sur méthodes d'analyse : le département d'écologie et d'évolution de l'université de Lausanne a, par deux fois, pris une initiative en faveur d'une collaboration inter-laboratoires tout d'abord pour constituer une population de référence unique, puis pour passer de concert à de nouvelles techniques d'analyses. Faute de réponse, le laboratoire de l'université de Lausanne a abandonné l'ambition d'avoir un échantillon de référence et changé de méthodes d'analyses pour améliorer le génotypage de microsatellites en adoptant le séquençage à haut débit (HTS). Vient d'être publié un article scientifique sur le taux d'hybridation loup X chien des 115 individus de la base de données suisse : « Two decades of non-invasive genetic monitoring of the grey wolves recolonizing the Alps support very limited dog introgression » - Scientific Reports volume 9, Article number148 (2019).
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Prévues par la directive du 9 octobre 2017. Coût annuel de 3 millions d'euros. Choix de l'OFEV :
·
encourager financièrement les mesures de protection de façon à ce qu'elles soient supportables pour les agriculteurs. Les mesures concernent : la réalisation par le canton du plan de pâturage (diagnostic de vulnérabilité des unités pastorales) ; l'élevage /éducation de chiens de protection de troupeaux enregistrés officiellement ou à l'importation d'individus issus d'une association d'élevage reconnue ; la détention à l'année de chiens de troupeau ; l'électrification des clôtures ; l'entretien et au contrôle quotidien des clôtures dans des conditions difficiles ; la création d'un enclos de nuit ; l'acquisition par le canton de kits d'urgence protection des troupeaux permettant de faire face à une présence soudaine du prédateur. conditionner les indemnisations à la mise en oeuvre effective des mesures de protection ; considérer les tirs comme une mesure éducative de prévention venant compléter les mesures de protection.
· ·
Rôle des cantons : définir les mesures de protection des troupeaux qu'ils jugent nécessaires, appropriées et raisonnables et pour cela :
·
informer les agriculteurs se situant dans un secteur exposé aux risques de prédation,
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FICHE Suisse
sur la présence et les mouvements des prédateurs ;
·
conseiller sur les mesures appropriées (le conseil se base d'une part sur la réalisation d'un plan de pâture (diagnostic) par le technicien pastoral du canton analysant le risque de prédation et classant les estives en 4 catégories : difficiles à protéger, protégeables avec adaptation au niveau gestion, protégeables avec les moyens existants, déjà protégées et d'autre part par une visite individuelle de l'exploitation en présence de l'agriculteur si la situation nécessite une adaptation complexe).
La mise en oeuvre des mesures de la responsabilité de l'agriculteur qui bénéficie de visites « conseil-contrôle » du technicien pastoral et d'un salarié de l'association AGRIDEA. Le contrôle est par contre obligatoire dès lors qu'il y a attaque et que celle-ci doit être imputée pour calculer le contingent de tir. Soutien parallèle de l'office fédéral de l'agriculture (OFAG) structure en charge du soutien à l'agriculture (paiements directs, contributions au paysage...) qui facilite la mise en oeuvre des mesures de protection des troupeaux. Par exemple différenciation de la contribution relative à l'estivage des moutons selon le type de conduite (non plafonné) : - 400 francs suisses (FS) par UGB pour une estive gardée en permanence par un berger ou pour des moutons parqués protégés par un chien de protection officiellement enregistré ; - 320 FS par UGB pour des moutons estivés en pâturage tournant non protégés par un chien de protection ; - 120 FS par UGB pour un estivage dans un pâturage permanent. Tirs de loup : envisageables dans des conditions très encadrées par l'ordonnance du 29 février 1988 sur la chasse et la protection des mammifères et des oiseaux sauvages (autorisation accordée au niveau cantonal pour le tir d'un loup, au niveau fédéral pour le tir d'une meute) lorsque les individus causent des dégâts considérables. Des mesures raisonnables pour protéger les troupeaux doivent avoir été prises en amont. Sur 115 spécimens de loup identifiés génétiquement en Suisse depuis sa réapparition, 23 ont été tués (légalement ou non). Réflexions en cours concernant la régulation : modification de l'ordonnance donnant aux cantons la possibilité, après avoir consulté l'OFEV, compétent en la matière, de désamorcer en amont les conflits entre les exigences de certaines espèces protégées et les intérêts de la population par des interventions régulatrices préventives, tout en restant dans l'esprit de la convention de Berne.
Loups en captivité et hybrides chien/loup
Les deux sujets ne sont pas sensibles.
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Parcs à loup : un seul parc avec 4-5 loups de la sous-population balte, identifiés génétiquement. Hybrides : des travaux récents de Lucas Fumagalli démontre le très faible taux d'hybridation (< 2%). Une réflexion est en cours concernant l'interdiction de posséder des chiens hybrides de loup comme races de chiens domestiques.
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2.3. La Castille et Léon, siège de la population lupine la plus nombreuse d'Europe en présence d'un élevage abondant ; la base de la prévention est le « Mâtin d'Espagne »
FICHE Castille et Léon (Espagne) Éléments de contexte
L'Espagne a toujours conservé une population importante de loups, même si celui-ci était classé comme « espèce nuisible » jusqu'en 1971. Le changement de statut de l'espèce (différencié selon les zones du pays) a permis une nouvelle dynamique de colonisation qui fait de l'Espagne le pays d'Europe qui détient une des plus grandes populations de loups. Si la cohabitation avec l'élevage est correcte dans les zones où le loup a toujours été présent, la recolonisation récente du sud du Duero pose d'importants problèmes principalement avec l'élevage extensif de bovins viande, non gardés et de plus en plus attaqués (60 % des victimes désormais, en forte croissance). La conduite de troupeaux ovins sur toute l'année en parcours ouverts "méditerranéens" pose moins de problèmes lorsqu'elle est associée à un gardiennage humain et à la protection de chiens bergers (Mâtin d'Espagne) en nombre suffisant. Les éleveurs ont peu recours au système assurantiel en vigueur pour l'indemnisation des dégâts, ce qui conduit probablement à une sous-estimation des dommages.
Carte d'identité
Superficie : Castilla y León, 94 226 km² , 26 hab./km² ; Espagne, 505 911 km², 97 hab./ km² Sous-population de loups concernée : ibérique (Canis lupus signatus) Nombre de meutes/ loups : 191 meutes, 162 au nord du fleuve Duero et 29 (doublement en 15 ans) au sud (estimation 2018). Recensement 2012/2014, 179 meutes - entre 900 et 1600 loups (Espagne entière : 297 meutes  entre 1500 et 2700 loups - disparu en Sierra Morena  présence rare en Catalogne de loups d'origine italo-alpine). Statut du loup : classé nuisible jusqu'en 1971 ; espèce cynégétique ensuite, convention de Berne ratifiée en 1986, sous réserve que le loup (en Espagne) soit inscrit à l'annexe 3 (espèce protégée, peut être régulée si état de conservation favorable), · transposition, dans le droit espagnol, de la directive européenne HFF (1995/1997) : au nord du fleuve Duero, loup inscrit à l'annexe V (chasse possible) ; au sud du Duero, loup inscrit à l'annexe IV (protection stricte avec dérogations possibles), · chaque communauté autonome est néanmoins compétente pour déterminer le statut précis de l'espèce sur son territoire (cynégétique, protégée, soumis à plan de gestion, régime général des espèces sauvages...). Nombre de têtes ovins / caprins et bovins et taille moyenne des troupeaux :
· · · · ·
3 200 000 ovins et caprins - 1 300 000 bovins, taille moyenne des troupeaux : 60 têtes pour les bovins, 250 pour les ovins, élevage essentiellement extensif.
Nombre de victimes : 2 000 attaques causant 3 000 victimes dont 60 % de bovins ; 15 % des attaques au Nord du Duero, 85 % au sud (inversement proportionnel à la présence du loup). Chiffres inférieurs à la réalité, les éleveurs ne déclarant pas systématiquement les dégâts. Attaques en forte croissance sur le front de colonisation. Administrations en charge de la gestion :
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au niveau national, seul le ministère de la transition écologique est compétent ; il
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FICHE Castille et Léon (Espagne)
assure principalement une fonction de coordination,
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la gestion réelle relève de la responsabilité des autorités régionales (l'Espagne compte 17 « communautés autonomes »).
Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup : chaque communauté autonome s'organise comme elle le souhaite ; la coordination État central / Régions s'organise autour d'un groupe de travail entre techniciens, d'un comité technique avec des responsables de rang supérieur puis entre directeurs généraux (ministères central et régionaux) et enfin entre ministres central et régionaux. En Castille et Léon, création en 2017 d'une « table du loup » regroupant les divers secteurs socio-économiques concernés pour un échange de points de vue au moins une fois par an. Existence ou non d'un plan national loup : pas de plan national mais une « stratégie pour la conservation et la gestion du loup en Espagne » de 2004/2005 (en cours de révision), censée être déclinée par des plans de gestion élaborés par chaque communauté autonome. Plan de gestion de Castille et Léon (2016) : vise à assurer l'état de conservation favorable du loup tout en contrôlant la population d'une espèce qui génère des conflits, à défendre l'élevage extensif, établir un espace de dialogue « la table ronde du loup » et acquérir une meilleure connaissance et un suivi plus scientifique de la population de loup en Castille et Léon. Attaqué en justice par une association environnementale, il a été annulé en première instance en février 2018, puis annulé définitivement par le tribunal suprême fin décembre de la même année. Est principalement en cause la possibilité de chasser le loup au nord du Duero. Indemnisations des dégâts : Pour l'ensemble de l'Espagne, pas d'indemnisation directe par l'État central. En Castille et Léon, pas d'indemnisation directe par la communauté autonome (sauf sur des terrains gérés par l'administration comme les zones de chasse appelées « réserves de chasse » en Espagne. Possibilité pour les éleveurs de recourir à un système d'assurance, subventionné par le ministère central, avec en outre prise en charge par la communauté autonome de tout ou partie de la franchise par sinistre avec paiement sous 25 jours. Beaucoup d'éleveurs renoncent à souscrire une telle assurance (méconnaissance, complications...). Barème d'indemnisation par ovin : 120 . Le budget indemnisations est passé de 850 k en 2017 à 1,8 M en 2018 pour 4 200 têtes (essentiellement des bovins). Réflexion en cours sur la mise en place d'un fonds mutualisé alimenté par les éleveurs et partiellement abondé par l'État pour compenser les dommages.
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : ministère de la transition écologique. Cependant, depuis 1991, transfert de la plupart des compétences aux communautés autonomes, chargées, chacune en ce qui la concerne, du suivi biologique de l'espèce. Difficulté d'avoir un panorama précis à l'échelle nationale. Un recensement national, coordonné par le ministère tous les 10 ans, compile les résultats des recensements de chaque communauté autonome. Le recensement 2012/2014 est le premier réalisé de manière coordonnée sur tout le pays. Il a été basé sur l'évaluation du nombre de meutes, sur leur distribution et sur leur niveau de reproduction. En Castille et Léon : mobilisation de 700 personnes (pour près de 100 000 km²), principalement agents de terrain du gouvernement régional. Quadrillage du territoire en unités de 10X10 km. Utilisation de transects, de points d'observation, de hurlements provoqués, pièges photographiques, ainsi que tous types d'indices collectés directement ou indirectement (attaques comprises). L'organisation de l'ensemble et le traitement des données sont externalisés (entreprise « Consultora de recursos naturales » - http://www.crnaturales.com/) et supervisés par un comité scientifique régional. Depuis 2014, alimentation en continu d'une base de données (INFOLOBO), gérée par le même prestataire et accessible aux seuls agents de la région habilités à partir de fiches d'observation/récolte d'indices. De nombreuses données sont récoltées « au fil de l'eau ». En fonction de besoins ponctuels (besoin d'informations sur telle ou telle meute, suspicion de
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FICHE Castille et Léon (Espagne)
présence d'une nouvelle meute...), des recherches d'indices orientées sont effectuées. Quelques analyses génétiques ont commencé à y être incorporées. Un premier travail de recherche, sur un territoire de 4 378 km², a été récemment conduit, combinant l'utilisation d'un modèle de capture / recapture spatial et des analyses génétiques ( https://www.nature.com/articles/s41598-018-20675-9 ).
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Le mâtin d'Espagne est le mode principal de protection des troupeaux ovins en parcours libre sur des grandes surfaces de plateaux plus ou moins enforestés et embroussaillés. 100 000 mâtins sont « en service » pour toute l'Espagne. Très importante production de chiots avec échanges entre les éleveurs (brassage génétique). Il a été dit à la mission qu'au moins 1 000 chiots/an de bonne souche pourraient être exportés pour la France. Aucun appui financier n'existe au niveau national pour aider les éleveurs à adopter des moyens de protection. Des recommandations / suggestions techniques sont consultables sur le site internet du ministère de l'écologie : https://www.miteco.gob.es/es/biodiversidad/temas/conservacion-de-especies/especiessilvestres/ce-silvestres-interacciones-medidas.aspx Protection des ovins/caprins : (1) - regroupement nocturne « traditionnel » avec adjonction, autour du parc nocturne, d'une clôture électrifiée de 1,80 à 2 m de hauteur formée de 6 à 8 fils de 2 mm de diamètre de plus en plus rapprochés vers le bas ou de filets de 1,80 à 2 m de hauteur. Électrification via batterie rechargée par un panneau solaire avec 9,2 kV de voltage de sortie. Coût investissement estimé : 850 pour une exploitation moyenne ; (2) - utilisation de 2 chiens de protection par groupe de 100 animaux, soit 6 à 8 chiens pour 1 000 ovins. Coût : 500 pour l'achat d'un chien et 300 /an pour son entretien. Protection des veaux allaitants : création d'enclos de regroupement des veaux (20 à 25 veaux par demi hectare) avec (1) - clôture maillée résistante de 2 à 2,5 m de hauteur et enterrée de 0,5 à 1 m de profondeur ; (2) - électrification (contre le loup et contre les vaches) avec deux fils, l'un à l'extérieur à 0,25/0,3 m de hauteur, l'autre à l'intérieur à 0,6/0,9 cm de hauteur et électrification à 9kV ; (3)  2 systèmes d'accès (sas) sélectifs qui laissent passer les vaches, mais pas les veaux. L'enclos doit être équipé d'un abreuvoir, d'une mangeoire et d'un abri. Coût approximatif : 12 000 pour une exploitation moyenne. Protection des génisses : système similaire à celui décrit ci-dessus avec une seule porte qui peut être programmée pour s'ouvrir le matin et se fermer le soir, les génisses étant rentrées pendant la nuit. Coût approximatif : 6 000 pour une superficie de 0,5 ha abritant 15 à 20 génisses. Protection des bovins adultes : utilisation de chiens de garde de race « mâtin d'Espagne ». Nécessité de 2 à 4 chiens par groupe de 100 animaux. Les chiens peuvent être équipés de colliers (« de carlancas ») afin de les protéger contre des morsures au cou par le loup. Coût : 500 pour l'achat d'un chien et 300 /an pour son entretien.
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Chaque communauté autonome peut décider d'apporter un appui financier pour des moyens de protection, mais peu le font de manière régulière à ce jour. Ces aides, quand elles existent, sont limitées aux surcoûts liés à la présence du loup, limitées aux investissements et plafonnées. En Castille et Léon, le plan de gestion du loup prévoyait cette possibilité.
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FICHE Castille et Léon (Espagne)
Tirs de loups : Les tirs létaux sont clairement considérés comme un des moyens de prévention des dommages. La stratégie pour la conservation et la gestion du loup en Espagne de 2005 indique que la chasse (au nord du fleuve Duero) est un moyen d'atteindre les objectifs de taille et de répartition géographique de la population de loups tout en garantissant un état de conservation favorable des populations. Elle est prévue dans le cadre de plan d'aménagement cynégétique avec établissement de quotas de tirs zone par zone. Elle peut permettre une valorisation économique importante (jusqu'à 12 000 à 14 000 /loup tué). En Castille et Léon, au nord du Duero, les quotas sont limités à 10 % de la population estimée (par le nombre de meutes). Ils peuvent atteindre 18 % dans des zones qui subissent de fortes attaques (si des moyens de prévention sont mis en place) ou être diminués, voire réduits à zéro, si le bon état de conservation de l'espèce est menacé. Au sud du Duero, le tir de loups ne peut être confié qu'à des agents de la communauté autonome ou sous leur supervision stricte, et effectué conformément aux dispositions nationales pour les espèces protégées (par exemple dans le cas de dommages trop importants au bétail).
Loups en captivité et hybrides chien/loup
La question des hybrides chiens/loups et des loups en captivité n'est pas un sujet sensible en Espagne. Le pays compte peu de centres hébergeant des loups captifs. Leur ouverture est soumise à autorisation. Les loups détenus doivent être identifiés et marqués. Les chiens errants ne portant aucun signe d'identification doivent être éliminés. Le phénomène d'hybridation est considéré comme rare. Des résultats publiés en 2012 sur un échantillon de 200 individus a montré que 4 % d'entre eux étaient des hybrides. Le phénomène avait été identifié comme plus important en Andalousie où la population de loups était très réduite, mais il semble que la population lupine andalouse soit désormais éteinte. Lorsqu'il est avéré qu'un individu est un hybride, il peut être éliminé, ce qui reste cependant très théorique.
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2.4. En Allemagne, le seuil des 500 loups a été franchi avec peu de dégâts. Les ovins sont parqués en terrain le plus souvent dégagé et la clôture électrique est le moyen de protection numéro un
FICHE Saxe (Allemagne) Éléments de contexte
L'essentiel des loups se situe au Nord de l'Allemagne, récemment recolonisée alors que la population lupine avait disparu de ce pays au XX e siècle. Cette zone, relativement plane, présente un contexte d'élevage en enclos de pâturage, à l'année, jour et nuit en été, avec déplacement régulier des clôtures. La taille habituelle des troupeaux atteint quelques centaines de bêtes. Une grande rigueur est apportée à l'étanchéité des clôtures, condition nécessaire pour être indemnisé. Les chiens de défense, optionnels, sont retenus par certains éleveurs, encore peu nombreux, comme garantie supplémentaire. Avec 600 loups présents, le très faible niveau de dégâts constaté atteste de l'efficacité du système de protection mis en place. Cependant, le surcroît de travail pour les éleveurs (lié notamment au déplacement des clôtures), le danger perpétuel que fait courir le loup aux élevages au fur et à mesure que la population de loups augmente, entraînent une montée de la contestation et une demande de recours simplifié à des tirs létaux.
Carte d'identité
Superficie : 357 000 km² (Saxe : 18 400 km²) Population de loups concernée : germano-polonaise principalement (nord et est du pays) Nombre de meutes/ loups : 1ère meute en 2000. 2018 : 73 meutes + 30 couples (18 meutes + 4 couples en Saxe), soit 500 à 600 loups. Évolution : + 30 % par an. Statut de protection du loup :
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international : convention de Berne (espèce strictement protégée  annexe II), et convention de Washington (annexe II) ; UE : règlement européen 338/97 (annexe A), directive HFF : annexes II et IV, art 12 et 16 (16.1 sans le « e ») ; fédéral : loi de protection de la nature (BnatSchG, paragraphe 7, alinéa 2 et 43, paragraphe 44) ; régional : droit régional de la chasse (Annexe 2) ; l'état de conservation du loup serait atteint pour un effectif de 1 000 loups adultes (rapports UE et UICN). 1 200 000 ovins en Allemagne ; 134 000 en Saxe (+ 12 000 caprins) ; Saxe : 1 000 éleveurs amateurs + 70 professionnels (taille des troupeaux : 500600 têtes).
Nombre d'ovins et éleveurs :
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Nombre de victimes : 1ers dégâts en 2002. En 2018 :1 790 victimes (87 % ovins-caprins ; 3 % bovins) ; 232 en Saxe. Une meute en Basse-Saxe spécialisée sur des bovins adultes. Administrations en charge de la gestion : la protection des troupeaux est traitée au niveau fédéral ; la gestion du loup au niveau des Länder.
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Administrations fédérales : ministère fédéral de l'environnement (BMU) ; office fédéral pour la protection de la nature (BFN) ; ministère fédéral de l'agriculture (BMEL) ;
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FICHE Saxe (Allemagne)
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Saxe : ministère régional de l'environnement et de l'agriculture (SMUL). Ministères séparés dans certains autres Länder. centre fédéral de documentation et de conseil sur le loup (DBBW) ; centre LUPUS ; Institut Leibniz, Institut Senckenberg (génétique). absence de comité loup au niveau fédéral ; Saxe : 2 groupes de travail (éleveurs / ministère et chasseurs / protecteurs de la nature) ; Saxe : la chambre d'agriculture de Saxe conseille les éleveurs sur le loup.
Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup :
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Existence ou non d'un plan national loup :
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plan fédéral datant de 2014 ; Le Bundesrat demande en ce moment au gouvernement fédéral de transposer l'intégralité de l'article 16.1, de fournir un bilan annuel de l'état de conservation, d'introduire une prime aux animaux de pâturage et/ou d'entretien du paysage, et de mettre en place avec les Länder, un centre national de protection des troupeaux ; Saxe : 1er plan de gestion en 2009 ; révision en cours (discussion sur la régulation avec les fédérations agricoles). conditionnées, depuis 2013, au fait d'avoir mis en place une clôture électrique, avec ou sans chien (pas de tradition avec berger). 6 employés de l'État (les vétérinaires ont refusé de le faire), répartis par circonscription, réalisent les constats et dispensent des conseils. Quelques prélèvements génétiques sont pratiqués en cas de doute ; montant total des indemnisations: 0,2 M pour toute l'Allemagne (2017) ; Saxe : seulement 7 600 /an (200 par brebis ; bouc, sur facture) ; 80 % des dégâts concernent des éleveurs amateurs qui ne réclament pas d'indemnisation.
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Indemnisations des dégâts (Saxe) :
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : le DBBV rassemble et présente l'ensemble des données régionales (effectifs et dégâts). Un contrat de collaboration le lie avec plusieurs instituts (dont LUPUS, Institut SENCKENBERG, Institut de Leibzig). Structure commune pour tous les Länder, mais grande différence de moyens entre Länder. Méthode : procédure de collecte standardisée au niveau national : critères transfrontaliers SCALP (Lynx) ou WAG (Loup). N'importe qui peut collecter des indices. 5 400 indices/an (dont 3 200 photos). Carte (présence/absence) quadrillage 10 kmX10 km. Données mises à la disposition du public sur le site « dbb-wolf.de », y compris la localisation des attaques et leur nombre. Analyses génétiques : Pas de CMR pratiquée. Quelques suivis génétiques des populations, en particulier pour déterminer les liens de parenté entre meutes ou d'éventuelles hybridations loup/chien (2 cas recensés pour toute l'Allemagne, en 2003 et 2017) et déceler des mouvements migratoires. 4 000 échantillons analysés depuis 2000  résultats sous 4 à 5 semaines. Un laboratoire de référence : l'institut SENCKENBERG. Échanges récents de données génétiques avec la Pologne, le Danemark, les Pays-Bas, et l'Autriche. Actualités sur méthodes d'analyse : les élus souhaiteraient connaître un nombre de loups (impossible à estimer avec les techniques actuelles). Aucun chiffre volontairement avancé à ce sujet (uniquement, un nombre de meutes ; critère qui est jugé suffisant).
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FICHE Saxe (Allemagne)
Échanges scientifiques avec Pologne, Tchéquie, pays scandinaves, Danemark, Pays-Bas et Autriche (plutôt qu'avec les autres pays de l'arc alpin)
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Traditionnellement pas de bergers. Clôtures électriques (2,5-3,5 kV) de 90 cm (en renforcement du grillage classique, non électrifié, qui existait avant l'arrivée du loup) ; voire 120 cm dans les cas les plus critiques (si cela ne suffit pas : demande de tir). En Saxe (absence de transhumance), les animaux ne sont pas rentrés le soir en été. Beaucoup de pâturage tournant avec filets mobiles (électrifiés) déplacés au fur à mesure. Une directive fédérale fixe un minimum 3 chiens par troupeau. Dans les faits, encore peu de chiens utilisés (seulement 15 % des élevages professionnels en Saxe). Races les plus courantes : Berger des Abruzzes, Berger des Pyrénées, mâtin d'Espagne. Apprentissage et certification assurée entre bergers. Dans le Brandebourg, il existe une fédération des éleveurs de chiens de protection (pas d'aide publique à l'entretien des chiens). Un bon chien de protection peut coûter 5 000 Aides : 80 % de l'investissement par le Land (bientôt 100 % avec UE). Environ 300 000 par an d'aides en Saxe, 1,3 M pour toute l'Allemagne (2016). Tirs de loup : envisageables en théorie dès l'instant qu'un « loup à problèmes » est identifié. Tir par un chasseur agréé. Dans les faits : un seul tir en Saxe (aucun en Brandebourg). En 2018, le tir d'une meute posant des problèmes depuis 3 ans (sautant les clôtures) a été empêché suite à un recours juridique. Réflexions en cours concernant la régulation : Depuis 2 ans, demande à l'UE d'autoriser une régulation ; refus de l'UE de modifier le règlement ; solution à trouver en Allemagne (l'État doit présenter un rapport juridico-scientifique prouvant que la population est bien au minimum viable). Interventions régulatrices préventives : néant, mais souhaitée par certains à la suite de plusieurs cas de rencontre avec les loups en zone urbaine : Dresde, Brandebourg.
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2.5. En Pologne, une population de loups importante, strictement protégée, mais un élevage ovin très restreint
FICHE Pologne Éléments de contexte
La Pologne dans son ensemble a toujours vécu avec le loup, mais celui-ci était fortement persécuté jusqu'à la chute du régime communiste. Il est strictement protégé depuis 1998, ce qui a conduit à une forte progression de ses effectifs. Les dommages sont en hausse malgré la place très marginale de l'élevage ovin/caprin en Pologne. Peu de moyens de protection ont été mis en place à ce jour, dans un contexte (climat, topographie, modes d'élevage...) très proche de celui de l'Allemagne. Si la protection du loup est largement plébiscitée par la population polonaise dans son ensemble, qui en conçoit une fierté, il n'y a pas de consensus entre les ministères en charge de l'environnement et de l'agriculture, notamment sur la question d'une éventuelle régulation de l'espèce.
Carte d'identité
Superficie :312 679 km² Nombre de meutes/ loups : 2 390 (estimations 2017) répartis en 3 sous-populations : Balte (500 stable), Carpatique (1 000 stable), germano-polonaise (600 en hausse). Doublement depuis l'instauration d'une protection stricte (1998) Statut du loup : · exclu nommément de la convention Berne, en annexe V de la directive HFF ;
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autrefois chassable, protection stricte depuis 1998, protégé par la loi du 16 avril 2004 sur la protection de la nature (État polonais responsable, financièrement, des dégâts). Art. 126 du Nature Conservation Act et Règlement du 12/10/2011 pour les mesures de protection/prévention.
Importance de l'élevage : têtes ovins / têtes bovins : · moins de 250 000 chèvres et moutons ;
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6 millions de bovins.
Nombre de victimes : · environ 2 000 victimes indemnisées (180 k/an), ovins en majorité.
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quelques attaques sur bovins (9 %).
En Pologne le loup ne représente que 3 à 4 % des indemnisations liées à la faune protégée (5 M/an), le principal responsable est le castor. Administrations en charge de la gestion : · direction générale de la protection de l'environnement (GDOS), sous tutelle du ministère chargé de l'environnement (les directions régionales effectuent les constats de dommages) ;
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inspectorat général de la protection de l'environnement (GIOS) chargé du suivi des populations.
Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup : · association (nationale mais non financée par l'État) « Loup » qui fait des comptages et fournit de l'information sur internet (cartes, statistiques de suivi, etc.). S'intéresse également à la pacification des conflits loup-homme. Existence ou non d'un plan national loup : Non
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FICHE Pologne
Indemnisation des dégâts : par l'État polonais, après constat d'expertise. À partir de 2019 l'indemnisation sera conditionnée à la présence de mesures de protection (en conformité avec la réglementation européenne sur les aides d'État). Impératif de ne pas avoir de troupeaux dehors la nuit sans chiens de protection.
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
La Pologne essaie de converger avec les méthodologies allemandes de suivi, mais cet objectif n'est pas atteint pour l'instant. Les recensements sont annuels depuis 1999, basés sur des indices kilométriques d'abondance (IKA), réalisés par des agents forestiers d'État ou de parcs nationaux. Ils donnent des estimations discutées au niveau des districts avec les chasseurs et les scientifiques. L'aire de répartition géographique ne pose pas de problème. L'estimation numérique en revanche, manque de fiabilité : trop haute pour les naturalistes, trop basse pour les chasseurs. Une méthode solide, utilisant la génétique et les statistiques (CMR comme en France) a été mise en place pour 2017-2020. Les premiers résultats, pas encore validés, ne sont pas disponibles début 2019. Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : · Inspectorat Général de la Protection de l'Environnement (GIOS) ;
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pas de collaboration officielle avec l'Association nationale « Loup » (indépendante) qui fait ses propres suivis. Collaboration en revanche sur le repérage de l'hybridation loup-chien.
Analyses génétiques : elles ont débuté en 2016 avec un financement de l'UE. Réalisées sur 10 zones échantillon (type forêt de Bieloweza) permettant de déterminer le nombre de loups par la technique CMR. (900 échantillons récoltés, 40 % de génotypes exploitables). Très forte incertitude relative, car les résultats sont très hétérogènes (Bieloweza : 80 génotypes différents qui donneraient une densité -peu vraisemblable- de 9 loups/100 km2). Par ailleurs, des analyses sont menées pour détecter l'hybridation (par exemple sur des portées de louveteaux). Présence assez abondante de chiens errants ensauvagés (quelques milliers) qui attaquent également les ovins.
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Une période d'apprentissage et de conseil aux éleveurs a débuté récemment, avec un apport de financement sur les investissements : électrification des clôtures (achetées et fournies par l'État), achat de chiens de protection (à 100 %). Seulement quelques centaines de milliers d'euros ont été dépensés en 2018 (pour la part nationale). La principale inquiétude concerne les dangers pour l'homme, avec de plus en plus de signalements de loups en zone habitée. Un premier cas de morsure est survenu en 2018 (depuis 1945), comme en Allemagne, ayant déclenché une très vaste campagne d'information par le ministère de l'environnement, pour rassurer (beaucoup de rumeurs se sont mises à circuler). Le loup a néanmoins une image très positive en Pologne. Tirs de loup : Seul un très petit nombre de dérogations pour le tir du loup sont délivrées chaque année par le ministère, avant tout pour des motifs de sécurité publique. 1 seul tireur autorisé (chasseur).
Année 2016 2017 2018 Nombre de dérogations 3 2 9 Nombre maximum d'individus à prélever 5 4 27 Prélèvement réalisé 1 3 8
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FICHE Pologne
Pas de recours des associations mais certaines comme le WWF demandent à participer à la prise de décision. Réflexions en cours concernant la régulation : le ministère de l'environnement ne voit pas la nécessité d'une régulation par tir, il ne croit pas que le loup puisse « exploser » en Pologne et pense qu'il s'auto-régulera de lui-même par rapport aux proies sauvages disponibles (il fait très peu de tort pour l'instant à l'élevage, 4 % de son régime alimentaire). Le ministère de l'agriculture et les représentants agricoles, sont d'un tout autre avis et en conflit avec lui sur cette question. Les chasseurs ont comme objectif le retour du loup dans les espèces chassables.
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3. Liste des personnes rencontrées
(En cas d'entretiens multiples n'est mentionnée que la première date de rencontre ; + Participation à la réunion du groupe national loup et activités d'élevage du 24 septembre 2018 ; * entretien téléphonique ou par visioconférence) La mission remercie tout particulièrement les conseillers agricoles des ambassades de France en Allemagne et en Pologne pour leur appui (notes de synthèse sur le sujet et aide à l'identification de contacts dans ces deux pays).
Pays
Nom
Prénom
Institution
Gfonction
Date entretien
Allemagne Adams Allemagne Blanke Allemagne Blazer Allemagne Brizay* Allemagne Gehrmann Allemagne Gröger Allemagne Keiser Allemagne Kieslich Allemagne Kittel Allemagne Klose Allemagne Leinfelder Allemagne Reinhardt Allemagne Tankert Allemagne Tiesmeyer Allemagne Uhlemann Allemagne Walther Allemagne Wiedmer Espagne AgustÃn Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne AymerichHuyghues Ballesteros Cornejo Barreñada Sanz Doadrio Villarejo GarcÃa DomÃnguez GonzálezQuirós Hernández Palacios López-Bao Losada Palenzuela Muñoz
Gerhard Philipp Sandra Arnaud Claudia Thomas Imke Frank Melanie Siegfried Rasso Ilka Bern Annika Manfred Regina Uwe Noriega Miguel José Manuel Enrique José Ignacio Francisco Pablo Orencio
Ministère fédéral de l'environnement, de la protection de la nature, de la construction et de la sûreté nucléaire Ministère fédéral de l'environnement, de la protection de la nature, de la construction et de la sûreté nucléaire Agence fédérale pour la protection de la nature Ambassade de France en Allemagne Ministère fédéral de l'alimentation et de l'agriculture Ministère régional de Saxe pour l'agriculture et l'environnement
Chef d'unité N13  protection des espèces Unité protection des espèces Cheffe du service II 1.1  protection des espèces zoologiques Conseiller agricole Directrice  diversité biologique et brevets biologiques Chef de la division des aires protégées, de la protection des biotopes et des espèces Département juridique
14/01/19 14/01/19 14/01/19 20/12/19 14/01/19 16/01/19 16/01/19 15/01/19 16/01/19 15/01/19 14/01/19 16/01/19 16/01/19 14/01/19 15/01/19 15/01/19 15/01/19 13/12/18 11/12/18 14/12/18 12/12/18 11/12/18 11/12/18 12/12/18 12/12/18 12/12/18 11/12/18 13/12/18
Ministère régional de Saxe pour l'agriculture et l'environnement Exploitation ovine (Saxe) Eleveur ovin Ministère régional de Saxe pour Département de la protection des l'agriculture et l'environnement espèces Exploitation ovine (Saxe) Eleveur ovin Ministère fédéral de l'environnement, de Unité protection des espèces  la protection de la nature, de la membre du groupe « Large construction et de la sûreté nucléaire Carnivore Initiative » Institut LUPUS pour le suivi et la Co-directrice et biologiste recherche sur le loup en Allemagne Ministère régional de Saxe pour Responsable de la protection des l'agriculture et l'environnement espèces Agence fédérale pour la protection de la Génétique et biologie évolutive nature Association paysanne de Saxe Directeur général Association des éleveurs ovins de Saxe Référente élevage et gardiennage Exploitation ovine (Saxe) Conseil régional (Junta) de Castille et Léon Ministerio para la transición ecológica Eleveur ovin Responsable du loup
Sudirector general de biodiversidad y medio natural GanaderÃa Pascualalin S.C. Exploitation Eleveur ovins ovine (Castille et Léon) Conseil régional (Junta) de Castille et Membre du service de la chasse et Léon de la pêche Museo Nacional de ciencias naturales Sous-directeur Ministerio para la transición ecológica Principauté des Asturies Principado de Asturias Asistencia técnica  Subdirección general de biodiversidad y medio natural Biologiste Chef du service de la chasse et la pêche Chercheur en biologie de la conservation Asistencia técnica  Subdirección general de biodiversidad y medio natural Sous-directeur du milieu naturel
José Vincente Universdad de Oviedo Sofia Javier Ministerio para la transición ecológica Conseil régional (Junta) de Castille et Léon
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Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne France France
Muñoz Igualda Jaime Palacios MarÃa Jesus Palacios Albert Jesus Puente Oscar Cabrerizo Rodriguez Arturo Javier Silos Rojas Hidalgo Eva Santos Redin ArnautouPages Arpin Pablo Elisabeth Isabelle
Ministerio para la transición ecológica
France France France France France France France France France France France
Barjol Barsacq Bigot Borelli Bouffartigue Bouillon Bové Cosme Dantin* Daumergue Delduc
Jean-Louis Elizabeth Cécile Jean-Marc Bertrand Stéphane José Maria Michel Nathan Paul
Asistencia técnica  Subdirección general de biodiversidad y medio natural Conseil régional (Junta) d'Extremadura Directora de Infonatur Conseil régional (Junta) de Castille et Directeur du centre du loup Léon ibérique de Castille et Léon GanadrÃa Puente  Exploitation bovine Eleveur bovins (Castille et Léon) Agence pour l'environnement et l'eau Plan de recuperación del lobo en d'Andalousie AndalucÃa Agence pour l'environnement et l'eau Life Lobo AndalucÃa d'Andalousie Conseil régional (Junta) de Castille et Service territorial de Léon l'environnement de Zamorra DDCSPP Lozère Technicienne santé et protection animales IRSTEA Responsable de l'équipe BIOSES au sein du laboratoire écosystèmes et sociétés en montagne Ministère de l'agriculture et de Membre permanent CGAAER l'alimentation Préfecture Auvergne-Rhône-Alpes Conseillère diplomatique Préfecture des Hautes-Alpes Préfète IPRA/Fondation Jean-Marc Landry Co-responsable du projet CanOvis Races de France Préfecture Auvergne-Rhône-Alpes Parlement européen Minsitère de l'agriculture et de l'alimentation Parlement européen IRSTEA MTES Technicienne Préfet coordonnateur du plan national d'action sur le loup Député Cheffe du bureau coordination du développement rural Député Assistant-ingénieur de recherche au laboratoire écosystèmes et sociétés en montagne Directeur général de l'aménagement, du logement et de la nature Directeur Préfet en mission auprès du préfet de région Unité prédateurs et animaux déprédateurs Chef de projets Lieutenant de louveterie Directeur de cabinet Directeur adjoint Chargée de mission biodiversité Président Référente nationale protection des troupeaux et pastoralisme Chef de la mission coordination des expertises collectives, des enseignements et des publications de l'UMS Patrimoine naturel Chargé de mission faune Chargé de mission nationale loup, lynx Président de la commission chiens de protection
11/12/18 12/12/18 13/12/18 14/12/18 12/12/18 12/12/18 12/12/18 06/11/18 03/10/18
27/02/19 01/10/18 02/10/18 28/11/18 28/02/19 01/10/18 07/11/18 21/03/19 10/10/18 03/10/18 05/10/18
France France France France France France France France France France France
Dimanche Doublet Duchamp Ducreux Favre Félix Garde Goussot Grossan Guillon Haffner
Marc Xavier Christophe Barbara René Denis Laurent Anne Christian Véronique Patrick
Centre d'études et de réalisations pastorales Alpes-Méditerranée Préfecture Auvergne-Rhône-Alpes ONCFS Institut de l'élevage DREAL Auvergne-Rhône-Alpes Centre d'études et de réalisations pastorales Alpes-Méditerranée Parc naturel régional du Queyras Parc naturel régional du Queyras DRAF Auvergne-Rhône-Alpes MNHN-AFB
28/02/19 01/10/18 02/10/18 19/12/18 28/02/19 21/11/18 28/02/19 02/10/18 02/10/18 21/11/18 12/09/18
France France France
Imberdis Jean Kerihuel
Ludovic Nicolas Jean Paul
Parc national des Ecrins ONCFS Centrale canine
02/10/18 06/09/18 28/02/19
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France France France France France France France France France France France France France France France France France France
Lachenal Lacouture Larbouret Legile Locqueville Macchi Marchive Massucci Matera Mathieu Metral Meyrueix Missant Morizot Noars Olivier Papouin Perret
Yves Anne Patricia Anne Bruno Sylvain Ginette Mario Joseph Jean-Marc Mathieu Xavier Fleur-Marie Baptiste Françoise Thierry Matthieu Michel
Institut de l'élevage
Ministère de l'agriculture et de l'alimentation Parc national des Cévennes DRAF Auvergne-Rhône-Alpes Parc à loups du Gévaudan Centrale canine Parc à loups du Gévaudan DREAL Auvergne-Rhône-Alpes DREAL DDCSPP Lozère Société centrale canine Université Aix-Marseille DREAL Auvergne-Rhône-Alpes Préfecture Lozère MTES MTES
Référent national chiens de protection (et agriculteur) Assistante parlementaire Cheffe du bureau changement climatique et biodiversité Directrice Directeur adjoint Capacitaire loups Médecin généraliste retraitée Membre de la commission chiens de protection Directeur Secrétaire technique loup Chef de l'unité loup Adjoint au chef de service santé et protection animales-environnement Cheffe de projets santé et ressources génétiques Enseignant-chercheur Directrice Secrétaire général Sous-directeur de la protection et de la restauration des écosystèmes terrestres Chargé de mission auprès du sous-directeur de la protection et de la restauration des écosystèmes terrestres Chef de la brigade mobile d'intervention Directeur Délégué régional AuvergneRhône-Alpes Capacitaire cerfs Président Chef de mission (biodiversité et services écosystémiques) au CGDD Éleveur Directrice Directeur de la recherche et de l'expertise Directeur adjoint Éleveur Directeur de l'expertise et de l'UMS Patrimoine naturel Eleveurs Directeur Directeur de recherche Étudiante en Master 1, écologie et biologie des populations Directeur général Directeur Directeur adjoint Chargée de mission pour l'ours, le loup et le lynx
19/12/18 07/11/18 21/03/19 07/11/18 21/11/18 06/11/18 07/11/18 28/02/19 06/11/18 21/11/18 01/10/18 06/11/18 28/02/19 28/11/18 21/11/18 06/11/18 11/09/18 17/09/18
France France France France France France France France France France France France France France France France France France France France
Pisi Poirson Poyet
Christophe Jean-Michel Patrick
ONCFS DDCSPP Lozère ONCFS Parc à loups du Gévaudan ANTAGENE MTES
01/10/18 06/11/18 06/09/18 06/11/18 24/09/18 12/09/18 07/11/18 02/10/18 06/09/18 23/10/18 07/11/18 12/09/18 19/12/18 01/10/18 19/12/18 11/09/18 06/09/18 28/02/19 01/10/18 01/08/18
Prucca-Macchi Audrey Queney Rayé Reversat Rivat Rousset Scheyer Scoquart Siblet Sibuet Sinoir Taberlet Taysse Thibault Varlet Vauterin Vebr Guillaume Gilles Laurent Valérie Guillaume
Parc naturel régional du Queyras ONCFS
Laurent Parc national du Mercantour Jean-Paul Jean-Philippe MNHN-AFB Mylène et Nicolas Michel Pierre Laura Olivier André Patrick Marianne Bergerie des Moyes DRAAF Laboratoire d'écologie Alpine Université de Poitiers ONCFS Centrale canine DREAL MTES
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France France France France France France Italie Italie Italie Italie Italie Italie Italie Pologne Pologne Pologne Pologne Pologne Pologne Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse/ France
Vedel Vidal Viret Wils-Morel Wurteisen Zinsstag Baracco Borgna Canavese Cerra Marucco Menzano Salsatto Ciszak Ginalski Le Gal Lieder Romanowski
Sylvain Isabelle Christophe Christine Fabrice Georges Michele Irene Giuseppe Marina Francesca Ariana Paolo Bozena Andrzej MarieChristine Ewa Jakub
Direction départementale des territoires Directeur Parc national des Ecrins Chef du service aménagement et ingénierie financière Parc National du Mercantour Directeur Préfecture Lozère Préfète Parc naturel régional du Queyras Technicien écopastoralisme Parc national des Cévennes Président de la commission agricole Eleveur ovin Parco Naturale Alpi Marittime Responsable communication projet LIFE Loup Parco Naturale Alpi Marittime Directeur Région Piémont Secteur biodiversité et aires naturelles Parco Naturale Alpi Marittime Responsable projet LIFE loup Vétérinaire Parco Naturale Alpi Marittime Président Ambassade de France en Pologne Attachés agricole Direction générale pour la protection de Directeur adjoint du département l'environnement de la gestion de la nature Ambassade de France en Pologne Conseillère agricole Pologne, Hongrie, Estonie, Lettonie, Lituanie Parlement polonais Direction générale pour la protection de l'environnement Inspection générale de la protection de l'environnement Office fédéral de l'environnement Office fédéral de l'environnement Parc animalier Juraparc  Vallorbe Université de Lausanne KORA KORA AGRIDEA Office fédéral de l'environnement Association suisse des chiens de protection des troupeaux KORA IPRA/Fondation Jean-Marc Landry Députée Chef d'unité au département de la gestion de la nature Spécialiste pour le suivi des ressources naturelles Suppléant du chef de la section faune sauvage et biodiversité en forêt Section faune sauvage et biodiversité en forêt Responsable du parc Directeur du laboratoire de biologie de la conservation Suivi des grands carnivores Suivi des grands carnivores Chef de groupe protection des troupeaux et agriculture de montagne Section faune sauvage et biodiversité en forêt Président Suivi des grands carnivores Directeur et directeur de recherches
02/10/18 02/10/18 23/10/18 06/11/18 02/10/18 07/11/18 22/11/18 23/11/18 23/11/18 22/11/18 23/11/18 22/11/18 22/11/18 17/01/19 17/01/19 17/01/19 17/01/19 17/01/19 17/01/19 25/10/18 25/10/18 25/10/18 24/10/18 24/10/18 24/10/18 28/11/18 25/10/18 25/10/18 24/10/18 28/11/18
Zajczkowska Monika Baumann Bourquin Coelho Fumagalli Kunz Manz Mettler Pewsner Pfister Zimmermann Landry Martin Nicolas Paulo Luca Florin Ralph Daniel Mirjam Ueli Fridolin Jean-Marc
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4. Lettre des commissaires européens à l'environnement et à l'agriculture en date du 11 février 2019
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5. Éléments de méthode sur l'évaluation de la viabilité de la population de loups en France
Lors de la préparation du Plan National Loup (PNL) 2018-2023, une expertise (mentionnée en introduction de ce rapport) a été commandée au MNHN et à l'ONCFS sur ce point précis. Or, à cette époque, après deux années de stabilisation de l'effectif (2014-2016), l'ONCFS indiquait qu'il n'était pas possible sur le plan statistique de distinguer lequel des deux modèles utilisables (« à croissance freinée94 » ou « à croissance exponentielle95 ») décrivait le mieux l'évolution observée des effectifs. Or, le calcul de l'effectif minimum viable est très dépendant de ce modèle. Ainsi en France, le taux de croissance modélisé sur la période 1995-2016 sous un régime considéré « exponentiel » correspondrait à un effectif plancher d'environ 50 loups pour respecter un risque d'extinction de 10 % sur un horizon de 100 ans. Le modèle « exponentiel » correspond à une dynamique avec peu de contraintes de prélèvements et surtout une poursuite de colonisation de l'espèce supposée identique à celle observée dans les Alpes. Par contre, si on modélise la dynamique observée sous un régime de « croissance freinée » (tenant ainsi compte de la stabilisation des effectifs entre 2014 et 2016), l'effectif plancher de viabilité est de 100 à 125 individus pour un même seuil de risque. Un taux de croissance correspondant à une population stable, donnerait quant à lui un seuil minimum de 400 à 500 animaux pour éviter un risque d'extinction de 10 % à l'horizon de 100 ans.
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5 % de croissance par an. 12 % de croissance par an.
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6. Glossaire des sigles et acronymes
Acronyme ADN APN ASP CERPAM CGAAER CGEDD CITES CIVAM CMR CNRS DBBW DDCSPP DDT DEB DGALN DGER DRAAF DREAL ECF EMR HFF ICAD IDELE IKA ISPRA LCIE LECA LOOF MAA MNHN MTES OFEV ONCFS ONF OPA PAC PDR PNA UICN UTH WISO ZDP ZPP Signification Acide désoxyribonucléique Association de protection de la nature Agence de services et de paiement Centre d'études et de réalisations pastorales alpes méditerranée Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux Conseil général de l'environnement et du développement durable Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction Centre d'initiative pour valoriser l'agriculture et le milieu rural Capture, marquage, recapture Centre national de la recherche scientifique Centre fédéral de documentation et de conseil sur le loup Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations Direction départementale des territoires Direction de l'eau et de la biodiversité Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature Direction générale de l'enseignement et de la recherche Direction départementale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Etat de conservation favorable Effectif minimum retenu Habitats, faune, flore (directive) Identification des carnivores domestiques Institut de l'élevage Indice kilométrique d'abondance Institut supérieur pour la protection et la recherche environnementale Large carnivore initiative for Europe Laboratoire d'écologie alpine Livre officiel des origines françaises Ministère de l'agriculture et de l'alimentation Museum national d'histoire naturelle Ministère de la transition écologique et solidaire Office fédéral de l'environnement Office national de la chasse et de la faune sauvage Office national des forêts Organisation professionnelle agricole Politique agricole commune Programme de développement rural Plan national d'action Union internationale pour la conservation de la nature Unité de travail humain Grands carnivores, ongulés sauvages et sociétés (plateforme) Zone difficilement protégeable Zone de présence permanente
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Site internet du CGEDD : « Les derniers rapports »
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INVALIDE) (ATTENTION: OPTION devrait à l'avenir être généralisé à tous les nouveaux loups de ces parcs. Des échantillons génétiques surnuméraires doivent être stockés par l'administration pour des analyses ultérieures (en cas de changement de méthodes génétiques). Les surplus de naissance des parcs à loup, s'ils ne peuvent pas être légalement confiés à un autre détenteur (en suivant les procédures CITES) peuvent en revanche être euthanasiés par un vétérinaire dressant constat. La mission conseille que cette règle soit rappelée aux directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) en charge des contrôles de ces établissements.
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3. Des mesures de protection et de prévention très variables d'un contexte à l'autre
Les pays visités n'ont rapporté à la mission aucun élément concernant les mesures d'effarouchement. Cela ne signifie pas qu'aucune expérience en la matière n'existe. Mais l'effarouchement n'y est, en tout état de cause, pas considéré comme un moyen efficace de prévention avec une espèce aussi adaptable et apte à déjouer rapidement ce type de dispositifs. Les spécialistes italiens rencontrés, pourtant très protecteurs, les considèrent quant à eux inefficaces.
3.1. Il n'existe pas de solution technique unique qui garantisse l'absence de dommages, mais une palette de moyens à étudier, moduler et adapter en fonction des contextes 3.1.1. La mise en oeuvre du triptyque clôtures/chiens de protection/bergers pour assurer une protection efficace est appréhendée de façon différente dans les pays
Tous les pays reconnaissent que les mesures de protection sont nécessaires, mais n'assureront jamais une protection à 100 % des troupeaux. Le triptyque clôtures/chiens de protection/ bergers est connu de l'ensemble des pays, mais l'ordre d'importance accordée à chacun d'eux, le soutien financier, comme le soutien technique à la conception de la mise en oeuvre effective, sont très variables d'un pays à l'autre. La mission a également noté qu'aucun des pays visités ne fait du gardiennage une mesure de protection fondamentale et soutenue financièrement.
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En Suisse, les chiens de protection et les clôtures électrifiées sont considérés comme des moyens efficaces dont la mise en place est aidée financièrement (90 % du budget global de protection est consacré aux chiens de protectionachat et entretien- et 10 % aux clôtures, dont seul le surcoût éventuel lié au loup est pris en charge). La conception de la mise en oeuvre est aidée par le technicien pastoral du canton, si celle-ci s'avère difficile, puis contrôlée. Depuis peu, l'association AGRIDEA, en lien étroit avec les techniciens pastoraux des cantons, fait un suivi des clôtures qui sont financées, incluant conseil technique approfondi (puissance de l'électrification, mise à la terre) et contrôle. Cela enrichit la connaissance du terrain et permet la réalisation de documents de vulgarisation60 très précis à destination des éleveurs. Lorsque le troupeau est regroupé pour la nuit, il est sous la garde des chiens, sans que le berger dorme forcément à proximité. En Italie-région Piémont, les trois volets du triptyque sont présents. Seule la détention des chiens de protection et la mise en place de clôtures électrifiées de 1,2 mètres de haut sont financées dans le cadre du PDR (programme de développement rural). La conception de la mise en oeuvre a été accompagnée par les vétérinaires privés jusqu'en 2012, mais cette expérience, considérée
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60
AGRIDEA se dédie au développement de l'agriculture et de l'espace rural. Sur le loup, il est conventionné avec le gouvernement fédéral. https://www.agridea.ch/fr/publications/publications/developpement-rural/protection-destroupeaux/clotures-de-protection-contre-le-loup/
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comme très positive par les acteurs rencontrés, s'est arrêtée faute de moyens. La protection des troupeaux bovins est considérée comme plus compliquée, mais non impossible. Un travail est en cours sur l'adaptation des mesures de protection aux troupeaux bovins, axé sur le regroupement des animaux pendant la pâture.
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En Espagne (province de Castille et Léon), un « plan régional loup » prévoit l'élaboration d'un catalogue de bonnes pratiques agricoles en zone à loups (techniques de clôtures pour protéger les moutons, les génisses, les vaches et les veaux) et des aides qui favorisent leur adoption en fonction des disponibilités budgétaires et de ce qui est envisagé dans le programme communautaire FEADER61. Les missionnés ont compris qu'à ce jour, faute de disponibilités budgétaires, la mise en oeuvre des moyens de protection n'est accompagnée ni techniquement, ni financièrement. Les éleveurs rencontrés se protègent cependant. Dans les territoires où le loup n'a jamais disparu (Nord du Duero), le gardiennage de jour est une pratique qui n'a jamais été abandonnée. Le chien est le moyen considéré comme le plus efficace et particulièrement la présence en nombre de mâtins d'Espagne, sans pour autant que cette pratique soit adoptée par tous les éleveurs62. La situation est différente dans les territoires où le loup avait disparu et revient récemment (sud du Duero). Le gardiennage ne se pratique plus et les éleveurs, surtout de bovins, ont souvent un statut de double-actifs se rendant très peu sur leurs exploitations, n'ayant pas ou peu recours aux chiens de protection (impossibilité de les nourrir tous les jours). C'est particulièrement pour ces zones que sont expérimentées des systèmes de clôtures permettant de protéger les veaux, tout en les laissant accessibles à leur mère (voir fiche Espagne en annexe 2).
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En Allemagne, le financement des bergers ne fait pas partie des mesures de protection des troupeaux (ces derniers étant nuit et jour dans des parcs clôturés). Les clôtures électrifiées sont donc la base de la protection et leur mise en place est aidée financièrement. La Saxe finance, depuis 2019, à 100 % l'investissement dans les clôtures après avoir longtemps soutenu à hauteur de 60 % seulement. L'utilisation de chiens (Berger des Abruzzes, mâtin d'Espagne, Berger des Pyrénées), dont seul l'achat est financé, est une mesure de protection qui est assez peu mise en place par les éleveurs63. La mission a rencontré trois éleveurs, dont un refusait d'avoir des chiens. Ceux qui font le choix des chiens, fonctionnent avec des meutes dont l'importance est proportionnelle à la taille du troupeau. L'utilisation des chiens n'est pas une condition obligatoire pour que l'éleveur soit indemnisé en cas d'attaque. Ce
Fonds européen d'aménagement et de développement de l'espace rural. La mission a visité une exploitation de 1 800 brebis à viande produisant 5 000 agneaux de lait. Le troupeau est en permanence divisé entre brebis prêtes à naître, ainsi que les allaitantes, maintenues en bâtiment (environ 800) et agnelles/ brebis vides ou en début de gestation (environ 1 000) qui paissent sur des parcours (plus de 1 000 ha). Le troupeau est accompagné la journée par un berger et environ 15 mâtins. La nuit, le troupeau est regroupé dans un enclos de barrières mobiles (déplacé tous les jours de quelques dizaines de mètres, durée de la manoeuvre 1 heure), gardé par la meute de chiens. Il y a 1 enclos pour chaque 200 ha de parcours. À l'inverse, la mission a rencontré un éleveur, de 200 vaches allaitantes, élevées en plein air, mettant bas dehors et nourrissant leurs veaux jusqu'à 6 mois, qui refuse d'avoir des chiens. Cet éleveur a souligné la nécessité de choisir une race d'animaux d'élevage (raza alistano-sanabresa) sachant défendre son veau (association de 50 éleveurs soutenus par la Région de Zamora pour la conservation génétique de cette race rustique: 150 /an par vache).
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Seulement 15 % des éleveurs professionnels en Saxe ont recours aux chiens de protection, bien qu'une directive fédérale conseille, sans l'imposer, un minimum de 3 chiens par troupeau.
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Land a également expérimenté une brigade mobile composée d'un berger et de deux chiens en cas d'attaques importantes. Peu d'éleveurs ont souhaité faire appel à elle. Il propose aussi un renfort de chiens de protection en cas d'urgence. Les éleveurs ont plus souvent recours à cette dernière proposition.
3.1.2. La question de la qualité des chiens de protection et de leurs filières, se pose partout où ils sont utilisés.
Le chien de protection64 est considéré par la plupart des pays comme un moyen efficace de protection, à condition d'avoir un nombre de chiens en rapport avec la taille du troupeau (deux chiens pour 150-200 brebis, et un chien supplémentaire par tranche de 200 brebis supplémentaires). Mais les conceptions d'obtention d'un bon chien sont très différentes et chacun prétend détenir la vérité. Les éleveurs, quant à eux, ne l'utilisent pas de façon systématique, et ce dans tous les pays, évoquant les problèmes induits par sa présence : trouble de voisinage, cohabitation difficile avec les touristes et avec les chasseurs, conséquences en termes de responsabilité qu'ils estiment lourdes à assumer. C'est la Suisse qui a réalisé le travail de structuration de la filière chien le plus abouti. Elle a délégué la sélection des chiens, leur dressage, leur agrément, et enfin la formation des agriculteurs à leur utilisation, à une association d'éleveurs ovins et de formateurs financée par le ministère de l'environnement. Tous les chiens naissent et sont élevés chez des éleveurs d'animaux dits « de rente ». Les chiens font l'objet de tests à 15 mois (attitude vis-à -vis des promeneurs et vis-à -vis de chiens intrus) avant leur mise en place chez un éleveur qui en a exprimé la demande auprès du canton, et dont la demande a été acceptée. Les chiens qui ne réussissent pas le test sont euthanasiés. L'éducation du chien est considérée comme un point essentiel. L'accompagnement des nouveaux détenteurs, qui reçoivent des chiens adultes formés, est aussi considéré fondamental, avec une formation avant l'intégration du chien dans le troupeau, puis son suivi ensuite. La sélection des chiens (pour la reproduction) est basée sur un contrôle répété des qualités au travail, enregistré dans une base de données. Ce travail de structuration de la filière canine est un choix fort du ministère de l'environnement, sans doute facilité par la faible taille de la population canine65. La sélection effectuée permet au gouvernement suisse de prendre systématiquement la défense des éleveurs en cas de plainte contre un chien de protection (conflits avec les usagers de la montagne) et jusqu'à présent, de gagner. La loi suisse précise que ces chiens peuvent se trouver en montagne auprès d'un troupeau sans être sous la garde de leur maître (berger facultatif). Aucun des autres pays visités n'a fait un travail similaire. En Espagne, une association nationale enregistre chaque année les chiots, mais aucun test d'aptitude à la protection n'est réalisé. Elle part en effet du postulat que la capacité des chiens à défendre le troupeau est fixée génétiquement (contrairement au Berger des Pyrénées, le Mâtin d'Espagne66 a toujours connu le loup). Des analyses
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Sur la question, on se reportera utilement au rapport CGEDD-CGAER de juin 2010 « Évaluation de la situation relative à l'utilisation des chiens de protection des troupeaux contre la prédation » dont l'essentiel des conclusions restent d'actualité. Actuellement, environ 280 chiens de protection officiellement reconnus travaillent en Suisse et 100 sont « en formation ». Tout comme le Berger des Abruzzes et le Berger d'Anatolie.
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phylo-génétiques sur les races de chiens de défense, publiées dans des revues scientifiques, ont été présentés à la mission. De ce fait, l'éducation du chien n'est pas jugée essentielle, mais il a été souligné l'importance d'avoir des meutes mélangeant des jeunes chiens et des chiens plus âgés, la meute étant le lieu de l'éducation. En Allemagne, il existe une fédération d'éleveurs de chiens en Brandebourg, qui dispose de moyens importants, et qui assure le dressage par ses adhérents. En Italie, après avoir commencé à structurer une filière chien, le travail n'a pu être mené à terme et l'attention des missionnés a été attirée sur le constat de la perte de contrôle de la qualité des chiens. En France, plus de 3 600 chiens bénéficient du « forfait chien de protection » prévu par instruction technique67. Leur achat et leur entretien font donc l'objet de soutiens financiers importants. L'État a mandaté l'IDELE (institut de l'élevage) pour constituer un réseau technique68 chien de protection en charge de la formation des éleveurs qui souhaitent intégrer un chien dans leur troupeau, mais à ce jour aucun travail concernant la sélection des chiens de protection n'est réalisé et très peu de chiens sont testés (58 chiens69), alors que le test de comportement du chien au travail, mis au point par la centrale canine, existe depuis 2010. Son financement est d'ailleurs prévu par la même instruction technique. Les référents IDELE et les techniciens chiens de la Pastorale pyrénéenne ne sont pas testeurs agréés par la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF), tel que le prévoit l'instruction technique. Concrètement un seul testeur de la Centrale canine réalise les tests pour l'ensemble du territoire métropolitain. Ce travail de connaissance des lignées, de sélection et de tests comportementaux vis-à -vis de l'homme et d'attachement défensif au troupeau est un préalable au déploiement des actions de formation vers les éleveurs, au risque de perdre en efficacité70. C'est la compétence de la centrale canine. Par ailleurs, la mission juge que le recours quasi-exclusif au Berger des Pyrénées (prioritairement sélectionné, en l'absence de loup depuis 70 ans, pour sa docilité) n'est pas à lui seul un gage d'efficacité. Elle estime donc que le travail de sélection doit aussi porter sur les autres races de chiens de protection, en encourageant des programmes de coopération avec l'Italie et l'Espagne. La mission a identifié des associations d'éleveurs ovins capables de fournir des sources génétiques sélectionnées dans plusieurs pays visités. Elle suggère que la centrale canine soit mandatée pour s'en rapprocher. 6. Recommandation (MAA) : accélérer la structuration de la filière chiens de protection par un réel travail de sélection, incluant les tests comportementaux visà -vis de l'homme, en lien étroit avec la centrale canine et les professionnels, et engager une réflexion visant, à terme, à ne financer que des chiens sélectionnés et testés.
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69 70
Instruction DGPE/SPDE/2018-124. À ce jour, le réseau est constitué de 6 référents nationaux et de 10 relais locaux, tous éleveurs et d'une animatrice. Chiffre de la centrale canine. Former des éleveurs qui ont déjà acquis un mauvais chien présente des intérêts très limités.
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3.1.3. L'attention à porter aux clôtures a été soulignée dans l'ensemble des pays visités
Comme indiqué en 3.1.1. :
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la Saxe fait des clôtures la seule mesure de protection indispensable pour prétendre à indemnisation en cas d'attaque. La mission a visité trois exploitations de plaine et son attention a été attirée sur l'aspect pratique de la réalisation à savoir le nombre de fils, la hauteur des fils et la puissance de l'électrification ; la Suisse accorde aussi beaucoup d'importance à cet aspect et produit des documents d'aides à la mise en place insistant sur tous les risques de dysfonctionnement, notamment celui d'électrification insuffisante. AGRIDEA note qu'en estive la réalisation systématique des parcs de nuit n'est cependant pas toujours possible, mais que le regroupement l'est, sous la surveillance de la meute de chiens ; l'Espagne conduit au niveau national une réflexion sur les clôtures et sur des enclos spécifiques71.
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3.1.4. La taille des troupeaux conditionne largement l'efficacité de leur protection
Quels que soient les moyens de protection utilisés, la mission fait le constat que les pays visités considèrent que la taille des troupeaux est un facteur qui influe largement sur la capacité qu'a l'éleveur à se protéger efficacement. L'association AGRIDEA (Suisse) considère qu'au-dessus de 5 chiens, la meute de chiens dysfonctionne, ce qui impose de limiter la taille du troupeau à 700-1 000 brebis. Au-delà de la question du fonctionnement de la meute de chiens, le constat est fait qu'il y a une taille maximum du troupeau sous la conduite d'un seul berger à ne pas dépasser pour garantir un gardiennage efficace 72, tant pour la protection vis-à -vis du loup que pour celle de la capacité d'un seul homme à bien soigner l'ensemble des animaux. Dans tous les pays visités, la taille maximum des troupeaux est très inférieure à ce qu'on trouve en France. Des maximums de 3 000 à 5 000 animaux ne sont pas rares en France, alors que très peu de troupeaux dépassent les 1 000 unités sous la conduite d'un seul berger dans les pays visités. La réflexion sur la future politique agricole commune (PAC) peut être le bon moment de mener une réflexion quant aux risques liés à l'accroissement de la taille des troupeaux et des surfaces par unité de travail humain (UTH). Ce point sera développé en 3.2.3.
3.1.5. La formation des éleveurs et bergers au diagnostic de vulnérabilité est essentielle
Les pays visités partagent le constat de la nécessité de mieux former les agriculteurs, mais aussi les bergers.
71
72
L'éleveur rencontré utilise pour la nuit des barrières mobiles articulées type barrières urbaines permettent un déplacement facile des parcs et remédiant aux inconvénients de type risque sanitaire. Là encore l'exploitation était située sur un plateau. Tant par le berger que par les chiens.
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L'Italie a souligné qu'elle n'avait pas d'école de bergers et que cela constituait un manque. Il existe en revanche, une association de bergers qui essaie d'améliorer les compétences des éleveurs concernant la mise en place des méthodes préventives de protection. En Suisse, la formation initiale des bergers est possible depuis 2009, au sein de trois écoles d'agriculture. Celle-ci est complétée par une formation continue organisée par AGRIDEA, consistant à réunir, une fois tous les deux ans, tous les bergers sur une exploitation professionnelle. Pour ce qui est des éleveurs, une formation collective est obligatoire au moment de l'achat de chiens, suivie d'un accompagnement individuel sur l'exploitation. En Espagne, le manque de formation des bergers à la gestion d'une meute de chiens a été souligné, mais cela est en partie compensé par le fait que l'association nationale (évoquée au 3.1.2.) fait un suivi-accompagnement de tous les chiens qui ont un pedigree. Cet aspect formation, tant des éleveurs que des bergers, a été aussi souligné par de nombreux acteurs rencontrés sur le territoire métropolitain, évoquant l'absence de formation des bergers à la maîtrise des techniques de protection (en particulier la conduite d'une meute de chiens de protection). La mission déplore également l'absence de formation initiale des jeunes éleveurs aux techniques de protection, ainsi que l'insuffisante formation continue des éleveurs73. La mission propose à la direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) du ministère de l'agriculture et de l'alimentation qu'elle intègre dans les programmes de formation de brevet professionnel des responsables d'exploitations agricoles les aspects protection des troupeaux vis-à -vis des prédateurs et oeuvre à l'écriture d'un cahier des charges national du métier de berger qui intègre la présence des prédateurs et les conséquences pour le pastoralisme, cahier des charges qui devra être pris en compte par l'ensemble des responsables de formation. Cette proposition rejoint celle de la récente mission concernant les mesures d'accompagnement des éleveurs confrontés à la prédation de l'ours74.
3.1.6. Un conseil technique personnalisé, pluridisciplinaire et adapté à chaque situation apporte une plus-value indiscutable
La Suisse a conçu un accompagnement individualisé des éleveurs, soit qui achètent un chien, soit qui rencontrent des difficultés dans la mise en place des clôtures. Le rôle du canton et de ses techniciens pastoraux est fondamental. Les techniciens pastoraux travaillent en lien étroit avec les deux associations mandatées par l'OFEV (AGRIDEA et « Chiens de protection des troupeaux Suisse »). La pluridisciplinarité des approches est donc un élément essentiel dans la production du conseil à l'éleveur. De plus, comme évoqué au 3.1.1., le conseil s'accompagne ensuite d'un contrôle. Le Piémont italien a fait ce choix de l'accompagnement individuel pour l'analyse de vulnérabilité et la mise en oeuvre des mesures de protection jusqu'en 2012, mais, faute de crédits, a dû l'abandonner à regret. Nos interlocuteurs ont insisté sur l'importance de l'observation de terrain (analyse au cas par cas) et du facteur temps, essentiels, tant pour l'expérimentation que la mise en oeuvre effective des techniques de protection appropriées. Avec le nouveau projet LIFE (en cours de préparation), le
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La consultation des offres de formation des chambres d'agriculture PACA et Rhône-Alpes ont confirmé qu'aucune offre de formation à la gestion des troupeaux en présence de prédateurs n'était proposée. « Propositions d'évolution des mesures d'accompagnement aux éleveurs confrontés à la prédation de l'ours et aux difficultés économiques du pastoralisme » - CGEDD/CGAAER - Septembre 2018.
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Piémont italien ambitionne de remettre en place cet accompagnement en s'appuyant notamment, sur les vétérinaires sanitaires et sur des équipes locales. Notre attention a été attirée sur le fait que lorsque le loup arrive dans de nouveaux espaces, le temps d'adaptation de l'éleveur est important (20 ans) d'où la nécessité d'anticiper ce changement de comportement sur les fronts de colonisation, là où les éleveurs ont perdu depuis longtemps l'habitude de vivre avec le loup. En Saxe, l'importance du conseil a été soulignée et ce Land a fait le choix d'avoir six conseillers dont la mission est de visiter et de conseiller les éleveurs à propos des mesures de protection (et aussi de faire les constats de dommages). Dans les trois exemples cités, il s'agit donc de conseil au cas par cas, chez l'exploitant, en allant dans le détail de la mise en oeuvre des mesures de protection. En Suisse, l'approche pluridisciplinaire est déjà présente. En Piémont italien, c'est en projet. En France, dans les zones colonisées de longue date, les fédérations pastorales ont la compétence pour ce travail d'accompagnement. Le centre d'études et de réalisations pastorales alpes méditerranée (CERPAM) a réalisé de nombreux diagnostics de vulnérabilité à l'échelle territoriale comme à l'échelle d'une exploitation, suite à des sollicitations de celles-ci. Ce sont les diagnostics à l'échelle de l'exploitation ou de l'estive qui présentent le plus grand intérêt, s'ils sont bien faits, c'est-à -dire s'ils s'intéressent au détail de la mise en oeuvre des mesures de protection. Sur les fronts de colonisation, peu d'acteurs ont la capacité immédiate de réaliser cet accompagnement fin. Il s'agit, territoire par territoire, de construire cette compétence en s'appuyant sur la diversité des acteurs présents : acteurs du développement agricole, mouvement d'éducation populaire comme les centres d'initiative pour valoriser l'agriculture et le milieu rural (CIVAM), association d'utilisateurs de chiens, référents nationaux et locaux de l'IDELE, techniciens chiens de la pastorale pyrénéenne, ONCFS, etc. Cette même démarche peut être aussi intéressante pour des territoires où le loup est solidement installé et où les acteurs professionnels se sont peu engagés dans la réalisation des diagnostics de vulnérabilité. Cette construction de compétence départementale et partagée pourrait être confiée à un référent loup au sein de la DDT qui pourrait, en outre, être chargé de l'animation du comité local loup, du contrôle de l'effectivité de la mise en oeuvre des mesures de protection, de la connaissance du contexte des attaques. 7. Recommandation (MAA, MTES) : créer au sein des directions départementales des territoires, un poste de référent loup, en particulier dans les départements de front de colonisation, et oeuvrer ainsi à la création des conditions d'une mobilisation coordonnée des acteurs.
3.1.7. Une protection durablement efficace ne s'avère possible qu'avec l'engagement des éleveurs accompagnés par les organisations professionnelles agricoles
Tous les pays visités font le constat de la non-acceptation croissante des éleveurs vis-à vis du loup, la comprennent, mais insistent sur :
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la nécessaire implication de l'éleveur dans la réalisation du diagnostic de vulnérabilité de son exploitation, en amont de la mise en oeuvre effective des mesures de protection ;
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l'indispensable engagement des éleveurs dans la réflexion et la mise en oeuvre des mesures de protection. Les pays font part de difficultés plus importantes (résistance au changement) de la part des éleveurs double-actifs, voire non professionnels (Suisse, Allemagne75, Espagne) ; l'indispensable accompagnement des éleveurs particulièrement par les chambres d'agriculture ; par les OPA, tout
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le temps long, nécessaire à l'adaptation au changement.
Pour la France, il y a de ce fait un réel intérêt à réfléchir à la manière dont peuvent être accompagnés les éleveurs sur les fronts de colonisation, dont les exploitations sont inéligibles au dispositif d'accompagnement technique, tel que prévu dans l'action 1.4 du plan national, dans la mesure où ils ne sont ni en cercle 1, ni en cercle 2. Ce constat rejoint la recommandation précédente.
3.2. La maîtrise des dommages n'a pas de lien direct avec le montant des aides et des indemnités versées aux éleveurs
Comme indiqué en 1.2 et 1.3, la mission n'a pas observé, en France, le bienfait évident que les aides attribuées (tant pour la mise en oeuvre des mesures de protection que pour les indemnisations) pouvaient avoir sur une meilleure maîtrise des dommages. Malgré les sommes investies, les dommages continuent d'augmenter. L'essentiel des propositions, qui figurent dans les paragraphes suivants, vise à améliorer cette situation et à rendre ces financements efficaces. Les propositions sont bien entendu nourries des constats faits dans les pays visités.
3.2.1. La mise en oeuvre effective des mesures de protection, lorsqu'elle est aidée, doit être contrôlée sur le terrain
La mission fait le constat que dans certains pays visités (Suisse et Allemagne notamment) le contrôle est une opération sur le terrain qui tient à la fois du conseil et du contrôle proprement dit. Si cette double posture peut être source de difficulté de positionnement pour le contrôleur, elle présente l'intérêt de proposer un accompagnement individuel dont on a vu l'importance en 3.1.5., puis de s'intéresser à la réalité de la bonne mise en oeuvre et ce dans le détail76. Pour mettre un terme à cette ambiguïté de positionnement des conseilleurs-contrôleurs, la Suisse envisage que les gardes faunes des cantons qui font les constats de dommages, fassent aussi le constat de la mise en place effective des mesures de protection. Pour la mission, ce contrôle sur le terrain est essentiel : il permet de s'assurer de la mise en place effective des moyens de protection, de se donner la possibilité d'objectiver le discours (trop souvent entendu) de l'inutilité des mesures de protection faute d'efficacité, et de progresser dans l'art de leur mise en oeuvre.
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À noter qu'en Suisse comme en Allemagne, la part d'éleveurs double actif est importante : 90 % de double actif pour les éleveurs suisses de moutons, 80 % des attaques en Allemagne ont lieu chez des éleveurs qui pratiquent l'élevage comme hobby. Par exemple la pose des clôtures avec le nombre de fils nécessaires et la bonne électrification, le nombre de chiens effectivement en estive et non pas celui de chiens achetés, etc.
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La mission est parfaitement consciente qu'en France, les mesures de protection, quand elles bénéficient de soutien financier, font déjà l'objet de contrôle de l'organisme payeur qu'est l'agence de services et de paiement (ASP), mais ce contrôle, le plus souvent réalisé sur facture sans aller sur le terrain, n'est pas suffisant. Le plan national d'actions sur le loup et les activités d'élevage prévoit une action 1.12 visant à s'assurer que les mesures de protection sont mises en oeuvre selon le dispositif contractuel de protection des troupeaux, en vue de garantir leur efficacité au niveau attendu. L'idéal serait que les difficultés récurrentes de mise en oeuvre mises en évidence lors des contrôles (inopinés, sans lien avec les attaques) puissent ensuite faire l'objet d'une analyse, afin d'alimenter judicieusement l'observatoire de l'efficacité des mesures de protection des troupeaux prévu dans l'action 1.3. La mission attire l'attention du MAA et du MTES sur la nécessité de fusionner le contrôle lié à la conditionnalité des indemnisations et le contrôle aujourd'hui réalisé par l'ASP. 8. Recommandation (MAA, MTES) : mettre en place sans tarder un contrôle, unique (conditionnalité, ASP) et sur le terrain, des mesures de protection. La mission rappelle la nécessité de la mise en place rapide du groupe de travail prévu à la mesure 1.12 du plan national et de l'observatoire de l'efficacité des mesures de protection qui devra s'enrichir par une analyse qualitative des difficultés et des défauts le plus souvent rencontrés lors des contrôles.
3.2.2. L'indemnisation des dommages est conditionnée à la mise en oeuvre effective de mesures de protection, raisonnées grâce à une analyse de vulnérabilité
Seules la Suisse et l'Allemagne ont un système comparable à celui de la France avec une indemnisation conditionnée à la mise en oeuvre effective des mesures de protection. Le montant moyen de l'indemnisation varie entre 200 et 400 /brebis77. C'est la Suisse qui est la plus généreuse, suivie de la France. Suisse et Allemagne conseillent les éleveurs en amont sur les mesures de protection et contrôlent la réalité de leur mise en oeuvre. Comme évoqué en 1.3., le Piémont italien et la province de Castille et Léon ont fait le choix d'un système assurantiel par ailleurs moins généreux (120 euros/brebis pour la Castille Léon). Les éleveurs n'y adhèrent que très partiellement, ce qui n'est pas sans poser souci pour le recensement réel des dommages 78. En Espagne, le ministère de la transition écologique subventionne le système assurantiel, avec en outre une prise en charge par la communauté autonome concernée, de tout ou partie de la franchise par sinistre. Les dommages ne sont indemnisés par l'assureur, que si les mesures de protection sont mises en oeuvre. L'expertise de vulnérabilité n'est plus réalisée dans ces deux territoires, faute de financement. Elle l'a été provisoirement, grâce à des programmes LIFE. En Espagne, le ministère de la transition écologique réfléchit en outre à la mise en place d'un fonds mutualisé alimenté par les éleveurs et partiellement abondé par l'État, pour compenser les dommages.
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Les deux chiffres sont des ordres de grandeur. À plusieurs reprises, les interlocuteurs ont évoqué la non fiabilité des chiffres des dommages suite à la mise en place du système assurantiel.
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Comme indiqué dans en 1.2., la mission s'est interrogée sur l'importance des dégâts en France et tout particulièrement sur les raisons de la concentration des attaques sur un petit nombre d'unités : vulnérabilité plus importante des estives ? Taille trop importante des troupeaux ? Impossibilité de les protéger ? Non volonté de les protéger ? Mauvaise qualité de la mise en oeuvre des mesures de protection ? Une comparaison fine des facteurs explicatifs des vulnérabilités différentes entre les pays visités ne peut relever que d'un travail de recherche. L'énormité des écarts constatés doit néanmoins conduire à s'interroger sur ce qui apparaît à beaucoup des interlocuteurs rencontrés comme une spécificité française qu'ils ont du mal à s'expliquer. Une consultation des statistiques d'attaques en zone pastorale de l'ex-région RhôneAlpes et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur sur la période 2013-2017 montre que 50 % des 8 685 attaques recensées se concentrent sur 10 % seulement des unités pastorales. Dans le Var, 10 unités pastorales concentrent la moitié des attaques, 33 pour le département des Alpes-Maritimes. La mission estime que notre pays gagnerait beaucoup à analyser en détail et sans tabou (vulnérabilité, type de conduite des troupeaux, qualité des mesures de protections et de leur mise en oeuvre...) cette anomalie qui influe de manière très négative sur l'ensemble de la gestion du loup en France.
3.2.3. En France, une réflexion s'impose quant aux modes de financement des mesures de protection et des indemnisations, dans le contexte de la future politique agricole commune
La mission ne nie pas la difficulté de la mise en oeuvre des mesures de protection et le travail supplémentaire que celle-ci occasionne aux éleveurs quand le loup arrive sur un territoire. Elle est, de plus, bien consciente du stress engendré par les attaques. Elle considère, au vu des exemples probants qui lui ont été présentés au cours de ses visites, que ce risque, ou cette contrainte naturelle, doit être évaluée par un diagnostic de vulnérabilité. L'éleveur doit s'approprier ce diagnostic dans la mesure où la vulnérabilité du territoire évolue dans le temps et où il est nécessaire de remettre à jour régulièrement ce diagnostic. Le premier doit être élaboré de façon pluridisciplinaire, en associant divers compétences : zootechniques, pastorales, naturalistes, sur le dressage de chiens... et nécessite un travail de coordination, rôle du référent DDT. La mission considère que ce temps d'appropriation est long et que l'État doit donc concentrer son appui sur l'adoption par les éleveurs, des mesures de protection. En 2017 sur les 23,34 millions consacrés aux mesures de protection, un peu plus de 39 % étaient consacrés au gardiennage hors salarié, 43 % au gardiennage salarié, 10,5 % aux investissements matériels, 7 % aux chiens de protection et à peine à 0,04 % aux diagnostics de vulnérabilité. La répartition entre ces différents postes interroge la mission qui regrette un faible appui aux diagnostics de vulnérabilité, pour un soutien fort au gardiennage hors salarié qui relève pourtant du métier classique de l'éleveur (en présence ou en absence de loup). La mission préconise donc que l'investissement de l'État soit mis en priorité sur les diagnostics de vulnérabilité élaborés de façon pluridisciplinaire, sur les investissements en clôture et leur entretien, ainsi que sur la sélection des chiens de protection. Elle estime, comme cela est largement admis dans tous les pays visités, que le gardiennage fait partie du travail normal de l'éleveur.
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Partant des constats que le système des aides ne contribue que peu à la diminution des dommages et que l'efficacité des mesures est fortement dépendante de l'engagement des éleveurs, la mission s'est interrogée sur l'intérêt d'une aide forfaitaire globale plafonnée79. Celle-ci viserait à remettre l'éleveur au centre des décisions sur les mesures de protection les plus adaptées à son cas, mais aussi à le responsabiliser. L'aide serait versée après réalisation du diagnostic de vulnérabilité, et devrait être remboursée si les mesures de protection qui en découlent ne sont pas mises en oeuvre (en zone considérée comme protégeable). Deux scénarios sont alors envisageables concernant les indemnisations, selon la zone où l'éleveur subit les dégâts :
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en front de colonisation, une indemnisation après constat (incluant prélèvement génétique sur blessure) , sous condition d'un réel engagement de l'éleveur dans la réalisation du diagnostic de vulnérabilité de son exploitation. Cet engagement devrait se traduire par la mise en place effective de mesures de protection dans les deux ans qui suivent la réalisation du diagnostic ; en zone de présence permanente (ZPP) :
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soit une indemnisation qui pourrait être intégrée à l'aide forfaitaire globale pour la mise en oeuvre des mesures de protection ci-dessus définie, et être basée sur un indicateur de menace défini par les diagnostics de vulnérabilité et un facteur d'échelle (nombre de jours d'estive) ; soit un arrêt des indemnisations (droit commun des autres prédateurs soumis à régulation, mustélidés, renard, ou non régulés, buse, rapaces), sauf dans le cas d'un événement exceptionnel (dérochement par exemple).
Il s'agit de marquer ainsi que la stratégie française est de prioriser la prévention des dommages. Enfin, pour les éleveurs des zones non protégeables définies à partir des diagnostics de vulnérabilité, une réflexion pourrait être menée sur la mise en place, soit d'un système assurantiel, soit d'un fonds mutualisé. La proposition de règlement du parlement européen et du conseil établissant des règles régissant l'aide aux plans stratégiques devant être établis par les États membres dans le cadre de la politique agricole commune (PAC), parue le 1 er juin 2018, donne en partie le cadre de la réflexion concernant la future PAC. La mission considère que c'est le bon moment pour démarrer une réflexion concernant le soutien à moyen terme des éleveurs confrontés à la prédation. Les articles 65 concernant les engagements en matière d'environnement et de climat et autres engagements en matière de gestion (mesures agro-environnementales et climatiques), 68 (investissements) et 70 (outils de gestion du risque) du chapitre 4 du dit règlement ouvrent des possibilités différentes qui méritent d'être étudiées quant à leur impact sur l'élevage dans les secteurs colonisés par le loup. Les articles 65 et 68 ouvrent la possibilité du forfait. Cette possibilité a déjà été activée pour le soutien actuel aux mesures dites d'entretien au sein des mesures de protection à savoir gardiennage et entretien des chiens. Elle ne l'a pas été pour le soutien aux investissements (clôtures, achat de chien). Dans un souci de simplification administrative pour l'éleveur, la question se pose d'élargir la mesure 65 aux investissements et d'aller vers une aide forfaitaire globale incluant un montant d'indemnisation forfaitaire.
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Par exemple, en fonction (inversement proportionnelle) du nombre de brebis par UTH (cf paragraphe 3.1.4) afin d'inciter à diminuer la taille des troupeaux afin de pouvoir les protéger de façon beaucoup plus efficace.
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9. Recommandation (MAA, MTES) : mandater les experts français engagés dans la négociation visant à définir le nouveau règlement agricole européen, afin que celui-ci permette l'adoption d'un régime d'aide forfaitaire dans les zones de présence permanente du loup. Cela permettrait de mettre en place un système plus simple, reconnaissant la capacité de l'éleveur à ajuster les mesures de protection à sa situation, mais aussi plus responsabilisant. Une telle évolution devrait s'accompagner d'une pression de tir accrue sur l'espèce, rendue possible par les progrès de son bon état de conservation en France (voir 3.3.).
3.2.4. En France, il est nécessaire de se projeter à moyen terme pour ne pas dissuader les éleveurs bovins de se protéger
La question de la prédation sur bovins se pose de façon croissante (cf. 1.1.). La mission a constaté que l'Espagne est confrontée de façon importante à la prédation sur bovins. L'Italie et l'Allemagne ont fait part de meutes se spécialisant sur les bovins. Il importe donc que la France se prépare à cette éventualité. Aujourd'hui, celle-ci a fait le choix de considérer les troupeaux bovins comme non protégeables et ce sans aucune analyse de vulnérabilité des territoires impliqués. Or, certains fronts de colonisation sont concernés par la présence d'élevages ovins, mais aussi d'élevages bovins. Déclarer les troupeaux bovins non protégeables, sans élaborer de diagnostics de vulnérabilité, revient à ne pas inciter les éleveurs à raisonner la faisabilité ou non de la mise en oeuvre des mesures de protection. C'est aussi prendre le risque à moyen terme de générer des meutes qui se spécialisent sur les troupeaux bovins, les éleveurs d'ovins s'étant eux protégés. Par ailleurs, sur certains fronts de colonisation les éleveurs sont déjà confrontés aux dégâts de gibier (sangliers, cervidés), avec une nécessaire réflexion sur la protection, non seulement des cultures, mais aussi des prairies. Il en découle un vrai intérêt à réfléchir à la mise en défends de l'ensemble de l'exploitation vis-à vis des prédateurs, comme du gibier, avec une réflexion approfondie au sujet des clôtures.
3.2.5. En France, il est nécessaire de s'interroger sur la définition des zones non protégeables
Avec un raisonnement similaire à celui tenu pour les troupeaux de bovins, la mission estime qu'une zone ne doit être déclarée difficilement protégeable (ZDP) que suite à la réalisation d'un diagnostic de vulnérabilité approfondi. Déclarer tout un territoire en ZDP sans réalisation de diagnostics de vulnérabilité présente différents risques : celui d'accorder l'autorisation du tir de défense et celui d'ouvrir le droit aux indemnités sans qu'il y ait la moindre réflexion sur la protection, ce qui ne manquerait pas de conduire à des contentieux avec les associations de protection de la nature. Par ailleurs, comme on peut le remarquer dans les prises de position des parties prenantes à l'occasion des réunions du groupe national loup, introduire des inégalités de traitement des éleveurs entre zones géographiques n'est pas bien perçu et doit être solidement étayé.
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Ceci n'exclut cependant pas, de l'avis de la mission, de diversifier la pression de régulation du prédateur selon les régions où sa présence pose moins de problèmes (zones de polyculture, forêts, etc.) et celles où elle accentue des difficultés économiques et de développement déjà aiguës.
3.3. Le recours aux tirs létaux de défense, encore peu utilisés en Europe, peut être d'autant plus simplifié que l'état de conservation de l'espèce progresse
La mission considère le tir des loups 80 comme un moyen à part entière de prévention des dégâts. Le prélèvement d'individus par tir s'inscrit pour le moment dans un cadre dérogatoire qui en fait la dernière extrémité (au cas où aucune autre mesure satisfaisante ne peut être mise en oeuvre pour limiter les "dommages"). Il semble cependant clair à de nombreux spécialistes, que cette approche trop restrictive a enhardi les loups et encouragé le développement de la prédation sur les troupeaux considérés comme ressource alimentaire "de confort". Dans la mise en place d'un cadre de protection stricte, des paramètres très importants de l'éthologie du loup ont ainsi été négligés. Le loup est une espèce « rusée » et « prudente », mais qui a toujours cherché à approcher l'homme. C'est sans doute pour cela que c'est la première espèce sauvage à avoir été domestiquée dès la préhistoire. Aidé par son statut de protection, le loup a naturellement tendance à côtoyer l'homme de plus en plus près, sans recevoir de signaux négatifs qui renforceraient sa prudence. Au moment où le bon état de conservation progresse et que, du fait de la forte hausse simultanée des effectifs de loup présents en France et plus généralement en Europe, la régulation numérique de l'espèce par des quotas de tirs létaux est souhaitée par un nombre croissant d'acteurs des pays visités (voir 1.5.), la mission considère important d'attirer l'attention sur le bénéfice que pourrait apporter le renforcement de tirs de défense, à proximité immédiate des troupeaux, de préférence à des tirs de prélèvement non ciblés. Il s'agit prioritairement de rechercher un bénéfice éthologique, en renforçant la prudence naturelle du loup, en modifiant son comportement de chasse ; ce qui revient à "réinitialiser" l'instinct sauvage du grand prédateur. Un effet de synergie est ainsi espéré avec les mesures de protection "passives".
3.3.1. Les tirs létaux sont peu pratiqués
Parmi les pays visités, seules l'Espagne et la Suisse prélèvent régulièrement des loups de manière légale. En Espagne, il faut préciser que ces tirs, réalisés par des chasseurs (jusqu'à 200/an), s'effectuaient au Nord du Duero, sur une population de plus de 2 000 loups (la plus dense d'Europe), non soumise à une protection totale par la directive HFF et la Convention de Berne. Le tir du loup en chasse guidée dans les "Réserves de Faune" constitue une recette81 touristique importante pour des zones isolées, au même titre que les trophées de cerf. En revanche, en Suisse, c'est la doctrine du Ministère fédéral chargé du loup (OFEV) qui, en concertation avec l'échelon politique cantonal, a institué sur une base temporaire, le tir des loups, 5 ans après son apparition sur le territoire helvétique, en
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En France, il est actuellement défini par l'arrêté du 19 février 2018 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do? cidTexte=JORFTEXT000036619326&dateTexte=&categorieLien=id Lors des enchères pour l'adjudication des lots de chasse, il n'est pas rare d'atteindre 12 à 14 000 pour avoir le droit de tirer un loup !
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accord avec le texte de la Convention de Berne 82. Ce sont exclusivement des "garde faune" cantonaux qui réalisent les tirs (bilan : 23 tués sur 115 loups ayant été identifiés sur le sol suisse, depuis 1998). L'État fédéral refuse d'envisager l'armement des bergers. Le tir de défense, limité au périmètre des alpages, peut être déclenché sur un "loup problématique" (solitaire) identifié par le suivi des dégâts et le monitoring génétique. La régulation numérique peut s'exercer par prélèvement de 50 % des juvéniles d'une meute trop spécialisée sur les moutons (meute "déviante"). Dans les deux cas, l'objectif des tirs est de détourner le prédateur des animaux d'élevage et de lui conserver sa "timidité" atavique. L'Allemagne et notamment le Land de Basse Saxe 83, envisage une extension des possibilités de tir, notamment pour éloigner les loups "téméraires" des zones habitées, mais aussi pour réguler une expansion numérique beaucoup plus rapide qu'anticipée sur des parties sensibles de son territoire (zones de plaine industrielle très habitées, zones humides de pâturage ovin non clôturé, marais, polders, etc.).
3.3.2. Il importe de sécuriser juridiquement le recours aux tirs vis-à -vis du droit international
Pour l'instant, hormis le cas de l'Espagne au Nord du Duero 84, tous les pays, y compris la France, s'appuient sur des autorisations de tir de destruction au cas par cas, basées sur l'intensité des dommages, la mise en place de mesures de protection passive (cercle 1) ou l'absence d'autre solution satisfaisante (cercle 2 et front). De plus, dans certains pays (Castille et Léon par exemple), l'interprétation des textes par le juge administratif limite sérieusement la marge d'action de la communauté autonome. Non envisagée par les pays dépourvus de loups (qui ont dès lors facilement admis qu'il soit placé dans l'Annexe IV), la régulation numérique de l'espèce s'invite à l'ordre du jour plus rapidement que prévu compte tenu du doublement des effectifs constaté entre 2014 et 2018. Sans évolution des textes, les États impuissants à juguler la nouvelle dynamique de l'espèce, s'exposeront inéluctablement à la recrudescence des destructions illicites. Et contrairement à la chasse, dont le paradoxe est de maintenir durablement les populations d'espèces sur lesquelles elle est pratiquée (voir sanglier, cervidés, tétraslyre), ces méthodes illégales peuvent conduire à l'extermination du loup. L'Allemagne réfléchit à appuyer ses mesures de régulation sur la transposition de l'alinéa 1-e de l'Art.16 de la directive85. Sa formulation semble en effet convenir pour des mesures de régulation fondées sur la chasse en quotas limités. Il s'agirait aussi de pouvoir maintenir des zones "sans loup", en évitant l'installation de meutes, pour des raisons de sécurité des personnes notamment86. Cet alinéa de la directive est transposé en droit français, par le biais du protocole des tirs de prélèvement renforcés, liés à la période de chasse et déconnectés de la période de présence des troupeaux.
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Les conditions à remplir et les règles de décision ont été stabilisées, proche du système français, 10 ans plus tard. Projet de résolution du 12/10/2018 présentée au Bundesrat. Qui correspond au cas des pays de l'Est et des Balkans-loup classé en Annexe V de la Directive HFF. Permettre, dans des conditions strictement précisées, le prélèvement sur une base sélective et en quantité limitée, la conservation ou tout autre exploitation judicieuse de certaines espèces protégées (animales ou végétales)en petit nombre. L'Allemagne a été le théâtre en 2018, de la 1 ère attaque d'un loup sur l'homme en Europe, depuis 1945.
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La Suisse souhaite une évolution dans le cadre de la Convention de Berne dont le texte a été repris mot à mot par la directive HFF pour ce qui concerne les possibilités de dérogation à la protection intégrale. Elle avance trois arguments : 1) le succès du plan de sauvegarde du loup qui se trouve désormais hors de menace sur l'ensemble du territoire européen ; 2) la hausse prévisible et insupportable du coût des moyens de protection au vu de la hausse des effectifs et de la répartition géographique ; 3) la facilité accordée, il y a 40 ans, aux pays signataires de la Convention de Berne et qui abritaient déjà des populations conséquentes de loup européen, en les autorisant à continuer de le gérer en dehors d'un cadre de protection totale (soit comme gibier, soit autrement). Elle considère que cette dérogation devrait aujourd'hui être concédée, par parallélisme des formes, aux pays qui accueillent le retour du loup, une fois dépassé un cap démographique à définir (sorte de "point de non-retour", dont sans doute la situation de 2019 est assez voisine). L'Autriche et l'Allemagne envisagent de la soutenir auprès du Comité permanent. C'est le même paradoxe, à l'intérieur de ses propres frontières, que l'Espagne met en avant ; la segmentation "Nord du Duero/Sud du Duero" a été mise en place pour protéger à l'époque la population relictuelle d'Andalousie aujourd'hui disparue. La population de loup du Sud du Duero n'est autre que l'extension géographique de la population chassable du Nord du Duero, et donc toute discrimination juridique paraît aujourd'hui totalement incongrue. Pour l'Espagne, la logique voudrait aujourd'hui que le loup passe de l'annexe IV à l'annexe V de la directive HFF87. En raison du fort tabou que cela représente, la démarche allemande, qui ne nécessite pas de modification de la directive, peut s'avérer plus pragmatique, à condition d'oeuvrer de concert, dans le cadre d'une nouvelle rédaction en cours du guide interprétatif de la directive. 10.Recommandation (MAA, MTES) : fixer un mandat précis aux experts français participant aux travaux de réécriture du guide interprétatif de la directive Habitats faune flore concernant la protection des espèces annoncés par les commissaires européens à l'environnement et à l'agriculture pour 2019, avec pour objectif de permettre, dans un cadre dérogatoire précisé, de sécuriser juridiquement le recours aux différentes modalités de tirs létaux sur le loup. La mission considère par ailleurs qu'il serait utile de viser parallèlement la réévaluation du positionnement du loup comme espèce protégée à l'aune de sa répartition et de sa situation démographique actuelle (effectifs et rythme d'accroissement), afin de ne retenir, dans les textes internationaux s'appliquant à la France, que des mesures de protection mieux proportionnées à l'objectif de protection de l'espèce.
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Elle considère en effet logiquement que l'espèce étant, sur son territoire, sortie d'un état de menace « critique », elle devrait logiquement quitter le statut de protection stricte prévu par la directive pour les espèces en danger critique de disparition. Il faudrait sinon étendre le régime de protection stricte à toutes les espèces !
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3.3.3. Dans le cadre juridique actuel, renforcer en France la réactivité, la pertinence et l'efficacité des tirs comme moyen de prévention en synergie avec les mesures de protection passive
La conception française des tirs de défense, simple ou renforcée, auprès d'un troupeau régulièrement attaqué par le loup se rapproche du concept suisse, dans son idée. Par contre, elle s'en éloigne dans la mise en oeuvre, faute de réactivité suffisante. Concernant les tirs de défense simple, la réactivité est garantie puisque 53 % des éleveurs ayant souscrit des mesures de protection des troupeaux disposent d'autorisations individuelles délivrées par le préfet de département, valables 5 ans ; ces autorisations n'étant pas suspendues quand le quota annuel est atteint. En pratique, très peu de tirs de défense simple sont fructueux (quelques unités par an pour plus de 1 000 autorisations). Cette mesure de bon sens et rassurante a donc un impact limité. Les tirs de défense renforcée sont en revanche beaucoup plus efficaces, grâce à la coordination entre tireurs et l'utilisation de matériel à visée infra rouge. Pour qu'ils soient mis en oeuvre, il faut soit mobiliser la brigade ONCFS (délai d'une à deux semaines), soit organiser une opération sous le contrôle d'un lieutenant de louveterie local, avec des personnes habilitées et disponibles. Or, bien souvent après ce délai, les meutes ou loups solitaires incriminées ont changé de secteur. Pour être vraiment efficace comme mesure de prévention des dommages, dans un nouveau contexte de pression démographique du loup, cette procédure de premier rang opérationnel devrait être accélérée (avec un double impact sur les niveaux de dégâts, via la modification du comportement des meutes et via les effectifs du prédateur). Il serait également utile de créer un « tir de défense simple élargie », pour les zones de forte concentration des dégâts et les ZDP, mobilisable immédiatement par l'éleveur autorisé, mais limité à 3, voire 5 tireurs.
Répartition des différentes modalités de tir en France
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En matière de régulation, les tirs de prélèvement simples ou renforcés sont des tirs sans lien de proximité du troupeau, et qui ont l'inconvénient de ne pas cibler les comportements nuisibles du loup et ne sont donc d'aucun remède immédiat pour la prévention des dommages. Ils peuvent même déstructurer une meute, si un dominant est tué, ce qui entraînera davantage de risque de dommages à court terme sur la faune domestique (prédation opportuniste). De fait, ce sont les tirs de régulation renforcée (tir en opération de chasse au grand gibier) qui sont pratiqués sur quelques secteurs à forte densité de loups du Sud des Alpes. Réalisés comme c'est le cas en fin d'année civile, ils peuvent contribuer partiellement à une gestion adaptative vers laquelle la mission considère souhaitable de se diriger (voir 3.3.4.). Il faudrait répartir le quota au moins entre deux groupes de départements, ceux de la zone "dense" (Sud des Alpes) et ceux comportant une ZDP, voire une zone d'exclusion sur laquelle l'objectif serait d'éviter l'installation de meutes. Pour optimiser les opérations de régulation, il faut s'appuyer spatialement sur le dispositif mis en place par les préfets et l'ONCFS avec la louveterie. La mission propose que chaque préfet de département où le loup est présent crée une équipe de louvetiers, spécialistes du loup, réquisitionnables par l'administration et chargés d'exécuter, avec réactivité, les tirs de défense renforcée. Leur sujétion et leurs déplacements seraient défrayés sur les crédits de prévention des dommages. Ils devraient pouvoir utiliser la lunette de tir à visée thermique, tout comme la brigade ONCFS. Les éleveurs resteraient bien sûr, quant à eux, porteurs de l'autorisation de tir de défense simple. Les autres modalités de régulation du loup, prélèvement renforcé notamment, seraient déclenchées en fin d'année civile, en rapport avec des objectifs stratégiques de régulation ou de ralentissement de la colonisation (ZDP) débattus régionalement.
3.3.4. Dans le contexte de forte progression démographique de l'espèce, il importe désormais d'évoluer vers une gestion adaptative de l'espèce permettant un meilleur pilotage par les dégâts
Seule la France a mis en place, dans le respect de ses engagements internationaux et du droit européen, une forme de régulation quantitative des loups avec différents degrés d'intervention, y compris le droit pour les bergers de défendre eux-mêmes leur bien avec un fusil. Pour autant, elle se trouve face à un risque élevé de perte de contrôle de la progression numérique et spatiale de l'espèce qui pourrait conduire à un nouveau doublement dans 4 à 5 ans risquant d'entraîner une explosion encore plus importante du coût des moyens de protection et d'indemnisation tout en renforçant les conflits déjà nombreux. L'idéal serait de ne plus piloter par rapport à l'effectif, avec un seuil bas (minimum 500 loups), sans aucune limite supérieure, mais par rapport à un plafond haut correspondant à un nombre objectif de meutes (à débattre et à répartir spatialement). Ce nombre devrait être également corrélé à des objectifs de maîtrise des dégâts ou autres objectifs locaux d'équilibre des écosystèmes, de sécurité, etc. Les tirs létaux pourraient alors être effectués dans les meilleures conditions d'efficacité, avec au départ un plafond de prélèvement "non bloquant" que l'on peut
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estimer au double du plafond actuel. Ce plafond serait diminué sitôt que les indicateurs de suivi de la population témoigneraient 2 années de suite d'une stagnation démographique. De cette façon, l'expansion de la population serait sous contrôle de la puissance publique, en accord avec les objectifs patrimoniaux poursuivis région géographique par région géographique. Dans le cas d'une gestion adaptative, le nombre de loups pouvant être éliminés sur une année ne se mesure pas à l'unité près. Si l'on estime la population à 500 loups (+ ou - 50) et un accroissement annuel potentiel de +100 loups (+ ou  10), il apparaît que l'unité de compte est la dizaine et surtout que l'écart minimum entre une stratégie assumée d'augmentation des effectifs et une stratégie visant à arrêter sa progression est d'au moins 50 unités. La gestion adaptative aurait le mérite de la différenciation, c'est-à -dire d'un pilotage démographique fondé sur un objectif à atteindre, notamment en fonction de la place que l'on souhaite accorder à l'élevage :
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là où l'on souhaite "retirer" des meutes, il faut augmenter le quota de loups à tuer, jusqu'à ce que le nombre de loups diminue ; ailleurs, où l'objectif en nombre de meutes n'est pas atteint, le nombre de prélèvement doit permettre une progression démographique et doit être baissé si besoin.
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La mission propose que la France se dirige sans tarder vers la mise en place d'une gestion adaptative du loup en France en s'appuyant sur la nouvelle version, en cours de préparation, du guide interprétatif de la directive Habitats faune flore.
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4. La complexité de la coexistence loup - activités humaines requiert une communication équilibrée, basée sur des informations solides et partagées
Les dispositions relatives à la communication dans les pays visités par la mission sont assez hétérogènes et aucun pays n'évite la polémique. En France, où la faisabilité même d'une coexistence est souvent questionnée, la mission considère que ce sujet mérite, loin des affirmations simplistes, angéliques ou catastrophistes, une véritable politique de communication.
4.1. En Europe, des exemples intéressants qui, bien qu'insuffisamment aboutis, peuvent inspirer la France
Dans tous les pays visités, les controverses sont importantes et récurrentes, souvent amplifiées ou déformées par des media en quête de sensationnel, ou plus ou moins instrumentalisées par un camp ou un autre. La mission a recueilli beaucoup de témoignages en ce sens. La question de l'information objective du public et des messages que l'on souhaite véhiculer est donc une préoccupation générale. Parmi les pays visités, l'Allemagne, qui connaît un phénomène de recolonisation par le loup très comparable à celui de la France, se démarque. Sa communication s'articule de façon complémentaire entre le niveau fédéral et le niveau des Länder de façon à toucher un large public et à être aussi incarnée que possible au niveau local. Elle a également recours à un partage des rôles intéressant entre acteurs publics et acteurs extérieurs à l'État (fédéral ou Land), mais reconnus, notamment pour la production d'informations. Enfin, les messages sont cohérents et clairs en réaffirmant d'une part les engagements internationaux et européens du pays au sujet de la protection de l'espèce et de son état de conservation favorable, sans nier les difficultés que le retour du loup pose aux éleveurs qui sont aidés en conséquence. Au niveau fédéral, le ministère de l'environnement et l'Agence pour la protection de la nature ont externalisé, tout en le finançant et le supervisant, un « Centre de documentation et de conseil sur les loups » (DBBW). Confié au « Senckenberg Museum für Naturkunde Görlitz » qui le gère et en assure la coordination, il est alimenté par les données de trois organismes indépendants : le Leibnitz Institute für Zoo und Wildtierforschung (données sur les loups morts, régime alimentaire...), l'Institut LUPUS (qui coordonne le suivi biologique et la recherche sur le loup en Saxe) et du laboratoire de l'Institut de recherche Senckenberg, laboratoire de référence pour les recherches génétiques sur le loup et le lynx en Allemagne. Le DBBW apporte son conseil au gouvernement fédéral et à ceux des Länder pour la gestion du loup. Il est chargé de compiler annuellement l'information relative à la situation du loup en Allemagne (état des populations, dommages, mesures de prévention, dédommagements...).
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Le DBBW met à disposition du public, via son site internet 88, un grand nombre de données : biologie de l'animal, statut de protection, méthodologie et résultats de l'évaluation des populations, cartes sur la présence de l'espèce en Allemagne, dans chacun des Länder, données sur chaque meute, progression de la colonisation par territoire, données issues de la génétique, liste des loups abattus, coûts des mesures de protection et des indemnisations... La présentation est attractive, claire et factuelle. Enfin, pour chaque Land, le site donne accès à son plan loup et à son ou ses sites spécialisés. Dans le cas de la Saxe, il s'agit d'une part du site du ministère saxon de l'environnement (informations de base et renvoi au site ci-après décrit), d'autre part du site du « bureau de contact sur le loup » en Saxe, créé dès 2004 par le gouvernement saxon. Le « Kontaktbüro » se présente comme « le bureau d'information officiel pour la population, les médias et les autorités sur le loup ». Son site précise : « Les informations issues de la surveillance (collecte de données scientifiques) et de la protection des troupeaux sont collectées par ce bureau, préparées pour le public et rendues accessibles ou activement annoncées. Notre but est d'informer la population de manière opportune et objective et de fournir des informations factuelles sur le loup ». Une des missions « pilier » du Kontaktbüro est d'apporter de l'information aux éleveurs (sur le loup, sa présence, son comportement... ; sur les moyens de protection, les aides disponibles, les indemnisations...). Il est intéressant de noter que le site propose beaucoup de contacts personnels (téléphone ou mail), afin que les éleveurs, ou toute personne, puissent s'informer en direct. Les personnes interrogées par la mission en Saxe ont insisté sur l'importance, dans la politique de communication du Land, de ces interlocuteurs joignables par téléphone. Le Kontaktbüro envisage d'ailleurs d'avoir des correspondants dans chacune des communes de Saxe, plutôt qu'ils soient tous regroupés sur son siège, à l'est du Land, afin de se rapprocher encore plus des besoins de la population dans ce domaine. La Suisse a adopté un positionnement un peu différent, sans doute dicté par l'importance culturelle de la place de l'élevage dans ce pays. Le volet information de son plan d'action indique que : « Les cantons et l'OFEV coordonnent leurs politiques d'information et fournissent des informations objectives sur le loup, les problèmes qu'il pose et les solutions envisageables ». La question de la coexistence et de ses moyens apparaît ainsi centrale dans la préoccupation suisse.
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https://www.dbb-wolf.de/
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L'OFEV a également recours à l'externalisation (qu'il finance) pour gérer une partie de la communication et de l'information sur le loup au niveau fédéral :
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la collecte et la présentation des informations relatives au suivi de l'espèce sont confiées à une fondation ad hoc, Le Kora89, qui se définit comme suit : « Le KORA enquête sur l'écologie des carnivores et suit l'évolution de leur population. Nous observons également les interactions des prédateurs avec un paysage anthropisé afin de développer les bases d'une coexistence sans conflit entre les grands prédateurs et les humains ». Son site regroupe de façon assez détaillée l'information disponible sur la présence et le développement du loup en Suisse, sur les analyses génétiques effectuées chaque année, sur les dégâts constatés en temps quasi réel, etc. ; le volet cohabitation avec l'élevage est confié à une association, AGRIDEA, qui se définit comme faisant « partie intégrante du système de connaissances agricoles constitué notamment par la recherche, la formation, la vulgarisation, la pratique et l'administration ». AGRIDEA a développé un site spécifique, remarquable (et une newsletter associée), pour le monde agricole baptisé « Protection des troupeaux »90 qui fournit une information très détaillée et d'ordre technique aux éleveurs et bergers sur toutes les mesures techniques et dispositions administratives relatives à la protection.
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L'Italie et l'Espagne de leur côté ont une communication qui est apparue à la mission moins structurée et plus axée sur la volonté de mieux faire connaître le loup, sa biologie, son éthologie, son développement, et de convaincre qu'il est utile et qu'il a sa place dans les régions concernées, malgré les dommages qu'il crée aux activités d'élevage. Elle semble en outre peu articulée avec le niveau local. En Italie, le projet LIFE Wolfalps (2013-2018, 6 millions d'euros), piloté par le Parco Naturale Alpi Marittime à la tête de 12 partenaires des régions alpines de l'Italie et de la Slovénie, a été consacré à 50 % à la communication. Le projet suivant, qui devrait inclure des partenaires français, devrait se consacrer beaucoup plus directement à la recherche de solutions techniques pour diminuer la prédation, et aux façons de diminuer les coûts et la quantité de travail associés aux moyens de prévention. Preuve s'il en est de l'importance de ce volet. En Espagne, comme en Italie, l'outil « parc à loups » est considéré également important, en termes de communication, toujours principalement pour mieux faire connaître et accepter le loup91. Dans les deux cas, « Centre du loup ibérique » en Espagne et « Centre faunistique hommes et loups » en Italie92, il a été choisi de ne présenter au public que des loups locaux (population ibérique ou population italoalpine) dans un milieu aussi naturel et proche que possible de celui fréquenté par l'animal dans ces deux pays. Il est intéressant que la Saxe ait fait au contraire le choix de ne pas faire de parc à loups. Elle considère en effet qu'un tel investissement est trop consommateur de moyens et surtout trop artificiel, alors que la priorité consiste pour la population à savoir cohabiter avec un animal présent dans le milieu naturel et qu'elle peut être amenée à croiser.
89 90 91 92
https://www.kora.ch/ http://www.protectiondestroupeaux.ch/fr/ Même si la difficile coexistence avec les troupeaux est abordée dans les deux parcs visités. http://www.centrodellobo.es/ et http://www.turismoentracque.it/vivere/uomini-e-lupi/
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4.2. En France, il y aurait un intérêt à mettre en place une politique de communication impliquant l'ensemble des acteurs
La mission rappelle que la communication est censée produire des éléments de discours à des fins précises, pour appuyer une thèse, aider à l'atteinte d'un objectif. Elle doit avoir comme base la production d'informations, c'est-à -dire d'éléments vérifiés et reconnus valides par tous les acteurs. Celle-ci ne doit pas être confondue avec la gouvernance (groupe national, groupes départementaux...), ni avec les actions de formation des éleveurs et/ou bergers, même si elle doit pouvoir être utile à l'une comme aux autres.
4.2.1. Définir un objectif de communication commun entre les principaux protagonistes serait l'idéal
S'il s'agit de communiquer sur la coexistence entre le loup et les activités humaines, au premier rang desquelles l'élevage, il convient d'impliquer dans l'élaboration de cette politique de communication l'ensemble des parties prenantes : État, élus locaux, organisations de professionnels agricoles, associations de protection de la nature. La mission conseille également d'impliquer les professionnels du tourisme et des sports de nature. Il importe en premier lieu, que ces acteurs définissent ensemble l'objectif de cette communication commune et les messages dont ils souhaitent que cette communication soit porteuse. Du point de vue de la mission, il s'agit de proscrire toute « communication prosélyte » pour ou contre le loup, sujet dépassé, mais bien de regarder la réalité en face, celle d'un équilibre complexe, et sans doute fragile, à atteindre. La mission propose la constitution un « groupe de travail communication », composé de membres de groupes loup départementaux, réunis sous la supervision d'un médiateur professionnel agréé par le groupe national loup, avec pour objectif d'élaborer une politique de communication commune sur la coexistence du loup et des activités humaines. La mission est consciente de la difficulté d'un tel travail. Elle pense néanmoins, qu'une relative méconnaissance des acteurs les uns envers les autres et des perceptions souvent biaisées du monde rural par le monde urbain (et vice-versa), compliquent sérieusement la recherche de solutions pragmatiques. Une telle démarche peut contribuer à dépasser ces clivages. Elle suppose que celle-ci intervienne, dans le cadre d'une affirmation décomplexée des engagements internationaux et européens de la France, mais aussi d'une clarification de la notion de « bon état de conservation de l'espèce » et de la vision prospective correspondante de la présence du loup sur le territoire national.
4.2.2. Le partage d'une base d'informations communes, validées et factuelles est indispensable
Au-delà de la méconnaissance des uns par les autres, une partie des controverses actuelles ou du traitement médiatique approximatif de la question, est parfois alimentée par une suspicion sur les informations disponibles ou sur le temps nécessaire pour leur partage.
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De gros progrès ont néanmoins été faits dans ce domaine ces dernières années et beaucoup d'informations sont désormais accessibles, principalement sur le site de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Auvergne Rhône-Alpes (AuRA) et sur celui de l'ONCFS, l'une et l'autre diffusant en outre des lettres d'informations régulières aux contenus denses. Pour autant, la présentation des informations via les deux sites internet cités plus haut, apparaît peu attractive dans sa forme et assez peu didactique, avec des tableaux de données parfois difficiles à déchiffrer. Ceci peut contribuer à entretenir l'idée que l'on ne facilite pas la mise à disposition du public de cette information. Très récemment (le 20 février 2019), l'ONCFS a lancé un nouveau site dédié aux informations sur le loup www.loupfrance.fr. Un réel effort de présentation a été fait. L'essentiel du contenu reprend les informations déjà disponibles sur le site institutionnel de l'ONCFS, mais la présentation qui en est faite ici est à la fois claire et attractive, ce qui constitue une évolution très positive. La mission considère qu'il y aurait un intérêt, à partir d'une telle base, à disposer d'un lieu de regroupement de toute l'information relative à la présence du loup en France et à sa coexistence avec les activités d'élevage. Une première étape pourrait ainsi consister à enrichir ce site des informations présentes sur le site de la DREAL AuRA, en les présentant dans le même esprit que le site actuel. Le plan national d'action (PNA) 2018-2023 prévoit d'ailleurs la création (dans le cadre de l'action 6.1) d'un « centre de ressources sur le loup ainsi que sur ses interactions avec le pastoralisme et l'environnement »93. Il convient de le mettre en place sans tarder.
4.2.3. Vers la création d'un « observatoire de la coexistence entre le loup et les activités humaines », autonome et mandaté de façon paritaire ?
La mission considère cependant qu'il serait utile que les acteurs se fixent une ambition plus large, afin d'aller au-delà de cette simple mise en commun de l'information. Le PNA prévoit d'ailleurs (p. 81) qu'une expérimentation soit conduite avec la création d'un « média particulier (site Internet, newsletter périodique, ou articulation des deux) dont le pilotage éditorial serait assuré de façon paritaire par les représentants des éleveurs et des représentants des APN ». 11.Recommandation (MAA, MTES) : favoriser la création d'un « observatoire national de la coexistence du loup et des activités humaines », confié à un acteur tiers disposant d'une autonomie suffisante par rapport à l'ensemble des acteurs du sujet et travaillant sur la base d'un mandat d'un « groupe de travail communication » issu des groupes loup départementaux.. Un tel observatoire aurait vocation à présenter en temps réel et de façon transparente, factuelle et accessible à un large public, l'ensemble des informations disponibles sur le sujet complexe de la coexistence du loup et des activités d'élevage (suivi biologique, éthologie, dommages, moyens de préventions, interventions sur l'espèce, bonnes pratiques, intérêt écologique, conséquences économiques, etc.). Il pourrait s'appuyer autant que de besoin sur le conseil scientifique du PNA pour la validation ou la vulgarisation des données issues de la recherche.
93
« Cette plateforme aura en particulier pour but de rassembler des données relatives à la situation du loup en France, aux études scientifiques réalisées et en cours, à des informations sur le loup et sur les mesures de protection, à des bonnes pratiques en matière de coexistence entre l'homme et le prédateur, à des transferts d'expériences nationales ou internationales. » PNA 2018-2023 p. 81.
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Conclusion
Les solutions techniques et financières, importantes, sont longuement débattues dans ce rapport. Elles ne répondront cependant pas à toutes les questions soulevées par le retour du loup en France. L'expansion rapide de l'espèce concerne désormais des zones telles que le Massif Central, région d'élevage prédominant, l'Aquitaine et l'Occitanie, deux fois plus denses en moutons que les Alpes et la région Provence-Alpes Côte d'Azur, avec de plus, des troupeaux bovins en élevage extensif de plein air, cibles potentielle des loups. Une proportion croissante du monde de l'élevage va donc être concernée par cette évolution. Ceci devrait conduire, du point de vue de la mission, à reconsidérer les modalités de suivi de la population lupine, de protection des troupeaux, de prévention des attaques par le recours aux tirs, mais aussi les moyens alloués aux actions correspondantes. Cela oblige aussi à se poser la question de la place que l'on souhaite accorder au loup, son bon état de conservation étant désormais largement assuré. Au-delà des recommandations formulées, la mission encourage l'État à innover dans deux directions. Tout d'abord, à l'heure où la plupart des acteurs souhaitent que les décisions se prennent au plus près du terrain, la question de la gouvernance mérite d'être examinée à nouveau. Le groupe national loup est essentiel comme instance de suivi du plan national d'actions 2018-2023 et comme lieu de dialogue entre les différents acteurs. La mission a, cependant, fait le constat que le rôle joué par les gouvernements régionaux des pays visités, en concertation étroite avec l'administration centrale et dans le respect des engagements européens ou internationaux, permet une meilleure prise en compte des particularités locales. Elle considère qu'il serait essentiel que les régions françaises, compétentes dans plusieurs domaines clef tels que la formation, le développement économique, la gestion des fonds européens, la biodiversité, puissent être associées plus étroitement à la réflexion et aux décisions. Il s'agit en effet de réfléchir, territoire par territoire, au type d'agriculture et plus largement d'activités humaines que l'on souhaite, avec leurs conséquences en termes de biodiversité, de paysage, de filières économiques, de formation des femmes et des hommes. Enfin, à l'heure où la fracture entre monde urbain et monde rural est exacerbée et où, malgré la méconnaissance fréquente de l'ensemble des enjeux, les acteurs expriment des positions très tranchées, l'idée d'engager un vrai dialogue sociétal semble pertinente. Il pourrait prendre la forme d'une conférence citoyenne qui serait de nature à aider à légitimer les décisions à prendre sur un sujet complexe et sensible. Thierry Boisseaux Christian Démolis Odile Stefanini-Meyrignac Michel Vallance
Ingénieur général Ingénieur général Ingénieure générale Ingénieur général des ponts, des eaux des ponts, des eaux des ponts, des eaux des ponts, des eaux et des forêts et des forêts et des forêts et des forêts
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Annexes
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1. Lettre de mission
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2. Fiches pays
2.1. Le Piémont italien, protection forte du loup, unités d'élevage de taille restreinte et accent mis sur le gardiennage
Verbatim : « le loup ne tue pas les moutons, il sélectionne les bergers ». FICHE Piémont (Italie) Éléments de contexte
Les Alpes italiennes, où le loup avait disparu au XX e siècle, contrairement aux Apennins où il a toujours été présent, sont en cours de recolonisation par le loup dans des proportions similaires à la France. La présence ovine y est cependant beaucoup moins importante avec une majorité de troupeaux de petite taille et en général regroupés tous les soirs pour la traite. Les budgets publics pour la prévention sont restreints et inconstants. Le système d'indemnisation des victimes ne fonctionne pas correctement, ce qui rend les statistiques de dégâts sans doute sous-estimées. Le tir légal du loup reste prohibé, mais de nombreux témoignages font état d'un braconnage important.
Carte d'identité Piémont
Superficie : 25 402 km² ; Sous-population concernée : italo-alpine Nombre de meutes/ loups : 33 meutes / environ 195 loups Statut du loup :
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protégé par la convention Berne (espèce strictement protégée  annexe II) protégé par la directive Habitats
Mortalité loup : 15 à 20 % liée au braconnage-accidents de la route Nombre d'éleveurs/têtes ovins/têtes bovins : Élevage bovin très majoritaire (à plus de 80 % en alpage), environ 120 000 ovins, surtout troupeaux laitiers de taille moyenne de 300 têtes). Il a été indiqué à la mission que certains troupeaux à viande, de grande taille, seraient laissés en estive sans surveillance, ce qui permet de recevoir des primes PAC, sans se préoccuper de pertes liées au loup. Nombre de victimes :
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mal connu depuis la mise en place du système assurantiel l'indemnisation des dommages 350 à 400 déclarées Région Piémont Ministère de l'environnement et de la protection du territoire et de la mer (MATTM) et son bras armé, l'ISPRA
Administrations en charge de la gestion :
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Existence ou non d'un plan national loup : plan national loup sur 10 ans, nouveau plan en cours de discussion depuis 2017 et non encore validé par les régions fin 2018.
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finalité : guider la conservation et la gestion du loup par une approche intégrée, f ournir des orientations pour le rôle de l'Italie dans la coordination avec les pays de l'ensemble de la région alpine. objectifs de prévention du braconnage et des empoisonnements, de lutte contre les chiens errants et l'hybridation, de prévention des conflits, de gouvernance et de
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FICHE Piémont (Italie)
régulation par le tir, ce dernier faisant l'objet de débat entre les régions. Indemnisations des dégâts : système assurantiel depuis 2012. Constat par les vétérinaires de l'ASL (autorité sanitaire locale) jugé non satisfaisant par le projet Life Wolfalps. Les vétérinaires n'arrivent pas à se déplacer dans les 48 h, ce qui conduit à une sous-déclaration des dommages alors que le nombre de meutes progresse.
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup :
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Suivi par un réseau d'acteurs (services forestiers, agents des parcs, chasseurs - 500 personnes) sur la base de transects définis et à partir d'enquêtes de terrain opportunistes utilisant les techniques suivantes : recherche de traces dans la neige, excréments, poils ; pièges photos ; écoute des hurlements provoqué. Existence grâce au Projet Life wolfalps d'un manuel de poche « Instructions pour la collecte de signes de présence de loups dans les Alpes », de formations à la fois théoriques et sur le terrain, dispensées aux nouveaux observateurs (plus de 200).
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Estimation par la méthode CMR.
Analyses génétiques : Réalisées par un laboratoire américain (Piémont) et divers laboratoires italiens (reste de l'Italie). Pas de centralisation des données : existence d'une base de données piémontaise, pas de base de données italienne. Ambition de disposer d'une telle base inscrite dans le plan national loup.
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Mesures de protection (les mesures d'effarouchement sont jugées inefficaces) :
Financées par le PDR, mesure 10 (paiements agro-climatiques-environnementaux) et mesure 4 (investissements en actifs corporels : financement à 100 % de l'achat des chiens et des clôtures). Plafonnement à 5 000 /exploitation (moyenne entre 4 000 et 4 500 ). Enveloppe globale insuffisante : 300 k région/Europe) 3 volets : gardiennage continu du bétail, chiens, confinement nocturne avec clôtures électrifiées d'au moins 1,20 mètre de haut. Mise en oeuvre réfléchie au cas par cas jusqu'en 2012 avec un appui par un vétérinaire privé (un par province avec rôle d'accompagnement soit 8). Arrêt de l'accompagnement depuis 2012 faute de moyens. Projet de relancer cet accompagnement individuel dans le cadre du nouveau programme LIFE avec les vétérinaires des autorités sanitaires locales. Dans le cadre du projet Life Wolfalps 2013-2018, réalisation d'une enquête sur les dommages causés par le loup avec analyse de la vulnérabilité des systèmes d'exploitation suivie de réunions avec les régions / les éleveurs. Résultats dans la base de données. Conclusion en matière de pratiques agricoles dans l'annexe concernant les lignes directrices pour la gestion du loup avec distinction selon le type d'élevage (ovins / caprins et bovins). Protection des troupeaux bovins plus compliquée mais possible.
Loups en captivité et hybrides chien/loup
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Loups captifs : pas de mention dans le plan national loup. Existence d'un parc (visité) à Entracque (parc naturel des Alpes Maritimes) avec 4 ou 5 loups (aucune reproduction depuis sa mise en place). Loups hybrides : développement important du sujet dans l'annexe FRE9-01 (lignes
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FICHE Piémont (Italie)
directrices pour la gestion du loup dans les alpes italiennes) avec référence à un document établi en 2015 (directives pour la gestion de l'hybridation entre le loup et le chien-Bocci et al). Expériences de capture des hybrides nécessitant un accord de l'ISPRA, de stérilisation puis soit de relâcher dans la nature soit de rétention dans des installations agréées. L'Italie centrale, source d'émigration du loup italien vers les Alpes où le taux d'hybridation est inférieur à 10 %, est très concernée (très fort taux constaté sur quelques meutes). Le nouveau plan loup souhaite interdire la détention comme chien domestique du chien-loup tchécoslovaque et du chien de Sarloos.
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2.2. En Suisse, une gestion pragmatique fondée sur une priorité donnée à l'élevage ; le tir du loup intégré comme prévention
FICHE Suisse Éléments de contexte
La Suisse connaît depuis la fin des années 1990 le retour du loup (en provenance d'Italie et de France) alors que celui-ci avait totalement disparu au XX e siècle. L'importance de l'élevage dans la culture et l'identité suisses a conduit ce pays à adopter une stratégie assumée de limitation de l'expansion du loup, ce qui le conduit à questionner la convention de Berne. Les cantons ont un pouvoir d'initiative sur les tirs létaux. Parallèlement la protection des troupeaux est prise en charge très rigoureusement, tant dans les moyens d'aide que dans les moyens de conseil et de contrôle. Dans un contexte d'alpage en saison estivale et de troupeaux de petite taille, les dégâts constatés pour 3 à 4 meutes présentes sont moins intensifs qu'en France du fait d'un moins grand nombre de victimes par attaque. Enfin, les témoignages de braconnage dans certains cantons ne sont pas rares.
Carte d'identité
Superficie : 41 285 km² Nombre de meutes/ loups : 3 ou 4 meutes / environ 50 loups Statut du loup : protégé par la convention Berne (espèce strictement protégée  annexe II) ; protégé par l'ordonnance fédérale sur la chasse et la protection des mammifères et des oiseaux sauvages (OchP), modifiée substantiellement en 2012, 2013 et 2015 pour les mesures de protection et la régulation du loup. Nombre d'éleveurs/têtes ovins/têtes bovins :
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8 000 éleveurs de moutons dont 90 % de doubles actifs ; · 400 000 moutons dont la 1/2 est estivée ; taille moyenne des troupeaux montant en estive : 500 têtes ; · 700 000 vaches. Nombre de victimes : environ 250 animaux de rente (ovins en majorité - pas d'attaque sur bovins).
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Administrations en charge de la gestion : · office fédéral de l'environnement (OFEV) ; · cantons. Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup : groupe de travail national grands prédateurs ; · associations / fondation (KORA pour le suivi de population, AGRIDEA pour la mise en oeuvre des mesures de protection, « Chiens de protection des troupeaux Suisse » pour l'agrément des chiens et la formation des éleveurs). Existence ou non d'un plan national loup : plan national loup (dernière version 2016) avec objectifs de protection du loup, d'information du public, de gestion des conflits avec l'ensemble des acteurs, de maintien de l'activité d'élevage, de définition de critères autorisant le tir.
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Indemnisations des dégâts : 80 % par l'OFEV et 20 % par les cantons (environ 100 k/an).
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FICHE Suisse Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : la fondation KORA travaille de façon très étroite avec les cantons qui recueillent tous les indices de présence du loup grâce à une démarche dite « opportuniste » avec :
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des prélèvements d'échantillons dans la salive récoltée sur des animaux de rente ou sauvages qui ont été prédatés par le loup ou dans des crottes / poils / urines recueillies dans la nature ;
des photos provenant de pièges photographiques ou directement de personnes ayant rencontré un loup. Établissement tous les trimestres par la KORA d'un rapport sur la situation du loup en Suisse.
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Analyses génétiques réalisées à l'université de Lausanne (département d'écologie et évolution dirigé par Luca Fumagalli) permettant de déterminer le nombre minimum de loups en Suisse. Suite à la demande des cantons, le nombre d'analyses réalisées a plus que doublé (passage de 350-400 à 600-1000 échantillons par an). Actualités sur méthodes d'analyse : le département d'écologie et d'évolution de l'université de Lausanne a, par deux fois, pris une initiative en faveur d'une collaboration inter-laboratoires tout d'abord pour constituer une population de référence unique, puis pour passer de concert à de nouvelles techniques d'analyses. Faute de réponse, le laboratoire de l'université de Lausanne a abandonné l'ambition d'avoir un échantillon de référence et changé de méthodes d'analyses pour améliorer le génotypage de microsatellites en adoptant le séquençage à haut débit (HTS). Vient d'être publié un article scientifique sur le taux d'hybridation loup X chien des 115 individus de la base de données suisse : « Two decades of non-invasive genetic monitoring of the grey wolves recolonizing the Alps support very limited dog introgression » - Scientific Reports volume 9, Article number148 (2019).
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Prévues par la directive du 9 octobre 2017. Coût annuel de 3 millions d'euros. Choix de l'OFEV :
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encourager financièrement les mesures de protection de façon à ce qu'elles soient supportables pour les agriculteurs. Les mesures concernent : la réalisation par le canton du plan de pâturage (diagnostic de vulnérabilité des unités pastorales) ; l'élevage /éducation de chiens de protection de troupeaux enregistrés officiellement ou à l'importation d'individus issus d'une association d'élevage reconnue ; la détention à l'année de chiens de troupeau ; l'électrification des clôtures ; l'entretien et au contrôle quotidien des clôtures dans des conditions difficiles ; la création d'un enclos de nuit ; l'acquisition par le canton de kits d'urgence protection des troupeaux permettant de faire face à une présence soudaine du prédateur. conditionner les indemnisations à la mise en oeuvre effective des mesures de protection ; considérer les tirs comme une mesure éducative de prévention venant compléter les mesures de protection.
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Rôle des cantons : définir les mesures de protection des troupeaux qu'ils jugent nécessaires, appropriées et raisonnables et pour cela :
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informer les agriculteurs se situant dans un secteur exposé aux risques de prédation,
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FICHE Suisse
sur la présence et les mouvements des prédateurs ;
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conseiller sur les mesures appropriées (le conseil se base d'une part sur la réalisation d'un plan de pâture (diagnostic) par le technicien pastoral du canton analysant le risque de prédation et classant les estives en 4 catégories : difficiles à protéger, protégeables avec adaptation au niveau gestion, protégeables avec les moyens existants, déjà protégées et d'autre part par une visite individuelle de l'exploitation en présence de l'agriculteur si la situation nécessite une adaptation complexe).
La mise en oeuvre des mesures de la responsabilité de l'agriculteur qui bénéficie de visites « conseil-contrôle » du technicien pastoral et d'un salarié de l'association AGRIDEA. Le contrôle est par contre obligatoire dès lors qu'il y a attaque et que celle-ci doit être imputée pour calculer le contingent de tir. Soutien parallèle de l'office fédéral de l'agriculture (OFAG) structure en charge du soutien à l'agriculture (paiements directs, contributions au paysage...) qui facilite la mise en oeuvre des mesures de protection des troupeaux. Par exemple différenciation de la contribution relative à l'estivage des moutons selon le type de conduite (non plafonné) : - 400 francs suisses (FS) par UGB pour une estive gardée en permanence par un berger ou pour des moutons parqués protégés par un chien de protection officiellement enregistré ; - 320 FS par UGB pour des moutons estivés en pâturage tournant non protégés par un chien de protection ; - 120 FS par UGB pour un estivage dans un pâturage permanent. Tirs de loup : envisageables dans des conditions très encadrées par l'ordonnance du 29 février 1988 sur la chasse et la protection des mammifères et des oiseaux sauvages (autorisation accordée au niveau cantonal pour le tir d'un loup, au niveau fédéral pour le tir d'une meute) lorsque les individus causent des dégâts considérables. Des mesures raisonnables pour protéger les troupeaux doivent avoir été prises en amont. Sur 115 spécimens de loup identifiés génétiquement en Suisse depuis sa réapparition, 23 ont été tués (légalement ou non). Réflexions en cours concernant la régulation : modification de l'ordonnance donnant aux cantons la possibilité, après avoir consulté l'OFEV, compétent en la matière, de désamorcer en amont les conflits entre les exigences de certaines espèces protégées et les intérêts de la population par des interventions régulatrices préventives, tout en restant dans l'esprit de la convention de Berne.
Loups en captivité et hybrides chien/loup
Les deux sujets ne sont pas sensibles.
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Parcs à loup : un seul parc avec 4-5 loups de la sous-population balte, identifiés génétiquement. Hybrides : des travaux récents de Lucas Fumagalli démontre le très faible taux d'hybridation (< 2%). Une réflexion est en cours concernant l'interdiction de posséder des chiens hybrides de loup comme races de chiens domestiques.
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2.3. La Castille et Léon, siège de la population lupine la plus nombreuse d'Europe en présence d'un élevage abondant ; la base de la prévention est le « Mâtin d'Espagne »
FICHE Castille et Léon (Espagne) Éléments de contexte
L'Espagne a toujours conservé une population importante de loups, même si celui-ci était classé comme « espèce nuisible » jusqu'en 1971. Le changement de statut de l'espèce (différencié selon les zones du pays) a permis une nouvelle dynamique de colonisation qui fait de l'Espagne le pays d'Europe qui détient une des plus grandes populations de loups. Si la cohabitation avec l'élevage est correcte dans les zones où le loup a toujours été présent, la recolonisation récente du sud du Duero pose d'importants problèmes principalement avec l'élevage extensif de bovins viande, non gardés et de plus en plus attaqués (60 % des victimes désormais, en forte croissance). La conduite de troupeaux ovins sur toute l'année en parcours ouverts "méditerranéens" pose moins de problèmes lorsqu'elle est associée à un gardiennage humain et à la protection de chiens bergers (Mâtin d'Espagne) en nombre suffisant. Les éleveurs ont peu recours au système assurantiel en vigueur pour l'indemnisation des dégâts, ce qui conduit probablement à une sous-estimation des dommages.
Carte d'identité
Superficie : Castilla y León, 94 226 km² , 26 hab./km² ; Espagne, 505 911 km², 97 hab./ km² Sous-population de loups concernée : ibérique (Canis lupus signatus) Nombre de meutes/ loups : 191 meutes, 162 au nord du fleuve Duero et 29 (doublement en 15 ans) au sud (estimation 2018). Recensement 2012/2014, 179 meutes - entre 900 et 1600 loups (Espagne entière : 297 meutes  entre 1500 et 2700 loups - disparu en Sierra Morena  présence rare en Catalogne de loups d'origine italo-alpine). Statut du loup : classé nuisible jusqu'en 1971 ; espèce cynégétique ensuite, convention de Berne ratifiée en 1986, sous réserve que le loup (en Espagne) soit inscrit à l'annexe 3 (espèce protégée, peut être régulée si état de conservation favorable), · transposition, dans le droit espagnol, de la directive européenne HFF (1995/1997) : au nord du fleuve Duero, loup inscrit à l'annexe V (chasse possible) ; au sud du Duero, loup inscrit à l'annexe IV (protection stricte avec dérogations possibles), · chaque communauté autonome est néanmoins compétente pour déterminer le statut précis de l'espèce sur son territoire (cynégétique, protégée, soumis à plan de gestion, régime général des espèces sauvages...). Nombre de têtes ovins / caprins et bovins et taille moyenne des troupeaux :
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3 200 000 ovins et caprins - 1 300 000 bovins, taille moyenne des troupeaux : 60 têtes pour les bovins, 250 pour les ovins, élevage essentiellement extensif.
Nombre de victimes : 2 000 attaques causant 3 000 victimes dont 60 % de bovins ; 15 % des attaques au Nord du Duero, 85 % au sud (inversement proportionnel à la présence du loup). Chiffres inférieurs à la réalité, les éleveurs ne déclarant pas systématiquement les dégâts. Attaques en forte croissance sur le front de colonisation. Administrations en charge de la gestion :
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au niveau national, seul le ministère de la transition écologique est compétent ; il
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FICHE Castille et Léon (Espagne)
assure principalement une fonction de coordination,
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la gestion réelle relève de la responsabilité des autorités régionales (l'Espagne compte 17 « communautés autonomes »).
Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup : chaque communauté autonome s'organise comme elle le souhaite ; la coordination État central / Régions s'organise autour d'un groupe de travail entre techniciens, d'un comité technique avec des responsables de rang supérieur puis entre directeurs généraux (ministères central et régionaux) et enfin entre ministres central et régionaux. En Castille et Léon, création en 2017 d'une « table du loup » regroupant les divers secteurs socio-économiques concernés pour un échange de points de vue au moins une fois par an. Existence ou non d'un plan national loup : pas de plan national mais une « stratégie pour la conservation et la gestion du loup en Espagne » de 2004/2005 (en cours de révision), censée être déclinée par des plans de gestion élaborés par chaque communauté autonome. Plan de gestion de Castille et Léon (2016) : vise à assurer l'état de conservation favorable du loup tout en contrôlant la population d'une espèce qui génère des conflits, à défendre l'élevage extensif, établir un espace de dialogue « la table ronde du loup » et acquérir une meilleure connaissance et un suivi plus scientifique de la population de loup en Castille et Léon. Attaqué en justice par une association environnementale, il a été annulé en première instance en février 2018, puis annulé définitivement par le tribunal suprême fin décembre de la même année. Est principalement en cause la possibilité de chasser le loup au nord du Duero. Indemnisations des dégâts : Pour l'ensemble de l'Espagne, pas d'indemnisation directe par l'État central. En Castille et Léon, pas d'indemnisation directe par la communauté autonome (sauf sur des terrains gérés par l'administration comme les zones de chasse appelées « réserves de chasse » en Espagne. Possibilité pour les éleveurs de recourir à un système d'assurance, subventionné par le ministère central, avec en outre prise en charge par la communauté autonome de tout ou partie de la franchise par sinistre avec paiement sous 25 jours. Beaucoup d'éleveurs renoncent à souscrire une telle assurance (méconnaissance, complications...). Barème d'indemnisation par ovin : 120 . Le budget indemnisations est passé de 850 k en 2017 à 1,8 M en 2018 pour 4 200 têtes (essentiellement des bovins). Réflexion en cours sur la mise en place d'un fonds mutualisé alimenté par les éleveurs et partiellement abondé par l'État pour compenser les dommages.
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : ministère de la transition écologique. Cependant, depuis 1991, transfert de la plupart des compétences aux communautés autonomes, chargées, chacune en ce qui la concerne, du suivi biologique de l'espèce. Difficulté d'avoir un panorama précis à l'échelle nationale. Un recensement national, coordonné par le ministère tous les 10 ans, compile les résultats des recensements de chaque communauté autonome. Le recensement 2012/2014 est le premier réalisé de manière coordonnée sur tout le pays. Il a été basé sur l'évaluation du nombre de meutes, sur leur distribution et sur leur niveau de reproduction. En Castille et Léon : mobilisation de 700 personnes (pour près de 100 000 km²), principalement agents de terrain du gouvernement régional. Quadrillage du territoire en unités de 10X10 km. Utilisation de transects, de points d'observation, de hurlements provoqués, pièges photographiques, ainsi que tous types d'indices collectés directement ou indirectement (attaques comprises). L'organisation de l'ensemble et le traitement des données sont externalisés (entreprise « Consultora de recursos naturales » - http://www.crnaturales.com/) et supervisés par un comité scientifique régional. Depuis 2014, alimentation en continu d'une base de données (INFOLOBO), gérée par le même prestataire et accessible aux seuls agents de la région habilités à partir de fiches d'observation/récolte d'indices. De nombreuses données sont récoltées « au fil de l'eau ». En fonction de besoins ponctuels (besoin d'informations sur telle ou telle meute, suspicion de
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FICHE Castille et Léon (Espagne)
présence d'une nouvelle meute...), des recherches d'indices orientées sont effectuées. Quelques analyses génétiques ont commencé à y être incorporées. Un premier travail de recherche, sur un territoire de 4 378 km², a été récemment conduit, combinant l'utilisation d'un modèle de capture / recapture spatial et des analyses génétiques ( https://www.nature.com/articles/s41598-018-20675-9 ).
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Le mâtin d'Espagne est le mode principal de protection des troupeaux ovins en parcours libre sur des grandes surfaces de plateaux plus ou moins enforestés et embroussaillés. 100 000 mâtins sont « en service » pour toute l'Espagne. Très importante production de chiots avec échanges entre les éleveurs (brassage génétique). Il a été dit à la mission qu'au moins 1 000 chiots/an de bonne souche pourraient être exportés pour la France. Aucun appui financier n'existe au niveau national pour aider les éleveurs à adopter des moyens de protection. Des recommandations / suggestions techniques sont consultables sur le site internet du ministère de l'écologie : https://www.miteco.gob.es/es/biodiversidad/temas/conservacion-de-especies/especiessilvestres/ce-silvestres-interacciones-medidas.aspx Protection des ovins/caprins : (1) - regroupement nocturne « traditionnel » avec adjonction, autour du parc nocturne, d'une clôture électrifiée de 1,80 à 2 m de hauteur formée de 6 à 8 fils de 2 mm de diamètre de plus en plus rapprochés vers le bas ou de filets de 1,80 à 2 m de hauteur. Électrification via batterie rechargée par un panneau solaire avec 9,2 kV de voltage de sortie. Coût investissement estimé : 850 pour une exploitation moyenne ; (2) - utilisation de 2 chiens de protection par groupe de 100 animaux, soit 6 à 8 chiens pour 1 000 ovins. Coût : 500 pour l'achat d'un chien et 300 /an pour son entretien. Protection des veaux allaitants : création d'enclos de regroupement des veaux (20 à 25 veaux par demi hectare) avec (1) - clôture maillée résistante de 2 à 2,5 m de hauteur et enterrée de 0,5 à 1 m de profondeur ; (2) - électrification (contre le loup et contre les vaches) avec deux fils, l'un à l'extérieur à 0,25/0,3 m de hauteur, l'autre à l'intérieur à 0,6/0,9 cm de hauteur et électrification à 9kV ; (3)  2 systèmes d'accès (sas) sélectifs qui laissent passer les vaches, mais pas les veaux. L'enclos doit être équipé d'un abreuvoir, d'une mangeoire et d'un abri. Coût approximatif : 12 000 pour une exploitation moyenne. Protection des génisses : système similaire à celui décrit ci-dessus avec une seule porte qui peut être programmée pour s'ouvrir le matin et se fermer le soir, les génisses étant rentrées pendant la nuit. Coût approximatif : 6 000 pour une superficie de 0,5 ha abritant 15 à 20 génisses. Protection des bovins adultes : utilisation de chiens de garde de race « mâtin d'Espagne ». Nécessité de 2 à 4 chiens par groupe de 100 animaux. Les chiens peuvent être équipés de colliers (« de carlancas ») afin de les protéger contre des morsures au cou par le loup. Coût : 500 pour l'achat d'un chien et 300 /an pour son entretien.
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Chaque communauté autonome peut décider d'apporter un appui financier pour des moyens de protection, mais peu le font de manière régulière à ce jour. Ces aides, quand elles existent, sont limitées aux surcoûts liés à la présence du loup, limitées aux investissements et plafonnées. En Castille et Léon, le plan de gestion du loup prévoyait cette possibilité.
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FICHE Castille et Léon (Espagne)
Tirs de loups : Les tirs létaux sont clairement considérés comme un des moyens de prévention des dommages. La stratégie pour la conservation et la gestion du loup en Espagne de 2005 indique que la chasse (au nord du fleuve Duero) est un moyen d'atteindre les objectifs de taille et de répartition géographique de la population de loups tout en garantissant un état de conservation favorable des populations. Elle est prévue dans le cadre de plan d'aménagement cynégétique avec établissement de quotas de tirs zone par zone. Elle peut permettre une valorisation économique importante (jusqu'à 12 000 à 14 000 /loup tué). En Castille et Léon, au nord du Duero, les quotas sont limités à 10 % de la population estimée (par le nombre de meutes). Ils peuvent atteindre 18 % dans des zones qui subissent de fortes attaques (si des moyens de prévention sont mis en place) ou être diminués, voire réduits à zéro, si le bon état de conservation de l'espèce est menacé. Au sud du Duero, le tir de loups ne peut être confié qu'à des agents de la communauté autonome ou sous leur supervision stricte, et effectué conformément aux dispositions nationales pour les espèces protégées (par exemple dans le cas de dommages trop importants au bétail).
Loups en captivité et hybrides chien/loup
La question des hybrides chiens/loups et des loups en captivité n'est pas un sujet sensible en Espagne. Le pays compte peu de centres hébergeant des loups captifs. Leur ouverture est soumise à autorisation. Les loups détenus doivent être identifiés et marqués. Les chiens errants ne portant aucun signe d'identification doivent être éliminés. Le phénomène d'hybridation est considéré comme rare. Des résultats publiés en 2012 sur un échantillon de 200 individus a montré que 4 % d'entre eux étaient des hybrides. Le phénomène avait été identifié comme plus important en Andalousie où la population de loups était très réduite, mais il semble que la population lupine andalouse soit désormais éteinte. Lorsqu'il est avéré qu'un individu est un hybride, il peut être éliminé, ce qui reste cependant très théorique.
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2.4. En Allemagne, le seuil des 500 loups a été franchi avec peu de dégâts. Les ovins sont parqués en terrain le plus souvent dégagé et la clôture électrique est le moyen de protection numéro un
FICHE Saxe (Allemagne) Éléments de contexte
L'essentiel des loups se situe au Nord de l'Allemagne, récemment recolonisée alors que la population lupine avait disparu de ce pays au XX e siècle. Cette zone, relativement plane, présente un contexte d'élevage en enclos de pâturage, à l'année, jour et nuit en été, avec déplacement régulier des clôtures. La taille habituelle des troupeaux atteint quelques centaines de bêtes. Une grande rigueur est apportée à l'étanchéité des clôtures, condition nécessaire pour être indemnisé. Les chiens de défense, optionnels, sont retenus par certains éleveurs, encore peu nombreux, comme garantie supplémentaire. Avec 600 loups présents, le très faible niveau de dégâts constaté atteste de l'efficacité du système de protection mis en place. Cependant, le surcroît de travail pour les éleveurs (lié notamment au déplacement des clôtures), le danger perpétuel que fait courir le loup aux élevages au fur et à mesure que la population de loups augmente, entraînent une montée de la contestation et une demande de recours simplifié à des tirs létaux.
Carte d'identité
Superficie : 357 000 km² (Saxe : 18 400 km²) Population de loups concernée : germano-polonaise principalement (nord et est du pays) Nombre de meutes/ loups : 1ère meute en 2000. 2018 : 73 meutes + 30 couples (18 meutes + 4 couples en Saxe), soit 500 à 600 loups. Évolution : + 30 % par an. Statut de protection du loup :
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international : convention de Berne (espèce strictement protégée  annexe II), et convention de Washington (annexe II) ; UE : règlement européen 338/97 (annexe A), directive HFF : annexes II et IV, art 12 et 16 (16.1 sans le « e ») ; fédéral : loi de protection de la nature (BnatSchG, paragraphe 7, alinéa 2 et 43, paragraphe 44) ; régional : droit régional de la chasse (Annexe 2) ; l'état de conservation du loup serait atteint pour un effectif de 1 000 loups adultes (rapports UE et UICN). 1 200 000 ovins en Allemagne ; 134 000 en Saxe (+ 12 000 caprins) ; Saxe : 1 000 éleveurs amateurs + 70 professionnels (taille des troupeaux : 500600 têtes).
Nombre d'ovins et éleveurs :
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Nombre de victimes : 1ers dégâts en 2002. En 2018 :1 790 victimes (87 % ovins-caprins ; 3 % bovins) ; 232 en Saxe. Une meute en Basse-Saxe spécialisée sur des bovins adultes. Administrations en charge de la gestion : la protection des troupeaux est traitée au niveau fédéral ; la gestion du loup au niveau des Länder.
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Administrations fédérales : ministère fédéral de l'environnement (BMU) ; office fédéral pour la protection de la nature (BFN) ; ministère fédéral de l'agriculture (BMEL) ;
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FICHE Saxe (Allemagne)
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Saxe : ministère régional de l'environnement et de l'agriculture (SMUL). Ministères séparés dans certains autres Länder. centre fédéral de documentation et de conseil sur le loup (DBBW) ; centre LUPUS ; Institut Leibniz, Institut Senckenberg (génétique). absence de comité loup au niveau fédéral ; Saxe : 2 groupes de travail (éleveurs / ministère et chasseurs / protecteurs de la nature) ; Saxe : la chambre d'agriculture de Saxe conseille les éleveurs sur le loup.
Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup :
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Existence ou non d'un plan national loup :
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plan fédéral datant de 2014 ; Le Bundesrat demande en ce moment au gouvernement fédéral de transposer l'intégralité de l'article 16.1, de fournir un bilan annuel de l'état de conservation, d'introduire une prime aux animaux de pâturage et/ou d'entretien du paysage, et de mettre en place avec les Länder, un centre national de protection des troupeaux ; Saxe : 1er plan de gestion en 2009 ; révision en cours (discussion sur la régulation avec les fédérations agricoles). conditionnées, depuis 2013, au fait d'avoir mis en place une clôture électrique, avec ou sans chien (pas de tradition avec berger). 6 employés de l'État (les vétérinaires ont refusé de le faire), répartis par circonscription, réalisent les constats et dispensent des conseils. Quelques prélèvements génétiques sont pratiqués en cas de doute ; montant total des indemnisations: 0,2 M pour toute l'Allemagne (2017) ; Saxe : seulement 7 600 /an (200 par brebis ; bouc, sur facture) ; 80 % des dégâts concernent des éleveurs amateurs qui ne réclament pas d'indemnisation.
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Indemnisations des dégâts (Saxe) :
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : le DBBV rassemble et présente l'ensemble des données régionales (effectifs et dégâts). Un contrat de collaboration le lie avec plusieurs instituts (dont LUPUS, Institut SENCKENBERG, Institut de Leibzig). Structure commune pour tous les Länder, mais grande différence de moyens entre Länder. Méthode : procédure de collecte standardisée au niveau national : critères transfrontaliers SCALP (Lynx) ou WAG (Loup). N'importe qui peut collecter des indices. 5 400 indices/an (dont 3 200 photos). Carte (présence/absence) quadrillage 10 kmX10 km. Données mises à la disposition du public sur le site « dbb-wolf.de », y compris la localisation des attaques et leur nombre. Analyses génétiques : Pas de CMR pratiquée. Quelques suivis génétiques des populations, en particulier pour déterminer les liens de parenté entre meutes ou d'éventuelles hybridations loup/chien (2 cas recensés pour toute l'Allemagne, en 2003 et 2017) et déceler des mouvements migratoires. 4 000 échantillons analysés depuis 2000  résultats sous 4 à 5 semaines. Un laboratoire de référence : l'institut SENCKENBERG. Échanges récents de données génétiques avec la Pologne, le Danemark, les Pays-Bas, et l'Autriche. Actualités sur méthodes d'analyse : les élus souhaiteraient connaître un nombre de loups (impossible à estimer avec les techniques actuelles). Aucun chiffre volontairement avancé à ce sujet (uniquement, un nombre de meutes ; critère qui est jugé suffisant).
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FICHE Saxe (Allemagne)
Échanges scientifiques avec Pologne, Tchéquie, pays scandinaves, Danemark, Pays-Bas et Autriche (plutôt qu'avec les autres pays de l'arc alpin)
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Traditionnellement pas de bergers. Clôtures électriques (2,5-3,5 kV) de 90 cm (en renforcement du grillage classique, non électrifié, qui existait avant l'arrivée du loup) ; voire 120 cm dans les cas les plus critiques (si cela ne suffit pas : demande de tir). En Saxe (absence de transhumance), les animaux ne sont pas rentrés le soir en été. Beaucoup de pâturage tournant avec filets mobiles (électrifiés) déplacés au fur à mesure. Une directive fédérale fixe un minimum 3 chiens par troupeau. Dans les faits, encore peu de chiens utilisés (seulement 15 % des élevages professionnels en Saxe). Races les plus courantes : Berger des Abruzzes, Berger des Pyrénées, mâtin d'Espagne. Apprentissage et certification assurée entre bergers. Dans le Brandebourg, il existe une fédération des éleveurs de chiens de protection (pas d'aide publique à l'entretien des chiens). Un bon chien de protection peut coûter 5 000 Aides : 80 % de l'investissement par le Land (bientôt 100 % avec UE). Environ 300 000 par an d'aides en Saxe, 1,3 M pour toute l'Allemagne (2016). Tirs de loup : envisageables en théorie dès l'instant qu'un « loup à problèmes » est identifié. Tir par un chasseur agréé. Dans les faits : un seul tir en Saxe (aucun en Brandebourg). En 2018, le tir d'une meute posant des problèmes depuis 3 ans (sautant les clôtures) a été empêché suite à un recours juridique. Réflexions en cours concernant la régulation : Depuis 2 ans, demande à l'UE d'autoriser une régulation ; refus de l'UE de modifier le règlement ; solution à trouver en Allemagne (l'État doit présenter un rapport juridico-scientifique prouvant que la population est bien au minimum viable). Interventions régulatrices préventives : néant, mais souhaitée par certains à la suite de plusieurs cas de rencontre avec les loups en zone urbaine : Dresde, Brandebourg.
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2.5. En Pologne, une population de loups importante, strictement protégée, mais un élevage ovin très restreint
FICHE Pologne Éléments de contexte
La Pologne dans son ensemble a toujours vécu avec le loup, mais celui-ci était fortement persécuté jusqu'à la chute du régime communiste. Il est strictement protégé depuis 1998, ce qui a conduit à une forte progression de ses effectifs. Les dommages sont en hausse malgré la place très marginale de l'élevage ovin/caprin en Pologne. Peu de moyens de protection ont été mis en place à ce jour, dans un contexte (climat, topographie, modes d'élevage...) très proche de celui de l'Allemagne. Si la protection du loup est largement plébiscitée par la population polonaise dans son ensemble, qui en conçoit une fierté, il n'y a pas de consensus entre les ministères en charge de l'environnement et de l'agriculture, notamment sur la question d'une éventuelle régulation de l'espèce.
Carte d'identité
Superficie :312 679 km² Nombre de meutes/ loups : 2 390 (estimations 2017) répartis en 3 sous-populations : Balte (500 stable), Carpatique (1 000 stable), germano-polonaise (600 en hausse). Doublement depuis l'instauration d'une protection stricte (1998) Statut du loup : · exclu nommément de la convention Berne, en annexe V de la directive HFF ;
·
autrefois chassable, protection stricte depuis 1998, protégé par la loi du 16 avril 2004 sur la protection de la nature (État polonais responsable, financièrement, des dégâts). Art. 126 du Nature Conservation Act et Règlement du 12/10/2011 pour les mesures de protection/prévention.
Importance de l'élevage : têtes ovins / têtes bovins : · moins de 250 000 chèvres et moutons ;
·
6 millions de bovins.
Nombre de victimes : · environ 2 000 victimes indemnisées (180 k/an), ovins en majorité.
·
quelques attaques sur bovins (9 %).
En Pologne le loup ne représente que 3 à 4 % des indemnisations liées à la faune protégée (5 M/an), le principal responsable est le castor. Administrations en charge de la gestion : · direction générale de la protection de l'environnement (GDOS), sous tutelle du ministère chargé de l'environnement (les directions régionales effectuent les constats de dommages) ;
·
inspectorat général de la protection de l'environnement (GIOS) chargé du suivi des populations.
Autres acteurs impliqués dans la gestion du loup : · association (nationale mais non financée par l'État) « Loup » qui fait des comptages et fournit de l'information sur internet (cartes, statistiques de suivi, etc.). S'intéresse également à la pacification des conflits loup-homme. Existence ou non d'un plan national loup : Non
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FICHE Pologne
Indemnisation des dégâts : par l'État polonais, après constat d'expertise. À partir de 2019 l'indemnisation sera conditionnée à la présence de mesures de protection (en conformité avec la réglementation européenne sur les aides d'État). Impératif de ne pas avoir de troupeaux dehors la nuit sans chiens de protection.
Mesures de suivi - Méthodes d'analyse
La Pologne essaie de converger avec les méthodologies allemandes de suivi, mais cet objectif n'est pas atteint pour l'instant. Les recensements sont annuels depuis 1999, basés sur des indices kilométriques d'abondance (IKA), réalisés par des agents forestiers d'État ou de parcs nationaux. Ils donnent des estimations discutées au niveau des districts avec les chasseurs et les scientifiques. L'aire de répartition géographique ne pose pas de problème. L'estimation numérique en revanche, manque de fiabilité : trop haute pour les naturalistes, trop basse pour les chasseurs. Une méthode solide, utilisant la génétique et les statistiques (CMR comme en France) a été mise en place pour 2017-2020. Les premiers résultats, pas encore validés, ne sont pas disponibles début 2019. Structure en charge de la surveillance nationale des populations de loup : · Inspectorat Général de la Protection de l'Environnement (GIOS) ;
·
pas de collaboration officielle avec l'Association nationale « Loup » (indépendante) qui fait ses propres suivis. Collaboration en revanche sur le repérage de l'hybridation loup-chien.
Analyses génétiques : elles ont débuté en 2016 avec un financement de l'UE. Réalisées sur 10 zones échantillon (type forêt de Bieloweza) permettant de déterminer le nombre de loups par la technique CMR. (900 échantillons récoltés, 40 % de génotypes exploitables). Très forte incertitude relative, car les résultats sont très hétérogènes (Bieloweza : 80 génotypes différents qui donneraient une densité -peu vraisemblable- de 9 loups/100 km2). Par ailleurs, des analyses sont menées pour détecter l'hybridation (par exemple sur des portées de louveteaux). Présence assez abondante de chiens errants ensauvagés (quelques milliers) qui attaquent également les ovins.
Mesures de protection, d'effarouchement et de prévention des attaques
Une période d'apprentissage et de conseil aux éleveurs a débuté récemment, avec un apport de financement sur les investissements : électrification des clôtures (achetées et fournies par l'État), achat de chiens de protection (à 100 %). Seulement quelques centaines de milliers d'euros ont été dépensés en 2018 (pour la part nationale). La principale inquiétude concerne les dangers pour l'homme, avec de plus en plus de signalements de loups en zone habitée. Un premier cas de morsure est survenu en 2018 (depuis 1945), comme en Allemagne, ayant déclenché une très vaste campagne d'information par le ministère de l'environnement, pour rassurer (beaucoup de rumeurs se sont mises à circuler). Le loup a néanmoins une image très positive en Pologne. Tirs de loup : Seul un très petit nombre de dérogations pour le tir du loup sont délivrées chaque année par le ministère, avant tout pour des motifs de sécurité publique. 1 seul tireur autorisé (chasseur).
Année 2016 2017 2018 Nombre de dérogations 3 2 9 Nombre maximum d'individus à prélever 5 4 27 Prélèvement réalisé 1 3 8
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FICHE Pologne
Pas de recours des associations mais certaines comme le WWF demandent à participer à la prise de décision. Réflexions en cours concernant la régulation : le ministère de l'environnement ne voit pas la nécessité d'une régulation par tir, il ne croit pas que le loup puisse « exploser » en Pologne et pense qu'il s'auto-régulera de lui-même par rapport aux proies sauvages disponibles (il fait très peu de tort pour l'instant à l'élevage, 4 % de son régime alimentaire). Le ministère de l'agriculture et les représentants agricoles, sont d'un tout autre avis et en conflit avec lui sur cette question. Les chasseurs ont comme objectif le retour du loup dans les espèces chassables.
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3. Liste des personnes rencontrées
(En cas d'entretiens multiples n'est mentionnée que la première date de rencontre ; + Participation à la réunion du groupe national loup et activités d'élevage du 24 septembre 2018 ; * entretien téléphonique ou par visioconférence) La mission remercie tout particulièrement les conseillers agricoles des ambassades de France en Allemagne et en Pologne pour leur appui (notes de synthèse sur le sujet et aide à l'identification de contacts dans ces deux pays).
Pays
Nom
Prénom
Institution
Gfonction
Date entretien
Allemagne Adams Allemagne Blanke Allemagne Blazer Allemagne Brizay* Allemagne Gehrmann Allemagne Gröger Allemagne Keiser Allemagne Kieslich Allemagne Kittel Allemagne Klose Allemagne Leinfelder Allemagne Reinhardt Allemagne Tankert Allemagne Tiesmeyer Allemagne Uhlemann Allemagne Walther Allemagne Wiedmer Espagne AgustÃn Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne AymerichHuyghues Ballesteros Cornejo Barreñada Sanz Doadrio Villarejo GarcÃa DomÃnguez GonzálezQuirós Hernández Palacios López-Bao Losada Palenzuela Muñoz
Gerhard Philipp Sandra Arnaud Claudia Thomas Imke Frank Melanie Siegfried Rasso Ilka Bern Annika Manfred Regina Uwe Noriega Miguel José Manuel Enrique José Ignacio Francisco Pablo Orencio
Ministère fédéral de l'environnement, de la protection de la nature, de la construction et de la sûreté nucléaire Ministère fédéral de l'environnement, de la protection de la nature, de la construction et de la sûreté nucléaire Agence fédérale pour la protection de la nature Ambassade de France en Allemagne Ministère fédéral de l'alimentation et de l'agriculture Ministère régional de Saxe pour l'agriculture et l'environnement
Chef d'unité N13  protection des espèces Unité protection des espèces Cheffe du service II 1.1  protection des espèces zoologiques Conseiller agricole Directrice  diversité biologique et brevets biologiques Chef de la division des aires protégées, de la protection des biotopes et des espèces Département juridique
14/01/19 14/01/19 14/01/19 20/12/19 14/01/19 16/01/19 16/01/19 15/01/19 16/01/19 15/01/19 14/01/19 16/01/19 16/01/19 14/01/19 15/01/19 15/01/19 15/01/19 13/12/18 11/12/18 14/12/18 12/12/18 11/12/18 11/12/18 12/12/18 12/12/18 12/12/18 11/12/18 13/12/18
Ministère régional de Saxe pour l'agriculture et l'environnement Exploitation ovine (Saxe) Eleveur ovin Ministère régional de Saxe pour Département de la protection des l'agriculture et l'environnement espèces Exploitation ovine (Saxe) Eleveur ovin Ministère fédéral de l'environnement, de Unité protection des espèces  la protection de la nature, de la membre du groupe « Large construction et de la sûreté nucléaire Carnivore Initiative » Institut LUPUS pour le suivi et la Co-directrice et biologiste recherche sur le loup en Allemagne Ministère régional de Saxe pour Responsable de la protection des l'agriculture et l'environnement espèces Agence fédérale pour la protection de la Génétique et biologie évolutive nature Association paysanne de Saxe Directeur général Association des éleveurs ovins de Saxe Référente élevage et gardiennage Exploitation ovine (Saxe) Conseil régional (Junta) de Castille et Léon Ministerio para la transición ecológica Eleveur ovin Responsable du loup
Sudirector general de biodiversidad y medio natural GanaderÃa Pascualalin S.C. Exploitation Eleveur ovins ovine (Castille et Léon) Conseil régional (Junta) de Castille et Membre du service de la chasse et Léon de la pêche Museo Nacional de ciencias naturales Sous-directeur Ministerio para la transición ecológica Principauté des Asturies Principado de Asturias Asistencia técnica  Subdirección general de biodiversidad y medio natural Biologiste Chef du service de la chasse et la pêche Chercheur en biologie de la conservation Asistencia técnica  Subdirección general de biodiversidad y medio natural Sous-directeur du milieu naturel
José Vincente Universdad de Oviedo Sofia Javier Ministerio para la transición ecológica Conseil régional (Junta) de Castille et Léon
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Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne Espagne France France
Muñoz Igualda Jaime Palacios MarÃa Jesus Palacios Albert Jesus Puente Oscar Cabrerizo Rodriguez Arturo Javier Silos Rojas Hidalgo Eva Santos Redin ArnautouPages Arpin Pablo Elisabeth Isabelle
Ministerio para la transición ecológica
France France France France France France France France France France France
Barjol Barsacq Bigot Borelli Bouffartigue Bouillon Bové Cosme Dantin* Daumergue Delduc
Jean-Louis Elizabeth Cécile Jean-Marc Bertrand Stéphane José Maria Michel Nathan Paul
Asistencia técnica  Subdirección general de biodiversidad y medio natural Conseil régional (Junta) d'Extremadura Directora de Infonatur Conseil régional (Junta) de Castille et Directeur du centre du loup Léon ibérique de Castille et Léon GanadrÃa Puente  Exploitation bovine Eleveur bovins (Castille et Léon) Agence pour l'environnement et l'eau Plan de recuperación del lobo en d'Andalousie AndalucÃa Agence pour l'environnement et l'eau Life Lobo AndalucÃa d'Andalousie Conseil régional (Junta) de Castille et Service territorial de Léon l'environnement de Zamorra DDCSPP Lozère Technicienne santé et protection animales IRSTEA Responsable de l'équipe BIOSES au sein du laboratoire écosystèmes et sociétés en montagne Ministère de l'agriculture et de Membre permanent CGAAER l'alimentation Préfecture Auvergne-Rhône-Alpes Conseillère diplomatique Préfecture des Hautes-Alpes Préfète IPRA/Fondation Jean-Marc Landry Co-responsable du projet CanOvis Races de France Préfecture Auvergne-Rhône-Alpes Parlement européen Minsitère de l'agriculture et de l'alimentation Parlement européen IRSTEA MTES Technicienne Préfet coordonnateur du plan national d'action sur le loup Député Cheffe du bureau coordination du développement rural Député Assistant-ingénieur de recherche au laboratoire écosystèmes et sociétés en montagne Directeur général de l'aménagement, du logement et de la nature Directeur Préfet en mission auprès du préfet de région Unité prédateurs et animaux déprédateurs Chef de projets Lieutenant de louveterie Directeur de cabinet Directeur adjoint Chargée de mission biodiversité Président Référente nationale protection des troupeaux et pastoralisme Chef de la mission coordination des expertises collectives, des enseignements et des publications de l'UMS Patrimoine naturel Chargé de mission faune Chargé de mission nationale loup, lynx Président de la commission chiens de protection
11/12/18 12/12/18 13/12/18 14/12/18 12/12/18 12/12/18 12/12/18 06/11/18 03/10/18
27/02/19 01/10/18 02/10/18 28/11/18 28/02/19 01/10/18 07/11/18 21/03/19 10/10/18 03/10/18 05/10/18
France France France France France France France France France France France
Dimanche Doublet Duchamp Ducreux Favre Félix Garde Goussot Grossan Guillon Haffner
Marc Xavier Christophe Barbara René Denis Laurent Anne Christian Véronique Patrick
Centre d'études et de réalisations pastorales Alpes-Méditerranée Préfecture Auvergne-Rhône-Alpes ONCFS Institut de l'élevage DREAL Auvergne-Rhône-Alpes Centre d'études et de réalisations pastorales Alpes-Méditerranée Parc naturel régional du Queyras Parc naturel régional du Queyras DRAF Auvergne-Rhône-Alpes MNHN-AFB
28/02/19 01/10/18 02/10/18 19/12/18 28/02/19 21/11/18 28/02/19 02/10/18 02/10/18 21/11/18 12/09/18
France France France
Imberdis Jean Kerihuel
Ludovic Nicolas Jean Paul
Parc national des Ecrins ONCFS Centrale canine
02/10/18 06/09/18 28/02/19
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France France France France France France France France France France France France France France France France France France
Lachenal Lacouture Larbouret Legile Locqueville Macchi Marchive Massucci Matera Mathieu Metral Meyrueix Missant Morizot Noars Olivier Papouin Perret
Yves Anne Patricia Anne Bruno Sylvain Ginette Mario Joseph Jean-Marc Mathieu Xavier Fleur-Marie Baptiste Françoise Thierry Matthieu Michel
Institut de l'élevage
Ministère de l'agriculture et de l'alimentation Parc national des Cévennes DRAF Auvergne-Rhône-Alpes Parc à loups du Gévaudan Centrale canine Parc à loups du Gévaudan DREAL Auvergne-Rhône-Alpes DREAL DDCSPP Lozère Société centrale canine Université Aix-Marseille DREAL Auvergne-Rhône-Alpes Préfecture Lozère MTES MTES
Référent national chiens de protection (et agriculteur) Assistante parlementaire Cheffe du bureau changement climatique et biodiversité Directrice Directeur adjoint Capacitaire loups Médecin généraliste retraitée Membre de la commission chiens de protection Directeur Secrétaire technique loup Chef de l'unité loup Adjoint au chef de service santé et protection animales-environnement Cheffe de projets santé et ressources génétiques Enseignant-chercheur Directrice Secrétaire général Sous-directeur de la protection et de la restauration des écosystèmes terrestres Chargé de mission auprès du sous-directeur de la protection et de la restauration des écosystèmes terrestres Chef de la brigade mobile d'intervention Directeur Délégué régional AuvergneRhône-Alpes Capacitaire cerfs Président Chef de mission (biodiversité et services écosystémiques) au CGDD Éleveur Directrice Directeur de la recherche et de l'expertise Directeur adjoint Éleveur Directeur de l'expertise et de l'UMS Patrimoine naturel Eleveurs Directeur Directeur de recherche Étudiante en Master 1, écologie et biologie des populations Directeur général Directeur Directeur adjoint Chargée de mission pour l'ours, le loup et le lynx
19/12/18 07/11/18 21/03/19 07/11/18 21/11/18 06/11/18 07/11/18 28/02/19 06/11/18 21/11/18 01/10/18 06/11/18 28/02/19 28/11/18 21/11/18 06/11/18 11/09/18 17/09/18
France France France France France France France France France France France France France France France France France France France France
Pisi Poirson Poyet
Christophe Jean-Michel Patrick
ONCFS DDCSPP Lozère ONCFS Parc à loups du Gévaudan ANTAGENE MTES
01/10/18 06/11/18 06/09/18 06/11/18 24/09/18 12/09/18 07/11/18 02/10/18 06/09/18 23/10/18 07/11/18 12/09/18 19/12/18 01/10/18 19/12/18 11/09/18 06/09/18 28/02/19 01/10/18 01/08/18
Prucca-Macchi Audrey Queney Rayé Reversat Rivat Rousset Scheyer Scoquart Siblet Sibuet Sinoir Taberlet Taysse Thibault Varlet Vauterin Vebr Guillaume Gilles Laurent Valérie Guillaume
Parc naturel régional du Queyras ONCFS
Laurent Parc national du Mercantour Jean-Paul Jean-Philippe MNHN-AFB Mylène et Nicolas Michel Pierre Laura Olivier André Patrick Marianne Bergerie des Moyes DRAAF Laboratoire d'écologie Alpine Université de Poitiers ONCFS Centrale canine DREAL MTES
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France France France France France France Italie Italie Italie Italie Italie Italie Italie Pologne Pologne Pologne Pologne Pologne Pologne Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse Suisse/ France
Vedel Vidal Viret Wils-Morel Wurteisen Zinsstag Baracco Borgna Canavese Cerra Marucco Menzano Salsatto Ciszak Ginalski Le Gal Lieder Romanowski
Sylvain Isabelle Christophe Christine Fabrice Georges Michele Irene Giuseppe Marina Francesca Ariana Paolo Bozena Andrzej MarieChristine Ewa Jakub
Direction départementale des territoires Directeur Parc national des Ecrins Chef du service aménagement et ingénierie financière Parc National du Mercantour Directeur Préfecture Lozère Préfète Parc naturel régional du Queyras Technicien écopastoralisme Parc national des Cévennes Président de la commission agricole Eleveur ovin Parco Naturale Alpi Marittime Responsable communication projet LIFE Loup Parco Naturale Alpi Marittime Directeur Région Piémont Secteur biodiversité et aires naturelles Parco Naturale Alpi Marittime Responsable projet LIFE loup Vétérinaire Parco Naturale Alpi Marittime Président Ambassade de France en Pologne Attachés agricole Direction générale pour la protection de Directeur adjoint du département l'environnement de la gestion de la nature Ambassade de France en Pologne Conseillère agricole Pologne, Hongrie, Estonie, Lettonie, Lituanie Parlement polonais Direction générale pour la protection de l'environnement Inspection générale de la protection de l'environnement Office fédéral de l'environnement Office fédéral de l'environnement Parc animalier Juraparc  Vallorbe Université de Lausanne KORA KORA AGRIDEA Office fédéral de l'environnement Association suisse des chiens de protection des troupeaux KORA IPRA/Fondation Jean-Marc Landry Députée Chef d'unité au département de la gestion de la nature Spécialiste pour le suivi des ressources naturelles Suppléant du chef de la section faune sauvage et biodiversité en forêt Section faune sauvage et biodiversité en forêt Responsable du parc Directeur du laboratoire de biologie de la conservation Suivi des grands carnivores Suivi des grands carnivores Chef de groupe protection des troupeaux et agriculture de montagne Section faune sauvage et biodiversité en forêt Président Suivi des grands carnivores Directeur et directeur de recherches
02/10/18 02/10/18 23/10/18 06/11/18 02/10/18 07/11/18 22/11/18 23/11/18 23/11/18 22/11/18 23/11/18 22/11/18 22/11/18 17/01/19 17/01/19 17/01/19 17/01/19 17/01/19 17/01/19 25/10/18 25/10/18 25/10/18 24/10/18 24/10/18 24/10/18 28/11/18 25/10/18 25/10/18 24/10/18 28/11/18
Zajczkowska Monika Baumann Bourquin Coelho Fumagalli Kunz Manz Mettler Pewsner Pfister Zimmermann Landry Martin Nicolas Paulo Luca Florin Ralph Daniel Mirjam Ueli Fridolin Jean-Marc
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4. Lettre des commissaires européens à l'environnement et à l'agriculture en date du 11 février 2019
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5. Éléments de méthode sur l'évaluation de la viabilité de la population de loups en France
Lors de la préparation du Plan National Loup (PNL) 2018-2023, une expertise (mentionnée en introduction de ce rapport) a été commandée au MNHN et à l'ONCFS sur ce point précis. Or, à cette époque, après deux années de stabilisation de l'effectif (2014-2016), l'ONCFS indiquait qu'il n'était pas possible sur le plan statistique de distinguer lequel des deux modèles utilisables (« à croissance freinée94 » ou « à croissance exponentielle95 ») décrivait le mieux l'évolution observée des effectifs. Or, le calcul de l'effectif minimum viable est très dépendant de ce modèle. Ainsi en France, le taux de croissance modélisé sur la période 1995-2016 sous un régime considéré « exponentiel » correspondrait à un effectif plancher d'environ 50 loups pour respecter un risque d'extinction de 10 % sur un horizon de 100 ans. Le modèle « exponentiel » correspond à une dynamique avec peu de contraintes de prélèvements et surtout une poursuite de colonisation de l'espèce supposée identique à celle observée dans les Alpes. Par contre, si on modélise la dynamique observée sous un régime de « croissance freinée » (tenant ainsi compte de la stabilisation des effectifs entre 2014 et 2016), l'effectif plancher de viabilité est de 100 à 125 individus pour un même seuil de risque. Un taux de croissance correspondant à une population stable, donnerait quant à lui un seuil minimum de 400 à 500 animaux pour éviter un risque d'extinction de 10 % à l'horizon de 100 ans.
94 95
5 % de croissance par an. 12 % de croissance par an.
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6. Glossaire des sigles et acronymes
Acronyme ADN APN ASP CERPAM CGAAER CGEDD CITES CIVAM CMR CNRS DBBW DDCSPP DDT DEB DGALN DGER DRAAF DREAL ECF EMR HFF ICAD IDELE IKA ISPRA LCIE LECA LOOF MAA MNHN MTES OFEV ONCFS ONF OPA PAC PDR PNA UICN UTH WISO ZDP ZPP Signification Acide désoxyribonucléique Association de protection de la nature Agence de services et de paiement Centre d'études et de réalisations pastorales alpes méditerranée Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux Conseil général de l'environnement et du développement durable Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction Centre d'initiative pour valoriser l'agriculture et le milieu rural Capture, marquage, recapture Centre national de la recherche scientifique Centre fédéral de documentation et de conseil sur le loup Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations Direction départementale des territoires Direction de l'eau et de la biodiversité Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature Direction générale de l'enseignement et de la recherche Direction départementale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Etat de conservation favorable Effectif minimum retenu Habitats, faune, flore (directive) Identification des carnivores domestiques Institut de l'élevage Indice kilométrique d'abondance Institut supérieur pour la protection et la recherche environnementale Large carnivore initiative for Europe Laboratoire d'écologie alpine Livre officiel des origines françaises Ministère de l'agriculture et de l'alimentation Museum national d'histoire naturelle Ministère de la transition écologique et solidaire Office fédéral de l'environnement Office national de la chasse et de la faune sauvage Office national des forêts Organisation professionnelle agricole Politique agricole commune Programme de développement rural Plan national d'action Union internationale pour la conservation de la nature Unité de travail humain Grands carnivores, ongulés sauvages et sociétés (plateforme) Zone difficilement protégeable Zone de présence permanente
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Site internet du CGEDD : « Les derniers rapports »
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INVALIDE)