Extension du classement du site de la vallée de la Vézère. Communes : Audrix, Le Bugue, Campagne, Les Eyzies de Tayac Sireuil, Fleurac, Manaurie, Marquay, Meyrals, Montignac, Peyzac le Moustier, Plazac, Rouffignac Saint Cernin, Saint André d'Allas, Saint Cirq, Saint Léon sur Vézère, Savignac de Miremont, Sergeac, Thonac, Tursac, Valojoulx (Dordogne). Rapport à la commission supérieure des sites, perspectives et paysages. Séance du 7 février 2014

CREUCHET, Bertrand

Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">La Vallée de la Vézère, en Dordogne, recèle un patrimoine archéologique exceptionnel et abrite notamment la grotte de Lascaux. Elle est surnommée la vallée de l'Homme de Cro-Magnon. Le rapport propose d'étendre le classement initial de 1.300 hectares à 11.500 hectares, permettant ainsi une protection renforcée des abords et de la surface des cavités, mais également une reconnaissance de la valeur du paysage.</div>
Editeur
CGEDD
Descripteur Urbamet
fonctionnement des institutions ; paysage ; histoire
Descripteur écoplanete
site classé ; commission supérieure des sites ; patrimoine mondial
Thème
Environnement - Paysage
Texte intégral
MINISTÈRE DE L'ÉCOLOGIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'ÉNERGIE Conseil général de l'Environnement et du Développement durable 3ème Section Aménagement durable des Territoires Collège paysage, espaces protégés et patrimoine Bertrand Creuchet Inspecteur général de l'administration du développement durable Affaire suivie par : Bertrand Creuchet bertrand.creuchet@developpement-durable.gouv.fr Tél. 03 80 29 44 62 ­ Fax : 03 80 29 42 57 CGEDD n° 008940-02 Paris, le 7 février 2014 RAPPORT A LA COMMISSION SUPERIEURE DES SITES PERSPECTIVES ET PAYSAGES SEANCE DU 7 FEVRIER 2014 EXTENSION DU CLASSEMENT DU SITE DE LA VALLEE DE LA VEZERE Communes : Audrix, Le Bugue, Campagne, Les Eyzies de Tayac Sireuil, Fleurac, Manaurie, Marquay, Meyrals, Montignac, Peyzac le Moustier, Plazac, Rouffignac Saint Cernin, Saint André d'Allas, Saint Cirq, Saint Léon sur Vézère, Savignac de Miremont, Sergeac, Thonac, Tursac, Valojoulx (DORDOGNE) La vallée de la Vézère accueille des hommes depuis longtemps : le gisement de la Micoque, au coeur de la vallée, a témoigné d'une installation d'homo erectus dès 400 000 ans environ avant notre ère. Ces hommes ayant disparu vers -30 000 ans, près de 13 000 générations s'y seraient succédé avant l'installation de nos ancêtres (homo sapiens) représentés là par l'homme de Cromagnon. Pour ceux-ci l'installation fut plus marquée puisqu'en complément de leurs lieux d'habitat dans des abris ou sous les porches naturels des falaises, ils firent des peintures et des gravures au fond des grottes plus profondes : sans que nous sachions encore très bien le sens de ces représentations, les lieux concernés avaient sans doute la vocation d'une sorte de sanctuaire. Beaucoup plus tard des chapelles, puis des châteaux témoignent encore de l'attrait de cette vallée pour des sociétés successives. Aujourd'hui encore, la pression d'urbanisation reste importante que ce soit pour des habitations ou des résidences secondaires et les maisons neuves sont nombreuses. Ainsi depuis les chasseurs-cueilleurs jusqu'à aujourd'hui, la vallée a toujours exercé un attrait particulier sur les sociétés humaines... Cela doit être dû à un climat particulier puisqu'alors que la France a connu des périodes glaciaires des hommes y ont survécu. Le milieu naturel y était riche puisque le gibier et les poissons devaient y être abondants et la vallée devait également être fertile pour avoir permis l'installation de l'agriculture et le développement de l'élevage. www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr Tour Pascal B ­ 92055 La Défense cedex ­ Tél : 33 (0)1 40 81 64 96 ­ Fax : 33 (0)1 40 81 23 95 Les installations humaines de toutes ces époques ont laissé de multiples traces, ruines et monuments qui se superposent et sont enchevêtrés. Dans le périmètre proposé au classement et à l'inscription, 46 monuments sont classés (monument historique), 93 zones archéologiques ont été recensées, neuf sites classés existent, des espaces ont été répertoriés pour leur intérêt faunistique ou floristique. En 1979, quinze gisements archéologiques ont été inscrits par l'UNESCO : mais de la même façon qu'on ne protège plus une espèce sans protéger sa zone d'habitat, il vous est proposé de valider une protection globale de l'espace de la vallée de la Vézère qui a accueilli toutes ces installations humaines successives en raison de ses qualités. Le paysage naturel peut être aussi qualifié de pittoresque : les vallées, sinueuses, tantôt étroites tantôt s'élargissant, bordées de falaises, forment un chapelet d'unités paysagères relativement diversifiées mais la Vézère et les Beunes avec leurs ripisylves assurent la continuité paysagère qui fédère le paysage en un site unique. Des plantations de peupliers sont dans certains lieux très présentes et leur verticalité ferme alors un paysage plutôt ouvert d'un bord à l'autre des vallées. Les falaises sont elles peu visibles, tant elles sont colonisées par la végétation, faute de l'entretien nécessaire : l'opération ponctuelle de dégagement d'une portion de rocher à l'entrée des Eyzies est édifiante sur le paysage qui dort derrière les murs végétaux. L'implantation des constructions anciennes et des villages est aussi une richesse du site : tous les cas de figure sont présents, du fond de vallée jusqu'aux crêtes en passant par les implantations dans les pentes. Dans les constructions anciennes même les plus populaires, les signes de traitements savants -encadrement, corniches, symétrie- sont nombreux. La qualité architecturale des constructions récentes est très moyenne mais l'homogénéité des matériaux employés en particulier pour les toitures évite les dissonances trop voyantes. Il faut en outre être conscient de la tradition d'implantations dispersées, qui se prolonge pour les constructions récentes, et ne permet pas une discrimination facile entre des espaces naturels et des ensembles bâtis. D'un simple examen visuel, on mesure l'essoufflement des agriculteurs dans l'utilisation de leur terre : les friches et le manque d'entretien de certaines parcelles sont visibles et la végétation profite d'un climat favorable pour coloniser à sa guise tout ce que les hommes lui abandonnent... La réponse en terme de protection réglementaire se décompose en deux zones distinctes : l'une au titre d'un projet de classement, l'autre pour une inscription. Les deux périmètres représentent bien la logique de ces vallées accueillantes, la réponse réglementaire est elle dédoublée suivant la nature des espaces à protéger. La proposition de classement : Les espaces proposés pour le classement sont les espaces naturels ou cultivés du fond de vallée, auxquels s'ajoutent les falaises et leur rebord. Quelques constructions isolées et stables dans leur usage ont été insérées dans le périmètre chaque fois que la protection n'est pas susceptible de gêner un développement normal mais les hameaux et les espaces bâtis importants sont détourés. Les vallées adjacentes sont prises en compte dans le classement et en particulier la vallée des Beunes dont la valeur écologique des zones humides se double d'une grande qualité paysagère. De l'examen fait sur place, le périmètre à classer adopté présente partout un caractère naturel dominant, que ce soit des pâturages, des forêts, des cours d'eau, ou des landes et partout le caractère pittoresque peut être évoqué même si c'est l'histoire ou les histoires successives qui constituent le fondement principal de la protection. Ainsi alors qu'au-delà du périmètre proposé le caractère pittoresque ou la valeur écologique auraient pu être évoqués, il a été retenu de ne pas étendre le périmètre au-delà des lieux marqués par l'histoire. Pour moi l'ensemble des séquences de cette portion de la vallée constitue bien un site continu dont les rivières sont le lien qui relie un ensemble d'espaces avec des vues longitudinales permettant d'apprécier le lit de la Vézère sur plusieurs kilomètres et des lieux plus secrets dans les vallées adjacentes. Les deux espaces disjoints dans le projet de site classé font partie du même projet de classement au titre des mêmes valeurs mais les espaces bâtis qui les isolent du périmètre principal ne pourraient relever du classement. www.developpement-durable.gouv.fr 2 Six campings existants sont insérés dans le périmètre proposé au classement : pour les deux les plus importants, leur situation en zone inondable a conduit à les inscrire dans le site classé, une extension de leur capacité d'accueil n'étant pas possible en tout état de cause. La proposition d'inscription : Les espaces proposés pour une inscription sont de plusieurs natures : leur délimitation est d'abord l'enveloppe des lieux d'où l'on a des vues sur la vallée et les falaises. Ce sont des villages, des hameaux ou des fermes isolées pour lesquels le classement représenterait une contrainte trop lourde : il est important de faciliter le maintien de l'agriculture et de l'élevage qui sont très utiles à l'entretien des paysages de la Vézère. Pour les 35 monuments inclus dans le périmètre proposé à l'inscription, leurs abords sont aussi inclus et le site inscrit constitue une redéfinition du périmètre des abords, adapté au contexte de chacun (en l'attente de PPM éventuel si ce dispositif est maintenu). Enfin les périmètres identifiés comme périmètres de protection archéologique sont aussi inclus. Le site inscrit ainsi délimité représente une protection simplifiée qui absorbe différents outils juridiques et simplifie la lecture du citoyen ; le choix d'une inscription au titre des sites semble en l'état actuel de la législation un outil fédérateur approprié, même si ses effets réglementaires sont très limités. Dans le cadre d'une évolution de cet outil qui serait adopté par le législateur, il conviendrait de remplacer ce site inscrit par une protection équivalente ou de le conserver en l'état si cette possibilité est offerte. Après plus de dix ans d'études et de concertation, j'ai relevé l'attachement et le consensus des élus locaux pour cette réponse à laquelle ils avaient abouti. La procédure : L'enquête publique et la réunion de la commission départementale ont fait apparaître dans quelques communes des observations sur le périmètre proposé : les demandes ont porté sur des ajouts comme sur des retraits mais elles témoignaient en premier lieu de l'incompréhension de la substitution des périmètres de protection existants pour les monuments historiques par le site inscrit. Les communes se sont prononcées majoritairement en faveur du classement et les observations des 5 communes défavorables (à l'inscription comme au classement) évoquent un manque d'information et le rejet d'une nouvelle protection. J'ai relevé que les réunions d'information ont été très nombreuses depuis dix ans et je ressens ces observations davantage comme des péripéties internes à ces communes et non comme un réel manque d'information. Je souligne également que les projets de protection ont donné lieu à une longue concertation avec la profession agricole, avec la chambre d'agriculture qui a réalisé un diagnostic de la situation et auprès des intéressés (90) : cette concertation a abouti à un accord des agriculteurs sur les mesures et le périmètre. Un cahier d'orientations de gestion du site classé et du site inscrit a été élaboré. Ce document valide le résultat des négociations et il a reçu l'aval des partenaires : c'est le témoignage de l'aboutissement des longues concertations et c'est un outil très utile pour la gestion à venir. Les sites proposés s'inscrivent dans la perspective à moyen terme de soumettre à l'UNESCO un dossier modificatif pour l'inscription plus large et plus cohérente d'un « bien » sur le périmètre qui serait classé, le site inscrit pouvant alors valoir « zone tampon » de ce bien. Pour avoir participé à une évaluation de la présentation des quinze sites inscrits en 79 comme « patrimoine mondial » je ne peux que confirmer que leur délimitation étriquée est indigne et leur présentation indigente : il me paraît donc justifié que la France répare cette situation, en premier lieu en affichant une protection à la hauteur des enjeux patrimoniaux dans le droit français et non plus une protection qui cerne chacun des sites préhistoriques au plus près des gisements découverts. Conclusion: Ayant été associé très à l'amont sur ce projet, sur les principes retenus pour définir les limites des protections, je suis favorable au projet présenté et je propose à votre commission de donner aussi un avis favorable au classement et à l'inscription des sites proposés : la vallée de la Vézère a montré qu'elle était de tous temps un lieu d'accueil privilégié pour les sociétés humaines et il convient, tout en reconnaissant son occupation actuelle, de ne pas altérer ses qualités et de préserver le cadre de vie de nos très lointains et proches ancêtres, même de ceux dont nous ne serions pas les descendants. www.developpement-durable.gouv.fr 3 Je tiens à relever sur ce dossier le travail considérable mené depuis 8 ans par Muriel Kazmierczak, tant sur le terrain pour délimiter le site qu'en réunion avec les élus ou les agriculteurs : c'est un site particulièrement complexe sur le plan physique et économique, le montage du dossier a été obligatoirement très lourd et les concertations qui l'ont entouré ont été parfois délicates. Pour avoir au cours de trois visites réparties dans le temps, suivi la progression de son travail et examiné sur le terrain la définition qu'elle a proposée du périmètre, j'ai pu mesurer quel a été son investissement. Bertrand Creuchet L'abri sous la falaise, où l'homme de Cromagnon a été trouvé, l'un des 15 sites inscrits par l'UNESCO. www.developpement-durable.gouv.fr 4

puce  Accés à la notice sur le site du portail documentaire du Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires

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