La planification écologique dans le monde - Parangonnage sur la démarche de planification écologique dans des pays du G20 et de l'Union européenne. Appui à Mme Barbara Pompili

DUMOULIN, Virginie

Auteur moral
France. Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD)
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">Dans le cadre de sa « transition écologique » face à la crise climatique et environnementale, la France a mis en oeuvre une « planification écologique » s'appuyant sur un plan mis en oeuvre par l'ensemble du gouvernement dont le pilotage relève du Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), dans le respect des obligations internationales et européennes en matière de neutralité carbone et de préservation et de restauration de la biodiversité d'ici 2050. Malgré son adoption au plus haut niveau de l'État, la France se retrouve confrontée à des difficultés de mise en oeuvre, à l'instar de nombreux autres pays, dont certains sont en demande d'échanges et de coopération avec la France. Un parangonnage sur la planification écologique a conduit à la rédaction de ce rapport, recentré sur les pays du G20 et de l'Union européenne et certains pays pionniers dans le domaine. La quasi-totalité des pays recourent à la mise en oeuvre de stratégies dans le cadre de leurs obligations internationales découlant de l'accord de Paris : réduction des émissions de gaz à effet de serre et mise en oeuvre de politiques publiques sur la plupart des secteurs émetteurs (énergie, transport, logement, agriculture et forêt). Néanmoins, la plupart peinent à l'adoption d'une stratégie globale concernant les autres enjeux environnementaux (adaptation, biodiversité, ressources). L'étude fait ressortir les éléments nécessaires pour garantir la réussite de la planification écologique notamment s'appuyer sur un narratif politique, porté par le plus haut niveau de l'État, indispensable pour l'appropriation par la population et la classe politique et être transversale sur l'ensemble des sujets, y compris sur le plan sociétal et économique tout en incluant des éléments clés comme la biodiversité, la transformation de la production alimentaire et l'efficacité de l'usage des ressources. Son pilotage par une organisation rattachée au plus haut niveau de l'État conforte sa capacité à agir. Elle doit s'inscrire dans un calendrier de court, moyen et long terme, accompagné d'une programmation budgétaire pluriannuelle. Une évaluation indépendante, régulière et fiable permet la réorientation des politiques publiques tout en faisant l'objet d'une redevabilité politique auprès des autres échelons de l'appareil démocratique. Sa déclinaison auprès des acteurs des territoires favorise son acceptation par la co-construction. De nombreux exemples et pratiques dans les pays examinés démontrent qu'il est possible de mettre en oeuvre une planification écologique regroupant l'ensemble de ces recommandations. La France peut s'appuyer sur son organisation existante et faire également de la planification écologique un outil de diplomatie climatique et environnementale.</div>
Editeur
IGEDD
Descripteur Urbamet
gouvernance ; politique publique ; transition écologique
Descripteur écoplanete
Thème
Environnement - Paysage
Texte intégral
Parangonnage sur la démarche de planification écologique dans des pays du G20 et de l?Union européenne Barbara POMPILI Ancienne Ministre de la Transition écologique Avec l?appui de Virginie DUMOULIN - IGEDD Mars 2025 La planification écologique dans le monde P U B L I É PUBLIÉ Les auteurs attestent qu'aucun des éléments de leurs activités passées ou présentes n'a affecté leur impartialité dans la rédaction de ce rapport Statut de communication ? Préparatoire à une décision administrative ? Non communicable ? Communicable (données confidentielles occultées) ? Communicable PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 4/60 Sommaire Sommaire........................................................................................................................ 4 Edito ................................................................................................................................ 6 Résumé ........................................................................................................................... 7 Liste des recommandations .......................................................................................... 9 Introduction .................................................................................................................. 10 1 Une mise en place progressive d?outils de planification de la transition climatique et écologique dans la plupart des pays du G20 et de l?Union européenne, qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre ........................... 12 1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique ........................................... 12 1.2 Les pays pionniers de la planification écologique ................................................ 13 1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique ............................ 14 1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique ..................................... 14 1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale .................. 19 1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs de transparence .............................................................................................. 20 1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en oeuvre ...................... 22 1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs objectifs de transition ................................................................................................ 22 1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de l?engagement citoyen ................................................................................. 23 2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au dernier kilomètre ? Des recommandations à tirer des exemples étrangers ........................................ 25 2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté au plus haut niveau de l?Etat et répondant aux attentes citoyennes ........... 25 2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son portage par la société .............................................................................................. 25 2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat .................. 26 2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes citoyennes quant à leur avenir .................................................................... 27 2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans un cadre juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous les secteurs d?activités ..... 29 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 5/60 2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements internationaux ................................................................................................................... 29 2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace et juste ........................................................................................................... 30 2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante ......................................................... 33 2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique ................. 33 2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter ......................................................... 35 2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique .......... 37 2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle ................................. 39 2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050) ...................................................................... 39 2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels ................................................................................................ 40 2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens ................................................................. 42 2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires ................. 42 2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens ................................................... 45 2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale ...................................... 48 Conclusion ................................................................................................................... 50 Annexes ........................................................................................................................ 51 Annexe 1. Lettre de mission IGEDD ........................................................................... 52 Annexe 2. Liste des personnes rencontrées ............................................................. 54 Annexe 3. Ambassades consultées ........................................................................... 57 Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes .................................................................. 58 Annexe 5. Fiches Pays ................................................................................................ 60 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 6/60 Edito Ministre de la Transition écologique de 2020 à 2022, j?ai porté la mise en place d?une planification écologique en France qui s?est traduite par la création du Secrétariat général à la planification écologique. C?est dans ce cadre que j?ai accepté de rejoindre pour un peu plus d?une année de SGPE (octobre 2023 à janvier 2025) afin de porter un regard sur les réactions à l?égard de ce dispositif français original dans l?échiquier international et d?examiner ce dont il pourrait s?inspirer à l?extérieur de nos frontières. L?ensemble des pays sont en effet confrontés au même défi de la mise en oeuvre de leur transition écologique, devant faire face aux impacts de plus en plus visibles et couteux socialement et économiquement du changement climatique et de l?affaiblissement de la biodiversité, dans un contexte de raréfaction des ressources naturelles, à commencer par les plus importantes comme l?eau. L?ensemble des pays doivent comme la France faire face à la difficulté de respecter des objectifs de long terme alors qu?ils subissent déjà des impacts immédiats, qui déstabilisent davantage encore leurs équilibres sociétaux et économiques. L?ensemble des pays doivent trouver les moyens de mettre en oeuvre au plus près du terrain des réformes concrètes acceptées voire portées par leurs citoyens. Il m?est donc apparu utile de consacrer cette année à examiner la situation des autres pays, pour en tirer des exemples, des principes, des philosophies politiques qui puissent appuyer la mise en oeuvre de la planification écologique française. Ce rapport est l?une des concrétisations de ce travail très enrichissant, co-écrit avec Virginie Dumoulin de l?IGEDD, et avec l?appui des ambassades de France des pays du G20, de l?UE et de quelques Etats exemplaires en matière de planification écologique. Ce rapport n?aurait pas pu être rédigé sans la contribution des stagiaires du SGPE, tout particulièrement Raphaëlle CAMARCAT, et Baki KAVLAK, Lola LECOMTE, et Damien THERY- DUPRESSOIR, et la bienveillante relecture et coordination de Laurent ROY (IGEDD). Barbara POMPILI PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 7/60 Résumé Dans le cadre de sa « transition écologique » lui permettant de faire face à la crise climatique et environnementale, la France a mis en oeuvre une « planification écologique », s?appuyant sur un plan mis en oeuvre par l?ensemble du gouvernement et dont le pilotage est assuré par le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE). Ce plan est en phase avec les obligations internationales et européennes de la France, en matière d?objectifs et de calendrier, qui doivent permettre l?atteinte de la neutralité carbone et de « vivre en harmonie avec la nature » en 2050. Malgré une préparation rapide de cet outil de pilotage de l?action publique et privée et son adoption au plus haut niveau de l?Etat, la France se retrouve confrontée à des difficultés de mise en oeuvre de cette planification. De nombreux pays apparaissent également confrontés aux mêmes préoccupations et difficultés de mise en oeuvre de la transition écologique et sont en demande d?échanges et de coopération avec la France dont le modèle de planification écologique intéresse. Un parangonnage sur la planification écologique a donc conduit à la rédaction de ce rapport, recentré sur les pays du G20 et de l?Union européenne, auxquels sont adjoints certains pays et collectivités sub-nationales pionniers dans la planification écologique. Il ressort de ce travail de parangonnage que la plupart voire la quasi-totalité des pays recourent à un processus de planification ou d?inscription dans une stratégie de leurs obligations climatiques. Les obligations internationales découlant de l?accord de Paris ont permis le déploiement à travers le monde de stratégies visant la réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui entrainent des politiques publiques sur la plupart des secteurs émetteurs (énergie, transport, logement, agriculture et forêt). Néanmoins, la plupart des pays peinent à l?adoption d?une stratégie globale intégrant également dans un même cadre et sous un même pilotage des stratégies similaires pour les autres enjeux environnementaux (adaptation, biodiversité, ressources). Les pays de tradition planificatrice réussissent mieux cet exercice de transversalité. Les pays buttent également sur les mêmes difficultés que celles identifiées par la France à la fois d?appropriation par la classe politique et la population des actions à mettre en oeuvre, de cohérence globale des politiques publiques et de déclinaison dans les territoires. Un certain nombre d?outils, de pratiques sont néanmoins apparus comme de bons exemples nécessitant d?être étudiés plus avant afin de pouvoir inspirer la planification française pour répondre aux enjeux qu?elle rencontre. Des fiches relatives à 19 pays recensant la planification écologique dans chacun d?entre eux figurent en annexe. Le Costa Rica a également fait l?objet d?un examen mais uniquement sur la base d?une contribution de l?ambassade de France et ne fait donc pas l?objet d?une fiche spécifique. L?étude en a retiré les éléments qui lui sont apparus nécessaires, au titre des meilleurs exemples étrangers rencontrés, pour garantir la réussite de la planification écologique. Ils font l?objet de 11 recommandations. La transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté par le plus haut niveau de l?Etat, indispensable pour l?appropriation par la population et la classe politique, quand bien même ce narratif englobe des enjeux autres que les questions climatiques et environnementales. La planification écologique doit être globale, transversale et traiter de l?ensemble des sujets, y compris les plus délicats sur le plan sociétal et économique. La biodiversité et la transformation de la production alimentaire sont des éléments clés de la transition, ainsi que l?efficacité de l?usage des ressources. Elle doit être pilotée par une organisation identifiée et rattachée au plus haut niveau de l?Etat pour assurer sa capacité à agir. Elle doit s?inscrire dans un calendrier de court (2030), moyen (2040) et long terme (2050), garantissant la stabilité de la trajectoire et de l?action publique, afin de rassurer les acteurs du changement, qu?il s?agisse des collectivités dans les territoires ou des acteurs PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 8/60 économiques. Elle doit s?appuyer sur une programmation budgétaire pluriannuelle assurant elle aussi la continuité de l?action publique et permettant de rassurer les investisseurs et d?appréhender les modifications nécessaires de la planification. Elle doit faire l?objet d?une évaluation indépendante, régulière et fiable car basée sur des données non contestées, permettant la réorientation des politiques publiques lorsque les objectifs ne sont pas atteints. Elle doit également dans ce cadre faire l?objet d?une redevabilité politique auprès des autres échelons de l?appareil démocratique notamment le Parlement. Elle doit être déclinée dans les territoires au plus près de l?action quotidienne afin d?être en mesure d?être appréhendée, co-construite et acceptée par les acteurs des territoires, ce qui nécessite la définition d?outils de consultation et d?association de la société civile dans son ensemble à la prise de décision, mais aussi et surtout à la mise en oeuvre des politiques. De nombreux exemples et pratiques dans les pays examinés démontrent qu?il est possible de mettre en oeuvre une planification écologique regroupant l?ensemble de ces recommandations. La France a la capacité de le faire en s?appuyant sur les outils déjà mis en oeuvre et en renforçant sa planification écologique sur les aspects qui apparaissent encore insuffisants à ce stade. La planification écologique peut par ailleurs devenir un outil de diplomatie climatique et environnementale au service du pays. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 9/60 Liste des recommandations Construire un narratif, fondé sur une vision de l?avenir du pays portée par le chef de l?Etat et le chef du gouvernement et partagée avec les citoyens, dans lequel la transition écologique est considérée comme un moyen et non une fin. ......................... 29 Inscrire dans la loi l?obligation d?une planification écologique ........... 30 La planification écologique doit intégrer tous les secteurs d?activités et l?ensemble des politiques doivent être mises en oeuvre, en adaptant si nécessaire la trajectoire et les financements pour surmonter les difficultés. ............................................ 33 Maintenir le SGPE auprès du premier ministre, le renforcer dans son rôle de pilotage de la planification écologique, en appui de l?action des ministères, et d?animation de son déploiement dans les territoires. .......................................................... 35 La France doit se doter d?une entité d?évaluation de sa planification écologique indépendante et reconnue qui appuiera le SGPE dans sa démarche de pilotage de la planification écologique. ............................................................................................. 37 La planification écologique doit faire l?objet d?un suivi annuel devant le Parlement, qui permettra d?évaluer si la trajectoire est respectée et de définir les mesures à mettre en place si ce n?est pas le cas. Ce suivi sera alimenté par la publication en amont d?un rapport annuel de l?organe d?évaluation indépendant. ................................................ 38 La France doit se doter d?une planification à échéance 2040 et à échéance 2050 qui doit intégrer ses objectifs en matière d?adaptation et de reconquête de la biodiversité. ...................................................................................................................... 40 La France doit se doter d?une loi d?orientation budgétaire pluriannuelle de la transition écologique et prévoir la mise en place de fonds dédiés au financement de la transition pouvant permettre de mutualiser des financements publics et privés. ............... 42 Impliquer tous les acteurs des territoires de l?élaboration jusqu?à la mise en oeuvre ............................................................................................................................. 45 Poursuivre la mise en oeuvre territoriale de la démarche de planification écologique en se concentrant davantage sur les outils à déployer, notamment budgétaires et numériques, pour aider les collectivités au-delà des outils de rapportage, les acteurs économiques dans le suivi de leurs transitions et les citoyens dans leur appréhension et leur inclusion dans le processus de transformation. ................................ 48 Faire de la planification écologique un nouvel outil de coopération internationale et renforcer les partenariats avec les pays les plus susceptibles de faire progresser la planification écologique française. ................................................................ 49 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 10/60 Introduction Confrontés aux conséquences de la dégradation de l?environnement sous les effets du changement climatique, de l?effondrement de la biodiversité et de l?épuisement des ressources, les pouvoirs publics du monde entier cherchent à mettre en place des politiques permettant à la fois de limiter voire d?inverser ces tendances, et d?adapter les sociétés humaines à cette nouvelle donne. Pour relever ce défi écologique mais aussi sociétal, les autorités publiques doivent mettre en oeuvre une politique que l?on peut qualifier de « transition écologique », entrainant « l?ensemble des changements imprimés au modèle économique et social dans le but de répondre aux exigences du développement durable et de réduire l?empreinte écologique de la société »1. L?ampleur des modifications nécessaires est considérable : tous les secteurs de l?activités économique sont concernés (énergie, transport, agriculture, logement, industrie, etc.), toutes les régions du monde y sont confrontées, et les modes de vie eux même sont questionnés. L?urgence à agir est réelle, appuyée sur des constats scientifiques formulés et reconnus à l?échelle planétaire (GIEC, IPBES, IRP). Ces constats sont traduits en des objectifs précis et inscrits dans le temps2, au-delà desquels l?effondrement de la biodiversité et l?impact du changement climatique sur les écosystèmes et l?humanité ne seront plus maitrisables et les conséquences seront imprédictibles. Ces objectifs ont été adoptés par la quasi-totalité des nations3 dans des normes internationales (Accord de Paris pour le climat, Accord cadre global pour la biodiversité Kunming-Montréal). Ils sont traduits à l?échelle régionale de l?Union européenne dans le Pacte vert, ce qui leur donne un caractère normatif. L?ambition de l?atteinte de la neutralité carbone d?ici 2050 impose aux pays européens la mise en oeuvre d?une transition écologique disposant d?étapes intermédiaires, notamment 2030 et 2040. La France a choisi pour la concrétisation de sa transition écologique la mise en place d?une « planification écologique », s?inscrivant dans la tradition des politiques de planification déployées dans le pays depuis l?après-guerre. Un organe spécifique, le Secrétariat Général à la Planification Ecologique (SGPE), a été créé le 7 juillet 2022 pour animer cette stratégie d?action publique baptisée « France Nation Verte ». En janvier 2023 s?est tenu un premier conseil de planification écologique mobilisant autour du président de la République et de la Première ministre l?ensemble du gouvernement qui doit contribuer à l?élaboration du « plan collectif, concret et crédible qui doit aboutir à une stratégie complète, cohérente et efficace »4 permettant de répondre aux défis de la transition écologique : planifier pour couvrir tous les sujets du climat à la biodiversité, s?inscrire dans le temps long, renforcer la coordination interministérielle, crédibiliser les politiques publiques. Ce plan a été adopté en septembre 2023 5 à l?issue d?un nouveau conseil de planification écologique autour du président de la République. Conformément aux impulsions données par le président de la République, la transition écologique doit tout à la fois être basée sur la science et des résultats objectifs, renforcer notre souveraineté grâce à la décarbonation de notre économie (ce qui sous-entend la mise en place d?une stratégie industrielle), associer l?ensemble des acteurs, être juste en ne laissant personne sans solutions, tout en renforçant la protection des citoyens et de la nature, être déclinée dans les territoires et partagée avec nos partenaires dans le monde. 1 Larousse 2 Limiter la hausse des températures à 1,5°C, vivre en harmonie avec la nature d?ici 2050, respecter les limites planétaires. 3 Les Etats-Unis d?Amérique ne sont pas parties à la Convention sur la diversité biologique dont découle l?accord cadre global sur la biodiversité. 4 Discours du 12 juillet 2023 d?E. Borne devant le Conseil nationale de la transition écologique 5 https://www.ecologie.gouv.fr/actualites/planification-ecologique-plan-daction-accelerer-transition-ecologique PUBLIÉ https://www.ecologie.gouv.fr/actualites/planification-ecologique-plan-daction-accelerer-transition-ecologique Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 11/60 Sa déclinaison territoriale a été enclenchée dans le cadre de conférences des parties (COP) dans chaque région à compter de l?automne 2023, alors qu?en parallèle des dialogues se sont ouverts au niveau national avec certaines parties prenantes, notamment les secteurs industriels. La loi de finances initiale pour 2024 avait prévu 10 milliards d?euros pour le financement du plan. De nouvelles stratégies sectorielles ont été adoptées pour alimenter le processus global de planification courant 2024 (Stratégie nationale de la biodiversité en décembre 2023, Plan national d?adaptation au changement climatique soumis à consultation du public à partir d?octobre 2024, Stratégie emploi et compétences pour la planification écologique en février puis juillet 2024, Plan de transformation écologique de l?Etat en mars 2024). Un tableau de bord de la planification écologique contenant les indicateurs répartis en 9 volets est rendu disponible6 en mars 2024. L?année 2024 a donc vu les premières mises en oeuvre du plan mais les premières difficultés ont également été rencontrées. L?enveloppe prévue en loi de finances 2024 a été amputée de 2 Milliards dès février 2024. Certaines stratégies tardent à être finalisées et adoptées. La compréhension et l?acceptation démocratiques de la démarche de transition écologique demeurent insuffisantes face à l?ampleur des politiques à déployer et à leurs coûts budgétaires et sociaux. Il est donc apparu utile de pouvoir s?inspirer d?exemples étrangers pour trouver de nouvelles approches et confronter les difficultés rencontrées. Une étude de parangonnage a été lancée sous la tutelle de Barbara POMPILI, en tant qu?ancienne ministre de la transition écologique, avec l?appui de l?IGEDD. Eu égard à l?ampleur des éléments traités dans le cadre de la planification de la transition écologique, le choix a été fait de se concentrer sur les pays du G20 et de l?Union européenne, tout en regardant également quelques exemples de pays avant-gardistes en la matière. A l?issue de l?approfondissement de 19 cas de pays, il apparait que la plupart des pays du G20 et de l?UE ont mis en oeuvre des outils de planification de l?action publique environnementale a minima en matière de lutte contre le changement climatique, mais rencontrent des difficultés dans leur déploiement sur le terrain (I). Des exemples inspirants peuvent toutefois être retirés des pays examinés ce qui permet la formulation de recommandations afin de faire progresser la planification écologique française dans sa mise en oeuvre jusqu?au dernier kilomètre (II). 6 https://barometre.planification-ecologique.gouv.fr/accueil PUBLIÉ https://barometre.planification-ecologique.gouv.fr/accueil Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 12/60 1 Une mise en place progressive d?outils de planification de la transition climatique et écologique dans la plupart des pays du G20 et de l?Union européenne, qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre 1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique « La planification est un processus qui fixe (pour un individu, une entreprise, une institution, une collectivité territoriale ou un État), après études et réflexion prospective, les objectifs à atteindre, les moyens nécessaires, les étapes de réalisation, les méthodes de suivi de celle-ci ainsi que les délais nécessaires »7. Elle se traduit le plus souvent dans la production de plans d?action dont la mise en oeuvre fait l?objet d?un suivi et d?une évaluation. La planification permet la projection dans un horizon temporel défini (au moins 5-6 ans) de la vision globale d?une action publique. Elle est partagée avec les parties prenantes dans une perspective d?intérêt général, afin d?assurer le déploiement de ressources suffisantes autour de priorités définies et dont la mise en oeuvre est coordonnée entre les différents acteurs8. Le processus de planification est utilisé par les puissances publiques depuis la Première Guerre mondiale : la France et l?Allemagne y ont recours dans le cadre de l?effort de guerre. C?est ensuite l?organisation d?une nouvelle économie en URSS dès 1929 puis la reconstruction après la Seconde Guerre mondiale qui rendent son usage plus généralisé, par le Royaume-Uni et les Etats-Unis mais également par la France, sous l?influence de Jean Monnet, convaincu de l?utilité de l?outil et nommé premier commissaire général au plan en 1946. L?objectif est alors une modernisation rapide de l?économie française centrée sur les secteurs prioritaires (charbon, acier, électricité, ciment, transports, machines agricoles) et s?appuyant sur les financements apportés par le plan Marshall américain. Cette planification vise à faire intervenir l?Etat par de nouvelles modalités d?intervention économique pour faire face aux insuffisances du marché. Elle lui permet d?associer l?ensemble des parties prenantes à une vision politique de croissance économique. Le contexte de l?après-guerre est certes spécifique, l?Etat étant en capacité de faire effet de levier pour orienter et coordonner la production nationale et optimiser l?usage des ressources. La France n?est plus aujourd?hui dans une situation similaire : elle est insérée à la fois dans une économie mondialisée s?appuyant sur des processus de libéralisation des échanges et dans une Union européenne qui a fait sienne cette orientation libérale. Les processus de planification ont donc été fortement remis en cause à la fin du XXème siècle, ne parvenant plus à associer l?ensemble des acteurs, à faire remonter des indicateurs chiffrés fiables dans un contexte de place croissante des échanges commerciaux internationaux, à imposer l?objectif à atteindre de croissance comme modèle de société et les Etats ne disposant plus des outils de politiques publiques susceptibles d?influencer les marchés. En parallèle, le modèle planificateur soviétique a été très largement considéré comme ayant échoué avec la fin de l?URSS. Pourtant, à la suite notamment de la crise économique internationale provoquée par l?épidémie de Covid19 en 2020-2021, le concept de planification a fait son retour dans la plupart des pays du monde. Certes, le plus souvent, l?objectif de cette idée de planification était, comme en temps de guerre, de pallier la pénurie en produits essentiels consécutive à la perturbation des échanges internationaux. Face à l?incapacité du marché à apporter une réponse adaptée, la planification est apparue à nouveau comme une solution. Des pays pratiquant toujours la planification, comme la Chine ou Singapour, sont apparus comme en capacité de s?adapter plus rapidement, réhabilitant 7 Pierre Merlin et Françoise Choay, « Dictionnaire de l'urbanisme et de l'aménagement », Paris, PUF, 2010 8 France stratégie ? « La planification : idée d?hier ou piste pour demain ? », 17 Juin 2020, Par Daniel Agacinski, Julien Bueb, Anne Faure, Julien Fosse, Hélène Garner, Boris Le Hir, Gautier Maigne et Mathilde Viennot https://www.strategie.gouv.fr/publications/la-planification-idee-dhier-ou-piste-pour-demain PUBLIÉ https://www.strategie.gouv.fr/publications/la-planification-idee-dhier-ou-piste-pour-demain Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 13/60 les processus de planification. De plus, la planification sectorielle est restée largement utilisée comme outil de politique publique, souvent sous la forme de « stratégies » disposant d?un échéancier de 5 ou 6 ans. Mais surtout, le concept de planification prend une nouvelle dimension dans le cadre de la nécessaire réponse à apporter à la crise écologique que rencontre l?humanité. Le concept de « planification écologique », inspiré de la planification spatiale comme un processus qui vise à intégrer la préservation et la restauration des écosystèmes naturels dans les décisions de développement humain9, semble répondre au besoin d?outils de mise en oeuvre de la transition écologique. Des objectifs internationaux de réduction des émissions des gaz à effet de serre ou de reconquête de la biodiversité ont été définis à horizon 2030 et 2050 et doivent se décliner dans des politiques nationales sous la forme de contributions nationales déterminées (NDC?s)10 pour le climat ou de stratégies nationales et de plans d?action biodiversité (NBSAP?s)11 qui ne sont autres que des outils de « planification » ou des « stratégies ». Pour l?atteinte des objectifs climatiques ou de biodiversité, les outils offerts par les processus de planification apparaissent de fait particulièrement utiles. La planification permet en effet : - d?agir sur tous les fronts de façon systémique et globale : climat, adaptation, ressources, biodiversité, santé ; - de définir des politiques et des trajectoires crédibles pour atteindre les objectifs fixés, dans chaque secteur concerné : industrie, énergie, transport, agriculture, aires protégées, etc. ; - de disposer des outils nécessaires au déploiement des politiques publiques et des actions à mettre en oeuvre, notamment des financements adaptés ; - d?associer l?ensemble des parties prenantes à la définition des politiques et des outils pour s?assurer de leur application à tous les échelons y compris géographiques ; - de permettre un suivi, une évaluation en continu, permettant la réorientation des politiques lorsque cela est nécessaire. La planification avait certes été jusqu?alors un outil servant la production et la croissance économique, alors qu?elle devrait désormais organiser la décroissance de l?utilisation des ressources naturelles. Néanmoins, l?outil planification permet d?organiser la réponse à apporter aux enjeux de la transition écologique. La planification écologique telle qu?examinée par ce rapport dans les pays du G20 et de l?Union européenne, ainsi que dans des pays pionniers, apparaît comme un outil de pilotage susceptible de répondre à l?ensemble des différents volets d?une démarche de transition écologique : le narratif politique et sociétal qui porte la transition écologique, le cadre normatif mis en place pour définir et décliner la stratégie de transition, l?association des acteurs publics et privés impliqués dans le projet, les outils de consultation de la société civile dans la prise de décision et la déclinaison des politiques de transition, les outils d?évaluation de la planification et les ressources financières affectées à la planification. 1.2 Les pays pionniers de la planification écologique Des analyses menées dans le cadre de cette étude de parangonnage, il ressort que les pays qui 9 ?Design with nature? - Ian Lennox McHARG, 1969 10 En anglais ?Nationally Determined Contributions? dans le cadre de la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques 11 En anglais ?National Biodiversity Strategies and Action Plan? dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 14/60 disposent d?une tradition de planification de l?action de l?Etat, notamment économique, ont également mis en place une planification de leur transition écologique, souvent bien avant la crise sanitaire mondiale. Depuis 1953, l?Etat chinois se fixe de grands objectifs en matière de développement social et économique dans le cadre de cycles quinquennaux de planification stratégique. Le plan quinquennal présente une vision spatialisée du développement et fixe les grandes orientations et priorités des politiques sectorielles. Il prévoit également leur mise en oeuvre, leur suivi et leur évaluation. Le concept de « civilisation écologique », qui constitue l?un des 5 piliers de la construction d?un socialisme aux caractéristiques chinoises, apparait lors de l?adoption du 11ème plan (2005-2010). Pour le Président Xi Jinping, « s?avancer vers une nouvelle ère de la civilisation écologique et construire une belle Chine font partie importante de la réalisation du rêve chinois du grand renouveau de la nation chinoise ». La transition écologique figure ainsi au coeur du grand récit de renaissance nationale porté par le président et figure dans la constitution depuis 2012. En Indonésie, le ministère chargé de la planification - le BAPPENAS - pilote un plan à long terme le RPJPN 12 (20 ans) et un plan à moyen terme le RPJMN 13 (5 ans) dont les objectifs, principalement tournés vers le développement économique, sont désormais teintés de durabilité environnementale. Le plan de réduction des émissions, le RAN-GRK, et ses déclinaisons dans les provinces les RAD-GRK, qui existaient depuis 2011, ont été révisés et intégrés dans les plans de développement globaux du pays en 2017. Le RPJPN « Indonésie Dorée 2045 », adopté en janvier 2024, prévoit l?atteinte du « zéro émissions nettes ». Singapour est également un pays qui planifie intégralement son évolution, de façon très détaillée eu égard à sa superficie. Confronté aux risques découlant du changement climatique et de la pauvreté de ses ressources naturelles, sa planification est orientée vers une transition écologique lui permettant de s?adapter à la crise environnementale. La politique de l?eau menée par Singapour depuis son indépendance (1965) est désormais en passe de lui garantir son autonomie vis-à-vis de son approvisionnement par la Malaisie dont le pays était totalement dépendant initialement. L?ampleur des infrastructures réalisées (barrages, sites de stockage, stockage souterrain des eaux de pluie, usines de traitement) s?est intégrée dans le reste de la planification des infrastructures urbaines, mais également naturelles et économiques. D?autres pays ont mis en place, parfois depuis les années 1970, des démarches de planification servant des objectifs exclusivement environnementaux, sans forcément être intégrés dans une politique de développement globale du pays. La politique de reconquête forestière du Costa Rica, déployée depuis le milieu des années 1980, constitue par exemple une claire action de planification inscrite sur 30 ans. On citera enfin le cas particulier de la ville de Portland aux Etats-Unis qui a commencé sa démarche de planification spatiale dans les années 1970 par la limitation de son étalement urbain afin de préserver la nature et les espaces agricoles l?environnant. Cette planification de « ceinture verte » à court terme (5 ans) et long terme (d?ici à 2040) a ensuite entrainé l?ensemble de la planification environnementale mise en place par la ville qui fait partie des premières au monde à disposer d?une stratégie climat (1993) et décline tous les sujets de la transition écologique dans sa planification. 1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique 1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique Il ressort de l?examen réalisée par cette étude sur plus de 20 pays (dont 19 font l?objet de fiches en 12 Rencana Pembangunan Jangka Panjang Nasional = Plan national de développement à long terme 13 Rencana Pembangunan Jangka Menengah Nasional = Plan national de développement à moyen terme (loi n°17/2007) PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 15/60 annexe) que presque tous ont mis en place une stratégie ou planification pour décliner leur politique climatique. Cette démarche découle notamment du besoin d?atteindre des objectifs cadrés à l?échelon supranational (suites de l?accord de Paris sur le climat), dans un calendrier court (rapports bisannuels de transparence et des inventaires d?émissions de GES à partir de 2024, bilan mondial tous les 5 ans). L?usage de « stratégies » ou de « plans », outils administratifs de base dans la déclinaison des politiques publiques, permet aux pays de rendre compte de la mise en oeuvre de leur engagement de réduction de leurs émissions, qui figure dans leur Contribution Déterminée au niveau National (CDN) transmise au secrétariat de l?UNFCCC. Ces outils administratifs facilitent le respect des obligations de rapportage auprès des organisations internationales qui sont utilisées dans les comparaisons entre pairs. La première étape est donc la traduction des obligations internationales relatives à la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le cadre juridique national. Quels que soient les objectifs assignés, les pays ont tous pris des engagements de réduction des émissions, les ont déclinés par secteurs d?émission (au moins pour le secteur énergétique), voire ont pris des engagements supérieurs aux attentes tels que l?atteinte de la neutralité carbone à échéance 2050 ou au-delà. Les cadres juridiques correspondants existent partout. La démarche de planification oblige à mesurer : les pays ont donc mis en place des systèmes de collecte des données des émissions de gaz à effet de serre, des indicateurs, voire des démarches d?évaluation des résultats des politiques. Ces outils de planification climatique s?accompagnent la plupart du temps de la mise en place d?un organe de coordination ou de pilotage. Les pays traditionnellement enclins à la planification disposent d?une organisation pilotant la démarche de planification qui peut également prendre en charge la planification écologique. Ainsi, le BAPPENAS (ministère de la planification) en Indonésie apparait comme le seul organe en charge de toute la coordination. Ses ministres se voient attribuer des spécialisations, qui les placent comme coordinateurs des ministères techniques, qui sont eux responsables de la mise en oeuvre de la partie thématique du plan qui les concerne. A la suite de l?intégration de la transition écologique au sein des autres objectifs de développement économique et social, les ministres du BAPPENAS se retrouvent également pilotes de celle-ci. Le pilotage de la planification peut également être complété par un organe de coordination sur la politique climatique, principalement sur sa partie atténuation. En Chine, le pilotage de la politique climat reste entre les mains de la Commission nationale de la réforme et du développement (NDRC) qui est en charge de la planification, mais le conseil des affaires d?Etat a mis en place une coordination interministérielle avec le « Groupe de travail national sur la réponse au changement climatique, à l?efficacité énergétique et à la réduction des émissions », supervisé par le premier ministre et a renforcé le pouvoir de coordination du Ministère de l?environnement rebaptisé Ministère de l?écologie et de l?environnement et auquel la lutte contre le changement climatique a été confiée. A Singapour, le pilotage de la transition climatique est fait au sein du Bureau de durabilité du secteur public (PSSO) et par le Secrétariat national au changement climatique (NCCS). Néanmoins, il apparait que dans la plupart des pays, le pilotage de la politique climatique est réalisé par le ministère en charge des questions climatiques et/ou par une organisation relativement informelle de coordination de nature plus politique qu?administrative, visant en fait au renforcement de l?interministérialité rendue nécessaire par la transversalité des sujets climatiques, même en matière d?atténuation. Cette coordination devient donc un enjeu en soi. Parmi la plupart des pays développés dont le modèle est proche, l?exemple du Royaume-Uni en est une bonne illustration. C?est le ministère en charge de la sécurité énergétique et de la neutralité climatique (Department for energy security and PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 16/60 net zero) qui est responsable et chef de file de la mise en oeuvre et du suivi de la stratégie, tandis que chaque ministère reste en charge de la mise en oeuvre des actions qui lui reviennent dans ce cadre. Des réunions entre les directeurs généraux concernés sont régulièrement organisées tandis que les équipes du DESNZ en charge de la coordination s?entretiennent fréquemment avec les différents services pour s?assurer de la bonne avancée des travaux. Une unité de pilotage interministériel a été établie dès 2021 pour le pilotage de l?atteinte de la neutralité carbone : la « Prime Minister delivery unit ». On retrouve une même organisation aux Etats-Unis sous la présidence Biden avec le « Climate policy office », piloté directement par la Maison Blanche qui réalise l?interministérialisation des politiques climat. Le même mécanisme existe en Allemagne (pilotage par le ministère de l?économie et interministérialisation par un « cabinet climat »), en Belgique (« task force fédérale énergie et climat »), en Finlande (groupe de travail interministériel chargé de coordonner la politique climatique et énergétique), aux Pays-Bas. Au Japon, la stratégie de transformation verte « GX », adoptée le 10 février 2023, est pilotée par un « comité exécutif de la politique de transformation verte » présidé par le Premier ministre, même si le METI (Ministère de l?économie, du commerce et de l?industrie) qui pilote l?action publique reste sa cheville ouvrière. Dans d?autres pays, comme l?Irlande ou la Suède, il n?existe pas de structure en charge de l?interministérialité. Cette situation se retrouve également en Inde où le Ministère de l?environnement, de la forêt et du changement climatique (MoEFCC) a la responsabilité de la coordination interministérielle sans en avoir les moyens. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 17/60 Outils de planification Pays Plan global Plan climat Autres stratégies Organe de coordination Afrique du sud Plan de développement pour 2030 (2012) Plan climatique NCCRPWP (2018) Stratégie nationale d?expansion des aires protégées (2008) Stratégie et Plan d?Action National pour la Biodiversité (2015) Stratégie d?adaptation au changement climatique 2020-2030 (2019) Commission présidentielle du climat (PCC) et son secrétariat Allemagne Non Programme de protection climatique (2023) + loi fédérale pour la protection du climat (2024) Stratégie de développement durable (2021) Loi sur l?adaptation au changement climatique (2022) Programme d?action fédéral sur les solutions fondées sur la nature en faveur du climat et de la biodiversité (2023) Stratégie nationale sur l?eau (2023) Non sauf Comité des secrétaires d?Etat pour le développement durable Belgique Non Stratégie climatique à horizon 2050 (2020) Plan fédéral de développement durable (2021) Plan d?action fédéral pour une économie circulaire (2021) Commission nationale climat Brésil Plan de transformation écologique du Brésil (2023) Politique nationale sur le changement climatique et ses 5 plans (2009) Plan climat 2024-2035 (2024) Politique nationale d?adaptation (2016) Comité interministériel sur le changement climatique Canada Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques (2016) Plan de réduction des émissions pour 2030 Plan d'action pour l'adaptation du gouvernement du Canada (PAAGC) Non sauf Conseil canadien des ministres de l?environnement Chine 14ème plan quinquennal national de développement économique et social (2021- 2025) Plans climat 1+N Plans quinquennaux sectoriels Plan stratégique de conservation de la biodiversité (2011) Commission nationale de la réforme et du développement (NDRC) Groupe de travail national sur la réponse au changement climatique, à l?efficacité énergétique et à la réduction des émissions Commission nationale pour la conservation de la biodiversité Costa-Rica Non Plan national de décarbonation 2018-2050 (2018) Stratégie nationale de la biodiversité 2026-2025 Cadre stratégique et règlementaire pour une gestion intégrée des déchets Plan national d?adaptation 2022-2026 (2022) Non Danemark Non Loi cadre sur le climat (2020) + feuille de route pour un Danemark vert (24 mesures à présenter d?ici 2025) + Plan climat annuel Plan d?action national pour l?économie circulaire pour la période 2020-2032 (2020) Plan forestier Comité gouvernemental permanent et spécialement compétent en matière de transition verte PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 18/60 Etats-Unis Non Stratégie de long terme (horizon 2050) + National climate strategy (horizon 2030) Cadre National de résilience climatique Climate Policy Office (CPO) Finlande Non Feuille de route gouvernementale pour une transition juste vers une économie neutre en carbone (2020) Loi climat (2022) Plan climatique à long terme et à moyen terme Stratégie nationale pour le climat et l?énergie (2022) Stratégie sur le développement durable 2022? 2030 Plan d?adaptation au changement climatique Plan climatique pour le secteur de l?utilisation des terres Groupe de travail interministériel chargé de coordonner la politique climatique et énergétique Inde The National Environment Policy (2008) Stratégie de long terme de l?Inde pour l?atteinte de la neutralité carbone à horizon 2070 National Action Plan for Climate Change (NAPCC) (2008) Programme FAME (Faster Adoption and Manufacturing of Hybrid and Electric Vehicles) MISHTI (Mangrove Initiative for Shoreline Habitats & Tangible Incomes) LiFE 21-Day Challenge Conseil sur le changement climatique (PMCCC) Indonésie Plan de développement national à long terme 2025-2045 RPJPN Plan de développement national à moyen terme RPJMN RAN-GRK plan d?action de la réduction des émissions Plan stratégique sectoriel ministériel (Renstra) Ministère de la planification du développement national BAPPENAS Irlande Plan national de développement (2021- 2030) Loi d?action climatique et développement bas carbone (2021) Cadre national d?adaptation (2024) Conseil consultatif sur le changement climatique Japon Politique de la transformation verte (GX) (2023) 22 feuilles de routes sectorielles Comité exécutif de la GX Pays-Bas Non Accord national sur le climat entre le gouvernement, les acteurs économiques et la société civile (2019) Ministère du climat Roumanie Plan national de relance et de résilience (2021) Non Conseiller d?Etat Royaume- Uni Non Stratégie net zéro (2023) Plan « Powering up Britain? (2023) Environment improvement plan Prime Minister?s Delivery Unit Rwanda Stratégie nationale de développement vision 2050 (2020) Stratégie nationale de transformation 2017- 2024 Stratégie de Croissance Verte et de Résilience Climatique (2022) + Feuilles de route sectorielles Politique et stratégie nationale pour l?eau et l?assainissement (2010) Stratégie nationale et plan biodiversité (NBSAP II) (2016-2020) Autorité de gestion de l?environnement du Rwanda Singapour Plan de long terme (horizon 50 ans) Master plan (horizon 10-15 ans) Singapore Green Plan 2030 Urban Redevelopment Authority (URA) Bureau de Durabilité du Secteur Public (PSSO) Secrétariat national au changement climatique (NCCS). Suède Non Loi climat (2017) + loi du cadre climatique (2017) + Plan d?actions climatiques tous les 4 ans Ministère de l?environnement Portland Schémas directeur Région 2040 (2002) + « Urban growth report » Portland Global Warming Reduction Strategy (1993) Bureau du planning et de la soutenabilité PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 19/60 1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale On constate néanmoins que peu de pays ont une démarche totalement englobante face à tous les enjeux de la transition : soit la démarche de planification est liée à une vision du développement, au sein de laquelle la planification climatique, voire écologique, s?insère, soit la démarche de planification est limitée aux enjeux climatiques. Une large part des démarches examinées à l?occasion de ce rapport sont même limitées aux enjeux d?atténuation en raison des obligations de rapportage liées à la CDN, de leur plus grande acceptabilité par le marché et les acteurs économiques (développement du secteur énergétique) et à la disponibilité de financements internationaux consacrés au climat. L?adaptation est encore trop souvent oubliée même si le sujet semble évoluer dans la bonne direction. Au moins 8 plans d?adaptation au changement climatique ont été identifiés. De même, la mise en oeuvre de l?accord de Kunming-Montréal sur la biodiversité semble pousser les pays au développement de politiques de protection et de restauration de la biodiversité. Mais la grande difficulté de la plupart des pays à publier leur nouvelle « SPANB » (Stratégies et Plans d?Action Nationaux pour la Biodiversité)14 lors de la COP16 de la Convention sur la diversité biologique en Colombie en octobre dernier illustre la difficulté à intégrer des politiques de conservation et de restauration de la biodiversité dans l?ensemble des politiques publiques, y compris dans les politiques de transition écologique. Les pays le plus souvent additionnent les stratégies sectorielles (DE, ZA FI, CR), démontrant ainsi leur volonté de couvrir également d?autres enjeux que ceux directement liés à l?atténuation, mais il n?existe pas de liens apparents entre ces différentes stratégies. Les documents sont adoptés dans des calendriers différents. Les ministères en charge ne sont pas les mêmes et, comme vu précédemment, il n?existe souvent pas d?organe de coordination globale pour la transition écologique. Cela comporte le risque de la conduite en silo de politiques qui pourtant pourraient se répondre : la protection de la biodiversité et des espaces naturels permet notamment l?atténuation des GES, l?adaptation couvre l?ensemble des sujets de même que la politique de l?eau, ou l?aménagement urbain. Il apparait que les pays qui pratiquent la planification de façon globale réussissent mieux à interconnecter leurs politiques entre elles. En témoigne la tradition planificatrice de Singapour qui a mené de front une politique ambitieuse d?autonomie en matière d?eau avec son développement industriel : l?eau recyclée est notamment utilisée par l?industrie des semi-conducteurs qui finance très largement le surcoût de la production d?eau. La Chine entend aussi mener de front tous les chantiers de la transition. Il semble également que cette nécessité de disposer d?une approche globale progresse. Ainsi, le nouveau plan de transformation écologique du Brésil, introduit en 2023, agit à la fois sur les axes financiers, fiscaux, règlementaires, administratifs et opérationnels. Il cible la finance durable, l?innovation dans le secteur productif, la bioéconomie, la transition énergétique, l?économie circulaire et les infrastructures vertes et résilientes. Il prévoit une articulation avec les plans climat et adaptation du pays. Il est piloté par le Ministère des finances au plan technique mais également par un comité interministériel sur le changement climatique et la croissance verte, à vocation transversale. Même s?il est trop tôt pour savoir si cet effort de planification sera couronné de succès, la démarche montre la prise de conscience sur cet enjeu de transversalité. L?Afrique du sud dispose également d?une Commission présidentielle pour le climat, couvrant des enjeux dépassant clairement l?atténuation. Les pays européens mènent également plusieurs chantiers de front. Le « Pacte vert pour 14 85% des Etats n?auraient pas soumis leur SPANB avant la COP16 d?octobre 2024 http://www.carbonbrief.org/cop16-countries-miss-un-deadline-to-submit-nature-pledges/ PUBLIÉ http://www.carbonbrief.org/cop16-countries-miss-un-deadline-to-submit-nature-pledges/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 20/60 l'Europe » (« Green Deal »), lancé par la Commission européenne en 2019, visait cet objectif d?engager l'UE sur la voie de la transition écologique, notamment dans l'objectif d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 en prenant une approche globale et transversale, dans laquelle tous les domaines d'action pertinents contribuent à l'objectif climatique ultime. Le train de mesures comprend des initiatives couvrant le climat, l'environnement, l'énergie, les transports, l'industrie, l'agriculture et la finance durable, qui sont tous étroitement liés. Au sein des pays européens, le Danemark accompagne sa loi climat d?accords environnementaux, déclinaisons opérationnelles et majoritairement sectorielles pour atteindre ses objectifs climatiques, mais qui couvrent tous les secteurs d?activité : logement, traitement des déchets et économie circulaire, transports, agriculture, fiscalité. Le gouvernement a également pris des engagements en matière forestière, de biodiversité marine, d?eau. L?organe de coordination interministériel voit son champ d?action s?élargir au-delà du climat : le « Comité gouvernemental permanent et spécialement compétent en matière de transition verte », créé en 2019, présidé par le ministre du Climat, de l?Énergie et de l?Approvisionnement devient en 2023 le « Comité vert », présidé par le ministre des Finances. Certains pays, comme la Suède, l?Allemagne ou la Belgique, utilisent le cadre du déploiement de l?Agenda 2030 pour la mise en oeuvre des Objectifs de développement durable (ODD) pour le pilotage de leur politique de transition écologique et leur coordination intergouvernementale. Ce dernier n?a le plus souvent pas d?aspect contraignant. On constate donc, même parmi les pays européens, le maintien de politiques qui manquent d?interconnections. Ainsi les Pays-Bas viennent de relancer une politique de planification territoriale, qui va intégrer les enjeux biodiversité comme les enjeux de risque inondation, mais butent sur les enjeux de la transformation agricole. Le manque de structures de coordination globale, la plupart étant seulement chargées de la politique climatique et des politiques en silo, y compris pour les enjeux de financement, illustre cette situation. En Allemagne, le choix d?individualiser pour chaque ministère (et donc secteur) l?atteinte des objectifs de réduction des émissions de GES a été remis en cause suite à l?incapacité du Ministère des transports de respecter ses engagements. Au Costa-Rica, la planification de la politique forestière n?a pas été accompagnée de politiques similaires dans d?autres secteurs de l?activité. Le modèle mis en place est remis en cause du fait notamment d?insuffisances dans l?accès à l?eau de la population ou de la mise en place d?une politique des transports adaptée aux besoins. 1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs de transparence Dans ce contexte de mise en oeuvre de politiques complexes, l?outil de planification sert également des objectifs de transparence et d?information sur l?action gouvernementale afin de répondre à des attentes sociétales fortes. Ainsi, la planification climatique ou écologique aide à répondre aux procès climatiques15 et aux manifestations de la jeunesse face au changement climatique dans les pays de l?UE, à la demande à vivre dans un environnement « sain »/qui respecte la santé (Chine, Inde, Singapour, pays du nord de l?UE), à celle de justice sociale et de lutte contre la corruption (Chine, Indonésie, Brésil, Afrique du sud, Rwanda). Aux Pays-Bas, la décision de justice qui condamne l?Etat néerlandais pour insuffisance d?action climatique a conduit à la mise en place d?un processus de mise en oeuvre de la politique climatique extrêmement cadré, avec des évaluations annuelles réalisées par un organisme indépendant - l?office de planification écologique (PBL)16 ? qui imposent une réorientation des politiques publiques pour respecter la trajectoire d?atténuation des émissions de GES. Le procès climatique en Irlande a permis la réorientation de la politique du pays, le Parlement irlandais devenant la deuxième assemblée du monde à déclarer l?urgence climatique. Au Brésil, le gouvernement a créé le groupe 15 Procès climatiques aux Pays-Bas, en Irlande, en Finlande, en Suède, en Belgique, en Allemagne et en France. 16 Planbureau voor de Leefomgeving PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 21/60 « AGU recupera » qui a pour objectif d?adopter des mesures judiciaires de protection des biomes brésiliens. L?AGU mène des actions en justice contre les auteurs de déforestation illégale et d?incendies volontaires et demande comme compensation financière une valeur équivalente à la quantité de gaz à effet de serre émis, calculée selon une méthode de l?OCDE (60 euros par tonne de GES en juillet 2024). 89 actions de ce type sont en cours au Brésil, dont les compensations éventuellement obtenues se chiffrent en millions de reals. L'administration Biden aux Etats-Unis a lancé l'initiative Justice40, introduite par l'« Executive Order » 14008 puis 14096 sur la justice environnementale. Cette initiative vise à ce que 40% des investissements fédéraux dans le climat, les énergies propres, le logement durable, etc. bénéficient aux communautés défavorisées, sous- financées et particulièrement exposées à la pollution. En Inde, le « National Green Tribunal », créé en vertu du National Green Tribunal Act en 2010, statue dans les 6 mois qui suivent le dépôt des demandes et appels et a pour rôle d?accélérer la justice en matière d?environnement. Afin d?assurer la transparence de ces politiques publiques, des « parlements citoyens » chargés à la fois d?associer les citoyens à la prise de décision politique et d?être des outils de vulgarisation des enjeux complexes de la transition climatique et écologique ont tenté de rapprocher l?élaboration des planifications de la société. L?Irlande a été pionnière : en 2018, une assemblée a travaillé sur des questions climatiques, recommandant de mettre le changement climatique au coeur des politiques nationales. Ces recommandations ont conduit à des actions concrètes, telles que le Plan d'action pour le climat de 2019. Les « Conversations climatiques » (« Climate Conversations ») de 2023, véritable dialogue national ayant impliqué des milliers de participants à travers des ateliers et des questionnaires en ligne, a permis au gouvernement de mieux comprendre les perceptions des citoyens sur les enjeux climatiques et d'adapter ses politiques en conséquence. Aux Pays-Bas, le « Forum citoyen sur la politique climatique et énergétique », créé en 2022, rassemble un échantillon représentatif de citoyens pour formuler des recommandations sur les politiques climatiques et énergétiques. Inspiré de la « Convention citoyenne pour le climat » française elle- même appuyée sur l?exemple irlandais, ce forum est doté d?un budget de 5 à 6 millions d?euros et vise à impliquer activement la société civile dans les décisions majeures. Le Danemark a également mis en place un tel Parlement citoyen en 2020, atour de 19 thématiques dont certaines originales comme l?éducation populaire. Singapour a mis en place des consultations publiques inclusives, telles que la campagne « A Space for Our Dreams », qui a mobilisé 15 000 participants pour définir les priorités à long terme de la ville. Ces consultations prennent des formes variées, notamment des dialogues interactifs, des concours artistiques, et des expositions ; elles permettent de s?assurer du soutien de la population à la planification écologique. L?enjeu pour les pouvoirs publics à la suite de ces associations des citoyens à la prise de décision est de traduire effectivement dans les règles ces propositions, sans quoi la promesse de l?association à la décision sera considérée comme factice. Même si elle découle de motivations économiques pour stimuler la captation par l?industrie chinoise des nouvelles technologies du climat, c?est également sous la pression de son opinion publique, qui réagissait face à la forte dégradation de l?environnement et notamment de la pollution de l?air et des eaux, et au non-respect des règles par des autorités locales ou des dirigeants des entreprises d?Etat, que le parti communiste chinois a enclenché une politique environnementale plus stricte, et dont découle in fine la « civilisation écologique ». L?Indonésie déploie également sa planification pour lutter contre la corruption, notamment au sein des échelons les plus déconcentrés. Au Brésil comme en Afrique du sud, c?est la promesse d?une « transition juste », visant à corriger les écarts de revenus au sein de la société, qui légitime la planification climatique. Le Rwanda appuie également sa planification écologique sur l?enjeu de réconciliation au sein de sa population. La planification permet également d?adapter les politiques à mener aux enjeux comme en témoigne celle de la ville de Portland aux Etats-Unis. D?abord planification urbaine pour limiter la croissance de la ville sur sa « ceinture verte », la planification écologique de Portland a ensuite répondu aux enjeux de respect de ses obligations climatiques, de desserte en matière de transport et s?attaque aujourd?hui aux déséquilibres sociaux constatés dans l?implantation territoriale des minorités au sein de la ville. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 22/60 1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en oeuvre 1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs objectifs de transition Accorder un aspect contraignant aux objectifs de transition écologique bute sur différents obstacles. Certains pays n?ont pas intégré de dimension véritablement contraignante dans leurs objectifs climatiques. Les stratégies nationales se limitent alors à des orientations politiques ou à des engagements déclaratifs, sans mécanismes coercitifs. Ainsi, la « Stratégie de Long Terme » ("Long Term Strategy" - LTS) des États-Unis est présentée comme une série de scénarios possibles ("pathways to net-zero by 2050") et non comme un cadre législatif obligatoire. Cette approche reflète une vision basée sur le recours à des incitations économiques et technologiques plutôt qu?à des obligations juridiques. Les législations climatiques fédérales aux États-Unis sont sujettes à des renversements fréquents en raison de la polarisation politique. Même sous des administrations démocrates, les mesures contraignantes peinent à obtenir un soutien suffisant au Congrès. Cette instabilité complique l'établissement d'un cadre contraignant durable. L'EPA 17 (Agence de protection de l'environnement) a mis en place des normes d'émissions, mais leur efficacité dépend souvent de la jurisprudence de la Cour suprême, qui peut remettre en question l'autorité des agences fédérales, notamment sur les questions environnementales. D?autres pays imposent des obligations légales, mais qui ne sont pas pour autant respectées. Ainsi, le cadre européen impose des objectifs contraignants aux Etats-membres, déclinés pour chacun d?entre eux. La loi européenne sur le climat impose une réduction d?au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 et la plupart des Etats-membres l?ont traduite dans leur législation nationale. Outre le cas néerlandais évoqué précédemment, la Finlande a adopté une loi climat ("Climate Act") qui fixe des objectifs contraignants, notamment la neutralité carbone d'ici 2035. Cette loi inclut un suivi régulier avec des rapports d?étape et impose une révision des politiques pour aligner les résultats avec les objectifs. De même, en Suède, le cadre climatique national s'appuie sur la "Loi climat" de 2017, qui fixe des objectifs contraignants de réduction des émissions. Un plan d'action quadriennal est élaboré après chaque élection pour assurer une mise en oeuvre concrète des mesures, garantissant un suivi strict des objectifs intermédiaires. Le Danemark a introduit législativement un double objectif contraignant de réduction de ses émissions de GES allant même au-delà des objectifs européens (neutralité carbone en 2045, baisse des émissions de 110%). La loi climat au Royaume-Uni, adoptée dès 2008, fixe un objectif à long terme en termes d'émissions, ponctué de budgets carbone de 5 ans. De même, au Canada, la loi sur la responsabilité en matière de neutralité carbone oblige le gouvernement à fixer des cibles quinquennales et à rendre compte régulièrement de ses progrès. Cependant, l?absence de sanctions en cas de non-atteinte des objectifs peut limiter l?impact réel de ce cadre juridique. C?est le cas au Canada ou en Belgique où le Plan national énergie-climat fixe des objectifs ambitieux à l?horizon 2030, mais qui ne sont pas toujours intégrés dans des dispositifs législatifs coercitifs aux niveaux des provinces. Cette lacune se traduit par des retards ou des incohérences dans la mise en oeuvre des mesures prévues. Cette approche illustre la tension entre ambition et contrainte effective. La nécessité aux Pays-Bas que la justice condamne le gouvernement démontre aussi la fragilité de ce modèle. En Suède et en Finlande, les nouveaux gouvernements en place ne garantissent pas le respect des engagements pris par leurs prédécesseurs. La difficulté de conserver un aspect contraignant pour ces stratégies découle notamment du besoin de les inscrire dans le temps long, en décalage avec les contraintes électorales dans les 17 Environmental Protection Agency PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 23/60 démocraties et avec le calendrier budgétaire qui est, lui, annuel. Beaucoup de stratégies/planifications sont limitées dans leurs aspects contraignants à l?échéance 2030 (UE, Belgique, Inde, Brésil, Japon, Afrique du sud, Etats-Unis) ou à des durées de 5-6 ans, et les planifications allant au-delà sont souvent peu précises et non budgétées. Ce décalage entre le court terme de l?action politique et l?annualité budgétaire d?une part, et le temps long de la planification d?autre part, conduit à l?absence d?objectifs réellement contraignants. Il n?a pas été possible de trouver des références de planification budgétaire étatique de la transition écologique. L?aspect contraignant des enjeux de transition se heurte également à la difficulté à traduire au plus près des territoires les obligations découlant de la planification : peu de pays rendent obligatoires les cibles climatiques pour leurs échelons territoriaux, à l?exception notamment de la Chine où les objectifs nationaux de réduction des émissions sont traduits en cibles chiffrées et obligatoires pour les gouvernements locaux. Ces derniers sont évalués sur leur performance, et des sanctions administratives peuvent être appliquées en cas de non-respect. Ce modèle centralisé renforce l?autorité de l?État mais peut réduire l?adaptabilité locale. On note néanmoins l?auto-saisine d?obligations de transition écologique par des entités sub- nationales. Aux Etats-Unis, les États fédérés ont une grande autonomie en matière de politique environnementale, ce qui conduit à des disparités importantes dans la mise en oeuvre. Par exemple, la Californie a adopté des normes ambitieuses, la ville de Portland également, même si ces initiatives ne remplacent pas un cadre national cohérent et contraignant. Des Länder allemands se sont également autosaisis d?objectifs en matière de neutralité carbone (2040 pour la Bavière, sortie du charbon d?ici 2038 pour la Rhénanie-du-Nord-Westphalie, réduction de 90 % des émissions de GES d'ici 2040 pour le Bade-Wurtenberg). Stockholm et Göteborg en Suède visent des objectifs climatiques avancés, comme la neutralité carbone avant 2030. Des villes sud-africaines ont fait de même. Ces engagements des collectivités souffrent néanmoins des mêmes risques de non atteinte que les échelons nationaux. 1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de l?engagement citoyen La mise en oeuvre des stratégies nationales de transition écologique rencontre des obstacles majeurs à l?échelon du dernier kilomètre. Ces difficultés, qu?elles soient économiques, sociales ou liées à un manque d?engagement citoyen, freinent la traduction des objectifs nationaux dans des actions concrètes sur le terrain. De nombreux pays sont confrontés à des résistances économiques et sociales face à l?ampleur des changements requis par la transition écologique. Ces résistances se manifestent particulièrement dans des secteurs clés tels que l?agriculture, l?énergie ou l?industrie. Dans l?Union européenne, le secteur agricole est souvent perçu comme l?un des plus réfractaires à la transition. Les réformes visant à réduire l?utilisation des pesticides ou à promouvoir l?agroécologie suscitent de fortes oppositions ; les syndicats agricoles dénoncent une menace pour la compétitivité des exploitations européennes, voire même nationales au sein d?une Europe insuffisamment alignée en son sein. Aux Pays-Bas, l?obligation de réduire la taille des élevages pour respecter les obligations relatives aux taux de nitrates dans l?eau a contribué à l?émergence d?un parti politique, le "Mouvement agriculteur-citoyen" (BBB, BoerBurgerBeweging) qui a conduit à la déstabilisation du gouvernement alors en place. En Allemagne, les réformes énergétiques et industrielles nécessaires pour atteindre la neutralité carbone se heurtent à des résistances liées à la crainte de pertes d?emplois et de délocalisations, en particulier dans le secteur de l?automobile. La crise énergétique de 2023 à la suite de la fin de l?approvisionnement de l?Union européenne en gaz russe a provoqué également la déstabilisation des gouvernements finlandais et suédois. Par ailleurs, dans des pays comme les États-Unis, la Roumanie ou la Bulgarie, le déni climatique reste un frein important. Aux États-Unis, des lobbys industriels influents alimentent le scepticisme, décrédibilisent les réalités scientifiques et ont participé à la réélection du Président Donald Trump PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 24/60 en 2024 avec un discours axé sur le développement de l?extraction d?énergie fossile comme option privilégiée de développement économique et l?arrêt des politiques de protection de l?environnement remise en place par l?administration Biden. En Roumanie et en Bulgarie, les faibles investissements dans l?éducation et la sensibilisation ralentissent l?acceptation des politiques de transition. La remise en cause des constats scientifiques permet de légitimer l?immobilisme et d?empêcher la transition. Elle fragilise aussi le narratif politique de la transition écologique, notamment européen, fortement axé sur les analyses du GIEC et de l?IPBES. Un autre obstacle majeur réside dans la difficulté à impliquer directement les citoyens dans les démarches de transition écologique. Même lorsque les cadres nationaux sont bien établis, leur succès dépend de l?adhésion et de la participation active de la population. Ainsi, malgré des plans climatiques ambitieux, la Belgique peine à mobiliser les citoyens sur des actions concrètes, faute de communication claire et de campagnes d?information suffisantes. Dans des pays comme le Costa Rica, les politiques de transition peinent à atteindre les populations les plus vulnérables, notamment en milieu rural. Cette fracture socio-économique renforce le sentiment d?exclusion et limite l?impact des mesures adoptées. La transition est également freinée dans sa mise en oeuvre par la corruption et la désorganisation des autorités locales à l?échelon territorial. Ces résistances freinent l?application des lois environnementales. Ainsi, la déforestation illégale en Amazonie brésilienne est souvent facilitée par des réseaux de corruption impliquant des autorités locales et des entreprises. Pour faire face à cette corruption locale, l?Indonésie a également dû renforcer ses dispositifs de décentralisation. Dans certains États indiens, des programmes de transition écologique, comme les projets solaires, font face à des résistances locales dues à des intérêts économiques ou à des conflits fonciers. Cela ralentit leur adoption et leur mise en oeuvre. En Afrique du sud, la corruption dans les entreprises publiques, notamment dans le secteur de l?énergie (Eskom), compromet la transition vers des énergies renouvelables. Les résistances au changement proviennent également de l?échelon local, où les mines de charbon sont encore des employeurs clés. Globalement, l?analyse de la mise en oeuvre de la transition écologique dans les pays examinés reflète des difficultés de mise en oeuvre proches, même si les situations géographiques et économiques des pays sont différentes. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 25/60 2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au dernier kilomètre ? Des recommandations à tirer des exemples étrangers 2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté au plus haut niveau de l?Etat et répondant aux attentes citoyennes 2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son portage par la société Un narratif clair et adapté au contexte national est essentiel pour mobiliser la société autour de la transition écologique. Selon le GIEC (2022), « la gouvernance climatique est limitée et favorisée par des facteurs structurants nationaux tels que les systèmes politiques, les ressources disponibles, et les valeurs dominantes ». Le narratif varie donc selon les pays. Dans les pays en développement où ce narratif existe, il est clairement orienté sur l?opportunité de développement que représente la transition écologique. Bien que le discours sur la durabilité se développe, les priorités économiques dominent encore largement. En Indonésie, le narratif met l?accent sur le développement économique durable, même s?il reste fortement axé sur l?exploitation de ressources naturelles comme le nickel et l?huile de palme. De même, le Brésil positionne la transition écologique comme une opportunité économique, en s?appuyant sur le potentiel des énergies renouvelables, notamment l?éthanol et l?hydroélectricité. En Inde, la transition écologique est associée à une vision de développement inclusif et moderne. Le gouvernement indien promeut l?idée que l?Inde peut devenir un leader mondial des technologies vertes, tout en assurant une amélioration du bien-être de sa population. Les pays en développement vont cependant au-delà de cette simple idée de transition vers un développement économique durable. En Afrique du sud, la transition écologique est présentée comme une solution à la crise énergétique et comme un levier de justice climatique. Ce discours sur la transition juste vise à rassurer les populations les plus vulnérables, fortement dépendantes des industries polluantes comme le charbon. Allant plus loin, la notion de « civilisation écologique » est inscrite dans la Constitution chinoise, amendée en 2018, comme l'un des cinq piliers du socialisme aux caractéristiques chinoises. Elle guide les politiques environnementales et économiques du pays, plaçant l?écologie au coeur du développement national. La stratégie climatique de la Chine est intégrée dans un narratif de modernisation et de compétitivité technologique. La transition écologique est présentée comme une opportunité pour asseoir la puissance nationale, notamment par le leadership dans les technologies vertes. Parfois, comme dans le cas de Singapour, le récit national cimente les objectifs de planification écologique à ceux des équilibres sociétaux. Le changement climatique est décrit comme une menace existentielle pour la ville-État, mais aussi comme une opportunité pour devenir un hub régional de la finance verte et de l?innovation écologique. Ce narratif repose sur une planification urbaine rigoureuse et des consultations publiques inclusives. Au Rwanda, la transition écologique est intégrée dans le paradigme de la garantie d?un développement inclusif et durable, pilier de la réconciliation nationale. En présentant sa dernière stratégie, le président Paul Kagamé a annoncé : « La Vision 2020 concernait ce que nous devions faire pour survivre et retrouver notre dignité. Mais la Vision 2050 doit porter sur l'avenir que nous choisissons, parce que nous le pouvons et parce que nous le méritons ». Il s?agit d?une vision de long terme stratégique qui pointe la direction pour PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 26/60 « le Rwanda que nous voulons » sur la base d?un développement et d?une croissance économique compatibles avec la préservation de l?environnement. Cette force du narratif ancre les politiques de transition dans la transformation nécessaire du pays. A l?inverse, dans de nombreux pays développés, un manque de narratif clair freine l?engagement dans la transition écologique. Les pays développés ont principalement articulé leur narratif politique de la transition écologique autour des risques posés par la crise climatique et environnementale pour leur modèle de développement. Ces risques ne sont pas contestables car appuyés sur les analyses de la science mondiale et la réponse politique apportée est le maintien d?une économie de marché soutenue par une compétitivité accrue grâce à une décarbonation précoce de l?économie. Ainsi, les plans canadiens s?appellent « Un environnement sain et une économie saine » en 2016 et « Un air pur et une économie forte » en 2022. De même, aux États-Unis, le discours reste souvent fragmenté entre intérêts économiques et préoccupations environnementales, et la réélection de Donald Trump fin 2024 s?est notamment faite contre les enjeux de transition environnementale. Au Royaume-Uni, le discours est clairement axé sur l?apport pour l?économie britannique d?une économie rendue plus compétitive parce que décarbonée. L?Union européenne, de son côté, doit surmonter une crise de narratif en réconciliant les objectifs climatiques avec les craintes économiques de ses citoyens. Ce narratif semble amalgamer constats scientifiques de la réalité de la crise écologique (changement climatique, perte de biodiversité, raréfaction des ressources, ampleur de la pollution) et solutions politiques dont la mise en oeuvre est imposée sans offrir d?espace au débat démocratique sur la nature de ces solutions à déployer. La plupart des pays européens n?ont pas développé de narratif laissant voir un futur durable et désirable qui suivra la phase de transition. Ils considèrent qu?appuyer les politiques de transition sur des analyses scientifiques, et sur la promesse de la poursuite de la croissance économique, certes plus durable, suffit à entrainer la société. Par exemple, l?article 1er de la loi Climat de 2019 du Danemark dit : « la réalisation des objectifs climatiques du Danemark doit être aussi efficace que possible d?un point de vue économique, en tenant compte de la trajectoire de long terme de la transition verte, du caractère durable des entreprises danoises et de leur compétitivité, de la solidité des finances publiques et de l'emploi, et du fait que l?économie danoise doit être stimulée plutôt que resserrée ». Ils articulent leurs messages davantage vers les marchés économiques que vers leurs citoyens. Dans tous les pays, le message d?amélioration de la santé des citoyens grâce à la transition écologique est le seul message politique commun porté en parallèle de celui de la croissance économique durable. Il vise à répondre à la perception d?une dégradation accélérée de l?environnement et de l?explosion des pollutions, notamment diffuses dans l?eau et l?air, qui ont des impacts sur les populations et dont les acteurs économiques qui en sont à l?origine refusent de porter la responsabilité, s?appuyant sur les Etats pour indemniser les victimes. 2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat Ce narratif doit s?incarner dans la classe politique et être porté au plus haut niveau de l?Etat pour être crédible aux yeux des populations. La transition est en effet source de changements, et donc de stress, de modifications de long terme, et génère de ce point de vue des angoisses dans la population notamment des classes laborieuses susceptibles d?être déstabilisées dans leurs équilibres sociaux-économiques. Cette incarnation politique est clairement affichée dans les pays en développement. Le président chinois Xi Jinping décrit la civilisation écologique comme une étape cruciale pour réaliser le « rêve chinois » du renouveau national. Elle s'inscrit dans un projet historique de transformation, combinant progrès économique et modernisation écologique. Ce narratif vise à mobiliser la population et à renforcer l?autorité de l?État dans la transition écologique. Au Rwanda et en Afrique PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 27/60 du sud, comme décrit précédemment, la transition est portée par les Présidents Paul Kagamé et Cyril Ramaphosa, auprès desquels sont rattachés les organes de pilotage de la politique de transition. Au Brésil, la transition écologique est intégrée dans une vision de justice sociale et environnementale, sous le leadership du président Lula. Cette approche met l?accent sur la réduction des inégalités et la préservation de l?Amazonie comme patrimoine mondial et tranche fortement avec la présidence précédente de Bolsonaro. La lutte contre la déforestation a été élevée sous Lula au rang de priorité nationale avec des cibles chiffrées et des plans d?action, tels que le PPCDAM (Plan de Prévention et de Contrôle de la Déforestation en Amazonie). La défense des peuples d?Amazonie fait partie du narratif. Narendra Modi joue également un rôle clé en personnifiant ce narratif en Inde. Il a fait de l'énergie solaire et de l'Alliance solaire internationale des priorités politiques majeures, renforçant ainsi le message de leadership mondial de l?Inde. A Singapour, le portage politique de la transition écologique est étroitement associé au « People's Action Party » (PAP), qui est au pouvoir depuis l?indépendance en 1965. Ce portage politique au plus haut niveau de l?Etat permet même de dissocier le projet de transition des enjeux écologiques. C?est bien sur une vision de la société future que s?appuient les chefs d?Etat pour faire accepter la transition aux citoyens, en additionnant des objectifs sociétaux à ceux de la transition climatique et écologique. Pour le Rwanda c?est une vision post-génocide, de réduction de la pauvreté, et d?amélioration de la qualité de vie comme socles fondamentaux qui sont servis par la durabilité. De même au Costa Rica, c?est le président José Figueres Ferrer, qui sera trois fois président de 1948 à 1974, et dont le fils le sera aussi dans les années 1990, qui démocratise le pays18, supprime l?armée et lance le pays comme un pionnier de la durabilité, valorisant son « capital vert ». Le pays porte ce narratif à travers des engagements internationaux ambitieux, tels que la neutralité carbone d?ici 2050, mettant en avant la reforestation et la production d?énergie 100 % renouvelable comme des éléments clés de son identité nationale. La crise d?incarnation politique que traverse actuellement le pays remet en cause ses priorités. La crise de « leadership » européen illustre à l?envers cette réalité. Le Pacte vert (« Green Deal ») a pourtant été clairement associé à la présidente de la Commission européenne Ursula Van Der Leyen. Mais après avoir porté sa popularité pendant son premier mandat, il a semblé compliquer sa réélection. Aux Etats-Unis, la réélection de Donald Trump est clairement liée, entre autres facteurs, au rejet qu?il exprime d?une politique environnementale freinant une croissance économique appuyée sur l?exploitation des ressources naturelles. Cette déstabilisation des élites européennes, américaines et canadiennes, découle des craintes du coût économique de la transition écologique pour les secteurs économiques soumis à la compétition internationale et pour des populations qui n?ont pas pu adhérer à un narratif de la transition écologique. La remise en cause régulière des planifications écologiques et les changements permanents de règles nuisent également à l?incarnation du projet. 2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes citoyennes quant à leur avenir L?implication des citoyens dans la construction d?un narratif écologique apparait comme un levier essentiel pour garantir l?acceptabilité et l?efficacité des politiques climatiques. L?intégration des citoyens dans le processus de décision améliore : - L?acceptabilité des mesures : les citoyens se sentent davantage impliqués et enclins à adopter les changements requis. 18 Il donne le droit de vote aux femmes et à la population d?origine africaine en 1953. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 28/60 - La pertinence des politiques : les solutions proposées reflètent mieux les réalités locales et les besoins des populations. - La transparence : ces processus renforcent la confiance envers les institutions publiques. L?ensemble des pays ayant fait l?objet d?une étude en sont conscients et ont essayé d?associer la société civile, dès la définition des plans climat et environnement, avec notamment les assemblées citoyennes sur le climat évoquées précédemment dans les pays européens, mais qui, à l?exception de l?Irlande, n?ont pas toujours eu le succès attendu. Ainsi aux Pays-Bas, malgré les démarches d?association mises en place (Forums citoyens évoqués en 1.3.3), et des avancées sur les objectifs climatiques, les partis pro-climat ont subi une défaite significative lors des élections provinciales en 2023, reflétant une fracture entre les priorités écologiques et les préoccupations sociales des électeurs. Les aides financières accordées par le gouvernement pour la transition climatique étaient sans conditions de ressources ce qui a été interprété comme favorisant inutilement les plus hauts revenus du pays, sans pour autant permettre le soutien nécessaire aux plus pauvres qui n?ont pu investir pour limiter les surcouts de la facture énergétique. En Suède, l?absence de mécanisme de régulation des tarifs énergétique a provoqué une explosion des prix de l?énergie, consécutive à l?invasion de l?Ukraine par la Russie, et principal moteur de l?arrivée au pouvoir des partis opposés aux taxes écologiques. En Finlande, le cap ambitieux de la neutralité climatique dès 2035 est remis en cause par le nouveau gouvernement élu notamment en raison de la crainte des milieux économiques d?une incapacité à financer une telle ambition. Au Danemark également, la transition écologique qui vise une réduction de 70% des émissions d?ici 2030 est devenue un sujet de clivage électoral avec des critiques croissantes sur les impacts socio-économiques des politiques ambitieuses. Le décalage entre les attentes citoyennes et les politiques mises en place impactent fortement la capacité à poursuivre la planification climatique et environnementale. Hors Europe, d?autres mécanismes cherchent l?association de la société civile à la transition. En Afrique du sud, la société civile est présente dans la Commission présidentielle pour le climat, organe de gouvernance de la planification climatique : 4 représentants y sont commissaires en représentation d?un syndicat de travailleurs, d?une ONG environnementale, des acteurs de la recherche et des jeunes pour le climat. Cette volonté d?inclusivité et d?intégration dans les processus consultatifs préalable favorise la prise de décision, et répond au narratif politique du pays sur la transition juste. En Inde, l?initiative LiFE « Lifestyle for Environment » a pour vocation d?inciter les citoyens, les industries et les décideurs politiques du monde à adopter un mode de vie respectueux de l?environnement. La mission LiFE est envisagée comme un mouvement mondial visant à opérer un changement de paradigme en passant d'une consommation irréfléchie et destructrice à une utilisation réfléchie et délibérée des ressources nationales. Elle est portée par l?Inde à l?échelle internationale également dans le cadre du G20 et avec l?adoption d?une résolution à l?Assemblée générale des Nations unies pour l?environnement19. Pour sa mise en oeuvre, les outils numériques sont promus pour leur inclusivité et leur capacité d?exploiter l?ampleur des données nécessaires. En France, le portage politique a connu des crises avec la perte de cohérence dans les discours et les actions, illustrée par les débats autour de la Convention citoyenne pour le climat et les difficultés à traduire ses propositions dans la loi climat et résilience. Alors que la France dispose aujourd?hui d?une planification écologique, portée par le SGPE, l?ancrage de cette politique fait l?objet de remises en cause budgétaires, d?arbitrages défavorables au bénéfice de représentants des activités économiques (agriculture, principe du zéro artificialisation nette, politique de réindustrialisation), de moindre lisibilité de son positionnement administratif, qui nuisent à sa mise en place. On peut s?interroger si la fragilité de la planification écologique française ne découle pas notamment de sa non incarnation dans le discours politique ? quel futur désirable propose la 19 https://docs.un.org/fr/UNEP/EA.6/Res.8 PUBLIÉ https://docs.un.org/fr/UNEP/EA.6/Res.8 Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 29/60 planification française ? ? et de son absence de portage par les plus hautes autorités de l?Etat depuis janvier 2024. La planification écologique ne peut pas être seulement un outil administratif d?organisation de l?action de l?Etat et des collectivités. Elle doit être au service d?un projet de société, décrivant non seulement le chemin de la transition, mais également un point d?arrivée désirable autour duquel puisse se retrouver la société française dans sa diversité. Construire un narratif, fondé sur une vision de l?avenir du pays portée par le chef de l?Etat et le chef du gouvernement et partagée avec les citoyens, dans lequel la transition écologique est considérée comme un moyen et non une fin. 2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans un cadre juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous les secteurs d?activités 2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements internationaux La planification écologique doit répondre à des objectifs clairs qui déclinent les engagements internationaux. Certains pays, tels que le Rwanda et le Costa Rica, s'appuient sur leurs engagements internationaux en matière de climat et d'environnement pour justifier leurs politiques nationales et renforcer leur influence sur la scène mondiale. Pourtant classé parmi les pays les plus vulnérables au changement climatique, le Rwanda utilise sa politique nationale de transition pour asseoir sa diplomatie climatique et environnementale et bénéficier de financements internationaux. Le Costa Rica est reconnu comme un pionnier dans la lutte contre le changement climatique et la préservation de l'environnement, ayant lancé dès 2019 un Plan national de décarbonation, avec pour objectif d'atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. Ces initiatives ont valu au Costa Rica une reconnaissance internationale, notamment en recevant le prix « Champion de la Terre » des Nations Unies en 2019 pour son rôle de pionnier dans la lutte contre le changement climatique. De même, l?Afrique du sud et l?Indonésie font partie des premiers pays ayant bénéficié de partenariats internationaux pour leurs transitions énergétiques (JETP). Les cadres internationaux permettent à la fois de structurer les réponses nationales et de renforcer les outils de mise en oeuvre. Cette utilité d?intégrer la planification écologique dans un cadre juridique clair respectant les obligations internationales et européennes s?impose de manière croissante, comme en témoignent plusieurs décisions judiciaires récentes remettant en cause des stratégies ou trajectoires jugées insuffisamment ambitieuses. Ces cas illustrent que l'absence de clarté et de rigueur dans la planification écologique peut entraîner des sanctions judiciaires, forçant les gouvernements à revoir leurs politiques pour aligner leurs objectifs sur leurs engagements. Les Pays-Bas, avec le célèbre arrêt « Urgenda » de 2015, ont vu la condamnation du gouvernement par la Cour qui lui a ordonné de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 25 % d'ici 2020 par rapport à 1990, en vertu de ses obligations en matière de droits humains et des engagements climatiques internationaux. De manière similaire, en Allemagne, la Cour constitutionnelle a jugé en 2021 que la loi sur la protection du climat de 2019 était partiellement inconstitutionnelle, imposant une révision pour garantir des objectifs de réduction des émissions après 2030 et protéger les droits des générations futures. En Irlande, la Cour suprême a annulé en 2020 le Plan d'action pour le climat 2017-2022, arguant qu'il manquait de spécificité et n'était pas conforme à la loi de 2015 sur l'action climatique, qui exige des mesures précises pour atteindre les objectifs climatiques fixés. La faible ambition dans les plans initiaux de décarbonation a été critiquée pour son manque de spécificité et d?efforts dans des secteurs comme l?agriculture et le PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 30/60 logement. En Belgique, l?affaire climat (« Klimaatzaak ») a conduit à une injonction judiciaire imposant une réduction de 55 % des émissions de GES d?ici 2030, après que le tribunal a jugé insuffisantes les politiques nationales pour répondre aux obligations européennes et internationales. Au Royaume-Uni, dans son jugement du 18 juillet 2022, la Haute Cour de Justice avait jugé que la « Stratégie net zéro » (« Net Zero Strategy ») était « illégale » et « inadéquate », dans la mesure où elle ne respectait pas les obligations minimales de transparence fixées par la loi climat notamment pour évaluer la capacité du gouvernement à respecter le plafond de la 6ème période (2033-2037), ni ne contenait d?éléments suffisamment détaillés permettant au Parlement et au public de demander compte au gouvernement. En conséquence, la Haute Cour de Justice avait enjoint le gouvernement à présenter au Parlement une stratégie révisée d?ici le 31 mars 2023. Ces exemples soulignent l?importance de définir un cadre juridique robuste et ambitieux. Les actions en justice de ce type se multiplient, et rien n?indique que le mouvement va se ralentir. Une stratégie claire, assortie d'objectifs contraignants et spécifiques, garantit non seulement la conformité avec les engagements internationaux, mais aussi une protection contre des contestations judiciaires pouvant retarder la mise en oeuvre des politiques climatiques. La France a été confrontée à plusieurs condamnations judiciaires en raison de l'insuffisance de ses actions face au changement climatique20, illustrant la nécessité d'établir un cadre juridique conforme aux engagements internationaux et européens. La planification écologique mise en place en France a repris les objectifs internationaux, européens et nationaux dont certains figurent dans un cadre juridique. Néanmoins, la planification française ne constitue pas un outil juridique contraignant. Elle constitue tout au plus un cadre d?action justifiant les choix de mise en oeuvre des politiques publiques. Cette absence de cadre juridique contraignant fragilise sa capacité à entrainer les choix de politiques publiques dans le sens de l?atteinte des objectifs. Inscrire dans la loi l?obligation d?une planification écologique 2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace et juste La planification écologique, pour être efficace et équitable, doit aller au-delà des obligations climatiques fixées par l?Accord de Paris. Elle doit englober l?ensemble des enjeux écologiques, notamment en établissant des liens avec les impacts de la perte de biodiversité et de la pollution, tout en favorisant des synergies entre les politiques de lutte contre les effets du changement climatique et de restauration de la biodiversité. Les exemples internationaux montrent l'importance de cette approche holistique. Singapour intègre les enjeux de biodiversité, d?eau et de climat dans son plan à long terme. Des projets comme les corridors écologiques et les infrastructures vertes urbaines mettent en avant l?interdépendance entre les politiques de lutte contre la perte de biodiversité et l?adaptation climatique. L?utilisation d?eaux recyclées illustre également les synergies entre gestion des ressources et objectifs industriels, démontrant une planification écologique systémique. L?Afrique du Sud a développé une stratégie pour les aires protégées et des lois environnementales fortes, couvrant près de 9,2 % du territoire terrestre et 15 % de son littoral. Ces mesures visent à freiner la perte de biodiversité tout en contribuant à la résilience face au changement climatique, en 20 En février 2021, le tribunal administratif de Paris a reconnu l'État français responsable de "manquements dans la lutte contre le changement climatique", le tenant ainsi responsable d'un préjudice écologique (« L'Affaire du Siècle »). En juillet 2021, le Conseil d'État, saisi par la commune de Grande-Synthe, a enjoint au gouvernement français de prendre, dans un délai de neuf mois, toutes les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, conformément aux engagements de la France. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 31/60 établissant un lien direct entre protection écologique et durabilité. La Chine a intégré la biodiversité dans son 13ème plan quinquennal et mis en place un système national d?aires protégées, incluant des parcs nationaux. La centralisation de la gestion environnementale sous un ministère unique a permis une meilleure coordination des politiques liées à la biodiversité, à la pollution et au climat, illustrant une gestion intégrée des ressources naturelles. L'Indonésie a adopté une planification nationale intégrant des objectifs de faible émission carbone et de préservation de la biodiversité. Le ministère de la Planification du développement national (BAPPENAS) a mis en place une évaluation environnementale stratégique pour s'assurer que les plans incluent des indicateurs liés au climat, à la biodiversité et à la gestion des ressources naturelles. Cette approche est soutenue par un modèle intégré (IV204521 ), qui relie économie, société et capital naturel, permettant de mieux comprendre les interactions entre la conservation de la biodiversité et la gestion durable des ressources. Le Brésil met en oeuvre un plan de transformation écologique (PTE) articulé autour de la lutte contre la déforestation et la promotion de la bioéconomie. Ce plan combine des mesures environnementales et économiques pour atteindre zéro déforestation, tout en soutenant des initiatives locales et la valorisation des produits de la biodiversité brésilienne. Par ailleurs, l?Institut brésilien de l?environnement (IBAMA) joue un rôle crucial dans la surveillance et la mise en oeuvre des politiques liées à la biodiversité, tandis que le pays utilise des systèmes avancés de surveillance de la déforestation, démontrant ainsi l?interconnexion entre gestion des écosystèmes et lutte contre le changement climatique. A l?inverse, les pays ayant centré leur action sur une seule politique échouent à transformer l?essai ou ont des difficultés à poursuivre leur action. Ainsi le Costa Rica qui n?a finalement intégré dans sa planification que la politique forestière se trouve confronté à des difficultés de financement de la poursuite de sa politique et fait face à des contestations populaires sur la non atteinte d?autres objectifs. L?efficacité de la planification écologique repose sur une approche globale, incluant les questions complexes et sensibles. Ignorer ces enjeux risque de limiter l'impact des politiques écologiques et de compromettre la transition nécessaire. Plusieurs exemples montrent les défis que représentent ces sujets délicats. Les Pays-Bas, avec leur modèle agricole intensif, sont confrontés à des niveaux élevés de pollution par les nitrates et les émissions de méthane. Ces problèmes affectent la biodiversité et la qualité des sols. La mise en oeuvre de politiques visant à réduire l?intensité de l?élevage et l?usage d?engrais a déclenché des protestations de la part des agriculteurs, soulignant les défis liés à l?acceptabilité sociale des mesures nécessaires. L?incapacité à inclure les parties prenantes et à proposer des alternatives viables complique l?application de ces politiques. La dépendance au charbon en Inde, Afrique du Sud et Indonésie est un frein à leur transition énergétique. En Inde, le charbon représente plus de 70 % de la production d?électricité. Bien que le pays investisse dans les énergies renouvelables, la transition est entravée par la dépendance économique et sociale au charbon, qui emploie des millions de travailleurs. En Afrique du Sud, où le charbon fournit 86 % de l?électricité, les efforts pour décarboner sont limités par des contraintes économiques, des infrastructures vieillissantes et une opposition sociale forte. La transition juste, soutenue par des mécanismes internationaux comme le Partenariat pour une transition énergétique juste (JETP), est essentielle pour éviter une fracture sociale. En Indonésie, le charbon est également central dans la production énergétique, et des retards dans l?adoption de politiques ambitieuses ralentissent la transition énergétique nécessaire pour aligner le pays sur ses engagements climatiques. À Singapour, bien que le pays se positionne comme leader régional en matière de finance verte et de technologies, la planification reste centrée sur des objectifs 21 https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the- Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf PUBLIÉ https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 32/60 économiques, parfois au détriment de mesures structurelles plus contraignantes nécessaires pour réduire durablement les émissions de gaz à effet de serre. L?Allemagne peine à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports, malgré son engagement dans la décarbonation. Les retards dans l?électrification des infrastructures et la promotion insuffisante des mobilités douces, comme le rail ou le vélo, freinent les progrès et ont même conduit à déstabiliser la coalition au pouvoir. Le ministre des transports, Volker Wissing (FDP, libéral), avait refusé à plusieurs reprises de présenter un programme de réduction des émissions de GES dans son secteur, suite aux échecs répétés à atteindre les objectifs fixés (trois années consécutives en 2023). Cette situation a entraîné une révision de la loi fédérale sur la protection du climat en avril 2024, supprimant le caractère contraignant des objectifs sectoriels et introduisant un objectif global intersectoriel et pluriannuel. Cette modification est considérée comme un compromis interne à la coalition au pouvoir, visant à éviter une escalade politique tout en maintenant les engagements climatiques généraux de l'Allemagne. Cette situation illustre que des secteurs difficiles doivent être traité en priorité dans la planification pour éviter des retards coûteux en termes climatiques. A l?inverse, des exemples de prise en compte de secteurs difficiles ont permis de mieux préparer la transition. En Allemagne, un fonds d?avenir pour l?industrie automobile doté d?un milliard d?euros pour la période 2021-2025, afin de soutenir la transformation de ce secteur stratégique a été lancé. En collaboration avec les syndicats (IG Metall), des réseaux régionaux de transformation ont été établis dans les bassins industriels. Ces initiatives, qui intègrent des universités, chambres d'industrie, centres de formation et agences pour l?emploi, ont pour but d?élaborer des stratégies adaptées aux besoins locaux tout en assurant le maintien de l?emploi et la reconversion vers des technologies plus durables. Le Danemark, a introduit une taxe carbone sur l?agriculture, ciblant les émissions de méthane issues des élevages bovins et porcins. Entrant en vigueur progressivement d?ici 2030, cette taxe est accompagnée de déductions fiscales pour les agriculteurs afin de limiter les effets négatifs et d?investir dans des technologies vertes. Cette mesure a été adoptée grâce à un processus de concertation impliquant l?Etat, les agriculteurs et les ONG environnementales qui a abouti à un accord largement validé par le Parlement. Ces mesures visent à financer la transition écologique tout en soutenant les producteurs affectés. L?Indonésie, premier producteur mondial d?huile de palme, a mis en oeuvre des politiques pour promouvoir des pratiques responsables. Un moratoire permanent sur la déforestation et le drainage des tourbières a été instauré, accompagné d?un projet national de certification pour la durabilité. Des aides ont été déployées pour soutenir les petits producteurs dans l?adoption de méthodes modernes, tout en luttant contre la déforestation illégale et les feux de forêts. Une même politique de protection des tourbières, utilisées par la population comme appoint pour le chauffage, a également été déployée en Irlande. Ces exemples démontrent qu?une planification ciblée et des incitations bien conçues peuvent permettre des progrès significatifs dans des secteurs critiques tout en minimisant les impacts socio- économiques. La France peut s?enorgueillir d?avoir également lancé un plan de décarbonation de son industrie, comme en Allemagne, ciblant les 50 entreprises les plus émettrices tout comme d?avoir mis en place une planification globale intégrant tous les secteurs d?activité et toutes les politiques. Néanmoins, elle peine à réussir l?intégration concrète de son secteur agricole dans la planification écologique, ce qui laisse des possibilités de constante renégociation à la baisse d?autres objectifs figurant dans la planification comme la réduction de l?usage des pesticides et des nitrates et la protection des espaces naturels et de la biodiversité. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 33/60 La planification écologique doit intégrer tous les secteurs d?activités et l?ensemble des politiques doivent être mises en oeuvre, en adaptant si nécessaire la trajectoire et les financements pour surmonter les difficultés. 2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante 2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique ? Les bons exemples internationaux de planification écologique : Peu des pays examinés disposent de structures transversales pilotant leur planification écologique, souvent en raison de l?absence de planification globale, mais parfois ces structures sont absentes même dans la planification climatique. A part la France et le SGPE, on peut néanmoins citer le ministère indonésien de la Planification du Développement National (BAPPENAS), chargé de la planification écologique et du développement durable. Placé directement sous l'autorité du président, il joue un rôle clé dans la définition des objectifs nationaux et dans leur coordination interministérielle. Il est responsable de l?élaboration et de la synchronisation des plans nationaux de développement durable. Il coordonne les ministères techniques. Il joue également un rôle crucial dans la mise en oeuvre territoriale en soutenant les provinces dans leurs plans d?atténuation des émissions de carbone. Le BAPPENAS utilise des outils tels que des modèles d'évaluation stratégique (par exemple GLOBIOM-Indonésie22) pour planifier et synchroniser des politiques cohérentes, renforçant ainsi la capacité de déclinaison territoriale grâce à l?implication des provinces. Parmi les nouvelles organisations, le Brésil a réintroduit en 2023 un comité interministériel pour le changement climatique, dirigé par le chef de cabinet de la présidence et impliquant plusieurs ministères. Ce comité supervise la révision de la politique nationale sur le changement climatique et coordonne les plans d?atténuation et d?adaptation sectoriels. Il assure également la cohérence entre les mesures prises par différents ministères, tout en mobilisant des acteurs financiers comme la Banque Nationale de Développement Économique et Social (BNDES) pour financer les projets liés à la transition écologique. Au Japon, le Comité exécutif de la stratégie GX (« Green Transformation »), créé en juillet 2022, est présidé par le Premier ministre et piloté par le ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (METI). Il a pour mission d'élaborer la "politique fondamentale pour la réalisation de la GX". Le comité supervise les mesures transversales en matière de décarbonation et de transformation verte, avec une collaboration entre le METI, le ministère de l'Environnement (MOE), et le ministère des Finances (MOF) pour coordonner les enjeux de production énergétique, d'industrie et de conservation environnementale. Il est certes trop tôt pour analyser les résultats dans ces deux pays, mais la tendance à la création de structures transversales témoigne de la prise de conscience de leur utilité. Bien que limité aux enjeux climatique, l?Office de Planification Environnementale (PBL) agit aux Pays-Bas comme un outil de pilotage transversal pour la politique climatique. Cet organisme 22 https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf PUBLIÉ https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 34/60 indépendant évalue annuellement les progrès de la politique climatique et recommande des ajustements pour garantir l'atteinte des objectifs. L?efficacité du PBL repose sur sa légitimité, qui lui permet de coordonner différentes parties prenantes et de s?assurer que les politiques régionales et nationales sont alignées avec les engagements internationaux. Il dispose de moyens lui permettant de réaliser sa tâche tant sur le plan des ressources humaines que budgétaires. ? Les conséquences de l?absence d?une planification centralisée : La difficulté à mettre en oeuvre une planification écologique sans programmation centralisée se voit à l?inverse dans d?autres exemples. Cette absence d'une organisation unique et puissante complique la prise de décision et ralentit la mise en oeuvre des politiques. L?absence de structure de coordination peut ainsi conduire à des problèmes de coordination interministérielle comme déjà évoqué en Allemagne. Aux Pays-Bas, le manque d'une structure de coordination globale a conduit à une mise en oeuvre fragmentée des politiques climatiques et agricoles. Bien que la planification territoriale intègre les enjeux de biodiversité et de gestion des risques d'inondation, la transformation agricole reste un point de blocage majeur. L?insuffisance du poids d?une instance de coordination pourtant existante produit les mêmes effets de fragilisation de la planification écologique. En Roumanie, la gouvernance de la planification écologique repose sur un comité interministériel pour le changement climatique, présidé par le Premier ministre et impliquant divers ministères et agences. Cependant, ce système est marqué par une coordination complexe et intermittente, tandis que le rôle du conseiller d'État chargé de la transition écologique est limité à un rôle de facilitateur sans réelle autorité décisionnelle. En Belgique, la Commission Nationale Climat (CNC), créée en 2002, vise à coordonner les politiques climatiques entre les niveaux fédéral et régional. Elle est composée de représentants des gouvernements fédéral et régionaux, épaulée par un secrétariat permanent et 14 groupes de travail thématiques. Cependant, son rôle reste majoritairement évaluatif plutôt que décisionnel, ce qui limite son efficacité en termes de pilotage stratégique. La structure fédérale des pays pose des défis supplémentaires. Les objectifs et politiques climatiques des provinces ou entités décentralisées ne sont pas toujours alignés avec la stratégie nationale, ce qui complique l'harmonisation des efforts. Par exemple, des politiques comme le développement de l?éolien en mer nécessitent une collaboration étroite entre le gouvernement central et les gouvernements locaux, mais cette coordination reste imparfaite. Le manque de coordination freine la mise en oeuvre des projets essentiels et ralentit la transition écologique au niveau national. Ainsi, en Allemagne, les Länder, responsables de nombreuses politiques environnementales, disposent d?une grande autonomie. Cette configuration complique l?alignement des actions régionales avec les objectifs nationaux, surtout dans des secteurs comme le transport et l?énergie. La Belgique se caractérise par une gouvernance climatique fragmentée, reflétant sa structure institutionnelle complexe. Les compétences sont partagées entre l?État fédéral et les trois régions (Wallonie, Flandre, Bruxelles-Capitale), ce qui complique la coordination des politiques environnementales et climatiques. Chaque région dispose de son propre plan de transition écologique, ce qui entraîne des incohérences dans les priorités et les méthodologies adoptées. Par exemple, la Flandre et la Wallonie ont des approches divergentes sur la gestion agricole et les émissions industrielles. Au Royaume-Uni, les 4 nations ont leurs propres cibles de réduction des émissions et leurs propres politiques en matière de changements climatiques, mais ils contribuent également à l?atteinte des cibles intermédiaires du Royaume Uni et à la mise en place de politiques dans l?ensemble du pays. S?il existe une réunion bimestrielle entre les ministres des 4 nations pour PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 35/60 discuter des politiques climatiques23, les objectifs et politiques des nations ne sont pas encore parfaitement alignées avec la stratégie Net Zéro. Cette coopération imparfaite se reflète en particulier dans le développement de certaines politiques indispensables pour l?atteinte des objectifs climatiques des nations pour lesquelles le Gouvernement central détient une compétence exclusive (ex : capture et stockage du carbone) ou des politiques nationales nécessitant une étroite association des gouvernements compétents (ex : développement de l?éolien en mer en Ecosse). On peut donc en déduire que la planification écologique nécessite un pilotage centralisé, confié à une organisation dédiée, rattachée à l?échelon politique le plus élevé, ce qui se rapproche du modèle français qui est donc à préserver. Cette organisation doit également être en mesure d?animer le déploiement de cette planification dans les territoires afin d?en garantir la cohérence. Maintenir le SGPE auprès du premier ministre, le renforcer dans son rôle de pilotage de la planification écologique, en appui de l?action des ministères, et d?animation de son déploiement dans les territoires. 2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter L?évaluation régulière et indépendante de la planification écologique est cruciale pour garantir son efficacité. Les bons exemples, comme celui des Pays-Bas avec PBL déjà cité, montrent que l?investissement dans des systèmes de collecte de données et des évaluations indépendantes est un levier stratégique pour réussir la transition écologique. Appuyer sa politique de transition sur des données fiables et transparentes est une condition sine qua non pour identifier les réussites et corriger les échecs. Les contre-exemples illustrent que l?absence de fiabilité dans les données peut compromettre la crédibilité et l?impact des politiques publiques. Ainsi, en Indonésie, le défi majeur réside dans la fragmentation des données et le manque de capacités institutionnelles pour les centraliser et les vérifier. Bien que le BAPPENAS tente d?intégrer les indicateurs climatiques dans les plans nationaux, les provinces et les districts ne disposent pas toujours des infrastructures nécessaires pour collecter des données fiables. Cela entraîne des incohérences dans les rapports nationaux et freine les efforts de coordination. L?Afrique du sud rencontre le même problème : alors qu?elle dispose d?une méthodologie ? le « Climate Change Response Monitoring & Evaluation System » - intéressante car visant à analyser les données dans des démarches à la fois top-down et bottom-up, et couvrant les champs de l?atténuation, de l?adaptation et du financement, elle peine dans l?agrégation de données en dehors du système énergétique. En Chine, malgré une capacité impressionnante de collecte de données, la transparence et la fiabilité des informations posent problème. Les rapports environnementaux sont souvent influencés par des pressions politiques ou des manipulations locales, rendant difficile une évaluation objective. Par exemple, les statistiques sur la pollution de l?air ou les émissions industrielles peuvent être sous-évaluées dans certaines régions pour éviter des sanctions administratives, ce qui compromet la précision des politiques correctives. A l?inverse, la planification écologique soutenue par une collecte de données robustes, s?appuyant sur de multiples sources, notamment des ministères, des agences environnementales et des bases 23 https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change- communique-13-march-2024 PUBLIÉ https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024 https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024 Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 36/60 de données publiques, et indépendante24 permet l?évaluation régulière (idéalement annuellement) des progrès des politiques climatiques. Par exemple, le PBL utilise des outils de modélisation pour anticiper les impacts des mesures et proposer des ajustements avant qu?il ne soit trop tard. L'Irlande dispose de deux structures clés pour l'évaluation de sa planification écologique : ? L?Agence de protection environnementale (EPA) : indépendante, elle fournit des données et des rapports réguliers sur les émissions de gaz à effet de serre, la qualité de l?air, et d'autres indicateurs environnementaux. Ces rapports alimentent les débats politiques et permettent d?ajuster les politiques climatiques. ? Le Conseil consultatif sur le changement climatique (CCAC) : cet organe indépendant donne des recommandations stratégiques et suit les progrès des politiques environnementales dans le cadre de rapports réguliers soumis au gouvernement et au Parlement. En Suède, le Haut Conseil pour le climat est chargé d?évaluer si les politiques publiques permettent d?atteindre les objectifs climatiques nationaux. Il réalise une analyse indépendante des décisions gouvernementales et des trajectoires climatiques, tout en mettant en évidence les mesures supplémentaires nécessaires pour combler les écarts entre les objectifs et les résultats attendus. Ces évaluations sont basées sur des données scientifiques fournies par l?Agence suédoise de l?Environnement et sont publiées annuellement. Créé par la loi climat de 2008, le Comité pour la changement climatique (« Committee for Climate Change ») au Royaume-Uni occupe un rôle central dans l?évaluation des politiques climatiques (sur l?adaptation comme sur l?atténuation) et la définition des budgets carbone. Son mandat est par ailleurs renforcé par l?articulation étroite qu?il entretient avec le Parlement britannique et l?obligation donnée au gouvernement de répondre aux recommandations du comité d?experts. Grâce à cette approche, les décisions politiques sont ajustées régulièrement pour aligner les actions avec les objectifs climatiques. En Irlande, en 2023, l'EPA a signalé que le pays n'atteindrait qu'une réduction de 29 % des émissions d'ici 2030, bien en deçà de l'objectif de 51 %. Ce constat a conduit à une révision des priorités et des politiques climatiques, notamment dans les secteurs de l?agriculture et du transport, pour réduire cet écart. L?EPA continue de jouer un rôle central en fournissant des données scientifiques indépendantes pour guider les ajustements nécessaires. En Finlande, le « Panel climatique », un organe scientifique indépendant, a publié en 2024 un rapport soulignant l'insuffisance des efforts dans le secteur UTCATF (utilisation des terres, changement d?affectation des terres et foresterie). Il a recommandé des actions immédiates pour restaurer les puits de carbone, ce qui a incité le gouvernement à revoir ses politiques forestières et à allouer des financements supplémentaires à la gestion durable des forêts. Par ailleurs, bien que non appliqué pour le moment aux sujets climatiques, le Royaume-Uni a également expérimenté un modèle original d?évaluation des politiques publiques : le réseau des « What Works Centres », centres thématiques chargés de faire la synthèse des connaissances dans leur domaine afin d?éclairer la décision publique. Pour évaluer leurs politiques, les ministères britanniques s?adressent régulièrement à des consortiums d?acteurs externes réunissant des universités, des organismes indépendants de recherche et des cabinets de conseil. Cette externalisation constitue pour la presse et l?opinion publique une garantie de qualité des évaluations et de crédibilité de leurs résultats. Depuis 2015, un panel d?experts de l?administration et du monde académique, le « Cross- Government Trial Advice Panel » (CG-TAP), est également à la disposition des ministères pour les aider à mettre en oeuvre des évaluations d?impact. Avec 24 L?indépendance dont il est fait mention ici renvoie à une indépendance par rapport au pouvoir politique, au sens autorité administrative indépendante en France, et par rapport aux lobbies économiques et sociétaux (syndicats et monde associatif notamment). PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 37/60 une approche similaire, l?Académies des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (NASEM) aux Etats-Unis, organisation privée à but non lucratif qui regroupe de grands chercheurs du pays, publie des rapports sur les thématiques de la transition écologique, tels que « l?Accélération de la décarbonation aux Etats-Unis » (2024), « L?intégration du changement climatique et de la politique climatique dans la modélisation macro-économique » (2024), « Intégrer les sciences humaines pour adapter les réponses sociétales aux changements environnementaux » (2023), produisant une évaluation externe de l?action de l?administration fédérale. La question de l?aspect contraignant ? que la contrainte s?appuie sur la norme ou sur une pression sociale et morale ? de ces modalités de contrôle et d?évaluation est également centrale dans leur capacité à réorienter les politiques publiques. Ainsi en Afrique du sud, le rôle d?évaluation joué depuis 2020 par la Commission présidentielle sur le climat renforce le message critique sur le retard pris dans la mise en oeuvre des politiques, que les autres dispositifs d?évaluation sud-africain sur le climat et la biodiversité, de par leur nature non contraignante, ne pouvaient pas porter. Le modèle français de planification écologique ne dispose pas d?un tel outil d?évaluation. Certes, le Haut Conseil pour le Climat (HCC), créé en 2018, joue un rôle d?évaluation étant un organisme indépendant chargé d'évaluer l'action publique en matière de climat. Composé d'experts issus de diverses disciplines, il analyse la cohérence des politiques françaises avec les engagements nationaux et internationaux, notamment l'Accord de Paris, et formule des recommandations pour améliorer leur efficacité. Il publie des rapports annuels et des avis spécifiques évaluant les progrès de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le respect des budgets carbone, et l'adaptation au changement climatique, publications ayant vocation à éclairer les décideurs politiques et le public sur l'état de la transition écologique en France. Néanmoins, la Cour des comptes, avec l'appui du HCC, a publié en mars 2024 un rapport intitulé « Évaluation annuelle de la mise en oeuvre des mesures prévues par la loi climat et résilience » qui conclut que les dispositifs actuels de suivi et d'évaluation des politiques climatiques sont insuffisants pour mesurer efficacement les progrès réalisés et que plusieurs recommandations du HCC, notamment en matière de gouvernance et de coordination des actions climatiques, n'ont pas été entièrement suivies d'effets. En mai 2023, l'IGF a publié un rapport intitulé « Adaptation de la fiscalité aux exigences de la transition écologique » recommandant une refonte de la fiscalité pour mieux intégrer les objectifs climatiques, en ligne avec les préconisations du HCC sur l'utilisation d'instruments fiscaux pour encourager la transition écologique, et insistant sur la nécessité d'un suivi rigoureux des dépenses publiques liées à l'environnement, rejoignant les recommandations du HCC sur la transparence budgétaire et l'affectation des ressources. Cependant, non seulement il ne dispose pas de l?autorité nécessaire pour imposer les constats que font apparaitre ses évaluations, mais en outre, le HCC est centré uniquement sur les enjeux climatiques, et non sur les autres aspects de la transition écologique. Ce constat a déjà fait l?objet d?évocation de réformes telles qu?une évolution du HCC ou la création d?un Défenseur de l?environnement sur le modèle de celui du Défenseur des droits, mais ces idées n?ont jamais prospéré. La France doit se doter d?une entité d?évaluation de sa planification écologique indépendante et reconnue qui appuiera le SGPE dans sa démarche de pilotage de la planification écologique. 2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique L?obligation de rendre des comptes sur la mise en oeuvre de la planification écologique est cruciale pour garantir la transparence et l?efficacité des politiques publiques, mais aussi leur acceptabilité PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 38/60 sociale. Le narratif de la transition doit s?appuyer sur une redevabilité politique afin d?être appréhendé et déployé par les élus locaux du pays. Le Parlement peut ainsi avoir un rôle à jouer quand il est associé à la prise de décision sur la planification écologique ou à l?évaluation de cette politique, étant alors en capacité de constater les difficultés rencontrées par les pouvoirs publics en charge. C?est ce pari d?association du Parlement que font les Pays-Bas, la Finlande, la Suède, le Danemark ou encore l?Irlande et le Royaume-Uni. Ainsi, en Irlande, le Premier ministre publie annuellement un rapport d?étape sur les progrès réalisés dans le cadre du Plan d'action climat. Ce rapport est complété par les analyses de l?EPA qui alimentent les débats parlementaires avec des projections et des évaluations des politiques mises en oeuvre. Ces échanges permettent d?identifier les lacunes et d?ajuster les stratégies, renforçant ainsi la redevabilité du gouvernement envers le Parlement et les citoyens. En Suède, la loi cadre climatique impose au gouvernement de publier chaque année un rapport intégré au projet de loi de finances. Ce document évalue l?écart entre les objectifs climatiques et les résultats obtenus, permettant une comparaison transparente des trajectoires. Le Parlement utilise ces rapports pour surveiller et débattre des performances du gouvernement en matière de transition écologique. À Singapour, les « Committee of Supply » sont des plateformes où chaque ministère présente et justifie ses actions devant le Parlement lors des discussions budgétaires annuelles. Cette démarche permet d?assurer une redevabilité politique sur la mise en oeuvre des initiatives du Plan Vert (« Green Plan ») et d?informer les décisions budgétaires à venir. Au Danemark, chaque année, le Ministère du Climat, de l?Énergie et de l?Approvisionnement, est chargé de présenter au Parlement un programme climatique (« klimaprogram »). C?est l?occasion de faire le point sur le niveau de réalisation des objectifs nationaux tout comme des initiatives et mesures prévues en matière de climat. La planification écologique ne fait pas en France l?objet d?une présentation systématique devant le Parlement. Elle ne fait donc pas l?objet d?une confrontation en matière de redevabilité politique, ce qui affaiblit sa capacité à être appréhendée par le personnel politique. Une opération de formation à très grande échelle de l?administration publique à la transition écologique a été lancée dans le cadre de la planification écologique. Une même démarche n?a pas été menée auprès des députés ou des sénateurs, ni des élus régionaux ou locaux en dehors de la déclinaison territoriale actuellement engagée de la planification écologique. Leur adhésion à la transition n?est donc pas garantie par une démarche d?échange ou d?information et peut donc pâtir d?un déficit de compréhension fine des enjeux mais également de la perception des contraintes dans sa mise en oeuvre. Pire, la création d?instances citoyennes sans rôle clairement défini au préalable, telle que la convention citoyenne pour le climat, a conduit les parlementaires à se sentir dessaisis de leur rôle de législateurs sur ces enjeux les poussant à diverses surenchères lors de l?adoption de la loi climat-résilience, ce qui a largement compliqué les débats et conduit à l?abandon ou la réduction de l?ambition de certaines mesures. La planification écologique doit faire l?objet d?un suivi annuel devant le Parlement, qui permettra d?évaluer si la trajectoire est respectée et de définir les mesures à mettre en place si ce n?est pas le cas. Ce suivi sera alimenté par la publication en amont d?un rapport annuel de l?organe d?évaluation indépendant. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 39/60 2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle 2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050) Une planification écologique efficace repose sur une trajectoire claire, articulée autour d?échéances courtes, moyennes et longues. Cette approche garantit une visibilité accrue pour les acteurs économiques et permet de déployer des politiques ambitieuses. Singapour dispose d?un plan à long terme, révisé en 2021, pour projeter son développement sur 50 ans. Ce plan inclut des projets ambitieux comme la reconquête de terres sur la mer avec le projet "Long Island" pour répondre à la montée des eaux. Les infrastructures urbaines, économiques et naturelles sont intégrées dans cette vision, renforçant la résilience climatique tout en garantissant la durabilité urbaine. Cette perspective de long terme garantit la confiance des acteurs économiques qui nous l?ont exprimé lors de notre visite sur place. L?Indonésie articule sa planification autour d?un plan national de développement à long terme (RPJPN), couvrant 20 ans, et d?un plan à moyen terme (RPJMN), révisé tous les 5 ans pour refléter les priorités présidentielles. Adopté en janvier 2024, le RPJPN "Indonésie Dorée 2045" cible la neutralité carbone et intègre des objectifs socio-économiques et écologiques, tels que le renforcement des capacités face aux chocs environnementaux. Ce plan de long terme permet d?assurer que la transition entre deux présidents ne remettra pas en cause les engagements de long terme, tout en laissant la place aux adaptations politiques découlant nécessairement des changements démocratiques. L?Union européenne développe également des plans climatiques basés sur des échéances multiples. Par exemple, la stratégie 2030-2050 fixe des objectifs intermédiaires en termes de réduction des émissions et d?adaptation, tout en proposant des mécanismes financiers à long terme pour soutenir les transitions nationales. Les Pays-Bas ont mis en place une planification à long terme de la gestion de l?eau, essentielle dans un pays en partie situé sous le niveau de la mer. Leur approche inclut des mesures pour la prévention et la gestion des inondations, combinant solutions infrastructurelles et préservation des écosystèmes. Cette stratégie repose sur une vision à 50 ans, garantissant la sécurité hydrique tout en répondant aux défis climatiques. Au Royaume-Uni, des objectifs de long et moyen terme (réduction des émissions de GES de 81% d?ici 2035 par exemple) s?accompagnent de planifications successives sur 5 ans, sous la forme de budgets carbone, ce qui permet d?allier une planification de long terme avec des échéances de plus court terme sur lesquelles le gouvernement est redevable. Une telle visibilité est particulièrement importante pour accompagner les politiques d?adaptation (Pays-Bas sur les inondations), de reconquête de la biodiversité (Costa Rica avec la reconquête forestière, Afrique du sud avec les aires protégées) mais également dans des objectifs de transformation de filières économiques - politique agricole, réindustrialisation ? (voir l?exemple de Singapour sur l?eau et la politique industrielle) ou de gestion de l?étalement urbain (Portland, Singapour). La planification écologique de la France se limite à 2030 et peine à décliner des objectifs pour 2040 et au-delà, même si l?objectif de neutralité carbone en 2050, celui de l?absence d?artificialisation nette en 2050 ou les objectifs intermédiaires fixés à l?échelle communautaires devraient la pousser dans cette direction. Ce manque de visibilité nuit à la crédibilité de la politique et encourage sa remise en cause régulière. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 40/60 La France doit se doter d?une planification à échéance 2040 et à échéance 2050 qui doit intégrer ses objectifs en matière d?adaptation et de reconquête de la biodiversité. 2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels Une fois le calendrier de la transition établi sur les court, moyen et long termes, cette visibilité calendaire sur le plan de transition écologique nécessite d?être accompagnée de perspectives budgétaires permettant la mise en oeuvre des actions du plan. La planification de la transition écologique doit ainsi faire l?objet d?une planification budgétaire claire et pluriannuelle. Cette visibilité apporte de la certitude aux investissements publics et privés qui doivent être engagés. Sans une telle visibilité, l?action est freinée et peine à se déployer. La Commission européenne l?avait bien compris lors du lancement du Plan vert de l?Union européenne : il s?appuie sur l?annonce de 1 000 milliards d?euros d?investissements durables au cours de la décennie. Ce plan combine des fonds provenant du budget de l'UE, du système d'échange de quotas d'émission (ETS) et du programme InvestEU, qui vise à attirer des investissements publics et privés. Les fonds de cohésion de l'UE soutiennent les pays et régions dans la mise en oeuvre de projets contribuant au « Green Deal ». Les États membres doivent consacrer au moins 30 % des fonds reçus du Fonds européen de développement régional (FEDER) à ces priorités. De plus, 37 % du Fonds de cohésion est spécifiquement destiné à atteindre la neutralité climatique d'ici 2050. La politique agricole commune a également été renforcée dans son volet environnemental (au moins en affichage au niveau européen) pour accompagner la stratégie de la ferme à la fourchette. Cette programmation budgétaire de l?Union européenne a facilité la planification budgétaire nationale des Etats membres, qui se sont également appuyés sur les plans de relance post crise COVID lancés au sein de l?UE. De même, l?administration Biden aux Etats-Unis a déployé sa politique climatique dans le cadre d?une « nouvelle politique industrielle » qui s?est traduite par cinq lois appuyées sur des financements publics : la loi sur l?énergie de décembre 2020 prévoit 7 milliards de dollars sur 5 ans, la loi bipartite sur l?infrastructure de novembre 2021 y consacre 454 milliards de dollars, la loi sur la réduction de l?inflation (Inflation réduction Act) d?août 2022 prévoit 370 milliards de dollars sous forme de crédits d?impôt, de subvention et de prêts, l?acte « puces et sciences » prévoit enfin plus de 60 milliards de dollars pour la recherche-développement (semi-conducteurs, technologies sans fil notamment). Cette problématique se retrouve dans d?autres pays : l?annualité budgétaire ou l?émergence de nouvelles priorités nuisent à la mise en place de financements pluriannuels et rendent le financement de la planification écologique dépendant des autres choix budgétaires, parfois en contradiction avec son inscription dans le temps long. L?usage de fonds dédiés à la transition écologique ? comme le Fonds vert en France ? permet aux pays l?affichage des subventions publiques affectées au plan de transition écologique et peut, en cas d?affectation de certaines recettes, à la fois garantir un financement pluriannuel et faciliter l?acceptation par la population du financement de la transition de long terme, prenant notamment appui sur le principe pollueur-payeur. Depuis 2023, l?Allemagne s?est dotée d?un fonds pour le climat et la transformation (KTF), alimenté par les recettes du système national de tarification du CO?, c'est-à-dire la taxe carbone appliquée aux émissions provenant de la combustion de combustibles fossiles. Cependant, en novembre PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 41/60 2023, la Cour constitutionnelle fédérale allemande a déclaré inconstitutionnel le transfert de 60 milliards d'euros de crédits non utilisés, initialement destinés à la gestion de la pandémie de COVID-19, vers le KTF. Cette décision a entraîné une révision du financement du fonds, nécessitant des ajustements pour maintenir les programmes clés de financement de l'énergie et des infrastructures. La Belgique a également mis en place un « Fonds de transition écologique », dont la mission est valable pour 30 ans et renouvelable, et qui sert de courroie de transmission pour les fonds européens vers les entreprises et les projets de réduction des émissions. Le Danemark a annoncé en juin 2022 la mise en place d?un « Fonds Vert » de 53,5 milliards de couronnes (7,2 milliards d?euros) provenant de recettes fiscales qui devraient alimenter les caisses de l?Etat entre 2024 et 2040. C?est également le cas en Finlande, en Irlande, aux Pays-Bas, au Japon, à Singapour. Hors Union européenne, les pays recourent également à des fonds dédiés. Le Rwanda appuie sa politique de transition environnementale sur un fond spécifique : le « Rwanda Green Fund » ou FONERWA, établi dès 2012. Le Brésil a doté sa politique sur le changement climatique d?un fond fédéral spécifique, doté notamment de 10 milliards de reals par la levée d?obligations vertes. Il a même plus récemment doté sa politique forestière d?un Fonds national pour la mise en valeur des forêts, outil de sa planification forestière à grande échelle. Il est également question en Chine d?un « fonds national de transformation à faible émissions de carbone » ou d?un fonds de développement vert Ces fonds peuvent être utilisés par les pays pour doter les collectivités locales afin d?accompagner la transition écologique sur le terrain. Ainsi, depuis la mise sur pied du plan climatique renforcé du Canada en décembre 2020, le gouvernement a investi 247 millions de dollars au moyen du Fonds pour une économie à faibles émissions de carbone dans 21 programmes provinciaux et territoriaux de rénovation de maisons et de bâtiments. En Indonésie, le fonds pour le changement climatique, bien que piloté par le BAPPENAS, est directement chargé de financer des programmes provinciaux et locaux en mobilisant des ressources nationales et internationales. Le Danemark dispose d?un Fonds d?investissement pour les pays en développement, afin de clarifier l?usage de ses financements publics de coopération internationale dans le domaine de la transition climatique et environnementale. Au-delà de son fond climat assez classique, la Finlande dispose d?un Fonds public d?investissement pour l?innovation (Sitra), fondation dont l?objectif est de « promouvoir un développement stable et équilibré en Finlande, une croissance économique qualitative et quantitative et une compétitivité et une coopération internationale ». Cette fondation est responsable devant le Parlement mais pas devant le gouvernement. Sa capitalisation était évaluée à 771 millions d?euros en 2017. Elle fonctionne à la fois comme un « think-thank » et comme une société d?investissement. Créée en 1967 dans le cadre de la Banque de Finlande, la majeure partie de sa dotation actuelle provient d?un don d?actions Nokia du Parlement finlandais de 1992. Le fonds dépense environ 30 millions d?euros par an correspondant au rendement de sa dotation. Il investit principalement dans des entreprises et des start-ups pour créer de nouvelles activités rentables. Le manque de transparence sur les financements accordés à la transition écologique que nous avons rencontré dans nos recherches démontre que l?enjeu est commun à tous les pays. Nous recommandons donc qu?une analyse approfondie des financements de la transition écologique soit menée, pour compléter la première approche faite dans ce rapport. Les outils de dépense publique sont en effet un très bon indicateur de la capacité des pays à respecter leurs engagements. En Suède, le suivi de l?atteinte des objectifs est effectué par le gouvernement, chaque année dans le cadre du rapport « climat » du PLF (avec l?appui des Agences nationales, dont l?Agence de protection de l?Environnement Naturvårdsverket). Ainsi un relèvement de 8% au premier semestre PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 42/60 2024 des émissions suédoises a été évalué comme principalement dû à l?augmentation de la consommation des carburants routiers fossiles entretenue par la décision du nouveau gouvernement de réduire le taux d?incorporation des biodiesels à 6% (contre 50% en volume précédemment). Faisant ressortir l?importance de la programmation budgétaire de la transition écologique, « l?Irish Fiscal Advisory Council », organisme de surveillance budgétaire de l?Irlande, a publié en octobre 2023 un rapport sur l?impact du changement climatique sur les finances publiques, faisant partie d?une série de recherche sur la viabilité à long terme des finances publiques, en lien avec le changement climatique. Le rapport estime le coût de l?ensemble des dépenses publiques nécessaires pour atteindre les objectifs climatiques irlandais en suivant une « transition juste », telle que décrite par la législation adoptée. Le rapport modélise deux scénarios pour les dépenses, l?un de coût faible correspondant à la limite inférieure de l'implication potentielle de l'État, et l?autre de coût élevé considéré comme une estimation supérieure raisonnable, tout en reconnaissant que ces coûts pourraient être encore plus élevés. Entre 2026 et 2030, le gouvernement devrait dépenser entre 0.6% et 1.1% du GNI par an (1.6 à 3 milliards d?euros en valeur actuelle) pour assurer une transition climatique. L?accompagnement par une programmation budgétaire ambitieuse du plan lors de son adoption par la France (loi de finances pour 2024) avait initialement assis la planification française dans une perspective budgétaire claire. Le fonds vert permettait notamment le co-financement par l?Etat d?actions dans les territoires, méthode dont l?efficacité avait été testée lors du premier plan de relance post Covid. Suite à la dégradation des finances publiques, la remise en cause des financements attribués à la transition écologique n?a pas fait l?objet d?une évaluation de ses conséquences, et notamment du coût du retard de la mise en oeuvre de certaines actions. La France doit se doter d?une loi d?orientation budgétaire pluriannuelle de la transition écologique et prévoir la mise en place de fonds dédiés au financement de la transition pouvant permettre de mutualiser des financements publics et privés. 2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens 2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires La planification écologique, une fois établie et financée, doit ensuite se déployer au plus près des territoires. Elle doit être appropriée par les échelons locaux, adaptée aux réalités géographiques et économiques des territoires. Elle doit pour cela s?appuyer sur des outils permettant sa déclinaison. Et faire l?objet de financements clairs et identifiés, d?un montant adapté à la taille des projets d?échelle locale. La politique forestière du Costa Rica est un exemple de déclinaison territoriale efficace d?une action de transition dont les résultats sur le long terme sont indéniables. Elle combine plusieurs outils de politique publique, visant plusieurs actions en parallèle (loi contre la conversion de la forêt N°7575, programme d?aires protégées) : la réduction de la déforestation 25 et l?accroissement de la 25 50 000 ha/an dans les années 80, 38 000 ha/an dans les années 90 et 27 000 ha/an depuis 2000. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 43/60 régénération de la forêt26, permettant à la fois la protection de la forêt et son exploitation soutenable, mais aussi la diversification agricole, la protection de la biodiversité et des ressources en eau, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le développement rural et la participation de la société dans toutes ces composantes (peuples autochtones, professionnels de la forêt et de l?agriculture). Le programme dispose également d?un financement clairement identifié au sein du FONAFIFO (Fond de financement de la forêt nationale), alimenté en partie par des ressources extérieures (financement REDD+ de la Banque mondiale)27 et s?appuyant sur des outils innovants de financement (Forest Bond Certificate CAF, Forest Bond Certificate for forest management CAFMA, paiements pour services environnementaux). Le principal acteur des territoires étant les collectivités, c?est en premier lieu auprès d?elles que doit se déployer la planification de la transition. En Afrique du sud, les provinces et les municipalités doivent décliner la planification climatique nationale. Ainsi, la province du Cap occidental est régulièrement en première ligne pour proposer divers plans de planification écologique : sa « Climate Change Response Strategy ? Vision 2050 » a été publiée en 2022 puis révisée en 2023, et son « Energy Resilience Program » (2021) définit les actions à engager dans le secteur électrique de la région. La ville du Cap est particulièrement volontariste et a adopté divers stratégies et plans depuis 2014 (Resilience Strategy en 2019, Water Strategy en 2019, Inclusive Economic Growth Strategy en 2019, Bioregional Plan en 2015, Integrated Coastal Management Policy en 2014). En Indonésie, le plan national de développement à moyen terme est décliné dans les territoires via les RPJMN. Ils sont mis en oeuvre par les administrations techniques décentralisées au niveau de chaque province ayant à leur tête un gouverneur. Etablis pour 5 ans, ils font l?objet d?une élaboration concertée, qui s?appuie sur une analyse de la situation, la formulation de scénarii environnementaux et l?identification de recommandations stratégiques. En parallèle, les gouvernements provinciaux doivent également rédiger leurs plans de réduction des émissions de GES ? les RAD-GRK. Les villes indonésiennes disposent également de leurs plans de réduction des émissions. Au Danemark, les régions sont pleinement associées à l?élaboration et à la mise en oeuvre de la transition verte du Royaume. Les régions et la fondation danoise Sustainia28, qui met en contact le monde des affaires et le monde scientifique, ont uni leurs forces pour remettre une feuille de route au Gouvernement sur la manière dont les régions peuvent faciliter la participation et l?inclusion citoyennes dans la transition vers une société durable. Le Danemark est en passe de devenir le premier pays au monde où chaque municipalité (98) disposera d'un plan d'action climatique. La loi finlandaise a été modifiée le 1er mars 2023 pour ajouter une obligation pour les municipalités d?établir un plan climat et de le mettre à jour au moins une fois par mandat municipal. Ce plan devait inclure l?objectif de réduction des émissions, et des mesures pour atteindre ces objectifs. Chaque municipalité avait droit à une subvention de 45 000 euros maximum pour l?élaboration de son plan. Ces plans devaient être élaborés entre 2025 et 2029 mais le programme du nouveau gouvernement Petteri Orpo a prévu de supprimer cette mesure ainsi que les subventions afférentes en novembre 2023 dans le cadre du budget national et des réformes proposées par le gouverne- ment Orpo pour l'année 2024. 26 De 417 000 ha de forêt régénérés en 1986, la couverture atteint 918 000 ha en 2013. 27 200 millions de dollars entre 1998 et 2011 28 Sustainia, anciennement « Copenhagen Climate Council », est une collaboration mondiale entre le monde des affaires et le monde scientifique, fondée par Erik Rasmussen, fondateur du principal groupe de réflexion indépendant de Scandinavie, Monday Morning, basé à Copenhague, et aujourd'hui dirigée par Rasmus Schjødt Larsen, diplômé de Harvard https://sustainiaworld.com/about/ PUBLIÉ https://sustainiaworld.com/about/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 44/60 Bien que n?ayant pas l?obligation de le faire, la plupart des Länder allemands ont adopté leur propre stratégie ou législation climat, formulant leurs propres objectifs sectoriels et prévoyant des outils de déploiement régionaux. En se basant sur l?étude menée par « Climate chance »29, on compte 12 des 16 Länder et villes-Etat à avoir adopté une législation permettant de coordonner les actions de transition climatique à l?échelle régionale30. Huit d?entre elles31 incluent un objectif quantifié de réduction des émissions de GES. L?appropriation des enjeux par les échelons locaux se retrouve également dans la définition de la politique de l?eau néerlandaise. Elle s?appuie sur un ancrage local historique qui permet de penser la gestion de l?eau et du risque, en amont et au quotidien. Aux Etats-Unis, la Californie dispose d?une politique climatique autonome de celle du gouvernement fédéral. En novembre 2022, elle a adopté une loi visant la réduction de ses GES de 48% d?ici 2030 et l?atteinte de la neutralité carbone d?ici 2045, le tout soutenu par un budget de 52 milliards de dollars sur 5 ans. Elle a même mis en place son propre marché carbone qui couvre 85% des émissions dont les transports et le logement, et est connecté au marché carbone du Québec. Les « Sustainable Communities Strategies », mises en place en Californie (SB 375) donnent un cadre pour la réduction des émissions de GES pour les transports et la planification urbaine, en cohérence avec les autres lois de l'Etat. Les organisations métropolitaines de planification de l'Etat (18 en tout) sont tenues d'élaborer des infrastructures urbaines permettant d'augmenter la densité (transports en commun, infrastructures cyclables et piétonnes, réduire la dépendance automobile, ou agir sur l'étalement urbain). A l?inverse, une mauvaise appropriation des enjeux à l?échelon local peut conduire à des retards dans la mise en oeuvre voire à des déclinaisons inappropriées. Ainsi en Indonésie, la décentralisation mise en oeuvre très rapidement à la fin de la dictature de Suharto, pourtant axée sur l?autonomisation des provinces, a conduit à une autonomisation de groupes clientélistes s?appuyant sur des réseaux oligarchiques, favorisant les passe-droits d?exploitation, les incendies criminels et la pêche illégale, contre lesquels le gouvernement actuel lutte encore. De même, la déclinaison verticale descendante de la planification chinoise s?est heurtée à des retards de mise en oeuvre et de la corruption aux échelons locaux. La très grande fragmentation de la structure administrative en Chine l?explique également. C?est dans ce cadre que la Chine a eu recours à une réforme administrative en 2026 pour renforcer l?autonomie des bureaux de protection de l?environnement (BPE) préfectoraux, dans le but d?éviter la double tutelle qu?ils subissaient des échelons préfectoraux et provinciaux. Et cela explique également la mise en place du « crédit social ». Ce système de notation des citoyens, des entreprises et des fonctionnaires locaux conduit à la distribution de récompenses, mais aussi et surtout de pénalités pour ceux ne respectant pas les règles, en s?appuyant sur une collecte automatique de données et leur traitement par des intelligences artificielles. La France a mis en place une déclinaison territoriale de sa planification écologique dans le cadre des COP, qui se déroulent dans les régions françaises depuis l?automne 2023. A ce stade, cette démarche ne s?est pas traduite par des plans régionaux. Elle englobe un état des lieux de la région pour établir un diagnostic partagé. Elle doit permettre l?articulation de la planification écologique régionale avec la planification nationale et la coordination avec les plans locaux. Elle doit définir 29 https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/ 30 La Bavière a adopté une réforme de la Loi bavaroise sur la protection du climat en janvier 2023 (BayKlimaG) avec des objectifs climatiques plus ambitieux que les objectifs fédéraux (neutralité climatique à l?horizon 2040). La Basse-Saxe a adopté une révision de la Loi sur la protection du climat (NKlimaG) en décembre 2023. 31 Sauf celle d?Hambourg qui veut pourtant atteindre la neutralité carbone. Celle du Land de Hesse a des objectifs en matière d?ENR et de quota de rénovation des bâtiments. PUBLIÉ https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 45/60 des mesures concrètes permettant le soutien aux projets à l?échelon local. Cette approche qui se veut à la fois montante et descendante doit permettre une meilleure association des échelons locaux dans le déploiement de la planification écologique. Impliquer tous les acteurs des territoires de l?élaboration jusqu?à la mise en oeuvre 2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens La planification écologique dans les territoires doit s?appuyer sur l?ensemble des acteurs locaux pour assurer son ancrage et son efficience et sur des outils adaptés à ces enjeux, notamment en matière de financements. 2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la planification Les principaux porteurs de ces politiques sont les collectivités locales et elles sont donc le principal vecteur de la traduction concrète des actions de la planification écologique, en s?appropriant les objectifs de la planification ou de la stratégie nationale. En Inde, des États comme le Gujarat et le Rajasthan sont des leaders dans le déploiement de l?énergie solaire. Dans le domaine agricole, l?État du Sikkim a mis en place une politique axée sur la transition écologique, lui permettant de devenir le premier État indien entièrement bio en 2016, grâce à une interdiction complète des pesticides et engrais chimiques. Cette initiative s'inscrit dans une stratégie de développement durable qui vise à protéger les sols, améliorer la santé publique et soutenir les petits agriculteurs. En Afrique du sud, le Cap, Johannesburg et Durban sont membres du C40 « Cities Climate Leadership Group », qui rassemble environ cent maires de grandes villes mondiales décidées à faire face à la crise climatique. En comparaison, seule Paris est membre de ce réseau en France. Plusieurs villes appartiennent également à l?« International Council for Local Environmental Initiatives » (ICLEI) ou au réseau « Resilient cities ». La « South African Local Government Association » (SALGA) apparait comme l?organe compétent pour assurer la remontée des revendications locales dans la mise en oeuvre de ces stratégies climatiques, établissant un dialogue avec l?échelon central. S?appuyant sur l?exemple allemand développé ci-dessous, le pays a également mis en place un « Local government climate change support program » depuis 2012 qui fonctionne avec une plateforme internet fournissant guides, outils, jeux de données, formations. En effet, l?Allemagne déploie depuis 2012 un dispositif de soutien pour les collectivités dans la mise en oeuvre de la transition climatique : l?initiative nationale pour la protection du climat (NKI) qui fête ses 15 ans d?action. Elle dispose d?un site internet dédié, affiche plus de 45 000 projets réalisés, 1,5 milliards d?euros de financements distribués. Parmi ses projets emblématiques, le centre historique de la ville de Lemgo est climatiquement neutre grâce à un projet de chauffage urbain réutilisant la chaleur des eaux usées ou le projet de transformation de l?éclairage urbain au LED mis en place dans 48 communes de la haute Hesse. Depuis avril 2023, une « Agence de protection locale du climat » appuie les collectivités dans la mise en oeuvre de leur projet climatique depuis les méthodologies de calcul des émissions jusqu?aux financements pour les projets, en sus d?outils de formation et de mentorat. Cette démarche s?appuie sur le KTF évoqué dans la section précédente. Pour aller au bout de leur démarche, les collectivités utilisent également leur système PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 46/60 comptable (BISKO) lors de l?établissement de leur bilan énergétique et des émissions de GES ce qui permet la traçabilité des démarches entamées. De même, la Finlande dispose depuis 2018 d?un Programme de solutions climatique municipales (2018-2023, 8 millions d?euros) pour financer des projets climat des communes et des régions. Mais les outils de la planification doivent également pouvoir s?adresser aux autres acteurs du territoire. 2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification En premier lieu, les acteurs économiques doivent pouvoir être associés à la planification écologique. La Finlande a élaboré en coopération avec les acteurs de chaque secteur économique des feuilles de route sectorielles. Cette approche est assez révolutionnaire car il s?agit de « feuilles de route inversées » : ce sont les acteurs de chaque secteur qui élaborent ces feuilles de route, régulièrement remises à jour. Cela permet au gouvernement lorsqu?il en fait la synthèse de disposer d?une vision permettant notamment une meilleure adéquation des moyens. Une démarche du même type a été mise en place aux Pays-Bas, avec en 2013 l?accord volontaire de l?énergie, puis l?accord national pour le climat avec son plan d?action, qui associe les acteurs économiques à la prise de décision sur les objectifs et leurs déclinaisons. A la différence de certains pays, on observe en Suède un mouvement volontaire industriel de décarbonation. Les bioénergies et l?électrification ont déjà fait chuter la part des énergies fossiles à 19% de la consommation énergétique de l?industrie (contre 54% en 1975, comme en France aujourd?hui). Les acteurs industriels concentrant les dernières sources fossiles (les plus difficiles à éliminer car situées au coeur des procédés industriels comme le coke dans la production d?acier et les émissions des process chimiques de fabrication du ciment) ont pris conscience de l?avantage stratégique de décarboner leur production pour renforcer leurs ventes à court et moyen terme. L?implication du monde économique est allée en Allemagne jusqu?à la création de nouveaux modes de décision au sein des entreprises, poussés par les syndicats qui cherchent à accompagner la transition et à ce que ces transitions s?opèrent dans le respect des droits des salariés et du maintien de leurs emplois. Ils ont ainsi fortement plaidé pour la mise en place de primes devant accompagner l?évolution des compétences des salariés sur leur poste de travail. Les syndicats portent également une proposition de révision de la loi sur le conseil d?établissement (Betriebsräte), dans lesquels ils ne siègent pourtant pas formellement : il est proposé que le conseil ait un droit d?initiative et de codécision en matière de décisions destinées à mieux protéger l?environnement, y compris l?évolution des modes de production ; l?instauration d?une commission environnementale dans toute entreprise de plus de 100 salariés est également proposée. Les outils doivent aussi permettre le financement des projets des acteurs du territoire, entreprises comme citoyens. La Californie distribue des aides et des prêts sur l?ensemble des sujets environnementaux et climatiques, dans le cadre d?appels à projets notamment. Ces subventions proposées sont regroupées sur un seul portail, avec un moteur de recherche extrêmement fluide et possibilité de traduction. L?un des outils les plus complets apparait comme celui de la stratégie de transition économique de Bruxelles capitale 2022-2030 : « Shifting economy ». Le programme vise à l?accompagnement de la trajectoire climatique et environnementale de la région par une stratégie dont l?objectif est une économie décarbonée, régénérative, circulaire, sociale, démocratique et digitale. Le programme cherche à « aligner les objectifs économiques sur les objectifs climatiques » et s?adresse à tous les acteurs économiques de la région. La « transition économique » est définie comme : « la PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 47/60 transformation progressive au sens large (qui va de l?adoption d?une démarche d?écogestion à des changements fondamentaux de business model) des activités économiques bruxelloises (en ce compris les sous-traitants et les fournisseurs bruxellois) dans la perspective de contribuer aux défis sociaux et environnementaux locaux et globaux ainsi qu?à la création et au maintien d?emplois de qualité à Bruxelles ». Dès 2024, les entreprises inscrites dans une démarche de transition économique ou qui sont exemplaires sur le plan social ou environnemental bénéficieront d?une majoration des aides économiques. A partir de 2030, les outils économiques de la région seront concentrés sur le soutien aux entreprises qui auront fait le choix de l?exemplarité sociale et environnementale. Certains outils sont déjà en place : - « finance&invest.brussels » facilite le financement des entreprises en transition et vient d?être recapitalisé (triplement de sa capacité financière avec 131 millions d?euros additionnels) ; - adoption d?un « Plan régional pour l?innovation » (PRI) qui prévoit 400 millions d?euros de financement entre 2021 et 2027 pour les domaines d?innovation stratégique ; - lancement de « Renolution » alliance des secteurs privé et public pour atteindre le triplemement du taux de rénovation du bâti bruxellois ; - la Stratégie Qualification-Emploi portée par le ministre de l?emploi et de la formation. La stratégie a été co-construite avec l?écosystème bruxellois. Au total, 280 participants ont été impliqués dont 132 organismes publics ou privés (fédérations professionnelles et sectorielles, experts, guichets d?économie locale, universités, etc). 2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire L?association des citoyens au projet de planification écologique est un élément essentiel pour la concrétisation des projets. De nombreux pays ont tenté d?inclure les citoyens dans la prise de décision et organisé différentes modalités de concertation ou de consultation comme nous l?avons vu précédemment. Mais c?est dans la traduction concrète des projets dans les territoires que se mesure la qualité de l?association des citoyens et leur adhésion au projet. En Afrique du sud, la gestion des aires protégées a offert la possibilité d?association des propriétaires privés (25% des aires protégées appartiennent à des propriétaires privés) et des communautés locales. Plusieurs projets présentent aujourd?hui une gestion partagée entre l?autorité locale, les ONG et les communautés implantées. C?est par exemple le cas de la réserve de la communauté Mabaso, qui a établi un plan de gestion de l?aire protégée en partenariat avec WWF-SA. En Indonésie, les consultations avec les communautés locales, notamment sur la gestion des ressources naturelles et la reforestation, font partie intégrante de la planification. Les forums multi- acteurs (Musrenbang) offrent un cadre où citoyens, ONG et autorité locales participent à la prise de décision. Des plateformes locales existent au Costa Rica, initiatives locales impliquant directement les citoyens, notamment sur la reforestation et la préservation de la biodiversité. Ces efforts renforcent le lien entre les communautés et les objectifs nationaux de transition écologique. En Allemagne, la concertation locale est profondément ancrée dans les processus de planification écologique. Les initiatives citoyennes, comme les "Ratsbürger" (assemblées locales consultatives), permettent aux habitants de co-décider sur des projets énergétiques et environnementaux. Les Länder et les municipalités favorisent également les consultations pour intégrer les besoins spécifiques des populations dans la mise en oeuvre des objectifs climatiques. Plusieurs pays ont de même misé sur l?association de la jeunesse aux processus de réflexion sur la transition écologique : c?est le cas de l?Irlande, du Danemark (Conseil des jeunes pour le climat) ? PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 48/60 Les outils doivent également couvrir l?information des citoyens. Ainsi, en matière d?adaptation, le gouvernement de Californie a mis en place une série d?outils permettant l?information du grand public sur les ilots de chaleur, les risques liés aux tempêtes et aux inondations, mais aussi pour les collectivités avec notamment Adapt-CA, boite à outils de développement des capacités d?adaptation32 ou CERI-climate qui gère les interventions d?urgence sur les 600 infrastructures considérées comme essentielles à la capacité de l?Etat à réagir aux catastrophes. En France, le SGPE s?est saisi de cet enjeu de l?association citoyenne qui semble être ressenti comme un manque. Il a notamment développé un outil d?information/formation sur le plan (Le Bon Plan), sans disposer pour autant des moyens nécessaires pour en assurer la diffusion. Il analyse également les outils de déclinaison de la planification auprès des citoyens (aides directes pour l?efficacité énergétique des bâtiments, l?achat de véhicules électriques) qui sont les meilleurs moyens de constater le niveau d?adhésion de la population. Pourtant, l?incapacité à entrainer certains secteurs économiques à forte composante sociétale (agriculture notamment) et la grande majorité des citoyens qui restent peu conscient de la démarche de planification entamée par la France nuit à la mise en oeuvre de ses travaux. Poursuivre la mise en oeuvre territoriale de la démarche de planification écologique en se concentrant davantage sur les outils à déployer, notamment budgétaires et numériques, pour aider les collectivités au-delà des outils de rapportage, les acteurs économiques dans le suivi de leurs transitions et les citoyens dans leur appréhension et leur inclusion dans le processus de transformation. 2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale La planification écologique apparait également comme un bon outil de diplomatie climatique et environnementale. Des pays s?appuient sur leur expérience de planification écologique et leurs résultats pour renforcer leur positionnement dans les instances internationales : on citera notamment Singapour, le Costa Rica, et le Rwanda. Mais on peut également mentionner le rôle de leader au sein de leur continent que veulent jouer l?Indonésie, l?Afrique du sud ou le Brésil, comme porte-parole pendant les négociations internationales mais également comme des pays cherchant un mode de développement alternatif, s?appuyant sur une transition juste. Du côté des pays développés, le Royaume-Uni et le Danemark poursuivent leur investissement à l?échelle internationale et l?Allemagne dispose avec le GIZ d?un outil très puissant de coopération. La diffusion de la planification écologique au sein de la plupart des pays pourrait permettre de renforcer les outils internationaux existants au sein des 3 conventions de l?ONU : elle crédibilise les politiques nationales pour l?accession à des financements internationaux et facilite la lutte contre la corruption. A l?issue de plus d?une année à examiner la planification écologique dans les autres pays, il apparait clairement aux autrices du rapport une réelle appétence de nombreux pays rencontrés dans différents contextes pour des coopérations internationales en matière de planification écologique. Même si la planification écologique reste liée à un contexte national, les expériences et les outils 32 https://arccacalifornia.org/adapt-ca/ PUBLIÉ https://arccacalifornia.org/adapt-ca/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 49/60 mis en place par chacun sont très utiles pour la mise en place d?une planification plus efficiente. Par ailleurs, peu de pays ont mis en place une planification écologique complète et peu parviennent à déployer effectivement leur planification dans leurs territoires. Les mêmes obstacles sont souvent rencontrés par les uns et les autres ce qui renforce encore la valeur du parangonnage. La planification écologique pourrait donc devenir un nouvel outil de la stratégie diplomatique climatique et environnementale de la France. Faire de la planification écologique un nouvel outil de coopération internationale et renforcer les partenariats avec les pays les plus susceptibles de faire progresser la planification écologique française. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 50/60 Conclusion La planification écologique se déploie donc dans la majorité des pays du G20 et de l?Union européenne. Elle souffre le plus souvent des mêmes difficultés de mise en oeuvre, mais apparait néanmoins comme le meilleur outil pour permettre d?assurer la transition. Avec son exemple de planification écologique centralisée, la France dispose d?un outil puissant susceptible d?accompagner sa transition. Les recommandations de ce rapport ont vocation à accompagner le déploiement de cette planification et à faciliter sa mise en oeuvre, notamment sa déclinaison dans les territoires. L?utilité du parangonnage réalisé encourage à poursuivre la démarche, pour explorer certains pays supplémentaires non étudiés (Espagne, Italie, Portugal notamment), ou approfondir certaines situations n?ayant pas fait l?objet d?une étude suffisante par manque de temps et de moyens (Japon, Canada). Mais c?est également sur le plan sectoriel que cet approfondissement mériterait d?être réalisé. L?articulation entre les planifications et leur programmation budgétaire mérite en premier lieu d?être creusée tant elle apparait comme l?une des clés de la réussite de cette démarche. Des outils budgétaires innovants permettant de mieux garantir le financement de la transition, qu?ils soient des outils fiscaux, d?affectation budgétaire, ou de recours à des financements externes permettant d?associer mieux les acteurs économiques à la transition, méritent d?être expertisés. Les difficultés rencontrées par certains pays et les réussites sur des secteurs pour lesquels la transition écologique française patine pourraient également faire l?objet d?un approfondissement, notamment en priorité la politique de souveraineté alimentaire et agricole. Enfin, certains exemples très positifs de traduction de la planification dans les pays déjà étudiés pourraient faire l?objet d?échanges avec les pays concernés notamment les outils développés par l?Allemagne, la Belgique ou le Danemark en matière d?accompagnement des collectivités dans leurs projets de transition climatique et environnementale et d?implication citoyenne dans la prise de décision et la mise en oeuvre des politiques sur le terrain, notamment avec le rôle joué par le monde associatif. Enfin, à l?issue de cette année consacrée à cette étude, il apparait clairement une appétence des autres pays au-delà du cercle étudié pour la planification écologique française. Cet outil de diplomatie climatique et environnementale doit être développé en accord avec le Ministère de l?Europe et des Affaires Etrangères, l?AFD et Expertise France afin que le SGPE puisse à la fois transmettre l?expertise française tout en recueillant des exemples et des outils utiles à la planification française. Barbara POMPILI Virginie DUMOULIN PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 51/60 Annexes PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 52/60 Annexe 1. Lettre de mission IGEDD PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 53/60 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 54/60 Annexe 2. Liste des personnes rencontrées Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre THARYAT Tri République d?Indonésie Ambassador, Deputy Minister for Multilateral Cooperation 28/11/2023 NAKAGAMI Hidetoshi Jyukankyo Research Institute Inc.Japan CEO&Founder Delegation japan leaders 29/11/2023 FINK-HOOIJER Florika DG ENV Commission Européenne Directrice générale 08/12/2023 VAN VLEDHOVEN Stientje World Resources Institute Vice-présidente et Directrice régionale Europe 08/12/2023 ANTTONEN Matti Ambassade de la Finlande en France Ambassadeur 06/02/2024 HEKKERT Marko Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur général 29/02/2024 STREMLER Jaco Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur Climat Air et Energie 29/02/2024 MINNESMA Marjan Fondation Urgenda ? Pays-Bas Directrice et Fondatrice 29/02/2024 VAN GINNEKEN Meike Ministère des Infrastructures et de l?Eau Pays-Bas Envoyée spéciale sur l?Eau et directrice du Programme international sur l?adaptation au changement climatique et l?eau 29/02/2024 BONJER Jan Waterschap Hollandse Delta (Dutch Delta Water Board) ? Pays-Bas Président 29/02/2024 SPIERINGS Anne-Marie Transition du cluster industriel de Rotterdam (DeltaLinqs) ? Pays-Bas Directrice 29/02/2024 HEIJDRA Michel Ministère de l?Économie et du Climat Pays-Bas Directeur Général pour le Climat et l?Énergie 01/03/2024 VRUGT René Ministère de l?Économie et du Climat Pays-Bas Directeur des sols, de l?aménagement du territoire et de l?adaptation au climat 01/03/2024 POLS Donald Association environnementale Milieudefensie ? Pays-Bas Directeur 01/03/2024 KERSTEN Kiki Central Bureau voor de Statistiek (CBS) ? Pays-Bas Central Bureau voor de Statistiek (CBS) 01/03/2024 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 55/60 Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre RAUTAVAARA Antti Centre for Peace Mediation de la Finlande Envoyé Spécial Eau 13/03/2024 SHANMUGARATNAM Tharman République de Singapour Président 15/05/2024 KHOR Dr. Amy Ministère du développement durable et de l?agence publique de l?eau de Singapour Senior Minister of State for Sustainability and the Environment 16/05/2024 TAN Adele Urban Redevelopment Authority of Singapore Chief Planner and deputy CEO 16/05/2024 TEO Joseph Ministry of Sustainability and the Environment of Singapore Chief Negociator for Climate Change 17/05/2024 GUO Yiran Ministry of Sustainability and the Environment of Singapore, National Climate Change Secretariat, Singapore Expert 17/05/2024 BHASKAR Ananda Ram National Environment Agency, Singapore Deputy Chief Executive Officier, Environmental Portection Director- General 17/05/2024 LESPAYANDEL Carine French Chamber of Commerce in Singapore Executive Director 16/05/2024 WIKODO Joko République d?Indonésie Président 20/05/2024 ADININGGAR Amalia BAPPENAS Indonésie Deputy for Economic Affairs 20/05/2024 YULASWATI Vivi BAPPENAS Indonésie Deputy for Maritime Affairs and Natural Resources 22/05/2024 HENDIARTI Nani Ministre coordinateur des affaires maritimes et de l?investissement Ministre adjointe chargée des questions environnementale et forestières 23/05/2024 DHEWANTI Laksmi Ministère de l?environnement et des forêts Directrice générale de la lutte contre le changement climatique 23/05/2024 KUSUMASTUTI Diana Ministère des travaux publics Directrice générale de « human settlements » 23/05/2024 DUBEUX Rafael Ministère des Finances du Brésil Secrétaire exécutif adjoint et coordinateur du plan écologique 17/06/2024 MOREL Julien Swedish Ministry of Climate and Enterprise Climate policy analyst 26/08/2024 VIATTE Loïc Expert français, ex-conseiller Environnement à la RP suédoise à Bruxelles 26/08/2024 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 56/60 Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre PERSSON Asa Stockholm Environment Institute Swedish Climate Policy Council Research Director and Deputy Director Chair of the CPC 26/08/2024 ALTERA Ola Swedish Climate Policy Council Chief Executive 26/08/2024 FORSLUND Anna Swedish Agency for Nature Conservation Head of Unit Nature Analysis 26/08/2024 WIKHOLM Nanna Swedish Royal Institute of Technology Natural resources department Head of the Spatial Planning Unit 26/08/2024 VINNMYR Sabina Swedish Environment Protection Agency Senior scientific officer 26/08/2024 HANNERZ Fredrik Swedish Ministry of Climate and Enterprise Deputy-Director General Head of Natural Environment Division 26/08/2024 GRANATH Fredrik Swedish Ministry of Climate and Enterprise Advisor in charge of national environmental objectives 26/08/2024 H.E.MR.WANG Bao Ministry of Water Resources of China Vice Minister of Water Resources of China 09/10/2024 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 57/60 Annexe 3. Ambassades consultées Ambassade de France en Afrique du sud Ambassade de France aux Etats-Unis d?Amérique Ambassade de France en Allemagne Ambassade de France en Finlande Ambassade de France en Belgique Ambassade de France en Inde Ambassade de France au Brésil Ambassade de France en Indonésie Ambassade de France au Canada Ambassade de France en Irlande Ambassade de France en Chine Ambassade de France au Pays-Bas Ambassade de France au Costa Rica Ambassade de France au Royaume Uni Ambassade de France au Danemark Ambassade de France à Singapour Ambassade de France en Suède PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 58/60 Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes Acronyme/Sigles Signification Adapt-CA Adaptation Capability Advancement Toolkit AFD Agence France Développement BAPPENAS Ministère de la planification d?Indonésie BISKO BIlanzierungs-Standard KOmmunal (système comptable en Allemagne) BPE Bureau de protection de l?environnement CAF Banque de Développement d?Amérique latine et des Caraïbes CAFMA Forest Bond Certificate for forest management CCAC Conseil consultatif sur le changement climatique (EI) CERI-Climate California Emergency Response Infrastructure Climate Vulnerability Tool (USA) CNC Commission nationale climat (Belgique) COP Conférence des parties CPO Climate policy office (Etats-Unis) CR Costa Rica (code ISO) C40 Cities Climate Leadership Group DE Allemagne (code ISO) DESNZ Ministère en charge de la sécurité énergétique et de la neutralité climatique au Royaume-Uni EI Irlande (code ISO) EPA Agence de protection de l?environnement (USA, EI) ETS Echange de quotas d?émission (UE) FEDER Fonds européen de développement régional FI Finlande (code ISO) FONAFIFO Fond de financement de la forêt nationale FONERWA Fonds vert (Rwanda) GES Gaz à effet de serre GIEC Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat GIZ Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (en français : Société allemande de coopération internationale) GNI Gross national income ? Revenu national brut (proche du PNB) GX Green transformation (transformation verte) au Japon G20 Groupe des 20 (forum intergouvernemental des 19 pays aux économies les plus développées du monde) HCC Haut conseil pour le climat (France) ICLEI Conseil International des Initiatives Locales pour l?Environment IBAMA Institut brésilien de l?environnement et des ressources naturelle IGEDD Inspection générale de l?environnement et du développement durable IGF Inspection générale des finances IPBES Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques IRA Inflation reduction act (USA) IRP Panel International des Ressources JETP Partenariat pour une transition énergétique juste KTF Fonds pour le climat et la transformation (DE) LED Diode électroluminescente LiFE Lifestyl for environment / Modes de vie durables (Inde) LTS Stratégie de long terme (USA) MoEFCC Ministère de l?environnement, de la forêt et du changement climatique Inde METI Ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (Japon) MOE Ministère de l?environnement (Japon) MOF Ministère des finances (Japon) NAPCC Plan d?action pour le changement climatique en Inde NASEM Académie des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (USA) NBSAP(en)/SPANB (fr) Stratégies et plans d?action nationaux pour la biodiversité NCCRPWP Plan climatique en Afrique du sud PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 59/60 Acronyme/Sigles Signification NCCS Secrétariat national au changement climatique à Singapour NDC(en)/CDN(fr) Contribution nationalement déterminée (climat) NDCR Commission nationale de la réforme et du développement en Chine NKI Initiative nationale pour la protection du climat (DE) OCDE Organisation de coopération et de développement économiques ODD Objectifs de développement durable ONG Organisation non gouvernementale PBL Office de la planification écologique (Pays-Bas) PCC Commission présidentielle du climat en Afrique du sud PLF Projet de loi de finances PMCC Conseil sur le changement climatique (Inde) PRI Plan régional pour l?innovation PSSO Bureau de la durabilité du secteur public à Singapour RAD-GRK Plan climat provincial en Indonésie RAN-GRK Plan climat national en Indonésie REDD+ Réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation forestière RPJMN Plan de moyen terme de développement ? 5 ans (Indonésie) RPJPN Plan de long terme de développement ? 20 ans (Indonésie) SALGA Association des collectivités locales (ZA) SB 375 Législation californienne : le Senate Bill 375 SGPE Secrétariat général à la planification écologique UE Union européenne UNFCCC Convention cadre des nations unie sur le changement climatique URA Urban redevelopment Authority (Singapour) URSS Union des républiques socialistes soviétiques UTCATF Utilisation des terres, changement d?affectation des terres et foresterie WWF-SA World Wide Fund for Nature ? South Africa ZA Afrique du sud (code ISO) PUBLIÉ Annexe 5. Fiches Pays Présenté dans un document séparé PUBLIÉ  Sommaire  Edito  Résumé  Liste des recommandations  Introduction  1 Une mise en place progressive d?outils de planification de la transition climatique et écologique dans la plupart des pays du G20 et de l?Union européenne, qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre  1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique  1.2 Les pays pionniers de la planification écologique  1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique  1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique  1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale  1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs de transparence  1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en oeuvre  1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs objectifs de transition  1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de l?engagement citoyen  2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au dernier kilomètre ? Des recommandations à tirer des exemples étrangers  2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté au plus haut niveau de l?Etat et répondant aux attentes citoyennes  2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son portage par la société  2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat  2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes citoyennes quant à leur avenir  2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans un cadre juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous les secteurs d?activités  2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements internationaux  2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace et juste  2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante  2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique  2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter  2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique  2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle  2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050)  2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels  2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens  2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires  2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens  2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la planification  2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification  2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire  2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale  Conclusion  Annexes  Annexe 1. Lettre de mission IGEDD  Annexe 2. Liste des personnes rencontrées  Annexe 3. Ambassades consultées  Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes  Annexe 5. Fiches Pays (ATTENTION: OPTION rrestre et 15 % de son littoral. Ces mesures visent à freiner la perte de biodiversité tout en contribuant à la résilience face au changement climatique, en 20 En février 2021, le tribunal administratif de Paris a reconnu l'État français responsable de "manquements dans la lutte contre le changement climatique", le tenant ainsi responsable d'un préjudice écologique (« L'Affaire du Siècle »). En juillet 2021, le Conseil d'État, saisi par la commune de Grande-Synthe, a enjoint au gouvernement français de prendre, dans un délai de neuf mois, toutes les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, conformément aux engagements de la France. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 31/60 établissant un lien direct entre protection écologique et durabilité. La Chine a intégré la biodiversité dans son 13ème plan quinquennal et mis en place un système national d?aires protégées, incluant des parcs nationaux. La centralisation de la gestion environnementale sous un ministère unique a permis une meilleure coordination des politiques liées à la biodiversité, à la pollution et au climat, illustrant une gestion intégrée des ressources naturelles. L'Indonésie a adopté une planification nationale intégrant des objectifs de faible émission carbone et de préservation de la biodiversité. Le ministère de la Planification du développement national (BAPPENAS) a mis en place une évaluation environnementale stratégique pour s'assurer que les plans incluent des indicateurs liés au climat, à la biodiversité et à la gestion des ressources naturelles. Cette approche est soutenue par un modèle intégré (IV204521 ), qui relie économie, société et capital naturel, permettant de mieux comprendre les interactions entre la conservation de la biodiversité et la gestion durable des ressources. Le Brésil met en oeuvre un plan de transformation écologique (PTE) articulé autour de la lutte contre la déforestation et la promotion de la bioéconomie. Ce plan combine des mesures environnementales et économiques pour atteindre zéro déforestation, tout en soutenant des initiatives locales et la valorisation des produits de la biodiversité brésilienne. Par ailleurs, l?Institut brésilien de l?environnement (IBAMA) joue un rôle crucial dans la surveillance et la mise en oeuvre des politiques liées à la biodiversité, tandis que le pays utilise des systèmes avancés de surveillance de la déforestation, démontrant ainsi l?interconnexion entre gestion des écosystèmes et lutte contre le changement climatique. A l?inverse, les pays ayant centré leur action sur une seule politique échouent à transformer l?essai ou ont des difficultés à poursuivre leur action. Ainsi le Costa Rica qui n?a finalement intégré dans sa planification que la politique forestière se trouve confronté à des difficultés de financement de la poursuite de sa politique et fait face à des contestations populaires sur la non atteinte d?autres objectifs. L?efficacité de la planification écologique repose sur une approche globale, incluant les questions complexes et sensibles. Ignorer ces enjeux risque de limiter l'impact des politiques écologiques et de compromettre la transition nécessaire. Plusieurs exemples montrent les défis que représentent ces sujets délicats. Les Pays-Bas, avec leur modèle agricole intensif, sont confrontés à des niveaux élevés de pollution par les nitrates et les émissions de méthane. Ces problèmes affectent la biodiversité et la qualité des sols. La mise en oeuvre de politiques visant à réduire l?intensité de l?élevage et l?usage d?engrais a déclenché des protestations de la part des agriculteurs, soulignant les défis liés à l?acceptabilité sociale des mesures nécessaires. L?incapacité à inclure les parties prenantes et à proposer des alternatives viables complique l?application de ces politiques. La dépendance au charbon en Inde, Afrique du Sud et Indonésie est un frein à leur transition énergétique. En Inde, le charbon représente plus de 70 % de la production d?électricité. Bien que le pays investisse dans les énergies renouvelables, la transition est entravée par la dépendance économique et sociale au charbon, qui emploie des millions de travailleurs. En Afrique du Sud, où le charbon fournit 86 % de l?électricité, les efforts pour décarboner sont limités par des contraintes économiques, des infrastructures vieillissantes et une opposition sociale forte. La transition juste, soutenue par des mécanismes internationaux comme le Partenariat pour une transition énergétique juste (JETP), est essentielle pour éviter une fracture sociale. En Indonésie, le charbon est également central dans la production énergétique, et des retards dans l?adoption de politiques ambitieuses ralentissent la transition énergétique nécessaire pour aligner le pays sur ses engagements climatiques. À Singapour, bien que le pays se positionne comme leader régional en matière de finance verte et de technologies, la planification reste centrée sur des objectifs 21 https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the- Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf PUBLIÉ https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 32/60 économiques, parfois au détriment de mesures structurelles plus contraignantes nécessaires pour réduire durablement les émissions de gaz à effet de serre. L?Allemagne peine à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports, malgré son engagement dans la décarbonation. Les retards dans l?électrification des infrastructures et la promotion insuffisante des mobilités douces, comme le rail ou le vélo, freinent les progrès et ont même conduit à déstabiliser la coalition au pouvoir. Le ministre des transports, Volker Wissing (FDP, libéral), avait refusé à plusieurs reprises de présenter un programme de réduction des émissions de GES dans son secteur, suite aux échecs répétés à atteindre les objectifs fixés (trois années consécutives en 2023). Cette situation a entraîné une révision de la loi fédérale sur la protection du climat en avril 2024, supprimant le caractère contraignant des objectifs sectoriels et introduisant un objectif global intersectoriel et pluriannuel. Cette modification est considérée comme un compromis interne à la coalition au pouvoir, visant à éviter une escalade politique tout en maintenant les engagements climatiques généraux de l'Allemagne. Cette situation illustre que des secteurs difficiles doivent être traité en priorité dans la planification pour éviter des retards coûteux en termes climatiques. A l?inverse, des exemples de prise en compte de secteurs difficiles ont permis de mieux préparer la transition. En Allemagne, un fonds d?avenir pour l?industrie automobile doté d?un milliard d?euros pour la période 2021-2025, afin de soutenir la transformation de ce secteur stratégique a été lancé. En collaboration avec les syndicats (IG Metall), des réseaux régionaux de transformation ont été établis dans les bassins industriels. Ces initiatives, qui intègrent des universités, chambres d'industrie, centres de formation et agences pour l?emploi, ont pour but d?élaborer des stratégies adaptées aux besoins locaux tout en assurant le maintien de l?emploi et la reconversion vers des technologies plus durables. Le Danemark, a introduit une taxe carbone sur l?agriculture, ciblant les émissions de méthane issues des élevages bovins et porcins. Entrant en vigueur progressivement d?ici 2030, cette taxe est accompagnée de déductions fiscales pour les agriculteurs afin de limiter les effets négatifs et d?investir dans des technologies vertes. Cette mesure a été adoptée grâce à un processus de concertation impliquant l?Etat, les agriculteurs et les ONG environnementales qui a abouti à un accord largement validé par le Parlement. Ces mesures visent à financer la transition écologique tout en soutenant les producteurs affectés. L?Indonésie, premier producteur mondial d?huile de palme, a mis en oeuvre des politiques pour promouvoir des pratiques responsables. Un moratoire permanent sur la déforestation et le drainage des tourbières a été instauré, accompagné d?un projet national de certification pour la durabilité. Des aides ont été déployées pour soutenir les petits producteurs dans l?adoption de méthodes modernes, tout en luttant contre la déforestation illégale et les feux de forêts. Une même politique de protection des tourbières, utilisées par la population comme appoint pour le chauffage, a également été déployée en Irlande. Ces exemples démontrent qu?une planification ciblée et des incitations bien conçues peuvent permettre des progrès significatifs dans des secteurs critiques tout en minimisant les impacts socio- économiques. La France peut s?enorgueillir d?avoir également lancé un plan de décarbonation de son industrie, comme en Allemagne, ciblant les 50 entreprises les plus émettrices tout comme d?avoir mis en place une planification globale intégrant tous les secteurs d?activité et toutes les politiques. Néanmoins, elle peine à réussir l?intégration concrète de son secteur agricole dans la planification écologique, ce qui laisse des possibilités de constante renégociation à la baisse d?autres objectifs figurant dans la planification comme la réduction de l?usage des pesticides et des nitrates et la protection des espaces naturels et de la biodiversité. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 33/60 La planification écologique doit intégrer tous les secteurs d?activités et l?ensemble des politiques doivent être mises en oeuvre, en adaptant si nécessaire la trajectoire et les financements pour surmonter les difficultés. 2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante 2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique ? Les bons exemples internationaux de planification écologique : Peu des pays examinés disposent de structures transversales pilotant leur planification écologique, souvent en raison de l?absence de planification globale, mais parfois ces structures sont absentes même dans la planification climatique. A part la France et le SGPE, on peut néanmoins citer le ministère indonésien de la Planification du Développement National (BAPPENAS), chargé de la planification écologique et du développement durable. Placé directement sous l'autorité du président, il joue un rôle clé dans la définition des objectifs nationaux et dans leur coordination interministérielle. Il est responsable de l?élaboration et de la synchronisation des plans nationaux de développement durable. Il coordonne les ministères techniques. Il joue également un rôle crucial dans la mise en oeuvre territoriale en soutenant les provinces dans leurs plans d?atténuation des émissions de carbone. Le BAPPENAS utilise des outils tels que des modèles d'évaluation stratégique (par exemple GLOBIOM-Indonésie22) pour planifier et synchroniser des politiques cohérentes, renforçant ainsi la capacité de déclinaison territoriale grâce à l?implication des provinces. Parmi les nouvelles organisations, le Brésil a réintroduit en 2023 un comité interministériel pour le changement climatique, dirigé par le chef de cabinet de la présidence et impliquant plusieurs ministères. Ce comité supervise la révision de la politique nationale sur le changement climatique et coordonne les plans d?atténuation et d?adaptation sectoriels. Il assure également la cohérence entre les mesures prises par différents ministères, tout en mobilisant des acteurs financiers comme la Banque Nationale de Développement Économique et Social (BNDES) pour financer les projets liés à la transition écologique. Au Japon, le Comité exécutif de la stratégie GX (« Green Transformation »), créé en juillet 2022, est présidé par le Premier ministre et piloté par le ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (METI). Il a pour mission d'élaborer la "politique fondamentale pour la réalisation de la GX". Le comité supervise les mesures transversales en matière de décarbonation et de transformation verte, avec une collaboration entre le METI, le ministère de l'Environnement (MOE), et le ministère des Finances (MOF) pour coordonner les enjeux de production énergétique, d'industrie et de conservation environnementale. Il est certes trop tôt pour analyser les résultats dans ces deux pays, mais la tendance à la création de structures transversales témoigne de la prise de conscience de leur utilité. Bien que limité aux enjeux climatique, l?Office de Planification Environnementale (PBL) agit aux Pays-Bas comme un outil de pilotage transversal pour la politique climatique. Cet organisme 22 https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf PUBLIÉ https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 34/60 indépendant évalue annuellement les progrès de la politique climatique et recommande des ajustements pour garantir l'atteinte des objectifs. L?efficacité du PBL repose sur sa légitimité, qui lui permet de coordonner différentes parties prenantes et de s?assurer que les politiques régionales et nationales sont alignées avec les engagements internationaux. Il dispose de moyens lui permettant de réaliser sa tâche tant sur le plan des ressources humaines que budgétaires. ? Les conséquences de l?absence d?une planification centralisée : La difficulté à mettre en oeuvre une planification écologique sans programmation centralisée se voit à l?inverse dans d?autres exemples. Cette absence d'une organisation unique et puissante complique la prise de décision et ralentit la mise en oeuvre des politiques. L?absence de structure de coordination peut ainsi conduire à des problèmes de coordination interministérielle comme déjà évoqué en Allemagne. Aux Pays-Bas, le manque d'une structure de coordination globale a conduit à une mise en oeuvre fragmentée des politiques climatiques et agricoles. Bien que la planification territoriale intègre les enjeux de biodiversité et de gestion des risques d'inondation, la transformation agricole reste un point de blocage majeur. L?insuffisance du poids d?une instance de coordination pourtant existante produit les mêmes effets de fragilisation de la planification écologique. En Roumanie, la gouvernance de la planification écologique repose sur un comité interministériel pour le changement climatique, présidé par le Premier ministre et impliquant divers ministères et agences. Cependant, ce système est marqué par une coordination complexe et intermittente, tandis que le rôle du conseiller d'État chargé de la transition écologique est limité à un rôle de facilitateur sans réelle autorité décisionnelle. En Belgique, la Commission Nationale Climat (CNC), créée en 2002, vise à coordonner les politiques climatiques entre les niveaux fédéral et régional. Elle est composée de représentants des gouvernements fédéral et régionaux, épaulée par un secrétariat permanent et 14 groupes de travail thématiques. Cependant, son rôle reste majoritairement évaluatif plutôt que décisionnel, ce qui limite son efficacité en termes de pilotage stratégique. La structure fédérale des pays pose des défis supplémentaires. Les objectifs et politiques climatiques des provinces ou entités décentralisées ne sont pas toujours alignés avec la stratégie nationale, ce qui complique l'harmonisation des efforts. Par exemple, des politiques comme le développement de l?éolien en mer nécessitent une collaboration étroite entre le gouvernement central et les gouvernements locaux, mais cette coordination reste imparfaite. Le manque de coordination freine la mise en oeuvre des projets essentiels et ralentit la transition écologique au niveau national. Ainsi, en Allemagne, les Länder, responsables de nombreuses politiques environnementales, disposent d?une grande autonomie. Cette configuration complique l?alignement des actions régionales avec les objectifs nationaux, surtout dans des secteurs comme le transport et l?énergie. La Belgique se caractérise par une gouvernance climatique fragmentée, reflétant sa structure institutionnelle complexe. Les compétences sont partagées entre l?État fédéral et les trois régions (Wallonie, Flandre, Bruxelles-Capitale), ce qui complique la coordination des politiques environnementales et climatiques. Chaque région dispose de son propre plan de transition écologique, ce qui entraîne des incohérences dans les priorités et les méthodologies adoptées. Par exemple, la Flandre et la Wallonie ont des approches divergentes sur la gestion agricole et les émissions industrielles. Au Royaume-Uni, les 4 nations ont leurs propres cibles de réduction des émissions et leurs propres politiques en matière de changements climatiques, mais ils contribuent également à l?atteinte des cibles intermédiaires du Royaume Uni et à la mise en place de politiques dans l?ensemble du pays. S?il existe une réunion bimestrielle entre les ministres des 4 nations pour PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 35/60 discuter des politiques climatiques23, les objectifs et politiques des nations ne sont pas encore parfaitement alignées avec la stratégie Net Zéro. Cette coopération imparfaite se reflète en particulier dans le développement de certaines politiques indispensables pour l?atteinte des objectifs climatiques des nations pour lesquelles le Gouvernement central détient une compétence exclusive (ex : capture et stockage du carbone) ou des politiques nationales nécessitant une étroite association des gouvernements compétents (ex : développement de l?éolien en mer en Ecosse). On peut donc en déduire que la planification écologique nécessite un pilotage centralisé, confié à une organisation dédiée, rattachée à l?échelon politique le plus élevé, ce qui se rapproche du modèle français qui est donc à préserver. Cette organisation doit également être en mesure d?animer le déploiement de cette planification dans les territoires afin d?en garantir la cohérence. Maintenir le SGPE auprès du premier ministre, le renforcer dans son rôle de pilotage de la planification écologique, en appui de l?action des ministères, et d?animation de son déploiement dans les territoires. 2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter L?évaluation régulière et indépendante de la planification écologique est cruciale pour garantir son efficacité. Les bons exemples, comme celui des Pays-Bas avec PBL déjà cité, montrent que l?investissement dans des systèmes de collecte de données et des évaluations indépendantes est un levier stratégique pour réussir la transition écologique. Appuyer sa politique de transition sur des données fiables et transparentes est une condition sine qua non pour identifier les réussites et corriger les échecs. Les contre-exemples illustrent que l?absence de fiabilité dans les données peut compromettre la crédibilité et l?impact des politiques publiques. Ainsi, en Indonésie, le défi majeur réside dans la fragmentation des données et le manque de capacités institutionnelles pour les centraliser et les vérifier. Bien que le BAPPENAS tente d?intégrer les indicateurs climatiques dans les plans nationaux, les provinces et les districts ne disposent pas toujours des infrastructures nécessaires pour collecter des données fiables. Cela entraîne des incohérences dans les rapports nationaux et freine les efforts de coordination. L?Afrique du sud rencontre le même problème : alors qu?elle dispose d?une méthodologie ? le « Climate Change Response Monitoring & Evaluation System » - intéressante car visant à analyser les données dans des démarches à la fois top-down et bottom-up, et couvrant les champs de l?atténuation, de l?adaptation et du financement, elle peine dans l?agrégation de données en dehors du système énergétique. En Chine, malgré une capacité impressionnante de collecte de données, la transparence et la fiabilité des informations posent problème. Les rapports environnementaux sont souvent influencés par des pressions politiques ou des manipulations locales, rendant difficile une évaluation objective. Par exemple, les statistiques sur la pollution de l?air ou les émissions industrielles peuvent être sous-évaluées dans certaines régions pour éviter des sanctions administratives, ce qui compromet la précision des politiques correctives. A l?inverse, la planification écologique soutenue par une collecte de données robustes, s?appuyant sur de multiples sources, notamment des ministères, des agences environnementales et des bases 23 https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change- communique-13-march-2024 PUBLIÉ https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024 https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024 Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 36/60 de données publiques, et indépendante24 permet l?évaluation régulière (idéalement annuellement) des progrès des politiques climatiques. Par exemple, le PBL utilise des outils de modélisation pour anticiper les impacts des mesures et proposer des ajustements avant qu?il ne soit trop tard. L'Irlande dispose de deux structures clés pour l'évaluation de sa planification écologique : ? L?Agence de protection environnementale (EPA) : indépendante, elle fournit des données et des rapports réguliers sur les émissions de gaz à effet de serre, la qualité de l?air, et d'autres indicateurs environnementaux. Ces rapports alimentent les débats politiques et permettent d?ajuster les politiques climatiques. ? Le Conseil consultatif sur le changement climatique (CCAC) : cet organe indépendant donne des recommandations stratégiques et suit les progrès des politiques environnementales dans le cadre de rapports réguliers soumis au gouvernement et au Parlement. En Suède, le Haut Conseil pour le climat est chargé d?évaluer si les politiques publiques permettent d?atteindre les objectifs climatiques nationaux. Il réalise une analyse indépendante des décisions gouvernementales et des trajectoires climatiques, tout en mettant en évidence les mesures supplémentaires nécessaires pour combler les écarts entre les objectifs et les résultats attendus. Ces évaluations sont basées sur des données scientifiques fournies par l?Agence suédoise de l?Environnement et sont publiées annuellement. Créé par la loi climat de 2008, le Comité pour la changement climatique (« Committee for Climate Change ») au Royaume-Uni occupe un rôle central dans l?évaluation des politiques climatiques (sur l?adaptation comme sur l?atténuation) et la définition des budgets carbone. Son mandat est par ailleurs renforcé par l?articulation étroite qu?il entretient avec le Parlement britannique et l?obligation donnée au gouvernement de répondre aux recommandations du comité d?experts. Grâce à cette approche, les décisions politiques sont ajustées régulièrement pour aligner les actions avec les objectifs climatiques. En Irlande, en 2023, l'EPA a signalé que le pays n'atteindrait qu'une réduction de 29 % des émissions d'ici 2030, bien en deçà de l'objectif de 51 %. Ce constat a conduit à une révision des priorités et des politiques climatiques, notamment dans les secteurs de l?agriculture et du transport, pour réduire cet écart. L?EPA continue de jouer un rôle central en fournissant des données scientifiques indépendantes pour guider les ajustements nécessaires. En Finlande, le « Panel climatique », un organe scientifique indépendant, a publié en 2024 un rapport soulignant l'insuffisance des efforts dans le secteur UTCATF (utilisation des terres, changement d?affectation des terres et foresterie). Il a recommandé des actions immédiates pour restaurer les puits de carbone, ce qui a incité le gouvernement à revoir ses politiques forestières et à allouer des financements supplémentaires à la gestion durable des forêts. Par ailleurs, bien que non appliqué pour le moment aux sujets climatiques, le Royaume-Uni a également expérimenté un modèle original d?évaluation des politiques publiques : le réseau des « What Works Centres », centres thématiques chargés de faire la synthèse des connaissances dans leur domaine afin d?éclairer la décision publique. Pour évaluer leurs politiques, les ministères britanniques s?adressent régulièrement à des consortiums d?acteurs externes réunissant des universités, des organismes indépendants de recherche et des cabinets de conseil. Cette externalisation constitue pour la presse et l?opinion publique une garantie de qualité des évaluations et de crédibilité de leurs résultats. Depuis 2015, un panel d?experts de l?administration et du monde académique, le « Cross- Government Trial Advice Panel » (CG-TAP), est également à la disposition des ministères pour les aider à mettre en oeuvre des évaluations d?impact. Avec 24 L?indépendance dont il est fait mention ici renvoie à une indépendance par rapport au pouvoir politique, au sens autorité administrative indépendante en France, et par rapport aux lobbies économiques et sociétaux (syndicats et monde associatif notamment). PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 37/60 une approche similaire, l?Académies des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (NASEM) aux Etats-Unis, organisation privée à but non lucratif qui regroupe de grands chercheurs du pays, publie des rapports sur les thématiques de la transition écologique, tels que « l?Accélération de la décarbonation aux Etats-Unis » (2024), « L?intégration du changement climatique et de la politique climatique dans la modélisation macro-économique » (2024), « Intégrer les sciences humaines pour adapter les réponses sociétales aux changements environnementaux » (2023), produisant une évaluation externe de l?action de l?administration fédérale. La question de l?aspect contraignant ? que la contrainte s?appuie sur la norme ou sur une pression sociale et morale ? de ces modalités de contrôle et d?évaluation est également centrale dans leur capacité à réorienter les politiques publiques. Ainsi en Afrique du sud, le rôle d?évaluation joué depuis 2020 par la Commission présidentielle sur le climat renforce le message critique sur le retard pris dans la mise en oeuvre des politiques, que les autres dispositifs d?évaluation sud-africain sur le climat et la biodiversité, de par leur nature non contraignante, ne pouvaient pas porter. Le modèle français de planification écologique ne dispose pas d?un tel outil d?évaluation. Certes, le Haut Conseil pour le Climat (HCC), créé en 2018, joue un rôle d?évaluation étant un organisme indépendant chargé d'évaluer l'action publique en matière de climat. Composé d'experts issus de diverses disciplines, il analyse la cohérence des politiques françaises avec les engagements nationaux et internationaux, notamment l'Accord de Paris, et formule des recommandations pour améliorer leur efficacité. Il publie des rapports annuels et des avis spécifiques évaluant les progrès de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le respect des budgets carbone, et l'adaptation au changement climatique, publications ayant vocation à éclairer les décideurs politiques et le public sur l'état de la transition écologique en France. Néanmoins, la Cour des comptes, avec l'appui du HCC, a publié en mars 2024 un rapport intitulé « Évaluation annuelle de la mise en oeuvre des mesures prévues par la loi climat et résilience » qui conclut que les dispositifs actuels de suivi et d'évaluation des politiques climatiques sont insuffisants pour mesurer efficacement les progrès réalisés et que plusieurs recommandations du HCC, notamment en matière de gouvernance et de coordination des actions climatiques, n'ont pas été entièrement suivies d'effets. En mai 2023, l'IGF a publié un rapport intitulé « Adaptation de la fiscalité aux exigences de la transition écologique » recommandant une refonte de la fiscalité pour mieux intégrer les objectifs climatiques, en ligne avec les préconisations du HCC sur l'utilisation d'instruments fiscaux pour encourager la transition écologique, et insistant sur la nécessité d'un suivi rigoureux des dépenses publiques liées à l'environnement, rejoignant les recommandations du HCC sur la transparence budgétaire et l'affectation des ressources. Cependant, non seulement il ne dispose pas de l?autorité nécessaire pour imposer les constats que font apparaitre ses évaluations, mais en outre, le HCC est centré uniquement sur les enjeux climatiques, et non sur les autres aspects de la transition écologique. Ce constat a déjà fait l?objet d?évocation de réformes telles qu?une évolution du HCC ou la création d?un Défenseur de l?environnement sur le modèle de celui du Défenseur des droits, mais ces idées n?ont jamais prospéré. La France doit se doter d?une entité d?évaluation de sa planification écologique indépendante et reconnue qui appuiera le SGPE dans sa démarche de pilotage de la planification écologique. 2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique L?obligation de rendre des comptes sur la mise en oeuvre de la planification écologique est cruciale pour garantir la transparence et l?efficacité des politiques publiques, mais aussi leur acceptabilité PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 38/60 sociale. Le narratif de la transition doit s?appuyer sur une redevabilité politique afin d?être appréhendé et déployé par les élus locaux du pays. Le Parlement peut ainsi avoir un rôle à jouer quand il est associé à la prise de décision sur la planification écologique ou à l?évaluation de cette politique, étant alors en capacité de constater les difficultés rencontrées par les pouvoirs publics en charge. C?est ce pari d?association du Parlement que font les Pays-Bas, la Finlande, la Suède, le Danemark ou encore l?Irlande et le Royaume-Uni. Ainsi, en Irlande, le Premier ministre publie annuellement un rapport d?étape sur les progrès réalisés dans le cadre du Plan d'action climat. Ce rapport est complété par les analyses de l?EPA qui alimentent les débats parlementaires avec des projections et des évaluations des politiques mises en oeuvre. Ces échanges permettent d?identifier les lacunes et d?ajuster les stratégies, renforçant ainsi la redevabilité du gouvernement envers le Parlement et les citoyens. En Suède, la loi cadre climatique impose au gouvernement de publier chaque année un rapport intégré au projet de loi de finances. Ce document évalue l?écart entre les objectifs climatiques et les résultats obtenus, permettant une comparaison transparente des trajectoires. Le Parlement utilise ces rapports pour surveiller et débattre des performances du gouvernement en matière de transition écologique. À Singapour, les « Committee of Supply » sont des plateformes où chaque ministère présente et justifie ses actions devant le Parlement lors des discussions budgétaires annuelles. Cette démarche permet d?assurer une redevabilité politique sur la mise en oeuvre des initiatives du Plan Vert (« Green Plan ») et d?informer les décisions budgétaires à venir. Au Danemark, chaque année, le Ministère du Climat, de l?Énergie et de l?Approvisionnement, est chargé de présenter au Parlement un programme climatique (« klimaprogram »). C?est l?occasion de faire le point sur le niveau de réalisation des objectifs nationaux tout comme des initiatives et mesures prévues en matière de climat. La planification écologique ne fait pas en France l?objet d?une présentation systématique devant le Parlement. Elle ne fait donc pas l?objet d?une confrontation en matière de redevabilité politique, ce qui affaiblit sa capacité à être appréhendée par le personnel politique. Une opération de formation à très grande échelle de l?administration publique à la transition écologique a été lancée dans le cadre de la planification écologique. Une même démarche n?a pas été menée auprès des députés ou des sénateurs, ni des élus régionaux ou locaux en dehors de la déclinaison territoriale actuellement engagée de la planification écologique. Leur adhésion à la transition n?est donc pas garantie par une démarche d?échange ou d?information et peut donc pâtir d?un déficit de compréhension fine des enjeux mais également de la perception des contraintes dans sa mise en oeuvre. Pire, la création d?instances citoyennes sans rôle clairement défini au préalable, telle que la convention citoyenne pour le climat, a conduit les parlementaires à se sentir dessaisis de leur rôle de législateurs sur ces enjeux les poussant à diverses surenchères lors de l?adoption de la loi climat-résilience, ce qui a largement compliqué les débats et conduit à l?abandon ou la réduction de l?ambition de certaines mesures. La planification écologique doit faire l?objet d?un suivi annuel devant le Parlement, qui permettra d?évaluer si la trajectoire est respectée et de définir les mesures à mettre en place si ce n?est pas le cas. Ce suivi sera alimenté par la publication en amont d?un rapport annuel de l?organe d?évaluation indépendant. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 39/60 2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle 2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050) Une planification écologique efficace repose sur une trajectoire claire, articulée autour d?échéances courtes, moyennes et longues. Cette approche garantit une visibilité accrue pour les acteurs économiques et permet de déployer des politiques ambitieuses. Singapour dispose d?un plan à long terme, révisé en 2021, pour projeter son développement sur 50 ans. Ce plan inclut des projets ambitieux comme la reconquête de terres sur la mer avec le projet "Long Island" pour répondre à la montée des eaux. Les infrastructures urbaines, économiques et naturelles sont intégrées dans cette vision, renforçant la résilience climatique tout en garantissant la durabilité urbaine. Cette perspective de long terme garantit la confiance des acteurs économiques qui nous l?ont exprimé lors de notre visite sur place. L?Indonésie articule sa planification autour d?un plan national de développement à long terme (RPJPN), couvrant 20 ans, et d?un plan à moyen terme (RPJMN), révisé tous les 5 ans pour refléter les priorités présidentielles. Adopté en janvier 2024, le RPJPN "Indonésie Dorée 2045" cible la neutralité carbone et intègre des objectifs socio-économiques et écologiques, tels que le renforcement des capacités face aux chocs environnementaux. Ce plan de long terme permet d?assurer que la transition entre deux présidents ne remettra pas en cause les engagements de long terme, tout en laissant la place aux adaptations politiques découlant nécessairement des changements démocratiques. L?Union européenne développe également des plans climatiques basés sur des échéances multiples. Par exemple, la stratégie 2030-2050 fixe des objectifs intermédiaires en termes de réduction des émissions et d?adaptation, tout en proposant des mécanismes financiers à long terme pour soutenir les transitions nationales. Les Pays-Bas ont mis en place une planification à long terme de la gestion de l?eau, essentielle dans un pays en partie situé sous le niveau de la mer. Leur approche inclut des mesures pour la prévention et la gestion des inondations, combinant solutions infrastructurelles et préservation des écosystèmes. Cette stratégie repose sur une vision à 50 ans, garantissant la sécurité hydrique tout en répondant aux défis climatiques. Au Royaume-Uni, des objectifs de long et moyen terme (réduction des émissions de GES de 81% d?ici 2035 par exemple) s?accompagnent de planifications successives sur 5 ans, sous la forme de budgets carbone, ce qui permet d?allier une planification de long terme avec des échéances de plus court terme sur lesquelles le gouvernement est redevable. Une telle visibilité est particulièrement importante pour accompagner les politiques d?adaptation (Pays-Bas sur les inondations), de reconquête de la biodiversité (Costa Rica avec la reconquête forestière, Afrique du sud avec les aires protégées) mais également dans des objectifs de transformation de filières économiques - politique agricole, réindustrialisation ? (voir l?exemple de Singapour sur l?eau et la politique industrielle) ou de gestion de l?étalement urbain (Portland, Singapour). La planification écologique de la France se limite à 2030 et peine à décliner des objectifs pour 2040 et au-delà, même si l?objectif de neutralité carbone en 2050, celui de l?absence d?artificialisation nette en 2050 ou les objectifs intermédiaires fixés à l?échelle communautaires devraient la pousser dans cette direction. Ce manque de visibilité nuit à la crédibilité de la politique et encourage sa remise en cause régulière. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 40/60 La France doit se doter d?une planification à échéance 2040 et à échéance 2050 qui doit intégrer ses objectifs en matière d?adaptation et de reconquête de la biodiversité. 2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels Une fois le calendrier de la transition établi sur les court, moyen et long termes, cette visibilité calendaire sur le plan de transition écologique nécessite d?être accompagnée de perspectives budgétaires permettant la mise en oeuvre des actions du plan. La planification de la transition écologique doit ainsi faire l?objet d?une planification budgétaire claire et pluriannuelle. Cette visibilité apporte de la certitude aux investissements publics et privés qui doivent être engagés. Sans une telle visibilité, l?action est freinée et peine à se déployer. La Commission européenne l?avait bien compris lors du lancement du Plan vert de l?Union européenne : il s?appuie sur l?annonce de 1 000 milliards d?euros d?investissements durables au cours de la décennie. Ce plan combine des fonds provenant du budget de l'UE, du système d'échange de quotas d'émission (ETS) et du programme InvestEU, qui vise à attirer des investissements publics et privés. Les fonds de cohésion de l'UE soutiennent les pays et régions dans la mise en oeuvre de projets contribuant au « Green Deal ». Les États membres doivent consacrer au moins 30 % des fonds reçus du Fonds européen de développement régional (FEDER) à ces priorités. De plus, 37 % du Fonds de cohésion est spécifiquement destiné à atteindre la neutralité climatique d'ici 2050. La politique agricole commune a également été renforcée dans son volet environnemental (au moins en affichage au niveau européen) pour accompagner la stratégie de la ferme à la fourchette. Cette programmation budgétaire de l?Union européenne a facilité la planification budgétaire nationale des Etats membres, qui se sont également appuyés sur les plans de relance post crise COVID lancés au sein de l?UE. De même, l?administration Biden aux Etats-Unis a déployé sa politique climatique dans le cadre d?une « nouvelle politique industrielle » qui s?est traduite par cinq lois appuyées sur des financements publics : la loi sur l?énergie de décembre 2020 prévoit 7 milliards de dollars sur 5 ans, la loi bipartite sur l?infrastructure de novembre 2021 y consacre 454 milliards de dollars, la loi sur la réduction de l?inflation (Inflation réduction Act) d?août 2022 prévoit 370 milliards de dollars sous forme de crédits d?impôt, de subvention et de prêts, l?acte « puces et sciences » prévoit enfin plus de 60 milliards de dollars pour la recherche-développement (semi-conducteurs, technologies sans fil notamment). Cette problématique se retrouve dans d?autres pays : l?annualité budgétaire ou l?émergence de nouvelles priorités nuisent à la mise en place de financements pluriannuels et rendent le financement de la planification écologique dépendant des autres choix budgétaires, parfois en contradiction avec son inscription dans le temps long. L?usage de fonds dédiés à la transition écologique ? comme le Fonds vert en France ? permet aux pays l?affichage des subventions publiques affectées au plan de transition écologique et peut, en cas d?affectation de certaines recettes, à la fois garantir un financement pluriannuel et faciliter l?acceptation par la population du financement de la transition de long terme, prenant notamment appui sur le principe pollueur-payeur. Depuis 2023, l?Allemagne s?est dotée d?un fonds pour le climat et la transformation (KTF), alimenté par les recettes du système national de tarification du CO?, c'est-à-dire la taxe carbone appliquée aux émissions provenant de la combustion de combustibles fossiles. Cependant, en novembre PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 41/60 2023, la Cour constitutionnelle fédérale allemande a déclaré inconstitutionnel le transfert de 60 milliards d'euros de crédits non utilisés, initialement destinés à la gestion de la pandémie de COVID-19, vers le KTF. Cette décision a entraîné une révision du financement du fonds, nécessitant des ajustements pour maintenir les programmes clés de financement de l'énergie et des infrastructures. La Belgique a également mis en place un « Fonds de transition écologique », dont la mission est valable pour 30 ans et renouvelable, et qui sert de courroie de transmission pour les fonds européens vers les entreprises et les projets de réduction des émissions. Le Danemark a annoncé en juin 2022 la mise en place d?un « Fonds Vert » de 53,5 milliards de couronnes (7,2 milliards d?euros) provenant de recettes fiscales qui devraient alimenter les caisses de l?Etat entre 2024 et 2040. C?est également le cas en Finlande, en Irlande, aux Pays-Bas, au Japon, à Singapour. Hors Union européenne, les pays recourent également à des fonds dédiés. Le Rwanda appuie sa politique de transition environnementale sur un fond spécifique : le « Rwanda Green Fund » ou FONERWA, établi dès 2012. Le Brésil a doté sa politique sur le changement climatique d?un fond fédéral spécifique, doté notamment de 10 milliards de reals par la levée d?obligations vertes. Il a même plus récemment doté sa politique forestière d?un Fonds national pour la mise en valeur des forêts, outil de sa planification forestière à grande échelle. Il est également question en Chine d?un « fonds national de transformation à faible émissions de carbone » ou d?un fonds de développement vert Ces fonds peuvent être utilisés par les pays pour doter les collectivités locales afin d?accompagner la transition écologique sur le terrain. Ainsi, depuis la mise sur pied du plan climatique renforcé du Canada en décembre 2020, le gouvernement a investi 247 millions de dollars au moyen du Fonds pour une économie à faibles émissions de carbone dans 21 programmes provinciaux et territoriaux de rénovation de maisons et de bâtiments. En Indonésie, le fonds pour le changement climatique, bien que piloté par le BAPPENAS, est directement chargé de financer des programmes provinciaux et locaux en mobilisant des ressources nationales et internationales. Le Danemark dispose d?un Fonds d?investissement pour les pays en développement, afin de clarifier l?usage de ses financements publics de coopération internationale dans le domaine de la transition climatique et environnementale. Au-delà de son fond climat assez classique, la Finlande dispose d?un Fonds public d?investissement pour l?innovation (Sitra), fondation dont l?objectif est de « promouvoir un développement stable et équilibré en Finlande, une croissance économique qualitative et quantitative et une compétitivité et une coopération internationale ». Cette fondation est responsable devant le Parlement mais pas devant le gouvernement. Sa capitalisation était évaluée à 771 millions d?euros en 2017. Elle fonctionne à la fois comme un « think-thank » et comme une société d?investissement. Créée en 1967 dans le cadre de la Banque de Finlande, la majeure partie de sa dotation actuelle provient d?un don d?actions Nokia du Parlement finlandais de 1992. Le fonds dépense environ 30 millions d?euros par an correspondant au rendement de sa dotation. Il investit principalement dans des entreprises et des start-ups pour créer de nouvelles activités rentables. Le manque de transparence sur les financements accordés à la transition écologique que nous avons rencontré dans nos recherches démontre que l?enjeu est commun à tous les pays. Nous recommandons donc qu?une analyse approfondie des financements de la transition écologique soit menée, pour compléter la première approche faite dans ce rapport. Les outils de dépense publique sont en effet un très bon indicateur de la capacité des pays à respecter leurs engagements. En Suède, le suivi de l?atteinte des objectifs est effectué par le gouvernement, chaque année dans le cadre du rapport « climat » du PLF (avec l?appui des Agences nationales, dont l?Agence de protection de l?Environnement Naturvårdsverket). Ainsi un relèvement de 8% au premier semestre PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 42/60 2024 des émissions suédoises a été évalué comme principalement dû à l?augmentation de la consommation des carburants routiers fossiles entretenue par la décision du nouveau gouvernement de réduire le taux d?incorporation des biodiesels à 6% (contre 50% en volume précédemment). Faisant ressortir l?importance de la programmation budgétaire de la transition écologique, « l?Irish Fiscal Advisory Council », organisme de surveillance budgétaire de l?Irlande, a publié en octobre 2023 un rapport sur l?impact du changement climatique sur les finances publiques, faisant partie d?une série de recherche sur la viabilité à long terme des finances publiques, en lien avec le changement climatique. Le rapport estime le coût de l?ensemble des dépenses publiques nécessaires pour atteindre les objectifs climatiques irlandais en suivant une « transition juste », telle que décrite par la législation adoptée. Le rapport modélise deux scénarios pour les dépenses, l?un de coût faible correspondant à la limite inférieure de l'implication potentielle de l'État, et l?autre de coût élevé considéré comme une estimation supérieure raisonnable, tout en reconnaissant que ces coûts pourraient être encore plus élevés. Entre 2026 et 2030, le gouvernement devrait dépenser entre 0.6% et 1.1% du GNI par an (1.6 à 3 milliards d?euros en valeur actuelle) pour assurer une transition climatique. L?accompagnement par une programmation budgétaire ambitieuse du plan lors de son adoption par la France (loi de finances pour 2024) avait initialement assis la planification française dans une perspective budgétaire claire. Le fonds vert permettait notamment le co-financement par l?Etat d?actions dans les territoires, méthode dont l?efficacité avait été testée lors du premier plan de relance post Covid. Suite à la dégradation des finances publiques, la remise en cause des financements attribués à la transition écologique n?a pas fait l?objet d?une évaluation de ses conséquences, et notamment du coût du retard de la mise en oeuvre de certaines actions. La France doit se doter d?une loi d?orientation budgétaire pluriannuelle de la transition écologique et prévoir la mise en place de fonds dédiés au financement de la transition pouvant permettre de mutualiser des financements publics et privés. 2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens 2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires La planification écologique, une fois établie et financée, doit ensuite se déployer au plus près des territoires. Elle doit être appropriée par les échelons locaux, adaptée aux réalités géographiques et économiques des territoires. Elle doit pour cela s?appuyer sur des outils permettant sa déclinaison. Et faire l?objet de financements clairs et identifiés, d?un montant adapté à la taille des projets d?échelle locale. La politique forestière du Costa Rica est un exemple de déclinaison territoriale efficace d?une action de transition dont les résultats sur le long terme sont indéniables. Elle combine plusieurs outils de politique publique, visant plusieurs actions en parallèle (loi contre la conversion de la forêt N°7575, programme d?aires protégées) : la réduction de la déforestation 25 et l?accroissement de la 25 50 000 ha/an dans les années 80, 38 000 ha/an dans les années 90 et 27 000 ha/an depuis 2000. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 43/60 régénération de la forêt26, permettant à la fois la protection de la forêt et son exploitation soutenable, mais aussi la diversification agricole, la protection de la biodiversité et des ressources en eau, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le développement rural et la participation de la société dans toutes ces composantes (peuples autochtones, professionnels de la forêt et de l?agriculture). Le programme dispose également d?un financement clairement identifié au sein du FONAFIFO (Fond de financement de la forêt nationale), alimenté en partie par des ressources extérieures (financement REDD+ de la Banque mondiale)27 et s?appuyant sur des outils innovants de financement (Forest Bond Certificate CAF, Forest Bond Certificate for forest management CAFMA, paiements pour services environnementaux). Le principal acteur des territoires étant les collectivités, c?est en premier lieu auprès d?elles que doit se déployer la planification de la transition. En Afrique du sud, les provinces et les municipalités doivent décliner la planification climatique nationale. Ainsi, la province du Cap occidental est régulièrement en première ligne pour proposer divers plans de planification écologique : sa « Climate Change Response Strategy ? Vision 2050 » a été publiée en 2022 puis révisée en 2023, et son « Energy Resilience Program » (2021) définit les actions à engager dans le secteur électrique de la région. La ville du Cap est particulièrement volontariste et a adopté divers stratégies et plans depuis 2014 (Resilience Strategy en 2019, Water Strategy en 2019, Inclusive Economic Growth Strategy en 2019, Bioregional Plan en 2015, Integrated Coastal Management Policy en 2014). En Indonésie, le plan national de développement à moyen terme est décliné dans les territoires via les RPJMN. Ils sont mis en oeuvre par les administrations techniques décentralisées au niveau de chaque province ayant à leur tête un gouverneur. Etablis pour 5 ans, ils font l?objet d?une élaboration concertée, qui s?appuie sur une analyse de la situation, la formulation de scénarii environnementaux et l?identification de recommandations stratégiques. En parallèle, les gouvernements provinciaux doivent également rédiger leurs plans de réduction des émissions de GES ? les RAD-GRK. Les villes indonésiennes disposent également de leurs plans de réduction des émissions. Au Danemark, les régions sont pleinement associées à l?élaboration et à la mise en oeuvre de la transition verte du Royaume. Les régions et la fondation danoise Sustainia28, qui met en contact le monde des affaires et le monde scientifique, ont uni leurs forces pour remettre une feuille de route au Gouvernement sur la manière dont les régions peuvent faciliter la participation et l?inclusion citoyennes dans la transition vers une société durable. Le Danemark est en passe de devenir le premier pays au monde où chaque municipalité (98) disposera d'un plan d'action climatique. La loi finlandaise a été modifiée le 1er mars 2023 pour ajouter une obligation pour les municipalités d?établir un plan climat et de le mettre à jour au moins une fois par mandat municipal. Ce plan devait inclure l?objectif de réduction des émissions, et des mesures pour atteindre ces objectifs. Chaque municipalité avait droit à une subvention de 45 000 euros maximum pour l?élaboration de son plan. Ces plans devaient être élaborés entre 2025 et 2029 mais le programme du nouveau gouvernement Petteri Orpo a prévu de supprimer cette mesure ainsi que les subventions afférentes en novembre 2023 dans le cadre du budget national et des réformes proposées par le gouverne- ment Orpo pour l'année 2024. 26 De 417 000 ha de forêt régénérés en 1986, la couverture atteint 918 000 ha en 2013. 27 200 millions de dollars entre 1998 et 2011 28 Sustainia, anciennement « Copenhagen Climate Council », est une collaboration mondiale entre le monde des affaires et le monde scientifique, fondée par Erik Rasmussen, fondateur du principal groupe de réflexion indépendant de Scandinavie, Monday Morning, basé à Copenhague, et aujourd'hui dirigée par Rasmus Schjødt Larsen, diplômé de Harvard https://sustainiaworld.com/about/ PUBLIÉ https://sustainiaworld.com/about/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 44/60 Bien que n?ayant pas l?obligation de le faire, la plupart des Länder allemands ont adopté leur propre stratégie ou législation climat, formulant leurs propres objectifs sectoriels et prévoyant des outils de déploiement régionaux. En se basant sur l?étude menée par « Climate chance »29, on compte 12 des 16 Länder et villes-Etat à avoir adopté une législation permettant de coordonner les actions de transition climatique à l?échelle régionale30. Huit d?entre elles31 incluent un objectif quantifié de réduction des émissions de GES. L?appropriation des enjeux par les échelons locaux se retrouve également dans la définition de la politique de l?eau néerlandaise. Elle s?appuie sur un ancrage local historique qui permet de penser la gestion de l?eau et du risque, en amont et au quotidien. Aux Etats-Unis, la Californie dispose d?une politique climatique autonome de celle du gouvernement fédéral. En novembre 2022, elle a adopté une loi visant la réduction de ses GES de 48% d?ici 2030 et l?atteinte de la neutralité carbone d?ici 2045, le tout soutenu par un budget de 52 milliards de dollars sur 5 ans. Elle a même mis en place son propre marché carbone qui couvre 85% des émissions dont les transports et le logement, et est connecté au marché carbone du Québec. Les « Sustainable Communities Strategies », mises en place en Californie (SB 375) donnent un cadre pour la réduction des émissions de GES pour les transports et la planification urbaine, en cohérence avec les autres lois de l'Etat. Les organisations métropolitaines de planification de l'Etat (18 en tout) sont tenues d'élaborer des infrastructures urbaines permettant d'augmenter la densité (transports en commun, infrastructures cyclables et piétonnes, réduire la dépendance automobile, ou agir sur l'étalement urbain). A l?inverse, une mauvaise appropriation des enjeux à l?échelon local peut conduire à des retards dans la mise en oeuvre voire à des déclinaisons inappropriées. Ainsi en Indonésie, la décentralisation mise en oeuvre très rapidement à la fin de la dictature de Suharto, pourtant axée sur l?autonomisation des provinces, a conduit à une autonomisation de groupes clientélistes s?appuyant sur des réseaux oligarchiques, favorisant les passe-droits d?exploitation, les incendies criminels et la pêche illégale, contre lesquels le gouvernement actuel lutte encore. De même, la déclinaison verticale descendante de la planification chinoise s?est heurtée à des retards de mise en oeuvre et de la corruption aux échelons locaux. La très grande fragmentation de la structure administrative en Chine l?explique également. C?est dans ce cadre que la Chine a eu recours à une réforme administrative en 2026 pour renforcer l?autonomie des bureaux de protection de l?environnement (BPE) préfectoraux, dans le but d?éviter la double tutelle qu?ils subissaient des échelons préfectoraux et provinciaux. Et cela explique également la mise en place du « crédit social ». Ce système de notation des citoyens, des entreprises et des fonctionnaires locaux conduit à la distribution de récompenses, mais aussi et surtout de pénalités pour ceux ne respectant pas les règles, en s?appuyant sur une collecte automatique de données et leur traitement par des intelligences artificielles. La France a mis en place une déclinaison territoriale de sa planification écologique dans le cadre des COP, qui se déroulent dans les régions françaises depuis l?automne 2023. A ce stade, cette démarche ne s?est pas traduite par des plans régionaux. Elle englobe un état des lieux de la région pour établir un diagnostic partagé. Elle doit permettre l?articulation de la planification écologique régionale avec la planification nationale et la coordination avec les plans locaux. Elle doit définir 29 https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/ 30 La Bavière a adopté une réforme de la Loi bavaroise sur la protection du climat en janvier 2023 (BayKlimaG) avec des objectifs climatiques plus ambitieux que les objectifs fédéraux (neutralité climatique à l?horizon 2040). La Basse-Saxe a adopté une révision de la Loi sur la protection du climat (NKlimaG) en décembre 2023. 31 Sauf celle d?Hambourg qui veut pourtant atteindre la neutralité carbone. Celle du Land de Hesse a des objectifs en matière d?ENR et de quota de rénovation des bâtiments. PUBLIÉ https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 45/60 des mesures concrètes permettant le soutien aux projets à l?échelon local. Cette approche qui se veut à la fois montante et descendante doit permettre une meilleure association des échelons locaux dans le déploiement de la planification écologique. Impliquer tous les acteurs des territoires de l?élaboration jusqu?à la mise en oeuvre 2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens La planification écologique dans les territoires doit s?appuyer sur l?ensemble des acteurs locaux pour assurer son ancrage et son efficience et sur des outils adaptés à ces enjeux, notamment en matière de financements. 2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la planification Les principaux porteurs de ces politiques sont les collectivités locales et elles sont donc le principal vecteur de la traduction concrète des actions de la planification écologique, en s?appropriant les objectifs de la planification ou de la stratégie nationale. En Inde, des États comme le Gujarat et le Rajasthan sont des leaders dans le déploiement de l?énergie solaire. Dans le domaine agricole, l?État du Sikkim a mis en place une politique axée sur la transition écologique, lui permettant de devenir le premier État indien entièrement bio en 2016, grâce à une interdiction complète des pesticides et engrais chimiques. Cette initiative s'inscrit dans une stratégie de développement durable qui vise à protéger les sols, améliorer la santé publique et soutenir les petits agriculteurs. En Afrique du sud, le Cap, Johannesburg et Durban sont membres du C40 « Cities Climate Leadership Group », qui rassemble environ cent maires de grandes villes mondiales décidées à faire face à la crise climatique. En comparaison, seule Paris est membre de ce réseau en France. Plusieurs villes appartiennent également à l?« International Council for Local Environmental Initiatives » (ICLEI) ou au réseau « Resilient cities ». La « South African Local Government Association » (SALGA) apparait comme l?organe compétent pour assurer la remontée des revendications locales dans la mise en oeuvre de ces stratégies climatiques, établissant un dialogue avec l?échelon central. S?appuyant sur l?exemple allemand développé ci-dessous, le pays a également mis en place un « Local government climate change support program » depuis 2012 qui fonctionne avec une plateforme internet fournissant guides, outils, jeux de données, formations. En effet, l?Allemagne déploie depuis 2012 un dispositif de soutien pour les collectivités dans la mise en oeuvre de la transition climatique : l?initiative nationale pour la protection du climat (NKI) qui fête ses 15 ans d?action. Elle dispose d?un site internet dédié, affiche plus de 45 000 projets réalisés, 1,5 milliards d?euros de financements distribués. Parmi ses projets emblématiques, le centre historique de la ville de Lemgo est climatiquement neutre grâce à un projet de chauffage urbain réutilisant la chaleur des eaux usées ou le projet de transformation de l?éclairage urbain au LED mis en place dans 48 communes de la haute Hesse. Depuis avril 2023, une « Agence de protection locale du climat » appuie les collectivités dans la mise en oeuvre de leur projet climatique depuis les méthodologies de calcul des émissions jusqu?aux financements pour les projets, en sus d?outils de formation et de mentorat. Cette démarche s?appuie sur le KTF évoqué dans la section précédente. Pour aller au bout de leur démarche, les collectivités utilisent également leur système PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 46/60 comptable (BISKO) lors de l?établissement de leur bilan énergétique et des émissions de GES ce qui permet la traçabilité des démarches entamées. De même, la Finlande dispose depuis 2018 d?un Programme de solutions climatique municipales (2018-2023, 8 millions d?euros) pour financer des projets climat des communes et des régions. Mais les outils de la planification doivent également pouvoir s?adresser aux autres acteurs du territoire. 2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification En premier lieu, les acteurs économiques doivent pouvoir être associés à la planification écologique. La Finlande a élaboré en coopération avec les acteurs de chaque secteur économique des feuilles de route sectorielles. Cette approche est assez révolutionnaire car il s?agit de « feuilles de route inversées » : ce sont les acteurs de chaque secteur qui élaborent ces feuilles de route, régulièrement remises à jour. Cela permet au gouvernement lorsqu?il en fait la synthèse de disposer d?une vision permettant notamment une meilleure adéquation des moyens. Une démarche du même type a été mise en place aux Pays-Bas, avec en 2013 l?accord volontaire de l?énergie, puis l?accord national pour le climat avec son plan d?action, qui associe les acteurs économiques à la prise de décision sur les objectifs et leurs déclinaisons. A la différence de certains pays, on observe en Suède un mouvement volontaire industriel de décarbonation. Les bioénergies et l?électrification ont déjà fait chuter la part des énergies fossiles à 19% de la consommation énergétique de l?industrie (contre 54% en 1975, comme en France aujourd?hui). Les acteurs industriels concentrant les dernières sources fossiles (les plus difficiles à éliminer car situées au coeur des procédés industriels comme le coke dans la production d?acier et les émissions des process chimiques de fabrication du ciment) ont pris conscience de l?avantage stratégique de décarboner leur production pour renforcer leurs ventes à court et moyen terme. L?implication du monde économique est allée en Allemagne jusqu?à la création de nouveaux modes de décision au sein des entreprises, poussés par les syndicats qui cherchent à accompagner la transition et à ce que ces transitions s?opèrent dans le respect des droits des salariés et du maintien de leurs emplois. Ils ont ainsi fortement plaidé pour la mise en place de primes devant accompagner l?évolution des compétences des salariés sur leur poste de travail. Les syndicats portent également une proposition de révision de la loi sur le conseil d?établissement (Betriebsräte), dans lesquels ils ne siègent pourtant pas formellement : il est proposé que le conseil ait un droit d?initiative et de codécision en matière de décisions destinées à mieux protéger l?environnement, y compris l?évolution des modes de production ; l?instauration d?une commission environnementale dans toute entreprise de plus de 100 salariés est également proposée. Les outils doivent aussi permettre le financement des projets des acteurs du territoire, entreprises comme citoyens. La Californie distribue des aides et des prêts sur l?ensemble des sujets environnementaux et climatiques, dans le cadre d?appels à projets notamment. Ces subventions proposées sont regroupées sur un seul portail, avec un moteur de recherche extrêmement fluide et possibilité de traduction. L?un des outils les plus complets apparait comme celui de la stratégie de transition économique de Bruxelles capitale 2022-2030 : « Shifting economy ». Le programme vise à l?accompagnement de la trajectoire climatique et environnementale de la région par une stratégie dont l?objectif est une économie décarbonée, régénérative, circulaire, sociale, démocratique et digitale. Le programme cherche à « aligner les objectifs économiques sur les objectifs climatiques » et s?adresse à tous les acteurs économiques de la région. La « transition économique » est définie comme : « la PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 47/60 transformation progressive au sens large (qui va de l?adoption d?une démarche d?écogestion à des changements fondamentaux de business model) des activités économiques bruxelloises (en ce compris les sous-traitants et les fournisseurs bruxellois) dans la perspective de contribuer aux défis sociaux et environnementaux locaux et globaux ainsi qu?à la création et au maintien d?emplois de qualité à Bruxelles ». Dès 2024, les entreprises inscrites dans une démarche de transition économique ou qui sont exemplaires sur le plan social ou environnemental bénéficieront d?une majoration des aides économiques. A partir de 2030, les outils économiques de la région seront concentrés sur le soutien aux entreprises qui auront fait le choix de l?exemplarité sociale et environnementale. Certains outils sont déjà en place : - « finance&invest.brussels » facilite le financement des entreprises en transition et vient d?être recapitalisé (triplement de sa capacité financière avec 131 millions d?euros additionnels) ; - adoption d?un « Plan régional pour l?innovation » (PRI) qui prévoit 400 millions d?euros de financement entre 2021 et 2027 pour les domaines d?innovation stratégique ; - lancement de « Renolution » alliance des secteurs privé et public pour atteindre le triplemement du taux de rénovation du bâti bruxellois ; - la Stratégie Qualification-Emploi portée par le ministre de l?emploi et de la formation. La stratégie a été co-construite avec l?écosystème bruxellois. Au total, 280 participants ont été impliqués dont 132 organismes publics ou privés (fédérations professionnelles et sectorielles, experts, guichets d?économie locale, universités, etc). 2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire L?association des citoyens au projet de planification écologique est un élément essentiel pour la concrétisation des projets. De nombreux pays ont tenté d?inclure les citoyens dans la prise de décision et organisé différentes modalités de concertation ou de consultation comme nous l?avons vu précédemment. Mais c?est dans la traduction concrète des projets dans les territoires que se mesure la qualité de l?association des citoyens et leur adhésion au projet. En Afrique du sud, la gestion des aires protégées a offert la possibilité d?association des propriétaires privés (25% des aires protégées appartiennent à des propriétaires privés) et des communautés locales. Plusieurs projets présentent aujourd?hui une gestion partagée entre l?autorité locale, les ONG et les communautés implantées. C?est par exemple le cas de la réserve de la communauté Mabaso, qui a établi un plan de gestion de l?aire protégée en partenariat avec WWF-SA. En Indonésie, les consultations avec les communautés locales, notamment sur la gestion des ressources naturelles et la reforestation, font partie intégrante de la planification. Les forums multi- acteurs (Musrenbang) offrent un cadre où citoyens, ONG et autorité locales participent à la prise de décision. Des plateformes locales existent au Costa Rica, initiatives locales impliquant directement les citoyens, notamment sur la reforestation et la préservation de la biodiversité. Ces efforts renforcent le lien entre les communautés et les objectifs nationaux de transition écologique. En Allemagne, la concertation locale est profondément ancrée dans les processus de planification écologique. Les initiatives citoyennes, comme les "Ratsbürger" (assemblées locales consultatives), permettent aux habitants de co-décider sur des projets énergétiques et environnementaux. Les Länder et les municipalités favorisent également les consultations pour intégrer les besoins spécifiques des populations dans la mise en oeuvre des objectifs climatiques. Plusieurs pays ont de même misé sur l?association de la jeunesse aux processus de réflexion sur la transition écologique : c?est le cas de l?Irlande, du Danemark (Conseil des jeunes pour le climat) ? PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 48/60 Les outils doivent également couvrir l?information des citoyens. Ainsi, en matière d?adaptation, le gouvernement de Californie a mis en place une série d?outils permettant l?information du grand public sur les ilots de chaleur, les risques liés aux tempêtes et aux inondations, mais aussi pour les collectivités avec notamment Adapt-CA, boite à outils de développement des capacités d?adaptation32 ou CERI-climate qui gère les interventions d?urgence sur les 600 infrastructures considérées comme essentielles à la capacité de l?Etat à réagir aux catastrophes. En France, le SGPE s?est saisi de cet enjeu de l?association citoyenne qui semble être ressenti comme un manque. Il a notamment développé un outil d?information/formation sur le plan (Le Bon Plan), sans disposer pour autant des moyens nécessaires pour en assurer la diffusion. Il analyse également les outils de déclinaison de la planification auprès des citoyens (aides directes pour l?efficacité énergétique des bâtiments, l?achat de véhicules électriques) qui sont les meilleurs moyens de constater le niveau d?adhésion de la population. Pourtant, l?incapacité à entrainer certains secteurs économiques à forte composante sociétale (agriculture notamment) et la grande majorité des citoyens qui restent peu conscient de la démarche de planification entamée par la France nuit à la mise en oeuvre de ses travaux. Poursuivre la mise en oeuvre territoriale de la démarche de planification écologique en se concentrant davantage sur les outils à déployer, notamment budgétaires et numériques, pour aider les collectivités au-delà des outils de rapportage, les acteurs économiques dans le suivi de leurs transitions et les citoyens dans leur appréhension et leur inclusion dans le processus de transformation. 2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale La planification écologique apparait également comme un bon outil de diplomatie climatique et environnementale. Des pays s?appuient sur leur expérience de planification écologique et leurs résultats pour renforcer leur positionnement dans les instances internationales : on citera notamment Singapour, le Costa Rica, et le Rwanda. Mais on peut également mentionner le rôle de leader au sein de leur continent que veulent jouer l?Indonésie, l?Afrique du sud ou le Brésil, comme porte-parole pendant les négociations internationales mais également comme des pays cherchant un mode de développement alternatif, s?appuyant sur une transition juste. Du côté des pays développés, le Royaume-Uni et le Danemark poursuivent leur investissement à l?échelle internationale et l?Allemagne dispose avec le GIZ d?un outil très puissant de coopération. La diffusion de la planification écologique au sein de la plupart des pays pourrait permettre de renforcer les outils internationaux existants au sein des 3 conventions de l?ONU : elle crédibilise les politiques nationales pour l?accession à des financements internationaux et facilite la lutte contre la corruption. A l?issue de plus d?une année à examiner la planification écologique dans les autres pays, il apparait clairement aux autrices du rapport une réelle appétence de nombreux pays rencontrés dans différents contextes pour des coopérations internationales en matière de planification écologique. Même si la planification écologique reste liée à un contexte national, les expériences et les outils 32 https://arccacalifornia.org/adapt-ca/ PUBLIÉ https://arccacalifornia.org/adapt-ca/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 49/60 mis en place par chacun sont très utiles pour la mise en place d?une planification plus efficiente. Par ailleurs, peu de pays ont mis en place une planification écologique complète et peu parviennent à déployer effectivement leur planification dans leurs territoires. Les mêmes obstacles sont souvent rencontrés par les uns et les autres ce qui renforce encore la valeur du parangonnage. La planification écologique pourrait donc devenir un nouvel outil de la stratégie diplomatique climatique et environnementale de la France. Faire de la planification écologique un nouvel outil de coopération internationale et renforcer les partenariats avec les pays les plus susceptibles de faire progresser la planification écologique française. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 50/60 Conclusion La planification écologique se déploie donc dans la majorité des pays du G20 et de l?Union européenne. Elle souffre le plus souvent des mêmes difficultés de mise en oeuvre, mais apparait néanmoins comme le meilleur outil pour permettre d?assurer la transition. Avec son exemple de planification écologique centralisée, la France dispose d?un outil puissant susceptible d?accompagner sa transition. Les recommandations de ce rapport ont vocation à accompagner le déploiement de cette planification et à faciliter sa mise en oeuvre, notamment sa déclinaison dans les territoires. L?utilité du parangonnage réalisé encourage à poursuivre la démarche, pour explorer certains pays supplémentaires non étudiés (Espagne, Italie, Portugal notamment), ou approfondir certaines situations n?ayant pas fait l?objet d?une étude suffisante par manque de temps et de moyens (Japon, Canada). Mais c?est également sur le plan sectoriel que cet approfondissement mériterait d?être réalisé. L?articulation entre les planifications et leur programmation budgétaire mérite en premier lieu d?être creusée tant elle apparait comme l?une des clés de la réussite de cette démarche. Des outils budgétaires innovants permettant de mieux garantir le financement de la transition, qu?ils soient des outils fiscaux, d?affectation budgétaire, ou de recours à des financements externes permettant d?associer mieux les acteurs économiques à la transition, méritent d?être expertisés. Les difficultés rencontrées par certains pays et les réussites sur des secteurs pour lesquels la transition écologique française patine pourraient également faire l?objet d?un approfondissement, notamment en priorité la politique de souveraineté alimentaire et agricole. Enfin, certains exemples très positifs de traduction de la planification dans les pays déjà étudiés pourraient faire l?objet d?échanges avec les pays concernés notamment les outils développés par l?Allemagne, la Belgique ou le Danemark en matière d?accompagnement des collectivités dans leurs projets de transition climatique et environnementale et d?implication citoyenne dans la prise de décision et la mise en oeuvre des politiques sur le terrain, notamment avec le rôle joué par le monde associatif. Enfin, à l?issue de cette année consacrée à cette étude, il apparait clairement une appétence des autres pays au-delà du cercle étudié pour la planification écologique française. Cet outil de diplomatie climatique et environnementale doit être développé en accord avec le Ministère de l?Europe et des Affaires Etrangères, l?AFD et Expertise France afin que le SGPE puisse à la fois transmettre l?expertise française tout en recueillant des exemples et des outils utiles à la planification française. Barbara POMPILI Virginie DUMOULIN PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 51/60 Annexes PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 52/60 Annexe 1. Lettre de mission IGEDD PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 53/60 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 54/60 Annexe 2. Liste des personnes rencontrées Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre THARYAT Tri République d?Indonésie Ambassador, Deputy Minister for Multilateral Cooperation 28/11/2023 NAKAGAMI Hidetoshi Jyukankyo Research Institute Inc.Japan CEO&Founder Delegation japan leaders 29/11/2023 FINK-HOOIJER Florika DG ENV Commission Européenne Directrice générale 08/12/2023 VAN VLEDHOVEN Stientje World Resources Institute Vice-présidente et Directrice régionale Europe 08/12/2023 ANTTONEN Matti Ambassade de la Finlande en France Ambassadeur 06/02/2024 HEKKERT Marko Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur général 29/02/2024 STREMLER Jaco Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur Climat Air et Energie 29/02/2024 MINNESMA Marjan Fondation Urgenda ? Pays-Bas Directrice et Fondatrice 29/02/2024 VAN GINNEKEN Meike Ministère des Infrastructures et de l?Eau Pays-Bas Envoyée spéciale sur l?Eau et directrice du Programme international sur l?adaptation au changement climatique et l?eau 29/02/2024 BONJER Jan Waterschap Hollandse Delta (Dutch Delta Water Board) ? Pays-Bas Président 29/02/2024 SPIERINGS Anne-Marie Transition du cluster industriel de Rotterdam (DeltaLinqs) ? Pays-Bas Directrice 29/02/2024 HEIJDRA Michel Ministère de l?Économie et du Climat Pays-Bas Directeur Général pour le Climat et l?Énergie 01/03/2024 VRUGT René Ministère de l?Économie et du Climat Pays-Bas Directeur des sols, de l?aménagement du territoire et de l?adaptation au climat 01/03/2024 POLS Donald Association environnementale Milieudefensie ? Pays-Bas Directeur 01/03/2024 KERSTEN Kiki Central Bureau voor de Statistiek (CBS) ? Pays-Bas Central Bureau voor de Statistiek (CBS) 01/03/2024 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 55/60 Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre RAUTAVAARA Antti Centre for Peace Mediation de la Finlande Envoyé Spécial Eau 13/03/2024 SHANMUGARATNAM Tharman République de Singapour Président 15/05/2024 KHOR Dr. Amy Ministère du développement durable et de l?agence publique de l?eau de Singapour Senior Minister of State for Sustainability and the Environment 16/05/2024 TAN Adele Urban Redevelopment Authority of Singapore Chief Planner and deputy CEO 16/05/2024 TEO Joseph Ministry of Sustainability and the Environment of Singapore Chief Negociator for Climate Change 17/05/2024 GUO Yiran Ministry of Sustainability and the Environment of Singapore, National Climate Change Secretariat, Singapore Expert 17/05/2024 BHASKAR Ananda Ram National Environment Agency, Singapore Deputy Chief Executive Officier, Environmental Portection Director- General 17/05/2024 LESPAYANDEL Carine French Chamber of Commerce in Singapore Executive Director 16/05/2024 WIKODO Joko République d?Indonésie Président 20/05/2024 ADININGGAR Amalia BAPPENAS Indonésie Deputy for Economic Affairs 20/05/2024 YULASWATI Vivi BAPPENAS Indonésie Deputy for Maritime Affairs and Natural Resources 22/05/2024 HENDIARTI Nani Ministre coordinateur des affaires maritimes et de l?investissement Ministre adjointe chargée des questions environnementale et forestières 23/05/2024 DHEWANTI Laksmi Ministère de l?environnement et des forêts Directrice générale de la lutte contre le changement climatique 23/05/2024 KUSUMASTUTI Diana Ministère des travaux publics Directrice générale de « human settlements » 23/05/2024 DUBEUX Rafael Ministère des Finances du Brésil Secrétaire exécutif adjoint et coordinateur du plan écologique 17/06/2024 MOREL Julien Swedish Ministry of Climate and Enterprise Climate policy analyst 26/08/2024 VIATTE Loïc Expert français, ex-conseiller Environnement à la RP suédoise à Bruxelles 26/08/2024 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 56/60 Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre PERSSON Asa Stockholm Environment Institute Swedish Climate Policy Council Research Director and Deputy Director Chair of the CPC 26/08/2024 ALTERA Ola Swedish Climate Policy Council Chief Executive 26/08/2024 FORSLUND Anna Swedish Agency for Nature Conservation Head of Unit Nature Analysis 26/08/2024 WIKHOLM Nanna Swedish Royal Institute of Technology Natural resources department Head of the Spatial Planning Unit 26/08/2024 VINNMYR Sabina Swedish Environment Protection Agency Senior scientific officer 26/08/2024 HANNERZ Fredrik Swedish Ministry of Climate and Enterprise Deputy-Director General Head of Natural Environment Division 26/08/2024 GRANATH Fredrik Swedish Ministry of Climate and Enterprise Advisor in charge of national environmental objectives 26/08/2024 H.E.MR.WANG Bao Ministry of Water Resources of China Vice Minister of Water Resources of China 09/10/2024 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 57/60 Annexe 3. Ambassades consultées Ambassade de France en Afrique du sud Ambassade de France aux Etats-Unis d?Amérique Ambassade de France en Allemagne Ambassade de France en Finlande Ambassade de France en Belgique Ambassade de France en Inde Ambassade de France au Brésil Ambassade de France en Indonésie Ambassade de France au Canada Ambassade de France en Irlande Ambassade de France en Chine Ambassade de France au Pays-Bas Ambassade de France au Costa Rica Ambassade de France au Royaume Uni Ambassade de France au Danemark Ambassade de France à Singapour Ambassade de France en Suède PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 58/60 Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes Acronyme/Sigles Signification Adapt-CA Adaptation Capability Advancement Toolkit AFD Agence France Développement BAPPENAS Ministère de la planification d?Indonésie BISKO BIlanzierungs-Standard KOmmunal (système comptable en Allemagne) BPE Bureau de protection de l?environnement CAF Banque de Développement d?Amérique latine et des Caraïbes CAFMA Forest Bond Certificate for forest management CCAC Conseil consultatif sur le changement climatique (EI) CERI-Climate California Emergency Response Infrastructure Climate Vulnerability Tool (USA) CNC Commission nationale climat (Belgique) COP Conférence des parties CPO Climate policy office (Etats-Unis) CR Costa Rica (code ISO) C40 Cities Climate Leadership Group DE Allemagne (code ISO) DESNZ Ministère en charge de la sécurité énergétique et de la neutralité climatique au Royaume-Uni EI Irlande (code ISO) EPA Agence de protection de l?environnement (USA, EI) ETS Echange de quotas d?émission (UE) FEDER Fonds européen de développement régional FI Finlande (code ISO) FONAFIFO Fond de financement de la forêt nationale FONERWA Fonds vert (Rwanda) GES Gaz à effet de serre GIEC Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat GIZ Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (en français : Société allemande de coopération internationale) GNI Gross national income ? Revenu national brut (proche du PNB) GX Green transformation (transformation verte) au Japon G20 Groupe des 20 (forum intergouvernemental des 19 pays aux économies les plus développées du monde) HCC Haut conseil pour le climat (France) ICLEI Conseil International des Initiatives Locales pour l?Environment IBAMA Institut brésilien de l?environnement et des ressources naturelle IGEDD Inspection générale de l?environnement et du développement durable IGF Inspection générale des finances IPBES Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques IRA Inflation reduction act (USA) IRP Panel International des Ressources JETP Partenariat pour une transition énergétique juste KTF Fonds pour le climat et la transformation (DE) LED Diode électroluminescente LiFE Lifestyl for environment / Modes de vie durables (Inde) LTS Stratégie de long terme (USA) MoEFCC Ministère de l?environnement, de la forêt et du changement climatique Inde METI Ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (Japon) MOE Ministère de l?environnement (Japon) MOF Ministère des finances (Japon) NAPCC Plan d?action pour le changement climatique en Inde NASEM Académie des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (USA) NBSAP(en)/SPANB (fr) Stratégies et plans d?action nationaux pour la biodiversité NCCRPWP Plan climatique en Afrique du sud PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 59/60 Acronyme/Sigles Signification NCCS Secrétariat national au changement climatique à Singapour NDC(en)/CDN(fr) Contribution nationalement déterminée (climat) NDCR Commission nationale de la réforme et du développement en Chine NKI Initiative nationale pour la protection du climat (DE) OCDE Organisation de coopération et de développement économiques ODD Objectifs de développement durable ONG Organisation non gouvernementale PBL Office de la planification écologique (Pays-Bas) PCC Commission présidentielle du climat en Afrique du sud PLF Projet de loi de finances PMCC Conseil sur le changement climatique (Inde) PRI Plan régional pour l?innovation PSSO Bureau de la durabilité du secteur public à Singapour RAD-GRK Plan climat provincial en Indonésie RAN-GRK Plan climat national en Indonésie REDD+ Réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation forestière RPJMN Plan de moyen terme de développement ? 5 ans (Indonésie) RPJPN Plan de long terme de développement ? 20 ans (Indonésie) SALGA Association des collectivités locales (ZA) SB 375 Législation californienne : le Senate Bill 375 SGPE Secrétariat général à la planification écologique UE Union européenne UNFCCC Convention cadre des nations unie sur le changement climatique URA Urban redevelopment Authority (Singapour) URSS Union des républiques socialistes soviétiques UTCATF Utilisation des terres, changement d?affectation des terres et foresterie WWF-SA World Wide Fund for Nature ? South Africa ZA Afrique du sud (code ISO) PUBLIÉ Annexe 5. Fiches Pays Présenté dans un document séparé PUBLIÉ Sommaire Edito Résumé Liste des recommandations Introduction 1 Une mise en place progressive d?outils de planification de la transition climatique et écologique dans la plupart des pays du G20 et de l?Union européenne, qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre 1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique 1.2 Les pays pionniers de la planification écologique 1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique 1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique 1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale 1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs de transparence 1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en oeuvre 1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs objectifs de transition 1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de l?engagement citoyen 2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au dernier kilomètre ? Des recommandations à tirer des exemples étrangers 2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté au plus haut niveau de l?Etat et répondant aux attentes citoyennes 2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son portage par la société 2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat 2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes citoyennes quant à leur avenir 2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans un cadre juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous les secteurs d?activités 2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements internationaux 2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace et juste 2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante 2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique 2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter 2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique 2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle 2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050) 2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels 2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens 2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires 2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens 2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la planification 2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification 2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire 2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale Conclusion Annexes Annexe 1. Lettre de mission IGEDD Annexe 2. Liste des personnes rencontrées Annexe 3. Ambassades consultées Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes Annexe 5. Fiches Pays INVALIDE) (ATTENTION: OPTION 20 En février 2021, le tribunal administratif de Paris a reconnu l'État français responsable de "manquements dans la lutte contre le changement climatique", le tenant ainsi responsable d'un préjudice écologique (« L'Affaire du Siècle »). En juillet 2021, le Conseil d'État, saisi par la commune de Grande-Synthe, a enjoint au gouvernement français de prendre, dans un délai de neuf mois, toutes les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, conformément aux engagements de la France. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 31/60 établissant un lien direct entre protection écologique et durabilité. La Chine a intégré la biodiversité dans son 13ème plan quinquennal et mis en place un système national d?aires protégées, incluant des parcs nationaux. La centralisation de la gestion environnementale sous un ministère unique a permis une meilleure coordination des politiques liées à la biodiversité, à la pollution et au climat, illustrant une gestion intégrée des ressources naturelles. L'Indonésie a adopté une planification nationale intégrant des objectifs de faible émission carbone et de préservation de la biodiversité. Le ministère de la Planification du développement national (BAPPENAS) a mis en place une évaluation environnementale stratégique pour s'assurer que les plans incluent des indicateurs liés au climat, à la biodiversité et à la gestion des ressources naturelles. Cette approche est soutenue par un modèle intégré (IV204521 ), qui relie économie, société et capital naturel, permettant de mieux comprendre les interactions entre la conservation de la biodiversité et la gestion durable des ressources. Le Brésil met en oeuvre un plan de transformation écologique (PTE) articulé autour de la lutte contre la déforestation et la promotion de la bioéconomie. Ce plan combine des mesures environnementales et économiques pour atteindre zéro déforestation, tout en soutenant des initiatives locales et la valorisation des produits de la biodiversité brésilienne. Par ailleurs, l?Institut brésilien de l?environnement (IBAMA) joue un rôle crucial dans la surveillance et la mise en oeuvre des politiques liées à la biodiversité, tandis que le pays utilise des systèmes avancés de surveillance de la déforestation, démontrant ainsi l?interconnexion entre gestion des écosystèmes et lutte contre le changement climatique. A l?inverse, les pays ayant centré leur action sur une seule politique échouent à transformer l?essai ou ont des difficultés à poursuivre leur action. Ainsi le Costa Rica qui n?a finalement intégré dans sa planification que la politique forestière se trouve confronté à des difficultés de financement de la poursuite de sa politique et fait face à des contestations populaires sur la non atteinte d?autres objectifs. L?efficacité de la planification écologique repose sur une approche globale, incluant les questions complexes et sensibles. Ignorer ces enjeux risque de limiter l'impact des politiques écologiques et de compromettre la transition nécessaire. Plusieurs exemples montrent les défis que représentent ces sujets délicats. Les Pays-Bas, avec leur modèle agricole intensif, sont confrontés à des niveaux élevés de pollution par les nitrates et les émissions de méthane. Ces problèmes affectent la biodiversité et la qualité des sols. La mise en oeuvre de politiques visant à réduire l?intensité de l?élevage et l?usage d?engrais a déclenché des protestations de la part des agriculteurs, soulignant les défis liés à l?acceptabilité sociale des mesures nécessaires. L?incapacité à inclure les parties prenantes et à proposer des alternatives viables complique l?application de ces politiques. La dépendance au charbon en Inde, Afrique du Sud et Indonésie est un frein à leur transition énergétique. En Inde, le charbon représente plus de 70 % de la production d?électricité. Bien que le pays investisse dans les énergies renouvelables, la transition est entravée par la dépendance économique et sociale au charbon, qui emploie des millions de travailleurs. En Afrique du Sud, où le charbon fournit 86 % de l?électricité, les efforts pour décarboner sont limités par des contraintes économiques, des infrastructures vieillissantes et une opposition sociale forte. La transition juste, soutenue par des mécanismes internationaux comme le Partenariat pour une transition énergétique juste (JETP), est essentielle pour éviter une fracture sociale. En Indonésie, le charbon est également central dans la production énergétique, et des retards dans l?adoption de politiques ambitieuses ralentissent la transition énergétique nécessaire pour aligner le pays sur ses engagements climatiques. À Singapour, bien que le pays se positionne comme leader régional en matière de finance verte et de technologies, la planification reste centrée sur des objectifs 21 https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the- Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf PUBLIÉ https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 32/60 économiques, parfois au détriment de mesures structurelles plus contraignantes nécessaires pour réduire durablement les émissions de gaz à effet de serre. L?Allemagne peine à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports, malgré son engagement dans la décarbonation. Les retards dans l?électrification des infrastructures et la promotion insuffisante des mobilités douces, comme le rail ou le vélo, freinent les progrès et ont même conduit à déstabiliser la coalition au pouvoir. Le ministre des transports, Volker Wissing (FDP, libéral), avait refusé à plusieurs reprises de présenter un programme de réduction des émissions de GES dans son secteur, suite aux échecs répétés à atteindre les objectifs fixés (trois années consécutives en 2023). Cette situation a entraîné une révision de la loi fédérale sur la protection du climat en avril 2024, supprimant le caractère contraignant des objectifs sectoriels et introduisant un objectif global intersectoriel et pluriannuel. Cette modification est considérée comme un compromis interne à la coalition au pouvoir, visant à éviter une escalade politique tout en maintenant les engagements climatiques généraux de l'Allemagne. Cette situation illustre que des secteurs difficiles doivent être traité en priorité dans la planification pour éviter des retards coûteux en termes climatiques. A l?inverse, des exemples de prise en compte de secteurs difficiles ont permis de mieux préparer la transition. En Allemagne, un fonds d?avenir pour l?industrie automobile doté d?un milliard d?euros pour la période 2021-2025, afin de soutenir la transformation de ce secteur stratégique a été lancé. En collaboration avec les syndicats (IG Metall), des réseaux régionaux de transformation ont été établis dans les bassins industriels. Ces initiatives, qui intègrent des universités, chambres d'industrie, centres de formation et agences pour l?emploi, ont pour but d?élaborer des stratégies adaptées aux besoins locaux tout en assurant le maintien de l?emploi et la reconversion vers des technologies plus durables. Le Danemark, a introduit une taxe carbone sur l?agriculture, ciblant les émissions de méthane issues des élevages bovins et porcins. Entrant en vigueur progressivement d?ici 2030, cette taxe est accompagnée de déductions fiscales pour les agriculteurs afin de limiter les effets négatifs et d?investir dans des technologies vertes. Cette mesure a été adoptée grâce à un processus de concertation impliquant l?Etat, les agriculteurs et les ONG environnementales qui a abouti à un accord largement validé par le Parlement. Ces mesures visent à financer la transition écologique tout en soutenant les producteurs affectés. L?Indonésie, premier producteur mondial d?huile de palme, a mis en oeuvre des politiques pour promouvoir des pratiques responsables. Un moratoire permanent sur la déforestation et le drainage des tourbières a été instauré, accompagné d?un projet national de certification pour la durabilité. Des aides ont été déployées pour soutenir les petits producteurs dans l?adoption de méthodes modernes, tout en luttant contre la déforestation illégale et les feux de forêts. Une même politique de protection des tourbières, utilisées par la population comme appoint pour le chauffage, a également été déployée en Irlande. Ces exemples démontrent qu?une planification ciblée et des incitations bien conçues peuvent permettre des progrès significatifs dans des secteurs critiques tout en minimisant les impacts socio- économiques. La France peut s?enorgueillir d?avoir également lancé un plan de décarbonation de son industrie, comme en Allemagne, ciblant les 50 entreprises les plus émettrices tout comme d?avoir mis en place une planification globale intégrant tous les secteurs d?activité et toutes les politiques. Néanmoins, elle peine à réussir l?intégration concrète de son secteur agricole dans la planification écologique, ce qui laisse des possibilités de constante renégociation à la baisse d?autres objectifs figurant dans la planification comme la réduction de l?usage des pesticides et des nitrates et la protection des espaces naturels et de la biodiversité. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 33/60 La planification écologique doit intégrer tous les secteurs d?activités et l?ensemble des politiques doivent être mises en oeuvre, en adaptant si nécessaire la trajectoire et les financements pour surmonter les difficultés. 2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante 2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique ? Les bons exemples internationaux de planification écologique : Peu des pays examinés disposent de structures transversales pilotant leur planification écologique, souvent en raison de l?absence de planification globale, mais parfois ces structures sont absentes même dans la planification climatique. A part la France et le SGPE, on peut néanmoins citer le ministère indonésien de la Planification du Développement National (BAPPENAS), chargé de la planification écologique et du développement durable. Placé directement sous l'autorité du président, il joue un rôle clé dans la définition des objectifs nationaux et dans leur coordination interministérielle. Il est responsable de l?élaboration et de la synchronisation des plans nationaux de développement durable. Il coordonne les ministères techniques. Il joue également un rôle crucial dans la mise en oeuvre territoriale en soutenant les provinces dans leurs plans d?atténuation des émissions de carbone. Le BAPPENAS utilise des outils tels que des modèles d'évaluation stratégique (par exemple GLOBIOM-Indonésie22) pour planifier et synchroniser des politiques cohérentes, renforçant ainsi la capacité de déclinaison territoriale grâce à l?implication des provinces. Parmi les nouvelles organisations, le Brésil a réintroduit en 2023 un comité interministériel pour le changement climatique, dirigé par le chef de cabinet de la présidence et impliquant plusieurs ministères. Ce comité supervise la révision de la politique nationale sur le changement climatique et coordonne les plans d?atténuation et d?adaptation sectoriels. Il assure également la cohérence entre les mesures prises par différents ministères, tout en mobilisant des acteurs financiers comme la Banque Nationale de Développement Économique et Social (BNDES) pour financer les projets liés à la transition écologique. Au Japon, le Comité exécutif de la stratégie GX (« Green Transformation »), créé en juillet 2022, est présidé par le Premier ministre et piloté par le ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (METI). Il a pour mission d'élaborer la "politique fondamentale pour la réalisation de la GX". Le comité supervise les mesures transversales en matière de décarbonation et de transformation verte, avec une collaboration entre le METI, le ministère de l'Environnement (MOE), et le ministère des Finances (MOF) pour coordonner les enjeux de production énergétique, d'industrie et de conservation environnementale. Il est certes trop tôt pour analyser les résultats dans ces deux pays, mais la tendance à la création de structures transversales témoigne de la prise de conscience de leur utilité. Bien que limité aux enjeux climatique, l?Office de Planification Environnementale (PBL) agit aux Pays-Bas comme un outil de pilotage transversal pour la politique climatique. Cet organisme 22 https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf PUBLIÉ https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 34/60 indépendant évalue annuellement les progrès de la politique climatique et recommande des ajustements pour garantir l'atteinte des objectifs. L?efficacité du PBL repose sur sa légitimité, qui lui permet de coordonner différentes parties prenantes et de s?assurer que les politiques régionales et nationales sont alignées avec les engagements internationaux. Il dispose de moyens lui permettant de réaliser sa tâche tant sur le plan des ressources humaines que budgétaires. ? Les conséquences de l?absence d?une planification centralisée : La difficulté à mettre en oeuvre une planification écologique sans programmation centralisée se voit à l?inverse dans d?autres exemples. Cette absence d'une organisation unique et puissante complique la prise de décision et ralentit la mise en oeuvre des politiques. L?absence de structure de coordination peut ainsi conduire à des problèmes de coordination interministérielle comme déjà évoqué en Allemagne. Aux Pays-Bas, le manque d'une structure de coordination globale a conduit à une mise en oeuvre fragmentée des politiques climatiques et agricoles. Bien que la planification territoriale intègre les enjeux de biodiversité et de gestion des risques d'inondation, la transformation agricole reste un point de blocage majeur. L?insuffisance du poids d?une instance de coordination pourtant existante produit les mêmes effets de fragilisation de la planification écologique. En Roumanie, la gouvernance de la planification écologique repose sur un comité interministériel pour le changement climatique, présidé par le Premier ministre et impliquant divers ministères et agences. Cependant, ce système est marqué par une coordination complexe et intermittente, tandis que le rôle du conseiller d'État chargé de la transition écologique est limité à un rôle de facilitateur sans réelle autorité décisionnelle. En Belgique, la Commission Nationale Climat (CNC), créée en 2002, vise à coordonner les politiques climatiques entre les niveaux fédéral et régional. Elle est composée de représentants des gouvernements fédéral et régionaux, épaulée par un secrétariat permanent et 14 groupes de travail thématiques. Cependant, son rôle reste majoritairement évaluatif plutôt que décisionnel, ce qui limite son efficacité en termes de pilotage stratégique. La structure fédérale des pays pose des défis supplémentaires. Les objectifs et politiques climatiques des provinces ou entités décentralisées ne sont pas toujours alignés avec la stratégie nationale, ce qui complique l'harmonisation des efforts. Par exemple, des politiques comme le développement de l?éolien en mer nécessitent une collaboration étroite entre le gouvernement central et les gouvernements locaux, mais cette coordination reste imparfaite. Le manque de coordination freine la mise en oeuvre des projets essentiels et ralentit la transition écologique au niveau national. Ainsi, en Allemagne, les Länder, responsables de nombreuses politiques environnementales, disposent d?une grande autonomie. Cette configuration complique l?alignement des actions régionales avec les objectifs nationaux, surtout dans des secteurs comme le transport et l?énergie. La Belgique se caractérise par une gouvernance climatique fragmentée, reflétant sa structure institutionnelle complexe. Les compétences sont partagées entre l?État fédéral et les trois régions (Wallonie, Flandre, Bruxelles-Capitale), ce qui complique la coordination des politiques environnementales et climatiques. Chaque région dispose de son propre plan de transition écologique, ce qui entraîne des incohérences dans les priorités et les méthodologies adoptées. Par exemple, la Flandre et la Wallonie ont des approches divergentes sur la gestion agricole et les émissions industrielles. Au Royaume-Uni, les 4 nations ont leurs propres cibles de réduction des émissions et leurs propres politiques en matière de changements climatiques, mais ils contribuent également à l?atteinte des cibles intermédiaires du Royaume Uni et à la mise en place de politiques dans l?ensemble du pays. S?il existe une réunion bimestrielle entre les ministres des 4 nations pour PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 35/60 discuter des politiques climatiques23, les objectifs et politiques des nations ne sont pas encore parfaitement alignées avec la stratégie Net Zéro. Cette coopération imparfaite se reflète en particulier dans le développement de certaines politiques indispensables pour l?atteinte des objectifs climatiques des nations pour lesquelles le Gouvernement central détient une compétence exclusive (ex : capture et stockage du carbone) ou des politiques nationales nécessitant une étroite association des gouvernements compétents (ex : développement de l?éolien en mer en Ecosse). On peut donc en déduire que la planification écologique nécessite un pilotage centralisé, confié à une organisation dédiée, rattachée à l?échelon politique le plus élevé, ce qui se rapproche du modèle français qui est donc à préserver. Cette organisation doit également être en mesure d?animer le déploiement de cette planification dans les territoires afin d?en garantir la cohérence. Maintenir le SGPE auprès du premier ministre, le renforcer dans son rôle de pilotage de la planification écologique, en appui de l?action des ministères, et d?animation de son déploiement dans les territoires. 2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter L?évaluation régulière et indépendante de la planification écologique est cruciale pour garantir son efficacité. Les bons exemples, comme celui des Pays-Bas avec PBL déjà cité, montrent que l?investissement dans des systèmes de collecte de données et des évaluations indépendantes est un levier stratégique pour réussir la transition écologique. Appuyer sa politique de transition sur des données fiables et transparentes est une condition sine qua non pour identifier les réussites et corriger les échecs. Les contre-exemples illustrent que l?absence de fiabilité dans les données peut compromettre la crédibilité et l?impact des politiques publiques. Ainsi, en Indonésie, le défi majeur réside dans la fragmentation des données et le manque de capacités institutionnelles pour les centraliser et les vérifier. Bien que le BAPPENAS tente d?intégrer les indicateurs climatiques dans les plans nationaux, les provinces et les districts ne disposent pas toujours des infrastructures nécessaires pour collecter des données fiables. Cela entraîne des incohérences dans les rapports nationaux et freine les efforts de coordination. L?Afrique du sud rencontre le même problème : alors qu?elle dispose d?une méthodologie ? le « Climate Change Response Monitoring & Evaluation System » - intéressante car visant à analyser les données dans des démarches à la fois top-down et bottom-up, et couvrant les champs de l?atténuation, de l?adaptation et du financement, elle peine dans l?agrégation de données en dehors du système énergétique. En Chine, malgré une capacité impressionnante de collecte de données, la transparence et la fiabilité des informations posent problème. Les rapports environnementaux sont souvent influencés par des pressions politiques ou des manipulations locales, rendant difficile une évaluation objective. Par exemple, les statistiques sur la pollution de l?air ou les émissions industrielles peuvent être sous-évaluées dans certaines régions pour éviter des sanctions administratives, ce qui compromet la précision des politiques correctives. A l?inverse, la planification écologique soutenue par une collecte de données robustes, s?appuyant sur de multiples sources, notamment des ministères, des agences environnementales et des bases 23 https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change- communique-13-march-2024 PUBLIÉ https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024 https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024 Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 36/60 de données publiques, et indépendante24 permet l?évaluation régulière (idéalement annuellement) des progrès des politiques climatiques. Par exemple, le PBL utilise des outils de modélisation pour anticiper les impacts des mesures et proposer des ajustements avant qu?il ne soit trop tard. L'Irlande dispose de deux structures clés pour l'évaluation de sa planification écologique : ? L?Agence de protection environnementale (EPA) : indépendante, elle fournit des données et des rapports réguliers sur les émissions de gaz à effet de serre, la qualité de l?air, et d'autres indicateurs environnementaux. Ces rapports alimentent les débats politiques et permettent d?ajuster les politiques climatiques. ? Le Conseil consultatif sur le changement climatique (CCAC) : cet organe indépendant donne des recommandations stratégiques et suit les progrès des politiques environnementales dans le cadre de rapports réguliers soumis au gouvernement et au Parlement. En Suède, le Haut Conseil pour le climat est chargé d?évaluer si les politiques publiques permettent d?atteindre les objectifs climatiques nationaux. Il réalise une analyse indépendante des décisions gouvernementales et des trajectoires climatiques, tout en mettant en évidence les mesures supplémentaires nécessaires pour combler les écarts entre les objectifs et les résultats attendus. Ces évaluations sont basées sur des données scientifiques fournies par l?Agence suédoise de l?Environnement et sont publiées annuellement. Créé par la loi climat de 2008, le Comité pour la changement climatique (« Committee for Climate Change ») au Royaume-Uni occupe un rôle central dans l?évaluation des politiques climatiques (sur l?adaptation comme sur l?atténuation) et la définition des budgets carbone. Son mandat est par ailleurs renforcé par l?articulation étroite qu?il entretient avec le Parlement britannique et l?obligation donnée au gouvernement de répondre aux recommandations du comité d?experts. Grâce à cette approche, les décisions politiques sont ajustées régulièrement pour aligner les actions avec les objectifs climatiques. En Irlande, en 2023, l'EPA a signalé que le pays n'atteindrait qu'une réduction de 29 % des émissions d'ici 2030, bien en deçà de l'objectif de 51 %. Ce constat a conduit à une révision des priorités et des politiques climatiques, notamment dans les secteurs de l?agriculture et du transport, pour réduire cet écart. L?EPA continue de jouer un rôle central en fournissant des données scientifiques indépendantes pour guider les ajustements nécessaires. En Finlande, le « Panel climatique », un organe scientifique indépendant, a publié en 2024 un rapport soulignant l'insuffisance des efforts dans le secteur UTCATF (utilisation des terres, changement d?affectation des terres et foresterie). Il a recommandé des actions immédiates pour restaurer les puits de carbone, ce qui a incité le gouvernement à revoir ses politiques forestières et à allouer des financements supplémentaires à la gestion durable des forêts. Par ailleurs, bien que non appliqué pour le moment aux sujets climatiques, le Royaume-Uni a également expérimenté un modèle original d?évaluation des politiques publiques : le réseau des « What Works Centres », centres thématiques chargés de faire la synthèse des connaissances dans leur domaine afin d?éclairer la décision publique. Pour évaluer leurs politiques, les ministères britanniques s?adressent régulièrement à des consortiums d?acteurs externes réunissant des universités, des organismes indépendants de recherche et des cabinets de conseil. Cette externalisation constitue pour la presse et l?opinion publique une garantie de qualité des évaluations et de crédibilité de leurs résultats. Depuis 2015, un panel d?experts de l?administration et du monde académique, le « Cross- Government Trial Advice Panel » (CG-TAP), est également à la disposition des ministères pour les aider à mettre en oeuvre des évaluations d?impact. Avec 24 L?indépendance dont il est fait mention ici renvoie à une indépendance par rapport au pouvoir politique, au sens autorité administrative indépendante en France, et par rapport aux lobbies économiques et sociétaux (syndicats et monde associatif notamment). PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 37/60 une approche similaire, l?Académies des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (NASEM) aux Etats-Unis, organisation privée à but non lucratif qui regroupe de grands chercheurs du pays, publie des rapports sur les thématiques de la transition écologique, tels que « l?Accélération de la décarbonation aux Etats-Unis » (2024), « L?intégration du changement climatique et de la politique climatique dans la modélisation macro-économique » (2024), « Intégrer les sciences humaines pour adapter les réponses sociétales aux changements environnementaux » (2023), produisant une évaluation externe de l?action de l?administration fédérale. La question de l?aspect contraignant ? que la contrainte s?appuie sur la norme ou sur une pression sociale et morale ? de ces modalités de contrôle et d?évaluation est également centrale dans leur capacité à réorienter les politiques publiques. Ainsi en Afrique du sud, le rôle d?évaluation joué depuis 2020 par la Commission présidentielle sur le climat renforce le message critique sur le retard pris dans la mise en oeuvre des politiques, que les autres dispositifs d?évaluation sud-africain sur le climat et la biodiversité, de par leur nature non contraignante, ne pouvaient pas porter. Le modèle français de planification écologique ne dispose pas d?un tel outil d?évaluation. Certes, le Haut Conseil pour le Climat (HCC), créé en 2018, joue un rôle d?évaluation étant un organisme indépendant chargé d'évaluer l'action publique en matière de climat. Composé d'experts issus de diverses disciplines, il analyse la cohérence des politiques françaises avec les engagements nationaux et internationaux, notamment l'Accord de Paris, et formule des recommandations pour améliorer leur efficacité. Il publie des rapports annuels et des avis spécifiques évaluant les progrès de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le respect des budgets carbone, et l'adaptation au changement climatique, publications ayant vocation à éclairer les décideurs politiques et le public sur l'état de la transition écologique en France. Néanmoins, la Cour des comptes, avec l'appui du HCC, a publié en mars 2024 un rapport intitulé « Évaluation annuelle de la mise en oeuvre des mesures prévues par la loi climat et résilience » qui conclut que les dispositifs actuels de suivi et d'évaluation des politiques climatiques sont insuffisants pour mesurer efficacement les progrès réalisés et que plusieurs recommandations du HCC, notamment en matière de gouvernance et de coordination des actions climatiques, n'ont pas été entièrement suivies d'effets. En mai 2023, l'IGF a publié un rapport intitulé « Adaptation de la fiscalité aux exigences de la transition écologique » recommandant une refonte de la fiscalité pour mieux intégrer les objectifs climatiques, en ligne avec les préconisations du HCC sur l'utilisation d'instruments fiscaux pour encourager la transition écologique, et insistant sur la nécessité d'un suivi rigoureux des dépenses publiques liées à l'environnement, rejoignant les recommandations du HCC sur la transparence budgétaire et l'affectation des ressources. Cependant, non seulement il ne dispose pas de l?autorité nécessaire pour imposer les constats que font apparaitre ses évaluations, mais en outre, le HCC est centré uniquement sur les enjeux climatiques, et non sur les autres aspects de la transition écologique. Ce constat a déjà fait l?objet d?évocation de réformes telles qu?une évolution du HCC ou la création d?un Défenseur de l?environnement sur le modèle de celui du Défenseur des droits, mais ces idées n?ont jamais prospéré. La France doit se doter d?une entité d?évaluation de sa planification écologique indépendante et reconnue qui appuiera le SGPE dans sa démarche de pilotage de la planification écologique. 2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique L?obligation de rendre des comptes sur la mise en oeuvre de la planification écologique est cruciale pour garantir la transparence et l?efficacité des politiques publiques, mais aussi leur acceptabilité PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 38/60 sociale. Le narratif de la transition doit s?appuyer sur une redevabilité politique afin d?être appréhendé et déployé par les élus locaux du pays. Le Parlement peut ainsi avoir un rôle à jouer quand il est associé à la prise de décision sur la planification écologique ou à l?évaluation de cette politique, étant alors en capacité de constater les difficultés rencontrées par les pouvoirs publics en charge. C?est ce pari d?association du Parlement que font les Pays-Bas, la Finlande, la Suède, le Danemark ou encore l?Irlande et le Royaume-Uni. Ainsi, en Irlande, le Premier ministre publie annuellement un rapport d?étape sur les progrès réalisés dans le cadre du Plan d'action climat. Ce rapport est complété par les analyses de l?EPA qui alimentent les débats parlementaires avec des projections et des évaluations des politiques mises en oeuvre. Ces échanges permettent d?identifier les lacunes et d?ajuster les stratégies, renforçant ainsi la redevabilité du gouvernement envers le Parlement et les citoyens. En Suède, la loi cadre climatique impose au gouvernement de publier chaque année un rapport intégré au projet de loi de finances. Ce document évalue l?écart entre les objectifs climatiques et les résultats obtenus, permettant une comparaison transparente des trajectoires. Le Parlement utilise ces rapports pour surveiller et débattre des performances du gouvernement en matière de transition écologique. À Singapour, les « Committee of Supply » sont des plateformes où chaque ministère présente et justifie ses actions devant le Parlement lors des discussions budgétaires annuelles. Cette démarche permet d?assurer une redevabilité politique sur la mise en oeuvre des initiatives du Plan Vert (« Green Plan ») et d?informer les décisions budgétaires à venir. Au Danemark, chaque année, le Ministère du Climat, de l?Énergie et de l?Approvisionnement, est chargé de présenter au Parlement un programme climatique (« klimaprogram »). C?est l?occasion de faire le point sur le niveau de réalisation des objectifs nationaux tout comme des initiatives et mesures prévues en matière de climat. La planification écologique ne fait pas en France l?objet d?une présentation systématique devant le Parlement. Elle ne fait donc pas l?objet d?une confrontation en matière de redevabilité politique, ce qui affaiblit sa capacité à être appréhendée par le personnel politique. Une opération de formation à très grande échelle de l?administration publique à la transition écologique a été lancée dans le cadre de la planification écologique. Une même démarche n?a pas été menée auprès des députés ou des sénateurs, ni des élus régionaux ou locaux en dehors de la déclinaison territoriale actuellement engagée de la planification écologique. Leur adhésion à la transition n?est donc pas garantie par une démarche d?échange ou d?information et peut donc pâtir d?un déficit de compréhension fine des enjeux mais également de la perception des contraintes dans sa mise en oeuvre. Pire, la création d?instances citoyennes sans rôle clairement défini au préalable, telle que la convention citoyenne pour le climat, a conduit les parlementaires à se sentir dessaisis de leur rôle de législateurs sur ces enjeux les poussant à diverses surenchères lors de l?adoption de la loi climat-résilience, ce qui a largement compliqué les débats et conduit à l?abandon ou la réduction de l?ambition de certaines mesures. La planification écologique doit faire l?objet d?un suivi annuel devant le Parlement, qui permettra d?évaluer si la trajectoire est respectée et de définir les mesures à mettre en place si ce n?est pas le cas. Ce suivi sera alimenté par la publication en amont d?un rapport annuel de l?organe d?évaluation indépendant. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 39/60 2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle 2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050) Une planification écologique efficace repose sur une trajectoire claire, articulée autour d?échéances courtes, moyennes et longues. Cette approche garantit une visibilité accrue pour les acteurs économiques et permet de déployer des politiques ambitieuses. Singapour dispose d?un plan à long terme, révisé en 2021, pour projeter son développement sur 50 ans. Ce plan inclut des projets ambitieux comme la reconquête de terres sur la mer avec le projet "Long Island" pour répondre à la montée des eaux. Les infrastructures urbaines, économiques et naturelles sont intégrées dans cette vision, renforçant la résilience climatique tout en garantissant la durabilité urbaine. Cette perspective de long terme garantit la confiance des acteurs économiques qui nous l?ont exprimé lors de notre visite sur place. L?Indonésie articule sa planification autour d?un plan national de développement à long terme (RPJPN), couvrant 20 ans, et d?un plan à moyen terme (RPJMN), révisé tous les 5 ans pour refléter les priorités présidentielles. Adopté en janvier 2024, le RPJPN "Indonésie Dorée 2045" cible la neutralité carbone et intègre des objectifs socio-économiques et écologiques, tels que le renforcement des capacités face aux chocs environnementaux. Ce plan de long terme permet d?assurer que la transition entre deux présidents ne remettra pas en cause les engagements de long terme, tout en laissant la place aux adaptations politiques découlant nécessairement des changements démocratiques. L?Union européenne développe également des plans climatiques basés sur des échéances multiples. Par exemple, la stratégie 2030-2050 fixe des objectifs intermédiaires en termes de réduction des émissions et d?adaptation, tout en proposant des mécanismes financiers à long terme pour soutenir les transitions nationales. Les Pays-Bas ont mis en place une planification à long terme de la gestion de l?eau, essentielle dans un pays en partie situé sous le niveau de la mer. Leur approche inclut des mesures pour la prévention et la gestion des inondations, combinant solutions infrastructurelles et préservation des écosystèmes. Cette stratégie repose sur une vision à 50 ans, garantissant la sécurité hydrique tout en répondant aux défis climatiques. Au Royaume-Uni, des objectifs de long et moyen terme (réduction des émissions de GES de 81% d?ici 2035 par exemple) s?accompagnent de planifications successives sur 5 ans, sous la forme de budgets carbone, ce qui permet d?allier une planification de long terme avec des échéances de plus court terme sur lesquelles le gouvernement est redevable. Une telle visibilité est particulièrement importante pour accompagner les politiques d?adaptation (Pays-Bas sur les inondations), de reconquête de la biodiversité (Costa Rica avec la reconquête forestière, Afrique du sud avec les aires protégées) mais également dans des objectifs de transformation de filières économiques - politique agricole, réindustrialisation ? (voir l?exemple de Singapour sur l?eau et la politique industrielle) ou de gestion de l?étalement urbain (Portland, Singapour). La planification écologique de la France se limite à 2030 et peine à décliner des objectifs pour 2040 et au-delà, même si l?objectif de neutralité carbone en 2050, celui de l?absence d?artificialisation nette en 2050 ou les objectifs intermédiaires fixés à l?échelle communautaires devraient la pousser dans cette direction. Ce manque de visibilité nuit à la crédibilité de la politique et encourage sa remise en cause régulière. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 40/60 La France doit se doter d?une planification à échéance 2040 et à échéance 2050 qui doit intégrer ses objectifs en matière d?adaptation et de reconquête de la biodiversité. 2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels Une fois le calendrier de la transition établi sur les court, moyen et long termes, cette visibilité calendaire sur le plan de transition écologique nécessite d?être accompagnée de perspectives budgétaires permettant la mise en oeuvre des actions du plan. La planification de la transition écologique doit ainsi faire l?objet d?une planification budgétaire claire et pluriannuelle. Cette visibilité apporte de la certitude aux investissements publics et privés qui doivent être engagés. Sans une telle visibilité, l?action est freinée et peine à se déployer. La Commission européenne l?avait bien compris lors du lancement du Plan vert de l?Union européenne : il s?appuie sur l?annonce de 1 000 milliards d?euros d?investissements durables au cours de la décennie. Ce plan combine des fonds provenant du budget de l'UE, du système d'échange de quotas d'émission (ETS) et du programme InvestEU, qui vise à attirer des investissements publics et privés. Les fonds de cohésion de l'UE soutiennent les pays et régions dans la mise en oeuvre de projets contribuant au « Green Deal ». Les États membres doivent consacrer au moins 30 % des fonds reçus du Fonds européen de développement régional (FEDER) à ces priorités. De plus, 37 % du Fonds de cohésion est spécifiquement destiné à atteindre la neutralité climatique d'ici 2050. La politique agricole commune a également été renforcée dans son volet environnemental (au moins en affichage au niveau européen) pour accompagner la stratégie de la ferme à la fourchette. Cette programmation budgétaire de l?Union européenne a facilité la planification budgétaire nationale des Etats membres, qui se sont également appuyés sur les plans de relance post crise COVID lancés au sein de l?UE. De même, l?administration Biden aux Etats-Unis a déployé sa politique climatique dans le cadre d?une « nouvelle politique industrielle » qui s?est traduite par cinq lois appuyées sur des financements publics : la loi sur l?énergie de décembre 2020 prévoit 7 milliards de dollars sur 5 ans, la loi bipartite sur l?infrastructure de novembre 2021 y consacre 454 milliards de dollars, la loi sur la réduction de l?inflation (Inflation réduction Act) d?août 2022 prévoit 370 milliards de dollars sous forme de crédits d?impôt, de subvention et de prêts, l?acte « puces et sciences » prévoit enfin plus de 60 milliards de dollars pour la recherche-développement (semi-conducteurs, technologies sans fil notamment). Cette problématique se retrouve dans d?autres pays : l?annualité budgétaire ou l?émergence de nouvelles priorités nuisent à la mise en place de financements pluriannuels et rendent le financement de la planification écologique dépendant des autres choix budgétaires, parfois en contradiction avec son inscription dans le temps long. L?usage de fonds dédiés à la transition écologique ? comme le Fonds vert en France ? permet aux pays l?affichage des subventions publiques affectées au plan de transition écologique et peut, en cas d?affectation de certaines recettes, à la fois garantir un financement pluriannuel et faciliter l?acceptation par la population du financement de la transition de long terme, prenant notamment appui sur le principe pollueur-payeur. Depuis 2023, l?Allemagne s?est dotée d?un fonds pour le climat et la transformation (KTF), alimenté par les recettes du système national de tarification du CO?, c'est-à-dire la taxe carbone appliquée aux émissions provenant de la combustion de combustibles fossiles. Cependant, en novembre PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 41/60 2023, la Cour constitutionnelle fédérale allemande a déclaré inconstitutionnel le transfert de 60 milliards d'euros de crédits non utilisés, initialement destinés à la gestion de la pandémie de COVID-19, vers le KTF. Cette décision a entraîné une révision du financement du fonds, nécessitant des ajustements pour maintenir les programmes clés de financement de l'énergie et des infrastructures. La Belgique a également mis en place un « Fonds de transition écologique », dont la mission est valable pour 30 ans et renouvelable, et qui sert de courroie de transmission pour les fonds européens vers les entreprises et les projets de réduction des émissions. Le Danemark a annoncé en juin 2022 la mise en place d?un « Fonds Vert » de 53,5 milliards de couronnes (7,2 milliards d?euros) provenant de recettes fiscales qui devraient alimenter les caisses de l?Etat entre 2024 et 2040. C?est également le cas en Finlande, en Irlande, aux Pays-Bas, au Japon, à Singapour. Hors Union européenne, les pays recourent également à des fonds dédiés. Le Rwanda appuie sa politique de transition environnementale sur un fond spécifique : le « Rwanda Green Fund » ou FONERWA, établi dès 2012. Le Brésil a doté sa politique sur le changement climatique d?un fond fédéral spécifique, doté notamment de 10 milliards de reals par la levée d?obligations vertes. Il a même plus récemment doté sa politique forestière d?un Fonds national pour la mise en valeur des forêts, outil de sa planification forestière à grande échelle. Il est également question en Chine d?un « fonds national de transformation à faible émissions de carbone » ou d?un fonds de développement vert Ces fonds peuvent être utilisés par les pays pour doter les collectivités locales afin d?accompagner la transition écologique sur le terrain. Ainsi, depuis la mise sur pied du plan climatique renforcé du Canada en décembre 2020, le gouvernement a investi 247 millions de dollars au moyen du Fonds pour une économie à faibles émissions de carbone dans 21 programmes provinciaux et territoriaux de rénovation de maisons et de bâtiments. En Indonésie, le fonds pour le changement climatique, bien que piloté par le BAPPENAS, est directement chargé de financer des programmes provinciaux et locaux en mobilisant des ressources nationales et internationales. Le Danemark dispose d?un Fonds d?investissement pour les pays en développement, afin de clarifier l?usage de ses financements publics de coopération internationale dans le domaine de la transition climatique et environnementale. Au-delà de son fond climat assez classique, la Finlande dispose d?un Fonds public d?investissement pour l?innovation (Sitra), fondation dont l?objectif est de « promouvoir un développement stable et équilibré en Finlande, une croissance économique qualitative et quantitative et une compétitivité et une coopération internationale ». Cette fondation est responsable devant le Parlement mais pas devant le gouvernement. Sa capitalisation était évaluée à 771 millions d?euros en 2017. Elle fonctionne à la fois comme un « think-thank » et comme une société d?investissement. Créée en 1967 dans le cadre de la Banque de Finlande, la majeure partie de sa dotation actuelle provient d?un don d?actions Nokia du Parlement finlandais de 1992. Le fonds dépense environ 30 millions d?euros par an correspondant au rendement de sa dotation. Il investit principalement dans des entreprises et des start-ups pour créer de nouvelles activités rentables. Le manque de transparence sur les financements accordés à la transition écologique que nous avons rencontré dans nos recherches démontre que l?enjeu est commun à tous les pays. Nous recommandons donc qu?une analyse approfondie des financements de la transition écologique soit menée, pour compléter la première approche faite dans ce rapport. Les outils de dépense publique sont en effet un très bon indicateur de la capacité des pays à respecter leurs engagements. En Suède, le suivi de l?atteinte des objectifs est effectué par le gouvernement, chaque année dans le cadre du rapport « climat » du PLF (avec l?appui des Agences nationales, dont l?Agence de protection de l?Environnement Naturvårdsverket). Ainsi un relèvement de 8% au premier semestre PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 42/60 2024 des émissions suédoises a été évalué comme principalement dû à l?augmentation de la consommation des carburants routiers fossiles entretenue par la décision du nouveau gouvernement de réduire le taux d?incorporation des biodiesels à 6% (contre 50% en volume précédemment). Faisant ressortir l?importance de la programmation budgétaire de la transition écologique, « l?Irish Fiscal Advisory Council », organisme de surveillance budgétaire de l?Irlande, a publié en octobre 2023 un rapport sur l?impact du changement climatique sur les finances publiques, faisant partie d?une série de recherche sur la viabilité à long terme des finances publiques, en lien avec le changement climatique. Le rapport estime le coût de l?ensemble des dépenses publiques nécessaires pour atteindre les objectifs climatiques irlandais en suivant une « transition juste », telle que décrite par la législation adoptée. Le rapport modélise deux scénarios pour les dépenses, l?un de coût faible correspondant à la limite inférieure de l'implication potentielle de l'État, et l?autre de coût élevé considéré comme une estimation supérieure raisonnable, tout en reconnaissant que ces coûts pourraient être encore plus élevés. Entre 2026 et 2030, le gouvernement devrait dépenser entre 0.6% et 1.1% du GNI par an (1.6 à 3 milliards d?euros en valeur actuelle) pour assurer une transition climatique. L?accompagnement par une programmation budgétaire ambitieuse du plan lors de son adoption par la France (loi de finances pour 2024) avait initialement assis la planification française dans une perspective budgétaire claire. Le fonds vert permettait notamment le co-financement par l?Etat d?actions dans les territoires, méthode dont l?efficacité avait été testée lors du premier plan de relance post Covid. Suite à la dégradation des finances publiques, la remise en cause des financements attribués à la transition écologique n?a pas fait l?objet d?une évaluation de ses conséquences, et notamment du coût du retard de la mise en oeuvre de certaines actions. La France doit se doter d?une loi d?orientation budgétaire pluriannuelle de la transition écologique et prévoir la mise en place de fonds dédiés au financement de la transition pouvant permettre de mutualiser des financements publics et privés. 2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens 2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires La planification écologique, une fois établie et financée, doit ensuite se déployer au plus près des territoires. Elle doit être appropriée par les échelons locaux, adaptée aux réalités géographiques et économiques des territoires. Elle doit pour cela s?appuyer sur des outils permettant sa déclinaison. Et faire l?objet de financements clairs et identifiés, d?un montant adapté à la taille des projets d?échelle locale. La politique forestière du Costa Rica est un exemple de déclinaison territoriale efficace d?une action de transition dont les résultats sur le long terme sont indéniables. Elle combine plusieurs outils de politique publique, visant plusieurs actions en parallèle (loi contre la conversion de la forêt N°7575, programme d?aires protégées) : la réduction de la déforestation 25 et l?accroissement de la 25 50 000 ha/an dans les années 80, 38 000 ha/an dans les années 90 et 27 000 ha/an depuis 2000. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 43/60 régénération de la forêt26, permettant à la fois la protection de la forêt et son exploitation soutenable, mais aussi la diversification agricole, la protection de la biodiversité et des ressources en eau, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le développement rural et la participation de la société dans toutes ces composantes (peuples autochtones, professionnels de la forêt et de l?agriculture). Le programme dispose également d?un financement clairement identifié au sein du FONAFIFO (Fond de financement de la forêt nationale), alimenté en partie par des ressources extérieures (financement REDD+ de la Banque mondiale)27 et s?appuyant sur des outils innovants de financement (Forest Bond Certificate CAF, Forest Bond Certificate for forest management CAFMA, paiements pour services environnementaux). Le principal acteur des territoires étant les collectivités, c?est en premier lieu auprès d?elles que doit se déployer la planification de la transition. En Afrique du sud, les provinces et les municipalités doivent décliner la planification climatique nationale. Ainsi, la province du Cap occidental est régulièrement en première ligne pour proposer divers plans de planification écologique : sa « Climate Change Response Strategy ? Vision 2050 » a été publiée en 2022 puis révisée en 2023, et son « Energy Resilience Program » (2021) définit les actions à engager dans le secteur électrique de la région. La ville du Cap est particulièrement volontariste et a adopté divers stratégies et plans depuis 2014 (Resilience Strategy en 2019, Water Strategy en 2019, Inclusive Economic Growth Strategy en 2019, Bioregional Plan en 2015, Integrated Coastal Management Policy en 2014). En Indonésie, le plan national de développement à moyen terme est décliné dans les territoires via les RPJMN. Ils sont mis en oeuvre par les administrations techniques décentralisées au niveau de chaque province ayant à leur tête un gouverneur. Etablis pour 5 ans, ils font l?objet d?une élaboration concertée, qui s?appuie sur une analyse de la situation, la formulation de scénarii environnementaux et l?identification de recommandations stratégiques. En parallèle, les gouvernements provinciaux doivent également rédiger leurs plans de réduction des émissions de GES ? les RAD-GRK. Les villes indonésiennes disposent également de leurs plans de réduction des émissions. Au Danemark, les régions sont pleinement associées à l?élaboration et à la mise en oeuvre de la transition verte du Royaume. Les régions et la fondation danoise Sustainia28, qui met en contact le monde des affaires et le monde scientifique, ont uni leurs forces pour remettre une feuille de route au Gouvernement sur la manière dont les régions peuvent faciliter la participation et l?inclusion citoyennes dans la transition vers une société durable. Le Danemark est en passe de devenir le premier pays au monde où chaque municipalité (98) disposera d'un plan d'action climatique. La loi finlandaise a été modifiée le 1er mars 2023 pour ajouter une obligation pour les municipalités d?établir un plan climat et de le mettre à jour au moins une fois par mandat municipal. Ce plan devait inclure l?objectif de réduction des émissions, et des mesures pour atteindre ces objectifs. Chaque municipalité avait droit à une subvention de 45 000 euros maximum pour l?élaboration de son plan. Ces plans devaient être élaborés entre 2025 et 2029 mais le programme du nouveau gouvernement Petteri Orpo a prévu de supprimer cette mesure ainsi que les subventions afférentes en novembre 2023 dans le cadre du budget national et des réformes proposées par le gouverne- ment Orpo pour l'année 2024. 26 De 417 000 ha de forêt régénérés en 1986, la couverture atteint 918 000 ha en 2013. 27 200 millions de dollars entre 1998 et 2011 28 Sustainia, anciennement « Copenhagen Climate Council », est une collaboration mondiale entre le monde des affaires et le monde scientifique, fondée par Erik Rasmussen, fondateur du principal groupe de réflexion indépendant de Scandinavie, Monday Morning, basé à Copenhague, et aujourd'hui dirigée par Rasmus Schjødt Larsen, diplômé de Harvard https://sustainiaworld.com/about/ PUBLIÉ https://sustainiaworld.com/about/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 44/60 Bien que n?ayant pas l?obligation de le faire, la plupart des Länder allemands ont adopté leur propre stratégie ou législation climat, formulant leurs propres objectifs sectoriels et prévoyant des outils de déploiement régionaux. En se basant sur l?étude menée par « Climate chance »29, on compte 12 des 16 Länder et villes-Etat à avoir adopté une législation permettant de coordonner les actions de transition climatique à l?échelle régionale30. Huit d?entre elles31 incluent un objectif quantifié de réduction des émissions de GES. L?appropriation des enjeux par les échelons locaux se retrouve également dans la définition de la politique de l?eau néerlandaise. Elle s?appuie sur un ancrage local historique qui permet de penser la gestion de l?eau et du risque, en amont et au quotidien. Aux Etats-Unis, la Californie dispose d?une politique climatique autonome de celle du gouvernement fédéral. En novembre 2022, elle a adopté une loi visant la réduction de ses GES de 48% d?ici 2030 et l?atteinte de la neutralité carbone d?ici 2045, le tout soutenu par un budget de 52 milliards de dollars sur 5 ans. Elle a même mis en place son propre marché carbone qui couvre 85% des émissions dont les transports et le logement, et est connecté au marché carbone du Québec. Les « Sustainable Communities Strategies », mises en place en Californie (SB 375) donnent un cadre pour la réduction des émissions de GES pour les transports et la planification urbaine, en cohérence avec les autres lois de l'Etat. Les organisations métropolitaines de planification de l'Etat (18 en tout) sont tenues d'élaborer des infrastructures urbaines permettant d'augmenter la densité (transports en commun, infrastructures cyclables et piétonnes, réduire la dépendance automobile, ou agir sur l'étalement urbain). A l?inverse, une mauvaise appropriation des enjeux à l?échelon local peut conduire à des retards dans la mise en oeuvre voire à des déclinaisons inappropriées. Ainsi en Indonésie, la décentralisation mise en oeuvre très rapidement à la fin de la dictature de Suharto, pourtant axée sur l?autonomisation des provinces, a conduit à une autonomisation de groupes clientélistes s?appuyant sur des réseaux oligarchiques, favorisant les passe-droits d?exploitation, les incendies criminels et la pêche illégale, contre lesquels le gouvernement actuel lutte encore. De même, la déclinaison verticale descendante de la planification chinoise s?est heurtée à des retards de mise en oeuvre et de la corruption aux échelons locaux. La très grande fragmentation de la structure administrative en Chine l?explique également. C?est dans ce cadre que la Chine a eu recours à une réforme administrative en 2026 pour renforcer l?autonomie des bureaux de protection de l?environnement (BPE) préfectoraux, dans le but d?éviter la double tutelle qu?ils subissaient des échelons préfectoraux et provinciaux. Et cela explique également la mise en place du « crédit social ». Ce système de notation des citoyens, des entreprises et des fonctionnaires locaux conduit à la distribution de récompenses, mais aussi et surtout de pénalités pour ceux ne respectant pas les règles, en s?appuyant sur une collecte automatique de données et leur traitement par des intelligences artificielles. La France a mis en place une déclinaison territoriale de sa planification écologique dans le cadre des COP, qui se déroulent dans les régions françaises depuis l?automne 2023. A ce stade, cette démarche ne s?est pas traduite par des plans régionaux. Elle englobe un état des lieux de la région pour établir un diagnostic partagé. Elle doit permettre l?articulation de la planification écologique régionale avec la planification nationale et la coordination avec les plans locaux. Elle doit définir 29 https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/ 30 La Bavière a adopté une réforme de la Loi bavaroise sur la protection du climat en janvier 2023 (BayKlimaG) avec des objectifs climatiques plus ambitieux que les objectifs fédéraux (neutralité climatique à l?horizon 2040). La Basse-Saxe a adopté une révision de la Loi sur la protection du climat (NKlimaG) en décembre 2023. 31 Sauf celle d?Hambourg qui veut pourtant atteindre la neutralité carbone. Celle du Land de Hesse a des objectifs en matière d?ENR et de quota de rénovation des bâtiments. PUBLIÉ https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 45/60 des mesures concrètes permettant le soutien aux projets à l?échelon local. Cette approche qui se veut à la fois montante et descendante doit permettre une meilleure association des échelons locaux dans le déploiement de la planification écologique. Impliquer tous les acteurs des territoires de l?élaboration jusqu?à la mise en oeuvre 2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens La planification écologique dans les territoires doit s?appuyer sur l?ensemble des acteurs locaux pour assurer son ancrage et son efficience et sur des outils adaptés à ces enjeux, notamment en matière de financements. 2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la planification Les principaux porteurs de ces politiques sont les collectivités locales et elles sont donc le principal vecteur de la traduction concrète des actions de la planification écologique, en s?appropriant les objectifs de la planification ou de la stratégie nationale. En Inde, des États comme le Gujarat et le Rajasthan sont des leaders dans le déploiement de l?énergie solaire. Dans le domaine agricole, l?État du Sikkim a mis en place une politique axée sur la transition écologique, lui permettant de devenir le premier État indien entièrement bio en 2016, grâce à une interdiction complète des pesticides et engrais chimiques. Cette initiative s'inscrit dans une stratégie de développement durable qui vise à protéger les sols, améliorer la santé publique et soutenir les petits agriculteurs. En Afrique du sud, le Cap, Johannesburg et Durban sont membres du C40 « Cities Climate Leadership Group », qui rassemble environ cent maires de grandes villes mondiales décidées à faire face à la crise climatique. En comparaison, seule Paris est membre de ce réseau en France. Plusieurs villes appartiennent également à l?« International Council for Local Environmental Initiatives » (ICLEI) ou au réseau « Resilient cities ». La « South African Local Government Association » (SALGA) apparait comme l?organe compétent pour assurer la remontée des revendications locales dans la mise en oeuvre de ces stratégies climatiques, établissant un dialogue avec l?échelon central. S?appuyant sur l?exemple allemand développé ci-dessous, le pays a également mis en place un « Local government climate change support program » depuis 2012 qui fonctionne avec une plateforme internet fournissant guides, outils, jeux de données, formations. En effet, l?Allemagne déploie depuis 2012 un dispositif de soutien pour les collectivités dans la mise en oeuvre de la transition climatique : l?initiative nationale pour la protection du climat (NKI) qui fête ses 15 ans d?action. Elle dispose d?un site internet dédié, affiche plus de 45 000 projets réalisés, 1,5 milliards d?euros de financements distribués. Parmi ses projets emblématiques, le centre historique de la ville de Lemgo est climatiquement neutre grâce à un projet de chauffage urbain réutilisant la chaleur des eaux usées ou le projet de transformation de l?éclairage urbain au LED mis en place dans 48 communes de la haute Hesse. Depuis avril 2023, une « Agence de protection locale du climat » appuie les collectivités dans la mise en oeuvre de leur projet climatique depuis les méthodologies de calcul des émissions jusqu?aux financements pour les projets, en sus d?outils de formation et de mentorat. Cette démarche s?appuie sur le KTF évoqué dans la section précédente. Pour aller au bout de leur démarche, les collectivités utilisent également leur système PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 46/60 comptable (BISKO) lors de l?établissement de leur bilan énergétique et des émissions de GES ce qui permet la traçabilité des démarches entamées. De même, la Finlande dispose depuis 2018 d?un Programme de solutions climatique municipales (2018-2023, 8 millions d?euros) pour financer des projets climat des communes et des régions. Mais les outils de la planification doivent également pouvoir s?adresser aux autres acteurs du territoire. 2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification En premier lieu, les acteurs économiques doivent pouvoir être associés à la planification écologique. La Finlande a élaboré en coopération avec les acteurs de chaque secteur économique des feuilles de route sectorielles. Cette approche est assez révolutionnaire car il s?agit de « feuilles de route inversées » : ce sont les acteurs de chaque secteur qui élaborent ces feuilles de route, régulièrement remises à jour. Cela permet au gouvernement lorsqu?il en fait la synthèse de disposer d?une vision permettant notamment une meilleure adéquation des moyens. Une démarche du même type a été mise en place aux Pays-Bas, avec en 2013 l?accord volontaire de l?énergie, puis l?accord national pour le climat avec son plan d?action, qui associe les acteurs économiques à la prise de décision sur les objectifs et leurs déclinaisons. A la différence de certains pays, on observe en Suède un mouvement volontaire industriel de décarbonation. Les bioénergies et l?électrification ont déjà fait chuter la part des énergies fossiles à 19% de la consommation énergétique de l?industrie (contre 54% en 1975, comme en France aujourd?hui). Les acteurs industriels concentrant les dernières sources fossiles (les plus difficiles à éliminer car situées au coeur des procédés industriels comme le coke dans la production d?acier et les émissions des process chimiques de fabrication du ciment) ont pris conscience de l?avantage stratégique de décarboner leur production pour renforcer leurs ventes à court et moyen terme. L?implication du monde économique est allée en Allemagne jusqu?à la création de nouveaux modes de décision au sein des entreprises, poussés par les syndicats qui cherchent à accompagner la transition et à ce que ces transitions s?opèrent dans le respect des droits des salariés et du maintien de leurs emplois. Ils ont ainsi fortement plaidé pour la mise en place de primes devant accompagner l?évolution des compétences des salariés sur leur poste de travail. Les syndicats portent également une proposition de révision de la loi sur le conseil d?établissement (Betriebsräte), dans lesquels ils ne siègent pourtant pas formellement : il est proposé que le conseil ait un droit d?initiative et de codécision en matière de décisions destinées à mieux protéger l?environnement, y compris l?évolution des modes de production ; l?instauration d?une commission environnementale dans toute entreprise de plus de 100 salariés est également proposée. Les outils doivent aussi permettre le financement des projets des acteurs du territoire, entreprises comme citoyens. La Californie distribue des aides et des prêts sur l?ensemble des sujets environnementaux et climatiques, dans le cadre d?appels à projets notamment. Ces subventions proposées sont regroupées sur un seul portail, avec un moteur de recherche extrêmement fluide et possibilité de traduction. L?un des outils les plus complets apparait comme celui de la stratégie de transition économique de Bruxelles capitale 2022-2030 : « Shifting economy ». Le programme vise à l?accompagnement de la trajectoire climatique et environnementale de la région par une stratégie dont l?objectif est une économie décarbonée, régénérative, circulaire, sociale, démocratique et digitale. Le programme cherche à « aligner les objectifs économiques sur les objectifs climatiques » et s?adresse à tous les acteurs économiques de la région. La « transition économique » est définie comme : « la PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 47/60 transformation progressive au sens large (qui va de l?adoption d?une démarche d?écogestion à des changements fondamentaux de business model) des activités économiques bruxelloises (en ce compris les sous-traitants et les fournisseurs bruxellois) dans la perspective de contribuer aux défis sociaux et environnementaux locaux et globaux ainsi qu?à la création et au maintien d?emplois de qualité à Bruxelles ». Dès 2024, les entreprises inscrites dans une démarche de transition économique ou qui sont exemplaires sur le plan social ou environnemental bénéficieront d?une majoration des aides économiques. A partir de 2030, les outils économiques de la région seront concentrés sur le soutien aux entreprises qui auront fait le choix de l?exemplarité sociale et environnementale. Certains outils sont déjà en place : - « finance&invest.brussels » facilite le financement des entreprises en transition et vient d?être recapitalisé (triplement de sa capacité financière avec 131 millions d?euros additionnels) ; - adoption d?un « Plan régional pour l?innovation » (PRI) qui prévoit 400 millions d?euros de financement entre 2021 et 2027 pour les domaines d?innovation stratégique ; - lancement de « Renolution » alliance des secteurs privé et public pour atteindre le triplemement du taux de rénovation du bâti bruxellois ; - la Stratégie Qualification-Emploi portée par le ministre de l?emploi et de la formation. La stratégie a été co-construite avec l?écosystème bruxellois. Au total, 280 participants ont été impliqués dont 132 organismes publics ou privés (fédérations professionnelles et sectorielles, experts, guichets d?économie locale, universités, etc). 2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire L?association des citoyens au projet de planification écologique est un élément essentiel pour la concrétisation des projets. De nombreux pays ont tenté d?inclure les citoyens dans la prise de décision et organisé différentes modalités de concertation ou de consultation comme nous l?avons vu précédemment. Mais c?est dans la traduction concrète des projets dans les territoires que se mesure la qualité de l?association des citoyens et leur adhésion au projet. En Afrique du sud, la gestion des aires protégées a offert la possibilité d?association des propriétaires privés (25% des aires protégées appartiennent à des propriétaires privés) et des communautés locales. Plusieurs projets présentent aujourd?hui une gestion partagée entre l?autorité locale, les ONG et les communautés implantées. C?est par exemple le cas de la réserve de la communauté Mabaso, qui a établi un plan de gestion de l?aire protégée en partenariat avec WWF-SA. En Indonésie, les consultations avec les communautés locales, notamment sur la gestion des ressources naturelles et la reforestation, font partie intégrante de la planification. Les forums multi- acteurs (Musrenbang) offrent un cadre où citoyens, ONG et autorité locales participent à la prise de décision. Des plateformes locales existent au Costa Rica, initiatives locales impliquant directement les citoyens, notamment sur la reforestation et la préservation de la biodiversité. Ces efforts renforcent le lien entre les communautés et les objectifs nationaux de transition écologique. En Allemagne, la concertation locale est profondément ancrée dans les processus de planification écologique. Les initiatives citoyennes, comme les "Ratsbürger" (assemblées locales consultatives), permettent aux habitants de co-décider sur des projets énergétiques et environnementaux. Les Länder et les municipalités favorisent également les consultations pour intégrer les besoins spécifiques des populations dans la mise en oeuvre des objectifs climatiques. Plusieurs pays ont de même misé sur l?association de la jeunesse aux processus de réflexion sur la transition écologique : c?est le cas de l?Irlande, du Danemark (Conseil des jeunes pour le climat) ? PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 48/60 Les outils doivent également couvrir l?information des citoyens. Ainsi, en matière d?adaptation, le gouvernement de Californie a mis en place une série d?outils permettant l?information du grand public sur les ilots de chaleur, les risques liés aux tempêtes et aux inondations, mais aussi pour les collectivités avec notamment Adapt-CA, boite à outils de développement des capacités d?adaptation32 ou CERI-climate qui gère les interventions d?urgence sur les 600 infrastructures considérées comme essentielles à la capacité de l?Etat à réagir aux catastrophes. En France, le SGPE s?est saisi de cet enjeu de l?association citoyenne qui semble être ressenti comme un manque. Il a notamment développé un outil d?information/formation sur le plan (Le Bon Plan), sans disposer pour autant des moyens nécessaires pour en assurer la diffusion. Il analyse également les outils de déclinaison de la planification auprès des citoyens (aides directes pour l?efficacité énergétique des bâtiments, l?achat de véhicules électriques) qui sont les meilleurs moyens de constater le niveau d?adhésion de la population. Pourtant, l?incapacité à entrainer certains secteurs économiques à forte composante sociétale (agriculture notamment) et la grande majorité des citoyens qui restent peu conscient de la démarche de planification entamée par la France nuit à la mise en oeuvre de ses travaux. Poursuivre la mise en oeuvre territoriale de la démarche de planification écologique en se concentrant davantage sur les outils à déployer, notamment budgétaires et numériques, pour aider les collectivités au-delà des outils de rapportage, les acteurs économiques dans le suivi de leurs transitions et les citoyens dans leur appréhension et leur inclusion dans le processus de transformation. 2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale La planification écologique apparait également comme un bon outil de diplomatie climatique et environnementale. Des pays s?appuient sur leur expérience de planification écologique et leurs résultats pour renforcer leur positionnement dans les instances internationales : on citera notamment Singapour, le Costa Rica, et le Rwanda. Mais on peut également mentionner le rôle de leader au sein de leur continent que veulent jouer l?Indonésie, l?Afrique du sud ou le Brésil, comme porte-parole pendant les négociations internationales mais également comme des pays cherchant un mode de développement alternatif, s?appuyant sur une transition juste. Du côté des pays développés, le Royaume-Uni et le Danemark poursuivent leur investissement à l?échelle internationale et l?Allemagne dispose avec le GIZ d?un outil très puissant de coopération. La diffusion de la planification écologique au sein de la plupart des pays pourrait permettre de renforcer les outils internationaux existants au sein des 3 conventions de l?ONU : elle crédibilise les politiques nationales pour l?accession à des financements internationaux et facilite la lutte contre la corruption. A l?issue de plus d?une année à examiner la planification écologique dans les autres pays, il apparait clairement aux autrices du rapport une réelle appétence de nombreux pays rencontrés dans différents contextes pour des coopérations internationales en matière de planification écologique. Même si la planification écologique reste liée à un contexte national, les expériences et les outils 32 https://arccacalifornia.org/adapt-ca/ PUBLIÉ https://arccacalifornia.org/adapt-ca/ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 49/60 mis en place par chacun sont très utiles pour la mise en place d?une planification plus efficiente. Par ailleurs, peu de pays ont mis en place une planification écologique complète et peu parviennent à déployer effectivement leur planification dans leurs territoires. Les mêmes obstacles sont souvent rencontrés par les uns et les autres ce qui renforce encore la valeur du parangonnage. La planification écologique pourrait donc devenir un nouvel outil de la stratégie diplomatique climatique et environnementale de la France. Faire de la planification écologique un nouvel outil de coopération internationale et renforcer les partenariats avec les pays les plus susceptibles de faire progresser la planification écologique française. PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 50/60 Conclusion La planification écologique se déploie donc dans la majorité des pays du G20 et de l?Union européenne. Elle souffre le plus souvent des mêmes difficultés de mise en oeuvre, mais apparait néanmoins comme le meilleur outil pour permettre d?assurer la transition. Avec son exemple de planification écologique centralisée, la France dispose d?un outil puissant susceptible d?accompagner sa transition. Les recommandations de ce rapport ont vocation à accompagner le déploiement de cette planification et à faciliter sa mise en oeuvre, notamment sa déclinaison dans les territoires. L?utilité du parangonnage réalisé encourage à poursuivre la démarche, pour explorer certains pays supplémentaires non étudiés (Espagne, Italie, Portugal notamment), ou approfondir certaines situations n?ayant pas fait l?objet d?une étude suffisante par manque de temps et de moyens (Japon, Canada). Mais c?est également sur le plan sectoriel que cet approfondissement mériterait d?être réalisé. L?articulation entre les planifications et leur programmation budgétaire mérite en premier lieu d?être creusée tant elle apparait comme l?une des clés de la réussite de cette démarche. Des outils budgétaires innovants permettant de mieux garantir le financement de la transition, qu?ils soient des outils fiscaux, d?affectation budgétaire, ou de recours à des financements externes permettant d?associer mieux les acteurs économiques à la transition, méritent d?être expertisés. Les difficultés rencontrées par certains pays et les réussites sur des secteurs pour lesquels la transition écologique française patine pourraient également faire l?objet d?un approfondissement, notamment en priorité la politique de souveraineté alimentaire et agricole. Enfin, certains exemples très positifs de traduction de la planification dans les pays déjà étudiés pourraient faire l?objet d?échanges avec les pays concernés notamment les outils développés par l?Allemagne, la Belgique ou le Danemark en matière d?accompagnement des collectivités dans leurs projets de transition climatique et environnementale et d?implication citoyenne dans la prise de décision et la mise en oeuvre des politiques sur le terrain, notamment avec le rôle joué par le monde associatif. Enfin, à l?issue de cette année consacrée à cette étude, il apparait clairement une appétence des autres pays au-delà du cercle étudié pour la planification écologique française. Cet outil de diplomatie climatique et environnementale doit être développé en accord avec le Ministère de l?Europe et des Affaires Etrangères, l?AFD et Expertise France afin que le SGPE puisse à la fois transmettre l?expertise française tout en recueillant des exemples et des outils utiles à la planification française. Barbara POMPILI Virginie DUMOULIN PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 51/60 Annexes PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 52/60 Annexe 1. Lettre de mission IGEDD PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 53/60 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 54/60 Annexe 2. Liste des personnes rencontrées Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre THARYAT Tri République d?Indonésie Ambassador, Deputy Minister for Multilateral Cooperation 28/11/2023 NAKAGAMI Hidetoshi Jyukankyo Research Institute Inc.Japan CEO&Founder Delegation japan leaders 29/11/2023 FINK-HOOIJER Florika DG ENV Commission Européenne Directrice générale 08/12/2023 VAN VLEDHOVEN Stientje World Resources Institute Vice-présidente et Directrice régionale Europe 08/12/2023 ANTTONEN Matti Ambassade de la Finlande en France Ambassadeur 06/02/2024 HEKKERT Marko Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur général 29/02/2024 STREMLER Jaco Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur Climat Air et Energie 29/02/2024 MINNESMA Marjan Fondation Urgenda ? Pays-Bas Directrice et Fondatrice 29/02/2024 VAN GINNEKEN Meike Ministère des Infrastructures et de l?Eau Pays-Bas Envoyée spéciale sur l?Eau et directrice du Programme international sur l?adaptation au changement climatique et l?eau 29/02/2024 BONJER Jan Waterschap Hollandse Delta (Dutch Delta Water Board) ? Pays-Bas Président 29/02/2024 SPIERINGS Anne-Marie Transition du cluster industriel de Rotterdam (DeltaLinqs) ? Pays-Bas Directrice 29/02/2024 HEIJDRA Michel Ministère de l?Économie et du Climat Pays-Bas Directeur Général pour le Climat et l?Énergie 01/03/2024 VRUGT René Ministère de l?Économie et du Climat Pays-Bas Directeur des sols, de l?aménagement du territoire et de l?adaptation au climat 01/03/2024 POLS Donald Association environnementale Milieudefensie ? Pays-Bas Directeur 01/03/2024 KERSTEN Kiki Central Bureau voor de Statistiek (CBS) ? Pays-Bas Central Bureau voor de Statistiek (CBS) 01/03/2024 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 55/60 Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre RAUTAVAARA Antti Centre for Peace Mediation de la Finlande Envoyé Spécial Eau 13/03/2024 SHANMUGARATNAM Tharman République de Singapour Président 15/05/2024 KHOR Dr. Amy Ministère du développement durable et de l?agence publique de l?eau de Singapour Senior Minister of State for Sustainability and the Environment 16/05/2024 TAN Adele Urban Redevelopment Authority of Singapore Chief Planner and deputy CEO 16/05/2024 TEO Joseph Ministry of Sustainability and the Environment of Singapore Chief Negociator for Climate Change 17/05/2024 GUO Yiran Ministry of Sustainability and the Environment of Singapore, National Climate Change Secretariat, Singapore Expert 17/05/2024 BHASKAR Ananda Ram National Environment Agency, Singapore Deputy Chief Executive Officier, Environmental Portection Director- General 17/05/2024 LESPAYANDEL Carine French Chamber of Commerce in Singapore Executive Director 16/05/2024 WIKODO Joko République d?Indonésie Président 20/05/2024 ADININGGAR Amalia BAPPENAS Indonésie Deputy for Economic Affairs 20/05/2024 YULASWATI Vivi BAPPENAS Indonésie Deputy for Maritime Affairs and Natural Resources 22/05/2024 HENDIARTI Nani Ministre coordinateur des affaires maritimes et de l?investissement Ministre adjointe chargée des questions environnementale et forestières 23/05/2024 DHEWANTI Laksmi Ministère de l?environnement et des forêts Directrice générale de la lutte contre le changement climatique 23/05/2024 KUSUMASTUTI Diana Ministère des travaux publics Directrice générale de « human settlements » 23/05/2024 DUBEUX Rafael Ministère des Finances du Brésil Secrétaire exécutif adjoint et coordinateur du plan écologique 17/06/2024 MOREL Julien Swedish Ministry of Climate and Enterprise Climate policy analyst 26/08/2024 VIATTE Loïc Expert français, ex-conseiller Environnement à la RP suédoise à Bruxelles 26/08/2024 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 56/60 Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre PERSSON Asa Stockholm Environment Institute Swedish Climate Policy Council Research Director and Deputy Director Chair of the CPC 26/08/2024 ALTERA Ola Swedish Climate Policy Council Chief Executive 26/08/2024 FORSLUND Anna Swedish Agency for Nature Conservation Head of Unit Nature Analysis 26/08/2024 WIKHOLM Nanna Swedish Royal Institute of Technology Natural resources department Head of the Spatial Planning Unit 26/08/2024 VINNMYR Sabina Swedish Environment Protection Agency Senior scientific officer 26/08/2024 HANNERZ Fredrik Swedish Ministry of Climate and Enterprise Deputy-Director General Head of Natural Environment Division 26/08/2024 GRANATH Fredrik Swedish Ministry of Climate and Enterprise Advisor in charge of national environmental objectives 26/08/2024 H.E.MR.WANG Bao Ministry of Water Resources of China Vice Minister of Water Resources of China 09/10/2024 PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 57/60 Annexe 3. Ambassades consultées Ambassade de France en Afrique du sud Ambassade de France aux Etats-Unis d?Amérique Ambassade de France en Allemagne Ambassade de France en Finlande Ambassade de France en Belgique Ambassade de France en Inde Ambassade de France au Brésil Ambassade de France en Indonésie Ambassade de France au Canada Ambassade de France en Irlande Ambassade de France en Chine Ambassade de France au Pays-Bas Ambassade de France au Costa Rica Ambassade de France au Royaume Uni Ambassade de France au Danemark Ambassade de France à Singapour Ambassade de France en Suède PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 58/60 Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes Acronyme/Sigles Signification Adapt-CA Adaptation Capability Advancement Toolkit AFD Agence France Développement BAPPENAS Ministère de la planification d?Indonésie BISKO BIlanzierungs-Standard KOmmunal (système comptable en Allemagne) BPE Bureau de protection de l?environnement CAF Banque de Développement d?Amérique latine et des Caraïbes CAFMA Forest Bond Certificate for forest management CCAC Conseil consultatif sur le changement climatique (EI) CERI-Climate California Emergency Response Infrastructure Climate Vulnerability Tool (USA) CNC Commission nationale climat (Belgique) COP Conférence des parties CPO Climate policy office (Etats-Unis) CR Costa Rica (code ISO) C40 Cities Climate Leadership Group DE Allemagne (code ISO) DESNZ Ministère en charge de la sécurité énergétique et de la neutralité climatique au Royaume-Uni EI Irlande (code ISO) EPA Agence de protection de l?environnement (USA, EI) ETS Echange de quotas d?émission (UE) FEDER Fonds européen de développement régional FI Finlande (code ISO) FONAFIFO Fond de financement de la forêt nationale FONERWA Fonds vert (Rwanda) GES Gaz à effet de serre GIEC Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat GIZ Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (en français : Société allemande de coopération internationale) GNI Gross national income ? Revenu national brut (proche du PNB) GX Green transformation (transformation verte) au Japon G20 Groupe des 20 (forum intergouvernemental des 19 pays aux économies les plus développées du monde) HCC Haut conseil pour le climat (France) ICLEI Conseil International des Initiatives Locales pour l?Environment IBAMA Institut brésilien de l?environnement et des ressources naturelle IGEDD Inspection générale de l?environnement et du développement durable IGF Inspection générale des finances IPBES Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques IRA Inflation reduction act (USA) IRP Panel International des Ressources JETP Partenariat pour une transition énergétique juste KTF Fonds pour le climat et la transformation (DE) LED Diode électroluminescente LiFE Lifestyl for environment / Modes de vie durables (Inde) LTS Stratégie de long terme (USA) MoEFCC Ministère de l?environnement, de la forêt et du changement climatique Inde METI Ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (Japon) MOE Ministère de l?environnement (Japon) MOF Ministère des finances (Japon) NAPCC Plan d?action pour le changement climatique en Inde NASEM Académie des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (USA) NBSAP(en)/SPANB (fr) Stratégies et plans d?action nationaux pour la biodiversité NCCRPWP Plan climatique en Afrique du sud PUBLIÉ Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 59/60 Acronyme/Sigles Signification NCCS Secrétariat national au changement climatique à Singapour NDC(en)/CDN(fr) Contribution nationalement déterminée (climat) NDCR Commission nationale de la réforme et du développement en Chine NKI Initiative nationale pour la protection du climat (DE) OCDE Organisation de coopération et de développement économiques ODD Objectifs de développement durable ONG Organisation non gouvernementale PBL Office de la planification écologique (Pays-Bas) PCC Commission présidentielle du climat en Afrique du sud PLF Projet de loi de finances PMCC Conseil sur le changement climatique (Inde) PRI Plan régional pour l?innovation PSSO Bureau de la durabilité du secteur public à Singapour RAD-GRK Plan climat provincial en Indonésie RAN-GRK Plan climat national en Indonésie REDD+ Réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation forestière RPJMN Plan de moyen terme de développement ? 5 ans (Indonésie) RPJPN Plan de long terme de développement ? 20 ans (Indonésie) SALGA Association des collectivités locales (ZA) SB 375 Législation californienne : le Senate Bill 375 SGPE Secrétariat général à la planification écologique UE Union européenne UNFCCC Convention cadre des nations unie sur le changement climatique URA Urban redevelopment Authority (Singapour) URSS Union des républiques socialistes soviétiques UTCATF Utilisation des terres, changement d?affectation des terres et foresterie WWF-SA World Wide Fund for Nature ? South Africa ZA Afrique du sud (code ISO) PUBLIÉ Annexe 5. Fiches Pays Présenté dans un document séparé PUBLIÉ Sommaire Edito Résumé Liste des recommandations Introduction 1 Une mise en place progressive d?outils de planification de la transition climatique et écologique dans la plupart des pays du G20 et de l?Union européenne, qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre 1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique 1.2 Les pays pionniers de la planification écologique 1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique 1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique 1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale 1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs de transparence 1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en oeuvre 1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs objectifs de transition 1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de l?engagement citoyen 2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au dernier kilomètre ? Des recommandations à tirer des exemples étrangers 2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté au plus haut niveau de l?Etat et répondant aux attentes citoyennes 2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son portage par la société 2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat 2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes citoyennes quant à leur avenir 2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans un cadre juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous les secteurs d?activités 2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements internationaux 2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace et juste 2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante 2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique 2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter 2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique 2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle 2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050) 2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels 2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens 2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires 2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens 2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la planification 2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification 2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire 2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale Conclusion Annexes Annexe 1. Lettre de mission IGEDD Annexe 2. Liste des personnes rencontrées Annexe 3. Ambassades consultées Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes Annexe 5. Fiches Pays INVALIDE)

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