Interdiction des épandages aériens de produits phytopharmaceutiques sauf dérogations : situation actuelle - propositions de mise en oeuvre des dérogations.
ALLAIN, Yves-Marie ;GRIVAULT, Gilbert
Auteur moral
France. Conseil général de l'environnement et du développement durable
;France. Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux
Auteur secondaire
Résumé
Moins de 0,3% de la surface agricole nationale et moins de 0,1% de la surface forestière et des espaces boisés sont traités par aéronef. Compte tenu des cultures et des techniques agronomiques employées, des matériels terrestres disponibles, des bio-agresseurs concernés, des règles strictes appliquées à ces modes de traitements, le rapport estime qu'il est actuellement prématuré d'interdire ce mode d'épandage. Cependant, afin de se conformer à la directive européenne sur les pesticides et aux textes législatifs français, des propositions sont faites afin d'encadrer de façon encore plus stricte ce recours à l'aéronef. Le principe proposé est l'obligation d'une demande préalable formelle avec dépôt d'un dossier de demande de dérogation qui sera examiné au niveau ministériel pour la vigne, le maïs doux et maïs «pop corn», le riz et la banane et au niveau préfectoral pour les autres cultures. Le traitement des forêts et espaces boisés étant à exclure de cette nouvelle procédure.
Editeur
CGEDD
;CGAAER
Descripteur Urbamet
traitement des boues
;forêt
;pollution
;polluant
;droit de l'environnement
;pollution atmosphérique
;pollution de l'eau
;flore
;avion
;cadre juridique
;culture
Descripteur écoplanete
pesticide
;riz
Thème
Environnement - Paysage
;Ressources - Nuisances
Texte intégral
Ministère de l'Écologie, de l'Énergie, du Développement durable et de la Mer
en charge des Technologies vertes et des Négociations sur le climat
Ministère de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Pêche
Conseil général de l'environnement et du développement durable
Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux
CGEDD N° 006772-01
CGAAER N° 1972
RAPPORT
Interdiction des épandages aériens de produits phytopharmaceutiques sauf dérogations :
situation actuelle propositions de mise en oeuvre des dérogations
établi par
Yves-Marie ALLAIN
Ingénieur de recherche hors classe
Gilbert GRIVAULT
Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts
Février 2010
SOMMAIRE
Résumé..................................................................................................................................................3 1 - Objet et déroulement de la mission..................................................................................................4 2 Définitions de divers mots et expressions.......................................................................................4 3 Textes spécifiques actuellement applicables à l'épandage aérien...................................................6 4 Textes votés ou en cours de discussion sur l'épandage aérien........................................................7 5 Situation actuelle de l'épandage aérien en France..........................................................................7 5.1 régions et cultures concernées....................................................................................................7 5.2 Entreprises de traitements aériens et aéronefs employés..........................................................11 5.3 Les principales raisons du recours à l'épandage par aéronefs..................................................14 5.4 chaînes de décision et de responsabilité ..................................................................................15 6 - Mise en oeuvre des divers scénarios et leurs conséquences ..........................................................16 6.1 Interdiction totale...................................................................................................................17 6.2 - Les diverses modalités de dérogations ..................................................................................18 6.2.1 - dérogation ministérielle..................................................................................................18 6.2.2 - dérogations préfectorales................................................................................................19 6.2.3 - Cas des luttes obligatoires..............................................................................................20 7 Recommandations de la mission...................................................................................................21 8 Annexes.........................................................................................................................................22
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Résumé
La mission, diligentée par le Directeur général de l'alimentation du Ministère de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Pêche (MAAP) et le Directeur général de la prévention des risques du Ministère de l'Écologie, de l'Énergie, du Développement durable et de la Mer en charge des Technologies vertes et des Négociations sur le climat (MEEDM), par lettre du 15 mai 2009 (cf Annexe 1), devait identifier, suite à l'interdiction de l'épandage aérien des produits phytopharmaceutiques, les situations pour lesquelles il n'existe pas d'alternative à cet épandage par aéronef et les conditions de mise en oeuvre des dérogations. La mission a procédé à un certain nombre d'auditions (professionnels, administrations, associations...- cf. Annexe 2), effectué trois visites de terrain en province et participé à une réunion intermédiaire de présentation des propositions auprès des services commanditaires. Bien que limitée aux seuls produits phytopharmaceutiques, la mission s'est néanmoins intéressée au cas des traitements par aéronefs de biocides sur les forêts et de la lutte contre les moustiques effectuée dans le cadre des ententes interdépartementales pour la démoustication (EID). Après une enquête auprès de l'ensemble des services déconcentrés de l'État en charge du suivi des déclarations de traitements phytopharmaceutiques et analyse des données par la mission, il s'avère que moins de 0,3 % de la surface agricole utile est concernée par les traitements par aéronefs. Compte tenu des cultures et des techniques agronomiques employées, des matériels terrestres disponibles, des bio-agresseurs concernés, des règles strictes imposées aux traitements par aéronefs (produits à utiliser, bande de protection à respecter...), la mission estime qu'il est actuellement prématuré d'interdire la possibilité du recours à l'aéronef. Cependant, afin de se conformer à la directive européenne sur les pesticides, aux textes législatifs français, la mission fait des propositions afin d'encadrer de façon encore plus stricte ce recours à l'aéronef. Le principe proposé est l'obligation d'une demande préalable formelle avec dépôt d'un dossier de demande de dérogation, qui sera examiné au niveau ministériel pour la vigne, le maïs doux et maïs `pop corn', le riz et la banane et au niveau préfectoral pour les autres cultures. La mission estime que les traitements des forêts et espaces boisés pour des raisons de santé publique (avec des biocides) devraient être exclus de cette nouvelle procédure mise en place pour les traitements de produits phytopharmaceutiques par aéronefs.
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1 - Objet et déroulement de la mission
Par lettre du 15 mai 2009, le Directeur général de l'alimentation du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche et le Directeur général de la prévention des risques du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, ont saisi conjointement le Vice-président du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) ainsi que celui du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), d'une mission sur l'épandage aérien des produits phytopharmaceutiques. La mission a pour objet (cf. annexe 1), suite à l'objectif d'interdire, sauf dérogations, l'épandage aérien, inscrit dans la directive européenne du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d'action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatibles avec le développement durable et dans la loi Grenelle 1, d'identifier les situations pour lesquelles il n'existe pas d'alternative à l'épandage aérien de produits phytopharmaceutiques et les conditions de la mise en oeuvre des dérogations à cette interdiction. Cette mission est effectuée par : - Gilbert GRIVAULT, désigné par le vice-président du CGAAER, - Yves-Marie ALLAIN, désigné par le vice-président du CGEDD. La mission a débuté son travail fin juin 2009. Elle a pris connaissance des quelques rapports sur le traitement par aéronefs et en particulier celui de l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale-institut national de l'environnement industriel et des risques (AFSSE-INERIS) : l'épandage aérien de produits anti-parasitaires, rapport du groupe de travail institutionnel en charge de la saisine AFSSE, de juin 2005. Afin d'avoir une vision aussi complète que possible des traitements réalisés par aéronefs sur le territoire national, un questionnaire a été adressé à l'ensemble des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt/service régional de l'alimentation (DRAAF/SRAL) pour l'hexagone et des directions de l'agriculture et de la forêt/service de la protection des végétaux (DAF/SPV) pour l'Outre-mer. De nombreuses rencontres ont été effectuées à Paris avec les représentants de syndicats, groupements et organismes professionnels de l'agriculture et des prestataires de services (traitements aériens), de France hexagonale et d'outre-mer, d'association de protection de la nature concernés par cette réglementation. La mission a fait quelques visites sur le terrain, uniquement dans l'hexagone, afin de rencontrer les services déconcentrés de l'État, les agriculteurs, les prestataires de services sur des thématiques ciblées... en régions Provence-Alpes-Côte-d'Azur et Languedoc-Roussillon (riz et chenille processionnaire), Champagne (vigne) et Aquitaine (maïs). La liste des personnes rencontrées figure en annexe du présent rapport.
2 Définitions de divers mots et expressions
Dans le domaine des produits permettant de lutter contre les maladies des plantes, des animaux ou pour détruire des populations animales considérées comme nuisibles surtout pour la santé humaine ou le confort, divers mots ont existé et co-existent. Ainsi se côtoient dans les textes et surtout dans le langage courant, des termes ou des expressions comme phytopharmaceutiques, antiparasitaires, phytosanitaires, pesticides...Parmi ces mots, certains d'entre eux ont vu leur définition s'affiner et leur champ se modifier dont, en français, le mot pesticide.
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Dans le cadre de la directive1 européenne instaurant un cadre d'action d'action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable, ceux-ci se divisent en deux grands groupes de produits, les phytopharmaceutiques et les biocides. Les produits phytopharmaceutiques sont définis dans le Code rural2 comme des « préparations contenant une ou plusieurs substances actives et les produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés présentés sous la forme dans laquelle ils sont livrés à l'utilisateur final, destinés à : a)protéger les végétaux ou produits végétaux contre tous les organismes nuisibles ou à prévenir leur action ; b)exercer une action sur les processus vitaux des végétaux, dans la mesure où il ne s'agit pas de substances nutritives ; c)assurer la conservation des produits végétaux, à l'exception des substances et produits faisant l'objet d'une réglementation communautaire particulière relative aux agents conservateurs ; d)détruire les végétaux indésirables ; e)détruire des parties de végétaux, freiner ou prévenir une croissance indésirable des végétaux ». La directive européenne relative aux biocides3, définit les produits biocides comme « les substances actives et les préparations contenant une ou plusieurs substances actives qui sont présentées sous la forme dans laquelle elles sont livrées à l'utilisateur, qui sont destinées à détruire, repousser ou rendre inoffensifs les organismes nuisibles, à en prévenir l'action ou à les combattre de toute autre manière, par une action chimique ou biologique. » Les types et descriptions des produits biocides sont définis dans l'annexe V, dont le groupe 3 aborde les produits antiparasitaires. A la lecture des définitions données pour phytopharmaceutique et biocide, il semble que ce ne soit pas tant la substance active qui permette de faire la différence que les raisons de son emploi lors d'un traitement. Si le produit est épandu à des fins de protection des végétaux, il s'agit d'un produit phytopharmaceutique, si ce même produit est employé pour détruire une population d'insectes pour d'autres raisons dont celle de santé publique, il entre dans la catégorie des biocides. Cette question de classement n'est pas uniquement théorique, car elle se pose dans le cadre de la lutte contre les chenilles processionnaires, produit phytopharmaceutique s'il s'agit de protéger la forêt, biocide si le produit est épandu pour des raisons de santé publique. Une autre expression peut prêter à confusion en fonction des familles professionnelles, celle de « pulvérisation aérienne ». Dans le domaine agricole et de l'écologie, la pulvérisation aérienne fait référence aux applications effectuées par aéronefs tels que définis par l'article L110-1 du code de l'aviation civile. En revanche, pour certains professionnels de la santé, il s'agit des produits qui se retrouvent dans l'atmosphère et que l'homme respire et inhale et ce, quel que soit le procédé employé (moyen terrestre ou aérien) lors de la dispersion du produit. Il est à noter que la loi Grenelle utilise la terminologie « épandage aérien » alors que la directive cadre européenne celle de « pulvérisation aérienne ». Ces quelques exemples montrent à quel point une rigueur sémantique est importante dans la rédaction des textes y compris dans les notices de vulgarisation. Il devient impératif, pour tout texte à portée juridique, que les mots soient correctement employés afin d'éviter les incohérences, les difficultés d'interprétation tant pour les services en charge du contrôle que pour les donneurs d'ordre et applicateurs.
1 Directive européenne du 21 octobre 2009 (publiée au JO de l'Union européenne du 24 novembre 2009) instaurant un cadre d'action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable. 2 Code rural, article L 21_53-1. 3 Article 2 de la directive 98/8/CE du parlement européen et du conseil du 16 février 1998, concernant la mise sur le marché des produits biocides. page 5
3 Textes spécifiques actuellement applicables à l'épandage aérien
Indépendamment des textes généraux relatifs aux pesticides, dans les divers codes (rural, environnement, santé), des multiples règlements dont ceux liés à l'agrément professionnel des applicateurs, les pratiques pour l'épandage par aéronefs relèvent également :
·du
code de l'aviation civile. Les applicateurs sont soumis à la réglementation des services de la Direction générale de l'aviation civile sur la formation et le maintien des compétences : brevets et licences « vols rasants », et dépôt d'un manuel d'activités particulières définissant de manière précise les différentes tâches dont celles spécifiques au métier d'applicateur aérien;
·de
textes plus spécifiques dont l'arrêté interministériel du 5 mars 2004 (cf. Annexe n° 3) « relatif à l'utilisation par voie aérienne de produits mentionnés à l'article L.253-1 du code rural ». Parmi les dispositions imposées aux traitements par aéronefs, une bande de 50 mètres (art. 6) de recul par rapport à un certain nombre de lieux, dont les habitations et les cours d'eau, et l'interdiction (art. 5) d'emploi des produits classés « toxiques », T, et « très toxiques », T+, au sens de l'article L.5132-2 du code de la santé publique. Certains des interlocuteurs ont fait part à la mission de quelques problèmes en partie liés à l'application de l'arrêté du 5 mars 2004. En effet :
·faute
de pouvoir être traitée par aéronefs, la bande des 50 mètres l'est par des moyens terrestres dans des conditions techniques souvent difficiles (pentes, portance des sols, hauteur des cultures...) et parfois avec l'emploi de produits T et T+ ; cas très particulier des rizières surtout dans la mise en oeuvre de la bande des 50 mètres. L'article 13 de l'arrêté4 du 12 septembre 2006 précise que l'obligation d'une zone non traitée n'est pas applicable « aux produits bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché pour une utilisation sur plantes aquatiques ou semi-aquatiques ou sur rizière ». Dans la rédaction actuelle de l'arrêté du 5 mars 2004 (art. 6), la mission attire l'attention sur l'absence de support juridique à l'expression « littoral maritime ». Un rapprochement avec les textes d'application de la loi littoral5 devrait permettre de donner une valeur juridique et un contenu pratique à cette expression. Bien qu'en dehors du strict sujet posé dans le cadre de la lettre de mission, la mission a souhaité évoquer les textes régissant les traitements par aéronefs des produits biocides. Il existe une note de service interministérielle6, agriculture, écologie, santé, du 13 septembre 2005 pour « la mise en oeuvre de traitements par voie aérienne pour des motifs de santé publique contre les chenilles processionnaires du pin et du chêne et les chenilles de bombyx-cul brun ». Quant aux traitements effectués par les ententes interdépartementales de démoustication, les modalités des traitements aériens sont définies par des arrêtés préfectoraux.
·le
4 Arrêté interministériel du 12 septembre 2006 relatif à la mise sur le marché et à l'utilisation des produits visés à l'article L.253-1 du code rural. 5 Loi de protection, d'aménagement et de mise en valeur du littoral, 8 février 1986. Les communes riveraines des mers et océans représentent 785 communes en métropole et 91 communes dans les DOM. Il faut y ajouter les 98 communes riveraines d'estuaires situés en aval de la limite transversale de la mer et les 87 communes riveraines d'estuaires et de deltas depuis le décret du 29 mars 2004. 6 Note de service à Mesdames et Messieurs les préfets de régions et de départements, DGAL/SDQV/N2005-8219 et DGFAR/SDFB/N2005-5029 du 13 septembre 2005. page 6
4 Textes votés ou en cours de discussion sur l'épandage aérien
Plusieurs textes relatifs aux traitements par aéronefs n'ont pas encore de transcriptions réglementaires, mais servent, néanmoins, de fondements à la réflexion de la mission. Parmi ces textes :
·la directive européenne du 21 octobre 2009 (publiée au JO de l'Union Européenne du 24 novembre 2009) instaurant un cadre d'action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable ; ·la loi de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement du 3 août 2009 ; ·la loi portant engagement national pour l'environnement, dite loi Grenelle 2, en cours de discussion au parlement français.
Tous ces textes, avec des formulations différentes, tendent vers l'interdiction de la pulvérisation par aéronefs des produits phytopharmaceutiques, sauf dérogations. Dans la directive « pesticides », le paragraphe 1 de l'article 9 est ainsi formulé : « Les États membres veillent à ce que la pulvérisation aérienne soit interdite. » Au paragraphe 2 de ce même article, suivent les cas particuliers pour lesquels la pulvérisation aérienne peut être autorisée. (cf .Annexe 4). La loi dite Grenelle 17, article 31-g, cite parmi les objectifs à atteindre, celui « d'interdire l'épandage aérien de produits phytopharmaceutiques, sauf dérogations ».
5 Situation actuelle de l'épandage aérien en France
5.1 régions et cultures concernées
Un recensement des opérations de traitements aériens a été établi à partir des données 2008 (ou moyenne triennale 2006-2008 si 2008 n'a pas été jugée comme étant une année représentative). Les données ont été communiquées par les DRAAF/SRAL pour la France hexagonale et les DAF/SPV pour les départements d'outre-mer, à partir des déclarations de traitements reçues en application de l'arrêté du 5 mars 2004. Ce recensement porte essentiellement sur l'application de produits phytopharmaceutiques, objet de la mission. Néanmoins, les éléments relatifs à la lutte contre les chenilles processionnaires du pin ont été inclus bien que relevant principalement de motifs de santé publique, et ce parce que cette lutte est soumise au même dispositif de déclarations obligatoires auprès des DRAAF et DAF par la note de service interministérielle du 13 septembre 2005. Par ailleurs, la problématique de la lutte contre les moustiques et des luttes anti-vectorielles a aussi été abordée, à partir des informations dont disposent certaines DRAAF/SRAL et DAF/SPV et de celles communiquées par les Ententes interdépartementales de démoustication. Environ 50 000 ha développés seraient traités annuellement par aéronefs contre les moustiques sur le territoire national. Comme il s'agit de biocides, hors champ de la mission, ce sujet n'est pas examiné dans ce rapport.
7 Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement,
Chapitre III, Une agriculture et une sylviculture diversifiées et de qualité, productives et durables. page 7
Sont concernés (c'est à dire au moins une déclaration de traitement dans l'année) : 22 Régions ( DOM compris) et 66 départements (cf Annexe 5). Au total, les traitements portent sur environ 203 000 ha « développés » (c'est à dire qu'une même parcelle compte autant de fois qu'il y a de passages d'un aéronef), soit une surface traitée « réelle » (recevant au moins une fois par an une application par aéronef) certainement inférieure à 100 000 ha. Six régions administratives, qui ont une surface développée traitée supérieure à 15 000 ha, totalisent les ¾ des surfaces développées : Martinique, Aquitaine, Champagne-Ardennes, Guadeloupe, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Guyane. Huit régions, qui ont une surface traitée développée inférieure à 10 000 ha et supérieure à 2 000 ha, représentent un peu moins d'un quart des surfaces développées : Midi-Pyrénées, Picardie, Languedoc-Roussillon, Centre, Alsace, Bourgogne, Poitou-Charentes, Rhône-Alpes. Les huit autres régions concernées le sont très ponctuellement (moins de 900 ha développés) : Auvergne, Ile-De-France, Lorraine, Franche-Comté, Pays de la Loire, Corse, Limousin, Nord-PasDe-Calais. Quatre régions ne reçoivent pas (ou plus depuis au moins 3 ans) de traitements aériens : BasseNormandie, Bretagne, Haute-Normandie, Réunion. De plus, d'après les éléments fournis à la mission, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie et St-Pierre et Miquelon n'épandent pas de produits phytopharmaceutiques par aéronef. La part de la surface agricole nationale traitée par aéronef, au moins une fois, avoisine ainsi 0,3 %, et la part de la surface forestière et des espaces boisés moins de 0,1%. Par rapport au dernier recensement réalisé en 2003 (environ 275 000 ha), la baisse de la superficie développée traitée par aéronefs depuis l'arrêté du 5 mars 2004 serait donc supérieure à 30 %. Cinq végétaux ou catégories de végétaux sont dominants: Chacune de ces productions dominantes fait l'objet d'une fiche en Annexes 6 à 10. Vigne : Des traitements aériens sont réalisés dans 16 régions, 30 départements, sur une surface développée de l'ordre de 45 000 ha. Les organismes nuisibles visés sont principalement les maladies cryptogamiques (mildiou, oïdium, black-rot) ainsi que des insectes (tordeuses de la grappe, cicadelle vectrice de la flavescence dorée). L'application de désherbants s'est faite ponctuellement dans une seule région. Le nombre de passages de l'aéronef sur la même parcelle varie entre 1 à 11 selon les vignobles. La surface réelle est ainsi probablement inférieure à 10 000 ha, soit un peu plus de 1% du vignoble français, avec un taux de couverture nettement plus élevé pour le vignoble champenois (se rapprochant de 10 %). Une quarantaine de produits phytopharmaceutiques différents (spécialités commerciales) est utilisée sur vigne.
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Maïs : Des traitements aériens sont réalisés dans 16 régions, 34 départements, sur une surface développée de l'ordre de 42 000 ha ( avec une très forte proportion de maïs doux et maïs popcorn). Les organismes nuisibles visés sont principalement des insectes (pyrale, sésamie, heliothis, chrysomèle) mais aussi des maladies cryptogamiques (helminthosporiose et fusariose, principalement sur maïs semence). Les traitements ont lieu quasi exclusivement quand la hauteur du maïs dépasse 1,10 mètres, soit quelques semaines avant la floraison mâle. Un à deux passages de l'aéronef sur la même parcelle est généralement réalisé, parfois 3, soit sur une surface réelle de maïs qui ne dépasse probablement pas 30 000 ha. Le taux de la sole de maïs traitée au moins une fois par aéronef est ainsi de l'ordre de 1%, tous types de maïs confondus. En Aquitaine, la proportion atteint 5 à 6% ( maïs grains + maïs semences + maïs doux). Une vingtaine de produits phytopharmaceutiques différents (spécialités commerciales) est utilisée. Riz : Des traitements aériens sont réalisés dans les 3 régions de production ( Provence-Alpes-Côte d'Azur, Languedoc-Roussillon et Guyane) sur environ 31 000 ha développés (45 % en Camargue et 55 % en Guyane). Les organismes nuisibles visés sont essentiellement les plantes adventices (désherbage), des insectes (pyrale en Camargue, et de nombreux insectes de climat équatorial en Guyane), ainsi que des maladies cryptogamiques (pyriculariose). Entre 1 à 6 applications sont réalisées par an, avec une plus forte pression en Guyane. La surface réelle traitée au moins une fois dans l'année doit se situer aux environs de 14 000 ha (près de 60% des rizières en Camargue et la quasi totalité en Guyane). Une dizaine de spécialités commerciales est utilisée. Banane : Des traitements sont réalisés en Martinique et en Guadeloupe sur 63 500 ha développés. Ce sont uniquement des traitements anti-cryptogamiques (cercosporiose jaune), avec 9 à 12 passages par an. Ils sont réalisés sur une surface réelle traitée d' environ 7 000 ha, soit sur environ 75 % de la bananeraie. Trois spécialités commerciales sont utilisées. Forêt et espaces boisés : Des traitements aériens sont réalisés dans 17 régions, 35 départements, sur une surface développée dépassant 11 000 ha. Les organismes nuisibles visés sont principalement des insectes, essentiellement les chenilles processionnaires du pin et les chenilles défoliatrices des feuillus qui ont la particularité d'être urticantes. La processionnaire du pin représente au moins 80% des surfaces traitées (9 000 ha développés). Très ponctuellement des traitements anti-pucerons ont été réalisés (une région).
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Les rouilles du peuplier donnent également lieu à des traitements aériens (3 régions, 2 000 ha développés). Très localement, un traitement a été réalisé pour le contrôle des fougères (une région). Une dizaine de spécialités commerciales est utilisée. D'autres cultures, dont certaines très ponctuellement et occasionnellement, sont concernées mais sur des surfaces nettement moindres : Céréales à paille : Dans 6 régions, 15 départements, sur 3 350 ha développés. Il s'agit principalement du blé dur, dans les régions rizicoles ( Provence-Alpes-Côte d'Azur et Languedoc-Roussillon). Les organismes nuisibles concernés sont les maladies cryptogamiques (rouille, oïdium, fusariose, septoriose), les insectes et les plantes adventices des cultures ( une région). Le plus souvent un seul passage est réalisé par an. Une dizaine de spécialités commerciales est utilisée. Oléo-protéagineux : Dans 6 régions, 20 départements, sur 4 200 ha développés (essentiellement colza), avec généralement un seul passage par an. Les organismes nuisibles sont :
·sur
colza : insectes (charançon, pucerons, mélighètes) et maladies cryptogamiques (sclérotiniose, alternariose, oïdium), ·sur tournesol : maladie cryptogamique (phomopsis), et les plantes adventices des cultures dans une région. Une dizaine de spécialités commerciales est utilisée. Arbres fruitiers ( y compris châtaignier et noyer) : Dans 5 régions, 8 départements, sur 1 900 ha développés ( dont 2/3 sur pommiers ). Organismes nuisibles:
·sur
pommier (2 régions : Poitou-Charente et Provence-Alpes-Côte d'Azur): maladies cryptogamiques (tavelure, oïdium, botrytis). Des passages sont également effectués à des fins de nutrition foliaire. ·sur châtaignier (4 régions : Poitou-Charente, Aquitaine, Limousin et Midi-Pyrénées) : insectes (carpocapse et balanin) ·sur noyer (une région : Limousin): bactériose.
Le nombre annuel de passages d'aéronefs varie de 1 à 5 (pommier). Une vingtaine de spécialités commerciales est utilisée.
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Betterave : Trois régions concernées (Aquitaine, Centre et Provence-Alpes-Côte d'Azur), 6 départements, soit environ 1 000 ha développés ( principalement sur betteraves porte-graines). Organismes nuisibles: insectes (altise, pucerons, noctuelles), maladie cryptogamique (oïdium) et plantes adventices des cultures. Pépinières : Deux régions ( Pays de la Loire et Ile-de-France), 2 départements, 220 ha contre : anthracnose, oïdium Prairies-plantes fourragères : Deux régions ( Centre et Midi-Pyrénées), 3 départements, 100 ha. contre : plantes adventices des cultures, insectes (phytonome). Cultures légumières : Deux régions ( Provence-Alpes-Côte d'Azur et Languedoc-Rousillon) , 2 départements, 75 ha ( principalement tomate) contre : acariens, mildiou, pucerons Roseaux : Une région ( Provence-Alpes-Côte d'Azur), 1 département, 115 ha.
5.2 Entreprises de traitements aériens et aéronefs employés
Le fichier national des distributeurs et applicateurs de produits antiparasitaires agréés (DAPA) comporte 121 entreprises, sachant que le syndicat national des exploitants d'hélicoptères (SNEH) n'indique que 19 entreprises en activité (dont 5 aux Antilles-Guyane) employant au moins 135 personnes, dont 52 pilotes (39 sur hélicoptères et 13 sur avions) et 48 mécaniciens. Toujours d'après les données du SNEH, la flotte d'aéronefs est composée d'environ 59 hélicoptères (dont 80% de type Bell) et 22 avions. Les hélicoptères avec des kits spécifiques d'épandage sont des appareils d'ancienne génération (Bell), les hélicoptères de nouvelle génération n'ayant pas ces kits. L'activité principale des diverses entreprises reposerait sur les traitements à base de produits phytopharmaceutiques et biocides (chenilles processionnaires), mais pour bon nombre de ces entreprises, le SNEH indique que les aéronefs peuvent également réaliser :
·dans
le secteur agricole: des travaux de blanchiment et déblanchiment des serres, de pollinisation des plantes (notamment maïs) par brassage d'air, d'épandage d'engrais, de semis de graines, de lutte anti-gel en vignobles et vergers par brassage d'air, de séchage des vendanges..., ·dans le secteur non agricole, des épandages de produits tels que chaux ou bactéries sur des bassins de décantation d'eaux usées, des traitements de démoustication..., ·des missions de reconnaissance pour vérifier des dégâts de gibiers, d'orages ou de grêle...
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La part d'activité phytopharmaceutique de chacune de ces entreprise n'est pas précisée, mais certaines, très liées au secteur agricole, interviennent quasi-exclusivement dans ce domaine. Dans toutes les régions concernées de la France hexagonale, les aéronefs utilisés pour les traitements phytopharmaceutiques sont des hélicoptères. En Guyane, seul les avions réalisent des épandages. En Guadeloupe et en Martinique avions et hélicoptères interviennent. Sur les 22 avions recensés par le SNEH, une dizaine intervient en outre-mer pour l'épandage de produits phytopharmaceutiques. Les autres avions réalisent essentiellement des traitements de démoustication y compris en France hexagonale. Recherche et expérimentation Afin de répondre aux critiques formulées sur les conséquences des traitements par aéronef en dehors de la stricte zone traitée, différentes études ont été conduites ces dernières années, afin de mesurer les phénomènes de dérive et de chercher les voies d'amélioration. La mission a eu connaissance des résultats de certaines de ces études et expérimentations conduites par divers organismes :
L'observatoire régional de l'air en Midi-Pyrénées (ORAMIP) a mesuré en 2004 les concentrations dans l'air de produits phytosanitaires en situation de traitement du maïs doux contre la pyrale, dans le cas d'un tracteur, d'un enjambeur et d'un hélicoptère. Par des prélèvements en limite des parcelles traitées, les pulvérisations réalisées par tracteur présentent les concentrations moyennes les plus importantes, l'enjambeur des niveaux de concentration plus faibles, tandis que l'hélicoptère du fait de sa rapidité de passage et de la technique employée semble limiter la durée et la concentration de la dérive. En 2004, la Coopérative du syndicat général des vignerons (CSGV) a conduit, en association avec la société Bayer et l'institut de recherche agronomique de Geisenheim (Allemagne), une étude sur la dérive de pulvérisation par hélicoptère sur le vignoble de Champagne. Ces essais ont notamment montré des gains manifestes apportés par les buses à inclusion d'air, qui placent les traitements par hélicoptère à un niveau assez voisin des applications terrestres en matière de dérive. Au vu de ces bons résultats, l'utilisation de ces buses a été généralisée en Champagne. Le CEMAGREF, avec le soutien du ministère en charge de l'agriculture, réalise une étude pour « l'optimisation des usages des pesticides et des fertilisants en traitements par aéronefs », avec un volet particulier développé aux Antilles en collaboration avec la filière banane (programme OPTIBAN). Le rapport remis par le CEMAGREF en juillet 2009 dresse le bilan de 138 essais sur différentes cultures représentant plus de 20 000 analyses. Les études conduites sur la bananeraie aux Antilles étant en cours, les résultats seront publiés ultérieurement.
Le rapport du CEMAGREF de juillet 2009 conclut notamment :
pour les traitements par hélicoptère: en cumulant la réduction de la largeur de rampe à environ 60 % de la largeur du rotor, une hauteur de vol limitée à 2 mètres au-dessus de la culture et l'emploi de buses à inclusion d'air, il est possible d'obtenir des courbes de dérive très proches de celles obtenues pour des applications terrestres. Dans certains cas, elles peuvent même s'avérer plus favorables (arboriculture) ; pour les traitements par avion: la vitesse de vol élevée engendre une altitude de vol supérieure et des mouvements d'air importants. Une diminution importante de la largeur de la rampe et/ou l'adjonction d'équipements supplémentaires pourrait apporter des améliorations sensibles.
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Quelques exemples de bonnes pratiques Suite aux études et essais de ces dernières années, des dispositions ont été prises pour améliorer l'équipement des aéronefs et leurs pratiques, afin de maîtriser les phénomènes de dérive, de réduire les impacts possibles sur l'environnement et sur la santé et de façon générale, d'assurer une meilleure traçabilité des épandages. Sur vigne en Champagne, un prestataire réalise 60 % des traitements aériens dans le vignoble, avec 4 hélicoptères, 4 pilotes saisonniers, 2 mécaniciens permanents (renforcés saisonnièrement d'un troisième), et 4,5 employés administratifs. Les hélicoptères sont équipés d'un dispositif permettant, depuis le poste de pilotage, de réduire instantanément la largeur de pulvérisation de 12 à 6 mètres selon la configuration des parcelles identifiées préalablement par des balises en couleur. Les appareils sont dotés d'un GPS permettant de géoréférencer les parcelles traitées (données stockées depuis 8 ans), mais sans liaison avec un système d'information géographique. Afin de réduire les risques de pollutions accidentelles, ce prestataire a installé à côté de son atelier de maintenance un dispositif de récupération et de traitement des effluents (fonds de cuve). Le traitement des effluents est effectué par ultra-filtration et osmose inverse dans des cuves d'une capacité suffisante pour une campagne entière. Les boues de décantation sont ensuite confiées à une société spécialisée pour leur destruction. La station est également équipée d'une machine, conçue localement, pour rincer les bidons de produits phytopharmaceutiques, qui sont ensuite stockés sur place avant élimination par la filière ADIVALOR. En 2007, un référentiel des bonnes pratiques de traitement aérien, établi sous l'égide du CIVC, a été adopté par les deux sociétés d'aéronefs intervenant en Champagne. Il renforce la professionnalisation et la qualité des applications. Il a aussi défini une distance de 12 mètres par rapport aux parcelles en viticulture biologique, avec marquage spécifique des parcelles concernées, ce qui a apaisé les relations avec la trentaine de producteurs 'bio'. Sur maïs doux, la filière a fait le choix d'abandonner totalement l'épandage par voie aérienne en zones péri-urbanisées (cas du Béarn), en le remplaçant par des traitements terrestres avec tracteurs enjambeurs. Pour les rizières de Camargue, un dispositif spécifique a été retenu en 2005. Il consiste à gérer les traitements aériens par « ilots hydrauliques » positionnés de façon précise sur un SIG (contour, surface, position des exutoires...). Ces ilots sont constitués d'un groupe de parcelles contiguës, ayant une gestion hydraulique commune, en particulier au niveau de leur vidange. La gestion hydraulique de l'ilot doit permettre en fermant les vannes d'éviter tout mouvement d'eau pendant une période de 10 jours après l'application aérienne. L'hélicoptère doit respecter une zone de non traitement de 50 mètres en bordure intérieure des ilots (zone soit traitée par voie terrestre, soit non traitée), ce qui implique que les ilots soient de superficie suffisante. Les produits à base d'alphamétrine, dont le profil écotoxicologique est très défavorable, ont été exclus de ce dispositif. Sur banane en Guadeloupe (en cours d'extension en Martinique), les aéronefs sont équipés de GPS depuis début 2008. Des mises au point sont en cours devant permettre à ces équipements : de guider avec précision les traitements sur le parcellaire en fonction des contraintes réglementaires ( zones de non traitement, coupures automatiques des buses aux moments opportuns...), d'assurer une traçabilité des épandages réalisés grâce à l'enregistrement de diverses données (parcelles, vitesses de vol, volume épandu, largeur traitées... ) et à l'archivage numérique sur un SIG pour permettre à la filière un suivi précis et pouvoir répondre aux besoins de contrôle.
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5.3 Les principales raisons du recours à l'épandage par aéronefs
Un certain nombre de raisons explique et justifie les interventions par aéronefs.
Réactivité et rapidité d'intervention : La rapidité d'intervention sur des surfaces importantes constitue un atout majeur des épandages aériens. En effet, en moyenne, pendant le même temps, un avion est en mesure de traiter 2 fois plus de superficie qu'un hélicoptère, dix à vingt fois plus qu'un tracteur, et 50 à 100 fois plus qu'un appareil à dos. Les périodes optimum de traitement sont parfois très courtes. Si le traitement n'est pas réalisé au bon moment, son efficacité est moindre, et cela peut conduire à devoir renouveler l'intervention, ou à utiliser des produits ayant un profil écotoxicologique moins favorable. C'est le cas, par exemple, des traitements contre la pyrale du maïs, le mildiou de la vigne, la cercosporiose jaune de la banane, ou du désherbage du riz en pré-levée... Organisation de luttes collectives et/ou obligatoires : L'efficacité de dispositifs de lutte contre certains organismes nuisibles est très dépendante de la bonne coordination, synchronisation et parfois généralisation des traitements. Une organisation collective peut éviter l'installation et la propagation d'un organisme nuisible, ce qui en final réduit le nombre d'interventions ainsi que la superficie traitée. Les traitements aériens permettent une meilleure synchronisation des interventions sur les foyers, alors que l'utilisation de moyens terrestres difficiles à coordonner constitue une prise de risques. Il est plus aisé de réussir ces luttes avec quelques aéronefs qu'avec une multitude de machines terrestres. Cela est particulièrement vrai pour des organismes nuisibles émergents faisant l'objet de luttes obligatoires (arrêtés ministériels et préfectoraux). La chrysomèle du maïs détectée il y a quelques années en France et dont la présence reste cantonnée dans quelques foyers, ou la cicadelle vectrice de la maladie de la flavescence dorée de la vigne qui n'affecte pas l'ensemble du vignoble, constituent de bonnes illustrations. Aspects santé-environnement : Les traitements aériens, réalisés par des entreprises professionnelles spécialisées, avec mutualisation de certaines opérations (notamment dosage des produits, remplissage de la cuve, élimination des effluents et des emballages...) peuvent présenter des avantages manifestes par rapport à une multitude d'interventions individuelles ( un chantier de traitement aérien remplace 20 chantiers terrestres). La vitesse d'avancement permet, en optimisant la qualité de la pulvérisation, de réduire jusqu'à 30 % les doses de matière active épandue par rapport aux applications terrestres. En terme de bilan carbone, la comparaison traitements aériens / applications terrestres mériterait d'être étudiée. D'après la filière maïs, à surface traitée égale, l'emploi de l'hélicoptère permet de réduire de près des 2/3 les émissions de CO2 par rapport à l'enjambeur. Sur le plan de la santé humaine, l'exemple de la Champagne constitue une illustration intéressante : dans les coteaux s'est développée depuis plusieurs années l'utilisation de petits chenillards (sorte de motoculteur sur chenilles portant un pulvérisateur) conduit manuellement par une personne qui marche derrière sa machine ; les utilisateurs de ces machines sont particulièrement exposés au brouillard de pulvérisation ainsi qu'aux risques d'accidents. Hauteur des végétaux : Des matériels de pulvérisation terrestres sont inexistants ou à faible efficacité pour traiter des productions hautes (cas notamment de la banane, de certains arbres fruitiers, des forêts et espaces boisés...), ou bien provoquent des dégâts mécaniques aux cultures (exemple du maïs en fin de cycle, et dans une moindre mesure du colza et tournesol...).
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Cultures sur fortes pentes et reliefs accidentés : Certaines cultures (vigne, banane...) ou forêts implantées sur coteaux sont difficilement ou non accessibles par des moyens terrestres classiques. Des accidents de retournement de tracteurs ou enjambeurs sont fréquents sur les parcelles à forte pente. Enjeux pédologiques : Le cas des rizières est bien sûr particulier : le passage des machines terrestres est rendu impossible la plupart du temps parce que trop destructeur des sols et de leur nivellement fin (obligatoire pour bien gérer les mises en eau). Pour d'autres productions, des problèmes de portance des sols après d'importants épisodes pluvieux peuvent également exister, rendant impossible l'entrée des tracteurs dans les parcelles sans abimer la structure de ces sols. Cela concerne ponctuellement diverses cultures comme les céréales à paille, le colza en sortie d'hiver... Enjeux socio- économiques : De façon générale, le passage au « tout terrestre », sous réserve qu'il soit techniquement possible, en l'état actuel des choix de cultures, engendrerait des surcoûts pour la profession agricole (investissements dans de nouvelles machines, dégâts causés par le passage de celles-ci) et pourrait fragiliser fortement des filières dans une conjoncture déjà très concurrentielle avec les autres pays producteurs. Pour le maïs doux, la filière estime ce surcoût à 30%, sachant qu'il serait nécessaire de doubler le parc actuel d'enjambeurs. Les traitements aériens se positionnent ainsi comme composante d'une stratégie globale de développement durable pour certaines filières. Leur arrêt brutal pourrait menacer la survie même de ces filières (c'est particulièrement vrai pour le riz, le maïs doux et pop-corn, la banane et, dans une moindre mesure, pour certains vignobles).
5.4 chaînes de décision et de responsabilité
L'arrêté du 5 mars 2004, relatif à l'utilisation par voie aérienne des produits phytosanitaires, repris dans la notice déclarative des traitements cerfa N°51010#01, définit deux intervenants : le donneur d'ordre et l'opérateur. Le donneur d'ordre, personne morale ou physique, est celui pour le compte duquel est effectué le traitement aérien. Il peut être donneur d'ordre à titre particulier ou à titre collectif. Quant à l'opérateur, également personne morale ou physique, c'est celui qui réalise le traitement par aéronef. En qualité de prestataire pour l'application de produits phytosanitaires à usage agricole, l'opérateur doit nécessairement être agréée au titre de l'article L 254-2 du code rural. En 2008, d'après les données communiquées par les DRAAF/SRAL et DAF/SPV, il y a eu au total sur le territoire national environ 340 donneurs d'ordre, et 1 710 déclarations de traitements par aéronefs. La déclaration préalable de traitement doit être signée conjointement par le donneur d'ordre et l'opérateur du traitement aérien. Lorsque le traitement a lieu sur un couvert végétal qui ne permet pas au pilote de s'assurer de l'absence de personnes dans la zone à traiter ou sur un espace fréquenté par le public, le donneur d'ordre doit porter au préalable à la connaissance du public la réalisation de ces traitements. En revanche, c'est l'opérateur du traitement qui doit faire parvenir dans les cinq jours qui suivent le traitement, le formulaire prévu, dûment rempli, avec toutes les informations jugées utiles. Il semble ressortir de ces dispositions que l'opérateur, en l'occurrence l'entreprise de traitement par aéronef, porte principalement la responsabilité des traitements réalisés, partagée cependant pour partie avec le donneur d'ordre. Sur le terrain, les situations rencontrées peuvent être différentes et parfois complexes.
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En Champagne, sur vigne, pour un vigneron coopérateur, c'est le service technique de la coopérative qui détermine le programme des traitements. Si ce vigneron a passé un contrat avec un prestataire de service, il lui transfère sa responsabilité. La société d'aéronefs effectue les déclarations de traitements aériens, et informe les viticulteurs et les mairies des passages de l'hélicoptère. Sur maïs doux, où la production est réalisée sous contrat, la campagne de traitements contre les insectes de 2ème génération est organisée par l'industriel. Ce dernier prend la décision de traiter, choisit et approvisionne les produits, retient le prestataire de service pour les traitements par aéronefs et effectue les déclarations auprès de l'autorité compétente. Sur riz en Camargue, un dispositif spécifique consiste à gérer les traitements aériens par « ilots hydrauliques » positionnés de façon précise sur un SIG. Les formulaires de déclaration de traitement aérien (modèle spécifique) sont renseignés par les prestataires et transmis par courrier électronique au plus tard la veille de chaque opération, avec la localisation des traitements (numéro d'ilot hydraulique), les dates de traitement, la surface traitée et les produits utilisés. Sur riz en Guyane, pour chaque épandage, un bon de commande est envoyé par les riziculteurs à la société de traitements, et les produits sont fournis par les sociétés rizicoles. La mise en oeuvre des stations de préparation des bouillies et l'ensemble des opérations liées à l'application sont prises en charge par la société d'aéronefs. Les déclarations de traitements sont adressées par les riziculteurs. Sur banane, la lutte contre la cerscosporiose jaune, réglementée par arrêté préfectoral, est mutualisée. Une convention est passée entre la fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (FREDON) et un organisme professionnel qui gère la logistique des traitements, et qui notamment achète et fournit les produits. Les applications par aéronefs sont réalisées par des prestataires. Ces quelques exemples montrent que des organisations différentes, adaptées à chaque filière et au contexte local, peuvent exister. Chaque mode d'organisation nécessiterait d'être expertisé au plan juridique pour situer les responsabilités réelles de chaque maillon (donneur d'ordre, opérateur, autres intervenants professionnels). Dans le nouveau cadre réglementaire basé sur le principe de « ce qui n'est pas autorisé est interdit » à la place de « ce qui n'est pas interdit est autorisé », cette question d'identification des responsabilités mérite la plus grande attention, en particulier en ce qui concerne la délivrance des dérogations à l'interdiction, entre l'organisme qui en fait la demande et l'autorité qui l'accorde.
6 - Mise en oeuvre des divers scénarios et leurs conséquences
Lors de ces diverses visites et rencontres, la mission n'a pas été en mesure de trouver des éléments techniques et scientifiques irréfutables pouvant prouver, actuellement, une nocivité accrue des épandages par aéronefs par rapport aux traitements terrestres. Les améliorations techniques tant au niveau des buses que des rampes de pulvérisation, les niveaux altimétriques des traitements, en particulier par hélicoptère, les produits autorisés, leur dose...ne permettent pas, a priori, de considérer que le traitement aérien effectué dans les conditions préconisées par les textes soit plus dangereux pour l'environnement ou la santé humaine. Néanmoins, la mission n'a pas eu la possibilité de se faire une réelle opinion sur l'acceptation sociale des traitements par aéronefs, y compris pour les produits biocides appliqués pour des raisons de santé publique. La mission n'ayant pas à se prononcer sur l'opportunité des textes votés, elle examinera, dans le contexte présent, les possibilités d'application de la législation actuelle selon plusieurs options.
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6.1 Interdiction totale
Les divers textes, tant législatifs que réglementaires, affichent l'objectif d'arriver à terme, à une interdiction totale des pulvérisations par aéronefs, du moins dans un premier temps, uniquement des produits phytopharmaceutiques. L'une des options consisterait à envisager dès à présent cet arrêt et à fixer un calendrier, négocié avec l'ensemble des professionnels, organismes, associations et services concernés. Cela aurait l'avantage :
·d'être
clair et sans ambiguïté pour l'ensemble des acteurs (y compris pour les associations de défense de l'environnement) avec un échéancier de mise en application ; ·d'inclure cette décision dans le cadre des négociations Ecophyto 2018 sur l'emploi des produits phytopharmaceutiques, voire des biocides ; ·d'accélérer la mise en place de nouvelles méthodes et matériels de traitements et d'inciter vivement l'industrie du machinisme agricole à rechercher des matériels adaptés aux conditions particulières de certaines cultures ; ·d'envisager la modification des cultures ou de leurs cycles de rotations, avec dans certains cas, l'abandon de certaines parcelles trop difficiles à exploiter ; ·d'inviter les sociétés prestataires de service à se reconvertir dans d'autres types de service. Cette interdiction totale n'aurait de sens que si, parallèlement, des dispositions étaient prévues pour éviter la substitution des traitements aériens par des pulvérisations pouvant présenter plus de risques pour la santé humaine et l'environnement. En effet, dans le cadre de la réglementation nationale actuelle, le risque est d'employer en substitution des produits autorisés pour le traitement terrestre T et T+, et de devoir effectuer plus de traitements pour avoir une efficacité comparable à celle apportée actuellement par les épandages aériens (la bonne réactivité et la rapidité d'intervention de ceux-ci permettent d'intervenir au moment optimum, et de juguler un organisme nuisible avant qu'il ne se propage). Néanmoins, il ne faut pas sous-estimer les conséquences d'une interdiction des pulvérisations par voie aérienne. Les opérateurs risquent d'être confrontés à des problèmes financiers pour investir, et les exploitants à des attaques sanitaires de leurs cultures auxquelles ils ne pourront pas toujours faire face, certaines filières pouvant être mise en difficultés dans un contexte économique et politique actuellement très sensible. Il n'est pas certain que les prestations demandées dans le cadre de la lutte contre des insectes avec des biocides dans le cadre de la santé publique soient suffisantes pour faire vivre des sociétés privées avec un matériel spécifique et des pilotes aguerris. La disparition des qualifications des sociétés prestataires de service aérien et surtout de leurs pilotes pourrait poser problème à terme lors : virulentes ou de traitements préventifs nécessitant une intervention immédiate, coordonnée et de grande ampleur ; ·de traitements à caractère de santé publique pour lutter contre de nouveaux insectes vecteurs porteurs de maladies. Dans ce cas la France se trouverait tributaire de prestataires originaires d'autres pays , ce qui pose le problème de leur disponibilité, du contrôle de leurs compétences, de leurs savoir-faire, de leurs connaissances et du respect des règles applicables sur le territoire français. Il n'était pas dans les attributions de la mission d'aborder les solutions alternatives qui devraient être mises en place sur l'ensemble du territoire français, afin que les autorités ne soient pas techniquement démunies pour faire face à un problème majeur de sauvegarde de cultures (lutte obligatoire) ou de santé publique. Mais, ne faudrait-il pas envisager de former des pilotes, dont ceux de la Protection civile, aux techniques d'application, sur des grands territoires, des produits phytopharmaceutiques et biocides.
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·d'attaques
6.2 - Les diverses modalités de dérogations
Compte tenu des pratiques actuelles, des enjeux économiques et pour accompagner une évolution souhaitable des pratiques, la mission propose que soit mise en place une procédure afin d'offrir la possibilité d'accorder des dérogations pour les traitements de produits phytopharmaceutiques par aéronef. Le principe proposé est l'obtention préalable à tout traitement par aéronef, d'une réponse positive à un dossier de demande de dérogation (correspondant à « l'approbation du programme d'application » prévu à l'article 9-4 de la directive 2009/128/CE). Pour un programme approuvé, les demandes relatives à des applications par pulvérisation aérienne (tels que prévues par cette même directive) seraient ensuite réalisées selon un dispositif comparable aux déclarations actuellement en vigueur en application de l'arrêté du 5 mars 2004. Si la dérogation est accordée, elle ne peut cependant pas être considérée comme un « droit acquis ». Les demandeurs devront régulièrement faire la preuve, à l'occasion du dépôt périodique de leur dossier de dérogation, de la nécessité de recourir aux aéronefs pour effectuer les traitements phytopharmaceutiques. Dans une vision à la fois pratique d'étude des dossiers et de cohérence des réponses, la mission propose deux niveaux de procédure et d'autorisation, le niveau ministériel pour quatre cultures préalablement définies, le niveau préfectoral pour toutes les autres. Le cas des luttes obligatoires contre des bioagresseurs réglementés doit aussi être prévu.
6.2.1 - dérogation ministérielle
La dérogation serait accordée au niveau ministériel, dans un objectif de cohérence des dossiers et des réponses de l'administration : ·aux seules cultures préalablement définies ; ·après dépôt d'un dossier de demande de dérogation, pour une culture, établi par la filière concernée ; il serait souhaitable que soit déposé un dossier unique pour l'ensemble du territoire national concerné, ou à défaut, au moins par grand bassin de production. ·après passage en comité national ad hoc, après expertise technique confiée à un agent qualifié (par exemple un expert ou rapporteur national de l'organisation nationale de la protection des végétaux). L'approbation du programme d'application et des modalités proposés vaudrait pour une durée de 3 à 5 années ou cycles de culture, avec ajustements annuels éventuels. Compte tenu des principales surfaces actuellement concernées, de leur répartition géographique souvent sur plusieurs régions administratives, et faute actuellement de réponses techniques alternatives satisfaisantes, la mission préconise, parmi les cultures faisant déjà appel à l'aéronef, d'en retenir quatre : - la vigne, en France hexagonale, - le maïs doux et le maïs 'pop corn' en France hexagonale, - le riz, en France hexagonale et en Guyane, - la banane en Guadeloupe et Martinique. La dérogation ministérielle ne pourrait être accordée qu'après constitution et présentation d'un dossier unique par culture et au moins par grand bassin de production ( « programme d'application au sens de la directive »), présenté par la filière concernée. Les dossiers à caractère individuel ou personnel ne seraient pas recevables.
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Pour la mission, au vu de la situation actuelle, aucune autre culture ne devrait pouvoir bénéficier, de ce niveau de dérogation. Le dossier de demande de dérogation à présenter au niveau national devrait : - préciser le ou les porteurs du dossier ; - indiquer la culture et le territoire (avec cartes et superficies) concernés ; - justifier les raisons du recours aux traitements par aéronefs par rapport à d'autres méthodes de traitement ; - expliciter les avantages sur la santé, l'environnement et l'impact positif du traitement par aéronefs ; - indiquer les travaux en cours pour améliorer les techniques actuelles de pulvérisation par aéronefs et/ou pour leur substitution par des pulvérisations par voie terrestre ; - établir le programme prévisionnel des traitements, en décrivant le dispositif mis en place pour raisonner la protection de la culture ; - indiquer les modalités d'information générale du public et au moment des traitements ; - présenter une charte des bonnes pratiques (dont le géoréférencement des parcelles traitées) et les obligations techniques exigées des prestataires (type d'aéronef, largeur des rampes, type de buses...) ; - établir tous les ans en fin de saison, un compte rendu des opérations effectuées. Ce bilan établi par la filière sera expertisé et pourrait être présenté au comité national ad hoc. Sans remarques particulières, la dérogation serait reconduite pour un an, dans la limite de la durée initiale de la dérogation. En cas de non constitution d'un dossier au niveau national ou en cas de refus de dérogation, aucune demande individuelle ou collective, pour la culture concernée, ne pourra être effectuée au niveau préfectoral. La dérogation ministérielle ne l'est que par rapport à l'interdiction d'épandage de produits phytopharmaceutiques par aéronefs. Bien entendu, l'obtention de cette dérogation implique le respect de l'ensemble des autres obligations légales et réglementaires en vigueur pour l'emploi des pesticides et pour la mise en oeuvre des traitements effectués par aéronefs. Des conditions pourraient également être imposées réglementairement en ce qui concerne l'équipement des aéronefs (rampes, buses, GPS...) au vu des connaissances acquises ( notamment travaux du CEMAGREF) comme le prévoit l'article 9-2-f de la directive 2009/128/CE, en anticipant l'échéance 2013 annoncée par cette même directive. La mission estime que les traitements des boisements forestiers, pour des raisons de santé, ne sont pas à inclure dans le champ des dérogations ministérielles puisque les produits utilisés relèvent de la législation sur les biocides et non de celle sur les phytopharmaceutiques. Les éventuels traitements phytopharmaceutiques, pour des raisons de sauvegarde des plantations forestières, devraient être instruits dans le cadre des dérogations préfectorales.
6.2.2 - dérogations préfectorales
6.2.2.1 - Dérogation annuelle Des possibilités de dérogations annuelles pourraient être accordées par le préfet de région ou de département après avis des commissions départementales compétentes en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques. Cette procédure de niveau local, permet d'ouvrir la possibilité d'un traitement phytopharmaceutique par aéronef à toutes les productions agricoles (autres que celles définies comme relevant de la procédure ministérielle définie au 7-2-1), ainsi qu'aux forêts et espaces boisés.
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La dérogation est accordée, au maximum, pour une campagne ou une année civile afin de répondre à des besoins locaux, plus ou moins récurrents, liés à des problèmes de type agronomique, physico-agronomique (portance des sols), climatique... Les dossiers de demande de dérogation préfectorale, individuels ou collectifs, doivent comporter les mêmes informations et documents que celles décrites dans la procédure 6-2-1. adaptées à la dimension territoriale des épandages aériens prévus. La dérogation est annuelle, sans reconduction automatique possible. L'obtention de cette dérogation préfectorale implique le respect de l'ensemble des autres obligations légales et réglementaires en vigueur pour l'emploi des pesticides et pour la mise en oeuvre des traitements de produits phytopharmaceutiques effectués par aéronefs. 6.2.2.2 - Dérogation ponctuelle La dérogation est accordée par le préfet, pour répondre à des circonstances exceptionnelles, par nature non prévisibles et qui ne pouvaient pas être anticipées et donc faire l'objet d'un dossier dans le cadre initial de la dérogation annuelle. Afin d'obtenir la dérogation, une procédure simplifiée serait mise en place avec la constitution d'un dossier sommaire comprenant : - nom et qualités du pétitionnaire ; - la culture et les parcelles (avec plans) concernées ; - les raisons du recours à l'aéronef ; - la maladie à combattre et les produits prévus. L'administration doit pouvoir répondre rapidement (2 à 3 jours), une non-réponse dans le délai valant acceptation. En effet, ce n'est qu'après acceptation, que peut être mise en route l'ensemble des procédures relatives aux traitements par voie aérienne des produits phytopharmaceutiques. Afin d'éviter toute déviance dans l'emploi de cette procédure accélérée et allégée, le nombre de possibilités de dérogation devrait être limité dans le temps, pour les cultures effectuées sur une même parcelle (par exemple pas plus de 2 fois sur 3 années consécutives).
6.2.3 - Cas des luttes obligatoires
En complément des dispositions décrites ci-dessus, il convient également de prévoir la possibilité d'autoriser par arrêtés ministériels et préfectoraux le recours à l'aéronef pour la mise en oeuvre, sur toutes cultures, de luttes obligatoires contre des bioagresseurs émergents présentant une menace forte pour l'agriculture et l'environnement.
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7 Recommandations de la mission
La mission recommande :
·de
mettre en place, dès que possible, par voie réglementaire les modalités de dérogation permettant l'épandage par aéronefs de produits phytopharmaceutiques ;
·de
retenir deux niveaux administratifs pour l'obtention des dérogations : - ministériel pour les cultures de la vigne, du maïs doux et maïs `pop corn', du riz et de la banane, - préfectoral pour toutes autres cultures ;
·d'exclure
de ces procédures les traitements des forêts et espaces boisés pour des raisons de santé publique en appliquant la législation et réglementation sur les biocides ;
·de bien définir les responsabilités réelles de chaque maillon de la chaîne de décisions (donneur d'ordre, opérateur, autres intervenants professionnels) ; ·d'entamer une réflexion au niveau national sur l'avenir des capacités et possibilités de traitements de grande ampleur à base de pesticides (produits biocides et phytopharmaceutiques) par aéronefs avec des appareils équipés et des pilotes habilités pour des traitements à basse altitude, notamment pour faire face à d'éventuels bioagresseurs émergents constituant une menace pour l'agriculture, l'environnement ou la santé publique.
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8 Annexes
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Annexe n° 1
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Annexe n° 2
Mission sur l'épandage aérien de produits phytopharmaceutiques CGAAER n° 1972 - CGEDD n° 006772-01 -
Personnes rencontrées
Professionnels et organismes professionnels et interprofessionnels Prestataires de services Thierry Couderc, Union française de l'hélicoptère Frédéric Coupé, Général Air services, SNEH Pierre Charlier, Air Champagne, Champagne hélicoptères, Phyt' Air Jean-Pierre Charlier, Air Champagne, Champagne hélicoptères, Phyt' Air Patrice Durand, Directeur Entrepreneurs des Territoires Filière maïs Cédric Poeydomenge, directeur général adjoint Maiz' Europ', directeur adjoint de Association générale des producteurs de maïs (AGPM) Matthieu Caldumbide, chargé de mission, AGPM Alix d'Armaillé, chargé de mission, AGPM/ORAMA Jean-Baptiste Thibord, Arvalis, Institut du végétal Christophe Ballouhey, Seretram- Géant Vert Guillaume Ferry, agriculteur, commune de Solferino, Landes Alexis Blanco, chef de culture, commune de Solferino, Landes Alain Gausset, agriculteur, commune de Josse, Landes Didier Laborde, entrepreneur travaux agricoles, commune de Hauriet, Landes Sylvain Castaignos, technicien maïs doux, Seretram Roland Sarraméa, technicien, responsable maturité et traitements maïs doux, Seretram Filière banane Sébastien Zanoletti, directeur Innovation et développement durable, Union des groupements de producteurs de bananes de Guadeloupe et Martinique (UGPBAN) Filière riz Cyrille Thomas, Centre français du riz, Camargue François Callet, Syndicat du Riz, Centre français du riz, Camargue Olivier Rollin, riziculteur, Camargue Thierry Scholastique, groupe SOS ( riz Guyane)
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Filière vigne Bernard Nadal, président de l'Institut français de la vigne (IFV) Jean-Pierre Van Ruyskensvelde, directeur général, IFV Thierry Coulon, directeur scientifique et technique vigne et terroir, IFV Sébastien Codis, pôle technique et viticole, IFV Jean-Marie Tarlant, Vigneron en Champagne Dominique Moncomble, directeur technique et environnement, Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CICV) Arnaud Descotes, responsable environnement, CICV Sébastien Debuisson, chef de projet viticulture, CICV Patrick Charlot, directeur général, Coopérative du syndicat général des vignerons (CSGV) Luc Truchon, responsable technique et environnement, CSGV Jean-louis Uriel, responsable commercial, La vigneronne, CSGV Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat Direction générale de la Prévention des risques, service de la Prévention des nuisances et de la Qualité de l'environnement Catherine Mir, adjointe au chef de service, Guillaume Bailly, Stéphane Jacques Stéphane Jacques, chargé de mission pesticides, bureau des substances et préparations chimiques, Guillaume Bailly, Adjoint au chef de Bureau des Substances et Préparations Chimiques, Service de la Prévention des Nuisances et de la Qualité de l'Environnement Ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche Direction générale de l'Alimentation, Sous-direction de la qualité et de la protection des végétaux Marie-Christiane Casala, chef du bureau des biotechnologies, de la biovigilance et de la qualité des végétaux Laurence Grassard, bureau des biotechnologies, de la biovigilance et de la qualité des végétaux Jean-Luc Flot, Chef du Département de la santé des forêts (DSF) Organismes publics de l'Etat Sylvain Rousset, Unité de recherche en aménités et dynamiques des espaces ruraux, Cemagref Vincent Polveche, Cemagref Dominique Didelot, Cemagref Philippe Boiseau, direction territoriale Méditerranée, 0NF Guy Clément, Cirad
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Services déconcentrés de l'Etat Pierre Girard, DSF Languedoc-Roussillon Serge Gasc, DDAF Hérault Christophe Pueyo, Draaf/Sral, Languedoc-Roussillon Virginie Grzesiak, Draaf/Sral, Languedoc-Roussillon Michel Larguier, Draaf, Chef du Sral Languedoc-Roussillon Eric Oudard, Draaf/Sral, Provence-Alpes-Côte d'Azur Joël Raymond, Diren, Languedoc-Roussillon Gérard Courtois, ingénieur du génie sanitaire, Drass, Languedoc-Roussillon Isabelle Estève Moussion, ingénieur, Drass, Languedoc-Roussillon Christine Ricoux, ingénieur sanitaire, Cire, Languedoc-Roussillon Philippe Reulet, Draaf/Sral, Aquitaine, Luc Lescieux, Draaf/Sral, Aquitaine Henri Simon, Draaf/chef du Sral, Aquitaine Mélanie Taubu, Diren, Aquitaine Jean-Pierre Morzières, Draaf/Sral, Midi-Pyrénées Pierre Claquin, Draaf, chef du Sral, Champagne-Ardenne Yan Holosne, Draaf/Sral, Champagne-Ardenne Françoise Marchal, responsable cellule ressources en eau, Dréal, Champagne-Ardenne Karine Alleaume, ingénieur d'études sanitaires, Drass, Champagne-Ardenne, pôle départemental Autres organismes Jean-Claude Bévillard, secrétaire national, pilote du réseau agriculture, France Nature Environnement (FNE) Didier Moulis, directeur technique, Entente interdépartementale pour la démoustication du littoral méditerranéen (EID) Dominique Gindre, coordinatrice opérationnelle de démoustication, EID Méditerranée Christophe Lagneau, directeur de la recherche, EID Méditerranée Jean-Marie Bocquet, directeur général, Union des industries de la protection des plantes (UIPP) Philippe Michel, responsable des affaires techniques et réglementaires, Union des industries de la protection des plantes (UIPP)
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Annexe n° 5
Surfaces développées traitées par aéronef en hectares ( par régions et cultures)
AL AQ AU BN BO CA CE CO FC GU GY LI IF LO LR MA MP NC PA PC PI PL RA total banane 0 0 0 0 0 0 0 0 0 19143 0 0 0 0 0 44386 0 0 0 0 0 0 0 63529 vigne 1270 163 0 0 4703 23 572 740 142 7 0 0 0 79 255 1435 58 0 3135 39 7293 21 2117 45029 maïs 5280 21737 889 0 399 308 4494 7 345 0 0 0 91 0 114 0 6595 0 82 920 20 45 548 41874 riz 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 17230 0 0 0 3237 0 0 0 10683 0 0 0 0 31150 f orêt 34 1996 0 0 50 506 134 58 0 0 0 0 156 105 1553 0 425 25 3174 663 1207 59 120 10265 oléo-pro céréales 0 0 346 82 0 0 0 0 0 275 9 0 745 231 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 121 0 0 0 0 1042 0 0 1608 336 0 0 0 1379 1355 0 0 0 0 0 0 0 4184 3345 f ruitiers betterave 0 0 197 704 0 0 0 0 0 0 0 0 0 236 0 0 0 0 0 0 0 0 150 0 0 0 0 0 0 0 0 0 120 0 0 0 260 60 1156 0 0 0 0 0 0 0 1883 1000 autres total 0 6584 0 25225 0 889 0 0 0 5427 0 24395 50 6630 0 207 0 352 0 19143 0 17230 0 150 75 522 0 360 22 7403 0 44386 49 9191 0 25 165 18938 0 4133 0 8520 146 271 0 2785 507 202766
50000 45000 40000 35000 30000 25000 20000 15000 10000 5000 0
AL AQ AU BN BO CA CE CO FC GU GY LI IF LO LR MA MP NC PA PC PI PL RA
autres betterave fruitiers céréales oléo-pro forêt riz maïs vigne banane
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Annexe n° 6 : Fiche VIGNE Le vignoble (raisins de cuve) occupe en France une superficie totale de 846 000 hectares, avec une production qui avoisine 48 millions d'hectolitres en 2009. Des traitements aériens sont réalisés dans 16 régions, 30 départements, sur une surface développée de 45 000 ha, uniquement par hélicoptère. Les organismes nuisibles visés sont principalement les maladies cryptogamiques (mildiou, oïdium, black-rot) ainsi que des insectes (tordeuses de la grappe, cicadelle vectrice de la flavescence dorée). L'application de désherbants s'est faite très ponctuellement dans une seule région . Le nombre de passages de l'aéronef sur la même parcelle varie entre 1 à 11 selon les vignobles. La surface réelle ainsi traitée est probablement inférieure à 10 000 ha, soit un peu plus de 1% du vignoble, avec un taux de couverture nettement plus élevé pour le vignoble champenois (se rapprochant de 10%). Une quarantaine de produits phytopharmaceutiques (spécialités commerciales) est utilisée sur vigne. Les représentants de la profession viticole rencontrés au plan national se sont exprimés pour le maintien des traitements aériens sur vigne pour un ensemble de raisons : vignes cultivées sur des pentes fortes et des parcelles accidentées avec des devers importants, rapidité d'intervention, situation de nombreux petits exploitants non équipés pour la réalisation des traitements par voie terrestre, cas des années climatiques exceptionnelles et des luttes obligatoires contre des organismes nuisibles émergeant... Ils ont également souhaité qu'aucun vignoble ne soit exclu du dispositif, sachant que la problématique comporte des variantes selon les régions. La situation du vignoble Champenois a été examinée plus particulièrement. Le contexte du vignoble Champenois La culture de la vigne en Champagne remonte à l'époque gallo-romaine, mais c'est à compter du XVIIème siècle que la notoriété de ses vins s'est développée. C'est le vignoble le plus septentrional de France. En 2008 un dossier de demande d'inscription des paysages de Champagne sur la liste du Patrimoine mondial de l'UNESCO a été déposé. Il occupe une superficie proche de 34 000 ha, dont 90 % sont la propriété des vignerons et 10 % des « maisons ». Il se répartit principalement sur deux régions administratives (Champagne-Ardennes et Picardie) mais avec quelques parcelles en Ile-de-France. Cinq départements sont concernés : la Marne ( près des ¾ du vignoble), l'Aube et la Haute-Marne, l'Aisne, la Seine-et-Marne. Il existe près de 15 600 exploitations viticoles, d'une superficie moyenne de 2,18 ha. Le vignoble est très morcelé : 283 681 parcelles soit une superficie moyenne de 12 ares. La pente moyenne des parcelles est de 12%, avec des extrêmes pouvant dépasser 50%. Plus de la moitié des propriétaires sont des pluri-actifs. 23 % du vignoble est exploité par les propriétaires, 44 % en fermage et 33 % en métayage. Il existe 4 718 récoltants-manipulants et récoltants-coopératives, 12 157 vignerons vendent des raisins, 13 830 sont adhérents de 137 coopératives, et on dénombre 329 « maisons » de Champagne. La filière est structurée autour de trois instances officielles : l'Union des maisons de Champagne ( UMC) regroupant les négociants, le Syndicat général des vignerons de la Champagne (SGVC) regroupant les vignerons, et le Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC) interprofession entre les négociants et les vignerons. La production annuelle de vin oscille autour de 3 millions d'hectolitres (environ 6 % de la production nationale), représentant un chiffre d'affaire de 4,4 milliards d'euros dont la moitié à l'exportation (80 % en volume au sein de l'Union européenne). Les maisons de Champagne exportent 86 % de la production, les récoltants et coopératives occupent la moitié du marché national.
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Les pratiques phytosanitaires en Champagne Les conseils en matière de protection des cultures sont assurés dans le cadre d'un dispositif mutualisé dont la maîtrise d'ouvrage est assurée par le CIVC. A l'origine, en 1991, avait été mise en place conjointement entre le Service de la protection des végétaux et le CIVC, l'organisation « MAGISTER » sous forme de GIE associant également les distributeurs de produits phytopharmaceutiques et les coopératives. Actuellement, un réseau de 30 à 40 techniciens du CIVC, des chambres d'agriculture, des groupements de développement viticole et de techniciens et ingénieurs conseils privés employés par les coopératives et maisons de Champagne, réalisent des observations biologiques hebdomadaires sur 500 à 1 000 parcelles. Des données météo sont fournies par 35 stations, et le CIVC fait tourner des modèles mathématiques de prévision (notamment mildiou et oïdium). Les techniciens du réseau sont réunis chaque semaine pour mettre en commun les informations, et un bulletin basé sur une cartographie des risques est édité par le CIVC. Les avertissements agricoles, auparavant publiés par le service de la protection des végétaux, sont désormais remplacés par le bulletin de santé du végétal édité par le CIVC. Il s'agit d'un outil d'aide aux décisions, sur lequel s'appuient les coopératives et distributeurs pour leurs préconisations, les décisions de traitement revenant aux exploitants (ceci est valable pour les traitements terrestres comme pour les traitements aériens). Cependant, dans le cas des vignerons ayant passé un contrat avec un prestataire de traitement, c'est le service technique de la coopérative qui détermine le programme, et un document est signé par le vigneron qui transfère la responsabilité au prestataire. Les traitements se font avec trois types de machines :
tracteurs enjambeurs avec matériel porté de pulvérisation terrestre classique en vignoble (à jets portés, à rampes à pendillard, ou pneumatiques), qui traitent sur des largeurs allant de 4 à 10 rangs de vigne. des petits chenillards (comparables à des motoculteurs), conduits manuellement dans le rang de vigne par un opérateur qui marche derrière la machine, et sur lequel est installé un pulvérisateur doté de son propre moteur (soit un appareil à rampes, soit un atomiseur). Ce type de matériel s'est développé à partir de 2007, année particulièrement pluvieuse à l'époque des vendanges, pour permettre de sortir les raisins des parcelles. Il existe des chenillards de différentes puissance, certains applicateurs réalisant des prestations de service s'étant équipés des plus gros modèles. Selon le type de matériel, le nombre de rangs traités lors du passage est plus ou moins important. des hélicoptères, essentiellement de type Bell, avec deux sociétés basées en Champagne, dont l'une est une filiale de la plus grosse coopérative de vignerons. Ce sont les sociétés d'aéronefs qui assurent les déclarations de traitements aériens auprès de la DRAAF/SRAL, et qui informent les viticulteurs et les mairies des passages de l'hélicoptère. Les traitements sont réalisés en général à raison de 50 l/ha de bouillie, à une hauteur de 1,5 mètre en moyenne au-dessus de la vigne. Ils interviennent entre début mai et mi-août, à raison de 8 à 12 passages par an sur les parcelles. Les produits appliqués sont principalement des fongicides systémiques et pénétrants, et des insecticides (2 traitements maximum).
La quasi totalité des exploitants qui ont recours à l'hélicoptère s'engage pour l'ensemble de la campagne de traitement. Il est cependant parfois nécessaire de réaliser en complément des applications terrestres contre les maladies menaçant directement les grappes (cas de l'oïdium, des tordeuses de la grappe, et du Botrytis), car les applications aériennes sont plus efficaces pour la protection du feuillage (mildiou en particulier) que des grappes. Le coût moyen des traitements par ha est de l'ordre de 200 avec l'hélicoptère, 300 à 400 avec les chenillards, et 150 à 250 avec les tracteurs enjambeurs, sachant que les charges correspondantes aux traitements phytosanitaires représentent en moyenne 5 % du compte d'exploitation.
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En moyenne, l'hélicoptère peut traiter 80 à 100 ha en une journée, pendant que le tracteur enjambeur en traite 5, et le chenillard 2,5. Du fait du grand nombre de vignerons pluri-actifs et de la petite taille des exploitations, beaucoup d'exploitants ne sont pas équipés et font appel à des prestataires pour la réalisation des traitements. Il existe environ 300 prestataires agrées, dont 1/5 sont des entreprises professionnelles de travaux agricoles (activité à titre principal), les autres prestataires intervenant dans un cadre familial et de voisinage, généralement dans un rayon de 10-15 km maximum. L 'acquisition ces dernières années de chenillards, peu couteux à l'achat, facilement transportables et permettant d'accéder mécaniquement sur les parcelles en forte pente, a fait chuter significativement les surfaces traitées par aéronefs. Elles sont passées d'environ 3 500 ha (surface réelle) il y a 10 ans, à 2 000 2 500 ha actuellement ( pour 2 500 à 3 000 vignerons et 9 000 à 10 000 parcelles). Initiatives champenoises pour le développement des bonnes pratiques du traitement aérien En 2004, la Coopérative du syndicat général des vignerons (CSGV) a conduit, en association avec la société Bayer et l'institut de recherche agronomique de Geisenheim (Allemagne), une étude sur la dérive de pulvérisation par hélicoptère sur le vignoble de Champagne. Ces essais ont notamment montré des gains manifestes apportés par les buses à inclusion d'air, qui placent les traitements par hélicoptère à un niveau assez voisin des applications terrestres en matière de dérive. L'utilisation de ces buses a été généralisée en Champagne. En 2007, un référentiel des bonnes pratiques de traitement aérien, établi sous l'égide du CIVC, a été adopté par les deux sociétés d'aéronefs. Il renforce la professionnalisation des applicateurs et la qualité des applications. Il a notamment permis de définir une distance de 12 mètres par rapport aux parcelles en viticulture biologique, avec marquage spécifique des parcelles concernées, ce qui a apaisé les relations avec les producteurs bio (ils sont une trentaine). Le prestataire dont la mission a pu visiter les installations, qui réalise 60% des traitements aériens en Champagne, possède 4 hélicoptères, une équipe de 2 mécaniciens permanents (renforcée en saison d'un troisième), 4,5 employés administratifs, et 4 pilotes saisonniers. Les hélicoptères sont équipés d'un dispositif permettant, depuis le poste de pilotage, de réduire instantanément la largeur de pulvérisation de 12 à 6 mètres selon la configuration des parcelles identifiées préalablement par des balises en couleur. Les appareils sont dotés d'un GPS permettant de géoréférencer les parcelles traitées (données stockées depuis 8 ans), mais sans liaison avec un système d'information géographique. Afin de réduire les risques de pollutions accidentelles, ce prestataire a mis en place sur site un dispositif de récupération et de traitement des effluents (fonds de cuve). Le traitement des effluents est effectué par ultra-filtration et osmose inverse dans des cuves d'une capacité suffisante pour une campagne entière. Les boues de décantation sont ensuite confiées à une société spécialisée pour leur destruction. La station s'est également équipée d'une machine, conçue localement, pour rincer les bidons de produits phytopharmaceutiques, qui sont ensuite stockés sur place avant élimination par la filière ADIVALOR. En 2009, un guide pratique « viticulture durable en Champagne » a été édité par le CIVC. Il comporte des préconisations en matière de protection raisonnée de la vigne, mais aussi pour la nutrition des sols et de la vigne, l'entretien des sols, la gestion des déchets, l'aménagement du vignoble, et les divers travaux de conduite de la vigne. A titre d'exemple, la technique de « confusion sexuelle » se développe pour lutter contre les tordeuses de la grappe.
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Les arguments en faveur des traitements aériens en Champagne Les traitements aériens sur le vignoble de Champagne s'expliquent et se justifient par :
la topographie : situées en limite septentrionale de culture, les vignes sont plantées sur un relief vallonné et escarpé pour bénéficier d'une insolation optimale. L'aéronef permet d'intervenir sur des zones d'accès difficile, parfois dangereuses avec du matériel terrestre. les structures d'exploitation : le vignoble est extrêmement morcelé et les structures atomisées. Plus de la moitié des vignerons exploitent moins d'un hectare, et n'ont pas de matériel adapté, étant souvent double-actifs. La prestation de service (que ce soit avec des appareils de traitements terrestres ou aériens) permet ainsi de répondre à la demande de ces vignerons. le climat avec des épisodes orageux pendant le printemps et l'été, parfois accompagnés de grêle, peuvent rendre temporairement inaccessibles des parcelles réclamant une intervention rapide (pour notamment empêcher le développement du mildiou). Les risques sanitaires pour les applicateurs : les personnes conduisant manuellement les chenillards sont particulièrement exposés au brouillard de pulvérisation, et une étude est en cours à l'inspection du travail de la Marne sur les effets articulaires causés par les vibrations de l'appareil en cas d'utilisation répétée.
Des moyens de traitement terrestre existent, soit avec des tracteurs enjambeurs, soit des chenillards, mais ces machines n'accèdent pas à toutes les parcelles et sont source d'accidents. Ainsi, les traitements aériens en Champagne se positionnent en composante d'une stratégie globale de viticulture durable voulue par la profession, en appoint des traitements terrestres. Le vignoble de Champagne est aujourd'hui indemne de certaines maladies (flavescence dorée, black-rot ...), aussi le recours à l'hélicoptère pourrait devenir indispensable au cas où celles-ci viendraient à se déclarer dans le vignoble. La superficie traitée par hélicoptère en Champagne a été réduite de près de moitié en 10 ans, pour se stabiliser actuellement en dessous de 10% du vignoble. Une réduction des surfaces est sans doute encore possible, mais se posera alors la question de la viabilité des sociétés de traitements par aéronefs. Les risques sont de ne plus pouvoir disposer des appareils spécialement équipés et agréés, et surtout des pilotes formés au traitement en vol rasant avec ce type d'hélicoptères, lorsque cela sera nécessaire. En conclusion pour l'ensemble du vignoble français Les motivations du recours aux traitements aériens sont assez communes d'un vignoble à l'autre avec cependant des variantes, notamment une acuité plus forte dans les zones septentrionales de production soumises à de fortes pressions phytosanitaires et lorsque la vigne est cultivée sur des reliefs accidentés. Il conviendrait, dans le contexte spécifique à chaque bassin viticole, que la profession définisse la place qu'il souhaite donner aux traitements par aéronefs dans le cadre d'une stratégie globale de viticulture durable.
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Annexe n° 7 Fiche MAIS La culture du maïs occupe, en 2008 en France, une superficie totale d'environ 3,2 millions d'hectares, dont 1,75 millions en maïs grain (avec 5 500 ha pour le pop-corn essentiellement sur Midi-Pyrénées et en Charente), et 1,4 millions en maïs fourrage, ainsi que 25 500 ha de maïs doux classé comme légume dans le cadre de la PAC (85% des surfaces en région Aquitaine, 8% en région Centre, 6% en Midi-Pyrénées). Le maïs semences occupe 50 000 ha principalement concentrés dans le sud-ouest (mais aussi présent dans l'Aude, la vallée du Rhône, la Limagne et le val de Loire), la France étant le premier exportateur mondial de semences de maïs. Contre les insectes ravageurs (chenilles foreuses de l'épi telles que la pyrale et la sésamie), des traitements aériens sont réalisés assez systématiquement sur maïs doux et maïs pop-corn (un à trois traitements estival), de façon beaucoup plus ponctuelle sur maïs grain, et encore plus rarement sur maïs ensilage. Depuis 2003, la filière est confrontée à la problématique particulière de la lutte obligatoire contre le coléoptère émergeant Diabrotica virgifera (intervention sur des surfaces variant annuellement entre 1 000 et 10 000 ha) aujourd'hui cantonné dans certains secteurs du tiers nord-est de la France, mais qui pourrait menacer l'ensemble des bassins de production. Des traitements sont aussi réalisés de façon assez systématique sur maïs semences contre les chenilles foreuses, et les maladies cryptogamiques (principalement Helminthosporium turcicum), à raison de 2 ou 3 passages par an. Au total, 42 000 ha développés de maïs ont été traités par hélicoptère en 2008, entre juillet et septembre, à un stade de la culture ne permettant généralement pas une intervention avec les moyens terrestres disponibles. La situation du maïs doux, qui représente la part dominante des surfaces traitées par aéronefs, a été examinée plus particulièrement. La production française de maïs doux pour la transformation en conserve et surgelé représente 40 % de la production de l'Union européenne. Deuxième producteur derrière les États-Unis, la France exporte 65 % de sa production principalement vers l'Allemagne, le Royaume-Uni et l'Espagne pour une valeur dépassant 150 millions d'euros. Elle concerne 25 000 ha et 1 200 agriculteurs en 2008. La filière maïs doux est organisée avec un petit nombre d'industriels disposant d'outils récents et de taille importante, en partenariat solide avec l'amont agricole. La production se fait sous contrat signé entre l'agriculteur et une coopérative pour un industriel déterminé, et selon des cahiers des charges industriels ainsi que des chartes de production dans l'esprit de l'agriculture raisonnée. Bien que disposant d'importants atouts, cette filière née il y a trente ans est confrontée à un contexte mondial très concurrentiel (USA, Canada et Thaïlande en particulier), et à des exigences très fortes de qualité (tolérance zéro insecte dans les produits transformés, principale source de réclamation des consommateurs, qui vont jusqu'à exprimer leur dégoût par l'intermédiaire des médias- exemple d'un article paru dans un journal suédois en 2005). Un des principaux industriel indique que la présence de chenilles dans ses produits, qui était la première source de réclamation des consommateurs il y a quelques années, est descendue à la quatrième place grâce à l'efficacité des traitements.
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Les traitements insecticides sur maïs doux ont pour but de lutter contre plusieurs insectes lépidoptères: la pyrale, la sésamie et l'héliothis, et de façon plus exceptionnelle le cirphis. Leurs larves peuvent causer différents types de dégâts : verse de la plante et chute d'épis après épisode de vents (plus fréquente en Midi-Pyrénées), affaiblissement des plantes et réduction du poids des grains, perte de qualité des épis et risque de déclassement de la production. Des larves de ces insectes sont retrouvées fréquemment avec les épis livrés à l'usine, et malgré l'utilisation de machines de haute technologie (reconnaissance par voie électronique), les industriels déclarent ne pas pouvoir trier et éliminer la totalité des larves, d'où l'importance de la lutte insecticide au champ. Le maïs doux doit être récolté à un stade optimum de maturité, pour répondre à des standards de qualité stricts, aussi les attaques parasitaires et défauts de nutrition peuvent condamner le produit. Les attaques d'insectes peuvent aussi favoriser, certaines années, le développement de fusarioses génératrices de mycotoxines dangereuses pour les animaux d'élevage voire l'homme. Les insectes sont suivis par un réseau de piégeage et des observations au champ, ce qui permet d'apprécier les risques de nuisibilité et les dates optimum de traitements. Ces traitements doivent être réalisés à un stade précis du cycle de l'insecte (stade larvaire « baladeur » pendant les 24 heures suivant l'éclosion des oeufs) et en conséquence sur une période courte, ainsi que sur des créneaux horaires précis car les produits utilisés (essentiellement de la famille des pyrèthrinoïdes) agissent par contact et ont une efficacité moindre s'ils sont appliqués pendant les fortes températures. La fenêtre de traitement optimum serait de l'ordre d'une dizaine de jours entre le nord et le sud du territoire cultivé. Les récentes réductions des doses autorisées rendent encore plus nécessaires le respect de ce créneau de traitement très court. Les vols de deuxième génération de ces insectes se situent principalement entre le 20 juillet et le 20 août avec une variabilité selon les années et les secteurs. En fonction des risques de nuisibilité, un ou deux traitements sont réalisés sur la culture, parfois un troisième (lié principalement au développement d'héliothis depuis 2003, insecte polyphage). La première génération (vols en maijuin) n'est pas traitée par hélicoptère, mais par des moyens terrestres avec le matériel de l'agriculteur. Au moment des traitements contre la deuxième génération d'insectes, le maïs qui a atteint ou dépassé le stade floraison, mesure entre 1,5 et 2,5 mètres (selon les variétés, les sols et les pratiques agronomiques), aussi les interventions avec un tracteur classique dont la garde au sol ne dépasse pas 0,70 mètre ne sont plus envisageables. Deux types de matériels sont alors utilisés pour réaliser les traitements :
des enjambeurs lorsque le parcellaire est morcelé et/ou situé en zone péri-urbaine : c'est le cas du Béarn où les ilots culturaux sont de 8 ha en moyenne. L'appareil d'un entrepreneur de travaux agricoles présenté lors d'un déplacement de la mission, a une garde au sol de 1,60 mètre, une rampe de pulvérisation de 24 mètres de largeur positionnée à 2,40 mètre de hauteur maximum pendant le traitement, et est équipé de buses à air pulsé (système twinforce qui permet de plaquer la pulvérisation sur la culture). Cette machine a une autonomie de traitement de 35 à 40 ha, et peut traiter en moyenne 80 ha par jour en intégrant les temps de trajet. Son coût à l'achat est de l'ordre de 170 000 avec une durée d'amortissement estimée à 6 ans sur la base de 2 500 ha (développés) traités par an. Le parc utilisé par les deux industriels rencontrés (qui représentent 60 % de la production nationale), est constitué de 6 enjambeurs, dont certains peuvent avoir un rayon d'intervention de 80 km, ce qui implique des déplacements importants sur le réseau routier. L'entrepreneur estime que son enjambeur passe 30% de son temps sur les routes pendant la campagne de traitements, soit environ 150 heures, sachant que l'appareil pèse 11 tonnes, a une largeur de roue à roue de 2,60 mètres et un encombrement au niveau de la cabine proche de 3 mètres, et ne peut réglementairement dépasser la vitesse de 25 km par heure. Les traitements s'échelonnent de
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juillet à septembre, avec une période de pointe vers mi-août. L'appareil consomme environ 3 litres de carburant par ha (presque trois fois plus que l'hélicoptère). Il est nécessaire avant le passage de l'enjambeur de retirer de la parcelle les tuyaux d'irrigation, ce qui peut poser problème par rapport à la programmation des tours d'eau : les agriculteurs sont prévenus une semaine avant le traitement, puis rappelés la veille. Une personne est recrutée spécialement à plein temps pendant la campagne de traitement pour cette organisation. Pendant la saison, l'enjambeur intervient tous les jours sauf en cas de conditions climatiques défavorables (problème de portance des sols, notamment après une pluie de 50 mm). Il ne peut intervenir sur les parcelles trop pentues, ainsi qu'en cas de verse de la culture.
Des hélicoptères interviennent dans les zones à grand parcellaire et peu urbanisées. C'est le cas principalement en Hautes-Landes (environ 2 500 ha cultivés au milieu de la forêt des Landes) sur sols sableux (mais avec une croûte d' « alios » imperméable, située à environ un mètre de profondeur). Dans cette région où l'agriculture s'est développée au milieu du 20ème siècle, les parcelles sont constituées d'ilots de taille atteignant souvent 40 à 50 ha, entourés de fossés de drainage. Ces ilots sont équipés de systèmes d'irrigation fixe de type couverture intégrale ou d'un pivot avec une rampe d'arrosage qui peut atteindre 500 mètres de long. L'eau est prélevée par pompage dans la nappe qui est assez stable (entre 20 et 100 mètres de profondeur). La rampe d'irrigation fait une rotation (180 °) aller-retour en 48 heures, avec un apport de 6 mm d'eau par jour. L'assolement est constitué principalement de maïs (doux et grain) et carottes, parfois haricot, avec implantation d'un engrais vert hivernal (seigle-orge) après récolte du maïs doux. La plupart des fossés de drainage sont à sec pendant la période estivale et ne figurent pas sur les cartes IGN, ni sur l'arrêté préfectoral définissant les cours d'eau. L'hélicoptère traite généralement 40 ha par heure (trois à quatre fois plus qu'un enjambeur). Le choix de l'hélicoptère évite de devoir retirer le système d'irrigation de la parcelle. Cette opération lourde, deux journées de travail, a des conséquences sur l'irrigation des cultures qui doit être continue compte-tenu de la nature des sols. Le parc se compose de 5 hélicoptères (4 pour le sud-ouest, 1 en région Centre).
La campagne de traitements des maïs doux contre les insectes de 2ème génération est organisée par l'industriel qui prend la décision de traiter, choisit les produits, s'occupe de leur approvisionnement, retient un prestataire de service pour les traitements (pour les enjambeurs, et pour les hélicoptères) et effectue les déclarations de traitements par aéronefs auprès de l'autorité compétente. En 2008, sur les 25 500 ha en culture de maïs doux, les traitements insecticides se répartissent comme suit :
45 % traités par hélicoptère (22 000 ha en surface développée, à raison de un à trois traitements pendant la campagne), 40 à 45 % par enjambeur, le reste non traité, soit parce qu'il s'agit de parcelles précoces ne nécessitant pas de traitements contre la deuxième génération de l'insecte, soit par impossibilité d'intervention.
Concernant le maïs grain, mise à part la lutte obligatoire contre Diabrotica, les traitements insecticides réalisés le sont généralement uniquement contre la première génération de la pyrale et de la sésamie, par des moyens terrestres classiques quand la taille du maïs le permet (les traitements ne sont plus possibles après le stade 1,10 mètre, soit après début juillet). Localement (Alsace, MidiPyrénées...), il existe des traitements sur 2ème génération par aéronef lors de fortes infestations, parfois groupées avec les interventions sur maïs doux ou pop-corn.
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Pour conclure sur la culture du maïs doux et pop-corn où l'exigence en matière de qualité du produit est déterminante, les principales raisons justifiant les interventions par aéronefs sur les deuxièmes générations d'insectes peuvent se résumer comme suit :
une plus grande réactivité et rapidité d'intervention que par voie terrestre, permettant un meilleur ciblage des périodes optimum de traitements souvent très courtes et qui ne peuvent être définies que quelques jours à l'avance à partir des piégeages et observations au champ. Un traitement réalisé au bon moment peut éviter de devoir en réaliser un deuxième, une organisation collective bien encadrée avec des applicateurs spécialisés sécurisant l'efficacité du dispositif de lutte, eu égard aux exigences de qualité des consommateurs (tolérance zéro insecte dans les produits mis sur le marché de la consommation humaine), et aux contraintes des exploitations (présence de réseaux fixes d'irrigation, problèmes de portance des sols, cas des parcelles avec des cultures versées...), des nuisances environnementales pas supérieures à celles des applications terrestres, et qui pourraient se révéler être moindres : le « tout enjambeur » conduirait à doubler le parc de ces machines avec pour conséquence des trajets routiers augmentés, un bilan énergétique défavorable (consommation de carburants fossiles), et sans gain véritable en terme de dérive des produits (cf étude de 2004 de l'observatoire régional de l'air en Midi-Pyrénées et récents travaux du CEMAGREF). D'après des données communiquées par Arvalis, l'aéronef permet de réduire de 63 % les émissions de CO2 par rapport aux enjambeurs au cours du traitement (3 kg de CO2/ha traité pour l'hélicoptère contre 8 pour l'enjambeur). Sur la base de 22 000 ha traités, le passage au « tout enjambeur » entrainerait une émission supplémentaire de près de 200 tonnes de CO2 par an, des raisons économiques pour le maintien de la compétitivité de la filière, le recours au « tout enjambeur » apporterait, d'après les informations communiquées par la profession, un surcoût de 30% des traitements, lié aux nombreux problèmes logistiques (transport, organisation des chantiers, main d'oeuvre, nombre d'enjambeurs nécessaires...) et aux dégâts aux cultures provoqués par le passage des machines dans les parcelles.
Pour l'ensemble de la filière maïs, le recours à l'aéronef peut aussi être rendu nécessaire voire indispensable en cas de force majeure ou sur demande de l'administration : lutte contre un organisme nuisible émergeant (exemples depuis 2003 de Diabrotica virgifera, et menace de Spodoptera exigua signalé dans le sud-ouest depuis 2006...), période exceptionnellement pluvieuse empêchant l'entrée des machines dans les champs (problèmes de portance des sols et risque de les dégrader).
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Annexe n° 8 Fiche RIZ La culture du riz se pratique en France sur environ 22 000 ha en 2008, répartis pour environ 80 % en Camargue et 20 % en Guyane, avec une production récoltée de 104 000 tonnes de riz paddy. Elle représente 5 % de la production européenne de riz. La France produit moins de 1/5ème de sa consommation et l'Union européenne reste déficitaire (taux de couverture d'environ 85 %). La production de riz français est conduite en mode irrigué, exigeant des parcelles planes recouvertes d'eau du semis à la récolte (mais parfois vidées pour certains travaux pendant le cycle de culture), avec un réseau de canaux pour le contrôle des niveaux d'eau de chaque parcelle. Le contexte En Camargue, les premières véritables rizières ont été créées à la fin du XIXème siècle pour lutter contre les remontées de sel consécutives à l'endiguement du delta du Rhône. Après une période de déclin, cette culture a connu un nouveau développement au milieu du XXème siècle (avec jusqu'à 24 000 ha de cultures en 1994). L'assolement repose principalement sur une rotation riz-blé dur (2 à 3 ans consécutifs par espèce) avec un peu de luzerne et tournesol, variable entre le nord et le sud de la Camargue selon l'hétérogénéité des sols et la structure des exploitations. La salinité des sols est un facteur limitant pour l'introduction d'autres cultures dans la rotation. Aujourd'hui, il existe 200 riziculteurs, 20 000 ha ont été cultivés en riz en 2008, avec une surface moyenne de 100 ha de riz par exploitation. Pratiquement toutes les opérations (production, stockage, et une grande partie de la transformation) sont réalisées en Camargue. La filière représente environ 2 000 emplois directs et un chiffre d'affaire de l'ordre de 61 millions d'euros. Le riz de Camargue a obtenu une Indication géographique protégée (IGP) depuis 2000, et 4 à 5 % de la production est en agriculture biologique sans apparemment de problèmes de cohabitation (certains riziculteurs font à la fois du riz bio et du riz conventionnel sur la même exploitation). L'eau est prélevée dans le Rhône, dans le cadre d'une dizaine d'associations syndicales autorisées (ASA) ou par des pompages privés. Environ la moitié des rizières est incluse dans le Parc régional de Camargue, et certaines exploitations sont en limite de réserve naturelle nationale sans qu'il y ait de conflit majeur. Les rizières jouent un rôle important pour éviter les remontées de sel dans les sols, et pour préserver le paysage actuel. Des traitements par aéronefs (uniquement hélicoptère) sont réalisés sur une part de la sole, pour le désherbage et la lutte contre les insectes (uniquement pyrale) et les maladies cryptogamiques. La surface traitée par hélicoptère représentait près de 14 000 ha développés en 2008 (¾ en région Provence-Alpes-Côte d'Azur et ¼ en région Languedoc-Roussillon). En Guyane, le riz a été introduit il y a plus de deux siècles, mais sa culture s'est développée à partir des années 1980, et un plan de développement engagé par les pouvoirs publics a permis de réaliser un important périmètre irrigué dans l'ouest guyanais. La zone de production couvre aujourd'hui un territoire de l'ordre de 5 000 ha, divisée en deux parties de part et d'autre du fleuve Mana : un polder, bordant également l'océan, de 3 800 ha sur la rive droite, et un second de 1 200 ha sur sa rive gauche. En 2008, 2 800 ha ont été semés, 1/3 en premier cycle (décembre à mars) et 2/3 en deuxième cycle (juin à septembre). La production qui a culminé à 28 500 tonnes de riz paddy en 1991, est de l'ordre de 10 000 tonnes en 2008. Une grande part est exportée sous forme brute (en Espagne principalement), ce qui représente le cinquième des tonnages embarqués au port de Cayenne et 11 % de la valeur des exportations de l'industrie agroalimentaire de Guyane. La baisse de la production est la résultante de difficultés économiques de la filière, et du passage à un seul cycle annuel de culture sur la même parcelle en lien avec le nouveau dispositif d'aides directes de la PAC (aide à la surface cultivée et non plus au tonnage récolté). La filière représente un tiers des emplois marchands sur la commune de Mana, et est concentrée autour de 5 opérateurs dont
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2 représentent 80 % de la production. Cette filière s'inscrit dans un contexte régional très concurrentiel (le Guyana et le Surinam produisent respectivement 315 000 et 150 000 tonnes de riz), mais la qualité du riz de Guyane (riz long) est très appréciée en Espagne et au Portugal. La filière riz reste un maillon important de l'économie locale. La structure des polders et la nature des sols (argiles très peu stables) rendent difficiles l'accès des engins terrestres. C'est pourquoi il est fait appel aux aéronefs (avion) pour les semis, la fertilisation, et les traitements phytopharmaceutiques (désherbants, insecticides et fongicides). La surface traitée par avion représentait en 2008 environ 17 000 ha développés. Les pratiques culturales et phytosanitaires : En Camargue Trois désherbages et un traitement conjoint insecticide + fongicide sont réalisés au maximum par an, par voie terrestre ou par hélicoptère. Le choix, terrestre ou aérien, revient à chaque riziculteur, en fonction du coût mais surtout des pointes de travaux sur l'exploitation et des conditions de développement de la culture, elles-mêmes dépendantes des conditions climatiques de l'année, de la structure d'exploitation et de la nature très hétérogène des sols. Le semis est réalisé fin avril - début mai, dans les parcelles mises en eau. Désherbage Pour les traitements de pré-levée, la technique du « faux semis » est souvent pratiquée : elle consiste à provoquer les levées d'adventices 3 à 4 semaines avant le semis de la culture, par une mise en eau de quelques jours suivie d'une vidange, puis par leur destruction par un travail du sol, ou le plus souvent par l'application d'un herbicide anti-germinatif (par moyen terrestre ou par hélicoptère). Les infestations de riz sauvage constituent un des principaux soucis des riziculteurs. Le recours au traitement aérien est surtout lié à la charge de travail sur l'exploitation à cette période de travaux très critique, mais également à la nature des sols dont l'état d'humidité - intermédiaire entre sec et en eau, avec une lame de 1 à 2 cm d'eau- est délicat pour le passage des tracteurs qui s'embourbent fréquemment et abiment les sols. L'importance des surfaces cultivées dépend beaucoup des conditions climatiques en période des semis. Si les semis de riz ne peuvent être réalisés, les parcelles sont alors emblavées en blé dur. Chaque riziculteur décide en fonction de son matériel, de sa main d'oeuvre et de ses sols, de faire appel ou non à l'aéronef. La majorité réalise des applications terrestres et ont recours à l'hélicoptère en cas de besoin. Pour les traitements de post-semis avec un herbicide de contact, les rizières sont vidées avant la pulvérisation, mais pas séchées (il reste une mince lame d'eau plus ou moins épaisse selon l'herbicide utilisé), et l'eau est remise dès que possible (24 à 72 heures après) car un coup de vent présente un double risque : stress hydrique et remontée de sel. Le choix des produits est principalement dicté par le stade du riz (risque de phytotoxicité), et par la concurrence, du semis au tallage, entre la culture et les adventices. Pyrale Le suivi des vols de l'insecte par un réseau de piégeage permet d'établir les dates optimales de traitement. Mais cela ne s'avère pas suffisant pour décider de la nécessité ou non de l'intervention, aussi la décision est laissée à l'appréciation du riziculteur, en fonction notamment des variétés de riz en culture. Un traitement est réalisé, sur une période d'une dizaine de jours (première quinzaine d'août), sur 1/6 des surfaces (3 000 ha). A cette période, la hauteur du riz ne permet pas le passage d'engins motorisés dans l'eau sans causer des dégâts directs. La variété la plus sensible (Ariette) est maintenant très peu cultivée. La principale matière active utilisée par voie aérienne est le Tébufénicozide (les produits à base de Bacillus thuringiensis appliqués en agriculture biologique sont considérés comme moins efficaces). Les traitements sont tous réalisés par hélicoptère.
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La mise en oeuvre de l'arrêté du 5 mars 2004 relatif à l'utilisation par voie aérienne de produits phytopharmaceutiques, qui fixe une distance de 50 mètres par rapport aux cours d'eau, crée des difficultés dans le contexte particulier de la culture du riz par suite de l'omniprésence de canaux d'irrigation et de drainage. Suite à des échanges entre le Ministère en charge de l'agriculture (DGAL/SDQPV) et le Syndicat des riziculteurs de France, et à des réunions de travail avec les DRAF/SRPV, un dispositif spécifique a été retenu pour la Camargue, en 2005. Il consiste à gérer les traitements aériens par « ilots hydrauliques » positionnés de façon précise sur un système d'information géographique (SIG avec contours, surfaces, position des exutoires...). Ces ilots, numérotés, sont constitués d'un groupe de parcelles contiguës, ayant une gestion hydraulique commune, en particulier au niveau de la vidange. La gestion hydraulique de l'ilot doit permettre, en fermant les vannes, d'éviter tout mouvement d'eau pendant une période de 10 jours après l'application aérienne. L'hélicoptère doit respecter une zone de non traitement de 50 mètres en bordure intérieure des ilots (zone soit traitée par voie terrestre, soit non traitée), ce qui implique que les ilots soient de taille suffisante. Les produits à base d'alphamétrine, dont le profil écotoxicologique est très défavorable, sont exclus de ce dispositif. Les formulaires de déclaration de traitements aériens (modèle spécifique convenu avec les SRPV) sont renseignés par les prestataires (deux entreprises de traitements par hélicoptère interviennent en Camargue) qui doivent avoir obtenu l'accord formel de la part des riziculteurs donneurs d'ordre. Ces formulaires sont transmis au SRPV, par courrier électronique, la veille de chaque opération, avec la localisation des traitements (numéro d'ilot hydraulique), la surface traitée et les produits utilisés. Cinq jours après l'opération, une nouvelle déclaration doit être envoyée avec les informations sur les traitements effectivement réalisés. Des mesures de suivi de la qualité des eaux ont été réalisés en prélevant des échantillons à l'exutoire de parcelles traitées, pour la recherche de résidus. L'université de Marseille a notamment conduit, en 2005, une étude sur plusieurs ilots avec mesure au cours du temps des résidus de produits dans les parcelles et les canaux. En Guyane La culture de riz est exposée à une forte pression d'insectes ravageurs équatoriaux qui peuvent entraîner des pertes importantes de rendement et de qualité : mouches mineuses en période de semis, punaise piqueuse des tiges (considérée comme le ravageur le plus important), punaise des grains, foreurs des tiges, noctuelles défoliatrices sur les jeunes plants, delphacides... La principale maladie est la pyriculariose, mais elle ne cause plus de gros problèmes depuis l'utilisation de variétés moins sensibles. En revanche, les adventices constituent une préoccupation majeure sur le polder, avec des pertes sur récolte estimées entre 30 et 70 %. Les riziculteurs sont confrontés au manque de diversité des produits phytopharmaceutiques homologués pour la plupart des ravageurs présents sur le riz en Guyane («usages orphelins»), et à une efficacité réduite en conditions équatoriales des produits homologués en Europe. Les principaux insecticides utilisés appartiennent à la famille des pyréthrinoïdes. Un dispositif d'avertissements agricoles a été mis en place en 2006, avec des observations quasiquotidiennes, et envoi de bulletins d'alertes aux riziculteurs. En moyenne, 3 traitements insecticides ont été réalisés par an depuis les 6 derniers cycles, le nombre variant de 1 à 5 traitement par parcelle et par an. Le réseau d'avertissements agricoles aurait permis de supprimer, en moyenne, un traitement insecticide par an.
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Pour les traitements herbicides, le schéma est généralement le suivant : un produit non spécifique appliqué deux semaines avant semis (à base de glyphosate), une association d'un anti-graminées et d'un anti-dicotylédones deux semaines après semis (à base de 2-4 MCPA, azimsulfuron ou cyhalofop butyl), et une troisième intervention de rattrapage si nécessaire selon la flore présente. Les traitements aériens sont réalisés par une seule société sous traitante (DGTA) qui intervient également en Guadeloupe; Elle dispose de cinq avions sur place : trois gros biplans (charge utile de 700 kg) pour les semis et les engrais, et deux monoplans (charge utile 400 kg) pour les produits phytopharmaceutiques. Ils sont équipés d'un diffuseur ventral pour l'épandage solide (épandage sur une largeur de 9 m pour les semis et de 12 m pour les engrais) et de deux rampes avec pompe éolienne pour l'épandage des produits phytopharmaceutiques (sur une largeur de 16 à 18 m). Le travail aérien est programmé et réalisé sous contrôle d'un système de navigation basé sur un GPS différentiel, et une barre de guidage (AGANAV). Un seul pilote est présent à temps plein, et un autre à temps partiel. Pour la réalisation d'un épandage, un bon de commande est envoyé par les riziculteurs à la société de traitements, et les produits sont fournis par les sociétés rizicoles. La mise en oeuvre des stations de préparation des bouillies et l'ensemble des opérations liées à l'application sont prises en charge par la société d'aéronefs. Les déclarations de traitements (avant et après le traitements) sont adressées à la DAF/ SPV par les riziculteurs. Depuis plusieurs années, des analyses de résidus de produits phytopharmaceutiques sont réalisées dans les eaux en zones est et ouest du polder, sur cinq points de prélèvements. Les principaux arguments en faveur des traitements aériens sur la culture de riz:
faute d'une portance suffisante, le passage de machines terrestres dans des parcelles inondées est destructeur des sols et de leur nivellement fin. En Camargue, une partie des travaux est réalisée avec des tracteurs équipés de roues métalliques crantées, mais leur passage est délicat dans de nombreuses parcelles (hétérogénéité des sols, conditions d'humidité...) et demande un investissement matériel élevé. En Guyane, même les pistes sur les levées du polder sont endommagées par les passages d'engins, les parcelles sont difficilement accessibles aux tracteurs, car la portance des sols est faible à nulle (plusieurs mètres d'épaisseur d'une argile fine à très faible cohésion) ce qui provoque l'enlisement fréquent des machines agricoles actuellement disponibles (sauf à faire sécher les terres suffisamment à l'avance, ce qui n'est envisageable que pour la moisson et est très aléatoire compte-tenu du climat de type équatorial). L'aéronef permet d'intervenir rapidement. C'est indispensable en Camargue au moment du désherbage de printemps, période où les riziculteurs sont confrontés à des pointes de travaux importants (mise en eau des rizières), alors que les périodes optimales des semis et du désherbage sont courtes. Il en est de même pour le traitement contre la pyrale qui doit être effectué à des dates précises. En application terrestre, il est possible de traiter 50 ha par jour avec une rampe de 25 m, l'hélicoptère traite la même surface en une heure. En Guyane, les attaques, très rapides, d'insectes sont assez difficilement prévisibles, et l'avion traite l'ensemble du polder en deux heures alors qu'il faudrait plusieurs jours avec un tracteur. Cette rapidité d'intervention permet par ailleurs de traiter aux heures les plus favorables par rapport aux conditions climatiques (vent, pluie, températures). Compte-tenu de la réglementation en vigueur pour les traitements par aéronefs, la dégradation des produits et leur diffusion dans les réseaux d'irrigation et de drainage, sont mieux maîtrisées grâce à l'isolation hydraulique des ilots traités selon le dispositif adopté en Camargue. Un dispositif comparable est à l'étude dans le contexte de la Guyane, mais cela nécessiterait de mettre en place un système de vannage qui n'existe pas
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actuellement (les parcelles du polder sont contiguës avec une gestion hydraulique commune). Les riziculteurs considèrent qu'il est difficilement envisageable agronomiquement d'isoler les parcelles pendant 10 jours (ce qui entrainerait le développement d'insectes ou d'adventices, sachant qu'en conditions tropicales les substances chimiques se dégradent plus rapidement ce qui pourrait raccourcir le délai de 10 jours). Avec les aéronefs, les risques de pollution accidentelle lors du remplissage du pulvérisateur et du rinçage des cuves sont moindres car le nombre de points de ravitaillement est réduit et géré par des opérateurs professionnels.
La survie économique de cette filière est étroitement dépendante de la possibilité de recourir aux aéronefs, en l'absence d'alternatives viables. Ceci est d'autant plus crucial en Guyane que l'avion permet aussi les semis et la fertilisation des rizières.
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Annexe n° 9 Fiche BANANE La production de bananes, introduite en Martinique et en Guadeloupe au XVIIIème siècle, revêt une importance particulière aux Antilles puisque largement tournée vers l'exportation et pourvoyeuse d'un nombre important d'emplois. Le contexte La production est aujourd'hui organisée au sein de trois groupements (un en Guadeloupe et deux en Martinique) fédérés au sein de l'Union des groupements de producteurs de bananes (UGPBAN) qui commercialise la quasi totalité de la production. La filière représente 10 000 emplois aux Antilles, la culture occupant près de 9 000 ha (environ ¾ en Martinique et ¼ en Guadeloupe), sur environ 700 exploitations. Les exportations de banane vers l'Union européenne représentent en valeur respectivement 14 % et 24 % des exportations de Guadeloupe et de Martinique. La valeur de la production de banane aux Antilles avoisine 200 millions d'euros, soit environ 40 % de la valeur totale de la production agricole des deux régions. La production commercialisée, qui culminait à 375 000 tonnes en 1997, a connu depuis cette période une diminution progressive sous l'effet de la concurrence internationale (plus particulièrement des pays producteurs d'Amérique latine) , ainsi que des épisodes cycloniques (le dernier en date étant le cyclone Dean en août 2007). Elle a atteint 172 000 tonnes en 2008 mais est en nette augmentation en 2009. La part occupée par la banane des Antilles sur le marché de l'Union européenne se situe aux environs de 11 %, alors que les pays latino-américains (« banane dollar ») et les pays AfriqueCaraïbes-Pacifique (ACP) occupent respectivement 68 % et 16 % de ce marché. L'Espagne (Iles des Canaries) est le premier producteur européen de bananes (350 000 tonnes). L'Organisation commune de marché (OCM) de la banane, mise en place en 1993, a été profondément remaniée en 2006 avec un basculement des aides directes à la production dans le Programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI ), et une baisse des tarifs douaniers à l'entrée des bananes des pays tiers sur le marché de l'Union Européenne. Un «plan banane durable» a été mis en place en 2008, avec en particulier pour objectifs de rétablir la production au niveau de celui du début des années 2000 (environs 300 000 tonnes), de diminuer l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et d'instaurer un plus grand respect de l'environnement. Dans ce cadre, un institut technique de la banane est créé. Les pratiques actuelles de traitements aériens Les traitements aériens sont réalisés uniquement pour lutter contre la maladie cryptogamique de la cercosporiore jaune, qui est rendue obligatoire par arrêtés préfectoraux en Martinique et en Guadeloupe. La cercosporiose noire est absente du territoire des Antilles françaises, mais elle constitue une menace très forte, car elle nécessite un traitement toutes les deux semaines en moyenne dans les pays où elle est implantée.
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La lutte contre la cerscosporiose jaune est mutualisée. Une convention est passée dans chacune des deux régions entre la fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (FREDON) et un organisme professionnel qui gère la logistique des traitements. Les groupements de producteurs sont actionnaires de ces 2 organismes. Les producteurs cotisent forfaitairement pour la mise en oeuvre des traitements. Les produits (fongicides et huile minérale) sont achetés et fournis par les organismes professionnels. Les applications sont réalisées par des prestataires, avec 1 avion et 4 hélicoptères en Martinique, 2 avions et un hélicoptère en Guadeloupe. Le déclenchement des traitements est assuré à partir d'un réseau de parcelles d'observations avec un suivi épidémiologique de la maladie et des conditions climatiques. La cercospsoriose jaune nécessite entre 5 et 15 traitements annuels de la bananeraie, avec une moyenne de 9 à 12 traitements, réalisés à très bas volume hectare (de l'ordre de 15 litres/ha). La filière dispose d'un faible nombre de produits phytopharmaceutiques homologués : deux substances fongicides systémiques de la famille des triazoles, complétées récemment par deux autres de familles chimiques différentes mais assorties d'une zone non traitée (ZNT) de 100 mètres. L'huile minérale paraffinique également autorisée est systématiquement utilisée comme base des bouillies (qui ne comportent pas d'eau), en raison de ses propriétés anti-évaporantes, de sa faculté à faciliter la pénétration des substances dans les feuilles, et de ses propriétés fongi-statiques (c'est pourquoi elle est aussi utilisée seule, sans adjonction de fongicide). En 2008, des traitements par aéronefs ont été réalisés en Martinique et en Guadeloupe sur 63 500 ha développés, le taux de surface traitée par aéronef étant estimé à 75 % de la bananeraie. Les 25 % autres correspondent à des surfaces proches d'habitation ou cours d'eau, qui sont soit traitées par des moyens terrestres (essentiellement appareils portés à dos d'homme), soit non traitées (cas aussi de parcelles peu entretenues par leurs propriétaires). Les études en cours Un vaste programme d'études « OPTIBAN » (optimisation des traitements phytosanitaires contre la cercosporiose de bananes en Martinique et Guadeloupe) est conduit par le CEMAGREF en association avec les organisations professionnelles et le ministère en charge de l'agriculture. Il comporte plusieurs volets dont notamment : la recherche de méthodes terrestres alternatives aux traitements par aéronefs, la cartographie des zones de production, afin de préciser les zones d'exclusion des traitements aériens (distance réglementée de 50 mètres, ou 100 mètres pour certains produits, par rapport au bâti et au réseau hydrographique), et d'apprécier les surfaces accessibles pour les différentes solutions terrestres étudiées (en fonction de la pente, de la taille du parcellaire...), l'optimisation des traitements aériens par l'amélioration des pratiques et matériels, et avec des outils de traçabilité. Ce programme n'étant pas achevé et les résultats non publiés à la date de rédaction de ce rapport de mission, nous donnons à titre indicatif et provisoire quelques éléments:
les traitements par aéronefs ont été abandonnés sur une partie de la bananeraie de Martinique et remplacés par des traitements terrestres manuels avec appareils portés à dos. Cela concerne environ 250 planteurs, à qui ont été fournis les appareils ainsi que les équipements de protection. En Guadeloupe, cette alternative est déjà mise en oeuvre depuis plusieurs années dans les zones proches des habitations. Des études sont en cours sur l'évaluation de la sécurité des opérateurs lors des traitements manuels, et les moyens d'amélioration.
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Plusieurs matériels de traitement auto-portés tout-terrain sont expérimentés :
des petits-porteurs dotés d'un kit de pulvérisation traitant la canopée par le dessus (avec un mât équipé de mains à tuyères d'une portée de 12 à 18 mètres) ou par le dessous (atomiseur avec une portée de 6 mètres), des gros-porteurs avec un système de pulvérisation de grande portée (de type canon traitant jusqu'à 50 mètres), un système fixe avec un réseau de type irrigation avec mâts et micro-asperseurs.
Ces divers prototypes, conçus spécialement pour les bananeraies, nécessiteraient encore au moins une ou deux années d'étude avant de pouvoir conclure sur leur opérationnalité et achever leur mise au point. Ces appareils sont notamment confrontés à des problèmes de pente et d'irrégularité des parcelles (présence de fossés de drainage, mauvais alignement des plants...), d'adaptation des volumes de bouillies à appliquer par hectare (entre 35 et 50 litres/ha) et leur utilisation pourrait nécessiter de modifier sensiblement la conduite des plantations (nivellement des sols, enfouissement des réseaux de drainage, espacement des rangs, haubanage des bananiers...).
Les aéronefs basés en Guadeloupe sont déjà équipés depuis début 2008 d'un système GPS et ceux intervenant en Martinique devraient l'être prochainement. Des mises au point sont en cours devant permettre à ces équipements : de guider avec précision les traitements sur le parcellaire en fonction des contraintes réglementaires (zones de non traitement, coupures automatiques des buses aux moments opportuns...), d'assurer une traçabilité par l'enregistrement et l'archivage numérique sur un SIG des épandages réalisés, pour permettre à la filière un suivi précis et pouvoir répondre aux besoins de contrôle (données telles que lieux, vitesses de vol, volume épandu, largeur traitée ... ). Les essais conduits sur les applications par aéronefs sur bananeraie ont donné les résultats suivants en matière de dérive: pour l'avion, la direction du vent est un critère déterminant, s'il est dans l'axe du vol il permet de supprimer la majeure partie des pertes latérales. L'usage de buses à inclusion d'air (en remplacement des buses centrifuges) permet de se rapprocher d'une situation « arboriculture par matériel terrestre », mais la hauteur et la vitesse de vol de l'avion (160 à 200 km/h) limitent les marges de progrès. Un ajustement de la largeur de la rampe et/ou l'adjonction d'équipements supplémentaires (déflecteurs...) pourraient cependant apporter des améliorations sensibles. Pour l'hélicoptère, l'emploi de buses à inclusion d'air, associé à la réduction de la largeur de la rampe de pulvérisation (à 60 % de la largeur du rotor) et à une hauteur de vol limitée à 2 mètres au-dessus de la culture, ont montré tout leur intérêt.
Les principaux arguments en faveur du maintien des traitements aériens
Il n'existe pas d'alternatives opérationnelles de traitements terrestres mécanisables : Les prototypes autoportés, s'ils se révèlent performants, ne pourraient au mieux se déployer opérationnellement sur l'ensemble des zones de production que dans un délai de 3 à 4 ans. Outre le temps nécessaire pour poursuivre la mise au point de ces matériels, se rajouteront les délais d'investissements (acquisition des machines et adaptation des bananeraies). Les solutions palliatives disponibles actuellement (appareils à dos, canons...) soulèvent des questions d'exposition des utilisateurs particulièrement problématique sous climat tropical (pénibilité des vêtements de protection, difficulté à assurer en même temps pressurisation et climatisation des cabines des tracteurs..). Elles peuvent même se révéler défavorables en matière de dérive (cas en particulier des canons à longue portée).
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Les traitements par aéronefs, moyennant certaines améliorations, offrent plusieurs avantages :
le choix de buses à inclusion d'air, la réduction de la largeur de la rampe de pulvérisation, et la hauteur de vol, abaissent les phénomènes de dérive à un niveau comparable à celle obtenue par des applications terrestres classiques sur arbres fruitiers ; l'équipement des aéronefs avec un GPS couplé à un SIG permet d'assurer un bon guidage des traitements et une traçabilité meilleure que pour les applications terrestres ; les doses de produits phytopharmaceutiques appliquées par ha sont moindres qu'avec les appareils terrestres actuellement disponibles (moitié de celle appliquée avec un appareil porté à dos), et la qualité de la pulvérisation par aéronef permet d'appliquer de l'huile minérale seule (en moyenne un traitement sur deux), d'où des réductions importantes de substance active fongicide apportée annuellement ; le recours à l'aéronef permet une organisation collective de la lutte contre la cercosporiose jaune, d'autant plus efficace que les traitements contre la maladie sont généralisés. La disponibilité des aéronefs assure une réactivité essentielle en cas d'apparition d'une maladie émergente comme la cercosporiose noire qui constitue une grave menace pour les bananeraies de l'arc antillais (elle vient récemment d'être détectée dans l'Ile de Sainte-Lucie voisine de la Martinique) ; La réalisation des traitements par des entreprises professionnelles spécialisées amenuise les risques de pollution accidentelle lors du remplissage des pulvérisateurs et de la vidange des fonds de cuve, par rapport au recours à un grand nombre d'appareils terrestres.
Le passage éventuel au « tout terrestre », entrainerait une augmentation du coût de la protection phytosanitaire de la culture, avec une efficacité moindre, à une période où la filière est soumise à une obligation de compétitivité accrue dans un contexte de forte concurrence internationale et de réforme de l'OCM banane. Les orientations fixées par le « plan banane durable » lancé en 2008 demanderont quelques années pour apporter des solutions concrètes ayant un impact sur le revenu des producteurs, l'une des pistes étant la sélection de variétés résistantes à la cercosporiose. Il convient de souligner que la culture du bananier reste aujourd'hui l'une des meilleures solutions pour l'occupation agricole des terres fortement contaminées par la chlordécone, et que la culture de bananes aux Antilles françaises reçoit déjà aujourd'hui une quantité de substances actives phytosanitaires par hectare nettement moindre que dans bon nombre de pays producteurs (par exemple 10 fois moins qu'au Costa-Rica).
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Annexe n° 10 Fiche FORÊT ET ESPACES BOISES Ce vocable désigne l'ensemble des espèces ligneuses (autres que les arbres fruitiers) constitutives de forêts, bois ou espaces verts, à des fins de production de bois, de protection, de paysage ou de loisir. Les pins donnent lieu à des traitements aériens chaque année contre la chenille processionnaire Thaumetopoae pityocampa (au moins 9 000 ha développés), ainsi que les peupliers contre la rouille (près de 2 000 ha), puis de façon beaucoup plus locale et sporadique les feuillus (essentiellement chênes) contre la chenille processionnaire Thaumetopoae processionea et les bombyx (350 ha). De rares applications ont été réalisées contre les pucerons, la tordeuse du chêne, ou pour le contrôle des fougères. Chenilles processionnaires du pin La dynamique des populations des chenilles processionnaires dans les peuplements forestiers fait l'objet, depuis 1981, d'un suivi régulier organisé par le Département de la santé des forêts (DSF) du ministère en charge de l'agriculture. Un réseau permanent de plus de 400 placettes (points d'observations) est réparti sur l'ensemble du territoire national, et où sont notamment notés le nombre de pins attaqués et la quantité de nids de chenille. Une rénovation de ce réseau est engagée depuis deux ans avec un renforcement et une homogénéisation de la surveillance dans les zones les plus boisées, ce qui s'est traduit par une augmentation de 20 % du nombre de placettes. Les attaques sont cycliques. Après de forts niveaux enregistrés en 2007, une régression du niveau général des populations est constatée depuis 2 ans, avec de forts contrastes locaux. Dans le grand quart sud-ouest de la France se dessine clairement le début d'une nouvelle gradation. Les pontes ont lieu normalement de fin juin à mi-septembre selon les espèces de pin et les secteurs, les éclosions s'étalent entre fin juillet et fin septembre, et les chenilles se regroupent dés les premiers froids dans un nid définitif soyeux sur une branche exposée au soleil. Elles quittent les arbres en procession entre février et avril pour s'enfouir dans le sol où aura lieu la nymphose. Les chenilles colonisent préférentiellement les lisières ensoleillées, et les dégâts provoqués par la défoliation sont généralement tolérables pour l'arbre, sauf en cas de pullulation très forte sur des plantations jeunes ou des arbres déjà affaiblis. Dans le sud-ouest de la France, un raccourcissement atypique du cycle de l'insecte a été constaté depuis peu (nymphose réalisée dès la Toussaint), avec pour effet de concentrer l'alimentation des chenilles sur une période plus courte, ce qui fait craindre des conséquences plus graves sur la santé des arbres, déjà touchés par la récente tempête. Sauf circonstances exceptionnelles, au point de vue strictement forestier, les traitements chimiques sont jugés ni nécessaires, ni souhaitables. Ils ne permettent pas d'éviter une nouvelle pullulation et peuvent même être contre-productifs s'ils se situent en phase de régression des populations de l'insecte. En revanche, sur le plan de la santé humaine et animale (chiens notamment), les poils des chenilles provoquent dans les secteurs fréquentés par le public (bûcheronnage, urbanisation, loisirs ...) des urtications avec des atteintes cutanées, oculaires, respiratoires ou allergiques, pouvant aller jusqu'à causer des oedèmes. Ces effets sur la santé n'impliquent pas nécessairement un contact direct avec les insectes, car ils peuvent être provoqués par les poils de chenilles emportés par le vent.
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Les décisions de traitements sont en conséquence prises essentiellement pour des raisons de santé humaine ou animale. Il existe des seuils de risques (nombre de colonies par arbres) pour l'aide à la décision, mais des traitements d'assurance sont souvent réalisés dans les secteurs très fréquentés par le public et à haut intérêt touristique et résidentiel. Pour être efficaces, les traitements doivent être réalisés aux jeunes stades de l'insecte (avant la constitution des nids hivernaux). Deux catégories de produits sont autorisées pour les traitements: l'un à base de Bacillus thuringiensis qui agit par contact (substance d'origine bactérienne, spécifique des larves de lépidoptères), l'autre de diflubenzuron qui agit par ingestion (perturbateur des mues). Compte-tenu de la hauteur des arbres, les traitements sont réalisés essentiellement par hélicoptère, à raison d'une ou deux applications en septembre-octobre. Les demandes d'intervention émanent souvent des collectivités territoriales (communes et conseils généraux). Les chantiers sont plus généralement organisés selon les cas par l'ONF, et les fédérations de défense contre les organismes nuisibles aux cultures (FREDON, FDGDON), en faisant appel aux sociétés de traitements par aéronefs comme prestataires de service. Un arrêté annuel du préfet de département fixe les modalités de réalisation des traitements : produits autorisés (uniquement à base de Bacillus thuringiensis), période de traitement, distances de sécurité par rapport aux lieux visés par l'article 6 de l'arrêté du 5 mars 2004 (à l'exception de la distance minimale des 50 mètres), obligations de déclaration avant et après traitements, information du public, et peines prévues en cas d'infractions à ces dispositions. Ces arrêtés s'appuient sur les préconisations édictées par la note de service interministérielle (agriculture-santé-environnement) du 13 septembre 2005, relative à la mise en oeuvre de traitements par voie aérienne pour des motifs de protection de la santé publique contre les chenilles processionnaires, et sont pris après avis des différents services déconcentrés concernés: DDAF, DDSV, DSF, DIREN, DRAAF/SRAL, DDASS. Ces interventions, réalisées quasi exclusivement à des fins de protection de santé publique et non pas de protection des végétaux, impliquent ainsi actuellement un grand nombre d'administrations. Le recours à l'aéronef est justifié par l'absence de moyens terrestres opérationnels, mais les traitements peuvent en partie être qualifiés «de confort» dans les secteurs résidentiels, touristiques et de loisirs. Ils sont, à ce titre, dans ces secteurs assez systématiquement reconduits d'une année sur l'autre. En 2008, au moins 9 000 ha développés ont été traités par aéronefs, principalement en régions Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Aquitaine et Languedoc-Roussillon, mais aussi sur des surfaces significatives en Poitou-Charentes et Midi-Pyrénées, et beaucoup plus ponctuellement dans d'autres régions. Des études sont conduites par l'INRA sur d'autres moyens de lutte : piégeage de masse des mâles pendant les vols de l'insecte (essais réalisés en Alsace, mais non concluants), confusion sexuelle par application de phéromones (peut donner de bons résultats si le traitement est réalisé sur une grande surface), et prédation par les mésanges.
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Rouille du peuplier Certains cultivars de peupliers d'origine américaine restent très touchés par plusieurs espèces de rouille du genre Melamspora, particulièrement lorsque les printemps et étés sont doux avec une forte hygrométrie, ce qui a été le cas des années 2007 et 2008. Le Département de la santé des forêts suit l'impact des pathologies foliaires du peuplier sur 67 sites répartis sur le territoire national. Cette maladie fongique peut réduire de façon drastique la croissance des arbres, induire le développement de parasites dits de faiblesse, et en cas d'attaques répétées provoquer la mortalité des arbres. Deux produits sont homologués pour ces traitements, réalisés en début d'été (généralement première quinzaine de juillet) lorsque sont visibles sur les feuilles les pustules orangées pulvérulentes (urédospores). Les peupleraies occupent environ 235 000 ha. Le premier bassin de production inclut les régions Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Ile-de-France, Champagne-Ardennes, puis viennent ensuite les vallées de la Loire, et de la Garonne. Ces 3 bassins représentent 75 % des surfaces de peupleraies. Environ 2 000 ha ont été traités par hélicoptère en 2008, principalement dans la Somme et le nord de l'Aisne (1 200 ha), la Marne (500 ha) et la Seine-et-Marne (150 ha). Il s'agirait surtout de peupleraies d'accès difficile et sur des reliefs accidentés, sachant que des applications terrestres (type canon) sont aussi réalisées plutôt sur des jeunes plantations, en vallée, sur sols «propres». Le traitement aérien coûte cher (environ 150 /ha) alors que le prix du bois de peuplier est au plus bas. Des cultivars résistants ou tolérants aux rouilles sont plantés en substitution depuis plusieurs années, mais il subsiste encore des peupleraies sensibles, âgées pour la plupart de 10 à 12 ans. Des aides financières existent pour inciter les producteurs à les exploiter avant terme. La filière est par ailleurs confrontée au développement préoccupant d'un ravageur, le puceron lanigère, qui complique le choix des futurs cultivars à planter. Chenilles défoliatrices du chêne Il s'agit principalement de la chenille processionnaire Thaumetopoae processionea, ainsi que des Bombyx (disparate et cul-brun). Ces lépidoptères manifestent des explosions souvent inattendues et spectaculaires (cas de la processionnaire dans l'Est de la France en 2007), pouvant provoquer une défoliation totale des arbres. Compte-tenu de la physiologie du chêne, qui a la particularité de puiser pendant plusieurs mois dans ses réserves racinaires pour constituer sa production avant que la photosynthèse ne prenne le relais, une forte défoliation peut être très dommageable, d'autant plus que surviennent fréquemment sur le nouveau feuillage des attaques d'oïdium qui empêchent la reconstitution d'un bon niveau de réserves avant l'hiver. Ces chenilles ont aussi des propriétés urticantes, et peuvent donc causer des problèmes de santé publique. Le risque urticant des chenilles processionnaires du chêne, est amplifié par le fait que les chenilles restent plus longtemps dans l'arbre que les processionnaires du pin et ne s'enfouissent pas dans le sol pour la nymphose, aussi la période d'exposition est plus longue. En Lorraine, lors de fortes attaques de ces chenilles, il avait été nécessaire d'équiper les bucherons d'une combinaison de protection. Pour cette raison, des arrêtés préfectoraux sont préconisés par la note de service interministérielle du 13 septembre 2005, selon les mêmes modalités que pour la chenille processionnaire du pin.
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Il n'existe pas vraiment de méthodes opérationnelles permettant de prévoir les pullulations, et quand la défoliation est constatée, il est généralement trop tard pour réaliser un traitement. Des études sont conduites sur l'intérêt de déclencher un traitement contre les attaques d'oïdium qui succèdent souvent à la défoliation afin de réduire l'affaiblissement des arbres avant l'hiver, ainsi que sur l'efficacité d'un traitement insecticide ou d'une lutte par confusion sexuelle l'année suivante pour prévenir une nouvelle attaque. Environ 450 ha ont été traités par aéronef en 2008, en Lorraine, Aquitaine, Pays de la Loire, et Alsace. Les produits utilisés sont pratiquement identiques à ceux mis en oeuvre contre la chenille processionnaire du pin. Les arguments en faveur des traitements aériens : La hauteur des arbres, la densité des houppiers, et l'absence de solutions alternatives terrestres viables imposent généralement le choix de l'aéronef. Par rapport aux traitements terrestres, quand ils sont possibles (de type canon), les traitements par hélicoptère ont pour atout d'être appliqués à bas volume avec des quantités réduites et une dérive moindre de matières actives. Schématiquement, trois cas de figure sont rencontrés :
interventions systématiques, tous les ans, sur des surfaces pouvant varier en fonction de l'importance des populations d'insectes. C'est le cas des chenilles processionnaires du pin qui représentent plus de 80 % des surfaces de forêt et espaces boisés traités, quasi exclusivement pour des motifs de santé publique dans des sites urbanisés et touristiques. La nécessité de traiter des forêts et boisements à des fins de protection des végétaux n'est cependant pas à exclure en situations exceptionnelles ; interventions encore fréquentes mais se réduisant progressivement, contre la rouille du peuplier sur des cultivars sensibles, en conditions climatiques favorables au développement de la maladie ( cas de 2007 et 2008) ; situation mixte où des traitements sont réalisés à la fois pour des raisons forestières et de santé publique, mais de façon assez imprévisible et très ponctuelle : cas des chenilles défoliatrices des feuillus.
L'arrêté du 5 mars 2004, précise dans son article 1 : « on entend par traitement aérien toute utilisation au moyen d'aéronefs de produits mentionnés à l'article L 253-1 du code rural à des fins de protection des végétaux ». Il apparaît donc nécessaire de clarifier juridiquement le statut des traitements contre les chenilles processionnaires réalisé pour des motifs de santé publique, ainsi que leur suivi administratif. Ces traitements devraient être pris en compte dans le cadre de la réglementation s'appliquant aux biocides, et non pas à celle relative aux produits phytopharmaceutiques.
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(ATTENTION: OPTION n, cette culture a connu un nouveau développement au milieu du XXème siècle (avec jusqu'à 24 000 ha de cultures en 1994). L'assolement repose principalement sur une rotation riz-blé dur (2 à 3 ans consécutifs par espèce) avec un peu de luzerne et tournesol, variable entre le nord et le sud de la Camargue selon l'hétérogénéité des sols et la structure des exploitations. La salinité des sols est un facteur limitant pour l'introduction d'autres cultures dans la rotation. Aujourd'hui, il existe 200 riziculteurs, 20 000 ha ont été cultivés en riz en 2008, avec une surface moyenne de 100 ha de riz par exploitation. Pratiquement toutes les opérations (production, stockage, et une grande partie de la transformation) sont réalisées en Camargue. La filière représente environ 2 000 emplois directs et un chiffre d'affaire de l'ordre de 61 millions d'euros. Le riz de Camargue a obtenu une Indication géographique protégée (IGP) depuis 2000, et 4 à 5 % de la production est en agriculture biologique sans apparemment de problèmes de cohabitation (certains riziculteurs font à la fois du riz bio et du riz conventionnel sur la même exploitation). L'eau est prélevée dans le Rhône, dans le cadre d'une dizaine d'associations syndicales autorisées (ASA) ou par des pompages privés. Environ la moitié des rizières est incluse dans le Parc régional de Camargue, et certaines exploitations sont en limite de réserve naturelle nationale sans qu'il y ait de conflit majeur. Les rizières jouent un rôle important pour éviter les remontées de sel dans les sols, et pour préserver le paysage actuel. Des traitements par aéronefs (uniquement hélicoptère) sont réalisés sur une part de la sole, pour le désherbage et la lutte contre les insectes (uniquement pyrale) et les maladies cryptogamiques. La surface traitée par hélicoptère représentait près de 14 000 ha développés en 2008 (¾ en région Provence-Alpes-Côte d'Azur et ¼ en région Languedoc-Roussillon). En Guyane, le riz a été introduit il y a plus de deux siècles, mais sa culture s'est développée à partir des années 1980, et un plan de développement engagé par les pouvoirs publics a permis de réaliser un important périmètre irrigué dans l'ouest guyanais. La zone de production couvre aujourd'hui un territoire de l'ordre de 5 000 ha, divisée en deux parties de part et d'autre du fleuve Mana : un polder, bordant également l'océan, de 3 800 ha sur la rive droite, et un second de 1 200 ha sur sa rive gauche. En 2008, 2 800 ha ont été semés, 1/3 en premier cycle (décembre à mars) et 2/3 en deuxième cycle (juin à septembre). La production qui a culminé à 28 500 tonnes de riz paddy en 1991, est de l'ordre de 10 000 tonnes en 2008. Une grande part est exportée sous forme brute (en Espagne principalement), ce qui représente le cinquième des tonnages embarqués au port de Cayenne et 11 % de la valeur des exportations de l'industrie agroalimentaire de Guyane. La baisse de la production est la résultante de difficultés économiques de la filière, et du passage à un seul cycle annuel de culture sur la même parcelle en lien avec le nouveau dispositif d'aides directes de la PAC (aide à la surface cultivée et non plus au tonnage récolté). La filière représente un tiers des emplois marchands sur la commune de Mana, et est concentrée autour de 5 opérateurs dont
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2 représentent 80 % de la production. Cette filière s'inscrit dans un contexte régional très concurrentiel (le Guyana et le Surinam produisent respectivement 315 000 et 150 000 tonnes de riz), mais la qualité du riz de Guyane (riz long) est très appréciée en Espagne et au Portugal. La filière riz reste un maillon important de l'économie locale. La structure des polders et la nature des sols (argiles très peu stables) rendent difficiles l'accès des engins terrestres. C'est pourquoi il est fait appel aux aéronefs (avion) pour les semis, la fertilisation, et les traitements phytopharmaceutiques (désherbants, insecticides et fongicides). La surface traitée par avion représentait en 2008 environ 17 000 ha développés. Les pratiques culturales et phytosanitaires : En Camargue Trois désherbages et un traitement conjoint insecticide + fongicide sont réalisés au maximum par an, par voie terrestre ou par hélicoptère. Le choix, terrestre ou aérien, revient à chaque riziculteur, en fonction du coût mais surtout des pointes de travaux sur l'exploitation et des conditions de développement de la culture, elles-mêmes dépendantes des conditions climatiques de l'année, de la structure d'exploitation et de la nature très hétérogène des sols. Le semis est réalisé fin avril - début mai, dans les parcelles mises en eau. Désherbage Pour les traitements de pré-levée, la technique du « faux semis » est souvent pratiquée : elle consiste à provoquer les levées d'adventices 3 à 4 semaines avant le semis de la culture, par une mise en eau de quelques jours suivie d'une vidange, puis par leur destruction par un travail du sol, ou le plus souvent par l'application d'un herbicide anti-germinatif (par moyen terrestre ou par hélicoptère). Les infestations de riz sauvage constituent un des principaux soucis des riziculteurs. Le recours au traitement aérien est surtout lié à la charge de travail sur l'exploitation à cette période de travaux très critique, mais également à la nature des sols dont l'état d'humidité - intermédiaire entre sec et en eau, avec une lame de 1 à 2 cm d'eau- est délicat pour le passage des tracteurs qui s'embourbent fréquemment et abiment les sols. L'importance des surfaces cultivées dépend beaucoup des conditions climatiques en période des semis. Si les semis de riz ne peuvent être réalisés, les parcelles sont alors emblavées en blé dur. Chaque riziculteur décide en fonction de son matériel, de sa main d'oeuvre et de ses sols, de faire appel ou non à l'aéronef. La majorité réalise des applications terrestres et ont recours à l'hélicoptère en cas de besoin. Pour les traitements de post-semis avec un herbicide de contact, les rizières sont vidées avant la pulvérisation, mais pas séchées (il reste une mince lame d'eau plus ou moins épaisse selon l'herbicide utilisé), et l'eau est remise dès que possible (24 à 72 heures après) car un coup de vent présente un double risque : stress hydrique et remontée de sel. Le choix des produits est principalement dicté par le stade du riz (risque de phytotoxicité), et par la concurrence, du semis au tallage, entre la culture et les adventices. Pyrale Le suivi des vols de l'insecte par un réseau de piégeage permet d'établir les dates optimales de traitement. Mais cela ne s'avère pas suffisant pour décider de la nécessité ou non de l'intervention, aussi la décision est laissée à l'appréciation du riziculteur, en fonction notamment des variétés de riz en culture. Un traitement est réalisé, sur une période d'une dizaine de jours (première quinzaine d'août), sur 1/6 des surfaces (3 000 ha). A cette période, la hauteur du riz ne permet pas le passage d'engins motorisés dans l'eau sans causer des dégâts directs. La variété la plus sensible (Ariette) est maintenant très peu cultivée. La principale matière active utilisée par voie aérienne est le Tébufénicozide (les produits à base de Bacillus thuringiensis appliqués en agriculture biologique sont considérés comme moins efficaces). Les traitements sont tous réalisés par hélicoptère.
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La mise en oeuvre de l'arrêté du 5 mars 2004 relatif à l'utilisation par voie aérienne de produits phytopharmaceutiques, qui fixe une distance de 50 mètres par rapport aux cours d'eau, crée des difficultés dans le contexte particulier de la culture du riz par suite de l'omniprésence de canaux d'irrigation et de drainage. Suite à des échanges entre le Ministère en charge de l'agriculture (DGAL/SDQPV) et le Syndicat des riziculteurs de France, et à des réunions de travail avec les DRAF/SRPV, un dispositif spécifique a été retenu pour la Camargue, en 2005. Il consiste à gérer les traitements aériens par « ilots hydrauliques » positionnés de façon précise sur un système d'information géographique (SIG avec contours, surfaces, position des exutoires...). Ces ilots, numérotés, sont constitués d'un groupe de parcelles contiguës, ayant une gestion hydraulique commune, en particulier au niveau de la vidange. La gestion hydraulique de l'ilot doit permettre, en fermant les vannes, d'éviter tout mouvement d'eau pendant une période de 10 jours après l'application aérienne. L'hélicoptère doit respecter une zone de non traitement de 50 mètres en bordure intérieure des ilots (zone soit traitée par voie terrestre, soit non traitée), ce qui implique que les ilots soient de taille suffisante. Les produits à base d'alphamétrine, dont le profil écotoxicologique est très défavorable, sont exclus de ce dispositif. Les formulaires de déclaration de traitements aériens (modèle spécifique convenu avec les SRPV) sont renseignés par les prestataires (deux entreprises de traitements par hélicoptère interviennent en Camargue) qui doivent avoir obtenu l'accord formel de la part des riziculteurs donneurs d'ordre. Ces formulaires sont transmis au SRPV, par courrier électronique, la veille de chaque opération, avec la localisation des traitements (numéro d'ilot hydraulique), la surface traitée et les produits utilisés. Cinq jours après l'opération, une nouvelle déclaration doit être envoyée avec les informations sur les traitements effectivement réalisés. Des mesures de suivi de la qualité des eaux ont été réalisés en prélevant des échantillons à l'exutoire de parcelles traitées, pour la recherche de résidus. L'université de Marseille a notamment conduit, en 2005, une étude sur plusieurs ilots avec mesure au cours du temps des résidus de produits dans les parcelles et les canaux. En Guyane La culture de riz est exposée à une forte pression d'insectes ravageurs équatoriaux qui peuvent entraîner des pertes importantes de rendement et de qualité : mouches mineuses en période de semis, punaise piqueuse des tiges (considérée comme le ravageur le plus important), punaise des grains, foreurs des tiges, noctuelles défoliatrices sur les jeunes plants, delphacides... La principale maladie est la pyriculariose, mais elle ne cause plus de gros problèmes depuis l'utilisation de variétés moins sensibles. En revanche, les adventices constituent une préoccupation majeure sur le polder, avec des pertes sur récolte estimées entre 30 et 70 %. Les riziculteurs sont confrontés au manque de diversité des produits phytopharmaceutiques homologués pour la plupart des ravageurs présents sur le riz en Guyane («usages orphelins»), et à une efficacité réduite en conditions équatoriales des produits homologués en Europe. Les principaux insecticides utilisés appartiennent à la famille des pyréthrinoïdes. Un dispositif d'avertissements agricoles a été mis en place en 2006, avec des observations quasiquotidiennes, et envoi de bulletins d'alertes aux riziculteurs. En moyenne, 3 traitements insecticides ont été réalisés par an depuis les 6 derniers cycles, le nombre variant de 1 à 5 traitement par parcelle et par an. Le réseau d'avertissements agricoles aurait permis de supprimer, en moyenne, un traitement insecticide par an.
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Pour les traitements herbicides, le schéma est généralement le suivant : un produit non spécifique appliqué deux semaines avant semis (à base de glyphosate), une association d'un anti-graminées et d'un anti-dicotylédones deux semaines après semis (à base de 2-4 MCPA, azimsulfuron ou cyhalofop butyl), et une troisième intervention de rattrapage si nécessaire selon la flore présente. Les traitements aériens sont réalisés par une seule société sous traitante (DGTA) qui intervient également en Guadeloupe; Elle dispose de cinq avions sur place : trois gros biplans (charge utile de 700 kg) pour les semis et les engrais, et deux monoplans (charge utile 400 kg) pour les produits phytopharmaceutiques. Ils sont équipés d'un diffuseur ventral pour l'épandage solide (épandage sur une largeur de 9 m pour les semis et de 12 m pour les engrais) et de deux rampes avec pompe éolienne pour l'épandage des produits phytopharmaceutiques (sur une largeur de 16 à 18 m). Le travail aérien est programmé et réalisé sous contrôle d'un système de navigation basé sur un GPS différentiel, et une barre de guidage (AGANAV). Un seul pilote est présent à temps plein, et un autre à temps partiel. Pour la réalisation d'un épandage, un bon de commande est envoyé par les riziculteurs à la société de traitements, et les produits sont fournis par les sociétés rizicoles. La mise en oeuvre des stations de préparation des bouillies et l'ensemble des opérations liées à l'application sont prises en charge par la société d'aéronefs. Les déclarations de traitements (avant et après le traitements) sont adressées à la DAF/ SPV par les riziculteurs. Depuis plusieurs années, des analyses de résidus de produits phytopharmaceutiques sont réalisées dans les eaux en zones est et ouest du polder, sur cinq points de prélèvements. Les principaux arguments en faveur des traitements aériens sur la culture de riz:
faute d'une portance suffisante, le passage de machines terrestres dans des parcelles inondées est destructeur des sols et de leur nivellement fin. En Camargue, une partie des travaux est réalisée avec des tracteurs équipés de roues métalliques crantées, mais leur passage est délicat dans de nombreuses parcelles (hétérogénéité des sols, conditions d'humidité...) et demande un investissement matériel élevé. En Guyane, même les pistes sur les levées du polder sont endommagées par les passages d'engins, les parcelles sont difficilement accessibles aux tracteurs, car la portance des sols est faible à nulle (plusieurs mètres d'épaisseur d'une argile fine à très faible cohésion) ce qui provoque l'enlisement fréquent des machines agricoles actuellement disponibles (sauf à faire sécher les terres suffisamment à l'avance, ce qui n'est envisageable que pour la moisson et est très aléatoire compte-tenu du climat de type équatorial). L'aéronef permet d'intervenir rapidement. C'est indispensable en Camargue au moment du désherbage de printemps, période où les riziculteurs sont confrontés à des pointes de travaux importants (mise en eau des rizières), alors que les périodes optimales des semis et du désherbage sont courtes. Il en est de même pour le traitement contre la pyrale qui doit être effectué à des dates précises. En application terrestre, il est possible de traiter 50 ha par jour avec une rampe de 25 m, l'hélicoptère traite la même surface en une heure. En Guyane, les attaques, très rapides, d'insectes sont assez difficilement prévisibles, et l'avion traite l'ensemble du polder en deux heures alors qu'il faudrait plusieurs jours avec un tracteur. Cette rapidité d'intervention permet par ailleurs de traiter aux heures les plus favorables par rapport aux conditions climatiques (vent, pluie, températures). Compte-tenu de la réglementation en vigueur pour les traitements par aéronefs, la dégradation des produits et leur diffusion dans les réseaux d'irrigation et de drainage, sont mieux maîtrisées grâce à l'isolation hydraulique des ilots traités selon le dispositif adopté en Camargue. Un dispositif comparable est à l'étude dans le contexte de la Guyane, mais cela nécessiterait de mettre en place un système de vannage qui n'existe pas
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actuellement (les parcelles du polder sont contiguës avec une gestion hydraulique commune). Les riziculteurs considèrent qu'il est difficilement envisageable agronomiquement d'isoler les parcelles pendant 10 jours (ce qui entrainerait le développement d'insectes ou d'adventices, sachant qu'en conditions tropicales les substances chimiques se dégradent plus rapidement ce qui pourrait raccourcir le délai de 10 jours). Avec les aéronefs, les risques de pollution accidentelle lors du remplissage du pulvérisateur et du rinçage des cuves sont moindres car le nombre de points de ravitaillement est réduit et géré par des opérateurs professionnels.
La survie économique de cette filière est étroitement dépendante de la possibilité de recourir aux aéronefs, en l'absence d'alternatives viables. Ceci est d'autant plus crucial en Guyane que l'avion permet aussi les semis et la fertilisation des rizières.
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Annexe n° 9 Fiche BANANE La production de bananes, introduite en Martinique et en Guadeloupe au XVIIIème siècle, revêt une importance particulière aux Antilles puisque largement tournée vers l'exportation et pourvoyeuse d'un nombre important d'emplois. Le contexte La production est aujourd'hui organisée au sein de trois groupements (un en Guadeloupe et deux en Martinique) fédérés au sein de l'Union des groupements de producteurs de bananes (UGPBAN) qui commercialise la quasi totalité de la production. La filière représente 10 000 emplois aux Antilles, la culture occupant près de 9 000 ha (environ ¾ en Martinique et ¼ en Guadeloupe), sur environ 700 exploitations. Les exportations de banane vers l'Union européenne représentent en valeur respectivement 14 % et 24 % des exportations de Guadeloupe et de Martinique. La valeur de la production de banane aux Antilles avoisine 200 millions d'euros, soit environ 40 % de la valeur totale de la production agricole des deux régions. La production commercialisée, qui culminait à 375 000 tonnes en 1997, a connu depuis cette période une diminution progressive sous l'effet de la concurrence internationale (plus particulièrement des pays producteurs d'Amérique latine) , ainsi que des épisodes cycloniques (le dernier en date étant le cyclone Dean en août 2007). Elle a atteint 172 000 tonnes en 2008 mais est en nette augmentation en 2009. La part occupée par la banane des Antilles sur le marché de l'Union européenne se situe aux environs de 11 %, alors que les pays latino-américains (« banane dollar ») et les pays AfriqueCaraïbes-Pacifique (ACP) occupent respectivement 68 % et 16 % de ce marché. L'Espagne (Iles des Canaries) est le premier producteur européen de bananes (350 000 tonnes). L'Organisation commune de marché (OCM) de la banane, mise en place en 1993, a été profondément remaniée en 2006 avec un basculement des aides directes à la production dans le Programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI ), et une baisse des tarifs douaniers à l'entrée des bananes des pays tiers sur le marché de l'Union Européenne. Un «plan banane durable» a été mis en place en 2008, avec en particulier pour objectifs de rétablir la production au niveau de celui du début des années 2000 (environs 300 000 tonnes), de diminuer l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et d'instaurer un plus grand respect de l'environnement. Dans ce cadre, un institut technique de la banane est créé. Les pratiques actuelles de traitements aériens Les traitements aériens sont réalisés uniquement pour lutter contre la maladie cryptogamique de la cercosporiore jaune, qui est rendue obligatoire par arrêtés préfectoraux en Martinique et en Guadeloupe. La cercosporiose noire est absente du territoire des Antilles françaises, mais elle constitue une menace très forte, car elle nécessite un traitement toutes les deux semaines en moyenne dans les pays où elle est implantée.
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La lutte contre la cerscosporiose jaune est mutualisée. Une convention est passée dans chacune des deux régions entre la fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (FREDON) et un organisme professionnel qui gère la logistique des traitements. Les groupements de producteurs sont actionnaires de ces 2 organismes. Les producteurs cotisent forfaitairement pour la mise en oeuvre des traitements. Les produits (fongicides et huile minérale) sont achetés et fournis par les organismes professionnels. Les applications sont réalisées par des prestataires, avec 1 avion et 4 hélicoptères en Martinique, 2 avions et un hélicoptère en Guadeloupe. Le déclenchement des traitements est assuré à partir d'un réseau de parcelles d'observations avec un suivi épidémiologique de la maladie et des conditions climatiques. La cercospsoriose jaune nécessite entre 5 et 15 traitements annuels de la bananeraie, avec une moyenne de 9 à 12 traitements, réalisés à très bas volume hectare (de l'ordre de 15 litres/ha). La filière dispose d'un faible nombre de produits phytopharmaceutiques homologués : deux substances fongicides systémiques de la famille des triazoles, complétées récemment par deux autres de familles chimiques différentes mais assorties d'une zone non traitée (ZNT) de 100 mètres. L'huile minérale paraffinique également autorisée est systématiquement utilisée comme base des bouillies (qui ne comportent pas d'eau), en raison de ses propriétés anti-évaporantes, de sa faculté à faciliter la pénétration des substances dans les feuilles, et de ses propriétés fongi-statiques (c'est pourquoi elle est aussi utilisée seule, sans adjonction de fongicide). En 2008, des traitements par aéronefs ont été réalisés en Martinique et en Guadeloupe sur 63 500 ha développés, le taux de surface traitée par aéronef étant estimé à 75 % de la bananeraie. Les 25 % autres correspondent à des surfaces proches d'habitation ou cours d'eau, qui sont soit traitées par des moyens terrestres (essentiellement appareils portés à dos d'homme), soit non traitées (cas aussi de parcelles peu entretenues par leurs propriétaires). Les études en cours Un vaste programme d'études « OPTIBAN » (optimisation des traitements phytosanitaires contre la cercosporiose de bananes en Martinique et Guadeloupe) est conduit par le CEMAGREF en association avec les organisations professionnelles et le ministère en charge de l'agriculture. Il comporte plusieurs volets dont notamment : la recherche de méthodes terrestres alternatives aux traitements par aéronefs, la cartographie des zones de production, afin de préciser les zones d'exclusion des traitements aériens (distance réglementée de 50 mètres, ou 100 mètres pour certains produits, par rapport au bâti et au réseau hydrographique), et d'apprécier les surfaces accessibles pour les différentes solutions terrestres étudiées (en fonction de la pente, de la taille du parcellaire...), l'optimisation des traitements aériens par l'amélioration des pratiques et matériels, et avec des outils de traçabilité. Ce programme n'étant pas achevé et les résultats non publiés à la date de rédaction de ce rapport de mission, nous donnons à titre indicatif et provisoire quelques éléments:
les traitements par aéronefs ont été abandonnés sur une partie de la bananeraie de Martinique et remplacés par des traitements terrestres manuels avec appareils portés à dos. Cela concerne environ 250 planteurs, à qui ont été fournis les appareils ainsi que les équipements de protection. En Guadeloupe, cette alternative est déjà mise en oeuvre depuis plusieurs années dans les zones proches des habitations. Des études sont en cours sur l'évaluation de la sécurité des opérateurs lors des traitements manuels, et les moyens d'amélioration.
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Plusieurs matériels de traitement auto-portés tout-terrain sont expérimentés :
des petits-porteurs dotés d'un kit de pulvérisation traitant la canopée par le dessus (avec un mât équipé de mains à tuyères d'une portée de 12 à 18 mètres) ou par le dessous (atomiseur avec une portée de 6 mètres), des gros-porteurs avec un système de pulvérisation de grande portée (de type canon traitant jusqu'à 50 mètres), un système fixe avec un réseau de type irrigation avec mâts et micro-asperseurs.
Ces divers prototypes, conçus spécialement pour les bananeraies, nécessiteraient encore au moins une ou deux années d'étude avant de pouvoir conclure sur leur opérationnalité et achever leur mise au point. Ces appareils sont notamment confrontés à des problèmes de pente et d'irrégularité des parcelles (présence de fossés de drainage, mauvais alignement des plants...), d'adaptation des volumes de bouillies à appliquer par hectare (entre 35 et 50 litres/ha) et leur utilisation pourrait nécessiter de modifier sensiblement la conduite des plantations (nivellement des sols, enfouissement des réseaux de drainage, espacement des rangs, haubanage des bananiers...).
Les aéronefs basés en Guadeloupe sont déjà équipés depuis début 2008 d'un système GPS et ceux intervenant en Martinique devraient l'être prochainement. Des mises au point sont en cours devant permettre à ces équipements : de guider avec précision les traitements sur le parcellaire en fonction des contraintes réglementaires (zones de non traitement, coupures automatiques des buses aux moments opportuns...), d'assurer une traçabilité par l'enregistrement et l'archivage numérique sur un SIG des épandages réalisés, pour permettre à la filière un suivi précis et pouvoir répondre aux besoins de contrôle (données telles que lieux, vitesses de vol, volume épandu, largeur traitée ... ). Les essais conduits sur les applications par aéronefs sur bananeraie ont donné les résultats suivants en matière de dérive: pour l'avion, la direction du vent est un critère déterminant, s'il est dans l'axe du vol il permet de supprimer la majeure partie des pertes latérales. L'usage de buses à inclusion d'air (en remplacement des buses centrifuges) permet de se rapprocher d'une situation « arboriculture par matériel terrestre », mais la hauteur et la vitesse de vol de l'avion (160 à 200 km/h) limitent les marges de progrès. Un ajustement de la largeur de la rampe et/ou l'adjonction d'équipements supplémentaires (déflecteurs...) pourraient cependant apporter des améliorations sensibles. Pour l'hélicoptère, l'emploi de buses à inclusion d'air, associé à la réduction de la largeur de la rampe de pulvérisation (à 60 % de la largeur du rotor) et à une hauteur de vol limitée à 2 mètres au-dessus de la culture, ont montré tout leur intérêt.
Les principaux arguments en faveur du maintien des traitements aériens
Il n'existe pas d'alternatives opérationnelles de traitements terrestres mécanisables : Les prototypes autoportés, s'ils se révèlent performants, ne pourraient au mieux se déployer opérationnellement sur l'ensemble des zones de production que dans un délai de 3 à 4 ans. Outre le temps nécessaire pour poursuivre la mise au point de ces matériels, se rajouteront les délais d'investissements (acquisition des machines et adaptation des bananeraies). Les solutions palliatives disponibles actuellement (appareils à dos, canons...) soulèvent des questions d'exposition des utilisateurs particulièrement problématique sous climat tropical (pénibilité des vêtements de protection, difficulté à assurer en même temps pressurisation et climatisation des cabines des tracteurs..). Elles peuvent même se révéler défavorables en matière de dérive (cas en particulier des canons à longue portée).
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Les traitements par aéronefs, moyennant certaines améliorations, offrent plusieurs avantages :
le choix de buses à inclusion d'air, la réduction de la largeur de la rampe de pulvérisation, et la hauteur de vol, abaissent les phénomènes de dérive à un niveau comparable à celle obtenue par des applications terrestres classiques sur arbres fruitiers ; l'équipement des aéronefs avec un GPS couplé à un SIG permet d'assurer un bon guidage des traitements et une traçabilité meilleure que pour les applications terrestres ; les doses de produits phytopharmaceutiques appliquées par ha sont moindres qu'avec les appareils terrestres actuellement disponibles (moitié de celle appliquée avec un appareil porté à dos), et la qualité de la pulvérisation par aéronef permet d'appliquer de l'huile minérale seule (en moyenne un traitement sur deux), d'où des réductions importantes de substance active fongicide apportée annuellement ; le recours à l'aéronef permet une organisation collective de la lutte contre la cercosporiose jaune, d'autant plus efficace que les traitements contre la maladie sont généralisés. La disponibilité des aéronefs assure une réactivité essentielle en cas d'apparition d'une maladie émergente comme la cercosporiose noire qui constitue une grave menace pour les bananeraies de l'arc antillais (elle vient récemment d'être détectée dans l'Ile de Sainte-Lucie voisine de la Martinique) ; La réalisation des traitements par des entreprises professionnelles spécialisées amenuise les risques de pollution accidentelle lors du remplissage des pulvérisateurs et de la vidange des fonds de cuve, par rapport au recours à un grand nombre d'appareils terrestres.
Le passage éventuel au « tout terrestre », entrainerait une augmentation du coût de la protection phytosanitaire de la culture, avec une efficacité moindre, à une période où la filière est soumise à une obligation de compétitivité accrue dans un contexte de forte concurrence internationale et de réforme de l'OCM banane. Les orientations fixées par le « plan banane durable » lancé en 2008 demanderont quelques années pour apporter des solutions concrètes ayant un impact sur le revenu des producteurs, l'une des pistes étant la sélection de variétés résistantes à la cercosporiose. Il convient de souligner que la culture du bananier reste aujourd'hui l'une des meilleures solutions pour l'occupation agricole des terres fortement contaminées par la chlordécone, et que la culture de bananes aux Antilles françaises reçoit déjà aujourd'hui une quantité de substances actives phytosanitaires par hectare nettement moindre que dans bon nombre de pays producteurs (par exemple 10 fois moins qu'au Costa-Rica).
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Annexe n° 10 Fiche FORÊT ET ESPACES BOISES Ce vocable désigne l'ensemble des espèces ligneuses (autres que les arbres fruitiers) constitutives de forêts, bois ou espaces verts, à des fins de production de bois, de protection, de paysage ou de loisir. Les pins donnent lieu à des traitements aériens chaque année contre la chenille processionnaire Thaumetopoae pityocampa (au moins 9 000 ha développés), ainsi que les peupliers contre la rouille (près de 2 000 ha), puis de façon beaucoup plus locale et sporadique les feuillus (essentiellement chênes) contre la chenille processionnaire Thaumetopoae processionea et les bombyx (350 ha). De rares applications ont été réalisées contre les pucerons, la tordeuse du chêne, ou pour le contrôle des fougères. Chenilles processionnaires du pin La dynamique des populations des chenilles processionnaires dans les peuplements forestiers fait l'objet, depuis 1981, d'un suivi régulier organisé par le Département de la santé des forêts (DSF) du ministère en charge de l'agriculture. Un réseau permanent de plus de 400 placettes (points d'observations) est réparti sur l'ensemble du territoire national, et où sont notamment notés le nombre de pins attaqués et la quantité de nids de chenille. Une rénovation de ce réseau est engagée depuis deux ans avec un renforcement et une homogénéisation de la surveillance dans les zones les plus boisées, ce qui s'est traduit par une augmentation de 20 % du nombre de placettes. Les attaques sont cycliques. Après de forts niveaux enregistrés en 2007, une régression du niveau général des populations est constatée depuis 2 ans, avec de forts contrastes locaux. Dans le grand quart sud-ouest de la France se dessine clairement le début d'une nouvelle gradation. Les pontes ont lieu normalement de fin juin à mi-septembre selon les espèces de pin et les secteurs, les éclosions s'étalent entre fin juillet et fin septembre, et les chenilles se regroupent dés les premiers froids dans un nid définitif soyeux sur une branche exposée au soleil. Elles quittent les arbres en procession entre février et avril pour s'enfouir dans le sol où aura lieu la nymphose. Les chenilles colonisent préférentiellement les lisières ensoleillées, et les dégâts provoqués par la défoliation sont généralement tolérables pour l'arbre, sauf en cas de pullulation très forte sur des plantations jeunes ou des arbres déjà affaiblis. Dans le sud-ouest de la France, un raccourcissement atypique du cycle de l'insecte a été constaté depuis peu (nymphose réalisée dès la Toussaint), avec pour effet de concentrer l'alimentation des chenilles sur une période plus courte, ce qui fait craindre des conséquences plus graves sur la santé des arbres, déjà touchés par la récente tempête. Sauf circonstances exceptionnelles, au point de vue strictement forestier, les traitements chimiques sont jugés ni nécessaires, ni souhaitables. Ils ne permettent pas d'éviter une nouvelle pullulation et peuvent même être contre-productifs s'ils se situent en phase de régression des populations de l'insecte. En revanche, sur le plan de la santé humaine et animale (chiens notamment), les poils des chenilles provoquent dans les secteurs fréquentés par le public (bûcheronnage, urbanisation, loisirs ...) des urtications avec des atteintes cutanées, oculaires, respiratoires ou allergiques, pouvant aller jusqu'à causer des oedèmes. Ces effets sur la santé n'impliquent pas nécessairement un contact direct avec les insectes, car ils peuvent être provoqués par les poils de chenilles emportés par le vent.
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Les décisions de traitements sont en conséquence prises essentiellement pour des raisons de santé humaine ou animale. Il existe des seuils de risques (nombre de colonies par arbres) pour l'aide à la décision, mais des traitements d'assurance sont souvent réalisés dans les secteurs très fréquentés par le public et à haut intérêt touristique et résidentiel. Pour être efficaces, les traitements doivent être réalisés aux jeunes stades de l'insecte (avant la constitution des nids hivernaux). Deux catégories de produits sont autorisées pour les traitements: l'un à base de Bacillus thuringiensis qui agit par contact (substance d'origine bactérienne, spécifique des larves de lépidoptères), l'autre de diflubenzuron qui agit par ingestion (perturbateur des mues). Compte-tenu de la hauteur des arbres, les traitements sont réalisés essentiellement par hélicoptère, à raison d'une ou deux applications en septembre-octobre. Les demandes d'intervention émanent souvent des collectivités territoriales (communes et conseils généraux). Les chantiers sont plus généralement organisés selon les cas par l'ONF, et les fédérations de défense contre les organismes nuisibles aux cultures (FREDON, FDGDON), en faisant appel aux sociétés de traitements par aéronefs comme prestataires de service. Un arrêté annuel du préfet de département fixe les modalités de réalisation des traitements : produits autorisés (uniquement à base de Bacillus thuringiensis), période de traitement, distances de sécurité par rapport aux lieux visés par l'article 6 de l'arrêté du 5 mars 2004 (à l'exception de la distance minimale des 50 mètres), obligations de déclaration avant et après traitements, information du public, et peines prévues en cas d'infractions à ces dispositions. Ces arrêtés s'appuient sur les préconisations édictées par la note de service interministérielle (agriculture-santé-environnement) du 13 septembre 2005, relative à la mise en oeuvre de traitements par voie aérienne pour des motifs de protection de la santé publique contre les chenilles processionnaires, et sont pris après avis des différents services déconcentrés concernés: DDAF, DDSV, DSF, DIREN, DRAAF/SRAL, DDASS. Ces interventions, réalisées quasi exclusivement à des fins de protection de santé publique et non pas de protection des végétaux, impliquent ainsi actuellement un grand nombre d'administrations. Le recours à l'aéronef est justifié par l'absence de moyens terrestres opérationnels, mais les traitements peuvent en partie être qualifiés «de confort» dans les secteurs résidentiels, touristiques et de loisirs. Ils sont, à ce titre, dans ces secteurs assez systématiquement reconduits d'une année sur l'autre. En 2008, au moins 9 000 ha développés ont été traités par aéronefs, principalement en régions Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Aquitaine et Languedoc-Roussillon, mais aussi sur des surfaces significatives en Poitou-Charentes et Midi-Pyrénées, et beaucoup plus ponctuellement dans d'autres régions. Des études sont conduites par l'INRA sur d'autres moyens de lutte : piégeage de masse des mâles pendant les vols de l'insecte (essais réalisés en Alsace, mais non concluants), confusion sexuelle par application de phéromones (peut donner de bons résultats si le traitement est réalisé sur une grande surface), et prédation par les mésanges.
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Rouille du peuplier Certains cultivars de peupliers d'origine américaine restent très touchés par plusieurs espèces de rouille du genre Melamspora, particulièrement lorsque les printemps et étés sont doux avec une forte hygrométrie, ce qui a été le cas des années 2007 et 2008. Le Département de la santé des forêts suit l'impact des pathologies foliaires du peuplier sur 67 sites répartis sur le territoire national. Cette maladie fongique peut réduire de façon drastique la croissance des arbres, induire le développement de parasites dits de faiblesse, et en cas d'attaques répétées provoquer la mortalité des arbres. Deux produits sont homologués pour ces traitements, réalisés en début d'été (généralement première quinzaine de juillet) lorsque sont visibles sur les feuilles les pustules orangées pulvérulentes (urédospores). Les peupleraies occupent environ 235 000 ha. Le premier bassin de production inclut les régions Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Ile-de-France, Champagne-Ardennes, puis viennent ensuite les vallées de la Loire, et de la Garonne. Ces 3 bassins représentent 75 % des surfaces de peupleraies. Environ 2 000 ha ont été traités par hélicoptère en 2008, principalement dans la Somme et le nord de l'Aisne (1 200 ha), la Marne (500 ha) et la Seine-et-Marne (150 ha). Il s'agirait surtout de peupleraies d'accès difficile et sur des reliefs accidentés, sachant que des applications terrestres (type canon) sont aussi réalisées plutôt sur des jeunes plantations, en vallée, sur sols «propres». Le traitement aérien coûte cher (environ 150 /ha) alors que le prix du bois de peuplier est au plus bas. Des cultivars résistants ou tolérants aux rouilles sont plantés en substitution depuis plusieurs années, mais il subsiste encore des peupleraies sensibles, âgées pour la plupart de 10 à 12 ans. Des aides financières existent pour inciter les producteurs à les exploiter avant terme. La filière est par ailleurs confrontée au développement préoccupant d'un ravageur, le puceron lanigère, qui complique le choix des futurs cultivars à planter. Chenilles défoliatrices du chêne Il s'agit principalement de la chenille processionnaire Thaumetopoae processionea, ainsi que des Bombyx (disparate et cul-brun). Ces lépidoptères manifestent des explosions souvent inattendues et spectaculaires (cas de la processionnaire dans l'Est de la France en 2007), pouvant provoquer une défoliation totale des arbres. Compte-tenu de la physiologie du chêne, qui a la particularité de puiser pendant plusieurs mois dans ses réserves racinaires pour constituer sa production avant que la photosynthèse ne prenne le relais, une forte défoliation peut être très dommageable, d'autant plus que surviennent fréquemment sur le nouveau feuillage des attaques d'oïdium qui empêchent la reconstitution d'un bon niveau de réserves avant l'hiver. Ces chenilles ont aussi des propriétés urticantes, et peuvent donc causer des problèmes de santé publique. Le risque urticant des chenilles processionnaires du chêne, est amplifié par le fait que les chenilles restent plus longtemps dans l'arbre que les processionnaires du pin et ne s'enfouissent pas dans le sol pour la nymphose, aussi la période d'exposition est plus longue. En Lorraine, lors de fortes attaques de ces chenilles, il avait été nécessaire d'équiper les bucherons d'une combinaison de protection. Pour cette raison, des arrêtés préfectoraux sont préconisés par la note de service interministérielle du 13 septembre 2005, selon les mêmes modalités que pour la chenille processionnaire du pin.
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Il n'existe pas vraiment de méthodes opérationnelles permettant de prévoir les pullulations, et quand la défoliation est constatée, il est généralement trop tard pour réaliser un traitement. Des études sont conduites sur l'intérêt de déclencher un traitement contre les attaques d'oïdium qui succèdent souvent à la défoliation afin de réduire l'affaiblissement des arbres avant l'hiver, ainsi que sur l'efficacité d'un traitement insecticide ou d'une lutte par confusion sexuelle l'année suivante pour prévenir une nouvelle attaque. Environ 450 ha ont été traités par aéronef en 2008, en Lorraine, Aquitaine, Pays de la Loire, et Alsace. Les produits utilisés sont pratiquement identiques à ceux mis en oeuvre contre la chenille processionnaire du pin. Les arguments en faveur des traitements aériens : La hauteur des arbres, la densité des houppiers, et l'absence de solutions alternatives terrestres viables imposent généralement le choix de l'aéronef. Par rapport aux traitements terrestres, quand ils sont possibles (de type canon), les traitements par hélicoptère ont pour atout d'être appliqués à bas volume avec des quantités réduites et une dérive moindre de matières actives. Schématiquement, trois cas de figure sont rencontrés :
interventions systématiques, tous les ans, sur des surfaces pouvant varier en fonction de l'importance des populations d'insectes. C'est le cas des chenilles processionnaires du pin qui représentent plus de 80 % des surfaces de forêt et espaces boisés traités, quasi exclusivement pour des motifs de santé publique dans des sites urbanisés et touristiques. La nécessité de traiter des forêts et boisements à des fins de protection des végétaux n'est cependant pas à exclure en situations exceptionnelles ; interventions encore fréquentes mais se réduisant progressivement, contre la rouille du peuplier sur des cultivars sensibles, en conditions climatiques favorables au développement de la maladie ( cas de 2007 et 2008) ; situation mixte où des traitements sont réalisés à la fois pour des raisons forestières et de santé publique, mais de façon assez imprévisible et très ponctuelle : cas des chenilles défoliatrices des feuillus.
L'arrêté du 5 mars 2004, précise dans son article 1 : « on entend par traitement aérien toute utilisation au moyen d'aéronefs de produits mentionnés à l'article L 253-1 du code rural à des fins de protection des végétaux ». Il apparaît donc nécessaire de clarifier juridiquement le statut des traitements contre les chenilles processionnaires réalisé pour des motifs de santé publique, ainsi que leur suivi administratif. Ces traitements devraient être pris en compte dans le cadre de la réglementation s'appliquant aux biocides, et non pas à celle relative aux produits phytopharmaceutiques.
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INVALIDE) (ATTENTION: OPTION ns consécutifs par espèce) avec un peu de luzerne et tournesol, variable entre le nord et le sud de la Camargue selon l'hétérogénéité des sols et la structure des exploitations. La salinité des sols est un facteur limitant pour l'introduction d'autres cultures dans la rotation. Aujourd'hui, il existe 200 riziculteurs, 20 000 ha ont été cultivés en riz en 2008, avec une surface moyenne de 100 ha de riz par exploitation. Pratiquement toutes les opérations (production, stockage, et une grande partie de la transformation) sont réalisées en Camargue. La filière représente environ 2 000 emplois directs et un chiffre d'affaire de l'ordre de 61 millions d'euros. Le riz de Camargue a obtenu une Indication géographique protégée (IGP) depuis 2000, et 4 à 5 % de la production est en agriculture biologique sans apparemment de problèmes de cohabitation (certains riziculteurs font à la fois du riz bio et du riz conventionnel sur la même exploitation). L'eau est prélevée dans le Rhône, dans le cadre d'une dizaine d'associations syndicales autorisées (ASA) ou par des pompages privés. Environ la moitié des rizières est incluse dans le Parc régional de Camargue, et certaines exploitations sont en limite de réserve naturelle nationale sans qu'il y ait de conflit majeur. Les rizières jouent un rôle important pour éviter les remontées de sel dans les sols, et pour préserver le paysage actuel. Des traitements par aéronefs (uniquement hélicoptère) sont réalisés sur une part de la sole, pour le désherbage et la lutte contre les insectes (uniquement pyrale) et les maladies cryptogamiques. La surface traitée par hélicoptère représentait près de 14 000 ha développés en 2008 (¾ en région Provence-Alpes-Côte d'Azur et ¼ en région Languedoc-Roussillon). En Guyane, le riz a été introduit il y a plus de deux siècles, mais sa culture s'est développée à partir des années 1980, et un plan de développement engagé par les pouvoirs publics a permis de réaliser un important périmètre irrigué dans l'ouest guyanais. La zone de production couvre aujourd'hui un territoire de l'ordre de 5 000 ha, divisée en deux parties de part et d'autre du fleuve Mana : un polder, bordant également l'océan, de 3 800 ha sur la rive droite, et un second de 1 200 ha sur sa rive gauche. En 2008, 2 800 ha ont été semés, 1/3 en premier cycle (décembre à mars) et 2/3 en deuxième cycle (juin à septembre). La production qui a culminé à 28 500 tonnes de riz paddy en 1991, est de l'ordre de 10 000 tonnes en 2008. Une grande part est exportée sous forme brute (en Espagne principalement), ce qui représente le cinquième des tonnages embarqués au port de Cayenne et 11 % de la valeur des exportations de l'industrie agroalimentaire de Guyane. La baisse de la production est la résultante de difficultés économiques de la filière, et du passage à un seul cycle annuel de culture sur la même parcelle en lien avec le nouveau dispositif d'aides directes de la PAC (aide à la surface cultivée et non plus au tonnage récolté). La filière représente un tiers des emplois marchands sur la commune de Mana, et est concentrée autour de 5 opérateurs dont
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2 représentent 80 % de la production. Cette filière s'inscrit dans un contexte régional très concurrentiel (le Guyana et le Surinam produisent respectivement 315 000 et 150 000 tonnes de riz), mais la qualité du riz de Guyane (riz long) est très appréciée en Espagne et au Portugal. La filière riz reste un maillon important de l'économie locale. La structure des polders et la nature des sols (argiles très peu stables) rendent difficiles l'accès des engins terrestres. C'est pourquoi il est fait appel aux aéronefs (avion) pour les semis, la fertilisation, et les traitements phytopharmaceutiques (désherbants, insecticides et fongicides). La surface traitée par avion représentait en 2008 environ 17 000 ha développés. Les pratiques culturales et phytosanitaires : En Camargue Trois désherbages et un traitement conjoint insecticide + fongicide sont réalisés au maximum par an, par voie terrestre ou par hélicoptère. Le choix, terrestre ou aérien, revient à chaque riziculteur, en fonction du coût mais surtout des pointes de travaux sur l'exploitation et des conditions de développement de la culture, elles-mêmes dépendantes des conditions climatiques de l'année, de la structure d'exploitation et de la nature très hétérogène des sols. Le semis est réalisé fin avril - début mai, dans les parcelles mises en eau. Désherbage Pour les traitements de pré-levée, la technique du « faux semis » est souvent pratiquée : elle consiste à provoquer les levées d'adventices 3 à 4 semaines avant le semis de la culture, par une mise en eau de quelques jours suivie d'une vidange, puis par leur destruction par un travail du sol, ou le plus souvent par l'application d'un herbicide anti-germinatif (par moyen terrestre ou par hélicoptère). Les infestations de riz sauvage constituent un des principaux soucis des riziculteurs. Le recours au traitement aérien est surtout lié à la charge de travail sur l'exploitation à cette période de travaux très critique, mais également à la nature des sols dont l'état d'humidité - intermédiaire entre sec et en eau, avec une lame de 1 à 2 cm d'eau- est délicat pour le passage des tracteurs qui s'embourbent fréquemment et abiment les sols. L'importance des surfaces cultivées dépend beaucoup des conditions climatiques en période des semis. Si les semis de riz ne peuvent être réalisés, les parcelles sont alors emblavées en blé dur. Chaque riziculteur décide en fonction de son matériel, de sa main d'oeuvre et de ses sols, de faire appel ou non à l'aéronef. La majorité réalise des applications terrestres et ont recours à l'hélicoptère en cas de besoin. Pour les traitements de post-semis avec un herbicide de contact, les rizières sont vidées avant la pulvérisation, mais pas séchées (il reste une mince lame d'eau plus ou moins épaisse selon l'herbicide utilisé), et l'eau est remise dès que possible (24 à 72 heures après) car un coup de vent présente un double risque : stress hydrique et remontée de sel. Le choix des produits est principalement dicté par le stade du riz (risque de phytotoxicité), et par la concurrence, du semis au tallage, entre la culture et les adventices. Pyrale Le suivi des vols de l'insecte par un réseau de piégeage permet d'établir les dates optimales de traitement. Mais cela ne s'avère pas suffisant pour décider de la nécessité ou non de l'intervention, aussi la décision est laissée à l'appréciation du riziculteur, en fonction notamment des variétés de riz en culture. Un traitement est réalisé, sur une période d'une dizaine de jours (première quinzaine d'août), sur 1/6 des surfaces (3 000 ha). A cette période, la hauteur du riz ne permet pas le passage d'engins motorisés dans l'eau sans causer des dégâts directs. La variété la plus sensible (Ariette) est maintenant très peu cultivée. La principale matière active utilisée par voie aérienne est le Tébufénicozide (les produits à base de Bacillus thuringiensis appliqués en agriculture biologique sont considérés comme moins efficaces). Les traitements sont tous réalisés par hélicoptère.
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La mise en oeuvre de l'arrêté du 5 mars 2004 relatif à l'utilisation par voie aérienne de produits phytopharmaceutiques, qui fixe une distance de 50 mètres par rapport aux cours d'eau, crée des difficultés dans le contexte particulier de la culture du riz par suite de l'omniprésence de canaux d'irrigation et de drainage. Suite à des échanges entre le Ministère en charge de l'agriculture (DGAL/SDQPV) et le Syndicat des riziculteurs de France, et à des réunions de travail avec les DRAF/SRPV, un dispositif spécifique a été retenu pour la Camargue, en 2005. Il consiste à gérer les traitements aériens par « ilots hydrauliques » positionnés de façon précise sur un système d'information géographique (SIG avec contours, surfaces, position des exutoires...). Ces ilots, numérotés, sont constitués d'un groupe de parcelles contiguës, ayant une gestion hydraulique commune, en particulier au niveau de la vidange. La gestion hydraulique de l'ilot doit permettre, en fermant les vannes, d'éviter tout mouvement d'eau pendant une période de 10 jours après l'application aérienne. L'hélicoptère doit respecter une zone de non traitement de 50 mètres en bordure intérieure des ilots (zone soit traitée par voie terrestre, soit non traitée), ce qui implique que les ilots soient de taille suffisante. Les produits à base d'alphamétrine, dont le profil écotoxicologique est très défavorable, sont exclus de ce dispositif. Les formulaires de déclaration de traitements aériens (modèle spécifique convenu avec les SRPV) sont renseignés par les prestataires (deux entreprises de traitements par hélicoptère interviennent en Camargue) qui doivent avoir obtenu l'accord formel de la part des riziculteurs donneurs d'ordre. Ces formulaires sont transmis au SRPV, par courrier électronique, la veille de chaque opération, avec la localisation des traitements (numéro d'ilot hydraulique), la surface traitée et les produits utilisés. Cinq jours après l'opération, une nouvelle déclaration doit être envoyée avec les informations sur les traitements effectivement réalisés. Des mesures de suivi de la qualité des eaux ont été réalisés en prélevant des échantillons à l'exutoire de parcelles traitées, pour la recherche de résidus. L'université de Marseille a notamment conduit, en 2005, une étude sur plusieurs ilots avec mesure au cours du temps des résidus de produits dans les parcelles et les canaux. En Guyane La culture de riz est exposée à une forte pression d'insectes ravageurs équatoriaux qui peuvent entraîner des pertes importantes de rendement et de qualité : mouches mineuses en période de semis, punaise piqueuse des tiges (considérée comme le ravageur le plus important), punaise des grains, foreurs des tiges, noctuelles défoliatrices sur les jeunes plants, delphacides... La principale maladie est la pyriculariose, mais elle ne cause plus de gros problèmes depuis l'utilisation de variétés moins sensibles. En revanche, les adventices constituent une préoccupation majeure sur le polder, avec des pertes sur récolte estimées entre 30 et 70 %. Les riziculteurs sont confrontés au manque de diversité des produits phytopharmaceutiques homologués pour la plupart des ravageurs présents sur le riz en Guyane («usages orphelins»), et à une efficacité réduite en conditions équatoriales des produits homologués en Europe. Les principaux insecticides utilisés appartiennent à la famille des pyréthrinoïdes. Un dispositif d'avertissements agricoles a été mis en place en 2006, avec des observations quasiquotidiennes, et envoi de bulletins d'alertes aux riziculteurs. En moyenne, 3 traitements insecticides ont été réalisés par an depuis les 6 derniers cycles, le nombre variant de 1 à 5 traitement par parcelle et par an. Le réseau d'avertissements agricoles aurait permis de supprimer, en moyenne, un traitement insecticide par an.
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Pour les traitements herbicides, le schéma est généralement le suivant : un produit non spécifique appliqué deux semaines avant semis (à base de glyphosate), une association d'un anti-graminées et d'un anti-dicotylédones deux semaines après semis (à base de 2-4 MCPA, azimsulfuron ou cyhalofop butyl), et une troisième intervention de rattrapage si nécessaire selon la flore présente. Les traitements aériens sont réalisés par une seule société sous traitante (DGTA) qui intervient également en Guadeloupe; Elle dispose de cinq avions sur place : trois gros biplans (charge utile de 700 kg) pour les semis et les engrais, et deux monoplans (charge utile 400 kg) pour les produits phytopharmaceutiques. Ils sont équipés d'un diffuseur ventral pour l'épandage solide (épandage sur une largeur de 9 m pour les semis et de 12 m pour les engrais) et de deux rampes avec pompe éolienne pour l'épandage des produits phytopharmaceutiques (sur une largeur de 16 à 18 m). Le travail aérien est programmé et réalisé sous contrôle d'un système de navigation basé sur un GPS différentiel, et une barre de guidage (AGANAV). Un seul pilote est présent à temps plein, et un autre à temps partiel. Pour la réalisation d'un épandage, un bon de commande est envoyé par les riziculteurs à la société de traitements, et les produits sont fournis par les sociétés rizicoles. La mise en oeuvre des stations de préparation des bouillies et l'ensemble des opérations liées à l'application sont prises en charge par la société d'aéronefs. Les déclarations de traitements (avant et après le traitements) sont adressées à la DAF/ SPV par les riziculteurs. Depuis plusieurs années, des analyses de résidus de produits phytopharmaceutiques sont réalisées dans les eaux en zones est et ouest du polder, sur cinq points de prélèvements. Les principaux arguments en faveur des traitements aériens sur la culture de riz:
faute d'une portance suffisante, le passage de machines terrestres dans des parcelles inondées est destructeur des sols et de leur nivellement fin. En Camargue, une partie des travaux est réalisée avec des tracteurs équipés de roues métalliques crantées, mais leur passage est délicat dans de nombreuses parcelles (hétérogénéité des sols, conditions d'humidité...) et demande un investissement matériel élevé. En Guyane, même les pistes sur les levées du polder sont endommagées par les passages d'engins, les parcelles sont difficilement accessibles aux tracteurs, car la portance des sols est faible à nulle (plusieurs mètres d'épaisseur d'une argile fine à très faible cohésion) ce qui provoque l'enlisement fréquent des machines agricoles actuellement disponibles (sauf à faire sécher les terres suffisamment à l'avance, ce qui n'est envisageable que pour la moisson et est très aléatoire compte-tenu du climat de type équatorial). L'aéronef permet d'intervenir rapidement. C'est indispensable en Camargue au moment du désherbage de printemps, période où les riziculteurs sont confrontés à des pointes de travaux importants (mise en eau des rizières), alors que les périodes optimales des semis et du désherbage sont courtes. Il en est de même pour le traitement contre la pyrale qui doit être effectué à des dates précises. En application terrestre, il est possible de traiter 50 ha par jour avec une rampe de 25 m, l'hélicoptère traite la même surface en une heure. En Guyane, les attaques, très rapides, d'insectes sont assez difficilement prévisibles, et l'avion traite l'ensemble du polder en deux heures alors qu'il faudrait plusieurs jours avec un tracteur. Cette rapidité d'intervention permet par ailleurs de traiter aux heures les plus favorables par rapport aux conditions climatiques (vent, pluie, températures). Compte-tenu de la réglementation en vigueur pour les traitements par aéronefs, la dégradation des produits et leur diffusion dans les réseaux d'irrigation et de drainage, sont mieux maîtrisées grâce à l'isolation hydraulique des ilots traités selon le dispositif adopté en Camargue. Un dispositif comparable est à l'étude dans le contexte de la Guyane, mais cela nécessiterait de mettre en place un système de vannage qui n'existe pas
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actuellement (les parcelles du polder sont contiguës avec une gestion hydraulique commune). Les riziculteurs considèrent qu'il est difficilement envisageable agronomiquement d'isoler les parcelles pendant 10 jours (ce qui entrainerait le développement d'insectes ou d'adventices, sachant qu'en conditions tropicales les substances chimiques se dégradent plus rapidement ce qui pourrait raccourcir le délai de 10 jours). Avec les aéronefs, les risques de pollution accidentelle lors du remplissage du pulvérisateur et du rinçage des cuves sont moindres car le nombre de points de ravitaillement est réduit et géré par des opérateurs professionnels.
La survie économique de cette filière est étroitement dépendante de la possibilité de recourir aux aéronefs, en l'absence d'alternatives viables. Ceci est d'autant plus crucial en Guyane que l'avion permet aussi les semis et la fertilisation des rizières.
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Annexe n° 9 Fiche BANANE La production de bananes, introduite en Martinique et en Guadeloupe au XVIIIème siècle, revêt une importance particulière aux Antilles puisque largement tournée vers l'exportation et pourvoyeuse d'un nombre important d'emplois. Le contexte La production est aujourd'hui organisée au sein de trois groupements (un en Guadeloupe et deux en Martinique) fédérés au sein de l'Union des groupements de producteurs de bananes (UGPBAN) qui commercialise la quasi totalité de la production. La filière représente 10 000 emplois aux Antilles, la culture occupant près de 9 000 ha (environ ¾ en Martinique et ¼ en Guadeloupe), sur environ 700 exploitations. Les exportations de banane vers l'Union européenne représentent en valeur respectivement 14 % et 24 % des exportations de Guadeloupe et de Martinique. La valeur de la production de banane aux Antilles avoisine 200 millions d'euros, soit environ 40 % de la valeur totale de la production agricole des deux régions. La production commercialisée, qui culminait à 375 000 tonnes en 1997, a connu depuis cette période une diminution progressive sous l'effet de la concurrence internationale (plus particulièrement des pays producteurs d'Amérique latine) , ainsi que des épisodes cycloniques (le dernier en date étant le cyclone Dean en août 2007). Elle a atteint 172 000 tonnes en 2008 mais est en nette augmentation en 2009. La part occupée par la banane des Antilles sur le marché de l'Union européenne se situe aux environs de 11 %, alors que les pays latino-américains (« banane dollar ») et les pays AfriqueCaraïbes-Pacifique (ACP) occupent respectivement 68 % et 16 % de ce marché. L'Espagne (Iles des Canaries) est le premier producteur européen de bananes (350 000 tonnes). L'Organisation commune de marché (OCM) de la banane, mise en place en 1993, a été profondément remaniée en 2006 avec un basculement des aides directes à la production dans le Programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI ), et une baisse des tarifs douaniers à l'entrée des bananes des pays tiers sur le marché de l'Union Européenne. Un «plan banane durable» a été mis en place en 2008, avec en particulier pour objectifs de rétablir la production au niveau de celui du début des années 2000 (environs 300 000 tonnes), de diminuer l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et d'instaurer un plus grand respect de l'environnement. Dans ce cadre, un institut technique de la banane est créé. Les pratiques actuelles de traitements aériens Les traitements aériens sont réalisés uniquement pour lutter contre la maladie cryptogamique de la cercosporiore jaune, qui est rendue obligatoire par arrêtés préfectoraux en Martinique et en Guadeloupe. La cercosporiose noire est absente du territoire des Antilles françaises, mais elle constitue une menace très forte, car elle nécessite un traitement toutes les deux semaines en moyenne dans les pays où elle est implantée.
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La lutte contre la cerscosporiose jaune est mutualisée. Une convention est passée dans chacune des deux régions entre la fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (FREDON) et un organisme professionnel qui gère la logistique des traitements. Les groupements de producteurs sont actionnaires de ces 2 organismes. Les producteurs cotisent forfaitairement pour la mise en oeuvre des traitements. Les produits (fongicides et huile minérale) sont achetés et fournis par les organismes professionnels. Les applications sont réalisées par des prestataires, avec 1 avion et 4 hélicoptères en Martinique, 2 avions et un hélicoptère en Guadeloupe. Le déclenchement des traitements est assuré à partir d'un réseau de parcelles d'observations avec un suivi épidémiologique de la maladie et des conditions climatiques. La cercospsoriose jaune nécessite entre 5 et 15 traitements annuels de la bananeraie, avec une moyenne de 9 à 12 traitements, réalisés à très bas volume hectare (de l'ordre de 15 litres/ha). La filière dispose d'un faible nombre de produits phytopharmaceutiques homologués : deux substances fongicides systémiques de la famille des triazoles, complétées récemment par deux autres de familles chimiques différentes mais assorties d'une zone non traitée (ZNT) de 100 mètres. L'huile minérale paraffinique également autorisée est systématiquement utilisée comme base des bouillies (qui ne comportent pas d'eau), en raison de ses propriétés anti-évaporantes, de sa faculté à faciliter la pénétration des substances dans les feuilles, et de ses propriétés fongi-statiques (c'est pourquoi elle est aussi utilisée seule, sans adjonction de fongicide). En 2008, des traitements par aéronefs ont été réalisés en Martinique et en Guadeloupe sur 63 500 ha développés, le taux de surface traitée par aéronef étant estimé à 75 % de la bananeraie. Les 25 % autres correspondent à des surfaces proches d'habitation ou cours d'eau, qui sont soit traitées par des moyens terrestres (essentiellement appareils portés à dos d'homme), soit non traitées (cas aussi de parcelles peu entretenues par leurs propriétaires). Les études en cours Un vaste programme d'études « OPTIBAN » (optimisation des traitements phytosanitaires contre la cercosporiose de bananes en Martinique et Guadeloupe) est conduit par le CEMAGREF en association avec les organisations professionnelles et le ministère en charge de l'agriculture. Il comporte plusieurs volets dont notamment : la recherche de méthodes terrestres alternatives aux traitements par aéronefs, la cartographie des zones de production, afin de préciser les zones d'exclusion des traitements aériens (distance réglementée de 50 mètres, ou 100 mètres pour certains produits, par rapport au bâti et au réseau hydrographique), et d'apprécier les surfaces accessibles pour les différentes solutions terrestres étudiées (en fonction de la pente, de la taille du parcellaire...), l'optimisation des traitements aériens par l'amélioration des pratiques et matériels, et avec des outils de traçabilité. Ce programme n'étant pas achevé et les résultats non publiés à la date de rédaction de ce rapport de mission, nous donnons à titre indicatif et provisoire quelques éléments:
les traitements par aéronefs ont été abandonnés sur une partie de la bananeraie de Martinique et remplacés par des traitements terrestres manuels avec appareils portés à dos. Cela concerne environ 250 planteurs, à qui ont été fournis les appareils ainsi que les équipements de protection. En Guadeloupe, cette alternative est déjà mise en oeuvre depuis plusieurs années dans les zones proches des habitations. Des études sont en cours sur l'évaluation de la sécurité des opérateurs lors des traitements manuels, et les moyens d'amélioration.
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Plusieurs matériels de traitement auto-portés tout-terrain sont expérimentés :
des petits-porteurs dotés d'un kit de pulvérisation traitant la canopée par le dessus (avec un mât équipé de mains à tuyères d'une portée de 12 à 18 mètres) ou par le dessous (atomiseur avec une portée de 6 mètres), des gros-porteurs avec un système de pulvérisation de grande portée (de type canon traitant jusqu'à 50 mètres), un système fixe avec un réseau de type irrigation avec mâts et micro-asperseurs.
Ces divers prototypes, conçus spécialement pour les bananeraies, nécessiteraient encore au moins une ou deux années d'étude avant de pouvoir conclure sur leur opérationnalité et achever leur mise au point. Ces appareils sont notamment confrontés à des problèmes de pente et d'irrégularité des parcelles (présence de fossés de drainage, mauvais alignement des plants...), d'adaptation des volumes de bouillies à appliquer par hectare (entre 35 et 50 litres/ha) et leur utilisation pourrait nécessiter de modifier sensiblement la conduite des plantations (nivellement des sols, enfouissement des réseaux de drainage, espacement des rangs, haubanage des bananiers...).
Les aéronefs basés en Guadeloupe sont déjà équipés depuis début 2008 d'un système GPS et ceux intervenant en Martinique devraient l'être prochainement. Des mises au point sont en cours devant permettre à ces équipements : de guider avec précision les traitements sur le parcellaire en fonction des contraintes réglementaires (zones de non traitement, coupures automatiques des buses aux moments opportuns...), d'assurer une traçabilité par l'enregistrement et l'archivage numérique sur un SIG des épandages réalisés, pour permettre à la filière un suivi précis et pouvoir répondre aux besoins de contrôle (données telles que lieux, vitesses de vol, volume épandu, largeur traitée ... ). Les essais conduits sur les applications par aéronefs sur bananeraie ont donné les résultats suivants en matière de dérive: pour l'avion, la direction du vent est un critère déterminant, s'il est dans l'axe du vol il permet de supprimer la majeure partie des pertes latérales. L'usage de buses à inclusion d'air (en remplacement des buses centrifuges) permet de se rapprocher d'une situation « arboriculture par matériel terrestre », mais la hauteur et la vitesse de vol de l'avion (160 à 200 km/h) limitent les marges de progrès. Un ajustement de la largeur de la rampe et/ou l'adjonction d'équipements supplémentaires (déflecteurs...) pourraient cependant apporter des améliorations sensibles. Pour l'hélicoptère, l'emploi de buses à inclusion d'air, associé à la réduction de la largeur de la rampe de pulvérisation (à 60 % de la largeur du rotor) et à une hauteur de vol limitée à 2 mètres au-dessus de la culture, ont montré tout leur intérêt.
Les principaux arguments en faveur du maintien des traitements aériens
Il n'existe pas d'alternatives opérationnelles de traitements terrestres mécanisables : Les prototypes autoportés, s'ils se révèlent performants, ne pourraient au mieux se déployer opérationnellement sur l'ensemble des zones de production que dans un délai de 3 à 4 ans. Outre le temps nécessaire pour poursuivre la mise au point de ces matériels, se rajouteront les délais d'investissements (acquisition des machines et adaptation des bananeraies). Les solutions palliatives disponibles actuellement (appareils à dos, canons...) soulèvent des questions d'exposition des utilisateurs particulièrement problématique sous climat tropical (pénibilité des vêtements de protection, difficulté à assurer en même temps pressurisation et climatisation des cabines des tracteurs..). Elles peuvent même se révéler défavorables en matière de dérive (cas en particulier des canons à longue portée).
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Les traitements par aéronefs, moyennant certaines améliorations, offrent plusieurs avantages :
le choix de buses à inclusion d'air, la réduction de la largeur de la rampe de pulvérisation, et la hauteur de vol, abaissent les phénomènes de dérive à un niveau comparable à celle obtenue par des applications terrestres classiques sur arbres fruitiers ; l'équipement des aéronefs avec un GPS couplé à un SIG permet d'assurer un bon guidage des traitements et une traçabilité meilleure que pour les applications terrestres ; les doses de produits phytopharmaceutiques appliquées par ha sont moindres qu'avec les appareils terrestres actuellement disponibles (moitié de celle appliquée avec un appareil porté à dos), et la qualité de la pulvérisation par aéronef permet d'appliquer de l'huile minérale seule (en moyenne un traitement sur deux), d'où des réductions importantes de substance active fongicide apportée annuellement ; le recours à l'aéronef permet une organisation collective de la lutte contre la cercosporiose jaune, d'autant plus efficace que les traitements contre la maladie sont généralisés. La disponibilité des aéronefs assure une réactivité essentielle en cas d'apparition d'une maladie émergente comme la cercosporiose noire qui constitue une grave menace pour les bananeraies de l'arc antillais (elle vient récemment d'être détectée dans l'Ile de Sainte-Lucie voisine de la Martinique) ; La réalisation des traitements par des entreprises professionnelles spécialisées amenuise les risques de pollution accidentelle lors du remplissage des pulvérisateurs et de la vidange des fonds de cuve, par rapport au recours à un grand nombre d'appareils terrestres.
Le passage éventuel au « tout terrestre », entrainerait une augmentation du coût de la protection phytosanitaire de la culture, avec une efficacité moindre, à une période où la filière est soumise à une obligation de compétitivité accrue dans un contexte de forte concurrence internationale et de réforme de l'OCM banane. Les orientations fixées par le « plan banane durable » lancé en 2008 demanderont quelques années pour apporter des solutions concrètes ayant un impact sur le revenu des producteurs, l'une des pistes étant la sélection de variétés résistantes à la cercosporiose. Il convient de souligner que la culture du bananier reste aujourd'hui l'une des meilleures solutions pour l'occupation agricole des terres fortement contaminées par la chlordécone, et que la culture de bananes aux Antilles françaises reçoit déjà aujourd'hui une quantité de substances actives phytosanitaires par hectare nettement moindre que dans bon nombre de pays producteurs (par exemple 10 fois moins qu'au Costa-Rica).
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Annexe n° 10 Fiche FORÊT ET ESPACES BOISES Ce vocable désigne l'ensemble des espèces ligneuses (autres que les arbres fruitiers) constitutives de forêts, bois ou espaces verts, à des fins de production de bois, de protection, de paysage ou de loisir. Les pins donnent lieu à des traitements aériens chaque année contre la chenille processionnaire Thaumetopoae pityocampa (au moins 9 000 ha développés), ainsi que les peupliers contre la rouille (près de 2 000 ha), puis de façon beaucoup plus locale et sporadique les feuillus (essentiellement chênes) contre la chenille processionnaire Thaumetopoae processionea et les bombyx (350 ha). De rares applications ont été réalisées contre les pucerons, la tordeuse du chêne, ou pour le contrôle des fougères. Chenilles processionnaires du pin La dynamique des populations des chenilles processionnaires dans les peuplements forestiers fait l'objet, depuis 1981, d'un suivi régulier organisé par le Département de la santé des forêts (DSF) du ministère en charge de l'agriculture. Un réseau permanent de plus de 400 placettes (points d'observations) est réparti sur l'ensemble du territoire national, et où sont notamment notés le nombre de pins attaqués et la quantité de nids de chenille. Une rénovation de ce réseau est engagée depuis deux ans avec un renforcement et une homogénéisation de la surveillance dans les zones les plus boisées, ce qui s'est traduit par une augmentation de 20 % du nombre de placettes. Les attaques sont cycliques. Après de forts niveaux enregistrés en 2007, une régression du niveau général des populations est constatée depuis 2 ans, avec de forts contrastes locaux. Dans le grand quart sud-ouest de la France se dessine clairement le début d'une nouvelle gradation. Les pontes ont lieu normalement de fin juin à mi-septembre selon les espèces de pin et les secteurs, les éclosions s'étalent entre fin juillet et fin septembre, et les chenilles se regroupent dés les premiers froids dans un nid définitif soyeux sur une branche exposée au soleil. Elles quittent les arbres en procession entre février et avril pour s'enfouir dans le sol où aura lieu la nymphose. Les chenilles colonisent préférentiellement les lisières ensoleillées, et les dégâts provoqués par la défoliation sont généralement tolérables pour l'arbre, sauf en cas de pullulation très forte sur des plantations jeunes ou des arbres déjà affaiblis. Dans le sud-ouest de la France, un raccourcissement atypique du cycle de l'insecte a été constaté depuis peu (nymphose réalisée dès la Toussaint), avec pour effet de concentrer l'alimentation des chenilles sur une période plus courte, ce qui fait craindre des conséquences plus graves sur la santé des arbres, déjà touchés par la récente tempête. Sauf circonstances exceptionnelles, au point de vue strictement forestier, les traitements chimiques sont jugés ni nécessaires, ni souhaitables. Ils ne permettent pas d'éviter une nouvelle pullulation et peuvent même être contre-productifs s'ils se situent en phase de régression des populations de l'insecte. En revanche, sur le plan de la santé humaine et animale (chiens notamment), les poils des chenilles provoquent dans les secteurs fréquentés par le public (bûcheronnage, urbanisation, loisirs ...) des urtications avec des atteintes cutanées, oculaires, respiratoires ou allergiques, pouvant aller jusqu'à causer des oedèmes. Ces effets sur la santé n'impliquent pas nécessairement un contact direct avec les insectes, car ils peuvent être provoqués par les poils de chenilles emportés par le vent.
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Les décisions de traitements sont en conséquence prises essentiellement pour des raisons de santé humaine ou animale. Il existe des seuils de risques (nombre de colonies par arbres) pour l'aide à la décision, mais des traitements d'assurance sont souvent réalisés dans les secteurs très fréquentés par le public et à haut intérêt touristique et résidentiel. Pour être efficaces, les traitements doivent être réalisés aux jeunes stades de l'insecte (avant la constitution des nids hivernaux). Deux catégories de produits sont autorisées pour les traitements: l'un à base de Bacillus thuringiensis qui agit par contact (substance d'origine bactérienne, spécifique des larves de lépidoptères), l'autre de diflubenzuron qui agit par ingestion (perturbateur des mues). Compte-tenu de la hauteur des arbres, les traitements sont réalisés essentiellement par hélicoptère, à raison d'une ou deux applications en septembre-octobre. Les demandes d'intervention émanent souvent des collectivités territoriales (communes et conseils généraux). Les chantiers sont plus généralement organisés selon les cas par l'ONF, et les fédérations de défense contre les organismes nuisibles aux cultures (FREDON, FDGDON), en faisant appel aux sociétés de traitements par aéronefs comme prestataires de service. Un arrêté annuel du préfet de département fixe les modalités de réalisation des traitements : produits autorisés (uniquement à base de Bacillus thuringiensis), période de traitement, distances de sécurité par rapport aux lieux visés par l'article 6 de l'arrêté du 5 mars 2004 (à l'exception de la distance minimale des 50 mètres), obligations de déclaration avant et après traitements, information du public, et peines prévues en cas d'infractions à ces dispositions. Ces arrêtés s'appuient sur les préconisations édictées par la note de service interministérielle (agriculture-santé-environnement) du 13 septembre 2005, relative à la mise en oeuvre de traitements par voie aérienne pour des motifs de protection de la santé publique contre les chenilles processionnaires, et sont pris après avis des différents services déconcentrés concernés: DDAF, DDSV, DSF, DIREN, DRAAF/SRAL, DDASS. Ces interventions, réalisées quasi exclusivement à des fins de protection de santé publique et non pas de protection des végétaux, impliquent ainsi actuellement un grand nombre d'administrations. Le recours à l'aéronef est justifié par l'absence de moyens terrestres opérationnels, mais les traitements peuvent en partie être qualifiés «de confort» dans les secteurs résidentiels, touristiques et de loisirs. Ils sont, à ce titre, dans ces secteurs assez systématiquement reconduits d'une année sur l'autre. En 2008, au moins 9 000 ha développés ont été traités par aéronefs, principalement en régions Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Aquitaine et Languedoc-Roussillon, mais aussi sur des surfaces significatives en Poitou-Charentes et Midi-Pyrénées, et beaucoup plus ponctuellement dans d'autres régions. Des études sont conduites par l'INRA sur d'autres moyens de lutte : piégeage de masse des mâles pendant les vols de l'insecte (essais réalisés en Alsace, mais non concluants), confusion sexuelle par application de phéromones (peut donner de bons résultats si le traitement est réalisé sur une grande surface), et prédation par les mésanges.
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Rouille du peuplier Certains cultivars de peupliers d'origine américaine restent très touchés par plusieurs espèces de rouille du genre Melamspora, particulièrement lorsque les printemps et étés sont doux avec une forte hygrométrie, ce qui a été le cas des années 2007 et 2008. Le Département de la santé des forêts suit l'impact des pathologies foliaires du peuplier sur 67 sites répartis sur le territoire national. Cette maladie fongique peut réduire de façon drastique la croissance des arbres, induire le développement de parasites dits de faiblesse, et en cas d'attaques répétées provoquer la mortalité des arbres. Deux produits sont homologués pour ces traitements, réalisés en début d'été (généralement première quinzaine de juillet) lorsque sont visibles sur les feuilles les pustules orangées pulvérulentes (urédospores). Les peupleraies occupent environ 235 000 ha. Le premier bassin de production inclut les régions Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Ile-de-France, Champagne-Ardennes, puis viennent ensuite les vallées de la Loire, et de la Garonne. Ces 3 bassins représentent 75 % des surfaces de peupleraies. Environ 2 000 ha ont été traités par hélicoptère en 2008, principalement dans la Somme et le nord de l'Aisne (1 200 ha), la Marne (500 ha) et la Seine-et-Marne (150 ha). Il s'agirait surtout de peupleraies d'accès difficile et sur des reliefs accidentés, sachant que des applications terrestres (type canon) sont aussi réalisées plutôt sur des jeunes plantations, en vallée, sur sols «propres». Le traitement aérien coûte cher (environ 150 /ha) alors que le prix du bois de peuplier est au plus bas. Des cultivars résistants ou tolérants aux rouilles sont plantés en substitution depuis plusieurs années, mais il subsiste encore des peupleraies sensibles, âgées pour la plupart de 10 à 12 ans. Des aides financières existent pour inciter les producteurs à les exploiter avant terme. La filière est par ailleurs confrontée au développement préoccupant d'un ravageur, le puceron lanigère, qui complique le choix des futurs cultivars à planter. Chenilles défoliatrices du chêne Il s'agit principalement de la chenille processionnaire Thaumetopoae processionea, ainsi que des Bombyx (disparate et cul-brun). Ces lépidoptères manifestent des explosions souvent inattendues et spectaculaires (cas de la processionnaire dans l'Est de la France en 2007), pouvant provoquer une défoliation totale des arbres. Compte-tenu de la physiologie du chêne, qui a la particularité de puiser pendant plusieurs mois dans ses réserves racinaires pour constituer sa production avant que la photosynthèse ne prenne le relais, une forte défoliation peut être très dommageable, d'autant plus que surviennent fréquemment sur le nouveau feuillage des attaques d'oïdium qui empêchent la reconstitution d'un bon niveau de réserves avant l'hiver. Ces chenilles ont aussi des propriétés urticantes, et peuvent donc causer des problèmes de santé publique. Le risque urticant des chenilles processionnaires du chêne, est amplifié par le fait que les chenilles restent plus longtemps dans l'arbre que les processionnaires du pin et ne s'enfouissent pas dans le sol pour la nymphose, aussi la période d'exposition est plus longue. En Lorraine, lors de fortes attaques de ces chenilles, il avait été nécessaire d'équiper les bucherons d'une combinaison de protection. Pour cette raison, des arrêtés préfectoraux sont préconisés par la note de service interministérielle du 13 septembre 2005, selon les mêmes modalités que pour la chenille processionnaire du pin.
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Il n'existe pas vraiment de méthodes opérationnelles permettant de prévoir les pullulations, et quand la défoliation est constatée, il est généralement trop tard pour réaliser un traitement. Des études sont conduites sur l'intérêt de déclencher un traitement contre les attaques d'oïdium qui succèdent souvent à la défoliation afin de réduire l'affaiblissement des arbres avant l'hiver, ainsi que sur l'efficacité d'un traitement insecticide ou d'une lutte par confusion sexuelle l'année suivante pour prévenir une nouvelle attaque. Environ 450 ha ont été traités par aéronef en 2008, en Lorraine, Aquitaine, Pays de la Loire, et Alsace. Les produits utilisés sont pratiquement identiques à ceux mis en oeuvre contre la chenille processionnaire du pin. Les arguments en faveur des traitements aériens : La hauteur des arbres, la densité des houppiers, et l'absence de solutions alternatives terrestres viables imposent généralement le choix de l'aéronef. Par rapport aux traitements terrestres, quand ils sont possibles (de type canon), les traitements par hélicoptère ont pour atout d'être appliqués à bas volume avec des quantités réduites et une dérive moindre de matières actives. Schématiquement, trois cas de figure sont rencontrés :
interventions systématiques, tous les ans, sur des surfaces pouvant varier en fonction de l'importance des populations d'insectes. C'est le cas des chenilles processionnaires du pin qui représentent plus de 80 % des surfaces de forêt et espaces boisés traités, quasi exclusivement pour des motifs de santé publique dans des sites urbanisés et touristiques. La nécessité de traiter des forêts et boisements à des fins de protection des végétaux n'est cependant pas à exclure en situations exceptionnelles ; interventions encore fréquentes mais se réduisant progressivement, contre la rouille du peuplier sur des cultivars sensibles, en conditions climatiques favorables au développement de la maladie ( cas de 2007 et 2008) ; situation mixte où des traitements sont réalisés à la fois pour des raisons forestières et de santé publique, mais de façon assez imprévisible et très ponctuelle : cas des chenilles défoliatrices des feuillus.
L'arrêté du 5 mars 2004, précise dans son article 1 : « on entend par traitement aérien toute utilisation au moyen d'aéronefs de produits mentionnés à l'article L 253-1 du code rural à des fins de protection des végétaux ». Il apparaît donc nécessaire de clarifier juridiquement le statut des traitements contre les chenilles processionnaires réalisé pour des motifs de santé publique, ainsi que leur suivi administratif. Ces traitements devraient être pris en compte dans le cadre de la réglementation s'appliquant aux biocides, et non pas à celle relative aux produits phytopharmaceutiques.
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