Prévention (la) de la délinquance dans les transports collectifs urbains : condition de la mobilité durable (hors Ile-de-France).
CHABROL, Didier ;MECHERI, Hervé ;LAFFARGUE, Bruno ;DESCHAMPS, Michel ;INGALL-MONTAGNIER, Magali
Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
;France. Inspection générale de l'administration
;France. Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
;France. Inspection générale de l'éducation nationale
;France. Inspection générale des affaires sociales
;France. Inspection générale des services judiciaires
;Mission permanente d'évaluation de la politique de prévention de la délinquance
Auteur secondaire
Résumé
Le rapport s'inscrit dans les travaux de la mission permanente d'évaluation de la politique de prévention de la délinquance (MPEPPD). L'analyse a été limitée aux transports collectifs urbains (TCU) de province, avec le constat d'un décalage entre la réalité de la délinquance dans les réseaux de transport et l'intensité du sentiment d'insécurité. Une première partie rappelle les enjeux de sécurité des TCU, en prenant en compte leur environnement spécifique, ainsi qu'en analysant les préoccupations propres à chacun des acteurs. Dans la deuxième partie, consacrée aux actions menées dans les TCU, le rapport rappelle les compétences nouvelles des autorités organisatrices en matière de prévention de la délinquance et constate une hétérogénéité dans leur mise en oeuvre. Il propose de développer des polices municipales intercommunales dédiées aux réseaux de transport. La troisième partie traite des moyens humains ou techniques. Elle estime que la lutte contre les incivilités devrait impliquer davantage les clients eux-mêmes et note les campagnes sur ce thème. La quatrième partie invite à faire figurer la mesure du sentiment d'insécurité et de la délinquance parmi les indicateurs de la qualité de service.
Editeur
CGEDD
;Mission permanente d'évaluation de la politique de prévention de la délinquance
;IGA
;IGEN
;IGAERN
;IGAS
;IGSJ
Descripteur Urbamet
prévention des risques
;délinquance
;sécurité
;sentiment d'insécurité
;transport en commun urbain
;politique publique
;qualité de service
;autorité organisatrice de la mobilité
;police
;évaluation des politiques publiques
;INSECURITE
;MOBILITE DURABLE
Descripteur écoplanete
Thème
Transports
Texte intégral
MISSION PERMANENTE D'EVALUATION DE LA POLITIQUE DE PREVENTION DE LA DELINQUANCE
INSPECTION GENERALE DE L'ADMINISTRATION 13-025/12-063/01/ CONSEIL GENERAL DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE 007479-10
INSPECTION GENERALE DES SERVICES JUDICIAIRES 16-13 INSPECTION GENERALE DE L'EDUCATION NATIONALE 2013-015
INSPECTION GENERALE DES AFFAIRES SOCIALES RM2013-040P INSPECTION GENERALE DE L'ADMINISTRATION DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE
LA RECHERCHE
2013-015
RAPPORT LA PREVENTION DE LA DELINQUANCE DANS LES TRANSPORTS COLLECTIFS URBAINS : CONDITION DE LA MOBILITE DURABLE (HORS ILE-DE-FRANCE)
MARS 2013
2
RAPPORT LA PREVENTION DE LA DELINQUANCE DANS LES TRANSPORTS COLLECTIFS URBAINS : CONDITION DE LA MOBILITE DURABLE (HORS ILE-DE-FRANCE)
Etabli par :
Didier CHABROL, Inspecteur général de l'administration
Michel DESCHAMPS, Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts, conseil général de l'environnement et du développement durable Magali INGALLMONTAGNIER, Inspectrice générale adjointe des services judiciaires Bruno LAFFARGUE, Inspecteur général de l'administration
HerÎ MECHERI, Inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
MARS 2013
3
4
SOMMAIRE
INTRODUCTION ........................................................................................................ 7 1 LES ENJEUX DE LA SECURITE POUR LES TRANSPORTS COLLECTIFS URBAINS ................................................................................................................. 11
1.1 Un environnement très spécifique ............................................................................................................ 11 1.1.1 Des espaces confrontés à certains types de faits ............................................................................. 11 1.1.2 Les vulnérabilités des transports publics urbains ............................................................................ 15 1.1.3 Un environnement institutionnel décentralisé complexe ................................................................ 17 1.1.3.1 Une organisation propre à chaque type de réseau ..................................................................... 17 1.1.3.2 Un système décentralisé ......................................................................................................... 18 1.2 Des phénomènes encore mal analysés ...................................................................................................... 20 1.2.1 Un dispositif d'observation en construction ................................................................................... 20 1.2.1.1 L' optique sociale est privilégiée par la profession ............................................................... 20 1.2.1.2 La mise en place d'observatoires locaux de la délinquance dans les TCU .......................... 22 1.2.2 Une délinquance qui reste en général limitée ................................................................................. 23 1.2.2.1 La part des faits constatés commis dans les TCU paraît limitée .......................................... 23 1.2.2.2 Une intuition confortée par les enquêtes de victimation ........................................................... 24 1.2.2.3 Le besoin d'un outil d'observation rigoureux ....................................................................... 26 1.3 Les enjeux des acteurs ............................................................................................................................... 26 1.3.1 L'Etat : garant de la sécurité ........................................................................................................... 27 1.3.2 Les collectivités territoriales : en charge des transports et de la tranquillité publique .................... 27 1.3.3 Les entreprises de transport : exploitants des réseaux .................................................................... 28 1.3.4 La population : en attente de qualité de service et de sécurité ........................................................ 29
2
UN VOLET ESSENTIEL DES STRATEGIES LOCALES ................................. 31
2.1 La coproduction de sécurité appliquée aux réseaux de TC ................................................................... 31 2.1.1 Les compétences nouvelles des AOT en prévention ...................................................................... 31 2.1.2 Complémentarité et coopération ..................................................................................................... 32 2.1.2.1 Les interventions de l'exploitant : lutte contre la fraude, médiation .................................. 33 2.1.2.2 Les interventions des différentes collectivités concernées : garantir la tranquillité publique du réseau, comme celle de la ville .................................................................................................................... 39 2.1.2.3 Le rôle de l'Etat : lutter contre la délinquance, avec l'appui de ses partenaires ........................ 42 2.1.3 Un partenariat formalisé par des conventions ................................................................................. 43 2.2 La prise en compte dans les stratégies territoriales de sécurité et de prévention ................................ 46 2.2.1 L'indispensable diagnostic préalable .............................................................................................. 47 2.2.2 L'articulation avec la stratégie territoriale, les instances et les outils ............................................. 48
3 DES MOYENS SIGNIFICATIFS POUR REPONDRE A DES BESOINS MULTIPLES ............................................................................................................. 51
3.1 Des moyens humains en progression continue ........................................................................................ 51 3.1.1 La présence humaine, facteur essentiel de réduction du sentiment d'insécurité ............................. 51 3.1.2 La lutte contre l'incivilité .............................................................................................................. 53 3.1.3 Des personnels spécialisés aux missions diversifiées ..................................................................... 55 3.2 Le progrès technique au service de la prévention ................................................................................... 58 3.2.1 Des moyens efficaces et généralement déployés ............................................................................ 58
5
3.2.2
S'inscrire dans les potentialités techniques nouvelles .................................................................... 59
3.3 Management et financement ..................................................................................................................... 61 3.3.1 Une approche managériale de la prévention ................................................................................... 61 3.3.2 Coûts, priorités et arbitrages ........................................................................................................... 63 3.3.3 La question du financement de la prévention ................................................................................. 64
4
4.1
LA QUALITE AU SERVICE DE LA MOBILITE DURABLE .............................. 67
Les enjeux de la mobilité durable............................................................................................................. 67
4.2 La responsabilisation des acteurs par la qualité de service contractuelle ............................................ 69 4.2.1 L'expérience de la qualité ............................................................................................................... 69 4.2.2 Qualité et sécurité ........................................................................................................................... 70 4.3 Une approche globale et professionnalisée .............................................................................................. 71 4.3.1 Une prise en charge globale ............................................................................................................ 71 4.3.2 Une démarche professionnalisée .................................................................................................... 72
CONCLUSION ......................................................................................................... 75 RECOMMANDATIONS ............................................................................................ 77 ANNEXE................................................................................................................... 81
Liste des personnes auditionnées ................................................................................................................. 81
6
Introduction
La mission permanente d'évaluation de la politique de prévention de la délinquance, dont les travaux sont coordonnés par M. Didier Chabrol, inspecteur général de l'administration, a poursuivi, au cours de l'année 2012, son programme d'évaluation thématique, validé par le Premier ministre, au sein duquel figure la prévention de la délinquance dans les transports collectifs urbains. Pour approfondir cette question, un groupe de travail a été constitué. Une note de cadrage, définissant le champ de la mission, les axes et la méthode de travail, a été approuÎe par la mission permanente. L'animation en a été confiée à M. Michel Deschamps, membre permanent du Conseil général de l'environnement et du développement durable et à M. Didier Chabrol. Ils ont été aidés dans leur tâche par Mme Magali Ingall-Montagnier, inspectrice générale adjointe des services judiciaires, M. Bruno Laffargue, inspecteur général de l'administration et M. HerÎ Mecheri, inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche. Sécurité et sûreté Le terme « sécurité » est polysémique. Etre (physiquement) en sécurité est une situation où l'on affronte un minimum de risques. Se sentir (psychologiquement) en sécurité indique un sentiment de confiance et de tranquillité. L'insécurité est l'état de celui qui n'est pas en confiance. La sécurité concerne donc l'ensemble des dispositions prises pour prévenir et protéger contre tout type de risque et contribuant à réduire le sentiment d'insécurité. Les risques que l'on affronte peuvent notamment être dûs à la malveillance. Les domaines techniques intégrant la prévention et la protection contre tout type de risque, tels que l'industrie nucléaire ou celle des transports, distinguent les dispositifs utilisés pour prévenir contre les risques d'origine accidentelle ou naturelle, des risques d'origine intentionnelle. Dans le domaine des transports, on utilise le terme sûreté pour désigner l'ensemble des dispositifs de prévention et de protection contre le risque intentionnel. La mission a utilisé de préférence le terme le plus large de sécurité. On rencontrera le terme sûreté dans les citations et les exemples. Méthodologie de la mission La mission a décidé de limiter le champ de son étude à la prévention de la délinquance, dans les transports collectifs urbains de province, hors SNCF et RATP. En effet, tant la nature des questions souleÎes que les acteurs impliqués, ou encore le contexte et les mesures mises en oeuvre, sont trop diverses, pour qu'un examen commun soit possible et pour que des conclusions générales puissent être tirées en un rapport unique concernant la prévention de la délinquance dans l'ensemble des transports terrestres de voyageurs. La mission a visité des réseaux de province, présentant des caractéristiques variées, en fréquentation, en nature des moyens de transport, en acteurs de sécurité (police nationale, 7
police municipale, dédiée ou non) et en doctrine d'emploi des personnels de l'opérateur de transport. Lorsque la visite n'a pas été possible, elle s'est attachée à conduire des entretiens avec les responsables sécurité des opérateurs de transport. Le présent rapport est donc fondé sur les observations recueillies auprès de tout ou partie des acteurs impliqués dans la sécurité des réseaux suivants : - TCL (SYTRAL , Grand Lyon ) ; - Régie de transports de Marseille (RTM) ; - CTS (Communauté urbaine de Strasbourg) ; - réseaux de bus OPTILE (Grande couronne Ile-de-France) ; - SETRAM (Le Mans Métropole) ; - TaO (Agglomération d'Orléans) ; - TBC (Communauté urbaine de Bordeaux) ; - Horizon (Communauté d'agglomération Castelroussine, Chateauroux) . Un compte-rendu d'entretien adressé aux interlocuteurs de la mission à l'issue de chaque échange a permis, lorsque les interlocuteurs l'ont souhaité, de s'assurer que leurs propos avaient été correctement recueillis. Par ailleurs, le sentiment d'insécurité dans les TCU semble avoir d'autres racines que la délinquance elle-même. La lutte contre les incivilités fait l'objet d'études notamment à la SNCF et à la RATP. C'est dans ce cadre que la mission a rencontré les spécialistes de ces deux entreprises, ainsi que des chercheurs. La mission a également rencontré les administrations centrales, et les organisations nationales des différents acteurs, notamment les autorités organisatrices représentées par le « Groupement des autorités responsables de transport » (GART) et les opérateurs de transport représentés par « l'Union des transports publics et ferroviaires » (UTP). Les grandes lignes du rapport Les transports collectifs urbains (TCU) des grandes agglomérations de province ont vu croître le nombre de voyages de près de 29% en dix ans. Cette croissance liée notamment à la mise en service de modes lourds (métros, tramways), accompagne la densification des centres urbains, dans un contexte d'attention renforcée aux questions de délinquance. Paradoxalement, cette croissance s'accompagne d'une dégradation des recettes et d'une envolée des coûts. Les questions de fraude et de sentiment d'insécurité sont suivies attentivement par les collectivités et les opérateurs de transport. La délinquance elle-même, même si les faits graves sont peu nombreux, requière l'attention de tous. La première partie de ce rapport décrit les enjeux de la sécurité au sens large - pour chacun des acteurs et tente d'apprécier la situation particulière des réseaux de transports en commun. La seconde traite de la coproduction de sécurité et de l'insertion des problématiques des transports urbains dans les stratégies de prévention, ce qui renvoie à des questions de compétence territoriale. La troisième étudie les moyens mobilisés : ressources humaines, moyens techniques et management de l'ensemble.
8
La quatrième enfin inscrit la question de la sécurité des transports dans la perspective de la mobilité durable.
9
10
1 Les enjeux de la sécurité pour les transports collectifs urbains
La question de la sécurité dans les services publics de transports collectifs doit retenir l'attention car elle s'y présente de façon spécifique : les espaces sont surexposés par la concentration de population, la continuité et la qualité du service sont vulnérables pour différentes raisons, et ils s'exercent dans un dispositif institutionnel complexe qui a de fortes implications (1.1). L'intensité de la délinquance qui s'y produit, surtout lorsqu'elle est mesurée dans un but interne à l'entreprise de transport, est difficile à analyser et à comparer. Néanmoins, les faits graves aÎrés y sont peu nombreux, en tout cas en province, et, malgré les limites de l'appareil statistique de suivi, elle paraît rester au total circonscrite (1.2). Les missions respectives des acteurs et leur complémentarité en matière de prévention de la délinquance dans les TCU sont parfois difficiles à identifier, aussi faut-il bien saisir les enjeux propres à chacun (1.3).
1.1
Un environnement très spécifique
Les transports en commun font régulièrement la une des médias pour des faits divers violents ou marquants, mais la délinquance qui s'y déroule n'est que le reflet de celle de l'agglomération qu'ils desservent. Ses caractéristiques particulières sont liées aux risques générés par des flux importants dans des espaces restreints. Son impact est très visible, en raison de la vulnérabilité des systèmes de transport de masse. L'environnement institutionnel est complexe.
1.1.1
Des espaces confrontés à certains types de faits
Les entretiens réalisés par la mission notamment auprès des directeurs de sécurité des groupes de transport et de réseaux locaux, confirment que la délinquance est globalement exogène aux TCU. Les auteurs des faits sont les mêmes que ceux des faits constatés dans l'agglomération dont ils sont issus. Cependant, l'émergence de certains types de délinquance dans les Îhicules et les espaces d'échange des réseaux de transport, est favorisée par les flux importants de voyageurs, notamment aux heures de pointe. La vigilance est souvent réduite par le besoin de meubler l'attente et de s'isoler par la lecture, les jeux, la vidéo, au sein d'une population ressentie comme hétérogène. Certains types d'incidents appartenant à différentes catégories de la délinquance générale (atteintes aux personnes et atteintes aux biens) sont surreprésentés dans les TCU, et des faits spécifiques les concernent tout particulièrement.
11
les atteintes aux personnes Elles ne sont pas nécessairement constitutives d'une Îritable « délinquance », mais peuvent conduire, par des phénomènes de dégradation rapide propres aux espaces clos où la densité de présence humaine est importante, à des agressions verbales ou même physiques contre les personnels ou contre d'autres voyageurs. Selon une étude réalisée par l'observatoire national de la délinquance dans les transports (ONDT)1, les atteintes physiques et verbales concernant les personnels du transport hors Ile de France (TCU et SNCF), atteignent le taux moyen de 2,87 par million de voyages. La part la plus importante de ces atteintes reste au niveau verbal. Selon la synthèse 2012 du rapport de l'ONDT, de 2002 à 2011, le taux d'atteintes verbales est toujours supérieur au taux d'atteintes physiques avec un écart globalement stable. Les réseaux bus/tramways connaissent un taux d'atteintes physiques et verbales par million de voyages à l'encontre des personnels plus important que les réseaux métro/RER/train. Le contact direct entre conducteur de bus et passagers majore le risque d'agression. La situation de ce mode de transport sur la voie publique favorise la fuite des auteurs. La fiabilité des données recueillies est inégale. Celles relatives aux agressions verbales restent entachées de subjectivité, alors que les agressions physiques aÎrées par un constat d'incapacité temporaire de travail sont plus sûres. La mesure des agressions touchant les personnels est à l'évidence plus complète et précise, alors que les chiffres relatifs aux voyageurs-victimes sont fragmentaires, les agressions physiques elles-mêmes ne donnant lieu à plainte que dans 20 à 30% des cas, et les menaces que dans moins de10% des cas2. Les agressions sur les voyageurs des réseaux UTP, portées à la connaissance des entreprises de transport, s'élèvent à 1,27 par million de voyages en 20113, soit de l'ordre de 3000 faits4. Les atteintes sexuelles pénalement répréhensibles sont peu nombreuses. Toutefois, favorisé par la promiscuité dans les Îhicules ou par la faible présence humaine, un sentiment de harcèlement récurrent, ressenti par les femmes, alimente le sentiment d'insécurité au quotidien, en particulier à certaines heures. Là encore, les données disponibles sur les TCU sont peu détaillées. A titre indicatif, selon l'enquête de l'IAU-IdF5 « «victimation et sentiment d'insécurité en Île-de-France» de 2011, les premiers résultats » indiquent que les atteintes sexuelles touchent essentiellement les femmes et que 29% des faits déclarés lors de l'enquête et les concernant, ont lieu dans les transports en commun (Îhicules et gares).
1
Etude ONDT « Les atteintes physiques et verbales subies par les personnels des entreprises de transport de 2002 à 2011 », intégrée dans le rapport 2012 de l'ONDRP 2 Source : bulletin mensuel ONDRP, août 2012. 3 Source UTP : Les 145 réseaux membres de l'UTP, hors SNCF, ont réalisé 5,4 milliards de voyages en 2010, dont 43,5% en province, soit 2,35 milliards. 2975 faits concernant des voyageurs ont été rapportés aux opérateurs de transport 4 Source UTP : rapport sûreté dans les transports urbains en 2011 5 Institut d'Aménagement et d'Urbanisme d'Ile-de-France Enquête 2011 de victimation et sentiment d'insécurité en IdF Les premiers résultats .Novembre 2011
12
les vols Ce type de délinquance peut être, dans les TCU comme en général, cyclique et thématique : c'est le cas des vols de téléphones portables, qui a connu un pic significatif en 2006-20076 et s'est stabilisé depuis 20087. Bien que ce type de vol n'ait pas lieu uniquement dans les transports collectifs, il y représente une part essentielle de la délinquance. Les informations détaillées concernant ces incidents n'étant pas disponibles pour les TCU de province, on donnera à titre indicatif, les chiffres disponibles pour l'Ile-de-France : 41% des vols dans les transports en commun de l'Ile de France concernaient les téléphones mobiles, en 2007.8 Dans un tiers des cas, ces vols étaient accompagnés de violence. Ils ont en fait été jugulés tant par une disposition législative obligeant l'opérateur de télécommunications à bloquer les portables signalés volés que grâce à une communication ciblée appelant les usagers à la vigilance. Les autres objets les plus fréquemment volés, selon cette étude, sont les cartes bancaires et les papiers d'identité, (37% environ, dans les deux cas). Les vols simples sans violence représentent 60% des faits recensés de délinquance dans les transports collectifs9. Les témoignages que la mission a recueillis auprès d'unités de police nationale spécialisés en sécurité des TCU, confirment l'importance relative de ces divers délits. Les vols sont plus concentrés dans certaines zones, et à certaines périodes de l'année. Par exemple, en zone touristique, dans les TCU comme sur la voie publique, ils concernent des personnes peu familières des lieux, concentrées sur leur itinéraire. Les dégradations volontaires Les destructions de siège, tags, gravages de vitres et autres dégradations perturbent les voyageurs par leur visibilité et leur répétition. Cette forme de délinquance est étroitement corrélée à la taille des réseaux, et donc à l'importance de l'agglomération. Ainsi les réseaux des agglomérations de plus de 250 000 habitants disposent de 62,1% des Îhicules, mais subissent 84,1% des coûts induits par le vandalisme sur le matériel roulant. Le coût total du vandalisme sur le matériel roulant recensé en 2011 a été de 7,2 millions d'euros. Certains réseaux voient des progressions alarmantes. A Lyon, le réseau TCL a vu le nombre de faits de vandalisme passer de 1464 en 2009 à 2617 en 201110. Les violences urbaines spécifiques Elles vont du rayon laser visant le conducteur jusqu'à l'incendie de Îhicules, en passant par les jets de divers projectiles. Le TCU est, comme d'autres services publics, une
6 7
Source ONDRP 850 000 faits en 2007, environ 600 000 depuis 2008 Rappelons qu'il s'agit de faits donnant lieu à dépôt de plainte, ce qui n'est pas toujours le cas des impolitesses et agressions verbales 8 Source Etude ONDRP Phénomènes de délinquance dans les transports en commun ferrés d'Ile-deFrance, décembre 2008 Etudes des plaintes transmises au service régional de la police des transports (SRPT) en 2007 et analyse du profil des plaignants 9 Source : entretien avec l'unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun (UCSTC/DGPN) 10 Entretien avec le SYTRAL, présentation des résultats de l'observatoire de sûreté des transports urbains
13
institution cible pour certaines violences urbaines. L'impact médiatique en est généralement important, compte tenu du nombre de personnes concernées. Les transports de surface desservant les quartiers périphériques sont les plus vulnérables. Ces agressions et leurs conséquences éventuelles sur la continuité du service, sont une préoccupation essentielle des services de sécurité et de la direction de l'exploitation des entreprises de transport urbain (cf. infra). La fraude Si la « resquille » affecte de nombreux commerces, son ampleur, sa visibilité, son impact économique et les moyens mis en oeuvre pour la réduire, en font un sujet spécifique des TCU. Elle a également un impact important en termes d'agressions verbales et physiques. Pour certaines personnes, les TCU sont un des rares endroits où le non-respect de la règle peut être sanctionné immédiatement, ce qui conduit à des agressions verbales et physiques de ceux qui détiennent une autorité pour le leur rappeler. Cependant, la très grande majorité des fraudeurs sont des « joueurs », pariant sur la faible probabilité d'un contrôle, qui, verbalisés, règlent l'indemnité forfaitaire, et redeviennent des clients11. La fraude est quantifiée au moyen de deux indicateurs : par constat des contrôleurs et par enquête. La fraude constatée est fonction de l'efficacité et de l'ampleur du contrôle. Les enquêtes ne sont souvent que partielles, par échantillonnage, les enquêtes exhaustives étant lourdes et chères. Bien que ces deux indicateurs soient tous deux biaisés, les réseaux ont établi un rapport moyen de quatre entre le taux de fraude constaté et le taux de fraude mesuré.12. Le rapport annuel sûreté de l'UTP n'évoque pas la fraude. Peu de réseaux communiquent d'ailleurs leurs informations sur ce sujet. Ainsi selon l'UTP, dans la mesure où seules 35 entreprises ont répondu à l'enquête 2011, l'évaluation de la fraude s'aÏrerait difficile et le résultat peu représentatif. Certains réseaux fournissent néanmoins des éléments : Toulouse Tisséo indique un taux de fraude mesuré global de 3,5%, mais de 6% dans les tramways. Il est important de noter que l'entreprise dispose d'un service prévention de 132 personnes, pour un effectif de 1202 conducteurs de bus13 ; A Marseille, en 2009, la RTM subissait une fraude mesurée de 33% dans les bus. Ce taux a été réduit significativement depuis 201114 ; A Orléans, le taux de fraude mesuré est passé de 20% en 2001 à un taux avoisinant les 9% en 201115 ;
11 12
Source : entretien avec le directeur sécurité de Keolis Entretiens avec le directeur d'Optile et le directeur prévention santé sécurité de Veolia Transdev 13 Sources : en ce qui concerne le taux de fraude , interview d'Olivier Pointrenaud, directeur de la régie Tisséo, in dossier spécial Tisséo, Ville-Rail-Transports octobre 2012 et en ce qui concerne les effectifs : livret d'accueil Tisséo 14 Sources : journal la Provence du 7 juillet 2011,citant le président de la RTM, Karim Zéribi, et entretien de la mission avec le directeur de la sûreté de la RTM 15 Rapport d'activité 2011, publié en mai 2012, de la communauté d'agglomération d'Orléans Val de Loire. La précision sur la nature du taux de fraude (mesuré) a été apportée lors du déplacement de la mission à Orléans
14
A Bordeaux, le taux mesuré passe à 11,2 % en 2011, contre 14,6 % l'année précédente. L'objectif du contrat est de 8% 16. Bien que les situations puissent être très contrastées suivant les réseaux, les matériels de transports, les effectifs de Îrificateurs, les exigences contractuelles de l'autorité organisatrice, les lignes, voire les stations, un taux de l'ordre de 2-3%, de fraude constatée est généralement admis, étant rappelé que la fraude réelle, déduite des enquêtes, est environ quatre fois supérieure. Un taux de fraude plus réduit est obtenu dans les bus à montée unique par l'avant et dans les métros fermés équipés de portillons. L'enjeu économique de ce phénomène est très significatif et conduit à un renouveau de l'intérêt de l'autorité organisatrice et de l'opérateur pour sa maîtrise. Le transport des auteurs présumés Les délinquants utilisent les TCU tant pour fuir le lieu de leurs exactions que pour en commettre. Les opérateurs de transport abordent ce sujet par l'aspect fraude, car une bande en déplacement se livre le plus souvent à une fraude massive. Le nombre génère un sentiment d'impunité et favorise les comportements incivils. La mobilité de la délinquance n'est pas favorisée de la même manière par tous les modes de transport. Elle affectera davantage les transports qui, comme le métro ou le tramway traversent l'agglomération et couvrent rapidement un vaste territoire que les lignes de bus plus locales17. Deux points liés à ce phénomène seront évoqués dans la suite du rapport: le sentiment d'insécurité croissant dans des villes peu éloignées en temps de trajet de zones connues pour leur taux de délinquance, mais où les faits constatés de délinquance sont peu nombreux. La peur de la diffusion de la délinquance par les TCU n'est pas nouvelle. Il s'agit d'une réalité dans certains centres-villes de grandes agglomérations, certains jours à certaines heures, particulièrement le week-end. Ces déplacements de délinquance potentielle engendrent également un sentiment d'insécurité dans des petites villes résidentielles périphériques. ; le besoin d'échange d'information entre les opérateurs de transport et les services de police, (par exemple, cas de grandes manifestations sportives).
1.1.2
Les vulnérabilités des transports publics urbains
L'exploitation du service de transport collectif urbain (TCU) est une activité fragile tant du point de vue technique qu'économique. Les TCU sont également fragilisés sur le plan commercial par l'image d'insécurité dont ils sont porteurs :
16
Source : journal « sud-ouest », présentation des résultats 2011 par la communauté urbaine et Keolis, publié le 15 mars 2012 17 Source : entretiens à Strasbourg (CTS) et au Mans (DDSP)
15
La dégradation des conditions d'exploitation Comme tout lieu recevant du public, les transports se doivent de mettre en oeuvre des mesures précises de prévention et de secours en cas d'accident, tel que des moyens de lutte contre l'incendie et d'évacuation, qui impliquent des contraintes. Les dispositifs de sécurité sont parfois actionnés ou dégradés à des fins malveillantes, depuis la décompression de porte sur un bus, jusqu'à la dégradation de la signalisation d'un tramway. Les conséquences de ces dégradations ou manoeuvres malveillantes sur l'exploitation, en terme de régularité ou de ponctualité, sont plus importantes sur les modes lourds (transports guidés), du fait de la complexité des systèmes de sécurité. Les incidents d'exploitation se traduisent par des interruptions de service pénalisantes pour les usagers et pour les entreprises, dans le cadre de malus contractuels. La prévention de ces actes est donc un enjeu économique essentiel. Le sentiment de régression du vivre-ensemble La visibilité des dégradations et des comportements frauduleux ou incivils interpelle les valeurs de l'ensemble des clients, témoins de ces faits. De par les flux massifs transportés, l'impact sociétal est supérieur à celui qu'il aurait en tout autre point de l'espace public. L'exercice des droits de retrait Ce climat d'incivilité et ces incidents sont mal ressentis par les conducteurs et Îrificateurs, alors que simultanément, le métier de conducteur de bus a profondément évolué (cf. 3ème partie). Un conducteur témoigne « qu'on ne s'habitue pas aux insultes ni à la pièce de monnaie jetée sans un mot, ou au dédain d'un voyageur attendu à un arrêt sans aucun merci. ». Les « petites » agressions répétées, accumulées et sans réponse vont conduire à l'expression d'un « ras-le-bol » spontané lors de l'incident de trop18, qui ne s'aÎrera pas finalement d'une gravité particulière par rapport aux précédents. Dans ce contexte, un incident sérieux comme l'agression physique d'un collègue, peut être le détonateur d'un « droit de retrait » instantané et non formalisé19. Ces protestations immédiates ont un impact instantané sur l'exploitation, notamment des lignes desservant les quartiers les plus enclaÎs. Selon l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP), en 2011, les personnels ont subi 800 agressions physiques impliquant 40 000 jours d'arrêt de travail. Il faut noter que ces arrêts de travail sont de mieux en mieux mesurés, dans la mesure où les réseaux recourent de plus en plus fréquemment aux unités médico-judiciaires (UMJ) pour la détermination de l'impact de l'agression physique. Par contre, il ne semble pas exister de suivi statistique publié concernant le nombre d'heures d'exploitation perdues suite à exercice d'un droit de retrait.
18 19
Le seuil de tolérance jusqu'à l'incident de trop est variable d'une personne à l'autre... Entretien avec Pascal André, consultant spécialiste du traitement du sentiment d'insécurité dans les transports
16
L'incivilité routière Un autre aspect des comportements incivils auxquels sont soumis les conducteurs des Îhicules de surface concerne le partage de la voirie avec les autres types de circulation. De nombreuses règles du code de la route peuvent être violées, depuis le stationnement sur la voie réserÎe au bus ou au tramway, jusqu'au deux-roues s'accrochant au Îhicule de transport. Outre le stress pour le conducteur, l'impact économique de la baisse de la vitesse commerciale et de la régularité du bus est important.
1.1.3
Un environnement institutionnel décentralisé complexe
1.1.3.1 Une organisation propre à chaque type de réseau
Il convient de rappeler la diversité fondamentale des réseaux de transport de voyageurs, composés d'une multitude d'entreprises, mettant en oeuvre des moyens de transports spécifiques, répondant à des besoins de déplacements très divers et ne soulevant pas les mêmes questions en termes de sécurité. On peut ainsi distinguer les grandes catégories suivantes : Les liaisons ferrées nationales ou internationales Elles sont l'apanage presque exclusif de la SNCF, car les effets de l'ouverture à la concurrence du rail sont encore peu perceptibles, et le cas du tunnel sous la Manche reste spécifique. Dans le cas des trains d'équilibre du territoire (Intercités), la SNCF agit dans le cadre d'une convention avec l'Etat, autorité organisatrice. Les services ferroviaires régionaux de voyageurs (TER) Ils répondent davantage à des déplacements pendulaires domicile-travail sur des distances plus courtes, impliquant un public plus large et des fréquentations récurrentes et soutenues. Depuis 2002, ils sont assumés par la SNCF dans le cadre de conventions passées avec chaque région, autorité organisatrice, dont les échéances vont de 2012 à 2018, et qui déterminent les trajets à mettre en place, la fréquence des dessertes, les tarifs, le niveau de qualité du service à offrir. Les matériels spécifiques mis en oeuvre connaissent une modernisation assez rapide, grâce aux investissements consentis par ces collectivités. Ces conventions devraient faire l'objet d'une ouverture à la concurrence, dans le cadre de la libéralisation progressive du secteur. Les réseaux locaux interurbains et scolaires Ils sont exploités dans le cadre de conventions avec les départements, autorités organisatrices, sauf lorsqu'ils se substituent aux TER sur des distances moyennes, auquel cas l'autorité organisatrice est la région. C'est le mode de transport des habitants des secteurs ruraux et des petites villes, sur des distances relativement courtes, au moyen généralement de cars. Leur part modale est relativement faible.
17
Le réseau parisien et francilien Il présente des différences marquées avec les réseaux de province, tant par l'organisation spécifique définie par le code des transports que par l'importance du dispositif. Le Syndicat des transports de l'Ile-de-France (Stif), autorité organisatrice spécifique, a compétence sur l'ensemble de la région et a pour exploitants : la RATP (15,7 milliards de voyageurs-kilomètres en 2011 ; contre 9,3 milliards dans les 144 autres réseaux de transport hors Ile-de-France, ) ; la SNCF-Transilien (11,8 milliards de voyageurs-kilomètre contre 13,5 pour les TER) ; le réseau Optile de la grande couronne (1,8 milliards de voyageurs-kilomètres20). Les problèmes de sécurité s'y posent avec une grande acuité et des réponses spécifiques incluant des moyens humains et techniques importants y sont données. Les réseaux de transports collectifs urbains (TCU) de province Ils sont exploités dans le cadre d'une convention avec une autorité organisatrice, qui est très généralement l'agglomération. Ils assurent au quotidien les déplacements domicile travail pour l'essentiel, mais aussi familiaux et de loisirs, des habitants d'une agglomération et de sa zone d'attraction. Ils représentent des parts modales parfois éleÎes et connaissent une fréquentation en développement depuis quelques années, marquée aussi par l'affluence aux heures de pointe, et par la desserte de tous les quartiers sur une large plage horaire. Le bus urbain (simple ou articulé) en constitue le Îhicule de base. Mais dans les villes moyennes les plus importantes, le tramway connaît un essor rapide. Le métro, avec conducteur et dorénavant automatique, est l'apanage des seules grandes villes (Lyon, Marseille, Lille, Rennes, Toulouse). Les questions de sécurité des personnes (usagers et personnels) s'y posent avec une acuité généralement corrélée au contexte sécuritaire général de l'agglomération et à sa population. Les sites d'échanges multimodaux et les parkings relais sont autant de points sensibles. La diversité des organisations, des acteurs responsables et des caractéristiques de la délinquance a conduit la mission à limiter le champ de son étude au cas des TCU de province (voir Introduction, méthodologie de la mission).
1.1.3.2
Un système décentralisé
L'organisation des services publics de transport a connu une profonde évolution, qui les a inscrits dans le mouvement général de décentralisation et dans celui de l'ouverture des services à la concurrence au niveau européen. Les différentes collectivités territoriales jouent dorénavant un rôle dominant dans la définition des politiques de déplacement, les conditions de l'exécution et le suivi de la qualité de la prestation. Cette situation n'est pas sans conséquences en termes de sécurité
20
Source : comptes des transports 2011 MEDDE/CGDD
18
Les « autorités organisatrices des transports » (AOT) de la LOTI21, communales et intercommunales, ont pris dorénavant toute leur place, s'appuyant progressivement sur les possibilités offertes par les règles européennes de mise en concurrence des opérateurs, pour assumer la responsabilité complète de l'organisation de ce service public. En milieu urbain elles s'affirment en général au niveau de l'agglomération, soit au travers d'un regroupement de droit commun (communauté de communes ou communauté d'agglomération), soit au travers d'une structure dédiée aux transports collectifs (syndicat, syndicat mixte). La limite de compétence territoriale est fixée par un périmètre de transports urbains ou PTU22, qui comprend le territoire d'une commune ou le ressort territorial d'un établissement public ayant reçu mission d'organiser les transports publics de personnes (y compris les transports scolaires). Les collectivités assument la conception et le développement des réseaux, dont elles financent les infrastructures et les équipements, et dont elles délèguent généralement l'exploitation à l'entreprise. Dans la plupart des cas, elles assument, par leur budget propre et par le versement transport, la couverture de l'écart financier important qui existe entre le coût du service et les recettes perçues des usagers (clients) qui n'en représentent que 25 à 30%. Elles sont d'ailleurs généralement maîtresses des tarifs pratiqués. Cette charge est en constante augmentation. Le taux de couverture des dépenses par les recettes s'est dégradé de 7,7% en 10 ans dans les grands réseaux, et il est encore plus faible dans les petites agglomérations23. L'entreprise de transport collectif de voyageurs quant à elle, est devenue un simple prestataire de service, exploitant un réseau appartenant à la collectivité (infrastructures, matériels de transports et équipements), sous différentes formules contractuelles, avec une marge de manoeuvre limitée. Elle peut être publique (sous le nom de régie24 elle est alors un simple service industriel et commercial de la collectivité), semi-publique (société d'économie mixte associant la collectivité à un groupe de transport) ou priÎe (filiale d'un groupe en général). Dans ces deux derniers cas, elle exploite le réseau dans le cadre d'un contrat de délégation de service public (ou parfois d'un simple marché public), avec mise en concurrence périodique. Elle s'engage à délivrer un service de qualité, sous un contrôle étroit de la collectivité, qui peut impacter ses résultats financiers. Son autonomie est variable d'un type de contrat à l'autre, mais elle a tendance à se réduire. Le choix de l'entreprise de transport lors des appels d'offre est lié à sa capacité à offrir le meilleur service dans le cadre de la stratégie définie par l'AOT. Des incitations financières sanctionnent sous forme de bonus/malus la tenue effective des engagements. Les AOT disposant maintenant d'une expérience de plusieurs décennies, les contrats sont précis, la durée généralement courte, (de l'ordre de 5-6 ans) et le nombre d'indicateurs de suivi peut atteindre la centaine.
21
Loi n°82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, codifiée aux
art.L1221-1
et suivants du code des transports.
22 23
L1231-4 du code des transports (CT) Source les chiffres clés du transport public urbain 2010 UTP 24 Décret 85-891 du 116 août 1985 relatif au transport urbain de personnes et aux transports routiers non urbains (articles 12 et suivants). Voir également l'article L1221-7 du code des transports
19
Confrontée aux réalités quotidiennes du terrain, l'entreprise reste fréquemment une force d'études et de propositions, sur le plan du développement du réseau ou sur le plan tarifaire et commercial, ainsi qu'en matière de sécurité, mais surtout à l'occasion des remises en concurrence. Les équipements de sécurité, annexes des infrastructures et des Îhicules (notamment la vidéo), sont donc généralement à la charge de la collectivité à qui il appartient de décider de leur implantation, souvent sur proposition de l'entreprise délégataire. En ce qui concerne les ressources humaines, l'entreprise ayant remporté le contrat reprend les personnels en place mais dispose ensuite d'une certaine autonomie, dans le cadre des ressources prévus au contrat. Le développement des moyens résulte donc d'un processus décisionnel partenarial, dans lequel l'entreprise et ses salariés pèsent, mais dont l'issue appartient presque toujours aux services de l'autorité organisatrice, à son exécutif et finalement à son instance délibérante. C'est précisément l'impact de ce dispositif partenarial, ses potentialités et ses exigences spécifiques que la mission a choisi d'approfondir.
1.2
Des phénomènes encore mal analysés
Au-delà des constats fragmentaires faits ci-dessus, l'appréciation de la réalité quantitative de la délinquance dans les TCU est difficile, car les mesures sont entachées de biais. De nouveaux dispositifs de mesure sont en construction, mais leur mise au point se heurte aux contraintes du système institutionnel décrit ci-dessus. Toutefois, dans le champ étudié, les phénomènes de délinquance restent limités sur les réseaux de TCU, sauf dans quelques cas exceptionnels : périphéries des très grandes agglomérations et certains secteurs de la grande couronne parisienne,
1.2.1
Un dispositif d'observation en construction
1.2.1.1 L' optique sociale est privilégiée par la profession
Un dispositif d'observation et de suivi a été mis en place par l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP) en 199525 dans une optique de dialogue social et dans le contexte initial de la préparation d'un accord de branche sur la sécurité des personnes et des biens, signé le 29 juin 1995. Un nouvel accord, du 11 juin 2002, s'est substitué à celui de 1995. Il permet d'offrir des garanties de suivi et d'assistance aux salariés agressés. Cet accord a ensuite été revu le 17 avril 2007, puis étendu à l'ensemble des entreprises par arrêté du 21
25
Les statistiques de 1995-96-97 ont été publiées pour la première fois par l'UTP en 1998, les statistiques des années suivantes ont fait l'objet d'un rapport de branche annuel, ne concernant que les entreprises soumises à la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs. La forme du rapport est stabilisée depuis 1997.
20
décembre 200726 Il prévoit notamment des mesures de prise en charge financière, juridique et médicale des salariés agressés. La sécurité est en effet une préoccupation récurrente et ancienne des personnels des entreprises de transport urbain. Les agressions dont sont victimes ces derniers donnent bien souvent lieu à des actions de protestations immédiates27, ce qui a conduit les entreprises de transport à consacrer une part non négligeable de leur budget à la sécurité des personnels, devenue un enjeu majeur de l'exploitant.. Les données suivies concernent pour l'essentiel : les agressions sur le personnel suivies (ou non) d'un arrêt de travail ; les dégradations subies par l'entreprise ; les agressions sur les voyageurs signalées à l'entreprise, généralement par le personnel de l'entreprise ; les « incidents ». Il convient de préciser que l'UTP définit les « incidents », (intitulés également improprement "incivilités"), comme l'ensemble des faits délictueux ou concourant à l'insécurité portés à la connaissance de l'entreprise de transport urbain par les salariés, la police, les voyageurs etc. On y trouve l'ensemble des faits, depuis les agressions sur le personnel et les voyageurs, les actes de vandalisme, jusqu'à ceux qui n'entraînent pas nécessairement poursuite judiciaire mais créent un climat d'insécurité (chahut, décompression de portes, insultes, altercations verbales entre clients, etc.). Cet indicateur est donc empreint d'une certaine subjectivité. Le nombre d'incidents releÎs en 2005 était de 32 911, en 2011 de 41 098. Cependant, si on prend en compte l'augmentation du nombre de voyages 28, l'UTP constate que le fort développement de l'offre de transport et de la fréquentation depuis 10 ans n'a pas entraîné une augmentation corrélative des incidents signalés aux entreprises de transport public urbain de voyageurs. Les accords nationaux cités sont repris localement dans chaque réseau. A titre d'exemple, la mission a ainsi eu accès au compte-rendu d'un comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail d'une entreprise de TCU, entièrement consacré aux incidents et agressions recensés sur le réseau sur les 3 dernières années, à l'évolution en 2011 des accidents du travail liés à l'insécurité, et aux mesures prévues par l'accord sécurité de l'entreprise. Indépendamment de limites géographiques éventuellement différentes de la circonscription de sécurité publique et du périmètre de transport urbain, l'outil statistique de l'UTP ne peut être comparé à ceux basés sur l'exploitation de l'état 4001 (faits de délinquance constatés par les services de police et de gendarmerie). En effet la prise en compte de données ne pouvant donner lieu à prise en compte d'une plainte, concernant généralement les personnels, et la prise en compte partielle des faits affectant les voyageurs, limités à ceux
26
Arrêté du 17 décembre 2007 portant extension d'un accord et d'un avenant conclus dans le cadre de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs. 27 Voir également l'étude du programme européen Leonardo da Vinci, « Le conducteur de transport urbain en France » CTUE 28 En 2003, le nombre d'incidents rapportés aux entreprises de transport par million de voyages est de 26,6. Il était de 24,3 l'année précédente. En 2010, il est de 17,4 et de 17,5 en 2011.
21
connus de l'opérateur de transport, créent un décalage. Mais le rapport de branche sur la sécurité dans les transports urbains de l'UTP, devenu le rapport sûreté dans les transports urbains, est le seul outil existant dans la durée.
1.2.1.2 La mise en place d'observatoires locaux de la délinquance dans les TCU
L'article 6 de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance pose le principe de la participation des autorités organisatrices à la prévention de la délinquance : « Les autorités organisatrices de transports collectifs de personnes et le Syndicat des transports d'Ile-de-France concourent, chacun pour ce qui le concerne, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, aux actions de prévention de la délinquance et de sécurisation des personnels et des usagers dans ces transports ». Le décret d'application du 27 août 2008, précise les modalités du concours apporté par les autorités organisatrices de transports collectifs de voyageurs aux actions de prévention de la délinquance et de la sécurisation des personnels et des usagers, hors la région Ile-de-France. Il précise notamment que les AOT définissent les modalités du recensement des actes de délinquance par les opérateurs de transport, et transmettent les données statistiques relatives aux faits de délinquance au moins une fois par an au représentant de l'Etat dans le département. Ce dernier texte a conduit à la mise au point d'une nomenclature nationale adaptable à la taille des réseaux diffusée, par circulaire du ministre chargé des transports du 2 avril 2012, soit quatre ans après la parution du décret. Elle distingue les atteintes aux personnes (avec ou sans violence physique, sexuelle et vols contre personnes), les atteintes aux biens et les autres infractions à la réglementation des transports en commun29. Ce dispositif confie aux autorités organisatrices le soin d'organiser un observatoire local de la délinquance dans les TCU, au bon niveau d'observation, très généralement celui de l'agglomération. De la qualité de ces observations, dépend la pertinence du diagnostic local de sécurité. Les données recueillies ont la même source que l'enquête sûreté de l'UTP auprès des réseaux. Elles souffriront donc des mêmes biais. Cependant, la mise en oeuvre d'une nomenclature nationale commune est l'occasion de remobiliser certains réseaux, notamment ceux de moyenne importance, et de faciliter la rigueur de l'intégration au niveau national. Au plan local, la sensibilisation des autorités organisatrices devrait permettre de constituer de Îritables observatoires locaux de la délinquance analysant les données recueillies par l'opérateur de transport en les croisant notamment avec les informations de délinquance issues de l'état 4001 sur le même périmètre. La mission a déjà insisté dans des rapports précédents sur l'importance d'une telle analyse, préalable à l'établissement d'un diagnostic de sécurité sur lequel fonder une stratégie, qui, en l'espèce, ne prend tout son sens que sur le périmètre de transport urbain considéré. La
29
Par ailleurs, une expérimentation est en cours pour mettre en place un outil de saisie informatique des faits d'insécurité pour les AOT qui en sont dépourvues, et une plate-forme d'échange de données.
22
mission a releÎ avec intérêt le travail réalisé par le SYTRAL à Lyon, la CUS à Strasbourg et la police municipale intercommunale de l'agglomération d'Orléans, avec le support technique de la police municipale de la ville centre.
1. Recommandation : pour les autorités organisatrices de transport urbain: encourager la construction d'observatoires locaux de la délinquance dans les TCU exploitant l'ensemble des sources de données, incluant notamment les informations de l'opérateur de transport et celles issues des constats des services de police et de gendarmerie.
Ces observatoires gagneraient à être intégrés dans un observatoire local de la délinquance travaillant au niveau de l'agglomération, dans le cadre d'un CISPD, lorsqu'il existe.
1.2.2
Une délinquance qui reste en général limitée
Tous les témoignages recueillis par la mission confirment que l'intensité de la délinquance dans les TCU est liée à celle la ville desservie, dont elle ne représente au total qu'une part limitée. Il est d'ailleurs malaisé d'apprécier cette part, mais la question doit être posée pour éclairer le débat relatif au sentiment d'insécurité dans les réseaux, car des faits relativement peu nombreux, peuvent y nourrir une inquiétude significative, qui semble alors disproportionnée. Pour apprécier la situation, on peut opérer une comparaison entre les faits constatés dans les transports collectifs et la délinquance comparable dans l'agglomération qu'ils desservent, mais les données sont trop fragmentaires - et consulter les résultats des enquêtes de victimation dans les transports collectifs, qui restent au total limitées.
1.2.2.1 La part des faits constatés commis dans les TCU paraît limitée
Le dispositif professionnel consolidé par l'UTP n'est pas un instrument pertinent d'appréciation de la part de la délinquance localisée dans les TCU, et ce n'est pas son objectif. Bien que les données exemptes de biais fassent défaut, quelques approches peuvent être tentées : plus de 3,5 millions de faits de délinquance ont été constatés en France en 2011, dont un peu moins de 176 000 dans les transports en commun. Le ratio global parait donc être de 5% environ. Cependant, la comparaison n'est pertinente qu'avec une partie des index de l'état 4001 qui implique des faits susceptibles d'être commis dans les TCU : atteintes volontaires à l'intégrité physique (AVIP), vols personnels, agressions verbales et menaces...etc. Or il n'existe pas d'agrégat regroupant l'ensemble de ces faits. Si l'on considère les AVIP, près de 470 000 faits ont été constatés en France, en 2011, dont plus de 33 00030dans les transports en commun. Le ratio entre les TCU et la ville est alors de 7,1 %. A titre indicatif, une analyse détaillée a pu néanmoins être tentée en Ile-de-France où la Police nationale (PAF-SRPT) a pu développer un dispositif statistique concernant les TCU.
30
Source UCSTC / DGPN
23
Ce travail réalisé par l'ONDRP (ex-OND) 31concerne l'année 2007. Les 20.000 faits recensés dans les transports en commun de l'Ile-de-France représentent 11% des 174 000 vols, violences physiques hors vol, atteintes sexuelles et menaces32 recensés dans les quatre départements de Paris et de la petite couronne. Pour la province, malgré la faiblesse des sources, il est possible de comparer les ordres de grandeur de l'ensemble des atteintes individuelles constatées, hors Ile-de-France, au total des incidents releÎ par l'UTP, qui était en 2011 de l'ordre de 3.000 pour les voyageurs. Le nombre d'agressions sur le personnel, suivies ou non d'un arrêt de travail était quant à lui de 4.818. L'addition de ces deux chiffres (7.818) a peu de sens, du fait des réalités différentes qu'ils recouvrent, toutefois elle peut être mise en face du nombre de vols, violences physiques hors vol, atteintes sexuelles et menaces comptabilisé par l'ONDRP sur le même périmètre : soit 657 42933. A titre d'illustration, un observatoire de la délinquance dans les TCU a été créé à Orléans, auquel participe l'ensemble des acteurs, grâce en particulier à l'implication de la communauté d'agglomération. On dispose ainsi du nombre de faits constatés de l'état 4001 dans les TCU. Pour l'année 2009, le sous-ensemble des faits constatés les plus fréquemment commis dans les TCU (vols, menaces, dégradations, atteintes sexuelles, outrages, etc.) est de 27034. Sur la même période, le nombre de faits de voie publique constatés sur la circonscription de sécurité publique d'Orléans est de 724235. Au total, une mesure plus exacte de la part des TCU dans la délinquance ne peut résulter que de la constitution d'un appareil statistique propre aux transports collectifs complet et fiable, sur des bases autorisant la confrontation aux statistiques générales de la délinquance, dont il faut rappeler qu'elles sont quant à elles régulièrement remises en cause. La mission est consciente des limites des rapprochements quantitatifs exposés ci-dessus. Elle considère cependant que les écarts d'ordre de grandeur entre délinquance dans la ville et dans les TCU, sont tels qu'ils confortent l'appréciation des professionnels sur le caractère limitée de la délinquance dans les TCU, souvent en déphasage avec les inquiétudes disproportionnées qu'elle génère.
1.2.2.2 Une intuition confortée par les enquêtes de victimation
Les limites connues des statistiques de faits constatés ont conduit à réaliser des enquêtes de victimation. L'ONDRP 36 a publié en septembre 2009 une analyse de la victimation spécifique aux transports en commun, qui concluait que 5,4 % des atteintes aux personnes déclarées par les 14 ans et plus ont lieu dans les transports en commun. Cette analyse se fonde
31
OND Décembre 2008 Grand Angle N°15 Phénomènes de délinquance dans les transports en commun ferrés d'Ile de France Etudes des plaintes transmises au service régional de la police des transports (SRPT) en 2007 et analyse du profil des plaignants 32 Index 2,4,22,25,26,32,43 (vols avec et sans violence), 12 (menaces), 46 à 50 (atteintes sexuelles) et 6,7 (violences hors vol) 33 Le total France entière des index 2 ,4, 22, 25, 26, 32, 43, 12, 46 à 50 est de 860 415 faits constatés. 34 Source : entretien avec F. Montillot, maire adjoint d'Orléans chargé de la prévention 35 Source : plan départemental de prévention de la délinquance du Loiret 2010-2012 36 OND Grand Angle N° 19, septembre 2009, 5,4 % Des atteintes aux personnes déclarées par les 14 ans et plus ont lieu dans les transports en commun; résultats des enquêtes « cadre de vie et sécurité » de 2007 et 2008 sur la victimation et le sentiment d'insécurité dans les transports en commun
24
sur les résultats des enquêtes « cadre de vie et sécurité » de 2007 et 2008 sur la victimation et le sentiment d'insécurité dans les transports en commun, France entière. Sur 100 atteintes déclarées dans les transports en commun, un peu plus de la moitié (50,6 %) sont des insultes ou injures, 32,9 % des vols personnels et moins de 17 % des violences physiques ou menaces. En comparaison des atteintes dans les autres lieux publics, on trouve en proportion plus de victimes de vols dans les transports en commun, notamment de vols sans violence ni menace. Près d'un quart (23,8 %) des victimes dans les transports en commun ont déclaré avoir subi un tel vol. Dans les autres lieux, cette part est deux fois plus faible (11,7 %). Le nombre plus important de victimes réÎlées par l'enquête de victimation est liée à l'importance de la « petite » délinquance, insultes et injures, qui conduisent très rarement à un dépôt de plainte. L'étude citée précisait que moins de 1% des insultes donnent lieu à dépôt de plainte. Elle relevait également que le taux de victimation dans les transports en commun en Ile de France est trois fois plus éleÎ que la moyenne France entière (15,1%).Ce résultat est en ligne avec la fréquentation plus intense des transports collectifs en Ile-de-France et le taux de délinquance en Ile-de-France très supérieur à la moyenne nationale. Il est aussi cohérent avec l'analyse des faits constatés concernant les atteintes individuelles (cf. supra). Certains faits se produisent cependant plus fréquemment dans les transports. Ainsi l'étude citée indique une intensité significative pour : les vols sur personnes avec violence : 13% ; les vols sans violence : 9,7% ; les atteintes physique : 6% . Encore faut-il mentionner que l'étude en question concerne l'ensemble des réseaux de transports en commun : transports ferrés et TCU. Elle indique que plus de 45% des atteintes ont lieu dans les modes lourds (métro, RER ou train) et 21,8% dans une station de métro ou une gare. Compte tenu du poids du transport ferroviaire (Transilien, RER) en Ile-de-France, les chiffres concernant les TCU de province sont donc bien plus faibles. Cette appréciation est confortée par une enquête spécifique à l'Ile-de-France de l'IAUIdF, qui donne un taux plus éleÎ dans les transports en commun. En effet, près de 30% des enquêtés déclarant comme dernier fait subi un vol personnel ou une agression au cours des trois dernières années, ont indiqué que le fait s'était produit dans les transports en commun, et plus précisément : 31 % des vols sans violence ; 27 % des agressions tout venant (y compris les vols violents) ; 29% des agressions sexuelles concernant les femmes.
25
1.2.2.3 Le besoin d'un outil d'observation rigoureux
Il est donc aÎré que certains types de faits se déroulent dans les TCU avec une intensité éleÎe. La mission considère que ces faits méritent un suivi particulier et homogène. En effet, le diagnostic de sécurité sur le périmètre de transport urbain ne peut être fondé que sur des données collectées suivant des méthodes stables, permettant ainsi d'apprécier les évolutions, et croisées, pour approcher au mieux la réalité. Dans ce contexte, il paraît nécessaire de disposer d'une liste des index les plus significatifs des faits constatés de délinquance devant faire l'objet d'un suivi par l'observatoire local de la délinquance dans les TCU. La mission ayant pu constater l'emploi d'agrégats variables, elle recommande qu'une maquette soit élaborée par un groupe de travail sous l'égide conjointe du ministère de l'Intérieur, du ministère chargé des Transports, et comprenant des représentants des services de police, des opérateurs et des Autorités organisatrices.
2. Recommandation : établir la liste des index les plus significatifs des faits constatés de délinquance faisant l'objet d'un suivi dans les TCU, par un groupe de travail placé sous l'égide conjointe du ministère de l'Intérieur et du ministère chargé des Transports, afin de favoriser une analyse locale pertinente de l'évolution de la délinquance dans les TCU par rapport à la voie publique.
Au terme de cette rapide présentation la mission relève : que la part de la délinquance constatée dans les transports en commun ne peut être appréciée justement en l'état actuel de l'appareil statistique ; que la construction engagée avec difficulté par le ministère des transports en application de la loi de 2007 ne permettra pas, à elle seule, de remédier rapidement à cette carence ; et que les données disponibles indiquent néanmoins une grande différence de situations entre l'Ile-de-France et la province, et sans doute une corrélation avec l'importance de l'agglomération.
1.3
Les enjeux des acteurs
Compte tenu des vulnérabilités présentées ci-dessus et des ressentis constatés, même s'ils sont difficiles à mesurer, la sécurité dans les transports en commun, qu'il s'agisse de celle des usagers ou de celle des personnels, ou encore de la protection des équipements, est un enjeu important pour ses différents acteurs. Comment l'Etat, porteur d'une politique ambitieuse de développement des transports collectifs et par ailleurs garant de la sécurité publique, se positionne-t-il face à ce risque ? Quelles en sont les implications pour les collectivités, qu'il s'agisse des villes et des agglomérations, dans le cadre de leurs compétences en général, notamment en matière de tranquillité publique, et de celles qui sont « autorités organisatrices » des transports urbains, à qui l'organisation de ce service public est confiée ? Comment l'opérateur public ou priÎ qui
26
a la charge du réseau peut-il assumer les exigences de sa sécurisation du réseau et de la lutte contre la fraude et l'incivilité ? Quelles sont les perceptions et les attentes du public, usager ou pas, et par ailleurs contribuable ? Identifier parfaitement les enjeux propres à chacun est indispensable pour analyser ensuite l'adéquation des réponses, comprendre leurs limites, et envisager leur agencement.
1.3.1
L'Etat : garant de la sécurité
Le transport collectif urbain est une politique publique entièrement décentralisée, et l'Etat n'en est donc que le régulateur, au travers des règles qu'il édicte, qu'elles touchent à la sûreté, aux conditions de travail, au financement, au jeu de la concurrence ou à d'autres aspects. (cf supra). Il porte aussi une ambition de développement, accentuée par les exigences environnementales, et peut appuyer financièrement par ses fonds spécialisés, les développements qu'il estime prioritaires. Il est par ailleurs garant de la sécurité dans l'espace public et à ce titre concerné par la lutte contre la délinquance qui se développe dans les transports, ou autour d'eux, lutte dans laquelle les forces de sécurité sont très impliquées. Ces différentes préoccupations de l'Etat sont certes prises en charge par différents ministères et services déconcentrés, mais elles ne sont nullement contradictoires. En réalité elles se conditionnent mutuellement : pas de développement des transports collectifs sans une régulation rigoureuse de ce service public industriel et commercial la plupart du temps délégué à l'entreprise : normes s'imposant à tous, transparence de la mise en concurrence, respect des droits sociaux des salariés, satisfaction de l'usager ; pas d'augmentation de la part modale des TC, enjeu majeur du développement durable, sans un standard suffisant de sécurité et de tranquillité publique sur les réseaux, dans les Îhicules, aux stations, aux centres d'échange ; Sans être directement en charge des TCU, l'Etat est donc largement impliqué dans ce débat, et la coopération avec ses services s'impose naturellement.
1.3.2 Les collectivités territoriales : en charge des transports et de la tranquillité publique
Deux et parfois trois niveaux de collectivités sont concernés par la problématique de la sécurisation des réseaux de TC. La ville chef-lieu et toutes les autres communes de l'aire couverte par le réseau, en ce qu'elles sont responsables de la tranquillité publique, au travers de leurs compétences en matière de prévention et de sécurité de premier échelon, en matière d'équipements et
27
d'aménagements urbains, en matière sociale....etc. Les pouvoirs de police administrative sont exercés par le maire, et les moyens pour en faire respecter les règles sont municipaux. A titre d'exemple, la mission a Îrifié au cours de ses visites combien la présence d'une police municipale, les missions qui lui sont confiées, sa bonne articulation avec l'action des forces de sécurité au travers d'une convention, peuvent être utiles pour prévenir le sentiment d'insécurité, suivant différentes modalités, même si sa capacité d'intervention reste limitée. Elle a releÎ la grande diversité qui prévaut d'une ville à l'autre tant au niveau des besoins mais le ressenti n'est pas plus faible lorsque les situations sont moins graves que des réponses : existence et dimension de la police municipale, existence et densité des installations de vidéoprotection...etc. Les réseaux de TC sont directement concernés par les choix faits, qui recouvrent un large éventail, contraignant l'opérateur à apporter des réponses propres à l'entreprise elles aussi très différentiées. Encore faut-il rappeler que c'est dans une très large mesure le contribuable local qui en assume la charge ultime, dans cet environnement structurellement déficitaire. Les agglomérations ne sont généralement pas concernées par les politiques locales de sécurité, et la compétence prévention de la délinquance ne leur est que rarement déléguée. Elles sont par contre très fortement impliquées dans l'aménagement urbain et dans la gestion des grands services publics, y compris celui des transports, sauf si une « autorité organisatrice spécifique », sur un périmètre ou avec des partenaires différents a été mise en place. A ce stade, il convient de relever que le risque d'une prise en compte insuffisante des problématiques de sécurité par les intercommunalités, constatée ici ou là, peut s'expliquer par ce décalage de compétences. Ainsi dans telle agglomération, le fait que seule la ville chef-lieu dispose d'une vraie police municipale ou d'un service de médiation de tranquillité publique, dont les interventions ne peuvent se développer au-delà du territoire communal, est mal ressenti par les personnels et les usagers du réseau de transport qui vivent naturellement à l'échelle de l'agglomération. La mission reviendra sur cette question importante, mais d'oreset-déjà il faut noter que toute innovation juridique ou pratique pour conjurer ce problème devra être regardée avec intérêt. La mission permanente a par ailleurs Îrifié concrètement que l'extension des périmètres des intercommunalités qui résultera de la réforme en cours, dont l'intérêt global n'est pas discutable, ne fera que creuser l'écart évoqué ci-dessus.
1.3.3
Les entreprises de transport : exploitants des réseaux
Confrontées aux injonctions parfois contradictoires des exigences du service public et de celles de l'équilibre financier - qui s'impose à elles, même s'il est assuré en grande partie par une « subvention » - les entreprises de transport urbain doivent aujourd'hui inclure leurs réponses en matière de sécurité et de sentiment d'insécurité dans leurs arbitrages stratégiques. Elles n'y étaient pas nécessairement préparées. Deux points de vue doivent être pris en considération en leur sein, sous le contrôle des AOT :
28
Les exigences du service public, qui conduisent à développer et améliorer l'offre, pour un meilleur désenclavement des quartiers, à créer les conditions d'un accroissement continu de la fréquentation, et à délivrer un service fiable, ponctuel et confortable, ce qui suppose un climat social apaisé et une image positive; ces orientations sont généralement partagées entre l'exploitant et l'AOT, mais elles ont un prix. Les exigences de l'équilibre financier, qui est le leur en temps réel - mais aussi celui de la collectivité sur le moyen et le long terme - imposent de limiter la mise en place des moyens, notamment humains, au strict nécessaire, de lutter contre la fraude et de prévenir les dégradations, mais aussi de veiller à la rentabilité des moyens de transport en améliorant la « vitesse commerciale » des Îhicules. La question de la sécurité s'entremêle à ces préoccupations : sa maîtrise est une condition de la fidélisation des clients usagers, et elle est très liée à la fraude. Le coût des équipements n'est pas négligeable, et celui de la présence humaine de contrôle, de médiation ou de sécurité est important, et implique des arbitrages malaisés. C'est pourquoi il faudra donner à la collectivité délégante, par la voie contractuelle, la possibilité de peser par des incitations (sanctions). La mission s'attachera, dans la suite de ce rapport, à explorer les voies et moyens d'une mobilisation et d'une responsabilisation des opérateurs sur cette question, sans ignorer les limites que fixent les contraintes financières, et en s'interrogeant sur l'utilisation de l'outil contractuel pour y parvenir.
1.3.4
La population : en attente de qualité de service et de sécurité
Les enquêtes réalisées ici ou là confirment les attentes très fortes du public en matière de sécurité en général et de « civilité » dans les transports en commun en particulier, dans l'espace desquels le confinement majore le ressenti. Ces attentes peuvent se confondre avec celles qu'il place dans la qualité du service, en y incluant l'attitude plus ou moins « commerciale » des personnels, qui se considèrent quant eux comme les premières victimes d'un climat qui est ressenti comme s'aggravant. Encore faut-il différentier les publics. Les usagers captifs, c'est-à-dire qui n'ont pas Îritablement de solution de rechange, ont des exigences qui leur sont propres, et le risque que le transporteur ne les prenne pas suffisamment en considération n'est pas négligeable, puisqu'ils ne peuvent le sanctionner. L'enjeu des relations entre ses représentants (conducteurs, contrôleurs...) et ce public est au centre de la problématique managériale de l'entreprise. En matière de sécurité, ses attentes sont celles qui correspondent aux trajets domicile travail, aux heures de pointe marquées par l'affluence, ou aux horaires extrêmes réputés plus risqués. Leur contribution au coût du service (abonnement) est une charge fixe obligatoire et non négligeable du budget familial. La frustration et la fatigue peuvent faire d'eux des voyageurs hyper sensibilisés. S'agissant des clients par choix et des non clients - il s'agit de les convaincre avec toute la panoplie de l'offre de mobilité et de la qualité du service, dont la sécurité fait partie. Les experts en marketing estiment que l'insécurité serait davantage la raison d'une
29
désaffection éventuelle dans la mesure où on a une solution de rechange -, que la sécurité supposée serait celle d'une adhésion. Cela suggère de privilégier les stratégies de fidélisation. Quoi qu'il en soit, face au cocon que représente le Îhicule individuel, et à sa souplesse, le transport collectif doit garantir un confort et une tranquillité suffisants pour convaincre, même si les arguments concurrentiels majeurs tiennent plutôt à la qualité de la desserte et à la fréquence. Le public est de plus en plus interrogé, de différentes manières, par les collectivités et les transporteurs et il leur appartient de ne pas négliger l'expression de son ressenti en matière de sécurité, en l'identifiant et en le localisant de façon précise, pour adapter en permanence les réponses.
30
2 Un volet essentiel des stratégies locales
La mission permanente a une nouvelle fois constaté, lors de ses investigations sur le thème des transports collectifs, que les dispositifs de prévention de la délinquance qui fonctionnent efficacement sont ceux dans lesquels tous les acteurs sont impliqués, dans un système partenarial qu'il est d'autant plus nécessaire de réguler qu'il est complexe. Une meilleure sécurité dans les réseaux de TCU ne peut résulter en effet que d'une bonne coproduction de la prévention associant tous les acteurs compétents, sous l'égide des AOT qui ont des responsabilités nouvelles, en veillant à une parfaite complémentarité des missions exercées, garantie par une convention (2.1). Mais elle doit aussi être intégrée dans la stratégie territoriale de l'agglomération, dont elle peut d'ailleurs favoriser l'émergence, ou à défaut être parfaitement articulée avec celles des communes concernées (2.2).
2.1 La coproduction de sécurité appliquée aux réseaux de TC
La coproduction de sécurité dans les TCU est une démarche exigeante qui renvoie aux compétences des différents acteurs. La loi de 2007 confie aux collectivités compétentes (AOT) qu'elles soient généralistes ou dédiées, le même rôle de pivot qu'elle confie aux maires, mais son application est encore balbutiante (2.1.1). Une parfaite compréhension de l'étagement et de la complémentarité des interventions des uns et des autres : transporteur, collectivités territoriales et Etat, est indispensable (2.1.2). Son bon fonctionnement en temps normal comme en cas de crise, suppose une formalisation appropriée (2.1.3).
2.1.1 Les compétences nouvelles des AOT en prévention
Les AOT urbaines sont dans la majorité des cas les intercommunalités de droit commun. La mission permanente s'était penchée dans un rapport précédent sur la thématique de l'intercommunalité appliquée à la prévention de la délinquance37. Elle en a souligné l'intérêt et en a releÎ les difficultés y compris politiques - de mise en oeuvre, qui ont jusqu'à présent bridé l'exercice de cette compétence au niveau des agglomérations. Elle avait alors formulé quelques suggestions pour réduire ce décalage constaté entre la possibilité offerte par les textes et la réalité. Quoiqu'il en soit, en tant que telles les intercommunalités organisatrices des réseaux de transports en commun qu'elles soient généralistes ou spécifiques - sont par ailleurs soumises aux obligations du décret du 27 août 2008 déjà cité, précisant les modalités du concours qu'elles doivent apporter aux actions de prévention de la délinquance, qui, outre l'organisation de la collecte et des échanges de données concernant la délinquance dans les TCU, leur prescrit notamment :
37
L'intercommunalité un atout pour la prévention de la délinquance. Perspectives et prospective. Juin 2011
31
de s'impliquer dans l'élaboration des dispositions propres aux transports incluses dans le contrat local de sécurité (remplacé depuis par la stratégie territoriale) ; de préciser les mesures de prévention ou de sécurisation des personnels et des usagers qu'elles s'engagent à mettre en oeuvre dans le cadre de cette stratégie ; de veiller à définir des mesures de nature à prévenir les actes de délinquance et à protéger les usagers et les personnels des services de transport ainsi que les moyens consacrés à leur mise en oeuvre dans les conventions avec les opérateurs ou dans les budgets des régies, et notamment les modalités d'organisation, de fonctionnement et de financement ; de définir les modalités d'évaluation de ces mesures. Ce texte ne fait qu'appliquer au contexte des TCU les principes généraux de la loi. Sa mise en oeuvre ne va cependant pas de soi du fait de la complexité de l'organisation des transports collectifs urbains qui se reporte sur les questions de prévention et de sécurité. L'acteur responsable de cette politique publique n'est pas parfaitement identifié ni même unique. Les autorités organisatrices doivent s'impliquer en application des textes et du fait de la compréhension large qui est dorénavant la leur de leur rôle, mais elles sont étroitement dépendantes des prestations des opérateurs de transport qu'elles ont désigné, présents quant à eux sur le terrain dans des partenariats au quotidien avec les autres acteurs, dont notamment les forces de sécurité. Les limites territoriales à considérer pour les actions sur le réseau sont par hypothèse celles de l'AOT, mais il est relativement peu fréquent que la compétence générale de prévention de la délinquance ait été transférée au niveau intercommunal, ce qui crée une distorsion. La mission a donc releÎ que la construction proposée par les textes rencontre de sérieuses difficultés de mise en oeuvre et elle a axé sa réflexion sur les voies et moyens d'une amélioration.
2.1.2 Complémentarité et coopération
Sans revenir sur les missions respectives du transporteur, des collectivités, et des différents services de l'Etat, la mission propose ci-dessous une approche graduée des interventions possibles de chacun d'eux et de leurs synergies, sur la base des observations qu'elle a pu faire. Elle a notamment releÎ des structures et pratiques innovantes dont elle suggère de s'inspirer. Pour en faire une présentation ordonnée elle aborde ci-dessous successivement les champs d'intervention : de l'opérateur exploitant le réseau, à qui il appartient, dans le cadre des textes en vigueur et avec des moyens appropriés dont il a la maîtrise, de lutter contre l'incivilité, contre la fraude et contre d'autres infractions ;
32
des collectivités locales concernées dont la prise en charge de la « tranquillité publique » peut s'organiser de différentes manières, mais reste encore trop rare ; de l'Etat, dont l'efficacité dans l'exercice de ses compétences régaliennes en matière de sécurité, peut être sensiblement accrue par un partenariat opérationnel bien organisé.
2.1.2.1
Les interventions de l'exploitant : lutte contre la fraude, médiation
Les limites du rôle de l'exploitant font débat, comme la mission a pu le relever lors de ses contacts. Les textes en vigueur et une compréhension large de la mission d'une entreprise de service public fut-elle de statut priÎ suggèrent une certaine implication, que la réalité des faits a d'ailleurs imposé dans les sites les plus concernés, et en particulier dans les grandes agglomérations. Mais une conception plus restrictive et donc plus économe de moyens et centrée sur les objectifs propres à l'entreprise - s'exprime fortement, de la part d'une profession dont les équilibres économiques sont fragiles dans un contexte concurrentiel assez affirmé. La mission estime quant à elle que le rôle de l'exploitant pour assurer un service public de qualité, incluant un standard éleÎ de confort et de sécurité, est essentiel. Il doit le conduire à investir dans les deux champs complémentaires de : la lutte contre la fraude, maladie endémique des transports urbains qui mine l'équilibre financier du service, menace le « bien vivre ensemble » dans la ville, et est souvent le signe d'une situation dégradée et l'antichambre de comportements plus graves. la médiation pour lutter contre l'incivilité et garantir des conditions paisibles de déplacement. La lutte contre la fraude La lutte contre la fraude est un objectif central des opérateurs de transports urbains et des AOT, pour des raisons économiques et en raison des implications diverses d'un tel comportement incivique.(voir supra paragraphe 1.1.1.). La mission a releÎ que la lutte contre la fraude était assez contingente, subissant des variations dans un sens ou un autre en fonction : de troubles divers sur le réseau ; des conséquences de mouvements sociaux ; de troubles importants à la circulation routière sur les axes urbains du fait de gros travaux ; de la crise de l'emploi ; de la fragilité économique du système de transport urbain.
33
Sa mise en oeuvre ne va pas sans difficultés vis-à-vis de certains publics et dans certaines circonstances, et peut générer un « risque », vivement ressenti parfois par les personnels qui en sont chargés, ce qui a conduit à renforcer et à sécuriser les dispositifs. Il s'agit donc d'une action ambivalente : sa nécessité n'est pas contestée, mais elle ne bénéficie pas toujours d'un soutien unanime et ses implications sont redoutées. Elle est assurée par des Îrificateurs et contrôleurs assermentés mais non nécessairement agréés. D'autres agents de l'exploitant, assermentés et agréés dans le cadre des mêmes textes, pourront avoir un rôle de « sécurisation » ou « d'intervention ». Les modalités de son exercice peuvent varier, mais la mission a releÎ qu'elles ont dû partout s'adapter à des contextes de plus en plus difficiles. Les contrôleurs-Îrificateurs ont d'abord une fonction commerciale d'accueil, de renseignement et de reconquête du client en infraction. La fiche métier « contrôleur du service public de voyageurs » du CNFPT précise les deux missions : contrôler la validité des titres de transport, et assister et renseigner les voyageurs. La démarche est la même dans la fiche métier de la RTM : « les Îrificateurs sont en relation directe avec la clientèle. Ils sont chargés de veiller au respect du Règlement Public d'Exploitation en général et au respect des règles d'utilisation des titres de transport en particulier. Ils portent assistance à l'exploitation en cas de dysfonctionnement, d'incident, de problème de circulation, d'accident. Ils renseignent les voyageurs, les assistent en situation dégradée, les accueillent et les guident en cas de forte affluence et participent à la prévention des accidents ». Le fraudeur n'est généralement pas un délinquant potentiel38. La politique commerciale de certains réseaux39 est d'abord de fidéliser le client, par exemple en remplaçant l'indemnité forfaitaire par la vente d'un abonnement de deux mois, en fonction du délai de règlement du procès-verbal (cas de Lille ou Dijon). Dans les réseaux de TCU, il y a donc une complémentarité commerciale et d'exploitation entre le conducteur et le contrôleur-Îrificateur. Dans les entreprises de transport urbain des réseaux Veolia40, une équipe de contrôle est en général composée de trois personnes : deux Îrificateurs assermentés chargés du contrôle des titres ; un agent de maîtrise, agréé par le procureur (529-4 du CPP et R49-8-1 du CPP) pour constater l'infraction et relever l'identité des contrevenants refusant de régler l'indemnité forfaitaire. Les opérations de contrôle, notamment lorsqu'elles se déroulent à la montée dans les transports de surface, peuvent avoir un impact sur l'exploitation, en compliquant l'accès au Îhicule, par exemple, et en augmentant la durée de l'arrêt. Le contrôleur-Îrificateur travaille en lien avec le conducteur. Pour des raisons d'efficacité, notamment économique, certains réseaux ont choisi de cultiver la polyvalence et de recruter leurs contrôleurs parmi les conducteurs. Si les contrôles
38 39 40
Entretiens avec les directions de la sécurité de Keolis et Veolia Transdev Notamment dans le groupe Keolis Entretien avec le directeur prévention, santé, sécurité de Veolia
34
nécessitent des personnels ponctuellement plus nombreux, il est difficile, notamment dans les petits réseaux, de maintenir en permanence une équipe de personnels uniquement dédiés au contrôle. L'effectif de contrôle doit pouvoir être modulé. Cette logique peut aller jusqu'à des emplois à mi-temps de contrôle et de conduite41. Mais le besoin concerne aussi l'efficacité dans l'exploitation. Pour mieux comprendre le métier de l'autre, d'autres politiques de ressources humaines peuvent prévoir des cycles d'alternance plus longs, le contrôleur pouvant choisir de revenir à la conduite, au bout de quelques années, en cas de fatigue excessive42.43. La dégradation des conditions du contrôle des titres de transport peut rendre la mission des agents extrêmement difficile, au point de ne pouvoir s'exercer sans le renfort de moyens d'intervention, qu'ils soient internes à l'entreprise ou issus des forces de sécurité. Dans les faits, cet appui, y compris de la part de la police nationale, est relativement fréquent, notamment dans certains secteurs centraux ou difficiles des grandes villes. L'esprit des textes en vigueur désigne logiquement les policiers municipaux, dans le cadre de leur mission générale de contrôle du respect des règles locales, dont le paiement du titre de transport fait partie, pour assurer cet appui. La mission relève cependant que leur implication est rare et qu'à l'inverse, celle de la police nationale ne l'est pas. Il convient de s'interroger sur cette situation, qui résulte certes de la nécessité d'assurer la protection d'agents assermentés du service public particulièrement menacés, mais peut dénaturer l'opération de contrôle et éloigner les policiers nationaux de leurs missions principales. La mission estime que l'implication de la police municipale devrait être recherchée en priorité, et que la police nationale ne devrait intervenir qu'au titre d'une menace aÎrée à l'ordre public ou pour constater des faits délictueux. Elle est cependant consciente que les réponses praticables sont étroitement fonction des moyens effectivement disponibles localement. La récidive des infractions de fraude au titre de transport peut devenir un délit, à partir de dix infractions constatées. L'aggravation de cette approche, en réduisant à cinq infractions la quotité constitutive du délit a été envisagée dans le Plan national 2009-2012. Cependant, cette mesure ne s'est pas à ce jour concrétisée, faute d'un consensus suffisant entre les ministères concernés (Transports, Intérieur, Justice) et entre les grands opérateurs de transports. Le débat auquel elle a donné lieu illustre des compréhensions encore assez différentes des exigences de la lutte contre la fraude, notamment entre les opérateurs priÎs de province et les grandes entreprises publiques. Indépendamment du nombre d'infractions pour fraude releÎes contre une personne générant le délit de fraude d'habitude, les conditions dans lesquelles se déroule le constat du délit ont une grande importance. Une bonne pratique releÎe à Orléans est de faire procéder à l'interpellation de l'auteur, qui marque la gravité de la situation.
41 42
Entretien avec la CTS Entretien avec la SETRAM 43 Plusieurs textes législatifs et réglementaires ont renforcé la protection des personnels des entreprises de transport dans leur mission de service public. On peut notamment citer : l'article L211-16 du code rural et de la pêche maritime concernant les chiens d'attaque, le décret 2000-1136 du 24 novembre 2000 concernant la procédure d'agrément des agents appelés à constater des infractions tarifaires, l'article L2242-7 du code des transports concernant l'outrage à agent de l'exploitant, les infractions spécifiques prévues par le code pénal (22212, 222-14-1, 222-15-1 et 433-3)
35
Les agents assermentés des entreprises de transport ont également d'autres prérogatives, dont la mise en oeuvre reste inégale. Le support juridique en est la loi du 15 juillet 184544, codifiée dans le code des transports, et notamment le L2241-1 et suivants, qui charge notamment les agents assermentés de l'exploitant du service de transport de constater par procès-verbaux les contraventions prévues par les règlements relatifs à la police ou à la sûreté du transport. A défaut de paiement immédiat, ces agents, lorsqu'ils sont agréés par le Procureur de la République, sont habilités à relever l'identité et l'adresse du contrevenant45 . Les articles 73, 74 et 77 du décret du 22 mars 1942 définissent les infractions contraventionnelles que peuvent constater les agents assermentés de l'entreprise de transport ferroviaire d'intérêt national ou local, et le transport public routier de personnes. Outre l'absence de titre de transport valable, il s'agit d'actes de délinquance spécifiques : dégradations aux infrastructures et aux appareils et au matériel de toute nature servant à l'exploitation ; entrave à la circulation dans le couloir (du Îhicule de transport) ; obstacle à la fermeture des portières ; emploi abusif du signal d'alarme ou d'arrêt ; état d'ivresse. L'article 6 de ce décret fonde les arrêtés préfectoraux d'approbation des règlements d'exploitation des transports publics de voyageurs. Ce sont les infractions à ces règlements que constatent les agents assermentés de l'exploitant du service de transport46. L'article L2241-2 du Code des Transports dispose également que si le contrevenant refuse ou se déclare dans l'impossibilité de justifier de son identité, les agents assermentés et agréés en avisent sans délai et par tout moyen un officier de police judiciaire territorialement compétent. Pendant le temps nécessaire à l'information et à la décision de l'officier de police judiciaire, le contrevenant est tenu de demeurer à la disposition d'un agent visé au même premier alinéa. Sur l'ordre de l'officier de police judiciaire, les agents peuvent conduire l'auteur de l'infraction devant lui ou bien le retenir le temps nécessaire à son arriÎe ou à celle d'un agent de police judiciaire agissant sous son contrôle47. L'article L 3114-1 du même code a étendu les dispositions décrites ci-dessus aux services de transport public routier de personnes réguliers et à la demande. En aucun cas, les agents de l'opérateur ne peuvent intervenir sur la voie publique.
44
Le décret du 22 mars 1942 précise les dispositions de la loi du 15 juillet 1845. L'article 1er indique les articles du décret qui sont applicables au contrôle et à l'ordre public dans les transports publics routiers de personnes. 45 Cf. l'article 529-4 du code de procédure pénale, qui définit également les conditions d'établissement du procès-verbal, et en particulier du versement de l'indemnité forfaitaire à régler par le contrevenant. 46 Selon le L2241-1 du code des transports cité. 47 Ce qui peut justifier une formation adaptée aux gestes techniques et professionnels d'intervention (GTPI)
36
Les interventions des agents concernés dans ce cadre, qui va bien au-delà du contrôle des titres, sont plus ou moins pratiquées, selon l'historique local et les consignes des groupes de transport. Les textes donnent cependant une indication claire de la conception qui est celle du législateur du champ de responsabilité du transporteur. Ils n'autorisent pas en théorie des compréhensions restrictives de ce rôle, dont la mission a cependant pu Îrifier qu'elles avaient largement cours, conduisant à un report vers l'Etat et ses services de la responsabilité des constats. Elle estime qu'une clarification par voie de circulaire serait utile (voir recommandation N° 7 infra). La lutte contre l'incivilité par la médiation, en partenariat Dans les réseaux de transports comme dans les quartiers, la médiation de tranquillité publique est une réponse largement développée, qui a démontré son efficacité. Cette forme d'action implique l'opérateur de transport, avec l'accord et le financement de l'AOT, mais en liaison avec la ville (agglo ou commune) qui met généralement en place des actions et moyens humains du même type. Elle peut avoir plusieurs objectifs suivant les phénomènes que l'on doit maîtriser : Assurer simplement une présence humaine rassurante.
Au Mans, des patrouilles de médiateurs du service municipal de tranquillité publique assurent une présence sur le réseau (aux points d'échanges et dans les Îhicules) en vue de prévenir des débordements de fin de semaine, aux heures les plus adaptées possibles. S'agissant d'un service municipal, sa présence ne peut concerner le territoire des autres communes de l'agglomération. Une équipe dédiée est ainsi mise à disposition de l'opérateur de transport. Mais ce dernier envisage de se doter de moyens propres, pour les spécialiser davantage aux problématiques du réseau, et en disposer sur tout le périmètre de transport. Cet exemple souligne que la coopération ville-réseau de transports peut emprunter plusieurs modalités, et requiert des arbitrages à la fois économique et d'organisation sur les attributions respectives entre l'opérateur et la collectivité, autorité organisatrice. Contribuer à empêcher l'usage détourné ou malveillant des dispositifs de sécurité des Îhicules. A Nantes, en septembre 2008, une conductrice a été tuée par son bus qu'elle contournait pour réarmer la sécurité de porte, dans un contexte de stress créé par plusieurs décompressions successives des portes. Par ailleurs, des passagers tiraient le signal d'alarme du tramway pour descendre devant chez eux. L'opérateur a mis en place un groupe de médiation, dont l'objectif est d'expliquer aux 10-12 ans les règles à respecter dans les transports en commun. Dans ce cas particulier, il s'agit de conducteurs affectés à temps partiel à cette tâche. Rappeler les règles de validation des titres.
A Bordeaux, l'opérateur utilise les services d'une dizaine de médiateurs qui interviennent quotidiennement dans les Îhicules de transport (bus et tram) du réseau et effectuent des actions de prévention et de médiation des incivilités, incitent à la validation, rappellent les règles d'usages, orientent et informent les voyageurs.
37
A Strasbourg, la CTS a un objectif identique : mieux faire comprendre au public jeune les règles et contraintes de fonctionnement, ainsi que de mieux faire respecter les personnels et les matériels. D'autres dispositifs de médiation peuvent être mis en place par les agglomérations et les villes, dans le cadre d'une politique de prévention dans les quartiers. Ces dispositifs peuvent être actiÎs en cas d'incidents sur le réseau de transports. Le dialogue avec les habitants est assuré généralement par une cellule de veille, dans un pilotage municipal, sous l'égide du CLSPD. Ces équipes peuvent être d'une grande utilité, sous réserve d'un professionnalisme qui est devenu un leitmotiv pour les associations impliquées. Il y a maintenant une filière d'emploi, avec des diplômes, équivalent du CAP et jusqu'à technicien de la médiation. Le recrutement est celui du territoire. Au travers de la formation, les médiateurs sont amenés à un niveau de diplôme qui leur permet de postuler ailleurs. Ils restent en moyenne cinq ou six ans avant de rejoindre des entreprises ou des communes48. Outre ces missions d'impact direct sur l'exploitation du service de transport, des actions extérieures impliquent également les acteurs concernés par les TCU : Les interventions en milieu scolaire (IMS) Elles concernent généralement les élèves de CM1-CM2, avant l'entrée en 6ème, qui conduit souvent à utiliser davantage les réseaux de transport. Il s'agit de comprendre les itinéraires et la signalétique, d'expliquer le fonctionnement, les sécurités des Îhicules, et le respect des règles. Ces IMS sont mises en oeuvre par pratiquement tous les réseaux. A Marseille, ces IMS sont réalisées par la cellule prévention de la RTM. Leur efficacité est mesurée par la baisse des incivilités dans les zones sensibles où ils interviennent. Si les interventions de la cellule médiation cessent, les incidents augmentent très rapidement. Par exemple, en cas de caillassage des bus, et en complément des actions de police, ces agents, avec des services municipaux (travailleurs sociaux) viennent au contact de la population et expliquent aux habitants les conséquences en termes d'exploitation de la ligne, suppression de certains services ou détournement d'itinéraire impliquant la non-desserte de certains arrêts49. L'animation d'éÏnements sportifs L'idée, là encore, est l'apprentissage de la règle, par l'intermédiaire de l'exemple du rugby, du foot. A Strasbourg, la CTS s'implique dans l'animation d'éÎnements sportifs, tel que le football en salle (« futsal »). L'apprentissage des règles de sécurité routière, peut impliquer l'agglomération ou la ville, et l'opérateur de transport (cas de la communauté urbaine de Strasbourg).
48
Témoignage d'Isabelle Idier, association « partenaires pour la ville » lors de la conférence Sécurité, démocratie et villes : Le futur de la prévention » organisé par l'EFUS, 13 décembre 2012. 49 Entretien avec le directeur de la sécurité de la RTM
38
L'implication dans les dispositifs mutualisés de médiation Un groupe de transport public s'est ainsi fortement impliqué dans la promotion et le fonctionnement des PIMMS (Points information médiation multiservices) en lien étroit avec d'autres opérateurs comme La Poste, EDF et des bailleurs sociaux. Il souligne que sa participation se fait avec l'appui des autorités organisatrices. Les PIMMS sont des lieux d'accueil animés par une équipe de professionnels, relais d'information et de médiation, qui facilitent l'utilisation des services publics, en informant sur les produits et services (horaires des bus, qualité de l'eau, horaires d'ouverture des agences, des bibliothèques,...), en expliquant les modalités de facturation, l'utilisation d'un mandat postal, en conseillant sur la maîtrise de la consommation d'énergie. Ils vendent des produits de base des entreprises partenaires : timbres, tickets de transports en commun, billets de train... Au total, la mission estime que les voies et moyens d'initiatives de médiation efficaces ne peuvent être normées et doivent s'inscrire parfaitement dans les cultures locales. Elle en a releÎ l'efficacité et a obserÎ des pratiques remarquables. Elle estime qu'il serait souhaitable qu'à due proportion de la gravité des situations, ces approches soient développées partout au sein des entreprises de transports dans leur espace propre, en complément des efforts faits par les collectivités locales, et en partenariat étroit avec elles ou avec les associations en charge.
3.
Recommandation : encourager la généralisation des démarches de médiation de tranquillité publique propres aux réseaux de transport, en diffusant les bonnes pratiques et en leur attribuant prioritairement des emplois aidés en réponse à proportion de leurs besoins.
2.1.2.2
Les interventions des différentes collectivités concernées : garantir la tranquillité publique du réseau, comme celle de la ville
Dans la majorité des agglomérations de province, l'essentiel des missions de tranquillité publique dans les TCU, comme sur la voie publique en général, devraient être assurées par la police municipale ou par une police intercommunale. La mission a releÎ que c'est loin d'être partout le cas. La mission principale des polices municipales est de nature administrative et préventive50 . Selon un rapport du Sénat : « La police municipale a une mission d'application des arrêtés édictés par l'autorité municipale dans un objectif de partage harmonieux de l'espace public pour faire respecter le bien-vivre ensemble »51. Les pouvoirs des agents des polices municipales sont définis notamment à l'article L511-1 du code de sécurité intérieure. Ils peuvent verbaliser en particulier les contraventions aux arrêtés de police du maire et les contraventions au code de la route. Ils peuvent également constater les infractions aux dispositions de plusieurs codes (code de la santé, code rural, code
50
De la police municipale à la police territoriale : mieux assurer la tranquillité publique, par MM. François PILLET et René VANDIERENDONCK, sénateurs. Rapport d'information du sénat, 26 septembre 2012 51 Cependant, la doctrine d'emploi de certains maires tendent à un emploi en intervention, notamment en exploitant les images de centres de supervision urbains en procédure de flagrant délit
39
forestier,...) Ils ne peuvent pas procéder à des enquêtes, mais peuvent recueillir des renseignements et rendre compte à un OPJ. Une convention de coordination signée entre le maire et le préfet permet de définir les échanges d'informations et de coordonner certaines procédures entre polices municipales et les forces de sécurité nationale, dans le respect des compétences de chacun. Les petites communes éprouvent des difficultés à créer et à supporter la charge d'entretien d'un tel service. L'article L512 du CSI autorise le recrutement par un EPCI d'agents de police municipale. La mutualisation est limitée à la gestion budgétaire et des ressources humaines. Pendant l'exercice de leurs fonctions sur le territoire d'une commune, ils sont placés sous l'autorité du maire de cette commune. Ce dispositif est parfois appelé abusivement : police intercommunale. Il suppose la signature par le maire d'une convention avec les autres communes membres du dispositif, précisant la doctrine d'emploi sur le territoire de chaque commune. Le rapport sénatorial cité propose de favoriser l'émergence de Îritables polices intercommunales. Il note en particulier que « comme l'a souligné lors de son audition le directeur général des collectivités locales, lorsque la coopération avec la police nationale telle que formalisée dans la convention de coordination s'étend aux transports et que cette compétence a été transférée à l'EPCI, il parait plus simple que la police des transports soit de la responsabilité de celui-ci ». La mission fait sienne cette recommandation.
4.
Recommandation : permettre le développement de polices intercommunales dédiées aux réseaux de transports en donnant explicitement cette possibilité aux collectivités territoriales, autorités organisatrices.
Les dispositifs de police municipale impliqués dans les TCU sont peu fréquents. Le dispositif le plus ancien est celui de la police municipale intercommunale des transports d'Orléans. Créée en 2004, cette police agit dans le cadre du contrat local de sécurité dans les transports (CLST) de la communauté d'agglomération, signé par 18 communes sur 22. Les policiers intercommunaux, recrutés et gérés administrativement par l'EPCI, sont mis à la disposition des maires pour l'exercice de leurs missions opérationnelles et notamment la constatation d'infractions. Le service fonctionne en complémentarité avec la police nationale et la gendarmerie nationale. La police intercommunale est composée de 24 agents dont des policiers municipaux, des agents de surveillance et des agents de médiation, qui exercent sur 18 des 22 communes de l'agglomération signataires du CLST52. La PMIT ne peut donc intervenir sur le territoire des
communes non signataires et le regrette.
Les principales missions de cette police intercommunale sont notamment: d'assister le service contrôle de la SEMTAO (lutte contre la fraude) ; de surveiller le réseau SEMTAO par des patrouilles embarquées à bord des bus et trams du réseau.
52
Entretien cité avec F. Montillot et communiqué de presse de l'agglO, 18 janvier 2010
40
La mission considère que cette expérience, dont le fondement juridique alimente certes des débats qui justifieraient une mise à jour des textes, a une efficacité aÎrée, et peut servir de référence à des développements similaires. A Chateauroux, la police municipale effectue une centaine d'interventions par an concernant le réseau de transports. Son efficacité est reconnue, mais elle est limitée au territoire de la ville centre. Au Mans, les agents de Tranquillité publique, bien que ne bénéficiant pas du statut de policiers municipaux, effectuent également de telles patrouilles. La limitation statutaire de leur champ d'intervention au territoire de la ville du Mans est, là encore, ressentie comme un handicap sérieux. A Bordeaux, Marseille ou Strasbourg au contraire, les interventions de la police municipale d'importance d'ailleurs très inégale dans les TCU sont exceptionnelles ou inexistantes. La connaissance fine du terrain permettrait pourtant à ces agents de garantir la tranquillité publique dans les Îhicules et au voisinage des lignes dans l'agglomération, d'appuyer les contrôles, de rappeler la règle et de conforter les actions de médiation mises en oeuvre. Une autre limitation fréquemment releÎe par les opérateurs de transport concerne l'amplitude de service des policiers municipaux qui est souvent sensiblement plus étroite que celle du service de transport. Ce décalage est d'autant plus ressenti que la présence humaine apaisante est particulièrement nécessaire en fin de journée. Une mission beaucoup plus fréquemment assurée par les polices municipales concerne les incivilités routières : stationnement sur des arrêts de bus ou dans des couloirs réserÎs. Cette mission reÐt un enjeu important de qualité de service. La coopération de la police municipale avec l'entreprise de TCU peut concerner également le soutien aux conducteurs victimes d'agressions verbales ou physiques de la part de conducteurs d'autres Îhicules53. Tout en étant consciente des implications en termes de coûts et donc des arbitrages financiers que cela implique inévitablement, la mission estime : que la prise de conscience d'une responsabilité locale en matière de tranquillité publique et de sécurité de proximité est réelle et très encourageante, mais qu'elle devrait s'étendre davantage à l'espace des TCU, qui n'ont aucune raison d'en être tenus à l'écart ; des bonnes pratiques existent dont on peut s'inspirer ; qu'une approche globale des moyens locaux de la prévention, susceptible de déboucher sur des arbitrages qui incombent en toute hypothèse aux collectivités locales concernées, devrait être systématiquement recherchée, pour affecter les ressources appropriées au bon niveau, compte-tenu des responsabilités juridiques respectives.
53
Entretien de la mission avec la police municipale de la ville de Lyon
41
2.1.2.3 Le rôle de l'Etat : lutter contre la délinquance, avec l'appui de ses partenaires
La responsabilité de l'Etat en matière de sécurité et de lutte contre la délinquance ne se divise pas : elle concerne donc les espaces du TCU au même titre que tous les autres, qui requièrent une implication des services à due proportion des risques, sans qu'il soit nécessaire d'aller au-delà dans le cadre de ce rapport. Une question a toutefois été souvent évoquée devant les membres de la mission : la capacité d'intervention des forces de sécurité (police ou gendarmerie) dans les espaces du TU est-elle suffisante ? Comment l'améliorer ? Faut-il mettre en place des structures ou unités dédiées ? La mission a releÎ une certaine diversité de réponses, face à un risque spécifique reconnu comme tel. Il est certain qu'elles découlent au premier chef de la taille de l'agglomération et des effectifs de police urbaine disponibles : la mise en place d'une unité dédiée n'est possible et pertinente, en toute hypothèse, que dans les grandes villes, et sous réserve de confirmation d'un besoin spécifique, que l'observation fine de la délinquance peut contribuer à définir. Un certain nombre d'initiatives ont pu être prises dans ce sens. Il s'agit de services interdépartementaux de sécurisation des transports en commun (SISTC), forts d'une centaine d'agents, à Lille, Lyon, Marseille, ou d'unités de sécurisation des transports en commun (USTC) d'environ 20 agents54. Ces dispositifs sont très appréciés des opérateurs, l'intervention dans les transports requérant une étroite coordination avec l'encadrement et les personnels (conducteurs et Îrificateurs) et des relations spécifiques avec les passagers, qui ne sont pas celles de la voie publique en général et nécessitent formation souvent assurée par l'opérateur - et habitudes. Les SISTC ou USTC sont des structures souples. Dans une grande agglomération, les policiers de l'entité spécialisée ne sont pas dédiés exclusivement aux transports. S'il y a lieu, ils interviennent sous le signe de l'urgence ou en cas de proximité sur d'autres types de mission. Cependant, l'essentiel de leurs tâches concernent les TCU. En retour, les interventions sur le réseau de TCU ne sont pas réserÎes à l'entité spécialisée : c'est l'unité la plus rapidement disponible qui est sollicitée. Un DDSP indique que les missions principales des policiers de l'entité chargée des transports au sein de sa direction concernent la délinquance d'appropriation (« vols à la tire »), les atteintes aux personnes, les infractions à la législation sur les étrangers (ILE) et les infractions à la législation sur les stupéfiants (ILS). Ces objectifs seront atteints notamment lors de la présence policière en appui à des opérations de contrôle par l'opérateur (cf. supra point de vue de la mission à ce sujet). Si l'on s'en tient aux attentes exprimées, force est de constater que le développement de ces unités, ou même leur généralisation au-dessus d'un certain seuil de population, serait une réponse appréciée. La mission le comprend. Mais elle estime que la qualité des relations opérationnelles et quotidiennes, qui permet d'installer la confiance, est la condition essentielle
54
Toulouse, Bordeaux, Rouen, Strasbourg, Nantes, St Etienne, Montpellier ; certaines existent depuis les années 90. Creteil a été intégrée dans le périmètre de la SPRT
42
de l'efficacité de la lutte contre la délinquance dans les transports, et qu'elle permet des réponses appropriées aux risques encourus et aux signalements, même en l'absence d'unité spécialisée. Une réalité s'impose en fait à l'observation : la connaissance et la compréhension mutuelle des difficultés Îcues, notamment face aux risques propres à certains quartiers et à certains publics, caractérisent les relations au quotidien entre policiers et personnels du réseau. Dans ces conditions, le constat d'une bonne réactivité de la police paraît très largement fait. Le souhait de cette dernière de disposer, de la part du transporteur et de ses agents, de toutes les informations en sa possession pour faciliter sa tâche, est parfois exprimé, dénotant sans doute des interrogations ici ou là. La mission estime qu'il appartient aux responsables, par exemple dans le cadre des conventions évoquées ci-dessous, de définir les voies et moyens d'une telle pratique d'informations mutuelles, qui requiert des précautions pour rester strictement dans le cadre des textes en vigueur et préserver la sécurité de tous. Enfin, ayant noté que la question du coût pour l'opérateur de la recherche et de la transmission des images vidéo dans le cadre des investigations judiciaires, reste posée par certains transporteurs, qui estiment qu'il devrait être pris en charge par l'Etat et ne pas leur incomber, la mission souhaite indiquer clairement sa position. Faisant siennes les conclusions déjà produites à ce sujet par l'IGA dans un rapport sur l'efficacité de la vidéoprotection 55, et à l'instar de l'option prise par de très nombreux réseaux d'une coopération fondée sur l'intérêt mutuel, qui les conduit à effectuer cette tâche à titre gracieux, la mission estime que cette solution s'impose. Corollairement, les services de police n'obtiendront de réponses rapides et utiles à leurs demandes que si celles-ci impliquent des efforts que l'on peut raisonnablement exiger d'un partenaire. Par exemple, tel directeur de réseau mobilisera volontiers son personnel habilité pour lire de nombreux enregistrements en cas de fait particulièrement grave, mais ne pourra pas réserver la même suite à des demandes récurrentes qui peuvent être disproportionnées par rapport aux faits. Il faut donc privilégier une approche pragmatique, donnant lieu à des échanges permanents pour que les demandes soient calibrées et les réponses rapides, les modalités pouvant également figurer dans une convention locale.
2.1.3
Un partenariat formalisé par des conventions
L'importance d'une coopération opérationnelle fluide, et la nécessité d'en préciser les objectifs, les contours dans le respect des textes fixant les missions de chacun des acteurs et les modalités, suggère à la mission de préconiser la mise en place de conventions ad-hoc, entre l'opérateur, la ou les collectivités locales et l'Etat. De telles conventions existent déjà dans la plupart des grands réseaux. Ce dispositif spécifique doit néanmoins s'intégrer dans la logique plus large de la prévention de la délinquance dans l'agglomération (voir 2.2) et
55
Rapport complémentaire sur l'efficacité de la vidéoprotection IGA n° 10-059-02, IGGN n° 32 568 et IGPN n° 10/1246D Novembre 2012
43
s'articuler avec ceux régissant strictement les relations police nationale- police municipale qui ont d'ailleurs été récemment rénoÎs. Cet exercice doit rester souple et adapté aux circonstances locales, c'est pourquoi on se limitera ici à en préconiser le principe et à en proposer les éléments essentiels, du point de vue des acteurs impliqués, du contenu, et des articulations évoquées ci-dessus. Il s'agirait d'un document multipartite, impliquant tous les acteurs concernés par la prévention et la sécurité sur le réseau de TCU et y consacrant des moyens : l'opérateur, l'autorité organisatrice, l'agglomération (si elle est différente) et les communes concernées, et l'Etat. Pour ce dernier partenaire les questions traitées impliquent l'engagement de l'autorité administrative et de l'autorité judiciaire. Du point de vue du contenu il devrait a minima comprendre : Les objectifs et les modalités de l'échange d'information (y inclus vidéoprotection) ; Les formations ou sensibilisations aux spécificités du TCU et aux contraintes mutuelles ; Les instances et les modalités de la coordination opérationnelle (en temps normal et en période de crise, y inclus exercices préparatoires) ; Les modalités du soutien au personnel et aux autres victimes en cas d'agression...etc. (modalités du dépôt de plainte, accueil, soutien psychologique...etc.) ; Un dispositif d'évaluation et de remise à plat périodique. S'agissant de l'articulation avec l'ensemble des dispositifs en place, la mission recommande de veiller à ce que cet exercice soit effectivement réalisé et suivi, sous l'égide de l'AOT, conformément à l'esprit des textes en vigueur, et en liaison avec les instances partenariales de la prévention de la délinquance, si possible au niveau de l'agglomération. Dans la mesure où les polices municipales sont concernées, il devra impliquer toutes les communes qui le souhaitent et tenir compte des dispositions conventionnelles spécifiques régissant pour chacune d'elles, les rapports entre police (ou gendarmerie) nationale et police municipale.
5.
Recommandation : proposer la généralisation à tous les réseaux de transports urbains des agglomérations de plus de 100 000 habitants par exemple, d'une convention multipartite régissant les rapports entre tous les acteurs impliqués dans la prévention et la sécurité sur le réseau, pour optimiser l'efficacité de leurs interventions respectives par une bonne coopération.
L'annexe au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale fournit le canevas d'une convention de coordination entre police nationale ou brigade de gendarmerie nationale et police
44
municipale.56 Cette convention-type ne prévoit pas le besoin de coordination pour des actions de sécurisation ou de prévention concernant les TCU.
6.
Recommandation : faire évoluer la convention-type annexée au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale pour prendre en compte le besoin de coordination au bénéfice de la tranquillité et de la sécurité publique dans les TCU.
En conclusion de cette partie, la mission fait le constat : a- qu'une relation de confiance entre forces de police (ou de gendarmerie), polices municipales et opérateur de transport est indispensable, et qu'elle est établie, dans la grande majorité des cas ; b- qu'au-delà de la présentation « commerciale » au voyageur de la nécessité d'acquitter le prix d'un titre de transport et de respecter les règles de savoir-vivre, l'opérateur a besoin d'un appui à ses opérations de contrôle et à la lutte contre les dégradations et les agressions verbales, visant notamment ses personnels ; c- qu'en fonction des conditions locales, de l'intensité de la délinquance dans les TCU et de sa nature, cet appui est fourni par une police municipale, (ou une police municipale intercommunale), ou par la police nationale ; d- que tous les opérateurs et les groupes contactés reconnaissent que l'intérêt bien compris de l'opérateur est de s'investir dans une coopération fondée sur l'intérêt mutuel, ce qui est le cas très général. Cette coopération est notamment illustrée par la fourniture d'images analysées aux forces de police ; e- que ces coopérations, si elles sont généralement excellentes, méritent une meilleure formalisation et un organe de régulation. Par exemple, une réunion annuelle ou bi-annuelle de haut niveau (préfet, procureur, président de l'autorité organisatrice, DG de l'opérateur) de bilan et de perspective permet d'adapter les limites raisonnables aux demandes de chacun ; f- que, dans quelques cas, il est pris prétexte de l'ambiguïté des textes pour refuser de sortir des limites étroites des intérêts à court terme. En attendant une mise à jour de ces textes, la mission recommande :
56
Voir la circulaire d'application INTK1300185C du 31 janvier 2013 qui prévoit notamment la réalisation d'un diagnostic de sécurité préalable à la signature de la convention. Cette circulaire s'applique aux polices municipales composées d'agents recrutés par un EPCI et mis à disposition de plusieurs communes.
45
7.
Recommandation : rappeler aux acteurs du transport public, par voie de circulaire (Transports-Intérieur-Justice) publiée au JO, leurs droits et devoirs en terme de respect des règles dans les espaces dont ils ont la maîtrise dans le cadre des textes en vigueur, en précisant bien les champs d'application des différents dispositifs et leurs implications diverses, y compris en termes de concours éventuel de la force publique.
Cette circulaire pourra utilement servir de base à la convention multipartite évoquée ci-dessus.
2.2 La prise en compte dans les stratégies territoriales de sécurité et de prévention
Sur la base des observatoires de la délinquance animés par l'autorité organisatrice, que prévoit le décret précité, la délinquance dans les transports mérite un diagnostic particulier avant d'agir en prévention, du fait des risques spécifiques à l'espace transport, des populations concernées et des territoires traversés. Cependant, les actions de prévention menées doivent s'intégrer dans une stratégie territoriale globale, qui ne peut être que d'agglomération, ce que l'entrée TCU peut favoriser. La mission a fait le point avec les structures administratives qui suivent la situation des dispositifs de prévention dans les transports. Comme de précédents travaux l'avaient releÎ, et comme l'a confirmé « l'Observatoire national de la délinquance dans les transports » (ONDT Ministère chargé des Transports) la promotion de la formule de « Contrat locaux de sécurité » dédiés aux transports collectifs (CLS-Transports), a été remplie de succès, puisqu'ils se sont multipliés et réÏlent des démarches très intéressantes. Cela confirme l'importance ici aussi du partenariat. Cette approche très spécifique aux acteurs des TCU est souvent portée par la dynamique d'une relation efficace entre l'exploitant et la police, dont la mission a pu observer qu'elle est aujourd'hui très générale et proportionnelle à la gravité des situations. Elle a toutefois pu contribuer à un certain isolement de la problématique « transports » par rapport à la stratégie générale de la ville ou de l'agglomération. La mission, l'ayant obserÎ en plusieurs sites, estime qu'il faut progressivement y remédier et en fait l'un de ses points forts. A ce titre elle suggère une approche en deux étapes : si la phase de diagnostic doit être menée séparément, car il importe d'identifier les problèmes spécifiques des TCU dans la ville en matière de sécurité, l'intégration des actions qui en découlent à la stratégie générale de sécurité dans l'agglomération dont ils peuvent représenter un volet identifié nous paraît s'imposer, dans un souci de décloisonnement et de cohérence. Dans un certain nombre de cas, le CLS-T tient partiellement lieu de la convention multipartite préconisée. La mission juge préférable de clairement distinguer le volet TCU de la stratégie territoriale de l'agglomération de la convention citée, plus proche de l'opérationnel que de la stratégie, comme l'exemple de Lyon le démontre.
46
2.2.1 L'indispensable diagnostic préalable
Dans son guide sur l'évaluation des politiques locales de prévention de la délinquance publié début 2011, la Mission permanente avait rappelé l'importance d'un Îritable diagnostic « partir d'un diagnostic partagé » - et l'a situé dans le processus général. Ses préconisations de principe et de méthodologie s'appliquent parfaitement à la problématique des TCU : le diagnostic est établi sur la base de données aussi complètes que possible (sans négliger les « signaux faibles ») fournies par les différents acteurs et partenaires du réseau, à commencer par ses clients ; les conclusions doivent être partagées par les acteurs principaux : entreprise, AOT, agglomération, Etat, pour pouvoir servir de fondement à une stratégie partenariale ; il est effectué à une certaine date, avant le lancement d'un programme d'actions à moyen terme, et doit être périodiquement renouvelé sur la base du suivi de l'évolution de choses, dans cet univers en constant mouvement ; on peut juger nécessaire de faire appel à un expert, mais ce n'est nullement indispensable car un bon diagnostic repose avant tout sur la connaissance intime du réseau, du territoire, des attentes du public et du ressenti des personnels, que seuls ses acteurs possèdent ; l'établissement du diagnostic peut fournir matière au dialogue social d'une part, pour inclure complètement le volet sécurité dans le management de l'entreprise, et au dialogue avec les usagers d'autre part, dans le cadre des enquêtes sur la qualité de service ou au sein d'instances de dialogue et de conseils de quartiers. Les exemples de diagnostic de sécurité produit par des autorités organisatrices sont encore rares. Cependant celui établi en 2010 par un groupe restreint sous l'égide de l'autorité organisatrice lyonnaise (SYTRAL), a été présenté à la mission, lors de son déplacement à Lyon. Le document s'inscrit dans la logique du plan national de sécurisation des Transports et du plan national de prévention de la délinquance et de leurs déclinaisons départementales. Il décrit les principaux phénomènes, les points et les périodes sensibles, l'enjeu majeur que constitue la fraude, dresse les portraits croisés des auteurs et des victimes et présente le point de vue des personnels. C'est là une bonne pratique à encourager. Compte tenu des responsabilités respectives, et en application des textes en vigueur, l'Autorité organisatrice paraît devoir être davantage qu'aujourd'hui - l'initiateur et l'animateur naturel d'une telle démarche, avec le concours actif de l'opérateur exploitant, et celui des autres partenaires. Elle en livrera les résultats à la (ou aux) collectivité (s) qui portent la stratégie territoriale de prévention de la délinquance. A cet égard, une évolution des textes est souhaitable, dans le sens d'une clarification.
47
8.
Recommandation : faire évoluer le décret du 27 août 2008 pour confier explicitement à l'autorité organisatrice la responsabilité de produire le diagnostic de sécurité pour les transports urbains.
2.2.2 L'articulation avec la stratégie territoriale, les instances et les outils
La mission a souligné dans d'autres travaux combien le niveau de l'agglomération lui paraît pertinent pour établir et piloter une « stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance » telle que le Plan national de 2009 les prescrivait. Elle estime d'ailleurs que, compte tenu de l'écho rencontré par cette formule à la fois plus volontariste, y compris en termes d'évaluation, et plus souple dans sa forme le moment est venu de l'officialiser par un texte, qui inciterait également à l'entreprendre au niveau intercommunal, car c'est encore trop peu le cas, pour toutes sortes de raisons. S'agissant de la problématique transports, la mission estime donc qu'elle doit être intégrée à la stratégie générale tout en lui conservant une certaine identité, pour marquer l'appartenance du réseau à la ville tout en ménageant un espace de dialogue et de proposition pour ses acteurs et partenaires propres. Cela lui paraît pouvoir se faire à trois niveaux : celui des instances de prévention, celui des engagements, et celui de l'évaluation. Les instances Le développement de démarches spécifiques de prévention (CLS-Transports) s'est accompagné dans la plupart des cas de la mise en place d'une instance spécifique de concertation réunissant les acteurs concernés, qui a permis de grandes avancées. Toutefois, compte tenu des impératifs de cohérence rappelés ci-dessus, la mission estime qu'il faut préférer une participation active des acteurs des TCU à la démarche globale, au travers de leur participation au CISPD, ou, à défaut, des CLSPD des principales villes de l'agglomération, ainsi qu'à certains de ses groupes de travail thématiques ou opérationnels. Cette participation permettra l'apport des problématiques transports à la démarche générale, et en retour le bénéfice d'une association à cette démarche pour les acteurs du transport. Bien entendu, la mise sur pied d'un groupe de travail dédié aux transports au sein du CISPD s'impose. Elle permettra de préserver l'acquis d'une instance ancienne si elle existait, ou d'initier une dynamique dans le cas contraire. Elle fournira le lieu d'échanges spécifiques en cercle plus restreint, tout en restant en liaison avec l'ensemble, au travers des documents partagés, de la présence du ou des animateurs (élus, coordonnateurs...etc), et de l'inscription d'objectifs stratégiques et de programmes d'action articulés à la stratégie générale. La mission a constaté que les acteurs de la sécurité des TCU sont de plus en plus impliqués dans les débats parfois formels mais indispensables des réunions plénières des CLSPD, prenant place au sein des autres logiques urbaines. Leur management est porté par une instance plus concrète et souvent réunie, dans l'environnement institutionnel de la
48
prévention, piloté par l'exécutif de l'agglomération ou par le maire. Il est nécessaire de généraliser ces bonnes pratiques, là où ce n'est pas encore le cas. Dans le cas des grandes agglomérations, la participation à la démarche globale pourra être mise en place sous la forme d'une instance spécifique à laquelle sont associées toutes les communes du périmètre de transport urbain. Réciproquement, le comité restreint pilotant cette instance participe systématiquement au CLSPD de chacune des communes. A Lyon, à la suite du diagnostic de sécurité cité, le SYTRAL a produit une stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance pour les transports en commun Lyonnais d'une durée courte de 2 ans (2011-2013). Le document prévoit la gouvernance par un comité de suivi restreint et la coordination avec l'ensemble des CLSPD et des CUCS des communes incluses dans le périmètre de transport urbain. L'observatoire de la sécurité dans les transports urbains se réunit deux à trois fois par an. Les partenaires en sont la Préfecture, la Police Nationale, la Gendarmerie Nationale, le Parquet, l'Inspection Académique, et les communes du PTU57. Stratégie, engagements La mission préconise que les engagements relatifs aux actions de prévention à mener en direction des TCU, soient tout simplement l'un des volets de la stratégie générale et non plus consignés dans un document spécifique (CLS-T) comme c'est souvent le cas aujourd'hui. Il faut rappeler qu'en application de la loi, le pilotage de la prévention de la délinquance est assumé par le maire ou le président de l'intercommunalité, qui est dans la plupart des cas l'autorité organisatrice du TCU. Même dans les cas où ce service public relève d'une collectivité spécifique à compétence unique, la prise en charge politique est généralement la même ou en correspondance. Il est hautement souhaitable d'élever les engagements propres aux TCU, au même rang de solennité que tous les autres, et que la revue en soit assurée dans les mêmes conditions. La Mission préconise donc la mise en place d'un volet TCU dans toutes les stratégies territoriales, et suggère que cette recommandation figure dans le texte les officialisant. L'évaluation L'évaluation des actions de prévention reste très insuffisante en France. Elle est pourtant indispensable pour apprécier leur efficacité, permettre un pilotage fin, et optimiser les financements publics. Les conditions de fonctionnement des TCU sont par essence très évolutives et les réponses doivent être adaptées en permanence. C'est pourquoi la mission estime qu'au sein même d'un effort général d'évaluation qui reste à engager le cas des actions de prévention liées au réseau de transport devrait être prioritaire.
57
18 personnes participaient à la réunion du 18 janvier 2012, dont des représentants de la justice, de la préfecture, de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de l'inspection d'académie, de la ville de Lyon, de la ville de Villeurbanne et de l'opérateur Keolis.
49
Elle a fait valoir dans le Guide déjà cité qu'il n'est pas possible de se limiter à suivre le bon accomplissement des actions (indicateurs de réalisation) même si c'est indispensable, et à l'inverse qu'il est hasardeux de prétendre attribuer aux seules actions de prévention une évolution à la baisse de la délinquance. Ces deux limites valent pour les TCU. C'est pourquoi elle a développé la notion « d'indicateur intermédiaire » c'est-à-dire mesurant une évolution ponctuelle, dont on peut démontrer qu'elle a un lien direct non contestable avec une action ou un programme d'action. Elle estime que l'environnement des TCU est tout à fait propice à la détermination de tels indicateurs, car les faits qui affectent spécifiquement les usagers, les personnels et les équipements, peuvent être prévenus par des actions spécifiques, assez aisément mesurables. Certains le sont d'ailleurs d'ores et déjà. Il en va ainsi en particulier : de la lutte contre la fraude, qui est aussi une prévention en ce qu'elle impose un niveau accru de civilité sur le réseau et qu'à l'inverse l'élévation du taux de fraude est généralement le signe d'une dégradation de la situation et un facteur aggravant du risque d'incidents plus ou moins graves ; des programmes d'action coûteux notamment en moyens humains sont menés, et l'évolution peut être mesurée par des techniques d'enquêtes maintenant éprouÎes ; de la prévention des dégradations, par l'appel au respect des équipements, qui peut emprunter plusieurs voies, y compris la pédagogie du Travail d'intérêt général qui tend à prévenir la récidive ; l'efficacité de ces actions peut être aisément appréciée par un suivi fin des faits constatés, au travers des coûts de remise en état, dès lors qu'on adopte, comme le font aujourd'hui la plupart des opérateurs, un standard éleÎ de bon état visible des matériels et des espaces d'échange. Au total la mission estime donc qu'il est temps de donner à toutes ces initiatives une reconnaissance officielle et de permettre leur inscription dans des stratégies territoriales ellemême officialisées.
9.
Recommandation : dans le cadre de l'officialisation des « stratégies territoriales de sécurité et de prévention de la délinquance », par évolution des anciens CLS, prévoir à la fois la promotion des approches intercommunales au sein des CISPD, et la présence d'un volet « transports urbains » en leur sein, mis au point par un groupe de travail ad-hoc, mais validé comme l'ensemble de la stratégie, par l'instance plénière.
Enfin, la mission considère qu'il serait souhaitable d'évaluer l'impact du décret cité deux ans après le début de sa mise en oeuvre suite à la publication de la circulaire citée d'avril 2012.
10. Recommandation : faire évaluer l'impact de l'article 6 de la loi du 5 mars 2007 et de son décret d'application 2008-857 du 27 août 2008 précisant les modalités de concours apporté par les AOT aux actions de prévention de la délinquance deux ans après la publication de la circulaire de mise en oeuvre d' avril 2012.
50
3 Des moyens significatifs pour répondre à des besoins multiples
Au cours de ses entretiens et visites, la mission a cherché à apprécier la pertinence des moyens humains, techniques et organisationnels mis en oeuvre dans les réseaux de transports. Leur mise en place est forcément coûteuse, ce qui renvoie à d'inévitables arbitrages dans lesquels l'exigence de sécurité doit trouver toute sa place. Elle a choisi de résumer ses constats et suggestions en distinguant : les moyens humains (3.1) ; les moyens techniques (3.2) ; l'agencement de l'ensemble et son financement (3.3).
3.1 Des moyens humains en progression continue
S'agissant de prévention de la délinquance et de lutte contre le sentiment d'insécurité, il paraît évident que les réponses doivent prendre avant tout la forme d'une présence humaine rassurante, démontrant la maîtrise des lieux. Pourtant le monde du transport public n'a pas échappé à la loi générale de la substitution de dispositifs techniques de plus en plus perfectionnés à l'intervention humaine et ce mouvement n'est pas acheÎ. Dès lors, comment les AOT et les entreprises délégataires peuvent-elles, en respectant des équilibres financiers de plus en plus difficiles, répondre aux attentes du public et de leurs salariés ? Après avoir évoqué le sentiment d'insécurité et rappelé pourquoi la présence humaine est une réponse incontournable, on évoquera successivement la lutte contre l'incivilité, puis le développement, dans un certain désordre, des personnels spécialisés, et enfin l'évolution du rôle des conducteurs de bus.
3.1.1 La présence humaine, facteur essentiel de réduction du sentiment d'insécurité
Il est acquis depuis les premières études aux Etats-Unis dans les années 70 qu'il existe un décalage sensible entre l'intensité de la délinquance effectivement constatée et l'expression de la « peur du crime ». Le sentiment d'insécurité est sans commune mesure avec la criminalité réelle, et ce ne sont pas nécessairement les groupes les plus exposés qui éprouvent la peur la plus intense. Celle-ci joue sur les comportements des personnels comme des passagers, qui adoptent des stratégies d'évitement.
51
Selon la théorie la plus répandue, le sentiment d'insécurité se construit autour de deux composantes : une composante émotionnelle, la « peur personnelle », fondée sur l'appréciation de sa propre vulnérabilité, liée à l'âge, au sexe, le cas échéant, à une situation sociale précaire ; une appréciation du risque ou « perception sociale du risque »58, construite sur la nouveauté de la situation rencontrée, la capacité de la contrôler (alerter, fuir, ou résister), la référence à des situations précédentes, et au contexte perçu à travers les médias et l'entourage. L'appréhension sera d'autant plus vive que le besoin de respect de valeurs est prégnant.
Le sentiment d'insécurité des passagers
Les enquêtes de victimation mesurent ces deux aspects du sentiment d'insécurité par des jeux de questions adaptés. L'enquête « Victimation et sentiment d'insécurité de 2011 en Ile de France59 » fait apparaître que 3,4% des personnes interrogées déclarent avoir été victime d'une atteinte personnelle (vol ou agression) dans les deux ans qui précèdent. Tandis que simultanément, 45,5% des personnes interrogées déclaraient avoir peur d'être agressées ou volées dans les transports en commun. Les auteurs du rapport estiment qu' « améliorer le sentiment de sécurité dans les transports en commun est une priorité, car au regard des chiffres 2011, les franciliens sont beaucoup plus sujets à s'y sentir en insécurité qu'à y être victimes ». Ces conclusions sont valables également en province. Dans les réseaux de moyenne ou de faible importance, le fait qu'il y ait peu, voire pas d'incidents réels, n'empêche pas la préoccupation sécuritaire, d'autant que l'échelle de l'appréhension n'y est pas la même. Les personnes concernées par ces phénomènes souhaitent notamment percevoir des signes qu'il existe un garant des lieux ; pouvoir alerter ; obtenir du secours en cas d'incident s'orienter facilement pour échapper à une situation risquée...etc. Une présence humaine active est donc indispensable à toute stratégie de prévention. Elle doit être une réponse à la fois au ressenti des personnels et à celui des usagers.
Le sentiment d'insécurité des personnels
Les personnels des TCU sont depuis longtemps sensibilisés aux problèmes d'insécurité en raison des agressions de toutes natures qu'ils subissent. Dès lors la préoccupation de sécurité imprègne la gestion des ressources humaines dans l'entreprise, et le management de l'exploitation. Le conducteur est le premier, souvent le seul, pour rappeler la règle. Ceci explique qu'ils représentent le plus grand nombre de victimes d'agressions. (54%). Cependant, 38%
58
Marion Guilloux, université de Nantes, perception sociale du risque, sentiment d'insécurité et comportement de vigilance dans les espaces ferroviaires
59
IAU-IdF Novembre 2011 Enquête victimation et sentiment d'insécurité en Ile-de-France
52
des agressions concernent les Îrificateurs, ce qui les place largement en-tête pour le taux d'agression, de une pour 6,9 Îrificateurs contre une pour 66,9 conducteurs. 60 Les Îrificateurs et contrôleurs sont encore davantage confrontés au dilemme entre le respect des règlements qui fonde leur légitimité et la politique de l'entreprise qui, à la fois pour des raisons commerciales et pour la propre sécurité des agents, donne des consignes de retrait dès qu'un incident est à craindre. 61 Le premier moyen de lutte contre un tel sentiment est une formation adéquate des agents qui peuvent ainsi mieux gérer les situations anxiogènes et réduire les risques. Mais leur demande porte davantage sur le soutien et le renfort par des personnels spécialisés, en contradiction parfois avec l'approche client de l'entreprise. Après l'agression, la démonstration de l'implication de la hiérarchie auprès de son conducteur en cas d'incident joue un rôle essentiel dans l'acceptation personnelle de l'éÏnement et la limitation de l'anxiété lors du retour au poste de travail. Les procédures sont rodées, elles impliquent notamment le retrait du service, l'accompagnement personnel et juridique de l'agent s'il souhaite porter plainte, et un soutien psychologique.
3.1.2 La lutte contre l'incivilité
Le terme « incivilités » étant parfois utilisé pour désigner les actes de délinquance dont la sanction est prévue par le code pénal, mais que l'on renonce à relever et à sanctionner, du fait de leur nombre, la mission a retenu le terme de « comportement incivil » pour désigner toute attitude d'impolitesse, d'agressivité et de mépris, « dont l'accumulation provoque une usure, une érosion sur les individus et les collectifs, et en tout cas sur les acteurs de première ligne »62. Ces comportements coûtent cher aux entreprises. Les grandes entreprises publiques y ont consacré des moyens d'étude importants. Ainsi une étude réalisée pour la SNCF met en lumière la contribution des comportements incivils au renforcement de la préoccupation sécuritaire, composante du sentiment d'insécurité (cf supra). L'auteure, Monique Sassier, indique que « les comportements incivils entament la confiance dans le lieu et dans la relation aux personnels ou à l'entreprise ». La réponse de l'entreprise réside dans la valorisation du service au client, incluant l'accueil, la qualité de l'information et d'une façon plus générale, la qualité de service de transport. Elle suppose d'identifier les processus de production permettant de ne pas mettre le personnel de « première ligne » en situation de gêne ou de désaveu, au coeur de contradictions, du fait de leur incapacité à satisfaire ce que les clients ont compris des promesses de l'entreprise. Elle suppose aussi de former les personnels à subir les comportements des voyageurs et à ne pas provoquer inconsciemment ce type d'attitude. Elle doit impliquer la formation de
60
Rapport sûreté UTP 2011 Voir « "Orientation client" et (in)civilité : le cas d'une ligne de transport public collectif », Sophie Beauquier Lien social et Politiques, n° 57, 2007, p. 115-124. 62 Monique Sassier Lutter contre les incivilités à la SNCF
61
53
l'encadrement à l'écoute pour « réparer l'usure ». L'accumulation de mille petits faits est une Îritable « bombe à retardement » qu'il convient de désamorcer. Ces nuisances sont certes provoquées par la dégradation du climat sociétal ambiant. L'entreprise de transport peut considérer qu'elle n'est pas chargée de « réparer » la société. Cependant, selon certains sociologues, « les Français sont en demande d'autorité et attendent davantage de règles dans la vie collective 63». L'intérêt opérationnel, économique, commercial et social de l'entreprise de transport lui commande donc de faire respecter les règles et de réduire les dysfonctionnements conduisant à des comportements incivils. Outre la formation des personnels et l'amélioration des processus, la sensibilisation des voyageurs contribue à la réduction du nombre des incidents et à l'attractivité du transport collectif. C'est le sens des campagnes de sensibilisation lancées par les grandes entreprises de transport. Une telle sensibilisation devrait permettre de rappeler aux voyageurs qu'ils sont coproducteurs de sécurité dans les transports. Il arrive trop souvent que les voyageurs s'accommodent des incivilités et jugent parfois excessives les mesures prises pour les enrayer. Ils en viennent parfois à prendre le parti des contrevenants. Le rôle des contrôleurs est trop souvent incompris lorsqu'ils verbalisent ou reprennent des attitudes inciviles. Cependant, le message est délicat à formuler et à diffuser. Les TCU sont considérés comme une institution publique et pris à partie comme tels. L'idée que le coût des dégradations ne favorise pas l'amélioration de la qualité de service n'est pas toujours audible par l'usager, qui ne réalise que rarement qu'il ne paie qu'une partie réduite du coût du service. Les exemples utilisés dans les messages ne doivent pas stigmatiser, leurs destinataires doivent être clairement identifiés. Tel est l'objectif de la mise en scène d'un chewing-gum ou d'un mégot géant par la SNCF dans certaines gares sur le thème « il n'y a pas de petites incivilités ». Ce type de messages est également décliné dans le contexte plus étroit des TCU. L'émetteur ne devrait pas être le seul opérateur de transport. L'autorité organisatrice doit également s'impliquer. Même si les applications concrètes sont encore timides, les prises de position des autorités locales sont de plus en plus nombreuses dans ce sens. Par exemple, le conseil de développement du grand Lyon propose notamment de communiquer davantage sur les amendes appliquées aux contrevenants et d'accroître la sensibilisation des citoyens aux incivilités à travers les différents supports médias disponibles64. En outre, les actions de sensibilisation et de promotion de la mobilité durable devraient davantage aborder la question du vivre-ensemble. Dans les documents relatifs aux plans de déplacements urbains (débat public, observatoire de suivi,..) que la mission a pu consulter, elle a constaté une appropriation plus aisée de deux thématiques particulières d'insécurité : l'insécurité routière et la protection des moyens personnels de transport doux (Îlo,..). Des sensibilisations pourraient utilement être lancées suivant plusieurs axes.
63 64
Julien Damon, cité par Monique Sassier, Séance du 23 février 2011 les politiques de stationnement comme levier des politiques de déplacement
54
11. Recommandation : promouvoir une présentation plus claire et plus simple des éléments essentiels du règlement d'exploitation en matière de prévention, ainsi que des campagnes locales de prévention des détériorations diverses.
12. Recommandation : mieux impliquer les voyageurs des TCU dans la lutte contre des phénomènes concrets de dégradation (sièges,..) par des campagnes locales de sensibilisation, en coopération avec l'autorité organisatrice.
3.1.3 Des personnels spécialisés aux missions diversifiées
Dans un environnement marqué par la raréfaction de la présence humaine d'exploitation ou commerciale, aussi bien en surface que dans les métros, associée à de lourds investissements (métros automatiques, billetterie électronique...etc.), la réponse par des moyens humains aux défis de l'insécurité est une Îritable gageure pour les exploitants et les AOT. L'examen des statistiques disponibles confirme la progression continue des personnels spécialisés au cours des dernières années, mais les missions sont diversifiées et ne s'exercent pas sans ambiguïtés. Un niveau encore modeste en province, mais une progression continue Le rapport « Sureté » de l'UTP pour 2011 est le seul bilan disponible, mais ses données ne sont pas exhaustives puisqu'elles résultent d'une enquête annuelle à laquelle tous les réseaux ne répondent pas. Quoiqu'il en soit, il établit notamment qu'en 2011 : 2.123 salariés étaient employés dans des services dédiés à la sécurité qui représentent 4,9% des ETP de la branche du transport urbain. Cette part est passée de 3% en 2002 à 4,9% en 2011, avec une tendance à la stabilisation au cours des dernières années ; 58 réseaux sur les 115 du panel enquêté, dont tous les plus importants, se sont dotés d'un service dédié à la sécurité ; 62 réseaux disposent d'un poste de « responsable sécurité » ; le coût global de ces moyens est estimé à 110 M. La mission a releÎ au cours de ces visites, une certaine diversité des réponses, fonction des risques propres à chaque agglomération, des cultures d'entreprises, des moyens disponibles et aussi des réponses municipales en termes de moyens policiers. Des missions qui pourraient être clarifiées Les effectifs concernés se répartissent pour l'essentiel entre deux catégories : les contrôleurs Îrificateurs chargé notamment du contrôle des titres, mais qui peuvent avoir une mission plus large ;
55
les agents d'intervention, sous différentes dénominations, qui sont chargé d'intervenir en cas d'incident ou d'assurer un appui aux contrôleurs pour les prévenir. On observe donc partout une complémentarité organisée entre ces deux catégories. Par exemple, à Strasbourg, la CTS dispose d'une palette complète : agents de conduite et de contrôle, assurant 50% de conduite et 50% de contrôle voyageurs ; agents de contrôle des voyageurs, chargés du contrôle des titres et de l'information aux voyageurs ; agents de prévention et d'intervention auprès des clients et des conducteurs (APICC), chargés d'intervenir sur les incidents sérieux. L'équipe d'intervention comprend trois personnes, dont 2 APICC et un agent de maîtrise. A l'inverse, d'autres réseaux choisissent de ne pas mettre en place d'agents d' « intervention » ou de « sécurisation », chargés de constater les infractions troublant la tranquillité publique dans le TCU comme le décret de mars 1942 leur en donne la possibilité, estimant que ce n'est pas leur rôle. L'UTP constate que ces textes fort anciens sont largement inadaptés à la réalité de terrain et demande leur révision pour lever les ambiguïtés avec les services de sûreté régis par le code de sécurité intérieure (dispositions codifiées de la loi de 1983 concernant les activités de surveillance et de gardiennage), d'autant que la réorganisation récente de la profession de la « sécurité priÎe » (création du CNAPS...etc.) soulève de nouvelles difficultés. La mission estime que ce souhait est fondé. Il ne lui paraît pas acceptable que des réponses aussi différentes soient données à des situations similaires, tout en ayant conscience qu'une uniformisation impliquerait des coûts supplémentaires pour certains réseaux. Ce constat doit cependant être rapproché de celui de la grande diversité qui continue à prévaloir en matière de moyens des polices municipales, puisque les élus, dans le cadre du principe de libre administration des collectivités, développent des positions très divergentes à ce sujet. Dès lors, des écarts considérables peuvent être releÎs d'une agglomération à l'autre en ce qui concerne les rôles respectifs et finalement la qualité des réponses apportées au besoin de sécurité selon que les communes qui la composent sont ou non dotées de polices municipales conséquentes, et que le réseau de transport s'est ou non doté de moyens humains de sécurisation. La mission quant à elle estime (cf. recommandation infra) que le respect du principe de libre administration des collectivités ne doit pas conduire à des lectures différentes des textes en vigueur sur les missions respectives et qu'une normalisation s'impose, qui rappelle aux AOT et aux transporteurs le champ de leur responsabilité. L'évolution du rôle des conducteurs de bus : la polyvalence au service de la qualité La situation des lignes de bus, notamment lorsqu'elles desservent des secteurs difficiles doit retenir plus spécialement l'attention. Elle renvoie aux difficultés spécifiques de leurs conducteurs, dont le rôle a dû, souvent à leur corps défendant, évoluer profondément. De simples « machinistes » - terme auquel ils sont restés longtemps attachés - ils sont souvent 56
devenus des agents polyvalents, seuls représentants permanents de l'exploitant et à travers lui de la collectivité auprès du public, avec les risques que cela peut impliquer. Leur profil en a donc été sensiblement modifié, entraînant des exigences de compétences beaucoup plus larges qui impactent le recrutement et la formation. De même, la corporation a dû, comme tous les autres services publics, s'ouvrir à la diversité pour offrir au public l'image d'une communauté humaine représentative de la ville qu'elle dessert. Le conducteur a donc dorénavant une triple fonction : Conduite accueil commercial et incitation à la validation des titres de transport (d'où le titre de conducteur-receveur employé sur certains réseaux) médiation face aux incidents éventuels, (dans la mesure de ses moyens). La montée par l'avant face au conducteur et aux moyens de validation du titre de transport, qui prévaut dans la quasi-totalité des réseaux de bus en province, conforte la maîtrise des lieux. La conduite ne constitue plus l'unique enjeu du poste, remarque dès 2005 un rapport concernant le conducteur de transport urbain en France65. La généralisation des liaisons radio, de la géo-localisation le fait travailler dans un univers interdépendant. Sur le plan relationnel, il est nécessaire d'avoir les capacités de faire face au stress engendré par la conduite et par les clients, d'avoir un bon accueil, de pouvoir diminuer les causes de conflit. La fiche métier de l'ONISEP confirme : « Dans tous les cas, courtoisie, bonne présentation et professionnalisme sont de rigueur. Le conducteur assure en toute sécurité le transport des voyageurs. Mais pas seulement. Il les accueille, les assiste, les conseille et les informe, anticipe et gère au mieux les incidents de parcours». L'environnement social changeant, le conducteur volontaire pourra être amené à s'impliquer dans des actions de médiation, par exemple des interventions en milieu scolaire ou des manifestations sportives et à y encadrer des jeunes66. La mission a releÎ que ces évolutions sont partout prises en compte, même si elles rencontrent chez les personnels concernés, et notamment les plus anciens, de réelles difficultés d'acceptation, à la mesure aussi des risques encourus dès lors qu'on doit rappeler la règle. Les stratégies d'évitement prévalent donc parfois, mais au total un nouveau relationnel s'est imposé, favorisé par les nouveaux modes de validation des titres et c'est l'image d'un agent du service public accueillant et vigilant qui s'impose. Le développement des tramways, qui se caractérise par des stations et des Îhicules largement ouverts, alors que le conducteur est nécessairement cantonné à une fonction technique très absorbante, repose la question du contrôle de la fraude et de la prévention des incidents dans des termes nouveaux. Cette tendance croîtra avec les bus articulés et les bus à
65
Projet Conducteurs de transports urbains en Europe (CTUE) Programme Leonardo da Vinci programme européen pour l'enseignement et la formation professionnelle 66 Le rapport de CTUE cite l'exemple de CTB, à Besançon. Au cours de ses entretiens, la mission a pu constater des initiatives similaires impliquant directement le personnel, notamment à la RATP (les mercredis du Rugby) et à la CTS de Strasbourg (matchs de « futsal »)
57
haut niveau de service. A elle seule elle peut justifier la mise en place de moyens humains mobiles spécifiques, et la mission estime que ces interrogations devraient intervenir dès la conception du projet et être intégrées à son bilan financier prévisionnel, ce qui n'est manifestement pas partout le cas.
3.2 Le progrès technique au service de la prévention
Le progrès technique a mis à disposition des responsables du TCU des moyens performants, qui sont très largement utilisés. Leur emploi est différencié suivant les modes et les objectifs. Leur généralisation s'impose.
3.2.1 Des moyens efficaces et généralement déployés
Dans les bus, le premier objectif est la protection du conducteur, en synergie avec les besoins d'exploitation et d'information du client. L'équipement aujourd'hui généralisé sur les grands réseaux comprend la liaison radio, de plus en plus fréquemment la géolocalisation et l'appel de détresse, dont le suivi est assuré par un PC centralisé armé pour la sécurité et l'exploitation. La protection physique du conducteur est partiellement assurée par une cabine de protection. La cabine est par exemple inefficace contre une projection de liquide. Mal exploitée, elle peut augmenter l'isolement du conducteur. La sécurité du conducteur et des voyageurs est confortée par des dispositifs de vidéoprotection, dont le rôle est essentiel en dissuasion et pour la qualité de la preuve lors des enquêtes. L'équipement des Îhicules en vidéoprotection est de plus en plus souvent réalisé de série. Le taux d'équipement moyen en caméras de vidéoprotection des bus est de 73,2%, selon le rapport sûreté 2011 de l'UTP. A titre de comparaison, le taux d'équipement moyen des bus en 2005 était de 49,6% . Le taux d'équipement des Îhicules neufs est supérieur à la moyenne indiquée. A noter cependant, un faible équipement des bus des réseaux Optile. Sur 4528 bus roulant en 2011, 2156 sont équipés, soit moins de 48%. En outre, le taux de nouveaux Îhicules équipés en 2011 sur ces réseaux serait de 51 %.67 La situation n'est pas uniforme pour l'ensemble des adhérents d'Optile. Des réseaux comme Lacroix ou Tice ont équipé 100% de leurs Îhicules.
13. Recommandation : renforcer l'équipement en dispositifs de vidéoprotection des autobus de l'ensemble des réseaux, notamment dans la grande couronne de l' Ile-de-France.
67
Source : Optile lignes régulières statistiques 2011. Rappel : OPTILE signifie Organisation Professionnelle des Transports d'Ile-de-France. Il s'agit d'une association régie par la loi 1901. OPTILE assure la gestion administrative des lignes régulières exploitées par ses adhérents, et conduit des projets communautaires du Réseau Intégré Régional avec la SNCF et la RATP : titres de transports, information voyageurs dynamique, vente de titres, sécurité, etc. (source : site Optile.com)
58
L'équipement en caméras embarquées des tramways est de 100% 68. De plus, les nécessités de la sécurité (au sens de prévention des accidents) et la surveillance des dispositifs de billettique conduisent le plus souvent à la vidéoprotection de l'ensemble des stations et des carrefours. Les dispositifs de vidéoprotection sont plébiscités par les conducteurs et les Îrificateurs. Sur plusieurs des réseaux contactés par la mission, le bon fonctionnement de la vidéoprotection est systématiquement Îrifié sur les Îhicules affectés au service de nuit. En cas de dysfonctionnement, le Îhicule est remplacé. Ces dispositifs peuvent être victimes de leur succès, les services régaliens requérant de plus en plus souvent la collaboration des services des opérateurs pour mettre à disposition des enregistrements. Malgré des remarques ça et là sur les coûts en ressources humaines, les groupes fournissent volontiers cet appui, dans des limites qui doivent rester raisonnables. Ce support aux services, et d'autres échanges de données, crée en effet des liens très favorables à une articulation efficace et confiante.
14. Recommandation : renforcer là où c'est nécessaire, la qualité des données des opérateurs (dont les images) élément d'une articulation efficace avec les services de l'Etat.
Les métros sont susceptibles d'une exploitation en mode fermé, impliquant le franchissement d'un portillon de contrôle pour y pénétrer, ou en mode ouvert. A Lyon, la délinquance dans les TCU avait connu une baisse significative en 2006, année où l'exploitation avait basculé d'un mode ouvert à un mode fermé. Une unité de sécurisation des transports en commun avait été créée la même année. En dehors de la vidéoprotection, des mesures de prévention situationnelle peuvent être étudiées et mises en oeuvre dans les enceintes des métros. Ces infrastructures sont récentes, et la mise en oeuvre de ces politiques dans un objectif de réduction du sentiment d'insécurité ne suscité pas de difficulté, sauf les contraintes financières. Ce n'est pas le cas de certaines gares routières, situées à proximité de gares ferroviaires, nécessitant donc des surfaces de centre ville, que des aménageurs souhaiteraient utiliser à d'autres fins. Elles gagneraient à être éclairées, à disposer d'une signalétique claire et de cheminements appropriés entre les quais routiers et la gare ferroviaire.
3.2.2 S'inscrire dans les potentialités techniques nouvelles
L'innovation technique dans le domaine des transports est inséparable d'études d'acceptabilité par le client et de sa capacité à l'utiliser, compte tenu de la nature même des activités.69. La question essentielle concerne l'optimisation des systèmes pour offrir la réponse au juste besoin de mobilité durable dans l'agglomération façonnée par le transport, l'étalement urbain ayant été favorisé par le gain de vitesse.
68 69
Source UTP Voire par exemple les travaux sur l'emploi de la billetique par une population vieillissante
59
Deux grandes questions techniques contribuent à cette réflexion70: le Îhicule du futur, son niveau d'automatisation, et son impact sur l'environnement ; l'impact des technologies de l'information et de la communication (TIC) sur la fluidité du trafic, le confort des voyageurs et la sécurité des personnes. Les dispositifs intégrés de billettique vont contribuer à une meilleure connaissance des besoins individuels de transport. Leur application va s'étendre au-delà du TCU pour inclure les modes doux et l'accès aux infrastructures de mobilité (parkings,...). Leur généralisation conduira à une forme de système « fermé virtuel », défavorable à l'extension de la fraude, et plus efficace en termes de ressources humaines dédiées au contrôle. Le développement des moyens interactifs de communication conduira à la nécessaire prise en compte des alertes et témoignages directs des clients face à un incident de toute nature et notamment, les incidents générateurs d'insécurité. Par exemple, la SNCF met à disposition de ses clients le numéro 3617 pour être une ligne d'écoute des clients victimes d'incivilités. Il est vraisemblable qu'une demande forte des clients conduira au développement de ce type de service. L'aspect sociologique, les contraintes budgétaires et le cycle industriel de renouvellement des flottes inscrit ces évolutions dans le temps long (quinze à vingt ans). La complexité des systèmes augmentera leur vulnérabilité aux actes de malveillance et renforcera le besoin de protection. A moyen terme, l'évolution des capteurs permettra d'améliorer le confort et la sûreté des passagers dans les transports en commun en permettant de détecter des agressions physiques, des actes de vandalisme, d'effectuer du comptage, etc. (Projet DéGIV du programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres). Il faut noter qu'en dehors de l'exemple de DéGIV, les études sur la prise en compte de la délinquance dans les dysfonctionnements de systèmes de plus en plus complexes est peu prise en compte dans les travaux financés par le PREDIT.
15. Recommandation : développer les travaux du programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres (PREDIT) concernant l'impact économique et social de la délinquance dans les TCU et l'optimisation des moyens techniques et humains de prévention.
A court terme, la norme 4G, ou la norme Long Terme Evolution permettront des transferts d'images entre le bord et le sol, en dépit d'une disponibilité encore limitée.
70
Voir le document de présentation du groupe opérationnel N° 2 « qualité et sécurité des transports du PREDIT4, du 27 février 2012, qui définit cinq axes d'étude : la gestion des mobilités et du trafic routier (application des TIC à la réduction des congestions), sécurité des transports ferroviaires, sûreté des transports (protection contre les actes de malveillance), fiabilité et sécurité des dispositifs embarqués ou de commande centralisée et ergonomie, accessibilité et confort.
60
3.3 Management et financement
La prévention de l'insécurité et des incivilités implique, à l'instar de ce que font depuis plusieurs années les grands réseaux, la mise au point d'une stratégie globale (Plan sureté) impliquant toutes les fonctions de l'entreprise et prévoyant un dimensionnement et une combinaison appropriée des dispositifs techniques et des moyens humains, en fonction des perspectives budgétaires ouvertes.
3.3.1
Une approche managériale de la prévention
La mise en oeuvre des outils de médiation, de prévention, de contrôle et d'intervention par des personnels polyvalents ou spécialisés, suppose une identification claire des objectifs poursuivis par un diagnostic et une stratégie (cf. supra). En synergie avec les objectifs poursuivis par l'autorité organisatrice, il pourra s'agir de prévenir les comportements incivils, de faire respecter la règle, de réduire le sentiment d'insécurité, de coproduire la tranquillité publique ou la sécurité. Au-delà de la mise en place de moyens techniques et d'une présence humaine appropriée, la combinaison de tous les moyens de l'entreprise dans le cadre de son organisation et de son management au quotidien est une clef du succès. La mission a pu observer plusieurs dispositifs intéressants durant ses investigations. Les grands réseaux qui disposent de moyens relativement importants et doivent souvent faire face à des situations difficiles, présentent les constructions les plus avancées. L'un d'eux, auquel on se réfère ci-dessous, a pu faire baisser significativement sur trois ans depuis 2009 le nombre d'incidents ainsi que le taux de fraude (depuis un an). Interrogé sur les raisons de ce succès, et tout en demeurant prudent car un contretemps peut survenir à tout moment, en raison notamment des incidences des crises de violences urbaines, son directeur de la sûreté considère que deux éléments sont essentiels : la mise en place d'un plan concerté et coordonné des moyens humains et techniques concourant au renforcement de la sécurité ; la création d'une dynamique, d'une synergie entre les acteurs. Le plan sûreté de ce réseau consiste notamment à agir sur 3 leviers: la présence humaine sur le terrain ; le bon emploi des moyens techniques le partenariat. La présence humaine doit y être répartie dans le temps et dans l'espace entre les différentes catégories de personnes concourant à la sûreté (en concertation avec les responsables / exploitation de chaque mode), dans l'ordre croissant : les agents de station et les chefs de ligne (exploitants) ; les médiateurs ;
61
les agents de sécurité (en poste fixe ou en patrouille mobile) ; les Îrificateurs et contrôleurs ; la Police Nationale en appui ; les patrouilles Vigipirate (forces armées)
L'objectif est double : être au maximum présent et visible afin de rassurer (la clientèle) et de dissuader (les malfaiteurs), et être en mesure d'intervenir au plus vite avec des moyens adaptés à l'incident. L'appui technologique est fondé d'abord sur la vidéo protection : Les caméras sont de plus en plus nombreuses. La mise en oeuvre de nouvelles capacités technologiques est en cours, en fonction des problématiques rencontrées : caméras télécommandables, à haute définition et à champs élargis ; caméras "intelligentes" à détection automatique ; renvoi des images en temps réel (technologie 3G) ; renforcement des capacités de mémoire (prolongation des enregistrements) ; transmission des images en temps réel sur des téléphones portables de la police ; Exploitation en temps réel du réseau raccordé au PC central ; vidéo-patrouilles ; interventions coordonnées de la PN sur des flagrants délits et des opérateurs durant toute la période du service au PC Sûreté (réaction immédiate) ; Exploitation en temps différé des enregistrements: lecture et analyse ; "enquêtes vidéo" ; travail d'exploitation des images d'un incident jusqu'à trouver et faciliter l'identification des auteurs.
Des moyens radio performants (appels de détresse et géo-localisation automatique) sont exploités 24 heures sur 24 par un PC centralisé regroupé avec le PC exploitation. La dynamique et les synergies entre acteurs, outre les relations quotidiennes évoquées ci-dessus, sont renforcées par l'existence d'un « contrat local de sécurité transport », mais aussi par la participation systématique à tous les dispositifs de partenariat de prévention (CLSPD, GLTD, sécurité routière,..). La place de l'exploitant est unanimement reconnue dans toutes ces instances. La mission ne peut que faire siennes de telles bonnes pratiques et diffuser cet exemple, qui peut parfaitement être décliné en formules plus simples pour des agglomérations moins importantes. Dans la ligne de sa recommandation ci-dessus d'une reformulation par voie de circulaire des missions respectives dans le cadre des textes en vigueur, elle suggère que cette harmonisation prenne localement la forme d'une validation du plan sureté par arrêté préfectoral, dans le cadre de la réglementation de la police et de la sureté des transports qui découle de la loi de 1845 et du décret de 1942 étendu en 2006 au transports routiers de voyageurs.
62
Dans une telle optique, l'arrêté préfectoral fixant le règlement d'exploitation d'un réseau, préciserait toujours, comme c'est le cas aujourd'hui, les droits et devoirs des usagers. Mais il fournirait aussi une description des missions des agents, pour les légitimer, et ne pourrait intervenir que sur présentation par l'AOT et l'exploitant d'un « plan sureté » en bonne et due forme, attestant de leur capacité à faire respecter les règles et d'une dynamique partenariale, sous l'égide des instances locales de prévention, pour y parvenir. La mission estime qu'une telle démarche est possible dans le cadre des textes en vigueur, mais à défaut, il suffirait de les compléter au préalable.
3.3.2 Coûts, priorités et arbitrages
Quel que soit le mode de gestion retenu par l'autorité organisatrice (régie, marché public ou délégation de service public), les coûts des transports collectifs urbains sont au coeur de nombreuses interrogations en ces périodes de contraintes budgétaires : des investissements lourds concernant les TCU ont été réalisés dans la dernière décennie. Il faut assurer le financement des emprunts contractés à cette fin ; le versement transport acquitté par les entreprises a atteint son plafond dans de nombreuses agglomérations ; la part de financement par la billetterie ne cesse de se dégrader. En outre, en ce qui concerne les réseaux exploités dans le cadre d'une délégation de service public, l'opérateur doit assumer le risque de sa gestion, et décider des moyens qu'il met en place pour obtenir les résultats attendus par le contrat. Depuis la création des autorités organisatrices par la loi sur l'organisation du transport intérieur de décembre 1982, les exigences des AOT se sont faites plus complètes et plus précises, les durées des contrats se sont réduites, le nombre d'indicateurs donnant lieu à incitation ou amende (bonus / malus) a augmenté. Aujourd'hui, dans de nombreux cas, le niveau des malus éventuels est de l'ordre, voire supérieur à la marge que permet de dégager le contrat. Les incitations sont liées principalement à l'augmentation du nombre de voyageurs, souvent mesurée par l'évolution du nombre de voyages par an et par habitant, la régularité ou à la ponctualité, selon que l'on garantit une fréquence ou un horaire, l'information, l'accueil, la propreté et le confort. Doivent également être satisfaites des obligations liées au taux de contrôle de la fraude, au sentiment d'insécurité, etc. L'opérateur est donc incité à mettre en oeuvre les moyens les plus efficaces pour obtenir le meilleur compromis entre le coût de personnel Îrificateurs et contrôleurs, et la réduction du taux de fraude. Les indemnités forfaitaires perçues, dans le meilleur des cas, couvrent de 50 à 60% des coûts de personnel dédié. L'ordre de grandeur du nombre de Îrificateurs est de 5 % de l'effectif de l'entreprise, selon le responsable sécurité d'un grand groupe.
63
Ponctuellement, la mission a pu relever les chiffres suivants dans différents réseaux : Effectif total (valeurs arrondies) A 600 B 2400 C 2400 D 3400 E 700 Nombre de Îrificateurs 28 65 132 320 34 Pourcentage 4,6% 2,7% 5,5% 9,5% 4,9% Taux de fraude mesuré71 7% 12% 3,5% 17% 9%
Suivant les réseaux, une partie de l'équipe peut être dédiée à la Îrification des titres de transport dans un esprit « commercial », l'autre partie dans un esprit plus dissuasif. Le coût des dépenses de sécurité supportées par les opérateurs s'élève, selon le rapport de l'UTP cité à 148 176 900 en 2011. Ce coût comprend 141 millions pour les frais de personnels. Il est probable que soient comptabilisés les coûts des personnels dédiés au contrôle des titres dans ce montant. En 2011, le coût direct de la fraude fourni par 35 entreprises sur 90 ayant répondu à cette partie du questionnaire annuel de l'UTP est de 31 millions d'euros. Les autres coûts correspondent essentiellement à tout ou partie des équipements de sécurité et de la réparation des dégradations (5 millions d'euros) et à la prise en charge par l'opérateur de frais divers tels qu'indisponibilité de personnels victimes d'agressions et pénalités (1 million d'euros). La priorité des employeurs - régie ou entreprise - est clairement la protection des personnels contre les agressions. C'est pourquoi de nombreux réseaux utilisent l'ensemble des possibilités offertes par la loi de juillet 1845 codifiée pour confier à une partie de leurs Îrificateurs des missions de dissuasion (Strasbourg , Toulouse, Marseille). La lutte contre la fraude est la seconde priorité affichée, conjointe aux autorités organisatrices et aux opérateurs.
3.3.3 La question du financement de la prévention
Les éléments disponibles pour apprécier les moyens financiers consacrés à la prévention sont très limités. Dans son enquête annuelle, l'UTP collecte des informations qu'elle publie de façon consolidée, sans qu'il soit possible d'accéder aux chiffres locaux. D'autre part le total n'est pas un chiffre exhaustif. Elle établit qu'en 2011, le coût direct des mesures de sécurité a été de 148 M (cf. supra) (dont le coût des 2 123 salariés des services de sécurité, incluant les Îrificateurs). Ce montant a progressé de 8,8% en un an, au titre principalement des moyens humains.
71
Ces quelques exemples montrent qu'il n'y a pas de lien mécanique entre le nombre de contrôleurs et le taux de fraude.
64
Il convient d'ajouter à ce budget celui de la réparation des actes de vandalisme, qui est stable à 14 M environ (dont plus de la moitié sur le matériel roulant). Mais ce calcul n'inclut pas le coût d'amortissement des équipements financés par les AOT, qui en représentent l'essentiel, et n'intègre pas non plus le manque à gagner dû à la fraude, qui est malaisé à établir et sur lequel pèse un certain tabou. Au cours de ses visites la mission n'a recueilli que des informations fragmentaires, qui ne peuvent en aucun cas être extrapolées. Elle se gardera donc de tout jugement de valeur ou comparatif à ce sujet, d'autant que les situations locales sont objectivement très diverses impliquant des réponses de niveaux et donc de coûts très variés. Ses observations la conduisent donc simplement à formuler quelques observations générales : 1/ Le coût prévisionnel de la sécurité reste peu pris en compte en tant que tel, soit dans les appels d'offres (sauf exceptions dans certains grands réseaux) soit dans les projets de développement (implantations de modes nouveaux comme les tramways ; extension de lignes de métro ; création de lignes de bus à forte capacité et en site propre ; modernisation des systèmes billettiques) ; il est trop souvent constaté ex-post comme une résultante incontrôlée. A cet égard, la logique des « Etudes de sureté » qui se sont imposées dans les projets d'urbanisme devrait être étendue aux projets de développement des réseaux de TCU, et ce poste de charge intégré systématiquement aux budgets prévisionnels des projets. 2/ La réponse au sentiment d'insécurité des usagers, la prévention et le traitement des incidents les concernant, devraient mobiliser des énergies équivalentes à celles qui sont déployées pour la protection des agents. Cette tendance est bien engagée partout où les exigences de qualité de service suivies et le cas échéant sanctionnées par l'AOT, sont les plus avancées. 3/ Les équipements de sécurité financés par les collectivités locales, ainsi que les moyens mis en place par les exploitants, dans le cadre des responsabilités qui sont les leurs au titre de la délégation de service public, pourraient utilement être soumis à concertation avec les partenaires de la prévention au sein des instances ad-hoc, car ils participent largement de la « stratégie territoriale » et doivent être articulés avec les autres réponses locales.
65
66
4 La qualité au service de la mobilité durable
Le défi que doit affronter le transport collectif est celui de l'optimisation et de la cohérence. Il faut optimiser les réseaux et leurs interconnections, les durées de transport et l'information due aux voyageurs, renforcer la cohérence des modes de transport comme des systèmes de billetique, pour maximiser l'activité. L'enjeu de la mobilité est celui du développement durable de la ville (4.1.). Si aujourd'hui encore, le choix du transport public est trop souvent un choix négatif, soit par manque d'alternative, soit par comparaison des coûts, la qualité de service deviendra inéluctablement un facteur essentiel de choix, surtout si la part de financement client devait augmenter. (4.2.). La sécurité est un facteur important de non-qualité. Dans la ville globale, les défis évoqués supposent l'échange et la professionnalisation toujours renforcée (4.3.).
4.1 Les enjeux de la mobilité durable
La mobilité joue un rôle majeur dans le développement économique et d'un bassin de vie et d'emploi. Cette mobilité est aujourd'hui encore basée sur le transport automobile individuel, qui a favorisé l'étalement de l'agglomération72. L'allongement des durées de transport, le gaspillage des ressources naturelles (terres agricoles, air, ...) conduisent à rechercher un équilibre durable entre les besoins de mobilité des personnes et des biens, d'une part, la protection de l'environnement et de la santé et la préservation de la qualité de vie, d'autre part, sous contrainte des capacités de financement des collectivités73. L'objectif de développement des transports collectifs et des moyens de déplacements les moins consommateurs d'énergie et les moins polluants, fixé par la loi SRU dès décembre 200074, est maintenant largement intégré dans les programmes des agglomérations de plus de 100 000 habitants. Pour concurrencer l'automobile individuelle, il faut répondre au défi du porte-à-porte, intégrant un usage différent de la voiture (co-voiturage, location, ..), le développement des modes doux sur de faibles distances, et les transports collectifs dans un maillage s'adossant à un réseau de plates-formes intermodales. Outre les défis techniques (développement d'outils de communication, de billettique, ..), les défis industriels (nouveaux acteurs investissant dans les parkings, les locations de voiture,..) et économiques, cette évolution de l'architecture globale des transports collectifs urbains et interurbains implique un changement culturel pour l'usager devenu client.
72
Les distances domicile-travail ont été multipliées par 9 en 50 ans. (source : manifeste de la mobilité durable UTP) Selon l'OCDE, la mobilité durable est « une mobilité qui ne met pas en danger la santé publique et les écosystèmes, respecte les
73
besoins de transport tout en étant compatible avec une utilisation des ressources renouvelables à un taux inférieur à celui nécessaire à leur régénération et une utilisation des ressources non renouvelables à un taux inférieur à celui nécessaire à la mise au point de ressources renouvelables de remplacement » 74 Devenu article L1214-2 du CT et suivants
67
Ce n'est qu'au prix d'une attractivité renforcée des transports collectifs urbains et nonurbains qu'ils pourront devenir l'ossature d'un système de mobilité durable. Les plans de déplacements urbains des agglomérations font figurer parmi leurs objectifs l'amélioration de l'attractivité75. Les enquêtes périodiques de déplacements des ménages constatent que l'attractivité est d'abord fonction de la qualité de desserte (étendue de l'offre de transport collectif), mais aussi de la qualité de service, incluant en premier chef, la ponctualité ou la régularité. Or, « ce qui nous énerve le plus dans les transports publics, c'est l'autre 76». Les enquêtes montrent que pour un conducteur de Îhicule priÎ, la journée de travail est terminée quand il monte dans sa voiture, alors que pour un utilisateur de transports collectifs, elle ne le sera que lorsqu'il rentre chez lui77. Le confort, la propreté, la tranquillité sont des enjeux forts de l'attractivité pour conquérir de nouveaux types de clientèle. Le sentiment de bien-être ou d'insécurité, est modulé par l'expérience récente. Une gare pimpante vue en sortie d'un parking sale, paraîtra plus sale. L'attractivité sera celle de la chaîne globale, incluant les pôles d'échange avec les lignes de rabattement, les lieux de stockage des moyens doux ou des Îhicules (parking-relais).
16. Recommandation: prendre en compte la sécurité dans les études et les outils favorisant l'attractivité de la mobilité durable.
La multiplicité des acteurs de la mobilité durable impose de définir un chef de file, capable de coordonner les actions d'amélioration de la qualité de service. La question de la gouvernance de la chaîne de mobilité est l'objet de propositions du GART depuis plusieurs années. Le GART propose notamment de transformer les AOT en autorités organisatrices de la mobilité durable. Quelle que soit la solution retenue, elle devra prendre en compte les logiques de sécurité et la coopération avec les autres acteurs de la sécurité.
17. Recommandation: désigner l'autorité organisatrice comme chef de file des acteurs de la sécurité de la mobilité durable.
Du point de vue des élus, la question du vivre-ensemble est un enjeu essentiel de notre société plus diversifiée, plus individualiste, plus exigeante. L'étude des formes de violence dans les transports collectifs (cf. 1ère partie) montre qu'ils sont le miroir exacerbé des difficultés contemporaines.
75 76 77
PDU STIF février 2012 « Défi 2 : Rendre les transports collectifs plus attractifs, (Actions 2.1 à 2.9) », Julien Damon, sociologue, in Transport public avril 2012 Source : entretien avec l'AQST
68
4.2 La responsabilisation des acteurs par la qualité de service contractuelle
Le sentiment d'insécurité est une forme de non qualité vivement ressentie par les clients-usagers. L'entreprise de transport a un rôle à jouer pour le conjurer, même si elle ne peut pas tout. Elle doit donc être responsabilisée au-delà de la protection de ses personnels qu'elle assume déjà largement. Cela requiert une certaine créativité sur le plan contractuel, fondée sur une appréciation juste des rôles respectifs.
4.2.1
L'expérience de la qualité
La recherche systématique d'une meilleure qualité de service aux usagers est de longue date une priorité partagée des collectivités locales responsables et des exploitants de réseaux. Elle a donné lieu à de nombreuses innovations et a vu son champ s'élargir constamment. Cette préoccupation a été encouragée fortement par le développement des mouvements de consommateurs et d'usagers des services publics. Elle prend appui dorénavant sur des dispositifs bien établis d'échanges et d'enquête : la mesure de la satisfaction des usagers fait partie du quotidien des responsables des réseaux de transport. La compréhension des ingrédients de cette satisfaction s'est progressivement élargie et couvre aujourd'hui, en particulier dans les grandes agglomérations, un spectre assez large : d'un suivi assez formel de quelques indicateurs de base portant notamment sur la ponctualité, la propreté ou la disponibilité des équipements, on est passé à un registre beaucoup plus complet et qualitatif, qui interroge l'usager devenu client sur sa perception de tous les aspects du service rendu. Engagée généralement à l'initiative des entreprises délégataires, dans une optique d'amélioration de leurs prestations pour accroître la fréquentation du réseau et consolider la confiance que les collectivités placent en elles, cette démarche s'est considérablement sophistiquée ensuite dans deux directions principales : un levier de management, pouvant aller jusqu'à constituer un outil d'appréciation de la manière de servir des salariés, mais cela reste encore l'exception car les organisations représentatives des personnels peuvent être réticentes ; et surtout une possibilité nouvelle pour les autorités organisatrices de contrôler et de responsabiliser les exploitants pendant la durée du contrat, au moyen d'un dispositif de sanction pécuniaire. La plupart des contrats de délégation de service public appliqués aux TCU, contiennent aujourd'hui de tels dispositifs, définis dans le cahier des charges de la mise en concurrence, ce qui permet aux candidats à l'exploitation d'en intégrer les implications à leurs offres. Ce sont des systèmes qui peuvent atteindre des niveaux éleÎs d'exigence dans tous les compartiments de la qualité de service, ou plus simplement du respect du cahier de charges. Ils ont permis des améliorations significatives, même si des progrès restent encore à faire.
69
4.2.2
Qualité et sécurité
L'amélioration du ressenti de sécurité par les usagers du réseau, qui compte pour eux autant que bien d'autres aspects de la qualité du service rendu, peut-elle être intégrée à une telle approche ? Sur le vu des quelques indications qu'elle a pu collecter, la mission estime que c'est un objectif digne d'intérêt d'y tendre, sous un certain nombre de réserves importantes. Mais, s'agissant d'un sujet complexe sur lequel elle considère que son expertise est trop limitée pour livrer des recommandations précises, elle se limite à quelques remarques de principe et à une recommandation générale : l'exploitant ne peut être responsabilisé que sur des terrains dont il a une maîtrise suffisante : dans le domaine qui nous occupe ce sont les résultats de la lutte contre l'incivilité qui devront être pris en considération et non le constat de l'évolution de la délinquance ellemême, dont les principaux facteurs sont étrangers aux acteurs du TCU. Cela impose, comme la Mission permanente l'a souligné avec force dans son Guide de l'évaluation publié en février 2011, de choisir des « indicateurs intermédiaires » illustratifs de résultats imputables à une action ou à un programme d'actions entrant dans les possibilités juridiques et économiques de l'entreprise de transport. Ce point est un facteur limitant important ; la mesure des résultats devra pouvoir être faite par des techniques indiscutables et praticables : le volet d'une enquête de satisfaction portant sur cet aspect devra obéir à une rigueur de construction contrôlée et offrir une stabilité temporelle permettant des appréciations fiables des évolutions enregistrées ; le suivi peut être effectué par l'exploitant lui-même, qui en livre les résultats périodiquement à la collectivité, ou par cette dernière directement ces deux conceptions se développent mais ses modalités doivent être parfaitement concertées dans le cadre contractuel : soit elles sont définies au cahier des charges, par hypothèse accepté par les soumissionnaires, soit elles relèvent d'un accord ultérieur. Sous ces réserves notamment, la Mission estime que la mesure de la satisfaction du client en ce qui concerne l'ambiance de tranquillité qui prévaut ou pas dans les Îhicules et espaces d'échange du réseau de transport, est possible et souhaitable. Elle doit être orientée vers le suivi de l'efficacité des dispositions prises par l'entreprise, dans le champ de compétence qui est le sien. Cela peut viser principalement les initiatives de présence humaine apaisante spécifique (médiation...etc.), de formation et d'implication de toutes les catégories de personnel (conducteurs, contrôleurs, agents commerciaux), les campagnes de promotion des attitudes responsables et civiques, la lutte contre la fraude alliant des objectifs ambitieux et des méthodes favorisant un climat détendu.
18. Recommandation: inclure la mesure du sentiment d'insécurité dans les enquêtes de satisfaction client, là où cela n'est pas déjà fait.
Sur la base de constats faits sur le terrain qui indiquent que l'approximation et la précipitation sont contre-productives, et de sa réflexion générale, la Mission estime toutefois qu'en une matière aussi sensible la prudence suggère : 70
de ne s'engager que de façon progressive dans l'intégration de tels critères dans le suivi de la qualité de service, en commençant par exemple par des expérimentations ponctuelles non sanctionnées, pour Îrifier la faisabilité et la pertinence ; de les mettre en place en accompagnement d'initiatives ou de programmes d'actions concrets, par exemple de prévention de l'incivilité, dont on mesurera les effets en termes de ressenti par les usagers. Compte tenu des enjeux, la Mission suggère que les pouvoirs publics (Transports, Intérieur) investissent dans la recherche appliquée de dispositifs adaptés de suivi du ressenti par les usagers de la « sécurité » dans les transports collectifs, en liaison avec les instances représentatives des acteurs du TCU (AMF, GART, UTP notamment) en recourant à des experts missionnés précisément.
4.3
Une approche globale et professionnalisée
Au terme de ce tour d'horizon, et alors que le constat satisfaisant peut être fait que l'insécurité propre aux réseaux de transports urbains reste limitée et que des réponses très significatives sont données d'ores-et-déjà par les collectivités locales et par les transporteurs, la Mission souhaite confirmer deux indications générales que ses travaux lui suggèrent : la sécurité dans les TCU ne peut résulter que d'une prise en charge globale, et elle relève d'une démarche parfaitement professionnalisée.
4.3.1
Une prise en charge globale
On entend ici rappeler deux champs complémentaires dont l'efficacité doit s'additionner. Le couple AOT-exploitant doit trouver les voies et moyens, en rendant les arbitrages nécessaires chacun dans son champ de responsabilité mais sans oublier qu'ils interfèrent -, aux échéances budgétaires et contractuelles appropriées, de réserver à l'objectif de sécurité, celle des usagers, celle des personnels et celle des équipements, une priorité à hauteur des attentes respectives, dans leurs décisions d'investissement et dans l'affectation des moyens humains et autres. L'observation de la réalité conduit à suggérer d'accorder une attention plus soutenue aux attentes des usagers, équivalente à celle qui l'a été aux personnels de longue date. Ce résultat ne peut être atteint que par une meilleure implication des AOT dont c'est le rôle en application de la lettre et de l'esprit de la loi du 5 mars 2007. La limite de l'exercice en est bien entendu le coût, toujours supporté par un partage à proportions variables suivant les sites et les politiques tarifaires menées, entre l'usager et le contribuable local, en investissement, qu'il faut amortir, et en fonctionnement. La Mission est consciente que les équilibres économiques n'autorisent qu'une faible marge de manoeuvre et estime qu'il doit donc s'agir davantage de mettre en concurrence et d'arbitrer entre des priorités différentes. La seule façon d'apprécier le niveau de priorité de la sécurité par rapport 71
aux autres, est d'interroger les usagers eux-mêmes et les non-usagers, ce qui est de plus en plus souvent le cas. Une approche globale implique en second lieu que les acteurs du TCU (AOT, entreprise, salariés...) acceptent de s'inscrire dans la démarche partenariale de l'agglomération en matière de sécurité et de prévention de la délinquance, comme en toute autre matière, en renonçant à la tentation d'un cloisonnement supposé protecteur d'une spécificité inaccessible. Le réseau de transport est au service de la ville et de ses habitants, il est ouvert sur elle et l'irrigue en permanence. Le public lui porte certes un intérêt spécifique, dans la mesure où il rend un service essentiel à son quotidien, parfois éprouvant, mais il le considère comme le maillon d'un ensemble. Il est un élément structurant de l'agglomération. La Mission a obserÎ que des cloisonnements perdurent, entretenus involontairement par une culture propre très marquée du monde du transport urbain, une grande famille dont les membres peuvent avoir des intérêts divergents, mais qui communique par un langage commun et s'unit pour dénoncer les entraves qui sont mis à son développement. Cette synergie avec les acteurs principaux de la tranquillité publique, la ville et l'Etat, est rendue difficile également par les différences de niveaux de compétence comme cela a été mentionné. Les TCU vivent au niveau de l'agglomération, mais la loi, la tradition et les contraintes politiques du mouvement intercommunal font de la sécurité un enjeu municipal. La Mission estime que les acteurs du TCU peuvent être les vecteurs d'une évolution, et que c'est une condition à une approche Îritablement globale.
4.3.2
Une démarche professionnalisée
La contribution des acteurs des transports en commun à la sécurité est encore souvent Îcue comme contrainte imposée par les circonstances qui les conduit à s'aventurer sur des terrains qui échappent à leurs compétences et à engager des financements indus. Ainsi des revendications entendues sur le coût du traitement et de la fourniture des images vidéo sur réquisition de justice, ou du débat sur l'opportunité pour le réseau de transport d'avoir des moyens humains d'intervention, que la Mission a tenté d'éclairer. Où commence et où finit en ces matières la responsabilité des entreprises et des AOT ? Il n'appartient pas à la Mission de trancher ces débats, qui sont affaire de conception de chacun dans le cadre des textes en vigueur, et obéissent aussi aux contextes locaux. Cependant, l'observation des évolutions conduit à relever que la compréhension de leur rôle par les acteurs du TCU n'a cessé de s'élargir, à la mesure du développement des réseaux, de la diversification des modes, des progrès techniques, de l'accroissement continu de la fréquentation, d'une meilleure perception des attentes du public, et de l'affirmation dans leur rôle des collectivités organisatrices. A leur corps défendant parfois, en raison notamment des coûts impliqués, ils se sont engagés sur des voies nouvelles que personne d'autre ne voulait ou ne pouvait emprunter, mais qui offraient des perspectives qu'on ne pouvait refuser. La sécurité n'échappe pas à cette tendance.
72
A l'évidence certains champs d'action strictement régaliens (la répression des crimes et délits par exemple) ne peuvent entrer dans ce raisonnement. Mais dès qu'on passe à l'étage en-dessous en termes de gravité, et qu'on évoque la tranquillité publique et bien sûr la prévention, on voit bien que des réponses très diversifiées sont données. Vidéoprotection ; importance et missions des polices municipales, sont des variables fondamentales d'une ville à l'autre, à leur discrétion entière. Comme on l'a montré plus haut, les choix faits sont loin d'être indifférents pour les transports publics. Dès lors, des réponses propres du réseau de transport doivent prendre place dans le dispositif de coproduction. La mission souhaite indiquer en achevant ce rapport, qu'il lui a été donné d'observer, dans certains compartiments de ce jeu complexe, un grand professionnalisme de certaines entreprises ou collectivités innovantes, et elle estime que la contribution du monde du transport doit s'inscrire sous une telle exigence qui en signe la légitimité. Les deux grandes entreprises publiques RATP et SNCF qui n'étaient pas au centre des préoccupations de ce rapport, offrent à cet égard des exemples d'engagement et de créativité remarquables. Leur initiatives ne sont pas nécessairement transposables telles que, pour des raisons à la fois de statuts (déterminant des champs de compétences spécifiques) et de capacité financières ou humaines. Mais il est loisible de s'en inspirer. Les groupes priÎs ou para-publics qui contrôlent l'exploitation des transports urbains en province, tout en étant moins avancés et parfois plus réserÎs, ne sont cependant pas en reste. Dans les grands réseaux dotés de métros et de tramways, ils rivalisent même, à leur échelle, avec les deux cas précités. Ce concept de professionnalisation implique pour la mission que : la formation et le management des agents des réseaux de toutes catégories, inclue la préoccupation de la sécurité, car chacun, dans sa fonction et sans en dévier, a un rôle important à jouer ; la prise en considération de la relation humaine qu'implique l'acte de transporter des personnes, s'affirme davantage dans la culture de ceux qui s'y consacrent ; elle restera « technique », mais devra intégrer désormais, dans un volet commercial cultiÎ depuis longtemps, une valence de contact et d'apaisement des tensions ; les bonnes pratiques initiées ici ou là soient diffusées par les groupes et finalement imposées à leurs structures locales, par des modules de formation types et des processus de recrutement normés ; les collectivités renforcent leur attention à ces sujets, en sus des critères prioritaires de choix que sont les prix, les perspectives de développement de la fréquentation ou d'autres critères plus qualitatifs lors des appels d'offres.
73
74
Conclusion
La mission a rencontré des acteurs généralement très motiÎs et mettant en oeuvre des méthodes de prévention de la délinquance variables, en fonction du contexte fort divers de la délinquance dans chaque s agglomération et des organisations locales. Elle a retenu les points essentiels ci-après. La délinquance dans les TCU est le reflet de la délinquance dans la ville, avec des spécificités marquées concernant les agressions, notamment verbales, les vols et le harcèlement sexuel. Le caractère répétitif de cette délinquance du quotidien, et l'usage souvent lié à une contrainte économique des transports en commun conduit à un ressenti aggraÎ et à un sentiment d'insécurité souvent exagéré par rapport aux faits réels. La possibilité de lutter contre la fraude est largement ouverte aux opérateurs de transport, qui n'exploitent pas tous l'ensemble des possibilités que leur donnent les textes. La répartition des rôles est très variable d'un réseau à l'autre entre l'approche commerciale, la médiation, le constat des infractions, la dissuasion et l'intervention de sécurité concernant d'autres infractions releÎes à l'occasion de contrôles dans les TCU. Il faut cependant noter que tous les grands réseaux confrontés à ces problématiques ont pris des mesures permettant au minimum la protection des personnels. La mission a également releÎ l'implication dans les actions de médiation et les immersions en milieu scolaire. La répartition des rôles entre les acteurs mérite d'être abordée clairement et notamment entre l'opérateur et l'autorité organisatrice, qui devrait davantage s'impliquer dans la mise en place d'un observatoire local de la délinquance au niveau de l'agglomération, la production d'un diagnostic de sécurité et d'une stratégie territoriale dans les TCU, volet d'une stratégie plus globale. L'agglomération devrait également s'impliquer dans la mise en place d'une police intercommunale des transports, ou, le cas échéant, dans la coordination de l'implication des diverses polices municipales des villes de l'agglomération dans la tranquillité publique au bénéfice des TCU. L'objectif de mobilité durable implique une amélioration de l'image des TCU dont la réduction du sentiment d'insécurité est une composante importante. Or, le sentiment d'insécurité procède également de l'infra-délinquance que constituent les incivilités envers les personnels, comme envers les autres voyageurs. Ce sujet voit de plus en plus les opérateurs s'impliquer, ainsi que certaines AOT. La lutte contre le sentiment d'insécurité dans la chaîne de mobilité durable (parc relais, gare bus, ...) nécessite des actions cohérentes ; elle implique la mise en responsabilité d'un acteur central sur l'ensemble de la chaîne, qui devrait être l'AOT.
75
76
RECOMMANDATIONS
1. Recommandation : pour les autorités organisatrices de transport urbain: encourager la construction d'observatoires locaux de la délinquance dans les TCU exploitant l'ensemble des sources de données, incluant notamment les informations de l'opérateur de transport et celles issues des constats des services de police et de gendarmerie. ......................................................................................................................... 23 2. Recommandation : établir la liste des index les plus significatifs des faits constatés de délinquance faisant l'objet d'un suivi dans les TCU, par un groupe de travail placé sous l'égide conjointe du ministère de l'Intérieur et du ministère chargé des Transports, afin de favoriser une analyse locale pertinente de l'évolution de la délinquance dans les TCU par rapport à la voie publique. .................. 26 3. Recommandation : encourager la généralisation des démarches de médiation de tranquillité publique propres aux réseaux de transport, en diffusant les bonnes pratiques et en leur attribuant prioritairement des emplois aidés en réponse à proportion de leurs besoins. ................................................................................................ 39 4. Recommandation : permettre le développement de polices intercommunales dédiées aux réseaux de transports en donnant explicitement cette possibilité aux collectivités territoriales, autorités organisatrices. ............................................................ 40 5. Recommandation : proposer la généralisation à tous les réseaux de transports urbains des agglomérations de plus de 100 000 habitants par exemple, d'une convention multipartite régissant les rapports entre tous les acteurs impliqués dans la prévention et la sécurité sur le réseau, pour optimiser l'efficacité de leurs interventions respectives par une bonne coopération. ...................................................... 44 6. Recommandation : faire évoluer la convention-type annexée au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale pour prendre en compte le besoin de coordination au bénéfice de la tranquillité et de la sécurité publique dans les TCU. ............................................... 45 7. Recommandation : rappeler aux acteurs du transport public, par voie de circulaire (Transports-Intérieur-Justice) publiée au JO, leurs droits et devoirs en terme de respect des règles dans les espaces dont ils ont la maîtrise dans le cadre des textes en vigueur, en précisant bien les champs d'application des différents dispositifs et leurs implications diverses, y compris en termes de concours éventuel de la force publique. ............................................................................................................. 46 8. Recommandation : faire évoluer le décret du 27 août 2008 pour confier explicitement à l'autorité organisatrice la responsabilité de produire le diagnostic de sécurité pour les transports urbains. ............................................................................. 48 9. Recommandation : dans le cadre de l'officialisation des « stratégies territoriales de sécurité et de prévention de la délinquance », par évolution des anciens CLS, prévoir à la fois la promotion des approches intercommunales au sein des CISPD, et la présence d'un volet « transports urbains » en leur sein, mis au point par un groupe de travail ad-hoc, mais validé comme l'ensemble de la stratégie, par l'instance plénière. ........................................................................................ 50
77
10. Recommandation : faire évaluer par la MPEPPD l'impact de l'article 6 de la loi du 5 mars 2007 et de son décret d'application 2008-857 du 27 août 2008 précisant les modalités de concours apporté par les AOT aux actions de prévention de la délinquance deux ans après la publication de la circulaire de mise en oeuvre d' avril 2012. ......................................................................................................................... 50 11. Recommandation : promouvoir une présentation plus claire et plus simple des éléments essentiels du règlement d'exploitation en matière de prévention, ainsi que des campagnes locales de prévention des détériorations diverses. 55 12. Recommandation : mieux impliquer les voyageurs des TCU dans la lutte contre des phénomènes concrets de dégradation (sièges,..) par des campagnes locales de sensibilisation, en coopération avec l'autorité organisatrice. ......................... 55 13. Recommandation : renforcer l'équipement en dispositifs de vidéoprotection des autobus de l'ensemble des réseaux, notamment dans la grande couronne de l' Ile-de-France. .............................................................................................. 58 14. Recommandation : renforcer là où c'est nécessaire, la qualité des données des opérateurs (dont les images) élément d'une articulation efficace avec les services de l'Etat. ............................................................................................................ 59 15. Recommandation : développer les travaux du programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres (PREDIT) concernant l'impact économique et social de la délinquance dans les TCU et l'optimisation des moyens techniques et humains de prévention. ................................................................................ 60 16. Recommandation: prendre en compte la sécurité dans les études et les outils favorisant l'attractivité de la mobilité durable. ...................................................... 68 17. Recommandation: désigner l'autorité organisatrice comme chef de file des acteurs de la sécurité de la mobilité durable. .............................................................. 68 18. Recommandation: inclure la mesure du sentiment d'insécurité dans les enquêtes de satisfaction client, là où cela n'est pas déjà fait. ........................................... 70
78
Didier CHABROL Coordonnateur de la mission permanente Inspecteur général de l'administration
Bernard MESSIAS Inspecteur des services judiciaires
Bruno LAFFARGUE Inspecteur général de l'administration
Catherine HESSE Inspectrice générale des affaires sociales
Marc LE DORH Conseiller des services du Sénat Chargé de mission à l'inspection générale de l'administration
Isabelle MASSIN Inspectrice générale de l'administration du développement durable
Michel DESCHAMPS Inspecteur général des ponts, des eaux et des forêts
Alain TAUPIN Inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
HerÎ MECHERI Inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
Didier JOUAULT Inspecteur général de l'éducation nationale
Magali INGALL-MONTAGNIER Inspectrice générale adjointe des services judicaires
Jean-Luc MIRAUX Inspecteur général de l'éducation nationale 79
80
ANNEXE
Liste des personnes auditionnées
Administrations centrales, organismes nationaux, directions générales d'entreprises Ministère de l'Intérieur, DGPN, unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun Carine Vialatte, Commissaire divisionnaire, chef de l'UCSTC ; Guillaume Emile-Zola-Place, Lt-Colonel de gendarmerie, chef-adjoint de l'UCSTC ; Laurent Boisset, Commandant de police ;
Ministère de l'écologie, du développement durable, et de l'énergie Pascal Mignerey, directeur de l'autorité de la qualité de service des transports (AQST) ; Arnaud Dumontier, secrétaire général de l'AQST ; Gérard Rolland, chef du département de la sûreté dans les transports (DSUT) ; Yves Rougier, chef-adjoint DSUT ; Fabrice Fussy, chef de l'observatoire national de la délinquance dans les transports ; Christelle François, Yasmina Baaba, bureau du développement de la sûreté multimodale, DSUT ; Emmanuel Kozal, chef du bureau des opérateurs de transport collectif. Union des Transports Public et ferroviaires (UTP) Anne Meyer, directrice du département clientèle, exploitation et Recherche ; Benoît Juery, directeur adjoint du département des affaires sociales.
Groupement des autorités responsables de transport (GART) Jean-François Malbrancq, président de la commission accessibilité / sécurité, viceprésident de la communauté urbaine d'Arras délégué aux Transports et au Plan de Déplacements Urbains ; Denis Leroy, vice- président de la commission accessibilité / sécurité, vice-président de la communauté d'agglomération de La Rochelle ; Benoît Chauvin, responsable du Pôle Technologie des Transports et Accessibilité ; Groupe Keolis Jean-Yves Topin, directeur de la sécurité du groupe.
81
Groupe Veolia Transdev André Cailliez, directeur prévention, santé et sécurité du groupe.
82
Organismes ou personnes auditionnés du fait de leur expertise en matière de délinquance, d'insécurité ou de comportements incivils dans les transports Jean-Marc Novaro, directeur sécurité de la RATP ; Josiane Sommacal, chef de la mission coordination de la prévention de la direction de la sécurité de la RATP ; Céline Debove-Postel, directrice déléguée à la prévention et à la gestion des incivilités, direction de la sûreté, SNCF; Michèle FORT, direction de la sûreté de la SNCF ; Alain Riou, directeur développement Optile ;
Sylvie Scherer, directrice de la mission études sécurité de l'institut d'aménagement et d'urbanisme d'Ile de France (IAU IdF) ; Hélène Heurtel, statisticienne à la mission études sécurité IAU IdF ; Marion Guillou, psychologue sociale, en thèse à l'université de Nantes concernant les incivilités dans les transports ferroviaires ; Pascal André, senior consultant incivilités délinquance dans les transports, cabinet Plein Ciel ; Marion Baud, Chef du projet Gares du grand Paris, direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement (DRIEA) d'Ile de France ; François Bertrand, Directeur, Unité Territoriale 92/DRIEA ; Anne Grandguillot, Centre d'études techniques de l'équipement (CETE) de Lyon, directrice du département construction Aménagement projet ; Pierre Guyot, Service environnement et urbanisme réglementaire, DRIEA / Unité territoriale de la Seine Saint Denis ; Cédric Boussuge, Chargé d'études, Cete de Lyon ; Cyril Pouvesle, Chargé d'études, Cete de Lyon ; Stéphane Melot, Responsable Sûreté et sécurité publique Société du Grand Paris (SGP) ; Valérie Vernet, Responsable de l'unité Gares, SGP ; Juliette Battini, Préfecture de Police, Service Information Sécurité ; Laurence Kimmel,Chargée de mission/ SADD/UT92/DRIEA ; Laetitia Conreaux, Stagiaire/ UT92/ DRIEA ; Aurore Nativité, Chef du service environnement et réglementation de l'urbanisme/UT94/ DRIEA ; Sophie Mozer, Responsable du pôle de l'application du droit des sols / UT 94/DRIEA ; Fanny HerÎ, Responsable SADT, DRIEA / UT93. Personnes rencontrées lors du déplacement à Strasbourg Patrick Poirret, Procureur de la République près le TGI de Strasbourg ;
83
Jean-François Colombet, Directeur de Cabinet du Préfet de la Région Alsace, Préfet du Bas-Rhin ; Olivier Bitz, Adjoint au Maire en charge de la Tranquillité publique à Strasbourg ;
Luc-Didier Mazoyer, Directeur Départemental de la Sécurité Publique ; Stéphane Lacour, chef du service de sécurité de proximité ; Sébastien Raimbault, Chef de l'Unité de Sécurisation des Transports en Commun (USTC) ; Francis Jaecki, Directeur Général Adjoint en charge du Pôle sécurité, prévention et réglementation de la Communauté Urbaine de Strasbourg (CUS) ; Christian Anthoni, Chef du service prévention, animation, sécurité du pôle sécurité prévention et réglementation de la CUS ; Jean-Louis Metzger, directeur des déplacements clients de la compagnie des transports Strasbourgeois (CTS) ; Jean-Michel Augé, directeur du développement durable et des relations institutionnelles de la CTS ; Gilbert Stammbach, Responsable sûreté pour la Région Alsace SNCF. Personnes rencontrées lors du déplacement à Lyon Jean-Pierre Cazenave-Lacrouts, préfet délégué pour la défense et la sécurité ; Gilles Rouveure, directeur de cabinet du préfet délégué pour la défense et la sécurité ; Laurent Hyp, cabinet du préfet délégué ;
Albert Doutre, directeur départemental de la sécurité publique (DDSP) ; Alain Payet, chef d'état major adjoint de la DDSP ; Cdt Josselyne Massoco, chef du Service interdépartemental de sécurisation des transports en commun ; Commandant Bonnal, chef du bureau opérations emploi du groupement de gendarmerie du Rhône ; Stéphane Canalis, directeur mobilité du Conseil Général du Rhône (CG 69) ; Maxime Bulinge, Chef du bureau Accessibilité et Qualité du Réseau, direction mobilité CG 69 ; Georges Pasini, Directeur sécurité prévention de la ville de Lyon ; Henri Fernandez, Directeur opérationnel de la Police Municipale (PM) ; Jean-Georges Meritza, responsable du bureau d'ordre des activités de la PM ; Laurence Emin-Coutino, direction prévention sécurité en charge de la coordination du CLSPD ; M Emmanuel Magne, directeur de la direction supervision globale de la ville de Lyon ; Bernard Rivalta, Président du Sytral ; Raymond Deschamps, Directeur Général du Sytral ; 84
Valérie Guillou, directrice de l'Exploitation du Sytral L ; Eve-Marie Moos, conseillère sécurité auprès du président ; Pascal Jacquesson, directeur général de Kéolis Lyon ; Patrick Aujogue, directeur Sécurité Kéolis Lyon.
Personnes rencontrées lors du déplacement au Mans Pascal Lelarge, préfet de la Sarthe ; François de Keréver, Directeur du cabinet du préfet de la Sarthe ; Magali Debatte, secrétaire générale de la préfecture ;
Jean-François Soulard, Conseiller municipal, vice-président de Le Mans Métropole en charge des transports en commun de l'agglomération mancelle et Président de la SETRAM ; François Chaumard, directeur départemental de la sécurité publique 72 ; Daniel Peneaud, directeur du service « Tranquillité publique », mairie du Mans ; Jean-Paul Pringuet, directeur de la SETRAM ; Laurence Tilloy, directrice d'exploitation à la SETRAM.
Personnes rencontrées lors du déplacement à Orléans Florent Montillot, Maire Adjoint à la Tranquillité Publique, la Prévention, la Réussite et l'Intégration, membre du bureau de l'Agglomération d'Orléans ; Pascal Desuert, Directeur de la sécurité et de la tranquillité publique, directeur de la police municipale de la ville d'Orléans ; William Le Pelletier, chef de service, responsable de la police municipale intercommunale des transports ; Franck Meunier , responsable sécurité contrôle prévention de Keolis Orléans.
Autres entretiens Benoît Berque, Chef du Pôle Sécurité Publique-Cultes Cabinet du Préfet de la région Auvergne Clermont-Ferrand ; Emmanuel Gerber, responsable du service transports d'agglomération castelroussine ; Jean-Luc Quintric, directeur du réseau (Keolis Châteauroux) ; Etienne Sesmat, directeur de la sûreté de la RTM Marseille. de la communauté
85
(ATTENTION: OPTION Les pouvoirs des agents des polices municipales sont définis notamment à l'article L511-1 du code de sécurité intérieure. Ils peuvent verbaliser en particulier les contraventions aux arrêtés de police du maire et les contraventions au code de la route. Ils peuvent également constater les infractions aux dispositions de plusieurs codes (code de la santé, code rural, code
50
De la police municipale à la police territoriale : mieux assurer la tranquillité publique, par MM. François PILLET et René VANDIERENDONCK, sénateurs. Rapport d'information du sénat, 26 septembre 2012 51 Cependant, la doctrine d'emploi de certains maires tendent à un emploi en intervention, notamment en exploitant les images de centres de supervision urbains en procédure de flagrant délit
39
forestier,...) Ils ne peuvent pas procéder à des enquêtes, mais peuvent recueillir des renseignements et rendre compte à un OPJ. Une convention de coordination signée entre le maire et le préfet permet de définir les échanges d'informations et de coordonner certaines procédures entre polices municipales et les forces de sécurité nationale, dans le respect des compétences de chacun. Les petites communes éprouvent des difficultés à créer et à supporter la charge d'entretien d'un tel service. L'article L512 du CSI autorise le recrutement par un EPCI d'agents de police municipale. La mutualisation est limitée à la gestion budgétaire et des ressources humaines. Pendant l'exercice de leurs fonctions sur le territoire d'une commune, ils sont placés sous l'autorité du maire de cette commune. Ce dispositif est parfois appelé abusivement : police intercommunale. Il suppose la signature par le maire d'une convention avec les autres communes membres du dispositif, précisant la doctrine d'emploi sur le territoire de chaque commune. Le rapport sénatorial cité propose de favoriser l'émergence de Îritables polices intercommunales. Il note en particulier que « comme l'a souligné lors de son audition le directeur général des collectivités locales, lorsque la coopération avec la police nationale telle que formalisée dans la convention de coordination s'étend aux transports et que cette compétence a été transférée à l'EPCI, il parait plus simple que la police des transports soit de la responsabilité de celui-ci ». La mission fait sienne cette recommandation.
4.
Recommandation : permettre le développement de polices intercommunales dédiées aux réseaux de transports en donnant explicitement cette possibilité aux collectivités territoriales, autorités organisatrices.
Les dispositifs de police municipale impliqués dans les TCU sont peu fréquents. Le dispositif le plus ancien est celui de la police municipale intercommunale des transports d'Orléans. Créée en 2004, cette police agit dans le cadre du contrat local de sécurité dans les transports (CLST) de la communauté d'agglomération, signé par 18 communes sur 22. Les policiers intercommunaux, recrutés et gérés administrativement par l'EPCI, sont mis à la disposition des maires pour l'exercice de leurs missions opérationnelles et notamment la constatation d'infractions. Le service fonctionne en complémentarité avec la police nationale et la gendarmerie nationale. La police intercommunale est composée de 24 agents dont des policiers municipaux, des agents de surveillance et des agents de médiation, qui exercent sur 18 des 22 communes de l'agglomération signataires du CLST52. La PMIT ne peut donc intervenir sur le territoire des
communes non signataires et le regrette.
Les principales missions de cette police intercommunale sont notamment: d'assister le service contrôle de la SEMTAO (lutte contre la fraude) ; de surveiller le réseau SEMTAO par des patrouilles embarquées à bord des bus et trams du réseau.
52
Entretien cité avec F. Montillot et communiqué de presse de l'agglO, 18 janvier 2010
40
La mission considère que cette expérience, dont le fondement juridique alimente certes des débats qui justifieraient une mise à jour des textes, a une efficacité aÎrée, et peut servir de référence à des développements similaires. A Chateauroux, la police municipale effectue une centaine d'interventions par an concernant le réseau de transports. Son efficacité est reconnue, mais elle est limitée au territoire de la ville centre. Au Mans, les agents de Tranquillité publique, bien que ne bénéficiant pas du statut de policiers municipaux, effectuent également de telles patrouilles. La limitation statutaire de leur champ d'intervention au territoire de la ville du Mans est, là encore, ressentie comme un handicap sérieux. A Bordeaux, Marseille ou Strasbourg au contraire, les interventions de la police municipale d'importance d'ailleurs très inégale dans les TCU sont exceptionnelles ou inexistantes. La connaissance fine du terrain permettrait pourtant à ces agents de garantir la tranquillité publique dans les Îhicules et au voisinage des lignes dans l'agglomération, d'appuyer les contrôles, de rappeler la règle et de conforter les actions de médiation mises en oeuvre. Une autre limitation fréquemment releÎe par les opérateurs de transport concerne l'amplitude de service des policiers municipaux qui est souvent sensiblement plus étroite que celle du service de transport. Ce décalage est d'autant plus ressenti que la présence humaine apaisante est particulièrement nécessaire en fin de journée. Une mission beaucoup plus fréquemment assurée par les polices municipales concerne les incivilités routières : stationnement sur des arrêts de bus ou dans des couloirs réserÎs. Cette mission reÐt un enjeu important de qualité de service. La coopération de la police municipale avec l'entreprise de TCU peut concerner également le soutien aux conducteurs victimes d'agressions verbales ou physiques de la part de conducteurs d'autres Îhicules53. Tout en étant consciente des implications en termes de coûts et donc des arbitrages financiers que cela implique inévitablement, la mission estime : que la prise de conscience d'une responsabilité locale en matière de tranquillité publique et de sécurité de proximité est réelle et très encourageante, mais qu'elle devrait s'étendre davantage à l'espace des TCU, qui n'ont aucune raison d'en être tenus à l'écart ; des bonnes pratiques existent dont on peut s'inspirer ; qu'une approche globale des moyens locaux de la prévention, susceptible de déboucher sur des arbitrages qui incombent en toute hypothèse aux collectivités locales concernées, devrait être systématiquement recherchée, pour affecter les ressources appropriées au bon niveau, compte-tenu des responsabilités juridiques respectives.
53
Entretien de la mission avec la police municipale de la ville de Lyon
41
2.1.2.3 Le rôle de l'Etat : lutter contre la délinquance, avec l'appui de ses partenaires
La responsabilité de l'Etat en matière de sécurité et de lutte contre la délinquance ne se divise pas : elle concerne donc les espaces du TCU au même titre que tous les autres, qui requièrent une implication des services à due proportion des risques, sans qu'il soit nécessaire d'aller au-delà dans le cadre de ce rapport. Une question a toutefois été souvent évoquée devant les membres de la mission : la capacité d'intervention des forces de sécurité (police ou gendarmerie) dans les espaces du TU est-elle suffisante ? Comment l'améliorer ? Faut-il mettre en place des structures ou unités dédiées ? La mission a releÎ une certaine diversité de réponses, face à un risque spécifique reconnu comme tel. Il est certain qu'elles découlent au premier chef de la taille de l'agglomération et des effectifs de police urbaine disponibles : la mise en place d'une unité dédiée n'est possible et pertinente, en toute hypothèse, que dans les grandes villes, et sous réserve de confirmation d'un besoin spécifique, que l'observation fine de la délinquance peut contribuer à définir. Un certain nombre d'initiatives ont pu être prises dans ce sens. Il s'agit de services interdépartementaux de sécurisation des transports en commun (SISTC), forts d'une centaine d'agents, à Lille, Lyon, Marseille, ou d'unités de sécurisation des transports en commun (USTC) d'environ 20 agents54. Ces dispositifs sont très appréciés des opérateurs, l'intervention dans les transports requérant une étroite coordination avec l'encadrement et les personnels (conducteurs et Îrificateurs) et des relations spécifiques avec les passagers, qui ne sont pas celles de la voie publique en général et nécessitent formation souvent assurée par l'opérateur - et habitudes. Les SISTC ou USTC sont des structures souples. Dans une grande agglomération, les policiers de l'entité spécialisée ne sont pas dédiés exclusivement aux transports. S'il y a lieu, ils interviennent sous le signe de l'urgence ou en cas de proximité sur d'autres types de mission. Cependant, l'essentiel de leurs tâches concernent les TCU. En retour, les interventions sur le réseau de TCU ne sont pas réserÎes à l'entité spécialisée : c'est l'unité la plus rapidement disponible qui est sollicitée. Un DDSP indique que les missions principales des policiers de l'entité chargée des transports au sein de sa direction concernent la délinquance d'appropriation (« vols à la tire »), les atteintes aux personnes, les infractions à la législation sur les étrangers (ILE) et les infractions à la législation sur les stupéfiants (ILS). Ces objectifs seront atteints notamment lors de la présence policière en appui à des opérations de contrôle par l'opérateur (cf. supra point de vue de la mission à ce sujet). Si l'on s'en tient aux attentes exprimées, force est de constater que le développement de ces unités, ou même leur généralisation au-dessus d'un certain seuil de population, serait une réponse appréciée. La mission le comprend. Mais elle estime que la qualité des relations opérationnelles et quotidiennes, qui permet d'installer la confiance, est la condition essentielle
54
Toulouse, Bordeaux, Rouen, Strasbourg, Nantes, St Etienne, Montpellier ; certaines existent depuis les années 90. Creteil a été intégrée dans le périmètre de la SPRT
42
de l'efficacité de la lutte contre la délinquance dans les transports, et qu'elle permet des réponses appropriées aux risques encourus et aux signalements, même en l'absence d'unité spécialisée. Une réalité s'impose en fait à l'observation : la connaissance et la compréhension mutuelle des difficultés Îcues, notamment face aux risques propres à certains quartiers et à certains publics, caractérisent les relations au quotidien entre policiers et personnels du réseau. Dans ces conditions, le constat d'une bonne réactivité de la police paraît très largement fait. Le souhait de cette dernière de disposer, de la part du transporteur et de ses agents, de toutes les informations en sa possession pour faciliter sa tâche, est parfois exprimé, dénotant sans doute des interrogations ici ou là. La mission estime qu'il appartient aux responsables, par exemple dans le cadre des conventions évoquées ci-dessous, de définir les voies et moyens d'une telle pratique d'informations mutuelles, qui requiert des précautions pour rester strictement dans le cadre des textes en vigueur et préserver la sécurité de tous. Enfin, ayant noté que la question du coût pour l'opérateur de la recherche et de la transmission des images vidéo dans le cadre des investigations judiciaires, reste posée par certains transporteurs, qui estiment qu'il devrait être pris en charge par l'Etat et ne pas leur incomber, la mission souhaite indiquer clairement sa position. Faisant siennes les conclusions déjà produites à ce sujet par l'IGA dans un rapport sur l'efficacité de la vidéoprotection 55, et à l'instar de l'option prise par de très nombreux réseaux d'une coopération fondée sur l'intérêt mutuel, qui les conduit à effectuer cette tâche à titre gracieux, la mission estime que cette solution s'impose. Corollairement, les services de police n'obtiendront de réponses rapides et utiles à leurs demandes que si celles-ci impliquent des efforts que l'on peut raisonnablement exiger d'un partenaire. Par exemple, tel directeur de réseau mobilisera volontiers son personnel habilité pour lire de nombreux enregistrements en cas de fait particulièrement grave, mais ne pourra pas réserver la même suite à des demandes récurrentes qui peuvent être disproportionnées par rapport aux faits. Il faut donc privilégier une approche pragmatique, donnant lieu à des échanges permanents pour que les demandes soient calibrées et les réponses rapides, les modalités pouvant également figurer dans une convention locale.
2.1.3
Un partenariat formalisé par des conventions
L'importance d'une coopération opérationnelle fluide, et la nécessité d'en préciser les objectifs, les contours dans le respect des textes fixant les missions de chacun des acteurs et les modalités, suggère à la mission de préconiser la mise en place de conventions ad-hoc, entre l'opérateur, la ou les collectivités locales et l'Etat. De telles conventions existent déjà dans la plupart des grands réseaux. Ce dispositif spécifique doit néanmoins s'intégrer dans la logique plus large de la prévention de la délinquance dans l'agglomération (voir 2.2) et
55
Rapport complémentaire sur l'efficacité de la vidéoprotection IGA n° 10-059-02, IGGN n° 32 568 et IGPN n° 10/1246D Novembre 2012
43
s'articuler avec ceux régissant strictement les relations police nationale- police municipale qui ont d'ailleurs été récemment rénoÎs. Cet exercice doit rester souple et adapté aux circonstances locales, c'est pourquoi on se limitera ici à en préconiser le principe et à en proposer les éléments essentiels, du point de vue des acteurs impliqués, du contenu, et des articulations évoquées ci-dessus. Il s'agirait d'un document multipartite, impliquant tous les acteurs concernés par la prévention et la sécurité sur le réseau de TCU et y consacrant des moyens : l'opérateur, l'autorité organisatrice, l'agglomération (si elle est différente) et les communes concernées, et l'Etat. Pour ce dernier partenaire les questions traitées impliquent l'engagement de l'autorité administrative et de l'autorité judiciaire. Du point de vue du contenu il devrait a minima comprendre : Les objectifs et les modalités de l'échange d'information (y inclus vidéoprotection) ; Les formations ou sensibilisations aux spécificités du TCU et aux contraintes mutuelles ; Les instances et les modalités de la coordination opérationnelle (en temps normal et en période de crise, y inclus exercices préparatoires) ; Les modalités du soutien au personnel et aux autres victimes en cas d'agression...etc. (modalités du dépôt de plainte, accueil, soutien psychologique...etc.) ; Un dispositif d'évaluation et de remise à plat périodique. S'agissant de l'articulation avec l'ensemble des dispositifs en place, la mission recommande de veiller à ce que cet exercice soit effectivement réalisé et suivi, sous l'égide de l'AOT, conformément à l'esprit des textes en vigueur, et en liaison avec les instances partenariales de la prévention de la délinquance, si possible au niveau de l'agglomération. Dans la mesure où les polices municipales sont concernées, il devra impliquer toutes les communes qui le souhaitent et tenir compte des dispositions conventionnelles spécifiques régissant pour chacune d'elles, les rapports entre police (ou gendarmerie) nationale et police municipale.
5.
Recommandation : proposer la généralisation à tous les réseaux de transports urbains des agglomérations de plus de 100 000 habitants par exemple, d'une convention multipartite régissant les rapports entre tous les acteurs impliqués dans la prévention et la sécurité sur le réseau, pour optimiser l'efficacité de leurs interventions respectives par une bonne coopération.
L'annexe au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale fournit le canevas d'une convention de coordination entre police nationale ou brigade de gendarmerie nationale et police
44
municipale.56 Cette convention-type ne prévoit pas le besoin de coordination pour des actions de sécurisation ou de prévention concernant les TCU.
6.
Recommandation : faire évoluer la convention-type annexée au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale pour prendre en compte le besoin de coordination au bénéfice de la tranquillité et de la sécurité publique dans les TCU.
En conclusion de cette partie, la mission fait le constat : a- qu'une relation de confiance entre forces de police (ou de gendarmerie), polices municipales et opérateur de transport est indispensable, et qu'elle est établie, dans la grande majorité des cas ; b- qu'au-delà de la présentation « commerciale » au voyageur de la nécessité d'acquitter le prix d'un titre de transport et de respecter les règles de savoir-vivre, l'opérateur a besoin d'un appui à ses opérations de contrôle et à la lutte contre les dégradations et les agressions verbales, visant notamment ses personnels ; c- qu'en fonction des conditions locales, de l'intensité de la délinquance dans les TCU et de sa nature, cet appui est fourni par une police municipale, (ou une police municipale intercommunale), ou par la police nationale ; d- que tous les opérateurs et les groupes contactés reconnaissent que l'intérêt bien compris de l'opérateur est de s'investir dans une coopération fondée sur l'intérêt mutuel, ce qui est le cas très général. Cette coopération est notamment illustrée par la fourniture d'images analysées aux forces de police ; e- que ces coopérations, si elles sont généralement excellentes, méritent une meilleure formalisation et un organe de régulation. Par exemple, une réunion annuelle ou bi-annuelle de haut niveau (préfet, procureur, président de l'autorité organisatrice, DG de l'opérateur) de bilan et de perspective permet d'adapter les limites raisonnables aux demandes de chacun ; f- que, dans quelques cas, il est pris prétexte de l'ambiguïté des textes pour refuser de sortir des limites étroites des intérêts à court terme. En attendant une mise à jour de ces textes, la mission recommande :
56
Voir la circulaire d'application INTK1300185C du 31 janvier 2013 qui prévoit notamment la réalisation d'un diagnostic de sécurité préalable à la signature de la convention. Cette circulaire s'applique aux polices municipales composées d'agents recrutés par un EPCI et mis à disposition de plusieurs communes.
45
7.
Recommandation : rappeler aux acteurs du transport public, par voie de circulaire (Transports-Intérieur-Justice) publiée au JO, leurs droits et devoirs en terme de respect des règles dans les espaces dont ils ont la maîtrise dans le cadre des textes en vigueur, en précisant bien les champs d'application des différents dispositifs et leurs implications diverses, y compris en termes de concours éventuel de la force publique.
Cette circulaire pourra utilement servir de base à la convention multipartite évoquée ci-dessus.
2.2 La prise en compte dans les stratégies territoriales de sécurité et de prévention
Sur la base des observatoires de la délinquance animés par l'autorité organisatrice, que prévoit le décret précité, la délinquance dans les transports mérite un diagnostic particulier avant d'agir en prévention, du fait des risques spécifiques à l'espace transport, des populations concernées et des territoires traversés. Cependant, les actions de prévention menées doivent s'intégrer dans une stratégie territoriale globale, qui ne peut être que d'agglomération, ce que l'entrée TCU peut favoriser. La mission a fait le point avec les structures administratives qui suivent la situation des dispositifs de prévention dans les transports. Comme de précédents travaux l'avaient releÎ, et comme l'a confirmé « l'Observatoire national de la délinquance dans les transports » (ONDT Ministère chargé des Transports) la promotion de la formule de « Contrat locaux de sécurité » dédiés aux transports collectifs (CLS-Transports), a été remplie de succès, puisqu'ils se sont multipliés et réÏlent des démarches très intéressantes. Cela confirme l'importance ici aussi du partenariat. Cette approche très spécifique aux acteurs des TCU est souvent portée par la dynamique d'une relation efficace entre l'exploitant et la police, dont la mission a pu observer qu'elle est aujourd'hui très générale et proportionnelle à la gravité des situations. Elle a toutefois pu contribuer à un certain isolement de la problématique « transports » par rapport à la stratégie générale de la ville ou de l'agglomération. La mission, l'ayant obserÎ en plusieurs sites, estime qu'il faut progressivement y remédier et en fait l'un de ses points forts. A ce titre elle suggère une approche en deux étapes : si la phase de diagnostic doit être menée séparément, car il importe d'identifier les problèmes spécifiques des TCU dans la ville en matière de sécurité, l'intégration des actions qui en découlent à la stratégie générale de sécurité dans l'agglomération dont ils peuvent représenter un volet identifié nous paraît s'imposer, dans un souci de décloisonnement et de cohérence. Dans un certain nombre de cas, le CLS-T tient partiellement lieu de la convention multipartite préconisée. La mission juge préférable de clairement distinguer le volet TCU de la stratégie territoriale de l'agglomération de la convention citée, plus proche de l'opérationnel que de la stratégie, comme l'exemple de Lyon le démontre.
46
2.2.1 L'indispensable diagnostic préalable
Dans son guide sur l'évaluation des politiques locales de prévention de la délinquance publié début 2011, la Mission permanente avait rappelé l'importance d'un Îritable diagnostic « partir d'un diagnostic partagé » - et l'a situé dans le processus général. Ses préconisations de principe et de méthodologie s'appliquent parfaitement à la problématique des TCU : le diagnostic est établi sur la base de données aussi complètes que possible (sans négliger les « signaux faibles ») fournies par les différents acteurs et partenaires du réseau, à commencer par ses clients ; les conclusions doivent être partagées par les acteurs principaux : entreprise, AOT, agglomération, Etat, pour pouvoir servir de fondement à une stratégie partenariale ; il est effectué à une certaine date, avant le lancement d'un programme d'actions à moyen terme, et doit être périodiquement renouvelé sur la base du suivi de l'évolution de choses, dans cet univers en constant mouvement ; on peut juger nécessaire de faire appel à un expert, mais ce n'est nullement indispensable car un bon diagnostic repose avant tout sur la connaissance intime du réseau, du territoire, des attentes du public et du ressenti des personnels, que seuls ses acteurs possèdent ; l'établissement du diagnostic peut fournir matière au dialogue social d'une part, pour inclure complètement le volet sécurité dans le management de l'entreprise, et au dialogue avec les usagers d'autre part, dans le cadre des enquêtes sur la qualité de service ou au sein d'instances de dialogue et de conseils de quartiers. Les exemples de diagnostic de sécurité produit par des autorités organisatrices sont encore rares. Cependant celui établi en 2010 par un groupe restreint sous l'égide de l'autorité organisatrice lyonnaise (SYTRAL), a été présenté à la mission, lors de son déplacement à Lyon. Le document s'inscrit dans la logique du plan national de sécurisation des Transports et du plan national de prévention de la délinquance et de leurs déclinaisons départementales. Il décrit les principaux phénomènes, les points et les périodes sensibles, l'enjeu majeur que constitue la fraude, dresse les portraits croisés des auteurs et des victimes et présente le point de vue des personnels. C'est là une bonne pratique à encourager. Compte tenu des responsabilités respectives, et en application des textes en vigueur, l'Autorité organisatrice paraît devoir être davantage qu'aujourd'hui - l'initiateur et l'animateur naturel d'une telle démarche, avec le concours actif de l'opérateur exploitant, et celui des autres partenaires. Elle en livrera les résultats à la (ou aux) collectivité (s) qui portent la stratégie territoriale de prévention de la délinquance. A cet égard, une évolution des textes est souhaitable, dans le sens d'une clarification.
47
8.
Recommandation : faire évoluer le décret du 27 août 2008 pour confier explicitement à l'autorité organisatrice la responsabilité de produire le diagnostic de sécurité pour les transports urbains.
2.2.2 L'articulation avec la stratégie territoriale, les instances et les outils
La mission a souligné dans d'autres travaux combien le niveau de l'agglomération lui paraît pertinent pour établir et piloter une « stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance » telle que le Plan national de 2009 les prescrivait. Elle estime d'ailleurs que, compte tenu de l'écho rencontré par cette formule à la fois plus volontariste, y compris en termes d'évaluation, et plus souple dans sa forme le moment est venu de l'officialiser par un texte, qui inciterait également à l'entreprendre au niveau intercommunal, car c'est encore trop peu le cas, pour toutes sortes de raisons. S'agissant de la problématique transports, la mission estime donc qu'elle doit être intégrée à la stratégie générale tout en lui conservant une certaine identité, pour marquer l'appartenance du réseau à la ville tout en ménageant un espace de dialogue et de proposition pour ses acteurs et partenaires propres. Cela lui paraît pouvoir se faire à trois niveaux : celui des instances de prévention, celui des engagements, et celui de l'évaluation. Les instances Le développement de démarches spécifiques de prévention (CLS-Transports) s'est accompagné dans la plupart des cas de la mise en place d'une instance spécifique de concertation réunissant les acteurs concernés, qui a permis de grandes avancées. Toutefois, compte tenu des impératifs de cohérence rappelés ci-dessus, la mission estime qu'il faut préférer une participation active des acteurs des TCU à la démarche globale, au travers de leur participation au CISPD, ou, à défaut, des CLSPD des principales villes de l'agglomération, ainsi qu'à certains de ses groupes de travail thématiques ou opérationnels. Cette participation permettra l'apport des problématiques transports à la démarche générale, et en retour le bénéfice d'une association à cette démarche pour les acteurs du transport. Bien entendu, la mise sur pied d'un groupe de travail dédié aux transports au sein du CISPD s'impose. Elle permettra de préserver l'acquis d'une instance ancienne si elle existait, ou d'initier une dynamique dans le cas contraire. Elle fournira le lieu d'échanges spécifiques en cercle plus restreint, tout en restant en liaison avec l'ensemble, au travers des documents partagés, de la présence du ou des animateurs (élus, coordonnateurs...etc), et de l'inscription d'objectifs stratégiques et de programmes d'action articulés à la stratégie générale. La mission a constaté que les acteurs de la sécurité des TCU sont de plus en plus impliqués dans les débats parfois formels mais indispensables des réunions plénières des CLSPD, prenant place au sein des autres logiques urbaines. Leur management est porté par une instance plus concrète et souvent réunie, dans l'environnement institutionnel de la
48
prévention, piloté par l'exécutif de l'agglomération ou par le maire. Il est nécessaire de généraliser ces bonnes pratiques, là où ce n'est pas encore le cas. Dans le cas des grandes agglomérations, la participation à la démarche globale pourra être mise en place sous la forme d'une instance spécifique à laquelle sont associées toutes les communes du périmètre de transport urbain. Réciproquement, le comité restreint pilotant cette instance participe systématiquement au CLSPD de chacune des communes. A Lyon, à la suite du diagnostic de sécurité cité, le SYTRAL a produit une stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance pour les transports en commun Lyonnais d'une durée courte de 2 ans (2011-2013). Le document prévoit la gouvernance par un comité de suivi restreint et la coordination avec l'ensemble des CLSPD et des CUCS des communes incluses dans le périmètre de transport urbain. L'observatoire de la sécurité dans les transports urbains se réunit deux à trois fois par an. Les partenaires en sont la Préfecture, la Police Nationale, la Gendarmerie Nationale, le Parquet, l'Inspection Académique, et les communes du PTU57. Stratégie, engagements La mission préconise que les engagements relatifs aux actions de prévention à mener en direction des TCU, soient tout simplement l'un des volets de la stratégie générale et non plus consignés dans un document spécifique (CLS-T) comme c'est souvent le cas aujourd'hui. Il faut rappeler qu'en application de la loi, le pilotage de la prévention de la délinquance est assumé par le maire ou le président de l'intercommunalité, qui est dans la plupart des cas l'autorité organisatrice du TCU. Même dans les cas où ce service public relève d'une collectivité spécifique à compétence unique, la prise en charge politique est généralement la même ou en correspondance. Il est hautement souhaitable d'élever les engagements propres aux TCU, au même rang de solennité que tous les autres, et que la revue en soit assurée dans les mêmes conditions. La Mission préconise donc la mise en place d'un volet TCU dans toutes les stratégies territoriales, et suggère que cette recommandation figure dans le texte les officialisant. L'évaluation L'évaluation des actions de prévention reste très insuffisante en France. Elle est pourtant indispensable pour apprécier leur efficacité, permettre un pilotage fin, et optimiser les financements publics. Les conditions de fonctionnement des TCU sont par essence très évolutives et les réponses doivent être adaptées en permanence. C'est pourquoi la mission estime qu'au sein même d'un effort général d'évaluation qui reste à engager le cas des actions de prévention liées au réseau de transport devrait être prioritaire.
57
18 personnes participaient à la réunion du 18 janvier 2012, dont des représentants de la justice, de la préfecture, de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de l'inspection d'académie, de la ville de Lyon, de la ville de Villeurbanne et de l'opérateur Keolis.
49
Elle a fait valoir dans le Guide déjà cité qu'il n'est pas possible de se limiter à suivre le bon accomplissement des actions (indicateurs de réalisation) même si c'est indispensable, et à l'inverse qu'il est hasardeux de prétendre attribuer aux seules actions de prévention une évolution à la baisse de la délinquance. Ces deux limites valent pour les TCU. C'est pourquoi elle a développé la notion « d'indicateur intermédiaire » c'est-à-dire mesurant une évolution ponctuelle, dont on peut démontrer qu'elle a un lien direct non contestable avec une action ou un programme d'action. Elle estime que l'environnement des TCU est tout à fait propice à la détermination de tels indicateurs, car les faits qui affectent spécifiquement les usagers, les personnels et les équipements, peuvent être prévenus par des actions spécifiques, assez aisément mesurables. Certains le sont d'ailleurs d'ores et déjà. Il en va ainsi en particulier : de la lutte contre la fraude, qui est aussi une prévention en ce qu'elle impose un niveau accru de civilité sur le réseau et qu'à l'inverse l'élévation du taux de fraude est généralement le signe d'une dégradation de la situation et un facteur aggravant du risque d'incidents plus ou moins graves ; des programmes d'action coûteux notamment en moyens humains sont menés, et l'évolution peut être mesurée par des techniques d'enquêtes maintenant éprouÎes ; de la prévention des dégradations, par l'appel au respect des équipements, qui peut emprunter plusieurs voies, y compris la pédagogie du Travail d'intérêt général qui tend à prévenir la récidive ; l'efficacité de ces actions peut être aisément appréciée par un suivi fin des faits constatés, au travers des coûts de remise en état, dès lors qu'on adopte, comme le font aujourd'hui la plupart des opérateurs, un standard éleÎ de bon état visible des matériels et des espaces d'échange. Au total la mission estime donc qu'il est temps de donner à toutes ces initiatives une reconnaissance officielle et de permettre leur inscription dans des stratégies territoriales ellemême officialisées.
9.
Recommandation : dans le cadre de l'officialisation des « stratégies territoriales de sécurité et de prévention de la délinquance », par évolution des anciens CLS, prévoir à la fois la promotion des approches intercommunales au sein des CISPD, et la présence d'un volet « transports urbains » en leur sein, mis au point par un groupe de travail ad-hoc, mais validé comme l'ensemble de la stratégie, par l'instance plénière.
Enfin, la mission considère qu'il serait souhaitable d'évaluer l'impact du décret cité deux ans après le début de sa mise en oeuvre suite à la publication de la circulaire citée d'avril 2012.
10. Recommandation : faire évaluer l'impact de l'article 6 de la loi du 5 mars 2007 et de son décret d'application 2008-857 du 27 août 2008 précisant les modalités de concours apporté par les AOT aux actions de prévention de la délinquance deux ans après la publication de la circulaire de mise en oeuvre d' avril 2012.
50
3 Des moyens significatifs pour répondre à des besoins multiples
Au cours de ses entretiens et visites, la mission a cherché à apprécier la pertinence des moyens humains, techniques et organisationnels mis en oeuvre dans les réseaux de transports. Leur mise en place est forcément coûteuse, ce qui renvoie à d'inévitables arbitrages dans lesquels l'exigence de sécurité doit trouver toute sa place. Elle a choisi de résumer ses constats et suggestions en distinguant : les moyens humains (3.1) ; les moyens techniques (3.2) ; l'agencement de l'ensemble et son financement (3.3).
3.1 Des moyens humains en progression continue
S'agissant de prévention de la délinquance et de lutte contre le sentiment d'insécurité, il paraît évident que les réponses doivent prendre avant tout la forme d'une présence humaine rassurante, démontrant la maîtrise des lieux. Pourtant le monde du transport public n'a pas échappé à la loi générale de la substitution de dispositifs techniques de plus en plus perfectionnés à l'intervention humaine et ce mouvement n'est pas acheÎ. Dès lors, comment les AOT et les entreprises délégataires peuvent-elles, en respectant des équilibres financiers de plus en plus difficiles, répondre aux attentes du public et de leurs salariés ? Après avoir évoqué le sentiment d'insécurité et rappelé pourquoi la présence humaine est une réponse incontournable, on évoquera successivement la lutte contre l'incivilité, puis le développement, dans un certain désordre, des personnels spécialisés, et enfin l'évolution du rôle des conducteurs de bus.
3.1.1 La présence humaine, facteur essentiel de réduction du sentiment d'insécurité
Il est acquis depuis les premières études aux Etats-Unis dans les années 70 qu'il existe un décalage sensible entre l'intensité de la délinquance effectivement constatée et l'expression de la « peur du crime ». Le sentiment d'insécurité est sans commune mesure avec la criminalité réelle, et ce ne sont pas nécessairement les groupes les plus exposés qui éprouvent la peur la plus intense. Celle-ci joue sur les comportements des personnels comme des passagers, qui adoptent des stratégies d'évitement.
51
Selon la théorie la plus répandue, le sentiment d'insécurité se construit autour de deux composantes : une composante émotionnelle, la « peur personnelle », fondée sur l'appréciation de sa propre vulnérabilité, liée à l'âge, au sexe, le cas échéant, à une situation sociale précaire ; une appréciation du risque ou « perception sociale du risque »58, construite sur la nouveauté de la situation rencontrée, la capacité de la contrôler (alerter, fuir, ou résister), la référence à des situations précédentes, et au contexte perçu à travers les médias et l'entourage. L'appréhension sera d'autant plus vive que le besoin de respect de valeurs est prégnant.
Le sentiment d'insécurité des passagers
Les enquêtes de victimation mesurent ces deux aspects du sentiment d'insécurité par des jeux de questions adaptés. L'enquête « Victimation et sentiment d'insécurité de 2011 en Ile de France59 » fait apparaître que 3,4% des personnes interrogées déclarent avoir été victime d'une atteinte personnelle (vol ou agression) dans les deux ans qui précèdent. Tandis que simultanément, 45,5% des personnes interrogées déclaraient avoir peur d'être agressées ou volées dans les transports en commun. Les auteurs du rapport estiment qu' « améliorer le sentiment de sécurité dans les transports en commun est une priorité, car au regard des chiffres 2011, les franciliens sont beaucoup plus sujets à s'y sentir en insécurité qu'à y être victimes ». Ces conclusions sont valables également en province. Dans les réseaux de moyenne ou de faible importance, le fait qu'il y ait peu, voire pas d'incidents réels, n'empêche pas la préoccupation sécuritaire, d'autant que l'échelle de l'appréhension n'y est pas la même. Les personnes concernées par ces phénomènes souhaitent notamment percevoir des signes qu'il existe un garant des lieux ; pouvoir alerter ; obtenir du secours en cas d'incident s'orienter facilement pour échapper à une situation risquée...etc. Une présence humaine active est donc indispensable à toute stratégie de prévention. Elle doit être une réponse à la fois au ressenti des personnels et à celui des usagers.
Le sentiment d'insécurité des personnels
Les personnels des TCU sont depuis longtemps sensibilisés aux problèmes d'insécurité en raison des agressions de toutes natures qu'ils subissent. Dès lors la préoccupation de sécurité imprègne la gestion des ressources humaines dans l'entreprise, et le management de l'exploitation. Le conducteur est le premier, souvent le seul, pour rappeler la règle. Ceci explique qu'ils représentent le plus grand nombre de victimes d'agressions. (54%). Cependant, 38%
58
Marion Guilloux, université de Nantes, perception sociale du risque, sentiment d'insécurité et comportement de vigilance dans les espaces ferroviaires
59
IAU-IdF Novembre 2011 Enquête victimation et sentiment d'insécurité en Ile-de-France
52
des agressions concernent les Îrificateurs, ce qui les place largement en-tête pour le taux d'agression, de une pour 6,9 Îrificateurs contre une pour 66,9 conducteurs. 60 Les Îrificateurs et contrôleurs sont encore davantage confrontés au dilemme entre le respect des règlements qui fonde leur légitimité et la politique de l'entreprise qui, à la fois pour des raisons commerciales et pour la propre sécurité des agents, donne des consignes de retrait dès qu'un incident est à craindre. 61 Le premier moyen de lutte contre un tel sentiment est une formation adéquate des agents qui peuvent ainsi mieux gérer les situations anxiogènes et réduire les risques. Mais leur demande porte davantage sur le soutien et le renfort par des personnels spécialisés, en contradiction parfois avec l'approche client de l'entreprise. Après l'agression, la démonstration de l'implication de la hiérarchie auprès de son conducteur en cas d'incident joue un rôle essentiel dans l'acceptation personnelle de l'éÏnement et la limitation de l'anxiété lors du retour au poste de travail. Les procédures sont rodées, elles impliquent notamment le retrait du service, l'accompagnement personnel et juridique de l'agent s'il souhaite porter plainte, et un soutien psychologique.
3.1.2 La lutte contre l'incivilité
Le terme « incivilités » étant parfois utilisé pour désigner les actes de délinquance dont la sanction est prévue par le code pénal, mais que l'on renonce à relever et à sanctionner, du fait de leur nombre, la mission a retenu le terme de « comportement incivil » pour désigner toute attitude d'impolitesse, d'agressivité et de mépris, « dont l'accumulation provoque une usure, une érosion sur les individus et les collectifs, et en tout cas sur les acteurs de première ligne »62. Ces comportements coûtent cher aux entreprises. Les grandes entreprises publiques y ont consacré des moyens d'étude importants. Ainsi une étude réalisée pour la SNCF met en lumière la contribution des comportements incivils au renforcement de la préoccupation sécuritaire, composante du sentiment d'insécurité (cf supra). L'auteure, Monique Sassier, indique que « les comportements incivils entament la confiance dans le lieu et dans la relation aux personnels ou à l'entreprise ». La réponse de l'entreprise réside dans la valorisation du service au client, incluant l'accueil, la qualité de l'information et d'une façon plus générale, la qualité de service de transport. Elle suppose d'identifier les processus de production permettant de ne pas mettre le personnel de « première ligne » en situation de gêne ou de désaveu, au coeur de contradictions, du fait de leur incapacité à satisfaire ce que les clients ont compris des promesses de l'entreprise. Elle suppose aussi de former les personnels à subir les comportements des voyageurs et à ne pas provoquer inconsciemment ce type d'attitude. Elle doit impliquer la formation de
60
Rapport sûreté UTP 2011 Voir « "Orientation client" et (in)civilité : le cas d'une ligne de transport public collectif », Sophie Beauquier Lien social et Politiques, n° 57, 2007, p. 115-124. 62 Monique Sassier Lutter contre les incivilités à la SNCF
61
53
l'encadrement à l'écoute pour « réparer l'usure ». L'accumulation de mille petits faits est une Îritable « bombe à retardement » qu'il convient de désamorcer. Ces nuisances sont certes provoquées par la dégradation du climat sociétal ambiant. L'entreprise de transport peut considérer qu'elle n'est pas chargée de « réparer » la société. Cependant, selon certains sociologues, « les Français sont en demande d'autorité et attendent davantage de règles dans la vie collective 63». L'intérêt opérationnel, économique, commercial et social de l'entreprise de transport lui commande donc de faire respecter les règles et de réduire les dysfonctionnements conduisant à des comportements incivils. Outre la formation des personnels et l'amélioration des processus, la sensibilisation des voyageurs contribue à la réduction du nombre des incidents et à l'attractivité du transport collectif. C'est le sens des campagnes de sensibilisation lancées par les grandes entreprises de transport. Une telle sensibilisation devrait permettre de rappeler aux voyageurs qu'ils sont coproducteurs de sécurité dans les transports. Il arrive trop souvent que les voyageurs s'accommodent des incivilités et jugent parfois excessives les mesures prises pour les enrayer. Ils en viennent parfois à prendre le parti des contrevenants. Le rôle des contrôleurs est trop souvent incompris lorsqu'ils verbalisent ou reprennent des attitudes inciviles. Cependant, le message est délicat à formuler et à diffuser. Les TCU sont considérés comme une institution publique et pris à partie comme tels. L'idée que le coût des dégradations ne favorise pas l'amélioration de la qualité de service n'est pas toujours audible par l'usager, qui ne réalise que rarement qu'il ne paie qu'une partie réduite du coût du service. Les exemples utilisés dans les messages ne doivent pas stigmatiser, leurs destinataires doivent être clairement identifiés. Tel est l'objectif de la mise en scène d'un chewing-gum ou d'un mégot géant par la SNCF dans certaines gares sur le thème « il n'y a pas de petites incivilités ». Ce type de messages est également décliné dans le contexte plus étroit des TCU. L'émetteur ne devrait pas être le seul opérateur de transport. L'autorité organisatrice doit également s'impliquer. Même si les applications concrètes sont encore timides, les prises de position des autorités locales sont de plus en plus nombreuses dans ce sens. Par exemple, le conseil de développement du grand Lyon propose notamment de communiquer davantage sur les amendes appliquées aux contrevenants et d'accroître la sensibilisation des citoyens aux incivilités à travers les différents supports médias disponibles64. En outre, les actions de sensibilisation et de promotion de la mobilité durable devraient davantage aborder la question du vivre-ensemble. Dans les documents relatifs aux plans de déplacements urbains (débat public, observatoire de suivi,..) que la mission a pu consulter, elle a constaté une appropriation plus aisée de deux thématiques particulières d'insécurité : l'insécurité routière et la protection des moyens personnels de transport doux (Îlo,..). Des sensibilisations pourraient utilement être lancées suivant plusieurs axes.
63 64
Julien Damon, cité par Monique Sassier, Séance du 23 février 2011 les politiques de stationnement comme levier des politiques de déplacement
54
11. Recommandation : promouvoir une présentation plus claire et plus simple des éléments essentiels du règlement d'exploitation en matière de prévention, ainsi que des campagnes locales de prévention des détériorations diverses.
12. Recommandation : mieux impliquer les voyageurs des TCU dans la lutte contre des phénomènes concrets de dégradation (sièges,..) par des campagnes locales de sensibilisation, en coopération avec l'autorité organisatrice.
3.1.3 Des personnels spécialisés aux missions diversifiées
Dans un environnement marqué par la raréfaction de la présence humaine d'exploitation ou commerciale, aussi bien en surface que dans les métros, associée à de lourds investissements (métros automatiques, billetterie électronique...etc.), la réponse par des moyens humains aux défis de l'insécurité est une Îritable gageure pour les exploitants et les AOT. L'examen des statistiques disponibles confirme la progression continue des personnels spécialisés au cours des dernières années, mais les missions sont diversifiées et ne s'exercent pas sans ambiguïtés. Un niveau encore modeste en province, mais une progression continue Le rapport « Sureté » de l'UTP pour 2011 est le seul bilan disponible, mais ses données ne sont pas exhaustives puisqu'elles résultent d'une enquête annuelle à laquelle tous les réseaux ne répondent pas. Quoiqu'il en soit, il établit notamment qu'en 2011 : 2.123 salariés étaient employés dans des services dédiés à la sécurité qui représentent 4,9% des ETP de la branche du transport urbain. Cette part est passée de 3% en 2002 à 4,9% en 2011, avec une tendance à la stabilisation au cours des dernières années ; 58 réseaux sur les 115 du panel enquêté, dont tous les plus importants, se sont dotés d'un service dédié à la sécurité ; 62 réseaux disposent d'un poste de « responsable sécurité » ; le coût global de ces moyens est estimé à 110 M. La mission a releÎ au cours de ces visites, une certaine diversité des réponses, fonction des risques propres à chaque agglomération, des cultures d'entreprises, des moyens disponibles et aussi des réponses municipales en termes de moyens policiers. Des missions qui pourraient être clarifiées Les effectifs concernés se répartissent pour l'essentiel entre deux catégories : les contrôleurs Îrificateurs chargé notamment du contrôle des titres, mais qui peuvent avoir une mission plus large ;
55
les agents d'intervention, sous différentes dénominations, qui sont chargé d'intervenir en cas d'incident ou d'assurer un appui aux contrôleurs pour les prévenir. On observe donc partout une complémentarité organisée entre ces deux catégories. Par exemple, à Strasbourg, la CTS dispose d'une palette complète : agents de conduite et de contrôle, assurant 50% de conduite et 50% de contrôle voyageurs ; agents de contrôle des voyageurs, chargés du contrôle des titres et de l'information aux voyageurs ; agents de prévention et d'intervention auprès des clients et des conducteurs (APICC), chargés d'intervenir sur les incidents sérieux. L'équipe d'intervention comprend trois personnes, dont 2 APICC et un agent de maîtrise. A l'inverse, d'autres réseaux choisissent de ne pas mettre en place d'agents d' « intervention » ou de « sécurisation », chargés de constater les infractions troublant la tranquillité publique dans le TCU comme le décret de mars 1942 leur en donne la possibilité, estimant que ce n'est pas leur rôle. L'UTP constate que ces textes fort anciens sont largement inadaptés à la réalité de terrain et demande leur révision pour lever les ambiguïtés avec les services de sûreté régis par le code de sécurité intérieure (dispositions codifiées de la loi de 1983 concernant les activités de surveillance et de gardiennage), d'autant que la réorganisation récente de la profession de la « sécurité priÎe » (création du CNAPS...etc.) soulève de nouvelles difficultés. La mission estime que ce souhait est fondé. Il ne lui paraît pas acceptable que des réponses aussi différentes soient données à des situations similaires, tout en ayant conscience qu'une uniformisation impliquerait des coûts supplémentaires pour certains réseaux. Ce constat doit cependant être rapproché de celui de la grande diversité qui continue à prévaloir en matière de moyens des polices municipales, puisque les élus, dans le cadre du principe de libre administration des collectivités, développent des positions très divergentes à ce sujet. Dès lors, des écarts considérables peuvent être releÎs d'une agglomération à l'autre en ce qui concerne les rôles respectifs et finalement la qualité des réponses apportées au besoin de sécurité selon que les communes qui la composent sont ou non dotées de polices municipales conséquentes, et que le réseau de transport s'est ou non doté de moyens humains de sécurisation. La mission quant à elle estime (cf. recommandation infra) que le respect du principe de libre administration des collectivités ne doit pas conduire à des lectures différentes des textes en vigueur sur les missions respectives et qu'une normalisation s'impose, qui rappelle aux AOT et aux transporteurs le champ de leur responsabilité. L'évolution du rôle des conducteurs de bus : la polyvalence au service de la qualité La situation des lignes de bus, notamment lorsqu'elles desservent des secteurs difficiles doit retenir plus spécialement l'attention. Elle renvoie aux difficultés spécifiques de leurs conducteurs, dont le rôle a dû, souvent à leur corps défendant, évoluer profondément. De simples « machinistes » - terme auquel ils sont restés longtemps attachés - ils sont souvent 56
devenus des agents polyvalents, seuls représentants permanents de l'exploitant et à travers lui de la collectivité auprès du public, avec les risques que cela peut impliquer. Leur profil en a donc été sensiblement modifié, entraînant des exigences de compétences beaucoup plus larges qui impactent le recrutement et la formation. De même, la corporation a dû, comme tous les autres services publics, s'ouvrir à la diversité pour offrir au public l'image d'une communauté humaine représentative de la ville qu'elle dessert. Le conducteur a donc dorénavant une triple fonction : Conduite accueil commercial et incitation à la validation des titres de transport (d'où le titre de conducteur-receveur employé sur certains réseaux) médiation face aux incidents éventuels, (dans la mesure de ses moyens). La montée par l'avant face au conducteur et aux moyens de validation du titre de transport, qui prévaut dans la quasi-totalité des réseaux de bus en province, conforte la maîtrise des lieux. La conduite ne constitue plus l'unique enjeu du poste, remarque dès 2005 un rapport concernant le conducteur de transport urbain en France65. La généralisation des liaisons radio, de la géo-localisation le fait travailler dans un univers interdépendant. Sur le plan relationnel, il est nécessaire d'avoir les capacités de faire face au stress engendré par la conduite et par les clients, d'avoir un bon accueil, de pouvoir diminuer les causes de conflit. La fiche métier de l'ONISEP confirme : « Dans tous les cas, courtoisie, bonne présentation et professionnalisme sont de rigueur. Le conducteur assure en toute sécurité le transport des voyageurs. Mais pas seulement. Il les accueille, les assiste, les conseille et les informe, anticipe et gère au mieux les incidents de parcours». L'environnement social changeant, le conducteur volontaire pourra être amené à s'impliquer dans des actions de médiation, par exemple des interventions en milieu scolaire ou des manifestations sportives et à y encadrer des jeunes66. La mission a releÎ que ces évolutions sont partout prises en compte, même si elles rencontrent chez les personnels concernés, et notamment les plus anciens, de réelles difficultés d'acceptation, à la mesure aussi des risques encourus dès lors qu'on doit rappeler la règle. Les stratégies d'évitement prévalent donc parfois, mais au total un nouveau relationnel s'est imposé, favorisé par les nouveaux modes de validation des titres et c'est l'image d'un agent du service public accueillant et vigilant qui s'impose. Le développement des tramways, qui se caractérise par des stations et des Îhicules largement ouverts, alors que le conducteur est nécessairement cantonné à une fonction technique très absorbante, repose la question du contrôle de la fraude et de la prévention des incidents dans des termes nouveaux. Cette tendance croîtra avec les bus articulés et les bus à
65
Projet Conducteurs de transports urbains en Europe (CTUE) Programme Leonardo da Vinci programme européen pour l'enseignement et la formation professionnelle 66 Le rapport de CTUE cite l'exemple de CTB, à Besançon. Au cours de ses entretiens, la mission a pu constater des initiatives similaires impliquant directement le personnel, notamment à la RATP (les mercredis du Rugby) et à la CTS de Strasbourg (matchs de « futsal »)
57
haut niveau de service. A elle seule elle peut justifier la mise en place de moyens humains mobiles spécifiques, et la mission estime que ces interrogations devraient intervenir dès la conception du projet et être intégrées à son bilan financier prévisionnel, ce qui n'est manifestement pas partout le cas.
3.2 Le progrès technique au service de la prévention
Le progrès technique a mis à disposition des responsables du TCU des moyens performants, qui sont très largement utilisés. Leur emploi est différencié suivant les modes et les objectifs. Leur généralisation s'impose.
3.2.1 Des moyens efficaces et généralement déployés
Dans les bus, le premier objectif est la protection du conducteur, en synergie avec les besoins d'exploitation et d'information du client. L'équipement aujourd'hui généralisé sur les grands réseaux comprend la liaison radio, de plus en plus fréquemment la géolocalisation et l'appel de détresse, dont le suivi est assuré par un PC centralisé armé pour la sécurité et l'exploitation. La protection physique du conducteur est partiellement assurée par une cabine de protection. La cabine est par exemple inefficace contre une projection de liquide. Mal exploitée, elle peut augmenter l'isolement du conducteur. La sécurité du conducteur et des voyageurs est confortée par des dispositifs de vidéoprotection, dont le rôle est essentiel en dissuasion et pour la qualité de la preuve lors des enquêtes. L'équipement des Îhicules en vidéoprotection est de plus en plus souvent réalisé de série. Le taux d'équipement moyen en caméras de vidéoprotection des bus est de 73,2%, selon le rapport sûreté 2011 de l'UTP. A titre de comparaison, le taux d'équipement moyen des bus en 2005 était de 49,6% . Le taux d'équipement des Îhicules neufs est supérieur à la moyenne indiquée. A noter cependant, un faible équipement des bus des réseaux Optile. Sur 4528 bus roulant en 2011, 2156 sont équipés, soit moins de 48%. En outre, le taux de nouveaux Îhicules équipés en 2011 sur ces réseaux serait de 51 %.67 La situation n'est pas uniforme pour l'ensemble des adhérents d'Optile. Des réseaux comme Lacroix ou Tice ont équipé 100% de leurs Îhicules.
13. Recommandation : renforcer l'équipement en dispositifs de vidéoprotection des autobus de l'ensemble des réseaux, notamment dans la grande couronne de l' Ile-de-France.
67
Source : Optile lignes régulières statistiques 2011. Rappel : OPTILE signifie Organisation Professionnelle des Transports d'Ile-de-France. Il s'agit d'une association régie par la loi 1901. OPTILE assure la gestion administrative des lignes régulières exploitées par ses adhérents, et conduit des projets communautaires du Réseau Intégré Régional avec la SNCF et la RATP : titres de transports, information voyageurs dynamique, vente de titres, sécurité, etc. (source : site Optile.com)
58
L'équipement en caméras embarquées des tramways est de 100% 68. De plus, les nécessités de la sécurité (au sens de prévention des accidents) et la surveillance des dispositifs de billettique conduisent le plus souvent à la vidéoprotection de l'ensemble des stations et des carrefours. Les dispositifs de vidéoprotection sont plébiscités par les conducteurs et les Îrificateurs. Sur plusieurs des réseaux contactés par la mission, le bon fonctionnement de la vidéoprotection est systématiquement Îrifié sur les Îhicules affectés au service de nuit. En cas de dysfonctionnement, le Îhicule est remplacé. Ces dispositifs peuvent être victimes de leur succès, les services régaliens requérant de plus en plus souvent la collaboration des services des opérateurs pour mettre à disposition des enregistrements. Malgré des remarques ça et là sur les coûts en ressources humaines, les groupes fournissent volontiers cet appui, dans des limites qui doivent rester raisonnables. Ce support aux services, et d'autres échanges de données, crée en effet des liens très favorables à une articulation efficace et confiante.
14. Recommandation : renforcer là où c'est nécessaire, la qualité des données des opérateurs (dont les images) élément d'une articulation efficace avec les services de l'Etat.
Les métros sont susceptibles d'une exploitation en mode fermé, impliquant le franchissement d'un portillon de contrôle pour y pénétrer, ou en mode ouvert. A Lyon, la délinquance dans les TCU avait connu une baisse significative en 2006, année où l'exploitation avait basculé d'un mode ouvert à un mode fermé. Une unité de sécurisation des transports en commun avait été créée la même année. En dehors de la vidéoprotection, des mesures de prévention situationnelle peuvent être étudiées et mises en oeuvre dans les enceintes des métros. Ces infrastructures sont récentes, et la mise en oeuvre de ces politiques dans un objectif de réduction du sentiment d'insécurité ne suscité pas de difficulté, sauf les contraintes financières. Ce n'est pas le cas de certaines gares routières, situées à proximité de gares ferroviaires, nécessitant donc des surfaces de centre ville, que des aménageurs souhaiteraient utiliser à d'autres fins. Elles gagneraient à être éclairées, à disposer d'une signalétique claire et de cheminements appropriés entre les quais routiers et la gare ferroviaire.
3.2.2 S'inscrire dans les potentialités techniques nouvelles
L'innovation technique dans le domaine des transports est inséparable d'études d'acceptabilité par le client et de sa capacité à l'utiliser, compte tenu de la nature même des activités.69. La question essentielle concerne l'optimisation des systèmes pour offrir la réponse au juste besoin de mobilité durable dans l'agglomération façonnée par le transport, l'étalement urbain ayant été favorisé par le gain de vitesse.
68 69
Source UTP Voire par exemple les travaux sur l'emploi de la billetique par une population vieillissante
59
Deux grandes questions techniques contribuent à cette réflexion70: le Îhicule du futur, son niveau d'automatisation, et son impact sur l'environnement ; l'impact des technologies de l'information et de la communication (TIC) sur la fluidité du trafic, le confort des voyageurs et la sécurité des personnes. Les dispositifs intégrés de billettique vont contribuer à une meilleure connaissance des besoins individuels de transport. Leur application va s'étendre au-delà du TCU pour inclure les modes doux et l'accès aux infrastructures de mobilité (parkings,...). Leur généralisation conduira à une forme de système « fermé virtuel », défavorable à l'extension de la fraude, et plus efficace en termes de ressources humaines dédiées au contrôle. Le développement des moyens interactifs de communication conduira à la nécessaire prise en compte des alertes et témoignages directs des clients face à un incident de toute nature et notamment, les incidents générateurs d'insécurité. Par exemple, la SNCF met à disposition de ses clients le numéro 3617 pour être une ligne d'écoute des clients victimes d'incivilités. Il est vraisemblable qu'une demande forte des clients conduira au développement de ce type de service. L'aspect sociologique, les contraintes budgétaires et le cycle industriel de renouvellement des flottes inscrit ces évolutions dans le temps long (quinze à vingt ans). La complexité des systèmes augmentera leur vulnérabilité aux actes de malveillance et renforcera le besoin de protection. A moyen terme, l'évolution des capteurs permettra d'améliorer le confort et la sûreté des passagers dans les transports en commun en permettant de détecter des agressions physiques, des actes de vandalisme, d'effectuer du comptage, etc. (Projet DéGIV du programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres). Il faut noter qu'en dehors de l'exemple de DéGIV, les études sur la prise en compte de la délinquance dans les dysfonctionnements de systèmes de plus en plus complexes est peu prise en compte dans les travaux financés par le PREDIT.
15. Recommandation : développer les travaux du programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres (PREDIT) concernant l'impact économique et social de la délinquance dans les TCU et l'optimisation des moyens techniques et humains de prévention.
A court terme, la norme 4G, ou la norme Long Terme Evolution permettront des transferts d'images entre le bord et le sol, en dépit d'une disponibilité encore limitée.
70
Voir le document de présentation du groupe opérationnel N° 2 « qualité et sécurité des transports du PREDIT4, du 27 février 2012, qui définit cinq axes d'étude : la gestion des mobilités et du trafic routier (application des TIC à la réduction des congestions), sécurité des transports ferroviaires, sûreté des transports (protection contre les actes de malveillance), fiabilité et sécurité des dispositifs embarqués ou de commande centralisée et ergonomie, accessibilité et confort.
60
3.3 Management et financement
La prévention de l'insécurité et des incivilités implique, à l'instar de ce que font depuis plusieurs années les grands réseaux, la mise au point d'une stratégie globale (Plan sureté) impliquant toutes les fonctions de l'entreprise et prévoyant un dimensionnement et une combinaison appropriée des dispositifs techniques et des moyens humains, en fonction des perspectives budgétaires ouvertes.
3.3.1
Une approche managériale de la prévention
La mise en oeuvre des outils de médiation, de prévention, de contrôle et d'intervention par des personnels polyvalents ou spécialisés, suppose une identification claire des objectifs poursuivis par un diagnostic et une stratégie (cf. supra). En synergie avec les objectifs poursuivis par l'autorité organisatrice, il pourra s'agir de prévenir les comportements incivils, de faire respecter la règle, de réduire le sentiment d'insécurité, de coproduire la tranquillité publique ou la sécurité. Au-delà de la mise en place de moyens techniques et d'une présence humaine appropriée, la combinaison de tous les moyens de l'entreprise dans le cadre de son organisation et de son management au quotidien est une clef du succès. La mission a pu observer plusieurs dispositifs intéressants durant ses investigations. Les grands réseaux qui disposent de moyens relativement importants et doivent souvent faire face à des situations difficiles, présentent les constructions les plus avancées. L'un d'eux, auquel on se réfère ci-dessous, a pu faire baisser significativement sur trois ans depuis 2009 le nombre d'incidents ainsi que le taux de fraude (depuis un an). Interrogé sur les raisons de ce succès, et tout en demeurant prudent car un contretemps peut survenir à tout moment, en raison notamment des incidences des crises de violences urbaines, son directeur de la sûreté considère que deux éléments sont essentiels : la mise en place d'un plan concerté et coordonné des moyens humains et techniques concourant au renforcement de la sécurité ; la création d'une dynamique, d'une synergie entre les acteurs. Le plan sûreté de ce réseau consiste notamment à agir sur 3 leviers: la présence humaine sur le terrain ; le bon emploi des moyens techniques le partenariat. La présence humaine doit y être répartie dans le temps et dans l'espace entre les différentes catégories de personnes concourant à la sûreté (en concertation avec les responsables / exploitation de chaque mode), dans l'ordre croissant : les agents de station et les chefs de ligne (exploitants) ; les médiateurs ;
61
les agents de sécurité (en poste fixe ou en patrouille mobile) ; les Îrificateurs et contrôleurs ; la Police Nationale en appui ; les patrouilles Vigipirate (forces armées)
L'objectif est double : être au maximum présent et visible afin de rassurer (la clientèle) et de dissuader (les malfaiteurs), et être en mesure d'intervenir au plus vite avec des moyens adaptés à l'incident. L'appui technologique est fondé d'abord sur la vidéo protection : Les caméras sont de plus en plus nombreuses. La mise en oeuvre de nouvelles capacités technologiques est en cours, en fonction des problématiques rencontrées : caméras télécommandables, à haute définition et à champs élargis ; caméras "intelligentes" à détection automatique ; renvoi des images en temps réel (technologie 3G) ; renforcement des capacités de mémoire (prolongation des enregistrements) ; transmission des images en temps réel sur des téléphones portables de la police ; Exploitation en temps réel du réseau raccordé au PC central ; vidéo-patrouilles ; interventions coordonnées de la PN sur des flagrants délits et des opérateurs durant toute la période du service au PC Sûreté (réaction immédiate) ; Exploitation en temps différé des enregistrements: lecture et analyse ; "enquêtes vidéo" ; travail d'exploitation des images d'un incident jusqu'à trouver et faciliter l'identification des auteurs.
Des moyens radio performants (appels de détresse et géo-localisation automatique) sont exploités 24 heures sur 24 par un PC centralisé regroupé avec le PC exploitation. La dynamique et les synergies entre acteurs, outre les relations quotidiennes évoquées ci-dessus, sont renforcées par l'existence d'un « contrat local de sécurité transport », mais aussi par la participation systématique à tous les dispositifs de partenariat de prévention (CLSPD, GLTD, sécurité routière,..). La place de l'exploitant est unanimement reconnue dans toutes ces instances. La mission ne peut que faire siennes de telles bonnes pratiques et diffuser cet exemple, qui peut parfaitement être décliné en formules plus simples pour des agglomérations moins importantes. Dans la ligne de sa recommandation ci-dessus d'une reformulation par voie de circulaire des missions respectives dans le cadre des textes en vigueur, elle suggère que cette harmonisation prenne localement la forme d'une validation du plan sureté par arrêté préfectoral, dans le cadre de la réglementation de la police et de la sureté des transports qui découle de la loi de 1845 et du décret de 1942 étendu en 2006 au transports routiers de voyageurs.
62
Dans une telle optique, l'arrêté préfectoral fixant le règlement d'exploitation d'un réseau, préciserait toujours, comme c'est le cas aujourd'hui, les droits et devoirs des usagers. Mais il fournirait aussi une description des missions des agents, pour les légitimer, et ne pourrait intervenir que sur présentation par l'AOT et l'exploitant d'un « plan sureté » en bonne et due forme, attestant de leur capacité à faire respecter les règles et d'une dynamique partenariale, sous l'égide des instances locales de prévention, pour y parvenir. La mission estime qu'une telle démarche est possible dans le cadre des textes en vigueur, mais à défaut, il suffirait de les compléter au préalable.
3.3.2 Coûts, priorités et arbitrages
Quel que soit le mode de gestion retenu par l'autorité organisatrice (régie, marché public ou délégation de service public), les coûts des transports collectifs urbains sont au coeur de nombreuses interrogations en ces périodes de contraintes budgétaires : des investissements lourds concernant les TCU ont été réalisés dans la dernière décennie. Il faut assurer le financement des emprunts contractés à cette fin ; le versement transport acquitté par les entreprises a atteint son plafond dans de nombreuses agglomérations ; la part de financement par la billetterie ne cesse de se dégrader. En outre, en ce qui concerne les réseaux exploités dans le cadre d'une délégation de service public, l'opérateur doit assumer le risque de sa gestion, et décider des moyens qu'il met en place pour obtenir les résultats attendus par le contrat. Depuis la création des autorités organisatrices par la loi sur l'organisation du transport intérieur de décembre 1982, les exigences des AOT se sont faites plus complètes et plus précises, les durées des contrats se sont réduites, le nombre d'indicateurs donnant lieu à incitation ou amende (bonus / malus) a augmenté. Aujourd'hui, dans de nombreux cas, le niveau des malus éventuels est de l'ordre, voire supérieur à la marge que permet de dégager le contrat. Les incitations sont liées principalement à l'augmentation du nombre de voyageurs, souvent mesurée par l'évolution du nombre de voyages par an et par habitant, la régularité ou à la ponctualité, selon que l'on garantit une fréquence ou un horaire, l'information, l'accueil, la propreté et le confort. Doivent également être satisfaites des obligations liées au taux de contrôle de la fraude, au sentiment d'insécurité, etc. L'opérateur est donc incité à mettre en oeuvre les moyens les plus efficaces pour obtenir le meilleur compromis entre le coût de personnel Îrificateurs et contrôleurs, et la réduction du taux de fraude. Les indemnités forfaitaires perçues, dans le meilleur des cas, couvrent de 50 à 60% des coûts de personnel dédié. L'ordre de grandeur du nombre de Îrificateurs est de 5 % de l'effectif de l'entreprise, selon le responsable sécurité d'un grand groupe.
63
Ponctuellement, la mission a pu relever les chiffres suivants dans différents réseaux : Effectif total (valeurs arrondies) A 600 B 2400 C 2400 D 3400 E 700 Nombre de Îrificateurs 28 65 132 320 34 Pourcentage 4,6% 2,7% 5,5% 9,5% 4,9% Taux de fraude mesuré71 7% 12% 3,5% 17% 9%
Suivant les réseaux, une partie de l'équipe peut être dédiée à la Îrification des titres de transport dans un esprit « commercial », l'autre partie dans un esprit plus dissuasif. Le coût des dépenses de sécurité supportées par les opérateurs s'élève, selon le rapport de l'UTP cité à 148 176 900 en 2011. Ce coût comprend 141 millions pour les frais de personnels. Il est probable que soient comptabilisés les coûts des personnels dédiés au contrôle des titres dans ce montant. En 2011, le coût direct de la fraude fourni par 35 entreprises sur 90 ayant répondu à cette partie du questionnaire annuel de l'UTP est de 31 millions d'euros. Les autres coûts correspondent essentiellement à tout ou partie des équipements de sécurité et de la réparation des dégradations (5 millions d'euros) et à la prise en charge par l'opérateur de frais divers tels qu'indisponibilité de personnels victimes d'agressions et pénalités (1 million d'euros). La priorité des employeurs - régie ou entreprise - est clairement la protection des personnels contre les agressions. C'est pourquoi de nombreux réseaux utilisent l'ensemble des possibilités offertes par la loi de juillet 1845 codifiée pour confier à une partie de leurs Îrificateurs des missions de dissuasion (Strasbourg , Toulouse, Marseille). La lutte contre la fraude est la seconde priorité affichée, conjointe aux autorités organisatrices et aux opérateurs.
3.3.3 La question du financement de la prévention
Les éléments disponibles pour apprécier les moyens financiers consacrés à la prévention sont très limités. Dans son enquête annuelle, l'UTP collecte des informations qu'elle publie de façon consolidée, sans qu'il soit possible d'accéder aux chiffres locaux. D'autre part le total n'est pas un chiffre exhaustif. Elle établit qu'en 2011, le coût direct des mesures de sécurité a été de 148 M (cf. supra) (dont le coût des 2 123 salariés des services de sécurité, incluant les Îrificateurs). Ce montant a progressé de 8,8% en un an, au titre principalement des moyens humains.
71
Ces quelques exemples montrent qu'il n'y a pas de lien mécanique entre le nombre de contrôleurs et le taux de fraude.
64
Il convient d'ajouter à ce budget celui de la réparation des actes de vandalisme, qui est stable à 14 M environ (dont plus de la moitié sur le matériel roulant). Mais ce calcul n'inclut pas le coût d'amortissement des équipements financés par les AOT, qui en représentent l'essentiel, et n'intègre pas non plus le manque à gagner dû à la fraude, qui est malaisé à établir et sur lequel pèse un certain tabou. Au cours de ses visites la mission n'a recueilli que des informations fragmentaires, qui ne peuvent en aucun cas être extrapolées. Elle se gardera donc de tout jugement de valeur ou comparatif à ce sujet, d'autant que les situations locales sont objectivement très diverses impliquant des réponses de niveaux et donc de coûts très variés. Ses observations la conduisent donc simplement à formuler quelques observations générales : 1/ Le coût prévisionnel de la sécurité reste peu pris en compte en tant que tel, soit dans les appels d'offres (sauf exceptions dans certains grands réseaux) soit dans les projets de développement (implantations de modes nouveaux comme les tramways ; extension de lignes de métro ; création de lignes de bus à forte capacité et en site propre ; modernisation des systèmes billettiques) ; il est trop souvent constaté ex-post comme une résultante incontrôlée. A cet égard, la logique des « Etudes de sureté » qui se sont imposées dans les projets d'urbanisme devrait être étendue aux projets de développement des réseaux de TCU, et ce poste de charge intégré systématiquement aux budgets prévisionnels des projets. 2/ La réponse au sentiment d'insécurité des usagers, la prévention et le traitement des incidents les concernant, devraient mobiliser des énergies équivalentes à celles qui sont déployées pour la protection des agents. Cette tendance est bien engagée partout où les exigences de qualité de service suivies et le cas échéant sanctionnées par l'AOT, sont les plus avancées. 3/ Les équipements de sécurité financés par les collectivités locales, ainsi que les moyens mis en place par les exploitants, dans le cadre des responsabilités qui sont les leurs au titre de la délégation de service public, pourraient utilement être soumis à concertation avec les partenaires de la prévention au sein des instances ad-hoc, car ils participent largement de la « stratégie territoriale » et doivent être articulés avec les autres réponses locales.
65
66
4 La qualité au service de la mobilité durable
Le défi que doit affronter le transport collectif est celui de l'optimisation et de la cohérence. Il faut optimiser les réseaux et leurs interconnections, les durées de transport et l'information due aux voyageurs, renforcer la cohérence des modes de transport comme des systèmes de billetique, pour maximiser l'activité. L'enjeu de la mobilité est celui du développement durable de la ville (4.1.). Si aujourd'hui encore, le choix du transport public est trop souvent un choix négatif, soit par manque d'alternative, soit par comparaison des coûts, la qualité de service deviendra inéluctablement un facteur essentiel de choix, surtout si la part de financement client devait augmenter. (4.2.). La sécurité est un facteur important de non-qualité. Dans la ville globale, les défis évoqués supposent l'échange et la professionnalisation toujours renforcée (4.3.).
4.1 Les enjeux de la mobilité durable
La mobilité joue un rôle majeur dans le développement économique et d'un bassin de vie et d'emploi. Cette mobilité est aujourd'hui encore basée sur le transport automobile individuel, qui a favorisé l'étalement de l'agglomération72. L'allongement des durées de transport, le gaspillage des ressources naturelles (terres agricoles, air, ...) conduisent à rechercher un équilibre durable entre les besoins de mobilité des personnes et des biens, d'une part, la protection de l'environnement et de la santé et la préservation de la qualité de vie, d'autre part, sous contrainte des capacités de financement des collectivités73. L'objectif de développement des transports collectifs et des moyens de déplacements les moins consommateurs d'énergie et les moins polluants, fixé par la loi SRU dès décembre 200074, est maintenant largement intégré dans les programmes des agglomérations de plus de 100 000 habitants. Pour concurrencer l'automobile individuelle, il faut répondre au défi du porte-à-porte, intégrant un usage différent de la voiture (co-voiturage, location, ..), le développement des modes doux sur de faibles distances, et les transports collectifs dans un maillage s'adossant à un réseau de plates-formes intermodales. Outre les défis techniques (développement d'outils de communication, de billettique, ..), les défis industriels (nouveaux acteurs investissant dans les parkings, les locations de voiture,..) et économiques, cette évolution de l'architecture globale des transports collectifs urbains et interurbains implique un changement culturel pour l'usager devenu client.
72
Les distances domicile-travail ont été multipliées par 9 en 50 ans. (source : manifeste de la mobilité durable UTP) Selon l'OCDE, la mobilité durable est « une mobilité qui ne met pas en danger la santé publique et les écosystèmes, respecte les
73
besoins de transport tout en étant compatible avec une utilisation des ressources renouvelables à un taux inférieur à celui nécessaire à leur régénération et une utilisation des ressources non renouvelables à un taux inférieur à celui nécessaire à la mise au point de ressources renouvelables de remplacement » 74 Devenu article L1214-2 du CT et suivants
67
Ce n'est qu'au prix d'une attractivité renforcée des transports collectifs urbains et nonurbains qu'ils pourront devenir l'ossature d'un système de mobilité durable. Les plans de déplacements urbains des agglomérations font figurer parmi leurs objectifs l'amélioration de l'attractivité75. Les enquêtes périodiques de déplacements des ménages constatent que l'attractivité est d'abord fonction de la qualité de desserte (étendue de l'offre de transport collectif), mais aussi de la qualité de service, incluant en premier chef, la ponctualité ou la régularité. Or, « ce qui nous énerve le plus dans les transports publics, c'est l'autre 76». Les enquêtes montrent que pour un conducteur de Îhicule priÎ, la journée de travail est terminée quand il monte dans sa voiture, alors que pour un utilisateur de transports collectifs, elle ne le sera que lorsqu'il rentre chez lui77. Le confort, la propreté, la tranquillité sont des enjeux forts de l'attractivité pour conquérir de nouveaux types de clientèle. Le sentiment de bien-être ou d'insécurité, est modulé par l'expérience récente. Une gare pimpante vue en sortie d'un parking sale, paraîtra plus sale. L'attractivité sera celle de la chaîne globale, incluant les pôles d'échange avec les lignes de rabattement, les lieux de stockage des moyens doux ou des Îhicules (parking-relais).
16. Recommandation: prendre en compte la sécurité dans les études et les outils favorisant l'attractivité de la mobilité durable.
La multiplicité des acteurs de la mobilité durable impose de définir un chef de file, capable de coordonner les actions d'amélioration de la qualité de service. La question de la gouvernance de la chaîne de mobilité est l'objet de propositions du GART depuis plusieurs années. Le GART propose notamment de transformer les AOT en autorités organisatrices de la mobilité durable. Quelle que soit la solution retenue, elle devra prendre en compte les logiques de sécurité et la coopération avec les autres acteurs de la sécurité.
17. Recommandation: désigner l'autorité organisatrice comme chef de file des acteurs de la sécurité de la mobilité durable.
Du point de vue des élus, la question du vivre-ensemble est un enjeu essentiel de notre société plus diversifiée, plus individualiste, plus exigeante. L'étude des formes de violence dans les transports collectifs (cf. 1ère partie) montre qu'ils sont le miroir exacerbé des difficultés contemporaines.
75 76 77
PDU STIF février 2012 « Défi 2 : Rendre les transports collectifs plus attractifs, (Actions 2.1 à 2.9) », Julien Damon, sociologue, in Transport public avril 2012 Source : entretien avec l'AQST
68
4.2 La responsabilisation des acteurs par la qualité de service contractuelle
Le sentiment d'insécurité est une forme de non qualité vivement ressentie par les clients-usagers. L'entreprise de transport a un rôle à jouer pour le conjurer, même si elle ne peut pas tout. Elle doit donc être responsabilisée au-delà de la protection de ses personnels qu'elle assume déjà largement. Cela requiert une certaine créativité sur le plan contractuel, fondée sur une appréciation juste des rôles respectifs.
4.2.1
L'expérience de la qualité
La recherche systématique d'une meilleure qualité de service aux usagers est de longue date une priorité partagée des collectivités locales responsables et des exploitants de réseaux. Elle a donné lieu à de nombreuses innovations et a vu son champ s'élargir constamment. Cette préoccupation a été encouragée fortement par le développement des mouvements de consommateurs et d'usagers des services publics. Elle prend appui dorénavant sur des dispositifs bien établis d'échanges et d'enquête : la mesure de la satisfaction des usagers fait partie du quotidien des responsables des réseaux de transport. La compréhension des ingrédients de cette satisfaction s'est progressivement élargie et couvre aujourd'hui, en particulier dans les grandes agglomérations, un spectre assez large : d'un suivi assez formel de quelques indicateurs de base portant notamment sur la ponctualité, la propreté ou la disponibilité des équipements, on est passé à un registre beaucoup plus complet et qualitatif, qui interroge l'usager devenu client sur sa perception de tous les aspects du service rendu. Engagée généralement à l'initiative des entreprises délégataires, dans une optique d'amélioration de leurs prestations pour accroître la fréquentation du réseau et consolider la confiance que les collectivités placent en elles, cette démarche s'est considérablement sophistiquée ensuite dans deux directions principales : un levier de management, pouvant aller jusqu'à constituer un outil d'appréciation de la manière de servir des salariés, mais cela reste encore l'exception car les organisations représentatives des personnels peuvent être réticentes ; et surtout une possibilité nouvelle pour les autorités organisatrices de contrôler et de responsabiliser les exploitants pendant la durée du contrat, au moyen d'un dispositif de sanction pécuniaire. La plupart des contrats de délégation de service public appliqués aux TCU, contiennent aujourd'hui de tels dispositifs, définis dans le cahier des charges de la mise en concurrence, ce qui permet aux candidats à l'exploitation d'en intégrer les implications à leurs offres. Ce sont des systèmes qui peuvent atteindre des niveaux éleÎs d'exigence dans tous les compartiments de la qualité de service, ou plus simplement du respect du cahier de charges. Ils ont permis des améliorations significatives, même si des progrès restent encore à faire.
69
4.2.2
Qualité et sécurité
L'amélioration du ressenti de sécurité par les usagers du réseau, qui compte pour eux autant que bien d'autres aspects de la qualité du service rendu, peut-elle être intégrée à une telle approche ? Sur le vu des quelques indications qu'elle a pu collecter, la mission estime que c'est un objectif digne d'intérêt d'y tendre, sous un certain nombre de réserves importantes. Mais, s'agissant d'un sujet complexe sur lequel elle considère que son expertise est trop limitée pour livrer des recommandations précises, elle se limite à quelques remarques de principe et à une recommandation générale : l'exploitant ne peut être responsabilisé que sur des terrains dont il a une maîtrise suffisante : dans le domaine qui nous occupe ce sont les résultats de la lutte contre l'incivilité qui devront être pris en considération et non le constat de l'évolution de la délinquance ellemême, dont les principaux facteurs sont étrangers aux acteurs du TCU. Cela impose, comme la Mission permanente l'a souligné avec force dans son Guide de l'évaluation publié en février 2011, de choisir des « indicateurs intermédiaires » illustratifs de résultats imputables à une action ou à un programme d'actions entrant dans les possibilités juridiques et économiques de l'entreprise de transport. Ce point est un facteur limitant important ; la mesure des résultats devra pouvoir être faite par des techniques indiscutables et praticables : le volet d'une enquête de satisfaction portant sur cet aspect devra obéir à une rigueur de construction contrôlée et offrir une stabilité temporelle permettant des appréciations fiables des évolutions enregistrées ; le suivi peut être effectué par l'exploitant lui-même, qui en livre les résultats périodiquement à la collectivité, ou par cette dernière directement ces deux conceptions se développent mais ses modalités doivent être parfaitement concertées dans le cadre contractuel : soit elles sont définies au cahier des charges, par hypothèse accepté par les soumissionnaires, soit elles relèvent d'un accord ultérieur. Sous ces réserves notamment, la Mission estime que la mesure de la satisfaction du client en ce qui concerne l'ambiance de tranquillité qui prévaut ou pas dans les Îhicules et espaces d'échange du réseau de transport, est possible et souhaitable. Elle doit être orientée vers le suivi de l'efficacité des dispositions prises par l'entreprise, dans le champ de compétence qui est le sien. Cela peut viser principalement les initiatives de présence humaine apaisante spécifique (médiation...etc.), de formation et d'implication de toutes les catégories de personnel (conducteurs, contrôleurs, agents commerciaux), les campagnes de promotion des attitudes responsables et civiques, la lutte contre la fraude alliant des objectifs ambitieux et des méthodes favorisant un climat détendu.
18. Recommandation: inclure la mesure du sentiment d'insécurité dans les enquêtes de satisfaction client, là où cela n'est pas déjà fait.
Sur la base de constats faits sur le terrain qui indiquent que l'approximation et la précipitation sont contre-productives, et de sa réflexion générale, la Mission estime toutefois qu'en une matière aussi sensible la prudence suggère : 70
de ne s'engager que de façon progressive dans l'intégration de tels critères dans le suivi de la qualité de service, en commençant par exemple par des expérimentations ponctuelles non sanctionnées, pour Îrifier la faisabilité et la pertinence ; de les mettre en place en accompagnement d'initiatives ou de programmes d'actions concrets, par exemple de prévention de l'incivilité, dont on mesurera les effets en termes de ressenti par les usagers. Compte tenu des enjeux, la Mission suggère que les pouvoirs publics (Transports, Intérieur) investissent dans la recherche appliquée de dispositifs adaptés de suivi du ressenti par les usagers de la « sécurité » dans les transports collectifs, en liaison avec les instances représentatives des acteurs du TCU (AMF, GART, UTP notamment) en recourant à des experts missionnés précisément.
4.3
Une approche globale et professionnalisée
Au terme de ce tour d'horizon, et alors que le constat satisfaisant peut être fait que l'insécurité propre aux réseaux de transports urbains reste limitée et que des réponses très significatives sont données d'ores-et-déjà par les collectivités locales et par les transporteurs, la Mission souhaite confirmer deux indications générales que ses travaux lui suggèrent : la sécurité dans les TCU ne peut résulter que d'une prise en charge globale, et elle relève d'une démarche parfaitement professionnalisée.
4.3.1
Une prise en charge globale
On entend ici rappeler deux champs complémentaires dont l'efficacité doit s'additionner. Le couple AOT-exploitant doit trouver les voies et moyens, en rendant les arbitrages nécessaires chacun dans son champ de responsabilité mais sans oublier qu'ils interfèrent -, aux échéances budgétaires et contractuelles appropriées, de réserver à l'objectif de sécurité, celle des usagers, celle des personnels et celle des équipements, une priorité à hauteur des attentes respectives, dans leurs décisions d'investissement et dans l'affectation des moyens humains et autres. L'observation de la réalité conduit à suggérer d'accorder une attention plus soutenue aux attentes des usagers, équivalente à celle qui l'a été aux personnels de longue date. Ce résultat ne peut être atteint que par une meilleure implication des AOT dont c'est le rôle en application de la lettre et de l'esprit de la loi du 5 mars 2007. La limite de l'exercice en est bien entendu le coût, toujours supporté par un partage à proportions variables suivant les sites et les politiques tarifaires menées, entre l'usager et le contribuable local, en investissement, qu'il faut amortir, et en fonctionnement. La Mission est consciente que les équilibres économiques n'autorisent qu'une faible marge de manoeuvre et estime qu'il doit donc s'agir davantage de mettre en concurrence et d'arbitrer entre des priorités différentes. La seule façon d'apprécier le niveau de priorité de la sécurité par rapport 71
aux autres, est d'interroger les usagers eux-mêmes et les non-usagers, ce qui est de plus en plus souvent le cas. Une approche globale implique en second lieu que les acteurs du TCU (AOT, entreprise, salariés...) acceptent de s'inscrire dans la démarche partenariale de l'agglomération en matière de sécurité et de prévention de la délinquance, comme en toute autre matière, en renonçant à la tentation d'un cloisonnement supposé protecteur d'une spécificité inaccessible. Le réseau de transport est au service de la ville et de ses habitants, il est ouvert sur elle et l'irrigue en permanence. Le public lui porte certes un intérêt spécifique, dans la mesure où il rend un service essentiel à son quotidien, parfois éprouvant, mais il le considère comme le maillon d'un ensemble. Il est un élément structurant de l'agglomération. La Mission a obserÎ que des cloisonnements perdurent, entretenus involontairement par une culture propre très marquée du monde du transport urbain, une grande famille dont les membres peuvent avoir des intérêts divergents, mais qui communique par un langage commun et s'unit pour dénoncer les entraves qui sont mis à son développement. Cette synergie avec les acteurs principaux de la tranquillité publique, la ville et l'Etat, est rendue difficile également par les différences de niveaux de compétence comme cela a été mentionné. Les TCU vivent au niveau de l'agglomération, mais la loi, la tradition et les contraintes politiques du mouvement intercommunal font de la sécurité un enjeu municipal. La Mission estime que les acteurs du TCU peuvent être les vecteurs d'une évolution, et que c'est une condition à une approche Îritablement globale.
4.3.2
Une démarche professionnalisée
La contribution des acteurs des transports en commun à la sécurité est encore souvent Îcue comme contrainte imposée par les circonstances qui les conduit à s'aventurer sur des terrains qui échappent à leurs compétences et à engager des financements indus. Ainsi des revendications entendues sur le coût du traitement et de la fourniture des images vidéo sur réquisition de justice, ou du débat sur l'opportunité pour le réseau de transport d'avoir des moyens humains d'intervention, que la Mission a tenté d'éclairer. Où commence et où finit en ces matières la responsabilité des entreprises et des AOT ? Il n'appartient pas à la Mission de trancher ces débats, qui sont affaire de conception de chacun dans le cadre des textes en vigueur, et obéissent aussi aux contextes locaux. Cependant, l'observation des évolutions conduit à relever que la compréhension de leur rôle par les acteurs du TCU n'a cessé de s'élargir, à la mesure du développement des réseaux, de la diversification des modes, des progrès techniques, de l'accroissement continu de la fréquentation, d'une meilleure perception des attentes du public, et de l'affirmation dans leur rôle des collectivités organisatrices. A leur corps défendant parfois, en raison notamment des coûts impliqués, ils se sont engagés sur des voies nouvelles que personne d'autre ne voulait ou ne pouvait emprunter, mais qui offraient des perspectives qu'on ne pouvait refuser. La sécurité n'échappe pas à cette tendance.
72
A l'évidence certains champs d'action strictement régaliens (la répression des crimes et délits par exemple) ne peuvent entrer dans ce raisonnement. Mais dès qu'on passe à l'étage en-dessous en termes de gravité, et qu'on évoque la tranquillité publique et bien sûr la prévention, on voit bien que des réponses très diversifiées sont données. Vidéoprotection ; importance et missions des polices municipales, sont des variables fondamentales d'une ville à l'autre, à leur discrétion entière. Comme on l'a montré plus haut, les choix faits sont loin d'être indifférents pour les transports publics. Dès lors, des réponses propres du réseau de transport doivent prendre place dans le dispositif de coproduction. La mission souhaite indiquer en achevant ce rapport, qu'il lui a été donné d'observer, dans certains compartiments de ce jeu complexe, un grand professionnalisme de certaines entreprises ou collectivités innovantes, et elle estime que la contribution du monde du transport doit s'inscrire sous une telle exigence qui en signe la légitimité. Les deux grandes entreprises publiques RATP et SNCF qui n'étaient pas au centre des préoccupations de ce rapport, offrent à cet égard des exemples d'engagement et de créativité remarquables. Leur initiatives ne sont pas nécessairement transposables telles que, pour des raisons à la fois de statuts (déterminant des champs de compétences spécifiques) et de capacité financières ou humaines. Mais il est loisible de s'en inspirer. Les groupes priÎs ou para-publics qui contrôlent l'exploitation des transports urbains en province, tout en étant moins avancés et parfois plus réserÎs, ne sont cependant pas en reste. Dans les grands réseaux dotés de métros et de tramways, ils rivalisent même, à leur échelle, avec les deux cas précités. Ce concept de professionnalisation implique pour la mission que : la formation et le management des agents des réseaux de toutes catégories, inclue la préoccupation de la sécurité, car chacun, dans sa fonction et sans en dévier, a un rôle important à jouer ; la prise en considération de la relation humaine qu'implique l'acte de transporter des personnes, s'affirme davantage dans la culture de ceux qui s'y consacrent ; elle restera « technique », mais devra intégrer désormais, dans un volet commercial cultiÎ depuis longtemps, une valence de contact et d'apaisement des tensions ; les bonnes pratiques initiées ici ou là soient diffusées par les groupes et finalement imposées à leurs structures locales, par des modules de formation types et des processus de recrutement normés ; les collectivités renforcent leur attention à ces sujets, en sus des critères prioritaires de choix que sont les prix, les perspectives de développement de la fréquentation ou d'autres critères plus qualitatifs lors des appels d'offres.
73
74
Conclusion
La mission a rencontré des acteurs généralement très motiÎs et mettant en oeuvre des méthodes de prévention de la délinquance variables, en fonction du contexte fort divers de la délinquance dans chaque s agglomération et des organisations locales. Elle a retenu les points essentiels ci-après. La délinquance dans les TCU est le reflet de la délinquance dans la ville, avec des spécificités marquées concernant les agressions, notamment verbales, les vols et le harcèlement sexuel. Le caractère répétitif de cette délinquance du quotidien, et l'usage souvent lié à une contrainte économique des transports en commun conduit à un ressenti aggraÎ et à un sentiment d'insécurité souvent exagéré par rapport aux faits réels. La possibilité de lutter contre la fraude est largement ouverte aux opérateurs de transport, qui n'exploitent pas tous l'ensemble des possibilités que leur donnent les textes. La répartition des rôles est très variable d'un réseau à l'autre entre l'approche commerciale, la médiation, le constat des infractions, la dissuasion et l'intervention de sécurité concernant d'autres infractions releÎes à l'occasion de contrôles dans les TCU. Il faut cependant noter que tous les grands réseaux confrontés à ces problématiques ont pris des mesures permettant au minimum la protection des personnels. La mission a également releÎ l'implication dans les actions de médiation et les immersions en milieu scolaire. La répartition des rôles entre les acteurs mérite d'être abordée clairement et notamment entre l'opérateur et l'autorité organisatrice, qui devrait davantage s'impliquer dans la mise en place d'un observatoire local de la délinquance au niveau de l'agglomération, la production d'un diagnostic de sécurité et d'une stratégie territoriale dans les TCU, volet d'une stratégie plus globale. L'agglomération devrait également s'impliquer dans la mise en place d'une police intercommunale des transports, ou, le cas échéant, dans la coordination de l'implication des diverses polices municipales des villes de l'agglomération dans la tranquillité publique au bénéfice des TCU. L'objectif de mobilité durable implique une amélioration de l'image des TCU dont la réduction du sentiment d'insécurité est une composante importante. Or, le sentiment d'insécurité procède également de l'infra-délinquance que constituent les incivilités envers les personnels, comme envers les autres voyageurs. Ce sujet voit de plus en plus les opérateurs s'impliquer, ainsi que certaines AOT. La lutte contre le sentiment d'insécurité dans la chaîne de mobilité durable (parc relais, gare bus, ...) nécessite des actions cohérentes ; elle implique la mise en responsabilité d'un acteur central sur l'ensemble de la chaîne, qui devrait être l'AOT.
75
76
RECOMMANDATIONS
1. Recommandation : pour les autorités organisatrices de transport urbain: encourager la construction d'observatoires locaux de la délinquance dans les TCU exploitant l'ensemble des sources de données, incluant notamment les informations de l'opérateur de transport et celles issues des constats des services de police et de gendarmerie. ......................................................................................................................... 23 2. Recommandation : établir la liste des index les plus significatifs des faits constatés de délinquance faisant l'objet d'un suivi dans les TCU, par un groupe de travail placé sous l'égide conjointe du ministère de l'Intérieur et du ministère chargé des Transports, afin de favoriser une analyse locale pertinente de l'évolution de la délinquance dans les TCU par rapport à la voie publique. .................. 26 3. Recommandation : encourager la généralisation des démarches de médiation de tranquillité publique propres aux réseaux de transport, en diffusant les bonnes pratiques et en leur attribuant prioritairement des emplois aidés en réponse à proportion de leurs besoins. ................................................................................................ 39 4. Recommandation : permettre le développement de polices intercommunales dédiées aux réseaux de transports en donnant explicitement cette possibilité aux collectivités territoriales, autorités organisatrices. ............................................................ 40 5. Recommandation : proposer la généralisation à tous les réseaux de transports urbains des agglomérations de plus de 100 000 habitants par exemple, d'une convention multipartite régissant les rapports entre tous les acteurs impliqués dans la prévention et la sécurité sur le réseau, pour optimiser l'efficacité de leurs interventions respectives par une bonne coopération. ...................................................... 44 6. Recommandation : faire évoluer la convention-type annexée au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale pour prendre en compte le besoin de coordination au bénéfice de la tranquillité et de la sécurité publique dans les TCU. ............................................... 45 7. Recommandation : rappeler aux acteurs du transport public, par voie de circulaire (Transports-Intérieur-Justice) publiée au JO, leurs droits et devoirs en terme de respect des règles dans les espaces dont ils ont la maîtrise dans le cadre des textes en vigueur, en précisant bien les champs d'application des différents dispositifs et leurs implications diverses, y compris en termes de concours éventuel de la force publique. ............................................................................................................. 46 8. Recommandation : faire évoluer le décret du 27 août 2008 pour confier explicitement à l'autorité organisatrice la responsabilité de produire le diagnostic de sécurité pour les transports urbains. ............................................................................. 48 9. Recommandation : dans le cadre de l'officialisation des « stratégies territoriales de sécurité et de prévention de la délinquance », par évolution des anciens CLS, prévoir à la fois la promotion des approches intercommunales au sein des CISPD, et la présence d'un volet « transports urbains » en leur sein, mis au point par un groupe de travail ad-hoc, mais validé comme l'ensemble de la stratégie, par l'instance plénière. ........................................................................................ 50
77
10. Recommandation : faire évaluer par la MPEPPD l'impact de l'article 6 de la loi du 5 mars 2007 et de son décret d'application 2008-857 du 27 août 2008 précisant les modalités de concours apporté par les AOT aux actions de prévention de la délinquance deux ans après la publication de la circulaire de mise en oeuvre d' avril 2012. ......................................................................................................................... 50 11. Recommandation : promouvoir une présentation plus claire et plus simple des éléments essentiels du règlement d'exploitation en matière de prévention, ainsi que des campagnes locales de prévention des détériorations diverses. 55 12. Recommandation : mieux impliquer les voyageurs des TCU dans la lutte contre des phénomènes concrets de dégradation (sièges,..) par des campagnes locales de sensibilisation, en coopération avec l'autorité organisatrice. ......................... 55 13. Recommandation : renforcer l'équipement en dispositifs de vidéoprotection des autobus de l'ensemble des réseaux, notamment dans la grande couronne de l' Ile-de-France. .............................................................................................. 58 14. Recommandation : renforcer là où c'est nécessaire, la qualité des données des opérateurs (dont les images) élément d'une articulation efficace avec les services de l'Etat. ............................................................................................................ 59 15. Recommandation : développer les travaux du programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres (PREDIT) concernant l'impact économique et social de la délinquance dans les TCU et l'optimisation des moyens techniques et humains de prévention. ................................................................................ 60 16. Recommandation: prendre en compte la sécurité dans les études et les outils favorisant l'attractivité de la mobilité durable. ...................................................... 68 17. Recommandation: désigner l'autorité organisatrice comme chef de file des acteurs de la sécurité de la mobilité durable. .............................................................. 68 18. Recommandation: inclure la mesure du sentiment d'insécurité dans les enquêtes de satisfaction client, là où cela n'est pas déjà fait. ........................................... 70
78
Didier CHABROL Coordonnateur de la mission permanente Inspecteur général de l'administration
Bernard MESSIAS Inspecteur des services judiciaires
Bruno LAFFARGUE Inspecteur général de l'administration
Catherine HESSE Inspectrice générale des affaires sociales
Marc LE DORH Conseiller des services du Sénat Chargé de mission à l'inspection générale de l'administration
Isabelle MASSIN Inspectrice générale de l'administration du développement durable
Michel DESCHAMPS Inspecteur général des ponts, des eaux et des forêts
Alain TAUPIN Inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
HerÎ MECHERI Inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
Didier JOUAULT Inspecteur général de l'éducation nationale
Magali INGALL-MONTAGNIER Inspectrice générale adjointe des services judicaires
Jean-Luc MIRAUX Inspecteur général de l'éducation nationale 79
80
ANNEXE
Liste des personnes auditionnées
Administrations centrales, organismes nationaux, directions générales d'entreprises Ministère de l'Intérieur, DGPN, unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun Carine Vialatte, Commissaire divisionnaire, chef de l'UCSTC ; Guillaume Emile-Zola-Place, Lt-Colonel de gendarmerie, chef-adjoint de l'UCSTC ; Laurent Boisset, Commandant de police ;
Ministère de l'écologie, du développement durable, et de l'énergie Pascal Mignerey, directeur de l'autorité de la qualité de service des transports (AQST) ; Arnaud Dumontier, secrétaire général de l'AQST ; Gérard Rolland, chef du département de la sûreté dans les transports (DSUT) ; Yves Rougier, chef-adjoint DSUT ; Fabrice Fussy, chef de l'observatoire national de la délinquance dans les transports ; Christelle François, Yasmina Baaba, bureau du développement de la sûreté multimodale, DSUT ; Emmanuel Kozal, chef du bureau des opérateurs de transport collectif. Union des Transports Public et ferroviaires (UTP) Anne Meyer, directrice du département clientèle, exploitation et Recherche ; Benoît Juery, directeur adjoint du département des affaires sociales.
Groupement des autorités responsables de transport (GART) Jean-François Malbrancq, président de la commission accessibilité / sécurité, viceprésident de la communauté urbaine d'Arras délégué aux Transports et au Plan de Déplacements Urbains ; Denis Leroy, vice- président de la commission accessibilité / sécurité, vice-président de la communauté d'agglomération de La Rochelle ; Benoît Chauvin, responsable du Pôle Technologie des Transports et Accessibilité ; Groupe Keolis Jean-Yves Topin, directeur de la sécurité du groupe.
81
Groupe Veolia Transdev André Cailliez, directeur prévention, santé et sécurité du groupe.
82
Organismes ou personnes auditionnés du fait de leur expertise en matière de délinquance, d'insécurité ou de comportements incivils dans les transports Jean-Marc Novaro, directeur sécurité de la RATP ; Josiane Sommacal, chef de la mission coordination de la prévention de la direction de la sécurité de la RATP ; Céline Debove-Postel, directrice déléguée à la prévention et à la gestion des incivilités, direction de la sûreté, SNCF; Michèle FORT, direction de la sûreté de la SNCF ; Alain Riou, directeur développement Optile ;
Sylvie Scherer, directrice de la mission études sécurité de l'institut d'aménagement et d'urbanisme d'Ile de France (IAU IdF) ; Hélène Heurtel, statisticienne à la mission études sécurité IAU IdF ; Marion Guillou, psychologue sociale, en thèse à l'université de Nantes concernant les incivilités dans les transports ferroviaires ; Pascal André, senior consultant incivilités délinquance dans les transports, cabinet Plein Ciel ; Marion Baud, Chef du projet Gares du grand Paris, direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement (DRIEA) d'Ile de France ; François Bertrand, Directeur, Unité Territoriale 92/DRIEA ; Anne Grandguillot, Centre d'études techniques de l'équipement (CETE) de Lyon, directrice du département construction Aménagement projet ; Pierre Guyot, Service environnement et urbanisme réglementaire, DRIEA / Unité territoriale de la Seine Saint Denis ; Cédric Boussuge, Chargé d'études, Cete de Lyon ; Cyril Pouvesle, Chargé d'études, Cete de Lyon ; Stéphane Melot, Responsable Sûreté et sécurité publique Société du Grand Paris (SGP) ; Valérie Vernet, Responsable de l'unité Gares, SGP ; Juliette Battini, Préfecture de Police, Service Information Sécurité ; Laurence Kimmel,Chargée de mission/ SADD/UT92/DRIEA ; Laetitia Conreaux, Stagiaire/ UT92/ DRIEA ; Aurore Nativité, Chef du service environnement et réglementation de l'urbanisme/UT94/ DRIEA ; Sophie Mozer, Responsable du pôle de l'application du droit des sols / UT 94/DRIEA ; Fanny HerÎ, Responsable SADT, DRIEA / UT93. Personnes rencontrées lors du déplacement à Strasbourg Patrick Poirret, Procureur de la République près le TGI de Strasbourg ;
83
Jean-François Colombet, Directeur de Cabinet du Préfet de la Région Alsace, Préfet du Bas-Rhin ; Olivier Bitz, Adjoint au Maire en charge de la Tranquillité publique à Strasbourg ;
Luc-Didier Mazoyer, Directeur Départemental de la Sécurité Publique ; Stéphane Lacour, chef du service de sécurité de proximité ; Sébastien Raimbault, Chef de l'Unité de Sécurisation des Transports en Commun (USTC) ; Francis Jaecki, Directeur Général Adjoint en charge du Pôle sécurité, prévention et réglementation de la Communauté Urbaine de Strasbourg (CUS) ; Christian Anthoni, Chef du service prévention, animation, sécurité du pôle sécurité prévention et réglementation de la CUS ; Jean-Louis Metzger, directeur des déplacements clients de la compagnie des transports Strasbourgeois (CTS) ; Jean-Michel Augé, directeur du développement durable et des relations institutionnelles de la CTS ; Gilbert Stammbach, Responsable sûreté pour la Région Alsace SNCF. Personnes rencontrées lors du déplacement à Lyon Jean-Pierre Cazenave-Lacrouts, préfet délégué pour la défense et la sécurité ; Gilles Rouveure, directeur de cabinet du préfet délégué pour la défense et la sécurité ; Laurent Hyp, cabinet du préfet délégué ;
Albert Doutre, directeur départemental de la sécurité publique (DDSP) ; Alain Payet, chef d'état major adjoint de la DDSP ; Cdt Josselyne Massoco, chef du Service interdépartemental de sécurisation des transports en commun ; Commandant Bonnal, chef du bureau opérations emploi du groupement de gendarmerie du Rhône ; Stéphane Canalis, directeur mobilité du Conseil Général du Rhône (CG 69) ; Maxime Bulinge, Chef du bureau Accessibilité et Qualité du Réseau, direction mobilité CG 69 ; Georges Pasini, Directeur sécurité prévention de la ville de Lyon ; Henri Fernandez, Directeur opérationnel de la Police Municipale (PM) ; Jean-Georges Meritza, responsable du bureau d'ordre des activités de la PM ; Laurence Emin-Coutino, direction prévention sécurité en charge de la coordination du CLSPD ; M Emmanuel Magne, directeur de la direction supervision globale de la ville de Lyon ; Bernard Rivalta, Président du Sytral ; Raymond Deschamps, Directeur Général du Sytral ; 84
Valérie Guillou, directrice de l'Exploitation du Sytral L ; Eve-Marie Moos, conseillère sécurité auprès du président ; Pascal Jacquesson, directeur général de Kéolis Lyon ; Patrick Aujogue, directeur Sécurité Kéolis Lyon.
Personnes rencontrées lors du déplacement au Mans Pascal Lelarge, préfet de la Sarthe ; François de Keréver, Directeur du cabinet du préfet de la Sarthe ; Magali Debatte, secrétaire générale de la préfecture ;
Jean-François Soulard, Conseiller municipal, vice-président de Le Mans Métropole en charge des transports en commun de l'agglomération mancelle et Président de la SETRAM ; François Chaumard, directeur départemental de la sécurité publique 72 ; Daniel Peneaud, directeur du service « Tranquillité publique », mairie du Mans ; Jean-Paul Pringuet, directeur de la SETRAM ; Laurence Tilloy, directrice d'exploitation à la SETRAM.
Personnes rencontrées lors du déplacement à Orléans Florent Montillot, Maire Adjoint à la Tranquillité Publique, la Prévention, la Réussite et l'Intégration, membre du bureau de l'Agglomération d'Orléans ; Pascal Desuert, Directeur de la sécurité et de la tranquillité publique, directeur de la police municipale de la ville d'Orléans ; William Le Pelletier, chef de service, responsable de la police municipale intercommunale des transports ; Franck Meunier , responsable sécurité contrôle prévention de Keolis Orléans.
Autres entretiens Benoît Berque, Chef du Pôle Sécurité Publique-Cultes Cabinet du Préfet de la région Auvergne Clermont-Ferrand ; Emmanuel Gerber, responsable du service transports d'agglomération castelroussine ; Jean-Luc Quintric, directeur du réseau (Keolis Châteauroux) ; Etienne Sesmat, directeur de la sûreté de la RTM Marseille. de la communauté
85
INVALIDE) (ATTENTION: OPTION e police du maire et les contraventions au code de la route. Ils peuvent également constater les infractions aux dispositions de plusieurs codes (code de la santé, code rural, code
50
De la police municipale à la police territoriale : mieux assurer la tranquillité publique, par MM. François PILLET et René VANDIERENDONCK, sénateurs. Rapport d'information du sénat, 26 septembre 2012 51 Cependant, la doctrine d'emploi de certains maires tendent à un emploi en intervention, notamment en exploitant les images de centres de supervision urbains en procédure de flagrant délit
39
forestier,...) Ils ne peuvent pas procéder à des enquêtes, mais peuvent recueillir des renseignements et rendre compte à un OPJ. Une convention de coordination signée entre le maire et le préfet permet de définir les échanges d'informations et de coordonner certaines procédures entre polices municipales et les forces de sécurité nationale, dans le respect des compétences de chacun. Les petites communes éprouvent des difficultés à créer et à supporter la charge d'entretien d'un tel service. L'article L512 du CSI autorise le recrutement par un EPCI d'agents de police municipale. La mutualisation est limitée à la gestion budgétaire et des ressources humaines. Pendant l'exercice de leurs fonctions sur le territoire d'une commune, ils sont placés sous l'autorité du maire de cette commune. Ce dispositif est parfois appelé abusivement : police intercommunale. Il suppose la signature par le maire d'une convention avec les autres communes membres du dispositif, précisant la doctrine d'emploi sur le territoire de chaque commune. Le rapport sénatorial cité propose de favoriser l'émergence de Îritables polices intercommunales. Il note en particulier que « comme l'a souligné lors de son audition le directeur général des collectivités locales, lorsque la coopération avec la police nationale telle que formalisée dans la convention de coordination s'étend aux transports et que cette compétence a été transférée à l'EPCI, il parait plus simple que la police des transports soit de la responsabilité de celui-ci ». La mission fait sienne cette recommandation.
4.
Recommandation : permettre le développement de polices intercommunales dédiées aux réseaux de transports en donnant explicitement cette possibilité aux collectivités territoriales, autorités organisatrices.
Les dispositifs de police municipale impliqués dans les TCU sont peu fréquents. Le dispositif le plus ancien est celui de la police municipale intercommunale des transports d'Orléans. Créée en 2004, cette police agit dans le cadre du contrat local de sécurité dans les transports (CLST) de la communauté d'agglomération, signé par 18 communes sur 22. Les policiers intercommunaux, recrutés et gérés administrativement par l'EPCI, sont mis à la disposition des maires pour l'exercice de leurs missions opérationnelles et notamment la constatation d'infractions. Le service fonctionne en complémentarité avec la police nationale et la gendarmerie nationale. La police intercommunale est composée de 24 agents dont des policiers municipaux, des agents de surveillance et des agents de médiation, qui exercent sur 18 des 22 communes de l'agglomération signataires du CLST52. La PMIT ne peut donc intervenir sur le territoire des
communes non signataires et le regrette.
Les principales missions de cette police intercommunale sont notamment: d'assister le service contrôle de la SEMTAO (lutte contre la fraude) ; de surveiller le réseau SEMTAO par des patrouilles embarquées à bord des bus et trams du réseau.
52
Entretien cité avec F. Montillot et communiqué de presse de l'agglO, 18 janvier 2010
40
La mission considère que cette expérience, dont le fondement juridique alimente certes des débats qui justifieraient une mise à jour des textes, a une efficacité aÎrée, et peut servir de référence à des développements similaires. A Chateauroux, la police municipale effectue une centaine d'interventions par an concernant le réseau de transports. Son efficacité est reconnue, mais elle est limitée au territoire de la ville centre. Au Mans, les agents de Tranquillité publique, bien que ne bénéficiant pas du statut de policiers municipaux, effectuent également de telles patrouilles. La limitation statutaire de leur champ d'intervention au territoire de la ville du Mans est, là encore, ressentie comme un handicap sérieux. A Bordeaux, Marseille ou Strasbourg au contraire, les interventions de la police municipale d'importance d'ailleurs très inégale dans les TCU sont exceptionnelles ou inexistantes. La connaissance fine du terrain permettrait pourtant à ces agents de garantir la tranquillité publique dans les Îhicules et au voisinage des lignes dans l'agglomération, d'appuyer les contrôles, de rappeler la règle et de conforter les actions de médiation mises en oeuvre. Une autre limitation fréquemment releÎe par les opérateurs de transport concerne l'amplitude de service des policiers municipaux qui est souvent sensiblement plus étroite que celle du service de transport. Ce décalage est d'autant plus ressenti que la présence humaine apaisante est particulièrement nécessaire en fin de journée. Une mission beaucoup plus fréquemment assurée par les polices municipales concerne les incivilités routières : stationnement sur des arrêts de bus ou dans des couloirs réserÎs. Cette mission reÐt un enjeu important de qualité de service. La coopération de la police municipale avec l'entreprise de TCU peut concerner également le soutien aux conducteurs victimes d'agressions verbales ou physiques de la part de conducteurs d'autres Îhicules53. Tout en étant consciente des implications en termes de coûts et donc des arbitrages financiers que cela implique inévitablement, la mission estime : que la prise de conscience d'une responsabilité locale en matière de tranquillité publique et de sécurité de proximité est réelle et très encourageante, mais qu'elle devrait s'étendre davantage à l'espace des TCU, qui n'ont aucune raison d'en être tenus à l'écart ; des bonnes pratiques existent dont on peut s'inspirer ; qu'une approche globale des moyens locaux de la prévention, susceptible de déboucher sur des arbitrages qui incombent en toute hypothèse aux collectivités locales concernées, devrait être systématiquement recherchée, pour affecter les ressources appropriées au bon niveau, compte-tenu des responsabilités juridiques respectives.
53
Entretien de la mission avec la police municipale de la ville de Lyon
41
2.1.2.3 Le rôle de l'Etat : lutter contre la délinquance, avec l'appui de ses partenaires
La responsabilité de l'Etat en matière de sécurité et de lutte contre la délinquance ne se divise pas : elle concerne donc les espaces du TCU au même titre que tous les autres, qui requièrent une implication des services à due proportion des risques, sans qu'il soit nécessaire d'aller au-delà dans le cadre de ce rapport. Une question a toutefois été souvent évoquée devant les membres de la mission : la capacité d'intervention des forces de sécurité (police ou gendarmerie) dans les espaces du TU est-elle suffisante ? Comment l'améliorer ? Faut-il mettre en place des structures ou unités dédiées ? La mission a releÎ une certaine diversité de réponses, face à un risque spécifique reconnu comme tel. Il est certain qu'elles découlent au premier chef de la taille de l'agglomération et des effectifs de police urbaine disponibles : la mise en place d'une unité dédiée n'est possible et pertinente, en toute hypothèse, que dans les grandes villes, et sous réserve de confirmation d'un besoin spécifique, que l'observation fine de la délinquance peut contribuer à définir. Un certain nombre d'initiatives ont pu être prises dans ce sens. Il s'agit de services interdépartementaux de sécurisation des transports en commun (SISTC), forts d'une centaine d'agents, à Lille, Lyon, Marseille, ou d'unités de sécurisation des transports en commun (USTC) d'environ 20 agents54. Ces dispositifs sont très appréciés des opérateurs, l'intervention dans les transports requérant une étroite coordination avec l'encadrement et les personnels (conducteurs et Îrificateurs) et des relations spécifiques avec les passagers, qui ne sont pas celles de la voie publique en général et nécessitent formation souvent assurée par l'opérateur - et habitudes. Les SISTC ou USTC sont des structures souples. Dans une grande agglomération, les policiers de l'entité spécialisée ne sont pas dédiés exclusivement aux transports. S'il y a lieu, ils interviennent sous le signe de l'urgence ou en cas de proximité sur d'autres types de mission. Cependant, l'essentiel de leurs tâches concernent les TCU. En retour, les interventions sur le réseau de TCU ne sont pas réserÎes à l'entité spécialisée : c'est l'unité la plus rapidement disponible qui est sollicitée. Un DDSP indique que les missions principales des policiers de l'entité chargée des transports au sein de sa direction concernent la délinquance d'appropriation (« vols à la tire »), les atteintes aux personnes, les infractions à la législation sur les étrangers (ILE) et les infractions à la législation sur les stupéfiants (ILS). Ces objectifs seront atteints notamment lors de la présence policière en appui à des opérations de contrôle par l'opérateur (cf. supra point de vue de la mission à ce sujet). Si l'on s'en tient aux attentes exprimées, force est de constater que le développement de ces unités, ou même leur généralisation au-dessus d'un certain seuil de population, serait une réponse appréciée. La mission le comprend. Mais elle estime que la qualité des relations opérationnelles et quotidiennes, qui permet d'installer la confiance, est la condition essentielle
54
Toulouse, Bordeaux, Rouen, Strasbourg, Nantes, St Etienne, Montpellier ; certaines existent depuis les années 90. Creteil a été intégrée dans le périmètre de la SPRT
42
de l'efficacité de la lutte contre la délinquance dans les transports, et qu'elle permet des réponses appropriées aux risques encourus et aux signalements, même en l'absence d'unité spécialisée. Une réalité s'impose en fait à l'observation : la connaissance et la compréhension mutuelle des difficultés Îcues, notamment face aux risques propres à certains quartiers et à certains publics, caractérisent les relations au quotidien entre policiers et personnels du réseau. Dans ces conditions, le constat d'une bonne réactivité de la police paraît très largement fait. Le souhait de cette dernière de disposer, de la part du transporteur et de ses agents, de toutes les informations en sa possession pour faciliter sa tâche, est parfois exprimé, dénotant sans doute des interrogations ici ou là. La mission estime qu'il appartient aux responsables, par exemple dans le cadre des conventions évoquées ci-dessous, de définir les voies et moyens d'une telle pratique d'informations mutuelles, qui requiert des précautions pour rester strictement dans le cadre des textes en vigueur et préserver la sécurité de tous. Enfin, ayant noté que la question du coût pour l'opérateur de la recherche et de la transmission des images vidéo dans le cadre des investigations judiciaires, reste posée par certains transporteurs, qui estiment qu'il devrait être pris en charge par l'Etat et ne pas leur incomber, la mission souhaite indiquer clairement sa position. Faisant siennes les conclusions déjà produites à ce sujet par l'IGA dans un rapport sur l'efficacité de la vidéoprotection 55, et à l'instar de l'option prise par de très nombreux réseaux d'une coopération fondée sur l'intérêt mutuel, qui les conduit à effectuer cette tâche à titre gracieux, la mission estime que cette solution s'impose. Corollairement, les services de police n'obtiendront de réponses rapides et utiles à leurs demandes que si celles-ci impliquent des efforts que l'on peut raisonnablement exiger d'un partenaire. Par exemple, tel directeur de réseau mobilisera volontiers son personnel habilité pour lire de nombreux enregistrements en cas de fait particulièrement grave, mais ne pourra pas réserver la même suite à des demandes récurrentes qui peuvent être disproportionnées par rapport aux faits. Il faut donc privilégier une approche pragmatique, donnant lieu à des échanges permanents pour que les demandes soient calibrées et les réponses rapides, les modalités pouvant également figurer dans une convention locale.
2.1.3
Un partenariat formalisé par des conventions
L'importance d'une coopération opérationnelle fluide, et la nécessité d'en préciser les objectifs, les contours dans le respect des textes fixant les missions de chacun des acteurs et les modalités, suggère à la mission de préconiser la mise en place de conventions ad-hoc, entre l'opérateur, la ou les collectivités locales et l'Etat. De telles conventions existent déjà dans la plupart des grands réseaux. Ce dispositif spécifique doit néanmoins s'intégrer dans la logique plus large de la prévention de la délinquance dans l'agglomération (voir 2.2) et
55
Rapport complémentaire sur l'efficacité de la vidéoprotection IGA n° 10-059-02, IGGN n° 32 568 et IGPN n° 10/1246D Novembre 2012
43
s'articuler avec ceux régissant strictement les relations police nationale- police municipale qui ont d'ailleurs été récemment rénoÎs. Cet exercice doit rester souple et adapté aux circonstances locales, c'est pourquoi on se limitera ici à en préconiser le principe et à en proposer les éléments essentiels, du point de vue des acteurs impliqués, du contenu, et des articulations évoquées ci-dessus. Il s'agirait d'un document multipartite, impliquant tous les acteurs concernés par la prévention et la sécurité sur le réseau de TCU et y consacrant des moyens : l'opérateur, l'autorité organisatrice, l'agglomération (si elle est différente) et les communes concernées, et l'Etat. Pour ce dernier partenaire les questions traitées impliquent l'engagement de l'autorité administrative et de l'autorité judiciaire. Du point de vue du contenu il devrait a minima comprendre : Les objectifs et les modalités de l'échange d'information (y inclus vidéoprotection) ; Les formations ou sensibilisations aux spécificités du TCU et aux contraintes mutuelles ; Les instances et les modalités de la coordination opérationnelle (en temps normal et en période de crise, y inclus exercices préparatoires) ; Les modalités du soutien au personnel et aux autres victimes en cas d'agression...etc. (modalités du dépôt de plainte, accueil, soutien psychologique...etc.) ; Un dispositif d'évaluation et de remise à plat périodique. S'agissant de l'articulation avec l'ensemble des dispositifs en place, la mission recommande de veiller à ce que cet exercice soit effectivement réalisé et suivi, sous l'égide de l'AOT, conformément à l'esprit des textes en vigueur, et en liaison avec les instances partenariales de la prévention de la délinquance, si possible au niveau de l'agglomération. Dans la mesure où les polices municipales sont concernées, il devra impliquer toutes les communes qui le souhaitent et tenir compte des dispositions conventionnelles spécifiques régissant pour chacune d'elles, les rapports entre police (ou gendarmerie) nationale et police municipale.
5.
Recommandation : proposer la généralisation à tous les réseaux de transports urbains des agglomérations de plus de 100 000 habitants par exemple, d'une convention multipartite régissant les rapports entre tous les acteurs impliqués dans la prévention et la sécurité sur le réseau, pour optimiser l'efficacité de leurs interventions respectives par une bonne coopération.
L'annexe au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale fournit le canevas d'une convention de coordination entre police nationale ou brigade de gendarmerie nationale et police
44
municipale.56 Cette convention-type ne prévoit pas le besoin de coordination pour des actions de sécurisation ou de prévention concernant les TCU.
6.
Recommandation : faire évoluer la convention-type annexée au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale pour prendre en compte le besoin de coordination au bénéfice de la tranquillité et de la sécurité publique dans les TCU.
En conclusion de cette partie, la mission fait le constat : a- qu'une relation de confiance entre forces de police (ou de gendarmerie), polices municipales et opérateur de transport est indispensable, et qu'elle est établie, dans la grande majorité des cas ; b- qu'au-delà de la présentation « commerciale » au voyageur de la nécessité d'acquitter le prix d'un titre de transport et de respecter les règles de savoir-vivre, l'opérateur a besoin d'un appui à ses opérations de contrôle et à la lutte contre les dégradations et les agressions verbales, visant notamment ses personnels ; c- qu'en fonction des conditions locales, de l'intensité de la délinquance dans les TCU et de sa nature, cet appui est fourni par une police municipale, (ou une police municipale intercommunale), ou par la police nationale ; d- que tous les opérateurs et les groupes contactés reconnaissent que l'intérêt bien compris de l'opérateur est de s'investir dans une coopération fondée sur l'intérêt mutuel, ce qui est le cas très général. Cette coopération est notamment illustrée par la fourniture d'images analysées aux forces de police ; e- que ces coopérations, si elles sont généralement excellentes, méritent une meilleure formalisation et un organe de régulation. Par exemple, une réunion annuelle ou bi-annuelle de haut niveau (préfet, procureur, président de l'autorité organisatrice, DG de l'opérateur) de bilan et de perspective permet d'adapter les limites raisonnables aux demandes de chacun ; f- que, dans quelques cas, il est pris prétexte de l'ambiguïté des textes pour refuser de sortir des limites étroites des intérêts à court terme. En attendant une mise à jour de ces textes, la mission recommande :
56
Voir la circulaire d'application INTK1300185C du 31 janvier 2013 qui prévoit notamment la réalisation d'un diagnostic de sécurité préalable à la signature de la convention. Cette circulaire s'applique aux polices municipales composées d'agents recrutés par un EPCI et mis à disposition de plusieurs communes.
45
7.
Recommandation : rappeler aux acteurs du transport public, par voie de circulaire (Transports-Intérieur-Justice) publiée au JO, leurs droits et devoirs en terme de respect des règles dans les espaces dont ils ont la maîtrise dans le cadre des textes en vigueur, en précisant bien les champs d'application des différents dispositifs et leurs implications diverses, y compris en termes de concours éventuel de la force publique.
Cette circulaire pourra utilement servir de base à la convention multipartite évoquée ci-dessus.
2.2 La prise en compte dans les stratégies territoriales de sécurité et de prévention
Sur la base des observatoires de la délinquance animés par l'autorité organisatrice, que prévoit le décret précité, la délinquance dans les transports mérite un diagnostic particulier avant d'agir en prévention, du fait des risques spécifiques à l'espace transport, des populations concernées et des territoires traversés. Cependant, les actions de prévention menées doivent s'intégrer dans une stratégie territoriale globale, qui ne peut être que d'agglomération, ce que l'entrée TCU peut favoriser. La mission a fait le point avec les structures administratives qui suivent la situation des dispositifs de prévention dans les transports. Comme de précédents travaux l'avaient releÎ, et comme l'a confirmé « l'Observatoire national de la délinquance dans les transports » (ONDT Ministère chargé des Transports) la promotion de la formule de « Contrat locaux de sécurité » dédiés aux transports collectifs (CLS-Transports), a été remplie de succès, puisqu'ils se sont multipliés et réÏlent des démarches très intéressantes. Cela confirme l'importance ici aussi du partenariat. Cette approche très spécifique aux acteurs des TCU est souvent portée par la dynamique d'une relation efficace entre l'exploitant et la police, dont la mission a pu observer qu'elle est aujourd'hui très générale et proportionnelle à la gravité des situations. Elle a toutefois pu contribuer à un certain isolement de la problématique « transports » par rapport à la stratégie générale de la ville ou de l'agglomération. La mission, l'ayant obserÎ en plusieurs sites, estime qu'il faut progressivement y remédier et en fait l'un de ses points forts. A ce titre elle suggère une approche en deux étapes : si la phase de diagnostic doit être menée séparément, car il importe d'identifier les problèmes spécifiques des TCU dans la ville en matière de sécurité, l'intégration des actions qui en découlent à la stratégie générale de sécurité dans l'agglomération dont ils peuvent représenter un volet identifié nous paraît s'imposer, dans un souci de décloisonnement et de cohérence. Dans un certain nombre de cas, le CLS-T tient partiellement lieu de la convention multipartite préconisée. La mission juge préférable de clairement distinguer le volet TCU de la stratégie territoriale de l'agglomération de la convention citée, plus proche de l'opérationnel que de la stratégie, comme l'exemple de Lyon le démontre.
46
2.2.1 L'indispensable diagnostic préalable
Dans son guide sur l'évaluation des politiques locales de prévention de la délinquance publié début 2011, la Mission permanente avait rappelé l'importance d'un Îritable diagnostic « partir d'un diagnostic partagé » - et l'a situé dans le processus général. Ses préconisations de principe et de méthodologie s'appliquent parfaitement à la problématique des TCU : le diagnostic est établi sur la base de données aussi complètes que possible (sans négliger les « signaux faibles ») fournies par les différents acteurs et partenaires du réseau, à commencer par ses clients ; les conclusions doivent être partagées par les acteurs principaux : entreprise, AOT, agglomération, Etat, pour pouvoir servir de fondement à une stratégie partenariale ; il est effectué à une certaine date, avant le lancement d'un programme d'actions à moyen terme, et doit être périodiquement renouvelé sur la base du suivi de l'évolution de choses, dans cet univers en constant mouvement ; on peut juger nécessaire de faire appel à un expert, mais ce n'est nullement indispensable car un bon diagnostic repose avant tout sur la connaissance intime du réseau, du territoire, des attentes du public et du ressenti des personnels, que seuls ses acteurs possèdent ; l'établissement du diagnostic peut fournir matière au dialogue social d'une part, pour inclure complètement le volet sécurité dans le management de l'entreprise, et au dialogue avec les usagers d'autre part, dans le cadre des enquêtes sur la qualité de service ou au sein d'instances de dialogue et de conseils de quartiers. Les exemples de diagnostic de sécurité produit par des autorités organisatrices sont encore rares. Cependant celui établi en 2010 par un groupe restreint sous l'égide de l'autorité organisatrice lyonnaise (SYTRAL), a été présenté à la mission, lors de son déplacement à Lyon. Le document s'inscrit dans la logique du plan national de sécurisation des Transports et du plan national de prévention de la délinquance et de leurs déclinaisons départementales. Il décrit les principaux phénomènes, les points et les périodes sensibles, l'enjeu majeur que constitue la fraude, dresse les portraits croisés des auteurs et des victimes et présente le point de vue des personnels. C'est là une bonne pratique à encourager. Compte tenu des responsabilités respectives, et en application des textes en vigueur, l'Autorité organisatrice paraît devoir être davantage qu'aujourd'hui - l'initiateur et l'animateur naturel d'une telle démarche, avec le concours actif de l'opérateur exploitant, et celui des autres partenaires. Elle en livrera les résultats à la (ou aux) collectivité (s) qui portent la stratégie territoriale de prévention de la délinquance. A cet égard, une évolution des textes est souhaitable, dans le sens d'une clarification.
47
8.
Recommandation : faire évoluer le décret du 27 août 2008 pour confier explicitement à l'autorité organisatrice la responsabilité de produire le diagnostic de sécurité pour les transports urbains.
2.2.2 L'articulation avec la stratégie territoriale, les instances et les outils
La mission a souligné dans d'autres travaux combien le niveau de l'agglomération lui paraît pertinent pour établir et piloter une « stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance » telle que le Plan national de 2009 les prescrivait. Elle estime d'ailleurs que, compte tenu de l'écho rencontré par cette formule à la fois plus volontariste, y compris en termes d'évaluation, et plus souple dans sa forme le moment est venu de l'officialiser par un texte, qui inciterait également à l'entreprendre au niveau intercommunal, car c'est encore trop peu le cas, pour toutes sortes de raisons. S'agissant de la problématique transports, la mission estime donc qu'elle doit être intégrée à la stratégie générale tout en lui conservant une certaine identité, pour marquer l'appartenance du réseau à la ville tout en ménageant un espace de dialogue et de proposition pour ses acteurs et partenaires propres. Cela lui paraît pouvoir se faire à trois niveaux : celui des instances de prévention, celui des engagements, et celui de l'évaluation. Les instances Le développement de démarches spécifiques de prévention (CLS-Transports) s'est accompagné dans la plupart des cas de la mise en place d'une instance spécifique de concertation réunissant les acteurs concernés, qui a permis de grandes avancées. Toutefois, compte tenu des impératifs de cohérence rappelés ci-dessus, la mission estime qu'il faut préférer une participation active des acteurs des TCU à la démarche globale, au travers de leur participation au CISPD, ou, à défaut, des CLSPD des principales villes de l'agglomération, ainsi qu'à certains de ses groupes de travail thématiques ou opérationnels. Cette participation permettra l'apport des problématiques transports à la démarche générale, et en retour le bénéfice d'une association à cette démarche pour les acteurs du transport. Bien entendu, la mise sur pied d'un groupe de travail dédié aux transports au sein du CISPD s'impose. Elle permettra de préserver l'acquis d'une instance ancienne si elle existait, ou d'initier une dynamique dans le cas contraire. Elle fournira le lieu d'échanges spécifiques en cercle plus restreint, tout en restant en liaison avec l'ensemble, au travers des documents partagés, de la présence du ou des animateurs (élus, coordonnateurs...etc), et de l'inscription d'objectifs stratégiques et de programmes d'action articulés à la stratégie générale. La mission a constaté que les acteurs de la sécurité des TCU sont de plus en plus impliqués dans les débats parfois formels mais indispensables des réunions plénières des CLSPD, prenant place au sein des autres logiques urbaines. Leur management est porté par une instance plus concrète et souvent réunie, dans l'environnement institutionnel de la
48
prévention, piloté par l'exécutif de l'agglomération ou par le maire. Il est nécessaire de généraliser ces bonnes pratiques, là où ce n'est pas encore le cas. Dans le cas des grandes agglomérations, la participation à la démarche globale pourra être mise en place sous la forme d'une instance spécifique à laquelle sont associées toutes les communes du périmètre de transport urbain. Réciproquement, le comité restreint pilotant cette instance participe systématiquement au CLSPD de chacune des communes. A Lyon, à la suite du diagnostic de sécurité cité, le SYTRAL a produit une stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance pour les transports en commun Lyonnais d'une durée courte de 2 ans (2011-2013). Le document prévoit la gouvernance par un comité de suivi restreint et la coordination avec l'ensemble des CLSPD et des CUCS des communes incluses dans le périmètre de transport urbain. L'observatoire de la sécurité dans les transports urbains se réunit deux à trois fois par an. Les partenaires en sont la Préfecture, la Police Nationale, la Gendarmerie Nationale, le Parquet, l'Inspection Académique, et les communes du PTU57. Stratégie, engagements La mission préconise que les engagements relatifs aux actions de prévention à mener en direction des TCU, soient tout simplement l'un des volets de la stratégie générale et non plus consignés dans un document spécifique (CLS-T) comme c'est souvent le cas aujourd'hui. Il faut rappeler qu'en application de la loi, le pilotage de la prévention de la délinquance est assumé par le maire ou le président de l'intercommunalité, qui est dans la plupart des cas l'autorité organisatrice du TCU. Même dans les cas où ce service public relève d'une collectivité spécifique à compétence unique, la prise en charge politique est généralement la même ou en correspondance. Il est hautement souhaitable d'élever les engagements propres aux TCU, au même rang de solennité que tous les autres, et que la revue en soit assurée dans les mêmes conditions. La Mission préconise donc la mise en place d'un volet TCU dans toutes les stratégies territoriales, et suggère que cette recommandation figure dans le texte les officialisant. L'évaluation L'évaluation des actions de prévention reste très insuffisante en France. Elle est pourtant indispensable pour apprécier leur efficacité, permettre un pilotage fin, et optimiser les financements publics. Les conditions de fonctionnement des TCU sont par essence très évolutives et les réponses doivent être adaptées en permanence. C'est pourquoi la mission estime qu'au sein même d'un effort général d'évaluation qui reste à engager le cas des actions de prévention liées au réseau de transport devrait être prioritaire.
57
18 personnes participaient à la réunion du 18 janvier 2012, dont des représentants de la justice, de la préfecture, de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de l'inspection d'académie, de la ville de Lyon, de la ville de Villeurbanne et de l'opérateur Keolis.
49
Elle a fait valoir dans le Guide déjà cité qu'il n'est pas possible de se limiter à suivre le bon accomplissement des actions (indicateurs de réalisation) même si c'est indispensable, et à l'inverse qu'il est hasardeux de prétendre attribuer aux seules actions de prévention une évolution à la baisse de la délinquance. Ces deux limites valent pour les TCU. C'est pourquoi elle a développé la notion « d'indicateur intermédiaire » c'est-à-dire mesurant une évolution ponctuelle, dont on peut démontrer qu'elle a un lien direct non contestable avec une action ou un programme d'action. Elle estime que l'environnement des TCU est tout à fait propice à la détermination de tels indicateurs, car les faits qui affectent spécifiquement les usagers, les personnels et les équipements, peuvent être prévenus par des actions spécifiques, assez aisément mesurables. Certains le sont d'ailleurs d'ores et déjà. Il en va ainsi en particulier : de la lutte contre la fraude, qui est aussi une prévention en ce qu'elle impose un niveau accru de civilité sur le réseau et qu'à l'inverse l'élévation du taux de fraude est généralement le signe d'une dégradation de la situation et un facteur aggravant du risque d'incidents plus ou moins graves ; des programmes d'action coûteux notamment en moyens humains sont menés, et l'évolution peut être mesurée par des techniques d'enquêtes maintenant éprouÎes ; de la prévention des dégradations, par l'appel au respect des équipements, qui peut emprunter plusieurs voies, y compris la pédagogie du Travail d'intérêt général qui tend à prévenir la récidive ; l'efficacité de ces actions peut être aisément appréciée par un suivi fin des faits constatés, au travers des coûts de remise en état, dès lors qu'on adopte, comme le font aujourd'hui la plupart des opérateurs, un standard éleÎ de bon état visible des matériels et des espaces d'échange. Au total la mission estime donc qu'il est temps de donner à toutes ces initiatives une reconnaissance officielle et de permettre leur inscription dans des stratégies territoriales ellemême officialisées.
9.
Recommandation : dans le cadre de l'officialisation des « stratégies territoriales de sécurité et de prévention de la délinquance », par évolution des anciens CLS, prévoir à la fois la promotion des approches intercommunales au sein des CISPD, et la présence d'un volet « transports urbains » en leur sein, mis au point par un groupe de travail ad-hoc, mais validé comme l'ensemble de la stratégie, par l'instance plénière.
Enfin, la mission considère qu'il serait souhaitable d'évaluer l'impact du décret cité deux ans après le début de sa mise en oeuvre suite à la publication de la circulaire citée d'avril 2012.
10. Recommandation : faire évaluer l'impact de l'article 6 de la loi du 5 mars 2007 et de son décret d'application 2008-857 du 27 août 2008 précisant les modalités de concours apporté par les AOT aux actions de prévention de la délinquance deux ans après la publication de la circulaire de mise en oeuvre d' avril 2012.
50
3 Des moyens significatifs pour répondre à des besoins multiples
Au cours de ses entretiens et visites, la mission a cherché à apprécier la pertinence des moyens humains, techniques et organisationnels mis en oeuvre dans les réseaux de transports. Leur mise en place est forcément coûteuse, ce qui renvoie à d'inévitables arbitrages dans lesquels l'exigence de sécurité doit trouver toute sa place. Elle a choisi de résumer ses constats et suggestions en distinguant : les moyens humains (3.1) ; les moyens techniques (3.2) ; l'agencement de l'ensemble et son financement (3.3).
3.1 Des moyens humains en progression continue
S'agissant de prévention de la délinquance et de lutte contre le sentiment d'insécurité, il paraît évident que les réponses doivent prendre avant tout la forme d'une présence humaine rassurante, démontrant la maîtrise des lieux. Pourtant le monde du transport public n'a pas échappé à la loi générale de la substitution de dispositifs techniques de plus en plus perfectionnés à l'intervention humaine et ce mouvement n'est pas acheÎ. Dès lors, comment les AOT et les entreprises délégataires peuvent-elles, en respectant des équilibres financiers de plus en plus difficiles, répondre aux attentes du public et de leurs salariés ? Après avoir évoqué le sentiment d'insécurité et rappelé pourquoi la présence humaine est une réponse incontournable, on évoquera successivement la lutte contre l'incivilité, puis le développement, dans un certain désordre, des personnels spécialisés, et enfin l'évolution du rôle des conducteurs de bus.
3.1.1 La présence humaine, facteur essentiel de réduction du sentiment d'insécurité
Il est acquis depuis les premières études aux Etats-Unis dans les années 70 qu'il existe un décalage sensible entre l'intensité de la délinquance effectivement constatée et l'expression de la « peur du crime ». Le sentiment d'insécurité est sans commune mesure avec la criminalité réelle, et ce ne sont pas nécessairement les groupes les plus exposés qui éprouvent la peur la plus intense. Celle-ci joue sur les comportements des personnels comme des passagers, qui adoptent des stratégies d'évitement.
51
Selon la théorie la plus répandue, le sentiment d'insécurité se construit autour de deux composantes : une composante émotionnelle, la « peur personnelle », fondée sur l'appréciation de sa propre vulnérabilité, liée à l'âge, au sexe, le cas échéant, à une situation sociale précaire ; une appréciation du risque ou « perception sociale du risque »58, construite sur la nouveauté de la situation rencontrée, la capacité de la contrôler (alerter, fuir, ou résister), la référence à des situations précédentes, et au contexte perçu à travers les médias et l'entourage. L'appréhension sera d'autant plus vive que le besoin de respect de valeurs est prégnant.
Le sentiment d'insécurité des passagers
Les enquêtes de victimation mesurent ces deux aspects du sentiment d'insécurité par des jeux de questions adaptés. L'enquête « Victimation et sentiment d'insécurité de 2011 en Ile de France59 » fait apparaître que 3,4% des personnes interrogées déclarent avoir été victime d'une atteinte personnelle (vol ou agression) dans les deux ans qui précèdent. Tandis que simultanément, 45,5% des personnes interrogées déclaraient avoir peur d'être agressées ou volées dans les transports en commun. Les auteurs du rapport estiment qu' « améliorer le sentiment de sécurité dans les transports en commun est une priorité, car au regard des chiffres 2011, les franciliens sont beaucoup plus sujets à s'y sentir en insécurité qu'à y être victimes ». Ces conclusions sont valables également en province. Dans les réseaux de moyenne ou de faible importance, le fait qu'il y ait peu, voire pas d'incidents réels, n'empêche pas la préoccupation sécuritaire, d'autant que l'échelle de l'appréhension n'y est pas la même. Les personnes concernées par ces phénomènes souhaitent notamment percevoir des signes qu'il existe un garant des lieux ; pouvoir alerter ; obtenir du secours en cas d'incident s'orienter facilement pour échapper à une situation risquée...etc. Une présence humaine active est donc indispensable à toute stratégie de prévention. Elle doit être une réponse à la fois au ressenti des personnels et à celui des usagers.
Le sentiment d'insécurité des personnels
Les personnels des TCU sont depuis longtemps sensibilisés aux problèmes d'insécurité en raison des agressions de toutes natures qu'ils subissent. Dès lors la préoccupation de sécurité imprègne la gestion des ressources humaines dans l'entreprise, et le management de l'exploitation. Le conducteur est le premier, souvent le seul, pour rappeler la règle. Ceci explique qu'ils représentent le plus grand nombre de victimes d'agressions. (54%). Cependant, 38%
58
Marion Guilloux, université de Nantes, perception sociale du risque, sentiment d'insécurité et comportement de vigilance dans les espaces ferroviaires
59
IAU-IdF Novembre 2011 Enquête victimation et sentiment d'insécurité en Ile-de-France
52
des agressions concernent les Îrificateurs, ce qui les place largement en-tête pour le taux d'agression, de une pour 6,9 Îrificateurs contre une pour 66,9 conducteurs. 60 Les Îrificateurs et contrôleurs sont encore davantage confrontés au dilemme entre le respect des règlements qui fonde leur légitimité et la politique de l'entreprise qui, à la fois pour des raisons commerciales et pour la propre sécurité des agents, donne des consignes de retrait dès qu'un incident est à craindre. 61 Le premier moyen de lutte contre un tel sentiment est une formation adéquate des agents qui peuvent ainsi mieux gérer les situations anxiogènes et réduire les risques. Mais leur demande porte davantage sur le soutien et le renfort par des personnels spécialisés, en contradiction parfois avec l'approche client de l'entreprise. Après l'agression, la démonstration de l'implication de la hiérarchie auprès de son conducteur en cas d'incident joue un rôle essentiel dans l'acceptation personnelle de l'éÏnement et la limitation de l'anxiété lors du retour au poste de travail. Les procédures sont rodées, elles impliquent notamment le retrait du service, l'accompagnement personnel et juridique de l'agent s'il souhaite porter plainte, et un soutien psychologique.
3.1.2 La lutte contre l'incivilité
Le terme « incivilités » étant parfois utilisé pour désigner les actes de délinquance dont la sanction est prévue par le code pénal, mais que l'on renonce à relever et à sanctionner, du fait de leur nombre, la mission a retenu le terme de « comportement incivil » pour désigner toute attitude d'impolitesse, d'agressivité et de mépris, « dont l'accumulation provoque une usure, une érosion sur les individus et les collectifs, et en tout cas sur les acteurs de première ligne »62. Ces comportements coûtent cher aux entreprises. Les grandes entreprises publiques y ont consacré des moyens d'étude importants. Ainsi une étude réalisée pour la SNCF met en lumière la contribution des comportements incivils au renforcement de la préoccupation sécuritaire, composante du sentiment d'insécurité (cf supra). L'auteure, Monique Sassier, indique que « les comportements incivils entament la confiance dans le lieu et dans la relation aux personnels ou à l'entreprise ». La réponse de l'entreprise réside dans la valorisation du service au client, incluant l'accueil, la qualité de l'information et d'une façon plus générale, la qualité de service de transport. Elle suppose d'identifier les processus de production permettant de ne pas mettre le personnel de « première ligne » en situation de gêne ou de désaveu, au coeur de contradictions, du fait de leur incapacité à satisfaire ce que les clients ont compris des promesses de l'entreprise. Elle suppose aussi de former les personnels à subir les comportements des voyageurs et à ne pas provoquer inconsciemment ce type d'attitude. Elle doit impliquer la formation de
60
Rapport sûreté UTP 2011 Voir « "Orientation client" et (in)civilité : le cas d'une ligne de transport public collectif », Sophie Beauquier Lien social et Politiques, n° 57, 2007, p. 115-124. 62 Monique Sassier Lutter contre les incivilités à la SNCF
61
53
l'encadrement à l'écoute pour « réparer l'usure ». L'accumulation de mille petits faits est une Îritable « bombe à retardement » qu'il convient de désamorcer. Ces nuisances sont certes provoquées par la dégradation du climat sociétal ambiant. L'entreprise de transport peut considérer qu'elle n'est pas chargée de « réparer » la société. Cependant, selon certains sociologues, « les Français sont en demande d'autorité et attendent davantage de règles dans la vie collective 63». L'intérêt opérationnel, économique, commercial et social de l'entreprise de transport lui commande donc de faire respecter les règles et de réduire les dysfonctionnements conduisant à des comportements incivils. Outre la formation des personnels et l'amélioration des processus, la sensibilisation des voyageurs contribue à la réduction du nombre des incidents et à l'attractivité du transport collectif. C'est le sens des campagnes de sensibilisation lancées par les grandes entreprises de transport. Une telle sensibilisation devrait permettre de rappeler aux voyageurs qu'ils sont coproducteurs de sécurité dans les transports. Il arrive trop souvent que les voyageurs s'accommodent des incivilités et jugent parfois excessives les mesures prises pour les enrayer. Ils en viennent parfois à prendre le parti des contrevenants. Le rôle des contrôleurs est trop souvent incompris lorsqu'ils verbalisent ou reprennent des attitudes inciviles. Cependant, le message est délicat à formuler et à diffuser. Les TCU sont considérés comme une institution publique et pris à partie comme tels. L'idée que le coût des dégradations ne favorise pas l'amélioration de la qualité de service n'est pas toujours audible par l'usager, qui ne réalise que rarement qu'il ne paie qu'une partie réduite du coût du service. Les exemples utilisés dans les messages ne doivent pas stigmatiser, leurs destinataires doivent être clairement identifiés. Tel est l'objectif de la mise en scène d'un chewing-gum ou d'un mégot géant par la SNCF dans certaines gares sur le thème « il n'y a pas de petites incivilités ». Ce type de messages est également décliné dans le contexte plus étroit des TCU. L'émetteur ne devrait pas être le seul opérateur de transport. L'autorité organisatrice doit également s'impliquer. Même si les applications concrètes sont encore timides, les prises de position des autorités locales sont de plus en plus nombreuses dans ce sens. Par exemple, le conseil de développement du grand Lyon propose notamment de communiquer davantage sur les amendes appliquées aux contrevenants et d'accroître la sensibilisation des citoyens aux incivilités à travers les différents supports médias disponibles64. En outre, les actions de sensibilisation et de promotion de la mobilité durable devraient davantage aborder la question du vivre-ensemble. Dans les documents relatifs aux plans de déplacements urbains (débat public, observatoire de suivi,..) que la mission a pu consulter, elle a constaté une appropriation plus aisée de deux thématiques particulières d'insécurité : l'insécurité routière et la protection des moyens personnels de transport doux (Îlo,..). Des sensibilisations pourraient utilement être lancées suivant plusieurs axes.
63 64
Julien Damon, cité par Monique Sassier, Séance du 23 février 2011 les politiques de stationnement comme levier des politiques de déplacement
54
11. Recommandation : promouvoir une présentation plus claire et plus simple des éléments essentiels du règlement d'exploitation en matière de prévention, ainsi que des campagnes locales de prévention des détériorations diverses.
12. Recommandation : mieux impliquer les voyageurs des TCU dans la lutte contre des phénomènes concrets de dégradation (sièges,..) par des campagnes locales de sensibilisation, en coopération avec l'autorité organisatrice.
3.1.3 Des personnels spécialisés aux missions diversifiées
Dans un environnement marqué par la raréfaction de la présence humaine d'exploitation ou commerciale, aussi bien en surface que dans les métros, associée à de lourds investissements (métros automatiques, billetterie électronique...etc.), la réponse par des moyens humains aux défis de l'insécurité est une Îritable gageure pour les exploitants et les AOT. L'examen des statistiques disponibles confirme la progression continue des personnels spécialisés au cours des dernières années, mais les missions sont diversifiées et ne s'exercent pas sans ambiguïtés. Un niveau encore modeste en province, mais une progression continue Le rapport « Sureté » de l'UTP pour 2011 est le seul bilan disponible, mais ses données ne sont pas exhaustives puisqu'elles résultent d'une enquête annuelle à laquelle tous les réseaux ne répondent pas. Quoiqu'il en soit, il établit notamment qu'en 2011 : 2.123 salariés étaient employés dans des services dédiés à la sécurité qui représentent 4,9% des ETP de la branche du transport urbain. Cette part est passée de 3% en 2002 à 4,9% en 2011, avec une tendance à la stabilisation au cours des dernières années ; 58 réseaux sur les 115 du panel enquêté, dont tous les plus importants, se sont dotés d'un service dédié à la sécurité ; 62 réseaux disposent d'un poste de « responsable sécurité » ; le coût global de ces moyens est estimé à 110 M. La mission a releÎ au cours de ces visites, une certaine diversité des réponses, fonction des risques propres à chaque agglomération, des cultures d'entreprises, des moyens disponibles et aussi des réponses municipales en termes de moyens policiers. Des missions qui pourraient être clarifiées Les effectifs concernés se répartissent pour l'essentiel entre deux catégories : les contrôleurs Îrificateurs chargé notamment du contrôle des titres, mais qui peuvent avoir une mission plus large ;
55
les agents d'intervention, sous différentes dénominations, qui sont chargé d'intervenir en cas d'incident ou d'assurer un appui aux contrôleurs pour les prévenir. On observe donc partout une complémentarité organisée entre ces deux catégories. Par exemple, à Strasbourg, la CTS dispose d'une palette complète : agents de conduite et de contrôle, assurant 50% de conduite et 50% de contrôle voyageurs ; agents de contrôle des voyageurs, chargés du contrôle des titres et de l'information aux voyageurs ; agents de prévention et d'intervention auprès des clients et des conducteurs (APICC), chargés d'intervenir sur les incidents sérieux. L'équipe d'intervention comprend trois personnes, dont 2 APICC et un agent de maîtrise. A l'inverse, d'autres réseaux choisissent de ne pas mettre en place d'agents d' « intervention » ou de « sécurisation », chargés de constater les infractions troublant la tranquillité publique dans le TCU comme le décret de mars 1942 leur en donne la possibilité, estimant que ce n'est pas leur rôle. L'UTP constate que ces textes fort anciens sont largement inadaptés à la réalité de terrain et demande leur révision pour lever les ambiguïtés avec les services de sûreté régis par le code de sécurité intérieure (dispositions codifiées de la loi de 1983 concernant les activités de surveillance et de gardiennage), d'autant que la réorganisation récente de la profession de la « sécurité priÎe » (création du CNAPS...etc.) soulève de nouvelles difficultés. La mission estime que ce souhait est fondé. Il ne lui paraît pas acceptable que des réponses aussi différentes soient données à des situations similaires, tout en ayant conscience qu'une uniformisation impliquerait des coûts supplémentaires pour certains réseaux. Ce constat doit cependant être rapproché de celui de la grande diversité qui continue à prévaloir en matière de moyens des polices municipales, puisque les élus, dans le cadre du principe de libre administration des collectivités, développent des positions très divergentes à ce sujet. Dès lors, des écarts considérables peuvent être releÎs d'une agglomération à l'autre en ce qui concerne les rôles respectifs et finalement la qualité des réponses apportées au besoin de sécurité selon que les communes qui la composent sont ou non dotées de polices municipales conséquentes, et que le réseau de transport s'est ou non doté de moyens humains de sécurisation. La mission quant à elle estime (cf. recommandation infra) que le respect du principe de libre administration des collectivités ne doit pas conduire à des lectures différentes des textes en vigueur sur les missions respectives et qu'une normalisation s'impose, qui rappelle aux AOT et aux transporteurs le champ de leur responsabilité. L'évolution du rôle des conducteurs de bus : la polyvalence au service de la qualité La situation des lignes de bus, notamment lorsqu'elles desservent des secteurs difficiles doit retenir plus spécialement l'attention. Elle renvoie aux difficultés spécifiques de leurs conducteurs, dont le rôle a dû, souvent à leur corps défendant, évoluer profondément. De simples « machinistes » - terme auquel ils sont restés longtemps attachés - ils sont souvent 56
devenus des agents polyvalents, seuls représentants permanents de l'exploitant et à travers lui de la collectivité auprès du public, avec les risques que cela peut impliquer. Leur profil en a donc été sensiblement modifié, entraînant des exigences de compétences beaucoup plus larges qui impactent le recrutement et la formation. De même, la corporation a dû, comme tous les autres services publics, s'ouvrir à la diversité pour offrir au public l'image d'une communauté humaine représentative de la ville qu'elle dessert. Le conducteur a donc dorénavant une triple fonction : Conduite accueil commercial et incitation à la validation des titres de transport (d'où le titre de conducteur-receveur employé sur certains réseaux) médiation face aux incidents éventuels, (dans la mesure de ses moyens). La montée par l'avant face au conducteur et aux moyens de validation du titre de transport, qui prévaut dans la quasi-totalité des réseaux de bus en province, conforte la maîtrise des lieux. La conduite ne constitue plus l'unique enjeu du poste, remarque dès 2005 un rapport concernant le conducteur de transport urbain en France65. La généralisation des liaisons radio, de la géo-localisation le fait travailler dans un univers interdépendant. Sur le plan relationnel, il est nécessaire d'avoir les capacités de faire face au stress engendré par la conduite et par les clients, d'avoir un bon accueil, de pouvoir diminuer les causes de conflit. La fiche métier de l'ONISEP confirme : « Dans tous les cas, courtoisie, bonne présentation et professionnalisme sont de rigueur. Le conducteur assure en toute sécurité le transport des voyageurs. Mais pas seulement. Il les accueille, les assiste, les conseille et les informe, anticipe et gère au mieux les incidents de parcours». L'environnement social changeant, le conducteur volontaire pourra être amené à s'impliquer dans des actions de médiation, par exemple des interventions en milieu scolaire ou des manifestations sportives et à y encadrer des jeunes66. La mission a releÎ que ces évolutions sont partout prises en compte, même si elles rencontrent chez les personnels concernés, et notamment les plus anciens, de réelles difficultés d'acceptation, à la mesure aussi des risques encourus dès lors qu'on doit rappeler la règle. Les stratégies d'évitement prévalent donc parfois, mais au total un nouveau relationnel s'est imposé, favorisé par les nouveaux modes de validation des titres et c'est l'image d'un agent du service public accueillant et vigilant qui s'impose. Le développement des tramways, qui se caractérise par des stations et des Îhicules largement ouverts, alors que le conducteur est nécessairement cantonné à une fonction technique très absorbante, repose la question du contrôle de la fraude et de la prévention des incidents dans des termes nouveaux. Cette tendance croîtra avec les bus articulés et les bus à
65
Projet Conducteurs de transports urbains en Europe (CTUE) Programme Leonardo da Vinci programme européen pour l'enseignement et la formation professionnelle 66 Le rapport de CTUE cite l'exemple de CTB, à Besançon. Au cours de ses entretiens, la mission a pu constater des initiatives similaires impliquant directement le personnel, notamment à la RATP (les mercredis du Rugby) et à la CTS de Strasbourg (matchs de « futsal »)
57
haut niveau de service. A elle seule elle peut justifier la mise en place de moyens humains mobiles spécifiques, et la mission estime que ces interrogations devraient intervenir dès la conception du projet et être intégrées à son bilan financier prévisionnel, ce qui n'est manifestement pas partout le cas.
3.2 Le progrès technique au service de la prévention
Le progrès technique a mis à disposition des responsables du TCU des moyens performants, qui sont très largement utilisés. Leur emploi est différencié suivant les modes et les objectifs. Leur généralisation s'impose.
3.2.1 Des moyens efficaces et généralement déployés
Dans les bus, le premier objectif est la protection du conducteur, en synergie avec les besoins d'exploitation et d'information du client. L'équipement aujourd'hui généralisé sur les grands réseaux comprend la liaison radio, de plus en plus fréquemment la géolocalisation et l'appel de détresse, dont le suivi est assuré par un PC centralisé armé pour la sécurité et l'exploitation. La protection physique du conducteur est partiellement assurée par une cabine de protection. La cabine est par exemple inefficace contre une projection de liquide. Mal exploitée, elle peut augmenter l'isolement du conducteur. La sécurité du conducteur et des voyageurs est confortée par des dispositifs de vidéoprotection, dont le rôle est essentiel en dissuasion et pour la qualité de la preuve lors des enquêtes. L'équipement des Îhicules en vidéoprotection est de plus en plus souvent réalisé de série. Le taux d'équipement moyen en caméras de vidéoprotection des bus est de 73,2%, selon le rapport sûreté 2011 de l'UTP. A titre de comparaison, le taux d'équipement moyen des bus en 2005 était de 49,6% . Le taux d'équipement des Îhicules neufs est supérieur à la moyenne indiquée. A noter cependant, un faible équipement des bus des réseaux Optile. Sur 4528 bus roulant en 2011, 2156 sont équipés, soit moins de 48%. En outre, le taux de nouveaux Îhicules équipés en 2011 sur ces réseaux serait de 51 %.67 La situation n'est pas uniforme pour l'ensemble des adhérents d'Optile. Des réseaux comme Lacroix ou Tice ont équipé 100% de leurs Îhicules.
13. Recommandation : renforcer l'équipement en dispositifs de vidéoprotection des autobus de l'ensemble des réseaux, notamment dans la grande couronne de l' Ile-de-France.
67
Source : Optile lignes régulières statistiques 2011. Rappel : OPTILE signifie Organisation Professionnelle des Transports d'Ile-de-France. Il s'agit d'une association régie par la loi 1901. OPTILE assure la gestion administrative des lignes régulières exploitées par ses adhérents, et conduit des projets communautaires du Réseau Intégré Régional avec la SNCF et la RATP : titres de transports, information voyageurs dynamique, vente de titres, sécurité, etc. (source : site Optile.com)
58
L'équipement en caméras embarquées des tramways est de 100% 68. De plus, les nécessités de la sécurité (au sens de prévention des accidents) et la surveillance des dispositifs de billettique conduisent le plus souvent à la vidéoprotection de l'ensemble des stations et des carrefours. Les dispositifs de vidéoprotection sont plébiscités par les conducteurs et les Îrificateurs. Sur plusieurs des réseaux contactés par la mission, le bon fonctionnement de la vidéoprotection est systématiquement Îrifié sur les Îhicules affectés au service de nuit. En cas de dysfonctionnement, le Îhicule est remplacé. Ces dispositifs peuvent être victimes de leur succès, les services régaliens requérant de plus en plus souvent la collaboration des services des opérateurs pour mettre à disposition des enregistrements. Malgré des remarques ça et là sur les coûts en ressources humaines, les groupes fournissent volontiers cet appui, dans des limites qui doivent rester raisonnables. Ce support aux services, et d'autres échanges de données, crée en effet des liens très favorables à une articulation efficace et confiante.
14. Recommandation : renforcer là où c'est nécessaire, la qualité des données des opérateurs (dont les images) élément d'une articulation efficace avec les services de l'Etat.
Les métros sont susceptibles d'une exploitation en mode fermé, impliquant le franchissement d'un portillon de contrôle pour y pénétrer, ou en mode ouvert. A Lyon, la délinquance dans les TCU avait connu une baisse significative en 2006, année où l'exploitation avait basculé d'un mode ouvert à un mode fermé. Une unité de sécurisation des transports en commun avait été créée la même année. En dehors de la vidéoprotection, des mesures de prévention situationnelle peuvent être étudiées et mises en oeuvre dans les enceintes des métros. Ces infrastructures sont récentes, et la mise en oeuvre de ces politiques dans un objectif de réduction du sentiment d'insécurité ne suscité pas de difficulté, sauf les contraintes financières. Ce n'est pas le cas de certaines gares routières, situées à proximité de gares ferroviaires, nécessitant donc des surfaces de centre ville, que des aménageurs souhaiteraient utiliser à d'autres fins. Elles gagneraient à être éclairées, à disposer d'une signalétique claire et de cheminements appropriés entre les quais routiers et la gare ferroviaire.
3.2.2 S'inscrire dans les potentialités techniques nouvelles
L'innovation technique dans le domaine des transports est inséparable d'études d'acceptabilité par le client et de sa capacité à l'utiliser, compte tenu de la nature même des activités.69. La question essentielle concerne l'optimisation des systèmes pour offrir la réponse au juste besoin de mobilité durable dans l'agglomération façonnée par le transport, l'étalement urbain ayant été favorisé par le gain de vitesse.
68 69
Source UTP Voire par exemple les travaux sur l'emploi de la billetique par une population vieillissante
59
Deux grandes questions techniques contribuent à cette réflexion70: le Îhicule du futur, son niveau d'automatisation, et son impact sur l'environnement ; l'impact des technologies de l'information et de la communication (TIC) sur la fluidité du trafic, le confort des voyageurs et la sécurité des personnes. Les dispositifs intégrés de billettique vont contribuer à une meilleure connaissance des besoins individuels de transport. Leur application va s'étendre au-delà du TCU pour inclure les modes doux et l'accès aux infrastructures de mobilité (parkings,...). Leur généralisation conduira à une forme de système « fermé virtuel », défavorable à l'extension de la fraude, et plus efficace en termes de ressources humaines dédiées au contrôle. Le développement des moyens interactifs de communication conduira à la nécessaire prise en compte des alertes et témoignages directs des clients face à un incident de toute nature et notamment, les incidents générateurs d'insécurité. Par exemple, la SNCF met à disposition de ses clients le numéro 3617 pour être une ligne d'écoute des clients victimes d'incivilités. Il est vraisemblable qu'une demande forte des clients conduira au développement de ce type de service. L'aspect sociologique, les contraintes budgétaires et le cycle industriel de renouvellement des flottes inscrit ces évolutions dans le temps long (quinze à vingt ans). La complexité des systèmes augmentera leur vulnérabilité aux actes de malveillance et renforcera le besoin de protection. A moyen terme, l'évolution des capteurs permettra d'améliorer le confort et la sûreté des passagers dans les transports en commun en permettant de détecter des agressions physiques, des actes de vandalisme, d'effectuer du comptage, etc. (Projet DéGIV du programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres). Il faut noter qu'en dehors de l'exemple de DéGIV, les études sur la prise en compte de la délinquance dans les dysfonctionnements de systèmes de plus en plus complexes est peu prise en compte dans les travaux financés par le PREDIT.
15. Recommandation : développer les travaux du programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres (PREDIT) concernant l'impact économique et social de la délinquance dans les TCU et l'optimisation des moyens techniques et humains de prévention.
A court terme, la norme 4G, ou la norme Long Terme Evolution permettront des transferts d'images entre le bord et le sol, en dépit d'une disponibilité encore limitée.
70
Voir le document de présentation du groupe opérationnel N° 2 « qualité et sécurité des transports du PREDIT4, du 27 février 2012, qui définit cinq axes d'étude : la gestion des mobilités et du trafic routier (application des TIC à la réduction des congestions), sécurité des transports ferroviaires, sûreté des transports (protection contre les actes de malveillance), fiabilité et sécurité des dispositifs embarqués ou de commande centralisée et ergonomie, accessibilité et confort.
60
3.3 Management et financement
La prévention de l'insécurité et des incivilités implique, à l'instar de ce que font depuis plusieurs années les grands réseaux, la mise au point d'une stratégie globale (Plan sureté) impliquant toutes les fonctions de l'entreprise et prévoyant un dimensionnement et une combinaison appropriée des dispositifs techniques et des moyens humains, en fonction des perspectives budgétaires ouvertes.
3.3.1
Une approche managériale de la prévention
La mise en oeuvre des outils de médiation, de prévention, de contrôle et d'intervention par des personnels polyvalents ou spécialisés, suppose une identification claire des objectifs poursuivis par un diagnostic et une stratégie (cf. supra). En synergie avec les objectifs poursuivis par l'autorité organisatrice, il pourra s'agir de prévenir les comportements incivils, de faire respecter la règle, de réduire le sentiment d'insécurité, de coproduire la tranquillité publique ou la sécurité. Au-delà de la mise en place de moyens techniques et d'une présence humaine appropriée, la combinaison de tous les moyens de l'entreprise dans le cadre de son organisation et de son management au quotidien est une clef du succès. La mission a pu observer plusieurs dispositifs intéressants durant ses investigations. Les grands réseaux qui disposent de moyens relativement importants et doivent souvent faire face à des situations difficiles, présentent les constructions les plus avancées. L'un d'eux, auquel on se réfère ci-dessous, a pu faire baisser significativement sur trois ans depuis 2009 le nombre d'incidents ainsi que le taux de fraude (depuis un an). Interrogé sur les raisons de ce succès, et tout en demeurant prudent car un contretemps peut survenir à tout moment, en raison notamment des incidences des crises de violences urbaines, son directeur de la sûreté considère que deux éléments sont essentiels : la mise en place d'un plan concerté et coordonné des moyens humains et techniques concourant au renforcement de la sécurité ; la création d'une dynamique, d'une synergie entre les acteurs. Le plan sûreté de ce réseau consiste notamment à agir sur 3 leviers: la présence humaine sur le terrain ; le bon emploi des moyens techniques le partenariat. La présence humaine doit y être répartie dans le temps et dans l'espace entre les différentes catégories de personnes concourant à la sûreté (en concertation avec les responsables / exploitation de chaque mode), dans l'ordre croissant : les agents de station et les chefs de ligne (exploitants) ; les médiateurs ;
61
les agents de sécurité (en poste fixe ou en patrouille mobile) ; les Îrificateurs et contrôleurs ; la Police Nationale en appui ; les patrouilles Vigipirate (forces armées)
L'objectif est double : être au maximum présent et visible afin de rassurer (la clientèle) et de dissuader (les malfaiteurs), et être en mesure d'intervenir au plus vite avec des moyens adaptés à l'incident. L'appui technologique est fondé d'abord sur la vidéo protection : Les caméras sont de plus en plus nombreuses. La mise en oeuvre de nouvelles capacités technologiques est en cours, en fonction des problématiques rencontrées : caméras télécommandables, à haute définition et à champs élargis ; caméras "intelligentes" à détection automatique ; renvoi des images en temps réel (technologie 3G) ; renforcement des capacités de mémoire (prolongation des enregistrements) ; transmission des images en temps réel sur des téléphones portables de la police ; Exploitation en temps réel du réseau raccordé au PC central ; vidéo-patrouilles ; interventions coordonnées de la PN sur des flagrants délits et des opérateurs durant toute la période du service au PC Sûreté (réaction immédiate) ; Exploitation en temps différé des enregistrements: lecture et analyse ; "enquêtes vidéo" ; travail d'exploitation des images d'un incident jusqu'à trouver et faciliter l'identification des auteurs.
Des moyens radio performants (appels de détresse et géo-localisation automatique) sont exploités 24 heures sur 24 par un PC centralisé regroupé avec le PC exploitation. La dynamique et les synergies entre acteurs, outre les relations quotidiennes évoquées ci-dessus, sont renforcées par l'existence d'un « contrat local de sécurité transport », mais aussi par la participation systématique à tous les dispositifs de partenariat de prévention (CLSPD, GLTD, sécurité routière,..). La place de l'exploitant est unanimement reconnue dans toutes ces instances. La mission ne peut que faire siennes de telles bonnes pratiques et diffuser cet exemple, qui peut parfaitement être décliné en formules plus simples pour des agglomérations moins importantes. Dans la ligne de sa recommandation ci-dessus d'une reformulation par voie de circulaire des missions respectives dans le cadre des textes en vigueur, elle suggère que cette harmonisation prenne localement la forme d'une validation du plan sureté par arrêté préfectoral, dans le cadre de la réglementation de la police et de la sureté des transports qui découle de la loi de 1845 et du décret de 1942 étendu en 2006 au transports routiers de voyageurs.
62
Dans une telle optique, l'arrêté préfectoral fixant le règlement d'exploitation d'un réseau, préciserait toujours, comme c'est le cas aujourd'hui, les droits et devoirs des usagers. Mais il fournirait aussi une description des missions des agents, pour les légitimer, et ne pourrait intervenir que sur présentation par l'AOT et l'exploitant d'un « plan sureté » en bonne et due forme, attestant de leur capacité à faire respecter les règles et d'une dynamique partenariale, sous l'égide des instances locales de prévention, pour y parvenir. La mission estime qu'une telle démarche est possible dans le cadre des textes en vigueur, mais à défaut, il suffirait de les compléter au préalable.
3.3.2 Coûts, priorités et arbitrages
Quel que soit le mode de gestion retenu par l'autorité organisatrice (régie, marché public ou délégation de service public), les coûts des transports collectifs urbains sont au coeur de nombreuses interrogations en ces périodes de contraintes budgétaires : des investissements lourds concernant les TCU ont été réalisés dans la dernière décennie. Il faut assurer le financement des emprunts contractés à cette fin ; le versement transport acquitté par les entreprises a atteint son plafond dans de nombreuses agglomérations ; la part de financement par la billetterie ne cesse de se dégrader. En outre, en ce qui concerne les réseaux exploités dans le cadre d'une délégation de service public, l'opérateur doit assumer le risque de sa gestion, et décider des moyens qu'il met en place pour obtenir les résultats attendus par le contrat. Depuis la création des autorités organisatrices par la loi sur l'organisation du transport intérieur de décembre 1982, les exigences des AOT se sont faites plus complètes et plus précises, les durées des contrats se sont réduites, le nombre d'indicateurs donnant lieu à incitation ou amende (bonus / malus) a augmenté. Aujourd'hui, dans de nombreux cas, le niveau des malus éventuels est de l'ordre, voire supérieur à la marge que permet de dégager le contrat. Les incitations sont liées principalement à l'augmentation du nombre de voyageurs, souvent mesurée par l'évolution du nombre de voyages par an et par habitant, la régularité ou à la ponctualité, selon que l'on garantit une fréquence ou un horaire, l'information, l'accueil, la propreté et le confort. Doivent également être satisfaites des obligations liées au taux de contrôle de la fraude, au sentiment d'insécurité, etc. L'opérateur est donc incité à mettre en oeuvre les moyens les plus efficaces pour obtenir le meilleur compromis entre le coût de personnel Îrificateurs et contrôleurs, et la réduction du taux de fraude. Les indemnités forfaitaires perçues, dans le meilleur des cas, couvrent de 50 à 60% des coûts de personnel dédié. L'ordre de grandeur du nombre de Îrificateurs est de 5 % de l'effectif de l'entreprise, selon le responsable sécurité d'un grand groupe.
63
Ponctuellement, la mission a pu relever les chiffres suivants dans différents réseaux : Effectif total (valeurs arrondies) A 600 B 2400 C 2400 D 3400 E 700 Nombre de Îrificateurs 28 65 132 320 34 Pourcentage 4,6% 2,7% 5,5% 9,5% 4,9% Taux de fraude mesuré71 7% 12% 3,5% 17% 9%
Suivant les réseaux, une partie de l'équipe peut être dédiée à la Îrification des titres de transport dans un esprit « commercial », l'autre partie dans un esprit plus dissuasif. Le coût des dépenses de sécurité supportées par les opérateurs s'élève, selon le rapport de l'UTP cité à 148 176 900 en 2011. Ce coût comprend 141 millions pour les frais de personnels. Il est probable que soient comptabilisés les coûts des personnels dédiés au contrôle des titres dans ce montant. En 2011, le coût direct de la fraude fourni par 35 entreprises sur 90 ayant répondu à cette partie du questionnaire annuel de l'UTP est de 31 millions d'euros. Les autres coûts correspondent essentiellement à tout ou partie des équipements de sécurité et de la réparation des dégradations (5 millions d'euros) et à la prise en charge par l'opérateur de frais divers tels qu'indisponibilité de personnels victimes d'agressions et pénalités (1 million d'euros). La priorité des employeurs - régie ou entreprise - est clairement la protection des personnels contre les agressions. C'est pourquoi de nombreux réseaux utilisent l'ensemble des possibilités offertes par la loi de juillet 1845 codifiée pour confier à une partie de leurs Îrificateurs des missions de dissuasion (Strasbourg , Toulouse, Marseille). La lutte contre la fraude est la seconde priorité affichée, conjointe aux autorités organisatrices et aux opérateurs.
3.3.3 La question du financement de la prévention
Les éléments disponibles pour apprécier les moyens financiers consacrés à la prévention sont très limités. Dans son enquête annuelle, l'UTP collecte des informations qu'elle publie de façon consolidée, sans qu'il soit possible d'accéder aux chiffres locaux. D'autre part le total n'est pas un chiffre exhaustif. Elle établit qu'en 2011, le coût direct des mesures de sécurité a été de 148 M (cf. supra) (dont le coût des 2 123 salariés des services de sécurité, incluant les Îrificateurs). Ce montant a progressé de 8,8% en un an, au titre principalement des moyens humains.
71
Ces quelques exemples montrent qu'il n'y a pas de lien mécanique entre le nombre de contrôleurs et le taux de fraude.
64
Il convient d'ajouter à ce budget celui de la réparation des actes de vandalisme, qui est stable à 14 M environ (dont plus de la moitié sur le matériel roulant). Mais ce calcul n'inclut pas le coût d'amortissement des équipements financés par les AOT, qui en représentent l'essentiel, et n'intègre pas non plus le manque à gagner dû à la fraude, qui est malaisé à établir et sur lequel pèse un certain tabou. Au cours de ses visites la mission n'a recueilli que des informations fragmentaires, qui ne peuvent en aucun cas être extrapolées. Elle se gardera donc de tout jugement de valeur ou comparatif à ce sujet, d'autant que les situations locales sont objectivement très diverses impliquant des réponses de niveaux et donc de coûts très variés. Ses observations la conduisent donc simplement à formuler quelques observations générales : 1/ Le coût prévisionnel de la sécurité reste peu pris en compte en tant que tel, soit dans les appels d'offres (sauf exceptions dans certains grands réseaux) soit dans les projets de développement (implantations de modes nouveaux comme les tramways ; extension de lignes de métro ; création de lignes de bus à forte capacité et en site propre ; modernisation des systèmes billettiques) ; il est trop souvent constaté ex-post comme une résultante incontrôlée. A cet égard, la logique des « Etudes de sureté » qui se sont imposées dans les projets d'urbanisme devrait être étendue aux projets de développement des réseaux de TCU, et ce poste de charge intégré systématiquement aux budgets prévisionnels des projets. 2/ La réponse au sentiment d'insécurité des usagers, la prévention et le traitement des incidents les concernant, devraient mobiliser des énergies équivalentes à celles qui sont déployées pour la protection des agents. Cette tendance est bien engagée partout où les exigences de qualité de service suivies et le cas échéant sanctionnées par l'AOT, sont les plus avancées. 3/ Les équipements de sécurité financés par les collectivités locales, ainsi que les moyens mis en place par les exploitants, dans le cadre des responsabilités qui sont les leurs au titre de la délégation de service public, pourraient utilement être soumis à concertation avec les partenaires de la prévention au sein des instances ad-hoc, car ils participent largement de la « stratégie territoriale » et doivent être articulés avec les autres réponses locales.
65
66
4 La qualité au service de la mobilité durable
Le défi que doit affronter le transport collectif est celui de l'optimisation et de la cohérence. Il faut optimiser les réseaux et leurs interconnections, les durées de transport et l'information due aux voyageurs, renforcer la cohérence des modes de transport comme des systèmes de billetique, pour maximiser l'activité. L'enjeu de la mobilité est celui du développement durable de la ville (4.1.). Si aujourd'hui encore, le choix du transport public est trop souvent un choix négatif, soit par manque d'alternative, soit par comparaison des coûts, la qualité de service deviendra inéluctablement un facteur essentiel de choix, surtout si la part de financement client devait augmenter. (4.2.). La sécurité est un facteur important de non-qualité. Dans la ville globale, les défis évoqués supposent l'échange et la professionnalisation toujours renforcée (4.3.).
4.1 Les enjeux de la mobilité durable
La mobilité joue un rôle majeur dans le développement économique et d'un bassin de vie et d'emploi. Cette mobilité est aujourd'hui encore basée sur le transport automobile individuel, qui a favorisé l'étalement de l'agglomération72. L'allongement des durées de transport, le gaspillage des ressources naturelles (terres agricoles, air, ...) conduisent à rechercher un équilibre durable entre les besoins de mobilité des personnes et des biens, d'une part, la protection de l'environnement et de la santé et la préservation de la qualité de vie, d'autre part, sous contrainte des capacités de financement des collectivités73. L'objectif de développement des transports collectifs et des moyens de déplacements les moins consommateurs d'énergie et les moins polluants, fixé par la loi SRU dès décembre 200074, est maintenant largement intégré dans les programmes des agglomérations de plus de 100 000 habitants. Pour concurrencer l'automobile individuelle, il faut répondre au défi du porte-à-porte, intégrant un usage différent de la voiture (co-voiturage, location, ..), le développement des modes doux sur de faibles distances, et les transports collectifs dans un maillage s'adossant à un réseau de plates-formes intermodales. Outre les défis techniques (développement d'outils de communication, de billettique, ..), les défis industriels (nouveaux acteurs investissant dans les parkings, les locations de voiture,..) et économiques, cette évolution de l'architecture globale des transports collectifs urbains et interurbains implique un changement culturel pour l'usager devenu client.
72
Les distances domicile-travail ont été multipliées par 9 en 50 ans. (source : manifeste de la mobilité durable UTP) Selon l'OCDE, la mobilité durable est « une mobilité qui ne met pas en danger la santé publique et les écosystèmes, respecte les
73
besoins de transport tout en étant compatible avec une utilisation des ressources renouvelables à un taux inférieur à celui nécessaire à leur régénération et une utilisation des ressources non renouvelables à un taux inférieur à celui nécessaire à la mise au point de ressources renouvelables de remplacement » 74 Devenu article L1214-2 du CT et suivants
67
Ce n'est qu'au prix d'une attractivité renforcée des transports collectifs urbains et nonurbains qu'ils pourront devenir l'ossature d'un système de mobilité durable. Les plans de déplacements urbains des agglomérations font figurer parmi leurs objectifs l'amélioration de l'attractivité75. Les enquêtes périodiques de déplacements des ménages constatent que l'attractivité est d'abord fonction de la qualité de desserte (étendue de l'offre de transport collectif), mais aussi de la qualité de service, incluant en premier chef, la ponctualité ou la régularité. Or, « ce qui nous énerve le plus dans les transports publics, c'est l'autre 76». Les enquêtes montrent que pour un conducteur de Îhicule priÎ, la journée de travail est terminée quand il monte dans sa voiture, alors que pour un utilisateur de transports collectifs, elle ne le sera que lorsqu'il rentre chez lui77. Le confort, la propreté, la tranquillité sont des enjeux forts de l'attractivité pour conquérir de nouveaux types de clientèle. Le sentiment de bien-être ou d'insécurité, est modulé par l'expérience récente. Une gare pimpante vue en sortie d'un parking sale, paraîtra plus sale. L'attractivité sera celle de la chaîne globale, incluant les pôles d'échange avec les lignes de rabattement, les lieux de stockage des moyens doux ou des Îhicules (parking-relais).
16. Recommandation: prendre en compte la sécurité dans les études et les outils favorisant l'attractivité de la mobilité durable.
La multiplicité des acteurs de la mobilité durable impose de définir un chef de file, capable de coordonner les actions d'amélioration de la qualité de service. La question de la gouvernance de la chaîne de mobilité est l'objet de propositions du GART depuis plusieurs années. Le GART propose notamment de transformer les AOT en autorités organisatrices de la mobilité durable. Quelle que soit la solution retenue, elle devra prendre en compte les logiques de sécurité et la coopération avec les autres acteurs de la sécurité.
17. Recommandation: désigner l'autorité organisatrice comme chef de file des acteurs de la sécurité de la mobilité durable.
Du point de vue des élus, la question du vivre-ensemble est un enjeu essentiel de notre société plus diversifiée, plus individualiste, plus exigeante. L'étude des formes de violence dans les transports collectifs (cf. 1ère partie) montre qu'ils sont le miroir exacerbé des difficultés contemporaines.
75 76 77
PDU STIF février 2012 « Défi 2 : Rendre les transports collectifs plus attractifs, (Actions 2.1 à 2.9) », Julien Damon, sociologue, in Transport public avril 2012 Source : entretien avec l'AQST
68
4.2 La responsabilisation des acteurs par la qualité de service contractuelle
Le sentiment d'insécurité est une forme de non qualité vivement ressentie par les clients-usagers. L'entreprise de transport a un rôle à jouer pour le conjurer, même si elle ne peut pas tout. Elle doit donc être responsabilisée au-delà de la protection de ses personnels qu'elle assume déjà largement. Cela requiert une certaine créativité sur le plan contractuel, fondée sur une appréciation juste des rôles respectifs.
4.2.1
L'expérience de la qualité
La recherche systématique d'une meilleure qualité de service aux usagers est de longue date une priorité partagée des collectivités locales responsables et des exploitants de réseaux. Elle a donné lieu à de nombreuses innovations et a vu son champ s'élargir constamment. Cette préoccupation a été encouragée fortement par le développement des mouvements de consommateurs et d'usagers des services publics. Elle prend appui dorénavant sur des dispositifs bien établis d'échanges et d'enquête : la mesure de la satisfaction des usagers fait partie du quotidien des responsables des réseaux de transport. La compréhension des ingrédients de cette satisfaction s'est progressivement élargie et couvre aujourd'hui, en particulier dans les grandes agglomérations, un spectre assez large : d'un suivi assez formel de quelques indicateurs de base portant notamment sur la ponctualité, la propreté ou la disponibilité des équipements, on est passé à un registre beaucoup plus complet et qualitatif, qui interroge l'usager devenu client sur sa perception de tous les aspects du service rendu. Engagée généralement à l'initiative des entreprises délégataires, dans une optique d'amélioration de leurs prestations pour accroître la fréquentation du réseau et consolider la confiance que les collectivités placent en elles, cette démarche s'est considérablement sophistiquée ensuite dans deux directions principales : un levier de management, pouvant aller jusqu'à constituer un outil d'appréciation de la manière de servir des salariés, mais cela reste encore l'exception car les organisations représentatives des personnels peuvent être réticentes ; et surtout une possibilité nouvelle pour les autorités organisatrices de contrôler et de responsabiliser les exploitants pendant la durée du contrat, au moyen d'un dispositif de sanction pécuniaire. La plupart des contrats de délégation de service public appliqués aux TCU, contiennent aujourd'hui de tels dispositifs, définis dans le cahier des charges de la mise en concurrence, ce qui permet aux candidats à l'exploitation d'en intégrer les implications à leurs offres. Ce sont des systèmes qui peuvent atteindre des niveaux éleÎs d'exigence dans tous les compartiments de la qualité de service, ou plus simplement du respect du cahier de charges. Ils ont permis des améliorations significatives, même si des progrès restent encore à faire.
69
4.2.2
Qualité et sécurité
L'amélioration du ressenti de sécurité par les usagers du réseau, qui compte pour eux autant que bien d'autres aspects de la qualité du service rendu, peut-elle être intégrée à une telle approche ? Sur le vu des quelques indications qu'elle a pu collecter, la mission estime que c'est un objectif digne d'intérêt d'y tendre, sous un certain nombre de réserves importantes. Mais, s'agissant d'un sujet complexe sur lequel elle considère que son expertise est trop limitée pour livrer des recommandations précises, elle se limite à quelques remarques de principe et à une recommandation générale : l'exploitant ne peut être responsabilisé que sur des terrains dont il a une maîtrise suffisante : dans le domaine qui nous occupe ce sont les résultats de la lutte contre l'incivilité qui devront être pris en considération et non le constat de l'évolution de la délinquance ellemême, dont les principaux facteurs sont étrangers aux acteurs du TCU. Cela impose, comme la Mission permanente l'a souligné avec force dans son Guide de l'évaluation publié en février 2011, de choisir des « indicateurs intermédiaires » illustratifs de résultats imputables à une action ou à un programme d'actions entrant dans les possibilités juridiques et économiques de l'entreprise de transport. Ce point est un facteur limitant important ; la mesure des résultats devra pouvoir être faite par des techniques indiscutables et praticables : le volet d'une enquête de satisfaction portant sur cet aspect devra obéir à une rigueur de construction contrôlée et offrir une stabilité temporelle permettant des appréciations fiables des évolutions enregistrées ; le suivi peut être effectué par l'exploitant lui-même, qui en livre les résultats périodiquement à la collectivité, ou par cette dernière directement ces deux conceptions se développent mais ses modalités doivent être parfaitement concertées dans le cadre contractuel : soit elles sont définies au cahier des charges, par hypothèse accepté par les soumissionnaires, soit elles relèvent d'un accord ultérieur. Sous ces réserves notamment, la Mission estime que la mesure de la satisfaction du client en ce qui concerne l'ambiance de tranquillité qui prévaut ou pas dans les Îhicules et espaces d'échange du réseau de transport, est possible et souhaitable. Elle doit être orientée vers le suivi de l'efficacité des dispositions prises par l'entreprise, dans le champ de compétence qui est le sien. Cela peut viser principalement les initiatives de présence humaine apaisante spécifique (médiation...etc.), de formation et d'implication de toutes les catégories de personnel (conducteurs, contrôleurs, agents commerciaux), les campagnes de promotion des attitudes responsables et civiques, la lutte contre la fraude alliant des objectifs ambitieux et des méthodes favorisant un climat détendu.
18. Recommandation: inclure la mesure du sentiment d'insécurité dans les enquêtes de satisfaction client, là où cela n'est pas déjà fait.
Sur la base de constats faits sur le terrain qui indiquent que l'approximation et la précipitation sont contre-productives, et de sa réflexion générale, la Mission estime toutefois qu'en une matière aussi sensible la prudence suggère : 70
de ne s'engager que de façon progressive dans l'intégration de tels critères dans le suivi de la qualité de service, en commençant par exemple par des expérimentations ponctuelles non sanctionnées, pour Îrifier la faisabilité et la pertinence ; de les mettre en place en accompagnement d'initiatives ou de programmes d'actions concrets, par exemple de prévention de l'incivilité, dont on mesurera les effets en termes de ressenti par les usagers. Compte tenu des enjeux, la Mission suggère que les pouvoirs publics (Transports, Intérieur) investissent dans la recherche appliquée de dispositifs adaptés de suivi du ressenti par les usagers de la « sécurité » dans les transports collectifs, en liaison avec les instances représentatives des acteurs du TCU (AMF, GART, UTP notamment) en recourant à des experts missionnés précisément.
4.3
Une approche globale et professionnalisée
Au terme de ce tour d'horizon, et alors que le constat satisfaisant peut être fait que l'insécurité propre aux réseaux de transports urbains reste limitée et que des réponses très significatives sont données d'ores-et-déjà par les collectivités locales et par les transporteurs, la Mission souhaite confirmer deux indications générales que ses travaux lui suggèrent : la sécurité dans les TCU ne peut résulter que d'une prise en charge globale, et elle relève d'une démarche parfaitement professionnalisée.
4.3.1
Une prise en charge globale
On entend ici rappeler deux champs complémentaires dont l'efficacité doit s'additionner. Le couple AOT-exploitant doit trouver les voies et moyens, en rendant les arbitrages nécessaires chacun dans son champ de responsabilité mais sans oublier qu'ils interfèrent -, aux échéances budgétaires et contractuelles appropriées, de réserver à l'objectif de sécurité, celle des usagers, celle des personnels et celle des équipements, une priorité à hauteur des attentes respectives, dans leurs décisions d'investissement et dans l'affectation des moyens humains et autres. L'observation de la réalité conduit à suggérer d'accorder une attention plus soutenue aux attentes des usagers, équivalente à celle qui l'a été aux personnels de longue date. Ce résultat ne peut être atteint que par une meilleure implication des AOT dont c'est le rôle en application de la lettre et de l'esprit de la loi du 5 mars 2007. La limite de l'exercice en est bien entendu le coût, toujours supporté par un partage à proportions variables suivant les sites et les politiques tarifaires menées, entre l'usager et le contribuable local, en investissement, qu'il faut amortir, et en fonctionnement. La Mission est consciente que les équilibres économiques n'autorisent qu'une faible marge de manoeuvre et estime qu'il doit donc s'agir davantage de mettre en concurrence et d'arbitrer entre des priorités différentes. La seule façon d'apprécier le niveau de priorité de la sécurité par rapport 71
aux autres, est d'interroger les usagers eux-mêmes et les non-usagers, ce qui est de plus en plus souvent le cas. Une approche globale implique en second lieu que les acteurs du TCU (AOT, entreprise, salariés...) acceptent de s'inscrire dans la démarche partenariale de l'agglomération en matière de sécurité et de prévention de la délinquance, comme en toute autre matière, en renonçant à la tentation d'un cloisonnement supposé protecteur d'une spécificité inaccessible. Le réseau de transport est au service de la ville et de ses habitants, il est ouvert sur elle et l'irrigue en permanence. Le public lui porte certes un intérêt spécifique, dans la mesure où il rend un service essentiel à son quotidien, parfois éprouvant, mais il le considère comme le maillon d'un ensemble. Il est un élément structurant de l'agglomération. La Mission a obserÎ que des cloisonnements perdurent, entretenus involontairement par une culture propre très marquée du monde du transport urbain, une grande famille dont les membres peuvent avoir des intérêts divergents, mais qui communique par un langage commun et s'unit pour dénoncer les entraves qui sont mis à son développement. Cette synergie avec les acteurs principaux de la tranquillité publique, la ville et l'Etat, est rendue difficile également par les différences de niveaux de compétence comme cela a été mentionné. Les TCU vivent au niveau de l'agglomération, mais la loi, la tradition et les contraintes politiques du mouvement intercommunal font de la sécurité un enjeu municipal. La Mission estime que les acteurs du TCU peuvent être les vecteurs d'une évolution, et que c'est une condition à une approche Îritablement globale.
4.3.2
Une démarche professionnalisée
La contribution des acteurs des transports en commun à la sécurité est encore souvent Îcue comme contrainte imposée par les circonstances qui les conduit à s'aventurer sur des terrains qui échappent à leurs compétences et à engager des financements indus. Ainsi des revendications entendues sur le coût du traitement et de la fourniture des images vidéo sur réquisition de justice, ou du débat sur l'opportunité pour le réseau de transport d'avoir des moyens humains d'intervention, que la Mission a tenté d'éclairer. Où commence et où finit en ces matières la responsabilité des entreprises et des AOT ? Il n'appartient pas à la Mission de trancher ces débats, qui sont affaire de conception de chacun dans le cadre des textes en vigueur, et obéissent aussi aux contextes locaux. Cependant, l'observation des évolutions conduit à relever que la compréhension de leur rôle par les acteurs du TCU n'a cessé de s'élargir, à la mesure du développement des réseaux, de la diversification des modes, des progrès techniques, de l'accroissement continu de la fréquentation, d'une meilleure perception des attentes du public, et de l'affirmation dans leur rôle des collectivités organisatrices. A leur corps défendant parfois, en raison notamment des coûts impliqués, ils se sont engagés sur des voies nouvelles que personne d'autre ne voulait ou ne pouvait emprunter, mais qui offraient des perspectives qu'on ne pouvait refuser. La sécurité n'échappe pas à cette tendance.
72
A l'évidence certains champs d'action strictement régaliens (la répression des crimes et délits par exemple) ne peuvent entrer dans ce raisonnement. Mais dès qu'on passe à l'étage en-dessous en termes de gravité, et qu'on évoque la tranquillité publique et bien sûr la prévention, on voit bien que des réponses très diversifiées sont données. Vidéoprotection ; importance et missions des polices municipales, sont des variables fondamentales d'une ville à l'autre, à leur discrétion entière. Comme on l'a montré plus haut, les choix faits sont loin d'être indifférents pour les transports publics. Dès lors, des réponses propres du réseau de transport doivent prendre place dans le dispositif de coproduction. La mission souhaite indiquer en achevant ce rapport, qu'il lui a été donné d'observer, dans certains compartiments de ce jeu complexe, un grand professionnalisme de certaines entreprises ou collectivités innovantes, et elle estime que la contribution du monde du transport doit s'inscrire sous une telle exigence qui en signe la légitimité. Les deux grandes entreprises publiques RATP et SNCF qui n'étaient pas au centre des préoccupations de ce rapport, offrent à cet égard des exemples d'engagement et de créativité remarquables. Leur initiatives ne sont pas nécessairement transposables telles que, pour des raisons à la fois de statuts (déterminant des champs de compétences spécifiques) et de capacité financières ou humaines. Mais il est loisible de s'en inspirer. Les groupes priÎs ou para-publics qui contrôlent l'exploitation des transports urbains en province, tout en étant moins avancés et parfois plus réserÎs, ne sont cependant pas en reste. Dans les grands réseaux dotés de métros et de tramways, ils rivalisent même, à leur échelle, avec les deux cas précités. Ce concept de professionnalisation implique pour la mission que : la formation et le management des agents des réseaux de toutes catégories, inclue la préoccupation de la sécurité, car chacun, dans sa fonction et sans en dévier, a un rôle important à jouer ; la prise en considération de la relation humaine qu'implique l'acte de transporter des personnes, s'affirme davantage dans la culture de ceux qui s'y consacrent ; elle restera « technique », mais devra intégrer désormais, dans un volet commercial cultiÎ depuis longtemps, une valence de contact et d'apaisement des tensions ; les bonnes pratiques initiées ici ou là soient diffusées par les groupes et finalement imposées à leurs structures locales, par des modules de formation types et des processus de recrutement normés ; les collectivités renforcent leur attention à ces sujets, en sus des critères prioritaires de choix que sont les prix, les perspectives de développement de la fréquentation ou d'autres critères plus qualitatifs lors des appels d'offres.
73
74
Conclusion
La mission a rencontré des acteurs généralement très motiÎs et mettant en oeuvre des méthodes de prévention de la délinquance variables, en fonction du contexte fort divers de la délinquance dans chaque s agglomération et des organisations locales. Elle a retenu les points essentiels ci-après. La délinquance dans les TCU est le reflet de la délinquance dans la ville, avec des spécificités marquées concernant les agressions, notamment verbales, les vols et le harcèlement sexuel. Le caractère répétitif de cette délinquance du quotidien, et l'usage souvent lié à une contrainte économique des transports en commun conduit à un ressenti aggraÎ et à un sentiment d'insécurité souvent exagéré par rapport aux faits réels. La possibilité de lutter contre la fraude est largement ouverte aux opérateurs de transport, qui n'exploitent pas tous l'ensemble des possibilités que leur donnent les textes. La répartition des rôles est très variable d'un réseau à l'autre entre l'approche commerciale, la médiation, le constat des infractions, la dissuasion et l'intervention de sécurité concernant d'autres infractions releÎes à l'occasion de contrôles dans les TCU. Il faut cependant noter que tous les grands réseaux confrontés à ces problématiques ont pris des mesures permettant au minimum la protection des personnels. La mission a également releÎ l'implication dans les actions de médiation et les immersions en milieu scolaire. La répartition des rôles entre les acteurs mérite d'être abordée clairement et notamment entre l'opérateur et l'autorité organisatrice, qui devrait davantage s'impliquer dans la mise en place d'un observatoire local de la délinquance au niveau de l'agglomération, la production d'un diagnostic de sécurité et d'une stratégie territoriale dans les TCU, volet d'une stratégie plus globale. L'agglomération devrait également s'impliquer dans la mise en place d'une police intercommunale des transports, ou, le cas échéant, dans la coordination de l'implication des diverses polices municipales des villes de l'agglomération dans la tranquillité publique au bénéfice des TCU. L'objectif de mobilité durable implique une amélioration de l'image des TCU dont la réduction du sentiment d'insécurité est une composante importante. Or, le sentiment d'insécurité procède également de l'infra-délinquance que constituent les incivilités envers les personnels, comme envers les autres voyageurs. Ce sujet voit de plus en plus les opérateurs s'impliquer, ainsi que certaines AOT. La lutte contre le sentiment d'insécurité dans la chaîne de mobilité durable (parc relais, gare bus, ...) nécessite des actions cohérentes ; elle implique la mise en responsabilité d'un acteur central sur l'ensemble de la chaîne, qui devrait être l'AOT.
75
76
RECOMMANDATIONS
1. Recommandation : pour les autorités organisatrices de transport urbain: encourager la construction d'observatoires locaux de la délinquance dans les TCU exploitant l'ensemble des sources de données, incluant notamment les informations de l'opérateur de transport et celles issues des constats des services de police et de gendarmerie. ......................................................................................................................... 23 2. Recommandation : établir la liste des index les plus significatifs des faits constatés de délinquance faisant l'objet d'un suivi dans les TCU, par un groupe de travail placé sous l'égide conjointe du ministère de l'Intérieur et du ministère chargé des Transports, afin de favoriser une analyse locale pertinente de l'évolution de la délinquance dans les TCU par rapport à la voie publique. .................. 26 3. Recommandation : encourager la généralisation des démarches de médiation de tranquillité publique propres aux réseaux de transport, en diffusant les bonnes pratiques et en leur attribuant prioritairement des emplois aidés en réponse à proportion de leurs besoins. ................................................................................................ 39 4. Recommandation : permettre le développement de polices intercommunales dédiées aux réseaux de transports en donnant explicitement cette possibilité aux collectivités territoriales, autorités organisatrices. ............................................................ 40 5. Recommandation : proposer la généralisation à tous les réseaux de transports urbains des agglomérations de plus de 100 000 habitants par exemple, d'une convention multipartite régissant les rapports entre tous les acteurs impliqués dans la prévention et la sécurité sur le réseau, pour optimiser l'efficacité de leurs interventions respectives par une bonne coopération. ...................................................... 44 6. Recommandation : faire évoluer la convention-type annexée au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale pour prendre en compte le besoin de coordination au bénéfice de la tranquillité et de la sécurité publique dans les TCU. ............................................... 45 7. Recommandation : rappeler aux acteurs du transport public, par voie de circulaire (Transports-Intérieur-Justice) publiée au JO, leurs droits et devoirs en terme de respect des règles dans les espaces dont ils ont la maîtrise dans le cadre des textes en vigueur, en précisant bien les champs d'application des différents dispositifs et leurs implications diverses, y compris en termes de concours éventuel de la force publique. ............................................................................................................. 46 8. Recommandation : faire évoluer le décret du 27 août 2008 pour confier explicitement à l'autorité organisatrice la responsabilité de produire le diagnostic de sécurité pour les transports urbains. ............................................................................. 48 9. Recommandation : dans le cadre de l'officialisation des « stratégies territoriales de sécurité et de prévention de la délinquance », par évolution des anciens CLS, prévoir à la fois la promotion des approches intercommunales au sein des CISPD, et la présence d'un volet « transports urbains » en leur sein, mis au point par un groupe de travail ad-hoc, mais validé comme l'ensemble de la stratégie, par l'instance plénière. ........................................................................................ 50
77
10. Recommandation : faire évaluer par la MPEPPD l'impact de l'article 6 de la loi du 5 mars 2007 et de son décret d'application 2008-857 du 27 août 2008 précisant les modalités de concours apporté par les AOT aux actions de prévention de la délinquance deux ans après la publication de la circulaire de mise en oeuvre d' avril 2012. ......................................................................................................................... 50 11. Recommandation : promouvoir une présentation plus claire et plus simple des éléments essentiels du règlement d'exploitation en matière de prévention, ainsi que des campagnes locales de prévention des détériorations diverses. 55 12. Recommandation : mieux impliquer les voyageurs des TCU dans la lutte contre des phénomènes concrets de dégradation (sièges,..) par des campagnes locales de sensibilisation, en coopération avec l'autorité organisatrice. ......................... 55 13. Recommandation : renforcer l'équipement en dispositifs de vidéoprotection des autobus de l'ensemble des réseaux, notamment dans la grande couronne de l' Ile-de-France. .............................................................................................. 58 14. Recommandation : renforcer là où c'est nécessaire, la qualité des données des opérateurs (dont les images) élément d'une articulation efficace avec les services de l'Etat. ............................................................................................................ 59 15. Recommandation : développer les travaux du programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres (PREDIT) concernant l'impact économique et social de la délinquance dans les TCU et l'optimisation des moyens techniques et humains de prévention. ................................................................................ 60 16. Recommandation: prendre en compte la sécurité dans les études et les outils favorisant l'attractivité de la mobilité durable. ...................................................... 68 17. Recommandation: désigner l'autorité organisatrice comme chef de file des acteurs de la sécurité de la mobilité durable. .............................................................. 68 18. Recommandation: inclure la mesure du sentiment d'insécurité dans les enquêtes de satisfaction client, là où cela n'est pas déjà fait. ........................................... 70
78
Didier CHABROL Coordonnateur de la mission permanente Inspecteur général de l'administration
Bernard MESSIAS Inspecteur des services judiciaires
Bruno LAFFARGUE Inspecteur général de l'administration
Catherine HESSE Inspectrice générale des affaires sociales
Marc LE DORH Conseiller des services du Sénat Chargé de mission à l'inspection générale de l'administration
Isabelle MASSIN Inspectrice générale de l'administration du développement durable
Michel DESCHAMPS Inspecteur général des ponts, des eaux et des forêts
Alain TAUPIN Inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
HerÎ MECHERI Inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
Didier JOUAULT Inspecteur général de l'éducation nationale
Magali INGALL-MONTAGNIER Inspectrice générale adjointe des services judicaires
Jean-Luc MIRAUX Inspecteur général de l'éducation nationale 79
80
ANNEXE
Liste des personnes auditionnées
Administrations centrales, organismes nationaux, directions générales d'entreprises Ministère de l'Intérieur, DGPN, unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun Carine Vialatte, Commissaire divisionnaire, chef de l'UCSTC ; Guillaume Emile-Zola-Place, Lt-Colonel de gendarmerie, chef-adjoint de l'UCSTC ; Laurent Boisset, Commandant de police ;
Ministère de l'écologie, du développement durable, et de l'énergie Pascal Mignerey, directeur de l'autorité de la qualité de service des transports (AQST) ; Arnaud Dumontier, secrétaire général de l'AQST ; Gérard Rolland, chef du département de la sûreté dans les transports (DSUT) ; Yves Rougier, chef-adjoint DSUT ; Fabrice Fussy, chef de l'observatoire national de la délinquance dans les transports ; Christelle François, Yasmina Baaba, bureau du développement de la sûreté multimodale, DSUT ; Emmanuel Kozal, chef du bureau des opérateurs de transport collectif. Union des Transports Public et ferroviaires (UTP) Anne Meyer, directrice du département clientèle, exploitation et Recherche ; Benoît Juery, directeur adjoint du département des affaires sociales.
Groupement des autorités responsables de transport (GART) Jean-François Malbrancq, président de la commission accessibilité / sécurité, viceprésident de la communauté urbaine d'Arras délégué aux Transports et au Plan de Déplacements Urbains ; Denis Leroy, vice- président de la commission accessibilité / sécurité, vice-président de la communauté d'agglomération de La Rochelle ; Benoît Chauvin, responsable du Pôle Technologie des Transports et Accessibilité ; Groupe Keolis Jean-Yves Topin, directeur de la sécurité du groupe.
81
Groupe Veolia Transdev André Cailliez, directeur prévention, santé et sécurité du groupe.
82
Organismes ou personnes auditionnés du fait de leur expertise en matière de délinquance, d'insécurité ou de comportements incivils dans les transports Jean-Marc Novaro, directeur sécurité de la RATP ; Josiane Sommacal, chef de la mission coordination de la prévention de la direction de la sécurité de la RATP ; Céline Debove-Postel, directrice déléguée à la prévention et à la gestion des incivilités, direction de la sûreté, SNCF; Michèle FORT, direction de la sûreté de la SNCF ; Alain Riou, directeur développement Optile ;
Sylvie Scherer, directrice de la mission études sécurité de l'institut d'aménagement et d'urbanisme d'Ile de France (IAU IdF) ; Hélène Heurtel, statisticienne à la mission études sécurité IAU IdF ; Marion Guillou, psychologue sociale, en thèse à l'université de Nantes concernant les incivilités dans les transports ferroviaires ; Pascal André, senior consultant incivilités délinquance dans les transports, cabinet Plein Ciel ; Marion Baud, Chef du projet Gares du grand Paris, direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement (DRIEA) d'Ile de France ; François Bertrand, Directeur, Unité Territoriale 92/DRIEA ; Anne Grandguillot, Centre d'études techniques de l'équipement (CETE) de Lyon, directrice du département construction Aménagement projet ; Pierre Guyot, Service environnement et urbanisme réglementaire, DRIEA / Unité territoriale de la Seine Saint Denis ; Cédric Boussuge, Chargé d'études, Cete de Lyon ; Cyril Pouvesle, Chargé d'études, Cete de Lyon ; Stéphane Melot, Responsable Sûreté et sécurité publique Société du Grand Paris (SGP) ; Valérie Vernet, Responsable de l'unité Gares, SGP ; Juliette Battini, Préfecture de Police, Service Information Sécurité ; Laurence Kimmel,Chargée de mission/ SADD/UT92/DRIEA ; Laetitia Conreaux, Stagiaire/ UT92/ DRIEA ; Aurore Nativité, Chef du service environnement et réglementation de l'urbanisme/UT94/ DRIEA ; Sophie Mozer, Responsable du pôle de l'application du droit des sols / UT 94/DRIEA ; Fanny HerÎ, Responsable SADT, DRIEA / UT93. Personnes rencontrées lors du déplacement à Strasbourg Patrick Poirret, Procureur de la République près le TGI de Strasbourg ;
83
Jean-François Colombet, Directeur de Cabinet du Préfet de la Région Alsace, Préfet du Bas-Rhin ; Olivier Bitz, Adjoint au Maire en charge de la Tranquillité publique à Strasbourg ;
Luc-Didier Mazoyer, Directeur Départemental de la Sécurité Publique ; Stéphane Lacour, chef du service de sécurité de proximité ; Sébastien Raimbault, Chef de l'Unité de Sécurisation des Transports en Commun (USTC) ; Francis Jaecki, Directeur Général Adjoint en charge du Pôle sécurité, prévention et réglementation de la Communauté Urbaine de Strasbourg (CUS) ; Christian Anthoni, Chef du service prévention, animation, sécurité du pôle sécurité prévention et réglementation de la CUS ; Jean-Louis Metzger, directeur des déplacements clients de la compagnie des transports Strasbourgeois (CTS) ; Jean-Michel Augé, directeur du développement durable et des relations institutionnelles de la CTS ; Gilbert Stammbach, Responsable sûreté pour la Région Alsace SNCF. Personnes rencontrées lors du déplacement à Lyon Jean-Pierre Cazenave-Lacrouts, préfet délégué pour la défense et la sécurité ; Gilles Rouveure, directeur de cabinet du préfet délégué pour la défense et la sécurité ; Laurent Hyp, cabinet du préfet délégué ;
Albert Doutre, directeur départemental de la sécurité publique (DDSP) ; Alain Payet, chef d'état major adjoint de la DDSP ; Cdt Josselyne Massoco, chef du Service interdépartemental de sécurisation des transports en commun ; Commandant Bonnal, chef du bureau opérations emploi du groupement de gendarmerie du Rhône ; Stéphane Canalis, directeur mobilité du Conseil Général du Rhône (CG 69) ; Maxime Bulinge, Chef du bureau Accessibilité et Qualité du Réseau, direction mobilité CG 69 ; Georges Pasini, Directeur sécurité prévention de la ville de Lyon ; Henri Fernandez, Directeur opérationnel de la Police Municipale (PM) ; Jean-Georges Meritza, responsable du bureau d'ordre des activités de la PM ; Laurence Emin-Coutino, direction prévention sécurité en charge de la coordination du CLSPD ; M Emmanuel Magne, directeur de la direction supervision globale de la ville de Lyon ; Bernard Rivalta, Président du Sytral ; Raymond Deschamps, Directeur Général du Sytral ; 84
Valérie Guillou, directrice de l'Exploitation du Sytral L ; Eve-Marie Moos, conseillère sécurité auprès du président ; Pascal Jacquesson, directeur général de Kéolis Lyon ; Patrick Aujogue, directeur Sécurité Kéolis Lyon.
Personnes rencontrées lors du déplacement au Mans Pascal Lelarge, préfet de la Sarthe ; François de Keréver, Directeur du cabinet du préfet de la Sarthe ; Magali Debatte, secrétaire générale de la préfecture ;
Jean-François Soulard, Conseiller municipal, vice-président de Le Mans Métropole en charge des transports en commun de l'agglomération mancelle et Président de la SETRAM ; François Chaumard, directeur départemental de la sécurité publique 72 ; Daniel Peneaud, directeur du service « Tranquillité publique », mairie du Mans ; Jean-Paul Pringuet, directeur de la SETRAM ; Laurence Tilloy, directrice d'exploitation à la SETRAM.
Personnes rencontrées lors du déplacement à Orléans Florent Montillot, Maire Adjoint à la Tranquillité Publique, la Prévention, la Réussite et l'Intégration, membre du bureau de l'Agglomération d'Orléans ; Pascal Desuert, Directeur de la sécurité et de la tranquillité publique, directeur de la police municipale de la ville d'Orléans ; William Le Pelletier, chef de service, responsable de la police municipale intercommunale des transports ; Franck Meunier , responsable sécurité contrôle prévention de Keolis Orléans.
Autres entretiens Benoît Berque, Chef du Pôle Sécurité Publique-Cultes Cabinet du Préfet de la région Auvergne Clermont-Ferrand ; Emmanuel Gerber, responsable du service transports d'agglomération castelroussine ; Jean-Luc Quintric, directeur du réseau (Keolis Châteauroux) ; Etienne Sesmat, directeur de la sûreté de la RTM Marseille. de la communauté
85
INVALIDE)