Mise en place de l'inspection du travail maritime.

BARADUC, Bruno ; HAMON, Jean-Marc ; SIMON-ROVETTO, Marie-Françoise

Auteur moral
France. Conseil général des ponts et chaussées ; France. Inspection générale des services des affaires maritimes
Auteur secondaire
Résumé
Le rapport examine les conditions dans lesquelles l'inspection du travail maritime (ITM), instituée par la loi n°96-151 du 26 février 1996 relative aux transports, peut être réorganisée pour trouver une dynamique nouvelle. Parmi les pistes d'évolution possibles, l'option retenue est celle de l'intégration dans le champ de compétence de l'inspection du travail des transports. Le rapport analyse les raisons de l'échec du système actuel qui tiennent à une triple défaillance juridique, budgétaire et méthodologique, et en tire des enseignements pour la mise en oeuvre de la réforme. Il recommande notamment de ne pas la réduire à une simple opération de transfert mais de tenir compte de la conception originelle de l'ITM et de la spécificité du travail à bord des navires. Ses préconisations portent sur la reconnaissance d'une spécialité maritime, notamment par la limitation de l'exercice du contrôle du travail des marins aux agents qui justifieront d'une formation spéciale, et sur l'organisation administrative de la nouvelle spécialité. Au niveau local, celle-ci devra préserver des liens de proximité entre les services et, au niveau central, à renforcer le dispositif d'encadrement par la nomination d'un cadre « référent ».
Editeur
CGPC
Descripteur Urbamet
code ; droit ; organisation du travail ; navigation maritime ; bateau ; sécurité ; mer ; administration publique ; service administratif ; organisation administrative
Descripteur écoplanete
Thème
Administration publique
Texte intégral
CONSEIL GENERAL DES PONTS ET CHAUSSEES INSPECTION GENERALE DES SERVICES DES AFFAIRES MARITIMES Rapport n° 004549-01 MISE EN PLACE DE L'INSPECTION DU TRAVAIL MARITIME Bruno BARADUC IGSAM Jean-Marc HAMON IGSAM Marie-Françoise SIMON-ROVETTO IGE Décembre 2007 1 SOMMAIRE Page Résumé du rapport Introduction I Les raisons d'un échec 1.1 L'inspection du travail maritime : un concept autonome et consensuel 1.2 Un constat d'échec précipité ? 1.3 Trois causes à l'origine de la situation actuelle II La spécificité de la fonction 2.1 Un droit du travail spécifique 2.2 La nature particulière du risque pour le marin et son appréhension 2.3 Un régime de contrôle a priori 2.4 Une vocation internationale de plus en plus affirmée III Un dispositif aménagé au sein de l'ITT 3.1 La reconnaissance d'une spécialité maritime 3.2 Organisation administrative de la nouvelle spécialité 3.3 Un dispositif central d'encadrement 3 5 9 9 11 11 21 21 22 23 23 25 25 27 31 2 Résumé du rapport La présente mission a pour objet d'examiner les conditions de réorganisation de l'inspection du travail maritime (ITM) dont le fonctionnement n'est pas jugé satisfaisant. Parmi les options possibles, c'est celle d'une intégration de la fonction d'inspection du travail maritime dans le champ de compétence de l'inspection du travail des transports qui est retenue et qui donne lieu, depuis quelques semaines, à une première expérimentation locale de rapprochement des services. La mission s'est donc attachée à identifier les conditions dans lesquelles devait se réaliser cette évolution. Elle a d'abord recherché les raisons qui expliquent l'échec du système actuel. Il en ressort une triple défaillance juridique, budgétaire et méthodologique dont il convient de tirer toutes les conséquences dans la mise en oeuvre de la réforme car celle-ci ne saurait se réduire à une simple opération de transfert pour deux raisons principales. -La première tient à la conception originelle de l'inspection du travail maritime. Le dispositif, échappant au droit commun du travail, a été institué au sein de l'administration des affaires maritimes par la loi n°96-151 du 26 février 1996 relative aux transports. Le législateur ne faisait ainsi qu'identifier une fonction d'inspection se fondant, jusqu'alors, dans le bloc des attributions de cette administration qui associent étroitement la sécurité maritime, la santé des gens de mer, la réglementation du travail à bord et les diverses composantes du dialogue social. Comme les services des affaires maritimes seront appelés à conserver d'importantes prérogatives sur ces différentes matières après l'extraction de la fonction d'inspection du travail maritime, une clarification rigoureuse du rôle respectif de ces deux autorités et des modalités de leur nécessaire coopération s'impose. -La seconde résulte de la spécificité persistante du travail à bord des navires. Elle s'exprime d'abord dans l'existence d'un corpus de droit spécial abondant, longtemps considéré comme autonome par rapport au droit commun du travail et par une imbrication des prescriptions sociales avec les prescriptions techniques relatives au navire et à la navigation qui est la réplique, au plan du droit, de l'imbrication des compétences administratives évoquées cidessus. Enfin, les conditions d'intervention des autorités de contrôle revêtent une dimension internationale de plus en plus affirmée qui n'a aucun équivalent dans les autres secteurs d'activité couverts par l'Inspection du travail des transports. Ces considérations militent pour que l'intégration de l'Inspection du travail maritime dans l'Inspection du travail des transports soit subordonnée à des aménagements fonctionnels au sein de ce service et au sein de l'administration des affaires maritimes. -En premier lieu, il est indispensable que les inspecteurs et contrôleurs appelés à exercer leur mission auprès des gens de mer maîtrisent le droit spécial, pratiquent une langue étrangère et aient une connaissance minimale de l'environnement institutionnel et juridique de l'organisation internationale de la sécurité maritime. C'est pourquoi il est recommandé que 3 seuls les agents de contrôle justifiant d'une formation ad hoc dûment validée par l'inspection du travail des transports soient habilités à intervenir dans le secteur maritime. Ces agents exerceraient leur spécialité soit au sein des subdivisions actuelles de l'inspection du travail des transports, à titre exclusif ou dans un champ multisectoriel, soit dans le cadre des structures spécialisées évoquées ci-après. -En deuxième lieu, il est impératif que la logique d'intégration des fonctions d'inspecteur du travail maritime au sein du service de l'inspection du travail des transports ne compromette pas l'opportunité de préserver une articulation étroite entre les services déconcentrés des affaires maritimes qui instruisent notamment les visas d'effectif, les services de santé des gens de mer qui exercent les attributions de médecin du travail pour les marins et les centres de sécurité des navires qui jouent le rôle de pôles de prévention des risques professionnels maritimes. Dans cette perspective, il est proposé de constituer une unité administrative spécialisée au niveau d'un périmètre géographique correspondant à la circonscription de chacune des directions des affaires maritimes dites « de l'article 4 » ou « de façade ». Ces six structures légères constitueraient des services de l'inspection du travail des transports assimilés à des subdivisions maritimes spécialisées et seraient placées sous l'autorité hiérarchique du directeur régional de l'ITT dans le ressort duquel elles seraient géographiquement implantées. Leur vocation serait double : exercer une fonction de référent maritime interrégional pour tous les agents de contrôle en poste dans les subdivisions de droit commun habilités à intervenir dans le secteur maritime et un rôle de relais avec les services des affaires maritimes, en particulier la DRAM 4 de la zone, dans la perspective de constituer avec les services de santé des gens de mer et les centres de sécurité des navires de véritables pôles de compétence locaux en matière de sécurisation et d'amélioration de l'environnement de travail des marins. -En troisième et dernier lieu, un cadre de haut niveau viendrait compléter la structure de direction des services centraux de l'inspection du travail des transports en qualité de référent national. Ce fonctionnaire serait chargé de produire le cadre doctrinal adapté au secteur maritime qui a fait défaut dans l'organisation actuelle de l'inspection du travail maritime, il assurerait la liaison opérationnelle avec la Direction des affaires maritimes et l'Inspection générale des services des affaires maritimes pour effectuer le travail de mise à plat des fonctions respectives de ces services et de l'Inspection et proposerait les modalités d'articulation à établir entre les subdivisions de l'ITT et les services déconcentrés des affaires maritimes au niveau local et entre l'ITT, le bureau du travail maritime et le service de santé des gens de mer au niveau central. * 4 Introduction Par note du 28 Octobre 2005, le directeur du cabinet du ministre de l'équipement, du tourisme et de la mer a demandé au Conseil général des ponts et chaussées de diligenter une mission sur « la mise en place de l'inspection du travail maritime ». Cette mission a été conjointement conduite par Jean-Marc Hamon, inspecteur général des services des affaires maritimes et Marie-Françoise Simon-Rovetto, inspectrice générale de l'équipement, le présent rapport ayant été élaboré par cette dernière, avec la participation de M. Bruno Baraduc, successeur de M. Hamon. Elle est enregistrée sous le n° 2005-0364-01 dans le système de gestion des affaires du CGPC. La commande visait à examiner les conditions dans lesquelles l'inspection du travail des marins du commerce, de la pêche et de la plaisance instituée par la loi n°96-151 du 26 février 1996 relative aux transports, peut être réorganisée pour lui insuffler une dynamique nouvelle alors que son fonctionnement n'est pas jugé satisfaisant. De fait, les postes fonctionnels d'inspection du travail maritime1 ayant été difficilement pourvus par les agents des services des affaires maritimes pour lesquels ils étaient conçus, la pratique s'est développée de leur substituer des contrôleurs et inspecteurs du travail de droit commun placés en position de détachement. Il était donc demandé de rechercher les solutions permettant de positionner de tels agents sans devoir recourir à la procédure du détachement. Ainsi formulée, la démarche implique une modification du dispositif juridique adopté en 1996, car la loi n°96-151 sus-mentionnée a institué pour les navigants des entreprises d'armement maritime une fonction d'inspection du travail entièrement distincte de celle qui est assurée par les agents relevant des deux statuts d'inspecteur et de contrôleur du travail consignés au Livre VI du code du travail. Ce régime autonome place l'inspection du travail maritime dans une situation comparable à celle qui prévaut dans les établissements de l'Etat intéressant la défense nationale ou dans les établissements et ouvrages de production d'énergie. Les spécificités techniques ou l'exigence de confidentialité ont conduit, dans ces secteurs, à ne pas confier les fonctions d'inspection du travail aux fonctionnaires justifiant des statuts d'inspecteur ou de contrôleur du travail, mais à les réserver à du personnel relevant des ministères qui y exercent la tutelle. Toutefois, ce mode d'attribution, qui tend à préférer la maîtrise acquise par divers corps d'encadrement sur leur champ sectoriel d'intervention à un professionnalisme générique de l'inspection du travail est aujourd'hui remis en cause, au profit des seuls agents des deux corps précités qui ont désormais une vocation interministérielle confirmée. C'est ainsi que l'inspection du travail des transports2 et l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricoles3, si elles demeurent des services placés sous l'autorité respective du ministre chargé des transports et du ministre chargé de l'agriculture, ne sont aujourd'hui composées que d'agents relevant des statuts de droit commun d'inspecteur et de contrôleur du travail. Dès lors, l'alternative suivante se présente : 1 2 Ci-après désignée par le sigle ITM Ci-après désignée par le sigle ITT. 3 Ci-après désignée par le sigle ITEPSA 5 1/-soit le régime d'inspection du travail maritime est conservé dans sa spécificité juridique, mais le pourvoi des postes est expressément étendu aux agents des deux corps interministériels régis par le code du travail, ce que ne prévoient pas les textes actuels; 2/-soit la fonction d'inspection du travail maritime est intégrée dans le champ de compétence de ces deux corps interministériels. Dans cette seconde hypothèse, trois options alternatives sont alors envisageables: -Option 1 : la mission d'inspection du travail des marins est dévolue au service d'inspection du travail directement géré par le ministère du travail ; -Option 2 : un service autonome d'inspection du travail maritime est préservé, à l'instar de ce qui existe pour les services d'inspection du travail des transports ou du travail agricole; -Option 3 : la mission d'inspection du travail des marins est attribuée au service de l'inspection du travail des transports. La mission recommande cette troisième option qui correspond à l'hypothèse d'évolution envisagée par la DAM et qui inspire, depuis quelques semaines, une expérience de rapprochement des deux services en haute Normandie. 1- Elle présente en effet l'avantage d'être en concordance avec des orientations générales de la réforme administrative: -elle permet de supprimer une structure administrative dépourvue de la taille critique pour garantir sa viabilité budgétaire et assurer une gestion satisfaisante des carrières de ses membres (ce qui n'assurent ni la solution 1 ni l'option 2 de la solution 2) ; -elle concourt à rapatrier dans le giron des deux corps de contrôle à vocation interministérielle une nouvelle fonction sectorielle d'inspection, conformément au voeu du ministère du travail. 2- Dans le même temps, elle renforce la spécialité dévolue, dans le cadre du statut unique, à l'inspection du travail des transports sur l'ensemble des modes de transports. Soulignons toutefois que l'option 1 de la solution 2 ne serait pas dénuée de pertinence en termes de périmètre de tutelle puisque les services d'inspection du travail placés sous l'autorité directe du ministère du travail ont déjà compétence pour exercer le contrôle du travail des personnels sédentaires des entreprises d'armement maritime et celui des ouvriers dockers des entreprises de manutention portuaire. Retenir l'option 3 de la solution 2 conduit donc à affirmer la compétence de l'ITT sur les activités maritimes et portuaires plutôt que celle de l'inspection du travail de droit commun, ce qui est une démarche concordante avec l'évolution historique de ce service qui n'a cessé, au fil du temps, d'étendre sa vocation à de nouveaux modes de transport, et précisément, dans ses déploiements les plus récents, au profit de secteurs d'activité voisins, les entreprises de navigation fluviale et les établissements portuaires. Rappelons qu'initialement conçue pour le seul contrôle des chemins de fer, elle a reçu progressivement des attributions pour le transport routier, le transport aérien et le travail aéroportuaire4, les remontées mécaniques, le personnel navigant des entreprises de navigation intérieure, puis le personnel sédentaire de ces mêmes entreprises, enfin, en 2000, le personnel des ports autonomes. 4 6 3- De surcroît, s'agissant d'une solution interne, cette option permet au ministère chargé des transports de conserver l'entière maîtrise des aménagements et des adaptations qui seraient nécessaires pour assurer un transfert de compétence réussi. 4- La démarche, enfin, ne contraint pas à engager une lourde procédure d'adoption législative. Il est vrai qu'en l'état actuel du droit, des modifications d'ordre législatif sont à prévoir dans tous les cas de figure : -Dans la solution 1, une modification du paragraphe I de l'article L 742-1-15 du code du travail est nécessaire pour ouvrir les fonctions d'inspecteur du travail maritime aux agents relevant des statuts d'inspecteur et de contrôleur du travail, es-qualité et non plus en vertu de leur détachement sur un poste « relevant du ministère chargé de la mer ». -Dans la solution 2, une abrogation complète de l'article L 742-1-1 s'impose, en même temps qu'une modification de l'article L 611-4 du même code6 relatif aux domaines d'intervention du service de contrôle placé sous l'autorité du ministre chargé des transports, soit, dans l'option 3, pour inclure les entreprises employant des marins dans le champ de compétence du service d'inspection du travail des transports, soit, dans l'option 1, pour inclure ces dernières dans l'exception prévue par le dernier alinéa de cet article, au même titre que les entreprises de manutention. Cependant, cette situation pourrait être rapidement simplifiée, dans la mesure où la recodification en cours du code du travail devrait conduire à reclasser au niveau réglementaire les dispositions législatives instituant l'inspection du travail, au plus tard le 1 er mars 2008, date ultime de ratification de l'ordonnance relative au code du travail7. Le présent rapport a donc pour objet de formuler les propositions d'aménagement des services permettant d'assurer à court terme l'intégration réussie de l'inspection du travail maritime au sein du service d'inspection du travail des transports. Dans cette perspective, il a paru toutefois utile aux missionnaires de reconsidérer au préalable le constat d'échec qui a été dressé du fonctionnement de l'ITM, non pour en contester les conclusions mais pour en analyser les ressorts, de sorte que l'organisation à mettre en place ne rencontre pas de difficultés analogues, susceptibles de reproduire les mêmes effets. Ils ont en outre souligné que la recherche d'une professionnalisation renforcée de la fonction de contrôle du travail maritime, telle qu'elle est attendue dans le cadre de la nouvelle configuration administrative, ne peut se conduire en méconnaissance des contraintes persistantes liées au particularisme de l'organisation du travail maritime. Article L 742-1-1 du code du travail: « I L'inspection du travail maritime est confiée aux inspecteurs et contrôleurs du travail maritime relevant du ministère chargé de la mer. Un décret en Conseil d'Etat fixe la répartition des compétences attribuées au contrôleur du travail, à l'inspecteur du travail, au directeur départemental du travail et de l'emploi et au directeur régional du travail et de l'emploi par le présent code au sein des services déconcentrés du ministère chargé de la mer ». Article L 611-4 du code du travail : « Dans les établissements soumis au contrôle technique des ministères chargés des transports et du tourisme, les attributions des inspecteurs du travail et de la main-d'oeuvre sont confiées aux fonctionnaires relevant de ce département, lesquels sont placés à cet effet sous l'autorité du ministre chargé du travail, sauf en ce qui concerne les entreprises de chemin de fer d'intérêt général, de voies ferrées d'intérêt local, les entreprises de transport publics par véhicules routiers motorisés, les entreprises de transports et de travail aériens et les entreprises autres que les entreprises de construction aéronautique exerçant leur activité sur les aérodromes ouverts à la circulation publique. L'alinéa précédent n'est pas applicable aux entreprises de manutention dans les ports maritimes. » 7 6 5 Ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail. 7 Le rapport comprend ainsi trois parties : -I- Les raisons d'un échec. -II- La spécificité de la fonction de contrôle du travail maritime. -III- Un dispositif aménagé au sein de l`inspection du travail des transports. * 8 I Les raisons d'un échec. 1.1 L'inspection du travail maritime :un concept autonome et consensuel. 1.1.1. L'objectif général de sécurité maritime. L'institution d'une inspection du travail maritime (ITM) participait de l'un des principaux objectifs de la loi n°96-151 du 26 février 1996 relative aux transports, celui de renforcer la sécurité maritime, car la qualité de l'organisation du travail à bord des navires concourt significativement à réduite le risque principal attaché au facteur humain. L'identification d'un contrôle du régime de travail et de la vie des marins en mer faisait ainsi pendant au renforcement du contrôle technique des navires que la même loi confiait aux inspecteurs des affaires maritimes dont le corps avait été crée quatre ans plus tôt. Mais contrairement à cette dernière catégorie d'agents, la fonction d'inspecteur du travail maritime ne fit l'objet d'aucun débat lors des travaux parlementaires. 1.1.2. Un précédent. Ce faisant, l'innovation ne résidait pas dans l'émergence d'une fonction de contrôle du travail car celle-ci préexistait. Un corps spécifique d'« inspecteur du travail et de la navigation maritimes » avait été crée par un décret du 26 mars 1909 et avait exercé des fonctions générales de contrôle jusqu'à sa fusion, en 1992, dans le corps en voie de création des « inspecteurs des affaires maritimes ». Elle s'exprimait plutôt dans l'exigence de mieux identifier, désormais, les fonctions ayant trait au droit du travail au sein du bloc de compétence étendue reconnu traditionnellement à l'administration des affaires maritimes en matière sociale. 1.1.3. Des notions imbriquées, des compétences croisées. L'imbrication des questions sociales dans le corps des attributions polyvalentes dévolues à ses agents est une donnée inhérente à l'organisation de l'administration des affaires maritimes. Sans revenir sur le poids de l'histoire, rappelons que le chef des services déconcentrés dispose de prérogatives exorbitantes du droit commun en matière de travail des marins, héritées de l'ancienne « inscription maritime » qui imposait des sujétions militaires aux marins civils et leur assurait, en contrepartie, le bénéfice du premier régime national de protection sociale8. Par dérogation aux principes généraux de l'organisation administrative, l'autorité maritime cumule, en outre, des attributions normalement dévolues aux services spécialisés de l'Etat pour mettre en oeuvre, pour les gens de mer, les politiques publiques en matière d'emploi, de formation professionnelle, d'action sociale, de négociation collective et de règlement des conflits collectifs du travail. Dans ce cadre, les dispositions réglementaires pertinentes ont non seulement prévu de transférer aux chefs des services des affaires maritimes les fonctions confiées aux chefs des services déconcentrés du ministère du travail mais aussi, formellement, plusieurs des missions assignées aux inspecteurs du travail. 8 Aujourd'hui Etablissement national des invalides de la marine (ENIM). 9 L' évolution historique a donc consacré une solidarité étroite entre fonction de protection et fonction de contrôle. 1.1.4. Les limites de la polyvalence de fonctions. Cependant, si elle maintient la garantie d'une action administrative coordonnée, la concentration au sein d'un même service et, souvent, sur la même personne, de missions assurées dans les autres secteurs d'activité par des autorités distinctes ne va pas sans risque de confusion des genres quand la même autorité est appelée à être à la fois juge et partie, à prendre des actes et à en exercer le contrôle. S'agissant de droit du travail, cette observation, faite au début des années 90, valait également pour l'organisation de l'administration centrale des gens de mer. A Paris, le chef du bureau du travail maritime exerçait, concurremment avec d'autres attributions, les fonctions d'inspecteur du travail pour les navigants appartenant à des armements dont le siège était situé hors du ressort d'un service déconcentré des affaires maritimes. Dans ces circonstances, le fait que le même agent eût à instruire, en tant qu'autorité ministérielle, le recours formé contre une décision qu'il avait lui-même prise, en sa qualité d'inspecteur du travail, ne fut pas qu'un cas d'école... 1.1.5. Une spécialisation non détachable du bloc de compétence des affaires maritimes. La réforme initiée en 1996 avait cependant pour but de distinguer les fonctions d'inspection du travail des autres fonctions exercées par l'administration des affaires maritimes, sans pour autant altérer le bloc de compétence dont cette dernière est investie. Il était ainsi prévu de créer un service départemental d'inspection du travail maritime au sein de chaque direction départementale des affaires maritimes et de placer son responsable sous l'autorité du directeur départemental. L'application d'un schéma d'évolution analogue en administration centrale devait conduire à transférer les attributions d'inspection du travail, jusqu'à lors assurées par le chef du bureau du travail maritime, à un inspecteur du travail maritime chargé d'animer un nouveau bureau de l'inspection placé sous la même autorité que le premier, à savoir la sous-direction des gens de mer. Par conséquent, l'attribution exclusive des fonctions d'inspection du travail maritime à des agents des services des affaires maritimes n'était pas commandée par la seule préoccupation de favoriser l'adhésion des milieux professionnels maritimes à cette nouvelle modalité du contrôle en la réservant à des agents au fait de leurs usages, mais répondait, logiquement, au souci de ne pas fragiliser l'organisation administrative d'ensemble. De ce point de vue, l'identification formelle d'une fonction d'inspection n'était pas conçue comme une disjonction de compétence mais comme une spécialisation interne, à l'instar de ce qui était réalisé dans le domaine connexe de la prévention des risques professionnels. En cette matière, les centres de sécurité des navires avaient reçu des attributions propres, tout en demeurant sous la tutelle hiérarchique du directeur régional des affaires maritimes. 10 1.2 Un constat d'échec précipité ? 1.2.1. L'analyse critique de l'approche retenue en 1996 a été officiellement formulée lors du comité technique paritaire de la DAMGM en janvier 2004. Elle a conduit, à partir du printemps 2004, à suspendre le processus d'affectation d'agents des affaires maritimes et à pourvoir les postes par recrutement externe dans les deux corps interministériels d'inspecteur et de contrôleur du travail. 1.2.2. Or, ce constat sanctionne une période d'application effective particulièrement courte. Ce n'est qu'à partir de l'automne 2001, après qu'ait été publié, le 21 Août de la même année, l'arrêté ministériel fixant l'implantation territoriale du service d'inspection du travail maritime, que la mise en oeuvre de celui-ci a commencé à se concrétiser. A titre d'illustration, l'administrateur des affaires maritimes pré-positionné sur un poste d'inspecteur dans la DDAM du Morbihan en septembre 2000, ne commença à exercer pleinement ses fonctions qu'à compter de mars 2003. Il aura donc fallu plus de cinq ans pour parachever l'élaboration du dispositif réglementaire d'application de la loi du 26 février 1996, quand deux années seulement sont prises en compte, entre l'automne 2001 et l'hiver 2004, pour en apprécier la pertinence. La période écoulée depuis la décision du CTPM n'est guère significative, quant à elle, puisqu'elle s'inscrit dans une perspective de réforme de l'organisation du service, sur le fondement d'une réflexion qui fut immédiatement engagée et que prolonge la présente mission. La décennie d'existence de l'inspection du travail maritime s'analyse, en réalité, comme la succession de trois phases inégales, une longue gestation, une brève expérimentation et la période d'observation actuelle. Pour autant, ces considérations ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions déjà tirées. Mais il a paru utile d'exposer les ressorts de cette situation afin d'éviter qu'elle ne se reproduise, la prise en charge de la fonction d'inspection du travail maritime par le service de l'ITT ne suffisant pas, par elle-même, à garantir son bon fonctionnement à l'avenir si elle n'est pas assortie des mesures d'accompagnement adaptées. 1.3 Trois causes à l'origine de la situation actuelle. Le défaut d'attractivité des postes offerts et l'impréparation des agents des affaires maritimes à remplir les fonctions d'inspection du travail maritime ont été mis en avant, non sans quelques raisons. Toutefois, ces éléments nous paraissent être davantage la conséquence d'un état de fait que la cause profonde de l'insuccès de la démarche engagée en 1996. Celui-ci serait plus imputable à la combinaison de trois facteurs qui mettent en évidence une insuffisance du dispositif sur trois plans: 11 - au plan juridique, un vice de conception ; - au plan budgétaire, une exceptionnelle volatilité ; - au plan de l'organisation, un déficit d'identité et d'encadrement. 1.3.1. Un vice de conception du dispositif légal. Il a pour effet de ne pas définir avec la précision et la rigueur nécessaires le rôle et le champ de compétence attribués à l'inspecteur du travail maritime. 1.3.1.1 La loi du 26 février 1996 est succincte. La notion d'inspection introduite par la loi n'est pas définie comme un service, la détermination de ses missions est renvoyée à des dispositions réglementaires et les agents qui exercent la fonction ne sont pas identifiés par un titre leur conférant la base d'un statut. Durant dix années, la qualité d' « inspecteur du travail » ou de« contrôleur du travail » n'était pas expressément retenue, jusqu'à ce qu'intervienne la loi n°2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports dont l'article 45 a rehaussé au rang de normes législatives les dispositions fixant leurs prérogatives, comme dans le droit commun9. Les dispositions de la loi de 1996 assurant le transfert de compétence ne sont pas plus affinées. S'il est prévu de substituer à la mention « d'autorité maritime », (c'est-à-dire le chef du service local des affaires maritimes) figurant dans le code du travail maritime, celle d'« autorité chargée de l'inspection du travail maritime », la mesure, qui conduit à modifier 17 articles de ce code, n'est accompagnée d'aucune disposition de principe permettant de fonder un partage clair des activités respectives de ces autorités pour assurer l'application de la législation. Certes, il est prévu de renvoyer à un décret d'application la répartition des compétences, mais le texte en question ne s'intéressera qu'à l'articulation à établir entre les services des affaires maritimes et les services déconcentrés du travail et de l'emploi relevant du ministère du travail et portera sur la mise en oeuvre des politiques publiques en faveur de l'emploi, non sur le suivi du régime de travail des marins. 1.3.1.2 Le décret d'application de la loi n'a pas non plus levé toutes les ambiguïtés initiales. Sans doute, le décret n° 99-489 du 7 juin 1999 pris pour l'application de la loi du 26 février 1996 identifie-t-il bien l'inspection du travail maritime comme un « service » composé d'«inspecteurs » et de « contrôleurs » auxquels sont dévolues des fonctions définies par analogie avec celles attribuées aux inspecteurs et contrôleurs du travail en vertu du livre VI du code du travail. La logique du transfert de compétence est également respectée, l'article 2 du décret du 7 juin 1999 prévoyant que dans tous les textes réglementaires relatifs au régime de travail des marins, les attributions du directeur départemental ou interdépartemental des affaires maritimes sont confiées à l'inspecteur du travail maritime « lorsque ces textes concernent des missions relevant de cet agent ». Corollaire de cette disposition, un inspecteur du travail maritime est affecté au« bureau chargé de l'inspection maritime » pour y exercer tous les pouvoirs d'inspection que les textes confiaient, jusqu'à lors, au chef du bureau du travail maritime. 9 Une situation désormais remise en cause, dans le cadre des travaux de recodification du code du travail, comme cela a été indiqué dans l'introduction. 12 Pour autant, plusieurs éléments de ces dispositions réglementaires concourent à restreindre la portée réelle de l'institution qu'elles ont vocation à édifier. S'il est vrai que le décret prévoit d'investir l'inspecteur du travail maritime d'une mission générale visant à faire respecter la législation du travail et à constater les infractions en des termes comparables à ceux qui fondent la compétence des inspecteurs du travail de droit commun, force est de constater que la seule référence explicite au code du travail vise les obligations et prérogatives des inspecteurs, non leurs attributions. On remarque, en particulier, que l'inspecteur du travail maritime n'a pas reçu, sous l'empire du décret du 7 juin 1999, de compétence en ce qui concerne l'application des conventions et accords collectifs de travail ou la répression du travail clandestin. La lacune a été comblée, s'agissant de la répression du travail clandestin, par la loi précitée du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports. Le paragraphe V de l'article 46 de ce texte ajoute ainsi les inspecteurs et contrôleurs du travail maritime à la liste des agents habilités à constater les infractions au travail dissimulé qui est fixée par l'article L 324-12 du code du travail. Jusqu'à cette intervention législative, les agents chargés des fonctions d'ITM pouvaient intervenir en la matière, non pas en raison de leur fonction d'inspecteur ou de contrôleur du travail maritime, mais en vertu de leur appartenance statutaire, soit qu'ils relevaient de l'un des deux corps interministériels d'inspection, soit qu'ils entraient dans la catégorie des « officiers et agents assermentés des affaires maritimes ». Ces agents avaient en effet été ajoutés à la liste des personnels habilités fixée par l'article L 324-12 du code du travail, par une loi de 1991 qui ne fut pas actualisée lors de la création de l'inspection du travail maritime. Cette omission n'était sans doute pas involontaire mais procédait d'une logique interne qui n'envisageait pas, alors, que les agents « relevant du ministère chargé de la mer » mentionnés par la loi n° 96-151 puissent être des personnels autres que ceux des corps civils et militaires des affaires maritimes. Au reste, cette dernière explication semble devoir être la seule qui permette de justifier que, contrairement au droit commun de l'inspection du travail, l'exercice de la fonction d'ITM n'ait pas été formellement subordonné à une assermentation préalable de ses représentants, puisque les agents issus des corps des affaires maritimes qui étaient, a priori, les seuls concernés, étaient déjà assujettis à cette obligation en vertu de leurs statuts respectifs. 1.3.1.3 Au delà de ces éléments de définition, la conciliation des différents objectifs poursuivis par les dispositions du décret du 7 juin 1999 paraît génératrice de confusion. L'adoption tardive du règlement d'application de la loi de 1996 est intervenue dans un contexte marqué par la mise en place de la nouvelle organisation territoriale de l'administration des affaires maritimes, sur le fondement du décret n°97-156 du 19 février 1997. Ce dernier texte reconfigurait fortement la structure administrative déconcentrée du service en établissant une construction hiérarchique et un périmètre de compétence selon trois échelons territoriaux : les directions départementales ou interdépartementales des affaires maritimes (DDAM), les directions régionales des affaires maritimes, dites de l'article 3 (DRAM 3) et les directions régionales des affaires maritimes à ressort élargi, dites de l'article 4 (DRAM 4). 13 Comme l'atteste le contenu du décret du 7 juin 1999, qui traite à la fois de l'inspection du travail maritime et de la répartition des compétences entre les différents niveaux de services déconcentrés des affaires maritimes, le déploiement du concept d'inspection introduit par le législateur en 1996 a été reconsidéré à l'aune de ce nouveau cadre organisationnel, de manière à ne pas remettre en cause l'équilibre des attributions qui y était réalisé, la répartition des compétences fixée par le décret du 19 février 1997 ne s'inscrivant manifestement pas dans la perspective ouverte par la loi n° 96-151du 26 février 1996. En effet, sa rédaction initiale ignorait l'installation prochaine d'une inspection du travail maritime et reconduisait la situation antérieure. En contradiction avec les dispositions du IV de l'article 23 de la loi n° 96-151, la première formulation de l'article 2-I du décret du 19 février 1997 précisait que « le directeur départemental ou interdépartemental des affaires maritimes exerce les attributions antérieurement attribuées aux chefs de quartier des affaires maritimes ».Cette disposition fut bien modifiée par le décret du 7 juin 1999 qui la compléta de la formule « à l'exception des attributions relevant de l'inspection du travail maritime ». Mais ces ambiguïtés originelles ont concouru durablement à fragiliser la position de l'IAM. 1.3.1.4 Deux exemples illustrent bien cette situation. Le premier, qui concerne le domaine de la négociation collective et des conflits collectifs du travail dont il a été question plus haut, est révélateur de l'imprécision qui entache le domaine de compétence de l'ITM. L'article 3 du décret du 7 juin 1999 attribue sans partage au directeur départemental des affaires maritimes la mission d'assurer « le suivi de la négociation collective entre les organisations syndicales de marins et d'armateurs », tandis que l'article 4 du même texte confirme «les pouvoirs propres conférés par les lois et règlements » au directeur régional « en matière de régime de travail des marins, notamment en matière de règlements des conflits collectifs du travail ». Cette rédactions tirait légitimement les conséquences des dispositions du code du travail qui attribuaient aux services des affaires maritimes les compétences dévolues aux services départementaux et régionaux du travail en matière d'enregistrement des conventions collectives (articles R742-1 à R 742-6), de conciliation (article R742-7) et de médiation (article R 742-7-19), lorsqu'il s'agit de marins. En revanche, elles ne semblaient pas tenir compte du principe général de transfert de la compétence précédemment dévolue aux administrateurs des affaires maritimes en matière d'inspection du travail au profit de la nouvelle ITM, tel que le posait l'article 2 du même décret. Or, à la lumière de ce principe, l'article R 742-22 du code du travail, qui dispose : « les attributions conférées aux inspecteurs du travail par les dispositions du Livre I relatives aux conventions collectives et du Livre V relatives aux conflits du travail sont exercées, pour ce qui concerne le personnel navigant de la marine marchande, par les administrateurs des affaires maritimes » aurait dû faire l'objet d'une nouvelle lecture conduisant à reconnaître à l'ITM des compétences en matière de conventions collectives et de conflits du travail équivalentes à celles dont jouissent les inspecteurs du travail de droit commun, sans pour autant priver l'administrateur des affaires maritimes des attributions énumérées ci-dessus qu'il assure, en sa qualité de chef de service déconcentré, en lieu et place des services locaux du ministère du travail. 14 Ce défaut de redistribution des rôles est préjudiciable à l'ITM : quelle est, dès lors, la portée concrète de cette autre disposition du même article 3 du décret du 7 juin 1999 qui engage le directeur départemental des affaires maritimes à contribuer à la prévention et au règlement des conflits collectifs du travail « en liaison avec l'inspecteur du travail maritime » ? Et quelle peut être la consistance de la mission générale qui est confiée à ce dernier en matière de « relations sociales » ? Paradoxalement, à rebours du processus d'interprétation floue, voire restrictive dénoncé cidessus, la pratique a révélé, au contraire, une extension informelle de prérogatives dénuée de tout fondement légal sur un domaine pourtant particulièrement délicat puisqu'il s'agit de compétence juridictionnelle. Ainsi, sur le champ voisin du règlement des conflits individuels du travail, les inspecteurs du travail maritime en fonction ont pu être sollicités par leur hiérarchie pour mettre en oeuvre le régime spécifique de conciliation institué par le code du travail maritime, en vertu duquel le chef du service des affaires maritimes se voit reconnaître intuitu personae le pouvoir exceptionnel d'engager une procédure de conciliation qui remplace le recours à la juridiction prud'homale. Le second exemple, pris dans le domaine de la prévention des risques professionnels, atteste que la fragilité juridique sur laquelle repose la capacité d'agir de l'inspecteur du travail maritime se double d'une incertitude sur son positionnement fonctionnel dans l'organisation administrative. L'intervention de l'inspecteur du travail maritime en cette matière figure au nombre de ses missions principales mentionnées à l'article 2 du décret du 7 juin 1999. Elle trouve également sa légitimité dans les dispositions de l'article R 742-8-13 du code du travail qui, en application de la règle de transfert de compétence fixée par l'article 2 du décret du 7 juin 1999, restitue à l'ITM les fonctions d'inspection du travail confiées, en 1985, au chef de quartier des affaires maritimes pour les « dispositions auxquelles se réfère le deuxième alinéa de l'article L 742-5 du code du travail ». Pour mémoire, cet alinéa couvre un large champ comprenant les principes généraux de prévention, les obligations de l'employeur en matière de formation et d'information de ses personnels sur la santé et la sécurité, la mise en oeuvre des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les pénalités encourues en cas de non respect des dispositions prescrites ainsi que les modalités d'intervention de l'inspecteur du travail, notamment pour l'engagement des procédures de mise en demeure et de fermeture de l'établissement, cette dernière étant transposée en immobilisation des navires. Le décret du 7 juin 1999 a mal exploité ce capital juridique. Si, au niveau départemental, l'articulation entre les attributions du directeur des affaires maritimes et celles de l'inspecteur du travail maritime est clairement formalisée par le paragraphe II de l'article 3 du même texte, il n'en va pas de même, au niveau régional, pour ce qui concerne le positionnement de l'ITM par rapport au pôle central de prévention des risques professionnels maritimes que constitue, en région, le centre de sécurité des navires. Le paragraphe 2 de l'article 5 du décret de 1999 investit ainsi le chef du centre, sous l'autorité du DRAM 4, d'une mission générale de « coordination, d'animation et de contrôle » de la prévention et lui confère, dans ce cadre, « qualité pour constater les infractions aux dispositions relatives au régime de travail des marins à bord des navires ». 15 La formule, là encore, procède d'une suite logique, compte-tenu de l'évidente interdépendance entre la norme de sécurité technique et les éléments déterminant l'environnement de travail et de vie des marins à bord des navires. Elle a constamment justifié la définition d'une approche juridique spécifique, consacrée par les lois successives sur la sauvegarde de la vie en mer et l'habitabilité à bord des navires. Il n'était donc pas critiquable que le décret de 1999 précise :« dans la mise en oeuvre des actions d'inspection de la sécurité des navires, le centre de sécurité contribue notamment à la prévention des risques professionnels, à l'amélioration des conditions de travail, d'hygiène et de vie des marins à bord des navires ». Ces dispositions étaient pleinement concordantes avec celles introduites à l'article L 742-1 du code du travail par la loi du 26 février 1996, en vertu desquelles les officiers et agents civils assermentés des affaires maritimes étaient investis d'une compétence générale pour constater les infractions à l'ensemble des textes relatifs au régime de travail des marins. En revanche, l'asymétrie des situations qui en découle au détriment de l'inspecteur du travail maritime est plus surprenante car dans le cadre de cette compétence générale, aucune attribution précise ou exclusive n'a été réservée à l'ITM. Le « concours » que le chef de centre de sécurité des navires est chargé de lui apporter ne s'apparente pas à une collaboration active mais consiste en une modalité d'information unilatérale. Il lui adresse « copie des procès-verbaux d'infractions et des relevés d'observations établis par lui ou les agents placés sous son autorité à l'encontre des armateurs en matière de régime du travail des marins à bord (...)ainsi que toute information relative à l'application des règles de droit du travail à bord des navires qu'il contrôle ». Quelle peut être, dans ces conditions, la valeur ajoutée de l'intervention de l'inspecteur ou du contrôleur du travail maritime par rapport aux tâches de contrôle statutairement confiées aux inspecteurs et contrôleurs des affaires maritimes? On souligne, à cet égard, que la participation de l'inspecteur du travail maritime aux visites annuelles de sécurité des navires n'a pas non plus été expressément prévue par les textes, alors qu'elle l'est pour le médecin des gens de mer. On constate également que, contrairement à l'organisation prévue par le livre VI du code du travail entre l'inspection du travail et la médecine du travail, aucune relation formalisée n'a été définie entre les services locaux d'inspection du travail maritime et les médecins des gens de mer. Les témoignages recueillis durant la mission confirment la difficulté rencontrée par les inspecteurs et contrôleurs du travail maritime pour trouver leur place dans cette fonction majeure qu'est, pour l'administration des affaires maritimes, la prévention et le renforcement de la sécurité maritime. Il nous fut rapporté combien la participation de l'inspecteur du travail maritime à l'activité du centre de sécurité des navires a pu susciter la perplexité des parties, en dépit d'une bonne volonté réciproque et comment, par défaut, la question du partage des rôles- quand elle a été abordée- a été traitée suivant une approche pragmatique. Par exemple, en réservant à l'inspecteur du travail maritime un champ d'intervention correspondant aux sujets tels que la prévention des effets de l'amiante, l'emploi de fraiseuses ou la sécurité des ascenseurs, qui sont principalement régis par le droit terrestre de l'hygiène et de la sécurité et demeurent, de ce fait, moins familiers aux agents chargés du contrôle technique des navires. 16 En outre, la légitimité d'intervention de l'inspecteur du travail maritime à bord des navires était si mal assurée en droit que certains chefs de services déconcentrés avaient pris l'initiative d'établir un ordre de mission qui l'autorisait à embarquer sur les moyens nautiques des ULAM pour effectuer en mer des missions relevant de ses fonctions d'inspecteur. L'un d'entre eux tentera, en particulier, de mieux cerner la capacité d'agir de ce fonctionnaire à bord des navires étrangers en précisant : « les agents de contrôle de l'ITM peuvent assister le centre de sécurité des navires en tant qu'expert » (pour contrôler de tels navires). Cette prérogative de l'Etat, essentielle dans la mise en oeuvre du dispositif international du contrôle par l'Etat du port, n'a finalement trouvé à s'appliquer avec une sécurité juridique incontestable, pour ce qui concerne l'inspection du travail maritime, qu'avec l'adoption de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports. 1.3.1.5 Le décret du 7 juin 1999 introduit, enfin, une disposition, sans équivalent dans le droit commun de l'inspection du travail, qui a eu de lourdes conséquences sur la consistance du dispositif. En prévoyant qu'« outre ses attributions principales, l'inspecteur du travail maritime concourt à l'exécution de l'ensemble des missions de la direction départementale ou interdépartementale des affaires maritimes », l'article 2 du décret du 7 juin 1999 répondait à une contrainte budgétaire sévère mais entérinait, du même coup, le principe selon lequel cette fonction d'inspection, au contraire du droit commun, pouvait n'être qu'une activité partielle, en complément d'autres fonctions. Ce faisant, il autorisa l'engagement d'un processus actif d'indifférenciation de la fonction d'inspection au sein du système administratif des affaires maritimes. L'absence de créations de postes ou le non pourvoi des postes alloués précipita cette banalisation puisqu'en l'absence d'un inspecteur du travail maritime et d'un service dédié, les directeurs régionaux des affaires maritimes reçurent instruction, par un arrêté du 10 juillet 2001 publié le 2 Août, de confier aux directeurs départementaux ou interdépartementaux placés sous leur autorité les missions normalement dévolues aux inspecteurs du travail maritime. Si bien qu'après seulement quelques mois d'application effective, la réforme adoptée en 1996 était objectivement vidée de son contenu, la plupart des chefs de services territoriaux continuant à cumuler des attributions que le législateur avait voulu séparer. Une remarque identique s'applique à la situation qui prévalut en administration centrale. Le « bureau chargé de l'inspection du travail maritime » ne fut autre que le bureau existant du travail maritime. Et l'adjoint spécialisé qui fut placé auprès du chef du bureau eut peu le loisir de se consacrer exclusivement aux tâches relevant de l'inspection, compte tenu de la contraction des effectifs qui affecta alors cette unité administrative. 1.3.2. Une volatilité budgétaire exceptionnelle. La contrainte budgétaire est inhérente à l'action administrative mais l'instabilité des crédits consentis pour mette en place le dispositif a enregistré une vigueur exceptionnelle. 17 1.3.2.1 Les restrictions de nature juridique. L'arrêté du 10 juillet 2001 précité est révélateur de la difficulté à laquelle s'est heurtée l'administration des gens de mer pour réserver l'allocation de postes budgétaires à l'exercice de la fonction d'inspection du travail maritime. Un second arrêté, pris le même jour et publié le 21 Août 2001, consacre le recadrage opéré en deux ans par rapport au projet initial. Alors que le décret du 7 juin 1999 prévoyait, en vertu de son article premier, la création d'un service d'inspection du travail maritime dans chaque direction départementale ou interdépartementale des affaires maritimes, l'arrêté du 21 Août 2001 fixa une organisation territoriale fondée sur la circonscription régionale, le service implanté au siège des DRAM pouvant être secondé par des antennes locales. 13 services étaient ainsi répartis sur le territoire, à raison de : - 9 dans les régions littorales métropolitaines, - 3 dans les régions d'outre-mer, - 1 au siège de l'administration centrale à Paris, recevant une compétence géographique pour l'ensemble des départements non littoraux. Ils prenaient appui sur 9 antennes locales implantées dans les ports de Dieppe, Cherbourg, Saint-Brieuc, Brest, Les Sables d'Olonne, Bayonne, Toulon, Ajaccio et Cayenne. Au total, 22 implantations étaient identifiées, pour un nombre de postes estimé entre 25 et 30. Le présent rapport ne porte pas d'appréciation négative sur un tel chiffre. Les dispositions rappelées ci-dessus n'ont d'autre visée que de mettre en évidence le fait que l'assiette du service d'inspection du travail maritime fut révisée à la baisse par rapport à sa conception initiale, avant même sa mise en place effective. 1.3.2.2 Les restrictions de nature financière. En outre, le calibrage financier issu de cette première régulation d'ordre juridique ne fut jamais respecté. Ce qui est évoqué, ici, ne traduit pas une montée en puissance du dispositif qui aurait été trop poussive mais rappelle la réalité d'un processus budgétaire qui a conduit à le remettre radicalement en cause. Le comité interministériel de la mer du 27 juin 2000 avait confirmé le dimensionnement du service de l'inspection du travail maritime à 30 emplois, et fixé sa composition à raison de 12 postes d'inspecteurs et 18 postes de contrôleurs. Dans ce cadrage, en vue d'assurer le démarrage du dispositif, la loi de finances initiale pour l'exercice 2001 validait la création de 15 emplois de catégorie A (2 postes d'administrateurs des affaires maritimes et 13 postes d'inspecteurs des affaires maritimes) et de 6 emplois de catégorie B. Cibler ces emplois destinés à constituer une première vague de postes n'a manifestement pas suffi à sanctuariser la dotation au profit de la fonction d'inspection du travail maritime. L'émergence d'autres priorités intéressant les mêmes catégories de personnel a conduit à réaffecter successivement une partie de ces postes au contrôle technique des navires et aux lycées maritimes. Le tableau ci-dessous, qui retrace l'évolution du nombre de postes correspondant à l'affectation territoriale des agents de contrôle de l'ITM, montre que les effectifs ont été stabilisés à un niveau constamment inférieur au tiers du nombre prévu par la décision 18 interministérielle de 2000 et égal seulement à la moitié de la première vague de créations de postes arrêtée en 2001. Evolution du nombre et de l'implantation des postes dédiées au service de l'ITM Services d'ITM Boulogne Le Havre Rennes-St-Brieuc Lorient Nantes Bordeaux Marseille Nice Total ITM Total CTM Total général 2001 1 CTM 1 ITM 1 CTM 1 ITM 1 ITM 1 CTM / 1 ITM 1 CTM 1 ITM 5 4 9 2002 1 CTM 1 ITM 1 CTM 1 CTM 1 ITM 1 ITM 1 CTM / 1 ITM 1 CTM / 4 5 9 2003 1 CTM 1 ITM 1 CTM 1 CTM 1 ITM 1 ITM 1 CTM / 1 ITM 1 CTM / 4 5 9 2004 1 CTM 1 ITM 1 CTM 1 CTM 1 ITM 1 ITM 1 CTM / 1 ITM / 4 4 8 2005 1 CTM 1 ITM 1 CTM 1 CTM 1 ITM 1 ITM 1 CTM / 1 ITM / 4 4 8 2006 1 CTM 1 CTM 1 CTM 1 CTM 1 ITM 1 CTM 1 ITM 1 ITM / 3 5 8 2007 1 ITM 1 ITM 1 CTM 1 ITM 1 CTM / 1 ITM 1 CTM 1 ITM 1 ITM / 6 3 9 La situation en administration centrale a suivi une évolution comparable: le bureau GM3, qui cumule les missions que la réforme confiait initialement à deux bureaux distincts a vu ses effectifs passer de 11 à 4 agents.10. 1.3.2.3 Les effets sur l'attractivité de la fonction. On ne peut ignorer les effets négatifs induits par cette situation budgétaire sur l'attractivité de la nouvelle fonction d'inspection du travail maritime. L'incertitude pesant sur la réalité de la programmation des postes et son instabilité en cours d'exercice ont joué un rôle dissuasif pour les éventuels candidats dans le cadre des premières affectations ou des mutations. Cet élément s'est conjugué avec la difficulté de faire coïncider la vacance de poste et la disponibilité du candidat, inhérente à toutes les structures de taille exiguë. De plus, les restrictions à répétition ont, de l'avis des responsables rencontrés, alimenté la suspicion et le scepticisme des chefs de service territoriaux qui ont craint de devoir prélever sur leur dotation d'effectifs déjà tendue les ressources nécessaires pour individualiser une fonction qu'ils estimaient déjà remplir et ce, au détriment d'autres postes de charge. La possibilité offerte aux DRAM, par l'arrêté du 10 juillet 2001, de déléguer aux DDAM les fonctions d'inspection, outre qu'elle permettait d'éviter de tels prélèvement, ne contribua pas à encourager la vocation des cadres des affaires maritimes ayant de l'appétence pour le droit social à briguer des fonctions qu'en tout état de cause, ils pouvaient continuer à exercer dans le cadre d`autres responsabilités. 10 dont 3 cadres de catégorie A. 19 1.3.3. Un déficit d'identité et d'encadrement. 1.3.3.1 L'institution de l'ITM est restée peu visible. Il a été observé, plus haut, combien l'individualisation de la fonction est demeurée minoritaire dans les services locaux des affaires maritimes. Mais il faut également souligner que cette individualisation s'est portée sur une personne physique, non sur une unité fonctionnelle. A l'exception de la DRAM de Nantes, les autres services pourvus n'ont pas bénéficié ou n'ont bénéficié qu'à titre temporaire de l'apport simultané de deux agents chargés de l'inspection, si bien qu'il n'y a pas eu constitution d'équipes ni création à proprement parler de « service » de l'ITM, en contradiction avec l'esprit et la lettre du décret du 7 juin 1999. Cette situation n'a pas favorisé l'allocation de moyens financiers ou matériels dédiés qui auraient permis à l'ITM de prendre des initiatives pour se faire mieux connaître, mais aussi, par exemple, pour parfaire sa documentation technique, animer son réseau interne, participer à des actions conjointes avec d'autres services d'inspection ou financer des tournées d'information ou de contrôle. Elle n'a pas non plus permis de lever une autre imprécision du dispositif légal constitutif de l'ITM : contrairement à ce qui existe dans l'inspection du travail de droit commun, le rôle et les prérogatives respectifs des inspecteurs, qui relèvent de la catégorie A et des contrôleurs, qui relèvent de la catégorie B, n'ont pas été précisés. Il est patent qu'une telle indifférenciation a aussi concouru à affaiblir le positionnement hiérarchique de l'inspecteur et l'attractivité de la fonction pour les personnels d'encadrement supérieur. Le défaut de visibilité ne se constate pas seulement dans l'organisation interne de l'administration déconcentrée des affaires maritimes. On observe que les décrets successifs d'attribution des ministres ou secrétaires d'Etat en charge du domaine des transports, s'ils font systématiquement référence à l'inspection du travail des transports au nombre des inspections générales mises à la disposition de l'autorité ministérielle, ne mentionnent jamais le service de l'ITM, qui constitue pourtant aujourd'hui, avec l'ITT, la seconde inspection du travail spécialisée relevant de ce ministère. 1.3.3.2. Un manque de doctrine et de programmation de l'action. Les incertitudes organisationnelles et juridiques de la fonction d'ITM n'ont pas été compensées par un encadrement doctrinal soutenu dans la durée. L'effort de formation et la diffusion de fiches techniques ont été irréguliers, au gré des disponibilités budgétaires, et l'animation nationale du service limitée, du fait que le nouveau bureau d'administration centrale qui devait assurer cette mission n'a pas vu le jour. Sur le terrain, à l'image de ce qui a déjà été noté concernant le positionnement de l'inspecteur du travail maritime dans les centres de sécurité des navires, le rôle de l'inspecteur ou du contrôleur présent au sein de la structure administrative locale a été défini non par référence à un cadre de prérogatives ou d'activités national précis, mais par une simple lettre de mission, déterminant un champ d'attribution variable, à la discrétion de chaque chef de service. 20 II La spécificité de la fonction. Ce n'est céder ni à la nostalgie ni à la force de la formule de Platon (« il n'y a que trois sortes d'êtres: les vivants, les morts et ceux qui vont sur mer »), que de souligner la contrainte que représente le particularisme maritime pour recomposer, demain, une inspection du travail maritime efficace. Nos interlocuteurs ont souvent insisté sur l'originalité sociologique du milieu, surtout dans le secteur des pêches, pour rappeler la nécessité d'une démarche de contrôle qui lui soit adaptée, sauf à susciter de violents rejets. La défiance ancestrale vis à vis des actions de contrôle se trouve en effet avivée, aujourd'hui, par les rigueurs de la politique communautaire de restriction de l'effort de pêche, et ce, alors que toute une fraction de la population maritime continue de considérer le risque comme valorisant, réservant un accueil réservé, souvent goguenard et parfois même hostile aux démarches de précaution. On ne reviendra pas ci-après sur ces considérations qui sont bien connues et qui méritent assurément d'être prises en compte pour définir le profil souhaitable, autant psychologique que professionnel, des agents chargés du contrôle et leur offrir les éléments de formation et de méthodologie appropriés. Sont évoquées, en revanche, les questions qui ont un impact direct sur les conditions d'organisation de la fonction d'inspection du travail maritime au sein de l'ITT. 2.1 Un droit du travail spécifique. La spécificité du travail maritime s'apprécie d'emblée dans le droit qui lui est applicable, avec l'existence d'un système juridique qui fut longtemps considéré comme autonome par rapport au droit du travail terrestre, qui trouve place, notamment, dans deux codes spéciaux, le « code du travail maritime » et le « code disciplinaire et pénal de la marine marchande » et qui se nourrit toujours de normes juridiques internationales particulières. C'est pourquoi, si, aujourd'hui, l'articulation juridique avec le droit commun du travail se conforte et se précise, l'affirmation d'un corps de droit original ne se dément pas. Ainsi, dans le cadre des travaux de recodification qu'il a engagés, le ministère du travail a souhaité que les dispositions relatives aux marins actuellement consignées dans le code du travail soient intégralement transférées dans le code des transports en cours d' élaboration. Les inspecteurs et contrôleurs du travail des transports sont rompus à une adaptation permanente aux divers secteurs d'activité dont ils ont la charge. Pour autant, aucun des secteurs entrant dans leur champ de compétence ne présente un corps de droit aussi différent de la législation commune du travail. La maîtrise de ce droit spécial implique un investissement personnel qui requiert la durée et une pratique dense. Or, cette logique de spécialisation ne se rencontre au sein de l'ITT que pour la minorité des inspecteurs en charge des « sites » aéroportuaires, tandis que 80% des interventions du service sont réalisés dans le transport routier. 21 2.2 La nature particulière du risque pour le marin et son appréhension. Le navire constitue un environnement technique spécial omniprésent pendant toute la phase d'exécution du contrat de travail maritime. 2.2.1. La sécurité du marin ne se limite pas à la sécurité du navire mais elle est fondamentalement conditionnée par celle-ci. De ce fait, jusqu'à une date récente, le dispositif d'hygiène et de sécurité applicable aux marins reposait exclusivement sur la loi fondant le régime de sécurité des navires, en l'espèce la loi n° 83-581 du 5 juillet 1983 sur « la sauvegarde de la vie humaine en mer, l'habitabilité à bord des navires et la prévention de la pollution » et sur l'abondante réglementation technique qui en découle. En outre, la sécurité du marin à bord d'un navire ne se limite pas aux conditions de son travail puisque le navire est également son lieu de vie. 2.2.2. Un risque individualisé. Alors que le transport aérien et le transport terrestre s'opèrent, pour l'essentiel, sur des véhicules standardisés faisant l'objet d'approbations de séries et sont, dès lors, porteurs de risques pour les salariés qui peuvent être identifiés et prévenus par des mesures de portée générale, dans le transport maritime et plus encore à la pêche, la construction de série est l'exception. Chaque navire est un cas particulier dont les caractéristiques peuvent en outre évoluer au fil des réparations et des transformations. Le risque professionnel devient ainsi pour une part spécifique à chaque navire, ce qui légitime la compétence attribuée en cette matière aux centres de sécurité des navires, dès l'examen de la conception des projets de construction. 2.2.3. Un régime autonome de médecine de prévention La médecine des gens de mer n'est pas seulement chargée d'apprécier l'aptitude physique du marin qui conditionne son accès à la profession et ensuite son maintien dans celle-ci. Bénéficiant d'une compétence générale dans le secteur, ce qui permet à ses membres de monter à bord des navires et de siéger, de droit, dans les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail des entreprises d'armement maritime, le service de santé des gens de mer exerce désormais toutes les prérogatives d'une médecine de prévention dans le cadre de l'application aux marins de la directive CE 89/391 relative à la sécurité du travailleur au travail. Mais à la différence de l'organisation de droit commun de la médecine du travail, ce dispositif, articulé avec le régime spécial de sécurité sociale qu'est l'ENIM, est placé sous l'autorité directe de l'administration des affaires maritimes, la profession n'intervenant pas dans son financement. Ces considérations déterminent une action du contrôle qui diffère sensiblement de celle du droit terrestre. Non seulement les prérogatives des agents en matière de contrôle des conditions de travail des marins sont insérées dans des compétences administratives générales et, de ce fait, partagées par la quasi totalité des catégories d'agents des affaires maritimes11, 11 A savoir, les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique des affaires maritimes, les inspecteurs et contrôleurs des affaires maritimes, les syndics des gens de mer. Seule exception, les professeurs de 22 mais l'intervention des différents acteurs, tout au long de la chaîne du contrôle, demeure sous la tutelle directe de la même administration. L'« osmose » constatée entre le contrôle technique et le contrôle social, inhérente à l'action de l'administration des affaires maritimes, doit être prise en compte avec la plus grande précaution dès lors qu'une fonction individualisée d'inspection du travail maritime sera attribuée à un service indépendant de cette administration. 2.3 Un régime de contrôle a priori. Un rôle d'équipage ne peut être délivré qu'après que l'administration des affaires maritimes se soit assurée que l'équipage est conforme à une « décision d'effectif » qui détermine le nombre de personnes présentes à bord et leurs qualifications requises pour tenir compte des caractéristiques du navire, de la nature de la traversée et respecter la durée légale du travail. A cette occasion, un contrôle général des conditions d'engagement du marin est effectué par l'administration des affaires maritimes qui vérifie, notamment, les formes et clauses du contrat d'engagement maritime et l'application des dispositions conventionnelles pertinentes. Cette particularité tient à ce qu'il est trop tard de s'interroger sur les conséquences pour la sécurité individuelle et collective des défauts de qualification de l'équipage ou des déficiences de l'organisation du travail à bord, une fois que le navire a pris la mer, la possibilité de faire cesser le danger par une immobilisation du navire n'étant pas immédiate, comme dans le contrôle des transports terrestres, mais nécessairement différée au port de touchée ou de destination. C'est pourquoi la composition du personnel en nombre et en qualité intervient préalablement à l'exploitation, les conditions de l'engagement sont obligatoirement connues au moment de l'embarquement et la conformité de l'équipage à la décision d'effectif qui en résulte est vérifiée à l'occasion des mouvements du rôle. Ce mode de contrôle préalable qui s'apparente à une mission de police (ne parle-t-on pas de « police du rôle d'équipage » ?) et qui s'inscrit dans une conception historique plaçant l'intervention de l'administration des affaires maritimes au coeur de la relation contractuelle unissant le marin à son employeur, n'exclut pas une action d'inspection a posteriori conforme à la démarche classique du contrôle en entreprise effectué par l'inspection du travail à terre. Il implique toutefois la construction d'une articulation fonctionnelle solide entre le service des affaires maritimes qui instruit les décisions d'effectifs en se référant au prescriptions du droit social autant qu'à la norme technique et les agents statutaires investis des missions d'inspection du travail des marins. 2.4 Une vocation internationale de plus en plus affirmée. On a mentionné, plus haut, les incertitudes juridiques qui ont pesé sur la capacité de l'inspecteur et du contrôleur du travail maritime à intervenir à bord de navires étrangers jusqu'à l'adoption de la loi n° 2006-1012. l'enseignement technique maritime. 12 Loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports. 23 Il faut cependant insister sur le fait que cet apport législatif ne vise pas seulement à mieux préciser les prérogatives des agents de l'ITM en ce domaine mais sert, surtout, à préparer le déploiement futur de la capacité de contrôle des autorités françaises dans un cadre international. 2.4.1 Les prérogatives reconnues à « l'Etat du port ». La démarche s'inscrit, d'abord, dans le cadre juridique du rôle en pleine expansion reconnu à « l'Etat du port », en regard de celui reconnu traditionnellement à « l'Etat du pavillon », pour conduire aux plans international et communautaire la lutte contre les navires « sous normes ». La communauté internationale s'est dotée, de longue date, d'instruments conventionnels ou d'arrangements administratifs permettant aux autorités de l'Etat dans le port duquel se trouve un navire étranger de vérifier sa conformité à des normes établies par des textes internationaux pertinents, même si l'Etat dont ce navire bat le pavillon n'a pas ratifié ces derniers. 2.4.2. Vers l'application d'un système de contrôle international. Dépassant largement cette portée initiale, la démarche anticipe, désormais, la mise en place prochaine d'un système mondial de contrôle de la norme sociale applicable aux équipages des navires. Alors que le dispositif de prévention des accidents maritimes et de la pollution marine revêt un caractère essentiellement technique, dans lequel la prise en compte d'exigences sociales demeure largement subordonnée à leur incidence sur la sécurité des navires, l'Organisation internationale du travail promeut maintenant une norme universelle destinée à garantir un « travail décent » aux marins et des conditions de concurrence plus saines pour les exploitants du transport maritime, dans un secteur d'activités qui compte parmi les plus mondialisés qui soient. Déjà, l'OIT avait élaboré, en 1996, la convention n° 178 « concernant l'inspection des conditions de travail et de vie des gens de mer ». Cet instrument, qui remplace une recommandation sur le même sujet datant de 1926, stipule que « l'autorité» centrale » veille à ce que tous les navires immatriculés sur son territoire soient inspectés tous les trois ans au moins par un service d'inspecteurs formés à cet effet13, autorisés à monter à bord des navires nationaux, à procéder à tous examens et contrôles, à exiger qu'il soit mis fin aux carences, et, sous certaines conditions, à interdire aux navires de quitter le port. La convention, entrée en vigueur le 27 avril 2005, est applicable en France depuis la publication du décret n°2005-510 du 11 mai 2005. L'action engagée désormais par l'Organisation Internationale du travail est beaucoup plus ambitieuse car elle établit un panel incompressible de normes sociales qui devient une référence unique et universelle, sous la forme d'un « code du travail maritime mondial» regroupant les dispositions de pas moins de 70 conventions et recommandations traitant des gens de mer14 et elle édifie un véritable système international de contrôle. Dans cette nouvelle approche, elle ne se contente pas de réaffirmer les obligations de contrôle incombant à l'Etat sur les navires battant son pavillon. Elle attribue aussi à ce dernier le pouvoir d'effectuer l'inspection du travail à bord des navires étrangers qui fréquentent les ports de son territoire. Selon la Convention, le service en cause peut être soit entièrement, soit partiellement consacré aux conditions de travail et de vie des gens de mer. 14 Dont la convention n° 178 13 24 Un « certificat de travail maritime » atteste ainsi que le navire a été dûment inspecté par l'Etat du pavillon; il est complété par une « déclaration de conformité » qui permet à l'autorité du pavillon comme à l'autorité du port d'escale étranger d'établir un historique des inspections ultérieures et de prendre connaissance des commentaires et des prescriptions qu'elles ont suscités. En outre, l'Etat sur le territoire duquel une inspection est conduite a le droit d'adresser au directeur général de l'OIT la copie du rapport d'inspection accompagnée, le cas échéant, de la réponse des autorités compétentes de l'Etat du pavillon. Enfin, chaque Etat partie à la convention doit établir une procédure permettant au marin qui se trouve à bord d'un navire étranger à l'escale dans un port relevant de sa juridiction de déposer une plainte en cas d'infraction aux normes conventionnelles. Cette plainte est de nature à déclencher une inspection par l'Etat du port qui est notifiée à l'Etat du pavillon, lequel est invité à présenter un plan de mesures correctives. Et si la plainte n'a pas été réglée, l'autorité du port est en droit de communiquer une copie du rapport établi au directeur général de l'OIT et aux organisations représentatives d'armateurs et de marins susceptibles d'utiliser les moyens de recours à leur disposition. Pour l'heure, ce dispositif ne représente encore qu'un projet de convention dont le texte a été adopté en février 2006 et qui n'entrera en vigueur que lorsqu'il aura été ratifié par un nombre conséquent d'Etats. Il n'en illustre pas moins les particularismes de l'inspection du travail à bord des navires en regard des activités habituelles de l'inspection du travail des transports : prééminence de la norme internationale, compétences concurrentes entre fonction d'inspection du travail et fonction de contrôle du navire, mise en oeuvre contraignante de procédures formalisées avec les administrations étrangères et avec des instances internationales (OIT, Organisation maritime internationale, Mémorandum de Paris, Agence européenne de sécurité maritime), pratique obligatoire d'une langue étrangère, principalement de la langue anglaise. III Un dispositif aménagé au sein de l'ITT 3.1 La reconnaissance d'une spécialité maritime. Les éléments rappelés ci-dessus conduisent à identifier une fonction spécialisée d'inspecteur et de contrôleur pour le travail des gens de mer, au prix d'une adaptation à la marge du service de l'inspection du travail des transports. 3.1.1. Une formation spécifique. La connaissance du droit de travail maritime s'avère indispensable. 25 Elle serait dispensée dans le cadre du « parcours individuel de formation » déjà institué au bénéfice des nouveaux agents de l'ITT et qui paraît tout à fait adapté, selon la présentation qui en est faite sur son site intranet. Elle devrait être au moins équivalente à celle qui est délivrée aujourd'hui aux inspecteurs et contrôleurs des affaires maritimes de l'option administrative en matière de réglementation sociale des marins15. Cependant, cette originalité ne constitue pas le seul élément justifiant la reconnaissance d'une spécialité maritime au sein de l'ITT. Car la maîtrise de la législation et des règles conventionnelles qui régissent le secteur maritime, si elle implique un apprentissage plus conséquent que pour d'autres secteurs professionnels, procède d'une exigence qui est familière au personnel de l'ITT. Dans le cadre de leur vocation générale, les agents des corps interministériels d'inspecteur et de contrôleur du travail sont appelés à intervenir dans des contextes d'activités professionnelles fortement différenciées. Le fait que les missions d'inspection du travail maritime, dans les services centraux comme dans les services déconcentrés du ministère, soient majoritairement assurées, depuis 2004, par des inspecteurs et contrôleurs du travail issus de ces corps atteste d'ailleurs de leur capacité d'adaptation, même si l'on peut objecter que cette dernière a été favorisée par leur immersion au coeur de la structure administrative des affaires maritimes, ce que n'offrira pas la nouvelle configuration. En revanche, la connaissance de la langue anglaise et de l'environnement international dans lequel s'exerce le contrôle des navires étrangers s'apprécie comme une contrainte plus sévère, qui requiert non seulement une formation de base satisfaisante mais aussi une pratique permettant d'en conserver l'acquis. 3.1.2. Des attributions exclusives. Seuls les inspecteurs et contrôleurs ayant suivi avec succès la formation spécifique seraient habilités à exercer leurs prérogatives dans le domaine du travail maritime. Ils pourraient alors intervenir soit dans le seul champ de la spécialité maritime, soit simultanément dans d'autres secteurs La mission considère cependant qu'une pratique régulière dans le secteur maritime est indispensable pour permettre aux agents justifiant de la spécialité maritime d'atteindre la maîtrise professionnelle souhaitée mais aussi d'optimiser l'investissement que représenterait leur formation spécifique. De plus, un suivi attentif du milieu maritime par des acteurs fidélisés serait le meilleur gage que la nouvelle organisation de l'inspection du travail maritime soit bien acceptée par des professionnels habitués à une gestion de proximité. . Pour mémoire, les inspecteurs des affaires maritimes reçoivent, en plus de leur cursus dans un Institut régional d'administration, une formation maritime complémentaire théorique et pratique d'une durée totale de 33 semaines, les contrôleurs des affaires maritimes de 28 semaines. 15 26 3.2 Organisation administrative de la nouvelle spécialité. La formule souple proposée ci-dessus autorise une implantation territoriale modulable de la capacité de contrôle du travail maritime, soit dans le cadre des subdivisions territoriales classiques de l'ITT, soit dans le cadre de structures maritimes spécialisées, comparables aux subdivisions de Roissy et d'Orly dédiées au travail aéroportuaire. 3.2.1 L'intégration dans les structures territoriales existantes de l'ITT. L'organisation territoriale du service est constituée de 96 unités de base polyvalentes, les « subdivisions », placées sous la responsabilité d'un inspecteur du travail, assisté, le plus souvent, par un ou deux contrôleurs et bénéficiant d'un personnel d'assistance et d'appui. Ces unités représentent, avec 393 personnes, 84% de l'effectif de l'Inspection. Elles sont placées sous l'autorité de 22 directeurs régionaux qui assurent leur animation et leur coordination et totalisent, avec leurs équipes, 11% des personnels du service. L'intégration des agents chargés du travail maritime dans cette configuration répond à une logique d'optimisation de gestion et de simplification de l'organisation du service. On souligne, toutefois, la divergence des centres d'intérêts que révèle l'implantation territoriale de chacun des deux services. Comme il apparaît sur le tableau comparatif ci-après, tandis que les subdivisions de l'ITT correspondent, dans chaque région, aux plus grosses agglomérations, la localisation des sièges et antennes locales de l'ITM, telle qu'elle ressort de l'arrêté du 10 juillet 2001, consacre le poids relatif des ports de pêche. Les exemples des régions Bretagne, Poitou-Charentes, et Languedoc-Roussillon sont remarquables à cet égard, avec une seule localisation commune à Saint Brieuc pour la première et aucune pour les deux autres. 27 Localisation des services de l'ITM et de l'ITT Régions16 Siège des services d'ITM Siège des subdivisions d'ITT prévu par l'arrêté du 10-072001 Le Havre (antenne à Dieppe) Le Havre Evreux Rouen Caen St Lo St Brieuc Rennes Vannes Quimper Nantes Angers, Le Mans La Roche sur Yon La Rochelle La Couronne Niort, Poitiers Périgueux, Pau Bordeaux(I et II) Bayonne Nîmes Montpellier, Perpignan Marseille (I à III) Toulon Nice Gap, Avignon Ajaccio Paris (I à III) Melun Versailles, Evry Nanterre (I et II) Rungis, Orly Roissy (I à III) Drancy (I et II) Cergy-Pontoise St Denis Fort de France Pointe à Pitre Cayenne Haute Normandie Basse Normandie Bretagne Caen (antenne à Cherbourg) St Malo (antenne à St Brieuc) Concarneau (antenne à Brest) Lorient Nantes (antenne aux Sables d'Olonne) Marennes Pays de Loire Poitou-Charentes Aquitaine Arcachon (antenne à Bayonne) Sète Marseille (antenne à Toulon) Nice Antenne de Nice à Ajaccio Paris17 Languedoc-Roussillon Provence-Alpes-Côte d'Azur Corse Ile de France Réunion Martinique Guadeloupe Guyane St Denis Fort de France Pointe à Pitre Antenne de Fort de France à Cayenne En outre, si l'intégration au sein des services de l'ITT met fin à l'état d'isolement professionnel que déplorent aujourd'hui les agents en charge de l'ITM, elle n'assure pas 16 17 La région Midi- Pyrénées n'ayant pas de littoral n'est pas prise en compte. Il s'agit du bureau GM3 28 nécessairement, en elle-même, une capacité d'échanges sur la pratique professionnelle en milieu maritime plus satisfaisante que celle de la configuration actuelle. Or, cette capacité d'échanges est indispensable, à la fois pour combler les lacunes de l'encadrement doctrinal constaté et pour garantir une action homogène de la « spécialité ». On ne peut, en effet, écarter le risque d'un isolement sectoriel persistant pour l'agent qui, au sein d'une subdivision, serait le seul à exercer la spécialité maritime. L'expérience montre en effet que les inspecteurs et contrôleurs du travail maritime sont moins en recherche de coopération avec leurs collègues de l'inspection du travail des transports qu'avec leurs homologues du service de l'ITEPSA, lorsque sont concernés des marins des entreprises de pêche ou de cultures marines, et de l'inspection du travail relevant du ministère du travail, lorsque sont concernées les compagnies maritimes de commerce. 3.2.2 La création de structures spécialisées de coordination. Ces considérations militent en faveur de la préservation de structures spécialisées chargées d'exercer un rôle de référent et de coordonnateur auprès des agents exerçant la spécialité maritime dans un segment de littoral donné. En concordance avec la logique de « façade » de l'organisation administrative des affaires maritimes, cette zone d'intervention correspondrait à la circonscription des DRAM 4. Six subdivisions composées exclusivement d'agents titulaires de la spécialité maritime seraient ainsi constituées dans les villes correspondant au siège des DRAM 4 (Le Havre, Rennes, Nantes, Bordeaux, Marseille, Fort-de-France). Conformément au schéma d'organisation de l'ITT, ces subdivisions exerceraient leur activité dans le cadre de la circonscription de la Direction régionale de l'ITT dont le siège est situé dans ces villes, sous l'autorité de leur chef de service Mais elles se verraient également reconnaître, dans un cadre interrégional, une mission d'animation de l'inspection en secteur maritime auprès des agents titulaires de la spécialité implantés dans les subdivisions classiques de l'ITT. A ce titre, elles développeraient toutes les fonctions annexes de conseil et d'appui qui n'ont pu être assurées pour l'ITM : veille juridique et documentaire, élaboration et suivi de statistiques, échange de bonnes pratiques. A ces fonctions qui s'apparentent à celles de têtes de réseaux régionaux, elles ajouteraient une mission de coordination permettant, par exemple, de mobiliser les agents habilités de l'aire géographique d'intervention en vue du déploiement de campagnes de contrôle ciblées ou de missions thématiques communes. Enfin, elles joueraient le rôle d'interface qu'il est impératif d'établir avec les directions régionales des affaires maritimes implantées dans les mêmes villes 3.2.3 Une activité adossée à celle des centres de sécurité des navires. La confusion juridique autant qu'organisationnelle qui existe entre les missions de l'inspection du travail et les missions que continueront à remplir les services des affaires maritimes en matière de réglementation du travail interdit que le transfert des compétences d'une administration à l'autre s'effectue sans précautions préalables, c'est-à-dire sans une explicitation précise de leurs rôles respectifs. Il en va de la crédibilité de l'ITT auprès des populations maritimes comme de la nécessité de ne pas fragiliser l'action que les services locaux des affaires maritimes ont vocation à poursuivre sur des champs connexes. Au plan fonctionnel, cette clarification devra permettre de préciser les circuits d'information à établir entre les deux administrations et les modalités d'alerte. Elle devra également prévoir 29 les conditions dans lesquelles les agents de l'ITT pourront embarquer à bord des navires des affaires maritimes pour procéder à des contrôles en mer. Sur un plan plus stratégique, les compétences en matière de sécurité en mer dévolues aux DRAM 4 dont les attributions élargies comprennent la sauvegarde de la vie humaine en mer, l'habitabilité à bord des navires et la prévention de la pollution, rendent indispensable le maintien d'une liaison étroite entre les agents de spécialité maritime de l'ITT, les services Gens de mer ­ENIM des DDAM et DRAM et, surtout, les instances spécialisées que constituent les services de santé des gens de mer et les centres de sécurité des navires. Aujourd'hui, seize centres de sécurité des navires sont implantés sur le territoire national et regroupés sous l'autorité des chefs de services des DRAM 4, dans le cadre de la logique d'intervention par façade maritime. La recherche d'une synergie entre ces structures clefs de la prévention des risques professionnels maritimes et les actions complémentaires assurées par l'inspection du travail et la médecine des gens de mer apparaît hautement souhaitable car elle permettrait de constituer de véritables pôles régionaux de compétence en matière de sécurisation et d'amélioration de l'environnement de travail des marins, tout en évitant les effets de redondance ou les conflits négatifs de compétence que risquent d'entraîner le chevauchement des attributions de ces trois entités en ce qui concerne l'hygiène et l'habitabilité à bord des navires et, demain, la mise en oeuvre du système de certification sociale qui résultera de l'application du code mondial maritime mentionné au § 2.4.2. Un adossement de l'action des unités maritimes spécialisées de l'ITT à celle des centres de sécurité des navires devrait dès lors être privilégié. Il autoriserait le développement de missions conjointes Inspection du travail des transports/ inspection des affaires maritimes/ médecin des gens de mer à bord des navires à quai ou à la mer. 3.2.4 Préserver des liens de proximité. Le rayonnement que l'on peut attendre de ces unités maritimes spécialisées ne compensera pas complètement l'éloignement géographique qui résultera de la suppression des antennes locales de l'ITM dans les ports ne bénéficiant pas de l'implantation proche d'une subdivision de l'ITT. On souligne, cependant, que la mise en oeuvre de modalités de communication appropriées devrait permettre de compenser la non présence physique permanente d'agents sur le terrain. Dans la ligne déjà ouverte par la loi n° 2005-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports qui prévoit que « le contrat d'engagement (du marin) mentionne l'adresse et le numéro d'appel de l'inspection du travail maritime », les données relatives aux implantations les plus proches des agents de l'ITT titulaires de la spécialité maritime, la composition des subdivisions de l'ITT, la présentation des unités maritimes spécialisées et de leurs missions devraient faire l'objet d'une large diffusion auprès des instances professionnelles concernées et des services déconcentrés de l'Etat intéressés. L'installation de « boîtes aux lettres » ou de bornes électroniques permettant aux usagers de saisir directement l'inspecteur chargé du travail maritime et l'unité maritime spécialisée devrait être réalisée dans les services locaux des affaires maritimes et dans les subdivisions de l'ITT qui ne comprennent pas d'inspecteurs ou de contrôleurs titulaires de la spécialité. 30 3.2.5 En conclusion: Une instruction conjointe IGTT/DAM devrait: 1/ définir avec la précision requise les modifications de compétence induites par la réforme de l'ITM pour les services « gens de mer ­ENIM » des DDAM et DRAM, notamment dans le domaine du suivi des conventions collectives ; des visas d'effectif et de la résolution des conflits individuels ; 2/ arrêter entre les subdivisions de l'ITT et les services locaux des affaires maritimes les modalités pratiques relatives à l'échange d'information, à l'acheminement du contenu des « boîtes aux lettres », à la mise à disposition éventuelle de salles de réunions pour les équipes de l'ITT en mission, aux conditions d'embarquement des inspecteurs et contrôleurs du travail des transports sur les navires de l'administration ; 3/ identifier les modes de coopération entre les directions régionales du travail des transports dont relèveraient les unités spécialisées maritimes, les chefs régionaux ou interrégionaux des médecins des gens de mer dont relèvent les services locaux de santé des marins et les DRAM 4 dont relèvent les centres de sécurité des navires. 3.3 Un dispositif central d'encadrement. Des aménagements inspirés par la même démarche que celle proposée pour les services déconcentrés sont recommandés s'agissant des services centraux. 3.3.1 Un « référent » dans la structure centrale de l'inspection du travail des transports. 3.3.1.1 L'organisation fonctionnelle des services centraux de l'ITT. Actuellement, sous l'autorité de l'inspecteur général du travail des transports, deux contrôleurs généraux exercent des missions d'autorité centrale d'inspection et d'animation des directions régionales, selon une double répartition sectorielle et géographique. Le contrôleur général en charge de la section Nord exerce ainsi son autorité sur les secteurs : -des transports routiers, -des transports urbains, -de la RATP, -de la navigation intérieure, -des autoroutes, -des ordures ménagères -des ports maritimes et fluviaux ET sur les régions : -d'Alsace, -de Bretagne, de Champagne-Ardenne, d'Ile de France, de Lorraine, du Nord-Pas-de-Calais, de Haute et de Basse Normandie, de Picardie, des Pays de Loire et des DOM ; Le contrôleur général en charge de la section Sud exerce son autorité sur les secteurs : -des transports ferroviaires, -des voies ferrées d'intérêt local, 31 -des wagons-lits, -de la restauration ferroviaire, -du transport et du travail aérien, -des bases aériennes -de la manutention aéroportuaire et ferroviaire, -des remontées mécaniques ET sur les régions : d'Aquitaine, d'Auvergne, de Bourgogne, du Centre, de Corse, de Franche-Comté, du Languedoc-Roussillon, de Midi-Pyrénées, du Poitou-Charentes, de Provence-Alpes-Côte-d'Azur et de RhôneAlpes. Jusqu'à présent, les élargissements de compétence successifs de l'inspection du travail des transports ont été effectués sans modifier cette organisation fonctionnelle, même pour des domaines très spécifiques comme la navigation fluviale qui offre un élément de comparaison particulièrement pertinent puisque le secteur inclut le personnel navigant de ces entreprises. Mais à la différence du secteur fluvial qui ne disposait que d'un encadrement administratif modeste avant son intégration dans le champ d'intervention de l`ITT, l'opération de décroisement à réaliser entre la fonction d'inspection du travail maritime et les missions plurielles qui incombent aux services des affaires maritimes est complexe et exige, par conséquent, un pilotage direct et précis. 3.3.1.2 Une mission dédiée Dans cette optique, sous l'autorité directe de l'inspecteur général du travail des transports, un cadre de haut niveau assurerait une liaison opérationnelle avec la Direction des affaires maritimes et l'Inspection générale des services des affaires maritimes, dans un premier temps pour effectuer le travail de mise à plat des fonctions exercées par l'administration des affaires maritimes en matière de droit du travail et redéfinir les rôles respectifs de cette administration et de l'ITT et, par la suite, pour coordonner les actions et les programmes d'inspection de ces deux autorités. Cet agent jouerait donc un rôle essentiel dans l'élaboration et la mise en oeuvre de l'instruction conjointe DAM/ ITT préconisée plus haut. De même, il serait chargé d'arrêter, en collaboration avec les intéressés, les modalités de coopération qu'il importe d'établir entre les médecins de l'inspection médicale du travail des transports présente au sein de l'ITT et le service de santé des gens de mer relevant de la Direction des Affaires Maritimes. Enfin, il développerait une activité d'encadrement doctrinal et méthodologique. En sus des informations générales dispensées par l'ITT, cette mission recouvrirait, par exemple, la rédaction de fiches juridiques, la présentation d'études de cas, de grilles d'inspection ou de tout autre élément renvoyant à la spécificité du secteur maritime. Mais dans ce domaine, il s'attacherait, d'abord, à déterminer le contenu de la formation et les modalités de validation conditionnant l'accès des inspecteurs et contrôleurs de l'ITT à la spécialité maritime. 3.3.1.3 Quelles perspectives d'évolution ? Cette mission spécifique au sein de l'organisation centrale de l'ITT pourrait n'avoir qu'une vocation temporaire, correspondant au temps nécessaire à la mise en oeuvre de la réforme. Toutefois, elle pourrait aussi servir d'expérimentation à la recherche d'une plus grande spécialisation des structures de direction de l'ITT au profit de secteurs demeurant très minoritaires par rapport au poids du transport routier. Dans cette perspective, la mission pourrait ultérieurement se voir confier des attributions analogues dans les secteurs connexes 32 que représentent la navigation fluviale ou les établissements portuaires, de manière à ce que l'ITT optimise son intervention sur ces activités, dans une logique d'action qui privilégierait la notion de site portuaire. 3.3.2 Un recentrage des missions du bureau du travail maritime de la sous direction des gens de mer. Corollaire du décroisement des compétences à opérer aux échelons déconcentrés, une redéfinition des attributions du bureau du travail maritime s'impose en administration centrale. La constitution d'une mission dédiée au secteur maritime dans l'équipe de tête de l'ITT et les attributions qu'il est proposé de lui confier font ainsi écho à la démarche prévue en 1996 lors de l'institution de l'ITM et qui visait à dédoubler le bureau du travail maritime en créant un bureau distinct chargé de mettre en oeuvre le dispositif. Le bureau GM3 serait ainsi dégagé d'une partie des missions qui aujourd'hui lui incombent. * 33

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