Création de civelleries et d'unités d'élevage d'anguilles en France.

BLANC, Nicole ; ROUSSEL, François ; ORNELLAS, Christian d' ; FERLIN, Philippe

Auteur moral
France. Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux ; France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">L'anguille européenne voit ses populations régresser fortement et disparaître localement, notamment dans le sud-est de la France. L'Union européenne a adopté en 2007 un plan de restauration de l'espèce fondé sur la connaissance et la protection. Dans ce contexte, la filière civelière se trouvant aussi confrontée à l'interdiction d'exporter hors d'Europe sa production et perdant ainsi un marché asiatique lucratif, envisage la création de civelleries en France qui permettraient de récupérer la plus-value aujourd'hui réalisée dans d'autres États-membres. Le rapport étudie les fondements tant scientifiques qu'économiques qui étayent la proposition de création de civelleries. Même si techniquement celles-ci sont réalisables, compte-tenu de leur rentabilité incertaine et de leur aberration écologique, les auteurs restent sceptiques, dans l'état actuel des connaissances, sur l'opportunité de créer des civelleries. Les difficultés techniques avérées de l'élevage d'anguilles en démontrent l'immaturité et en repoussent l'utilisation en routine à plusieurs décennies. Toutefois, des marges de progrès existent, portant principalement sur la connaissance et le suivi de l'anguille ainsi que sur l'implication de la profession dans sa gestion.</div>
Editeur
CGEDD ; CGAAER
Descripteur Urbamet
faune ; élevage ; protection de la nature ; analyse économique ; activité économique ; rentabilité
Descripteur écoplanete
anguille
Thème
Ressources - Nuisances ; Environnement - Paysage
Texte intégral
CONSEILGENERAL DE L'ALIMENTATION, DE L'AGRICULTURE ET DES ESPACES RURAUX CONSEIL GENERAL DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE Rapport no 11116 ­ 02 et 03 Rapport n° 007965-01 CREATION de CIVELLERIES et d'UNITES d'ELEVAGE d'ANGUILLES en FRANCE Par Nicole BLANC, Ingénieure générale des ponts, des eaux et des forêts François ROUSSEL, Inspecteur général de l'agriculture Christian d'ORNELLAS, Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Avec l'appui de Philippe FERLIN, Ingénieur général des ponts, des eaux et de s forêts Avril 2012 1 2 PLAN RÉSUMÉ.................................................................................................................................... 6 LISTE DES RECOMMANDATIONS 6 I - PROBLEMATIQUE. .......................................................................................................... 12 Spécificité de l'anguille............................................................................................................ 12 Importance de l'anguille sur le plan biologique, écologique, culturel, et économique............ 13 Evolution des populations ........................................................................................................ 14 Les recrutements ...................................................................................................................... 15 Anguilles dans les cours d'eau. ................................................................................................ 16 Décisions de gestion................................................................................................................. 18 Le plan de gestion « anguille » (PGA) ..................................................................................... 18 L'interdiction d'exportation hors d'Europe, dite « C.I.T.E.S. » .............................................. 19 Les propositions de la pêcherie civelière face aux contraintes de gestion. .............................. 20 La création de civelleries.......................................................................................................... 20 La création d'aquaculture d'anguilles. ..................................................................................... 21 II - CERTITUDES et INTERROGATIONS SCIENTIFIQUES ............................................. 21 .Le recrutement décroît­il de façon alarmiste ? ....................................................................... 21 Les effectifs d'anguilles de nos rivières sont-ils au plus bas ?................................................. 22 Les effets du repeuplement peuvent-ils être valablement estimés aujourd'hui ?..................... 23 Le repeuplement est-il efficace pour reconstituer les stocks ?................................................. 24 La pêche est-elle responsable de la diminution des stocks d'anguilles ?................................. 25 Toutes les causes de mortalité de l'anguille sont-elles connues?............................................ 26 III - ANALYSE DES RISQUES ECONOMIQUES................................................................ 27 La fermeture des frontières « CITES » a-t-elle fait baisser les prix des civelles? ................... 27 La crise de la pêche civelière française est-elle liée aux contraintes PGA et « CITES »?....... 30 Question de gouvernance ......................................................................................................... 31 IV - CIVELLERIES PROBLEMES POSES ET ELEVAGE D'ANGUILLES REPONDENT-ILS AUX 31 La production d'anguillettes est-elle opportune? ..................................................................... 34 -Est-elle est possible en civellerie. ........................................................................................... 34 mais elle pose des problèmes particuliers liés à l'aquaculture................................................. 35 et la production d'anguillettes est inadaptée au repeuplement................................................. 36 La production d'anguillettes en civelleries d'engraissement est-elle économiquement viable ? 38 3 V - LA TRANSFORMATION DE CIVELLERIES EN ELEVAGE D'ANGUILLES. EST-ELLE OPPORTUNE ?......................................................................................................41 L'élevage d'anguille en cycle fermé est-il économiquement viable ? ............................................42 CONCLUSION...............................................................................................................................44 ACRONYMES................................................................................................................................46 BIBLIOGRAPHIE..........................................................................................................................48 PERSONNES RENCONTREES OU CONTACTEES...................................................................50 LETTRE DE MISSION..................................................................................................................52 4 5 RÉSUMÉ L'anguille, migrateur amphihalin, a la particularité de se reproduire en mer (Sargasses) et de croître en eaux continentales. Ce poisson résiste à de grands écarts de pression en mer et se satisfait des eaux les plus diverses sur terre. L'alevin (civelle) entre en Europe à 80 % par les côtes françaises. Mais l'anguille a quasiment disparu du sud-est du pays et le recrutement en civelles atteint un minimum. Ainsi, remarquable par sa physiologie et notamment par sa migration incomparable, l'anguille européenne (Anguilla anguilla) voit ses populations régresser fortement et disparaître localement. L'Union européenne a adopté en 2007 un plan de restauration de l'espèce fondé sur la connaissance et la protection. Le règlement européen du 18 septembre 2007 dispose que les États membres établissent des plans de gestion de l'anguille (PGA) tenant compte des causes de déclin identifiées : obstacles sur les cours d'eau, pêche, pollution. Le PGA de la France prévoit de reconstituer les stocks naturels par des repeuplements en civelles et anguillettes, sur le territoire français ou ailleurs en Europe, pour 10 % des quota de pêche. L'État achète aux pêcheurs les civelles nécessaires au prix de 450 /kg. Du fait de la convention CITES sur le commerce international de la faune et de la flore sauvages et sur avis des autorités scientifiques, l'exportation des civelles hors de l'Union européenne est prohibée depuis 2010, fermant le marché asiatique. La filière civelière, à la recherche de débouchés, s'efforce de récupérer la plus-value des civelleries du nord de l'Europe, qui engraissent des civelles achetées en France. Elle a conduit des études sur des projets de civellerie en Pays de la Loire et en Aquitaine, qui pourraient aboutir à de véritables élevages en cycle fermé. La mission a étudié pour le compte des ministères chargés de écologie et de la pêche les fondements et les perspectives de ces projets. La connaissance des effectifs d'anguilles présente plusieurs carences importantes: les séries d'observation des populations manquent d'homogénéité et de normes reconnues ; il n'y a pas de modèle sur la dynamique des populations en rivière, ni de protocole commun de recueil des données. Aussi est-il difficile de fixer avec objectivité les réductions exactes des populations à tous stades biologiques, et même les quota de pêche ; enfin la communauté scientifique doute de l'effet réel des repeuplements. La dégradation des milieux naturels est une cause déterminante du déclin de l'espèce, mais des pans entiers de la vie de l'anguille restent mal connus et susceptibles de comporter des risques appréciables de mortalité. La recherche a du mal à s'y impliquer malgré quelques projets internationaux comme EELIAD, qui vise à mieux connaître le comportement migratoire en mer ; il importe que la France y maintienne une participation active. L'économie de la pêche des civelles est elle aussi mal connue. Ainsi l'effet sur les prix de la fermeture du marché chinois peut prêter à discussion. Il semble que la filière souffrait déjà de déséquilibres de fond avant que ne fussent imposées les restrictions européennes. Les prêts de 20 millions d'euros pour alléger les conséquences de crises régulières (aides aux arrêts temporaires, sorties de flotte, cessation d'activité) qu'y a consacrés le ministère chargé de la pêche n'y ont pu mais. 6 Aujourd'hui, l'État doit ainsi faire face à deux problèmes dont l'échelle de temps différe: réduire la pêche pour sauvegarder l'espèce à terme (PGA) ; répondre aux problèmes immédiats de la pêche civelière. Les choix publics n'apparaissent pas clairement, et leur efficacité reste douteuse. Une solution serait de mettre fin à la pêche des civelles (qui est en elle-même une exception à l'interdiction de pêcher des alevins). Elle impliquerait que les professionnels en fussent très clairement informés et que l'État mît en oeuvre toutes les dispositions nécessaires pour pallier les conséquences économiques. Bien entendu, elle imposerait que l'Etat active, avec une force toute particulière et une obligation de résultat sur la reconstitution des populations d'anguille, les leviers dont il dispose par ailleurs pour contribuer au bon état écologique des eaux , SAGE et lutte contre le braconnage, par exemple . Néanmoins la mission penche pour une solution moins radicale : responsabiliser les professionnels pour qu'ils poursuivent leur activité économique dans une optique de pêche durable. La gestion au plus près de la ressource en relation avec les services de l'Etat avec, le cas échéant, mise en oeuvre de quota individuels, pourrait être une piste innovante à explorer pour maintenir l'activité. Les professionnels seraient invités à formuler des propositions dans ce sens. L'État fixerait un quota global de capture, qu'une organisation des professionnels répartirait au niveau individuel, procédé qui a déjà démontré qu'il amène les pêcheurs à étaler leur campagne de pêche, qu'il accroît le taux de survie des civelles capturées, et pousse à diversification des activités halieutiques professionnelles. Les esprits semblent mûrs pour aller dans cette voie, que les comités de gestion des poissons migrateurs (COGEPOMI) de bassin a déjà ouverte depuis longtemps pour la pêche continentale. Une telle solution contribuerait de surcroît à harmoniser la gestion de l'anguille entre la terre et la mer. Pour ce qui concerne la piste des civelleries, la mission a constaté que les tentatives pour produire des anguillettes dans le passé ont donné des résultats décevants pour le repeuplement avec des problèmes sanitaires, et de dérive physiologique (excédents de mâles) en particulier. Des expériences récentes en Suède et en mer Baltique démontrent que les anguillettes relâchées ont du mal à survivre, et plus encore à s'orienter vers les Sargasses. Tant que demeureront ces incertitudes, il ne sera pas raisonnable d'envisager des civelleries vouées au repeuplement. Pour l'engraissement, le projet en Aquitaine serait rentable à partir de 24 t/an. Or, le marché européen, bien tenu par les pays du Nord, est en net recul, ce qui laisse des doutes sur les débouchés de telles productions y compris pour la consommation alimentaire. Quant à l'élevage d'anguilles, il butte toujours sur la reproduction. Le projet européen Pro Eel tente d'en percer les mystères. Les résultats obtenus en 2011 en montrent les difficultés et l'éloignement des applications en routine. Ainsi, il apparaît impératif de suspendre toute décision sur le financement de civelleries ou d'aquaculture d'anguilles en France tant que n'auront pas été apportées les réponses scientifiques aux questions essentielles et que n'auront pas été lancées des études de marché approfondies. Cette constatation n'interdit pas, au contraire, que la profession, dans le souci de sa survie, ne s'organise pour faire face à une réduction durable des prises de civelles. 7 LISTE DES RECOMMANDATIONS Recommandation 1 Promouvoir auprès de l'expert scientifique de la Commission (le CIEM) une méthode scientifique unique et normalisée au niveau européen pour évaluer la population des civelles. Recommandation 2 Demander aux établissements publics de recherche d'élaborer un ou des modèles de dynamique des populations des anguilles pendant leurs stades biologiques continentaux. Recommandation 3 Solliciter les établissements scientifiques spécialisés (MNHN, IRSTEA, ONEMA) pour créer un protocole standard de recueil de données de terrain facilement exploitables par des scientifiques et chercheurs. Recommandation 4 Faire remonter à la Commission européenne les problèmes posés par l'approvisionnement en civelles de repeuplement des pays membres, en période de décrue de recrutement des civelles sur les côtes de France. Recommandation 5 Accélérer la réalisation des SAGE, notamment sur la façade Atlantique, dont la mise en oeuvre conditionne le bon état des eaux et leur reconquête biologique, en particulier par l'anguille, sentinelle de l'état écologique des milieux aquatiques . Recommandation 6 Poursuivre la participation française au projet EELIAD dont les premiers résultats ne permettent pas encore de préjuger du devenir des anguilles, notamment en matière de mortalité, au cours de leur long périple vers leur zone de reproduction, la mer des Sargasses, à l'aller comme au retour. 8 Recommandation 7 Aussi longtemps que sera maintenu le cadre actuel d'obligation de repeuplements et d'interdiction « CITES », mobiliser les conseillers agricoles de nos ambassades européennes à l'importance de nos exportations de civelles vers les autres Etats membres. Recommandation 8 Annoncer l'objectif de la politique de la pêche civeliére : la protection de l'anguille étant une priorité, quel devenir est souhaité pour la pêcherie ? Recommandation 9 Demander aux établissements scientifiques spécialisés une évaluation scientifique précise de l'efficacité des repeuplements à partir d'anguillettes d'aquaculture d'engraissement. Recommandations 10 Suspendre la décision de production d'anguillettes de repeuplement issues de civellerie(s) d'engraissement, si elle(s)devaient être créée(s), aux résultats de l'évaluation scientifique précédemment préconisée sur l'efficacité du repeuplement par anguillettes d'aquaculture. Recommandation 11 En tout état de cause ne prendre aucune décision positive concernant la création de civellerie d'engraissement en France, sans avoir procédé ou fait procéder à une étude de marché. Recommandation 12 Soumettre toute décision sur la création éventuelle d'aquaculture d'anguilles, d'une part à des résultats concrets de la recherche sur la reproduction des anguilles en cycle fermé, d'autre part aux conclusions approfondies d'études économiques et de marché sur les projets pressentis. 9 MOTS-CLES : Anguilla anguilla (anguille européenne),civelles, CITES, dévalaison, échappement, recrutement, plan de gestion anguilles (P.G.A), filière civelière, mer des Sargasses, poissons migrateurs amphialins. 10 CREATION de CIVELLERIES et d'UNITES d'ELEVAGE d'ANGUILLES en FRANCE Assurément, l'anguille est une espèce fascinante, quasiment mythique. Née dans les profondeurs des Sargasses, traversant l'Atlantique à rebours des autres poissons migrateurs, pénétrant dans les estuaires, en Baltique, en Méditerranée et autrefois même en mer Noire, colonisant les ruisseaux, les mares, les marais des contrées les plus reculées d'Europe ; prisée des gastronomes, familière des traditions et légendes des terroirs de France et d'Espagne, de Scandinavie et de Russie ; remarquable par une physiologie révélatrice d'aspects fondamentaux (neurologie), l'anguille parle à l'imagination, mobilise les esprits, fleurit le langage de ses particularités, stimule la quête du chercheur. Or, sa survie est en question. Après plus d'une décennie de déclin continu, la population d'anguilles d'Europe, car il s'agit bien d'une seule et unique espèce européenne, s'effondre partout, disparaît souvent. Le phénomène a des causes diverses : maladies, parasites, pollutions, surpêche, braconnage, et sans doute en premier lieu un demi-siècle de destructions méthodiques des habitats (remembrements), qui d'ailleurs se poursuivent ; très probablement, l'accumulation de toutes ces causes joue. Les milieux naturalistes, la communauté scientifique, les autorités publiques s'en émeuvent. Le Conseil des ministres de l'Union européenne a adopté en 2007 un plan de restauration de l'espèce imposant aux États membres de mettre en place des plans de gestion de l'espèce fondés sur la connaissance et la protection. Le plan français, approuvé par la Commission européenne en 2010, vise « un taux d'échappement vers la mer d'au moins 40 % de la biomasse d'anguilles argentées », impliquant de réduire de moitié la mortalité par pêche et des trois-quarts « les autres sources de mortalités anthropiques ». La France a une responsabilité particulière dans la conduite des opérations. Ses façades maritimes, principaux lieux d'entrée des civelles sur le continent, l'importance relative des populations sur de vastes portions du territoire métropolitain, lui donnent un rôle premier dans le succès du plan de restauration. Notre pays est également riche en compétences de haut niveau scientifique et d'expériences dans la restauration des espèces et des milieux, comme en témoignent les résultats obtenus dans la reproduction de l'esturgeon d'Europe ou en reconquêtes (partielles) des rivières bretonnes ou pyrénéennes par le saumon atlantique. Une condition nécessaire (mais non suffisante) pour obtenir des résultats est de protéger l'espèce au stade d'alevin, stade auquel la pêche est généralement prohibée dans les autres espèces. Précisément, l'anguille est une exception. Les pêcheurs en mer ou en eau douce s'adonnent de longue date à la pêche de la civelle (ou pibale) dans les estuaires de l'Atlantique ou de la Manche (Briand, 2009 ; Elie, 1979 ; Etie et al., 1982 ; Gascuel, 1987). Les exportations anciennes vers l'Espagne, plus récentes vers la Chine, étaient naguère la ressource principale de nombreux professionnels. Les quota imposés par le plan de gestion, qui vont diminuant, portent atteinte à l'équilibre économique de ces activités, que perturbent, par un cumul de malchances, les restrictions du plan national d'action contre les polychlorobiphényles (PCB). 11 Au milieu de ces épreuves, le mérite de la pêche professionnelle et de ses organisations est de ne pas s'en tenir à des revendications. La profession s'engage dans des actions positives. Comme pour d'autres espèces, elle livre à la science le fruit de ses multiples observations sur l'évolution des populations et des milieux. Elle exécute les opérations inspirées par l'ambition de « seconder le nature », qui a fait ses preuves pour diverses espèces menacées soumises aux aléas des migrations (cigogne) : ainsi les délicates opérations de repeuplement, transfert de civelles vers des milieux naturels propices au grossissement, qui leur épargnent les périls de la remontée des cours d'eau, doivent-elles beaucoup au savoir-faire des pêcheurs. Avec dynamisme les professionnels espèrent des perspectives nouvelles. La civelle pêchée ne pourrait-elle pas être grossie en captivité, voire passer au stade d'anguillette ou d'anguille, à l'abri des atteintes et prédations inhérentes à la vie sauvage ? Pourquoi les Français ne reproduiraient-ils pas les expériences de civelleries d'Europe du Nord ? L'idée initiale est de récupérer sur le territoire national une plus-value que les exportations habituelles laissent sur les rives de la Baltique ou des lacs Mazures, de créer une activité économique durable, de garantir quelques débouchés aux pêcheurs. Elle procède d'une ambition fondée. Deux projets sont assez avancés, en Pays de Loire et en Aquitaine, qui veulent aller plus loin encore : participer à la restauration de l'espèce. Ce sont des investissements lourds : l'évaluation des risques, exercice classique dans toute conduite de projet, est l'objet du présent rapport. La mission s'est attachée à rassembler les éléments scientifiques, techniques, économiques disponibles et à en établir une synthèse lui permettant de se prononcer dans l'état actuel de la connaissance. Le coeur de ses interrogations porte sur la capacité des projets à contribuer à l'objectif du plan français : au moins de 40 % de retour des anguilles à la mer, en préservant l'intérêt économique général. Les membres de la mission ont ressenti l'impératif d'objectivité, qui s'impose pour tout rapport d'expertise, avec une acuité particulière, comme une exigence morale, dans la mesure où ce sont bien plus que des « structures » qui sont en jeu, mais des hommes, leur sort, celui de leurs familles. Un double souci l'a animée : ne pas nourrir des illusions, ne pas décourager. Aussi, la mission reste fermement attachée à l'orientation des pouvoirs publics d'associer les pêcheurs professionnels tant à la préservation des enjeux économiques de la filière qu'à la reconquête de la biodiversité des milieux naturels dont ils sont les premiers défenseurs. I - PROBLEMATIQUE. Spécificité de l'anguille L'anguille est un migrateur amphihalin, mais qui contrairement à la plupart des autres migrateurs (saumon, esturgeon, etc.) est de nature thalassotoque, c'est à dire qu'il effectue sa reproduction en milieu marin et croît en eaux continentales. C'est aussi un migrateur de longue distance connu dans ses performances par les études menées depuis le début du 20ème siècle (Roulle L., 1922 ; Schmidt J., 1914). 12 Celles ci ont montré que les anguilles se dirigent toutes vers l'ouest mais leur suivi n'a pu être mené jusqu'à leur destination finale, même si les dernières technologies ont permis d'affiner les connaissances sur cette migration de 6000 km environ (Tesch, 2003). D'autre part , dès le début du siècle dernier, des campagnes océanographiques ont permis de récupérer des stades larvaires (leptocéphales) de plus en plus jeunes, jusqu'à la zone présumée de reproduction, la Mer des Sargasses (Lecomte-Finiger et al., 2004). Une autre particularité de l'anguille est la longueur de son cycle de vie : d'une vingtaine d'années entre sa naissance et sa phase de reproduction. Sa croissance principale a lieu en eaux continentales, tandis que la phase de reproduction a lieu en eaux marines. Il est maintenant connu que l'anguille d'avalaison, dite anguille jaune puis argentée n'est pas encore mature sur le plan sexuel quand elle atteint les eaux marines, ses organes sexuels ne se développant que pendant sa migration en mer vers son lieu de reproduction. Ce point est d'importance pour la gestion de la pêcherie qui s'exerce essentiellement sur un alevin (civelle) ou un animal non mature (anguille jaune ou argentée). Malgré les efforts de recherche entrepris depuis une centaine d'années pour mieux connaître la biologie de l'anguille de nombreux points obscurs subsistent, tant sur le stade larvaire (et son métabolisme) que sur la maturation sexuelle. On est encore loin des connaissances acquises sur les autres migrateurs, du fait de la spécificité de son cycle. Importance de l'anguille sur le plan biologique, écologique, culturel, et économique. L'anguille européenne (Anguilla anguilla) fait partie d'une seul genre (Anguilla), lui même élément d'une seule famille (Anguillidés) dans l'ordre des Apodes, parmi les poissons. C'est un poisson qui se situe très en amont dans l'échelle de l'évolution, et qui présente ainsi un intérêt exceptionnel en matière de biologie , d'écologie et de caractéristiques génétiques. Un des points intéressants sur le plan biologique est sa capacité à subir des variations de pression extrêmes, puisque les dernières études menées sur sa migration en mer, ont montré qu'elle migre également sur un rythme nycthéméral, d'une profondeur de 200 m durant la nuit à plus de 600 m durant le jour. Sur le plan écologique, c'est également un poisson presque unique, car il peut fréquenter les eaux de toutes les qualités : eaux saumâtres , eaux d'étangs, eaux de rivières jusqu'à des altitudes où s'arrête la majorité des poissons, et il peut même se déplacer à l'air libre sur les rives des fleuves qu'un obstacle infranchissable encombre (barrage, par exemple). Sur le plan culturel, l'anguille représentait jusqu'au siècle dernier la base d'une certaine vie sociale dans de nombreuses régions d'Europe, notamment sur les estuaires et grands fleuves : fleuves atlantiques (Castelnaud, 1978) , Est de la France, Plaine du Pô, étangs et fleuves de la mer du Nord ou de la Baltique. De nombreux villages de pêcheurs dans ces régions, vivaient autour de l'anguille (capture, fumage, commercialisation). 13 Sur le plan économique , sa production permettait aussi de conserver des bassins d'emplois dans des zones relativement pauvres, jusqu'à la décroissance des populations et des captures observées depuis 40 ans. Evolution des populations Toutes les données relatives aux captures qui ont pu être recueillies depuis la fin du siècle dernier ont montré un effondrement des stocks d'anguilles en Europe (Fournet, 1986 ; Castelnaud et al., 1994), tant au niveau des anguilles jaunes ou argentées, que des civelles. De nombreux cours d'eau en Europe, sont aujourd'hui dépourvus d'anguilles, alors qu `autrefois ils en hébergeaient un grand nombre. Dans les rivières du sud-est de la France, par exemple, leur densité est désormais voisine de zéro et les scientifiques estiment que les populations d'anguilles à tous stades de croissance sont en réduction importante et sont menacées (CGPM, 2010 ; CGPM, 2011). Les rapports ou études scientifiques concluent tous dans ce sens. Le dernier rapport du working group on eels (WGEEL) , réuni à Lisbonne les 5-9 septembre 2011 (FAO, réunion de l'EIFAAC et de l'ICES), a ainsi analysé les séries quantitatives au niveau européen relatives au recrutement (arrivée sur les côtes) de civelles ainsi qu'à la présence d'anguilles en eau douce qui en attestent. 14 les recrutements -Au niveau européen, les recrutements en civelles livrés par le WGEEL (1) à partir de données hors mer Baltique (non fiables) depuis 1950 prennent par exemple la forme logarithmique suivante : WGEEL recruitment index: mean of estimated (GLM) glass eel recruitment for the con-tinental North Sea and elsewhere in Europe.. No series for glass eel are available in the Baltic area. Note logarithmic scale on the yaxis. (indices de recrutement des civelles, sous forme logarithmique, pour la mer du Nord en bleu, et pour le reste de l'Europe, hors mer Baltique en rouge) Décroissant depuis au moins 40 ans, les recrutements en civelles constatés en Europe sont à des minima historiques et ils continuent de décroître, atteignant juste les limites de survie de l'espèce depuis 5 ans. -Sur le plan national, les suivis rapportés par le programme européen INDICANG (indicateur d'abondance et de colonisation par l'anguille), relevés dans l'estuaire de l'Adour, probablement l'estuaire le plus prolifique de la façade Atlantique, entre 1927 et 2003 confirment les conclusions du WGEEL pour l'Europe (Lauroncle et al., 2007). . 1 Cf en annexe liste des acronymes 15 Ci-dessous figurent les résultats des captures par unité d'effort (i.e. nombre d'unités pêchées à chaque levée d'instrument de pêche) sur l'Adour, pour cette période. Finalement, la réduction des recrutements sur nos côtes Atlantiques est considérée comme égale au moins à 8% par an. anguilles dans les cours d'eau. Le programme INDICANG a notamment cherché à évaluer les populations de dévalaison d'anguilles. En suivant les captures journalières de pêcheries fluviales utilisant, à l'amont des marées, des engins de pêche identiques (de type guideau) barrant l'ensemble du courant descendant, il est possible de fournir des séries chronologiques de captures. Pour la Loire ces données, transformées en indices annuels, permettent de suivre l'évolution relative des anguilles argentées dévalant le cours inférieur du fleuve. 16 (données INDICANG. Indices annuels de dévalaison sur la Loire) . Pour la période analysée (1987-2006), on constate une baisse conséquente de l'indice à partir de 1999 qui passe alors nettement au-dessous de ses valeurs antérieures. Ceci confirme le diagnostic européen d'une population en situation problématique, même si la tendance à la baisse est moins visible sur le stock en rivière que sur le recrutement en civelles. Il n'apparaît pas facile non plus d'estimer les effectifs d'anguilles de montaison et d'avalaison dans les rivières selon les méthodes déclaratives habituelles : les pêcheurs amateurs à la ligne ne sont pas soumis à déclaration ; en outre, régulièrement, des anguilles argentées (dont la pêche est très encadrée) sont capturées avec des techniques variées, contrairement à la réglementation générale, et sont alors déclarées sous l'appellation d'anguilles jaunes. Toutefois quelques expériences isolées sont rapportées en France, souvent à l'initiative des professionnels, qui permettent de conforter les prévisions des scientifiques. Ainsi sur les cours moyen et inférieur de la Loire, considérée comme représentative d'un grand bassin versant à l'échelle européenne (117 054 km2 , 1/5 de la France et 1 020 km de linéaire), un recensement d'anguilles de dévalaison a été mené pendant une dizaine d'années par quatorze pêcheries. Ce programme financé par l'Europe, l'Etat, l'Agence de l'Eau et la Région notamment, consistait à re-capturer à l'aval des anguilles argentées marquées précédemment. 17 Les principaux résultats en sont les suivants : (Actes des rencontres internationales de Biarritz-25 au 27/11/2009) Ce comptage de terrain a permis d'avancer un ordre de grandeur de 300 000 individus qui s'échapperaient par grand bassin fluvial, soit pour 10 grands bassins en Europe Atlantique 3 millions de géniteurs par an. Avec le complément des petits bassins versants de 100km2 produisant chacun 500 géniteurs et qui sont au nombre de 45 000 (soit 22,5 millions de géniteurs), l'Europe, hors Baltique, produirait 25 millions de géniteurs par an. Cette évaluation ne doit être retenue qu'avec précaution car elle ne présume pas du sexe des anguilles qui s'échappent. Or l'indicateur privilégié pour la reconstitution du stock est celui des femelles, que leur grande taille rend aussi les plus vulnérables en rivières pour franchir les barrages ou accumuler les PCB . Finalement, les scientifiques admettent des taux de 5 à 10% seulement d'anguilles jaunes qui s'argentent. Le PGA , s'appuyant sur les données SNPE, annonce de la même façon des effectifs dans nos eaux douces divisés par deux entre 1997 et 2007, avec une réduction annuelle de 8% des anguilles jaunes, identique à celle des civelles. . Décisions de gestion Le plan de gestion « anguille » (PGA) Dès 2003 la Commission s'émouvait de la situation de l'anguille. Elle présentait une communication au Conseil et au Parlement européens (Com 2003/0573) appelant au « développement d'un plan d'actions communautaire concernant la gestion de l'anguille européenne » , puis un projet de règlement établissant des mesures de reconstitution (Com 2005/0201). Le Parlement européen, pour sa part, se saisissait également du problème en appuyant l'idée d'un plan d'action communautaire (Parlement européen, 2005). . 18 La reconstitution du stock d'anguilles était ainsi devenue une question d'importance internationale. Le règlement 1100/2 007 du 18 septembre 2007 du Conseil, pris dans la droite ligne de cette communication, a précisé un cadre pour la protection et l'exploitation durable du stock des anguilles. Il prévoit que les Etats membres élaborent des plans de gestion de l'anguille (PGA) qui s'appuient sur les trois principales causes de déclin identifiées, à savoir les obstacles infranchissables sur les cours d'eau, la pêche et les polluants . Celui de la France a été adopté par décision de la Commission du 15 février 2010. Pour ce qui est de la pêche et en sus des mesures de limitation (quota) ou d'interdiction, le PGA national impose notamment des mesures de reconstitution du stock à partir de repeuplement en anguilles de taille inférieure à 12cm (civelles) ou de transfert d'anguilles de taille inférieure à 20cm (anguillettes).Cette mesure correspond particulièrement bien aux écosystémes marins de notre pays puisque ses façades atlantiques surtout, et de mer du Nord dans une moindre mesure, assurent environ 80% du recrutement des civelles européennes dont la communauté scientifique considère qu'elles appartiennent toutes à une seule et unique population. L'obligation de repeuplement qui représente 10% des quota de pêche peut être honorée indifféremment sur notre territoire ou ceux d'autres pays de l'U.E. En France, pour compenser la perte économique qui pourrait résulter du repeuplement, c'est l'Etat qui prend en charge, après appel à projets, les frais afférents y compris l'achat des civelles au prix de 450/kg, prix considéré comme seuil de rentabilité de la pêche après vente aux mareyeurs. L'interdiction d'exportation hors d'Europe, dite « C.I.T.E.S. » A la Conférence des Parties de La Haye (juin 2007), l'Union européenne proposait d'inscrire l'anguille en annexe II de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (C.I.T.E.S.), proposition adoptée par 93 voix contre 9. Cette proposition a été transposée en droit européen par inscription de l'anguille en annexe B du règlement (CE) n° 338/97 qui met en oeuv re la CITES dans l'UE. Comme pour les espèces de l'annexe II de la CITES, le règlement conditionne les exportations hors d'Europe des espèces inscrites à l'annexe B à l'avis favorable de l'autorité scientifique CITES du pays exportateur, en l'occurrence le MNHN en France. Au sein du « Scientific Review Group » (SRG) , les autorités scientifiques des 27 Etats membres ont rendu un avis défavorable sur les exportations de civelles en décembre 2010 ( étendu à tous les stades biologiques de l'anguille en 2011). Cet avis étant contraignant, toute exportation de civelles hors UE est devenue interdite depuis 2010 et ce, jusqu'à ce que le SRG revienne éventuellement sur sa position. Cette interdiction est actuellement formalisée par la publication début 2012 d'un quota d'exportation d'anguilles fixé à zéro, à tous stades biologiques. 19 Les propositions de la pêcherie civelière face aux contraintes de gestion. La création de civelleries. L'interdiction d'exportation « CITES » a mis fin à un marché asiatique dont la filière a toujours considéré qu'il était porteur du marché et, à ce titre, particulièrement intéressant , le prix de 1000/Kg de civelles étant souvent avancé. D'après l'étude socio-économique de la pêcherie civelière française de l'IFREMER datée de 2009, les exportations asiatiques auraient précédemment absorbé de 40 à 50t d'une production totale française de 80t et auraient soutenu les achats à des cours élevés. Les professionnels civeliers se sont donc émus de la fermeture des frontières européennes, les seuls marchés européens ne pouvant plus, selon leur diagnostic, leur offrir de débouchés commerciaux suffisants. Les prix de vente devaient alors s'effondrer pour devenir proches des coûts de production, n'assurant plus la rentabilité de la pêcherie. Comme l'Europe impose que 60% des captures de civelles soient réservés au repeuplement au terme du P G A (1/7/2013) et que la France en est le premier et quasi-exclusif producteur, avec 80% des arrivées continentales, la profession a recherché les moyens de se garantir un prix de vente plancher pour repeuplement. Or aujourd'hui les pays européens du Nord qui ne peuvent repeupler au stade « civelles » à cause des hivers prolongés achètent en France des civelles pour les engraisser chez eux en civellerie jusqu'au stade d'« anguillettes » Par ailleurs, à partir des années 1950, la quantité d'anguilles capturées à l'état sauvage pour la consommation a si fortement décru que la majeure partie de celles destinées à l'alimentation est aujourd'hui produite en Europe par l'aquaculture. Ce phénomène a concerné l'anguille à tous les stades, civelles comprises, en raison de la demande considérable du sud-est asiatique et de ses prix attractifs. Escomptant une plus value économique en commercialisant à nos partenaires des anguillettes grossies sur le territoire français plutôt que des civelles pour satisfaire leurs obligations de repeuplement, avec un marché potentiel alimentaire ultérieur, les organisations socioprofessionnelles maritimes et fluviales, C.N.P.M.E.M et C.O.N.A.P.P.E.D, ainsi que leurs délégations locales, ont proposé de créer en France une ou des fermes aquacoles produisant dans l'immédiat des anguillettes de repeuplement . Ils ont entrepris des études pour aboutir à la création de civelleries en Pays de Loire et Aquitaine. Ces civelleries permettraient, selon eux, de répondre aux besoins européens en valorisant sur place la ressource « civelles » et en conservant pour la filière française la plus-value actuellement réalisée dans d'autres Etats membres. Le projet de Pays de Loire est assez avancé. Il associe les mareyeurs, eux aussi touchés par la perte de marché asiatique, et prévoit l'implication financière de toute la chaîne professionnelle regroupée en coopérative avec l'appui des collectivités territoriales et le soutien de l'Etat. 20 La création d'aquaculture d'anguilles. Au-delà du projet de civellerie en phase d'élaboration, la filière suggère la transformation ultérieure des civelleries en élevages d'anguilles en cycle fermé permettant la production de civelles à partir d'anguilles matures en aquaculture et leur vente hors UE ce que la réglementation européenne autorise. Elle fait valoir, notamment, le nombre d' emplois induits par ce type de « fermes aquacoles », évalués à au moins trois par pêcheur. Les ministres en charge de l'écologie et de la pêche ont donc souhaité qu'une mission conjointe du conseil général de l'écologie et du développement durable et du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et de l'espace rural étudie les perspectives de mise en place rapide de civelleries , et ultérieurement d'aquaculture d'anguilles, en France. II - CERTITUDES et INTERROGATIONS SCIENTIFIQUES Le recrutement décroît­il de façon alarmiste ? Les données qui ont été étudiées en groupe WGEEL dont les conclusions ont été rapportées précédemment sont, comme celles figurant dans le PGA, issues de différentes sources : déclarations obligatoires des pêcheurs, SNPE (suivi national de pêche aux engins ) ou pêches électriques de l'ONEMA ou SIH (système d'informations halieutiques) de l'IFREMER. Leurs agrégations ne sont pas toujours uniformes : déclarations des marins-pêcheurs et barrage d'Arzal pour la Vilaine par exemple avant le PGA. Parfois elles n'apparaissent pas très homogènes dans une même UGA (Loire), ou bien sont excellentes mais ne peuvent être maintenues pour des raisons externes . En outre les unités de gestion de l'anguille (UGA.) retenues par le PGA français ne coÏncident pas avec les bassins hydrographiques , ce qui ne permet pas d'assemblage rigoureux par bassin versant. Sur le plan de l'appréciation, enfin, rarement accompagnées de la quantification de l'effort de pêche déployé , elles restent peu comparables d'un lieu à l'autre et parfois d'une période à l'autre. De surcroît, aujourd'hui, les quota peuvent sensiblement découpler la relation entre captures et abondance sur l'ensemble de la saison. A titre d'illustration, la mission s'est penchée sur la méthode choisie pour fixer les quota de pêche autorisés chaque année. L'administration fait alors appel à l'expertise d'un comité scientifique composé de membres de l'IFREMER, de l'INRA, du MNHN et de l'IRSTEA pour évaluer les recrutements. Pour formuler ses propositions, ce groupe ne dispose que des informations qui lui sont fournies par les services publics, elles-mêmes issues des saisons de pêche antérieures : SIH de l'IFREMER qui ne concernent que les marins-pêcheurs, SNPE de l'ONEMA pour les fluviaux, renseignements incomplets ou antérieurs à 2005 qu'il faut extrapoler ... 21 Ainsi le comité s'est-il limité ces deux dernières années ( la mission n'est pas remontée au-delà) à estimer des tendances de recrutement sans donner d'estimation réelle des effectifs de civelles abordant nos côtes. Complémentairement au niveau européen, le WGEEL recommande certains principes méthodologiques harmonisés entre Etats quant à l'intercalibration des mesures d'évaluation, quant à la collecte des données et quant à la préparation de la post-évaluation 2012 des PGA. Ainsi à tous niveaux, les séries, quand elles existent, sont d'une grande hétérogénéité, alors que l'anguille devrait être traitée et appréciée sur les mêmes bases et uniformément pour l'ensemble de sa population. Toute cette diversité conduit au doute sur le résultat et suggère tout simplement l'approximation. La France qui est en quelque sorte le « berceau européen de la civelle (et de l'anguille) en en étant l'essentiel pourvoyeur, a toute légitimité à promouvoir l'harmonisation des méthodes scientifiques de suivi de l'espèce. Elle pourrait saisir le CIEM, organe scientifique de la Commission, qui rassemble les autorités scientifiques des Etats membres Recommandation 1 Promouvoir auprès de l'expert scientifique de la Commission (le CIEM) une méthode scientifique unique et normalisée au niveau européen pour évaluer la population des civelles. Les effectifs d'anguilles de nos rivières sont-ils au plus bas ? Comme noté précédemment, les résultats INDICANG , les marquages re-captures d'anguilles, les avis des pêcheurs d'eau douce et toutes les observations de terrain font le constat d'une quasi disparition des anguilles en milieu fluvial. Finalement, les conclusions des scientifiques concernant les populations en rivière s'arrêtent sur une fourchette de 5 à 10% d'anguilles jaunes qui s'argenteraient et le PGA annonce des effectifs divisés par deux entre 1997 et 2007, ce qui donne une réduction probable de 8% des anguilles jaunes chaque année, sans que soient données d'indications sur les effectifs de l'un ou l'autre stade biologique. Ces approximations correspondent au manque de précisions des informations disponibles et aux difficultés de « comptages » des effectifs d'anguilles en rivières. Cependant justement parce que le séjour de l'espèce en rivière représente la plus grande partie de sa vie et qu'il peut être considéré comme facile à observer contrairement à son séjour marin, la mission s'étonne qu'il n'ait pas encore fait l'objet de modélisation 22 C'est une méthode bien connue dans le secteur de la pêche que de s'appuyer sur les modèles de dynamique des populations pour prendre des décisions halieutiques, notamment pour ce qui concerne les effectifs autorisés à la pêche. Pour l'anguille en phase continentale, l'exercice est certes plus complexe avec l'interférence de multiples facteurs écologiques, anthropiques, voire climatiques mais il relève d'un domaine scientifique déjà exploré . Recommandation 2 Demander aux établissements publics de recherche d'élaborer un ou des modèles de dynamique des populations des anguilles pendant leurs stades biologiques continentaux. Les effets du repeuplement peuvent-ils être valablement estimés aujourd'hui ? Le WGEEL s'est montré déçu des résultats obtenus par les campagnes de repeuplement au regard de la constante diminution des stocks dans les séries dont il dispose. Pour les raisons ci-dessus exposées quant à la fiabilité des données et l'hétérogénéité des estimations actuelles, il semble hasardeux de fonder un quelconque jugement sur ces seules séries. Par ailleurs, comment évaluer le bénéfice de mesures de repeuplement en civelles qui n'ont cours que depuis peu de saisons, alors que l'anguille vit de 5 ans (pour les mâles) à 10 ans (pour les femelles) en rivières avant d'en repartir pour les Sargasses, les civelles dérivant 2 à 3 ans pour en revenir et, qu'en outre, aujourd'hui, les taux de mortalité en eau douce sont encore très mal connus ? D'ailleurs pour la saison 2011-2012, après quatre semaines de pêche seulement en Bretagne, le quota de pêche alloué et destiné à la consommation, a été épuisé à la faveur de conditions hydro climatiques hors normes, favorisant la mobilité et la colonisation des rivières par des civelles surabondantes, et la pêche a été fermée dès le 31 décembre après seulement 4 semaines. De même dans les bassins d'Adour, Gironde, Charente et Vendée la pêche a été particulièrement exceptionnelle. Ces événements ont pu apparaître comme des démentis des estimations scientifiques pessimistes et faire croire à de l'incompétence. Ils appellent avec d'autant plus d'acuité la mise en place d'une méthode solide et indiscutable de recueil des données sur l'anguille applicable en eau douce comme en milieux marins. L'IRSTEA pourrait être sollicité pour créer , en lien avec le MNHN , et en collaboration avec l'ONEMA, un protocole de recueil de données de terrain facilement exploitables par les autorités scientifiques appelées à les analyser. 23 Recommandation 3 Solliciter les établissements scientifiques français spécialisés (MNHN, IRSTEA, ONEMA....) pour créer un protocole standard de recueil de données de terrain facilement exploitables par des scientifiques et chercheurs. Le repeuplement est-il efficace pour reconstituer les stocks ? Même si le repeuplement a pu être considéré à l'origine comme une mesure de reconstitution des populations, d'où son inscription en bonne place du règlement européen, les scientifiques commencent à s'interroger aujourd'hui sur sa réelle efficacité. Le CIEM (conseil international pour l'exploration de la mer) doute, sur avis du WGEEL, de la suffisance des recrutements pour satisfaire les repeuplements. Le MNHN, par la voix de Madame Sylvie Dufour, Directrice de l'UMR BOREA "Biologie des Organismes et Ecosystèmes Aquatiques"., considère même que les recrutements sont insuffisants pour assurer la reconstitution du stock. La communauté scientifique a peu de recul sur les repeuplements et l'efficacité de ce type d'action reste discutée. Ainsi, dans son avis de 2010, le CIEM va jusqu'à considérer qu'il est peu probable que les programmes de repeuplement contribuent à la restauration du stock d'anguilles... Dans son PGA, la France se montre, elle aussi, très prudente lorsqu'elle indique : La communauté scientifique reste encore divisée sur les effets des actions de repeuplement inter-bassins. Dans ce contexte, la France ne mise pas massivement en première approche sur le repeuplement en tant que mesure de reconstitution. En effet, les façades maritimes françaises bénéficient encore d'arrivées de civelles et l'objectif premier du plan de gestion est de réduire les mortalités sur l'ensemble des bassins pour leur permettre de re-coloniser naturellement leurs habitats historiques Au vu de ces éléments, la mission considère que des incertitudes persistent encore quant à l'efficacité des repeuplements pour rétablir la population d'anguilles. En période de baisse des recrutements, elle estime que la France pourrait rencontrer des difficultés pour tenir ses engagements quant à l'approvisionnement de ses voisins européens en civelles de repeuplement. C'est une question qui nécessiterait certainement d'être traitée préventivement au niveau européen. 24 Recommandation 4 Faire remonter à la Commission européenne les problèmes posés par l'approvisionnement en civelles de repeuplement des pays membres, en période de décrue de recrutement des civelles en France. La pêche est-elle responsable de la diminution des stocks d'anguilles ? Malgré une résistance remarquable, le chemin que parcourt l'anguille tout au long de sa vie, est semé d'embûches dans les eaux continentales, tant à la montaison (anguilles jaunes) qu'à l'avalaison (anguilles argentées), du fait des prédateurs et des activités humaines (ouvrages sur les rivières, pollutions, pêche...) , comme dans les eaux maritimes. De l'avis convergent des scientifiques français (MNHN, IRSTEA, INRA) comme de celui de ceux des autres pays européens (Suède, Pologne, Allemagne, Italie) ou organismes internationaux ( FAO-CGPM, FAO-EIFAC, CIEM, etc.), cette dangerosité aurait trois causes principales : la pollution des eaux douces dont ont été vu les effets, principalement dans les grands fleuves d'Europe du Nord, puisqu'elle a entraîné un premier effondrement des stocks de cette région. Cette pollution agit d'une part sur la remontée des civelles gênées par le niveau de certains polluants, et d'autre part sur la maturation sexuelle des anguilles d'avalaison, certains métaux lourds (cadmium) ou produits complexes (PCB), dont l'anguille est un fort accumulateur, ayant des effets très défavorables sur la maturité sexuelle, le développement des gonades ou même la croissance larvaire, la multiplication des obstacles physiques, notamment des grands barrages, bloquant ou freinant la remontée des civelles et détruisant les anguilles d'avalaison prises dans le turbinage, la sur-pêche, généralisée durant les années 60 et 70 dans toute l'Europe sur les anguilles jaunes et argentées, et en France sur les civelles. - - Les scientifiques s'accordent pour dire que la sur-pêche n'est pas le seul facteur de cet effondrement, même s'il est important, mais c'est celui sur lequel on peut agir le plus rapidement, dans l'attente d'une amélioration des conditions chimiques et physiques des eaux continentales. La France s'est engagée à restaurer la population d'anguilles en agissant sur ces trois causes de mortalité. Pour la pêche, elle met en oeuvre et contrôle les quota après avoir sérieusement réduit les possibilités de pêche de toutes natures. 25 Evidemment le braconnage , dont l'évaluation est difficile, échappe au resserrement de la réglementation et s'avère difficilement répressible, mais les personnels en charge de police de terrain ont été appelés à renforcer leur surveillance face à une « cueillette » aussi attractive. Pour les autres causes, la France a rappelé dans le PGA, ses engagements dans la mise en oeuvre de la convention internationale RAMSAR de 1971 sur les zones humides ; les Directive cadre sur l'eau (2000) et cadre stratégie pour le milieu marin (2008) permettant d'atteindre le bon état des eaux ; les plans nationaux interministériels d'actions concernant les PCB ; et le code de l'environnement, notamment, dans ses prescriptions concernant le franchissement des ouvrages, pour éviter le turbinage et pour assurer la continuité écologique. Ces mesures qui relèvent du niveau local (SDAGE et SAGE) marquent un retard significatif sur le calendrier prescrit . Il convient d'en hâter la mise en oeuvre. Il semblerait, d'après les dernières statistiques illustrées diffusées par GEST'EAU qu'à peine 19 SAGE sur plus de 170 étaient mis en oeuvre fin 2011. Recommandation 5 Accélérer la réalisation des SAGE, notamment sur la façade Atlantique, dont la mise en oeuvre conditionne le bon état des eaux et leur reconquête biologique, en particulier par l'anguille, sentinelle de l'état écologique des milieux aquatiques. Toutes les causes de mortalité de l'anguille sont-elles connues? Alors que l'écologie de l'anguille est bien connue dans ses périodes aquatiques continentales, on ne sait rien ou presque de ses phases océaniques, depuis les découvertes de Shmidt sur son lieu probable de reproduction dans la mer des Sargasses. Or tous les événements clefs associés à sa reproduction et à la survivance des oeufs et des larves se produisent en mer. Cette méconnaissance est évidemment liée en grande partie au challenge technique que représente, dès l'aller, le suivi de populations sur d'aussi longs périples marins, avec des cheminements individuels variables et des positionnements trop profonds deux fois par 24h pour être localisables. C'est pourquoi les phases d'après échappement des adultes des continents et d'avant recrutement des civelles ont souvent été désignées par l'image de « the big blue box » (« la grande boîte bleue »), tant était obscur ce que pouvait y être le devenir de l'anguille. 26 Fin 2006, l'Union Européenne retenait le projet EELIAD (European eels in the Atlantic) , pour 2,6M parmi sept programmes de recherche destinés à renforcer la connaissance des ressources naturelles. Ce programme international (il associe Canada, Danemark, France/INRA, Irlande, Norvège, Royaume-Uni qui en est le promoteur, et USA) vise à identifier les raisons du déclin du stock d`anguilles et à contribuer à l'amélioration des mesures de gestion des habitats et pêcheries susceptibles de contribuer au plan européen « anguilles ». Les premiers résultats du projet EELIAD, inachevé à ce jour, viennent d'être publiés : un marquage par émetteur enregistreur (de type pop-up satellite archival tag ou PSAT) de plusieurs centaines d'anguilles argentées a permis de confirmer le comportement migratoire (et nycthéméral) des anguilles mais il a aussi apporté des informations sur leur environnement . Ainsi a-t-on découvert que certains de ces migrateurs étaient ingérés par des poissons de grande taille et, probablement, des mammifères-marins compte tenu de leur profondeur de nage, lesquels expulsent les balises souvent à nouveau avalées par des oiseaux puis régurgitées sur des plages. Il est souhaitable que le projet encore à ses débuts, puisse être prolongé au delà de 2012 , en principe son terme, pour permettre une évaluation statistique fiable de la mortalité des anguilles argentées « balisées ». Pour les leptocéphales , il est admis qu'une perte assez importante peut se produire en étant siphonnés avec d'autres espèces planctoniques par d'autres poissons. Un volet complémentaire consacré aux leptocéphales , particulièrement leur déperdition in eo itinere, permettrait de boucler un cycle biologique dont les « zones d'ombre » amènent peut-être à taxer trop fortement les acteurs des phases situées en « zones claires ». Recommandation 6 Poursuivre la participation française au projet EELIAD dont les premiers résultats ne permettent pas encore de préjuger du devenir des anguilles, notamment en matière de mortalité, au cours de leur long périple vers leur zone de reproduction, la mer des Sargasses, à l'aller comme au retour. III - ANALYSE DES RISQUES ECONOMIQUES La fermeture des frontières « CITES » a-t-elle fait baisser les prix des civelles? L'étude socio-économique sur la pêcherie civelière française de l'IFREMER (rendue en 2009) constatait que la pêche professionnelle civelière présentait des capacités de reconversion limitées. 27 Elle prévoyait donc que la fermeture du marché asiatique et la réservation d'une partie de la production pour le repeuplement toucheraient l'ensemble de la pêcherie et qu'elles représentaient une menace pour sa viabilité économique du fait de la division escomptée par deux du cours du marché mondial. Les représentants nationaux des pêcheurs professionnels marins et d'eau douce se sont fait l'écho de ces prévisions auprès des autorités pour asseoir leur proposition de civelleries et d'aquacultures d'anguilles . Deux questions se posent donc : y a-t-il eu répercussion sur les volumes de civelles exportées par la France de la fermeture des frontières de l'Europe, comme annoncé ? et y a-t-il eu chute des prix des civelles françaises vendues en Europe? Sur ces deux questions, FranceAgriMer (FAM) a fourni les tableaux des exportations enregistrées auprès de ses services pour les années 2008,2009,2010 et 2011 pour les anguilles vivantes et alevins(civelles). Ventes à l'exportation d'anguilles vivantes à tous stades et d'alevins (Source F.A.M.) Poids (t) 2008 (dont Chine 39 t) 2009 (dont Chine 7t) 2010 (dont Chine 14t) 2011 (dont Chine 0t) 286,6 282 358 201,4 Valeur (K) 30 972 9614 22 593 10 913 Moyenne (/Kg) 108,07 34,04 63,14 54,19 Quantitativement l'année 2011, où les frontières étaient fermées pour les exportations hors UE, marque effectivement une certaine inflexion à la baisse par rapport aux deux années précédentes (2010 et 2009). Toutefois compte tenu des faibles tonnages exportés ces deux années-là vers la Chine, il est délicat d'en conclure à une relation directe avec la perte du marché asiatique. Si l'on ne retient des données de FAM que celles qui concernent les acheteurs ayant consacré plus de 300/kg à l'achat qui représenteraient, d'après FAM et la DPMA, les acheteurs de civelles, les ventes de civelles à l'exportation ont pu être réparties sur la même période (cf tableau page suivante).. 28 2008 Poids (t) Chine Danemark Pays Bas 39,17 3,05 - Valeur (k) 19 276 1509 80,6 2791 1594 99 26 272 2009 Poids (t) 7 3 2 2 14 Valeur (k) 2285 1436 913 395 5029 2010 Poids (t) 14 3 4 3 -1 25 Valeur (k) 11 986 1328 1716 1164 289 16 483 2011 Poids (t) 4 4,5 4,2 0,6 0,9 0,1 0,1 14,4 Valeur (k) 2105 1565 1799 267 359 56 38 6189 Hong Kong 1,58 + Taïwan Roy. Uni Allemagne Rép. Tchèque Grèce Belgique Pologne TOTAL Prix moyen /kg (Source F.A.M.) 5,15 2,94 0,21 52,52 500,24 /kg 359 /kg 659 /kg 430 /kg Même s'il serait audacieux de conclure avec certitude que la fermeture du marché de l'exportation vers la Chine est restée sans effet, les trois campagnes de pêche qui ont précédé la mise en route du moratoire CITES ne sont toutefois pas démonstratives de cours de la civelle de très haut niveau par rapport à 2011. Il est probable que le soutien du marché apporté par le gouvernement , avec des appels à projet pour repeuplement en France sur la base de 450/kg, prix donné comme seuil de rentabilité de la pêcherie, ait pu servir de mercuriale pour les cours à l'exportation comme pour le marché intérieur. En revanche, la mission a noté l'arrivée de nouveaux acheteurs de pays de l'Europe orientale ( Grèce, Pologne, République Tchèque) qu'il y aurait intérêt à fidéliser 29 Recommandation 7 Aussi longtemps que sera maintenu le cadre actuel d'obligation de repeuplements et d'interdiction « CITES », mobiliser les conseillers agricoles de nos ambassades européennes sur l'importance de nos exportations vers les autres Etats membres. La crise de la pêche civelière française est-elle liée aux contraintes PGA et « CITES »?. Deux études socio-économiques, achevées en 2009, ont été consacrées aux pêcheries civelières professionnelles en eau douce (étude AND International) et en eau maritime et estuarienne (IFREMER). Pour les pêcheurs maritimes et estuariens de la façade Atlantique qui exerçaient sur 679 navires et dont l'activité civelière représentait au moins 36% de l'activité, les chiffres d'affaires liés à la civelle s'échelonnaient de 30 823 à 103 511, selon la dépendance à la civelle et la taille du navire (les pêches diversifiées à d'autres espèces que la civelle étaient incluses dans ces résultats). Cependant un bon tiers (236) dont les embarcations mesuraient moins de 9 métres n'obtenait pas de chiffre d'affaires supérieur à 50 794 . Quant aux fluviaux, l'ANDI cite des chiffres d'affaires moyens de 46 600 à 48 900. En prenant la proportion de 60% avancée dans l'étude PECOSUD de 2000, réalisée sur 55 pêcheurs estuariens et fluviaux, comme rapport entre le revenu du patron seul à bord et son chiffre d'affaires, les minima constatés sur mer et en eau douce donneraient un revenu approximatif du patron de 18 000 à 25 000 .1 Parallèlement, l'évolution concernant les professionnels pratiquant la pêche à la civelle sur la période 2006/2011, en ne comptabilisant les droits à pêche civelle qu'en début d'année, c'est à dire avant les plans de sortie de flotte pour les marins pêcheurs, n'a cessé de décroître. année Marins-pêcheurs2 TOTAUX 2006 853 1224 2007 862 343 1205 2008 814 328 1142 2009 753 205 958 2010 643 180 823 2011 573 158 731 Evolution 2006/2011 -32,83% -57,41% -40,28% Pêcheurs fluviaux3 371 1 pour mémoire : le revenu moyen des agriculteurs français en 2011 s'est élevé en moyenne à 30200 par actif, avec des extrêmes de 10100 pour les maraîchers et 55900 pour les viticulteurs. La procédure AGRIDIFF est déclenchée pour un revenu annuel inférieur au SMIC (12900 environ). 2 origine CMEA 3 origine CONAPPED 30 Même en rétablissant les 195 navires qui ont été retirés de la pêche civelière à l'occasion des quatre plans de sortie de flotte des mêmes années (2008-2009-20102011), la diminution « naturelle » de la flotte aurait été de 19% (presque 1 navire sur 5). Dans ces conditions les contraintes supplémentaires du PGA en matière de réduction de captures et de ventes sont venues toucher de plein fouet une filière déjà en crise économique et dont les problèmes structurels préexistaient au règlement européen. La mission tient à souligner les efforts déployés par le ministère en charge de la pêche pour mobiliser les moyens susceptibles d'alléger les conséquences de la crise : dispositifs d'arrêts temporaires d'activité en février et mars 2011 ; quatre plans de sortie de flotte chaque année depuis 2008 pour 12,2M sur le FEP à l'intention des pêcheurs maritimes et estuariens ; et leur équivalent, un plan de cessation d'activité , pour 182 pêcheurs fluviaux (sur 391) en 2012 déjà évalué à 7,3M sur trois ans. Cependant l'ampleur des fonds publics qui auront été consacrés à la filière comparée à la persistance de la crise structurelle de la pêcherie tant fluviale qu'estuarienne amène au surplus à s'interroger sur les questions de gouvernance particulières de l'espèce. Questions de gouvernance Ce dossier de pêche à la civelle semble tout à fait caractéristique des problèmes que rencontre encore notre société pour mener à bien des questions sociétales qui mêlent des intérêts écologiques et économiques. En l'occurrence, des difficultés de gouvernance semblent naître de la gestion d'impératifs de nature écologique concernant l'anguille et de la poursuite d'activités économiques s'agissant des pêcheurs. Deux politiques qui paraissent divergentes sont aujourd'hui mises en oeuvre par les autorités publiques qui en obscurcissent les objectifs et en gênent la réalisation. D'une part, L'Etat doit gérer un problème écologique de gestion de l'anguille, espèce réputée en déclin au plan international. Pour y parvenir, il pilote un P.G.A dont la mesure essentielle consiste à réduire les quota nationaux de capture de son alevin, la civelle, dans l'objectif de reconstituer les stocks d'adultes. Cependant il s'agit d'une politique à long terme, dont l'échéance ne peut être fixée dès à présent et sur laquelle les scientifiques s'interrogent, en particulier , mais pas seulement, au regard de l'insuffisante activation des mesures d'accompagnement en faveur des écosystèmes aquatiques maritimes et fluviaux. D'autre part, l'Etat est confronté aux problèmes économiques d'une pêcherie civelière spécialisée qui a des difficultés à s'adapter à la raréfaction de son unique ressource et à l'application de quota en baisse. Il dispose alors des plans de sortie de flotte (PSF) ou de cessation d'activité (PCA) qui corrigent la surcapacité de la flotte par rapport à la ressource. 31 Cependant il s'agit là d'une politique à court terme qui, au jour le jour, procède à des ajustements en imposant des cessations définitives d'activité aux professionnels2 avec destruction de leur navire et qui, au rythme actuel, laisse plutôt augurer la disparition de l'espèce que la restauration ciblée par l'autre volet politique. Cette ensemble manque de lisibilité et, de surcroît, il ne semble efficace pour aucun de ses deux objectifs. La sauvegarde de l'espèce comme soutien économique des pêcheurs n'empêche en effet ni poursuite du déclin de l'anguille ni crise structurelle de la pêcherie.... La mission considère qu'il est indispensable que les services de l'Etat choisissent et annoncent un objectif précis. La protection de l'anguille étant une priorité incontournable, quel devenir est recherché pour la pêcherie ? Certains scientifiques vont jusqu'à préconiser de mettre fin à une pratique de pêche singulière. Cette option présenterait l'avantage de la cohérence et de la simplicité. Elle permettrait à la France de se dégager des obligations de repeuplement sur son propre territoire prévues par le PGA , et ses voisins européens, qui sont dépourvus en civelles, pourraient s'approvisionner sur les marchés ibérique et portugais. Mais la radicalité du choix invite à en prévenir les conséquences humaines. Elle imposerait d'une part, que les pêcheurs en soient clairement informés dés à présent, quel que soit le terme de réalisation escompté, et d'autre part, que toutes les solutions honorables pour leur permettre d'abandonner cette activité soient mises en oeuvre. Par ailleurs la vitalité de bon nombre de mareyeurs devrait, si on les en croit, être consolidée par des solutions économiques à trouver. Cette voie n'exonérerait pas l'Etat, simultanément, de montrer sa volonté exemplaire d'aboutir à la reconstitution de l'espèce et d'activer tous les leviers réglementaires en sa possession (DCE, DCSMM, plan PCB,lutte contre le braconnage...) pour y parvenir. Enfin, comme déjà mentionné, ces scientifiques considèrent que l'objectif poursuivi quant à la reconstitution des populations d'anguilles en l'absence de tout dommage anthropique ou naturel, ne pourrait de toutes façons être atteint que dans de nombreuses années. Une voie d'avenir, que privilégie la mission, consisterait à maintenir une pêcherie concurrentielle , avec des stocks halieutiques durables . Elle s'appuierait sur la responsabilisation et la volonté de la filière de s'organiser pour adapter son développement économique aux conditions actuelles et à venir de protection et de croissance de l'espèce. Depuis 2008, 195 marins-pêcheurs, soit 17% de l'effectif initial. En outre le plan qui serait prévu pour les professionnels fluviaux cette année affecterait 182 d'entre les 391, soit 46%. 2 32 Dans ce cadre, pourrait être choisi de déléguer à une organisation constituée entre professionnels (art.L912-11 du code rural), la responsabilité de répartir par UGA ou par bassin versant, les quantités individuelles qui peuvent être pêchées chaque année au sein des quota arrêtés par l'Etat. Les avantages écologiques et économiques d'une telle mesure sont déjà connus : - étalement de la campagne de pêche au bénéfice de l'espèce pêchée (ici de civelles3 ) - amélioration de la qualité des produits, en accroissant les taux de survie des civelles, actuellement très variables (Briand et al., 2008, Créan et al., 2007, Leroux et al., 2002) - et diversification « obligatoire » des activités halieutiques pour le bienfait des professionnels. En amont, l'organisation professionnelle devrait être mieux associée à la définition des conditions de suivi de l'état des populations, à la répartition des limitations nationales de pêche ainsi qu'aux programmes de soutien des effectifs. Cette organisation semble accessible. Les professionnels de l'ensemble de la filière ont montré qu'ils étaient prêts à s'associer pour créer des civelleries et des aquacultures. Ce mouvement de solidarité collective serait sollicité. L'Etat mettrait les professionnels face à la problématique de durabilité et de bon équilibre à trouver entre l'industrie de la pêche et les stocks. Ceux-ci devraient lui proposer une organisation commune qui réponde à ces défis4. L'association de cette organisation à la gestion de l'espèce particulière à laquelle chacun de ses membres est lié, semble logique et légitime. Déjà les marins-pêcheurs d'estuaires qui pêchent entre la limite de salure des eaux et la limite transversale de la mer, participent aux comités de gestion des poissons migrateurs (CO.GE.PO.MI.) de Bassins, régis par les articles R436-47 et R436-49 du code de l'environnement . Ils concourent dans cette instance, représentés par les CRPMEM, à l'élaboration des plans de gestion des poissons migrateurs (PLA.GE.PO.MI) qui prévoient notamment , en milieu fluvial, selon l'article R436-45 : « ...des mesures utiles ...à la conservation de ces poissons (les migrateurs)... ......des modalités d'estimation des stocks et ... de la quantité qui peut être pêchée chaque année... ......les modalités de la limitation éventuelle des pêches... » 3 4 Contrairement à la saison 2011/2012, par exemple, où le quota de certaine UGA était épuisé dès le 15/12/2011 le découpage actuel des CRPMEM/CLPMEM ne correspond pas aux UGA. 33 Complémentaire de la gestion collective qui existe en rivière, la consultation formalisée d'une organisation représentative de l'ensemble des professionnels, marins-pêcheurs comme mareyeurs, assurerait ainsi la continuité de gestion de l'anguille , aujourd'hui gérée par une instance participative5 lorsqu'elle est en phase continentale et plutôt régalienne lorsqu'elle se trouve en phase marine6. Enfin l'option est relativement aisée quant à la mise en place des quota individuels, puisque les licences individuelles de pêche sont depuis la loi du 2 mai 1991 instruites par les CLPMEM. Recommandation 8 Les services de l'Etat doivent annoncer l'objectif de leur politique halieutique : la protection de l'anguille étant une priorité, quel devenir est souhaité pour la pêcherie ? IV - CIVELLERIES ET ELEVAGE d'ANGUILLES REPONDENT-ILS PROBLEMES POSES? AUX La production d'anguillettes est-elle opportune? elle est possible en civellerie. Aux propositions de la profession de créer en France des civelleries d'engraissement opérationnelles pour obtenir des anguillettes (12cm au plus) de quelques grammes (6 à 10g) répondent évidemment celles qui fonctionnent, par exemple, dans les pays européens du Nord (Danemark, Pays-Bas, Allemagne et quelques sites autour de la Baltique) Cependant, s'il n'existe plus en France depuis le début des années 1980, d'unités de grossissement de civelles, plusieurs projets avaient vu le jour durant les années 1970. Leur objectif était de valoriser la civelle vendue à l'époque à un prix relativement bas (environ 50 FF par kilo, ce qui représenterait 15 à 20 euros actuellement), soit en Espagne pour la consommation directe, soit en Italie pour la mise en élevage. 5 6 régie par des articles en R du code de l'environnement. Régie par des articles en L du code rural et de la pêche. 34 Les premières tentatives commerciales avaient été menées par la Compagnie des Salins du Midi à Sète. Un projet pilote avait été financé par le CNEXO sur le Domaine de Certes à Audenge ­ Bassin d'Arcachon ; une civellerie expérimentale avait été construite également au sein du CEMAGREF de Bordeaux (à l'époque, CTGREF) ; enfin existait un projet pilote soutenu par l'AFNOR basé sur l'utilisation des eaux chaudes de la centrale nucléaire de Saint-Laurent de Eaux. Aucun de ces projets ne s'est avéré commercialement viable. Les raisons de cet échec sont à rechercher dans le manque d'expérience locale en matière d'élevage, le coût élevé de l'aliment utilisé du fait d'une certaine méconnaissance des besoins alimentaires de l'espèce, et la main-d'oeuvre onéreuse liée aux besoins en nettoyage des bassins et des traitements sanitaires, et le développement de nombreux pathogènes et parasites alors incontrôlés. En revanche, l'Italie, puis certains pays du Nord de l'Europe, s'équipèrent de civelleries, destinées uniquement à alimenter en anguillettes des élevages intensifs d'anguilles destinées soit au marché en frais (Italie) soit au fumage (Italie , Pays-Bas, Danemark). Malgré le coût élevé du grossissement de civelles, la marge dégagée dans le stade de l'élevage jusqu'à la commercialisation permet, semble-t-il, de rentabiliser l'exploitation. Le schéma de grossissement de la civelle est maintenant assez bien maîtrisé. Le début de l'élevage s'effectue généralement en circuit fermé (maîtrise des conditions d'élevage), dans des bacs de 3 à 4 m3. Après un démarrage à l'aliment naturel (à base d'oeufs de poissons, en général), les civelles sont conditionnées à l'aliment artificiel, qui à ce stade est présenté sous forme humide. Cet aliment est disponible dans le commerce (groupes Biomar, Skretting, par exemple..). Il permet d'atteindre un poids de l'ordre de 5 g., au moment où elles sont adaptées à un aliment sec, puis transférées en bassins d'élevage de juvéniles . Les conditions de succès de cette phase repose principalement sur le contrôle des conditions d'élevage et des maladies, la civelle étant encore fragile. Cette phase demande donc une main d'oeuvre assez importante (par rapport à d'autres élevages piscicoles), et bien formée. La plupart des élevages commerciaux d'anguilles, gèrent eux mêmes ces civelleries, de façon à mieux connaître l'historique de leurs animaux. mais elle pose des problèmes particuliers liés à l'aquaculture. En bassin aquacole sont bien connus les problèmes sanitaires incontrôlables de l'aquaculture dont n'ont pu être identifiées les conséquences chez l'adulte (stade biologique restant à découvrir, rappelons-le). De surcroît sont aussi reconnus aujourd'hui : - des signes de dérive physiologique dans la sexualité exprimée par les anguillettes produites qui, par influence environnementale (et non génétique), présentent une forte prédominance de mâles, moins « utiles » pour la reproduction ; - des altérations de comportement alimentaire, nonobstant l'efficacité proprement dite de ce type d'engraissement « forcé » des civelles. Ces questions-là sont encore mal maîtrisées. 35 et la production d'anguillettes est inadaptée au repeuplement S'agissant du repeuplement en civelles en Europe, WGEEL note une forte décroissance à partir de 1990 qui semble légèrement s'estomper depuis 1999. (repeuplement en civelles, en millions, en Europe. source WGEEL). Toutefois, selon des données rapportées par le WGEEL, des pays du Nord compenseraient le manque de civelles de repeuplement par un surcroît de repeuplement en anguillettes. La courbe suivante, qui produit les effectifs d'anguillettes ayant permis de repeupler entre 1947 et 2011 et affecte en effet une hausse très nette à partir des années 90 en s'y maintenant à quelques événements accidentels près, paraît en effet probante quant à une certaine compensation. 36 .(repeuplement en anguillettes, en millions, en Europe. source WGEEL) Or, parmi les rares expérimentations de suivi de repeuplement Wickström (Wickström et al., 1996), entre 1980 et 1994, a relaté celle d'un lâcher de civelles pré-grossies en hors-sol (23-25° c pendant 7 mois). Ce lâcher s'est effectué dans deux lacs suédois, le premier profond et riche sur le plan trophique, l'autre plus profond et moins riche. Le plus riche repeuplé à l'origine en 1980 par 53 000 anguillettes de 11 cm (et 3 g) a permis d'obtenir, 11 ans plus tard, 5 900 anguilles argentées, dénotant un taux de survie de 11 % entre les deux périodes, et avec des niveaux de croissance très échelonnés de 2 à 11 cm/an. L'autre lac, moins riche, a donné des résultats décevants en termes de croissance et de recapture (à peine 1 %) sur la même période. Cette expérimentation ne va pas au-delà du constat de survie et de croissance constatées dans chacun des lacs sans pouvoir aborder l'aspect économique du grossissement ni l'efficacité de l'élevage en termes de retour au site de reproduction, les deux lacs étant fermés et elle ne peut dresser de bilan comparatif avec un parcours naturel, les données n'existant pas. Elle aboutit toutefois à des taux de survie si faibles comparés à ceux donnés pour les populations naturelles qu'une relation avec le pré-grossissement paraît probable. Une autre expérience effectuée par L WESTIN a étudié les mécanismes d'orientation de l'anguille européenne, sur un programme en mer Baltique (1980) avec des anguillettes de repeuplement obtenues à partir de civelles en provenance de France. Il constate que pour les anguilles obtenues, au moment des migrations, le sens de l'orientation pour leur retour vers la mer des Sargasses semble être perturbé puisqu'elles prennent un chemin détourné par rapport aux anguilles sauvages indigènes. 37 Il conclut que ce phénomène pourrait générer une faible contribution des anguilles issues de repeuplement à la reproduction en mer des Sargasses et participer au déclin de la population de civelles de l'Europe de l'Ouest constaté ces dernières décennies. Il est donc probable que les repeuplements effectués à partir de civelles importées du Royaume Uni ou de France, depuis quelques années , notamment dans les pays du Nord de l'Europe, ne semblent pas avoir eu d'effets sur le niveau des stocks, du fait que les anguilles d'avalaison issues de ces repeuplements ne retrouvent que difficilement le chemin de l'océan. Le seul effet positif a été de renforcer les stocks exploités dans ces pays, avec cependant un taux de re-capture généralement assez faible (de l'ordre de 3 % en Pologne, par exemple). Au vu de ces éléments, la mission considère que la tolérance du règlement européen pour les repeuplements en anguillettes si elle devait perdurer alors que la France est pratiquement le seul pays à fournir les demandes en civelles, justifierait de meilleures bases scientifiques. Recommandation 9 Demander aux établissements scientifiques spécialisés une évaluation scientifique précise de l'efficacité des repeuplements à partir d'anguillettes d'aquaculture d'engraissement. La production d'anguillettes économiquement viable ? en civelleries d'engraissement est-elle Les projets de civellerie en Pays de Loire et Aquitaine élaborés par les professionnels sont présentés en équilibre économique ou devant l'être. Pour le plus avancé, celui d'Aquitaine, il est basé sur un budget équilibré avec 2,1 tonnes de civelles qui seraient vendues grossies en anguillettes pour 24 tonnes au total. Or actuellement, le marché lié à la consommation alimentaire est déjà occupé par les pays du Nord qui produisent des anguillettes, Pologne, Danemark, Pays-Bas et Allemagne notamment, ces trois derniers ayant de surcroît une très forte aquaculture locale, au-delà du marché de repeuplement. 38 Ils représentent des concurrents potentiels à ne pas négliger dans le cadre d'un marché en effondrement sous l'effet des ONG notamment, comme le montre l'illustration ci-dessous, et qui reste confiné à l'Europe, du fait des prescriptions CITES. S'agissant de l'évolution en très forte baisse de la production, le WGEEL livre trois courbes rapportant l'évolution de l'aquaculture en Europe entre 2003 et 2010 (à partir des statistiques FAO : rapports des pays, en vert ; statistiques pêche de la FAO, en bleu ;et des données de l'aquaculture en rouge) : Different sources of data for aquaculture production of European eel in Europe from 2003 to 2010, in tonnes. Country reports : rapports des différents pays FAO : statistiques FAO Aquamedia : information aquaculture Aquaculture production of European eel in Europe from 2003 to 2009, in tonnes. Source: FAO FishStat. L'évolution significativement décroissante de ces courbes est confortée par les volumes déclarés au titre de l'aquaculture en Europe sur la même période. Les tonnages y sont divisés par deux atteignant globalement le volume de 4330 tonnes en 2010, tous stades biologiques de l'anguille compris. 39 Denmark Estonia Germany Netherlan ds Portugal Sweden Poland Italy Spain Total 2003 2050 18 372 4200 4.7 170 1 1325 339 8475 2004 1500 26 328 4500 1.5 158 1 1220 424 8159 2005 1700 19 329 4500 1.4 222 1 1131 427 8330 2006 1900 27 567 4200 1.1 191 1 807 403 8096 2007 1617 52 740 4000 0.5 175 1 1000 478 8064 2008 1740 45 749 3700 0.4 172 1 551 385 7343 2009 1707 30 667 3200 1.1 139 1 587 370 6705 2010 1537 20 681 2000 no data 91 1 no data ? 4330 Production en tonnes de 2003 à 2010 des pays disposant d'aquaculture. (source : FAO) La mission a interrogé les professionnels sur le marché escompté pour écouler les 24 tonnes (une seule civellerie), voire 50 tonnes (si deux civelleries), d'anguillettes. Les professionnels considèrent simplement, en fonction de l'expérience des mareyeurs, qu'ils trouveront facilement des clients. La mission s'inquiète donc d'une part, de la possibilité pour une civellerie nationale d'obtenir des prix de ventes concurrentiels dans des installations ne fonctionnant que quelques mois par an pour produire des anguillettes, sur un marché déjà encombré tandis que ses concurrentes européennes qui fonctionnent déjà en continu fournissent une production en nette régression ; d'autre part, qu'aucune étude de marché n'ait encore été réalisée pour confirmer la rentabilité du projet. Sur le plan humain, il n'est pas concevable de laisser espérer toute une profession, à partir d'une solution dont tous les fondements n'ont pu être vérifiés. Recommandations 10 Suspendre la décision de production d'anguillettes de repeuplement issues de civellerie(s) d'engraissement, si elle(s)devaient être créée(s) en France, aux résultats de l'évaluation scientifique précédemment préconisée sur l'efficacité du repeuplement par anguillettes d'aquaculture. Recommandation 11 En tout état de cause ne prendre aucune décision positive concernant la création de civellerie d'engraissement en France, sans avoir procédé ou fait procéder à une étude de marché. 40 V - LA TRANSFORMATION DE CIVELLERIES EN ELEVAGE D'ANGUILLES ESTELLE OPPORTUNE ? Est-elle possible aujourd'hui? La question de savoir si une civellerie pourrait devenir à terme une « écloserie » ; semblable à celles utilisées pour les autres espèces de poissons en élevage est posée. A ce jour aucun adulte parvenu à maturité sexuelle ni aucun oeuf d'anguille européenne (A. Anguilla) ou américaine (A. Rostrata) n'a jamais été pêché et les essais de reproduction artificielle (avec émission artificielle de gamètes) ont à peine permis d'atteindre en 1987 l'éclosion d'oeuf. En France, les premiers travaux du professeur Maurice Fontaine remontent aux années 60, qui avait réussi par l'usage d'hormones à provoquer la maturation des mâles, puis de femelles élevées en captivité (dans les années 1960). Vingt ans plus tard, des larves vivantes ont été obtenues suite à une fécondation artificielle dans le cadre d'un programme danois de recherche, mais qui n'ont pas survécu plus de 2 jours et demi. En revanche au Japon où des recherches ont débuté il y a plus de 70 ans, les travaux sur l'espèce locale, A. Japonica, ont abouti plus rapidement avec fécondation dès 1974 et larves de 14 jours en 1976. Sur l'anguille japonaise , les institutions de recherche japonaises ont travaillé depuis les années 60, pour aboutir à la fermeture du cycle en élevage contrôlé, à savoir produire des civelles à partir d'individus euxmêmes reproduits et élevés en captivité. Ces travaux ont nécessité la mobilisation de très nombreux laboratoires, et de plusieurs mois de campagnes à la mer, pour mieux comprendre les conditions de reproduction de l'espèce en milieu naturel. Ces recherches ont bénéficié de financements assez lourds, notamment pour des recherches de base sur l'espèce. Ils ont abouti en 1975 aux premières éclosions de larves, mais il a fallu attendre 25 ans de plus pour pouvoir atteindre la seconde génération ( Tanaka et al., 2003). Depuis les Japonais ont annoncé par voie de presse en 2010 avoir obtenu quelques civelles à partir d'anguilles elles-mêmes obtenues artificiellement. Le problème essentiel reste cependant celui de l'alimentation des civelles après résorption des réserves vittelines. Les japonais annoncent avoir utilisé des mélanges à base d'oeufs de requins. Se posent également des problèmes particuliers concernant les installations qui doivent être bien spécifiques, ainsi qu'un fort taux de difformité (60%) constaté chez les larves (Okumara et al., 2011). Les chercheurs japonais estiment que le coût de civelles ainsi produites est de l'ordre de 100 000 $ par individu, ce qui est évidemment sans commune mesure avec le prix actuel de la civelle de pêche . En outre, en l' état actuel des connaissances les deux espèces d' anguilles, japonaise et européenne, présentent de grandes différences dans leur croissance : 41 l'anguille européenne conserverait le stade leptocéphale de 2 à 3 ans tandis que l'anguille japonaise ne s'y maintiendrait qu'environ 250 jours. Il ne serait donc pas réaliste de lier les recherches sur l'anguille européenne aux avancées de celles sur l'anguille japonaise . Aussi l'Union Européenne a-t-elle lancé un projet européen de recherches « PROEEL » sur 4 ans (du1/04/10 au 31/03/14) pour connaître la physiologie de la reproduction de l'anguille, induire le développement des gamètes, obtenir des embryons puis des larves vivantes d'Anguilla anguilla (Yomkiewiz, 2011 ; Tomkiewiz et al., 2011). Ce projet, constitué en consortium international de 15 partenaires , instituts de recherches et industries européens, est coordonné par l'Institut National des Ressources Aquatiques du Danemark. La France y est présente, au travers la participation du CNRS et de l'INRA. En octobre 2011, les différentes équipes rapportaient des résultats relatifs aux aspects singuliers de l'alimentation et de la digestion chez les pré-leptocéphales ; au transfert de polluants (y compris PCB) de la mère à l'oeuf ; au comportement des larves après résorption du sac vitellin ; à la maturation sexuelle des mâles et à l'induction de la sexualité sur des anguilles pré-pubères. Ces résultats encore partiels dans le cycle complet de la reproduction de l'anguille, malgré les moyens scientifiques déployés, démontrent les immenses difficultés qu'il faudra surmonter avant d'envisager l'élevage d'anguilles en routine . Ainsi cet objectif apparaît comme très lointain, du fait des caractéristiques de l'espèce et du manque de connaissances biologiques pour les stades de la reproduction et de la phase larvaire. L'élevage d'anguille en cycle fermé est-il économiquement viable ? Avec l'expérience japonaise, il apparaît impossible d'utiliser les mêmes installations pour les alevins et pour les reproducteurs (l'anguille est un carnivore qui n'hésite pas à pratiquer le cannibalisme). Dans le cas de transformation de civellerie, ces extensions d'installations ne peuvent dès à présent être chiffrée. Il en est de même de tous les intrants (alimentation, inducteurs de mâturité, de ponte...etc...) qui seront vraisemblablement nécessaires mais dont on ne connaîtra précisément la liste qu'en fin de recherches scientifiques. Aucune évaluation réelle du coût (investissements comme fonctionnement) de ce type d'installation ne peut être réalisée . Dans ces conditions d'incertitudes tant techniques qu'économiques, la mission recommande aux services de l'Etat de suspendre l'examen de la question relative à la création d'aquaculture d'anguilles aux résultats probants de la recherche sur la reproduction des anguilles en cycle fermé. 42 Recommandation 12 Soumettre toute décision sur la création éventuelle d'aquaculture d'anguilles, d'une part à des résultats concrets de la recherche sur la reproduction des anguilles en cycle fermé, d'autre part aux conclusions approfondies d'études économiques et de marché sur les projets pressentis. 43 CONCLUSION Il y a une menace réelle de disparition de l'anguille, tant sa raréfaction s'est accélérée au cours de la dernière décennie. Cette éventualité constituerait une perte inestimable pour la biodiversité car son cycle de vie est d'une originalité et d'une complexité exceptionnelles. Elle représente aussi pour bon nombre de petites régions, notamment européennes, une activité de tradition relativement récente, mais lucrative et culturelle, dont la disparition aurait des conséquences économiques et sociales très négatives. Ainsi le secteur de la pêche civelière en France est confronté à un double défi : un défi écologique, avec la raréfaction de cette ressource halieutique, qu'il est nécessaire de restaurer, et un défi économique, avec ses conséquences possibles en termes de réduction des marchés pour les produits de la pêche. Danger pour l'écologie d'une partie du monde, défi pour une pêche locale nationale , quelles bonnes décisions doivent prendre les pouvoirs publics français? L'Europe et la France ont proposé diverses solutions pour freiner et si possible inverser la pente d'un déclin qui semble inexorable. La mission, à son tour, a voulu appréhender l'ampleur et l'inéluctabilité du déclin des populations d'anguilles. La rencontre d'éminents spécialistes de l'anguille et la compilation d'une abondante bibliographie l'a amenée à constater l'absence de données scientifiques fiables sur des parties importantes du cycle de vie de l'anguille tout particulièrement dans sa phase marine (EELIAD). Ces lacunes dans la connaissance de pans entiers de la vie de l'anguille fragilisent les solutions ou recommandations trop péremptoires. Il en est de même de la fiabilité des comptages tout particulièrement celui des civelles, même si l'analyse graphique de l'évolution des populations d'anguilles en constate la pente inquiétante. Il y a aussi une grande part de mystère sur la nature des causes qui peuvent affecter les anguilles au cours de leurs voyages, à l'aller et au retour en Atlantique, au long de milliers de kilomètres de leur parcours dans la "big box blue".7 Toutes les incertitudes qui pèsent sur le déclin des populations d'anguilles n'empêchent pas d'avoir une stratégie défensive et offensive pour la reconquête de l'espèce et de ses milieux. Dans les problématiques écologiques et économiques, les intérêts respectifs sont souvent opposés à court terme. La communauté scientifique semble unanime pour affirmer qu'il serait très injuste de faire porter aux seuls pêcheurs la responsabilité de la raréfaction de la ressource. D'ailleurs, dans les pays scandinaves où il n'y a pas de prélèvement de civelles, la même décroissance des populations d'anguilles jaunes et argentées a pu être observée. Elle peut raisonnablement être imputée à la pollution des eaux estuariennes et continentales. La mission a pris en compte l'intérêt marqué des professionnels pour les civelleries et s'est interrogée sur la pertinence écologique et économique de ces structures. A l'évidence pour leur destination écologique, le repeuplement, les civelleries ne peuvent actuellement constituer une alternance "d'aide à la nature" . Les anguilles issues de civelleries sont désorientées et ne peuvent rejoindre leurs lieux de reproduction. De plus, les anguilles de civellerie produisent beaucoup plus de mâles que de femelles ce qui constitue un désavantage supplémentaire pour la reproduction. 7 Les anglo-saxons parlent de grande boîte bleue pour la séquence océanique "d'Anguilla anguilla » 44 Quant à l'hypothèse de la réalisation d'un cycle de reproduction fermé, elle semble totalement irréaliste. Les dernières recherches japonaises très en pointe sur le sujet ont nécessité 30 à 50 ans de travaux pour obtenir une civelle à 100.000 dollars ! De plus, y a-t'il un intérêt économique à la réalisation de civelleries d'engraissement pour "capter" une éventuelle valeur ajoutée lors de la phase de croissance de l'anguille ? Les derniers chiffres connus ne plaident pas en faveur de la viabilité de ce modèle économique. La mission mesure donc la difficulté qu'il y a à trouver des solutions équilibrées entre les intérêts économiques et financiers des pêcheurs, intérêts très respectables, mais aussi l'intérêt écologique exceptionnel de l'anguille. La mission a entendu la communauté scientifique proposer la solution drastique de l'interdiction totale de prélèvements sur l'espèce "Anguilla anguilla" à tous les stades de sa vie ; civelle, anguille jaune, ou anguille argentée. Elle repose sur un raisonnement simple : plus il y aura d'anguilles dans leurs milieux à tous les stades biologiques en zone continentale, plus il y aura de chances de voir augmenter le nombre d'anguilles revenir en mer des Sargasses et contribuer ainsi à restaurer un cycle vertueux, prometteur d'une pêche durable, des années plus tard. Cependant, elle n'a été avancée qu'avec un plan de soutien économique pour les pêcheurs concerné. En outre, une restriction draconienne ou l'interdiction totale de la pêche des civelles ne serait comprise par les pêcheurs que si dans un même temps des efforts très importants étaient réalisés pour supprimer les centaines de points noirs recensés dans les eaux continentales et leurs bassins versants. Si tel n'était pas le cas, les pêcheurs de civelles n'admettraient pas de laisser partir des civelles des zones maritimes et estuariennes vers des biotopes continentaux où la pollution et les obstacles mécaniques vont les anéantir. De surcroît l'interdiction n'atteindrait son objectif que dans de nombreuses années. . En réitérant le fait que l'on ne saurait faire porter la responsabilité de la raréfaction sévère de l'anguille aux seuls pêcheurs, la mission propose d'explorer une voie d'avenir en maintenant une pêche durable dans le cadre d'une plus grande responsabilisation de la profession au niveau local. . Un maillage de proximité, en organisations de producteurs8 par exemple, gestionnaire de la ressource locale avec mise en place de quota individuels dans le cadre des quota fixés par l'Administration, pourrait être suggéré. La filière serait appelée à formuler des propositions dans ce sens. . Entre l'arrêt total de la pêche de l'anguille à tous ses stades biologiques et le maintien d'un encadrement participatif des prélèvements sur la ressource, il y a un choix politique à faire dans le sens le plus noble du terme. La mission , par l'éclairage qu'elle a porté sur les enjeux majeurs de ce dossier, espère avoir aidé les ministères concernés à décider. 8 L912-11 et suivants du code rural et de la pêche 45 ACRONYMES AAPPMA Association Agréé de Pêche et de Protection du Milieu Aquatique AGM Société de mareyage/ transport BDMAP Banque de Données Milieux Aquatiques et Poissons BNDE Banque Nationale des Données sur l'Eau CEMAGREF Institut de Recherche pour l'Ingénierie de l'Agriculture et de l'Environnement CIEM Conseil International pour l'Exploration de la Mer CITES Convention ou International Trade in Endangered Spaces (convention sur le commerce international des espèces de la faune et de la flore menacées d'extinction ou convention de Washington) CMEA Commission des Milieux Estuariens et Amphihalins CNPMEM Comité National des Pêches Maritimes et des Elevages Marins CNEXO Centre National pour l'Exploitation des Océans CONAPPED Comité National pour la Pêche Professionnelle en Eau Douce COREPEM Comité Régional des Pêches et des Elevages Marins CPUE Capture Par Unité d'Effort CS Comité Scientifique chargé de proposer les quota de captures d'anguilles (comporte 2 IFREMER + 1 INRA + 2MNHN + 1 CEMAGREF) CSE Comité Socio Economique du CONAPPED et CNPMEM) CSP Conseil Supérieur de la Pêche DCE Directive Cadre sur l'Eau DCSMM Directive Cadre Strategie pour les Milieux Marins DIREN Direction Régionale de l'Environnement DPMA Direction des Pêches Maritimes et de l'Aquaculture DRAM Direction Régionale des Affaires Maritimes EELIAD European eels in the Atlantic EIFAC European Inland Fisheries Advisory Commitee FAM FranceAgriMer FAO Food and Agriculture Organization of the United Nations FEP Fonds Européen pour la Pêche GRISAM Groupement d'Intérêt Scientifique sur les Amphihalins ICES iInternational Council for the Exploration of Sea = CIEM IFEN Institut Français de l'Environnement IFREMER Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer INDICANG. INDICateurs d'abondance et de colonisation sur l'ANGuille européenne IRSTEA Institut national de Recherche en Sciences et Technologies pour l'Environnement et l'Agriculture MNHN Muséum National d'Histoire Naturelle OFIMER OFfice national Interprofessionnel des produits de la MER et de l'aquaculture ONEMA Office National de l'Eau et des Milieux Aquatiques PCB PolyChloroBiphényles PCP Politique Commune de la Pêche PGA Plan de Gestion de l'Anguille PSF Plan de sortie de flotte RHP Réseau Hydro-biologique et Piscicole SAGE Schéma d'Aménagement et de Gestion des Eaux SDAGE Schéma Directeur d'Aménagement et de Gestion des Eaux SMIDAP Syndicat Mixte pour le Développement de l'Aquaculture et de la Pêche (des Pays de Loire). 46 SNPE Suivi National de la Pêche aux Engins et filets UGA Unité de Gestion de l'Anguille UMR Unité Mixte de Recherche WGEEL Groupe de Travail sur l'Anguille du CIEM 47 BIBLIOGRAPHIE BRIAND C., 2009. Dynamique de population et migration des civelles en estuaire de Vilaine. Thèse présentée à AgroCampus Ouest 205 p. BRIAND C., BONHOMMEAU S., BEAULATON L. and CASTELNAUD G., 2008. An appraisal of historical glass eel fisheries and markets: landings, trade routes and future prospect for management. In The Institute of Fisheries Management Annual Conference 2007 (ed C. Moriarty), Wesport, Ireland. BRIAND C., SAUVAGET B., BEAULATON L.,GIRARD P., VERON V., FATIN D. 2008. les tamis poussés sont responsables de blessures et de mortalités chez la civelle (Anguilla anguilla) CASTELNAUD G. 1978. Etude de la pêche aux filets et aux engins dans l'estuaire de la Gironde. Thèse de 3ème cycle, Institut de Géographie, Université de Bordeaux III, 191 p. CASTELNAUD G., GUÉRAULT D., DÉSAUNAY Y. et ELIE P., 1994. Production et abondance de la civelle en France au début des années 90. Bulletin Français de la Pêche et de la Pisciculture, 335, 263-288. 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Thorpe), pp. 407. Blackwell Publishing, London. TOMKIEWIZ J. 2011. Reproduction of European eel towards a self-sustained aquaculture (PRO-EEL), Aquaculture Europe 11, Rhodes , October 18-21 2011 TOMKIEWIZ, J., KOFOED, T.M., PEDERSEN, J.S.. 2011. Assessment of testis development during induced spermatogenesis in the European eel Anguilla anguilla, Marine and Coastal Fisheries, Vol;3, Issue 1, 2011 pp 106-118 WESTIN L.1990. Orientation mechanisms in migrating European silver eel (Anguilla anguilla) : temperature and olfaction, Marine biology 106 : 175-179 WICKSTROM H., WESTIN L., CLEVESTAN P.1996. The biological and economic yield from a long-term eel-stocking experiment, Ecology of freshwater fish 1996 : 140-147 49 PERSONNES RENCONTREES OU CONTACTEES André BARLIER Laurent BEAULATON Benoît BELIAEFF Cécile BIGOT Benoît BOURBON Gérard CASTELNAUD Marco CIAMBELLI Alexis DELAUNAY Paul DELDUC Sylvie DUFOUR Gilles FOUCHER Sylvie GUILLAUME Marion GUILLOU Patrick LAMBERT Françoise MEDALE Nicolas MICHELET Cécile PAGES Jean-Yves PERROT Thomas PETITGUYEAU Patrick PROUZET Jacqueline RABIC Christian RIGAUD Directeur des marchés, études et prospectives - FAM ONEMA Directeur "ressources biologiques et environnement" - IFREMER Adjointe au Directeur - DPMA Chef du bureau de la pisciculture et de la pêche continentale -DPMA Président du comité scientifique et technique de la CECPAI, commission européenne consultative sur la pêche et l'aquaculture continentale Bureau des Echanges Internationaux d'espèces menacées à la Direction de l'eau et de la biodiversité - MEDDTL Directeur du contrôle des usages et de l'action territoriale - ONEMA Sous-Directeur Protection et Valorisation des Espèces et de leurs Milieux MEDDTL Directrice de l'unité de « Biologie des Organismes et Ecosystèmes Aquatiques (BOREA) au MNHN SAS Anguilla Anguilla Chef de bureau des échanges internationaux d'espèces menacées MEDDTL Président Directeur Général de l'INRA Animateur de l'équipe « poissons migrateurs amphihalins » de l'QIRSTEA Bordeaux Directrice de l'unité de recherche Nutrition, Métabolisme, Aquaculture à l'INRA Chargé de mission CNPMEM/CONAPPED Coordinatrice du CRPMEM Languedoc Roussillon Président Directeur Général de l'IFREMER Chef du bureau des milieux aquatiques (MEDDTL) iFREMER Vice-présidente CRPMEM Aquitaine IRSTEA Bordeaux, pôle Ecohydraulique, animateur GRISAM 50 Jacques ROBERT Eric ROCHARD Jérôme SOUBEN Pierre TRIBON Marie-Hélène TUSSEAU VUILLEMIN, Nicolas UDREA Christian VANIER Louis VILAINE Bureau des Echanges Internationaux d'espèces menacées à la Direction de l'au et de la biodiversité - MEDDTL Chef de l'unité de recherche « Ecosystèmes estuariens et poissons migrateurs amphhalins » de l'IRSTEA Bordeaux ARA France DPMA Directrice « Prospective et Stratégie Scientifique » à l'IFREMER DPMA DIrecteur "animation des filières" de FAM Pr2sident du C A d'ARA France 51 Lettre de mission 52 53 54 55 (ATTENTION: OPTION et Fluviaux en eau douce de Loire Atlantique, Nantes. LOIC B. 2009. Etude de l'impact de la pêche à la civelle sur les estuaires de la Seudre et de la Charente dans le cadre du règlement européen r5E) 1100/2007 sur l'anguille. Mémoire de Master 2Pro , UFR Sciences et techniques Côte Basque, 69p. ONEMA ­ Sauvegarde de l'anguille ­ Un règlement européen ­ Questions/réponses ­ 2008 ­ 12p. PARLEMENT EUROPEEN, 2005. Rapport sur le développement d'un plan d'action communautaire concernant la restauration des anguilles européennes. 9 p. ROULE L. 1922. Les poissons migrateurs, leur vie et leur pêche. Flammarion, 175 p. SUPERREGUI N.2007. Caractérisation de la pêcherie professionnelle de civelles sur l'Isle.. TESCH F. W., 2003. The eel (ed J. E. Thorpe), pp. 407. Blackwell Publishing, London. TOMKIEWIZ J. 2011. Reproduction of European eel towards a self-sustained aquaculture (PRO-EEL), Aquaculture Europe 11, Rhodes , October 18-21 2011 TOMKIEWIZ, J., KOFOED, T.M., PEDERSEN, J.S.. 2011. Assessment of testis development during induced spermatogenesis in the European eel Anguilla anguilla, Marine and Coastal Fisheries, Vol;3, Issue 1, 2011 pp 106-118 WESTIN L.1990. Orientation mechanisms in migrating European silver eel (Anguilla anguilla) : temperature and olfaction, Marine biology 106 : 175-179 WICKSTROM H., WESTIN L., CLEVESTAN P.1996. The biological and economic yield from a long-term eel-stocking experiment, Ecology of freshwater fish 1996 : 140-147 49 PERSONNES RENCONTREES OU CONTACTEES André BARLIER Laurent BEAULATON Benoît BELIAEFF Cécile BIGOT Benoît BOURBON Gérard CASTELNAUD Marco CIAMBELLI Alexis DELAUNAY Paul DELDUC Sylvie DUFOUR Gilles FOUCHER Sylvie GUILLAUME Marion GUILLOU Patrick LAMBERT Françoise MEDALE Nicolas MICHELET Cécile PAGES Jean-Yves PERROT Thomas PETITGUYEAU Patrick PROUZET Jacqueline RABIC Christian RIGAUD Directeur des marchés, études et prospectives - FAM ONEMA Directeur "ressources biologiques et environnement" - IFREMER Adjointe au Directeur - DPMA Chef du bureau de la pisciculture et de la pêche continentale -DPMA Président du comité scientifique et technique de la CECPAI, commission européenne consultative sur la pêche et l'aquaculture continentale Bureau des Echanges Internationaux d'espèces menacées à la Direction de l'eau et de la biodiversité - MEDDTL Directeur du contrôle des usages et de l'action territoriale - ONEMA Sous-Directeur Protection et Valorisation des Espèces et de leurs Milieux MEDDTL Directrice de l'unité de « Biologie des Organismes et Ecosystèmes Aquatiques (BOREA) au MNHN SAS Anguilla Anguilla Chef de bureau des échanges internationaux d'espèces menacées MEDDTL Président Directeur Général de l'INRA Animateur de l'équipe « poissons migrateurs amphihalins » de l'QIRSTEA Bordeaux Directrice de l'unité de recherche Nutrition, Métabolisme, Aquaculture à l'INRA Chargé de mission CNPMEM/CONAPPED Coordinatrice du CRPMEM Languedoc Roussillon Président Directeur Général de l'IFREMER Chef du bureau des milieux aquatiques (MEDDTL) iFREMER Vice-présidente CRPMEM Aquitaine IRSTEA Bordeaux, pôle Ecohydraulique, animateur GRISAM 50 Jacques ROBERT Eric ROCHARD Jérôme SOUBEN Pierre TRIBON Marie-Hélène TUSSEAU VUILLEMIN, Nicolas UDREA Christian VANIER Louis VILAINE Bureau des Echanges Internationaux d'espèces menacées à la Direction de l'au et de la biodiversité - MEDDTL Chef de l'unité de recherche « Ecosystèmes estuariens et poissons migrateurs amphhalins » de l'IRSTEA Bordeaux ARA France DPMA Directrice « Prospective et Stratégie Scientifique » à l'IFREMER DPMA DIrecteur "animation des filières" de FAM Pr2sident du C A d'ARA France 51 Lettre de mission 52 53 54 55 INVALIDE) (ATTENTION: OPTION r5E) 1100/2007 sur l'anguille. Mémoire de Master 2Pro , UFR Sciences et techniques Côte Basque, 69p. ONEMA ­ Sauvegarde de l'anguille ­ Un règlement européen ­ Questions/réponses ­ 2008 ­ 12p. PARLEMENT EUROPEEN, 2005. Rapport sur le développement d'un plan d'action communautaire concernant la restauration des anguilles européennes. 9 p. ROULE L. 1922. Les poissons migrateurs, leur vie et leur pêche. Flammarion, 175 p. SUPERREGUI N.2007. Caractérisation de la pêcherie professionnelle de civelles sur l'Isle.. TESCH F. W., 2003. The eel (ed J. E. Thorpe), pp. 407. Blackwell Publishing, London. TOMKIEWIZ J. 2011. Reproduction of European eel towards a self-sustained aquaculture (PRO-EEL), Aquaculture Europe 11, Rhodes , October 18-21 2011 TOMKIEWIZ, J., KOFOED, T.M., PEDERSEN, J.S.. 2011. Assessment of testis development during induced spermatogenesis in the European eel Anguilla anguilla, Marine and Coastal Fisheries, Vol;3, Issue 1, 2011 pp 106-118 WESTIN L.1990. Orientation mechanisms in migrating European silver eel (Anguilla anguilla) : temperature and olfaction, Marine biology 106 : 175-179 WICKSTROM H., WESTIN L., CLEVESTAN P.1996. The biological and economic yield from a long-term eel-stocking experiment, Ecology of freshwater fish 1996 : 140-147 49 PERSONNES RENCONTREES OU CONTACTEES André BARLIER Laurent BEAULATON Benoît BELIAEFF Cécile BIGOT Benoît BOURBON Gérard CASTELNAUD Marco CIAMBELLI Alexis DELAUNAY Paul DELDUC Sylvie DUFOUR Gilles FOUCHER Sylvie GUILLAUME Marion GUILLOU Patrick LAMBERT Françoise MEDALE Nicolas MICHELET Cécile PAGES Jean-Yves PERROT Thomas PETITGUYEAU Patrick PROUZET Jacqueline RABIC Christian RIGAUD Directeur des marchés, études et prospectives - FAM ONEMA Directeur "ressources biologiques et environnement" - IFREMER Adjointe au Directeur - DPMA Chef du bureau de la pisciculture et de la pêche continentale -DPMA Président du comité scientifique et technique de la CECPAI, commission européenne consultative sur la pêche et l'aquaculture continentale Bureau des Echanges Internationaux d'espèces menacées à la Direction de l'eau et de la biodiversité - MEDDTL Directeur du contrôle des usages et de l'action territoriale - ONEMA Sous-Directeur Protection et Valorisation des Espèces et de leurs Milieux MEDDTL Directrice de l'unité de « Biologie des Organismes et Ecosystèmes Aquatiques (BOREA) au MNHN SAS Anguilla Anguilla Chef de bureau des échanges internationaux d'espèces menacées MEDDTL Président Directeur Général de l'INRA Animateur de l'équipe « poissons migrateurs amphihalins » de l'QIRSTEA Bordeaux Directrice de l'unité de recherche Nutrition, Métabolisme, Aquaculture à l'INRA Chargé de mission CNPMEM/CONAPPED Coordinatrice du CRPMEM Languedoc Roussillon Président Directeur Général de l'IFREMER Chef du bureau des milieux aquatiques (MEDDTL) iFREMER Vice-présidente CRPMEM Aquitaine IRSTEA Bordeaux, pôle Ecohydraulique, animateur GRISAM 50 Jacques ROBERT Eric ROCHARD Jérôme SOUBEN Pierre TRIBON Marie-Hélène TUSSEAU VUILLEMIN, Nicolas UDREA Christian VANIER Louis VILAINE Bureau des Echanges Internationaux d'espèces menacées à la Direction de l'au et de la biodiversité - MEDDTL Chef de l'unité de recherche « Ecosystèmes estuariens et poissons migrateurs amphhalins » de l'IRSTEA Bordeaux ARA France DPMA Directrice « Prospective et Stratégie Scientifique » à l'IFREMER DPMA DIrecteur "animation des filières" de FAM Pr2sident du C A d'ARA France 51 Lettre de mission 52 53 54 55 INVALIDE)

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