Audit thématique sur l'application de la loi littoral par les services de l'État.

CREUCHET, Bertrand ; DUFOURMANTELLE, Aude ; GADBIN, Françoise ; HELIAS, Annick ; VANDEWALLE, Bernadette ; GOMEL, Cyril

Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">25 ans après l'adoption de la loi n°86-2 du 3 janvier 1986 dite loi Littoral, la manière dont les services de l'État veillent à son application, en particulier pour les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme, est l'objet de cet audit. Le rapport rappelle la finalité et les objectifs de la loi et donne les éléments de contexte expliquant une grande part des difficultés rencontrées dans son application. Il s'attache à analyser les méthodes et outils développés par les services pour assurer l'application de ces dispositions particulières au littoral dans les documents d'urbanisme et lors de l'instruction des autorisations individuelles. Sont mises en exergue les difficultés rencontrées. Les recommandations, sous la forme d'un plan d'action, s'articulent autour de quatre axes : affirmer le rôle majeur des ScoT dans l'application des dispositions particulières au littoral et renforcer le rôle d'encadrement des documents d'aménagement de rang supérieur ; assurer la sécurisation juridique de l'application des dispositions particulières au littoral en engageant une analyse systématique de compatibilité des PLU ; organiser le pilotage du plan d'action et l'animation des services de l'État en charge de le mettre en oeuvre; redonner une lisibilité d'ensemble à la politique d'aménagement du littoral.</div>
Editeur
CGEDD
Descripteur Urbamet
audit ; matériau de construction ; loi ; littoral ; politique de l'environnement ; recherche ; droit de l'urbanisme
Descripteur écoplanete
protection du littoral ; loi littoral 86-2
Thème
Administration publique ; Cadre juridique ; Environnement - Paysage
Texte intégral
n°- 007707-01 Septembre 2012 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat CONSEIL GÉNÉRAL DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE Rapport n° : 007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat établi par Annick HELIAS Membre permanent, coordonnatrice Bertrand CREUCHET Inspecteur général de l'administration du développement durable Aude DUFOURMANTELLE Architecte urbaniste en chef de l'Etat Françoise GADBIN Architecte urbaniste en chef de l'Etat Cyril GOMEL Ingénieur des ponts, des eaux et des forêts Bernadette VANDEWALLE Attachée principale d'administration de l'équipement Septembre 2012 Sommaire Résumé.....................................................................................................................5 Introduction..............................................................................................................9 1. Perçue comme une politique de protection de l'environnement, la politique littorale portée par la loi de 1986 a perdu une grande partie de sa lisibilité.....13 1.1. Quelques rappels sur ce qu'on appelle encore aujourd'hui « la loi Littoral ».............13 1.1.1. Une politique d'aménagement équilibré du littoral portée par quelques grands principes.................................................................................................................. 13 1.1.2. Une politique littorale mise en oeuvre par l'État dès les années 1970............14 1.1.3. Une loi cadre d'aménagement et d'urbanisme combinant grands principes et prescriptions............................................................................................................. 14 1.1.4. Une loi cadre dont les modalités d'application seront en fait très peu précisées par des prescriptions particulières adaptées aux spécificités des littoraux français. 15 1.2. Par défaut de textes réglementaires, des modalités d'application progressivement définies par la jurisprudence administrative ....................................................................17 1.2.1. La planification au coeur du droit du littoral.....................................................17 1.2.2. Des collectivités locales peu empressées de mettre en oeuvre les dispositions particulières du littoral et de rendre compatibles leurs documents d'urbanisme.......18 1.2.3. Des services de l'État déstabilisés par la décentralisation de l'urbanisme mais aussi par une loi dont la mise en oeuvre des principes exige appréciation et justification............................................................................................................... 18 1.2.4. Une jurisprudence administrative dont le rôle est d'interpréter la loi...............20 1.3. Une loi aujourd'hui éclatée entre de nombreux codes mais un socle de dispositions d'urbanisme qui a gardé toute sa force............................................................................22 1.3.1. Une loi éclatée dans de multiples codes qui a perdu de ce fait toute lisibilité du dispositif législatif correspondant.............................................................................22 1.3.2. Mais un socle de dispositions particulières au littoral qui a relativement peu évolué dans le temps...............................................................................................22 2. Les modalités d'intervention des services dans la mise en oeuvre des dispositions d'urbanisme de la loi Littoral............................................................25 2.1. De quelle hétérogénéité parle t-on ?.........................................................................26 2.1.1. Des priorités corrélées aux spécificités de chaque littoral..............................26 2.1.2. Le littoral focalise des enjeux et des politiques publiques dont la mise en oeuvre est pour certaines complexe et qu'il n'est pas toujours évident de mettre en cohérence................................................................................................................ 28 2.1.3. Les services ne disposent pas d'une « vision stratégique de l'État » sur le devenir du littoral......................................................................................................30 2.2. Les modalités d'organisation et d'action des services pour veiller à l'application de la loi Littoral......................................................................................................................... 33 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 1/137 2.2.1. Les DDTM en « première ligne », mais à la recherche d'appui......................33 2.2.2. Une animation et un pilotage au niveau régional encore à structurer.............34 2.2.3. Des attentes fortes vis-à-vis de l'administration centrale................................36 2.2.4. Une mobilisation des services sur la planification..........................................39 2.2.5. L'application du droit des sols (ADS), un chantier qui restera d'actualité........43 2.2.6. Le contrôle de légalité : une réalité peu adaptée aux enjeux..........................44 2.3. Les documents de référence et leur partage avec les collectivités...........................47 2.3.1. Les démarches engagées en réponse à la circulaire de 1991.......................47 2.3.2. Les circulaires de 2006 : une nouvelle impulsion mais aussi une rupture......50 2.3.3. L'enjeu d'une veille juridique organisée au bon niveau...................................52 2.4. En conclusion de ce chapitre, quatre chantiers jugés prioritaires.............................54 3. Les difficultés d'appréciation dans l'application des dispositions particulières restent nombreuses..........................................................................55 3.1. Le champ d'application géographique des dispositions particulières au littoral ........58 3.2. Les sous-ensembles du champ d'application géographique.....................................61 3.2.1. La bande littorale des cent mètres.................................................................62 3.2.2. La délimitation des espaces proches du rivage..............................................65 3.3. Les notions et principes liés aux espaces urbanisés littoraux ..................................66 3.3.1. La qualification des espaces urbanisés (agglomérations, villages, hameaux, autres) ..................................................................................................................... 67 3.3.2. L'extension de l'urbanisation en continuité et l'extension limitée dans les espaces proches du rivage......................................................................................70 3.3.3. La capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser..........................74 3.4. Les mesures relatives aux activités spécifiques........................................................77 3.4.1. Le traitement des terrains de camping en dehors des espaces urbanisés.....77 3.4.2. Les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières 79 3.4.3. Les difficultés liées aux installations d'énergie renouvelable..........................81 3.5. Les dispositions relatives aux espaces à préserver de l'urbanisation.......................83 3.5.1. Les espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation..83 3.5.2. Les espaces remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel..................................................................................................................... 86 3.5.3. Les espaces boisés significatifs ....................................................................90 3.6. Les autres dispositions ayant fait l'objet d'observations significatives de la part des services : la gestion du domaine public maritime (DPM).................................................91 4. Conclusion et recommandations ....................................................................93 Annexes................................................................................................................105 1. Lettres de mission............................................................................................107 2. Note de cadrage................................................................................................109 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 2/137 3. Liste des auditeurs et des services audités..................................................117 4. Note relative aux moyens de l'Etat pour s'opposer aux PLU et aux autorisations contraires à la loi Littoral..............................................................121 5. L'application de la loi Littoral en Bretagne (synthèse).................................123 6. Le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares (synthèse).....................131 7. Glossaire des sigles et acronymes.................................................................135 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 3/137 Résumé Objet de l'audit et méthode 25 ans après l'adoption à l'unanimité de la loi n°86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite « loi Littoral », la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN) a souhaité connaître la manière dont les services de l'État veillent à son application. En effet, nombre d'acteurs, au premier rang desquels des élus, dénoncent de façon récurrente l'hétérogénéité de son application sur le terrain, d'un département à l'autre. La direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DGALN/DHUP) souhaitant une approche exhaustive de la réalité de terrain, la mission a proposé, pour des raisons d'efficacité, de cibler l'audit -tout au moins dans une première phase- sur « les dispositions particulières au littoral » relevant du code de l'urbanisme, celles-ci étant la source principale des griefs exprimés. Pour les mêmes raisons, il a été convenu avec le commanditaire que leur application dans les départements d'outre-mer ferait l'objet d'une mission spécifique. Par contre, les services concernés par leur application dans les communes riveraines des lacs de plus de 1000 ha ont été intégrés au présent audit. Ont été ainsi audités quarante-deux services dont une quinzaine de services préfectoraux, les vingt-six directions départementales des territoires et de la mer (DDTM), six DDT « grands lacs », les services régionaux concernés (DREAL, DIRM). Pour établir la note de cadrage de l'audit, la mission a procédé à l'examen des textes, initiaux et en vigueur, des nombreux rapports et documents consacrés à l'application de la loi Littoral. La note, ainsi qu'un guide d'entretien et une grille d'analyse des dispositions particulières au littoral, ont été finalisés par l'équipe d'auditeurs composée de membres des missions d'inspection générale territoriale et de sections du CGEDD. Ces documents ont ensuite été adressés aux services audités, préalablement aux entretiens. De la compréhension de la finalité et des objectifs de la politique publique portée par une loi dépend sa bonne application. Aussi, la mission a-t-elle fait le choix de les rappeler dans la première partie de son rapport, comme d'en donner les éléments de contexte qui expliquent, à son sens, une grande part des difficultés rencontrées dans l'application de la loi Littoral. La mission s'est ensuite attachée à analyser les méthodes et outils développés par les services pour assurer l'application de ces dispositions particulières au littoral dans les documents d'urbanisme et lors de l'instruction des autorisations individuelles. La seconde partie du rapport en rend compte. Dans la troisième partie, sont mises en exergue les difficultés rencontrées par les services pour l'application des dispositions particulières au littoral, préoccupation première de l'audit. Toutefois, pour répondre aux attentes de la DGALN, mais aussi prendre en compte celles exprimées par les services au cours de l'audit, la mission a repris ses principales recommandations, regroupées dans la quatrième partie, sous la forme d'un plan d'action proposé à l'administration centrale. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 5/137 Principaux constats et enseignements La loi Littoral correspond à une politique spécifique d'aménagement durable du territoire national qui vise à organiser le développement du littoral, en limitant l'urbanisation dans les espaces proches du rivage, en réservant ces espaces aux activités maritimes et traditionnelles et en orientant l'urbanisation vers l'arrière-pays, tout en assurant la protection des milieux et paysages remarquables et caractéristiques du littoral. Ces principes trouvent principalement leur application dans les documents d'urbanisme, même si les dispositions particulières qui les traduisent dans le code de l'urbanisme sont aussi directement opposables à tout acte individuel d'utilisation du sol. Pour les services de l'Etat, s'assurer de leur bonne application ouvre le champ à l'interprétation pour tenir compte des spécificités de chaque territoire, exige tout à la fois des capacités d'appréciation, des connaissances transversales permettant de justifier solidement les positions prises et une forte volonté administrative, préalables que la mission n'a pas toujours trouvé rassemblés au même niveau dans tous les départements. La mission a ainsi pu constater de fortes disparités d'application des dispositions particulières au littoral d'un département à un autre : ­ dans le niveau de mobilisation des services en fonction de la géographie, des enjeux, des acteurs, de l'histoire, y compris administrative ; dans les moyens et méthodes de travail développés (documents d'application de la loi Littoral, animation inter-services, coordination des actions avec les collectivités, contrôle de légalité) ; dans l'interprétation des dispositions (élaboration de doctrines locales et appréciation des situations au cas par cas). ­ ­ Mais, comme la mission s'est efforcée de le démontrer, ce grief d'hétérogénéité dans l'application des dispositions particulières au littoral trouve son origine tout autant dans l'esprit de la loi Littoral que dans une appropriation différentiée de la doctrine administrative diffusée en mars 2006 et complétée par la circulaire de juillet 2006. D'autres motifs y contribuent également, comme l'absence d'une vision stratégique partagée du devenir du littoral, l'insuffisance de pilotage des services de l'État sur cette politique d'aménagement spécifique (pilotage que les réorganisations successives n'ont pas facilité), ou encore, la prédominance des politiques sectorielles et la faible traduction de ces dispositions particulières dans les documents d'urbanisme. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 6/137 Recommandations Pour formuler ces recommandations, la mission s'est donc attachée à analyser ce qui, au-delà des particularités locales (qui devront être en partie assumées), permettrait d'harmoniser les interprétations des dispositions particulières au littoral et les pratiques des services de l'Etat. Les circulaires du 14 mars et 20 juillet 2006 sont les dernières instructions données aux services sur la base d'objectifs explicites, notamment la première qui vise la sécurisation juridique des documents d'urbanisme et sert encore de référence aux services. Si cet objectif est pour la mission plus que jamais d'actualité, les conditions de sa mise en oeuvre doivent être repensées au regard des trois principaux constats dressés par la mission : ­ l'absence de plan d'accompagnement de cette circulaire permettant d'assurer aux services l'appui indispensable à sa mise en oeuvre ; la fragilité -et les limites- de la doctrine administrative définie à cette occasion ; l'absence de vision stratégique de la politique publique que les services de l'Etat sont chargés de mettre en oeuvre. ­ ­ C'est à partir de ces constats que la mission a structuré les recommandations émises dans le présent rapport sous la forme d'un plan d'action qui s'articule autour de quatre grands axes : 1 ­ Affirmer le rôle majeur des schémas de cohérence territoriale (SCoT) dans l'application des dispositions particulières au littoral et renforcer le rôle d'encadrement des documents d'aménagement de rang supérieur (DTA, SAR) lorsqu'ils existent. L'objectif est de favoriser la traduction, à une échelle pertinente, des dispositions particulières au littoral. Pour que les services puissent actualiser et harmoniser leurs outils de connaissance et d'analyse dans le cadre de leur association à l'élaboration ou la révision de ces documents, il conviendrait qu'ils disposent d'une doctrine administrative actualisée, complétée et tenue à jour. 2 - Assurer la sécurisation juridique de l'application des dispositions particulières au littoral en engageant une analyse systématique de compatibilité des plans locaux d'urbanisme (méthode et leviers d'action). Cet objectif implique de la part des services une analyse systématique de compatibilité de ces documents d'urbanisme qui ne peut être menée à bien qu'en y associant étroitement les collectivités. Pour éviter les difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre de la circulaire de mars 2006 qui poursuivait ce même objectif, un travail préliminaire de définition de la démarche et des méthodes à suivre par les services serait à engager par l'administration centrale en s'appuyant sur les actions déjà Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 7/137 engagées dans certaines régions et départements. Une gestion stratégique du contentieux serait également à mettre en place afin de pouvoir apporter aux services les éclairages juridiques indispensables à une telle action. 3 - Organiser le pilotage du plan d'action et l'animation des services de l'État en charge de le mettre en oeuvre. La difficulté d'identifier un interlocuteur chargé du suivi de la politique littorale au niveau de l'administration centrale, soulignée par l'ensemble des services, et l'absence d'animation des services ont grandement contribué à développer les disparités d'application de la loi Littoral. La mission propose que soit nommé un chef de projet auprès du DGALN en charge de préciser et de porter le plan d'action proposé, d'organiser le soutien méthodologique indispensable aux services sur la base d'un travail en réseau impliquant le niveau régional. Au niveau national, il veillerait tout particulièrement à associer à la définition, comme à la mise en oeuvre, de ce plan les principaux acteurs concernés (ministère de l'Intérieur, Conseil national de la mer et du littoral, grandes associations d'élus) et des représentants des services. Un tel plan d'action ne saurait toutefois répondre à l'attente des services de disposer d'une vision stratégique de l'aménagement du littoral à long terme, leur permettant d'inscrire leurs actions dans une politique publique, clairement identifiée et porteuse des principes du développement durable. Il s'agit là d'un autre chantier, autrement plus complexe, qui reste à ouvrir par l'administration centrale en mobilisant toutes ses composantes. La mission propose cependant de l'intégrer dans le plan d'action comme quatrième grand axe. 4 - Redonner une lisibilité d'ensemble à la politique d'aménagement du littoral, en mettant en perspective les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme avec la future stratégie nationale de la mer et du littoral. Le contexte actuel d'élaboration de la stratégie nationale de la mer et du littoral serait en effet favorable à la relance d'une politique spécifique d'aménagement du littoral et offre l'occasion de développer ainsi une vision stratégique orientant la politique à mettre en oeuvre en partenariat avec les collectivités territoriales. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 8/137 Introduction Objet et champ de l'audit La loi n°86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite « loi Littoral », a été adoptée à l'unanimité par le Parlement, il y a maintenant plus de 25 ans. Depuis cette date, alors que l'attractivité du littoral - plus que jamais qualifié d'espace rare, fragile et convoité - n'a fait que se confirmer et se renforcer, le contexte géographique et le cadre institutionnel d'application de cette politique d'aménagement spécifique ont profondément évolué. La dynamique économique et démographique du littoral s'est accompagnée d'un changement d'échelle des espaces de peuplement et d'une artificialisation accélérée des sols. Les écosystèmes littoraux ont subi de nombreuses mutations dont l'ampleur n'est ni maîtrisée, ni précisément mesurée. Plusieurs grandes lois ont transformé le cadre de la planification spatiale, modifié les règles de gestion des territoires, instauré des formes nouvelles de gouvernance. Pourtant, en élevant au niveau législatif dès le milieu des années 1980 des principes visant à concilier la mise en valeur du littoral (entendre son développement) et la préservation de ses espaces naturels, mais aussi agricoles, pastoraux, forestiers et maritimes, la loi Littoral s'affichait comme un texte précurseur en matière d'aménagement intégré et de développement durable. Bien que reprenant pour l'essentiel des instructions aux services datant de 1976, puis les dispositions d'une directive d'aménagement du territoire de 1979, son application dans le cadre de la décentralisation de l'urbanisme intervenue en 1983 n'a pas été sans soulever de nombreuses questions arbitrées, faute de déclinaison locale adaptée, par la jurisprudence administrative. Dressant ce constat, le Grenelle de l'environnement comme celui de la mer ont réaffirmé la nécessité que soit élaborée une stratégie nationale visant à une gestion intégrée de la mer et du littoral déclinée par grande façade maritime. Dans ce contexte, le ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement (MEDDTL)1 a souhaité connaître la manière dont les services de l'État veillent aujourd'hui à l'application de la loi Littoral. De nombreux acteurs, au premier rang desquels des élus, mais également des acteurs professionnels, dénoncent en effet la grande hétérogénéité de son application sur le terrain, d'un département, d'une région à l'autre. Il ne s'agit pas dans le présent audit de dresser le bilan de l'application de la loi Littoral et des mesures spécifiques prises en faveur du littoral. Celui-ci, conformément à la loi n°2005-157 relative au développement des territoires ruraux, devrait être engagé prochainement à l'initiative du gouvernement. 1 Aujourd'hui, le ministère de l'égalité des territoires et du logement (METL) en charge de l'urbanisme, mais également le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie (MEDDE) en charge de la politique de protection du littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 9/137 La direction de l'habitat, de l'urbanisme et du paysage (DHUP) souhaitant également que cet audit sur les modalités d'application de la loi Littoral soit exhaustif et donc mené au niveau de chaque département, il a été convenu avec le commanditaire, du moins dans une première phase, de le cibler sur « les dispositions particulières au littoral »2 relevant du code de l'urbanisme. Ces dispositions traduisent la volonté du législateur d'organiser le développement du littoral en limitant l'urbanisation dans les espaces proches du rivage, en l'orientant vers l'arrière-pays et en réservant ces espaces aux activités maritimes et traditionnelles, tout en assurant la protection des milieux et paysages remarquables et caractéristiques du littoral. En ciblant ainsi le champ de l'audit sur les seules « dispositions particulières au littoral » du code de l'urbanisme, la mission est consciente de n'aborder qu'une partie de l'approche « développement durable » de la loi Littoral, y compris dans son application par les services de l'État, mais l'analyse des modalités d'application de l'ensemble des 43 articles de la loi Littoral3 aurait exigé un travail particulièrement lourd auprès des services déconcentrés : ­ en raison de la multiplicité des domaines concernés (qualité de l'eau, gestion du domaine public maritime, aménagements portuaires, police de la baignade, ...) en raison également de l'importance des évolutions réglementaires intervenues dans ces différents domaines. législatives et ­ Des missions complémentaires pourront plus pertinemment auditer l'application des différentes dispositions aujourd'hui éclatées dans de nombreux codes. Ainsi sont d'ores et déjà programmées pour 2012 des missions portant sur le développement des grands ports maritimes ou encore sur la gestion intégrée pour la mer et le littoral ; elles viendront utilement compléter la présente mission. De même, pour des raisons d'efficacité, il a été convenu que l'audit sur l'application de la loi Littoral dans les départements d'outre-mer ferait l'objet d'une mission spécifique. En revanche, il est paru pertinent d'intégrer au présent audit les services concernés par les lacs de plus de 1 000 ha dont les communes riveraines sont également soumises aux dispositions particulières de la Loi littoral. Enfin, la mission a circonscrit ses investigations à la délivrance des actes d'urbanisme, sans traiter de l'intervention de l'Etat dans le champ de la police de l'urbanisme 4. 2 Dispositions insérées dans le titre V « Dispositions particulières à certaines parties du territoire » du livre Ier « Règles générales d'aménagement et d'urbanisme » du code de l'urbanisme. Initialement 42 articles. Cas des constructions illégales, sans autorisation ou non conformes à l'autorisation accordée. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 10/137 3 4 Méthode de travail Cet audit a été inscrit au programme 2011 du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). Désignée en mars 2011 et actualisée en mai 20125, la mission d'audit a élaboré, après s'être entretenue avec les principaux services de l'administration centrale concernées (DGALN - DHUP et DEB, CGDD), une note de cadrage annexée6 au présent rapport. Elle a également procédé à l'examen des textes initiaux et en vigueur, des nombreux rapports et documents consacrés à l'application de la loi Littoral7. La mission s'est ensuite constituée autour de Gérard Ruiz, coordonnateur, en comité de pilotage pour animer l'équipe d'auditeurs composée de membres de missions d'inspection générale territoriale (MIGT) et de sections du CGEDD8. Dans ce cadre, ont été mis au point un guide d'entretien, ainsi qu'une grille d'analyse portant sur l'application des dispositions particulières au littoral, adressée aux services avant l'entretien. Quarante-deux services dont les vingt-six directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) ainsi que six directions départementales des territoires (DDT) en charge de l'application de la loi Littoral autour des grands lacs, ont été audités 9. Ces entretiens ont fait l'objet de comptes rendus élaborés à partir du guide d'entretien. Les MIGT ont également produit des rapports de synthèse, soit par département, soit par région, voire les deux. À partir de l'examen de tous ces documents, le comité de pilotage, coordonné par Annick Hélias10, a rédigé la présente synthèse générale de l'audit. Yves Malfilatre (section 3) et Mireille Bensussan (MIGT n° 5) en ont assuré la relecture. Alain Lecomte, président de la 3ème section « aménagement durable des territoires », a supervisé l'ensemble de l'audit. Rapport de synthèse De la compréhension de la finalité et des objectifs de la politique publique qu'elle porte, dépend la bonne application d'une loi. Aussi, la mission a-t-elle fait le choix de les rappeler dans la première partie de son rapport, comme de donner les éléments de 5 6 7 8 9 10 Cf. lettres de mission en annexe 1. Cf. note de cadrage en annexe 2. La liste des principaux textes et rapports figure à la fin de la note de cadrage. Cf. liste des auditeurs en annexe 3. Cf. liste des services audités en annexe 3. A la suite du départ en retraite du coordonnateur, Gérard Ruiz. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 11/137 contexte qui expliquent, à son sens, une grande part des difficultés rencontrées dans l'application de la loi Littoral. Bien que l'audit soit ciblé sur les modalités d'application des seules dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme, la mission a souhaité interroger les services sur leur perception de la politique nationale du littoral portée par l'État et sur l'existence d'une vision stratégique de son développement au niveau local. La mission s'est ensuite attachée à analyser les méthodes et outils développés par les services pour l'application de ces dispositions particulières dans les documents d'urbanisme et lors de l'instruction des autorisations individuelles. La seconde partie du rapport en rend compte. Dans une troisième partie, sont mises en exergue les difficultés rencontrées par les services pour l'application des dispositions particulières. Les principales recommandations sont regroupées dans une quatrième partie. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 12/137 1. Perçue comme une politique de protection de l'environnement, la politique littorale portée par la loi de 1986 a perdu une grande partie de sa lisibilité Des entretiens avec les services déconcentrés ressort un premier constat général : les services de l'État ne sont plus porteurs d'une politique spécifique d'aménagement en faveur du littoral. Si la loi Littoral est bien connue des services, c'est uniquement par le biais des dispositions particulières du code de l'urbanisme et des principales règles qui en découlent comme la protection des espaces remarquables, l'inconstructibilité de la bande des 100 m ou encore la constructibilité en continuité des espaces urbanisés existants. La finalité et les objectifs de cette politique d'aménagement spécifique au littoral ne sous-tendent plus l'action des services de l'État auprès des collectivités et des acteurs socioprofessionnels. C'est pourtant de leur compréhension que dépend la bonne application de cette loi. 1.1. Quelques rappels sur ce qu'on appelle encore aujourd'hui « la loi Littoral » 1.1.1. Une politique d'aménagement équilibré du littoral portée par quelques grands principes « Le littoral est une entité géographique qui appelle une politique spécifique d'aménagement, de protection et de mise en valeur. La réalisation de cette politique d'intérêt général implique une coordination des actions de l'État et des collectivités locales, ou de leurs groupements, ayant pour objet : la mise en oeuvre d'un effort de recherche et d'innovation... la protection des équilibres biologiques, la lutte contre l'érosion, la préservation (...) du patrimoine, la préservation et le développement des activités économiques liées à la proximité de l'eau (pêche, cultures marines, activités maritimes...), le maintien ou le développement dans la zone littorale des activités agricoles ou sylvicoles, de l'industrie, de l'artisanat et du tourisme. »11 La politique littorale, définie en 1986, se voulait donc une politique d'aménagement équilibré entre protection et développement. Elle se traduisait par une organisation volontariste de l'utilisation de l'espace littoral sur la base de quelques grands principes d'aménagement. L'objectif du législateur était de limiter l'urbanisation en front de mer et sa privatisation, en dégageant des perspectives et des accès au public, sans pour autant interdire aux communes littorales tout développement mais en le localisant vers l'arrière-pays et en veillant toujours à limiter le mitage des espaces naturels, agricoles et forestiers. 11 Art. 1 de la loi Littoral, abrogé par l'ordonnance n°2000-914 et (re)créé dans le code de l'environnement (Art. L.321-1). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 13/137 1.1.2. Une politique littorale mise en oeuvre par l'État dès les années 1970 La politique nationale en faveur de cet espace spécifique ne date toutefois pas du vote de cette loi. À partir des années 70, face à la forte pression qui s'exerçait sur le littoral, l'État a défini des stratégies d'aménagement et engagé des programmes lourds (schéma Racine en Languedoc, schéma MIACA - mission interministérielle d'aménagement de la côte aquitaine). En 1971, le comité interministériel d'aménagement du territoire (CIAT) lançait un groupe d'études chargé de faire un rapport sur les perspectives à long terme du littoral français. Ce sera le rapport « Picquard »12 paru à la Documentation française en 1974. Parallèlement, l'élaboration de plusieurs schémas régionaux d'aménagement du littoral était engagée par les directions régionales de l'équipement (DRE), en Bretagne, en Normandie, sur la côte ouest-atlantique. Cette politique du littoral se traduira en 1976 13 par une instruction ministérielle, puis en 1979, face à son insuffisance juridique, par une directive d'aménagement national 14. Ces deux textes comportaient déjà la plupart des dispositions urbanistiques de ce que sera la future loi Littoral. La décentralisation rendra la directive de 1979 inopérante. Si la loi du 7 novembre 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État soumettait bien les documents d'urbanisme à une obligation de compatibilité avec les dispositions des directives d'aménagement national en qualifiant celles-ci de prescriptions nationales au sens de l'article L-111-1-1 du code de l'urbanisme, la valeur juridique de la directive de 1979 sera contestée devant les tribunaux, notamment son opposabilité aux tiers15. L'élaboration d'une loi spécifique devenait dès lors incontournable pour maintenir l'existence d'une politique d'aménagement spécifique au littoral. 1.1.3. Une loi cadre d'aménagement et d'urbanisme combinant grands principes et prescriptions Dans le contexte de la décentralisation de l'urbanisme, la transformation d'une directive d'aménagement national en loi prescriptive n'était pas évidente. Intervenant après la loi Montagne votée en 1985, la loi Littoral sera votée à l'unanimité, après s'être enrichie de nombreuses autres dispositions relatives à la qualité des eaux, à la gestion du domaine public maritime et fluvial, à la répartition des compétences entre collectivités et État et, surtout, après avoir réaffirmé son objectif d'aménagement 12 Parmi les 10 mesures alors proposées, la plupart d'entre elles ont été mises en oeuvre dont la plus emblématique reste la création du Conservatoire du littoral et des rivages lacustres. Elles gardent cependant toute leur actualité (formation des agents, élaboration de plans intégrés d'utilisation du littoral... intercommunaux !). L'instruction du 4 août 1976 concernant la protection et l'aménagement du littoral proposait 3 orientations : éviter l'urbanisation linéaire du bord de mer, aménager en profondeur, prévoir des coupures naturelles. Le Conseil d'État lui a dénié tout caractère réglementaire. Le décret n° 79-716 du 25 août 1979 approuvant la directive d'aménagement national relative à la protection et l'aménagement du littoral, dite directive « d'Ornano » prévoyait la préservation d'une bande de 100m et d'autres mesures de protection. Conseil d'État ­ 17 décembre 1986 ­ Recueil Lebon. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 14/137 13 14 15 Rapport n°007707-01 équilibré entre développement et protection. À ce titre, mais aussi à bien d'autres (accès du public au littoral, place spécifique réservée à la pratique du camping, coordination des parties prenantes, dimension interprétative et évaluative...), elle peut être considérée comme un texte précurseur pour l'application des principes du développement durable. C'est aussi par un subtil équilibre négocié que les « dispositions particulières au littoral » seront tout à la fois opposables aux documents d'urbanisme, dont l'élaboration est désormais de la compétence des collectivités locales et de leurs groupements, et à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, installations et travaux divers16, ce qui reste exceptionnel dans le domaine de l'urbanisme17 et lourd de conséquences en matière de contentieux. 1.1.4. Une loi cadre dont les modalités d'application seront en fait très peu précisées par des prescriptions particulières adaptées aux spécificités des littoraux français Pour prendre en compte la diversité des littoraux français mais aussi la compétence en aménagement du territoire nouvellement partagée entre l'État et les régions, le législateur avait prévu que des prescriptions particulières à certaines parties du territoire pouvaient préciser les conditions d'application des dispositions particulières au littoral. « Ces prescriptions sont établies par décret en Conseil d'État après avis ou sur proposition des conseils régionaux intéressés et après avis des départements et des communes ou groupements de communes concernées. »18 Aucune initiative ne sera prise en ce sens, ni par les régions, ni par l'État, qui tardera même à publier les décrets d'application prévus par la loi, rendant la mise en oeuvre de la loi incertaine durant plusieurs années. Il en sera ainsi du décret de 1989 19 fixant la liste des espaces et milieux à protéger et surtout du décret fixant la liste des communes riveraines des estuaires et deltas qui ne sera publié qu'en 2004 20. Le décret qui devait fixer la liste des communes participant aux équilibres économiques et écologiques littoraux ne sera, quant à lui, jamais pris. Il aurait visé à appliquer les dispositions particulières au littoral à des entités géographiques littorales cohérentes dépassant l'espace constitué par les seules communes littorales. 16 17 Art. L.146-1 du code de l'urbanisme. En effet, seules les prescriptions particulières à certaines parties du territoire édictées par les lois Littoral, Montagne et Aérodromes ont ce double caractère d'opposabilité. Il en est également ainsi des directives territoriales d'aménagement (DTA) et du plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC). Art. L.146-1 (version initiale de la loi Littoral). Décret n°89-694 du 20 septembre 1989 portant application des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral. Décret n°2004-311 du 29 mars 2004 fixant la liste des communes riveraines des estuaires et des deltas considérées comme communes littorales (codifié à l'article R.312 du code de l'environnement). 18 19 20 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 15/137 Nous y reviendrons en examinant les difficultés posées par le champ d'application des dispositions particulières au littoral. ­ Les possibilités ouvertes par les DTA mais affaiblies par les DTADD Ce n'est en fait qu'avec la création des directives territoriales d'aménagement (DTA) 21, en 1995, que l'État utilisera la possibilité offerte par la loi Littoral de 1986 de préciser les modalités d'application des dispositions particulières en matière d'urbanisme. Sur les 6 DTA aujourd'hui approuvées, 4 concernent le littoral. Nous analyserons dans la partie 2 leur apport. Avec les lois Grenelle de 2009 et 2010, les DTA - sans être supprimées - sont remplacées par des directives territoriales d'aménagement et de développement durables (DTADD) ; celles-ci ne sont plus opposables aux documents d'urbanisme, ni aux travaux, constructions et opérations diverses des personnes publiques et privées 22 comme le sont encore les DTA approuvées maintenues en vigueur. ­ Les perspectives en devenir des SCoT et des SMVM Les schémas de cohérence territoriale (SCoT) apparaissent désormais, du moins en métropole et nonobstant la spécificité Corse 23, comme les seuls documents d'urbanisme aptes à décliner les principes d'un « aménagement équilibré » sur le littoral, les documents d'encadrement de niveau supérieur étant généralement des documents de planification thématique. Généralement, car il existe en fait un autre outil d'aménagement pouvant décliner territorialement les dispositions de la loi Littoral, les schémas de mise en valeur de la mer (SMVM). Créés par la loi de 1983 relative à la répartition des compétences entre l'État et les collectivités 24, renforcés par la loi Littoral (article 18), ils précisent et organisent sur une entité géographique et maritime cohérente la vocation des espaces concernés, arbitrent les conflits d'usage et proposent les mesures pour y remédier. Successeurs des schémas d'aptitude et d'utilisation de la mer (SAUM), ils permettent désormais à l'État, propriétaire et gestionnaire du domaine public maritime, d'imposer des prescriptions, y compris sur les espaces terrestres attenants, dès lors qu'elles sont nécessaires à la préservation du milieu marin et littoral. Mais l'État peine à élaborer ces schémas et seuls 4 sur les 11 engagés sont à ce jour approuvés25. La loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux 21 Loi d'orientation du 4 février 1995 pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT). Les DTA sont ni plus, ni moins que des prescriptions particulières à certaines parties du territoire au sens de l'article L.111-1-1 initial du code de l'urbanisme mais qui sera à cette occasion fortement remanié. Dès lors que les DTA précisent les modalités d'application des dispositions particulières du littoral (Art. L.146-1 du code de l'urbanisme). Le plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC) et, jusqu'à l'approbation de celui-ci, le schéma d'aménagement de la Corse ont valeur de SCoT. Il en est de même des schémas d'aménagements régionaux (SAR) des régions d'outre-mer (Art. L.122-2 du code de l'urbanisme). Mais c'est le décret du 5 décembre 1986 qui en définit le contenu et les modalités d'élaboration. Il est aujourd'hui remplacé par le décret 2007-1586. L'étang de Thau (1995), le bassin d'Arcachon (2004), le golfe du Morbihan (2006), le Trégor-Goëlo (2007). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 16/137 22 23 24 25 Rapport n°007707-01 en a simplifié la procédure d'élaboration et modifié le pilotage qui n'est plus exclusivement État. Ils peuvent désormais être intégrés dans un SCoT par le biais d'un chapitre individualisé avec toutefois le risque de perdre leur cohérence géographique et écosystémique et sans qu'il soit certain que les établissements publics de coopération intercommunale, porteurs des SCoT, se saisissent de cette opportunité à l'échelle et avec l'ambition appropriées. Nous verrons que l'apport des SMVM, autonomes ou intégrés dans les SCoT, reste modeste dans la déclinaison des dispositions particulières au littoral dans les documents d'urbanisme locaux. ­ L'hypothèse sans suite des schémas d'aménagement interrégionaux du littoral Pour être exhaustif dans le rappel des documents pouvant décliner les dispositions de la loi Littoral, peuvent être également évoqués les schémas interrégionaux du littoral. Créés par la loi de 1995 déjà citée 26, ils visent à faciliter la mise en oeuvre d'une politique d'aménagement spécifique au littoral. Ces schémas, s'inspirant des schémas interrégionaux de massif de la loi Montagne de 1985, ont pour objectif d'assurer la cohérence des projets d'équipement et des actions de l'État et des collectivités ayant une incidence sur l'aménagement et la protection du littoral. Ils doivent, bien sûr, le faire en respectant le futur schéma national d'aménagement et de développement du territoire (SNADT) ainsi que les schémas régionaux (SRADT). Ces outils de planification intermédiaire ne seront jamais mis en chantier. 1.2. Par défaut de textes réglementaires, des modalités d'application progressivement définies par la jurisprudence administrative 1.2.1. La planification au coeur du droit du littoral Comme le souligne Loïc Prieur27, « la planification est au coeur du droit du littoral » ; ses principes directeurs doivent en effet être mis en oeuvre dans les documents d'urbanisme. Aussi, la directive de 1979 prévoyait-elle la généralisation sur le littoral des plans d'occupation des sols (POS). Elle en avait même fixé le délai : « Les communes disposeront toutes, dans un délai de quatre ans, de documents d'urbanisme rendus publics ou approuvés, conformes aux prescriptions ci-dessus. » La décentralisation de 1983 va profondément modifier les modalités d'application de ces dispositions spécifiques au littoral. Les communes deviennent pleinement compétentes pour l'élaboration et la révision de leurs documents d'urbanisme. Il revient désormais aux services de l'État, non plus d'appliquer, mais de veiller à la bonne application par les collectivités des dispositions particulières au littoral, du moins pour les communes disposant d'un POS. Plus de 25 ans après le vote de la loi, qu'en est-il ? 26 27 Article 7 complétant la loi littoral en y ajoutant un article 40.A. Loïc Prieur est juriste, avocat au barreau de Brest ; il a écrit un ouvrage de référence sur « la loi Littoral » - Éditions Techni.Cités. Novembre 2005, réédité en 2008. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 17/137 Ainsi que le précisait, et le précise toujours, la loi Littoral dans son article premier 28, la réalisation de cette politique d'intérêt général implique une coordination des actions de l'État et des collectivités locales ou de leurs groupements. 1.2.2. Des collectivités locales peu empressées de mettre en oeuvre les dispositions particulières du littoral et de rendre compatibles leurs documents d'urbanisme Comme le met en évidence l'analyse des données recueillies lors du présent audit, si la quasi-totalité des communes littorales dispose aujourd'hui d'un document d'urbanisme, elles sont encore nombreuses à ne pas l'avoir rendu compatible avec les dispositions particulières au littoral. Les raisons en sont bien connues des services : les élus estiment difficiles de remettre en cause ce qu'ils considèrent comme des droits acquis en termes de constructibilité, et donc de valeur foncière, au travers de documents d'urbanisme dûment approuvés. Dans leur grande majorité, ils ne souhaitent pas pour autant l'abrogation de la loi Littoral dont ils jugent les grands principes encore aujourd'hui pertinents. Ce qu'ils contestent, ce sont les interprétations qui en sont faites localement par les services de l'État, voire par la jurisprudence, faute de textes réglementaires les ayant précisés. Nous y reviendrons plus longuement dans la deuxième partie du rapport. 1.2.3. Des services de l'État déstabilisés par la décentralisation de l'urbanisme mais aussi par une loi dont la mise en oeuvre des principes exige appréciation et justification La loi Littoral a souvent été critiquée pour son imprécision et pour l'insécurité juridique qui en résulte. Loïc Prieur, dans son ouvrage précité, estime cette critique cependant non pertinente. Le code de l'urbanisme, bien avant le code de l'environnement, met fréquemment en oeuvre de tels principes généraux comme « gérer le sol de façon économe », « assurer la protection des milieux naturels et des paysages », « assurer sans discrimination des conditions d'habitat » et utilise des notions comme celles d'« espaces urbanisés », de « sites pittoresques ». Ce type de principes et de notions, dont l'application nécessite une interprétation, est aujourd'hui généralisé dans le droit français, sous l'influence notamment du droit européen mais aussi international. Leur application ne repose pas en effet sur des objectifs de moyens - dont la fixation des normes relève des autorités publiques compétentes - mais sur des objectifs de résultats dont l'appréciation repose sur une argumentation arbitrée, si nécessaire, par les tribunaux. En l'absence de doctrine administrative et d'instructions spécifiques, du moins jusqu'en 199129, l'interprétation des dispositions particulières au littoral par les services de l'État 28 29 Aujourd'hui, codifié (art. L.321-1 ­ II du code de l'environnement). A l'exception notable des espaces remarquables qui feront l'objet d'un décret et d'instructions dès 1989. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 18/137 Rapport n°007707-01 et leur action pour veiller à leur bonne application par les collectivités ont longtemps été hésitantes, incertaines. La décentralisation de l'urbanisme n'a pourtant pas privé l'État de prérogatives importantes dans le cadre de sa mission de contrôle de légalité, renforçant de facto le poids de l'association de ses services à l'élaboration des documents d'urbanisme. La mise à disposition des services de l'Etat auprès de nombreuses communes littorales pour l'application du droit des sols et parfois pour l'élaboration des documents d'urbanisme leur donne encore une obligation de conseil aux collectivités. La mise en oeuvre de ces moyens d'actions par les services sera examinée dans la partie 2. ­ La circulaire de 1991 : bâtir une position de l'État local sur la base d'études permettant aux services de développer éléments d'appréciation et argumentaires, en toute transparence avec les collectivités30 Après une première circulaire en date du 10 octobre 1989 portant sur l'application de l'article L.146-6 relatif aux espaces remarquables et les aménagements légers 31, l'instruction interministérielle du 22 octobre 1991 demandait aux préfets de veiller plus fermement à la mise en compatibilité des POS avec les dispositions de la loi Littoral. Elle n'aura pas les résultats escomptés, faute de doctrine administrative clairement affichée. Il lui est notamment reproché de ne pas s'appuyer suffisamment sur la jurisprudence naissante et nombreuses seront les communes qui ne mettront pas en révision leur POS, considéré hier légal et aujourd'hui non compatible avec la loi par les mêmes services. De plus, s'il est bien de la compétence des services de l'État dans le cadre du « porter à connaissance » de rappeler aux maires et présidents d'EPCI que les dispositions particulières au littoral doivent être appliquées dans leur territoire, certains juristes estiment qu'il n'est pas de la compétence de l'État de les interpréter. Une interprétation erronée de la part de ses services pourrait de plus être de nature à engager sa responsabilité solidairement avec celle de la collectivité concernée en cas de recours de tiers. De son analyse des textes, renforcée par son examen des modalités d'intervention des services de l'État, la mission estime indispensable de nuancer une telle position, car elle ne voit pas comment ces derniers pourraient assurer leurs missions de conseil auprès des collectivités locales et de contrôle de légalité sur d'éventuelles erreurs d'appréciation, sans avoir eux-mêmes procédé à une interprétation des grands principes de la loi et à leur déclinaison sur le terrain. De plus, cette interprétation par les services de l'État est incontournable dès lors que l'accord du représentant de l'État est sollicité pour l'application d'une des dispositions. Ainsi, la circulaire de 1991 demandait expressément aux services de l'État d'engager « la conduite d'études préalables, à la fois géographiques et thématiques sur des aires territoriales adaptées aux enjeux (...). Ces études sont à mener avec une 30 31 Le recueil de l'ensemble des circulaires citées dans ce rapport du CGEDD est disponible au CGEDD. Décret n°89-694 du 20 septembre 1989 relatif à l'application des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral (art. C. urb R.146-1 et R.146-2). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 19/137 préoccupation de transparence vis-à-vis des partenaires locaux et des acteurs de l'aménagement auxquels vous communiquerez les résultats. » Les ministres signataires poursuivaient : « vous trouverez dans ces études les éléments d'appréciation et les argumentaires qui permettront de bâtir une position de l'État sur les conditions du respect des principes fixés par la loi. » ­ La circulaire de mars 2006 : procéder à une analyse des risques juridiques des documents d'urbanisme, POS/PLU mais aussi SCoT, et conseiller aux collectivités d'engager leur révision si nécessaire32 Intervenant 20 ans après le vote de la loi et après la publication des décrets d'application de 2004, la circulaire du 14 mars 2006, tout en réaffirmant la pertinence des objectifs de la loi Littoral et la nécessité de disposer d'une vision à long terme, rappelle la nécessité pour l'État de procéder à une analyse des risques juridiques liés à l'existence de documents d'urbanisme non compatibles avec les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme. Partant du constat que la mise en compatibilité des documents d'urbanisme ne progressait guère sur le terrain et que les demandes de mise en révision des documents d'urbanisme formulées par les préfets restaient sans suite, l'administration centrale se devait de trouver de nouvelles pistes d'action. Il ne s'agit donc plus seulement pour les services de l'État de veiller à la compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions de la loi lors de leur révision, ou encore de leur élaboration, mais d'exercer une sorte de « contrôle de légalité a posteriori » des documents d'urbanisme existants afin de réduire le contentieux sur les actes individuels considérés comme non compatibles avec les dispositions particulières au littoral bien que conformes à des documents d'urbanisme, eux-mêmes non compatibles. Nous analyserons la mise en oeuvre de ces circulaires par les services dans la partie 2 du rapport. 1.2.4. Une jurisprudence administrative dont le rôle est d'interpréter la loi A défaut de prescriptions particulières au sens de l'article L.111-1-1 précisant au niveau territorial les dispositions de la loi Littoral, le juge administratif a été conduit à exercer un très large pouvoir d'appréciation, incluant deux dimensions qu'il convient de bien distinguer : · · l'interprétation des dispositions (éléments de doctrine), l'appréciation des situations particulières (examen au cas par cas). De ce fait, il est devenu un acteur majeur de la protection du littoral. ­ Des principes d'aménagement éclairés par des jugements successifs fondés sur l'esprit de la loi Littoral 32 Le recueil de l'ensemble des circulaires citées dans ce rapport est disponible au CGEDD. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 20/137 Rapport n°007707-01 D'une façon pragmatique, sur la base d'analyses au cas pas cas, les juridictions administratives ont progressivement précisé les modalités d'application de la loi en dégageant des critères et des faisceaux d'indices, leur permettant ainsi de qualifier les espaces proches du rivage, de définir le principe d'extension limitée ou encore la notion de hameau. Ces critères ont généralement été déterminés en référence aux objectifs du législateur et le Conseil d'État, en procédant au contrôle de la qualification juridique des faits, a favorisé une application plus homogène des dispositions particulières de la loi sur l'ensemble du littoral, définissant ainsi progressivement une doctrine jurisprudentielle. Par défaut, et pour peu qu'ils en disposent, la jurisprudence administrative est donc devenue au fil du temps le « vade-mecum » des services de l'État en charge de veiller à l'application des dispositions particulières au littoral, se rapprochant en cela de la pratique du droit communautaire. ­ Un pouvoir d'appréciation exercé par le juge en faveur de la protection du littoral faute d'éléments motivés et justifiés en faveur d'un aménagement équilibré Toutefois, et ce n'est pas sans fondement, les dispositions particulières au littoral ont été interprétées par le juge administratif comme des dispositions de protection et non d'aménagement équilibré de l'espace littoral. En l'absence de vision d'ensemble d'un aménagement équilibré, argumenté et justifié conformément aux principes fixés par la loi, et validée par des prescriptions particulières au littoral au sens de l'ancien article L.111-1-1 ou dans des documents d'urbanisme (POS/PLU mais surtout SDAU/SCoT), voire en présence de documents eux-mêmes non compatibles à la loi, les tribunaux administratifs se sont trouvés confrontés à juger de la compatibilité de nombreuses opérations privées et même publiques aux dispositions particulières au littoral à une échelle très locale. Il en est résulté un contentieux particulièrement abondant, déstabilisant pour les collectivités locales mais également pour les services de l'État. La mise en oeuvre de la loi Littoral, et tout particulièrement des dispositions particulières du code de l'urbanisme, ne s'est pas faite sans heurts et des voix s'élèvent régulièrement pour en réclamer l'assouplissement. Toujours selon Loïc Prieur, « la politique jurisprudentielle des juridictions administratives relève, il est vrai, d'une rigueur que ne laissaient pas présager les termes de la loi ». De ce point de vue, la mission estime que les effets d'arbitrage des dispositions particulières au littoral par les jurisprudences seraient réduits par une meilleure justification des aménagements projetés, notamment au regard de leur localisation (examen de solutions alternatives), et cela très en amont, aux différentes échelles de planification. C'est bien ce à quoi doivent logiquement répondre les documents d'urbanisme, et tout particulièrement les SCoT. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 21/137 1.3. Une loi aujourd'hui éclatée entre de nombreux codes mais un socle de dispositions d'urbanisme qui a gardé toute sa force 1.3.1. Une loi éclatée dans de multiples codes qui a perdu de ce fait toute lisibilité du dispositif législatif correspondant Les 42 articles initiaux de la loi Littoral telle qu'elle a été adoptée en 1986 concernent des domaines nombreux et variés comme l'aménagement et l'urbanisme, mais également la qualité des eaux, la gestion du domaine public et fluvial, la réglementation des plages, le classement des communes touristiques en stations classées... Ils ont été regroupés en quatre titres et de nombreux chapitres dont un certain nombre d'articles sont aujourd'hui abrogés. Il est ainsi difficile aujourd'hui, en consultant ne serait-ce qu'un site de référence comme celui de Légifrance, de connaître les modifications survenues au cours du temps et sur quoi exactement ces articles portaient. La version en vigueur de la loi renvoie en effet sur de nombreux codes (code de l'urbanisme, code de l'environnement, code de la santé publique, code des communes, code du domaine de l'État, code général des impôts, code du tourisme...) dont l'évolution des articles dans le temps résulte bien souvent de lois modificatives sans grand lien avec une politique d'aménagement équilibré du littoral. La partie consacrée à l'urbanisme, et tout particulièrement l'article 3 de la loi, reste toutefois bien identifiable. Les lois et règles d'urbanisme étant déjà codifiées, l'article 3 insère dans ce code un nouveau chapitre consacré aux « dispositions particulières au littoral » (articles L.146-1 et suivants). 1.3.2. Mais un socle de dispositions particulières au littoral qui a relativement peu évolué dans le temps Malgré de nombreuses tentatives d'origine parlementaire, les modifications apportées à ces dispositions restent mineures. Pour la plupart d'entre elles, ces modifications résultent de difficultés rencontrées dans l'application de politiques sectorielles nouvelles se traduisant par des règlements incompatibles avec les dispositions de la loi et ont introduit dans la loi Littoral des procédures dérogatoires sans remettre en cause les dispositions elles-mêmes. Ainsi en a-t-il été pour respecter les règles relatives à l'assainissement des zones urbaines, ou encore la mise aux normes des élevages. La question se pose aujourd'hui pour les installations d'énergies renouvelables et, d'une façon plus générale, pour toutes installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), le législateur ayant expressément signifié sa volonté que leur soient appliquées les dispositions particulières au littoral (article L.146-1 du code de l'urbanisme). Cela ne signifie pas, comme trop souvent entendu, que la loi Littoral interdit de fait toute implantation d'ICPE dans les communes littorales, les textes régissant les ICPE exigeant généralement des distances de sécurité par rapport aux habitations. Si toute implantation isolée est interdite, de nombreuses ICPE peuvent être autorisées en Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 22/137 zones d'activités et en extension de celles-ci dans le respect de leur propre réglementation ou sous réserve de dérogations juridiquement acceptables. ­ La loi n° 94-112 du 9 février 1994 portant diverses dispositions en matière d'urbanisme et de construction (art. 8) a complété l'article L.148-8 en intégrant les stations d'épuration des eaux usées33 dans la liste des installations et aménagements non soumis aux dispositions particulières au littoral sous réserve que leur localisation soit due à une nécessité technique impérative. Cette « intégration » est toutefois assortie d'un dispositif dérogatoire et conditionnel supplémentaire (autorisation ministérielle, réponse aux seuls besoins de l'urbanisation existante) marquant ainsi la volonté du législateur d'en conserver le caractère exceptionnel. Plusieurs autres lois se sont penchées sur les problèmes spécifiques liés à la modernisation des activités agricoles, la règle de l'extension de l'urbanisation en continuité des agglomérations et villages sur l'ensemble du territoire communal (art. L.146-4 ­ I) interdisant de fait toute construction en dehors des sièges d'exploitation. Pour y répondre : · la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole (art. 109) a atténué, par dérogation, moyennant l'accord du préfet, l'obligation d'étendre l'urbanisation en continuité des agglomérations et villages au profit des installations agricoles incompatibles avec le voisinage des zones habitées ; · plus récemment, la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, dite loi DTR (art. 235 X) a réglé les problèmes posés par le nécessité de mettre aux normes certaines installations d'élevage mais, là encore, le législateur a veillé à ce que cette mise aux normes ne soit pas l'occasion d'accroître la pression sur l'environnement littoral (pas d'augmentation des effluents). Le même article de la loi DTR (art. 235 XI) a également complété l'article L.1464 par un paragraphe V précisant que « Les dispositions des II et III 34 ne s'appliquent pas aux rives des étiers et des rus, en amont d'une limite située à l'embouchure et fixée par l'autorité administrative dans des conditions définies par un décret en Conseil d'État. ». Cet amendement vise à soustraire de l'application de ces dispositions considérées comme trop contraignantes les littoraux aux côtes particulièrement découpées. Le décret d'application qui soulève beaucoup d'interrogations n'est pas encore paru35. La loi DTR par son article 187 a également modifié le champ d'application de la loi Littoral en complétant l'article L.145-1 du code de l'urbanisme relatif aux dispositions particulières à la montagne. Cet amendement visait à éviter l'application conjointe des lois Montagne et Littoral sur une même commune. Mais, renvoyant la définition de ces modalités à un décret, celui-ci n'a pas été ­ ­ ­ 33 34 Cet amendement a été introduit pour donner une base juridique à la station d'épuration de Toulon. Principes de l'extension limitée de l'urbanisation dans les espaces proches du rivage (II) et d'une bande littorale inconstructible (III). Cf. question parlementaire n°0516S publiée au JO du Sénat du 9 avril 2009 (p. 852) et échéancier d'application de la loi sur le site de Légifrance. 35 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 23/137 validé par le Conseil d'Etat. La loi Grenelle 2 a supprimé l'alinéa correspondant de l'article L.145-1.36 ­ La loi n° 2003-590 du 2 juillet 2003 « urbanisme et habitat » a précisé que la disposition sur les nouvelles routes de transit ne s'applique pas aux rives des plans d'eau intérieurs (article 37 modifiant l'art. L.146-7 du CU). La loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dite Grenelle 2 : · par son article 167, a modifié l'article L.146-4 ­ III (2e alinéa) levant l'interdiction de toute construction ou installation dans la bande littorale hors des espaces urbanisés dès lors qu'il s'agit de services publics ou d'activités exigeant la proximité immédiate de l'eau. Cette modification est en fait une précision permettant d'inclure sans ambiguïté dans cette dérogation « notamment les ouvrages de raccordement aux réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité des installations marines utilisant les énergies renouvelables » et de prévoir un décret d'application. Un projet de décret a été mis à la consultation du public en septembre 2011 mais n'est pas encore publié. · par son article 240, a ajouté un nouvel article L.146-6-1 créant les schémas d'aménagement de plage pouvant, à titre dérogatoire, autoriser le maintien ou la reconstruction d'une partie des équipements ou constructions existantes à l'intérieur de la bande de 100m dès lors que ceux-ci sont de nature à concilier les objectifs de préservation de la nature et d'organisation de la fréquentation du public. Cette disposition permet de clarifier des situations parfois difficiles à résoudre, concernant notamment l'aménagement ou la rénovation de sanitaires, de postes de secours... rendus nécessaires à proximité de plages fréquentées. ­ Il s'agit donc d'ajustements mineurs, qui reposent pour la grande majorité d'entre eux sur des procédures dérogatoires nécessitant l'accord du représentant de l'État et qui visent à concilier des législations dont certaines dispositions peuvent s'avérer contradictoires avec les dispositions particulières au littoral. Ils ne remettent pas en cause les objectifs fondamentaux poursuivis par la loi Littoral, à savoir le report de l'urbanisation en arrière du littoral et la lutte contre le mitage. Mais s'agissant d'amendements parlementaires, sans analyse d'impacts, leur application comme celle de nouvelles dispositions issues d'autres législations peuvent être source de nouvelles difficultés, ce que nous analyserons en partie 3 du présent rapport. Tels sont les éléments de contexte et de problématique retenus par la mission pour auditer les modalités d'application des dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme par les services de l'État. 36 Cf. annexe 6 : Le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 24/137 Rapport n°007707-01 2. Les modalités d'intervention des services dans la mise en oeuvre des dispositions d'urbanisme de la loi Littoral L'application de la loi Littoral a fait l'objet de plusieurs circulaires spécifiques qui ont précisé les prérogatives de l'État et l'action à mener par ses services vis-à-vis des collectivités locales, seules compétentes depuis la décentralisation pour élaborer les documents d'urbanisme, SCoT et PLU, et délivrer les autorisations d'urbanisme dès lors qu'elles disposent d'un PLU (sauf exceptions). Trois circulaires ont plus particulièrement nourri l'analyse faite dans le cadre de cet audit en fournissant un référentiel pour les actions entreprises dans les services : ­ La circulaire interministérielle du 24 octobre 1991 37, qui n'a pas été abrogée mais n'est plus identifiée dans les services, rappelle l'obligation pour l'État de garantir le strict respect des principes de la loi et souligne la nécessité d'harmoniser les positions de l'État et des collectivités, notamment pour la mise en compatibilité des documents d'urbanisme. La mobilisation des services sur des études géographiques et thématiques était demandée, ces études devant apporter tout à la fois des éléments d'appréciation et des argumentaires pour bâtir la position de l'État ; Les circulaires ministérielle du 14 mars 200638 et interministérielle du 20 juillet 200639, font par contre toujours référence dans les services, notamment celle de mars dont la cible prioritaire est la sécurité juridique des documents et actes d'urbanisme, la circulaire de juillet remettant en perspective les objectifs de la loi au regard des politiques nationales et européennes de protection et de préservation de l'environnement littoral ; ­ L'impact de ces circulaires sur la manière dont les services ont organisé leurs outils et documents de référence fait l'objet d'une analyse particulière (cf. 2.3). La circulaire ministérielle du 15 septembre 200540 relative aux espaces remarquables du littoral a également été analysée, tout particulièrement son volet portant sur les aménagements qui y sont autorisés. Préalablement, la mission s'est attachée à comprendre pourquoi, plus de 25 ans après la promulgation de la loi Littoral, ses dispositions particulières du code de l'urbanisme sont encore loin d'être prises en compte et intégrées dans tous les documents d'urbanisme et pourquoi il est encore fait grief aux services de l'État de son application hétérogène, alors même qu'ils ne sont plus, depuis la décentralisation qui a précédé le vote de la loi, les acteurs principaux de sa mise en oeuvre. 37 Cosignée par les ministres de l'intérieur, de l'équipement, de l'environnement, du tourisme et le secrétaire d'État à la mer. Signée par le ministre des transports de l'équipement, du tourisme et de la mer. Cosignée par les ministres de l'équipement et de l'écologie. Cette circulaire, abrogeant celle du 10 octobre 1989, fait suite à la publication du décret n°2004-310 du 29 mars 2004 relatifs aux espaces remarquables du littoral. 38 39 40 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 25/137 2.1. De quelle hétérogénéité parle t-on ? Ce grief d'application hétérogène de la loi Littoral fait par les élus aux services de l'État est à l'origine de la commande du présent audit. Cette hétérogénéité souvent mise en exergue pour caractériser les modalités d'application des dispositions particulières au littoral a donc fait l'objet d'une analyse transversale parallèle à l'analyse de ses modalités d'interprétation. Celle-ci répondait à un objectif simple : mieux comprendre ce que recouvre le grief d'hétérogénéité pour rendre plus pragmatiques les propositions formulées. Les éléments explicatifs recueillis dans le cadre de l'audit ont ainsi été regroupés en trois grandes familles. 2.1.1. Des priorités corrélées aux spécificités de chaque littoral La géographie du littoral et les pressions spécifiques à chaque territoire impactent nécessairement la sensibilité et l'action des acteurs locaux, dont font partie les représentants de l'État, et l'échelle de leurs priorités. ­ La géographie physique forme le facteur fondamental de la diversité des littoraux Les côtes sableuses, les falaises, les forêts littorales, les landes, les marais, les estuaires, les îles et péninsules... constituent autant de géomorphologies qui ont rapidement conditionné la géographie humaine et les caractéristiques de l'occupation de l'espace littoral et rétro-littoral à travers les époques (agriculture, pêche, conchyliculture, villes-ports, stations balnéaires...). Il en est notamment ainsi de l'implantation de l'habitat (groupé, dispersé, en retrait...) et des activités économiques traditionnelles. Or, ces caractéristiques se retrouvent indirectement liées à la formulation des dispositions particulières au littoral : il est évident que la règle d'urbanisation en continuité des agglomérations et villages interroge bien plus les territoires ayant un habitat dispersé que les autres, que la préservation des espaces remarquables n'a pas le même impact dans des territoires constitués de grands marais littoraux que dans des secteurs urbanisés ou des espaces de plaines agricoles cultivées jusqu'au rivage. ­ Principales responsables de l'application des dispositions particulières au littoral, les collectivités territoriales présentent également des contextes institutionnels et politiques extrêmement variés Les agglomérations constituées de longue date, ou plus récemment par l'effet de l'urbanisation résidentielle, les territoires ruraux encore vécus et gérés à l'échelle de petites communes, restées parfois en dehors de toute intercommunalité, les espaces de villégiature, de production agricole ou d'activités industrialisé-portuaires... forment une diversité qui ne peut être ignorée. De ce fait, la vision de l'aménagement et de la planification, mais également la mobilisation des moyens en ingénierie, ainsi que l'échelle et les moyens d'action de ces collectivités, vont extrêmement varier. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 26/137 Interlocuteurs de ces collectivités, les services de l'État ne peuvent qu'être conduits à adapter leur posture à la situation rencontrée. ­ Enfin, de la sociologie du littoral va principalement dépendre l'éventuelle émergence, ancienne ou plus récente, d'acteurs de la société civile Généralement constitués en organisations socio-professionnelles ou en associations, ces acteurs vont se saisir, selon leurs sensibilités et intérêts, des problématiques de l'urbanisation et de l'environnement littoral et se constituer en groupes de pression aptes à exploiter, si nécessaire, la dimension contentieuse que permettent les dispositions particulières au littoral. Ce type de « vigilance » voire d'interventionnisme de la société civile dans le débat sur l'application des dispositions particulières au littoral est extraordinairement varié d'une commune (voire d'un hameau ou quartier) à l'autre, selon l'existence ou non des acteurs concernés, ainsi que leur degré de motivation, et façonne en grande partie le contexte local, en fonction du risque contentieux qu'il génère. Dans la mesure où les collectivités territoriales en tiennent prioritairement compte dans leur stratégie, les services de l'État ne peuvent l'ignorer dans leur propre action. ­ Reste la manière dont l'État s'organise lui-même, en regard de déterminants propres à ses services Les services de l'État ne dérogent pas à cette règle de diversité qui trouve sa traduction à différents niveaux : · au niveau de l'importance accordée au littoral Le département du Nord qui ne dispose que de 35 km de littoral (pour moitié occupé par le port de Dunkerque) n'a pas les mêmes priorités que celui du Finistère avec ses 1250 km de côtes. Il en est de même pour les régions qui n'ont qu'un seul département côtier ou une façade littorale très réduite ; · au niveau de la détermination des enjeux prioritaires La catastrophe Xynthia a eu une incidence directe sur la prévention des risques qui a, pour le moment, supplanté sur les littoraux les plus vulnérables les autres priorités ; · au niveau de l'antériorité des réflexions La culture administrative relative à cette politique spécifique est plus ou moins ancienne. Certains services avaient engagé des réflexions sur l'espace littoral bien antérieurement à la loi Littoral : ­ le schéma de la mission interministérielle d'aménagement de la côte aquitaine de 1972, dit schéma MIACA, fait toujours référence pour les services et les élus du département des Landes ; Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 27/137 ­ il en est de même dans le Languedoc-Roussillon avec la Mission Racine de 1963 à 1983 et la Mission interministérielle d'aménagement du littoral du Languedoc-Roussillon (MIAL) dans la période 2001-2006 ; l'aménagement des rivages du Var et des Alpes-maritimes a donné lieu à de multiples contentieux sur les quelques espaces disponibles dans les années 90 qui, par leur valeur de jurisprudence, ont réduit les pressions ultérieures. ­ Pour d'autres services audités, la mobilisation n'a été effective qu'à partir des circulaires de mars et juillet 2006, les agents concernés ne disposant visiblement pas d'information sur les travaux menés par leurs prédécesseurs. La mission a été frappée par l'absence de mémoire administrative des services, hormis quelques exceptions, sur les démarches entreprises pour l'application de la loi Littoral, en particulier avant 2006. 2.1.2. Le littoral focalise des enjeux et des politiques publiques dont la mise en oeuvre est pour certaines complexe et qu'il n'est pas toujours évident de mettre en cohérence La loi Littoral de 1986 portait déjà les principes du développement durable en affichant pour ambition l'aménagement équilibré d'un espace limité et convoité, soumis à l'interaction terre-mer. Si l'objectif paraît simple, sa mise en oeuvre est d'une grande complexité, car l'essentiel de la pression foncière liée aux économies résidentielle et productive se porte encore dans les départements littoraux sur la frange littorale même si, parallèlement, le contexte socio-économique des différentes façades littorales et les attentes des Français en matière d'environnement ont largement évolué depuis 1986. Cette pression est cependant loin d'être uniforme. En Méditerranée par exemple, les pressions sur l'arrière-pays devenu « arrière-plage » sont tout autant difficiles à maîtriser face aux risques spécifiques (incendies de forêt notamment), aux difficultés d'accès et à la grande sensibilité des paysages, que sur le littoral. ­ Des politiques publiques multiples dont la déclinaison territoriale n'est pas toujours cohérente De par sa nature, le territoire littoral concentre les contraintes d'aménagement et l'application de multiples politiques nationales thématiques (prévention des risques, développement portuaire, protection d'espaces naturels sensibles, développement des énergies renouvelables...). Ses caractéristiques rendent plus complexe la mise en oeuvre de ces politiques publiques et cela, d'autant plus que les objectifs de certaines peuvent se révéler contradictoires. Les DDTM mentionnent ainsi : · « développer les énergies renouvelables et lutter contre le mitage du paysage littoral ; la loi Littoral exige la continuité du tissu urbain alors que ces installations sont interdites en zones urbanisées, ce qui se traduit par Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 28/137 Rapport n°007707-01 l'impossibilité juridique photovoltaïques » ; · d'y implanter des éoliennes ou des parcs « développer la mixité et limiter l'urbanisation littorale ; la raréfaction du foncier constructible y renchérit le prix des logements, rendant difficile la réalisation de logements sociaux » ; « développer les transports en commun sans créer de nouvelles voies à moins de 2 km » ; « maintenir les activités traditionnelles (agriculture, conchyliculture...) mais en limitant la modernisation des installations. » · · Les exemples sont nombreux et, même s'ils ne sont pas tous recevables aux yeux de la mission, ils sont largement exploités par les détracteurs de la loi. La focalisation sur les dispositions particulières au littoral masque le fait que la dimension interprétative de la loi conduit bien souvent à s'appuyer sur des éléments plus contraignants issus d'autres politiques (prévention des risques, conservation de la biodiversité...) mais dont la charge reste portée par la seule loi Littoral. A cela s'ajoute un sentiment d'iniquité territoriale, fortement ressenti dans les communes littorales et partagé par les services, sentiment nourri par le fait que les communes limitrophes, pour certaines aussi proches du littoral mais sans rivage, ne sont pas assujetties aux mêmes contraintes. ­ Des dispositions particulières au littoral qui servent de « variables d'ajustement » Les constats montrent donc que, si des contradictions réelles ou supposées apparaissent, c'est la loi Littoral qui est dans la plupart des cas stigmatisée, voire amendée, sans que soient toujours analysée l'origine réelle des difficultés rencontrées, étudiées suffisamment en amont les solutions alternatives, envisagés les marges d'appréciation et les dispositifs dérogatoires relevant des autres réglementations (exemple des dérogations possibles des règlements sanitaires départementaux pour l'implantation de bâtiments d'élevage nécessaires à la gestion d'espaces naturels protégés). La gestion de ces contradictions entre politiques publiques et définition des priorités locales relèvent, en ce qui concerne l'Etat, du pouvoir général d'appréciation des préfets. Il en est de même lorsque l'interprétation des dispositions particulières au littoral par une DDTM et son application à une situation donnée, à un cas précis, ne convergent pas avec celles d'une collectivité. Le dossier est généralement soumis à l'arbitrage du préfet. Ainsi, en fonction des problématiques territoriales (contexte économique, pressions sociales...), les modalités d'application des dispositions particulières au littoral retenues par les préfets peuvent différer de celles proposées par les DDTM et certains préfets n'hésitent pas à reconnaître qu'ils utilisent ces dispositions, celles-ci étant pour partie Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 29/137 interprétatives, comme « variables d'ajustement » dans les négociations à mener avec les collectivités. Quelques exemples de changements d'interprétation liés à la nomination d'un nouveau préfet ont également été signalés aux auditeurs, ce qui est difficile à gérer pour les services et déstabilise leur action qui doit, vis-à-vis des collectivités, s'inscrire dans la durée. L'hétérogénéité des situations constatées, d'un département à un autre, dans l'application de la loi Littoral ne peut donc ignorer le rôle d'arbitrage des préfets, ni le fait qu'en l'absence de doctrine administrative explicite, son application soit sujette à des interprétations différenciées avec, en arbitrage final, la justice administrative. 2.1.3. Les services ne disposent pas d'une « vision stratégique de l'État » sur le devenir du littoral Ce constat ressort de l'ensemble des entretiens. Depuis les circulaires de 2006, les services ne ressentent plus d'impulsion sur la thématique littorale de la part des services centraux, les réflexions engagées dans la cadre de l'atelier littoral national à partir de sites expérimentaux, proches de la démarche d'urbanisme de projet, n'éclairent pas la doctrine nationale et ne servent pas de référence pour l'application des dispositions particulières au littoral dans les documents d'urbanisme, ni pour l'examen des projets locaux. Les messages ministériels actuels sont très majoritairement sectoriels (protection des milieux naturels, prévention des risques, stratégie nationale de gestion du trait de côte...) et occultent la philosophie générale de la loi Littoral qui correspond à une politique spécifique d'aménagement, de protection et de valorisation de cette partie du territoire national. ­ Une réflexion essentiellement terrienne à l'échelle des SCoT Dans ce contexte d'absence de vision stratégique portée par l'État, malgré la circulaire interministérielle de juillet 2006, les plans d'action des services s'organisent en réponse (encouragés en cela par la circulaire de mars 2006) mais parfois aussi en anticipation des démarches de planification portées par les collectivités territoriales (SCoT, PLU). Dans ce cas, ils se limitent généralement à une lecture « terrienne » de l'espace littoral, insuffisamment prospective et assez ignorante des logiques économiques, notamment maritimes, en étant de ce fait peu porteurs des politiques de valorisation de l'interface terre-mer. Il en résulte des volets maritimes des documents d'urbanisme peu développés par les collectivités elles-mêmes, le volet « SMVM » peine à s'imposer dans les SCoT littoraux. Une première journée d'échanges « SCoT littoraux et Grenelle de la Mer » a été organisée le 11 mai 2011 afin d'échanger sur les moyens qui pourraient être mis en oeuvre pour développer la prise en compte des propositions du Grenelle de la mer dans les SCOT41. Les schémas de mise en valeur de la mer (SMVM), qui peuvent juridiquement préciser les modalités d'application des dispositions particulières au littoral, dès lors qu'elles sont nécessaires à la préservation du milieu marin et littoral, restent rares. Parmi les 41 « Le Grenelle de la mer ­ Deuxième rapport d'étape - 2009­2011 » (Références, mars 2012, CGDD). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 30/137 Rapport n°007707-01 quatre documents approuvés à ce jour, aucun ne s'est véritablement engagé dans cette voie (simple rappel des dispositions particulières au littoral et prise en compte des délimitations des espaces proches du rivage et des espaces remarquables arrêtées antérieurement par les services de l'État pour celui du Trégor-Goëlo, renvoi au SCoT pour celui du bassin d'Arcachon) ou alors l'a fait très prudemment (quelques prescriptions spécifiques dans celui du Golfe du Morbihan). ­ Une déclinaison des modalités d'application par les DTA généralement limitée à quelques dispositions particulières L'élaboration des directives territoriales d'aménagement (quatre des six DTA ont une façade littorale42) a souvent été l'occasion de réflexions élargies, mais aucune n'est allée jusqu'au bout de la logique de la loi Littoral en apportant tout à la fois une stratégie pour le littoral concerné et une interprétation des dispositions d'urbanisme de la loi directement applicables aux SCoT et PLU tel que le prévoyait explicitement l'article L.111-1-1 du code de l'urbanisme. La plupart d'entre elles se sont contentées d'identifier les espaces remarquables et les grandes coupures d'urbanisation et encore pas toujours sur l'ensemble des communes littorales concernées. Peu d'entre elles identifient les espaces proches du rivage. Les orientations et les objectifs relatifs au développement de l'urbanisme sur les communes littorales sont peu prescriptives et aucune DTA n'aborde la question d'un champ d'application géographique élargi pour le rendre plus cohérent. Paradoxalement, le projet de DTA des Alpes du Nord, qui n'a pas été approuvé mais avait donné lieu à une large concertation, envisageait des modalités d'application précises de la loi Littoral autour des grands lacs de plus de 1000 hectares compris dans son périmètre. ­ Un défaut d'animation transversale qui accentue l'hétérogénéité des postures locales Le défaut d'animation transversale par les services centraux a des répercussions sur l'hétérogénéité des « valeurs » portées localement. En l'absence de vision stratégique commune, si les lieux de débats inter-services sont insuffisants ou inexistants localement, la lecture des objectifs de la loi Littoral devient tributaire de l'expérience des agents et/ou du positionnement des services. Tout l'éventail des postures est alors possible, depuis la protection exclusive de l'environnement jusqu'à l'accompagnement du développement, réduit bien trop souvent à quelques projets communaux. Les services de l'État disposent donc très rarement d'une vision intégrée de l'aménagement du littoral, notamment parce que le littoral focalise une multiplicité de politiques publiques sectorielles, toutes prioritaires aux yeux des services directement concernés. Les débats sur la nécessaire transversalité engagés dans le cadre du Grenelle de l'environnement n'ont pas, pour le moment, mobilisé les services sur le terrain. Ces débat ont conclu sur la nécessité de définir une gestion intégrée et concertée pour la mer et le littoral (GIML) et d'élaborer une stratégie nationale de la mer et du littoral 42 Il s'agit des DTA des Alpes Maritimes, des Bouches-du-Rhöne, de l'estuaire de la Loire et de l'estuaire de la Seine. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 31/137 (SNML) déclinée par grande façade maritime (DSF) 43. L'élaboration des futurs documents stratégiques de façades pourrait offrir une nouvelle opportunité pour décliner de façon cohérente sur le terrain la stratégie nationale relative à la mer et au littoral et (re)mettre en perspective les principes d'aménagement équilibré portés par la loi Littoral. ­ Un grief d'hétérogénéité à relativiser : assumer la dimension interprétative et appréciative des dispositions particulières au littoral Les éléments rassemblés dans le cadre de l'audit amènent à considérer qu'il faut tout à la fois relativiser le grief d'hétérogénéité des pratiques et s'inquiéter du fait que les services ne soient pas armés de la même manière et à un niveau suffisant pour assumer la complexité de la problématique littorale. La loi Littoral, loi d'équilibre entre protection et développement, est une loi dont la mise en oeuvre reste nécessairement complexe, car interprétative (nécessité d'une doctrine) et appréciative (nécessité d'un examen au cas par cas). Son application repose donc sur la justification des choix d'aménagement retenus par les collectivités, sur l'appréciation qu'en font les services de l'État au regard notamment des dispositions particulières au littoral et, le cas échéant, les tribunaux administratifs. La circulaire interministérielle de 1991 insistait tout particulièrement sur l'importance de justifier les projets tant sur le plan économique qu'environnemental (études d'impact). Les nouveaux décrets sur l'évaluation environnementale, notamment des documents d'urbanisme, devraient renforcer au sein des services des collectivités territoriales comme de l'État une véritable culture de l'évaluation ex-ante mais aussi renforcer les relations entre les services de l'État en charge de la planification territoriale et ceux chargés de l'évaluation environnementale. Bien qu'assurant des missions différentes, ils sont en effet amenés à se prononcer sur les mêmes dossiers (documents d'urbanisme et projets soumis à évaluation...). Dans ce contexte en devenir, les services ont d'autant plus de difficultés à porter la loi Littoral auprès de l'ensemble des acteurs que celle-ci a perdu une grande partie de sa lisibilité concernant l'aménagement durable des territoires. Pour beaucoup, elle est aujourd'hui identifiée aux seules « dispositions particulières» du code de l'urbanisme dans ce qu'elles ont finalement de contraignant vis-à-vis des projets de territoire littoraux, sans aucune référence aux principes, pourtant similaires, portés par la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU) ou à ceux, plus récents, des lois Grenelle. En outre, la politique d'aménagement littoral, pourtant conçue comme une politique intégratrice des politiques sectorielles, n'est plus identifiée comme prioritaire, contrairement à celles-ci. La mission juge donc indispensable de redonner leur lisibilité et leur sens aux grands principes portés par la loi Littoral de 1986. La mise en oeuvre de la stratégie nationale pour la mer et le littoral offre à ce niveau une opportunité. 43 Cf. loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement (art. 35) ; loi 2010-788 du 27 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (art. 166 ­ L.219-1 et suivants du code de l'environnement) ; décret n°2012-219 du 16 février 2012 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 32/137 Rapport n°007707-01 2.2. Les modalités d'organisation et d'action des services pour veiller à l'application de la loi Littoral L'analyse des situations départementales amène plusieurs observations qui portent tout autant sur l'organisation des services que sur leurs modalités d'action pour veiller à l'application de la loi littoral. 2.2.1. Les DDTM en « première ligne », mais à la recherche d'appui Les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) sont les premières concernées par le suivi de l'application de la loi littoral : leur souci de la porter auprès des collectivités locales et d'accompagner son application ressort de l'ensemble des entretiens. Cette appréciation est globalement confirmée par l'avis des préfets rencontrés : ceux-ci estiment que la loi Littoral est dans l'ensemble appliquée même si certains vont jusqu'à dire que cette application reste « hasardeuse » et manque de continuité, du fait notamment de jurisprudences pas toujours concordantes. ­ La réorganisation de l'administration territoriale a profondément modifié le rôle des services et les relations interdépartementales Les directions départementales interministérielles (dont les DDTM) sont devenues des services déconcentrés de l'État placés sous la seule autorité des préfets de département, ce qui a renforcé la présence du corps préfectoral sur le champ de la mise en oeuvre de la loi Littoral mais en a réduit l'approche technique. Dans plusieurs départements, ce sont les sous-préfets qui président les instances de coordination et d'arbitrage interne, ainsi que celles de concertation et de négociation avec les élus locaux. Ces instances ne sont pas spécifiques à l'application de la loi Littoral mais elles sont amenées à prendre position sur la compatibilité des documents d'urbanisme ou de projets, généralement les plus importants, avec les dispositions particulières au littoral. ­ La démarche d'évaluation environnementale des documents d'urbanisme doit contribuer à l'application des dispositions particulières au littoral L'évaluation environnementale, réalisée par les communes et leurs groupements, et la préparation des avis de l'autorité environnementale, organisée au niveau régional, ont introduit de nouvelles relations de travail entre les services départementaux et régionaux avec des incidences utiles à analyser. Les DREAL se sont toutes structurées pour assumer cette mission relative à l'évaluation environnementale et c'est aujourd'hui principalement à partir de cette porte d'entrée qu'elles contribuent à l'application de la loi Littoral (via les documents d'urbanisme et parfois les autorisations soumises à étude d'impact). Néanmoins, lorsque leurs moyens leur ont permis de garder un ancrage fort sur la connaissance territoriale, l'intégration de l'environnement, voire la prospective, la plupart des DREAL s'efforcent encore, de façon formelle ou informelle, de contribuer à l'élaboration du Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 33/137 porter à connaissance et de l'avis de l'État, ne serait-ce qu'au titre de leurs compétences départementales, notamment en matière d'environnement44. Si globalement les relations sont bonnes entre les services de niveau régional et de niveau départemental, la spécificité des équipes en charge de l'exercice de l'autorité environnementale peut entraîner, en cas d'insuffisance de partage, des divergences d'appréciation entre ces services. Les dispositions particulières au littoral n'y échappent pas. Ces divergences demandent à être expliquées et gérées : quelques exemples d'incompréhension ont ainsi été signalés à la mission, les collectivités reprochant alors aux services de l'État d'émettre des avis considérés comme divergents dans le cadre de procédures parallèles mais portant sur un même document. Pour la mission, il conviendrait d'éviter toute ambiguïté sur cette procédure d'avis spécifique : il ne peut qu'être de bonne pratique administrative que services régionaux et services départementaux se rapprochent afin de partager les éléments de contexte et éléments d'expertise avant d'émettre leurs avis en toute indépendance. ­ Des modalités de coordination entre les différents niveaux de l'État à redéfinir Les réseaux métiers, qui fonctionnaient au sein du ministère de l'équipement et étaient en général animés par les services régionaux ou parfois les CETE, ont bien souvent disparu. Dans plusieurs régions pour lesquelles le littoral n'est pas un enjeu majeur, les relations interdépartementales, qui avaient existé antérieurement aux réorganisations, ont également disparu ; elles ne perdurent que lorsque des dossiers communs sont identifiés (un plan de prévention des risques ou un SCoT interdépartemental par exemple) et que les préfets y sont favorables. La disparition souvent constatée des lieux de partage de connaissances et d'expériences, y compris au niveau départemental, entre services départementaux mais aussi entre siège et unités territoriales, est donc à souligner. Dans un contexte de profonde réorganisation et de forte mobilité des agents, cette disparition des réseaux se double dans plusieurs départements d'une « perte de mémoire » toujours pénalisante pour l'action des services. La mission a constaté en outre des disparités d'approches ou de regards entre les agents issus des anciens ministères de l'agriculture, de l'équipement et de l'environnement. L'enrichissement mutuel ne peut se réaliser que sur la base d'objectifs partagés, ce qui renforce encore, si besoin en était, la nécessité déjà soulignée de redonner leur sens et leur lisibilité aux principes d'aménagement de la loi Littoral. 2.2.2. Une animation et un pilotage au niveau régional encore à structurer Les informations recueillies montrent que l'implication du niveau régional sur la politique littorale est fortement liée au contexte géographique et à l'histoire de ces territoires littoraux (importance du littoral, pressions et enjeux mesurés à l'aune de l'ensemble des autres politiques à mettre en oeuvre localement, existence ou non d'une 44 Cf. décret n°2009-235 du 27 février 2009. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 34/137 Rapport n°007707-01 DTA, niveau d'investissement des DREAL dans les territoires au titre de leurs compétences départementales). Bien que le rôle des préfets de région ait été renforcé, notamment sur l'organisation de la cohérence de l'action de l'État, le constat général est celui d'une grande disparité dans la façon dont les DREAL animent et coordonnent l'action des services départementaux sur l'aménagement du littoral, et rares sont celles qui contribuent aujourd'hui à l'élaboration d'une vision prospective de son devenir, comme cela avait été engagé en 2006-2007 dans le cadre de l'atelier national littoral. ­ Aujourd'hui une grande disparité selon les régions Ainsi, les réunions inter-services sur la problématique littorale ne sont plus régulières dans la plupart des régions littorales ; elles ne perdurent que dans quelques-unes d'entre elles. En Languedoc-Roussillon, si la « mission littorale » issue de la mission interministérielle d'aménagement du littoral (MIAL), elle-même vestige de la mission Racine, a été maintenue auprès du préfet de région, elle est désormais réduite à un poste de sous-préfet, chargé de mission au SGAR, avec un rôle très limité de la DREAL. La Région Bretagne constitue un cas intéressant à souligner 45. Région maritime par excellence, l'implication du niveau régional y est ancienne. Le préfet de région s'est personnellement saisi du sujet, la loi Littoral faisant régulièrement, depuis les circulaires de 2006, l'objet de débats en comité de l'administration régionale (CAR) avec une préoccupation constante de mise en cohérence et de fermeté dans son application locale. La DREAL, lors de sa création, a donné une dimension nouvelle au dossier « loi Littoral » en l'intégrant à une mission « zones côtières et milieux marins » placée auprès du directeur. Dans ce cadre, la DREAL anime l'atelier interdépartemental littoral qui a réalisé un travail conséquent sur l'harmonisation des modalités d'application des dispositions particulières au littoral. ­ Mais aussi de nouvelles perspectives à valoriser Les Grenelles de l'environnement et de la mer ont ouvert de nouvelles perspectives. La gestion intégrée de la mer et du littoral (GIML) est au coeur de la nouvelle gouvernance mise en place suite au Grenelle de la mer. L'élaboration d'une stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML), évoquée précédemment 46 devrait être l'occasion de mobiliser sur cette politique l'ensemble des acteurs concernés au sein du Conseil national de la mer et des littoraux (CNML) : État, collectivités territoriales, communauté scientifique, acteurs socio-économiques et associations de protection de l'environnement. Les documents stratégiques de façade (DSF) devront en décliner les principes et orientations en matière de protection du milieu, de valorisation des ressources marines et de gestion intégrée des activités liées à la mer et au littoral. Ils organiseront 45 46 Cf. synthèse de la démarche engagée en annexe 4. Cf. § 213. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 35/137 également la planification stratégique et spatiale des activités en mer et devraient ainsi permettre de renforcer le volet mer des SCoT. Par ailleurs, un bilan de la mise en oeuvre française de la recommandation communautaire sur la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) a été réalisé47. La mission a souhaité savoir si les services de l'État se préparaient à faire face à ces perspectives et comment ils s'y préparaient. Ainsi, en Aquitaine, le lancement d'un projet de DTADD a remobilisé la DREAL mais également les DDTM autour des travaux du groupement d'intérêt public (GIP) du littoral. En revanche, les démarches de gestion intégrée des zones côtières (GIZC) et la stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML) ne fédèrent pas encore l'action des services. Les instances qui se mobilisent sur la problématique littorale sont principalement portées par les collectivités territoriales (GIP, syndicats mixtes...) et la participation des services à ces structures locales est très variable suivant les régions ; celle-ci se limite dans la plupart des cas à de l'information mutuelle, au mieux à de l'accompagnement de dossiers, ce que déplorent certains préfets, notamment pour les appels à projets GIZC lancés par la DATAR. En Bretagne, la DREAL a initié en 2010 une réflexion au sein d'un groupe de travail sur le « volet mer » des SCoT, rassemblant les quatre DDTM et les services de la préfecture maritime. Deux notes, stratégique et juridique, ont respectivement été produites sous l'égide de la mission « zones côtières et milieux marins » de la DREAL48. De création plus récente, les directions inter-régionales de la mer (DIRM) se mettent progressivement en place mais elles n'ont pas, pour le moment, reçu d'instructions spécifiques pour animer la réflexion de façade annoncée, ni ne disposent toujours de l'ensemble des compétences techniques pour le faire. Elles restent essentiellement centrées sur les politiques strictement maritimes. Le constat actuel est donc que les relations de travail (souvent ténues) entre les services de différents niveaux ne portent pas encore sur l'élaboration « d'une vision stratégique globale dans une perspective de développement durable », à quelques exceptions notables près, comme la Bretagne et l'Aquitaine. 2.2.3. Des attentes fortes vis-à-vis de l'administration centrale Vis-à-vis de l'administration centrale, le sentiment qui prévaut actuellement est une absence de pilotage et d'animation, sentiment renforcé par la perte de repères et d'interlocuteurs depuis les réorganisations de 2008. 47 48 Rapports à la Commission européenne 2010 et 2011 (MEDDTL-MAAPRAT- SGG-DATAR). Cf. annexe 5 sur l'application de la loi Littoral en Bretagne. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 36/137 Rapport n°007707-01 Les ateliers littoraux lancés par la DHUP ont été peu évoqués lors des rencontres avec les services et, lorsqu'ils l'ont été, les avis ont été nuancés : · d'une part, la disparition du lieu d'échanges que constituait depuis 2005 « l'Atelier littoral national portant sur les enjeux et les approches par façade », est ressentie comme une perte par les DREAL. Il avait réellement impulsé une dynamique avec des prolongements dans un certain nombre de régions (Aquitaine, Bretagne, mais aussi dans des régions comme le LanguedocRoussillon et le Nord-Pas de Calais auquel s'était associée la Picardie)49 ; d'autre part, les ateliers expérimentaux conduits sur des sites individualisés ont été diversement appréciés par les services. Une synthèse de ces travaux a été présentée à l'ensemble des parties prenantes lors d'une réunion qui s'est tenue à Guérande en novembre 200950 mais leur apport reste à évaluer tant auprès des services que des bénéficiaires. · Cette évaluation serait d'autant plus intéressante qu'en l'absence d'autres communications du niveau central sur la loi Littoral, les messages véhiculés variablement par les représentants de la DHUP ou les intervenants prestataires, lors des réflexions parfois très ouvertes menées dans ces ateliers, ont pu être interprétés, principalement par certains élus, comme la nouvelle doctrine en vigueur par l'État, plus souple, concernant l'application des dispositions particulières au littoral. Les circulaires de 2006, qui restent pour les services « la référence » en matière de politique littorale, marquent donc une étape importante. Depuis cette date, aucune orientation spécifique n'a été donnée aux services alors même que les Grenelle de l'environnement et de la mer mettaient en évidence de nouveaux enjeux sur le littoral. Si certains services s'en accommodent, beaucoup regrettent cette absence d'animation lorsque, confrontés à des difficultés d'interprétation de la loi, leurs questions restent sans réponse. Les attentes exprimées vis-à-vis des services centraux sont de différentes natures : · de nouvelles instructions, plutôt interministérielles, pour tenir compte des évolutions législatives et jurisprudentielles. Certains sujets méritent en effet des précisions : c'est le cas par exemple pour la gestion des projets de production d'énergies renouvelables ou pour l'application de la loi dans les estuaires, voire le développement du logement social ; une animation, avec diffusion/partage des bonnes pratiques, et des réponses aux questions posées, ce qui suppose des interlocuteurs clairement identifiés au niveau central mais aussi régional. Un appui spécifique pour les rives des grands lacs et les étangs salés qui subissent une pression · 49 Cf. « Restitution des travaux de l'atelier 2006-2007 - Atelier littoral ­ enjeux et approches par façade »; MEEDDM, nov 2009. Cf. dossier « Atelier littoral ­ Les projets - Séminaire de restitution ­ 10 et 11 déc. 2009 ». Les expérimentations présentées sont le résultat pour partie d'appels à candidatures et ont notamment pour objectif d'accompagner l'État local, aux côtés des élus, dans la construction des stratégies territoriales et de leur mise en oeuvre. 50 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 37/137 très importante et sont l'objet de contentieux répétés (Lacs d'Annecy, Léman, Le Bourget, étang de Berre) est également souhaité par les services concernés. · une veille juridique active impliquant le suivi de la jurisprudence mais aussi, si nécessaire, des appels motivés, car même si, avec le temps, les tribunaux administratifs ont stabilisé certaines notions, leur interprétation reste évolutive au gré de leurs décisions. Pour y faire face, les services doivent chacun, avec une forte dispersion des énergies, se doter d'outils plus ou moins performants suivant les moyens disponibles au niveau départemental et/ou régional. Deux ans après la réforme de l'administration territoriale de l'État qui a profondément modifié l'organisation des services, il paraît à la mission indispensable de mobiliser à nouveau les services déconcentrés sur la politique spécifique d'aménagement du littoral. Cette mobilisation, pour être opérationnelle, devrait se réaliser à différents niveaux : - au niveau national, avec la nomination (sur la base d'une lettre de mission) d'un référent « aménagement/urbanisme littoral » au sein de la DGALN avec une double mission : favoriser la transversalité entre les directions de l'administration centrale concernées, participer à l'animation des réseaux métiers « aménagement/urbanisme » et « évaluation environnementale, en favorisant les relations nécessaires ; - au niveau régional (voire interrégional en fonction des spécificités de façades), avec la désignation d'un référent « aménagement/urbanisme littoral » en charge de : mettre en cohérence des politiques impactant le littoral, favoriser la transversalité des actions de la (ou des) DREAL, animer les DDTM et DDT concernées par les grands lacs sur cette thématique précise, en veillant à y associer les DIRM ; - et, bien sûr, au niveau départemental, en veillant : à la participation active des DDTM et DDT concernées (sièges, unités territoriales et délégations littoral-mer pour les DDTM) à l'animation collective organisée au niveau régional (ou interrégional), à la bonne coordination des différents services mais aussi des services du siège avec les délégations littoral-mer et les unités territoriales, à l'organisation structurée des relations avec les collectivités locales, notamment avec celles qui assurent l'instruction des autorisations d'urbanisme. Une telle mobilisation ne pourrait toutefois se concevoir sans que ne soient adressées au préalable aux préfets de région et de département de nouvelles instructions interministérielles portant sur la mise en oeuvre d'une politique d'aménagement littoral, définie dans sa dimension intégratrice du développement socio-économique et de la protection des ressources et milieux naturels. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 38/137 2.2.4. Une mobilisation des services sur la planification Les démarches de planification (et particulièrement les SCoT) sont identifiées par tous les services comme prioritaires. Dans les DDTM, cette stratégie n'est pas spécifique à la politique d'aménagement littoral qui est considérée comme une composante de l'ensemble des politiques devant être portées par les documents d'urbanisme. ­ Une priorité bien identifiée sur l'enjeu que représentent les documents d'urbanisme sur le littoral Concernant le littoral, la priorité accordée aux documents d'urbanisme est pour la mission d'autant plus pertinente que leur qualité est indispensable à l'application de la loi Littoral dans son esprit et dans sa globalité, ce qu'avaient souligné les circulaires précitées, mais aussi dans sa mise en oeuvre opérationnelle, au travers de l'instruction des actes individuels. En matière de planification, la situation du littoral peut apparaître favorable comme le montrent les données 201151 du service de l'observation et des statistiques du CGDD (SOeS) : plus de 96 % des communes littorales sont dotées d'un POS/PLU (approuvé, en cours d'élaboration ou de révision), 2 % disposent d'une carte communale et seules 1,4 % des communes n'ont aucun document d'urbanisme (parfois en raison de leur annulation) ; elles sont 32 % dans ce cas au niveau national . Il n'en est pas de même sur le plan qualitatif. Les services signalent une majorité de POS voire de PLU encore non compatibles avec l'ensemble des dispositions de la loi Littoral et regrettent une certaine inertie des élus lorsqu'il s'agit de faire évoluer les « POS dormeurs ». Cette insuffisante prise en compte de la loi dans les documents d'urbanisme, qui reste là encore très variable suivant les départements, avait déjà été soulignée dans le bilan de la loi Littoral réalisé fin 2007. Sans aucun doute, il s'agit encore aujourd'hui du principal facteur de difficulté dans le respect effectif des dispositions particulières au littoral. La sécurisation juridique des documents locaux d'urbanisme, voulue par la circulaire de mars 2006, reste donc un chantier plus que jamais d'actualité même si le sujet est particulièrement sensible. ­ Mais des leviers d'action pour les services de l'État dont l'opérationnalité interroge Force est de constater que les démarches, parfois volontaristes, entreprises par les services avec le soutien de préfets pour obtenir la mise en révision des documents d'urbanismes se heurtent souvent au refus d'élus, peu enclins à faire évoluer la situation. Les « POS dormeurs » présentent en effet l'avantage de ne pas ouvrir de débat sur l'aménagement communal et de ne pas remettre en cause « d'anciens droits à construire » tant qu'un contentieux n'annule pas les documents concernés ou les autorisations délivrées. Mais cela vaut aussi pour des PLU récents dont certains ne sont manifestement pas plus compatibles avec les dispositions particulières au littoral. 51 « Références » de mai 2011 sur l'environnement littoral et marin, DGALN. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 39/137 L'État, à travers le contrôle de légalité prévu par le code général des collectivités territoriales, dispose pourtant des moyens d'agir avec fermeté tant sur le champ des documents d'urbanisme que sur celui des autorisations. Mais, pour les services, les procédures contentieuses, longues et coûteuses, et dont l'issue reste toujours aléatoire, ne sont pas assorties de sanctions opérationnelles pour les collectivités locales et leurs groupements. Il s'agit là d'un point particulièrement sensible. Faut-il le rappeler, jusqu'en 2000, un POS ne pouvait pas être abrogé. En cas d'annulation par voie juridictionnelle, la collectivité était simplement tenue d'élaborer sans délai un nouveau POS (ancien art. L.123-4-1) mais, pour autant, la loi de décentralisation portant sur l'urbanisme, complétée par la loi de 1987 relative à la prévention des risques, n'avait pas laissé l'État démuni de moyens d'actions que la loi SRU a repris en modifiant à la marge les anciens articles. Les services se sont relativement peu exprimés sur ces moyens d'actions, sinon pour affirmer qu'ils en étaient démunis. Aussi la mission s'est-elle efforcée de mieux les cerner52. · De façon préventive, avant l'entrée en vigueur des PLU53 Cette mesure permet au préfet de notifier à un maire dans le délai d'un mois, par lettre motivée, les modifications qu'il estime nécessaire d'apporter au PLU ; celui-ci ne deviendra exécutoire qu'une fois les modifications intervenues 54. Mais, depuis la loi SRU, cette mesure ne concerne plus que les communes non couvertes par un SCoT, de moins en moins nombreuses sur le littoral (moins de 20 % en 2011 55. · De façon corrective, lorsque le PLU (ou POS) est déjà entré en vigueur56 Un préfet peut, lorsqu'il constate qu'un POS/PLU n'est pas compatible avec les dispositions particulières au littoral (ou de celles d'une DTA), en informer le maire et lui demander de modifier ou réviser son document d'urbanisme. Passé un délai de 6 mois, à défaut, le préfet peut engager la procédure à la place de la commune. Ces dispositions sont en fait peu utilisées, car, pour les quelques préfets qui se sont exprimés sur ce point, mieux vaut un PLU imparfait qu'une absence de PLU (situation fragilisant l'ensemble des actes d'urbanisme) ou un retour à l'ancien document d'urbanisme, encore moins compatible avec les lois et documents d'encadrement supérieur. 52 53 54 Cf. note du 3 juillet 2012 de la DHUP, établie à la demande de la mission, en annexe 5. Art. L.123-12 du code de l'urbanisme (ancien L.123-3-2 créé par la loi de décentralisation de 1983). Une disposition identique existe pour les SCoT non compatibles avec les dispositions particulières au littoral (art. L.122-19 du CU). Cf. Références - Environnement littoral et marin ­ Edition 2011 (CGDD/SOeS). Art. L.123-14 du code de l'urbanisme (ancien art. L.123-7-1 créé par la loi n°83-8 du 7 janvier 1983). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 40/137 55 56 Rapport n°007707-01 Pour la mission, une autre raison, bien que non évoquée par les services, peut être avancée. La plupart des dispositions particulières au littoral étant de nature interprétative, il ne paraît sans doute pas évident pour l'État de se substituer, avec les risques juridiques qui y sont associés, à l'autorité compétente pour les traduire de façon autoritaire dans un document d'urbanisme. Il semble plus aisé pour les préfets d'y avoir recours lorsqu'il s'agit de rendre compatible un document d'urbanisme avec un projet d'intérêt général. · Lors de l'instruction des actes individuels Les dispositions particulières au littoral (ou celles d'une DTA qui les a précisées) sont, rappelons-le, directement « applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, installations et travaux divers (...) l'exploitation de minerais »57. Ces actes vont donc bien au-delà des seuls permis de construire. Aussi est-ce essentiellement par le biais du contrôle de légalité 58 des actes individuels considérés comme non compatibles avec les dispositions particulières au littoral, bien que conformes aux documents d'urbanisme, que les préfets s'efforcent de convaincre les collectivités de mettre en révision leur document d'urbanisme pour le rendre compatible lui-même avec ces dispositions. Faire cesser ces situations était pourtant l'objectif principal de la circulaire de mars 2006 : « il est essentiel de mettre fin à des situations où le permis de construire est refusé, car contraire à la loi Littoral alors que le terrain est déclaré constructible par le POS et qu'un certificat d'urbanisme positif avait pu être délivré de bonne foi sur cette base. » Face au constat dressé par la mission d'audit, ce ne sont donc pas les objectifs de la circulaire de mars 2006 qui sont à revoir mais bien les conditions et modalités de mise en révision des documents d'urbanisme non compatibles avec les dispositions particulières au littoral, et plus précisément encore la volonté de les utiliser. Pour faire cesser cette situation dommageable qui n'a que trop duré, la mission préconise qu'une note spécifique soit adressée aux préfets pour préciser les conditions d'utilisation de ces différents leviers d'action et qu'en dernier recours, lorsque qu'une collectivité refuse de mettre en révision son POS/PLU illégal dans un délai qui reste à fixer, soit prévu par la loi le retour réglementaire au RNU, les documents d'urbanisme précédents n'étant pas plus que l'actuel compatibles avec la loi Littoral. Une telle mesure constituerait un message fort vis-à-vis des élus du littoral mais également auprès de l'ensemble des élus et devrait être de nature à faire évoluer 57 58 Article L.146-1 du code de l'urbanisme. Avec ses trois grandes phases possibles : recours gracieux, déféré préfectoral, suspension sur déféré. Ce référé particulier est prévu à l'article L.554-1 du code de justice administrative et a comme particularité de ne pas nécessiter la démonstration de l'urgence, par exception aux règles applicables en matière de référé. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 41/137 significativement la situation. Elle répondrait par ailleurs au besoin de sécuriser les documents d'urbanisme au regard des tiers. Une mesure similaire existe pour les SCoT : ceux-ci sont rendus caducs à défaut de délibération de l'établissement public compétent sur son maintien en vigueur ou sur sa révision partielle ou complète à l'issue, il est vrai, d'un bilan, 6 ans après son approbation (art. L.122-14 modifié). ­ Un rendez-vous à ne pas manquer : la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec les lois Grenelle S'il n'est pas évident pour un préfet de provoquer une procédure de révision pour la mise en compatibilité d'un document d'urbanisme par rapport à des dispositions spécifiques datant de 1986, il leur est plus aisé de profiter d'une procédure de révision suscitée par une législation récente pour veiller à cette mise en compatibilité. Les lois Grenelle ont introduit de nouvelles échéances pour les SCoT et les PLU qui devront être mis en compatibilité, sous les trois ans, respectivement avec les dispositions des lois Grenelle pour les premiers, avec celles des SCoT nouvellement élaborés ou révisés pour les seconds59. Il s'agit là de rendez-vous importants auxquels il importe que les services en charge de l'urbanisme se préparent. Le travail qu'ils ont à mener préalablement est d'autant plus nécessaire que, si la majorité des dispositions nouvelles confortent les dispositions particulières au littoral (gestion économe de l'espace, trame verte et bleue par exemple), certaines d'entre elles sont considérées comme contradictoires par les collectivités, opinions parfois partagées par les DDTM. Pour y répondre , les services expriment tous, au travers des entretiens menés dans le cadre du présent audit, la nécessité d'analyser les enjeux de la loi Littoral avec une « maille de traitement » qui dépasse les limites communales et intègre une échelle plus large et transversale permettant, notamment, d'intégrer le rétro-littoral au-delà de ces limites communales. La priorité que les services en charge de l'urbanisme accordent à l'accompagnement des SCoT ou des PLU intercommunaux est donc plus que pertinente lorsqu'il s'agit du fonctionnement de l'espace littoral conditionné par des échanges terre-mer, mais aussi littoral-intérieur des terres. Là encore, le contexte littoral est favorable, car l'intercommunalité s'y est davantage développée. Même si le poids de l'intercommunalité varie selon les départements littoraux et que les démarches engagées ne sont pas encore terminées pour la plupart d'entre elles, les données du SOeS montrent que plus de 80 % des communes littorales sont en 2011 incluses dans un périmètre de SCoT. Compte tenu cependant des modalités de gouvernance, généralement consensuelles, qui président à l'élaboration d'un SCoT (voire d'un PLU intercommunal) et de l'inertie à attendre des collectivités pour rendre compatibles leur PLU ou ScoT (pour peu que ce 59 Articles L.111-1-1 (mise en compatibilité avec les documents de rang supérieur comme les futurs plans de gestion des risques d'inondation, ou prise en compte des schémas régionaux de cohérence écologique et des plans climat-énergie territoriaux), L.122-1-12 (SCoT), L.123-1-9 (PLU) modifiés du code de l'urbanisme. De nombreuses autres dispositions du Grenelle doivent également être intégrées dans les documents d'urbanisme avec des échéances qui leur sont spécifiques. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 42/137 Rapport n°007707-01 dernier dispose d'un contenu suffisamment prescriptif), il n'y a pas à douter que l'encadrement réglementaire des PLU littoraux par les SCoT ne pourra suffire à leur mise en compatibilité, ce qui implique, de la part de l'État, le maintien d'un investissement sans faille dans le suivi des PLU littoraux. L'élaboration de SCoT suffisamment ambitieux dans ce domaine n'en sera que facilitée. ­ Une vigilance sur les priorités d'action fixées aux services L'action des services devra être soutenue et accompagnée lors du dialogue de gestion, car les DREAL et les DDTM auront à faire face à un chantier important en matière de planification. Les DDTM se sont généralement structurées autour d'un double niveau d'intervention, avec des variantes liées au contexte : · les services du siège portent la doctrine et la stratégie, harmonisent les interventions du niveau territorial (diffusion des connaissances et méthodes, porter à connaissance, association, avis, contrôle de légalité lorsque celui-ci n'a pas été transféré en préfecture) ; des unités territoriales ou référents travaillent au contact des collectivités territoriales avec pour mission le portage local des politiques publiques. · Les notes d'enjeux, qui accompagnent généralement les porter à connaissance, sont élaborées, suivant les cas, par le niveau territorial, les services du siège ou conjointement. Les DREAL y contribuent généralement dans le cadre de leurs missions départementales. Les services sont donc organisés pour accompagner les démarches de planification, même si, comme la mission l'a déjà souligné, l'absence de vision stratégique pour le littoral peut mettre en difficulté les agents en charge de défendre la position de l'État dans le cadre de l'association. La qualité des documents de référence disponibles constitue donc un enjeu pour les services de l'État dans l'exercice de leurs missions. 2.2.5. L'application du droit des sols (ADS), un chantier qui restera d'actualité ­ Des services investis dans la sécurisation de la chaîne d'intervention de l'État Toutes les DDTM et DDT auditées se sont organisées pour sécuriser, au mieux de leurs moyens, la filière ADS même si l'organisation qui en découle est variable : organisation fonctionnelle au niveau du siège avec d'éventuelles antennes géographiques ou cellules dédiées dans les délégations territoriales avec animation et support juridique du siège. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 43/137 Quelle que soit l'organisation retenue, partout des actions ont été entreprises pour sécuriser la chaîne d'intervention en ADS. Cet objectif a fondé plusieurs des réorganisations déjà réalisées avant la création des DDTM. Le suivi de l'application de la loi Littoral a bénéficié de cette organisation qui ne lui est pas propre, avec notamment l'élaboration par les services du siège, constatée presque partout, de fiches de doctrine spécifiques. Bon nombre des documents de référence disponibles dans les services ont d'ailleurs été élaborés pour servir de support aux instructeurs. ­ Maintenir l'appui aux services instructeurs, y compris des collectivités locales La filière ADS est l'une des rares filières à avoir maintenu un appui aux instructeurs par le biais de réunions de réseau et/ou de référents, en y associant de plus en plus souvent les instructeurs des collectivités territoriales, comme dans les Côtes-d'Armor ou dans le Var. Les constats montrent que, dans l'ensemble, les dispositions particulières au littoral sont généralement bien connues des services, ce qui n'exclut pas les difficultés d'interprétation de certaines notions (cf. partie 3). Lorsque les modalités de collaboration ne sont pas définies et que les outils d'échanges sont insuffisants, les divergences d'appréciation des projets peuvent exister, comme nous l'avons déjà évoqué, entre les équipes régionales en charge de l'évaluation environnementale et les services départementaux. Au-delà des problèmes de moyens, des interrogations sur les compétences disponibles pour l'instruction ADS ont ainsi été exprimées par quelques DREAL mais aussi quelques préfets, notamment autour des grands lacs. La prise en charge progressive de l'instruction ADS par les collectivités renforce encore, si besoin en était, la nécessité pour les services de l'État de disposer de documents de référence actualisés et partagés, notamment avec les collectivités territoriales. Quelques expériences sont intéressantes à signaler, comme la participation des services techniques des villes aux réunions de réseaux ADS déjà évoquée, mais ces initiatives locales ne sont pas à la hauteur des enjeux. La circulaire du 4 mai 2012 relative à l'organisation de l'application du droit des sols dans les services déconcentrés souligne à juste titre le fait que les services agiront à l'avenir de plus en plus comme animateurs et experts d'une filière qui relèvera majoritairement des collectivités locales. L'enjeu est donc important pour ce qui concerne l'application de la loi Littoral : le partage de documents de référence prendra une acuité particulière alors même que les instructions données aux services par la circulaire de mars 2006 ont généré, comme on le verra plus loin, une grande confusion à ce sujet. 2.2.6. Le contrôle de légalité : une réalité peu adaptée aux enjeux Comme la mission l'a mis en évidence lors de son analyse de la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions particulières au littoral, le contrôle de légalité constitue un maillon essentiel de la chaîne du processus de mise en oeuvre de Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 44/137 la loi Littoral de par son opposabilité aux actes individuels. Il était donc utile de l'évoquer à l'occasion des entretiens avec les Préfets et les différents services de l'État. ­ un transfert de mission et de moyens vers les préfectures sans retour d'information organisé Lors de la création des DDI, au 1er janvier 2010, le contrôle de légalité des actes d'urbanisme a été transféré systématiquement en préfecture. La situation est plus nuancée pour les documents d'urbanisme dont le contrôle de légalité, sous la forme du contrôle dit « intégré », a été maintenu en DDTM dans près d'une dizaine de départements littoraux. Quelle que soit l'organisation retenue, les DDTM interviennent toujours, soit en appui technique, soit, lorsque les services de l'État sont mis à disposition d'une commune, par le biais du signalement des avis divergents entre l'arrêté pris par le maire et la proposition initiale du service. Lorsque les communes instruisent elles-mêmes les autorisations relatives au droit du sol, et elles sont de plus en plus nombreuses sur le littoral, l'organisation du contrôle de légalité paraît difficile à réaliser. D'une façon générale, les relations entretenues entre les services sont bonnes, mais beaucoup de DDTM regrettent l'absence de retour de la part des services préfectoraux sur les dossiers soumis au contrôle de légalité. Conformément aux circulaires relatives au contrôle de légalité60, l'application de la loi Littoral constitue pour les préfets, d'une manière générale, un champ d'action prioritaire. Toutefois, cette priorité ne se concrétise pas toujours dans les faits et, dans de nombreux départements littoraux, le contrôle de légalité des actes d'urbanisme dans les zones soumises à risques a pris le pas sur l'application des dispositions particulières de la loi Littoral. Si les entretiens mettent en évidence des situations très variables d'un département à l'autre, l'expression générale va dans le sens d'une insuffisance de moyens et/ou de compétences sur la mission du contrôle de légalité en matière d'urbanisme alors que celle-ci demande beaucoup de technicité. A ce sujet, un département a d'ailleurs signalé l'accessibilité difficile aux formations organisées par le ministère pour les agents des préfectures. ­ Une mission majeure, sans grande lisibilité, qui reste à approfondir Il est en outre constaté dans le cadre de l'audit un nombre de lettres d'observations ou de déférés globalement faible eu égard au volume des actes, tant au niveau des documents d'urbanisme que des décisions individuelles. L'audit ne portant pas spécifiquement sur le contrôle de légalité, les données recueillies ne permettent pas d'approfondir l'analyse. De plus, les statistiques du ministère de l'Intérieur ne 60 Circulaires interministérielles du 1er septembre 2009 relative au contrôle de légalité en matière d'urbanisme et du 25 janvier 2012 relative à la définition des actes prioritaires en matière de contrôle de légalité. Voir aussi, pour mémoire, les circulaires relatives au contrôle de légalité qui ont suivi la décentralisation en matière d'urbanisme, celles des 26 mars et 25 octobre 1984. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 45/137 différencient pas ce qui relève des communes littorales du reste du département et, dans les communes littorales, ce qui relève des dispositions particulières au littoral. En l'absence de statistiques nationales disponibles sur le sujet, les interrogations demeurent : le faible nombre d'observations ou de déférés est-il la conséquence d'une application rigoureuse de la loi par les collectivités ou d'un contrôle de légalité insuffisant de la part de l'État ? En ce qui concerne l'application du contrôle de légalité des documents d'urbanisme, la réponse laisse peu de doute au regard du nombre de documents existants jugés par les services non compatibles avec les seules dispositions particulières au littoral. Si la circulaire du 4 mai 2012 relative à l'organisation de l'application du droit des sols dans les services déconcentrés de l'État inscrit toujours les dossiers littoraux parmi les dossiers à forts enjeux et rappelle dans son annexe 1 les priorités en matière de contrôle de légalité des actes d'urbanisme, on ne peut que s'interroger sur le l'avenir de cette mission dans le contexte rappelé d'évolution de l'intercommunalité à l'échéance 2013 ou de nouvelles perspectives de décentralisation. Les moyens et compétences disponibles dans les services ne sont pas actuellement à la hauteur des enjeux, alors même que les informations obtenues dans le cadre de l'audit soulignent de nombreuses difficultés dans l'organisation du contrôle de légalité des actes relatifs à l'application du droit du sol instruits par les communes. Dans ce contexte, la mission juge opportun d'envisager un travail spécifique sur les objectifs et l'organisation du contrôle de légalité dans les territoires littoraux, et tout particulièrement sur les documents d'urbanisme, source de risques juridiques importants pour les collectivités mais également pour les particuliers. Un groupe de travail interministériel Intérieur/Égalité des territoires pourrait être mis en place à cet effet61. Le bilan des rencontres dans les services permet donc de constater des modalités d'action certes variables, mais aussi l'investissement réel de chacun : les difficultés constatées dans l'application de la loi Littoral ne résultent pas d'une organisation défaillante ou de services laxistes. Par contre, deux motifs d'inquiétude sont à signaler et à gérer : · la quasi-disparition des réseaux métiers qui permettaient le partage d'expériences, la forte mobilité des agents entraînant une perte, quand ce n'est pas la disparition, des compétences nécessaires. · À cela, s'ajoute la difficulté récurrente et maintes fois soulignée des services à organiser des démarches de capitalisation des actions menées antérieurement, 61 Cette recommandation s'est trouvée confortée par les déclarations d'élus relatives au contrôle de légalité lors des récentes rencontres organisées par le GIP littoral aquitain le 21 juin dernier à Capbreton. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 46/137 Rapport n°007707-01 difficulté qui va de pair avec la perte de la « mémoire administrative » constatée. D'un tel constat découlent quelques pistes d'action pour y remédier qu'auraient à gérer les référents préconisés ci-dessus. 2.3. Les documents de référence et leur partage avec les collectivités C'est au niveau des documents de travail disponibles et des modalités de leur partage avec les collectivités locales que les plus grandes disparités entre services apparaissent. Or, la qualité des analyses territoriales est fondamentale, notamment parce que c'est sur la base d'un bon diagnostic, si possible partagé avec les collectivités, que les services pourront construire une stratégie locale, étayer et défendre leurs positions concernant la traduction spatiale des différents principes de la loi Littoral. On constate en effet que les divergences d'appréciation maintes fois soulignées prennent souvent leur source dans une absence de diagnostic partagé du contexte local et de ses enjeux ; à cela s'ajoute le fait que certaines notions utilisées comme critères d'appréciation, telles que la notion « d'ambiance marine », sont souvent sujet d'âpres discussions, même entre services de l'État. Par ailleurs, il n'y a pas dans les services de systèmes d'observation dédiés au littoral, ni d'indicateurs de suivi spécifiques. Les données existantes sont intégrées dans les bases de données, notamment géomatiques, permettant d'enrichir les systèmes d'information géographique (SIG) dont dispose chaque service et sont largement exploitées dans les notes d'enjeux et les « porter à connaissance » produits. Dans l'ensemble, les services n'expriment pas de besoins particuliers sur ce plan et jugent positivement les complémentarités entre le niveau régional et le niveau départemental ainsi que les relations de travail établies. 2.3.1. Les démarches engagées en réponse à la circulaire de 199162 Les termes de la circulaire interministérielle du 24 octobre 1991 sont intéressants à rappeler pour éclairer l'analyse des évolutions intervenues après la circulaire de mars 2006. La circulaire de 1991, co-signée par cinq ministres dont celui de l'Intérieur, se positionnait sur le champ de la collaboration entre l'État et les collectivités locales. Tout en rappelant que les règles générales du code de l'urbanisme « mentionnent l'appartenance du littoral au patrimoine commun de la nation et la nécessité de la gestion économe et équilibrée de l'espace », cette circulaire met l'accent sur le fait que l'application de ces règles implique l'harmonisation des décisions de l'État et des collectivités locales qui doit être conduite sous l'autorité des préfets. 62 Le recueil de l'ensemble des circulaires citées dans ce rapport du CGEDD est disponible au CGEDD. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 47/137 L'association des services à l'élaboration ou la révision des documents d'urbanisme élaborés par les collectivités présente donc une importance particulière, la position de l'État devant être solidement étayée grâce aux études préalables réalisées sur « des aires territoriales adaptées aux enjeux (...) avec une préoccupation de transparence vis-à-vis des partenaires locaux et des acteurs de l'aménagement » auxquels les résultats devaient être communiqués ». La mobilisation des services était demandée, tout comme une grande fermeté pour faire prendre en compte la position de l'État (solidement étayée) à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme. De même, il leur était demandé de saisir les collectivités lorsque leurs documents d'urbanisme n'étaient pas jugés compatibles et « de susciter voire imposer les procédures de révision nécessaires ». ­ Les documents départementaux d'application de la loi Littoral (DDALL), base du « porter à connaissance » de l'État auprès des collectivités Dans les régions ou départements soumis à fortes pressions, les directions départementales de l'équipement (DDE) ont engagé très tôt le travail de spatialisation des dispositions de la loi Littoral nécessaire à l'élaboration du « porter à connaissance » et des avis de l'État dans le cadre de l'élaboration ou la révision des documents d'urbanisme (SDAU, POS). Mais ce n'est qu'en juillet 1992, à la suite de la publication de la circulaire d'octobre 1991, que la direction de l'architecture et de l'urbanisme (DAU) adresse une note relative aux documents départementaux d'application de la loi Littoral (DDALL), en précisant l'objet, le champ, l'élaboration, la portée, la forme et le contenu de ces documents (espaces remarquables et caractéristiques, coupures d'urbanisation, espaces proches du rivage et zones préférentielles d'aménagement). En septembre 1993, elle publie un document « Proposition pour des applications spatiales de la loi Littoral »63, beaucoup plus ambitieux que la note précédente, car il préconise la prise en compte des dynamiques locales. La grande majorité des DDE littorales et des DDE concernées par les grands lacs se sont ainsi engagées dans l'élaboration de ces outils d'analyse et les ont généralement communiqués aux communes. Tous les DDALL réalisés à cette époque identifiaient à minima les espaces remarquables (dont l'inventaire avait été réalisé sous la conduite des DIREN), les coupures d'urbanisation et les espaces boisés significatifs. Par contre, certaines notions comme celles des espaces proches du rivage ou les espaces urbanisés y sont peu traitées. Cette diversité de contenu s'est aussi trouvée renforcée par la vivacité, plus ou moins forte, des dynamiques locales. En effet, les DDALL se sont enrichis des études ou démarches engagées parallèlement (missions interministérielles d'aménagement de la côte Aquitaine ou du Languedoc, DTA, SMVM...). Pour pallier cette diversité de contenu, la DAU a diffusé en 1999 une méthodologie mise au point dans le cadre de l'élaboration du DDALL de la Charente-Maritime et 63 Etude réalisée par le bureau d'études SCE. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 48/137 Rapport n°007707-01 quelques DRE se sont investies dans l'harmonisation des pratiques départementales (Aquitaine, Bretagne...). Malgré toutes ces initiatives, le constat général dressé par les auditeurs montre que le contenu des DDALL est resté très divers d'un département à un autre. En outre, les échelles retenues (1/25 000 ou 1/50 000) ont un impact fort sur la lisibilité des documents produits. Si la prise en compte de leur contenu dans les schémas directeurs, puis à partir de 2000 dans les SCoT, est aisée, cette prise en compte exige pour les PLU un travail de délimitation, au cas par cas, sur le terrain : il n'y a pas de traduction automatique à la parcelle. ­ Aujourd'hui, des documents toujours incomplets, non actualisés, parfois même délaissés, mais qui restent indispensables pour asseoir la position de l'État Quel que soit leur contenu, ces documents ont tous servi, et continuent de servir pour nombre d'entre eux et ce, malgré la circulaire de mars 2006, de support aux « porter à connaissance » (PAC) de l'État lors de l'élaboration des documents d'urbanisme ainsi qu'à l'instruction ADS quand celle-ci est encore assurée par les services de l'État. L'examen des DDALL existants amène toutefois deux interrogations sur : · les conditions de leur mise à jour, · l'évolution de leur contenu. Les doctrines locales sur la base desquelles ces documents ont été élaborés méritent d'être revisitées au regard de la jurisprudence la plus récente mais aussi des études et inventaires réalisés depuis leur élaboration. De plus, dans de nombreux départements, les documents cartographiques sont désormais réalisés à l'échelle de la commune (tendance favorisée par la numérisation des PLU et le développement des outils géomatiques) alors que les services de l'État ont plus que jamais besoin de disposer de documents d'analyse à une plus large échelle, a minima celle des SCoT littoraux. Aussi l'instruction donnée aux services en 1991 « de bâtir une position de l'Etat sur les conditions du respect des principes fixés par la loi Littoral » paraît-elle toujours d'actualité à la mission dès lors que les documents d'urbanisme ne sont pas encore compatibles avec les dispositions de la loi. Elle devrait toutefois perdre une part de sa pertinence lorsque l'ensemble du littoral sera couvert de schémas de cohérence territoriale (SCoT) et de PLU estimés compatibles, régulièrement révisables et donc évalués, mais une part seulement, car l'État, garant de l'application des lois, devra conserver une capacité d'appréciation des situations qui lui est propre et la possibilité de faire évoluer, si nécessaire, sa doctrine administrative. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 49/137 2.3.2. Les circulaires de 2006 : une nouvelle impulsion mais aussi une rupture64 Les circulaires de mars et de juillet 2006 ont remobilisé les services départementaux et stimulé ceux qui, jusque-là, avaient très peu investi le champ de l'application de la loi Littoral du fait d'une faible pression sur leurs territoires littoraux. Pour l'ensemble des services, celle du 14 mars a constitué une véritable rupture. Si les finalités (gestion économe de l'espace, préservation des valeurs environnementales et patrimoniales du littoral, équilibre entre développement et préservation...) et le cadre de l'action (c'est à l'échelle des grands espaces « qu'il faut mener ces politiques cohérentes et volontaristes » qui supposent « une vision à long terme, stratégique et ambitieuse relayée par des volontés politiques locales fortes ») restent identiques, la mobilisation des services est avant tout ciblée sur la sécurisation juridique des documents d'urbanisme (SCoT, POS/PLU). Aucune instruction n'est toutefois donnée pour l'élaboration de cette vision stratégique et son partage avec les collectivités. Le partenariat avec les collectivités n'est plus la règle affichée, en dehors des sites expérimentaux retenus dans le cadre de l'atelier national littoral avec les limites que la mission a précédemment analysées. Il est principalement attendu des services qu'ils précisent l'application des dispositions de la loi Littoral à partir de la doctrine nationale figurant en annexe, qu'ils vérifient la compatibilité des documents d'urbanisme avec ces nouvelles interprétations et qu'ils conseillent aux communes de prendre les mesures nécessaires et, au besoin, qu'ils fassent procéder à la révision des documents qui ne seraient pas compatibles avec la loi, pour éviter au final « les situations conflictuelles » souvent constatées lors de la mise en oeuvre de projets. ­ Une analyse juridique a posteriori des POS/PLU qui garde toute sa pertinence Pour répondre à cette exigence, la plupart des services se sont engagés dans l'analyse des risques juridiques des POS/PLU, avec cartographie des parcelles concernées. Plusieurs démarches intéressantes ont été entreprises dans ce contexte. Sans prétendre à l'exhaustivité, peuvent être signalées : · au niveau régional, celles de l'Aquitaine et de la Bretagne qui ont respectivement élaboré un guide régional pour l'application de la loi Littoral et une série de référentiels validée en CAR ; au niveau départemental, celle du Finistère qui, parallèlement à la cartographie en cours des risques juridiques des POS/PLU, a élaboré en 2008 un atlas départemental 65 validé en groupe de travail inter-services ; · 64 65 Le recueil de l'ensemble des circulaires citées dans ce rapport du CGEDD est disponible au CGEDD. Atlas qui sert de base à la contribution de l'État aux diagnostics territoriaux. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 50/137 Rapport n°007707-01 celle du Pas-de-Calais qui a travaillé l'analyse des risques juridiques aux deux échelles, POS/PLU et SCoT ; les documents produits en 2011 ont également été validés dans le cadre d'un pôle inter-services. L'intérêt et l'utilité des documents d'analyse des risques juridiques produits dans cette lignée sont évidents, ne serait-ce que pour assurer un contrôle de légalité étayé des actes individuels d'occupation du sol. ­ Mais un exercice de sécurisation des documents d'urbanisme sans procédure, ni surtout méthodologie La mission ne peut que souligner les ambiguïtés générées par la circulaire de mars 2006. Si le rappel à l'ordre sur le fait que les DDALL, documents produits par les services pour expliciter le point de vue de l'État sur l'application locale de la loi Littoral, ne pouvaient en aucun cas être « notifiés » - au sens juridique du terme - aux communes (y compris dans le cadre des PAC), ce rappel a souvent été assimilé à l'impossibilité d'utiliser en toute transparence les informations cartographiques produites dans le cadre de l'association à l'élaboration des documents d'urbanisme et donc de les communiquer aux collectivités. Pour la mission, il ne s'agit nullement de « notifier » aux collectivités les interprétations de l'État mais de leur communiquer des études conformément à l'article L.121-2 du Code de l'urbanisme précisant : « le préfet fournit notamment les études techniques dont dispose l'État en matière de prévention des risques et de protection de l'Environnement ». Cette position s'est d'ailleurs trouvée renforcée par le souci, exprimé par certains services dans le cadre de l'audit, de ne pas contribuer au développement des contentieux, les associations mais aussi les particuliers pouvant trouver dans ces documents de travail matière à recours. La plupart des préfets les ont dès lors considérés comme des documents de travail internes à l'administration et n'en communiquent des extraits qu'aux seuls maires des communes concernées.66 La nature des différents documents produits par les services doit donc être précisée, tout comme la posture attendue des services après trente ans de décentralisation dans le domaine de l'urbanisme. Cette situation va en effet à l'encontre des objectifs de transparence et d'évaluation partagée qui figurent parmi les fondements du développement durable, mais aussi, et plus concrètement en ce qui concerne l'association de l'État à l'élaboration des documents d'urbanisme, à la réglementation fixée par le code de l'urbanisme 67 : l'État est tenu de transmettre aux collectivités toutes les informations dont il dispose et qui sont nécessaires à l'exercice de leurs compétences en matière d'urbanisme. 66 À noter toutefois que, suite au recours d'une association, la CADA a demandé que la cartographie lui soit communiquée. Cf. art.L.121-2 du CU. 67 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 51/137 ­ Le besoin confirmé d'outils appropriés pour l'exercice des missions de l'État L'audit n'avait pas pour objet de réaliser une analyse comparée de la qualité des documents de référence élaborés et/ou utilisés par les services mais, dans la mesure où ceux-ci constituent la clef de voûte de la qualité des « porter à connaissance » de l'État concernant l'application des dispositions particulières au littoral, mais aussi de leur appréciation dans le cadre du contrôle de légalité, la mission a prêté une attention particulière à ces documents. La mission a ainsi été frappée par l'absence de continuité ou d'articulation dans les départements et régions avec les documents plus anciens (souvent antérieurs à 2000) élaborés pour définir les modalités d'application de la loi Littoral de 1986. Les éléments recueillis permettent de mettre en évidence deux sources principales de difficultés : · d'une part, la grande diversité des documents utilisés couplée pour certains d'entre eux à des insuffisances (données non mises à jour, absence de données sur certains thèmes...) ; d'autre part, les ambiguïtés constatées depuis la circulaire de mars 2006 dans les conditions d'élaboration, de partage et de communicabilité aux collectivités des documents de spatialisation élaborés par les services. · La mission considère qu'il y a matière à réflexion sur les objectifs de ces documents de référence, et surtout sur les moyens et méthodes pour y répondre. En effet, s'il est évident, depuis la décentralisation, que la définition des projets de territoires est de la compétence des collectivités locales et de leurs groupements, notamment dans le cadre des démarches SCoT et PLU, l'État reste le garant du respect de la loi, de la loi Littoral en particulier, des solidarités territoriales en général. Pour assurer ces missions, ses services doivent être en capacité d'apprécier les évolutions territoriales et d'étayer le point de vue de l'État. Dans un contexte en pleine mutation, une telle réflexion constitue un des quatre chantiers prioritaires développés ci-après. 2.3.3. L'enjeu d'une veille juridique organisée au bon niveau Comme nous l'avons déjà souligné, la loi Littoral est une loi dont les dispositions doivent être interprétées et dont les modalités d'application sont sanctionnées au final par les tribunaux administratifs. Si plusieurs jugements ont permis la consolidation de l'interprétation de certaine notions, d'autres sont venus contredire l'appréciation portée par les services, appréciation pourtant fondée sur une analyse de la jurisprudence la plus récente. La jurisprudence reste évolutive. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 52/137 Une étude plus approfondie des différents contentieux permettrait sans doute de comprendre les raisons pour lesquelles la position des services n'a pas été suivie par les tribunaux. En particulier, la fragilité de certains mémoires rédigés par l'administration 68 peut être source d'interrogations sérieuses, ce qui amène la mission à considérer que le suivi et l'analyse de l'impact des jurisprudences successives constituent un véritable enjeu pour la bonne application des dispositions particulières au littoral, non seulement pour la pertinence des conseils aux collectivités mais également pour celle du contrôle de légalité des actes d'urbanisme. Comme rappelé à maintes reprises dans ce rapport, la dimension interprétative et appréciative des dispositions particulières au littoral ne peut être ignorée. Dès lors, la valeur de la jurisprudence, comparable à celle en vigueur dans le droit communautaire, devient une référence obligée. Dans cet esprit, il apparaît stratégique pour l'État de ne pas « subir » le contentieux mais au contraire d'en faire un instrument clé de mise en oeuvre de la politique. Ceci implique, au rebours des pratiques administratives courantes, de développer une gestion stratégique des situations potentiellement ou effectivement contentieuses, en mobilisant les compétences et moyens nécessaires dès lors que ces situations sont susceptibles d'avoir un effet jurisprudentiel avéré et capitalisable sur l'ensemble du territoire littoral. Les compétences à mobiliser ne relèvent pas strictement du droit de l'urbanisme, elles doivent être aussi porteuses de toutes les composantes techniques de l'aménagement et de l'évaluation. Elles doivent pouvoir développer des argumentaires juridiques de toutes origines thématiques (biodiversité, risques, agriculture...) qui, combinés, permettent d'étayer une position intégrée. De nombreuses attentes se sont exprimées à ce sujet lors des entretiens même si la plupart des services s'efforcent d'organiser au niveau départemental et/ou régional un suivi actif des jugements rendus sur l'application de la loi Littoral. Plusieurs démarches intéressantes ont été constatées localement : un classeur jurisprudentiel en Gironde, une analyse de la jurisprudence bretonne dans le Morbihan, des suivis de la jurisprudence dans la plupart des services urbanisme ou au niveau des pôles juridiques régionaux quand il existe. Ces attentes d'un appui juridique structuré avaient déjà été formulées d'une façon générale mais avec force par les services déconcentrés lors de la mission menée par le CGEDD sur l'évaluation du fonctionnement de l'administration centrale69. De même, l'absence de réponse aux questions posées à l'administration centrale est très mal ressentie par les services qui regrettent de ne plus pouvoir identifier de correspondant au niveau national, car, quel que soit le sérieux des services déconcentrés en la matière, force est de constater que les compétences juridiques ne sont pas équitablement réparties sur le territoire et que celles-ci sont particulièrement mobiles. 68 69 Bien que la grande majorité des mémoires soient rédigés par les collectivités locales en défense. Rapport n°007986-00 à 09 de septembre 2011. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 53/137 La mission estime que l'administration centrale doit jouer un rôle plus important dans l'accompagnement des services et l'organisation d'une veille juridique capable de leur apporter soutien et, si besoin, professionnalisme dans le contexte actuel de réduction de moyens, ce qui renforce la nécessité de fonctionner en réseau métier et de mettre en place une véritable gestion stratégique du contentieux en matière d'urbanisme. 2.4. En conclusion de ce chapitre, quatre chantiers jugés prioritaires Au vu des éléments recueillis, la mission constate que l'hétérogénéité des pratiques dans les services reste relative et doit être considérée comme inhérente à la loi Littoral, loi d'interprétation qui met en avant l'importance des spécificités locales dans un contexte de développement durable. Pour autant, la relativité des appréciations portées sur les dispositions particulières au littoral, qu'il conviendrait d'assumer, ne doit pas masquer l'importance des difficultés qui restent à surmonter pour que la loi soit portée au bon niveau d'analyse et correctement mise en oeuvre. Pour y parvenir, la mission identifie quatre chantiers qu'elle juge prioritaires : ­ clarifier la nature et le contenu des documents de référence dont les services devraient disposer, référentiels parmi lesquels figurent les outils juridiques mentionnés plus haut ; lever notamment les ambiguïtés générées par la circulaire de mars 2006 quant à la communicabilité de ces documents ; poursuivre la sécurisation juridique des documents d'urbanisme ; si les objectifs de la circulaire de mars 2006 restent d'actualité, les leviers pour les atteindre sont à repenser y compris dans le cadre du dialogue de gestion ; relancer l'animation du réseau métiers « aménagement/urbanisme » en liaison avec celui de l'évaluation environnementale, indispensable pour assurer une bonne application de la loi Littoral, loi interprétative nécessitant un appui juridique efficace, des réponses aux questions et le partage des « bons outils ». définir un dispositif spécifique du suivi de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers des espaces littoraux (bande littorale, espaces proches du rivage, communes littorales) dans le cadre du dispositif national de suivi de la consommation de ces espaces, en coordination avec l'observatoire du littoral (SOeS). ­ ­ ­ Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 54/137 3. Les difficultés d'appréciation dans l'application des dispositions particulières restent nombreuses Faire une synthèse nationale des positions soutenues par les services déconcentrés dans l'ensemble des départements de métropole n'est pas chose aisée, même si des lignes de force peuvent être dégagées. Comme nous venons de l'analyser, les positions adoptées par les services de l'État diffèrent très logiquement d'un département, d'une région à l'autre, en fonction des enjeux locaux. Certaines dispositions soulèvent toutefois moins de difficultés que d'autres dans leur application. ­ les dispositions relatives à la protection des espaces littoraux posent relativement moins de problème d'interprétation et même d'application mais leur respect dans le temps interpelle les services Globalement, les espaces naturels (non construits) de la bande littorale, les espaces remarquables et caractéristiques, les espaces boisés significatifs, font l'objet de la part des services d'un porter à connaissance (PAC) argumenté auprès des collectivités. Les services de l'État ont accès à suffisamment d'éléments de connaissance scientifique et d'arguments juridiques pour motiver et justifier les propositions de l'État. Ce PAC repose en effet, dans les espaces littoraux, sur une politique déjà ancienne et particulièrement active d'inventaires scientifiques et de protections réglementaires du patrimoine naturel et paysager. Les circulaires des 10 octobre 1989 et 15 septembre 2005 relatives aux espaces remarquables ont donné aux services des instructions leur permettant une application rigoureuse de cette disposition. La politique de protection des espaces naturels littoraux a de plus été confortée par les directives européennes, notamment les directives « habitat-faune-flore » et « oiseaux »70, mais également par la politique de prévention des risques naturels, comme l'a souligné la circulaire du 20 juillet 2006. Il y a en ces domaines de protection des milieux et de prévention des risques cohérence des enjeux et convergence des objectifs poursuivis. Il ressort ainsi de l'audit que les dispositions visant à protéger les espaces littoraux sensibles posent moins de difficultés d'interprétation que celles visant à maîtriser l'urbanisation littorale. Elles sont de ce fait mieux portées par les services auprès des collectivités, qui les ont, de leur côté, admises et intégrées dans leurs discours. Elles sont donc, en général, mieux traduites dans les documents d'urbanisme et davantage respectées dans l'instruction des actes individuels. Toutefois, lors des entretiens avec les services, la situation n'apparaît pas aussi positive et présente des fragilités que la mission s'est efforcée de mettre en exergue dans la restitition faite, ci-après, par disposition. Les inventaires ne sont pas toujours 70 Directives européennes 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages et 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages (ancienne directive 79/409/CEE modifiée à plusieurs reprises et recodifiée). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 55/137 actualisés et surtout la pérennité de ces espaces dans le temps est loin d'être assurée (effet de grignotages successifs, gestion non maîtrisée). ­ les dispositions visant à maîtriser l'urbanisation du littoral continuent de soulever de nombreuses difficultés d'interprétation et plus encore d'application Malgré les circulaires, les plaquettes et guides les concernant, malgré la jurisprudence abondante dont elles ont fait et continuent de faire l'objet, les dispositions particulières visant à encadrer l'urbanisation sur le littoral posent encore aux services, ainsi qu'aux élus, de nombreuses difficultés d'interprétation et donc d'application. Pour la mission, la première difficulté reste la qualification des espaces urbanisés, tant dans la bande littorale que dans le reste des communes littorales. En outre, l'identification d'une typologie urbaine hiérarchisée reste un défi dans la France des 36 000 communes71 et il n'est pas évident que le PLU intercommunal soit une réponse appropriée pour définir un projet de territoire fondé notamment sur une analyse urbaine pertinente au niveau d'un bassin de vie. Définir dans un SCoT une armature urbaine, un schéma de développement lisible et maîtrisé n'est pas encore un exercice couramment pratiqué, surtout s'il se veut prescriptif. C'est pourtant à l'échelle d'un « bassin de vie » côtier que la notion d'aménagement équilibré de l'espace littoral peut prendre tout son sens, que peut se concevoir un aménagement en profondeur permettant de protéger la bande littorale, d'identifier les espaces proches du rivage et de définir une capacité d'accueil prenant en compte la préservation des écosystèmes littoraux, tout en organisant sur l'ensemble du territoire son développement urbain et économique. C'est à cette échelle que peuvent se définir et se traduire les stratégies de développement des activités, qu'elles soient maritimes, agricoles, forestières, touristiques ou encore industrielles, ainsi que les politiques de logement et de déplacement qui les accompagnent. Il revient aux SCoT littoraux de fixer ces grandes orientations et les objectifs à décliner dans les PLU. La seconde difficulté concerne la délimitation des « espaces proches du rivage », délimitation à laquelle est liée la notion d'extension limitée de l'urbanisation. ­ La nécessité pour les services de l'État de maîtriser les grands principes d'aménagement à appliquer sur les territoires S'il n'est pas de la compétence des services de l'État de se substituer aux collectivités locales et à leurs groupements pour définir leur projet de territoire, ils ne doivent pas pour autant se départir de leur capacité d'analyse pour garantir le strict respect des dispositions de la loi Littoral. A chacune des étapes de la procédure d'élaboration ou de révision des documents d'urbanisme (porter à connaissance, association et avis), les services de l'État ont à définir et à faire valoir les conditions locales de l'application des dispositions 71 36 680 communes exactement, dont 36 568 en métropole (2011). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 56/137 Rapport n°007707-01 particulières fixées par la loi Littoral, à s'assurer de leur prise en compte effective et, s'il y a lieu, de l'imposer, soit en demandant des modifications du projet approuvé, soit en le déférant au juge administratif. Pour cela, comme nous venons de l'analyser dans la précédente partie de ce rapport, les services doivent non seulement maîtriser les principes et notions liés à chaque disposition particulière mais également les enjeux du territoire où elles doivent s'appliquer. Ils doivent donc disposer des éléments d'appréciation et des argumentaires qui leur permettent de bâtir la position de l'État. C'est donc dans ce cadre très précis de la décentralisation de l'urbanisme que la mission s'est efforcée, à partir des éléments recueillis auprès des services déconcentrés et pour chacune des dispositions particulières au littoral de : · présenter le constat général de son application tel que les services le dressent72, lister les principales difficultés rencontrées par les services pour veiller à cette application, proposer son propre diagnostic, formuler une série de recommandations dont seules les plus importantes seront reprises dans la dernière partie de ce rapport. · · · Mais avant d'analyser les modalités d'application de chaque disposition particulière au littoral, la mission a jugé nécessaire de s'arrêter sur le champ d'application géographique fixé par la loi Littoral. Ce champ d'application n'est pas en effet sans poser, en tant que tel, des difficultés aux services. Seront ensuite successivement abordés : · les sous-ensembles du champ d'application géographique : ­ la bande littorale des 100 mètres, ­ la délimitation des espaces proches du rivage. les notions et principes liés à l'urbanisation littorale : ­ la qualification des espaces urbanisés en agglomérations, villages et hameaux, ­ l'extension en continuité et l'extension limitée dans les espaces proches du rivage, ­ la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser. les mesures relatives aux activités spécifiques : ­ le traitement des terrains de camping dans les documents d'urbanisme, ­ les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières, · · 72 Il ne s'agit pas dans le cadre de cette mission de réaliser un bilan de l'application des dispositions particulières au littoral, ni d'une inspection de services, mais bien d'un audit de leurs modalités d'application par les services. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 57/137 ­ · les installations énergétiques. les dispositions relatives aux espaces à préserver de l'urbanisation : ­ les coupures d'urbanisation, ­ les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral, ­ les espaces boisés significatifs. La disposition relative aux plans de plage n'a pas été abordée avec les services. Par contre, les quelques éléments recueillis sur la gestion du domaine public maritime (DPM) ont été repris. Il est à noter que certaines régions ou départements ont élaboré des documents ou fiches d'analyse pour chacun de ces items. Les travaux les plus aboutis concernent la région Aquitaine (guide d'application) et la Bretagne où un atelier littoral régional et interdépartemental a élaboré un fascicule explicitant la doctrine administrative pour chaque disposition particulière (référentiel)73. 3.1. Le champ d'application géographique des dispositions particulières au littoral Article L.146-1 (code de l'urbanisme) - Les dispositions du présent chapitre déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : - dans les communes littorales définies à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (désormais intégré au code de l'environnement), - dans les communes qui participent aux équilibres économiques et écologiques littoraux, lorsqu'elles en font la demande auprès du représentant de l'État dans le département. La liste de ces communes est fixée par décret en Conseil d'État, après avis du conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres. Article L.321-2 (code de l'environnement) ­ Sont considérées comme communes littorales au sens de la présente loi, les communes de métropole et d'outre-mer : - riveraines des mers et océans, des étangs salés, des plans d'eau intérieurs d'une superficie supérieure à 1 000 ha, - riveraines des estuaires et deltas lorsqu'elles sont situées en aval de la limite de salure des eaux et participent aux équilibres économiques et écologiques littoraux. La liste de ces communes est fixée par décret en Conseil d'État, par consultation des conseils municipaux intéressés. Il existe en fait trois catégories de communes soumises à la loi Littoral : les communes « riveraines », les communes dites « estuariennes » et les communes « volontaires ». Les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme relèvent ainsi d'un champ d'application élargi par rapport aux autres titres et chapitres de la loi Littoral. 73 Cf. note de présentation de la démarche suivie par cette région en annexe 4. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 58/137 Rapport n°007707-01 La liste des deux dernières catégories de communes doit être fixée par décret du Conseil d'État. Le décret relatif aux communes riveraines des estuaires et deltas est paru tardivement, en mars 200474. Il inclut -sans toutefois que soit fait référence au code de l'urbanisme- quelques communes relevant de la disposition propre à ce code et donc d'une démarche volontaire de la part de ces communes. Le décret ne permet pas de les identifier75. La disposition législative qui vise à définir des périmètres d'application cohérents sur la base d'une notion fonctionnelle, « la participation aux équilibres économiques et écologiques littoraux », en faisant appel au volontariat des communes concernées, s'est révélée pour le moins ambitieuse, sinon utopique. L'intervention possible du Conservatoire du littoral n'a sans doute pas été suffisante pour contrebalancer l'application des dispositions particulières au littoral, perçues par les élus comme une contrainte dans l'exercice de leur compétence en matière d'urbanisme. a) Le constat des services sur le champ d'application géographique Il existe une certaine incompréhension de la part des élus sur l'application des dispositions particulières au littoral dans la partie rétro-littorale des communes littorales de grande superficie et pénétrant profondément à l'intérieur des terres, alors que des communes limitrophes situées à la même distance, mais non littorales, ne sont pas concernées par ces dispositions. Sur les rives des dix grands lacs situés en zone de montagne, l'application conjointe des lois Montagne et Littoral pose également aux élus un problème de compréhension quant à l'intérêt de cette superposition. Ils sont à l'origine de la disposition de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux 76 qui devait permettre d'appliquer de façon exclusive, soit l'une, soit l'autre loi, selon des modalités fixées par un décret pris en Conseil d'État. La loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement a abrogé cette disposition (art. 21)77. La principale difficulté pour les élus porte sur l'interdiction de développer les hameaux dans les parties éloignées des lacs aux caractéristiques montagnardes, notammment les hameaux d'altitude. b) Les difficultés rencontrées par les services Si la parution du décret de 2004 fixant la liste des communes estuariennes a permis de compléter le champ d'application de la loi Littoral, les collectivités continuent d'interpeller les services de l'État sur le manque de cohérence des limites communales pour appliquer les dispositions particulières au littoral. Les services manquent d'arguments pour leur répondre. 74 75 Décret n°2004-311 du 29 mars 2004, art. 1er. La MIGT 5 en a toutefois identifié quelque-unes dans son périmètre : Vauvert dans le Gard et Vescovato en Corse. Article 187 complétant l'article L.145-1 du code de l'urbanisme (2è alinéa). Cf. annexe 6 : le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares 76 77 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 59/137 c) Le diagnostic de la mission sur le champ d'application géographique Le champ d'application limité aux seules communes riveraines ne facilite pas en effet la réflexion en faveur d'un aménagement équilibré orienté vers l'arrière-littoral, mais il est de la compétence partagée de l'État et des collectivités d'y remédier. Les possibilités ouvertes par la loi d'élargir le champ d'application de ces dispositions aux communes participant aux équilibres économiques et écologiques littoraux ne semblent pas être connues des services et donc relayées auprès des collectivités. Il est vrai que donner sa cohérence et sa pertinence au champ d'application d'une loi connue par ses seules contraintes urbanistiques sur la base du volontariat des communes n'a guère de chance d'être entendu et moins encore de se concrétiser. Il en est de même de la possibilité qu'offrait l'article L.146-1 du code de l'urbanisme en permettant, par le biais de prescriptions particulières prévues à l'article L.111-1-1 du même code, de préciser les conditions d'application des dispositions particulières au littoral. Ces prescriptions, qui devaient être établies par décret pris en Conseil d'État, auraient pu traiter ce problème et élargir le périmètre d'application des dispositions particulières après les consultations prévues. Aucune des quatre directives territoriales d'aménagement (DTA) ayant une façade littorale ne s'y est hasardée. Les lois Grenelle ayant remplacé les DTA par des DTADD non opposables aux documents d'urbanisme et aux actes individuels, excepté par le recours exceptionnel à des projets d'intérêt général, cette disposition n'est plus mobilisable, excepté pour les quatre DTA approuvées. Les schémas d'aménagement régionaux de la Corse (PADDUC) et de l'outre-mer (SAR), comme les schémas de mise en valeur de la mer (SMVM) 78 pourraient juridiquement prescrire de telles dispositions sur un périmètre élargi et ainsi assurer une cohérence territoriale. Enfin, les SCoT pourraient, également, par le biais de leurs orientations et surtout de leurs prescriptions, bâtir une vision cohérente de l'aménagement littoral, notamment en identifiant les espaces proches du rivage et en prescrivant sur des unités territoriales cohérentes des principes d'aménagement identiques aux principes portés par les dispositions particulières au littoral. Rappelons enfin que, depuis la loi SRU (2000), les communes situées à moins de 15 km du rivage de la mer (ou d'agglomérations d'une certaine importance) et non couvertes par un SCoT (ou un SAR) ne peuvent ouvrir à l'urbanisation des zones naturelles, ni même des zones d'urbanisation future délimitées dans les POS ou PLU après le 1er juillet 2002, ou procéder à leur révision, sans l'accord du préfet (demande de dérogation)79. La loi Grenelle 2 (art. 17) a étendu cette disposition à l'ensemble des communes, à l'échéance du 1er janvier 2017. Toutes les communes riveraines des grands lacs y seront donc soumises. Dès lors, les difficultés liées à la superposition des lois Montagne et Littoral devraient être moins sensibles pour les élus, d'autant plus que la 78 Il n'est cependant pas évident que les SMVM soient l'outil le plus pertinent pour assurer une cohérence terrestre en matière de développement urbain et économique. Art. L.122-2 du code de l'urbanisme. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 60/137 79 Rapport n°007707-01 principale difficulté signalée concerne généralement des communes ou parties de communes rurales dont l'activité économique repose sur l'agriculture et le tourisme estival. En ce sens, la loi Littoral est plutôt un bon outil de préservation des espaces agricoles et naturels. Elle oblige de plus à une réflexion planificatrice autour des agglomérations, des villages et non des hameaux isolés. d) Recommandations de la mission sur le champ d'application géographique · Préciser aux services les différentes possibilités ouvertes par la loi Littoral pour appliquer les dispositions particulières au littoral sur des entités géographiques cohérentes, notamment le rôle des documents d'aménagement de rang supérieur (DTA approuvées, SMVM) mais aussi des SAR (PADDUC) et SCoT littoraux (ou lacustres), dans la définition d'un aménagement équilibré du littoral ou des rives des grands lacs. Rendre obligatoire pour ces documents la traduction de l'ensemble des dispositions particulières au littoral sur toutes les communes concernées, non seulement pour les adapter aux caractéristiques de leur façade littorale mais également pour en assurer la cohérence. Aujourd'hui, le principe de compatibilité de ces documents avec la loi Littoral ne les oblige pas en effet à les préciser dans leur totalité. Mobiliser les services pour veiller à la qualité de cette traduction dans le cadre de leur association à l'élaboration des documents d'urbanisme (mise en oeuvre du principe du contrôle dit « continu », du porter à connaissance au contrôle de légalité). Faire référence à la distance des 15 km du rivage de la mer ou des rives des grands lacs pour donner un cadre minimal à cette mise en cohérence. Cette distance est celle qui est utilisée pour la mise en oeuvre du principe de constructibilité limitée (Art. L. 122-2 précité). · · · 3.2. Les sous-ensembles du champ d'application géographique Les règles liées à l'urbanisation littorale sont différentiées par la loi Littoral en fonction de leur plus ou moins grande proximité du rivage. Trois sous-ensembles sont ainsi à identifier dans les communes soumises aux dispositions particulières au littoral : la bande littorale, les espaces proches du rivage et le reste de la commune, souvent qualifié de rétro-littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 61/137 3.2.1. La bande littorale des cent mètres Article L.146-4-III - En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée. Cette interdiction ne s'applique pas aux constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (...). Les circulaires de 1991 et de 2006 n'évoquent pas cette disposition qui ne semble pas a priori soulever de difficulté de compréhension. a) Le constat des services sur la délimitation de la bande littorale Bien que la délimitation de la bande des 100 m à partir de la limite haute du rivage (dont la fixation est de la compétence de l'État) ne figure pas dans tous les documents d'urbanisme littoraux (et loin s'en faut80), cette disposition ne pose pas de problème de fond aux services mais des problèmes techniques. Les services concernés par les grands lacs rencontrent également des difficultés pour délimiter la limite haute des rives. 81 Selon les services, l'inconstructibilité des espaces non urbanisés y est globalement respectée. 82 b) Les difficultés rencontrées par les services Dans les communes dont le littoral est soumis à forte érosion, faute d'avoir pris en compte ce phénomène, la délimitation de la bande de 100 m dans les PLU est une source de difficultés, une largeur significative pouvant basculer dans le domaine public maritime (DPM). Les droits à construire en arrière immédiat de la bande littorale en sont fragilisés et des modifications régulières de ces PLU seraient nécessaires, ce qui est rarement le cas en raison de la sensibilité du sujet. Les services ne disposent pas toujours de la connaissance nécessaire, ni des moyens juridiques, pour que leurs arguments d'élargissement soient entendus des collectivités. Ils ne peuvent que rappeler la possibilité offerte par la loi d'élargir la bande des 100 m en fonction des critères cités dans la disposition. Seul un plan de prévention des risques (PPR) peut juridiquement imposer ce recul. La notion d'espaces urbanisés dans la bande littorale soulève également de nombreuses difficultés d'interprétation, même si la jurisprudence a dégagé des 80 81 82 Exemple : seuls 3 des 23 PLU littoraux délimitent la bande littorale en Ille-et-Vilaine. Cf. annexe 6 : le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares. Le problème des constructions illégales qui relève de l'exercice de la police de l'urbanisme, n'a pas été abordé dans le cadre de cet audit. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 62/137 Rapport n°007707-01 faisceaux d'indices (cf. § 331). Il en est de même de la notion d'activités nécessitant la proximité de l'eau qui soulève des d'interrogations : ­ selon la nature des opérations (ports à sec, écoles de voile avec hébergement, établissements de thalassothérapie, certains bâtiments ostréicoles comme les centres d'expédition, certains types de construction dans les concessions portuaires...) ; selon la qualification des espaces naturels, notamment dans les espaces remarquables (autorisations dans certains départements, refus dans d'autres) alors que seuls peuvent y être autorisés des « aménagements légers » (cf. § 352). c) Le diagnostic de la mission sur la délimitation de la bande littorale ­ La délimitation de la bande littorale dont l'objectif est de préserver la frange terrestre en fonction des caractéristiques physiques de la côte (écosystèmes côtiers ou zones soumises à érosion) fait rarement l'objet d'une réflexion lors de l'élaboration des PLU. Lorsque sa délimitation dans les PLU porte sur les 100 m à partir de la limite haute du rivage, elle ne peut qu'être indicative, cette limite pouvant dans certaines communes varier significativement dans le temps. De plus, l'État n'a pas procédé à sa délimitation sur l'ensemble du littoral. S'agissant a minima de délimiter une bande de 100 m, l'application de cette disposition ne relève pas des SCoT qui devraient toutefois identifier les zones littorales où la bande littorale devrait être élargie pour prendre en compte l'érosion côtière mais également les grands écosystèmes littoraux (comme des massifs dunaires ou des marais littoraux). Cette identification de la bande littorale à l'échelle d'un SCoT ne règle pas pour autant les problèmes de sa délimitation rencontrés au niveau des PLU mais elle est indispensable à une application cohérente de cette disposition à l'échelle de l'intercommunalité. Les réflexions engagées sur la gestion du trait de côte et la trame verte et bleue devraient être de nature à renforcer l'argumentaire des services mais encore faut-il qu'ils arrivent à convaincre les collectivités de la pertinence de procéder à l'élargissement de la bande littorale et de considérer cette mesure non comme une contrainte mais comme une mesure de prévention des risques et de bonne gestion des écosystèmes côtiers. Par ailleurs, la notion d'« espaces urbanisés » paraît mal comprise par de nombreux services qui en font une notion spécifique à la bande littorale, alors que, pour la mission, il s'agit d'une notion commune à l'ensemble du territoire des communes littorales, et même bien au-delà, car cette notion est régulièrement utilisée dans le code de l'urbanisme. Pour bien interpréter les règles de constructibilité des espaces urbanisés dans la bande littorale, une lecture croisée des différentes dispositions particulières au littoral est indispensable. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 63/137 Il convient notamment d'identifier les espaces urbanisés de la bande littorale selon la même typologie que pour l'ensemble de la commune (agglomération, village, hameau, autres), en référence à la disposition de l'article L.146-4 ­ I. Il serait pour le moins incohérent d'interdire dans la zone rétro-littorale de la commune toute densification d'un secteur d'habitat dispersé ou d'un « écart » et de l'autoriser dans la bande des 100 m (cf. § 331). d) Recommandations de la mission pour la délimitation de la bande littorale · Veiller à l'identification des zones d'érosion littorale dans les SCoT ainsi que celle des milieux sensibles littoraux justifiant un élargissement de la bande littorale, notamment pour assurer la continuité de la protection et faciliter la cohérence de gestion des écosystèmes littoraux tels que les massifs dunaires ou les marais arrière-littoraux (SCoT prescriptifs). Rappeler la possibilité de fixer dans un PPRL des prescriptions de recul et donc d'élargissement de la bande littorale. Quand elle ne fait pas l'objet d'élargissements motivés, donner des indications sur la façon de cartographier la bande littorale de 100 m dans les PLU, notamment en l'absence de délimitation de délimitation du rivage par l'État (zonage susceptible d'être précisé lors de toute instruction d'acte individuel) et de rédiger le règlement correspondant. Clarifier à la lumière des dernières jurisprudences la notion d'« espaces urbanisés » dans la bande littorale, en précisant que cette notion n'est pas propre à cette partie du territoire communal ; recommander ainsi d'y distinguer les espaces urbanisés selon la même typologie que dans le reste de la commune, à savoir leur appartenance à une agglomération, à un village, à un hameau de la commune ou à d'autres types d'espaces littoraux que la doctrine administrative gagnerait à qualifier. rappeler que la bande littorale est une composante du territoire communal à laquelle s'appliquent, en plus des prescriptions qui lui sont propres (principalement l'interdiction de toute extension de l'urbanisation), les autres dispositions particulières au littoral (espaces remarquables, coupures d'urbanisation...). Mettre en place au niveau national un fonctionnement en réseau des services pour faciliter les échanges sur la qualification des « espaces urbanisés » et l'identification des activités nécessitant la proximité de l'eau ainsi qu'un appui juridique pour les cas difficiles. Assurer un contrôle de légalité exhaustif pour tous les actes délivrés dans la bande littorale (transmission automatique des autorisations à la préfecture par les communes). · · · · · · Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 64/137 3.2.2. La délimitation des espaces proches du rivage Article L.146-4-II - L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. La circulaire du 14 mars 2006 consacre un long développement à la notion d'espaces proches du rivage et aux règles de construction limitée qui leur sont attachées. « L'importance de ces règles implique qu'un soin particulier soit accordé à la délimitation de ces espaces ». Elle en détaille la méthode et les critères à prendre en compte, critères progressivement définis par la juridiction administrative et confirmés par le Conseil d'État qui distingue très clairement les critères en fonction de la nature de ces espaces, urbanisés ou naturels. Cette circulaire rappelle toutefois qu'« il appartient aux collectivités locales dans le cadre de l'élaboration de leur SCoT ou de leur PLU de procéder à cette délimitation » et va jusqu'à préciser que « les DDALL ne doivent en aucun cas être notifiés aux communes dans le cadre du PAC ou de tout autre forme de notification à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme, jetant le trouble dans les services comme constaté dans la partie 2 de ce rapport. a) Le constat des services sur la délimitation des espaces proches du rivage Les services les ont généralement délimités dans leur DDALL. Certains d'entre eux ont même actualisé ces délimitations suite à l'arrêt « Barrière »83. Pour les services, c'est l'une des notions les plus difficiles à interpréter. La doctrine est bien comprise mais sa traduction locale s'avère complexe et difficile à négocier avec les collectivités. La situation relative à leur traduction dans les documents d'urbanisme (délimitation et règlement) est très variable d'un département à un autre. Dans certains départements, les espaces proches du rivage ne sont pas délimités dans les zones urbanisées en front de mer. D'une façon générale, leur délimitation dans les POS/PLU est rare. b) Les difficultés rencontrées par les services Lorsque les collectivités procèdent elles-mêmes à la délimitation des espaces proches du rivage, les négociations entre les services et les collectivités sont encore plus difficiles. Lorsqu'un document de rang supérieur (DTA, SRA, SCoT) les a préalablement identifiés, l'échelle utilisée pour les cartographier est loin de régler les problèmes de délimitation dans les PLU. 83 CE, 3 mai 2004, Mme Barrière, req. N°251534. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 65/137 Les services s'interrogent sur leur légitimité d'intégrer dans leur PAC, notamment pour les SCoT, une délimitation des espaces proches du rivage : l'argumentaire est souvent difficile à développer. Jusqu'où l'État peut-il aller sur ce point ? La délimitation des espaces proches du rivage soulève des difficultés particulières dans les zones estuariennes en raison de vastes zones concernées et d'une occupation très spécifique (exploitations viticoles, bâtiments isolés...) - cf. § 332. c) Le diagnostic de la mission pour la délimitation des espaces proches du rivage L'absence de délimitation des espaces proches du rivage dans les POS/PLU et donc de la traduction du principe d'extension limitée de l'urbanisation dans le règlement constitue une vraie difficulté pour les instructeurs ADS. Lorsque les collectivités procédent à cette délimitation dans leur document d'urbanisme (PLU mais surtout SCoT), les services ne peuvent engager le dialogue et veiller à l'absence d'erreur manifeste d'appréciation sans disposer d'une analyse générale sur l'ensemble du littoral départemental, y compris aux marges (cohérence avec les littoraux des départements limitrophes). d) Recommandations de la mission · Il est indispensable que les services disposent d'un document de référence départemental leur permettant d'assurer le contrôle de légalité des documents d'urbanisme et de l'ADS : sur la base de critères mis en exergue par la jurisprudence, critères qui devront être affinés localement par leur connaissance du territoire (cf. étude CETE pour le Seine-Maritime). après concertation avec les services des départements limitrophes. Rendre obligatoires, sans aucune exception, l'identification des espaces proches du rivage dans les SCoT et leur délimitation dans les PLU, ainsi que la traduction dans les orientations (SCoT) et règlement (PLU) du principe d'extension limitée de l'urbanisation, cette absence d'identification ou de délimitation n'étant pas aujourd'hui considérée par les services de l'État comme un élément de non compatibilité avec la loi Littoral. Dans le cadre du dispositif de suivi de la consommation des espaces agricoles, naturels et forestiers (SCoT et PLU), prévoir le recueil de données spécifiques aux espaces proches du rivage (et à la bande littorale en particulier). · · 3.3. Les notions et principes liés aux espaces urbanisés littoraux Tout autant que les principes d'extension de l'urbanisation en continuité ou d'extension limitée, la notion même d'espaces urbanisés soulève de nombreuses difficultés aux services. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 66/137 3.3.1. La qualification des espaces urbanisés (agglomérations, villages, hameaux, autres) Article L.146-4-I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. (...) Article L.146-4-III - En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée. La circulaire du 14 mars 2006 développe longuement les notions d'agglomérations, de villages et de hameaux en s'appuyant sur une jurisprudence abondante mais elle semble avoir apporté aux services plus de confusion que de clarté 84. Il s'agit là, encore aujourd'hui, d'une des principales difficultés rencontrées par les services de l'État, mais aussi par les collectivités, dans l'application des dispositions particulières de la loi Littoral. Les définitions adoptées dans cette circulaire ne suffisent pas à qualifier avec certitude un espace urbanisé en agglomération et surtout en village ou en hameau, voire en espace urbanisé (par exemple un lotissement isolé) dès lors que la juridiction administrative estime que seule une analyse au cas par cas permet de les qualifier d'abord en espace urbanisé, puis selon leurs caractéristiques locales en agglomération, village, hameau ou « autres ». a) Le constat des services sur la qualification des espaces urbanisés Beaucoup de POS/PLU littoraux ne distinguent pas, dans les espaces urbanisés, les agglomérations, les villages, les hameaux. Certains SCoT commencent à le faire (Brest, Cap-Atlantique, Pays de Retz). Le contentieux se développe principalement autour de l'extension de hameaux, d'une part, de la densification de zones d'habitat diffus assimilées à des espaces urbanisés, d'autre part. Il y a très peu de hameaux nouveaux programmés, mais la pression existe. La possibilité d'autoriser des hameaux nouveaux, alors que l'extension des hameaux existants est interdite, est mal comprise des élus mais aussi des préfets et sous-préfets qui s'en font l'écho. Les DDTM sont réticentes à la création de hameaux nouveaux, craignant des abus. Certaines DDTM disposent d'une cartographie des espaces littoraux urbanisés (habitat, activités). D'autres vont jusqu'à identifier ceux qui relèvent d'une agglomération, d'un village ou d'un hameau (Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Gironde). 84 Confusion aggravée par le contenu (notamment les illustrations) de la plaquette diffusée à la même époque et plus particulièrement destinée aux collectivités. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 67/137 Leur traduction dans les DDALL est très hétérogène, y compris au sein d'une même région disposant de guide (Aquitaine) ou de référentiels partagés (Bretagne). Certains services gardent en mémoire la demande de l'administration centrale de proscrire ce type de documents qui déresponsabilisaient les élus alors que ces documents, selon eux, servaient de supports au dialogue avec les collectivités. b) Les difficultés rencontrées par les services Bien qu'ayant fait l'objet de nombreuses précisions, notamment dans la circulaire de mars 2006, la classification des espaces urbanisés en agglomérations, villages ou hameaux, soulève encore de nombreuses difficultés, tout particulièrement en milieu rural (lotissements peu denses, habitats diffus) et dans les estuaires. Les collectivités sont réticentes à effectuer de telles distinctions entre espaces urbanisés dans leur PLU, car elles se refusent à réduire, voire supprimer, des zones classées en urbanisées ou urbanisables dans les anciens POS, voire dans des PLU relativement récents, et donc à remettre en cause ce qu'elles estiment être des « droits acquis ». Des jurisprudences « malheureuses » fragilisent également la position des services, mais aussi des contentieux mal suivis, faute de volonté et/ou d'une organisation permettant de les instruire dans les temps impartis85. c) Le diagnostic de la mission sur la qualification des espaces urbanisés littoraux La notion d'espaces urbanisés est une notion régulièrement employée dans le code de l'urbanisme. Ce n'est donc pas une notion propre aux dispositions particulières au littoral, ni a fortiori à la disposition relative à la bande littorale. Le zonage et le règlement des espaces dont la qualification en espaces urbanisés est incertaine, constituent un problème général et ancien en urbanisme (cas des zones NB par exemple). Toutefois, la bonne application des dispositions particulières au littoral et leur traduction dans les documents d'urbanisme exigent un minimum de précisions sur ce que sont les espaces urbanisés dans les communes littorales pour leur garder une cohérence globale. L'article L.146-2 précise ainsi : « dans les espaces urbanisés, ces dispositions ne font pas obstacle à la réalisation des opérations de rénovation des quartiers ou de réhabilitation de l'habitat existant, ainsi qu'à l'amélioration, l'extension ou la reconstruction des constructions existantes. » ... sous réserve bien sûr que ces dernières aient été légalement construites. La doctrine administrative, telle qu'elle a été fixée dans l'annexe de la circulaire de mars 2006, n'a pas permis aux services de faire face aux nombreux contentieux, ni de 85 Cas d'une résidence de tourisme de 58 500 m2 (Mandelieu) dont le permis a été annulé par le Tribunal administratif à la demande du préfet ; le jugement a été annulé par la Cour d'appel de Marseille qui a assimilé le projet à un hameau nouveau. Le pourvoi de l'État n'a pas été déposé à temps auprès du Conseil d'État. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 68/137 Rapport n°007707-01 conforter leur propre interprétation de la notion d'espaces urbanisés, d'une part, des notions d'agglomérations, de villages, de hameaux, d'autre part. De plus, nombreux sont les services qui n'en ont pas partagé la totalité des interprétations, la plus « emblématique » étant la possibilité d'autoriser une extension limitée à la frange des hameaux86. Cette possibilité a été jugée par les tribunaux administratifs contraire à la loi (jurisprudence Le Bono87). Pour lui assurer crédibilité et opérationnalité, la doctrine administrative nécessiterait d'être réactualisée régulièrement, non seulement pour prendre en compte la jurisprudence la plus récente, mais aussi pour s'enrichir des travaux réalisés par les services les plus engagés dans l'application des dispositions particulières au littoral. Pour autant, la mission estime que l'actualisation de la doctrine administrative ne réglera pas toutes les difficultés d'application locale de ces notions. L'identification par les services (comme pour les collectivités) des espaces urbanisés, puis leur qualification en agglomération, village, hameau ou autres88, ne peuvent se faire qu'au cas par cas (appréciation). De plus, « le juge administratif interprète strictement l'exception des espaces urbains qui relève de son appréciation souveraine »89. Malgré les démarches engagées dans certains départements visant à développer les justifications, y compris par des visites de terrain, la grande majorité des services n'ont pas les moyens de procéder systématiquement à de telles vérifications, ni toujours les compétences nécessaires pour procéder à ces analyses, leur permettant de justifier accord ou refus sur la base de critères bien explicités. C'est pourtant sur la base de critères (doctrine administrative) et de leur appréciation locale (analyse au cas par cas) que peuvent s'appliquer de telles notions. Il paraît également indispensable à la mission que soient également distingués dans la bande littorale les espaces urbanisés faisant partie d'une agglomération, d'un village, d'un hameau ou d'un autre type d'espaces urbanisés (qui reste à qualifier) afin d'y définir des règles de constructibilité (par densification), compatibles avec l'ensemble des dispositions particulières au littoral et pas seulement avec la disposition particulière à la bande littorale. Pour la mission, l'article L.146-4 ­ III ne peut être interprété indépendamment des autres dispositions particulières au littoral (cf. § 321). d) Recommandations de la mission · Élaborer une doctrine administrative, régulièrement actualisée au regard de la jurisprudence, permettant de clarifier et d'articuler entre elles les différentes catégories d'espaces urbanisés à identifier dans les communes littorales, y compris dans la bande littorale (agglomérations, villages, hameaux, autres espaces urbanisés). 86 87 88 Cette analyse ressort clairement du questionnaire renseigné par les DDTM. Arrêt du Conseil d'État du 27 juillet 2009. Espaces urbanisés non qualifiables d'agglomération, de village ou de hameau, tels les écarts, les lotissements isolés, l'habitat diffus... Conseil d'État (12 mai 1997) ; Société Coprotour ; Recueil Lebon. 89 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 69/137 · En ce qui concerne les documents d'urbanisme : rendre obligatoire dans les SCoT littoraux, qui doivent définir un projet de territoire et décrire leur armature urbaine, l'identification des agglomérations et villages pouvant faire l'objet d'une extension en continuité dans les communes littorales ; veiller dans les PLU littoraux à ce que soient délimitées des extensions au bénéfice des seuls espaces urbains qualifiés dans les SCoT d'agglomérations et villages ; les autres catégories d'espaces urbains délimités ne pouvant faire l'objet d'aucune extension géographique (densification possible des hameaux dans leur périmètre strict ; écarts et habitat diffus non densifiables)90. · Préciser la nature du zonage et les règlements-types à adopter dans les PLU pour décliner cette typologie des espaces urbanisés, notamment de ceux qui ne relèvent pas des agglomérations, villages et hameaux, ce qui contribuerait à régler le problème des zones NB des anciens POS. Demander aux services de l'État de disposer de documents de référence identifiant les espaces urbanisés dans les communes littorales et de veiller à leur actualisation régulière afin qu'ils puissent apprécier les orientations et choix opérés par les collectivités, formuler des avis argumentés et exercer, le cas échéant, un contrôle de légalité sur la compatibilité des documents d'urbanisme et des actes individuels. Une harmonisation des échelles de ces documents serait fortement souhaitable (1/10 000 par exemple). 3.3.2. L'extension de l'urbanisation en continuité et l'extension limitée dans les espaces proches du rivage · Article L.146-4-I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Article L.146-4-II - L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. 90 Le référentiel breton distingue 3 règles d'urbanisation (doctrine administrative régionale) : des urbanisations extensibles (villages et agglomérations) ; des urbanisations densifiables mais non extensibles (hameaux, secteurs urbanisés isolés des années 1960 à 1986, ...) ; les autres types d'urbanisation ne sont ni extensibles, ni densifiables (écarts, habitat diffus, ...). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 70/137 Rapport n°007707-01 En l'absence de ces documents, l'urbanisation peut être réalisée avec l'accord du représentant de l'État dans le département. Cet accord est donné après que la commune a motivé sa demande et après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites appréciant l'impact de l'urbanisation sur la nature. Les communes intéressées peuvent également faire connaître leur avis dans un délai de deux mois suivant le dépôt de la demande d'accord. Le plan local d'urbanisme doit respecter les dispositions de cet accord. La notion d'extension de l'urbanisation, ainsi que les principes d'extension en continuité et d'extension limitée, sont au coeur des instructions reçues par les services en mars 2006. La circulaire dans son annexe en précise les éléments constitutifs non sans créer des ambiguïtés dont certaines ont été réfutées depuis par les tribunaux administratifs comme la possibilité d'autoriser une extension à la « frange d'un hameau ». Par ailleurs, pour donner plus de lisibilité aux dispositions de l'article L.146-4 dans sa globalité et interpréter le principe d'extension limitée de l'urbanisation littorale dans les espaces proches du rivage, la juridiction administrative a, d'une part, donné une double dimension à la notion d'extension, une dimension horizontale (extension spatiale) et une dimension verticale (densification) et, d'autre part, appliqué à la constructibilité des espaces urbanisés de la bande littorale (uniquement donc par densification), les mêmes principes que pour les espaces proches du rivage (densification limitée des seules agglomérations et villages). Comme tout principe général ou notion qualitative, leur application relève d'une appréciation fondée sur des critères, des motifs et justifications et exige donc une analyse au cas par cas. C'est tout particulièrement le cas du principe d'extension limitée dans les espaces proches du rivage qui doit, en l'absence de SCoT, de SAR ou de SMVM, être justifiée dans le PLU sur deux critères bien précis liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Pour réaliser l'analyse des risques juridiques liés à des POS/PLU non compatibles avec les dispositions particulières au littoral, il est indispensable que les services en charge de veiller à cette compatibilité en maîtrisent les notions et principes. Cette maîtrise est d'autant plus importante qu'en l'absence de documents d'encadrement de rang supérieur (ScoT ou SAR valant SCoT), aucune opération d'urbanisation dans les espaces à urbaniser d'un PLU ne peut être réalisée sans l'accord du représentant de l'État.91 a) Le constat des services sur l'application des principes d'extension en continuité et d'extension limitée Face à certaines collectivités qui estiment que le principe de l'urbanisation en continuité contribue à aggraver l'urbanisation linéaire et le phénomène d'étalement 91 Article L.122-2 du code de l'urbanisme. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 71/137 urbain, les services regrettent la faiblesse des réflexions sur les armatures urbaines littorales dans les documents d'urbanisme locaux, y compris dans les SCoT. Mais, ils sont une majorité, dont plusieurs préfets, à estimer que le principe de continuité est globalement bien respecté par les PLU. Un tel constat surprend 92, car l'extension de l'urbanisation en continuité des agglomérations et villages constitue, pour ces mêmes services, le problème majeur de l'application de la loi Littoral. Il est signalé dans tous les départements littoraux. La mission n'a pu recueillir le nombre exact de POS/PLU non compatibles avec cette disposition, mais les quelques données recueillies sont significatives93. 10% des POS annulés en Bretagne le sont sur cette base. Tous les services n'ont pas engagé l'analyse juridique des POS/PLU et identifié les situations de non-compatibilité conformément à la circulaire de mars 2006. Selon les éléments recueillis par la mission, seuls sept départements ont mené l'exercice de façon systématique.94 La Bretagne l'a fait en élaborant une doctrine régionale validée en CAR. Ce travail interdépartemental animé par la DREAL a servi de « cadre référentiel » pour établir au niveau de chaque département des cartes des risques juridiques sur l'extension de l'urbanisation, à la parcelle, des POS/PLU (cf. § 232). L'application se révèle toutefois complexe et longue (analyse au cas par cas, vérification sur le terrain) et fait l'objet de négociations difficiles avec les élus95. b) Les difficultés rencontrées par les services Les principales difficultés sont en fait liées : ­ d'une part à la différenciation entre villages, hameaux, et habitat dispersé, l'extension géographique n'étant possible que pour les seuls espaces qualifiés de villages (cf. § 331), ­ et d'autre part à la délimitation des espaces proches du rivage, l'extension devant dès lors être limitée (cf. § 322). Lorsque les espaces proches du rivage sont délimités dans les POS/PLU, les services rencontrent également des difficultés pour apprécier les justifications et motivations des extensions prévues dans ces espaces sur la base des deux critères précisés dans la loi, la configuration des lieux ou l'accueil d'activités nécessitant la proximité du rivage. Ces justifications et motivations ne sont pas toujours très explicites. Ces deux critères ne sont pas applicables dès lors qu'il existe un document de rang supérieur (DTA, SAR, SCoT, SMVM) mais ceux-ci précisent rarement, et surtout insuffisamment, les modalités d'application de cette disposition littorale pour qu'elles 92 La raison est sans nul doute à rechercher dans la qualification très souple dans les POS/PLU des espaces urbanisés pouvant faire l'objet d'une extension, ce qui explique aussi l'importance du contentieux lié à ce prinicipe. 19 POS/PLU considérés comme non compatibles sur 21 communes littorales en Ille-et-Vilaine ; 50 % en Loire-Atlantique. Les 4 départements bretons, les Pyrénées-Atlantiques, la Manche et le Pas-de-Calais. Cf. présentation de la démarche bretonne en annexe 4. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 72/137 93 94 95 Rapport n°007707-01 soient opérationnelles (identification agglomérations et villages). des espaces proches du rivage, des De plus, les tribunaux apprécient librement si ces documents font écran ­ ou pas - à l'application de la loi Littoral. L'application rigoureuse de la circulaire de mars 2006 a conduit les services qui se sont mobilisés à remettre en cause, non seulement les POS « dormeurs », mais également des PLU récents qui n'avaient pas fait l'objet d'observations de leur part. Ces interprétations actualisées de l'extension en continuité des agglomérations et villages sont parfois contestées par les collectivités devant les tribunaux qui peuvent leur donner raison, ce qui fragilise les positions de l'État. c) Le diagnostic de la mission sur les principes d'extension en continuité de l'urbanisation et d'extension limitée L'extension en continuité des agglomérations et villages est le sujet le plus sensible de la loi Littoral. La circulaire de mars 2006 a fortement bousculé la position des services de l'État, en cherchant à permettre d'urbaniser au-delà de ce que la loi prévoyait. Car, au delà de l'ouverture faite sur une extension de l'urbanisation aux marges des hameaux, la circulaire et, plus encore, la plaquette d'accompagnement destinée aux élus ont conforté certaines collectivités dans leur position d'interprétation « souple » des dispositions de la loi avec les conséquences que l'on sait en matière de contentieux. Les services ont aujourd'hui besoin : ­ d'une doctrine nationale réactualisée ; ­ d'un travail en réseau leur permettant d'échanger (nécessité d'apprécier, de justifier, de motiver...) ; ­ d'un appui juridique pour les cas difficiles. Par ailleurs, aucun dispositif de suivi de l'application des dispositions particulières de la loi Littoral n'a été mis en place, permettant de suivre la consommation de l'espace dans les communes littorales, et tout particulièrement dans les espaces proches du rivage et la bande littorale, d'évaluer l'efficacité de cette disposition (ou de sa bonne application). Le projet de la DREAL Bretagne en liaison avec le CETE de l'Ouest n'a pu encore être mis en place par les DDTM. Ce projet n'a pas été retenu comme prioritaire par les DDTM. 96 d) Recommandations de la mission Les recommandations qui suivent sont des recommandations d'ordre général et concernent l'ensemble des dispositions particulières au littoral, mais la mission les formule tout particulièrement pour la bonne application des deux principes qui soulèvent le plus de difficultés d'application : l'extension de l'urbanisation en continuité des agglomérations et villages et leur extension limitée dans les espaces proches du rivage. · Établir un référentiel permettant de préciser les principes d'extension en continuité et d'extension limitée (définition de critères ou faisceau d'indices) à 96 Cf. Annexe 5 sur l'application de la loi Littoral en Bretagne Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 73/137 partir des travaux d'un groupe de travail national assisté de juristes spécialisés à l'instar de ce qui a été fait en Bretagne ; en prévoir une mise en ligne et une actualisation régulière en fonction de la jurisprudence. · Organiser un appui juridique au niveau national sur la base d'une gestion du contentieux permettant d'apprécier au cas par cas les situations les plus difficiles (si nécessaire avec une assistance de juristes spécialisés) ; procéder au niveau de chaque région, en collaboration avec les tribunaux administratifs, au suivi des contentieux et des déférés engagés par l'État dans le champ de l'urbanisme, en distinguant en particulier les territoires d'intérêt national comme le littoral (bilan triennal présenté en CAR et adressé au ministre en charge de l'urbanisme). Donner de nouvelles instructions aux services sur la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions particulières au littoral (en particulier avec celles de l'article L.146-4) et sur les modalités de travail avec les collectivités locales (diffusion sur demande des cartes de risques juridiques notamment). Pour cela, abroger la circulaire de mars 2006 et la remplacer par une circulaire issue des travaux précités, intégrant les avancées des lois Grenelle, notamment l'obligation de justifier les objectifs chiffrés de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers 97 dans les documents d'urbanisme. 3.3.3. La capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser · Article L.146-2 - Pour déterminer la capacité d'accueil des espaces urbanisés ou à urbaniser, les documents d'urbanisme doivent tenir compte : - de la préservation des espaces et milieux mentionnés à l'article L. 146-6 ; - de la protection des espaces nécessaires au maintien ou au développement des activités agricoles, pastorales, forestières et maritimes ; - des conditions de fréquentation par le public des espaces naturels, du rivage et des équipements qui y sont liés. La circulaire de 1991, tout en reconnaissant la quantification de la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser délicate, souligne l'importance de cette notion qui vise à proportionner le développement de l'urbanisation littorale à la protection des espaces naturels, agricoles, forestiers et maritimes, y compris en termes de fréquentation. Celle de mars 2006 ne l'évoque pas. a) Le constat des services sur la détermination de la capacité d'accueil La question de la capacité d'accueil est traitée de manière très insuffisante dans les PLU, ainsi que dans les SCoT littoraux, alors que cette réflexion devrait être plus facile à mener à ce niveau malgré des périmètres pas toujours adaptés. 97 Articles L.122-1-2 (SCoT) et L.123-1-2 (PLU) du code de l'urbanisme. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 74/137 Rapport n°007707-01 Dans la grande majorité des départements, il n'y a pas de doctrine établie, ni de méthode définie, et donc pas de préconisation aux collectivités de la part des services sur une notion qu'ils ne maîtrisent pas eux-mêmes. Les services adoptent généralement une attitude indulgente à l'égard des collectivités qui s'y essaient dans leurs documents d'urbanisme et émettent une simple mise en garde quand le sujet n'y est pas abordé (pour motif de sécurité juridique). Il y a peu de jurisprudence portant sur cette disposition (annulation du PLU de l'ÃŽle d'Yeu). Seules deux régions y ont travaillé : les Pays de la Loire (méthodologie et expérimentations98) et l'Aquitaine (méthodologie s'appuyant sur la démarche de l'évaluation environnementale99). b) Les difficultés rencontrées par les services Si la base législative en est claire, cette notion, qui s'applique à l'ensemble du territoire communal comme à des unités de territoire plus vastes (DTA, SAR, SCoT...), est ressentie comme floue, sans doctrine arrêtée et surtout sans méthodologie établie au niveau national. La méthode mise au point dans les Pays de la Loire est connue d'un certain nombre de services, mais jugée par eux difficile à appliquer pour les collectivités, car trop compliquée. Les services regrettent le manque de soutien de la part de l'administration centrale, notamment les services des Pays de la Loire dont le travail méthodologique mené localement avec l'appui d'universitaires n'a jamais été examiné par l'administration centrale et a fortiori validé. De plus, cette notion de capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser leur paraît limitée dans les critères à prendre en compte. Elle ne permet pas, par exemple, d'aborder les besoins de logements, notamment sociaux, particulièrement aigus sur le littoral (critères de la loi SRU, mais également hébergement des saisonniers dans les communes touristiques). c) Le diagnostic de la mission sur la détermination de la capacité d'accueil Les services (et plus encore les collectivités) ont de réelles difficultés à appréhender la notion de capacité d'accueil fondée sur les grands principes de la loi Littoral. La préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, qui va jusqu'à inclure la préoccupation d'éviter la surfréquentation de ces espaces, exige une maîtrise du développement littoral et son orientation volontaire vers l'arrière-pays. 98 Guide « évaluation de la capacité d'accueil et de développement des territoires littoraux », pilotage DREAL ; expérimentation sur l'ÃŽle d'Yeu suite à l'annulation du PLU. Guide régional de 2006 s'appuyant sur un diagnostic territorial et des critères qui vont au-delà de ceux énumérés à l'article L.146-2. 99 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 75/137 La conception d'un véritable aménagement en profondeur ne peut être portée que par l'intercommunalité. Cette conception, ainsi que la capacité d'accueil des communes de sa façade littorale, devraient relever du SCoT dont le périmètre serait à délimiter en conséquence. Dans les communes littorales, la capacité d'accueil des espaces pouvant encore être urbanisés ne peut pas résulter de scénarios de développement basés uniquement, comme cela est trop souvent constaté, sur des hypothèses démographiques (demande), ces espaces étant juridiquement restreints (protection des espaces remarquables mais aussi coupures d'urbanisation, extension limitée...). Aucun lien n'est clairement établi par les services entre l'obligation d'évaluer les impacts environnementaux des documents d'urbanisme100 et cette disposition relative à la capacité d'accueil uniquement ciblée sur la préservation des espaces naturels, agricoles, forestiers littoraux. Certains services recommandent aux collectivités d'y adjoindre d'autres critères limitants comme la capacité résiduelle de tous les réseaux dont l'assainissement101 ou encore la prévention des risques102. La circulaire de 1991 faisait pourtant dans son annexe une large place à la nécessaire justification des projets mais elle la limitait à l'évaluation économique et environnementale des projets d'équipements et d'opérations d'urbanisation relevant d'une étude d'impact, au-delà donc d'un certain seuil financier, pas à l'évaluation environnementale des plans et programmes qui ne sera exigée qu'à partir de 2004. Les travaux engagés sur ce sujet par l'administration en 1992, puis dans le cadre de l'atelier littoral national en 2005, sont méconnus des services pour les premiers travaux et très peu évoqués par eux pour les seconds. Les critères de mixité sociale fixés par la loi SRU, jugés par certains élus comme incompatibles avec les dispositions particulières au littoral, sont souvent évoqués pour justifier une capacité d'accueil « souhaitable ». C'est une problématique générale, mais particulièrement aiguë sur le littoral. Sans nier ces difficultés, des services nuancent les propos des élus. Ainsi, selon la DDTM des Pyrénées-Atlantiques, la loi Littoral n'est pas perçue dans ce département comme un obstacle à la construction de logements sociaux dès lors que les communes littorales ont, sur la base d'une intervention publique affirmée, la volonté d'agir, ce qui est également observé dans d'autres départements littoraux sous pression foncière. d) Recommandations de la mission · Intégrer la « question » de la capacité d'accueil dans la démarche d'évaluation environnementale des documents d'urbanisme, obligatoire pour les SCoT et pour l'ensemble des PLU des communes littorales, en identifiant clairement les critères spécifiques au littoral à prendre en compte (à préciser dans le guide en cours d'élaboration). Cette recommandation répond à l'attente formulée dans le cadre du Grenelle de la mer. 100 101 102 Directive 2001/42/CE et articles L.121-10 à L.121-15 du code de l'urbanisme. Critère cité dans la loi Littoral mais relevant d'autres réglementations. Critère cité pour la délimitation de la bande littorale . Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 76/137 Rapport n°007707-01 · Veiller à la prise en compte de ces critères lors de l'avis des services de l'État sur les documents d'urbanisme, avis éclairé par celui de l'autorité environnementale, ce qui exige une coordination renforcée des interventions de l'État en ce domaine (porter à connaissance/cadrage et avis). Veiller à la définition de périmètre de SCoT littoraux permettant de concevoir un aménagement en profondeur et de mener une réflexion pertinente sur la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser dans les communes littorales. · 3.4. Les mesures relatives aux activités spécifiques Les dispositions particulières au littoral prévoient un certain nombre de cas où elles ne s'appliquent pas, soit de façon générale, soit par procédure dérogatoire. 3.4.1. Le traitement des terrains de camping en dehors des espaces urbanisés Article L.146-5 - L'aménagement et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes en dehors des espaces urbanisés sont subordonnés à la délimitation de secteurs prévus à cet effet par le plan local d'urbanisme. Ils respectent les dispositions du présent chapitre relatives à l'extension de l'urbanisation et ne peuvent, en tout état de cause, être installés dans la bande littorale définie à l'article L. 146-4. Cet article spécifique aux terrains de camping met en évidence la volonté du législateur de traiter différemment les terrains de camping et les espaces urbanisés puisque la possibilité d'en aménager en dehors de ce type d'espaces est explicitement prévue par la loi. Les secteurs qui leur sont réservés dans les PLU littoraux doivent toutefois respecter les dispositions relatives à l'extension de l'urbanisation (extension en continuité de l'existant, extension limitée dans les espaces proches du rivage et extension interdite dans la bande littorale). a) Le constat des services sur le traitement des terrains de camping littoraux Rares sont les services qui ont élaboré leur propre doctrine sur ce sujet. Il est vrai que les créations de terrains de camping sont aujourd'hui peu nombreuses, ce qui n'est pas le cas des demandes d'extension qui posent de nombreux problèmes103. Généralement, seules les extensions des terrains de camping situés en continuité de 103 Deux annulations dans la Manche. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 77/137 l'urbanisation sont autorisées. De petites extensions sont cependant autorisées dans des campings isolés existants. Dans la grande majorité des départements, les terrains de camping ne font pas l'objet d'un zonage spécifique104 et sont assimilés à des espaces urbanisés, avec les difficultés de qualification précédemment analysés (cf. § 331). Un seul service, la DDTM du Calvados, a précisé que, dans son département, les communes classent les terrains de camping dans leur PLU selon un zonage spécifique. La DDTM des Pyrénées Atlantiques a fait un travail intéressant de classification des terrains de camping en trois catégories, en fonction de leur localisation (U : peuvent évoluer ; N : peuvent être conservés mais sans évolution possible ; N.ER : à résorber). b) Les difficultés rencontrées par les services Le classement des campings en zone urbaine (U) ou naturelle (N) fait l'objet de vifs débats entre les services et les collectivités. Les services manquent de critères précis pour argumenter : faut-il les considérer comme des espaces urbanisés en raison de leur « durcissement » ou comme des secteurs spécifiques bénéficiant de règles particulières et alors, avec quel zonage ? Le nombre de plus en plus important d'habitations légères de loisir, de résidences mobiles de loisir, de caravanes stationnées à l'année, ainsi que le développement de multiples services « intégrés » (épicerie, discothèque, terrain de sport, piscine...), transforment progressivement ces terrains de camping en véritables complexes de loisirs qui se différencient de moins en moins des espaces urbanisés. Peuvent-ils être assimilés à des hameaux ? Un important secteur de terrains de camping avec commerces, services et activités de loisirs peut-il être assimilé à un village ? Ces interrogations sont accentuées avec la présence d'une population permanente dans les terrains de camping situés dans les zones à forte pression foncière, tout particulièrement autour des grandes agglomérations et villes universitaires (Languedoc-Roussillon, La Rochelle...). Par ailleurs, beaucoup de dossiers sont instruits dans le cadre de régularisations sur lesquelles il est difficile pour les services de revenir, l'enjeu économique étant souvent mis en avant par les pétitionnaires et les collectivités. Les contentieux se développent dans les zones de forte fréquentation touristique et/ou soumises aux risques littoraux (Languedoc-Roussillon). c) Le diagnostic de la mission sur le traitement des terrains de camping Le zonage spécifique des terrains de camping avait initialement un double objectif : ­ favoriser cette activité de loisir en plein air dans des lieux adaptés, ­ « protéger » de l'immobilier touristique le foncier de cette activité pour permettre au plus grand nombre de partir en vacances. 104 Côtes d'Armor, Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Landes... Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 78/137 Rapport n°007707-01 Le « durcissement » des terrains de camping fait qu'aujourd'hui cette spécificité a perdu beaucoup de son sens et n'est plus guère prise en compte dans les PLU. Leur réglementation a beaucoup évolué ces dernières années 105, ainsi que les pratiques ; il est indispensable d'établir une doctrine nationale actualisée qui permette d'appliquer sans divergence les dispositions particulières de l'article L. 146-5. Une ambiguïté importante demeure en effet sur la qualification en matière d'urbanisme de l'hôtellerie de plein air, qui s'éloigne de plus en plus de la pratique du camping. En fonction de cette qualification (espaces urbanisés ou espaces spécifiques), l'interprétation des dispositions particulières au littoral à leur encontre peut considérablement varier. Toutefois, en s'appuyant sur la jurisprudence, la plupart des services les assimilent à de l'urbanisation et leur en appliquent strictement les règles, mais ils ne les qualifient pas pour autant selon la typologie des espaces urbanisés telle que définie par la loi Littoral (villages, hameaux, autres) rendant juridiquement incertain tout développement de cette activité de plein air dans les communes littorales. d) Recommandations de la mission · Clarifier les dispositions relatives aux terrains de campings, notamment la possibilité ou non de délimiter des secteurs spécifiques à partir d'un ensemble de terrains de camping existants, dûment autorisés, dès lors que leurs caractéristiques le justifient (critères à définir) et, à partir de cette délimitation, la possibilité ou non de leur extension (hors bande littorale, extension en continuité et extension limitée dans les espaces proches du rivage). Intégrer à cette réflexion nationale la classification mise en oeuvre dans le département des Pyrénées-Atlantiques bien qu'elle ne corresponde pas à une analyse de secteurs spécifiques mais de terrains de camping. Au préalable, recenser les contentieux portant sur cette thématique en veillant tout particulièrement à bien identifier les problèmes liés à leur « durcissement » et à la spéculation sur le foncier. 3.4.2. Les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières · · Article 146-4-I modifié (art. 109 de la loi d'orientation agricole du 10 juillet 1999 et art. 235 de la loi relative au développement des territoires ruraux du 23 février 2005) L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières qui sont incompatibles 105 Décret n°2011-1214 du 29 septembre 2011 et circulaire du 28 novembre 2011. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 79/137 avec le voisinage des zones habitées peuvent être autorisées, en dehors des espaces proches du rivage, avec l'accord du préfet après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysage et de sites. Cet accord est refusé si les constructions ou installations sont de nature à porter atteinte à l'environnement ou aux paysages. Les dispositions du premier alinéa ne font pas obstacle à la réalisation de travaux de mise aux normes des exploitations agricoles, à condition que les effluents d'origine animale ne soient pas accrus. a) Le constat des services sur les procédures liées aux constructions agricoles L'application du dispositif dérogatoire est très variable d'un département à l'autre : ­ les dérogations sont généralement accordées sans difficulté hors des espaces proches du rivage (par exemple, 91% des demandes déposées en 2009 dans le département de la Manche ont reçu une suite favorable) ; les pratiques diffèrent dans les espaces proches du rivage où toute dérogation est interdite (ce qui contribue à la réticence des collectivités de les délimiter dans leur PLU). La procédure de dérogation créée en 2005 y est appliquée de façon très souple en interprétant parfois très librement la délimitation des espaces proches du rivage, voire en l'ignorant. ­ Les avis des services sont plus ou moins suivis par les services préfectoraux . Pour en faciliter l'application, un certain nombre de services ont élaboré, en liaison avec les organismes professionnels, des chartes ou des guides (département de la Manche). b) Les difficultés rencontrées par les services pour mettre en oeuvre les procédures relatives aux constructions liées aux activités agricoles L'agrandissement des exploitations est généralement autorisé dans les espaces proches du rivage (extension limitée en continuité d'exploitations ou en discontinuité pour les ouvrages de mise aux normes). Les services signalent l'ambiguïté de cette règle quand il s'agit de la mise aux normes du bien-être animal, qui exige une augmentation significative des surfaces, et de l'inapplicabilité de la limité fixée « sans augmentation des effluents ». Les problèmes posés par les regroupements d'élevages, les déplacements d'installations, ne sont pas réglés par le dispositif dérogatoire en espaces proches du rivage... Il ne s'agit plus d'extension limitée (Finistère). Les logements de fonction sont autorisés par certains services (bergeries dans la Manche, Bretagne) bien qu'ils ne soient pas incompatibles avec le voisinage des zones Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 80/137 habitées (critère pour accorder la dérogation). Ces services sont toutefois conscients que ce type d'autorisations créent des « rentes de situation ». La réalisation de hangars plus ou moins isolés soulève également des interrogations, car ils peuvent être réalisés en continuité de l'exploitation (cas de l'Aude). Par ailleurs, l'utilisation de ces bâtiments agricoles peut évoluer dans le temps (transformation en habitations ou en restaurants), y compris dans des espaces remarquables106. La DDTM de Charente-Maritime a élaboré une note de doctrine sur ce sujet. Les serres, qui ne sont pas considérées comme constitutives d'urbanisation par les services de l'État (Finistère, Pyrénées-Atlantiques), sont autorisées en dehors de la bande littorale, alors que la jurisprudence s'est prononcée différemment. Le problème est encore plus difficile à régler dès lors que le projet associe serres et ferme photovoltaïque (Pyrénées-Atlantiques). c) Le diagnostic de la mission sur la mise en oeuvre des procédures liées aux activités agricoles Les caractéristiques des activités agricoles (mais aussi pastorales, forestières, ostréicoles...) et les problèmes soulevés par leur développement, voire leur simple maintien, diffèrent considérablement d'un littoral à un autre. Dès lors, l'élaboration locale de chartes ou de guides en concertation avec les parties prenantes peut être de nature à faciliter l'application de ce dispositif dérogatoire. En revanche, ils ne doivent pas aller au-delà de la doctrine administrative élaborée au niveau national. Les recherches de solutions d'implantation alternatives ne sont jamais évoquées et les motifs justifiant la localisation du projet rarement développés (évaluation environnementale). d) Recommandations de la mission · Elaborer une doctrine nationale clarifiant l'application des procédures dérogatoires liées aux activités forestières et soumettre à la validation de l'administration centrale les chartes et guides locaux avant diffusion. Renforcer le contrôle des autorisations dérogatoires et l'effectuer dans la durée. 3.4.3. Les difficultés liées aux installations d'énergie renouvelable · Le problème soulevé pour l'implantation d'éoliennes terrestres dans les communes concernées par la loi Littoral a fait l'objet d'une mission d'audit spécifique confiée au CGEDD107. Certes, cette mission ne concerne que la Corse et les départements 106 Le problème de la transformation des constructions autorisées car nécessaires aux activités économiques traditionnelles est encore plus sensible pour les installations ostréicoles. Rapport CGEDD n° 008203-01 sur « le développement de l'énergie éolienne terrestre dans les DOM et en Corse ». 107 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 81/137 d'outre-mer mais les difficultés que soulève le cadre législatif et réglementaire sont de même nature. Aussi la présente mission ne les a-t-elle pas analysées. Elle a toutefois recueilli les observations des services. a) Le constat des services sur l'implantation des éoliennes terrestres Pour les services, il n'y a pas d'ambiguïté : la réglementation actuelle ne permet pas d'implanter à terre des éoliennes de plus de 12 m dans les communes littorales. Le principe de l'extension de l'urbanisation en continuité est contraire aux règles de distance imposées pour l'installation de ce type d'équipements. Il en est de même de toute implantation d'activités exigeant par voie réglementaire une certaine distance des zones d'habitation (ou de toute autre construction). b) Les difficultés rencontrées par les services Les services sont interpellés par les collectivités sur l'incohérence des politiques publiques promues par l'État (développement des énergies renouvelables et protection du littoral). c) Le diagnostic de la mission Il ne s'agit pas, pour la mission, d'incohérence de politiques publiques comme cela a été trop souvent entendu au cours de cet audit, mais de choix prioritaire portant sur une partie du territoire national. Ce choix relève des motifs mêmes de la loi. La loi Littoral est porteuse d'une politique spécifique d'aménagement visant à reporter à l'arrière du littoral toute urbanisation nouvelle, y compris donc les activités ne justifiant pas la proximité immédiate de l'eau, y compris aussi les activités économiques isolées. Il convient d'afficher plus clairement un tel choix. Il a été mis en évidence lors des débats parlementaires et, de plus, clairement exprimé dans le texte législatif en ce qui concerne les ICPE : « Elles (les dispositions particulières au littoral) sont également applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement » (art. L.146-1 - dernier alinéa). En revanche, il n'est pas souhaitable de laisser dire qu'aucune implantation économique n'est possible dans les communes littorales. Des zones d'activités, qu'il convient d'identifier en espaces urbanisés, existent et peuvent y être développées dès lors qu'elles respectent les différentes dispositions particulières au littoral. d) Recommandations de la mission · Mieux expliciter les enjeux sur le littoral justifiant une politique restrictive d'implantation d'activités isolées (hors zones d'activités, hors activités agricoles, pastorales, forestières et maritimes dont un régime dérogatoire a été intégré à la loi). Analyser les conséquences (avantages et inconvénients) dans les communes littorales continentales, les communes iliennes autres que la Corse et les communes riveraines des grands lacs, de l'application des recommandations Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 82/137 · Rapport n°007707-01 du rapport du CGEDD précité, portant sur le cadre législatif et réglementaire applicable aux éoliennes dans les départements d'outre-mer et en Corse. 3.5. Les dispositions relatives aux espaces à préserver de l'urbanisation Outre la bande littorale où toute extension de l'urbanisation est interdite en dehors des espaces urbanisés, la loi Littoral prévoit que soient identifiés d'autres types d'espaces à préserver également de l'urbanisation. Ces espaces où s'appliquent des règles qui leur sont propres, concernent l'ensemble du territoire communal et donc bien sûr la bande littorale. Comme pour les espaces urbanisés, les dispositions particulières propres à chaque type d'espaces naturels, agricoles ou forestiers se cumulent sur la bande littorale avec celles qui lui sont propres. 3.5.1. Les espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation Article L.146-2 - Les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme doivent prévoir des espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation. La circulaire de 1991 en précise la conception : « composantes positives qui séparent selon leur échelle des zones d'urbanisation présentant une homogénéité physique et une certaine autonomie de fonctionnement. L'étendue de ces coupures doit être suffisante pour permettre leur gestion et assurer leur pérennité. ». Elles devront figurer avec un zonage propre (ND ou NC). Les services de l'État devront bâtir leur position concernant leur localisation sur la base d'études. La circulaire de mars 2006 n'évoque pas sur cette disposition. a) Le constat des services sur l'identification de coupures d'urbanisation Si la notion de coupure d'urbanisation ne semble pas poser de difficultés majeures aux services, il n'en est pas de même de son application. Beaucoup de PLU littoraux n'identifient pas de coupures d'urbanisation. Les SCoT le font davantage mais de façon encore insuffisante. Certains élus estiment que cette disposition est incohérente avec le principe d'extension de l'urbanisation en continuité de l'existant. Il n'est pas toujours évident de délimiter et surtout de justifier des coupures d'urbanisation dans les PLU littoraux ruraux en raison du faible niveau d'urbanisation. A l'inverse, les coupures d'urbanisation dans les PLU des communes très urbanisées nécessitent des délimitations très précises, voire des micro-coupures, permettant de mettre fin à une urbanisation continue le long des axes principaux. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 83/137 Il n'y a pas beaucoup d'éléments de jurisprudence108. b) Les difficultés rencontrées par les services pour son application Les différences d'application par les services sont importantes d'un département à un autre, tout particulièrement dans l'identification des activités qui peuvent y être autorisées : ­ Hébergements liés aux activités de loisir : quelques services s'interrogent encore sur la possibilité d'y autoriser des opérations lourdes comme les golfs immobiliers ou les « center parks » ; plus nombreux sont ceux qui hésitent à bloquer des opérations plus modestes visant à assurer la viabilité économique de centres de loisirs tels que des centres équestres. Constructions de bâtiments agricoles : si les extensions limitées des bâtiments existants ne posent pas de problème d'autorisation, il n'en est pas de même pour de nouvelles constructions liées à l'activité agricole, notamment en espaces proches du rivage. ­ D'une façon générale, se pose pour les services le problème du changement d'usage de bâtiments existants, avec ou sans extension, qui remet en cause le caractère de coupure d'urbanisation. Face à ces incertitudes, certains services vont jusqu'à n'autoriser dans les coupures d'urbanisation que des aménagements légers. Les différences d'échelles entre les PLU et les documents de rang supérieur (DTA, SCoT) constituent un problème difficile à gérer (grandes coupures et coupures locales)109. Lorsque ces documents identifient des coupures d'urbanisation, il est rare que les PLU les traduisent dans un zonage et un règlement appropriés et surtout en identifient d'autres. L'obligation de définir des coupures d'urbanisation dans les PLU ne s'impose pas aux révisions partielles ne touchant qu'une partie jugée non significative du territoire communal. Les services notent toutefois des évolutions positives. Pour les services, l'État ne dispose pas de moyens réellement contraignants pour les imposer aux collectivités, ou ne marque pas sa volonté d'y recourir. De plus, leur identification dans les documents d'urbanisme ne règle pas le problème de leur gestion. Enfin, Les services observent un grignotage dans le temps des coupures d'urbanisation, car leur périmètre n'est pas juridiquement garanti dans le temps (cf. jurisprudence). c) Le diagnostic de la mission sur les coupures d'urbanisation littorales L'enjeu des grandes coupures d'urbanisation sur le littoral se joue au niveau des SCoT : tout SCoT littoral qui n'identifierait pas de coupures d'urbanisation significatives 108 Mais néanmoins 42 arrêts (Cours d'Appel et Conseil d'État) dont c ertains sont illustrés et commentés dans le référentiel breton. 109 ... surtout lorsque ces documents ne donnent aucune indication sur la vocation de ces coupures. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 84/137 Rapport n°007707-01 devrait être déclaré non compatible par le préfet et, si nécessaire, être déféré au tribunal administratif. Certains élus estiment en effet cette disposition comme contraire au principe d'urbanisation en continuité de l'existant, en occultant les autres principes généraux de la loi à prendre concomitamment en compte (aménagement en profondeur ; accès au rivage ; protection des espaces naturels, agricoles, forestiers et paysagers, tout particulièrement dans les espaces proches du rivage). Les projets de territoire (PADD) des SCoT et des PLU devraient définir leur vocation (naturelle, agricole ou forestière, récréative, multifonctionnelle) afin de donner des orientations quant à la nature des activités qui y sont encouragées, ainsi que les principes à respecter dans les PLU. Au-delà de la protection des espaces naturels et agricoles par les documents d'urbanisme, des outils complémentaires existants pourraient également être mis en oeuvre pour soustraire ces espaces à la pression urbaine littorale : ­ les zones agricoles protégées (ZAP)110 définies par la loi d'orientation agricole de 1999, qui doivent présenter un intérêt général en raison de la qualité de leur production ou de leur situation géographique, ce qui est le cas des espaces agricoles littoraux ; les périmètres de protection et de mise en valeur des espaces naturels et agricoles péri-urbains (PAEN)111 définis par la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, qui permettent aux départements, avec l'accord des communes, d'y définir des programmes d'action et de sécuriser les activités agricoles qui s'y exercent. ­ Ces outils sont relativement peu utilisés par les services de l'État (ZAP) et par les collectivités territoriales (PAEN), les communes s'avérant peu enclines à mobiliser ces outils de protection qui doivent, lors de leur élaboration, exclure tous espaces urbanisés ou à urbaniser des PLU et être compatibles avec les SCoT lorsqu'ils existent mais qui, une fois approuvés, deviennent opposables aux PLU. L'État est insuffisamment vigilant sur la matérialisation de ces coupures en termes de zonage et de règlement dans les documents d'urbanisme, ainsi que sur leur évolution dans le temps. Ce sont les associations qui engagent à 95 % le contentieux portant sur l'application de cette disposition. d) Recommandations de la mission · En l'absence de coupures d'urbanisation dans les SCoT et les PLU, demander aux collectivités de modifier leurs documents d'urbanisme en justifiant les modifications demandées au-delà de la seule lutte contre l'urbanisation linéaire le long du rivage (préservation des accès au littoral et des perspectives sur la mer, protection des espaces naturels et agricoles littoraux...). 110 111 Art. L.112-2 du code rural. Art. L.143 et suivants du code de l'urbanisme. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 85/137 · Veiller à ce que les PADD des SCoT et des PLU définissent, avec un niveau de précision suffisant, les vocations, les fonctions économiques, sociales (aménités) et environnementales à donner aux coupures d'urbanisation que les collectivités auront identifiées, fixent les règles à décliner dans les PLU, voire proposent leur protection réglementaire (PAEN, ZAP...). Mettre en évidence la complémentarité de certaines de ces coupures d'urbanisation, dont l'intérêt écologique est avéré, avec la « trame verte et bleue » (TVB) : en confortant dans le temps les coupures d'urbanisation par leur connexion à un réseau plus large, en identifiant de nouvelles coupures d'urbanisation contribuant au fonctionnement de la trame verte et bleue, y compris en zones urbaines (micro-coupures). Proposer aux collectivités, le cas échéant, la mise en oeuvre d'outils de protection réglementaire des espaces agricoles littoraux soumis à forte pression (PAEN et ZAP). Identifier les coupures d'urbanisation des communes littorales dans le suivi de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers. 3.5.2. Les espaces remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel · · · Article L.146-6 modifié : Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive européenne n° 79-409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et, dans les départements d'outre-mer, les récifs coralliens, les lagons et les mangroves. Toutefois, des aménagements légers peuvent y être implantés lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. Un décret définit la nature et les modalités de réalisation de ces aménagements qui incluent, selon leur importance et leur incidence sur l'environnement, soit une enquête publique, soit une mise à disposition du public préalablement à leur autorisation. En outre, la réalisation de travaux ayant pour objet la conservation ou la protection de ces espaces et milieux peut être admise, après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 86/137 L'identification des espaces remarquables ou caractéristiques du littoral, ainsi que les règles qui s'y appliquent, ont fait l'objet de décrets d'application 112 et de nombreuses instructions aux services dont la dernière en date du 15 septembre 2005. La circulaire du 14 mars 2006 ne les évoque pas mais celle du 20 juillet 2006 rappelle que les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral doivent être classés en tant que tels dans les PLU. La circulaire de juillet 2006 précise par ailleurs que : « s'il appartient en premier lieu aux communes d'identifier et de délimiter les espaces remarquables lors de l'élaboration ou de la révision de leur PLU, pour autant l'État doit avoir sa propre vision des espaces à qualifier de remarquables afin de pouvoir exercer pleinement son rôle lors des réunions d'associations notamment. Les études réalisées (...) pourront utilement être communiquées aux communes dans le cadre du PAC ». Cette instruction nuance pour le moins l'instruction donnée dans la circulaire de mars 2006 : « Les DDALL ne doivent en aucun cas être notifiés aux communes dans le cadre du « porter à connaissance » (PAC) ou de toute autre forme de notification à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme. » Bien sûr, il est ici question de notification, mais les services n'en ont pas moins été déstabilisés dans leurs pratiques de PAC. Certains d'entre eux ont dès lors « abandonnés » leur DDALL, d'autres au contraire ont estimé que la circulaire de juillet 2006 les encourageait à l'actualiser, en lançant des études complémentaires, et à en communiquer les informations aux communes (sans qu'il soit question pour autant de les notifier). a) Le constat des services sur l'identification des espaces remarquables et caractéristiques Les textes et instructions sont abondantes et précises (circulaire de 2005 notamment). Il n'y a guère de difficultés pour interpréter cette disposition, du moins au niveau de la doctrine. Les services disposent pratiquement tous d'une cartographie identifiant et délimitant les espaces remarquables à une échelle suffisamment précise pour leur PAC. Il y a un recoupement fréquent avec les espaces juridiquement protégés (sites classés, zones de protection spéciale, réserves naturelles...) ou inventoriés par l'État (ZNIEFF notamment). Les espaces remarquables sont rarement identifiés comme tels dans les documents d'urbanisme. Cette carence est jugée de peu d'effets par les services qui veillent à ce qu'ils soient classés en zones N avec un règlement adapté dans les PLU, excepté pour les zones humides qui, lorsqu'elles ne sont pas identifiées comme espaces 112 Décret n°89-694 du 20 septembre 1989 et décret n°2004-310 du 29 mars 2004. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 87/137 remarquables (les espaces caractéristiques ayant tendance à être oubliés), ne sont pas, d'une façon générale, respectées par les collectivités113. b) Les difficultés rencontrées par les services pour l'application de cette disposition ­ Pour leur identification et délimitation Un certain nombre de documents départementaux cartographiant les espaces remarquables du littoral n'ont pas fait l'objet d'actualisation, ce qui peut constituer une source de fragilité juridique lors des « porter à connaissance ». Les cartographies disponibles ne règlent pas toujours les problèmes de délimitation à la marge, notamment dans le cas des zones humides. Dès lors qu'ils sont identifiés dans un document de rang supérieur (DTA, SCoT), il est rare que les PLU en identifient de nouveaux ; certains PLU ne les ont pas encore repris (Loire-Atlantique). La question des espaces remarquables en mer est techniquement et juridiquement plus délicate que côté terre (identification, délimitation, prise en compte dans les documents d'urbanisme et les autorisations...) : cas des extractions d'agrégats ou de zones de dépôts en mer. ­ Pour leur pérennité dans le temps Si leur identification ne pose pas de difficulté majeure (excepté en mer), il n'en est pas de même de leur gestion dans le temps, ce qui pourrait être de nature à remettre en cause, à terme, leur caractère d'espaces remarquables. La délimitation des espaces remarquables délimités dans les POS/PLU peut être remise en cause à l'occasion de projets précis. Les cas sont de plus en plus nombreux (port de plaisance à Portbail, passage de câbles...). ­ Pour la prise en compte des activités La possibilité de maintenir, voire de développer, certaines activités dites « de gestion » en espaces remarquables, mais dont les aménagements ne peuvent être considérés comme « légers », conduit à un « pastillage » de ces zones naturelles114 dans les PLU (bâtiments ostréicoles dans les départements de Charente-Maritime et de Gironde). La pression pour adosser à des bâtiments d'exploitation agricoles ou pastoraux des logements dits de fonction (sièges d'exploitation) est de plus en plus forte. 113 Pour certains services, si, seules, certaines zones humides littorales sont des espaces remarquables, toutes sont des espaces caractéristiques du littoral. Le pastillage est un terme utilisé en urbanisme pour décrire la technique qui consiste à créer de toutes petites zones avec une réglementation spécifique au sein d'une grande zone dont le règlement est considéré comme incompatible avec le maintien ou le développement des activités dans une telle zone. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 88/137 114 Rapport n°007707-01 Les procédures relatives à la réalisation des « aménagements légers » ne sont pas totalement maîtrisées par les services et continuent de leur poser des problèmes de légalité (goudronnage des pistes cyclables, réalisation de sentiers avec ou sans permis d'aménager). c) Le diagnostic de la mission sur la délimitation des espaces remarquables ou caractéristiques Bien que cette disposition particulière du code de l'urbanisme ne soit pas la plus complexe, son application soulève encore des difficultés. La connaissance des espaces remarquables ou caractéristiques des communes littorales par les services de l'État n'est pas encore stabilisée, tout particulièrement en mer (développement du réseau Natura 2000 défini en application des directives européennes dite « habitat-faune-flore » et « oiseaux »115). L'approche des espaces caractéristiques du patrimoine culturel est relativement moins développée et se fait essentiellement par le biais de la partie naturelle des sites protégés. La réglementation qui doit y être appliquée n'est pas non plus totalement maîtrisée par les services et a fortiori reprise dans les PLU (aménagements légers). Pas plus que ne l'est la réglementation relative à l'évaluation environnementale des projets : tout aménagement réalisé dans les espaces remarquables ou caractéristiques est soumis à étude d'impact, ce qui devrait permettre d'apprécier son caractère d'intérêt général et surtout la pertinence de sa localisation (analyse des solutions de substitution). Si l'espace remarquable est également un site Natura 2000, l'étude d'incidence exigé peut être incluse dans l'étude d'impact du projet. Les sites Natura 2000 sont particulièrement nombreux sur le littoral. d) Recommandations de la mission · Rappeler dans les guides relatifs à l'élaboration des documents d'urbanisme l'obligation : d'identifier dans les SCoT les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral en tant que tels et d'y prescrire des objectifs de gestion ; de les délimiter dans les PLU avec un zonage spécifique renvoyant à un règlement conforme a minima à l'article R.146-2. Donner l'instruction aux services : d'assurer une actualisation permanente des espaces remarquables et caractéristiques du littoral en distinguant ceux qui relèvent d'une protection juridique et ceux qui relèvent d'inventaires avec effets juridiques indirects (ZNIEFF par exemple) ; de garder la trace de la qualification en espaces remarquables et, plus précisément, de conserver l'historique des inventaires, des actualisations et des notifications ou communications ; · 115 Cf. références en note de bas de page n° 70. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 89/137 d'examiner la pertinence d'une protection réglementaire des espaces qui en seraient dépourvus 116; de renforcer l'analyse qualitative des évaluations environnementales des projets et des plans et programmes affectant les espaces remarquables et caractéristiques du littoral. · Bien que nombre de cas évoqués dans le domaine de l'urbanisme paraissent à la mission ne pas poser de difficulté particulière (problème de formation des agents), mettre en place un appui juridique au niveau national incluant les démarches d'évaluation environnementale (études d'impact et études d'incidence Natura 2000). 3.5.3. Les espaces boisés significatifs Article L.146-6 - Le plan local d'urbanisme doit classer en espaces boisés, au titre de l'article L.130-1 du présent code, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après consultation de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites. Cette disposition n'a pas fait l'objet d'instructions spécifiques. a) Le constat des services sur l'identification des espaces boisés les plus significatifs La délimitation des parcs et espaces boisés significatifs et leur classement dans les PLU ne semblent pas poser de problème particulier aux services. Les parcs et espaces boisés significatifs sont identifiés dans la plupart des DDALL. b) Les difficultés rencontrées par les services Des contentieux locaux demeurent, toutefois, possibles (constructions illicites). Contrairement aux textes réglementaires, une DDTM estime que le classement des espaces boisés significatifs ne concerne que les espaces proches du rivage. c) Le diagnostic de la mission sur l'identification des espaces boisés les plus significatifs Leur identification dans les DDALL ne règle pas toujours les problèmes de délimitation dans les PLU, notamment lorsque les communes littorales disposent d'importants massifs forestiers. Les appréciations sur les espaces significatifs diffèrent généralement en fonction du taux de boisement des communes. 116 Sites classés, par exemple, pour les espaces dits caractéristiques du patrimoine naturel et culturel. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 90/137 Rapport n°007707-01 L'évolution dans le temps des espaces boisés ainsi identifiés, sur le plan tant quantitatif que qualitatif, ne fait pas l'objet d'un suivi, pas plus que le suivi des mesures compensatoires en cas de déclassement. Les enjeux et les problèmes se situent généralement aux franges de ces espaces classés. d) Recommandations de la mission · Actualiser l'inventaire des parcs et espaces boisés significatifs situés dans les communes littorales (ou le réaliser s'il n'existe pas), en liaison avec le Conservatoire du littoral, l'Office national des forêts et les Conseils généraux en charge des espaces naturels sensibles, afin de pouvoir veiller à leur pérennité. Développer, comme pour les espaces remarquables ou caractéristiques, une réflexion avec les parties prenantes (communes, propriétaires, établissements publics) sur la gestion de ces espaces classés, en prenant en compte le taux de boisement de la commune. · 3.6. Les autres dispositions ayant fait l'objet d'observations significatives de la part des services : la gestion du domaine public maritime (DPM) La présente mission d'audit, ciblée sur l'application des dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme, ne portait pas sur la gestion du domaine public maritime (DPM). Toutefois la mission a recueilli un certain nombre d'éléments, repris ci-après . a) Le constat des services sur la gestion du DPM Les méthodes de contrôle de la gestion du DPM et tout particulièrement des autorisations d'occupation temporaire (AOT) ont été améliorées (logiciel de contrôle en Pyrénées-Atlantiques). Les services ont, dans leur ensemble, entrepris des actions de « reconquête » du DPM, en particulier pour les travaux de lutte contre l'érosion et l'occupation commerciale (ouvrages et équipements sans autorisation). Les relations avec les communes ont été renforcées à l'occasion de l'attribution ou du renouvellement des concessions de plages, mais aussi pour la gestion des autorisations d'occupation temporaire en général. En Haute-Corse, une commission de gestion du DPM a ainsi été instituée par un arrêté préfectoral du 23 juillet 2010 pour se prononcer sur les AOT et en faciliter le contrôle ; un document définissant la doctrine et le fonctionnement de la commission a été élaboré. Les délais d'instruction des sites Natura 2000 en mer ont été réduits. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 91/137 b) Les difficultés rencontrées par les services Malgré ces progrès, la gestion du DPM pose encore quelques problèmes liés au bornage qui n'est pas partout achevé (certains procès-verbaux sont jugés discutables sur ce point par les services eux-mêmes). Les autorisations dans les espaces remarquables en mer soulèvent de nombreux problèmes : par exemple, l'autorisation des cales ostréicoles qui ne sauraient être considérées comme des « aménagements légers ». c) Le diagnostic de la mission établi en fonction des observations recueillies Le « décloisonnement » du fonctionnement des services déconcentrés (renforcement des méthodes de travail entre services et unités en charge de la planification, de l'application du droit des sols, de la gestion du DPM, de l'évaluation des plans et projets) doit être poursuivi dans une optique de gestion durable du DPM (par exemple, pour la gestion du trait de côte). Le bornage du DPM n'est pas justifié sur l'ensemble du littoral : il doit être réalisé là où existent des projets ou dans les secteurs où se posent des problèmes nécessitant cette délimitation. d) Recommandations de la mission · Développer le volet sur l'espace marin des SCoT (SMVM) dès lors que les services de l'État y ont identifié des enjeux économiques, sociaux et/ou environnementaux. Organiser un fonctionnement en réseau des délégations à la mer et au littoral (DLM) si ce n'est pas déjà le cas. Généraliser la démarche engagée par le préfet de Haute-Corse (commission de gestion des AOT)117. Clarifier la nature des activités maritimes autorisées dans les espaces marins qualifiés de remarquables ou de caractéristiques. · · · Seules les recommandations d'ordre général formulées dans cette partie consacrée à l'analyse de l'application des dispositions particulières au littoral sont reprises dans le plan d'action proposé ci-après à l'administration centrale. La mission estime en effet indispensable que les recommandations propres à chaque disposition fassent l'objet d'un travail d'approfondissement et de validation dans le cadre d'un groupe de travail national dont l'objet serait d'actualiser la doctrine administrative. 117 Le préfet de la zone de défense Sud a formulé le souhait que cette doctrine soit généralisée à tout le littoral méditéranéen. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 92/137 Rapport n°007707-01 4. Conclusion et recommandations Face au constat d'une pression de l'urbanisation qui reste parmi les plus importantes du territoire métropolitain, les grands principes portés par la loi Littoral gardent, aujourd'hui encore, toute leur acuité. La recherche d'un aménagement équilibré du littoral reposant sur une vision prospective de son devenir et sur une valorisation de ses richesses spécifiques, ne peut que conforter les principes d'un développement urbain et économique orienté vers l'arrière-pays, ne laissant se développer sur la frange côtière que les activités nécessitant la proximité immédiate de la mer et respectant les grands écosystèmes littoraux comme les espaces agricoles et forestiers qui en façonnent les paysages. La pertinence de ces principes d'aménagement se trouve même renforcée par les défis à relever face au changement climatique et aux risques littoraux dont la réalité brutale nous a été rappelée encore récemment par la catastrophe de Xynthia. Il en est de même pour des défis plus anciens, remis sous les feux de l'actualité par le Grenelle de l'environnement, que sont la maîtrise de l'étalement urbain, la gestion économe de l'espace, la préservation de la biodiversité au travers de la trame verte et bleue. Les nombreuses études menées sur le sujet, les bilans périodiques publiés, ont montré que la loi Littoral a contribué à protéger cet espace fragile et limité et en a freiné la dégradation, même si à l'évidence elle n'est pas parvenue à la stopper. Les dispositions particulières au littoral regroupées dans le code de l'urbanisme ne sauraient suffire, à elles seules, à endiguer cette dégradation. La lutte contre les pollutions marines, la gestion du trait de côte, la prévention des risques, la préservation de la biodiversité, le maintien des activités traditionnelles de gestion et de valorisation de l'espace, réclament tout autant l'application rigoureuse de politiques publiques spécifiques. Mais une application rigoureuse de ces dispositions particulières doit contribuer, conformément à l'article 1 de la loi de 1986118, à la mise en cohérence des politiques sectorielles et permettre de mieux répondre à tous ces défis auxquels le littoral est confronté de façon souvent amplifiée, exacerbée, par rapport aux autres parties du territoire national. Au vu des constats réalisés par la mission d'audit et développés dans les parties 2 et 3 du présent rapport, la mise en oeuvre de ces dispositions rencontre, plus de 25 ans après le vote de la loi Littoral, de nombreuses difficultés d'application, tant par les collectivités en charge de les traduire dans leurs documents d'urbanisme et dans l'instruction des actes individuels que par les services de l'État en charge de veiller à la compatibilité de ces documents et actes avec la loi. L'importance de la jurisprudence, qui lui est consacrée encore aujourd'hui, en témoigne. C'est pour répondre à ces difficultés d'application que la circulaire ministérielle de mars 2006 demandait aux services de l'État de procéder à une analyse juridique des documents locaux d'urbanisme littoraux existants et de conseiller aux collectivités de 118 Article aujourd'hui codifié dans le code de l'environnement (art. L.321-1). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 93/137 les mettre en révision en cas d'incompatibilité constatée avec les dispositions particulières de la loi Littoral. L'objectif recherché était clairement affiché : sécuriser juridiquement les actes individuels d'occupation délivrés sur la base de documents d'urbanisme, euxmêmes juridiquement sécurisés au regard des dispositions particulières du littoral. Une doctrine administrative, jointe en annexe, visait à mieux en cerner les notions et principes portés par ces dispositions et à en faciliter ainsi l'application. Si cette circulaire a provoqué une réelle mobilisation des services de l'État, la diffusion de la doctrine administrative n'a pas permis d'assurer une application homogène de ces dispositions sur l'ensemble des départements français concernés. A la question posée par le ministère sur l'hétérogénéité des modalités de leur application par les services de l'État dans les différents départements concernés, question à l'origine du présent audit, la mission répond clairement et sans ambiguïté par l'affirmative. Il y a effectivement une grande hétérogénéité d'un département à l'autre , d'une région à l'autre : ­ dans le niveau de mobilisation des services en fonction de la géographie, des enjeux, des acteurs, de l'histoire, y compris administrative ; dans les moyens et méthodes de travail développés (documents d'application de la loi Littoral, animation inter-services, coordination des actions avec les collectivités ; exercice du contrôle de légalité...) ; dans leur interprétation des dispositions (élaboration de doctrines locales et appréciation des situations au cas par cas). ­ ­ Mais, comme la mission s'est efforcée de le démontrer, ce grief d'hétérogénéité dans l'application des dispositions particulières au littoral trouve son origine tout autant dans l'esprit de la loi Littoral que dans une appropriation différenciée de la doctrine administrative diffusée en mars 2006 et complétée par la circulaire de juillet 2006. D'autres motifs y contribuent également, comme l'absence d'une vision stratégique partagée du devenir du littoral et l'insuffisance de pilotage des services de l'État sur cette politique d'aménagement spécifique, ou encore, la prédominance des politiques sectorielles et la faible traduction de ces dispositions particulières dans les documents de planification. Pour autant, la mission estime que l'objectif fixé aux services par la circulaire de mars 2006, à savoir la sécurisation juridique des documents d'urbanisme locaux, garde toute sa pertinence. L'élaboration d'une nouvelle circulaire le confirmant lui parait donc opportune, sous réserve de tirer les enseignements des constats dressés par la mission d'audit auprès des services. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 94/137 Le premier constat dressé par la mission d'audit porte sur l'absence de plan d'accompagnement de cette circulaire permettant d'assurer aux services l'appui indispensable à sa mise en oeuvre. Aucun dispositif n'a été défini par l'administration centrale pour en suivre la bonne application. Cette absence d'accompagnement a été d'autant plus mal ressentie par les services que, s'agissant d'une loi interprétative, ils ont été confrontés à de nombreuses difficultés d'application. Toute nouvelle instruction aux services devrait donc être précédée par un travail préparatoire au niveau central associant les services déconcentrés et accompagnée d'un plan d'action pour accompagner sa mise en oeuvre. Le deuxième constat concerne la fragilité -et les limites- de la doctrine administrative en la matière. Au-delà des éléments discutés et discutables de la doctrine diffusée en mars 2006, qui nécessiterait en tout état de cause une actualisation au regard notamment de la jurisprudence la plus récente, demeureront les interprétations de cette doctrine, l'appréciation au cas par cas des situations locales, et surtout, l'interprétation souveraine du juge administratif. Pour faire face à ce constat et développer les argumentaires et les justifications nécessaires, il conviendrait que l'administration centrale organise un appui juridique aux services déconcentrés et les forme à l'application d'un droit plus appréciatif que normatif. Le troisième constat est qu'il paraît difficile de mobiliser les services de l'État dans la durée sans leur apporter une vision stratégique de la politique publique qu'ils sont chargés de mettre en oeuvre. Or les services ne disposent pas aujourd'hui d'une vision d'ensemble sur le devenir du littoral. L'élaboration de la stratégie nationale pour la mer et le littoral pourrait offrir ce cadre. C'est à partir de ces constats que la mission a structuré les recommandations émises dans le présent rapport sous la forme d'un plan d'action qui s'articule autour de trois grands axes : ­ Affirmer le rôle majeur des schémas de cohérence territoriale (SCoT) dans l'application de dispositions particulières au littoral (élaboration des dossiers d'association des services de l'Etat sur la base d'une doctrine administrative réactualisée) et renforcer le rôle d'encadrement des documents de rang supérieur (DTA, SAR) quand ils existent ; Assurer la sécurisation juridique de l'application des dispositions particulières au littoral en engageant une analyse systématique de compatiblité des plans locaux d'urbanisme (méthode et leviers d'action) ; ­ Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 95/137 ­ Organiser le pilotage du plan d'action et l'animation des services de l'État en charge de le mettre en application. Ce plan d'action ne saurait toutefois répondre à l'attente des services de disposer d'une vision stratégique de l'aménagement littoral à long terme, leur permettant d'inscrire leurs actions dans une politique publique clairement identifiée et porteuse des principes du développement durable. Il s'agit là d'un autre chantier, autrement plus complexe, qui reste à ouvrir par l'administration centrale en mobilisant toutes ses composantes. La mission propose cependant de l'intégrer dans le plan d'action comme quatrième grand axe, même si son contenu comme son échéance en font un axe à part. ­ Redonner une lisibilité d'ensemble à la politique d'aménagement du littoral, en mettant en perspective les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme avec la future stratégie nationale de la mer et du littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 96/137 Recommandations à l'administration centrale pour la mise en place d'un plan d'action relatif à l'application des dispositions particulières au littoral Axe 1 ­ Replacer la planification territoriale au coeur de la politique d'aménagement du littoral 1.1 Affirmer le rôle majeur des schémas de cohérence territoriale littoraux (SCoT) dans la déclinaison territoriale des dispositions particulières au littoral , en y intégrant, en tant que de besoin, un chapitre schéma de mise en valeur de la mer et renforcer le rôle d'encadrement des documents d'aménagement de rang supérieur quand ils existent (DTA, SAR119) 1.1.1 Objectif : traduire à la bonne échelle particulières au littoral, et plus particulièrement pour : les dispositions - concevoir un aménagement en profondeur du développement urbain et économique, y compris touristique (identification d'une armature urbaine reposant sur une typologie des espaces urbanisés composés de pôles principaux (agglomérations) et de pôles secondaires (villages) et l'identification des grandes coupures d'urbanisation ; - identifier les espaces proches du rivage, les secteurs d'érosion comme les grands écosystèmes de leur façade littorale, les espaces remarquables ou caractéristiques ; - organiser les activités nécessitant la proximité de la mer (en lien avec le volet SMVM) et le maintien des activités agricoles, pastorales ou forestiers dans les communes littorales ; - déterminer, si nécessaire, des unités géographiques littorales cohérentes « participant aux équilibres économiques et écologiques littoraux » où s'appliqueraient les dispositions particulières ; - mettre en cohérence les politiques sectorielles par une approche transversale. 1.1.2 Moyens : : veiller à la compatibilité des ces documents avec les dispositions particulières au littoral et pour cela : - donner des instructions aux préfets pour coordonner ce chantier et celui de la mise en compatibilité des SCoT avec les lois Grenelle, en rappelant l'enjeu de la compatibilité « limitée » ; 119 En prenant en compte, si possible, les perspectives de l'acte III de la décentralisation en ce domaine. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 97/137 - s'appuyer sur la démarche d'évaluation environnementale des SCoT pour analyser les justifications et motivations des choix d'aménagement retenus par le maître d'ouvrage, notamment la fixation de la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser littoraux au regard de la loi Littoral ; - intégrer dans le dispositif de suivi de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers un suivi spécifique pour les communes littorales (bande littorale et espaces proches du rivage) ; - renforcer, si nécessaire, le caractère obligatoire de la traduction de l'ensemble des dispositions dans les SCoT littoraux. 1.2 Actualiser et compléter la doctrine administrative sur l'application des dispositions particulières au littoral, la tenir à jour 1.2.1 Objectifs : assurer une lecture nationale des principes et notions portées par les dispositions particulières au littoral tout en facilitant leur interprétation par les services déconcentrés pour : - clarifier ce qui relève de la doctrine nationale et des adaptations locales ; - conseiller les collectivités et procéder aux analyses locales au cas par cas sur la base de mêmes référentiels nationaux ou de chartes locales validées par l'administration centrale. 1.2.2 Moyens : mettre en place un groupe de travail au niveau national comprenant des représentant de DREAL, de DDTM et de DDT concernées, des juristes spécialisés. - s'appuyant sur la jurisprudence la plus récente, - reprenant le travail réalisé au niveau territorial (guides, référentiels, chartes...) pour valoriser le travail des services mais aussi pour l'harmoniser en tant que de besoin. 1.3 Procéder à l'actualisation et à l'harmonisation des documents et outils d'application de la loi Littoral en clarifiant au préalable leur nature et leur contenu 1.3.1 Objectif : disposer au niveau territorial (départemental ou interdépartemental) des éléments de connaissance et d'analyse permettant de fonder la position de l'État pour : - produire des « porter à connaissance » et des notes d'enjeux argumentées aux collectivités dans le cadre de l'association des services à l'élaboration des documents d'urbanisme ; - veiller à la compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions particulières au littoral et, le cas échéant, assurer cette compatibilité dans le cadre du contrôle de légalité ou de tout autre moyen. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 98/137 1.3.2 Moyen : dans le cadre du groupe de travail précité, préciser les caractéristiques de ces documents et outils qui pourront, une fois définies, prendre la forme d'une note technique annexée à la future circulaire adressée aux services pour préciser : - la nature juridique des documents (documents de référence), - leur contenu (cartes et rédactionnel), - le champ géographique et l'échelle, - les modalités de leur élaboration, - les modalités de leur communicabilité aux collectivités et aux tiers. 1.4 Engager une évaluation des actions menées dans le cadre de l'atelier national du littoral 1.4.1 Objectif : tirer les enseignements des expériences locales auprès des collectivités locales concernées mais également des services. 1.4.2 Moyen : solliciter une mission auprès du CGEDD (programme 2013). Axe 2 - Assurer la sécurisation juridique de l'application des dispositions particulières au littoral en engageant une analyse systématique de compatibilité des POS/PLU 2.1 A l'issue des groupes de travail, préparer une nouvelle circulaire interministérielle (METL - MEDDE ­ MI) aux préfets, reprenant tout à la fois les enjeux portés par la loi Littoral et la priorité d'action que constitue la sécurisation juridique de son application 2.1.1 Objectif : faire de l'application des dispositions particulières au littoral une action prioritaire des DDTM - bien expliciter l'objectif recherché (sécurisation des actes individuels) et fixer un calendrier ; - préciser la démarche à mener vis-à-vis des collectivités locales et les leviers d'action à mobiliser par les services pour parvenir à l'objectif fixé ; - présenter les modalités d'appui mis en place au niveau central, notamment sur le plan juridique, et le rôle attendu du niveau régional ; - définir un dispositif de suivi et d'évaluation de sa mise en oeuvre. 2.1.2 Moyens : - faire une note technique sur les différents leviers d'action de l'État permettant aux préfets d'engager la mise en compatibilité des Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 99/137 documents d'urbanisme, note à mettre également en annexe de la circulaire ; - engager parallèlement une réflexion sur l'exercice du contrôle de légalité des documents d'urbanisme avec le ministère de l'Intérieur (DGCL) - introduire une procédure d'évaluation obligatoire des PLU tous les 6 ans dont le bilan pourrait conduire à une obligation de révision (à l'instar de ce qui est prévu pour les SCoT) et prévoir, le cas échéant, un retour au RNU (chantier législatif). 2.2 Mettre en place au niveau central une gestion stratégique du contentieux relatif aux dispositions particulières au littoral 2.2.1 Objectifs : - actualiser la doctrine administrative, - analyser les motifs d'incompatibilité posés par certains types de projets au regard de l'ensemble des législations et réglementations auxquels ils sont soumis et faire arbitrer les choix prioritaires au niveau gouvernemental (préférer les procédures dérogatoires, y compris pour les autres législations, à des modifications remettant en cause les principes de la loi Littoral) ; - apporter, en tant que de besoin, un appui juridique aux services dans le traitement des dossiers. 2.2.2 Moyens : - à définir en liaison avec la direction compétente (DAJ), - solliciter également la juridiction administrative pour examiner la possibilité d'accéder à ses bases de données. Axe 3 - Organiser le pilotage du plan d'action et l'animation des services en charge de le mettre en oeuvre 3.1 Nommer un chef de projet auprès du DGALN 3.1.1 Objectifs : - élaborer le plan d'action et son calendrier, - mettre en place les différents groupes de travail et la veille juridique (jurisprudence), - animer les services déconcentrés et organiser le soutien juridique, - définir et gérer le dispositif de suivi et d'évaluation, - participer à la réflexion transversale mer/littoral au niveau central (SNML et DSF, SMVM, expérience pilote DTADD Aquitaine...). 3.1.2 Moyens : - affecter à cette mission un cadre de haut niveau, - lui donner une feuille de route. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 100/137 3.2 Informer parallèlement les principaux acteurs de la démarche et les associer à sa mise en oeuvre 3.2.1 associer le ministère de l'Intérieur (DGCL) à l'élaboration du plan d'action et veiller à l'information préalable des préfets (réunion des préfets) ; 3.2.2 consulter le Conseil national de la mer et du littoral (CNML) et les grandes associations d'élus en rappelant les compétences respectives des collectivités locales et de l'État pour l'application des dispositions particulières au littoral. 3.3 Apporter un soutien méthodologique aux services et organiser le travail en réseau 3.3.1 au niveau national - participer à l'animation du réseau « aménagement/urbanisme » - créer et animer un forum « Questions/Réponses » en lien avec les référents régionaux « littoral » ; - organiser des rencontres nationales (ou inter-régionales) régulières au moins durant le plan d'action 3.3.2 au niveau régional (ou inter-régional) - demander la désignation d'un référent régional (ou inter-régional) en DREAL sur la thématique de l'aménagement littoral en charge d'animer le réseau des DDTM (et des DDT « grands lacs ») et de suivre le plan d'action à cet échelon ; - faire valider en comité de l'administration en région (CAR) la déclinaison régionale (on inter-régionale) du plan d'action et en suivre au moins une fois par an la mise en oeuvre ; - présenter en CAR un bilan annuel du contentieux lié à l'application de la loi Littoral. 3.3.3 au niveau départemental (ou interdépartemental) - élaborer ou actualiser les documents d'application de la loi Littoral ; - informer l'association départementale des maires (ADM) et autres parties prenantes de la démarche engagée au niveau local ; - engager, si ce n'est fait, l'analyse des risques juridiques des POS/PLU au regard des dispositions particulières au littoral ; - organiser le contrôle de légalité des documents d'urbanisme « en continu » (mesurer les avantages et inconvénients de le confier aux DDT ou aux services de préfecture, organiser les retours vers les DDT) ; Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 101/137 - organiser le contrôle de légalité des actes individuels dans les communes littorales avec transmission obligatoire des actes en préfecture pour les communes en assurant l'instruction (a minima pour les actes délivrés dans la bande littorale et les espaces proches du rivage lorsqu'ils sont délimités) ; - veiller au décloisonnement du fonctionnement des services au niveau interne en DDTM (services du siège/délégation à la mer et au littoral/unités territoriales) et à la coordination inter-services (DDT/préfectures), y compris avec l'échelon régional (DREAL, DIRM). Axe 4 - Redonner une lisibilité à la loi Littoral en mettant en perspective les dispositions particulières avec la future stratégie nationale de la mer et du littoral 4.1 Relancer la politique spécifique d'aménagement du littoral dans le cadre de la stratégie nationale de la mer et du littoral (SNML) 4.1.1 en veillant à développer une vision stratégique de leur devenir (travaux de prospective des futurs documents stratégiques de façade ­ DSF) ; 4.1.2 en y associant les collectivités territoriales au premier rang desquelles les régions mais aussi les autres parties prenantes. 4.2 Promouvoir les démarches de gestion intégrée des zones côtières (GIZC) 4.2.1 en clarifiant la nature différente de cette démarche par rapport à la planification ; 4.2.2 en veillant à mieux associer les services déconcentrés (préfets) aux procédures d'appels à projets. 4.3 Suivre la démarche pilote de la directive territoriale d'aménagement et de développement durable du littoral aquitain et du massif forestier de Gascogne (DTADD) pour en tirer les enseignements, notamment sur : 4.3.1 la réalisation de documents de référence co-construits avec les collectivités ; 4.3.2 la mise en place d'observatoires du littoral (indicateurs et méthodologie). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 102/137 4.4 Veiller à ce que les documents d'aménagement qui pourraient résulter du futur chantier de décentralisation soient compatibles avec la loi Littoral. Annick HELIAS Bertrand CREUCHET Aude DUFOURMANTELLE Membre Permanent Coordonnatrice Françoise GADBIN Inspecteur général de l'administration du développement durable Cyril GOMEL Architecte urbaniste en chef de l'Etat Bernadette VANDEWALLE Architecte urbaniste en chef de l'Etat Ingénieur des ponts, des eaux et des forêts Attachée principale d'administration de l'équipement Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 103/137 Annexes 1 ­ Lettres de mission 2 - Note de cadrage et bibliographie 3 ­ Liste des auditeurs et des services audités 4 ­ Note relative aux moyens de l'Etat pour s'opposer aux PLU et aux autorisations contraires à la loi Littoral 5 ­ L'application de la loi Littoral en Bretagne (synthèse) 6 ­ Les grands lacs de plus de 1000 hectares (synthèse) 7 ­ Glossaire des sigles et acronymes Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 105/137 1. Lettres de mission Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 107/137 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 108/137 2. Note de cadrage Note de cadrage de l'audit sur l'application de la loi littoral par les services de l'État (22 juin 2011) 1 - Contexte de l'audit 1.1 - Evolution de la loi Littoral Bien qu'ayant bénéficié d'un large consensus parlementaire lors de son vote en 1986, la loi littoral venant à l'encontre de nombreux intérêts particuliers, a été mise en oeuvre de façon progressive. Depuis quelques années, sous la pression d'une demande sociale forte, sa mise en oeuvre se précise et s'intensifie (circulaire du 14 mars et du 20 juillet 2006). Élaborée à la suite des 1ères lois de décentralisation de 1983, elle définit une politique nationale spécifique d'aménagement, de protection et de mise en valeur du littoral qui repose sur quelques grands principes : ­ ­ ­ ­ préserver les espaces rares et sensibles, gérer de façon économe l'espace des communes littorales, ouvrir plus largement l'espace littoral au public, y accueillir en priorité les activités dont le développement est lié à la mer. Ces principes sont traduits dans la loi par un certain nombre de dispositions d'application. Chaque littoral ayant ses particularités, il revient en premier lieu aux collectivités territoriales120 de mettre en oeuvre ces principes et dispositions dans leurs documents d'urbanisme, l'ensemble des communes littorales devant normalement disposer de tels documents. Leurs actions doivent être coordonnées avec celles de l'Etat. Pour en suivre l'application, les progrès réalisés comme les difficultés rencontrées, la loi prévoit que le gouvernement soumette régulièrement des rapports au Parlement. La loi relative au développement des territoires dite loi DTR du 23 février 2005 précise que ces rapports seront désormais réalisés tous les 3 ans. La plupart des articles de la loi littoral de 1986 sont aujourd'hui codifiés mais éclatés dans plusieurs codes. Certains de ces articles ont par ailleurs été soit modifiés, soit même abrogés. De ce fait la « lecture » de la loi littoral qui n'existe plus en tant que telle (seuls demeurent quelques articles), est devenue d'autant plus complexe. Par ailleurs, la loi n'ayant pas toujours été mise en oeuvre par les autorités compétentes dans leurs documents d'urbanisme, ces dispositions ont fait l'objet d'une jurisprudence abondante, créant des constantes de position mais en maintenant de nombreuses incertitudes.121 120 121 cf. article 1 de la loi et circulaire du 14 mars 2006. C'est le cas notamment avec le L.146-4-1 toute construction doit être en continuité des agglomérations et villages. S'est ainsi posé la question de : Qu'est-ce qu'un village ? qu'est-ce qu'une agglomération ? la jurisprudence Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 109/137 La loi dite de Développement des Territoires Ruraux du 23 février 2005 participe au toilettage de la loi littoral avec notamment des modifications sur les espaces proches du rivage qui ont précisé des assouplissements sur les installations agricoles... Enfin en 2006 il y a eu une nouvelle mobilisation des services de l'État au travers des circulaires du 10 Mars et 20 Juillet qui ont relancé l'action des services pour l'application de la loi littoral en apportant des éléments de cadrage réactualisés et en insistant sur la nécessaire mise en compatibilité des documents d'urbanisme. 1.2 - Évolution du contexte juridique et institutionnel D'autres textes législatifs nationaux (la loi SRU de 2000, les lois "Grenelle" de 2009 et 2010, la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche de 2010) et communautaires (la DCE) qui ne sont pas spécifiques au littoral ont intégré dans leur dispositif des mesures venant compléter ou modifier celles de la loi littoral. Certains sont venus renforcer la loi littoral en confortant son esprit initial : ­ ­ ­ Une recommandation du Parlement européen et du Conseil de 2002, sur la base d'un programme de démonstration, préconise de développer une gestion intégrée des zones côtières (GIZC). Plusieurs appels à projets de la DATAR se sont efforcés de vulgariser cette démarche proche de celle d'un agenda 21 local. En 2009, le Grenelle de l'environnement puis le Grenelle de la mer ont fait le constat que la loi Littoral était insuffisamment appliquée et que le manque de coordination des acteurs publics, notamment communaux, constituait un handicap pour en assurer une gestion durable. Les lois Grenelle apportent des éléments de réponse, en renforçant le rôle des schémas de cohérence territorial (SCOT), en encourageant l'élaboration de PLU intercommunaux et en mettant en place les conditions d'une gestion intégrée de la mer et du littoral. L'article L110-1 du code de l'environnement, dans sa version modifiée par la loi Grenelle 2 (art 253), précise que « la cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et les générations » constitue l'une des cinq finalités de l'objectif de développement durable. Il conforte la volonté du législateur, au travers de la loi Littoral, d'assurer le libre accès aux rivages, d'ouvrir certains espaces remarquables littoraux au public, de maintenir sur cet espace convoité des activités traditionnelles, y compris des activités touristiques comme le camping même si celles-ci doivent être encadrées. D'autres textes sont venus réinterroger la manière dont la loi est mise en oeuvre : ­ ­ La définition d'une stratégie nationale (collectivités territoriales et État) pour la gestion du trait de côte répondant à un engagement du Grenelle invite les autorités locales à la décliner au niveau d'unités littorales cohérentes ; le guide publié par le ministère en 2010 vise à leur apporter la méthodologie nécessaire. Le plan national de prévention des submersions marines et crues rapides, arrêté en mars 2011 à la suite de la tempête de Xynthia et des inondations catastrophiques du Var, comprend une soixantaine d'actions visant notamment à mieux maitriser l'urbanisation dans les zones dangereuses et à renforcer la l'aborde à travers la densité significative de construction. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 110/137 fiabilité des digues dans le cadre de plans d'action pour la prévention des inondations (PAPI) dans les territoires à risques importants. Enfin, la jurisprudence continue d'éclairer et de préciser les conditions d'application de la loi sur de très nombreux points. 2 - Objet de la commande Alors que les pressions restent fortes sur le littoral, le MEDDTL a souhaité connaître la manière dont les services veillent à l'application de la loi littoral (pour les dispositions relevant du code de l'urbanisme). Cette démarche d'évaluation est à distinguer de la réalisation d'un prochain bilan de la loi qui devra être mené par l'État pour être présenté au Parlement. De nombreux acteurs en effet dénoncent encore la grande hétérogénéité de son application sur le terrain, d'un département, d'une région, à l'autre. Aussi, le ministère souhaite-t-il que cet audit concerne l'ensemble des départements littoraux afin que soit dégagée une vision complète des modalités d'application des dispositions de la loi littoral. 3 - Champ et périmètre de l'audit 3.1 - Le champ de l'audit La loi littoral de 1986 aborde de nombreuses thématiques regroupées sous quatre titres. ­ ­ ­ ­ L'aménagement et la protection du littoral La gestion des domaines publics maritime et fluvial Les dispositions spécifiques aux DOM Dispositions diverses Suite aux entretiens avec les différentes directions de l'administration centrales concernées, la mission limitera ses investigations, dans le cadre du présent audit, aux « dispositions particulières au littoral » du code de l'urbanisme122 relatives à l'aménagement et à la protection du littoral, à savoir prioritairement les dispositions fixant les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres autour des principaux concepts fixés par la loi et les textes administratifs d'application : ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ la capacité d'accueil, les coupures d'urbanisation l'urbanisation en continuité les espaces proches du rivage la bande littorale des 100m. Les espaces naturels remarquables les accès au littoral (servitude, nouvelles routes...) 122 Code l'urbanisme ­ Livre premier- Titre IV - Chapitre VI (L.146-1 à L.146-9 et R.146-1 à R.146-4). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 111/137 ­ les aménagements portuaires de commerce et de plaisance ainsi que les aménagements liés aux activités économiques à proximité de l'eau, les campings, les constructions agricoles... La mission intégrera cependant dans son questionnement les autres dispositions relevant de la loi littoral pouvant conditionner cette utilisation spatiale (comme les systèmes d'assainissement). Elle interrogera également les services sur les autres thématiques pouvant soulever des difficultés particulières d'application, ainsi que les autres dispositions juridiques interférant avec la loi littoral, notamment un certain nombre de directives européennes comme la directive cadre « stratégie pour le milieu marin » et les lois Grenelle (généralisation des ScoT, gestion intégrée de la mer et du littoral...). Par la suite, il sera examiné comment la mission d'audit pourrait se prolonger dans une seconde phase, sur d'autres volets relatifs à la loi littoral (notamment la gestion du domaine public maritime). 3.2 - Le périmètre Le ministère souhaitant disposer d'une vision globale de la manière dont les dispositions de la loi littoral sont appliquées par les services sur l'ensemble du territoire, l'ensemble des départements littoraux et lacustres au sens de la loi littoral seront concernés par l'audit. Les DOM seront analysés spécifiquement dans un cadre différent par la MIGT OutreMer. De même la MIGT 6 analysera l'application de la loi littoral à un lac alpin 123 par audition des services compétents( DTT et DREAL) 4 - Le questionnement Les investigations qui seront menées auprès des services de l'État (préfets, DREAL, DDTM, DIRM) devront mettre en lumière l'approche menée par les services au regard de l'objectif initial de la loi et le rôle assuré par ces services qu'il soit simple mise en oeuvre de procédures, vision stratégique de l'évolution du littoral, ou autre. Ces investigations porteront plus particulièrement sur les points suivants : 1. L'analyse préalable des spécificités locales (géographiques, institutionnelles, socio-économiques, environnementales, politique...) 2. L'existence d'une vision stratégique de l'État concernant l'évolution du littoral et prenant en compte les objectifs du développement durable. 3. L'organisation et les méthodes de l'État pour l'application de la loi littoral (a priori dans le cadre notamment du porter-à-connaissance et a posteriori dans le cadre du contrôle de légalité).. 4. L'élaboration de documents de références et d'outils de connaissance pour son application. 5. Les actions significatives engagées par le service (synthèse) 6. Les avancées constatées et les principales difficultés rencontrées. 123 De plus de 1000ha Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 112/137 Rapport n°007707-01 5 ­ Méthode et organisation de l'audit 5.1 - Méthode ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ Rassemblement des textes actualisés (consolidation des article de la loi de 1986 avec repérage des modifications, annulations et éventuels ajouts ; décrets d'application et circulaires) Élaboration de la bibliographie correspondante (bilans antérieurs de la loi , rapports du Grenelle de la mer,..) Entretiens avec les directions d'administration centrale ( DAC) concernées. Élaboration d'un cahier des charges et d'un guide d'entretien destiné aux auditeurs Réunion de coordination avec les équipes d'audit Réalisation de rapports d'audit des services par les équipes d'auditeurs Réunion de restitution avec les auditeurs Synthèse des rapports pour élaboration d'un document global par le comité de pilotage 5.2 - Organisation ­ Le groupe de pilotage, coordonné par Gérard RUIZ. Il est composé de : Gérard Ruiz, Bertrand Creuchet, Annick Hélias, Françoise Gadbin, Aude Dufourmantelle, Bernadette Vandewalle, rédacteurs du rapport de synthèse Il rencontrera des personnalités concernées par l'audit et extérieures aux services en tant que de besoin (DAC, CGDD, Conservatoire du littoral,...) Groupe d'audit : Pour les MIGT, sont déjà désignés : Migt1 : C. Andarelli, B. Vandewalle, MIGT 3 : P. Puech et F. Gadbin, MIGT 4 : H. Maillot, P. Garin, Migt 5 : M. Wepierre, M. Bensussan, MIGT 6 : J. Lalot, Migt 2: D.Burette ­ ­ Les présidents de section seront également contactés pour solliciter des candidatures. 6 - Calendrier Année 2011 ­ ­ ­ Mars/avril : élaboration par le comité de pilotage du cahier des charges de l'audit et du questionnement auprès des services. 18 mai : réunion de l'ensemble des auditeurs pour examiner le projet de cahier des charges et cadrer les audits de terrain pour faciliter la cohérence des synthèses. Deuxième partie de juin à fin octobre : conduite des entretiens dans les services et rapports correspondants. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 113/137 ­ ­ Novembre/Décembre : réunion de restitution avec l'ensemble des auditeurs pour analyser les retours d'audit et débattre du pré-rapport. A partir de Janvier 2012 - rapport de synthèse. 7 ­ Listes 7.1 - Liste des textes législatifs et réglementaires relatifs à l'application de la loi littoral (liste non exhaustive) I ­ Textes législatifs et réglementaires Loi n°86-2 du 3 Janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral consolidée au 01/12/2010 Articles intégrés dans le code de l'urbanisme : - L 146-1 à L 146-9 - R 146-1 sur les critères des espaces remarquables - R 146-2 sur liste des aménagements autorisés - L 156-1 à L 156-3 sur les DOM - L 160-6 et L 160-7 Articles intégrés dans le code de l'environnement - L 219 sur la gestion intégrée de la mer et du littoral - L 321-2 - L 361-1 - L 411 et L 414 sur la protection des espèces et des habitats - R 414-2 à R 414-18 sur les sites Natura 2000 (en mer) Articles intégrés dans le code de la santé ( sur la qualité des eaux) Lois prévoyant des dispositions particulières au littoral : - Loi Bosson du 09/02/1994 sur les STEP et l'urbanisation proche du rivage dans les DOM - Loi n°95-115 du 4 Février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. - Loi LOA du 09/07/1999 : dérogations pour les installations agricoles. - Loi DTR du 23/02/2005 sur l'urbanisation des rives des rivières et estuaires et limitation de l'application de la loi littoral sur les lacs de montagne de plus de 1000 hectares (art.187 modifiant l'art L 145-1 du CU)). - Loi SRU du 13/12/2000 modifiant l'article L 146-6-1 du CU. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 114/137 - Loi Grenelle 1 du 03/08/ 2009 - Art 35 sur une gestion intégrée et concertée de la mer et du littoral avec une nouvelle gouvernance. - Loi Grenelle 2 du 12/07/2010 portant engagement national pour l'environnement ­ Art. 166 à 168 sur la stratégie nationale pour la mer et le littoral et les documents stratégiques par façade et la concertation avec tous les acteurs. II - Décrets et circulaires - Décret n°89-694 du 20 Septembre 1989 portant sur l'application de dispositions du code de l'urbanisme particulière au littoral et modifiant la liste des catégories d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux devant être précédés d'une enquête publique. - Décret du 20/09/1989 et du 29/03/2004 fixant la liste des communes littorales - Décret n°2004-308 du 29 Mars 2004 relatif aux concessions d'utilisation du domaine public maritime en dehors des ports. - Décret n°2004-309 du 29 Mars 2004 relatif à la procédure de délimitation du rivage de la mer, des lais et relais de la mer et des limites transversales de la mer à l'embouchure des fleuves et rivières ( liste des communes littorales). - Décret n°2004-310 du 29 Mars 2004 relatif aux espaces remarquables du littoral. - Décret n°2007-1586 du 8 Novembre 2007 relatif aux schémas de mise en valeur de la mer et modifiant le décret n°86-1252 du 5 décembre 1986 relatif au contenu et à l'élaboration des schémas de mise en valeur de la mer. - Décret n° 2008-487 du 15 mai 2008 relatif aux sites Natura 2000 en mer - Décret n° 2011-492 du 05 mai 2011 relatif au plan d'action pour le milieu marin - Circulaire du 14 Mars 2006 (MTETM) relative à l'application de la loi littoral et à l'urbanisation des communes littorales - Circulaire du 20 Juillet 2006 (METETM et Ecologie et développement durable) relative à l'application de la loi littoral et la préservation de l'environnement - Circulaire interministérielle n°2007-17 du 20 Février 2007 relative à l'intervention du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres sur le domaine public maritime ­ élaboration de la stratégie nationale et géographique d'intervention du Conservatoire du littoral sur le domaine public maritime en concertation avec les services de l'Etat concernés. - Circulaire du 15 Juin 2009 relative à la réforme de l'administration territoriale de la mer et du littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 115/137 III ­ Directives communautaires - Directive Oiseaux - avril 1979 - Directive Habitats, Faune et Flore - mai 1992 - Directive Eau - 23 octobre 2000 ­ intégrée en droit français le 21/04/2004 et loi du 30/12/2006 sur l'eau et le milieu aquatique - Recommandation du Parlement européen et du Conseil du 30 Mai 2002 relative à la mise en oeuvre d'une stratégie de gestion intégrée des zones côtières en Europe. Mis en oeuvre en France lors du CIM du 29/04/2003 - Directive sur les eaux de baignade en mer ­ 15 février 2006 - Directive du 17 juin 2008 sur la stratégie pour le milieu marin 7.2 - Bibliographie de référence - Rapports et Audits - CGPC- Mission d'expertise relative aux difficultés liées à l'application de la loi littoral n°86-2 du 3 Janvier 1986 - CGPC- Rapport sur les conditions d'application de la loi littoral -15 juillet 2000 - Bilan loi littoral Septembre 2007 - Audit thématique d'initiative locale DDE 2A et DDE 2B - Avril 2008 : respect des dispositions du code de l'urbanisme applicables au littoral - Audit thématique d'initiative local : Gestion stratégique du littoral dans les régions Bretagne et Pays de Loire ­ janvier 2010 - Rapport final du 23 Juin 2010 COMOP 6 : Comité Aménagement, Protection et Gestion des espaces littoraux opérationnel - Audit d'initiative locale MIGT 5- Méditerranée - Février 2010 sur la gestion et la conservation du domaine public maritime - Rapport d'évaluation Grenelle 2 : mer Octobre 2010 pp118 à 123 - CGEDD ­ Mer et littoral : vers une planification stratégique ­ Décembre 2010 - Rapport d'étape Grenelle mer Février 2011 - Atelier littoral Bretagne : plaquettes portant sur les articles L 146-4-I/II/III du code de l'urbanisme (rapport DREAL Bretagne) - DATAR ­ Enquête auprès des SGAR sur le lien Terre-mer 7.3- Liste des services à auditer (cf. annexe suivante) Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 116/137 3. Liste des auditeurs et des services audités Services auditésauditeurs-dates des audits Services audités Région Nord Pas-deCalais MIGT1 DREAL Nord/Pas de Calais DIRM Auditeurs Dates des audits Gérard RUIZ Bernadette VANDEWALLE sept 2011 62 59 · · Nord DDTM du Nord DDTM Pas de Calais Préfecture ( SG et contrôle de légalité) Catherine ANDARELLI Bernadette VANDEWALLE Gérard RUIZ, Bernadette VANDEWALLE 01/07/11 Sept 2011 Pas-de-Calais Région Picardie MIGT 1 80 · Somme DDTM Somme DREAL Picardie Synthèse commune Haute et Basse Normandie DIRM Manche Est Mer du Nord DREAL Haute Normandie DDTM DDTM Synthèse commune Haute et Basse Normandie Bernadette VANDEWALLE, Catherine ANDARELLI Guy BARREY Daniel BURETTE Vincent ALLAIS 01/07/11 Région HauteNormandie MIGT 2 Déc 2011 76 · · Seine Maritime Eure Région BasseNormandie MIGT 2 27 Guy BARREY Daniel BURETTE Vincent ALLAIS Déc 2011 14 · · Calvados Manche DDTM et Préfecture DDTM Préfet Région Bretagne, préfet d'Ile et Vilaine DREAL DIRMO DDTM Préfet Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Françoise GADBIN Annick HELIAS Patrick PUECH 27/10/11 27/10/11 10/11/11 4 et 5 nov 2011 Région Bretagne MIGT 3 22 50 · Cote d'Armor Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 117/137 29 · Finistère DDTM Préfet et Préfecture( SG et contrôle de légalité) Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Françoise GADBIN Patrick PUECH Annick HELIAS Françoise GADBIN Patrick PUECH Françoise GADBIN Patrick PUECH Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Henri MAILLOT 24 et 25 octobre 2011 5 · Ille-et-Vilaine DDTM sous Préfet Saint Malo 26/10/11 56 · Morbihan DDTM Préfet 7 nov 2011 Région Pays de Loire MIGT 3 Préfet de région Pays de Loire, préfet de Loire Atlantique DREAL DDTM 9 nov 2011 9 nov 2011 8 nov 2011 44 · Loire Atlantique Vendée · DDTM Préfet Région PoitouCharentes MIGT 4 Synthèse commune PoitouCharentes, Aquitaine Octobre 2011 17 · CharenteMaritime DDTM Préfecture (contrôle de légalité) Henri MAILLOT Philippe GARIN Madeleine GRANCHER Henri MAILLOT 20 sept 2011 Région Aquitaine MIGT 4 Synthèse commune PoitouCharentes, Aquitaine DDTM Octobre 2011 09/08/11 33 · Gironde Gérard RUIZ Henri MAILLOT Philippe GARIN Henri MAILLOT Philippe GARIN Henri MAILLOT Philippe GARIN Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Michel WEPIERRE Xavier LAFON 40 · Landes DDTM 20 juillet 2011 14 et 15 sept Oct 2011 Déc 2011 64 · PyrénéesAtlantiques DDTM Sous préfecture DREAL Lang Roussillon. DIRM Méditerranée Région LanguedocRoussillon MIGT 5 65 · PyrénéesOrientales DDTM Préfet et préfecture ( dir.des CL Oct 2011 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 118/137 et contrôle de légalité) 11 · Aude DDTM Contrôle de légalité DDTM Préfecture ( SG et CL) Sous préfecture Béziers DDTM Préfecture : contrôle de légalité Synthèse commune L-Rouss et PACA DIRM méditerranée DREAL PACA DDTM dont chef unité légalité DDTM SG Préfecture DDTM Préfet Services préf dont contr. légalité DREAL Préfet de Région DDTM Préfecture : SG, SGAC, bu urba ( contrôle légalité) DDTM Préfet Préfecture ( dir CL, dir cab, stag ENA) Michel WEPIERRE Nov 2011 Oct 2011 34 · Hérault Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN 30 · Gard Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Nov 2011 Région ProvenceAlpes-Côte d'Azur MIGT 5 Déc 2011 13 · Bouches du Rhône Var Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Sept 2011 83 · Oct 2011 6 · AlpesMaritimes Oct 2011 Région Corse MIGT 5 Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Oct 2011 2A · Corse du Sud Oct 2011 2B · Haute-Corse Oct 2011 Grands lacs Région Rhône Alpes MIGT 6 DREAL Rhône Alpes Bertrand CREUCHET Synthèse Grands lacs Sept 2011 73 · Savoie (Bourget) DDT Préfet contrôle de légalité DDT Préfet Bertrand CREUCHET Aude DUFOURMANTELLE Jean LALOT Bertrand CREUCHET Aude DUFOURMANTELLE 01/08/11 74 · Haute-Savoie (Annecy, Léman) 01/08/11 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 119/137 contrôle de légalité Jean LALOT Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Nov 2011 Région LanguedocRoussillon PACA MIGT 5 Synthèse lacs des départements méditerranéens 48 · Lozère (Naussac, Grandval) Var (Ste Croix) Alpes de Haute Provence (Ste Croix, SerrePonçon) Hautes-Alpes (SerrePonçon) DDT Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Déc 2011 83 · DDTM Oct 2011 4 · DDT Nov 2011 5 · DDT Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Nov 2011 Région ChampagneArdennes MIGT 7 10 · Aube (Temple, Orient) DDT Gérard RUIZ * Région FrancheComté MIGT 6 39 · Jura (Vouglans) DDT Gérard RUIZ * * échanges de courriers et courriels. Nombre de services audités et personnalités rencontrées : ­ départementaux : - 26 DDTM ( la totalité des DDTM concernées par la loi Littoral) et 6 DDT, - 11 préfets et 2 sous-préfets, - 14 services de préfecture dont ceux chargés du contrôle de légalité. régionaux : - 8 DREAL ( sur 11 concernées), - 3 DIRM, - 3 Préfets de Région, préfets de département. ­ Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 120/137 4. Note relative aux moyens de l'Etat pour s'opposer aux PLU et aux autorisations contraires à la loi Littoral Note DHUP (3 juillet 2012) 124 Les moyens mis à disposition du préfet par le code de l'urbanisme pour s'opposer à un PLU ou à un POS contraire à la loi Littoral : L'Etat dispose de deux moyens prévus par le code de l'urbanisme qui s'ajoutent au contrôle de légalité prévu par le code général des collectivités territoriales :125 - l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme, qui est en quelque sorte préventif car il s'utilise avant l'entrée en vigueur du PLU :126 Cet article concerne le caractère exécutoire du plan local d'urbanisme et vise uniquement les communes non couvertes par un SCOT. Dans cette hypothèse, et si le préfet estime que le document d'urbanisme n'est pas compatible avec la loi Littoral (ou avec une directive territoriale d'aménagement, qui peut préciser les modalités d'application de la loi Littoral), il peut notifier par lettre motivée à la commune ou à l'EPCI compétent les modifications qu'il estime nécessaires. Le PLU ne deviendra exécutoire qu'une fois les modifications intervenues. - l'article L. 123-14 du code de l'urbanisme, qui peut être utilisé lorsque le PLU est déjà entré en vigueur : Lorsque le document d'urbanisme n'est pas conforme à la loi littoral (ou avec une directive territoriale d'aménagement, qui peut préciser les modalités d'application de la loi Littoral), le préfet doit en informer la commune ou l'EPCI compétent et lui demander de modifier ou de réviser son document d'urbanisme. En cas de refus de l'autorité compétente, ou si la délibération correspondante n'est pas intervenue dans un délai de six mois à compter de la demande initiale du préfet, ce dernier peut engager et approuver la révision ou la modification à la place de la commune ou de l'EPCI. Les moyens mis à disposition du préfet pour s'opposer à une autorisation d'urbanisme contraire à la loi Littoral mais conforme au POS ou au PLU. Dans la lignée d'une jurisprudence constante, le conseil d'Etat a réaffirmé récemment que l'autorité administrative compétente doit refuser d'appliquer les dispositions illégales d'un document d'urbanisme et se référer aux règles d'urbanisme antérieures (Conseil d'Etat avis 9 mai 2005, M. Marangio, req. 277280). Le maire devra donc refuser de délivrer une autorisation de construire conforme à un document d'urbanisme en vigueur, lorsque les dispositions de ce document d'urbanisme permettant la 124 Note rédigée à la demande de la mission d'audit par A. Vandervorst (bureau de la législation de l'urbanisme QV4). Des dispositions similaires existent pour les SCOT aux articles L.122-12 et L.122-15-1 du code de l'urbanisme. les articles L.123-12 et L.123-14 s'appliquent aux PLU mais également aux POS en application de l'article L.123-19. 125 126 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 121/137 construction sont contraires aux dispositions de la loi littoral et ce quand bien même le document d'urbanisme n'aurait fait l'objet d'aucun recours direct. Il devra toutefois statuer sur l'autorisation de construire au vu des règles d'urbanisme immédiatement antérieures. Lorsqu'un maire délivre une autorisation de construire illégale dans cette hypothèse, le préfet est donc fondé à utiliser les divers instruments dont il dispose dans le cadre du contrôle de légalité (recours gracieux, déféré préfectoral, référé suspension préfectoral127). 127 Ce référé particulier est prévu à l'article L.554-1 du code de justice administrative et a comme particularité de ne pas nécessiter la démonstration de l'urgence, par exception aux règles applicables en matière de référé. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 122/137 Rapport n°007707-01 5. L'application de la loi Littoral en Bretagne (synthèse) Une expérience à partager... MIGT 3 (juin 2012) Cette présente note décrit l'expérience bretonne et explicite la manière dont les services de l'État en région se sont saisis de la question relative à l'application de la loi Littoral. 1. Une planification encore loin d'être compatible avec la loi Littoral Si le lien entre loi Littoral et planification est primordial pour les DDTM, force est de constater que ces dernières n'ont toujours pas trouvé les moyens adéquats pour sensibiliser les élus et leur faire intégrer cette donnée. Les services de l'État utilisent, dans ce but, l'association de l'État dans l'élaboration des documents d'urbanisme pour attirer l'attention des élus, mais cela reste une action de longue haleine, dans la mesure où nombre d'entre eux ne sont pas enclins à transformer leur POS en PLU tandis que les révisions, quand elles sont entreprises, s'étalent sur de nombreuses années. Les PLU sont donc encore loin d'être conformes à la loi Littoral dans un contexte de contestation importante de la société civile sur la qualité de sa prise en compte. C'est ainsi qu'entre 2005 et 2010, 23 PLU ont été annulés pour non conformité à la loi Littoral, soit près de 10% de ces documents (dont un seul à l'initiative de l'État). De même, le littoral breton est totalement couvert par des SCoT, mais ceux-ci ne sont pas tous approuvés et ceux qui le sont, restent encore sur ce point de valeur très inégale et sont rarement prescriptives. Seuls les SCoT de Brest et de Lorient ont à ce jour entrepris une lecture volontariste dans ce domaine grâce, en particulier, au relais décisif que représente leur agence d'urbanisme. La Bretagne compte, par ailleurs deux schémas de mise en valeur de la mer (SMVM), celui du Trégor-Goëlo dans les Côtes d'Armor et celui du golfe du Morbihan, approuvés respectivement en 2007 et 2006. Ces deux SMVM ont intégré les délimitations définies préalablement par les services de l'État (espaces remarquables et espaces proches, bande des 100m, coupures d'urbanisation), permettant ainsi une prise en compte par les collectivisées territoriales dans leurs documents locaux. 2. Une stratégie régionale forte Au delà des travaux menés par la DRE en 2007 « Contribution de l'État sur le littoral breton », et des stratégies départementales, propres à chaque DDE, un atelier littoral régional est créé en 2008, aboutissement et formalisation des travaux collectifs engagés depuis 2004 par les quatre DDE et la DRE pour réexaminer les conditions d'application de la loi Littoral de façon globale. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 123/137 Le constat fut d'une part, que les documents d'urbanisme étaient encore peu compatibles avec la loi Littoral d'où un fort risque de contentieux et d'autre part, que les doctrines, cadres et outils de mise en oeuvre, étaient différents selon les départements. Au delà, cet atelier littoral, expression d'une approche unanime et volontariste des services de l'État pour se doter d'une vision partagée du littoral s'est finalement concrétisée à cette date, par le recrutement d'un cadre A+, ce qui a permis à cette structure transversale d'englober plus largement les thèmes de la planification stratégique de la zone côtière et de la gestion du DPM. La création de la DREAL en 2010 a été l'occasion de confirmer cette orientation et de lui assigner des ambitions plus importantes qui s'inscrivent dans les préconisations du livre bleu « stratégie pour la mer et les océans », lui-même inspiré des recommandations de l'Union européenne : promouvoir dans la première région maritime française une gestion intégrée de la mer et du littoral. Au niveau régional le préfet s'appuie sur la DREAL et sa mission transversale dédiée à l'interface terre-mer et intitulée mission « zones côtières et milieux marins ». Cette mission assure notamment l'animation de l'atelier littoral128 qui associe les DDTM (chefs de service DDTM et DREAL) et, en tant que de besoin, les DIRM, DRAAF, DRAC et les services de la préfecture maritime. Son statut lui permet désormais d'aborder dans l'esprit de la gestion intégrée des zones côtières tous les dossiers portés par la DREAL touchant à la gestion de la mer et du littoral sans se substituer pour autant aux autres services spécialisés garants des politiques sectorielles qui leur sont dévolues : application de la loi Littoral, gestion du DPM, gestion des sédiments de dragages terre-mer, planification stratégique intégrée terre-mer avec les volets mer des SCoT, suivi des dossiers d'énergie en mer, représentation de l'État au parc marin d'Iroise et préfiguration des nouveaux parcs, etc. De ce fait, la démarche engagée pour l'application de la loi Littoral, bien qu'évoquée en CAR dès janvier 2009, ne débouchera qu'après la réforme de l'État et les nouvelles relations entre niveaux régional et départemental instaurés par la REATE : c'est le CAR de janvier 2010 qui entérinera ce nouveau positionnement de l'atelier littoral ainsi que son programme de travail avec 5 ateliers thématiques dont un consacré à la loi Littoral. Le dossier "loi Littoral" y est abordé avec les 3 objectifs suivants : · « Mettre les services de l'État en capacité d'expliciter de manière cohérente et homogène l'ensemble des notions de la loi Littoral. » « Réduire le plus possible l'insécurité juridique des documents locaux et de l'instruction et développer, à cette fin, une information cohérente vers les élus. » « Articuler les différentes postures de l'État en promouvant l'échelle des SCoT dans la prise en charge de la loi Littoral et en mettant l'accent sur la promotion d'une approche par le projet.» · · 128 Note de la DREAL du 27/09/10 : Programme de travail de l'atelier littoral. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 124/137 Rapport n°007707-01 Dans ce nouveau contexte de fonctionnement de l'État, le rôle d'animation porté en ce domaine par la DREAL est cependant ressenti par certains préfets, comme susceptible de porter atteinte à leur propre marge d'action qui, en matière de contrôle de légalité, comporte un champ d'autonomie vis-à-vis du préfet de région. Cependant, du fait de l'importance des enjeux en matière d'aménagement du territoire, ce dernier a rapidement considéré qu'une harmonisation régionale était indispensable pour sécuriser les documents locaux d'urbanisme sans pour autant remettre en cause la compétence propre des préfets en matière de contrôle sur les actes individuels ou les documents d'urbanisme. Pour être efficace, celle-ci devait en outre, à ses yeux, être concrète et prendre appui sur une expertise des documents locaux. La doctrine régionale a donc été construite selon des modalités arrêtées en CAR, et sera co-construite par les quatre DDTM en atelier thématique sous l'égide de la DREAL, qui en a au départ stabilisé les objectifs, le cadre de production, tout en assurant l'articulation et le suivi avec le CAR. La DDTM du Finistère s'en est vu confier le pilotage (voir ci-après). Aujourd'hui, le « Référentiel Loi Littoral » issu de ces travaux, appelé communément au sein des services le « référentiel breton », constitue, pour les quatre DDTM, le corps de recommandations régional utilisé tant par les chargés d'études en matière de planification que par les instructeurs ADS. Il est aussi une source précieuse d'informations sur la jurisprudence qui y est abordée sous forme illustrée pour les services en charge du Contentieux en Préfecture ou en DDTM (Ille-et-Vilaine). 3. Une coordination entre services autour de l'interprétation des grands principes posés par la loi L'atelier littoral breton fonctionne à travers un atelier permanent, lieu d'échanges, d'impulsion et de validation des travaux menés par des ateliers thématiques dont notamment l'atelier 5 intitulé "loi Littoral". 129 Pour la thématique loi Littoral, les réflexions et travaux de l'atelier correspondant ont été élaborés lors de huit séances de travail pilotés par la DDTM du Finistère, auxquels participaient les trois autres DDTM et la DREAL. On peut citer également l'atelier 1 sur le volet mer de SCoT qui a fait l'objet de notes stratégique et juridique : "Contribution à la réflexion sur les volets MER des SCoT". Ce document de travail élaboré par l'atelier thématique auquel participait le préfet maritime Atlantique, s'inscrivait aussi dans le cadre de la réflexion 2009 lancé par la sous-direction du littoral et des milieux marins de la DGALN, à la demande des DREAL, notamment la DREAL Bretagne. La DGALN n'a cependant pas donné suite à ce groupe de travail et ce document, issu de l'atelier breton, tout comme la plaquette consacrée aux volets mer des SCOT que le CETE Méditerranée y avait présenté, n'ont pas pu être partagés avec les autres DREAL et DDTM littorales. 129 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 125/137 Afin de donner de la solidité et de la distance à l'approche, la DREAL a proposé, en accord avec la DDTM du Finistère, un accompagnement de juristes externes aux services des DDTM, dans un premier temps issus du CETE de Nantes et dans un second temps de l'Université en la personne d'Olivier Lozachmeur, docteur en droit, spécialiste de la loi littoral et de la GIZC, disciple de l'éminent juriste du Littoral en France qu'est Jean-Marie Becet. Olivier Lozachmeur est le rédacteur-juriste des fascicules du Référentiel breton. Le référentiel de plus de 250 pages de jurisprudence illustrée et de recommandations qui en est issu intègre des jurisprudences nationales (décisions du Conseil d'État et de Cours d'appel), mais aussi celles du Tribunal administratif (TA) de Rennes qui traite la majorité des conflits relatifs à cette loi et dont 93% des décisions ne font pas l'objet d'appel. Ce corpus de 9 documents, constitutif de la doctrine bretonne, a entièrement été validé par l'Atelier Permanent du Littoral. Il s'agit à ce jour des fascicules consacrés à : ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ l'article L.146-2 (coupures d'urbanisation), l'article L.146-4-I (extension de l'urbanisation et continuité de l'urbanisation), l'article L.146-4-1 et les exploitations agricoles, l'article L.146-4-II (espaces proches), l'article L.146-4-III (bande des 100 m), l'article L.146-5 (campings), l'article L.146-6 (espaces remarquables), l'article L.146-7 (routes littorales), l'article L.146-8 (dérogations). La qualité de l'ensemble de ces documents co-élaborés entre les services départementaux et régionaux est reconnue par les préfets de départements, qui y voient un référentiel utile qu'ils ont globalement validé, mais ils se refusent toutefois à y voir un corps de doctrine immuable. Le CAR du 27 janvier 2010 a adopté le fascicule relatif à la continuité de l'urbanisation dans les communes littorales (L 146-4-1) dans la mesure où la règle de continuité représente à ce jour de très loin la source la plus importante de contentieux. Ce fascicule sur le L 146-4-1 a été expertisé par J-M. Becet, à la demande de la DREAL et depuis, un plan de formation multi-acteurs destiné à de nombreux publics sur la base de ce référentiel a été mis en place tant pour les agents exerçant en DDTM que pour les bureaux d'études et services techniques des collectivités locales ou d'autres plus spécifiques mais dont le rôle est essentiel comme les commissaires enquêteurs, les notaires, etc. Ce plan a déjà touché, lors de deux séances en mai 2012, près de 40 personnes et se poursuivra fin 2012 et en 2013 pour toucher les bureaux d'études, services techniques des collectivités et commissaires enquêteurs. D'autres séances pour les services de l'État seront mises en place à leur demande. Ces documents sont actuellement accessibles sur le site intranet de la DREAL Bretagne. Il est envisagé une mise à disposition plus large pour les différents acteurs du territoire littoral et notamment les élus qui ont en charge la planification. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 126/137 4. Des stratégies départementales déclinant la stratégie régionale Les travaux les plus significatifs depuis la publication de ces documents130 réalisés par le niveau départemental sont ceux relatifs à l'extension de l'urbanisation dans les communes littorales et le fascicule du « Référentiel Loi Littoral » spécifique à l'article L 146-4-1 du CU a servi de cadre référentiel à l'élaboration d'une cartographie de la compatibilité des zonages constructibles des documents d'urbanisme. Le principe retenu (réalisé antérieurement dans le Morbihan) est une analyse juridique, par les DDTM, de tous les secteurs ouverts à l'urbanisation dans les POS ou PLU - ou qui pourraient l'être - au regard de la jurisprudence en matière de continuité. Un code de couleur permet de distinguer : · les zones rouges où la construction est en contradiction avec la lecture faite par l'État en région de la loi Littoral (fascicule L 146-4-1 du référentiel régional). Dans ce cas, l'instruction ADS doit conduire à une proposition de refus et logiquement le contrôle de légalité doit s'exercer dès lors que le maire ne suit pas cette proposition ; les zones vertes, où il n'y a pas de contradiction, au titre du L146-4-1, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en a pas à d'autre titre (bandes des 100m, espace remarquable, espaces proches, etc.) ; les zones oranges, où il y a une incertitude juridique potentielle (jurisprudence non stabilisée), sur lesquelles l'État déconseille la délivrance d'un acte individuel d'urbanisme et sur lequel l'élu est prévenu du risque encouru. · · Ces cartes qui ont valeur d'expertise sont évolutives et font état de la situation jurisprudentielle à un moment donné. Ainsi, le Morbihan qui avait devancé la démarche régionale, a-t-il été amené à produire une version réactualisée de ses premières cartes d'expertise après adoption du référentiel en CAR. D'une manière générale, ce travail qui a rassemblé les différents services de chaque DDTM (agents du siège et unités territoriales en charge de l'ADS et de la planification) a été validé par les sous-préfets et présenté aux maires qui gardent leur liberté d'appréciation : la consigne préconisée par le niveau régional en la matière était bien de préciser qu'il s'agissait là d'une lecture par l'État en Région des fragilités juridiques des documents de planification, les élus étant invités à produire une expertise plus poussée pour préciser certaines notions dans leur document et retrouver le cas échéant quelques marges de manoeuvre au delà de la sécurisation de leur POS ou PLU. Le document finalisé doit leur servir de base, aussi bien pour réviser ­ afin de les sécuriser - leur document d'urbanisme que pour assurer la qualité de l'instruction au titre de l'application du droit des sols aux 130 Des documents de référence avaient été réalisés de manière inégale dans les 4 départements pour appréhender l'application de la loi avant 2006 tant par les DDE que la DIREN : Atlas des espaces remarquables de la DIREN, DDALL ou délimitation de certains espaces dans des cartographies spécifiques en DDE (espaces proches, parties actuellement urbanisées des agglomérations et hameaux en DDTM, etc...). A noter toutefois la demande expresse de la centrale de ne plus produire, ni diffuser les DDALL suite à un rapport du CGEDD qui avait insisté sur l'importance de l'exercice de planification par les élus et au retrait des services de l'État dans « l'adaptation » de la Loi. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 127/137 constructions et aménagements nouveaux (que l'instruction soit faite ou non par les services de l'État). De même, il sert de référence pour les instructeurs ADS et pour ceux du contrôle de légalité. Ce travail non encore achevé lors du passage de la mission d'audit portait déjà ses fruits, semble-t-il, avec les maires du Finistère notamment, motivés pour sécuriser leur PLU en cours d'élaboration. Ce véritable « chantier » concerne 270 communes littorales sur les 1270 communes de la région Bretagne et le Finistère, à lui seul, en totalise 118. En novembre 2011, pour le Finistère : le travail était en cours de finalisation. Sur les 118 communes, les cartes des risques juridiques avaient été réalisés sur 50 communes avec 15 retours des maires sans remise en cause. Pour les services, c'était le résultat d'un travail associant l'État, les élus, partageant, à défaut de l'accepter, un même raisonnement. Ces documents n'avaient pas vocation à être rendus publics, mais seront communiqués sur demande (cf. décision CADA). A noter que ce type d'expertise issu du référentiel n'avait pas son équivalent dans ce département antérieurement, contrairement au Morbihan ; il y a donc représenté un saut qualitatif très important par rapport aux pratiques antérieures. Réalisées de manière homogène et centralisé au siège de la DDTM, les cartes ont été ajustées, puis, présentées et laissées aux élus locaux par le secrétariat général de la préfecture ou les sous-préfets qui ont supervisé et porté les versions finales. Ces cartes, lorsqu'elles sont réalisées, constituent le document de référence tant pour l'instruction que la planification au sein de la DDTM. En novembre 2011, pour les Côtes d'Armor : si la DDTM (service planification en lien avec les unités territoriales) a fait l'analyse juridique des PLU/POS et a identifié les situations jugées non conformes aux dispositions de la loi Littoral avec des visites de terrain, ce sont les sous-préfets qui ont rencontré chaque maire sur la base du travail fourni par la DDTM avec ou sans la DDTM. Les points de désaccord avec les élus font l'objet d'un arbitrage au niveau du préfet. La production de la version initiale des cartes est réalisée par les unités territoriales de la DDTM, puis consolidée et supervisée par le siège sur la base du référentiel régional. Les cartes n'ont, en revanche, pas été communiquées aux élus dans ce département. En octobre 2011, en IIle-et-Vilaine : la DDTM signale à la mission que ce travail de mise à jour au regard du référentiel régional s'inscrit dans la poursuite de l'analyse de la fragilité juridique des POS et PLU effectué en 2008 et communiqué sous une forme écrite, très détaillée et personnalisée à chacun des élus. Les cartes des risques juridiques étaient toutes réalisées et révisées en novembre 2011 mais devaient être validées en interne avec les conseils (architecte et paysagiste) avant une présentation au sous-préfet de Saint-Malo qui consultera les communes. A Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 128/137 ce stade, sur 21 communes, seuls deux PLU étaient expertisés comme compatibles (et 2 peu compatibles). Les cartes étaient déjà néanmoins utilisées par les instructeurs ADS. En novembre 2011, pour le Morbihan : c'est la 2ème génération de cartes, l'exercice ayant commencé le 16 mars 2006 lors d'une réunion à l'initiative des élus à Locoal Mendon à laquelle a participé la DGALN. A cette occasion, la circulaire du 14 mars venant d'être publiée, la DGALN a commenté la demande faite aux services de procéder à l'analyse du risque sous la forme de l'élaboration de cartes dites des « 3 couleurs ». Un travail en équipe a été conduit avec les collèges planification et ADS pour qualifier les "zones U ou AU" à partir de photos aériennes, du cadastre, de visites de terrain et en reprenant aussi les anciens actes pour prendre en compte, à la demande du préfet, les « errements antérieurs ».131 50% des cartes étaient faites à cette date, 100% programmé à fin 2011. Les documents de travail ont été présentés aux maires par le chef de service accompagné par la responsable de l'unité "animation de la filière planification". La consigne de la préfecture a été de laisser l'appréciation aux maires : le document est à ce titre amendable par les élus et fait d'ailleurs l'objet de courriers en aller et retour avec eux. En cas de désaccord avec la DDTM, c'est le sous-préfet ou le SG qui arbitre. Le document final a été notifié au maire (cas de Damgan). L'objectif de telles cartes d'expertise locales est de permettre aux services de l'État de préciser leur position (au regard de la jurisprudence). Elles constituent un outil d'information pour les maires sur les risques juridiques qu'ils sont susceptibles de prendre au titre des actes individuels d'urbanisme. Elles n'ont pour objectif que d'éclairer le seul aspect juridique lié au L.146-4-1, article à l'application particulièrement problématique, et n'a pas pour objectif d'aborder la question de la prise en charge de cette notion dans le projet d'aménagement de la commune en articulation avec l'ensemble des autres enjeux de planification. 5. Des conclusions provisoires Tout en étant un outil de gestion partagé de la gestion courante de l'ADS en matière de continuité, ces cartes constituent une base à travers laquelle s'élaborent les ajustements imposés par la jurisprudence et l'intégration des enjeux locaux dans la rédaction des documents de planification révisés afin de donner une sécurité plus importante à ces documents. 131 Par exemple une parcelle sur laquelle un CU aurait été délivré sur proposition de l'État sans que le contrôle de légalité ne soit exercé se retrouve en "vert" même si normalement au regard de la loi c'est du "rouge" ! Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 129/137 Cet objectif porté par le Préfet de Région Bretagne devrait se poursuivre à travers un bilan du niveau d'harmonisation atteint avec cette stratégie entre les différents départements bretons ; ce bilan fera aussi l'objet de préconisations d'amélioration en continu tant de la posture de l'État que du portage de la lecture jurisprudentielle. A ce titre, la principale difficulté en la matière provient de documents d'urbanisme anciens (POS jamais révisés ou remis en service par annulation du PLU) ou en cours de révision qui n'ont pas intégré les évolutions jurisprudentielles. Dès lors, seule la réalisation par les communes (ou mieux des intercommunalités) de PLU établis sur un projet respectueux de la loi Littoral dans toutes ses thématiques, mais intégrant aussi les enjeux des autres politiques nationales 132 dans l'esprit de la loi SRU, du contexte local133 et du projet politique de développement, pourrait permettre de sortir des dysfonctionnements actuels et dépasser leurs apparentes contradictions pour replacer la règle de continuité dans la perspective globale du projet d'aménagement. Cet exercice met toutefois en évidence la nécessité pour toute collectivité compétente en matière d'urbanisme sur le littoral de disposer d'un haut niveau d'expertise juridique lui permettant de mettre le droit au service du projet plutôt que d'en subir quotidiennement les contraintes134. De nombreuses petites collectivités ne disposent probablement pas actuellement de cette expertise. Le rôle d'alerte et l'engagement de l'État local se sont avérés de ce point de vue essentiel tout comme le sera l'exercice de son contrôle de légalité. 132 133 134 zones humides, paysage, déplacements, offre équilibrée de logements, etc. paysage, relief, utilisation du sol. Plusieurs communes bretonnes confrontées à des recours récurrents rencontrent des difficultés pour trouver une compagnie d'assurance couvrant le risque juridique. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 130/137 6. Le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares (synthèse) MIGT 6 (juillet 2012) Seize lacs du territoire métropolitain ont une superficie de plus de 1000 hectares, entraînant par là l'application de la loi Littoral sur le territoire des communes riveraines. En outre, pour huit de ces lacs, s'applique également aux territoires concernés la loi Montagne. La situation de ces lacs dans des régions de densité de population très diverse avec une attractivité touristique variable a conduit l'équipe de pilotage du présent audit à ne pas réaliser d'audit détaillé auprès des 15 départements concernés mais à mener des missions d'audit sur cinq d'entre eux parmi les plus exposés aux pressions urbanistiques et touristiques. Parmi ceux-ci, la Haute Savoie pour le lac d'Annecy connaît une pression très importante de l'urbanisation, assimilant les difficultés rencontrées à celles du littoral méditerranéen. Dans une moindre mesure, le littoral français du lac Léman (département de la Haute-Savoie), les rives du Lac du Bourget (département de la Savoie) font également face à des pressions d'aménagement importantes et par suite à des coûts du foncier très élevés. Le nombre des contentieux, liés à l'application de la Loi Littoral autour de ces trois lacs, témoigne du niveau des pressions rencontrées. Pour les autres lacs de plus de 1000 hectares, l'urbanisation et les aménagements nautiques sont limités à quelques segments de leurs rives, soit que ces rives soient peu ou pas accessibles, que le littoral soit protégé à un autre titre (réserve naturelle par exemple) ou simplement que le lac soit peu attractif, car situé dans un territoire isolé et/ou au climat peu favorable. Quelques différences avec le littoral maritime évoquées par les services audités... Une spécificité de ces lacs, par rapport au rivage maritime, est de permettre pour tous les plans d'eau concernés une vision de leur paysage facile et quotidienne depuis la rive opposée. Une autre caractéristique est la difficulté de fixer la hauteur des plus hautes eaux : si celle-ci peut être déterminée sans difficultés pour les plans d'eau naturel, une partie de ces grands lacs a été créée artificiellement et ils connaissent un marnage important des eaux lié à leur usage et à leur entretien. La limite « des plus hautes eaux » a été parfois contestée compte tenu du caractère artificiel de ces plans d'eau. Le pilotage, les réseaux Tous les services audités ont témoigné du manque d'instruction et, pour certains, de réponses à des questions posées de la part de l'administration centrale (tout au moins depuis 2006 et les dernières circulaires Loi littoral). L'audit révèle également que les DREAL (et avant les DIREN) n'ont pas assuré d'animation spécifique sur la question de la gestion de ces grands lacs alors qu'au moins pour la région Rhône-Alpes (départements de la Savoie et de la Haute-Savoie) et la région PACA une telle démarche trouverait son utilité. Enfin la concertation entre départements voisins, Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 131/137 parfois concernés par les rives d'un même lac (Serre-Ponçon, Sainte Croix, Sarrans et Grandval ) soit n'a jamais eu lieu, soit est en panne ou très laborieuse. Une exception à cela est le projet de directive territoriale (DTA) des Alpes du Nord, qui a donné lieu à la mise au point d'une position concertée entre les services régionaux et départementaux puis présentée aux élus concernés : ce sont les dispositions arrêtées dans ce dossier qui sont encore la référence pour les rives du lac du Bourget en Savoie, et pour une part en Haute Savoie pour les lacs d'Annecy et Léman. Les porter à connaissance Dans tous les départements, les « porter à connaissance » adressés par l'État aux communes riveraines des lacs de plus de 1000 ha rappellent la nécessité d'appliquer la Loi littoral. La DDT de Haute Savoie communique les dispositions d'application de la Loi, telles qu'elles avaient été élaborées et adressées aux collectivités pour la DTA des Alpes du Nord. Les autres DDT le font oralement à l'occasion des réunions d'association. La capacité d'accueil (L 146-2) Cette notion est particulièrement difficile à utiliser et aucun témoignage de référence à cet article n'a été recueilli pour la gestion des autorisations et de la planification. Le libre accès du public au rivage (L 146-3) L'application de cet article est au moins aussi difficile que pour le littoral maritime mais les services veillent autant qu'ils le peuvent à son respect et parviennent dans des situations anciennes à rétablir des accès. L'extension de l'urbanisation en continuité ou en hameaux nouveaux, la protection des espaces proches et la bande des 100 mètres inconstructible (L 146-4) Cet article est celui qui est le plus délicat à interpréter sur le terrain, d'autant que les tribunaux administratifs paraissent eux-même avoir des approches décalées. Une fois encore, les difficultés et les conflits apparaissent là où la pression est la plus importante, autour des lacs des Alpes du Nord. Les positions arrêtées par les services varient dans le temps suivant les jugements intervenus. En outre, là ou l'urbanisation se poursuit au nom de la continuité, elle investit de place en place les coupures d'urbanisation qui n'ont pu être sanctuarisées. De ce point de vue, il faut également remarquer, s'agissant des opérations d'ensemble en continuité (lotissements par exemple), que ce sont les parcelles les plus éloignées qui s'urbanisent en premier et qui parfois restent isolées, à l'opposé de l'esprit de la loi Littoral. Dans les départements audités, aucun dysfonctionnement entre les services internes des DTT (service en charge de l'aménagement et unités ADS), ni mise en cause importante par l'autorité préfectorale des positions des services n'ont été détectés par les auditeurs. Les préfets ou des sous-préfets s'investissent parfois eux-mêmes et participent à des visites de terrain pour visualiser les traductions de la Loi Littoral qui leur sont soumises. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 132/137 S'agissant de la notion « d'espaces proches », l'équipe d'audit a relevé une évolution de l'appréciation autour du lac d'Annecy : les critères retenus pour leur délimitation et partagés entre les départements à l'occasion de l'élaboration de la DTA ont été reconsidérés d'une façon plus restrictive à la suite d'un jugement tandis que ces critères restent la référence autour du lac du Bourget. L'application du principe d'inconstructibilité de « la bande des 100 mètres » en dehors des espaces urbanisés pose également la question de la délimitation des urbanisations existantes, d'autant que les territoires peuvent avoir connu des traditions très contrastées d'urbanisation concentrée ou de constructions isolées sur de grandes parcelles. En fait la question se pose encore plus vis-à-vis de la règle des 300 mètres introduite par la loi Montagne (voir dernier paragraphe). Les espaces remarquables (L 146-6, R 146-1) Toutes les DDT consultées ont identifié les espaces remarquables tel que cela a été prévu par la loi et demandé par circulaires avant 2000 mais l'instabilité des listes retenues par l'État depuis l'application de la loi aurait nécessité la réactualisation de ce travail. L'instruction donnée par l'administration centrale à partir de 2002/2003 (suite à l'arrêt Balmète) de laisser les communes identifier les espaces remarquables, à l'occasion de l'élaboration ou de la révision des PLU, a déstabilisé les services. La mission a également pointé la nécessité de faire oeuvre de pédagogie vis-à-vis des collectivités pour justifier les différences de surface de ces espaces selon les situations locales. Suivant la qualité des caractéristiques environnementales qui y sont recensées mais aussi l'importance des urbanisations voisines et des pressions d'aménagement, un espace d'un demi-hectare peut être significatif et constituer un enjeu tandis qu'il est ridicule d'isoler des espaces de moins de dix hectares autour des lacs restés naturels. Cette observation peut également s'appliquer aux coupures d'urbanisation (article R.146-2). L'annulation de l'article 187 de la loi 2005-157 du 23 février 2005 Cet article avait complété le code de l'urbanisme (article L.145-1) en introduisant, pour les communes riveraines des lacs de plus de 1000 hectares et situées en zone de montagne, la possibilité de délimiter un secteur dans lequel les dispositions particulières au littoral s'appliquent seules. Dans les autres secteurs de ces communes, ce sont les dispositions particulières à la montagne qui devaient seules s'appliquer. La délimitation de ces secteurs de non-superposition de l'application des deux lois devait relever d'un décret pris en Conseil d'Etat, après avis ou sur proposition des communes riveraines. Le décret dapplication n°2006-993 du 1er août 2006 a été annulé par le Conseil d'Etat et l'ajout à l'article L.145-1 du code de l'urbanisme apporté par l'article 187 de la loi DTR, supprimé par la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 (Grenelle 2). Les auditeurs ont noté que pour la DDT des Alpes de Haute Provence, un tel dispositif paraissait souhaitable ; pour la mission, une clarification serait utile pour aider les Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 133/137 services, sous l'autorité des préfets, à expliquer aux communes la cohérence de ces deux lois mais les effets de cette superposition des textes ne lui sont pas apparus poser problème dans la pratique. En conclusion, s'agissant de l'application de la loi Littoral aux rives des lacs de plus de 1000 hectares, les auditeurs relèvent que les difficultés d'application se concentrent logiquement là où les pressions pour l'urbanisation sont les plus importantes (Annecy, Léman, et dans une moindre mesure, Le Bourget, Serre-Ponçon et Sainte Croix) et elles sont similaires à celles qui sont constatées sur le littoral maritime. Les services départementaux travaillent d'une façon isolée, n'échangent pas avec leurs voisins, ne bénéficient pas d'une animation du niveau régional et ne reçoivent pas de réponse quand ils sollicitent l'administration centrale. Ils sont déstabilisés par des jurisprudences, parfois d'apparence erratique en raison de spécificités locales particulières à chaque affaire jugée, et s'ils investissent beaucoup sur l'interprétation du droit, ils sont très peu présents pour l'accompagnement technique, social et économique de la gestion des espaces naturels ou de l'aménagement. De plus, les rives de ces grands lacs sont le support de logiques très différentes de développement urbain et périurbain. Pour certains d'entre eux, les enjeux économiques, particulièrement touristiques, mais aussi les enjeux environnementaux, s'y concentrent et les conflits d'usage y sont nombreux. D'autres, au contraire, sont confrontés à la déprise agricole et aux difficultés de gestion des espaces naturels de leurs rives. Pour quelqu'uns de ces lacs, parmi les moins exposés aux pressions, des études globales pour leur gestion ont pu être conduites (Lac de Vouglans par la DDT, charte du PNR de la forêt d'Orient pour les lacs d'Orient et du Temple). En l'absence de telles études, les services prennent position au cas par cas. Les auditeurs ne peuvent que recommander qu'une animation spécifique soit engagée pour armer les services sur l'application de la loi Littoral autour des lacs de plus de 1000 hectares et que les moyens leur soient apportés pour veiller à l'application des différents articles de la loi dans les documents d'urbanisme (ScoT et PLU). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 134/137 7. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme ADS AE CA CAR CC CETE CGDD CGEDD CIAT CNML CU DAC DATAR DDALL DDI DDT DDTM DEB DGALN DHUP DIRM DPM DRE DREAL DSF Application du droit des sols Autorité environnementale Communauté d'agglomération Signification Comité de l'administration régionale Communauté de communes Centre d'études techniques de l'équipement Commissariat général au développement durable Conseil général de l'environnement et du développement durable Comité interministériel d'aménagement du territoire Conseil national de la mer et des littoraux Code de l'urbanisme Direction d'administration centrale Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale Document départemental d'application de la loi littoral Direction départementale interministérielle Direction départementale des territoires Direction départementale des territoires et de la mer Direction de l'eau et de la biodiversité Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages Direction interrégionale de la mer Domaine public maritime Direction régionele de l'environnement Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Document stratégique de façade Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 135/137 Acronyme DTA DTADD EPCI GIMEL GIP GIZC ICPE LOADDT Loi DTR Loi Grenelle 1 Loi Grenelle 2 Loi SRU MEDDE METL MI MIACA MIAL MIGT PAC PACA PADD PADDUC PAEN PLU PNR POS PPR Signification Directive territoriale d'aménagement Directive territoriale d'aménagement développement durable Établissement public de coopération intercommunale Gestion intégrée de la mer et du littoral Groupement d'intéret public Gestion intégrée des zones côtières Installations classées pour la protection de l'environnement Loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire Loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux Loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement Loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement Loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie Ministère de l'égalité des territoires et du logement Minsitère de l'Intérieur Mission interministérielle d'aménagement de la côte Aquitaine Mission interministérielle d'aménagement du littoral Mission d'inspection générale territoriale Porter à connaissance Provence-Alpes-Côte d'Azur Plan d'aménagement et de développement durable Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse Périmètre de protection et de mise en valeur des espaces naturels et agricoles périurbains Plan local d'urbanisme Parc naturel régional Plan d'occupation des sols Plan de prévention des risques Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 136/137 Acronyme RNU SAR SCoT SDAGE SDAU SGAR SIG SMVM SNML SOeS TA TVB ZAP ZNIEFF Règlement national d'urbanisme Signification Schéma d'aménagement régional Schéma de cohérence territoriale Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme Secrétariat général aux affaires régionales Système d'information géographique Schéma de mise en valeur de la mer Stratégie nationale mer littoral Services de l'observation et des statistiques (CGDD) Tribunal administratif Trame verte et bleue Zone agricole protégée Zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 137/137 Ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie Conseil général de l'Environnement et du Développement durable 7e section ­ secrétariat général bureau Rapports et Documentation Tour Pascal B - 92055 La Défense cedex Tél. (33) 01 40 81 68 73 www.developpement-durable.gouv.fr (ATTENTION: OPTION fet, chargé de mission au SGAR, avec un rôle très limité de la DREAL. La Région Bretagne constitue un cas intéressant à souligner 45. Région maritime par excellence, l'implication du niveau régional y est ancienne. Le préfet de région s'est personnellement saisi du sujet, la loi Littoral faisant régulièrement, depuis les circulaires de 2006, l'objet de débats en comité de l'administration régionale (CAR) avec une préoccupation constante de mise en cohérence et de fermeté dans son application locale. La DREAL, lors de sa création, a donné une dimension nouvelle au dossier « loi Littoral » en l'intégrant à une mission « zones côtières et milieux marins » placée auprès du directeur. Dans ce cadre, la DREAL anime l'atelier interdépartemental littoral qui a réalisé un travail conséquent sur l'harmonisation des modalités d'application des dispositions particulières au littoral. ­ Mais aussi de nouvelles perspectives à valoriser Les Grenelles de l'environnement et de la mer ont ouvert de nouvelles perspectives. La gestion intégrée de la mer et du littoral (GIML) est au coeur de la nouvelle gouvernance mise en place suite au Grenelle de la mer. L'élaboration d'une stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML), évoquée précédemment 46 devrait être l'occasion de mobiliser sur cette politique l'ensemble des acteurs concernés au sein du Conseil national de la mer et des littoraux (CNML) : État, collectivités territoriales, communauté scientifique, acteurs socio-économiques et associations de protection de l'environnement. Les documents stratégiques de façade (DSF) devront en décliner les principes et orientations en matière de protection du milieu, de valorisation des ressources marines et de gestion intégrée des activités liées à la mer et au littoral. Ils organiseront 45 46 Cf. synthèse de la démarche engagée en annexe 4. Cf. § 213. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 35/137 également la planification stratégique et spatiale des activités en mer et devraient ainsi permettre de renforcer le volet mer des SCoT. Par ailleurs, un bilan de la mise en oeuvre française de la recommandation communautaire sur la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) a été réalisé47. La mission a souhaité savoir si les services de l'État se préparaient à faire face à ces perspectives et comment ils s'y préparaient. Ainsi, en Aquitaine, le lancement d'un projet de DTADD a remobilisé la DREAL mais également les DDTM autour des travaux du groupement d'intérêt public (GIP) du littoral. En revanche, les démarches de gestion intégrée des zones côtières (GIZC) et la stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML) ne fédèrent pas encore l'action des services. Les instances qui se mobilisent sur la problématique littorale sont principalement portées par les collectivités territoriales (GIP, syndicats mixtes...) et la participation des services à ces structures locales est très variable suivant les régions ; celle-ci se limite dans la plupart des cas à de l'information mutuelle, au mieux à de l'accompagnement de dossiers, ce que déplorent certains préfets, notamment pour les appels à projets GIZC lancés par la DATAR. En Bretagne, la DREAL a initié en 2010 une réflexion au sein d'un groupe de travail sur le « volet mer » des SCoT, rassemblant les quatre DDTM et les services de la préfecture maritime. Deux notes, stratégique et juridique, ont respectivement été produites sous l'égide de la mission « zones côtières et milieux marins » de la DREAL48. De création plus récente, les directions inter-régionales de la mer (DIRM) se mettent progressivement en place mais elles n'ont pas, pour le moment, reçu d'instructions spécifiques pour animer la réflexion de façade annoncée, ni ne disposent toujours de l'ensemble des compétences techniques pour le faire. Elles restent essentiellement centrées sur les politiques strictement maritimes. Le constat actuel est donc que les relations de travail (souvent ténues) entre les services de différents niveaux ne portent pas encore sur l'élaboration « d'une vision stratégique globale dans une perspective de développement durable », à quelques exceptions notables près, comme la Bretagne et l'Aquitaine. 2.2.3. Des attentes fortes vis-à-vis de l'administration centrale Vis-à-vis de l'administration centrale, le sentiment qui prévaut actuellement est une absence de pilotage et d'animation, sentiment renforcé par la perte de repères et d'interlocuteurs depuis les réorganisations de 2008. 47 48 Rapports à la Commission européenne 2010 et 2011 (MEDDTL-MAAPRAT- SGG-DATAR). Cf. annexe 5 sur l'application de la loi Littoral en Bretagne. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 36/137 Rapport n°007707-01 Les ateliers littoraux lancés par la DHUP ont été peu évoqués lors des rencontres avec les services et, lorsqu'ils l'ont été, les avis ont été nuancés : · d'une part, la disparition du lieu d'échanges que constituait depuis 2005 « l'Atelier littoral national portant sur les enjeux et les approches par façade », est ressentie comme une perte par les DREAL. Il avait réellement impulsé une dynamique avec des prolongements dans un certain nombre de régions (Aquitaine, Bretagne, mais aussi dans des régions comme le LanguedocRoussillon et le Nord-Pas de Calais auquel s'était associée la Picardie)49 ; d'autre part, les ateliers expérimentaux conduits sur des sites individualisés ont été diversement appréciés par les services. Une synthèse de ces travaux a été présentée à l'ensemble des parties prenantes lors d'une réunion qui s'est tenue à Guérande en novembre 200950 mais leur apport reste à évaluer tant auprès des services que des bénéficiaires. · Cette évaluation serait d'autant plus intéressante qu'en l'absence d'autres communications du niveau central sur la loi Littoral, les messages véhiculés variablement par les représentants de la DHUP ou les intervenants prestataires, lors des réflexions parfois très ouvertes menées dans ces ateliers, ont pu être interprétés, principalement par certains élus, comme la nouvelle doctrine en vigueur par l'État, plus souple, concernant l'application des dispositions particulières au littoral. Les circulaires de 2006, qui restent pour les services « la référence » en matière de politique littorale, marquent donc une étape importante. Depuis cette date, aucune orientation spécifique n'a été donnée aux services alors même que les Grenelle de l'environnement et de la mer mettaient en évidence de nouveaux enjeux sur le littoral. Si certains services s'en accommodent, beaucoup regrettent cette absence d'animation lorsque, confrontés à des difficultés d'interprétation de la loi, leurs questions restent sans réponse. Les attentes exprimées vis-à-vis des services centraux sont de différentes natures : · de nouvelles instructions, plutôt interministérielles, pour tenir compte des évolutions législatives et jurisprudentielles. Certains sujets méritent en effet des précisions : c'est le cas par exemple pour la gestion des projets de production d'énergies renouvelables ou pour l'application de la loi dans les estuaires, voire le développement du logement social ; une animation, avec diffusion/partage des bonnes pratiques, et des réponses aux questions posées, ce qui suppose des interlocuteurs clairement identifiés au niveau central mais aussi régional. Un appui spécifique pour les rives des grands lacs et les étangs salés qui subissent une pression · 49 Cf. « Restitution des travaux de l'atelier 2006-2007 - Atelier littoral ­ enjeux et approches par façade »; MEEDDM, nov 2009. Cf. dossier « Atelier littoral ­ Les projets - Séminaire de restitution ­ 10 et 11 déc. 2009 ». Les expérimentations présentées sont le résultat pour partie d'appels à candidatures et ont notamment pour objectif d'accompagner l'État local, aux côtés des élus, dans la construction des stratégies territoriales et de leur mise en oeuvre. 50 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 37/137 très importante et sont l'objet de contentieux répétés (Lacs d'Annecy, Léman, Le Bourget, étang de Berre) est également souhaité par les services concernés. · une veille juridique active impliquant le suivi de la jurisprudence mais aussi, si nécessaire, des appels motivés, car même si, avec le temps, les tribunaux administratifs ont stabilisé certaines notions, leur interprétation reste évolutive au gré de leurs décisions. Pour y faire face, les services doivent chacun, avec une forte dispersion des énergies, se doter d'outils plus ou moins performants suivant les moyens disponibles au niveau départemental et/ou régional. Deux ans après la réforme de l'administration territoriale de l'État qui a profondément modifié l'organisation des services, il paraît à la mission indispensable de mobiliser à nouveau les services déconcentrés sur la politique spécifique d'aménagement du littoral. Cette mobilisation, pour être opérationnelle, devrait se réaliser à différents niveaux : - au niveau national, avec la nomination (sur la base d'une lettre de mission) d'un référent « aménagement/urbanisme littoral » au sein de la DGALN avec une double mission : favoriser la transversalité entre les directions de l'administration centrale concernées, participer à l'animation des réseaux métiers « aménagement/urbanisme » et « évaluation environnementale, en favorisant les relations nécessaires ; - au niveau régional (voire interrégional en fonction des spécificités de façades), avec la désignation d'un référent « aménagement/urbanisme littoral » en charge de : mettre en cohérence des politiques impactant le littoral, favoriser la transversalité des actions de la (ou des) DREAL, animer les DDTM et DDT concernées par les grands lacs sur cette thématique précise, en veillant à y associer les DIRM ; - et, bien sûr, au niveau départemental, en veillant : à la participation active des DDTM et DDT concernées (sièges, unités territoriales et délégations littoral-mer pour les DDTM) à l'animation collective organisée au niveau régional (ou interrégional), à la bonne coordination des différents services mais aussi des services du siège avec les délégations littoral-mer et les unités territoriales, à l'organisation structurée des relations avec les collectivités locales, notamment avec celles qui assurent l'instruction des autorisations d'urbanisme. Une telle mobilisation ne pourrait toutefois se concevoir sans que ne soient adressées au préalable aux préfets de région et de département de nouvelles instructions interministérielles portant sur la mise en oeuvre d'une politique d'aménagement littoral, définie dans sa dimension intégratrice du développement socio-économique et de la protection des ressources et milieux naturels. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 38/137 2.2.4. Une mobilisation des services sur la planification Les démarches de planification (et particulièrement les SCoT) sont identifiées par tous les services comme prioritaires. Dans les DDTM, cette stratégie n'est pas spécifique à la politique d'aménagement littoral qui est considérée comme une composante de l'ensemble des politiques devant être portées par les documents d'urbanisme. ­ Une priorité bien identifiée sur l'enjeu que représentent les documents d'urbanisme sur le littoral Concernant le littoral, la priorité accordée aux documents d'urbanisme est pour la mission d'autant plus pertinente que leur qualité est indispensable à l'application de la loi Littoral dans son esprit et dans sa globalité, ce qu'avaient souligné les circulaires précitées, mais aussi dans sa mise en oeuvre opérationnelle, au travers de l'instruction des actes individuels. En matière de planification, la situation du littoral peut apparaître favorable comme le montrent les données 201151 du service de l'observation et des statistiques du CGDD (SOeS) : plus de 96 % des communes littorales sont dotées d'un POS/PLU (approuvé, en cours d'élaboration ou de révision), 2 % disposent d'une carte communale et seules 1,4 % des communes n'ont aucun document d'urbanisme (parfois en raison de leur annulation) ; elles sont 32 % dans ce cas au niveau national . Il n'en est pas de même sur le plan qualitatif. Les services signalent une majorité de POS voire de PLU encore non compatibles avec l'ensemble des dispositions de la loi Littoral et regrettent une certaine inertie des élus lorsqu'il s'agit de faire évoluer les « POS dormeurs ». Cette insuffisante prise en compte de la loi dans les documents d'urbanisme, qui reste là encore très variable suivant les départements, avait déjà été soulignée dans le bilan de la loi Littoral réalisé fin 2007. Sans aucun doute, il s'agit encore aujourd'hui du principal facteur de difficulté dans le respect effectif des dispositions particulières au littoral. La sécurisation juridique des documents locaux d'urbanisme, voulue par la circulaire de mars 2006, reste donc un chantier plus que jamais d'actualité même si le sujet est particulièrement sensible. ­ Mais des leviers d'action pour les services de l'État dont l'opérationnalité interroge Force est de constater que les démarches, parfois volontaristes, entreprises par les services avec le soutien de préfets pour obtenir la mise en révision des documents d'urbanismes se heurtent souvent au refus d'élus, peu enclins à faire évoluer la situation. Les « POS dormeurs » présentent en effet l'avantage de ne pas ouvrir de débat sur l'aménagement communal et de ne pas remettre en cause « d'anciens droits à construire » tant qu'un contentieux n'annule pas les documents concernés ou les autorisations délivrées. Mais cela vaut aussi pour des PLU récents dont certains ne sont manifestement pas plus compatibles avec les dispositions particulières au littoral. 51 « Références » de mai 2011 sur l'environnement littoral et marin, DGALN. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 39/137 L'État, à travers le contrôle de légalité prévu par le code général des collectivités territoriales, dispose pourtant des moyens d'agir avec fermeté tant sur le champ des documents d'urbanisme que sur celui des autorisations. Mais, pour les services, les procédures contentieuses, longues et coûteuses, et dont l'issue reste toujours aléatoire, ne sont pas assorties de sanctions opérationnelles pour les collectivités locales et leurs groupements. Il s'agit là d'un point particulièrement sensible. Faut-il le rappeler, jusqu'en 2000, un POS ne pouvait pas être abrogé. En cas d'annulation par voie juridictionnelle, la collectivité était simplement tenue d'élaborer sans délai un nouveau POS (ancien art. L.123-4-1) mais, pour autant, la loi de décentralisation portant sur l'urbanisme, complétée par la loi de 1987 relative à la prévention des risques, n'avait pas laissé l'État démuni de moyens d'actions que la loi SRU a repris en modifiant à la marge les anciens articles. Les services se sont relativement peu exprimés sur ces moyens d'actions, sinon pour affirmer qu'ils en étaient démunis. Aussi la mission s'est-elle efforcée de mieux les cerner52. · De façon préventive, avant l'entrée en vigueur des PLU53 Cette mesure permet au préfet de notifier à un maire dans le délai d'un mois, par lettre motivée, les modifications qu'il estime nécessaire d'apporter au PLU ; celui-ci ne deviendra exécutoire qu'une fois les modifications intervenues 54. Mais, depuis la loi SRU, cette mesure ne concerne plus que les communes non couvertes par un SCoT, de moins en moins nombreuses sur le littoral (moins de 20 % en 2011 55. · De façon corrective, lorsque le PLU (ou POS) est déjà entré en vigueur56 Un préfet peut, lorsqu'il constate qu'un POS/PLU n'est pas compatible avec les dispositions particulières au littoral (ou de celles d'une DTA), en informer le maire et lui demander de modifier ou réviser son document d'urbanisme. Passé un délai de 6 mois, à défaut, le préfet peut engager la procédure à la place de la commune. Ces dispositions sont en fait peu utilisées, car, pour les quelques préfets qui se sont exprimés sur ce point, mieux vaut un PLU imparfait qu'une absence de PLU (situation fragilisant l'ensemble des actes d'urbanisme) ou un retour à l'ancien document d'urbanisme, encore moins compatible avec les lois et documents d'encadrement supérieur. 52 53 54 Cf. note du 3 juillet 2012 de la DHUP, établie à la demande de la mission, en annexe 5. Art. L.123-12 du code de l'urbanisme (ancien L.123-3-2 créé par la loi de décentralisation de 1983). Une disposition identique existe pour les SCoT non compatibles avec les dispositions particulières au littoral (art. L.122-19 du CU). Cf. Références - Environnement littoral et marin ­ Edition 2011 (CGDD/SOeS). Art. L.123-14 du code de l'urbanisme (ancien art. L.123-7-1 créé par la loi n°83-8 du 7 janvier 1983). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 40/137 55 56 Rapport n°007707-01 Pour la mission, une autre raison, bien que non évoquée par les services, peut être avancée. La plupart des dispositions particulières au littoral étant de nature interprétative, il ne paraît sans doute pas évident pour l'État de se substituer, avec les risques juridiques qui y sont associés, à l'autorité compétente pour les traduire de façon autoritaire dans un document d'urbanisme. Il semble plus aisé pour les préfets d'y avoir recours lorsqu'il s'agit de rendre compatible un document d'urbanisme avec un projet d'intérêt général. · Lors de l'instruction des actes individuels Les dispositions particulières au littoral (ou celles d'une DTA qui les a précisées) sont, rappelons-le, directement « applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, installations et travaux divers (...) l'exploitation de minerais »57. Ces actes vont donc bien au-delà des seuls permis de construire. Aussi est-ce essentiellement par le biais du contrôle de légalité 58 des actes individuels considérés comme non compatibles avec les dispositions particulières au littoral, bien que conformes aux documents d'urbanisme, que les préfets s'efforcent de convaincre les collectivités de mettre en révision leur document d'urbanisme pour le rendre compatible lui-même avec ces dispositions. Faire cesser ces situations était pourtant l'objectif principal de la circulaire de mars 2006 : « il est essentiel de mettre fin à des situations où le permis de construire est refusé, car contraire à la loi Littoral alors que le terrain est déclaré constructible par le POS et qu'un certificat d'urbanisme positif avait pu être délivré de bonne foi sur cette base. » Face au constat dressé par la mission d'audit, ce ne sont donc pas les objectifs de la circulaire de mars 2006 qui sont à revoir mais bien les conditions et modalités de mise en révision des documents d'urbanisme non compatibles avec les dispositions particulières au littoral, et plus précisément encore la volonté de les utiliser. Pour faire cesser cette situation dommageable qui n'a que trop duré, la mission préconise qu'une note spécifique soit adressée aux préfets pour préciser les conditions d'utilisation de ces différents leviers d'action et qu'en dernier recours, lorsque qu'une collectivité refuse de mettre en révision son POS/PLU illégal dans un délai qui reste à fixer, soit prévu par la loi le retour réglementaire au RNU, les documents d'urbanisme précédents n'étant pas plus que l'actuel compatibles avec la loi Littoral. Une telle mesure constituerait un message fort vis-à-vis des élus du littoral mais également auprès de l'ensemble des élus et devrait être de nature à faire évoluer 57 58 Article L.146-1 du code de l'urbanisme. Avec ses trois grandes phases possibles : recours gracieux, déféré préfectoral, suspension sur déféré. Ce référé particulier est prévu à l'article L.554-1 du code de justice administrative et a comme particularité de ne pas nécessiter la démonstration de l'urgence, par exception aux règles applicables en matière de référé. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 41/137 significativement la situation. Elle répondrait par ailleurs au besoin de sécuriser les documents d'urbanisme au regard des tiers. Une mesure similaire existe pour les SCoT : ceux-ci sont rendus caducs à défaut de délibération de l'établissement public compétent sur son maintien en vigueur ou sur sa révision partielle ou complète à l'issue, il est vrai, d'un bilan, 6 ans après son approbation (art. L.122-14 modifié). ­ Un rendez-vous à ne pas manquer : la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec les lois Grenelle S'il n'est pas évident pour un préfet de provoquer une procédure de révision pour la mise en compatibilité d'un document d'urbanisme par rapport à des dispositions spécifiques datant de 1986, il leur est plus aisé de profiter d'une procédure de révision suscitée par une législation récente pour veiller à cette mise en compatibilité. Les lois Grenelle ont introduit de nouvelles échéances pour les SCoT et les PLU qui devront être mis en compatibilité, sous les trois ans, respectivement avec les dispositions des lois Grenelle pour les premiers, avec celles des SCoT nouvellement élaborés ou révisés pour les seconds59. Il s'agit là de rendez-vous importants auxquels il importe que les services en charge de l'urbanisme se préparent. Le travail qu'ils ont à mener préalablement est d'autant plus nécessaire que, si la majorité des dispositions nouvelles confortent les dispositions particulières au littoral (gestion économe de l'espace, trame verte et bleue par exemple), certaines d'entre elles sont considérées comme contradictoires par les collectivités, opinions parfois partagées par les DDTM. Pour y répondre , les services expriment tous, au travers des entretiens menés dans le cadre du présent audit, la nécessité d'analyser les enjeux de la loi Littoral avec une « maille de traitement » qui dépasse les limites communales et intègre une échelle plus large et transversale permettant, notamment, d'intégrer le rétro-littoral au-delà de ces limites communales. La priorité que les services en charge de l'urbanisme accordent à l'accompagnement des SCoT ou des PLU intercommunaux est donc plus que pertinente lorsqu'il s'agit du fonctionnement de l'espace littoral conditionné par des échanges terre-mer, mais aussi littoral-intérieur des terres. Là encore, le contexte littoral est favorable, car l'intercommunalité s'y est davantage développée. Même si le poids de l'intercommunalité varie selon les départements littoraux et que les démarches engagées ne sont pas encore terminées pour la plupart d'entre elles, les données du SOeS montrent que plus de 80 % des communes littorales sont en 2011 incluses dans un périmètre de SCoT. Compte tenu cependant des modalités de gouvernance, généralement consensuelles, qui président à l'élaboration d'un SCoT (voire d'un PLU intercommunal) et de l'inertie à attendre des collectivités pour rendre compatibles leur PLU ou ScoT (pour peu que ce 59 Articles L.111-1-1 (mise en compatibilité avec les documents de rang supérieur comme les futurs plans de gestion des risques d'inondation, ou prise en compte des schémas régionaux de cohérence écologique et des plans climat-énergie territoriaux), L.122-1-12 (SCoT), L.123-1-9 (PLU) modifiés du code de l'urbanisme. De nombreuses autres dispositions du Grenelle doivent également être intégrées dans les documents d'urbanisme avec des échéances qui leur sont spécifiques. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 42/137 Rapport n°007707-01 dernier dispose d'un contenu suffisamment prescriptif), il n'y a pas à douter que l'encadrement réglementaire des PLU littoraux par les SCoT ne pourra suffire à leur mise en compatibilité, ce qui implique, de la part de l'État, le maintien d'un investissement sans faille dans le suivi des PLU littoraux. L'élaboration de SCoT suffisamment ambitieux dans ce domaine n'en sera que facilitée. ­ Une vigilance sur les priorités d'action fixées aux services L'action des services devra être soutenue et accompagnée lors du dialogue de gestion, car les DREAL et les DDTM auront à faire face à un chantier important en matière de planification. Les DDTM se sont généralement structurées autour d'un double niveau d'intervention, avec des variantes liées au contexte : · les services du siège portent la doctrine et la stratégie, harmonisent les interventions du niveau territorial (diffusion des connaissances et méthodes, porter à connaissance, association, avis, contrôle de légalité lorsque celui-ci n'a pas été transféré en préfecture) ; des unités territoriales ou référents travaillent au contact des collectivités territoriales avec pour mission le portage local des politiques publiques. · Les notes d'enjeux, qui accompagnent généralement les porter à connaissance, sont élaborées, suivant les cas, par le niveau territorial, les services du siège ou conjointement. Les DREAL y contribuent généralement dans le cadre de leurs missions départementales. Les services sont donc organisés pour accompagner les démarches de planification, même si, comme la mission l'a déjà souligné, l'absence de vision stratégique pour le littoral peut mettre en difficulté les agents en charge de défendre la position de l'État dans le cadre de l'association. La qualité des documents de référence disponibles constitue donc un enjeu pour les services de l'État dans l'exercice de leurs missions. 2.2.5. L'application du droit des sols (ADS), un chantier qui restera d'actualité ­ Des services investis dans la sécurisation de la chaîne d'intervention de l'État Toutes les DDTM et DDT auditées se sont organisées pour sécuriser, au mieux de leurs moyens, la filière ADS même si l'organisation qui en découle est variable : organisation fonctionnelle au niveau du siège avec d'éventuelles antennes géographiques ou cellules dédiées dans les délégations territoriales avec animation et support juridique du siège. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 43/137 Quelle que soit l'organisation retenue, partout des actions ont été entreprises pour sécuriser la chaîne d'intervention en ADS. Cet objectif a fondé plusieurs des réorganisations déjà réalisées avant la création des DDTM. Le suivi de l'application de la loi Littoral a bénéficié de cette organisation qui ne lui est pas propre, avec notamment l'élaboration par les services du siège, constatée presque partout, de fiches de doctrine spécifiques. Bon nombre des documents de référence disponibles dans les services ont d'ailleurs été élaborés pour servir de support aux instructeurs. ­ Maintenir l'appui aux services instructeurs, y compris des collectivités locales La filière ADS est l'une des rares filières à avoir maintenu un appui aux instructeurs par le biais de réunions de réseau et/ou de référents, en y associant de plus en plus souvent les instructeurs des collectivités territoriales, comme dans les Côtes-d'Armor ou dans le Var. Les constats montrent que, dans l'ensemble, les dispositions particulières au littoral sont généralement bien connues des services, ce qui n'exclut pas les difficultés d'interprétation de certaines notions (cf. partie 3). Lorsque les modalités de collaboration ne sont pas définies et que les outils d'échanges sont insuffisants, les divergences d'appréciation des projets peuvent exister, comme nous l'avons déjà évoqué, entre les équipes régionales en charge de l'évaluation environnementale et les services départementaux. Au-delà des problèmes de moyens, des interrogations sur les compétences disponibles pour l'instruction ADS ont ainsi été exprimées par quelques DREAL mais aussi quelques préfets, notamment autour des grands lacs. La prise en charge progressive de l'instruction ADS par les collectivités renforce encore, si besoin en était, la nécessité pour les services de l'État de disposer de documents de référence actualisés et partagés, notamment avec les collectivités territoriales. Quelques expériences sont intéressantes à signaler, comme la participation des services techniques des villes aux réunions de réseaux ADS déjà évoquée, mais ces initiatives locales ne sont pas à la hauteur des enjeux. La circulaire du 4 mai 2012 relative à l'organisation de l'application du droit des sols dans les services déconcentrés souligne à juste titre le fait que les services agiront à l'avenir de plus en plus comme animateurs et experts d'une filière qui relèvera majoritairement des collectivités locales. L'enjeu est donc important pour ce qui concerne l'application de la loi Littoral : le partage de documents de référence prendra une acuité particulière alors même que les instructions données aux services par la circulaire de mars 2006 ont généré, comme on le verra plus loin, une grande confusion à ce sujet. 2.2.6. Le contrôle de légalité : une réalité peu adaptée aux enjeux Comme la mission l'a mis en évidence lors de son analyse de la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions particulières au littoral, le contrôle de légalité constitue un maillon essentiel de la chaîne du processus de mise en oeuvre de Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 44/137 la loi Littoral de par son opposabilité aux actes individuels. Il était donc utile de l'évoquer à l'occasion des entretiens avec les Préfets et les différents services de l'État. ­ un transfert de mission et de moyens vers les préfectures sans retour d'information organisé Lors de la création des DDI, au 1er janvier 2010, le contrôle de légalité des actes d'urbanisme a été transféré systématiquement en préfecture. La situation est plus nuancée pour les documents d'urbanisme dont le contrôle de légalité, sous la forme du contrôle dit « intégré », a été maintenu en DDTM dans près d'une dizaine de départements littoraux. Quelle que soit l'organisation retenue, les DDTM interviennent toujours, soit en appui technique, soit, lorsque les services de l'État sont mis à disposition d'une commune, par le biais du signalement des avis divergents entre l'arrêté pris par le maire et la proposition initiale du service. Lorsque les communes instruisent elles-mêmes les autorisations relatives au droit du sol, et elles sont de plus en plus nombreuses sur le littoral, l'organisation du contrôle de légalité paraît difficile à réaliser. D'une façon générale, les relations entretenues entre les services sont bonnes, mais beaucoup de DDTM regrettent l'absence de retour de la part des services préfectoraux sur les dossiers soumis au contrôle de légalité. Conformément aux circulaires relatives au contrôle de légalité60, l'application de la loi Littoral constitue pour les préfets, d'une manière générale, un champ d'action prioritaire. Toutefois, cette priorité ne se concrétise pas toujours dans les faits et, dans de nombreux départements littoraux, le contrôle de légalité des actes d'urbanisme dans les zones soumises à risques a pris le pas sur l'application des dispositions particulières de la loi Littoral. Si les entretiens mettent en évidence des situations très variables d'un département à l'autre, l'expression générale va dans le sens d'une insuffisance de moyens et/ou de compétences sur la mission du contrôle de légalité en matière d'urbanisme alors que celle-ci demande beaucoup de technicité. A ce sujet, un département a d'ailleurs signalé l'accessibilité difficile aux formations organisées par le ministère pour les agents des préfectures. ­ Une mission majeure, sans grande lisibilité, qui reste à approfondir Il est en outre constaté dans le cadre de l'audit un nombre de lettres d'observations ou de déférés globalement faible eu égard au volume des actes, tant au niveau des documents d'urbanisme que des décisions individuelles. L'audit ne portant pas spécifiquement sur le contrôle de légalité, les données recueillies ne permettent pas d'approfondir l'analyse. De plus, les statistiques du ministère de l'Intérieur ne 60 Circulaires interministérielles du 1er septembre 2009 relative au contrôle de légalité en matière d'urbanisme et du 25 janvier 2012 relative à la définition des actes prioritaires en matière de contrôle de légalité. Voir aussi, pour mémoire, les circulaires relatives au contrôle de légalité qui ont suivi la décentralisation en matière d'urbanisme, celles des 26 mars et 25 octobre 1984. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 45/137 différencient pas ce qui relève des communes littorales du reste du département et, dans les communes littorales, ce qui relève des dispositions particulières au littoral. En l'absence de statistiques nationales disponibles sur le sujet, les interrogations demeurent : le faible nombre d'observations ou de déférés est-il la conséquence d'une application rigoureuse de la loi par les collectivités ou d'un contrôle de légalité insuffisant de la part de l'État ? En ce qui concerne l'application du contrôle de légalité des documents d'urbanisme, la réponse laisse peu de doute au regard du nombre de documents existants jugés par les services non compatibles avec les seules dispositions particulières au littoral. Si la circulaire du 4 mai 2012 relative à l'organisation de l'application du droit des sols dans les services déconcentrés de l'État inscrit toujours les dossiers littoraux parmi les dossiers à forts enjeux et rappelle dans son annexe 1 les priorités en matière de contrôle de légalité des actes d'urbanisme, on ne peut que s'interroger sur le l'avenir de cette mission dans le contexte rappelé d'évolution de l'intercommunalité à l'échéance 2013 ou de nouvelles perspectives de décentralisation. Les moyens et compétences disponibles dans les services ne sont pas actuellement à la hauteur des enjeux, alors même que les informations obtenues dans le cadre de l'audit soulignent de nombreuses difficultés dans l'organisation du contrôle de légalité des actes relatifs à l'application du droit du sol instruits par les communes. Dans ce contexte, la mission juge opportun d'envisager un travail spécifique sur les objectifs et l'organisation du contrôle de légalité dans les territoires littoraux, et tout particulièrement sur les documents d'urbanisme, source de risques juridiques importants pour les collectivités mais également pour les particuliers. Un groupe de travail interministériel Intérieur/Égalité des territoires pourrait être mis en place à cet effet61. Le bilan des rencontres dans les services permet donc de constater des modalités d'action certes variables, mais aussi l'investissement réel de chacun : les difficultés constatées dans l'application de la loi Littoral ne résultent pas d'une organisation défaillante ou de services laxistes. Par contre, deux motifs d'inquiétude sont à signaler et à gérer : · la quasi-disparition des réseaux métiers qui permettaient le partage d'expériences, la forte mobilité des agents entraînant une perte, quand ce n'est pas la disparition, des compétences nécessaires. · À cela, s'ajoute la difficulté récurrente et maintes fois soulignée des services à organiser des démarches de capitalisation des actions menées antérieurement, 61 Cette recommandation s'est trouvée confortée par les déclarations d'élus relatives au contrôle de légalité lors des récentes rencontres organisées par le GIP littoral aquitain le 21 juin dernier à Capbreton. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 46/137 Rapport n°007707-01 difficulté qui va de pair avec la perte de la « mémoire administrative » constatée. D'un tel constat découlent quelques pistes d'action pour y remédier qu'auraient à gérer les référents préconisés ci-dessus. 2.3. Les documents de référence et leur partage avec les collectivités C'est au niveau des documents de travail disponibles et des modalités de leur partage avec les collectivités locales que les plus grandes disparités entre services apparaissent. Or, la qualité des analyses territoriales est fondamentale, notamment parce que c'est sur la base d'un bon diagnostic, si possible partagé avec les collectivités, que les services pourront construire une stratégie locale, étayer et défendre leurs positions concernant la traduction spatiale des différents principes de la loi Littoral. On constate en effet que les divergences d'appréciation maintes fois soulignées prennent souvent leur source dans une absence de diagnostic partagé du contexte local et de ses enjeux ; à cela s'ajoute le fait que certaines notions utilisées comme critères d'appréciation, telles que la notion « d'ambiance marine », sont souvent sujet d'âpres discussions, même entre services de l'État. Par ailleurs, il n'y a pas dans les services de systèmes d'observation dédiés au littoral, ni d'indicateurs de suivi spécifiques. Les données existantes sont intégrées dans les bases de données, notamment géomatiques, permettant d'enrichir les systèmes d'information géographique (SIG) dont dispose chaque service et sont largement exploitées dans les notes d'enjeux et les « porter à connaissance » produits. Dans l'ensemble, les services n'expriment pas de besoins particuliers sur ce plan et jugent positivement les complémentarités entre le niveau régional et le niveau départemental ainsi que les relations de travail établies. 2.3.1. Les démarches engagées en réponse à la circulaire de 199162 Les termes de la circulaire interministérielle du 24 octobre 1991 sont intéressants à rappeler pour éclairer l'analyse des évolutions intervenues après la circulaire de mars 2006. La circulaire de 1991, co-signée par cinq ministres dont celui de l'Intérieur, se positionnait sur le champ de la collaboration entre l'État et les collectivités locales. Tout en rappelant que les règles générales du code de l'urbanisme « mentionnent l'appartenance du littoral au patrimoine commun de la nation et la nécessité de la gestion économe et équilibrée de l'espace », cette circulaire met l'accent sur le fait que l'application de ces règles implique l'harmonisation des décisions de l'État et des collectivités locales qui doit être conduite sous l'autorité des préfets. 62 Le recueil de l'ensemble des circulaires citées dans ce rapport du CGEDD est disponible au CGEDD. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 47/137 L'association des services à l'élaboration ou la révision des documents d'urbanisme élaborés par les collectivités présente donc une importance particulière, la position de l'État devant être solidement étayée grâce aux études préalables réalisées sur « des aires territoriales adaptées aux enjeux (...) avec une préoccupation de transparence vis-à-vis des partenaires locaux et des acteurs de l'aménagement » auxquels les résultats devaient être communiqués ». La mobilisation des services était demandée, tout comme une grande fermeté pour faire prendre en compte la position de l'État (solidement étayée) à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme. De même, il leur était demandé de saisir les collectivités lorsque leurs documents d'urbanisme n'étaient pas jugés compatibles et « de susciter voire imposer les procédures de révision nécessaires ». ­ Les documents départementaux d'application de la loi Littoral (DDALL), base du « porter à connaissance » de l'État auprès des collectivités Dans les régions ou départements soumis à fortes pressions, les directions départementales de l'équipement (DDE) ont engagé très tôt le travail de spatialisation des dispositions de la loi Littoral nécessaire à l'élaboration du « porter à connaissance » et des avis de l'État dans le cadre de l'élaboration ou la révision des documents d'urbanisme (SDAU, POS). Mais ce n'est qu'en juillet 1992, à la suite de la publication de la circulaire d'octobre 1991, que la direction de l'architecture et de l'urbanisme (DAU) adresse une note relative aux documents départementaux d'application de la loi Littoral (DDALL), en précisant l'objet, le champ, l'élaboration, la portée, la forme et le contenu de ces documents (espaces remarquables et caractéristiques, coupures d'urbanisation, espaces proches du rivage et zones préférentielles d'aménagement). En septembre 1993, elle publie un document « Proposition pour des applications spatiales de la loi Littoral »63, beaucoup plus ambitieux que la note précédente, car il préconise la prise en compte des dynamiques locales. La grande majorité des DDE littorales et des DDE concernées par les grands lacs se sont ainsi engagées dans l'élaboration de ces outils d'analyse et les ont généralement communiqués aux communes. Tous les DDALL réalisés à cette époque identifiaient à minima les espaces remarquables (dont l'inventaire avait été réalisé sous la conduite des DIREN), les coupures d'urbanisation et les espaces boisés significatifs. Par contre, certaines notions comme celles des espaces proches du rivage ou les espaces urbanisés y sont peu traitées. Cette diversité de contenu s'est aussi trouvée renforcée par la vivacité, plus ou moins forte, des dynamiques locales. En effet, les DDALL se sont enrichis des études ou démarches engagées parallèlement (missions interministérielles d'aménagement de la côte Aquitaine ou du Languedoc, DTA, SMVM...). Pour pallier cette diversité de contenu, la DAU a diffusé en 1999 une méthodologie mise au point dans le cadre de l'élaboration du DDALL de la Charente-Maritime et 63 Etude réalisée par le bureau d'études SCE. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 48/137 Rapport n°007707-01 quelques DRE se sont investies dans l'harmonisation des pratiques départementales (Aquitaine, Bretagne...). Malgré toutes ces initiatives, le constat général dressé par les auditeurs montre que le contenu des DDALL est resté très divers d'un département à un autre. En outre, les échelles retenues (1/25 000 ou 1/50 000) ont un impact fort sur la lisibilité des documents produits. Si la prise en compte de leur contenu dans les schémas directeurs, puis à partir de 2000 dans les SCoT, est aisée, cette prise en compte exige pour les PLU un travail de délimitation, au cas par cas, sur le terrain : il n'y a pas de traduction automatique à la parcelle. ­ Aujourd'hui, des documents toujours incomplets, non actualisés, parfois même délaissés, mais qui restent indispensables pour asseoir la position de l'État Quel que soit leur contenu, ces documents ont tous servi, et continuent de servir pour nombre d'entre eux et ce, malgré la circulaire de mars 2006, de support aux « porter à connaissance » (PAC) de l'État lors de l'élaboration des documents d'urbanisme ainsi qu'à l'instruction ADS quand celle-ci est encore assurée par les services de l'État. L'examen des DDALL existants amène toutefois deux interrogations sur : · les conditions de leur mise à jour, · l'évolution de leur contenu. Les doctrines locales sur la base desquelles ces documents ont été élaborés méritent d'être revisitées au regard de la jurisprudence la plus récente mais aussi des études et inventaires réalisés depuis leur élaboration. De plus, dans de nombreux départements, les documents cartographiques sont désormais réalisés à l'échelle de la commune (tendance favorisée par la numérisation des PLU et le développement des outils géomatiques) alors que les services de l'État ont plus que jamais besoin de disposer de documents d'analyse à une plus large échelle, a minima celle des SCoT littoraux. Aussi l'instruction donnée aux services en 1991 « de bâtir une position de l'Etat sur les conditions du respect des principes fixés par la loi Littoral » paraît-elle toujours d'actualité à la mission dès lors que les documents d'urbanisme ne sont pas encore compatibles avec les dispositions de la loi. Elle devrait toutefois perdre une part de sa pertinence lorsque l'ensemble du littoral sera couvert de schémas de cohérence territoriale (SCoT) et de PLU estimés compatibles, régulièrement révisables et donc évalués, mais une part seulement, car l'État, garant de l'application des lois, devra conserver une capacité d'appréciation des situations qui lui est propre et la possibilité de faire évoluer, si nécessaire, sa doctrine administrative. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 49/137 2.3.2. Les circulaires de 2006 : une nouvelle impulsion mais aussi une rupture64 Les circulaires de mars et de juillet 2006 ont remobilisé les services départementaux et stimulé ceux qui, jusque-là, avaient très peu investi le champ de l'application de la loi Littoral du fait d'une faible pression sur leurs territoires littoraux. Pour l'ensemble des services, celle du 14 mars a constitué une véritable rupture. Si les finalités (gestion économe de l'espace, préservation des valeurs environnementales et patrimoniales du littoral, équilibre entre développement et préservation...) et le cadre de l'action (c'est à l'échelle des grands espaces « qu'il faut mener ces politiques cohérentes et volontaristes » qui supposent « une vision à long terme, stratégique et ambitieuse relayée par des volontés politiques locales fortes ») restent identiques, la mobilisation des services est avant tout ciblée sur la sécurisation juridique des documents d'urbanisme (SCoT, POS/PLU). Aucune instruction n'est toutefois donnée pour l'élaboration de cette vision stratégique et son partage avec les collectivités. Le partenariat avec les collectivités n'est plus la règle affichée, en dehors des sites expérimentaux retenus dans le cadre de l'atelier national littoral avec les limites que la mission a précédemment analysées. Il est principalement attendu des services qu'ils précisent l'application des dispositions de la loi Littoral à partir de la doctrine nationale figurant en annexe, qu'ils vérifient la compatibilité des documents d'urbanisme avec ces nouvelles interprétations et qu'ils conseillent aux communes de prendre les mesures nécessaires et, au besoin, qu'ils fassent procéder à la révision des documents qui ne seraient pas compatibles avec la loi, pour éviter au final « les situations conflictuelles » souvent constatées lors de la mise en oeuvre de projets. ­ Une analyse juridique a posteriori des POS/PLU qui garde toute sa pertinence Pour répondre à cette exigence, la plupart des services se sont engagés dans l'analyse des risques juridiques des POS/PLU, avec cartographie des parcelles concernées. Plusieurs démarches intéressantes ont été entreprises dans ce contexte. Sans prétendre à l'exhaustivité, peuvent être signalées : · au niveau régional, celles de l'Aquitaine et de la Bretagne qui ont respectivement élaboré un guide régional pour l'application de la loi Littoral et une série de référentiels validée en CAR ; au niveau départemental, celle du Finistère qui, parallèlement à la cartographie en cours des risques juridiques des POS/PLU, a élaboré en 2008 un atlas départemental 65 validé en groupe de travail inter-services ; · 64 65 Le recueil de l'ensemble des circulaires citées dans ce rapport du CGEDD est disponible au CGEDD. Atlas qui sert de base à la contribution de l'État aux diagnostics territoriaux. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 50/137 Rapport n°007707-01 celle du Pas-de-Calais qui a travaillé l'analyse des risques juridiques aux deux échelles, POS/PLU et SCoT ; les documents produits en 2011 ont également été validés dans le cadre d'un pôle inter-services. L'intérêt et l'utilité des documents d'analyse des risques juridiques produits dans cette lignée sont évidents, ne serait-ce que pour assurer un contrôle de légalité étayé des actes individuels d'occupation du sol. ­ Mais un exercice de sécurisation des documents d'urbanisme sans procédure, ni surtout méthodologie La mission ne peut que souligner les ambiguïtés générées par la circulaire de mars 2006. Si le rappel à l'ordre sur le fait que les DDALL, documents produits par les services pour expliciter le point de vue de l'État sur l'application locale de la loi Littoral, ne pouvaient en aucun cas être « notifiés » - au sens juridique du terme - aux communes (y compris dans le cadre des PAC), ce rappel a souvent été assimilé à l'impossibilité d'utiliser en toute transparence les informations cartographiques produites dans le cadre de l'association à l'élaboration des documents d'urbanisme et donc de les communiquer aux collectivités. Pour la mission, il ne s'agit nullement de « notifier » aux collectivités les interprétations de l'État mais de leur communiquer des études conformément à l'article L.121-2 du Code de l'urbanisme précisant : « le préfet fournit notamment les études techniques dont dispose l'État en matière de prévention des risques et de protection de l'Environnement ». Cette position s'est d'ailleurs trouvée renforcée par le souci, exprimé par certains services dans le cadre de l'audit, de ne pas contribuer au développement des contentieux, les associations mais aussi les particuliers pouvant trouver dans ces documents de travail matière à recours. La plupart des préfets les ont dès lors considérés comme des documents de travail internes à l'administration et n'en communiquent des extraits qu'aux seuls maires des communes concernées.66 La nature des différents documents produits par les services doit donc être précisée, tout comme la posture attendue des services après trente ans de décentralisation dans le domaine de l'urbanisme. Cette situation va en effet à l'encontre des objectifs de transparence et d'évaluation partagée qui figurent parmi les fondements du développement durable, mais aussi, et plus concrètement en ce qui concerne l'association de l'État à l'élaboration des documents d'urbanisme, à la réglementation fixée par le code de l'urbanisme 67 : l'État est tenu de transmettre aux collectivités toutes les informations dont il dispose et qui sont nécessaires à l'exercice de leurs compétences en matière d'urbanisme. 66 À noter toutefois que, suite au recours d'une association, la CADA a demandé que la cartographie lui soit communiquée. Cf. art.L.121-2 du CU. 67 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 51/137 ­ Le besoin confirmé d'outils appropriés pour l'exercice des missions de l'État L'audit n'avait pas pour objet de réaliser une analyse comparée de la qualité des documents de référence élaborés et/ou utilisés par les services mais, dans la mesure où ceux-ci constituent la clef de voûte de la qualité des « porter à connaissance » de l'État concernant l'application des dispositions particulières au littoral, mais aussi de leur appréciation dans le cadre du contrôle de légalité, la mission a prêté une attention particulière à ces documents. La mission a ainsi été frappée par l'absence de continuité ou d'articulation dans les départements et régions avec les documents plus anciens (souvent antérieurs à 2000) élaborés pour définir les modalités d'application de la loi Littoral de 1986. Les éléments recueillis permettent de mettre en évidence deux sources principales de difficultés : · d'une part, la grande diversité des documents utilisés couplée pour certains d'entre eux à des insuffisances (données non mises à jour, absence de données sur certains thèmes...) ; d'autre part, les ambiguïtés constatées depuis la circulaire de mars 2006 dans les conditions d'élaboration, de partage et de communicabilité aux collectivités des documents de spatialisation élaborés par les services. · La mission considère qu'il y a matière à réflexion sur les objectifs de ces documents de référence, et surtout sur les moyens et méthodes pour y répondre. En effet, s'il est évident, depuis la décentralisation, que la définition des projets de territoires est de la compétence des collectivités locales et de leurs groupements, notamment dans le cadre des démarches SCoT et PLU, l'État reste le garant du respect de la loi, de la loi Littoral en particulier, des solidarités territoriales en général. Pour assurer ces missions, ses services doivent être en capacité d'apprécier les évolutions territoriales et d'étayer le point de vue de l'État. Dans un contexte en pleine mutation, une telle réflexion constitue un des quatre chantiers prioritaires développés ci-après. 2.3.3. L'enjeu d'une veille juridique organisée au bon niveau Comme nous l'avons déjà souligné, la loi Littoral est une loi dont les dispositions doivent être interprétées et dont les modalités d'application sont sanctionnées au final par les tribunaux administratifs. Si plusieurs jugements ont permis la consolidation de l'interprétation de certaine notions, d'autres sont venus contredire l'appréciation portée par les services, appréciation pourtant fondée sur une analyse de la jurisprudence la plus récente. La jurisprudence reste évolutive. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 52/137 Une étude plus approfondie des différents contentieux permettrait sans doute de comprendre les raisons pour lesquelles la position des services n'a pas été suivie par les tribunaux. En particulier, la fragilité de certains mémoires rédigés par l'administration 68 peut être source d'interrogations sérieuses, ce qui amène la mission à considérer que le suivi et l'analyse de l'impact des jurisprudences successives constituent un véritable enjeu pour la bonne application des dispositions particulières au littoral, non seulement pour la pertinence des conseils aux collectivités mais également pour celle du contrôle de légalité des actes d'urbanisme. Comme rappelé à maintes reprises dans ce rapport, la dimension interprétative et appréciative des dispositions particulières au littoral ne peut être ignorée. Dès lors, la valeur de la jurisprudence, comparable à celle en vigueur dans le droit communautaire, devient une référence obligée. Dans cet esprit, il apparaît stratégique pour l'État de ne pas « subir » le contentieux mais au contraire d'en faire un instrument clé de mise en oeuvre de la politique. Ceci implique, au rebours des pratiques administratives courantes, de développer une gestion stratégique des situations potentiellement ou effectivement contentieuses, en mobilisant les compétences et moyens nécessaires dès lors que ces situations sont susceptibles d'avoir un effet jurisprudentiel avéré et capitalisable sur l'ensemble du territoire littoral. Les compétences à mobiliser ne relèvent pas strictement du droit de l'urbanisme, elles doivent être aussi porteuses de toutes les composantes techniques de l'aménagement et de l'évaluation. Elles doivent pouvoir développer des argumentaires juridiques de toutes origines thématiques (biodiversité, risques, agriculture...) qui, combinés, permettent d'étayer une position intégrée. De nombreuses attentes se sont exprimées à ce sujet lors des entretiens même si la plupart des services s'efforcent d'organiser au niveau départemental et/ou régional un suivi actif des jugements rendus sur l'application de la loi Littoral. Plusieurs démarches intéressantes ont été constatées localement : un classeur jurisprudentiel en Gironde, une analyse de la jurisprudence bretonne dans le Morbihan, des suivis de la jurisprudence dans la plupart des services urbanisme ou au niveau des pôles juridiques régionaux quand il existe. Ces attentes d'un appui juridique structuré avaient déjà été formulées d'une façon générale mais avec force par les services déconcentrés lors de la mission menée par le CGEDD sur l'évaluation du fonctionnement de l'administration centrale69. De même, l'absence de réponse aux questions posées à l'administration centrale est très mal ressentie par les services qui regrettent de ne plus pouvoir identifier de correspondant au niveau national, car, quel que soit le sérieux des services déconcentrés en la matière, force est de constater que les compétences juridiques ne sont pas équitablement réparties sur le territoire et que celles-ci sont particulièrement mobiles. 68 69 Bien que la grande majorité des mémoires soient rédigés par les collectivités locales en défense. Rapport n°007986-00 à 09 de septembre 2011. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 53/137 La mission estime que l'administration centrale doit jouer un rôle plus important dans l'accompagnement des services et l'organisation d'une veille juridique capable de leur apporter soutien et, si besoin, professionnalisme dans le contexte actuel de réduction de moyens, ce qui renforce la nécessité de fonctionner en réseau métier et de mettre en place une véritable gestion stratégique du contentieux en matière d'urbanisme. 2.4. En conclusion de ce chapitre, quatre chantiers jugés prioritaires Au vu des éléments recueillis, la mission constate que l'hétérogénéité des pratiques dans les services reste relative et doit être considérée comme inhérente à la loi Littoral, loi d'interprétation qui met en avant l'importance des spécificités locales dans un contexte de développement durable. Pour autant, la relativité des appréciations portées sur les dispositions particulières au littoral, qu'il conviendrait d'assumer, ne doit pas masquer l'importance des difficultés qui restent à surmonter pour que la loi soit portée au bon niveau d'analyse et correctement mise en oeuvre. Pour y parvenir, la mission identifie quatre chantiers qu'elle juge prioritaires : ­ clarifier la nature et le contenu des documents de référence dont les services devraient disposer, référentiels parmi lesquels figurent les outils juridiques mentionnés plus haut ; lever notamment les ambiguïtés générées par la circulaire de mars 2006 quant à la communicabilité de ces documents ; poursuivre la sécurisation juridique des documents d'urbanisme ; si les objectifs de la circulaire de mars 2006 restent d'actualité, les leviers pour les atteindre sont à repenser y compris dans le cadre du dialogue de gestion ; relancer l'animation du réseau métiers « aménagement/urbanisme » en liaison avec celui de l'évaluation environnementale, indispensable pour assurer une bonne application de la loi Littoral, loi interprétative nécessitant un appui juridique efficace, des réponses aux questions et le partage des « bons outils ». définir un dispositif spécifique du suivi de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers des espaces littoraux (bande littorale, espaces proches du rivage, communes littorales) dans le cadre du dispositif national de suivi de la consommation de ces espaces, en coordination avec l'observatoire du littoral (SOeS). ­ ­ ­ Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 54/137 3. Les difficultés d'appréciation dans l'application des dispositions particulières restent nombreuses Faire une synthèse nationale des positions soutenues par les services déconcentrés dans l'ensemble des départements de métropole n'est pas chose aisée, même si des lignes de force peuvent être dégagées. Comme nous venons de l'analyser, les positions adoptées par les services de l'État diffèrent très logiquement d'un département, d'une région à l'autre, en fonction des enjeux locaux. Certaines dispositions soulèvent toutefois moins de difficultés que d'autres dans leur application. ­ les dispositions relatives à la protection des espaces littoraux posent relativement moins de problème d'interprétation et même d'application mais leur respect dans le temps interpelle les services Globalement, les espaces naturels (non construits) de la bande littorale, les espaces remarquables et caractéristiques, les espaces boisés significatifs, font l'objet de la part des services d'un porter à connaissance (PAC) argumenté auprès des collectivités. Les services de l'État ont accès à suffisamment d'éléments de connaissance scientifique et d'arguments juridiques pour motiver et justifier les propositions de l'État. Ce PAC repose en effet, dans les espaces littoraux, sur une politique déjà ancienne et particulièrement active d'inventaires scientifiques et de protections réglementaires du patrimoine naturel et paysager. Les circulaires des 10 octobre 1989 et 15 septembre 2005 relatives aux espaces remarquables ont donné aux services des instructions leur permettant une application rigoureuse de cette disposition. La politique de protection des espaces naturels littoraux a de plus été confortée par les directives européennes, notamment les directives « habitat-faune-flore » et « oiseaux »70, mais également par la politique de prévention des risques naturels, comme l'a souligné la circulaire du 20 juillet 2006. Il y a en ces domaines de protection des milieux et de prévention des risques cohérence des enjeux et convergence des objectifs poursuivis. Il ressort ainsi de l'audit que les dispositions visant à protéger les espaces littoraux sensibles posent moins de difficultés d'interprétation que celles visant à maîtriser l'urbanisation littorale. Elles sont de ce fait mieux portées par les services auprès des collectivités, qui les ont, de leur côté, admises et intégrées dans leurs discours. Elles sont donc, en général, mieux traduites dans les documents d'urbanisme et davantage respectées dans l'instruction des actes individuels. Toutefois, lors des entretiens avec les services, la situation n'apparaît pas aussi positive et présente des fragilités que la mission s'est efforcée de mettre en exergue dans la restitition faite, ci-après, par disposition. Les inventaires ne sont pas toujours 70 Directives européennes 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages et 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages (ancienne directive 79/409/CEE modifiée à plusieurs reprises et recodifiée). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 55/137 actualisés et surtout la pérennité de ces espaces dans le temps est loin d'être assurée (effet de grignotages successifs, gestion non maîtrisée). ­ les dispositions visant à maîtriser l'urbanisation du littoral continuent de soulever de nombreuses difficultés d'interprétation et plus encore d'application Malgré les circulaires, les plaquettes et guides les concernant, malgré la jurisprudence abondante dont elles ont fait et continuent de faire l'objet, les dispositions particulières visant à encadrer l'urbanisation sur le littoral posent encore aux services, ainsi qu'aux élus, de nombreuses difficultés d'interprétation et donc d'application. Pour la mission, la première difficulté reste la qualification des espaces urbanisés, tant dans la bande littorale que dans le reste des communes littorales. En outre, l'identification d'une typologie urbaine hiérarchisée reste un défi dans la France des 36 000 communes71 et il n'est pas évident que le PLU intercommunal soit une réponse appropriée pour définir un projet de territoire fondé notamment sur une analyse urbaine pertinente au niveau d'un bassin de vie. Définir dans un SCoT une armature urbaine, un schéma de développement lisible et maîtrisé n'est pas encore un exercice couramment pratiqué, surtout s'il se veut prescriptif. C'est pourtant à l'échelle d'un « bassin de vie » côtier que la notion d'aménagement équilibré de l'espace littoral peut prendre tout son sens, que peut se concevoir un aménagement en profondeur permettant de protéger la bande littorale, d'identifier les espaces proches du rivage et de définir une capacité d'accueil prenant en compte la préservation des écosystèmes littoraux, tout en organisant sur l'ensemble du territoire son développement urbain et économique. C'est à cette échelle que peuvent se définir et se traduire les stratégies de développement des activités, qu'elles soient maritimes, agricoles, forestières, touristiques ou encore industrielles, ainsi que les politiques de logement et de déplacement qui les accompagnent. Il revient aux SCoT littoraux de fixer ces grandes orientations et les objectifs à décliner dans les PLU. La seconde difficulté concerne la délimitation des « espaces proches du rivage », délimitation à laquelle est liée la notion d'extension limitée de l'urbanisation. ­ La nécessité pour les services de l'État de maîtriser les grands principes d'aménagement à appliquer sur les territoires S'il n'est pas de la compétence des services de l'État de se substituer aux collectivités locales et à leurs groupements pour définir leur projet de territoire, ils ne doivent pas pour autant se départir de leur capacité d'analyse pour garantir le strict respect des dispositions de la loi Littoral. A chacune des étapes de la procédure d'élaboration ou de révision des documents d'urbanisme (porter à connaissance, association et avis), les services de l'État ont à définir et à faire valoir les conditions locales de l'application des dispositions 71 36 680 communes exactement, dont 36 568 en métropole (2011). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 56/137 Rapport n°007707-01 particulières fixées par la loi Littoral, à s'assurer de leur prise en compte effective et, s'il y a lieu, de l'imposer, soit en demandant des modifications du projet approuvé, soit en le déférant au juge administratif. Pour cela, comme nous venons de l'analyser dans la précédente partie de ce rapport, les services doivent non seulement maîtriser les principes et notions liés à chaque disposition particulière mais également les enjeux du territoire où elles doivent s'appliquer. Ils doivent donc disposer des éléments d'appréciation et des argumentaires qui leur permettent de bâtir la position de l'État. C'est donc dans ce cadre très précis de la décentralisation de l'urbanisme que la mission s'est efforcée, à partir des éléments recueillis auprès des services déconcentrés et pour chacune des dispositions particulières au littoral de : · présenter le constat général de son application tel que les services le dressent72, lister les principales difficultés rencontrées par les services pour veiller à cette application, proposer son propre diagnostic, formuler une série de recommandations dont seules les plus importantes seront reprises dans la dernière partie de ce rapport. · · · Mais avant d'analyser les modalités d'application de chaque disposition particulière au littoral, la mission a jugé nécessaire de s'arrêter sur le champ d'application géographique fixé par la loi Littoral. Ce champ d'application n'est pas en effet sans poser, en tant que tel, des difficultés aux services. Seront ensuite successivement abordés : · les sous-ensembles du champ d'application géographique : ­ la bande littorale des 100 mètres, ­ la délimitation des espaces proches du rivage. les notions et principes liés à l'urbanisation littorale : ­ la qualification des espaces urbanisés en agglomérations, villages et hameaux, ­ l'extension en continuité et l'extension limitée dans les espaces proches du rivage, ­ la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser. les mesures relatives aux activités spécifiques : ­ le traitement des terrains de camping dans les documents d'urbanisme, ­ les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières, · · 72 Il ne s'agit pas dans le cadre de cette mission de réaliser un bilan de l'application des dispositions particulières au littoral, ni d'une inspection de services, mais bien d'un audit de leurs modalités d'application par les services. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 57/137 ­ · les installations énergétiques. les dispositions relatives aux espaces à préserver de l'urbanisation : ­ les coupures d'urbanisation, ­ les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral, ­ les espaces boisés significatifs. La disposition relative aux plans de plage n'a pas été abordée avec les services. Par contre, les quelques éléments recueillis sur la gestion du domaine public maritime (DPM) ont été repris. Il est à noter que certaines régions ou départements ont élaboré des documents ou fiches d'analyse pour chacun de ces items. Les travaux les plus aboutis concernent la région Aquitaine (guide d'application) et la Bretagne où un atelier littoral régional et interdépartemental a élaboré un fascicule explicitant la doctrine administrative pour chaque disposition particulière (référentiel)73. 3.1. Le champ d'application géographique des dispositions particulières au littoral Article L.146-1 (code de l'urbanisme) - Les dispositions du présent chapitre déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : - dans les communes littorales définies à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (désormais intégré au code de l'environnement), - dans les communes qui participent aux équilibres économiques et écologiques littoraux, lorsqu'elles en font la demande auprès du représentant de l'État dans le département. La liste de ces communes est fixée par décret en Conseil d'État, après avis du conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres. Article L.321-2 (code de l'environnement) ­ Sont considérées comme communes littorales au sens de la présente loi, les communes de métropole et d'outre-mer : - riveraines des mers et océans, des étangs salés, des plans d'eau intérieurs d'une superficie supérieure à 1 000 ha, - riveraines des estuaires et deltas lorsqu'elles sont situées en aval de la limite de salure des eaux et participent aux équilibres économiques et écologiques littoraux. La liste de ces communes est fixée par décret en Conseil d'État, par consultation des conseils municipaux intéressés. Il existe en fait trois catégories de communes soumises à la loi Littoral : les communes « riveraines », les communes dites « estuariennes » et les communes « volontaires ». Les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme relèvent ainsi d'un champ d'application élargi par rapport aux autres titres et chapitres de la loi Littoral. 73 Cf. note de présentation de la démarche suivie par cette région en annexe 4. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 58/137 Rapport n°007707-01 La liste des deux dernières catégories de communes doit être fixée par décret du Conseil d'État. Le décret relatif aux communes riveraines des estuaires et deltas est paru tardivement, en mars 200474. Il inclut -sans toutefois que soit fait référence au code de l'urbanisme- quelques communes relevant de la disposition propre à ce code et donc d'une démarche volontaire de la part de ces communes. Le décret ne permet pas de les identifier75. La disposition législative qui vise à définir des périmètres d'application cohérents sur la base d'une notion fonctionnelle, « la participation aux équilibres économiques et écologiques littoraux », en faisant appel au volontariat des communes concernées, s'est révélée pour le moins ambitieuse, sinon utopique. L'intervention possible du Conservatoire du littoral n'a sans doute pas été suffisante pour contrebalancer l'application des dispositions particulières au littoral, perçues par les élus comme une contrainte dans l'exercice de leur compétence en matière d'urbanisme. a) Le constat des services sur le champ d'application géographique Il existe une certaine incompréhension de la part des élus sur l'application des dispositions particulières au littoral dans la partie rétro-littorale des communes littorales de grande superficie et pénétrant profondément à l'intérieur des terres, alors que des communes limitrophes situées à la même distance, mais non littorales, ne sont pas concernées par ces dispositions. Sur les rives des dix grands lacs situés en zone de montagne, l'application conjointe des lois Montagne et Littoral pose également aux élus un problème de compréhension quant à l'intérêt de cette superposition. Ils sont à l'origine de la disposition de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux 76 qui devait permettre d'appliquer de façon exclusive, soit l'une, soit l'autre loi, selon des modalités fixées par un décret pris en Conseil d'État. La loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement a abrogé cette disposition (art. 21)77. La principale difficulté pour les élus porte sur l'interdiction de développer les hameaux dans les parties éloignées des lacs aux caractéristiques montagnardes, notammment les hameaux d'altitude. b) Les difficultés rencontrées par les services Si la parution du décret de 2004 fixant la liste des communes estuariennes a permis de compléter le champ d'application de la loi Littoral, les collectivités continuent d'interpeller les services de l'État sur le manque de cohérence des limites communales pour appliquer les dispositions particulières au littoral. Les services manquent d'arguments pour leur répondre. 74 75 Décret n°2004-311 du 29 mars 2004, art. 1er. La MIGT 5 en a toutefois identifié quelque-unes dans son périmètre : Vauvert dans le Gard et Vescovato en Corse. Article 187 complétant l'article L.145-1 du code de l'urbanisme (2è alinéa). Cf. annexe 6 : le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares 76 77 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 59/137 c) Le diagnostic de la mission sur le champ d'application géographique Le champ d'application limité aux seules communes riveraines ne facilite pas en effet la réflexion en faveur d'un aménagement équilibré orienté vers l'arrière-littoral, mais il est de la compétence partagée de l'État et des collectivités d'y remédier. Les possibilités ouvertes par la loi d'élargir le champ d'application de ces dispositions aux communes participant aux équilibres économiques et écologiques littoraux ne semblent pas être connues des services et donc relayées auprès des collectivités. Il est vrai que donner sa cohérence et sa pertinence au champ d'application d'une loi connue par ses seules contraintes urbanistiques sur la base du volontariat des communes n'a guère de chance d'être entendu et moins encore de se concrétiser. Il en est de même de la possibilité qu'offrait l'article L.146-1 du code de l'urbanisme en permettant, par le biais de prescriptions particulières prévues à l'article L.111-1-1 du même code, de préciser les conditions d'application des dispositions particulières au littoral. Ces prescriptions, qui devaient être établies par décret pris en Conseil d'État, auraient pu traiter ce problème et élargir le périmètre d'application des dispositions particulières après les consultations prévues. Aucune des quatre directives territoriales d'aménagement (DTA) ayant une façade littorale ne s'y est hasardée. Les lois Grenelle ayant remplacé les DTA par des DTADD non opposables aux documents d'urbanisme et aux actes individuels, excepté par le recours exceptionnel à des projets d'intérêt général, cette disposition n'est plus mobilisable, excepté pour les quatre DTA approuvées. Les schémas d'aménagement régionaux de la Corse (PADDUC) et de l'outre-mer (SAR), comme les schémas de mise en valeur de la mer (SMVM) 78 pourraient juridiquement prescrire de telles dispositions sur un périmètre élargi et ainsi assurer une cohérence territoriale. Enfin, les SCoT pourraient, également, par le biais de leurs orientations et surtout de leurs prescriptions, bâtir une vision cohérente de l'aménagement littoral, notamment en identifiant les espaces proches du rivage et en prescrivant sur des unités territoriales cohérentes des principes d'aménagement identiques aux principes portés par les dispositions particulières au littoral. Rappelons enfin que, depuis la loi SRU (2000), les communes situées à moins de 15 km du rivage de la mer (ou d'agglomérations d'une certaine importance) et non couvertes par un SCoT (ou un SAR) ne peuvent ouvrir à l'urbanisation des zones naturelles, ni même des zones d'urbanisation future délimitées dans les POS ou PLU après le 1er juillet 2002, ou procéder à leur révision, sans l'accord du préfet (demande de dérogation)79. La loi Grenelle 2 (art. 17) a étendu cette disposition à l'ensemble des communes, à l'échéance du 1er janvier 2017. Toutes les communes riveraines des grands lacs y seront donc soumises. Dès lors, les difficultés liées à la superposition des lois Montagne et Littoral devraient être moins sensibles pour les élus, d'autant plus que la 78 Il n'est cependant pas évident que les SMVM soient l'outil le plus pertinent pour assurer une cohérence terrestre en matière de développement urbain et économique. Art. L.122-2 du code de l'urbanisme. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 60/137 79 Rapport n°007707-01 principale difficulté signalée concerne généralement des communes ou parties de communes rurales dont l'activité économique repose sur l'agriculture et le tourisme estival. En ce sens, la loi Littoral est plutôt un bon outil de préservation des espaces agricoles et naturels. Elle oblige de plus à une réflexion planificatrice autour des agglomérations, des villages et non des hameaux isolés. d) Recommandations de la mission sur le champ d'application géographique · Préciser aux services les différentes possibilités ouvertes par la loi Littoral pour appliquer les dispositions particulières au littoral sur des entités géographiques cohérentes, notamment le rôle des documents d'aménagement de rang supérieur (DTA approuvées, SMVM) mais aussi des SAR (PADDUC) et SCoT littoraux (ou lacustres), dans la définition d'un aménagement équilibré du littoral ou des rives des grands lacs. Rendre obligatoire pour ces documents la traduction de l'ensemble des dispositions particulières au littoral sur toutes les communes concernées, non seulement pour les adapter aux caractéristiques de leur façade littorale mais également pour en assurer la cohérence. Aujourd'hui, le principe de compatibilité de ces documents avec la loi Littoral ne les oblige pas en effet à les préciser dans leur totalité. Mobiliser les services pour veiller à la qualité de cette traduction dans le cadre de leur association à l'élaboration des documents d'urbanisme (mise en oeuvre du principe du contrôle dit « continu », du porter à connaissance au contrôle de légalité). Faire référence à la distance des 15 km du rivage de la mer ou des rives des grands lacs pour donner un cadre minimal à cette mise en cohérence. Cette distance est celle qui est utilisée pour la mise en oeuvre du principe de constructibilité limitée (Art. L. 122-2 précité). · · · 3.2. Les sous-ensembles du champ d'application géographique Les règles liées à l'urbanisation littorale sont différentiées par la loi Littoral en fonction de leur plus ou moins grande proximité du rivage. Trois sous-ensembles sont ainsi à identifier dans les communes soumises aux dispositions particulières au littoral : la bande littorale, les espaces proches du rivage et le reste de la commune, souvent qualifié de rétro-littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 61/137 3.2.1. La bande littorale des cent mètres Article L.146-4-III - En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée. Cette interdiction ne s'applique pas aux constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (...). Les circulaires de 1991 et de 2006 n'évoquent pas cette disposition qui ne semble pas a priori soulever de difficulté de compréhension. a) Le constat des services sur la délimitation de la bande littorale Bien que la délimitation de la bande des 100 m à partir de la limite haute du rivage (dont la fixation est de la compétence de l'État) ne figure pas dans tous les documents d'urbanisme littoraux (et loin s'en faut80), cette disposition ne pose pas de problème de fond aux services mais des problèmes techniques. Les services concernés par les grands lacs rencontrent également des difficultés pour délimiter la limite haute des rives. 81 Selon les services, l'inconstructibilité des espaces non urbanisés y est globalement respectée. 82 b) Les difficultés rencontrées par les services Dans les communes dont le littoral est soumis à forte érosion, faute d'avoir pris en compte ce phénomène, la délimitation de la bande de 100 m dans les PLU est une source de difficultés, une largeur significative pouvant basculer dans le domaine public maritime (DPM). Les droits à construire en arrière immédiat de la bande littorale en sont fragilisés et des modifications régulières de ces PLU seraient nécessaires, ce qui est rarement le cas en raison de la sensibilité du sujet. Les services ne disposent pas toujours de la connaissance nécessaire, ni des moyens juridiques, pour que leurs arguments d'élargissement soient entendus des collectivités. Ils ne peuvent que rappeler la possibilité offerte par la loi d'élargir la bande des 100 m en fonction des critères cités dans la disposition. Seul un plan de prévention des risques (PPR) peut juridiquement imposer ce recul. La notion d'espaces urbanisés dans la bande littorale soulève également de nombreuses difficultés d'interprétation, même si la jurisprudence a dégagé des 80 81 82 Exemple : seuls 3 des 23 PLU littoraux délimitent la bande littorale en Ille-et-Vilaine. Cf. annexe 6 : le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares. Le problème des constructions illégales qui relève de l'exercice de la police de l'urbanisme, n'a pas été abordé dans le cadre de cet audit. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 62/137 Rapport n°007707-01 faisceaux d'indices (cf. § 331). Il en est de même de la notion d'activités nécessitant la proximité de l'eau qui soulève des d'interrogations : ­ selon la nature des opérations (ports à sec, écoles de voile avec hébergement, établissements de thalassothérapie, certains bâtiments ostréicoles comme les centres d'expédition, certains types de construction dans les concessions portuaires...) ; selon la qualification des espaces naturels, notamment dans les espaces remarquables (autorisations dans certains départements, refus dans d'autres) alors que seuls peuvent y être autorisés des « aménagements légers » (cf. § 352). c) Le diagnostic de la mission sur la délimitation de la bande littorale ­ La délimitation de la bande littorale dont l'objectif est de préserver la frange terrestre en fonction des caractéristiques physiques de la côte (écosystèmes côtiers ou zones soumises à érosion) fait rarement l'objet d'une réflexion lors de l'élaboration des PLU. Lorsque sa délimitation dans les PLU porte sur les 100 m à partir de la limite haute du rivage, elle ne peut qu'être indicative, cette limite pouvant dans certaines communes varier significativement dans le temps. De plus, l'État n'a pas procédé à sa délimitation sur l'ensemble du littoral. S'agissant a minima de délimiter une bande de 100 m, l'application de cette disposition ne relève pas des SCoT qui devraient toutefois identifier les zones littorales où la bande littorale devrait être élargie pour prendre en compte l'érosion côtière mais également les grands écosystèmes littoraux (comme des massifs dunaires ou des marais littoraux). Cette identification de la bande littorale à l'échelle d'un SCoT ne règle pas pour autant les problèmes de sa délimitation rencontrés au niveau des PLU mais elle est indispensable à une application cohérente de cette disposition à l'échelle de l'intercommunalité. Les réflexions engagées sur la gestion du trait de côte et la trame verte et bleue devraient être de nature à renforcer l'argumentaire des services mais encore faut-il qu'ils arrivent à convaincre les collectivités de la pertinence de procéder à l'élargissement de la bande littorale et de considérer cette mesure non comme une contrainte mais comme une mesure de prévention des risques et de bonne gestion des écosystèmes côtiers. Par ailleurs, la notion d'« espaces urbanisés » paraît mal comprise par de nombreux services qui en font une notion spécifique à la bande littorale, alors que, pour la mission, il s'agit d'une notion commune à l'ensemble du territoire des communes littorales, et même bien au-delà, car cette notion est régulièrement utilisée dans le code de l'urbanisme. Pour bien interpréter les règles de constructibilité des espaces urbanisés dans la bande littorale, une lecture croisée des différentes dispositions particulières au littoral est indispensable. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 63/137 Il convient notamment d'identifier les espaces urbanisés de la bande littorale selon la même typologie que pour l'ensemble de la commune (agglomération, village, hameau, autres), en référence à la disposition de l'article L.146-4 ­ I. Il serait pour le moins incohérent d'interdire dans la zone rétro-littorale de la commune toute densification d'un secteur d'habitat dispersé ou d'un « écart » et de l'autoriser dans la bande des 100 m (cf. § 331). d) Recommandations de la mission pour la délimitation de la bande littorale · Veiller à l'identification des zones d'érosion littorale dans les SCoT ainsi que celle des milieux sensibles littoraux justifiant un élargissement de la bande littorale, notamment pour assurer la continuité de la protection et faciliter la cohérence de gestion des écosystèmes littoraux tels que les massifs dunaires ou les marais arrière-littoraux (SCoT prescriptifs). Rappeler la possibilité de fixer dans un PPRL des prescriptions de recul et donc d'élargissement de la bande littorale. Quand elle ne fait pas l'objet d'élargissements motivés, donner des indications sur la façon de cartographier la bande littorale de 100 m dans les PLU, notamment en l'absence de délimitation de délimitation du rivage par l'État (zonage susceptible d'être précisé lors de toute instruction d'acte individuel) et de rédiger le règlement correspondant. Clarifier à la lumière des dernières jurisprudences la notion d'« espaces urbanisés » dans la bande littorale, en précisant que cette notion n'est pas propre à cette partie du territoire communal ; recommander ainsi d'y distinguer les espaces urbanisés selon la même typologie que dans le reste de la commune, à savoir leur appartenance à une agglomération, à un village, à un hameau de la commune ou à d'autres types d'espaces littoraux que la doctrine administrative gagnerait à qualifier. rappeler que la bande littorale est une composante du territoire communal à laquelle s'appliquent, en plus des prescriptions qui lui sont propres (principalement l'interdiction de toute extension de l'urbanisation), les autres dispositions particulières au littoral (espaces remarquables, coupures d'urbanisation...). Mettre en place au niveau national un fonctionnement en réseau des services pour faciliter les échanges sur la qualification des « espaces urbanisés » et l'identification des activités nécessitant la proximité de l'eau ainsi qu'un appui juridique pour les cas difficiles. Assurer un contrôle de légalité exhaustif pour tous les actes délivrés dans la bande littorale (transmission automatique des autorisations à la préfecture par les communes). · · · · · · Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 64/137 3.2.2. La délimitation des espaces proches du rivage Article L.146-4-II - L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. La circulaire du 14 mars 2006 consacre un long développement à la notion d'espaces proches du rivage et aux règles de construction limitée qui leur sont attachées. « L'importance de ces règles implique qu'un soin particulier soit accordé à la délimitation de ces espaces ». Elle en détaille la méthode et les critères à prendre en compte, critères progressivement définis par la juridiction administrative et confirmés par le Conseil d'État qui distingue très clairement les critères en fonction de la nature de ces espaces, urbanisés ou naturels. Cette circulaire rappelle toutefois qu'« il appartient aux collectivités locales dans le cadre de l'élaboration de leur SCoT ou de leur PLU de procéder à cette délimitation » et va jusqu'à préciser que « les DDALL ne doivent en aucun cas être notifiés aux communes dans le cadre du PAC ou de tout autre forme de notification à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme, jetant le trouble dans les services comme constaté dans la partie 2 de ce rapport. a) Le constat des services sur la délimitation des espaces proches du rivage Les services les ont généralement délimités dans leur DDALL. Certains d'entre eux ont même actualisé ces délimitations suite à l'arrêt « Barrière »83. Pour les services, c'est l'une des notions les plus difficiles à interpréter. La doctrine est bien comprise mais sa traduction locale s'avère complexe et difficile à négocier avec les collectivités. La situation relative à leur traduction dans les documents d'urbanisme (délimitation et règlement) est très variable d'un département à un autre. Dans certains départements, les espaces proches du rivage ne sont pas délimités dans les zones urbanisées en front de mer. D'une façon générale, leur délimitation dans les POS/PLU est rare. b) Les difficultés rencontrées par les services Lorsque les collectivités procèdent elles-mêmes à la délimitation des espaces proches du rivage, les négociations entre les services et les collectivités sont encore plus difficiles. Lorsqu'un document de rang supérieur (DTA, SRA, SCoT) les a préalablement identifiés, l'échelle utilisée pour les cartographier est loin de régler les problèmes de délimitation dans les PLU. 83 CE, 3 mai 2004, Mme Barrière, req. N°251534. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 65/137 Les services s'interrogent sur leur légitimité d'intégrer dans leur PAC, notamment pour les SCoT, une délimitation des espaces proches du rivage : l'argumentaire est souvent difficile à développer. Jusqu'où l'État peut-il aller sur ce point ? La délimitation des espaces proches du rivage soulève des difficultés particulières dans les zones estuariennes en raison de vastes zones concernées et d'une occupation très spécifique (exploitations viticoles, bâtiments isolés...) - cf. § 332. c) Le diagnostic de la mission pour la délimitation des espaces proches du rivage L'absence de délimitation des espaces proches du rivage dans les POS/PLU et donc de la traduction du principe d'extension limitée de l'urbanisation dans le règlement constitue une vraie difficulté pour les instructeurs ADS. Lorsque les collectivités procédent à cette délimitation dans leur document d'urbanisme (PLU mais surtout SCoT), les services ne peuvent engager le dialogue et veiller à l'absence d'erreur manifeste d'appréciation sans disposer d'une analyse générale sur l'ensemble du littoral départemental, y compris aux marges (cohérence avec les littoraux des départements limitrophes). d) Recommandations de la mission · Il est indispensable que les services disposent d'un document de référence départemental leur permettant d'assurer le contrôle de légalité des documents d'urbanisme et de l'ADS : sur la base de critères mis en exergue par la jurisprudence, critères qui devront être affinés localement par leur connaissance du territoire (cf. étude CETE pour le Seine-Maritime). après concertation avec les services des départements limitrophes. Rendre obligatoires, sans aucune exception, l'identification des espaces proches du rivage dans les SCoT et leur délimitation dans les PLU, ainsi que la traduction dans les orientations (SCoT) et règlement (PLU) du principe d'extension limitée de l'urbanisation, cette absence d'identification ou de délimitation n'étant pas aujourd'hui considérée par les services de l'État comme un élément de non compatibilité avec la loi Littoral. Dans le cadre du dispositif de suivi de la consommation des espaces agricoles, naturels et forestiers (SCoT et PLU), prévoir le recueil de données spécifiques aux espaces proches du rivage (et à la bande littorale en particulier). · · 3.3. Les notions et principes liés aux espaces urbanisés littoraux Tout autant que les principes d'extension de l'urbanisation en continuité ou d'extension limitée, la notion même d'espaces urbanisés soulève de nombreuses difficultés aux services. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 66/137 3.3.1. La qualification des espaces urbanisés (agglomérations, villages, hameaux, autres) Article L.146-4-I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. (...) Article L.146-4-III - En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée. La circulaire du 14 mars 2006 développe longuement les notions d'agglomérations, de villages et de hameaux en s'appuyant sur une jurisprudence abondante mais elle semble avoir apporté aux services plus de confusion que de clarté 84. Il s'agit là, encore aujourd'hui, d'une des principales difficultés rencontrées par les services de l'État, mais aussi par les collectivités, dans l'application des dispositions particulières de la loi Littoral. Les définitions adoptées dans cette circulaire ne suffisent pas à qualifier avec certitude un espace urbanisé en agglomération et surtout en village ou en hameau, voire en espace urbanisé (par exemple un lotissement isolé) dès lors que la juridiction administrative estime que seule une analyse au cas par cas permet de les qualifier d'abord en espace urbanisé, puis selon leurs caractéristiques locales en agglomération, village, hameau ou « autres ». a) Le constat des services sur la qualification des espaces urbanisés Beaucoup de POS/PLU littoraux ne distinguent pas, dans les espaces urbanisés, les agglomérations, les villages, les hameaux. Certains SCoT commencent à le faire (Brest, Cap-Atlantique, Pays de Retz). Le contentieux se développe principalement autour de l'extension de hameaux, d'une part, de la densification de zones d'habitat diffus assimilées à des espaces urbanisés, d'autre part. Il y a très peu de hameaux nouveaux programmés, mais la pression existe. La possibilité d'autoriser des hameaux nouveaux, alors que l'extension des hameaux existants est interdite, est mal comprise des élus mais aussi des préfets et sous-préfets qui s'en font l'écho. Les DDTM sont réticentes à la création de hameaux nouveaux, craignant des abus. Certaines DDTM disposent d'une cartographie des espaces littoraux urbanisés (habitat, activités). D'autres vont jusqu'à identifier ceux qui relèvent d'une agglomération, d'un village ou d'un hameau (Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Gironde). 84 Confusion aggravée par le contenu (notamment les illustrations) de la plaquette diffusée à la même époque et plus particulièrement destinée aux collectivités. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 67/137 Leur traduction dans les DDALL est très hétérogène, y compris au sein d'une même région disposant de guide (Aquitaine) ou de référentiels partagés (Bretagne). Certains services gardent en mémoire la demande de l'administration centrale de proscrire ce type de documents qui déresponsabilisaient les élus alors que ces documents, selon eux, servaient de supports au dialogue avec les collectivités. b) Les difficultés rencontrées par les services Bien qu'ayant fait l'objet de nombreuses précisions, notamment dans la circulaire de mars 2006, la classification des espaces urbanisés en agglomérations, villages ou hameaux, soulève encore de nombreuses difficultés, tout particulièrement en milieu rural (lotissements peu denses, habitats diffus) et dans les estuaires. Les collectivités sont réticentes à effectuer de telles distinctions entre espaces urbanisés dans leur PLU, car elles se refusent à réduire, voire supprimer, des zones classées en urbanisées ou urbanisables dans les anciens POS, voire dans des PLU relativement récents, et donc à remettre en cause ce qu'elles estiment être des « droits acquis ». Des jurisprudences « malheureuses » fragilisent également la position des services, mais aussi des contentieux mal suivis, faute de volonté et/ou d'une organisation permettant de les instruire dans les temps impartis85. c) Le diagnostic de la mission sur la qualification des espaces urbanisés littoraux La notion d'espaces urbanisés est une notion régulièrement employée dans le code de l'urbanisme. Ce n'est donc pas une notion propre aux dispositions particulières au littoral, ni a fortiori à la disposition relative à la bande littorale. Le zonage et le règlement des espaces dont la qualification en espaces urbanisés est incertaine, constituent un problème général et ancien en urbanisme (cas des zones NB par exemple). Toutefois, la bonne application des dispositions particulières au littoral et leur traduction dans les documents d'urbanisme exigent un minimum de précisions sur ce que sont les espaces urbanisés dans les communes littorales pour leur garder une cohérence globale. L'article L.146-2 précise ainsi : « dans les espaces urbanisés, ces dispositions ne font pas obstacle à la réalisation des opérations de rénovation des quartiers ou de réhabilitation de l'habitat existant, ainsi qu'à l'amélioration, l'extension ou la reconstruction des constructions existantes. » ... sous réserve bien sûr que ces dernières aient été légalement construites. La doctrine administrative, telle qu'elle a été fixée dans l'annexe de la circulaire de mars 2006, n'a pas permis aux services de faire face aux nombreux contentieux, ni de 85 Cas d'une résidence de tourisme de 58 500 m2 (Mandelieu) dont le permis a été annulé par le Tribunal administratif à la demande du préfet ; le jugement a été annulé par la Cour d'appel de Marseille qui a assimilé le projet à un hameau nouveau. Le pourvoi de l'État n'a pas été déposé à temps auprès du Conseil d'État. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 68/137 Rapport n°007707-01 conforter leur propre interprétation de la notion d'espaces urbanisés, d'une part, des notions d'agglomérations, de villages, de hameaux, d'autre part. De plus, nombreux sont les services qui n'en ont pas partagé la totalité des interprétations, la plus « emblématique » étant la possibilité d'autoriser une extension limitée à la frange des hameaux86. Cette possibilité a été jugée par les tribunaux administratifs contraire à la loi (jurisprudence Le Bono87). Pour lui assurer crédibilité et opérationnalité, la doctrine administrative nécessiterait d'être réactualisée régulièrement, non seulement pour prendre en compte la jurisprudence la plus récente, mais aussi pour s'enrichir des travaux réalisés par les services les plus engagés dans l'application des dispositions particulières au littoral. Pour autant, la mission estime que l'actualisation de la doctrine administrative ne réglera pas toutes les difficultés d'application locale de ces notions. L'identification par les services (comme pour les collectivités) des espaces urbanisés, puis leur qualification en agglomération, village, hameau ou autres88, ne peuvent se faire qu'au cas par cas (appréciation). De plus, « le juge administratif interprète strictement l'exception des espaces urbains qui relève de son appréciation souveraine »89. Malgré les démarches engagées dans certains départements visant à développer les justifications, y compris par des visites de terrain, la grande majorité des services n'ont pas les moyens de procéder systématiquement à de telles vérifications, ni toujours les compétences nécessaires pour procéder à ces analyses, leur permettant de justifier accord ou refus sur la base de critères bien explicités. C'est pourtant sur la base de critères (doctrine administrative) et de leur appréciation locale (analyse au cas par cas) que peuvent s'appliquer de telles notions. Il paraît également indispensable à la mission que soient également distingués dans la bande littorale les espaces urbanisés faisant partie d'une agglomération, d'un village, d'un hameau ou d'un autre type d'espaces urbanisés (qui reste à qualifier) afin d'y définir des règles de constructibilité (par densification), compatibles avec l'ensemble des dispositions particulières au littoral et pas seulement avec la disposition particulière à la bande littorale. Pour la mission, l'article L.146-4 ­ III ne peut être interprété indépendamment des autres dispositions particulières au littoral (cf. § 321). d) Recommandations de la mission · Élaborer une doctrine administrative, régulièrement actualisée au regard de la jurisprudence, permettant de clarifier et d'articuler entre elles les différentes catégories d'espaces urbanisés à identifier dans les communes littorales, y compris dans la bande littorale (agglomérations, villages, hameaux, autres espaces urbanisés). 86 87 88 Cette analyse ressort clairement du questionnaire renseigné par les DDTM. Arrêt du Conseil d'État du 27 juillet 2009. Espaces urbanisés non qualifiables d'agglomération, de village ou de hameau, tels les écarts, les lotissements isolés, l'habitat diffus... Conseil d'État (12 mai 1997) ; Société Coprotour ; Recueil Lebon. 89 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 69/137 · En ce qui concerne les documents d'urbanisme : rendre obligatoire dans les SCoT littoraux, qui doivent définir un projet de territoire et décrire leur armature urbaine, l'identification des agglomérations et villages pouvant faire l'objet d'une extension en continuité dans les communes littorales ; veiller dans les PLU littoraux à ce que soient délimitées des extensions au bénéfice des seuls espaces urbains qualifiés dans les SCoT d'agglomérations et villages ; les autres catégories d'espaces urbains délimités ne pouvant faire l'objet d'aucune extension géographique (densification possible des hameaux dans leur périmètre strict ; écarts et habitat diffus non densifiables)90. · Préciser la nature du zonage et les règlements-types à adopter dans les PLU pour décliner cette typologie des espaces urbanisés, notamment de ceux qui ne relèvent pas des agglomérations, villages et hameaux, ce qui contribuerait à régler le problème des zones NB des anciens POS. Demander aux services de l'État de disposer de documents de référence identifiant les espaces urbanisés dans les communes littorales et de veiller à leur actualisation régulière afin qu'ils puissent apprécier les orientations et choix opérés par les collectivités, formuler des avis argumentés et exercer, le cas échéant, un contrôle de légalité sur la compatibilité des documents d'urbanisme et des actes individuels. Une harmonisation des échelles de ces documents serait fortement souhaitable (1/10 000 par exemple). 3.3.2. L'extension de l'urbanisation en continuité et l'extension limitée dans les espaces proches du rivage · Article L.146-4-I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Article L.146-4-II - L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. 90 Le référentiel breton distingue 3 règles d'urbanisation (doctrine administrative régionale) : des urbanisations extensibles (villages et agglomérations) ; des urbanisations densifiables mais non extensibles (hameaux, secteurs urbanisés isolés des années 1960 à 1986, ...) ; les autres types d'urbanisation ne sont ni extensibles, ni densifiables (écarts, habitat diffus, ...). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 70/137 Rapport n°007707-01 En l'absence de ces documents, l'urbanisation peut être réalisée avec l'accord du représentant de l'État dans le département. Cet accord est donné après que la commune a motivé sa demande et après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites appréciant l'impact de l'urbanisation sur la nature. Les communes intéressées peuvent également faire connaître leur avis dans un délai de deux mois suivant le dépôt de la demande d'accord. Le plan local d'urbanisme doit respecter les dispositions de cet accord. La notion d'extension de l'urbanisation, ainsi que les principes d'extension en continuité et d'extension limitée, sont au coeur des instructions reçues par les services en mars 2006. La circulaire dans son annexe en précise les éléments constitutifs non sans créer des ambiguïtés dont certaines ont été réfutées depuis par les tribunaux administratifs comme la possibilité d'autoriser une extension à la « frange d'un hameau ». Par ailleurs, pour donner plus de lisibilité aux dispositions de l'article L.146-4 dans sa globalité et interpréter le principe d'extension limitée de l'urbanisation littorale dans les espaces proches du rivage, la juridiction administrative a, d'une part, donné une double dimension à la notion d'extension, une dimension horizontale (extension spatiale) et une dimension verticale (densification) et, d'autre part, appliqué à la constructibilité des espaces urbanisés de la bande littorale (uniquement donc par densification), les mêmes principes que pour les espaces proches du rivage (densification limitée des seules agglomérations et villages). Comme tout principe général ou notion qualitative, leur application relève d'une appréciation fondée sur des critères, des motifs et justifications et exige donc une analyse au cas par cas. C'est tout particulièrement le cas du principe d'extension limitée dans les espaces proches du rivage qui doit, en l'absence de SCoT, de SAR ou de SMVM, être justifiée dans le PLU sur deux critères bien précis liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Pour réaliser l'analyse des risques juridiques liés à des POS/PLU non compatibles avec les dispositions particulières au littoral, il est indispensable que les services en charge de veiller à cette compatibilité en maîtrisent les notions et principes. Cette maîtrise est d'autant plus importante qu'en l'absence de documents d'encadrement de rang supérieur (ScoT ou SAR valant SCoT), aucune opération d'urbanisation dans les espaces à urbaniser d'un PLU ne peut être réalisée sans l'accord du représentant de l'État.91 a) Le constat des services sur l'application des principes d'extension en continuité et d'extension limitée Face à certaines collectivités qui estiment que le principe de l'urbanisation en continuité contribue à aggraver l'urbanisation linéaire et le phénomène d'étalement 91 Article L.122-2 du code de l'urbanisme. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 71/137 urbain, les services regrettent la faiblesse des réflexions sur les armatures urbaines littorales dans les documents d'urbanisme locaux, y compris dans les SCoT. Mais, ils sont une majorité, dont plusieurs préfets, à estimer que le principe de continuité est globalement bien respecté par les PLU. Un tel constat surprend 92, car l'extension de l'urbanisation en continuité des agglomérations et villages constitue, pour ces mêmes services, le problème majeur de l'application de la loi Littoral. Il est signalé dans tous les départements littoraux. La mission n'a pu recueillir le nombre exact de POS/PLU non compatibles avec cette disposition, mais les quelques données recueillies sont significatives93. 10% des POS annulés en Bretagne le sont sur cette base. Tous les services n'ont pas engagé l'analyse juridique des POS/PLU et identifié les situations de non-compatibilité conformément à la circulaire de mars 2006. Selon les éléments recueillis par la mission, seuls sept départements ont mené l'exercice de façon systématique.94 La Bretagne l'a fait en élaborant une doctrine régionale validée en CAR. Ce travail interdépartemental animé par la DREAL a servi de « cadre référentiel » pour établir au niveau de chaque département des cartes des risques juridiques sur l'extension de l'urbanisation, à la parcelle, des POS/PLU (cf. § 232). L'application se révèle toutefois complexe et longue (analyse au cas par cas, vérification sur le terrain) et fait l'objet de négociations difficiles avec les élus95. b) Les difficultés rencontrées par les services Les principales difficultés sont en fait liées : ­ d'une part à la différenciation entre villages, hameaux, et habitat dispersé, l'extension géographique n'étant possible que pour les seuls espaces qualifiés de villages (cf. § 331), ­ et d'autre part à la délimitation des espaces proches du rivage, l'extension devant dès lors être limitée (cf. § 322). Lorsque les espaces proches du rivage sont délimités dans les POS/PLU, les services rencontrent également des difficultés pour apprécier les justifications et motivations des extensions prévues dans ces espaces sur la base des deux critères précisés dans la loi, la configuration des lieux ou l'accueil d'activités nécessitant la proximité du rivage. Ces justifications et motivations ne sont pas toujours très explicites. Ces deux critères ne sont pas applicables dès lors qu'il existe un document de rang supérieur (DTA, SAR, SCoT, SMVM) mais ceux-ci précisent rarement, et surtout insuffisamment, les modalités d'application de cette disposition littorale pour qu'elles 92 La raison est sans nul doute à rechercher dans la qualification très souple dans les POS/PLU des espaces urbanisés pouvant faire l'objet d'une extension, ce qui explique aussi l'importance du contentieux lié à ce prinicipe. 19 POS/PLU considérés comme non compatibles sur 21 communes littorales en Ille-et-Vilaine ; 50 % en Loire-Atlantique. Les 4 départements bretons, les Pyrénées-Atlantiques, la Manche et le Pas-de-Calais. Cf. présentation de la démarche bretonne en annexe 4. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 72/137 93 94 95 Rapport n°007707-01 soient opérationnelles (identification agglomérations et villages). des espaces proches du rivage, des De plus, les tribunaux apprécient librement si ces documents font écran ­ ou pas - à l'application de la loi Littoral. L'application rigoureuse de la circulaire de mars 2006 a conduit les services qui se sont mobilisés à remettre en cause, non seulement les POS « dormeurs », mais également des PLU récents qui n'avaient pas fait l'objet d'observations de leur part. Ces interprétations actualisées de l'extension en continuité des agglomérations et villages sont parfois contestées par les collectivités devant les tribunaux qui peuvent leur donner raison, ce qui fragilise les positions de l'État. c) Le diagnostic de la mission sur les principes d'extension en continuité de l'urbanisation et d'extension limitée L'extension en continuité des agglomérations et villages est le sujet le plus sensible de la loi Littoral. La circulaire de mars 2006 a fortement bousculé la position des services de l'État, en cherchant à permettre d'urbaniser au-delà de ce que la loi prévoyait. Car, au delà de l'ouverture faite sur une extension de l'urbanisation aux marges des hameaux, la circulaire et, plus encore, la plaquette d'accompagnement destinée aux élus ont conforté certaines collectivités dans leur position d'interprétation « souple » des dispositions de la loi avec les conséquences que l'on sait en matière de contentieux. Les services ont aujourd'hui besoin : ­ d'une doctrine nationale réactualisée ; ­ d'un travail en réseau leur permettant d'échanger (nécessité d'apprécier, de justifier, de motiver...) ; ­ d'un appui juridique pour les cas difficiles. Par ailleurs, aucun dispositif de suivi de l'application des dispositions particulières de la loi Littoral n'a été mis en place, permettant de suivre la consommation de l'espace dans les communes littorales, et tout particulièrement dans les espaces proches du rivage et la bande littorale, d'évaluer l'efficacité de cette disposition (ou de sa bonne application). Le projet de la DREAL Bretagne en liaison avec le CETE de l'Ouest n'a pu encore être mis en place par les DDTM. Ce projet n'a pas été retenu comme prioritaire par les DDTM. 96 d) Recommandations de la mission Les recommandations qui suivent sont des recommandations d'ordre général et concernent l'ensemble des dispositions particulières au littoral, mais la mission les formule tout particulièrement pour la bonne application des deux principes qui soulèvent le plus de difficultés d'application : l'extension de l'urbanisation en continuité des agglomérations et villages et leur extension limitée dans les espaces proches du rivage. · Établir un référentiel permettant de préciser les principes d'extension en continuité et d'extension limitée (définition de critères ou faisceau d'indices) à 96 Cf. Annexe 5 sur l'application de la loi Littoral en Bretagne Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 73/137 partir des travaux d'un groupe de travail national assisté de juristes spécialisés à l'instar de ce qui a été fait en Bretagne ; en prévoir une mise en ligne et une actualisation régulière en fonction de la jurisprudence. · Organiser un appui juridique au niveau national sur la base d'une gestion du contentieux permettant d'apprécier au cas par cas les situations les plus difficiles (si nécessaire avec une assistance de juristes spécialisés) ; procéder au niveau de chaque région, en collaboration avec les tribunaux administratifs, au suivi des contentieux et des déférés engagés par l'État dans le champ de l'urbanisme, en distinguant en particulier les territoires d'intérêt national comme le littoral (bilan triennal présenté en CAR et adressé au ministre en charge de l'urbanisme). Donner de nouvelles instructions aux services sur la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions particulières au littoral (en particulier avec celles de l'article L.146-4) et sur les modalités de travail avec les collectivités locales (diffusion sur demande des cartes de risques juridiques notamment). Pour cela, abroger la circulaire de mars 2006 et la remplacer par une circulaire issue des travaux précités, intégrant les avancées des lois Grenelle, notamment l'obligation de justifier les objectifs chiffrés de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers 97 dans les documents d'urbanisme. 3.3.3. La capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser · Article L.146-2 - Pour déterminer la capacité d'accueil des espaces urbanisés ou à urbaniser, les documents d'urbanisme doivent tenir compte : - de la préservation des espaces et milieux mentionnés à l'article L. 146-6 ; - de la protection des espaces nécessaires au maintien ou au développement des activités agricoles, pastorales, forestières et maritimes ; - des conditions de fréquentation par le public des espaces naturels, du rivage et des équipements qui y sont liés. La circulaire de 1991, tout en reconnaissant la quantification de la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser délicate, souligne l'importance de cette notion qui vise à proportionner le développement de l'urbanisation littorale à la protection des espaces naturels, agricoles, forestiers et maritimes, y compris en termes de fréquentation. Celle de mars 2006 ne l'évoque pas. a) Le constat des services sur la détermination de la capacité d'accueil La question de la capacité d'accueil est traitée de manière très insuffisante dans les PLU, ainsi que dans les SCoT littoraux, alors que cette réflexion devrait être plus facile à mener à ce niveau malgré des périmètres pas toujours adaptés. 97 Articles L.122-1-2 (SCoT) et L.123-1-2 (PLU) du code de l'urbanisme. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 74/137 Rapport n°007707-01 Dans la grande majorité des départements, il n'y a pas de doctrine établie, ni de méthode définie, et donc pas de préconisation aux collectivités de la part des services sur une notion qu'ils ne maîtrisent pas eux-mêmes. Les services adoptent généralement une attitude indulgente à l'égard des collectivités qui s'y essaient dans leurs documents d'urbanisme et émettent une simple mise en garde quand le sujet n'y est pas abordé (pour motif de sécurité juridique). Il y a peu de jurisprudence portant sur cette disposition (annulation du PLU de l'ÃŽle d'Yeu). Seules deux régions y ont travaillé : les Pays de la Loire (méthodologie et expérimentations98) et l'Aquitaine (méthodologie s'appuyant sur la démarche de l'évaluation environnementale99). b) Les difficultés rencontrées par les services Si la base législative en est claire, cette notion, qui s'applique à l'ensemble du territoire communal comme à des unités de territoire plus vastes (DTA, SAR, SCoT...), est ressentie comme floue, sans doctrine arrêtée et surtout sans méthodologie établie au niveau national. La méthode mise au point dans les Pays de la Loire est connue d'un certain nombre de services, mais jugée par eux difficile à appliquer pour les collectivités, car trop compliquée. Les services regrettent le manque de soutien de la part de l'administration centrale, notamment les services des Pays de la Loire dont le travail méthodologique mené localement avec l'appui d'universitaires n'a jamais été examiné par l'administration centrale et a fortiori validé. De plus, cette notion de capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser leur paraît limitée dans les critères à prendre en compte. Elle ne permet pas, par exemple, d'aborder les besoins de logements, notamment sociaux, particulièrement aigus sur le littoral (critères de la loi SRU, mais également hébergement des saisonniers dans les communes touristiques). c) Le diagnostic de la mission sur la détermination de la capacité d'accueil Les services (et plus encore les collectivités) ont de réelles difficultés à appréhender la notion de capacité d'accueil fondée sur les grands principes de la loi Littoral. La préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, qui va jusqu'à inclure la préoccupation d'éviter la surfréquentation de ces espaces, exige une maîtrise du développement littoral et son orientation volontaire vers l'arrière-pays. 98 Guide « évaluation de la capacité d'accueil et de développement des territoires littoraux », pilotage DREAL ; expérimentation sur l'ÃŽle d'Yeu suite à l'annulation du PLU. Guide régional de 2006 s'appuyant sur un diagnostic territorial et des critères qui vont au-delà de ceux énumérés à l'article L.146-2. 99 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 75/137 La conception d'un véritable aménagement en profondeur ne peut être portée que par l'intercommunalité. Cette conception, ainsi que la capacité d'accueil des communes de sa façade littorale, devraient relever du SCoT dont le périmètre serait à délimiter en conséquence. Dans les communes littorales, la capacité d'accueil des espaces pouvant encore être urbanisés ne peut pas résulter de scénarios de développement basés uniquement, comme cela est trop souvent constaté, sur des hypothèses démographiques (demande), ces espaces étant juridiquement restreints (protection des espaces remarquables mais aussi coupures d'urbanisation, extension limitée...). Aucun lien n'est clairement établi par les services entre l'obligation d'évaluer les impacts environnementaux des documents d'urbanisme100 et cette disposition relative à la capacité d'accueil uniquement ciblée sur la préservation des espaces naturels, agricoles, forestiers littoraux. Certains services recommandent aux collectivités d'y adjoindre d'autres critères limitants comme la capacité résiduelle de tous les réseaux dont l'assainissement101 ou encore la prévention des risques102. La circulaire de 1991 faisait pourtant dans son annexe une large place à la nécessaire justification des projets mais elle la limitait à l'évaluation économique et environnementale des projets d'équipements et d'opérations d'urbanisation relevant d'une étude d'impact, au-delà donc d'un certain seuil financier, pas à l'évaluation environnementale des plans et programmes qui ne sera exigée qu'à partir de 2004. Les travaux engagés sur ce sujet par l'administration en 1992, puis dans le cadre de l'atelier littoral national en 2005, sont méconnus des services pour les premiers travaux et très peu évoqués par eux pour les seconds. Les critères de mixité sociale fixés par la loi SRU, jugés par certains élus comme incompatibles avec les dispositions particulières au littoral, sont souvent évoqués pour justifier une capacité d'accueil « souhaitable ». C'est une problématique générale, mais particulièrement aiguë sur le littoral. Sans nier ces difficultés, des services nuancent les propos des élus. Ainsi, selon la DDTM des Pyrénées-Atlantiques, la loi Littoral n'est pas perçue dans ce département comme un obstacle à la construction de logements sociaux dès lors que les communes littorales ont, sur la base d'une intervention publique affirmée, la volonté d'agir, ce qui est également observé dans d'autres départements littoraux sous pression foncière. d) Recommandations de la mission · Intégrer la « question » de la capacité d'accueil dans la démarche d'évaluation environnementale des documents d'urbanisme, obligatoire pour les SCoT et pour l'ensemble des PLU des communes littorales, en identifiant clairement les critères spécifiques au littoral à prendre en compte (à préciser dans le guide en cours d'élaboration). Cette recommandation répond à l'attente formulée dans le cadre du Grenelle de la mer. 100 101 102 Directive 2001/42/CE et articles L.121-10 à L.121-15 du code de l'urbanisme. Critère cité dans la loi Littoral mais relevant d'autres réglementations. Critère cité pour la délimitation de la bande littorale . Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 76/137 Rapport n°007707-01 · Veiller à la prise en compte de ces critères lors de l'avis des services de l'État sur les documents d'urbanisme, avis éclairé par celui de l'autorité environnementale, ce qui exige une coordination renforcée des interventions de l'État en ce domaine (porter à connaissance/cadrage et avis). Veiller à la définition de périmètre de SCoT littoraux permettant de concevoir un aménagement en profondeur et de mener une réflexion pertinente sur la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser dans les communes littorales. · 3.4. Les mesures relatives aux activités spécifiques Les dispositions particulières au littoral prévoient un certain nombre de cas où elles ne s'appliquent pas, soit de façon générale, soit par procédure dérogatoire. 3.4.1. Le traitement des terrains de camping en dehors des espaces urbanisés Article L.146-5 - L'aménagement et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes en dehors des espaces urbanisés sont subordonnés à la délimitation de secteurs prévus à cet effet par le plan local d'urbanisme. Ils respectent les dispositions du présent chapitre relatives à l'extension de l'urbanisation et ne peuvent, en tout état de cause, être installés dans la bande littorale définie à l'article L. 146-4. Cet article spécifique aux terrains de camping met en évidence la volonté du législateur de traiter différemment les terrains de camping et les espaces urbanisés puisque la possibilité d'en aménager en dehors de ce type d'espaces est explicitement prévue par la loi. Les secteurs qui leur sont réservés dans les PLU littoraux doivent toutefois respecter les dispositions relatives à l'extension de l'urbanisation (extension en continuité de l'existant, extension limitée dans les espaces proches du rivage et extension interdite dans la bande littorale). a) Le constat des services sur le traitement des terrains de camping littoraux Rares sont les services qui ont élaboré leur propre doctrine sur ce sujet. Il est vrai que les créations de terrains de camping sont aujourd'hui peu nombreuses, ce qui n'est pas le cas des demandes d'extension qui posent de nombreux problèmes103. Généralement, seules les extensions des terrains de camping situés en continuité de 103 Deux annulations dans la Manche. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 77/137 l'urbanisation sont autorisées. De petites extensions sont cependant autorisées dans des campings isolés existants. Dans la grande majorité des départements, les terrains de camping ne font pas l'objet d'un zonage spécifique104 et sont assimilés à des espaces urbanisés, avec les difficultés de qualification précédemment analysés (cf. § 331). Un seul service, la DDTM du Calvados, a précisé que, dans son département, les communes classent les terrains de camping dans leur PLU selon un zonage spécifique. La DDTM des Pyrénées Atlantiques a fait un travail intéressant de classification des terrains de camping en trois catégories, en fonction de leur localisation (U : peuvent évoluer ; N : peuvent être conservés mais sans évolution possible ; N.ER : à résorber). b) Les difficultés rencontrées par les services Le classement des campings en zone urbaine (U) ou naturelle (N) fait l'objet de vifs débats entre les services et les collectivités. Les services manquent de critères précis pour argumenter : faut-il les considérer comme des espaces urbanisés en raison de leur « durcissement » ou comme des secteurs spécifiques bénéficiant de règles particulières et alors, avec quel zonage ? Le nombre de plus en plus important d'habitations légères de loisir, de résidences mobiles de loisir, de caravanes stationnées à l'année, ainsi que le développement de multiples services « intégrés » (épicerie, discothèque, terrain de sport, piscine...), transforment progressivement ces terrains de camping en véritables complexes de loisirs qui se différencient de moins en moins des espaces urbanisés. Peuvent-ils être assimilés à des hameaux ? Un important secteur de terrains de camping avec commerces, services et activités de loisirs peut-il être assimilé à un village ? Ces interrogations sont accentuées avec la présence d'une population permanente dans les terrains de camping situés dans les zones à forte pression foncière, tout particulièrement autour des grandes agglomérations et villes universitaires (Languedoc-Roussillon, La Rochelle...). Par ailleurs, beaucoup de dossiers sont instruits dans le cadre de régularisations sur lesquelles il est difficile pour les services de revenir, l'enjeu économique étant souvent mis en avant par les pétitionnaires et les collectivités. Les contentieux se développent dans les zones de forte fréquentation touristique et/ou soumises aux risques littoraux (Languedoc-Roussillon). c) Le diagnostic de la mission sur le traitement des terrains de camping Le zonage spécifique des terrains de camping avait initialement un double objectif : ­ favoriser cette activité de loisir en plein air dans des lieux adaptés, ­ « protéger » de l'immobilier touristique le foncier de cette activité pour permettre au plus grand nombre de partir en vacances. 104 Côtes d'Armor, Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Landes... Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 78/137 Rapport n°007707-01 Le « durcissement » des terrains de camping fait qu'aujourd'hui cette spécificité a perdu beaucoup de son sens et n'est plus guère prise en compte dans les PLU. Leur réglementation a beaucoup évolué ces dernières années 105, ainsi que les pratiques ; il est indispensable d'établir une doctrine nationale actualisée qui permette d'appliquer sans divergence les dispositions particulières de l'article L. 146-5. Une ambiguïté importante demeure en effet sur la qualification en matière d'urbanisme de l'hôtellerie de plein air, qui s'éloigne de plus en plus de la pratique du camping. En fonction de cette qualification (espaces urbanisés ou espaces spécifiques), l'interprétation des dispositions particulières au littoral à leur encontre peut considérablement varier. Toutefois, en s'appuyant sur la jurisprudence, la plupart des services les assimilent à de l'urbanisation et leur en appliquent strictement les règles, mais ils ne les qualifient pas pour autant selon la typologie des espaces urbanisés telle que définie par la loi Littoral (villages, hameaux, autres) rendant juridiquement incertain tout développement de cette activité de plein air dans les communes littorales. d) Recommandations de la mission · Clarifier les dispositions relatives aux terrains de campings, notamment la possibilité ou non de délimiter des secteurs spécifiques à partir d'un ensemble de terrains de camping existants, dûment autorisés, dès lors que leurs caractéristiques le justifient (critères à définir) et, à partir de cette délimitation, la possibilité ou non de leur extension (hors bande littorale, extension en continuité et extension limitée dans les espaces proches du rivage). Intégrer à cette réflexion nationale la classification mise en oeuvre dans le département des Pyrénées-Atlantiques bien qu'elle ne corresponde pas à une analyse de secteurs spécifiques mais de terrains de camping. Au préalable, recenser les contentieux portant sur cette thématique en veillant tout particulièrement à bien identifier les problèmes liés à leur « durcissement » et à la spéculation sur le foncier. 3.4.2. Les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières · · Article 146-4-I modifié (art. 109 de la loi d'orientation agricole du 10 juillet 1999 et art. 235 de la loi relative au développement des territoires ruraux du 23 février 2005) L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières qui sont incompatibles 105 Décret n°2011-1214 du 29 septembre 2011 et circulaire du 28 novembre 2011. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 79/137 avec le voisinage des zones habitées peuvent être autorisées, en dehors des espaces proches du rivage, avec l'accord du préfet après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysage et de sites. Cet accord est refusé si les constructions ou installations sont de nature à porter atteinte à l'environnement ou aux paysages. Les dispositions du premier alinéa ne font pas obstacle à la réalisation de travaux de mise aux normes des exploitations agricoles, à condition que les effluents d'origine animale ne soient pas accrus. a) Le constat des services sur les procédures liées aux constructions agricoles L'application du dispositif dérogatoire est très variable d'un département à l'autre : ­ les dérogations sont généralement accordées sans difficulté hors des espaces proches du rivage (par exemple, 91% des demandes déposées en 2009 dans le département de la Manche ont reçu une suite favorable) ; les pratiques diffèrent dans les espaces proches du rivage où toute dérogation est interdite (ce qui contribue à la réticence des collectivités de les délimiter dans leur PLU). La procédure de dérogation créée en 2005 y est appliquée de façon très souple en interprétant parfois très librement la délimitation des espaces proches du rivage, voire en l'ignorant. ­ Les avis des services sont plus ou moins suivis par les services préfectoraux . Pour en faciliter l'application, un certain nombre de services ont élaboré, en liaison avec les organismes professionnels, des chartes ou des guides (département de la Manche). b) Les difficultés rencontrées par les services pour mettre en oeuvre les procédures relatives aux constructions liées aux activités agricoles L'agrandissement des exploitations est généralement autorisé dans les espaces proches du rivage (extension limitée en continuité d'exploitations ou en discontinuité pour les ouvrages de mise aux normes). Les services signalent l'ambiguïté de cette règle quand il s'agit de la mise aux normes du bien-être animal, qui exige une augmentation significative des surfaces, et de l'inapplicabilité de la limité fixée « sans augmentation des effluents ». Les problèmes posés par les regroupements d'élevages, les déplacements d'installations, ne sont pas réglés par le dispositif dérogatoire en espaces proches du rivage... Il ne s'agit plus d'extension limitée (Finistère). Les logements de fonction sont autorisés par certains services (bergeries dans la Manche, Bretagne) bien qu'ils ne soient pas incompatibles avec le voisinage des zones Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 80/137 habitées (critère pour accorder la dérogation). Ces services sont toutefois conscients que ce type d'autorisations créent des « rentes de situation ». La réalisation de hangars plus ou moins isolés soulève également des interrogations, car ils peuvent être réalisés en continuité de l'exploitation (cas de l'Aude). Par ailleurs, l'utilisation de ces bâtiments agricoles peut évoluer dans le temps (transformation en habitations ou en restaurants), y compris dans des espaces remarquables106. La DDTM de Charente-Maritime a élaboré une note de doctrine sur ce sujet. Les serres, qui ne sont pas considérées comme constitutives d'urbanisation par les services de l'État (Finistère, Pyrénées-Atlantiques), sont autorisées en dehors de la bande littorale, alors que la jurisprudence s'est prononcée différemment. Le problème est encore plus difficile à régler dès lors que le projet associe serres et ferme photovoltaïque (Pyrénées-Atlantiques). c) Le diagnostic de la mission sur la mise en oeuvre des procédures liées aux activités agricoles Les caractéristiques des activités agricoles (mais aussi pastorales, forestières, ostréicoles...) et les problèmes soulevés par leur développement, voire leur simple maintien, diffèrent considérablement d'un littoral à un autre. Dès lors, l'élaboration locale de chartes ou de guides en concertation avec les parties prenantes peut être de nature à faciliter l'application de ce dispositif dérogatoire. En revanche, ils ne doivent pas aller au-delà de la doctrine administrative élaborée au niveau national. Les recherches de solutions d'implantation alternatives ne sont jamais évoquées et les motifs justifiant la localisation du projet rarement développés (évaluation environnementale). d) Recommandations de la mission · Elaborer une doctrine nationale clarifiant l'application des procédures dérogatoires liées aux activités forestières et soumettre à la validation de l'administration centrale les chartes et guides locaux avant diffusion. Renforcer le contrôle des autorisations dérogatoires et l'effectuer dans la durée. 3.4.3. Les difficultés liées aux installations d'énergie renouvelable · Le problème soulevé pour l'implantation d'éoliennes terrestres dans les communes concernées par la loi Littoral a fait l'objet d'une mission d'audit spécifique confiée au CGEDD107. Certes, cette mission ne concerne que la Corse et les départements 106 Le problème de la transformation des constructions autorisées car nécessaires aux activités économiques traditionnelles est encore plus sensible pour les installations ostréicoles. Rapport CGEDD n° 008203-01 sur « le développement de l'énergie éolienne terrestre dans les DOM et en Corse ». 107 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 81/137 d'outre-mer mais les difficultés que soulève le cadre législatif et réglementaire sont de même nature. Aussi la présente mission ne les a-t-elle pas analysées. Elle a toutefois recueilli les observations des services. a) Le constat des services sur l'implantation des éoliennes terrestres Pour les services, il n'y a pas d'ambiguïté : la réglementation actuelle ne permet pas d'implanter à terre des éoliennes de plus de 12 m dans les communes littorales. Le principe de l'extension de l'urbanisation en continuité est contraire aux règles de distance imposées pour l'installation de ce type d'équipements. Il en est de même de toute implantation d'activités exigeant par voie réglementaire une certaine distance des zones d'habitation (ou de toute autre construction). b) Les difficultés rencontrées par les services Les services sont interpellés par les collectivités sur l'incohérence des politiques publiques promues par l'État (développement des énergies renouvelables et protection du littoral). c) Le diagnostic de la mission Il ne s'agit pas, pour la mission, d'incohérence de politiques publiques comme cela a été trop souvent entendu au cours de cet audit, mais de choix prioritaire portant sur une partie du territoire national. Ce choix relève des motifs mêmes de la loi. La loi Littoral est porteuse d'une politique spécifique d'aménagement visant à reporter à l'arrière du littoral toute urbanisation nouvelle, y compris donc les activités ne justifiant pas la proximité immédiate de l'eau, y compris aussi les activités économiques isolées. Il convient d'afficher plus clairement un tel choix. Il a été mis en évidence lors des débats parlementaires et, de plus, clairement exprimé dans le texte législatif en ce qui concerne les ICPE : « Elles (les dispositions particulières au littoral) sont également applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement » (art. L.146-1 - dernier alinéa). En revanche, il n'est pas souhaitable de laisser dire qu'aucune implantation économique n'est possible dans les communes littorales. Des zones d'activités, qu'il convient d'identifier en espaces urbanisés, existent et peuvent y être développées dès lors qu'elles respectent les différentes dispositions particulières au littoral. d) Recommandations de la mission · Mieux expliciter les enjeux sur le littoral justifiant une politique restrictive d'implantation d'activités isolées (hors zones d'activités, hors activités agricoles, pastorales, forestières et maritimes dont un régime dérogatoire a été intégré à la loi). Analyser les conséquences (avantages et inconvénients) dans les communes littorales continentales, les communes iliennes autres que la Corse et les communes riveraines des grands lacs, de l'application des recommandations Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 82/137 · Rapport n°007707-01 du rapport du CGEDD précité, portant sur le cadre législatif et réglementaire applicable aux éoliennes dans les départements d'outre-mer et en Corse. 3.5. Les dispositions relatives aux espaces à préserver de l'urbanisation Outre la bande littorale où toute extension de l'urbanisation est interdite en dehors des espaces urbanisés, la loi Littoral prévoit que soient identifiés d'autres types d'espaces à préserver également de l'urbanisation. Ces espaces où s'appliquent des règles qui leur sont propres, concernent l'ensemble du territoire communal et donc bien sûr la bande littorale. Comme pour les espaces urbanisés, les dispositions particulières propres à chaque type d'espaces naturels, agricoles ou forestiers se cumulent sur la bande littorale avec celles qui lui sont propres. 3.5.1. Les espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation Article L.146-2 - Les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme doivent prévoir des espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation. La circulaire de 1991 en précise la conception : « composantes positives qui séparent selon leur échelle des zones d'urbanisation présentant une homogénéité physique et une certaine autonomie de fonctionnement. L'étendue de ces coupures doit être suffisante pour permettre leur gestion et assurer leur pérennité. ». Elles devront figurer avec un zonage propre (ND ou NC). Les services de l'État devront bâtir leur position concernant leur localisation sur la base d'études. La circulaire de mars 2006 n'évoque pas sur cette disposition. a) Le constat des services sur l'identification de coupures d'urbanisation Si la notion de coupure d'urbanisation ne semble pas poser de difficultés majeures aux services, il n'en est pas de même de son application. Beaucoup de PLU littoraux n'identifient pas de coupures d'urbanisation. Les SCoT le font davantage mais de façon encore insuffisante. Certains élus estiment que cette disposition est incohérente avec le principe d'extension de l'urbanisation en continuité de l'existant. Il n'est pas toujours évident de délimiter et surtout de justifier des coupures d'urbanisation dans les PLU littoraux ruraux en raison du faible niveau d'urbanisation. A l'inverse, les coupures d'urbanisation dans les PLU des communes très urbanisées nécessitent des délimitations très précises, voire des micro-coupures, permettant de mettre fin à une urbanisation continue le long des axes principaux. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 83/137 Il n'y a pas beaucoup d'éléments de jurisprudence108. b) Les difficultés rencontrées par les services pour son application Les différences d'application par les services sont importantes d'un département à un autre, tout particulièrement dans l'identification des activités qui peuvent y être autorisées : ­ Hébergements liés aux activités de loisir : quelques services s'interrogent encore sur la possibilité d'y autoriser des opérations lourdes comme les golfs immobiliers ou les « center parks » ; plus nombreux sont ceux qui hésitent à bloquer des opérations plus modestes visant à assurer la viabilité économique de centres de loisirs tels que des centres équestres. Constructions de bâtiments agricoles : si les extensions limitées des bâtiments existants ne posent pas de problème d'autorisation, il n'en est pas de même pour de nouvelles constructions liées à l'activité agricole, notamment en espaces proches du rivage. ­ D'une façon générale, se pose pour les services le problème du changement d'usage de bâtiments existants, avec ou sans extension, qui remet en cause le caractère de coupure d'urbanisation. Face à ces incertitudes, certains services vont jusqu'à n'autoriser dans les coupures d'urbanisation que des aménagements légers. Les différences d'échelles entre les PLU et les documents de rang supérieur (DTA, SCoT) constituent un problème difficile à gérer (grandes coupures et coupures locales)109. Lorsque ces documents identifient des coupures d'urbanisation, il est rare que les PLU les traduisent dans un zonage et un règlement appropriés et surtout en identifient d'autres. L'obligation de définir des coupures d'urbanisation dans les PLU ne s'impose pas aux révisions partielles ne touchant qu'une partie jugée non significative du territoire communal. Les services notent toutefois des évolutions positives. Pour les services, l'État ne dispose pas de moyens réellement contraignants pour les imposer aux collectivités, ou ne marque pas sa volonté d'y recourir. De plus, leur identification dans les documents d'urbanisme ne règle pas le problème de leur gestion. Enfin, Les services observent un grignotage dans le temps des coupures d'urbanisation, car leur périmètre n'est pas juridiquement garanti dans le temps (cf. jurisprudence). c) Le diagnostic de la mission sur les coupures d'urbanisation littorales L'enjeu des grandes coupures d'urbanisation sur le littoral se joue au niveau des SCoT : tout SCoT littoral qui n'identifierait pas de coupures d'urbanisation significatives 108 Mais néanmoins 42 arrêts (Cours d'Appel et Conseil d'État) dont c ertains sont illustrés et commentés dans le référentiel breton. 109 ... surtout lorsque ces documents ne donnent aucune indication sur la vocation de ces coupures. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 84/137 Rapport n°007707-01 devrait être déclaré non compatible par le préfet et, si nécessaire, être déféré au tribunal administratif. Certains élus estiment en effet cette disposition comme contraire au principe d'urbanisation en continuité de l'existant, en occultant les autres principes généraux de la loi à prendre concomitamment en compte (aménagement en profondeur ; accès au rivage ; protection des espaces naturels, agricoles, forestiers et paysagers, tout particulièrement dans les espaces proches du rivage). Les projets de territoire (PADD) des SCoT et des PLU devraient définir leur vocation (naturelle, agricole ou forestière, récréative, multifonctionnelle) afin de donner des orientations quant à la nature des activités qui y sont encouragées, ainsi que les principes à respecter dans les PLU. Au-delà de la protection des espaces naturels et agricoles par les documents d'urbanisme, des outils complémentaires existants pourraient également être mis en oeuvre pour soustraire ces espaces à la pression urbaine littorale : ­ les zones agricoles protégées (ZAP)110 définies par la loi d'orientation agricole de 1999, qui doivent présenter un intérêt général en raison de la qualité de leur production ou de leur situation géographique, ce qui est le cas des espaces agricoles littoraux ; les périmètres de protection et de mise en valeur des espaces naturels et agricoles péri-urbains (PAEN)111 définis par la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, qui permettent aux départements, avec l'accord des communes, d'y définir des programmes d'action et de sécuriser les activités agricoles qui s'y exercent. ­ Ces outils sont relativement peu utilisés par les services de l'État (ZAP) et par les collectivités territoriales (PAEN), les communes s'avérant peu enclines à mobiliser ces outils de protection qui doivent, lors de leur élaboration, exclure tous espaces urbanisés ou à urbaniser des PLU et être compatibles avec les SCoT lorsqu'ils existent mais qui, une fois approuvés, deviennent opposables aux PLU. L'État est insuffisamment vigilant sur la matérialisation de ces coupures en termes de zonage et de règlement dans les documents d'urbanisme, ainsi que sur leur évolution dans le temps. Ce sont les associations qui engagent à 95 % le contentieux portant sur l'application de cette disposition. d) Recommandations de la mission · En l'absence de coupures d'urbanisation dans les SCoT et les PLU, demander aux collectivités de modifier leurs documents d'urbanisme en justifiant les modifications demandées au-delà de la seule lutte contre l'urbanisation linéaire le long du rivage (préservation des accès au littoral et des perspectives sur la mer, protection des espaces naturels et agricoles littoraux...). 110 111 Art. L.112-2 du code rural. Art. L.143 et suivants du code de l'urbanisme. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 85/137 · Veiller à ce que les PADD des SCoT et des PLU définissent, avec un niveau de précision suffisant, les vocations, les fonctions économiques, sociales (aménités) et environnementales à donner aux coupures d'urbanisation que les collectivités auront identifiées, fixent les règles à décliner dans les PLU, voire proposent leur protection réglementaire (PAEN, ZAP...). Mettre en évidence la complémentarité de certaines de ces coupures d'urbanisation, dont l'intérêt écologique est avéré, avec la « trame verte et bleue » (TVB) : en confortant dans le temps les coupures d'urbanisation par leur connexion à un réseau plus large, en identifiant de nouvelles coupures d'urbanisation contribuant au fonctionnement de la trame verte et bleue, y compris en zones urbaines (micro-coupures). Proposer aux collectivités, le cas échéant, la mise en oeuvre d'outils de protection réglementaire des espaces agricoles littoraux soumis à forte pression (PAEN et ZAP). Identifier les coupures d'urbanisation des communes littorales dans le suivi de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers. 3.5.2. Les espaces remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel · · · Article L.146-6 modifié : Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive européenne n° 79-409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et, dans les départements d'outre-mer, les récifs coralliens, les lagons et les mangroves. Toutefois, des aménagements légers peuvent y être implantés lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. Un décret définit la nature et les modalités de réalisation de ces aménagements qui incluent, selon leur importance et leur incidence sur l'environnement, soit une enquête publique, soit une mise à disposition du public préalablement à leur autorisation. En outre, la réalisation de travaux ayant pour objet la conservation ou la protection de ces espaces et milieux peut être admise, après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 86/137 L'identification des espaces remarquables ou caractéristiques du littoral, ainsi que les règles qui s'y appliquent, ont fait l'objet de décrets d'application 112 et de nombreuses instructions aux services dont la dernière en date du 15 septembre 2005. La circulaire du 14 mars 2006 ne les évoque pas mais celle du 20 juillet 2006 rappelle que les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral doivent être classés en tant que tels dans les PLU. La circulaire de juillet 2006 précise par ailleurs que : « s'il appartient en premier lieu aux communes d'identifier et de délimiter les espaces remarquables lors de l'élaboration ou de la révision de leur PLU, pour autant l'État doit avoir sa propre vision des espaces à qualifier de remarquables afin de pouvoir exercer pleinement son rôle lors des réunions d'associations notamment. Les études réalisées (...) pourront utilement être communiquées aux communes dans le cadre du PAC ». Cette instruction nuance pour le moins l'instruction donnée dans la circulaire de mars 2006 : « Les DDALL ne doivent en aucun cas être notifiés aux communes dans le cadre du « porter à connaissance » (PAC) ou de toute autre forme de notification à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme. » Bien sûr, il est ici question de notification, mais les services n'en ont pas moins été déstabilisés dans leurs pratiques de PAC. Certains d'entre eux ont dès lors « abandonnés » leur DDALL, d'autres au contraire ont estimé que la circulaire de juillet 2006 les encourageait à l'actualiser, en lançant des études complémentaires, et à en communiquer les informations aux communes (sans qu'il soit question pour autant de les notifier). a) Le constat des services sur l'identification des espaces remarquables et caractéristiques Les textes et instructions sont abondantes et précises (circulaire de 2005 notamment). Il n'y a guère de difficultés pour interpréter cette disposition, du moins au niveau de la doctrine. Les services disposent pratiquement tous d'une cartographie identifiant et délimitant les espaces remarquables à une échelle suffisamment précise pour leur PAC. Il y a un recoupement fréquent avec les espaces juridiquement protégés (sites classés, zones de protection spéciale, réserves naturelles...) ou inventoriés par l'État (ZNIEFF notamment). Les espaces remarquables sont rarement identifiés comme tels dans les documents d'urbanisme. Cette carence est jugée de peu d'effets par les services qui veillent à ce qu'ils soient classés en zones N avec un règlement adapté dans les PLU, excepté pour les zones humides qui, lorsqu'elles ne sont pas identifiées comme espaces 112 Décret n°89-694 du 20 septembre 1989 et décret n°2004-310 du 29 mars 2004. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 87/137 remarquables (les espaces caractéristiques ayant tendance à être oubliés), ne sont pas, d'une façon générale, respectées par les collectivités113. b) Les difficultés rencontrées par les services pour l'application de cette disposition ­ Pour leur identification et délimitation Un certain nombre de documents départementaux cartographiant les espaces remarquables du littoral n'ont pas fait l'objet d'actualisation, ce qui peut constituer une source de fragilité juridique lors des « porter à connaissance ». Les cartographies disponibles ne règlent pas toujours les problèmes de délimitation à la marge, notamment dans le cas des zones humides. Dès lors qu'ils sont identifiés dans un document de rang supérieur (DTA, SCoT), il est rare que les PLU en identifient de nouveaux ; certains PLU ne les ont pas encore repris (Loire-Atlantique). La question des espaces remarquables en mer est techniquement et juridiquement plus délicate que côté terre (identification, délimitation, prise en compte dans les documents d'urbanisme et les autorisations...) : cas des extractions d'agrégats ou de zones de dépôts en mer. ­ Pour leur pérennité dans le temps Si leur identification ne pose pas de difficulté majeure (excepté en mer), il n'en est pas de même de leur gestion dans le temps, ce qui pourrait être de nature à remettre en cause, à terme, leur caractère d'espaces remarquables. La délimitation des espaces remarquables délimités dans les POS/PLU peut être remise en cause à l'occasion de projets précis. Les cas sont de plus en plus nombreux (port de plaisance à Portbail, passage de câbles...). ­ Pour la prise en compte des activités La possibilité de maintenir, voire de développer, certaines activités dites « de gestion » en espaces remarquables, mais dont les aménagements ne peuvent être considérés comme « légers », conduit à un « pastillage » de ces zones naturelles114 dans les PLU (bâtiments ostréicoles dans les départements de Charente-Maritime et de Gironde). La pression pour adosser à des bâtiments d'exploitation agricoles ou pastoraux des logements dits de fonction (sièges d'exploitation) est de plus en plus forte. 113 Pour certains services, si, seules, certaines zones humides littorales sont des espaces remarquables, toutes sont des espaces caractéristiques du littoral. Le pastillage est un terme utilisé en urbanisme pour décrire la technique qui consiste à créer de toutes petites zones avec une réglementation spécifique au sein d'une grande zone dont le règlement est considéré comme incompatible avec le maintien ou le développement des activités dans une telle zone. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 88/137 114 Rapport n°007707-01 Les procédures relatives à la réalisation des « aménagements légers » ne sont pas totalement maîtrisées par les services et continuent de leur poser des problèmes de légalité (goudronnage des pistes cyclables, réalisation de sentiers avec ou sans permis d'aménager). c) Le diagnostic de la mission sur la délimitation des espaces remarquables ou caractéristiques Bien que cette disposition particulière du code de l'urbanisme ne soit pas la plus complexe, son application soulève encore des difficultés. La connaissance des espaces remarquables ou caractéristiques des communes littorales par les services de l'État n'est pas encore stabilisée, tout particulièrement en mer (développement du réseau Natura 2000 défini en application des directives européennes dite « habitat-faune-flore » et « oiseaux »115). L'approche des espaces caractéristiques du patrimoine culturel est relativement moins développée et se fait essentiellement par le biais de la partie naturelle des sites protégés. La réglementation qui doit y être appliquée n'est pas non plus totalement maîtrisée par les services et a fortiori reprise dans les PLU (aménagements légers). Pas plus que ne l'est la réglementation relative à l'évaluation environnementale des projets : tout aménagement réalisé dans les espaces remarquables ou caractéristiques est soumis à étude d'impact, ce qui devrait permettre d'apprécier son caractère d'intérêt général et surtout la pertinence de sa localisation (analyse des solutions de substitution). Si l'espace remarquable est également un site Natura 2000, l'étude d'incidence exigé peut être incluse dans l'étude d'impact du projet. Les sites Natura 2000 sont particulièrement nombreux sur le littoral. d) Recommandations de la mission · Rappeler dans les guides relatifs à l'élaboration des documents d'urbanisme l'obligation : d'identifier dans les SCoT les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral en tant que tels et d'y prescrire des objectifs de gestion ; de les délimiter dans les PLU avec un zonage spécifique renvoyant à un règlement conforme a minima à l'article R.146-2. Donner l'instruction aux services : d'assurer une actualisation permanente des espaces remarquables et caractéristiques du littoral en distinguant ceux qui relèvent d'une protection juridique et ceux qui relèvent d'inventaires avec effets juridiques indirects (ZNIEFF par exemple) ; de garder la trace de la qualification en espaces remarquables et, plus précisément, de conserver l'historique des inventaires, des actualisations et des notifications ou communications ; · 115 Cf. références en note de bas de page n° 70. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 89/137 d'examiner la pertinence d'une protection réglementaire des espaces qui en seraient dépourvus 116; de renforcer l'analyse qualitative des évaluations environnementales des projets et des plans et programmes affectant les espaces remarquables et caractéristiques du littoral. · Bien que nombre de cas évoqués dans le domaine de l'urbanisme paraissent à la mission ne pas poser de difficulté particulière (problème de formation des agents), mettre en place un appui juridique au niveau national incluant les démarches d'évaluation environnementale (études d'impact et études d'incidence Natura 2000). 3.5.3. Les espaces boisés significatifs Article L.146-6 - Le plan local d'urbanisme doit classer en espaces boisés, au titre de l'article L.130-1 du présent code, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après consultation de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites. Cette disposition n'a pas fait l'objet d'instructions spécifiques. a) Le constat des services sur l'identification des espaces boisés les plus significatifs La délimitation des parcs et espaces boisés significatifs et leur classement dans les PLU ne semblent pas poser de problème particulier aux services. Les parcs et espaces boisés significatifs sont identifiés dans la plupart des DDALL. b) Les difficultés rencontrées par les services Des contentieux locaux demeurent, toutefois, possibles (constructions illicites). Contrairement aux textes réglementaires, une DDTM estime que le classement des espaces boisés significatifs ne concerne que les espaces proches du rivage. c) Le diagnostic de la mission sur l'identification des espaces boisés les plus significatifs Leur identification dans les DDALL ne règle pas toujours les problèmes de délimitation dans les PLU, notamment lorsque les communes littorales disposent d'importants massifs forestiers. Les appréciations sur les espaces significatifs diffèrent généralement en fonction du taux de boisement des communes. 116 Sites classés, par exemple, pour les espaces dits caractéristiques du patrimoine naturel et culturel. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 90/137 Rapport n°007707-01 L'évolution dans le temps des espaces boisés ainsi identifiés, sur le plan tant quantitatif que qualitatif, ne fait pas l'objet d'un suivi, pas plus que le suivi des mesures compensatoires en cas de déclassement. Les enjeux et les problèmes se situent généralement aux franges de ces espaces classés. d) Recommandations de la mission · Actualiser l'inventaire des parcs et espaces boisés significatifs situés dans les communes littorales (ou le réaliser s'il n'existe pas), en liaison avec le Conservatoire du littoral, l'Office national des forêts et les Conseils généraux en charge des espaces naturels sensibles, afin de pouvoir veiller à leur pérennité. Développer, comme pour les espaces remarquables ou caractéristiques, une réflexion avec les parties prenantes (communes, propriétaires, établissements publics) sur la gestion de ces espaces classés, en prenant en compte le taux de boisement de la commune. · 3.6. Les autres dispositions ayant fait l'objet d'observations significatives de la part des services : la gestion du domaine public maritime (DPM) La présente mission d'audit, ciblée sur l'application des dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme, ne portait pas sur la gestion du domaine public maritime (DPM). Toutefois la mission a recueilli un certain nombre d'éléments, repris ci-après . a) Le constat des services sur la gestion du DPM Les méthodes de contrôle de la gestion du DPM et tout particulièrement des autorisations d'occupation temporaire (AOT) ont été améliorées (logiciel de contrôle en Pyrénées-Atlantiques). Les services ont, dans leur ensemble, entrepris des actions de « reconquête » du DPM, en particulier pour les travaux de lutte contre l'érosion et l'occupation commerciale (ouvrages et équipements sans autorisation). Les relations avec les communes ont été renforcées à l'occasion de l'attribution ou du renouvellement des concessions de plages, mais aussi pour la gestion des autorisations d'occupation temporaire en général. En Haute-Corse, une commission de gestion du DPM a ainsi été instituée par un arrêté préfectoral du 23 juillet 2010 pour se prononcer sur les AOT et en faciliter le contrôle ; un document définissant la doctrine et le fonctionnement de la commission a été élaboré. Les délais d'instruction des sites Natura 2000 en mer ont été réduits. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 91/137 b) Les difficultés rencontrées par les services Malgré ces progrès, la gestion du DPM pose encore quelques problèmes liés au bornage qui n'est pas partout achevé (certains procès-verbaux sont jugés discutables sur ce point par les services eux-mêmes). Les autorisations dans les espaces remarquables en mer soulèvent de nombreux problèmes : par exemple, l'autorisation des cales ostréicoles qui ne sauraient être considérées comme des « aménagements légers ». c) Le diagnostic de la mission établi en fonction des observations recueillies Le « décloisonnement » du fonctionnement des services déconcentrés (renforcement des méthodes de travail entre services et unités en charge de la planification, de l'application du droit des sols, de la gestion du DPM, de l'évaluation des plans et projets) doit être poursuivi dans une optique de gestion durable du DPM (par exemple, pour la gestion du trait de côte). Le bornage du DPM n'est pas justifié sur l'ensemble du littoral : il doit être réalisé là où existent des projets ou dans les secteurs où se posent des problèmes nécessitant cette délimitation. d) Recommandations de la mission · Développer le volet sur l'espace marin des SCoT (SMVM) dès lors que les services de l'État y ont identifié des enjeux économiques, sociaux et/ou environnementaux. Organiser un fonctionnement en réseau des délégations à la mer et au littoral (DLM) si ce n'est pas déjà le cas. Généraliser la démarche engagée par le préfet de Haute-Corse (commission de gestion des AOT)117. Clarifier la nature des activités maritimes autorisées dans les espaces marins qualifiés de remarquables ou de caractéristiques. · · · Seules les recommandations d'ordre général formulées dans cette partie consacrée à l'analyse de l'application des dispositions particulières au littoral sont reprises dans le plan d'action proposé ci-après à l'administration centrale. La mission estime en effet indispensable que les recommandations propres à chaque disposition fassent l'objet d'un travail d'approfondissement et de validation dans le cadre d'un groupe de travail national dont l'objet serait d'actualiser la doctrine administrative. 117 Le préfet de la zone de défense Sud a formulé le souhait que cette doctrine soit généralisée à tout le littoral méditéranéen. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 92/137 Rapport n°007707-01 4. Conclusion et recommandations Face au constat d'une pression de l'urbanisation qui reste parmi les plus importantes du territoire métropolitain, les grands principes portés par la loi Littoral gardent, aujourd'hui encore, toute leur acuité. La recherche d'un aménagement équilibré du littoral reposant sur une vision prospective de son devenir et sur une valorisation de ses richesses spécifiques, ne peut que conforter les principes d'un développement urbain et économique orienté vers l'arrière-pays, ne laissant se développer sur la frange côtière que les activités nécessitant la proximité immédiate de la mer et respectant les grands écosystèmes littoraux comme les espaces agricoles et forestiers qui en façonnent les paysages. La pertinence de ces principes d'aménagement se trouve même renforcée par les défis à relever face au changement climatique et aux risques littoraux dont la réalité brutale nous a été rappelée encore récemment par la catastrophe de Xynthia. Il en est de même pour des défis plus anciens, remis sous les feux de l'actualité par le Grenelle de l'environnement, que sont la maîtrise de l'étalement urbain, la gestion économe de l'espace, la préservation de la biodiversité au travers de la trame verte et bleue. Les nombreuses études menées sur le sujet, les bilans périodiques publiés, ont montré que la loi Littoral a contribué à protéger cet espace fragile et limité et en a freiné la dégradation, même si à l'évidence elle n'est pas parvenue à la stopper. Les dispositions particulières au littoral regroupées dans le code de l'urbanisme ne sauraient suffire, à elles seules, à endiguer cette dégradation. La lutte contre les pollutions marines, la gestion du trait de côte, la prévention des risques, la préservation de la biodiversité, le maintien des activités traditionnelles de gestion et de valorisation de l'espace, réclament tout autant l'application rigoureuse de politiques publiques spécifiques. Mais une application rigoureuse de ces dispositions particulières doit contribuer, conformément à l'article 1 de la loi de 1986118, à la mise en cohérence des politiques sectorielles et permettre de mieux répondre à tous ces défis auxquels le littoral est confronté de façon souvent amplifiée, exacerbée, par rapport aux autres parties du territoire national. Au vu des constats réalisés par la mission d'audit et développés dans les parties 2 et 3 du présent rapport, la mise en oeuvre de ces dispositions rencontre, plus de 25 ans après le vote de la loi Littoral, de nombreuses difficultés d'application, tant par les collectivités en charge de les traduire dans leurs documents d'urbanisme et dans l'instruction des actes individuels que par les services de l'État en charge de veiller à la compatibilité de ces documents et actes avec la loi. L'importance de la jurisprudence, qui lui est consacrée encore aujourd'hui, en témoigne. C'est pour répondre à ces difficultés d'application que la circulaire ministérielle de mars 2006 demandait aux services de l'État de procéder à une analyse juridique des documents locaux d'urbanisme littoraux existants et de conseiller aux collectivités de 118 Article aujourd'hui codifié dans le code de l'environnement (art. L.321-1). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 93/137 les mettre en révision en cas d'incompatibilité constatée avec les dispositions particulières de la loi Littoral. L'objectif recherché était clairement affiché : sécuriser juridiquement les actes individuels d'occupation délivrés sur la base de documents d'urbanisme, euxmêmes juridiquement sécurisés au regard des dispositions particulières du littoral. Une doctrine administrative, jointe en annexe, visait à mieux en cerner les notions et principes portés par ces dispositions et à en faciliter ainsi l'application. Si cette circulaire a provoqué une réelle mobilisation des services de l'État, la diffusion de la doctrine administrative n'a pas permis d'assurer une application homogène de ces dispositions sur l'ensemble des départements français concernés. A la question posée par le ministère sur l'hétérogénéité des modalités de leur application par les services de l'État dans les différents départements concernés, question à l'origine du présent audit, la mission répond clairement et sans ambiguïté par l'affirmative. Il y a effectivement une grande hétérogénéité d'un département à l'autre , d'une région à l'autre : ­ dans le niveau de mobilisation des services en fonction de la géographie, des enjeux, des acteurs, de l'histoire, y compris administrative ; dans les moyens et méthodes de travail développés (documents d'application de la loi Littoral, animation inter-services, coordination des actions avec les collectivités ; exercice du contrôle de légalité...) ; dans leur interprétation des dispositions (élaboration de doctrines locales et appréciation des situations au cas par cas). ­ ­ Mais, comme la mission s'est efforcée de le démontrer, ce grief d'hétérogénéité dans l'application des dispositions particulières au littoral trouve son origine tout autant dans l'esprit de la loi Littoral que dans une appropriation différenciée de la doctrine administrative diffusée en mars 2006 et complétée par la circulaire de juillet 2006. D'autres motifs y contribuent également, comme l'absence d'une vision stratégique partagée du devenir du littoral et l'insuffisance de pilotage des services de l'État sur cette politique d'aménagement spécifique, ou encore, la prédominance des politiques sectorielles et la faible traduction de ces dispositions particulières dans les documents de planification. Pour autant, la mission estime que l'objectif fixé aux services par la circulaire de mars 2006, à savoir la sécurisation juridique des documents d'urbanisme locaux, garde toute sa pertinence. L'élaboration d'une nouvelle circulaire le confirmant lui parait donc opportune, sous réserve de tirer les enseignements des constats dressés par la mission d'audit auprès des services. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 94/137 Le premier constat dressé par la mission d'audit porte sur l'absence de plan d'accompagnement de cette circulaire permettant d'assurer aux services l'appui indispensable à sa mise en oeuvre. Aucun dispositif n'a été défini par l'administration centrale pour en suivre la bonne application. Cette absence d'accompagnement a été d'autant plus mal ressentie par les services que, s'agissant d'une loi interprétative, ils ont été confrontés à de nombreuses difficultés d'application. Toute nouvelle instruction aux services devrait donc être précédée par un travail préparatoire au niveau central associant les services déconcentrés et accompagnée d'un plan d'action pour accompagner sa mise en oeuvre. Le deuxième constat concerne la fragilité -et les limites- de la doctrine administrative en la matière. Au-delà des éléments discutés et discutables de la doctrine diffusée en mars 2006, qui nécessiterait en tout état de cause une actualisation au regard notamment de la jurisprudence la plus récente, demeureront les interprétations de cette doctrine, l'appréciation au cas par cas des situations locales, et surtout, l'interprétation souveraine du juge administratif. Pour faire face à ce constat et développer les argumentaires et les justifications nécessaires, il conviendrait que l'administration centrale organise un appui juridique aux services déconcentrés et les forme à l'application d'un droit plus appréciatif que normatif. Le troisième constat est qu'il paraît difficile de mobiliser les services de l'État dans la durée sans leur apporter une vision stratégique de la politique publique qu'ils sont chargés de mettre en oeuvre. Or les services ne disposent pas aujourd'hui d'une vision d'ensemble sur le devenir du littoral. L'élaboration de la stratégie nationale pour la mer et le littoral pourrait offrir ce cadre. C'est à partir de ces constats que la mission a structuré les recommandations émises dans le présent rapport sous la forme d'un plan d'action qui s'articule autour de trois grands axes : ­ Affirmer le rôle majeur des schémas de cohérence territoriale (SCoT) dans l'application de dispositions particulières au littoral (élaboration des dossiers d'association des services de l'Etat sur la base d'une doctrine administrative réactualisée) et renforcer le rôle d'encadrement des documents de rang supérieur (DTA, SAR) quand ils existent ; Assurer la sécurisation juridique de l'application des dispositions particulières au littoral en engageant une analyse systématique de compatiblité des plans locaux d'urbanisme (méthode et leviers d'action) ; ­ Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 95/137 ­ Organiser le pilotage du plan d'action et l'animation des services de l'État en charge de le mettre en application. Ce plan d'action ne saurait toutefois répondre à l'attente des services de disposer d'une vision stratégique de l'aménagement littoral à long terme, leur permettant d'inscrire leurs actions dans une politique publique clairement identifiée et porteuse des principes du développement durable. Il s'agit là d'un autre chantier, autrement plus complexe, qui reste à ouvrir par l'administration centrale en mobilisant toutes ses composantes. La mission propose cependant de l'intégrer dans le plan d'action comme quatrième grand axe, même si son contenu comme son échéance en font un axe à part. ­ Redonner une lisibilité d'ensemble à la politique d'aménagement du littoral, en mettant en perspective les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme avec la future stratégie nationale de la mer et du littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 96/137 Recommandations à l'administration centrale pour la mise en place d'un plan d'action relatif à l'application des dispositions particulières au littoral Axe 1 ­ Replacer la planification territoriale au coeur de la politique d'aménagement du littoral 1.1 Affirmer le rôle majeur des schémas de cohérence territoriale littoraux (SCoT) dans la déclinaison territoriale des dispositions particulières au littoral , en y intégrant, en tant que de besoin, un chapitre schéma de mise en valeur de la mer et renforcer le rôle d'encadrement des documents d'aménagement de rang supérieur quand ils existent (DTA, SAR119) 1.1.1 Objectif : traduire à la bonne échelle particulières au littoral, et plus particulièrement pour : les dispositions - concevoir un aménagement en profondeur du développement urbain et économique, y compris touristique (identification d'une armature urbaine reposant sur une typologie des espaces urbanisés composés de pôles principaux (agglomérations) et de pôles secondaires (villages) et l'identification des grandes coupures d'urbanisation ; - identifier les espaces proches du rivage, les secteurs d'érosion comme les grands écosystèmes de leur façade littorale, les espaces remarquables ou caractéristiques ; - organiser les activités nécessitant la proximité de la mer (en lien avec le volet SMVM) et le maintien des activités agricoles, pastorales ou forestiers dans les communes littorales ; - déterminer, si nécessaire, des unités géographiques littorales cohérentes « participant aux équilibres économiques et écologiques littoraux » où s'appliqueraient les dispositions particulières ; - mettre en cohérence les politiques sectorielles par une approche transversale. 1.1.2 Moyens : : veiller à la compatibilité des ces documents avec les dispositions particulières au littoral et pour cela : - donner des instructions aux préfets pour coordonner ce chantier et celui de la mise en compatibilité des SCoT avec les lois Grenelle, en rappelant l'enjeu de la compatibilité « limitée » ; 119 En prenant en compte, si possible, les perspectives de l'acte III de la décentralisation en ce domaine. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 97/137 - s'appuyer sur la démarche d'évaluation environnementale des SCoT pour analyser les justifications et motivations des choix d'aménagement retenus par le maître d'ouvrage, notamment la fixation de la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser littoraux au regard de la loi Littoral ; - intégrer dans le dispositif de suivi de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers un suivi spécifique pour les communes littorales (bande littorale et espaces proches du rivage) ; - renforcer, si nécessaire, le caractère obligatoire de la traduction de l'ensemble des dispositions dans les SCoT littoraux. 1.2 Actualiser et compléter la doctrine administrative sur l'application des dispositions particulières au littoral, la tenir à jour 1.2.1 Objectifs : assurer une lecture nationale des principes et notions portées par les dispositions particulières au littoral tout en facilitant leur interprétation par les services déconcentrés pour : - clarifier ce qui relève de la doctrine nationale et des adaptations locales ; - conseiller les collectivités et procéder aux analyses locales au cas par cas sur la base de mêmes référentiels nationaux ou de chartes locales validées par l'administration centrale. 1.2.2 Moyens : mettre en place un groupe de travail au niveau national comprenant des représentant de DREAL, de DDTM et de DDT concernées, des juristes spécialisés. - s'appuyant sur la jurisprudence la plus récente, - reprenant le travail réalisé au niveau territorial (guides, référentiels, chartes...) pour valoriser le travail des services mais aussi pour l'harmoniser en tant que de besoin. 1.3 Procéder à l'actualisation et à l'harmonisation des documents et outils d'application de la loi Littoral en clarifiant au préalable leur nature et leur contenu 1.3.1 Objectif : disposer au niveau territorial (départemental ou interdépartemental) des éléments de connaissance et d'analyse permettant de fonder la position de l'État pour : - produire des « porter à connaissance » et des notes d'enjeux argumentées aux collectivités dans le cadre de l'association des services à l'élaboration des documents d'urbanisme ; - veiller à la compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions particulières au littoral et, le cas échéant, assurer cette compatibilité dans le cadre du contrôle de légalité ou de tout autre moyen. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 98/137 1.3.2 Moyen : dans le cadre du groupe de travail précité, préciser les caractéristiques de ces documents et outils qui pourront, une fois définies, prendre la forme d'une note technique annexée à la future circulaire adressée aux services pour préciser : - la nature juridique des documents (documents de référence), - leur contenu (cartes et rédactionnel), - le champ géographique et l'échelle, - les modalités de leur élaboration, - les modalités de leur communicabilité aux collectivités et aux tiers. 1.4 Engager une évaluation des actions menées dans le cadre de l'atelier national du littoral 1.4.1 Objectif : tirer les enseignements des expériences locales auprès des collectivités locales concernées mais également des services. 1.4.2 Moyen : solliciter une mission auprès du CGEDD (programme 2013). Axe 2 - Assurer la sécurisation juridique de l'application des dispositions particulières au littoral en engageant une analyse systématique de compatibilité des POS/PLU 2.1 A l'issue des groupes de travail, préparer une nouvelle circulaire interministérielle (METL - MEDDE ­ MI) aux préfets, reprenant tout à la fois les enjeux portés par la loi Littoral et la priorité d'action que constitue la sécurisation juridique de son application 2.1.1 Objectif : faire de l'application des dispositions particulières au littoral une action prioritaire des DDTM - bien expliciter l'objectif recherché (sécurisation des actes individuels) et fixer un calendrier ; - préciser la démarche à mener vis-à-vis des collectivités locales et les leviers d'action à mobiliser par les services pour parvenir à l'objectif fixé ; - présenter les modalités d'appui mis en place au niveau central, notamment sur le plan juridique, et le rôle attendu du niveau régional ; - définir un dispositif de suivi et d'évaluation de sa mise en oeuvre. 2.1.2 Moyens : - faire une note technique sur les différents leviers d'action de l'État permettant aux préfets d'engager la mise en compatibilité des Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 99/137 documents d'urbanisme, note à mettre également en annexe de la circulaire ; - engager parallèlement une réflexion sur l'exercice du contrôle de légalité des documents d'urbanisme avec le ministère de l'Intérieur (DGCL) - introduire une procédure d'évaluation obligatoire des PLU tous les 6 ans dont le bilan pourrait conduire à une obligation de révision (à l'instar de ce qui est prévu pour les SCoT) et prévoir, le cas échéant, un retour au RNU (chantier législatif). 2.2 Mettre en place au niveau central une gestion stratégique du contentieux relatif aux dispositions particulières au littoral 2.2.1 Objectifs : - actualiser la doctrine administrative, - analyser les motifs d'incompatibilité posés par certains types de projets au regard de l'ensemble des législations et réglementations auxquels ils sont soumis et faire arbitrer les choix prioritaires au niveau gouvernemental (préférer les procédures dérogatoires, y compris pour les autres législations, à des modifications remettant en cause les principes de la loi Littoral) ; - apporter, en tant que de besoin, un appui juridique aux services dans le traitement des dossiers. 2.2.2 Moyens : - à définir en liaison avec la direction compétente (DAJ), - solliciter également la juridiction administrative pour examiner la possibilité d'accéder à ses bases de données. Axe 3 - Organiser le pilotage du plan d'action et l'animation des services en charge de le mettre en oeuvre 3.1 Nommer un chef de projet auprès du DGALN 3.1.1 Objectifs : - élaborer le plan d'action et son calendrier, - mettre en place les différents groupes de travail et la veille juridique (jurisprudence), - animer les services déconcentrés et organiser le soutien juridique, - définir et gérer le dispositif de suivi et d'évaluation, - participer à la réflexion transversale mer/littoral au niveau central (SNML et DSF, SMVM, expérience pilote DTADD Aquitaine...). 3.1.2 Moyens : - affecter à cette mission un cadre de haut niveau, - lui donner une feuille de route. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 100/137 3.2 Informer parallèlement les principaux acteurs de la démarche et les associer à sa mise en oeuvre 3.2.1 associer le ministère de l'Intérieur (DGCL) à l'élaboration du plan d'action et veiller à l'information préalable des préfets (réunion des préfets) ; 3.2.2 consulter le Conseil national de la mer et du littoral (CNML) et les grandes associations d'élus en rappelant les compétences respectives des collectivités locales et de l'État pour l'application des dispositions particulières au littoral. 3.3 Apporter un soutien méthodologique aux services et organiser le travail en réseau 3.3.1 au niveau national - participer à l'animation du réseau « aménagement/urbanisme » - créer et animer un forum « Questions/Réponses » en lien avec les référents régionaux « littoral » ; - organiser des rencontres nationales (ou inter-régionales) régulières au moins durant le plan d'action 3.3.2 au niveau régional (ou inter-régional) - demander la désignation d'un référent régional (ou inter-régional) en DREAL sur la thématique de l'aménagement littoral en charge d'animer le réseau des DDTM (et des DDT « grands lacs ») et de suivre le plan d'action à cet échelon ; - faire valider en comité de l'administration en région (CAR) la déclinaison régionale (on inter-régionale) du plan d'action et en suivre au moins une fois par an la mise en oeuvre ; - présenter en CAR un bilan annuel du contentieux lié à l'application de la loi Littoral. 3.3.3 au niveau départemental (ou interdépartemental) - élaborer ou actualiser les documents d'application de la loi Littoral ; - informer l'association départementale des maires (ADM) et autres parties prenantes de la démarche engagée au niveau local ; - engager, si ce n'est fait, l'analyse des risques juridiques des POS/PLU au regard des dispositions particulières au littoral ; - organiser le contrôle de légalité des documents d'urbanisme « en continu » (mesurer les avantages et inconvénients de le confier aux DDT ou aux services de préfecture, organiser les retours vers les DDT) ; Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 101/137 - organiser le contrôle de légalité des actes individuels dans les communes littorales avec transmission obligatoire des actes en préfecture pour les communes en assurant l'instruction (a minima pour les actes délivrés dans la bande littorale et les espaces proches du rivage lorsqu'ils sont délimités) ; - veiller au décloisonnement du fonctionnement des services au niveau interne en DDTM (services du siège/délégation à la mer et au littoral/unités territoriales) et à la coordination inter-services (DDT/préfectures), y compris avec l'échelon régional (DREAL, DIRM). Axe 4 - Redonner une lisibilité à la loi Littoral en mettant en perspective les dispositions particulières avec la future stratégie nationale de la mer et du littoral 4.1 Relancer la politique spécifique d'aménagement du littoral dans le cadre de la stratégie nationale de la mer et du littoral (SNML) 4.1.1 en veillant à développer une vision stratégique de leur devenir (travaux de prospective des futurs documents stratégiques de façade ­ DSF) ; 4.1.2 en y associant les collectivités territoriales au premier rang desquelles les régions mais aussi les autres parties prenantes. 4.2 Promouvoir les démarches de gestion intégrée des zones côtières (GIZC) 4.2.1 en clarifiant la nature différente de cette démarche par rapport à la planification ; 4.2.2 en veillant à mieux associer les services déconcentrés (préfets) aux procédures d'appels à projets. 4.3 Suivre la démarche pilote de la directive territoriale d'aménagement et de développement durable du littoral aquitain et du massif forestier de Gascogne (DTADD) pour en tirer les enseignements, notamment sur : 4.3.1 la réalisation de documents de référence co-construits avec les collectivités ; 4.3.2 la mise en place d'observatoires du littoral (indicateurs et méthodologie). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 102/137 4.4 Veiller à ce que les documents d'aménagement qui pourraient résulter du futur chantier de décentralisation soient compatibles avec la loi Littoral. Annick HELIAS Bertrand CREUCHET Aude DUFOURMANTELLE Membre Permanent Coordonnatrice Françoise GADBIN Inspecteur général de l'administration du développement durable Cyril GOMEL Architecte urbaniste en chef de l'Etat Bernadette VANDEWALLE Architecte urbaniste en chef de l'Etat Ingénieur des ponts, des eaux et des forêts Attachée principale d'administration de l'équipement Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 103/137 Annexes 1 ­ Lettres de mission 2 - Note de cadrage et bibliographie 3 ­ Liste des auditeurs et des services audités 4 ­ Note relative aux moyens de l'Etat pour s'opposer aux PLU et aux autorisations contraires à la loi Littoral 5 ­ L'application de la loi Littoral en Bretagne (synthèse) 6 ­ Les grands lacs de plus de 1000 hectares (synthèse) 7 ­ Glossaire des sigles et acronymes Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 105/137 1. Lettres de mission Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 107/137 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 108/137 2. Note de cadrage Note de cadrage de l'audit sur l'application de la loi littoral par les services de l'État (22 juin 2011) 1 - Contexte de l'audit 1.1 - Evolution de la loi Littoral Bien qu'ayant bénéficié d'un large consensus parlementaire lors de son vote en 1986, la loi littoral venant à l'encontre de nombreux intérêts particuliers, a été mise en oeuvre de façon progressive. Depuis quelques années, sous la pression d'une demande sociale forte, sa mise en oeuvre se précise et s'intensifie (circulaire du 14 mars et du 20 juillet 2006). Élaborée à la suite des 1ères lois de décentralisation de 1983, elle définit une politique nationale spécifique d'aménagement, de protection et de mise en valeur du littoral qui repose sur quelques grands principes : ­ ­ ­ ­ préserver les espaces rares et sensibles, gérer de façon économe l'espace des communes littorales, ouvrir plus largement l'espace littoral au public, y accueillir en priorité les activités dont le développement est lié à la mer. Ces principes sont traduits dans la loi par un certain nombre de dispositions d'application. Chaque littoral ayant ses particularités, il revient en premier lieu aux collectivités territoriales120 de mettre en oeuvre ces principes et dispositions dans leurs documents d'urbanisme, l'ensemble des communes littorales devant normalement disposer de tels documents. Leurs actions doivent être coordonnées avec celles de l'Etat. Pour en suivre l'application, les progrès réalisés comme les difficultés rencontrées, la loi prévoit que le gouvernement soumette régulièrement des rapports au Parlement. La loi relative au développement des territoires dite loi DTR du 23 février 2005 précise que ces rapports seront désormais réalisés tous les 3 ans. La plupart des articles de la loi littoral de 1986 sont aujourd'hui codifiés mais éclatés dans plusieurs codes. Certains de ces articles ont par ailleurs été soit modifiés, soit même abrogés. De ce fait la « lecture » de la loi littoral qui n'existe plus en tant que telle (seuls demeurent quelques articles), est devenue d'autant plus complexe. Par ailleurs, la loi n'ayant pas toujours été mise en oeuvre par les autorités compétentes dans leurs documents d'urbanisme, ces dispositions ont fait l'objet d'une jurisprudence abondante, créant des constantes de position mais en maintenant de nombreuses incertitudes.121 120 121 cf. article 1 de la loi et circulaire du 14 mars 2006. C'est le cas notamment avec le L.146-4-1 toute construction doit être en continuité des agglomérations et villages. S'est ainsi posé la question de : Qu'est-ce qu'un village ? qu'est-ce qu'une agglomération ? la jurisprudence Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 109/137 La loi dite de Développement des Territoires Ruraux du 23 février 2005 participe au toilettage de la loi littoral avec notamment des modifications sur les espaces proches du rivage qui ont précisé des assouplissements sur les installations agricoles... Enfin en 2006 il y a eu une nouvelle mobilisation des services de l'État au travers des circulaires du 10 Mars et 20 Juillet qui ont relancé l'action des services pour l'application de la loi littoral en apportant des éléments de cadrage réactualisés et en insistant sur la nécessaire mise en compatibilité des documents d'urbanisme. 1.2 - Évolution du contexte juridique et institutionnel D'autres textes législatifs nationaux (la loi SRU de 2000, les lois "Grenelle" de 2009 et 2010, la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche de 2010) et communautaires (la DCE) qui ne sont pas spécifiques au littoral ont intégré dans leur dispositif des mesures venant compléter ou modifier celles de la loi littoral. Certains sont venus renforcer la loi littoral en confortant son esprit initial : ­ ­ ­ Une recommandation du Parlement européen et du Conseil de 2002, sur la base d'un programme de démonstration, préconise de développer une gestion intégrée des zones côtières (GIZC). Plusieurs appels à projets de la DATAR se sont efforcés de vulgariser cette démarche proche de celle d'un agenda 21 local. En 2009, le Grenelle de l'environnement puis le Grenelle de la mer ont fait le constat que la loi Littoral était insuffisamment appliquée et que le manque de coordination des acteurs publics, notamment communaux, constituait un handicap pour en assurer une gestion durable. Les lois Grenelle apportent des éléments de réponse, en renforçant le rôle des schémas de cohérence territorial (SCOT), en encourageant l'élaboration de PLU intercommunaux et en mettant en place les conditions d'une gestion intégrée de la mer et du littoral. L'article L110-1 du code de l'environnement, dans sa version modifiée par la loi Grenelle 2 (art 253), précise que « la cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et les générations » constitue l'une des cinq finalités de l'objectif de développement durable. Il conforte la volonté du législateur, au travers de la loi Littoral, d'assurer le libre accès aux rivages, d'ouvrir certains espaces remarquables littoraux au public, de maintenir sur cet espace convoité des activités traditionnelles, y compris des activités touristiques comme le camping même si celles-ci doivent être encadrées. D'autres textes sont venus réinterroger la manière dont la loi est mise en oeuvre : ­ ­ La définition d'une stratégie nationale (collectivités territoriales et État) pour la gestion du trait de côte répondant à un engagement du Grenelle invite les autorités locales à la décliner au niveau d'unités littorales cohérentes ; le guide publié par le ministère en 2010 vise à leur apporter la méthodologie nécessaire. Le plan national de prévention des submersions marines et crues rapides, arrêté en mars 2011 à la suite de la tempête de Xynthia et des inondations catastrophiques du Var, comprend une soixantaine d'actions visant notamment à mieux maitriser l'urbanisation dans les zones dangereuses et à renforcer la l'aborde à travers la densité significative de construction. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 110/137 fiabilité des digues dans le cadre de plans d'action pour la prévention des inondations (PAPI) dans les territoires à risques importants. Enfin, la jurisprudence continue d'éclairer et de préciser les conditions d'application de la loi sur de très nombreux points. 2 - Objet de la commande Alors que les pressions restent fortes sur le littoral, le MEDDTL a souhaité connaître la manière dont les services veillent à l'application de la loi littoral (pour les dispositions relevant du code de l'urbanisme). Cette démarche d'évaluation est à distinguer de la réalisation d'un prochain bilan de la loi qui devra être mené par l'État pour être présenté au Parlement. De nombreux acteurs en effet dénoncent encore la grande hétérogénéité de son application sur le terrain, d'un département, d'une région, à l'autre. Aussi, le ministère souhaite-t-il que cet audit concerne l'ensemble des départements littoraux afin que soit dégagée une vision complète des modalités d'application des dispositions de la loi littoral. 3 - Champ et périmètre de l'audit 3.1 - Le champ de l'audit La loi littoral de 1986 aborde de nombreuses thématiques regroupées sous quatre titres. ­ ­ ­ ­ L'aménagement et la protection du littoral La gestion des domaines publics maritime et fluvial Les dispositions spécifiques aux DOM Dispositions diverses Suite aux entretiens avec les différentes directions de l'administration centrales concernées, la mission limitera ses investigations, dans le cadre du présent audit, aux « dispositions particulières au littoral » du code de l'urbanisme122 relatives à l'aménagement et à la protection du littoral, à savoir prioritairement les dispositions fixant les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres autour des principaux concepts fixés par la loi et les textes administratifs d'application : ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ la capacité d'accueil, les coupures d'urbanisation l'urbanisation en continuité les espaces proches du rivage la bande littorale des 100m. Les espaces naturels remarquables les accès au littoral (servitude, nouvelles routes...) 122 Code l'urbanisme ­ Livre premier- Titre IV - Chapitre VI (L.146-1 à L.146-9 et R.146-1 à R.146-4). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 111/137 ­ les aménagements portuaires de commerce et de plaisance ainsi que les aménagements liés aux activités économiques à proximité de l'eau, les campings, les constructions agricoles... La mission intégrera cependant dans son questionnement les autres dispositions relevant de la loi littoral pouvant conditionner cette utilisation spatiale (comme les systèmes d'assainissement). Elle interrogera également les services sur les autres thématiques pouvant soulever des difficultés particulières d'application, ainsi que les autres dispositions juridiques interférant avec la loi littoral, notamment un certain nombre de directives européennes comme la directive cadre « stratégie pour le milieu marin » et les lois Grenelle (généralisation des ScoT, gestion intégrée de la mer et du littoral...). Par la suite, il sera examiné comment la mission d'audit pourrait se prolonger dans une seconde phase, sur d'autres volets relatifs à la loi littoral (notamment la gestion du domaine public maritime). 3.2 - Le périmètre Le ministère souhaitant disposer d'une vision globale de la manière dont les dispositions de la loi littoral sont appliquées par les services sur l'ensemble du territoire, l'ensemble des départements littoraux et lacustres au sens de la loi littoral seront concernés par l'audit. Les DOM seront analysés spécifiquement dans un cadre différent par la MIGT OutreMer. De même la MIGT 6 analysera l'application de la loi littoral à un lac alpin 123 par audition des services compétents( DTT et DREAL) 4 - Le questionnement Les investigations qui seront menées auprès des services de l'État (préfets, DREAL, DDTM, DIRM) devront mettre en lumière l'approche menée par les services au regard de l'objectif initial de la loi et le rôle assuré par ces services qu'il soit simple mise en oeuvre de procédures, vision stratégique de l'évolution du littoral, ou autre. Ces investigations porteront plus particulièrement sur les points suivants : 1. L'analyse préalable des spécificités locales (géographiques, institutionnelles, socio-économiques, environnementales, politique...) 2. L'existence d'une vision stratégique de l'État concernant l'évolution du littoral et prenant en compte les objectifs du développement durable. 3. L'organisation et les méthodes de l'État pour l'application de la loi littoral (a priori dans le cadre notamment du porter-à-connaissance et a posteriori dans le cadre du contrôle de légalité).. 4. L'élaboration de documents de références et d'outils de connaissance pour son application. 5. Les actions significatives engagées par le service (synthèse) 6. Les avancées constatées et les principales difficultés rencontrées. 123 De plus de 1000ha Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 112/137 Rapport n°007707-01 5 ­ Méthode et organisation de l'audit 5.1 - Méthode ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ Rassemblement des textes actualisés (consolidation des article de la loi de 1986 avec repérage des modifications, annulations et éventuels ajouts ; décrets d'application et circulaires) Élaboration de la bibliographie correspondante (bilans antérieurs de la loi , rapports du Grenelle de la mer,..) Entretiens avec les directions d'administration centrale ( DAC) concernées. Élaboration d'un cahier des charges et d'un guide d'entretien destiné aux auditeurs Réunion de coordination avec les équipes d'audit Réalisation de rapports d'audit des services par les équipes d'auditeurs Réunion de restitution avec les auditeurs Synthèse des rapports pour élaboration d'un document global par le comité de pilotage 5.2 - Organisation ­ Le groupe de pilotage, coordonné par Gérard RUIZ. Il est composé de : Gérard Ruiz, Bertrand Creuchet, Annick Hélias, Françoise Gadbin, Aude Dufourmantelle, Bernadette Vandewalle, rédacteurs du rapport de synthèse Il rencontrera des personnalités concernées par l'audit et extérieures aux services en tant que de besoin (DAC, CGDD, Conservatoire du littoral,...) Groupe d'audit : Pour les MIGT, sont déjà désignés : Migt1 : C. Andarelli, B. Vandewalle, MIGT 3 : P. Puech et F. Gadbin, MIGT 4 : H. Maillot, P. Garin, Migt 5 : M. Wepierre, M. Bensussan, MIGT 6 : J. Lalot, Migt 2: D.Burette ­ ­ Les présidents de section seront également contactés pour solliciter des candidatures. 6 - Calendrier Année 2011 ­ ­ ­ Mars/avril : élaboration par le comité de pilotage du cahier des charges de l'audit et du questionnement auprès des services. 18 mai : réunion de l'ensemble des auditeurs pour examiner le projet de cahier des charges et cadrer les audits de terrain pour faciliter la cohérence des synthèses. Deuxième partie de juin à fin octobre : conduite des entretiens dans les services et rapports correspondants. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 113/137 ­ ­ Novembre/Décembre : réunion de restitution avec l'ensemble des auditeurs pour analyser les retours d'audit et débattre du pré-rapport. A partir de Janvier 2012 - rapport de synthèse. 7 ­ Listes 7.1 - Liste des textes législatifs et réglementaires relatifs à l'application de la loi littoral (liste non exhaustive) I ­ Textes législatifs et réglementaires Loi n°86-2 du 3 Janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral consolidée au 01/12/2010 Articles intégrés dans le code de l'urbanisme : - L 146-1 à L 146-9 - R 146-1 sur les critères des espaces remarquables - R 146-2 sur liste des aménagements autorisés - L 156-1 à L 156-3 sur les DOM - L 160-6 et L 160-7 Articles intégrés dans le code de l'environnement - L 219 sur la gestion intégrée de la mer et du littoral - L 321-2 - L 361-1 - L 411 et L 414 sur la protection des espèces et des habitats - R 414-2 à R 414-18 sur les sites Natura 2000 (en mer) Articles intégrés dans le code de la santé ( sur la qualité des eaux) Lois prévoyant des dispositions particulières au littoral : - Loi Bosson du 09/02/1994 sur les STEP et l'urbanisation proche du rivage dans les DOM - Loi n°95-115 du 4 Février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. - Loi LOA du 09/07/1999 : dérogations pour les installations agricoles. - Loi DTR du 23/02/2005 sur l'urbanisation des rives des rivières et estuaires et limitation de l'application de la loi littoral sur les lacs de montagne de plus de 1000 hectares (art.187 modifiant l'art L 145-1 du CU)). - Loi SRU du 13/12/2000 modifiant l'article L 146-6-1 du CU. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 114/137 - Loi Grenelle 1 du 03/08/ 2009 - Art 35 sur une gestion intégrée et concertée de la mer et du littoral avec une nouvelle gouvernance. - Loi Grenelle 2 du 12/07/2010 portant engagement national pour l'environnement ­ Art. 166 à 168 sur la stratégie nationale pour la mer et le littoral et les documents stratégiques par façade et la concertation avec tous les acteurs. II - Décrets et circulaires - Décret n°89-694 du 20 Septembre 1989 portant sur l'application de dispositions du code de l'urbanisme particulière au littoral et modifiant la liste des catégories d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux devant être précédés d'une enquête publique. - Décret du 20/09/1989 et du 29/03/2004 fixant la liste des communes littorales - Décret n°2004-308 du 29 Mars 2004 relatif aux concessions d'utilisation du domaine public maritime en dehors des ports. - Décret n°2004-309 du 29 Mars 2004 relatif à la procédure de délimitation du rivage de la mer, des lais et relais de la mer et des limites transversales de la mer à l'embouchure des fleuves et rivières ( liste des communes littorales). - Décret n°2004-310 du 29 Mars 2004 relatif aux espaces remarquables du littoral. - Décret n°2007-1586 du 8 Novembre 2007 relatif aux schémas de mise en valeur de la mer et modifiant le décret n°86-1252 du 5 décembre 1986 relatif au contenu et à l'élaboration des schémas de mise en valeur de la mer. - Décret n° 2008-487 du 15 mai 2008 relatif aux sites Natura 2000 en mer - Décret n° 2011-492 du 05 mai 2011 relatif au plan d'action pour le milieu marin - Circulaire du 14 Mars 2006 (MTETM) relative à l'application de la loi littoral et à l'urbanisation des communes littorales - Circulaire du 20 Juillet 2006 (METETM et Ecologie et développement durable) relative à l'application de la loi littoral et la préservation de l'environnement - Circulaire interministérielle n°2007-17 du 20 Février 2007 relative à l'intervention du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres sur le domaine public maritime ­ élaboration de la stratégie nationale et géographique d'intervention du Conservatoire du littoral sur le domaine public maritime en concertation avec les services de l'Etat concernés. - Circulaire du 15 Juin 2009 relative à la réforme de l'administration territoriale de la mer et du littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 115/137 III ­ Directives communautaires - Directive Oiseaux - avril 1979 - Directive Habitats, Faune et Flore - mai 1992 - Directive Eau - 23 octobre 2000 ­ intégrée en droit français le 21/04/2004 et loi du 30/12/2006 sur l'eau et le milieu aquatique - Recommandation du Parlement européen et du Conseil du 30 Mai 2002 relative à la mise en oeuvre d'une stratégie de gestion intégrée des zones côtières en Europe. Mis en oeuvre en France lors du CIM du 29/04/2003 - Directive sur les eaux de baignade en mer ­ 15 février 2006 - Directive du 17 juin 2008 sur la stratégie pour le milieu marin 7.2 - Bibliographie de référence - Rapports et Audits - CGPC- Mission d'expertise relative aux difficultés liées à l'application de la loi littoral n°86-2 du 3 Janvier 1986 - CGPC- Rapport sur les conditions d'application de la loi littoral -15 juillet 2000 - Bilan loi littoral Septembre 2007 - Audit thématique d'initiative locale DDE 2A et DDE 2B - Avril 2008 : respect des dispositions du code de l'urbanisme applicables au littoral - Audit thématique d'initiative local : Gestion stratégique du littoral dans les régions Bretagne et Pays de Loire ­ janvier 2010 - Rapport final du 23 Juin 2010 COMOP 6 : Comité Aménagement, Protection et Gestion des espaces littoraux opérationnel - Audit d'initiative locale MIGT 5- Méditerranée - Février 2010 sur la gestion et la conservation du domaine public maritime - Rapport d'évaluation Grenelle 2 : mer Octobre 2010 pp118 à 123 - CGEDD ­ Mer et littoral : vers une planification stratégique ­ Décembre 2010 - Rapport d'étape Grenelle mer Février 2011 - Atelier littoral Bretagne : plaquettes portant sur les articles L 146-4-I/II/III du code de l'urbanisme (rapport DREAL Bretagne) - DATAR ­ Enquête auprès des SGAR sur le lien Terre-mer 7.3- Liste des services à auditer (cf. annexe suivante) Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 116/137 3. Liste des auditeurs et des services audités Services auditésauditeurs-dates des audits Services audités Région Nord Pas-deCalais MIGT1 DREAL Nord/Pas de Calais DIRM Auditeurs Dates des audits Gérard RUIZ Bernadette VANDEWALLE sept 2011 62 59 · · Nord DDTM du Nord DDTM Pas de Calais Préfecture ( SG et contrôle de légalité) Catherine ANDARELLI Bernadette VANDEWALLE Gérard RUIZ, Bernadette VANDEWALLE 01/07/11 Sept 2011 Pas-de-Calais Région Picardie MIGT 1 80 · Somme DDTM Somme DREAL Picardie Synthèse commune Haute et Basse Normandie DIRM Manche Est Mer du Nord DREAL Haute Normandie DDTM DDTM Synthèse commune Haute et Basse Normandie Bernadette VANDEWALLE, Catherine ANDARELLI Guy BARREY Daniel BURETTE Vincent ALLAIS 01/07/11 Région HauteNormandie MIGT 2 Déc 2011 76 · · Seine Maritime Eure Région BasseNormandie MIGT 2 27 Guy BARREY Daniel BURETTE Vincent ALLAIS Déc 2011 14 · · Calvados Manche DDTM et Préfecture DDTM Préfet Région Bretagne, préfet d'Ile et Vilaine DREAL DIRMO DDTM Préfet Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Françoise GADBIN Annick HELIAS Patrick PUECH 27/10/11 27/10/11 10/11/11 4 et 5 nov 2011 Région Bretagne MIGT 3 22 50 · Cote d'Armor Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 117/137 29 · Finistère DDTM Préfet et Préfecture( SG et contrôle de légalité) Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Françoise GADBIN Patrick PUECH Annick HELIAS Françoise GADBIN Patrick PUECH Françoise GADBIN Patrick PUECH Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Henri MAILLOT 24 et 25 octobre 2011 5 · Ille-et-Vilaine DDTM sous Préfet Saint Malo 26/10/11 56 · Morbihan DDTM Préfet 7 nov 2011 Région Pays de Loire MIGT 3 Préfet de région Pays de Loire, préfet de Loire Atlantique DREAL DDTM 9 nov 2011 9 nov 2011 8 nov 2011 44 · Loire Atlantique Vendée · DDTM Préfet Région PoitouCharentes MIGT 4 Synthèse commune PoitouCharentes, Aquitaine Octobre 2011 17 · CharenteMaritime DDTM Préfecture (contrôle de légalité) Henri MAILLOT Philippe GARIN Madeleine GRANCHER Henri MAILLOT 20 sept 2011 Région Aquitaine MIGT 4 Synthèse commune PoitouCharentes, Aquitaine DDTM Octobre 2011 09/08/11 33 · Gironde Gérard RUIZ Henri MAILLOT Philippe GARIN Henri MAILLOT Philippe GARIN Henri MAILLOT Philippe GARIN Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Michel WEPIERRE Xavier LAFON 40 · Landes DDTM 20 juillet 2011 14 et 15 sept Oct 2011 Déc 2011 64 · PyrénéesAtlantiques DDTM Sous préfecture DREAL Lang Roussillon. DIRM Méditerranée Région LanguedocRoussillon MIGT 5 65 · PyrénéesOrientales DDTM Préfet et préfecture ( dir.des CL Oct 2011 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 118/137 et contrôle de légalité) 11 · Aude DDTM Contrôle de légalité DDTM Préfecture ( SG et CL) Sous préfecture Béziers DDTM Préfecture : contrôle de légalité Synthèse commune L-Rouss et PACA DIRM méditerranée DREAL PACA DDTM dont chef unité légalité DDTM SG Préfecture DDTM Préfet Services préf dont contr. légalité DREAL Préfet de Région DDTM Préfecture : SG, SGAC, bu urba ( contrôle légalité) DDTM Préfet Préfecture ( dir CL, dir cab, stag ENA) Michel WEPIERRE Nov 2011 Oct 2011 34 · Hérault Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN 30 · Gard Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Nov 2011 Région ProvenceAlpes-Côte d'Azur MIGT 5 Déc 2011 13 · Bouches du Rhône Var Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Sept 2011 83 · Oct 2011 6 · AlpesMaritimes Oct 2011 Région Corse MIGT 5 Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Oct 2011 2A · Corse du Sud Oct 2011 2B · Haute-Corse Oct 2011 Grands lacs Région Rhône Alpes MIGT 6 DREAL Rhône Alpes Bertrand CREUCHET Synthèse Grands lacs Sept 2011 73 · Savoie (Bourget) DDT Préfet contrôle de légalité DDT Préfet Bertrand CREUCHET Aude DUFOURMANTELLE Jean LALOT Bertrand CREUCHET Aude DUFOURMANTELLE 01/08/11 74 · Haute-Savoie (Annecy, Léman) 01/08/11 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 119/137 contrôle de légalité Jean LALOT Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Nov 2011 Région LanguedocRoussillon PACA MIGT 5 Synthèse lacs des départements méditerranéens 48 · Lozère (Naussac, Grandval) Var (Ste Croix) Alpes de Haute Provence (Ste Croix, SerrePonçon) Hautes-Alpes (SerrePonçon) DDT Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Déc 2011 83 · DDTM Oct 2011 4 · DDT Nov 2011 5 · DDT Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Nov 2011 Région ChampagneArdennes MIGT 7 10 · Aube (Temple, Orient) DDT Gérard RUIZ * Région FrancheComté MIGT 6 39 · Jura (Vouglans) DDT Gérard RUIZ * * échanges de courriers et courriels. Nombre de services audités et personnalités rencontrées : ­ départementaux : - 26 DDTM ( la totalité des DDTM concernées par la loi Littoral) et 6 DDT, - 11 préfets et 2 sous-préfets, - 14 services de préfecture dont ceux chargés du contrôle de légalité. régionaux : - 8 DREAL ( sur 11 concernées), - 3 DIRM, - 3 Préfets de Région, préfets de département. ­ Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 120/137 4. Note relative aux moyens de l'Etat pour s'opposer aux PLU et aux autorisations contraires à la loi Littoral Note DHUP (3 juillet 2012) 124 Les moyens mis à disposition du préfet par le code de l'urbanisme pour s'opposer à un PLU ou à un POS contraire à la loi Littoral : L'Etat dispose de deux moyens prévus par le code de l'urbanisme qui s'ajoutent au contrôle de légalité prévu par le code général des collectivités territoriales :125 - l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme, qui est en quelque sorte préventif car il s'utilise avant l'entrée en vigueur du PLU :126 Cet article concerne le caractère exécutoire du plan local d'urbanisme et vise uniquement les communes non couvertes par un SCOT. Dans cette hypothèse, et si le préfet estime que le document d'urbanisme n'est pas compatible avec la loi Littoral (ou avec une directive territoriale d'aménagement, qui peut préciser les modalités d'application de la loi Littoral), il peut notifier par lettre motivée à la commune ou à l'EPCI compétent les modifications qu'il estime nécessaires. Le PLU ne deviendra exécutoire qu'une fois les modifications intervenues. - l'article L. 123-14 du code de l'urbanisme, qui peut être utilisé lorsque le PLU est déjà entré en vigueur : Lorsque le document d'urbanisme n'est pas conforme à la loi littoral (ou avec une directive territoriale d'aménagement, qui peut préciser les modalités d'application de la loi Littoral), le préfet doit en informer la commune ou l'EPCI compétent et lui demander de modifier ou de réviser son document d'urbanisme. En cas de refus de l'autorité compétente, ou si la délibération correspondante n'est pas intervenue dans un délai de six mois à compter de la demande initiale du préfet, ce dernier peut engager et approuver la révision ou la modification à la place de la commune ou de l'EPCI. Les moyens mis à disposition du préfet pour s'opposer à une autorisation d'urbanisme contraire à la loi Littoral mais conforme au POS ou au PLU. Dans la lignée d'une jurisprudence constante, le conseil d'Etat a réaffirmé récemment que l'autorité administrative compétente doit refuser d'appliquer les dispositions illégales d'un document d'urbanisme et se référer aux règles d'urbanisme antérieures (Conseil d'Etat avis 9 mai 2005, M. Marangio, req. 277280). Le maire devra donc refuser de délivrer une autorisation de construire conforme à un document d'urbanisme en vigueur, lorsque les dispositions de ce document d'urbanisme permettant la 124 Note rédigée à la demande de la mission d'audit par A. Vandervorst (bureau de la législation de l'urbanisme QV4). Des dispositions similaires existent pour les SCOT aux articles L.122-12 et L.122-15-1 du code de l'urbanisme. les articles L.123-12 et L.123-14 s'appliquent aux PLU mais également aux POS en application de l'article L.123-19. 125 126 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 121/137 construction sont contraires aux dispositions de la loi littoral et ce quand bien même le document d'urbanisme n'aurait fait l'objet d'aucun recours direct. Il devra toutefois statuer sur l'autorisation de construire au vu des règles d'urbanisme immédiatement antérieures. Lorsqu'un maire délivre une autorisation de construire illégale dans cette hypothèse, le préfet est donc fondé à utiliser les divers instruments dont il dispose dans le cadre du contrôle de légalité (recours gracieux, déféré préfectoral, référé suspension préfectoral127). 127 Ce référé particulier est prévu à l'article L.554-1 du code de justice administrative et a comme particularité de ne pas nécessiter la démonstration de l'urgence, par exception aux règles applicables en matière de référé. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 122/137 Rapport n°007707-01 5. L'application de la loi Littoral en Bretagne (synthèse) Une expérience à partager... MIGT 3 (juin 2012) Cette présente note décrit l'expérience bretonne et explicite la manière dont les services de l'État en région se sont saisis de la question relative à l'application de la loi Littoral. 1. Une planification encore loin d'être compatible avec la loi Littoral Si le lien entre loi Littoral et planification est primordial pour les DDTM, force est de constater que ces dernières n'ont toujours pas trouvé les moyens adéquats pour sensibiliser les élus et leur faire intégrer cette donnée. Les services de l'État utilisent, dans ce but, l'association de l'État dans l'élaboration des documents d'urbanisme pour attirer l'attention des élus, mais cela reste une action de longue haleine, dans la mesure où nombre d'entre eux ne sont pas enclins à transformer leur POS en PLU tandis que les révisions, quand elles sont entreprises, s'étalent sur de nombreuses années. Les PLU sont donc encore loin d'être conformes à la loi Littoral dans un contexte de contestation importante de la société civile sur la qualité de sa prise en compte. C'est ainsi qu'entre 2005 et 2010, 23 PLU ont été annulés pour non conformité à la loi Littoral, soit près de 10% de ces documents (dont un seul à l'initiative de l'État). De même, le littoral breton est totalement couvert par des SCoT, mais ceux-ci ne sont pas tous approuvés et ceux qui le sont, restent encore sur ce point de valeur très inégale et sont rarement prescriptives. Seuls les SCoT de Brest et de Lorient ont à ce jour entrepris une lecture volontariste dans ce domaine grâce, en particulier, au relais décisif que représente leur agence d'urbanisme. La Bretagne compte, par ailleurs deux schémas de mise en valeur de la mer (SMVM), celui du Trégor-Goëlo dans les Côtes d'Armor et celui du golfe du Morbihan, approuvés respectivement en 2007 et 2006. Ces deux SMVM ont intégré les délimitations définies préalablement par les services de l'État (espaces remarquables et espaces proches, bande des 100m, coupures d'urbanisation), permettant ainsi une prise en compte par les collectivisées territoriales dans leurs documents locaux. 2. Une stratégie régionale forte Au delà des travaux menés par la DRE en 2007 « Contribution de l'État sur le littoral breton », et des stratégies départementales, propres à chaque DDE, un atelier littoral régional est créé en 2008, aboutissement et formalisation des travaux collectifs engagés depuis 2004 par les quatre DDE et la DRE pour réexaminer les conditions d'application de la loi Littoral de façon globale. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 123/137 Le constat fut d'une part, que les documents d'urbanisme étaient encore peu compatibles avec la loi Littoral d'où un fort risque de contentieux et d'autre part, que les doctrines, cadres et outils de mise en oeuvre, étaient différents selon les départements. Au delà, cet atelier littoral, expression d'une approche unanime et volontariste des services de l'État pour se doter d'une vision partagée du littoral s'est finalement concrétisée à cette date, par le recrutement d'un cadre A+, ce qui a permis à cette structure transversale d'englober plus largement les thèmes de la planification stratégique de la zone côtière et de la gestion du DPM. La création de la DREAL en 2010 a été l'occasion de confirmer cette orientation et de lui assigner des ambitions plus importantes qui s'inscrivent dans les préconisations du livre bleu « stratégie pour la mer et les océans », lui-même inspiré des recommandations de l'Union européenne : promouvoir dans la première région maritime française une gestion intégrée de la mer et du littoral. Au niveau régional le préfet s'appuie sur la DREAL et sa mission transversale dédiée à l'interface terre-mer et intitulée mission « zones côtières et milieux marins ». Cette mission assure notamment l'animation de l'atelier littoral128 qui associe les DDTM (chefs de service DDTM et DREAL) et, en tant que de besoin, les DIRM, DRAAF, DRAC et les services de la préfecture maritime. Son statut lui permet désormais d'aborder dans l'esprit de la gestion intégrée des zones côtières tous les dossiers portés par la DREAL touchant à la gestion de la mer et du littoral sans se substituer pour autant aux autres services spécialisés garants des politiques sectorielles qui leur sont dévolues : application de la loi Littoral, gestion du DPM, gestion des sédiments de dragages terre-mer, planification stratégique intégrée terre-mer avec les volets mer des SCoT, suivi des dossiers d'énergie en mer, représentation de l'État au parc marin d'Iroise et préfiguration des nouveaux parcs, etc. De ce fait, la démarche engagée pour l'application de la loi Littoral, bien qu'évoquée en CAR dès janvier 2009, ne débouchera qu'après la réforme de l'État et les nouvelles relations entre niveaux régional et départemental instaurés par la REATE : c'est le CAR de janvier 2010 qui entérinera ce nouveau positionnement de l'atelier littoral ainsi que son programme de travail avec 5 ateliers thématiques dont un consacré à la loi Littoral. Le dossier "loi Littoral" y est abordé avec les 3 objectifs suivants : · « Mettre les services de l'État en capacité d'expliciter de manière cohérente et homogène l'ensemble des notions de la loi Littoral. » « Réduire le plus possible l'insécurité juridique des documents locaux et de l'instruction et développer, à cette fin, une information cohérente vers les élus. » « Articuler les différentes postures de l'État en promouvant l'échelle des SCoT dans la prise en charge de la loi Littoral et en mettant l'accent sur la promotion d'une approche par le projet.» · · 128 Note de la DREAL du 27/09/10 : Programme de travail de l'atelier littoral. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 124/137 Rapport n°007707-01 Dans ce nouveau contexte de fonctionnement de l'État, le rôle d'animation porté en ce domaine par la DREAL est cependant ressenti par certains préfets, comme susceptible de porter atteinte à leur propre marge d'action qui, en matière de contrôle de légalité, comporte un champ d'autonomie vis-à-vis du préfet de région. Cependant, du fait de l'importance des enjeux en matière d'aménagement du territoire, ce dernier a rapidement considéré qu'une harmonisation régionale était indispensable pour sécuriser les documents locaux d'urbanisme sans pour autant remettre en cause la compétence propre des préfets en matière de contrôle sur les actes individuels ou les documents d'urbanisme. Pour être efficace, celle-ci devait en outre, à ses yeux, être concrète et prendre appui sur une expertise des documents locaux. La doctrine régionale a donc été construite selon des modalités arrêtées en CAR, et sera co-construite par les quatre DDTM en atelier thématique sous l'égide de la DREAL, qui en a au départ stabilisé les objectifs, le cadre de production, tout en assurant l'articulation et le suivi avec le CAR. La DDTM du Finistère s'en est vu confier le pilotage (voir ci-après). Aujourd'hui, le « Référentiel Loi Littoral » issu de ces travaux, appelé communément au sein des services le « référentiel breton », constitue, pour les quatre DDTM, le corps de recommandations régional utilisé tant par les chargés d'études en matière de planification que par les instructeurs ADS. Il est aussi une source précieuse d'informations sur la jurisprudence qui y est abordée sous forme illustrée pour les services en charge du Contentieux en Préfecture ou en DDTM (Ille-et-Vilaine). 3. Une coordination entre services autour de l'interprétation des grands principes posés par la loi L'atelier littoral breton fonctionne à travers un atelier permanent, lieu d'échanges, d'impulsion et de validation des travaux menés par des ateliers thématiques dont notamment l'atelier 5 intitulé "loi Littoral". 129 Pour la thématique loi Littoral, les réflexions et travaux de l'atelier correspondant ont été élaborés lors de huit séances de travail pilotés par la DDTM du Finistère, auxquels participaient les trois autres DDTM et la DREAL. On peut citer également l'atelier 1 sur le volet mer de SCoT qui a fait l'objet de notes stratégique et juridique : "Contribution à la réflexion sur les volets MER des SCoT". Ce document de travail élaboré par l'atelier thématique auquel participait le préfet maritime Atlantique, s'inscrivait aussi dans le cadre de la réflexion 2009 lancé par la sous-direction du littoral et des milieux marins de la DGALN, à la demande des DREAL, notamment la DREAL Bretagne. La DGALN n'a cependant pas donné suite à ce groupe de travail et ce document, issu de l'atelier breton, tout comme la plaquette consacrée aux volets mer des SCOT que le CETE Méditerranée y avait présenté, n'ont pas pu être partagés avec les autres DREAL et DDTM littorales. 129 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 125/137 Afin de donner de la solidité et de la distance à l'approche, la DREAL a proposé, en accord avec la DDTM du Finistère, un accompagnement de juristes externes aux services des DDTM, dans un premier temps issus du CETE de Nantes et dans un second temps de l'Université en la personne d'Olivier Lozachmeur, docteur en droit, spécialiste de la loi littoral et de la GIZC, disciple de l'éminent juriste du Littoral en France qu'est Jean-Marie Becet. Olivier Lozachmeur est le rédacteur-juriste des fascicules du Référentiel breton. Le référentiel de plus de 250 pages de jurisprudence illustrée et de recommandations qui en est issu intègre des jurisprudences nationales (décisions du Conseil d'État et de Cours d'appel), mais aussi celles du Tribunal administratif (TA) de Rennes qui traite la majorité des conflits relatifs à cette loi et dont 93% des décisions ne font pas l'objet d'appel. Ce corpus de 9 documents, constitutif de la doctrine bretonne, a entièrement été validé par l'Atelier Permanent du Littoral. Il s'agit à ce jour des fascicules consacrés à : ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ l'article L.146-2 (coupures d'urbanisation), l'article L.146-4-I (extension de l'urbanisation et continuité de l'urbanisation), l'article L.146-4-1 et les exploitations agricoles, l'article L.146-4-II (espaces proches), l'article L.146-4-III (bande des 100 m), l'article L.146-5 (campings), l'article L.146-6 (espaces remarquables), l'article L.146-7 (routes littorales), l'article L.146-8 (dérogations). La qualité de l'ensemble de ces documents co-élaborés entre les services départementaux et régionaux est reconnue par les préfets de départements, qui y voient un référentiel utile qu'ils ont globalement validé, mais ils se refusent toutefois à y voir un corps de doctrine immuable. Le CAR du 27 janvier 2010 a adopté le fascicule relatif à la continuité de l'urbanisation dans les communes littorales (L 146-4-1) dans la mesure où la règle de continuité représente à ce jour de très loin la source la plus importante de contentieux. Ce fascicule sur le L 146-4-1 a été expertisé par J-M. Becet, à la demande de la DREAL et depuis, un plan de formation multi-acteurs destiné à de nombreux publics sur la base de ce référentiel a été mis en place tant pour les agents exerçant en DDTM que pour les bureaux d'études et services techniques des collectivités locales ou d'autres plus spécifiques mais dont le rôle est essentiel comme les commissaires enquêteurs, les notaires, etc. Ce plan a déjà touché, lors de deux séances en mai 2012, près de 40 personnes et se poursuivra fin 2012 et en 2013 pour toucher les bureaux d'études, services techniques des collectivités et commissaires enquêteurs. D'autres séances pour les services de l'État seront mises en place à leur demande. Ces documents sont actuellement accessibles sur le site intranet de la DREAL Bretagne. Il est envisagé une mise à disposition plus large pour les différents acteurs du territoire littoral et notamment les élus qui ont en charge la planification. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 126/137 4. Des stratégies départementales déclinant la stratégie régionale Les travaux les plus significatifs depuis la publication de ces documents130 réalisés par le niveau départemental sont ceux relatifs à l'extension de l'urbanisation dans les communes littorales et le fascicule du « Référentiel Loi Littoral » spécifique à l'article L 146-4-1 du CU a servi de cadre référentiel à l'élaboration d'une cartographie de la compatibilité des zonages constructibles des documents d'urbanisme. Le principe retenu (réalisé antérieurement dans le Morbihan) est une analyse juridique, par les DDTM, de tous les secteurs ouverts à l'urbanisation dans les POS ou PLU - ou qui pourraient l'être - au regard de la jurisprudence en matière de continuité. Un code de couleur permet de distinguer : · les zones rouges où la construction est en contradiction avec la lecture faite par l'État en région de la loi Littoral (fascicule L 146-4-1 du référentiel régional). Dans ce cas, l'instruction ADS doit conduire à une proposition de refus et logiquement le contrôle de légalité doit s'exercer dès lors que le maire ne suit pas cette proposition ; les zones vertes, où il n'y a pas de contradiction, au titre du L146-4-1, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en a pas à d'autre titre (bandes des 100m, espace remarquable, espaces proches, etc.) ; les zones oranges, où il y a une incertitude juridique potentielle (jurisprudence non stabilisée), sur lesquelles l'État déconseille la délivrance d'un acte individuel d'urbanisme et sur lequel l'élu est prévenu du risque encouru. · · Ces cartes qui ont valeur d'expertise sont évolutives et font état de la situation jurisprudentielle à un moment donné. Ainsi, le Morbihan qui avait devancé la démarche régionale, a-t-il été amené à produire une version réactualisée de ses premières cartes d'expertise après adoption du référentiel en CAR. D'une manière générale, ce travail qui a rassemblé les différents services de chaque DDTM (agents du siège et unités territoriales en charge de l'ADS et de la planification) a été validé par les sous-préfets et présenté aux maires qui gardent leur liberté d'appréciation : la consigne préconisée par le niveau régional en la matière était bien de préciser qu'il s'agissait là d'une lecture par l'État en Région des fragilités juridiques des documents de planification, les élus étant invités à produire une expertise plus poussée pour préciser certaines notions dans leur document et retrouver le cas échéant quelques marges de manoeuvre au delà de la sécurisation de leur POS ou PLU. Le document finalisé doit leur servir de base, aussi bien pour réviser ­ afin de les sécuriser - leur document d'urbanisme que pour assurer la qualité de l'instruction au titre de l'application du droit des sols aux 130 Des documents de référence avaient été réalisés de manière inégale dans les 4 départements pour appréhender l'application de la loi avant 2006 tant par les DDE que la DIREN : Atlas des espaces remarquables de la DIREN, DDALL ou délimitation de certains espaces dans des cartographies spécifiques en DDE (espaces proches, parties actuellement urbanisées des agglomérations et hameaux en DDTM, etc...). A noter toutefois la demande expresse de la centrale de ne plus produire, ni diffuser les DDALL suite à un rapport du CGEDD qui avait insisté sur l'importance de l'exercice de planification par les élus et au retrait des services de l'État dans « l'adaptation » de la Loi. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 127/137 constructions et aménagements nouveaux (que l'instruction soit faite ou non par les services de l'État). De même, il sert de référence pour les instructeurs ADS et pour ceux du contrôle de légalité. Ce travail non encore achevé lors du passage de la mission d'audit portait déjà ses fruits, semble-t-il, avec les maires du Finistère notamment, motivés pour sécuriser leur PLU en cours d'élaboration. Ce véritable « chantier » concerne 270 communes littorales sur les 1270 communes de la région Bretagne et le Finistère, à lui seul, en totalise 118. En novembre 2011, pour le Finistère : le travail était en cours de finalisation. Sur les 118 communes, les cartes des risques juridiques avaient été réalisés sur 50 communes avec 15 retours des maires sans remise en cause. Pour les services, c'était le résultat d'un travail associant l'État, les élus, partageant, à défaut de l'accepter, un même raisonnement. Ces documents n'avaient pas vocation à être rendus publics, mais seront communiqués sur demande (cf. décision CADA). A noter que ce type d'expertise issu du référentiel n'avait pas son équivalent dans ce département antérieurement, contrairement au Morbihan ; il y a donc représenté un saut qualitatif très important par rapport aux pratiques antérieures. Réalisées de manière homogène et centralisé au siège de la DDTM, les cartes ont été ajustées, puis, présentées et laissées aux élus locaux par le secrétariat général de la préfecture ou les sous-préfets qui ont supervisé et porté les versions finales. Ces cartes, lorsqu'elles sont réalisées, constituent le document de référence tant pour l'instruction que la planification au sein de la DDTM. En novembre 2011, pour les Côtes d'Armor : si la DDTM (service planification en lien avec les unités territoriales) a fait l'analyse juridique des PLU/POS et a identifié les situations jugées non conformes aux dispositions de la loi Littoral avec des visites de terrain, ce sont les sous-préfets qui ont rencontré chaque maire sur la base du travail fourni par la DDTM avec ou sans la DDTM. Les points de désaccord avec les élus font l'objet d'un arbitrage au niveau du préfet. La production de la version initiale des cartes est réalisée par les unités territoriales de la DDTM, puis consolidée et supervisée par le siège sur la base du référentiel régional. Les cartes n'ont, en revanche, pas été communiquées aux élus dans ce département. En octobre 2011, en IIle-et-Vilaine : la DDTM signale à la mission que ce travail de mise à jour au regard du référentiel régional s'inscrit dans la poursuite de l'analyse de la fragilité juridique des POS et PLU effectué en 2008 et communiqué sous une forme écrite, très détaillée et personnalisée à chacun des élus. Les cartes des risques juridiques étaient toutes réalisées et révisées en novembre 2011 mais devaient être validées en interne avec les conseils (architecte et paysagiste) avant une présentation au sous-préfet de Saint-Malo qui consultera les communes. A Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 128/137 ce stade, sur 21 communes, seuls deux PLU étaient expertisés comme compatibles (et 2 peu compatibles). Les cartes étaient déjà néanmoins utilisées par les instructeurs ADS. En novembre 2011, pour le Morbihan : c'est la 2ème génération de cartes, l'exercice ayant commencé le 16 mars 2006 lors d'une réunion à l'initiative des élus à Locoal Mendon à laquelle a participé la DGALN. A cette occasion, la circulaire du 14 mars venant d'être publiée, la DGALN a commenté la demande faite aux services de procéder à l'analyse du risque sous la forme de l'élaboration de cartes dites des « 3 couleurs ». Un travail en équipe a été conduit avec les collèges planification et ADS pour qualifier les "zones U ou AU" à partir de photos aériennes, du cadastre, de visites de terrain et en reprenant aussi les anciens actes pour prendre en compte, à la demande du préfet, les « errements antérieurs ».131 50% des cartes étaient faites à cette date, 100% programmé à fin 2011. Les documents de travail ont été présentés aux maires par le chef de service accompagné par la responsable de l'unité "animation de la filière planification". La consigne de la préfecture a été de laisser l'appréciation aux maires : le document est à ce titre amendable par les élus et fait d'ailleurs l'objet de courriers en aller et retour avec eux. En cas de désaccord avec la DDTM, c'est le sous-préfet ou le SG qui arbitre. Le document final a été notifié au maire (cas de Damgan). L'objectif de telles cartes d'expertise locales est de permettre aux services de l'État de préciser leur position (au regard de la jurisprudence). Elles constituent un outil d'information pour les maires sur les risques juridiques qu'ils sont susceptibles de prendre au titre des actes individuels d'urbanisme. Elles n'ont pour objectif que d'éclairer le seul aspect juridique lié au L.146-4-1, article à l'application particulièrement problématique, et n'a pas pour objectif d'aborder la question de la prise en charge de cette notion dans le projet d'aménagement de la commune en articulation avec l'ensemble des autres enjeux de planification. 5. Des conclusions provisoires Tout en étant un outil de gestion partagé de la gestion courante de l'ADS en matière de continuité, ces cartes constituent une base à travers laquelle s'élaborent les ajustements imposés par la jurisprudence et l'intégration des enjeux locaux dans la rédaction des documents de planification révisés afin de donner une sécurité plus importante à ces documents. 131 Par exemple une parcelle sur laquelle un CU aurait été délivré sur proposition de l'État sans que le contrôle de légalité ne soit exercé se retrouve en "vert" même si normalement au regard de la loi c'est du "rouge" ! Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 129/137 Cet objectif porté par le Préfet de Région Bretagne devrait se poursuivre à travers un bilan du niveau d'harmonisation atteint avec cette stratégie entre les différents départements bretons ; ce bilan fera aussi l'objet de préconisations d'amélioration en continu tant de la posture de l'État que du portage de la lecture jurisprudentielle. A ce titre, la principale difficulté en la matière provient de documents d'urbanisme anciens (POS jamais révisés ou remis en service par annulation du PLU) ou en cours de révision qui n'ont pas intégré les évolutions jurisprudentielles. Dès lors, seule la réalisation par les communes (ou mieux des intercommunalités) de PLU établis sur un projet respectueux de la loi Littoral dans toutes ses thématiques, mais intégrant aussi les enjeux des autres politiques nationales 132 dans l'esprit de la loi SRU, du contexte local133 et du projet politique de développement, pourrait permettre de sortir des dysfonctionnements actuels et dépasser leurs apparentes contradictions pour replacer la règle de continuité dans la perspective globale du projet d'aménagement. Cet exercice met toutefois en évidence la nécessité pour toute collectivité compétente en matière d'urbanisme sur le littoral de disposer d'un haut niveau d'expertise juridique lui permettant de mettre le droit au service du projet plutôt que d'en subir quotidiennement les contraintes134. De nombreuses petites collectivités ne disposent probablement pas actuellement de cette expertise. Le rôle d'alerte et l'engagement de l'État local se sont avérés de ce point de vue essentiel tout comme le sera l'exercice de son contrôle de légalité. 132 133 134 zones humides, paysage, déplacements, offre équilibrée de logements, etc. paysage, relief, utilisation du sol. Plusieurs communes bretonnes confrontées à des recours récurrents rencontrent des difficultés pour trouver une compagnie d'assurance couvrant le risque juridique. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 130/137 6. Le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares (synthèse) MIGT 6 (juillet 2012) Seize lacs du territoire métropolitain ont une superficie de plus de 1000 hectares, entraînant par là l'application de la loi Littoral sur le territoire des communes riveraines. En outre, pour huit de ces lacs, s'applique également aux territoires concernés la loi Montagne. La situation de ces lacs dans des régions de densité de population très diverse avec une attractivité touristique variable a conduit l'équipe de pilotage du présent audit à ne pas réaliser d'audit détaillé auprès des 15 départements concernés mais à mener des missions d'audit sur cinq d'entre eux parmi les plus exposés aux pressions urbanistiques et touristiques. Parmi ceux-ci, la Haute Savoie pour le lac d'Annecy connaît une pression très importante de l'urbanisation, assimilant les difficultés rencontrées à celles du littoral méditerranéen. Dans une moindre mesure, le littoral français du lac Léman (département de la Haute-Savoie), les rives du Lac du Bourget (département de la Savoie) font également face à des pressions d'aménagement importantes et par suite à des coûts du foncier très élevés. Le nombre des contentieux, liés à l'application de la Loi Littoral autour de ces trois lacs, témoigne du niveau des pressions rencontrées. Pour les autres lacs de plus de 1000 hectares, l'urbanisation et les aménagements nautiques sont limités à quelques segments de leurs rives, soit que ces rives soient peu ou pas accessibles, que le littoral soit protégé à un autre titre (réserve naturelle par exemple) ou simplement que le lac soit peu attractif, car situé dans un territoire isolé et/ou au climat peu favorable. Quelques différences avec le littoral maritime évoquées par les services audités... Une spécificité de ces lacs, par rapport au rivage maritime, est de permettre pour tous les plans d'eau concernés une vision de leur paysage facile et quotidienne depuis la rive opposée. Une autre caractéristique est la difficulté de fixer la hauteur des plus hautes eaux : si celle-ci peut être déterminée sans difficultés pour les plans d'eau naturel, une partie de ces grands lacs a été créée artificiellement et ils connaissent un marnage important des eaux lié à leur usage et à leur entretien. La limite « des plus hautes eaux » a été parfois contestée compte tenu du caractère artificiel de ces plans d'eau. Le pilotage, les réseaux Tous les services audités ont témoigné du manque d'instruction et, pour certains, de réponses à des questions posées de la part de l'administration centrale (tout au moins depuis 2006 et les dernières circulaires Loi littoral). L'audit révèle également que les DREAL (et avant les DIREN) n'ont pas assuré d'animation spécifique sur la question de la gestion de ces grands lacs alors qu'au moins pour la région Rhône-Alpes (départements de la Savoie et de la Haute-Savoie) et la région PACA une telle démarche trouverait son utilité. Enfin la concertation entre départements voisins, Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 131/137 parfois concernés par les rives d'un même lac (Serre-Ponçon, Sainte Croix, Sarrans et Grandval ) soit n'a jamais eu lieu, soit est en panne ou très laborieuse. Une exception à cela est le projet de directive territoriale (DTA) des Alpes du Nord, qui a donné lieu à la mise au point d'une position concertée entre les services régionaux et départementaux puis présentée aux élus concernés : ce sont les dispositions arrêtées dans ce dossier qui sont encore la référence pour les rives du lac du Bourget en Savoie, et pour une part en Haute Savoie pour les lacs d'Annecy et Léman. Les porter à connaissance Dans tous les départements, les « porter à connaissance » adressés par l'État aux communes riveraines des lacs de plus de 1000 ha rappellent la nécessité d'appliquer la Loi littoral. La DDT de Haute Savoie communique les dispositions d'application de la Loi, telles qu'elles avaient été élaborées et adressées aux collectivités pour la DTA des Alpes du Nord. Les autres DDT le font oralement à l'occasion des réunions d'association. La capacité d'accueil (L 146-2) Cette notion est particulièrement difficile à utiliser et aucun témoignage de référence à cet article n'a été recueilli pour la gestion des autorisations et de la planification. Le libre accès du public au rivage (L 146-3) L'application de cet article est au moins aussi difficile que pour le littoral maritime mais les services veillent autant qu'ils le peuvent à son respect et parviennent dans des situations anciennes à rétablir des accès. L'extension de l'urbanisation en continuité ou en hameaux nouveaux, la protection des espaces proches et la bande des 100 mètres inconstructible (L 146-4) Cet article est celui qui est le plus délicat à interpréter sur le terrain, d'autant que les tribunaux administratifs paraissent eux-même avoir des approches décalées. Une fois encore, les difficultés et les conflits apparaissent là où la pression est la plus importante, autour des lacs des Alpes du Nord. Les positions arrêtées par les services varient dans le temps suivant les jugements intervenus. En outre, là ou l'urbanisation se poursuit au nom de la continuité, elle investit de place en place les coupures d'urbanisation qui n'ont pu être sanctuarisées. De ce point de vue, il faut également remarquer, s'agissant des opérations d'ensemble en continuité (lotissements par exemple), que ce sont les parcelles les plus éloignées qui s'urbanisent en premier et qui parfois restent isolées, à l'opposé de l'esprit de la loi Littoral. Dans les départements audités, aucun dysfonctionnement entre les services internes des DTT (service en charge de l'aménagement et unités ADS), ni mise en cause importante par l'autorité préfectorale des positions des services n'ont été détectés par les auditeurs. Les préfets ou des sous-préfets s'investissent parfois eux-mêmes et participent à des visites de terrain pour visualiser les traductions de la Loi Littoral qui leur sont soumises. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 132/137 S'agissant de la notion « d'espaces proches », l'équipe d'audit a relevé une évolution de l'appréciation autour du lac d'Annecy : les critères retenus pour leur délimitation et partagés entre les départements à l'occasion de l'élaboration de la DTA ont été reconsidérés d'une façon plus restrictive à la suite d'un jugement tandis que ces critères restent la référence autour du lac du Bourget. L'application du principe d'inconstructibilité de « la bande des 100 mètres » en dehors des espaces urbanisés pose également la question de la délimitation des urbanisations existantes, d'autant que les territoires peuvent avoir connu des traditions très contrastées d'urbanisation concentrée ou de constructions isolées sur de grandes parcelles. En fait la question se pose encore plus vis-à-vis de la règle des 300 mètres introduite par la loi Montagne (voir dernier paragraphe). Les espaces remarquables (L 146-6, R 146-1) Toutes les DDT consultées ont identifié les espaces remarquables tel que cela a été prévu par la loi et demandé par circulaires avant 2000 mais l'instabilité des listes retenues par l'État depuis l'application de la loi aurait nécessité la réactualisation de ce travail. L'instruction donnée par l'administration centrale à partir de 2002/2003 (suite à l'arrêt Balmète) de laisser les communes identifier les espaces remarquables, à l'occasion de l'élaboration ou de la révision des PLU, a déstabilisé les services. La mission a également pointé la nécessité de faire oeuvre de pédagogie vis-à-vis des collectivités pour justifier les différences de surface de ces espaces selon les situations locales. Suivant la qualité des caractéristiques environnementales qui y sont recensées mais aussi l'importance des urbanisations voisines et des pressions d'aménagement, un espace d'un demi-hectare peut être significatif et constituer un enjeu tandis qu'il est ridicule d'isoler des espaces de moins de dix hectares autour des lacs restés naturels. Cette observation peut également s'appliquer aux coupures d'urbanisation (article R.146-2). L'annulation de l'article 187 de la loi 2005-157 du 23 février 2005 Cet article avait complété le code de l'urbanisme (article L.145-1) en introduisant, pour les communes riveraines des lacs de plus de 1000 hectares et situées en zone de montagne, la possibilité de délimiter un secteur dans lequel les dispositions particulières au littoral s'appliquent seules. Dans les autres secteurs de ces communes, ce sont les dispositions particulières à la montagne qui devaient seules s'appliquer. La délimitation de ces secteurs de non-superposition de l'application des deux lois devait relever d'un décret pris en Conseil d'Etat, après avis ou sur proposition des communes riveraines. Le décret dapplication n°2006-993 du 1er août 2006 a été annulé par le Conseil d'Etat et l'ajout à l'article L.145-1 du code de l'urbanisme apporté par l'article 187 de la loi DTR, supprimé par la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 (Grenelle 2). Les auditeurs ont noté que pour la DDT des Alpes de Haute Provence, un tel dispositif paraissait souhaitable ; pour la mission, une clarification serait utile pour aider les Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 133/137 services, sous l'autorité des préfets, à expliquer aux communes la cohérence de ces deux lois mais les effets de cette superposition des textes ne lui sont pas apparus poser problème dans la pratique. En conclusion, s'agissant de l'application de la loi Littoral aux rives des lacs de plus de 1000 hectares, les auditeurs relèvent que les difficultés d'application se concentrent logiquement là où les pressions pour l'urbanisation sont les plus importantes (Annecy, Léman, et dans une moindre mesure, Le Bourget, Serre-Ponçon et Sainte Croix) et elles sont similaires à celles qui sont constatées sur le littoral maritime. Les services départementaux travaillent d'une façon isolée, n'échangent pas avec leurs voisins, ne bénéficient pas d'une animation du niveau régional et ne reçoivent pas de réponse quand ils sollicitent l'administration centrale. Ils sont déstabilisés par des jurisprudences, parfois d'apparence erratique en raison de spécificités locales particulières à chaque affaire jugée, et s'ils investissent beaucoup sur l'interprétation du droit, ils sont très peu présents pour l'accompagnement technique, social et économique de la gestion des espaces naturels ou de l'aménagement. De plus, les rives de ces grands lacs sont le support de logiques très différentes de développement urbain et périurbain. Pour certains d'entre eux, les enjeux économiques, particulièrement touristiques, mais aussi les enjeux environnementaux, s'y concentrent et les conflits d'usage y sont nombreux. D'autres, au contraire, sont confrontés à la déprise agricole et aux difficultés de gestion des espaces naturels de leurs rives. Pour quelqu'uns de ces lacs, parmi les moins exposés aux pressions, des études globales pour leur gestion ont pu être conduites (Lac de Vouglans par la DDT, charte du PNR de la forêt d'Orient pour les lacs d'Orient et du Temple). En l'absence de telles études, les services prennent position au cas par cas. Les auditeurs ne peuvent que recommander qu'une animation spécifique soit engagée pour armer les services sur l'application de la loi Littoral autour des lacs de plus de 1000 hectares et que les moyens leur soient apportés pour veiller à l'application des différents articles de la loi dans les documents d'urbanisme (ScoT et PLU). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 134/137 7. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme ADS AE CA CAR CC CETE CGDD CGEDD CIAT CNML CU DAC DATAR DDALL DDI DDT DDTM DEB DGALN DHUP DIRM DPM DRE DREAL DSF Application du droit des sols Autorité environnementale Communauté d'agglomération Signification Comité de l'administration régionale Communauté de communes Centre d'études techniques de l'équipement Commissariat général au développement durable Conseil général de l'environnement et du développement durable Comité interministériel d'aménagement du territoire Conseil national de la mer et des littoraux Code de l'urbanisme Direction d'administration centrale Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale Document départemental d'application de la loi littoral Direction départementale interministérielle Direction départementale des territoires Direction départementale des territoires et de la mer Direction de l'eau et de la biodiversité Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages Direction interrégionale de la mer Domaine public maritime Direction régionele de l'environnement Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Document stratégique de façade Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 135/137 Acronyme DTA DTADD EPCI GIMEL GIP GIZC ICPE LOADDT Loi DTR Loi Grenelle 1 Loi Grenelle 2 Loi SRU MEDDE METL MI MIACA MIAL MIGT PAC PACA PADD PADDUC PAEN PLU PNR POS PPR Signification Directive territoriale d'aménagement Directive territoriale d'aménagement développement durable Établissement public de coopération intercommunale Gestion intégrée de la mer et du littoral Groupement d'intéret public Gestion intégrée des zones côtières Installations classées pour la protection de l'environnement Loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire Loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux Loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement Loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement Loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie Ministère de l'égalité des territoires et du logement Minsitère de l'Intérieur Mission interministérielle d'aménagement de la côte Aquitaine Mission interministérielle d'aménagement du littoral Mission d'inspection générale territoriale Porter à connaissance Provence-Alpes-Côte d'Azur Plan d'aménagement et de développement durable Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse Périmètre de protection et de mise en valeur des espaces naturels et agricoles périurbains Plan local d'urbanisme Parc naturel régional Plan d'occupation des sols Plan de prévention des risques Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 136/137 Acronyme RNU SAR SCoT SDAGE SDAU SGAR SIG SMVM SNML SOeS TA TVB ZAP ZNIEFF Règlement national d'urbanisme Signification Schéma d'aménagement régional Schéma de cohérence territoriale Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme Secrétariat général aux affaires régionales Système d'information géographique Schéma de mise en valeur de la mer Stratégie nationale mer littoral Services de l'observation et des statistiques (CGDD) Tribunal administratif Trame verte et bleue Zone agricole protégée Zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 137/137 Ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie Conseil général de l'Environnement et du Développement durable 7e section ­ secrétariat général bureau Rapports et Documentation Tour Pascal B - 92055 La Défense cedex Tél. (33) 01 40 81 68 73 www.developpement-durable.gouv.fr INVALIDE) (ATTENTION: OPTION ©gional y est ancienne. Le préfet de région s'est personnellement saisi du sujet, la loi Littoral faisant régulièrement, depuis les circulaires de 2006, l'objet de débats en comité de l'administration régionale (CAR) avec une préoccupation constante de mise en cohérence et de fermeté dans son application locale. La DREAL, lors de sa création, a donné une dimension nouvelle au dossier « loi Littoral » en l'intégrant à une mission « zones côtières et milieux marins » placée auprès du directeur. Dans ce cadre, la DREAL anime l'atelier interdépartemental littoral qui a réalisé un travail conséquent sur l'harmonisation des modalités d'application des dispositions particulières au littoral. ­ Mais aussi de nouvelles perspectives à valoriser Les Grenelles de l'environnement et de la mer ont ouvert de nouvelles perspectives. La gestion intégrée de la mer et du littoral (GIML) est au coeur de la nouvelle gouvernance mise en place suite au Grenelle de la mer. L'élaboration d'une stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML), évoquée précédemment 46 devrait être l'occasion de mobiliser sur cette politique l'ensemble des acteurs concernés au sein du Conseil national de la mer et des littoraux (CNML) : État, collectivités territoriales, communauté scientifique, acteurs socio-économiques et associations de protection de l'environnement. Les documents stratégiques de façade (DSF) devront en décliner les principes et orientations en matière de protection du milieu, de valorisation des ressources marines et de gestion intégrée des activités liées à la mer et au littoral. Ils organiseront 45 46 Cf. synthèse de la démarche engagée en annexe 4. Cf. § 213. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 35/137 également la planification stratégique et spatiale des activités en mer et devraient ainsi permettre de renforcer le volet mer des SCoT. Par ailleurs, un bilan de la mise en oeuvre française de la recommandation communautaire sur la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) a été réalisé47. La mission a souhaité savoir si les services de l'État se préparaient à faire face à ces perspectives et comment ils s'y préparaient. Ainsi, en Aquitaine, le lancement d'un projet de DTADD a remobilisé la DREAL mais également les DDTM autour des travaux du groupement d'intérêt public (GIP) du littoral. En revanche, les démarches de gestion intégrée des zones côtières (GIZC) et la stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML) ne fédèrent pas encore l'action des services. Les instances qui se mobilisent sur la problématique littorale sont principalement portées par les collectivités territoriales (GIP, syndicats mixtes...) et la participation des services à ces structures locales est très variable suivant les régions ; celle-ci se limite dans la plupart des cas à de l'information mutuelle, au mieux à de l'accompagnement de dossiers, ce que déplorent certains préfets, notamment pour les appels à projets GIZC lancés par la DATAR. En Bretagne, la DREAL a initié en 2010 une réflexion au sein d'un groupe de travail sur le « volet mer » des SCoT, rassemblant les quatre DDTM et les services de la préfecture maritime. Deux notes, stratégique et juridique, ont respectivement été produites sous l'égide de la mission « zones côtières et milieux marins » de la DREAL48. De création plus récente, les directions inter-régionales de la mer (DIRM) se mettent progressivement en place mais elles n'ont pas, pour le moment, reçu d'instructions spécifiques pour animer la réflexion de façade annoncée, ni ne disposent toujours de l'ensemble des compétences techniques pour le faire. Elles restent essentiellement centrées sur les politiques strictement maritimes. Le constat actuel est donc que les relations de travail (souvent ténues) entre les services de différents niveaux ne portent pas encore sur l'élaboration « d'une vision stratégique globale dans une perspective de développement durable », à quelques exceptions notables près, comme la Bretagne et l'Aquitaine. 2.2.3. Des attentes fortes vis-à-vis de l'administration centrale Vis-à-vis de l'administration centrale, le sentiment qui prévaut actuellement est une absence de pilotage et d'animation, sentiment renforcé par la perte de repères et d'interlocuteurs depuis les réorganisations de 2008. 47 48 Rapports à la Commission européenne 2010 et 2011 (MEDDTL-MAAPRAT- SGG-DATAR). Cf. annexe 5 sur l'application de la loi Littoral en Bretagne. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 36/137 Rapport n°007707-01 Les ateliers littoraux lancés par la DHUP ont été peu évoqués lors des rencontres avec les services et, lorsqu'ils l'ont été, les avis ont été nuancés : · d'une part, la disparition du lieu d'échanges que constituait depuis 2005 « l'Atelier littoral national portant sur les enjeux et les approches par façade », est ressentie comme une perte par les DREAL. Il avait réellement impulsé une dynamique avec des prolongements dans un certain nombre de régions (Aquitaine, Bretagne, mais aussi dans des régions comme le LanguedocRoussillon et le Nord-Pas de Calais auquel s'était associée la Picardie)49 ; d'autre part, les ateliers expérimentaux conduits sur des sites individualisés ont été diversement appréciés par les services. Une synthèse de ces travaux a été présentée à l'ensemble des parties prenantes lors d'une réunion qui s'est tenue à Guérande en novembre 200950 mais leur apport reste à évaluer tant auprès des services que des bénéficiaires. · Cette évaluation serait d'autant plus intéressante qu'en l'absence d'autres communications du niveau central sur la loi Littoral, les messages véhiculés variablement par les représentants de la DHUP ou les intervenants prestataires, lors des réflexions parfois très ouvertes menées dans ces ateliers, ont pu être interprétés, principalement par certains élus, comme la nouvelle doctrine en vigueur par l'État, plus souple, concernant l'application des dispositions particulières au littoral. Les circulaires de 2006, qui restent pour les services « la référence » en matière de politique littorale, marquent donc une étape importante. Depuis cette date, aucune orientation spécifique n'a été donnée aux services alors même que les Grenelle de l'environnement et de la mer mettaient en évidence de nouveaux enjeux sur le littoral. Si certains services s'en accommodent, beaucoup regrettent cette absence d'animation lorsque, confrontés à des difficultés d'interprétation de la loi, leurs questions restent sans réponse. Les attentes exprimées vis-à-vis des services centraux sont de différentes natures : · de nouvelles instructions, plutôt interministérielles, pour tenir compte des évolutions législatives et jurisprudentielles. Certains sujets méritent en effet des précisions : c'est le cas par exemple pour la gestion des projets de production d'énergies renouvelables ou pour l'application de la loi dans les estuaires, voire le développement du logement social ; une animation, avec diffusion/partage des bonnes pratiques, et des réponses aux questions posées, ce qui suppose des interlocuteurs clairement identifiés au niveau central mais aussi régional. Un appui spécifique pour les rives des grands lacs et les étangs salés qui subissent une pression · 49 Cf. « Restitution des travaux de l'atelier 2006-2007 - Atelier littoral ­ enjeux et approches par façade »; MEEDDM, nov 2009. Cf. dossier « Atelier littoral ­ Les projets - Séminaire de restitution ­ 10 et 11 déc. 2009 ». Les expérimentations présentées sont le résultat pour partie d'appels à candidatures et ont notamment pour objectif d'accompagner l'État local, aux côtés des élus, dans la construction des stratégies territoriales et de leur mise en oeuvre. 50 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 37/137 très importante et sont l'objet de contentieux répétés (Lacs d'Annecy, Léman, Le Bourget, étang de Berre) est également souhaité par les services concernés. · une veille juridique active impliquant le suivi de la jurisprudence mais aussi, si nécessaire, des appels motivés, car même si, avec le temps, les tribunaux administratifs ont stabilisé certaines notions, leur interprétation reste évolutive au gré de leurs décisions. Pour y faire face, les services doivent chacun, avec une forte dispersion des énergies, se doter d'outils plus ou moins performants suivant les moyens disponibles au niveau départemental et/ou régional. Deux ans après la réforme de l'administration territoriale de l'État qui a profondément modifié l'organisation des services, il paraît à la mission indispensable de mobiliser à nouveau les services déconcentrés sur la politique spécifique d'aménagement du littoral. Cette mobilisation, pour être opérationnelle, devrait se réaliser à différents niveaux : - au niveau national, avec la nomination (sur la base d'une lettre de mission) d'un référent « aménagement/urbanisme littoral » au sein de la DGALN avec une double mission : favoriser la transversalité entre les directions de l'administration centrale concernées, participer à l'animation des réseaux métiers « aménagement/urbanisme » et « évaluation environnementale, en favorisant les relations nécessaires ; - au niveau régional (voire interrégional en fonction des spécificités de façades), avec la désignation d'un référent « aménagement/urbanisme littoral » en charge de : mettre en cohérence des politiques impactant le littoral, favoriser la transversalité des actions de la (ou des) DREAL, animer les DDTM et DDT concernées par les grands lacs sur cette thématique précise, en veillant à y associer les DIRM ; - et, bien sûr, au niveau départemental, en veillant : à la participation active des DDTM et DDT concernées (sièges, unités territoriales et délégations littoral-mer pour les DDTM) à l'animation collective organisée au niveau régional (ou interrégional), à la bonne coordination des différents services mais aussi des services du siège avec les délégations littoral-mer et les unités territoriales, à l'organisation structurée des relations avec les collectivités locales, notamment avec celles qui assurent l'instruction des autorisations d'urbanisme. Une telle mobilisation ne pourrait toutefois se concevoir sans que ne soient adressées au préalable aux préfets de région et de département de nouvelles instructions interministérielles portant sur la mise en oeuvre d'une politique d'aménagement littoral, définie dans sa dimension intégratrice du développement socio-économique et de la protection des ressources et milieux naturels. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 38/137 2.2.4. Une mobilisation des services sur la planification Les démarches de planification (et particulièrement les SCoT) sont identifiées par tous les services comme prioritaires. Dans les DDTM, cette stratégie n'est pas spécifique à la politique d'aménagement littoral qui est considérée comme une composante de l'ensemble des politiques devant être portées par les documents d'urbanisme. ­ Une priorité bien identifiée sur l'enjeu que représentent les documents d'urbanisme sur le littoral Concernant le littoral, la priorité accordée aux documents d'urbanisme est pour la mission d'autant plus pertinente que leur qualité est indispensable à l'application de la loi Littoral dans son esprit et dans sa globalité, ce qu'avaient souligné les circulaires précitées, mais aussi dans sa mise en oeuvre opérationnelle, au travers de l'instruction des actes individuels. En matière de planification, la situation du littoral peut apparaître favorable comme le montrent les données 201151 du service de l'observation et des statistiques du CGDD (SOeS) : plus de 96 % des communes littorales sont dotées d'un POS/PLU (approuvé, en cours d'élaboration ou de révision), 2 % disposent d'une carte communale et seules 1,4 % des communes n'ont aucun document d'urbanisme (parfois en raison de leur annulation) ; elles sont 32 % dans ce cas au niveau national . Il n'en est pas de même sur le plan qualitatif. Les services signalent une majorité de POS voire de PLU encore non compatibles avec l'ensemble des dispositions de la loi Littoral et regrettent une certaine inertie des élus lorsqu'il s'agit de faire évoluer les « POS dormeurs ». Cette insuffisante prise en compte de la loi dans les documents d'urbanisme, qui reste là encore très variable suivant les départements, avait déjà été soulignée dans le bilan de la loi Littoral réalisé fin 2007. Sans aucun doute, il s'agit encore aujourd'hui du principal facteur de difficulté dans le respect effectif des dispositions particulières au littoral. La sécurisation juridique des documents locaux d'urbanisme, voulue par la circulaire de mars 2006, reste donc un chantier plus que jamais d'actualité même si le sujet est particulièrement sensible. ­ Mais des leviers d'action pour les services de l'État dont l'opérationnalité interroge Force est de constater que les démarches, parfois volontaristes, entreprises par les services avec le soutien de préfets pour obtenir la mise en révision des documents d'urbanismes se heurtent souvent au refus d'élus, peu enclins à faire évoluer la situation. Les « POS dormeurs » présentent en effet l'avantage de ne pas ouvrir de débat sur l'aménagement communal et de ne pas remettre en cause « d'anciens droits à construire » tant qu'un contentieux n'annule pas les documents concernés ou les autorisations délivrées. Mais cela vaut aussi pour des PLU récents dont certains ne sont manifestement pas plus compatibles avec les dispositions particulières au littoral. 51 « Références » de mai 2011 sur l'environnement littoral et marin, DGALN. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 39/137 L'État, à travers le contrôle de légalité prévu par le code général des collectivités territoriales, dispose pourtant des moyens d'agir avec fermeté tant sur le champ des documents d'urbanisme que sur celui des autorisations. Mais, pour les services, les procédures contentieuses, longues et coûteuses, et dont l'issue reste toujours aléatoire, ne sont pas assorties de sanctions opérationnelles pour les collectivités locales et leurs groupements. Il s'agit là d'un point particulièrement sensible. Faut-il le rappeler, jusqu'en 2000, un POS ne pouvait pas être abrogé. En cas d'annulation par voie juridictionnelle, la collectivité était simplement tenue d'élaborer sans délai un nouveau POS (ancien art. L.123-4-1) mais, pour autant, la loi de décentralisation portant sur l'urbanisme, complétée par la loi de 1987 relative à la prévention des risques, n'avait pas laissé l'État démuni de moyens d'actions que la loi SRU a repris en modifiant à la marge les anciens articles. Les services se sont relativement peu exprimés sur ces moyens d'actions, sinon pour affirmer qu'ils en étaient démunis. Aussi la mission s'est-elle efforcée de mieux les cerner52. · De façon préventive, avant l'entrée en vigueur des PLU53 Cette mesure permet au préfet de notifier à un maire dans le délai d'un mois, par lettre motivée, les modifications qu'il estime nécessaire d'apporter au PLU ; celui-ci ne deviendra exécutoire qu'une fois les modifications intervenues 54. Mais, depuis la loi SRU, cette mesure ne concerne plus que les communes non couvertes par un SCoT, de moins en moins nombreuses sur le littoral (moins de 20 % en 2011 55. · De façon corrective, lorsque le PLU (ou POS) est déjà entré en vigueur56 Un préfet peut, lorsqu'il constate qu'un POS/PLU n'est pas compatible avec les dispositions particulières au littoral (ou de celles d'une DTA), en informer le maire et lui demander de modifier ou réviser son document d'urbanisme. Passé un délai de 6 mois, à défaut, le préfet peut engager la procédure à la place de la commune. Ces dispositions sont en fait peu utilisées, car, pour les quelques préfets qui se sont exprimés sur ce point, mieux vaut un PLU imparfait qu'une absence de PLU (situation fragilisant l'ensemble des actes d'urbanisme) ou un retour à l'ancien document d'urbanisme, encore moins compatible avec les lois et documents d'encadrement supérieur. 52 53 54 Cf. note du 3 juillet 2012 de la DHUP, établie à la demande de la mission, en annexe 5. Art. L.123-12 du code de l'urbanisme (ancien L.123-3-2 créé par la loi de décentralisation de 1983). Une disposition identique existe pour les SCoT non compatibles avec les dispositions particulières au littoral (art. L.122-19 du CU). Cf. Références - Environnement littoral et marin ­ Edition 2011 (CGDD/SOeS). Art. L.123-14 du code de l'urbanisme (ancien art. L.123-7-1 créé par la loi n°83-8 du 7 janvier 1983). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 40/137 55 56 Rapport n°007707-01 Pour la mission, une autre raison, bien que non évoquée par les services, peut être avancée. La plupart des dispositions particulières au littoral étant de nature interprétative, il ne paraît sans doute pas évident pour l'État de se substituer, avec les risques juridiques qui y sont associés, à l'autorité compétente pour les traduire de façon autoritaire dans un document d'urbanisme. Il semble plus aisé pour les préfets d'y avoir recours lorsqu'il s'agit de rendre compatible un document d'urbanisme avec un projet d'intérêt général. · Lors de l'instruction des actes individuels Les dispositions particulières au littoral (ou celles d'une DTA qui les a précisées) sont, rappelons-le, directement « applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, installations et travaux divers (...) l'exploitation de minerais »57. Ces actes vont donc bien au-delà des seuls permis de construire. Aussi est-ce essentiellement par le biais du contrôle de légalité 58 des actes individuels considérés comme non compatibles avec les dispositions particulières au littoral, bien que conformes aux documents d'urbanisme, que les préfets s'efforcent de convaincre les collectivités de mettre en révision leur document d'urbanisme pour le rendre compatible lui-même avec ces dispositions. Faire cesser ces situations était pourtant l'objectif principal de la circulaire de mars 2006 : « il est essentiel de mettre fin à des situations où le permis de construire est refusé, car contraire à la loi Littoral alors que le terrain est déclaré constructible par le POS et qu'un certificat d'urbanisme positif avait pu être délivré de bonne foi sur cette base. » Face au constat dressé par la mission d'audit, ce ne sont donc pas les objectifs de la circulaire de mars 2006 qui sont à revoir mais bien les conditions et modalités de mise en révision des documents d'urbanisme non compatibles avec les dispositions particulières au littoral, et plus précisément encore la volonté de les utiliser. Pour faire cesser cette situation dommageable qui n'a que trop duré, la mission préconise qu'une note spécifique soit adressée aux préfets pour préciser les conditions d'utilisation de ces différents leviers d'action et qu'en dernier recours, lorsque qu'une collectivité refuse de mettre en révision son POS/PLU illégal dans un délai qui reste à fixer, soit prévu par la loi le retour réglementaire au RNU, les documents d'urbanisme précédents n'étant pas plus que l'actuel compatibles avec la loi Littoral. Une telle mesure constituerait un message fort vis-à-vis des élus du littoral mais également auprès de l'ensemble des élus et devrait être de nature à faire évoluer 57 58 Article L.146-1 du code de l'urbanisme. Avec ses trois grandes phases possibles : recours gracieux, déféré préfectoral, suspension sur déféré. Ce référé particulier est prévu à l'article L.554-1 du code de justice administrative et a comme particularité de ne pas nécessiter la démonstration de l'urgence, par exception aux règles applicables en matière de référé. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 41/137 significativement la situation. Elle répondrait par ailleurs au besoin de sécuriser les documents d'urbanisme au regard des tiers. Une mesure similaire existe pour les SCoT : ceux-ci sont rendus caducs à défaut de délibération de l'établissement public compétent sur son maintien en vigueur ou sur sa révision partielle ou complète à l'issue, il est vrai, d'un bilan, 6 ans après son approbation (art. L.122-14 modifié). ­ Un rendez-vous à ne pas manquer : la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec les lois Grenelle S'il n'est pas évident pour un préfet de provoquer une procédure de révision pour la mise en compatibilité d'un document d'urbanisme par rapport à des dispositions spécifiques datant de 1986, il leur est plus aisé de profiter d'une procédure de révision suscitée par une législation récente pour veiller à cette mise en compatibilité. Les lois Grenelle ont introduit de nouvelles échéances pour les SCoT et les PLU qui devront être mis en compatibilité, sous les trois ans, respectivement avec les dispositions des lois Grenelle pour les premiers, avec celles des SCoT nouvellement élaborés ou révisés pour les seconds59. Il s'agit là de rendez-vous importants auxquels il importe que les services en charge de l'urbanisme se préparent. Le travail qu'ils ont à mener préalablement est d'autant plus nécessaire que, si la majorité des dispositions nouvelles confortent les dispositions particulières au littoral (gestion économe de l'espace, trame verte et bleue par exemple), certaines d'entre elles sont considérées comme contradictoires par les collectivités, opinions parfois partagées par les DDTM. Pour y répondre , les services expriment tous, au travers des entretiens menés dans le cadre du présent audit, la nécessité d'analyser les enjeux de la loi Littoral avec une « maille de traitement » qui dépasse les limites communales et intègre une échelle plus large et transversale permettant, notamment, d'intégrer le rétro-littoral au-delà de ces limites communales. La priorité que les services en charge de l'urbanisme accordent à l'accompagnement des SCoT ou des PLU intercommunaux est donc plus que pertinente lorsqu'il s'agit du fonctionnement de l'espace littoral conditionné par des échanges terre-mer, mais aussi littoral-intérieur des terres. Là encore, le contexte littoral est favorable, car l'intercommunalité s'y est davantage développée. Même si le poids de l'intercommunalité varie selon les départements littoraux et que les démarches engagées ne sont pas encore terminées pour la plupart d'entre elles, les données du SOeS montrent que plus de 80 % des communes littorales sont en 2011 incluses dans un périmètre de SCoT. Compte tenu cependant des modalités de gouvernance, généralement consensuelles, qui président à l'élaboration d'un SCoT (voire d'un PLU intercommunal) et de l'inertie à attendre des collectivités pour rendre compatibles leur PLU ou ScoT (pour peu que ce 59 Articles L.111-1-1 (mise en compatibilité avec les documents de rang supérieur comme les futurs plans de gestion des risques d'inondation, ou prise en compte des schémas régionaux de cohérence écologique et des plans climat-énergie territoriaux), L.122-1-12 (SCoT), L.123-1-9 (PLU) modifiés du code de l'urbanisme. De nombreuses autres dispositions du Grenelle doivent également être intégrées dans les documents d'urbanisme avec des échéances qui leur sont spécifiques. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 42/137 Rapport n°007707-01 dernier dispose d'un contenu suffisamment prescriptif), il n'y a pas à douter que l'encadrement réglementaire des PLU littoraux par les SCoT ne pourra suffire à leur mise en compatibilité, ce qui implique, de la part de l'État, le maintien d'un investissement sans faille dans le suivi des PLU littoraux. L'élaboration de SCoT suffisamment ambitieux dans ce domaine n'en sera que facilitée. ­ Une vigilance sur les priorités d'action fixées aux services L'action des services devra être soutenue et accompagnée lors du dialogue de gestion, car les DREAL et les DDTM auront à faire face à un chantier important en matière de planification. Les DDTM se sont généralement structurées autour d'un double niveau d'intervention, avec des variantes liées au contexte : · les services du siège portent la doctrine et la stratégie, harmonisent les interventions du niveau territorial (diffusion des connaissances et méthodes, porter à connaissance, association, avis, contrôle de légalité lorsque celui-ci n'a pas été transféré en préfecture) ; des unités territoriales ou référents travaillent au contact des collectivités territoriales avec pour mission le portage local des politiques publiques. · Les notes d'enjeux, qui accompagnent généralement les porter à connaissance, sont élaborées, suivant les cas, par le niveau territorial, les services du siège ou conjointement. Les DREAL y contribuent généralement dans le cadre de leurs missions départementales. Les services sont donc organisés pour accompagner les démarches de planification, même si, comme la mission l'a déjà souligné, l'absence de vision stratégique pour le littoral peut mettre en difficulté les agents en charge de défendre la position de l'État dans le cadre de l'association. La qualité des documents de référence disponibles constitue donc un enjeu pour les services de l'État dans l'exercice de leurs missions. 2.2.5. L'application du droit des sols (ADS), un chantier qui restera d'actualité ­ Des services investis dans la sécurisation de la chaîne d'intervention de l'État Toutes les DDTM et DDT auditées se sont organisées pour sécuriser, au mieux de leurs moyens, la filière ADS même si l'organisation qui en découle est variable : organisation fonctionnelle au niveau du siège avec d'éventuelles antennes géographiques ou cellules dédiées dans les délégations territoriales avec animation et support juridique du siège. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 43/137 Quelle que soit l'organisation retenue, partout des actions ont été entreprises pour sécuriser la chaîne d'intervention en ADS. Cet objectif a fondé plusieurs des réorganisations déjà réalisées avant la création des DDTM. Le suivi de l'application de la loi Littoral a bénéficié de cette organisation qui ne lui est pas propre, avec notamment l'élaboration par les services du siège, constatée presque partout, de fiches de doctrine spécifiques. Bon nombre des documents de référence disponibles dans les services ont d'ailleurs été élaborés pour servir de support aux instructeurs. ­ Maintenir l'appui aux services instructeurs, y compris des collectivités locales La filière ADS est l'une des rares filières à avoir maintenu un appui aux instructeurs par le biais de réunions de réseau et/ou de référents, en y associant de plus en plus souvent les instructeurs des collectivités territoriales, comme dans les Côtes-d'Armor ou dans le Var. Les constats montrent que, dans l'ensemble, les dispositions particulières au littoral sont généralement bien connues des services, ce qui n'exclut pas les difficultés d'interprétation de certaines notions (cf. partie 3). Lorsque les modalités de collaboration ne sont pas définies et que les outils d'échanges sont insuffisants, les divergences d'appréciation des projets peuvent exister, comme nous l'avons déjà évoqué, entre les équipes régionales en charge de l'évaluation environnementale et les services départementaux. Au-delà des problèmes de moyens, des interrogations sur les compétences disponibles pour l'instruction ADS ont ainsi été exprimées par quelques DREAL mais aussi quelques préfets, notamment autour des grands lacs. La prise en charge progressive de l'instruction ADS par les collectivités renforce encore, si besoin en était, la nécessité pour les services de l'État de disposer de documents de référence actualisés et partagés, notamment avec les collectivités territoriales. Quelques expériences sont intéressantes à signaler, comme la participation des services techniques des villes aux réunions de réseaux ADS déjà évoquée, mais ces initiatives locales ne sont pas à la hauteur des enjeux. La circulaire du 4 mai 2012 relative à l'organisation de l'application du droit des sols dans les services déconcentrés souligne à juste titre le fait que les services agiront à l'avenir de plus en plus comme animateurs et experts d'une filière qui relèvera majoritairement des collectivités locales. L'enjeu est donc important pour ce qui concerne l'application de la loi Littoral : le partage de documents de référence prendra une acuité particulière alors même que les instructions données aux services par la circulaire de mars 2006 ont généré, comme on le verra plus loin, une grande confusion à ce sujet. 2.2.6. Le contrôle de légalité : une réalité peu adaptée aux enjeux Comme la mission l'a mis en évidence lors de son analyse de la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions particulières au littoral, le contrôle de légalité constitue un maillon essentiel de la chaîne du processus de mise en oeuvre de Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 44/137 la loi Littoral de par son opposabilité aux actes individuels. Il était donc utile de l'évoquer à l'occasion des entretiens avec les Préfets et les différents services de l'État. ­ un transfert de mission et de moyens vers les préfectures sans retour d'information organisé Lors de la création des DDI, au 1er janvier 2010, le contrôle de légalité des actes d'urbanisme a été transféré systématiquement en préfecture. La situation est plus nuancée pour les documents d'urbanisme dont le contrôle de légalité, sous la forme du contrôle dit « intégré », a été maintenu en DDTM dans près d'une dizaine de départements littoraux. Quelle que soit l'organisation retenue, les DDTM interviennent toujours, soit en appui technique, soit, lorsque les services de l'État sont mis à disposition d'une commune, par le biais du signalement des avis divergents entre l'arrêté pris par le maire et la proposition initiale du service. Lorsque les communes instruisent elles-mêmes les autorisations relatives au droit du sol, et elles sont de plus en plus nombreuses sur le littoral, l'organisation du contrôle de légalité paraît difficile à réaliser. D'une façon générale, les relations entretenues entre les services sont bonnes, mais beaucoup de DDTM regrettent l'absence de retour de la part des services préfectoraux sur les dossiers soumis au contrôle de légalité. Conformément aux circulaires relatives au contrôle de légalité60, l'application de la loi Littoral constitue pour les préfets, d'une manière générale, un champ d'action prioritaire. Toutefois, cette priorité ne se concrétise pas toujours dans les faits et, dans de nombreux départements littoraux, le contrôle de légalité des actes d'urbanisme dans les zones soumises à risques a pris le pas sur l'application des dispositions particulières de la loi Littoral. Si les entretiens mettent en évidence des situations très variables d'un département à l'autre, l'expression générale va dans le sens d'une insuffisance de moyens et/ou de compétences sur la mission du contrôle de légalité en matière d'urbanisme alors que celle-ci demande beaucoup de technicité. A ce sujet, un département a d'ailleurs signalé l'accessibilité difficile aux formations organisées par le ministère pour les agents des préfectures. ­ Une mission majeure, sans grande lisibilité, qui reste à approfondir Il est en outre constaté dans le cadre de l'audit un nombre de lettres d'observations ou de déférés globalement faible eu égard au volume des actes, tant au niveau des documents d'urbanisme que des décisions individuelles. L'audit ne portant pas spécifiquement sur le contrôle de légalité, les données recueillies ne permettent pas d'approfondir l'analyse. De plus, les statistiques du ministère de l'Intérieur ne 60 Circulaires interministérielles du 1er septembre 2009 relative au contrôle de légalité en matière d'urbanisme et du 25 janvier 2012 relative à la définition des actes prioritaires en matière de contrôle de légalité. Voir aussi, pour mémoire, les circulaires relatives au contrôle de légalité qui ont suivi la décentralisation en matière d'urbanisme, celles des 26 mars et 25 octobre 1984. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 45/137 différencient pas ce qui relève des communes littorales du reste du département et, dans les communes littorales, ce qui relève des dispositions particulières au littoral. En l'absence de statistiques nationales disponibles sur le sujet, les interrogations demeurent : le faible nombre d'observations ou de déférés est-il la conséquence d'une application rigoureuse de la loi par les collectivités ou d'un contrôle de légalité insuffisant de la part de l'État ? En ce qui concerne l'application du contrôle de légalité des documents d'urbanisme, la réponse laisse peu de doute au regard du nombre de documents existants jugés par les services non compatibles avec les seules dispositions particulières au littoral. Si la circulaire du 4 mai 2012 relative à l'organisation de l'application du droit des sols dans les services déconcentrés de l'État inscrit toujours les dossiers littoraux parmi les dossiers à forts enjeux et rappelle dans son annexe 1 les priorités en matière de contrôle de légalité des actes d'urbanisme, on ne peut que s'interroger sur le l'avenir de cette mission dans le contexte rappelé d'évolution de l'intercommunalité à l'échéance 2013 ou de nouvelles perspectives de décentralisation. Les moyens et compétences disponibles dans les services ne sont pas actuellement à la hauteur des enjeux, alors même que les informations obtenues dans le cadre de l'audit soulignent de nombreuses difficultés dans l'organisation du contrôle de légalité des actes relatifs à l'application du droit du sol instruits par les communes. Dans ce contexte, la mission juge opportun d'envisager un travail spécifique sur les objectifs et l'organisation du contrôle de légalité dans les territoires littoraux, et tout particulièrement sur les documents d'urbanisme, source de risques juridiques importants pour les collectivités mais également pour les particuliers. Un groupe de travail interministériel Intérieur/Égalité des territoires pourrait être mis en place à cet effet61. Le bilan des rencontres dans les services permet donc de constater des modalités d'action certes variables, mais aussi l'investissement réel de chacun : les difficultés constatées dans l'application de la loi Littoral ne résultent pas d'une organisation défaillante ou de services laxistes. Par contre, deux motifs d'inquiétude sont à signaler et à gérer : · la quasi-disparition des réseaux métiers qui permettaient le partage d'expériences, la forte mobilité des agents entraînant une perte, quand ce n'est pas la disparition, des compétences nécessaires. · À cela, s'ajoute la difficulté récurrente et maintes fois soulignée des services à organiser des démarches de capitalisation des actions menées antérieurement, 61 Cette recommandation s'est trouvée confortée par les déclarations d'élus relatives au contrôle de légalité lors des récentes rencontres organisées par le GIP littoral aquitain le 21 juin dernier à Capbreton. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 46/137 Rapport n°007707-01 difficulté qui va de pair avec la perte de la « mémoire administrative » constatée. D'un tel constat découlent quelques pistes d'action pour y remédier qu'auraient à gérer les référents préconisés ci-dessus. 2.3. Les documents de référence et leur partage avec les collectivités C'est au niveau des documents de travail disponibles et des modalités de leur partage avec les collectivités locales que les plus grandes disparités entre services apparaissent. Or, la qualité des analyses territoriales est fondamentale, notamment parce que c'est sur la base d'un bon diagnostic, si possible partagé avec les collectivités, que les services pourront construire une stratégie locale, étayer et défendre leurs positions concernant la traduction spatiale des différents principes de la loi Littoral. On constate en effet que les divergences d'appréciation maintes fois soulignées prennent souvent leur source dans une absence de diagnostic partagé du contexte local et de ses enjeux ; à cela s'ajoute le fait que certaines notions utilisées comme critères d'appréciation, telles que la notion « d'ambiance marine », sont souvent sujet d'âpres discussions, même entre services de l'État. Par ailleurs, il n'y a pas dans les services de systèmes d'observation dédiés au littoral, ni d'indicateurs de suivi spécifiques. Les données existantes sont intégrées dans les bases de données, notamment géomatiques, permettant d'enrichir les systèmes d'information géographique (SIG) dont dispose chaque service et sont largement exploitées dans les notes d'enjeux et les « porter à connaissance » produits. Dans l'ensemble, les services n'expriment pas de besoins particuliers sur ce plan et jugent positivement les complémentarités entre le niveau régional et le niveau départemental ainsi que les relations de travail établies. 2.3.1. Les démarches engagées en réponse à la circulaire de 199162 Les termes de la circulaire interministérielle du 24 octobre 1991 sont intéressants à rappeler pour éclairer l'analyse des évolutions intervenues après la circulaire de mars 2006. La circulaire de 1991, co-signée par cinq ministres dont celui de l'Intérieur, se positionnait sur le champ de la collaboration entre l'État et les collectivités locales. Tout en rappelant que les règles générales du code de l'urbanisme « mentionnent l'appartenance du littoral au patrimoine commun de la nation et la nécessité de la gestion économe et équilibrée de l'espace », cette circulaire met l'accent sur le fait que l'application de ces règles implique l'harmonisation des décisions de l'État et des collectivités locales qui doit être conduite sous l'autorité des préfets. 62 Le recueil de l'ensemble des circulaires citées dans ce rapport du CGEDD est disponible au CGEDD. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 47/137 L'association des services à l'élaboration ou la révision des documents d'urbanisme élaborés par les collectivités présente donc une importance particulière, la position de l'État devant être solidement étayée grâce aux études préalables réalisées sur « des aires territoriales adaptées aux enjeux (...) avec une préoccupation de transparence vis-à-vis des partenaires locaux et des acteurs de l'aménagement » auxquels les résultats devaient être communiqués ». La mobilisation des services était demandée, tout comme une grande fermeté pour faire prendre en compte la position de l'État (solidement étayée) à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme. De même, il leur était demandé de saisir les collectivités lorsque leurs documents d'urbanisme n'étaient pas jugés compatibles et « de susciter voire imposer les procédures de révision nécessaires ». ­ Les documents départementaux d'application de la loi Littoral (DDALL), base du « porter à connaissance » de l'État auprès des collectivités Dans les régions ou départements soumis à fortes pressions, les directions départementales de l'équipement (DDE) ont engagé très tôt le travail de spatialisation des dispositions de la loi Littoral nécessaire à l'élaboration du « porter à connaissance » et des avis de l'État dans le cadre de l'élaboration ou la révision des documents d'urbanisme (SDAU, POS). Mais ce n'est qu'en juillet 1992, à la suite de la publication de la circulaire d'octobre 1991, que la direction de l'architecture et de l'urbanisme (DAU) adresse une note relative aux documents départementaux d'application de la loi Littoral (DDALL), en précisant l'objet, le champ, l'élaboration, la portée, la forme et le contenu de ces documents (espaces remarquables et caractéristiques, coupures d'urbanisation, espaces proches du rivage et zones préférentielles d'aménagement). En septembre 1993, elle publie un document « Proposition pour des applications spatiales de la loi Littoral »63, beaucoup plus ambitieux que la note précédente, car il préconise la prise en compte des dynamiques locales. La grande majorité des DDE littorales et des DDE concernées par les grands lacs se sont ainsi engagées dans l'élaboration de ces outils d'analyse et les ont généralement communiqués aux communes. Tous les DDALL réalisés à cette époque identifiaient à minima les espaces remarquables (dont l'inventaire avait été réalisé sous la conduite des DIREN), les coupures d'urbanisation et les espaces boisés significatifs. Par contre, certaines notions comme celles des espaces proches du rivage ou les espaces urbanisés y sont peu traitées. Cette diversité de contenu s'est aussi trouvée renforcée par la vivacité, plus ou moins forte, des dynamiques locales. En effet, les DDALL se sont enrichis des études ou démarches engagées parallèlement (missions interministérielles d'aménagement de la côte Aquitaine ou du Languedoc, DTA, SMVM...). Pour pallier cette diversité de contenu, la DAU a diffusé en 1999 une méthodologie mise au point dans le cadre de l'élaboration du DDALL de la Charente-Maritime et 63 Etude réalisée par le bureau d'études SCE. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 48/137 Rapport n°007707-01 quelques DRE se sont investies dans l'harmonisation des pratiques départementales (Aquitaine, Bretagne...). Malgré toutes ces initiatives, le constat général dressé par les auditeurs montre que le contenu des DDALL est resté très divers d'un département à un autre. En outre, les échelles retenues (1/25 000 ou 1/50 000) ont un impact fort sur la lisibilité des documents produits. Si la prise en compte de leur contenu dans les schémas directeurs, puis à partir de 2000 dans les SCoT, est aisée, cette prise en compte exige pour les PLU un travail de délimitation, au cas par cas, sur le terrain : il n'y a pas de traduction automatique à la parcelle. ­ Aujourd'hui, des documents toujours incomplets, non actualisés, parfois même délaissés, mais qui restent indispensables pour asseoir la position de l'État Quel que soit leur contenu, ces documents ont tous servi, et continuent de servir pour nombre d'entre eux et ce, malgré la circulaire de mars 2006, de support aux « porter à connaissance » (PAC) de l'État lors de l'élaboration des documents d'urbanisme ainsi qu'à l'instruction ADS quand celle-ci est encore assurée par les services de l'État. L'examen des DDALL existants amène toutefois deux interrogations sur : · les conditions de leur mise à jour, · l'évolution de leur contenu. Les doctrines locales sur la base desquelles ces documents ont été élaborés méritent d'être revisitées au regard de la jurisprudence la plus récente mais aussi des études et inventaires réalisés depuis leur élaboration. De plus, dans de nombreux départements, les documents cartographiques sont désormais réalisés à l'échelle de la commune (tendance favorisée par la numérisation des PLU et le développement des outils géomatiques) alors que les services de l'État ont plus que jamais besoin de disposer de documents d'analyse à une plus large échelle, a minima celle des SCoT littoraux. Aussi l'instruction donnée aux services en 1991 « de bâtir une position de l'Etat sur les conditions du respect des principes fixés par la loi Littoral » paraît-elle toujours d'actualité à la mission dès lors que les documents d'urbanisme ne sont pas encore compatibles avec les dispositions de la loi. Elle devrait toutefois perdre une part de sa pertinence lorsque l'ensemble du littoral sera couvert de schémas de cohérence territoriale (SCoT) et de PLU estimés compatibles, régulièrement révisables et donc évalués, mais une part seulement, car l'État, garant de l'application des lois, devra conserver une capacité d'appréciation des situations qui lui est propre et la possibilité de faire évoluer, si nécessaire, sa doctrine administrative. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 49/137 2.3.2. Les circulaires de 2006 : une nouvelle impulsion mais aussi une rupture64 Les circulaires de mars et de juillet 2006 ont remobilisé les services départementaux et stimulé ceux qui, jusque-là, avaient très peu investi le champ de l'application de la loi Littoral du fait d'une faible pression sur leurs territoires littoraux. Pour l'ensemble des services, celle du 14 mars a constitué une véritable rupture. Si les finalités (gestion économe de l'espace, préservation des valeurs environnementales et patrimoniales du littoral, équilibre entre développement et préservation...) et le cadre de l'action (c'est à l'échelle des grands espaces « qu'il faut mener ces politiques cohérentes et volontaristes » qui supposent « une vision à long terme, stratégique et ambitieuse relayée par des volontés politiques locales fortes ») restent identiques, la mobilisation des services est avant tout ciblée sur la sécurisation juridique des documents d'urbanisme (SCoT, POS/PLU). Aucune instruction n'est toutefois donnée pour l'élaboration de cette vision stratégique et son partage avec les collectivités. Le partenariat avec les collectivités n'est plus la règle affichée, en dehors des sites expérimentaux retenus dans le cadre de l'atelier national littoral avec les limites que la mission a précédemment analysées. Il est principalement attendu des services qu'ils précisent l'application des dispositions de la loi Littoral à partir de la doctrine nationale figurant en annexe, qu'ils vérifient la compatibilité des documents d'urbanisme avec ces nouvelles interprétations et qu'ils conseillent aux communes de prendre les mesures nécessaires et, au besoin, qu'ils fassent procéder à la révision des documents qui ne seraient pas compatibles avec la loi, pour éviter au final « les situations conflictuelles » souvent constatées lors de la mise en oeuvre de projets. ­ Une analyse juridique a posteriori des POS/PLU qui garde toute sa pertinence Pour répondre à cette exigence, la plupart des services se sont engagés dans l'analyse des risques juridiques des POS/PLU, avec cartographie des parcelles concernées. Plusieurs démarches intéressantes ont été entreprises dans ce contexte. Sans prétendre à l'exhaustivité, peuvent être signalées : · au niveau régional, celles de l'Aquitaine et de la Bretagne qui ont respectivement élaboré un guide régional pour l'application de la loi Littoral et une série de référentiels validée en CAR ; au niveau départemental, celle du Finistère qui, parallèlement à la cartographie en cours des risques juridiques des POS/PLU, a élaboré en 2008 un atlas départemental 65 validé en groupe de travail inter-services ; · 64 65 Le recueil de l'ensemble des circulaires citées dans ce rapport du CGEDD est disponible au CGEDD. Atlas qui sert de base à la contribution de l'État aux diagnostics territoriaux. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 50/137 Rapport n°007707-01 celle du Pas-de-Calais qui a travaillé l'analyse des risques juridiques aux deux échelles, POS/PLU et SCoT ; les documents produits en 2011 ont également été validés dans le cadre d'un pôle inter-services. L'intérêt et l'utilité des documents d'analyse des risques juridiques produits dans cette lignée sont évidents, ne serait-ce que pour assurer un contrôle de légalité étayé des actes individuels d'occupation du sol. ­ Mais un exercice de sécurisation des documents d'urbanisme sans procédure, ni surtout méthodologie La mission ne peut que souligner les ambiguïtés générées par la circulaire de mars 2006. Si le rappel à l'ordre sur le fait que les DDALL, documents produits par les services pour expliciter le point de vue de l'État sur l'application locale de la loi Littoral, ne pouvaient en aucun cas être « notifiés » - au sens juridique du terme - aux communes (y compris dans le cadre des PAC), ce rappel a souvent été assimilé à l'impossibilité d'utiliser en toute transparence les informations cartographiques produites dans le cadre de l'association à l'élaboration des documents d'urbanisme et donc de les communiquer aux collectivités. Pour la mission, il ne s'agit nullement de « notifier » aux collectivités les interprétations de l'État mais de leur communiquer des études conformément à l'article L.121-2 du Code de l'urbanisme précisant : « le préfet fournit notamment les études techniques dont dispose l'État en matière de prévention des risques et de protection de l'Environnement ». Cette position s'est d'ailleurs trouvée renforcée par le souci, exprimé par certains services dans le cadre de l'audit, de ne pas contribuer au développement des contentieux, les associations mais aussi les particuliers pouvant trouver dans ces documents de travail matière à recours. La plupart des préfets les ont dès lors considérés comme des documents de travail internes à l'administration et n'en communiquent des extraits qu'aux seuls maires des communes concernées.66 La nature des différents documents produits par les services doit donc être précisée, tout comme la posture attendue des services après trente ans de décentralisation dans le domaine de l'urbanisme. Cette situation va en effet à l'encontre des objectifs de transparence et d'évaluation partagée qui figurent parmi les fondements du développement durable, mais aussi, et plus concrètement en ce qui concerne l'association de l'État à l'élaboration des documents d'urbanisme, à la réglementation fixée par le code de l'urbanisme 67 : l'État est tenu de transmettre aux collectivités toutes les informations dont il dispose et qui sont nécessaires à l'exercice de leurs compétences en matière d'urbanisme. 66 À noter toutefois que, suite au recours d'une association, la CADA a demandé que la cartographie lui soit communiquée. Cf. art.L.121-2 du CU. 67 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 51/137 ­ Le besoin confirmé d'outils appropriés pour l'exercice des missions de l'État L'audit n'avait pas pour objet de réaliser une analyse comparée de la qualité des documents de référence élaborés et/ou utilisés par les services mais, dans la mesure où ceux-ci constituent la clef de voûte de la qualité des « porter à connaissance » de l'État concernant l'application des dispositions particulières au littoral, mais aussi de leur appréciation dans le cadre du contrôle de légalité, la mission a prêté une attention particulière à ces documents. La mission a ainsi été frappée par l'absence de continuité ou d'articulation dans les départements et régions avec les documents plus anciens (souvent antérieurs à 2000) élaborés pour définir les modalités d'application de la loi Littoral de 1986. Les éléments recueillis permettent de mettre en évidence deux sources principales de difficultés : · d'une part, la grande diversité des documents utilisés couplée pour certains d'entre eux à des insuffisances (données non mises à jour, absence de données sur certains thèmes...) ; d'autre part, les ambiguïtés constatées depuis la circulaire de mars 2006 dans les conditions d'élaboration, de partage et de communicabilité aux collectivités des documents de spatialisation élaborés par les services. · La mission considère qu'il y a matière à réflexion sur les objectifs de ces documents de référence, et surtout sur les moyens et méthodes pour y répondre. En effet, s'il est évident, depuis la décentralisation, que la définition des projets de territoires est de la compétence des collectivités locales et de leurs groupements, notamment dans le cadre des démarches SCoT et PLU, l'État reste le garant du respect de la loi, de la loi Littoral en particulier, des solidarités territoriales en général. Pour assurer ces missions, ses services doivent être en capacité d'apprécier les évolutions territoriales et d'étayer le point de vue de l'État. Dans un contexte en pleine mutation, une telle réflexion constitue un des quatre chantiers prioritaires développés ci-après. 2.3.3. L'enjeu d'une veille juridique organisée au bon niveau Comme nous l'avons déjà souligné, la loi Littoral est une loi dont les dispositions doivent être interprétées et dont les modalités d'application sont sanctionnées au final par les tribunaux administratifs. Si plusieurs jugements ont permis la consolidation de l'interprétation de certaine notions, d'autres sont venus contredire l'appréciation portée par les services, appréciation pourtant fondée sur une analyse de la jurisprudence la plus récente. La jurisprudence reste évolutive. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 52/137 Une étude plus approfondie des différents contentieux permettrait sans doute de comprendre les raisons pour lesquelles la position des services n'a pas été suivie par les tribunaux. En particulier, la fragilité de certains mémoires rédigés par l'administration 68 peut être source d'interrogations sérieuses, ce qui amène la mission à considérer que le suivi et l'analyse de l'impact des jurisprudences successives constituent un véritable enjeu pour la bonne application des dispositions particulières au littoral, non seulement pour la pertinence des conseils aux collectivités mais également pour celle du contrôle de légalité des actes d'urbanisme. Comme rappelé à maintes reprises dans ce rapport, la dimension interprétative et appréciative des dispositions particulières au littoral ne peut être ignorée. Dès lors, la valeur de la jurisprudence, comparable à celle en vigueur dans le droit communautaire, devient une référence obligée. Dans cet esprit, il apparaît stratégique pour l'État de ne pas « subir » le contentieux mais au contraire d'en faire un instrument clé de mise en oeuvre de la politique. Ceci implique, au rebours des pratiques administratives courantes, de développer une gestion stratégique des situations potentiellement ou effectivement contentieuses, en mobilisant les compétences et moyens nécessaires dès lors que ces situations sont susceptibles d'avoir un effet jurisprudentiel avéré et capitalisable sur l'ensemble du territoire littoral. Les compétences à mobiliser ne relèvent pas strictement du droit de l'urbanisme, elles doivent être aussi porteuses de toutes les composantes techniques de l'aménagement et de l'évaluation. Elles doivent pouvoir développer des argumentaires juridiques de toutes origines thématiques (biodiversité, risques, agriculture...) qui, combinés, permettent d'étayer une position intégrée. De nombreuses attentes se sont exprimées à ce sujet lors des entretiens même si la plupart des services s'efforcent d'organiser au niveau départemental et/ou régional un suivi actif des jugements rendus sur l'application de la loi Littoral. Plusieurs démarches intéressantes ont été constatées localement : un classeur jurisprudentiel en Gironde, une analyse de la jurisprudence bretonne dans le Morbihan, des suivis de la jurisprudence dans la plupart des services urbanisme ou au niveau des pôles juridiques régionaux quand il existe. Ces attentes d'un appui juridique structuré avaient déjà été formulées d'une façon générale mais avec force par les services déconcentrés lors de la mission menée par le CGEDD sur l'évaluation du fonctionnement de l'administration centrale69. De même, l'absence de réponse aux questions posées à l'administration centrale est très mal ressentie par les services qui regrettent de ne plus pouvoir identifier de correspondant au niveau national, car, quel que soit le sérieux des services déconcentrés en la matière, force est de constater que les compétences juridiques ne sont pas équitablement réparties sur le territoire et que celles-ci sont particulièrement mobiles. 68 69 Bien que la grande majorité des mémoires soient rédigés par les collectivités locales en défense. Rapport n°007986-00 à 09 de septembre 2011. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 53/137 La mission estime que l'administration centrale doit jouer un rôle plus important dans l'accompagnement des services et l'organisation d'une veille juridique capable de leur apporter soutien et, si besoin, professionnalisme dans le contexte actuel de réduction de moyens, ce qui renforce la nécessité de fonctionner en réseau métier et de mettre en place une véritable gestion stratégique du contentieux en matière d'urbanisme. 2.4. En conclusion de ce chapitre, quatre chantiers jugés prioritaires Au vu des éléments recueillis, la mission constate que l'hétérogénéité des pratiques dans les services reste relative et doit être considérée comme inhérente à la loi Littoral, loi d'interprétation qui met en avant l'importance des spécificités locales dans un contexte de développement durable. Pour autant, la relativité des appréciations portées sur les dispositions particulières au littoral, qu'il conviendrait d'assumer, ne doit pas masquer l'importance des difficultés qui restent à surmonter pour que la loi soit portée au bon niveau d'analyse et correctement mise en oeuvre. Pour y parvenir, la mission identifie quatre chantiers qu'elle juge prioritaires : ­ clarifier la nature et le contenu des documents de référence dont les services devraient disposer, référentiels parmi lesquels figurent les outils juridiques mentionnés plus haut ; lever notamment les ambiguïtés générées par la circulaire de mars 2006 quant à la communicabilité de ces documents ; poursuivre la sécurisation juridique des documents d'urbanisme ; si les objectifs de la circulaire de mars 2006 restent d'actualité, les leviers pour les atteindre sont à repenser y compris dans le cadre du dialogue de gestion ; relancer l'animation du réseau métiers « aménagement/urbanisme » en liaison avec celui de l'évaluation environnementale, indispensable pour assurer une bonne application de la loi Littoral, loi interprétative nécessitant un appui juridique efficace, des réponses aux questions et le partage des « bons outils ». définir un dispositif spécifique du suivi de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers des espaces littoraux (bande littorale, espaces proches du rivage, communes littorales) dans le cadre du dispositif national de suivi de la consommation de ces espaces, en coordination avec l'observatoire du littoral (SOeS). ­ ­ ­ Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 54/137 3. Les difficultés d'appréciation dans l'application des dispositions particulières restent nombreuses Faire une synthèse nationale des positions soutenues par les services déconcentrés dans l'ensemble des départements de métropole n'est pas chose aisée, même si des lignes de force peuvent être dégagées. Comme nous venons de l'analyser, les positions adoptées par les services de l'État diffèrent très logiquement d'un département, d'une région à l'autre, en fonction des enjeux locaux. Certaines dispositions soulèvent toutefois moins de difficultés que d'autres dans leur application. ­ les dispositions relatives à la protection des espaces littoraux posent relativement moins de problème d'interprétation et même d'application mais leur respect dans le temps interpelle les services Globalement, les espaces naturels (non construits) de la bande littorale, les espaces remarquables et caractéristiques, les espaces boisés significatifs, font l'objet de la part des services d'un porter à connaissance (PAC) argumenté auprès des collectivités. Les services de l'État ont accès à suffisamment d'éléments de connaissance scientifique et d'arguments juridiques pour motiver et justifier les propositions de l'État. Ce PAC repose en effet, dans les espaces littoraux, sur une politique déjà ancienne et particulièrement active d'inventaires scientifiques et de protections réglementaires du patrimoine naturel et paysager. Les circulaires des 10 octobre 1989 et 15 septembre 2005 relatives aux espaces remarquables ont donné aux services des instructions leur permettant une application rigoureuse de cette disposition. La politique de protection des espaces naturels littoraux a de plus été confortée par les directives européennes, notamment les directives « habitat-faune-flore » et « oiseaux »70, mais également par la politique de prévention des risques naturels, comme l'a souligné la circulaire du 20 juillet 2006. Il y a en ces domaines de protection des milieux et de prévention des risques cohérence des enjeux et convergence des objectifs poursuivis. Il ressort ainsi de l'audit que les dispositions visant à protéger les espaces littoraux sensibles posent moins de difficultés d'interprétation que celles visant à maîtriser l'urbanisation littorale. Elles sont de ce fait mieux portées par les services auprès des collectivités, qui les ont, de leur côté, admises et intégrées dans leurs discours. Elles sont donc, en général, mieux traduites dans les documents d'urbanisme et davantage respectées dans l'instruction des actes individuels. Toutefois, lors des entretiens avec les services, la situation n'apparaît pas aussi positive et présente des fragilités que la mission s'est efforcée de mettre en exergue dans la restitition faite, ci-après, par disposition. Les inventaires ne sont pas toujours 70 Directives européennes 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages et 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages (ancienne directive 79/409/CEE modifiée à plusieurs reprises et recodifiée). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 55/137 actualisés et surtout la pérennité de ces espaces dans le temps est loin d'être assurée (effet de grignotages successifs, gestion non maîtrisée). ­ les dispositions visant à maîtriser l'urbanisation du littoral continuent de soulever de nombreuses difficultés d'interprétation et plus encore d'application Malgré les circulaires, les plaquettes et guides les concernant, malgré la jurisprudence abondante dont elles ont fait et continuent de faire l'objet, les dispositions particulières visant à encadrer l'urbanisation sur le littoral posent encore aux services, ainsi qu'aux élus, de nombreuses difficultés d'interprétation et donc d'application. Pour la mission, la première difficulté reste la qualification des espaces urbanisés, tant dans la bande littorale que dans le reste des communes littorales. En outre, l'identification d'une typologie urbaine hiérarchisée reste un défi dans la France des 36 000 communes71 et il n'est pas évident que le PLU intercommunal soit une réponse appropriée pour définir un projet de territoire fondé notamment sur une analyse urbaine pertinente au niveau d'un bassin de vie. Définir dans un SCoT une armature urbaine, un schéma de développement lisible et maîtrisé n'est pas encore un exercice couramment pratiqué, surtout s'il se veut prescriptif. C'est pourtant à l'échelle d'un « bassin de vie » côtier que la notion d'aménagement équilibré de l'espace littoral peut prendre tout son sens, que peut se concevoir un aménagement en profondeur permettant de protéger la bande littorale, d'identifier les espaces proches du rivage et de définir une capacité d'accueil prenant en compte la préservation des écosystèmes littoraux, tout en organisant sur l'ensemble du territoire son développement urbain et économique. C'est à cette échelle que peuvent se définir et se traduire les stratégies de développement des activités, qu'elles soient maritimes, agricoles, forestières, touristiques ou encore industrielles, ainsi que les politiques de logement et de déplacement qui les accompagnent. Il revient aux SCoT littoraux de fixer ces grandes orientations et les objectifs à décliner dans les PLU. La seconde difficulté concerne la délimitation des « espaces proches du rivage », délimitation à laquelle est liée la notion d'extension limitée de l'urbanisation. ­ La nécessité pour les services de l'État de maîtriser les grands principes d'aménagement à appliquer sur les territoires S'il n'est pas de la compétence des services de l'État de se substituer aux collectivités locales et à leurs groupements pour définir leur projet de territoire, ils ne doivent pas pour autant se départir de leur capacité d'analyse pour garantir le strict respect des dispositions de la loi Littoral. A chacune des étapes de la procédure d'élaboration ou de révision des documents d'urbanisme (porter à connaissance, association et avis), les services de l'État ont à définir et à faire valoir les conditions locales de l'application des dispositions 71 36 680 communes exactement, dont 36 568 en métropole (2011). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 56/137 Rapport n°007707-01 particulières fixées par la loi Littoral, à s'assurer de leur prise en compte effective et, s'il y a lieu, de l'imposer, soit en demandant des modifications du projet approuvé, soit en le déférant au juge administratif. Pour cela, comme nous venons de l'analyser dans la précédente partie de ce rapport, les services doivent non seulement maîtriser les principes et notions liés à chaque disposition particulière mais également les enjeux du territoire où elles doivent s'appliquer. Ils doivent donc disposer des éléments d'appréciation et des argumentaires qui leur permettent de bâtir la position de l'État. C'est donc dans ce cadre très précis de la décentralisation de l'urbanisme que la mission s'est efforcée, à partir des éléments recueillis auprès des services déconcentrés et pour chacune des dispositions particulières au littoral de : · présenter le constat général de son application tel que les services le dressent72, lister les principales difficultés rencontrées par les services pour veiller à cette application, proposer son propre diagnostic, formuler une série de recommandations dont seules les plus importantes seront reprises dans la dernière partie de ce rapport. · · · Mais avant d'analyser les modalités d'application de chaque disposition particulière au littoral, la mission a jugé nécessaire de s'arrêter sur le champ d'application géographique fixé par la loi Littoral. Ce champ d'application n'est pas en effet sans poser, en tant que tel, des difficultés aux services. Seront ensuite successivement abordés : · les sous-ensembles du champ d'application géographique : ­ la bande littorale des 100 mètres, ­ la délimitation des espaces proches du rivage. les notions et principes liés à l'urbanisation littorale : ­ la qualification des espaces urbanisés en agglomérations, villages et hameaux, ­ l'extension en continuité et l'extension limitée dans les espaces proches du rivage, ­ la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser. les mesures relatives aux activités spécifiques : ­ le traitement des terrains de camping dans les documents d'urbanisme, ­ les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières, · · 72 Il ne s'agit pas dans le cadre de cette mission de réaliser un bilan de l'application des dispositions particulières au littoral, ni d'une inspection de services, mais bien d'un audit de leurs modalités d'application par les services. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 57/137 ­ · les installations énergétiques. les dispositions relatives aux espaces à préserver de l'urbanisation : ­ les coupures d'urbanisation, ­ les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral, ­ les espaces boisés significatifs. La disposition relative aux plans de plage n'a pas été abordée avec les services. Par contre, les quelques éléments recueillis sur la gestion du domaine public maritime (DPM) ont été repris. Il est à noter que certaines régions ou départements ont élaboré des documents ou fiches d'analyse pour chacun de ces items. Les travaux les plus aboutis concernent la région Aquitaine (guide d'application) et la Bretagne où un atelier littoral régional et interdépartemental a élaboré un fascicule explicitant la doctrine administrative pour chaque disposition particulière (référentiel)73. 3.1. Le champ d'application géographique des dispositions particulières au littoral Article L.146-1 (code de l'urbanisme) - Les dispositions du présent chapitre déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : - dans les communes littorales définies à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (désormais intégré au code de l'environnement), - dans les communes qui participent aux équilibres économiques et écologiques littoraux, lorsqu'elles en font la demande auprès du représentant de l'État dans le département. La liste de ces communes est fixée par décret en Conseil d'État, après avis du conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres. Article L.321-2 (code de l'environnement) ­ Sont considérées comme communes littorales au sens de la présente loi, les communes de métropole et d'outre-mer : - riveraines des mers et océans, des étangs salés, des plans d'eau intérieurs d'une superficie supérieure à 1 000 ha, - riveraines des estuaires et deltas lorsqu'elles sont situées en aval de la limite de salure des eaux et participent aux équilibres économiques et écologiques littoraux. La liste de ces communes est fixée par décret en Conseil d'État, par consultation des conseils municipaux intéressés. Il existe en fait trois catégories de communes soumises à la loi Littoral : les communes « riveraines », les communes dites « estuariennes » et les communes « volontaires ». Les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme relèvent ainsi d'un champ d'application élargi par rapport aux autres titres et chapitres de la loi Littoral. 73 Cf. note de présentation de la démarche suivie par cette région en annexe 4. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 58/137 Rapport n°007707-01 La liste des deux dernières catégories de communes doit être fixée par décret du Conseil d'État. Le décret relatif aux communes riveraines des estuaires et deltas est paru tardivement, en mars 200474. Il inclut -sans toutefois que soit fait référence au code de l'urbanisme- quelques communes relevant de la disposition propre à ce code et donc d'une démarche volontaire de la part de ces communes. Le décret ne permet pas de les identifier75. La disposition législative qui vise à définir des périmètres d'application cohérents sur la base d'une notion fonctionnelle, « la participation aux équilibres économiques et écologiques littoraux », en faisant appel au volontariat des communes concernées, s'est révélée pour le moins ambitieuse, sinon utopique. L'intervention possible du Conservatoire du littoral n'a sans doute pas été suffisante pour contrebalancer l'application des dispositions particulières au littoral, perçues par les élus comme une contrainte dans l'exercice de leur compétence en matière d'urbanisme. a) Le constat des services sur le champ d'application géographique Il existe une certaine incompréhension de la part des élus sur l'application des dispositions particulières au littoral dans la partie rétro-littorale des communes littorales de grande superficie et pénétrant profondément à l'intérieur des terres, alors que des communes limitrophes situées à la même distance, mais non littorales, ne sont pas concernées par ces dispositions. Sur les rives des dix grands lacs situés en zone de montagne, l'application conjointe des lois Montagne et Littoral pose également aux élus un problème de compréhension quant à l'intérêt de cette superposition. Ils sont à l'origine de la disposition de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux 76 qui devait permettre d'appliquer de façon exclusive, soit l'une, soit l'autre loi, selon des modalités fixées par un décret pris en Conseil d'État. La loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement a abrogé cette disposition (art. 21)77. La principale difficulté pour les élus porte sur l'interdiction de développer les hameaux dans les parties éloignées des lacs aux caractéristiques montagnardes, notammment les hameaux d'altitude. b) Les difficultés rencontrées par les services Si la parution du décret de 2004 fixant la liste des communes estuariennes a permis de compléter le champ d'application de la loi Littoral, les collectivités continuent d'interpeller les services de l'État sur le manque de cohérence des limites communales pour appliquer les dispositions particulières au littoral. Les services manquent d'arguments pour leur répondre. 74 75 Décret n°2004-311 du 29 mars 2004, art. 1er. La MIGT 5 en a toutefois identifié quelque-unes dans son périmètre : Vauvert dans le Gard et Vescovato en Corse. Article 187 complétant l'article L.145-1 du code de l'urbanisme (2è alinéa). Cf. annexe 6 : le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares 76 77 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 59/137 c) Le diagnostic de la mission sur le champ d'application géographique Le champ d'application limité aux seules communes riveraines ne facilite pas en effet la réflexion en faveur d'un aménagement équilibré orienté vers l'arrière-littoral, mais il est de la compétence partagée de l'État et des collectivités d'y remédier. Les possibilités ouvertes par la loi d'élargir le champ d'application de ces dispositions aux communes participant aux équilibres économiques et écologiques littoraux ne semblent pas être connues des services et donc relayées auprès des collectivités. Il est vrai que donner sa cohérence et sa pertinence au champ d'application d'une loi connue par ses seules contraintes urbanistiques sur la base du volontariat des communes n'a guère de chance d'être entendu et moins encore de se concrétiser. Il en est de même de la possibilité qu'offrait l'article L.146-1 du code de l'urbanisme en permettant, par le biais de prescriptions particulières prévues à l'article L.111-1-1 du même code, de préciser les conditions d'application des dispositions particulières au littoral. Ces prescriptions, qui devaient être établies par décret pris en Conseil d'État, auraient pu traiter ce problème et élargir le périmètre d'application des dispositions particulières après les consultations prévues. Aucune des quatre directives territoriales d'aménagement (DTA) ayant une façade littorale ne s'y est hasardée. Les lois Grenelle ayant remplacé les DTA par des DTADD non opposables aux documents d'urbanisme et aux actes individuels, excepté par le recours exceptionnel à des projets d'intérêt général, cette disposition n'est plus mobilisable, excepté pour les quatre DTA approuvées. Les schémas d'aménagement régionaux de la Corse (PADDUC) et de l'outre-mer (SAR), comme les schémas de mise en valeur de la mer (SMVM) 78 pourraient juridiquement prescrire de telles dispositions sur un périmètre élargi et ainsi assurer une cohérence territoriale. Enfin, les SCoT pourraient, également, par le biais de leurs orientations et surtout de leurs prescriptions, bâtir une vision cohérente de l'aménagement littoral, notamment en identifiant les espaces proches du rivage et en prescrivant sur des unités territoriales cohérentes des principes d'aménagement identiques aux principes portés par les dispositions particulières au littoral. Rappelons enfin que, depuis la loi SRU (2000), les communes situées à moins de 15 km du rivage de la mer (ou d'agglomérations d'une certaine importance) et non couvertes par un SCoT (ou un SAR) ne peuvent ouvrir à l'urbanisation des zones naturelles, ni même des zones d'urbanisation future délimitées dans les POS ou PLU après le 1er juillet 2002, ou procéder à leur révision, sans l'accord du préfet (demande de dérogation)79. La loi Grenelle 2 (art. 17) a étendu cette disposition à l'ensemble des communes, à l'échéance du 1er janvier 2017. Toutes les communes riveraines des grands lacs y seront donc soumises. Dès lors, les difficultés liées à la superposition des lois Montagne et Littoral devraient être moins sensibles pour les élus, d'autant plus que la 78 Il n'est cependant pas évident que les SMVM soient l'outil le plus pertinent pour assurer une cohérence terrestre en matière de développement urbain et économique. Art. L.122-2 du code de l'urbanisme. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 60/137 79 Rapport n°007707-01 principale difficulté signalée concerne généralement des communes ou parties de communes rurales dont l'activité économique repose sur l'agriculture et le tourisme estival. En ce sens, la loi Littoral est plutôt un bon outil de préservation des espaces agricoles et naturels. Elle oblige de plus à une réflexion planificatrice autour des agglomérations, des villages et non des hameaux isolés. d) Recommandations de la mission sur le champ d'application géographique · Préciser aux services les différentes possibilités ouvertes par la loi Littoral pour appliquer les dispositions particulières au littoral sur des entités géographiques cohérentes, notamment le rôle des documents d'aménagement de rang supérieur (DTA approuvées, SMVM) mais aussi des SAR (PADDUC) et SCoT littoraux (ou lacustres), dans la définition d'un aménagement équilibré du littoral ou des rives des grands lacs. Rendre obligatoire pour ces documents la traduction de l'ensemble des dispositions particulières au littoral sur toutes les communes concernées, non seulement pour les adapter aux caractéristiques de leur façade littorale mais également pour en assurer la cohérence. Aujourd'hui, le principe de compatibilité de ces documents avec la loi Littoral ne les oblige pas en effet à les préciser dans leur totalité. Mobiliser les services pour veiller à la qualité de cette traduction dans le cadre de leur association à l'élaboration des documents d'urbanisme (mise en oeuvre du principe du contrôle dit « continu », du porter à connaissance au contrôle de légalité). Faire référence à la distance des 15 km du rivage de la mer ou des rives des grands lacs pour donner un cadre minimal à cette mise en cohérence. Cette distance est celle qui est utilisée pour la mise en oeuvre du principe de constructibilité limitée (Art. L. 122-2 précité). · · · 3.2. Les sous-ensembles du champ d'application géographique Les règles liées à l'urbanisation littorale sont différentiées par la loi Littoral en fonction de leur plus ou moins grande proximité du rivage. Trois sous-ensembles sont ainsi à identifier dans les communes soumises aux dispositions particulières au littoral : la bande littorale, les espaces proches du rivage et le reste de la commune, souvent qualifié de rétro-littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 61/137 3.2.1. La bande littorale des cent mètres Article L.146-4-III - En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée. Cette interdiction ne s'applique pas aux constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (...). Les circulaires de 1991 et de 2006 n'évoquent pas cette disposition qui ne semble pas a priori soulever de difficulté de compréhension. a) Le constat des services sur la délimitation de la bande littorale Bien que la délimitation de la bande des 100 m à partir de la limite haute du rivage (dont la fixation est de la compétence de l'État) ne figure pas dans tous les documents d'urbanisme littoraux (et loin s'en faut80), cette disposition ne pose pas de problème de fond aux services mais des problèmes techniques. Les services concernés par les grands lacs rencontrent également des difficultés pour délimiter la limite haute des rives. 81 Selon les services, l'inconstructibilité des espaces non urbanisés y est globalement respectée. 82 b) Les difficultés rencontrées par les services Dans les communes dont le littoral est soumis à forte érosion, faute d'avoir pris en compte ce phénomène, la délimitation de la bande de 100 m dans les PLU est une source de difficultés, une largeur significative pouvant basculer dans le domaine public maritime (DPM). Les droits à construire en arrière immédiat de la bande littorale en sont fragilisés et des modifications régulières de ces PLU seraient nécessaires, ce qui est rarement le cas en raison de la sensibilité du sujet. Les services ne disposent pas toujours de la connaissance nécessaire, ni des moyens juridiques, pour que leurs arguments d'élargissement soient entendus des collectivités. Ils ne peuvent que rappeler la possibilité offerte par la loi d'élargir la bande des 100 m en fonction des critères cités dans la disposition. Seul un plan de prévention des risques (PPR) peut juridiquement imposer ce recul. La notion d'espaces urbanisés dans la bande littorale soulève également de nombreuses difficultés d'interprétation, même si la jurisprudence a dégagé des 80 81 82 Exemple : seuls 3 des 23 PLU littoraux délimitent la bande littorale en Ille-et-Vilaine. Cf. annexe 6 : le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares. Le problème des constructions illégales qui relève de l'exercice de la police de l'urbanisme, n'a pas été abordé dans le cadre de cet audit. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 62/137 Rapport n°007707-01 faisceaux d'indices (cf. § 331). Il en est de même de la notion d'activités nécessitant la proximité de l'eau qui soulève des d'interrogations : ­ selon la nature des opérations (ports à sec, écoles de voile avec hébergement, établissements de thalassothérapie, certains bâtiments ostréicoles comme les centres d'expédition, certains types de construction dans les concessions portuaires...) ; selon la qualification des espaces naturels, notamment dans les espaces remarquables (autorisations dans certains départements, refus dans d'autres) alors que seuls peuvent y être autorisés des « aménagements légers » (cf. § 352). c) Le diagnostic de la mission sur la délimitation de la bande littorale ­ La délimitation de la bande littorale dont l'objectif est de préserver la frange terrestre en fonction des caractéristiques physiques de la côte (écosystèmes côtiers ou zones soumises à érosion) fait rarement l'objet d'une réflexion lors de l'élaboration des PLU. Lorsque sa délimitation dans les PLU porte sur les 100 m à partir de la limite haute du rivage, elle ne peut qu'être indicative, cette limite pouvant dans certaines communes varier significativement dans le temps. De plus, l'État n'a pas procédé à sa délimitation sur l'ensemble du littoral. S'agissant a minima de délimiter une bande de 100 m, l'application de cette disposition ne relève pas des SCoT qui devraient toutefois identifier les zones littorales où la bande littorale devrait être élargie pour prendre en compte l'érosion côtière mais également les grands écosystèmes littoraux (comme des massifs dunaires ou des marais littoraux). Cette identification de la bande littorale à l'échelle d'un SCoT ne règle pas pour autant les problèmes de sa délimitation rencontrés au niveau des PLU mais elle est indispensable à une application cohérente de cette disposition à l'échelle de l'intercommunalité. Les réflexions engagées sur la gestion du trait de côte et la trame verte et bleue devraient être de nature à renforcer l'argumentaire des services mais encore faut-il qu'ils arrivent à convaincre les collectivités de la pertinence de procéder à l'élargissement de la bande littorale et de considérer cette mesure non comme une contrainte mais comme une mesure de prévention des risques et de bonne gestion des écosystèmes côtiers. Par ailleurs, la notion d'« espaces urbanisés » paraît mal comprise par de nombreux services qui en font une notion spécifique à la bande littorale, alors que, pour la mission, il s'agit d'une notion commune à l'ensemble du territoire des communes littorales, et même bien au-delà, car cette notion est régulièrement utilisée dans le code de l'urbanisme. Pour bien interpréter les règles de constructibilité des espaces urbanisés dans la bande littorale, une lecture croisée des différentes dispositions particulières au littoral est indispensable. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 63/137 Il convient notamment d'identifier les espaces urbanisés de la bande littorale selon la même typologie que pour l'ensemble de la commune (agglomération, village, hameau, autres), en référence à la disposition de l'article L.146-4 ­ I. Il serait pour le moins incohérent d'interdire dans la zone rétro-littorale de la commune toute densification d'un secteur d'habitat dispersé ou d'un « écart » et de l'autoriser dans la bande des 100 m (cf. § 331). d) Recommandations de la mission pour la délimitation de la bande littorale · Veiller à l'identification des zones d'érosion littorale dans les SCoT ainsi que celle des milieux sensibles littoraux justifiant un élargissement de la bande littorale, notamment pour assurer la continuité de la protection et faciliter la cohérence de gestion des écosystèmes littoraux tels que les massifs dunaires ou les marais arrière-littoraux (SCoT prescriptifs). Rappeler la possibilité de fixer dans un PPRL des prescriptions de recul et donc d'élargissement de la bande littorale. Quand elle ne fait pas l'objet d'élargissements motivés, donner des indications sur la façon de cartographier la bande littorale de 100 m dans les PLU, notamment en l'absence de délimitation de délimitation du rivage par l'État (zonage susceptible d'être précisé lors de toute instruction d'acte individuel) et de rédiger le règlement correspondant. Clarifier à la lumière des dernières jurisprudences la notion d'« espaces urbanisés » dans la bande littorale, en précisant que cette notion n'est pas propre à cette partie du territoire communal ; recommander ainsi d'y distinguer les espaces urbanisés selon la même typologie que dans le reste de la commune, à savoir leur appartenance à une agglomération, à un village, à un hameau de la commune ou à d'autres types d'espaces littoraux que la doctrine administrative gagnerait à qualifier. rappeler que la bande littorale est une composante du territoire communal à laquelle s'appliquent, en plus des prescriptions qui lui sont propres (principalement l'interdiction de toute extension de l'urbanisation), les autres dispositions particulières au littoral (espaces remarquables, coupures d'urbanisation...). Mettre en place au niveau national un fonctionnement en réseau des services pour faciliter les échanges sur la qualification des « espaces urbanisés » et l'identification des activités nécessitant la proximité de l'eau ainsi qu'un appui juridique pour les cas difficiles. Assurer un contrôle de légalité exhaustif pour tous les actes délivrés dans la bande littorale (transmission automatique des autorisations à la préfecture par les communes). · · · · · · Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 64/137 3.2.2. La délimitation des espaces proches du rivage Article L.146-4-II - L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. La circulaire du 14 mars 2006 consacre un long développement à la notion d'espaces proches du rivage et aux règles de construction limitée qui leur sont attachées. « L'importance de ces règles implique qu'un soin particulier soit accordé à la délimitation de ces espaces ». Elle en détaille la méthode et les critères à prendre en compte, critères progressivement définis par la juridiction administrative et confirmés par le Conseil d'État qui distingue très clairement les critères en fonction de la nature de ces espaces, urbanisés ou naturels. Cette circulaire rappelle toutefois qu'« il appartient aux collectivités locales dans le cadre de l'élaboration de leur SCoT ou de leur PLU de procéder à cette délimitation » et va jusqu'à préciser que « les DDALL ne doivent en aucun cas être notifiés aux communes dans le cadre du PAC ou de tout autre forme de notification à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme, jetant le trouble dans les services comme constaté dans la partie 2 de ce rapport. a) Le constat des services sur la délimitation des espaces proches du rivage Les services les ont généralement délimités dans leur DDALL. Certains d'entre eux ont même actualisé ces délimitations suite à l'arrêt « Barrière »83. Pour les services, c'est l'une des notions les plus difficiles à interpréter. La doctrine est bien comprise mais sa traduction locale s'avère complexe et difficile à négocier avec les collectivités. La situation relative à leur traduction dans les documents d'urbanisme (délimitation et règlement) est très variable d'un département à un autre. Dans certains départements, les espaces proches du rivage ne sont pas délimités dans les zones urbanisées en front de mer. D'une façon générale, leur délimitation dans les POS/PLU est rare. b) Les difficultés rencontrées par les services Lorsque les collectivités procèdent elles-mêmes à la délimitation des espaces proches du rivage, les négociations entre les services et les collectivités sont encore plus difficiles. Lorsqu'un document de rang supérieur (DTA, SRA, SCoT) les a préalablement identifiés, l'échelle utilisée pour les cartographier est loin de régler les problèmes de délimitation dans les PLU. 83 CE, 3 mai 2004, Mme Barrière, req. N°251534. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 65/137 Les services s'interrogent sur leur légitimité d'intégrer dans leur PAC, notamment pour les SCoT, une délimitation des espaces proches du rivage : l'argumentaire est souvent difficile à développer. Jusqu'où l'État peut-il aller sur ce point ? La délimitation des espaces proches du rivage soulève des difficultés particulières dans les zones estuariennes en raison de vastes zones concernées et d'une occupation très spécifique (exploitations viticoles, bâtiments isolés...) - cf. § 332. c) Le diagnostic de la mission pour la délimitation des espaces proches du rivage L'absence de délimitation des espaces proches du rivage dans les POS/PLU et donc de la traduction du principe d'extension limitée de l'urbanisation dans le règlement constitue une vraie difficulté pour les instructeurs ADS. Lorsque les collectivités procédent à cette délimitation dans leur document d'urbanisme (PLU mais surtout SCoT), les services ne peuvent engager le dialogue et veiller à l'absence d'erreur manifeste d'appréciation sans disposer d'une analyse générale sur l'ensemble du littoral départemental, y compris aux marges (cohérence avec les littoraux des départements limitrophes). d) Recommandations de la mission · Il est indispensable que les services disposent d'un document de référence départemental leur permettant d'assurer le contrôle de légalité des documents d'urbanisme et de l'ADS : sur la base de critères mis en exergue par la jurisprudence, critères qui devront être affinés localement par leur connaissance du territoire (cf. étude CETE pour le Seine-Maritime). après concertation avec les services des départements limitrophes. Rendre obligatoires, sans aucune exception, l'identification des espaces proches du rivage dans les SCoT et leur délimitation dans les PLU, ainsi que la traduction dans les orientations (SCoT) et règlement (PLU) du principe d'extension limitée de l'urbanisation, cette absence d'identification ou de délimitation n'étant pas aujourd'hui considérée par les services de l'État comme un élément de non compatibilité avec la loi Littoral. Dans le cadre du dispositif de suivi de la consommation des espaces agricoles, naturels et forestiers (SCoT et PLU), prévoir le recueil de données spécifiques aux espaces proches du rivage (et à la bande littorale en particulier). · · 3.3. Les notions et principes liés aux espaces urbanisés littoraux Tout autant que les principes d'extension de l'urbanisation en continuité ou d'extension limitée, la notion même d'espaces urbanisés soulève de nombreuses difficultés aux services. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 66/137 3.3.1. La qualification des espaces urbanisés (agglomérations, villages, hameaux, autres) Article L.146-4-I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. (...) Article L.146-4-III - En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée. La circulaire du 14 mars 2006 développe longuement les notions d'agglomérations, de villages et de hameaux en s'appuyant sur une jurisprudence abondante mais elle semble avoir apporté aux services plus de confusion que de clarté 84. Il s'agit là, encore aujourd'hui, d'une des principales difficultés rencontrées par les services de l'État, mais aussi par les collectivités, dans l'application des dispositions particulières de la loi Littoral. Les définitions adoptées dans cette circulaire ne suffisent pas à qualifier avec certitude un espace urbanisé en agglomération et surtout en village ou en hameau, voire en espace urbanisé (par exemple un lotissement isolé) dès lors que la juridiction administrative estime que seule une analyse au cas par cas permet de les qualifier d'abord en espace urbanisé, puis selon leurs caractéristiques locales en agglomération, village, hameau ou « autres ». a) Le constat des services sur la qualification des espaces urbanisés Beaucoup de POS/PLU littoraux ne distinguent pas, dans les espaces urbanisés, les agglomérations, les villages, les hameaux. Certains SCoT commencent à le faire (Brest, Cap-Atlantique, Pays de Retz). Le contentieux se développe principalement autour de l'extension de hameaux, d'une part, de la densification de zones d'habitat diffus assimilées à des espaces urbanisés, d'autre part. Il y a très peu de hameaux nouveaux programmés, mais la pression existe. La possibilité d'autoriser des hameaux nouveaux, alors que l'extension des hameaux existants est interdite, est mal comprise des élus mais aussi des préfets et sous-préfets qui s'en font l'écho. Les DDTM sont réticentes à la création de hameaux nouveaux, craignant des abus. Certaines DDTM disposent d'une cartographie des espaces littoraux urbanisés (habitat, activités). D'autres vont jusqu'à identifier ceux qui relèvent d'une agglomération, d'un village ou d'un hameau (Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Gironde). 84 Confusion aggravée par le contenu (notamment les illustrations) de la plaquette diffusée à la même époque et plus particulièrement destinée aux collectivités. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 67/137 Leur traduction dans les DDALL est très hétérogène, y compris au sein d'une même région disposant de guide (Aquitaine) ou de référentiels partagés (Bretagne). Certains services gardent en mémoire la demande de l'administration centrale de proscrire ce type de documents qui déresponsabilisaient les élus alors que ces documents, selon eux, servaient de supports au dialogue avec les collectivités. b) Les difficultés rencontrées par les services Bien qu'ayant fait l'objet de nombreuses précisions, notamment dans la circulaire de mars 2006, la classification des espaces urbanisés en agglomérations, villages ou hameaux, soulève encore de nombreuses difficultés, tout particulièrement en milieu rural (lotissements peu denses, habitats diffus) et dans les estuaires. Les collectivités sont réticentes à effectuer de telles distinctions entre espaces urbanisés dans leur PLU, car elles se refusent à réduire, voire supprimer, des zones classées en urbanisées ou urbanisables dans les anciens POS, voire dans des PLU relativement récents, et donc à remettre en cause ce qu'elles estiment être des « droits acquis ». Des jurisprudences « malheureuses » fragilisent également la position des services, mais aussi des contentieux mal suivis, faute de volonté et/ou d'une organisation permettant de les instruire dans les temps impartis85. c) Le diagnostic de la mission sur la qualification des espaces urbanisés littoraux La notion d'espaces urbanisés est une notion régulièrement employée dans le code de l'urbanisme. Ce n'est donc pas une notion propre aux dispositions particulières au littoral, ni a fortiori à la disposition relative à la bande littorale. Le zonage et le règlement des espaces dont la qualification en espaces urbanisés est incertaine, constituent un problème général et ancien en urbanisme (cas des zones NB par exemple). Toutefois, la bonne application des dispositions particulières au littoral et leur traduction dans les documents d'urbanisme exigent un minimum de précisions sur ce que sont les espaces urbanisés dans les communes littorales pour leur garder une cohérence globale. L'article L.146-2 précise ainsi : « dans les espaces urbanisés, ces dispositions ne font pas obstacle à la réalisation des opérations de rénovation des quartiers ou de réhabilitation de l'habitat existant, ainsi qu'à l'amélioration, l'extension ou la reconstruction des constructions existantes. » ... sous réserve bien sûr que ces dernières aient été légalement construites. La doctrine administrative, telle qu'elle a été fixée dans l'annexe de la circulaire de mars 2006, n'a pas permis aux services de faire face aux nombreux contentieux, ni de 85 Cas d'une résidence de tourisme de 58 500 m2 (Mandelieu) dont le permis a été annulé par le Tribunal administratif à la demande du préfet ; le jugement a été annulé par la Cour d'appel de Marseille qui a assimilé le projet à un hameau nouveau. Le pourvoi de l'État n'a pas été déposé à temps auprès du Conseil d'État. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 68/137 Rapport n°007707-01 conforter leur propre interprétation de la notion d'espaces urbanisés, d'une part, des notions d'agglomérations, de villages, de hameaux, d'autre part. De plus, nombreux sont les services qui n'en ont pas partagé la totalité des interprétations, la plus « emblématique » étant la possibilité d'autoriser une extension limitée à la frange des hameaux86. Cette possibilité a été jugée par les tribunaux administratifs contraire à la loi (jurisprudence Le Bono87). Pour lui assurer crédibilité et opérationnalité, la doctrine administrative nécessiterait d'être réactualisée régulièrement, non seulement pour prendre en compte la jurisprudence la plus récente, mais aussi pour s'enrichir des travaux réalisés par les services les plus engagés dans l'application des dispositions particulières au littoral. Pour autant, la mission estime que l'actualisation de la doctrine administrative ne réglera pas toutes les difficultés d'application locale de ces notions. L'identification par les services (comme pour les collectivités) des espaces urbanisés, puis leur qualification en agglomération, village, hameau ou autres88, ne peuvent se faire qu'au cas par cas (appréciation). De plus, « le juge administratif interprète strictement l'exception des espaces urbains qui relève de son appréciation souveraine »89. Malgré les démarches engagées dans certains départements visant à développer les justifications, y compris par des visites de terrain, la grande majorité des services n'ont pas les moyens de procéder systématiquement à de telles vérifications, ni toujours les compétences nécessaires pour procéder à ces analyses, leur permettant de justifier accord ou refus sur la base de critères bien explicités. C'est pourtant sur la base de critères (doctrine administrative) et de leur appréciation locale (analyse au cas par cas) que peuvent s'appliquer de telles notions. Il paraît également indispensable à la mission que soient également distingués dans la bande littorale les espaces urbanisés faisant partie d'une agglomération, d'un village, d'un hameau ou d'un autre type d'espaces urbanisés (qui reste à qualifier) afin d'y définir des règles de constructibilité (par densification), compatibles avec l'ensemble des dispositions particulières au littoral et pas seulement avec la disposition particulière à la bande littorale. Pour la mission, l'article L.146-4 ­ III ne peut être interprété indépendamment des autres dispositions particulières au littoral (cf. § 321). d) Recommandations de la mission · Élaborer une doctrine administrative, régulièrement actualisée au regard de la jurisprudence, permettant de clarifier et d'articuler entre elles les différentes catégories d'espaces urbanisés à identifier dans les communes littorales, y compris dans la bande littorale (agglomérations, villages, hameaux, autres espaces urbanisés). 86 87 88 Cette analyse ressort clairement du questionnaire renseigné par les DDTM. Arrêt du Conseil d'État du 27 juillet 2009. Espaces urbanisés non qualifiables d'agglomération, de village ou de hameau, tels les écarts, les lotissements isolés, l'habitat diffus... Conseil d'État (12 mai 1997) ; Société Coprotour ; Recueil Lebon. 89 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 69/137 · En ce qui concerne les documents d'urbanisme : rendre obligatoire dans les SCoT littoraux, qui doivent définir un projet de territoire et décrire leur armature urbaine, l'identification des agglomérations et villages pouvant faire l'objet d'une extension en continuité dans les communes littorales ; veiller dans les PLU littoraux à ce que soient délimitées des extensions au bénéfice des seuls espaces urbains qualifiés dans les SCoT d'agglomérations et villages ; les autres catégories d'espaces urbains délimités ne pouvant faire l'objet d'aucune extension géographique (densification possible des hameaux dans leur périmètre strict ; écarts et habitat diffus non densifiables)90. · Préciser la nature du zonage et les règlements-types à adopter dans les PLU pour décliner cette typologie des espaces urbanisés, notamment de ceux qui ne relèvent pas des agglomérations, villages et hameaux, ce qui contribuerait à régler le problème des zones NB des anciens POS. Demander aux services de l'État de disposer de documents de référence identifiant les espaces urbanisés dans les communes littorales et de veiller à leur actualisation régulière afin qu'ils puissent apprécier les orientations et choix opérés par les collectivités, formuler des avis argumentés et exercer, le cas échéant, un contrôle de légalité sur la compatibilité des documents d'urbanisme et des actes individuels. Une harmonisation des échelles de ces documents serait fortement souhaitable (1/10 000 par exemple). 3.3.2. L'extension de l'urbanisation en continuité et l'extension limitée dans les espaces proches du rivage · Article L.146-4-I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Article L.146-4-II - L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. 90 Le référentiel breton distingue 3 règles d'urbanisation (doctrine administrative régionale) : des urbanisations extensibles (villages et agglomérations) ; des urbanisations densifiables mais non extensibles (hameaux, secteurs urbanisés isolés des années 1960 à 1986, ...) ; les autres types d'urbanisation ne sont ni extensibles, ni densifiables (écarts, habitat diffus, ...). Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 70/137 Rapport n°007707-01 En l'absence de ces documents, l'urbanisation peut être réalisée avec l'accord du représentant de l'État dans le département. Cet accord est donné après que la commune a motivé sa demande et après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites appréciant l'impact de l'urbanisation sur la nature. Les communes intéressées peuvent également faire connaître leur avis dans un délai de deux mois suivant le dépôt de la demande d'accord. Le plan local d'urbanisme doit respecter les dispositions de cet accord. La notion d'extension de l'urbanisation, ainsi que les principes d'extension en continuité et d'extension limitée, sont au coeur des instructions reçues par les services en mars 2006. La circulaire dans son annexe en précise les éléments constitutifs non sans créer des ambiguïtés dont certaines ont été réfutées depuis par les tribunaux administratifs comme la possibilité d'autoriser une extension à la « frange d'un hameau ». Par ailleurs, pour donner plus de lisibilité aux dispositions de l'article L.146-4 dans sa globalité et interpréter le principe d'extension limitée de l'urbanisation littorale dans les espaces proches du rivage, la juridiction administrative a, d'une part, donné une double dimension à la notion d'extension, une dimension horizontale (extension spatiale) et une dimension verticale (densification) et, d'autre part, appliqué à la constructibilité des espaces urbanisés de la bande littorale (uniquement donc par densification), les mêmes principes que pour les espaces proches du rivage (densification limitée des seules agglomérations et villages). Comme tout principe général ou notion qualitative, leur application relève d'une appréciation fondée sur des critères, des motifs et justifications et exige donc une analyse au cas par cas. C'est tout particulièrement le cas du principe d'extension limitée dans les espaces proches du rivage qui doit, en l'absence de SCoT, de SAR ou de SMVM, être justifiée dans le PLU sur deux critères bien précis liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Pour réaliser l'analyse des risques juridiques liés à des POS/PLU non compatibles avec les dispositions particulières au littoral, il est indispensable que les services en charge de veiller à cette compatibilité en maîtrisent les notions et principes. Cette maîtrise est d'autant plus importante qu'en l'absence de documents d'encadrement de rang supérieur (ScoT ou SAR valant SCoT), aucune opération d'urbanisation dans les espaces à urbaniser d'un PLU ne peut être réalisée sans l'accord du représentant de l'État.91 a) Le constat des services sur l'application des principes d'extension en continuité et d'extension limitée Face à certaines collectivités qui estiment que le principe de l'urbanisation en continuité contribue à aggraver l'urbanisation linéaire et le phénomène d'étalement 91 Article L.122-2 du code de l'urbanisme. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 71/137 urbain, les services regrettent la faiblesse des réflexions sur les armatures urbaines littorales dans les documents d'urbanisme locaux, y compris dans les SCoT. Mais, ils sont une majorité, dont plusieurs préfets, à estimer que le principe de continuité est globalement bien respecté par les PLU. Un tel constat surprend 92, car l'extension de l'urbanisation en continuité des agglomérations et villages constitue, pour ces mêmes services, le problème majeur de l'application de la loi Littoral. Il est signalé dans tous les départements littoraux. La mission n'a pu recueillir le nombre exact de POS/PLU non compatibles avec cette disposition, mais les quelques données recueillies sont significatives93. 10% des POS annulés en Bretagne le sont sur cette base. Tous les services n'ont pas engagé l'analyse juridique des POS/PLU et identifié les situations de non-compatibilité conformément à la circulaire de mars 2006. Selon les éléments recueillis par la mission, seuls sept départements ont mené l'exercice de façon systématique.94 La Bretagne l'a fait en élaborant une doctrine régionale validée en CAR. Ce travail interdépartemental animé par la DREAL a servi de « cadre référentiel » pour établir au niveau de chaque département des cartes des risques juridiques sur l'extension de l'urbanisation, à la parcelle, des POS/PLU (cf. § 232). L'application se révèle toutefois complexe et longue (analyse au cas par cas, vérification sur le terrain) et fait l'objet de négociations difficiles avec les élus95. b) Les difficultés rencontrées par les services Les principales difficultés sont en fait liées : ­ d'une part à la différenciation entre villages, hameaux, et habitat dispersé, l'extension géographique n'étant possible que pour les seuls espaces qualifiés de villages (cf. § 331), ­ et d'autre part à la délimitation des espaces proches du rivage, l'extension devant dès lors être limitée (cf. § 322). Lorsque les espaces proches du rivage sont délimités dans les POS/PLU, les services rencontrent également des difficultés pour apprécier les justifications et motivations des extensions prévues dans ces espaces sur la base des deux critères précisés dans la loi, la configuration des lieux ou l'accueil d'activités nécessitant la proximité du rivage. Ces justifications et motivations ne sont pas toujours très explicites. Ces deux critères ne sont pas applicables dès lors qu'il existe un document de rang supérieur (DTA, SAR, SCoT, SMVM) mais ceux-ci précisent rarement, et surtout insuffisamment, les modalités d'application de cette disposition littorale pour qu'elles 92 La raison est sans nul doute à rechercher dans la qualification très souple dans les POS/PLU des espaces urbanisés pouvant faire l'objet d'une extension, ce qui explique aussi l'importance du contentieux lié à ce prinicipe. 19 POS/PLU considérés comme non compatibles sur 21 communes littorales en Ille-et-Vilaine ; 50 % en Loire-Atlantique. Les 4 départements bretons, les Pyrénées-Atlantiques, la Manche et le Pas-de-Calais. Cf. présentation de la démarche bretonne en annexe 4. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 72/137 93 94 95 Rapport n°007707-01 soient opérationnelles (identification agglomérations et villages). des espaces proches du rivage, des De plus, les tribunaux apprécient librement si ces documents font écran ­ ou pas - à l'application de la loi Littoral. L'application rigoureuse de la circulaire de mars 2006 a conduit les services qui se sont mobilisés à remettre en cause, non seulement les POS « dormeurs », mais également des PLU récents qui n'avaient pas fait l'objet d'observations de leur part. Ces interprétations actualisées de l'extension en continuité des agglomérations et villages sont parfois contestées par les collectivités devant les tribunaux qui peuvent leur donner raison, ce qui fragilise les positions de l'État. c) Le diagnostic de la mission sur les principes d'extension en continuité de l'urbanisation et d'extension limitée L'extension en continuité des agglomérations et villages est le sujet le plus sensible de la loi Littoral. La circulaire de mars 2006 a fortement bousculé la position des services de l'État, en cherchant à permettre d'urbaniser au-delà de ce que la loi prévoyait. Car, au delà de l'ouverture faite sur une extension de l'urbanisation aux marges des hameaux, la circulaire et, plus encore, la plaquette d'accompagnement destinée aux élus ont conforté certaines collectivités dans leur position d'interprétation « souple » des dispositions de la loi avec les conséquences que l'on sait en matière de contentieux. Les services ont aujourd'hui besoin : ­ d'une doctrine nationale réactualisée ; ­ d'un travail en réseau leur permettant d'échanger (nécessité d'apprécier, de justifier, de motiver...) ; ­ d'un appui juridique pour les cas difficiles. Par ailleurs, aucun dispositif de suivi de l'application des dispositions particulières de la loi Littoral n'a été mis en place, permettant de suivre la consommation de l'espace dans les communes littorales, et tout particulièrement dans les espaces proches du rivage et la bande littorale, d'évaluer l'efficacité de cette disposition (ou de sa bonne application). Le projet de la DREAL Bretagne en liaison avec le CETE de l'Ouest n'a pu encore être mis en place par les DDTM. Ce projet n'a pas été retenu comme prioritaire par les DDTM. 96 d) Recommandations de la mission Les recommandations qui suivent sont des recommandations d'ordre général et concernent l'ensemble des dispositions particulières au littoral, mais la mission les formule tout particulièrement pour la bonne application des deux principes qui soulèvent le plus de difficultés d'application : l'extension de l'urbanisation en continuité des agglomérations et villages et leur extension limitée dans les espaces proches du rivage. · Établir un référentiel permettant de préciser les principes d'extension en continuité et d'extension limitée (définition de critères ou faisceau d'indices) à 96 Cf. Annexe 5 sur l'application de la loi Littoral en Bretagne Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 73/137 partir des travaux d'un groupe de travail national assisté de juristes spécialisés à l'instar de ce qui a été fait en Bretagne ; en prévoir une mise en ligne et une actualisation régulière en fonction de la jurisprudence. · Organiser un appui juridique au niveau national sur la base d'une gestion du contentieux permettant d'apprécier au cas par cas les situations les plus difficiles (si nécessaire avec une assistance de juristes spécialisés) ; procéder au niveau de chaque région, en collaboration avec les tribunaux administratifs, au suivi des contentieux et des déférés engagés par l'État dans le champ de l'urbanisme, en distinguant en particulier les territoires d'intérêt national comme le littoral (bilan triennal présenté en CAR et adressé au ministre en charge de l'urbanisme). Donner de nouvelles instructions aux services sur la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions particulières au littoral (en particulier avec celles de l'article L.146-4) et sur les modalités de travail avec les collectivités locales (diffusion sur demande des cartes de risques juridiques notamment). Pour cela, abroger la circulaire de mars 2006 et la remplacer par une circulaire issue des travaux précités, intégrant les avancées des lois Grenelle, notamment l'obligation de justifier les objectifs chiffrés de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers 97 dans les documents d'urbanisme. 3.3.3. La capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser · Article L.146-2 - Pour déterminer la capacité d'accueil des espaces urbanisés ou à urbaniser, les documents d'urbanisme doivent tenir compte : - de la préservation des espaces et milieux mentionnés à l'article L. 146-6 ; - de la protection des espaces nécessaires au maintien ou au développement des activités agricoles, pastorales, forestières et maritimes ; - des conditions de fréquentation par le public des espaces naturels, du rivage et des équipements qui y sont liés. La circulaire de 1991, tout en reconnaissant la quantification de la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser délicate, souligne l'importance de cette notion qui vise à proportionner le développement de l'urbanisation littorale à la protection des espaces naturels, agricoles, forestiers et maritimes, y compris en termes de fréquentation. Celle de mars 2006 ne l'évoque pas. a) Le constat des services sur la détermination de la capacité d'accueil La question de la capacité d'accueil est traitée de manière très insuffisante dans les PLU, ainsi que dans les SCoT littoraux, alors que cette réflexion devrait être plus facile à mener à ce niveau malgré des périmètres pas toujours adaptés. 97 Articles L.122-1-2 (SCoT) et L.123-1-2 (PLU) du code de l'urbanisme. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 74/137 Rapport n°007707-01 Dans la grande majorité des départements, il n'y a pas de doctrine établie, ni de méthode définie, et donc pas de préconisation aux collectivités de la part des services sur une notion qu'ils ne maîtrisent pas eux-mêmes. Les services adoptent généralement une attitude indulgente à l'égard des collectivités qui s'y essaient dans leurs documents d'urbanisme et émettent une simple mise en garde quand le sujet n'y est pas abordé (pour motif de sécurité juridique). Il y a peu de jurisprudence portant sur cette disposition (annulation du PLU de l'ÃŽle d'Yeu). Seules deux régions y ont travaillé : les Pays de la Loire (méthodologie et expérimentations98) et l'Aquitaine (méthodologie s'appuyant sur la démarche de l'évaluation environnementale99). b) Les difficultés rencontrées par les services Si la base législative en est claire, cette notion, qui s'applique à l'ensemble du territoire communal comme à des unités de territoire plus vastes (DTA, SAR, SCoT...), est ressentie comme floue, sans doctrine arrêtée et surtout sans méthodologie établie au niveau national. La méthode mise au point dans les Pays de la Loire est connue d'un certain nombre de services, mais jugée par eux difficile à appliquer pour les collectivités, car trop compliquée. Les services regrettent le manque de soutien de la part de l'administration centrale, notamment les services des Pays de la Loire dont le travail méthodologique mené localement avec l'appui d'universitaires n'a jamais été examiné par l'administration centrale et a fortiori validé. De plus, cette notion de capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser leur paraît limitée dans les critères à prendre en compte. Elle ne permet pas, par exemple, d'aborder les besoins de logements, notamment sociaux, particulièrement aigus sur le littoral (critères de la loi SRU, mais également hébergement des saisonniers dans les communes touristiques). c) Le diagnostic de la mission sur la détermination de la capacité d'accueil Les services (et plus encore les collectivités) ont de réelles difficultés à appréhender la notion de capacité d'accueil fondée sur les grands principes de la loi Littoral. La préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, qui va jusqu'à inclure la préoccupation d'éviter la surfréquentation de ces espaces, exige une maîtrise du développement littoral et son orientation volontaire vers l'arrière-pays. 98 Guide « évaluation de la capacité d'accueil et de développement des territoires littoraux », pilotage DREAL ; expérimentation sur l'ÃŽle d'Yeu suite à l'annulation du PLU. Guide régional de 2006 s'appuyant sur un diagnostic territorial et des critères qui vont au-delà de ceux énumérés à l'article L.146-2. 99 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 75/137 La conception d'un véritable aménagement en profondeur ne peut être portée que par l'intercommunalité. Cette conception, ainsi que la capacité d'accueil des communes de sa façade littorale, devraient relever du SCoT dont le périmètre serait à délimiter en conséquence. Dans les communes littorales, la capacité d'accueil des espaces pouvant encore être urbanisés ne peut pas résulter de scénarios de développement basés uniquement, comme cela est trop souvent constaté, sur des hypothèses démographiques (demande), ces espaces étant juridiquement restreints (protection des espaces remarquables mais aussi coupures d'urbanisation, extension limitée...). Aucun lien n'est clairement établi par les services entre l'obligation d'évaluer les impacts environnementaux des documents d'urbanisme100 et cette disposition relative à la capacité d'accueil uniquement ciblée sur la préservation des espaces naturels, agricoles, forestiers littoraux. Certains services recommandent aux collectivités d'y adjoindre d'autres critères limitants comme la capacité résiduelle de tous les réseaux dont l'assainissement101 ou encore la prévention des risques102. La circulaire de 1991 faisait pourtant dans son annexe une large place à la nécessaire justification des projets mais elle la limitait à l'évaluation économique et environnementale des projets d'équipements et d'opérations d'urbanisation relevant d'une étude d'impact, au-delà donc d'un certain seuil financier, pas à l'évaluation environnementale des plans et programmes qui ne sera exigée qu'à partir de 2004. Les travaux engagés sur ce sujet par l'administration en 1992, puis dans le cadre de l'atelier littoral national en 2005, sont méconnus des services pour les premiers travaux et très peu évoqués par eux pour les seconds. Les critères de mixité sociale fixés par la loi SRU, jugés par certains élus comme incompatibles avec les dispositions particulières au littoral, sont souvent évoqués pour justifier une capacité d'accueil « souhaitable ». C'est une problématique générale, mais particulièrement aiguë sur le littoral. Sans nier ces difficultés, des services nuancent les propos des élus. Ainsi, selon la DDTM des Pyrénées-Atlantiques, la loi Littoral n'est pas perçue dans ce département comme un obstacle à la construction de logements sociaux dès lors que les communes littorales ont, sur la base d'une intervention publique affirmée, la volonté d'agir, ce qui est également observé dans d'autres départements littoraux sous pression foncière. d) Recommandations de la mission · Intégrer la « question » de la capacité d'accueil dans la démarche d'évaluation environnementale des documents d'urbanisme, obligatoire pour les SCoT et pour l'ensemble des PLU des communes littorales, en identifiant clairement les critères spécifiques au littoral à prendre en compte (à préciser dans le guide en cours d'élaboration). Cette recommandation répond à l'attente formulée dans le cadre du Grenelle de la mer. 100 101 102 Directive 2001/42/CE et articles L.121-10 à L.121-15 du code de l'urbanisme. Critère cité dans la loi Littoral mais relevant d'autres réglementations. Critère cité pour la délimitation de la bande littorale . Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 76/137 Rapport n°007707-01 · Veiller à la prise en compte de ces critères lors de l'avis des services de l'État sur les documents d'urbanisme, avis éclairé par celui de l'autorité environnementale, ce qui exige une coordination renforcée des interventions de l'État en ce domaine (porter à connaissance/cadrage et avis). Veiller à la définition de périmètre de SCoT littoraux permettant de concevoir un aménagement en profondeur et de mener une réflexion pertinente sur la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser dans les communes littorales. · 3.4. Les mesures relatives aux activités spécifiques Les dispositions particulières au littoral prévoient un certain nombre de cas où elles ne s'appliquent pas, soit de façon générale, soit par procédure dérogatoire. 3.4.1. Le traitement des terrains de camping en dehors des espaces urbanisés Article L.146-5 - L'aménagement et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes en dehors des espaces urbanisés sont subordonnés à la délimitation de secteurs prévus à cet effet par le plan local d'urbanisme. Ils respectent les dispositions du présent chapitre relatives à l'extension de l'urbanisation et ne peuvent, en tout état de cause, être installés dans la bande littorale définie à l'article L. 146-4. Cet article spécifique aux terrains de camping met en évidence la volonté du législateur de traiter différemment les terrains de camping et les espaces urbanisés puisque la possibilité d'en aménager en dehors de ce type d'espaces est explicitement prévue par la loi. Les secteurs qui leur sont réservés dans les PLU littoraux doivent toutefois respecter les dispositions relatives à l'extension de l'urbanisation (extension en continuité de l'existant, extension limitée dans les espaces proches du rivage et extension interdite dans la bande littorale). a) Le constat des services sur le traitement des terrains de camping littoraux Rares sont les services qui ont élaboré leur propre doctrine sur ce sujet. Il est vrai que les créations de terrains de camping sont aujourd'hui peu nombreuses, ce qui n'est pas le cas des demandes d'extension qui posent de nombreux problèmes103. Généralement, seules les extensions des terrains de camping situés en continuité de 103 Deux annulations dans la Manche. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 77/137 l'urbanisation sont autorisées. De petites extensions sont cependant autorisées dans des campings isolés existants. Dans la grande majorité des départements, les terrains de camping ne font pas l'objet d'un zonage spécifique104 et sont assimilés à des espaces urbanisés, avec les difficultés de qualification précédemment analysés (cf. § 331). Un seul service, la DDTM du Calvados, a précisé que, dans son département, les communes classent les terrains de camping dans leur PLU selon un zonage spécifique. La DDTM des Pyrénées Atlantiques a fait un travail intéressant de classification des terrains de camping en trois catégories, en fonction de leur localisation (U : peuvent évoluer ; N : peuvent être conservés mais sans évolution possible ; N.ER : à résorber). b) Les difficultés rencontrées par les services Le classement des campings en zone urbaine (U) ou naturelle (N) fait l'objet de vifs débats entre les services et les collectivités. Les services manquent de critères précis pour argumenter : faut-il les considérer comme des espaces urbanisés en raison de leur « durcissement » ou comme des secteurs spécifiques bénéficiant de règles particulières et alors, avec quel zonage ? Le nombre de plus en plus important d'habitations légères de loisir, de résidences mobiles de loisir, de caravanes stationnées à l'année, ainsi que le développement de multiples services « intégrés » (épicerie, discothèque, terrain de sport, piscine...), transforment progressivement ces terrains de camping en véritables complexes de loisirs qui se différencient de moins en moins des espaces urbanisés. Peuvent-ils être assimilés à des hameaux ? Un important secteur de terrains de camping avec commerces, services et activités de loisirs peut-il être assimilé à un village ? Ces interrogations sont accentuées avec la présence d'une population permanente dans les terrains de camping situés dans les zones à forte pression foncière, tout particulièrement autour des grandes agglomérations et villes universitaires (Languedoc-Roussillon, La Rochelle...). Par ailleurs, beaucoup de dossiers sont instruits dans le cadre de régularisations sur lesquelles il est difficile pour les services de revenir, l'enjeu économique étant souvent mis en avant par les pétitionnaires et les collectivités. Les contentieux se développent dans les zones de forte fréquentation touristique et/ou soumises aux risques littoraux (Languedoc-Roussillon). c) Le diagnostic de la mission sur le traitement des terrains de camping Le zonage spécifique des terrains de camping avait initialement un double objectif : ­ favoriser cette activité de loisir en plein air dans des lieux adaptés, ­ « protéger » de l'immobilier touristique le foncier de cette activité pour permettre au plus grand nombre de partir en vacances. 104 Côtes d'Armor, Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Landes... Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 78/137 Rapport n°007707-01 Le « durcissement » des terrains de camping fait qu'aujourd'hui cette spécificité a perdu beaucoup de son sens et n'est plus guère prise en compte dans les PLU. Leur réglementation a beaucoup évolué ces dernières années 105, ainsi que les pratiques ; il est indispensable d'établir une doctrine nationale actualisée qui permette d'appliquer sans divergence les dispositions particulières de l'article L. 146-5. Une ambiguïté importante demeure en effet sur la qualification en matière d'urbanisme de l'hôtellerie de plein air, qui s'éloigne de plus en plus de la pratique du camping. En fonction de cette qualification (espaces urbanisés ou espaces spécifiques), l'interprétation des dispositions particulières au littoral à leur encontre peut considérablement varier. Toutefois, en s'appuyant sur la jurisprudence, la plupart des services les assimilent à de l'urbanisation et leur en appliquent strictement les règles, mais ils ne les qualifient pas pour autant selon la typologie des espaces urbanisés telle que définie par la loi Littoral (villages, hameaux, autres) rendant juridiquement incertain tout développement de cette activité de plein air dans les communes littorales. d) Recommandations de la mission · Clarifier les dispositions relatives aux terrains de campings, notamment la possibilité ou non de délimiter des secteurs spécifiques à partir d'un ensemble de terrains de camping existants, dûment autorisés, dès lors que leurs caractéristiques le justifient (critères à définir) et, à partir de cette délimitation, la possibilité ou non de leur extension (hors bande littorale, extension en continuité et extension limitée dans les espaces proches du rivage). Intégrer à cette réflexion nationale la classification mise en oeuvre dans le département des Pyrénées-Atlantiques bien qu'elle ne corresponde pas à une analyse de secteurs spécifiques mais de terrains de camping. Au préalable, recenser les contentieux portant sur cette thématique en veillant tout particulièrement à bien identifier les problèmes liés à leur « durcissement » et à la spéculation sur le foncier. 3.4.2. Les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières · · Article 146-4-I modifié (art. 109 de la loi d'orientation agricole du 10 juillet 1999 et art. 235 de la loi relative au développement des territoires ruraux du 23 février 2005) L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières qui sont incompatibles 105 Décret n°2011-1214 du 29 septembre 2011 et circulaire du 28 novembre 2011. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 79/137 avec le voisinage des zones habitées peuvent être autorisées, en dehors des espaces proches du rivage, avec l'accord du préfet après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysage et de sites. Cet accord est refusé si les constructions ou installations sont de nature à porter atteinte à l'environnement ou aux paysages. Les dispositions du premier alinéa ne font pas obstacle à la réalisation de travaux de mise aux normes des exploitations agricoles, à condition que les effluents d'origine animale ne soient pas accrus. a) Le constat des services sur les procédures liées aux constructions agricoles L'application du dispositif dérogatoire est très variable d'un département à l'autre : ­ les dérogations sont généralement accordées sans difficulté hors des espaces proches du rivage (par exemple, 91% des demandes déposées en 2009 dans le département de la Manche ont reçu une suite favorable) ; les pratiques diffèrent dans les espaces proches du rivage où toute dérogation est interdite (ce qui contribue à la réticence des collectivités de les délimiter dans leur PLU). La procédure de dérogation créée en 2005 y est appliquée de façon très souple en interprétant parfois très librement la délimitation des espaces proches du rivage, voire en l'ignorant. ­ Les avis des services sont plus ou moins suivis par les services préfectoraux . Pour en faciliter l'application, un certain nombre de services ont élaboré, en liaison avec les organismes professionnels, des chartes ou des guides (département de la Manche). b) Les difficultés rencontrées par les services pour mettre en oeuvre les procédures relatives aux constructions liées aux activités agricoles L'agrandissement des exploitations est généralement autorisé dans les espaces proches du rivage (extension limitée en continuité d'exploitations ou en discontinuité pour les ouvrages de mise aux normes). Les services signalent l'ambiguïté de cette règle quand il s'agit de la mise aux normes du bien-être animal, qui exige une augmentation significative des surfaces, et de l'inapplicabilité de la limité fixée « sans augmentation des effluents ». Les problèmes posés par les regroupements d'élevages, les déplacements d'installations, ne sont pas réglés par le dispositif dérogatoire en espaces proches du rivage... Il ne s'agit plus d'extension limitée (Finistère). Les logements de fonction sont autorisés par certains services (bergeries dans la Manche, Bretagne) bien qu'ils ne soient pas incompatibles avec le voisinage des zones Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 80/137 habitées (critère pour accorder la dérogation). Ces services sont toutefois conscients que ce type d'autorisations créent des « rentes de situation ». La réalisation de hangars plus ou moins isolés soulève également des interrogations, car ils peuvent être réalisés en continuité de l'exploitation (cas de l'Aude). Par ailleurs, l'utilisation de ces bâtiments agricoles peut évoluer dans le temps (transformation en habitations ou en restaurants), y compris dans des espaces remarquables106. La DDTM de Charente-Maritime a élaboré une note de doctrine sur ce sujet. Les serres, qui ne sont pas considérées comme constitutives d'urbanisation par les services de l'État (Finistère, Pyrénées-Atlantiques), sont autorisées en dehors de la bande littorale, alors que la jurisprudence s'est prononcée différemment. Le problème est encore plus difficile à régler dès lors que le projet associe serres et ferme photovoltaïque (Pyrénées-Atlantiques). c) Le diagnostic de la mission sur la mise en oeuvre des procédures liées aux activités agricoles Les caractéristiques des activités agricoles (mais aussi pastorales, forestières, ostréicoles...) et les problèmes soulevés par leur développement, voire leur simple maintien, diffèrent considérablement d'un littoral à un autre. Dès lors, l'élaboration locale de chartes ou de guides en concertation avec les parties prenantes peut être de nature à faciliter l'application de ce dispositif dérogatoire. En revanche, ils ne doivent pas aller au-delà de la doctrine administrative élaborée au niveau national. Les recherches de solutions d'implantation alternatives ne sont jamais évoquées et les motifs justifiant la localisation du projet rarement développés (évaluation environnementale). d) Recommandations de la mission · Elaborer une doctrine nationale clarifiant l'application des procédures dérogatoires liées aux activités forestières et soumettre à la validation de l'administration centrale les chartes et guides locaux avant diffusion. Renforcer le contrôle des autorisations dérogatoires et l'effectuer dans la durée. 3.4.3. Les difficultés liées aux installations d'énergie renouvelable · Le problème soulevé pour l'implantation d'éoliennes terrestres dans les communes concernées par la loi Littoral a fait l'objet d'une mission d'audit spécifique confiée au CGEDD107. Certes, cette mission ne concerne que la Corse et les départements 106 Le problème de la transformation des constructions autorisées car nécessaires aux activités économiques traditionnelles est encore plus sensible pour les installations ostréicoles. Rapport CGEDD n° 008203-01 sur « le développement de l'énergie éolienne terrestre dans les DOM et en Corse ». 107 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 81/137 d'outre-mer mais les difficultés que soulève le cadre législatif et réglementaire sont de même nature. Aussi la présente mission ne les a-t-elle pas analysées. Elle a toutefois recueilli les observations des services. a) Le constat des services sur l'implantation des éoliennes terrestres Pour les services, il n'y a pas d'ambiguïté : la réglementation actuelle ne permet pas d'implanter à terre des éoliennes de plus de 12 m dans les communes littorales. Le principe de l'extension de l'urbanisation en continuité est contraire aux règles de distance imposées pour l'installation de ce type d'équipements. Il en est de même de toute implantation d'activités exigeant par voie réglementaire une certaine distance des zones d'habitation (ou de toute autre construction). b) Les difficultés rencontrées par les services Les services sont interpellés par les collectivités sur l'incohérence des politiques publiques promues par l'État (développement des énergies renouvelables et protection du littoral). c) Le diagnostic de la mission Il ne s'agit pas, pour la mission, d'incohérence de politiques publiques comme cela a été trop souvent entendu au cours de cet audit, mais de choix prioritaire portant sur une partie du territoire national. Ce choix relève des motifs mêmes de la loi. La loi Littoral est porteuse d'une politique spécifique d'aménagement visant à reporter à l'arrière du littoral toute urbanisation nouvelle, y compris donc les activités ne justifiant pas la proximité immédiate de l'eau, y compris aussi les activités économiques isolées. Il convient d'afficher plus clairement un tel choix. Il a été mis en évidence lors des débats parlementaires et, de plus, clairement exprimé dans le texte législatif en ce qui concerne les ICPE : « Elles (les dispositions particulières au littoral) sont également applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement » (art. L.146-1 - dernier alinéa). En revanche, il n'est pas souhaitable de laisser dire qu'aucune implantation économique n'est possible dans les communes littorales. Des zones d'activités, qu'il convient d'identifier en espaces urbanisés, existent et peuvent y être développées dès lors qu'elles respectent les différentes dispositions particulières au littoral. d) Recommandations de la mission · Mieux expliciter les enjeux sur le littoral justifiant une politique restrictive d'implantation d'activités isolées (hors zones d'activités, hors activités agricoles, pastorales, forestières et maritimes dont un régime dérogatoire a été intégré à la loi). Analyser les conséquences (avantages et inconvénients) dans les communes littorales continentales, les communes iliennes autres que la Corse et les communes riveraines des grands lacs, de l'application des recommandations Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 82/137 · Rapport n°007707-01 du rapport du CGEDD précité, portant sur le cadre législatif et réglementaire applicable aux éoliennes dans les départements d'outre-mer et en Corse. 3.5. Les dispositions relatives aux espaces à préserver de l'urbanisation Outre la bande littorale où toute extension de l'urbanisation est interdite en dehors des espaces urbanisés, la loi Littoral prévoit que soient identifiés d'autres types d'espaces à préserver également de l'urbanisation. Ces espaces où s'appliquent des règles qui leur sont propres, concernent l'ensemble du territoire communal et donc bien sûr la bande littorale. Comme pour les espaces urbanisés, les dispositions particulières propres à chaque type d'espaces naturels, agricoles ou forestiers se cumulent sur la bande littorale avec celles qui lui sont propres. 3.5.1. Les espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation Article L.146-2 - Les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme doivent prévoir des espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation. La circulaire de 1991 en précise la conception : « composantes positives qui séparent selon leur échelle des zones d'urbanisation présentant une homogénéité physique et une certaine autonomie de fonctionnement. L'étendue de ces coupures doit être suffisante pour permettre leur gestion et assurer leur pérennité. ». Elles devront figurer avec un zonage propre (ND ou NC). Les services de l'État devront bâtir leur position concernant leur localisation sur la base d'études. La circulaire de mars 2006 n'évoque pas sur cette disposition. a) Le constat des services sur l'identification de coupures d'urbanisation Si la notion de coupure d'urbanisation ne semble pas poser de difficultés majeures aux services, il n'en est pas de même de son application. Beaucoup de PLU littoraux n'identifient pas de coupures d'urbanisation. Les SCoT le font davantage mais de façon encore insuffisante. Certains élus estiment que cette disposition est incohérente avec le principe d'extension de l'urbanisation en continuité de l'existant. Il n'est pas toujours évident de délimiter et surtout de justifier des coupures d'urbanisation dans les PLU littoraux ruraux en raison du faible niveau d'urbanisation. A l'inverse, les coupures d'urbanisation dans les PLU des communes très urbanisées nécessitent des délimitations très précises, voire des micro-coupures, permettant de mettre fin à une urbanisation continue le long des axes principaux. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 83/137 Il n'y a pas beaucoup d'éléments de jurisprudence108. b) Les difficultés rencontrées par les services pour son application Les différences d'application par les services sont importantes d'un département à un autre, tout particulièrement dans l'identification des activités qui peuvent y être autorisées : ­ Hébergements liés aux activités de loisir : quelques services s'interrogent encore sur la possibilité d'y autoriser des opérations lourdes comme les golfs immobiliers ou les « center parks » ; plus nombreux sont ceux qui hésitent à bloquer des opérations plus modestes visant à assurer la viabilité économique de centres de loisirs tels que des centres équestres. Constructions de bâtiments agricoles : si les extensions limitées des bâtiments existants ne posent pas de problème d'autorisation, il n'en est pas de même pour de nouvelles constructions liées à l'activité agricole, notamment en espaces proches du rivage. ­ D'une façon générale, se pose pour les services le problème du changement d'usage de bâtiments existants, avec ou sans extension, qui remet en cause le caractère de coupure d'urbanisation. Face à ces incertitudes, certains services vont jusqu'à n'autoriser dans les coupures d'urbanisation que des aménagements légers. Les différences d'échelles entre les PLU et les documents de rang supérieur (DTA, SCoT) constituent un problème difficile à gérer (grandes coupures et coupures locales)109. Lorsque ces documents identifient des coupures d'urbanisation, il est rare que les PLU les traduisent dans un zonage et un règlement appropriés et surtout en identifient d'autres. L'obligation de définir des coupures d'urbanisation dans les PLU ne s'impose pas aux révisions partielles ne touchant qu'une partie jugée non significative du territoire communal. Les services notent toutefois des évolutions positives. Pour les services, l'État ne dispose pas de moyens réellement contraignants pour les imposer aux collectivités, ou ne marque pas sa volonté d'y recourir. De plus, leur identification dans les documents d'urbanisme ne règle pas le problème de leur gestion. Enfin, Les services observent un grignotage dans le temps des coupures d'urbanisation, car leur périmètre n'est pas juridiquement garanti dans le temps (cf. jurisprudence). c) Le diagnostic de la mission sur les coupures d'urbanisation littorales L'enjeu des grandes coupures d'urbanisation sur le littoral se joue au niveau des SCoT : tout SCoT littoral qui n'identifierait pas de coupures d'urbanisation significatives 108 Mais néanmoins 42 arrêts (Cours d'Appel et Conseil d'État) dont c ertains sont illustrés et commentés dans le référentiel breton. 109 ... surtout lorsque ces documents ne donnent aucune indication sur la vocation de ces coupures. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 84/137 Rapport n°007707-01 devrait être déclaré non compatible par le préfet et, si nécessaire, être déféré au tribunal administratif. Certains élus estiment en effet cette disposition comme contraire au principe d'urbanisation en continuité de l'existant, en occultant les autres principes généraux de la loi à prendre concomitamment en compte (aménagement en profondeur ; accès au rivage ; protection des espaces naturels, agricoles, forestiers et paysagers, tout particulièrement dans les espaces proches du rivage). Les projets de territoire (PADD) des SCoT et des PLU devraient définir leur vocation (naturelle, agricole ou forestière, récréative, multifonctionnelle) afin de donner des orientations quant à la nature des activités qui y sont encouragées, ainsi que les principes à respecter dans les PLU. Au-delà de la protection des espaces naturels et agricoles par les documents d'urbanisme, des outils complémentaires existants pourraient également être mis en oeuvre pour soustraire ces espaces à la pression urbaine littorale : ­ les zones agricoles protégées (ZAP)110 définies par la loi d'orientation agricole de 1999, qui doivent présenter un intérêt général en raison de la qualité de leur production ou de leur situation géographique, ce qui est le cas des espaces agricoles littoraux ; les périmètres de protection et de mise en valeur des espaces naturels et agricoles péri-urbains (PAEN)111 définis par la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, qui permettent aux départements, avec l'accord des communes, d'y définir des programmes d'action et de sécuriser les activités agricoles qui s'y exercent. ­ Ces outils sont relativement peu utilisés par les services de l'État (ZAP) et par les collectivités territoriales (PAEN), les communes s'avérant peu enclines à mobiliser ces outils de protection qui doivent, lors de leur élaboration, exclure tous espaces urbanisés ou à urbaniser des PLU et être compatibles avec les SCoT lorsqu'ils existent mais qui, une fois approuvés, deviennent opposables aux PLU. L'État est insuffisamment vigilant sur la matérialisation de ces coupures en termes de zonage et de règlement dans les documents d'urbanisme, ainsi que sur leur évolution dans le temps. Ce sont les associations qui engagent à 95 % le contentieux portant sur l'application de cette disposition. d) Recommandations de la mission · En l'absence de coupures d'urbanisation dans les SCoT et les PLU, demander aux collectivités de modifier leurs documents d'urbanisme en justifiant les modifications demandées au-delà de la seule lutte contre l'urbanisation linéaire le long du rivage (préservation des accès au littoral et des perspectives sur la mer, protection des espaces naturels et agricoles littoraux...). 110 111 Art. L.112-2 du code rural. Art. L.143 et suivants du code de l'urbanisme. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 85/137 · Veiller à ce que les PADD des SCoT et des PLU définissent, avec un niveau de précision suffisant, les vocations, les fonctions économiques, sociales (aménités) et environnementales à donner aux coupures d'urbanisation que les collectivités auront identifiées, fixent les règles à décliner dans les PLU, voire proposent leur protection réglementaire (PAEN, ZAP...). Mettre en évidence la complémentarité de certaines de ces coupures d'urbanisation, dont l'intérêt écologique est avéré, avec la « trame verte et bleue » (TVB) : en confortant dans le temps les coupures d'urbanisation par leur connexion à un réseau plus large, en identifiant de nouvelles coupures d'urbanisation contribuant au fonctionnement de la trame verte et bleue, y compris en zones urbaines (micro-coupures). Proposer aux collectivités, le cas échéant, la mise en oeuvre d'outils de protection réglementaire des espaces agricoles littoraux soumis à forte pression (PAEN et ZAP). Identifier les coupures d'urbanisation des communes littorales dans le suivi de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers. 3.5.2. Les espaces remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel · · · Article L.146-6 modifié : Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive européenne n° 79-409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et, dans les départements d'outre-mer, les récifs coralliens, les lagons et les mangroves. Toutefois, des aménagements légers peuvent y être implantés lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. Un décret définit la nature et les modalités de réalisation de ces aménagements qui incluent, selon leur importance et leur incidence sur l'environnement, soit une enquête publique, soit une mise à disposition du public préalablement à leur autorisation. En outre, la réalisation de travaux ayant pour objet la conservation ou la protection de ces espaces et milieux peut être admise, après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 86/137 L'identification des espaces remarquables ou caractéristiques du littoral, ainsi que les règles qui s'y appliquent, ont fait l'objet de décrets d'application 112 et de nombreuses instructions aux services dont la dernière en date du 15 septembre 2005. La circulaire du 14 mars 2006 ne les évoque pas mais celle du 20 juillet 2006 rappelle que les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral doivent être classés en tant que tels dans les PLU. La circulaire de juillet 2006 précise par ailleurs que : « s'il appartient en premier lieu aux communes d'identifier et de délimiter les espaces remarquables lors de l'élaboration ou de la révision de leur PLU, pour autant l'État doit avoir sa propre vision des espaces à qualifier de remarquables afin de pouvoir exercer pleinement son rôle lors des réunions d'associations notamment. Les études réalisées (...) pourront utilement être communiquées aux communes dans le cadre du PAC ». Cette instruction nuance pour le moins l'instruction donnée dans la circulaire de mars 2006 : « Les DDALL ne doivent en aucun cas être notifiés aux communes dans le cadre du « porter à connaissance » (PAC) ou de toute autre forme de notification à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme. » Bien sûr, il est ici question de notification, mais les services n'en ont pas moins été déstabilisés dans leurs pratiques de PAC. Certains d'entre eux ont dès lors « abandonnés » leur DDALL, d'autres au contraire ont estimé que la circulaire de juillet 2006 les encourageait à l'actualiser, en lançant des études complémentaires, et à en communiquer les informations aux communes (sans qu'il soit question pour autant de les notifier). a) Le constat des services sur l'identification des espaces remarquables et caractéristiques Les textes et instructions sont abondantes et précises (circulaire de 2005 notamment). Il n'y a guère de difficultés pour interpréter cette disposition, du moins au niveau de la doctrine. Les services disposent pratiquement tous d'une cartographie identifiant et délimitant les espaces remarquables à une échelle suffisamment précise pour leur PAC. Il y a un recoupement fréquent avec les espaces juridiquement protégés (sites classés, zones de protection spéciale, réserves naturelles...) ou inventoriés par l'État (ZNIEFF notamment). Les espaces remarquables sont rarement identifiés comme tels dans les documents d'urbanisme. Cette carence est jugée de peu d'effets par les services qui veillent à ce qu'ils soient classés en zones N avec un règlement adapté dans les PLU, excepté pour les zones humides qui, lorsqu'elles ne sont pas identifiées comme espaces 112 Décret n°89-694 du 20 septembre 1989 et décret n°2004-310 du 29 mars 2004. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 87/137 remarquables (les espaces caractéristiques ayant tendance à être oubliés), ne sont pas, d'une façon générale, respectées par les collectivités113. b) Les difficultés rencontrées par les services pour l'application de cette disposition ­ Pour leur identification et délimitation Un certain nombre de documents départementaux cartographiant les espaces remarquables du littoral n'ont pas fait l'objet d'actualisation, ce qui peut constituer une source de fragilité juridique lors des « porter à connaissance ». Les cartographies disponibles ne règlent pas toujours les problèmes de délimitation à la marge, notamment dans le cas des zones humides. Dès lors qu'ils sont identifiés dans un document de rang supérieur (DTA, SCoT), il est rare que les PLU en identifient de nouveaux ; certains PLU ne les ont pas encore repris (Loire-Atlantique). La question des espaces remarquables en mer est techniquement et juridiquement plus délicate que côté terre (identification, délimitation, prise en compte dans les documents d'urbanisme et les autorisations...) : cas des extractions d'agrégats ou de zones de dépôts en mer. ­ Pour leur pérennité dans le temps Si leur identification ne pose pas de difficulté majeure (excepté en mer), il n'en est pas de même de leur gestion dans le temps, ce qui pourrait être de nature à remettre en cause, à terme, leur caractère d'espaces remarquables. La délimitation des espaces remarquables délimités dans les POS/PLU peut être remise en cause à l'occasion de projets précis. Les cas sont de plus en plus nombreux (port de plaisance à Portbail, passage de câbles...). ­ Pour la prise en compte des activités La possibilité de maintenir, voire de développer, certaines activités dites « de gestion » en espaces remarquables, mais dont les aménagements ne peuvent être considérés comme « légers », conduit à un « pastillage » de ces zones naturelles114 dans les PLU (bâtiments ostréicoles dans les départements de Charente-Maritime et de Gironde). La pression pour adosser à des bâtiments d'exploitation agricoles ou pastoraux des logements dits de fonction (sièges d'exploitation) est de plus en plus forte. 113 Pour certains services, si, seules, certaines zones humides littorales sont des espaces remarquables, toutes sont des espaces caractéristiques du littoral. Le pastillage est un terme utilisé en urbanisme pour décrire la technique qui consiste à créer de toutes petites zones avec une réglementation spécifique au sein d'une grande zone dont le règlement est considéré comme incompatible avec le maintien ou le développement des activités dans une telle zone. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 88/137 114 Rapport n°007707-01 Les procédures relatives à la réalisation des « aménagements légers » ne sont pas totalement maîtrisées par les services et continuent de leur poser des problèmes de légalité (goudronnage des pistes cyclables, réalisation de sentiers avec ou sans permis d'aménager). c) Le diagnostic de la mission sur la délimitation des espaces remarquables ou caractéristiques Bien que cette disposition particulière du code de l'urbanisme ne soit pas la plus complexe, son application soulève encore des difficultés. La connaissance des espaces remarquables ou caractéristiques des communes littorales par les services de l'État n'est pas encore stabilisée, tout particulièrement en mer (développement du réseau Natura 2000 défini en application des directives européennes dite « habitat-faune-flore » et « oiseaux »115). L'approche des espaces caractéristiques du patrimoine culturel est relativement moins développée et se fait essentiellement par le biais de la partie naturelle des sites protégés. La réglementation qui doit y être appliquée n'est pas non plus totalement maîtrisée par les services et a fortiori reprise dans les PLU (aménagements légers). Pas plus que ne l'est la réglementation relative à l'évaluation environnementale des projets : tout aménagement réalisé dans les espaces remarquables ou caractéristiques est soumis à étude d'impact, ce qui devrait permettre d'apprécier son caractère d'intérêt général et surtout la pertinence de sa localisation (analyse des solutions de substitution). Si l'espace remarquable est également un site Natura 2000, l'étude d'incidence exigé peut être incluse dans l'étude d'impact du projet. Les sites Natura 2000 sont particulièrement nombreux sur le littoral. d) Recommandations de la mission · Rappeler dans les guides relatifs à l'élaboration des documents d'urbanisme l'obligation : d'identifier dans les SCoT les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral en tant que tels et d'y prescrire des objectifs de gestion ; de les délimiter dans les PLU avec un zonage spécifique renvoyant à un règlement conforme a minima à l'article R.146-2. Donner l'instruction aux services : d'assurer une actualisation permanente des espaces remarquables et caractéristiques du littoral en distinguant ceux qui relèvent d'une protection juridique et ceux qui relèvent d'inventaires avec effets juridiques indirects (ZNIEFF par exemple) ; de garder la trace de la qualification en espaces remarquables et, plus précisément, de conserver l'historique des inventaires, des actualisations et des notifications ou communications ; · 115 Cf. références en note de bas de page n° 70. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 89/137 d'examiner la pertinence d'une protection réglementaire des espaces qui en seraient dépourvus 116; de renforcer l'analyse qualitative des évaluations environnementales des projets et des plans et programmes affectant les espaces remarquables et caractéristiques du littoral. · Bien que nombre de cas évoqués dans le domaine de l'urbanisme paraissent à la mission ne pas poser de difficulté particulière (problème de formation des agents), mettre en place un appui juridique au niveau national incluant les démarches d'évaluation environnementale (études d'impact et études d'incidence Natura 2000). 3.5.3. Les espaces boisés significatifs Article L.146-6 - Le plan local d'urbanisme doit classer en espaces boisés, au titre de l'article L.130-1 du présent code, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après consultation de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites. Cette disposition n'a pas fait l'objet d'instructions spécifiques. a) Le constat des services sur l'identification des espaces boisés les plus significatifs La délimitation des parcs et espaces boisés significatifs et leur classement dans les PLU ne semblent pas poser de problème particulier aux services. Les parcs et espaces boisés significatifs sont identifiés dans la plupart des DDALL. b) Les difficultés rencontrées par les services Des contentieux locaux demeurent, toutefois, possibles (constructions illicites). Contrairement aux textes réglementaires, une DDTM estime que le classement des espaces boisés significatifs ne concerne que les espaces proches du rivage. c) Le diagnostic de la mission sur l'identification des espaces boisés les plus significatifs Leur identification dans les DDALL ne règle pas toujours les problèmes de délimitation dans les PLU, notamment lorsque les communes littorales disposent d'importants massifs forestiers. Les appréciations sur les espaces significatifs diffèrent généralement en fonction du taux de boisement des communes. 116 Sites classés, par exemple, pour les espaces dits caractéristiques du patrimoine naturel et culturel. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 90/137 Rapport n°007707-01 L'évolution dans le temps des espaces boisés ainsi identifiés, sur le plan tant quantitatif que qualitatif, ne fait pas l'objet d'un suivi, pas plus que le suivi des mesures compensatoires en cas de déclassement. Les enjeux et les problèmes se situent généralement aux franges de ces espaces classés. d) Recommandations de la mission · Actualiser l'inventaire des parcs et espaces boisés significatifs situés dans les communes littorales (ou le réaliser s'il n'existe pas), en liaison avec le Conservatoire du littoral, l'Office national des forêts et les Conseils généraux en charge des espaces naturels sensibles, afin de pouvoir veiller à leur pérennité. Développer, comme pour les espaces remarquables ou caractéristiques, une réflexion avec les parties prenantes (communes, propriétaires, établissements publics) sur la gestion de ces espaces classés, en prenant en compte le taux de boisement de la commune. · 3.6. Les autres dispositions ayant fait l'objet d'observations significatives de la part des services : la gestion du domaine public maritime (DPM) La présente mission d'audit, ciblée sur l'application des dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme, ne portait pas sur la gestion du domaine public maritime (DPM). Toutefois la mission a recueilli un certain nombre d'éléments, repris ci-après . a) Le constat des services sur la gestion du DPM Les méthodes de contrôle de la gestion du DPM et tout particulièrement des autorisations d'occupation temporaire (AOT) ont été améliorées (logiciel de contrôle en Pyrénées-Atlantiques). Les services ont, dans leur ensemble, entrepris des actions de « reconquête » du DPM, en particulier pour les travaux de lutte contre l'érosion et l'occupation commerciale (ouvrages et équipements sans autorisation). Les relations avec les communes ont été renforcées à l'occasion de l'attribution ou du renouvellement des concessions de plages, mais aussi pour la gestion des autorisations d'occupation temporaire en général. En Haute-Corse, une commission de gestion du DPM a ainsi été instituée par un arrêté préfectoral du 23 juillet 2010 pour se prononcer sur les AOT et en faciliter le contrôle ; un document définissant la doctrine et le fonctionnement de la commission a été élaboré. Les délais d'instruction des sites Natura 2000 en mer ont été réduits. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 91/137 b) Les difficultés rencontrées par les services Malgré ces progrès, la gestion du DPM pose encore quelques problèmes liés au bornage qui n'est pas partout achevé (certains procès-verbaux sont jugés discutables sur ce point par les services eux-mêmes). Les autorisations dans les espaces remarquables en mer soulèvent de nombreux problèmes : par exemple, l'autorisation des cales ostréicoles qui ne sauraient être considérées comme des « aménagements légers ». c) Le diagnostic de la mission établi en fonction des observations recueillies Le « décloisonnement » du fonctionnement des services déconcentrés (renforcement des méthodes de travail entre services et unités en charge de la planification, de l'application du droit des sols, de la gestion du DPM, de l'évaluation des plans et projets) doit être poursuivi dans une optique de gestion durable du DPM (par exemple, pour la gestion du trait de côte). Le bornage du DPM n'est pas justifié sur l'ensemble du littoral : il doit être réalisé là où existent des projets ou dans les secteurs où se posent des problèmes nécessitant cette délimitation. d) Recommandations de la mission · Développer le volet sur l'espace marin des SCoT (SMVM) dès lors que les services de l'État y ont identifié des enjeux économiques, sociaux et/ou environnementaux. Organiser un fonctionnement en réseau des délégations à la mer et au littoral (DLM) si ce n'est pas déjà le cas. Généraliser la démarche engagée par le préfet de Haute-Corse (commission de gestion des AOT)117. Clarifier la nature des activités maritimes autorisées dans les espaces marins qualifiés de remarquables ou de caractéristiques. · · · Seules les recommandations d'ordre général formulées dans cette partie consacrée à l'analyse de l'application des dispositions particulières au littoral sont reprises dans le plan d'action proposé ci-après à l'administration centrale. La mission estime en effet indispensable que les recommandations propres à chaque disposition fassent l'objet d'un travail d'approfondissement et de validation dans le cadre d'un groupe de travail national dont l'objet serait d'actualiser la doctrine administrative. 117 Le préfet de la zone de défense Sud a formulé le souhait que cette doctrine soit généralisée à tout le littoral méditéranéen. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 92/137 Rapport n°007707-01 4. Conclusion et recommandations Face au constat d'une pression de l'urbanisation qui reste parmi les plus importantes du territoire métropolitain, les grands principes portés par la loi Littoral gardent, aujourd'hui encore, toute leur acuité. La recherche d'un aménagement équilibré du littoral reposant sur une vision prospective de son devenir et sur une valorisation de ses richesses spécifiques, ne peut que conforter les principes d'un développement urbain et économique orienté vers l'arrière-pays, ne laissant se développer sur la frange côtière que les activités nécessitant la proximité immédiate de la mer et respectant les grands écosystèmes littoraux comme les espaces agricoles et forestiers qui en façonnent les paysages. La pertinence de ces principes d'aménagement se trouve même renforcée par les défis à relever face au changement climatique et aux risques littoraux dont la réalité brutale nous a été rappelée encore récemment par la catastrophe de Xynthia. Il en est de même pour des défis plus anciens, remis sous les feux de l'actualité par le Grenelle de l'environnement, que sont la maîtrise de l'étalement urbain, la gestion économe de l'espace, la préservation de la biodiversité au travers de la trame verte et bleue. Les nombreuses études menées sur le sujet, les bilans périodiques publiés, ont montré que la loi Littoral a contribué à protéger cet espace fragile et limité et en a freiné la dégradation, même si à l'évidence elle n'est pas parvenue à la stopper. Les dispositions particulières au littoral regroupées dans le code de l'urbanisme ne sauraient suffire, à elles seules, à endiguer cette dégradation. La lutte contre les pollutions marines, la gestion du trait de côte, la prévention des risques, la préservation de la biodiversité, le maintien des activités traditionnelles de gestion et de valorisation de l'espace, réclament tout autant l'application rigoureuse de politiques publiques spécifiques. Mais une application rigoureuse de ces dispositions particulières doit contribuer, conformément à l'article 1 de la loi de 1986118, à la mise en cohérence des politiques sectorielles et permettre de mieux répondre à tous ces défis auxquels le littoral est confronté de façon souvent amplifiée, exacerbée, par rapport aux autres parties du territoire national. Au vu des constats réalisés par la mission d'audit et développés dans les parties 2 et 3 du présent rapport, la mise en oeuvre de ces dispositions rencontre, plus de 25 ans après le vote de la loi Littoral, de nombreuses difficultés d'application, tant par les collectivités en charge de les traduire dans leurs documents d'urbanisme et dans l'instruction des actes individuels que par les services de l'État en charge de veiller à la compatibilité de ces documents et actes avec la loi. L'importance de la jurisprudence, qui lui est consacrée encore aujourd'hui, en témoigne. C'est pour répondre à ces difficultés d'application que la circulaire ministérielle de mars 2006 demandait aux services de l'État de procéder à une analyse juridique des documents locaux d'urbanisme littoraux existants et de conseiller aux collectivités de 118 Article aujourd'hui codifié dans le code de l'environnement (art. L.321-1). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 93/137 les mettre en révision en cas d'incompatibilité constatée avec les dispositions particulières de la loi Littoral. L'objectif recherché était clairement affiché : sécuriser juridiquement les actes individuels d'occupation délivrés sur la base de documents d'urbanisme, euxmêmes juridiquement sécurisés au regard des dispositions particulières du littoral. Une doctrine administrative, jointe en annexe, visait à mieux en cerner les notions et principes portés par ces dispositions et à en faciliter ainsi l'application. Si cette circulaire a provoqué une réelle mobilisation des services de l'État, la diffusion de la doctrine administrative n'a pas permis d'assurer une application homogène de ces dispositions sur l'ensemble des départements français concernés. A la question posée par le ministère sur l'hétérogénéité des modalités de leur application par les services de l'État dans les différents départements concernés, question à l'origine du présent audit, la mission répond clairement et sans ambiguïté par l'affirmative. Il y a effectivement une grande hétérogénéité d'un département à l'autre , d'une région à l'autre : ­ dans le niveau de mobilisation des services en fonction de la géographie, des enjeux, des acteurs, de l'histoire, y compris administrative ; dans les moyens et méthodes de travail développés (documents d'application de la loi Littoral, animation inter-services, coordination des actions avec les collectivités ; exercice du contrôle de légalité...) ; dans leur interprétation des dispositions (élaboration de doctrines locales et appréciation des situations au cas par cas). ­ ­ Mais, comme la mission s'est efforcée de le démontrer, ce grief d'hétérogénéité dans l'application des dispositions particulières au littoral trouve son origine tout autant dans l'esprit de la loi Littoral que dans une appropriation différenciée de la doctrine administrative diffusée en mars 2006 et complétée par la circulaire de juillet 2006. D'autres motifs y contribuent également, comme l'absence d'une vision stratégique partagée du devenir du littoral et l'insuffisance de pilotage des services de l'État sur cette politique d'aménagement spécifique, ou encore, la prédominance des politiques sectorielles et la faible traduction de ces dispositions particulières dans les documents de planification. Pour autant, la mission estime que l'objectif fixé aux services par la circulaire de mars 2006, à savoir la sécurisation juridique des documents d'urbanisme locaux, garde toute sa pertinence. L'élaboration d'une nouvelle circulaire le confirmant lui parait donc opportune, sous réserve de tirer les enseignements des constats dressés par la mission d'audit auprès des services. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 94/137 Le premier constat dressé par la mission d'audit porte sur l'absence de plan d'accompagnement de cette circulaire permettant d'assurer aux services l'appui indispensable à sa mise en oeuvre. Aucun dispositif n'a été défini par l'administration centrale pour en suivre la bonne application. Cette absence d'accompagnement a été d'autant plus mal ressentie par les services que, s'agissant d'une loi interprétative, ils ont été confrontés à de nombreuses difficultés d'application. Toute nouvelle instruction aux services devrait donc être précédée par un travail préparatoire au niveau central associant les services déconcentrés et accompagnée d'un plan d'action pour accompagner sa mise en oeuvre. Le deuxième constat concerne la fragilité -et les limites- de la doctrine administrative en la matière. Au-delà des éléments discutés et discutables de la doctrine diffusée en mars 2006, qui nécessiterait en tout état de cause une actualisation au regard notamment de la jurisprudence la plus récente, demeureront les interprétations de cette doctrine, l'appréciation au cas par cas des situations locales, et surtout, l'interprétation souveraine du juge administratif. Pour faire face à ce constat et développer les argumentaires et les justifications nécessaires, il conviendrait que l'administration centrale organise un appui juridique aux services déconcentrés et les forme à l'application d'un droit plus appréciatif que normatif. Le troisième constat est qu'il paraît difficile de mobiliser les services de l'État dans la durée sans leur apporter une vision stratégique de la politique publique qu'ils sont chargés de mettre en oeuvre. Or les services ne disposent pas aujourd'hui d'une vision d'ensemble sur le devenir du littoral. L'élaboration de la stratégie nationale pour la mer et le littoral pourrait offrir ce cadre. C'est à partir de ces constats que la mission a structuré les recommandations émises dans le présent rapport sous la forme d'un plan d'action qui s'articule autour de trois grands axes : ­ Affirmer le rôle majeur des schémas de cohérence territoriale (SCoT) dans l'application de dispositions particulières au littoral (élaboration des dossiers d'association des services de l'Etat sur la base d'une doctrine administrative réactualisée) et renforcer le rôle d'encadrement des documents de rang supérieur (DTA, SAR) quand ils existent ; Assurer la sécurisation juridique de l'application des dispositions particulières au littoral en engageant une analyse systématique de compatiblité des plans locaux d'urbanisme (méthode et leviers d'action) ; ­ Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 95/137 ­ Organiser le pilotage du plan d'action et l'animation des services de l'État en charge de le mettre en application. Ce plan d'action ne saurait toutefois répondre à l'attente des services de disposer d'une vision stratégique de l'aménagement littoral à long terme, leur permettant d'inscrire leurs actions dans une politique publique clairement identifiée et porteuse des principes du développement durable. Il s'agit là d'un autre chantier, autrement plus complexe, qui reste à ouvrir par l'administration centrale en mobilisant toutes ses composantes. La mission propose cependant de l'intégrer dans le plan d'action comme quatrième grand axe, même si son contenu comme son échéance en font un axe à part. ­ Redonner une lisibilité d'ensemble à la politique d'aménagement du littoral, en mettant en perspective les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme avec la future stratégie nationale de la mer et du littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 96/137 Recommandations à l'administration centrale pour la mise en place d'un plan d'action relatif à l'application des dispositions particulières au littoral Axe 1 ­ Replacer la planification territoriale au coeur de la politique d'aménagement du littoral 1.1 Affirmer le rôle majeur des schémas de cohérence territoriale littoraux (SCoT) dans la déclinaison territoriale des dispositions particulières au littoral , en y intégrant, en tant que de besoin, un chapitre schéma de mise en valeur de la mer et renforcer le rôle d'encadrement des documents d'aménagement de rang supérieur quand ils existent (DTA, SAR119) 1.1.1 Objectif : traduire à la bonne échelle particulières au littoral, et plus particulièrement pour : les dispositions - concevoir un aménagement en profondeur du développement urbain et économique, y compris touristique (identification d'une armature urbaine reposant sur une typologie des espaces urbanisés composés de pôles principaux (agglomérations) et de pôles secondaires (villages) et l'identification des grandes coupures d'urbanisation ; - identifier les espaces proches du rivage, les secteurs d'érosion comme les grands écosystèmes de leur façade littorale, les espaces remarquables ou caractéristiques ; - organiser les activités nécessitant la proximité de la mer (en lien avec le volet SMVM) et le maintien des activités agricoles, pastorales ou forestiers dans les communes littorales ; - déterminer, si nécessaire, des unités géographiques littorales cohérentes « participant aux équilibres économiques et écologiques littoraux » où s'appliqueraient les dispositions particulières ; - mettre en cohérence les politiques sectorielles par une approche transversale. 1.1.2 Moyens : : veiller à la compatibilité des ces documents avec les dispositions particulières au littoral et pour cela : - donner des instructions aux préfets pour coordonner ce chantier et celui de la mise en compatibilité des SCoT avec les lois Grenelle, en rappelant l'enjeu de la compatibilité « limitée » ; 119 En prenant en compte, si possible, les perspectives de l'acte III de la décentralisation en ce domaine. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 97/137 - s'appuyer sur la démarche d'évaluation environnementale des SCoT pour analyser les justifications et motivations des choix d'aménagement retenus par le maître d'ouvrage, notamment la fixation de la capacité d'accueil des espaces urbanisés et à urbaniser littoraux au regard de la loi Littoral ; - intégrer dans le dispositif de suivi de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers un suivi spécifique pour les communes littorales (bande littorale et espaces proches du rivage) ; - renforcer, si nécessaire, le caractère obligatoire de la traduction de l'ensemble des dispositions dans les SCoT littoraux. 1.2 Actualiser et compléter la doctrine administrative sur l'application des dispositions particulières au littoral, la tenir à jour 1.2.1 Objectifs : assurer une lecture nationale des principes et notions portées par les dispositions particulières au littoral tout en facilitant leur interprétation par les services déconcentrés pour : - clarifier ce qui relève de la doctrine nationale et des adaptations locales ; - conseiller les collectivités et procéder aux analyses locales au cas par cas sur la base de mêmes référentiels nationaux ou de chartes locales validées par l'administration centrale. 1.2.2 Moyens : mettre en place un groupe de travail au niveau national comprenant des représentant de DREAL, de DDTM et de DDT concernées, des juristes spécialisés. - s'appuyant sur la jurisprudence la plus récente, - reprenant le travail réalisé au niveau territorial (guides, référentiels, chartes...) pour valoriser le travail des services mais aussi pour l'harmoniser en tant que de besoin. 1.3 Procéder à l'actualisation et à l'harmonisation des documents et outils d'application de la loi Littoral en clarifiant au préalable leur nature et leur contenu 1.3.1 Objectif : disposer au niveau territorial (départemental ou interdépartemental) des éléments de connaissance et d'analyse permettant de fonder la position de l'État pour : - produire des « porter à connaissance » et des notes d'enjeux argumentées aux collectivités dans le cadre de l'association des services à l'élaboration des documents d'urbanisme ; - veiller à la compatibilité des documents d'urbanisme avec les dispositions particulières au littoral et, le cas échéant, assurer cette compatibilité dans le cadre du contrôle de légalité ou de tout autre moyen. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 98/137 1.3.2 Moyen : dans le cadre du groupe de travail précité, préciser les caractéristiques de ces documents et outils qui pourront, une fois définies, prendre la forme d'une note technique annexée à la future circulaire adressée aux services pour préciser : - la nature juridique des documents (documents de référence), - leur contenu (cartes et rédactionnel), - le champ géographique et l'échelle, - les modalités de leur élaboration, - les modalités de leur communicabilité aux collectivités et aux tiers. 1.4 Engager une évaluation des actions menées dans le cadre de l'atelier national du littoral 1.4.1 Objectif : tirer les enseignements des expériences locales auprès des collectivités locales concernées mais également des services. 1.4.2 Moyen : solliciter une mission auprès du CGEDD (programme 2013). Axe 2 - Assurer la sécurisation juridique de l'application des dispositions particulières au littoral en engageant une analyse systématique de compatibilité des POS/PLU 2.1 A l'issue des groupes de travail, préparer une nouvelle circulaire interministérielle (METL - MEDDE ­ MI) aux préfets, reprenant tout à la fois les enjeux portés par la loi Littoral et la priorité d'action que constitue la sécurisation juridique de son application 2.1.1 Objectif : faire de l'application des dispositions particulières au littoral une action prioritaire des DDTM - bien expliciter l'objectif recherché (sécurisation des actes individuels) et fixer un calendrier ; - préciser la démarche à mener vis-à-vis des collectivités locales et les leviers d'action à mobiliser par les services pour parvenir à l'objectif fixé ; - présenter les modalités d'appui mis en place au niveau central, notamment sur le plan juridique, et le rôle attendu du niveau régional ; - définir un dispositif de suivi et d'évaluation de sa mise en oeuvre. 2.1.2 Moyens : - faire une note technique sur les différents leviers d'action de l'État permettant aux préfets d'engager la mise en compatibilité des Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 99/137 documents d'urbanisme, note à mettre également en annexe de la circulaire ; - engager parallèlement une réflexion sur l'exercice du contrôle de légalité des documents d'urbanisme avec le ministère de l'Intérieur (DGCL) - introduire une procédure d'évaluation obligatoire des PLU tous les 6 ans dont le bilan pourrait conduire à une obligation de révision (à l'instar de ce qui est prévu pour les SCoT) et prévoir, le cas échéant, un retour au RNU (chantier législatif). 2.2 Mettre en place au niveau central une gestion stratégique du contentieux relatif aux dispositions particulières au littoral 2.2.1 Objectifs : - actualiser la doctrine administrative, - analyser les motifs d'incompatibilité posés par certains types de projets au regard de l'ensemble des législations et réglementations auxquels ils sont soumis et faire arbitrer les choix prioritaires au niveau gouvernemental (préférer les procédures dérogatoires, y compris pour les autres législations, à des modifications remettant en cause les principes de la loi Littoral) ; - apporter, en tant que de besoin, un appui juridique aux services dans le traitement des dossiers. 2.2.2 Moyens : - à définir en liaison avec la direction compétente (DAJ), - solliciter également la juridiction administrative pour examiner la possibilité d'accéder à ses bases de données. Axe 3 - Organiser le pilotage du plan d'action et l'animation des services en charge de le mettre en oeuvre 3.1 Nommer un chef de projet auprès du DGALN 3.1.1 Objectifs : - élaborer le plan d'action et son calendrier, - mettre en place les différents groupes de travail et la veille juridique (jurisprudence), - animer les services déconcentrés et organiser le soutien juridique, - définir et gérer le dispositif de suivi et d'évaluation, - participer à la réflexion transversale mer/littoral au niveau central (SNML et DSF, SMVM, expérience pilote DTADD Aquitaine...). 3.1.2 Moyens : - affecter à cette mission un cadre de haut niveau, - lui donner une feuille de route. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 100/137 3.2 Informer parallèlement les principaux acteurs de la démarche et les associer à sa mise en oeuvre 3.2.1 associer le ministère de l'Intérieur (DGCL) à l'élaboration du plan d'action et veiller à l'information préalable des préfets (réunion des préfets) ; 3.2.2 consulter le Conseil national de la mer et du littoral (CNML) et les grandes associations d'élus en rappelant les compétences respectives des collectivités locales et de l'État pour l'application des dispositions particulières au littoral. 3.3 Apporter un soutien méthodologique aux services et organiser le travail en réseau 3.3.1 au niveau national - participer à l'animation du réseau « aménagement/urbanisme » - créer et animer un forum « Questions/Réponses » en lien avec les référents régionaux « littoral » ; - organiser des rencontres nationales (ou inter-régionales) régulières au moins durant le plan d'action 3.3.2 au niveau régional (ou inter-régional) - demander la désignation d'un référent régional (ou inter-régional) en DREAL sur la thématique de l'aménagement littoral en charge d'animer le réseau des DDTM (et des DDT « grands lacs ») et de suivre le plan d'action à cet échelon ; - faire valider en comité de l'administration en région (CAR) la déclinaison régionale (on inter-régionale) du plan d'action et en suivre au moins une fois par an la mise en oeuvre ; - présenter en CAR un bilan annuel du contentieux lié à l'application de la loi Littoral. 3.3.3 au niveau départemental (ou interdépartemental) - élaborer ou actualiser les documents d'application de la loi Littoral ; - informer l'association départementale des maires (ADM) et autres parties prenantes de la démarche engagée au niveau local ; - engager, si ce n'est fait, l'analyse des risques juridiques des POS/PLU au regard des dispositions particulières au littoral ; - organiser le contrôle de légalité des documents d'urbanisme « en continu » (mesurer les avantages et inconvénients de le confier aux DDT ou aux services de préfecture, organiser les retours vers les DDT) ; Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 101/137 - organiser le contrôle de légalité des actes individuels dans les communes littorales avec transmission obligatoire des actes en préfecture pour les communes en assurant l'instruction (a minima pour les actes délivrés dans la bande littorale et les espaces proches du rivage lorsqu'ils sont délimités) ; - veiller au décloisonnement du fonctionnement des services au niveau interne en DDTM (services du siège/délégation à la mer et au littoral/unités territoriales) et à la coordination inter-services (DDT/préfectures), y compris avec l'échelon régional (DREAL, DIRM). Axe 4 - Redonner une lisibilité à la loi Littoral en mettant en perspective les dispositions particulières avec la future stratégie nationale de la mer et du littoral 4.1 Relancer la politique spécifique d'aménagement du littoral dans le cadre de la stratégie nationale de la mer et du littoral (SNML) 4.1.1 en veillant à développer une vision stratégique de leur devenir (travaux de prospective des futurs documents stratégiques de façade ­ DSF) ; 4.1.2 en y associant les collectivités territoriales au premier rang desquelles les régions mais aussi les autres parties prenantes. 4.2 Promouvoir les démarches de gestion intégrée des zones côtières (GIZC) 4.2.1 en clarifiant la nature différente de cette démarche par rapport à la planification ; 4.2.2 en veillant à mieux associer les services déconcentrés (préfets) aux procédures d'appels à projets. 4.3 Suivre la démarche pilote de la directive territoriale d'aménagement et de développement durable du littoral aquitain et du massif forestier de Gascogne (DTADD) pour en tirer les enseignements, notamment sur : 4.3.1 la réalisation de documents de référence co-construits avec les collectivités ; 4.3.2 la mise en place d'observatoires du littoral (indicateurs et méthodologie). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 102/137 4.4 Veiller à ce que les documents d'aménagement qui pourraient résulter du futur chantier de décentralisation soient compatibles avec la loi Littoral. Annick HELIAS Bertrand CREUCHET Aude DUFOURMANTELLE Membre Permanent Coordonnatrice Françoise GADBIN Inspecteur général de l'administration du développement durable Cyril GOMEL Architecte urbaniste en chef de l'Etat Bernadette VANDEWALLE Architecte urbaniste en chef de l'Etat Ingénieur des ponts, des eaux et des forêts Attachée principale d'administration de l'équipement Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 103/137 Annexes 1 ­ Lettres de mission 2 - Note de cadrage et bibliographie 3 ­ Liste des auditeurs et des services audités 4 ­ Note relative aux moyens de l'Etat pour s'opposer aux PLU et aux autorisations contraires à la loi Littoral 5 ­ L'application de la loi Littoral en Bretagne (synthèse) 6 ­ Les grands lacs de plus de 1000 hectares (synthèse) 7 ­ Glossaire des sigles et acronymes Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 105/137 1. Lettres de mission Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 107/137 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 108/137 2. Note de cadrage Note de cadrage de l'audit sur l'application de la loi littoral par les services de l'État (22 juin 2011) 1 - Contexte de l'audit 1.1 - Evolution de la loi Littoral Bien qu'ayant bénéficié d'un large consensus parlementaire lors de son vote en 1986, la loi littoral venant à l'encontre de nombreux intérêts particuliers, a été mise en oeuvre de façon progressive. Depuis quelques années, sous la pression d'une demande sociale forte, sa mise en oeuvre se précise et s'intensifie (circulaire du 14 mars et du 20 juillet 2006). Élaborée à la suite des 1ères lois de décentralisation de 1983, elle définit une politique nationale spécifique d'aménagement, de protection et de mise en valeur du littoral qui repose sur quelques grands principes : ­ ­ ­ ­ préserver les espaces rares et sensibles, gérer de façon économe l'espace des communes littorales, ouvrir plus largement l'espace littoral au public, y accueillir en priorité les activités dont le développement est lié à la mer. Ces principes sont traduits dans la loi par un certain nombre de dispositions d'application. Chaque littoral ayant ses particularités, il revient en premier lieu aux collectivités territoriales120 de mettre en oeuvre ces principes et dispositions dans leurs documents d'urbanisme, l'ensemble des communes littorales devant normalement disposer de tels documents. Leurs actions doivent être coordonnées avec celles de l'Etat. Pour en suivre l'application, les progrès réalisés comme les difficultés rencontrées, la loi prévoit que le gouvernement soumette régulièrement des rapports au Parlement. La loi relative au développement des territoires dite loi DTR du 23 février 2005 précise que ces rapports seront désormais réalisés tous les 3 ans. La plupart des articles de la loi littoral de 1986 sont aujourd'hui codifiés mais éclatés dans plusieurs codes. Certains de ces articles ont par ailleurs été soit modifiés, soit même abrogés. De ce fait la « lecture » de la loi littoral qui n'existe plus en tant que telle (seuls demeurent quelques articles), est devenue d'autant plus complexe. Par ailleurs, la loi n'ayant pas toujours été mise en oeuvre par les autorités compétentes dans leurs documents d'urbanisme, ces dispositions ont fait l'objet d'une jurisprudence abondante, créant des constantes de position mais en maintenant de nombreuses incertitudes.121 120 121 cf. article 1 de la loi et circulaire du 14 mars 2006. C'est le cas notamment avec le L.146-4-1 toute construction doit être en continuité des agglomérations et villages. S'est ainsi posé la question de : Qu'est-ce qu'un village ? qu'est-ce qu'une agglomération ? la jurisprudence Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 109/137 La loi dite de Développement des Territoires Ruraux du 23 février 2005 participe au toilettage de la loi littoral avec notamment des modifications sur les espaces proches du rivage qui ont précisé des assouplissements sur les installations agricoles... Enfin en 2006 il y a eu une nouvelle mobilisation des services de l'État au travers des circulaires du 10 Mars et 20 Juillet qui ont relancé l'action des services pour l'application de la loi littoral en apportant des éléments de cadrage réactualisés et en insistant sur la nécessaire mise en compatibilité des documents d'urbanisme. 1.2 - Évolution du contexte juridique et institutionnel D'autres textes législatifs nationaux (la loi SRU de 2000, les lois "Grenelle" de 2009 et 2010, la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche de 2010) et communautaires (la DCE) qui ne sont pas spécifiques au littoral ont intégré dans leur dispositif des mesures venant compléter ou modifier celles de la loi littoral. Certains sont venus renforcer la loi littoral en confortant son esprit initial : ­ ­ ­ Une recommandation du Parlement européen et du Conseil de 2002, sur la base d'un programme de démonstration, préconise de développer une gestion intégrée des zones côtières (GIZC). Plusieurs appels à projets de la DATAR se sont efforcés de vulgariser cette démarche proche de celle d'un agenda 21 local. En 2009, le Grenelle de l'environnement puis le Grenelle de la mer ont fait le constat que la loi Littoral était insuffisamment appliquée et que le manque de coordination des acteurs publics, notamment communaux, constituait un handicap pour en assurer une gestion durable. Les lois Grenelle apportent des éléments de réponse, en renforçant le rôle des schémas de cohérence territorial (SCOT), en encourageant l'élaboration de PLU intercommunaux et en mettant en place les conditions d'une gestion intégrée de la mer et du littoral. L'article L110-1 du code de l'environnement, dans sa version modifiée par la loi Grenelle 2 (art 253), précise que « la cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et les générations » constitue l'une des cinq finalités de l'objectif de développement durable. Il conforte la volonté du législateur, au travers de la loi Littoral, d'assurer le libre accès aux rivages, d'ouvrir certains espaces remarquables littoraux au public, de maintenir sur cet espace convoité des activités traditionnelles, y compris des activités touristiques comme le camping même si celles-ci doivent être encadrées. D'autres textes sont venus réinterroger la manière dont la loi est mise en oeuvre : ­ ­ La définition d'une stratégie nationale (collectivités territoriales et État) pour la gestion du trait de côte répondant à un engagement du Grenelle invite les autorités locales à la décliner au niveau d'unités littorales cohérentes ; le guide publié par le ministère en 2010 vise à leur apporter la méthodologie nécessaire. Le plan national de prévention des submersions marines et crues rapides, arrêté en mars 2011 à la suite de la tempête de Xynthia et des inondations catastrophiques du Var, comprend une soixantaine d'actions visant notamment à mieux maitriser l'urbanisation dans les zones dangereuses et à renforcer la l'aborde à travers la densité significative de construction. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 110/137 fiabilité des digues dans le cadre de plans d'action pour la prévention des inondations (PAPI) dans les territoires à risques importants. Enfin, la jurisprudence continue d'éclairer et de préciser les conditions d'application de la loi sur de très nombreux points. 2 - Objet de la commande Alors que les pressions restent fortes sur le littoral, le MEDDTL a souhaité connaître la manière dont les services veillent à l'application de la loi littoral (pour les dispositions relevant du code de l'urbanisme). Cette démarche d'évaluation est à distinguer de la réalisation d'un prochain bilan de la loi qui devra être mené par l'État pour être présenté au Parlement. De nombreux acteurs en effet dénoncent encore la grande hétérogénéité de son application sur le terrain, d'un département, d'une région, à l'autre. Aussi, le ministère souhaite-t-il que cet audit concerne l'ensemble des départements littoraux afin que soit dégagée une vision complète des modalités d'application des dispositions de la loi littoral. 3 - Champ et périmètre de l'audit 3.1 - Le champ de l'audit La loi littoral de 1986 aborde de nombreuses thématiques regroupées sous quatre titres. ­ ­ ­ ­ L'aménagement et la protection du littoral La gestion des domaines publics maritime et fluvial Les dispositions spécifiques aux DOM Dispositions diverses Suite aux entretiens avec les différentes directions de l'administration centrales concernées, la mission limitera ses investigations, dans le cadre du présent audit, aux « dispositions particulières au littoral » du code de l'urbanisme122 relatives à l'aménagement et à la protection du littoral, à savoir prioritairement les dispositions fixant les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres autour des principaux concepts fixés par la loi et les textes administratifs d'application : ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ la capacité d'accueil, les coupures d'urbanisation l'urbanisation en continuité les espaces proches du rivage la bande littorale des 100m. Les espaces naturels remarquables les accès au littoral (servitude, nouvelles routes...) 122 Code l'urbanisme ­ Livre premier- Titre IV - Chapitre VI (L.146-1 à L.146-9 et R.146-1 à R.146-4). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 111/137 ­ les aménagements portuaires de commerce et de plaisance ainsi que les aménagements liés aux activités économiques à proximité de l'eau, les campings, les constructions agricoles... La mission intégrera cependant dans son questionnement les autres dispositions relevant de la loi littoral pouvant conditionner cette utilisation spatiale (comme les systèmes d'assainissement). Elle interrogera également les services sur les autres thématiques pouvant soulever des difficultés particulières d'application, ainsi que les autres dispositions juridiques interférant avec la loi littoral, notamment un certain nombre de directives européennes comme la directive cadre « stratégie pour le milieu marin » et les lois Grenelle (généralisation des ScoT, gestion intégrée de la mer et du littoral...). Par la suite, il sera examiné comment la mission d'audit pourrait se prolonger dans une seconde phase, sur d'autres volets relatifs à la loi littoral (notamment la gestion du domaine public maritime). 3.2 - Le périmètre Le ministère souhaitant disposer d'une vision globale de la manière dont les dispositions de la loi littoral sont appliquées par les services sur l'ensemble du territoire, l'ensemble des départements littoraux et lacustres au sens de la loi littoral seront concernés par l'audit. Les DOM seront analysés spécifiquement dans un cadre différent par la MIGT OutreMer. De même la MIGT 6 analysera l'application de la loi littoral à un lac alpin 123 par audition des services compétents( DTT et DREAL) 4 - Le questionnement Les investigations qui seront menées auprès des services de l'État (préfets, DREAL, DDTM, DIRM) devront mettre en lumière l'approche menée par les services au regard de l'objectif initial de la loi et le rôle assuré par ces services qu'il soit simple mise en oeuvre de procédures, vision stratégique de l'évolution du littoral, ou autre. Ces investigations porteront plus particulièrement sur les points suivants : 1. L'analyse préalable des spécificités locales (géographiques, institutionnelles, socio-économiques, environnementales, politique...) 2. L'existence d'une vision stratégique de l'État concernant l'évolution du littoral et prenant en compte les objectifs du développement durable. 3. L'organisation et les méthodes de l'État pour l'application de la loi littoral (a priori dans le cadre notamment du porter-à-connaissance et a posteriori dans le cadre du contrôle de légalité).. 4. L'élaboration de documents de références et d'outils de connaissance pour son application. 5. Les actions significatives engagées par le service (synthèse) 6. Les avancées constatées et les principales difficultés rencontrées. 123 De plus de 1000ha Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 112/137 Rapport n°007707-01 5 ­ Méthode et organisation de l'audit 5.1 - Méthode ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ Rassemblement des textes actualisés (consolidation des article de la loi de 1986 avec repérage des modifications, annulations et éventuels ajouts ; décrets d'application et circulaires) Élaboration de la bibliographie correspondante (bilans antérieurs de la loi , rapports du Grenelle de la mer,..) Entretiens avec les directions d'administration centrale ( DAC) concernées. Élaboration d'un cahier des charges et d'un guide d'entretien destiné aux auditeurs Réunion de coordination avec les équipes d'audit Réalisation de rapports d'audit des services par les équipes d'auditeurs Réunion de restitution avec les auditeurs Synthèse des rapports pour élaboration d'un document global par le comité de pilotage 5.2 - Organisation ­ Le groupe de pilotage, coordonné par Gérard RUIZ. Il est composé de : Gérard Ruiz, Bertrand Creuchet, Annick Hélias, Françoise Gadbin, Aude Dufourmantelle, Bernadette Vandewalle, rédacteurs du rapport de synthèse Il rencontrera des personnalités concernées par l'audit et extérieures aux services en tant que de besoin (DAC, CGDD, Conservatoire du littoral,...) Groupe d'audit : Pour les MIGT, sont déjà désignés : Migt1 : C. Andarelli, B. Vandewalle, MIGT 3 : P. Puech et F. Gadbin, MIGT 4 : H. Maillot, P. Garin, Migt 5 : M. Wepierre, M. Bensussan, MIGT 6 : J. Lalot, Migt 2: D.Burette ­ ­ Les présidents de section seront également contactés pour solliciter des candidatures. 6 - Calendrier Année 2011 ­ ­ ­ Mars/avril : élaboration par le comité de pilotage du cahier des charges de l'audit et du questionnement auprès des services. 18 mai : réunion de l'ensemble des auditeurs pour examiner le projet de cahier des charges et cadrer les audits de terrain pour faciliter la cohérence des synthèses. Deuxième partie de juin à fin octobre : conduite des entretiens dans les services et rapports correspondants. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 113/137 ­ ­ Novembre/Décembre : réunion de restitution avec l'ensemble des auditeurs pour analyser les retours d'audit et débattre du pré-rapport. A partir de Janvier 2012 - rapport de synthèse. 7 ­ Listes 7.1 - Liste des textes législatifs et réglementaires relatifs à l'application de la loi littoral (liste non exhaustive) I ­ Textes législatifs et réglementaires Loi n°86-2 du 3 Janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral consolidée au 01/12/2010 Articles intégrés dans le code de l'urbanisme : - L 146-1 à L 146-9 - R 146-1 sur les critères des espaces remarquables - R 146-2 sur liste des aménagements autorisés - L 156-1 à L 156-3 sur les DOM - L 160-6 et L 160-7 Articles intégrés dans le code de l'environnement - L 219 sur la gestion intégrée de la mer et du littoral - L 321-2 - L 361-1 - L 411 et L 414 sur la protection des espèces et des habitats - R 414-2 à R 414-18 sur les sites Natura 2000 (en mer) Articles intégrés dans le code de la santé ( sur la qualité des eaux) Lois prévoyant des dispositions particulières au littoral : - Loi Bosson du 09/02/1994 sur les STEP et l'urbanisation proche du rivage dans les DOM - Loi n°95-115 du 4 Février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. - Loi LOA du 09/07/1999 : dérogations pour les installations agricoles. - Loi DTR du 23/02/2005 sur l'urbanisation des rives des rivières et estuaires et limitation de l'application de la loi littoral sur les lacs de montagne de plus de 1000 hectares (art.187 modifiant l'art L 145-1 du CU)). - Loi SRU du 13/12/2000 modifiant l'article L 146-6-1 du CU. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 114/137 - Loi Grenelle 1 du 03/08/ 2009 - Art 35 sur une gestion intégrée et concertée de la mer et du littoral avec une nouvelle gouvernance. - Loi Grenelle 2 du 12/07/2010 portant engagement national pour l'environnement ­ Art. 166 à 168 sur la stratégie nationale pour la mer et le littoral et les documents stratégiques par façade et la concertation avec tous les acteurs. II - Décrets et circulaires - Décret n°89-694 du 20 Septembre 1989 portant sur l'application de dispositions du code de l'urbanisme particulière au littoral et modifiant la liste des catégories d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux devant être précédés d'une enquête publique. - Décret du 20/09/1989 et du 29/03/2004 fixant la liste des communes littorales - Décret n°2004-308 du 29 Mars 2004 relatif aux concessions d'utilisation du domaine public maritime en dehors des ports. - Décret n°2004-309 du 29 Mars 2004 relatif à la procédure de délimitation du rivage de la mer, des lais et relais de la mer et des limites transversales de la mer à l'embouchure des fleuves et rivières ( liste des communes littorales). - Décret n°2004-310 du 29 Mars 2004 relatif aux espaces remarquables du littoral. - Décret n°2007-1586 du 8 Novembre 2007 relatif aux schémas de mise en valeur de la mer et modifiant le décret n°86-1252 du 5 décembre 1986 relatif au contenu et à l'élaboration des schémas de mise en valeur de la mer. - Décret n° 2008-487 du 15 mai 2008 relatif aux sites Natura 2000 en mer - Décret n° 2011-492 du 05 mai 2011 relatif au plan d'action pour le milieu marin - Circulaire du 14 Mars 2006 (MTETM) relative à l'application de la loi littoral et à l'urbanisation des communes littorales - Circulaire du 20 Juillet 2006 (METETM et Ecologie et développement durable) relative à l'application de la loi littoral et la préservation de l'environnement - Circulaire interministérielle n°2007-17 du 20 Février 2007 relative à l'intervention du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres sur le domaine public maritime ­ élaboration de la stratégie nationale et géographique d'intervention du Conservatoire du littoral sur le domaine public maritime en concertation avec les services de l'Etat concernés. - Circulaire du 15 Juin 2009 relative à la réforme de l'administration territoriale de la mer et du littoral. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 115/137 III ­ Directives communautaires - Directive Oiseaux - avril 1979 - Directive Habitats, Faune et Flore - mai 1992 - Directive Eau - 23 octobre 2000 ­ intégrée en droit français le 21/04/2004 et loi du 30/12/2006 sur l'eau et le milieu aquatique - Recommandation du Parlement européen et du Conseil du 30 Mai 2002 relative à la mise en oeuvre d'une stratégie de gestion intégrée des zones côtières en Europe. Mis en oeuvre en France lors du CIM du 29/04/2003 - Directive sur les eaux de baignade en mer ­ 15 février 2006 - Directive du 17 juin 2008 sur la stratégie pour le milieu marin 7.2 - Bibliographie de référence - Rapports et Audits - CGPC- Mission d'expertise relative aux difficultés liées à l'application de la loi littoral n°86-2 du 3 Janvier 1986 - CGPC- Rapport sur les conditions d'application de la loi littoral -15 juillet 2000 - Bilan loi littoral Septembre 2007 - Audit thématique d'initiative locale DDE 2A et DDE 2B - Avril 2008 : respect des dispositions du code de l'urbanisme applicables au littoral - Audit thématique d'initiative local : Gestion stratégique du littoral dans les régions Bretagne et Pays de Loire ­ janvier 2010 - Rapport final du 23 Juin 2010 COMOP 6 : Comité Aménagement, Protection et Gestion des espaces littoraux opérationnel - Audit d'initiative locale MIGT 5- Méditerranée - Février 2010 sur la gestion et la conservation du domaine public maritime - Rapport d'évaluation Grenelle 2 : mer Octobre 2010 pp118 à 123 - CGEDD ­ Mer et littoral : vers une planification stratégique ­ Décembre 2010 - Rapport d'étape Grenelle mer Février 2011 - Atelier littoral Bretagne : plaquettes portant sur les articles L 146-4-I/II/III du code de l'urbanisme (rapport DREAL Bretagne) - DATAR ­ Enquête auprès des SGAR sur le lien Terre-mer 7.3- Liste des services à auditer (cf. annexe suivante) Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 116/137 3. Liste des auditeurs et des services audités Services auditésauditeurs-dates des audits Services audités Région Nord Pas-deCalais MIGT1 DREAL Nord/Pas de Calais DIRM Auditeurs Dates des audits Gérard RUIZ Bernadette VANDEWALLE sept 2011 62 59 · · Nord DDTM du Nord DDTM Pas de Calais Préfecture ( SG et contrôle de légalité) Catherine ANDARELLI Bernadette VANDEWALLE Gérard RUIZ, Bernadette VANDEWALLE 01/07/11 Sept 2011 Pas-de-Calais Région Picardie MIGT 1 80 · Somme DDTM Somme DREAL Picardie Synthèse commune Haute et Basse Normandie DIRM Manche Est Mer du Nord DREAL Haute Normandie DDTM DDTM Synthèse commune Haute et Basse Normandie Bernadette VANDEWALLE, Catherine ANDARELLI Guy BARREY Daniel BURETTE Vincent ALLAIS 01/07/11 Région HauteNormandie MIGT 2 Déc 2011 76 · · Seine Maritime Eure Région BasseNormandie MIGT 2 27 Guy BARREY Daniel BURETTE Vincent ALLAIS Déc 2011 14 · · Calvados Manche DDTM et Préfecture DDTM Préfet Région Bretagne, préfet d'Ile et Vilaine DREAL DIRMO DDTM Préfet Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Françoise GADBIN Annick HELIAS Patrick PUECH 27/10/11 27/10/11 10/11/11 4 et 5 nov 2011 Région Bretagne MIGT 3 22 50 · Cote d'Armor Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 117/137 29 · Finistère DDTM Préfet et Préfecture( SG et contrôle de légalité) Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Françoise GADBIN Patrick PUECH Annick HELIAS Françoise GADBIN Patrick PUECH Françoise GADBIN Patrick PUECH Françoise GADBIN Patrick PUECH Aude DUFOURMANTELLE Henri MAILLOT 24 et 25 octobre 2011 5 · Ille-et-Vilaine DDTM sous Préfet Saint Malo 26/10/11 56 · Morbihan DDTM Préfet 7 nov 2011 Région Pays de Loire MIGT 3 Préfet de région Pays de Loire, préfet de Loire Atlantique DREAL DDTM 9 nov 2011 9 nov 2011 8 nov 2011 44 · Loire Atlantique Vendée · DDTM Préfet Région PoitouCharentes MIGT 4 Synthèse commune PoitouCharentes, Aquitaine Octobre 2011 17 · CharenteMaritime DDTM Préfecture (contrôle de légalité) Henri MAILLOT Philippe GARIN Madeleine GRANCHER Henri MAILLOT 20 sept 2011 Région Aquitaine MIGT 4 Synthèse commune PoitouCharentes, Aquitaine DDTM Octobre 2011 09/08/11 33 · Gironde Gérard RUIZ Henri MAILLOT Philippe GARIN Henri MAILLOT Philippe GARIN Henri MAILLOT Philippe GARIN Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Michel WEPIERRE Xavier LAFON 40 · Landes DDTM 20 juillet 2011 14 et 15 sept Oct 2011 Déc 2011 64 · PyrénéesAtlantiques DDTM Sous préfecture DREAL Lang Roussillon. DIRM Méditerranée Région LanguedocRoussillon MIGT 5 65 · PyrénéesOrientales DDTM Préfet et préfecture ( dir.des CL Oct 2011 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 118/137 et contrôle de légalité) 11 · Aude DDTM Contrôle de légalité DDTM Préfecture ( SG et CL) Sous préfecture Béziers DDTM Préfecture : contrôle de légalité Synthèse commune L-Rouss et PACA DIRM méditerranée DREAL PACA DDTM dont chef unité légalité DDTM SG Préfecture DDTM Préfet Services préf dont contr. légalité DREAL Préfet de Région DDTM Préfecture : SG, SGAC, bu urba ( contrôle légalité) DDTM Préfet Préfecture ( dir CL, dir cab, stag ENA) Michel WEPIERRE Nov 2011 Oct 2011 34 · Hérault Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN 30 · Gard Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Nov 2011 Région ProvenceAlpes-Côte d'Azur MIGT 5 Déc 2011 13 · Bouches du Rhône Var Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Sept 2011 83 · Oct 2011 6 · AlpesMaritimes Oct 2011 Région Corse MIGT 5 Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Gérard RUIZ Mireille BENSUSSAN Oct 2011 2A · Corse du Sud Oct 2011 2B · Haute-Corse Oct 2011 Grands lacs Région Rhône Alpes MIGT 6 DREAL Rhône Alpes Bertrand CREUCHET Synthèse Grands lacs Sept 2011 73 · Savoie (Bourget) DDT Préfet contrôle de légalité DDT Préfet Bertrand CREUCHET Aude DUFOURMANTELLE Jean LALOT Bertrand CREUCHET Aude DUFOURMANTELLE 01/08/11 74 · Haute-Savoie (Annecy, Léman) 01/08/11 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 119/137 contrôle de légalité Jean LALOT Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Nov 2011 Région LanguedocRoussillon PACA MIGT 5 Synthèse lacs des départements méditerranéens 48 · Lozère (Naussac, Grandval) Var (Ste Croix) Alpes de Haute Provence (Ste Croix, SerrePonçon) Hautes-Alpes (SerrePonçon) DDT Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Déc 2011 83 · DDTM Oct 2011 4 · DDT Nov 2011 5 · DDT Mireille BENSUSSAN Michel WEPIERRE Nov 2011 Région ChampagneArdennes MIGT 7 10 · Aube (Temple, Orient) DDT Gérard RUIZ * Région FrancheComté MIGT 6 39 · Jura (Vouglans) DDT Gérard RUIZ * * échanges de courriers et courriels. Nombre de services audités et personnalités rencontrées : ­ départementaux : - 26 DDTM ( la totalité des DDTM concernées par la loi Littoral) et 6 DDT, - 11 préfets et 2 sous-préfets, - 14 services de préfecture dont ceux chargés du contrôle de légalité. régionaux : - 8 DREAL ( sur 11 concernées), - 3 DIRM, - 3 Préfets de Région, préfets de département. ­ Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 120/137 4. Note relative aux moyens de l'Etat pour s'opposer aux PLU et aux autorisations contraires à la loi Littoral Note DHUP (3 juillet 2012) 124 Les moyens mis à disposition du préfet par le code de l'urbanisme pour s'opposer à un PLU ou à un POS contraire à la loi Littoral : L'Etat dispose de deux moyens prévus par le code de l'urbanisme qui s'ajoutent au contrôle de légalité prévu par le code général des collectivités territoriales :125 - l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme, qui est en quelque sorte préventif car il s'utilise avant l'entrée en vigueur du PLU :126 Cet article concerne le caractère exécutoire du plan local d'urbanisme et vise uniquement les communes non couvertes par un SCOT. Dans cette hypothèse, et si le préfet estime que le document d'urbanisme n'est pas compatible avec la loi Littoral (ou avec une directive territoriale d'aménagement, qui peut préciser les modalités d'application de la loi Littoral), il peut notifier par lettre motivée à la commune ou à l'EPCI compétent les modifications qu'il estime nécessaires. Le PLU ne deviendra exécutoire qu'une fois les modifications intervenues. - l'article L. 123-14 du code de l'urbanisme, qui peut être utilisé lorsque le PLU est déjà entré en vigueur : Lorsque le document d'urbanisme n'est pas conforme à la loi littoral (ou avec une directive territoriale d'aménagement, qui peut préciser les modalités d'application de la loi Littoral), le préfet doit en informer la commune ou l'EPCI compétent et lui demander de modifier ou de réviser son document d'urbanisme. En cas de refus de l'autorité compétente, ou si la délibération correspondante n'est pas intervenue dans un délai de six mois à compter de la demande initiale du préfet, ce dernier peut engager et approuver la révision ou la modification à la place de la commune ou de l'EPCI. Les moyens mis à disposition du préfet pour s'opposer à une autorisation d'urbanisme contraire à la loi Littoral mais conforme au POS ou au PLU. Dans la lignée d'une jurisprudence constante, le conseil d'Etat a réaffirmé récemment que l'autorité administrative compétente doit refuser d'appliquer les dispositions illégales d'un document d'urbanisme et se référer aux règles d'urbanisme antérieures (Conseil d'Etat avis 9 mai 2005, M. Marangio, req. 277280). Le maire devra donc refuser de délivrer une autorisation de construire conforme à un document d'urbanisme en vigueur, lorsque les dispositions de ce document d'urbanisme permettant la 124 Note rédigée à la demande de la mission d'audit par A. Vandervorst (bureau de la législation de l'urbanisme QV4). Des dispositions similaires existent pour les SCOT aux articles L.122-12 et L.122-15-1 du code de l'urbanisme. les articles L.123-12 et L.123-14 s'appliquent aux PLU mais également aux POS en application de l'article L.123-19. 125 126 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 121/137 construction sont contraires aux dispositions de la loi littoral et ce quand bien même le document d'urbanisme n'aurait fait l'objet d'aucun recours direct. Il devra toutefois statuer sur l'autorisation de construire au vu des règles d'urbanisme immédiatement antérieures. Lorsqu'un maire délivre une autorisation de construire illégale dans cette hypothèse, le préfet est donc fondé à utiliser les divers instruments dont il dispose dans le cadre du contrôle de légalité (recours gracieux, déféré préfectoral, référé suspension préfectoral127). 127 Ce référé particulier est prévu à l'article L.554-1 du code de justice administrative et a comme particularité de ne pas nécessiter la démonstration de l'urgence, par exception aux règles applicables en matière de référé. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 122/137 Rapport n°007707-01 5. L'application de la loi Littoral en Bretagne (synthèse) Une expérience à partager... MIGT 3 (juin 2012) Cette présente note décrit l'expérience bretonne et explicite la manière dont les services de l'État en région se sont saisis de la question relative à l'application de la loi Littoral. 1. Une planification encore loin d'être compatible avec la loi Littoral Si le lien entre loi Littoral et planification est primordial pour les DDTM, force est de constater que ces dernières n'ont toujours pas trouvé les moyens adéquats pour sensibiliser les élus et leur faire intégrer cette donnée. Les services de l'État utilisent, dans ce but, l'association de l'État dans l'élaboration des documents d'urbanisme pour attirer l'attention des élus, mais cela reste une action de longue haleine, dans la mesure où nombre d'entre eux ne sont pas enclins à transformer leur POS en PLU tandis que les révisions, quand elles sont entreprises, s'étalent sur de nombreuses années. Les PLU sont donc encore loin d'être conformes à la loi Littoral dans un contexte de contestation importante de la société civile sur la qualité de sa prise en compte. C'est ainsi qu'entre 2005 et 2010, 23 PLU ont été annulés pour non conformité à la loi Littoral, soit près de 10% de ces documents (dont un seul à l'initiative de l'État). De même, le littoral breton est totalement couvert par des SCoT, mais ceux-ci ne sont pas tous approuvés et ceux qui le sont, restent encore sur ce point de valeur très inégale et sont rarement prescriptives. Seuls les SCoT de Brest et de Lorient ont à ce jour entrepris une lecture volontariste dans ce domaine grâce, en particulier, au relais décisif que représente leur agence d'urbanisme. La Bretagne compte, par ailleurs deux schémas de mise en valeur de la mer (SMVM), celui du Trégor-Goëlo dans les Côtes d'Armor et celui du golfe du Morbihan, approuvés respectivement en 2007 et 2006. Ces deux SMVM ont intégré les délimitations définies préalablement par les services de l'État (espaces remarquables et espaces proches, bande des 100m, coupures d'urbanisation), permettant ainsi une prise en compte par les collectivisées territoriales dans leurs documents locaux. 2. Une stratégie régionale forte Au delà des travaux menés par la DRE en 2007 « Contribution de l'État sur le littoral breton », et des stratégies départementales, propres à chaque DDE, un atelier littoral régional est créé en 2008, aboutissement et formalisation des travaux collectifs engagés depuis 2004 par les quatre DDE et la DRE pour réexaminer les conditions d'application de la loi Littoral de façon globale. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 123/137 Le constat fut d'une part, que les documents d'urbanisme étaient encore peu compatibles avec la loi Littoral d'où un fort risque de contentieux et d'autre part, que les doctrines, cadres et outils de mise en oeuvre, étaient différents selon les départements. Au delà, cet atelier littoral, expression d'une approche unanime et volontariste des services de l'État pour se doter d'une vision partagée du littoral s'est finalement concrétisée à cette date, par le recrutement d'un cadre A+, ce qui a permis à cette structure transversale d'englober plus largement les thèmes de la planification stratégique de la zone côtière et de la gestion du DPM. La création de la DREAL en 2010 a été l'occasion de confirmer cette orientation et de lui assigner des ambitions plus importantes qui s'inscrivent dans les préconisations du livre bleu « stratégie pour la mer et les océans », lui-même inspiré des recommandations de l'Union européenne : promouvoir dans la première région maritime française une gestion intégrée de la mer et du littoral. Au niveau régional le préfet s'appuie sur la DREAL et sa mission transversale dédiée à l'interface terre-mer et intitulée mission « zones côtières et milieux marins ». Cette mission assure notamment l'animation de l'atelier littoral128 qui associe les DDTM (chefs de service DDTM et DREAL) et, en tant que de besoin, les DIRM, DRAAF, DRAC et les services de la préfecture maritime. Son statut lui permet désormais d'aborder dans l'esprit de la gestion intégrée des zones côtières tous les dossiers portés par la DREAL touchant à la gestion de la mer et du littoral sans se substituer pour autant aux autres services spécialisés garants des politiques sectorielles qui leur sont dévolues : application de la loi Littoral, gestion du DPM, gestion des sédiments de dragages terre-mer, planification stratégique intégrée terre-mer avec les volets mer des SCoT, suivi des dossiers d'énergie en mer, représentation de l'État au parc marin d'Iroise et préfiguration des nouveaux parcs, etc. De ce fait, la démarche engagée pour l'application de la loi Littoral, bien qu'évoquée en CAR dès janvier 2009, ne débouchera qu'après la réforme de l'État et les nouvelles relations entre niveaux régional et départemental instaurés par la REATE : c'est le CAR de janvier 2010 qui entérinera ce nouveau positionnement de l'atelier littoral ainsi que son programme de travail avec 5 ateliers thématiques dont un consacré à la loi Littoral. Le dossier "loi Littoral" y est abordé avec les 3 objectifs suivants : · « Mettre les services de l'État en capacité d'expliciter de manière cohérente et homogène l'ensemble des notions de la loi Littoral. » « Réduire le plus possible l'insécurité juridique des documents locaux et de l'instruction et développer, à cette fin, une information cohérente vers les élus. » « Articuler les différentes postures de l'État en promouvant l'échelle des SCoT dans la prise en charge de la loi Littoral et en mettant l'accent sur la promotion d'une approche par le projet.» · · 128 Note de la DREAL du 27/09/10 : Programme de travail de l'atelier littoral. Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 124/137 Rapport n°007707-01 Dans ce nouveau contexte de fonctionnement de l'État, le rôle d'animation porté en ce domaine par la DREAL est cependant ressenti par certains préfets, comme susceptible de porter atteinte à leur propre marge d'action qui, en matière de contrôle de légalité, comporte un champ d'autonomie vis-à-vis du préfet de région. Cependant, du fait de l'importance des enjeux en matière d'aménagement du territoire, ce dernier a rapidement considéré qu'une harmonisation régionale était indispensable pour sécuriser les documents locaux d'urbanisme sans pour autant remettre en cause la compétence propre des préfets en matière de contrôle sur les actes individuels ou les documents d'urbanisme. Pour être efficace, celle-ci devait en outre, à ses yeux, être concrète et prendre appui sur une expertise des documents locaux. La doctrine régionale a donc été construite selon des modalités arrêtées en CAR, et sera co-construite par les quatre DDTM en atelier thématique sous l'égide de la DREAL, qui en a au départ stabilisé les objectifs, le cadre de production, tout en assurant l'articulation et le suivi avec le CAR. La DDTM du Finistère s'en est vu confier le pilotage (voir ci-après). Aujourd'hui, le « Référentiel Loi Littoral » issu de ces travaux, appelé communément au sein des services le « référentiel breton », constitue, pour les quatre DDTM, le corps de recommandations régional utilisé tant par les chargés d'études en matière de planification que par les instructeurs ADS. Il est aussi une source précieuse d'informations sur la jurisprudence qui y est abordée sous forme illustrée pour les services en charge du Contentieux en Préfecture ou en DDTM (Ille-et-Vilaine). 3. Une coordination entre services autour de l'interprétation des grands principes posés par la loi L'atelier littoral breton fonctionne à travers un atelier permanent, lieu d'échanges, d'impulsion et de validation des travaux menés par des ateliers thématiques dont notamment l'atelier 5 intitulé "loi Littoral". 129 Pour la thématique loi Littoral, les réflexions et travaux de l'atelier correspondant ont été élaborés lors de huit séances de travail pilotés par la DDTM du Finistère, auxquels participaient les trois autres DDTM et la DREAL. On peut citer également l'atelier 1 sur le volet mer de SCoT qui a fait l'objet de notes stratégique et juridique : "Contribution à la réflexion sur les volets MER des SCoT". Ce document de travail élaboré par l'atelier thématique auquel participait le préfet maritime Atlantique, s'inscrivait aussi dans le cadre de la réflexion 2009 lancé par la sous-direction du littoral et des milieux marins de la DGALN, à la demande des DREAL, notamment la DREAL Bretagne. La DGALN n'a cependant pas donné suite à ce groupe de travail et ce document, issu de l'atelier breton, tout comme la plaquette consacrée aux volets mer des SCOT que le CETE Méditerranée y avait présenté, n'ont pas pu être partagés avec les autres DREAL et DDTM littorales. 129 Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 125/137 Afin de donner de la solidité et de la distance à l'approche, la DREAL a proposé, en accord avec la DDTM du Finistère, un accompagnement de juristes externes aux services des DDTM, dans un premier temps issus du CETE de Nantes et dans un second temps de l'Université en la personne d'Olivier Lozachmeur, docteur en droit, spécialiste de la loi littoral et de la GIZC, disciple de l'éminent juriste du Littoral en France qu'est Jean-Marie Becet. Olivier Lozachmeur est le rédacteur-juriste des fascicules du Référentiel breton. Le référentiel de plus de 250 pages de jurisprudence illustrée et de recommandations qui en est issu intègre des jurisprudences nationales (décisions du Conseil d'État et de Cours d'appel), mais aussi celles du Tribunal administratif (TA) de Rennes qui traite la majorité des conflits relatifs à cette loi et dont 93% des décisions ne font pas l'objet d'appel. Ce corpus de 9 documents, constitutif de la doctrine bretonne, a entièrement été validé par l'Atelier Permanent du Littoral. Il s'agit à ce jour des fascicules consacrés à : ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ ­ l'article L.146-2 (coupures d'urbanisation), l'article L.146-4-I (extension de l'urbanisation et continuité de l'urbanisation), l'article L.146-4-1 et les exploitations agricoles, l'article L.146-4-II (espaces proches), l'article L.146-4-III (bande des 100 m), l'article L.146-5 (campings), l'article L.146-6 (espaces remarquables), l'article L.146-7 (routes littorales), l'article L.146-8 (dérogations). La qualité de l'ensemble de ces documents co-élaborés entre les services départementaux et régionaux est reconnue par les préfets de départements, qui y voient un référentiel utile qu'ils ont globalement validé, mais ils se refusent toutefois à y voir un corps de doctrine immuable. Le CAR du 27 janvier 2010 a adopté le fascicule relatif à la continuité de l'urbanisation dans les communes littorales (L 146-4-1) dans la mesure où la règle de continuité représente à ce jour de très loin la source la plus importante de contentieux. Ce fascicule sur le L 146-4-1 a été expertisé par J-M. Becet, à la demande de la DREAL et depuis, un plan de formation multi-acteurs destiné à de nombreux publics sur la base de ce référentiel a été mis en place tant pour les agents exerçant en DDTM que pour les bureaux d'études et services techniques des collectivités locales ou d'autres plus spécifiques mais dont le rôle est essentiel comme les commissaires enquêteurs, les notaires, etc. Ce plan a déjà touché, lors de deux séances en mai 2012, près de 40 personnes et se poursuivra fin 2012 et en 2013 pour toucher les bureaux d'études, services techniques des collectivités et commissaires enquêteurs. D'autres séances pour les services de l'État seront mises en place à leur demande. Ces documents sont actuellement accessibles sur le site intranet de la DREAL Bretagne. Il est envisagé une mise à disposition plus large pour les différents acteurs du territoire littoral et notamment les élus qui ont en charge la planification. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 126/137 4. Des stratégies départementales déclinant la stratégie régionale Les travaux les plus significatifs depuis la publication de ces documents130 réalisés par le niveau départemental sont ceux relatifs à l'extension de l'urbanisation dans les communes littorales et le fascicule du « Référentiel Loi Littoral » spécifique à l'article L 146-4-1 du CU a servi de cadre référentiel à l'élaboration d'une cartographie de la compatibilité des zonages constructibles des documents d'urbanisme. Le principe retenu (réalisé antérieurement dans le Morbihan) est une analyse juridique, par les DDTM, de tous les secteurs ouverts à l'urbanisation dans les POS ou PLU - ou qui pourraient l'être - au regard de la jurisprudence en matière de continuité. Un code de couleur permet de distinguer : · les zones rouges où la construction est en contradiction avec la lecture faite par l'État en région de la loi Littoral (fascicule L 146-4-1 du référentiel régional). Dans ce cas, l'instruction ADS doit conduire à une proposition de refus et logiquement le contrôle de légalité doit s'exercer dès lors que le maire ne suit pas cette proposition ; les zones vertes, où il n'y a pas de contradiction, au titre du L146-4-1, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en a pas à d'autre titre (bandes des 100m, espace remarquable, espaces proches, etc.) ; les zones oranges, où il y a une incertitude juridique potentielle (jurisprudence non stabilisée), sur lesquelles l'État déconseille la délivrance d'un acte individuel d'urbanisme et sur lequel l'élu est prévenu du risque encouru. · · Ces cartes qui ont valeur d'expertise sont évolutives et font état de la situation jurisprudentielle à un moment donné. Ainsi, le Morbihan qui avait devancé la démarche régionale, a-t-il été amené à produire une version réactualisée de ses premières cartes d'expertise après adoption du référentiel en CAR. D'une manière générale, ce travail qui a rassemblé les différents services de chaque DDTM (agents du siège et unités territoriales en charge de l'ADS et de la planification) a été validé par les sous-préfets et présenté aux maires qui gardent leur liberté d'appréciation : la consigne préconisée par le niveau régional en la matière était bien de préciser qu'il s'agissait là d'une lecture par l'État en Région des fragilités juridiques des documents de planification, les élus étant invités à produire une expertise plus poussée pour préciser certaines notions dans leur document et retrouver le cas échéant quelques marges de manoeuvre au delà de la sécurisation de leur POS ou PLU. Le document finalisé doit leur servir de base, aussi bien pour réviser ­ afin de les sécuriser - leur document d'urbanisme que pour assurer la qualité de l'instruction au titre de l'application du droit des sols aux 130 Des documents de référence avaient été réalisés de manière inégale dans les 4 départements pour appréhender l'application de la loi avant 2006 tant par les DDE que la DIREN : Atlas des espaces remarquables de la DIREN, DDALL ou délimitation de certains espaces dans des cartographies spécifiques en DDE (espaces proches, parties actuellement urbanisées des agglomérations et hameaux en DDTM, etc...). A noter toutefois la demande expresse de la centrale de ne plus produire, ni diffuser les DDALL suite à un rapport du CGEDD qui avait insisté sur l'importance de l'exercice de planification par les élus et au retrait des services de l'État dans « l'adaptation » de la Loi. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 127/137 constructions et aménagements nouveaux (que l'instruction soit faite ou non par les services de l'État). De même, il sert de référence pour les instructeurs ADS et pour ceux du contrôle de légalité. Ce travail non encore achevé lors du passage de la mission d'audit portait déjà ses fruits, semble-t-il, avec les maires du Finistère notamment, motivés pour sécuriser leur PLU en cours d'élaboration. Ce véritable « chantier » concerne 270 communes littorales sur les 1270 communes de la région Bretagne et le Finistère, à lui seul, en totalise 118. En novembre 2011, pour le Finistère : le travail était en cours de finalisation. Sur les 118 communes, les cartes des risques juridiques avaient été réalisés sur 50 communes avec 15 retours des maires sans remise en cause. Pour les services, c'était le résultat d'un travail associant l'État, les élus, partageant, à défaut de l'accepter, un même raisonnement. Ces documents n'avaient pas vocation à être rendus publics, mais seront communiqués sur demande (cf. décision CADA). A noter que ce type d'expertise issu du référentiel n'avait pas son équivalent dans ce département antérieurement, contrairement au Morbihan ; il y a donc représenté un saut qualitatif très important par rapport aux pratiques antérieures. Réalisées de manière homogène et centralisé au siège de la DDTM, les cartes ont été ajustées, puis, présentées et laissées aux élus locaux par le secrétariat général de la préfecture ou les sous-préfets qui ont supervisé et porté les versions finales. Ces cartes, lorsqu'elles sont réalisées, constituent le document de référence tant pour l'instruction que la planification au sein de la DDTM. En novembre 2011, pour les Côtes d'Armor : si la DDTM (service planification en lien avec les unités territoriales) a fait l'analyse juridique des PLU/POS et a identifié les situations jugées non conformes aux dispositions de la loi Littoral avec des visites de terrain, ce sont les sous-préfets qui ont rencontré chaque maire sur la base du travail fourni par la DDTM avec ou sans la DDTM. Les points de désaccord avec les élus font l'objet d'un arbitrage au niveau du préfet. La production de la version initiale des cartes est réalisée par les unités territoriales de la DDTM, puis consolidée et supervisée par le siège sur la base du référentiel régional. Les cartes n'ont, en revanche, pas été communiquées aux élus dans ce département. En octobre 2011, en IIle-et-Vilaine : la DDTM signale à la mission que ce travail de mise à jour au regard du référentiel régional s'inscrit dans la poursuite de l'analyse de la fragilité juridique des POS et PLU effectué en 2008 et communiqué sous une forme écrite, très détaillée et personnalisée à chacun des élus. Les cartes des risques juridiques étaient toutes réalisées et révisées en novembre 2011 mais devaient être validées en interne avec les conseils (architecte et paysagiste) avant une présentation au sous-préfet de Saint-Malo qui consultera les communes. A Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 128/137 ce stade, sur 21 communes, seuls deux PLU étaient expertisés comme compatibles (et 2 peu compatibles). Les cartes étaient déjà néanmoins utilisées par les instructeurs ADS. En novembre 2011, pour le Morbihan : c'est la 2ème génération de cartes, l'exercice ayant commencé le 16 mars 2006 lors d'une réunion à l'initiative des élus à Locoal Mendon à laquelle a participé la DGALN. A cette occasion, la circulaire du 14 mars venant d'être publiée, la DGALN a commenté la demande faite aux services de procéder à l'analyse du risque sous la forme de l'élaboration de cartes dites des « 3 couleurs ». Un travail en équipe a été conduit avec les collèges planification et ADS pour qualifier les "zones U ou AU" à partir de photos aériennes, du cadastre, de visites de terrain et en reprenant aussi les anciens actes pour prendre en compte, à la demande du préfet, les « errements antérieurs ».131 50% des cartes étaient faites à cette date, 100% programmé à fin 2011. Les documents de travail ont été présentés aux maires par le chef de service accompagné par la responsable de l'unité "animation de la filière planification". La consigne de la préfecture a été de laisser l'appréciation aux maires : le document est à ce titre amendable par les élus et fait d'ailleurs l'objet de courriers en aller et retour avec eux. En cas de désaccord avec la DDTM, c'est le sous-préfet ou le SG qui arbitre. Le document final a été notifié au maire (cas de Damgan). L'objectif de telles cartes d'expertise locales est de permettre aux services de l'État de préciser leur position (au regard de la jurisprudence). Elles constituent un outil d'information pour les maires sur les risques juridiques qu'ils sont susceptibles de prendre au titre des actes individuels d'urbanisme. Elles n'ont pour objectif que d'éclairer le seul aspect juridique lié au L.146-4-1, article à l'application particulièrement problématique, et n'a pas pour objectif d'aborder la question de la prise en charge de cette notion dans le projet d'aménagement de la commune en articulation avec l'ensemble des autres enjeux de planification. 5. Des conclusions provisoires Tout en étant un outil de gestion partagé de la gestion courante de l'ADS en matière de continuité, ces cartes constituent une base à travers laquelle s'élaborent les ajustements imposés par la jurisprudence et l'intégration des enjeux locaux dans la rédaction des documents de planification révisés afin de donner une sécurité plus importante à ces documents. 131 Par exemple une parcelle sur laquelle un CU aurait été délivré sur proposition de l'État sans que le contrôle de légalité ne soit exercé se retrouve en "vert" même si normalement au regard de la loi c'est du "rouge" ! Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 129/137 Cet objectif porté par le Préfet de Région Bretagne devrait se poursuivre à travers un bilan du niveau d'harmonisation atteint avec cette stratégie entre les différents départements bretons ; ce bilan fera aussi l'objet de préconisations d'amélioration en continu tant de la posture de l'État que du portage de la lecture jurisprudentielle. A ce titre, la principale difficulté en la matière provient de documents d'urbanisme anciens (POS jamais révisés ou remis en service par annulation du PLU) ou en cours de révision qui n'ont pas intégré les évolutions jurisprudentielles. Dès lors, seule la réalisation par les communes (ou mieux des intercommunalités) de PLU établis sur un projet respectueux de la loi Littoral dans toutes ses thématiques, mais intégrant aussi les enjeux des autres politiques nationales 132 dans l'esprit de la loi SRU, du contexte local133 et du projet politique de développement, pourrait permettre de sortir des dysfonctionnements actuels et dépasser leurs apparentes contradictions pour replacer la règle de continuité dans la perspective globale du projet d'aménagement. Cet exercice met toutefois en évidence la nécessité pour toute collectivité compétente en matière d'urbanisme sur le littoral de disposer d'un haut niveau d'expertise juridique lui permettant de mettre le droit au service du projet plutôt que d'en subir quotidiennement les contraintes134. De nombreuses petites collectivités ne disposent probablement pas actuellement de cette expertise. Le rôle d'alerte et l'engagement de l'État local se sont avérés de ce point de vue essentiel tout comme le sera l'exercice de son contrôle de légalité. 132 133 134 zones humides, paysage, déplacements, offre équilibrée de logements, etc. paysage, relief, utilisation du sol. Plusieurs communes bretonnes confrontées à des recours récurrents rencontrent des difficultés pour trouver une compagnie d'assurance couvrant le risque juridique. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 130/137 6. Le cas des grands lacs de plus de 1000 hectares (synthèse) MIGT 6 (juillet 2012) Seize lacs du territoire métropolitain ont une superficie de plus de 1000 hectares, entraînant par là l'application de la loi Littoral sur le territoire des communes riveraines. En outre, pour huit de ces lacs, s'applique également aux territoires concernés la loi Montagne. La situation de ces lacs dans des régions de densité de population très diverse avec une attractivité touristique variable a conduit l'équipe de pilotage du présent audit à ne pas réaliser d'audit détaillé auprès des 15 départements concernés mais à mener des missions d'audit sur cinq d'entre eux parmi les plus exposés aux pressions urbanistiques et touristiques. Parmi ceux-ci, la Haute Savoie pour le lac d'Annecy connaît une pression très importante de l'urbanisation, assimilant les difficultés rencontrées à celles du littoral méditerranéen. Dans une moindre mesure, le littoral français du lac Léman (département de la Haute-Savoie), les rives du Lac du Bourget (département de la Savoie) font également face à des pressions d'aménagement importantes et par suite à des coûts du foncier très élevés. Le nombre des contentieux, liés à l'application de la Loi Littoral autour de ces trois lacs, témoigne du niveau des pressions rencontrées. Pour les autres lacs de plus de 1000 hectares, l'urbanisation et les aménagements nautiques sont limités à quelques segments de leurs rives, soit que ces rives soient peu ou pas accessibles, que le littoral soit protégé à un autre titre (réserve naturelle par exemple) ou simplement que le lac soit peu attractif, car situé dans un territoire isolé et/ou au climat peu favorable. Quelques différences avec le littoral maritime évoquées par les services audités... Une spécificité de ces lacs, par rapport au rivage maritime, est de permettre pour tous les plans d'eau concernés une vision de leur paysage facile et quotidienne depuis la rive opposée. Une autre caractéristique est la difficulté de fixer la hauteur des plus hautes eaux : si celle-ci peut être déterminée sans difficultés pour les plans d'eau naturel, une partie de ces grands lacs a été créée artificiellement et ils connaissent un marnage important des eaux lié à leur usage et à leur entretien. La limite « des plus hautes eaux » a été parfois contestée compte tenu du caractère artificiel de ces plans d'eau. Le pilotage, les réseaux Tous les services audités ont témoigné du manque d'instruction et, pour certains, de réponses à des questions posées de la part de l'administration centrale (tout au moins depuis 2006 et les dernières circulaires Loi littoral). L'audit révèle également que les DREAL (et avant les DIREN) n'ont pas assuré d'animation spécifique sur la question de la gestion de ces grands lacs alors qu'au moins pour la région Rhône-Alpes (départements de la Savoie et de la Haute-Savoie) et la région PACA une telle démarche trouverait son utilité. Enfin la concertation entre départements voisins, Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 131/137 parfois concernés par les rives d'un même lac (Serre-Ponçon, Sainte Croix, Sarrans et Grandval ) soit n'a jamais eu lieu, soit est en panne ou très laborieuse. Une exception à cela est le projet de directive territoriale (DTA) des Alpes du Nord, qui a donné lieu à la mise au point d'une position concertée entre les services régionaux et départementaux puis présentée aux élus concernés : ce sont les dispositions arrêtées dans ce dossier qui sont encore la référence pour les rives du lac du Bourget en Savoie, et pour une part en Haute Savoie pour les lacs d'Annecy et Léman. Les porter à connaissance Dans tous les départements, les « porter à connaissance » adressés par l'État aux communes riveraines des lacs de plus de 1000 ha rappellent la nécessité d'appliquer la Loi littoral. La DDT de Haute Savoie communique les dispositions d'application de la Loi, telles qu'elles avaient été élaborées et adressées aux collectivités pour la DTA des Alpes du Nord. Les autres DDT le font oralement à l'occasion des réunions d'association. La capacité d'accueil (L 146-2) Cette notion est particulièrement difficile à utiliser et aucun témoignage de référence à cet article n'a été recueilli pour la gestion des autorisations et de la planification. Le libre accès du public au rivage (L 146-3) L'application de cet article est au moins aussi difficile que pour le littoral maritime mais les services veillent autant qu'ils le peuvent à son respect et parviennent dans des situations anciennes à rétablir des accès. L'extension de l'urbanisation en continuité ou en hameaux nouveaux, la protection des espaces proches et la bande des 100 mètres inconstructible (L 146-4) Cet article est celui qui est le plus délicat à interpréter sur le terrain, d'autant que les tribunaux administratifs paraissent eux-même avoir des approches décalées. Une fois encore, les difficultés et les conflits apparaissent là où la pression est la plus importante, autour des lacs des Alpes du Nord. Les positions arrêtées par les services varient dans le temps suivant les jugements intervenus. En outre, là ou l'urbanisation se poursuit au nom de la continuité, elle investit de place en place les coupures d'urbanisation qui n'ont pu être sanctuarisées. De ce point de vue, il faut également remarquer, s'agissant des opérations d'ensemble en continuité (lotissements par exemple), que ce sont les parcelles les plus éloignées qui s'urbanisent en premier et qui parfois restent isolées, à l'opposé de l'esprit de la loi Littoral. Dans les départements audités, aucun dysfonctionnement entre les services internes des DTT (service en charge de l'aménagement et unités ADS), ni mise en cause importante par l'autorité préfectorale des positions des services n'ont été détectés par les auditeurs. Les préfets ou des sous-préfets s'investissent parfois eux-mêmes et participent à des visites de terrain pour visualiser les traductions de la Loi Littoral qui leur sont soumises. Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 132/137 S'agissant de la notion « d'espaces proches », l'équipe d'audit a relevé une évolution de l'appréciation autour du lac d'Annecy : les critères retenus pour leur délimitation et partagés entre les départements à l'occasion de l'élaboration de la DTA ont été reconsidérés d'une façon plus restrictive à la suite d'un jugement tandis que ces critères restent la référence autour du lac du Bourget. L'application du principe d'inconstructibilité de « la bande des 100 mètres » en dehors des espaces urbanisés pose également la question de la délimitation des urbanisations existantes, d'autant que les territoires peuvent avoir connu des traditions très contrastées d'urbanisation concentrée ou de constructions isolées sur de grandes parcelles. En fait la question se pose encore plus vis-à-vis de la règle des 300 mètres introduite par la loi Montagne (voir dernier paragraphe). Les espaces remarquables (L 146-6, R 146-1) Toutes les DDT consultées ont identifié les espaces remarquables tel que cela a été prévu par la loi et demandé par circulaires avant 2000 mais l'instabilité des listes retenues par l'État depuis l'application de la loi aurait nécessité la réactualisation de ce travail. L'instruction donnée par l'administration centrale à partir de 2002/2003 (suite à l'arrêt Balmète) de laisser les communes identifier les espaces remarquables, à l'occasion de l'élaboration ou de la révision des PLU, a déstabilisé les services. La mission a également pointé la nécessité de faire oeuvre de pédagogie vis-à-vis des collectivités pour justifier les différences de surface de ces espaces selon les situations locales. Suivant la qualité des caractéristiques environnementales qui y sont recensées mais aussi l'importance des urbanisations voisines et des pressions d'aménagement, un espace d'un demi-hectare peut être significatif et constituer un enjeu tandis qu'il est ridicule d'isoler des espaces de moins de dix hectares autour des lacs restés naturels. Cette observation peut également s'appliquer aux coupures d'urbanisation (article R.146-2). L'annulation de l'article 187 de la loi 2005-157 du 23 février 2005 Cet article avait complété le code de l'urbanisme (article L.145-1) en introduisant, pour les communes riveraines des lacs de plus de 1000 hectares et situées en zone de montagne, la possibilité de délimiter un secteur dans lequel les dispositions particulières au littoral s'appliquent seules. Dans les autres secteurs de ces communes, ce sont les dispositions particulières à la montagne qui devaient seules s'appliquer. La délimitation de ces secteurs de non-superposition de l'application des deux lois devait relever d'un décret pris en Conseil d'Etat, après avis ou sur proposition des communes riveraines. Le décret dapplication n°2006-993 du 1er août 2006 a été annulé par le Conseil d'Etat et l'ajout à l'article L.145-1 du code de l'urbanisme apporté par l'article 187 de la loi DTR, supprimé par la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 (Grenelle 2). Les auditeurs ont noté que pour la DDT des Alpes de Haute Provence, un tel dispositif paraissait souhaitable ; pour la mission, une clarification serait utile pour aider les Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 133/137 services, sous l'autorité des préfets, à expliquer aux communes la cohérence de ces deux lois mais les effets de cette superposition des textes ne lui sont pas apparus poser problème dans la pratique. En conclusion, s'agissant de l'application de la loi Littoral aux rives des lacs de plus de 1000 hectares, les auditeurs relèvent que les difficultés d'application se concentrent logiquement là où les pressions pour l'urbanisation sont les plus importantes (Annecy, Léman, et dans une moindre mesure, Le Bourget, Serre-Ponçon et Sainte Croix) et elles sont similaires à celles qui sont constatées sur le littoral maritime. Les services départementaux travaillent d'une façon isolée, n'échangent pas avec leurs voisins, ne bénéficient pas d'une animation du niveau régional et ne reçoivent pas de réponse quand ils sollicitent l'administration centrale. Ils sont déstabilisés par des jurisprudences, parfois d'apparence erratique en raison de spécificités locales particulières à chaque affaire jugée, et s'ils investissent beaucoup sur l'interprétation du droit, ils sont très peu présents pour l'accompagnement technique, social et économique de la gestion des espaces naturels ou de l'aménagement. De plus, les rives de ces grands lacs sont le support de logiques très différentes de développement urbain et périurbain. Pour certains d'entre eux, les enjeux économiques, particulièrement touristiques, mais aussi les enjeux environnementaux, s'y concentrent et les conflits d'usage y sont nombreux. D'autres, au contraire, sont confrontés à la déprise agricole et aux difficultés de gestion des espaces naturels de leurs rives. Pour quelqu'uns de ces lacs, parmi les moins exposés aux pressions, des études globales pour leur gestion ont pu être conduites (Lac de Vouglans par la DDT, charte du PNR de la forêt d'Orient pour les lacs d'Orient et du Temple). En l'absence de telles études, les services prennent position au cas par cas. Les auditeurs ne peuvent que recommander qu'une animation spécifique soit engagée pour armer les services sur l'application de la loi Littoral autour des lacs de plus de 1000 hectares et que les moyens leur soient apportés pour veiller à l'application des différents articles de la loi dans les documents d'urbanisme (ScoT et PLU). Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 134/137 7. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme ADS AE CA CAR CC CETE CGDD CGEDD CIAT CNML CU DAC DATAR DDALL DDI DDT DDTM DEB DGALN DHUP DIRM DPM DRE DREAL DSF Application du droit des sols Autorité environnementale Communauté d'agglomération Signification Comité de l'administration régionale Communauté de communes Centre d'études techniques de l'équipement Commissariat général au développement durable Conseil général de l'environnement et du développement durable Comité interministériel d'aménagement du territoire Conseil national de la mer et des littoraux Code de l'urbanisme Direction d'administration centrale Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale Document départemental d'application de la loi littoral Direction départementale interministérielle Direction départementale des territoires Direction départementale des territoires et de la mer Direction de l'eau et de la biodiversité Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages Direction interrégionale de la mer Domaine public maritime Direction régionele de l'environnement Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Document stratégique de façade Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 135/137 Acronyme DTA DTADD EPCI GIMEL GIP GIZC ICPE LOADDT Loi DTR Loi Grenelle 1 Loi Grenelle 2 Loi SRU MEDDE METL MI MIACA MIAL MIGT PAC PACA PADD PADDUC PAEN PLU PNR POS PPR Signification Directive territoriale d'aménagement Directive territoriale d'aménagement développement durable Établissement public de coopération intercommunale Gestion intégrée de la mer et du littoral Groupement d'intéret public Gestion intégrée des zones côtières Installations classées pour la protection de l'environnement Loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire Loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux Loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement Loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement Loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie Ministère de l'égalité des territoires et du logement Minsitère de l'Intérieur Mission interministérielle d'aménagement de la côte Aquitaine Mission interministérielle d'aménagement du littoral Mission d'inspection générale territoriale Porter à connaissance Provence-Alpes-Côte d'Azur Plan d'aménagement et de développement durable Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse Périmètre de protection et de mise en valeur des espaces naturels et agricoles périurbains Plan local d'urbanisme Parc naturel régional Plan d'occupation des sols Plan de prévention des risques Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 136/137 Acronyme RNU SAR SCoT SDAGE SDAU SGAR SIG SMVM SNML SOeS TA TVB ZAP ZNIEFF Règlement national d'urbanisme Signification Schéma d'aménagement régional Schéma de cohérence territoriale Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme Secrétariat général aux affaires régionales Système d'information géographique Schéma de mise en valeur de la mer Stratégie nationale mer littoral Services de l'observation et des statistiques (CGDD) Tribunal administratif Trame verte et bleue Zone agricole protégée Zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique Rapport n°007707-01 Audit thématique sur l'application de la loi Littoral par les services de l'Etat Page 137/137 Ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie Conseil général de l'Environnement et du Développement durable 7e section ­ secrétariat général bureau Rapports et Documentation Tour Pascal B - 92055 La Défense cedex Tél. (33) 01 40 81 68 73 www.developpement-durable.gouv.fr INVALIDE)

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