La planification écologique dans le monde - Parangonnage sur la démarche de planification écologique dans des pays du G20 et de l'Union européenne. Appui à Mme Barbara Pompili
DUMOULIN, Virginie
Auteur moral
France. Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD)
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">Dans le cadre de sa « transition écologique » face à la crise climatique et environnementale, la France a mis en oeuvre une « planification écologique » s'appuyant sur un plan mis en oeuvre par l'ensemble du gouvernement dont le pilotage relève du Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), dans le respect des obligations internationales et européennes en matière de neutralité carbone et de préservation et de restauration de la biodiversité d'ici 2050. Malgré son adoption au plus haut niveau de l'État, la France se retrouve confrontée à des difficultés de mise en oeuvre, à l'instar de nombreux autres pays, dont certains sont en demande d'échanges et de coopération avec la France. Un parangonnage sur la planification écologique a conduit à la rédaction de ce rapport, recentré sur les pays du G20 et de l'Union européenne et certains pays pionniers dans le domaine. La quasi-totalité des pays recourent à la mise en oeuvre de stratégies dans le cadre de leurs obligations internationales découlant de l'accord de Paris : réduction des émissions de gaz à effet de serre et mise en oeuvre de politiques publiques sur la plupart des secteurs émetteurs (énergie, transport, logement, agriculture et forêt). Néanmoins, la plupart peinent à l'adoption d'une stratégie globale concernant les autres enjeux environnementaux (adaptation, biodiversité, ressources). L'étude fait ressortir les éléments nécessaires pour garantir la réussite de la planification écologique notamment s'appuyer sur un narratif politique, porté par le plus haut niveau de l'État, indispensable pour l'appropriation par la population et la classe politique et être transversale sur l'ensemble des sujets, y compris sur le plan sociétal et économique tout en incluant des éléments clés comme la biodiversité, la transformation de la production alimentaire et l'efficacité de l'usage des ressources. Son pilotage par une organisation rattachée au plus haut niveau de l'État conforte sa capacité à agir. Elle doit s'inscrire dans un calendrier de court, moyen et long terme, accompagné d'une programmation budgétaire pluriannuelle. Une évaluation indépendante, régulière et fiable permet la réorientation des politiques publiques tout en faisant l'objet d'une redevabilité politique auprès des autres échelons de l'appareil démocratique. Sa déclinaison auprès des acteurs des territoires favorise son acceptation par la co-construction. De nombreux exemples et pratiques dans les pays examinés démontrent qu'il est possible de mettre en oeuvre une planification écologique regroupant l'ensemble de ces recommandations. La France peut s'appuyer sur son organisation existante et faire également de la planification écologique un outil de diplomatie climatique et environnementale.</div>
Editeur
IGEDD
Descripteur Urbamet
gouvernance
;politique publique
;transition écologique
Descripteur écoplanete
Thème
Environnement - Paysage
Texte intégral
Parangonnage sur la démarche de planification écologique
dans des pays du G20 et de l?Union européenne
Barbara POMPILI
Ancienne Ministre de la
Transition écologique
Avec l?appui de
Virginie DUMOULIN - IGEDD
Mars 2025
La planification écologique dans le monde
P
U
B
L
I É
PUBLIÉ
Les auteurs attestent qu'aucun des éléments de leurs activités
passées ou présentes n'a affecté leur impartialité dans la rédaction
de ce rapport
Statut de communication
? Préparatoire à une décision administrative
? Non communicable
? Communicable (données confidentielles occultées)
? Communicable
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 4/60
Sommaire
Sommaire........................................................................................................................ 4
Edito ................................................................................................................................ 6
Résumé ........................................................................................................................... 7
Liste des recommandations .......................................................................................... 9
Introduction .................................................................................................................. 10
1 Une mise en place progressive d?outils de planification de la transition
climatique et écologique dans la plupart des pays du G20 et de l?Union
européenne, qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre ........................... 12
1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique ........................................... 12
1.2 Les pays pionniers de la planification écologique ................................................ 13
1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique ............................ 14
1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique ..................................... 14
1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale .................. 19
1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs de
transparence .............................................................................................. 20
1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en oeuvre ...................... 22
1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs objectifs
de transition ................................................................................................ 22
1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de
l?engagement citoyen ................................................................................. 23
2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au dernier kilomètre ?
Des recommandations à tirer des exemples étrangers ........................................ 25
2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique,
porté au plus haut niveau de l?Etat et répondant aux attentes citoyennes ........... 25
2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son portage
par la société .............................................................................................. 25
2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat .................. 26
2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes
citoyennes quant à leur avenir .................................................................... 27
2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans un cadre
juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous les secteurs d?activités ..... 29
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 5/60
2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements internationaux
................................................................................................................... 29
2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace et
juste ........................................................................................................... 30
2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures
administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet
d?une évaluation régulière et indépendante ......................................................... 33
2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en
oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique ................. 33
2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et
indépendante pour pouvoir s?adapter ......................................................... 35
2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique .......... 37
2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et
long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle ................................. 39
2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030),
moyen (2040) et long (2050) ...................................................................... 39
2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics
pluriannuels ................................................................................................ 40
2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles
territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des
acteurs économiques et des citoyens ................................................................. 42
2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires ................. 42
2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures
des territoires pour mobiliser les citoyens ................................................... 45
2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la
stratégie internationale climatique et environnementale ...................................... 48
Conclusion ................................................................................................................... 50
Annexes ........................................................................................................................ 51
Annexe 1. Lettre de mission IGEDD ........................................................................... 52
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées ............................................................. 54
Annexe 3. Ambassades consultées ........................................................................... 57
Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes .................................................................. 58
Annexe 5. Fiches Pays ................................................................................................ 60
PUBLIÉ
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Edito
Ministre de la Transition écologique de 2020 à 2022, j?ai porté la mise en place d?une planification
écologique en France qui s?est traduite par la création du Secrétariat général à la planification
écologique. C?est dans ce cadre que j?ai accepté de rejoindre pour un peu plus d?une année de
SGPE (octobre 2023 à janvier 2025) afin de porter un regard sur les réactions à l?égard de ce
dispositif français original dans l?échiquier international et d?examiner ce dont il pourrait s?inspirer à
l?extérieur de nos frontières.
L?ensemble des pays sont en effet confrontés au même défi de la mise en oeuvre de leur transition
écologique, devant faire face aux impacts de plus en plus visibles et couteux socialement et
économiquement du changement climatique et de l?affaiblissement de la biodiversité, dans un
contexte de raréfaction des ressources naturelles, à commencer par les plus importantes comme
l?eau.
L?ensemble des pays doivent comme la France faire face à la difficulté de respecter des objectifs
de long terme alors qu?ils subissent déjà des impacts immédiats, qui déstabilisent davantage
encore leurs équilibres sociétaux et économiques.
L?ensemble des pays doivent trouver les moyens de mettre en oeuvre au plus près du terrain des
réformes concrètes acceptées voire portées par leurs citoyens.
Il m?est donc apparu utile de consacrer cette année à examiner la situation des autres pays, pour
en tirer des exemples, des principes, des philosophies politiques qui puissent appuyer la mise en
oeuvre de la planification écologique française. Ce rapport est l?une des concrétisations de ce travail
très enrichissant, co-écrit avec Virginie Dumoulin de l?IGEDD, et avec l?appui des ambassades de
France des pays du G20, de l?UE et de quelques Etats exemplaires en matière de planification
écologique.
Ce rapport n?aurait pas pu être rédigé sans la contribution des stagiaires du SGPE, tout
particulièrement Raphaëlle CAMARCAT, et Baki KAVLAK, Lola LECOMTE, et Damien THERY-
DUPRESSOIR, et la bienveillante relecture et coordination de Laurent ROY (IGEDD).
Barbara POMPILI
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 7/60
Résumé
Dans le cadre de sa « transition écologique » lui permettant de faire face à la crise climatique et
environnementale, la France a mis en oeuvre une « planification écologique », s?appuyant sur un
plan mis en oeuvre par l?ensemble du gouvernement et dont le pilotage est assuré par le Secrétariat
général à la planification écologique (SGPE).
Ce plan est en phase avec les obligations internationales et européennes de la France, en matière
d?objectifs et de calendrier, qui doivent permettre l?atteinte de la neutralité carbone et de « vivre en
harmonie avec la nature » en 2050. Malgré une préparation rapide de cet outil de pilotage de
l?action publique et privée et son adoption au plus haut niveau de l?Etat, la France se retrouve
confrontée à des difficultés de mise en oeuvre de cette planification.
De nombreux pays apparaissent également confrontés aux mêmes préoccupations et difficultés
de mise en oeuvre de la transition écologique et sont en demande d?échanges et de coopération
avec la France dont le modèle de planification écologique intéresse. Un parangonnage sur la
planification écologique a donc conduit à la rédaction de ce rapport, recentré sur les pays du G20
et de l?Union européenne, auxquels sont adjoints certains pays et collectivités sub-nationales
pionniers dans la planification écologique.
Il ressort de ce travail de parangonnage que la plupart voire la quasi-totalité des pays recourent à
un processus de planification ou d?inscription dans une stratégie de leurs obligations climatiques.
Les obligations internationales découlant de l?accord de Paris ont permis le déploiement à travers
le monde de stratégies visant la réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui entrainent des
politiques publiques sur la plupart des secteurs émetteurs (énergie, transport, logement, agriculture
et forêt). Néanmoins, la plupart des pays peinent à l?adoption d?une stratégie globale intégrant
également dans un même cadre et sous un même pilotage des stratégies similaires pour les autres
enjeux environnementaux (adaptation, biodiversité, ressources). Les pays de tradition planificatrice
réussissent mieux cet exercice de transversalité.
Les pays buttent également sur les mêmes difficultés que celles identifiées par la France à la fois
d?appropriation par la classe politique et la population des actions à mettre en oeuvre, de cohérence
globale des politiques publiques et de déclinaison dans les territoires. Un certain nombre d?outils,
de pratiques sont néanmoins apparus comme de bons exemples nécessitant d?être étudiés plus
avant afin de pouvoir inspirer la planification française pour répondre aux enjeux qu?elle rencontre.
Des fiches relatives à 19 pays recensant la planification écologique dans chacun d?entre eux
figurent en annexe. Le Costa Rica a également fait l?objet d?un examen mais uniquement sur la
base d?une contribution de l?ambassade de France et ne fait donc pas l?objet d?une fiche spécifique.
L?étude en a retiré les éléments qui lui sont apparus nécessaires, au titre des meilleurs exemples
étrangers rencontrés, pour garantir la réussite de la planification écologique. Ils font l?objet de 11
recommandations.
La transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté par le plus haut niveau de
l?Etat, indispensable pour l?appropriation par la population et la classe politique, quand bien même
ce narratif englobe des enjeux autres que les questions climatiques et environnementales.
La planification écologique doit être globale, transversale et traiter de l?ensemble des sujets, y
compris les plus délicats sur le plan sociétal et économique. La biodiversité et la transformation de
la production alimentaire sont des éléments clés de la transition, ainsi que l?efficacité de l?usage
des ressources.
Elle doit être pilotée par une organisation identifiée et rattachée au plus haut niveau de l?Etat pour
assurer sa capacité à agir. Elle doit s?inscrire dans un calendrier de court (2030), moyen (2040) et
long terme (2050), garantissant la stabilité de la trajectoire et de l?action publique, afin de rassurer
les acteurs du changement, qu?il s?agisse des collectivités dans les territoires ou des acteurs
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économiques. Elle doit s?appuyer sur une programmation budgétaire pluriannuelle assurant elle
aussi la continuité de l?action publique et permettant de rassurer les investisseurs et d?appréhender
les modifications nécessaires de la planification.
Elle doit faire l?objet d?une évaluation indépendante, régulière et fiable car basée sur des données
non contestées, permettant la réorientation des politiques publiques lorsque les objectifs ne sont
pas atteints. Elle doit également dans ce cadre faire l?objet d?une redevabilité politique auprès des
autres échelons de l?appareil démocratique notamment le Parlement.
Elle doit être déclinée dans les territoires au plus près de l?action quotidienne afin d?être en mesure
d?être appréhendée, co-construite et acceptée par les acteurs des territoires, ce qui nécessite la
définition d?outils de consultation et d?association de la société civile dans son ensemble à la prise
de décision, mais aussi et surtout à la mise en oeuvre des politiques.
De nombreux exemples et pratiques dans les pays examinés démontrent qu?il est possible de
mettre en oeuvre une planification écologique regroupant l?ensemble de ces recommandations. La
France a la capacité de le faire en s?appuyant sur les outils déjà mis en oeuvre et en renforçant sa
planification écologique sur les aspects qui apparaissent encore insuffisants à ce stade. La
planification écologique peut par ailleurs devenir un outil de diplomatie climatique et
environnementale au service du pays.
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Liste des recommandations
Construire un narratif, fondé sur une vision de l?avenir du pays portée
par le chef de l?Etat et le chef du gouvernement et partagée avec les citoyens, dans lequel
la transition écologique est considérée comme un moyen et non une fin. ......................... 29
Inscrire dans la loi l?obligation d?une planification écologique ........... 30
La planification écologique doit intégrer tous les secteurs d?activités et
l?ensemble des politiques doivent être mises en oeuvre, en adaptant si nécessaire la
trajectoire et les financements pour surmonter les difficultés. ............................................ 33
Maintenir le SGPE auprès du premier ministre, le renforcer dans son
rôle de pilotage de la planification écologique, en appui de l?action des ministères, et
d?animation de son déploiement dans les territoires. .......................................................... 35
La France doit se doter d?une entité d?évaluation de sa planification
écologique indépendante et reconnue qui appuiera le SGPE dans sa démarche de pilotage
de la planification écologique. ............................................................................................. 37
La planification écologique doit faire l?objet d?un suivi annuel devant le
Parlement, qui permettra d?évaluer si la trajectoire est respectée et de définir les mesures à
mettre en place si ce n?est pas le cas. Ce suivi sera alimenté par la publication en amont
d?un rapport annuel de l?organe d?évaluation indépendant. ................................................ 38
La France doit se doter d?une planification à échéance 2040 et à
échéance 2050 qui doit intégrer ses objectifs en matière d?adaptation et de reconquête de
la biodiversité. ...................................................................................................................... 40
La France doit se doter d?une loi d?orientation budgétaire pluriannuelle
de la transition écologique et prévoir la mise en place de fonds dédiés au financement de la
transition pouvant permettre de mutualiser des financements publics et privés. ............... 42
Impliquer tous les acteurs des territoires de l?élaboration jusqu?à la mise
en oeuvre ............................................................................................................................. 45
Poursuivre la mise en oeuvre territoriale de la démarche de
planification écologique en se concentrant davantage sur les outils à déployer, notamment
budgétaires et numériques, pour aider les collectivités au-delà des outils de rapportage, les
acteurs économiques dans le suivi de leurs transitions et les citoyens dans leur
appréhension et leur inclusion dans le processus de transformation. ................................ 48
Faire de la planification écologique un nouvel outil de coopération
internationale et renforcer les partenariats avec les pays les plus susceptibles de faire
progresser la planification écologique française. ................................................................ 49
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Introduction
Confrontés aux conséquences de la dégradation de l?environnement sous les effets du
changement climatique, de l?effondrement de la biodiversité et de l?épuisement des ressources, les
pouvoirs publics du monde entier cherchent à mettre en place des politiques permettant à la fois
de limiter voire d?inverser ces tendances, et d?adapter les sociétés humaines à cette nouvelle donne.
Pour relever ce défi écologique mais aussi sociétal, les autorités publiques doivent mettre en oeuvre
une politique que l?on peut qualifier de « transition écologique », entrainant « l?ensemble des
changements imprimés au modèle économique et social dans le but de répondre aux exigences
du développement durable et de réduire l?empreinte écologique de la société »1. L?ampleur des
modifications nécessaires est considérable : tous les secteurs de l?activités économique sont
concernés (énergie, transport, agriculture, logement, industrie, etc.), toutes les régions du monde
y sont confrontées, et les modes de vie eux même sont questionnés. L?urgence à agir est réelle,
appuyée sur des constats scientifiques formulés et reconnus à l?échelle planétaire (GIEC, IPBES,
IRP). Ces constats sont traduits en des objectifs précis et inscrits dans le temps2, au-delà desquels
l?effondrement de la biodiversité et l?impact du changement climatique sur les écosystèmes et
l?humanité ne seront plus maitrisables et les conséquences seront imprédictibles. Ces objectifs ont
été adoptés par la quasi-totalité des nations3 dans des normes internationales (Accord de Paris
pour le climat, Accord cadre global pour la biodiversité Kunming-Montréal).
Ils sont traduits à l?échelle régionale de l?Union européenne dans le Pacte vert, ce qui leur donne
un caractère normatif. L?ambition de l?atteinte de la neutralité carbone d?ici 2050 impose aux pays
européens la mise en oeuvre d?une transition écologique disposant d?étapes intermédiaires,
notamment 2030 et 2040.
La France a choisi pour la concrétisation de sa transition écologique la mise en place d?une
« planification écologique », s?inscrivant dans la tradition des politiques de planification déployées
dans le pays depuis l?après-guerre.
Un organe spécifique, le Secrétariat Général à la Planification Ecologique (SGPE), a été créé le 7
juillet 2022 pour animer cette stratégie d?action publique baptisée « France Nation Verte ». En
janvier 2023 s?est tenu un premier conseil de planification écologique mobilisant autour du
président de la République et de la Première ministre l?ensemble du gouvernement qui doit
contribuer à l?élaboration du « plan collectif, concret et crédible qui doit aboutir à une stratégie
complète, cohérente et efficace »4 permettant de répondre aux défis de la transition écologique :
planifier pour couvrir tous les sujets du climat à la biodiversité, s?inscrire dans le temps long,
renforcer la coordination interministérielle, crédibiliser les politiques publiques.
Ce plan a été adopté en septembre 2023 5 à l?issue d?un nouveau conseil de planification
écologique autour du président de la République. Conformément aux impulsions données par le
président de la République, la transition écologique doit tout à la fois être basée sur la science et
des résultats objectifs, renforcer notre souveraineté grâce à la décarbonation de notre économie
(ce qui sous-entend la mise en place d?une stratégie industrielle), associer l?ensemble des acteurs,
être juste en ne laissant personne sans solutions, tout en renforçant la protection des citoyens et
de la nature, être déclinée dans les territoires et partagée avec nos partenaires dans le monde.
1 Larousse
2 Limiter la hausse des températures à 1,5°C, vivre en harmonie avec la nature d?ici 2050, respecter les limites
planétaires.
3 Les Etats-Unis d?Amérique ne sont pas parties à la Convention sur la diversité biologique dont découle l?accord
cadre global sur la biodiversité.
4 Discours du 12 juillet 2023 d?E. Borne devant le Conseil nationale de la transition écologique
5 https://www.ecologie.gouv.fr/actualites/planification-ecologique-plan-daction-accelerer-transition-ecologique
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https://www.ecologie.gouv.fr/actualites/planification-ecologique-plan-daction-accelerer-transition-ecologique
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Sa déclinaison territoriale a été enclenchée dans le cadre de conférences des parties (COP) dans
chaque région à compter de l?automne 2023, alors qu?en parallèle des dialogues se sont ouverts
au niveau national avec certaines parties prenantes, notamment les secteurs industriels. La loi de
finances initiale pour 2024 avait prévu 10 milliards d?euros pour le financement du plan. De
nouvelles stratégies sectorielles ont été adoptées pour alimenter le processus global de
planification courant 2024 (Stratégie nationale de la biodiversité en décembre 2023, Plan national
d?adaptation au changement climatique soumis à consultation du public à partir d?octobre 2024,
Stratégie emploi et compétences pour la planification écologique en février puis juillet 2024, Plan
de transformation écologique de l?Etat en mars 2024). Un tableau de bord de la planification
écologique contenant les indicateurs répartis en 9 volets est rendu disponible6 en mars 2024.
L?année 2024 a donc vu les premières mises en oeuvre du plan mais les premières difficultés ont
également été rencontrées. L?enveloppe prévue en loi de finances 2024 a été amputée de 2
Milliards dès février 2024. Certaines stratégies tardent à être finalisées et adoptées. La
compréhension et l?acceptation démocratiques de la démarche de transition écologique demeurent
insuffisantes face à l?ampleur des politiques à déployer et à leurs coûts budgétaires et sociaux.
Il est donc apparu utile de pouvoir s?inspirer d?exemples étrangers pour trouver de nouvelles
approches et confronter les difficultés rencontrées. Une étude de parangonnage a été lancée sous
la tutelle de Barbara POMPILI, en tant qu?ancienne ministre de la transition écologique, avec l?appui
de l?IGEDD. Eu égard à l?ampleur des éléments traités dans le cadre de la planification de la
transition écologique, le choix a été fait de se concentrer sur les pays du G20 et de l?Union
européenne, tout en regardant également quelques exemples de pays avant-gardistes en la
matière.
A l?issue de l?approfondissement de 19 cas de pays, il apparait que la plupart des pays du G20 et
de l?UE ont mis en oeuvre des outils de planification de l?action publique environnementale a minima
en matière de lutte contre le changement climatique, mais rencontrent des difficultés dans leur
déploiement sur le terrain (I). Des exemples inspirants peuvent toutefois être retirés des pays
examinés ce qui permet la formulation de recommandations afin de faire progresser la planification
écologique française dans sa mise en oeuvre jusqu?au dernier kilomètre (II).
6 https://barometre.planification-ecologique.gouv.fr/accueil
PUBLIÉ
https://barometre.planification-ecologique.gouv.fr/accueil
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1 Une mise en place progressive d?outils de planification
de la transition climatique et écologique dans la plupart
des pays du G20 et de l?Union européenne, qui se heurte
à des difficultés de mise en oeuvre
1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique
« La planification est un processus qui fixe (pour un individu, une entreprise, une institution, une
collectivité territoriale ou un État), après études et réflexion prospective, les objectifs à atteindre,
les moyens nécessaires, les étapes de réalisation, les méthodes de suivi de celle-ci ainsi que les
délais nécessaires »7. Elle se traduit le plus souvent dans la production de plans d?action dont la
mise en oeuvre fait l?objet d?un suivi et d?une évaluation. La planification permet la projection dans
un horizon temporel défini (au moins 5-6 ans) de la vision globale d?une action publique. Elle est
partagée avec les parties prenantes dans une perspective d?intérêt général, afin d?assurer le
déploiement de ressources suffisantes autour de priorités définies et dont la mise en oeuvre est
coordonnée entre les différents acteurs8.
Le processus de planification est utilisé par les puissances publiques depuis la Première Guerre
mondiale : la France et l?Allemagne y ont recours dans le cadre de l?effort de guerre. C?est ensuite
l?organisation d?une nouvelle économie en URSS dès 1929 puis la reconstruction après la Seconde
Guerre mondiale qui rendent son usage plus généralisé, par le Royaume-Uni et les Etats-Unis mais
également par la France, sous l?influence de Jean Monnet, convaincu de l?utilité de l?outil et nommé
premier commissaire général au plan en 1946. L?objectif est alors une modernisation rapide de
l?économie française centrée sur les secteurs prioritaires (charbon, acier, électricité, ciment,
transports, machines agricoles) et s?appuyant sur les financements apportés par le plan Marshall
américain. Cette planification vise à faire intervenir l?Etat par de nouvelles modalités d?intervention
économique pour faire face aux insuffisances du marché. Elle lui permet d?associer l?ensemble des
parties prenantes à une vision politique de croissance économique.
Le contexte de l?après-guerre est certes spécifique, l?Etat étant en capacité de faire effet de levier
pour orienter et coordonner la production nationale et optimiser l?usage des ressources. La France
n?est plus aujourd?hui dans une situation similaire : elle est insérée à la fois dans une économie
mondialisée s?appuyant sur des processus de libéralisation des échanges et dans une Union
européenne qui a fait sienne cette orientation libérale. Les processus de planification ont donc été
fortement remis en cause à la fin du XXème siècle, ne parvenant plus à associer l?ensemble des
acteurs, à faire remonter des indicateurs chiffrés fiables dans un contexte de place croissante des
échanges commerciaux internationaux, à imposer l?objectif à atteindre de croissance comme
modèle de société et les Etats ne disposant plus des outils de politiques publiques susceptibles
d?influencer les marchés. En parallèle, le modèle planificateur soviétique a été très largement
considéré comme ayant échoué avec la fin de l?URSS.
Pourtant, à la suite notamment de la crise économique internationale provoquée par l?épidémie de
Covid19 en 2020-2021, le concept de planification a fait son retour dans la plupart des pays du
monde. Certes, le plus souvent, l?objectif de cette idée de planification était, comme en temps de
guerre, de pallier la pénurie en produits essentiels consécutive à la perturbation des échanges
internationaux. Face à l?incapacité du marché à apporter une réponse adaptée, la planification est
apparue à nouveau comme une solution. Des pays pratiquant toujours la planification, comme la
Chine ou Singapour, sont apparus comme en capacité de s?adapter plus rapidement, réhabilitant
7 Pierre Merlin et Françoise Choay, « Dictionnaire de l'urbanisme et de l'aménagement », Paris, PUF, 2010
8 France stratégie ? « La planification : idée d?hier ou piste pour demain ? », 17 Juin 2020, Par Daniel Agacinski,
Julien Bueb, Anne Faure, Julien Fosse, Hélène Garner, Boris Le Hir, Gautier Maigne et Mathilde Viennot
https://www.strategie.gouv.fr/publications/la-planification-idee-dhier-ou-piste-pour-demain
PUBLIÉ
https://www.strategie.gouv.fr/publications/la-planification-idee-dhier-ou-piste-pour-demain
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les processus de planification. De plus, la planification sectorielle est restée largement utilisée
comme outil de politique publique, souvent sous la forme de « stratégies » disposant d?un
échéancier de 5 ou 6 ans.
Mais surtout, le concept de planification prend une nouvelle dimension dans le cadre de la
nécessaire réponse à apporter à la crise écologique que rencontre l?humanité. Le concept de
« planification écologique », inspiré de la planification spatiale comme un processus qui vise à
intégrer la préservation et la restauration des écosystèmes naturels dans les décisions de
développement humain9, semble répondre au besoin d?outils de mise en oeuvre de la transition
écologique. Des objectifs internationaux de réduction des émissions des gaz à effet de serre ou de
reconquête de la biodiversité ont été définis à horizon 2030 et 2050 et doivent se décliner dans
des politiques nationales sous la forme de contributions nationales déterminées (NDC?s)10 pour le
climat ou de stratégies nationales et de plans d?action biodiversité (NBSAP?s)11 qui ne sont autres
que des outils de « planification » ou des « stratégies ».
Pour l?atteinte des objectifs climatiques ou de biodiversité, les outils offerts par les processus de
planification apparaissent de fait particulièrement utiles. La planification permet en effet :
- d?agir sur tous les fronts de façon systémique et globale : climat, adaptation, ressources,
biodiversité, santé ;
- de définir des politiques et des trajectoires crédibles pour atteindre les objectifs fixés,
dans chaque secteur concerné : industrie, énergie, transport, agriculture, aires protégées,
etc. ;
- de disposer des outils nécessaires au déploiement des politiques publiques et des actions
à mettre en oeuvre, notamment des financements adaptés ;
- d?associer l?ensemble des parties prenantes à la définition des politiques et des outils
pour s?assurer de leur application à tous les échelons y compris géographiques ;
- de permettre un suivi, une évaluation en continu, permettant la réorientation des
politiques lorsque cela est nécessaire.
La planification avait certes été jusqu?alors un outil servant la production et la croissance
économique, alors qu?elle devrait désormais organiser la décroissance de l?utilisation des
ressources naturelles. Néanmoins, l?outil planification permet d?organiser la réponse à apporter aux
enjeux de la transition écologique.
La planification écologique telle qu?examinée par ce rapport dans les pays du G20 et de l?Union
européenne, ainsi que dans des pays pionniers, apparaît comme un outil de pilotage susceptible
de répondre à l?ensemble des différents volets d?une démarche de transition écologique : le narratif
politique et sociétal qui porte la transition écologique, le cadre normatif mis en place pour définir et
décliner la stratégie de transition, l?association des acteurs publics et privés impliqués dans le projet,
les outils de consultation de la société civile dans la prise de décision et la déclinaison des
politiques de transition, les outils d?évaluation de la planification et les ressources financières
affectées à la planification.
1.2 Les pays pionniers de la planification écologique
Des analyses menées dans le cadre de cette étude de parangonnage, il ressort que les pays qui
9 ?Design with nature? - Ian Lennox McHARG, 1969
10 En anglais ?Nationally Determined Contributions? dans le cadre de la Convention cadre des Nations Unies sur
les changements climatiques
11 En anglais ?National Biodiversity Strategies and Action Plan? dans le cadre de la Convention sur la diversité
biologique
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 14/60
disposent d?une tradition de planification de l?action de l?Etat, notamment économique, ont
également mis en place une planification de leur transition écologique, souvent bien avant la crise
sanitaire mondiale.
Depuis 1953, l?Etat chinois se fixe de grands objectifs en matière de développement social et
économique dans le cadre de cycles quinquennaux de planification stratégique. Le plan
quinquennal présente une vision spatialisée du développement et fixe les grandes orientations et
priorités des politiques sectorielles. Il prévoit également leur mise en oeuvre, leur suivi et leur
évaluation. Le concept de « civilisation écologique », qui constitue l?un des 5 piliers de la
construction d?un socialisme aux caractéristiques chinoises, apparait lors de l?adoption du 11ème
plan (2005-2010). Pour le Président Xi Jinping, « s?avancer vers une nouvelle ère de la civilisation
écologique et construire une belle Chine font partie importante de la réalisation du rêve chinois du
grand renouveau de la nation chinoise ». La transition écologique figure ainsi au coeur du grand
récit de renaissance nationale porté par le président et figure dans la constitution depuis 2012.
En Indonésie, le ministère chargé de la planification - le BAPPENAS - pilote un plan à long terme
le RPJPN 12 (20 ans) et un plan à moyen terme le RPJMN 13 (5 ans) dont les objectifs,
principalement tournés vers le développement économique, sont désormais teintés de durabilité
environnementale. Le plan de réduction des émissions, le RAN-GRK, et ses déclinaisons dans les
provinces les RAD-GRK, qui existaient depuis 2011, ont été révisés et intégrés dans les plans de
développement globaux du pays en 2017. Le RPJPN « Indonésie Dorée 2045 », adopté en janvier
2024, prévoit l?atteinte du « zéro émissions nettes ».
Singapour est également un pays qui planifie intégralement son évolution, de façon très détaillée
eu égard à sa superficie. Confronté aux risques découlant du changement climatique et de la
pauvreté de ses ressources naturelles, sa planification est orientée vers une transition écologique
lui permettant de s?adapter à la crise environnementale. La politique de l?eau menée par Singapour
depuis son indépendance (1965) est désormais en passe de lui garantir son autonomie vis-à-vis
de son approvisionnement par la Malaisie dont le pays était totalement dépendant initialement.
L?ampleur des infrastructures réalisées (barrages, sites de stockage, stockage souterrain des eaux
de pluie, usines de traitement) s?est intégrée dans le reste de la planification des infrastructures
urbaines, mais également naturelles et économiques.
D?autres pays ont mis en place, parfois depuis les années 1970, des démarches de planification
servant des objectifs exclusivement environnementaux, sans forcément être intégrés dans une
politique de développement globale du pays. La politique de reconquête forestière du Costa Rica,
déployée depuis le milieu des années 1980, constitue par exemple une claire action de planification
inscrite sur 30 ans.
On citera enfin le cas particulier de la ville de Portland aux Etats-Unis qui a commencé sa démarche
de planification spatiale dans les années 1970 par la limitation de son étalement urbain afin de
préserver la nature et les espaces agricoles l?environnant. Cette planification de « ceinture verte »
à court terme (5 ans) et long terme (d?ici à 2040) a ensuite entrainé l?ensemble de la planification
environnementale mise en place par la ville qui fait partie des premières au monde à disposer d?une
stratégie climat (1993) et décline tous les sujets de la transition écologique dans sa planification.
1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique
1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique
Il ressort de l?examen réalisée par cette étude sur plus de 20 pays (dont 19 font l?objet de fiches en
12 Rencana Pembangunan Jangka Panjang Nasional = Plan national de développement à long terme
13 Rencana Pembangunan Jangka Menengah Nasional = Plan national de développement à moyen terme (loi
n°17/2007)
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 15/60
annexe) que presque tous ont mis en place une stratégie ou planification pour décliner leur politique
climatique.
Cette démarche découle notamment du besoin d?atteindre des objectifs cadrés à l?échelon
supranational (suites de l?accord de Paris sur le climat), dans un calendrier court (rapports
bisannuels de transparence et des inventaires d?émissions de GES à partir de 2024, bilan mondial
tous les 5 ans). L?usage de « stratégies » ou de « plans », outils administratifs de base dans la
déclinaison des politiques publiques, permet aux pays de rendre compte de la mise en oeuvre de
leur engagement de réduction de leurs émissions, qui figure dans leur Contribution Déterminée au
niveau National (CDN) transmise au secrétariat de l?UNFCCC. Ces outils administratifs facilitent le
respect des obligations de rapportage auprès des organisations internationales qui sont utilisées
dans les comparaisons entre pairs.
La première étape est donc la traduction des obligations internationales relatives à la réduction des
émissions de gaz à effet de serre dans le cadre juridique national. Quels que soient les objectifs
assignés, les pays ont tous pris des engagements de réduction des émissions, les ont déclinés par
secteurs d?émission (au moins pour le secteur énergétique), voire ont pris des engagements
supérieurs aux attentes tels que l?atteinte de la neutralité carbone à échéance 2050 ou au-delà.
Les cadres juridiques correspondants existent partout.
La démarche de planification oblige à mesurer : les pays ont donc mis en place des systèmes de
collecte des données des émissions de gaz à effet de serre, des indicateurs, voire des démarches
d?évaluation des résultats des politiques.
Ces outils de planification climatique s?accompagnent la plupart du temps de la mise en place d?un
organe de coordination ou de pilotage. Les pays traditionnellement enclins à la planification
disposent d?une organisation pilotant la démarche de planification qui peut également prendre en
charge la planification écologique. Ainsi, le BAPPENAS (ministère de la planification) en Indonésie
apparait comme le seul organe en charge de toute la coordination. Ses ministres se voient attribuer
des spécialisations, qui les placent comme coordinateurs des ministères techniques, qui sont eux
responsables de la mise en oeuvre de la partie thématique du plan qui les concerne. A la suite de
l?intégration de la transition écologique au sein des autres objectifs de développement économique
et social, les ministres du BAPPENAS se retrouvent également pilotes de celle-ci. Le pilotage de
la planification peut également être complété par un organe de coordination sur la politique
climatique, principalement sur sa partie atténuation. En Chine, le pilotage de la politique climat
reste entre les mains de la Commission nationale de la réforme et du développement (NDRC) qui
est en charge de la planification, mais le conseil des affaires d?Etat a mis en place une coordination
interministérielle avec le « Groupe de travail national sur la réponse au changement climatique, à
l?efficacité énergétique et à la réduction des émissions », supervisé par le premier ministre et a
renforcé le pouvoir de coordination du Ministère de l?environnement rebaptisé Ministère de
l?écologie et de l?environnement et auquel la lutte contre le changement climatique a été confiée. A
Singapour, le pilotage de la transition climatique est fait au sein du Bureau de durabilité du secteur
public (PSSO) et par le Secrétariat national au changement climatique (NCCS).
Néanmoins, il apparait que dans la plupart des pays, le pilotage de la politique climatique est réalisé
par le ministère en charge des questions climatiques et/ou par une organisation relativement
informelle de coordination de nature plus politique qu?administrative, visant en fait au renforcement
de l?interministérialité rendue nécessaire par la transversalité des sujets climatiques, même en
matière d?atténuation.
Cette coordination devient donc un enjeu en soi. Parmi la plupart des pays développés dont le
modèle est proche, l?exemple du Royaume-Uni en est une bonne illustration. C?est le ministère en
charge de la sécurité énergétique et de la neutralité climatique (Department for energy security and
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 16/60
net zero) qui est responsable et chef de file de la mise en oeuvre et du suivi de la stratégie, tandis
que chaque ministère reste en charge de la mise en oeuvre des actions qui lui reviennent dans ce
cadre. Des réunions entre les directeurs généraux concernés sont régulièrement organisées tandis
que les équipes du DESNZ en charge de la coordination s?entretiennent fréquemment avec les
différents services pour s?assurer de la bonne avancée des travaux. Une unité de pilotage
interministériel a été établie dès 2021 pour le pilotage de l?atteinte de la neutralité carbone : la
« Prime Minister delivery unit ». On retrouve une même organisation aux Etats-Unis sous la
présidence Biden avec le « Climate policy office », piloté directement par la Maison Blanche qui
réalise l?interministérialisation des politiques climat. Le même mécanisme existe en Allemagne
(pilotage par le ministère de l?économie et interministérialisation par un « cabinet climat »), en
Belgique (« task force fédérale énergie et climat »), en Finlande (groupe de travail interministériel
chargé de coordonner la politique climatique et énergétique), aux Pays-Bas.
Au Japon, la stratégie de transformation verte « GX », adoptée le 10 février 2023, est pilotée par
un « comité exécutif de la politique de transformation verte » présidé par le Premier ministre, même
si le METI (Ministère de l?économie, du commerce et de l?industrie) qui pilote l?action publique reste
sa cheville ouvrière.
Dans d?autres pays, comme l?Irlande ou la Suède, il n?existe pas de structure en charge de
l?interministérialité. Cette situation se retrouve également en Inde où le Ministère de
l?environnement, de la forêt et du changement climatique (MoEFCC) a la responsabilité de la
coordination interministérielle sans en avoir les moyens.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 17/60
Outils de planification
Pays Plan global Plan climat Autres stratégies Organe de coordination
Afrique du
sud
Plan de développement pour 2030 (2012) Plan climatique NCCRPWP (2018) Stratégie nationale d?expansion des aires
protégées (2008)
Stratégie et Plan d?Action National pour la
Biodiversité (2015)
Stratégie d?adaptation au changement climatique
2020-2030 (2019)
Commission présidentielle du
climat (PCC) et son secrétariat
Allemagne Non Programme de protection climatique (2023) + loi
fédérale pour la protection du climat (2024)
Stratégie de développement durable (2021)
Loi sur l?adaptation au changement climatique
(2022)
Programme d?action fédéral sur les solutions
fondées sur la nature en faveur du climat et de la
biodiversité (2023)
Stratégie nationale sur l?eau (2023)
Non sauf Comité des
secrétaires d?Etat pour le
développement durable
Belgique Non Stratégie climatique à horizon 2050 (2020) Plan fédéral de développement durable (2021)
Plan d?action fédéral pour une économie
circulaire (2021)
Commission nationale climat
Brésil Plan de transformation écologique du Brésil
(2023)
Politique nationale sur le changement climatique
et ses 5 plans (2009)
Plan climat 2024-2035 (2024)
Politique nationale d?adaptation (2016)
Comité interministériel sur le
changement climatique
Canada Cadre pancanadien sur la croissance propre
et les changements climatiques (2016)
Plan de réduction des émissions pour 2030 Plan d'action pour l'adaptation du gouvernement
du Canada (PAAGC)
Non sauf Conseil canadien
des ministres de
l?environnement
Chine 14ème plan quinquennal national de
développement économique et social (2021-
2025)
Plans climat 1+N Plans quinquennaux sectoriels
Plan stratégique de conservation de la
biodiversité (2011)
Commission nationale de la
réforme et du développement
(NDRC)
Groupe de travail national sur
la réponse au changement
climatique, à l?efficacité
énergétique et à la réduction
des émissions
Commission nationale pour la
conservation de la biodiversité
Costa-Rica Non Plan national de décarbonation 2018-2050
(2018)
Stratégie nationale de la biodiversité 2026-2025
Cadre stratégique et règlementaire pour une
gestion intégrée des déchets
Plan national d?adaptation 2022-2026 (2022)
Non
Danemark Non Loi cadre sur le climat (2020) + feuille de route
pour un Danemark vert (24 mesures à présenter
d?ici 2025) + Plan climat annuel
Plan d?action national pour l?économie circulaire
pour la période 2020-2032 (2020)
Plan forestier
Comité gouvernemental
permanent et spécialement
compétent en matière de
transition verte
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 18/60
Etats-Unis Non Stratégie de long terme (horizon 2050) +
National climate strategy (horizon 2030)
Cadre National de résilience climatique Climate Policy Office (CPO)
Finlande Non Feuille de route gouvernementale pour une
transition juste vers une économie neutre en
carbone (2020)
Loi climat (2022)
Plan climatique à long terme et à moyen terme
Stratégie nationale pour le climat et l?énergie
(2022)
Stratégie sur le développement durable 2022?
2030
Plan d?adaptation au changement climatique
Plan climatique pour le secteur de l?utilisation
des terres
Groupe de travail
interministériel chargé de
coordonner la politique
climatique et énergétique
Inde The National Environment Policy (2008) Stratégie de long terme de l?Inde pour l?atteinte
de la neutralité carbone à horizon 2070
National Action Plan for Climate Change
(NAPCC) (2008)
Programme FAME (Faster Adoption and
Manufacturing of Hybrid and Electric Vehicles)
MISHTI (Mangrove Initiative for Shoreline
Habitats & Tangible Incomes)
LiFE 21-Day Challenge
Conseil sur le changement
climatique (PMCCC)
Indonésie Plan de développement national à long
terme 2025-2045 RPJPN
Plan de développement national à moyen
terme RPJMN
RAN-GRK plan d?action de la réduction des
émissions
Plan stratégique sectoriel ministériel (Renstra) Ministère de la planification du
développement national
BAPPENAS
Irlande Plan national de développement (2021-
2030)
Loi d?action climatique et développement bas
carbone (2021)
Cadre national d?adaptation (2024) Conseil consultatif sur le
changement climatique
Japon Politique de la transformation verte (GX)
(2023)
22 feuilles de routes sectorielles Comité exécutif de la GX
Pays-Bas Non Accord national sur le climat entre le
gouvernement, les acteurs économiques et la
société civile (2019)
Ministère du climat
Roumanie Plan national de relance et de résilience
(2021)
Non Conseiller d?Etat
Royaume-
Uni
Non Stratégie net zéro (2023)
Plan « Powering up Britain? (2023)
Environment improvement plan Prime Minister?s Delivery Unit
Rwanda Stratégie nationale de développement vision
2050 (2020)
Stratégie nationale de transformation 2017-
2024
Stratégie de Croissance Verte et de Résilience
Climatique (2022) + Feuilles de route
sectorielles
Politique et stratégie nationale pour l?eau et
l?assainissement (2010)
Stratégie nationale et plan biodiversité (NBSAP
II) (2016-2020)
Autorité de gestion de
l?environnement du Rwanda
Singapour Plan de long terme (horizon 50 ans)
Master plan (horizon 10-15 ans)
Singapore Green Plan 2030
Urban Redevelopment
Authority (URA)
Bureau de Durabilité du
Secteur Public (PSSO)
Secrétariat national au
changement climatique
(NCCS).
Suède Non Loi climat (2017) + loi du cadre climatique (2017)
+ Plan d?actions climatiques tous les 4 ans
Ministère de l?environnement
Portland Schémas directeur Région 2040 (2002) +
« Urban growth report »
Portland Global Warming Reduction Strategy
(1993)
Bureau du planning et de la
soutenabilité
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 19/60
1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale
On constate néanmoins que peu de pays ont une démarche totalement englobante face à tous les
enjeux de la transition : soit la démarche de planification est liée à une vision du développement,
au sein de laquelle la planification climatique, voire écologique, s?insère, soit la démarche de
planification est limitée aux enjeux climatiques. Une large part des démarches examinées à
l?occasion de ce rapport sont même limitées aux enjeux d?atténuation en raison des obligations de
rapportage liées à la CDN, de leur plus grande acceptabilité par le marché et les acteurs
économiques (développement du secteur énergétique) et à la disponibilité de financements
internationaux consacrés au climat.
L?adaptation est encore trop souvent oubliée même si le sujet semble évoluer dans la bonne
direction. Au moins 8 plans d?adaptation au changement climatique ont été identifiés.
De même, la mise en oeuvre de l?accord de Kunming-Montréal sur la biodiversité semble pousser
les pays au développement de politiques de protection et de restauration de la biodiversité. Mais
la grande difficulté de la plupart des pays à publier leur nouvelle « SPANB » (Stratégies et Plans
d?Action Nationaux pour la Biodiversité)14 lors de la COP16 de la Convention sur la diversité
biologique en Colombie en octobre dernier illustre la difficulté à intégrer des politiques de
conservation et de restauration de la biodiversité dans l?ensemble des politiques publiques, y
compris dans les politiques de transition écologique.
Les pays le plus souvent additionnent les stratégies sectorielles (DE, ZA FI, CR), démontrant ainsi
leur volonté de couvrir également d?autres enjeux que ceux directement liés à l?atténuation, mais il
n?existe pas de liens apparents entre ces différentes stratégies. Les documents sont adoptés dans
des calendriers différents. Les ministères en charge ne sont pas les mêmes et, comme vu
précédemment, il n?existe souvent pas d?organe de coordination globale pour la transition
écologique. Cela comporte le risque de la conduite en silo de politiques qui pourtant pourraient se
répondre : la protection de la biodiversité et des espaces naturels permet notamment l?atténuation
des GES, l?adaptation couvre l?ensemble des sujets de même que la politique de l?eau, ou
l?aménagement urbain.
Il apparait que les pays qui pratiquent la planification de façon globale réussissent mieux à
interconnecter leurs politiques entre elles. En témoigne la tradition planificatrice de Singapour qui
a mené de front une politique ambitieuse d?autonomie en matière d?eau avec son développement
industriel : l?eau recyclée est notamment utilisée par l?industrie des semi-conducteurs qui finance
très largement le surcoût de la production d?eau. La Chine entend aussi mener de front tous les
chantiers de la transition.
Il semble également que cette nécessité de disposer d?une approche globale progresse. Ainsi, le
nouveau plan de transformation écologique du Brésil, introduit en 2023, agit à la fois sur les axes
financiers, fiscaux, règlementaires, administratifs et opérationnels. Il cible la finance durable,
l?innovation dans le secteur productif, la bioéconomie, la transition énergétique, l?économie
circulaire et les infrastructures vertes et résilientes. Il prévoit une articulation avec les plans climat
et adaptation du pays. Il est piloté par le Ministère des finances au plan technique mais également
par un comité interministériel sur le changement climatique et la croissance verte, à vocation
transversale. Même s?il est trop tôt pour savoir si cet effort de planification sera couronné de succès,
la démarche montre la prise de conscience sur cet enjeu de transversalité. L?Afrique du sud dispose
également d?une Commission présidentielle pour le climat, couvrant des enjeux dépassant
clairement l?atténuation.
Les pays européens mènent également plusieurs chantiers de front. Le « Pacte vert pour
14 85% des Etats n?auraient pas soumis leur SPANB avant la COP16 d?octobre 2024
http://www.carbonbrief.org/cop16-countries-miss-un-deadline-to-submit-nature-pledges/
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http://www.carbonbrief.org/cop16-countries-miss-un-deadline-to-submit-nature-pledges/
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 20/60
l'Europe » (« Green Deal »), lancé par la Commission européenne en 2019, visait cet objectif
d?engager l'UE sur la voie de la transition écologique, notamment dans l'objectif d'atteindre la
neutralité carbone à l'horizon 2050 en prenant une approche globale et transversale, dans laquelle
tous les domaines d'action pertinents contribuent à l'objectif climatique ultime. Le train de mesures
comprend des initiatives couvrant le climat, l'environnement, l'énergie, les transports, l'industrie,
l'agriculture et la finance durable, qui sont tous étroitement liés. Au sein des pays européens, le
Danemark accompagne sa loi climat d?accords environnementaux, déclinaisons opérationnelles et
majoritairement sectorielles pour atteindre ses objectifs climatiques, mais qui couvrent tous les
secteurs d?activité : logement, traitement des déchets et économie circulaire, transports, agriculture,
fiscalité. Le gouvernement a également pris des engagements en matière forestière, de biodiversité
marine, d?eau. L?organe de coordination interministériel voit son champ d?action s?élargir au-delà
du climat : le « Comité gouvernemental permanent et spécialement compétent en matière de
transition verte », créé en 2019, présidé par le ministre du Climat, de l?Énergie et de
l?Approvisionnement devient en 2023 le « Comité vert », présidé par le ministre des Finances.
Certains pays, comme la Suède, l?Allemagne ou la Belgique, utilisent le cadre du déploiement de
l?Agenda 2030 pour la mise en oeuvre des Objectifs de développement durable (ODD) pour le
pilotage de leur politique de transition écologique et leur coordination intergouvernementale. Ce
dernier n?a le plus souvent pas d?aspect contraignant.
On constate donc, même parmi les pays européens, le maintien de politiques qui manquent
d?interconnections. Ainsi les Pays-Bas viennent de relancer une politique de planification territoriale,
qui va intégrer les enjeux biodiversité comme les enjeux de risque inondation, mais butent sur les
enjeux de la transformation agricole. Le manque de structures de coordination globale, la plupart
étant seulement chargées de la politique climatique et des politiques en silo, y compris pour les
enjeux de financement, illustre cette situation. En Allemagne, le choix d?individualiser pour chaque
ministère (et donc secteur) l?atteinte des objectifs de réduction des émissions de GES a été remis
en cause suite à l?incapacité du Ministère des transports de respecter ses engagements.
Au Costa-Rica, la planification de la politique forestière n?a pas été accompagnée de politiques
similaires dans d?autres secteurs de l?activité. Le modèle mis en place est remis en cause du fait
notamment d?insuffisances dans l?accès à l?eau de la population ou de la mise en place d?une
politique des transports adaptée aux besoins.
1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs
de transparence
Dans ce contexte de mise en oeuvre de politiques complexes, l?outil de planification sert également
des objectifs de transparence et d?information sur l?action gouvernementale afin de répondre à des
attentes sociétales fortes. Ainsi, la planification climatique ou écologique aide à répondre aux
procès climatiques15 et aux manifestations de la jeunesse face au changement climatique dans les
pays de l?UE, à la demande à vivre dans un environnement « sain »/qui respecte la santé (Chine,
Inde, Singapour, pays du nord de l?UE), à celle de justice sociale et de lutte contre la corruption
(Chine, Indonésie, Brésil, Afrique du sud, Rwanda).
Aux Pays-Bas, la décision de justice qui condamne l?Etat néerlandais pour insuffisance d?action
climatique a conduit à la mise en place d?un processus de mise en oeuvre de la politique climatique
extrêmement cadré, avec des évaluations annuelles réalisées par un organisme indépendant -
l?office de planification écologique (PBL)16 ? qui imposent une réorientation des politiques publiques
pour respecter la trajectoire d?atténuation des émissions de GES. Le procès climatique en Irlande
a permis la réorientation de la politique du pays, le Parlement irlandais devenant la deuxième
assemblée du monde à déclarer l?urgence climatique. Au Brésil, le gouvernement a créé le groupe
15 Procès climatiques aux Pays-Bas, en Irlande, en Finlande, en Suède, en Belgique, en Allemagne et en France.
16 Planbureau voor de Leefomgeving
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 21/60
« AGU recupera » qui a pour objectif d?adopter des mesures judiciaires de protection des biomes
brésiliens. L?AGU mène des actions en justice contre les auteurs de déforestation illégale et
d?incendies volontaires et demande comme compensation financière une valeur équivalente à la
quantité de gaz à effet de serre émis, calculée selon une méthode de l?OCDE (60 euros par tonne
de GES en juillet 2024). 89 actions de ce type sont en cours au Brésil, dont les compensations
éventuellement obtenues se chiffrent en millions de reals. L'administration Biden aux Etats-Unis a
lancé l'initiative Justice40, introduite par l'« Executive Order » 14008 puis 14096 sur la justice
environnementale. Cette initiative vise à ce que 40% des investissements fédéraux dans le climat,
les énergies propres, le logement durable, etc. bénéficient aux communautés défavorisées, sous-
financées et particulièrement exposées à la pollution. En Inde, le « National Green Tribunal », créé
en vertu du National Green Tribunal Act en 2010, statue dans les 6 mois qui suivent le dépôt des
demandes et appels et a pour rôle d?accélérer la justice en matière d?environnement.
Afin d?assurer la transparence de ces politiques publiques, des « parlements citoyens » chargés à
la fois d?associer les citoyens à la prise de décision politique et d?être des outils de vulgarisation
des enjeux complexes de la transition climatique et écologique ont tenté de rapprocher l?élaboration
des planifications de la société. L?Irlande a été pionnière : en 2018, une assemblée a travaillé sur
des questions climatiques, recommandant de mettre le changement climatique au coeur des
politiques nationales. Ces recommandations ont conduit à des actions concrètes, telles que le Plan
d'action pour le climat de 2019. Les « Conversations climatiques » (« Climate Conversations ») de
2023, véritable dialogue national ayant impliqué des milliers de participants à travers des ateliers
et des questionnaires en ligne, a permis au gouvernement de mieux comprendre les perceptions
des citoyens sur les enjeux climatiques et d'adapter ses politiques en conséquence. Aux Pays-Bas,
le « Forum citoyen sur la politique climatique et énergétique », créé en 2022, rassemble un
échantillon représentatif de citoyens pour formuler des recommandations sur les politiques
climatiques et énergétiques. Inspiré de la « Convention citoyenne pour le climat » française elle-
même appuyée sur l?exemple irlandais, ce forum est doté d?un budget de 5 à 6 millions d?euros et
vise à impliquer activement la société civile dans les décisions majeures. Le Danemark a
également mis en place un tel Parlement citoyen en 2020, atour de 19 thématiques dont certaines
originales comme l?éducation populaire. Singapour a mis en place des consultations publiques
inclusives, telles que la campagne « A Space for Our Dreams », qui a mobilisé 15 000 participants
pour définir les priorités à long terme de la ville. Ces consultations prennent des formes variées,
notamment des dialogues interactifs, des concours artistiques, et des expositions ; elles permettent
de s?assurer du soutien de la population à la planification écologique. L?enjeu pour les pouvoirs
publics à la suite de ces associations des citoyens à la prise de décision est de traduire
effectivement dans les règles ces propositions, sans quoi la promesse de l?association à la décision
sera considérée comme factice.
Même si elle découle de motivations économiques pour stimuler la captation par l?industrie chinoise
des nouvelles technologies du climat, c?est également sous la pression de son opinion publique,
qui réagissait face à la forte dégradation de l?environnement et notamment de la pollution de l?air
et des eaux, et au non-respect des règles par des autorités locales ou des dirigeants des
entreprises d?Etat, que le parti communiste chinois a enclenché une politique environnementale
plus stricte, et dont découle in fine la « civilisation écologique ». L?Indonésie déploie également sa
planification pour lutter contre la corruption, notamment au sein des échelons les plus déconcentrés.
Au Brésil comme en Afrique du sud, c?est la promesse d?une « transition juste », visant à corriger
les écarts de revenus au sein de la société, qui légitime la planification climatique. Le Rwanda
appuie également sa planification écologique sur l?enjeu de réconciliation au sein de sa population.
La planification permet également d?adapter les politiques à mener aux enjeux comme en témoigne
celle de la ville de Portland aux Etats-Unis. D?abord planification urbaine pour limiter la croissance
de la ville sur sa « ceinture verte », la planification écologique de Portland a ensuite répondu aux
enjeux de respect de ses obligations climatiques, de desserte en matière de transport et s?attaque
aujourd?hui aux déséquilibres sociaux constatés dans l?implantation territoriale des minorités au
sein de la ville.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 22/60
1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en
oeuvre
1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs
objectifs de transition
Accorder un aspect contraignant aux objectifs de transition écologique bute sur différents obstacles.
Certains pays n?ont pas intégré de dimension véritablement contraignante dans leurs objectifs
climatiques. Les stratégies nationales se limitent alors à des orientations politiques ou à des
engagements déclaratifs, sans mécanismes coercitifs. Ainsi, la « Stratégie de Long Terme » ("Long
Term Strategy" - LTS) des États-Unis est présentée comme une série de scénarios possibles
("pathways to net-zero by 2050") et non comme un cadre législatif obligatoire. Cette approche
reflète une vision basée sur le recours à des incitations économiques et technologiques plutôt qu?à
des obligations juridiques. Les législations climatiques fédérales aux États-Unis sont sujettes à des
renversements fréquents en raison de la polarisation politique. Même sous des administrations
démocrates, les mesures contraignantes peinent à obtenir un soutien suffisant au Congrès. Cette
instabilité complique l'établissement d'un cadre contraignant durable. L'EPA 17 (Agence de
protection de l'environnement) a mis en place des normes d'émissions, mais leur efficacité dépend
souvent de la jurisprudence de la Cour suprême, qui peut remettre en question l'autorité des
agences fédérales, notamment sur les questions environnementales.
D?autres pays imposent des obligations légales, mais qui ne sont pas pour autant respectées.
Ainsi, le cadre européen impose des objectifs contraignants aux Etats-membres, déclinés pour
chacun d?entre eux. La loi européenne sur le climat impose une réduction d?au moins 55 % des
émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 et la plupart des Etats-membres l?ont traduite dans leur
législation nationale. Outre le cas néerlandais évoqué précédemment, la Finlande a adopté une loi
climat ("Climate Act") qui fixe des objectifs contraignants, notamment la neutralité carbone d'ici
2035. Cette loi inclut un suivi régulier avec des rapports d?étape et impose une révision des
politiques pour aligner les résultats avec les objectifs. De même, en Suède, le cadre climatique
national s'appuie sur la "Loi climat" de 2017, qui fixe des objectifs contraignants de réduction des
émissions. Un plan d'action quadriennal est élaboré après chaque élection pour assurer une mise
en oeuvre concrète des mesures, garantissant un suivi strict des objectifs intermédiaires. Le
Danemark a introduit législativement un double objectif contraignant de réduction de ses émissions
de GES allant même au-delà des objectifs européens (neutralité carbone en 2045, baisse des
émissions de 110%). La loi climat au Royaume-Uni, adoptée dès 2008, fixe un objectif à long terme
en termes d'émissions, ponctué de budgets carbone de 5 ans. De même, au Canada, la loi sur la
responsabilité en matière de neutralité carbone oblige le gouvernement à fixer des cibles
quinquennales et à rendre compte régulièrement de ses progrès.
Cependant, l?absence de sanctions en cas de non-atteinte des objectifs peut limiter l?impact réel
de ce cadre juridique. C?est le cas au Canada ou en Belgique où le Plan national énergie-climat
fixe des objectifs ambitieux à l?horizon 2030, mais qui ne sont pas toujours intégrés dans des
dispositifs législatifs coercitifs aux niveaux des provinces. Cette lacune se traduit par des retards
ou des incohérences dans la mise en oeuvre des mesures prévues. Cette approche illustre la
tension entre ambition et contrainte effective. La nécessité aux Pays-Bas que la justice condamne
le gouvernement démontre aussi la fragilité de ce modèle. En Suède et en Finlande, les nouveaux
gouvernements en place ne garantissent pas le respect des engagements pris par leurs
prédécesseurs.
La difficulté de conserver un aspect contraignant pour ces stratégies découle notamment du besoin
de les inscrire dans le temps long, en décalage avec les contraintes électorales dans les
17 Environmental Protection Agency
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 23/60
démocraties et avec le calendrier budgétaire qui est, lui, annuel. Beaucoup de
stratégies/planifications sont limitées dans leurs aspects contraignants à l?échéance 2030 (UE,
Belgique, Inde, Brésil, Japon, Afrique du sud, Etats-Unis) ou à des durées de 5-6 ans, et les
planifications allant au-delà sont souvent peu précises et non budgétées. Ce décalage entre le
court terme de l?action politique et l?annualité budgétaire d?une part, et le temps long de la
planification d?autre part, conduit à l?absence d?objectifs réellement contraignants. Il n?a pas été
possible de trouver des références de planification budgétaire étatique de la transition écologique.
L?aspect contraignant des enjeux de transition se heurte également à la difficulté à traduire au plus
près des territoires les obligations découlant de la planification : peu de pays rendent obligatoires
les cibles climatiques pour leurs échelons territoriaux, à l?exception notamment de la Chine où les
objectifs nationaux de réduction des émissions sont traduits en cibles chiffrées et obligatoires pour
les gouvernements locaux. Ces derniers sont évalués sur leur performance, et des sanctions
administratives peuvent être appliquées en cas de non-respect. Ce modèle centralisé renforce
l?autorité de l?État mais peut réduire l?adaptabilité locale.
On note néanmoins l?auto-saisine d?obligations de transition écologique par des entités sub-
nationales. Aux Etats-Unis, les États fédérés ont une grande autonomie en matière de politique
environnementale, ce qui conduit à des disparités importantes dans la mise en oeuvre. Par exemple,
la Californie a adopté des normes ambitieuses, la ville de Portland également, même si ces
initiatives ne remplacent pas un cadre national cohérent et contraignant. Des Länder allemands se
sont également autosaisis d?objectifs en matière de neutralité carbone (2040 pour la Bavière, sortie
du charbon d?ici 2038 pour la Rhénanie-du-Nord-Westphalie, réduction de 90 % des émissions de
GES d'ici 2040 pour le Bade-Wurtenberg). Stockholm et Göteborg en Suède visent des objectifs
climatiques avancés, comme la neutralité carbone avant 2030. Des villes sud-africaines ont fait de
même. Ces engagements des collectivités souffrent néanmoins des mêmes risques de non atteinte
que les échelons nationaux.
1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de
l?engagement citoyen
La mise en oeuvre des stratégies nationales de transition écologique rencontre des obstacles
majeurs à l?échelon du dernier kilomètre. Ces difficultés, qu?elles soient économiques, sociales ou
liées à un manque d?engagement citoyen, freinent la traduction des objectifs nationaux dans des
actions concrètes sur le terrain.
De nombreux pays sont confrontés à des résistances économiques et sociales face à l?ampleur
des changements requis par la transition écologique. Ces résistances se manifestent
particulièrement dans des secteurs clés tels que l?agriculture, l?énergie ou l?industrie.
Dans l?Union européenne, le secteur agricole est souvent perçu comme l?un des plus réfractaires
à la transition. Les réformes visant à réduire l?utilisation des pesticides ou à promouvoir
l?agroécologie suscitent de fortes oppositions ; les syndicats agricoles dénoncent une menace pour
la compétitivité des exploitations européennes, voire même nationales au sein d?une Europe
insuffisamment alignée en son sein. Aux Pays-Bas, l?obligation de réduire la taille des élevages
pour respecter les obligations relatives aux taux de nitrates dans l?eau a contribué à l?émergence
d?un parti politique, le "Mouvement agriculteur-citoyen" (BBB, BoerBurgerBeweging) qui a conduit
à la déstabilisation du gouvernement alors en place. En Allemagne, les réformes énergétiques et
industrielles nécessaires pour atteindre la neutralité carbone se heurtent à des résistances liées à
la crainte de pertes d?emplois et de délocalisations, en particulier dans le secteur de l?automobile.
La crise énergétique de 2023 à la suite de la fin de l?approvisionnement de l?Union européenne en
gaz russe a provoqué également la déstabilisation des gouvernements finlandais et suédois.
Par ailleurs, dans des pays comme les États-Unis, la Roumanie ou la Bulgarie, le déni climatique
reste un frein important. Aux États-Unis, des lobbys industriels influents alimentent le scepticisme,
décrédibilisent les réalités scientifiques et ont participé à la réélection du Président Donald Trump
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 24/60
en 2024 avec un discours axé sur le développement de l?extraction d?énergie fossile comme option
privilégiée de développement économique et l?arrêt des politiques de protection de l?environnement
remise en place par l?administration Biden. En Roumanie et en Bulgarie, les faibles investissements
dans l?éducation et la sensibilisation ralentissent l?acceptation des politiques de transition. La
remise en cause des constats scientifiques permet de légitimer l?immobilisme et d?empêcher la
transition. Elle fragilise aussi le narratif politique de la transition écologique, notamment européen,
fortement axé sur les analyses du GIEC et de l?IPBES.
Un autre obstacle majeur réside dans la difficulté à impliquer directement les citoyens dans les
démarches de transition écologique. Même lorsque les cadres nationaux sont bien établis, leur
succès dépend de l?adhésion et de la participation active de la population. Ainsi, malgré des plans
climatiques ambitieux, la Belgique peine à mobiliser les citoyens sur des actions concrètes, faute
de communication claire et de campagnes d?information suffisantes. Dans des pays comme le
Costa Rica, les politiques de transition peinent à atteindre les populations les plus vulnérables,
notamment en milieu rural. Cette fracture socio-économique renforce le sentiment d?exclusion et
limite l?impact des mesures adoptées.
La transition est également freinée dans sa mise en oeuvre par la corruption et la désorganisation
des autorités locales à l?échelon territorial. Ces résistances freinent l?application des lois
environnementales. Ainsi, la déforestation illégale en Amazonie brésilienne est souvent facilitée
par des réseaux de corruption impliquant des autorités locales et des entreprises. Pour faire face
à cette corruption locale, l?Indonésie a également dû renforcer ses dispositifs de décentralisation.
Dans certains États indiens, des programmes de transition écologique, comme les projets solaires,
font face à des résistances locales dues à des intérêts économiques ou à des conflits fonciers.
Cela ralentit leur adoption et leur mise en oeuvre. En Afrique du sud, la corruption dans les
entreprises publiques, notamment dans le secteur de l?énergie (Eskom), compromet la transition
vers des énergies renouvelables. Les résistances au changement proviennent également de
l?échelon local, où les mines de charbon sont encore des employeurs clés.
Globalement, l?analyse de la mise en oeuvre de la transition écologique dans les pays examinés
reflète des difficultés de mise en oeuvre proches, même si les situations géographiques et
économiques des pays sont différentes.
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 25/60
2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au
dernier kilomètre ? Des recommandations à tirer des
exemples étrangers
2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un
narratif politique, porté au plus haut niveau de l?Etat et
répondant aux attentes citoyennes
2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son
portage par la société
Un narratif clair et adapté au contexte national est essentiel pour mobiliser la société autour de la
transition écologique. Selon le GIEC (2022), « la gouvernance climatique est limitée et favorisée
par des facteurs structurants nationaux tels que les systèmes politiques, les ressources disponibles,
et les valeurs dominantes ».
Le narratif varie donc selon les pays. Dans les pays en développement où ce narratif existe, il est
clairement orienté sur l?opportunité de développement que représente la transition écologique. Bien
que le discours sur la durabilité se développe, les priorités économiques dominent encore
largement. En Indonésie, le narratif met l?accent sur le développement économique durable, même
s?il reste fortement axé sur l?exploitation de ressources naturelles comme le nickel et l?huile de
palme. De même, le Brésil positionne la transition écologique comme une opportunité économique,
en s?appuyant sur le potentiel des énergies renouvelables, notamment l?éthanol et l?hydroélectricité.
En Inde, la transition écologique est associée à une vision de développement inclusif et moderne.
Le gouvernement indien promeut l?idée que l?Inde peut devenir un leader mondial des technologies
vertes, tout en assurant une amélioration du bien-être de sa population.
Les pays en développement vont cependant au-delà de cette simple idée de transition vers un
développement économique durable. En Afrique du sud, la transition écologique est présentée
comme une solution à la crise énergétique et comme un levier de justice climatique. Ce discours
sur la transition juste vise à rassurer les populations les plus vulnérables, fortement dépendantes
des industries polluantes comme le charbon.
Allant plus loin, la notion de « civilisation écologique » est inscrite dans la Constitution chinoise,
amendée en 2018, comme l'un des cinq piliers du socialisme aux caractéristiques chinoises. Elle
guide les politiques environnementales et économiques du pays, plaçant l?écologie au coeur du
développement national. La stratégie climatique de la Chine est intégrée dans un narratif de
modernisation et de compétitivité technologique. La transition écologique est présentée comme
une opportunité pour asseoir la puissance nationale, notamment par le leadership dans les
technologies vertes.
Parfois, comme dans le cas de Singapour, le récit national cimente les objectifs de planification
écologique à ceux des équilibres sociétaux. Le changement climatique est décrit comme une
menace existentielle pour la ville-État, mais aussi comme une opportunité pour devenir un hub
régional de la finance verte et de l?innovation écologique. Ce narratif repose sur une planification
urbaine rigoureuse et des consultations publiques inclusives. Au Rwanda, la transition écologique
est intégrée dans le paradigme de la garantie d?un développement inclusif et durable, pilier de la
réconciliation nationale. En présentant sa dernière stratégie, le président Paul Kagamé a annoncé :
« La Vision 2020 concernait ce que nous devions faire pour survivre et retrouver notre dignité. Mais
la Vision 2050 doit porter sur l'avenir que nous choisissons, parce que nous le pouvons et parce
que nous le méritons ». Il s?agit d?une vision de long terme stratégique qui pointe la direction pour
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 26/60
« le Rwanda que nous voulons » sur la base d?un développement et d?une croissance économique
compatibles avec la préservation de l?environnement. Cette force du narratif ancre les politiques
de transition dans la transformation nécessaire du pays.
A l?inverse, dans de nombreux pays développés, un manque de narratif clair freine l?engagement
dans la transition écologique. Les pays développés ont principalement articulé leur narratif politique
de la transition écologique autour des risques posés par la crise climatique et environnementale
pour leur modèle de développement. Ces risques ne sont pas contestables car appuyés sur les
analyses de la science mondiale et la réponse politique apportée est le maintien d?une économie
de marché soutenue par une compétitivité accrue grâce à une décarbonation précoce de
l?économie. Ainsi, les plans canadiens s?appellent « Un environnement sain et une économie
saine » en 2016 et « Un air pur et une économie forte » en 2022. De même, aux États-Unis, le
discours reste souvent fragmenté entre intérêts économiques et préoccupations
environnementales, et la réélection de Donald Trump fin 2024 s?est notamment faite contre les
enjeux de transition environnementale. Au Royaume-Uni, le discours est clairement axé sur l?apport
pour l?économie britannique d?une économie rendue plus compétitive parce que décarbonée.
L?Union européenne, de son côté, doit surmonter une crise de narratif en réconciliant les objectifs
climatiques avec les craintes économiques de ses citoyens. Ce narratif semble amalgamer
constats scientifiques de la réalité de la crise écologique (changement climatique, perte de
biodiversité, raréfaction des ressources, ampleur de la pollution) et solutions politiques dont la mise
en oeuvre est imposée sans offrir d?espace au débat démocratique sur la nature de ces solutions
à déployer. La plupart des pays européens n?ont pas développé de narratif laissant voir un futur
durable et désirable qui suivra la phase de transition. Ils considèrent qu?appuyer les politiques de
transition sur des analyses scientifiques, et sur la promesse de la poursuite de la croissance
économique, certes plus durable, suffit à entrainer la société. Par exemple, l?article 1er de la loi
Climat de 2019 du Danemark dit : « la réalisation des objectifs climatiques du Danemark doit être
aussi efficace que possible d?un point de vue économique, en tenant compte de la trajectoire de
long terme de la transition verte, du caractère durable des entreprises danoises et de leur
compétitivité, de la solidité des finances publiques et de l'emploi, et du fait que l?économie danoise
doit être stimulée plutôt que resserrée ». Ils articulent leurs messages davantage vers les marchés
économiques que vers leurs citoyens.
Dans tous les pays, le message d?amélioration de la santé des citoyens grâce à la transition
écologique est le seul message politique commun porté en parallèle de celui de la croissance
économique durable. Il vise à répondre à la perception d?une dégradation accélérée de
l?environnement et de l?explosion des pollutions, notamment diffuses dans l?eau et l?air, qui ont des
impacts sur les populations et dont les acteurs économiques qui en sont à l?origine refusent de
porter la responsabilité, s?appuyant sur les Etats pour indemniser les victimes.
2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat
Ce narratif doit s?incarner dans la classe politique et être porté au plus haut niveau de l?Etat pour
être crédible aux yeux des populations. La transition est en effet source de changements, et donc
de stress, de modifications de long terme, et génère de ce point de vue des angoisses dans la
population notamment des classes laborieuses susceptibles d?être déstabilisées dans leurs
équilibres sociaux-économiques.
Cette incarnation politique est clairement affichée dans les pays en développement. Le président
chinois Xi Jinping décrit la civilisation écologique comme une étape cruciale pour réaliser le « rêve
chinois » du renouveau national. Elle s'inscrit dans un projet historique de transformation,
combinant progrès économique et modernisation écologique. Ce narratif vise à mobiliser la
population et à renforcer l?autorité de l?État dans la transition écologique. Au Rwanda et en Afrique
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 27/60
du sud, comme décrit précédemment, la transition est portée par les Présidents Paul Kagamé et
Cyril Ramaphosa, auprès desquels sont rattachés les organes de pilotage de la politique de
transition. Au Brésil, la transition écologique est intégrée dans une vision de justice sociale et
environnementale, sous le leadership du président Lula. Cette approche met l?accent sur la
réduction des inégalités et la préservation de l?Amazonie comme patrimoine mondial et tranche
fortement avec la présidence précédente de Bolsonaro. La lutte contre la déforestation a été élevée
sous Lula au rang de priorité nationale avec des cibles chiffrées et des plans d?action, tels que le
PPCDAM (Plan de Prévention et de Contrôle de la Déforestation en Amazonie). La défense des
peuples d?Amazonie fait partie du narratif. Narendra Modi joue également un rôle clé en
personnifiant ce narratif en Inde. Il a fait de l'énergie solaire et de l'Alliance solaire internationale
des priorités politiques majeures, renforçant ainsi le message de leadership mondial de l?Inde. A
Singapour, le portage politique de la transition écologique est étroitement associé au « People's
Action Party » (PAP), qui est au pouvoir depuis l?indépendance en 1965.
Ce portage politique au plus haut niveau de l?Etat permet même de dissocier le projet de transition
des enjeux écologiques. C?est bien sur une vision de la société future que s?appuient les chefs
d?Etat pour faire accepter la transition aux citoyens, en additionnant des objectifs sociétaux à ceux
de la transition climatique et écologique. Pour le Rwanda c?est une vision post-génocide, de
réduction de la pauvreté, et d?amélioration de la qualité de vie comme socles fondamentaux qui
sont servis par la durabilité.
De même au Costa Rica, c?est le président José Figueres Ferrer, qui sera trois fois président de
1948 à 1974, et dont le fils le sera aussi dans les années 1990, qui démocratise le pays18, supprime
l?armée et lance le pays comme un pionnier de la durabilité, valorisant son « capital vert ». Le pays
porte ce narratif à travers des engagements internationaux ambitieux, tels que la neutralité carbone
d?ici 2050, mettant en avant la reforestation et la production d?énergie 100 % renouvelable comme
des éléments clés de son identité nationale. La crise d?incarnation politique que traverse
actuellement le pays remet en cause ses priorités.
La crise de « leadership » européen illustre à l?envers cette réalité. Le Pacte vert (« Green Deal »)
a pourtant été clairement associé à la présidente de la Commission européenne Ursula Van Der
Leyen. Mais après avoir porté sa popularité pendant son premier mandat, il a semblé compliquer
sa réélection. Aux Etats-Unis, la réélection de Donald Trump est clairement liée, entre autres
facteurs, au rejet qu?il exprime d?une politique environnementale freinant une croissance
économique appuyée sur l?exploitation des ressources naturelles. Cette déstabilisation des élites
européennes, américaines et canadiennes, découle des craintes du coût économique de la
transition écologique pour les secteurs économiques soumis à la compétition internationale et pour
des populations qui n?ont pas pu adhérer à un narratif de la transition écologique. La remise en
cause régulière des planifications écologiques et les changements permanents de règles nuisent
également à l?incarnation du projet.
2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes
citoyennes quant à leur avenir
L?implication des citoyens dans la construction d?un narratif écologique apparait comme un levier
essentiel pour garantir l?acceptabilité et l?efficacité des politiques climatiques. L?intégration des
citoyens dans le processus de décision améliore :
- L?acceptabilité des mesures : les citoyens se sentent davantage impliqués et enclins à
adopter les changements requis.
18 Il donne le droit de vote aux femmes et à la population d?origine africaine en 1953.
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 28/60
- La pertinence des politiques : les solutions proposées reflètent mieux les réalités locales et
les besoins des populations.
- La transparence : ces processus renforcent la confiance envers les institutions publiques.
L?ensemble des pays ayant fait l?objet d?une étude en sont conscients et ont essayé d?associer la
société civile, dès la définition des plans climat et environnement, avec notamment les assemblées
citoyennes sur le climat évoquées précédemment dans les pays européens, mais qui, à l?exception
de l?Irlande, n?ont pas toujours eu le succès attendu. Ainsi aux Pays-Bas, malgré les démarches
d?association mises en place (Forums citoyens évoqués en 1.3.3), et des avancées sur les objectifs
climatiques, les partis pro-climat ont subi une défaite significative lors des élections provinciales en
2023, reflétant une fracture entre les priorités écologiques et les préoccupations sociales des
électeurs. Les aides financières accordées par le gouvernement pour la transition climatique
étaient sans conditions de ressources ce qui a été interprété comme favorisant inutilement les plus
hauts revenus du pays, sans pour autant permettre le soutien nécessaire aux plus pauvres qui
n?ont pu investir pour limiter les surcouts de la facture énergétique. En Suède, l?absence de
mécanisme de régulation des tarifs énergétique a provoqué une explosion des prix de l?énergie,
consécutive à l?invasion de l?Ukraine par la Russie, et principal moteur de l?arrivée au pouvoir des
partis opposés aux taxes écologiques. En Finlande, le cap ambitieux de la neutralité climatique dès
2035 est remis en cause par le nouveau gouvernement élu notamment en raison de la crainte des
milieux économiques d?une incapacité à financer une telle ambition. Au Danemark également, la
transition écologique qui vise une réduction de 70% des émissions d?ici 2030 est devenue un sujet
de clivage électoral avec des critiques croissantes sur les impacts socio-économiques des
politiques ambitieuses. Le décalage entre les attentes citoyennes et les politiques mises en place
impactent fortement la capacité à poursuivre la planification climatique et environnementale.
Hors Europe, d?autres mécanismes cherchent l?association de la société civile à la transition. En
Afrique du sud, la société civile est présente dans la Commission présidentielle pour le climat,
organe de gouvernance de la planification climatique : 4 représentants y sont commissaires en
représentation d?un syndicat de travailleurs, d?une ONG environnementale, des acteurs de la
recherche et des jeunes pour le climat. Cette volonté d?inclusivité et d?intégration dans les
processus consultatifs préalable favorise la prise de décision, et répond au narratif politique du
pays sur la transition juste.
En Inde, l?initiative LiFE « Lifestyle for Environment » a pour vocation d?inciter les citoyens, les
industries et les décideurs politiques du monde à adopter un mode de vie respectueux de
l?environnement. La mission LiFE est envisagée comme un mouvement mondial visant à opérer
un changement de paradigme en passant d'une consommation irréfléchie et destructrice à une
utilisation réfléchie et délibérée des ressources nationales. Elle est portée par l?Inde à l?échelle
internationale également dans le cadre du G20 et avec l?adoption d?une résolution à l?Assemblée
générale des Nations unies pour l?environnement19. Pour sa mise en oeuvre, les outils numériques
sont promus pour leur inclusivité et leur capacité d?exploiter l?ampleur des données nécessaires.
En France, le portage politique a connu des crises avec la perte de cohérence dans les discours
et les actions, illustrée par les débats autour de la Convention citoyenne pour le climat et les
difficultés à traduire ses propositions dans la loi climat et résilience. Alors que la France dispose
aujourd?hui d?une planification écologique, portée par le SGPE, l?ancrage de cette politique fait
l?objet de remises en cause budgétaires, d?arbitrages défavorables au bénéfice de représentants
des activités économiques (agriculture, principe du zéro artificialisation nette, politique de
réindustrialisation), de moindre lisibilité de son positionnement administratif, qui nuisent à sa mise
en place. On peut s?interroger si la fragilité de la planification écologique française ne découle pas
notamment de sa non incarnation dans le discours politique ? quel futur désirable propose la
19 https://docs.un.org/fr/UNEP/EA.6/Res.8
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https://docs.un.org/fr/UNEP/EA.6/Res.8
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 29/60
planification française ? ? et de son absence de portage par les plus hautes autorités de l?Etat
depuis janvier 2024. La planification écologique ne peut pas être seulement un outil administratif
d?organisation de l?action de l?Etat et des collectivités. Elle doit être au service d?un projet de société,
décrivant non seulement le chemin de la transition, mais également un point d?arrivée désirable
autour duquel puisse se retrouver la société française dans sa diversité.
Construire un narratif, fondé sur une vision de l?avenir du pays portée
par le chef de l?Etat et le chef du gouvernement et partagée avec les citoyens, dans lequel
la transition écologique est considérée comme un moyen et non une fin.
2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans
un cadre juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous
les secteurs d?activités
2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements
internationaux
La planification écologique doit répondre à des objectifs clairs qui déclinent les engagements
internationaux.
Certains pays, tels que le Rwanda et le Costa Rica, s'appuient sur leurs engagements
internationaux en matière de climat et d'environnement pour justifier leurs politiques nationales et
renforcer leur influence sur la scène mondiale. Pourtant classé parmi les pays les plus vulnérables
au changement climatique, le Rwanda utilise sa politique nationale de transition pour asseoir sa
diplomatie climatique et environnementale et bénéficier de financements internationaux. Le Costa
Rica est reconnu comme un pionnier dans la lutte contre le changement climatique et la
préservation de l'environnement, ayant lancé dès 2019 un Plan national de décarbonation, avec
pour objectif d'atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. Ces initiatives ont valu au Costa Rica une
reconnaissance internationale, notamment en recevant le prix « Champion de la Terre » des
Nations Unies en 2019 pour son rôle de pionnier dans la lutte contre le changement climatique. De
même, l?Afrique du sud et l?Indonésie font partie des premiers pays ayant bénéficié de partenariats
internationaux pour leurs transitions énergétiques (JETP). Les cadres internationaux permettent à
la fois de structurer les réponses nationales et de renforcer les outils de mise en oeuvre.
Cette utilité d?intégrer la planification écologique dans un cadre juridique clair respectant les
obligations internationales et européennes s?impose de manière croissante, comme en témoignent
plusieurs décisions judiciaires récentes remettant en cause des stratégies ou trajectoires jugées
insuffisamment ambitieuses. Ces cas illustrent que l'absence de clarté et de rigueur dans la
planification écologique peut entraîner des sanctions judiciaires, forçant les gouvernements à
revoir leurs politiques pour aligner leurs objectifs sur leurs engagements.
Les Pays-Bas, avec le célèbre arrêt « Urgenda » de 2015, ont vu la condamnation du
gouvernement par la Cour qui lui a ordonné de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de
25 % d'ici 2020 par rapport à 1990, en vertu de ses obligations en matière de droits humains et
des engagements climatiques internationaux. De manière similaire, en Allemagne, la Cour
constitutionnelle a jugé en 2021 que la loi sur la protection du climat de 2019 était partiellement
inconstitutionnelle, imposant une révision pour garantir des objectifs de réduction des émissions
après 2030 et protéger les droits des générations futures. En Irlande, la Cour suprême a annulé
en 2020 le Plan d'action pour le climat 2017-2022, arguant qu'il manquait de spécificité et n'était
pas conforme à la loi de 2015 sur l'action climatique, qui exige des mesures précises pour atteindre
les objectifs climatiques fixés. La faible ambition dans les plans initiaux de décarbonation a été
critiquée pour son manque de spécificité et d?efforts dans des secteurs comme l?agriculture et le
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 30/60
logement. En Belgique, l?affaire climat (« Klimaatzaak ») a conduit à une injonction judiciaire
imposant une réduction de 55 % des émissions de GES d?ici 2030, après que le tribunal a jugé
insuffisantes les politiques nationales pour répondre aux obligations européennes et
internationales. Au Royaume-Uni, dans son jugement du 18 juillet 2022, la Haute Cour de Justice
avait jugé que la « Stratégie net zéro » (« Net Zero Strategy ») était « illégale » et « inadéquate »,
dans la mesure où elle ne respectait pas les obligations minimales de transparence fixées par la
loi climat notamment pour évaluer la capacité du gouvernement à respecter le plafond de la 6ème
période (2033-2037), ni ne contenait d?éléments suffisamment détaillés permettant au Parlement
et au public de demander compte au gouvernement. En conséquence, la Haute Cour de Justice
avait enjoint le gouvernement à présenter au Parlement une stratégie révisée d?ici le 31 mars 2023.
Ces exemples soulignent l?importance de définir un cadre juridique robuste et ambitieux. Les
actions en justice de ce type se multiplient, et rien n?indique que le mouvement va se ralentir. Une
stratégie claire, assortie d'objectifs contraignants et spécifiques, garantit non seulement la
conformité avec les engagements internationaux, mais aussi une protection contre des
contestations judiciaires pouvant retarder la mise en oeuvre des politiques climatiques. La France
a été confrontée à plusieurs condamnations judiciaires en raison de l'insuffisance de ses actions
face au changement climatique20, illustrant la nécessité d'établir un cadre juridique conforme aux
engagements internationaux et européens.
La planification écologique mise en place en France a repris les objectifs internationaux, européens
et nationaux dont certains figurent dans un cadre juridique. Néanmoins, la planification française
ne constitue pas un outil juridique contraignant. Elle constitue tout au plus un cadre d?action
justifiant les choix de mise en oeuvre des politiques publiques. Cette absence de cadre juridique
contraignant fragilise sa capacité à entrainer les choix de politiques publiques dans le sens de
l?atteinte des objectifs.
Inscrire dans la loi l?obligation d?une planification écologique
2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace
et juste
La planification écologique, pour être efficace et équitable, doit aller au-delà des obligations
climatiques fixées par l?Accord de Paris. Elle doit englober l?ensemble des enjeux écologiques,
notamment en établissant des liens avec les impacts de la perte de biodiversité et de la pollution,
tout en favorisant des synergies entre les politiques de lutte contre les effets du changement
climatique et de restauration de la biodiversité. Les exemples internationaux montrent l'importance
de cette approche holistique.
Singapour intègre les enjeux de biodiversité, d?eau et de climat dans son plan à long terme. Des
projets comme les corridors écologiques et les infrastructures vertes urbaines mettent en avant
l?interdépendance entre les politiques de lutte contre la perte de biodiversité et l?adaptation
climatique. L?utilisation d?eaux recyclées illustre également les synergies entre gestion des
ressources et objectifs industriels, démontrant une planification écologique systémique. L?Afrique
du Sud a développé une stratégie pour les aires protégées et des lois environnementales fortes,
couvrant près de 9,2 % du territoire terrestre et 15 % de son littoral. Ces mesures visent à freiner
la perte de biodiversité tout en contribuant à la résilience face au changement climatique, en
20 En février 2021, le tribunal administratif de Paris a reconnu l'État français responsable de "manquements dans
la lutte contre le changement climatique", le tenant ainsi responsable d'un préjudice écologique (« L'Affaire du
Siècle »). En juillet 2021, le Conseil d'État, saisi par la commune de Grande-Synthe, a enjoint au gouvernement
français de prendre, dans un délai de neuf mois, toutes les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs de
réduction des émissions de gaz à effet de serre, conformément aux engagements de la France.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 31/60
établissant un lien direct entre protection écologique et durabilité. La Chine a intégré la biodiversité
dans son 13ème plan quinquennal et mis en place un système national d?aires protégées, incluant
des parcs nationaux. La centralisation de la gestion environnementale sous un ministère unique a
permis une meilleure coordination des politiques liées à la biodiversité, à la pollution et au climat,
illustrant une gestion intégrée des ressources naturelles. L'Indonésie a adopté une planification
nationale intégrant des objectifs de faible émission carbone et de préservation de la biodiversité.
Le ministère de la Planification du développement national (BAPPENAS) a mis en place une
évaluation environnementale stratégique pour s'assurer que les plans incluent des indicateurs liés
au climat, à la biodiversité et à la gestion des ressources naturelles. Cette approche est soutenue
par un modèle intégré (IV204521 ), qui relie économie, société et capital naturel, permettant de
mieux comprendre les interactions entre la conservation de la biodiversité et la gestion durable des
ressources. Le Brésil met en oeuvre un plan de transformation écologique (PTE) articulé autour de
la lutte contre la déforestation et la promotion de la bioéconomie. Ce plan combine des mesures
environnementales et économiques pour atteindre zéro déforestation, tout en soutenant des
initiatives locales et la valorisation des produits de la biodiversité brésilienne. Par ailleurs, l?Institut
brésilien de l?environnement (IBAMA) joue un rôle crucial dans la surveillance et la mise en oeuvre
des politiques liées à la biodiversité, tandis que le pays utilise des systèmes avancés de
surveillance de la déforestation, démontrant ainsi l?interconnexion entre gestion des écosystèmes
et lutte contre le changement climatique.
A l?inverse, les pays ayant centré leur action sur une seule politique échouent à transformer l?essai
ou ont des difficultés à poursuivre leur action. Ainsi le Costa Rica qui n?a finalement intégré dans
sa planification que la politique forestière se trouve confronté à des difficultés de financement de
la poursuite de sa politique et fait face à des contestations populaires sur la non atteinte d?autres
objectifs.
L?efficacité de la planification écologique repose sur une approche globale, incluant les questions
complexes et sensibles. Ignorer ces enjeux risque de limiter l'impact des politiques écologiques et
de compromettre la transition nécessaire. Plusieurs exemples montrent les défis que représentent
ces sujets délicats.
Les Pays-Bas, avec leur modèle agricole intensif, sont confrontés à des niveaux élevés de pollution
par les nitrates et les émissions de méthane. Ces problèmes affectent la biodiversité et la qualité
des sols. La mise en oeuvre de politiques visant à réduire l?intensité de l?élevage et l?usage d?engrais
a déclenché des protestations de la part des agriculteurs, soulignant les défis liés à l?acceptabilité
sociale des mesures nécessaires. L?incapacité à inclure les parties prenantes et à proposer des
alternatives viables complique l?application de ces politiques.
La dépendance au charbon en Inde, Afrique du Sud et Indonésie est un frein à leur transition
énergétique. En Inde, le charbon représente plus de 70 % de la production d?électricité. Bien que
le pays investisse dans les énergies renouvelables, la transition est entravée par la dépendance
économique et sociale au charbon, qui emploie des millions de travailleurs. En Afrique du Sud, où
le charbon fournit 86 % de l?électricité, les efforts pour décarboner sont limités par des contraintes
économiques, des infrastructures vieillissantes et une opposition sociale forte. La transition juste,
soutenue par des mécanismes internationaux comme le Partenariat pour une transition
énergétique juste (JETP), est essentielle pour éviter une fracture sociale. En Indonésie, le charbon
est également central dans la production énergétique, et des retards dans l?adoption de politiques
ambitieuses ralentissent la transition énergétique nécessaire pour aligner le pays sur ses
engagements climatiques. À Singapour, bien que le pays se positionne comme leader régional en
matière de finance verte et de technologies, la planification reste centrée sur des objectifs
21 https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-
Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf
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https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf
https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 32/60
économiques, parfois au détriment de mesures structurelles plus contraignantes nécessaires pour
réduire durablement les émissions de gaz à effet de serre.
L?Allemagne peine à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports,
malgré son engagement dans la décarbonation. Les retards dans l?électrification des
infrastructures et la promotion insuffisante des mobilités douces, comme le rail ou le vélo, freinent
les progrès et ont même conduit à déstabiliser la coalition au pouvoir. Le ministre des transports,
Volker Wissing (FDP, libéral), avait refusé à plusieurs reprises de présenter un programme de
réduction des émissions de GES dans son secteur, suite aux échecs répétés à atteindre les
objectifs fixés (trois années consécutives en 2023). Cette situation a entraîné une révision de la loi
fédérale sur la protection du climat en avril 2024, supprimant le caractère contraignant des objectifs
sectoriels et introduisant un objectif global intersectoriel et pluriannuel. Cette modification est
considérée comme un compromis interne à la coalition au pouvoir, visant à éviter une escalade
politique tout en maintenant les engagements climatiques généraux de l'Allemagne. Cette situation
illustre que des secteurs difficiles doivent être traité en priorité dans la planification pour éviter des
retards coûteux en termes climatiques.
A l?inverse, des exemples de prise en compte de secteurs difficiles ont permis de mieux préparer
la transition. En Allemagne, un fonds d?avenir pour l?industrie automobile doté d?un milliard d?euros
pour la période 2021-2025, afin de soutenir la transformation de ce secteur stratégique a été lancé.
En collaboration avec les syndicats (IG Metall), des réseaux régionaux de transformation ont été
établis dans les bassins industriels. Ces initiatives, qui intègrent des universités, chambres
d'industrie, centres de formation et agences pour l?emploi, ont pour but d?élaborer des stratégies
adaptées aux besoins locaux tout en assurant le maintien de l?emploi et la reconversion vers des
technologies plus durables. Le Danemark, a introduit une taxe carbone sur l?agriculture, ciblant les
émissions de méthane issues des élevages bovins et porcins. Entrant en vigueur progressivement
d?ici 2030, cette taxe est accompagnée de déductions fiscales pour les agriculteurs afin de limiter
les effets négatifs et d?investir dans des technologies vertes. Cette mesure a été adoptée grâce à
un processus de concertation impliquant l?Etat, les agriculteurs et les ONG environnementales qui
a abouti à un accord largement validé par le Parlement. Ces mesures visent à financer la transition
écologique tout en soutenant les producteurs affectés. L?Indonésie, premier producteur mondial
d?huile de palme, a mis en oeuvre des politiques pour promouvoir des pratiques responsables. Un
moratoire permanent sur la déforestation et le drainage des tourbières a été instauré, accompagné
d?un projet national de certification pour la durabilité. Des aides ont été déployées pour soutenir les
petits producteurs dans l?adoption de méthodes modernes, tout en luttant contre la déforestation
illégale et les feux de forêts. Une même politique de protection des tourbières, utilisées par la
population comme appoint pour le chauffage, a également été déployée en Irlande.
Ces exemples démontrent qu?une planification ciblée et des incitations bien conçues peuvent
permettre des progrès significatifs dans des secteurs critiques tout en minimisant les impacts socio-
économiques.
La France peut s?enorgueillir d?avoir également lancé un plan de décarbonation de son industrie,
comme en Allemagne, ciblant les 50 entreprises les plus émettrices tout comme d?avoir mis en
place une planification globale intégrant tous les secteurs d?activité et toutes les politiques.
Néanmoins, elle peine à réussir l?intégration concrète de son secteur agricole dans la planification
écologique, ce qui laisse des possibilités de constante renégociation à la baisse d?autres objectifs
figurant dans la planification comme la réduction de l?usage des pesticides et des nitrates et la
protection des espaces naturels et de la biodiversité.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 33/60
La planification écologique doit intégrer tous les secteurs d?activités et
l?ensemble des politiques doivent être mises en oeuvre, en adaptant si nécessaire la
trajectoire et les financements pour surmonter les difficultés.
2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des
structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité
politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et
indépendante
2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise
en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique
? Les bons exemples internationaux de planification écologique :
Peu des pays examinés disposent de structures transversales pilotant leur planification écologique,
souvent en raison de l?absence de planification globale, mais parfois ces structures sont absentes
même dans la planification climatique.
A part la France et le SGPE, on peut néanmoins citer le ministère indonésien de la Planification du
Développement National (BAPPENAS), chargé de la planification écologique et du développement
durable. Placé directement sous l'autorité du président, il joue un rôle clé dans la définition des
objectifs nationaux et dans leur coordination interministérielle. Il est responsable de l?élaboration et
de la synchronisation des plans nationaux de développement durable. Il coordonne les ministères
techniques. Il joue également un rôle crucial dans la mise en oeuvre territoriale en soutenant les
provinces dans leurs plans d?atténuation des émissions de carbone. Le BAPPENAS utilise des
outils tels que des modèles d'évaluation stratégique (par exemple GLOBIOM-Indonésie22) pour
planifier et synchroniser des politiques cohérentes, renforçant ainsi la capacité de déclinaison
territoriale grâce à l?implication des provinces.
Parmi les nouvelles organisations, le Brésil a réintroduit en 2023 un comité interministériel pour le
changement climatique, dirigé par le chef de cabinet de la présidence et impliquant plusieurs
ministères. Ce comité supervise la révision de la politique nationale sur le changement climatique
et coordonne les plans d?atténuation et d?adaptation sectoriels. Il assure également la cohérence
entre les mesures prises par différents ministères, tout en mobilisant des acteurs financiers comme
la Banque Nationale de Développement Économique et Social (BNDES) pour financer les projets
liés à la transition écologique. Au Japon, le Comité exécutif de la stratégie GX (« Green
Transformation »), créé en juillet 2022, est présidé par le Premier ministre et piloté par le ministère
de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (METI). Il a pour mission d'élaborer la "politique
fondamentale pour la réalisation de la GX". Le comité supervise les mesures transversales en
matière de décarbonation et de transformation verte, avec une collaboration entre le METI, le
ministère de l'Environnement (MOE), et le ministère des Finances (MOF) pour coordonner les
enjeux de production énergétique, d'industrie et de conservation environnementale. Il est certes
trop tôt pour analyser les résultats dans ces deux pays, mais la tendance à la création de structures
transversales témoigne de la prise de conscience de leur utilité.
Bien que limité aux enjeux climatique, l?Office de Planification Environnementale (PBL) agit aux
Pays-Bas comme un outil de pilotage transversal pour la politique climatique. Cet organisme
22 https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf
PUBLIÉ
https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 34/60
indépendant évalue annuellement les progrès de la politique climatique et recommande des
ajustements pour garantir l'atteinte des objectifs. L?efficacité du PBL repose sur sa légitimité, qui
lui permet de coordonner différentes parties prenantes et de s?assurer que les politiques régionales
et nationales sont alignées avec les engagements internationaux. Il dispose de moyens lui
permettant de réaliser sa tâche tant sur le plan des ressources humaines que budgétaires.
? Les conséquences de l?absence d?une planification centralisée :
La difficulté à mettre en oeuvre une planification écologique sans programmation centralisée se voit
à l?inverse dans d?autres exemples. Cette absence d'une organisation unique et puissante
complique la prise de décision et ralentit la mise en oeuvre des politiques.
L?absence de structure de coordination peut ainsi conduire à des problèmes de coordination
interministérielle comme déjà évoqué en Allemagne. Aux Pays-Bas, le manque d'une structure de
coordination globale a conduit à une mise en oeuvre fragmentée des politiques climatiques et
agricoles. Bien que la planification territoriale intègre les enjeux de biodiversité et de gestion des
risques d'inondation, la transformation agricole reste un point de blocage majeur.
L?insuffisance du poids d?une instance de coordination pourtant existante produit les mêmes effets
de fragilisation de la planification écologique. En Roumanie, la gouvernance de la planification
écologique repose sur un comité interministériel pour le changement climatique, présidé par le
Premier ministre et impliquant divers ministères et agences. Cependant, ce système est marqué
par une coordination complexe et intermittente, tandis que le rôle du conseiller d'État chargé de la
transition écologique est limité à un rôle de facilitateur sans réelle autorité décisionnelle. En
Belgique, la Commission Nationale Climat (CNC), créée en 2002, vise à coordonner les politiques
climatiques entre les niveaux fédéral et régional. Elle est composée de représentants des
gouvernements fédéral et régionaux, épaulée par un secrétariat permanent et 14 groupes de travail
thématiques. Cependant, son rôle reste majoritairement évaluatif plutôt que décisionnel, ce qui
limite son efficacité en termes de pilotage stratégique.
La structure fédérale des pays pose des défis supplémentaires. Les objectifs et politiques
climatiques des provinces ou entités décentralisées ne sont pas toujours alignés avec la stratégie
nationale, ce qui complique l'harmonisation des efforts. Par exemple, des politiques comme le
développement de l?éolien en mer nécessitent une collaboration étroite entre le gouvernement
central et les gouvernements locaux, mais cette coordination reste imparfaite. Le manque de
coordination freine la mise en oeuvre des projets essentiels et ralentit la transition écologique au
niveau national.
Ainsi, en Allemagne, les Länder, responsables de nombreuses politiques environnementales,
disposent d?une grande autonomie. Cette configuration complique l?alignement des actions
régionales avec les objectifs nationaux, surtout dans des secteurs comme le transport et l?énergie.
La Belgique se caractérise par une gouvernance climatique fragmentée, reflétant sa structure
institutionnelle complexe. Les compétences sont partagées entre l?État fédéral et les trois régions
(Wallonie, Flandre, Bruxelles-Capitale), ce qui complique la coordination des politiques
environnementales et climatiques. Chaque région dispose de son propre plan de transition
écologique, ce qui entraîne des incohérences dans les priorités et les méthodologies adoptées.
Par exemple, la Flandre et la Wallonie ont des approches divergentes sur la gestion agricole et les
émissions industrielles. Au Royaume-Uni, les 4 nations ont leurs propres cibles de réduction des
émissions et leurs propres politiques en matière de changements climatiques, mais ils contribuent
également à l?atteinte des cibles intermédiaires du Royaume Uni et à la mise en place de politiques
dans l?ensemble du pays. S?il existe une réunion bimestrielle entre les ministres des 4 nations pour
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 35/60
discuter des politiques climatiques23, les objectifs et politiques des nations ne sont pas encore
parfaitement alignées avec la stratégie Net Zéro. Cette coopération imparfaite se reflète en
particulier dans le développement de certaines politiques indispensables pour l?atteinte des
objectifs climatiques des nations pour lesquelles le Gouvernement central détient une compétence
exclusive (ex : capture et stockage du carbone) ou des politiques nationales nécessitant une étroite
association des gouvernements compétents (ex : développement de l?éolien en mer en Ecosse).
On peut donc en déduire que la planification écologique nécessite un pilotage centralisé, confié à
une organisation dédiée, rattachée à l?échelon politique le plus élevé, ce qui se rapproche du
modèle français qui est donc à préserver. Cette organisation doit également être en mesure
d?animer le déploiement de cette planification dans les territoires afin d?en garantir la cohérence.
Maintenir le SGPE auprès du premier ministre, le renforcer dans son rôle
de pilotage de la planification écologique, en appui de l?action des ministères, et d?animation
de son déploiement dans les territoires.
2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation
régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter
L?évaluation régulière et indépendante de la planification écologique est cruciale pour garantir son
efficacité. Les bons exemples, comme celui des Pays-Bas avec PBL déjà cité, montrent que
l?investissement dans des systèmes de collecte de données et des évaluations indépendantes est
un levier stratégique pour réussir la transition écologique.
Appuyer sa politique de transition sur des données fiables et transparentes est une condition sine
qua non pour identifier les réussites et corriger les échecs. Les contre-exemples illustrent que
l?absence de fiabilité dans les données peut compromettre la crédibilité et l?impact des politiques
publiques.
Ainsi, en Indonésie, le défi majeur réside dans la fragmentation des données et le manque de
capacités institutionnelles pour les centraliser et les vérifier. Bien que le BAPPENAS tente
d?intégrer les indicateurs climatiques dans les plans nationaux, les provinces et les districts ne
disposent pas toujours des infrastructures nécessaires pour collecter des données fiables. Cela
entraîne des incohérences dans les rapports nationaux et freine les efforts de coordination.
L?Afrique du sud rencontre le même problème : alors qu?elle dispose d?une méthodologie ? le
« Climate Change Response Monitoring & Evaluation System » - intéressante car visant à analyser
les données dans des démarches à la fois top-down et bottom-up, et couvrant les champs de
l?atténuation, de l?adaptation et du financement, elle peine dans l?agrégation de données en dehors
du système énergétique. En Chine, malgré une capacité impressionnante de collecte de données,
la transparence et la fiabilité des informations posent problème. Les rapports environnementaux
sont souvent influencés par des pressions politiques ou des manipulations locales, rendant difficile
une évaluation objective. Par exemple, les statistiques sur la pollution de l?air ou les émissions
industrielles peuvent être sous-évaluées dans certaines régions pour éviter des sanctions
administratives, ce qui compromet la précision des politiques correctives.
A l?inverse, la planification écologique soutenue par une collecte de données robustes, s?appuyant
sur de multiples sources, notamment des ministères, des agences environnementales et des bases
23 https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-
communique-13-march-2024
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https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024
https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 36/60
de données publiques, et indépendante24 permet l?évaluation régulière (idéalement annuellement)
des progrès des politiques climatiques. Par exemple, le PBL utilise des outils de modélisation pour
anticiper les impacts des mesures et proposer des ajustements avant qu?il ne soit trop tard.
L'Irlande dispose de deux structures clés pour l'évaluation de sa planification écologique :
? L?Agence de protection environnementale (EPA) : indépendante, elle fournit des
données et des rapports réguliers sur les émissions de gaz à effet de serre, la qualité
de l?air, et d'autres indicateurs environnementaux. Ces rapports alimentent les débats
politiques et permettent d?ajuster les politiques climatiques.
? Le Conseil consultatif sur le changement climatique (CCAC) : cet organe indépendant
donne des recommandations stratégiques et suit les progrès des politiques
environnementales dans le cadre de rapports réguliers soumis au gouvernement et au
Parlement.
En Suède, le Haut Conseil pour le climat est chargé d?évaluer si les politiques publiques permettent
d?atteindre les objectifs climatiques nationaux. Il réalise une analyse indépendante des décisions
gouvernementales et des trajectoires climatiques, tout en mettant en évidence les mesures
supplémentaires nécessaires pour combler les écarts entre les objectifs et les résultats attendus.
Ces évaluations sont basées sur des données scientifiques fournies par l?Agence suédoise de
l?Environnement et sont publiées annuellement.
Créé par la loi climat de 2008, le Comité pour la changement climatique (« Committee for Climate
Change ») au Royaume-Uni occupe un rôle central dans l?évaluation des politiques climatiques
(sur l?adaptation comme sur l?atténuation) et la définition des budgets carbone. Son mandat est par
ailleurs renforcé par l?articulation étroite qu?il entretient avec le Parlement britannique et l?obligation
donnée au gouvernement de répondre aux recommandations du comité d?experts.
Grâce à cette approche, les décisions politiques sont ajustées régulièrement pour aligner les
actions avec les objectifs climatiques. En Irlande, en 2023, l'EPA a signalé que le pays n'atteindrait
qu'une réduction de 29 % des émissions d'ici 2030, bien en deçà de l'objectif de 51 %. Ce constat
a conduit à une révision des priorités et des politiques climatiques, notamment dans les secteurs
de l?agriculture et du transport, pour réduire cet écart. L?EPA continue de jouer un rôle central en
fournissant des données scientifiques indépendantes pour guider les ajustements nécessaires. En
Finlande, le « Panel climatique », un organe scientifique indépendant, a publié en 2024 un rapport
soulignant l'insuffisance des efforts dans le secteur UTCATF (utilisation des terres, changement
d?affectation des terres et foresterie). Il a recommandé des actions immédiates pour restaurer les
puits de carbone, ce qui a incité le gouvernement à revoir ses politiques forestières et à allouer des
financements supplémentaires à la gestion durable des forêts.
Par ailleurs, bien que non appliqué pour le moment aux sujets climatiques, le Royaume-Uni a
également expérimenté un modèle original d?évaluation des politiques publiques : le réseau des
« What Works Centres », centres thématiques chargés de faire la synthèse des connaissances
dans leur domaine afin d?éclairer la décision publique. Pour évaluer leurs politiques, les ministères
britanniques s?adressent régulièrement à des consortiums d?acteurs externes réunissant des
universités, des organismes indépendants de recherche et des cabinets de conseil. Cette
externalisation constitue pour la presse et l?opinion publique une garantie de qualité des
évaluations et de crédibilité de leurs résultats. Depuis 2015, un panel d?experts de l?administration
et du monde académique, le « Cross- Government Trial Advice Panel » (CG-TAP), est également
à la disposition des ministères pour les aider à mettre en oeuvre des évaluations d?impact. Avec
24 L?indépendance dont il est fait mention ici renvoie à une indépendance par rapport au pouvoir politique, au sens
autorité administrative indépendante en France, et par rapport aux lobbies économiques et sociétaux (syndicats et
monde associatif notamment).
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 37/60
une approche similaire, l?Académies des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (NASEM) aux
Etats-Unis, organisation privée à but non lucratif qui regroupe de grands chercheurs du pays, publie
des rapports sur les thématiques de la transition écologique, tels que « l?Accélération de la
décarbonation aux Etats-Unis » (2024), « L?intégration du changement climatique et de la politique
climatique dans la modélisation macro-économique » (2024), « Intégrer les sciences humaines
pour adapter les réponses sociétales aux changements environnementaux » (2023), produisant
une évaluation externe de l?action de l?administration fédérale.
La question de l?aspect contraignant ? que la contrainte s?appuie sur la norme ou sur une pression
sociale et morale ? de ces modalités de contrôle et d?évaluation est également centrale dans leur
capacité à réorienter les politiques publiques. Ainsi en Afrique du sud, le rôle d?évaluation joué
depuis 2020 par la Commission présidentielle sur le climat renforce le message critique sur le
retard pris dans la mise en oeuvre des politiques, que les autres dispositifs d?évaluation sud-africain
sur le climat et la biodiversité, de par leur nature non contraignante, ne pouvaient pas porter.
Le modèle français de planification écologique ne dispose pas d?un tel outil d?évaluation. Certes,
le Haut Conseil pour le Climat (HCC), créé en 2018, joue un rôle d?évaluation étant un organisme
indépendant chargé d'évaluer l'action publique en matière de climat. Composé d'experts issus de
diverses disciplines, il analyse la cohérence des politiques françaises avec les engagements
nationaux et internationaux, notamment l'Accord de Paris, et formule des recommandations pour
améliorer leur efficacité. Il publie des rapports annuels et des avis spécifiques évaluant les progrès
de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le respect des budgets
carbone, et l'adaptation au changement climatique, publications ayant vocation à éclairer les
décideurs politiques et le public sur l'état de la transition écologique en France. Néanmoins, la Cour
des comptes, avec l'appui du HCC, a publié en mars 2024 un rapport intitulé « Évaluation annuelle
de la mise en oeuvre des mesures prévues par la loi climat et résilience » qui conclut que les
dispositifs actuels de suivi et d'évaluation des politiques climatiques sont insuffisants pour mesurer
efficacement les progrès réalisés et que plusieurs recommandations du HCC, notamment en
matière de gouvernance et de coordination des actions climatiques, n'ont pas été entièrement
suivies d'effets. En mai 2023, l'IGF a publié un rapport intitulé « Adaptation de la fiscalité aux
exigences de la transition écologique » recommandant une refonte de la fiscalité pour mieux
intégrer les objectifs climatiques, en ligne avec les préconisations du HCC sur l'utilisation
d'instruments fiscaux pour encourager la transition écologique, et insistant sur la nécessité d'un
suivi rigoureux des dépenses publiques liées à l'environnement, rejoignant les recommandations
du HCC sur la transparence budgétaire et l'affectation des ressources. Cependant, non seulement
il ne dispose pas de l?autorité nécessaire pour imposer les constats que font apparaitre ses
évaluations, mais en outre, le HCC est centré uniquement sur les enjeux climatiques, et non sur
les autres aspects de la transition écologique. Ce constat a déjà fait l?objet d?évocation de réformes
telles qu?une évolution du HCC ou la création d?un Défenseur de l?environnement sur le modèle de
celui du Défenseur des droits, mais ces idées n?ont jamais prospéré.
La France doit se doter d?une entité d?évaluation de sa planification
écologique indépendante et reconnue qui appuiera le SGPE dans sa démarche de pilotage
de la planification écologique.
2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité
politique
L?obligation de rendre des comptes sur la mise en oeuvre de la planification écologique est cruciale
pour garantir la transparence et l?efficacité des politiques publiques, mais aussi leur acceptabilité
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 38/60
sociale. Le narratif de la transition doit s?appuyer sur une redevabilité politique afin d?être
appréhendé et déployé par les élus locaux du pays. Le Parlement peut ainsi avoir un rôle à jouer
quand il est associé à la prise de décision sur la planification écologique ou à l?évaluation de cette
politique, étant alors en capacité de constater les difficultés rencontrées par les pouvoirs publics
en charge. C?est ce pari d?association du Parlement que font les Pays-Bas, la Finlande, la Suède,
le Danemark ou encore l?Irlande et le Royaume-Uni.
Ainsi, en Irlande, le Premier ministre publie annuellement un rapport d?étape sur les progrès
réalisés dans le cadre du Plan d'action climat. Ce rapport est complété par les analyses de l?EPA
qui alimentent les débats parlementaires avec des projections et des évaluations des politiques
mises en oeuvre. Ces échanges permettent d?identifier les lacunes et d?ajuster les stratégies,
renforçant ainsi la redevabilité du gouvernement envers le Parlement et les citoyens. En Suède, la
loi cadre climatique impose au gouvernement de publier chaque année un rapport intégré au projet
de loi de finances. Ce document évalue l?écart entre les objectifs climatiques et les résultats
obtenus, permettant une comparaison transparente des trajectoires. Le Parlement utilise ces
rapports pour surveiller et débattre des performances du gouvernement en matière de transition
écologique. À Singapour, les « Committee of Supply » sont des plateformes où chaque ministère
présente et justifie ses actions devant le Parlement lors des discussions budgétaires annuelles.
Cette démarche permet d?assurer une redevabilité politique sur la mise en oeuvre des initiatives du
Plan Vert (« Green Plan ») et d?informer les décisions budgétaires à venir. Au Danemark, chaque
année, le Ministère du Climat, de l?Énergie et de l?Approvisionnement, est chargé de présenter au
Parlement un programme climatique (« klimaprogram »). C?est l?occasion de faire le point sur le
niveau de réalisation des objectifs nationaux tout comme des initiatives et mesures prévues en
matière de climat.
La planification écologique ne fait pas en France l?objet d?une présentation systématique devant le
Parlement. Elle ne fait donc pas l?objet d?une confrontation en matière de redevabilité politique, ce
qui affaiblit sa capacité à être appréhendée par le personnel politique. Une opération de formation
à très grande échelle de l?administration publique à la transition écologique a été lancée dans le
cadre de la planification écologique. Une même démarche n?a pas été menée auprès des députés
ou des sénateurs, ni des élus régionaux ou locaux en dehors de la déclinaison territoriale
actuellement engagée de la planification écologique. Leur adhésion à la transition n?est donc pas
garantie par une démarche d?échange ou d?information et peut donc pâtir d?un déficit de
compréhension fine des enjeux mais également de la perception des contraintes dans sa mise en
oeuvre. Pire, la création d?instances citoyennes sans rôle clairement défini au préalable, telle que
la convention citoyenne pour le climat, a conduit les parlementaires à se sentir dessaisis de leur
rôle de législateurs sur ces enjeux les poussant à diverses surenchères lors de l?adoption de la loi
climat-résilience, ce qui a largement compliqué les débats et conduit à l?abandon ou la réduction
de l?ambition de certaines mesures.
La planification écologique doit faire l?objet d?un suivi annuel devant le
Parlement, qui permettra d?évaluer si la trajectoire est respectée et de définir les mesures à
mettre en place si ce n?est pas le cas. Ce suivi sera alimenté par la publication en amont
d?un rapport annuel de l?organe d?évaluation indépendant.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 39/60
2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire
de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation
pluriannuelle
2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court
(2030), moyen (2040) et long (2050)
Une planification écologique efficace repose sur une trajectoire claire, articulée autour d?échéances
courtes, moyennes et longues. Cette approche garantit une visibilité accrue pour les acteurs
économiques et permet de déployer des politiques ambitieuses.
Singapour dispose d?un plan à long terme, révisé en 2021, pour projeter son développement sur
50 ans. Ce plan inclut des projets ambitieux comme la reconquête de terres sur la mer avec le
projet "Long Island" pour répondre à la montée des eaux. Les infrastructures urbaines,
économiques et naturelles sont intégrées dans cette vision, renforçant la résilience climatique tout
en garantissant la durabilité urbaine. Cette perspective de long terme garantit la confiance des
acteurs économiques qui nous l?ont exprimé lors de notre visite sur place. L?Indonésie articule sa
planification autour d?un plan national de développement à long terme (RPJPN), couvrant 20 ans,
et d?un plan à moyen terme (RPJMN), révisé tous les 5 ans pour refléter les priorités présidentielles.
Adopté en janvier 2024, le RPJPN "Indonésie Dorée 2045" cible la neutralité carbone et intègre
des objectifs socio-économiques et écologiques, tels que le renforcement des capacités face aux
chocs environnementaux. Ce plan de long terme permet d?assurer que la transition entre deux
présidents ne remettra pas en cause les engagements de long terme, tout en laissant la place aux
adaptations politiques découlant nécessairement des changements démocratiques.
L?Union européenne développe également des plans climatiques basés sur des échéances
multiples. Par exemple, la stratégie 2030-2050 fixe des objectifs intermédiaires en termes de
réduction des émissions et d?adaptation, tout en proposant des mécanismes financiers à long terme
pour soutenir les transitions nationales. Les Pays-Bas ont mis en place une planification à long
terme de la gestion de l?eau, essentielle dans un pays en partie situé sous le niveau de la mer. Leur
approche inclut des mesures pour la prévention et la gestion des inondations, combinant solutions
infrastructurelles et préservation des écosystèmes. Cette stratégie repose sur une vision à 50 ans,
garantissant la sécurité hydrique tout en répondant aux défis climatiques. Au Royaume-Uni, des
objectifs de long et moyen terme (réduction des émissions de GES de 81% d?ici 2035 par exemple)
s?accompagnent de planifications successives sur 5 ans, sous la forme de budgets carbone, ce qui
permet d?allier une planification de long terme avec des échéances de plus court terme sur
lesquelles le gouvernement est redevable.
Une telle visibilité est particulièrement importante pour accompagner les politiques d?adaptation
(Pays-Bas sur les inondations), de reconquête de la biodiversité (Costa Rica avec la reconquête
forestière, Afrique du sud avec les aires protégées) mais également dans des objectifs de
transformation de filières économiques - politique agricole, réindustrialisation ? (voir l?exemple de
Singapour sur l?eau et la politique industrielle) ou de gestion de l?étalement urbain (Portland,
Singapour).
La planification écologique de la France se limite à 2030 et peine à décliner des objectifs pour 2040
et au-delà, même si l?objectif de neutralité carbone en 2050, celui de l?absence d?artificialisation
nette en 2050 ou les objectifs intermédiaires fixés à l?échelle communautaires devraient la pousser
dans cette direction. Ce manque de visibilité nuit à la crédibilité de la politique et encourage sa
remise en cause régulière.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 40/60
La France doit se doter d?une planification à échéance 2040 et à
échéance 2050 qui doit intégrer ses objectifs en matière d?adaptation et de reconquête de
la biodiversité.
2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements
publics pluriannuels
Une fois le calendrier de la transition établi sur les court, moyen et long termes, cette visibilité
calendaire sur le plan de transition écologique nécessite d?être accompagnée de perspectives
budgétaires permettant la mise en oeuvre des actions du plan. La planification de la transition
écologique doit ainsi faire l?objet d?une planification budgétaire claire et pluriannuelle. Cette visibilité
apporte de la certitude aux investissements publics et privés qui doivent être engagés. Sans une
telle visibilité, l?action est freinée et peine à se déployer.
La Commission européenne l?avait bien compris lors du lancement du Plan vert de l?Union
européenne : il s?appuie sur l?annonce de 1 000 milliards d?euros d?investissements durables au
cours de la décennie. Ce plan combine des fonds provenant du budget de l'UE, du système
d'échange de quotas d'émission (ETS) et du programme InvestEU, qui vise à attirer des
investissements publics et privés. Les fonds de cohésion de l'UE soutiennent les pays et régions
dans la mise en oeuvre de projets contribuant au « Green Deal ». Les États membres doivent
consacrer au moins 30 % des fonds reçus du Fonds européen de développement régional (FEDER)
à ces priorités. De plus, 37 % du Fonds de cohésion est spécifiquement destiné à atteindre la
neutralité climatique d'ici 2050. La politique agricole commune a également été renforcée dans son
volet environnemental (au moins en affichage au niveau européen) pour accompagner la stratégie
de la ferme à la fourchette. Cette programmation budgétaire de l?Union européenne a facilité la
planification budgétaire nationale des Etats membres, qui se sont également appuyés sur les plans
de relance post crise COVID lancés au sein de l?UE.
De même, l?administration Biden aux Etats-Unis a déployé sa politique climatique dans le cadre
d?une « nouvelle politique industrielle » qui s?est traduite par cinq lois appuyées sur des
financements publics : la loi sur l?énergie de décembre 2020 prévoit 7 milliards de dollars sur 5 ans,
la loi bipartite sur l?infrastructure de novembre 2021 y consacre 454 milliards de dollars, la loi sur
la réduction de l?inflation (Inflation réduction Act) d?août 2022 prévoit 370 milliards de dollars sous
forme de crédits d?impôt, de subvention et de prêts, l?acte « puces et sciences » prévoit enfin plus
de 60 milliards de dollars pour la recherche-développement (semi-conducteurs, technologies sans
fil notamment).
Cette problématique se retrouve dans d?autres pays : l?annualité budgétaire ou l?émergence de
nouvelles priorités nuisent à la mise en place de financements pluriannuels et rendent le
financement de la planification écologique dépendant des autres choix budgétaires, parfois en
contradiction avec son inscription dans le temps long.
L?usage de fonds dédiés à la transition écologique ? comme le Fonds vert en France ? permet aux
pays l?affichage des subventions publiques affectées au plan de transition écologique et peut, en
cas d?affectation de certaines recettes, à la fois garantir un financement pluriannuel et faciliter
l?acceptation par la population du financement de la transition de long terme, prenant notamment
appui sur le principe pollueur-payeur.
Depuis 2023, l?Allemagne s?est dotée d?un fonds pour le climat et la transformation (KTF), alimenté
par les recettes du système national de tarification du CO?, c'est-à-dire la taxe carbone appliquée
aux émissions provenant de la combustion de combustibles fossiles. Cependant, en novembre
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 41/60
2023, la Cour constitutionnelle fédérale allemande a déclaré inconstitutionnel le transfert de
60 milliards d'euros de crédits non utilisés, initialement destinés à la gestion de la pandémie de
COVID-19, vers le KTF. Cette décision a entraîné une révision du financement du fonds,
nécessitant des ajustements pour maintenir les programmes clés de financement de l'énergie et
des infrastructures. La Belgique a également mis en place un « Fonds de transition écologique »,
dont la mission est valable pour 30 ans et renouvelable, et qui sert de courroie de transmission
pour les fonds européens vers les entreprises et les projets de réduction des émissions. Le
Danemark a annoncé en juin 2022 la mise en place d?un « Fonds Vert » de 53,5 milliards de
couronnes (7,2 milliards d?euros) provenant de recettes fiscales qui devraient alimenter les caisses
de l?Etat entre 2024 et 2040. C?est également le cas en Finlande, en Irlande, aux Pays-Bas, au
Japon, à Singapour.
Hors Union européenne, les pays recourent également à des fonds dédiés. Le Rwanda appuie sa
politique de transition environnementale sur un fond spécifique : le « Rwanda Green Fund » ou
FONERWA, établi dès 2012. Le Brésil a doté sa politique sur le changement climatique d?un fond
fédéral spécifique, doté notamment de 10 milliards de reals par la levée d?obligations vertes. Il a
même plus récemment doté sa politique forestière d?un Fonds national pour la mise en valeur des
forêts, outil de sa planification forestière à grande échelle. Il est également question en Chine d?un
« fonds national de transformation à faible émissions de carbone » ou d?un fonds de
développement vert
Ces fonds peuvent être utilisés par les pays pour doter les collectivités locales afin d?accompagner
la transition écologique sur le terrain. Ainsi, depuis la mise sur pied du plan climatique renforcé du
Canada en décembre 2020, le gouvernement a investi 247 millions de dollars au moyen du Fonds
pour une économie à faibles émissions de carbone dans 21 programmes provinciaux et territoriaux
de rénovation de maisons et de bâtiments. En Indonésie, le fonds pour le changement climatique,
bien que piloté par le BAPPENAS, est directement chargé de financer des programmes provinciaux
et locaux en mobilisant des ressources nationales et internationales.
Le Danemark dispose d?un Fonds d?investissement pour les pays en développement, afin de
clarifier l?usage de ses financements publics de coopération internationale dans le domaine de la
transition climatique et environnementale.
Au-delà de son fond climat assez classique, la Finlande dispose d?un Fonds public
d?investissement pour l?innovation (Sitra), fondation dont l?objectif est de « promouvoir un
développement stable et équilibré en Finlande, une croissance économique qualitative et
quantitative et une compétitivité et une coopération internationale ». Cette fondation est
responsable devant le Parlement mais pas devant le gouvernement. Sa capitalisation était évaluée
à 771 millions d?euros en 2017. Elle fonctionne à la fois comme un « think-thank » et comme une
société d?investissement. Créée en 1967 dans le cadre de la Banque de Finlande, la majeure partie
de sa dotation actuelle provient d?un don d?actions Nokia du Parlement finlandais de 1992. Le fonds
dépense environ 30 millions d?euros par an correspondant au rendement de sa dotation. Il investit
principalement dans des entreprises et des start-ups pour créer de nouvelles activités rentables.
Le manque de transparence sur les financements accordés à la transition écologique que nous
avons rencontré dans nos recherches démontre que l?enjeu est commun à tous les pays. Nous
recommandons donc qu?une analyse approfondie des financements de la transition écologique soit
menée, pour compléter la première approche faite dans ce rapport. Les outils de dépense publique
sont en effet un très bon indicateur de la capacité des pays à respecter leurs engagements.
En Suède, le suivi de l?atteinte des objectifs est effectué par le gouvernement, chaque année dans
le cadre du rapport « climat » du PLF (avec l?appui des Agences nationales, dont l?Agence de
protection de l?Environnement Naturvårdsverket). Ainsi un relèvement de 8% au premier semestre
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 42/60
2024 des émissions suédoises a été évalué comme principalement dû à l?augmentation de la
consommation des carburants routiers fossiles entretenue par la décision du nouveau
gouvernement de réduire le taux d?incorporation des biodiesels à 6% (contre 50% en volume
précédemment).
Faisant ressortir l?importance de la programmation budgétaire de la transition écologique, « l?Irish
Fiscal Advisory Council », organisme de surveillance budgétaire de l?Irlande, a publié en octobre
2023 un rapport sur l?impact du changement climatique sur les finances publiques, faisant partie
d?une série de recherche sur la viabilité à long terme des finances publiques, en lien avec le
changement climatique. Le rapport estime le coût de l?ensemble des dépenses publiques
nécessaires pour atteindre les objectifs climatiques irlandais en suivant une « transition juste »,
telle que décrite par la législation adoptée. Le rapport modélise deux scénarios pour les dépenses,
l?un de coût faible correspondant à la limite inférieure de l'implication potentielle de l'État, et l?autre
de coût élevé considéré comme une estimation supérieure raisonnable, tout en reconnaissant que
ces coûts pourraient être encore plus élevés. Entre 2026 et 2030, le gouvernement devrait
dépenser entre 0.6% et 1.1% du GNI par an (1.6 à 3 milliards d?euros en valeur actuelle) pour
assurer une transition climatique.
L?accompagnement par une programmation budgétaire ambitieuse du plan lors de son adoption
par la France (loi de finances pour 2024) avait initialement assis la planification française dans une
perspective budgétaire claire. Le fonds vert permettait notamment le co-financement par l?Etat
d?actions dans les territoires, méthode dont l?efficacité avait été testée lors du premier plan de
relance post Covid. Suite à la dégradation des finances publiques, la remise en cause des
financements attribués à la transition écologique n?a pas fait l?objet d?une évaluation de ses
conséquences, et notamment du coût du retard de la mise en oeuvre de certaines actions.
La France doit se doter d?une loi d?orientation budgétaire pluriannuelle
de la transition écologique et prévoir la mise en place de fonds dédiés au financement de la
transition pouvant permettre de mutualiser des financements publics et privés.
2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les
échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en
favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens
2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires
La planification écologique, une fois établie et financée, doit ensuite se déployer au plus près des
territoires. Elle doit être appropriée par les échelons locaux, adaptée aux réalités géographiques
et économiques des territoires. Elle doit pour cela s?appuyer sur des outils permettant sa
déclinaison. Et faire l?objet de financements clairs et identifiés, d?un montant adapté à la taille des
projets d?échelle locale.
La politique forestière du Costa Rica est un exemple de déclinaison territoriale efficace d?une action
de transition dont les résultats sur le long terme sont indéniables. Elle combine plusieurs outils de
politique publique, visant plusieurs actions en parallèle (loi contre la conversion de la forêt N°7575,
programme d?aires protégées) : la réduction de la déforestation 25 et l?accroissement de la
25 50 000 ha/an dans les années 80, 38 000 ha/an dans les années 90 et 27 000 ha/an depuis 2000.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 43/60
régénération de la forêt26, permettant à la fois la protection de la forêt et son exploitation soutenable,
mais aussi la diversification agricole, la protection de la biodiversité et des ressources en eau, la
réduction des émissions de gaz à effet de serre, le développement rural et la participation de la
société dans toutes ces composantes (peuples autochtones, professionnels de la forêt et de
l?agriculture). Le programme dispose également d?un financement clairement identifié au sein du
FONAFIFO (Fond de financement de la forêt nationale), alimenté en partie par des ressources
extérieures (financement REDD+ de la Banque mondiale)27 et s?appuyant sur des outils innovants
de financement (Forest Bond Certificate CAF, Forest Bond Certificate for forest management
CAFMA, paiements pour services environnementaux).
Le principal acteur des territoires étant les collectivités, c?est en premier lieu auprès d?elles que doit
se déployer la planification de la transition.
En Afrique du sud, les provinces et les municipalités doivent décliner la planification climatique
nationale. Ainsi, la province du Cap occidental est régulièrement en première ligne pour proposer
divers plans de planification écologique : sa « Climate Change Response Strategy ? Vision 2050 »
a été publiée en 2022 puis révisée en 2023, et son « Energy Resilience Program » (2021) définit
les actions à engager dans le secteur électrique de la région. La ville du Cap est particulièrement
volontariste et a adopté divers stratégies et plans depuis 2014 (Resilience Strategy en 2019, Water
Strategy en 2019, Inclusive Economic Growth Strategy en 2019, Bioregional Plan en 2015,
Integrated Coastal Management Policy en 2014). En Indonésie, le plan national de développement
à moyen terme est décliné dans les territoires via les RPJMN. Ils sont mis en oeuvre par les
administrations techniques décentralisées au niveau de chaque province ayant à leur tête un
gouverneur. Etablis pour 5 ans, ils font l?objet d?une élaboration concertée, qui s?appuie sur une
analyse de la situation, la formulation de scénarii environnementaux et l?identification de
recommandations stratégiques. En parallèle, les gouvernements provinciaux doivent également
rédiger leurs plans de réduction des émissions de GES ? les RAD-GRK. Les villes indonésiennes
disposent également de leurs plans de réduction des émissions.
Au Danemark, les régions sont pleinement associées à l?élaboration et à la mise en oeuvre de la
transition verte du Royaume. Les régions et la fondation danoise Sustainia28, qui met en contact le
monde des affaires et le monde scientifique, ont uni leurs forces pour remettre une feuille de route
au Gouvernement sur la manière dont les régions peuvent faciliter la participation et l?inclusion
citoyennes dans la transition vers une société durable. Le Danemark est en passe de devenir le
premier pays au monde où chaque municipalité (98) disposera d'un plan d'action climatique.
La loi finlandaise a été modifiée le 1er mars 2023 pour ajouter une obligation pour les municipalités
d?établir un plan climat et de le mettre à jour au moins une fois par mandat municipal. Ce plan
devait inclure l?objectif de réduction des émissions, et des mesures pour atteindre ces objectifs.
Chaque municipalité avait droit à une subvention de 45 000 euros maximum pour l?élaboration de
son plan. Ces plans devaient être élaborés entre 2025 et 2029 mais le programme du nouveau
gouvernement Petteri Orpo a prévu de supprimer cette mesure ainsi que les subventions afférentes
en novembre 2023 dans le cadre du budget national et des réformes proposées par le gouverne-
ment Orpo pour l'année 2024.
26 De 417 000 ha de forêt régénérés en 1986, la couverture atteint 918 000 ha en 2013.
27 200 millions de dollars entre 1998 et 2011
28 Sustainia, anciennement « Copenhagen Climate Council », est une collaboration mondiale entre le monde des
affaires et le monde scientifique, fondée par Erik Rasmussen, fondateur du principal groupe de réflexion
indépendant de Scandinavie, Monday Morning, basé à Copenhague, et aujourd'hui dirigée par Rasmus Schjødt
Larsen, diplômé de Harvard https://sustainiaworld.com/about/
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https://sustainiaworld.com/about/
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 44/60
Bien que n?ayant pas l?obligation de le faire, la plupart des Länder allemands ont adopté leur propre
stratégie ou législation climat, formulant leurs propres objectifs sectoriels et prévoyant des outils
de déploiement régionaux. En se basant sur l?étude menée par « Climate chance »29, on compte
12 des 16 Länder et villes-Etat à avoir adopté une législation permettant de coordonner les actions
de transition climatique à l?échelle régionale30. Huit d?entre elles31 incluent un objectif quantifié de
réduction des émissions de GES.
L?appropriation des enjeux par les échelons locaux se retrouve également dans la définition de la
politique de l?eau néerlandaise. Elle s?appuie sur un ancrage local historique qui permet de penser
la gestion de l?eau et du risque, en amont et au quotidien.
Aux Etats-Unis, la Californie dispose d?une politique climatique autonome de celle du
gouvernement fédéral. En novembre 2022, elle a adopté une loi visant la réduction de ses GES de
48% d?ici 2030 et l?atteinte de la neutralité carbone d?ici 2045, le tout soutenu par un budget de
52 milliards de dollars sur 5 ans. Elle a même mis en place son propre marché carbone qui couvre
85% des émissions dont les transports et le logement, et est connecté au marché carbone du
Québec. Les « Sustainable Communities Strategies », mises en place en Californie (SB 375)
donnent un cadre pour la réduction des émissions de GES pour les transports et la planification
urbaine, en cohérence avec les autres lois de l'Etat. Les organisations métropolitaines de
planification de l'Etat (18 en tout) sont tenues d'élaborer des infrastructures urbaines permettant
d'augmenter la densité (transports en commun, infrastructures cyclables et piétonnes, réduire la
dépendance automobile, ou agir sur l'étalement urbain).
A l?inverse, une mauvaise appropriation des enjeux à l?échelon local peut conduire à des retards
dans la mise en oeuvre voire à des déclinaisons inappropriées. Ainsi en Indonésie, la
décentralisation mise en oeuvre très rapidement à la fin de la dictature de Suharto, pourtant axée
sur l?autonomisation des provinces, a conduit à une autonomisation de groupes clientélistes
s?appuyant sur des réseaux oligarchiques, favorisant les passe-droits d?exploitation, les incendies
criminels et la pêche illégale, contre lesquels le gouvernement actuel lutte encore.
De même, la déclinaison verticale descendante de la planification chinoise s?est heurtée à des
retards de mise en oeuvre et de la corruption aux échelons locaux. La très grande fragmentation
de la structure administrative en Chine l?explique également. C?est dans ce cadre que la Chine a
eu recours à une réforme administrative en 2026 pour renforcer l?autonomie des bureaux de
protection de l?environnement (BPE) préfectoraux, dans le but d?éviter la double tutelle qu?ils
subissaient des échelons préfectoraux et provinciaux. Et cela explique également la mise en place
du « crédit social ». Ce système de notation des citoyens, des entreprises et des fonctionnaires
locaux conduit à la distribution de récompenses, mais aussi et surtout de pénalités pour ceux ne
respectant pas les règles, en s?appuyant sur une collecte automatique de données et leur
traitement par des intelligences artificielles.
La France a mis en place une déclinaison territoriale de sa planification écologique dans le cadre
des COP, qui se déroulent dans les régions françaises depuis l?automne 2023. A ce stade, cette
démarche ne s?est pas traduite par des plans régionaux. Elle englobe un état des lieux de la région
pour établir un diagnostic partagé. Elle doit permettre l?articulation de la planification écologique
régionale avec la planification nationale et la coordination avec les plans locaux. Elle doit définir
29 https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/
30 La Bavière a adopté une réforme de la Loi bavaroise sur la protection du climat en janvier 2023 (BayKlimaG)
avec des objectifs climatiques plus ambitieux que les objectifs fédéraux (neutralité climatique à l?horizon 2040). La
Basse-Saxe a adopté une révision de la Loi sur la protection du climat (NKlimaG) en décembre 2023.
31 Sauf celle d?Hambourg qui veut pourtant atteindre la neutralité carbone. Celle du Land de Hesse a des objectifs
en matière d?ENR et de quota de rénovation des bâtiments.
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https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 45/60
des mesures concrètes permettant le soutien aux projets à l?échelon local. Cette approche qui se
veut à la fois montante et descendante doit permettre une meilleure association des échelons
locaux dans le déploiement de la planification écologique.
Impliquer tous les acteurs des territoires de l?élaboration jusqu?à la mise
en oeuvre
2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les
structures des territoires pour mobiliser les citoyens
La planification écologique dans les territoires doit s?appuyer sur l?ensemble des acteurs locaux
pour assurer son ancrage et son efficience et sur des outils adaptés à ces enjeux, notamment en
matière de financements.
2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la
planification
Les principaux porteurs de ces politiques sont les collectivités locales et elles sont donc le principal
vecteur de la traduction concrète des actions de la planification écologique, en s?appropriant les
objectifs de la planification ou de la stratégie nationale.
En Inde, des États comme le Gujarat et le Rajasthan sont des leaders dans le déploiement de
l?énergie solaire. Dans le domaine agricole, l?État du Sikkim a mis en place une politique axée sur
la transition écologique, lui permettant de devenir le premier État indien entièrement bio en 2016,
grâce à une interdiction complète des pesticides et engrais chimiques. Cette initiative s'inscrit dans
une stratégie de développement durable qui vise à protéger les sols, améliorer la santé publique
et soutenir les petits agriculteurs.
En Afrique du sud, le Cap, Johannesburg et Durban sont membres du C40 « Cities Climate
Leadership Group », qui rassemble environ cent maires de grandes villes mondiales décidées à
faire face à la crise climatique. En comparaison, seule Paris est membre de ce réseau en France.
Plusieurs villes appartiennent également à l?« International Council for Local Environmental
Initiatives » (ICLEI) ou au réseau « Resilient cities ». La « South African Local Government
Association » (SALGA) apparait comme l?organe compétent pour assurer la remontée des
revendications locales dans la mise en oeuvre de ces stratégies climatiques, établissant un
dialogue avec l?échelon central. S?appuyant sur l?exemple allemand développé ci-dessous, le pays
a également mis en place un « Local government climate change support program » depuis 2012
qui fonctionne avec une plateforme internet fournissant guides, outils, jeux de données, formations.
En effet, l?Allemagne déploie depuis 2012 un dispositif de soutien pour les collectivités dans la mise
en oeuvre de la transition climatique : l?initiative nationale pour la protection du climat (NKI) qui fête
ses 15 ans d?action. Elle dispose d?un site internet dédié, affiche plus de 45 000 projets réalisés,
1,5 milliards d?euros de financements distribués. Parmi ses projets emblématiques, le centre
historique de la ville de Lemgo est climatiquement neutre grâce à un projet de chauffage urbain
réutilisant la chaleur des eaux usées ou le projet de transformation de l?éclairage urbain au LED
mis en place dans 48 communes de la haute Hesse. Depuis avril 2023, une « Agence de protection
locale du climat » appuie les collectivités dans la mise en oeuvre de leur projet climatique depuis
les méthodologies de calcul des émissions jusqu?aux financements pour les projets, en sus d?outils
de formation et de mentorat. Cette démarche s?appuie sur le KTF évoqué dans la section
précédente. Pour aller au bout de leur démarche, les collectivités utilisent également leur système
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 46/60
comptable (BISKO) lors de l?établissement de leur bilan énergétique et des émissions de GES ce
qui permet la traçabilité des démarches entamées. De même, la Finlande dispose depuis 2018
d?un Programme de solutions climatique municipales (2018-2023, 8 millions d?euros) pour financer
des projets climat des communes et des régions.
Mais les outils de la planification doivent également pouvoir s?adresser aux autres acteurs du
territoire.
2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification
En premier lieu, les acteurs économiques doivent pouvoir être associés à la planification
écologique.
La Finlande a élaboré en coopération avec les acteurs de chaque secteur économique des feuilles
de route sectorielles. Cette approche est assez révolutionnaire car il s?agit de « feuilles de route
inversées » : ce sont les acteurs de chaque secteur qui élaborent ces feuilles de route,
régulièrement remises à jour. Cela permet au gouvernement lorsqu?il en fait la synthèse de disposer
d?une vision permettant notamment une meilleure adéquation des moyens. Une démarche du
même type a été mise en place aux Pays-Bas, avec en 2013 l?accord volontaire de l?énergie, puis
l?accord national pour le climat avec son plan d?action, qui associe les acteurs économiques à la
prise de décision sur les objectifs et leurs déclinaisons.
A la différence de certains pays, on observe en Suède un mouvement volontaire industriel de
décarbonation. Les bioénergies et l?électrification ont déjà fait chuter la part des énergies fossiles
à 19% de la consommation énergétique de l?industrie (contre 54% en 1975, comme en France
aujourd?hui). Les acteurs industriels concentrant les dernières sources fossiles (les plus difficiles à
éliminer car situées au coeur des procédés industriels comme le coke dans la production d?acier et
les émissions des process chimiques de fabrication du ciment) ont pris conscience de l?avantage
stratégique de décarboner leur production pour renforcer leurs ventes à court et moyen terme.
L?implication du monde économique est allée en Allemagne jusqu?à la création de nouveaux modes
de décision au sein des entreprises, poussés par les syndicats qui cherchent à accompagner la
transition et à ce que ces transitions s?opèrent dans le respect des droits des salariés et du maintien
de leurs emplois. Ils ont ainsi fortement plaidé pour la mise en place de primes devant
accompagner l?évolution des compétences des salariés sur leur poste de travail. Les syndicats
portent également une proposition de révision de la loi sur le conseil d?établissement (Betriebsräte),
dans lesquels ils ne siègent pourtant pas formellement : il est proposé que le conseil ait un droit
d?initiative et de codécision en matière de décisions destinées à mieux protéger l?environnement, y
compris l?évolution des modes de production ; l?instauration d?une commission environnementale
dans toute entreprise de plus de 100 salariés est également proposée.
Les outils doivent aussi permettre le financement des projets des acteurs du territoire, entreprises
comme citoyens. La Californie distribue des aides et des prêts sur l?ensemble des sujets
environnementaux et climatiques, dans le cadre d?appels à projets notamment. Ces subventions
proposées sont regroupées sur un seul portail, avec un moteur de recherche extrêmement fluide
et possibilité de traduction.
L?un des outils les plus complets apparait comme celui de la stratégie de transition économique de
Bruxelles capitale 2022-2030 : « Shifting economy ». Le programme vise à l?accompagnement de
la trajectoire climatique et environnementale de la région par une stratégie dont l?objectif est une
économie décarbonée, régénérative, circulaire, sociale, démocratique et digitale. Le programme
cherche à « aligner les objectifs économiques sur les objectifs climatiques » et s?adresse à
tous les acteurs économiques de la région. La « transition économique » est définie comme : « la
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 47/60
transformation progressive au sens large (qui va de l?adoption d?une démarche d?écogestion à des
changements fondamentaux de business model) des activités économiques bruxelloises (en ce
compris les sous-traitants et les fournisseurs bruxellois) dans la perspective de contribuer aux défis
sociaux et environnementaux locaux et globaux ainsi qu?à la création et au maintien d?emplois de
qualité à Bruxelles ». Dès 2024, les entreprises inscrites dans une démarche de transition
économique ou qui sont exemplaires sur le plan social ou environnemental bénéficieront d?une
majoration des aides économiques. A partir de 2030, les outils économiques de la région seront
concentrés sur le soutien aux entreprises qui auront fait le choix de l?exemplarité sociale et
environnementale. Certains outils sont déjà en place :
- « finance&invest.brussels » facilite le financement des entreprises en transition et vient d?être
recapitalisé (triplement de sa capacité financière avec 131 millions d?euros additionnels) ;
- adoption d?un « Plan régional pour l?innovation » (PRI) qui prévoit 400 millions d?euros de
financement entre 2021 et 2027 pour les domaines d?innovation stratégique ;
- lancement de « Renolution » alliance des secteurs privé et public pour atteindre le
triplemement du taux de rénovation du bâti bruxellois ;
- la Stratégie Qualification-Emploi portée par le ministre de l?emploi et de la formation.
La stratégie a été co-construite avec l?écosystème bruxellois. Au total, 280 participants ont été
impliqués dont 132 organismes publics ou privés (fédérations professionnelles et sectorielles,
experts, guichets d?économie locale, universités, etc).
2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire
L?association des citoyens au projet de planification écologique est un élément essentiel pour la
concrétisation des projets. De nombreux pays ont tenté d?inclure les citoyens dans la prise de
décision et organisé différentes modalités de concertation ou de consultation comme nous l?avons
vu précédemment. Mais c?est dans la traduction concrète des projets dans les territoires que se
mesure la qualité de l?association des citoyens et leur adhésion au projet.
En Afrique du sud, la gestion des aires protégées a offert la possibilité d?association des
propriétaires privés (25% des aires protégées appartiennent à des propriétaires privés) et des
communautés locales. Plusieurs projets présentent aujourd?hui une gestion partagée entre
l?autorité locale, les ONG et les communautés implantées. C?est par exemple le cas de la réserve
de la communauté Mabaso, qui a établi un plan de gestion de l?aire protégée en partenariat avec
WWF-SA.
En Indonésie, les consultations avec les communautés locales, notamment sur la gestion des
ressources naturelles et la reforestation, font partie intégrante de la planification. Les forums multi-
acteurs (Musrenbang) offrent un cadre où citoyens, ONG et autorité locales participent à la prise
de décision. Des plateformes locales existent au Costa Rica, initiatives locales impliquant
directement les citoyens, notamment sur la reforestation et la préservation de la biodiversité. Ces
efforts renforcent le lien entre les communautés et les objectifs nationaux de transition écologique.
En Allemagne, la concertation locale est profondément ancrée dans les processus de planification
écologique. Les initiatives citoyennes, comme les "Ratsbürger" (assemblées locales consultatives),
permettent aux habitants de co-décider sur des projets énergétiques et environnementaux. Les
Länder et les municipalités favorisent également les consultations pour intégrer les besoins
spécifiques des populations dans la mise en oeuvre des objectifs climatiques. Plusieurs pays ont
de même misé sur l?association de la jeunesse aux processus de réflexion sur la transition
écologique : c?est le cas de l?Irlande, du Danemark (Conseil des jeunes pour le climat) ?
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 48/60
Les outils doivent également couvrir l?information des citoyens. Ainsi, en matière d?adaptation, le
gouvernement de Californie a mis en place une série d?outils permettant l?information du grand
public sur les ilots de chaleur, les risques liés aux tempêtes et aux inondations, mais aussi pour les
collectivités avec notamment Adapt-CA, boite à outils de développement des capacités
d?adaptation32 ou CERI-climate qui gère les interventions d?urgence sur les 600 infrastructures
considérées comme essentielles à la capacité de l?Etat à réagir aux catastrophes.
En France, le SGPE s?est saisi de cet enjeu de l?association citoyenne qui semble être ressenti
comme un manque. Il a notamment développé un outil d?information/formation sur le plan (Le Bon
Plan), sans disposer pour autant des moyens nécessaires pour en assurer la diffusion. Il analyse
également les outils de déclinaison de la planification auprès des citoyens (aides directes pour
l?efficacité énergétique des bâtiments, l?achat de véhicules électriques) qui sont les meilleurs
moyens de constater le niveau d?adhésion de la population. Pourtant, l?incapacité à entrainer
certains secteurs économiques à forte composante sociétale (agriculture notamment) et la grande
majorité des citoyens qui restent peu conscient de la démarche de planification entamée par la
France nuit à la mise en oeuvre de ses travaux.
Poursuivre la mise en oeuvre territoriale de la démarche de planification
écologique en se concentrant davantage sur les outils à déployer, notamment budgétaires
et numériques, pour aider les collectivités au-delà des outils de rapportage, les acteurs
économiques dans le suivi de leurs transitions et les citoyens dans leur appréhension et
leur inclusion dans le processus de transformation.
2.6 La planification de la transition écologique est également un
outil pour la stratégie internationale climatique et
environnementale
La planification écologique apparait également comme un bon outil de diplomatie climatique et
environnementale.
Des pays s?appuient sur leur expérience de planification écologique et leurs résultats pour renforcer
leur positionnement dans les instances internationales : on citera notamment Singapour, le Costa
Rica, et le Rwanda. Mais on peut également mentionner le rôle de leader au sein de leur continent
que veulent jouer l?Indonésie, l?Afrique du sud ou le Brésil, comme porte-parole pendant les
négociations internationales mais également comme des pays cherchant un mode de
développement alternatif, s?appuyant sur une transition juste. Du côté des pays développés, le
Royaume-Uni et le Danemark poursuivent leur investissement à l?échelle internationale et
l?Allemagne dispose avec le GIZ d?un outil très puissant de coopération.
La diffusion de la planification écologique au sein de la plupart des pays pourrait permettre de
renforcer les outils internationaux existants au sein des 3 conventions de l?ONU : elle crédibilise
les politiques nationales pour l?accession à des financements internationaux et facilite la lutte contre
la corruption.
A l?issue de plus d?une année à examiner la planification écologique dans les autres pays, il apparait
clairement aux autrices du rapport une réelle appétence de nombreux pays rencontrés dans
différents contextes pour des coopérations internationales en matière de planification écologique.
Même si la planification écologique reste liée à un contexte national, les expériences et les outils
32 https://arccacalifornia.org/adapt-ca/
PUBLIÉ
https://arccacalifornia.org/adapt-ca/
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 49/60
mis en place par chacun sont très utiles pour la mise en place d?une planification plus efficiente.
Par ailleurs, peu de pays ont mis en place une planification écologique complète et peu parviennent
à déployer effectivement leur planification dans leurs territoires. Les mêmes obstacles sont souvent
rencontrés par les uns et les autres ce qui renforce encore la valeur du parangonnage.
La planification écologique pourrait donc devenir un nouvel outil de la stratégie diplomatique
climatique et environnementale de la France.
Faire de la planification écologique un nouvel outil de coopération
internationale et renforcer les partenariats avec les pays les plus susceptibles de faire
progresser la planification écologique française.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 50/60
Conclusion
La planification écologique se déploie donc dans la majorité des pays du G20 et de l?Union
européenne. Elle souffre le plus souvent des mêmes difficultés de mise en oeuvre, mais apparait
néanmoins comme le meilleur outil pour permettre d?assurer la transition. Avec son exemple de
planification écologique centralisée, la France dispose d?un outil puissant susceptible
d?accompagner sa transition. Les recommandations de ce rapport ont vocation à accompagner le
déploiement de cette planification et à faciliter sa mise en oeuvre, notamment sa déclinaison dans
les territoires.
L?utilité du parangonnage réalisé encourage à poursuivre la démarche, pour explorer certains pays
supplémentaires non étudiés (Espagne, Italie, Portugal notamment), ou approfondir certaines
situations n?ayant pas fait l?objet d?une étude suffisante par manque de temps et de moyens (Japon,
Canada). Mais c?est également sur le plan sectoriel que cet approfondissement mériterait d?être
réalisé. L?articulation entre les planifications et leur programmation budgétaire mérite en premier
lieu d?être creusée tant elle apparait comme l?une des clés de la réussite de cette démarche. Des
outils budgétaires innovants permettant de mieux garantir le financement de la transition, qu?ils
soient des outils fiscaux, d?affectation budgétaire, ou de recours à des financements externes
permettant d?associer mieux les acteurs économiques à la transition, méritent d?être expertisés.
Les difficultés rencontrées par certains pays et les réussites sur des secteurs pour lesquels la
transition écologique française patine pourraient également faire l?objet d?un approfondissement,
notamment en priorité la politique de souveraineté alimentaire et agricole. Enfin, certains exemples
très positifs de traduction de la planification dans les pays déjà étudiés pourraient faire l?objet
d?échanges avec les pays concernés notamment les outils développés par l?Allemagne, la Belgique
ou le Danemark en matière d?accompagnement des collectivités dans leurs projets de transition
climatique et environnementale et d?implication citoyenne dans la prise de décision et la mise en
oeuvre des politiques sur le terrain, notamment avec le rôle joué par le monde associatif.
Enfin, à l?issue de cette année consacrée à cette étude, il apparait clairement une appétence des
autres pays au-delà du cercle étudié pour la planification écologique française. Cet outil de
diplomatie climatique et environnementale doit être développé en accord avec le Ministère de
l?Europe et des Affaires Etrangères, l?AFD et Expertise France afin que le SGPE puisse à la fois
transmettre l?expertise française tout en recueillant des exemples et des outils utiles à la
planification française.
Barbara POMPILI
Virginie DUMOULIN
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 51/60
Annexes
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 52/60
Annexe 1. Lettre de mission IGEDD
PUBLIÉ
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PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 54/60
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre
THARYAT Tri République d?Indonésie Ambassador, Deputy Minister for
Multilateral Cooperation
28/11/2023
NAKAGAMI Hidetoshi Jyukankyo Research Institute Inc.Japan CEO&Founder
Delegation japan leaders
29/11/2023
FINK-HOOIJER Florika DG ENV Commission Européenne Directrice générale 08/12/2023
VAN VLEDHOVEN Stientje World Resources Institute Vice-présidente et Directrice
régionale Europe
08/12/2023
ANTTONEN Matti Ambassade de la Finlande en France Ambassadeur 06/02/2024
HEKKERT Marko Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur général 29/02/2024
STREMLER Jaco Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur Climat Air et Energie 29/02/2024
MINNESMA Marjan Fondation Urgenda ? Pays-Bas Directrice et Fondatrice 29/02/2024
VAN GINNEKEN Meike Ministère des Infrastructures et de l?Eau
Pays-Bas
Envoyée spéciale sur l?Eau et
directrice du Programme
international sur l?adaptation au
changement climatique et l?eau
29/02/2024
BONJER Jan Waterschap Hollandse Delta (Dutch Delta
Water Board) ? Pays-Bas
Président 29/02/2024
SPIERINGS Anne-Marie Transition du cluster industriel de
Rotterdam (DeltaLinqs) ? Pays-Bas
Directrice 29/02/2024
HEIJDRA Michel Ministère de l?Économie et du Climat
Pays-Bas
Directeur Général pour le Climat
et l?Énergie
01/03/2024
VRUGT René Ministère de l?Économie et du Climat
Pays-Bas
Directeur des sols, de
l?aménagement du territoire et de
l?adaptation au climat
01/03/2024
POLS Donald Association environnementale
Milieudefensie ? Pays-Bas
Directeur 01/03/2024
KERSTEN Kiki Central Bureau voor de Statistiek (CBS) ?
Pays-Bas
Central Bureau voor de Statistiek
(CBS)
01/03/2024
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 55/60
Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre
RAUTAVAARA Antti Centre for Peace Mediation de la
Finlande
Envoyé Spécial Eau 13/03/2024
SHANMUGARATNAM Tharman République de Singapour Président 15/05/2024
KHOR Dr. Amy Ministère du développement durable et de
l?agence publique de l?eau de Singapour
Senior Minister of State for
Sustainability and the
Environment
16/05/2024
TAN Adele Urban Redevelopment Authority of
Singapore
Chief Planner and deputy CEO 16/05/2024
TEO Joseph Ministry of Sustainability and the
Environment of Singapore
Chief Negociator for Climate
Change
17/05/2024
GUO Yiran Ministry of Sustainability and the
Environment of Singapore, National
Climate Change Secretariat, Singapore
Expert 17/05/2024
BHASKAR Ananda Ram National Environment Agency, Singapore Deputy Chief Executive Officier,
Environmental Portection Director-
General
17/05/2024
LESPAYANDEL Carine French Chamber of Commerce in
Singapore
Executive Director 16/05/2024
WIKODO Joko République d?Indonésie Président 20/05/2024
ADININGGAR Amalia BAPPENAS Indonésie Deputy for Economic Affairs 20/05/2024
YULASWATI Vivi BAPPENAS Indonésie Deputy for Maritime Affairs and
Natural Resources
22/05/2024
HENDIARTI Nani Ministre coordinateur des affaires
maritimes et de l?investissement
Ministre adjointe chargée des
questions environnementale et
forestières
23/05/2024
DHEWANTI Laksmi Ministère de l?environnement et des forêts Directrice générale de la lutte
contre le changement climatique
23/05/2024
KUSUMASTUTI Diana Ministère des travaux publics Directrice générale de « human
settlements »
23/05/2024
DUBEUX Rafael Ministère des Finances du Brésil Secrétaire exécutif adjoint et
coordinateur du plan écologique
17/06/2024
MOREL Julien Swedish Ministry of Climate and
Enterprise
Climate policy analyst 26/08/2024
VIATTE Loïc Expert français, ex-conseiller
Environnement à la RP suédoise
à Bruxelles
26/08/2024
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 56/60
Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre
PERSSON Asa Stockholm Environment Institute
Swedish Climate Policy Council
Research Director and Deputy
Director
Chair of the CPC
26/08/2024
ALTERA Ola Swedish Climate Policy Council Chief Executive 26/08/2024
FORSLUND Anna Swedish Agency for Nature Conservation Head of Unit Nature Analysis 26/08/2024
WIKHOLM Nanna Swedish Royal Institute of Technology
Natural resources department
Head of the Spatial Planning Unit 26/08/2024
VINNMYR Sabina Swedish Environment Protection Agency Senior scientific officer 26/08/2024
HANNERZ Fredrik Swedish Ministry of Climate and
Enterprise
Deputy-Director General
Head of Natural Environment
Division
26/08/2024
GRANATH Fredrik Swedish Ministry of Climate and
Enterprise
Advisor in charge of national
environmental objectives
26/08/2024
H.E.MR.WANG Bao Ministry of Water Resources of China Vice Minister of Water Resources
of China
09/10/2024
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 57/60
Annexe 3. Ambassades consultées
Ambassade de France en Afrique du sud Ambassade de France aux Etats-Unis d?Amérique
Ambassade de France en Allemagne Ambassade de France en Finlande
Ambassade de France en Belgique Ambassade de France en Inde
Ambassade de France au Brésil Ambassade de France en Indonésie
Ambassade de France au Canada Ambassade de France en Irlande
Ambassade de France en Chine Ambassade de France au Pays-Bas
Ambassade de France au Costa Rica Ambassade de France au Royaume Uni
Ambassade de France au Danemark Ambassade de France à Singapour
Ambassade de France en Suède
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 58/60
Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes
Acronyme/Sigles Signification
Adapt-CA Adaptation Capability Advancement Toolkit
AFD Agence France Développement
BAPPENAS Ministère de la planification d?Indonésie
BISKO BIlanzierungs-Standard KOmmunal (système comptable en Allemagne)
BPE Bureau de protection de l?environnement
CAF Banque de Développement d?Amérique latine et des Caraïbes
CAFMA Forest Bond Certificate for forest management
CCAC Conseil consultatif sur le changement climatique (EI)
CERI-Climate California Emergency Response Infrastructure Climate Vulnerability Tool
(USA)
CNC Commission nationale climat (Belgique)
COP Conférence des parties
CPO Climate policy office (Etats-Unis)
CR Costa Rica (code ISO)
C40 Cities Climate Leadership Group
DE Allemagne (code ISO)
DESNZ Ministère en charge de la sécurité énergétique et de la neutralité climatique
au Royaume-Uni
EI Irlande (code ISO)
EPA Agence de protection de l?environnement (USA, EI)
ETS Echange de quotas d?émission (UE)
FEDER Fonds européen de développement régional
FI Finlande (code ISO)
FONAFIFO Fond de financement de la forêt nationale
FONERWA Fonds vert (Rwanda)
GES Gaz à effet de serre
GIEC Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat
GIZ Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (en français :
Société allemande de coopération internationale)
GNI Gross national income ? Revenu national brut (proche du PNB)
GX Green transformation (transformation verte) au Japon
G20 Groupe des 20 (forum intergouvernemental des 19 pays aux économies les
plus développées du monde)
HCC Haut conseil pour le climat (France)
ICLEI Conseil International des Initiatives Locales pour l?Environment
IBAMA Institut brésilien de l?environnement et des ressources naturelle
IGEDD Inspection générale de l?environnement et du développement durable
IGF Inspection générale des finances
IPBES Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité
et les services écosystémiques
IRA Inflation reduction act (USA)
IRP Panel International des Ressources
JETP Partenariat pour une transition énergétique juste
KTF Fonds pour le climat et la transformation (DE)
LED Diode électroluminescente
LiFE Lifestyl for environment / Modes de vie durables (Inde)
LTS Stratégie de long terme (USA)
MoEFCC Ministère de l?environnement, de la forêt et du changement climatique Inde
METI Ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (Japon)
MOE Ministère de l?environnement (Japon)
MOF Ministère des finances (Japon)
NAPCC Plan d?action pour le changement climatique en Inde
NASEM Académie des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (USA)
NBSAP(en)/SPANB (fr) Stratégies et plans d?action nationaux pour la biodiversité
NCCRPWP Plan climatique en Afrique du sud
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 59/60
Acronyme/Sigles Signification
NCCS Secrétariat national au changement climatique à Singapour
NDC(en)/CDN(fr) Contribution nationalement déterminée (climat)
NDCR Commission nationale de la réforme et du développement en Chine
NKI Initiative nationale pour la protection du climat (DE)
OCDE Organisation de coopération et de développement économiques
ODD Objectifs de développement durable
ONG Organisation non gouvernementale
PBL Office de la planification écologique (Pays-Bas)
PCC Commission présidentielle du climat en Afrique du sud
PLF Projet de loi de finances
PMCC Conseil sur le changement climatique (Inde)
PRI Plan régional pour l?innovation
PSSO Bureau de la durabilité du secteur public à Singapour
RAD-GRK Plan climat provincial en Indonésie
RAN-GRK Plan climat national en Indonésie
REDD+ Réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation
forestière
RPJMN Plan de moyen terme de développement ? 5 ans (Indonésie)
RPJPN Plan de long terme de développement ? 20 ans (Indonésie)
SALGA Association des collectivités locales (ZA)
SB 375 Législation californienne : le Senate Bill 375
SGPE Secrétariat général à la planification écologique
UE Union européenne
UNFCCC Convention cadre des nations unie sur le changement climatique
URA Urban redevelopment Authority (Singapour)
URSS Union des républiques socialistes soviétiques
UTCATF Utilisation des terres, changement d?affectation des terres et foresterie
WWF-SA World Wide Fund for Nature ? South Africa
ZA Afrique du sud (code ISO)
PUBLIÉ
Annexe 5. Fiches Pays
Présenté dans un document séparé
PUBLIÉ
Sommaire
Edito
Résumé
Liste des recommandations
Introduction
1 Une mise en place progressive d?outils de planification de la transition climatique et écologique dans la plupart des pays du G20 et de l?Union européenne, qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre
1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique
1.2 Les pays pionniers de la planification écologique
1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique
1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique
1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale
1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs de transparence
1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en oeuvre
1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs objectifs de transition
1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de l?engagement citoyen
2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au dernier kilomètre ? Des recommandations à tirer des exemples étrangers
2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté au plus haut niveau de l?Etat et répondant aux attentes citoyennes
2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son portage par la société
2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat
2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes citoyennes quant à leur avenir
2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans un cadre juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous les secteurs d?activités
2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements internationaux
2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace et juste
2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante
2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique
2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter
2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique
2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle
2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050)
2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels
2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens
2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires
2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens
2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la planification
2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification
2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire
2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale
Conclusion
Annexes
Annexe 1. Lettre de mission IGEDD
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Annexe 3. Ambassades consultées
Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes
Annexe 5. Fiches Pays
(ATTENTION: OPTION rrestre et 15 % de son littoral. Ces mesures visent à freiner
la perte de biodiversité tout en contribuant à la résilience face au changement climatique, en
20 En février 2021, le tribunal administratif de Paris a reconnu l'État français responsable de "manquements dans
la lutte contre le changement climatique", le tenant ainsi responsable d'un préjudice écologique (« L'Affaire du
Siècle »). En juillet 2021, le Conseil d'État, saisi par la commune de Grande-Synthe, a enjoint au gouvernement
français de prendre, dans un délai de neuf mois, toutes les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs de
réduction des émissions de gaz à effet de serre, conformément aux engagements de la France.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 31/60
établissant un lien direct entre protection écologique et durabilité. La Chine a intégré la biodiversité
dans son 13ème plan quinquennal et mis en place un système national d?aires protégées, incluant
des parcs nationaux. La centralisation de la gestion environnementale sous un ministère unique a
permis une meilleure coordination des politiques liées à la biodiversité, à la pollution et au climat,
illustrant une gestion intégrée des ressources naturelles. L'Indonésie a adopté une planification
nationale intégrant des objectifs de faible émission carbone et de préservation de la biodiversité.
Le ministère de la Planification du développement national (BAPPENAS) a mis en place une
évaluation environnementale stratégique pour s'assurer que les plans incluent des indicateurs liés
au climat, à la biodiversité et à la gestion des ressources naturelles. Cette approche est soutenue
par un modèle intégré (IV204521 ), qui relie économie, société et capital naturel, permettant de
mieux comprendre les interactions entre la conservation de la biodiversité et la gestion durable des
ressources. Le Brésil met en oeuvre un plan de transformation écologique (PTE) articulé autour de
la lutte contre la déforestation et la promotion de la bioéconomie. Ce plan combine des mesures
environnementales et économiques pour atteindre zéro déforestation, tout en soutenant des
initiatives locales et la valorisation des produits de la biodiversité brésilienne. Par ailleurs, l?Institut
brésilien de l?environnement (IBAMA) joue un rôle crucial dans la surveillance et la mise en oeuvre
des politiques liées à la biodiversité, tandis que le pays utilise des systèmes avancés de
surveillance de la déforestation, démontrant ainsi l?interconnexion entre gestion des écosystèmes
et lutte contre le changement climatique.
A l?inverse, les pays ayant centré leur action sur une seule politique échouent à transformer l?essai
ou ont des difficultés à poursuivre leur action. Ainsi le Costa Rica qui n?a finalement intégré dans
sa planification que la politique forestière se trouve confronté à des difficultés de financement de
la poursuite de sa politique et fait face à des contestations populaires sur la non atteinte d?autres
objectifs.
L?efficacité de la planification écologique repose sur une approche globale, incluant les questions
complexes et sensibles. Ignorer ces enjeux risque de limiter l'impact des politiques écologiques et
de compromettre la transition nécessaire. Plusieurs exemples montrent les défis que représentent
ces sujets délicats.
Les Pays-Bas, avec leur modèle agricole intensif, sont confrontés à des niveaux élevés de pollution
par les nitrates et les émissions de méthane. Ces problèmes affectent la biodiversité et la qualité
des sols. La mise en oeuvre de politiques visant à réduire l?intensité de l?élevage et l?usage d?engrais
a déclenché des protestations de la part des agriculteurs, soulignant les défis liés à l?acceptabilité
sociale des mesures nécessaires. L?incapacité à inclure les parties prenantes et à proposer des
alternatives viables complique l?application de ces politiques.
La dépendance au charbon en Inde, Afrique du Sud et Indonésie est un frein à leur transition
énergétique. En Inde, le charbon représente plus de 70 % de la production d?électricité. Bien que
le pays investisse dans les énergies renouvelables, la transition est entravée par la dépendance
économique et sociale au charbon, qui emploie des millions de travailleurs. En Afrique du Sud, où
le charbon fournit 86 % de l?électricité, les efforts pour décarboner sont limités par des contraintes
économiques, des infrastructures vieillissantes et une opposition sociale forte. La transition juste,
soutenue par des mécanismes internationaux comme le Partenariat pour une transition
énergétique juste (JETP), est essentielle pour éviter une fracture sociale. En Indonésie, le charbon
est également central dans la production énergétique, et des retards dans l?adoption de politiques
ambitieuses ralentissent la transition énergétique nécessaire pour aligner le pays sur ses
engagements climatiques. À Singapour, bien que le pays se positionne comme leader régional en
matière de finance verte et de technologies, la planification reste centrée sur des objectifs
21 https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-
Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf
PUBLIÉ
https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf
https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 32/60
économiques, parfois au détriment de mesures structurelles plus contraignantes nécessaires pour
réduire durablement les émissions de gaz à effet de serre.
L?Allemagne peine à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports,
malgré son engagement dans la décarbonation. Les retards dans l?électrification des
infrastructures et la promotion insuffisante des mobilités douces, comme le rail ou le vélo, freinent
les progrès et ont même conduit à déstabiliser la coalition au pouvoir. Le ministre des transports,
Volker Wissing (FDP, libéral), avait refusé à plusieurs reprises de présenter un programme de
réduction des émissions de GES dans son secteur, suite aux échecs répétés à atteindre les
objectifs fixés (trois années consécutives en 2023). Cette situation a entraîné une révision de la loi
fédérale sur la protection du climat en avril 2024, supprimant le caractère contraignant des objectifs
sectoriels et introduisant un objectif global intersectoriel et pluriannuel. Cette modification est
considérée comme un compromis interne à la coalition au pouvoir, visant à éviter une escalade
politique tout en maintenant les engagements climatiques généraux de l'Allemagne. Cette situation
illustre que des secteurs difficiles doivent être traité en priorité dans la planification pour éviter des
retards coûteux en termes climatiques.
A l?inverse, des exemples de prise en compte de secteurs difficiles ont permis de mieux préparer
la transition. En Allemagne, un fonds d?avenir pour l?industrie automobile doté d?un milliard d?euros
pour la période 2021-2025, afin de soutenir la transformation de ce secteur stratégique a été lancé.
En collaboration avec les syndicats (IG Metall), des réseaux régionaux de transformation ont été
établis dans les bassins industriels. Ces initiatives, qui intègrent des universités, chambres
d'industrie, centres de formation et agences pour l?emploi, ont pour but d?élaborer des stratégies
adaptées aux besoins locaux tout en assurant le maintien de l?emploi et la reconversion vers des
technologies plus durables. Le Danemark, a introduit une taxe carbone sur l?agriculture, ciblant les
émissions de méthane issues des élevages bovins et porcins. Entrant en vigueur progressivement
d?ici 2030, cette taxe est accompagnée de déductions fiscales pour les agriculteurs afin de limiter
les effets négatifs et d?investir dans des technologies vertes. Cette mesure a été adoptée grâce à
un processus de concertation impliquant l?Etat, les agriculteurs et les ONG environnementales qui
a abouti à un accord largement validé par le Parlement. Ces mesures visent à financer la transition
écologique tout en soutenant les producteurs affectés. L?Indonésie, premier producteur mondial
d?huile de palme, a mis en oeuvre des politiques pour promouvoir des pratiques responsables. Un
moratoire permanent sur la déforestation et le drainage des tourbières a été instauré, accompagné
d?un projet national de certification pour la durabilité. Des aides ont été déployées pour soutenir les
petits producteurs dans l?adoption de méthodes modernes, tout en luttant contre la déforestation
illégale et les feux de forêts. Une même politique de protection des tourbières, utilisées par la
population comme appoint pour le chauffage, a également été déployée en Irlande.
Ces exemples démontrent qu?une planification ciblée et des incitations bien conçues peuvent
permettre des progrès significatifs dans des secteurs critiques tout en minimisant les impacts socio-
économiques.
La France peut s?enorgueillir d?avoir également lancé un plan de décarbonation de son industrie,
comme en Allemagne, ciblant les 50 entreprises les plus émettrices tout comme d?avoir mis en
place une planification globale intégrant tous les secteurs d?activité et toutes les politiques.
Néanmoins, elle peine à réussir l?intégration concrète de son secteur agricole dans la planification
écologique, ce qui laisse des possibilités de constante renégociation à la baisse d?autres objectifs
figurant dans la planification comme la réduction de l?usage des pesticides et des nitrates et la
protection des espaces naturels et de la biodiversité.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 33/60
La planification écologique doit intégrer tous les secteurs d?activités et
l?ensemble des politiques doivent être mises en oeuvre, en adaptant si nécessaire la
trajectoire et les financements pour surmonter les difficultés.
2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des
structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité
politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et
indépendante
2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise
en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique
? Les bons exemples internationaux de planification écologique :
Peu des pays examinés disposent de structures transversales pilotant leur planification écologique,
souvent en raison de l?absence de planification globale, mais parfois ces structures sont absentes
même dans la planification climatique.
A part la France et le SGPE, on peut néanmoins citer le ministère indonésien de la Planification du
Développement National (BAPPENAS), chargé de la planification écologique et du développement
durable. Placé directement sous l'autorité du président, il joue un rôle clé dans la définition des
objectifs nationaux et dans leur coordination interministérielle. Il est responsable de l?élaboration et
de la synchronisation des plans nationaux de développement durable. Il coordonne les ministères
techniques. Il joue également un rôle crucial dans la mise en oeuvre territoriale en soutenant les
provinces dans leurs plans d?atténuation des émissions de carbone. Le BAPPENAS utilise des
outils tels que des modèles d'évaluation stratégique (par exemple GLOBIOM-Indonésie22) pour
planifier et synchroniser des politiques cohérentes, renforçant ainsi la capacité de déclinaison
territoriale grâce à l?implication des provinces.
Parmi les nouvelles organisations, le Brésil a réintroduit en 2023 un comité interministériel pour le
changement climatique, dirigé par le chef de cabinet de la présidence et impliquant plusieurs
ministères. Ce comité supervise la révision de la politique nationale sur le changement climatique
et coordonne les plans d?atténuation et d?adaptation sectoriels. Il assure également la cohérence
entre les mesures prises par différents ministères, tout en mobilisant des acteurs financiers comme
la Banque Nationale de Développement Économique et Social (BNDES) pour financer les projets
liés à la transition écologique. Au Japon, le Comité exécutif de la stratégie GX (« Green
Transformation »), créé en juillet 2022, est présidé par le Premier ministre et piloté par le ministère
de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (METI). Il a pour mission d'élaborer la "politique
fondamentale pour la réalisation de la GX". Le comité supervise les mesures transversales en
matière de décarbonation et de transformation verte, avec une collaboration entre le METI, le
ministère de l'Environnement (MOE), et le ministère des Finances (MOF) pour coordonner les
enjeux de production énergétique, d'industrie et de conservation environnementale. Il est certes
trop tôt pour analyser les résultats dans ces deux pays, mais la tendance à la création de structures
transversales témoigne de la prise de conscience de leur utilité.
Bien que limité aux enjeux climatique, l?Office de Planification Environnementale (PBL) agit aux
Pays-Bas comme un outil de pilotage transversal pour la politique climatique. Cet organisme
22 https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf
PUBLIÉ
https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 34/60
indépendant évalue annuellement les progrès de la politique climatique et recommande des
ajustements pour garantir l'atteinte des objectifs. L?efficacité du PBL repose sur sa légitimité, qui
lui permet de coordonner différentes parties prenantes et de s?assurer que les politiques régionales
et nationales sont alignées avec les engagements internationaux. Il dispose de moyens lui
permettant de réaliser sa tâche tant sur le plan des ressources humaines que budgétaires.
? Les conséquences de l?absence d?une planification centralisée :
La difficulté à mettre en oeuvre une planification écologique sans programmation centralisée se voit
à l?inverse dans d?autres exemples. Cette absence d'une organisation unique et puissante
complique la prise de décision et ralentit la mise en oeuvre des politiques.
L?absence de structure de coordination peut ainsi conduire à des problèmes de coordination
interministérielle comme déjà évoqué en Allemagne. Aux Pays-Bas, le manque d'une structure de
coordination globale a conduit à une mise en oeuvre fragmentée des politiques climatiques et
agricoles. Bien que la planification territoriale intègre les enjeux de biodiversité et de gestion des
risques d'inondation, la transformation agricole reste un point de blocage majeur.
L?insuffisance du poids d?une instance de coordination pourtant existante produit les mêmes effets
de fragilisation de la planification écologique. En Roumanie, la gouvernance de la planification
écologique repose sur un comité interministériel pour le changement climatique, présidé par le
Premier ministre et impliquant divers ministères et agences. Cependant, ce système est marqué
par une coordination complexe et intermittente, tandis que le rôle du conseiller d'État chargé de la
transition écologique est limité à un rôle de facilitateur sans réelle autorité décisionnelle. En
Belgique, la Commission Nationale Climat (CNC), créée en 2002, vise à coordonner les politiques
climatiques entre les niveaux fédéral et régional. Elle est composée de représentants des
gouvernements fédéral et régionaux, épaulée par un secrétariat permanent et 14 groupes de travail
thématiques. Cependant, son rôle reste majoritairement évaluatif plutôt que décisionnel, ce qui
limite son efficacité en termes de pilotage stratégique.
La structure fédérale des pays pose des défis supplémentaires. Les objectifs et politiques
climatiques des provinces ou entités décentralisées ne sont pas toujours alignés avec la stratégie
nationale, ce qui complique l'harmonisation des efforts. Par exemple, des politiques comme le
développement de l?éolien en mer nécessitent une collaboration étroite entre le gouvernement
central et les gouvernements locaux, mais cette coordination reste imparfaite. Le manque de
coordination freine la mise en oeuvre des projets essentiels et ralentit la transition écologique au
niveau national.
Ainsi, en Allemagne, les Länder, responsables de nombreuses politiques environnementales,
disposent d?une grande autonomie. Cette configuration complique l?alignement des actions
régionales avec les objectifs nationaux, surtout dans des secteurs comme le transport et l?énergie.
La Belgique se caractérise par une gouvernance climatique fragmentée, reflétant sa structure
institutionnelle complexe. Les compétences sont partagées entre l?État fédéral et les trois régions
(Wallonie, Flandre, Bruxelles-Capitale), ce qui complique la coordination des politiques
environnementales et climatiques. Chaque région dispose de son propre plan de transition
écologique, ce qui entraîne des incohérences dans les priorités et les méthodologies adoptées.
Par exemple, la Flandre et la Wallonie ont des approches divergentes sur la gestion agricole et les
émissions industrielles. Au Royaume-Uni, les 4 nations ont leurs propres cibles de réduction des
émissions et leurs propres politiques en matière de changements climatiques, mais ils contribuent
également à l?atteinte des cibles intermédiaires du Royaume Uni et à la mise en place de politiques
dans l?ensemble du pays. S?il existe une réunion bimestrielle entre les ministres des 4 nations pour
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 35/60
discuter des politiques climatiques23, les objectifs et politiques des nations ne sont pas encore
parfaitement alignées avec la stratégie Net Zéro. Cette coopération imparfaite se reflète en
particulier dans le développement de certaines politiques indispensables pour l?atteinte des
objectifs climatiques des nations pour lesquelles le Gouvernement central détient une compétence
exclusive (ex : capture et stockage du carbone) ou des politiques nationales nécessitant une étroite
association des gouvernements compétents (ex : développement de l?éolien en mer en Ecosse).
On peut donc en déduire que la planification écologique nécessite un pilotage centralisé, confié à
une organisation dédiée, rattachée à l?échelon politique le plus élevé, ce qui se rapproche du
modèle français qui est donc à préserver. Cette organisation doit également être en mesure
d?animer le déploiement de cette planification dans les territoires afin d?en garantir la cohérence.
Maintenir le SGPE auprès du premier ministre, le renforcer dans son rôle
de pilotage de la planification écologique, en appui de l?action des ministères, et d?animation
de son déploiement dans les territoires.
2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation
régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter
L?évaluation régulière et indépendante de la planification écologique est cruciale pour garantir son
efficacité. Les bons exemples, comme celui des Pays-Bas avec PBL déjà cité, montrent que
l?investissement dans des systèmes de collecte de données et des évaluations indépendantes est
un levier stratégique pour réussir la transition écologique.
Appuyer sa politique de transition sur des données fiables et transparentes est une condition sine
qua non pour identifier les réussites et corriger les échecs. Les contre-exemples illustrent que
l?absence de fiabilité dans les données peut compromettre la crédibilité et l?impact des politiques
publiques.
Ainsi, en Indonésie, le défi majeur réside dans la fragmentation des données et le manque de
capacités institutionnelles pour les centraliser et les vérifier. Bien que le BAPPENAS tente
d?intégrer les indicateurs climatiques dans les plans nationaux, les provinces et les districts ne
disposent pas toujours des infrastructures nécessaires pour collecter des données fiables. Cela
entraîne des incohérences dans les rapports nationaux et freine les efforts de coordination.
L?Afrique du sud rencontre le même problème : alors qu?elle dispose d?une méthodologie ? le
« Climate Change Response Monitoring & Evaluation System » - intéressante car visant à analyser
les données dans des démarches à la fois top-down et bottom-up, et couvrant les champs de
l?atténuation, de l?adaptation et du financement, elle peine dans l?agrégation de données en dehors
du système énergétique. En Chine, malgré une capacité impressionnante de collecte de données,
la transparence et la fiabilité des informations posent problème. Les rapports environnementaux
sont souvent influencés par des pressions politiques ou des manipulations locales, rendant difficile
une évaluation objective. Par exemple, les statistiques sur la pollution de l?air ou les émissions
industrielles peuvent être sous-évaluées dans certaines régions pour éviter des sanctions
administratives, ce qui compromet la précision des politiques correctives.
A l?inverse, la planification écologique soutenue par une collecte de données robustes, s?appuyant
sur de multiples sources, notamment des ministères, des agences environnementales et des bases
23 https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-
communique-13-march-2024
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https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024
https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 36/60
de données publiques, et indépendante24 permet l?évaluation régulière (idéalement annuellement)
des progrès des politiques climatiques. Par exemple, le PBL utilise des outils de modélisation pour
anticiper les impacts des mesures et proposer des ajustements avant qu?il ne soit trop tard.
L'Irlande dispose de deux structures clés pour l'évaluation de sa planification écologique :
? L?Agence de protection environnementale (EPA) : indépendante, elle fournit des
données et des rapports réguliers sur les émissions de gaz à effet de serre, la qualité
de l?air, et d'autres indicateurs environnementaux. Ces rapports alimentent les débats
politiques et permettent d?ajuster les politiques climatiques.
? Le Conseil consultatif sur le changement climatique (CCAC) : cet organe indépendant
donne des recommandations stratégiques et suit les progrès des politiques
environnementales dans le cadre de rapports réguliers soumis au gouvernement et au
Parlement.
En Suède, le Haut Conseil pour le climat est chargé d?évaluer si les politiques publiques permettent
d?atteindre les objectifs climatiques nationaux. Il réalise une analyse indépendante des décisions
gouvernementales et des trajectoires climatiques, tout en mettant en évidence les mesures
supplémentaires nécessaires pour combler les écarts entre les objectifs et les résultats attendus.
Ces évaluations sont basées sur des données scientifiques fournies par l?Agence suédoise de
l?Environnement et sont publiées annuellement.
Créé par la loi climat de 2008, le Comité pour la changement climatique (« Committee for Climate
Change ») au Royaume-Uni occupe un rôle central dans l?évaluation des politiques climatiques
(sur l?adaptation comme sur l?atténuation) et la définition des budgets carbone. Son mandat est par
ailleurs renforcé par l?articulation étroite qu?il entretient avec le Parlement britannique et l?obligation
donnée au gouvernement de répondre aux recommandations du comité d?experts.
Grâce à cette approche, les décisions politiques sont ajustées régulièrement pour aligner les
actions avec les objectifs climatiques. En Irlande, en 2023, l'EPA a signalé que le pays n'atteindrait
qu'une réduction de 29 % des émissions d'ici 2030, bien en deçà de l'objectif de 51 %. Ce constat
a conduit à une révision des priorités et des politiques climatiques, notamment dans les secteurs
de l?agriculture et du transport, pour réduire cet écart. L?EPA continue de jouer un rôle central en
fournissant des données scientifiques indépendantes pour guider les ajustements nécessaires. En
Finlande, le « Panel climatique », un organe scientifique indépendant, a publié en 2024 un rapport
soulignant l'insuffisance des efforts dans le secteur UTCATF (utilisation des terres, changement
d?affectation des terres et foresterie). Il a recommandé des actions immédiates pour restaurer les
puits de carbone, ce qui a incité le gouvernement à revoir ses politiques forestières et à allouer des
financements supplémentaires à la gestion durable des forêts.
Par ailleurs, bien que non appliqué pour le moment aux sujets climatiques, le Royaume-Uni a
également expérimenté un modèle original d?évaluation des politiques publiques : le réseau des
« What Works Centres », centres thématiques chargés de faire la synthèse des connaissances
dans leur domaine afin d?éclairer la décision publique. Pour évaluer leurs politiques, les ministères
britanniques s?adressent régulièrement à des consortiums d?acteurs externes réunissant des
universités, des organismes indépendants de recherche et des cabinets de conseil. Cette
externalisation constitue pour la presse et l?opinion publique une garantie de qualité des
évaluations et de crédibilité de leurs résultats. Depuis 2015, un panel d?experts de l?administration
et du monde académique, le « Cross- Government Trial Advice Panel » (CG-TAP), est également
à la disposition des ministères pour les aider à mettre en oeuvre des évaluations d?impact. Avec
24 L?indépendance dont il est fait mention ici renvoie à une indépendance par rapport au pouvoir politique, au sens
autorité administrative indépendante en France, et par rapport aux lobbies économiques et sociétaux (syndicats et
monde associatif notamment).
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 37/60
une approche similaire, l?Académies des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (NASEM) aux
Etats-Unis, organisation privée à but non lucratif qui regroupe de grands chercheurs du pays, publie
des rapports sur les thématiques de la transition écologique, tels que « l?Accélération de la
décarbonation aux Etats-Unis » (2024), « L?intégration du changement climatique et de la politique
climatique dans la modélisation macro-économique » (2024), « Intégrer les sciences humaines
pour adapter les réponses sociétales aux changements environnementaux » (2023), produisant
une évaluation externe de l?action de l?administration fédérale.
La question de l?aspect contraignant ? que la contrainte s?appuie sur la norme ou sur une pression
sociale et morale ? de ces modalités de contrôle et d?évaluation est également centrale dans leur
capacité à réorienter les politiques publiques. Ainsi en Afrique du sud, le rôle d?évaluation joué
depuis 2020 par la Commission présidentielle sur le climat renforce le message critique sur le
retard pris dans la mise en oeuvre des politiques, que les autres dispositifs d?évaluation sud-africain
sur le climat et la biodiversité, de par leur nature non contraignante, ne pouvaient pas porter.
Le modèle français de planification écologique ne dispose pas d?un tel outil d?évaluation. Certes,
le Haut Conseil pour le Climat (HCC), créé en 2018, joue un rôle d?évaluation étant un organisme
indépendant chargé d'évaluer l'action publique en matière de climat. Composé d'experts issus de
diverses disciplines, il analyse la cohérence des politiques françaises avec les engagements
nationaux et internationaux, notamment l'Accord de Paris, et formule des recommandations pour
améliorer leur efficacité. Il publie des rapports annuels et des avis spécifiques évaluant les progrès
de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le respect des budgets
carbone, et l'adaptation au changement climatique, publications ayant vocation à éclairer les
décideurs politiques et le public sur l'état de la transition écologique en France. Néanmoins, la Cour
des comptes, avec l'appui du HCC, a publié en mars 2024 un rapport intitulé « Évaluation annuelle
de la mise en oeuvre des mesures prévues par la loi climat et résilience » qui conclut que les
dispositifs actuels de suivi et d'évaluation des politiques climatiques sont insuffisants pour mesurer
efficacement les progrès réalisés et que plusieurs recommandations du HCC, notamment en
matière de gouvernance et de coordination des actions climatiques, n'ont pas été entièrement
suivies d'effets. En mai 2023, l'IGF a publié un rapport intitulé « Adaptation de la fiscalité aux
exigences de la transition écologique » recommandant une refonte de la fiscalité pour mieux
intégrer les objectifs climatiques, en ligne avec les préconisations du HCC sur l'utilisation
d'instruments fiscaux pour encourager la transition écologique, et insistant sur la nécessité d'un
suivi rigoureux des dépenses publiques liées à l'environnement, rejoignant les recommandations
du HCC sur la transparence budgétaire et l'affectation des ressources. Cependant, non seulement
il ne dispose pas de l?autorité nécessaire pour imposer les constats que font apparaitre ses
évaluations, mais en outre, le HCC est centré uniquement sur les enjeux climatiques, et non sur
les autres aspects de la transition écologique. Ce constat a déjà fait l?objet d?évocation de réformes
telles qu?une évolution du HCC ou la création d?un Défenseur de l?environnement sur le modèle de
celui du Défenseur des droits, mais ces idées n?ont jamais prospéré.
La France doit se doter d?une entité d?évaluation de sa planification
écologique indépendante et reconnue qui appuiera le SGPE dans sa démarche de pilotage
de la planification écologique.
2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité
politique
L?obligation de rendre des comptes sur la mise en oeuvre de la planification écologique est cruciale
pour garantir la transparence et l?efficacité des politiques publiques, mais aussi leur acceptabilité
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 38/60
sociale. Le narratif de la transition doit s?appuyer sur une redevabilité politique afin d?être
appréhendé et déployé par les élus locaux du pays. Le Parlement peut ainsi avoir un rôle à jouer
quand il est associé à la prise de décision sur la planification écologique ou à l?évaluation de cette
politique, étant alors en capacité de constater les difficultés rencontrées par les pouvoirs publics
en charge. C?est ce pari d?association du Parlement que font les Pays-Bas, la Finlande, la Suède,
le Danemark ou encore l?Irlande et le Royaume-Uni.
Ainsi, en Irlande, le Premier ministre publie annuellement un rapport d?étape sur les progrès
réalisés dans le cadre du Plan d'action climat. Ce rapport est complété par les analyses de l?EPA
qui alimentent les débats parlementaires avec des projections et des évaluations des politiques
mises en oeuvre. Ces échanges permettent d?identifier les lacunes et d?ajuster les stratégies,
renforçant ainsi la redevabilité du gouvernement envers le Parlement et les citoyens. En Suède, la
loi cadre climatique impose au gouvernement de publier chaque année un rapport intégré au projet
de loi de finances. Ce document évalue l?écart entre les objectifs climatiques et les résultats
obtenus, permettant une comparaison transparente des trajectoires. Le Parlement utilise ces
rapports pour surveiller et débattre des performances du gouvernement en matière de transition
écologique. À Singapour, les « Committee of Supply » sont des plateformes où chaque ministère
présente et justifie ses actions devant le Parlement lors des discussions budgétaires annuelles.
Cette démarche permet d?assurer une redevabilité politique sur la mise en oeuvre des initiatives du
Plan Vert (« Green Plan ») et d?informer les décisions budgétaires à venir. Au Danemark, chaque
année, le Ministère du Climat, de l?Énergie et de l?Approvisionnement, est chargé de présenter au
Parlement un programme climatique (« klimaprogram »). C?est l?occasion de faire le point sur le
niveau de réalisation des objectifs nationaux tout comme des initiatives et mesures prévues en
matière de climat.
La planification écologique ne fait pas en France l?objet d?une présentation systématique devant le
Parlement. Elle ne fait donc pas l?objet d?une confrontation en matière de redevabilité politique, ce
qui affaiblit sa capacité à être appréhendée par le personnel politique. Une opération de formation
à très grande échelle de l?administration publique à la transition écologique a été lancée dans le
cadre de la planification écologique. Une même démarche n?a pas été menée auprès des députés
ou des sénateurs, ni des élus régionaux ou locaux en dehors de la déclinaison territoriale
actuellement engagée de la planification écologique. Leur adhésion à la transition n?est donc pas
garantie par une démarche d?échange ou d?information et peut donc pâtir d?un déficit de
compréhension fine des enjeux mais également de la perception des contraintes dans sa mise en
oeuvre. Pire, la création d?instances citoyennes sans rôle clairement défini au préalable, telle que
la convention citoyenne pour le climat, a conduit les parlementaires à se sentir dessaisis de leur
rôle de législateurs sur ces enjeux les poussant à diverses surenchères lors de l?adoption de la loi
climat-résilience, ce qui a largement compliqué les débats et conduit à l?abandon ou la réduction
de l?ambition de certaines mesures.
La planification écologique doit faire l?objet d?un suivi annuel devant le
Parlement, qui permettra d?évaluer si la trajectoire est respectée et de définir les mesures à
mettre en place si ce n?est pas le cas. Ce suivi sera alimenté par la publication en amont
d?un rapport annuel de l?organe d?évaluation indépendant.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 39/60
2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire
de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation
pluriannuelle
2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court
(2030), moyen (2040) et long (2050)
Une planification écologique efficace repose sur une trajectoire claire, articulée autour d?échéances
courtes, moyennes et longues. Cette approche garantit une visibilité accrue pour les acteurs
économiques et permet de déployer des politiques ambitieuses.
Singapour dispose d?un plan à long terme, révisé en 2021, pour projeter son développement sur
50 ans. Ce plan inclut des projets ambitieux comme la reconquête de terres sur la mer avec le
projet "Long Island" pour répondre à la montée des eaux. Les infrastructures urbaines,
économiques et naturelles sont intégrées dans cette vision, renforçant la résilience climatique tout
en garantissant la durabilité urbaine. Cette perspective de long terme garantit la confiance des
acteurs économiques qui nous l?ont exprimé lors de notre visite sur place. L?Indonésie articule sa
planification autour d?un plan national de développement à long terme (RPJPN), couvrant 20 ans,
et d?un plan à moyen terme (RPJMN), révisé tous les 5 ans pour refléter les priorités présidentielles.
Adopté en janvier 2024, le RPJPN "Indonésie Dorée 2045" cible la neutralité carbone et intègre
des objectifs socio-économiques et écologiques, tels que le renforcement des capacités face aux
chocs environnementaux. Ce plan de long terme permet d?assurer que la transition entre deux
présidents ne remettra pas en cause les engagements de long terme, tout en laissant la place aux
adaptations politiques découlant nécessairement des changements démocratiques.
L?Union européenne développe également des plans climatiques basés sur des échéances
multiples. Par exemple, la stratégie 2030-2050 fixe des objectifs intermédiaires en termes de
réduction des émissions et d?adaptation, tout en proposant des mécanismes financiers à long terme
pour soutenir les transitions nationales. Les Pays-Bas ont mis en place une planification à long
terme de la gestion de l?eau, essentielle dans un pays en partie situé sous le niveau de la mer. Leur
approche inclut des mesures pour la prévention et la gestion des inondations, combinant solutions
infrastructurelles et préservation des écosystèmes. Cette stratégie repose sur une vision à 50 ans,
garantissant la sécurité hydrique tout en répondant aux défis climatiques. Au Royaume-Uni, des
objectifs de long et moyen terme (réduction des émissions de GES de 81% d?ici 2035 par exemple)
s?accompagnent de planifications successives sur 5 ans, sous la forme de budgets carbone, ce qui
permet d?allier une planification de long terme avec des échéances de plus court terme sur
lesquelles le gouvernement est redevable.
Une telle visibilité est particulièrement importante pour accompagner les politiques d?adaptation
(Pays-Bas sur les inondations), de reconquête de la biodiversité (Costa Rica avec la reconquête
forestière, Afrique du sud avec les aires protégées) mais également dans des objectifs de
transformation de filières économiques - politique agricole, réindustrialisation ? (voir l?exemple de
Singapour sur l?eau et la politique industrielle) ou de gestion de l?étalement urbain (Portland,
Singapour).
La planification écologique de la France se limite à 2030 et peine à décliner des objectifs pour 2040
et au-delà, même si l?objectif de neutralité carbone en 2050, celui de l?absence d?artificialisation
nette en 2050 ou les objectifs intermédiaires fixés à l?échelle communautaires devraient la pousser
dans cette direction. Ce manque de visibilité nuit à la crédibilité de la politique et encourage sa
remise en cause régulière.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 40/60
La France doit se doter d?une planification à échéance 2040 et à
échéance 2050 qui doit intégrer ses objectifs en matière d?adaptation et de reconquête de
la biodiversité.
2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements
publics pluriannuels
Une fois le calendrier de la transition établi sur les court, moyen et long termes, cette visibilité
calendaire sur le plan de transition écologique nécessite d?être accompagnée de perspectives
budgétaires permettant la mise en oeuvre des actions du plan. La planification de la transition
écologique doit ainsi faire l?objet d?une planification budgétaire claire et pluriannuelle. Cette visibilité
apporte de la certitude aux investissements publics et privés qui doivent être engagés. Sans une
telle visibilité, l?action est freinée et peine à se déployer.
La Commission européenne l?avait bien compris lors du lancement du Plan vert de l?Union
européenne : il s?appuie sur l?annonce de 1 000 milliards d?euros d?investissements durables au
cours de la décennie. Ce plan combine des fonds provenant du budget de l'UE, du système
d'échange de quotas d'émission (ETS) et du programme InvestEU, qui vise à attirer des
investissements publics et privés. Les fonds de cohésion de l'UE soutiennent les pays et régions
dans la mise en oeuvre de projets contribuant au « Green Deal ». Les États membres doivent
consacrer au moins 30 % des fonds reçus du Fonds européen de développement régional (FEDER)
à ces priorités. De plus, 37 % du Fonds de cohésion est spécifiquement destiné à atteindre la
neutralité climatique d'ici 2050. La politique agricole commune a également été renforcée dans son
volet environnemental (au moins en affichage au niveau européen) pour accompagner la stratégie
de la ferme à la fourchette. Cette programmation budgétaire de l?Union européenne a facilité la
planification budgétaire nationale des Etats membres, qui se sont également appuyés sur les plans
de relance post crise COVID lancés au sein de l?UE.
De même, l?administration Biden aux Etats-Unis a déployé sa politique climatique dans le cadre
d?une « nouvelle politique industrielle » qui s?est traduite par cinq lois appuyées sur des
financements publics : la loi sur l?énergie de décembre 2020 prévoit 7 milliards de dollars sur 5 ans,
la loi bipartite sur l?infrastructure de novembre 2021 y consacre 454 milliards de dollars, la loi sur
la réduction de l?inflation (Inflation réduction Act) d?août 2022 prévoit 370 milliards de dollars sous
forme de crédits d?impôt, de subvention et de prêts, l?acte « puces et sciences » prévoit enfin plus
de 60 milliards de dollars pour la recherche-développement (semi-conducteurs, technologies sans
fil notamment).
Cette problématique se retrouve dans d?autres pays : l?annualité budgétaire ou l?émergence de
nouvelles priorités nuisent à la mise en place de financements pluriannuels et rendent le
financement de la planification écologique dépendant des autres choix budgétaires, parfois en
contradiction avec son inscription dans le temps long.
L?usage de fonds dédiés à la transition écologique ? comme le Fonds vert en France ? permet aux
pays l?affichage des subventions publiques affectées au plan de transition écologique et peut, en
cas d?affectation de certaines recettes, à la fois garantir un financement pluriannuel et faciliter
l?acceptation par la population du financement de la transition de long terme, prenant notamment
appui sur le principe pollueur-payeur.
Depuis 2023, l?Allemagne s?est dotée d?un fonds pour le climat et la transformation (KTF), alimenté
par les recettes du système national de tarification du CO?, c'est-à-dire la taxe carbone appliquée
aux émissions provenant de la combustion de combustibles fossiles. Cependant, en novembre
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 41/60
2023, la Cour constitutionnelle fédérale allemande a déclaré inconstitutionnel le transfert de
60 milliards d'euros de crédits non utilisés, initialement destinés à la gestion de la pandémie de
COVID-19, vers le KTF. Cette décision a entraîné une révision du financement du fonds,
nécessitant des ajustements pour maintenir les programmes clés de financement de l'énergie et
des infrastructures. La Belgique a également mis en place un « Fonds de transition écologique »,
dont la mission est valable pour 30 ans et renouvelable, et qui sert de courroie de transmission
pour les fonds européens vers les entreprises et les projets de réduction des émissions. Le
Danemark a annoncé en juin 2022 la mise en place d?un « Fonds Vert » de 53,5 milliards de
couronnes (7,2 milliards d?euros) provenant de recettes fiscales qui devraient alimenter les caisses
de l?Etat entre 2024 et 2040. C?est également le cas en Finlande, en Irlande, aux Pays-Bas, au
Japon, à Singapour.
Hors Union européenne, les pays recourent également à des fonds dédiés. Le Rwanda appuie sa
politique de transition environnementale sur un fond spécifique : le « Rwanda Green Fund » ou
FONERWA, établi dès 2012. Le Brésil a doté sa politique sur le changement climatique d?un fond
fédéral spécifique, doté notamment de 10 milliards de reals par la levée d?obligations vertes. Il a
même plus récemment doté sa politique forestière d?un Fonds national pour la mise en valeur des
forêts, outil de sa planification forestière à grande échelle. Il est également question en Chine d?un
« fonds national de transformation à faible émissions de carbone » ou d?un fonds de
développement vert
Ces fonds peuvent être utilisés par les pays pour doter les collectivités locales afin d?accompagner
la transition écologique sur le terrain. Ainsi, depuis la mise sur pied du plan climatique renforcé du
Canada en décembre 2020, le gouvernement a investi 247 millions de dollars au moyen du Fonds
pour une économie à faibles émissions de carbone dans 21 programmes provinciaux et territoriaux
de rénovation de maisons et de bâtiments. En Indonésie, le fonds pour le changement climatique,
bien que piloté par le BAPPENAS, est directement chargé de financer des programmes provinciaux
et locaux en mobilisant des ressources nationales et internationales.
Le Danemark dispose d?un Fonds d?investissement pour les pays en développement, afin de
clarifier l?usage de ses financements publics de coopération internationale dans le domaine de la
transition climatique et environnementale.
Au-delà de son fond climat assez classique, la Finlande dispose d?un Fonds public
d?investissement pour l?innovation (Sitra), fondation dont l?objectif est de « promouvoir un
développement stable et équilibré en Finlande, une croissance économique qualitative et
quantitative et une compétitivité et une coopération internationale ». Cette fondation est
responsable devant le Parlement mais pas devant le gouvernement. Sa capitalisation était évaluée
à 771 millions d?euros en 2017. Elle fonctionne à la fois comme un « think-thank » et comme une
société d?investissement. Créée en 1967 dans le cadre de la Banque de Finlande, la majeure partie
de sa dotation actuelle provient d?un don d?actions Nokia du Parlement finlandais de 1992. Le fonds
dépense environ 30 millions d?euros par an correspondant au rendement de sa dotation. Il investit
principalement dans des entreprises et des start-ups pour créer de nouvelles activités rentables.
Le manque de transparence sur les financements accordés à la transition écologique que nous
avons rencontré dans nos recherches démontre que l?enjeu est commun à tous les pays. Nous
recommandons donc qu?une analyse approfondie des financements de la transition écologique soit
menée, pour compléter la première approche faite dans ce rapport. Les outils de dépense publique
sont en effet un très bon indicateur de la capacité des pays à respecter leurs engagements.
En Suède, le suivi de l?atteinte des objectifs est effectué par le gouvernement, chaque année dans
le cadre du rapport « climat » du PLF (avec l?appui des Agences nationales, dont l?Agence de
protection de l?Environnement Naturvårdsverket). Ainsi un relèvement de 8% au premier semestre
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 42/60
2024 des émissions suédoises a été évalué comme principalement dû à l?augmentation de la
consommation des carburants routiers fossiles entretenue par la décision du nouveau
gouvernement de réduire le taux d?incorporation des biodiesels à 6% (contre 50% en volume
précédemment).
Faisant ressortir l?importance de la programmation budgétaire de la transition écologique, « l?Irish
Fiscal Advisory Council », organisme de surveillance budgétaire de l?Irlande, a publié en octobre
2023 un rapport sur l?impact du changement climatique sur les finances publiques, faisant partie
d?une série de recherche sur la viabilité à long terme des finances publiques, en lien avec le
changement climatique. Le rapport estime le coût de l?ensemble des dépenses publiques
nécessaires pour atteindre les objectifs climatiques irlandais en suivant une « transition juste »,
telle que décrite par la législation adoptée. Le rapport modélise deux scénarios pour les dépenses,
l?un de coût faible correspondant à la limite inférieure de l'implication potentielle de l'État, et l?autre
de coût élevé considéré comme une estimation supérieure raisonnable, tout en reconnaissant que
ces coûts pourraient être encore plus élevés. Entre 2026 et 2030, le gouvernement devrait
dépenser entre 0.6% et 1.1% du GNI par an (1.6 à 3 milliards d?euros en valeur actuelle) pour
assurer une transition climatique.
L?accompagnement par une programmation budgétaire ambitieuse du plan lors de son adoption
par la France (loi de finances pour 2024) avait initialement assis la planification française dans une
perspective budgétaire claire. Le fonds vert permettait notamment le co-financement par l?Etat
d?actions dans les territoires, méthode dont l?efficacité avait été testée lors du premier plan de
relance post Covid. Suite à la dégradation des finances publiques, la remise en cause des
financements attribués à la transition écologique n?a pas fait l?objet d?une évaluation de ses
conséquences, et notamment du coût du retard de la mise en oeuvre de certaines actions.
La France doit se doter d?une loi d?orientation budgétaire pluriannuelle
de la transition écologique et prévoir la mise en place de fonds dédiés au financement de la
transition pouvant permettre de mutualiser des financements publics et privés.
2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les
échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en
favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens
2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires
La planification écologique, une fois établie et financée, doit ensuite se déployer au plus près des
territoires. Elle doit être appropriée par les échelons locaux, adaptée aux réalités géographiques
et économiques des territoires. Elle doit pour cela s?appuyer sur des outils permettant sa
déclinaison. Et faire l?objet de financements clairs et identifiés, d?un montant adapté à la taille des
projets d?échelle locale.
La politique forestière du Costa Rica est un exemple de déclinaison territoriale efficace d?une action
de transition dont les résultats sur le long terme sont indéniables. Elle combine plusieurs outils de
politique publique, visant plusieurs actions en parallèle (loi contre la conversion de la forêt N°7575,
programme d?aires protégées) : la réduction de la déforestation 25 et l?accroissement de la
25 50 000 ha/an dans les années 80, 38 000 ha/an dans les années 90 et 27 000 ha/an depuis 2000.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 43/60
régénération de la forêt26, permettant à la fois la protection de la forêt et son exploitation soutenable,
mais aussi la diversification agricole, la protection de la biodiversité et des ressources en eau, la
réduction des émissions de gaz à effet de serre, le développement rural et la participation de la
société dans toutes ces composantes (peuples autochtones, professionnels de la forêt et de
l?agriculture). Le programme dispose également d?un financement clairement identifié au sein du
FONAFIFO (Fond de financement de la forêt nationale), alimenté en partie par des ressources
extérieures (financement REDD+ de la Banque mondiale)27 et s?appuyant sur des outils innovants
de financement (Forest Bond Certificate CAF, Forest Bond Certificate for forest management
CAFMA, paiements pour services environnementaux).
Le principal acteur des territoires étant les collectivités, c?est en premier lieu auprès d?elles que doit
se déployer la planification de la transition.
En Afrique du sud, les provinces et les municipalités doivent décliner la planification climatique
nationale. Ainsi, la province du Cap occidental est régulièrement en première ligne pour proposer
divers plans de planification écologique : sa « Climate Change Response Strategy ? Vision 2050 »
a été publiée en 2022 puis révisée en 2023, et son « Energy Resilience Program » (2021) définit
les actions à engager dans le secteur électrique de la région. La ville du Cap est particulièrement
volontariste et a adopté divers stratégies et plans depuis 2014 (Resilience Strategy en 2019, Water
Strategy en 2019, Inclusive Economic Growth Strategy en 2019, Bioregional Plan en 2015,
Integrated Coastal Management Policy en 2014). En Indonésie, le plan national de développement
à moyen terme est décliné dans les territoires via les RPJMN. Ils sont mis en oeuvre par les
administrations techniques décentralisées au niveau de chaque province ayant à leur tête un
gouverneur. Etablis pour 5 ans, ils font l?objet d?une élaboration concertée, qui s?appuie sur une
analyse de la situation, la formulation de scénarii environnementaux et l?identification de
recommandations stratégiques. En parallèle, les gouvernements provinciaux doivent également
rédiger leurs plans de réduction des émissions de GES ? les RAD-GRK. Les villes indonésiennes
disposent également de leurs plans de réduction des émissions.
Au Danemark, les régions sont pleinement associées à l?élaboration et à la mise en oeuvre de la
transition verte du Royaume. Les régions et la fondation danoise Sustainia28, qui met en contact le
monde des affaires et le monde scientifique, ont uni leurs forces pour remettre une feuille de route
au Gouvernement sur la manière dont les régions peuvent faciliter la participation et l?inclusion
citoyennes dans la transition vers une société durable. Le Danemark est en passe de devenir le
premier pays au monde où chaque municipalité (98) disposera d'un plan d'action climatique.
La loi finlandaise a été modifiée le 1er mars 2023 pour ajouter une obligation pour les municipalités
d?établir un plan climat et de le mettre à jour au moins une fois par mandat municipal. Ce plan
devait inclure l?objectif de réduction des émissions, et des mesures pour atteindre ces objectifs.
Chaque municipalité avait droit à une subvention de 45 000 euros maximum pour l?élaboration de
son plan. Ces plans devaient être élaborés entre 2025 et 2029 mais le programme du nouveau
gouvernement Petteri Orpo a prévu de supprimer cette mesure ainsi que les subventions afférentes
en novembre 2023 dans le cadre du budget national et des réformes proposées par le gouverne-
ment Orpo pour l'année 2024.
26 De 417 000 ha de forêt régénérés en 1986, la couverture atteint 918 000 ha en 2013.
27 200 millions de dollars entre 1998 et 2011
28 Sustainia, anciennement « Copenhagen Climate Council », est une collaboration mondiale entre le monde des
affaires et le monde scientifique, fondée par Erik Rasmussen, fondateur du principal groupe de réflexion
indépendant de Scandinavie, Monday Morning, basé à Copenhague, et aujourd'hui dirigée par Rasmus Schjødt
Larsen, diplômé de Harvard https://sustainiaworld.com/about/
PUBLIÉ
https://sustainiaworld.com/about/
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 44/60
Bien que n?ayant pas l?obligation de le faire, la plupart des Länder allemands ont adopté leur propre
stratégie ou législation climat, formulant leurs propres objectifs sectoriels et prévoyant des outils
de déploiement régionaux. En se basant sur l?étude menée par « Climate chance »29, on compte
12 des 16 Länder et villes-Etat à avoir adopté une législation permettant de coordonner les actions
de transition climatique à l?échelle régionale30. Huit d?entre elles31 incluent un objectif quantifié de
réduction des émissions de GES.
L?appropriation des enjeux par les échelons locaux se retrouve également dans la définition de la
politique de l?eau néerlandaise. Elle s?appuie sur un ancrage local historique qui permet de penser
la gestion de l?eau et du risque, en amont et au quotidien.
Aux Etats-Unis, la Californie dispose d?une politique climatique autonome de celle du
gouvernement fédéral. En novembre 2022, elle a adopté une loi visant la réduction de ses GES de
48% d?ici 2030 et l?atteinte de la neutralité carbone d?ici 2045, le tout soutenu par un budget de
52 milliards de dollars sur 5 ans. Elle a même mis en place son propre marché carbone qui couvre
85% des émissions dont les transports et le logement, et est connecté au marché carbone du
Québec. Les « Sustainable Communities Strategies », mises en place en Californie (SB 375)
donnent un cadre pour la réduction des émissions de GES pour les transports et la planification
urbaine, en cohérence avec les autres lois de l'Etat. Les organisations métropolitaines de
planification de l'Etat (18 en tout) sont tenues d'élaborer des infrastructures urbaines permettant
d'augmenter la densité (transports en commun, infrastructures cyclables et piétonnes, réduire la
dépendance automobile, ou agir sur l'étalement urbain).
A l?inverse, une mauvaise appropriation des enjeux à l?échelon local peut conduire à des retards
dans la mise en oeuvre voire à des déclinaisons inappropriées. Ainsi en Indonésie, la
décentralisation mise en oeuvre très rapidement à la fin de la dictature de Suharto, pourtant axée
sur l?autonomisation des provinces, a conduit à une autonomisation de groupes clientélistes
s?appuyant sur des réseaux oligarchiques, favorisant les passe-droits d?exploitation, les incendies
criminels et la pêche illégale, contre lesquels le gouvernement actuel lutte encore.
De même, la déclinaison verticale descendante de la planification chinoise s?est heurtée à des
retards de mise en oeuvre et de la corruption aux échelons locaux. La très grande fragmentation
de la structure administrative en Chine l?explique également. C?est dans ce cadre que la Chine a
eu recours à une réforme administrative en 2026 pour renforcer l?autonomie des bureaux de
protection de l?environnement (BPE) préfectoraux, dans le but d?éviter la double tutelle qu?ils
subissaient des échelons préfectoraux et provinciaux. Et cela explique également la mise en place
du « crédit social ». Ce système de notation des citoyens, des entreprises et des fonctionnaires
locaux conduit à la distribution de récompenses, mais aussi et surtout de pénalités pour ceux ne
respectant pas les règles, en s?appuyant sur une collecte automatique de données et leur
traitement par des intelligences artificielles.
La France a mis en place une déclinaison territoriale de sa planification écologique dans le cadre
des COP, qui se déroulent dans les régions françaises depuis l?automne 2023. A ce stade, cette
démarche ne s?est pas traduite par des plans régionaux. Elle englobe un état des lieux de la région
pour établir un diagnostic partagé. Elle doit permettre l?articulation de la planification écologique
régionale avec la planification nationale et la coordination avec les plans locaux. Elle doit définir
29 https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/
30 La Bavière a adopté une réforme de la Loi bavaroise sur la protection du climat en janvier 2023 (BayKlimaG)
avec des objectifs climatiques plus ambitieux que les objectifs fédéraux (neutralité climatique à l?horizon 2040). La
Basse-Saxe a adopté une révision de la Loi sur la protection du climat (NKlimaG) en décembre 2023.
31 Sauf celle d?Hambourg qui veut pourtant atteindre la neutralité carbone. Celle du Land de Hesse a des objectifs
en matière d?ENR et de quota de rénovation des bâtiments.
PUBLIÉ
https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 45/60
des mesures concrètes permettant le soutien aux projets à l?échelon local. Cette approche qui se
veut à la fois montante et descendante doit permettre une meilleure association des échelons
locaux dans le déploiement de la planification écologique.
Impliquer tous les acteurs des territoires de l?élaboration jusqu?à la mise
en oeuvre
2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les
structures des territoires pour mobiliser les citoyens
La planification écologique dans les territoires doit s?appuyer sur l?ensemble des acteurs locaux
pour assurer son ancrage et son efficience et sur des outils adaptés à ces enjeux, notamment en
matière de financements.
2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la
planification
Les principaux porteurs de ces politiques sont les collectivités locales et elles sont donc le principal
vecteur de la traduction concrète des actions de la planification écologique, en s?appropriant les
objectifs de la planification ou de la stratégie nationale.
En Inde, des États comme le Gujarat et le Rajasthan sont des leaders dans le déploiement de
l?énergie solaire. Dans le domaine agricole, l?État du Sikkim a mis en place une politique axée sur
la transition écologique, lui permettant de devenir le premier État indien entièrement bio en 2016,
grâce à une interdiction complète des pesticides et engrais chimiques. Cette initiative s'inscrit dans
une stratégie de développement durable qui vise à protéger les sols, améliorer la santé publique
et soutenir les petits agriculteurs.
En Afrique du sud, le Cap, Johannesburg et Durban sont membres du C40 « Cities Climate
Leadership Group », qui rassemble environ cent maires de grandes villes mondiales décidées à
faire face à la crise climatique. En comparaison, seule Paris est membre de ce réseau en France.
Plusieurs villes appartiennent également à l?« International Council for Local Environmental
Initiatives » (ICLEI) ou au réseau « Resilient cities ». La « South African Local Government
Association » (SALGA) apparait comme l?organe compétent pour assurer la remontée des
revendications locales dans la mise en oeuvre de ces stratégies climatiques, établissant un
dialogue avec l?échelon central. S?appuyant sur l?exemple allemand développé ci-dessous, le pays
a également mis en place un « Local government climate change support program » depuis 2012
qui fonctionne avec une plateforme internet fournissant guides, outils, jeux de données, formations.
En effet, l?Allemagne déploie depuis 2012 un dispositif de soutien pour les collectivités dans la mise
en oeuvre de la transition climatique : l?initiative nationale pour la protection du climat (NKI) qui fête
ses 15 ans d?action. Elle dispose d?un site internet dédié, affiche plus de 45 000 projets réalisés,
1,5 milliards d?euros de financements distribués. Parmi ses projets emblématiques, le centre
historique de la ville de Lemgo est climatiquement neutre grâce à un projet de chauffage urbain
réutilisant la chaleur des eaux usées ou le projet de transformation de l?éclairage urbain au LED
mis en place dans 48 communes de la haute Hesse. Depuis avril 2023, une « Agence de protection
locale du climat » appuie les collectivités dans la mise en oeuvre de leur projet climatique depuis
les méthodologies de calcul des émissions jusqu?aux financements pour les projets, en sus d?outils
de formation et de mentorat. Cette démarche s?appuie sur le KTF évoqué dans la section
précédente. Pour aller au bout de leur démarche, les collectivités utilisent également leur système
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 46/60
comptable (BISKO) lors de l?établissement de leur bilan énergétique et des émissions de GES ce
qui permet la traçabilité des démarches entamées. De même, la Finlande dispose depuis 2018
d?un Programme de solutions climatique municipales (2018-2023, 8 millions d?euros) pour financer
des projets climat des communes et des régions.
Mais les outils de la planification doivent également pouvoir s?adresser aux autres acteurs du
territoire.
2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification
En premier lieu, les acteurs économiques doivent pouvoir être associés à la planification
écologique.
La Finlande a élaboré en coopération avec les acteurs de chaque secteur économique des feuilles
de route sectorielles. Cette approche est assez révolutionnaire car il s?agit de « feuilles de route
inversées » : ce sont les acteurs de chaque secteur qui élaborent ces feuilles de route,
régulièrement remises à jour. Cela permet au gouvernement lorsqu?il en fait la synthèse de disposer
d?une vision permettant notamment une meilleure adéquation des moyens. Une démarche du
même type a été mise en place aux Pays-Bas, avec en 2013 l?accord volontaire de l?énergie, puis
l?accord national pour le climat avec son plan d?action, qui associe les acteurs économiques à la
prise de décision sur les objectifs et leurs déclinaisons.
A la différence de certains pays, on observe en Suède un mouvement volontaire industriel de
décarbonation. Les bioénergies et l?électrification ont déjà fait chuter la part des énergies fossiles
à 19% de la consommation énergétique de l?industrie (contre 54% en 1975, comme en France
aujourd?hui). Les acteurs industriels concentrant les dernières sources fossiles (les plus difficiles à
éliminer car situées au coeur des procédés industriels comme le coke dans la production d?acier et
les émissions des process chimiques de fabrication du ciment) ont pris conscience de l?avantage
stratégique de décarboner leur production pour renforcer leurs ventes à court et moyen terme.
L?implication du monde économique est allée en Allemagne jusqu?à la création de nouveaux modes
de décision au sein des entreprises, poussés par les syndicats qui cherchent à accompagner la
transition et à ce que ces transitions s?opèrent dans le respect des droits des salariés et du maintien
de leurs emplois. Ils ont ainsi fortement plaidé pour la mise en place de primes devant
accompagner l?évolution des compétences des salariés sur leur poste de travail. Les syndicats
portent également une proposition de révision de la loi sur le conseil d?établissement (Betriebsräte),
dans lesquels ils ne siègent pourtant pas formellement : il est proposé que le conseil ait un droit
d?initiative et de codécision en matière de décisions destinées à mieux protéger l?environnement, y
compris l?évolution des modes de production ; l?instauration d?une commission environnementale
dans toute entreprise de plus de 100 salariés est également proposée.
Les outils doivent aussi permettre le financement des projets des acteurs du territoire, entreprises
comme citoyens. La Californie distribue des aides et des prêts sur l?ensemble des sujets
environnementaux et climatiques, dans le cadre d?appels à projets notamment. Ces subventions
proposées sont regroupées sur un seul portail, avec un moteur de recherche extrêmement fluide
et possibilité de traduction.
L?un des outils les plus complets apparait comme celui de la stratégie de transition économique de
Bruxelles capitale 2022-2030 : « Shifting economy ». Le programme vise à l?accompagnement de
la trajectoire climatique et environnementale de la région par une stratégie dont l?objectif est une
économie décarbonée, régénérative, circulaire, sociale, démocratique et digitale. Le programme
cherche à « aligner les objectifs économiques sur les objectifs climatiques » et s?adresse à
tous les acteurs économiques de la région. La « transition économique » est définie comme : « la
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 47/60
transformation progressive au sens large (qui va de l?adoption d?une démarche d?écogestion à des
changements fondamentaux de business model) des activités économiques bruxelloises (en ce
compris les sous-traitants et les fournisseurs bruxellois) dans la perspective de contribuer aux défis
sociaux et environnementaux locaux et globaux ainsi qu?à la création et au maintien d?emplois de
qualité à Bruxelles ». Dès 2024, les entreprises inscrites dans une démarche de transition
économique ou qui sont exemplaires sur le plan social ou environnemental bénéficieront d?une
majoration des aides économiques. A partir de 2030, les outils économiques de la région seront
concentrés sur le soutien aux entreprises qui auront fait le choix de l?exemplarité sociale et
environnementale. Certains outils sont déjà en place :
- « finance&invest.brussels » facilite le financement des entreprises en transition et vient d?être
recapitalisé (triplement de sa capacité financière avec 131 millions d?euros additionnels) ;
- adoption d?un « Plan régional pour l?innovation » (PRI) qui prévoit 400 millions d?euros de
financement entre 2021 et 2027 pour les domaines d?innovation stratégique ;
- lancement de « Renolution » alliance des secteurs privé et public pour atteindre le
triplemement du taux de rénovation du bâti bruxellois ;
- la Stratégie Qualification-Emploi portée par le ministre de l?emploi et de la formation.
La stratégie a été co-construite avec l?écosystème bruxellois. Au total, 280 participants ont été
impliqués dont 132 organismes publics ou privés (fédérations professionnelles et sectorielles,
experts, guichets d?économie locale, universités, etc).
2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire
L?association des citoyens au projet de planification écologique est un élément essentiel pour la
concrétisation des projets. De nombreux pays ont tenté d?inclure les citoyens dans la prise de
décision et organisé différentes modalités de concertation ou de consultation comme nous l?avons
vu précédemment. Mais c?est dans la traduction concrète des projets dans les territoires que se
mesure la qualité de l?association des citoyens et leur adhésion au projet.
En Afrique du sud, la gestion des aires protégées a offert la possibilité d?association des
propriétaires privés (25% des aires protégées appartiennent à des propriétaires privés) et des
communautés locales. Plusieurs projets présentent aujourd?hui une gestion partagée entre
l?autorité locale, les ONG et les communautés implantées. C?est par exemple le cas de la réserve
de la communauté Mabaso, qui a établi un plan de gestion de l?aire protégée en partenariat avec
WWF-SA.
En Indonésie, les consultations avec les communautés locales, notamment sur la gestion des
ressources naturelles et la reforestation, font partie intégrante de la planification. Les forums multi-
acteurs (Musrenbang) offrent un cadre où citoyens, ONG et autorité locales participent à la prise
de décision. Des plateformes locales existent au Costa Rica, initiatives locales impliquant
directement les citoyens, notamment sur la reforestation et la préservation de la biodiversité. Ces
efforts renforcent le lien entre les communautés et les objectifs nationaux de transition écologique.
En Allemagne, la concertation locale est profondément ancrée dans les processus de planification
écologique. Les initiatives citoyennes, comme les "Ratsbürger" (assemblées locales consultatives),
permettent aux habitants de co-décider sur des projets énergétiques et environnementaux. Les
Länder et les municipalités favorisent également les consultations pour intégrer les besoins
spécifiques des populations dans la mise en oeuvre des objectifs climatiques. Plusieurs pays ont
de même misé sur l?association de la jeunesse aux processus de réflexion sur la transition
écologique : c?est le cas de l?Irlande, du Danemark (Conseil des jeunes pour le climat) ?
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 48/60
Les outils doivent également couvrir l?information des citoyens. Ainsi, en matière d?adaptation, le
gouvernement de Californie a mis en place une série d?outils permettant l?information du grand
public sur les ilots de chaleur, les risques liés aux tempêtes et aux inondations, mais aussi pour les
collectivités avec notamment Adapt-CA, boite à outils de développement des capacités
d?adaptation32 ou CERI-climate qui gère les interventions d?urgence sur les 600 infrastructures
considérées comme essentielles à la capacité de l?Etat à réagir aux catastrophes.
En France, le SGPE s?est saisi de cet enjeu de l?association citoyenne qui semble être ressenti
comme un manque. Il a notamment développé un outil d?information/formation sur le plan (Le Bon
Plan), sans disposer pour autant des moyens nécessaires pour en assurer la diffusion. Il analyse
également les outils de déclinaison de la planification auprès des citoyens (aides directes pour
l?efficacité énergétique des bâtiments, l?achat de véhicules électriques) qui sont les meilleurs
moyens de constater le niveau d?adhésion de la population. Pourtant, l?incapacité à entrainer
certains secteurs économiques à forte composante sociétale (agriculture notamment) et la grande
majorité des citoyens qui restent peu conscient de la démarche de planification entamée par la
France nuit à la mise en oeuvre de ses travaux.
Poursuivre la mise en oeuvre territoriale de la démarche de planification
écologique en se concentrant davantage sur les outils à déployer, notamment budgétaires
et numériques, pour aider les collectivités au-delà des outils de rapportage, les acteurs
économiques dans le suivi de leurs transitions et les citoyens dans leur appréhension et
leur inclusion dans le processus de transformation.
2.6 La planification de la transition écologique est également un
outil pour la stratégie internationale climatique et
environnementale
La planification écologique apparait également comme un bon outil de diplomatie climatique et
environnementale.
Des pays s?appuient sur leur expérience de planification écologique et leurs résultats pour renforcer
leur positionnement dans les instances internationales : on citera notamment Singapour, le Costa
Rica, et le Rwanda. Mais on peut également mentionner le rôle de leader au sein de leur continent
que veulent jouer l?Indonésie, l?Afrique du sud ou le Brésil, comme porte-parole pendant les
négociations internationales mais également comme des pays cherchant un mode de
développement alternatif, s?appuyant sur une transition juste. Du côté des pays développés, le
Royaume-Uni et le Danemark poursuivent leur investissement à l?échelle internationale et
l?Allemagne dispose avec le GIZ d?un outil très puissant de coopération.
La diffusion de la planification écologique au sein de la plupart des pays pourrait permettre de
renforcer les outils internationaux existants au sein des 3 conventions de l?ONU : elle crédibilise
les politiques nationales pour l?accession à des financements internationaux et facilite la lutte contre
la corruption.
A l?issue de plus d?une année à examiner la planification écologique dans les autres pays, il apparait
clairement aux autrices du rapport une réelle appétence de nombreux pays rencontrés dans
différents contextes pour des coopérations internationales en matière de planification écologique.
Même si la planification écologique reste liée à un contexte national, les expériences et les outils
32 https://arccacalifornia.org/adapt-ca/
PUBLIÉ
https://arccacalifornia.org/adapt-ca/
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mis en place par chacun sont très utiles pour la mise en place d?une planification plus efficiente.
Par ailleurs, peu de pays ont mis en place une planification écologique complète et peu parviennent
à déployer effectivement leur planification dans leurs territoires. Les mêmes obstacles sont souvent
rencontrés par les uns et les autres ce qui renforce encore la valeur du parangonnage.
La planification écologique pourrait donc devenir un nouvel outil de la stratégie diplomatique
climatique et environnementale de la France.
Faire de la planification écologique un nouvel outil de coopération
internationale et renforcer les partenariats avec les pays les plus susceptibles de faire
progresser la planification écologique française.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 50/60
Conclusion
La planification écologique se déploie donc dans la majorité des pays du G20 et de l?Union
européenne. Elle souffre le plus souvent des mêmes difficultés de mise en oeuvre, mais apparait
néanmoins comme le meilleur outil pour permettre d?assurer la transition. Avec son exemple de
planification écologique centralisée, la France dispose d?un outil puissant susceptible
d?accompagner sa transition. Les recommandations de ce rapport ont vocation à accompagner le
déploiement de cette planification et à faciliter sa mise en oeuvre, notamment sa déclinaison dans
les territoires.
L?utilité du parangonnage réalisé encourage à poursuivre la démarche, pour explorer certains pays
supplémentaires non étudiés (Espagne, Italie, Portugal notamment), ou approfondir certaines
situations n?ayant pas fait l?objet d?une étude suffisante par manque de temps et de moyens (Japon,
Canada). Mais c?est également sur le plan sectoriel que cet approfondissement mériterait d?être
réalisé. L?articulation entre les planifications et leur programmation budgétaire mérite en premier
lieu d?être creusée tant elle apparait comme l?une des clés de la réussite de cette démarche. Des
outils budgétaires innovants permettant de mieux garantir le financement de la transition, qu?ils
soient des outils fiscaux, d?affectation budgétaire, ou de recours à des financements externes
permettant d?associer mieux les acteurs économiques à la transition, méritent d?être expertisés.
Les difficultés rencontrées par certains pays et les réussites sur des secteurs pour lesquels la
transition écologique française patine pourraient également faire l?objet d?un approfondissement,
notamment en priorité la politique de souveraineté alimentaire et agricole. Enfin, certains exemples
très positifs de traduction de la planification dans les pays déjà étudiés pourraient faire l?objet
d?échanges avec les pays concernés notamment les outils développés par l?Allemagne, la Belgique
ou le Danemark en matière d?accompagnement des collectivités dans leurs projets de transition
climatique et environnementale et d?implication citoyenne dans la prise de décision et la mise en
oeuvre des politiques sur le terrain, notamment avec le rôle joué par le monde associatif.
Enfin, à l?issue de cette année consacrée à cette étude, il apparait clairement une appétence des
autres pays au-delà du cercle étudié pour la planification écologique française. Cet outil de
diplomatie climatique et environnementale doit être développé en accord avec le Ministère de
l?Europe et des Affaires Etrangères, l?AFD et Expertise France afin que le SGPE puisse à la fois
transmettre l?expertise française tout en recueillant des exemples et des outils utiles à la
planification française.
Barbara POMPILI
Virginie DUMOULIN
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 51/60
Annexes
PUBLIÉ
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Annexe 1. Lettre de mission IGEDD
PUBLIÉ
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PUBLIÉ
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Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre
THARYAT Tri République d?Indonésie Ambassador, Deputy Minister for
Multilateral Cooperation
28/11/2023
NAKAGAMI Hidetoshi Jyukankyo Research Institute Inc.Japan CEO&Founder
Delegation japan leaders
29/11/2023
FINK-HOOIJER Florika DG ENV Commission Européenne Directrice générale 08/12/2023
VAN VLEDHOVEN Stientje World Resources Institute Vice-présidente et Directrice
régionale Europe
08/12/2023
ANTTONEN Matti Ambassade de la Finlande en France Ambassadeur 06/02/2024
HEKKERT Marko Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur général 29/02/2024
STREMLER Jaco Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur Climat Air et Energie 29/02/2024
MINNESMA Marjan Fondation Urgenda ? Pays-Bas Directrice et Fondatrice 29/02/2024
VAN GINNEKEN Meike Ministère des Infrastructures et de l?Eau
Pays-Bas
Envoyée spéciale sur l?Eau et
directrice du Programme
international sur l?adaptation au
changement climatique et l?eau
29/02/2024
BONJER Jan Waterschap Hollandse Delta (Dutch Delta
Water Board) ? Pays-Bas
Président 29/02/2024
SPIERINGS Anne-Marie Transition du cluster industriel de
Rotterdam (DeltaLinqs) ? Pays-Bas
Directrice 29/02/2024
HEIJDRA Michel Ministère de l?Économie et du Climat
Pays-Bas
Directeur Général pour le Climat
et l?Énergie
01/03/2024
VRUGT René Ministère de l?Économie et du Climat
Pays-Bas
Directeur des sols, de
l?aménagement du territoire et de
l?adaptation au climat
01/03/2024
POLS Donald Association environnementale
Milieudefensie ? Pays-Bas
Directeur 01/03/2024
KERSTEN Kiki Central Bureau voor de Statistiek (CBS) ?
Pays-Bas
Central Bureau voor de Statistiek
(CBS)
01/03/2024
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Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 55/60
Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre
RAUTAVAARA Antti Centre for Peace Mediation de la
Finlande
Envoyé Spécial Eau 13/03/2024
SHANMUGARATNAM Tharman République de Singapour Président 15/05/2024
KHOR Dr. Amy Ministère du développement durable et de
l?agence publique de l?eau de Singapour
Senior Minister of State for
Sustainability and the
Environment
16/05/2024
TAN Adele Urban Redevelopment Authority of
Singapore
Chief Planner and deputy CEO 16/05/2024
TEO Joseph Ministry of Sustainability and the
Environment of Singapore
Chief Negociator for Climate
Change
17/05/2024
GUO Yiran Ministry of Sustainability and the
Environment of Singapore, National
Climate Change Secretariat, Singapore
Expert 17/05/2024
BHASKAR Ananda Ram National Environment Agency, Singapore Deputy Chief Executive Officier,
Environmental Portection Director-
General
17/05/2024
LESPAYANDEL Carine French Chamber of Commerce in
Singapore
Executive Director 16/05/2024
WIKODO Joko République d?Indonésie Président 20/05/2024
ADININGGAR Amalia BAPPENAS Indonésie Deputy for Economic Affairs 20/05/2024
YULASWATI Vivi BAPPENAS Indonésie Deputy for Maritime Affairs and
Natural Resources
22/05/2024
HENDIARTI Nani Ministre coordinateur des affaires
maritimes et de l?investissement
Ministre adjointe chargée des
questions environnementale et
forestières
23/05/2024
DHEWANTI Laksmi Ministère de l?environnement et des forêts Directrice générale de la lutte
contre le changement climatique
23/05/2024
KUSUMASTUTI Diana Ministère des travaux publics Directrice générale de « human
settlements »
23/05/2024
DUBEUX Rafael Ministère des Finances du Brésil Secrétaire exécutif adjoint et
coordinateur du plan écologique
17/06/2024
MOREL Julien Swedish Ministry of Climate and
Enterprise
Climate policy analyst 26/08/2024
VIATTE Loïc Expert français, ex-conseiller
Environnement à la RP suédoise
à Bruxelles
26/08/2024
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 56/60
Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre
PERSSON Asa Stockholm Environment Institute
Swedish Climate Policy Council
Research Director and Deputy
Director
Chair of the CPC
26/08/2024
ALTERA Ola Swedish Climate Policy Council Chief Executive 26/08/2024
FORSLUND Anna Swedish Agency for Nature Conservation Head of Unit Nature Analysis 26/08/2024
WIKHOLM Nanna Swedish Royal Institute of Technology
Natural resources department
Head of the Spatial Planning Unit 26/08/2024
VINNMYR Sabina Swedish Environment Protection Agency Senior scientific officer 26/08/2024
HANNERZ Fredrik Swedish Ministry of Climate and
Enterprise
Deputy-Director General
Head of Natural Environment
Division
26/08/2024
GRANATH Fredrik Swedish Ministry of Climate and
Enterprise
Advisor in charge of national
environmental objectives
26/08/2024
H.E.MR.WANG Bao Ministry of Water Resources of China Vice Minister of Water Resources
of China
09/10/2024
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 57/60
Annexe 3. Ambassades consultées
Ambassade de France en Afrique du sud Ambassade de France aux Etats-Unis d?Amérique
Ambassade de France en Allemagne Ambassade de France en Finlande
Ambassade de France en Belgique Ambassade de France en Inde
Ambassade de France au Brésil Ambassade de France en Indonésie
Ambassade de France au Canada Ambassade de France en Irlande
Ambassade de France en Chine Ambassade de France au Pays-Bas
Ambassade de France au Costa Rica Ambassade de France au Royaume Uni
Ambassade de France au Danemark Ambassade de France à Singapour
Ambassade de France en Suède
PUBLIÉ
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Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes
Acronyme/Sigles Signification
Adapt-CA Adaptation Capability Advancement Toolkit
AFD Agence France Développement
BAPPENAS Ministère de la planification d?Indonésie
BISKO BIlanzierungs-Standard KOmmunal (système comptable en Allemagne)
BPE Bureau de protection de l?environnement
CAF Banque de Développement d?Amérique latine et des Caraïbes
CAFMA Forest Bond Certificate for forest management
CCAC Conseil consultatif sur le changement climatique (EI)
CERI-Climate California Emergency Response Infrastructure Climate Vulnerability Tool
(USA)
CNC Commission nationale climat (Belgique)
COP Conférence des parties
CPO Climate policy office (Etats-Unis)
CR Costa Rica (code ISO)
C40 Cities Climate Leadership Group
DE Allemagne (code ISO)
DESNZ Ministère en charge de la sécurité énergétique et de la neutralité climatique
au Royaume-Uni
EI Irlande (code ISO)
EPA Agence de protection de l?environnement (USA, EI)
ETS Echange de quotas d?émission (UE)
FEDER Fonds européen de développement régional
FI Finlande (code ISO)
FONAFIFO Fond de financement de la forêt nationale
FONERWA Fonds vert (Rwanda)
GES Gaz à effet de serre
GIEC Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat
GIZ Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (en français :
Société allemande de coopération internationale)
GNI Gross national income ? Revenu national brut (proche du PNB)
GX Green transformation (transformation verte) au Japon
G20 Groupe des 20 (forum intergouvernemental des 19 pays aux économies les
plus développées du monde)
HCC Haut conseil pour le climat (France)
ICLEI Conseil International des Initiatives Locales pour l?Environment
IBAMA Institut brésilien de l?environnement et des ressources naturelle
IGEDD Inspection générale de l?environnement et du développement durable
IGF Inspection générale des finances
IPBES Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité
et les services écosystémiques
IRA Inflation reduction act (USA)
IRP Panel International des Ressources
JETP Partenariat pour une transition énergétique juste
KTF Fonds pour le climat et la transformation (DE)
LED Diode électroluminescente
LiFE Lifestyl for environment / Modes de vie durables (Inde)
LTS Stratégie de long terme (USA)
MoEFCC Ministère de l?environnement, de la forêt et du changement climatique Inde
METI Ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (Japon)
MOE Ministère de l?environnement (Japon)
MOF Ministère des finances (Japon)
NAPCC Plan d?action pour le changement climatique en Inde
NASEM Académie des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (USA)
NBSAP(en)/SPANB (fr) Stratégies et plans d?action nationaux pour la biodiversité
NCCRPWP Plan climatique en Afrique du sud
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Acronyme/Sigles Signification
NCCS Secrétariat national au changement climatique à Singapour
NDC(en)/CDN(fr) Contribution nationalement déterminée (climat)
NDCR Commission nationale de la réforme et du développement en Chine
NKI Initiative nationale pour la protection du climat (DE)
OCDE Organisation de coopération et de développement économiques
ODD Objectifs de développement durable
ONG Organisation non gouvernementale
PBL Office de la planification écologique (Pays-Bas)
PCC Commission présidentielle du climat en Afrique du sud
PLF Projet de loi de finances
PMCC Conseil sur le changement climatique (Inde)
PRI Plan régional pour l?innovation
PSSO Bureau de la durabilité du secteur public à Singapour
RAD-GRK Plan climat provincial en Indonésie
RAN-GRK Plan climat national en Indonésie
REDD+ Réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation
forestière
RPJMN Plan de moyen terme de développement ? 5 ans (Indonésie)
RPJPN Plan de long terme de développement ? 20 ans (Indonésie)
SALGA Association des collectivités locales (ZA)
SB 375 Législation californienne : le Senate Bill 375
SGPE Secrétariat général à la planification écologique
UE Union européenne
UNFCCC Convention cadre des nations unie sur le changement climatique
URA Urban redevelopment Authority (Singapour)
URSS Union des républiques socialistes soviétiques
UTCATF Utilisation des terres, changement d?affectation des terres et foresterie
WWF-SA World Wide Fund for Nature ? South Africa
ZA Afrique du sud (code ISO)
PUBLIÉ
Annexe 5. Fiches Pays
Présenté dans un document séparé
PUBLIÉ
Sommaire
Edito
Résumé
Liste des recommandations
Introduction
1 Une mise en place progressive d?outils de planification de la transition climatique et écologique dans la plupart des pays du G20 et de l?Union européenne, qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre
1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique
1.2 Les pays pionniers de la planification écologique
1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique
1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique
1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale
1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs de transparence
1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en oeuvre
1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs objectifs de transition
1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de l?engagement citoyen
2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au dernier kilomètre ? Des recommandations à tirer des exemples étrangers
2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté au plus haut niveau de l?Etat et répondant aux attentes citoyennes
2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son portage par la société
2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat
2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes citoyennes quant à leur avenir
2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans un cadre juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous les secteurs d?activités
2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements internationaux
2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace et juste
2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante
2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique
2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter
2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique
2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle
2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050)
2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels
2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens
2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires
2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens
2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la planification
2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification
2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire
2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale
Conclusion
Annexes
Annexe 1. Lettre de mission IGEDD
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Annexe 3. Ambassades consultées
Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes
Annexe 5. Fiches Pays
INVALIDE) (ATTENTION: OPTION
20 En février 2021, le tribunal administratif de Paris a reconnu l'État français responsable de "manquements dans
la lutte contre le changement climatique", le tenant ainsi responsable d'un préjudice écologique (« L'Affaire du
Siècle »). En juillet 2021, le Conseil d'État, saisi par la commune de Grande-Synthe, a enjoint au gouvernement
français de prendre, dans un délai de neuf mois, toutes les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs de
réduction des émissions de gaz à effet de serre, conformément aux engagements de la France.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 31/60
établissant un lien direct entre protection écologique et durabilité. La Chine a intégré la biodiversité
dans son 13ème plan quinquennal et mis en place un système national d?aires protégées, incluant
des parcs nationaux. La centralisation de la gestion environnementale sous un ministère unique a
permis une meilleure coordination des politiques liées à la biodiversité, à la pollution et au climat,
illustrant une gestion intégrée des ressources naturelles. L'Indonésie a adopté une planification
nationale intégrant des objectifs de faible émission carbone et de préservation de la biodiversité.
Le ministère de la Planification du développement national (BAPPENAS) a mis en place une
évaluation environnementale stratégique pour s'assurer que les plans incluent des indicateurs liés
au climat, à la biodiversité et à la gestion des ressources naturelles. Cette approche est soutenue
par un modèle intégré (IV204521 ), qui relie économie, société et capital naturel, permettant de
mieux comprendre les interactions entre la conservation de la biodiversité et la gestion durable des
ressources. Le Brésil met en oeuvre un plan de transformation écologique (PTE) articulé autour de
la lutte contre la déforestation et la promotion de la bioéconomie. Ce plan combine des mesures
environnementales et économiques pour atteindre zéro déforestation, tout en soutenant des
initiatives locales et la valorisation des produits de la biodiversité brésilienne. Par ailleurs, l?Institut
brésilien de l?environnement (IBAMA) joue un rôle crucial dans la surveillance et la mise en oeuvre
des politiques liées à la biodiversité, tandis que le pays utilise des systèmes avancés de
surveillance de la déforestation, démontrant ainsi l?interconnexion entre gestion des écosystèmes
et lutte contre le changement climatique.
A l?inverse, les pays ayant centré leur action sur une seule politique échouent à transformer l?essai
ou ont des difficultés à poursuivre leur action. Ainsi le Costa Rica qui n?a finalement intégré dans
sa planification que la politique forestière se trouve confronté à des difficultés de financement de
la poursuite de sa politique et fait face à des contestations populaires sur la non atteinte d?autres
objectifs.
L?efficacité de la planification écologique repose sur une approche globale, incluant les questions
complexes et sensibles. Ignorer ces enjeux risque de limiter l'impact des politiques écologiques et
de compromettre la transition nécessaire. Plusieurs exemples montrent les défis que représentent
ces sujets délicats.
Les Pays-Bas, avec leur modèle agricole intensif, sont confrontés à des niveaux élevés de pollution
par les nitrates et les émissions de méthane. Ces problèmes affectent la biodiversité et la qualité
des sols. La mise en oeuvre de politiques visant à réduire l?intensité de l?élevage et l?usage d?engrais
a déclenché des protestations de la part des agriculteurs, soulignant les défis liés à l?acceptabilité
sociale des mesures nécessaires. L?incapacité à inclure les parties prenantes et à proposer des
alternatives viables complique l?application de ces politiques.
La dépendance au charbon en Inde, Afrique du Sud et Indonésie est un frein à leur transition
énergétique. En Inde, le charbon représente plus de 70 % de la production d?électricité. Bien que
le pays investisse dans les énergies renouvelables, la transition est entravée par la dépendance
économique et sociale au charbon, qui emploie des millions de travailleurs. En Afrique du Sud, où
le charbon fournit 86 % de l?électricité, les efforts pour décarboner sont limités par des contraintes
économiques, des infrastructures vieillissantes et une opposition sociale forte. La transition juste,
soutenue par des mécanismes internationaux comme le Partenariat pour une transition
énergétique juste (JETP), est essentielle pour éviter une fracture sociale. En Indonésie, le charbon
est également central dans la production énergétique, et des retards dans l?adoption de politiques
ambitieuses ralentissent la transition énergétique nécessaire pour aligner le pays sur ses
engagements climatiques. À Singapour, bien que le pays se positionne comme leader régional en
matière de finance verte et de technologies, la planification reste centrée sur des objectifs
21 https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-
Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf
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https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf
https://documents1.worldbank.org/curated/ar/293141564033633199/pdf/Accounting-for-Natural-Capital-in-the-Strategic-Environmental-Assessment-of-Indonesia-Carrying-Capacity-in-the-IV2045-Model.pdf
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économiques, parfois au détriment de mesures structurelles plus contraignantes nécessaires pour
réduire durablement les émissions de gaz à effet de serre.
L?Allemagne peine à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports,
malgré son engagement dans la décarbonation. Les retards dans l?électrification des
infrastructures et la promotion insuffisante des mobilités douces, comme le rail ou le vélo, freinent
les progrès et ont même conduit à déstabiliser la coalition au pouvoir. Le ministre des transports,
Volker Wissing (FDP, libéral), avait refusé à plusieurs reprises de présenter un programme de
réduction des émissions de GES dans son secteur, suite aux échecs répétés à atteindre les
objectifs fixés (trois années consécutives en 2023). Cette situation a entraîné une révision de la loi
fédérale sur la protection du climat en avril 2024, supprimant le caractère contraignant des objectifs
sectoriels et introduisant un objectif global intersectoriel et pluriannuel. Cette modification est
considérée comme un compromis interne à la coalition au pouvoir, visant à éviter une escalade
politique tout en maintenant les engagements climatiques généraux de l'Allemagne. Cette situation
illustre que des secteurs difficiles doivent être traité en priorité dans la planification pour éviter des
retards coûteux en termes climatiques.
A l?inverse, des exemples de prise en compte de secteurs difficiles ont permis de mieux préparer
la transition. En Allemagne, un fonds d?avenir pour l?industrie automobile doté d?un milliard d?euros
pour la période 2021-2025, afin de soutenir la transformation de ce secteur stratégique a été lancé.
En collaboration avec les syndicats (IG Metall), des réseaux régionaux de transformation ont été
établis dans les bassins industriels. Ces initiatives, qui intègrent des universités, chambres
d'industrie, centres de formation et agences pour l?emploi, ont pour but d?élaborer des stratégies
adaptées aux besoins locaux tout en assurant le maintien de l?emploi et la reconversion vers des
technologies plus durables. Le Danemark, a introduit une taxe carbone sur l?agriculture, ciblant les
émissions de méthane issues des élevages bovins et porcins. Entrant en vigueur progressivement
d?ici 2030, cette taxe est accompagnée de déductions fiscales pour les agriculteurs afin de limiter
les effets négatifs et d?investir dans des technologies vertes. Cette mesure a été adoptée grâce à
un processus de concertation impliquant l?Etat, les agriculteurs et les ONG environnementales qui
a abouti à un accord largement validé par le Parlement. Ces mesures visent à financer la transition
écologique tout en soutenant les producteurs affectés. L?Indonésie, premier producteur mondial
d?huile de palme, a mis en oeuvre des politiques pour promouvoir des pratiques responsables. Un
moratoire permanent sur la déforestation et le drainage des tourbières a été instauré, accompagné
d?un projet national de certification pour la durabilité. Des aides ont été déployées pour soutenir les
petits producteurs dans l?adoption de méthodes modernes, tout en luttant contre la déforestation
illégale et les feux de forêts. Une même politique de protection des tourbières, utilisées par la
population comme appoint pour le chauffage, a également été déployée en Irlande.
Ces exemples démontrent qu?une planification ciblée et des incitations bien conçues peuvent
permettre des progrès significatifs dans des secteurs critiques tout en minimisant les impacts socio-
économiques.
La France peut s?enorgueillir d?avoir également lancé un plan de décarbonation de son industrie,
comme en Allemagne, ciblant les 50 entreprises les plus émettrices tout comme d?avoir mis en
place une planification globale intégrant tous les secteurs d?activité et toutes les politiques.
Néanmoins, elle peine à réussir l?intégration concrète de son secteur agricole dans la planification
écologique, ce qui laisse des possibilités de constante renégociation à la baisse d?autres objectifs
figurant dans la planification comme la réduction de l?usage des pesticides et des nitrates et la
protection des espaces naturels et de la biodiversité.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 33/60
La planification écologique doit intégrer tous les secteurs d?activités et
l?ensemble des politiques doivent être mises en oeuvre, en adaptant si nécessaire la
trajectoire et les financements pour surmonter les difficultés.
2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des
structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité
politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et
indépendante
2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise
en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique
? Les bons exemples internationaux de planification écologique :
Peu des pays examinés disposent de structures transversales pilotant leur planification écologique,
souvent en raison de l?absence de planification globale, mais parfois ces structures sont absentes
même dans la planification climatique.
A part la France et le SGPE, on peut néanmoins citer le ministère indonésien de la Planification du
Développement National (BAPPENAS), chargé de la planification écologique et du développement
durable. Placé directement sous l'autorité du président, il joue un rôle clé dans la définition des
objectifs nationaux et dans leur coordination interministérielle. Il est responsable de l?élaboration et
de la synchronisation des plans nationaux de développement durable. Il coordonne les ministères
techniques. Il joue également un rôle crucial dans la mise en oeuvre territoriale en soutenant les
provinces dans leurs plans d?atténuation des émissions de carbone. Le BAPPENAS utilise des
outils tels que des modèles d'évaluation stratégique (par exemple GLOBIOM-Indonésie22) pour
planifier et synchroniser des politiques cohérentes, renforçant ainsi la capacité de déclinaison
territoriale grâce à l?implication des provinces.
Parmi les nouvelles organisations, le Brésil a réintroduit en 2023 un comité interministériel pour le
changement climatique, dirigé par le chef de cabinet de la présidence et impliquant plusieurs
ministères. Ce comité supervise la révision de la politique nationale sur le changement climatique
et coordonne les plans d?atténuation et d?adaptation sectoriels. Il assure également la cohérence
entre les mesures prises par différents ministères, tout en mobilisant des acteurs financiers comme
la Banque Nationale de Développement Économique et Social (BNDES) pour financer les projets
liés à la transition écologique. Au Japon, le Comité exécutif de la stratégie GX (« Green
Transformation »), créé en juillet 2022, est présidé par le Premier ministre et piloté par le ministère
de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (METI). Il a pour mission d'élaborer la "politique
fondamentale pour la réalisation de la GX". Le comité supervise les mesures transversales en
matière de décarbonation et de transformation verte, avec une collaboration entre le METI, le
ministère de l'Environnement (MOE), et le ministère des Finances (MOF) pour coordonner les
enjeux de production énergétique, d'industrie et de conservation environnementale. Il est certes
trop tôt pour analyser les résultats dans ces deux pays, mais la tendance à la création de structures
transversales témoigne de la prise de conscience de leur utilité.
Bien que limité aux enjeux climatique, l?Office de Planification Environnementale (PBL) agit aux
Pays-Bas comme un outil de pilotage transversal pour la politique climatique. Cet organisme
22 https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf
PUBLIÉ
https://globiom.org/training_material/GLOBIOM/GLOBIOM-Topic_RegionalApplications_APalazzo_Nov2020.pdf
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 34/60
indépendant évalue annuellement les progrès de la politique climatique et recommande des
ajustements pour garantir l'atteinte des objectifs. L?efficacité du PBL repose sur sa légitimité, qui
lui permet de coordonner différentes parties prenantes et de s?assurer que les politiques régionales
et nationales sont alignées avec les engagements internationaux. Il dispose de moyens lui
permettant de réaliser sa tâche tant sur le plan des ressources humaines que budgétaires.
? Les conséquences de l?absence d?une planification centralisée :
La difficulté à mettre en oeuvre une planification écologique sans programmation centralisée se voit
à l?inverse dans d?autres exemples. Cette absence d'une organisation unique et puissante
complique la prise de décision et ralentit la mise en oeuvre des politiques.
L?absence de structure de coordination peut ainsi conduire à des problèmes de coordination
interministérielle comme déjà évoqué en Allemagne. Aux Pays-Bas, le manque d'une structure de
coordination globale a conduit à une mise en oeuvre fragmentée des politiques climatiques et
agricoles. Bien que la planification territoriale intègre les enjeux de biodiversité et de gestion des
risques d'inondation, la transformation agricole reste un point de blocage majeur.
L?insuffisance du poids d?une instance de coordination pourtant existante produit les mêmes effets
de fragilisation de la planification écologique. En Roumanie, la gouvernance de la planification
écologique repose sur un comité interministériel pour le changement climatique, présidé par le
Premier ministre et impliquant divers ministères et agences. Cependant, ce système est marqué
par une coordination complexe et intermittente, tandis que le rôle du conseiller d'État chargé de la
transition écologique est limité à un rôle de facilitateur sans réelle autorité décisionnelle. En
Belgique, la Commission Nationale Climat (CNC), créée en 2002, vise à coordonner les politiques
climatiques entre les niveaux fédéral et régional. Elle est composée de représentants des
gouvernements fédéral et régionaux, épaulée par un secrétariat permanent et 14 groupes de travail
thématiques. Cependant, son rôle reste majoritairement évaluatif plutôt que décisionnel, ce qui
limite son efficacité en termes de pilotage stratégique.
La structure fédérale des pays pose des défis supplémentaires. Les objectifs et politiques
climatiques des provinces ou entités décentralisées ne sont pas toujours alignés avec la stratégie
nationale, ce qui complique l'harmonisation des efforts. Par exemple, des politiques comme le
développement de l?éolien en mer nécessitent une collaboration étroite entre le gouvernement
central et les gouvernements locaux, mais cette coordination reste imparfaite. Le manque de
coordination freine la mise en oeuvre des projets essentiels et ralentit la transition écologique au
niveau national.
Ainsi, en Allemagne, les Länder, responsables de nombreuses politiques environnementales,
disposent d?une grande autonomie. Cette configuration complique l?alignement des actions
régionales avec les objectifs nationaux, surtout dans des secteurs comme le transport et l?énergie.
La Belgique se caractérise par une gouvernance climatique fragmentée, reflétant sa structure
institutionnelle complexe. Les compétences sont partagées entre l?État fédéral et les trois régions
(Wallonie, Flandre, Bruxelles-Capitale), ce qui complique la coordination des politiques
environnementales et climatiques. Chaque région dispose de son propre plan de transition
écologique, ce qui entraîne des incohérences dans les priorités et les méthodologies adoptées.
Par exemple, la Flandre et la Wallonie ont des approches divergentes sur la gestion agricole et les
émissions industrielles. Au Royaume-Uni, les 4 nations ont leurs propres cibles de réduction des
émissions et leurs propres politiques en matière de changements climatiques, mais ils contribuent
également à l?atteinte des cibles intermédiaires du Royaume Uni et à la mise en place de politiques
dans l?ensemble du pays. S?il existe une réunion bimestrielle entre les ministres des 4 nations pour
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 35/60
discuter des politiques climatiques23, les objectifs et politiques des nations ne sont pas encore
parfaitement alignées avec la stratégie Net Zéro. Cette coopération imparfaite se reflète en
particulier dans le développement de certaines politiques indispensables pour l?atteinte des
objectifs climatiques des nations pour lesquelles le Gouvernement central détient une compétence
exclusive (ex : capture et stockage du carbone) ou des politiques nationales nécessitant une étroite
association des gouvernements compétents (ex : développement de l?éolien en mer en Ecosse).
On peut donc en déduire que la planification écologique nécessite un pilotage centralisé, confié à
une organisation dédiée, rattachée à l?échelon politique le plus élevé, ce qui se rapproche du
modèle français qui est donc à préserver. Cette organisation doit également être en mesure
d?animer le déploiement de cette planification dans les territoires afin d?en garantir la cohérence.
Maintenir le SGPE auprès du premier ministre, le renforcer dans son rôle
de pilotage de la planification écologique, en appui de l?action des ministères, et d?animation
de son déploiement dans les territoires.
2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation
régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter
L?évaluation régulière et indépendante de la planification écologique est cruciale pour garantir son
efficacité. Les bons exemples, comme celui des Pays-Bas avec PBL déjà cité, montrent que
l?investissement dans des systèmes de collecte de données et des évaluations indépendantes est
un levier stratégique pour réussir la transition écologique.
Appuyer sa politique de transition sur des données fiables et transparentes est une condition sine
qua non pour identifier les réussites et corriger les échecs. Les contre-exemples illustrent que
l?absence de fiabilité dans les données peut compromettre la crédibilité et l?impact des politiques
publiques.
Ainsi, en Indonésie, le défi majeur réside dans la fragmentation des données et le manque de
capacités institutionnelles pour les centraliser et les vérifier. Bien que le BAPPENAS tente
d?intégrer les indicateurs climatiques dans les plans nationaux, les provinces et les districts ne
disposent pas toujours des infrastructures nécessaires pour collecter des données fiables. Cela
entraîne des incohérences dans les rapports nationaux et freine les efforts de coordination.
L?Afrique du sud rencontre le même problème : alors qu?elle dispose d?une méthodologie ? le
« Climate Change Response Monitoring & Evaluation System » - intéressante car visant à analyser
les données dans des démarches à la fois top-down et bottom-up, et couvrant les champs de
l?atténuation, de l?adaptation et du financement, elle peine dans l?agrégation de données en dehors
du système énergétique. En Chine, malgré une capacité impressionnante de collecte de données,
la transparence et la fiabilité des informations posent problème. Les rapports environnementaux
sont souvent influencés par des pressions politiques ou des manipulations locales, rendant difficile
une évaluation objective. Par exemple, les statistiques sur la pollution de l?air ou les émissions
industrielles peuvent être sous-évaluées dans certaines régions pour éviter des sanctions
administratives, ce qui compromet la précision des politiques correctives.
A l?inverse, la planification écologique soutenue par une collecte de données robustes, s?appuyant
sur de multiples sources, notamment des ministères, des agences environnementales et des bases
23 https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-
communique-13-march-2024
PUBLIÉ
https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024
https://www.gov.uk/government/publications/interministerial-group-for-net-zero-energy-and-climate-change-communique-13-march-2024
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 36/60
de données publiques, et indépendante24 permet l?évaluation régulière (idéalement annuellement)
des progrès des politiques climatiques. Par exemple, le PBL utilise des outils de modélisation pour
anticiper les impacts des mesures et proposer des ajustements avant qu?il ne soit trop tard.
L'Irlande dispose de deux structures clés pour l'évaluation de sa planification écologique :
? L?Agence de protection environnementale (EPA) : indépendante, elle fournit des
données et des rapports réguliers sur les émissions de gaz à effet de serre, la qualité
de l?air, et d'autres indicateurs environnementaux. Ces rapports alimentent les débats
politiques et permettent d?ajuster les politiques climatiques.
? Le Conseil consultatif sur le changement climatique (CCAC) : cet organe indépendant
donne des recommandations stratégiques et suit les progrès des politiques
environnementales dans le cadre de rapports réguliers soumis au gouvernement et au
Parlement.
En Suède, le Haut Conseil pour le climat est chargé d?évaluer si les politiques publiques permettent
d?atteindre les objectifs climatiques nationaux. Il réalise une analyse indépendante des décisions
gouvernementales et des trajectoires climatiques, tout en mettant en évidence les mesures
supplémentaires nécessaires pour combler les écarts entre les objectifs et les résultats attendus.
Ces évaluations sont basées sur des données scientifiques fournies par l?Agence suédoise de
l?Environnement et sont publiées annuellement.
Créé par la loi climat de 2008, le Comité pour la changement climatique (« Committee for Climate
Change ») au Royaume-Uni occupe un rôle central dans l?évaluation des politiques climatiques
(sur l?adaptation comme sur l?atténuation) et la définition des budgets carbone. Son mandat est par
ailleurs renforcé par l?articulation étroite qu?il entretient avec le Parlement britannique et l?obligation
donnée au gouvernement de répondre aux recommandations du comité d?experts.
Grâce à cette approche, les décisions politiques sont ajustées régulièrement pour aligner les
actions avec les objectifs climatiques. En Irlande, en 2023, l'EPA a signalé que le pays n'atteindrait
qu'une réduction de 29 % des émissions d'ici 2030, bien en deçà de l'objectif de 51 %. Ce constat
a conduit à une révision des priorités et des politiques climatiques, notamment dans les secteurs
de l?agriculture et du transport, pour réduire cet écart. L?EPA continue de jouer un rôle central en
fournissant des données scientifiques indépendantes pour guider les ajustements nécessaires. En
Finlande, le « Panel climatique », un organe scientifique indépendant, a publié en 2024 un rapport
soulignant l'insuffisance des efforts dans le secteur UTCATF (utilisation des terres, changement
d?affectation des terres et foresterie). Il a recommandé des actions immédiates pour restaurer les
puits de carbone, ce qui a incité le gouvernement à revoir ses politiques forestières et à allouer des
financements supplémentaires à la gestion durable des forêts.
Par ailleurs, bien que non appliqué pour le moment aux sujets climatiques, le Royaume-Uni a
également expérimenté un modèle original d?évaluation des politiques publiques : le réseau des
« What Works Centres », centres thématiques chargés de faire la synthèse des connaissances
dans leur domaine afin d?éclairer la décision publique. Pour évaluer leurs politiques, les ministères
britanniques s?adressent régulièrement à des consortiums d?acteurs externes réunissant des
universités, des organismes indépendants de recherche et des cabinets de conseil. Cette
externalisation constitue pour la presse et l?opinion publique une garantie de qualité des
évaluations et de crédibilité de leurs résultats. Depuis 2015, un panel d?experts de l?administration
et du monde académique, le « Cross- Government Trial Advice Panel » (CG-TAP), est également
à la disposition des ministères pour les aider à mettre en oeuvre des évaluations d?impact. Avec
24 L?indépendance dont il est fait mention ici renvoie à une indépendance par rapport au pouvoir politique, au sens
autorité administrative indépendante en France, et par rapport aux lobbies économiques et sociétaux (syndicats et
monde associatif notamment).
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 37/60
une approche similaire, l?Académies des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (NASEM) aux
Etats-Unis, organisation privée à but non lucratif qui regroupe de grands chercheurs du pays, publie
des rapports sur les thématiques de la transition écologique, tels que « l?Accélération de la
décarbonation aux Etats-Unis » (2024), « L?intégration du changement climatique et de la politique
climatique dans la modélisation macro-économique » (2024), « Intégrer les sciences humaines
pour adapter les réponses sociétales aux changements environnementaux » (2023), produisant
une évaluation externe de l?action de l?administration fédérale.
La question de l?aspect contraignant ? que la contrainte s?appuie sur la norme ou sur une pression
sociale et morale ? de ces modalités de contrôle et d?évaluation est également centrale dans leur
capacité à réorienter les politiques publiques. Ainsi en Afrique du sud, le rôle d?évaluation joué
depuis 2020 par la Commission présidentielle sur le climat renforce le message critique sur le
retard pris dans la mise en oeuvre des politiques, que les autres dispositifs d?évaluation sud-africain
sur le climat et la biodiversité, de par leur nature non contraignante, ne pouvaient pas porter.
Le modèle français de planification écologique ne dispose pas d?un tel outil d?évaluation. Certes,
le Haut Conseil pour le Climat (HCC), créé en 2018, joue un rôle d?évaluation étant un organisme
indépendant chargé d'évaluer l'action publique en matière de climat. Composé d'experts issus de
diverses disciplines, il analyse la cohérence des politiques françaises avec les engagements
nationaux et internationaux, notamment l'Accord de Paris, et formule des recommandations pour
améliorer leur efficacité. Il publie des rapports annuels et des avis spécifiques évaluant les progrès
de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le respect des budgets
carbone, et l'adaptation au changement climatique, publications ayant vocation à éclairer les
décideurs politiques et le public sur l'état de la transition écologique en France. Néanmoins, la Cour
des comptes, avec l'appui du HCC, a publié en mars 2024 un rapport intitulé « Évaluation annuelle
de la mise en oeuvre des mesures prévues par la loi climat et résilience » qui conclut que les
dispositifs actuels de suivi et d'évaluation des politiques climatiques sont insuffisants pour mesurer
efficacement les progrès réalisés et que plusieurs recommandations du HCC, notamment en
matière de gouvernance et de coordination des actions climatiques, n'ont pas été entièrement
suivies d'effets. En mai 2023, l'IGF a publié un rapport intitulé « Adaptation de la fiscalité aux
exigences de la transition écologique » recommandant une refonte de la fiscalité pour mieux
intégrer les objectifs climatiques, en ligne avec les préconisations du HCC sur l'utilisation
d'instruments fiscaux pour encourager la transition écologique, et insistant sur la nécessité d'un
suivi rigoureux des dépenses publiques liées à l'environnement, rejoignant les recommandations
du HCC sur la transparence budgétaire et l'affectation des ressources. Cependant, non seulement
il ne dispose pas de l?autorité nécessaire pour imposer les constats que font apparaitre ses
évaluations, mais en outre, le HCC est centré uniquement sur les enjeux climatiques, et non sur
les autres aspects de la transition écologique. Ce constat a déjà fait l?objet d?évocation de réformes
telles qu?une évolution du HCC ou la création d?un Défenseur de l?environnement sur le modèle de
celui du Défenseur des droits, mais ces idées n?ont jamais prospéré.
La France doit se doter d?une entité d?évaluation de sa planification
écologique indépendante et reconnue qui appuiera le SGPE dans sa démarche de pilotage
de la planification écologique.
2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité
politique
L?obligation de rendre des comptes sur la mise en oeuvre de la planification écologique est cruciale
pour garantir la transparence et l?efficacité des politiques publiques, mais aussi leur acceptabilité
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 38/60
sociale. Le narratif de la transition doit s?appuyer sur une redevabilité politique afin d?être
appréhendé et déployé par les élus locaux du pays. Le Parlement peut ainsi avoir un rôle à jouer
quand il est associé à la prise de décision sur la planification écologique ou à l?évaluation de cette
politique, étant alors en capacité de constater les difficultés rencontrées par les pouvoirs publics
en charge. C?est ce pari d?association du Parlement que font les Pays-Bas, la Finlande, la Suède,
le Danemark ou encore l?Irlande et le Royaume-Uni.
Ainsi, en Irlande, le Premier ministre publie annuellement un rapport d?étape sur les progrès
réalisés dans le cadre du Plan d'action climat. Ce rapport est complété par les analyses de l?EPA
qui alimentent les débats parlementaires avec des projections et des évaluations des politiques
mises en oeuvre. Ces échanges permettent d?identifier les lacunes et d?ajuster les stratégies,
renforçant ainsi la redevabilité du gouvernement envers le Parlement et les citoyens. En Suède, la
loi cadre climatique impose au gouvernement de publier chaque année un rapport intégré au projet
de loi de finances. Ce document évalue l?écart entre les objectifs climatiques et les résultats
obtenus, permettant une comparaison transparente des trajectoires. Le Parlement utilise ces
rapports pour surveiller et débattre des performances du gouvernement en matière de transition
écologique. À Singapour, les « Committee of Supply » sont des plateformes où chaque ministère
présente et justifie ses actions devant le Parlement lors des discussions budgétaires annuelles.
Cette démarche permet d?assurer une redevabilité politique sur la mise en oeuvre des initiatives du
Plan Vert (« Green Plan ») et d?informer les décisions budgétaires à venir. Au Danemark, chaque
année, le Ministère du Climat, de l?Énergie et de l?Approvisionnement, est chargé de présenter au
Parlement un programme climatique (« klimaprogram »). C?est l?occasion de faire le point sur le
niveau de réalisation des objectifs nationaux tout comme des initiatives et mesures prévues en
matière de climat.
La planification écologique ne fait pas en France l?objet d?une présentation systématique devant le
Parlement. Elle ne fait donc pas l?objet d?une confrontation en matière de redevabilité politique, ce
qui affaiblit sa capacité à être appréhendée par le personnel politique. Une opération de formation
à très grande échelle de l?administration publique à la transition écologique a été lancée dans le
cadre de la planification écologique. Une même démarche n?a pas été menée auprès des députés
ou des sénateurs, ni des élus régionaux ou locaux en dehors de la déclinaison territoriale
actuellement engagée de la planification écologique. Leur adhésion à la transition n?est donc pas
garantie par une démarche d?échange ou d?information et peut donc pâtir d?un déficit de
compréhension fine des enjeux mais également de la perception des contraintes dans sa mise en
oeuvre. Pire, la création d?instances citoyennes sans rôle clairement défini au préalable, telle que
la convention citoyenne pour le climat, a conduit les parlementaires à se sentir dessaisis de leur
rôle de législateurs sur ces enjeux les poussant à diverses surenchères lors de l?adoption de la loi
climat-résilience, ce qui a largement compliqué les débats et conduit à l?abandon ou la réduction
de l?ambition de certaines mesures.
La planification écologique doit faire l?objet d?un suivi annuel devant le
Parlement, qui permettra d?évaluer si la trajectoire est respectée et de définir les mesures à
mettre en place si ce n?est pas le cas. Ce suivi sera alimenté par la publication en amont
d?un rapport annuel de l?organe d?évaluation indépendant.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 39/60
2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire
de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation
pluriannuelle
2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court
(2030), moyen (2040) et long (2050)
Une planification écologique efficace repose sur une trajectoire claire, articulée autour d?échéances
courtes, moyennes et longues. Cette approche garantit une visibilité accrue pour les acteurs
économiques et permet de déployer des politiques ambitieuses.
Singapour dispose d?un plan à long terme, révisé en 2021, pour projeter son développement sur
50 ans. Ce plan inclut des projets ambitieux comme la reconquête de terres sur la mer avec le
projet "Long Island" pour répondre à la montée des eaux. Les infrastructures urbaines,
économiques et naturelles sont intégrées dans cette vision, renforçant la résilience climatique tout
en garantissant la durabilité urbaine. Cette perspective de long terme garantit la confiance des
acteurs économiques qui nous l?ont exprimé lors de notre visite sur place. L?Indonésie articule sa
planification autour d?un plan national de développement à long terme (RPJPN), couvrant 20 ans,
et d?un plan à moyen terme (RPJMN), révisé tous les 5 ans pour refléter les priorités présidentielles.
Adopté en janvier 2024, le RPJPN "Indonésie Dorée 2045" cible la neutralité carbone et intègre
des objectifs socio-économiques et écologiques, tels que le renforcement des capacités face aux
chocs environnementaux. Ce plan de long terme permet d?assurer que la transition entre deux
présidents ne remettra pas en cause les engagements de long terme, tout en laissant la place aux
adaptations politiques découlant nécessairement des changements démocratiques.
L?Union européenne développe également des plans climatiques basés sur des échéances
multiples. Par exemple, la stratégie 2030-2050 fixe des objectifs intermédiaires en termes de
réduction des émissions et d?adaptation, tout en proposant des mécanismes financiers à long terme
pour soutenir les transitions nationales. Les Pays-Bas ont mis en place une planification à long
terme de la gestion de l?eau, essentielle dans un pays en partie situé sous le niveau de la mer. Leur
approche inclut des mesures pour la prévention et la gestion des inondations, combinant solutions
infrastructurelles et préservation des écosystèmes. Cette stratégie repose sur une vision à 50 ans,
garantissant la sécurité hydrique tout en répondant aux défis climatiques. Au Royaume-Uni, des
objectifs de long et moyen terme (réduction des émissions de GES de 81% d?ici 2035 par exemple)
s?accompagnent de planifications successives sur 5 ans, sous la forme de budgets carbone, ce qui
permet d?allier une planification de long terme avec des échéances de plus court terme sur
lesquelles le gouvernement est redevable.
Une telle visibilité est particulièrement importante pour accompagner les politiques d?adaptation
(Pays-Bas sur les inondations), de reconquête de la biodiversité (Costa Rica avec la reconquête
forestière, Afrique du sud avec les aires protégées) mais également dans des objectifs de
transformation de filières économiques - politique agricole, réindustrialisation ? (voir l?exemple de
Singapour sur l?eau et la politique industrielle) ou de gestion de l?étalement urbain (Portland,
Singapour).
La planification écologique de la France se limite à 2030 et peine à décliner des objectifs pour 2040
et au-delà, même si l?objectif de neutralité carbone en 2050, celui de l?absence d?artificialisation
nette en 2050 ou les objectifs intermédiaires fixés à l?échelle communautaires devraient la pousser
dans cette direction. Ce manque de visibilité nuit à la crédibilité de la politique et encourage sa
remise en cause régulière.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 40/60
La France doit se doter d?une planification à échéance 2040 et à
échéance 2050 qui doit intégrer ses objectifs en matière d?adaptation et de reconquête de
la biodiversité.
2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements
publics pluriannuels
Une fois le calendrier de la transition établi sur les court, moyen et long termes, cette visibilité
calendaire sur le plan de transition écologique nécessite d?être accompagnée de perspectives
budgétaires permettant la mise en oeuvre des actions du plan. La planification de la transition
écologique doit ainsi faire l?objet d?une planification budgétaire claire et pluriannuelle. Cette visibilité
apporte de la certitude aux investissements publics et privés qui doivent être engagés. Sans une
telle visibilité, l?action est freinée et peine à se déployer.
La Commission européenne l?avait bien compris lors du lancement du Plan vert de l?Union
européenne : il s?appuie sur l?annonce de 1 000 milliards d?euros d?investissements durables au
cours de la décennie. Ce plan combine des fonds provenant du budget de l'UE, du système
d'échange de quotas d'émission (ETS) et du programme InvestEU, qui vise à attirer des
investissements publics et privés. Les fonds de cohésion de l'UE soutiennent les pays et régions
dans la mise en oeuvre de projets contribuant au « Green Deal ». Les États membres doivent
consacrer au moins 30 % des fonds reçus du Fonds européen de développement régional (FEDER)
à ces priorités. De plus, 37 % du Fonds de cohésion est spécifiquement destiné à atteindre la
neutralité climatique d'ici 2050. La politique agricole commune a également été renforcée dans son
volet environnemental (au moins en affichage au niveau européen) pour accompagner la stratégie
de la ferme à la fourchette. Cette programmation budgétaire de l?Union européenne a facilité la
planification budgétaire nationale des Etats membres, qui se sont également appuyés sur les plans
de relance post crise COVID lancés au sein de l?UE.
De même, l?administration Biden aux Etats-Unis a déployé sa politique climatique dans le cadre
d?une « nouvelle politique industrielle » qui s?est traduite par cinq lois appuyées sur des
financements publics : la loi sur l?énergie de décembre 2020 prévoit 7 milliards de dollars sur 5 ans,
la loi bipartite sur l?infrastructure de novembre 2021 y consacre 454 milliards de dollars, la loi sur
la réduction de l?inflation (Inflation réduction Act) d?août 2022 prévoit 370 milliards de dollars sous
forme de crédits d?impôt, de subvention et de prêts, l?acte « puces et sciences » prévoit enfin plus
de 60 milliards de dollars pour la recherche-développement (semi-conducteurs, technologies sans
fil notamment).
Cette problématique se retrouve dans d?autres pays : l?annualité budgétaire ou l?émergence de
nouvelles priorités nuisent à la mise en place de financements pluriannuels et rendent le
financement de la planification écologique dépendant des autres choix budgétaires, parfois en
contradiction avec son inscription dans le temps long.
L?usage de fonds dédiés à la transition écologique ? comme le Fonds vert en France ? permet aux
pays l?affichage des subventions publiques affectées au plan de transition écologique et peut, en
cas d?affectation de certaines recettes, à la fois garantir un financement pluriannuel et faciliter
l?acceptation par la population du financement de la transition de long terme, prenant notamment
appui sur le principe pollueur-payeur.
Depuis 2023, l?Allemagne s?est dotée d?un fonds pour le climat et la transformation (KTF), alimenté
par les recettes du système national de tarification du CO?, c'est-à-dire la taxe carbone appliquée
aux émissions provenant de la combustion de combustibles fossiles. Cependant, en novembre
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 41/60
2023, la Cour constitutionnelle fédérale allemande a déclaré inconstitutionnel le transfert de
60 milliards d'euros de crédits non utilisés, initialement destinés à la gestion de la pandémie de
COVID-19, vers le KTF. Cette décision a entraîné une révision du financement du fonds,
nécessitant des ajustements pour maintenir les programmes clés de financement de l'énergie et
des infrastructures. La Belgique a également mis en place un « Fonds de transition écologique »,
dont la mission est valable pour 30 ans et renouvelable, et qui sert de courroie de transmission
pour les fonds européens vers les entreprises et les projets de réduction des émissions. Le
Danemark a annoncé en juin 2022 la mise en place d?un « Fonds Vert » de 53,5 milliards de
couronnes (7,2 milliards d?euros) provenant de recettes fiscales qui devraient alimenter les caisses
de l?Etat entre 2024 et 2040. C?est également le cas en Finlande, en Irlande, aux Pays-Bas, au
Japon, à Singapour.
Hors Union européenne, les pays recourent également à des fonds dédiés. Le Rwanda appuie sa
politique de transition environnementale sur un fond spécifique : le « Rwanda Green Fund » ou
FONERWA, établi dès 2012. Le Brésil a doté sa politique sur le changement climatique d?un fond
fédéral spécifique, doté notamment de 10 milliards de reals par la levée d?obligations vertes. Il a
même plus récemment doté sa politique forestière d?un Fonds national pour la mise en valeur des
forêts, outil de sa planification forestière à grande échelle. Il est également question en Chine d?un
« fonds national de transformation à faible émissions de carbone » ou d?un fonds de
développement vert
Ces fonds peuvent être utilisés par les pays pour doter les collectivités locales afin d?accompagner
la transition écologique sur le terrain. Ainsi, depuis la mise sur pied du plan climatique renforcé du
Canada en décembre 2020, le gouvernement a investi 247 millions de dollars au moyen du Fonds
pour une économie à faibles émissions de carbone dans 21 programmes provinciaux et territoriaux
de rénovation de maisons et de bâtiments. En Indonésie, le fonds pour le changement climatique,
bien que piloté par le BAPPENAS, est directement chargé de financer des programmes provinciaux
et locaux en mobilisant des ressources nationales et internationales.
Le Danemark dispose d?un Fonds d?investissement pour les pays en développement, afin de
clarifier l?usage de ses financements publics de coopération internationale dans le domaine de la
transition climatique et environnementale.
Au-delà de son fond climat assez classique, la Finlande dispose d?un Fonds public
d?investissement pour l?innovation (Sitra), fondation dont l?objectif est de « promouvoir un
développement stable et équilibré en Finlande, une croissance économique qualitative et
quantitative et une compétitivité et une coopération internationale ». Cette fondation est
responsable devant le Parlement mais pas devant le gouvernement. Sa capitalisation était évaluée
à 771 millions d?euros en 2017. Elle fonctionne à la fois comme un « think-thank » et comme une
société d?investissement. Créée en 1967 dans le cadre de la Banque de Finlande, la majeure partie
de sa dotation actuelle provient d?un don d?actions Nokia du Parlement finlandais de 1992. Le fonds
dépense environ 30 millions d?euros par an correspondant au rendement de sa dotation. Il investit
principalement dans des entreprises et des start-ups pour créer de nouvelles activités rentables.
Le manque de transparence sur les financements accordés à la transition écologique que nous
avons rencontré dans nos recherches démontre que l?enjeu est commun à tous les pays. Nous
recommandons donc qu?une analyse approfondie des financements de la transition écologique soit
menée, pour compléter la première approche faite dans ce rapport. Les outils de dépense publique
sont en effet un très bon indicateur de la capacité des pays à respecter leurs engagements.
En Suède, le suivi de l?atteinte des objectifs est effectué par le gouvernement, chaque année dans
le cadre du rapport « climat » du PLF (avec l?appui des Agences nationales, dont l?Agence de
protection de l?Environnement Naturvårdsverket). Ainsi un relèvement de 8% au premier semestre
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 42/60
2024 des émissions suédoises a été évalué comme principalement dû à l?augmentation de la
consommation des carburants routiers fossiles entretenue par la décision du nouveau
gouvernement de réduire le taux d?incorporation des biodiesels à 6% (contre 50% en volume
précédemment).
Faisant ressortir l?importance de la programmation budgétaire de la transition écologique, « l?Irish
Fiscal Advisory Council », organisme de surveillance budgétaire de l?Irlande, a publié en octobre
2023 un rapport sur l?impact du changement climatique sur les finances publiques, faisant partie
d?une série de recherche sur la viabilité à long terme des finances publiques, en lien avec le
changement climatique. Le rapport estime le coût de l?ensemble des dépenses publiques
nécessaires pour atteindre les objectifs climatiques irlandais en suivant une « transition juste »,
telle que décrite par la législation adoptée. Le rapport modélise deux scénarios pour les dépenses,
l?un de coût faible correspondant à la limite inférieure de l'implication potentielle de l'État, et l?autre
de coût élevé considéré comme une estimation supérieure raisonnable, tout en reconnaissant que
ces coûts pourraient être encore plus élevés. Entre 2026 et 2030, le gouvernement devrait
dépenser entre 0.6% et 1.1% du GNI par an (1.6 à 3 milliards d?euros en valeur actuelle) pour
assurer une transition climatique.
L?accompagnement par une programmation budgétaire ambitieuse du plan lors de son adoption
par la France (loi de finances pour 2024) avait initialement assis la planification française dans une
perspective budgétaire claire. Le fonds vert permettait notamment le co-financement par l?Etat
d?actions dans les territoires, méthode dont l?efficacité avait été testée lors du premier plan de
relance post Covid. Suite à la dégradation des finances publiques, la remise en cause des
financements attribués à la transition écologique n?a pas fait l?objet d?une évaluation de ses
conséquences, et notamment du coût du retard de la mise en oeuvre de certaines actions.
La France doit se doter d?une loi d?orientation budgétaire pluriannuelle
de la transition écologique et prévoir la mise en place de fonds dédiés au financement de la
transition pouvant permettre de mutualiser des financements publics et privés.
2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les
échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en
favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens
2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires
La planification écologique, une fois établie et financée, doit ensuite se déployer au plus près des
territoires. Elle doit être appropriée par les échelons locaux, adaptée aux réalités géographiques
et économiques des territoires. Elle doit pour cela s?appuyer sur des outils permettant sa
déclinaison. Et faire l?objet de financements clairs et identifiés, d?un montant adapté à la taille des
projets d?échelle locale.
La politique forestière du Costa Rica est un exemple de déclinaison territoriale efficace d?une action
de transition dont les résultats sur le long terme sont indéniables. Elle combine plusieurs outils de
politique publique, visant plusieurs actions en parallèle (loi contre la conversion de la forêt N°7575,
programme d?aires protégées) : la réduction de la déforestation 25 et l?accroissement de la
25 50 000 ha/an dans les années 80, 38 000 ha/an dans les années 90 et 27 000 ha/an depuis 2000.
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régénération de la forêt26, permettant à la fois la protection de la forêt et son exploitation soutenable,
mais aussi la diversification agricole, la protection de la biodiversité et des ressources en eau, la
réduction des émissions de gaz à effet de serre, le développement rural et la participation de la
société dans toutes ces composantes (peuples autochtones, professionnels de la forêt et de
l?agriculture). Le programme dispose également d?un financement clairement identifié au sein du
FONAFIFO (Fond de financement de la forêt nationale), alimenté en partie par des ressources
extérieures (financement REDD+ de la Banque mondiale)27 et s?appuyant sur des outils innovants
de financement (Forest Bond Certificate CAF, Forest Bond Certificate for forest management
CAFMA, paiements pour services environnementaux).
Le principal acteur des territoires étant les collectivités, c?est en premier lieu auprès d?elles que doit
se déployer la planification de la transition.
En Afrique du sud, les provinces et les municipalités doivent décliner la planification climatique
nationale. Ainsi, la province du Cap occidental est régulièrement en première ligne pour proposer
divers plans de planification écologique : sa « Climate Change Response Strategy ? Vision 2050 »
a été publiée en 2022 puis révisée en 2023, et son « Energy Resilience Program » (2021) définit
les actions à engager dans le secteur électrique de la région. La ville du Cap est particulièrement
volontariste et a adopté divers stratégies et plans depuis 2014 (Resilience Strategy en 2019, Water
Strategy en 2019, Inclusive Economic Growth Strategy en 2019, Bioregional Plan en 2015,
Integrated Coastal Management Policy en 2014). En Indonésie, le plan national de développement
à moyen terme est décliné dans les territoires via les RPJMN. Ils sont mis en oeuvre par les
administrations techniques décentralisées au niveau de chaque province ayant à leur tête un
gouverneur. Etablis pour 5 ans, ils font l?objet d?une élaboration concertée, qui s?appuie sur une
analyse de la situation, la formulation de scénarii environnementaux et l?identification de
recommandations stratégiques. En parallèle, les gouvernements provinciaux doivent également
rédiger leurs plans de réduction des émissions de GES ? les RAD-GRK. Les villes indonésiennes
disposent également de leurs plans de réduction des émissions.
Au Danemark, les régions sont pleinement associées à l?élaboration et à la mise en oeuvre de la
transition verte du Royaume. Les régions et la fondation danoise Sustainia28, qui met en contact le
monde des affaires et le monde scientifique, ont uni leurs forces pour remettre une feuille de route
au Gouvernement sur la manière dont les régions peuvent faciliter la participation et l?inclusion
citoyennes dans la transition vers une société durable. Le Danemark est en passe de devenir le
premier pays au monde où chaque municipalité (98) disposera d'un plan d'action climatique.
La loi finlandaise a été modifiée le 1er mars 2023 pour ajouter une obligation pour les municipalités
d?établir un plan climat et de le mettre à jour au moins une fois par mandat municipal. Ce plan
devait inclure l?objectif de réduction des émissions, et des mesures pour atteindre ces objectifs.
Chaque municipalité avait droit à une subvention de 45 000 euros maximum pour l?élaboration de
son plan. Ces plans devaient être élaborés entre 2025 et 2029 mais le programme du nouveau
gouvernement Petteri Orpo a prévu de supprimer cette mesure ainsi que les subventions afférentes
en novembre 2023 dans le cadre du budget national et des réformes proposées par le gouverne-
ment Orpo pour l'année 2024.
26 De 417 000 ha de forêt régénérés en 1986, la couverture atteint 918 000 ha en 2013.
27 200 millions de dollars entre 1998 et 2011
28 Sustainia, anciennement « Copenhagen Climate Council », est une collaboration mondiale entre le monde des
affaires et le monde scientifique, fondée par Erik Rasmussen, fondateur du principal groupe de réflexion
indépendant de Scandinavie, Monday Morning, basé à Copenhague, et aujourd'hui dirigée par Rasmus Schjødt
Larsen, diplômé de Harvard https://sustainiaworld.com/about/
PUBLIÉ
https://sustainiaworld.com/about/
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 44/60
Bien que n?ayant pas l?obligation de le faire, la plupart des Länder allemands ont adopté leur propre
stratégie ou législation climat, formulant leurs propres objectifs sectoriels et prévoyant des outils
de déploiement régionaux. En se basant sur l?étude menée par « Climate chance »29, on compte
12 des 16 Länder et villes-Etat à avoir adopté une législation permettant de coordonner les actions
de transition climatique à l?échelle régionale30. Huit d?entre elles31 incluent un objectif quantifié de
réduction des émissions de GES.
L?appropriation des enjeux par les échelons locaux se retrouve également dans la définition de la
politique de l?eau néerlandaise. Elle s?appuie sur un ancrage local historique qui permet de penser
la gestion de l?eau et du risque, en amont et au quotidien.
Aux Etats-Unis, la Californie dispose d?une politique climatique autonome de celle du
gouvernement fédéral. En novembre 2022, elle a adopté une loi visant la réduction de ses GES de
48% d?ici 2030 et l?atteinte de la neutralité carbone d?ici 2045, le tout soutenu par un budget de
52 milliards de dollars sur 5 ans. Elle a même mis en place son propre marché carbone qui couvre
85% des émissions dont les transports et le logement, et est connecté au marché carbone du
Québec. Les « Sustainable Communities Strategies », mises en place en Californie (SB 375)
donnent un cadre pour la réduction des émissions de GES pour les transports et la planification
urbaine, en cohérence avec les autres lois de l'Etat. Les organisations métropolitaines de
planification de l'Etat (18 en tout) sont tenues d'élaborer des infrastructures urbaines permettant
d'augmenter la densité (transports en commun, infrastructures cyclables et piétonnes, réduire la
dépendance automobile, ou agir sur l'étalement urbain).
A l?inverse, une mauvaise appropriation des enjeux à l?échelon local peut conduire à des retards
dans la mise en oeuvre voire à des déclinaisons inappropriées. Ainsi en Indonésie, la
décentralisation mise en oeuvre très rapidement à la fin de la dictature de Suharto, pourtant axée
sur l?autonomisation des provinces, a conduit à une autonomisation de groupes clientélistes
s?appuyant sur des réseaux oligarchiques, favorisant les passe-droits d?exploitation, les incendies
criminels et la pêche illégale, contre lesquels le gouvernement actuel lutte encore.
De même, la déclinaison verticale descendante de la planification chinoise s?est heurtée à des
retards de mise en oeuvre et de la corruption aux échelons locaux. La très grande fragmentation
de la structure administrative en Chine l?explique également. C?est dans ce cadre que la Chine a
eu recours à une réforme administrative en 2026 pour renforcer l?autonomie des bureaux de
protection de l?environnement (BPE) préfectoraux, dans le but d?éviter la double tutelle qu?ils
subissaient des échelons préfectoraux et provinciaux. Et cela explique également la mise en place
du « crédit social ». Ce système de notation des citoyens, des entreprises et des fonctionnaires
locaux conduit à la distribution de récompenses, mais aussi et surtout de pénalités pour ceux ne
respectant pas les règles, en s?appuyant sur une collecte automatique de données et leur
traitement par des intelligences artificielles.
La France a mis en place une déclinaison territoriale de sa planification écologique dans le cadre
des COP, qui se déroulent dans les régions françaises depuis l?automne 2023. A ce stade, cette
démarche ne s?est pas traduite par des plans régionaux. Elle englobe un état des lieux de la région
pour établir un diagnostic partagé. Elle doit permettre l?articulation de la planification écologique
régionale avec la planification nationale et la coordination avec les plans locaux. Elle doit définir
29 https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/
30 La Bavière a adopté une réforme de la Loi bavaroise sur la protection du climat en janvier 2023 (BayKlimaG)
avec des objectifs climatiques plus ambitieux que les objectifs fédéraux (neutralité climatique à l?horizon 2040). La
Basse-Saxe a adopté une révision de la Loi sur la protection du climat (NKlimaG) en décembre 2023.
31 Sauf celle d?Hambourg qui veut pourtant atteindre la neutralité carbone. Celle du Land de Hesse a des objectifs
en matière d?ENR et de quota de rénovation des bâtiments.
PUBLIÉ
https://www.climate-chance.org/en/card/germany-climate-multi-level-governance/
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 45/60
des mesures concrètes permettant le soutien aux projets à l?échelon local. Cette approche qui se
veut à la fois montante et descendante doit permettre une meilleure association des échelons
locaux dans le déploiement de la planification écologique.
Impliquer tous les acteurs des territoires de l?élaboration jusqu?à la mise
en oeuvre
2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les
structures des territoires pour mobiliser les citoyens
La planification écologique dans les territoires doit s?appuyer sur l?ensemble des acteurs locaux
pour assurer son ancrage et son efficience et sur des outils adaptés à ces enjeux, notamment en
matière de financements.
2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la
planification
Les principaux porteurs de ces politiques sont les collectivités locales et elles sont donc le principal
vecteur de la traduction concrète des actions de la planification écologique, en s?appropriant les
objectifs de la planification ou de la stratégie nationale.
En Inde, des États comme le Gujarat et le Rajasthan sont des leaders dans le déploiement de
l?énergie solaire. Dans le domaine agricole, l?État du Sikkim a mis en place une politique axée sur
la transition écologique, lui permettant de devenir le premier État indien entièrement bio en 2016,
grâce à une interdiction complète des pesticides et engrais chimiques. Cette initiative s'inscrit dans
une stratégie de développement durable qui vise à protéger les sols, améliorer la santé publique
et soutenir les petits agriculteurs.
En Afrique du sud, le Cap, Johannesburg et Durban sont membres du C40 « Cities Climate
Leadership Group », qui rassemble environ cent maires de grandes villes mondiales décidées à
faire face à la crise climatique. En comparaison, seule Paris est membre de ce réseau en France.
Plusieurs villes appartiennent également à l?« International Council for Local Environmental
Initiatives » (ICLEI) ou au réseau « Resilient cities ». La « South African Local Government
Association » (SALGA) apparait comme l?organe compétent pour assurer la remontée des
revendications locales dans la mise en oeuvre de ces stratégies climatiques, établissant un
dialogue avec l?échelon central. S?appuyant sur l?exemple allemand développé ci-dessous, le pays
a également mis en place un « Local government climate change support program » depuis 2012
qui fonctionne avec une plateforme internet fournissant guides, outils, jeux de données, formations.
En effet, l?Allemagne déploie depuis 2012 un dispositif de soutien pour les collectivités dans la mise
en oeuvre de la transition climatique : l?initiative nationale pour la protection du climat (NKI) qui fête
ses 15 ans d?action. Elle dispose d?un site internet dédié, affiche plus de 45 000 projets réalisés,
1,5 milliards d?euros de financements distribués. Parmi ses projets emblématiques, le centre
historique de la ville de Lemgo est climatiquement neutre grâce à un projet de chauffage urbain
réutilisant la chaleur des eaux usées ou le projet de transformation de l?éclairage urbain au LED
mis en place dans 48 communes de la haute Hesse. Depuis avril 2023, une « Agence de protection
locale du climat » appuie les collectivités dans la mise en oeuvre de leur projet climatique depuis
les méthodologies de calcul des émissions jusqu?aux financements pour les projets, en sus d?outils
de formation et de mentorat. Cette démarche s?appuie sur le KTF évoqué dans la section
précédente. Pour aller au bout de leur démarche, les collectivités utilisent également leur système
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 46/60
comptable (BISKO) lors de l?établissement de leur bilan énergétique et des émissions de GES ce
qui permet la traçabilité des démarches entamées. De même, la Finlande dispose depuis 2018
d?un Programme de solutions climatique municipales (2018-2023, 8 millions d?euros) pour financer
des projets climat des communes et des régions.
Mais les outils de la planification doivent également pouvoir s?adresser aux autres acteurs du
territoire.
2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification
En premier lieu, les acteurs économiques doivent pouvoir être associés à la planification
écologique.
La Finlande a élaboré en coopération avec les acteurs de chaque secteur économique des feuilles
de route sectorielles. Cette approche est assez révolutionnaire car il s?agit de « feuilles de route
inversées » : ce sont les acteurs de chaque secteur qui élaborent ces feuilles de route,
régulièrement remises à jour. Cela permet au gouvernement lorsqu?il en fait la synthèse de disposer
d?une vision permettant notamment une meilleure adéquation des moyens. Une démarche du
même type a été mise en place aux Pays-Bas, avec en 2013 l?accord volontaire de l?énergie, puis
l?accord national pour le climat avec son plan d?action, qui associe les acteurs économiques à la
prise de décision sur les objectifs et leurs déclinaisons.
A la différence de certains pays, on observe en Suède un mouvement volontaire industriel de
décarbonation. Les bioénergies et l?électrification ont déjà fait chuter la part des énergies fossiles
à 19% de la consommation énergétique de l?industrie (contre 54% en 1975, comme en France
aujourd?hui). Les acteurs industriels concentrant les dernières sources fossiles (les plus difficiles à
éliminer car situées au coeur des procédés industriels comme le coke dans la production d?acier et
les émissions des process chimiques de fabrication du ciment) ont pris conscience de l?avantage
stratégique de décarboner leur production pour renforcer leurs ventes à court et moyen terme.
L?implication du monde économique est allée en Allemagne jusqu?à la création de nouveaux modes
de décision au sein des entreprises, poussés par les syndicats qui cherchent à accompagner la
transition et à ce que ces transitions s?opèrent dans le respect des droits des salariés et du maintien
de leurs emplois. Ils ont ainsi fortement plaidé pour la mise en place de primes devant
accompagner l?évolution des compétences des salariés sur leur poste de travail. Les syndicats
portent également une proposition de révision de la loi sur le conseil d?établissement (Betriebsräte),
dans lesquels ils ne siègent pourtant pas formellement : il est proposé que le conseil ait un droit
d?initiative et de codécision en matière de décisions destinées à mieux protéger l?environnement, y
compris l?évolution des modes de production ; l?instauration d?une commission environnementale
dans toute entreprise de plus de 100 salariés est également proposée.
Les outils doivent aussi permettre le financement des projets des acteurs du territoire, entreprises
comme citoyens. La Californie distribue des aides et des prêts sur l?ensemble des sujets
environnementaux et climatiques, dans le cadre d?appels à projets notamment. Ces subventions
proposées sont regroupées sur un seul portail, avec un moteur de recherche extrêmement fluide
et possibilité de traduction.
L?un des outils les plus complets apparait comme celui de la stratégie de transition économique de
Bruxelles capitale 2022-2030 : « Shifting economy ». Le programme vise à l?accompagnement de
la trajectoire climatique et environnementale de la région par une stratégie dont l?objectif est une
économie décarbonée, régénérative, circulaire, sociale, démocratique et digitale. Le programme
cherche à « aligner les objectifs économiques sur les objectifs climatiques » et s?adresse à
tous les acteurs économiques de la région. La « transition économique » est définie comme : « la
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 47/60
transformation progressive au sens large (qui va de l?adoption d?une démarche d?écogestion à des
changements fondamentaux de business model) des activités économiques bruxelloises (en ce
compris les sous-traitants et les fournisseurs bruxellois) dans la perspective de contribuer aux défis
sociaux et environnementaux locaux et globaux ainsi qu?à la création et au maintien d?emplois de
qualité à Bruxelles ». Dès 2024, les entreprises inscrites dans une démarche de transition
économique ou qui sont exemplaires sur le plan social ou environnemental bénéficieront d?une
majoration des aides économiques. A partir de 2030, les outils économiques de la région seront
concentrés sur le soutien aux entreprises qui auront fait le choix de l?exemplarité sociale et
environnementale. Certains outils sont déjà en place :
- « finance&invest.brussels » facilite le financement des entreprises en transition et vient d?être
recapitalisé (triplement de sa capacité financière avec 131 millions d?euros additionnels) ;
- adoption d?un « Plan régional pour l?innovation » (PRI) qui prévoit 400 millions d?euros de
financement entre 2021 et 2027 pour les domaines d?innovation stratégique ;
- lancement de « Renolution » alliance des secteurs privé et public pour atteindre le
triplemement du taux de rénovation du bâti bruxellois ;
- la Stratégie Qualification-Emploi portée par le ministre de l?emploi et de la formation.
La stratégie a été co-construite avec l?écosystème bruxellois. Au total, 280 participants ont été
impliqués dont 132 organismes publics ou privés (fédérations professionnelles et sectorielles,
experts, guichets d?économie locale, universités, etc).
2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire
L?association des citoyens au projet de planification écologique est un élément essentiel pour la
concrétisation des projets. De nombreux pays ont tenté d?inclure les citoyens dans la prise de
décision et organisé différentes modalités de concertation ou de consultation comme nous l?avons
vu précédemment. Mais c?est dans la traduction concrète des projets dans les territoires que se
mesure la qualité de l?association des citoyens et leur adhésion au projet.
En Afrique du sud, la gestion des aires protégées a offert la possibilité d?association des
propriétaires privés (25% des aires protégées appartiennent à des propriétaires privés) et des
communautés locales. Plusieurs projets présentent aujourd?hui une gestion partagée entre
l?autorité locale, les ONG et les communautés implantées. C?est par exemple le cas de la réserve
de la communauté Mabaso, qui a établi un plan de gestion de l?aire protégée en partenariat avec
WWF-SA.
En Indonésie, les consultations avec les communautés locales, notamment sur la gestion des
ressources naturelles et la reforestation, font partie intégrante de la planification. Les forums multi-
acteurs (Musrenbang) offrent un cadre où citoyens, ONG et autorité locales participent à la prise
de décision. Des plateformes locales existent au Costa Rica, initiatives locales impliquant
directement les citoyens, notamment sur la reforestation et la préservation de la biodiversité. Ces
efforts renforcent le lien entre les communautés et les objectifs nationaux de transition écologique.
En Allemagne, la concertation locale est profondément ancrée dans les processus de planification
écologique. Les initiatives citoyennes, comme les "Ratsbürger" (assemblées locales consultatives),
permettent aux habitants de co-décider sur des projets énergétiques et environnementaux. Les
Länder et les municipalités favorisent également les consultations pour intégrer les besoins
spécifiques des populations dans la mise en oeuvre des objectifs climatiques. Plusieurs pays ont
de même misé sur l?association de la jeunesse aux processus de réflexion sur la transition
écologique : c?est le cas de l?Irlande, du Danemark (Conseil des jeunes pour le climat) ?
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 48/60
Les outils doivent également couvrir l?information des citoyens. Ainsi, en matière d?adaptation, le
gouvernement de Californie a mis en place une série d?outils permettant l?information du grand
public sur les ilots de chaleur, les risques liés aux tempêtes et aux inondations, mais aussi pour les
collectivités avec notamment Adapt-CA, boite à outils de développement des capacités
d?adaptation32 ou CERI-climate qui gère les interventions d?urgence sur les 600 infrastructures
considérées comme essentielles à la capacité de l?Etat à réagir aux catastrophes.
En France, le SGPE s?est saisi de cet enjeu de l?association citoyenne qui semble être ressenti
comme un manque. Il a notamment développé un outil d?information/formation sur le plan (Le Bon
Plan), sans disposer pour autant des moyens nécessaires pour en assurer la diffusion. Il analyse
également les outils de déclinaison de la planification auprès des citoyens (aides directes pour
l?efficacité énergétique des bâtiments, l?achat de véhicules électriques) qui sont les meilleurs
moyens de constater le niveau d?adhésion de la population. Pourtant, l?incapacité à entrainer
certains secteurs économiques à forte composante sociétale (agriculture notamment) et la grande
majorité des citoyens qui restent peu conscient de la démarche de planification entamée par la
France nuit à la mise en oeuvre de ses travaux.
Poursuivre la mise en oeuvre territoriale de la démarche de planification
écologique en se concentrant davantage sur les outils à déployer, notamment budgétaires
et numériques, pour aider les collectivités au-delà des outils de rapportage, les acteurs
économiques dans le suivi de leurs transitions et les citoyens dans leur appréhension et
leur inclusion dans le processus de transformation.
2.6 La planification de la transition écologique est également un
outil pour la stratégie internationale climatique et
environnementale
La planification écologique apparait également comme un bon outil de diplomatie climatique et
environnementale.
Des pays s?appuient sur leur expérience de planification écologique et leurs résultats pour renforcer
leur positionnement dans les instances internationales : on citera notamment Singapour, le Costa
Rica, et le Rwanda. Mais on peut également mentionner le rôle de leader au sein de leur continent
que veulent jouer l?Indonésie, l?Afrique du sud ou le Brésil, comme porte-parole pendant les
négociations internationales mais également comme des pays cherchant un mode de
développement alternatif, s?appuyant sur une transition juste. Du côté des pays développés, le
Royaume-Uni et le Danemark poursuivent leur investissement à l?échelle internationale et
l?Allemagne dispose avec le GIZ d?un outil très puissant de coopération.
La diffusion de la planification écologique au sein de la plupart des pays pourrait permettre de
renforcer les outils internationaux existants au sein des 3 conventions de l?ONU : elle crédibilise
les politiques nationales pour l?accession à des financements internationaux et facilite la lutte contre
la corruption.
A l?issue de plus d?une année à examiner la planification écologique dans les autres pays, il apparait
clairement aux autrices du rapport une réelle appétence de nombreux pays rencontrés dans
différents contextes pour des coopérations internationales en matière de planification écologique.
Même si la planification écologique reste liée à un contexte national, les expériences et les outils
32 https://arccacalifornia.org/adapt-ca/
PUBLIÉ
https://arccacalifornia.org/adapt-ca/
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 49/60
mis en place par chacun sont très utiles pour la mise en place d?une planification plus efficiente.
Par ailleurs, peu de pays ont mis en place une planification écologique complète et peu parviennent
à déployer effectivement leur planification dans leurs territoires. Les mêmes obstacles sont souvent
rencontrés par les uns et les autres ce qui renforce encore la valeur du parangonnage.
La planification écologique pourrait donc devenir un nouvel outil de la stratégie diplomatique
climatique et environnementale de la France.
Faire de la planification écologique un nouvel outil de coopération
internationale et renforcer les partenariats avec les pays les plus susceptibles de faire
progresser la planification écologique française.
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 50/60
Conclusion
La planification écologique se déploie donc dans la majorité des pays du G20 et de l?Union
européenne. Elle souffre le plus souvent des mêmes difficultés de mise en oeuvre, mais apparait
néanmoins comme le meilleur outil pour permettre d?assurer la transition. Avec son exemple de
planification écologique centralisée, la France dispose d?un outil puissant susceptible
d?accompagner sa transition. Les recommandations de ce rapport ont vocation à accompagner le
déploiement de cette planification et à faciliter sa mise en oeuvre, notamment sa déclinaison dans
les territoires.
L?utilité du parangonnage réalisé encourage à poursuivre la démarche, pour explorer certains pays
supplémentaires non étudiés (Espagne, Italie, Portugal notamment), ou approfondir certaines
situations n?ayant pas fait l?objet d?une étude suffisante par manque de temps et de moyens (Japon,
Canada). Mais c?est également sur le plan sectoriel que cet approfondissement mériterait d?être
réalisé. L?articulation entre les planifications et leur programmation budgétaire mérite en premier
lieu d?être creusée tant elle apparait comme l?une des clés de la réussite de cette démarche. Des
outils budgétaires innovants permettant de mieux garantir le financement de la transition, qu?ils
soient des outils fiscaux, d?affectation budgétaire, ou de recours à des financements externes
permettant d?associer mieux les acteurs économiques à la transition, méritent d?être expertisés.
Les difficultés rencontrées par certains pays et les réussites sur des secteurs pour lesquels la
transition écologique française patine pourraient également faire l?objet d?un approfondissement,
notamment en priorité la politique de souveraineté alimentaire et agricole. Enfin, certains exemples
très positifs de traduction de la planification dans les pays déjà étudiés pourraient faire l?objet
d?échanges avec les pays concernés notamment les outils développés par l?Allemagne, la Belgique
ou le Danemark en matière d?accompagnement des collectivités dans leurs projets de transition
climatique et environnementale et d?implication citoyenne dans la prise de décision et la mise en
oeuvre des politiques sur le terrain, notamment avec le rôle joué par le monde associatif.
Enfin, à l?issue de cette année consacrée à cette étude, il apparait clairement une appétence des
autres pays au-delà du cercle étudié pour la planification écologique française. Cet outil de
diplomatie climatique et environnementale doit être développé en accord avec le Ministère de
l?Europe et des Affaires Etrangères, l?AFD et Expertise France afin que le SGPE puisse à la fois
transmettre l?expertise française tout en recueillant des exemples et des outils utiles à la
planification française.
Barbara POMPILI
Virginie DUMOULIN
PUBLIÉ
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Annexes
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 52/60
Annexe 1. Lettre de mission IGEDD
PUBLIÉ
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PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 54/60
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre
THARYAT Tri République d?Indonésie Ambassador, Deputy Minister for
Multilateral Cooperation
28/11/2023
NAKAGAMI Hidetoshi Jyukankyo Research Institute Inc.Japan CEO&Founder
Delegation japan leaders
29/11/2023
FINK-HOOIJER Florika DG ENV Commission Européenne Directrice générale 08/12/2023
VAN VLEDHOVEN Stientje World Resources Institute Vice-présidente et Directrice
régionale Europe
08/12/2023
ANTTONEN Matti Ambassade de la Finlande en France Ambassadeur 06/02/2024
HEKKERT Marko Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur général 29/02/2024
STREMLER Jaco Ministère Climat, Air et Energie Pays-Bas Directeur Climat Air et Energie 29/02/2024
MINNESMA Marjan Fondation Urgenda ? Pays-Bas Directrice et Fondatrice 29/02/2024
VAN GINNEKEN Meike Ministère des Infrastructures et de l?Eau
Pays-Bas
Envoyée spéciale sur l?Eau et
directrice du Programme
international sur l?adaptation au
changement climatique et l?eau
29/02/2024
BONJER Jan Waterschap Hollandse Delta (Dutch Delta
Water Board) ? Pays-Bas
Président 29/02/2024
SPIERINGS Anne-Marie Transition du cluster industriel de
Rotterdam (DeltaLinqs) ? Pays-Bas
Directrice 29/02/2024
HEIJDRA Michel Ministère de l?Économie et du Climat
Pays-Bas
Directeur Général pour le Climat
et l?Énergie
01/03/2024
VRUGT René Ministère de l?Économie et du Climat
Pays-Bas
Directeur des sols, de
l?aménagement du territoire et de
l?adaptation au climat
01/03/2024
POLS Donald Association environnementale
Milieudefensie ? Pays-Bas
Directeur 01/03/2024
KERSTEN Kiki Central Bureau voor de Statistiek (CBS) ?
Pays-Bas
Central Bureau voor de Statistiek
(CBS)
01/03/2024
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 55/60
Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre
RAUTAVAARA Antti Centre for Peace Mediation de la
Finlande
Envoyé Spécial Eau 13/03/2024
SHANMUGARATNAM Tharman République de Singapour Président 15/05/2024
KHOR Dr. Amy Ministère du développement durable et de
l?agence publique de l?eau de Singapour
Senior Minister of State for
Sustainability and the
Environment
16/05/2024
TAN Adele Urban Redevelopment Authority of
Singapore
Chief Planner and deputy CEO 16/05/2024
TEO Joseph Ministry of Sustainability and the
Environment of Singapore
Chief Negociator for Climate
Change
17/05/2024
GUO Yiran Ministry of Sustainability and the
Environment of Singapore, National
Climate Change Secretariat, Singapore
Expert 17/05/2024
BHASKAR Ananda Ram National Environment Agency, Singapore Deputy Chief Executive Officier,
Environmental Portection Director-
General
17/05/2024
LESPAYANDEL Carine French Chamber of Commerce in
Singapore
Executive Director 16/05/2024
WIKODO Joko République d?Indonésie Président 20/05/2024
ADININGGAR Amalia BAPPENAS Indonésie Deputy for Economic Affairs 20/05/2024
YULASWATI Vivi BAPPENAS Indonésie Deputy for Maritime Affairs and
Natural Resources
22/05/2024
HENDIARTI Nani Ministre coordinateur des affaires
maritimes et de l?investissement
Ministre adjointe chargée des
questions environnementale et
forestières
23/05/2024
DHEWANTI Laksmi Ministère de l?environnement et des forêts Directrice générale de la lutte
contre le changement climatique
23/05/2024
KUSUMASTUTI Diana Ministère des travaux publics Directrice générale de « human
settlements »
23/05/2024
DUBEUX Rafael Ministère des Finances du Brésil Secrétaire exécutif adjoint et
coordinateur du plan écologique
17/06/2024
MOREL Julien Swedish Ministry of Climate and
Enterprise
Climate policy analyst 26/08/2024
VIATTE Loïc Expert français, ex-conseiller
Environnement à la RP suédoise
à Bruxelles
26/08/2024
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 56/60
Nom Prénom Organisme Fonction Date de rencontre
PERSSON Asa Stockholm Environment Institute
Swedish Climate Policy Council
Research Director and Deputy
Director
Chair of the CPC
26/08/2024
ALTERA Ola Swedish Climate Policy Council Chief Executive 26/08/2024
FORSLUND Anna Swedish Agency for Nature Conservation Head of Unit Nature Analysis 26/08/2024
WIKHOLM Nanna Swedish Royal Institute of Technology
Natural resources department
Head of the Spatial Planning Unit 26/08/2024
VINNMYR Sabina Swedish Environment Protection Agency Senior scientific officer 26/08/2024
HANNERZ Fredrik Swedish Ministry of Climate and
Enterprise
Deputy-Director General
Head of Natural Environment
Division
26/08/2024
GRANATH Fredrik Swedish Ministry of Climate and
Enterprise
Advisor in charge of national
environmental objectives
26/08/2024
H.E.MR.WANG Bao Ministry of Water Resources of China Vice Minister of Water Resources
of China
09/10/2024
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 57/60
Annexe 3. Ambassades consultées
Ambassade de France en Afrique du sud Ambassade de France aux Etats-Unis d?Amérique
Ambassade de France en Allemagne Ambassade de France en Finlande
Ambassade de France en Belgique Ambassade de France en Inde
Ambassade de France au Brésil Ambassade de France en Indonésie
Ambassade de France au Canada Ambassade de France en Irlande
Ambassade de France en Chine Ambassade de France au Pays-Bas
Ambassade de France au Costa Rica Ambassade de France au Royaume Uni
Ambassade de France au Danemark Ambassade de France à Singapour
Ambassade de France en Suède
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 58/60
Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes
Acronyme/Sigles Signification
Adapt-CA Adaptation Capability Advancement Toolkit
AFD Agence France Développement
BAPPENAS Ministère de la planification d?Indonésie
BISKO BIlanzierungs-Standard KOmmunal (système comptable en Allemagne)
BPE Bureau de protection de l?environnement
CAF Banque de Développement d?Amérique latine et des Caraïbes
CAFMA Forest Bond Certificate for forest management
CCAC Conseil consultatif sur le changement climatique (EI)
CERI-Climate California Emergency Response Infrastructure Climate Vulnerability Tool
(USA)
CNC Commission nationale climat (Belgique)
COP Conférence des parties
CPO Climate policy office (Etats-Unis)
CR Costa Rica (code ISO)
C40 Cities Climate Leadership Group
DE Allemagne (code ISO)
DESNZ Ministère en charge de la sécurité énergétique et de la neutralité climatique
au Royaume-Uni
EI Irlande (code ISO)
EPA Agence de protection de l?environnement (USA, EI)
ETS Echange de quotas d?émission (UE)
FEDER Fonds européen de développement régional
FI Finlande (code ISO)
FONAFIFO Fond de financement de la forêt nationale
FONERWA Fonds vert (Rwanda)
GES Gaz à effet de serre
GIEC Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat
GIZ Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (en français :
Société allemande de coopération internationale)
GNI Gross national income ? Revenu national brut (proche du PNB)
GX Green transformation (transformation verte) au Japon
G20 Groupe des 20 (forum intergouvernemental des 19 pays aux économies les
plus développées du monde)
HCC Haut conseil pour le climat (France)
ICLEI Conseil International des Initiatives Locales pour l?Environment
IBAMA Institut brésilien de l?environnement et des ressources naturelle
IGEDD Inspection générale de l?environnement et du développement durable
IGF Inspection générale des finances
IPBES Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité
et les services écosystémiques
IRA Inflation reduction act (USA)
IRP Panel International des Ressources
JETP Partenariat pour une transition énergétique juste
KTF Fonds pour le climat et la transformation (DE)
LED Diode électroluminescente
LiFE Lifestyl for environment / Modes de vie durables (Inde)
LTS Stratégie de long terme (USA)
MoEFCC Ministère de l?environnement, de la forêt et du changement climatique Inde
METI Ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (Japon)
MOE Ministère de l?environnement (Japon)
MOF Ministère des finances (Japon)
NAPCC Plan d?action pour le changement climatique en Inde
NASEM Académie des sciences, de l?ingénierie et de la médecine (USA)
NBSAP(en)/SPANB (fr) Stratégies et plans d?action nationaux pour la biodiversité
NCCRPWP Plan climatique en Afrique du sud
PUBLIÉ
Mars 2025 La planification écologique dans le monde Page 59/60
Acronyme/Sigles Signification
NCCS Secrétariat national au changement climatique à Singapour
NDC(en)/CDN(fr) Contribution nationalement déterminée (climat)
NDCR Commission nationale de la réforme et du développement en Chine
NKI Initiative nationale pour la protection du climat (DE)
OCDE Organisation de coopération et de développement économiques
ODD Objectifs de développement durable
ONG Organisation non gouvernementale
PBL Office de la planification écologique (Pays-Bas)
PCC Commission présidentielle du climat en Afrique du sud
PLF Projet de loi de finances
PMCC Conseil sur le changement climatique (Inde)
PRI Plan régional pour l?innovation
PSSO Bureau de la durabilité du secteur public à Singapour
RAD-GRK Plan climat provincial en Indonésie
RAN-GRK Plan climat national en Indonésie
REDD+ Réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation
forestière
RPJMN Plan de moyen terme de développement ? 5 ans (Indonésie)
RPJPN Plan de long terme de développement ? 20 ans (Indonésie)
SALGA Association des collectivités locales (ZA)
SB 375 Législation californienne : le Senate Bill 375
SGPE Secrétariat général à la planification écologique
UE Union européenne
UNFCCC Convention cadre des nations unie sur le changement climatique
URA Urban redevelopment Authority (Singapour)
URSS Union des républiques socialistes soviétiques
UTCATF Utilisation des terres, changement d?affectation des terres et foresterie
WWF-SA World Wide Fund for Nature ? South Africa
ZA Afrique du sud (code ISO)
PUBLIÉ
Annexe 5. Fiches Pays
Présenté dans un document séparé
PUBLIÉ
Sommaire
Edito
Résumé
Liste des recommandations
Introduction
1 Une mise en place progressive d?outils de planification de la transition climatique et écologique dans la plupart des pays du G20 et de l?Union européenne, qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre
1.1 Stratégie ou planification de la transition écologique
1.2 Les pays pionniers de la planification écologique
1.3 L?outil de la planification au service de la transition climatique
1.3.1 Le déploiement d?outils de planification climatique
1.3.2 Des planifications climatiques qui manquent de vision globale
1.3.3 Une planification climatique et écologique au service d?objectifs de transparence
1.4 Des planifications confrontées aux enjeux de leur mise en oeuvre
1.4.1 Peu de pays ont une approche réellement contraignante de leurs objectifs de transition
1.4.2 Une déclinaison locale entravée par des résistances et le défis de l?engagement citoyen
2 Comment réussir une planification écologique jusqu?au dernier kilomètre ? Des recommandations à tirer des exemples étrangers
2.1 La planification de la transition écologique doit s?appuyer sur un narratif politique, porté au plus haut niveau de l?Etat et répondant aux attentes citoyennes
2.1.1 Un nécessaire narratif de la transition écologique pour faciliter son portage par la société
2.1.2 Un narratif nécessairement porté au plus haut niveau de l?Etat
2.1.3 Un narratif qui gagne à être co-construit et doit refléter les attentes citoyennes quant à leur avenir
2.2 La planification de la transition écologique doit être inscrite dans un cadre juridique clair fixant des objectifs partagés entre tous les secteurs d?activités
2.2.1 La fixation d?objectifs clairs en phase avec les engagements internationaux
2.2.2 Une planification qui doit englober tous les enjeux pour être efficace et juste
2.3 La planification écologique doit être mise en oeuvre par des structures administratives stables, bénéficiant d?une légitimité politique, et doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante
2.3.1 Une organisation administrative stable pour la définition et la mise en oeuvre de la planification écologique appuyée au plan politique
2.3.2 La planification écologique doit faire l?objet d?une évaluation régulière et indépendante pour pouvoir s?adapter
2.3.3 La planification écologique doit faire l?objet de redevabilité politique
2.4 La planification écologique doit s?inscrire dans une trajectoire de court, moyen et long terme s?appuyant sur une budgétisation pluriannuelle
2.4.1 La planification écologique doit s?inscrire dans un temps court (2030), moyen (2040) et long (2050)
2.4.2 La planification écologique doit s?appuyer sur des financements publics pluriannuels
2.5 La planification écologique doit être déclinée dans toutes les échelles territoriales en s?appuyant sur tous les échelons et en favorisant l?action des acteurs économiques et des citoyens
2.5.1 La planification écologique doit se déployer dans les territoires
2.5.2 La planification écologique des territoires doit s?appuyer sur les structures des territoires pour mobiliser les citoyens
2.5.2.1 Le rôle des collectivités dans la mise en oeuvre de la planification
2.5.2.2 L?association du monde économique à la planification
2.5.2.3 L?association des citoyens et des acteurs du territoire
2.6 La planification de la transition écologique est également un outil pour la stratégie internationale climatique et environnementale
Conclusion
Annexes
Annexe 1. Lettre de mission IGEDD
Annexe 2. Liste des personnes rencontrées
Annexe 3. Ambassades consultées
Annexe 4. Glossaire sigles et acronymes
Annexe 5. Fiches Pays
INVALIDE)