Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises

DURANTHON, Jean-Philippe ; MOUGARD, Sophie

Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
Auteur secondaire
Résumé
<p style="margin-bottom: 0cm; line-height: 100%">Dans son rapport la mission analyse la crue exceptionnelle de la Seine en mai et juin 2016, caractérisée par une durée faible et une forte intensité, mais survenant à une période de l'année inhabituelle et pénalisant pour les professionnels. C'est pour les transporteurs de fret une époque de forte activité économique et pour les transporteurs de passagers une saison de forte affluence touristique. La crue a entraîné un arrêt de la navigation pendant une semaine, suivie d'une autre semaine permettant de remettre en état les installations nécessaires à l'activité des professionnels. Plusieurs catégories d'aide ont été mises en place pour compléter ou remplacer les mécanismes assurantiels. Le secteur du transport fluvial a pu bénéficier des dispositifs décidés par la cellule de continuité économique et d'aides spécifiques. Les aides allouées ont représenté des sommes relativement faibles et moindres qu'initialement prévu. Pour la plupart, elles ont tardé à être mises en place. Les artisans bateliers ont été les plus pénalisés par les conséquences de la crue. Mais elle n'est plus aujourd'hui l'objet de revendications fortes de la part des professions concernées. Celles-ci font face à des difficultés de plus grande ampleur : la crise céréalière pour les transporteurs de marchandises, dont l'effet sur leur activité est plus important et qui les fragilise davantage, la chute de l'activité touristique pour les professionnels du tourisme, qui réduit leur chiffre d'affaires. Certaines mesures sont cependant souhaitables pour que les conséquences d'une crue ultérieure soient moins pénalisantes : conforter juridiquement les aides allouées, rendre obligatoire l'assurance dommages à des tiers causés par les bateaux. Une réflexion sur l'avenir de la batellerie artisanale et une étude du statut et des missions de la Chambre nationale de la batellerie française (CNBA) sont également indispensables.
Editeur
CGEDD
Descripteur Urbamet
crue ; bateau ; navigation fluviale ; transport de marchandises ; transport de personnes ; fret ; trafic de marchandises ; activité économique ; activité touristique ; transport par eau ; subvention ; assurance ; gestion de la circulation
Descripteur écoplanete
gestion de crise ; crue exceptionnelle ; réparation des dommages
Thème
Ressources - Nuisances ; Transports
Texte intégral
MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENT, DE L'ÉNERGIE ET DE LA MER Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Rapport n° 010798-01 établi par Jean-Philippe DURANTHON et Sophie MOUGARD Novembre 2016 Les auteurs attestent qu'aucun des éléments de leurs activités passées ou présentes n'a affecté leur impartialité dans la rédaction de ce rapport. Sommaire Résumé......................................................................................................................2 Liste des recommandations....................................................................................3 Introduction...............................................................................................................4 1. La crue, exceptionnelle, est survenue dans un contexte déjà perturbé.........6 1.1. Les caractéristiques de la crue...................................................................................6 1.2. Le contexte particulier.................................................................................................8 2. Des aides ont été accordées mais elles ont été inégalement connues des professionnels concernés et restent limitées......................................................10 2.1. Les assurances........................................................................................................10 2.2. Les aides spécifiques...............................................................................................11 2.3. Synthèse.................................................................................................................. 14 3. Les conséquences de la crue diffèrent selon les catégories d'acteurs économiques et appellent des actions différenciées..........................................16 3.1. Les artisans bateliers ont été fragilisés par l'événement...........................................16 3.2. Les autres secteurs professionnels ont, dans l'ensemble, pu faire face à l'événement sans trop de difficultés.....................................................................................................19 3.3. Diverses améliorations de gestion sont indispensables............................................21 Conclusion...............................................................................................................24 Annexes...................................................................................................................27 1. Lettre de mission................................................................................................28 2. Liste des personnes rencontrées.....................................................................30 3. Documents relatifs aux aides mises en place par les organismes...............33 4. Glossaire des sigles et acronymes...................................................................54 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 1/56 Résumé Le bassin de la Seine a connu en mai et juin 2016 un épisode exceptionnel de crue, caractérisée par une durée relativement faible et une forte intensité, mais surtout survenant à une période de l'année inhabituelle et pénalisante pour les professionnels : c'est en effet pour les transporteurs de fret une époque de forte activité économique et, pour les transporteurs de passagers, une saison de forte affluence touristique. Aussi le secrétaire d'État chargé des transports a-t-il souhaité qu'une mission soit diligentée pour examiner si les mesures d'aide prises par les pouvoirs publics ont permis aux agents économiques concernés de faire face aux difficultés engendrées par la crue. Dans son rapport la mission analyse les caractéristiques de la crue. Elle observe que celle-ci a entraîné un arrêt de la navigation pendant une durée d'environ une semaine, suivie d'une autre semaine permettant de remettre en état les installations nécessaires à l'activité des professionnels. La mission constate que plusieurs catégories d'aide ont été mises en place pour compléter ou remplacer les mécanismes assurantiels. Le secteur du transport fluvial a pu bénéficier, d'une part des dispositifs décidés, sous le couvert des ministères financiers, par la cellule de continuité économique (aide au redémarrage notamment) et offerts aux professionnels de tous les secteurs économiques pénalisés par la crue, d'autre part d'aides spécifiques décidées par Voies navigables de France (VNF), le port autonome de Paris (PAP) ou la chambre nationale de la batellerie française (CNBA) ; des collectivités territoriales ont également exprimé leur souhait de venir en aide aux personnes touchées par la crue. Au total les aides allouées ont représenté des sommes relativement faibles et moindres que ce que les organismes avaient initialement prévu. À l'exception de celles décidées dans le cadre de la cellule de continuité économique, elles ont tardé à être mises en place. Les conséquences de la crue ont pesé de manière variable sur les différentes catégories d'acteurs. Les artisans bateliers, dont la situation est généralement fragile, ont été les plus pénalisés, d'autant que les aides alimentaires promises par le CNBA ne leur ont pas encore été versées. Les autres professions semblent avoir pu surmonter les difficultés plus aisément. La crue n'est plus aujourd'hui l'objet de revendications fortes de la part des professions concernées. La raison en est que celles-ci font à présent face à des difficultés de plus grande ampleur : la crise céréalière pour les transporteurs de marchandises, dont l'effet sur leur activité est bien plus important et qui les fragilise davantage, la chute de l'activité touristique pour les professionnels du tourisme, qui réduit considérablement leur chiffre d'affaires. C'est sur ces deux points que les professionnels concernés interpellent désormais les pouvoirs publics, ce n'est plus sur les conséquences de la crue. Certaines mesures sont cependant souhaitables pour que les conséquences d'une crue ultérieure soient moins pénalisantes qu'en 2016 : conforter juridiquement les aides allouées, rendre obligatoire l'assurance dommages à des tiers causés par les bateaux, notamment. Une réflexion sur l'avenir de la batellerie artisanale et une étude du statut et des missions de la CNBA sont également indispensables. Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 2/56 Liste des recommandations Pages Engager une réflexion sur la situation de la batellerie artisanale, comportant deux volets : - un volet conjoncturel pour déterminer comment elle peut faire face aux conséquences de la crise céréalière ; - un volet structurel pour définir les actions à entreprendre pour affronter la concurrence des autres modes de transport. Réformer la chambre nationale de la batellerie artisanale (CNBA) pour que les actions des pouvoirs publics soient plus efficaces et plus rapidement mises en oeuvre. S'interroger sur le statut d'établissement public, voire sur l'existence de la CNBA. S'interroger sur le niveau des taxes actuellement perçues par la CNBA et sur la création éventuelle d'un fonds de gestion géré par un tiers. Associer le ministère chargé des transports aux réflexions des pouvoirs publics visant à promouvoir le tourisme en Île-de-France. S'assurer que les textes permettent à Voies navigables de France (VNF), au port autonome de Paris (PAP) et à la chambre nationale de la batellerie artisanale (CNBA) d'allouer des aides en cas de crue exceptionnelle. Envisager que dans chacun de ces organismes une délibération cadre du conseil d'administration permette au directeur général de prendre dans des délais très courts les décisions nécessaires. Envisager de rendre obligatoire l'assurance des dommages causés par les bateaux à des tiers. Inviter les organismes publics (Voies navigables de France, chambre nationale de la batellerie artisanale, port autonome de Paris) ou professionnels (comité des armateurs fluviaux) à recueillir davantage d'informations sur l'activité et la situation financière de leurs correspondants ou adhérents. Mieux coordonner l'action des différents ministères concernés (ministères financiers, ministère chargé des transports, ministère chargé du tourisme). 18 19 21 21 22 23 23 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 3/56 Introduction Par lettre du 30 août 2016, le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche a rappelé que la crue survenue en mai et juin 2016 a fortement perturbé l'activité des opérateurs fluviaux et demandé au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) de diligenter une mission chargée d' « identifie(r) les conséquences économiques et financières pour les opérateurs fluviaux et les acteurs économiques concernés... et (de) propose(r) les mesures d'accompagnement nécessaires voire indispensables visant à éviter des répercussions gravement néfastes ». Cette mission a, par note de la vice-présidente du CGEDD en date du 21 septembre, été confiée à Jean-Philippe Duranthon et Sophie Mougard. Le travail demandé concerne uniquement les conséquences économiques de la crue et nullement les mesures qui ont été prises pour y faire face, ni la façon dont il serait possible d'améliorer le dispositif de prévention 1. Il s'intéresse aux utilisateurs de la voie d'eau, c'est-à-dire à la fois ceux qui transportent des passagers ou du fret, sur des liaisons linéaires ou circulaires, et ceux qui gèrent des installations fixes sur les berges ; par contre les personnes qui utilisent des bateaux pour leur seul logement n'entrent pas dans le champ de l'étude. Les agents économiques qui ont subi des dommages sans être utilisateurs de la voie d'eau (commerçants des villes inondées ou agriculteurs, par exemple) sont également exclus du champ de l'étude. Le champ couvert par la mission concerne l'ensemble du bassin de la Seine, qui assure environ la moitié du transport de marchandises et plus des trois quarts du tourisme fluvial. La mission, toutefois, a souvent, pour des raisons de disponibilité statistique, dû concentrer ses investigations sur le seul bief parisien ; cette restriction géographique n'est pas gênante car ce bief concentre l'essentiel de l'activité du bassin et sa situation peut facilement être généralisée à l'ensemble du bassin. La mission a rencontré l'ensemble des personnes concernées (voir en annexe 2 la liste des personnes rencontrées ou sollicitées) : administrations de l'État, organismes publics et organismes représentatifs des professions ; elle s'est également entretenue avec certains professionnels ou experts. Elle a examiné les documents que leurs interlocuteurs leur ont transmis, certains ayant été élaborés à sa demande et à son intention spécifique. En dépit de ce travail, la mission a éprouvé une grande difficulté à obtenir des données financières précises sur les conséquences de la crue. Cette difficulté ne résulte pas d'une réticence des différents interlocuteurs à fournir les renseignements demandés ; au contraire, la mission a reçu un excellent accueil de la part de l'ensemble des personnes sollicitées, même lorsqu'elle leur demandait des travaux spécifiques, par exemple une synthèse des demandes d'aide. Mais aucun organisme ou service de l'Etat ne dispose d'une vision d'ensemble de l'activité des utilisateurs de la Seine. Cette difficulté semble avoir deux origines principales : d'une part, les professionnels de la voie d'eau exercent des activités extrêmement diverses et relèvent d'instances professionnelles nombreuses, ce qui conduit à un morcellement de la population à examiner ; d'autre part, les entités économiques, généralement petites, ne sont pas Une mission sur ce sujet a été demandée le 27 juin 2016 au CGEDD et à l'Inspection générale de l'administration (IGA) par la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, en charge des négociations sur le climat et le ministre de l'intérieur. 1 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 4/56 obligées de rendre publics leurs comptes et ne sont donc pas habituées à une grande transparence financière. Toutefois, en dépit de ces difficultés, les analyses faites par la mission ne souffrent pas d'une grande incertitude, même lorsque la quantification des phénomènes observés est insuffisante. À l'issue de son analyse, la mission observe que la crue est survenue dans un contexte déjà perturbé (I) et que plusieurs dispositifs ont été instaurés pour venir en aide aux professionnels concernés (II). Elle constate que les conséquences de la crue diffèrent selon les différentes catégories d'acteurs et appellent des actions différentiées (III). Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 5/56 1. La crue, exceptionnelle, est survenue dans un contexte déjà perturbé Les difficultés rencontrées par les opérateurs fluviaux résultent de ce que la crue de mai-juin 2016 présente des caractéristiques exceptionnelles. Mais elles sont dues également au fait que la crue a ajouté ses effets à une situation perturbée pour d'autres raisons. 1.1. Les caractéristiques de la crue La crue de mai-juin présente un certain nombre de caractéristiques originales : - elle est survenue à une période de l'année inhabituelle : alors que les crues sont généralement dues à la fonte des neiges hivernales, et de ce fait surviennent à la fin de l'hiver, celle de 2016 est nettement plus tardive et résulte d'une abondance de pluies2. De ce fait la crue, contrairement aux crues « traditionnelles », est survenue à un moment où l'activité fluviale est plus importante. Cela est vrai pour le transport de marchandises, lié à l'activité économique, celle du BTP et de l'agriculture notamment ; cela est vrai surtout pour les activités fluviales liées au tourisme, particulièrement importantes durant les beaux jours du printemps : le mois de juin peut, pour certains opérateurs, représenter 15 % de leur activité annuelle ; - elle a été importante puisque la Seine a atteint dans la nuit du 3 au 4 juin une cote de 6,1 m à Paris - Austerlitz3, proche du niveau de la crue de 1982 ; le débit a atteint 1200 m3/s. Il ne s'agit nullement d'une crue centennale 4 mais le niveau d'eau est nettement supérieur à celui des crues annuelles ; - elle a été relativement courte, la décrue intervenant assez rapidement. Ainsi, la navigation a été interrompue dans le bief de Paris du 1er au 8 juin5. La durée moyenne d'immobilisation est donc d'une petite dizaine de jours, Pour la communauté portuaire de Paris (CPP) l'impact de la crue s'est fait sentir directement pendant dix jours et indirectement pendant dix autres jours, l'effet global pouvant être évalué à une quinzaine de jours d'activité normale : il a en effet fallu remettre en service les installations nécessaires sur les quais, notamment pour les activités touristiques ou industrielles (électricité, billetterie, aires de pesage des camions bétonnières, etc) et réparer les dégâts subis par les installations de chargement et déchargement de « Les cumuls (de pluie) enregistrés en 3 jours sur les bassins versants du Loiret, de l'Yonne ou de l'Essonne correspondent en moyenne à des périodes de retour comprises entre 10 et 50 ans, et ils atteignent localement des périodes de retour de 100 ans. Pour le mois de mai 2016, sur les bassins surveillés (...), les cumuls enregistrés sont 2 à 3 fois supérieurs aux normales. » (Service de la prévention des risques et des nuisances, « Épisodes de crue de mai-juin 2016 sur le bassin de la Seine, Rapport de retour d'expérience », octobre 2016). 2 3 4 L'alerte est donnée lorsque ce niveau atteint 2,50 m. Sur le Loing amont et l'Ouanne les niveaux de la crue de 2010 ont été dépassés, sur certains affluents ils dépassent les niveaux jamais enregistrés. 5 Les arrêts de navigation dans les différentes parties du réseau fluvial ont été les suivants : - du 30 mai au 15 juin sur l'Yonne amont et du 1er au 8 juin sur l'Yonne aval, - du 2 au 6 juin sur la Haute Seine et sur la Marne (jusqu'au 10 juin de Meaux à Chalifert), - du 1er au 8 juin dans Paris et du 2 au 7 juin entre Suresnes et Bougival. En aval de Gennevilliers aucun arrêt complet n'a été décidé et l'accès du port de Gennevilliers aux ports normands a été maintenu en permanence. Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 6/56 passagers (passerelles d'accès) et de fret. Par ailleurs, la direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Île-de-France (DRIEA-IF) a donné des consignes de prudence après la fin de la crue, compte tenu du risque de heurts avec des embâcles6. Au total, et comme le montrent les courbes ci-après 7, la période pendant laquelle la navigation a été perturbée a été sensiblement plus faible que celles constatées lors d'événements relativement récents : en 1978 la navigation a été arrêtée en mars et avril pendant dix-sept jours et de nombreux terrains ont été inondés pendant plus d'un mois ; en 1982 la navigation a été arrêtée pendant une durée qui a pu atteindre quinze jours en janvier ; - elle a été d'importance diverse selon les zones fluviales 8. Les difficultés les plus importantes et les plus longues ont été subies en amont du bief de Paris sur la Seine et la Marne, alors que la Seine est restée navigable en aval de Paris jusqu'à l'embouchure9. 6 7 Objets transportés par le fleuve, particulièrement importants lors des crues. Service de la prévention des risques et des nuisances, « Épisodes de crue de mai-juin 2016 sur le bassin de la Seine, Rapport de retour d'expérience », octobre 2016, p.13. 8 Voir supra note 5. Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 7/56 Rapport n° 010798-01 Au total, la crue du printemps 2016 est caractérisée par sa soudaineté, sa durée relativement réduite, mais surtout sa survenance à une période inhabituelle, particulièrement importante économiquement pour les professions concernées. Il ne fait pas de doute qu'elle présente un caractère exceptionnel mais celui-ci est difficile à définir ; c'est le cumul de ses caractéristiques qui permet de comprendre les difficultés qu'elle a créées. La crue a endommagé de nombreux ouvrages fluviaux sous la responsabilité de Voies navigables de France (VNF) ou du port autonome de Paris (PAP) : digues, barrages, écluses, quais, etc. VNF évalue à 7,6 M les travaux urgents nécessités sur le bassin de la Seine. Mais la crue a entraîné peu de dommages matériels pour les opérateurs : aucun accident n'est survenu, un seul bateau a cassé ses amarres, seules les installations à terre, lorsque l'activité les rendait nécessaires, ont souffert. Pour les opérateurs, les conséquences sont donc d'ordre économique et résultent de l'arrêt ou de la très forte baisse de leur activité. 1.2. Le contexte particulier Les difficultés entraînées par la crue ont été particulièrement ressenties par les opérateurs parce que ceux-ci étaient déjà pénalisés, ou étaient sur le point de l'être, par un contexte particulièrement défavorable. A/ Les opérateurs intervenant dans le domaine touristique (bateaux restaurant, bateaux croisière, etc) faisaient, en effet, face depuis plusieurs semaines à une diminution importante du nombre de touristes (selon le comité des armateurs fluviaux ­ CAF ­ la fréquentation touristique de ses adhérents a baissé de 35 % entre le 1er semestre 2015 et le 1er semestre 2016), particulièrement des touristes étrangers qui représentent une part importante d'une activité en forte croissance ces dernières années : + 5 à 10 % par an depuis 10 ans. Cette désaffection est due à la crainte de nouveaux attentats terroristes, conjuguée avec les grèves du secteur aérien, les manifestations liées au « projet de loi El Khomri » et le blocage des raffineries. Depuis l'instauration de l'état d'urgence, plusieurs compagnies d'assurance, notamment asiatiques et américaines, ont refusé d'assurer les touristes voyageant en France. La cellule de continuité économique mise en place par les ministères financiers a, durant sa réunion du 7 juin 2016, estimé que durant le mois de mai la fréquentation touristique a baissé de 19,2 % en Île-de-France et que le nombre de billets vendus pour les manifestations ou lieux culturels a baissé de 20 à 30 %. Ce constat a été fait officiellement au niveau national par le gouvernement dans le cadre d'une communication consacrée au bilan de la saison touristique présentée lors du Conseil des ministres du 19 octobre 2016. Le communiqué du conseil indique que « l'année 2016 restera une année à part pour les professionnels du tourisme. La filière enregistre en moyenne un recul de la fréquentation sous l'effet conjugué d'une perception négative de la sécurité (attentats terroristes ; délinquance sur les sites touristiques), des intempéries du printemps et des mouvements sociaux. ». Le texte indique qu'au niveau national « la fréquentation des lieux patrimoniaux et des grands musées nationaux est en baisse de 16 % sur les neuf premiers mois de l'année 2016 par rapport à la même période en 2015 ». Un « comité d'urgence du tourisme », présidé par le ministre des affaires étrangères et du développement international, s'est Comme on l'a vu la DREIEA-IF a toutefois, lors de la décrue, conseillé de limiter la navigation en raison du risque de heurt d'embâcles. 9 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 8/56 réuni à plusieurs reprises et a engagé des travaux sur six axes de réflexion devant faire l'objet de décisions concrètes. Importante au niveau national, la baisse d'activité est encore plus marquée en Île-de-France. La crue est donc survenue dans un contexte fortement récessif auquel elle a ajouté ses effets. B/ Dans le domaine du transport de marchandises, c'est la crise céréalière qui, d'une certaine façon, a prolongé les effets de la crue : alors que les bateliers auraient pu espérer que la forte activité céréalière, habituelle au début de l'été, leur aurait permis de reconstituer leur trésorerie, la faiblesse de la récolte et la moindre qualité de la production ont entraîné une diminution des tonnages transportés : loin de compenser les effets de la crue, l'activité céréalière a accru les difficultés rencontrées par les transporteurs. En effet, selon un point conjoncturel effectué par VNF en septembre 2016, les tonnages de céréales transportés sont en 2016 inférieurs de 20 % (11 Mt) à ceux de la précédente campagne et de 16 % (9 Mt) à la moyenne des campagnes 2011-2015. L'écart est particulièrement important pour le blé tendre (respectivement -29 % et -21 %) et le blé dur (-20 % et -24 %), il est moindre pour l'orge (-21 % et -7 %) et le maïs (= et -12 %). Or le transport de céréales représente une part importante de l'activité de la batellerie : environ 27 % des voyages de bateaux sur la Seine. VNF considère qu'en 2016, les tonnages de céréales perdus, par rapport aux années passées, seront de 2 350 000 t. Si la tonne est valorisée à 10 , cela représente pour la profession une perte de chiffre d'affaires de 23,5 M. Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 9/56 2. Des aides ont été accordées mais elles ont été inégalement connues des professionnels concernés et restent limitées Les professionnels ont pu bénéficier des couvertures assurantielles, lorsque celles-ci existaient, et d'aides mises en place par les pouvoirs publics, soit pour l'ensemble des acteurs économiques, soit de manière spécifique pour le secteur des transports. 2.1. Les assurances En ce qui concerne le domaine fluvial on distingue : ­ les assurances des biens, notamment des bateaux, dites assurances « corps » qui couvrent la coque et le moteur pour les dommages qu'ils peuvent subir. Le montant du coût de cette assurance représente de 0,5 à 2 % de la valeur du bateau. Au titre de l'assurance corps, les dommages causés aux biens des assurés et liés aux crues sont couverts ; l'assurance responsabilité civile, couvrant les dommages causés à des tiers, qui n'est pas obligatoire (mais moins de 1 % des transporteurs fluviaux ne seraient pas assurés selon Guian S.A., l'un des principaux courtiers d'assurances fluviales). ­ Il n'existe pas, en revanche, de recours assurantiel pour les pertes d'exploitation occasionnées par l'interruption de la navigation suite aux crues. Économiquement les études ont été faites et le caractère quasi certain de l'événement « crues » pèse lourdement sur l'appréciation du risque. Techniquement, peu d'assureurs seraient susceptibles d'intervenir (moins de 5). Par ailleurs, la caractéristique même de la crue est l'accumulation de sinistres au même moment et dans les mêmes lieux, conduisant au sinistre maximum possible. Dès lors la mutualisation du risque « crues » devient difficile à mettre en oeuvre, mutualisation qui est la base même de l'assurance. Le régime d'assurance des risques de catastrophe naturelle ne s'applique pas aux dommages subis par les corps des véhicules maritimes, lacustres et fluviaux ni aux marchandises transportées (article L125-5 du Code des assurances). En ce qui concerne les industriels utilisant le fleuve pour acheminer les matériaux dont ils ont besoin et dont les installations sont situées sur les quais bas de la Seine, les biens sont assurés pour les dommages occasionnés par les crues. Les dégâts directs à déplorer touchent essentiellement les pièces électriques de certaines installations (ponts-bascules, pelles électriques...). La profession a fait observer à la mission que le montant des franchises d'assurances contre les dommages aux biens était élevé (20 à 40 000 ), atteignant le même ordre de grandeur que le montant des dommages eux-mêmes. Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 10/56 2.2. Les aides spécifiques 1/ La cellule de continuité économique et l'aide au redémarrage Suite aux inondations consécutives aux crues, le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique a réactivé la cellule de continuité économique mise en place après les attentats de 2015. Cette cellule s'est réunie à trois reprises, le 7 juin, le 15 juin et le 20 juillet 2016. Au-delà de la mobilisation des aides « de droit commun » déjà mises en place en faveur des entreprises en difficulté suite aux attentats et qui sont rappelées ci-dessous, une aide exceptionnelle a été décidée pour aider les entreprises au redémarrage de leurs activités. Les mesures « de droit commun » en faveur des entreprises en difficulté se concentrent sur quatre axes : - L'indemnisation des dégâts matériels et de la perte d'exploitation par les assureurs La loi du 13 juillet 1982 encadre la couverture des dommages matériels et, lorsque la garantie est souscrite, des pertes d'exploitation en cas de catastrophe naturelle. La franchise représente 10 % du montant des dommages avec un minimum de 1140 pour les biens, et trois jours d'activité avec un minimum de 1140 pour les pertes d'exploitation. Comme on l'a vu, les bateaux et les marchandises transportées sont exclus du régime des catastrophes naturelles. - La mobilisation de l'activité partielle L'article R5122-2 du code du travail prévoit que l'employeur peut placer ses salariés en position d'activité partielle lorsque l'entreprise est contrainte de réduire ou suspendre temporairement son activité, notamment pour le motif d'un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel. L'activité partielle permet aux entreprises de bénéficier d'une allocation de 7,74 par heure chômée par salarié pour les entreprises de moins de 250 salariés et 7,23 pour celles de plus de 250 salariés. La durée de prise en charge est d'une semaine à six mois à concurrence de 1000 heures par salarié et par an. En contrepartie l'employeur verse une indemnité à ses salariés qui n'est pas assujettie aux cotisations sociales ni au versement forfaitaire sur les salaires. - L'étalement des échéances fiscales et sociales Des délais de paiement des cotisations sociales peuvent être octroyés sur demande des employeurs à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf). Les travailleurs indépendants (artisans bateliers notamment) peuvent également demander à la caisse du régime social des indépendants (RSI) un échéancier allongé de paiement de leurs cotisations et la remise des majorations de retard et pénalités qui pourraient leur avoir été notifiées. Enfin les entreprises peuvent solliciter la direction générale des finances publiques (DGFiP) en matière de dette fiscale. Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 11/56 - Les aides de la banque publique d'investissement (BPI France) Elles comprennent un fonds de garantie « renforcement de la trésorerie », un crédit de trésorerie préfinançant le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) pour les entreprises éligibles, la mobilisation du fonds de modernisation de la restauration etc. ; - S'y ajoute une mesure d'aide spécifique liée aux crues : l'aide au redémarrage Cette aide exceptionnelle de l'État bénéficie aux entreprises ayant subi des dommages importants ayant conduit à de réelles difficultés pour redémarrer leur activité à la suite des inondations. Elle vient compléter les dispositifs publics et assurantiels existants et déjà cités. Sont visées les entreprises dont le dernier chiffre d'affaires annuel est inférieur à 1 M et dont au moins un établissement est situé dans une commune visée par un arrêté de catastrophe naturelle du 8 juin au 15 juin 2016. L'aide maximale est de 3 000 et exceptionnellement, au cas par cas, le préfet peut décider une aide supérieure à concurrence de 10 000 . Bien que visant les arrêtés de catastrophe naturelle pour leur champ d'application, ces aides n'ont pas exclu le transport fluvial et une souplesse de traitement des dossiers a heureusement prévalu dans les services territoriaux. À noter la mise en place d'un guichet unique territorial de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) qui a bien fonctionné. Huit correspondants Petites et moyennes entreprises (PME), soit un par département, ont été mobilisés. Les entreprises pouvaient faire état de leurs difficultés et étaient orientées par ce correspondant vers les dispositifs d'aides adaptés. Ces interlocuteurs ont déployé une importante communication/information auprès des entreprises, des chambres de métiers, de la CNBA. Afin de statuer sur les aides au redémarrage, des comités d'attribution ont été réunis par les préfets. Sur l'ensemble de l'Île-de-France, à fin septembre ce sont 253 entreprises tous secteurs d'activités qui ont été aidées (dont 9 ont bénéficié d'une aide supérieure à 3 000 ) pour un montant total d'aides de 671 000 . Ces montants sont à comparer pour la France entière à un total de près de 500 entreprises pour 1,422 M. Il n'a pas été possible de disposer de statistiques limitées au champ professionnel ciblé par l'objet de la mission. Toutefois, selon le CAF, moins de dix entreprises de transport y avaient eu recours à fin septembre. 2/ Les aides de VNF - Pour le transport fluvial de marchandises En référence à une délibération du conseil d'administration du 19 juin 2014, le directeur général de VNF a décidé, le 8 juillet 2016, l'attribution d'indemnisations, à titre exceptionnel, aux transporteurs de marchandises dont l'activité a été interrompue sur le réseau navigable géré par VNF suite aux crues de mai et juin 2016. Cette délibération de juin 2014 s'applique aux cas d'immobilisation des bateaux ou de contraintes imposées telles que des restrictions d'emport, des allongements de parcours ou des découplages de convois, du fait de VNF. Bien que les crues ne relèvent pas de ces cas, le directeur général a appliqué les termes de la délibération dans un souci de réactivité. Une indemnisation est alors octroyée sur la base d'un forfait journalier déterminé en fonction du port en lourd du bateau et de la voie sur laquelle s'est produit l'incident. Ce forfait est actualisé en fonction des indices TP01 et Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 12/56 IPC hors tabac. L'indemnité représente le produit du forfait journalier par le nombre de jours d'immobilisation hors 4 jours de franchise. Toutefois tout transporteur peut demander une indemnité au réel en lieu et place du forfait. Selon VNF, le forfait journalier prend en compte 70 % du chiffre d'affaires (CA), correspondant au chiffre d'affaires total hors frais variables (i.e fuel, commission fret, péages etc.). Le chiffre d'affaires est fonction du type de bateau et du statut de la voie empruntée (grand ou petit gabarit). Dans l'annexe à la délibération, le CA varie entre 90 000 pour un bateau de type Freycinet et 350 000 pour un bateau de type Grand Rhénan. À fin septembre, la mesure d'aide mise en place par VNF devait bénéficier à une quarantaine d'entreprises pour une soixantaine de bateaux et un montant de 125 000 au total. Toutefois les versements n'avaient pas encore été faits. - Pour le tourisme fluvial Une délibération du conseil d'administration du 29 septembre 2016 a fixé les dispositions suivantes : - pour les professionnels du tourisme fluvial qui ont opté pour une vignette 2016 de type forfait (promenade, semaine à 210 jours) un report de validité à hauteur du nombre de jours d'arrêt de la navigation est octroyé ; - pour les professionnels du tourisme fluvial ayant opté pour une vignette annuelle, une réduction de 2/52ème du prix du forfait est effectuée. 3/ Les aides du port autonome de Paris (PAP) Les effets de la crue ont été particulièrement importants sur le bief de Paris où les quais bas ont été entièrement submergés. En outre, du fait de sa survenue tardive dans la saison, cette crue a impacté les installations à caractère d'animation et de loisirs (ICAL). Le port autonome de Paris a mis en place des dispositions exceptionnelles en faveur des clients du port impactés par la crue de 2016 par délibération de son conseil d'administration le 6 juillet 2016. Il a décidé les mesures suivantes : - nettoyage pris en charge par le port, y compris des espaces dont l'entretien est habituellement à la charge de l'occupant ; - suspension des redevances domaniales (base et complémentaire) des occupants réguliers du domaine public portuaire, industriels et ICAL, impactés par la crue et dont les conséquences pécuniaires ne seraient pas couvertes par les assurances. Cette mesure se traduit par un avoir sur la redevance annuelle calculé au prorata de quinze jours ; - différé de paiement du troisième trimestre de redevance 2016, à terme échu ; - droits de port 2017 maintenus au tarif de 2016. À fin septembre, une soixantaine d'entreprises ont sollicité une aide auprès du port autonome. La perte de chiffre d'affaires déclarée représente 13 M. Le montant Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 13/56 cumulé d'avoirs était de 270 000 (soit 2 %) au regard d'un montant annuel de redevances attendues de 6,5 M (source PAP). L'analyse du port autonome est celle d'un taux de retour très faible sur cette aide, pour laquelle le port envisageait un budget prévisionnel de 800 000 . Ceci s'expliquerait notamment par le fait que certains bénéficiaires potentiels auraient renoncé à solliciter l'aide ou que d'autres amodiataires, bien qu'encouragés à solliciter l'aide pour leurs sous-occupants, ne l'auraient pas fait. 4/ Les aides de la chambre nationale de la batellerie artisanale (CNBA) La CNBA a mobilisé des aides alimentaires pour les bateliers artisans en application de la délibération de son conseil d'administration en date du 25 mars 2011. Cette aide peut être accordée suite à l'immobilisation d'un bateau au cours d'un déplacement et intervient à partir de 7 jours d'immobilisation complète et non interrompue du bateau. L'aide représente 20 par personne et par jour pour les adultes, les parents d'enfant de moins de 18 ans percevant chacun 10 /enfant/jour. À fin octobre une quarantaine dossiers avaient été instruits par la CNBA et des aides étaient envisagées variant de 180 à 1 620 pour des durées d'immobilisation variant de 7 à 27 jours. Le budget total était de 27 100 . À noter qu'aucune aide n'était encore versée aux bateliers à la date du 20 octobre, ce qui pose question s'agissant d'une aide d'urgence sensée couvrir les premiers besoins. 5/ Les aides des collectivités territoriales Les collectivités territoriales ont mobilisé des dispositifs d'aide en faveur des secteurs économiques impactés. Parmi les annonces faites lors de la crue, la région Île-de-France a annoncé la mobilisation de dispositifs d'aides en faveur du tourisme fluvial. La présidente de la région a annoncé le 9 juin 2016 qu'un montant de 100 000 issu du fonds de développement touristique régional (FDTR) serait consacré à l'aide au tourisme fluvial. À ce jour, aucun des interlocuteurs de la mission n'a connaissance du dispositif concrètement mis en place ni n'en a bénéficié. 2.3. Synthèse 1/ Coût La mission a rencontré des difficultés à collecter des chiffrages précis quant aux conséquences des crues en terme notamment de pertes d'exploitation des différents secteurs concernés à mettre en regard des montants d'aides. Sur la base des éléments communiqués par les différents acteurs, les montants d'aides mobilisés sont : - 671 000 pour l'aide au redémarrage en Île-de-France, tous secteurs confondus ; - 125 000 pour l'aide de VNF au transport fluvial de marchandises ; - 270 000 pour l'aide du port autonome de Paris ; - 27 100 pour l'aide alimentaire de la CNBA à l'attention des bateliers artisans. Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 14/56 Ces montants ne s'additionnent pas car ils ne couvrent pas les mêmes bénéficiaires. Le montant des aides au redémarrage est fourni pour l'ensemble des très petites et des petites et moyennes entreprises (TPE-PME) tous secteurs confondus. Le montant total des aides reste limité au regard du chiffrage des conséquences des crues sur les chiffres d'affaires des entreprises tels qu'ils ressortent des évaluations faites par les professionnels sur la base d'enquêtes au lendemain des crues. Ils restent également très sensiblement en deçà des budgets prévisionnels identifiés, et ce pour chacun des organismes. 2/ Concertation entre les différents services ministériels concernés Les aides spécifiques telles que l'aide au redémarrage ont été mises en place par les ministères financiers en associant à la cellule de continuité économique les ministères concernés, en particulier le secrétariat d'État aux transports et les représentants de certains secteurs professionnels, dont le CAF. Il est dès lors surprenant pour la mission de constater que les aides mises en place par la cellule de continuité économique n'étaient pas connues de la CNBA et a fortiori n'ont pas été relayées par celle-ci auprès de ses membres ; de même, les réflexions en cours de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) sur l'éventualité de mise en place d'un dispositif complémentaire d'aide à la trésorerie ne semblent pas avoir pris en compte les dispositifs existants « de droit commun ». 3/ Ciblage des aides et réactivité des organismes L'instruction des aides a mobilisé de nombreux collaborateurs au sein des différentes entités. Les délais d'instruction ont été au mieux de deux à trois mois. A l'exception des aides au redémarrage versées rapidement, on note que les aides de VNF, du PAP ou de la CNBA n'étaient toujours pas versées aux entreprises fin octobre. S'agissant de l'aide alimentaire apportée par la CNBA, cette situation est préoccupante compte tenu du caractère d'urgence de l'aide et de la vulnérabilité des bénéficiaires auxquels elle est destinée. Enfin il faut noter l'importance du rôle de relais d'information auprès des professionnels qu'ont eu les différents interlocuteurs au sein des Direccte mais aussi de VNF, du PAP ou des représentants des différents secteurs. Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 15/56 3. Les conséquences de la crue diffèrent selon les catégories d'acteurs économiques et appellent des actions différenciées Les conséquences de la crue sur les acteurs du transport fluvial sont variables. Si les artisans bateliers, déjà en situation fragile, ont vu leurs difficultés accrues, les autres acteurs économiques, dans l'ensemble, ont pu supporter la mauvaise période. Un certain nombre de problématiques transversales méritent toutefois d'être examinées. 3.1. Les artisans bateliers ont été fragilisés par l'événement La crue et ses conséquences ont pénalisé la plupart des artisans bateliers : immobilisés, ceux-ci n'ont pas pu effectuer certaines livraisons qui, pour l'essentiel, ont été transférées sur d'autres moyens de transport, camions généralement. Ce constat est indéniable même s'il comporte des exceptions ; ainsi les adhérents de la coopérative de transport fluvial Scat ont été peu touchés, trois bateaux seulement ayant été pénalisés sur la centaine possédés par ses membres. La mission s'est trouvée cependant dans l'incapacité de quantifier sérieusement les pertes de chiffres d'affaires et de revenus résultant de cette situation. Les organismes qui ont alloué une aide n'ont, en effet, pas demandé aux requérants de leur fournir des évaluations des pertes subies mais seulement de prouver qu'ils étaient immobilisés par la crue. Cette attitude est compréhensible et cohérente avec le caractère forfaitaire des aides, elle devait permettre d'allouer ces dernières rapidement et sans formalisme excessif. Mais elle a pour conséquence l'impossibilité de mesurer l'ampleur des difficultés effectivement ressenties et l'adéquation entre les aides promises ou versées et le préjudice subi. On observe en outre que les bateliers n'ont pas toujours demandé les aides qu'ils connaissaient (cf ci-après) et auxquelles ils pouvaient prétendre, soit qu'ils aient trouvé les procédures trop contraignantes, soit qu'ils aient jugé les aides insuffisantes au regard du travail administratif demandé. VNF a effectué un calcul plus global lui permettant d'affirmer que la crue a réduit le trafic de marchandises sur le bassin de la Seine de 22,7 millions de t-km, le trafic des six premiers mois de l'année 2016 s'élevant à 1,87 milliard de t-km alors que, sans la crue, il aurait été de 1,89 milliard. Si cette évaluation est exacte, la perte serait un peu supérieure à 1 % du trafic semestriel. Il en résulte que : ­ la valorisation de cette perte de 22,7 millions de t-km, que la mission n'a pas pu effectuer, est nettement supérieure au total des aides allouées par la CNBA, VNF et la cellule de continuité économique. Le CAF estime que la vingtaine de millions de t-km perdues correspond à un chiffre d'affaires de 2 M ; sans être négligeable, l'effet global est relativement limité ; le pourcentage de 1 % est toutefois une moyenne de situations individuelles dont certaines peuvent être gravement pénalisées. ­ Sans être en mesure d'affiner cette analyse, la mission souhaite appeler l'attention sur deux points. En premier lieu, la CNBA ne semble pas avoir fait preuve d'une grande diligence dans le traitement de l'aide : Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 16/56 ­ elle n'a pas répercuté aux professionnels qu'elle représente les mécanismes d'aide mis en place par la cellule de continuité économique, qu'elle semblait même ignorer ; cela est d'autant plus regrettable que les services de l'État chargés de la mettre en oeuvre avaient reçu l'instruction de se montrer souples vis-à-vis des critères susceptibles de gêner les bateliers ; elle n'a pas été mesure de verser les aides dans un délai satisfaisant : plus de six mois après la crue, aucun versement n'a encore été effectué. ­ On peut en outre s'étonner que la CNBA n'ait pas mobilisé de ressources plus substantielles au bénéfice des artisans bateliers. En effet, les dispositions du code des transports relatives au statut de la CNBA, et en particulier l'article R4432-2 alinéa 9, citent explicitement parmi les missions confiées à la CNBA le soin de "verser des aides de secours et de créer des institutions d'entraide et d'assistance ou de concourir à leur fonctionnement". Le compte financier 2015 de la CNBA mentionne un montant de 1,211 M de recettes. On notera que la part de ces recettes restituée à la profession en 2015 est très limitée: 52 575 d'aides alimentaires et 16 849 de subventions aux écoles, soit moins de 6 % des recettes auxquels on peut ajouter 53 000 d'aide à la création d'entreprise. L'essentiel des dépenses de la CNBA est lié à son propre fonctionnement. Par ailleurs, la CNBA dispose d'un fonds de roulement de l'ordre de 4,5 M. La mission s'interroge sur le très faible montant des aides envisagées suite aux crues puis aux difficultés liées à la crise céréalière au regard des capacités budgétaires de la CNBA, étant observé que la mise en oeuvre d'aides aux bateliers artisans est dans l'objet social même de la CNBA. En second lieu, la crue n'a fait que mettre en lumière une fragilité structurelle de la profession. Ses effets sont en effet relativement limités si l'on se fonde, pour les évaluer, sur les estimations de VNF. Mais, d'une part ils s'ajoutent à une chute d'activité qui leur est antérieure : VNF estime qu'entre le premier semestre 2015 et le premier semestre 2016 le trafic aurait, sans la crue, diminué de 4,1 % : l'effet de la crue, légèrement supérieur à 1 %, est donc bien moindre que cette réduction d'activité « structurelle ». D'autre part, les effets de la crue ont été prolongés et amplifiés, comme on l'a vu10, par la crise céréalière qui, non seulement n'a pas permis aux bateliers de « se refaire », mais a, au contraire, accentué fortement la chute d'activité. Cette analyse est corroborée par le fait que la crue a quasiment disparu des préoccupations des professionnels concernés, telles qu'elles sont reflétées par les courriers de leurs instances représentatives 11 ou ceux d'associations diverses12, voire d'artisans bateliers agissant individuellement13 ; ces courriers réclament au contraire des mesures permettant de faire face à la crise céréalière. 10 11 Voir supra le paragraphe I.2. Voir les courriers adressés par la CNBA au Secrétaire d'État le 26 août 2016 et au préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes le 7 septembre 2016. Voir le courrier adressé au Secrétaire d'État par l'association de défense des intérêts professionnels et sociaux de la batellerie (ADIPSB) le 8 août 2016 et par l'association La Glissoire le 20 septembre 2016. Voir la pétition lancée par un artisan batelier sur le site www.change.org/p/alain-vidalies-la-batelleriefrancaise-en-detresse-consequence-directe-de-la-crise-agricole-2016 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 17/56 12 13 Rapport n° 010798-01 La mission considère que, face à cette situation, deux types d'actions doivent être engagées : * une réflexion sur la situation de la batellerie artisanale, comportant à la fois un volet conjoncturel relatif à la réponse devant, en cohérence avec les décisions prises en amont dans le domaine agricole, être donnée à la crise céréalière, et un volet structurel relatif à la capacité de la batellerie artisanale à affronter la concurrence des autres modes de transport et à réaliser les efforts continus visant à accroître la productivité des moyens de transport14 ; 1. Engager une réflexion sur la situation de la batellerie artisanale, comportant deux volets : - un volet conjoncturel pour déterminer comment elle peut faire face aux conséquences de la crise céréalière ; - un volet structurel pour définir les actions à entreprendre pour affronter la concurrence des autres modes de transport. * une réforme de la CNBA, en vue d'une plus grande réactivité face aux difficultés rencontrées par la profession. Ces travaux doivent en particulier porter sur les questions financières, sur l'opportunité de maintenir ou non l'excédent actuel des recettes par rapport aux dépenses de l'établissement public et sur la possibilité d'utiliser la trésorerie disponible pour alimenter un fonds d'aide susceptible d'intervenir en cas de difficulté passagère. À cet égard, trois attitudes sont a priori possibles : ­ réduire le montant de la taxe versée par les bateliers, en vue de parvenir à un équilibre entre les dépenses et les recettes ; la diminution de la taxe donnerait aux bateliers une aide bienvenue dans le contexte actuel ; mobiliser le fonds de roulement de la CNBA afin qu'elle consente à titre exceptionnel des aides face à la crise céréalière aggravée par l'épisode de crues. Les cas ultérieurs de recours à cette possibilité devraient bien évidemment être étroitement encadrés ; créer un fonds de garantie alimenté par une partie des taxes prélevées par VNF aujourd'hui pour le compte de la CNBA, fonds qui couvrirait une partie des pertes d'exploitation des bateliers artisans en cas de crue et serait géré directement par VNF. Là aussi les cas de recours à ce fonds de garantie devraient être dûment encadrés. ­ ­ Il n'entrait pas dans le mandat de la mission d'étudier et a fortiori de se prononcer sur ces différentes possibilités. Ce questionnement pourrait être prolongé à l'examen du statut de l'organisme, voire à celui de son existence même. 14 De nombreux aspects ont été traités lors de la conférence nationale sur le fret fluvial qui a fait l'objet d'une réunion de restitution le 15 septembre 2016. Mais d'autres sujets doivent faire l'objet d'une réflexion. Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 18/56 Rapport n° 010798-01 2. Réformer la chambre nationale de la batellerie artisanale (CNBA) pour que les actions des pouvoirs publics soient plus efficaces et plus rapidement mises en oeuvre. S'interroger sur le statut d'établissement public, voire sur l'existence de la CNBA. S'interroger sur le niveau des taxes actuellement perçues par la CNBA et sur la création éventuelle d'un fonds de gestion géré par un tiers. 3.2. Les autres secteurs professionnels ont, dans l'ensemble, pu faire face à l'événement sans trop de difficultés Les acteurs de la voie d'eau, autres que les bateliers, sont très variés. On peut distinguer trois catégories principales, les deux dernières étant généralement regroupées, pour l'essentiel, sous la dénomination d'ICAL : ­ les industriels qui utilisent le fleuve pour acheminer les matériaux dont ils ont besoin ; les principaux sont les professionnels du BTP, regroupés dans l'UNICEM15. Dans le secteur relevant de la compétence du port autonome de Paris (PAP), c'est à dire l'Île-de-France, 10 sites d'exploitation ont été arrêtés en raison de la crue. Selon le comité des armateurs de France (CAF), 40 000 tonnes de granulats sont transportées chaque jour en Île-de-France, dont la moitié au sein de Paris intra muros ; les navigants qui utilisent des bateaux à des fins touristiques : croisières de plusieurs jours, bateaux restaurants, etc ; leurs actifs sont essentiellement des bateaux mais ils ont besoin d'installations sur les quais pour permettre l'accès aux bateaux et accomplir divers services complémentaires. Les touristes venant de province et surtout les étrangers constituent une part très importante de leur clientèle. Dans la zone géographique du PAP, on dénombre 60 entreprises de tourisme fluvial, exploitant 130 bateaux. Le CAF évalue le nombre de passagers transportés chaque jour au printemps/été à 80 à 100 000 personnes ; les utilisateurs d'installations fixes à quai : restaurants, bateaux amarrés, etc. Ces installations sont au nombre d'une quarantaine. ­ ­ Tous les agents économiques qui utilisent une installation à terre doivent y être autorisés et, pour cela, conclure avec le gestionnaire du port un contrat d'amodiation ; le PAP a pour ce faire compétence pour l'ensemble de la région Île-de-France. Il considère que l'activité portuaire est à l'origine de 1000 emplois directs et 3000 emplois indirects, hors emplois saisonniers. La mission n'est pas en mesure d'indiquer de manière fiable les pertes de chiffre d'affaires que la crue a occasionnées aux différents intervenants. La difficulté à obtenir des informations a plusieurs causes : ­ ­ les professions sont extrêmement hétérogènes ; les contrats liant chaque amodiataire au PAP sont susceptibles de faire référence au chiffre d'affaires (CA) de l'utilisateur (ainsi un intéressement est, comme on l'a vu, perçu par le PAP si le CA d'un transporteur de passagers excède 1 M) ; aussi celui-ci est-il fréquemment réticent à fournir plus de renseignements que ceux que son contrat exige de lui ; 15 Union nationale des industries des carrières et matériaux de construction. Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 19/56 Rapport n° 010798-01 ­ de nombreux amodiataires font appel à des sous-traitants, dont ils ne connaissaient pas nécessairement le CA ; or c'est le CA des sous-traitants qui a été impacté par la crue. En dépit de ces difficultés, plusieurs chiffrages sont disponibles : ­ les dossiers demandés par le PAP pour l'octroi d'une aide permettent de connaître l'évaluation faite par le demandeur de sa perte de CA résultant de la crue. L'exploitation de ces dossiers, faite par le PAP à la demande de la mission, permet d'évaluer cette perte à environ 13 M, montant à rapprocher du CA de 2015 de ces requérants, estimé à 209 M. Ces données aboutissent par conséquent à une perte d'environ 6 % du CA annuel ; à la demande de la mission, le CAF a fourni une estimation des pertes de CA de ses adhérents16 ; il évalue celles-ci à 10 M pour le secteur touristique et 4 M pour le BTP. Il s'agit là de données brutes, dont il conviendrait de déduire les dépenses évitées : carburant non consommé, personnel n'ayant pas travaillé et n'étant pas rémunéré17, etc. La mission n'a pas connaissance de la méthode de calcul retenue par le CAF et ne peut donc pas reprendre à son compte ces chiffrages ; la communauté portuaire de Paris (CPP), pour sa part, fait état d'une évaluation de 15 M. Celle-ci appelle les mêmes observations que celle du CAF. ­ ­ Nonobstant cette réserve, la mission considère que les professionnels ont, dans l'ensemble, supporté sans gros dommage les conséquences de la crue qui n'est plus, aujourd'hui, invoquée par eux comme un motif de préoccupation. Cette appréciation est surtout fondée pour les entreprises les plus grosses, qui ont la possibilité de faire face à des phases défavorables, d'autant qu'elles ont, ces dernières années, connu une activité en forte croissance 18, qui leur a probablement permis de constituer des réserves financières. Elle est à nuancer pour les plus petites structures, mais celles-ci sont mal connues car elles sont souvent les sous-traitants d'entreprises plus importantes et n'apparaissent pas en tant que telles comme clients, du PAP par exemple. Plus que des aides, la profession demande que l'État tire les leçons de la crue de mai-juin et que la communauté portuaire puisse agir plus efficacement si un événement similaire survient à l'avenir. Tout en reconnaissant que VNF et le PAP ont agi avec célérité et en concertation avec elle, elle souhaite que l'État améliore ses modes de prévision et de gestion des crues. La profession se demande si le réchauffement climatique est susceptible d'accroître la fréquence de crues printanières, ce qui modifierait fortement la saisonnalité touristique de Paris. Une réflexion sur ce risque lui semblerait pertinente. 16 On n'évoque pas ici les pertes de CA de la batellerie, pour lesquelles le CAF reprend l'évaluation de VNF. Voir supra. Le personnel de restauration est généralement payé en fonction de l'activité effective ; seul le personnel commercial est payé de manière essentiellement forfaitaire. Le tourisme fluvial a, comme on l'a vu, connu depuis une dizaine d'années une croissance annuelle de 5 à 10 %. Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 20/56 17 18 Rapport n° 010798-01 Surtout, elle est préoccupée par la chute de l'activité touristique, liée au contexte terroriste et à la mauvaise image de la France (cf supra), dont les effets sont bien supérieurs et durables, et qui met davantage en jeu sa situation financière et la pérennité de certains de ses membres. 3. Associer le ministère chargé des transports aux réflexions des pouvoirs publics visant à promouvoir le tourisme en Île-de-France. 3.3. Diverses améliorations de gestion sont indispensables A/ Conforter juridiquement les dispositifs spécifiques d'aide en leur donnant une base légale permanente La mission observe que les aides octroyées par VNF l'ont été sur le fondement d'une délibération visant des causes d'immobilisation ou de sujétions de navigation dépendant de VNF, dont les crues ne relèvent pas. Il apparaît nécessaire de consolider le dispositif mobilisé pour les crues de 2016, sans perdre la réactivité indispensable à la mise en place des aides. Les aides au redémarrage mises en place par le ministère de l'économie et des finances (Minefi) suite aux réunions de la cellule de continuité économique ont été distribuées sans ordonnancement préalable, sur le fondement d'une décision de l'exécutif. La mission a noté qu'un décret offrant une assise juridique à l'aide au redémarrage était en cours de préparation. Par ailleurs, la mission s'est demandé si l'urgence qui caractérise les situations de crue ne rendait pas nécessaire la possibilité de prendre plus rapidement les mesures d'aide souhaitées. On pourrait dans cet esprit imaginer que les conseils d'administration des organismes (VNF, PAP, CNBA) prennent chacun une disposition cadre permettant au directeur général d'agir de sa propre initiative et sans délibération préalable du conseil, à la condition bien sûr d'informer ce dernier lors de sa réunion suivante. 4. S'assurer que les textes permettent à Voies navigables de France (VNF), au port autonome de Paris (PAP) et à la chambre nationale de la batellerie artisanale (CNBA) d'allouer des aides en cas de crue exceptionnelle. Envisager que dans chacun de ces organismes une délibération cadre du conseil d'administration permette au directeur général de prendre dans des délais très courts les décisions nécessaires. B/ Envisager de rendre obligatoire l'assurance couvrant les dommages causés aux tiers. La mise en place d'assurances pour couvrir les pertes d'exploitation susceptibles de résulter d'un épisode de crues se heurte à des difficultés économiques du fait de la caractéristique même du risque « crues » (cf.paragraphe 2.1 ci-dessus). Compte tenu de ces difficultés, la mission s'est interrogée sur la faisabilité et l'opportunité d'assurances de type événementiel pour couvrir les conséquences des crues. La prime d'assurance serait alors fonction du chiffre d'affaires ou de la marge à garantir. Tant le CAF que la CNBA ont insisté auprès de la mission sur le caractère disproportionné du montant de telles polices au regard des éventuelles pertes d'exploitation liées strictement aux crues. À titre indicatif un ordre de grandeur de 5 % du capital garanti a été envisagé. Il est à mettre en Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 21/56 regard de l'interruption d'activité du fait des crues (moins de 2 semaines sur 52, soit environ 4 %). Cette analyse ne permet pas de conclure à la faisabilité économique ou à l'opportunité d'une assurance systématique des pertes d'exploitation liées aux crues, entièrement à la charge des assurés. Pour ce qui est des biens en revanche, la mission considère que rien ne justifie l'absence d'obligation d'une assurance responsabilité civile couvrant les dommages occasionnés aux tiers par les transporteurs fluviaux. Aussi recommande-t-elle de rendre celle-ci obligatoire. 5. Envisager de rendre obligatoire l'assurance des dommages causés par les bateaux à des tiers. C/ Examiner avec prudence le projet de fonds de garantie mutualisé proposé par certains Parmi les pistes évoquées auprès de la mission figure celle d'un fonds de garantie, mutualisé et qui serait alimenté par la recette du port autonome provenant de la redevance dont s'acquittent les entreprises de transport de passagers dont le chiffre d'affaires excède 1 M. Cette redevance représente 1 % du chiffre d'affaires. Elle est partie intégrante des recettes du port autonome. La mission ne recommande pas la mise en place d'un fonds de garantie qui serait alimenté exclusivement par des crédits publics (recettes du PAP ou crédits budgétaires d'État) et qui aurait vocation à pallier l'absence de couverture assurantielle au motif d'un coût trop élevé de celle-ci. Il convient, d'une part, de responsabiliser les professionnels au regard de la couverture d'un risque inhérent à leur profession, à travers une participation à la couverture de ce risque, d'autre part, de s'assurer de la maîtrise des budgets qui y sont consacrés. L'acceptabilité d'un tel fonds de garantie est vraisemblablement fonction de l'origine des recettes qui l'alimentent. S'il s'agissait de prélever une cotisation nouvelle auprès des professionnels, on peut penser que tant le CAF que la CCP n'en serait plus réellement promoteurs. De plus la disparité des acteurs susceptibles de bénéficier d'un tel fonds pose question la solidarité dont ils pourraient faire preuve entre eux : il n'est pas certain qu'une réelle solidarité existe entre les transporteurs de passagers dont le CA est supérieur à 1 M, les plus petits transporteurs et les ICAL (restaurateurs etc.). D/ Demander aux différents organismes de mieux assurer le suivi de leur secteur d'activités La mission a rencontré des difficultés à obtenir des données financières précises sur les conséquences de la crue et particulièrement sur les pertes d'exploitation en résultant. Ces données permettant un suivi de l'activité des entreprises dans chaque secteur sont indispensables, a fortiori si elles servent d'assiette à la détermination de montants de redevances. Aussi la mission invite-t-elle VNF, le PAP mais aussi le CAF et la CNBA à assurer un suivi régulier de l'activité des secteurs qui les concernent. Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 22/56 6. Inviter les organismes publics (Voies navigables de France, chambre nationale de la batellerie artisanale, port autonome de Paris) ou professionnels (comité des armateurs fluviaux) à recueillir davantage d'informations sur l'activité et la situation financière de leurs correspondants ou adhérents. E/ Confirmer dans les conventions d'autorisation d'occupation temporaire (AOT) du PAP les prescriptions indispensables pour limiter l'impact des crues sur les installations concernées Certains interlocuteurs de la mission ont critiqué les prescriptions figurant dans les conventions donnant autorisation d'occupation temporaire signées avec le port autonome, qui obligent à un démontage des installations en moins de 24H. Ces obligations qui figurent au plan de prévention du risque d'inondation (PPRI) sont sans lien avec le délai de préavis de crue par les pouvoirs publics, mais visent à éviter embâcles et problèmes de sécurité pouvant en résulter. Dès lors la mission ne peut que confirmer leur pertinence. F/ Assurer une meilleure coordination entre les ministères La mission recommande que la DGITM se rapproche du ministère des Finances dans le cadre de la démarche qu'elle a engagée d'examen de l'opportunité et le cas échéant de définition des modalités les plus appropriées d'un complément d'aides à destination des transporteurs fluviaux. En effet, avec l'appui de la BPI, des aides à la trésorerie ont été mises en place. Tout dispositif envisagé à l'attention des bateliers devra s'articuler avec ces aides existantes. 7. Mieux coordonner l'action des différents ministères concernés (ministères financiers, ministère chargé des transports, ministère chargé du tourisme). Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 23/56 Conclusion Les pouvoirs publics ont, très rapidement, décidé des aides permettant aux utilisateurs de la voie d'eau de faire face aux difficultés qu'ils rencontraient. Toutefois, les délais de versement des aides spécifiques au transport ont été importants. Une plus grande réactivité des organismes est à l'avenir nécessaire. Les professionnels n'évoquent plus guère aujourd'hui les difficultés qu'ils ont rencontrées du fait de la crue. Mais ce comportement est dû avant tout au fait qu'ils font aujourd'hui face à des problèmes d'une plus grande ampleur : la crise céréalière dans le cas des artisans bateliers, la chute du tourisme pour les transporteurs de passagers et les bateaux-restaurants. Cette situation, que la mission n'avait pas pour mandat d'examiner, appelle sans doute des mesures adaptées. Le traitement de la crue conduit à s'interroger, de manière plus globale, sur l'action de la CNBA, qui ne semble pas s'être jusqu'ici mobilisée à hauteur des problèmes rencontrés par les bateliers et des possibilités qui sont les siennes. Jean-Philippe Duranthon Sophie Mougard Inspecteur général de l'administration du développement durable Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 24/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 25/56 Annexes Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 27/56 1. Lettre de mission Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 28/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 29/56 2. Liste des personnes rencontrées Cabinets ministériels Ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer François Lambert conseiller technique au cabinet du secrétaire d'État chargé des transports Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique Élise Calais directrice adjointe du cabinet de la secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire conseiller technique en charge des PME et TPE conseiller technique en charge de l'artisanat Arnaud Sébastien Boyer Malengeau Administrations d'État Ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer Thierry Guimbaud directeur des services de transport, direction générale des infrastructures de transport et de la mer (DGITM) sous-directeur des ports et du transport fluvial adjoint au sous-directeur des ports et du transport fluvial adjointe au chef du bureau du transport fluvial directeur de la direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Île-de-France DRIEA directeur adjoint sécurité transports défense à la DRIEA Marc Nicolas Sandrin Trift Aurélie Gilles Bouissou Leblanc Sylvain Lefoyer Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique Laurent de Jekhowsky secrétaire général des ministères financiers (conversation téléphonique) direction générale des entreprises, chef du service tourisme, commerce, artisanat et services directeur régional adjoint, chef du pôle Nicolas Lermant Franck Rapport n° 010798-01 Terrier Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 30/56 entreprises, emploi et économie, direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) d'Île- de-France Philippe Coupard directeur régional adjoint, directeur de l'unité départementale de Seine et Marne, Direccte d'Île-de-France chargé de mission départemental économie et correspondant PME pour la Seine Saint Denis, Direccte d'Ile de France Sébastien Moretti Ministère des affaires étrangères et du développement international Michel Durrieu sous-directeur du tourisme, Direction des entreprises, de l'économie internationale et de la promotion du tourisme Organismes étatiques Voies navigables de France VNF Marc Alain Papinutti Monteil directeur général directeur, direction territoriale bassin de la Seine directeur adjoint- direction du développement Jean-Christophe Brioist Port autonome de Paris PAP Régine Marion Mireille Bréhier Alfaro Kabile directrice générale directrice de l'agence Paris-Seine responsable du département des relations contractuelles Chambre nationale de la batellerie artisanale CNBA Michel Didier Marie-Line Sophie Dourlent Carpentier Verbeke Kulphom-Copin Représentants des professions Comité des armateurs fluviaux CAF Didier Rapport n° 010798-01 président national premier vice-président national administratrice Léandri Président délégué général Page 31/56 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises François Bouriot adjoint au président délégué général Communauté portuaire de Paris CPP Olivier Jamey président Professionnels Bruno Huvelin président de l'Union nationale des industries des carrières et matériaux de construction (UNICEM), directeur régional CEMEX président du collège granulats Ile de France de l'UNICEM secrétaire général de l'UNICEM président du directoire (conversation téléphonique) de la SCAT Marco Cancedda Jacques Philip Benharrous Maugé Autres personnes rencontrées ou sollicitées Philippe Giraud courtier en assurances, président de Guian Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 32/56 3. Documents relatifs aux aides mises en place par les organismes - VNF : délibération du 19 juin 2014 - CNBA : délibération du 25 mars 2011 - CNBA : formulaire de demande d'aide - PAP : délibération du 6 juillet 2016 - PAP : formulaire de demande de soutien Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 33/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 34/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 35/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 36/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 37/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 38/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 39/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 40/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 41/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 42/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 43/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 44/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 45/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 46/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 47/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 48/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 49/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 50/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 51/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 52/56 Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 53/56 4. Glossaire des sigles et acronymes AOT BPI BTP CA CAF CICE CNBA CPP DGFiP DGITM Direccte Autorisation d'occupation temporaire Banque publique d'investissements Bâtiment et travaux publics Chiffre d'affaires Comité des armateurs fluviaux Crédit d'Impôt pour la compétitivité et l'emploi Chambre nationale de la batellerie artisanale Communauté portuaire de Paris Direction générale des finances publiques Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi Direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Îlede-France Fonds de développement touristique régional Installations à caractère d'animation et de loisirs Inspection générale de l'administration Indice des Prix à la Consommation Ministère de l'économie et des finances Port autonome de Paris Petite ou moyenne entreprise Plan de prévention des risques inondation Régime social des indépendants Tonne x kilomètre Indice des travaux publics 01 Très petite entreprise Union nationale des industries des carrières et matériaux de construction Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Voies navigables de France DRIEA-IF FDTR ICAL IGA IPC Minefi PAP PME PPRI RSI t.km TP 01 TPE UNICEM URSSAF VNF Rapport n° 010798-01 Impact de la crue de mai-juin 2016 du bassin de la Seine sur la filière fluviale passagers et marchandises Page 54/56 http://www.developpement-durable.gouv.fr/

puce  Accés à la notice sur le site du portail documentaire du Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires

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