Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores

AVEZARD, Cécile ; LEBLANC, Sylvain ; ROSTAGNAT, Michel

Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
Auteur secondaire
Résumé
<p style="margin-bottom: 0cm; font-weight: normal; text-align: justify;"><font color="#000000"><font size="2" style="font-size: 10pt"><span style="background: transparent">Le rapport traite du bruit dans l'environnement, les transports, les chantiers ou les installations classées, et de la façon de s'en protéger par des politiques du logement et de l'urbanisme. La politique de lutte contre le bruit dans l'environnement relève historiquement de l'État, les collectivités sont concernées depuis les années 2000. Les interventions de l'État sont coordonnées au sein du « plan bruit » porté par l'Ademe. Le bilan de ce plan est mitigé, les crédits ayant été difficiles à mobiliser. La lutte contre les nuisances sonores du transport aérien bénéficie d'un dispositif complet de financement, de prévention et de contrôle. En matière de mesure et de cartographie du bruit, la coexistence de concepts d'origine communautaire et nationale crée la confusion et affaiblit la démarche de communication. La politique de traitement des bâtiments sur-exposés aux transports terrestres est dans une impasse. Les moyens budgétaires affectés sont sans commune mesure avec les besoins. Selon le principe « pollueur - payeur », un mode de financement pérenne doit pouvoir être dégagé. En matière de prévention, il est proposé de développer un label et de promouvoir les revêtements routiers peu bruyants, de sensibiliser les conducteurs, de mettre en place un dispositif de sanction, et de programmer les investissements pour le remplacement des systèmes de freinage des wagons de fret. En matière d'urbanisme, la mission recommande de développer un « volet bruit » dans les plans locaux d'urbanisme. En matière de règles de construction, la mission suggère de concevoir un nouveau dispositif de contrôle pour assurer à l'habitant un logement neuf conforme. La mission recommande que la plus grande attention soit portée à la valorisation et à la diffusion des résultats de la recherche et de l'innovation.</span></font></font>
Editeur
CGEDD
Descripteur Urbamet
bruit ; lutte anti-bruit ; prospective ; politique publique ; politique de l'environnement ; qualité des constructions ; coût ; financement
Descripteur écoplanete
lutte contre le bruit ; plan d'exposition au bruit ; bruit urbain ; bruit routier ; bruit aérien ; bruit industriel ; effet sur la santé ; santé publique
Thème
Environnement - Paysage ; Ressources - Nuisances
Texte intégral
MINISTÈRE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET SOLIDAIRE Réffléxion prospéctivé sur uné politiqué dé réfduction dés nuisancés sonorés Rapport n° 011057-01 établi par Cécile AVEZARD (coordonnatrice), Sylvain LEBLANC et Michel ROSTAGNAT Octobre 2017 Les auteurs attestent qu'aucun des éléments de leurs activités passées ou présentes n'a affecté leur impartialité dans la rédaction de ce rapport. Sommaire Résumé.....................................................................................................................5 Liste des recommandations...................................................................................7 Introduction..............................................................................................................9 1. Le bruit, une problématique de santé et d'environnement............................11 1.1. Le bruit, une problématique santé-environnement incontestable et une nuisance majeure pour les Français...............................................................................................11 1.1.1. La mesure du bruit.........................................................................................11 1.1.2. Les effets sanitaires extra auditifs du bruit.....................................................12 1.1.3. Le bruit, une nuisance de première importance pour les Français.................13 1.2. Pour la première fois, une récente étude montre que le coût social du bruit en France est important.................................................................................................................... 14 1.2.1. La méthodologie de l'étude............................................................................15 1.2.2. Le coût social du bruit en milieu professionnel et scolaire et du bruit de voisinage : une approche difficile car peu documentée............................................17 1.2.3. Le coût social du bruit des transports : une estimation plausible et minimale.19 1.3. Le bruit dans l'environnement : une politique publique aux multiples acteurs...........21 1.3.1. Les textes fondateurs.....................................................................................21 1.3.2. Les acteurs publics impliqués dans la politique de lutte contre le bruit dans l'environnement : la montée en puissance des collectivités territoriales...................22 1.3.3. Les interventions de l'État : le plan bruit de l'Ademe......................................24 1.3.4. Le bruit dans le plan national Santé Environnement......................................26 2. Le bruit des transports : une politique véritablement intégrée dans le secteur aérien, beaucoup moins dans les secteurs routier et ferroviaire.........27 2.1. La politique de protection et de prévention des nuisances sonores du transport aérien : un système organisé, financé et contrôlé............................................................28 2.1.1. La prévention : un ensemble complet de contraintes d'urbanisme, de gestion du trafic et de conception des avions.......................................................................28 2.1.2. La recherche : des programmes soutenus.....................................................29 2.2. Le bruit des transports terrestres : un cadre commun à la route et au rail................30 2.2.1. La cartographie des zones de bruit: un exercice pédagogique compliqué par les divergences d'approche réglementaire entre l'Europe et la France....................30 2.2.2. Le traitement des points noirs du bruit...........................................................31 2.3. Le bruit du transport ferroviaire : une politique prise en tenaille entre les difficultés économiques du secteur et la pression européenne........................................................31 2.3.1. La protection : des moyens très limités pour le traitement des points noirs....31 2.3.2. La prévention : une palette de solutions relativement large, en dépit du manque de soutien de la réglementation de l'urbanisme.........................................32 2.3.3. La recherche : orientations actuelles..............................................................34 2.4. Le bruit des transports routiers : une philosophie à repenser en intégrant l'ensemble des leviers....................................................................................................................... 34 2.4.1. La protection : la politique de résorption des points noirs du bruit est dans une impasse................................................................................................................... 34 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 1/80 2.4.2. Les interventions sur le véhicule pour réduire le bruit.....................................35 2.4.3. Le revêtement routier : d'importantes marges de progrès possibles..............36 2.4.4. Le comportement du conducteur : bruit, vitesse et sécurité routière..............39 2.4.5. La recherche : les orientations actuelles........................................................40 2.5. Les pistes de progrès : action coordonnée selon les différents leviers disponibles, convergence des principes, réduction à la source, sanction des contrevenants..............41 2.5.1. Fiabiliser et simplifier les dispositifs de mesure et de cartographie du bruit. . .41 2.5.2. Un traitement des points noirs coordonné selon les différents leviers disponibles............................................................................................................... 42 2.5.3. Mieux prendre en compte le bruit dans la création des nouvelles infrastructures.......................................................................................................... 44 2.5.4. Associer le bruit à la sécurité routière et mettre à l'étude un système de contrôle et sanction automatisés des fauteurs de bruits émergents.........................45 2.5.5. Anticiper l'évolution de la réglementation communautaire en matière de prévention................................................................................................................ 46 3. Le bruit, une thématique mal identifiée dans les politiques d'urbanisme, d'habitat et de construction....................................................................................47 3.1. Le bruit encore peu intégré dans la planification et l'aménagement urbains.............47 3.1.1. Le code de l'urbanisme ignore le bruit, à l'exception de celui du trafic aérien 47 3.1.2. Le plan de prévention du bruit dans l'environnement : un document de trop dans le maquis de la planification ?.........................................................................48 3.1.3. L'intégration du bruit dans l'aménagement urbain comme une composante à part entière de la qualité de vie................................................................................49 3.1.4. Trop de logements nouvellement construits ne sont pas conformes à la réglementation acoustique.......................................................................................50 3.1.5. Des opportunités pour procéder à l'amélioration de la qualité acoustique des logements................................................................................................................ 51 4. Pour une politique du bruit plus audible..........................................................55 4.1. Le bruit, un sujet de conflit pouvant devenir politiquement sensible..........................55 4.2. Renforcer la recherche développement et la communication...................................56 4.3. Rendre plus lisible la politique du bruit......................................................................57 Conclusion..............................................................................................................59 Annexes..................................................................................................................61 1. Lettre de mission................................................................................................63 2. Plan des actions à engager, impacts financiers et conditions de réussite. .65 3. L'évaluation de la nuisance sonore : il n'existe pas au plan international de base véritablement solide pour la mesure du bruit ni pour celle de son impact sanitaire.....................................................................................................................67 4. La politique de protection et de prévention des nuisances sonores du transport aérien : un système organisé, financé et contrôlé..............................69 4.1. La protection : un système financé et structuré........................................................69 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 2/80 4.2. La prévention : un ensemble complet de contraintes d'urbanisme, de gestion du trafic et de conception des avions....................................................................................69 4.3. Une autorité indépendante de contrôle et de sanction : l'Acnusa.............................71 5. Bibliographie sélective.......................................................................................72 6. Liste des personnes rencontrées.....................................................................74 7. Glossaire des sigles et acronymes...................................................................78 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 3/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 4/80 Résumé Si le bruit fait partie intégrante de notre vie, il revêt de nombreux aspects. Le présent rapport traite spécifiquement du bruit dans l'environnement, c'est-à-dire du bruit des transports (aérien, ferroviaire et routier), du bruit des activités comme les chantiers ou encore les installations classées, et de la façon de s'en protéger par des politiques du logement (rénovation, qualité de la construction) et de l'urbanisme. Le bruit, considéré comme une nuisance de première importance par les Français, a des effets objectifs importants sur la santé (hors effets auditifs) qui portent sur le sommeil, le système endocrinien, le système cardio-vasculaire, le système immunitaire, la cognition et sur la psychologie de l'individu. Une récente étude commandée par l'Ademe évalue le coût social du bruit (bruit au travail, bruit de voisinage et bruit des transports) en France à 57 milliards d'euros par an, dont plus de 20 milliards dus au transport. Après analyse critique, la mission estime que ce montant est un ordre de grandeur non seulement plausible, mais probablement minimal. La politique de lutte contre le bruit dans l'environnement relève historiquement de l'État. Depuis le début des années 2000, les collectivités sont plus fortement concernées. D'une part, le transfert de l'essentiel du réseau routier national aux départements s'est accompagné logiquement du transfert de la responsabilité des nuisances de ces infrastructures. D'autre part , la réglementation communautaire est venue imposer aux gestionnaires d'infrastructures de transport et aux collectivités territoriales l'obligation d'élaborer et de publier des cartes de bruit et des plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE). Depuis 2009, les interventions de l'État sont coordonnées au sein du « plan bruit » porté par l'Ademe, dont les actions se sont concentrées sur les domaines routier et ferroviaire (traitement des points noirs du bruit), sur le développement d'observatoires (cartes de bruit) et sur le soutien à des projets de recherche et développement. Le bilan de ce plan est clairement mitigé, les crédits (160 millions d'euros au total) ayant été difficiles à mobiliser sur des opérations complexes et de longue haleine, souvent nouvelles pour les collectivités responsables. Certaines opérations vont se poursuivre jusqu'en 2020, mais aucune enveloppe budgétaire nouvelle n'a été dégagée depuis 2011. La lutte contre les nuisances sonores du transport aérien bénéficie d'un dispositif complet de financement, de prévention et de contrôle. Pour accélérer la réalisation des travaux d'isolation des habitations les plus exposées, la question du niveau de la TNSA et de son déplafonnement peut être posée. Par ailleurs, on observe une tendance à écorner progressivement les principes de stricte limitation du développement urbain à proximité des aéroports du fait de la pression foncière et du besoin de logements. Les effets évidents du bruit sur la santé mais aussi les tensions que génère la proximité entre logements et aéroports invitent à la plus grande vigilance. En matière de mesure et de cartographie du bruit, la coexistence de concepts d'origine communautaire et nationale, qui de surcroît sont fondés sur des indicateurs différents, crée inutilement la confusion et affaiblit la démarche de communication. La mission préconise qu'à terme, les cartes de bruit établies en application de la réglementation européenne deviennent la référence. Il s'agit donc de développer l'expertise pour fiabiliser la qualité de ces données, faciliter l'usage, la compréhension et la diffusion de ces cartes et de promouvoir cette méthodologie auprès des collectivités concernées. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 5/80 La politique de traitement des bâtiments sur-exposés aux transports terrestres, appelés « points noirs du bruit » est dans une impasse. Les moyens budgétaires qui y sont affectés sont en effet sans commune mesure avec les besoins recensés. Selon le principe « pollueur - payeur », un mode de financement pérenne doit pouvoir être dégagé. La mission recommande que les leviers de l'exploitation et de l'aménagement routier, de la mutation du tissu et des usages urbains soient davantage mobilisés. Pour un maximum d'efficacité et d'efficience, les crédits alloués au traitement des façades doivent pouvoir être concentrés sur des opérations exemplaires, à forte dimension sociale, avec un financement pouvant atteindre 100 % du coût total. En matière de prévention (réduction à la source), il est proposé de développer un label et de promouvoir les revêtements routiers peu bruyants, de sensibiliser les conducteurs, de mettre en place un dispositif de sanction des comportements excessivement bruyants sur la route, et de programmer dès à présent les investissements pour le remplacement des systèmes de freinage des wagons de fret. En matière d'urbanisme, à l'exception du secteur aérien, le bruit fait l'objet de peu d'attention tant du législateur que des opérateurs. Pour encourager une meilleure prise en compte du bruit dans les règlements d'urbanisme et dans les politiques d'aménagement, la mission recommande de développer un « volet bruit » dans les plans locaux d'urbanisme, volet pouvant alors être assimilé au plan de prévention du bruit dans l'environnement exigé par l'Union européenne. En matière de règles de construction, partant du constat que plus de la moitié des bâtiments neufs ne sont pas conformes à la réglementation acoustique alors même que les bruits de voisinage sont considérés comme une nuisance importante par les Français, la mission suggère de concevoir un nouveau dispositif de contrôle pour assurer à l'habitant un logement neuf conforme. Par ailleurs, l'important mouvement amorcé en matière de rénovation thermique de l'habitat est une opportunité pour y intégrer la rénovation acoustique. Les démarches conduites au titre de la transition énergétique et dans les projets portés par l'Anah ont ainsi vocation à coupler les enjeux énergétique et acoustique. Enfin, les constats établis sur le neuf comme sur la rénovation conduisent à proposer de mobiliser et former la filière du bâtiment sur la question acoustique, d'intégrer plus souvent les acousticiens aux équipes de maîtrise d'oeuvre et de développer un label sur le confort acoustique des logements. Outre ses effets sur la santé, le bruit est un sujet socialement sensible et sa bonne prise en compte conditionne la faisabilité de certaines activités ou projets. Considérant, à l'instar du comité opérationnel « bruit » du Grenelle de l'environnement que « la lutte contre le bruit doit devenir le levier d'une démarche de progrès plutôt qu'une contrainte que les acteurs économiques essayent, hélas avec succès le plus souvent, de contourner », la mission insiste sur la nécessité de soutenir la recherche, l'innovation et l'expérimentation. Elle recommande aussi que la plus grande attention soit portée à la valorisation et à la diffusion des résultats, y compris par l'évolution de la réglementation. Si la relance de la politique de lutte contre le bruit dans l'environnement peut s'appuyer sur des points forts (dynamisme de la recherche et de l'expertise publique et privée, mobilisation effective des plus grandes agglomérations, existence du centre d'information et de documentation sur le bruit et du conseil national du bruit), elle ne peut réussir sans un minimum de moyens. Si certaines recommandations ont un faible coût de mise en oeuvre, d'autres nécessitent la mobilisation de crédits pérennes, dont le niveau est à apprécier mais reste faible si l'on considère le coût social annuel de plus de 20 milliards d'euros pour le seul secteur des transports. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 6/80 Liste des recommandations 1.Faire des cartes de bruit établies en application de la réglementation européenne la référence en matière de mesure du bruit dans l'environnement. Développer l'expertise pour fiabiliser la qualité des données, faciliter l'usage, la compréhension et la diffusion de ces cartes. Promouvoir cette méthodologie dans les collectivités concernées. (DGPR, Ademe, Cerema).................................................................................42 2.Dégager un financement pérenne permettant de soutenir notamment les collectivités locales dans la politique de traitement des zones les plus exposées au bruit, intégrant de nouveaux leviers (exploitation, aménagement et revêtement routiers, mutation du tissu et des usages urbains). Concentrer les crédits alloués au traitement des façades sur des opérations exemplaires, à forte dimension sociale, avec un financement pouvant aller jusqu'à 100 % du coût total. (DGPR, Ademe, DGITM)..............................................................................................................44 3.Associer le bruit à la politique de sécurité routière, sensibiliser les conducteurs et mettre à l'étude un système de contrôle sanction automatisé des bruits émergents excessifs causés par certains véhicules. (DGITM, DGPR, en lien avec le ministère de l'Intérieur)...........46 4.Encourager la labellisation et la promotion de l'utilisation des revêtements de chaussées peu bruyants. (DGITM).....................................46 5.Présenter sous un an un programme d'investissement pour le remplacement des systèmes de freinage des wagons de fret, permettant aux opérateurs français de respecter les échéances européennes (DGITM, en lien avec les propriétaires de wagons et opérateurs de fret). 46 6.Prendre en compte le bruit dans la planification urbaine en y intégrant un « volet bruit ». Inciter à définir dans les PLU des restrictions d'usage en matière de construction dans les zones fortement exposées pour épargner les publics sensibles et à définir des orientations en matière d'aménagement urbain intégrant le bruit dans les critères de qualité de vie. (DHUP).......................................................................................................50 7.Concevoir un nouveau système de contrôle du respect des règles de la construction pour garantir à l'habitant un logement conforme à la réglementation, notamment en matière acoustique. (DHUP).....................51 8.Intégrer le bruit dans les démarches d'amélioration de l'habitat au titre de la transition énergétique ainsi que dans les projets portés par l'Anah. (DHUP, Ademe, Anah)......................................................................................51 9.Mobiliser et former la filière du bâtiment sur la question acoustique, intégrer plus souvent les acousticiens aux équipes de maîtrise d'oeuvre et développer un label sur le confort acoustique des logements. (DHUP, CSTB)................................................................................................................53 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 7/80 10.Soutenir la recherche, l'innovation, l'expérimentation, valoriser leurs résultats et généraliser leurs applications. (tous acteurs publics, coordination DGPR)........................................................................................57 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 8/80 Introduction Si le bruit fait partie intégrante de notre vie, il constitue une véritable nuisance qui revêt de nombreux aspects : bruit dans l'environnement dû aux activités et en particulier au transport (routier, aérien, ferroviaire), bruit de voisinage, bruit au travail en sont les principaux. Le décret n°2017-1071 du 24 mai 2017 relatif aux attributions du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire précise que le ministre « participe, en liaison avec les ministres intéressés, à la réduction des nuisances sonores ». La présente mission confiée au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) vise à préciser les enjeux du bruit en matière de santé - environnement, en revenant notamment sur l'évaluation du coût social du bruit, une récente étude1 ayant été produite sur le sujet. Il s'agit ensuite de mener une réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores, en se fondant sur les résultats obtenus ces dernières années et en formulant des propositions d'actions nouvelles. Le sujet du bruit étant très vaste, la mission a fait le choix de circonscrire son travail et ses recommandations aux sujets relevant des politiques publiques conduites par l'administration constituée autour des ministres chargés de la transition écologique et solidaire, des transports ainsi que de la cohésion des territoires. Ainsi, la mission ne s'est pas penchée spécifiquement sur le bruit au travail, ni sur l'impact sanitaire auditif (dégradation ou perte de l'ouïe) du son fort ou amplifié, dans la mesure où ces politiques ne relèvent pas directement du champ de compétence des ministres exerçant la tutelle du CGEDD et où les recommandations ne leur seraient pas destinées. Par ailleurs, l'impact du bruit sur la faune terrestre ou marine, lors de chantiers ou bien du fait des activités courantes, n'a pas été traité dans le présent rapport. Il s'agit donc de traiter du bruit dans l'environnement, c'est-à-dire du bruit des transports (aérien, ferroviaire et routier), du bruit émis dans l'environnement par des activités comme les chantiers et des installations classées spécifiques (éoliennes), et de la façon de s'en protéger par des politiques du logement (rénovation, qualité de la construction) et de l'urbanisme. Toutefois, certaines des recommandations formulées par la mission peuvent être larges et avoir un impact sur l'ensemble des politiques publiques liées au bruit. 1 Étude réalisée par EY (nouveau nom d'Ernst and Young) pour le compte du Conseil national du bruit (CNB) et de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), mai 2016 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 9/80 Rapport n° 011057-01 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 10/80 1. Le bruit, une problématique de santé et d'environnement 1.1. Le bruit, une problématique santé-environnement incontestable et une nuisance majeure pour les Français 1.1.1. La mesure du bruit Le bruit se caractérise tout d'abord par son intensité, qui se mesure en décibels (dB). Cette unité est conçue comme une fonction logarithmique du rapport entre deux puissances : la grandeur mesurée et une valeur de référence trop faible pour être entendue. Ainsi, si le bruit mesuré correspond à une puissance double de la puissance seuil, il correspond à une mesure de 3 dB. En réalité, l'oreille humaine est capable de percevoir un seuil de 2 dB, un écart de 3 dB est à peine perceptible et ne correspond pas à une sensation de doublement du volume sonore. Il faut un écart de 10 dB pour avoir une sensation de doublement (ou de division par deux) du volume sonore. Par ailleurs, l'oreille a une sensibilité différente en fonction de la fréquence des sons : elle est moins sensible aux sons graves et aigus qu'aux sons mediums. Une unité physiologique a été créée pour en tenir compte : le décibel A (dB(A)) intègre une pondération des niveaux de bruit par bande de fréquence. Le graphique ci-dessous représente une échelle des niveaux sonores perceptibles dans l'environnement courant. À noter que le bruit à 100 mètres d'un avion au décollage est d'environ 120 dB, ce qui correspond à la limite supérieure d'audibilité et au seuil de la douleur. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 11/80 Le bruit dans l'environnement se caractérise aussi par sa très grande variabilité : le bruit de fond constitué par la circulation varie dans la journée, une mobylette qui passe dans un environnement calme apparaît comme un bruit émergent dans un bruit de fond général, et des bruits de même intensité peuvent être de qualité très différente. La répétition de bruits émergents, même d'intensité modérée, peut s'avérer très pénible à supporter. Il est donc particulièrement difficile de définir un indicateur qui reflète cette complexité, en particulier celle des bruits émergents. Pour caractériser la nuisance causée par une exposition de durée importante à celle d'un bruit variable dans le temps, on utilise la notion de niveau sonore équivalent (ou niveau sonore moyen) Leq. Pour simplifier, le Leq (« level equivalent ») est le niveau sonore constant qui aurait produit la même énergie totale pendant l'intervalle de temps considéré. L'indice préconisé par la commission européenne et adopté par la réglementation est le Lden (Level day, evening, night) qui prévoit une pondération de 5 dB pour la soirée (18 h ­ 22 h) et 10 dB pour la nuit (22 h ­ 6 h), et qui intègre ainsi le niveau de gêne différencié pour un bruit de même intensité, entre le jour et la nuit. Cet indicateur est retenu le plus souvent, dès lors que l'on recherche un lien entre le niveau de bruit, la gêne perçue et les effets sur la santé. Pour caractériser l'émergence des pics de bruit, on utilise un indice qui représente le nombre d'événements (par exemple survols) dont le niveau maximum atteint dépasse un seuil de bruit fixé. Cet indice, qui n'a pas de valeur réglementaire, est le NAx : Noise events Above x (dB). 1.1.2. Les effets sanitaires extra auditifs du bruit 2 Les effets extra-auditifs du bruit peuvent se manifester lors d'expositions chroniques ou répétées à des niveaux sonores beaucoup plus faibles que ceux ayant un impact sur le système auditif3, comme c'est généralement le cas dans l'environnement. Les mécanismes d'action sont complexes : d'une part, une stimulation acoustique constitue une agression de l'organisme et engendre une réponse non spécifique, qui dépend des caractéristiques physiques du bruit (intensité, spectre en fréquence, durée) ; d'autre part, le bruit est une notion subjective et la réaction à une stimulation sonore est influencée par des représentations individuelles (utilité des sources, bruit choisi ou subi, contrôle des sources...). C'est pourquoi les effets extra-auditifs du bruit peuvent généralement être classés en deux catégories : · effets subjectifs, pouvant entraîner une gêne, et donnant lieu à une perception individuelle. · effets objectifs, c'est-à-dire pouvant être mesurés selon des critères applicables à tous les individus : effets sur le sommeil, effets sur le système endocrinien, effets sur le système cardio-vasculaire, effets sur le système immunitaire, effets sur la cognition (données sur l'enfant), effets psychologiques. Au cours des deux dernières décennies, de nombreuses publications ont établi un lien entre exposition au bruit dans l'environnement et problèmes de santé, en particulier sur 2 Les indications de ce paragraphe sont largement issues de la brochure du Conseil national du bruit (CNB), intitulée « Les effets sanitaires du bruit », en date de juin 2017 et de l'avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) en date de février 2013 intitulé « Évaluation des impacts sanitaires extra-auditifs du bruit environnemental ». Un niveau de bruit dépassant 80 dB (A) pendant 8 heures est considéré comme le seuil d'apparition de la fatigue auditive. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 12/80 3 Rapport n° 011057-01 les effets du bruit des transports. Les impacts sanitaires qui sont aujourd'hui les mieux documentés et reconnus sont les suivants : la gêne, les effets sur le sommeil, le système cardio-vasculaire ainsi que les troubles dans les apprentissages. L'impact du bruit sur la santé fait aussi l'objet de nombreuses études et publications de l'Organisation mondiale pour la santé, qui a proposé en 2011 une méthodologie4 pour estimer la morbidité liée au bruit de l'environnement. Celle-ci repose sur l'utilisation de l'indicateur synthétique des années de vie en bonne santé perdues (DALY en anglais pour « disability adjusted life years ») du fait de l'incapacité ou de la mortalité prématurée. Selon cette méthodologie, 1,6 million d'années de vie en bonne santé seraient perdues chaque année dans l'Union européenne sous l'effet du bruit causé par les infrastructures de transport, principalement en raison des troubles du sommeil (903 000 DALY) et de la gêne (587 000 DALY). Le bruit des transports y serait également responsable de plus de 10 000 cas de mortalité prématurée et de 43 000 hospitalisations par an.5 1.1.3. Le bruit, une nuisance de première importance pour les Français Un sondage Ifop6 réalisé en septembre 2014 pour le compte du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie montre que 82 % des Français interviewés7 sont préoccupés par le bruit et les nuisances sonores, 47 % le sont plutôt et 35 % le sont « tout à fait ». Cette préoccupation est généralisée au sein de la population française et on observe de faibles écarts selon la génération, le territoire (commune rurale ou grande agglomération) ou les catégories socio-professionnelles. 86 % des personnes se disent gênées par le bruit à leur domicile. Si c'est dans l'agglomération parisienne que ce taux est le plus élevé (93 %), il est aussi important dans les communes rurales, où 79 % des sondés se déclarent gênés par le bruit à leur domicile. Les deux premières sources de gêne sont la circulation des véhicules (37 % de mention comme première source, 67 % au total) et le voisinage (38 % de mention comme première source et 65 % au total). Les autres sources sont beaucoup moins citées et apparaissent dans cet ordre décroissant : équipements du domicile, bruit aérien, chantiers de construction, circulation ferroviaire, cafés-restaurants et discothèques, activités commerciales ou industrielles. Les personnes se déclarent gênées à leur domicile à hauteur de 48 % le jour, 24 % la nuit et 28 % le jour et la nuit. Enfin, 53 % des interviewés pensent que les nuisances sonores affectent leur santé et celle de leur entourage. Selon d'autres enquêtes8, le bruit est un facteur important dans le choix du logement : il figure parmi les 5 premiers motifs de déménagement et il arrive en première position 4 Organisation Mondiale de la Santé Europe. Burden of disease from environmental noise -Quantification of healthy life years lost in Europe. Bern 2011. Noise in Europe 2014, EEA report, 2014. En ligne sur le site de l'Ifop Échantillon de 1001 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. Le numéro spécial du magazine écho bruit, revue du Centre d'information et de documentation sur le bruit (CIDB) intitulé « état de l'environnement sonore », fait référence à d'autres études ou sondages dont les conclusions sont reprises ci après. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 13/80 5 6 7 8 Rapport n° 011057-01 des nuisances rédhibitoires chez les futurs acquéreurs, devant l'isolation thermique et l'éloignement des transports en commun. Par ailleurs9, le bruit est également considéré comme la première préoccupation relative à la qualité de vie et facteur de stress dans le quartier ou l'espace urbain, devant le manque de transport en commun, la pollution de l'air, la dégradation de l'environnement urbain, les risques liés aux installations industrielles et les risques naturels. Cette préoccupation sur les nuisances sonores est la seule à être en progression constante depuis 2010. Il est aussi intéressant de se pencher sur les résultats d'une enquête menée en 2011 par la direction générale de l'aviation civile (DGAC) sur l'image de l'aviation civile, selon laquelle le bruit constitue pour les Français le premier facteur de nuisance imputable au transport aérien (38 % des personnes interrogées), suivi par les émissions de CO2, l'effet de serre (32 % des personnes interrogées) et la pollution de l'air (30 % des personnes interrogées). 1.2. Pour la première fois, une récente étude montre que le coût social du bruit en France est important C'est en mai 2016 que la première étude sur le coût social des pollutions sonores en France est parue. Réalisée par EY, cette étude avait été commanditée par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et le Conseil national du bruit (CNB)10. Au terme d'une revue minutieuse de la bibliographie, l'étude évalue le coût social du bruit à 57 milliards d'euros par an, soit près de 3 % du produit intérieur brut (PIB) national. Cette somme se décompose ainsi : Synthèse des coûts sociaux annuels des pollutions sonores en France, EY pour Ademe et CNB, mai 2016 Comme on le voit, le bruit des transports, le bruit au travail et le bruit de voisinage sont responsables chacun d'environ un tiers de ce coût. 9 10 Enquête de l'INSEE-SOeS, citée par le Commissariat général au développement durable, mars 2014. Analyse bibliographique des travaux français et européens ­ Le coût social des pollutions sonores ­ mai 2016 , étude réalisée pour le compte du CNB et de l'Ademe par EY ; étude disponible en ligne sur le site du CIDB. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 14/80 Rapport n° 011057-01 Conformément aux attentes de la lettre de mission, il est fait ici une analyse critique de la méthode utilisée pour cette étude, dont les principales conclusions sont présentées. 1.2.1. La méthodologie de l'étude11 Le bruit a des effets sur la qualité de vie et la santé, mais aussi sur la valeur du patrimoine et sur la productivité des organisations. L'évaluation du coût social consiste à traduire en coût financier chacun de ses effets. La méthodologie de l'étude repose sur une analyse des travaux de recherche de référence disponibles à l'échelle française et européenne. Pour chaque origine de bruit (transports, milieu professionnel et scolaire, voisinage), et pour chaque conséquence identifiée, les auteurs précisent si la littérature quantifie les effets du bruit et si elle le traduit en coût financier. Le sujet des transports est le plus documenté. L'étude a systématiquement pris en compte les effets dès lors que des travaux existants permettaient d'en mesurer le coût financier. Dans certains cas où la littérature ne fournissait pas de traduction financière du coût social du bruit, mais où il semblait important d'indiquer l'ampleur potentielle du phénomène, les auteurs ont fourni une estimation en détaillant les hypothèses, à interpréter avec les précautions nécessaires. Ainsi, sont pris en compte dans l'évaluation du coût social du bruit présenté par l'étude: · pour le transport : · sur la base de publications existantes : la gêne, les maladies cardiovasculaires, les troubles du sommeil, la perte de valeur immobilière ; · sur la base d'une estimation indicative des auteurs : la perte indirecte de productivité, l'entrave au parcours scolaire ; · pour le milieu professionnel et scolaire : · sur la base de publications existantes : les accidents du travail, la surdité ; · sur la base d'une estimation indicative des auteurs : l'entrave au parcours scolaire ; · pour le voisinage : · sur la base de publications existantes : la perte de valeur immobilière ; · sur la base d'une estimation indicative des auteurs : la gêne, les maladies cardiovasculaires et les troubles du sommeil. Différentes méthodes peuvent être utilisées pour faire le lien entre les effets d'une nuisance et leur valeur économique. Les auteurs ont utilisé principalement trois approches : · la méthode des coûts évités : il s'agit d'évaluer les gains pour la collectivité et les individus en l'absence totale de nuisance. Cela revient à se référer à la valeur d'une « année de vie en bonne santé » (estimée par l'OMS ou bien par chaque pays) et de faire un lien entre la dose de bruit reçue et l'effet sur la perte de qualité de vie. Cette méthode a été utilisée pour évaluer le coût de la gêne, des troubles du sommeil et des maladies cardiovasculaires pour le bruit des transports. La fiabilité de ce type de méthode dépend de la précision des statistiques d'exposition au bruit et de l'évaluation du coût par individu, 11 Un comité de pilotage de l'étude s'est constitué autour de ses commanditaires de l'étude, des principaux contributeurs et ainsi que d'un réseau d'experts publics ou privés indépendants de façon à pouvoir s'inscrire dans une approche partagée. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 15/80 Rapport n° 011057-01 · la méthode des prix hédoniques : il s'agit de révéler le coût d'un environnement bruyant par le prix que les gens sont prêts à payer pour un environnement plus calme. Cette méthode est pertinente pour évaluer la valeur de la gêne ou du confort au travers des prix de l'immobilier. La principale limite de cette méthode réside dans le fait que les prix de l'immobilier sont dûs à de nombreux facteurs, et qu'il est difficile d'isoler le seul facteur du bruit, · la méthode des transferts de valeur : il s'agit de transférer des estimations obtenues dans un domaine à un autre domaine, avec des ajustements pour tenir compte de la différence de contexte. Elle a été utilisée pour estimer le coût du bruit de voisinage, en utilisant les résultats obtenus à partir de la littérature sur le coût social du bruit des transports. Cette approche est intéressante, mais les situations ne peuvent être comparables en tous points, et les résultats doivent être pris avec précaution. Par ailleurs, lors de ses investigations, la mission a noté un questionnement de la DGITM sur la méthodologie employée par EY. La DGITM craint que le calcul du coût social de la gêne et des troubles du sommeil ne soit en partie fondé sur la perte de valeur immobilière, ce qui pourrait conduire à un double compte. Après vérification (la rédaction du rapport peut porter à confusion), il n'en est rien. Dès lors, l'impact sanitaire d'une part et la perte de valeur immobilière d'autre part sont bien deux notions distinctes dont les coûts peuvent être additionnés. La question de la prise en considération, dans l'évaluation du coût social du bruit, de la perte de valeur immobilière est toutefois délicate. La mission considère en effet qu'il ne faut retenir cette perte que lorsqu'elle correspond effectivement à un préjudice subi par l'individu, c'est-à-dire lorsque après acquisition, celui-ci voit la valeur de son bien diminuer du fait du bruit croissant dans son logement ou son environnement immédiat. Dans ce cas, le coût social ne relève pas d'impacts sur la santé, mais d'atteinte à la valeur du patrimoine sous forme d'une « moins-value » en cas de revente. Un bien vendu moins cher du fait du bruit mais acheté, du même fait, moins cher que le marché n'est pas selon la mission à prendre en considération, car il n'y a pas de préjudice financier. Plus généralement, l'approche retenue par l'étude consiste à évaluer globalement la perte de valeur du parc immobilier du fait du bruit, ce qui revient à évaluer le « préjudice patrimonial » subi par le pays ou la société dans son ensemble du fait de certaines activités. Cette approche d'ordre macroéconomique est intéressante, pour autant que soit alors évalué en contrepartie l'apport économique global ou encore la création de richesse produite par ces mêmes activités. Elle ne relève pas, quoi qu'il en soit, de l'évaluation du coût social du bruit. On comprend que l'évaluation du coût social du bruit est une approche complexe et l'étude a le mérite d'être très transparente sur les hypothèses retenues ainsi que les limites des connaissances actuelles. Mais, comme le rappelle ses auteurs (paragraphe 6.4 de l'étude) : « l'objectif de la présente étude est de dégager des tendances lourdes, de hiérarchiser les problématiques et de permettre au lecteur de former son propre jugement sur l'ampleur des phénomènes étudiés. L'incertitude n'empêche pas de fournir les clés pour agir, et met en lumière les recherches complémentaires à mener afin de combler des connaissances manquantes, mais pouvant être jugées importantes ». Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 16/80 1.2.2. Le coût social du bruit en milieu professionnel et scolaire et du bruit de voisinage : une approche difficile car peu documentée En ce qui concerne le bruit en milieu professionnel, les estimations sont issues des données de la Caisse primaire d'assurance maladie pour le coût de la surdité (85 M), et d'une étude réalisée en 1983 par le ministère des affaires sociales qui estime à 10 % le coût des accidents du travail et maladies professionnelles liées aux nuisances sonores sur le lieu de travail. Sur la base de ce ratio, l'impact sur la santé (surdité et maladies professionnelles) du bruit au travail est estimé au total à 1,2 milliards d'euros par an. Ce résultat est fragile. Il est en effet basé, pour les accidents du travail qui constituent l'essentiel du chiffre, sur une étude ancienne, qu'il faudrait réactualiser. La perte de rentabilité due au bruit au travail fait l'objet d'études qui montrent les impacts (baisse de performance des tâches cognitives, satisfaction au travail, perte de concentration), mais est très peu documentée quant au chiffrage de ces impacts. Les auteurs l'ont estimé uniquement pour le secteur tertiaire pour lequel une étude anglosaxonne12 montre que 57 % des personnes rapportent une détérioration majeure de leur concentration du fait du bruit dans leur environnement de travail. Il est ensuite considéré que cette « détérioration majeure » équivaut à une perte de 5 jours de travail par an, soit 35 heures, converties en unités monétaires en utilisant les ratios de productivité horaire13. L'ensemble14 conduit à un coût de 18 milliards d'euros par an en France pour le secteur tertiaire. Si la démarche des auteurs est claire, elle laisse le lecteur très interrogatif : en effet, le ratio des 57 % basé sur une étude étrangère avec un faible échantillon est très fragile et la perte de 5 jours de travail par an, si elle ne paraît pas excessive, n'est pas documentée. Par ailleurs, il est évident que l'impact du bruit sur la productivité ne touche pas uniquement le secteur tertiaire. Il est très regrettable qu'aucune étude ne permette de chiffrer les effets du bruit sur la productivité. Les conséquences du bruit en milieu scolaire concernent à la fois les élèves (détérioration de l'apprentissage et in fine des qualifications) et des enseignants (fatigue accrue, extinction de voix, stress). Selon les auteurs, il n'existe pas d'étude complète et robuste établissant la relation entre les nuisances sonores et la performance scolaire. L'étude EY propose donc d'approcher le coût social en se basant sur le coût du décrochage scolaire tel qu'estimé par le ministère de l'éducation nationale et en supposant, à titre purement indicatif, que 20 % du décrochage scolaire est imputable aux nuisances sonores perçues en salle de classe. Selon ces hypothèses15, le coût social du bruit en milieu scolaire est estimé à 6 milliards d'euros par an. On en peut que constater que cette approche est, là encore, très fragile : la part du décrochage due au bruit n'est pas documentée, le lien entre le bruit et le décrochage non plus, les effets du bruit sur la santé des enseignants ne sont pas évalués, de même que les effets autres que le décrochage. Il semble qu'en l'état des connaissances actuelles, il ne soit pas possible d'évaluer sérieusement le coût social du bruit en milieu scolaire. 12 13 14 Étude réalisée en 2005 sur un échantillon de 88 personnes travaillant dans des bureaux. Valeur de la productivité horaire en France : 45,4 selon Eurostat et OCDE. 19,6 millions de personnes travaillant dans le secteur tertiaire, multipliés par 57 % de personnes déclarant une « détérioration majeure » de leur concentration, multipliés par 1 589 de production perdue par personne. 110 000 jeunes décrocheurs chaque année, le coût estimé d'un décrocheur tout au long de la vie est de 230 000 , 20 % du décrochage est dû au bruit. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 17/80 15 Rapport n° 011057-01 En ce qui concerne le bruit de voisinage, les auteurs précisent qu'à ce jour on ne dispose d'aucune étude permettant d'en traduire le coût des perturbations. Pour la gêne, les troubles du sommeil et les autres impacts sur la santé, les auteurs se fondent sur le sondage Ifop de mars 2014 référencé plus haut, selon lequel les Français considèrent au même niveau la gêne des bruits de voisinage et du bruit des transports16. Par analogie, pour son impact sur la gêne, le sommeil et la santé, le coût social du bruit de voisinage est évalué au même niveau que celui des transports, soit 11,5 milliards d'euros par an. Ce raccourci paraît trop simpliste pour que l'on puisse se satisfaire de cette évaluation. Pour autant, la mission considère que les effets sur la santé des troubles de voisinage sont incontestables, comme en témoigne les plaintes (cf.infra) mais aussi les nombreux conflits quotidiens (non comptabilisés) gérés par les services de police et de gendarmerie, ainsi que par les maires et leurs polices municipales, responsables de la tranquillité publique. S'il ne fait pas de doute que le coût social des bruits de voisinage est important, la méthode d'approche proposée dans l'étude semble contestable. On ne peut que recommander que des études se développent sur ce sujet d'importance pour permettre d'approcher ce coût avec des références plus solides, permettant notamment de voir dans quelle mesure la qualité de l'isolation phonique des logements, souvent défaillante17, est un facteur intervenant dans le niveau des troubles. La diminution de la valeur immobilière due au bruit de voisinage est calculée en considérant une perte de 10 % à 20 %18 de la valeur d'un bien exposé au bruit de voisinage (commerce, café, discothèque...), une valeur totale de l'immobilier parisien 19, un ratio de 1 % des biens exposés au bruit des commerces, et une durée de vie d'un bâtiment de 50 ans. Cela conduit à une estimation globale de 120 millions d'euros par an pour Paris. Il ne s'agit pas de critiquer chacune de ces hypothèses, mais plutôt de rappeler l'objection sur la prise en compte du préjudice effectivement subi par l'individu, qu'il est très difficile d'estimer. Par ailleurs, s'agissant des commerces, les activités bruyantes ne sont pas immuables et en ville, les valeurs immobilières sont parfois très changeantes et sont le fait de multiples facteurs. Le coût du traitement policier et judiciaire des conflits liés au bruit de voisinage est estimé sur la base du nombre de faits traités par les services de police et de gendarmerie (12 408 faits constatés en 2013) et d'un coût unitaire de traitement de 500 euros, ce qui conduit à un montant de 5 millions d'euros par an. Toute la difficulté repose sur le montant moyen du coût de traitement. Il apparaît plutôt faible, notamment dès lors que l'infraction donne lieu à un déplacement, mais ce n'est pas toujours le cas. Notons toutefois que l'ordre de grandeur du coût est faible au regard notamment de l'estimation du coût sur la santé. Enfin, pour l'ensemble des bruits ici considérés ( bruit au travail, en milieu scolaire et bruit de voisinage) , faute de données, tous les effets dommageables ne sont pas traduits en coûts financiers. Ainsi, ne sont pas pris en compte dans l'étude : les conséquences du bruit en milieu professionnel et scolaire que sont la perte de journées de production, les autres coûts sanitaires autres que la surdité et les accidents du travail, les incompréhensions et pertes d'informations dans les entreprises, les pertes 16 À la question : « à votre domicile, quelle est la source de bruit et nuisances sonores que vous considérez comme la plus gênante », le bruit des transports et le bruit de voisinage sont cités par 46 % des personnes interrogées. Voir troisième partie du rapport. Fourchette citée dans plusieurs articles de presse et validée par Monsieur Mignot, expert judiciaire agréé par la Cour de Cassation et acousticien 642 milliards d'euros en 2011, selon « meilleurs agents », données internes et notaires de Paris. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 18/80 17 18 19 Rapport n° 011057-01 de rentrée fiscales et de cotisations sociales ; et enfin, pour ce qui concerne les bruits de voisinage, l'entrave au parcours scolaire et les incivilités et conflits de voisinage. En conclusion, l'évaluation du coût social du bruit au travail, en milieu scolaire et du bruit de voisinage, telle que proposée par l'étude EY, représente environ 37 milliards d'euros par an, soit les deux tiers du total. Faute d'études sur lesquelles se fonder, cette évaluation repose parfois sur des hypothèses fragiles mais plausibles, parfois sur des analogies contestables. S'agissant de l'impact du bruit sur la productivité au travail, le coût social évalué (18 milliards d'euros par an), ne paraît pas surévalué, et il est probable qu'il soit en réalité supérieur. Les conséquences du bruit en milieu scolaire sont approchées en prenant en compte le seul décrochage scolaire et le chiffre proposé (6 milliards d'euros par an) doit être pris avec précaution. Enfin, s'agissant des troubles de voisinage, le chiffre avancé (11,6 milliards d'euros par an) ne nous paraît pas pouvoir être retenu tel quel sans un minimum d'études complémentaires, même s'il n'est pas contestable que ce coût soit important. Malgré ces difficultés, la mission considère que les ordres de grandeur proposés sont plausibles, d'autant que certains coûts ne sont pas pris en compte et que d'autres sont sous estimés. La mission ne peut que recommander que des recherches plus approfondies soient entreprises sur les trois volets. 1.2.3. Le coût social du bruit des transports : une estimation plausible et minimale Le bruit des transports est le sujet à la fois le plus documenté et qui concerne le plus directement les politiques du ministère de la transition écologique et solidaire (MTES). Le tableau ci-dessous présente le détail des résultats fournis par l'étude. Coût social du bruit des transports en France, en milliards d'euros par an transport transport transport transport transport transport routier ferroviaire aérien routier ferroviaire aérien 5,5 0,7 0,2 4,1 0,3 0,2 0,7 7,1 1,7 0,3 20,7 troubles du sommeil Troubles sur la santé gêne maladies cardiovasculaires 11,6 transport routier Perte de valeur immobilière Perte de productivité Troubles de l'apprentissage TOTAL Le coût total est ainsi estimé à plus de 20 milliards d'euros par an, dont environ 11,5 milliards d'euros par an pour la santé20. 20 Dans l'ensemble des coûts pour la santé, les troubles du sommeil représentent 54 % du coût total, devant la gêne (40 %) et les maladies cardio-vasculaires (6 %). Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 19/80 Rapport n° 011057-01 Au total, le bruit des transports routiers représente de loin la première source de coût, soit 89 % du coût des troubles sur la santé, contre 9 % pour le ferroviaire et 2 % pour l'aérien. Ces différences entre les trois modes de transport sont dues essentiellement à la différence du nombre de personnes exposées : la population affectée par des niveaux critiques du trafic aérien est ainsi 15 fois inférieure à celle touchée par le trafic routier et 2 fois inférieure à celle concernée par le trafic ferroviaire. En procédant à une lecture critique de l'étude EY, certaines hypothèses et calculs peuvent apparaître fragiles : · le coût de la dépréciation immobilière due au bruit des transports est évalué sur la base d'une enquête réalisée dans des communes autour d'Orly. Cela conduit à retenir une dépréciation de 10 % de la valeur du logement, pour les 18 millions de ménages exposés à un bruit moyen (selon l'indice Lden) supérieur à 50 dB(A), sur un patrimoine immobilier moyen d'une valeur de 190 000 d'une durée de vie de 50 ans. Ainsi, cette perte de valeur immobilière est estimée à 7,1 milliards d'euros par an. Compte tenu que cette dépréciation a été observée en proximité de l'un des plus grands aéroports français, il est possible que le taux de 10 % soit surévalué. Par ailleurs, la mission observe que le nombre de ménages pris en considération est très important et oppose le principe de ne retenir que les seuls cas de préjudice financier effectivement subi. Pour ces deux raisons, la valorisation de la dépréciation immobilière présentée dans le rapport paraît sur évaluée ; · la perte de productivité au travail liée au transport par le biais des troubles du sommeil a été évaluée sur la base d'une étude faite au Royaume-Uni21 qui indique un coût de perte de productivité du fait des troubles du sommeil de 176 par personne et par an en Australie et de 218 par personne et par an au Japon. En estimant à 15 % la part des troubles du sommeil engendrés directement par le bruit, les auteurs considèrent que la perte de productivité au travail liée au transport est comprise entre 1,7 et 2,2 milliards d'euros par an. On ne peut contester le raisonnement, mais les hypothèses restent fragiles ; · les auteurs ont voulu estimer la part attribuable au bruit des transports dans les coûts d'hospitalisation des maladies cardiovasculaires, en considérant que le bruit était responsable de 3 % de celles-ci. Appliqué au coût de 17,9 milliards d'euros par an du traitement en affection de longue durée pour les maladies cardiovasculaires, ce ratio conduit à une estimation du coût attribuable au bruit des transports de 537 millions d'euros par an. Là encore, le calcul s'appuie sur des hypothèses plausibles mais non vérifiées ; · pour ce qui concerne les troubles de l'apprentissage liés au bruit des transports, les auteurs se sont basés sur une étude de l'OMS pour l'Europe de l'Ouest, qui évalue que le coût des impacts sur les troubles de l'apprentissage sont 20 fois moindres que ceux causés par le sommeil. Sur la base de ce ratio, le coût social annuel des troubles du sommeil (bien documenté) estimé dans l'étude étant d'environ 6 milliards d'euros par an, les auteurs évaluent le coût des troubles de l'apprentissage à 300 millions d'euros par an ; · certains effets ne sont que partiellement pris en compte : faute de références, la monétisation de la perte des « années de vie en bonne santé » des maladies cardiovasculaires dues au bruit des transports ne tient pas compte du transport aérien et du transport ferroviaire. Or, de nombreuses études montrent l'impact sur le système cardiovasculaire du bruit aérien. Ainsi, le coût des maladies 21 Étude réalisée par le DEFRA (Department for Environment, Food and Rural Affairs), UK, 2014, Environnmental Noise : Valuing impacts on : sleep, disturbance, annoyance, hypertension, productivity and quiet. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 20/80 Rapport n° 011057-01 cardio-vasculaires liées au bruit des transports, estimé à 715 millions d'euros par an, ne comprend que le transport routier ; · enfin, c'est essentiel, les auteurs ont retenu comme valeur économique de « l'année de vie en bonne santé » l'évaluation de l'OMS de 50 000 . Or, en France, cette valeur a été estimée à 115 000 dans le cadre des travaux conduits par Émile Quinet22 . Ainsi, ce simple ajustement du montant conduirait à plus que doubler le coût social des troubles sur la santé causés par les transports calculé sur la base de la valeur d'une année de vie en bonne santé, c'est-à-dire les troubles du sommeil et la gêne, que l'étude évalue à près de 11 milliards d'euros par an (avant doublement éventuel). Compte tenu de l'ensemble de ces observations, le coût social du bruit des transports présenté dans l'étude, qui s'élève à 20,6 milliards d'euros par an, ne paraît pas surévalué. S'il subsiste bien entendu des incertitudes du fait du manque de robustesse de certaines données ayant servi aux calculs, les hypothèses formulées sont étayées et plausibles. Par ailleurs, tous les effets ne sont pas pris en compte et les possibles sur-évaluations (perte de valeur immobilière) sont en réalité largement compensées par des sous-évaluations (impacts sur la santé) du coût, de telle sorte que le montant affiché peut apparaître comme un minimum. En conclusion, le coût social global du bruit dans l'environnement évalué par EY à 57 milliards d'euros par an est un montant non seulement plausible, mais très probablement minimal. Il serait ainsi d'un ordre de grandeur voisin du coût social de la qualité de l'air, évalué à 101 milliards d'euros par an23. 1.3. Le bruit dans l'environnement : une politique publique aux multiples acteurs 1.3.1. Les textes fondateurs La politique française du bruit s'est construite progressivement depuis 60 ans 24. Elle s'est cristallisée autour de la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 (codifiée aux articles L571-1 à L571-26 du code de l'environnement), dite « loi bruit » premier texte global en la matière qui constitue sans doute le premier effort notable de formulation d'un texte fondateur. Dans tous les domaines où il n'y est pas pourvu par des dispositions spécifiques, elle a pour but de prévenir, supprimer ou limiter l'émission ou la propagation sans nécessité ou par manque de précaution des bruits ou des vibrations de nature à présenter des dangers, à causer un trouble excessif aux personnes, à nuire à leur santé ou à porter atteinte à l'environnement. L'Union européenne a fondé sa politique du bruit sur la directive 2002/49/CE du 25 juin 2002 relative à l'évaluation et à la gestion du bruit dans l'environnement, qui impose aux gestionnaires d'infrastructures de transport (aérien, routier et ferroviaire) et aux 22 Ces travaux ont conduit au rapport éponyme qui fait référence pour les études socio-économiques sur le bruit en France. Rapport de la commission d'enquête sénatoriale présidée par le sénateur Jean-François Husson, 15 juillet 2015. Quelques jalons : réglementation du bruit à Paris (1959), réglementation de l'isolation des logements (1969), réglementation européenne sur le bruit des véhicules (1972), taxe parafiscale au profit des riverains des grands aérodromes (1973), arrêté fixant les isolations des façades des logements (1978), programme « points noirs » (1984), décret portant création des plans d'exposition au bruit (PEB) autour des aérodromes (1985). Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 21/80 23 24 Rapport n° 011057-01 collectivités territoriales l'obligation d'élaborer des cartes de bruit « stratégiques » et des plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE). En France, la traduction de cette directive s'est traduite par une approche en deux étapes : les grandes agglomérations de plus de 250 000 habitants ont été concernées dans un premier temps (2006 : cartes de bruit ­ 2007 : plans d'action), les plus petites agglomérations dans un second temps (2012­2013). 1.3.2. Les acteurs publics impliqués dans la politique de lutte contre le bruit dans l'environnement : la montée en puissance des collectivités territoriales Historiquement, la politique de lutte contre le bruit dans l'environnement a été prise en charge par l'État, au titre de sa responsabilité en matière de protection des populations mais aussi parce qu'il était directement et indirectement le principal aménageur et gestionnaire d'infrastructures de transport et qu'il exerçait de larges responsabilités en matière d'urbanisme. Son action s'est essentiellement traduite par la mise en place d'une réglementation visant à réduire les nuisances sonores et le nombre des personnes exposées, par la recherche et le développement de techniques nouvelles permettant de réduire les émissions ou de mieux s'en protéger, ainsi que par un programme de réparation du préjudice causé par les infrastructures routières et ferroviaires autour de la notion de « point noir du bruit »25. Depuis le début des années 2000, le contexte a progressivement évolué. La responsabilité du traitement du bruit dans l'environnement est aujourd'hui très largement partagée avec les collectivités locales : départements et collectivités gestionnaires des infrastructures routières26 et grandes agglomérations compétentes en matière d'urbanisme et plus généralement de qualité de vie des habitants. La réglementation communautaire est venue de plus renforcer le rôle des grandes agglomérations et a introduit de nouvelles obligations, non pas de respect de niveau de bruit maximum, mais en matière d'information du citoyen (publication des cartes de bruit) et de démarche de prévention (plan de prévention du bruit dans l'environnement). Par ailleurs, la prévention et le traitement du bruit ferroviaire relèvent de la responsabilité de la SNCF, et celui du bruit aérien des opérateurs du secteur ainsi que des collectivités riveraines, comme développé dans la deuxième partie du rapport. Aujourd'hui, pour ce qui concerne l'État, les services des ministères chargés de la prévention des pollutions, du transport, de l'urbanisme, de la construction et du 25 Le point noir est défini à l'article D571-54 du code de l'environnement : « Sont considérés comme points noirs du bruit des réseaux routiers et ferroviaires nationaux les bâtiments d'habitation et les établissements d'enseignement, de soins, de santé et d'action sociale répondant à des critères acoustiques et d'antériorité fixés par arrêté ». Ainsi, le bruit en façade d'un point noir dépasse en moyenne 70 dB le jour ou 65 dB la nuit. Le trafic de référence est une extrapolation à 20 ans. La loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (loi LRL) a procédé à des transferts de compétences de grande ampleur au profit des collectivités territoriales dans le domaine des grands équipements et infrastructures : la voirie (I), les ports (II. a) et les aérodromes (II. b). Les points noirs du bruit ont également été transférés. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 22/80 26 Rapport n° 011057-01 logement qu'ils soient centraux27 ou déconcentrés28, continuent de s'appuyer sur leurs établissements publics : le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) l'institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR), le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). Dans le domaine santé environnement, l'agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a développé également une expertise sur le sujet et soutient des programmes de recherche. Il existe également des laboratoires de recherche adossés à des écoles d'ingénieur ou des universités, dont la mission n'a pas fait l'inventaire. Enfin, l'État s'appuie sur l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) pour mettre en oeuvre un programme d'action spécifique. Les moyens dédiés à cette politique sont aujourd'hui faibles. La mission « bruit » rattachée à la DGPR mobilise 2 à 3 agents à temps plein. Au sein même de la DGITM, environ 4 équivalents temps plein (ETP) seraient affectés à cette mission. Dans les services déconcentrés, de nombreuses directions ne comptent plus d'effectifs dédiés. 29 Au sein des établissements publics que sont l'Ademe et l'Anses, les effectifs sont également faibles : 1 ingénieur à temps plein est affecté sur ces sujets dans chacun de ces établissements. En revanche, sur le bruit dans les transports routiers, le Cerema et l'IFSTTAR disposent d'équipes conséquentes. La récente création de l'unité mixte de recherche (UMR) en acoustique environnementale entre les deux établissements va permettre de réunir 25 permanents dont 13 chercheurs et 6 ingénieurs sur la thématique. Depuis plus d'une dizaine d'années, les collectivités sont montées en puissance dans leurs responsabilités sur le sujet du bruit. En effet, après le transfert des infrastructures, effectif au 1 er janvier 2006, les collectivités se sont donc trouvées responsables du traitement des points noirs du bruit. Selon une note récente du Cerema30, plus de 80 % des logements concernés (estimés à 850 000) sont en bordure infrastructures départementales (410 000 logements) ou communales (300 000 logements). Le traitement de ces points noirs, le plus souvent par isolation acoustique des façades ou par mur anti bruit, représente des opérations longues, complexes et coûteuses. Depuis 2009, l'État a apporté un soutien financier à ces opérations au travers de l'Ademe (cf. infra). Pour ce qui concerne les obligations liées à l'application de la directive européenne, les collectivités ont progressivement réalisé et publié les cartes de bruit et élaboré des plans de prévention, mais leur investissement sur ce sujet est très inégal. La Région Île-de-France et la Communauté urbaine de Lyon ont été pionnières dans la création des observatoires du bruit, respectivement Bruitparif et Acoucité. D'autres ont vu le jour depuis. Plus généralement, le bruit a vocation à être intégré dans les politiques d'urbanisme, de transport et de logement dont la compétence relève très largement des collectivités locales. 27 direction générale de la prévention des risques - DGPR, direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature ­ DGALN, et direction générale des infrastructures, des transports et de la mer - DGITM directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement - DREAL, directions interdépartementales des routes - DIR, directions départementales des territoires - DDT Selon le logiciel SALSA (logiciel qui enregistre l'affectation du temps de travail des agents aux diverses missions des ministères), le nombre d'ETP affectés au bruit en 2015 est de 70,8, mais une récente enquête auprès des services montre qu'en réalité, les moyens sont beaucoup moindres et seraient inférieurs à 20 ETP. Note du 6 octobre 2015 à l'attention de la DGPR Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 23/80 28 29 30 Rapport n° 011057-01 L'État soutient par ailleurs depuis 1978 le centre d'information et de documentation sur le bruit (CIDB), lieu de ressources et de diffusion de l'information vouée à la promotion de la qualité de notre environnement sonore. Association loi 1901 à but non lucratif, reconnue d'utilité publique, le CIDB a pour principales missions d'informer, de sensibiliser, de documenter et de former sur le thème de la protection de l'environnement sonore. Il est l'interlocuteur privilégié tant du grand public que des quelque 1 000 organismes publics ou privés intervenant dans le domaine de la gestion de l'environnement sonore. L'équipe du CIDB est constituée d'un président et de 8 salariés permanents. Le site internet du CIDB31 est à la fois très riche et très pédagogique. Il constitue une source d'information complète et précieuse pour le citoyen comme pour les professionnels concernés. Le CIDB organise par ailleurs des colloques, des formations et publie régulièrement des études, des guides techniques ou dossiers d'actualité. Il assure un service de « questions-réponses » pour les citoyens voulant s'informer ou régler des difficultés liées au bruit. Enfin, il faut signaler l'existence du Conseil national du bruit (CNB). Le CNB est une commission à caractère consultatif placé auprès du ministre chargé de l'environnement. Il est composé de représentants de l'État, de représentants des collectivités locales et des organisations syndicales, de personnalités compétentes et de représentants des différents groupements, associations et professions concernés par les problèmes d'amélioration de l'environnement sonore. Il peut être amené à émettre un avis sur toute question relative à la lutte contre les nuisances sonores et à l'amélioration de la qualité de l'environnement sonore. Il établit également un programme de travail. 1.3.3. Les interventions de l'État : le plan bruit de l'Ademe Depuis 2009, l'essentiel des fonds de l'État affectés à la lutte contre le bruit dans l'environnement le sont au titre du « plan bruit » porté par l'Ademe. Ce plan est issu du Grenelle de l'environnement (et en particulier des travaux de son comité opérationnel bruit32), qui a conduit l'État à prendre des engagements relatifs au bruit dans l'environnement dans 3 domaines : le financement de la réduction des nuisances sonores engendrées par le réseau routier national et le réseau ferroviaire, la sécurisation d'un dispositif de lutte contre les nuisances sonores du transport aérien et le développement d'un réseau d'observatoires du bruit dans les grandes agglomérations. Les interventions de l'Ademe se sont concentrées sur les domaines routier et ferroviaire (traitement des points noirs bruit), sur le développement des observatoires et sur le soutien à des projets de recherche et développement. Le tableau suivant dresse le bilan des financements engagés. 31 32 bruit.fr On se reportera utilement au rapport du comité opérationnel bruit (n°18), intitulé « Pour une approche globale », mars 2008, Grenelle de l'environnement. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 24/80 Rapport n° 011057-01 Financements engagés dans le cadre du plan bruit de l'Ademe, de 2009 à 2014 : Actions financées traitement des PNB routiers dont conventions collectivités locales dont État : fonds de concours traitement des PNB ferroviaire R et D dont soutien aux observatoires du bruit TOTAL Engagements en M 88,7 46,1 42,5 62,9 8,5 0,43 160,1 L'enveloppe de crédits a été obtenue pour la période 2009 - 2011. De fait, la programmation s'est étalée jusqu'en 2013 pour les collectivités et jusqu'en 2014 pour l'État. L'échéance de 2020 a été fixée pour les dernières réalisations et les paiements correspondants. Aucune nouvelle enveloppe budgétaire n'a été dégagée depuis 2011 dans le cadre de ce plan. Toutefois, sur le seul réseau national, l'État intervient dans le cadre des contrats de plan État ­ Région. Des crédits ont ainsi été engagés pour des actions de lutte contre le bruit routier en 2015 (2,7 M dont 2,2 M part État) et en 2016 (19 M dont 13 M part État). En 2009, le bruit était un champ d'intervention nouveau pour la plupart des collectivités. L'Ademe a établi des conventions avec 34 collectivités, de tout niveau (communes, EPCI et départements), la subvention représentant en moyenne près de 80 % du coût total des projets financés. Les collectivités ont principalement conduit des opérations de traitement de façade, parfois accompagnées de pose de revêtement routier peu sonore. Les opérations financées sur le réseau routier dont l'État à la charge l'ont été au travers d'un fonds de concours, qui s'est réparti entre des opérations de traitement de façade (pour 28,45 M) et des travaux de murs anti bruit (pour 14,05 M). Le traitement du bruit ferroviaire a mobilisé près de 63 M, en quasi totalité pour SNCF réseau (62,4 M), la RATP ayant conclu une convention d'un montant de 0,6 M. À noter que suite au Grenelle de l'environnement, la loi du 3 août 2009 a demandé l'accroissement budgétaire des moyens consacrés au traitement du bruit ferroviaire : une accélération du traitement des points noirs de bruit par SNCF réseau était donc attendue. Au total et sur toute la durée du plan, les crédits ont permis de protéger 7 954 logements, dont 3 324 exposés au bruit routier et 4 630 exposés au bruit ferroviaire. Rappelons que selon le Cerema, 912 000 logements sont situés dans des points noirs de bruit, dont 850 000 routiers33 et 62 000 ferroviaires. Notons bien que le Cerema a préféré évaluer le nombre de logements concernés et non le nombre de points noirs, ces derniers correspondant aux bâtiments. Un appel à manifestation d'intérêt pour la création d'observatoires dans les grandes agglomérations a été lancé et 4 lauréats ont été sélectionnés : Aix-en-Provence, Nice, Grenoble et Saint-Étienne. L'Ademe a financé des investissements matériels et le Ministère a engagé un budget de 680 000 pour financer le fonctionnement. Des balises fixes de mesure ont été installées sur l'ensemble des territoires, complétées 33 140 000 pour le réseau national, 410 000 pour le réseau départemental, 300 000 pour le réseau infra départemental Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 25/80 Rapport n° 011057-01 par des équipements de mesure mobiles. Tous les observatoires ont mis en place un dispositif de diffusion des données via internet. En ce qui concerne la recherche-développement, l'Ademe a soutenu, dans le cadre d'une dynamique générale de recherche sur l'urbanisme durable, 7 projets directement liés au bruit dans l'environnement urbain : réalisation d'un guide méthodologique pour un diagnostic partagé du paysage sonore urbain, création d'outils d'aide à la conception d'environnements sonores durables, développement de méthodes de cartographie fine et continue de la qualité sonore des lieux et parcours dans l'espace urbain ainsi que d'un outil de mesure de la qualité sonore en ville 34, réalisation d'un guide d'aide à la décision pour la réalisation de mobiliers urbains acoustiques, développement d'une méthodologie logicielle d'aide à l'aménagement durable du paysage sonore urbain, conception et réalisation d'un outil internet d'apprentissage et de dialogue en faveur de l'environnement sonore urbain. Ces projets peuvent associer notamment instituts de recherche, établissements d'enseignement supérieur et de recherche, collectivités locales et bureaux d'ingénierie spécialisés. 1.3.4. Le bruit dans le plan national Santé Environnement Le bruit figure au sein de l'ensemble des problématiques santé - environnement, mais y tient une place très marginale. Le troisième plan national santé environnement 2015 - 2019 propose deux actions : · mieux lutter contre les nuisances sonores générées par les deux-roues motorisés, par des campagnes de contrôle des véhicules, d'information pédagogique, et d'information des concepteurs de matériels... ; · résorber les points noirs du bruit. Le plan propose par ailleurs en 2015 trois actions immédiates : · la publication d'un guide pour améliorer la qualité acoustique dans les écoles : ce guide a été publié par le CNB en 2015 ; · le développement de l'éducation au bruit et à la citoyenneté, notamment auprès des jeunes : cette action (protection des risques auditifs liés notamment à l'écoute de musique amplifiée) est conduite par la direction générale de la santé (DGS) et l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) ; · la mise à disposition du public d'une application sur les 15 points à vérifier en matière de bruit dans les logements : cette application, sous forme de 7 séries de questions, est disponible sur le site du ministère 35. Il faut noter qu'aucun financement n'a été prévu à l'appui de la mise en oeuvre de ce plan, ce qui pose problème, en particulier pour la résorption des points noirs du bruit. 34 Il s'agit de développer un outil pouvant donner des indications sur la qualité des ambiances sonores, qui ne dépendent pas uniquement des aspects quantitatifs (niveau sonore) mais aussi de facteurs qualitatifs et de la multi exposition. https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/vigilance-bruit/index.php/questionnaire Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 26/80 35 Rapport n° 011057-01 2. Le bruit des transports : une politique véritablement intégrée dans le secteur aérien, beaucoup moins dans les secteurs routier et ferroviaire La politique de lutte contre les nuisances sonores des transports est ancienne et assez bien structurée. La maîtrise de l'urbanisation au voisinage des aérodromes a été codifiée il y a 40 ans par une directive d'aménagement national (décret du 22 septembre 1977), puis par la loi du 11 juillet 1985 relative à l'urbanisme au voisinage des aérodromes, dont les dispositions ont été insérées dans le code de l'urbanisme (art. L147-1 à L147-6), qui a créé le plan d'exposition au bruit (PEB). Le plan de déplacement urbain (PDU), dont l'un des objectifs est la diminution du trafic automobile en ville, procède de la loi d'orientation des transports intérieurs (Loti) de 1982, confortée par les lois LAURE36 (1996) et SRU37 (2000). Mais c'est surtout la loi du 30 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit qui a conduit à un certain nombre de dispositions majeures, relatives notamment au traitement des points noirs de bruit (PNB) des transports terrestres, définis dès 1981. Notons que si la politique nationale de rattrapage des points noirs de bruit est une politique volontariste instituée par l'État, elle n'est toutefois pas inscrite dans le cadre réglementaire contraignant. On constate un certain essoufflement de cette politique. Il est vrai que quand bien même la prévention des nuisances sonores figurait dès sa création, en 1990, dans le portefeuille de l'Ademe, cette nouvelle agence était avant tout fondée sur la mise en commun des compétences des trois agences des déchets, de l'air et de l'énergie. Il est tout aussi patent qu'à la sensibilité au cadre de vie qui a inspiré les premiers pas de la politique française de l'environnement, fondée dans les années 1960 et 70, a succédé moins de 20 ans plus tard l'urgence du traitement des problèmes d'environnement global, au premier rang desquels le changement climatique. De même, en matière de santé - environnement, les effets de la pollution de l'air, des produits phytopharmaceutiques ou encore des perturbateurs endocriniens apparaissent aujourd'hui plus inquiétants que ceux du bruit. Dans ces conditions, le bruit a régressé dans l'échelle des valeurs des gestionnaires de l'environnement. Dans le même temps, l'Union européenne a pris le relais en promulguant en 2002 une directive cadre38 et cinq règlements39. Elle a enclenché une dynamique réglementaire qui impose des exigences croissantes aux États membres et aux opérateurs. La France ne saurait l'ignorer. 36 37 38 Loi n°96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'Air et l'Utilisation Rationnelle de l'Énergie (LAURE). Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Directive -cadre relative à l'évaluation et à la gestion du bruit dans l'environnement, en 2002, transcrite en droit français à l'article L1521-1 du code des transports. Sur la sécurité des véhicules et l'étiquetage de pneumatiques en 2009, les bruits dans les aéroports, des matériels roulants ferroviaires et des véhicules routiers en 2014. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 27/80 39 Rapport n° 011057-01 2.1. La politique de protection et de prévention des nuisances sonores du transport aérien : un système organisé, financé et contrôlé En matière de lutte contre le bruit, le transport aérien bénéficie d'une organisation, de moyens et de résultats clairement meilleurs que les transports terrestres. En matière de protection, la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) permet de déployer un système financé et structuré d'insonorisation des habitations situées en proximité. On relèvera que pour accélérer ces travaux, la question du niveau de la taxe et de son déplafonnement peut être posée. L'annexe 4 présente ce dispositif de financement ainsi que les règles d'urbanisme et de contrôle applicables au voisinage des aéroports. L'autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa) a récemment pris des positions offensives pour renforcer la remédiation au bruit aérien. On présentera cidessous les leviers de réduction des nuisances. 2.1.1. La prévention : un ensemble complet de contraintes d'urbanisme, de gestion du trafic et de conception des avions La prévention du bruit du trafic aérien joue sur plusieurs registres : la limitation du droit à urbanisation des zones bruyantes, la gestion du trafic aérien (mesures d'exploitation) et notamment des procédures d'approche, et la réduction à la source sur l'aéronef luimême. Les contraintes à l'urbanisation au voisinage des aérodromes sont fixées dans le Plan d'exposition au bruit des aérodromes (PEB), défini à l'article L112-6 du code de l'urbanisme, et annexé au plan local d'urbanisme. L'ensemble du dispositif est présenté en annexe 4. On observe une tendance à écorner progressivement les principes de stricte limitation du développement urbain à proximité des aéroports du fait de la pression foncière et du besoin de logements. Les effets évidents du bruit sur la santé mais aussi les tensions que génère la proximité entre logements et aéroports invitent à la plus grande vigilance. S'agissant de la gestion du trafic, la réduction de la nuisance sonore a été obtenue au prix de couvre-feux (à Orly), de la surfacturation des créneaux nocturnes, de l'interdiction d'atterrissage des avions les plus bruyants (relevant du chapitre 2 de l'OACI40) en 2002, de l'éloignement des zones habitées du point de prise de l'ILS (point où l'avion vire de bord pour aligner sa trajectoire finale en ligne droite vers la piste), et du relèvement de ce point. À l'aéroport de Nantes Atlantique, une procédure dérogatoire d'approche en biais, selon un angle de 13°, permet au trafic d'éviter le survol du centre-ville. Des progrès sont encore envisagés, tels que la descente continue opérationnelle, à régime moteur faible, qui nécessite un plus grand espacement des créneaux et n'est donc envisageable que la nuit. L'interdiction de vol des avions relevant du chapitre 3 n'est en revanche pas à l'ordre du jour. On notera toutefois qu'en 2013, l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa, cf. annexe) a recommandé que, « sauf contraintes locales ou circonstances particulières dûment justifiées, sur les plates-formes pour lesquelles un couvre-feu n'a pas été institué sur l'ensemble de la période considérée, seuls les avions présentant une marge cumulée égale ou supérieure à 13 EPNDB 41 soient autorisés à atterrir ou à décoller entre 23 heures et 6 heures ». 40 41 Organisation de l'Aviation Civile Internationale L'EPNdB (Effective Perceived Noise Decibel) est l'unité de base permettant d'exprimer le niveau effectif de bruit perçu. Il est utilisé pour la certification des avions à réaction. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 28/80 Rapport n° 011057-01 S'agissant de la réduction à la source, dans son rapport de décembre 2015, le Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac)42 rappelle les deux sources majeures de bruit que sont le système propulsif et le bruit aérodynamique et les avancées faites en la matière, avec le double flux (qui réduit la vitesse d'éjection et la température des gaz brûlés et réduit ipso facto considérablement le bruit du système propulsif) et l'aérodynamisme des trains d'atterrissage et autres parties saillantes sur les appareils. Il note à ce propos que les progrès réalisés ces trente dernières années concernent essentiellement les systèmes propulsifs, ce qui s'est traduit par une diminution importante du bruit perçu au décollage mais peu à l'atterrissage où le bruit aérodynamique constitue la composante majeure. On note ainsi qu'Aéroports de Paris enregistre désormais plus de plaintes liées aux phases d'atterrissage qu'à celles de décollage. Ces avancées technologiques permettent aux aérodromes de faire face à la croissance de leur trafic sans extension de leur empreinte sonore. Ainsi à Paris Charles De Gaulle, l'Indice global mesuré pondéré créé par arrêté du 28 janvier 2003, ajusté à 100 sur la moyenne des années 1999 à 2001, n'était plus que de 75,5 en 2014, alors que le trafic s'était entre temps accru d'un tiers. 2.1.2. La recherche : des programmes soutenus Au niveau européen, à l'initiative et avec le soutien de la Commission européenne, plusieurs programmes de recherche sur les nuisances sonores aériennes sont engagés43. Une nouvelle initiative, Quiet Air Transport, portée par l'European Research Establishments Association et dont l'Onera44 serait le chef de file pour la France, est en gestation. Le Corac s'est fixé des objectifs ambitieux, notamment, en matière de bruit, une réduction de 50 % en 2020 et 65 % en 2050 du bruit émis par les nouveaux avions par rapport aux avions sortis d'usine en l'an 2000. À la demande des ministères de la transition écologique et solidaire et de la santé, l'IFSTTAR a entrepris un suivi sanitaire d'une cohorte de plus de 1 000 riverains de trois grands aéroports (Paris CDG, Lyon Saint-Exupéry et Toulouse Blagnac) afin d'évaluer l'impact du bruit sur leur santé. Ce travail, qui durera de 2009 à 2019, s'appelle DEBATS. Les premiers résultats devraient en être connus prochainement. 42 Association des acteurs du transport aérien français, créée dans la foulée du Grenelle de l'environnement et qui coordonne l'effort de recherche en matière de réduction d'impact environnemental de cette activité SESAR (depuis 2004), X Noise (depuis 2001), Silencer (de 2001 à 2007), Clean Sky (depuis 2008), OpenAir (de 2009 à 2013) L'Office national d'études et de recherches aérospatiales est le principal centre de recherche français dans le domaine de l'aérospatiale. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 29/80 43 44 Rapport n° 011057-01 2.2. Le bruit des transports terrestres : un cadre commun à la route et au rail 2.2.1. La cartographie des zones de bruit: un exercice pédagogique compliqué par les divergences d'approche réglementaire entre l'Europe et la France En matière de cartographie des zones de bruit des transports terrestres (ferroviaires et routiers), les exigences réglementaires nationales et communautaires concurrentes rendent la pédagogie de l'exercice hautement problématique. En effet : · La réglementation nationale est fondée sur le recensement et le classement, par le préfet, des infrastructures de transports terrestres en fonction de leurs caractéristiques sonores et du trafic (« classement sonore des voies »)45, Sont classées les routes supportant un trafic supérieur à 5 000 véhicules par jour et les voies ferrées supportant un trafic supérieur à 50 trains par jour. Sur la base de ce classement, le préfet détermine, après consultation des communes, les secteurs riverains affectés par le bruit, les niveaux de nuisances sonores à prendre en compte pour la construction de bâtiments et les prescriptions techniques de nature à les réduire. La gêne est évaluée selon un indice de puissance moyenne composite intégrant le jour et la nuit. Le trafic de référence est le trafic estimé « à terme » (à un horizon de l'ordre de 20 ans par exemple), selon l'arrêté du 30 mai 1996 ; · Par ailleurs, la circulaire du 12 juin 2001 relative à la résorption des points noirs de bruit des transports terrestres, toujours en vigueur, demande au préfet de recenser les points noirs du bruit'46, c'est-à-dire les bâtiments pour lesquels le bruit en façade dépasse en moyenne 70 dB le jour ou 65 dB la nuit. Le trafic de référence est une extrapolation à 20 ans ; · La réglementation communautaire (directive du 25 juin 2002) édicte quant à elle l'obligation d'établissement d'une carte stratégique de bruit des transports (terrestres et aériens) et d'un plan de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE). Cette directive a été traduite en droit français aux articles L572-2 et R572-3 du code de l'environnement. Les seuils sont fixés par la directive à 100 000 habitants agglomérés et 3 millions de véhicules ou 30 000 trains par an. La gêne est évaluée selon l'indice Lden et le trafic de référence est celui constaté l'année N-1. Les États membres ont une obligation d'information du public. Les cartes sont mises en ligne. Les plans doivent être révisés au moins tous les 5 ans. On note le paradoxe de la concurrence de trois procédures, désaccordées sur plusieurs points majeurs (l'unité de mesure, l'échéance temporelle du scénario de référence, le mode de restitution au public), qui vivent leurs vies parallèles. Dans ces conditions, l'information du public n'est pas claire et les moyens pour connaître et traduire la nuisance ne sont pas optimisés. 45 46 cf. article L571-10 du code de l'environnement créé en vertu de la loi bruit du 31/12/1992. article D571-54 du code de l'environnement : « Sont considérés comme points noirs du bruit des réseaux routier et ferroviaire nationaux les bâtiments d'habitation et les établissements d'enseignement, de soins, de santé et d'action sociale répondant à des critères acoustiques et d'antériorité fixés par arrêté » Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 30/80 Rapport n° 011057-01 2.2.2. Le traitement des points noirs du bruit Aux termes de l'article D571-53 du code de l'environnement, « Les propriétaires de locaux d'habitation [...] recensés par le préfet comme points noirs du bruit des réseaux routier et ferroviaire nationaux, peuvent bénéficier, en complément des aides publiques directes existantes, d'une subvention financée par le ministère chargé de l'environnement ». Il faut préciser que ce financement public offert aux propriétaires des locaux concernés intervient dans une logique de réparation d'un préjudice subi du fait de l'infrastructure lorsque celui-ci intervient postérieurement à l'occupation initiale. Dans les points noirs du bruit, les logements éligibles sont ceux construits avant la mise en place de la réglementation de protection acoustique des logements (1978) ou bien ceux construits avant le développement de la nuisance sonore, par création de l'infrastructure ou du fait de travaux ayant permis par exemple une augmentation du trafic sur une infrastructure préexistante. En pratique, que ce soit pour la route ou le rail, il y a loin du besoin aux moyens disponibles. 2.3. Le bruit du transport ferroviaire : une politique prise en tenaille entre les difficultés économiques du secteur et la pression européenne La maîtrise du bruit est une des clés du développement du transport ferroviaire. Le TGV d'un côté, avec ses bruits aérodynamiques dans les aigus, le fret de l'autre, générateur de bruits importants, notamment au freinage, sont les deux modes de transport critiques en termes de nuisances sonores. Au contraire de l'aérien, le ferroviaire ne peut s'appuyer ni sur des budgets incitatifs, ni sur un régime de sanctions, et les moyens qui sont consacrés au développement de solutions non bruyantes sont nettement plus modestes. Néanmoins, les acteurs du ferroviaire s'emploient à maîtriser le bruit de leur mode de transport. 2.3.1. La protection : des moyens très limités pour le traitement des points noirs On évalue à 53 000 le nombre de points noirs du bruit ferroviaire en France. Ce nombre à lui seul pose question car, étant fondé sur des estimations de trafic « à terme », il procède d'une estimation très ambitieuse du développement du trafic fret telle qu'on en faisait volontiers au tournant du millénaire. La réalité a ramené ces estimations à la baisse, mais les points noirs demeurent tels qu'on pouvait les prévoir en 2000 avec un trafic fret de 100 Mdt*km/an à terme, parcouru par un matériel ancien et bruyant. Le coût de la résorption de ces 53 000 points noirs est estimé à 2 milliards d'euros (Md). Or à ce jour, SNCF Réseau n'en a traité que 2 200, pour une dépense totale de 124 millions d'euros (M). Plus récemment, et sur la base du trafic actuel, le Cerema a estimé à 62 000 le nombre de logements (et non de points noirs, qui correspondent aux bâtiments) situés dans les immeubles classés points noirs du bruit ferroviaire. Or, le plan bruit de l'Ademe n'a permis de protéger que 4 615 logements en 5 ans. Au rythme actuel on voit donc que la procédure est dans une impasse. Par ailleurs SNCF Réseau, tout comme l'Ademe, se plaint de la lourdeur des procédures de conventionnement dans le cadre du plan bruit, qui ne contribue pas à assurer un emploi efficace des maigres dotations disponibles. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 31/80 2.3.2. La prévention : une palette de solutions relativement large, en dépit du manque de soutien de la réglementation de l'urbanisme Comme dans l'aérien, la prévention repose sur les deux piliers que sont la réglementation et la technologie. La réglementation, dans le cas des nouvelles infrastructures de transport terrestre (ferroviaire ou routier) provient de deux sources : · Au niveau communautaire, le règlement 1304/2014 du 26 novembre 2014 relatif à la spécification technique d'interopérabilité (STI) concernant le sous-système matériel roulant ­ bruit ; · Au niveau national, l'article R571-44 du code de l'environnement, qui dispose que « La conception, l'étude et la réalisation d'une infrastructure de transports terrestres nouvelle ainsi que la modification ou la transformation significative d'une infrastructure de transports terrestres existante sont accompagnées de mesures destinées à éviter que le fonctionnement de l'infrastructure ne crée des nuisances sonores excessives ». La STI bruit est actuellement en révision. L'ambition de nos voisins allemands est de durcir les spécifications relatives au bruit. Ils sont en effet soumis à un trafic fret ferroviaire en expansion, qui se reporte massivement sur des voies telles que celle de la vallée du Rhin. Ils possèdent une technologie de freinage des wagons de fret par semelle composite moins bruyante que l'ancienne technologie de la semelle de fonte 47. L'Allemagne a entrepris d'en équiper l'ensemble de son parc, soit 60 000 wagons. Elle y consacre 140 M/an de subventions publiques allouées aux propriétaires de wagons. Deux produits sont actuellement sur le marché : la semelle LL, développée par l'Allemand Knorr Bremse, jugée par la SNCF trop agressive pour les roues 48, et la semelle Y25, qui suppose un changement préalable de la timonerie, très onéreux. En France, Railenium49 s'efforce d'intéresser un industriel à la mise au point d'une solution concurrente plus adaptée, mais faute d'un signal politique fort, il doit déplorer l'attentisme des intéressés. L'Allemagne étant en train de convertir son parc et ayant de surcroît décidé, ainsi que la Suisse, d'interdire à compter de 2020 toute circulation sur son territoire de wagon équipé de semelle de fonte, le sujet fait l'objet de discussions au niveau européen. Dans ces conditions, le rapport n° 009254-01 de mars 2014 du CGEDD sur le bruit du fret ferroviaire a jugé raisonnable d'anticiper. Sa proposition est de défendre, au niveau européen, l'interdiction d'installation de semelles fonte à partir de 2022, pour une interdiction de circulation à partir de 2025 de tout wagon ne respectant pas les limites de bruit de la réglementation européenne, qui ne s'applique aujourd'hui qu'aux wagons neufs ou reconditionnés. La Commission européenne travaille aujourd'hui sur des bases voisines. 47 Le rapport précité du CGEDD (n°009254-01 , mars 2014) mentionne une différence de 8 à 13 dB entre un wagon de fret à semelle de fonte et un wagon de fret neuf (conforme à la STI 2011) avec semelle de frein en composite. Une autre technique d'atténuation du bruit de freinage existe et qui n'altère pas les roues : les freins à disque, mais leur rapport coût efficacité est jugé insuffisant pour le fret ferroviaire (rapport précité du CGEDD, page 10 et 11). Railenium est l'Institut de recherche technologique (IRT) de la filière ferroviaire française. Il rassemble les compétences et les moyens issus de neuf centres de recherche, de dix-huit entreprises du secteur ferroviaire et de deux gestionnaires de réseaux. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 32/80 48 49 Rapport n° 011057-01 Malgré les difficultés techniques mentionnées ci-dessus, l'équipement du parc en freins à semelles composites apparaît comme une solution économiquement bien plus avantageuse que le traitement des points noirs par murs antibruit. Le rapport du CGEDD a estimé qu'il ne coûterait pas plus cher 50 que la protection par mur anti-bruit de la seule voie de la rive droite du Rhône. La question des triages, qui concentrent les sources de bruit (nombreux aiguillages, crissement des roues sur les voies en courbe, freinages brutaux, chocs) est une question sensible. Le bruit émis par le triage de Drancy en banlieue parisienne mobilise depuis plus de 30 ans la SNCF. Ses espoirs (et ceux des riverains) sont éveillés aujourd'hui par une technologie mise au point en Slovénie et adoptée depuis 2011 par le triage de Nürnberg en Allemagne (900 000 wagons par an, soit 4 fois Drancy). Il s'agit de vaporiser un produit lubrifiant sur les flancs des roues des wagons en amont des freins, ce qui élimine le bruit de crissement lors de leur passage dans les freins. S'agissant du bruit du roulement, la palette technologique est relativement ouverte. La technologie de référence est le mur anti-bruit, efficace mais onéreux. À ce propos, l'Allemagne développe actuellement un concept de mur bas, évidemment moins cher que le mur haut traditionnel (dont l'Autriche par exemple est devenue adepte), mais susceptible de réduire la propagation du bruit émis au contact de la roue sur le rail. D'autres technologies atténuant le bruit existent : · Les traverses en béton, qui conduisent moins les graves et infrasons que les traverses en bois ; · Le long rail soudé, le meulage des voies et l'amélioration de leur géométrie, pour atténuer les bruits dus aux secousses et incidemment accroître la longévité de la voie ; · Les mécanismes d'attache des rails sur les traverses par coussins absorbeurs et les patins réducteurs d'attrition sous les traverses. Toutes contribuent, à leur niveau, à l'atténuation du niveau sonore au voisinage des voies. Selon SNCF Réseau, cette contribution serait d'environ : · 9 à 12 dB pour le mur anti-bruit ; · 3 dB pour le long rail soudé ; · 3 dB pour les mécanismes d'attache ; · 2 à 3 dB pour l'absorbeur sur rail, dont les performances sont jugées un peu décevantes ; · 2 dB pour le meulage acoustique des voies, sur lequel SNCF Réseau fonde de grands espoirs. On rappellera que compte tenu des modalités de calcul du bruit, ces gains ne s'additionnent pas. Ils n'en concourent pas moins au même objectif, et peuvent être utilement combinés. 50 Le coût du remplacement intégral des semelles des wagons de fret est estimé à moins de 150 M. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 33/80 Rapport n° 011057-01 2.3.3. La recherche : orientations actuelles La recherche développement de solutions ferroviaires innovantes est conduite en France sous l'égide de l'institut de recherche technologique (IRT) Railenium, qui réunit les acteurs (opérateurs, académiques, ingénierie, constructeurs, BTP) du monde ferroviaire. Deux programmes sont en cours : · Cervifer (Certification Virtuelle en Ferroviaire), soutenu par Ademe sur la période 2013 - 2017, qui traite du prototypage virtuel pour la réduction du bruit de roulement, de la modélisation du bruit de crissement en courbe, et du développement de solutions antibruit et de leur validation expérimentale ; · Ecobruit, projet propre Railenium d'évaluation du coût des nuisances causées par le bruit ferroviaire et des bénéfices engendrés par les murs anti-bruit. Comme il a été dit plus haut, Railenium souhaiterait intéresser un industriel au développement d'un nouveau système de frein non bruyant, à l'image des freins à semelles composites adoptés par l'Allemagne et la Suisse. 2.4. Le bruit des transports routiers : une philosophie à repenser en intégrant l'ensemble des leviers En matière de lutte contre les nuisances sonores, la route connaît à peu près les mêmes symptômes que le rail : faiblesse des budgets pour la protection des zones habitées, inadaptation des moyens de contrôle et sanction et concurrence de plusieurs méthodes de cartographie de la nuisance. D'autres leviers sont mobilisables : qualité des véhicules et du revêtement routier notamment. 2.4.1. La protection : la politique de résorption des points noirs du bruit est dans une impasse Techniquement, la résorption des points noirs de bruit routier et ferroviaire repose sur le mur anti-bruit et l'isolation acoustique de façade. Sur un logement déterminé, ces deux solutions sont en général employées exclusivement l'une de l'autre. En revanche, il n'est pas rare qu'un immeuble élevé soit protégé par mur anti-bruit pour ses étages inférieurs et par traitement de la façade pour les étages supérieurs. Le choix entre mur anti bruit et isolation des logements se fait au cas par cas, en fonction des contraintes techniques (il faut un espace minimum entre la voie bruyante et l'immeuble pour construire un mur anti bruit) mais aussi économiques. Le mur anti bruit offre une meilleure protection, puisqu'il permet de diminuer le bruit non seulement dans le logement mais aussi dans l'air ambiant, mais il est beaucoup plus coûteux et n'est donc pas systématisé. Le coût de la résorption des points noirs de bruit des transports terrestres (ferroviaires et routiers) était estimé dans le rapport Serrou (1991) à 9 MdF, dont 2,6 MdF pour les premiers, et 6,4 MdF pour les seconds. Moins de 20 ans plus tard, le Comité opérationnel « bruit » du Grenelle (mars 2008) l'estimait dans une fourchette cohérente d'encore 1,5 à 2 Md, dont 1 Md sur la route. Il constatait toutefois qu'en 8 ans, 1 Md avaient été investis par l'État, les collectivités territoriales et les sociétés d'autoroutes sur le réseau national dans la résorption des points noirs de bruit. L'objectif de leur effacement en 7 ans paraissait alors réaliste. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 34/80 Comme vu plus haut, le Cerema estime aujourd'hui 51 à 850 000 le nombre de logements situés dans des points noirs de bruit routier 52. Contrairement au ferroviaire, la prise en compte du bruit actuel ou du bruit de la circulation prospective à terme ne change pas fondamentalement le résultat. Sur la base d'un coût de traitement unitaire par logement de 7 000 , le coût de résorption des points noirs de bruit serait de l'ordre de 6 Md, soit 6 fois plus que l'estimation produite en 2008. La différence provient clairement de la prise en compte toute récente des points noirs des réseaux « historiques » des collectivités territoriales.53 Le plan bruit de l'Ademe mené entre 2009 et 2015 a mobilisé environ 90 M pour le traitement des points noirs de bruit routiers et a permis de protéger de 3 324 logements (par mur anti bruit ou par isolation de façade). Toutefois, il n'existe pas de suivi fiable du processus de résorption, certaines initiatives n'étant pas tracées, les riverains pouvant aussi mener des travaux par eux-mêmes. Mais en matière d'utilisation des crédits dédiés à la route, si la demande politique est très forte sur les nouvelles infrastructures, elle est quasiment inexistante sur le traitement des nuisances sonores54. 2.4.2. Les interventions sur le véhicule pour réduire le bruit Le bruit routier a deux composantes principales : le bruit de roulement (contact pneurevêtement) et le bruit du moteur. On peut y ajouter le bruit aérodynamique du flux d'air autour du véhicule en mouvement. La réduction du bruit à la source passe donc par l'amélioration des performances acoustiques des véhicules, d'une part au travers des pneus pour limiter le bruit de roulement et d'autre part du moteur. En la matière, la norme technique est définie dans l'enceinte de la Commission économique pour l'Europe de l'ONU (CEE-ONU) à Genève, et traduite en droit communautaire par voie de règlements. La réglementation communautaire prévoit un durcissement progressif des normes sonores : · réduction de 3 à 4 dB de la valeur limite de bruit des nouveaux types de véhicules en l'espace de 8 ans, entre le 1er juillet 2016 et le 1er juillet 2024 (annexe 3 du règlement 540-2014) ; · pour les pneumatiques, relèvement de l'exigence de l'ordre de 3 dB, ce qui se traduit par la disparition du marché des pneumatiques repérés par le pictogramme à trois ondes caractéristique des pneus les plus bruyants. Dans le cas du pneumatique, il s'agit d'optimiser simultanément l'impact sonore, l'adhérence et la résistance au roulement, qui sont des exigences a priori contradictoires. En effet, une bonne adhérence suppose un pneu sculpté, mais il est ipso facto générateur de bruits du fait du contact de ses alvéoles avec la route. C'est 51 52 note à l'attention de la mission bruit de la DGPR en date du 6 octobre 2015 L'estimation est toutefois compliquée par la multiplicité des propriétaires de voies (les collectivités territoriales) et leur inégale propension à renseigner l'application MapBruit Le Grenelle de l'environnement avait, en 2008, estimé que ceux-ci pourraient avoisiner environ 10 fois plus de points noirs de bruit que les réseaux gérés par l'État, qui étaient les seuls pris en compte. Par exemple, l'actuel contrat de plan État ­ Région Rhône Alpes 2015 ­ 2020 n'affecte que 3 M à la réduction à la source du bruit, pour une région concernée au premier chef par la question (agglomérations lyonnaise et stéphanoise notamment), disposant d'équipes aguerries tant au sein de l'État que des collectivités locales, qui se sont mobilisées dans le cadre du plan bruit de l'Ademe. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 35/80 53 54 Rapport n° 011057-01 pourquoi, si des progrès très significatifs ont été enregistrés en matière de bruit, ils restent toutefois limités du fait de ces contraintes de sécurité. L'IFSTTAR, qui dispose de son propre banc d'essai acoustique, note que les fabricants se tiennent désormais à des niveaux de performances voisins. Pour l'IFSTTAR, le gain acoustique qu'on peut attendre du pneu (4 dB) est nettement moindre que celui qu'on peut escompter du revêtement de la route (9 dB, cf. infra). Un label existe pour la qualité des pneus, incluant le bruit55, mais il semble que ce critère soit peu retenu par les utilisateurs. L'augmentation de la part des véhicules électriques dans le parc sera un facteur déterminant du point de vue du bruit, surtout en ville, où les vitesses ne dépassent pas 50 km/h, vitesse à laquelle le bruit provient essentiellement du moteur et non du roulement. De façon approximative, on peut considérer que si les véhicules électriques représentaient la moitié du parc (ce qui pourrait être atteint d'ici 2040) , les nuisances sonores seraient en moyenne divisées par deux. En ville, ce gain serait bien supérieur, même si un minimum de bruit doit être maintenu pour la sécurité des autres usagers comme les piétons et les cyclistes56. Par contre, la situation serait quasi inchangée en zone périphérique et inter urbaine, dès lors que les limitations de vitesse sont maintenues au-dessus de 70 km/h57. Des études sont en cours pour évaluer l'impact du développement du parc électrique sur le bruit dans l'environnement. Elles permettront notamment de cerner les points noirs urbains du bruit qui disparaîtraient d'eux-mêmes. On voit que les véhicules 2 roues ne sont pas concernés par ces textes, alors que certains d'entre eux contribuent notablement aux émergences sonores. Sur ce point, on ne peut que se féliciter de ce que les 2 roues débridés ne soient plus assurés en cas d'accident58. La solution, qui reste à imposer, serait de concevoir des 2 roues indébridables, sauf à un coût (de réparation) rédhibitoire. Quoi qu'il en soit, le sujet de la réduction du bruit des deux roues n'est pas véritablement pris au sérieux. Une étude de l'IFSTTAR avec la participation de Peugeot a montré qu'on peut gagner 4 dB sur les petites cylindrées de 50 cm3 au prix d'un capotage des organes moteurs, d'un changement de l'échappement et de l'introduction d'une pièce moteur tournante nouvelle. De même, on observe une tolérance avec les voitures de sport 59 . Vitesse, bruit et plaisir de conduite restent encore étroitement associés pour les deux roues et certaines voitures, et sont des arguments de vente malheureusement peu controversés. 2.4.3. Le revêtement routier : d'importantes marges de progrès possibles En matière de bruit, des revêtements générant moins de nuisances ont été développés avec des résultats probants. L'IFSTTAR indique que des revêtements poreux de type « béton bitumineux drainants » (BBDr) ont été testés dans le passé en milieu urbain. Même si le gain acoustique était substantiel lors de leur mise en oeuvre (gain de 5 à 7 dB), les 55 56 57 58 Les deux autres critères sont la consommation en carburant et l'adhérence sur sol mouillé. On peut se reporter au projet européen eVADER : http://evader-project.eu/ Voir paragraphe 2.3.4 En revanche, on peut regretter qu'ils échappent au contrôle technique. Néanmoins, dans la mesure où le bridage et le débridage restent des opérations de routine, le passage au contrôle technique ne permettrait pas de les repérer. ll y a un bouton sur certaines voitures de sport qui permet de débrayer l'échappement (voir sur internet Porsche PSE) Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 36/80 59 Rapport n° 011057-01 phénomènes de colmatage réduisaient considérablement ce bénéfice après quelques années de service. Ces problèmes étaient principalement liés à la faible vitesse des véhicules, qui ne pouvait assurer l'auto-entretien de la couche poreuse. Pour l'espace urbain, il devenait ainsi urgent de conduire de nouvelles recherches sur d'autres types de structures de revêtement à faible bruit. De là sont nés les bétons bitumineux à couche très mince à faible granularité (BBTM). Les grandes entreprises françaises de construction routière ont amplifié leurs recherches sur ces nouveaux revêtements en travaillant plus spécifiquement sur la granularité et la composition du liant. Des BBTM de faible granularité ont ainsi été expérimentés sur sites réels. Ces revêtements présentent des caractéristiques intéressantes en termes de bruit de roulement au passage d'un véhicule (mesuré suivant la norme ISO 11819-1). Les gains obtenus peuvent aller jusqu'à 9 dB (soit une division quasiment par deux du bruit perçu) par rapport à un produit de référence. Toutefois, ces gains demandent à être contrôlés sur le long terme en intégrant notamment le vieillissement de l'enrobé. Les recherches se poursuivent sur le sujet, notamment dans un cadre franco-allemand60. . Le graphique ci-dessous illustre l'impact sonore possible des différentes natures de revêtements. Source : Laboratoire régional des ponts et chaussées de Strasbourg, 2012 (R1 = revêtement peu bruyant, R3= bruyant) Du point de vue économique, ces revêtements sont plus chers à la pose, mais aussi et surtout en entretien (nettoyage éventuel, durée de vie), ce qui fait qu'il est difficile de disposer aujourd'hui de résultats sur le surcoût global. Le recours à ce type de revêtement est assez récent. Dans un article récent publié sur le site de l'office fédéral 60 Ainsi, le projet ODSURF, financé par l'Ademe et la BASt1 en Allemagne a été consacré à l'élaboration et à la réalisation de nouvelles technologies de revêtement de chaussée à faible bruit et de nouveau matériaux adaptés au milieu urbain2. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 37/80 Rapport n° 011057-01 suisse de l'environnement61, un retour d'expérience sur la pose d'un revêtement peu bruyant indique un surcoût 8 % à la pose, mais auquel il faut ajouter un renouvellement estimé à ce jour par l'exploitant comme trois fois plus fréquent. Ces résultats corroborent les indications de Bruitparif datant de 2011 62, qui évoquent un surcoût pouvant aller de 25 % environ à 200 %, voire 300 % pour les BBDr bicouche (aujourd'hui évités). Le facteur coût doit être appréhendé de manière différente selon qu'il s'agit d'une nouvelle construction de route (surcoût à mettre en relation avec le gain de confort et de qualité de vie des futurs riverains de l'infrastructure) ou s'il s'agit d'un changement de revêtement en vue de résoudre le problème du bruit généré par le trafic sur une voirie existante (le surcoût doit alors être comparé aux coûts des autres mesures potentielles comme la construction d'écrans, l'isolation acoustique des bâtiments...). Une analyse coût bénéfice s'avère alors nécessaire pour chaque contexte. L'étude Bruitparif précitée fait référence à une étude danoise, qui compare le coût d'un revêtement routier type BBDr, la construction d'un mur anti-bruit et l'isolation acoustique des logements, en centre-ville, boulevard périphérique ou sur l'autoroute. Le rapport coût ­ efficacité (coût/dB(A)/habitation) est nettement favorable à la pose d'un revêtement acoustique. De plus, la réduction du bruit bénéficie à l'espace ouvert. S'il est incontestable que la pose de revêtement moins bruyant est un vecteur très efficace de la réduction du bruit dans l'environnement, le recours à ce type de produit reste peu fréquent en France. Une étude de 2014 de l'Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité (IDDRIM) auprès des collectivités a montré que le paramètre bruit est à peu près totalement absent des critères de choix posés dans les appels d'offres pour le renouvellement des revêtements routiers. L'étude montre que, outre un manque d'information sur les revêtements de chaussée peu bruyants, le principal frein à leur utilisation est l'absence de garanties sur la pérennité de leurs performances. Vient ensuite leur coût trop élevé, puis l'absence de cadre réglementaire ou normatif. Récemment, l'État et la région Île-de-France ont décidé de financer une expérimentation de pose d'enrobés acoustiques sur le réseau routier national non concédé. L'évaluation portera sur le suivi des caractéristiques mécaniques et acoustiques du revêtement, pour une durée de 3 ans sur ce dernier aspect. À ce stade, le surcoût à la mise en oeuvre est de 25 % et on estime une durée de vie réduite à 6 ans contre 10 ans du revêtement, ce qui correspond à un doublement du coût global d'investissement. Ce surcoût est important mais ne paraît pas insurmontable. En effet, selon la DGITM, sur cette base et à titre d'exemple, si l'on devait généraliser les enrobés phoniques sur 15 % du réseau routier national non concédé dans les zones urbaines (soit 50 % des voies les plus bruyantes), cela engendrerait un surcoût de plus de 30 M par an, soit environ 10 % du budget annuel d'entretien des chaussées (plus de 280 M par an ces dernières années). L'idée d'une labellisation du revêtement de la route lui-même est actuellement promue par l'IFSTTAR, la PFA Filière automobile et mobilités, Michelin et les entreprises routières en pointe sur le sujet (Colas et Eurovia). Notons que la qualité de l'exécution étant déterminante dans le résultat, le label ne pourrait procéder que d'une mesure a posteriori des performances acoustiques des tronçons routiers considérés. À ce sujet, la récente normalisation d'un protocole de mesure du bruit de roulement sur la chaussée est un atout. La labellisation doit en effet garantir une diminution effective du 61 62 Revêtements de routes peu bruyants : l'asphalte phonoabsorbant : un fort potentiel, 18 mai 2016, État des lieux des performances acoustiques de revêtements de chaussées, Bruitparif, décembre 2011 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 38/80 Rapport n° 011057-01 bruit perçue de façon immédiate, en mentionnant l'évolution de cette performance dans le temps. Par ailleurs, une initiative néerlandaise au sein du groupe ad hoc de la CEE-ONU (le WP 29) va dans le sens de la promotion d'une labellisation du niveau sonore des routes. L'ambition de certains acteurs est de formaliser une norme ISO. L'amélioration de la qualité des revêtements routiers, par la voie de la labellisation voire de la normalisation est donc tout à fait d'actualité, et la France a tout intérêt à être en pointe sur ce sujet. 2.4.4. Le comportement du conducteur : bruit, vitesse et sécurité routière Une autre voie de réduction du bruit à la source est l'intervention sur le comportement du conducteur, avec deux volets : la sensibilisation pour une conduite moins bruyante et la sanction des comportements non réglementaires. A priori, le conducteur est peu sensibilisé au bruit qu'il crée, à la fois parce qu'il est luimême dans un environnement bruyant et parce que la conduite réclame de sa part d'autres formes d'attention à l'environnement. Le graphique ci-dessous illustre le bilan des contributions sonores: bruit de roulement , bruit du moteur et bruit de fond au bruit total émis par un véhicule, de la deuxième à la cinquième vitesse. On observe que pour les faibles vitesses,(entre 30 et 50 km/h) le bruit total est surtout composé du bruit du moteur, alors que pour les vitesses plus élevées (à partir de 60 km/h) le bruit total se confond quasiment avec le bruit de roulement (bruit du pneu). Il est donc intéressant d'amener l'automobiliste circulant en milieu habité à modérer sa vitesse. Les radars automatiques de contrôle des vitesses ont clairement réussi à apaiser la circulation. Ils font partie des solutions. Cela dit, l'assouplissement de la Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 39/80 conduite reste avant tout affaire de pédagogie vis-à-vis du conducteur qui est aussi, à ses heures, résident riverain d'une infrastructure bruyante. La maîtrise du bruit de la circulation suppose que les conduites et engins bruyants puissent être sanctionnés. Le code de la route dispose en la matière de différents articles réglementaires63, notamment l'article R325-8 : « lorsqu'un véhicule paraît exagérément bruyant, le fonctionnaire ou agent habilité à prononcer l'immobilisation peut prescrire de le présenter à un service de contrôle du niveau sonore en vue de sa vérification ». Cet article permet en théorie l'interception et la verbalisation par les forces de l'ordre d'un véhicule bruyant, sans qu'il soit au demeurant nécessaire d'exciper d'un niveau sonore quelconque. Néanmoins, les modalités de telles interceptions posent parfois de sérieux problèmes de sécurité (comment arrêter une moto circulant à grande vitesse dans un flux urbain dense), la mesure du niveau sonore suppose un matériel et des conditions opératoires qui ne sont que rarement à la portée des équipes de police, et l'absence de critère quantitatif de l'appréciation du bruit « exagéré » conduit bien souvent les fauteurs de bruit procéduriers à faire rapporter devant les tribunaux les condamnations dont ils ont été les sujets. En réponse à une question parlementaire64, le ministère de l'Intérieur précise que « chaque année, plus de 20 000 contraventions sont dressées, aussi bien pour sanctionner les usagers qui utilisent leur deux roues motorisé à des régimes moteur anormalement élevés, que pour sanctionner ceux qui modifient leurs dispositifs d'origine ou adaptent des versions non homologuées ». Ce chiffre, rapporté aux 24 millions de contraventions dans le domaine de la sécurité routière (dont 13,6 millions pour les excès de vitesse) est très faible. De fait, il n'existe à peu près plus aujourd'hui de contrôle/sanction des bruits émergents dans la circulation routière. 2.4.5. La recherche : les orientations actuelles La recherche sur le bruit des transports routiers intègre les travaux de la recherche publique conduits par l'IFSTTAR et le Cerema et ceux du secteur privé portés par les filières de l'automobile et des travaux publics. Ces travaux portent notamment sur le pneumatique et sur le revêtement, et sur le contact entre les deux, ainsi que sur les solutions curatives classiques telles que le mur anti-bruit (Cerema Strasbourg et CSTB Grenoble et IFSTTAR sur les méta-matériaux) et sur la relation entre le bruit et son ressenti par l'individu (psycho-acoustique, études épidémiologiques). L'IFSTTAR et le Cerema viennent de formaliser un projet d'unité mixte de recherche en acoustique environnementale, dont une partie des travaux porte sur le bruit routier. 63 l'article R 318-3 précise que « Les véhicules à moteur ne doivent pas émettre de bruits susceptibles de causer une gêne aux usagers de la route ou aux riverains. Le moteur doit être muni d'un dispositif d'échappement silencieux en bon état de fonctionnement sans possibilité d'interruption par le conducteur. Toute opération tendant à supprimer ou à réduire l'efficacité du dispositif d'échappement silencieux est interdite. » Question n° 90686 de M. Bernard Accoyer, réponse publiée au JO le 29 mars 2016. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 40/80 64 Rapport n° 011057-01 2.5. Les pistes de progrès : action coordonnée selon les différents leviers disponibles, convergence des principes, réduction à la source, sanction des contrevenants Partant de la description qui vient d'être faite des modalités et des perspectives de prise en compte des nuisances sonores dues aux transports, on esquisse ci-dessous quelques propositions en vue d'une meilleure intégration du bruit dans les politiques publiques correspondantes. On s'attache notamment à développer la réduction à la source, sans exclusive, mais de préférence aux politiques curatives. 2.5.1. Fiabiliser et simplifier les dispositifs de mesure et de cartographie du bruit La lutte contre toute nuisance nécessite au préalable de bien la définir, la mesurer et la transcrire dans un document clair, dont la méthode d'élaboration fait l'objet d'un consensus pour que les données soient une référence commune. L'enquête Ifop de septembre 2014 a montré qu'un Français sur cinq seulement connaît l'existence des cartes de bruit et des PPBE. On a vu plus haut la superposition et l'incohérence des cartographies et méthodes de mesures. On doit viser à ce qu'un seul dispositif de modélisation et de cartographie du bruit fasse référence. Il paraît naturel de préférer le dispositif communautaire des cartes de bruit. Ces cartes sont aujourd'hui établies sur la base d'un réseau de mesure et d'outils de modélisation. On peut imaginer aisément qu'elles s'enrichissent progressivement des mesures des usagers65, permettant de produire des cartes plus précises et actualisées plus fréquemment66. Le calendrier de mise en oeuvre initialement prévu en application de la directive a pris beaucoup de retard et les collectivités sont diversement avancées sur le sujet. Par ailleurs, les autorités désignées responsables (communes et/ou intercommunalités) ne relevaient pas toujours de l'échelle pertinente. Ce n'est que tout récemment (arrêté interministériel du 14 avril 2017) que la liste des 45 intercommunalités de plus de 100 000 habitants concernées par ce dispositif a été publiée. Selon les données de la mission bruit de la DGPR, plus de 80 % la population ainsi concernée est déjà couverte par une carte de bruit publiée. Les dynamiques locales sont cependant variables. Après la région Île-de-France et l'agglomération lyonnaise, le plan bruit de l'Ademe a permis de faire émerger des projets d'observatoires dans quatre autres grandes agglomérations : Nice, Grenoble, Aix-en-Provence et Saint-Étienne. Pour qu'à terme les cartes de bruit puissent devenir la référence, voire devenir opposables dès lors qu'un certain niveau d'exposition au bruit crée des droits ou des devoirs, il faut s'assurer de la qualité de la méthodologie et donc poursuivre le développement de l'expertise autour des principaux acteurs déjà engagés (Acoucité, Bruitparif et le Cerema notamment), soutenir la création d'observatoires dans les collectivités concernées et diffuser largement le savoir-faire acquis (concertation avec les citoyens et associations, information, communication,...). 65 Dans le cadre du projet européen ENERGIC-OD, le CNRS1 et l'Ifsttar ont développé une application smartphone baptisée NoiseCapture, qui permet de créer des cartes du bruit en milieu urbain. L''application mesure notre environnement sonore quand on se promène en milieu urbain, et permet même d'évaluer la perception qu'on en a avec des tags. NoiseCapture, est aussi une infrastructure informatique spécifique pour traiter toutes ces données sonores géolocalisées, pour les restituer sous forme de cartes de bruit. L'échelle actuellement requise par l'UE est 1/100 000 et la fréquence actualisation tous les 5 ans. 66 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 41/80 1. Faire des cartes de bruit établies en application de la réglementation européenne la référence en matière de mesure du bruit dans l'environnement. Développer l'expertise pour fiabiliser la qualité des données, faciliter l'usage, la compréhension et la diffusion de ces cartes. Promouvoir cette méthodologie dans les collectivités concernées. (DGPR, Ademe, Cerema) 2.5.2. Un traitement des points noirs coordonné selon les différents leviers disponibles Dans un contexte budgétaire des plus contraints, la politique de traitement des points noirs de bruit doit être reprise à nouveaux frais. Aux investissements de protection (murs anti-bruit et isolation acoustique des façades) qui ont été au coeur des politiques suivies jusqu'à présent peuvent et doivent s'adjoindre les autres actions pertinentes, dont on a vu plus haut qu'elles ne manquent pas. On peut ainsi penser : · au choix d'un revêtement routier moins bruyant ; · à la réduction imposée, et le cas échéant contrôlée par radar, de la vitesse autorisée ; · à des aménagements (giratoire plutôt que feux...) et à des plans de circulation évitant les confluences et déviant le trafic ; · et à l'aide à la mutation du tissu urbain. C'est d'autant plus légitime que le droit actuel, qui considère comme traité un immeuble à l'intérieur duquel le niveau sonore est redevenu acceptable une fois les fenêtres fermées, n'est pas adapté à l'évolution des moeurs qui veulent que l'on vive, notamment en été et dans les lieux d'accueil des enfants et des jeunes, fenêtres ouvertes. S'agissant de la mutation du tissu urbain, il peut être intéressant, dans les secteurs où la pression immobilière est forte, de réfléchir à l'alternative de l'implantation d'immeubles de bureau écrans en bordure de voie, voire de mutation du tissu résidentiel ou de requalification urbaine vers un immobilier d'activité moins sensible au bruit, conduisant au relogement progressif des populations exposées. Les immeubles locatifs seraient à traiter en priorité, et en particulier le locatif social, pour lesquels le relogement peut être appréhendé à l'échelle du parc de l'office HLM considéré. Les opérateurs de portage foncier pourraient également être mobilisés en cas de nécessité d'achat. Dans d'autres cas, la couverture totale ou partielle des infrastructures, dans le cadre d'opérations d'aménagement, s'avère une solution, coûteuse, possible. La mise en oeuvre coordonnée de ces différentes solutions dont chacune contribue à l'objectif de maîtrise des nuisances sonores suppose une véritable ingénierie de projet territoriale. La collectivité locale concernée a vocation à en assurer la direction, avec l'aide du propriétaire de la voie (quand ce n'est pas elle) et le soutien des réseaux d'expertise, au premier rang desquels le réseau scientifique et technique ministériel. La plupart des mesures énoncées ci-dessus ne nécessitent pas de subventions directes, mais elles ont un coût. Pour autant, il ne saurait être question d'abandonner totalement la politique de résorption des points noirs de bruit par les voies classiques d'isolation des façades et de murs anti-bruit, notamment dans les zones où la vitesse de circulation est de plus de 70 km/h. Or, depuis 2014, plus aucun crédit n'est Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 42/80 programmé. Poursuivre une politique volontariste de lutte contre le bruit dans l'environnement et de traitement des bâtiments les plus exposés nécessite de mobiliser un minimum de moyens humains et financiers, aujourd'hui très faibles dans le budget de l'État comme dans ceux des collectivités locales. Une étude réalisée pour le compte de l'Ademe en février 2015 par Beauvais consultants67 a étudié plusieurs scénarios possibles pour financer le traitement des points noirs de bruit routiers. L'étude est établie sur l'hypothèse d'un besoin de financement de 110 M par an68, ce qui est inférieur aux recommandations du Grenelle en 2008 (450 M par an) et ne permet pas de traiter l'ensemble du parc exposé, mais ce qui est beaucoup plus élevé que le rythme du plan Ademe 2009-2015 (90 M engagés sur 6 ans). Notons qu'en l'état actuel des moyens, de la typologie restreinte des actions financées et des procédures, les acteurs publics (Ademe, DDT et collectivités) pourront difficilement mettre en oeuvre davantage de crédits. Quoi qu'il en soit, pour obtenir une telle somme à l'aide d'outils économiques, en utilisant le principe de « pollueur-payeur », le rapport énonce quatre mesures alternatives de taxation qui lui paraissent pouvoir être étudiées sérieusement : · une taxe sur les ventes de carburant routier : 0,0017 par litre, soit 0,12 % d'augmentation du prix du litre, · une taxe sur les immatriculations : 6,64 par immatriculation (véhicules neufs et d'occasion), soit une augmentation du coût du certificat de 2 %, · une taxe sur les véhicules en circulation : 1,57 par véhicule et par an, soit une augmentation du prix de revient kilométrique de 0,03 %, · une taxe à la fois sur les ventes de carburant et les immatriculations : 0,0009 (+0,06 %) par litre et 3,32 (+1 %) par immatriculation. La préférence de la mission va plutôt à la première solution. D'une part, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE, anciennement TIPP) existe déjà, alors qu'il semble difficile dans le contexte actuel de créer un nouvel impôt. D'autre part, cette contribution est le moyen qui semble le plus juste pour représenter la nuisance sonore effectivement produite, qui dépend, tout comme la consommation de carburant, du nombre de kilomètres parcourus, de la puissance et de la nature du moteur (un moteur hybride, moins bruyant en ville, consomme moins de carburant). Si la proposition d'augmentation de la TICPE pour alimenter spécifiquement la politique du bruit ne pouvait aboutir 69, il s'agirait alors de dégager, au sein du produit qu'elle génère actuellement, une enveloppe spécifique, extrêmement faible au regard de son produit global (plus de 25 milliards d'euros en 2015, pour les seuls carburants routiers). Quel que soit le choix du mode de financement (l'un de ceux précités ou un autre) et son montant, compte tenu du niveau faible des moyens actuels au regard des besoins et des enjeux, il convient de tirer les conclusions de l'évaluation du plan bruit et de rechercher un maximum d'efficacité et de facilité de mise en oeuvre dans l'utilisation des crédits. La mise au point d'un nouveau « plan bruit » doit élargir davantage la palette des actions financées, notamment en direction des collectivités locales, dans une approche plus intégrée du bruit dans l'environnement. Dès lors, un montant annuel 67 Étude d'outils économiques visant à financer le traitement des points noirs de bruit routier, BEAUVAIS CONSULTANTS, 16 février 2015. Parc de 300 000 logements à traiter, coût moyen unitaire de 7300 , programme établi sur 20 ans. Il faudrait en exonérer les produits qui ne sont pas des carburants routiers (fioul domestique, gazole non routier, ...) Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 43/80 68 69 Rapport n° 011057-01 de l'ordre de 100 M, comme envisagé dans l'étude précitée, ne paraît pas disproportionné au regard des enjeux (coût social minimum du bruit des transport de plus de 20 milliards d'euros par an, dont près de 90 % pour le transport routier). Pour ce qui concerne l'isolation acoustique des façades, la gestion des opérations du plan bruit a été particulièrement lourde et sur la plupart des opérations, le taux de logements effectivement protégés sur une façade n'excédait que rarement 50 % du fait du refus des propriétaires de réaliser les travaux, souvent pour des raisons financières. La mission préconise donc de concentrer les interventions publiques sur certaines opérations particulièrement exemplaires tant sur le plan santé - environnement (ne retenir que les bâtiments répondant aux critères des points noirs du bruit) que sur le plan social. En effet, de nombreux logements exposés (dans le parc privé comme dans le logement social) sont occupés par des gens à très faible niveau de ressources, pour lesquels une participation de 20 % au coût total des travaux n'est pas accessible. Le financement pourrait être porté à 100 % du coût des travaux et porté par une maîtrise d'ouvrage unique, pouvant être confiée aux collectivités. Cette disposition éviterait des protocoles financiers avec de multiples co-contractants, permettrait de maîtriser plus facilement les coûts (appel d'offre unique) et de s'assurer que tous les logements seront effectivement protégés. 2. Dégager un financement pérenne permettant de soutenir notamment les collectivités locales dans la politique de traitement des zones les plus exposées au bruit, intégrant de nouveaux leviers (exploitation, aménagement et revêtement routiers, mutation du tissu et des usages urbains). Concentrer les crédits alloués au traitement des façades sur des opérations exemplaires, à forte dimension sociale, avec un financement pouvant aller jusqu'à 100 % du coût total. (DGPR, Ademe, DGITM) Le dispositif envisagé ne concerne que le secteur routier. Un programme spécifique doit pouvoir être mis en place par d'autres voies pour le secteur ferroviaire, avec un financement en provenance du secteur ferroviaire et de ses usagers, qu'il s'agisse du fret ou du transport de voyageurs. 2.5.3. Mieux prendre en compte le bruit dans la création des nouvelles infrastructures L'Autorité environnementale (Ae), placée au sein du CGEDD a adopté le 8 juillet 2015 et publié une note sur la prise en compte du bruit dans les infrastructures de transport routier et ferroviaire. Après dépouillement de 101 avis rendus depuis 2009, et tout en se félicitant de la nette amélioration de la prise en compte du bruit dans les études d'impact, l'Ae identifie six pistes d'amélioration allant pour la plupart au-delà de la stricte application des prescriptions réglementaires. Ce sont : · 1. Améliorer la présentation au public ; · 2. Mettre en perspective la stratégie adoptée au regard de l'objectif de respect de la réglementation ; · 3. Tenir compte des émergences : l'Ae rappelle à ce propos que l'Anses, dans son rapport de 2013, comme l'OMS, estiment « qu'un indice événementiel serait mieux adapté pour évaluer les risques de perturbation du sommeil » ; · 4. Inscrire le bruit dans la séquence éviter - réduire - compenser (ERC) ; Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 44/80 · 5. Faire le lien avec la politique des points noirs : en jouant de la large palette des solutions techniques à disposition, et non de la seule isolation des façades qui n'est efficace que fenêtres fermées ; · 6. Tenir compte des inégalités sociales face aux nuisances et de la multiexposition : observant que les situations de multi exposition tendent à se concentrer sur les populations les plus défavorisées, l'Ae recommande que les nouveaux projets d'infrastructure prennent en compte la qualité de vie globale des habitants concernés et ajustent les mesures prises en conséquence. La mission fait sienne ces recommandations, qui corroborent sa proposition de développer une approche intégrée du bruit dans l'environnement, ne se limitant pas au traitement des façades des bâtiments identifiés comme « points noirs du bruit » et de tenir également compte de la situation sociale des habitants. 2.5.4. Associer le bruit à la sécurité routière et mettre à l'étude un système de contrôle et sanction automatisés des fauteurs de bruits émergents Le respect des limites de vitesse est avant tout compris au titre de la sécurité. Dans certains cas, il est aussi justifié par le respect des riverains et la nécessité de produire moins de bruit. Les accélérations rapides sont aussi une source de bruit supplémentaire et inutile. Le bruit doit donc être intégré dans la qualité de conduite par exemple au travers de l'éco-conduite, qui vise d'abord à mieux maîtriser la dépense énergétique. Les conducteurs pourraient utilement être sensibilisés sur le sujet, ce qui favorisera de plus l'acquisition de véhicules électriques. De surcroît, rappelons qu'une conduite apaisée réduit aussi la pollution atmosphérique. Ainsi, la limitation de vitesse sur les voiries périphériques (de 110 km/h à 90 km/h ou de 90 km/h à 70 km/h ) a des effets multiples qui plaident en faveur de leur examen : réduction du bruit, réduction de la pollution de l'air, amélioration de la capacité de transit avec réduction des embouteillages. Le contrôle de la vitesse par radar pour le respect du bruit et non pour la seule sécurité serait le bienvenu sur certains tronçons urbains. Une discussion avec le ministère de l'intérieur s'imposera au préalable. En effet, le réseau des radars est actuellement implanté sur les lieux les plus accidentogènes, ce qui répond certes à son objectif premier, mais sans considération de la pollution sonore. Le contrôle des émergences atypiques sur route doit être envisagé. Il serait intéressant de s'inspirer de l'expérience acquise depuis 2005 en matière de contrôle sanction automatisés par radars de la vitesse sur route. L'idée serait de mettre au point, de faire valider et d'installer sur le bord des routes, notamment en milieu urbain et sur les points noirs, des appareils de mesure qui seraient au bruit ce que les radars automatiques de détection des véhicules en excès de vitesse sont aujourd'hui à la vitesse. La technologie existe. Elle est fondée sur le principe de la stéréo. Elle a été développée il y a 25 ans en vue de la localisation des snipers dans un environnement urbain. Elle a certes connu des tentatives avortées (notamment au Canada) et des résultats décevants (travaux de Greg Watts au Royaume-Uni). Elle est pourtant testée depuis 2016 par Bruitparif dans quelques quartiers animés en soirée de la capitale, à l'aide d'un appareil à 4 têtes enregistreuses appelé « méduse », et fait l'objet de recherches au sein de la communauté scientifique. Elle nécessitera sans doute des développements technologiques avant de pouvoir obtenir la validation des autorités judiciaires, mais offre des perspectives intéressantes de pacification du trafic. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 45/80 3. Associer le bruit à la politique de sécurité routière, sensibiliser les conducteurs et mettre à l'étude un système de contrôle sanction automatisé des bruits émergents excessifs causés par certains véhicules. (DGITM, DGPR, en lien avec le ministère de l'Intérieur) 2.5.5. Anticiper l'évolution de la réglementation communautaire en matière de prévention Dans un domaine où l'Union européenne donne désormais le tempo en matière de réglementation, il est important que la France sache anticiper pour faire valoir les principes auxquels elle est attachée. Comme on l'a vu, elle pourrait engager une démarche active sur deux questions au moins : la labellisation des revêtements peu bruyants et le bruit des wagons de fret. La labellisation des revêtements de chaussées peu bruyants est un sujet émergent au niveau européen alors même qu'un savoir faire est développé en France et promu par la filière. De plus, une démarche de labellisation serait de nature à mieux valoriser ces produits, trop peu utilisés en France. 4. Encourager la labellisation et la promotion de l'utilisation des revêtements de chaussées peu bruyants. (DGITM) Si le sujet est en cours de discussion au niveau européen, il est certain que la réglementation en matière de bruit ferroviaire en Union Européenne va se durcir d'ici moins de 10 ans. À très court terme, les semelles de fonte seront interdites en Allemagne et en Suisse. Si les systèmes de freinage des wagons français ne sont pas d'ores et déjà progressivement renouvelés, le fret français risque une très forte pénalisation le moment venu. La DGITM suggère une distinction entre différents types de section selon leur niveau de sensibilité vis-à-vis du bruit causé par les wagons de fret. Cette position devra toutefois être défendue à Bruxelles. Il est donc urgent de programmer les investissements correspondants, en priorisant sur les wagons circulant sur les voies les plus fréquentées ou sensibles (international, triages urbains, itinéraires habités comme la vallée du Rhône ou Serqueux ­ Gisors) ainsi que sur les wagons circulant en Allemagne ou en Suisse. Selon le rapport du CGEDD précité70, le coût total estimé est de l'ordre de 150 millions d'euros. Cette dépense pourrait être étalée sur 5 ans, soit 30 millions d'euros par an. En anticipant une échéance qui pourrait être 2025, il faudrait commencer au plus tard en 2020, sans compter qu'à cette date, les wagons non équipés d'un nouveau dispositif de freinage ne pourront plus circuler en Allemagne et en Suisse. 5. Présenter sous un an un programme d'investissement pour le remplacement des systèmes de freinage des wagons de fret, permettant aux opérateurs français de respecter les échéances européennes (DGITM, en lien avec les propriétaires de wagons et opérateurs de fret). 70 rapport n° 009254-01 de mars 2014 du CGEDD sur le bruit du fret ferroviaire Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 46/80 Rapport n° 011057-01 3. Le bruit, une thématique mal identifiée dans les politiques d'urbanisme, d'habitat et de construction 3.1. Le bruit encore peu intégré dans la planification et l'aménagement urbains 3.1.1. Le code de l'urbanisme ignore le bruit, à l'exception de celui du trafic aérien Comme il a été dit plus haut, le code de l'urbanisme n'édicte de contraintes à l'urbanisation qu'au voisinage des aérodromes. Le long des voies routières ou ferroviaires à fort trafic, les constructions sont possibles sous réserve du respect, dans une bande plus ou moins large selon le niveau de bruit généré par l'infrastructure, de prescriptions d'isolation acoustique. En principe, l'implantation de toute construction est soumise à l'obtention du permis de construire. Ce permis « peut être refusé, ou n'être accordé que sous réserve de prescriptions spéciales, si les constructions sont susceptibles, en raison de leur localisation, d'être exposées à des nuisances graves, dues notamment au bruit » (article R111-3 du code de l'urbanisme). Mais, selon l'article L 111-1 du code de l'urbanisme, cette disposition ne s'applique pas aux communes dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, c'est-à-dire la plupart des communes. Dans ce cas, il faut tenir compte des zones ou parties de zones qu'il délimite (zones industrielles par exemple) et dans lesquelles certaines constructions peuvent être interdites, ou au contraire seules autorisées, pour des raisons diverses, dont le bruit . Il n'existe donc paradoxalement aucune restriction de droit à l'occupation de l'espace riverain des voies bruyantes par des immeubles d'habitation ou d'accueil de publics sensibles tels que les enfants. Il est donc possible de construire au voisinage des voies ferrées et des routes à trafic intense, dès lors que les immeubles respectent les normes d'isolation acoustique aux bruits extérieurs. De fait, il a été signalé à la mission des exemples paradoxaux de crèches implantées en ZAC le long d'une voie rapide urbaine, alors que les terrains à l'arrière, jugés commercialement plus intéressants, étaient réservés aux bureaux et aux entreprises. A contrario, les urbanistes et les architectes savent aujourd'hui construire le long des voies bruyantes des immeubles tolérants au bruit (bureaux, hôtels, salles de sport...), dont la façade côté voie est occupée par les espaces les moins nobles (couloirs, cuisines et sanitaires...) et qui jouent vis-à-vis des immeubles à l'arrière le rôle bienvenu d'écrans acoustiques. Le silence du code de l'urbanisme sur le bruit des transports terrestres, comparé aux dispositions très complètes qu'il édicte au voisinage des aérodromes, surprend. Il paraît étrange qu'on puisse implanter une crèche ou une nouvelle école le long d'une voie rapide urbaine, sous la seule condition que le bruit à l'intérieur, fenêtres fermées, respecte les valeurs limites édictées par la réglementation. On rappellera à ce propos la déclaration de Parme des ministres européens de l'environnement et de la santé (2010) engageant l'UE et ses États membres à réduire l'exposition des enfants au bruit et demandant à l'OMS de produire des lignes directrices appropriées. Si la réglementation permet au PLU d'édicter des limitations, elle ne l'impose pas. Les secteurs affectés par le bruit de part et d'autre des voiries classées selon le processus de classement sonore des voies décrit au paragraphe 2.2.1 (entre 10 m et 300 m selon Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 47/80 leur catégorie sonore) ainsi que les prescriptions d'isolement acoustiques doivent toutefois être annexés au PLU. 3.1.2. Le plan de prévention du bruit dans l'environnement : un document de trop dans le maquis de la planification ? Comme on l'a vu au chapitre précédent, les cartes de bruit sont la base d'une démarche de réduction au travers des plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE), qui doit être compatible avec le PLU. Il vise à prévenir les effets du bruit, à en réduire le niveau ainsi qu'à préserver les « zones calmes ». Il doit comporter une évaluation du nombre de personnes exposées à un niveau de bruit excessif et identifier les sources de bruit dont les niveaux doivent être réduits. Il doit également recenser les mesures proposées par les autorités compétentes sur le territoire en question pour réduire les niveaux de bruit et lutter contre les nuisances sonores. Il doit préciser les financements éventuellement disponibles et les échéances prévues pour la mise en oeuvre des mesures recensées. Les PPBE sont diversement mis en oeuvre et leur qualité est très inégale. Selon les données de la mission bruit de la DGPR, le taux d'exécution des PPBE par les collectivités est tel que 57 % de la population concernée est couverte par un tel plan. Bien souvent, le PPBE est perçu comme un document de plus ou de trop, dans le maquis des documents de planification ou de programmation. L'Ademe a récemment lancé un appel à manifestation d'intérêt pour intégrer la démarche des PPBE à celle des plans climats air énergie territoriaux (PCAET). Actuellement, le bruit ne relève pas des PCAET. Dans cette nouvelle approche, il s'agit de lier le bruit à la qualité de l'air, en le considérant d'une certaine manière comme un indicateur de celle-ci, à l'instar du dioxyde d'azote ou des particules fines. Dans cet esprit, l'observatoire de Lyon a développé une plate-forme « air-bruit »71, outil régional de l'exposition du territoire aux nuisances air et bruit. L'outil propose des cartes distinctes et combinées pour les deux indicateurs, qui intègrent des problématiques proches. Leur utilisation commune dans les démarches de prévention et de traitement a bien entendu du sens. La démarche de liaison « air-bruit » est à poursuivre tant dans la cartographie des nuisances correspondantes que dans leur intégration dans les PCAET, qui pourraient devenir des PCAEBT. La mission privilégie une autre piste, qui consisterait à intégrer davantage le bruit dans la planification urbaine. Au sein du PLU serait développé un volet bruit, présentant un plan d'actions, ce dernier « valant » PPBE. L'évaluation environnementale comporterait un chapitre bruit, sur lequel l'Autorité environnementale serait amenée à se prononcer. Le lien avec le règlement de chaque zone serait plus aisé, il préciserait par exemple les limitations à la construction des logements ou des établissements accueillant des personnes sensibles dans les zones les plus exposées. Les cartes de bruit seraient alors annexées au PLU et intégrées dans le futur outil Géoportail. Comme indiqué dans le chapitre précédent, cette dernière étape suppose toutefois que la méthodologie de la cartographie soit encore améliorée pour que leur fiabilité ne soit pas contestée. On rappellera que la Commission européenne a mis en demeure la France en raison de son retard dans la publication des cartes et dans la réalisation des plans. Pour ce motif plusieurs circulaires et instructions du ministère de l'environnement ont invité au fil des années les préfets à sensibiliser et mobiliser les collectivités locales pour 71 ORHANE : observatoire Environnementales Régional Harmonisé Auvergne-Rhône-Alpes des Nuisances Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 48/80 l'élaboration des cartes et plans. Fin 2017, cette situation s'est améliorée 72. Une sanction financière, qui engagerait solidairement l'État et les collectivités locales, reste toujours possible. 3.1.3. L'intégration du bruit dans l'aménagement urbain comme une composante à part entière de la qualité de vie Si la réglementation de l'urbanisme offre peu d'outils permettant de réduire les nuisances sonores dans les villes et dans les zones particulièrement affectées par le bruit, la demande citoyenne se fait plus exigeante pour un environnement garantissant une réelle qualité de vie. Il s'agit dans le cadre d'une organisation de l'espace, des circulations, de l'affectation du bâti, en fonction du contexte et des contraintes, de maîtriser l'environnement sonore de façon harmonieuse, de construire avec les sons dans le respect de l'identité des lieux afin d'offrir un cadre de vie agréable. Parmi les opérations urbaines en capacité d'intégrer la réflexion sur la réduction du bruit figure le concept d'éco-quartiers ou encore de haute qualité environnementale (HQE) des aménagements. On peut noter qu'aucune de ces deux démarches ne fait explicitement référence au bruit. Dans la démarche éco-quartier issue du plan ville durable lancé en 2008, l'engagement vis-à-vis du bruit a été inclus au départ dans l'ensemble « offrir un cadre de vie agréable et sain », devenu en 2016 « assurer un cadre de vie sûr et qui intègre les grands enjeux de santé, notamment la qualité de l'air ». De même, le référentiel HQE aménagement fait référence au bruit dans un ensemble « santé » incluant les nuisances sonores olfactives et visuelles, la qualité de l'air extérieur et intérieur, les risques sanitaires (sols pollués, champs électromagnétiques, sites et sols pollués). Les retours d'expérience montrent que dans ces démarches, le bruit est rarement pris en compte en tant que tel, même s'il y a de ce point de vue, des opérations exemplaires 73 en général dans les zones les plus exposées. En pratique, la prise en compte du bruit n'est pas encore dans les « standards » de l'aménagement urbain dans lesquels la dimension sonore reste encore marginale par rapport à d'autres impératifs. Les collectivités disposent également de la possibilité d'instaurer des espaces dits « zone calmes » et « zone d'apaisement » introduites dans la législation en 2002 par la directive européenne et définies dans l'article L572-6 du code de l'environnement comme « des espaces extérieurs remarquables par leur faible exposition au bruit, dans lesquels l'autorité qui établit le PPBE souhaite maîtriser l'évolution de cette exposition compte tenu des activités pratiquées ou prévues »74. Un récent guide « Du calme en ville, aménager en faveur du bien être » du Cerema présente la démarche et quelques opérations exemplaires réalisées à Lyon, Bourg-enBresse, Bordeaux, Grenoble ou encore Rotterdam et Bilbao. Il faut promouvoir ces démarches en vue d'une meilleure prise en compte du bruit dans l'aménagement urbain. Mais force est de constater que le bruit n'est pas une préoccupation identifiée par l'administration : au sein de la sous-direction « qualité de 72 La définition récente (avril 2017) des nouvelles entités responsables rend encore fragile les statistiques, mais la DGPR estime que le taux de couverture rapporté à la population concernée est de 87 % s'agissant des cartes de bruit, et de 57 % s'agissant des PPBE Par exemple la ZAC Claude Bernard, opération de renouvellement urbain située dans le 19ème arrondissement à Paris, le long du tram 3 et de la future gare RER E « évangile ». La zone calme se caractérise par Lden<55 dB(A) ; la zone d'apaisement est comprise entre 55 dB(A) et 65 dB (A). Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 49/80 73 74 Rapport n° 011057-01 vie » de la direction de l'urbanisme, de l'habitat et des paysages (DHUP), on reconnaît volontiers que la question du bruit n'est pas ou très peu intégrée dans les critères pris en compte pour définir la qualité de vie. 6. Prendre en compte le bruit dans la planification urbaine en y intégrant un « volet bruit ». Inciter à définir dans les PLU des restrictions d'usage en matière de construction dans les zones fortement exposées pour épargner les publics sensibles et à définir des orientations en matière d'aménagement urbain intégrant le bruit dans les critères de qualité de vie. (DHUP) 3.1.4. Trop de logements nouvellement construits ne sont pas conformes à la réglementation acoustique Le contrôle du respect des règles de construction (contrôle CRC) des bâtiments neufs est piloté par la DHUP et réalisé par le Cerema. L'administration a régulièrement constaté, lors de ces contrôles, qu'en matière acoustique, plus d'un logement sur deux n'était pas conforme à la réglementation75. Cette piètre performance doit être corrigée, surtout si l'on considère que les bruits de voisinage sont perçus comme une nuisance importante et que leur coût social l'est tout autant. Il faut ajouter que l'isolation acoustique vis-à-vis de l'extérieur, si elle est de bonne facture (ce qui est en général le cas pour les logements neufs), fait ressortir les bruits intérieurs. Depuis le 1er janvier 2013, un arrêté76 impose aux maîtres d'ouvrage de signer une attestation de prise en compte de la réglementation acoustique à réception du chantier pour toute opération de logements collectifs ou de maisons individuelles accolées. Cette attestation doit être produite à l'autorité ayant délivré le permis de construire, en général le maire. Pour les opérations comportant au moins 10 logements, des mesures acoustiques doivent être réalisées. L'attestation engage la responsabilité du signataire en cas de contentieux. L'intention est louable, mais le protocole de ces mesures n'est pas très détaillé et la réglementation n'impose pas que ce contrôle soit réalisé par un tiers (bureau de contrôle agrée par exemple). En pratique, ces attestations ne sont pas toujours produites aux communes, qui ignorent bien souvent cette exigence, de même qu'a fortiori, le futur occupant du local, qu'il soit propriétaire ou locataire. Ainsi, il n'est guère surprenant que les contrôles CRC effectués depuis 2013 ne montrent pas d'amélioration significative en la matière. En l'état, l'attestation n'est donc d'aucune utilité et pourrait être supprimée. La mission préconise que l'ensemble du système de contrôle du respect des règles de la construction soit revu. Les non-conformités constatées de façon récurrente et parfois importantes ne concernent pas uniquement le volet acoustique, mais aussi l'accessibilité ou certaines normes de sécurité. La pression de contrôle est globalement très faible et le Cerema vient d'annoncer son intention de mettre fin à cette activité. Il est donc temps de concevoir un dispositif nouveau qui permette réellement de faire progresser la qualité de la construction (pas uniquement dans le domaine acoustique) et garantisse à l'habitant propriétaire ou locataire un logement réellement performant. 75 Selon le « bilan des contrôles acoustiques réalisés de 2007 à 2013 », réalisé par le Cerema et en date de novembre 2016, près de 60 % des opérations contrôlées présente au moins une non-conformité. Arrêté du 27 novembre 2012 relatif à l'attestation de prise en compte de la réglementation acoustique applicable en France métropolitaine aux bâtiments d'habitation neufs Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 50/80 76 Rapport n° 011057-01 7. Concevoir un nouveau système de contrôle du respect des règles de la construction pour garantir à l'habitant un logement conforme à la réglementation, notamment en matière acoustique. (DHUP). 3.1.5. Des opportunités pour procéder à l'amélioration de la qualité acoustique des logements Les travaux de rénovation qui vont s'engager dans le cadre de la loi pour la transition énergétique sont une opportunité d'ores et déjà identifiée pour combiner la rénovation acoustique à la rénovation thermique dès que nécessaire. Pris en application de l'article 14 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, le décret n° 2016-798 du 14 juin 2016 relatif aux travaux d'isolation acoustique en cas de travaux de rénovation importants complète le décret du 30 mai 2016. Le maître de l'ouvrage qui entame des travaux importants de rénovation doit réaliser à la fois des travaux d'isolation thermique et des travaux d'isolation acoustique si l'immeuble est situé dans une zone particulièrement exposée au bruit. L'arrêté du 13 avril 2017 précise, selon les types de bâtiments, selon la zone d'exposition au bruit extérieur et selon le type de travaux de rénovation, les exigences acoustiques à respecter. Ces dispositions sont entrées en vigueur au 1er juillet 2017. L'Ademe est sur le point de diffuser un guide de la rénovation acoustique combinée à la rénovation thermique en direction des points rénovation info service situés sur tout le territoire. Dans le parc privé, la rénovation groupée de logements dégradés peut aussi passer par des opérations programmées d'amélioration de l'habitat (OPAH) portées par les collectivités locales en partenariat avec l'Agence nationale de l'habitat (Anah), sur des secteurs et/ou des publics cibles. Pour ces opérations, l'Anah cible les habitats dégradés, insalubres ou les publics en précarité énergétique, mais ne cible pas les habitations fortement exposées au bruit. Par ailleurs, lors des travaux de réhabilitation, la question acoustique n'est pas spécifiquement abordée. On peut donc recommander d'une part d'élargir les OPAH aux problématiques du bruit 77, et d'autre part, pour lutter contre le bruit de voisinage, de proposer systématiquement un diagnostic sonore ainsi que les travaux correctifs nécessaires, même lorsque le logement n'est pas en zone de sur exposition au bruit. Si le bruit ne peut être assimilé à une marque d'insalubrité, il n'en constitue pas moins un problème de santé publique. 8. Intégrer le bruit dans les démarches d'amélioration de l'habitat au titre de la transition énergétique ainsi que dans les projets portés par l'Anah. (DHUP, Ademe, Anah) Pour améliorer l'acoustique du parc de logement existants, et notamment ceux les plus exposés, c'est l'ensemble de la filière de la rénovation du bâtiment qui doit être mobilisée, sensibilisée et formée sur ce sujet assez largement méconnu. Les acousticiens sont peu souvent inclus dans les équipes de maîtrise d'oeuvre. Le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) réalise des études et développe des programmes de recherche sur le sujet de l'acoustique dans les bâtiments et s'attache à promouvoir et diffuser le savoir faire en la matière 78. Il promeut notamment une approche intégrée de la qualité du bâtiment, ne se limitant pas aux aspects de 77 L'inventaire en cours des copropriétés dégradées réalisé à l'aide des DDTM pourrait comprendre des logements fortement impactés par le bruit. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 51/80 Rapport n° 011057-01 performance énergétique, mais intégrant aussi la qualité de l'air et le confort acoustique. Il suggère par exemple que l'observatoire de la qualité de l'air intérieur (OQAI) évolue en intégrant le bruit comme une des composantes de la qualité de l'air, se rapprochant en cela de la démarche de l'observatoire du bruit de l'agglomération de Lyon. Par ailleurs, on peut s'interroger sur l'intérêt de développer un label ou une certification spécifique sur le confort acoustique des logements 79. Afin d'inciter les constructeurs à prendre mieux en considération l'intérêt de l'isolation acoustique des bâtiments d'habitation, l'arrêté modifié du 10 février 1972 a créé un label « confort acoustique ». Ce label a été relayé ultérieurement par le label du même nom délivré par l'association Qualitel. Mais la réglementation acoustique de 1994, appelée alors Nouvelle réglementation acoustique (NRA), a rendu obligatoire les performances du label associé à l'ancienne réglementation. Dans la mesure où elle permettait déjà un certain confort acoustique, l'utilité d'un nouveau label aux exigences nettement plus élevées que ceux de la NRA ne s'est pas imposée. Le label Qualitel « confort acoustique » a donc été supprimé. Aujourd'hui, la certification Qualitel impose des exigences sur les bruits de chocs, le bruit de VMC double flux en chambre ou encore sur le traitement acoustique des locaux techniques pour la production d'eau chaude sanitaire. Les acousticiens développent aujourd'hui le concept de l'indicateur unique acoustique pour qualifier la qualité acoustique d'un lieu80. Dès 2011, le GIAc81 a répondu à une demande de l'association HQE pour définir un tel indicateur, déterminé de manière à correspondre le plus justement possible au ressenti d'un individu placé dans un local pour y exercer une activité. La notation comprend trois notes combinées : · une note de bruit de fond : basée sur l'écart entre le bruit de fond régnant dans le local étudié et le bruit de fond optimal pour l'activité, issue d'une base de données, · une note d'émergence : elle est évaluée en fonction des bruits émergents des espaces extérieurs, des espaces voisins du local et des équipements techniques des bâtiments, · une note de réverbération : elle est fonction de l'écart entre un critère de qualité interne du local (réverbération, intelligibilité des sons) et le critère optimal défini pour l'activité défini dans une base de données. Cette démarche conduit à classer le lieu selon une échelle à laquelle les consommateurs sont désormais habitués, comme le montre le graphique ci-dessous. 78 Le CSTB a notamment publié en décembre 2015 un guide de mise en oeuvre acoustique dans le logement collectif. Gages de qualité, les certifications qui accompagnent un logement neuf sont décernées aux constructions qui, par leur conception architecturale, les matériaux et les équipements choisis, l'isolation mise en oeuvre, vont permettre des économies de chauffage et d'entretien, assurer une certaine qualité acoustique, etc. L'élaboration des référentiels de certification, le contrôle de la conformité d'une construction à ces référentiels et la décision d'attribuer ou non la certification, sont confiés à des organismes indépendants, accrédités par le COFRAC. Voir l'article de Olivier Servonnat (Acouphen) et Thomas Toulemonde (Impédance ingénierie), dans le numéro « Environnement et technique » de juillet - août 2017, numéro hors série sur l'expertise acoustique, dont le présent rapport reprend des extraits. Créé en 1990, le syndicat CINOV GIAc regroupe des ingénieurs-conseils et des bureaux d'études indépendants, spécialisés en acoustique dans les secteurs du bâtiment, de l'environnement, de l'industrie, de la formation et de la recherche. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 52/80 79 80 81 Rapport n° 011057-01 On obtient ainsi une qualification claire et précise de la qualité acoustique d'un lieu, représentative du ressenti de l'occupant, basé sur la recherche non pas du silence mais d'un équilibre des différents bruits perçus. Cette approche paraît particulièrement pertinente et pourrait trouver matière à se développer si l'on veut faire augmenter progressivement la qualité sonore du parc immobilier. 9. Mobiliser et former la filière du bâtiment sur la question acoustique, intégrer plus souvent les acousticiens aux équipes de maîtrise d'oeuvre et développer un label sur le confort acoustique des logements. (DHUP, CSTB) Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 53/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 54/80 4. Pour une politique du bruit plus audible La politique du bruit est aujourd'hui le parent pauvre des politiques en matière de santé environnement, alors que le bruit est une nuisance de première importance pour les Français et que son coût social est important. Des leviers ont été identifiés dans les champs des transports, de l'urbanisme et du logement. Les connaissances sont encore à développer et la recherche peut conduire à de nombreux progrès. Le sujet est encore insuffisamment porté à la connaissance du grand public alors même que des outils existent. Cette politique complexe, qui implique de nombreux acteurs, gagnerait à être plus lisible et mieux coordonnée. 4.1. Le bruit, un sujet de conflit pouvant devenir politiquement sensible Alors qu'à la fin du XXème siècle, dans le domaine des infrastructures de transports, le sujet « environnement-nuisance » se limitait principalement à la question du bruit, ce sujet n'apparaît plus, ces dernières années, en « tête de gondole » des politiques de prévention des risques, d'environnement et de qualité de vie. De nouveaux sujets dont l'impact sur la santé semble au premier abord plus grave (pollution de l'air, perturbateurs endocriniens, pesticides...) sont apparus, les impacts des projets sur l'environnement prennent bien davantage en compte la biodiversité, la qualité visuelle et aujourd'hui la qualité énergétique en matière de construction, d'aménagement urbain et de mobilité prime sur la qualité sonore. Pourtant, comme on l'a vu, ses impacts sur la santé sont réels et son coût social est important. Mais plus encore, les Français perçoivent cette nuisance comme majeure et en réalité, le bruit est très souvent un facteur limitant du développement ou un sujet de conflit qui cristallise par exemple les oppositions à la réalisation des projets. Quelques exemples de la sensibilité de ce sujet : · le bruit des chantiers : parmi les véritables raisons de l'opposition aux projets portée par les comités de défense figurent avant tout le paysage et le bruit (et les vibrations associées), pendant l'exploitation du projet (infrastructure routière et ferroviaire notamment) mais aussi pendant le chantier. En ville, les travaux de tous ordres (nouveau bâtiment, réfection des voiries et réseaux, création de réseaux de transport en commun...) cristallisent bien souvent les oppositions du fait du bruit. Plusieurs guides existent sur la maîtrise du bruit des chantiers de construction82, des articles sortent régulièrement dans la presse spécialisée, mais pour autant, sauf si la pression des riverains est forte, le bruit est rarement un critère d'analyse et de sélection des offres, · le bruit des livraisons la nuit : la possibilité de livrer la nuit sans gêner les riverains est un véritable défi pour limiter la circulation en ville en journée. Cela permet aussi de massifier les flux de livraison, de diminuer la consommation de carburant et donc de contribuer à l'amélioration de la qualité de l'air. Le label Certibruit a été développé en 2012 pour minimiser le bruit des livraisons la nuit. Il s'adresse autant aux entreprises de transport qu'aux entreprises gérant des restaurants ou des magasins. Deux collectivités seulement en France ont retenu ce label dans leur politique de transport de fret : la ville de Paris et l'agglomération du Grand Lyon ; 82 « Maîtrise du bruit des chantiers de construction des infrastructures de transport terrestre », Cerema (ex Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité, IDRRIM, novembre 2011), « Bruit des chantiers, missions incombant aux acteurs d'une opération de construction pour limiter les nuisances », Conseil national du bruit, juin 2013. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 55/80 Rapport n° 011057-01 · le bruit des éoliennes : l'Anses a été saisie une première fois en 2006 par les ministères en charge de la santé et de l'environnement afin de réaliser une analyse critique du rapport publié par l'académie nationale de médecine recommandant l'implantation des éoliennes à une distance minimale de 1500 mètres des habitations, en raison des nuisances sonores. Au terme de cette première expertise publiée en 2008, l'Anses rappelait dans ses conclusions la nécessité d'étudier au cas par cas les distances d'implantation des éoliennes, par le biais notamment de modélisations acoustiques. À la suite de différentes plaintes de riverains de parc éoliens, les ministères ont à nouveau saisi l'agence en 2013, afin d'évaluer les effets sanitaires potentiels des infrasons et bruits basse fréquence émis par les parcs éoliens. En conclusion de son avis rendu en mars dernier, l'Anses considère que les données disponibles ne mettent pas en évidence d'argument scientifique suffisant en faveur de l'existence d'effets sanitaires liés à l'exposition au bruit des éoliennes. Rappelons également que la maîtrise des nuisances sonores peut être la condition du développement de certaines activités. La SNCF considère ainsi que le bruit du fret ferroviaire doit impérativement être mieux pris en compte si l'on veut développer ce mode de transport, qu'il s'agisse de la création de nouvelles voies ou de l'augmentation du trafic sur les voies actuelles. Au-delà de ces quelques exemples, le sujet du bruit est un souci récurrent pour les élus de proximité. Outre les problèmes classiques de bruit de voisinage, on voit apparaître de nouvelles plaintes, comme celles du bruit des cours d'école. Le seuil de tolérance au bruit, s'il diffère pour chacun, est un des indicateurs de notre capacité de vivre ensemble et lorsqu'il est en excès, les conflits et les oppositions, parfois lourdes de conséquences, sont inévitables. Le bruit est aussi un enjeu social. La multi-exposition au bruit (logement, quartier, travail, salle de classe ou d'apprentissage) est majoritairement le lot des personnes les plus défavorisées qui en subissent donc les effets cumulés. Le bruit dans l'environnement est donc un sujet socialemement sensible qui mérite d'être pris au sérieux. 4.2. Renforcer la recherche développement et la communication Le rapport du comité opérationnel du bruit du Grenelle de l'environnement préconise, en première recommandation, d'associer modernisation et bruit. Il précise en effet : « la lutte contre le bruit, condition au développement de nombreuses activités, est aussi une source d'innovations, une incitation permanente à la recherche d'une plus grande efficacité. La lutte contre le bruit doit devenir le levier d'une démarche de progrès plutôt qu'une contrainte que les acteurs économiques essayent, hélas avec succès le plus souvent, de contourner ». La mission s'accorde totalement avec cette approche. Dans la sphère publique, on ne peut que se féliciter de la création en cours de l'unité mixte de recherche en acoustique environnementale entre le Cerema et l'IFSTTAR. Sur le plan scientifique, ce rapprochement permettra de mutualiser les efforts de recherche sur des sujets communs (bruit de roulement, modélisation de la propagation acoustique dans l'environnement) mais également complémentaires (effets du bruit sur la biodiversité, matériaux acoustiques pour l'environnement, contact roue-rail...). Le projet de l'UMR s'inscrit dans une dynamique partenariale large, tant sur le plan national qu'international. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 56/80 Dans le registre de l'urbanisme et de la ville durable, les projets financés par l'Ademe (cf. première partie) doivent être valorisés le plus largement possible. Du point de vue des impacts du bruit sur la santé, on a vu dans la première partie que les connaissances étaient encore bien souvent lacunaires. Le champ de recherche est encore important. L'Anses et l'Ademe soutiennent différents projets : bruit intense et risque de neurinome du nerf acoustique, gêne acoustique dans les bureaux ouverts, méthode de prévision de l'ambiance sonore dans les bureaux ouverts, prématurité et multi exposition environnementale, liens entre exposition au bruit et hypertension,... Plusieurs pistes de travail paraissent devoir être explorées. Comme l'a déjà vu, on dispose de très peu d'études sur les bruits de voisinage et sur le bruit interne au logement. On ne dispose pas non plus d'études de surveillance épidémiologique des populations exposées. Notons, qu'en matière de recherche, l'Anses a souhaité qu'une plate-forme soit mise en place pour partager ou consolider l'ensemble des travaux concernant le bruit. Une telle initiative semble excellente et pourrait être développée en lien avec le ministère qui pourrait s'appuyer sur Ademe ou le CIDB. La recherche, l'expérimentation et l'innovation sont aussi très présentes dans le secteur privé. A titre d'exemple, on peut se référer au numéro récent de la revue environnement et technique83 qui présente quelques travaux des acousticiens sur la fenêtre coulissante active (fenêtre coulissante qui ne laisse pas passer le bruit même quand elle est ouverte), sur l'indicateur unique acoustique (cf. troisième partie) ou encore sur le bruit urbain. Les champs d'innovation sont très nombreux, qu'il s'agisse du bâtiment, des matériaux, des travaux publics, du matériel roulant etc. La dynamique serait utilement renforcée par le lancement d'appels à projets. Si la dynamique de recherche, d'expérimentation et d'innovation est réelle et touche tous les types d'acteurs (État, collectivités locales, entreprises de production et de conseil...), on peut regretter que la diffusion des résultats ne soit pas davantage valorisée et leurs applications concrètes plus largement diffusées, précisément pour « entraîner une démarche de progrès » comme le comité opérationnel du Grenelle de l'environnement cité plus haut l'appelle de ses voeux. Le progrès peut être apporté ou diffusé de diverses manières. Les guides de bonnes pratiques, la communication dans la presse spécialisée sont déjà utilisés mais en revanche les démarches de marquage de qualité comme la labellisation, voire la modification de la réglementation sont peu développées. 10.Soutenir la recherche, l'innovation, l'expérimentation, valoriser leurs résultats et généraliser leurs applications. (tous acteurs publics, coordination DGPR) 4.3. Rendre plus lisible la politique du bruit A court terme, il importe de poursuivre les travaux engagés par le Cerema à la demande de la DGPR et de la DGITM sur le chantier de « convergence » de la réglementation et des pratiques avec celles de l'Union européenne Il s'agit d'unifier les bases de données, les systèmes cartographiques et autres indicateurs de référence dont on a vu qu'ils sont multiples, pour pouvoir disposer d'un outil permettant de fournir à chaque citoyen une information objective et claire sur son exposition au bruit. Ce travail, réalisé en partenariat étroit avec les collectivités et notamment l'observatoire Acoucité, est essentiel pour la réalisation de cartes de bruit de qualité ainsi que pour 83 Environnement et technique, dossier « l'expertise acoustique gagne du terrain », numéro hors série, juillet-août 2017 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 57/80 Rapport n° 011057-01 leur généralisation. Ce travail s'articule avec la deuxième recommandation du rapport visée plus haut. La mission est en effet convaincue que l'un des moteurs d'une meilleure prise en compte du bruit dans l'environnement est la formation et l'information du public. L'existence de cartes largement diffusées est la base de cette démarche. Notons d'ailleurs que la démarche d'observatoire n'est pas uniquement une démarche technique. C'est aussi une démarche de concertation et de dialogue avec les partenaires concernés et les usagers, qui pourront à n'en pas douter, contribuer à l'avenir au renseignement des bases de données compte tenu des possibilités qu'offrent aujourd'hui les applications numériques. Quoi qu'il en soit, tout outil d'information ou de diagnostic environnemental n'a de valeur que s'il est compris et partagé par tous. Sujet par nature diffus et concernant de nombreuses filières techniques ou corps de métier, le bruit gagnerait à être davantage intégré dans toutes les politiques de qualité environnementale (éco-conception, éco-construction, éco-quartier, éco-conduite...) dont il est le plus souvent absent. Il doit aussi aller de pair avec le concept même de qualité de l'air, dont il peut devenir l'un des indicateurs. Le citoyen et le consommateur peuvent aussi être sensibilisés au bruit dans l'environnement dès lors que des signes de qualité qui le prennent en compte lui sont proposés : logement ou matériau de rénovation peu bruyant pour un particulier, chaussée, matériel d'entretien des espaces publics, démarche qualité exemplaire sur un chantier ou sur un bâtiment public pour un élu. Comme dans beaucoup de politiques environnementales, la sensibilisation par l'offre est aussi un vecteur de progrès. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 58/80 Conclusion Le bruit dans l'environnement est un sujet sensible, perçu comme une nuisance quotidienne de première importance par nos concitoyens. Pourtant, mis à part dans le secteur aérien pour lequel le « fauteur de trouble » est à la fois facile à identifier et réputé solvable, les crédits alloués à la réduction des nuisances sonores ont sensiblement décru, leur mise en oeuvre étant par ailleurs rendue plus difficile par la multiplication des acteurs concernés mais aussi par la baisse des effectifs de l'État en matière d'accompagnement dans les territoires. La relance d'une politique de réduction des nuisances sonores est une nécessité, au vu notamment du coût de l'inaction, que l'on peut assimiler au coût social annuel minimal de 20 milliards d'euros pour le bruit dans l'environnement causé par les transports. La mission propose pour cela des mesures de différente nature : · des mesures de traitement du bruit : traitement des points noirs du bruit routiers et ferroviaires, remplacement des dispositifs de freinage des wagons de fret. Ces mesures nécessitent un financement minimal et pérenne, qui peut être fondé sur le principe « pollueur payeur » et qui alimenterait un nouveau « plan bruit »; · des mesures de prévention ou de renforcement des contrôles visant dans la durée à diminuer des nuisances : sensibilisation des conducteurs et contrôlesanction du bruit routier, mise en place d'un dispositif performant de contrôle des règles de la construction. Le coût direct de ces mesures peut être assez faible, dans la mesure où il est susceptible soit d'être intégré à une politique déjà existante (sécurité routière), soit d'être en partie payé par l'usager (internalisation du coût du contrôle dans le prix du logement) ; · des mesures visant à diffuser la « culture du bruit » dans les pratiques des acteurs publics et privés : introduction d'un volet bruit dans les PLU, développement d'un label pour les revêtements peu bruyants, formation des acteurs du bâtiment. Dans l'immédiat, même s'il faut prévoir un dispositif minimum d'accompagnement, ces mesures nécessitent surtout la mobilisation des acteurs et des dispositifs existants et ont un surcoût direct relativement faible. À moyen voire à court terme, si elles portent leurs fruits, elles engendreront des surcoûts publics par rapport aux pratiques actuelles : choix d'aménagements et d'investissements plus qualitatifs et probablement plus coûteux pour les collectivités mais aussi pour l'État. Ce dernier doit prévoir un dispositif de soutien qui pourrait être inclus dans un nouveau « plan bruit » ; · des mesures visant à améliorer les connaissances et leur diffusion auprès de tous les publics : développer l'expertise sur les cartes de bruit pour les fiabiliser et en faire progressivement la référence unique, développer les signes de qualité faisant référence au bruit en direction des consommateurs, renforcer la recherche, soutenir l'innovation et en diffuser les résultats. Ces mesures sont des investissements (qui se traduisent pour l'essentiel par des moyens humains) qui, dans la durée, seront source d'économies. L'annexe 2 propose un programme d'action associé à ces recommandations avec des commentaires concernant leur coût. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 59/80 Une telle relance de la politique du bruit dans l'environnement pourra s'appuyer sur de nombreux points forts : la recherche et l'expertise encore solides des établissements publics de l'État, l'appui de la recherche publique et privée, la mobilisation et la conscience des enjeux des plus grandes agglomérations, un savoir-faire en matière d'ingénierie publique ou privée, un outil de capitalisation et de diffusion des connaissances : le centre d'information et de documentation sur le bruit, et un conseil réunissant l'ensemble des parties : le conseil national du bruit. Cécile Avezard Sylvain Leblanc Michel Rostagnat Ingénieure générale des ponts, des eaux et des forêts Inspecteur de l'administration du développement durable Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 60/80 Annexes Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 61/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 62/80 1. Lettre de mission Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 63/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 64/80 2. Plan des actions à engager, impacts financiers et conditions de réussite Ce tableau propose un certain nombre d'actions concrètes, non exclusives, issues des recommandations émises par la mission. Actions Concevoir un nouveau plan bruit, orienté principalement sur la lutte contre le bruit des transports routiers, en associant l'ensemble des parties et surtout les collectivités locales. · Prévoir un volet spécifique sur le traitement des zones sur exposées (points noirs du bruit et alentours), en développant de nouveaux leviers d'action, Impacts financiers L'ambition du plan dépendra du niveau des financements dégagés. Quelques chiffres repères : · Recommandations du Grenelle en 2008 : 450 M par an, Conditions de réussite Co-construction du plan avec les collectivités locales Simplification du processus d'instruction · · Soutenir le développement de l'expertise sur la cartographie du bruit ainsi que des expérimentations associant les citoyens à la production des données et à leur appropriation, Ouvrir la palette des actions éligibles à la prise en charge du surcoût de chaussées non bruyantes, à une communication en direction des automobilistes sur le lien entre les limitations de vitesse et le bruit, à des actions exemplaires en matière d'urbanisme (zones ou itinéraires calmes) et tout autre action relevant de la prévention, de l'information ou de la communication, Soutenir la recherche, l'innovation et l'expérimentation notamment au travers d'appels à projets, ouverts au secteur public et au secteur privé, Soutenir, le cas échéant, les expérimentations nécessaires à la labellisation des revêtements routiers · · · Plan bruit 2009-2014 : 160 M au total soit 27 M par an, TNSA 2016 : 55 M en 2016 affectée pour la lutte contre les nuisances sonores du trafic aérien · · coût social du bruit causé par les transports : 2 000 M par an minimum, dont 90 % du fait du transport routier Un montant de l'ordre de 100 M par an, tel que proposé dans l'étude Ademe/Beauvais consultants de 2015 est une base légitime. Engager, dans le cadre de la sécurité routière, une campagne de communication faisant le lien entre vitesse, sécurité et respect de l'environnement (bruit, consommation de carburant, pollution de l'air) et visant à « ringardiser » les conduites et engins bruyantes (notamment les deux roues) Établir un guide sur le PLU et le bruit à l'attention des élus responsables et des aménageurs Pas de surcoût a priori, inclus dans les crédits usuels de communication en matière de sécurité routière Cette action fait partie de l'activité courante des services. Elle sera l'occasion de mobiliser les réseaux d'expertise sur le sujet. Un guide de même nature, réalisé en 2006 par le pôle de compétences bruit de l'Isère peut fournir une bonne base de travail. Cette action fait partie de l'activité courante des services. Adhésion du ministère de l'Intérieur, coordonnateur de la politique de sécurité routière Association d'un réseau le plus large possible, (prenant en compte y compris des expériences internationales) tant pour la qualité du document que pour le succès de sa diffusion et de son utilisation. Mettre en place un groupe de travail réunissant le réseau scientifique et technique ministériel et les entreprises de travaux publics sur la labellisation des chaussées non bruyantes Intérêt commercial national et européen perçu comme tel par les entreprises Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 65/80 Établir un programme d'investissement contre le bruit du fret ferroviaire en ciblant le remplacement des semelles de frein des wagons Le remplacement des semelles de frein des wagons de fret coûte 150 M, soit 30 M par an sur 5 ans Le non remplacement fait courir le risque de l'exclusion du trafic de marchandise au moins en Allemagne et en Suisse à court terme. La mission devra proposer plusieurs alternatives devant être chiffrées et devant présenter le surcoût par rapport aux pratiques actuelles. Faire les arbitrages nécessaires au sein des crédits d'investissement ferroviaires de l'État et de la SNCF Confier au CGEDD une mission visant à faire des propositions pour refonder la politique de contrôle des règles de la construction Anticiper le caractère socialement sensible du sujet. Il s'agissait jusqu'ici d'une mission de service public réalisée par le Cerema dont les missions évoluent dans un contexte de diminution d'effectifs. Développement d'une expertise sur le sujet au sein de l'Anah Adhésion des professionnels Mettre en place des actions de rénovation acoustique (diagnostic, travaux) des logements dans les actions financées par l'Anah. Concevoir, avec la filière du bâtiment et les acousticiens, des outils de sensibilisation et un programme de formation sur la question acoustique dans la construction neuve et la rénovation Pas de surcoût a priori, il s'agit de dégager une enveloppe au sein des budgets actuels. Coût modéré à fort pouvant être pris en charge par les dispositifs de formation professionnelle (OPCA) Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 66/80 3. L'évaluation de la nuisance sonore : il n'existe pas au plan international de base véritablement solide pour la mesure du bruit ni pour celle de son impact sanitaire L'évaluation produite en 2016 par E&Y pour le Conseil national du bruit et l'Ademe, d'un coût social du bruit de l'ordre de 57 Md/an, soit près de 3 % du PIB français, peut légitimement interroger. Mais elle n'est que la sanction du flou conceptuel qui règne encore au niveau international en matière d'évaluation de l'impact du bruit. Ce qui frappe au premier abord en effet, c'est l'absence de consensus sur les définitions et sur la méthode. Il n'existe pas à ce jour d'indicateur de bruit qui fasse autorité. Le Lden paraît rallier le maximum de suffrages. Il n'en est pas moins jugé insuffisant pour rendre compte notamment des bruits émergents et impulsionnels. En France même, deux procédures concurrentes, le classement sonore des voies et la carte de bruit, rendent compte de l'exposition au bruit des zones riveraines des infrastructures de transport terrestre. Et en matière de cartes de bruit et de plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE), la France a de son propre chef substantiellement durci la réglementation. Quant à l'impact sanitaire du bruit, il est frappant de constater qu'il est estimé sur la foi d'une littérature épidémiologique abondante ­ et fort heureusement souvent convergente dans ses conclusions ­ mais nullement d'une campagne systématique, à grande échelle et reproductible qui seule pourrait faire autorité. On peut se demander si le préalable à une bonne évaluation de l'impact du bruit ne serait pas de diligenter un tel programme de surveillance épidémiologique des populations exposées. Ce point justifierait une discussion de fond entre les ministères de la transition écologique et solidaire et de la santé. Le tableau ci-dessous explicite les différences d'approches entre les niveaux international (OMS), communautaire et national. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 67/80 Concept Indice de bruit OMS Lnight (Lignes directrices nuit, 2009) UE Lden et Lnight (dir. 2002/49) France Aérodromes : Lden pour le PGS (art. R571-66 CE) et pour le PEB (art. R112-1 CU) Transports terrestres : Lday et Lnight (R571-34 CE) Affiner l'indice selon le spectre, la nature événementielle... (Anses, IFSTTAR) Lden (recommandé par Quinet, 2013) Méthode de mesure Mesure : selon principes Mesure : circulaire du 25 juillet ISO 1996-2: 1987 et ISO 1996 et normes NF S 31-085, NF 1996-1: 1982, sans réflexion S 31-088 de façade Calcul : selon CNOSSOS dès 2022 pour les transports Présentation : pas de norme, données agrégées (nombre de personnes exposées, surfaces exposées) (dir. 2002/49) Carte de bruit et PPBE : agglomérations > 100 000 h, routes > 3 Mvéh/an, voies ferrées > 30 000 trains/an, grands aéroports (à terme, dir. 2002/49) Carte de bruit et PPBE : idem directive (L572-2, L572-9, R572-3 CE) Classement sonore des voies : routes> 5 000 véh/j, voies de chemin de fer interurbaines > 50 trains/j et voies urbaines > 100 trains/j (décret 95-21) 57 Md/an, selon diverses méthodes : coûts évités, prix hédoniques, préférences déclarées, transfert de valeurs (CNB / Ademe, 2016) Impact sanitaire seul, selon HEATCO (Quinet, 2013) Voies sonores Évaluation de l'impact 1 685 000 années en bonne santé perdues en Europe ; unité de mesure : le disability-adjusted life-years (DALYs) ; relation exposition ­ réponse selon diverses études épidémiologiques (OMS / JRC, 2011) Étude de la gêne due au bruit dans l'environnement (OMS / JRC, 2011) Lignes directrices pour le bruit nocturne en Europe (2009) Lignes directrices pour le bruit ambiant (1999) 10 000 décès prématurés par an, 28 Mp gênées ; relation exposition ­ réponse selon diverses études épidémiologiques (EEA, 2014) Pas de norme (dir. 2002/49) Références Déclaration de Parme (2010) sur l'exposition au bruit des enfants HEATCO (2006) Le coût social des pollutions sonores (CNB et Ademe / E&Y, 2016) Évaluation socio-économique des investissements publics (CGSP / Émile Quinet, 2013) Impact extra-auditif du bruit (Anses, 2013) Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 68/80 4. La politique de protection et de prévention des nuisances sonores du transport aérien : un système organisé, financé et contrôlé En matière de lutte contre le bruit, le transport aérien bénéficie d'une organisation, de moyens et de résultats clairement meilleurs que les transports terrestres. 4.1. La protection : un système financé et structuré Le bruit causé par le trafic sur les 11 plus grands aéroports français est pris en compte par les Plans de gêne sonore (PGS) créés en vertu de l'article L571-16 du code de l'environnement. Le PGS est fondé sur un calcul du bruit selon l'indice de puissance acoustique moyenne pondérée Lden. Ce plan comporte trois zones : une zone I à l'intérieur de laquelle l'indice moyen est supérieur à 70 dB, une zone II où il est supérieur à 65 dB, et une zone III où il est supérieur à 55 dB (art. R571-66 du code de l'environnement). À l'intérieur de ces périmètres, les locaux d'habitation bénéficient d'une aide à l'insonorisation (art. R571-86 du code de l'environnement). Le fonds ad hoc est abondé par une taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires (TNSA) payée par les compagnies aériennes opérant sur lesdits aéroports. La TNSA est gérée par les autorités aéroportuaires. Le bénéfice de l'aide obéit à un principe général d'antériorité, qui veut qu'elle ne concerne que des locaux ou établissements existants ou autorisés à la date de la publication du PGS. En tant que taxe affectée, la TNSA a fait l'objet d'un plafonnement en 2014, revu à la hausse en 2016. La loi prévoyant explicitement l'indemnisation des personnes exposées, le principe du plafonnement de la taxe a fait débat. La TNSA a rapporté 55 M en 2016. L'aide moyenne est de l'ordre de 10 k par logement. Compte tenu du stock de dossiers non traités (environ 600 M), on estime qu'il faudra une douzaine d'années pour achever l'isolation acoustique du parc immobilier impacté. Le délai d'obtention de l'aide est actuellement de l'ordre de 3 à 4 ans. 4.2. La prévention : un ensemble complet de contraintes d'urbanisme, de gestion du trafic et de conception des avions La prévention du bruit du trafic aérien joue sur plusieurs registres : la limitation du droit à urbanisation des zones bruyantes, la gestion du trafic aérien (mesures d'exploitation) et notamment des procédures d'approche, et la réduction à la source sur l'aéronef ellemême. Les contraintes à l'urbanisation au voisinage des aérodromes sont fixées dans le Plan d'exposition au bruit des aérodromes (PEB), défini à l'article L112-6 du code de l'urbanisme, et annexé au plan local d'urbanisme. À ce jour, 200 aérodromes français en sont dotés. Le PEB est un document prospectif : il définit, à partir des prévisions de développement de l'activité aérienne, de l'extension prévisible des infrastructures et des procédures de circulation aérienne, des zones diversement exposées au bruit engendré par les aéronefs. Le PEB classe les zones bruyantes (A, B, C, D) en fonction de l'intensité (en Lden) décroissante du bruit. Les contraintes à l'urbanisation sont d'autant plus réduites que le niveau sonore est faible (article L112-10 du code de l'urbanisme). Le principe général Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 69/80 est l'interdiction des constructions à usage d'habitation sauf nécessité de service. Ce principe souffre toutefois quelques amodiations : · la rénovation, la réhabilitation, l'amélioration, l'extension mesurée ou la reconstruction des constructions existantes, et notamment en zone A ou B (bruit fort) ainsi que la reconstruction rendue nécessaire par une opération de démolition sont possibles dès lors qu'elles n'entraînent pas d'accroissement de la population exposée aux nuisances ; la disposition relative aux zones A et B a été introduite en vertu de la loi du 13 juillet 2006 dite engagement national pour le logement ; · en zone C (bruit modéré), des constructions individuelles non groupées situées dans des secteurs déjà urbanisés et desservis par des équipements publics y sont autorisées dès lors qu'elles n'entraînent qu'un faible accroissement de la capacité d'accueil d'habitants exposés aux nuisances ; · en zone C, le PEB peut délimiter des secteurs où, pour permettre le renouvellement urbain des quartiers ou villages existants, des opérations de réhabilitation et de réaménagement urbain peuvent être autorisées, à condition qu'elles n'entraînent pas d'augmentation de la population soumise aux nuisances sonores (disposition introduite en vertu de la loi SRU du 13 décembre 2000) ; une telle augmentation étant toutefois possible dans le cadre des opérations prévues par le I de l'article 166 de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR ; · en zone D (bruit faible), les constructions sont autorisées sous réserve d'isolation acoustique. L'article L112-9 du code de l'urbanisme créé en vertu de l'ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 a ouvert quelque peu les possibilités d'urbanisation à proximité des grands aérodromes. Aux termes de cet article, le plan d'exposition au bruit (PEB) des aérodromes dont le nombre de créneaux horaires attribuables fait l'objet d'une limitation réglementaire sur l'ensemble des plages horaires d'ouverture (ce qui est le cas notamment d'Orly) ne comprend plus désormais que des zones A et B. Toutefois, les contraintes de droit commun restent applicables à l'intérieur du périmètre défini par la zone C du PEB en vigueur au 19 février 2009. S'agissant des opérations de renouvellement urbain en zone C, une augmentation de la capacité de logements et de la population est autorisée dans une limite définie dans l'acte de création de ces secteurs ou dans une décision modificative. Cet amendement, porté par des parlementaires riverains d'Orly, visait à ne pas figer la dynamique urbaine dans leur secteur. Il conduit aujourd'hui à la manifestation de projets de construction de zones résidentielles importantes à proximité de l'aéroport, par exemple à Champlan dans l'Essonne. Sans nier qu'elles obéissent à deux logiques différentes, à savoir la prévention pour les PEB et la réparation pour les PGS, ni qu'elles sont gouvernées par des échéances différentes (respectivement : à 15 ans et à 1 an), on peut s'interroger sur le maintien de ce double traçage de l'impact sonore des aérodromes. À la réflexion, s'il paraît de bon aloi de vouloir unifier les procédures d'établissement de ces deux documents, il paraît tout autant intéressant de respecter la logique propre à chacun d'entre eux, et donc leur dualité. Le rapport n° 009392-02 : Coordination des aides à l'insonorisation et à la rénovation énergétique des logements à proximité des aérodromes du CGEDD (Anne Florette, Bruno Lebental et Jean-Michel Malerba) de mars 2017 suggère une procédure unique d'élaboration du PGS et du PEB, dans un souci de lisibilité aux yeux du public, mais sans préjudice de l'économie propre à chacun de ces deux documents. La maîtrise de l'urbanisation dans des secteurs périurbains généralement très dynamiques est en effet indispensable si l'on ne veut Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 70/80 pas rendre des populations otages d'un bruit qu'elles n'auront pas choisi en connaissance de cause. À l'inverse, il n'est pas raisonnable d'indemniser des habitations localisées dans une zone de bruit seulement putative. 4.3. Une autorité indépendante de contrôle et de sanction : l'Acnusa Le suivi et le contrôle des nuisances sur les 11 plus grandes plates-formes aéroportuaires françaises sont assurés par l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa), inscrite dans le code de l'aviation civile. L'Acnusa inflige des amendes administratives aux avions ne respectant pas les procédures (trajectoires d'approche, créneaux horaires...). Elle a ainsi émis des titres de perception à hauteur de 3 M/an environ depuis 2011. Elle procède également, le cas échéant, à la saisie conservatoire d'un appareil, ce qu'elle a fait à deux reprises en 2016. Le montant maximal (autorisé par la loi) de l'amende est de 40 000 , ce que l'Acnusa estime insuffisant au regard de ce que coûterait alternativement l'indemnisation des passagers retenus au sol. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 71/80 5. Bibliographie sélective On se rapportera également aux références citées dans le rapport le plus souvent en note de bas de page, mais aussi au site du CIDB, qui propose, de façon structurée, une abondante documentation. Rapport du comité opérationnel « bruit », Grenelle de l'Environnement, mars 2008 Rapport d''information de l'Assemblée nationale sur les nuisances sonores, P. Meunier et C. Bouillon, 28 juin 2011 Rapport d'information de l'Assemblée Nationale sur les nuisances sonores aéroportuaires, J-A. Benisti et C. Bouillon, 16 mars 2016 Rapport de la commission au Parlement européen et au Conseil sur la mise en oeuvre de la directive relative au bruit dans l'environnement conformément à l'article 11 de la directive 2002/49/CE, mars 2017 Rapport annuel de l'autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa), mars 2017 Évaluation des impacts sanitaires extra-auditifs du bruit environnemental, Anses, février 2013 Noise in Europe, European Environment Agency, janvier 2014 Le bruit du fret ferroviaire, une stratégie pour en limiter les impacts, B. Simon, M. Pinet, M. Sandrin, CGEDD, mars 2014 Limiter le bruit des infrastructures ferroviaires, O. Chiello, IFFSTTAR, avril 2014 Les Français et les nuisances sonores, sondage Ifop, Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, avril 2014 Étude pour une optimisation de l'insonorisation des locaux au voisinage des aéroports, C. Assailly et J-P. Decourcelle, CGEDD, mai 2014 Parangonnage des réglementations européennes en infrastructures de transports terrestres, Cerema, août 2014 matière de bruit des 3eme plan national santé environnement 2015-2019, ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et ministère de la Santé, novembre 2014 Étude d'outils économiques visant à financer le traitement des points noirs du bruit, JM. Beauvais, Ademe, février 2015 Diminuer le bruit et réduire la gêne sonore engendrés par l'aéronautique civile, Corac, décembre 2015 Le coût social des pollutions sonores, Analyse bibliographique des travaux français et européens, Conseil national du bruit et Ademe, mai 2016 Évaluation stratégique du plan bruit, Ademe, mai 2016 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 72/80 Science for environment policy, In-depth report 13, links between noise and air pollution and socioeconomic status, Commission européenne, septembre 2016 Étude sur les basses fréquences dans les logements collectifs, Qualitel, décembre 2016 Du calme en ville: aménager en faveur du bien-être, Collection l'essentiel, Cerema, février 2017 Plan d'action 2016-2019 pour la lutte contre le bruit et l'amélioration de l'environnement sonore, Ademe, février 2017 Coordination des aides à l'insonorisation et à la rénovation énergétique des logements à proximité des aérodromes, A. Florette, B. Lebental, J-M. Malerba, CGEDD, mars 2017 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 73/80 6. Liste des personnes rencontrées Nom DROUIN TORRIN prénom Sylvain David organisme MTES/DGPR MTES/DGPR Fonction Adjoint chef du bureau des risques Chef du bureau des risques des industries, de l'énergie et de la chimie Date de rencontre 22 juin 2017 22 juin 2017 VALENTIN Pascal MTES/DGPR Chef de la mission bruit 26 avril 2017 et 4 juillet 2017 31 mai 2017 31 mai 2017 25 avril 2017 MESSIER PREMILLIEU AMAT SAUVAGE BREJASSOU MOLA SUSBIELLE FOURTANE OUVRARD LEMAITRE CASTRES-SAINTMARTIN CHAUFAUX SOULIER SOUM THIEBAUT Cédric Maude Christophe Thierry Guillaume Thierry Nora Christine AnneEmmanuelle Hélène Anne-Lise Émilie Anne-Marie Soumicha Aloïs MTES/DGEC/SCEE/S Chef du bureau des voitures D6 particulières MTES/DGEC/SC/EE/ SD6 MTES/DGITM/DAM Chargée de mission Chef du bureau Animation et pilotage des projets Médecin chef des gens de mer MTES/DGITM/DAM 25 avril 2017 MTES/DGITM/DIT MTES/DGITM/ DIT MTES/DGITM/DIT MTES/DGITM / DST MTES/DGITM/DST Chargé d'études Adjoint au sous-directeur des aménagements routiers Chef du bureau de la politique de l'environnement Chef du bureau de la régulation ferroviaire Sous-directrice de la sécurité et de la régulation ferroviaire Chargée d'études 25 avril 2017 25/04/17 25 avril 2017 25 avril 2017 25 avril 2017 MTES/DGITM/ SAGS METS/DGALN/DHUP 25 avril 2017 Chef du bureau de l'aménagement opérationnel durable(AD4) Adjointe au chef du bureau de la législation de l'urbanisme (QV4) Chef de projet qualité de l'air et acoustique dans le bâtiment (QC1) Chargée de mission bureau de la législation de l'urbanisme (QV4) Chef de projet performance d'environnementale des bâtiments (QC1) 27 juillet 2017 MTES/DGALN/DHUP MTES/DGALN/DHUP MTES/DGALN/DHUP MTES/DGALN/DHUP 22 juin 2017 30 juin 2017 22 juin 2017 30 juin 2017 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 74/80 PILLAN PERILLAT TEODORO BARTHELET DARMIAN DEJOLLAT Aline Emmanuelle Louis Sophie Joël Yann MTES/DGAC/DTA MTES/DGAC/DTA MTES/DGAC/DTA DREAL-AuRA DREAL -AuRA Sous-directrice du développement durable Chef bureau des impacts territoriaux Chef du bureau de l'environnement 27 avril 2017 27 avril 2017 27 avril 2017 Chef du service habitat, construction, ville 7 juin 2017 durable Service réglementation et contrôle des transports et des véhicules Chef du service mobilité, aménagement, paysage 7 juin 2017 DREAL -AuRA 7 juin 2017 DENEUVY EPRINCHARD MONTES PHELIP BRACH Jean-Philippe Yves Denis Denis Aurore DREAL -AuRA DREAL -AuRA DREAL-AuRA DREAL-AuRA Directeur régional délégué Chef du service prévention des risques industriels, climat, airir, énergie Service réglementation et contrôle des transports et des véhicules Chef adjoint de cabinet 7 juin 2017 7 juin 2017 7 juin 2017 DIR Centre- Chef du district Est/district de Saint Etienne DIR Centre-Est/SIR Chargé d'études bruit de Lyon DTT de la Loire DTT de la Loire DTT de la Loire Saint-Étienne métropole/ Ville de Roanne Département de la Loire Directeur service environnement Chef du service environnement direction générale techniques des services 7 juin 2017 ROL CEREZA ROCH THOUMY BRUN GARCIA BERTHILLOT OLNY ECOTIERE DEMEZIEUX SOLDANO CARIOU Jérémie Xavier Laurence Denis Pierre Claude Jean-Luc Xavier David Patrick Bertrand Sophie 9 juin 2017 9 juin 2017 9 juin 2017 9 juin 2017 direction générale des services techniques direction générale des services techniques 9 juin 2017 9 juin 2017 7 juin 2017 16 juin 2017 16 juin 2017 16 juin 2017 Cerema/DTer Centre- Chef de l'unité environnement santé est Cerema/Dter Est Cerema/Dter Est Cerema/Dter Est Cerema/direction technique infrastructures Responsable de la division environnement de Responsable du groupe acoustique, laboratoire de Starsbourg 15 mai 2017 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 75/80 transport et matériaux THIRION CHENE DEFRANCE Philippe Jean-Baptiste Jérôme Cerema/Dter Est CSTB CSTB Chef de la division acoustique Responsable de la division acoustique environnementale et urbaine Directrice du département Santé confort coordinatrice scientifique de l'OQAI Chercheuse Psyco-acousticienne Directeur adjoint du département, mobilité, environnement aménagement Directeur adjoint du laboratoire d'acoustique environnemental Directeur du laboratoire d'acoustique environnementale Directeur général adjoint, chargé des politiques d'intervention Chef de projet scientifique Directeur Villes et Territoires durables ingénieur Chef du service organisation urbaine Chargé de mission Directeur Président Consultant-acoustique et développement durable Président du comité technique du Conseil national du bruit Adjointe au directeur du développement durable 16 juin 2017 30 juin 2017 30 juin 2017 KIRCHNER Séverine CSTB 30 juin 2017 CHAMPELOVIER BERENGIER Patricia Michel IFSTTAR IFSTTAR 1er juin 2017 LELONG PICAUT MOUROUGANE CADENE CAIRE THIBIER SANNA AUVERLOT VINCENT BIDOU GAMBA Joël Judicaël Christian Anthony José Emmanuel Daniela Dominique Bruno Dominique René IFSTTAR IFSTTAR Anah Anses Ademe Ademe Ademe FRANCE STRATEGIE ACOUCITE CIDB Acoustique Gamba 1er juin 1er juin 2017 14 juin 2017 7 juillet 2017 17 mai 2017 8 juin 2017 8 juin 2017 9 mai 2017 7 juin 2017 26 avril 2017 16 mai 2017 GUERRERO FAUSSURIER ROSIN ASSAF DELION Anne Jean Christophe Samir Jean-Marc SNCF réseau 23 juin 2017 20 juin 2017 20 juin 2017 2 juin 2017 2 juin 2017 SNCF réseau DG Île- Directeur Accès au réseau de-France SNCF réseau DG Île- Responsable acoustique de-France RAILENIUM RAILENIUM Chef du département simulation numérique Directeur général Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 76/80 PEREIRA SEDOARISOA PERROT PARDO Kevin Noëlvia JeanDominique LouisFerdinand RAILENIUM RAILENIUM MICHELIN Chef de projets innovation RD Post Doctorante Responsable Standards et régulations Responsable du service RTI CEM Acoustique 2 juin 2017 2 juin 2017 15 juin 2017 Union technique de l'automobile,du motocycle et du cycle(UTAC )CERAM CGEDD CGEDD CGEDD 31 mai 2017 LEBENTAL DUPONT-KERLAN ROCHE Bruno Elisabeth Pierre-Alain Membre permanent Présidente de section Président de section 25 avril Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 77/80 7. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme Acnusa Ademe Anah Anses BTP Cerema CIDB Corac CSTB DDT DGAC DGITM DGPR DHUP DIR DREAL IDDRIM IFSTTAR INPES MCT MTES NRA OACI OMS OPAH PCAET PDU PEB PGS PLU PNB PPBE STI TNSA UMR Signification Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie Agence nationale de l'habitat Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail Bâtiment et travaux publics Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement Centre d'information et de documentation sur le bruit Conseil pour la recherche aéronautique civile Centre scientifique et technique du bâtiment Direction départementale des territoires Direction Générale de l'Aviation Civile Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer Direction générale de la prévention des risques Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages Direction interrégionale des routes Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux Institut national de prévention et d'éducation pour la santé Ministère de la cohésion des territoires Ministère de la transition écologique et solidaire Nouvelle réglementation acoustique Organisation de l'aviation civile internationale Organisation mondiale de la santé Opération programmée d'amélioration de l'habitat Plan climat air énergie territorial Plan de déplacement urbain Plan d'exposition au bruit Plan de gêne sonore Plan local d'urbanisme Point noir de bruit Plan de prévention du bruit dans l'environnement Spécification technique d'interopérabilité Taxe sur les nuisances sonores aériennes Unité mixte de recherche Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 78/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 79/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 80/80 (ATTENTION: OPTION if, et peuvent être utilement combinés. 50 Le coût du remplacement intégral des semelles des wagons de fret est estimé à moins de 150 M. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 33/80 Rapport n° 011057-01 2.3.3. La recherche : orientations actuelles La recherche développement de solutions ferroviaires innovantes est conduite en France sous l'égide de l'institut de recherche technologique (IRT) Railenium, qui réunit les acteurs (opérateurs, académiques, ingénierie, constructeurs, BTP) du monde ferroviaire. Deux programmes sont en cours : · Cervifer (Certification Virtuelle en Ferroviaire), soutenu par Ademe sur la période 2013 - 2017, qui traite du prototypage virtuel pour la réduction du bruit de roulement, de la modélisation du bruit de crissement en courbe, et du développement de solutions antibruit et de leur validation expérimentale ; · Ecobruit, projet propre Railenium d'évaluation du coût des nuisances causées par le bruit ferroviaire et des bénéfices engendrés par les murs anti-bruit. Comme il a été dit plus haut, Railenium souhaiterait intéresser un industriel au développement d'un nouveau système de frein non bruyant, à l'image des freins à semelles composites adoptés par l'Allemagne et la Suisse. 2.4. Le bruit des transports routiers : une philosophie à repenser en intégrant l'ensemble des leviers En matière de lutte contre les nuisances sonores, la route connaît à peu près les mêmes symptômes que le rail : faiblesse des budgets pour la protection des zones habitées, inadaptation des moyens de contrôle et sanction et concurrence de plusieurs méthodes de cartographie de la nuisance. D'autres leviers sont mobilisables : qualité des véhicules et du revêtement routier notamment. 2.4.1. La protection : la politique de résorption des points noirs du bruit est dans une impasse Techniquement, la résorption des points noirs de bruit routier et ferroviaire repose sur le mur anti-bruit et l'isolation acoustique de façade. Sur un logement déterminé, ces deux solutions sont en général employées exclusivement l'une de l'autre. En revanche, il n'est pas rare qu'un immeuble élevé soit protégé par mur anti-bruit pour ses étages inférieurs et par traitement de la façade pour les étages supérieurs. Le choix entre mur anti bruit et isolation des logements se fait au cas par cas, en fonction des contraintes techniques (il faut un espace minimum entre la voie bruyante et l'immeuble pour construire un mur anti bruit) mais aussi économiques. Le mur anti bruit offre une meilleure protection, puisqu'il permet de diminuer le bruit non seulement dans le logement mais aussi dans l'air ambiant, mais il est beaucoup plus coûteux et n'est donc pas systématisé. Le coût de la résorption des points noirs de bruit des transports terrestres (ferroviaires et routiers) était estimé dans le rapport Serrou (1991) à 9 MdF, dont 2,6 MdF pour les premiers, et 6,4 MdF pour les seconds. Moins de 20 ans plus tard, le Comité opérationnel « bruit » du Grenelle (mars 2008) l'estimait dans une fourchette cohérente d'encore 1,5 à 2 Md, dont 1 Md sur la route. Il constatait toutefois qu'en 8 ans, 1 Md avaient été investis par l'État, les collectivités territoriales et les sociétés d'autoroutes sur le réseau national dans la résorption des points noirs de bruit. L'objectif de leur effacement en 7 ans paraissait alors réaliste. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 34/80 Comme vu plus haut, le Cerema estime aujourd'hui 51 à 850 000 le nombre de logements situés dans des points noirs de bruit routier 52. Contrairement au ferroviaire, la prise en compte du bruit actuel ou du bruit de la circulation prospective à terme ne change pas fondamentalement le résultat. Sur la base d'un coût de traitement unitaire par logement de 7 000 , le coût de résorption des points noirs de bruit serait de l'ordre de 6 Md, soit 6 fois plus que l'estimation produite en 2008. La différence provient clairement de la prise en compte toute récente des points noirs des réseaux « historiques » des collectivités territoriales.53 Le plan bruit de l'Ademe mené entre 2009 et 2015 a mobilisé environ 90 M pour le traitement des points noirs de bruit routiers et a permis de protéger de 3 324 logements (par mur anti bruit ou par isolation de façade). Toutefois, il n'existe pas de suivi fiable du processus de résorption, certaines initiatives n'étant pas tracées, les riverains pouvant aussi mener des travaux par eux-mêmes. Mais en matière d'utilisation des crédits dédiés à la route, si la demande politique est très forte sur les nouvelles infrastructures, elle est quasiment inexistante sur le traitement des nuisances sonores54. 2.4.2. Les interventions sur le véhicule pour réduire le bruit Le bruit routier a deux composantes principales : le bruit de roulement (contact pneurevêtement) et le bruit du moteur. On peut y ajouter le bruit aérodynamique du flux d'air autour du véhicule en mouvement. La réduction du bruit à la source passe donc par l'amélioration des performances acoustiques des véhicules, d'une part au travers des pneus pour limiter le bruit de roulement et d'autre part du moteur. En la matière, la norme technique est définie dans l'enceinte de la Commission économique pour l'Europe de l'ONU (CEE-ONU) à Genève, et traduite en droit communautaire par voie de règlements. La réglementation communautaire prévoit un durcissement progressif des normes sonores : · réduction de 3 à 4 dB de la valeur limite de bruit des nouveaux types de véhicules en l'espace de 8 ans, entre le 1er juillet 2016 et le 1er juillet 2024 (annexe 3 du règlement 540-2014) ; · pour les pneumatiques, relèvement de l'exigence de l'ordre de 3 dB, ce qui se traduit par la disparition du marché des pneumatiques repérés par le pictogramme à trois ondes caractéristique des pneus les plus bruyants. Dans le cas du pneumatique, il s'agit d'optimiser simultanément l'impact sonore, l'adhérence et la résistance au roulement, qui sont des exigences a priori contradictoires. En effet, une bonne adhérence suppose un pneu sculpté, mais il est ipso facto générateur de bruits du fait du contact de ses alvéoles avec la route. C'est 51 52 note à l'attention de la mission bruit de la DGPR en date du 6 octobre 2015 L'estimation est toutefois compliquée par la multiplicité des propriétaires de voies (les collectivités territoriales) et leur inégale propension à renseigner l'application MapBruit Le Grenelle de l'environnement avait, en 2008, estimé que ceux-ci pourraient avoisiner environ 10 fois plus de points noirs de bruit que les réseaux gérés par l'État, qui étaient les seuls pris en compte. Par exemple, l'actuel contrat de plan État ­ Région Rhône Alpes 2015 ­ 2020 n'affecte que 3 M à la réduction à la source du bruit, pour une région concernée au premier chef par la question (agglomérations lyonnaise et stéphanoise notamment), disposant d'équipes aguerries tant au sein de l'État que des collectivités locales, qui se sont mobilisées dans le cadre du plan bruit de l'Ademe. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 35/80 53 54 Rapport n° 011057-01 pourquoi, si des progrès très significatifs ont été enregistrés en matière de bruit, ils restent toutefois limités du fait de ces contraintes de sécurité. L'IFSTTAR, qui dispose de son propre banc d'essai acoustique, note que les fabricants se tiennent désormais à des niveaux de performances voisins. Pour l'IFSTTAR, le gain acoustique qu'on peut attendre du pneu (4 dB) est nettement moindre que celui qu'on peut escompter du revêtement de la route (9 dB, cf. infra). Un label existe pour la qualité des pneus, incluant le bruit55, mais il semble que ce critère soit peu retenu par les utilisateurs. L'augmentation de la part des véhicules électriques dans le parc sera un facteur déterminant du point de vue du bruit, surtout en ville, où les vitesses ne dépassent pas 50 km/h, vitesse à laquelle le bruit provient essentiellement du moteur et non du roulement. De façon approximative, on peut considérer que si les véhicules électriques représentaient la moitié du parc (ce qui pourrait être atteint d'ici 2040) , les nuisances sonores seraient en moyenne divisées par deux. En ville, ce gain serait bien supérieur, même si un minimum de bruit doit être maintenu pour la sécurité des autres usagers comme les piétons et les cyclistes56. Par contre, la situation serait quasi inchangée en zone périphérique et inter urbaine, dès lors que les limitations de vitesse sont maintenues au-dessus de 70 km/h57. Des études sont en cours pour évaluer l'impact du développement du parc électrique sur le bruit dans l'environnement. Elles permettront notamment de cerner les points noirs urbains du bruit qui disparaîtraient d'eux-mêmes. On voit que les véhicules 2 roues ne sont pas concernés par ces textes, alors que certains d'entre eux contribuent notablement aux émergences sonores. Sur ce point, on ne peut que se féliciter de ce que les 2 roues débridés ne soient plus assurés en cas d'accident58. La solution, qui reste à imposer, serait de concevoir des 2 roues indébridables, sauf à un coût (de réparation) rédhibitoire. Quoi qu'il en soit, le sujet de la réduction du bruit des deux roues n'est pas véritablement pris au sérieux. Une étude de l'IFSTTAR avec la participation de Peugeot a montré qu'on peut gagner 4 dB sur les petites cylindrées de 50 cm3 au prix d'un capotage des organes moteurs, d'un changement de l'échappement et de l'introduction d'une pièce moteur tournante nouvelle. De même, on observe une tolérance avec les voitures de sport 59 . Vitesse, bruit et plaisir de conduite restent encore étroitement associés pour les deux roues et certaines voitures, et sont des arguments de vente malheureusement peu controversés. 2.4.3. Le revêtement routier : d'importantes marges de progrès possibles En matière de bruit, des revêtements générant moins de nuisances ont été développés avec des résultats probants. L'IFSTTAR indique que des revêtements poreux de type « béton bitumineux drainants » (BBDr) ont été testés dans le passé en milieu urbain. Même si le gain acoustique était substantiel lors de leur mise en oeuvre (gain de 5 à 7 dB), les 55 56 57 58 Les deux autres critères sont la consommation en carburant et l'adhérence sur sol mouillé. On peut se reporter au projet européen eVADER : http://evader-project.eu/ Voir paragraphe 2.3.4 En revanche, on peut regretter qu'ils échappent au contrôle technique. Néanmoins, dans la mesure où le bridage et le débridage restent des opérations de routine, le passage au contrôle technique ne permettrait pas de les repérer. ll y a un bouton sur certaines voitures de sport qui permet de débrayer l'échappement (voir sur internet Porsche PSE) Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 36/80 59 Rapport n° 011057-01 phénomènes de colmatage réduisaient considérablement ce bénéfice après quelques années de service. Ces problèmes étaient principalement liés à la faible vitesse des véhicules, qui ne pouvait assurer l'auto-entretien de la couche poreuse. Pour l'espace urbain, il devenait ainsi urgent de conduire de nouvelles recherches sur d'autres types de structures de revêtement à faible bruit. De là sont nés les bétons bitumineux à couche très mince à faible granularité (BBTM). Les grandes entreprises françaises de construction routière ont amplifié leurs recherches sur ces nouveaux revêtements en travaillant plus spécifiquement sur la granularité et la composition du liant. Des BBTM de faible granularité ont ainsi été expérimentés sur sites réels. Ces revêtements présentent des caractéristiques intéressantes en termes de bruit de roulement au passage d'un véhicule (mesuré suivant la norme ISO 11819-1). Les gains obtenus peuvent aller jusqu'à 9 dB (soit une division quasiment par deux du bruit perçu) par rapport à un produit de référence. Toutefois, ces gains demandent à être contrôlés sur le long terme en intégrant notamment le vieillissement de l'enrobé. Les recherches se poursuivent sur le sujet, notamment dans un cadre franco-allemand60. . Le graphique ci-dessous illustre l'impact sonore possible des différentes natures de revêtements. Source : Laboratoire régional des ponts et chaussées de Strasbourg, 2012 (R1 = revêtement peu bruyant, R3= bruyant) Du point de vue économique, ces revêtements sont plus chers à la pose, mais aussi et surtout en entretien (nettoyage éventuel, durée de vie), ce qui fait qu'il est difficile de disposer aujourd'hui de résultats sur le surcoût global. Le recours à ce type de revêtement est assez récent. Dans un article récent publié sur le site de l'office fédéral 60 Ainsi, le projet ODSURF, financé par l'Ademe et la BASt1 en Allemagne a été consacré à l'élaboration et à la réalisation de nouvelles technologies de revêtement de chaussée à faible bruit et de nouveau matériaux adaptés au milieu urbain2. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 37/80 Rapport n° 011057-01 suisse de l'environnement61, un retour d'expérience sur la pose d'un revêtement peu bruyant indique un surcoût 8 % à la pose, mais auquel il faut ajouter un renouvellement estimé à ce jour par l'exploitant comme trois fois plus fréquent. Ces résultats corroborent les indications de Bruitparif datant de 2011 62, qui évoquent un surcoût pouvant aller de 25 % environ à 200 %, voire 300 % pour les BBDr bicouche (aujourd'hui évités). Le facteur coût doit être appréhendé de manière différente selon qu'il s'agit d'une nouvelle construction de route (surcoût à mettre en relation avec le gain de confort et de qualité de vie des futurs riverains de l'infrastructure) ou s'il s'agit d'un changement de revêtement en vue de résoudre le problème du bruit généré par le trafic sur une voirie existante (le surcoût doit alors être comparé aux coûts des autres mesures potentielles comme la construction d'écrans, l'isolation acoustique des bâtiments...). Une analyse coût bénéfice s'avère alors nécessaire pour chaque contexte. L'étude Bruitparif précitée fait référence à une étude danoise, qui compare le coût d'un revêtement routier type BBDr, la construction d'un mur anti-bruit et l'isolation acoustique des logements, en centre-ville, boulevard périphérique ou sur l'autoroute. Le rapport coût ­ efficacité (coût/dB(A)/habitation) est nettement favorable à la pose d'un revêtement acoustique. De plus, la réduction du bruit bénéficie à l'espace ouvert. S'il est incontestable que la pose de revêtement moins bruyant est un vecteur très efficace de la réduction du bruit dans l'environnement, le recours à ce type de produit reste peu fréquent en France. Une étude de 2014 de l'Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité (IDDRIM) auprès des collectivités a montré que le paramètre bruit est à peu près totalement absent des critères de choix posés dans les appels d'offres pour le renouvellement des revêtements routiers. L'étude montre que, outre un manque d'information sur les revêtements de chaussée peu bruyants, le principal frein à leur utilisation est l'absence de garanties sur la pérennité de leurs performances. Vient ensuite leur coût trop élevé, puis l'absence de cadre réglementaire ou normatif. Récemment, l'État et la région Île-de-France ont décidé de financer une expérimentation de pose d'enrobés acoustiques sur le réseau routier national non concédé. L'évaluation portera sur le suivi des caractéristiques mécaniques et acoustiques du revêtement, pour une durée de 3 ans sur ce dernier aspect. À ce stade, le surcoût à la mise en oeuvre est de 25 % et on estime une durée de vie réduite à 6 ans contre 10 ans du revêtement, ce qui correspond à un doublement du coût global d'investissement. Ce surcoût est important mais ne paraît pas insurmontable. En effet, selon la DGITM, sur cette base et à titre d'exemple, si l'on devait généraliser les enrobés phoniques sur 15 % du réseau routier national non concédé dans les zones urbaines (soit 50 % des voies les plus bruyantes), cela engendrerait un surcoût de plus de 30 M par an, soit environ 10 % du budget annuel d'entretien des chaussées (plus de 280 M par an ces dernières années). L'idée d'une labellisation du revêtement de la route lui-même est actuellement promue par l'IFSTTAR, la PFA Filière automobile et mobilités, Michelin et les entreprises routières en pointe sur le sujet (Colas et Eurovia). Notons que la qualité de l'exécution étant déterminante dans le résultat, le label ne pourrait procéder que d'une mesure a posteriori des performances acoustiques des tronçons routiers considérés. À ce sujet, la récente normalisation d'un protocole de mesure du bruit de roulement sur la chaussée est un atout. La labellisation doit en effet garantir une diminution effective du 61 62 Revêtements de routes peu bruyants : l'asphalte phonoabsorbant : un fort potentiel, 18 mai 2016, État des lieux des performances acoustiques de revêtements de chaussées, Bruitparif, décembre 2011 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 38/80 Rapport n° 011057-01 bruit perçue de façon immédiate, en mentionnant l'évolution de cette performance dans le temps. Par ailleurs, une initiative néerlandaise au sein du groupe ad hoc de la CEE-ONU (le WP 29) va dans le sens de la promotion d'une labellisation du niveau sonore des routes. L'ambition de certains acteurs est de formaliser une norme ISO. L'amélioration de la qualité des revêtements routiers, par la voie de la labellisation voire de la normalisation est donc tout à fait d'actualité, et la France a tout intérêt à être en pointe sur ce sujet. 2.4.4. Le comportement du conducteur : bruit, vitesse et sécurité routière Une autre voie de réduction du bruit à la source est l'intervention sur le comportement du conducteur, avec deux volets : la sensibilisation pour une conduite moins bruyante et la sanction des comportements non réglementaires. A priori, le conducteur est peu sensibilisé au bruit qu'il crée, à la fois parce qu'il est luimême dans un environnement bruyant et parce que la conduite réclame de sa part d'autres formes d'attention à l'environnement. Le graphique ci-dessous illustre le bilan des contributions sonores: bruit de roulement , bruit du moteur et bruit de fond au bruit total émis par un véhicule, de la deuxième à la cinquième vitesse. On observe que pour les faibles vitesses,(entre 30 et 50 km/h) le bruit total est surtout composé du bruit du moteur, alors que pour les vitesses plus élevées (à partir de 60 km/h) le bruit total se confond quasiment avec le bruit de roulement (bruit du pneu). Il est donc intéressant d'amener l'automobiliste circulant en milieu habité à modérer sa vitesse. Les radars automatiques de contrôle des vitesses ont clairement réussi à apaiser la circulation. Ils font partie des solutions. Cela dit, l'assouplissement de la Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 39/80 conduite reste avant tout affaire de pédagogie vis-à-vis du conducteur qui est aussi, à ses heures, résident riverain d'une infrastructure bruyante. La maîtrise du bruit de la circulation suppose que les conduites et engins bruyants puissent être sanctionnés. Le code de la route dispose en la matière de différents articles réglementaires63, notamment l'article R325-8 : « lorsqu'un véhicule paraît exagérément bruyant, le fonctionnaire ou agent habilité à prononcer l'immobilisation peut prescrire de le présenter à un service de contrôle du niveau sonore en vue de sa vérification ». Cet article permet en théorie l'interception et la verbalisation par les forces de l'ordre d'un véhicule bruyant, sans qu'il soit au demeurant nécessaire d'exciper d'un niveau sonore quelconque. Néanmoins, les modalités de telles interceptions posent parfois de sérieux problèmes de sécurité (comment arrêter une moto circulant à grande vitesse dans un flux urbain dense), la mesure du niveau sonore suppose un matériel et des conditions opératoires qui ne sont que rarement à la portée des équipes de police, et l'absence de critère quantitatif de l'appréciation du bruit « exagéré » conduit bien souvent les fauteurs de bruit procéduriers à faire rapporter devant les tribunaux les condamnations dont ils ont été les sujets. En réponse à une question parlementaire64, le ministère de l'Intérieur précise que « chaque année, plus de 20 000 contraventions sont dressées, aussi bien pour sanctionner les usagers qui utilisent leur deux roues motorisé à des régimes moteur anormalement élevés, que pour sanctionner ceux qui modifient leurs dispositifs d'origine ou adaptent des versions non homologuées ». Ce chiffre, rapporté aux 24 millions de contraventions dans le domaine de la sécurité routière (dont 13,6 millions pour les excès de vitesse) est très faible. De fait, il n'existe à peu près plus aujourd'hui de contrôle/sanction des bruits émergents dans la circulation routière. 2.4.5. La recherche : les orientations actuelles La recherche sur le bruit des transports routiers intègre les travaux de la recherche publique conduits par l'IFSTTAR et le Cerema et ceux du secteur privé portés par les filières de l'automobile et des travaux publics. Ces travaux portent notamment sur le pneumatique et sur le revêtement, et sur le contact entre les deux, ainsi que sur les solutions curatives classiques telles que le mur anti-bruit (Cerema Strasbourg et CSTB Grenoble et IFSTTAR sur les méta-matériaux) et sur la relation entre le bruit et son ressenti par l'individu (psycho-acoustique, études épidémiologiques). L'IFSTTAR et le Cerema viennent de formaliser un projet d'unité mixte de recherche en acoustique environnementale, dont une partie des travaux porte sur le bruit routier. 63 l'article R 318-3 précise que « Les véhicules à moteur ne doivent pas émettre de bruits susceptibles de causer une gêne aux usagers de la route ou aux riverains. Le moteur doit être muni d'un dispositif d'échappement silencieux en bon état de fonctionnement sans possibilité d'interruption par le conducteur. Toute opération tendant à supprimer ou à réduire l'efficacité du dispositif d'échappement silencieux est interdite. » Question n° 90686 de M. Bernard Accoyer, réponse publiée au JO le 29 mars 2016. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 40/80 64 Rapport n° 011057-01 2.5. Les pistes de progrès : action coordonnée selon les différents leviers disponibles, convergence des principes, réduction à la source, sanction des contrevenants Partant de la description qui vient d'être faite des modalités et des perspectives de prise en compte des nuisances sonores dues aux transports, on esquisse ci-dessous quelques propositions en vue d'une meilleure intégration du bruit dans les politiques publiques correspondantes. On s'attache notamment à développer la réduction à la source, sans exclusive, mais de préférence aux politiques curatives. 2.5.1. Fiabiliser et simplifier les dispositifs de mesure et de cartographie du bruit La lutte contre toute nuisance nécessite au préalable de bien la définir, la mesurer et la transcrire dans un document clair, dont la méthode d'élaboration fait l'objet d'un consensus pour que les données soient une référence commune. L'enquête Ifop de septembre 2014 a montré qu'un Français sur cinq seulement connaît l'existence des cartes de bruit et des PPBE. On a vu plus haut la superposition et l'incohérence des cartographies et méthodes de mesures. On doit viser à ce qu'un seul dispositif de modélisation et de cartographie du bruit fasse référence. Il paraît naturel de préférer le dispositif communautaire des cartes de bruit. Ces cartes sont aujourd'hui établies sur la base d'un réseau de mesure et d'outils de modélisation. On peut imaginer aisément qu'elles s'enrichissent progressivement des mesures des usagers65, permettant de produire des cartes plus précises et actualisées plus fréquemment66. Le calendrier de mise en oeuvre initialement prévu en application de la directive a pris beaucoup de retard et les collectivités sont diversement avancées sur le sujet. Par ailleurs, les autorités désignées responsables (communes et/ou intercommunalités) ne relevaient pas toujours de l'échelle pertinente. Ce n'est que tout récemment (arrêté interministériel du 14 avril 2017) que la liste des 45 intercommunalités de plus de 100 000 habitants concernées par ce dispositif a été publiée. Selon les données de la mission bruit de la DGPR, plus de 80 % la population ainsi concernée est déjà couverte par une carte de bruit publiée. Les dynamiques locales sont cependant variables. Après la région Île-de-France et l'agglomération lyonnaise, le plan bruit de l'Ademe a permis de faire émerger des projets d'observatoires dans quatre autres grandes agglomérations : Nice, Grenoble, Aix-en-Provence et Saint-Étienne. Pour qu'à terme les cartes de bruit puissent devenir la référence, voire devenir opposables dès lors qu'un certain niveau d'exposition au bruit crée des droits ou des devoirs, il faut s'assurer de la qualité de la méthodologie et donc poursuivre le développement de l'expertise autour des principaux acteurs déjà engagés (Acoucité, Bruitparif et le Cerema notamment), soutenir la création d'observatoires dans les collectivités concernées et diffuser largement le savoir-faire acquis (concertation avec les citoyens et associations, information, communication,...). 65 Dans le cadre du projet européen ENERGIC-OD, le CNRS1 et l'Ifsttar ont développé une application smartphone baptisée NoiseCapture, qui permet de créer des cartes du bruit en milieu urbain. L''application mesure notre environnement sonore quand on se promène en milieu urbain, et permet même d'évaluer la perception qu'on en a avec des tags. NoiseCapture, est aussi une infrastructure informatique spécifique pour traiter toutes ces données sonores géolocalisées, pour les restituer sous forme de cartes de bruit. L'échelle actuellement requise par l'UE est 1/100 000 et la fréquence actualisation tous les 5 ans. 66 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 41/80 1. Faire des cartes de bruit établies en application de la réglementation européenne la référence en matière de mesure du bruit dans l'environnement. Développer l'expertise pour fiabiliser la qualité des données, faciliter l'usage, la compréhension et la diffusion de ces cartes. Promouvoir cette méthodologie dans les collectivités concernées. (DGPR, Ademe, Cerema) 2.5.2. Un traitement des points noirs coordonné selon les différents leviers disponibles Dans un contexte budgétaire des plus contraints, la politique de traitement des points noirs de bruit doit être reprise à nouveaux frais. Aux investissements de protection (murs anti-bruit et isolation acoustique des façades) qui ont été au coeur des politiques suivies jusqu'à présent peuvent et doivent s'adjoindre les autres actions pertinentes, dont on a vu plus haut qu'elles ne manquent pas. On peut ainsi penser : · au choix d'un revêtement routier moins bruyant ; · à la réduction imposée, et le cas échéant contrôlée par radar, de la vitesse autorisée ; · à des aménagements (giratoire plutôt que feux...) et à des plans de circulation évitant les confluences et déviant le trafic ; · et à l'aide à la mutation du tissu urbain. C'est d'autant plus légitime que le droit actuel, qui considère comme traité un immeuble à l'intérieur duquel le niveau sonore est redevenu acceptable une fois les fenêtres fermées, n'est pas adapté à l'évolution des moeurs qui veulent que l'on vive, notamment en été et dans les lieux d'accueil des enfants et des jeunes, fenêtres ouvertes. S'agissant de la mutation du tissu urbain, il peut être intéressant, dans les secteurs où la pression immobilière est forte, de réfléchir à l'alternative de l'implantation d'immeubles de bureau écrans en bordure de voie, voire de mutation du tissu résidentiel ou de requalification urbaine vers un immobilier d'activité moins sensible au bruit, conduisant au relogement progressif des populations exposées. Les immeubles locatifs seraient à traiter en priorité, et en particulier le locatif social, pour lesquels le relogement peut être appréhendé à l'échelle du parc de l'office HLM considéré. Les opérateurs de portage foncier pourraient également être mobilisés en cas de nécessité d'achat. Dans d'autres cas, la couverture totale ou partielle des infrastructures, dans le cadre d'opérations d'aménagement, s'avère une solution, coûteuse, possible. La mise en oeuvre coordonnée de ces différentes solutions dont chacune contribue à l'objectif de maîtrise des nuisances sonores suppose une véritable ingénierie de projet territoriale. La collectivité locale concernée a vocation à en assurer la direction, avec l'aide du propriétaire de la voie (quand ce n'est pas elle) et le soutien des réseaux d'expertise, au premier rang desquels le réseau scientifique et technique ministériel. La plupart des mesures énoncées ci-dessus ne nécessitent pas de subventions directes, mais elles ont un coût. Pour autant, il ne saurait être question d'abandonner totalement la politique de résorption des points noirs de bruit par les voies classiques d'isolation des façades et de murs anti-bruit, notamment dans les zones où la vitesse de circulation est de plus de 70 km/h. Or, depuis 2014, plus aucun crédit n'est Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 42/80 programmé. Poursuivre une politique volontariste de lutte contre le bruit dans l'environnement et de traitement des bâtiments les plus exposés nécessite de mobiliser un minimum de moyens humains et financiers, aujourd'hui très faibles dans le budget de l'État comme dans ceux des collectivités locales. Une étude réalisée pour le compte de l'Ademe en février 2015 par Beauvais consultants67 a étudié plusieurs scénarios possibles pour financer le traitement des points noirs de bruit routiers. L'étude est établie sur l'hypothèse d'un besoin de financement de 110 M par an68, ce qui est inférieur aux recommandations du Grenelle en 2008 (450 M par an) et ne permet pas de traiter l'ensemble du parc exposé, mais ce qui est beaucoup plus élevé que le rythme du plan Ademe 2009-2015 (90 M engagés sur 6 ans). Notons qu'en l'état actuel des moyens, de la typologie restreinte des actions financées et des procédures, les acteurs publics (Ademe, DDT et collectivités) pourront difficilement mettre en oeuvre davantage de crédits. Quoi qu'il en soit, pour obtenir une telle somme à l'aide d'outils économiques, en utilisant le principe de « pollueur-payeur », le rapport énonce quatre mesures alternatives de taxation qui lui paraissent pouvoir être étudiées sérieusement : · une taxe sur les ventes de carburant routier : 0,0017 par litre, soit 0,12 % d'augmentation du prix du litre, · une taxe sur les immatriculations : 6,64 par immatriculation (véhicules neufs et d'occasion), soit une augmentation du coût du certificat de 2 %, · une taxe sur les véhicules en circulation : 1,57 par véhicule et par an, soit une augmentation du prix de revient kilométrique de 0,03 %, · une taxe à la fois sur les ventes de carburant et les immatriculations : 0,0009 (+0,06 %) par litre et 3,32 (+1 %) par immatriculation. La préférence de la mission va plutôt à la première solution. D'une part, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE, anciennement TIPP) existe déjà, alors qu'il semble difficile dans le contexte actuel de créer un nouvel impôt. D'autre part, cette contribution est le moyen qui semble le plus juste pour représenter la nuisance sonore effectivement produite, qui dépend, tout comme la consommation de carburant, du nombre de kilomètres parcourus, de la puissance et de la nature du moteur (un moteur hybride, moins bruyant en ville, consomme moins de carburant). Si la proposition d'augmentation de la TICPE pour alimenter spécifiquement la politique du bruit ne pouvait aboutir 69, il s'agirait alors de dégager, au sein du produit qu'elle génère actuellement, une enveloppe spécifique, extrêmement faible au regard de son produit global (plus de 25 milliards d'euros en 2015, pour les seuls carburants routiers). Quel que soit le choix du mode de financement (l'un de ceux précités ou un autre) et son montant, compte tenu du niveau faible des moyens actuels au regard des besoins et des enjeux, il convient de tirer les conclusions de l'évaluation du plan bruit et de rechercher un maximum d'efficacité et de facilité de mise en oeuvre dans l'utilisation des crédits. La mise au point d'un nouveau « plan bruit » doit élargir davantage la palette des actions financées, notamment en direction des collectivités locales, dans une approche plus intégrée du bruit dans l'environnement. Dès lors, un montant annuel 67 Étude d'outils économiques visant à financer le traitement des points noirs de bruit routier, BEAUVAIS CONSULTANTS, 16 février 2015. Parc de 300 000 logements à traiter, coût moyen unitaire de 7300 , programme établi sur 20 ans. Il faudrait en exonérer les produits qui ne sont pas des carburants routiers (fioul domestique, gazole non routier, ...) Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 43/80 68 69 Rapport n° 011057-01 de l'ordre de 100 M, comme envisagé dans l'étude précitée, ne paraît pas disproportionné au regard des enjeux (coût social minimum du bruit des transport de plus de 20 milliards d'euros par an, dont près de 90 % pour le transport routier). Pour ce qui concerne l'isolation acoustique des façades, la gestion des opérations du plan bruit a été particulièrement lourde et sur la plupart des opérations, le taux de logements effectivement protégés sur une façade n'excédait que rarement 50 % du fait du refus des propriétaires de réaliser les travaux, souvent pour des raisons financières. La mission préconise donc de concentrer les interventions publiques sur certaines opérations particulièrement exemplaires tant sur le plan santé - environnement (ne retenir que les bâtiments répondant aux critères des points noirs du bruit) que sur le plan social. En effet, de nombreux logements exposés (dans le parc privé comme dans le logement social) sont occupés par des gens à très faible niveau de ressources, pour lesquels une participation de 20 % au coût total des travaux n'est pas accessible. Le financement pourrait être porté à 100 % du coût des travaux et porté par une maîtrise d'ouvrage unique, pouvant être confiée aux collectivités. Cette disposition éviterait des protocoles financiers avec de multiples co-contractants, permettrait de maîtriser plus facilement les coûts (appel d'offre unique) et de s'assurer que tous les logements seront effectivement protégés. 2. Dégager un financement pérenne permettant de soutenir notamment les collectivités locales dans la politique de traitement des zones les plus exposées au bruit, intégrant de nouveaux leviers (exploitation, aménagement et revêtement routiers, mutation du tissu et des usages urbains). Concentrer les crédits alloués au traitement des façades sur des opérations exemplaires, à forte dimension sociale, avec un financement pouvant aller jusqu'à 100 % du coût total. (DGPR, Ademe, DGITM) Le dispositif envisagé ne concerne que le secteur routier. Un programme spécifique doit pouvoir être mis en place par d'autres voies pour le secteur ferroviaire, avec un financement en provenance du secteur ferroviaire et de ses usagers, qu'il s'agisse du fret ou du transport de voyageurs. 2.5.3. Mieux prendre en compte le bruit dans la création des nouvelles infrastructures L'Autorité environnementale (Ae), placée au sein du CGEDD a adopté le 8 juillet 2015 et publié une note sur la prise en compte du bruit dans les infrastructures de transport routier et ferroviaire. Après dépouillement de 101 avis rendus depuis 2009, et tout en se félicitant de la nette amélioration de la prise en compte du bruit dans les études d'impact, l'Ae identifie six pistes d'amélioration allant pour la plupart au-delà de la stricte application des prescriptions réglementaires. Ce sont : · 1. Améliorer la présentation au public ; · 2. Mettre en perspective la stratégie adoptée au regard de l'objectif de respect de la réglementation ; · 3. Tenir compte des émergences : l'Ae rappelle à ce propos que l'Anses, dans son rapport de 2013, comme l'OMS, estiment « qu'un indice événementiel serait mieux adapté pour évaluer les risques de perturbation du sommeil » ; · 4. Inscrire le bruit dans la séquence éviter - réduire - compenser (ERC) ; Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 44/80 · 5. Faire le lien avec la politique des points noirs : en jouant de la large palette des solutions techniques à disposition, et non de la seule isolation des façades qui n'est efficace que fenêtres fermées ; · 6. Tenir compte des inégalités sociales face aux nuisances et de la multiexposition : observant que les situations de multi exposition tendent à se concentrer sur les populations les plus défavorisées, l'Ae recommande que les nouveaux projets d'infrastructure prennent en compte la qualité de vie globale des habitants concernés et ajustent les mesures prises en conséquence. La mission fait sienne ces recommandations, qui corroborent sa proposition de développer une approche intégrée du bruit dans l'environnement, ne se limitant pas au traitement des façades des bâtiments identifiés comme « points noirs du bruit » et de tenir également compte de la situation sociale des habitants. 2.5.4. Associer le bruit à la sécurité routière et mettre à l'étude un système de contrôle et sanction automatisés des fauteurs de bruits émergents Le respect des limites de vitesse est avant tout compris au titre de la sécurité. Dans certains cas, il est aussi justifié par le respect des riverains et la nécessité de produire moins de bruit. Les accélérations rapides sont aussi une source de bruit supplémentaire et inutile. Le bruit doit donc être intégré dans la qualité de conduite par exemple au travers de l'éco-conduite, qui vise d'abord à mieux maîtriser la dépense énergétique. Les conducteurs pourraient utilement être sensibilisés sur le sujet, ce qui favorisera de plus l'acquisition de véhicules électriques. De surcroît, rappelons qu'une conduite apaisée réduit aussi la pollution atmosphérique. Ainsi, la limitation de vitesse sur les voiries périphériques (de 110 km/h à 90 km/h ou de 90 km/h à 70 km/h ) a des effets multiples qui plaident en faveur de leur examen : réduction du bruit, réduction de la pollution de l'air, amélioration de la capacité de transit avec réduction des embouteillages. Le contrôle de la vitesse par radar pour le respect du bruit et non pour la seule sécurité serait le bienvenu sur certains tronçons urbains. Une discussion avec le ministère de l'intérieur s'imposera au préalable. En effet, le réseau des radars est actuellement implanté sur les lieux les plus accidentogènes, ce qui répond certes à son objectif premier, mais sans considération de la pollution sonore. Le contrôle des émergences atypiques sur route doit être envisagé. Il serait intéressant de s'inspirer de l'expérience acquise depuis 2005 en matière de contrôle sanction automatisés par radars de la vitesse sur route. L'idée serait de mettre au point, de faire valider et d'installer sur le bord des routes, notamment en milieu urbain et sur les points noirs, des appareils de mesure qui seraient au bruit ce que les radars automatiques de détection des véhicules en excès de vitesse sont aujourd'hui à la vitesse. La technologie existe. Elle est fondée sur le principe de la stéréo. Elle a été développée il y a 25 ans en vue de la localisation des snipers dans un environnement urbain. Elle a certes connu des tentatives avortées (notamment au Canada) et des résultats décevants (travaux de Greg Watts au Royaume-Uni). Elle est pourtant testée depuis 2016 par Bruitparif dans quelques quartiers animés en soirée de la capitale, à l'aide d'un appareil à 4 têtes enregistreuses appelé « méduse », et fait l'objet de recherches au sein de la communauté scientifique. Elle nécessitera sans doute des développements technologiques avant de pouvoir obtenir la validation des autorités judiciaires, mais offre des perspectives intéressantes de pacification du trafic. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 45/80 3. Associer le bruit à la politique de sécurité routière, sensibiliser les conducteurs et mettre à l'étude un système de contrôle sanction automatisé des bruits émergents excessifs causés par certains véhicules. (DGITM, DGPR, en lien avec le ministère de l'Intérieur) 2.5.5. Anticiper l'évolution de la réglementation communautaire en matière de prévention Dans un domaine où l'Union européenne donne désormais le tempo en matière de réglementation, il est important que la France sache anticiper pour faire valoir les principes auxquels elle est attachée. Comme on l'a vu, elle pourrait engager une démarche active sur deux questions au moins : la labellisation des revêtements peu bruyants et le bruit des wagons de fret. La labellisation des revêtements de chaussées peu bruyants est un sujet émergent au niveau européen alors même qu'un savoir faire est développé en France et promu par la filière. De plus, une démarche de labellisation serait de nature à mieux valoriser ces produits, trop peu utilisés en France. 4. Encourager la labellisation et la promotion de l'utilisation des revêtements de chaussées peu bruyants. (DGITM) Si le sujet est en cours de discussion au niveau européen, il est certain que la réglementation en matière de bruit ferroviaire en Union Européenne va se durcir d'ici moins de 10 ans. À très court terme, les semelles de fonte seront interdites en Allemagne et en Suisse. Si les systèmes de freinage des wagons français ne sont pas d'ores et déjà progressivement renouvelés, le fret français risque une très forte pénalisation le moment venu. La DGITM suggère une distinction entre différents types de section selon leur niveau de sensibilité vis-à-vis du bruit causé par les wagons de fret. Cette position devra toutefois être défendue à Bruxelles. Il est donc urgent de programmer les investissements correspondants, en priorisant sur les wagons circulant sur les voies les plus fréquentées ou sensibles (international, triages urbains, itinéraires habités comme la vallée du Rhône ou Serqueux ­ Gisors) ainsi que sur les wagons circulant en Allemagne ou en Suisse. Selon le rapport du CGEDD précité70, le coût total estimé est de l'ordre de 150 millions d'euros. Cette dépense pourrait être étalée sur 5 ans, soit 30 millions d'euros par an. En anticipant une échéance qui pourrait être 2025, il faudrait commencer au plus tard en 2020, sans compter qu'à cette date, les wagons non équipés d'un nouveau dispositif de freinage ne pourront plus circuler en Allemagne et en Suisse. 5. Présenter sous un an un programme d'investissement pour le remplacement des systèmes de freinage des wagons de fret, permettant aux opérateurs français de respecter les échéances européennes (DGITM, en lien avec les propriétaires de wagons et opérateurs de fret). 70 rapport n° 009254-01 de mars 2014 du CGEDD sur le bruit du fret ferroviaire Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 46/80 Rapport n° 011057-01 3. Le bruit, une thématique mal identifiée dans les politiques d'urbanisme, d'habitat et de construction 3.1. Le bruit encore peu intégré dans la planification et l'aménagement urbains 3.1.1. Le code de l'urbanisme ignore le bruit, à l'exception de celui du trafic aérien Comme il a été dit plus haut, le code de l'urbanisme n'édicte de contraintes à l'urbanisation qu'au voisinage des aérodromes. Le long des voies routières ou ferroviaires à fort trafic, les constructions sont possibles sous réserve du respect, dans une bande plus ou moins large selon le niveau de bruit généré par l'infrastructure, de prescriptions d'isolation acoustique. En principe, l'implantation de toute construction est soumise à l'obtention du permis de construire. Ce permis « peut être refusé, ou n'être accordé que sous réserve de prescriptions spéciales, si les constructions sont susceptibles, en raison de leur localisation, d'être exposées à des nuisances graves, dues notamment au bruit » (article R111-3 du code de l'urbanisme). Mais, selon l'article L 111-1 du code de l'urbanisme, cette disposition ne s'applique pas aux communes dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, c'est-à-dire la plupart des communes. Dans ce cas, il faut tenir compte des zones ou parties de zones qu'il délimite (zones industrielles par exemple) et dans lesquelles certaines constructions peuvent être interdites, ou au contraire seules autorisées, pour des raisons diverses, dont le bruit . Il n'existe donc paradoxalement aucune restriction de droit à l'occupation de l'espace riverain des voies bruyantes par des immeubles d'habitation ou d'accueil de publics sensibles tels que les enfants. Il est donc possible de construire au voisinage des voies ferrées et des routes à trafic intense, dès lors que les immeubles respectent les normes d'isolation acoustique aux bruits extérieurs. De fait, il a été signalé à la mission des exemples paradoxaux de crèches implantées en ZAC le long d'une voie rapide urbaine, alors que les terrains à l'arrière, jugés commercialement plus intéressants, étaient réservés aux bureaux et aux entreprises. A contrario, les urbanistes et les architectes savent aujourd'hui construire le long des voies bruyantes des immeubles tolérants au bruit (bureaux, hôtels, salles de sport...), dont la façade côté voie est occupée par les espaces les moins nobles (couloirs, cuisines et sanitaires...) et qui jouent vis-à-vis des immeubles à l'arrière le rôle bienvenu d'écrans acoustiques. Le silence du code de l'urbanisme sur le bruit des transports terrestres, comparé aux dispositions très complètes qu'il édicte au voisinage des aérodromes, surprend. Il paraît étrange qu'on puisse implanter une crèche ou une nouvelle école le long d'une voie rapide urbaine, sous la seule condition que le bruit à l'intérieur, fenêtres fermées, respecte les valeurs limites édictées par la réglementation. On rappellera à ce propos la déclaration de Parme des ministres européens de l'environnement et de la santé (2010) engageant l'UE et ses États membres à réduire l'exposition des enfants au bruit et demandant à l'OMS de produire des lignes directrices appropriées. Si la réglementation permet au PLU d'édicter des limitations, elle ne l'impose pas. Les secteurs affectés par le bruit de part et d'autre des voiries classées selon le processus de classement sonore des voies décrit au paragraphe 2.2.1 (entre 10 m et 300 m selon Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 47/80 leur catégorie sonore) ainsi que les prescriptions d'isolement acoustiques doivent toutefois être annexés au PLU. 3.1.2. Le plan de prévention du bruit dans l'environnement : un document de trop dans le maquis de la planification ? Comme on l'a vu au chapitre précédent, les cartes de bruit sont la base d'une démarche de réduction au travers des plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE), qui doit être compatible avec le PLU. Il vise à prévenir les effets du bruit, à en réduire le niveau ainsi qu'à préserver les « zones calmes ». Il doit comporter une évaluation du nombre de personnes exposées à un niveau de bruit excessif et identifier les sources de bruit dont les niveaux doivent être réduits. Il doit également recenser les mesures proposées par les autorités compétentes sur le territoire en question pour réduire les niveaux de bruit et lutter contre les nuisances sonores. Il doit préciser les financements éventuellement disponibles et les échéances prévues pour la mise en oeuvre des mesures recensées. Les PPBE sont diversement mis en oeuvre et leur qualité est très inégale. Selon les données de la mission bruit de la DGPR, le taux d'exécution des PPBE par les collectivités est tel que 57 % de la population concernée est couverte par un tel plan. Bien souvent, le PPBE est perçu comme un document de plus ou de trop, dans le maquis des documents de planification ou de programmation. L'Ademe a récemment lancé un appel à manifestation d'intérêt pour intégrer la démarche des PPBE à celle des plans climats air énergie territoriaux (PCAET). Actuellement, le bruit ne relève pas des PCAET. Dans cette nouvelle approche, il s'agit de lier le bruit à la qualité de l'air, en le considérant d'une certaine manière comme un indicateur de celle-ci, à l'instar du dioxyde d'azote ou des particules fines. Dans cet esprit, l'observatoire de Lyon a développé une plate-forme « air-bruit »71, outil régional de l'exposition du territoire aux nuisances air et bruit. L'outil propose des cartes distinctes et combinées pour les deux indicateurs, qui intègrent des problématiques proches. Leur utilisation commune dans les démarches de prévention et de traitement a bien entendu du sens. La démarche de liaison « air-bruit » est à poursuivre tant dans la cartographie des nuisances correspondantes que dans leur intégration dans les PCAET, qui pourraient devenir des PCAEBT. La mission privilégie une autre piste, qui consisterait à intégrer davantage le bruit dans la planification urbaine. Au sein du PLU serait développé un volet bruit, présentant un plan d'actions, ce dernier « valant » PPBE. L'évaluation environnementale comporterait un chapitre bruit, sur lequel l'Autorité environnementale serait amenée à se prononcer. Le lien avec le règlement de chaque zone serait plus aisé, il préciserait par exemple les limitations à la construction des logements ou des établissements accueillant des personnes sensibles dans les zones les plus exposées. Les cartes de bruit seraient alors annexées au PLU et intégrées dans le futur outil Géoportail. Comme indiqué dans le chapitre précédent, cette dernière étape suppose toutefois que la méthodologie de la cartographie soit encore améliorée pour que leur fiabilité ne soit pas contestée. On rappellera que la Commission européenne a mis en demeure la France en raison de son retard dans la publication des cartes et dans la réalisation des plans. Pour ce motif plusieurs circulaires et instructions du ministère de l'environnement ont invité au fil des années les préfets à sensibiliser et mobiliser les collectivités locales pour 71 ORHANE : observatoire Environnementales Régional Harmonisé Auvergne-Rhône-Alpes des Nuisances Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 48/80 l'élaboration des cartes et plans. Fin 2017, cette situation s'est améliorée 72. Une sanction financière, qui engagerait solidairement l'État et les collectivités locales, reste toujours possible. 3.1.3. L'intégration du bruit dans l'aménagement urbain comme une composante à part entière de la qualité de vie Si la réglementation de l'urbanisme offre peu d'outils permettant de réduire les nuisances sonores dans les villes et dans les zones particulièrement affectées par le bruit, la demande citoyenne se fait plus exigeante pour un environnement garantissant une réelle qualité de vie. Il s'agit dans le cadre d'une organisation de l'espace, des circulations, de l'affectation du bâti, en fonction du contexte et des contraintes, de maîtriser l'environnement sonore de façon harmonieuse, de construire avec les sons dans le respect de l'identité des lieux afin d'offrir un cadre de vie agréable. Parmi les opérations urbaines en capacité d'intégrer la réflexion sur la réduction du bruit figure le concept d'éco-quartiers ou encore de haute qualité environnementale (HQE) des aménagements. On peut noter qu'aucune de ces deux démarches ne fait explicitement référence au bruit. Dans la démarche éco-quartier issue du plan ville durable lancé en 2008, l'engagement vis-à-vis du bruit a été inclus au départ dans l'ensemble « offrir un cadre de vie agréable et sain », devenu en 2016 « assurer un cadre de vie sûr et qui intègre les grands enjeux de santé, notamment la qualité de l'air ». De même, le référentiel HQE aménagement fait référence au bruit dans un ensemble « santé » incluant les nuisances sonores olfactives et visuelles, la qualité de l'air extérieur et intérieur, les risques sanitaires (sols pollués, champs électromagnétiques, sites et sols pollués). Les retours d'expérience montrent que dans ces démarches, le bruit est rarement pris en compte en tant que tel, même s'il y a de ce point de vue, des opérations exemplaires 73 en général dans les zones les plus exposées. En pratique, la prise en compte du bruit n'est pas encore dans les « standards » de l'aménagement urbain dans lesquels la dimension sonore reste encore marginale par rapport à d'autres impératifs. Les collectivités disposent également de la possibilité d'instaurer des espaces dits « zone calmes » et « zone d'apaisement » introduites dans la législation en 2002 par la directive européenne et définies dans l'article L572-6 du code de l'environnement comme « des espaces extérieurs remarquables par leur faible exposition au bruit, dans lesquels l'autorité qui établit le PPBE souhaite maîtriser l'évolution de cette exposition compte tenu des activités pratiquées ou prévues »74. Un récent guide « Du calme en ville, aménager en faveur du bien être » du Cerema présente la démarche et quelques opérations exemplaires réalisées à Lyon, Bourg-enBresse, Bordeaux, Grenoble ou encore Rotterdam et Bilbao. Il faut promouvoir ces démarches en vue d'une meilleure prise en compte du bruit dans l'aménagement urbain. Mais force est de constater que le bruit n'est pas une préoccupation identifiée par l'administration : au sein de la sous-direction « qualité de 72 La définition récente (avril 2017) des nouvelles entités responsables rend encore fragile les statistiques, mais la DGPR estime que le taux de couverture rapporté à la population concernée est de 87 % s'agissant des cartes de bruit, et de 57 % s'agissant des PPBE Par exemple la ZAC Claude Bernard, opération de renouvellement urbain située dans le 19ème arrondissement à Paris, le long du tram 3 et de la future gare RER E « évangile ». La zone calme se caractérise par Lden<55 dB(A) ; la zone d'apaisement est comprise entre 55 dB(A) et 65 dB (A). Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 49/80 73 74 Rapport n° 011057-01 vie » de la direction de l'urbanisme, de l'habitat et des paysages (DHUP), on reconnaît volontiers que la question du bruit n'est pas ou très peu intégrée dans les critères pris en compte pour définir la qualité de vie. 6. Prendre en compte le bruit dans la planification urbaine en y intégrant un « volet bruit ». Inciter à définir dans les PLU des restrictions d'usage en matière de construction dans les zones fortement exposées pour épargner les publics sensibles et à définir des orientations en matière d'aménagement urbain intégrant le bruit dans les critères de qualité de vie. (DHUP) 3.1.4. Trop de logements nouvellement construits ne sont pas conformes à la réglementation acoustique Le contrôle du respect des règles de construction (contrôle CRC) des bâtiments neufs est piloté par la DHUP et réalisé par le Cerema. L'administration a régulièrement constaté, lors de ces contrôles, qu'en matière acoustique, plus d'un logement sur deux n'était pas conforme à la réglementation75. Cette piètre performance doit être corrigée, surtout si l'on considère que les bruits de voisinage sont perçus comme une nuisance importante et que leur coût social l'est tout autant. Il faut ajouter que l'isolation acoustique vis-à-vis de l'extérieur, si elle est de bonne facture (ce qui est en général le cas pour les logements neufs), fait ressortir les bruits intérieurs. Depuis le 1er janvier 2013, un arrêté76 impose aux maîtres d'ouvrage de signer une attestation de prise en compte de la réglementation acoustique à réception du chantier pour toute opération de logements collectifs ou de maisons individuelles accolées. Cette attestation doit être produite à l'autorité ayant délivré le permis de construire, en général le maire. Pour les opérations comportant au moins 10 logements, des mesures acoustiques doivent être réalisées. L'attestation engage la responsabilité du signataire en cas de contentieux. L'intention est louable, mais le protocole de ces mesures n'est pas très détaillé et la réglementation n'impose pas que ce contrôle soit réalisé par un tiers (bureau de contrôle agrée par exemple). En pratique, ces attestations ne sont pas toujours produites aux communes, qui ignorent bien souvent cette exigence, de même qu'a fortiori, le futur occupant du local, qu'il soit propriétaire ou locataire. Ainsi, il n'est guère surprenant que les contrôles CRC effectués depuis 2013 ne montrent pas d'amélioration significative en la matière. En l'état, l'attestation n'est donc d'aucune utilité et pourrait être supprimée. La mission préconise que l'ensemble du système de contrôle du respect des règles de la construction soit revu. Les non-conformités constatées de façon récurrente et parfois importantes ne concernent pas uniquement le volet acoustique, mais aussi l'accessibilité ou certaines normes de sécurité. La pression de contrôle est globalement très faible et le Cerema vient d'annoncer son intention de mettre fin à cette activité. Il est donc temps de concevoir un dispositif nouveau qui permette réellement de faire progresser la qualité de la construction (pas uniquement dans le domaine acoustique) et garantisse à l'habitant propriétaire ou locataire un logement réellement performant. 75 Selon le « bilan des contrôles acoustiques réalisés de 2007 à 2013 », réalisé par le Cerema et en date de novembre 2016, près de 60 % des opérations contrôlées présente au moins une non-conformité. Arrêté du 27 novembre 2012 relatif à l'attestation de prise en compte de la réglementation acoustique applicable en France métropolitaine aux bâtiments d'habitation neufs Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 50/80 76 Rapport n° 011057-01 7. Concevoir un nouveau système de contrôle du respect des règles de la construction pour garantir à l'habitant un logement conforme à la réglementation, notamment en matière acoustique. (DHUP). 3.1.5. Des opportunités pour procéder à l'amélioration de la qualité acoustique des logements Les travaux de rénovation qui vont s'engager dans le cadre de la loi pour la transition énergétique sont une opportunité d'ores et déjà identifiée pour combiner la rénovation acoustique à la rénovation thermique dès que nécessaire. Pris en application de l'article 14 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, le décret n° 2016-798 du 14 juin 2016 relatif aux travaux d'isolation acoustique en cas de travaux de rénovation importants complète le décret du 30 mai 2016. Le maître de l'ouvrage qui entame des travaux importants de rénovation doit réaliser à la fois des travaux d'isolation thermique et des travaux d'isolation acoustique si l'immeuble est situé dans une zone particulièrement exposée au bruit. L'arrêté du 13 avril 2017 précise, selon les types de bâtiments, selon la zone d'exposition au bruit extérieur et selon le type de travaux de rénovation, les exigences acoustiques à respecter. Ces dispositions sont entrées en vigueur au 1er juillet 2017. L'Ademe est sur le point de diffuser un guide de la rénovation acoustique combinée à la rénovation thermique en direction des points rénovation info service situés sur tout le territoire. Dans le parc privé, la rénovation groupée de logements dégradés peut aussi passer par des opérations programmées d'amélioration de l'habitat (OPAH) portées par les collectivités locales en partenariat avec l'Agence nationale de l'habitat (Anah), sur des secteurs et/ou des publics cibles. Pour ces opérations, l'Anah cible les habitats dégradés, insalubres ou les publics en précarité énergétique, mais ne cible pas les habitations fortement exposées au bruit. Par ailleurs, lors des travaux de réhabilitation, la question acoustique n'est pas spécifiquement abordée. On peut donc recommander d'une part d'élargir les OPAH aux problématiques du bruit 77, et d'autre part, pour lutter contre le bruit de voisinage, de proposer systématiquement un diagnostic sonore ainsi que les travaux correctifs nécessaires, même lorsque le logement n'est pas en zone de sur exposition au bruit. Si le bruit ne peut être assimilé à une marque d'insalubrité, il n'en constitue pas moins un problème de santé publique. 8. Intégrer le bruit dans les démarches d'amélioration de l'habitat au titre de la transition énergétique ainsi que dans les projets portés par l'Anah. (DHUP, Ademe, Anah) Pour améliorer l'acoustique du parc de logement existants, et notamment ceux les plus exposés, c'est l'ensemble de la filière de la rénovation du bâtiment qui doit être mobilisée, sensibilisée et formée sur ce sujet assez largement méconnu. Les acousticiens sont peu souvent inclus dans les équipes de maîtrise d'oeuvre. Le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) réalise des études et développe des programmes de recherche sur le sujet de l'acoustique dans les bâtiments et s'attache à promouvoir et diffuser le savoir faire en la matière 78. Il promeut notamment une approche intégrée de la qualité du bâtiment, ne se limitant pas aux aspects de 77 L'inventaire en cours des copropriétés dégradées réalisé à l'aide des DDTM pourrait comprendre des logements fortement impactés par le bruit. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 51/80 Rapport n° 011057-01 performance énergétique, mais intégrant aussi la qualité de l'air et le confort acoustique. Il suggère par exemple que l'observatoire de la qualité de l'air intérieur (OQAI) évolue en intégrant le bruit comme une des composantes de la qualité de l'air, se rapprochant en cela de la démarche de l'observatoire du bruit de l'agglomération de Lyon. Par ailleurs, on peut s'interroger sur l'intérêt de développer un label ou une certification spécifique sur le confort acoustique des logements 79. Afin d'inciter les constructeurs à prendre mieux en considération l'intérêt de l'isolation acoustique des bâtiments d'habitation, l'arrêté modifié du 10 février 1972 a créé un label « confort acoustique ». Ce label a été relayé ultérieurement par le label du même nom délivré par l'association Qualitel. Mais la réglementation acoustique de 1994, appelée alors Nouvelle réglementation acoustique (NRA), a rendu obligatoire les performances du label associé à l'ancienne réglementation. Dans la mesure où elle permettait déjà un certain confort acoustique, l'utilité d'un nouveau label aux exigences nettement plus élevées que ceux de la NRA ne s'est pas imposée. Le label Qualitel « confort acoustique » a donc été supprimé. Aujourd'hui, la certification Qualitel impose des exigences sur les bruits de chocs, le bruit de VMC double flux en chambre ou encore sur le traitement acoustique des locaux techniques pour la production d'eau chaude sanitaire. Les acousticiens développent aujourd'hui le concept de l'indicateur unique acoustique pour qualifier la qualité acoustique d'un lieu80. Dès 2011, le GIAc81 a répondu à une demande de l'association HQE pour définir un tel indicateur, déterminé de manière à correspondre le plus justement possible au ressenti d'un individu placé dans un local pour y exercer une activité. La notation comprend trois notes combinées : · une note de bruit de fond : basée sur l'écart entre le bruit de fond régnant dans le local étudié et le bruit de fond optimal pour l'activité, issue d'une base de données, · une note d'émergence : elle est évaluée en fonction des bruits émergents des espaces extérieurs, des espaces voisins du local et des équipements techniques des bâtiments, · une note de réverbération : elle est fonction de l'écart entre un critère de qualité interne du local (réverbération, intelligibilité des sons) et le critère optimal défini pour l'activité défini dans une base de données. Cette démarche conduit à classer le lieu selon une échelle à laquelle les consommateurs sont désormais habitués, comme le montre le graphique ci-dessous. 78 Le CSTB a notamment publié en décembre 2015 un guide de mise en oeuvre acoustique dans le logement collectif. Gages de qualité, les certifications qui accompagnent un logement neuf sont décernées aux constructions qui, par leur conception architecturale, les matériaux et les équipements choisis, l'isolation mise en oeuvre, vont permettre des économies de chauffage et d'entretien, assurer une certaine qualité acoustique, etc. L'élaboration des référentiels de certification, le contrôle de la conformité d'une construction à ces référentiels et la décision d'attribuer ou non la certification, sont confiés à des organismes indépendants, accrédités par le COFRAC. Voir l'article de Olivier Servonnat (Acouphen) et Thomas Toulemonde (Impédance ingénierie), dans le numéro « Environnement et technique » de juillet - août 2017, numéro hors série sur l'expertise acoustique, dont le présent rapport reprend des extraits. Créé en 1990, le syndicat CINOV GIAc regroupe des ingénieurs-conseils et des bureaux d'études indépendants, spécialisés en acoustique dans les secteurs du bâtiment, de l'environnement, de l'industrie, de la formation et de la recherche. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 52/80 79 80 81 Rapport n° 011057-01 On obtient ainsi une qualification claire et précise de la qualité acoustique d'un lieu, représentative du ressenti de l'occupant, basé sur la recherche non pas du silence mais d'un équilibre des différents bruits perçus. Cette approche paraît particulièrement pertinente et pourrait trouver matière à se développer si l'on veut faire augmenter progressivement la qualité sonore du parc immobilier. 9. Mobiliser et former la filière du bâtiment sur la question acoustique, intégrer plus souvent les acousticiens aux équipes de maîtrise d'oeuvre et développer un label sur le confort acoustique des logements. (DHUP, CSTB) Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 53/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 54/80 4. Pour une politique du bruit plus audible La politique du bruit est aujourd'hui le parent pauvre des politiques en matière de santé environnement, alors que le bruit est une nuisance de première importance pour les Français et que son coût social est important. Des leviers ont été identifiés dans les champs des transports, de l'urbanisme et du logement. Les connaissances sont encore à développer et la recherche peut conduire à de nombreux progrès. Le sujet est encore insuffisamment porté à la connaissance du grand public alors même que des outils existent. Cette politique complexe, qui implique de nombreux acteurs, gagnerait à être plus lisible et mieux coordonnée. 4.1. Le bruit, un sujet de conflit pouvant devenir politiquement sensible Alors qu'à la fin du XXème siècle, dans le domaine des infrastructures de transports, le sujet « environnement-nuisance » se limitait principalement à la question du bruit, ce sujet n'apparaît plus, ces dernières années, en « tête de gondole » des politiques de prévention des risques, d'environnement et de qualité de vie. De nouveaux sujets dont l'impact sur la santé semble au premier abord plus grave (pollution de l'air, perturbateurs endocriniens, pesticides...) sont apparus, les impacts des projets sur l'environnement prennent bien davantage en compte la biodiversité, la qualité visuelle et aujourd'hui la qualité énergétique en matière de construction, d'aménagement urbain et de mobilité prime sur la qualité sonore. Pourtant, comme on l'a vu, ses impacts sur la santé sont réels et son coût social est important. Mais plus encore, les Français perçoivent cette nuisance comme majeure et en réalité, le bruit est très souvent un facteur limitant du développement ou un sujet de conflit qui cristallise par exemple les oppositions à la réalisation des projets. Quelques exemples de la sensibilité de ce sujet : · le bruit des chantiers : parmi les véritables raisons de l'opposition aux projets portée par les comités de défense figurent avant tout le paysage et le bruit (et les vibrations associées), pendant l'exploitation du projet (infrastructure routière et ferroviaire notamment) mais aussi pendant le chantier. En ville, les travaux de tous ordres (nouveau bâtiment, réfection des voiries et réseaux, création de réseaux de transport en commun...) cristallisent bien souvent les oppositions du fait du bruit. Plusieurs guides existent sur la maîtrise du bruit des chantiers de construction82, des articles sortent régulièrement dans la presse spécialisée, mais pour autant, sauf si la pression des riverains est forte, le bruit est rarement un critère d'analyse et de sélection des offres, · le bruit des livraisons la nuit : la possibilité de livrer la nuit sans gêner les riverains est un véritable défi pour limiter la circulation en ville en journée. Cela permet aussi de massifier les flux de livraison, de diminuer la consommation de carburant et donc de contribuer à l'amélioration de la qualité de l'air. Le label Certibruit a été développé en 2012 pour minimiser le bruit des livraisons la nuit. Il s'adresse autant aux entreprises de transport qu'aux entreprises gérant des restaurants ou des magasins. Deux collectivités seulement en France ont retenu ce label dans leur politique de transport de fret : la ville de Paris et l'agglomération du Grand Lyon ; 82 « Maîtrise du bruit des chantiers de construction des infrastructures de transport terrestre », Cerema (ex Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité, IDRRIM, novembre 2011), « Bruit des chantiers, missions incombant aux acteurs d'une opération de construction pour limiter les nuisances », Conseil national du bruit, juin 2013. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 55/80 Rapport n° 011057-01 · le bruit des éoliennes : l'Anses a été saisie une première fois en 2006 par les ministères en charge de la santé et de l'environnement afin de réaliser une analyse critique du rapport publié par l'académie nationale de médecine recommandant l'implantation des éoliennes à une distance minimale de 1500 mètres des habitations, en raison des nuisances sonores. Au terme de cette première expertise publiée en 2008, l'Anses rappelait dans ses conclusions la nécessité d'étudier au cas par cas les distances d'implantation des éoliennes, par le biais notamment de modélisations acoustiques. À la suite de différentes plaintes de riverains de parc éoliens, les ministères ont à nouveau saisi l'agence en 2013, afin d'évaluer les effets sanitaires potentiels des infrasons et bruits basse fréquence émis par les parcs éoliens. En conclusion de son avis rendu en mars dernier, l'Anses considère que les données disponibles ne mettent pas en évidence d'argument scientifique suffisant en faveur de l'existence d'effets sanitaires liés à l'exposition au bruit des éoliennes. Rappelons également que la maîtrise des nuisances sonores peut être la condition du développement de certaines activités. La SNCF considère ainsi que le bruit du fret ferroviaire doit impérativement être mieux pris en compte si l'on veut développer ce mode de transport, qu'il s'agisse de la création de nouvelles voies ou de l'augmentation du trafic sur les voies actuelles. Au-delà de ces quelques exemples, le sujet du bruit est un souci récurrent pour les élus de proximité. Outre les problèmes classiques de bruit de voisinage, on voit apparaître de nouvelles plaintes, comme celles du bruit des cours d'école. Le seuil de tolérance au bruit, s'il diffère pour chacun, est un des indicateurs de notre capacité de vivre ensemble et lorsqu'il est en excès, les conflits et les oppositions, parfois lourdes de conséquences, sont inévitables. Le bruit est aussi un enjeu social. La multi-exposition au bruit (logement, quartier, travail, salle de classe ou d'apprentissage) est majoritairement le lot des personnes les plus défavorisées qui en subissent donc les effets cumulés. Le bruit dans l'environnement est donc un sujet socialemement sensible qui mérite d'être pris au sérieux. 4.2. Renforcer la recherche développement et la communication Le rapport du comité opérationnel du bruit du Grenelle de l'environnement préconise, en première recommandation, d'associer modernisation et bruit. Il précise en effet : « la lutte contre le bruit, condition au développement de nombreuses activités, est aussi une source d'innovations, une incitation permanente à la recherche d'une plus grande efficacité. La lutte contre le bruit doit devenir le levier d'une démarche de progrès plutôt qu'une contrainte que les acteurs économiques essayent, hélas avec succès le plus souvent, de contourner ». La mission s'accorde totalement avec cette approche. Dans la sphère publique, on ne peut que se féliciter de la création en cours de l'unité mixte de recherche en acoustique environnementale entre le Cerema et l'IFSTTAR. Sur le plan scientifique, ce rapprochement permettra de mutualiser les efforts de recherche sur des sujets communs (bruit de roulement, modélisation de la propagation acoustique dans l'environnement) mais également complémentaires (effets du bruit sur la biodiversité, matériaux acoustiques pour l'environnement, contact roue-rail...). Le projet de l'UMR s'inscrit dans une dynamique partenariale large, tant sur le plan national qu'international. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 56/80 Dans le registre de l'urbanisme et de la ville durable, les projets financés par l'Ademe (cf. première partie) doivent être valorisés le plus largement possible. Du point de vue des impacts du bruit sur la santé, on a vu dans la première partie que les connaissances étaient encore bien souvent lacunaires. Le champ de recherche est encore important. L'Anses et l'Ademe soutiennent différents projets : bruit intense et risque de neurinome du nerf acoustique, gêne acoustique dans les bureaux ouverts, méthode de prévision de l'ambiance sonore dans les bureaux ouverts, prématurité et multi exposition environnementale, liens entre exposition au bruit et hypertension,... Plusieurs pistes de travail paraissent devoir être explorées. Comme l'a déjà vu, on dispose de très peu d'études sur les bruits de voisinage et sur le bruit interne au logement. On ne dispose pas non plus d'études de surveillance épidémiologique des populations exposées. Notons, qu'en matière de recherche, l'Anses a souhaité qu'une plate-forme soit mise en place pour partager ou consolider l'ensemble des travaux concernant le bruit. Une telle initiative semble excellente et pourrait être développée en lien avec le ministère qui pourrait s'appuyer sur Ademe ou le CIDB. La recherche, l'expérimentation et l'innovation sont aussi très présentes dans le secteur privé. A titre d'exemple, on peut se référer au numéro récent de la revue environnement et technique83 qui présente quelques travaux des acousticiens sur la fenêtre coulissante active (fenêtre coulissante qui ne laisse pas passer le bruit même quand elle est ouverte), sur l'indicateur unique acoustique (cf. troisième partie) ou encore sur le bruit urbain. Les champs d'innovation sont très nombreux, qu'il s'agisse du bâtiment, des matériaux, des travaux publics, du matériel roulant etc. La dynamique serait utilement renforcée par le lancement d'appels à projets. Si la dynamique de recherche, d'expérimentation et d'innovation est réelle et touche tous les types d'acteurs (État, collectivités locales, entreprises de production et de conseil...), on peut regretter que la diffusion des résultats ne soit pas davantage valorisée et leurs applications concrètes plus largement diffusées, précisément pour « entraîner une démarche de progrès » comme le comité opérationnel du Grenelle de l'environnement cité plus haut l'appelle de ses voeux. Le progrès peut être apporté ou diffusé de diverses manières. Les guides de bonnes pratiques, la communication dans la presse spécialisée sont déjà utilisés mais en revanche les démarches de marquage de qualité comme la labellisation, voire la modification de la réglementation sont peu développées. 10.Soutenir la recherche, l'innovation, l'expérimentation, valoriser leurs résultats et généraliser leurs applications. (tous acteurs publics, coordination DGPR) 4.3. Rendre plus lisible la politique du bruit A court terme, il importe de poursuivre les travaux engagés par le Cerema à la demande de la DGPR et de la DGITM sur le chantier de « convergence » de la réglementation et des pratiques avec celles de l'Union européenne Il s'agit d'unifier les bases de données, les systèmes cartographiques et autres indicateurs de référence dont on a vu qu'ils sont multiples, pour pouvoir disposer d'un outil permettant de fournir à chaque citoyen une information objective et claire sur son exposition au bruit. Ce travail, réalisé en partenariat étroit avec les collectivités et notamment l'observatoire Acoucité, est essentiel pour la réalisation de cartes de bruit de qualité ainsi que pour 83 Environnement et technique, dossier « l'expertise acoustique gagne du terrain », numéro hors série, juillet-août 2017 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 57/80 Rapport n° 011057-01 leur généralisation. Ce travail s'articule avec la deuxième recommandation du rapport visée plus haut. La mission est en effet convaincue que l'un des moteurs d'une meilleure prise en compte du bruit dans l'environnement est la formation et l'information du public. L'existence de cartes largement diffusées est la base de cette démarche. Notons d'ailleurs que la démarche d'observatoire n'est pas uniquement une démarche technique. C'est aussi une démarche de concertation et de dialogue avec les partenaires concernés et les usagers, qui pourront à n'en pas douter, contribuer à l'avenir au renseignement des bases de données compte tenu des possibilités qu'offrent aujourd'hui les applications numériques. Quoi qu'il en soit, tout outil d'information ou de diagnostic environnemental n'a de valeur que s'il est compris et partagé par tous. Sujet par nature diffus et concernant de nombreuses filières techniques ou corps de métier, le bruit gagnerait à être davantage intégré dans toutes les politiques de qualité environnementale (éco-conception, éco-construction, éco-quartier, éco-conduite...) dont il est le plus souvent absent. Il doit aussi aller de pair avec le concept même de qualité de l'air, dont il peut devenir l'un des indicateurs. Le citoyen et le consommateur peuvent aussi être sensibilisés au bruit dans l'environnement dès lors que des signes de qualité qui le prennent en compte lui sont proposés : logement ou matériau de rénovation peu bruyant pour un particulier, chaussée, matériel d'entretien des espaces publics, démarche qualité exemplaire sur un chantier ou sur un bâtiment public pour un élu. Comme dans beaucoup de politiques environnementales, la sensibilisation par l'offre est aussi un vecteur de progrès. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 58/80 Conclusion Le bruit dans l'environnement est un sujet sensible, perçu comme une nuisance quotidienne de première importance par nos concitoyens. Pourtant, mis à part dans le secteur aérien pour lequel le « fauteur de trouble » est à la fois facile à identifier et réputé solvable, les crédits alloués à la réduction des nuisances sonores ont sensiblement décru, leur mise en oeuvre étant par ailleurs rendue plus difficile par la multiplication des acteurs concernés mais aussi par la baisse des effectifs de l'État en matière d'accompagnement dans les territoires. La relance d'une politique de réduction des nuisances sonores est une nécessité, au vu notamment du coût de l'inaction, que l'on peut assimiler au coût social annuel minimal de 20 milliards d'euros pour le bruit dans l'environnement causé par les transports. La mission propose pour cela des mesures de différente nature : · des mesures de traitement du bruit : traitement des points noirs du bruit routiers et ferroviaires, remplacement des dispositifs de freinage des wagons de fret. Ces mesures nécessitent un financement minimal et pérenne, qui peut être fondé sur le principe « pollueur payeur » et qui alimenterait un nouveau « plan bruit »; · des mesures de prévention ou de renforcement des contrôles visant dans la durée à diminuer des nuisances : sensibilisation des conducteurs et contrôlesanction du bruit routier, mise en place d'un dispositif performant de contrôle des règles de la construction. Le coût direct de ces mesures peut être assez faible, dans la mesure où il est susceptible soit d'être intégré à une politique déjà existante (sécurité routière), soit d'être en partie payé par l'usager (internalisation du coût du contrôle dans le prix du logement) ; · des mesures visant à diffuser la « culture du bruit » dans les pratiques des acteurs publics et privés : introduction d'un volet bruit dans les PLU, développement d'un label pour les revêtements peu bruyants, formation des acteurs du bâtiment. Dans l'immédiat, même s'il faut prévoir un dispositif minimum d'accompagnement, ces mesures nécessitent surtout la mobilisation des acteurs et des dispositifs existants et ont un surcoût direct relativement faible. À moyen voire à court terme, si elles portent leurs fruits, elles engendreront des surcoûts publics par rapport aux pratiques actuelles : choix d'aménagements et d'investissements plus qualitatifs et probablement plus coûteux pour les collectivités mais aussi pour l'État. Ce dernier doit prévoir un dispositif de soutien qui pourrait être inclus dans un nouveau « plan bruit » ; · des mesures visant à améliorer les connaissances et leur diffusion auprès de tous les publics : développer l'expertise sur les cartes de bruit pour les fiabiliser et en faire progressivement la référence unique, développer les signes de qualité faisant référence au bruit en direction des consommateurs, renforcer la recherche, soutenir l'innovation et en diffuser les résultats. Ces mesures sont des investissements (qui se traduisent pour l'essentiel par des moyens humains) qui, dans la durée, seront source d'économies. L'annexe 2 propose un programme d'action associé à ces recommandations avec des commentaires concernant leur coût. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 59/80 Une telle relance de la politique du bruit dans l'environnement pourra s'appuyer sur de nombreux points forts : la recherche et l'expertise encore solides des établissements publics de l'État, l'appui de la recherche publique et privée, la mobilisation et la conscience des enjeux des plus grandes agglomérations, un savoir-faire en matière d'ingénierie publique ou privée, un outil de capitalisation et de diffusion des connaissances : le centre d'information et de documentation sur le bruit, et un conseil réunissant l'ensemble des parties : le conseil national du bruit. Cécile Avezard Sylvain Leblanc Michel Rostagnat Ingénieure générale des ponts, des eaux et des forêts Inspecteur de l'administration du développement durable Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 60/80 Annexes Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 61/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 62/80 1. Lettre de mission Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 63/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 64/80 2. Plan des actions à engager, impacts financiers et conditions de réussite Ce tableau propose un certain nombre d'actions concrètes, non exclusives, issues des recommandations émises par la mission. Actions Concevoir un nouveau plan bruit, orienté principalement sur la lutte contre le bruit des transports routiers, en associant l'ensemble des parties et surtout les collectivités locales. · Prévoir un volet spécifique sur le traitement des zones sur exposées (points noirs du bruit et alentours), en développant de nouveaux leviers d'action, Impacts financiers L'ambition du plan dépendra du niveau des financements dégagés. Quelques chiffres repères : · Recommandations du Grenelle en 2008 : 450 M par an, Conditions de réussite Co-construction du plan avec les collectivités locales Simplification du processus d'instruction · · Soutenir le développement de l'expertise sur la cartographie du bruit ainsi que des expérimentations associant les citoyens à la production des données et à leur appropriation, Ouvrir la palette des actions éligibles à la prise en charge du surcoût de chaussées non bruyantes, à une communication en direction des automobilistes sur le lien entre les limitations de vitesse et le bruit, à des actions exemplaires en matière d'urbanisme (zones ou itinéraires calmes) et tout autre action relevant de la prévention, de l'information ou de la communication, Soutenir la recherche, l'innovation et l'expérimentation notamment au travers d'appels à projets, ouverts au secteur public et au secteur privé, Soutenir, le cas échéant, les expérimentations nécessaires à la labellisation des revêtements routiers · · · Plan bruit 2009-2014 : 160 M au total soit 27 M par an, TNSA 2016 : 55 M en 2016 affectée pour la lutte contre les nuisances sonores du trafic aérien · · coût social du bruit causé par les transports : 2 000 M par an minimum, dont 90 % du fait du transport routier Un montant de l'ordre de 100 M par an, tel que proposé dans l'étude Ademe/Beauvais consultants de 2015 est une base légitime. Engager, dans le cadre de la sécurité routière, une campagne de communication faisant le lien entre vitesse, sécurité et respect de l'environnement (bruit, consommation de carburant, pollution de l'air) et visant à « ringardiser » les conduites et engins bruyantes (notamment les deux roues) Établir un guide sur le PLU et le bruit à l'attention des élus responsables et des aménageurs Pas de surcoût a priori, inclus dans les crédits usuels de communication en matière de sécurité routière Cette action fait partie de l'activité courante des services. Elle sera l'occasion de mobiliser les réseaux d'expertise sur le sujet. Un guide de même nature, réalisé en 2006 par le pôle de compétences bruit de l'Isère peut fournir une bonne base de travail. Cette action fait partie de l'activité courante des services. Adhésion du ministère de l'Intérieur, coordonnateur de la politique de sécurité routière Association d'un réseau le plus large possible, (prenant en compte y compris des expériences internationales) tant pour la qualité du document que pour le succès de sa diffusion et de son utilisation. Mettre en place un groupe de travail réunissant le réseau scientifique et technique ministériel et les entreprises de travaux publics sur la labellisation des chaussées non bruyantes Intérêt commercial national et européen perçu comme tel par les entreprises Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 65/80 Établir un programme d'investissement contre le bruit du fret ferroviaire en ciblant le remplacement des semelles de frein des wagons Le remplacement des semelles de frein des wagons de fret coûte 150 M, soit 30 M par an sur 5 ans Le non remplacement fait courir le risque de l'exclusion du trafic de marchandise au moins en Allemagne et en Suisse à court terme. La mission devra proposer plusieurs alternatives devant être chiffrées et devant présenter le surcoût par rapport aux pratiques actuelles. Faire les arbitrages nécessaires au sein des crédits d'investissement ferroviaires de l'État et de la SNCF Confier au CGEDD une mission visant à faire des propositions pour refonder la politique de contrôle des règles de la construction Anticiper le caractère socialement sensible du sujet. Il s'agissait jusqu'ici d'une mission de service public réalisée par le Cerema dont les missions évoluent dans un contexte de diminution d'effectifs. Développement d'une expertise sur le sujet au sein de l'Anah Adhésion des professionnels Mettre en place des actions de rénovation acoustique (diagnostic, travaux) des logements dans les actions financées par l'Anah. Concevoir, avec la filière du bâtiment et les acousticiens, des outils de sensibilisation et un programme de formation sur la question acoustique dans la construction neuve et la rénovation Pas de surcoût a priori, il s'agit de dégager une enveloppe au sein des budgets actuels. Coût modéré à fort pouvant être pris en charge par les dispositifs de formation professionnelle (OPCA) Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 66/80 3. L'évaluation de la nuisance sonore : il n'existe pas au plan international de base véritablement solide pour la mesure du bruit ni pour celle de son impact sanitaire L'évaluation produite en 2016 par E&Y pour le Conseil national du bruit et l'Ademe, d'un coût social du bruit de l'ordre de 57 Md/an, soit près de 3 % du PIB français, peut légitimement interroger. Mais elle n'est que la sanction du flou conceptuel qui règne encore au niveau international en matière d'évaluation de l'impact du bruit. Ce qui frappe au premier abord en effet, c'est l'absence de consensus sur les définitions et sur la méthode. Il n'existe pas à ce jour d'indicateur de bruit qui fasse autorité. Le Lden paraît rallier le maximum de suffrages. Il n'en est pas moins jugé insuffisant pour rendre compte notamment des bruits émergents et impulsionnels. En France même, deux procédures concurrentes, le classement sonore des voies et la carte de bruit, rendent compte de l'exposition au bruit des zones riveraines des infrastructures de transport terrestre. Et en matière de cartes de bruit et de plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE), la France a de son propre chef substantiellement durci la réglementation. Quant à l'impact sanitaire du bruit, il est frappant de constater qu'il est estimé sur la foi d'une littérature épidémiologique abondante ­ et fort heureusement souvent convergente dans ses conclusions ­ mais nullement d'une campagne systématique, à grande échelle et reproductible qui seule pourrait faire autorité. On peut se demander si le préalable à une bonne évaluation de l'impact du bruit ne serait pas de diligenter un tel programme de surveillance épidémiologique des populations exposées. Ce point justifierait une discussion de fond entre les ministères de la transition écologique et solidaire et de la santé. Le tableau ci-dessous explicite les différences d'approches entre les niveaux international (OMS), communautaire et national. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 67/80 Concept Indice de bruit OMS Lnight (Lignes directrices nuit, 2009) UE Lden et Lnight (dir. 2002/49) France Aérodromes : Lden pour le PGS (art. R571-66 CE) et pour le PEB (art. R112-1 CU) Transports terrestres : Lday et Lnight (R571-34 CE) Affiner l'indice selon le spectre, la nature événementielle... (Anses, IFSTTAR) Lden (recommandé par Quinet, 2013) Méthode de mesure Mesure : selon principes Mesure : circulaire du 25 juillet ISO 1996-2: 1987 et ISO 1996 et normes NF S 31-085, NF 1996-1: 1982, sans réflexion S 31-088 de façade Calcul : selon CNOSSOS dès 2022 pour les transports Présentation : pas de norme, données agrégées (nombre de personnes exposées, surfaces exposées) (dir. 2002/49) Carte de bruit et PPBE : agglomérations > 100 000 h, routes > 3 Mvéh/an, voies ferrées > 30 000 trains/an, grands aéroports (à terme, dir. 2002/49) Carte de bruit et PPBE : idem directive (L572-2, L572-9, R572-3 CE) Classement sonore des voies : routes> 5 000 véh/j, voies de chemin de fer interurbaines > 50 trains/j et voies urbaines > 100 trains/j (décret 95-21) 57 Md/an, selon diverses méthodes : coûts évités, prix hédoniques, préférences déclarées, transfert de valeurs (CNB / Ademe, 2016) Impact sanitaire seul, selon HEATCO (Quinet, 2013) Voies sonores Évaluation de l'impact 1 685 000 années en bonne santé perdues en Europe ; unité de mesure : le disability-adjusted life-years (DALYs) ; relation exposition ­ réponse selon diverses études épidémiologiques (OMS / JRC, 2011) Étude de la gêne due au bruit dans l'environnement (OMS / JRC, 2011) Lignes directrices pour le bruit nocturne en Europe (2009) Lignes directrices pour le bruit ambiant (1999) 10 000 décès prématurés par an, 28 Mp gênées ; relation exposition ­ réponse selon diverses études épidémiologiques (EEA, 2014) Pas de norme (dir. 2002/49) Références Déclaration de Parme (2010) sur l'exposition au bruit des enfants HEATCO (2006) Le coût social des pollutions sonores (CNB et Ademe / E&Y, 2016) Évaluation socio-économique des investissements publics (CGSP / Émile Quinet, 2013) Impact extra-auditif du bruit (Anses, 2013) Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 68/80 4. La politique de protection et de prévention des nuisances sonores du transport aérien : un système organisé, financé et contrôlé En matière de lutte contre le bruit, le transport aérien bénéficie d'une organisation, de moyens et de résultats clairement meilleurs que les transports terrestres. 4.1. La protection : un système financé et structuré Le bruit causé par le trafic sur les 11 plus grands aéroports français est pris en compte par les Plans de gêne sonore (PGS) créés en vertu de l'article L571-16 du code de l'environnement. Le PGS est fondé sur un calcul du bruit selon l'indice de puissance acoustique moyenne pondérée Lden. Ce plan comporte trois zones : une zone I à l'intérieur de laquelle l'indice moyen est supérieur à 70 dB, une zone II où il est supérieur à 65 dB, et une zone III où il est supérieur à 55 dB (art. R571-66 du code de l'environnement). À l'intérieur de ces périmètres, les locaux d'habitation bénéficient d'une aide à l'insonorisation (art. R571-86 du code de l'environnement). Le fonds ad hoc est abondé par une taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires (TNSA) payée par les compagnies aériennes opérant sur lesdits aéroports. La TNSA est gérée par les autorités aéroportuaires. Le bénéfice de l'aide obéit à un principe général d'antériorité, qui veut qu'elle ne concerne que des locaux ou établissements existants ou autorisés à la date de la publication du PGS. En tant que taxe affectée, la TNSA a fait l'objet d'un plafonnement en 2014, revu à la hausse en 2016. La loi prévoyant explicitement l'indemnisation des personnes exposées, le principe du plafonnement de la taxe a fait débat. La TNSA a rapporté 55 M en 2016. L'aide moyenne est de l'ordre de 10 k par logement. Compte tenu du stock de dossiers non traités (environ 600 M), on estime qu'il faudra une douzaine d'années pour achever l'isolation acoustique du parc immobilier impacté. Le délai d'obtention de l'aide est actuellement de l'ordre de 3 à 4 ans. 4.2. La prévention : un ensemble complet de contraintes d'urbanisme, de gestion du trafic et de conception des avions La prévention du bruit du trafic aérien joue sur plusieurs registres : la limitation du droit à urbanisation des zones bruyantes, la gestion du trafic aérien (mesures d'exploitation) et notamment des procédures d'approche, et la réduction à la source sur l'aéronef ellemême. Les contraintes à l'urbanisation au voisinage des aérodromes sont fixées dans le Plan d'exposition au bruit des aérodromes (PEB), défini à l'article L112-6 du code de l'urbanisme, et annexé au plan local d'urbanisme. À ce jour, 200 aérodromes français en sont dotés. Le PEB est un document prospectif : il définit, à partir des prévisions de développement de l'activité aérienne, de l'extension prévisible des infrastructures et des procédures de circulation aérienne, des zones diversement exposées au bruit engendré par les aéronefs. Le PEB classe les zones bruyantes (A, B, C, D) en fonction de l'intensité (en Lden) décroissante du bruit. Les contraintes à l'urbanisation sont d'autant plus réduites que le niveau sonore est faible (article L112-10 du code de l'urbanisme). Le principe général Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 69/80 est l'interdiction des constructions à usage d'habitation sauf nécessité de service. Ce principe souffre toutefois quelques amodiations : · la rénovation, la réhabilitation, l'amélioration, l'extension mesurée ou la reconstruction des constructions existantes, et notamment en zone A ou B (bruit fort) ainsi que la reconstruction rendue nécessaire par une opération de démolition sont possibles dès lors qu'elles n'entraînent pas d'accroissement de la population exposée aux nuisances ; la disposition relative aux zones A et B a été introduite en vertu de la loi du 13 juillet 2006 dite engagement national pour le logement ; · en zone C (bruit modéré), des constructions individuelles non groupées situées dans des secteurs déjà urbanisés et desservis par des équipements publics y sont autorisées dès lors qu'elles n'entraînent qu'un faible accroissement de la capacité d'accueil d'habitants exposés aux nuisances ; · en zone C, le PEB peut délimiter des secteurs où, pour permettre le renouvellement urbain des quartiers ou villages existants, des opérations de réhabilitation et de réaménagement urbain peuvent être autorisées, à condition qu'elles n'entraînent pas d'augmentation de la population soumise aux nuisances sonores (disposition introduite en vertu de la loi SRU du 13 décembre 2000) ; une telle augmentation étant toutefois possible dans le cadre des opérations prévues par le I de l'article 166 de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR ; · en zone D (bruit faible), les constructions sont autorisées sous réserve d'isolation acoustique. L'article L112-9 du code de l'urbanisme créé en vertu de l'ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 a ouvert quelque peu les possibilités d'urbanisation à proximité des grands aérodromes. Aux termes de cet article, le plan d'exposition au bruit (PEB) des aérodromes dont le nombre de créneaux horaires attribuables fait l'objet d'une limitation réglementaire sur l'ensemble des plages horaires d'ouverture (ce qui est le cas notamment d'Orly) ne comprend plus désormais que des zones A et B. Toutefois, les contraintes de droit commun restent applicables à l'intérieur du périmètre défini par la zone C du PEB en vigueur au 19 février 2009. S'agissant des opérations de renouvellement urbain en zone C, une augmentation de la capacité de logements et de la population est autorisée dans une limite définie dans l'acte de création de ces secteurs ou dans une décision modificative. Cet amendement, porté par des parlementaires riverains d'Orly, visait à ne pas figer la dynamique urbaine dans leur secteur. Il conduit aujourd'hui à la manifestation de projets de construction de zones résidentielles importantes à proximité de l'aéroport, par exemple à Champlan dans l'Essonne. Sans nier qu'elles obéissent à deux logiques différentes, à savoir la prévention pour les PEB et la réparation pour les PGS, ni qu'elles sont gouvernées par des échéances différentes (respectivement : à 15 ans et à 1 an), on peut s'interroger sur le maintien de ce double traçage de l'impact sonore des aérodromes. À la réflexion, s'il paraît de bon aloi de vouloir unifier les procédures d'établissement de ces deux documents, il paraît tout autant intéressant de respecter la logique propre à chacun d'entre eux, et donc leur dualité. Le rapport n° 009392-02 : Coordination des aides à l'insonorisation et à la rénovation énergétique des logements à proximité des aérodromes du CGEDD (Anne Florette, Bruno Lebental et Jean-Michel Malerba) de mars 2017 suggère une procédure unique d'élaboration du PGS et du PEB, dans un souci de lisibilité aux yeux du public, mais sans préjudice de l'économie propre à chacun de ces deux documents. La maîtrise de l'urbanisation dans des secteurs périurbains généralement très dynamiques est en effet indispensable si l'on ne veut Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 70/80 pas rendre des populations otages d'un bruit qu'elles n'auront pas choisi en connaissance de cause. À l'inverse, il n'est pas raisonnable d'indemniser des habitations localisées dans une zone de bruit seulement putative. 4.3. Une autorité indépendante de contrôle et de sanction : l'Acnusa Le suivi et le contrôle des nuisances sur les 11 plus grandes plates-formes aéroportuaires françaises sont assurés par l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa), inscrite dans le code de l'aviation civile. L'Acnusa inflige des amendes administratives aux avions ne respectant pas les procédures (trajectoires d'approche, créneaux horaires...). Elle a ainsi émis des titres de perception à hauteur de 3 M/an environ depuis 2011. Elle procède également, le cas échéant, à la saisie conservatoire d'un appareil, ce qu'elle a fait à deux reprises en 2016. Le montant maximal (autorisé par la loi) de l'amende est de 40 000 , ce que l'Acnusa estime insuffisant au regard de ce que coûterait alternativement l'indemnisation des passagers retenus au sol. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 71/80 5. Bibliographie sélective On se rapportera également aux références citées dans le rapport le plus souvent en note de bas de page, mais aussi au site du CIDB, qui propose, de façon structurée, une abondante documentation. Rapport du comité opérationnel « bruit », Grenelle de l'Environnement, mars 2008 Rapport d''information de l'Assemblée nationale sur les nuisances sonores, P. Meunier et C. Bouillon, 28 juin 2011 Rapport d'information de l'Assemblée Nationale sur les nuisances sonores aéroportuaires, J-A. Benisti et C. Bouillon, 16 mars 2016 Rapport de la commission au Parlement européen et au Conseil sur la mise en oeuvre de la directive relative au bruit dans l'environnement conformément à l'article 11 de la directive 2002/49/CE, mars 2017 Rapport annuel de l'autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa), mars 2017 Évaluation des impacts sanitaires extra-auditifs du bruit environnemental, Anses, février 2013 Noise in Europe, European Environment Agency, janvier 2014 Le bruit du fret ferroviaire, une stratégie pour en limiter les impacts, B. Simon, M. Pinet, M. Sandrin, CGEDD, mars 2014 Limiter le bruit des infrastructures ferroviaires, O. Chiello, IFFSTTAR, avril 2014 Les Français et les nuisances sonores, sondage Ifop, Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, avril 2014 Étude pour une optimisation de l'insonorisation des locaux au voisinage des aéroports, C. Assailly et J-P. Decourcelle, CGEDD, mai 2014 Parangonnage des réglementations européennes en infrastructures de transports terrestres, Cerema, août 2014 matière de bruit des 3eme plan national santé environnement 2015-2019, ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et ministère de la Santé, novembre 2014 Étude d'outils économiques visant à financer le traitement des points noirs du bruit, JM. Beauvais, Ademe, février 2015 Diminuer le bruit et réduire la gêne sonore engendrés par l'aéronautique civile, Corac, décembre 2015 Le coût social des pollutions sonores, Analyse bibliographique des travaux français et européens, Conseil national du bruit et Ademe, mai 2016 Évaluation stratégique du plan bruit, Ademe, mai 2016 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 72/80 Science for environment policy, In-depth report 13, links between noise and air pollution and socioeconomic status, Commission européenne, septembre 2016 Étude sur les basses fréquences dans les logements collectifs, Qualitel, décembre 2016 Du calme en ville: aménager en faveur du bien-être, Collection l'essentiel, Cerema, février 2017 Plan d'action 2016-2019 pour la lutte contre le bruit et l'amélioration de l'environnement sonore, Ademe, février 2017 Coordination des aides à l'insonorisation et à la rénovation énergétique des logements à proximité des aérodromes, A. Florette, B. Lebental, J-M. Malerba, CGEDD, mars 2017 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 73/80 6. Liste des personnes rencontrées Nom DROUIN TORRIN prénom Sylvain David organisme MTES/DGPR MTES/DGPR Fonction Adjoint chef du bureau des risques Chef du bureau des risques des industries, de l'énergie et de la chimie Date de rencontre 22 juin 2017 22 juin 2017 VALENTIN Pascal MTES/DGPR Chef de la mission bruit 26 avril 2017 et 4 juillet 2017 31 mai 2017 31 mai 2017 25 avril 2017 MESSIER PREMILLIEU AMAT SAUVAGE BREJASSOU MOLA SUSBIELLE FOURTANE OUVRARD LEMAITRE CASTRES-SAINTMARTIN CHAUFAUX SOULIER SOUM THIEBAUT Cédric Maude Christophe Thierry Guillaume Thierry Nora Christine AnneEmmanuelle Hélène Anne-Lise Émilie Anne-Marie Soumicha Aloïs MTES/DGEC/SCEE/S Chef du bureau des voitures D6 particulières MTES/DGEC/SC/EE/ SD6 MTES/DGITM/DAM Chargée de mission Chef du bureau Animation et pilotage des projets Médecin chef des gens de mer MTES/DGITM/DAM 25 avril 2017 MTES/DGITM/DIT MTES/DGITM/ DIT MTES/DGITM/DIT MTES/DGITM / DST MTES/DGITM/DST Chargé d'études Adjoint au sous-directeur des aménagements routiers Chef du bureau de la politique de l'environnement Chef du bureau de la régulation ferroviaire Sous-directrice de la sécurité et de la régulation ferroviaire Chargée d'études 25 avril 2017 25/04/17 25 avril 2017 25 avril 2017 25 avril 2017 MTES/DGITM/ SAGS METS/DGALN/DHUP 25 avril 2017 Chef du bureau de l'aménagement opérationnel durable(AD4) Adjointe au chef du bureau de la législation de l'urbanisme (QV4) Chef de projet qualité de l'air et acoustique dans le bâtiment (QC1) Chargée de mission bureau de la législation de l'urbanisme (QV4) Chef de projet performance d'environnementale des bâtiments (QC1) 27 juillet 2017 MTES/DGALN/DHUP MTES/DGALN/DHUP MTES/DGALN/DHUP MTES/DGALN/DHUP 22 juin 2017 30 juin 2017 22 juin 2017 30 juin 2017 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 74/80 PILLAN PERILLAT TEODORO BARTHELET DARMIAN DEJOLLAT Aline Emmanuelle Louis Sophie Joël Yann MTES/DGAC/DTA MTES/DGAC/DTA MTES/DGAC/DTA DREAL-AuRA DREAL -AuRA Sous-directrice du développement durable Chef bureau des impacts territoriaux Chef du bureau de l'environnement 27 avril 2017 27 avril 2017 27 avril 2017 Chef du service habitat, construction, ville 7 juin 2017 durable Service réglementation et contrôle des transports et des véhicules Chef du service mobilité, aménagement, paysage 7 juin 2017 DREAL -AuRA 7 juin 2017 DENEUVY EPRINCHARD MONTES PHELIP BRACH Jean-Philippe Yves Denis Denis Aurore DREAL -AuRA DREAL -AuRA DREAL-AuRA DREAL-AuRA Directeur régional délégué Chef du service prévention des risques industriels, climat, airir, énergie Service réglementation et contrôle des transports et des véhicules Chef adjoint de cabinet 7 juin 2017 7 juin 2017 7 juin 2017 DIR Centre- Chef du district Est/district de Saint Etienne DIR Centre-Est/SIR Chargé d'études bruit de Lyon DTT de la Loire DTT de la Loire DTT de la Loire Saint-Étienne métropole/ Ville de Roanne Département de la Loire Directeur service environnement Chef du service environnement direction générale techniques des services 7 juin 2017 ROL CEREZA ROCH THOUMY BRUN GARCIA BERTHILLOT OLNY ECOTIERE DEMEZIEUX SOLDANO CARIOU Jérémie Xavier Laurence Denis Pierre Claude Jean-Luc Xavier David Patrick Bertrand Sophie 9 juin 2017 9 juin 2017 9 juin 2017 9 juin 2017 direction générale des services techniques direction générale des services techniques 9 juin 2017 9 juin 2017 7 juin 2017 16 juin 2017 16 juin 2017 16 juin 2017 Cerema/DTer Centre- Chef de l'unité environnement santé est Cerema/Dter Est Cerema/Dter Est Cerema/Dter Est Cerema/direction technique infrastructures Responsable de la division environnement de Responsable du groupe acoustique, laboratoire de Starsbourg 15 mai 2017 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 75/80 transport et matériaux THIRION CHENE DEFRANCE Philippe Jean-Baptiste Jérôme Cerema/Dter Est CSTB CSTB Chef de la division acoustique Responsable de la division acoustique environnementale et urbaine Directrice du département Santé confort coordinatrice scientifique de l'OQAI Chercheuse Psyco-acousticienne Directeur adjoint du département, mobilité, environnement aménagement Directeur adjoint du laboratoire d'acoustique environnemental Directeur du laboratoire d'acoustique environnementale Directeur général adjoint, chargé des politiques d'intervention Chef de projet scientifique Directeur Villes et Territoires durables ingénieur Chef du service organisation urbaine Chargé de mission Directeur Président Consultant-acoustique et développement durable Président du comité technique du Conseil national du bruit Adjointe au directeur du développement durable 16 juin 2017 30 juin 2017 30 juin 2017 KIRCHNER Séverine CSTB 30 juin 2017 CHAMPELOVIER BERENGIER Patricia Michel IFSTTAR IFSTTAR 1er juin 2017 LELONG PICAUT MOUROUGANE CADENE CAIRE THIBIER SANNA AUVERLOT VINCENT BIDOU GAMBA Joël Judicaël Christian Anthony José Emmanuel Daniela Dominique Bruno Dominique René IFSTTAR IFSTTAR Anah Anses Ademe Ademe Ademe FRANCE STRATEGIE ACOUCITE CIDB Acoustique Gamba 1er juin 1er juin 2017 14 juin 2017 7 juillet 2017 17 mai 2017 8 juin 2017 8 juin 2017 9 mai 2017 7 juin 2017 26 avril 2017 16 mai 2017 GUERRERO FAUSSURIER ROSIN ASSAF DELION Anne Jean Christophe Samir Jean-Marc SNCF réseau 23 juin 2017 20 juin 2017 20 juin 2017 2 juin 2017 2 juin 2017 SNCF réseau DG Île- Directeur Accès au réseau de-France SNCF réseau DG Île- Responsable acoustique de-France RAILENIUM RAILENIUM Chef du département simulation numérique Directeur général Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 76/80 PEREIRA SEDOARISOA PERROT PARDO Kevin Noëlvia JeanDominique LouisFerdinand RAILENIUM RAILENIUM MICHELIN Chef de projets innovation RD Post Doctorante Responsable Standards et régulations Responsable du service RTI CEM Acoustique 2 juin 2017 2 juin 2017 15 juin 2017 Union technique de l'automobile,du motocycle et du cycle(UTAC )CERAM CGEDD CGEDD CGEDD 31 mai 2017 LEBENTAL DUPONT-KERLAN ROCHE Bruno Elisabeth Pierre-Alain Membre permanent Présidente de section Président de section 25 avril Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 77/80 7. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme Acnusa Ademe Anah Anses BTP Cerema CIDB Corac CSTB DDT DGAC DGITM DGPR DHUP DIR DREAL IDDRIM IFSTTAR INPES MCT MTES NRA OACI OMS OPAH PCAET PDU PEB PGS PLU PNB PPBE STI TNSA UMR Signification Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie Agence nationale de l'habitat Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail Bâtiment et travaux publics Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement Centre d'information et de documentation sur le bruit Conseil pour la recherche aéronautique civile Centre scientifique et technique du bâtiment Direction départementale des territoires Direction Générale de l'Aviation Civile Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer Direction générale de la prévention des risques Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages Direction interrégionale des routes Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux Institut national de prévention et d'éducation pour la santé Ministère de la cohésion des territoires Ministère de la transition écologique et solidaire Nouvelle réglementation acoustique Organisation de l'aviation civile internationale Organisation mondiale de la santé Opération programmée d'amélioration de l'habitat Plan climat air énergie territorial Plan de déplacement urbain Plan d'exposition au bruit Plan de gêne sonore Plan local d'urbanisme Point noir de bruit Plan de prévention du bruit dans l'environnement Spécification technique d'interopérabilité Taxe sur les nuisances sonores aériennes Unité mixte de recherche Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 78/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 79/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 80/80 INVALIDE) (ATTENTION: OPTION des nuisances sonores Page 33/80 Rapport n° 011057-01 2.3.3. La recherche : orientations actuelles La recherche développement de solutions ferroviaires innovantes est conduite en France sous l'égide de l'institut de recherche technologique (IRT) Railenium, qui réunit les acteurs (opérateurs, académiques, ingénierie, constructeurs, BTP) du monde ferroviaire. Deux programmes sont en cours : · Cervifer (Certification Virtuelle en Ferroviaire), soutenu par Ademe sur la période 2013 - 2017, qui traite du prototypage virtuel pour la réduction du bruit de roulement, de la modélisation du bruit de crissement en courbe, et du développement de solutions antibruit et de leur validation expérimentale ; · Ecobruit, projet propre Railenium d'évaluation du coût des nuisances causées par le bruit ferroviaire et des bénéfices engendrés par les murs anti-bruit. Comme il a été dit plus haut, Railenium souhaiterait intéresser un industriel au développement d'un nouveau système de frein non bruyant, à l'image des freins à semelles composites adoptés par l'Allemagne et la Suisse. 2.4. Le bruit des transports routiers : une philosophie à repenser en intégrant l'ensemble des leviers En matière de lutte contre les nuisances sonores, la route connaît à peu près les mêmes symptômes que le rail : faiblesse des budgets pour la protection des zones habitées, inadaptation des moyens de contrôle et sanction et concurrence de plusieurs méthodes de cartographie de la nuisance. D'autres leviers sont mobilisables : qualité des véhicules et du revêtement routier notamment. 2.4.1. La protection : la politique de résorption des points noirs du bruit est dans une impasse Techniquement, la résorption des points noirs de bruit routier et ferroviaire repose sur le mur anti-bruit et l'isolation acoustique de façade. Sur un logement déterminé, ces deux solutions sont en général employées exclusivement l'une de l'autre. En revanche, il n'est pas rare qu'un immeuble élevé soit protégé par mur anti-bruit pour ses étages inférieurs et par traitement de la façade pour les étages supérieurs. Le choix entre mur anti bruit et isolation des logements se fait au cas par cas, en fonction des contraintes techniques (il faut un espace minimum entre la voie bruyante et l'immeuble pour construire un mur anti bruit) mais aussi économiques. Le mur anti bruit offre une meilleure protection, puisqu'il permet de diminuer le bruit non seulement dans le logement mais aussi dans l'air ambiant, mais il est beaucoup plus coûteux et n'est donc pas systématisé. Le coût de la résorption des points noirs de bruit des transports terrestres (ferroviaires et routiers) était estimé dans le rapport Serrou (1991) à 9 MdF, dont 2,6 MdF pour les premiers, et 6,4 MdF pour les seconds. Moins de 20 ans plus tard, le Comité opérationnel « bruit » du Grenelle (mars 2008) l'estimait dans une fourchette cohérente d'encore 1,5 à 2 Md, dont 1 Md sur la route. Il constatait toutefois qu'en 8 ans, 1 Md avaient été investis par l'État, les collectivités territoriales et les sociétés d'autoroutes sur le réseau national dans la résorption des points noirs de bruit. L'objectif de leur effacement en 7 ans paraissait alors réaliste. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 34/80 Comme vu plus haut, le Cerema estime aujourd'hui 51 à 850 000 le nombre de logements situés dans des points noirs de bruit routier 52. Contrairement au ferroviaire, la prise en compte du bruit actuel ou du bruit de la circulation prospective à terme ne change pas fondamentalement le résultat. Sur la base d'un coût de traitement unitaire par logement de 7 000 , le coût de résorption des points noirs de bruit serait de l'ordre de 6 Md, soit 6 fois plus que l'estimation produite en 2008. La différence provient clairement de la prise en compte toute récente des points noirs des réseaux « historiques » des collectivités territoriales.53 Le plan bruit de l'Ademe mené entre 2009 et 2015 a mobilisé environ 90 M pour le traitement des points noirs de bruit routiers et a permis de protéger de 3 324 logements (par mur anti bruit ou par isolation de façade). Toutefois, il n'existe pas de suivi fiable du processus de résorption, certaines initiatives n'étant pas tracées, les riverains pouvant aussi mener des travaux par eux-mêmes. Mais en matière d'utilisation des crédits dédiés à la route, si la demande politique est très forte sur les nouvelles infrastructures, elle est quasiment inexistante sur le traitement des nuisances sonores54. 2.4.2. Les interventions sur le véhicule pour réduire le bruit Le bruit routier a deux composantes principales : le bruit de roulement (contact pneurevêtement) et le bruit du moteur. On peut y ajouter le bruit aérodynamique du flux d'air autour du véhicule en mouvement. La réduction du bruit à la source passe donc par l'amélioration des performances acoustiques des véhicules, d'une part au travers des pneus pour limiter le bruit de roulement et d'autre part du moteur. En la matière, la norme technique est définie dans l'enceinte de la Commission économique pour l'Europe de l'ONU (CEE-ONU) à Genève, et traduite en droit communautaire par voie de règlements. La réglementation communautaire prévoit un durcissement progressif des normes sonores : · réduction de 3 à 4 dB de la valeur limite de bruit des nouveaux types de véhicules en l'espace de 8 ans, entre le 1er juillet 2016 et le 1er juillet 2024 (annexe 3 du règlement 540-2014) ; · pour les pneumatiques, relèvement de l'exigence de l'ordre de 3 dB, ce qui se traduit par la disparition du marché des pneumatiques repérés par le pictogramme à trois ondes caractéristique des pneus les plus bruyants. Dans le cas du pneumatique, il s'agit d'optimiser simultanément l'impact sonore, l'adhérence et la résistance au roulement, qui sont des exigences a priori contradictoires. En effet, une bonne adhérence suppose un pneu sculpté, mais il est ipso facto générateur de bruits du fait du contact de ses alvéoles avec la route. C'est 51 52 note à l'attention de la mission bruit de la DGPR en date du 6 octobre 2015 L'estimation est toutefois compliquée par la multiplicité des propriétaires de voies (les collectivités territoriales) et leur inégale propension à renseigner l'application MapBruit Le Grenelle de l'environnement avait, en 2008, estimé que ceux-ci pourraient avoisiner environ 10 fois plus de points noirs de bruit que les réseaux gérés par l'État, qui étaient les seuls pris en compte. Par exemple, l'actuel contrat de plan État ­ Région Rhône Alpes 2015 ­ 2020 n'affecte que 3 M à la réduction à la source du bruit, pour une région concernée au premier chef par la question (agglomérations lyonnaise et stéphanoise notamment), disposant d'équipes aguerries tant au sein de l'État que des collectivités locales, qui se sont mobilisées dans le cadre du plan bruit de l'Ademe. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 35/80 53 54 Rapport n° 011057-01 pourquoi, si des progrès très significatifs ont été enregistrés en matière de bruit, ils restent toutefois limités du fait de ces contraintes de sécurité. L'IFSTTAR, qui dispose de son propre banc d'essai acoustique, note que les fabricants se tiennent désormais à des niveaux de performances voisins. Pour l'IFSTTAR, le gain acoustique qu'on peut attendre du pneu (4 dB) est nettement moindre que celui qu'on peut escompter du revêtement de la route (9 dB, cf. infra). Un label existe pour la qualité des pneus, incluant le bruit55, mais il semble que ce critère soit peu retenu par les utilisateurs. L'augmentation de la part des véhicules électriques dans le parc sera un facteur déterminant du point de vue du bruit, surtout en ville, où les vitesses ne dépassent pas 50 km/h, vitesse à laquelle le bruit provient essentiellement du moteur et non du roulement. De façon approximative, on peut considérer que si les véhicules électriques représentaient la moitié du parc (ce qui pourrait être atteint d'ici 2040) , les nuisances sonores seraient en moyenne divisées par deux. En ville, ce gain serait bien supérieur, même si un minimum de bruit doit être maintenu pour la sécurité des autres usagers comme les piétons et les cyclistes56. Par contre, la situation serait quasi inchangée en zone périphérique et inter urbaine, dès lors que les limitations de vitesse sont maintenues au-dessus de 70 km/h57. Des études sont en cours pour évaluer l'impact du développement du parc électrique sur le bruit dans l'environnement. Elles permettront notamment de cerner les points noirs urbains du bruit qui disparaîtraient d'eux-mêmes. On voit que les véhicules 2 roues ne sont pas concernés par ces textes, alors que certains d'entre eux contribuent notablement aux émergences sonores. Sur ce point, on ne peut que se féliciter de ce que les 2 roues débridés ne soient plus assurés en cas d'accident58. La solution, qui reste à imposer, serait de concevoir des 2 roues indébridables, sauf à un coût (de réparation) rédhibitoire. Quoi qu'il en soit, le sujet de la réduction du bruit des deux roues n'est pas véritablement pris au sérieux. Une étude de l'IFSTTAR avec la participation de Peugeot a montré qu'on peut gagner 4 dB sur les petites cylindrées de 50 cm3 au prix d'un capotage des organes moteurs, d'un changement de l'échappement et de l'introduction d'une pièce moteur tournante nouvelle. De même, on observe une tolérance avec les voitures de sport 59 . Vitesse, bruit et plaisir de conduite restent encore étroitement associés pour les deux roues et certaines voitures, et sont des arguments de vente malheureusement peu controversés. 2.4.3. Le revêtement routier : d'importantes marges de progrès possibles En matière de bruit, des revêtements générant moins de nuisances ont été développés avec des résultats probants. L'IFSTTAR indique que des revêtements poreux de type « béton bitumineux drainants » (BBDr) ont été testés dans le passé en milieu urbain. Même si le gain acoustique était substantiel lors de leur mise en oeuvre (gain de 5 à 7 dB), les 55 56 57 58 Les deux autres critères sont la consommation en carburant et l'adhérence sur sol mouillé. On peut se reporter au projet européen eVADER : http://evader-project.eu/ Voir paragraphe 2.3.4 En revanche, on peut regretter qu'ils échappent au contrôle technique. Néanmoins, dans la mesure où le bridage et le débridage restent des opérations de routine, le passage au contrôle technique ne permettrait pas de les repérer. ll y a un bouton sur certaines voitures de sport qui permet de débrayer l'échappement (voir sur internet Porsche PSE) Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 36/80 59 Rapport n° 011057-01 phénomènes de colmatage réduisaient considérablement ce bénéfice après quelques années de service. Ces problèmes étaient principalement liés à la faible vitesse des véhicules, qui ne pouvait assurer l'auto-entretien de la couche poreuse. Pour l'espace urbain, il devenait ainsi urgent de conduire de nouvelles recherches sur d'autres types de structures de revêtement à faible bruit. De là sont nés les bétons bitumineux à couche très mince à faible granularité (BBTM). Les grandes entreprises françaises de construction routière ont amplifié leurs recherches sur ces nouveaux revêtements en travaillant plus spécifiquement sur la granularité et la composition du liant. Des BBTM de faible granularité ont ainsi été expérimentés sur sites réels. Ces revêtements présentent des caractéristiques intéressantes en termes de bruit de roulement au passage d'un véhicule (mesuré suivant la norme ISO 11819-1). Les gains obtenus peuvent aller jusqu'à 9 dB (soit une division quasiment par deux du bruit perçu) par rapport à un produit de référence. Toutefois, ces gains demandent à être contrôlés sur le long terme en intégrant notamment le vieillissement de l'enrobé. Les recherches se poursuivent sur le sujet, notamment dans un cadre franco-allemand60. . Le graphique ci-dessous illustre l'impact sonore possible des différentes natures de revêtements. Source : Laboratoire régional des ponts et chaussées de Strasbourg, 2012 (R1 = revêtement peu bruyant, R3= bruyant) Du point de vue économique, ces revêtements sont plus chers à la pose, mais aussi et surtout en entretien (nettoyage éventuel, durée de vie), ce qui fait qu'il est difficile de disposer aujourd'hui de résultats sur le surcoût global. Le recours à ce type de revêtement est assez récent. Dans un article récent publié sur le site de l'office fédéral 60 Ainsi, le projet ODSURF, financé par l'Ademe et la BASt1 en Allemagne a été consacré à l'élaboration et à la réalisation de nouvelles technologies de revêtement de chaussée à faible bruit et de nouveau matériaux adaptés au milieu urbain2. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 37/80 Rapport n° 011057-01 suisse de l'environnement61, un retour d'expérience sur la pose d'un revêtement peu bruyant indique un surcoût 8 % à la pose, mais auquel il faut ajouter un renouvellement estimé à ce jour par l'exploitant comme trois fois plus fréquent. Ces résultats corroborent les indications de Bruitparif datant de 2011 62, qui évoquent un surcoût pouvant aller de 25 % environ à 200 %, voire 300 % pour les BBDr bicouche (aujourd'hui évités). Le facteur coût doit être appréhendé de manière différente selon qu'il s'agit d'une nouvelle construction de route (surcoût à mettre en relation avec le gain de confort et de qualité de vie des futurs riverains de l'infrastructure) ou s'il s'agit d'un changement de revêtement en vue de résoudre le problème du bruit généré par le trafic sur une voirie existante (le surcoût doit alors être comparé aux coûts des autres mesures potentielles comme la construction d'écrans, l'isolation acoustique des bâtiments...). Une analyse coût bénéfice s'avère alors nécessaire pour chaque contexte. L'étude Bruitparif précitée fait référence à une étude danoise, qui compare le coût d'un revêtement routier type BBDr, la construction d'un mur anti-bruit et l'isolation acoustique des logements, en centre-ville, boulevard périphérique ou sur l'autoroute. Le rapport coût ­ efficacité (coût/dB(A)/habitation) est nettement favorable à la pose d'un revêtement acoustique. De plus, la réduction du bruit bénéficie à l'espace ouvert. S'il est incontestable que la pose de revêtement moins bruyant est un vecteur très efficace de la réduction du bruit dans l'environnement, le recours à ce type de produit reste peu fréquent en France. Une étude de 2014 de l'Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité (IDDRIM) auprès des collectivités a montré que le paramètre bruit est à peu près totalement absent des critères de choix posés dans les appels d'offres pour le renouvellement des revêtements routiers. L'étude montre que, outre un manque d'information sur les revêtements de chaussée peu bruyants, le principal frein à leur utilisation est l'absence de garanties sur la pérennité de leurs performances. Vient ensuite leur coût trop élevé, puis l'absence de cadre réglementaire ou normatif. Récemment, l'État et la région Île-de-France ont décidé de financer une expérimentation de pose d'enrobés acoustiques sur le réseau routier national non concédé. L'évaluation portera sur le suivi des caractéristiques mécaniques et acoustiques du revêtement, pour une durée de 3 ans sur ce dernier aspect. À ce stade, le surcoût à la mise en oeuvre est de 25 % et on estime une durée de vie réduite à 6 ans contre 10 ans du revêtement, ce qui correspond à un doublement du coût global d'investissement. Ce surcoût est important mais ne paraît pas insurmontable. En effet, selon la DGITM, sur cette base et à titre d'exemple, si l'on devait généraliser les enrobés phoniques sur 15 % du réseau routier national non concédé dans les zones urbaines (soit 50 % des voies les plus bruyantes), cela engendrerait un surcoût de plus de 30 M par an, soit environ 10 % du budget annuel d'entretien des chaussées (plus de 280 M par an ces dernières années). L'idée d'une labellisation du revêtement de la route lui-même est actuellement promue par l'IFSTTAR, la PFA Filière automobile et mobilités, Michelin et les entreprises routières en pointe sur le sujet (Colas et Eurovia). Notons que la qualité de l'exécution étant déterminante dans le résultat, le label ne pourrait procéder que d'une mesure a posteriori des performances acoustiques des tronçons routiers considérés. À ce sujet, la récente normalisation d'un protocole de mesure du bruit de roulement sur la chaussée est un atout. La labellisation doit en effet garantir une diminution effective du 61 62 Revêtements de routes peu bruyants : l'asphalte phonoabsorbant : un fort potentiel, 18 mai 2016, État des lieux des performances acoustiques de revêtements de chaussées, Bruitparif, décembre 2011 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 38/80 Rapport n° 011057-01 bruit perçue de façon immédiate, en mentionnant l'évolution de cette performance dans le temps. Par ailleurs, une initiative néerlandaise au sein du groupe ad hoc de la CEE-ONU (le WP 29) va dans le sens de la promotion d'une labellisation du niveau sonore des routes. L'ambition de certains acteurs est de formaliser une norme ISO. L'amélioration de la qualité des revêtements routiers, par la voie de la labellisation voire de la normalisation est donc tout à fait d'actualité, et la France a tout intérêt à être en pointe sur ce sujet. 2.4.4. Le comportement du conducteur : bruit, vitesse et sécurité routière Une autre voie de réduction du bruit à la source est l'intervention sur le comportement du conducteur, avec deux volets : la sensibilisation pour une conduite moins bruyante et la sanction des comportements non réglementaires. A priori, le conducteur est peu sensibilisé au bruit qu'il crée, à la fois parce qu'il est luimême dans un environnement bruyant et parce que la conduite réclame de sa part d'autres formes d'attention à l'environnement. Le graphique ci-dessous illustre le bilan des contributions sonores: bruit de roulement , bruit du moteur et bruit de fond au bruit total émis par un véhicule, de la deuxième à la cinquième vitesse. On observe que pour les faibles vitesses,(entre 30 et 50 km/h) le bruit total est surtout composé du bruit du moteur, alors que pour les vitesses plus élevées (à partir de 60 km/h) le bruit total se confond quasiment avec le bruit de roulement (bruit du pneu). Il est donc intéressant d'amener l'automobiliste circulant en milieu habité à modérer sa vitesse. Les radars automatiques de contrôle des vitesses ont clairement réussi à apaiser la circulation. Ils font partie des solutions. Cela dit, l'assouplissement de la Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 39/80 conduite reste avant tout affaire de pédagogie vis-à-vis du conducteur qui est aussi, à ses heures, résident riverain d'une infrastructure bruyante. La maîtrise du bruit de la circulation suppose que les conduites et engins bruyants puissent être sanctionnés. Le code de la route dispose en la matière de différents articles réglementaires63, notamment l'article R325-8 : « lorsqu'un véhicule paraît exagérément bruyant, le fonctionnaire ou agent habilité à prononcer l'immobilisation peut prescrire de le présenter à un service de contrôle du niveau sonore en vue de sa vérification ». Cet article permet en théorie l'interception et la verbalisation par les forces de l'ordre d'un véhicule bruyant, sans qu'il soit au demeurant nécessaire d'exciper d'un niveau sonore quelconque. Néanmoins, les modalités de telles interceptions posent parfois de sérieux problèmes de sécurité (comment arrêter une moto circulant à grande vitesse dans un flux urbain dense), la mesure du niveau sonore suppose un matériel et des conditions opératoires qui ne sont que rarement à la portée des équipes de police, et l'absence de critère quantitatif de l'appréciation du bruit « exagéré » conduit bien souvent les fauteurs de bruit procéduriers à faire rapporter devant les tribunaux les condamnations dont ils ont été les sujets. En réponse à une question parlementaire64, le ministère de l'Intérieur précise que « chaque année, plus de 20 000 contraventions sont dressées, aussi bien pour sanctionner les usagers qui utilisent leur deux roues motorisé à des régimes moteur anormalement élevés, que pour sanctionner ceux qui modifient leurs dispositifs d'origine ou adaptent des versions non homologuées ». Ce chiffre, rapporté aux 24 millions de contraventions dans le domaine de la sécurité routière (dont 13,6 millions pour les excès de vitesse) est très faible. De fait, il n'existe à peu près plus aujourd'hui de contrôle/sanction des bruits émergents dans la circulation routière. 2.4.5. La recherche : les orientations actuelles La recherche sur le bruit des transports routiers intègre les travaux de la recherche publique conduits par l'IFSTTAR et le Cerema et ceux du secteur privé portés par les filières de l'automobile et des travaux publics. Ces travaux portent notamment sur le pneumatique et sur le revêtement, et sur le contact entre les deux, ainsi que sur les solutions curatives classiques telles que le mur anti-bruit (Cerema Strasbourg et CSTB Grenoble et IFSTTAR sur les méta-matériaux) et sur la relation entre le bruit et son ressenti par l'individu (psycho-acoustique, études épidémiologiques). L'IFSTTAR et le Cerema viennent de formaliser un projet d'unité mixte de recherche en acoustique environnementale, dont une partie des travaux porte sur le bruit routier. 63 l'article R 318-3 précise que « Les véhicules à moteur ne doivent pas émettre de bruits susceptibles de causer une gêne aux usagers de la route ou aux riverains. Le moteur doit être muni d'un dispositif d'échappement silencieux en bon état de fonctionnement sans possibilité d'interruption par le conducteur. Toute opération tendant à supprimer ou à réduire l'efficacité du dispositif d'échappement silencieux est interdite. » Question n° 90686 de M. Bernard Accoyer, réponse publiée au JO le 29 mars 2016. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 40/80 64 Rapport n° 011057-01 2.5. Les pistes de progrès : action coordonnée selon les différents leviers disponibles, convergence des principes, réduction à la source, sanction des contrevenants Partant de la description qui vient d'être faite des modalités et des perspectives de prise en compte des nuisances sonores dues aux transports, on esquisse ci-dessous quelques propositions en vue d'une meilleure intégration du bruit dans les politiques publiques correspondantes. On s'attache notamment à développer la réduction à la source, sans exclusive, mais de préférence aux politiques curatives. 2.5.1. Fiabiliser et simplifier les dispositifs de mesure et de cartographie du bruit La lutte contre toute nuisance nécessite au préalable de bien la définir, la mesurer et la transcrire dans un document clair, dont la méthode d'élaboration fait l'objet d'un consensus pour que les données soient une référence commune. L'enquête Ifop de septembre 2014 a montré qu'un Français sur cinq seulement connaît l'existence des cartes de bruit et des PPBE. On a vu plus haut la superposition et l'incohérence des cartographies et méthodes de mesures. On doit viser à ce qu'un seul dispositif de modélisation et de cartographie du bruit fasse référence. Il paraît naturel de préférer le dispositif communautaire des cartes de bruit. Ces cartes sont aujourd'hui établies sur la base d'un réseau de mesure et d'outils de modélisation. On peut imaginer aisément qu'elles s'enrichissent progressivement des mesures des usagers65, permettant de produire des cartes plus précises et actualisées plus fréquemment66. Le calendrier de mise en oeuvre initialement prévu en application de la directive a pris beaucoup de retard et les collectivités sont diversement avancées sur le sujet. Par ailleurs, les autorités désignées responsables (communes et/ou intercommunalités) ne relevaient pas toujours de l'échelle pertinente. Ce n'est que tout récemment (arrêté interministériel du 14 avril 2017) que la liste des 45 intercommunalités de plus de 100 000 habitants concernées par ce dispositif a été publiée. Selon les données de la mission bruit de la DGPR, plus de 80 % la population ainsi concernée est déjà couverte par une carte de bruit publiée. Les dynamiques locales sont cependant variables. Après la région Île-de-France et l'agglomération lyonnaise, le plan bruit de l'Ademe a permis de faire émerger des projets d'observatoires dans quatre autres grandes agglomérations : Nice, Grenoble, Aix-en-Provence et Saint-Étienne. Pour qu'à terme les cartes de bruit puissent devenir la référence, voire devenir opposables dès lors qu'un certain niveau d'exposition au bruit crée des droits ou des devoirs, il faut s'assurer de la qualité de la méthodologie et donc poursuivre le développement de l'expertise autour des principaux acteurs déjà engagés (Acoucité, Bruitparif et le Cerema notamment), soutenir la création d'observatoires dans les collectivités concernées et diffuser largement le savoir-faire acquis (concertation avec les citoyens et associations, information, communication,...). 65 Dans le cadre du projet européen ENERGIC-OD, le CNRS1 et l'Ifsttar ont développé une application smartphone baptisée NoiseCapture, qui permet de créer des cartes du bruit en milieu urbain. L''application mesure notre environnement sonore quand on se promène en milieu urbain, et permet même d'évaluer la perception qu'on en a avec des tags. NoiseCapture, est aussi une infrastructure informatique spécifique pour traiter toutes ces données sonores géolocalisées, pour les restituer sous forme de cartes de bruit. L'échelle actuellement requise par l'UE est 1/100 000 et la fréquence actualisation tous les 5 ans. 66 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 41/80 1. Faire des cartes de bruit établies en application de la réglementation européenne la référence en matière de mesure du bruit dans l'environnement. Développer l'expertise pour fiabiliser la qualité des données, faciliter l'usage, la compréhension et la diffusion de ces cartes. Promouvoir cette méthodologie dans les collectivités concernées. (DGPR, Ademe, Cerema) 2.5.2. Un traitement des points noirs coordonné selon les différents leviers disponibles Dans un contexte budgétaire des plus contraints, la politique de traitement des points noirs de bruit doit être reprise à nouveaux frais. Aux investissements de protection (murs anti-bruit et isolation acoustique des façades) qui ont été au coeur des politiques suivies jusqu'à présent peuvent et doivent s'adjoindre les autres actions pertinentes, dont on a vu plus haut qu'elles ne manquent pas. On peut ainsi penser : · au choix d'un revêtement routier moins bruyant ; · à la réduction imposée, et le cas échéant contrôlée par radar, de la vitesse autorisée ; · à des aménagements (giratoire plutôt que feux...) et à des plans de circulation évitant les confluences et déviant le trafic ; · et à l'aide à la mutation du tissu urbain. C'est d'autant plus légitime que le droit actuel, qui considère comme traité un immeuble à l'intérieur duquel le niveau sonore est redevenu acceptable une fois les fenêtres fermées, n'est pas adapté à l'évolution des moeurs qui veulent que l'on vive, notamment en été et dans les lieux d'accueil des enfants et des jeunes, fenêtres ouvertes. S'agissant de la mutation du tissu urbain, il peut être intéressant, dans les secteurs où la pression immobilière est forte, de réfléchir à l'alternative de l'implantation d'immeubles de bureau écrans en bordure de voie, voire de mutation du tissu résidentiel ou de requalification urbaine vers un immobilier d'activité moins sensible au bruit, conduisant au relogement progressif des populations exposées. Les immeubles locatifs seraient à traiter en priorité, et en particulier le locatif social, pour lesquels le relogement peut être appréhendé à l'échelle du parc de l'office HLM considéré. Les opérateurs de portage foncier pourraient également être mobilisés en cas de nécessité d'achat. Dans d'autres cas, la couverture totale ou partielle des infrastructures, dans le cadre d'opérations d'aménagement, s'avère une solution, coûteuse, possible. La mise en oeuvre coordonnée de ces différentes solutions dont chacune contribue à l'objectif de maîtrise des nuisances sonores suppose une véritable ingénierie de projet territoriale. La collectivité locale concernée a vocation à en assurer la direction, avec l'aide du propriétaire de la voie (quand ce n'est pas elle) et le soutien des réseaux d'expertise, au premier rang desquels le réseau scientifique et technique ministériel. La plupart des mesures énoncées ci-dessus ne nécessitent pas de subventions directes, mais elles ont un coût. Pour autant, il ne saurait être question d'abandonner totalement la politique de résorption des points noirs de bruit par les voies classiques d'isolation des façades et de murs anti-bruit, notamment dans les zones où la vitesse de circulation est de plus de 70 km/h. Or, depuis 2014, plus aucun crédit n'est Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 42/80 programmé. Poursuivre une politique volontariste de lutte contre le bruit dans l'environnement et de traitement des bâtiments les plus exposés nécessite de mobiliser un minimum de moyens humains et financiers, aujourd'hui très faibles dans le budget de l'État comme dans ceux des collectivités locales. Une étude réalisée pour le compte de l'Ademe en février 2015 par Beauvais consultants67 a étudié plusieurs scénarios possibles pour financer le traitement des points noirs de bruit routiers. L'étude est établie sur l'hypothèse d'un besoin de financement de 110 M par an68, ce qui est inférieur aux recommandations du Grenelle en 2008 (450 M par an) et ne permet pas de traiter l'ensemble du parc exposé, mais ce qui est beaucoup plus élevé que le rythme du plan Ademe 2009-2015 (90 M engagés sur 6 ans). Notons qu'en l'état actuel des moyens, de la typologie restreinte des actions financées et des procédures, les acteurs publics (Ademe, DDT et collectivités) pourront difficilement mettre en oeuvre davantage de crédits. Quoi qu'il en soit, pour obtenir une telle somme à l'aide d'outils économiques, en utilisant le principe de « pollueur-payeur », le rapport énonce quatre mesures alternatives de taxation qui lui paraissent pouvoir être étudiées sérieusement : · une taxe sur les ventes de carburant routier : 0,0017 par litre, soit 0,12 % d'augmentation du prix du litre, · une taxe sur les immatriculations : 6,64 par immatriculation (véhicules neufs et d'occasion), soit une augmentation du coût du certificat de 2 %, · une taxe sur les véhicules en circulation : 1,57 par véhicule et par an, soit une augmentation du prix de revient kilométrique de 0,03 %, · une taxe à la fois sur les ventes de carburant et les immatriculations : 0,0009 (+0,06 %) par litre et 3,32 (+1 %) par immatriculation. La préférence de la mission va plutôt à la première solution. D'une part, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE, anciennement TIPP) existe déjà, alors qu'il semble difficile dans le contexte actuel de créer un nouvel impôt. D'autre part, cette contribution est le moyen qui semble le plus juste pour représenter la nuisance sonore effectivement produite, qui dépend, tout comme la consommation de carburant, du nombre de kilomètres parcourus, de la puissance et de la nature du moteur (un moteur hybride, moins bruyant en ville, consomme moins de carburant). Si la proposition d'augmentation de la TICPE pour alimenter spécifiquement la politique du bruit ne pouvait aboutir 69, il s'agirait alors de dégager, au sein du produit qu'elle génère actuellement, une enveloppe spécifique, extrêmement faible au regard de son produit global (plus de 25 milliards d'euros en 2015, pour les seuls carburants routiers). Quel que soit le choix du mode de financement (l'un de ceux précités ou un autre) et son montant, compte tenu du niveau faible des moyens actuels au regard des besoins et des enjeux, il convient de tirer les conclusions de l'évaluation du plan bruit et de rechercher un maximum d'efficacité et de facilité de mise en oeuvre dans l'utilisation des crédits. La mise au point d'un nouveau « plan bruit » doit élargir davantage la palette des actions financées, notamment en direction des collectivités locales, dans une approche plus intégrée du bruit dans l'environnement. Dès lors, un montant annuel 67 Étude d'outils économiques visant à financer le traitement des points noirs de bruit routier, BEAUVAIS CONSULTANTS, 16 février 2015. Parc de 300 000 logements à traiter, coût moyen unitaire de 7300 , programme établi sur 20 ans. Il faudrait en exonérer les produits qui ne sont pas des carburants routiers (fioul domestique, gazole non routier, ...) Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 43/80 68 69 Rapport n° 011057-01 de l'ordre de 100 M, comme envisagé dans l'étude précitée, ne paraît pas disproportionné au regard des enjeux (coût social minimum du bruit des transport de plus de 20 milliards d'euros par an, dont près de 90 % pour le transport routier). Pour ce qui concerne l'isolation acoustique des façades, la gestion des opérations du plan bruit a été particulièrement lourde et sur la plupart des opérations, le taux de logements effectivement protégés sur une façade n'excédait que rarement 50 % du fait du refus des propriétaires de réaliser les travaux, souvent pour des raisons financières. La mission préconise donc de concentrer les interventions publiques sur certaines opérations particulièrement exemplaires tant sur le plan santé - environnement (ne retenir que les bâtiments répondant aux critères des points noirs du bruit) que sur le plan social. En effet, de nombreux logements exposés (dans le parc privé comme dans le logement social) sont occupés par des gens à très faible niveau de ressources, pour lesquels une participation de 20 % au coût total des travaux n'est pas accessible. Le financement pourrait être porté à 100 % du coût des travaux et porté par une maîtrise d'ouvrage unique, pouvant être confiée aux collectivités. Cette disposition éviterait des protocoles financiers avec de multiples co-contractants, permettrait de maîtriser plus facilement les coûts (appel d'offre unique) et de s'assurer que tous les logements seront effectivement protégés. 2. Dégager un financement pérenne permettant de soutenir notamment les collectivités locales dans la politique de traitement des zones les plus exposées au bruit, intégrant de nouveaux leviers (exploitation, aménagement et revêtement routiers, mutation du tissu et des usages urbains). Concentrer les crédits alloués au traitement des façades sur des opérations exemplaires, à forte dimension sociale, avec un financement pouvant aller jusqu'à 100 % du coût total. (DGPR, Ademe, DGITM) Le dispositif envisagé ne concerne que le secteur routier. Un programme spécifique doit pouvoir être mis en place par d'autres voies pour le secteur ferroviaire, avec un financement en provenance du secteur ferroviaire et de ses usagers, qu'il s'agisse du fret ou du transport de voyageurs. 2.5.3. Mieux prendre en compte le bruit dans la création des nouvelles infrastructures L'Autorité environnementale (Ae), placée au sein du CGEDD a adopté le 8 juillet 2015 et publié une note sur la prise en compte du bruit dans les infrastructures de transport routier et ferroviaire. Après dépouillement de 101 avis rendus depuis 2009, et tout en se félicitant de la nette amélioration de la prise en compte du bruit dans les études d'impact, l'Ae identifie six pistes d'amélioration allant pour la plupart au-delà de la stricte application des prescriptions réglementaires. Ce sont : · 1. Améliorer la présentation au public ; · 2. Mettre en perspective la stratégie adoptée au regard de l'objectif de respect de la réglementation ; · 3. Tenir compte des émergences : l'Ae rappelle à ce propos que l'Anses, dans son rapport de 2013, comme l'OMS, estiment « qu'un indice événementiel serait mieux adapté pour évaluer les risques de perturbation du sommeil » ; · 4. Inscrire le bruit dans la séquence éviter - réduire - compenser (ERC) ; Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 44/80 · 5. Faire le lien avec la politique des points noirs : en jouant de la large palette des solutions techniques à disposition, et non de la seule isolation des façades qui n'est efficace que fenêtres fermées ; · 6. Tenir compte des inégalités sociales face aux nuisances et de la multiexposition : observant que les situations de multi exposition tendent à se concentrer sur les populations les plus défavorisées, l'Ae recommande que les nouveaux projets d'infrastructure prennent en compte la qualité de vie globale des habitants concernés et ajustent les mesures prises en conséquence. La mission fait sienne ces recommandations, qui corroborent sa proposition de développer une approche intégrée du bruit dans l'environnement, ne se limitant pas au traitement des façades des bâtiments identifiés comme « points noirs du bruit » et de tenir également compte de la situation sociale des habitants. 2.5.4. Associer le bruit à la sécurité routière et mettre à l'étude un système de contrôle et sanction automatisés des fauteurs de bruits émergents Le respect des limites de vitesse est avant tout compris au titre de la sécurité. Dans certains cas, il est aussi justifié par le respect des riverains et la nécessité de produire moins de bruit. Les accélérations rapides sont aussi une source de bruit supplémentaire et inutile. Le bruit doit donc être intégré dans la qualité de conduite par exemple au travers de l'éco-conduite, qui vise d'abord à mieux maîtriser la dépense énergétique. Les conducteurs pourraient utilement être sensibilisés sur le sujet, ce qui favorisera de plus l'acquisition de véhicules électriques. De surcroît, rappelons qu'une conduite apaisée réduit aussi la pollution atmosphérique. Ainsi, la limitation de vitesse sur les voiries périphériques (de 110 km/h à 90 km/h ou de 90 km/h à 70 km/h ) a des effets multiples qui plaident en faveur de leur examen : réduction du bruit, réduction de la pollution de l'air, amélioration de la capacité de transit avec réduction des embouteillages. Le contrôle de la vitesse par radar pour le respect du bruit et non pour la seule sécurité serait le bienvenu sur certains tronçons urbains. Une discussion avec le ministère de l'intérieur s'imposera au préalable. En effet, le réseau des radars est actuellement implanté sur les lieux les plus accidentogènes, ce qui répond certes à son objectif premier, mais sans considération de la pollution sonore. Le contrôle des émergences atypiques sur route doit être envisagé. Il serait intéressant de s'inspirer de l'expérience acquise depuis 2005 en matière de contrôle sanction automatisés par radars de la vitesse sur route. L'idée serait de mettre au point, de faire valider et d'installer sur le bord des routes, notamment en milieu urbain et sur les points noirs, des appareils de mesure qui seraient au bruit ce que les radars automatiques de détection des véhicules en excès de vitesse sont aujourd'hui à la vitesse. La technologie existe. Elle est fondée sur le principe de la stéréo. Elle a été développée il y a 25 ans en vue de la localisation des snipers dans un environnement urbain. Elle a certes connu des tentatives avortées (notamment au Canada) et des résultats décevants (travaux de Greg Watts au Royaume-Uni). Elle est pourtant testée depuis 2016 par Bruitparif dans quelques quartiers animés en soirée de la capitale, à l'aide d'un appareil à 4 têtes enregistreuses appelé « méduse », et fait l'objet de recherches au sein de la communauté scientifique. Elle nécessitera sans doute des développements technologiques avant de pouvoir obtenir la validation des autorités judiciaires, mais offre des perspectives intéressantes de pacification du trafic. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 45/80 3. Associer le bruit à la politique de sécurité routière, sensibiliser les conducteurs et mettre à l'étude un système de contrôle sanction automatisé des bruits émergents excessifs causés par certains véhicules. (DGITM, DGPR, en lien avec le ministère de l'Intérieur) 2.5.5. Anticiper l'évolution de la réglementation communautaire en matière de prévention Dans un domaine où l'Union européenne donne désormais le tempo en matière de réglementation, il est important que la France sache anticiper pour faire valoir les principes auxquels elle est attachée. Comme on l'a vu, elle pourrait engager une démarche active sur deux questions au moins : la labellisation des revêtements peu bruyants et le bruit des wagons de fret. La labellisation des revêtements de chaussées peu bruyants est un sujet émergent au niveau européen alors même qu'un savoir faire est développé en France et promu par la filière. De plus, une démarche de labellisation serait de nature à mieux valoriser ces produits, trop peu utilisés en France. 4. Encourager la labellisation et la promotion de l'utilisation des revêtements de chaussées peu bruyants. (DGITM) Si le sujet est en cours de discussion au niveau européen, il est certain que la réglementation en matière de bruit ferroviaire en Union Européenne va se durcir d'ici moins de 10 ans. À très court terme, les semelles de fonte seront interdites en Allemagne et en Suisse. Si les systèmes de freinage des wagons français ne sont pas d'ores et déjà progressivement renouvelés, le fret français risque une très forte pénalisation le moment venu. La DGITM suggère une distinction entre différents types de section selon leur niveau de sensibilité vis-à-vis du bruit causé par les wagons de fret. Cette position devra toutefois être défendue à Bruxelles. Il est donc urgent de programmer les investissements correspondants, en priorisant sur les wagons circulant sur les voies les plus fréquentées ou sensibles (international, triages urbains, itinéraires habités comme la vallée du Rhône ou Serqueux ­ Gisors) ainsi que sur les wagons circulant en Allemagne ou en Suisse. Selon le rapport du CGEDD précité70, le coût total estimé est de l'ordre de 150 millions d'euros. Cette dépense pourrait être étalée sur 5 ans, soit 30 millions d'euros par an. En anticipant une échéance qui pourrait être 2025, il faudrait commencer au plus tard en 2020, sans compter qu'à cette date, les wagons non équipés d'un nouveau dispositif de freinage ne pourront plus circuler en Allemagne et en Suisse. 5. Présenter sous un an un programme d'investissement pour le remplacement des systèmes de freinage des wagons de fret, permettant aux opérateurs français de respecter les échéances européennes (DGITM, en lien avec les propriétaires de wagons et opérateurs de fret). 70 rapport n° 009254-01 de mars 2014 du CGEDD sur le bruit du fret ferroviaire Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 46/80 Rapport n° 011057-01 3. Le bruit, une thématique mal identifiée dans les politiques d'urbanisme, d'habitat et de construction 3.1. Le bruit encore peu intégré dans la planification et l'aménagement urbains 3.1.1. Le code de l'urbanisme ignore le bruit, à l'exception de celui du trafic aérien Comme il a été dit plus haut, le code de l'urbanisme n'édicte de contraintes à l'urbanisation qu'au voisinage des aérodromes. Le long des voies routières ou ferroviaires à fort trafic, les constructions sont possibles sous réserve du respect, dans une bande plus ou moins large selon le niveau de bruit généré par l'infrastructure, de prescriptions d'isolation acoustique. En principe, l'implantation de toute construction est soumise à l'obtention du permis de construire. Ce permis « peut être refusé, ou n'être accordé que sous réserve de prescriptions spéciales, si les constructions sont susceptibles, en raison de leur localisation, d'être exposées à des nuisances graves, dues notamment au bruit » (article R111-3 du code de l'urbanisme). Mais, selon l'article L 111-1 du code de l'urbanisme, cette disposition ne s'applique pas aux communes dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, c'est-à-dire la plupart des communes. Dans ce cas, il faut tenir compte des zones ou parties de zones qu'il délimite (zones industrielles par exemple) et dans lesquelles certaines constructions peuvent être interdites, ou au contraire seules autorisées, pour des raisons diverses, dont le bruit . Il n'existe donc paradoxalement aucune restriction de droit à l'occupation de l'espace riverain des voies bruyantes par des immeubles d'habitation ou d'accueil de publics sensibles tels que les enfants. Il est donc possible de construire au voisinage des voies ferrées et des routes à trafic intense, dès lors que les immeubles respectent les normes d'isolation acoustique aux bruits extérieurs. De fait, il a été signalé à la mission des exemples paradoxaux de crèches implantées en ZAC le long d'une voie rapide urbaine, alors que les terrains à l'arrière, jugés commercialement plus intéressants, étaient réservés aux bureaux et aux entreprises. A contrario, les urbanistes et les architectes savent aujourd'hui construire le long des voies bruyantes des immeubles tolérants au bruit (bureaux, hôtels, salles de sport...), dont la façade côté voie est occupée par les espaces les moins nobles (couloirs, cuisines et sanitaires...) et qui jouent vis-à-vis des immeubles à l'arrière le rôle bienvenu d'écrans acoustiques. Le silence du code de l'urbanisme sur le bruit des transports terrestres, comparé aux dispositions très complètes qu'il édicte au voisinage des aérodromes, surprend. Il paraît étrange qu'on puisse implanter une crèche ou une nouvelle école le long d'une voie rapide urbaine, sous la seule condition que le bruit à l'intérieur, fenêtres fermées, respecte les valeurs limites édictées par la réglementation. On rappellera à ce propos la déclaration de Parme des ministres européens de l'environnement et de la santé (2010) engageant l'UE et ses États membres à réduire l'exposition des enfants au bruit et demandant à l'OMS de produire des lignes directrices appropriées. Si la réglementation permet au PLU d'édicter des limitations, elle ne l'impose pas. Les secteurs affectés par le bruit de part et d'autre des voiries classées selon le processus de classement sonore des voies décrit au paragraphe 2.2.1 (entre 10 m et 300 m selon Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 47/80 leur catégorie sonore) ainsi que les prescriptions d'isolement acoustiques doivent toutefois être annexés au PLU. 3.1.2. Le plan de prévention du bruit dans l'environnement : un document de trop dans le maquis de la planification ? Comme on l'a vu au chapitre précédent, les cartes de bruit sont la base d'une démarche de réduction au travers des plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE), qui doit être compatible avec le PLU. Il vise à prévenir les effets du bruit, à en réduire le niveau ainsi qu'à préserver les « zones calmes ». Il doit comporter une évaluation du nombre de personnes exposées à un niveau de bruit excessif et identifier les sources de bruit dont les niveaux doivent être réduits. Il doit également recenser les mesures proposées par les autorités compétentes sur le territoire en question pour réduire les niveaux de bruit et lutter contre les nuisances sonores. Il doit préciser les financements éventuellement disponibles et les échéances prévues pour la mise en oeuvre des mesures recensées. Les PPBE sont diversement mis en oeuvre et leur qualité est très inégale. Selon les données de la mission bruit de la DGPR, le taux d'exécution des PPBE par les collectivités est tel que 57 % de la population concernée est couverte par un tel plan. Bien souvent, le PPBE est perçu comme un document de plus ou de trop, dans le maquis des documents de planification ou de programmation. L'Ademe a récemment lancé un appel à manifestation d'intérêt pour intégrer la démarche des PPBE à celle des plans climats air énergie territoriaux (PCAET). Actuellement, le bruit ne relève pas des PCAET. Dans cette nouvelle approche, il s'agit de lier le bruit à la qualité de l'air, en le considérant d'une certaine manière comme un indicateur de celle-ci, à l'instar du dioxyde d'azote ou des particules fines. Dans cet esprit, l'observatoire de Lyon a développé une plate-forme « air-bruit »71, outil régional de l'exposition du territoire aux nuisances air et bruit. L'outil propose des cartes distinctes et combinées pour les deux indicateurs, qui intègrent des problématiques proches. Leur utilisation commune dans les démarches de prévention et de traitement a bien entendu du sens. La démarche de liaison « air-bruit » est à poursuivre tant dans la cartographie des nuisances correspondantes que dans leur intégration dans les PCAET, qui pourraient devenir des PCAEBT. La mission privilégie une autre piste, qui consisterait à intégrer davantage le bruit dans la planification urbaine. Au sein du PLU serait développé un volet bruit, présentant un plan d'actions, ce dernier « valant » PPBE. L'évaluation environnementale comporterait un chapitre bruit, sur lequel l'Autorité environnementale serait amenée à se prononcer. Le lien avec le règlement de chaque zone serait plus aisé, il préciserait par exemple les limitations à la construction des logements ou des établissements accueillant des personnes sensibles dans les zones les plus exposées. Les cartes de bruit seraient alors annexées au PLU et intégrées dans le futur outil Géoportail. Comme indiqué dans le chapitre précédent, cette dernière étape suppose toutefois que la méthodologie de la cartographie soit encore améliorée pour que leur fiabilité ne soit pas contestée. On rappellera que la Commission européenne a mis en demeure la France en raison de son retard dans la publication des cartes et dans la réalisation des plans. Pour ce motif plusieurs circulaires et instructions du ministère de l'environnement ont invité au fil des années les préfets à sensibiliser et mobiliser les collectivités locales pour 71 ORHANE : observatoire Environnementales Régional Harmonisé Auvergne-Rhône-Alpes des Nuisances Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 48/80 l'élaboration des cartes et plans. Fin 2017, cette situation s'est améliorée 72. Une sanction financière, qui engagerait solidairement l'État et les collectivités locales, reste toujours possible. 3.1.3. L'intégration du bruit dans l'aménagement urbain comme une composante à part entière de la qualité de vie Si la réglementation de l'urbanisme offre peu d'outils permettant de réduire les nuisances sonores dans les villes et dans les zones particulièrement affectées par le bruit, la demande citoyenne se fait plus exigeante pour un environnement garantissant une réelle qualité de vie. Il s'agit dans le cadre d'une organisation de l'espace, des circulations, de l'affectation du bâti, en fonction du contexte et des contraintes, de maîtriser l'environnement sonore de façon harmonieuse, de construire avec les sons dans le respect de l'identité des lieux afin d'offrir un cadre de vie agréable. Parmi les opérations urbaines en capacité d'intégrer la réflexion sur la réduction du bruit figure le concept d'éco-quartiers ou encore de haute qualité environnementale (HQE) des aménagements. On peut noter qu'aucune de ces deux démarches ne fait explicitement référence au bruit. Dans la démarche éco-quartier issue du plan ville durable lancé en 2008, l'engagement vis-à-vis du bruit a été inclus au départ dans l'ensemble « offrir un cadre de vie agréable et sain », devenu en 2016 « assurer un cadre de vie sûr et qui intègre les grands enjeux de santé, notamment la qualité de l'air ». De même, le référentiel HQE aménagement fait référence au bruit dans un ensemble « santé » incluant les nuisances sonores olfactives et visuelles, la qualité de l'air extérieur et intérieur, les risques sanitaires (sols pollués, champs électromagnétiques, sites et sols pollués). Les retours d'expérience montrent que dans ces démarches, le bruit est rarement pris en compte en tant que tel, même s'il y a de ce point de vue, des opérations exemplaires 73 en général dans les zones les plus exposées. En pratique, la prise en compte du bruit n'est pas encore dans les « standards » de l'aménagement urbain dans lesquels la dimension sonore reste encore marginale par rapport à d'autres impératifs. Les collectivités disposent également de la possibilité d'instaurer des espaces dits « zone calmes » et « zone d'apaisement » introduites dans la législation en 2002 par la directive européenne et définies dans l'article L572-6 du code de l'environnement comme « des espaces extérieurs remarquables par leur faible exposition au bruit, dans lesquels l'autorité qui établit le PPBE souhaite maîtriser l'évolution de cette exposition compte tenu des activités pratiquées ou prévues »74. Un récent guide « Du calme en ville, aménager en faveur du bien être » du Cerema présente la démarche et quelques opérations exemplaires réalisées à Lyon, Bourg-enBresse, Bordeaux, Grenoble ou encore Rotterdam et Bilbao. Il faut promouvoir ces démarches en vue d'une meilleure prise en compte du bruit dans l'aménagement urbain. Mais force est de constater que le bruit n'est pas une préoccupation identifiée par l'administration : au sein de la sous-direction « qualité de 72 La définition récente (avril 2017) des nouvelles entités responsables rend encore fragile les statistiques, mais la DGPR estime que le taux de couverture rapporté à la population concernée est de 87 % s'agissant des cartes de bruit, et de 57 % s'agissant des PPBE Par exemple la ZAC Claude Bernard, opération de renouvellement urbain située dans le 19ème arrondissement à Paris, le long du tram 3 et de la future gare RER E « évangile ». La zone calme se caractérise par Lden<55 dB(A) ; la zone d'apaisement est comprise entre 55 dB(A) et 65 dB (A). Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 49/80 73 74 Rapport n° 011057-01 vie » de la direction de l'urbanisme, de l'habitat et des paysages (DHUP), on reconnaît volontiers que la question du bruit n'est pas ou très peu intégrée dans les critères pris en compte pour définir la qualité de vie. 6. Prendre en compte le bruit dans la planification urbaine en y intégrant un « volet bruit ». Inciter à définir dans les PLU des restrictions d'usage en matière de construction dans les zones fortement exposées pour épargner les publics sensibles et à définir des orientations en matière d'aménagement urbain intégrant le bruit dans les critères de qualité de vie. (DHUP) 3.1.4. Trop de logements nouvellement construits ne sont pas conformes à la réglementation acoustique Le contrôle du respect des règles de construction (contrôle CRC) des bâtiments neufs est piloté par la DHUP et réalisé par le Cerema. L'administration a régulièrement constaté, lors de ces contrôles, qu'en matière acoustique, plus d'un logement sur deux n'était pas conforme à la réglementation75. Cette piètre performance doit être corrigée, surtout si l'on considère que les bruits de voisinage sont perçus comme une nuisance importante et que leur coût social l'est tout autant. Il faut ajouter que l'isolation acoustique vis-à-vis de l'extérieur, si elle est de bonne facture (ce qui est en général le cas pour les logements neufs), fait ressortir les bruits intérieurs. Depuis le 1er janvier 2013, un arrêté76 impose aux maîtres d'ouvrage de signer une attestation de prise en compte de la réglementation acoustique à réception du chantier pour toute opération de logements collectifs ou de maisons individuelles accolées. Cette attestation doit être produite à l'autorité ayant délivré le permis de construire, en général le maire. Pour les opérations comportant au moins 10 logements, des mesures acoustiques doivent être réalisées. L'attestation engage la responsabilité du signataire en cas de contentieux. L'intention est louable, mais le protocole de ces mesures n'est pas très détaillé et la réglementation n'impose pas que ce contrôle soit réalisé par un tiers (bureau de contrôle agrée par exemple). En pratique, ces attestations ne sont pas toujours produites aux communes, qui ignorent bien souvent cette exigence, de même qu'a fortiori, le futur occupant du local, qu'il soit propriétaire ou locataire. Ainsi, il n'est guère surprenant que les contrôles CRC effectués depuis 2013 ne montrent pas d'amélioration significative en la matière. En l'état, l'attestation n'est donc d'aucune utilité et pourrait être supprimée. La mission préconise que l'ensemble du système de contrôle du respect des règles de la construction soit revu. Les non-conformités constatées de façon récurrente et parfois importantes ne concernent pas uniquement le volet acoustique, mais aussi l'accessibilité ou certaines normes de sécurité. La pression de contrôle est globalement très faible et le Cerema vient d'annoncer son intention de mettre fin à cette activité. Il est donc temps de concevoir un dispositif nouveau qui permette réellement de faire progresser la qualité de la construction (pas uniquement dans le domaine acoustique) et garantisse à l'habitant propriétaire ou locataire un logement réellement performant. 75 Selon le « bilan des contrôles acoustiques réalisés de 2007 à 2013 », réalisé par le Cerema et en date de novembre 2016, près de 60 % des opérations contrôlées présente au moins une non-conformité. Arrêté du 27 novembre 2012 relatif à l'attestation de prise en compte de la réglementation acoustique applicable en France métropolitaine aux bâtiments d'habitation neufs Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 50/80 76 Rapport n° 011057-01 7. Concevoir un nouveau système de contrôle du respect des règles de la construction pour garantir à l'habitant un logement conforme à la réglementation, notamment en matière acoustique. (DHUP). 3.1.5. Des opportunités pour procéder à l'amélioration de la qualité acoustique des logements Les travaux de rénovation qui vont s'engager dans le cadre de la loi pour la transition énergétique sont une opportunité d'ores et déjà identifiée pour combiner la rénovation acoustique à la rénovation thermique dès que nécessaire. Pris en application de l'article 14 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, le décret n° 2016-798 du 14 juin 2016 relatif aux travaux d'isolation acoustique en cas de travaux de rénovation importants complète le décret du 30 mai 2016. Le maître de l'ouvrage qui entame des travaux importants de rénovation doit réaliser à la fois des travaux d'isolation thermique et des travaux d'isolation acoustique si l'immeuble est situé dans une zone particulièrement exposée au bruit. L'arrêté du 13 avril 2017 précise, selon les types de bâtiments, selon la zone d'exposition au bruit extérieur et selon le type de travaux de rénovation, les exigences acoustiques à respecter. Ces dispositions sont entrées en vigueur au 1er juillet 2017. L'Ademe est sur le point de diffuser un guide de la rénovation acoustique combinée à la rénovation thermique en direction des points rénovation info service situés sur tout le territoire. Dans le parc privé, la rénovation groupée de logements dégradés peut aussi passer par des opérations programmées d'amélioration de l'habitat (OPAH) portées par les collectivités locales en partenariat avec l'Agence nationale de l'habitat (Anah), sur des secteurs et/ou des publics cibles. Pour ces opérations, l'Anah cible les habitats dégradés, insalubres ou les publics en précarité énergétique, mais ne cible pas les habitations fortement exposées au bruit. Par ailleurs, lors des travaux de réhabilitation, la question acoustique n'est pas spécifiquement abordée. On peut donc recommander d'une part d'élargir les OPAH aux problématiques du bruit 77, et d'autre part, pour lutter contre le bruit de voisinage, de proposer systématiquement un diagnostic sonore ainsi que les travaux correctifs nécessaires, même lorsque le logement n'est pas en zone de sur exposition au bruit. Si le bruit ne peut être assimilé à une marque d'insalubrité, il n'en constitue pas moins un problème de santé publique. 8. Intégrer le bruit dans les démarches d'amélioration de l'habitat au titre de la transition énergétique ainsi que dans les projets portés par l'Anah. (DHUP, Ademe, Anah) Pour améliorer l'acoustique du parc de logement existants, et notamment ceux les plus exposés, c'est l'ensemble de la filière de la rénovation du bâtiment qui doit être mobilisée, sensibilisée et formée sur ce sujet assez largement méconnu. Les acousticiens sont peu souvent inclus dans les équipes de maîtrise d'oeuvre. Le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) réalise des études et développe des programmes de recherche sur le sujet de l'acoustique dans les bâtiments et s'attache à promouvoir et diffuser le savoir faire en la matière 78. Il promeut notamment une approche intégrée de la qualité du bâtiment, ne se limitant pas aux aspects de 77 L'inventaire en cours des copropriétés dégradées réalisé à l'aide des DDTM pourrait comprendre des logements fortement impactés par le bruit. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 51/80 Rapport n° 011057-01 performance énergétique, mais intégrant aussi la qualité de l'air et le confort acoustique. Il suggère par exemple que l'observatoire de la qualité de l'air intérieur (OQAI) évolue en intégrant le bruit comme une des composantes de la qualité de l'air, se rapprochant en cela de la démarche de l'observatoire du bruit de l'agglomération de Lyon. Par ailleurs, on peut s'interroger sur l'intérêt de développer un label ou une certification spécifique sur le confort acoustique des logements 79. Afin d'inciter les constructeurs à prendre mieux en considération l'intérêt de l'isolation acoustique des bâtiments d'habitation, l'arrêté modifié du 10 février 1972 a créé un label « confort acoustique ». Ce label a été relayé ultérieurement par le label du même nom délivré par l'association Qualitel. Mais la réglementation acoustique de 1994, appelée alors Nouvelle réglementation acoustique (NRA), a rendu obligatoire les performances du label associé à l'ancienne réglementation. Dans la mesure où elle permettait déjà un certain confort acoustique, l'utilité d'un nouveau label aux exigences nettement plus élevées que ceux de la NRA ne s'est pas imposée. Le label Qualitel « confort acoustique » a donc été supprimé. Aujourd'hui, la certification Qualitel impose des exigences sur les bruits de chocs, le bruit de VMC double flux en chambre ou encore sur le traitement acoustique des locaux techniques pour la production d'eau chaude sanitaire. Les acousticiens développent aujourd'hui le concept de l'indicateur unique acoustique pour qualifier la qualité acoustique d'un lieu80. Dès 2011, le GIAc81 a répondu à une demande de l'association HQE pour définir un tel indicateur, déterminé de manière à correspondre le plus justement possible au ressenti d'un individu placé dans un local pour y exercer une activité. La notation comprend trois notes combinées : · une note de bruit de fond : basée sur l'écart entre le bruit de fond régnant dans le local étudié et le bruit de fond optimal pour l'activité, issue d'une base de données, · une note d'émergence : elle est évaluée en fonction des bruits émergents des espaces extérieurs, des espaces voisins du local et des équipements techniques des bâtiments, · une note de réverbération : elle est fonction de l'écart entre un critère de qualité interne du local (réverbération, intelligibilité des sons) et le critère optimal défini pour l'activité défini dans une base de données. Cette démarche conduit à classer le lieu selon une échelle à laquelle les consommateurs sont désormais habitués, comme le montre le graphique ci-dessous. 78 Le CSTB a notamment publié en décembre 2015 un guide de mise en oeuvre acoustique dans le logement collectif. Gages de qualité, les certifications qui accompagnent un logement neuf sont décernées aux constructions qui, par leur conception architecturale, les matériaux et les équipements choisis, l'isolation mise en oeuvre, vont permettre des économies de chauffage et d'entretien, assurer une certaine qualité acoustique, etc. L'élaboration des référentiels de certification, le contrôle de la conformité d'une construction à ces référentiels et la décision d'attribuer ou non la certification, sont confiés à des organismes indépendants, accrédités par le COFRAC. Voir l'article de Olivier Servonnat (Acouphen) et Thomas Toulemonde (Impédance ingénierie), dans le numéro « Environnement et technique » de juillet - août 2017, numéro hors série sur l'expertise acoustique, dont le présent rapport reprend des extraits. Créé en 1990, le syndicat CINOV GIAc regroupe des ingénieurs-conseils et des bureaux d'études indépendants, spécialisés en acoustique dans les secteurs du bâtiment, de l'environnement, de l'industrie, de la formation et de la recherche. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 52/80 79 80 81 Rapport n° 011057-01 On obtient ainsi une qualification claire et précise de la qualité acoustique d'un lieu, représentative du ressenti de l'occupant, basé sur la recherche non pas du silence mais d'un équilibre des différents bruits perçus. Cette approche paraît particulièrement pertinente et pourrait trouver matière à se développer si l'on veut faire augmenter progressivement la qualité sonore du parc immobilier. 9. Mobiliser et former la filière du bâtiment sur la question acoustique, intégrer plus souvent les acousticiens aux équipes de maîtrise d'oeuvre et développer un label sur le confort acoustique des logements. (DHUP, CSTB) Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 53/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 54/80 4. Pour une politique du bruit plus audible La politique du bruit est aujourd'hui le parent pauvre des politiques en matière de santé environnement, alors que le bruit est une nuisance de première importance pour les Français et que son coût social est important. Des leviers ont été identifiés dans les champs des transports, de l'urbanisme et du logement. Les connaissances sont encore à développer et la recherche peut conduire à de nombreux progrès. Le sujet est encore insuffisamment porté à la connaissance du grand public alors même que des outils existent. Cette politique complexe, qui implique de nombreux acteurs, gagnerait à être plus lisible et mieux coordonnée. 4.1. Le bruit, un sujet de conflit pouvant devenir politiquement sensible Alors qu'à la fin du XXème siècle, dans le domaine des infrastructures de transports, le sujet « environnement-nuisance » se limitait principalement à la question du bruit, ce sujet n'apparaît plus, ces dernières années, en « tête de gondole » des politiques de prévention des risques, d'environnement et de qualité de vie. De nouveaux sujets dont l'impact sur la santé semble au premier abord plus grave (pollution de l'air, perturbateurs endocriniens, pesticides...) sont apparus, les impacts des projets sur l'environnement prennent bien davantage en compte la biodiversité, la qualité visuelle et aujourd'hui la qualité énergétique en matière de construction, d'aménagement urbain et de mobilité prime sur la qualité sonore. Pourtant, comme on l'a vu, ses impacts sur la santé sont réels et son coût social est important. Mais plus encore, les Français perçoivent cette nuisance comme majeure et en réalité, le bruit est très souvent un facteur limitant du développement ou un sujet de conflit qui cristallise par exemple les oppositions à la réalisation des projets. Quelques exemples de la sensibilité de ce sujet : · le bruit des chantiers : parmi les véritables raisons de l'opposition aux projets portée par les comités de défense figurent avant tout le paysage et le bruit (et les vibrations associées), pendant l'exploitation du projet (infrastructure routière et ferroviaire notamment) mais aussi pendant le chantier. En ville, les travaux de tous ordres (nouveau bâtiment, réfection des voiries et réseaux, création de réseaux de transport en commun...) cristallisent bien souvent les oppositions du fait du bruit. Plusieurs guides existent sur la maîtrise du bruit des chantiers de construction82, des articles sortent régulièrement dans la presse spécialisée, mais pour autant, sauf si la pression des riverains est forte, le bruit est rarement un critère d'analyse et de sélection des offres, · le bruit des livraisons la nuit : la possibilité de livrer la nuit sans gêner les riverains est un véritable défi pour limiter la circulation en ville en journée. Cela permet aussi de massifier les flux de livraison, de diminuer la consommation de carburant et donc de contribuer à l'amélioration de la qualité de l'air. Le label Certibruit a été développé en 2012 pour minimiser le bruit des livraisons la nuit. Il s'adresse autant aux entreprises de transport qu'aux entreprises gérant des restaurants ou des magasins. Deux collectivités seulement en France ont retenu ce label dans leur politique de transport de fret : la ville de Paris et l'agglomération du Grand Lyon ; 82 « Maîtrise du bruit des chantiers de construction des infrastructures de transport terrestre », Cerema (ex Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité, IDRRIM, novembre 2011), « Bruit des chantiers, missions incombant aux acteurs d'une opération de construction pour limiter les nuisances », Conseil national du bruit, juin 2013. Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 55/80 Rapport n° 011057-01 · le bruit des éoliennes : l'Anses a été saisie une première fois en 2006 par les ministères en charge de la santé et de l'environnement afin de réaliser une analyse critique du rapport publié par l'académie nationale de médecine recommandant l'implantation des éoliennes à une distance minimale de 1500 mètres des habitations, en raison des nuisances sonores. Au terme de cette première expertise publiée en 2008, l'Anses rappelait dans ses conclusions la nécessité d'étudier au cas par cas les distances d'implantation des éoliennes, par le biais notamment de modélisations acoustiques. À la suite de différentes plaintes de riverains de parc éoliens, les ministères ont à nouveau saisi l'agence en 2013, afin d'évaluer les effets sanitaires potentiels des infrasons et bruits basse fréquence émis par les parcs éoliens. En conclusion de son avis rendu en mars dernier, l'Anses considère que les données disponibles ne mettent pas en évidence d'argument scientifique suffisant en faveur de l'existence d'effets sanitaires liés à l'exposition au bruit des éoliennes. Rappelons également que la maîtrise des nuisances sonores peut être la condition du développement de certaines activités. La SNCF considère ainsi que le bruit du fret ferroviaire doit impérativement être mieux pris en compte si l'on veut développer ce mode de transport, qu'il s'agisse de la création de nouvelles voies ou de l'augmentation du trafic sur les voies actuelles. Au-delà de ces quelques exemples, le sujet du bruit est un souci récurrent pour les élus de proximité. Outre les problèmes classiques de bruit de voisinage, on voit apparaître de nouvelles plaintes, comme celles du bruit des cours d'école. Le seuil de tolérance au bruit, s'il diffère pour chacun, est un des indicateurs de notre capacité de vivre ensemble et lorsqu'il est en excès, les conflits et les oppositions, parfois lourdes de conséquences, sont inévitables. Le bruit est aussi un enjeu social. La multi-exposition au bruit (logement, quartier, travail, salle de classe ou d'apprentissage) est majoritairement le lot des personnes les plus défavorisées qui en subissent donc les effets cumulés. Le bruit dans l'environnement est donc un sujet socialemement sensible qui mérite d'être pris au sérieux. 4.2. Renforcer la recherche développement et la communication Le rapport du comité opérationnel du bruit du Grenelle de l'environnement préconise, en première recommandation, d'associer modernisation et bruit. Il précise en effet : « la lutte contre le bruit, condition au développement de nombreuses activités, est aussi une source d'innovations, une incitation permanente à la recherche d'une plus grande efficacité. La lutte contre le bruit doit devenir le levier d'une démarche de progrès plutôt qu'une contrainte que les acteurs économiques essayent, hélas avec succès le plus souvent, de contourner ». La mission s'accorde totalement avec cette approche. Dans la sphère publique, on ne peut que se féliciter de la création en cours de l'unité mixte de recherche en acoustique environnementale entre le Cerema et l'IFSTTAR. Sur le plan scientifique, ce rapprochement permettra de mutualiser les efforts de recherche sur des sujets communs (bruit de roulement, modélisation de la propagation acoustique dans l'environnement) mais également complémentaires (effets du bruit sur la biodiversité, matériaux acoustiques pour l'environnement, contact roue-rail...). Le projet de l'UMR s'inscrit dans une dynamique partenariale large, tant sur le plan national qu'international. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 56/80 Dans le registre de l'urbanisme et de la ville durable, les projets financés par l'Ademe (cf. première partie) doivent être valorisés le plus largement possible. Du point de vue des impacts du bruit sur la santé, on a vu dans la première partie que les connaissances étaient encore bien souvent lacunaires. Le champ de recherche est encore important. L'Anses et l'Ademe soutiennent différents projets : bruit intense et risque de neurinome du nerf acoustique, gêne acoustique dans les bureaux ouverts, méthode de prévision de l'ambiance sonore dans les bureaux ouverts, prématurité et multi exposition environnementale, liens entre exposition au bruit et hypertension,... Plusieurs pistes de travail paraissent devoir être explorées. Comme l'a déjà vu, on dispose de très peu d'études sur les bruits de voisinage et sur le bruit interne au logement. On ne dispose pas non plus d'études de surveillance épidémiologique des populations exposées. Notons, qu'en matière de recherche, l'Anses a souhaité qu'une plate-forme soit mise en place pour partager ou consolider l'ensemble des travaux concernant le bruit. Une telle initiative semble excellente et pourrait être développée en lien avec le ministère qui pourrait s'appuyer sur Ademe ou le CIDB. La recherche, l'expérimentation et l'innovation sont aussi très présentes dans le secteur privé. A titre d'exemple, on peut se référer au numéro récent de la revue environnement et technique83 qui présente quelques travaux des acousticiens sur la fenêtre coulissante active (fenêtre coulissante qui ne laisse pas passer le bruit même quand elle est ouverte), sur l'indicateur unique acoustique (cf. troisième partie) ou encore sur le bruit urbain. Les champs d'innovation sont très nombreux, qu'il s'agisse du bâtiment, des matériaux, des travaux publics, du matériel roulant etc. La dynamique serait utilement renforcée par le lancement d'appels à projets. Si la dynamique de recherche, d'expérimentation et d'innovation est réelle et touche tous les types d'acteurs (État, collectivités locales, entreprises de production et de conseil...), on peut regretter que la diffusion des résultats ne soit pas davantage valorisée et leurs applications concrètes plus largement diffusées, précisément pour « entraîner une démarche de progrès » comme le comité opérationnel du Grenelle de l'environnement cité plus haut l'appelle de ses voeux. Le progrès peut être apporté ou diffusé de diverses manières. Les guides de bonnes pratiques, la communication dans la presse spécialisée sont déjà utilisés mais en revanche les démarches de marquage de qualité comme la labellisation, voire la modification de la réglementation sont peu développées. 10.Soutenir la recherche, l'innovation, l'expérimentation, valoriser leurs résultats et généraliser leurs applications. (tous acteurs publics, coordination DGPR) 4.3. Rendre plus lisible la politique du bruit A court terme, il importe de poursuivre les travaux engagés par le Cerema à la demande de la DGPR et de la DGITM sur le chantier de « convergence » de la réglementation et des pratiques avec celles de l'Union européenne Il s'agit d'unifier les bases de données, les systèmes cartographiques et autres indicateurs de référence dont on a vu qu'ils sont multiples, pour pouvoir disposer d'un outil permettant de fournir à chaque citoyen une information objective et claire sur son exposition au bruit. Ce travail, réalisé en partenariat étroit avec les collectivités et notamment l'observatoire Acoucité, est essentiel pour la réalisation de cartes de bruit de qualité ainsi que pour 83 Environnement et technique, dossier « l'expertise acoustique gagne du terrain », numéro hors série, juillet-août 2017 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 57/80 Rapport n° 011057-01 leur généralisation. Ce travail s'articule avec la deuxième recommandation du rapport visée plus haut. La mission est en effet convaincue que l'un des moteurs d'une meilleure prise en compte du bruit dans l'environnement est la formation et l'information du public. L'existence de cartes largement diffusées est la base de cette démarche. Notons d'ailleurs que la démarche d'observatoire n'est pas uniquement une démarche technique. C'est aussi une démarche de concertation et de dialogue avec les partenaires concernés et les usagers, qui pourront à n'en pas douter, contribuer à l'avenir au renseignement des bases de données compte tenu des possibilités qu'offrent aujourd'hui les applications numériques. Quoi qu'il en soit, tout outil d'information ou de diagnostic environnemental n'a de valeur que s'il est compris et partagé par tous. Sujet par nature diffus et concernant de nombreuses filières techniques ou corps de métier, le bruit gagnerait à être davantage intégré dans toutes les politiques de qualité environnementale (éco-conception, éco-construction, éco-quartier, éco-conduite...) dont il est le plus souvent absent. Il doit aussi aller de pair avec le concept même de qualité de l'air, dont il peut devenir l'un des indicateurs. Le citoyen et le consommateur peuvent aussi être sensibilisés au bruit dans l'environnement dès lors que des signes de qualité qui le prennent en compte lui sont proposés : logement ou matériau de rénovation peu bruyant pour un particulier, chaussée, matériel d'entretien des espaces publics, démarche qualité exemplaire sur un chantier ou sur un bâtiment public pour un élu. Comme dans beaucoup de politiques environnementales, la sensibilisation par l'offre est aussi un vecteur de progrès. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 58/80 Conclusion Le bruit dans l'environnement est un sujet sensible, perçu comme une nuisance quotidienne de première importance par nos concitoyens. Pourtant, mis à part dans le secteur aérien pour lequel le « fauteur de trouble » est à la fois facile à identifier et réputé solvable, les crédits alloués à la réduction des nuisances sonores ont sensiblement décru, leur mise en oeuvre étant par ailleurs rendue plus difficile par la multiplication des acteurs concernés mais aussi par la baisse des effectifs de l'État en matière d'accompagnement dans les territoires. La relance d'une politique de réduction des nuisances sonores est une nécessité, au vu notamment du coût de l'inaction, que l'on peut assimiler au coût social annuel minimal de 20 milliards d'euros pour le bruit dans l'environnement causé par les transports. La mission propose pour cela des mesures de différente nature : · des mesures de traitement du bruit : traitement des points noirs du bruit routiers et ferroviaires, remplacement des dispositifs de freinage des wagons de fret. Ces mesures nécessitent un financement minimal et pérenne, qui peut être fondé sur le principe « pollueur payeur » et qui alimenterait un nouveau « plan bruit »; · des mesures de prévention ou de renforcement des contrôles visant dans la durée à diminuer des nuisances : sensibilisation des conducteurs et contrôlesanction du bruit routier, mise en place d'un dispositif performant de contrôle des règles de la construction. Le coût direct de ces mesures peut être assez faible, dans la mesure où il est susceptible soit d'être intégré à une politique déjà existante (sécurité routière), soit d'être en partie payé par l'usager (internalisation du coût du contrôle dans le prix du logement) ; · des mesures visant à diffuser la « culture du bruit » dans les pratiques des acteurs publics et privés : introduction d'un volet bruit dans les PLU, développement d'un label pour les revêtements peu bruyants, formation des acteurs du bâtiment. Dans l'immédiat, même s'il faut prévoir un dispositif minimum d'accompagnement, ces mesures nécessitent surtout la mobilisation des acteurs et des dispositifs existants et ont un surcoût direct relativement faible. À moyen voire à court terme, si elles portent leurs fruits, elles engendreront des surcoûts publics par rapport aux pratiques actuelles : choix d'aménagements et d'investissements plus qualitatifs et probablement plus coûteux pour les collectivités mais aussi pour l'État. Ce dernier doit prévoir un dispositif de soutien qui pourrait être inclus dans un nouveau « plan bruit » ; · des mesures visant à améliorer les connaissances et leur diffusion auprès de tous les publics : développer l'expertise sur les cartes de bruit pour les fiabiliser et en faire progressivement la référence unique, développer les signes de qualité faisant référence au bruit en direction des consommateurs, renforcer la recherche, soutenir l'innovation et en diffuser les résultats. Ces mesures sont des investissements (qui se traduisent pour l'essentiel par des moyens humains) qui, dans la durée, seront source d'économies. L'annexe 2 propose un programme d'action associé à ces recommandations avec des commentaires concernant leur coût. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 59/80 Une telle relance de la politique du bruit dans l'environnement pourra s'appuyer sur de nombreux points forts : la recherche et l'expertise encore solides des établissements publics de l'État, l'appui de la recherche publique et privée, la mobilisation et la conscience des enjeux des plus grandes agglomérations, un savoir-faire en matière d'ingénierie publique ou privée, un outil de capitalisation et de diffusion des connaissances : le centre d'information et de documentation sur le bruit, et un conseil réunissant l'ensemble des parties : le conseil national du bruit. Cécile Avezard Sylvain Leblanc Michel Rostagnat Ingénieure générale des ponts, des eaux et des forêts Inspecteur de l'administration du développement durable Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 60/80 Annexes Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 61/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 62/80 1. Lettre de mission Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 63/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 64/80 2. Plan des actions à engager, impacts financiers et conditions de réussite Ce tableau propose un certain nombre d'actions concrètes, non exclusives, issues des recommandations émises par la mission. Actions Concevoir un nouveau plan bruit, orienté principalement sur la lutte contre le bruit des transports routiers, en associant l'ensemble des parties et surtout les collectivités locales. · Prévoir un volet spécifique sur le traitement des zones sur exposées (points noirs du bruit et alentours), en développant de nouveaux leviers d'action, Impacts financiers L'ambition du plan dépendra du niveau des financements dégagés. Quelques chiffres repères : · Recommandations du Grenelle en 2008 : 450 M par an, Conditions de réussite Co-construction du plan avec les collectivités locales Simplification du processus d'instruction · · Soutenir le développement de l'expertise sur la cartographie du bruit ainsi que des expérimentations associant les citoyens à la production des données et à leur appropriation, Ouvrir la palette des actions éligibles à la prise en charge du surcoût de chaussées non bruyantes, à une communication en direction des automobilistes sur le lien entre les limitations de vitesse et le bruit, à des actions exemplaires en matière d'urbanisme (zones ou itinéraires calmes) et tout autre action relevant de la prévention, de l'information ou de la communication, Soutenir la recherche, l'innovation et l'expérimentation notamment au travers d'appels à projets, ouverts au secteur public et au secteur privé, Soutenir, le cas échéant, les expérimentations nécessaires à la labellisation des revêtements routiers · · · Plan bruit 2009-2014 : 160 M au total soit 27 M par an, TNSA 2016 : 55 M en 2016 affectée pour la lutte contre les nuisances sonores du trafic aérien · · coût social du bruit causé par les transports : 2 000 M par an minimum, dont 90 % du fait du transport routier Un montant de l'ordre de 100 M par an, tel que proposé dans l'étude Ademe/Beauvais consultants de 2015 est une base légitime. Engager, dans le cadre de la sécurité routière, une campagne de communication faisant le lien entre vitesse, sécurité et respect de l'environnement (bruit, consommation de carburant, pollution de l'air) et visant à « ringardiser » les conduites et engins bruyantes (notamment les deux roues) Établir un guide sur le PLU et le bruit à l'attention des élus responsables et des aménageurs Pas de surcoût a priori, inclus dans les crédits usuels de communication en matière de sécurité routière Cette action fait partie de l'activité courante des services. Elle sera l'occasion de mobiliser les réseaux d'expertise sur le sujet. Un guide de même nature, réalisé en 2006 par le pôle de compétences bruit de l'Isère peut fournir une bonne base de travail. Cette action fait partie de l'activité courante des services. Adhésion du ministère de l'Intérieur, coordonnateur de la politique de sécurité routière Association d'un réseau le plus large possible, (prenant en compte y compris des expériences internationales) tant pour la qualité du document que pour le succès de sa diffusion et de son utilisation. Mettre en place un groupe de travail réunissant le réseau scientifique et technique ministériel et les entreprises de travaux publics sur la labellisation des chaussées non bruyantes Intérêt commercial national et européen perçu comme tel par les entreprises Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 65/80 Établir un programme d'investissement contre le bruit du fret ferroviaire en ciblant le remplacement des semelles de frein des wagons Le remplacement des semelles de frein des wagons de fret coûte 150 M, soit 30 M par an sur 5 ans Le non remplacement fait courir le risque de l'exclusion du trafic de marchandise au moins en Allemagne et en Suisse à court terme. La mission devra proposer plusieurs alternatives devant être chiffrées et devant présenter le surcoût par rapport aux pratiques actuelles. Faire les arbitrages nécessaires au sein des crédits d'investissement ferroviaires de l'État et de la SNCF Confier au CGEDD une mission visant à faire des propositions pour refonder la politique de contrôle des règles de la construction Anticiper le caractère socialement sensible du sujet. Il s'agissait jusqu'ici d'une mission de service public réalisée par le Cerema dont les missions évoluent dans un contexte de diminution d'effectifs. Développement d'une expertise sur le sujet au sein de l'Anah Adhésion des professionnels Mettre en place des actions de rénovation acoustique (diagnostic, travaux) des logements dans les actions financées par l'Anah. Concevoir, avec la filière du bâtiment et les acousticiens, des outils de sensibilisation et un programme de formation sur la question acoustique dans la construction neuve et la rénovation Pas de surcoût a priori, il s'agit de dégager une enveloppe au sein des budgets actuels. Coût modéré à fort pouvant être pris en charge par les dispositifs de formation professionnelle (OPCA) Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 66/80 3. L'évaluation de la nuisance sonore : il n'existe pas au plan international de base véritablement solide pour la mesure du bruit ni pour celle de son impact sanitaire L'évaluation produite en 2016 par E&Y pour le Conseil national du bruit et l'Ademe, d'un coût social du bruit de l'ordre de 57 Md/an, soit près de 3 % du PIB français, peut légitimement interroger. Mais elle n'est que la sanction du flou conceptuel qui règne encore au niveau international en matière d'évaluation de l'impact du bruit. Ce qui frappe au premier abord en effet, c'est l'absence de consensus sur les définitions et sur la méthode. Il n'existe pas à ce jour d'indicateur de bruit qui fasse autorité. Le Lden paraît rallier le maximum de suffrages. Il n'en est pas moins jugé insuffisant pour rendre compte notamment des bruits émergents et impulsionnels. En France même, deux procédures concurrentes, le classement sonore des voies et la carte de bruit, rendent compte de l'exposition au bruit des zones riveraines des infrastructures de transport terrestre. Et en matière de cartes de bruit et de plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE), la France a de son propre chef substantiellement durci la réglementation. Quant à l'impact sanitaire du bruit, il est frappant de constater qu'il est estimé sur la foi d'une littérature épidémiologique abondante ­ et fort heureusement souvent convergente dans ses conclusions ­ mais nullement d'une campagne systématique, à grande échelle et reproductible qui seule pourrait faire autorité. On peut se demander si le préalable à une bonne évaluation de l'impact du bruit ne serait pas de diligenter un tel programme de surveillance épidémiologique des populations exposées. Ce point justifierait une discussion de fond entre les ministères de la transition écologique et solidaire et de la santé. Le tableau ci-dessous explicite les différences d'approches entre les niveaux international (OMS), communautaire et national. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 67/80 Concept Indice de bruit OMS Lnight (Lignes directrices nuit, 2009) UE Lden et Lnight (dir. 2002/49) France Aérodromes : Lden pour le PGS (art. R571-66 CE) et pour le PEB (art. R112-1 CU) Transports terrestres : Lday et Lnight (R571-34 CE) Affiner l'indice selon le spectre, la nature événementielle... (Anses, IFSTTAR) Lden (recommandé par Quinet, 2013) Méthode de mesure Mesure : selon principes Mesure : circulaire du 25 juillet ISO 1996-2: 1987 et ISO 1996 et normes NF S 31-085, NF 1996-1: 1982, sans réflexion S 31-088 de façade Calcul : selon CNOSSOS dès 2022 pour les transports Présentation : pas de norme, données agrégées (nombre de personnes exposées, surfaces exposées) (dir. 2002/49) Carte de bruit et PPBE : agglomérations > 100 000 h, routes > 3 Mvéh/an, voies ferrées > 30 000 trains/an, grands aéroports (à terme, dir. 2002/49) Carte de bruit et PPBE : idem directive (L572-2, L572-9, R572-3 CE) Classement sonore des voies : routes> 5 000 véh/j, voies de chemin de fer interurbaines > 50 trains/j et voies urbaines > 100 trains/j (décret 95-21) 57 Md/an, selon diverses méthodes : coûts évités, prix hédoniques, préférences déclarées, transfert de valeurs (CNB / Ademe, 2016) Impact sanitaire seul, selon HEATCO (Quinet, 2013) Voies sonores Évaluation de l'impact 1 685 000 années en bonne santé perdues en Europe ; unité de mesure : le disability-adjusted life-years (DALYs) ; relation exposition ­ réponse selon diverses études épidémiologiques (OMS / JRC, 2011) Étude de la gêne due au bruit dans l'environnement (OMS / JRC, 2011) Lignes directrices pour le bruit nocturne en Europe (2009) Lignes directrices pour le bruit ambiant (1999) 10 000 décès prématurés par an, 28 Mp gênées ; relation exposition ­ réponse selon diverses études épidémiologiques (EEA, 2014) Pas de norme (dir. 2002/49) Références Déclaration de Parme (2010) sur l'exposition au bruit des enfants HEATCO (2006) Le coût social des pollutions sonores (CNB et Ademe / E&Y, 2016) Évaluation socio-économique des investissements publics (CGSP / Émile Quinet, 2013) Impact extra-auditif du bruit (Anses, 2013) Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 68/80 4. La politique de protection et de prévention des nuisances sonores du transport aérien : un système organisé, financé et contrôlé En matière de lutte contre le bruit, le transport aérien bénéficie d'une organisation, de moyens et de résultats clairement meilleurs que les transports terrestres. 4.1. La protection : un système financé et structuré Le bruit causé par le trafic sur les 11 plus grands aéroports français est pris en compte par les Plans de gêne sonore (PGS) créés en vertu de l'article L571-16 du code de l'environnement. Le PGS est fondé sur un calcul du bruit selon l'indice de puissance acoustique moyenne pondérée Lden. Ce plan comporte trois zones : une zone I à l'intérieur de laquelle l'indice moyen est supérieur à 70 dB, une zone II où il est supérieur à 65 dB, et une zone III où il est supérieur à 55 dB (art. R571-66 du code de l'environnement). À l'intérieur de ces périmètres, les locaux d'habitation bénéficient d'une aide à l'insonorisation (art. R571-86 du code de l'environnement). Le fonds ad hoc est abondé par une taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires (TNSA) payée par les compagnies aériennes opérant sur lesdits aéroports. La TNSA est gérée par les autorités aéroportuaires. Le bénéfice de l'aide obéit à un principe général d'antériorité, qui veut qu'elle ne concerne que des locaux ou établissements existants ou autorisés à la date de la publication du PGS. En tant que taxe affectée, la TNSA a fait l'objet d'un plafonnement en 2014, revu à la hausse en 2016. La loi prévoyant explicitement l'indemnisation des personnes exposées, le principe du plafonnement de la taxe a fait débat. La TNSA a rapporté 55 M en 2016. L'aide moyenne est de l'ordre de 10 k par logement. Compte tenu du stock de dossiers non traités (environ 600 M), on estime qu'il faudra une douzaine d'années pour achever l'isolation acoustique du parc immobilier impacté. Le délai d'obtention de l'aide est actuellement de l'ordre de 3 à 4 ans. 4.2. La prévention : un ensemble complet de contraintes d'urbanisme, de gestion du trafic et de conception des avions La prévention du bruit du trafic aérien joue sur plusieurs registres : la limitation du droit à urbanisation des zones bruyantes, la gestion du trafic aérien (mesures d'exploitation) et notamment des procédures d'approche, et la réduction à la source sur l'aéronef ellemême. Les contraintes à l'urbanisation au voisinage des aérodromes sont fixées dans le Plan d'exposition au bruit des aérodromes (PEB), défini à l'article L112-6 du code de l'urbanisme, et annexé au plan local d'urbanisme. À ce jour, 200 aérodromes français en sont dotés. Le PEB est un document prospectif : il définit, à partir des prévisions de développement de l'activité aérienne, de l'extension prévisible des infrastructures et des procédures de circulation aérienne, des zones diversement exposées au bruit engendré par les aéronefs. Le PEB classe les zones bruyantes (A, B, C, D) en fonction de l'intensité (en Lden) décroissante du bruit. Les contraintes à l'urbanisation sont d'autant plus réduites que le niveau sonore est faible (article L112-10 du code de l'urbanisme). Le principe général Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 69/80 est l'interdiction des constructions à usage d'habitation sauf nécessité de service. Ce principe souffre toutefois quelques amodiations : · la rénovation, la réhabilitation, l'amélioration, l'extension mesurée ou la reconstruction des constructions existantes, et notamment en zone A ou B (bruit fort) ainsi que la reconstruction rendue nécessaire par une opération de démolition sont possibles dès lors qu'elles n'entraînent pas d'accroissement de la population exposée aux nuisances ; la disposition relative aux zones A et B a été introduite en vertu de la loi du 13 juillet 2006 dite engagement national pour le logement ; · en zone C (bruit modéré), des constructions individuelles non groupées situées dans des secteurs déjà urbanisés et desservis par des équipements publics y sont autorisées dès lors qu'elles n'entraînent qu'un faible accroissement de la capacité d'accueil d'habitants exposés aux nuisances ; · en zone C, le PEB peut délimiter des secteurs où, pour permettre le renouvellement urbain des quartiers ou villages existants, des opérations de réhabilitation et de réaménagement urbain peuvent être autorisées, à condition qu'elles n'entraînent pas d'augmentation de la population soumise aux nuisances sonores (disposition introduite en vertu de la loi SRU du 13 décembre 2000) ; une telle augmentation étant toutefois possible dans le cadre des opérations prévues par le I de l'article 166 de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR ; · en zone D (bruit faible), les constructions sont autorisées sous réserve d'isolation acoustique. L'article L112-9 du code de l'urbanisme créé en vertu de l'ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 a ouvert quelque peu les possibilités d'urbanisation à proximité des grands aérodromes. Aux termes de cet article, le plan d'exposition au bruit (PEB) des aérodromes dont le nombre de créneaux horaires attribuables fait l'objet d'une limitation réglementaire sur l'ensemble des plages horaires d'ouverture (ce qui est le cas notamment d'Orly) ne comprend plus désormais que des zones A et B. Toutefois, les contraintes de droit commun restent applicables à l'intérieur du périmètre défini par la zone C du PEB en vigueur au 19 février 2009. S'agissant des opérations de renouvellement urbain en zone C, une augmentation de la capacité de logements et de la population est autorisée dans une limite définie dans l'acte de création de ces secteurs ou dans une décision modificative. Cet amendement, porté par des parlementaires riverains d'Orly, visait à ne pas figer la dynamique urbaine dans leur secteur. Il conduit aujourd'hui à la manifestation de projets de construction de zones résidentielles importantes à proximité de l'aéroport, par exemple à Champlan dans l'Essonne. Sans nier qu'elles obéissent à deux logiques différentes, à savoir la prévention pour les PEB et la réparation pour les PGS, ni qu'elles sont gouvernées par des échéances différentes (respectivement : à 15 ans et à 1 an), on peut s'interroger sur le maintien de ce double traçage de l'impact sonore des aérodromes. À la réflexion, s'il paraît de bon aloi de vouloir unifier les procédures d'établissement de ces deux documents, il paraît tout autant intéressant de respecter la logique propre à chacun d'entre eux, et donc leur dualité. Le rapport n° 009392-02 : Coordination des aides à l'insonorisation et à la rénovation énergétique des logements à proximité des aérodromes du CGEDD (Anne Florette, Bruno Lebental et Jean-Michel Malerba) de mars 2017 suggère une procédure unique d'élaboration du PGS et du PEB, dans un souci de lisibilité aux yeux du public, mais sans préjudice de l'économie propre à chacun de ces deux documents. La maîtrise de l'urbanisation dans des secteurs périurbains généralement très dynamiques est en effet indispensable si l'on ne veut Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 70/80 pas rendre des populations otages d'un bruit qu'elles n'auront pas choisi en connaissance de cause. À l'inverse, il n'est pas raisonnable d'indemniser des habitations localisées dans une zone de bruit seulement putative. 4.3. Une autorité indépendante de contrôle et de sanction : l'Acnusa Le suivi et le contrôle des nuisances sur les 11 plus grandes plates-formes aéroportuaires françaises sont assurés par l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa), inscrite dans le code de l'aviation civile. L'Acnusa inflige des amendes administratives aux avions ne respectant pas les procédures (trajectoires d'approche, créneaux horaires...). Elle a ainsi émis des titres de perception à hauteur de 3 M/an environ depuis 2011. Elle procède également, le cas échéant, à la saisie conservatoire d'un appareil, ce qu'elle a fait à deux reprises en 2016. Le montant maximal (autorisé par la loi) de l'amende est de 40 000 , ce que l'Acnusa estime insuffisant au regard de ce que coûterait alternativement l'indemnisation des passagers retenus au sol. Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 71/80 5. Bibliographie sélective On se rapportera également aux références citées dans le rapport le plus souvent en note de bas de page, mais aussi au site du CIDB, qui propose, de façon structurée, une abondante documentation. Rapport du comité opérationnel « bruit », Grenelle de l'Environnement, mars 2008 Rapport d''information de l'Assemblée nationale sur les nuisances sonores, P. Meunier et C. Bouillon, 28 juin 2011 Rapport d'information de l'Assemblée Nationale sur les nuisances sonores aéroportuaires, J-A. Benisti et C. Bouillon, 16 mars 2016 Rapport de la commission au Parlement européen et au Conseil sur la mise en oeuvre de la directive relative au bruit dans l'environnement conformément à l'article 11 de la directive 2002/49/CE, mars 2017 Rapport annuel de l'autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa), mars 2017 Évaluation des impacts sanitaires extra-auditifs du bruit environnemental, Anses, février 2013 Noise in Europe, European Environment Agency, janvier 2014 Le bruit du fret ferroviaire, une stratégie pour en limiter les impacts, B. Simon, M. Pinet, M. Sandrin, CGEDD, mars 2014 Limiter le bruit des infrastructures ferroviaires, O. Chiello, IFFSTTAR, avril 2014 Les Français et les nuisances sonores, sondage Ifop, Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, avril 2014 Étude pour une optimisation de l'insonorisation des locaux au voisinage des aéroports, C. Assailly et J-P. Decourcelle, CGEDD, mai 2014 Parangonnage des réglementations européennes en infrastructures de transports terrestres, Cerema, août 2014 matière de bruit des 3eme plan national santé environnement 2015-2019, ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et ministère de la Santé, novembre 2014 Étude d'outils économiques visant à financer le traitement des points noirs du bruit, JM. Beauvais, Ademe, février 2015 Diminuer le bruit et réduire la gêne sonore engendrés par l'aéronautique civile, Corac, décembre 2015 Le coût social des pollutions sonores, Analyse bibliographique des travaux français et européens, Conseil national du bruit et Ademe, mai 2016 Évaluation stratégique du plan bruit, Ademe, mai 2016 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 72/80 Science for environment policy, In-depth report 13, links between noise and air pollution and socioeconomic status, Commission européenne, septembre 2016 Étude sur les basses fréquences dans les logements collectifs, Qualitel, décembre 2016 Du calme en ville: aménager en faveur du bien-être, Collection l'essentiel, Cerema, février 2017 Plan d'action 2016-2019 pour la lutte contre le bruit et l'amélioration de l'environnement sonore, Ademe, février 2017 Coordination des aides à l'insonorisation et à la rénovation énergétique des logements à proximité des aérodromes, A. Florette, B. Lebental, J-M. Malerba, CGEDD, mars 2017 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 73/80 6. Liste des personnes rencontrées Nom DROUIN TORRIN prénom Sylvain David organisme MTES/DGPR MTES/DGPR Fonction Adjoint chef du bureau des risques Chef du bureau des risques des industries, de l'énergie et de la chimie Date de rencontre 22 juin 2017 22 juin 2017 VALENTIN Pascal MTES/DGPR Chef de la mission bruit 26 avril 2017 et 4 juillet 2017 31 mai 2017 31 mai 2017 25 avril 2017 MESSIER PREMILLIEU AMAT SAUVAGE BREJASSOU MOLA SUSBIELLE FOURTANE OUVRARD LEMAITRE CASTRES-SAINTMARTIN CHAUFAUX SOULIER SOUM THIEBAUT Cédric Maude Christophe Thierry Guillaume Thierry Nora Christine AnneEmmanuelle Hélène Anne-Lise Émilie Anne-Marie Soumicha Aloïs MTES/DGEC/SCEE/S Chef du bureau des voitures D6 particulières MTES/DGEC/SC/EE/ SD6 MTES/DGITM/DAM Chargée de mission Chef du bureau Animation et pilotage des projets Médecin chef des gens de mer MTES/DGITM/DAM 25 avril 2017 MTES/DGITM/DIT MTES/DGITM/ DIT MTES/DGITM/DIT MTES/DGITM / DST MTES/DGITM/DST Chargé d'études Adjoint au sous-directeur des aménagements routiers Chef du bureau de la politique de l'environnement Chef du bureau de la régulation ferroviaire Sous-directrice de la sécurité et de la régulation ferroviaire Chargée d'études 25 avril 2017 25/04/17 25 avril 2017 25 avril 2017 25 avril 2017 MTES/DGITM/ SAGS METS/DGALN/DHUP 25 avril 2017 Chef du bureau de l'aménagement opérationnel durable(AD4) Adjointe au chef du bureau de la législation de l'urbanisme (QV4) Chef de projet qualité de l'air et acoustique dans le bâtiment (QC1) Chargée de mission bureau de la législation de l'urbanisme (QV4) Chef de projet performance d'environnementale des bâtiments (QC1) 27 juillet 2017 MTES/DGALN/DHUP MTES/DGALN/DHUP MTES/DGALN/DHUP MTES/DGALN/DHUP 22 juin 2017 30 juin 2017 22 juin 2017 30 juin 2017 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 74/80 PILLAN PERILLAT TEODORO BARTHELET DARMIAN DEJOLLAT Aline Emmanuelle Louis Sophie Joël Yann MTES/DGAC/DTA MTES/DGAC/DTA MTES/DGAC/DTA DREAL-AuRA DREAL -AuRA Sous-directrice du développement durable Chef bureau des impacts territoriaux Chef du bureau de l'environnement 27 avril 2017 27 avril 2017 27 avril 2017 Chef du service habitat, construction, ville 7 juin 2017 durable Service réglementation et contrôle des transports et des véhicules Chef du service mobilité, aménagement, paysage 7 juin 2017 DREAL -AuRA 7 juin 2017 DENEUVY EPRINCHARD MONTES PHELIP BRACH Jean-Philippe Yves Denis Denis Aurore DREAL -AuRA DREAL -AuRA DREAL-AuRA DREAL-AuRA Directeur régional délégué Chef du service prévention des risques industriels, climat, airir, énergie Service réglementation et contrôle des transports et des véhicules Chef adjoint de cabinet 7 juin 2017 7 juin 2017 7 juin 2017 DIR Centre- Chef du district Est/district de Saint Etienne DIR Centre-Est/SIR Chargé d'études bruit de Lyon DTT de la Loire DTT de la Loire DTT de la Loire Saint-Étienne métropole/ Ville de Roanne Département de la Loire Directeur service environnement Chef du service environnement direction générale techniques des services 7 juin 2017 ROL CEREZA ROCH THOUMY BRUN GARCIA BERTHILLOT OLNY ECOTIERE DEMEZIEUX SOLDANO CARIOU Jérémie Xavier Laurence Denis Pierre Claude Jean-Luc Xavier David Patrick Bertrand Sophie 9 juin 2017 9 juin 2017 9 juin 2017 9 juin 2017 direction générale des services techniques direction générale des services techniques 9 juin 2017 9 juin 2017 7 juin 2017 16 juin 2017 16 juin 2017 16 juin 2017 Cerema/DTer Centre- Chef de l'unité environnement santé est Cerema/Dter Est Cerema/Dter Est Cerema/Dter Est Cerema/direction technique infrastructures Responsable de la division environnement de Responsable du groupe acoustique, laboratoire de Starsbourg 15 mai 2017 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 75/80 transport et matériaux THIRION CHENE DEFRANCE Philippe Jean-Baptiste Jérôme Cerema/Dter Est CSTB CSTB Chef de la division acoustique Responsable de la division acoustique environnementale et urbaine Directrice du département Santé confort coordinatrice scientifique de l'OQAI Chercheuse Psyco-acousticienne Directeur adjoint du département, mobilité, environnement aménagement Directeur adjoint du laboratoire d'acoustique environnemental Directeur du laboratoire d'acoustique environnementale Directeur général adjoint, chargé des politiques d'intervention Chef de projet scientifique Directeur Villes et Territoires durables ingénieur Chef du service organisation urbaine Chargé de mission Directeur Président Consultant-acoustique et développement durable Président du comité technique du Conseil national du bruit Adjointe au directeur du développement durable 16 juin 2017 30 juin 2017 30 juin 2017 KIRCHNER Séverine CSTB 30 juin 2017 CHAMPELOVIER BERENGIER Patricia Michel IFSTTAR IFSTTAR 1er juin 2017 LELONG PICAUT MOUROUGANE CADENE CAIRE THIBIER SANNA AUVERLOT VINCENT BIDOU GAMBA Joël Judicaël Christian Anthony José Emmanuel Daniela Dominique Bruno Dominique René IFSTTAR IFSTTAR Anah Anses Ademe Ademe Ademe FRANCE STRATEGIE ACOUCITE CIDB Acoustique Gamba 1er juin 1er juin 2017 14 juin 2017 7 juillet 2017 17 mai 2017 8 juin 2017 8 juin 2017 9 mai 2017 7 juin 2017 26 avril 2017 16 mai 2017 GUERRERO FAUSSURIER ROSIN ASSAF DELION Anne Jean Christophe Samir Jean-Marc SNCF réseau 23 juin 2017 20 juin 2017 20 juin 2017 2 juin 2017 2 juin 2017 SNCF réseau DG Île- Directeur Accès au réseau de-France SNCF réseau DG Île- Responsable acoustique de-France RAILENIUM RAILENIUM Chef du département simulation numérique Directeur général Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 76/80 PEREIRA SEDOARISOA PERROT PARDO Kevin Noëlvia JeanDominique LouisFerdinand RAILENIUM RAILENIUM MICHELIN Chef de projets innovation RD Post Doctorante Responsable Standards et régulations Responsable du service RTI CEM Acoustique 2 juin 2017 2 juin 2017 15 juin 2017 Union technique de l'automobile,du motocycle et du cycle(UTAC )CERAM CGEDD CGEDD CGEDD 31 mai 2017 LEBENTAL DUPONT-KERLAN ROCHE Bruno Elisabeth Pierre-Alain Membre permanent Présidente de section Président de section 25 avril Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 77/80 7. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme Acnusa Ademe Anah Anses BTP Cerema CIDB Corac CSTB DDT DGAC DGITM DGPR DHUP DIR DREAL IDDRIM IFSTTAR INPES MCT MTES NRA OACI OMS OPAH PCAET PDU PEB PGS PLU PNB PPBE STI TNSA UMR Signification Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie Agence nationale de l'habitat Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail Bâtiment et travaux publics Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement Centre d'information et de documentation sur le bruit Conseil pour la recherche aéronautique civile Centre scientifique et technique du bâtiment Direction départementale des territoires Direction Générale de l'Aviation Civile Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer Direction générale de la prévention des risques Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages Direction interrégionale des routes Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux Institut national de prévention et d'éducation pour la santé Ministère de la cohésion des territoires Ministère de la transition écologique et solidaire Nouvelle réglementation acoustique Organisation de l'aviation civile internationale Organisation mondiale de la santé Opération programmée d'amélioration de l'habitat Plan climat air énergie territorial Plan de déplacement urbain Plan d'exposition au bruit Plan de gêne sonore Plan local d'urbanisme Point noir de bruit Plan de prévention du bruit dans l'environnement Spécification technique d'interopérabilité Taxe sur les nuisances sonores aériennes Unité mixte de recherche Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 78/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 79/80 Rapport n° 011057-01 Réflexion prospective sur une politique de réduction des nuisances sonores Page 80/80 INVALIDE)

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