Évaluation de la deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens - Pour une future stratégie « zéro exposition aux perturbateurs endocriniens »

SAUDUBRAY, Frédéric ; RASOOLY, Emilie ; DURAND, Nicolas ; LABOUX, Olivier ; REINGEWIRTZ, Sacha

Auteur moral
France. Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD) ; France. Inspection générale des affaires sociales
Auteur secondaire
Résumé
<div style="text-align: justify;">Les perturbateurs endocriniens (PE) sont des substances chimiques qui, en dérèglant la fonction hormonale des organismes vivants, peuvent affecter la santé humaine dans de multiples domaines: reproduction (qualité du sperme, puberté précoce, infertilité...), cancers (sein, prostate...), neurodéveloppement (baisse du QI, troubles du comportement...), métabolisme (diabète et obésité). Certains de ces effets sanitaires peuvent se manifester à long terme, voire sur plusieurs générations. Les PE ont également un impact sur la faune (féminisation, atteintes osseuses, diminution du taux de testostérone, cryptorchidie, etc.) et contribuent à l'érosion de la biodiversité. On les retrouve dans de nombreux objets et produits de la vie courante et professionnelle (produits ménagers, détergents, produits phytosanitaires, cosmétiques, aliments, etc.) et, de ce fait, également dans les milieux aquatiques, l'air et les sols. Adoptée en septembre 2019, la deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE2) a pour ambition de réduire l'exposition de la population et de l'environnement aux PE. Son plan d'action s'articule autour de 3 volets : « Former et informer » (13 actions), « Protéger la population et l'environnement » (28 actions) et « Améliorer les connaissances » (9 actions).Les lacunes du dispositif de surveillance et le manque de suivi des indicateurs de la SNPE2 ne permettent pas d'apprécier l'atteinte - ou non - de son objectif premier : réduire l'exposition de la population et de l'environnement aux perturbateurs endocriniens. La mission considère néanmoins que cette stratégie est globalement pertinente, en adéquation avec les enjeux liés aux perturbateurs endocriniens, bien qu' insuffisamment tournée vers une réduction effective de l'exposition aux PE. Compte tenu des risques que les perturbateurs endocriniens font peser sur la santé humaine et celle des écosystèmes, la mission recommande de poursuivre et d'amplifier la dynamique impulsée par les deux premières stratégies. Cette action gagnerait à s'inscrire dans une stratégie « Une seule santé » (ou une « Stratégie nationale santé environnement ») bénéficiant d'un pilotage interministériel au plus haut niveau. A défaut d'une telle stratégie globale, la mission recommande d'élaborer une 3ème version de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE3) structurée autour de 3 grands objectifs : Produire des connaissances ; Former et informer ; Réduire les émissions. En matière de gouvernance, le succès de la SNPE3 nécessite un engagement de tous les ministères, y compris au niveau politique. Le plan d'action adossé à la SNPE3 doit être doté d'un budget pluriannuel, incluant des financements consacrés à la mise en oeuvre d'actions nouvelles et spécifiques aux PE, en complément des moyens déjà prévus ou engagés.</div>
Editeur
IGEDD ; IGAS
Descripteur Urbamet
pollution
Descripteur écoplanete
santé publique ; risque sanitaire ; substance dangereuse
Thème
Environnement - Paysage ; Ressources - Nuisances ; Santé
Texte intégral
Rapport n° 015190-01 Rapport n° M 2023-091 Mai 2024 Emilie RASOOLY ? IGEDD Frédéric SAUDUBRAY ? IGEDD EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Pour une future stratégie « zéro exposition aux perturbateurs endocriniens » Nicolas DURAND - IGAS Olivier LABOUX -IGAS Sacha REINGEWIRTZ - IGAS Avec la contribution d?Inès KHOUN - IGAS P U B L I É Les auteurs attestent qu'aucun des éléments de leurs activités passées ou présentes n'a affecté leur impartialité dans la rédaction de ce rapport En fonction au sein de la DGPR de janvier 2019 à janvier 2022, Emilie Rasooly n'a pas participé à l'évaluation des actions pilotées par la DGPR. Statut de communication ? Préparatoire à une décision administrative ? Non communicable ? Communicable (données confidentielles occultées) ? Communicable PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 3/203 Sommaire Résumé ........................................................................................................................... 9 Liste des recommandations ........................................................................................ 13 Introduction .................................................................................................................. 14 1 LA REDUCTION DE L?EXPOSITION AUX PERTURBATEURS ENDOCRINIENS : UN ENJEU MAJEUR POUR LA SANTE HUMAINE ET L?ENVIRONNEMENT ........ 16 1.1 Les perturbateurs endocriniens, un sujet complexe et un enjeu majeur pour la santé humaine et l?environnement ...................................................................... 16 1.1.1 La perturbation endocrinienne : définition, historique et mécanismes d?action ....................................................................................................... 16 1.1.2 Les principales sources et voies d?exposition aux perturbateurs endocriniens ............................................................................................... 17 1.1.3 Les dangers pour la santé humaine et l?environnement ............................. 18 1.1.4 Des enjeux socio-économiques importants, bien que mal évalués ............ 18 1.2 Le cadre réglementaire, fixé pour l?essentiel au niveau européen, demeure inabouti malgré des progrès récents ................................................................... 19 1.2.1 La réglementation des perturbateurs endocriniens reste hétérogène, avec des approches différentes selon les réglementations ................................. 19 1.2.2 La réglementation s?intègre dans la stratégie ambitieuse de la Commission européenne sur la durabilité des produits chimiques .................................. 21 1.2.3 Cette stratégie européenne a abouti à des avancées notables mais achoppe sur la réforme de REACH ............................................................ 22 1.2.4 Des initiatives françaises prises en complément, voire en anticipation de la réglementation européenne ........................................................................ 23 1.3 Une deuxième stratégie nationale, assortie d?un plan d?action, pour approfondir les actions engagées en 2014 ............................................................................. 24 1.3.1 La SNPE1, une initiative jugée pertinente et relativement efficace par les inspections générales en 2017 ................................................................... 24 1.3.2 La SNPE2 : élaboration, objectifs, gouvernance et structure...................... 24 1.4 Une stratégie originale en Europe, qui répond à une forte préoccupation citoyenne ............................................................................................................. 25 1.4.1 Une préoccupation forte des Français ........................................................ 25 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 4/203 1.4.2 La France fait partie des rares pays ayant adopté des stratégies sur les perturbateurs endocriniens ou les produits chimiques en général .............. 26 2 MALGRE DES AVANCEES, LE BILAN DE LA SNPE2 EST MODESTE ................. 27 2.1 Connaître pour mieux agir ................................................................................... 27 2.1.1 La recherche a progressé principalement en recherche fondamentale ...... 27 2.1.2 Un processus d?évaluation des substances lent et complexe ..................... 30 2.1.3 La surveillance sanitaire a progressé mais reste lacunaire ........................ 32 2.1.4 Une faible prise en compte des PE dans les programmes de surveillance environnementale ....................................................................................... 34 2.1.5 La surveillance des produits de consommation reste limitée ...................... 37 2.2 Agir pour réduire effectivement l?exposition et l?imprégnation .............................. 38 2.2.1 Des progrès limités en matière d?information de la population et de formation continue ...................................................................................... 38 2.2.2 La réglementation des substances et sa mise en oeuvre se heurtent à de nombreuses difficultés ................................................................................ 42 2.2.3 Un échec des actions en faveur de la substitution...................................... 44 2.2.4 Un foisonnement d?actions territoriales de prévention ................................ 45 3 UNE STRATEGIE PERTINENTE ET GLOBALEMENT COHERENTE MAIS DONT L?EFFICACITE EST INCERTAINE ............................................................................ 48 3.1 Une stratégie globalement pertinente mais insuffisamment tournée vers l?action et manquant de priorités ..................................................................................... 48 3.1.1 Une stratégie globalement pertinente mais qui ne mise pas assez sur les actions de prévention et de réduction des émissions ................................. 48 3.1.2 Une bonne prise en compte de la dimension européenne mais des lacunes s?agissant de l?approche ?une seule santé?, des inégalités sociales et des initiatives territoriales .................................................................................. 48 3.1.3 Un affichage d?actions souvent déjà lancées et qui dépassent les seuls perturbateurs endocriniens ......................................................................... 49 3.2 Si la SNPE2 est, dans l?ensemble, cohérente avec les plans globaux, elle souffre d?un certain nombre d?incohérences internes ...................................................... 49 3.2.1 Une cohérence satisfaisante avec les plans globaux mais une articulation moins lisible avec les stratégies et plans sectoriels .................................... 49 3.2.2 Le plan d?action conforte la dimension opérationnelle de la stratégie malgré quelques incohérences .............................................................................. 50 3.3 Malgré quelques avancées, les résultats sont bien en deçà des objectifs fixés en 2019 .................................................................................................................... 50 3.3.1 Des avancées notables sur le plan de la réglementation, de l?information PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 5/203 du public et en matière de recherche ......................................................... 50 3.3.2 Des résultats mitigés en matière d?évaluation des substances et de formation .................................................................................................... 51 3.3.3 Des progrès insuffisants sur le plan des contrôles et en matière de surveillance sanitaire et environnementale ................................................. 51 3.3.4 Un échec total des mesures prises en faveur de la substitution ................. 52 3.3.5 Des résultats modestes et difficiles à mesurer qui ne permettent pas de conclure quant à l?évolution de l?exposition de la population et de l?environnement aux perturbateurs endocriniens ........................................ 52 3.4 Une gouvernance marquée par un manque de soutien politique et l?absence de suivi des indicateurs ............................................................................................ 52 3.4.1 Un comité de suivi, instance de partage de l?avancée des actions, plus que de suivi et un comité de pilotage peu investi dans le pilotage .................... 52 3.4.2 Un manque de portage politique et un engagement insuffisant de certaines administrations ........................................................................................... 53 3.4.3 Malgré l?engagement de la DGS et de la DGPR, les échanges et la coordination entre les acteurs du plan (administrations et opérateurs) sont restés limités .............................................................................................. 53 3.4.4 Un suivi défaillant des indicateurs .............................................................. 53 4 RECOMMANDATIONS ............................................................................................. 54 4.1 Principes généraux ............................................................................................. 54 4.1.1 Une nouvelle stratégie est souhaitable et même nécessaire ...................... 54 4.1.2 Une stratégie globale assortie d?un plan d?action ciblé ............................... 54 4.1.3 Des principes généraux à inscrire dans la SNPE3 ..................................... 55 4.2 Les principaux objectifs à assigner à la SNPE3 .................................................. 56 4.2.1 Une SNPE3, tournée vers l?action et qui se donne pour horizon « zéro exposition aux PE » .................................................................................... 56 4.2.2 Premier objectif : produire des connaissances ........................................... 56 4.2.3 Deuxième objectif : former et informer ....................................................... 58 4.2.4 Troisième objectif : réduire les émissions ................................................... 58 4.3 Une gouvernance à refonder et des moyens spécifiques à allouer ..................... 60 4.3.1 Une gouvernance à refonder ...................................................................... 60 4.3.2 Doter le plan d?action d?un budget spécifique ............................................. 61 Conclusion ................................................................................................................... 63 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 6/203 ANNEXES...................................................................................................................... 64 Annexe 1. Lettre de mission........................................................................................ 65 Annexe 2. Liste des personnes rencontrées ............................................................. 68 Annexe 2.1. Ministères et directions d?administration centrale ................................... 68 Annexe 2.2. Europe & International ........................................................................... 71 Annexe 2.3. Opérateurs publics nationaux ................................................................ 73 Annexe 2.4. Instances nationales .............................................................................. 76 Annexe 2.5. Collectivités territoriales ......................................................................... 80 Annexe 2.6. Sociétés savantes & personnalités qualifiées ........................................ 81 Annexe 2.7. Structures professionnelles.................................................................... 82 Annexe 2.8. Associations & réseaux ......................................................................... 83 Annexe 3. La réglementation des perturbateurs endocriniens au niveau européen et national ................................................................................................................. 86 Annexe 3.1. En dépit de progrès, la règlementation européenne demeure insuffisante .......................................................................................................... 86 Annexe 3.2. La SNPE3 peut renforcer les réglementations européennes et nationales .......................................................................................................... 114 Annexe 4. Parangonnage international .................................................................... 125 Annexe 4.1. La Belgique a développé une stratégie inspirée de la SNPE2 et dispose d?un droit du travail considérant les perturbateurs endocriniens au même titre que les CMR ..................................................................................................... 125 Annexe 4.2. Le Danemark est actif contre la pollution chimique et a pris l?initiative de plusieurs législations sur les PFAS ................................................................... 126 Annexe 4.3. La Suède est également très préoccupée par son niveau de pollution aux PFAS .......................................................................................................... 127 Annexe 4.4. L?Allemagne publie un premier plan d?action sur les perturbateurs endocriniens ...................................................................................................... 128 Annexe 4.5. Les Etats-Unis ont relancé leur programme d?évaluation des pesticides perturbateurs endocriniens qui avait échoué ..................................................... 128 Annexe 5. Etat d?avancement des actions de la SNPE2 ......................................... 130 Annexe 6. Recherche ................................................................................................. 135 Annexe 6.1. Agence nationale de la recherche (ANR) ............................................. 135 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 7/203 Annexe 6.2. Le plan national de recherche Environnement Santé Travail (PNR EST) .......................................................................................................................... 137 Annexe 6.3. L?investissement de la France dans les projets européens .................. 139 Annexe 6.4. France Cohortes .................................................................................. 145 Annexe 7. Evaluation des substances ..................................................................... 147 Annexe 7.1. Evaluations de substances par l?Anses pour la période 2019 ? 2023 .. 147 Annexe 7.2. Etablissement d?une liste de substances de PE potentiels .................. 152 Annexe 8. Surveillance sanitaire .............................................................................. 154 Annexe 8.1. La biosurveillance ................................................................................ 154 Annexe 8.2. La surveillance épidémiologique .......................................................... 157 Annexe 9. La surveillance environnementale .......................................................... 164 Annexe 9.1. La surveillance de l?air ambiant ............................................................ 164 Annexe 9.2. La surveillance de l?air intérieur ........................................................... 165 Annexe 9.3. Focus sur les PFAS dans la surveillance des sols ............................... 166 Annexe 9.4. La surveillance des milieux aquatiques ................................................ 167 Annexe 9.5. La surveillance des rejets de stations de traitement des eaux usées urbaines (STEU) ............................................................................................... 167 Annexe 10. Formation ................................................................................................ 168 Annexe 10.1. Formation tout au long de la vie (initiale et continue) ......................... 168 Annexe 10.2. Service sanitaire des étudiants en santé (SSES) ............................... 171 Annexe 11. Actions territoriales ............................................................................... 173 Annexe 11.1. Les actions mises en oeuvre par les services de l?Etat et l?Assurance maladie ............................................................................................................. 173 Annexe 11.2. Les actions portées par les collectivités territoriales .......................... 178 Annexe 11.3. Les actions portées par les associations ........................................... 183 Annexe 11.4. Les actions portées par les crèches et maternités ............................. 188 Annexe 12. Gouvernance de la SNPE2 ..................................................................... 192 Annexe 12.1. Le comité de pilotage de la SNPE2 (COPIL) ..................................... 192 Annexe 12.2. Le comité de suivi de la SNPE2 (COSUI) .......................................... 194 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 8/203 Annexe 12.3. Le plan national santé environnement et ses interfaces avec les autres plans et stratégies ............................................................................................. 197 Annexe 13. Proposition non prescriptive et non exhaustive de plan d?actions .... 198 Annexe 14. Glossaire des sigles et acronymes ....................................................... 201 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 9/203 Résumé Les perturbateurs endocriniens (PE) sont des substances chimiques qui, en dérèglant la fonction hormonale des organismes vivants 1 , peuvent affecter la santé humaine dans de multiples domaines : reproduction (qualité du sperme, puberté précoce, infertilité?), cancers (sein, prostate?), neurodéveloppement (baisse du QI, troubles du comportement?), métabolisme (diabète et obésité).2 Certains de ces effets sanitaires peuvent se manifester à long terme, voire sur plusieurs générations. Les PE ont également un impact sur la faune (féminisation, atteintes osseuses, diminution du taux de testostérone, cryptorchidie, etc.) et contribuent à l?érosion de la biodiversité. On les retrouve dans de nombreux objets et produits de la vie courante et professionnelle (produits ménagers, détergents, produits phytosanitaires, cosmétiques, aliments, etc.) et, de ce fait, également dans les milieux aquatiques, l?air et les sols. Adoptée en septembre 2019, la deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE2) a pour ambition de réduire l?exposition de la population et de l?environnement aux PE. Son plan d?action s?articule autour de 3 volets : « Former et informer » (13 actions), « Protéger la population et l?environnement » (28 actions) et « Améliorer les connaissances » (9 actions). La SNPE2 s?inscrit dans le prolongement d?une première stratégie, lancée en 2014, qui faisait de la France un pays pionnier en la matière. Aujourd?hui encore notre pays fait partie ? avec la Belgique, l?Allemagne et le Danemark ? des pays européens les plus mobilisés autour du sujet des perturbateurs endocriniens. Les enquêtes d?opinion révèlent d?ailleurs que ce sujet est de mieux en mieux connu des Français, 88% en ayant entendu parler. Depuis 2019, des progrès ont été enregistrés sur le plan réglementaire avec, au niveau national, l?adoption en 2020 de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) : définition d?une liste de 128 perturbateurs endocriniens3 , instauration d?un droit d?accès à l?information pour le consommateur... Au niveau européen, la réforme en décembre 2022 du règlement CLP (classification, labelling and packaging) instaure une classification et un étiquetage spécifiques pour les substances et les mélanges contenant des perturbateurs endocriniens, dispositions qui s?appliqueront à compter de 2025. Malgré cette avancée très importante, pour laquelle la France a joué un rôle moteur, le cadre réglementaire européen demeure fragmenté, entre textes transversaux et sectoriels. L?ajournement de la réforme du règlement REACH (registration, evaluation, authorisation and restriction of chemicals) constitue un coup d?arrêt pour les ambitions de la stratégie européenne sur les produits chimiques dans laquelle les perturbateurs endocriniens occupent une place importante. Au total, la mission a identifié 53 mesures prises au titre des différents règlements européens pour interdire ou restreindre l?usage de substances en raison de leurs propriétés de perturbation endocrinienne. Bien que beaucoup de ces mesures aient été prises au cours des trois dernières années, ce chiffre est faible au regard du nombre de substances potentiellement PE4. 1 Selon la définition de l?OMS, un perturbateur endocrinien est une substance ou un mélange de substances, qui altère les fonctions du système endocrinien et de ce fait induit des effets néfastes dans un organisme intact, chez sa progéniture ou au sein de (sous)-populations 2 Ces pathologies et effets sanitaires peuvent avoir un lien avéré avec l?exposition aux PE (niveau de preuves suffisant selon la littérature scientifique) ou un lien suspecté (niveau de preuves plausibles). 3 Arrêté du 28 septembre 2023 4 906 substances selon la liste établie par l?Anses en avril 2021. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 10/203 L?évaluation des substances s?est accélérée (43 évaluations engagées par l?Agence nationale de sécurité sanitaire de l?alimentation, de l?environnement et du travail sur la période 2019-2023 contre 18 de 2014 à 2018) mais le rythme reste extrêmement modeste au regard du nombre de produits chimiques mis sur le marché5. Une liste de 906 perturbateurs endocriniens potentiels a été établie en 2021 sans toutefois se traduire par une priorisation des évaluations à conduire, tant au niveau national que communautaire. D?autres listes ont été élaborées (aux niveaux national et européen), engendrant une certaine confusion. Sur le plan de l?information du public, le site des 1000 premiers jours (où les perturbateurs endocriniens occupent une place importante) a connu un réel succès. L?information des consommateurs reste en revanche parcellaire en raison, notamment, des limites de l?application Scan4Chem. Quelques progrès ont été faits en matière de formation continue des professionnels de santé, même si le nombre de personnes formées reste très modeste. Il en va de même pour la formation initiale des professionnels de santé et de la petite enfance, et plus encore celle des futurs cadres des secteurs productifs, dans laquelle les perturbateurs endocriniens ? et plus généralement la santé environnementale ? occupent une place très réduite. Quant aux autres métiers, même dans les secteurs les plus exposés (industrie chimique, agriculture, nettoyage, soins esthétiques?), la formation initiale et continue aux perturbateurs endocriniens est presque inexistante. La recherche sur les perturbateurs endocriniens a progressé grâce au soutien financier de l?Agence nationale de la recherche (ANR) et du Programme national de recherche environnement- santé-travail (PNR EST), avec près d?une centaine de projets lancés sur la période 2019-2023. Dans le domaine des tests (évaluation du caractère perturbateur endocrinien des substances chimiques), la plateforme PEPPER a apporté une contribution appréciable à la normalisation des méthodes d?analyse (11 méthodes en cours de pré-validation dont 6 inscrites au programme de validation de l?Organisation de coopération et de développement économique). Au niveau européen, les perturbateurs endocriniens bénéficient également de plusieurs programmes de recherche, en particulier le projet PARC (Partenariat européen pour l'évaluation des risques liés aux substances chimiques) dont plusieurs volets (notamment la coordination générale) ont été confiés à des équipes françaises. Malgré ces avancées dont certaines constituent d?incontestables réussites de la SNPE2, plusieurs domaines restent largement inexplorés (recherche clinique, recherche environnementale, sciences humaines et sociales?). La surveillance sanitaire a permis de révéler une imprégnation générale de la population à plusieurs perturbateurs endocriniens, sans qu?il soit possible d?en apprécier l?évolution, faute de données antérieures. Un nouveau volet du programme national de biosurveillance (ALBANE) sera lancé en 2024, dans lequel les perturbateurs endocriniens occupent une place importante. La surveillance des pathologies a également progressé dans le champ de la santé reproductive dont plusieurs indicateurs affichent une dégradation préoccupante, notamment la fertilité masculine. Un élargissement de cette surveillance à d?autres pathologies (trouble du développement, maladies métaboliques, cancers?) est actuellement à l?étude, dans le cadre d?une surveillance intégrée associant surveillances sanitaire et environnementale. S?agissant de la surveillance environnementale, le progrès le plus notable concerne l?air intérieur (la seconde campagne nationale logement a recherché spécifiquement des perturbateurs endocriniens). Pour la surveillance des autres compartiments (air ambiant, milieux aquatiques et sols), des croisements avec les données existantes ont permis d?obtenir des premières informations partielles sur l?exposition mais sans harmonisation d?ensemble, et avec la difficulté d?une multiplicité des listes des perturbateurs endocriniens. 5 1300 substances commercialisées à plus de 100 tonnes par an et enregistrées dans REACH restent à évaluer PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 11/203 En matière de contrôle, les résultats sont encore plus mitigés. Les contrôles réglementaires pratiqués par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ? sur les matériaux en contact avec les denrées alimentaires, les jouets, les produits chimiques et les cosmétiques - sont en légère baisse sur les deux dernières années. Le taux de non-conformité est resté stable (15%). Le nombre de contrôles exploratoires s?est, quant à lui, maintenu mais les substances testées sont limitées par les moyens techniques dont dispose le laboratoire national de contrôle6. Le champ des contrôles s?est par ailleurs restreint à celui de la campagne nationale sur la sécurité des jouets. Quant aux contrôles réalisés aux frontières par les douanes, leur efficacité est compromise par plusieurs éléments : impossibilité de recontrôler les produits déjà dédouanés par d?autres Etat membres, manque de documentation et inadaptation au commerce en ligne. En matière de substitution, les objectifs de la SNPE2 n?ont clairement pas été atteints. Hormis la production d?outils informatifs, dont le site internet créé par l?Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris), les appels à projets à destination des industriels n?ont pas trouvé leur public et les budgets fléchés n?ont pas été consommés. Enfin, de nombreuses initiatives ont été prises par les acteurs locaux (associations, collectivités territoriales, services de l?Etat, assurance maladie, crèches, maternités?) pour lutter contre les risques environnementaux, dont les PE. Ces projets se sont déployés en grande partie « hors SNPE2 » qui n?apporte ni financements ni cadre d?action à ces acteurs. Si les données manquent pour en apprécier l?impact, ces actions de prévention suscitent indiscutablement des dynamiques territoriales positives en matière de santé environnementale, au bénéfice des publics les plus à risque au premier rang desquels figurent les femmes enceintes et les jeunes enfants. En matière d?efficacité, le bilan de la SNPE2 est donc modeste : des avancées ont été faites mais elles restent bien en deçà des objectifs fixés en 2019. Surtout, les lacunes du dispositif de surveillance et le manque de suivi des indicateurs de la SNPE2 ne permettent pas d?apprécier l?atteinte ? ou non ? de son objectif premier : réduire l?exposition de la population et de l?environnement aux perturbateurs endocriniens. La mission considère néanmoins que cette stratégie est globalement pertinente, en adéquation avec les enjeux liés aux perturbateurs endocriniens, même si elle est insuffisamment tournée vers une réduction effective de l?exposition aux PE. La production de connaissances y occupe une place très importante (ce qui est justifié au regard de la complexité du sujet) mais avec une traduction opérationnelle insuffisante des alertes et enseignements qui en résultent. La dimension européenne est ? à juste titre ? très présente. En revanche, l?approche « Une seule santé » est peu marquée, de même que les inégalités économiques et sociales. La mission a également évalué la cohérence (interne et externe) de la SNPE2. Sur le plan externe, cette stratégie s?inscrit dans un vaste ensemble de stratégies et plans nationaux consacrés à la santé environnementale7 , en premier lieu le PNSE 4 avec lequel la SNPE2 partage plusieurs objectifs. Avec les plans sectoriels (PFAS, chlordécone, Ecophyto?), la cohérence est plus difficile à établir, à l?exception du plan micropolluants avec lequel des correspondances sont clairement faites. Sur le plan interne, la SNPE2 est globalement cohérente même si le plan d?action comporte un certain nombre de faiblesses : indicateurs trop nombreux et parfois non pertinents, planification et séquençage des actions défaillants? En matière de gouvernance, les comités de suivi (instaurés en 2021) constituent, pour les différentes parties prenantes, des temps utiles d?information et d?échange. En revanche, ce n?est pas une réelle instance de suivi de la mise en oeuvre de la SNPE2, tâche qui a été davantage assurée par le comité de pilotage (où siègent uniquement les administrations centrales et les opérateurs), au détriment d?une approche plus prospective et stratégique. La SNPE2 a également 6 Service commun des laboratoires des ministères économiques et financiers 7 Sur 37 plans ou stratégies qui gravitent autour du PNSE4, pas moins de 12 sont en rapport avec la SNPE2 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 12/203 souffert d?un manque de portage politique. Sur le plan interministériel, le copilotage Santé/Environnement a été étroit et constant. En revanche, l?engagement des autres ministères a été inégal et parfois très insuffisant. Compte tenu des risques que les perturbateurs endocriniens font peser sur la santé humaine et celle des écosystèmes, la mission recommande de poursuivre et d?amplifier la dynamique impulsée par les deux premières stratégies. Cette action gagnerait à s?inscrire dans une stratégie « Une seule santé » (ou une « Stratégie nationale santé environnement ») bénéficiant d?un pilotage interministériel au plus haut niveau. A défaut d?une telle stratégie globale, la mission recommande d?élaborer une 3ème version de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE3). Cette SNPE3 doit fixer un cap (pour les 10 ou 15 prochaines années), avec des objectifs généraux et des priorités. Un tel document est en effet utile, au niveau européen, pour afficher et défendre les positions françaises (et contribuer ainsi au renforcement de la réglementation) et, aux niveaux national et territorial, pour mobiliser les différentes parties prenantes et légitimer leur action. Ce document stratégique doit être assorti d?un plan d?action ciblé, sur lequel administrations et opérateurs concentreront leur action au cours des 5 prochaines années. La SNPE3 doit assurer un meilleur équilibre entre l?action et la connaissance. Outre la formation et l?information, la réglementation et le contrôle de sa mise en oeuvre doivent y occuper une place importante, de même que la substitution, la limitation des émissions des substances et le soutien aux initiatives locales. Plus généralement, il ne s?agit plus seulement de « Protéger l?environnement et la population » (objectif de la SNPE2) mais de tendre vers le « Zéro exposition aux PE », à l?instar de la stratégie UE sur les produits chimiques qui vise « un environnement exempt de substances toxiques ». La mission propose de structurer la SNPE3 autour de 3 grands objectifs : ? « Produire des connaissances » : développer la recherche en mettant en oeuvre un programme national de recherche sur l?exposome ; accélérer le rythme d?évaluation des substances et élaborer une stratégie européenne de tests ; mettre en oeuvre une surveillance intégrée en couplant surveillances sanitaire et environnementale. ? « Former et informer » : garantir une information effective du consommateur ; sensibiliser les populations en allant vers les plus vulnérables ; généraliser la formation des professionnels les plus exposés. ? « Réduire les émissions » : élargir les restrictions de substances ayant des effets perturbateurs endocriniens ; renforcer le contrôle des produits aux frontières et sur le territoire national ; relancer les démarches de substitution et l?accompagnement des professionnels des secteurs émetteurs ; traduire sur le plan opérationnel les alertes résultant de la surveillance intégrée ; engager une réflexion prospective vers des changements de paradigme. En matière de gouvernance, le succès de la SNPE3 nécessite un engagement de tous les ministères, y compris au niveau politique. Au-delà de la coordination assurée par les ministères chargés de la santé et de l?environnement, la mission considère qu?il est indispensable d?impliquer plus fortement les ministères les plus concernés (agriculture, industrie, recherche?) dès la conception de la stratégie et du plan d?action. Enfin, le plan d?action adossé à la SNPE3 doit être doté d?un budget pluriannuel, incluant des financements consacrés à la mise en oeuvre d?actions nouvelles et spécifiques aux PE, en complément des moyens déjà prévus ou engagés. Une présentation de ce budget (mesures nouvelles et mesures déjà prévues ou engagées) et de son exécution pourra être faite chaque année devant les parties prenantes. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 13/203 Liste des recommandations : Elaborer une 3ème version de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, en revoyant profondément son contenu, son format et sa gouvernance [DGPR et DGS]. ............................................................................................ 54 : Assortir la SNPE3 (document à caractère stratégique fixant un cap pour 10 ou 15 ans), d?un plan d?action ciblé sur quelques mesures prioritaires avec identification des pilotes, livrables, échéances, moyens et indicateurs [DGPR et DGS]. .. 55 : Tourner la SNPE3 vers l?action, avec comme ambition de moyen terme d?atteindre le « zéro exposition aux PE » et comme principes généraux : une approche « une seule santé », l?intensification du plaidoyer européen, l?ancrage territorial et la prise en compte des inégalités socio-économiques [MTECT et MSP]. .......................... 56 : Structurer la SNPE3 autour de 3 objectifs: (1) Produire des connaissances : développer la recherche en mettant en oeuvre un programme national de recherche sur l?exposome ; accélérer le rythme d?évaluation des substances et élaborer une stratégie européenne de tests ; mettre en oeuvre une surveillance intégrée en couplant surveillances sanitaire et environnementale ; (2) Former et informer : garantir une information effective du consommateur ; sensibiliser les populations en allant vers les plus vulnérables ; généraliser la formation des professionnels les plus exposés ; et (3) Réduire les émissions : élargir les restrictions de substances ayant des effets perturbateurs endocriniens ; renforcer le contrôle des produits aux frontières et sur le territoire national ; relancer les démarches de substitution et l?accompagnement des professionnels des secteurs émetteurs ; traduire sur le plan opérationnel les alertes résultant de la surveillance intégrée ; engager une réflexion prospective vers des changements de paradigme [MTECT, MSP, MTSS, MASA, MEFSIN, MESR et MEN]................................................................... 60 : Fonder la gouvernance de la SNPE3 sur un pilotage interministériel renforcé, une implication accrue des ministères les plus concernés (Agriculture, Industrie et Recherche, au-delà des ministères en charge de l?environnement et de la santé) et un soutien ministériel au plus haut niveau [PM/SGPE, MTECT, MSP, MTSS, MASA, MEFSIN, MESR et MEN. .................................................................................................................... 61 : Doter la SNPE3 (plan d?action) d?un budget pluriannuel (5 ans), incluant les financements consacrés à la mise en oeuvre d?actions nouvelles et spécifiques aux PE ; rendre compte régulièrement aux parties prenantes de l?exécution de ce budget [MTECT, MSP, MTSS, MESR, MASA et MEFSIN].................................................. 62 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 14/203 Introduction Le 22 août 2023, le ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires et la ministre déléguée chargée de l?Organisation territoriale et des professions de santé ont demandé à l?Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD) et à l?Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de réaliser l?évaluation de la mise en oeuvre de la 2ème stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE2) et de faire des recommandations pour les 5 prochaines années (cf.lettre de mission en annexe n°1). Lancée en octobre 2023, la mission a procédé à plus de cent entretiens (voir en annexe n°2 la liste des personnes rencontrées) qui lui ont permis de recueillir les analyses et propositions de l?ensemble des parties prenantes : administrations centrales, opérateurs, associations de défense de l?environnement et des consommateurs, chercheurs et experts, fédérations et syndicats professionnels, associations d?élus? Des échanges ont également été organisés avec les instances et autorités intervenant dans le pilotage de la politique de santé environnementale (Groupe santé environnement du PNSE 4) ou, plus largement, de la santé publique (Haut conseil de santé publique) et de la transition écologique (Secrétariat général à la planification écologique). En complément de ces acteurs nationaux, la mission a mené des investigations dans 5 régions : Centre Val-de-Loire, Grand Est, Occitanie, Nouvelle-Aquitaine et Provence-Alpes-Côte-d?Azur. Elle y a rencontré les acteurs locaux impliqués, directement ou indirectement, dans la prévention des expositions aux perturbateurs endocriniens : agences régionales de santé, directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités, caisses primaires d?assurance maladie, agences de l?eau, collectivités territoriales (conseils régionaux, conseils départementaux, communes et intercommunalités), établissements de santé, écoles, crèches, mutuelles, associations? La mission s?est également rendue à Bruxelles pour entendre les directions de la Commission européenne concernées par ce sujet8, ainsi que les autorités fédérales belges comme l?y invitait la lettre de mission. Des échanges ont également été organisés avec d?autres pays européens (Danemark et Allemagne) et avec les autorités sanitaires américaines. Outre l?analyse de la bibliographie existante, la mission a eu accès aux principaux documents de suivi de la SNPE2 (compte-rendu des comités de pilotage et des comités de suivi, tableau de suivi?). En complément, un bilan synthétique a été demandé aux responsables des 50 actions de la SNPE2 (une quarantaine de fiches reçues) afin d?étayer par des chiffres et des réalisations précises le bilan qualitatif dressé lors des auditions. Sur la base de ces travaux, le présent rapport ? après avoir présenté de façon synthétique les enjeux liés aux perturbateurs endocriniens ? dresse un bilan, thème par thème, des actions conduites depuis 2019 puis procède à l?évaluation de la SNPE2 (pertinence, cohérence, efficacité et gouvernance) et, enfin, formule des recommandations pour une troisième stratégie sur les perturbateurs endocriniens. Pour dresser ce bilan et faire ces recommandations, la mission a tenu compte des limites et contraintes qui s?imposent aux autorités françaises, tant sur le plan du droit européen que de la gouvernance de la santé environnementale. En premier lieu, il faut rappeler que la France dispose d?une faible marge de manoeuvre pour interdire des substances chimiques dans les produits du quotidien (médicaments, cosmétiques, 8 Direction générale de la santé et de la sécurité alimentaire, Direction générale de l?environnement, Direction générale de l'emploi, des affaires sociales et de l'inclusion, Direction générale du marché intérieur, de l?industrie, de l?entrepreneuriat et des PME, Direction générale du commerce) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 15/203 jouets ...) puisque la compétence en revient essentiellement à l?Union européenne. Dès lors, pour garantir la protection de ses citoyens, la France est tributaire des évolutions du droit européen, qui, bien qu?étant un des plus avancés en la matière, reste encore insuffisant. De fait, dans de nombreux domaines, les Etats membres ne peuvent prendre de législations plus strictes sur les perturbateurs endocriniens sans s?exposer à un contentieux, malgré l?existence d?un certain nombre de dérogations que la mission a cherché à analyser. En deuxième lieu, la protection de la population face aux pollutions chimiques nécessite des actions dans de nombreux domaines, dont certains dépassent le simple cadre des perturbateurs endocriniens. La question s?est posée de la pertinence d?une SNPE alors qu?une stratégie sur les produits chimiques permettrait de couvrir un périmètre plus large, à l?instar de la stratégie européenne pour la durabilité des produits chimiques. Cette voie n?a pas été retenue à ce stade - ni par les autorités françaises ni par la mission - en raison de la préexistence d?autres plans axés sur des polluants chimiques (qualité de l?air, Ecophyto pour les produits phytopharmaceutiques, micropolluants, etc.) et du nombre déjà très important de plans et stratégies consacrés à la santé environnementale. La mission s?est en particulier interrogée au sujet des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), substances extrêmement persistantes, qui font l?objet d?une préoccupation grandissante, et qui possèdent pour certaines des effets de perturbation endocrinienne. Toutefois, au vu de l?actualisation en avril 2024 du « plan PFAS 2023-2027 » 9 , consécutivement à un rapport parlementaire sur le sujet10, la mission a souhaité éviter une approche en doublon et n?a donc pas traité spécifiquement cette problématique. Enfin, l?action sur les perturbateurs endocriniens pâtit de l?absence d?une stratégie nationale santé environnement, pourtant recommandée dans différents rapports des inspections générales11, de façon à piloter ces priorités au niveau politique et les porter au niveau interministériel. Là encore, c?est un élément de contexte dont la mission a tenu compte dans son bilan et son évaluation de la SNPE2. 9 Plan d?action interministériel sur les PFAS 2023-2027, dont la révision a été annoncée le 5 avril 2024 10 Rapport du député Cyrille Isaac-Sibille remis au Premier ministre par le 4 janvier 2024 11 Rapport CGAER-CGEDD-IGA-IGAS-IGESR-IGF sur les moyens et la gouvernance de la politique de santé environnement, août 2022 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 16/203 1 LA REDUCTION DE L?EXPOSITION AUX PERTURBATEURS ENDOCRINIENS : UN ENJEU MAJEUR POUR LA SANTE HUMAINE ET L?ENVIRONNEMENT 1.1 Les perturbateurs endocriniens, un sujet complexe et un enjeu majeur pour la santé humaine et l?environnement 1.1.1 La perturbation endocrinienne : définition, historique et mécanismes d?action Le système endocrinien est un ensemble de glandes et organes (hypophyse, hypothalamus, corps pinéal, thyroïde, parathyroïdes, thymus, glande surrénale, pancréas, ovaires, testicules?) qui produisent des hormones et les libèrent dans le sang. Le système endocrinien constitue un des deux grands systèmes de communication de l?organisme, l?autre étant le système nerveux. Il régule, par l?intermédiaire d?hormones, un certain nombre de fonctions de l?organisme, à tous les stades de développement et engage un dialogue continu avec le système nerveux et le système immunitaire. Un perturbateur endocrinien est une substance ou un mélange de substances, qui altère les fonctions du système endocrinien et de ce fait induit des effets néfastes dans un organisme intact, chez sa progéniture ou au sein de sous-populations 12. Les PE peuvent dérégler la fonction hormonale des organismes vivants selon trois mécanismes principaux : 1/ agoniste, en imitant l?action d?une hormone naturelle provoquant la réponse des cellules cibles ; 2/antagoniste, en empêchant la fixation d?une hormone sur son récepteur au niveau de la cellule cible ; 3/ en perturbant la production, la dégradation, le transport ou la régulation d?une hormone ou de son récepteur. Ainsi, en intervenant sur la production d?hormones, leur entrée dans les cellules et leur voie de signalisation, les PE peuvent modifier l?expression d?un gène. Définis conceptuellement aux États-Unis à la conférence de Wingspread en 1991, les perturbateurs endocriniens13, sont, dès 1996, un sujet de débat dans les arènes de la régulation des produits chimiques, un objet de recherche (notamment sur le déclin de populations animales aquatiques et les effets sur la reproduction) et une préoccupation pour l?OCDE. Au milieu des années 2000, le débat scientifique monte en visibilité, notamment avec les controverses sur le bisphénol A (BPA). Le mécanisme d?action des PE n?est pas toujours connu mais les effets néfastes ont été observés dans des études animales et au niveau des populations. La recherche doit relever plusieurs défis liés aux particularités de ces substances, notamment en raison d?incertitudes qui persistent, au-delà de l?effet cumulatif et de l?effet différé entre exposition et dommages : La relation dose/réponse peut être non-linéaire et non-monotone14 : les PE peuvent avoir des effets à faible dose qui sont parfois plus importants qu?à forte dose15. 12 Définition donnée par l?Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et le Programme International sur la Sécurité des Substances Chimiques (PISSC) en 2002 et endossée par la Commission Européenne. WHO/IPCS, Global assessment of the state-of-the-science of endocrine disruptors. 2002. cf.http://www.who.int/ipcs/publications/new_issues/endocrine_disruptors/en/. 13 Ces substances ont été pour la plupart mises en circulation entre 1940 et 1970 et classées dans la catégorie PE entre 1970 et 1980. 14 Une fonction monotone est soit partout croissante, soit partout décroissante ; une fonction non-monotone est tour à tour croissante et décroissante 15 L?effet non linéaire peut s?expliquer par des différences de sensibilités de tissu et les doses d?activations de différents récepteurs sur un même tissu. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 17/203 L?effet dit « cocktail » des PE est complexe à mettre en évidence : les expositions multiples aux PE peuvent non seulement avoir des effets cumulatifs (ou additionnels) mais aussi synergiques et antagonistes. Il existe des périodes de vulnérabilité liées à l?activité hormonale : in utero, grossesse, nourrisson, petite enfance et adolescence. Des effets multigénérationnels peuvent apparaître (le contact d?une femme enceinte aux PE peut exposer trois générations : F0, F1, F2) ainsi que des effets transgénérationnels (au-delà de la génération F2 des petits-enfants) via des mécanismes épigénétiques 16. 1.1.2 Les principales sources et voies d?exposition aux perturbateurs en- docriniens Les perturbateurs endocriniens se retrouvent dans de nombreux objets et produits de la vie courante et professionnelle (produits ménagers, détergents, produits phytosanitaires, cosmétiques, produits alimentaires, ustensiles de cuisine, revêtement des sols...). Les PE sont également présents dans l?environnement du fait d?une contamination des différents milieux (milieux aquatiques, sols, air). Schéma 1 : Les principales sources de perturbateurs endocriniens Pour la population générale, les principales voies d?exposition aux PE sont : maternelle (passage de la barrière placentaire, lait maternel), digestive, respiratoire et cutanée (produits cosmétiques, détergents, jouets, produits d?hygiène). 16 Le terme épigénétique désigne les processus moléculaires permettant de moduler l ?expression des gènes, mais qui ne sont pas fondés sur des changements dans la séquence de l ?ADN Source : INCa PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 18/203 Les études de biosurveillance montrent une imprégnation généralisée de la population française pour plusieurs familles de PE (phtalates, bisphénols A, S et F, perfluorés? (cf.infra le chapitre sur la surveillance sanitaire). 1.1.3 Les dangers pour la santé humaine et l?environnement Un certain nombre d?affections, avec des effets néfastes à court ou à long termes, sont (ou suspectés d?être) la conséquence d?une exposition aux PE. Parmi les pathologies et effets sanitaires pour lesquels le niveau de preuve est considéré comme suffisant17, on trouve un nombre important de troubles de la santé reproductive : endométriose, cryptorchidies, altération de la qualité du sperme, fibrome utérin, hypospadias, sex ratio et issues défavorables de grossesse. Figurent également dans cette catégorie les troubles du comportement et les troubles cognitifs chez l?enfant, la diminution des points de QI, l?asthme, le cancer du sein et le cancer de la prostate, les lymphomes et leucémies chez l?enfant et les maladies thyroïdiennes auto-immunes. Pour d?autres pathologies et effets sanitaires, le niveau de preuve est moins élevé et le lien avec une exposition aux PE est considéré comme seulement plausible. Il s?agit, là encore, de troubles de la santé reproductive (puberté précoce, diminution de la fécondité, infertilité) et de plusieurs cancers (ovaires, endomètre, testicule). On trouve également dans cette catégories des troubles métaboliques (diabète de type 2, obésité), des troubles neurocomportementaux (troubles relationnel et émotionnel, trouble du déficit de l?attention, troubles du spectre autistique?), la paralysie cérébrale, des allergies et les troubles hématopoïétiques. Les PE ont également un impact sur la faune et les écosystèmes. A titre d?illustration, peuvent être cités la féminisation du goéland ou de populations de poissons, le développement d?organes génitaux mâles chez les femelles de certains gastéropodes marins, les atteintes osseuses chez les phoques, l?hermaphrodisme chez le beluga, la diminution du taux de testostérone chez la grenouille et l?ours polaire, la cryptorchidie chez la panthère?.En outre, les animaux vertébrés ayant généralement les mêmes glandes endocrines que l?homme, un PE néfaste pour l?homme l?est donc aussi pour ces animaux (et vice versa). Tous ces effets peuvent engendrer des impacts relatifs à la survie d?individus et à l?évolution de certaines espèces. 1.1.4 Des enjeux socio-économiques importants, bien que mal évalués Bien que les estimations doivent être prises avec précaution en raison des difficultés à chiffrer tous les impacts, l?exposition à ces substances comporte de fortes externalités négatives sur le plan socio-économique. Selon les travaux de Trasande et al. (2016)18 , les coûts annuels relatifs à la santé et liés à l'exposition aux PE19 peuvent être estimés à 163 Mds ¤ par an pour le seul espace européen, soit 1,28% du PIB de l?UE (avec une probabilité de 95% que ce montant soit supérieur à 22 Mds ¤ et de 25%, qu?il s?élève à plus de 196 Mds ¤)20. Une autre étude réalisée par Goldenman et al.21 , relative uniquement aux substances per- et 17 Classement des effets sanitaires en lien avec les expositions aux PE, selon le niveau du poids des preuves, basé sur une revue de la littérature scientifique. Etude PEPS?PE : priorisation des effets sanitaires à surveiller dans le cadre du programme de surveillance en lien avec les perturbateurs endocriniens. Santé publique France, 2023 18 Trasande, L., R.T. Zoeller, et al., Burden of disease and costs of exposure to endocrine disrupting chemicals in the European Union: an updated analysis. Andrology, 2016. 4(4): p. 565-72. 19 L?essentiel de ces coûts est attribué à la perte de quotient intellectuel 20 Les auteurs se sont appuyés sur une approche fondée sur le poids de la preuve, qui permet de pondérer les cas et les coûts associés aux événements sanitaires attribués à une exposition donnée en fonction du niveau de preuve de la fonction dose- réponse reliant l'exposition et le résultat. Ils ont pondéré le coût des maladies et la probabilité qu?elles soient causées par une exposition de PE 21 Nordic Council of Ministers, The costs of inaction. A socioeconomic analysis of environmental and health impacts linked to exposure to PFAS, 2019 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 19/203 polyfluoroalkylées (PFAS), a estimé, à l?échelle européenne, les coûts pour la santé entre 52 et 84 Mds ¤ par an et les autres coûts à 46 Mds ¤ par an. Malgré ces coûts, certaines industries se montrent réticentes à une réglementation trop stricte des PE, qui nuirait à l?activité économique et à la compétitivité de certains secteurs. A ce jour, le coût de la substitution pour les industriels n?est pas évalué. 1.2 Le cadre réglementaire, fixé pour l?essentiel au niveau européen, demeure inabouti malgré des progrès récents 1.2.1 La réglementation des perturbateurs endocriniens reste hétérogène, avec des approches différentes selon les réglementations La réglementation des produits chimiques dans l?Union européenne est l?une des plus avancées au monde, mais la prise en compte des perturbateurs endocriniens pâtit d?une fragmentation entre différents textes sans approche harmonisée22. Deux réglementations transversales concernent les substances chimiques et prennent en compte l?effet perturbateur endocrinien de ces substances : Le règlement (UE) n°1907/2006 (dit REACH) concerne l?enregistrement, l?évaluation et l?autorisation des substances chimiques ainsi que les restrictions applicables à ces substances. Ce texte vise à mieux protéger la santé humaine et l'environnement tout en préservant la compétitivité de l'industrie chimique de l'UE. Un système d?autorisation et de restriction est mis en place pour les substances « extrêmement préoccupantes » (dites « SVHC »23) dont font notamment partie les perturbateurs endocriniens. Le règlement (UE) n°1272/2008 relatif à la classification, à l?étiquetage et à l?emballage (dit règlement CLP) vise à assurer la protection des travailleurs, des consommateurs et de l?environnement. Réformé en 2022, le CLP prévoit désormais une classification et un étiquetage spécifique pour les perturbateurs endocriniens, qui s?appliquera à partir de 2025. Au niveau sectoriel, certaines réglementations accordent un traitement particulier à la perturbation endocrinienne, en particulier s?agissant des pesticides. D?une part, le règlement (UE) n°528/2012 sur les produits biocides prévoit que les substances actives aux effets perturbateurs endocriniens néfastes pour l?homme ou des organismes non-cibles ne puissent plus être approuvées sauf dérogation. Son efficacité est toutefois limitée par une définition des critères de reconnaissance PE intervenue seulement en 2017, et par des retards dans les évaluations. Seulement 2 substances étaient interdites à la date de rédaction du rapport, parmi 6 reconnues pour leurs propriétés de perturbation endocrinienne. D?autre part, le règlement (UE) n°1107/2009 sur les produits phytopharmaceutiques interdit les substances aux effets perturbateurs endocriniens néfastes pour l?homme ou les organismes non- cibles, mais la définition des critères de reconnaissance PE n?est intervenue qu?en 2018. Depuis cette date, parmi les 442 substances actives autorisées, 62 ont été évaluées pour leurs propriétés de perturbation endocrinienne. Ces propriétés ont été reconnues pour 10 substances, conduisant à 8 interdictions de substance à ce stade. Malgré ces avancées, la mise en oeuvre du règlement est compromise par de nombreuses dérogations. La Commission a jugé ces dérogations 22 Pour rappel, en droit européen, on distingue les règlements, applicables tels quels dès leur entrée en vigueur, et les directives, que les Etats membres doivent transposer en droit national sous un délai donné. 23 SVHC : substance extrêmement préoccupante (substance of very high concern) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 20/203 « inefficaces et peu performantes »24 : c?est le cas notamment des substances placées sur la liste « substitution » qui présentent une toxicité aiguë mais restent approuvées en raison de l?absence d?alternative connue. Parmi les 52 substances présentes dans cette liste, au moins un quart d?entre elles sont régulièrement citées dans des études comme étant suspectes d?avoir un effet de perturbation endocrinienne (cf.annexe n°3). Il convient de noter que dans une jurisprudence récente, la Cour de justice de l?Union européenne25 a jugé que les agences sanitaires nationales disposaient de la possibilité de refuser l?autorisation de mise sur le marché d?un produit phytopharmaceutique pourtant approuvé au niveau européen, dès lors que des données scientifiques plus fiables que celles ayant conduit à l?approbation européenne indiqueraient que la substance contenue dans le produit en question serait susceptible de perturber le système endocrinien (cf annexe n°3). De façon plus générale, la perspective de réduction de l?usage des pesticides est affaiblie par un vote du Parlement européen de 2023 refusant une proposition de règlement visant à mettre en place une réduction de 50% des pesticides les plus toxiques, compromettant ainsi un objectif annoncé dans la stratégie européenne « De la ferme à la table ». D?autres textes prennent en compte la perturbation endocrinienne à différents degrés : La directive (UE) n°2020/2184 sur la qualité de l?eau de consommation humaine établit des mécanismes de vigilance de certaines substances en raison de leurs propriétés de perturbation endocrinienne. Le règlement (UE) n°2017/745 sur la certification des dispositifs médicaux interdit la présence de perturbateurs endocriniens à plus de 0,1%, sauf s?il n?existe pas de produits de substitution. S?agissant des médicaments, les effets perturbateurs endocriniens ne sont pas interdits en tant que tels, puisqu?il s?agit souvent de l?objectif recherché (oestrogènes, progestatifs ...), en revanche l?agence européenne des médicaments coordonne un travail d?évaluation des excipients. La directive (UE) n°2009/48 relative à la sécurité des jouets n?accorde pas de traitement particulier aux perturbateurs endocriniens, mais ce texte devrait être refondu en ce sens26. Le règlement (UE) n°1223/2009 relatif aux produits cosmétiques est à distinguer dans la mesure où il fixe des standards pour la sécurité des produits cosmétiques mais suit une approche au cas par cas s?agissant des perturbateurs endocriniens. Une révision annoncée n?est finalement pas intervenue, mais un bilan qualité initié en 2019 et s'intéressant aux principaux potentiels perturbateurs endocriniens présents dans les cosmétiques, a permis de mieux restreindre leur utilisation. A l?inverse, d?autres réglementations sectorielles ne réservent pas de traitement particulier aux propriétés de perturbation endocrinienne alors même qu?elles concernent des sources d?expositions importantes. C?est le cas notamment pour : Le règlement (CE) n°1935/2004 sur les matériaux de contact alimentaire27, qui peut, au cas par cas, fixer des limites de migration, notamment dans les contenants plastique ; il sera bientôt complété par une interdiction du PFAS dans les emballages alimentaires28. 24 Rapport de la Commission européenne au Parlement européen d?évaluation du règlement (CE) n° 1107/2009, publié le 20 mai 2020, au sujet de la liste des substances candidates à la substitution, cf.annexe dédiée à la réglementation 25 Arrêt de la CJUE du 25 avril 2024, ECLI:EU:C:2023:717 26 Vote du Parlement européen de mars 2024 pour interdire les PE et PFAS dans les jouets 27 Le règlement sur les matériaux de contact alimentaire fixe des limites de migration des substances présentes dans les contenants vers le contenu, mais ne prend pas spécifiquement en compte les perturbateurs endocriniens, alors même que ces derniers peuvent avoir des effets à très faible dose. 28 A l?issue d?un vote favorable du Parlement en mars 2024 pour interdire les PFAS dans les emballages alimentaires de contact à partir de mars 2026 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 21/203 Les directives relatives à l?exposition des travailleurs aux substances dangereuses (directive n°1998/24/CE sur les agents chimiques sur le lieu de travail et directive n°2004/37/CE sur les agents cancérogènes et mutagènes sur le lieu de travail29). Il existe également des réglementations consacrées à des substances en particulier, qui restreignent l?usage de certains perturbateurs endocriniens, comme le bisphénol A dans les contenants alimentaires pour enfant (interdiction qui devrait prochainement être étendue à toute la population30) ainsi que certains phtalates dans les jouets et contenants alimentaires. La définition des perturbateurs endocriniens n?est toutefois pas identique entre toutes ces réglementations, tant en ce qui concerne la définition elle-même que les tests requis pour les identifier. Par ailleurs, les différents tests requis pour identifier les perturbateurs endocriniens dans les dossiers de demande d?autorisation des produits sont trop peu exigeants pour couvrir leurs principales modalités et effets. L?ensemble manque enfin de cohérence dans la mesure où l?approche oscille entre une logique stricte de maîtrise des dangers pour certaines réglementations (interdiction générale de substances, à l?instar des règlements biocides et phytopharmaceutiques) et une logique plus souple de maîtrise du risque (prenant en compte les conditions d?utilisation). Au total, la mission a identifié 53 mesures prises au titre des différentes réglementations (REACH, produits phytopharmaceutiques, biocides et cosmétiques31) pour interdire ou restreindre l?usage de substances en raison de leurs propriétés de perturbation endocrinienne. Bien que beaucoup de ces mesures aient été prises au cours des trois dernières années, ce chiffre apparaît faible au regard du nombre substances potentiellement PE (que l?Anses avait estimé à 906 en avril 2021). 1.2.2 La réglementation s?intègre dans la stratégie ambitieuse de la Com- mission européenne sur la durabilité des produits chimiques Dans le cadre de l?ambition ?zéro pollution? de l?UE du pacte vert pour l?Europe, la Commission européenne a adopté une stratégie pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques le 14 octobre 2020 où les perturbateurs endocriniens font l?objet d?une attention particulière. La Commission y admet que si ?certains textes législatifs permettent de reconnaître les perturbateurs endocriniens, le système réglementaire de l?UE est globalement fragmenté et limité, et il est nécessaire de le consolider et de le simplifier pour que les perturbateurs endocriniens puissent être repérés en temps utile de manière à limiter le plus possible l?exposition des êtres humains et de l?environnement.? En conséquence, la Commission fait part de plusieurs orientations pour garantir la protection des citoyens et de l?environnement contre les produits chimiques les plus nocifs dont font partie les perturbateurs endocriniens : une approche générique de la gestion des risques de manière à garantir que les produits de consommation ne contiennent pas de substances qui affectent le système reproducteur 29 Le comité des représentants du Conseil européen a toutefois voté en 2023 en faveur d?un projet de directive pour intégrer les perturbateurs endocriniens à directive 2004/37/CE, qui pourrait aboutir d?ici 2030 30 La Commission a formulé une proposition de règlement en ce sens en 2024, à l?issue d?une évaluation de l?EFSA en 2023 revoyant la dose journalière tolérable de BPA à un niveau 20.000 fois inférieur à celui qu?elle avait évalué en 2016, cf.annexe 3. 31 35 de ces mesures relèvent du règlement Cosmétiques, 8 du règlement Phytopharmaceutiques, 2 du règlement Biocides et 8 du règlement REACH ; la mission n?a pas inclus dans ce décompte les 22 substances uniques et familles de substances dites SVHC (au total 118 substances) placées sur la liste candidate à autorisation dans la mesure où ces dernières ne font pas l?objet d?une limitation de leur utilisation PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 22/203 ou endocrinien ; un système juridiquement contraignant d?identification des dangers liés aux perturbateurs endocriniens qui s?appliquerait dans l?ensemble de la législation ; une interdiction des perturbateurs endocriniens dans les produits de consommation sauf quand l?utilisation est reconnue essentielle à la société ; l?ajout de nouvelles catégories de substances dans le règlement CLP ; l?examen des informations requises dans l?ensemble de la législation et leur renforcement pour permettre aux autorités de reconnaître les perturbateurs endocriniens. Le calendrier indicatif associé à la stratégie prévoyait que sa mise en oeuvre interviendrait entre 2021 et 2024, cependant l?ajournement, en 2023, de la révision du règlement REACH a repoussé certaines actions à une date inconnue pour le moment. 1.2.3 Cette stratégie européenne a abouti à des avancées notables mais achoppe sur la réforme de REACH La mise en oeuvre de la communication de la Commission européenne ?Vers un cadre complet de l?Union européenne en matière de perturbateurs endocriniens? (2018), suivie par celle de la stratégie européenne pour la durabilité des produits chimiques de 2020, a fait progresser la prise en compte des perturbateurs endocriniens dans la réglementation. L?avancée la plus notable concerne le règlement CLP, avec le règlement délégué (UE) n°2023/707 du 19 décembre 2022 qui prévoit désormais des règles de classification et d?étiquetage des perturbateurs endocriniens. Ces derniers seront classés en 2 catégories de dangers pour la santé humaine et l?environnement et étiquetés sans pictogramme mais avec mention d?avertissement, de danger et conseils de prudence. La catégorie 1 correspondant aux perturbateurs endocriniens avérés ou présumés, la catégorie 2 aux perturbateurs endocriniens suspectés. L?application de la réforme est prévue au plus tard le 1er mai 2025 en ce qui concerne les substances, et au plus tard le 1er mai 2026 en ce qui concerne les mélanges. En revanche, la réforme ambitieuse du règlement REACH prévue fin 2022, puis repoussée fin 2023, a été reportée à une prochaine mandature. Le projet de réforme visait à répondre aux failles d?un texte devenu à certains égards obsolète (nombre important de dossiers d?enregistrement non conformes, lenteur des procédures d?autorisation et de restriction, manque d?interaction avec les autres législations, faible prise en compte de la perturbation endocrinienne ...). L?une des principales avancées aurait consisté à évaluer les substances par famille, et non substance par substance, ce qui représenterait un gain de temps considérable. Il est essentiel que la France continue de porter dans la prochaine mandature une position exigeante au niveau européen sur l?accomplissement des objectifs de la stratégie sur la durabilité des produits chimiques, en apportant son soutien en particulier à : la refonte rapide et ambitieuse du règlement REACH ; la mise en oeuvre du nouveau règlement CLP (en veillant à la définition des tests retenus dans les documents d?accompagnement, et en soutenant la mise à jour des règlements sectoriels pour y inclure la définition des perturbateurs endocriniens au sens du CLP) ; l?actualisation de la directive n°2004/37/C sur les agents chimiques dangereux pour y inclure les perturbateurs endocriniens ; la restriction universelle des PFAS (actuellement en cours d?évaluation sous REACH)32 ; 32 Restriction universelle des PFAS, proposée par l?ECHA le 7 février 2023, sur une initiative de l?Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark, la Norvège et la Suède PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 23/203 Dans cet effort, la France pourra s?appuyer non seulement sur des pays alliés, à l?instar du groupe informel REACH- UP rassemblant 10 Etats membres qui s?était constitué lors de la tentative de réforme du règlement REACH, mais également sur la mobilisation de plusieurs ONG actives dans la veille et le lobbying parlementaire (HEAL, EEB33). 1.2.4 Des initiatives françaises prises en complément, voire en anticipa- tion de la réglementation européenne La répartition des compétences européennes et nationales en matière de perturbateurs endocriniens est complexe, puisqu?ils relèvent à la fois du marché intérieur (compétence exclusive de l?UE), de la protection de l?environnement (compétence de subsidiarité de l?UE) et de la santé publique (compétence d?appui de l?UE). Cette complexité génère un risque contentieux et pousse les Etats membres à faire preuve de vigilance dans leurs initiatives. Pour autant, des mesures nouvelles prises au niveau national ont parfois eu un effet d?entraînement à l?échelle européenne. Ainsi, le Danemark puis la France ont adopté des lois restreignant l?usage du bisphénol A, qui ont ensuite été adoptées au niveau européen pour les biberons. Plus récemment, la France a voté une loi en avance sur le droit européen : la loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l?économie circulaire, dite loi AGEC. Cette loi impose à toute personne mettant sur le marché français des produits à destination des consommateurs contenant des perturbateurs endocriniens avérés, présumés ou suspectés, de mettre à disposition du public les informations permettant de les identifier dans ces produits, par voie électronique, via une application (cf.infra 2.2.1.1.). Les produits concernés sont les denrées alimentaires, substances, mélanges et articles, à l'exception des médicaments. La France a aussi adopté la loi dite « EGALIM »34 en 2018 qui limite l?utilisation des plastiques, permettant ainsi de diminuer l?exposition des jeunes aux perturbateurs endocriniens. Cette loi interdit l?usage des bouteilles et des ustensiles de vaisselle en plastique dans la restauration scolaire depuis 2022. Elle prévoit, à partir de 2025, d?interdire d?utiliser des barquettes plastiques pour cuisiner ou réchauffer des aliments, dans les crèches, la restauration scolaire et universitaire ainsi que les services de pédiatrie ou de maternité. Le respect de cette obligation dans le calendrier prévu est compromis par le coût des investissements nécessaires à la disparition du plastique, bien que ceux-ci soient en grande partie amortis à moyen terme. L?offre récente de plastique « bio sourcé » par les industriels, dont la moindre nocivité n?a pourtant pas été prouvée, ajoute de la confusion. Au reste, l?absence de sanction assortie à cette obligation n?incite pas les collectivités ni les établissements de santé concernés à dans les délais impartis par la loi. A la suite d?enquêtes révélant la présence de perturbateurs endocriniens dans les produits de protection intime pour les femmes, la France a également adopté un décret pour améliorer la transparence de la composition de ces produits35, entré en vigueur en avril 2024. Ce décret impose de faire figurer la liste de composants, mais uniquement pour les substances et matériaux « incorporés intentionnellement durant le processus de fabrication du produit fini ». Cela permet donc de prendre en compte, par exemple, certains agents parfumants, mais laisse de côté des produits présents non intentionnellement, tels que les résidus de pesticides dans le coton ou des substances laissées par le blanchiment du coton ou le collage de la serviette. Enfin, une proposition de loi36, encore en discussion parlementaire au stade de la rédaction du 33 HEAL : Health and Environment Alliance ; EEB : European Environmental Bureau 34 Loi pour « l?équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire », dite EGALIM, du 30 octobre 2018 35 Décret n° 2023 ? 1427 du 30 décembre 2023 36 Proposition de loi votée le 4 avril 2024 en première lecture par l?Assemblée nationale PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 24/203 rapport, envisage une restriction des PFAS à plusieurs niveaux : interdiction dans certains produits (vêtements, cosmétiques ... à l?exception des ustensiles de cuisine), surveillance de l?eau potable, information du public sur les sites contaminés, et création d?une redevance pollueur-payeur. Cette proposition permet d?anticiper une régulation au niveau européen (interdiction des PFAS dans les emballages alimentaires à partir de 202637, ainsi qu?une restriction générale des PFAS en cours d?examen par l?ECHA38). 1.3 Une deuxième stratégie nationale, assortie d?un plan d?action, pour approfondir les actions engagées en 2014 1.3.1 La SNPE1, une initiative jugée pertinente et relativement efficace par les inspections générales en 2017 Le rapport rendu en 2017 par les inspections générales39 concluait que la première SNPE, lancée en 2014, était « pertinente et opportune ». Les inspections générales jugeaient ses résultats « po- sitifs » bien qu?en retrait par rapport aux objectifs initiaux, en raison notamment d?une insuffisante mobilisation interministérielle et de l?absence de plan d?action. Parmi les principales avancées de la SNPE1 étaient citées : la biosurveillance, la surveillance des milieux aquatiques, l?évaluation des substances par l?Anses, l?interdiction du bisphénol A, la révision du règlement biocides, la formation continue de certains professionnels de santé? En conséquence et compte tenu de l?importance des enjeux, le rapport préconisait de lancer une seconde stratégie, appuyée sur un « pilotage plus volontariste » et déclinée en « mesures à carac- tère opérationnel ». 1.3.2 La SNPE2 : élaboration, objectifs, gouvernance et structure Adoptée en septembre 2019 pour une durée initiale de 4 ans, la deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE2) se donne pour ambition de réduire l?exposition de la po- pulation et de l?environnement à ces substances. Son élaboration s?est étalée sur un an et demi, avec une mobilisation de l?ensemble des parties prenantes ainsi qu?une consultation publique et une saisine du Haut conseil de la santé publique (HCSP). Le Groupe santé environnement du PNSE a également été consulté à plusieurs reprises. Adossée à un « document de référence », le plan d?action de la SNPE2 s?articule autour de 3 vo- lets déclinés en 13 axes et 50 actions : « Former et informer » (3 axes et 13 actions) qui inclut, notamment, l?établissement d?une liste de perturbateurs endocriniens, l?évaluation des substances, une communication auprès du grand public, la formation des professionnels de santé et ceux de la périnatalité ... « Protéger la population et l?environnement » (5 axes et 28 actions) qui prévoit, notamment, la collecte de données sur l?imprégnation des différents milieux (air, eaux, sols?), l?évaluation de l?impact des perturbateurs endocriniens sur la faune sauvage et la biodiversité, l?accompagnement des démarches de substitution, l?adaptation du cadre réglementaire et le contrôle de son application. 37 Un accord a été trouvé entre le Parlement européen et le Conseil en mars 2024 à ce sujet 38 ECHA : agence européenne des produits chimiques (European Chemical Agency) 39 La stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens ? Evaluation de la mise en oeuvre et propositions d?évolution - IGAS- CGEDD-CGAAER ? 2017 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 25/203 « Améliorer les connaissances » (5 axes et 9 actions) qui vise, notamment, à accélérer la recherche aux niveaux national et européen, renforcer la surveillance des pathologies en lien avec les perturbateurs endocriniens et approfondir la biosurveillance. Co-pilotée par la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) et la Direction générale de la santé (DGS), cette stratégie se veut résolument interministérielle, avec l?implication de sept ministères40 et douze directions d?administration centrale. Plusieurs opérateurs sont également mis à contribution, en premier lieu l?Anses et Santé publique France mais aussi l'Ineris, l?Institut national de recherche et de sécurité (INRS), le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), l?Office français de la biodiversité (OFB) ? En termes de gouvernance, la SNPE2 est doté d?un « Comité de pilotage » qui rassemble admi- nistrations centrales et opérateurs impliqués dans la mise en oeuvre du plan d?action. Fin 2021, un « Comité de suivi » a été créé afin d?associer plus étroitement les différentes parties prenantes (organisations professionnelles, associations d?élus, associations de protection de l?environnement et de consommateurs, experts et chercheurs?) au déploiement de la SNPE2. 1.4 Une stratégie originale en Europe, qui répond à une forte pré- occupation citoyenne 1.4.1 Une préoccupation forte des Français L?importance accordée par les Français aux perturbateurs endocriniens a été démontrée par plu- sieurs études d?opinion. Le baromètre annuel de l?Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) sur la perception des risques et de la sécurité par les Français illustre une montée en puis- sance de ce sujet dans l?opinion. Entre 2014 et 2022, la part de Français considérant que les risques posés par les perturbateurs endocriniens sont très élevés est passée de 37% à 50%. Dans le même temps, la part des Français faisant confiance aux autorités pour prendre des mesures de protection, qui avait triplé de 11% à 35% entre 2014 et 2019, a reflué à 17% en 2022, dans un contexte de défiance après la crise sanitaire. En matière de notoriété, un sondage de 201741 indique que 66% des Français ont entendu parler des perturbateurs endocriniens. Une enquête d?opinion commandée par la DGPR en 202242 montre une progression : 88% des Français disent en avoir entendu parler, soit 22 points de plus que le chiffre constaté en 2017 par l?autre institut43. La progression concerne en particulier ceux qui indiquent savoir précisément de quoi il s?agit, avec une hausse de 26% à 45%. L?enquête de 2022 révèle que les sources d?informations principales sont les médias traditionnels (68%), devant Internet (35%) et les professionnels de santé (25%). La demande d?information est forte puisque 88% des Français souhaiteraient être mieux informés. Les sondés estiment que l?ex- position provient surtout des produits ménagers, plastiques, cosmétiques, tandis que l?air extérieur et l?eau potable sont perçus comme des sources d?exposition de second rang. 40 Economie et Industrie, Travail, Education Nationale, Enseignement supérieur et recherche, Agriculture, Santé et Ecologie 41 Sondage Odoxa réalisé en février 2017 auprès d?un échantillon de 1016 personnes 42 Sondage Harris Interactive réalisé en avril 2022 auprès d?un échantillon de 1100 personnes 43 Il existe peu d?exemple étrangers permettant de comparer ce résultat, mais d?après une étude réalisée en Belgique en 2020 par les Mutualités libres sur échantillon de 1000 personnes, seuls 52% des Belges en avaient entendu parler. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 26/203 1.4.2 La France fait partie des rares pays ayant adopté des stratégies sur les perturbateurs endocriniens ou les produits chimiques en général La France fait partie des pays européens les plus mobilisés autour de la question des perturbateurs endocriniens. La Belgique a mis en place depuis peu une stratégie nationale (NAPED44) sur le modèle de la SNPE. Cette stratégie, validée en 2022 à l?issue d?une consultation publique, est prévue sur 5 ans et contient 18 fiches-actions, divisées en trois axes : la prévention, les actions réglementaires et la recherche. Fin 2023, l?Allemagne a publié un plan fédéral pour la protection contre les perturbateurs endocriniens qui s?articule en cinq points : réglementation, information, coordination interministérielle, recherche et coopération internationale. D?autres approches existent, comme au Danemark qui applique depuis 1999 un plan d?actions sur les produits chimiques, régulièrement actualisé. Un centre des perturbateurs endocriniens y a été créé en 2009, pour renforcer la recherche et accompagner le gouvernement dans la prévention. Le pays accorde une priorité aux PFAS et les a récemment interdits dans les mousses anti-incendie et les contenants alimentaires. La Suède disposait également d?un plan d?action pour un environ- nement non-toxique qui n?a pas été renouvelé. Elle se positionne aussi contre les PFAS, avec des normes nationales plus strictes qu?au niveau européen pour les concentrations maximales autori- sées dans l?eau. Aux Etats-Unis, un programme national d?identification et d?évaluation des perturbateurs endocri- niens (EDSP45) a été lancé en 1999, axé sur les pesticides, destiné à prioriser et tester des subs- tances déjà autorisées ou nouvellement mises sur le marché, en vue d?une éventuelle interdiction. La mise en place du programme par l?EPA46 a toutefois été un échec, aucune évaluation n?ayant été menée à terme. Une refonte du plan a été annoncée fin 2023 pour mettre l?accent sur un pro- cessus d?évaluation des substances plus rapide. 44 NAPED : Nationaler Aktionsplan für endokrine Disruptoren ? Plan d?action national sur les PE 45 EDSP : Endocrine Disruptors Screening Programme 46 EPA : Environmental Protection Agency, agence fédérale PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 27/203 2 MALGRE DES AVANCEES, LE BILAN DE LA SNPE2 EST MODESTE Le bilan de la SNPE2 est présenté à travers les 9 domaines qui la structurent. Pour en faciliter la lecture, ils ont été regroupés en deux blocs qui sous-tendent la stratégie : « connaître pour mieux agir » et « agir pour réduire l?exposition et l?imprégnation ». Un tableau présente, en annexe n°5, les 50 actions de la SNPE2 avec leur état d?avancement, tel que présenté au Comité de pilotage de décembre 2023. 2.1 Connaître pour mieux agir 2.1.1 La recherche a progressé principalement en recherche fondamentale 2.1.1.1 Malgré la fin du PNRPE, la recherche sur les PE a bénéficié de soutiens budgétaires importants Avant la SNPE2, de 2005 à 2016, le Programme national de recherche sur les perturbateurs endocriniens (PNR PE) avait lancé 5 appels à projets de recherche sur la caractérisation et l?impact des PE, pour un montant total de 6M¤. Aujourd?hui, la recherche sur les PE est principalement portée, au niveau national, par le Programme national de recherche environnement-santé-travail (PNR EST) et par l?Agence Nationale de la Recherche (ANR), mais ceci de manière non fléchée sur les PE. De 2019 à 2023, le PNR EST, géré par l?Anses, a financé 59 projets sur les PE (ou en lien avec les PE), pour un total de 10,4 M¤. L?ANR note une augmentation significative des projets consacrés aux PE, retenus au titre de ses appels à projets génériques : 33 projets (12,5 M¤) financés au cours de la période 2014-2018 (SNPE1) contre 49 projets (24,5 M¤) au cours de la période 2019-2022. Mais il convient de noter que la deuxième période inclut dans ce calcul l?appel à projet chlordécone 1 lancé en 2022 (6 projets financés pour 5,5 M¤). Par ailleurs, l?ADEME, porte l?APR impacts47, qui vise à la description et l?analyse de l?effet des mélanges, dont les PE, via des expositions par l?air ou les sols, sur la santé humaine et les écosystèmes. Enfin, l?Institut national du cancer (INCa) a soutenu depuis 2019 quelques projets de recherche liés, le plus souvent très indirectement, aux PE. Calculé pour la période 2019-2022, le financement des projets PE par le PNR EST et l?ANR s?établit à 7 M¤/an (7,9 M¤/an en incluant la thématique chlordécone), ce qui représente une nette augmentation par rapport à 2014-2019. En revanche, il n'est pas certain que ces financements (en hausse) aient permis de maintenir une communauté scientifique structurée, et l?on peut d?ailleurs regretter que très peu de colloques scientifiques aient été organisés sur le sujet sur la période 2019-2023. Certains projets de recherche consacrés aux PE s'appuient sur des cohortes, notamment celles lancées spécifiquement sur les PE (Pélagie, TI-MOUN) ou sur les contaminants environnementaux (SEPAGES). S'agissant des cohortes "généralistes" (CONSTANCES, EDEN, E4N?), il n'a pas été possible à la mission d'évaluer leur apport à la recherche sur les PE. 47 https://agirpourlatransition.ademe.fr/ PUBLIÉ https://agirpourlatransition.ademe.fr/ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 28/203 2.1.1.2 La recherche sur les PE et singulièrement les équipes françaises occupent une place importante au niveau européen Au niveau européen, on relève plusieurs programmes de recherche portant sur les PE ou incluant cette problématique : PARC Chemical Risk Assessment Partnership (400 M¤ dont 200 M¤ de l?UE) dédié à la recherche en support à l?évaluation des risques chimiques ; EHEN European Human Exposome network (106 M¤), Joint Research Center (JRC) qui favorise le travail collectif de 126 groupes de recherche ; EIRENE Europ/Exposome Infrastructure : la participation au portage de cette infrastructure européenne sur l?exposome est doublée de France Exposome (grande infrastructure de recherche) ; EURION : projets PE portés par le JRC, dotés de 50 M¤ sur 5 ans (animation scientifique très forte, avec groupes miroirs en France). Cet effort de recherche européen et la place importante qu?y occupe la France, a, d?après les interlocuteurs de la mission, été acquis grâce à l?effort de structuration d?une recherche sur les PE au plan national, via notamment le PNR PE, qui a permis de cristalliser une communauté scientifique bien identifiée à l?échelon européen. Mais malgré cela, et au-delà des divers financements actuels, la mission s?interroge sur la pérennité de la communauté scientifique hexagonale PE, encore aujourd?hui composée de chercheurs dispersés : la recherche sur les PE a certainement besoin d?un projet emblématique sur la thématique PE. 2.1.1.3 Un nécessaire élargissement à l?exposome chimique Dès lors, un grand programme national de recherche sur l?exposome48 ,49 serait de nature à structurer et entrainer une communauté scientifique interdisciplinaire, en écho à l?orientation européenne d?EHEN et en cohérence avec l?action 19 du PNSE4 « Structurer et renforcer la recherche sur l?exposome et mieux connaître le poids des maladies liées aux atteintes à l?environnement »50. Cette mesure est d?ailleurs reprise dans la stratégie décennale de lutte contre le cancer « Participer à un programme national et européen sur l?exposome »51. Cette perspective est soutenue par l?ANR qui observe que, entre la SNPE1 et la SNPE2, la thématique des perturbateurs endocriniens a diffusé dans d?autres communautés de recherche et pourrait ainsi être un vecteur de développement du concept d?exposome. Ce programme pourrait s?appuyer sur France Exposome, infrastructure nationale de recherche créée en 2021, qui se concentre sur l?exposition aux agents chimiques. La mission considère donc qu?un financement ambitieux de la recherche sur l?exposome52 (incluant de fait l?exposome chimique et les PE) serait de nature à : 48 L?article 1 (L 1411-1) du Code santé publique (Loi n°2019-774 u 24 juillet 2019-art.7) fait explicitement référence au concept d?exposome. 49 L?exposome correspond à l?ensemble des expositions, notamment à des agents chimiques, biologiques, physiques et des influences socio-économiques, subies par un individu ou une population durant la vie entière (Wild C, Cancer Epidemiol Biomarkers Prev, 2005). 50 Cette action propose de créer deux programmes prioritaires de recherche, un PEPR Exposome et un PPR pathogènes émergents/zoonoses (PEPR Prézode) dans une démarche « One Health ». 51 Etude de l?impact de l?exposome sur tous types de maladies et sur la baisse de la fertilité (avec impact des expositions combi- nées (telles que tabac et pesticides) et les « effets cocktails » qui sont difficiles à appréhender. 52 La mission a bien connaissance des projets de PEPR Exposome de 2021 et 2022. Dans le cadre de la Stratégie d?accélération Prévention (2024), un Programmes et Equipements Prioritaires de Recherche (PEPR) Exposome devrait être soutenu. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 29/203 développer l?approche une seule santé par une déclinaison santé et environnement ; décliner la démarche européenne en la matière ; obtenir un effet d?entrainement fort pour la communauté scientifique santé environnement/perturbateurs endocriniens53. 2.1.1.4 Des domaines de recherche oubliés ou insuffisamment développés Même si tout n?est pas attribuable à la SNPE2, force est de constater que la recherche a progressé dans de nombreux domaines depuis 2019. On peut citer notamment la caractérisation des effets physiologiques, les méthodes de détection dans différentes matrices environnementales, l?étude des mécanismes d?action (interaction avec des récepteurs, biomarqueurs, biosenseurs, détecteurs de contaminants, in silico) et les études de composés (bisphénol A, phtalates, perfluorés, métaux). Mais il reste cependant des domaines majeurs à explorer. La recherche clinique : Le nombre d?essais cliniques recherché sur clinicaltrials.gov54 démontre qu?il est extrêmement faible sur le thème des PE (34 essais, 35% sont hexagonaux) même si leur nombre a doublé par rapport à la période 2014-2019. La recherche clinique, bien qu?inscrite dans la SNPE2, n?a pas avancé sur la période 2019-2023. La Direction générale de l?offre de soins (DGOS) fait état, faute de mobilisation des équipes sur le sujet, d?un seul projet de recherche retenu au titre du programme de recherche sur la performance du système de soins (PREPS), en 2022, PREVENIR55 et de deux lettres d?intention déposées à la campagne 2023 du PREPS concernant les perturbateurs endocriniens. La recherche environnementale : Plusieurs projets de recherche et développement ont été menés pendant la SNPE2 relativement à la surveillance environnementale. On peut mentionner les recherches sur les bio-essais, l?imprégnation des milieux aquatiques par les PE, la prise en compte de la perturbation endocrine dans les normes de qualité environnementale (NQE). En revanche, à part une étude de l?impact de l?imprégnation des eaux par les PE sur l?intersexualité des poissons, très peu de projets de recherche sur l?impact des PE sur l?environnement (et plus particulièrement la faune) ont été initiés, malgré l?inscription de ce sujet dans la SNPE2. La recherche en sciences humaines et sociales : Une exploitation par mots-clés du corpus de publications56 référencées dans le Web of Science (même si l?indexation des publications sciences humaines et sociales (SHS) n?est pas adaptée en France) a permis d?identifier seulement 2 publications relevant du domaine des SHS57. Ceci est d?autant plus regrettable que plusieurs sujets absents de la recherche (économie de la santé appliquée aux PE, prise en considération des inégalités socio-économiques) sont également absents de la SNPE2. De telles recherches, qui n?étaient pas explicitement inscrites dans la SNPE2, pourraient alimenter les réflexions quant aux orientations à privilégier et, dans certains cas, améliorer la pertinence et l?acceptabilité de certaines mesures ou initiatives. 53 Une analyse bibliométrique PubMed avec « exposome » démontre que la France est en deuxième position après les US. 54 Clinicaltrials.gov recense les essais cliniques dans le monde entier. 55 Evaluation de l?efficacité des plateformes PREVENIR (PREVention ENvIronnement Reproduction) sur les marqueurs urinaires d?expositions à des substances chimiques, essai clinique randomisé sans insu. 56 Avec la limite d?un champs ceint aux projets PIA (Idex, ISite, labex, equipex) et France 2030 57 Source ANR 2024 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 30/203 2.1.1.5 La plateforme PEPPER a apporté une contribution appréciable à la validation des méthodes de tests Prévue dès la SNPE1, la plateforme PEPPER a pour but d?accompagner et faciliter la validation des méthodes d?essai sur les PE par les instances internationales, en particulier l?OCDE. Avec 11 méthodes en cours de pré-validation fin 2023 (dont 6 inscrites au programme de validation de l?OCDE), l?objectif de la SNPE2 a été globalement atteint. Unique en son genre et très appréciée de l?OCDE, PEPPER suscite un intérêt croissant de la part des autres pays européens, dont plusieurs ont rejoint ses instances et certains apporté une contribution financière (les Pays-Bas et possiblement l?Allemagne et la Belgique). En effet, malgré un budget modeste (2 M¤/an et 5 ETP), le financement à moyen terme de la plateforme n'est pas à ce jour assuré. Au-delà de ces questions financières, on peut regretter l?absence d?une stratégie globale qui fixerait, idéalement au niveau européen, les méthodes d?essai à développer en priorité ainsi que les efforts à réaliser en matière de recherche et de normalisation. Une telle stratégie permettrait de mieux coordonner les initiatives des Etats membres mais aussi ? et surtout ? d?inscrire ces sujets dans les programmes communautaires de recherche et de développement (actuellement, la validation des tests occupe une place très réduite dans les projets de recherche européens, y compris dans PARC). 2.1.2 Un processus d?évaluation des substances lent et complexe 2.1.2.1 Un retard dans l?évaluation de substances au titre des règlements européens malgré une augmentation notable La SNPE2 fixait à l?Anses un objectif de 39 substances à évaluer au niveau national pour la période 2019-2023, dont 24 au titre de REACH et 15 substances actives biocides et produits phytopharmaceutiques. Pour le médicament, les cosmétiques et les dispositifs médicaux, aucun objectif d?évaluation n?avait été fixé. Ces évaluations se font sur la base de règlements qui prévoient, chacun, une gestion des risques différente au regard du caractère PE (cf.annexe n°3). Pour mettre en perspective ces objectifs, 1 300 substances commercialisées à plus de 100 tonnes par an et enregistrées dans REACH restaient à évaluer en juillet 2022. Les objectifs fixés par la SNPE2 semblent donc peu ambitieux, bien que la Commission européenne reconnaisse les efforts faits par la France en la matière. Au cours de la période 2019-2023, 43 évaluations de substances ont été initiées mais seulement 18 conclusions ont été rendues (cf.annexe n°7). Le taux de substances pour lesquelles une conclusion a été rendue au titre du règlement REACH est de 43%, alors qu?il est de 56% pour les substances soumises aux règlements phytopharmaceutiques et biocides. Cette différence s?explique par la révision, en 2017 et 2018, des règlements biocides et produits phytopharmaceutiques, qui rend obligatoire la fourniture de données pour évaluer le caractère PE, contrairement au règlement REACH. Les objectifs d?évaluation au titre de REACH et des règlements biocides et produits phytopharmaceutiques n?ont donc pas été atteints. Néanmoins, ce bilan est loin d?être négligeable : à titre de comparaison, 5 dossiers de classifications pour le caractère cancérigène ont été soumis par la France au Comité d?évaluation des risques sur une période comparable. Le nombre d?évaluation lancées est même en augmentation très sensible : 43 évaluations conduites de 2019 à 2023 contre 18 de 2014 à 2018. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 31/203 Le rythme d?évaluations est toutefois limité par le manque de ressources de l?Anses. Bien qu?il soit difficile d?estimer finement les moyens mis en oeuvre (le critère PE ne représentant qu?une partie de l?évaluation), l?Anses évalue à 2M¤58 le coût de cette évaluation sur la période 2019-2023, avec 5 à 6 ETP mobilisés sur cette thématique. Des contraintes pèsent également sur le « groupe de travail PE » de l?Anses dont la capacité est limitée à 5 substances sur lesquelles il peut travailler simultanément. L?Anses estime par ailleurs qu?au titre de REACH, l?élaboration d?un dossier de restriction nécessite 1,5 ETP et un dossier d?autorisation 1/3 ETP. Ces moyens ne permettent de lancer que 2 à 3 évaluations de substances par an au titre des règlement REACH et CLP, en complément du programme de travail sur les substances biocides et phytopharmaceutiques. Le temps nécessaire pour mener à terme l?évaluation d?une substance pour son caractère PE varie de 2 à 10 ans. Cette durée est dépendante de la disponibilité des données et se heurte à des difficultés d'obtention d?informations complémentaires de la part des industriels, en particulier pour les substances soumises au règlement REACH. L?Anses constate en effet que les demandes de données complémentaires sont plus rapidement satisfaites dans les cadres des règlements sur les produits phytopharmaceutiques et biocides. Pour y remédier, l?Agence européenne des produits chimiques (ECHA) travaille depuis plusieurs années sur l?évaluation de familles de substances, ce qui vise également à éviter des substitutions qui s?avéreraient in fine regrettables. Enfin, bien qu?identifiée comme une action de la SNPE2, aucune évaluation des risques n?a été menée pour les médicaments, les dispositifs médicaux et les cosmétiques. 2.1.2.2 La pertinence d?une méthode de priorisation à questionner Dans le cadre de l?action 3 de la SNPE2, le 15 avril 2021, l?Anses a publié une liste de substances d?intérêt du fait de leur action endocrine potentielle, ainsi qu?un avis et un rapport proposant une méthodologie de catégorisation des substances potentiellement PE en 3 catégories " avérées", 'présumées" ou "suspectées". La méthodologie publiée par l?Anses a permis d?identifier 906 substances avérées, présumées ou suspectées. La liste de ces substances n?a pas été rendue publique. L?application de plusieurs filtres a permis de retenir 16 substances prioritaires (catégorisées avec un score de priorisation de 1 à 16, cf.annexe n°7). Trois d?entre elles ont été inscrites au programme annuel d?évaluation de l?Anses. Le bilan reste donc à ce stade modeste au vu du faible nombre de substances proposées à l?évaluation. Cette liste avait en effet pour objectif de prioriser les substances pouvant présenter des propriétés PE en vue d?une gestion de risque adaptée (par exemple, reconnaissance européenne règlementaire, réduction par prévention ou précaution de l?utilisation). Mais elle n?a pas eu l?effet escompté, ni au niveau national ni au niveau européen. Quant au devenir de la liste, l?Anses a annoncé ne pas la mettre à jour en raison du caractère chronophage de la tâche. Les programmes de travail ne peuvent donc se baser de façon pérenne sur cette liste, relativisant la pertinence de son élaboration. A ressource constante, l?Anses préconise donc de participer à l?effort européen pour identifier des substances à évaluer en priorité plutôt que de prendre en charge cette tâche au niveau national. La mission partage cette position. 2.1.2.3 Une multiplication de listes dans laquelle il est difficile de s?y retrouver Outre la liste des 906 substances établie par l?Anses, une liste, également non publiée, de plus de 7 000 substances potentiellement PE a été élaborée par l?Ineris pour lancer l?action 14 de la SNPE2. 58 Outre les dépenses de personnels, le groupe de travail PE et, pour une partie de son activité, le Comité d?experts spécialisés Reach et CLP contribuent à l?évaluation PE des substances avec des vacations d?experts dont le taux est de 90¤ par demi-journée de présence et vacations pour des travaux d?analyse spécifique excédent le temps lié aux réunions. Cette activité d?expertise peut être estimée à 100K¤ par an. Chiffres fournis par l?Anses. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 32/203 L?établissement, en collaboration entre l?Anses et l?Ineris, d?une seule liste de référence aurait probablement permis des économies de moyens, une meilleure visibilité et compréhension et peut- être favorisé une meilleure valorisation nationale voire européenne. Ceci traduit une insuffisance de concertation entre les deux agences et un manque de séquençage des actions de la SNPE2. D?autres listes existent comme les ED list 59 (à caractère non officiel) ou encore la liste des substances présentant des propriétés de perturbation endocrinienne de l?arrêté du 28 septembre 2023 de la loi AGEC. Cette pluralité de listes crée de la confusion pour identifier les substances PE, ce qui nuit à une information et une action efficace des parties prenantes pour réduire les expositions. La plupart des personnes entendues par la mission ne connaissait pas la portée réglementaire de chacune des listes. 2.1.3 La surveillance sanitaire a progressé mais reste lacunaire La surveillance sanitaire prévue par la SNPE2 comporte deux volets : la biosurveillance et la surveillance des pathologies en lien avéré ou suspecté avec les perturbateurs endocriniens. Ces deux sujets sont détaillés en annexe n°8. 2.1.3.1 La biosurveillance a progressé, révélant un niveau élevé d?imprégnation de la population La SNPE2 accorde une place importante à la biosurveillance60 : 4 actions y sont consacrées et un axe lui est dédié, avec comme principal objectif le lancement d?un nouveau programme national de biosurveillance. Cet objectif a été atteint puisque l?enquête ALBANE (ALimentation Biosurveillance sAnté Nutrition Environnement) devrait être prochainement lancée, avec un premier cycle couvrant la période 2024-2026. ALBANE est mise en oeuvre par Santé publique France, qui a prévu d?y consacrer un budget de 10 M¤. Il s?agit de la contribution française au programme européen PARC dont l?un des 9 volets traite de la surveillance sanitaire et environnementale. Pour le premier cycle, une vingtaine de familles de substances seront analysées, dont une bonne part sont des perturbateurs endocriniens : phtalates, bisphénols/alkylphénols, PFAS, carbamates, pesticides, ions perchlorates, métaux. Quelques biomarqueurs d?effets seront intégrés dès le cycle 1 (et davantage aux cycles 2 et 3) afin de mettre en évidence des effets précoces. Bien que lancée avec retard (2024 au lieu de 2020), ALBANE constitue une réelle avancée qui apportera de nombreuses informations sur l?imprégnation de la population, y compris au niveau régional. La couverture populationnelle est large (1 150 enfants et adolescents de 3 à 17 ans et 2 000 adultes). Des programmes spécifiques aux outre-mer devraient être lancés ultérieurement, à l?image de ce qui est déjà en cours pour la chlordécone aux Antilles. 59 Le site internet « Endocrine Disruptor Lists » a été élaboré en Juin 2020 par la Belgique, le Danemark, la France, les Pays-Bas et la Suède, rejoints par l?Espagne en Février 2021. Il comporte 3 listes mises à jour régulièrement : Liste 1 = substances identifiées comme PE au niveau de l?UE ; Liste 2 = substances en cours d?évaluation pour la perturbation endocrinienne en vertu d?une législation de l?UE et Liste 3 = substances considérées par une autorité nationale comme ayant des propriétés de perturbation endocrinienne 60 Selon la définition donnée par SPF, la biosurveillance humaine permet de surveiller les expositions ou les effets précoces liés à la présence de substances chimiques dans l?organisme. Elle consiste à prélever des matrices biologiques comme le sang, l?urine, les cheveux, le lait maternel et à y doser les substances recherchées, ainsi appelées "biomarqueurs". La mesure qui est faite intègre toutes les sources d?exposition, quelles que soient les voies d?entrée des substances dans le corps humain (alimentation, respiration, contact?), et quels que soient le lieu d?exposition (domicile, travail?), l?activité ou la nature des produits consommés. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 33/203 Autre acquis des 5 dernières années (bien que curieusement absent des objectifs de la SNPE2) : l?exploitation d?ESTEBAN, programme de biosurveillance en population générale lancé en 2014 et clos en 2016 (pour la partie prélèvements biologiques). Dans le prolongement de l?enquête ELFE (volet périnatal du programme de biosurveillance, dont les résultats ont été publiés avant le lancement de la SNPE2), ESTEBAN apporte des informations précieuses sur l?imprégnation de la population française à de nombreuses substances, dont plusieurs perturbateurs endocriniens : bisphénols, phtalates, perfluorés, parabènes, retardateurs de flamme, plomb. A l?exception des parabènes (taux d?imprégnation de 60%), ces perturbateurs endocriniens sont retrouvés dans près de 100% des échantillons, révélant une imprégnation générale de la population. Pour chaque famille de substances, les principales voies d?exposition (alimentation, cosmétiques, tabac?) sont identifiées. En revanche, ces résultats ne permettent pas d?apprécier l?évolution de cette imprégnation, les perturbateurs endocriniens n?ayant pas été recherchés dans les précédents programmes de biosurveillance, à l?exception du plomb pour lequel on constate une nette diminution de l?imprégnation. Grâce au programme européen HBM4EU (European human biomonitoring Initiative), des comparaisons européennes de ces résultats ont été établies : c?est en France (parmi 11 pays de l?UE) que l?imprégnation aux bisphénols A et S est la plus importante (en revanche, elle est moindre pour le bisphénol F). De même, la France se distingue par des taux d?imprégnation des enfants aux phtalates particulièrement élevés. Ces résultats apportent des informations précieuses sur le niveau d?imprégnation de la population, qu?ALBANE viendra compléter dans les années qui viennent. En revanche, on peut regretter qu?aucun résultat n?ait été produit au cours des 5 dernières années sur les inégalités sociales d?exposition, qui étaient pourtant une des priorités de la SNPE2 et une recommandation forte du HCSP. Il en va de même de la surveillance « intégrée » (combinaison des surveillances sanitaire et environnementale) qui est annoncée dans la SNPE2 mais qui n?a pas trouvé de traduction substantielle à ce jour. 2.1.3.2 Les expositions professionnelles restent mal connues La connaissance des expositions et maladies professionnelles en lien avec les perturbateurs endocriniens a peu progressé en 5 ans. Le suivi des maladies professionnelles repose sur deux enquêtes (SUMER et COSET61) qui ne permettent pas d?identifier les pathologies liées aux perturbateurs endocriniens. Des travaux sont en cours à Santé publique France pour améliorer ce suivi, en exploitant notamment les données de la Caisse nationale d?assurance vieillesse (historique du parcours professionnel), couplées avec le système national des données de santé (SNDS) et les registres des cancers. De même, la biosurveillance des expositions professionnelles reste à ce jour embryonnaire et très lacunaire pour les perturbateurs endocriniens comme l?ensemble des produits chimiques (enjeu inscrit dans le plan santé au travail 4 adopté en 2021). 2.1.3.3 La surveillance des pathologies a progressé mais à rythme modeste et de façon très ciblée Confiée à Santé publique France, la surveillance des pathologies en lien avéré ou suspecté avec les perturbateurs endocriniens a produit plusieurs résultats, en particulier dans le champ de la santé reproductive pour laquelle les perturbateurs endocriniens jouent un rôle avéré. Qu?il s?agisse de fibromes utérins, d?endométriose ou de puberté précoce, on constate une hausse continue des taux d?incidence, avec parfois des progressions très importantes (+4,5%/an sur la 61 Enquête Surveillance Médicale des Expositions des Salariés aux Risques Professionnels (SUMER) et Cohorte pour la Surveillance Epidémiologique en lien avec le Travail (COSET) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 34/203 période 2007-2017 pour la puberté précoce). Ces alertes s?ajoutent à celles lancées en 2018 sur la fertilité masculine, notamment sur la qualité du sperme (concentration spermatique) qui a diminué de 32,2% sur la période 1989-2005. Malgré ces signaux très alarmants, connus pour certains depuis 2018, force est de constater que la SNPE2 s?est montrée peu ambitieuse, se fixant comme seuls objectifs de « poursuivre la surveillance des pathologies » et de réfléchir à un élargissement de cette surveillance. Il est notamment frappant de constater que, depuis près de 20 ans, aucune donnée nouvelle n?a été produite sur la qualité du sperme (les dernières en date remontent à 2005) alors que les problèmes de fertilité deviennent des enjeux de santé publique majeurs. De même, Santé publique France accompagne ses conclusions de beaucoup de précautions, en expliquant que la hausse des taux d?incidence peut être due à un meilleur diagnostic des pathologies (endométriose, fibrome utérin) et qu?il est difficile d?établir un lien de causalité entre ces indicateurs et les expositions environnementales. Pour compléter ce tableau épidémiologique, les indicateurs en matière de cancer du sein (un cancer hormono-dépendant pour lequel les perturbateurs endocriniens constituent un facteur de risque avéré) connaissent une dégradation constante, avec une progression du taux d?incidence de +1,1%/an sur la période 1990-201862. Au-delà de la santé reproductive, la SNPE2 s?était donné comme objectif d?élargir cette surveillance à d?autres pathologies. C?est le but de la démarche PEPS'PE63 , lancée en 2021 et achevée en novembre 2023, qui combine critères scientifiques (avis d?experts nationaux et internationaux) et critères sociétaux (classement des pathologies en fonction de leur gravité, incidence et importance sociétale par un panel de parties prenantes). Au final, il en résulte une liste d?une vingtaine de pathologies dans laquelle, outre la santé reproductive et les cancers, on retrouve des troubles métaboliques (maladies cardiovasculaires, surpoids et obésité, diabète de type 2, syndrome métabolique...) et des troubles du neurodéveloppement (troubles du déficit de l?attention, troubles du comportement, déficience intellectuelle). Ce nouveau programme de surveillance sanitaire ? dont le lancement constitue un enjeu majeur au regard des risques que les PE font peser sur la santé humaine - doit s?inscrire dans une démarche « intégrée », combinant analyses spatio-temporelles des taux d?incidence et expositions environnementales, avec à moyen terme l?appui de l?intelligence artificielle pour exploiter les bases des données (SNDS, Green data for health, Health data hub?). Cette surveillance intégrée devrait commencer par trois effets sanitaires en lien avec la santé reproductive puis s?étendre aux troubles du neurodéveloppement et, enfin, les cancers hormono-dépendants. 2.1.4 Une faible prise en compte des PE dans les programmes de surveillance environnementale 2.1.4.1 Seule la surveillance de l?air intérieur dans les logements intègre les perturbateurs endocriniens comme déterminant La surveillance des PE dans l?air intérieur des logements s?est améliorée durant la SNPE2 avec l?ajout de polluants émergents, dont font partie les perturbateurs endocriniens, dans la liste des substances à surveiller. Plus de 15 ans après la première campagne nationale « logement », une seconde, visant à 62 Entre 2010 et 2023, la progression a été plus faible, estimée à +0,3% par an. 63 Priorisation des effets sanitaires à surveiller dans le cadre du programme de surveillance lié aux perturbateurs endocriniens PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 35/203 mesurer la qualité de l?air intérieur a été menée de 2021 à janvier 2023 sur 600 logements avec notamment pour objectif la recherche de polluants émergents dont font partie les perturbateurs endocriniens. Ainsi, la surveillance de 7 perturbateurs endocriniens identifiés dans le cadre du règlement REACH a été ajoutée à cette campagne. La publication des résultats de cette campagne n?est pas encore intervenue, elle devrait avoir lieu courant 2024. Une fois le rapport publié, une réflexion sera engagée pour déterminer des actions à mener pour prévenir et réduire l?exposition aux polluants de l?air intérieur et identifier les différentes sources d?exposition. A l?image de ce qui a été fait dans l?air intérieur, la prise en compte du caractère de perturbation endocrinienne des substances est un critère à intégrer aux différents plans de surveillance existant dans l?air ambiant, les milieux aquatiques et les sols (cf.annexe n°9), ce qui n?a pas été fait jusque- là. 2.1.4.2 Les plans de surveillance des compartiments environnementaux contiennent des données sur les PE même si ces données ne sont pas valorisées Le croisement des données disponibles issues des programmes de surveillance des différents compartiments environnementaux que sont l?air ambiant, les milieux aquatiques et les sols, avec les listes de substances présentant des propriétés de perturbation endocrinienne permet de voir que certaines substances surveillées présentent des propriétés de perturbation endocrinienne. Ainsi, un suivi pérenne national des polluants d?intérêt national dans l?air ambiant a été mis en place depuis 2021. Sont concernés 75 pesticides parmi lesquels 3 sont identifiés comme étant en cours d?évaluation pour leur caractère de perturbation endocrinienne par un Etat membre et 46 sont identifiés comme étant des substances chimiques d?intérêt en raison de leur activité endocrinienne potentielle par l?Anses dans son avis d?avril 2021. Ces polluants d?intérêt national sont définis comme des « polluants autres que les polluants réglementés pour lesquels la surveillance est effectuée conformément au référentiel technique national ». Concernant la surveillance des milieux aquatiques, à la demande de la mission, un croisement des substances suivies au titre de la directive cadre sur l?eau (DCE) [arrêté du 26 avril 2022 établissant le programme de surveillance de l?état des eaux] avec les substances chimiques présentant des propriétés de perturbation endocrinienne figurant dans l?arrêté du 28 septembre 2023 (loi AGEC) a été réalisé. Il en ressort que 8 perturbateurs endocriniens sont suivis au titre de la DCE (cf.annexe n°9.4). D?autres données sur des substances PE ont très probablement été collectées au fil des années par les agences de l?eau64 ou l?OFB, mais elles n?ont été pas été valorisées pour leur caractère de perturbation endocrinienne. Le travail de croisement des données collectées par les différents opérateurs avec une liste de substances PE n?a pas été réalisé dans le cadre de la SNPE2. En 2022, plusieurs composés perfluoroalkylés (PFAS), dont certains peuvent être des perturbateurs endocriniens, ont été ajoutés au programme de surveillance de l?état chimique des eaux souterraines et des eaux de surface. Par ailleurs, comme prévu dans la SNPE2, une méthodologie visant à une meilleure prise en compte des propriétés de perturbation endocrinienne dans les NQE a été proposée, elle doit encore être mise en application sur plusieurs substances et présentée aux acteurs nationaux avant d?être proposée au niveau européen pour une amélioration de la méthodologie existante. Concernant les sols, la présence de substances chimiques, parmi lesquelles des perturbateurs endocriniens, est étudiée dans le cadre du réseau de mesure de la qualité des sols (RMQS). Ainsi, avant tout autre chose, ces données existantes sont à valoriser, comme cela a pu être le cas pour 64 L?Agence de l?eau Rhône Méditerranée Corse assure le suivi de certains PFAS depuis 2019, par exemple. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 36/203 les PFAS pour lesquels un rapport faisant un état de l?art des connaissances de ces substances et de leur présence dans les sites et sols pollués a été publié en décembre 2020. Pendant la SNPE2, le Groupement d?intérêt scientifique sol a fait l?objet de 2 évolutions majeures pouvant avoir un impact sur la surveillance des sols : la mise en oeuvre d?un projet Phytosol pour élargir la surveillance des résidus dans les sols ; l?intégration du Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) en charge du suivi des sites et sols pollués. Dans le cadre de la SNPE2, un croisement des données existantes avec la liste des 906 substances d?intérêt du fait de leur action endocrine potentielle identifiées dans l?avis de l?Anses d?avril 2021 a permis d?identifier que 76 substances d?intérêt sont mesurées dans le cadre du projet Phytosol et 46 dans le cadre du réseau de mesure de la qualité des sols sur les Polluants Organiques Persistants (POP RQMS1). Mais cette première analyse n?a donné lieu à aucune suite. En matière de perspective, le 5 juillet 2023, la Commission européenne a présenté sa proposition de directive relative à la surveillance et résilience des sols dont l?objectif principal est la surveillance et l?évaluation de l?état de santé des sols. La France devra porter dans ses positions l?intégration du caractère PE des substances comme étant un critère de sélection des substances à surveiller. Au niveau, européen le projet européen PARC prévoit le développement d?une campagne de surveillance dans les différents compartiments environnementaux. Démarré en mai 2022, ce projet se terminera en 2027. La France y participe activement. En parallèle des travaux prévus dans PARC, une exploitation des données existantes dans les différents plans de surveillance nationaux permettrait d?avoir une première vision, partielle et incomplète, de l?imprégnation de l?environnement par les perturbateurs endocriniens. 2.1.4.3 Les faiblesses de la surveillance : listes multiples et surveillance en silo La démultiplication des listes et l?absence d?une liste consensuelle de perturbateurs endocriniens avéré, présumés et suspectés est une difficulté commune à l?ensemble des compartiments de la surveillance environnementale. La surveillance environnementale est un outil indispensable pour appréhender l?imprégnation de l?environnement par les perturbateurs endocriniens, environnement qui constitue une des sources d?exposition de la population mais joue également un rôle essentiel pour la biodiversité en affectant la santé des écosystèmes et de la faune (baisse de fertilité, changement de sexe). Un croisement des données issues des différents compartiments environnementaux (que sont l?eau, l?air et le sol) permettrait d?avoir une approche intégrée de la surveillance environnementale et d?améliorer la compréhension de phénomènes observés sur la santé humaine et l?environnement. De la même manière, le croisement des données issues de la surveillance sanitaire avec celles issues de la surveillance environnementale permettrait d?aboutir à une approche intégrée de la surveillance qui pourrait être utilisée comme un indicateur des priorités de recherche et d?évaluation des substances afin d?identifier, parmi ces perturbateurs endocriniens potentiels, lesquels devraient faire l?objet d?une action prioritaire. Pour permettre l?exploitation et la valorisation des données issues de la surveillance, la SNPE2 prévoyait que les sites qui recueillent des données sur les perturbateurs endocriniens puissent transférer ces données via API sur le site data.gouv.fr. Il était également prévu la mise en place d?un datathon afin de croiser différents jeux de données (contamination des milieux, activité économique, catégorie socioprofessionnelle, pratiques sectorielles notamment en agriculture, fonctionnalité des écosystèmes?) pour produire une cartographie et faire ressortir les tendances spatio-temporelles et socio-économiques de la contamination des milieux par les PE et de PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 37/203 l?exposition des populations aux PE. Les moyens disponibles et l?absence d?une liste consensuelle des perturbateurs endocriniens avérés et présumés n?ont pas permis de réaliser ces actions, qui pourraient néanmoins voir le jour dans le cadre du Green Data for Health porté par l?action 18 du PNSE4. La concaténation et la valorisation des données d?imprégnation des milieux restent des actions nécessaires. La mission note cependant que des difficultés techniques telles que l?interopérabilité des données, la propriété des données ? sont à prévoir. 2.1.5 La surveillance des produits de consommation reste limitée 2.1.5.1 L?alimentation, une voie d?exposition majeure dont la connaissance progresse L?exposition de la population via l?alimentation peut être estimée grâce aux études de l?alimentation totale65 (EAT) reposant sur une méthodologie standardisée et recommandée par l?OMS et l?Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Même si le critère PE n?était pas spécifiquement pris en compte dans les précédentes EAT66 , certaines substances PE et d?autres potentiellement PE y ont été analysées. Ainsi, dès l?EAT1 (pour laquelle 39 substances ont été considérées), ont été recherchées dans les aliments plusieurs éléments-traces (cadmium, plomb, etc.) qui font partie de la liste des 906 substances potentiellement PE recensées par l?Anses. Ces substances ont été reconduites dans les EAT successives. Au cours de l?EAT2, d?autres substances PE ont été également recherchées comme des dioxines, des composés polybromés ou encore des PFAS. Ces substances ont toutes été incluses dans l?EAT3 et l?EAT infantile. Dans l?EAT3, le caractère PE (avéré ou présumé) de certaines substances a été spécifiquement pris en compte dans la priorisation des familles de substances à analyser dans les aliments préparés tels que consommés. Ainsi, d?autres PE sont venus s?ajouter à la liste, tels que le bisphénol A ou encore des phtalates. Avec l?EAT3, il sera possible pour certaines substances d?estimer des tendances dans les expositions de la population générale à travers son alimentation depuis les années 2000 ou 2010. En outre, considérant que la nomenclature d?ALBANE (pour la consommation alimentaire) s?appuie sur la nomenclature d?INCA3 qui est partagée par l?EAT3, il devrait être possible de lier les futures consommations d?ALBANE aux concentrations mesurées dans l?EAT3 et ainsi apprécier l?impact des données de consommation d?ALBANE sur l?exposition par rapport à celles calculées dans l?EAT3. Concernant l?EAT3, il est regrettable que le nombre de substances considérées ait dû être réduit (environ 300 substances ciblées contre 445 analysées lors de l?EAT2) du fait des moyens disponibles et surtout que le périmètre soit restreint au territoire métropolitain. La prise en considération des territoires d?outre-mer est en effet très souhaitable. D?un point de vue méthodologique, l?évolution vers une EAT continue, comme cela est déjà pratiqué dans certains pays (Australie, par exemple), doit être encouragée afin d?alimenter les flux de 65 Une étude de l'alimentation totale consiste à prélever sur différents points de vente les aliments régulièrement consommés par la population, les préparer tels qu'ils sont consommés, les mixer en des échantillons dits « composites » pour en réduire le nombre, puis les analyser pour rechercher un certain nombre de substances toxiques et nutriments. Dans la mesure où les aliments sont analysés "tels que consommés", c'est-à-dire lavés, épluchés et cuits le cas échéant, cette méthode présente l'avantage de fournir des données d'exposition "bruit de fond" plus réalistes que les approches fondées sur les normes alimentaires ou les résultats des programmes de surveillance et de contrôle. 66 EAT1 2001-2004, EAT2 2006-2011, EAT infantile 2010-16. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 38/203 données de manière régulière et faciliter la gestion des moyens à allouer (effet de lissage). La prise en considération du caractère PE dans le choix des substances à surveiller doit être encouragée et intensifiée. 2.1.5.2 La surveillance des produits de consommation repose sur des contrôles exploratoires à ce stade limités à la sécurité des jouets Des contrôles dits « exploratoires » sont réalisés par la DGCCRFF sur des produits de grande consommation destinés au public, pour des substances PE non encore réglementées mais susceptibles de le devenir. Ces contrôles ont été ciblés sur les jeux destinés aux enfants de moins de 3 ans, et notamment les cosmétiques jouets (paillettes, peintures pour le visage ...). Les substances testées ont été le résorcinol, les parabènes, et, depuis 2023, le bisphénol B. La DGCCRF effectue ces contrôles dans le cadre d?une stratégie plus large de visites ciblant la sécurité des jouets, dont le nombre est resté stable sur la période de la SNPE2 (708 prélèvements réalisés en 2022). En l?absence de réglementation, les suites de ces contrôles ne peuvent toutefois qu?être pédagogiques. Leur champ est également limité dans la mesure où le service des laboratoires67 ne dispose pas encore de méthode permettant de tester les bisphénols autres que le bisphénol A ou le bisphénol B. A l?avenir, une meilleure connaissance de l?exposition pourrait s?appuyer sur des campagnes vers d?autres produits de consommation, tels que des produits aux usages répétés (ustensiles de cuisine), ou permanents (sols en PVC) ou de contacts avec la peau (protections périodiques, couches, lingettes). 2.2 Agir pour réduire effectivement l?exposition et l?imprégnation 2.2.1 Des progrès limités en matière d?information de la population et de formation continue 2.2.1.1 La loi AGEC prévoit de renforcer l?information du consommateur mais sa bonne application est compromise Comme cela a été mentionné préalablement, la loi AGEC impose à toute personne mettant sur le marché français de produits à destination des consommateurs qui contiennent des perturbateurs endocriniens de mettre à disposition du public les informations permettant de les identifier. Selon l?arrêté du 28 septembre 2023, 128 perturbateurs endocriniens sont concernés68. Cette information doit se faire par voie électronique, dans un format ouvert, exploitable par système de traitement automatisé. L?application « Scan4Chem » a été retenue à cette fin. Celle-ci a été développée au niveau européen pour assurer l?application de l?article 33 de REACH consacrant un droit de connaître la présence de SVHC dans les articles de consommation. Pour autant, la sensibilisation du grand public se confronte à plusieurs obstacles : Scan4Chem a été conçu pour répondre à l?article 33 de REACH qui se limite aux « articles », elle ne permet donc pas de scanner les « mélanges » et « substances » (comme par exemple les cosmétiques ou les peintures). Pour la même raison, l?application ne répertorie que les produits SVHC, alors que les 67 Service commun des laboratoires des ministères économiques et financiers 68 Ces 128 perturbateurs endocriniens correspondent à 126 substances catégories SVHC dans le règlement REACH (dont 118 substances et 8 familles de substance) ainsi que 2 substances supplémentaires : le mancozèbe et le résorcinol PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 39/203 décrets d?application de la loi AGEC listent deux PE non SVHC. La diffusion de Scan4Chem au niveau national est encore très limitée : en août 2023, elle avait été téléchargée par moins de 12.000 personnes en France 69 (l?obligation d?information ne s?applique toutefois qu?à partir d?avril 2024). On peut donc douter que la diffusion de l?information telle que recherchée par la loi AGEC via l?application Scan4Chem soit réellement effective. En pratique, c?est davantage la réforme du règlement CLP, en ayant défini une classe de danger spécifique PE, qui crée les conditions d?une sensibilisation du grand public, en raison de l?obligation d?étiquetage des substances, même si, à l?heure actuelle, il n?est pas prévu qu?il y ait un pictogramme spécifique aux PE. 2.2.1.2 A l?inverse, le site des 1000 premiers jours a connu un réel succès Le site de Santé publique France fait état des risques chimiques (dont les perturbateurs endocriniens) dans la rubrique Agir sur son environnement (alimentation, produits d?hygiène, l?aménagement intérieur et extérieur)70. Une enquête SpF 2021 indique que la moitié des parents sondés connaissaient les 1000 premiers jours. En 2022, 2,5 millions de visites du site sont comptabilisées. L?application du même nom relaie les messages sur la qualité de l?air, les substances chimiques et habitudes de consommation, ou l?étiquetage des produits chimiques. A l?unanimité, les auditionnés connaissent la démarche 1000 premiers jours et s?appuient sur celle- ci. 2.2.1.3 Des avancées en matière de formation continue, principalement pour les professionnels de santé et les collectivités territoriales En matière de formation continue (cf.annexe n°10), les opérateurs de la formation n?ont pu fournir, pour 2019, un bilan précis du nombre de formations ni du nombre de personnes formées sur le thème des PE. Cela ne permet donc pas d?apprécier les évolutions par rapport à la SNPE1. Quoi qu?il en soit, selon les informations recueillies par la mission, le nombre de professionnels de santé formés est très faible. Au titre de la formation, la SNPE2 ne fait état que d?un seul financement, celui de la DGS (pour un montant total de 148 k¤ sur la période 2019-2023), attribué à l?Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) pour la formation « perturbateurs endocriniens et risque chimique autour de la périnatalité et l?enfance : les outils pour comprendre et agir71 ». Sur cette période 2019-2023, 1220 stagiaires ont suivi, avec succès, cette formation. L?EHESP a la volonté d?étendre ses formations. L?Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC) dispose des informations relatives aux inscriptions des professionnels de santé libéraux. Les actions en lien avec l'impact des perturbateurs endocriniens sur la santé sont incluses dans les orientations pluriannuelles prioritaires de développement professionnel continu (DPC)72. Sur la période 2021-2023, cela ne représente en moyenne que 0,3% des inscriptions, dont plus de 80% de médecins. Il convient de relever le travail du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT)73, qui 69 Sur un total de 147.000 téléchargements en Europe ; ces chiffres sont issus du rapport d?impact : Impact-assessment- report_version-FINAL_19.11.2023.pdf (askreach.eu) 70 Substances chimiques et habitudes de consommation (1000-premiers-jours.fr) 71 Cette formation, en ligne et gratuite pour les professionnels de santé, est agréée DPC 72 Le sujet des perturbateurs endocriniens a été intégré dans les orientations pluriannuelles prioritaires de DPC 2020-2022 ainsi que dans les orientations pluriannuelles prioritaires de DPC 2023-2025 73 Le CNFPT, avec ses structures déconcentrée, Inset et Inet, coordonne une offre de formation de préparation aux concours, de formations après réussite du concours et de formation continue PUBLIÉ https://www.askreach.eu/wp-content/uploads/2023/11/Impact-assessment-report_version-FINAL_19.11.2023.pdf https://www.askreach.eu/wp-content/uploads/2023/11/Impact-assessment-report_version-FINAL_19.11.2023.pdf https://www.1000-premiers-jours.fr/fr/substances-chimiques-et-habitudes-de-consommation Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 40/203 a réalisé des journées de formation (webinaires et présentiel) en appui aux collectivités territoriales. Depuis 2022, des podcasts sur la « webradio des territoriaux » sont librement accessibles74. Le CNFPT souhaite mutualiser ses ressources avec l?EHESP, et développer des ressources communes de formation avec l?EHESP et le réseau français des villes-santé de l?OMS. La mission a noté un travail remarquable de capitalisation des actions menées75. Entre 2020 et 2022, le CNFPT a formé 2 937 personnes via un webinaire sur le thème des PE (possibilités d?action des collectivités, périnatalité et petite enfance, entretien des locaux-bâtiment- habitat-centres techniques, eau et assainissement, développement de l?enfant, restauration collective). Pour les professionnels exerçant en établissement de santé ou médico-sociaux, les chiffres fournis par l?Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH) sont quant à eux extrêmement faibles : seulement 3 actions de formation proposées en 2021 et 5 en 2022 en lien avec les PE, totalisant 23 inscriptions en formation. Par ailleurs, l?opérateur de compétences OPCO Santé ne fait état que d?une seule action de formation PE en 2020 (la volumétrie de professionnels formés n?est pas documentée). De nombreuses ressources de formations sur le sujet des PE et plus largement sur la santé environnementale et/ou sur les risques chimiques76, se sont développées, agréées ou non pour le développement professionnel continu (DPC). S?agissant de la diffusion de documents d?informations auprès des professionnels, la mission a particulièrement remarqué : un outil de sensibilisation des professionnels de santé, élaboré par la DGS77, et diffusé notamment aux ordres et syndicats représentatifs des professionnels de santé en décembre 2023 ; un guide à l'usage des médecins libéraux de l'Union régionale des professionnels de santé (URPS) médecins libéraux PACA78 ; la fiche repères de l?INCa « Risques de cancer et perturbateurs endocriniens » 79 (2019) pour les réseaux professionnels. 2.2.1.4 La formation initiale sur les PE reste marginale Pour apprécier la formation initiale des professions de santé médecine-maïeutique-odontologie- pharmacie (cf.annexe n°10), la mission a adressé un questionnaire à la conférence des doyens de médecine et à la conférence des doyens d?odontologie80. La conférence des doyens de pharmacie avait procédé à une enquête en amont de l?audition. Il apparaît que la pharmacie développe une offre de formation santé environnement SE/PE structurée bien que protéiforme au plan national. L?odontologie est, sauf quelques exceptions, en développement sur ce sujet sur l?ensemble des facultés. L?enseignement des PE en facultés de médecine présente un état contrasté entre fort engagement en enseignement de la thématique PE, enseignement SE avec PE, ou sans PE, et 74 https://radio.cnfpt.fr/ 75 www.cnfpt.fr/s-informer/nos-actualites/le-fil-dactu/perturbateurs-endocriniens-document-capitalisation/inset-nancy (2021) 76 Par exemples : AFPA https://afpa.org/formation/perturbateurs-endocriniens-environnementaux-2023/; MOOC sur la Santé environnementale - FUN MOOC - Université de Bordeaux ;MOOC sur les perturbateurs endocriniens - URPS Pharmaciens Nouvelle-Aquitaine ; Syndicat des femmes chirurgiens-dentistes (SFCD) Les perturbateurs endocriniens, MOOC Le Prévention des risques environnementaux chez la femme enceinte et l?enfant ARS-AP-HP 77 Perturbateurs endocriniens - Ministère du travail, de la santé et des solidarités (sante.gouv.fr) 78 www.urps-ml-paca.org/wp-content/uploads/2019/06/Guide-Perturbateurs-Endocriniens.pdf 79 Perturbateurs endocriniens - Réf : FRPERTUBENDOCR19 (e-cancer.fr) 80 Voir annexe n°10 PUBLIÉ https://radio.cnfpt.fr/ http://www.cnfpt.fr/s-informer/nos-actualites/le-fil-dactu/perturbateurs-endocriniens-document-capitalisation/inset-nancy https://afpa.org/formation/perturbateurs-endocriniens-environnementaux-2023/ https://www.fun-mooc.fr/fr/cours/sante-environnementale/ https://www.fun-mooc.fr/fr/cours/sante-environnementale/ https://pe-urps.lemondepharmaceutique.tv/ https://pe-urps.lemondepharmaceutique.tv/ https://sfcd.fr/produit/les-perturbateurs-endocriniens-le-14-12-2023-en-distanciel/ https://sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/article/perturbateurs-endocriniens https://www.e-cancer.fr/Expertises-et-publications/Catalogue-des-publications/Perturbateurs-endocriniens Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 41/203 plus rarement, absence de formation PE ; près d?un tiers s?appuient sur le cours en ligne ouvert et massif (MOOC) national santé-environnement. Enfin l?enseignement sur le thème des PE en formation initiale est à l?appréciation des 35 écoles de sage-femmes, et représente en moyenne trois heures de formation dans le cursus. Les universités développent les programmes en toute autonomie. La mise en lumière, à l?aide d?un baromètre annuel, de ce qui est enseigné en santé-environnement (et sur les perturbateurs endocriniens), serait un bon moyen de stimuler ces enseignements. Pour les formations paramédicales les plus concernées, la mission, sans pouvoir obtenir de données d?ensemble, a pu noter un certain nombre de points convergents : pour les auxiliaires de puériculture, la thématique PE est abordée dans le module 2 du référentiel du diplôme d?Etat d?auxiliaire de puériculture (DEAP) repérage des risques notamment environnementaux ; pour les infirmières puéricultrices, la thématique PE, non obligatoire, peut être abordée dans le cadre d?enseignement en santé environnementale. Un module spécifique existe dans le service sanitaire des étudiants en santé, commun avec médecine-maïeutique-odontologie-pharmacie et infirmiers (cf. annexe n°10). Pour ce qui concerne les écoles d?ingénieurs, AgroParisTech participe à un tronc commun des cadres supérieurs du service public, par un volet transition écologique et One Health, dont le pilotage, la coordination et l?animation sont réalisés par l?Institut national du service public (INSP). Cela concerne 1 300 élèves en 2024, dans 21 écoles, principalement des écoles d?application. Plus globalement, la formation initiale des cadres des secteurs productifs (industrie, agriculture?), n?offre aucune lisibilité en matière de PE, à l?exception de l?Institut One Health (IOH). Soutenu par France 2030, l?IOH, porté par l?Ecole universitaire de recherche EID@lyon, a vocation à devenir un institut de référence pour la formation, l?expertise et la décision sur les sujets « Une seule santé ». L?IOH est issu de la réunion des établissements de formation des ministères chargés respectivement de l?agriculture (via l?ENSV-FVI VetAgro Sup et AgroParisTech), de la santé (EHESP), de l?écologie et de l?enseignement supérieur et la recherche. Les publics ciblés sont les décideurs publics, les décideurs privés et les organisations de la société civile. 2.2.1.5 Dans l?ensemble, les branches professionnelles n?accordent pas de place spécifique aux PE A l?exception des professions de santé, les branches professionnelles concernées par la manipulation de produits chimiques ne réservent pas de traitement particulier aux PE. Ceux-ci sont considérés au même titre que les autres produits chimiques. La réglementation française s?applique selon les règlements européens relatifs aux produits chimiques qui ne distingue pas spécifiquement les PE. Cette situation pourrait évoluer à la faveur d?une réforme européenne, actuellement en discussion, destinée à étendre le champ de la directive cancérigène mutagène reprotoxique (CMR) aux PE81, ce qui rendrait leur manipulation plus stricte, avec des obligations plus fortes imposées aux employeurs sur la substitution et la mise en place de mesures préventives. Les sapeurs-pompiers sont exposés, à travers les fumées d?incendie (10% de leur activité), à un certain nombre de PE malgré leurs équipements de protection individuelle (EPI). Sur une toute petite partie de ces incendies, ils utilisent des émulseurs, qui contiennent des PFAS. Les sapeurs- pompiers n?ont pas de formation spécifique sur les PE, mais sur la fumée et le port des EPI. 81 Un accord en COREPER du 6 décembre 2023 prévoit une réforme pour intégrer les PE dans la Directive 2004/37/CE sur les agents cancérogènes et mutagènes sur le lieu de travail (dite directive CMRD), une évaluation scientifique a été lancée par la Commission à cet effet PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 42/203 Les représentants professionnels soutiennent l?évolution de la réglementation européenne et invitent les services départementaux d?incendie et de secours (SDIS) à faire une transition vers des émulseurs « sans fluor », puisque les produits en contenant seront interdits dans 18 mois. Ils souhaitent suivre les conclusions de l?étude Anses ? SpF sur les métiers particulièrement exposés aux PFAS, notamment pour établir des valeurs limites d?exposition qui n?existent pas aujourd?hui (il n?y a d?ailleurs pas d?étude statistique ou épidémiologique sur la santé de ces professionnels à long terme). Les coiffeurs utilisent des produits à usage professionnel pouvant contenir des PE, pour lesquels ils expriment des inquiétudes tout en ne se sentant pas responsables, étant en « bout de chaîne ». Dans les écoles de formation, le volet préventif porte, lorsqu?il existe, sur l?ensemble de ses dimensions (postures de travail, troubles musculo-squelettiques?), sans volet particulier sur les PE ni sur les produits chimiques globalement. D?une façon générale, les risques liés au PE ne font pas partie des risques professionnels intégrés dans les référentiels enregistrés au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). Pourtant, le Centre d?ingénierie sectoriel industrie de l?Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) considère que 85 métiers sont concernés par l?impact des PE. 2.2.2 La réglementation des substances et sa mise en oeuvre se heurtent à de nombreuses difficultés 2.2.2.1 La SNPE2 a permis de soutenir l?adoption d?un règlement délégué du CLP instaurant de nouvelles classes de dangers La SNPE2 a contribué à consolider le rôle moteur de la France pour renforcer la réglementation européenne. C?est le cas en particulier pour la réforme du règlement CLP qui faisait partie des actions listées dans le SNPE2. Le vote de la loi AGEC au niveau national, qui apporte des obligations d?information sur la présence de perturbateurs endocriniens, a également contribué à affermir la position française au niveau européen. Le règlement délégué (UE) n°2023/707 modifiant le règlement CLP, introduisant des nouvelles classes de dangers de perturbateurs endocriniens pour la santé humaine et l?environnement est une étape importante vers l?harmonisation des réglementations européennes, qui devront à terme intégrer une même définition des perturbateurs endocriniens. Dans le prolongement de cette réforme, la France oeuvre en faveur de l?inscription des perturbateurs endocriniens et d?un pictogramme associé dans le système de classification internationale des Nations-Unies (UN ? GHS : système général harmonisé de classification et d?étiquetage des produits chimiques). 2.2.2.2 Le contrôle des produits, sur le territoire français et aux frontières, est limité par les moyens techniques et fragilisé par le commerce en ligne Les contrôles réglementaires sont destinés à vérifier l?application de la réglementation. Ils sont effectués par la DGCCRF82, ou par la DGDI83s?il s?agit de produits importés. Les contrôles de la DGCCRF sont effectués dans le cadre de son programme annuel de contrôle. Depuis 2019, ces contrôles ont porté sur les matériaux au contact des denrées alimentaires (recherche de bisphénol A et de phtalates), les jouets (recherche de bisphénol A, de parabènes et de phtalates), les produits chimiques et biocides (recherche de phtalates), ainsi que les cosmétiques (recherche de parabènes). Le nombre de visites avec prélèvement s?élève à 1 187 82 DGCCRF : Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes 83 DGDI : Direction générale des douanes et droits indirects PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 43/203 en 2023, un chiffre en légère baisse sur les deux dernières années. Le nombre d?établissements en anomalie sur la période est resté stable autour de 15% environ. La réforme du règlement CLP permettra d?élargir le pouvoir des autorités de contrôle via la vérification de l?étiquetage des propriétés PE des substances concernées à partir de 2025. Les contrôles douaniers sont orientés par des campagnes annuelles, et portent sur une variété de produits (cosmétiques, bijouterie, montres, parfums, colles, chaussures, vernis ...) dans lesquels des perturbateurs endocriniens ont pu être détectés. Ce contrôle douanier est limité par les règles du marché unique : une marchandise ne peut être contrôlée à nouveau si elle a déjà été dédouanée dans un autre Etat membre. Pour les produits dédouanés en France, les contrôles douaniers s?exposent par ailleurs au manque de documentation, dans le cas où le produit ne disposerait pas d?un code spécifique, comme c?est le cas pour les canards de bain, régulièrement ciblés pour la présence de BPA dans leur matériau. Le contrôle douanier n?est enfin pas adapté au commerce en ligne, puisque les prélèvements doivent nécessairement se faire sur 4 échantillons du même produit pour être probants, soit une quantité supérieure à la majorité des achats en ligne. Par ailleurs, dans un contexte de mondialisation, les capacités de contrôle des douanes sont minimes au regard du volume des transactions concernées. 2.2.2.3 Le droit du travail ne réserve pas de traitement spécifique aux perturbateurs endocriniens En matière de droit du travail, l?Union Européenne définit des exigences minimales, que les Etats membres peuvent renforcer en faveur des travailleurs. La protection de la santé et de la sécurité des travailleurs est organisée par la directive n°89/391/CEE qui définit des grands principes (prévention des risques, adaptation des postes de travail, instructions appropriées ...) Cette protection est complétée, en matière d?exposition aux substances dangereuses, par la directive n°98/24/CE sur les agents chimiques sur le lieu de travail, qui fixe les premières valeurs limites d?exposition professionnelle (VLEP) pour les substances chimiques, parmi lesquels figurent notamment des perturbateurs endocriniens. Il existe enfin une directive n°2004/37/CE sur les agents cancérogènes et mutagènes sur le lieu de travail qui pose des règles plus contraignantes, notamment sur les valeurs limites d?exposition professionnelle (VLEP). Cette directive a été révisée en 2022 pour inclure également les substances reprotoxiques. Les substances concernées par cette directive sont donc celles reconnues cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques (CMR), parmi lesquelles on retrouve certains perturbateurs endocriniens, mais qui n?apparaissent pas au titre de leur effet endocrinien. La Commission travaille actuellement à la réforme de cette directive n°2004/37/CE pour inclure les perturbateurs endocriniens en tant que tels, à l?issue d?un vote favorable du comité des représentants permanents qui prépare les travaux du Conseil de l?Union Européenne, le 6 décembre 2023. Une évaluation scientifique a été confiée à l?ECHA, qui pourrait aboutir à un projet de révision de directive entre 2028 et 2030. Le droit du travail faisant partie des domaines où l?Etat membre peut appliquer une réglementation plus stricte, il est possible de fixer des VLEP plus exigeantes dans le droit national. La SNPE prévoyait ainsi de revoir les VLEP des substances aux effets PE dans le droit national, mais cette action n?a pas été finalisée (l?Anses a proposé d?instaurer des VLEP pour deux substances, sans traduction dans le code du travail à ce stade). Il convient de noter que la Belgique a fait le choix de traiter les perturbateurs endocriniens au même titre que les substances CMR, choix cohérent avec la mise en place de sa propre stratégie sur les perturbateurs endocriniens (NAPED). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 44/203 2.2.3 Un échec des actions en faveur de la substitution 2.2.3.1 Des outils informatifs ont été produits à l?intention des industries mais n?ont connu qu?un faible écho Différents supports d?information ont été développés à destination des industriels. L?Ineris a ainsi participé aux travaux animés par l?ECHA et l?OCDE entre 2019 et 2021 qui ont conduit à la publication d?un guide méthodologique. Une autre initiative notable est celle du site destiné à apporter un appui aux acteurs économiques engagés dans une démarche de substitution afin de promouvoir la diffusion et le partage d?informations. Initialement restreint au bisphénol A, le site a été étendu à d?autres substances : bisphénols, phtalates, alkylphénols et PFAS. Le site met à disposition un guide méthodologique réalisé dans le cadre du PNSE3 afin d?aider les entreprises à identifier un substitut. Le site présente également des alternatives, sans toutefois être systématiquement en mesure de déterminer lesquelles sont les plus sûres. Il est bien précisé que la mention d?une alternative ne vaut pas étude de sa viabilité. Néanmoins, la mise à disposition de guides méthodologiques et d?outils de comparaison des alternatives disponibles reste un levier de prévention important pour intégrer l?approche « Safe and sustainable by design » dans la démarche de substitution. 2.2.3.2 Les appels à projets consacrés à la substitution ont été infructueux Les campagnes destinées à promouvoir la substitution volontaire n?ont pas rencontré leur public. Ainsi, le budget de plus de 15 millions d?euros prévus par la DGE84 pour mobiliser les entreprises n?a que peu été utilisé. En 2021, un critère de substitution avait été inclus dans l?appel à projets « Résilience », et seulement deux projets ont été retenus à ce titre : un sur la substitution du BPA dans les boîtes de conserve, l?autre sur l?utilisation de solutions biosourcées. Par ailleurs, l?appel à projet « Safe by design » prévu pour 2023 a finalement été repoussé n?ayant pu être intégré à la maquette France 2030 déjà consolidé, ni être porté par un budget DGE propre. L?appel à manifestation d?intérêt qui l?a précédé n?avait toutefois pas rencontré d?intérêt particulier de la part de l?industrie, un seul projet ayant été reçu, concernant une simulation numérique pour accélérer la recherche vers d?autres substances. De même, l?action de promotion de la substitution auprès des pôles de compétitivité n?a connu qu?une faible mise en oeuvre. De façon plus générale, la promotion de la substitution auprès des entreprises fait face à des dif- ficultés structurelles. D?une part, la substitution est une démarche volontaire qui reste tributaire de la volonté des industriels. D?autre part, il est difficile pour l?administration de disposer d?une vision précise de l?évolution de la recherche et développement de chaque entreprise. Par exemple, la diffusion des connaissances est limitée par le secret industriel, les entreprises ayant intérêt à gar- der confidentiel le développement de nouvelles formules et techniques pour préserver leur avan- tage concurrentiel. Pour autant, le manque de succès des actions de promotion de la substitution à ce jour ne saurait signifier que la réduction de l?exposition aux PE ne peut se faire que par la réglementation. La prochaine stratégie devra donc travailler à renouveler son approche dans la substitution, avec une démarche plus engagée des ministères concernées, assurer le financement des appels à projet (AAP) et envisager d?autres mesures innovantes (intégration dans les démarches RSE, accompagnement sur le modèle de ce qui existe dans l?industrie pharmaceutique, cf.annexe n°11?). 84 DGE : Direction générale des entreprises PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 45/203 Les services Économiques de l'État en région (SEER)85, sous l?impulsion de la DGE, assureront la promotion des actions et seront un relais auprès des industriels concernés. Un ciblage préalable des régions les plus susceptibles d?héberger des industriels concernés par une prochaine restriction d?usage d?une substance PE devra être réalisé par la DGPR et la DGE pour que l?action de communication et de promotion s?y concentre prioritairement. 2.2.4 Un foisonnement d?actions territoriales de prévention 2.2.4.1 Un foisonnement d?actions de prévention portées principalement par les associations, les collectivités territoriales, les maternités et les crèches Les initiatives prises sur le terrain sont nombreuses et même foisonnantes (cf.en annexe n°11, une description des projets dont la mission a eu connaissance). Elles émanent en premier lieu des collectivités territoriales qui ont mis en place de nombreuses actions visant à réduire l?exposition aux perturbateurs endocriniens, souvent à l?initiative du Réseau environnement santé dont la charte « villes et territoires sans perturbateurs endocriniens » a, selon l?association, été signée par près de 300 communes, 10 départements et 4 régions. Dans le domaine de la restauration collective, en particulier les cantines scolaires, les démarches dont la mission a eu connaissance ont permis de réelles avancées, parfois à large échelle. S?agissant de la commande publique, les résultats sont plus mitigés, les démarches se heurtant souvent à l?absence d?offre de produits certifiés « sans perturbateurs endocriniens ». Principale fenêtre de vulnérabilité, les 1 000 premiers jours concentrent logiquement la majeure partie des actions territoriales de prévention, en particulier dans les maternités et les crèches. Nettoyage des sols et des surfaces, produits d?hygiène et d?entretien, alimentation, sensibilisation des parents, jouets, aération des locaux : la prévention des perturbateurs endocriniens (et plus globalement la prévention des expositions environnementales) est une démarche globale qui suscite souvent une forte adhésion des personnels. Cette démarche s?étend généralement à l?ensemble des produits chimiques. De fait, il n?est pas aisé de lutter spécifiquement contre les perturbateurs endocriniens qui ne font pas l?objet d?un étiquetage particulier ni même, jusqu?à très récemment (loi AGEC), d?une liste officielle. Ces dynamiques territoriales reposent également sur des actions de sensibilisation/information à destination, d?une part, des parents et futurs parents et, d?autre part, des professionnels de santé et de la petite enfance. C?est le cas des ateliers « Nesting » dont l?objectif est de sensibiliser les parents ou futurs parents aux risques environnementaux, chimiques en particulier86. Le projet « FEES » (Femmes enceintes, environnement et santé) poursuit un objectif similaire (« réduire l?exposition aux polluants des futurs et jeunes parents »). Porté par l?Association pour la prévention de la pollution atmosphérique (APPA) et la Mutualité française, ce projet se déploie depuis 2011 dans les Hauts-de-France et s?étend dans 7 régions. Dans certaines régions, l?Assurance maladie apporte aussi sa contribution à la lutte contre les perturbateurs endocriniens. C?est le cas notamment dans l?Indre et dans l?Aisne où les caisses primaires d?assurance maladie ont mené des actions de sensibilisation des professionnels de santé et des femmes enceintes ; des initiatives qui ont trouvé un écho national dans la convention d?objectifs et de gestion 2023-2028 de la CNAM qui prévoit notamment la généralisation des expérimentations « 0 phtalates ». 85 Au sein des DREETS, les SEER déclinent la politique économie de l?Etat en région, autour de 3 axes : développer des filières stratégiques, soutenir l?innovation des entreprises, et préserver et consolider le tissu économique. 86 Selon WCEF (en charge de ce programme), près de 800 animatrices (sage-femmes, auxiliaires de puériculture?) ont été formées depuis 2009 à l?animation de ces ateliers qui peuvent se dérouler dans une maternité, un centre de PMI, une crèche? 600 ateliers auraient ainsi été organisés en 2022 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 46/203 2.2.4.2 Quelques initiatives locales de surveillance environnementale En 2021-2022, une évaluation de la présence des pesticides dans l?air ambiant a été réalisée par ATMO Occitanie. Cinq substances actives d?intérêt en raison de leur activité endocrine potentielle identifiées par l?Anses dans son avis d?avril 2021 ont été quantifiées sur l?ensemble des sites de mesures, à des fréquences plus ou moins importantes. Ce travail sera poursuivi dans les prochaines années. En 2022, sous l?égide de la DGPR, une démarche exploratoire d?identification d?une activité endocrinienne dans les effluents d?industries pharmaceutiques a été réalisée dans quelques régions. Cette action a permis d?affiner la méthodologie de caractérisation des activités endocriniennes par les outils bio-analytiques et si nécessaire pourrait aboutir à la mise en place d?actions spécifique pour chaque site afin de réduire ces émissions. Sans tirer de conclusion hâtive sur l?interprétation des résultats préliminaires, les premiers éléments convergent sur la détection d?une activité endocrinienne dans la majorité des rejets. 2.2.4.3 Des actions qui se sont déployées avec peu de soutien mais qui suscitent une réelle dynamique de terrain en faveur de la santé environnementale La plupart des acteurs de terrain engagés dans ces actions de prévention connaissent mal la SNPE2. Au mieux, elle constitue une référence qui permet de légitimer leur action et de mobiliser des partenaires (y compris sur le plan financier), en interne comme en externe. Pour ces acteurs, la SNPE2 n?apporte ni financement, ni cadre d?action : plusieurs interlocuteurs de la mission ont ainsi regretté l?absence de recommandations claires, à commencer par une liste d?outils dont l?efficacité aurait été scientifiquement établie. Cette lacune, qui n?est pas propre à la santé environnementale, conduit les acteurs locaux à recourir à des opérateurs et des méthodes sur la base d?échos favorables d?expériences menées dans d?autres régions. Santé publique France a procédé à un recensement précieux des principales actions de prévention consacrées aux perturbateurs endocriniens. En revanche, il ne lui a pas été possible d?en dresser le bilan et encore moins d?en mesurer l?impact sur les pratiques et a fortiori sur les expositions. Sur le plan méthodologique, le principal appui dont bénéficient les collectivités territoriales provient du CNFPT, grâce à son offre de formation mais aussi par la mise à disposition d?outils87 et par des conférences qui permettent de partager expériences et bonnes pratiques. Le réseau français des villes-santé de l?OMS apporte également un soutien apprécié par les communes et intercommunalités qui en font partie. Les crèches et les maternités bénéficient généralement de l?appui de prestataires qui les accompagnent dans la réalisation du diagnostic, l?élaboration du plan d?action et sa mise en oeuvre (actions de formation notamment). Lors des investigations de terrain, ce qui frappe également, c?est le manque de coordination entre les acteurs. Dans certaines régions se superposent ainsi plusieurs stratégies ou plans d?action sur les perturbateurs endocriniens : conseil régional, conseils départementaux, communes... Au niveau régional, les plans régionaux santé environnement (PRSE) portés par les ARS et les DREAL s?efforcent d?apporter de la cohérence et, ponctuellement, des financements à ces actions de prévention en santé. Ainsi, une grande partie des actions consacrées aux 1 000 premiers jours dont la mission a eu connaissance avaient bénéficié d?un financement ARS. De fait, les perturbateurs endocriniens apparaissent dans la quasi-totalité des PRSE4 mais la place qu?ils y occupent est limitée, centrée sur les 1000 premiers jours. Dans la très grande majorité des PRSE4, les perturbateurs endocriniens ne font pas l?objet d?actions spécifiques mais sont inclus dans des 87 Par exemple le guide « Agir localement en Santé environnement » paru en octobre 2023 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 47/203 objectifs plus généraux tels que l?amélioration de la qualité de l?air intérieur, la réduction de l?exposition aux produits chimiques? Dans le domaine de la santé au travail, les directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) s?efforcent également d?impulser et de coordonner des actions de prévention des expositions professionnelles aux perturbateurs endocriniens, via notamment les plans régionaux santé au travail (PRST). La mission a ainsi eu connaissance de démarches innovantes dans les régions PACA et Centre-val-de-Loire. Là encore, si quelques actions sont centrées sur les perturbateurs endocriniens, c?est une approche globale de réduction du risque chimique qui est le plus souvent retenue. Si les données manquent pour en apprécier l?impact, ces actions de prévention suscitent indiscutablement une dynamique positive sur le terrain qui va bien au-delà des perturbateurs endocriniens (sujet complexe qui se prête difficilement à des actions ciblées). Les perturbateurs endocriniens constituent ainsi un point de départ à partir duquel s?engage une évolution des pratiques et des organisations qui contribue à la « sobriété chimique » et plus largement à la réduction des expositions environnementales, au bénéfice des publics les plus à risque au premier rang desquels figurent les femmes enceintes et les jeunes enfants. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 48/203 3 UNE STRATEGIE PERTINENTE ET GLOBALEMENT COHERENTE MAIS DONT L?EFFICACITE EST INCERTAINE A partir du bilan qui précède, la mission s?est efforcée de dégager les points forts et les points faibles de la SNPE2 en répondant à quatre questions évaluatives : pertinence, cohérence, efficacité et gouvernance. La question de l?efficience n?a pas pu être traitée en raison du manque d?information sur les moyens mis en oeuvre. 3.1 Une stratégie globalement pertinente mais insuffisamment tournée vers l?action et manquant de priorités 3.1.1 Une stratégie globalement pertinente mais qui ne mise pas assez sur les actions de prévention et de réduction des émissions Avec ses trois volets (former et informer ; protéger la population et l?environnement ; faire progresser les connaissances), la SNPE2 couvre l?ensemble des thématiques et questions relatives aux PE. Cependant, sa structure est déséquilibrée, avec des actions visant la connaissance beaucoup plus nombreuses que celles relatives à la prévention et à la réduction de l?exposition des populations et de l?environnement, alors même que « protéger la population et l?environnement » est objectif général de la SNPE2. Les mesures visant l?amélioration de la connaissance, l?information et la formation sont nécessaires, mais leur traduction opérationnelle a été modeste. Ainsi, la biosurveillance, la surveillance sanitaire et la surveillance environnementale sont le plus souvent décorrélées d?actions de prévention ou de réduction des émissions. En matière d?actions de réduction de l?exposition, la SNPE2 mise principalement sur la réglementation, laisse la substitution sur la base du volontariat et soutient peu les initiatives des acteurs locaux (collectivités, crèches, établissements de santé, associations). 3.1.2 Une bonne prise en compte de la dimension européenne mais des lacunes s?agissant de l?approche ?une seule santé?, des inégalités sociales et des initiatives territoriales La règlementation encadrant les perturbateurs endocriniens étant principalement européenne, la SNPE2 met à juste titre l?accent sur la défense de positions françaises ambitieuses au niveau communautaire. Elle affiche une volonté de s?inscrire dans une approche ?une seule santé? et elle s'intéresse en effet à la santé humaine, aux écosystèmes et à la santé animale. Malheureusement, l?approche est limitée, les différentes actions restent compartimentées en silo et les interactions existent peu. De plus, comme le rapport du Haut conseil de la santé publique le soulignait en 2018, les inégalités socio-économiques et les inégalités d?exposition (genre, contexte socio-professionnel?) sont insuffisamment prises en compte. Or, selon des études, notamment américaines, des inégalités sociales dans l?exposition aux perturbateurs endocriniens existent : les personnes aux revenus les plus modestes consomment par exemple davantage de nourriture grasse, contaminée par des phtalates ou de denrées conditionnées dans des contenants contenant du BPA. Une étude permettrait d?éprouver cette hypothèse en France. Enfin, la dimension territoriale, bien que présente dans la SNPE2, reste balbutiante alors même que les acteurs locaux sont actifs sur le sujet et portent des initiatives pertinentes avec des actions de prévention, de sensibilisation et de réduction des émissions. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 49/203 3.1.3 Un affichage d?actions souvent déjà lancées et qui dépassent les seuls perturbateurs endocriniens Une bonne partie du plan d?action de la SNPE2 est constitué d?actions déjà prévues ou engagées par ailleurs, soit au titre d?un autre plan ou stratégie (par exemple le plan micropolluants 2016-2021) soit dans le cadre des programmes de travail des administrations centrales et des opérateurs. Par ailleurs, bon nombre de mesures dépassent les seuls perturbateurs endocriniens et concernent les produits chimiques en général, voire la santé environnementale. Enfin, les actions pour lesquelles un budget est affiché sont très peu nombreuses (moins d?une dizaine). Ces choix ne remettent pas en question la pertinence de la SNPE2. En revanche, ils rendent plus compliqué d?identifier sa « plus-value » et donc de distinguer ce qui est attribuable la SNPE2 de ce qui aurait, de toute façon, été mis en oeuvre. 3.2 Si la SNPE2 est, dans l?ensemble, cohérente avec les plans globaux, elle souffre d?un certain nombre d?incohérences internes 3.2.1 Une cohérence satisfaisante avec les plans globaux mais une articulation moins lisible avec les stratégies et plans sectoriels La SNPE2 est une composante du 4ème plan national santé environnement (PNSE4) et s?inscrit dans un (très vaste) ensemble de stratégies et plans nationaux consacrés à la santé publique, à la santé au travail et à la protection de l?environnement. Plusieurs actions du PNSE4 font écho à la SNPE2, en particulier dans les domaines de la recherche (PEPR exposome), de la formation (formation initiale et continue des professionnels de santé) et de l?information du consommateur (application Scan4chem, étiquetage des produits ménagers?). Le 4ème Plan santé au travail ne fait pas référence explicitement à la SNPE2 mais plusieurs actions, consacrées au risque chimique, incluent les perturbateurs endocriniens (action réglementaire au niveau européen, recherche sur l?exposome, biosurveillance professionnelle ?). Avec les plans sectoriels, la cohérence est plus difficile à établir. C?est le cas notamment des stratégies et plans d?action qui visent des substances (chlordécone) ou des familles de substances (PFAS, phytosanitaires) qui ont, pour certaines, un effet de perturbation endocrinienne. Qu?il s?agisse du 4ème plan chlordécone adopté en 2021 ou du plan d?action interministériel sur les PFAS lancé en 2024, aucun ne fait référence à la SNPE2, alors que leur contenu rejoint, en grande partie, ses objectifs. Il en est de même avec la stratégie Ecophyto 2030 dévoilée en mai 2024. Au total, parmi les 37 stratégies et plans gravitant autour du PNSE4 (cf. annexe 12), près de la moitié ont un lien ? direct ou indirect ? avec les perturbateurs endocriniens. Un tel foisonnement est difficilement lisible pour les acteurs de terrain et même pour la plupart des décideurs nationaux, comme la mission l?a constaté lors de ses auditions. La complémentarité est, en revanche, beaucoup plus explicite avec le plan micropolluants adopté en 2016, auquel plusieurs actions de la SNPE2 font explicitement référence. La stratégie décennale de lutte contre les cancers s?appuie également sur la SNPE2 et inclut les perturbateurs endocriniens dans plusieurs de ses axes (recherche, prévention?). Au niveau territorial, les perturbateurs endocriniens figurent dans la quasi-totalité des 4èmes plans régionaux santé environnement (PRSE4) même si très peu d?entre eux mentionnent explicitement la SNPE2. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 50/203 3.2.2 Le plan d?action conforte la dimension opérationnelle de la stratégie malgré quelques incohérences Conformément aux recommandations des inspections générales, la SNPE2 a été dotée d?un plan d?action destiné à rendre la stratégie plus opérationnelle. D?une soixantaine de pages, ce document a le mérite de préciser les objectifs poursuivis, les résultats attendus et les pilotes, contributeurs et opérateurs en charge de chacune des 50 actions. De fait, il a constitué la feuille de route de la SNPE2 et permis le suivi de son déploiement. Ce plan d?action, globalement cohérent et adapté aux enjeux, comporte cependant quelques incohérences : les indicateurs sont trop nombreux ; certains de ces indicateurs manquent de pertinence, ce qui est d?autant plus regrettable que le HCSP avait réalisé un travail considérable pour proposer des indicateurs « SMART88 », c?est-à-dire spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporellement définis. le découpage en axes est, sur certains sujets, difficilement lisible (l?axe dédié à l?alimentation ne comporte qu?une action alors que celui consacré à la connaissance de l?imprégnation de l?environnement en compte 13). si les volets 1 (formation et information) et 3 (améliorer les connaissances) sont cohérents et homogènes, ce n?est pas le cas du volet 2 qui couvre à la fois la surveillance environnementale, la substitution et la réglementation, sous un titre « protéger l?environnement et la population » qui correspond à l?objectif général de la SNPE2 ; un manque de séquençage temporel, certaines actions n?ayant pas pu être mises en oeuvre dans les délais impartis (voire abandonnées) car tributaires de la réalisation d?autres actions89. Enfin, il y a peu de complémentarité entre le plan d?action et le « document de référence », ce dernier n?ayant pas de caractère stratégique mais plutôt une vocation « communicante ». De fait, c?est le plan d?action qui a tenu lieu de stratégie. 3.3 Malgré quelques avancées, les résultats sont bien en deçà des objectifs fixés en 2019 3.3.1 Des avancées notables sur le plan de la réglementation, de l?information du public et en matière de recherche La France a fait partie des Etats qui ont soutenu la mise en oeuvre de la stratégie européenne pour la durabilité des produits chimiques, dont la principale avancée a été la réforme du règlement CLP créant une classe de dangers pour les PE, et qui a vocation à harmoniser l?appréhension des perturbateurs endocriniens dans la réglementation européenne. Pour autant, l?action de la France n?a pas suffi à inscrire la réforme du règlement REACH dans le programme de travail de la Commission européenne. Les citoyens européens pâtissent donc des lenteurs d?un système qui n?est plus en capacité de faire face au volume croissant des substances à évaluer. Sur le plan de la réglementation française, la loi AGEC représente aussi un progrès, mais sa mise 88 SMART pour Spécifique, Mesurable, Acceptable, Réaliste, Temporellement défini. George T. Doran, « There's a SMART way to write management's goals and objectives » Management Review, vol. 70, no 11, 1981, 35?36 89C?est le cas de l?action 3 qui prévoyait l?établissement d?une liste de substances ayant des propriétés PE, qui a été finalisée en avril 2021 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 51/203 en oeuvre est compromise par les limitations de l?application Scan4Chem. En matière d?information du public, les sondages révèlent que le sujet des perturbateurs endocriniens est de mieux en mieux connu des Français, 88% en ayant entendu parler. Il est possible que les campagnes d?information y aient contribué, notamment avec le déploiement de la campagne des 1 000 premiers jours auprès des familles attendant un enfant. Enfin, la recherche a progressé durant la SNPE2 et permis à la France de contribuer à orienter le programme de recherche PARC vers la thématique des perturbateurs endocriniens. De même, la plateforme « PEPPER » a apporté une contribution notable à la validation des méthodes de tests. Il reste néanmoins des domaines de recherche peu explorés à ce jour, en particulier dans le domaine environnemental et dans celui des sciences humaines et sociales 3.3.2 Des résultats mitigés en matière d?évaluation des substances et de formation Bien que la France fasse partie des Etats les plus actifs en la matière, elle n?a réalisé que partiellement les actions relatives à l?évaluation des substances au titre des différents règlements européens. Par ailleurs, la publication d?une liste de substances d?intérêt du fait de leur action endocrine potentielle, assortie d?une méthode de priorisation, n?a pas eu les effets escomptés, au niveau national ou européen. Les résultats ont également été mitigés sur le plan de formation, avec une formation initiale encore très marginale chez les professionnels de santé, et quasi-inexistante dans les autres secteurs. La formation continue présente des avancées chez certains professionnels de santé, mais avec des prises en compte encore très hétérogènes selon les métiers. 3.3.3 Des progrès insuffisants sur le plan des contrôles et en matière de surveillance sanitaire et environnementale Le nombre annuel de contrôles réglementaires pratiqués par la DGCCRF sur le territoire national est en légère baisse sur les deux dernières années. Il n?a pas été possible de retracer le nombre de contrôles réglementaires pratiqués aux frontières par la DGDI, mais il a été constaté que l?efficacité du contrôle douanier est compromise par plusieurs éléments : impossibilité de recontrôler les produits déjà dédouanés, manque de documentation, et inadaptation au commerce en ligne. Le nombre annuel de contrôles exploratoires pratiqués par la DGCCRF est resté stable, mais les substances testées sont limitées par les moyens techniques dont dispose le laboratoire national de contrôle. Le champ des contrôles s?est par ailleurs restreint à celui de la campagne nationale sur la sécurité des jouets. Dans le champ de la surveillance sanitaire, l?exploitation des résultats du programme de biosurveillance ESTEBAN a permis de révéler l?imprégnation de la population par les PE, mais il n?est pas encore possible de caractériser d?évolution, faute de données précédentes existantes, et dans l?attente du déploiement du programme ALBANE en 2024. La surveillance des pathologies a progressé avec des nouveaux résultats sur la santé reproductive, révélant une augmentation des taux d?incidence de nombreuses pathologies, sans toutefois que le lien avec l?exposition aux perturbateurs endocriniens n?ait pu être systématiquement établi. Par ailleurs, aucune donnée relative à la qualité du sperme n?a été produite en près de 20 ans, malgré une baisse très nette de la fertilité masculine. Au-delà de la santé reproductive, le lancement de la démarche PEPS?PE, qui priorise différents effets sanitaires à surveiller en lien avec les PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 52/203 perturbateurs endocriniens, offre des perspectives intéressantes en matière de surveillance intégrée, mais la mise en oeuvre de cette dernière reste un défi à relever. S?agissant de la surveillance environnementale, la seconde campagne nationale logement a recherché spécifiquement des perturbateurs endocriniens, à la différence de la surveillance des autres compartiments que sont l?air ambiant, les milieux aquatiques et les sols. Pour ces derniers, des croisements de données ont permis de renforcer les connaissances, mais sans harmonisation d?ensemble, et avec la difficulté d?une multiplicité des listes des perturbateurs endocriniens. 3.3.4 Un échec total des mesures prises en faveur de la substitution Les ambitions de la SNPE2 en matière de substitution n?ont pas pu être réalisées. Hormis la production d?outils informatifs, dont le site de l?Ineris de portée très modeste, les appels à projets à destination des industriels n?ont pas trouvé leur public, et les budgets fléchés n?ont finalement pas été mobilisés. 3.3.5 Des résultats modestes et difficiles à mesurer qui ne permettent pas de conclure quant à l?évolution de l?exposition de la population et de l?environnement aux perturbateurs endocriniens Même si des progrès ont été faits, les résultats obtenus sont modestes, traduisant une efficacité limitée. Dans l?ensemble, la faiblesse des données existantes en matière de surveillance, et le suivi lacunaire des indicateurs de la SNPE2, ne permettent pas d?apprécier l?atteinte ? ou non ? de son objectif premier : réduire l?exposition de la population et de l?environnement aux perturbateurs endocriniens. Même si la dimension territoriale ne constituait pas une priorité de la SNPE2, de nombreuses initiatives locales ont sans aucun doute permis de réduire l?exposition de la population aux perturbateurs endocriniens, en particulier celle des femmes et des jeunes enfants (1 000 premiers jours). En l?absence de bilan global, leur impact est néanmoins difficile ? voire impossible ? à établir précisément. Enfin, un certain nombre d?avancées, constatées depuis 2019, ne sont pas directement imputables à la SNPE 2 et auraient - de toute façon - été obtenues grâce à des programmes, plans ou stratégies qui existaient avant le lancement de cette stratégie (par exemple la campagne des 1000 premiers jours). Si la SNPE2 a incontestablement donné de la cohérence et de la visibilité à un ensemble d?actions consacrées aux PE, sa « plus-value » - et donc son efficacité - sont difficiles à établir. 3.4 Une gouvernance marquée par un manque de soutien politique et l?absence de suivi des indicateurs 3.4.1 Un comité de suivi, instance de partage de l?avancée des actions, plus que de suivi et un comité de pilotage peu investi dans le pilotage Le premier comité de suivi (COSUI) a été installé le 8 décembre 2021, en raison du souhait des parties prenantes du PNSE 4 d?avoir une instance spécifique pour les PE. Sa composition très large, environ 115 membres qui représentent 74 entités, lui confère une dimension plus informative (avec quelques débateurs récurrents bien identifiés) que de véritable suivi des actions, ie respect des objectifs/jalons, indicateurs des 50 actions etc. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 53/203 Le comité de pilotage (COPIL), 20 membres90, composé principalement des directions générales d?administration centrale et des agences, assure un suivi de l?avancement des 50 actions de la SNPE2, tâche qui devrait revenir au COSUI (par exemple le tableau de synthèse des actions fin 2023 devrait relever d?un COSUI). En conséquence, le temps consacré par le COPIL aux réflexions prospective et stratégique s?en est trouvé réduit. 3.4.2 Un manque de portage politique et un engagement insuffisant de certaines administrations En 2017, les inspections générales rapportaient que la SNPE avait manqué d?un pilotage réellement interministériel ; ceci reste d?actualité en 2024 : le travail est resté cloisonné, avec un engagement contrasté des administrations, voire une méconnaissance de la SNPE2 par certaines d?entre elles. En outre, le copilotage par les ministères chargés de l'environnement et de la santé est indéniable mais les ministères chargés de l?agriculture et de l?industrie notamment, sont peu mobilisés. Plus globalement, il ressort des auditions que le portage des responsables politiques au plus haut niveau (la "voix" des ministres concernés) a été faible. 3.4.3 Malgré l?engagement de la DGS et de la DGPR, les échanges et la coordination entre les acteurs du plan (administrations et opérateurs) sont restés limités Le rapport d?évaluation de la SNPE1 (2017) faisait le constat que la programmation de l?activité des différentes agences sur les PE manquait de coordination ; les contrats d?objectifs et de performance n?ont pas été assez utilisés pour fixer des objectifs précis aux opérateurs. La mission a toutefois relevé des exemples de bonne coopération (séquençage des AAP ANR/Anses ; OFB/Ineris pour la détermination des normes de qualité de l?eau, organismes nationaux de recherche et agences pour la continuité des grandes cohortes?). La situation en fin de SNPE2 semble donc avoir évolué favorablement bien qu?un certain nombre d?auditionnés font état d?un travail persistant en silos (par exemple Anses versus SpF ; Anses versus Ineris). Par ailleurs un meilleur séquençage temporel des différentes actions pourrait accroître l?efficacité de la SNPE. 3.4.4 Un suivi défaillant des indicateurs Le HCSP91 avait recommandé de définir des objectifs « SMART » renseignant sur les résultats à atteindre dans un laps de temps déterminé, et des indicateurs peu nombreux mais pertinents que l?on puisse renseigner sur la base de systèmes d?information existants et faciles d?accès. Ces recommandations n?ont été suivies que très partiellement. Les indicateurs ne sont pas toujours adaptés aux objectifs, et sont par ailleurs collectés avec beaucoup de difficultés. Les actions ne sont pas priorisées, pas toujours hiérarchisées et le financement n?est que rarement évoqué. 90 Les membres du COPIL sont présents au COSUI 91 Analyse critique du projet de SNPE2 et proposition d?indicateurs de résultats, HCSP, 2018 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 54/203 4 RECOMMANDATIONS Compte tenu du bilan et de l?évaluation qui précèdent, la mission formule un certain nombre de recommandations d?ordre général avant de préciser les principaux objectifs à atteindre dans les années qui viennent. 4.1 Principes généraux 4.1.1 Une nouvelle stratégie est souhaitable et même nécessaire Même si des avancées ont été enregistrées dans plusieurs domaines, le bilan de la SNPE2 est modeste, bien en deçà des objectifs fixés en 2019. La poursuite des efforts engagés depuis 10 ans (depuis le lancement de la SNPE1) est donc nécessaire, d?autant plus que les risques liés aux perturbateurs endocriniens sont majeurs, pour la santé humaine comme pour celle des écosystèmes. Cette action gagnerait à s?inscrire dans une stratégie « une seule santé » (ou une « stratégie nationale santé environnement ») bénéficiant d?un pilotage interministériel au plus haut niveau, comme le proposent plusieurs rapports récents92. A défaut d?une telle stratégie globale (les informations recueillies par la mission indiquent que cette hypothèse n?est pas prévue à court terme), la mission estime souhaitable et même nécessaire d?élaborer une 3ème version de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, à condition d?en revoir profondément le contenu, le format et la gouvernance. Sans un portage politique fort, cette troisième stratégie n?atteindra pas de meilleurs résultats que les deux premières. : Elaborer une 3ème version de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, en revoyant profondément son contenu, son format et sa gouvernance [DGPR et DGS]. 4.1.2 Une stratégie globale assortie d?un plan d?action ciblé Comme tout exercice à caractère stratégique, la SNPE3 doit fixer un cap de moyen terme (10 ou 15 ans), avec des objectifs généraux et des priorités en nombre limité. Comme la mission l?a constaté lors de ses auditions, un tel document présente en effet plusieurs avantages : afficher (et affirmer) clairement les positions françaises à Bruxelles (commission et parlement européen) et auprès de nos partenaires européens. mobiliser les administrations, opérateurs et parties prenantes. envoyer un signal aux acteurs de terrain (en particulier aux collectivités territoriales). Alors que la SNPE2 s?est très rapidement trouvée résumée à son plan d?action, la mission considère que le document stratégique devrait constituer le coeur de la SNPE3 et servir de référence pour guider l?action des pouvoirs publics et leur communication. Pour en donner une traduction opérationnelle, la SNPE3 devrait être assortie d?un plan d?action, détaillant - pour les 5 années à venir - les pilotes, les échéances, les moyens, les indicateurs et les livrables. 92 C?est la première recommandation du rapport de capitalisation « La santé-environnement dans les travaux de l?IGAS » publié en 2022 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 55/203 A la différence de la SNPE2, ce plan d?action devrait être ciblé sur quelques mesures prioritaires, sur lesquelles les administrations et les opérateurs concentreront leurs efforts et leurs moyens financiers. Dans cette perspective, la mission fait quelques propositions (non exhaustives) de mesures qu?elle estime devoir être inscrites dans ce plan d?action (cf. annexe n°13). Au-delà de l?efficacité accrue qu?on peut en attendre, cette priorisation facilitera l?évaluation du plan d?action dont la réussite pourra être mesurée au regard de l?atteinte ? ou non ? de quelques objectifs. Elle peut également servir à orienter l?allocation des moyens financiers et humains. Les actions à mettre en oeuvre ne doivent pas être considérées de manière individuelle mais de façon cohérente, en veillant à leur articulation et à leur séquençage temporel. Enfin, la mission considère que la SNPE3 devrait être conçue comme une « stratégie de transition », destinée à assurer l'intégration de la problématique des perturbateurs endocriniens dans la future stratégie « une seule santé » ou dans les versions à venir des stratégies et plans globaux (PNSE 5 notamment). : Assortir la SNPE3 (document à caractère stratégique fixant un cap pour 10 ou 15 ans), d?un plan d?action ciblé sur quelques mesures prioritaires avec identification des pilotes, livrables, échéances, moyens et indicateurs [DGPR et DGS]. 4.1.3 Des principes généraux à inscrire dans la SNPE3 Parmi les principes généraux qui devraient guider l?élaboration de la nouvelle stratégie figure, en premier lieu, la dimension européenne. Evaluation et réglementation des substances, information du consommateur, contrôle des produits : bon nombre de sujets (parmi les plus importants) relèvent, pour l?essentiel, du niveau communautaire qui devrait constituer le cadre de référence et d?action privilégié de la SNPE3. Outre la contribution active aux travaux des agences (EFSA et ECHA), cela suppose d?intensifier le plaidoyer auprès des instances européennes et des autres Etats membres. Le renouvellement de la Commission et du Parlement européens, à la suite du scrutin du 9 juin 2024, constituent une opportunité pour relancer la stratégie européenne sur les produits chimiques, en particulier la révision du règlement REACH. Cette priorité n'interdit pas - bien au contraire- de prendre des mesures nationales sur des domaines mal ou peu couverts par le niveau européen (formation, surveillances sanitaire et environnementale) ou qui nécessitent des actions complémentaires (recherche, substitution?). Tout en étant résolument tournée vers l?Europe, la SNPE3 gagnerait à affirmer son ancrage territorial, pour orienter et soutenir les initiatives prises par les acteurs locaux et accroître leur impact. Au-delà des actions de formation, d?information et de prévention en santé, cette dimension territoriale a vocation à irriguer tous les volets de la stratégie, y compris les actions relatives à la connaissance (par exemple pour fonder les actions de prévention sur les alertes résultant de la surveillance sanitaire et environnementale). Le concept « une seule santé / one health » devrait également figurer parmi les principes généraux de la SNPE3. Du fait de leurs mécanismes d?action et leur très large diffusion, les perturbateurs endocriniens représentent en effet une menace pour la santé globale dont il convient d?examiner toutes les dimensions et, surtout, les interactions. Enfin, la SNPE3 devrait accorder une place centrale aux inégalités économiques et sociales face aux PE, pour les documenter mais aussi ? et surtout ? pour orienter les actions de prévention, de formation et d?information. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 56/203 4.2 Les principaux objectifs à assigner à la SNPE3 4.2.1 Une SNPE3, tournée vers l?action et qui se donne pour horizon « zéro exposition aux PE » Le maintien d?une stratégie autour de 3 grands objectifs (produire des connaissances / former et informer / réduire les émissions) apparaît pertinent et permettrait une continuité logique entre l?ancienne et la nouvelle stratégie. La mission a toutefois relevé un déséquilibre dans la SNPE2, qui présente un nombre plus important d?actions orientées vers la production de connaissances, et réserve à l?inverse une part insuffisante aux actions de prévention et de réduction des expositions. Au sein de la SNPE3, un meilleur équilibre entre l?action et la connaissance devrait s?opérer. Outre la formation et l?information, la réglementation et le contrôle de sa mise en oeuvre devraient y occuper une place importante, de même que la substitution et la limitation des émissions des substances PE. Plus généralement, il ne s?agit pas de « protéger l?environnement et la population » (objectif général de la SNPE2) mais de tendre vers le « zéro exposition aux PE », à l?instar de la stratégie européenne sur les produits chimiques qui vise « un environnement exempt de substances toxiques ». La mission propose également des évolutions au sein des axes contenus dans les trois objectifs, qui sont détaillées ci-dessous. : Tourner la SNPE3 vers l?action, avec comme ambition de moyen terme d?atteindre le « zéro exposition aux PE » et comme principes généraux : une approche « une seule santé », l?intensification du plaidoyer européen, l?ancrage territorial et la prise en compte des inégalités socio-économiques [MTECT et MSP93]. 4.2.2 Premier objectif : produire des connaissances La mission propose de structurer l?objectif « production de connaissances » autour de 3 axes : la recherche ; l?évaluation des substances et la surveillance intégrée. Ces trois axes intégreraient un certain nombre d?actions qui étaient classées dans l?objectif « protéger l?environnement et la population » dans la SNPE2, dans la mesure où elles relèvent davantage de la connaissance. 4.2.2.1 Développer la recherche en mettant en oeuvre un PEPR exposome La déclinaison du concept d?exposome, qui met en valeur le rôle de l?environnement comme complément du génome et comme déterminant du bien-être et de la santé humaine, est ambitieux, mais peut avoir des impacts majeurs pour la prévention et la gestion des risques en santé. En recouvrant, d?une part, l?impact des facteurs environnementaux sur un organisme vivant, notamment l?être humain et, d?autre part, l?impact des organismes vivants sur les écosystèmes, notamment les modifications d?origine anthropique, le concept d?exposome est le meilleur véhicule du concept « une seule santé ». Cela se ferait en écho aux programmes EHEN et EIRENE déjà en place au niveau européen, et devrait concerner tout le champ de la santé environnement. 93 ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires (MTECT) et ministère chargé de la Santé et de la Prévention (MSP) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 57/203 La recherche en matière d?exposome chimique, dont les perturbateurs endocriniens, doit également se diversifier en développant des champs dont la mission a noté l?insuffisance actuelle : La caractérisation des effets cocktails et des effets non-monotones. La recherche environnementale avec, d?une part, l?impact sur la biodiversité et, d?autre part, la remédiation et la restauration de l?environnement. La recherche en sciences sociales avec l?étude des inégalités socio-économiques de santé. L?organisation et le suivi de cohortes de grandes tailles à l?échelle européenne. La mission recommande donc la mise en oeuvre d?un PEPR exposome dans le cadre de la Stratégie d?accélération prévention (2024). 4.2.2.2 Accélérer le rythme d?évaluation des substances et élaborer une stratégie européenne de tests Bien que la France s?investisse dans l?évaluation des substances, le rythme global au niveau européen reste insuffisant face au nombre toujours croissant de substances mises sur le marché. Il est nécessaire de fixer des objectifs plus ambitieux en matière de volume annuel de substances évaluées, et la France peut jouer un rôle moteur en la matière. L?accélération du rythme d?évaluation suppose de développer par ailleurs une stratégie en matière de tests au niveau européen, afin de développer et proposer à la normalisation des tests pour les voies d?action et effets actuellement les plus mal couverts (voie thyroïdienne, métabolisme, effets sur le neurodéveloppement ...). Afin de pouvoir atteindre cet objectif, l?élargissement de PEPPER à d?autres Etats membres doit être poursuivi et intensifié ainsi que la sécurisation de son financement. Enfin, cela suppose de poursuivre le soutien aux projets de recherche visant à développer de nouvelles méthodes de tests, ainsi que l?accompagnement de leur validation, au niveau national (via le PNR EST et l?ANR) et européen 4.2.2.3 Mettre en oeuvre une surveillance intégrée en couplant la surveillance sanitaire et environnementale Malgré ses ambitions dans ce domaine, la SNPE2 n?a pas abouti à une combinaison effective des données de surveillance sanitaire et de surveillance environnementale. Cette surveillance intégrée devrait constituer une priorité pour la SNPE3, qui pourra s?appuyer sur les résultats des nouveaux programmes de surveillance sanitaire, une meilleure prise en compte du caractère PE dans la surveillance environnementale (en particulier pour le choix des substances à suivre) et le recours à l?intelligence artificielle. La mission considère qu?il s?agit là d?un enjeu majeur, tout comme : Le lancement ? le plus rapidement possible ? d?un nouveau programme de surveillance des pathologies en lien avec les perturbateurs endocriniens (suite de l?étude PEPS?PE), en complément du nouveau programme de biosurveillance (ALBANE). La valorisation des données existantes et une meilleure prise en considération du caractère de perturbation endocrinienne dans le choix des substances à surveiller dans les différents compartiments environnementaux, en particulier les eaux et les sols. Les programmes de surveillance devront garantir l?inclusion des outre-mer au regard des particularités et de l?importance que ces territoires représentent en matière de lutte contre les PE. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 58/203 4.2.3 Deuxième objectif : former et informer La mission propose de structurer l?objectif « Formation et information » autour de 3 axes : l?information du consommateur ; la sensibilisation des populations et la formation des professionnels. 4.2.3.1 Garantir une information effective du consommateur La SNPE3 devra viser à ce que l?information délivrée au consommateur sur les produits soit systématique et effective, en facilitant le développement d?outils garantissant une information accessible, pour donner un plein effet à la loi AGEC et au règlement délégué CLP. Au niveau européen, la France pourra soutenir l?instauration de standards plus exigeants en matière d?étiquetage et d?information du consommateur, sur le modèle de la loi AGEC. 4.2.3.2 Sensibiliser les populations en allant vers les plus vulnérables La sensibilisation des populations devra amplifier les campagnes conduites pendant la SNPE2 (à l?instar des 1 000 premiers jours) en ciblant les populations les plus vulnérables : femmes enceintes, enfants et adolescents, publics en situation de précarité. Ce volet nécessite un appui renforcé aux actions territoriales de prévention des expositions environnementales, avec la mise à disposition de ressources techniques (notamment des méthodes recommandées au regard de leur efficacité) et budgétaires, pour les acteurs concernés (services de l?Etat, assurance-maladie, collectivités territoriales, associations ...). Ces actions de prévention devront mettre l?accent sur les alternatives (produits, comportements et usages) permettant aux professionnels et aux consommateurs de réduire leur exposition aux PE. Ces actions devront être coordonnées au niveau régional et reposer sur des méthodes de prévention dont l'efficacité a été démontrée. 4.2.3.3 Généraliser la formation des professionnels concernés La SNPE3 devra soutenir une vraie politique de formation initiale et continue des professionnels dans les différents domaines concernés en visant, d?une part, les professionnels de la santé et de la petite enfance et, d?autre part, les métiers à risque (industrie, agriculture, nettoyage, hygiène et esthétique?). Pour ces secteurs, il est important de s?assurer que les formations concernent non seulement les personnes manipulant les produits à risque, mais également les cadres et managers afin de sensibiliser toute la chaine de conception et de production. Les secteurs à risques pourraient également bénéficier d?une campagne visant chaque année un secteur professionnel différent. 4.2.4 Troisième objectif : réduire les émissions La mission propose de structurer cet objectif autour de 4 axes : la restriction voire l?interdiction des substances ayant des effets perturbateurs endocriniens ; le contrôle des produits ; la substitution ; la traduction opérationnelle des alertes résultant de la surveillance intégrée. En outre, la mission propose d?initier une réflexion prospective quant aux nécessaires changements de paradigme pour tendre vers l?objectif « zéro exposition aux PE ». PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 59/203 4.2.4.1 Elargir les restrictions de substances ayant des effets de perturbation endocrinienne Les restrictions de substances ayant des effets PE découlent pour l?essentiel des réglementations européennes concernées. A cet égard, la France devra intensifier son activité diplomatique pour que les travaux d?évaluation et de restriction au niveau européen se poursuivent à un rythme ambitieux, mais également pour que les réformes annoncées dans la stratégie européenne de durabilité des produits chimiques de 2020 et n?ayant pas pu être mises en oeuvre soient priorisées dans le prochain mandat de la Commission européenne. Sur le plan réglementaire, la France pourrait ainsi mener une double action : au niveau européen, soutenir la refonte du règlement REACH, la mise en oeuvre du nouveau règlement CLP, l?actualisation de la directive sur les agents chimiques dangereux, et la restriction universelle des PFAS ; au niveau international, soutenir l?inscription des PE dans le système général harmonisé de classification et d?étiquetage des produits chimiques des Nations-Unies. Pour les domaines dans lesquels le droit européen est subsidiaire, à l?instar du droit du travail, la SNPE3 devra encourager de nouvelles restrictions faisant de la France un modèle au niveau européen. Un travail de veille pourra également être effectué vis-à-vis des autres Etats membres pionniers pour s?inspirer de leurs législations. Dès maintenant, il pourrait être envisagé de traiter, en droit du travail, les perturbateurs endocriniens avec le même degré de protection que les substances classées CMR. 4.2.4.2 Renforcer le contrôle des produits, aux frontières et sur le territoire national La SNPE3 devra soutenir la mise en oeuvre de campagnes de contrôle des produits, à la fois aux frontières et sur le territoire national, ce qui implique une diversification des campagnes de contrôles exploratoires, une augmentation des moyens (humains et techniques) alloués aux contrôles réglementaires, et l?élaboration d?un encadrement spécifique pour le commerce en ligne. A l?avenir, les contrôles devront également porter sur la mise en oeuvre de l'étiquetage CLP (à partir de 2027) ainsi que sur la mise en oeuvre des obligations d?informations imposées par la loi AGEC (dès maintenant). 4.2.4.3 Relancer les démarches de substitution et l?accompagnement des professionnels des secteurs émetteurs Malgré le faible bilan de la SNPE2 en matière de substitution, et au regard de l?enjeu important qu?elle représente, la prochaine stratégie devra chercher de nouveaux moyens pour la rendre effectivement opérationnelle. La démarche « safe and sustainable by design » devra être promue auprès des industriels, en s?appuyant sur de nouveaux outils et en ciblant les substances faisant l?objet de discussions en vue d?une restriction au niveau européen. Au-delà de l?offre, la SNPE3 devra aussi agir sur la demande en orientant l?achat public, en développant des guides et formations destinées à systématiser le recours aux clauses intégrant les perturbateurs endocriniens dans les commandes des différentes administrations publiques. 4.2.4.4 Traduire sur le plan opérationnel les alertes issues de la surveillance intégrée La SNPE3 pourra ancrer son positionnement sur la réduction des expositions en veillant à ce que les alertes issues de la combinaison des surveillances sanitaire et environnementale se traduisent PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 60/203 en actions concrètes (mesures de santé publiques, évolution des pratiques agricoles ou industrielles) au niveau national ou au niveau européen selon les domaines concernés. 4.2.4.5 Engager une réflexion prospective pour des changements de paradigme Un monde sans perturbateurs endocriniens constitue très certainement une vision utopiste. Malgré tout, une stratégie « zéro exposition aux perturbateurs endocriniens » doit in fine viser un tel horizon. Si les mesures actuellement mises en oeuvre ou envisagées peuvent permettre de progresser vers une réduction de l?exposition de la population et de l?environnement, la dynamique d?évolution des dix dernières années tend à démontrer que la démarche suivie est insuffisante. Une réflexion prospective, au-delà des seuls critères économiques intégrant la possibilité de changement de positionnement (approche par famille et non par substance), de changements des pratiques du quotidien (produits d?entretien, de soins, de cuisine, achats de produits ...) et de changement de paradigme pour les principaux secteurs productifs semble nécessaire pour préparer les actions futures à déployer dans le cadre d?une approche « one health ». : Structurer la SNPE3 autour de 3 objectifs: (1) Produire des connaissances : développer la recherche en mettant en oeuvre un programme national de recherche sur l?exposome ; accélérer le rythme d?évaluation des substances et élaborer une stratégie européenne de tests ; mettre en oeuvre une surveillance intégrée en couplant surveillances sanitaire et environnementale ; (2) Former et informer : garantir une information effective du consommateur ; sensibiliser les populations en allant vers les plus vulnérables ; généraliser la formation des professionnels les plus exposés ; et (3) Réduire les émissions : élargir les restrictions de substances ayant des effets perturbateurs endocriniens ; renforcer le contrôle des produits aux frontières et sur le territoire national ; relancer les démarches de substitution et l?accompagnement des professionnels des secteurs émetteurs ; traduire sur le plan opérationnel les alertes résultant de la surveillance intégrée ; engager une réflexion prospective vers des changements de paradigme [MTECT, MSP, MTSS, MASA, MEFSIN, MESR et MEN94] 4.3 Une gouvernance à refonder et des moyens spécifiques à allouer 4.3.1 Une gouvernance à refonder Le succès de la SNPE3 nécessite un engagement de tous les ministères concernés, au plus haut niveau (ministres). Au-delà de la coordination assurée par les ministères chargés de la santé et de l?environnement, la mission considère qu?il est indispensable d?impliquer plus fortement les autres ministères les plus concernés (agriculture, industrie, recherche) dès la conception de la stratégie et tout au long de sa mise en oeuvre. Ce pilotage interministériel renforcé nécessite une implication accrue de la part des ministres en charge de la santé et de l?environnement. Cette parole ministérielle est d?autant plus attendue que les Français expriment une préoccupation croissante à l?égard des perturbateurs endocriniens. Il nécessite également un soutien explicite de la part du Premier ministre et une implication du Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) auquel la présidence du COPIL pourrait être confiée. 94 ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires (MTECT), ministère du travail, de la santé et des solidarités (MTSS), ministère chargé de la Santé et de la Prévention (MSP), ministère de l?Agriculture et de la Souveraineté alimentaire (MASA), ministère de l?Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique (MEFSIN), ministère de l?Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR), ministère de l?éducation nationale (MEN) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 61/203 S?agissant des instances de suivi et d?animation, la mission préconise de conserver les deux comités actuels mais de revoir leurs missions. Le COSUI deviendrait le « Comité des parties prenantes » et pourrait ainsi se consacrer aux échanges et au partage d?information sur les actions menées, en laissant au COPIL la stratégie et la prospective (le suivi du plan d?action étant assuré par la DGPR et la DGS). C?est au COPIL, en particulier, que devrait se déployer une vision d?ensemble des plans et stratégies qui, au-delà de la SNPE3, contribuent à l?ambition « zéro exposition aux PE ». Les rôles de ces instances doivent être distincts et complémentaires. Des échanges doivent être organisés entre-elles et ce à double sens, notamment : si l?élaboration de la SNPE3 relève du COPIL, le projet de stratégie devra être présenté devant le comité des parties prenantes ; pour la définition du plan d?action, le comité des parties prenantes pourra être source de propositions et informé de sa mise en oeuvre ; chaque instance pourra informer ou interpeller l?autre instance. : Fonder la gouvernance de la SNPE3 sur un pilotage interministériel renforcé, une implication accrue des ministères les plus concernés (Agriculture, Industrie et Recherche, au-delà des ministères en charge de l?environnement et de la santé) et un soutien ministériel au plus haut niveau [PM/SGPE, MTECT, MSP, MTSS, MASA, MEFSIN, MESR et MEN. 4.3.2 Doter le plan d?action d?un budget spécifique Certaines actions de la SNPE3 nécessitent des moyens supplémentaires, à prendre en compte lors des programmations budgétaires des administrations centrales et des opérateurs. C?est le cas, par exemple, de l?Anses qui, en absence d?un soutien budgétaire, pourra difficilement accélérer le rythme des évaluations de substances. Le plan d?action adossé à la SNPE3 doit donc être doté d?un budget pluriannuel, incluant des financements consacrés à la mise en oeuvre d?actions nouvelles et spécifiques aux PE, au-delà des moyens déjà prévus ou engagés. Au regard des enjeux et des coûts induits par les PE, cet effort financier est à la fois nécessaire et soutenable. Sans prétendre à l?exhaustivité, la mission a identifié certaines actions qui nécessiteraient un soutien financier spécifique : Un abondement du budget de l?Anses à hauteur de 600 K¤/an95 permettrait de doubler les moyens consacrés à l?évaluation (au regard du critère PE) des substances, ce qui ? sous réserve de la disponibilité des experts du groupe de travail PE et de la complétude des dossiers - permettrait de doubler le rythme des évaluations (soit 4 à 6 nouvelles substances/an). Une dotation d?1 M¤/an augmenterait sensiblement les moyens dont disposent ARS et DREAL pour mettre en oeuvre les PRSE496 et soutenir les actions territoriales destinées à réduire les expositions aux PE (et aux produits chimiques en général), en complément de l?animation apportée par une plateforme de capitalisation des initiatives de terrain (budget de fonctionnement d?environ 150 K¤/an). 95 Recrutement de 5 à 6 ETP et complément de 100 K¤ pour les frais d?expertise. Ce budget pourrait être apporté par les 5 ministères de tutelle de l?Anses, au prorata de leur participation au budget annuel de l?établissement. 96 environ 10 M¤/an pour les PRSE3). Cette dotation serait apportée, à parts égales, par le MTECT et le MSP, pendant toute la durée des PRSE4, soit 5 ans. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 62/203 Un abondement du PNR EST à hauteur de 1 M¤/an (en complément de la dotation de 2M¤/an apportée par la DGPR depuis 2019 et de celle de 600 K¤/an envisagée par la DGS au titre du futur plan fertilité) permettrait de lancer des recherches sur des sujets actuellement mal couverts tels que les inégalités socio-économiques, l?impact sur la faune sauvage, la remédiation et la restauration de l?environnement? Un budget d?environ 2 M¤/an (soit le budget prévu par la DGE au titre de la SNPE2) permettrait de soutenir les démarches de substitution, de manière plus efficace grâce à un ciblage des industriels, des substances et des régions. Un budget de 2 M¤/an permettrait de financer des actions de prévention de l?exposition professionnelle, en formant les préventeurs et en accompagnant les entreprises sur le terrain pour faire changer leurs pratiques, sur le modèle de la Dreets Centre-Val-de-Loire ; Avec un budget d?environ 1 M¤/an, il serait possible d?accompagner une cinquantaine de sites industriels pour la caractérisation des rejets et l?identification des émissions de PE, comme cela a été fait pour certains établissements pharmaceutiques en 2022. L?exécution de ce budget (mesures nouvelles et mesures déjà prévues ou engagées) doit faire l?objet de présentations régulières devant le comité des parties prenantes. : Doter la SNPE3 (plan d?action) d?un budget pluriannuel (5 ans), incluant les financements consacrés à la mise en oeuvre d?actions nouvelles et spécifiques aux PE ; rendre compte régulièrement aux parties prenantes de l?exécution de ce budget [MTECT, MSP, MTSS, MESR, MASA et MEFSIN]. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 63/203 Conclusion Au terme de cette évaluation, force est de constater qu?elle présente de nombreuses similitudes avec celle conduite en 2017 pour la SNPE1 : efficacité limitée, gouvernance hésitante, cohérence lacunaire. La répétition de ce constat pourrait inciter à mettre fin à toute stratégie nationale en matière de PE, d?autant plus qu?une part très importante des décisions relèvent de l?échelon européen. Par ailleurs, plusieurs rapports ont mis en avant la nécessité de restreindre le nombre de stratégies et plans d?actions relatifs à la santé ? environnement (une quarantaine au total). Pourtant, les risques que présentent les PE pour la population et l?environnement imposent de continuer à agir et d?intensifier les actions engagées. Une SNPE3 est donc souhaitable et même nécessaire. Une telle stratégie ne doit pas être considérée comme la poursuite des deux premières SNPE. Elle doit traduire un changement radical aussi bien sur les objectifs (zéro exposition aux PE) qu?en matière de priorités : réduction effective de l?exposition aux PE et pas uniquement production de connaissances, formation des professionnels et information du public. Elle doit également être portée beaucoup plus fermement au niveau politique, que ce soit à l?échelle nationale ou européenne et encourager les initiatives prises par les acteurs de terrain. Enfin, la SNPE3 doit être dotée d?un budget spécifique, condition indispensable de son efficacité et de sa crédibilité. Ce n?est qu?à ces conditions que cette stratégie nationale pourra atteindre (enfin) les objectifs fixés il y a 10 ans : protéger la population et l?environnement face aux perturbateurs endocriniens ; avec pour cible « zéro exposition aux PE ». Nicolas DURAND Olivier LABOUX Emilie RASOOLY Inspecteur général Inspecteur général Inspectrice Sacha REINGEWIRTZ Frédéric SAUDUBRAY Inspecteur Inspecteur général PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 64/203 ANNEXES PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 65/203 Annexe 1. Lettre de mission PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 66/203 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 67/203 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 68/203 Annexe 2. Liste des personnes rencontrées Annexe 2.1. Ministères et directions d?administration centrale Nom Prénom Organisme Fonction BRETON Pierre Ministère chargé de l?Organisation Territoriale et des Professions de Santé (OTPS) Conseiller santé environnement VIEILLEFOSSE Aurélie Secrétariat Général à la Planification Ecologique (SGPE) Conseillère écologie BERTHAUD Cecilia ? Secrétaire générale adjointe à la planification écologique en charge du pôle ?ambition? BODENEZ Philippe Direction générale de la prévention des risques (DGPR) ? Chef du service des risques sanitaires liés à l'envi- ronnement, déchets, pollutions diffuses BLATON Elisabeth Adjointe au chef du bureau des produits chimiques LEFRANC Agnès Sous-directrice Santé environnement, produits chimiques, agriculture BOUE Muirgen Chargée de mission au bureau des produits chimiques GRATPAIN Valérian ? Chargé de mission au bureau santé-environne- ment CARMES Joëlle Direction générale de la santé (DGS) Sous-directrice Environnement et Alimentation LEMAITRE Cécile Adjointe à la Sous-directrice Environnement et Alimentation PAUL Caroline Cheffe du bureau EA1 MERLE Carole Adjointe à la Cheffe de bureau EA1 LEFEVRE Barbara Chargée de mission au bureau EA1 LESTERLE Sébastien Chargé de mission SCHWARTZ Bertrand Direction générale de la recherche et de l?innovation (DGRI) Directeur scientifique adjoint du Secteur Biologie Santé PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 69/203 Nom Prénom Organisme Fonction GUILLOTTEAU Solène Direction générale de l?alimentation (DGAL) Cheffe du bureau de l'appui aux politiques incitatives PALIN Sophie Sous-directrice, Sous-direction de l?accompagnement des transitions alimentaires et agroécologiques CORNUAU Caroline Sous-directrice adjoint, Sous-direction de l?accompagne- ment des transitions alimentaires et agroécologiques DA-CRUZ Lionel Direction générale de l?offre de soins (DGOS) Chef du bureau Innovation et recherche clinique (PF4) CHRIESTA-CABANNE Virginie Direction générale du travail (DGT) Adjointe au chef du bureau des risques chimiques, phy- siques, biologiques et des maladies professionnelles de SAINT-JORES Jeremy Chef du pôle risques chimiques et agents biologiques LECOQ Pierre Ingénieur prévention du risque chimique ROUSSEL Romain Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) Sous-directeur « industrie, santé, logement" (Sd5) SIMBELIE Karine Chargé de mission BEY Claire Direction générale de l?enseignement scolaire (DGESCO) Chef de bureau santé et action sociale BULLET Claire Adjoint chef bureau santé et action sociale ASSAYAG-SOURY Doris Direction Générale des Douanes et des Droits Indirects (DGDDI) Politique des contrôles MAHE-DECKERS Caroline Direction générale de l?énergie et du climat (DGEC) Chef du bureau qualité de l?air RUDE Julien Chef de projet coordination du dispositif de surveillance de la qualité de l?air MARCHAND Caroline Chargée de mission politique territoriale de l?habitat CHOL Alexandra Direction générale à l?emploi et à la Formation professionnelle (DGEFP) Adjointe au chef de mission, Mission des politiques de certi- fication professionnelle PASS-LANNEAU Adèle Direction générale des entreprises (DGE) Directrice de projets réindustrialisation POURCHET Lison Cheffe de projet réglementation produits et substances PICHERY Elisabeth Chargée de mission règlementation substances et produits chimiques PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 70/203 Nom Prénom Organisme Fonction METAYER Marie-Laure Direction de l?Eau et de la Biodiversité (DEB) Adjointe à la Directrice KAMIL Isabelle Sous-directrice de la protection et de la gestion de l?eau, des ressources minérales et des écosystèmes aquatiques NICOLAS Véronique Cheffe du bureau de la lutte contre les pollutions domes- tiques et industrielles PINAULT Tiphaine Direction générale de la sécurité civile et la gestion des crises (DGSCGC) Directrice de sapeurs-pompiers, direction générale de la sé- curité civile et la gestion des crises JUGGERY Emmanuel Inspecteur général, adjoint à la sous-directrice de la doc- trine et des ressources humaines CAPART Rémi Chef du bureau de la doctrine, de la formation et des équi- pements POURRET Didier Médecin colonel de sapeur pompiers, médecin conseil au- près de la direction COUDERC-OBERT Céline Commissariat général au développement durable (CGDD) Cheffe de la mission biodiversité, santé et activités anthro- piques JOASSARD Irénée Adjointe- Sous-direction de l?information environnementale JAMET Céline Lutte contre l?antibiorésistance BARBIER Laura Chargée de mission recherche dans le domaine environne- ment santé LAVARDE Patrick Inspection générale Ecologie et Développement Durable (IGEDD) Inspecteur général BARTOLI Fabienne Inspection générale des Affaires Sociales (IGAS) Inspectrice générale LESTEVIN Pierre Inspecteur général SIMON-DELAVELLE Frédérique Inspectrice générale PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 71/203 Annexe 2.2. Europe & International Nom Prénom Organisme Fonction ANNYS Erwin Agence européenne des produits chimiques (ECHA) Directeur de l?unité d?appui et du respect de la légisation TIRAMANI Manuela Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) Cheffe de l?unité en charge de la révision par les pairs pour les pesticides JAMES Mathews Stagiaires aux relations extérieures internationales STRECK Georg Commission européenne / DG GROW Unité REACH (F1) HENDRIX Katleen Juriste (F1) GREFVORS-ERNOULT Charlotte Commission européenne / DG Emploi Chef de l?unité Santé et sécurité au travail et EU-OSHA (C2) PODNIECE Zinta Membre de l?unité Santé et sécurité au travail et EU-OSHA (C2) DE AVILA Christina Commission européenne / DG Environnement Chef de l?unité des Produits chimiques sûrs et durables (B2) WODLI Jordane Chargé de mission unité des Produits chimiques sûrs et durables (B2) FABRE Julien Chargé de mission BEREND Klaus Commission européenne / DG Santé Directeur de la sécurité sanitaire durabilité et innovation (unités E, F, G) RUBBIANI Maristella Unité Pesticides et Biocides (E4) BRINKS Jonathan Unité Technologie de transformation des aliments et nouveaux aliments (E2) COTURNI Flavio Commission européenne / DG Trade (Commerce) Chef de l?unité Agriculture, alimentation, sanitaire et phyto- sanitaire (D3) VARADY Meta Unité Agriculture, alimentation, sanitaire et phytosanitaire (D3) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 72/203 Nom Prénom Organisme Fonction MARQUIS-SAMARI Emilie Représentation permanente de la France auprès de l?Union européenne (RPUE) Conseillère Travail, emploi, inclusion sociale, égalité femmes-hommes LARSEN Henrik Soren Ministère danois de l?environnement Directeur du département Eaux propres et produits chi- miques sûrs JOUAN Sandrine Ministère de la santé publique belge Coordinatrice du NAPED, Service public fédéral MEUNIER Joëlle Service public fédéral KUELLMER Jens Ministère fédéral allemand de l?environnement Ministère fédéral de l?environnement (BMUV) ; division de la sécurité chimique, de l?environnement et de la santé (divi- sion C II) HIRINCHSEN Sinikka BMUV, division C II ARNING Juergen BMUV, division C II KEHER Anja BMUV, division C II SEVCIK Benoît Etats-Unis Conseiller aux Affaires Sociales, Ambassade de France PATISAUL Heather Chercheur, North Carolina State University AUBEE Catherine Conseillère sénior, Programme d?évaluation des perturba- teurs endocriniens (EDSP), Bureau des programmes des pesticides, Agence de protection de l?environnement (EPA) JOE Ronnie Toxicologiste (EDSP) LYNN Scott Biologiste (EDSP) PERRON Monique Conseillère scientifique senior, Bureau des programme des pesticides EMDUR Zoe Chargée de mission Liaison, Bureau de la sécurité chi- mique et de la prévention de la pollution (OCSPP) THOMAS Russell Directeur du centre pour le calcul de la toxicologie et l?expo- sition de l?EPA (CCTE) GUISEPPI-ELIE Annette Directrice associée pour la science, CCTE JUDSON Richard Chercheur, CCTE PAUL Katie Chercheur, CCTE PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 73/203 Nom Prénom Organisme Fonction DIDERICH Bob Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) Chef de la division Environnement, santé et sécurité GOURMELON Anne Administrateur principal du Groupe « Lignes directrices » Annexe 2.3. Opérateurs publics nationaux Nom Prénom Organisme Fonction PRIEUR-RICHARD Anne-Hélène Agence Nationale de la Recherche (ANR) Département environnement SCHOU Cécile Relations institutionnelles BOUVET Philippe Département Biologie santé MOUNEYRAC Catherine Responsable scientifique toxicologie et écotoxicologie SCHULER Matthieu Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l?Alimentation, de l?Environnement et du Travail (Anses) Directeur général délégué du pôle « Sciences pour l'expertise » MICHEL Cécile Directrice de l?unité Reach/CLP/PE DUBOIS Laetitia Directrice de la recherche et de la veille scientifique en santé SANDERS Pascal Coordinateur général PARC GOURLAY-FRANCE Catherine Directrice adjointe à la Direction de l?évaluation des produits réglementés VOLATIER Jean-Luc Adjoint au directeur de l?évaluation des risques ROTH Chris Chef de l?unité Méthodologie et Etudes (UME) CHAMPION Morgane Chargée des projets scientifiques liés à l?alimentation SIROT Véronique Département de l?évaluation des risques PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 74/203 Nom Prénom Organisme Fonction DITTENIT Frédéric Agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM) Directeur adjoint règlementation et déontologie LOUIN Gaëlle Chef du pôle non clinique SIRDEY Thierry Directeur des dispositifs médicaux des cosmétiques et des dispositifs de diagnostic in vitro HOUETTO Paul Évaluateur toxicologue LENOIR-SALFATI Michèle Agence nationale du Développement Professionnel Continu (ANDPC) Directrice générale NATALI Jean-Philippe Directeur du développement et de la qualité du DPC FULBERT Hervé Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) Directeur des titres professionnels ROBERT Tiam Directeur ingénierie sectorielle TRAON Claire Caisse nationale d?assurance maladie (CNAM) Directrice de mission chargée de la transition écologique et de la santé environnementale DISEGNI Alan Directeur de cabinet adjoint, Direction Déléguée à la Ges- tion et à l?Organisation des Soins PHILIZOT Armance Responsable du département prévention et promotion de la santé NGUYEN Dinh-Phong Adjoint du département prévention et promotion de la santé GROSS Stéphanie Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT) Coordinatrice Santé publique, référente Santé environne- ment ROBICHON Nathalie Cheffe de service, service de spécialités santé publique GELY-PERNOT Aurore Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) Maître de conférences BONVALLOT Nathalie Directrice adjointe IRSET HUBERT Philippe Infrastructures de recherche PEPPER Directeur BRETON Thierry Institut national du cancer (INCa) Directeur Général de l?INCa LINASSIER Claude Directeur du Pôle Prévention, Organisation et Parcours de Soins de BELS Frédéric Responsable du département Prévention PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 75/203 Nom Prénom Organisme Fonction FOUCAUD Jérôme Responsable du département Recherche SHS Santé pu- blique Epidémiologie COBIGO Alexandre Responsable de projets - département prévention SERVENKA Iris Département Recherche SHS Santé publique Epidémiolo- gie RICAUD Myriam Institut national de recherche et de sécurité (INRS) Experte en prévention des risques chimiques COINTE Raymond Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) Directeur général MORIN Anne Directrice de la direction Milieux et impacts sur le vivant (MIV) BOUDET Céline Adjointe à la Directrice de la MIV ANDRES Sandrine Responsable de l?unité toxicologie et écotoxicologie des substances LEOZ Eva Direction de la « Stratégie politique scientifique et Commu- nication » TEBBY Cléo Ingénieur en statistiques et modélisation en toxicologie et écotoxicologie BRIGNON Jean-Marc Responsable de l?unité Economie et décision pour l?environ- nement BRION Francois Chercheur AIT-AISSA Sélim Responsable de l?Unité éco toxicologie des substances et des milieux DUFFORT Gaelle Chargée du projet AskREACH BISPO Antonio Institut national de recherche pour l?agriculture, l?alimentation et l?environnement (INRAE) Directeur Unité Info&Sols SLAMA Remy Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) Directeur de l?Institut thématique Santé publique BERNADAC Gérard Mutualité sociale agricole (MSA) Médecin conseiller technique national chargé du risque chi- mique PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 76/203 Nom Prénom Organisme Fonction MUSSARD David Conseiller technique national SALLES Bernard Président du Conseil Scientifique SOULAT Jean-Marc Médecin national PERCEVAL Olivier Office français de la biodiversité (OFB) Chef de service Fonctionnement, préservation et restaura- tion des milieux aquatiques AUGEARD Bénédicte Directrice adjointe recherche et appui scientifique STRAUB Pierre-François Chargé de mission Pollution des écosystèmes et métrologie DENYS Sébastien Santé Publique France (SpF) Directeur de la Direction Santé Environnement Travail (DSET) LE BARBIER-ANDREANI Mélina Directrice Adjointe de la DSET VERRIER Agnès Chargée de prévention en Santé environnementale MENARD Céline Responsable de l?unité Surveillance des Pathologies en lien avec l?environnement et le travail, DSET FILLOL Clémence Responsable de l?unité Surveillance des expositions, DSET CAUDEVILLE Julien Chargé de projets en santé environnement Annexe 2.4. Instances nationales Nom Prénom Organisme Fonction LISOWKI Vincent Conférence des Doyens des Facultés de Pharmacie de France Président CLAVELOU Pierre Conférence des Doyens des Facultés de Médecine Vice-président PAYSANT Sabine Présidente CNP-M PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 77/203 Nom Prénom Organisme Fonction BERANGER Remi Conseil National Professionnel de Maïeutique (CNPM), Collège National des Sages-Femmes de France (CNSF) Collège national des Sage-femmes de France, Maître de conférences BARASINSKI Chloé Doctorat d?université, Université Clermont Auvergne BRIGNON Jean-Marc Haut conseil de la santé publique (HCSP) Commission spécialisée sur les risques liés à l?environne- ment PAYRASTRE Laurence Directrice de recherche INRAE SQUINAZI Fabien Président de la Commission risque environnement de la santé publique CHAGNON Marie-Christine Commission spécialisée sur les risques liés à l?environne- ment HUBERT Philippe Directeur de PEPPER BEAUBESTRE Claude Membre de la CSRE De BELS Frédéric INCa URBAN-BOUDJELAB Soïzic DGS/MSR/SGHCSP VIOLLAND Anne-Cécile Plan national Santé environnement (PNSE4) Députée, Présidente du groupe Santé environnement GRARD Floriane Collaboratrice CHOISY Guillaume Agence de l?eau- Adour Garonne Directeur général BOULP Lauriane Conseillère politique publique en appui à la direction géné- rale REBILLARD Jean Pierre Chef de service SOURZAC Ariette Chargée d?étude COMBOROURE Jean-Christophe Agence Régionale de Santé Centre-Val de Loire Directeur de la santé publique et environnementale BREJON-LAMARTINIERE Vincent Centre régional de pathologies professionnelles et environ- nementales HELLEU Annaïg Responsable du département santé environnement CAFFET Laurent Agence Régionale de Santé Grand Est Chef du département santé environnementale PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 78/203 Nom Prénom Organisme Fonction OSBERY Aline Directrice adjointe de la direction promotion de la santé, prévention et santé environnementale MONIOT Stéphanie Responsable Planification et Actions Transversales HALITIM Ilias Agence Régionale de Santé Hauts-de-France Chargé de mission santé environnement ARS Hauts de France AUTES-TREAND Erwan Agence Régionale de Santé Nouvelle Aquitaine Responsable du pôle vulnérabilité RIOU Anne département « Enfance et Jeunesse » HAUTREUX Sabine Département Santé environnement BEIJAS Marie-Laure Cheffe de projet périnatalité MARGUERON Thomas Agence Régionale de Santé Provence-Alpes- Côte d?Azur Responsable régional santé environnement FLOCH Carine Chargée de mission PRSE PIETIN Clément Chargé de mission Environnements Extérieurs DASSONVILLE Fabrice Chargé de mission Eaux MAALIKI Eliane Responsable du département santé environnementale et veille et sécurité sanitaire MEUR Hervé Chargé de mission au département prévention et promotion de la santé BRETELLE Florence Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (APHM) Chef de service AGOSTINI Nathalie Coordinatrice médicale, Réseau périnatalité méditerranée BIAGI Caroline Infirmière DE, plateforme CRÉER BOUARD Carole Chargée de territoire 1000 premiers jours (83) BREVAUT-MALATY Véronique Praticien-hospitalier maternité, Hôpital Nord, AP-HM CERRI Françoise Sage-femme coordonnatrice de la maïeutique, Maternité Conception CORVISIER Laurianne Chargée de territoire (13) Réseau périnatalité méditerranée MONTEAU Pauline Directrice de la transition écologique, AP-HM PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 79/203 Nom Prénom Organisme Fonction MICQUEL Laura Praticien-Hospitalier, Gynécologie obstétrique, AP-HM MENU Johanne Directrice référente Pôle Femmes, parents, enfants PERRIN Jeanne Biologie de la reproduction, AP-HM SUNYACH Claire Sage-femme coordinatrice plateforme CREER PIBOULEAU Josselin Caisse Primaire d?Assurance Maladie- Indre Directeur Assurance maladie de l?Indre GAFSI Sami Sous-directeur Régulation innovation santé ZAIA Laetitia Centre Permanent d'Initiatives pour l'Environnement du Tarn Chargée de projet BESSON Brice Direction Régionale de l?Alimentation, de l?Agriculture et de la Forêt- Occitanie Chef de l?unité Pilotage et animation du plan Ecophyto VILLEREZ François Direction Régionale de l?Environnement, de l?Aménagement et du Logement- Occitanie Directeur régional adjoint GARNIER Simon Chef de service des risques industriels THERY-DUPRESSOIR Thomas Direction Régionale de l?Environnement, de l?Aménagement et du Logement- Centre-Val de Loire Chef de service risques industriels LEWIS Florian Directeur adjoint LE BER Ronan Chef du département risques technologiques et sécurité in- dustrielle IDRISSI Myriam Référente chimie et réglementation produits chimiques BARBONI Géraldine Direction Régionale de l?Economie, de l?Emploi, du Travail et des Solidarités- Provence Alpes Côte d?Azur Cheffe de projet du PRST CHEVALLIER Raphael Ingénieur de prévention et référent risques chimiques LAVAURE Anouk Direction Régionale de l?Economie, de l?Emploi, du Travail et des Solidarités- Centre- Val de Loire Directrice régionale DREETS ROLSHAUSEN Nadia Responsable du pôle travail ROUSSELLE Sabrina Adjointe de la responsable du pôle travail, responsable du service Santé sécurité, référente pour le Plan Santé au Tra- vail PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 80/203 Nom Prénom Organisme Fonction DEVIN Elodie Ingénieur prévention sur le champ santé sécurité du pôle travail Annexe 2.5. Collectivités territoriales Nom Prénom Organisme Fonction MEILHAC Emeline Conseil Régional d?Occitanie Directrice de projets Santé CROCHET Clémence Inspectrice générale des services BRIDET Jean-François Conseil Régional Centre Val de Loire 8ème Vice-Président délégué à la biodiversité, aux PNR, à la Loire et aux rivières, à l?eau, à l?air et à la condition animale GONZALEZ César Directeur mission santé-handicap MARC Julie Chargée de mission éducation à l?environnement BENOIT-MARQUIE François Chargé de mission transitions écologique et énergétique AUBANEL Isabelle Conseil départemental des Alpes-Maritimes Directeur de la santé, DGA DSH BOUDON Emilie Protection Maternelle et Infantile PIERENS Carine Chef de projet « Plan santé » ARTUSI-BOUTRAUD Isabelle Adjointe chef de service Energies et Fluides NEYEN Joël Conseil départemental du Tarn Directeur général des services MAGNANON Hélène Chef du Service Randonnées et Transition écologique RUBIROLA Michèle Ville de Marseille Première adjointe PEROLE Gilles Ville de Mouans Sartoux Adjoint enfance, éducation, alimentation STURTON Léa Directrice de l?alimentation CHABERT Magali Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 81/203 Nom Prénom Organisme Fonction GILL Nathan Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux THOMAS Jean Paul Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux JAPART Cécilia Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux LAVENANT Gwendoline Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux CHEMLA Richard Ville de Nice Adjoint au Maire GRIMALDI Martine Chargée de mission santé environnement LANTERI Fabien Directeur de la santé FLEZ Alexandre Ville de Strasbourg Adjoint au maire chargé de la santé ROUILLARD-NEAU Pascale Chef de service Santé environnement THIL Elisa Chargée de mission Santé environnement LANGLOIS Laetitia Chargée de mission Santé autonomie Annexe 2.6. Sociétés savantes & personnalités qualifiées Nom Prénom Organisme Fonction BEAU Isabelle Société Française d?Endocrinologie (SFE) Directrice de Recherche Inserm FINI Jean-Baptiste Muséum national d?Histoire naturelle DESAILLOUD Rachel CHU Amiens STORME Laurent Société Française de Néonatalogie (SFN) Université de Lille- CHU de Lille FISCHER-FUMEAUX Céline-Julie Centre Hospitalier Universitaire Vaudois, Lausanne KALFA Nicolas Université de Montpellier- CHU de Montpellier DEIVA Kumaran Société Française de Neuropédiatrie (SFNP) Président PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 82/203 Nom Prénom Organisme Fonction RANNAUD-BARTAIRE Patricia Personnalités scientifiques Université Catholique de Lille BAROUKI Robert PU-PH, Université Paris Cité, APHP Baptiste Jean Museum national d?Histoire naturelle HAMAMAH Samir Université de Montpellier, CHU de Montpellier LEVI Yves Université Paris Saclay, APHM MARANO Francine Présidente, Commission spécialisée Risques liés à l?envi- ronnement, HCSP MIRAKIAN Pascale Centre PMA hôpital privé Natecia, Lyon SANDERS Pascal Coordinateur PARC RAT Patrice Responsable, Pôle Toxicologie cellulaire et Sécurité sani- taire, Université Paris Cité HOREL Stéphane Le Monde Journaliste FOUCART Stéphane Journaliste Annexe 2.7. Structures professionnelles Nom Prénom Organisme Fonction BERENGUEL Martine Confédération nationale artisanale des instituts de beauté (CNAIB) Présidente CNAIB Spa GOURDIEN Nadège Secrétaire générale CNAIB Spa RODDE Florence Juriste Droit de la Santé Affaires Réglementaires CNAIB Spa BEZES Christine Crèches Directrice de la crèche les P?tits Lis?loups (81) SAUVAN Nancy Fédération des Industries, des Peintures, encres, Couleurs, Colles et adhésifs (FIPEC) Responsable Santé et Sécurité des Produits RICHARD Gilles Délégué général PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 83/203 Nom Prénom Organisme Fonction ALEX Philippe Président Commission Biocides DOUMERC Martial Fédération française des industries du jouet Puériculture (FJP) Ingénieur qualité et affaires réglementaires-produits non ali- mentaires COLIN Valérie Fédération des entreprises de la Beauté (FEBEA) Directrice des affaires scientifiques et réglementaires GUEANT Xavier Directeur des affaires juridiques LEVY Patrick France Chimie Médecin conseil France Chimie LEOPOLD Thomas Toxicologue France Chimie MARTEL Florian FREDON Occitanie Chargé de mission environnement GIROUX Jean-Marie Industrie cosmétique entreprise cosmétique (COSMED) Président BASSONI Caroline Directrice des affaires réglementaires De COURCY Nathalie Directrice des affaires publiques DORE Christophe Union Nationale des Entreprises de Coiffure (UNEC) Président PELKA Christelle Directrice de cabinet Annexe 2.8. Associations & réseaux Nom Prénom Organisme Fonction JACQUET Virginie Association Label vie Responsable Développement BROUSMICHE Delphine Association pour la Prévention de la Pollution Atmosphérique (APPA) Directrice SOUVET Pierre Association Santé Environnement France (ASEF) Président et fondateur PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 84/203 Nom Prénom Organisme Fonction TILAK Dominique ATMO Occitanie Directrice ROBIC Pierre-Yves Directeur adjoint PACHEFF Tania Cantines sans plastiques ex-Présidente DUFOUR Alphée Comité départemental de la protection de la Nature et de l?environnement (CDPNE) Chargée de mission en éducation à l?environnement MOLIERES Véronique Comité pour le développement durable en santé (C2DS) Directrice GARNIER Véronique Élus santé publique et territoires Vice-Présidente de l?association Elus, santé publique et ter- ritoire, co-Présidente du Comité d?animation des territoires du PNSE 4 CHABROLLE Alain France Nature Environnement (FNE) Vice-président VEILLERETTE François Générations futures (et PAN-Europe) Porte-parole CINGOTTI Natacha Health & Environment Alliance (HEAL) Cheffe du programme Health and Chemicals PAPEGAY Nicolas Mutualité Française Coordinateur régional prévention, Hauts de France ROUSSEAU Mélie Coordinatrice FEES, Pays de la Loire PERRAULT Hélène Chargée de prévention, Hauts de France RETAUX Marion Responsable prévention et promotion de la santé, Occitanie WEISSMANN Ragnar Objectif Santé Environnement (O.S.E.) Directeur scientifique CHEVALLIER Laurent CHRU de Montpellier PALAMA Carynn Experte en transformation CICOLLELA André Réseau environnement santé (RES) Président du RES LEMAIRE Nina Réseau français des villes de l?OMS (RfVS) Coordinatrice FELTZ Alexandre Adjoint à la santé de la ville de Strasbourg ROUILLARD-NEAU Pascale Cheffe de service hygiène et santé-environnementale de la ville de Strasbourg PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 85/203 Nom Prénom Organisme Fonction THIL Elisa Chargée de mission santé-environnement à la ville de Strasbourg LANGLOIS Laetitia Chargée de projet santé à la ville de Strasbourg ZAVALLONE Romain Conseiller santé-environnement à la ville de Paris LARBRE Juliette Chef du Laboratoire d?Analyse de la ville de Paris RIVET Nadine Adjointe au Maire de Limoges chargée de la Petite En- fance, des Accueils de Loisirs et de la Ville nourricière PIQUET Julia Apprentie chargée de mission santé environnement RfVS VUILLAUME Xavier Directeur de la santé publique, Aubervilliers PLATEL Sylvie Woman Engage for a Common Future (WECF) Responsable plaidoyer santé environnement PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 86/203 Annexe 3. La réglementation des perturbateurs endocriniens au niveau européen et national Annexe 3.1. En dépit de progrès, la règlementation européenne demeure insuffisante Annexe 3.1.1 Une réglementation complexe qui a connu des avancées récentes La régulation des perturbateurs endocriniens se joue essentiellement à l?échelon européen Un cadre mondial généraliste Un cadre mondial sur la gestion des produits chimiques a été élaboré par les Nations-Unies, et a fait l?objet d?une révision récente en 2023 lors de l?accord de Bonn97. Cet accord s?ajoute à ceux pris sur le climat et la biodiversité afin d?apporter une réponse globale aux crises planétaires mul- tiples : le dérèglement climatique, la perte de biodiversité et les pollutions. Le cadre mondial sur les produits chimiques constitue une feuille de route pour les gouvernements et entreprises, qui promeut des grands principes tels que l?arrêt des pesticides hautement dange- reux, la transparence de l?industrie, la sécurité au travail ou la chimie durable. Il invite les parties prenantes à mettre en place des législations adéquates d?ici à 2030 ou 2035 en fonction des cibles, mais n?est pas juridiquement contraignant en tant que tel. Ce cadre mondial, assorti de 12 résolutions, se concentre sur les grands principes et ne mentionne pas directement la question des perturbateurs endocriniens. Il existe également un système général harmonisé de classification des produits chimiques (SGH), utilisé depuis les années 2000, basée sur une nomenclature associée à des numéros, des picto- grammes et des mentions de danger. Les produits y sont répartis en différentes classes de danger (danger physique, danger pour la santé et danger pour l?environnement) et classés par famille. Cependant, les perturbateurs endocriniens ne figurent pas à ce stade en tant que tels parmi les 28 classes de danger répertoriées. Un corpus réglementaire étoffé au niveau européen La compétence de l?Union européenne en matière de régulation des produits chimiques La régulation des produits chimiques au niveau de l?Union européenne est la plus avancée au monde. Le choix de l?Union européenne comme espace de compétence s?explique par plusieurs raisons. En premier lieu, la normalisation des produits chimiques est une des conditions de fonc- tionnement du marché intérieur, afin d?éviter des barrières à l?entrée déguisées, mais également pour ne pas tolérer une forme de dumping en matière sanitaire qui serait destiné à favoriser l?in- dustrie. En second lieu, la coopération entre Etats membres permet des économies d?échelle en faisant en sorte que les agences nationales compétentes se partagent le travail d?évaluation des nouvelles substances, avec un gain de temps et de moyens. En troisième lieu enfin, cette régula- tion concourt à une réduction de l?exposition humaine et de la pollution environnementale, objectif 97 Cinquième conférence internationale sur la gestion des produits de chimiques de Bonn, septembre 2023, qui a conduit à l?adoption d?un « Cadre mondial relatif aux produits chimiques pour une planète sans produits chimiques ni déchets nocifs » PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 87/203 qui est devenu une préoccupation de plus en plus importante parmi les Etats membres et leurs citoyens. La régulation des produits chimiques repose aujourd?hui sur une multitude de règlements et direc- tives : deux grands textes transversaux (REACH sur l?enregistrement, l?évaluation et l?autorisation des substances, et CLP sur la classification, l?étiquetage et l?emballage) ; des textes sectoriels (produits biocides, produits phytopharmaceutiques, protection et restauration des masses d?eau, eau potable, jouets, cosmétiques, médicaments, dispositifs médicaux, sécurité alimentaire et contenants alimentaires, exposition des travailleurs) ; des textes interdisant spécifiquement certaines substances pour des usages spécifiques (bisphénol A, phtalates, PFAS). Le cadre général du programme d?action pour l?environnement La politique de santé et de l?environnement de l?Union européenne est définie par des documents pluriannuels qui sont les programmes d?action pour l?environnement (PAE), adoptés par le Parle- ment et le Conseil. Le 8ème PAE98 couvre la période de 2023 à 2030 et oriente l?élaboration de la politique environnementale de l?Union européenne. Il vise à « accélérer la transition écologique vers une économie circulaire, neutre sur le plan climatique, durable, non toxique, efficace dans l?utilisation des ressources, fondée sur les énergies renouvelables, résiliente et compétitive, d?une manière juste, équitable et inclusive, et à protéger, restaurer et améliorer l?état de l?environnement, y compris en arrêtant et inversant la perte de biodiversité. Il soutient et renforce une approche intégrée des politiques et de la mise en oeuvre, en s?appuyant sur le pacte vert pour l?Europe. » (article 1, alinéa 2). Il est également posé que « Le 8ème PAE est fondé sur le principe de précaution, sur les principes d?action préventive et de correction de la pollution à la source et sur le principe du pollueur-payeur. » (article 1.5). Le 8ème PAE comprend six objectifs thématiques prioritaires, dont le quatrième est énoncé ainsi : « la recherche d?une pollution zéro, y compris par rapport aux produits chimiques dangereux, afin de parvenir à un environnement exempt de substances toxiques, notamment en ce qui concerne l?air, l?eau et les sols, et par rapport à la pollution lumineuse et sonore, ainsi que la protection de la santé et du bien-être des personnes, des animaux et des écosystèmes face aux risques et aux incidences négatives liés à l?environnement » (article 2.2 alinéa d). La 8ème PAE indique que, pour atteindre ces objectifs prioritaires, « la Commission, les États membres, les autorités régionales et locales ainsi que les parties prenantes, selon le cas, doivent (...) remplacer rapidement les substances préoccupantes, y compris les substances extrêmement préoccupantes, les perturbateurs endocriniens, les produits chimiques très persistants, ainsi que les substances neurotoxiques et immunotoxiques, et lutter contre les effets combinés des produits chimiques, des formes nanométriques des substances et de l?exposition aux produits chimiques dangereux contenus dans les produits, évaluer leurs incidences sur la santé et l?environnement, y compris le climat, et sur la biodiversité, tout en encourageant les produits chimiques et matériaux sûrs et durables dès la conception et en intensifiant et coordonnant les efforts déployés en vue de favoriser l?élaboration et la validation de méthodes de substitution à l?expérimentation animale. » (article 3, alinéa l). 98 Décision (UE) 2022/591 du Parlement européen et du Conseil du 6 avril 2022 relative à un programme d?action général de l?Union pour l?environnement à l?horizon 2030 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 88/203 La stratégie de la Commission relative aux perturbateurs endocriniens Une première stratégie communautaire avait été adoptée par la Commission dès 199999 pour dé- finir le problème de la perturbation endocrinienne, et mettre en évidence l?action politique appro- priée, en recommandant d?appliquer le principe de précaution. Une stratégie plus récente a été publiée par la Commission dans une communication du 7 no- vembre 2018 intitulée « Vers un cadre complet de l?Union européenne en matière de perturbateurs endocriniens ». Cette stratégie fait le bilan de la politique actuelle de l?Union européenne, en ma- tière de surveillance, de recherche et de réglementation. La Commission y reconnaît que, si « des progrès significatifs ont été accomplis (...) les préoccu- pations restent vives ». Elle recommande que l?approche stratégique de l?UE se fonde sur l?appli- cation du principe de précaution, pour « réduire le plus possible l?exposition globale des personnes et de l?environnement », « accélérer le développement d?une base de recherche approfondie » et « promouvoir un dialogue actif » entre parties prenantes. La Commission relève que les mesures législatives régissant les produits chimiques ont été mises au point à des moments différents, donnant parfois lieu à des approches diverses, soulevant des questions de cohérence. Elle souligne deux problématiques : l?absence d?une approche « horizontale » pour l?identification des perturbateurs endocriniens entre les différentes législations : ce que la commission propose de résoudre une adoptant une approche cohérente dans toute la législation, sur la base de la définition de l?OMS ; l?existence d?approches réglementaires différentes des perturbateurs endocriniens selon les textes législatifs (certains textes retenant une interdiction de principe tandis que d?autres privilégient le cas par cas, avec un risque que certaines approches ne soient pas appropriées) : difficulté à laquelle la Commission ne propose de solution immédiate, estimant qu?elle doit être examinée de manière plus approfondie. La Commission annonce en tout cas plusieurs mesures : le lancement d?un bilan de qualité global de la réglementation relative aux perturbateurs endocriniens ; le soutien à la recherche ; l?organi- sation d?un forum annuel sur les perturbateurs endocriniens ; le soutien à l?intégration des pertur- bateurs endocriniens dans le système international de classification des produits chimiques ; et le lancement d?un guichet web unique consacré aux perturbateurs endocriniens. Par une résolution du 15 avril 2019, le Parlement européen a réagi de façon critique à cette com- munication100. Le Parlement y note que la révision de la stratégie communautaire de 1999 a tardé, et que de ce fait, certains Etats membres, dont la France, la Suède, le Danemark ou la Belgique, ont pris une série de mesures au niveau national. Le Parlement considère que la communication de la commission de 2018 ne présente pas de plan d?action concret pour réduire au maximum l?exposition, ni de calendrier dédié. Le Parlement regrette que des dispositions spécifiques aux perturbateurs endocriniens fassent défaut dans des textes clefs (cosmétiques, jouets, matériaux de contact alimentaire) et s?inquiète que le bilan qualité ne soit commandé que pour retarder des mesures concrètes. Le Parlement demande à la Commission de prendre rapidement les mesures pour réduire au maxi- mum l?exposition globale, et notamment, d?ici à 2020, de mettre en place une définition transver- sale des perturbateurs endocriniens, accompagnée de documents d?orientation « dignes de ce 99 Communication 99/0706 de la Commission : Stratégie communautaire concernant les perturbateurs endocriniens 100 La résolution a été voté à une large majorité de 447 voix sur 502. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 89/203 nom », et de formuler des propositions pour insérer des dispositions spécifiques relatives aux per- turbateurs endocriniens dans les règlement relatifs aux cosmétiques, à la sécurité des jouets et aux matériaux de contact alimentaire. La stratégie de la Commission pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques Dans le cadre de l?ambition « zéro pollution » de l?UE du pacte vert pour l?Europe, la Commission européenne a adopté une stratégie pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques le 14 octobre 2020. La Commission y admet que si « certains textes législatifs permettent de recon- naître les perturbateurs endocriniens, le système réglementaire de l?UE est globalement fragmenté et limité, et il est nécessaire de le consolider et de le simplifier pour que les perturbateurs endocri- niens puissent être repérés en temps utile de manière à limiter le plus possible l?exposition des êtres humains et de l?environnement». En conséquence, la Commission annonce différentes orientations intéressant les perturbateurs endocriniens, parmi lesquelles : établir un système juridiquement contraignant d?identification des dangers liés aux perturbateurs endocriniens, en s?appuyant sur les critères déjà définis pour les pesticides et les biocides, et l?appliquer dans l?ensemble de la législation ; veiller à ce que les perturbateurs endocriniens soient interdits dans les produits de consommation dès qu?ils sont reconnus comme tels, leur utilisation n?étant autorisée que s?il est démontré qu?elle est essentielle pour la société ; renforcer la protection des travailleurs en faisant des perturbateurs endocriniens une catégorie de substances extrêmement préoccupantes dans le cadre du règlement REACH ; examiner les informations requises dans l?ensemble de la législation et les renforcer pour permettre aux autorités de reconnaître les perturbateurs endocriniens ; ajouter de nouvelles catégories de substances dans le règlement CLP ; accélérer la mise au point de méthodes permettant d?obtenir des informations sur les perturbateurs endocriniens grâce au criblage des substances et aux essais ; étudier la meilleure façon de mettre en place dans REACH un ou plusieurs facteurs d?évaluation des mélanges dans l?évaluation de la sécurité des substances ; coordonner les évaluations entre textes législatifs, en vue d?une approche « une substance, une évaluation » ; renforcer les procédures d?autorisation et de restriction de REACH. Une appréhension inégale dans les règlements transversaux REACH et CLP Le règlement REACH, texte fondateur, est peu adapté pour limiter les perturbateurs endocriniens, et nécessite une refonte REACH fonctionne sur le principe « Pas de données, pas de marché » Le règlement (UE) n°1907/2006 du 18 décembre 2006 (dit REACH) concerne l?enregistrement, l?évaluation et l?autorisation des substances chimiques ainsi que les restrictions applicables à ces substances. Ce texte vise à mieux protéger la santé humaine et l'environnement, assurer la libre circulation des substances dans le marché intérieur tout en préservant la compétitivité de l'industrie chimique. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 90/203 Ce règlement qui se distingue par sa technicité remplace une quarantaine d?anciens règlements et directives, et a fait l?objet de plus de quatre-vingts modifications réglementaires depuis son entrée en vigueur en 2007. REACH porte sur la fabrication, la mise sur le marché et l?utilisation : des « substances » (naturelles ou fabriquées), comme un solvant ou un métal ; des « mélanges » (deux substances ou plus), comme un alliage ou un produit de nettoyage ; des « articles » (objets dont la forme est plus déterminante que la composition chimique), comme un ustensile de cuisine ; toutefois, REACH ne concerne pas les produits phytosanitaires, les produits biocides, les médicaments ou les cosmétiques, qui font l?objet de règlements distincts. Le règlement repose sur le principe « pas de données, pas de marché » en faisant peser la charge de la preuve sur les entreprises (productrices, importatrices) tenues de déposer un dossier d?enre- gistrement pour chaque substance auprès de l?agence européenne des produits chimiques (ECHA). Celle-ci propose ensuite les mesures appropriées de gestion des risques à la Commission, telle que la restriction voire l?interdiction de l?usage d?une substance. Dans la première phase (enregistrement), les entreprises fabriquant ou important dans l?Union eu- ropéenne une substance pour une quantité supérieure à 1 tonne par an déposent un dossier d?en- registrement auprès de l?ECHA détaillant les propriétés de la substance, les risques éventuels pour la santé et l?environnement, et les mesures de gestion appropriées de ces risques. Plus la subs- tance est utilisée, plus le nombre de données à fournir est important. Dans le deuxième phase (évaluation), l?ECHA contrôle la complétude du dossier de la substance en question mais ne vérifie pas si les informations fournies sont appropriées sur le fond. Le contrôle de conformité relève de l?ECHA et des Etats membres, qui peuvent contrôler tout dossier d?enre- gistrement (l?objectif est fixé à 20% des dossiers) et doivent apprécier si les informations sont con- formes aux obligations légales. L?ECHA et les Etats membres élaborent un plan d?action communautaire (CoRAP101), mis à jour annuellement au gré des nouvelles préoccupations, qui répertorie les substances préoccupantes devant être soumises à évaluation sur une période de trois ans. Les critères de sélection pour l?inclusion sur cette liste s?appuient à la fois sur les quantités et les degrés d?exposition. Ces éva- luations sont réparties entre les agences compétentes des Etats membres. Dans la troisième phase (autorisation et restriction), les substances peuvent être soumises à diffé- rentes mesures de gestion des risques, à savoir l?autorisation ou la restriction selon leur dangero- sité. En premier lieu, les substances concernées par la procédure d?autorisation (listées dans l?années XIV de REACH) sont les substances les plus préoccupantes (SVHC)102 à savoir : les substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) ; les substances persistantes, bioaccumulables et toxiques (PBT) ; les substances très persistantes et très bioaccumulables (vPvB) ; les substances suscitant un niveau de préoccupation équivalent telles que les perturbateurs endocriniens ou les sensibilisants respiratoires. 101 CoRAP : plan d?action communautaire (Community Rolling Action Plan) 102 SVHC : substance extrêmement préoccupante (substance of very high concern) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 91/203 L?inscription sur la liste d?autorisation se fait en 2 étapes. Dans la première étape, les substances sont identifiées sur la base de propositions effectuées par les Etats membres ou l?ECHA. Après consultation publique, elles sont inscrites dans la « liste des substances candidates », dite « liste candidate » à la procédure d?autorisation. A la date de finalisation du rapport (mai 2024), cette liste candidate contenait 259 entrées, correspond chacune à une substance, ou parfois à une famille de substances. Au total, la liste candidate répertorie 486 substances différentes. Cette liste fait l?objet d?une actualisation deux fois par an. Dans la seconde étape, en partant de la liste candidate, l?ECHA recommande une liste de subs- tances à inscrire en priorité à l?annexe XIV, la décision revenant à la Commission européenne et aux Etats membres. Une fois inscrite à l?annexe XIV, une substance ne pourra plus, après des dates fixées, être utilisée, importée ou fabriquée, sans autorisation de la Commission. L?autorisation d?utilisation de la substance ne sera accordée que dans 2 cas : si les risques associés à l?utilisation sont valablement maîtrisés (ce qui est impossible pour les substances PBT ou vPvB) ; si les avantages socio-économiques de l?utilisation de la substance l?emportent et qu?il n?y a pas de substance ou de technologie de substitution dans l?immédiat. En mai 2024, l?annexe XIV comptait 59 entrées, une entrée pouvant réunir plusieurs substances. L?objectif est que ces substances soient progressivement remplacées par d?autres substances ou technologies moins dangereuses lorsque des solutions de remplacement appropriées économi- quement et techniquement viables existent. En second lieu, les substances concernées par la procédure de restriction (listées dans l?années XVII de REACH) sont les substances pour lesquelles un Etat membre ou la Commission estiment que la mise sur le marché entraînerait un risque inacceptable pour la santé humaine ou l?environ- nement. L?inscription se fait à l?issue d?une consultation publique, sur décision des Etats membres et de la commission. La restriction pourra concerner les conditions de fabrication, la limitation de mise sur le marché ou d?utilisation (par exemple : interdiction d?utiliser des phtalates à une concen- tration supérieure à 0,1% dans les jouets et articles de puériculture). En mai 2024, l?annexe XVII comptait 73 entrées, une entrée pouvant réunir plusieurs substances. Au-delà des substances et mélanges, des règles spéciales s?appliquent aux « articles », tels que des articles simples (composés d?une seule pièce, comme une chaise) ou complexes (véhicules, cartes électroniques, ...). Les producteurs ou importateurs d?articles sont tenus de notifier à l?ECHA la présence de substances classées SVHC, dès lors que la concentration de la substance dépasse 0,1% et que la substance est présente dans des quantités dont le volume dépasse une tonne par an. Par ailleurs, les fournisseurs des articles contenant une SVHC sont tenus de fournir au consom- mateur, à sa demande, des informations pour permettre l?utilisation de l?article en toute sécurité. La mise en oeuvre de ce « droit de savoir » a été facilitée par le développement de l?application Scan4Chem développée au niveau européen, et qui sera également utilisée en France pour l?ap- plication de la loi AGEC (cf.infra). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 92/203 Le nombre de substances concernées par des mesures de gestion de risque en raison de leur effet de perturbateur endocrinien est limité Un certain nombre de substances sont classées parmi les différentes annexes de REACH au titre de leur effet de perturbateur endocrinien. Il convient de préciser que l?appartenance à la première liste (liste candidate des substances hau- tement préoccupantes dites SVHC) n?emporte pas en tant que telle une véritable restriction sur le marché, les obligations liées à ce statut étant essentiellement des obligations d?information aux clients et à l?ECHA. Toutefois, l?inscription sur cette liste laisse présager, à terme, une inscription sur la liste autorisation ou restriction, ce qui incite les industries ayant recours à ces substances en amont à préparer leur substitution. A l?inverse, la présence sur la liste autorisation (annexe XIV) ou restriction (annexe XVII) signifie bien que les substances en question sont limitées dans leur usage et leur utilisation. Pour chaque substance, la base de données de l?ECHA indique le motif d?inclusion dans la liste, qui peut être la perturbation endocrinienne. Parmi les 486 substances listées, on en dénombre 118 faisant état d?un motif de perturbation endocrinienne103. Sur ces 118 substances, 104 appartiennent à 8 familles de substances, tandis que 14 sont des substances uniques. Au total on dénombre 22 substances uniques ou familles de substances classées dans la liste candidate au motif d?une propriété de perturbation endocrinienne, ce qu?illustre le tableau suivant. Tableau 1 : Substances classées dans la liste candidate à la procédure d?autorisation, dites SVHC, au motif de leurs propriétés de perturbation endocrinienne Nom des substances et familles de substances Nombre de substances Année d'inclusion dans la liste Motif d'inclusion des propriétés PE Isobutyl 4-hydroxybenzoate 1 2023 Santé humaine 4,4'-sulphonyldiphenol 1 2023 Santé humaine Environnement (±)-1,7,7-trimethyl-3-[(4- methylphenyl)methylene]bicyclo[2.2.1]heptan-2- one covering any of the individual isomers and/or combinations thereof (4-MBC) 7 2022 Santé humaine Phenol, alkylation products (mainly in para position) with C12-rich branched alkyl chains from oligomerisation, covering any individual isomers and/ or combinations thereof (PDDP) 6 2021 Santé humaine Environnement 4,4'-(1-methylpropylidene)bisphenol 1 2021 Santé humaine Environnement Butyl 4-hydroxybenzoate 1 2020 Santé humaine Tris(4-nonylphenyl, branched and linear) phosphite (TNPP) with ? 0.1% w/w of 4- nonylphenol, branched and linear (4-NP) 5 2019 Environnement 4-tert-butylphenol 1 2019 Environnement 1,7,7-trimethyl-3- (phenylmethylene)bicyclo[2.2.1]heptan-2-one 1 2019 Environnement 103 C?est sur la base de cette liste que l?Anses a établi la liste des substances concernées par l?obligation d?information de la loi AGEC relative à la présence de perturbateurs endocriniens dans les produits, cf infra PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 93/203 Dicyclohexyl phthalate 1 2018 Santé humaine Reaction products of 1,3,4-thiadiazolidine-2,5- dithione, formaldehyde and 4-heptylphenol, branched and linear (RP-HP) 2 2018 Environnement p-(1,1-dimethylpropyl)phenol 1 2017 Environnement 4-heptylphenol, branched and linear 25 2017 Environnement 4,4'-isopropylidenediphenol 1 2017 Santé humaine Environnement 4-Nonylphenol, branched and linear, ethoxylated 41 2013 Environnement 4-Nonylphenol, branched and linear 13 2012 Environnement 4-(1,1,3,3-tetramethylbutyl)phenol, ethoxylated 5 2012 Environnement 4-(1,1,3,3-tetramethylbutyl)phenol 1 2011 Environnement Diisobutyl phthalate 1 2010 Santé humaine Dibutyl phthalate (DBP) 1 2008 Santé humaine Environnement Bis (2-ethylhexyl)phthalate (DEHP) 1 2008 Santé humaine Environnement Benzyl butyl phthalate (BBP) 1 2008 Santé humaine TOTAL (familles ou substances uniques) 22 TOTAL (nombre de substances) 118 Site de l?ECHA, retraitement IGAS-IGEDD En ce qui concerne les substances ayant fait l?objet d?une mesure d?autorisation ou de restriction, leur nombre est bien plus limité, puisqu?une substance peut rester sur la liste SVHC de nombreuses années avant de basculer sur l?annexe XIV ou XVII. Ainsi, on ne compte qu?un faible nombre de substances (8 au total) ayant fait l?objet d?une mesure d?autorisation ou de restriction au sens de REACH, au titre de leur effet perturbateur endocrinien. Ce modeste résultat renvoie aux limites du règlement REACH, détaillées ci-dessous. Tableau 2 : Substances faisant l?objet d?une mesure de limitation au sens de REACH au titre de leur effet perturbateur endocrinien Liste autorisation (annexe XIV) Liste restriction (annexe XVII) NPE (4-Nonylphenol) 4-(1,1,3,3-tetramethylbutyl)phenol éthoxylé Bisphénol A / BPA (4,4'-isopropylidenediphenol : concentration maximale de 0,02% dans les papiers thermiques) DEHP (Bis(2-ethylhexyl) phthalate) ; BBP (Benzyl butyl phthalate) ; DBP (dibutyl phtalate) et DIBP (dissobutyl phtalate) (concentration maximale de 0,1% en poids de plastique dans les jouets et articles de puériculture) NPE (concentration maximale de 0,01% du poids des articles textiles) Site de l?ECHA, retraitement IGAS-IGEDD PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 94/203 De fait, REACH est confronté à des limites structurelles et doit faire l?objet d?une refonte attendue de longue date Bien que le règlement REACH représente en soi une avancée majeure, qui a transformé la com- mercialisation des produits chimiques et inspiré des systèmes similaires, notamment en Asie, le système actuel montre ses limites et souffre d?une obsolescence qui lui a valu moult critiques. Dans un rapport d?évaluation de REACH publié en 2018, la Commission104 appelait à traiter de toute urgence un certain nombre de questions : la non-conformité des dossiers d?enregistrement105 ; la simplification de la procédure d?autorisation ; l?équité des règles du jeu par rapport aux entreprises de pays tiers grâce à des restrictions et à des mesures d?application efficaces ; la clarification de l?interface entre le règlement REACH et le reste de la législation de l?Union européenne, notamment en matière de santé et de sécurité au travail (SST) et de déchets. La lenteur du processus d?évaluation est au coeur des critiques portant sur l?efficacité de REACH. Une analyse de l?European Environmental Bureau (EEB) en 2022106 comparait le temps pris par l?industrie pour enregistrer une substance et la mettre sur le marché (moins d?un mois), avec le temps pour classer une substance sur liste « autorisation » ou « restriction », à partir de sa mise sur le marché (près de 20 ans). Cette lenteur s?explique notamment par le fait que les évaluations s?effectuent substance par subs- tance, et non pas par famille de substances, ce qui a pour effet d?emboliser les agences nationales en charge de l?évaluation. Une fois l?évaluation réalisée, le manque de moyens humains de l?ECHA et de la Commission contribue également à ralentir la prise de décision finale. Un avis de 2020 du Conseil environnemental, économique et social107 relevait d?autres faiblesses, comme la difficile mise en oeuvre à l?échelle européenne (disparités dans l?intensité des contrôles selon les pays et faibles moyens de coordination de l?ECHA), et une information difficilement lisible pour les professionnels dans les fiches de données de sécurité, ainsi que pour les consommateurs au titre du « droit de savoir » pour les articles contenant des SVHC. Le règlement REACH est par ailleurs mal calibré pour prendre en compte des propriétés de per- turbation endocrinienne, puisqu?il ne comporte pas de définition précise des perturbateurs endocri- niens. De plus, le règlement ne distingue pas les perturbateurs endocriniens avérés des présumés ou suspectés, ce qui exige une preuve maximale (seuls des perturbateurs endocriniens avérés pourront être reconnus) et rend difficile l?application du principe de précaution. Au reste, les tests requis pour l?évaluation sont incomplets et ne recouvrent pas toutes les voies de perturbation endocrinienne en l?état des connaissances scientifiques actuelles, comme le dé- taille l?analyse faite en 2019 par les professeurs Barbara Demeneix et Remy Slama dans un rapport adressé au Parlement européen108. 104 Rapport général de la Commission sur le fonctionnement général du règlement REACH (dans le cadre d?un programme d?évaluation REFIT), publié le 5 mars 2018 105 Cette faible qualité de l?enregistrement avait été illustrée par une large étude de l?équivalent allemand de l?Anses réalisée en 2018 qui avait relevé que seuls un tiers des dossiers étaient conformes ; 106 Rapport « The need for speed », European Environmental Bureau : l?analyse de 1109 substances régulées dans REACH conduit à trouver un temps médian de 19 ans et 3 mois entre la mise sur le marché et une inclusion à l?annexe XIV ou XVII 107 Avis du CESE « REACH et la maîtrise du risque chimique : un bilan positif, un outil à améliorer », Catherine Tissot-Colle, Janvier 2020 108 « Endocrine disruptors : from scientific evidence to human health protection », B. Demeneix & R. Slama, mai 2019, étude réalisée sur demande du Parlement européen PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 95/203 A ceci s?ajoute plusieurs dérogations qui diminuent encore l?efficacité du règlement : pour les substances à faible tonnage (moins de 10 tonnes annuelles sur le marché), il n?y a pas de données de toxicité chronique demandées ; les tests d?évaluation ne prennent pas en compte les « mélanges » de substances, et passent donc à côté des « effets cocktails » les polymères sont exemptés d?enregistrement sous REACH, ce qui a pour effet d?exonérer une majorité des PFAS d?un enregistrement109. Ces difficultés de fonctionnement général de REACH et de prise en compte la perturbation endo- crinienne appellent une refonte de la législation. Le règlement CLP vient d?être réformé pour introduire une classification des perturbateurs endocriniens Le règlement (UE) n° 1272/2008 du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l?étiquetage et à l?emballage (dit règlement CLP) vise à assurer la protection des travailleurs, des consommateurs et de l?environnement en définissant les règles européennes de classification, d?étiquetage et d?em- ballage des produits chimiques. Le règlement CLP aligne l?ancienne législation européenne en la matière sur le SGH international. Les dangers présentés par les substances chimiques sont communiqués au moyen de mentions d?avertissement et de pictogrammes figurant sur les étiquettes et les fiches de données de sécurité. Comme REACH, le CLP ne s?applique pas aux produits concernés par des règlements sectoriels (cosmétiques, denrées alimentaires, médicaments ...). Réformé par le règlement délégué (UE) 2023/707 du 19 décembre 2022110, le CLP prévoit désor- mais une classification et un étiquetage spécifique pour les perturbateurs endocriniens, qui devra s?appliquer au plus tard le 1er mai 2025 en ce qui concerne les substances ; et au plus tard le 1er mai 2026 concernant les mélanges. Deux classes de danger apparaissent, chacune divisée en 2 catégories : Perturbateurs endocriniens pour la santé humaine : ? catégorie 1 : perturbateurs endocriniens avérés ou présumés pour la santé humaine ? catégorie 2 : perturbateurs endocriniens suspectés pour la santé humaine Perturbateurs endocriniens pour l?environnement : ? catégorie 1 : perturbateurs endocriniens avérés ou présumés pour l?environnement ? catégorie 2 : perturbateurs endocriniens suspectés pour l?environnement Le règlement précise la définition des perturbateurs endocriniens avec 5 critères alternatifs : 1. ?perturbateur endocrinien? désigne une substance ou un mélange altérant une ou plusieurs fonctions du système endocrinien et induisant de ce fait des effets néfastes 109 Le sujet des PFAS commence cependant à faire l?objet d?attention croissante. En février 2023, une première restriction au sens de REACH a visé certains PFAS (Les acides perfluorocarboxyliques (PFCA) en C9-C14). Plus généralement une proposition de 5 pays européens (Danemark, Allemagne, Norvège, Pays-Bas, Suède) a été adressée à l?ECHA en avril 2023 pour demander une restriction générale de plus de 10.000 PFAS, qui devra donner lieu à un avis de l?ECHA en 2024 et une éventuelle restriction décidée par la Commission en 2025. 110 Règlement délégué (UE) 2023/707 du 19 décembre 2022 publié le 31 mars 2023 PUBLIÉ https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32023R0707&from=EN Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 96/203 sur la santé d?un organisme intact, de ses descendants ou au niveau des populations ou sous-populations ; 2. ?perturbation endocrinienne? désigne l?altération d?une ou plusieurs fonctions du sys- tème endocrinien causée par un perturbateur endocrinien ; 3. ?activité endocrinienne? désigne une interaction avec le système endocrinien sus- ceptible d?entraîner une réponse de ce système, d?organes cibles ou de tissus cibles, et qui confère à une substance ou un mélange le potentiel d?altérer une ou plusieurs fonctions du système endocrinien ; 4. ?effet néfaste? désigne un changement dans la morphologie, la physiologie, la crois- sance, le développement, la reproduction ou de la durée de vie d?un organisme, d?un système ou d?une population ou sous-population qui se traduit par l?altération d?une capacité fonctionnelle ou d?une capacité à compenser un stress supplémentaire ou par l?augmentation de la sensibilité à d?autres influences ; 5. ?lien biologiquement plausible? désigne la corrélation entre une activité endocri- nienne et un effet néfaste, basé sur des processus biologiques, lorsque la corrélation est cohérente avec les connaissances existantes. Le règlement pose également les limites de concentration génériques des composants d?un mé- lange qui déterminent la classification du mélange en tant que perturbateur endocrinien : Pour les perturbateurs endocriniens avérés ou présumés (catégorie 1, pour la santé humaine ou pour l?environnement) : concentration supérieure ou égale à 0,1%. Pour les perturbateurs endocriniens suspectés (catégorie 2, pour la santé humaine ou pour l?environnement) : concentration supérieure ou égale à 1%. L?introduction d?une sous-catégorisation entre « avéré ou présumé » et « suspecté » correspond à une position qui avait été réclamée de longue date par la France, afin de mieux s?aligner sur les particularités des perturbateurs endocriniens et les avancées scientifiques. Cette réforme va dans le sens des positions annoncées par la Commission dans sa communication de 2018, dans la mesure où elle est un préalable à une définition dite « transversale » ou « hori- zontale » des perturbateurs endocriniens dans la réglementation européenne. Ainsi les substances enregistrées dans REACH devront être mises à jour pour classer éventuellement leurs substances parmi les nouvelles classes de danger du CLP. De même, les réglementations sectorielles devront harmoniser leurs définitions de la perturbation endocrinienne pour s?aligner avec celle proposée par le règlement CLP. Une reconnaissance grandissante dans les réglementations sectorielles Distinction entre produits biocides et produits phytopharmaceutiques La réglementation européenne distingue entre, d?une part, les produits biocides, qui sont des substances destinées à détruire ou neutraliser des organismes nuisibles (désinfectants, protec- tion, lutte contre les nuisibles, etc. ), et d?autre part les produits phytopharmaceutiques, qui sont des substances actives destinées à protéger les végétaux, de plusieurs manières possibles (pro- tection contre les nuisibles, accélérer leur croissance, détruire les végétaux indésirables ...). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 97/203 Si la distinction n?est pas toujours aisée en pratique d?autant plus qu?un même produit peut être soit un produit biocide soit un produit phytopharmaceutique en fonction de son utilisation, le principe est que le traitement biocide s?effectue dans un but d?hygiène générale ou de santé publique, tandis que le traitement phytopharmaceutique recherche la protection des plantes ou végétaux. Les produits biocides et produits pharmaceutiques sont régulés au niveau européen, dans une perspective de protection de la santé humaine et de l?environnement, et d?amélioration du fonc- tionnement du marché intérieur. Ils font l?objet d?un double processus d?agrément : les subs- tances actives sont approuvées au niveau de l?Union européenne, et les produits sont ensuite autorisés sur le marché principalement au niveau des Etats membres. Le règlement sur les produits biocides n?a abouti qu?à un très faible nombre de restriction de substances en raison de leurs propriétés endocriniennes Le règlement (UE) n° 528/2012 du 22 mai 2012 concerne la mise sur le marché et l?utilisation des produits biocides, qui sont utilisés pour protéger l'homme, les animaux, les matériaux ou les articles contre les organismes nuisibles, tels que les animaux nuisibles et les bactéries, par l'action des substances actives contenues dans le produit biocide. Les produits biocides destinés à être mis sur le marché requièrent une autorisation une fois que les substances actives qui les composent ont été approuvées. Ce principe fait toutefois l?objet de plusieurs exceptions, à la fois pour les substances actives en cours de réexamen, ou pour des substances actives nouvelles qui peuvent bénéficier d?autorisations provisoires pour 3 ans. Le règlement interdit l?approbation des substances cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques, et des substances classées PBT111 ou VPVB.112 De même, l?approbation est interdite pour les subs- tances ayant des effets de perturbation endocrinienne néfastes pour l?homme, ou qui seraient re- connues comme perturbateurs endocriniens au sens du règlement REACH. Pour autant, le règlement aménage des dérogations, qui pourront être accordées : si le risque est négligeable ; si la substance active est indispensable pour prévenir ou combattre un risque grave, pour la santé humaine, animale ou environnementale ; si la non-approbation aurait des conséquences négatives disproportionnées pour la société par rapport aux risques que son utilisation représente pour la santé humaine, animale ou environnementale. Les évaluations des substances actives sont réalisées par un Etat membre choisi par le deman- deur, qui transmet ensuite ses conclusions à l?ECHA. Sur la base de ces conclusions, l?ECHA donne un avis relatif à l?approbation de la substance active, transmis à la Commission européenne, qui adopte un règlement d?exécution portant approbation de la substance active et en détaillant les conditions. Cette approbation doit être renouvelée sous 15 ans, sauf s?il est précisée une durée plus brève. Une fois la substance approuvée, une demande d?autorisation de mise sur le marché, valable pour 10 ans, doit être effectuée dans chaque Etat membre où la commercialisation est envisagée, et examinée par l?agence responsable, qui est l?Anses en France. Une procédure d?autorisation par 111 PBT : persistances, bioaccumulables et toxiques. 112 VPVB : très persistantes et bioaccumulables. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 98/203 reconnaissance mutuelle est également prévue lorsqu?une commercialisation dans plusieurs Etats membres est souhaitée, qui permet une coordination entre Etats membres concernés. Les Etats membres ont la possibilité de déroger à la reconnaissance mutuelle s?ils apportent la preuve que la substance en question a des effets nocifs sur l?environnement ou la santé. Il existe également une autorisation de marché directement auprès de la Commission européenne qui vaut pour tout le marché européen, mais qui est impossible si la substance a des propriétés toxiques pour la santé (ce qui comprend la perturbation endocrinienne). Les substances déjà présentes sur le marché avant l?entrée en vigueur de la réglementation européenne font l?objet d?un programme d?examen initié dans les années 2000 pour répartir les évaluations entre les Etats membres, qui aurait dû théoriquement s?achever en 2024, mais a connu un retard considérable faute de moyens humains dans les agences compétences des différents Etats membres. Bien que le règlement biocides date de 2012, la définition réglementaire des critères d?identification du caractère perturbateur endocrinien d?une substance a seulement été adoptée via le règlement délégué n° 2017/2100 du 4 septembre 2017, en se basant sur les critères retenus par l?OMS. Ce dernier règlement a été complété par le règlement délégué 2021/525 du 19 octobre 2020, qui précise les méthodes d?essais nécessaires pour la détermination des propriétés de perturbation endocrinienne. De ce fait, l?évaluation des effets de perturbation endocrinienne a démarré tardivement, au vu du décalage entre la réglementation initiale de 2012 et les règlements d?application intervenus presque 10 ans plus tard. Ainsi, en octobre 2023, 6 substances biocides avaient été évaluées par la Commission comme ayant des propriétés de perturbation endocrinienne, et parmi celles-ci, seulement 2 avaient été interdites, les autres ayant été approuvées dans la mesure où elles répondaient aux critères prévus par la dérogation. A l?inverse, la Commission a conclu que 13 substances n?avaient pas d?effet perturbateur endocrinien, à partir des nouveaux critères appliqués depuis 2018. De plus, l?ECHA a rendu 26 évaluations dans lesquelles elle a estimé qu?il manquait d?information pour déterminer s?il existait ou non un effet de perturbation endocrinienne, en majorité en raison de données insuffisantes. Tableau 3 : Substances biocides dont l?effet perturbateur endocrinien a été reconnu par la Commission européenne Substance Décision Motif Cholecalciferol (rodenticide) Approbation prolongée jusqu?en 2025 (devait expirer en juin 2024) Délai supplémentaire nécessaire pour l?évaluation Cyanamide (désinfectant, insecticide) Non approuvé (décision de 2023) Impossible de démontrer que le produit n?avait pas d?effets inacceptables DBNPA (désinfectant) Non approuvé (décision de 2023) Malgré la possibilité d?un usage sûr, des alternatives de substitution existaient PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 99/203 Propiconazole (préservation du bois) Approuvé (décision de 2023) La non-approbation aurait des conséquences négatives disproportionnées Iodine et PVP-iodine (désinfectant) Réexamen anticipé (demandé en 2021) Effet perturbateur endocrinien reconnu, en attente d?une évaluation de la substitution et des risques Zinèbe (fongicide) Réexamen anticipé (demandé en 2021) Effet perturbateur endocrinien suspecté Document de travail fourni par la DG Santé, retraitement IGAS-IGEDD Par ailleurs, s?agissant des substances approuvées, une inspection coordonnée en 2023 par l?ECHA à l?échelle du marché européen a démontré que plus d?un tiers (37%) des produits bio- cides113 utilisés n?étaient pas en conformité avec la législation. 18% de ces non-conformités con- cernaient des exigences fondamentales (utilisation de produits non autorisés ou de produits con- tenant des substances non approuvées), tandis que 19% correspondaient à des non-conformités mineures (telle que l?absence d?information sur le contact du fournisseur). Le règlement sur les produits phytopharmaceutiques voit son efficacité limitée par un nombre important de dérogations En principe, le règlement n?autorise pas la présence de substances nocives Le règlement (UE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 concerne la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, à savoir des produits composés de substances actives, qui peuvent avoir plusieurs usages : la protection des végétaux contre les organismes nuisibles, l?action sur la crois- sance des végétaux, la conservation des produits végétaux, la destruction ou la prévention des végétaux indésirables. Les critères scientifiques de détermination des propriétés de perturbation endocrinienne ont été définis plus tard par le règlement (UE) n° 2018/605 du 19 avril 2018, à la fois pour l?homme et pour les organismes non-ciblés par la substance. L?objectif du règlement est de n?autoriser la présence de substances dans les produits phytophar- maceutiques qu?à la condition qu?elles présentent un intérêt manifeste pour la production végétale, et qu?elles n?aient pas d?effet nocif sur la santé humaine ou animale, ou d?effet inacceptable sur l?environnement. Les substances font l?objet d?une évaluation initiale par une agence d?un Etat membre, à partir de données fournies par les industriels demandeurs. L?Etat membre rapporteur remet ensuite un dos- sier à l?EFSA114, l?agence européenne de sécurité des aliments. L?EFSA examine le dossier et peut demander des données supplémentaires, consulter des experts, voire faire réaliser des analyses toxicologiques complémentaires. L?EFSA transmet ses conclusions à la Commission européenne qui adopte un règlement délégué concernant l?approbation ou non de la substance en question et à quelles conditions. 113 Inspection conduite sur plus de 3500 produits utilisés au sein de 29 Etats (membres de l?Union Européenne, de l?Espace économique européen et Suisse). 114 EFSA : Agence européenne de sécurité des aliments (European Food and Safety Agency) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 100/203 Sur la base de ce règlement délégué, les agences nationales peuvent autoriser la mise sur le marché des produits. Des autorisations provisoires peuvent être accordées pour des produits non encore approuvés pour une période maximale de 3 ans, à condition qu?ils n?aient pas d?effet nocif sur la santé humaine ou l?environnement, et que l?autorisation de mise sur le marché n?a pas être attribuée dans les délais usuels. Des autorisations temporaires sont également accordées pour 120 jours pour autoriser des pro- duits phytopharmaceutiques non approuvés (ce qui inclut des produits ayant un effet nocif sur la santé ou l?environnement), et ce uniquement dans des circonstances exceptionnelles, lorsqu?un danger ou une menace compromettant la production végétale ou les écosystèmes ne peut être maîtrisé par d?autres moyens raisonnables (espèce envahissante, maladie, ...). Le territoire européen est divisé en 3 zones géographiques, facilitant les reconnaissances mu- tuelles par zone, la France étant catégorisée en zone Sud. Le règlement distingue 5 types de substances, avec des règles différentes d?approbation : Les substances de base (article 23) : ? ce sont des substances intrinsèquement sans danger, comme le sucre ; Les substances à faible risque (article 22) pour la santé et l?environnement : ? leur approbation est valide pour 15 ans ; ? une substance active ne peut être considérée à faible risque si elle est réputée être un perturbateur endocrinien Les autres substances (approuvées pour 10 ans) ; Les substances soumises à exclusion (annexe II, articles 3.6.2 à 3.6.5) : ? il s?agit des substances classées mutagène de catégorie 1A ou 1B, ou cancérogène de catégorie 1A ou 1B, ou toxique pour la reproduction de catégorie 1A ou 1B, ou perturbateur endocrinien. A moins que cette exposition soit considérée comme négligeable avec des conditions excluant tout contact avec l?homme ; ? toutefois, ces critères ne s'appliquent qu?aux nouvelles substances. Tandis que les substances déjà présentes sur le marché y demeurent jusqu?au renouvellement de leur approbation (dans l?attente, elles seront classées comme substances candidates à la substitution). Les substances candidates à la substitution (article 24) : ? il s?agit des substances à toxicité aiguë, des substances mutagènes de catégorie des substances cancérigènes, ou reprotoxique 1A ou 1B, des substances PBT, et des substances à effet de perturbation endocrinienne pour la santé humaine ; ? toute nouvelle demande d?autorisation de mise sur le marché pour un produit à base de l?une de ces substances peut faire l?objet d?une évaluation comparative, et aboutir, le cas échéant, au refus d?autorisation ou à la limitation de l?utilisation de ce produit ; ? l?approbation se fait pour une période 7 ans maximum, qui peut être renouvelée à condition que des mesures de réduction des risques soient prises. En pratique, des dérogations accordées qui durent dans le temps Ce texte a fait l?objet de critiques au regard des possibilités de dérogation qu?il accorde, en parti- culier via la liste des substances candidates à substitution. Dans sa propre évaluation de politique publique115 , la Commission européenne considérait en 2020 que « Les règles applicables aux 115 Rapport de la Commission européenne au Parlement européen d?évaluation du règlement (CE) n° 1107/2009, publié le 20 mai 2020 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 101/203 substances actives dont on envisage la substitution sont à la fois inefficaces et peu performantes. Les données disponibles montrent que les évaluations comparatives, réalisées par les États membres, des produits contenant des substances actives dont la substitution est envisagée sont complexes et nécessitent des ressources, mais n?ont abouti à aucune substitution, principalement en raison de l?absence de solutions de remplacement présentant un meilleur profil de risque at- testé ». Cette problématique était déjà soulignée dans un rapport d?inspection conjoint sur les produits pharmaceutiques de 2017 qui constatait que « subsistent donc sur le marché des substances ac- tives nocives dans l?attente de l?échéance de leur approbation. Ce point est d?autant plus préjudi- ciable que les durées d?approbation des substances sont souvent prolongées par « paquet » (...) la Commission a fait valoir que ces reports étaient dus à des retards pris par les États membres dans l?évaluation des substances »116. Le rapport pointait aussi que, bien qu?une possibilité soit ouverte aux Etats membres de refuser une autorisation de mise sur le marché pour ces substances, elle était rarement mise en oeuvre en raison de conditions trop restrictives. Cette situation a conduit au maintien sur le marché de substances dont l?effet perturbateur endo- crinien était suspecté, d?autant que les critères de définition de la perturbation endocrinienne n?ont été précisés qu?en 2018. Les restrictions de substances à l?issue d?évaluation des propriétés de perturbation endocrinienne commencent à intervenir A partir de la mise en oeuvre du règlement sur les tests des propriétés de perturbation endocrinienne en 2018, 110 substances ont fait l?objet d?une évaluation de leurs éventuelles propriétés de perturbation endocrinienne, dont les résultats sont présentés ci-dessous. Graphique 1 : Evaluation des propriétés PE de 100 produits phytopharmaceutiques entre novembre 2018 et octobre 2023 Source : DG Santé, retraitement IGAS-IGEDD A la suite de ces évaluations, 8 décisions de non-approbation de substances en raison de leur effet perturbateur endocrinien ont été prises, qu?illustre le tableau ci-dessous. 116 Rapport CGEDD ? IGAS ? CGAAER sur l?utilisation des produits phytopharmaceutiques de 2017 ? IGAS n° 2017-124R 16% 34% 2% 41% 7% 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45% Effets sur l'homme 7% 26% 2% 39% 25% 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45% Effet sur organismes non cibles PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 102/203 Tableau 4 : Décisions de la Commission de non-renouvellement de substances en raison de leur effet perturbateur endocrinien reconnu Substance Date du règlement d'exécution Décision de la Commission Expiration de l'approbation sur le marché européen Mancozeb 14-déc-20 Non renouvelé Janvier 2021 Benthiavalicarb 06-nov-23 Non renouvelé Décembre 2024 Clofentézine 07-nov-23 Non renouvelé Novembre 2024 Métirame 7-nov-23 Non renouvelé Novembre 2023 Triflusulfuron-méthyl 16-nov-23 Non renouvelé Novembre 2023 Asulame-sodium 02-févr-24 Non approuvé Sans objet (demande retirée) Dimethomorph 29-avr-24 Non renouvelé Février 2025 Mepanipyrim 29-avr-24 Non renouvelé Mars 2025 Site de la Commission européenne, retraitement IGAS-IGEDD De nombreuses substances présentant des risques de perturbations endocrinienne subsistent toutefois sur le marché, soit au titre de leur classement sur la liste « substitution », soit en raison du retard pris par les évaluations La mission s?est intéressée à la liste des substances candidates à la substitution, qui comporte à ce jour 52 substances encore approuvées. Parmi celles-ci, la mission a pu identifier 14 substances qui apparaissent dans la littérature comme étant suspectes d?avoir des effets de perturbation en- docrinienne117. Tableau 5 : Liste non-exhaustive de substances candidates à substitution, à effet PE régulièrement cité dans les études, et autorisées sur le marché Substance Approbation jusqu'au : Benzovindiflupyr août-26 Bromuconazole avr-27 Chlorotoluron août-26 Cyprodinil mars-25 Difenoconazole mars-26 Fludioxonil juin-25 Flufenacet juin-25 Flurochloridone mars-26 Metribuzin 118 févr-25 Pendimethalin nov-24 Propyzamide juin-25 Tebuconazole août-26 Ziram mars-25 lambda-Cyhalothrin août-26 Site de la commission Européenne, Rapport PAN Europe de mai 2022 précités, retraitement IGAS-IGEDD 117 Source : rapport PAN-Europe : « Forbidden Fruit », Mai 2022 118 Par un avis du 24 août 2023, l?EFSA a conclu que la substance Metribuzin remplissait le critère de perturbation endocrinienne, mais la Commission n?a pas pris de décision interrompant son approbation à la date de rédaction du rapport PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 103/203 Cette liste, qui n?est pas exhaustive, reflète la problématique du renouvellement régulier des subs- tances sur la liste candidate à la substitution, faute d?alternative identifiée et en raison du retard pris par les évaluations. Le rapport de PAN Europe cité plus haut affirmait par ailleurs que la fréquence du recours aux substances candidates à substitution est passée de 19% à 29% pour les fruits et de 11% à 13% pour les légumes entre 2011 et 2019, sur la base des données de contrôle fournies annuellement par les Etats membres à l?EFSA. Ce constat va à rebours de la stratégie européenne « de la ferme à la table » qui vise une réduction de 50% de l?usage des pesticides les plus toxiques d?ici à 2030. Au-delà des substances présentes sur la liste candidate à la liste substitution, il demeure un nombre important substances autorisées dont l?évaluation n?a pas encore été renouvelée depuis 2018, et qui pourraient donc présenter des propriétés de perturbation endocrinienne. La mission a cherché à déterminer, sans vocation d?exhaustivité, des substances présentes sur le marché et dont l?effet perturbateur endocrinien apparaît dans la littérature, et notamment rapportés dans les tests réalisés par l?industrie en vue de leur approbation.119 Tableau 6 : Liste non-exhaustive de substances à effet PE régulièrement citées dans les études, et autorisées sur le marché Substance Approbation jusqu'au : 2,4-D déc-30 Amisulbrom sept-24 Bentazon mai-25 Boscalid avr-26 Buprofezin déc-25 Fenoxaprop-P août-25 Fludioxonil juin-25 Folpet févr-25 Glyphosate déc-33 Mepanipyrim mars-25 Propyzamide juin-25 Pyrimethanil mars-25 Spinosad mars-25 Thiabendazole120 mars-32 Thifensulfuron oct-31 Tolclofos-methyl août-34 Trifloxystrobine juil-33 Site de la Commission européenne, retraitement IGAS-IGEDD Le calendrier d?approbation laisse donc supposer que des substances dont l?effet perturbateur en- docrinien est suspecté pourraient, pour certaines, rester encore sur le marché plus de 10 ans avant 119 Sources utilisées : rapports Générations futures « Perturbateurs endocriniens, il est temps d?agir : l?exemple des perturbateurs thyroïdiens » de décembre 2021 et rapport PAN-Europe « Identification of endocrine disrupting properties ? trapped in a vicious circle » de novembre 2019 120 Par un avis du 28 mars 2022, l?EFSA a conclu que la substance Thiabendazole remplissait le critère de perturbation endocrinienne, mais la Commission n?a pas pris de décision interrompant son approbation à la date de rédaction du rapport PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 104/203 d?être à nouveau soumises à évaluation. La DG Santé a toutefois indiqué à la mission, lors des entretiens, qu?elle sollicitait auprès des industriels des évaluations de perturbation endocrinienne concernant les produits approuvés sur le marché avant 2018. Il convient de noter que fin novembre 2023, le Parlement européen a rejeté par vote121 une propo- sition de règlement qui visait à mettre en place le principe de réduction des pesticides dans la stratégie « de la ferme à la table », ce qui risque de sérieusement compromettre l?objectif de ré- duction des expositions visé par la réglementation. La réglementation sur l?eau s?intéresse à la recherche de certaines substances au titre de leurs propriétés PE Concernant l?eau destinée à la consommation humaine, la directive (UE) n° 2020/2184 du 16 dé- cembre 2020 sur la qualité de l?eau de consommation humaine établit des mécanismes de vigilance de certaines substances en raison de leurs propriétés de perturbation endocrinienne. Elle renforce le mécanisme de vigilance existant pour prendre en compte le paramètre de la per- turbation endocrinienne. Concernant la protection et la restauration des masses d?eau, la directive cadre sur l?eau (DCE) n° 2000/660 du 23 octobre 2020 définit des règles d?évaluation de l?état des eaux. Cette directive exige des Etats membres d?atteindre un bon état des eaux, en réduisant ou en supprimant les émissions de certaines substances, sur la base de normes de qualité environnementales (NQE) fixant des concentrations maximales, qui peuvent inclure des perturbateurs endocriniens. Une étude est en cours pour prendre en compte les effets PE dans la construction des NQE122. Ces normes de qualité environnementale ont été définies successivement par les directives-filles de la directive cadre, avec la directive 2008/105/CE puis la directive 2013/39/UE. Une nouvelle révision est en cours de discussion, la Commission ayant formulé en 2022 une pro- position de directive mettant à jour les substances prioritaires pour le sol et les milieux aquatiques, incluant davantage de pesticides et de PFAS, proposition soutenue par le Parlement européen. La version de compromis proposée par le Conseil européen en décembre 2023 revoit toutefois ces ambitions à la baisse, notamment sur les niveaux de pesticides, et propose de décaler l?entrée en vigueur des règles sur les nouvelles substances à 2039. Le règlement sur la sécurité des jouets s?apprête à être retouché pour inclure une approche générique des perturbateurs endocriniens La directive (UE) n° 2009/48 du 18 juin 2009 relative à la sécurité des jouets123 indique que les jouets, y compris les produits chimiques qu?ils contiennent, ne doivent pas mettre en danger la sécurité ou la santé. 121 Vote du 22 novembre 2023 refusant la proposition de règlement de la Commission concernant une utilisation des produits phytopharmaceutiques compatible avec le développement durable, qui aurait révisé la directive 2019/128/CE sur l?utilisation des pesticides compatible avec le développement durable 122 Etude Ineris 203222 - 2719249 du 30 novembre 2021 123 Transposée en France par le Décret n°2010-166 du 22 février 2010 sur la sécurité des jouets PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 105/203 La directive interdit ainsi les substances classées CMR au sens du règlement CLP dans la compo- sition des jouets124. La directive énumère par ailleurs une liste de substances parfumantes allergi- santes interdites. En revanche, la directive n?accorde pas de traitement particulier aux perturbateurs endocriniens en tant que tels. Ce texte est toutefois en révision, le Parlement européen ayant voté en mars 2024 en faveur d?une proposition de la Commission d?étendre l?interdiction actuelle des substances pro- hibées dans les jouets aux perturbateurs endocriniens et aux PFAS. Cette préoccupation est liée à des signalements importants de jouets non conformes sur le marché européen, dont une part considérable provient de produits commandés en ligne, en particulier ceux fabriqués hors de l?Union européenne. Il existe déjà une restriction spécifique pour le bisphénol A, avec une limite maximale de migration dans les jouets, qui a été revue à la baisse à 0,04 mg/l par le règlement délégué (UE) n° 2017/898 du 24 mai 2017. Les articles de puériculture relèvent d?un autre texte, la directive sécurité générale des produits 2001/95/CE125 du 3 décembre 2001, qui fixe des règles de sécurité sans prise en compte particu- lière des perturbateurs endocriniens. Cette directive a été abrogée et remplacée par la directive (UE) 2023/988 du 10 mai 2023 relatif à la sécurité générale des produits, qui entre en vigueur en décembre 2024. Le nouveau texte introduit des exigences vis-à-vis des places de marché en ligne, tenues de désigner un point de contact unique avec les autorités de surveillance du marché des Etats membres pour la sécurité des produits, ainsi qu?un point de contact unique pour communi- quer avec les consommateurs sur la sécurité des produits. Le règlement sur les cosmétiques conserve une approche au cas par cas, malgré des efforts récents pris pour restreindre des substances au titre de leurs propriétés PE Une approche au cas par cas pour laquelle aucune mise à jour n?est annoncée Le règlement (UE) n° 1223/2009 du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques concerne « toute substance ou tout mélange destiné à être mis en contact avec les parties superficielles du corps humain (épiderme, systèmes pileux et capillaire, ongles, lèvres, organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses buccales en vue, exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d?en modifier l?aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles ». Il s?agit essentiellement de parfumerie, de produits d?hygiène et de toilette, de produits capillaires, de produits de beauté et de soin. Le règlement pose des règles de sécurité concernent la composition des cosmétiques, leur fabri- cation, les informations affichées et l?étiquetage, l?évaluation des risques, les conditions d?utilisation, les substances interdites ou la concentration maximale autorisée. Une substance considérée comme nocive pourra être traitée de 2 manières : substance interdite (liste négative de 1328 substances, classées dans l?annexe 2) ; substance réglementée : liste positive de 256 substances soumises à restriction (classées 124 Des exceptions existent, sous condition stricte, pour des parties distinctes et inaccessibles aux enfants, permettant par exemple l?insertion de piles. 125 Transposée en France par le décret n° 91-1292 du 20 décembre 1991 sur la prévention des risques résultant de l?usage des articles de puériculture PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 106/203 dans l?annexe 3), avec des listes supplémentaires spécifiques pour les colorants (annexe 4), les conservateurs (annexe 5) et les crèmes solaires (annexe 6) : dans ces annexes, seront indiqués pour chaque substance les concentrations maximales autorisées, les conditions d?emploi et les avertissements à indiquer sur l?emballage. Les listes sont révisées régulièrement par les instances européennes, sur la base des avis d?un comité d?experts indépendants, le Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs (CSSC), suivi d?une décision de la Commission européenne via la Comité technique européen des produits cosmétiques (COMCOS). Le règlement interdit par ailleurs l?utilisation des substances classées CMR par le règlement CLP, à quelques exceptions près : pour les substances CMR de catégorie 1A et 1B (les plus dangereuses), l?utilisation est interdite, sauf à remplir de nombreuses conditions cumulatives (conformité aux prescriptions de sécurité alimentaire, absence de substitution appropriée, usage particulier avec exposition déterminée, et jugé sûr par le CSSC) ; pour les substances CMR de catégorie 2, elles ne pourront être utilisées que si le CSSC les a jugées sûres pour une utilisation dans les produits cosmétiques. En France, la mise en oeuvre du règlement repose sur la DGCCRF pour la mission d?inspection, de contrôle et de surveillance du marché. Et sur l?Anses pour la surveillance des effets indésirables (en remplacement de l?ANSM depuis le 1er janvier 2024). Il n?y a pas d?autorisation de mise sur le marché, mais un dossier d?identification du produit à cons- tituer par la personne responsable, comprenant les informations sur les évaluations de sécurité et effets indésirables identifiés. Un suivi des effets indésirables graves devra également être effectué. En revanche, les perturbateurs endocriniens ne sont pas spécifiquement listés comme substances interdites, toutefois l?article 15.4 du règlement indique que : « Lorsque des critères convenus par la Communauté ou au niveau international pour l'identification des substances présentant des pro- priétés perturbant le système endocrinien sont disponibles, ou au plus tard le 11 janvier 2015, la Commission révise le présent règlement en ce qui concerne les substances présentant des pro- priétés perturbant le système endocrinien ». La Commission n?a toutefois pas tenu ce calendrier et le règlement n?a pas été mis à jour. Pour y remédier, dans le cadre de sa communication du 7 novembre 2018 pour limiter l?exposition aux perturbateurs endocriniens, suivie d?un bilan de qualité de la législation européenne, la Commission a lancé deux appels à données sur les cosmétiques : un groupe A, prioritaire, de 14 substances, lancé en mai 2019, ainsi qu?un groupe B, pour 14 autres substances, lancé en 2021. Le bilan qualité a permis une augmentation récente du nombre de substances restreintes en raison de leurs propriétés de perturbation endocrinienne Cet appel à données a permis la réalisation de nouvelles évaluations qui a conduit à renforcer les limitations existantes ou en créer de nouvelles, pour les substances concernées. La mission a cherché à identifier les substances restreintes dans les cosmétiques en raison d?effets de perturbation endocrinienne, et a dénombré 35 substances, sans prétention d?exhaustivité. Parmi celles-ci, figurent 21 substances présentes dans l?appel à données de 2018 qui sont signalées par une ou deux astérisques (respectivement groupe A et groupe B). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 107/203 Tableau 7 : Traitement des substances aux effets PE dans les cosmétiques Substance Fonction Statut (±)-1,7,7-trimethyl-3-[(4-methylphenyl)methylene] bicyclo[2.2.1]heptan-2-(4-MBC) Filtre UV Interdit (annexe 2) 2-ethylhexyl salicylate Filtre UV Limité (annexe 6) 2-ethylhexyl salicylate Filtre UV Limité (annexe 6) 3-benzylidène camphre Filtre UV Limité (annexe 6) 3-benzylidène camphre Filtre UV Limité (annexe 6) 4,4?-isopropylidènediphénol (BPA) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) 4-methylbenzylidene camphor * Filtre UV Interdit (annexe 2) Acetyl hexamethyl tetralin Agent masquant Limité (annexe 3) Acetylcedrene Agent parfumant Limité (annexe 3) Acide kojique * Eclaircissant Limité (annexe 3) Benzophenone * Absorbant UV Interdit (annexe 2) Benzophenone-3 * Filtre UV Limité (annexe 6) Benzyl salicylate * Filtre UV Limité (annexe 6) Butylated hydroxytoluene (BHT) * Agent parfumant Limité (annexe 3) Butylparaben ** Conservateur Interdit (annexe 2) butylphenyl methyl propanol/BMHCA ** Agent parfumant Interdit (annexe 2) Daidzein * Entretien de la peau Limité (annexe 3) Ethylhexyl methoxycinnamate(EHMC) / octylmethoxycinnamate (OMC)/octinoxate ** Filtre UV Limité (annexe 6) Ethylhexyl salicylate Filtre UV Limité (annexe 6) Ethylparaben Conservateur Limité (annexe 5) Genistein * Entretien de la peau Limité (annexe 3) Homosalate * Filtre UV Limité (annexe 6) Isoamyl p-methoxycinnamate Filtre UV Limité (annexe 6) Isobutyl 4-hydroxybenzoate; Isobutylparaben Conservateur Interdit (annexe 2) methylparaben ** Agent parfumant Limité (annexe 6) Octocrylene * Filtre UV Limité (annexe 6) Phtalate de bis(2-éthylhexyle) (DEHP) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) Phtalate de dibutyle (DBP) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) Phtalate de di-n-pentyle (DnPP) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) Phthalate de butyle benzyle (BBP) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) Propylparaben * Conservateur Limité (annexe 6) Resorcinol * Colorant Limité (annexe 3) Triclocarban * Conservateur Interdit (annexe 2) Triclosan * Conservateur Limité (annexe 5) Trimethylbenzoyl Diphenylphosphine oxide Entretien de la peau Limité (annexe 3) Note de lecture : les substances avec une astérisque correspondent à celles incluses dans le groupe A établi par la Commission en 2018, celles avec deux astérisques au groupe B. Les annexes renvoient au règlement n° 1123/ 2009. Site de la Commission européenne, retraitement IGAS-IGEDD PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 108/203 Parmi les 10 substances présentes dans l?appel à données du groupe B qui n?ont pas encore fait l?objet d?une limitation au sens du règlement cosmétiques, certaines sont soumises à des limitations au titre d?autres règlements, comme l?illustre ce tableau : Tableau 8 : Substances présentes dans le groupe B de l?appel à données de la Commission de 2018 en attente de réglementation dans le règlement cosmétiques Substance Fonction Statut Acide salicylique ** Entretien de la peau Non réglementé Benzophenone-1/BP-1 ** Filtre UV Non réglementé Benzophenone-2/BP-2 ** Filtre UV Non réglementé Benzophenone-4/BP-4 ** Filtre UV Non réglementé Benzophenone-5/BP-5 ** Filtre UV Non réglementé Cyclomethicone ** Emollient Limité (via CLP) Cyclopentasiloxane/decamethylcycl opentasiloxane/D5 ** Emollient Limité (Annexe XVII REACH) Deltamethrin ** Antimoustiq ue Non règlementé (Approuvé comme biocide, en cours de réévaluation) Tert-butylhydroxyanisole/Butylated hydroxyanisole/BHA ** Antioxydant Non réglementé Triphenyl phosphate ** Agent plastifiant Non réglementé Sans prétention d?exhaustivité, et à titre d?illustration, la mission a également identifié : 2 substances dont la présence est interdite dans les cosmétiques en raison de leur classement dans d?autres règlements : Substance Fonction Statut Benzotriazole Agent antimicrobien Limité (Annexe XIV REACH) Di-isobutyl phthalate (DIBP) Agent plastifiant Interdit (CLP - R1B) 4 substances présentes dans les cosmétiques, régulièrement identifiées dans la littérature scientifique pour leur effet de perturbateur endocrinien126 : Substance Fonction Statut Méthyléthylcétone (MEK) Agent parfumant Non réglementé (sous évaluation CORAP 2020- 22) Nitrophenol Colorant Non réglementé T-Butyl methyl ether (MTBE) Solvant Non réglementé Thiabendazole Agent antimicrobien Non réglementé (reconnu PE au titre du règlement biocide) 126 Le thiabendazole a été reconnu comme remplissant le critère de perturbation endocrinienne par l?ECHA au titre du règlement biocide ; le nitrophenol et le T-butyl methyl ether sont cités comme PE suspectés en page 27 du rapport de l?IPCP pour l?ONU sur les perturbateurs endocriniens de juillet 2017 ; le méthyléthylcétone, autre nom du butanone, est inclus dans le CoRAP 2020- 2022 au titre de ses propriétés de perturbation endocrinienne potentielles. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 109/203 A terme, le règlement cosmétiques devrait intégrer la nouvelle classification issue du règlement CLP, ce qui permettrait une approche de restriction plus globale, à la différence de l?approche au cas par cas actuelle. Le règlement sur les dispositifs médicaux est conçu pour inciter à la substitution Le règlement (UE) n° 2017/745 du 5 avril 2017 organise la certification des dispositifs médicaux. Il prévoit que la conception et la fabrication de ces dispositifs réduisent autant que possible les risques liés aux substances. A cet effet, il limite à une concentration en fraction massique de 0,1 % : les substances CMR de catégorie 1A ou 1B au sens du règlement CLP ; les substances possédant des propriétés de perturbation endocrinienne pour lesquelles il est scientifiquement prouvé qu'elles peuvent avoir des effets graves sur la santé humaine. Le règlement autorise une dérogation à cette concentration maximale, mais demande que celle-ci soit justifiée par plusieurs éléments : une analyse et une estimation de l?exposition potentielle du patient ou de l?utilisateur ; une analyse des substances de substitution possibles, y compris de la recherche indépendante et des avis scientifiques, et une analyse de la disponibilité des substitutions ; une argumentation expliquant pourquoi, si la solution de substitution est disponible ou si une modification de conception est réalisable, elle ne convient pas pour maintenir le fonctionnement du produit, notamment en prenant en compte les populations particulièrement vulnérables aux substances telles que les enfants ou femmes enceintes ; les orientations les plus récentes du comité scientifique concerné. Cette logique, plus restrictive que l?ancienne qui se contentait de demander d?évaluer le rapport entre bénéfice et risque, commence lentement à produire des effets chez les fabricants en faveur de produits de substitution, notamment avec la substitution des phtalates dans les tubulures ou les pochettes de sang. S?agissant des médicaments, les effets perturbateurs endocriniens ne sont pas interdits en tant que tels, dans la mesure où s?agit souvent de l?objectif recherché (oestrogènes, progestatifs ...). En revanche, l?agence européenne des médicaments coordonne un travail d?évaluation des exci- pients. Celui-ci avait été conduit en France par l?ANSM qui avait notamment procédé aux évalua- tions dans les excipients des phtalates, du methyl et du propyl-parabène, de l'acide borique et de l'hydroxyanisole butyle (BHA). Les règlements sur les matériaux de contact alimentaire comportent des approches disparates Un principe général d?inertie avec des règles particulières pour certains matériaux Le règlement (CE) n° 1935/2004 sur les matériaux de contact alimentaire du 27 octobre 2004127) porte sur les emballages et conditionnements, les récipients et ustensiles de cuisine, les 127 Le règlement sur les matériaux de contact alimentaire fixe des limites de migration des substances présentes dans les contenants vers le contenu, mais ne prend pas spécifiquement en compte les perturbateurs endocriniens, alors même que ces derniers peuvent avoir des effets à très faible dose. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 110/203 tétines et biberons, les matériaux, machines et matériels utilisés pour produire, stocker ou trans- porter des denrées alimentaires. Il pose un principe général d?inertie : les matériaux de contact doivent être suffisamment inertes pour ne pas relâcher dans les denrées alimentaires une quantité susceptible de présenter un dan- ger pour la santé humaine, d?entraîner une modification inacceptable de la composition des ali- ments ou d?altérer leurs caractères organoleptiques. Parmi les 17 catégories de matériau existant, il existe des règles spécifiques d'inertie pour certains (matières plastiques, céramique, pellicule de cellulose régénérée et partiellement pour les caout- choucs, monomères des vernis époxydiques, matériaux actifs et intelligents) précisées dans d?autres règlements et directives. Les règles relatives à ces matériaux comportent chacune des « listes positives » de substances autorisées, détaillant les substances autorisées avec des règles spécifiques de migration, à l?instar du règlement UE n° 10/2011 sur les matériaux et objets en matière plastique de contact alimentaire. L'autorisation d'une substance est délivrée par la Com- mission après avis favorable de l?EFSA. Lorsqu?il n?existe pas d?harmonisation pour un matériau au niveau européen, les listes de subs- tances autorisées relèvent du niveau national. Dans ce cas, pour la France, l?autorisation est déli- vrée par la DGCCRF après évaluation de l?Anses. Malgré l?absence d?une prise en compte générique des perturbateurs endocriniens, des restrictions spécifiques ont été prises pour le bisphénol A et certains phtalates La réglementation relative au contact alimentaire ne réserve pas de règle particulière aux pertur- bateurs endocriniens, traités au cas par cas. A titre d?exemple, des valeurs limites de migration pour les phtalates sont fixées dans le règlement sur les matériaux de contact en matière plastique précités, qui viennent d?être renforcées par le règlement (UE) n° 2023/1442 du 11 juillet 2023 mo- difiant à la baisse les limites de migration spécifique pour le DBP, le BBP, le DEHP, le DINP et le DIDP. L?approche par valeur limite de migration a toutefois été critiquée dans la mesure où une limitation de la quantité de substance n?est pas pertinente pour les effets à faible dose ou les relations non- monotones observées pour certains perturbateurs endocriniens. Il existe toutefois des interdictions complètes s?agissant du bisphénol A, prises à l?issue de l?initia- tive française de l?interdire dans les biberons en 2010 puis dans les matériaux de contact alimen- taire pour enfant en 2012128. Des décisions similaires ont été prises au niveau européen, avec une interdiction du BPA dans les biberons (règlement (UE) n° 321/2011 du 1er avril 2011) suivie d?une limitation de la migration maximale de BPA autorisée dans les contenants alimentaires pour enfant (règlement (UE) n° 2018/213 du 12 février 2018 limitant la migration à 0,05 mg par kilo de denrée alimentaire, un niveau 10 fois inférieur à la norme antérieure). Un avis de l?EFSA de 2023 sur la réévaluation des risques posés par le bisphénol A dans les den- rées alimentaires129 a revu à la baisse son évaluation de dose journalière tolérable, en la fixant à un niveau de 0,2 nanogramme par kilo, soit 20.000 fois moins que la dose fixée dans sa précédente évaluation à 4 microgrammes par kilo. 128 Loi n° 2010-729 du 30 juin 2010 modifiée par la loi n°2012-1442 du 24 décembre 2012 129 The EFSA Journal 2023 ; 21(4):6857 : « Re?evaluation of the risks to public health related to the presence of bisphenol A (BPA) in foodstuffs » PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 111/203 A l?issue de cette évaluation, la Commission a formulé en février 2024 une proposition de règlement délégué, actuellement en discussion, pour une interdiction complète du bisphénol A dans tous les contenants alimentaires, et ce quelle que soit la population concernée. Cette proposition de la Commission ne s?étend toutefois pas aux autres types de bisphénols, tels que le bisphénols F ou S, qui sont régulièrement substitués au bisphénol A, mais pour lesquels les études toxicologiques sont moins nombreuses. Enfin, un accord a été trouvé par le Parlement et le Conseil en mars 2024 pour interdire les PFAS (dont certains ont des effets de perturbation endocrinienne) dans les emballages alimentaires de contact à partir de 2026. Les directives sur la sécurité des travailleurs n?ont pas encore classé les substances PE parmi celles qui nécessitent une protection maximale L?UE définit des exigences minimales de conditions de travail, qui peuvent être complétées par les Etats membres. Le texte de référence est la directive 89/391/CEE du 12 juin 1989 sur la sécurité et la santé des travailleurs, qui pose les principes généraux de prévention des risques profession- nels et de protection de la sécurité et la santé des travailleurs. Concernant l?exposition aux substances dangereuses, deux textes s?appliquent : la directive 98/24/CE sur les agents chimiques sur le lieu de travail : ? elle contraint à réaliser une évaluation des risques et prendre toutes mesures de prévention pour supprimer les risques liés aux agents chimiques dangereux ou les réduire au minimum ; ? des directives ultérieures fixent des valeurs limites d?exposition professionnelles (VLEP) qui sont des niveaux de concentration en polluants dans l?atmosphère des lieux de travail à ne pas dépasser sur une période de référence et en deçà desquels le risque d?altération de la santé est négligeable à partir des connaissances scientifiques ; ces VLEP peuvent être indicatives ou contraignantes ; ? les Etats membres, sur cette base, fixent dans leur droit du travail leurs propres VLEP, qui peuvent être plus strictes que celles proposées au niveau européen. la directive 2004/37/CE sur les agents cancérogènes et mutagènes sur le lieu de travail : ? elle porte sur les agents CMR de classe 1A et 1B au sens du CLP ; et comporte des règles plus exigeantes que la directive 98/24/CE ; ? les employeurs sont tenus de restreindre l?utilisation d?un agent cancérigène ou mutagène en le remplaçant par une substance ou un procédé non ou moins dangereux ; ? si la substitution est impossible, l?employeur doit assurer l?utilisation de l?agent cancérigène dans un système clos ; à défaut, l?employeur doit réduire le niveau d?exposition au minimum ; ? la directive précise les mesures que l?employeur est tenu d?appliquer si un agent cancérogène ou mutagène est utilisé ; et prévoit par ailleurs la fixation de VLEP toutes contraignantes ; ? la directive a été révisée à plusieurs reprises récemment (2017, 2018, 2019, 2022), la dernière révision ayant ajouté les substances reprotoxiques ; ? en revanche, les perturbateurs endocriniens n?y figurent pas en tant que tels. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 112/203 La Commission envisage d?ajouter les perturbateurs endocriniens aux substances concernées par la directive 2004/37/CE, ce qui limiterait davantage l?exposition des travailleurs concernés. Le pro- jet a été validé à l'unanimité par le comité des représentants permanents du Conseil de l?UE, le 6 décembre 2023. La Commission va lancer une évaluation scientifique de l?ECHA d?ici à 2025 pour confirmer la per- tinence d?une intégration des perturbateurs endocriniens dans la directive 2004/37/CE au vu des risques posés, ce qui pourrait aboutir à un projet de directive entre 2028 et 2030. Annexe 3.1.2 Un bilan insuffisant et des perspectives d?évolution compromises Un manque de cohérence à combler entre les différentes réglementations Le manque de cohérence de la législation apparaît dans la présentation des différentes réglemen- tations applicables, qui suivent des logiques diverses. Cette question a été largement pointée et notamment dans la communication de 2018 de la Commission. De fait, ce manque de cohérence renvoie essentiellement à l?existence de : Différentes définitions des perturbateurs endocriniens : REACH ne les définit pas ; les règlements pesticides et biocides ont leur propre définition ; le CLP introduit finalement une nouvelle définition plus large qui a vocation à devenir transversale. Un manque de passerelles entre législations : la restriction d?une substance dans un règlement n?emporte pas sa restriction dans un autre, et les évaluations conduites au titre d?un règlement ne sont pas coordonnées avec celles des autres règlements. Une diversité dans la logique de gestion du risque : certains règlements adoptent une logique de danger (par principe, une substance reconnue perturbateur endocrinien est interdite, sur la base des connaissances scientifiques, à l?instar des règlements phytopharmaceutiques et biocides, bien qu?ils accordent des dérogations) tandis que d?autres retiennent une logique de risque (le danger sera jaugé avec les conditions d?exposition et les mesures de maîtrise du risque, comme dans REACH). Des différences dans les méthodes de test requises : peu de règlements comportent des tests obligatoires pour l?évaluation du caractère de perturbation endocrinienne, et ceux qui en contiennent sont insuffisants dans la mesure où ils ne recouvrent pas toutes les voies de perturbation endocrinienne. Un faible bilan des restrictions adoptées malgré des progrès récents Le croisement des différentes mesures de gestion de risque adoptées en raison d?effet de pertur- bation endocrinienne au titre des différents règlements fait apparaître un faible bilan d?ensemble, avec un total de 53 mesures. Tableau 9 : Substances faisant l?objet d?une mesure de limitation en raison de leur effet perturbateur endocrinien Phytopharmaceutiques Biocides Cosmétiques REACH Annexe XIV Annexe XVII 8 2 35 2 6 Retraitement IGAS-IGEDD PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 113/203 On relève cependant qu?un nombre important de ces mesures datent des dernières années (cf.su- pra), signe d?une meilleure efficacité des règlements sectoriels. La précision des critères de perturbation endocrinienne a en effet entraîné une série de restrictions concernant les pesticides, et dans une moindre de mesures, des biocides, détaillées supra. De même, le bilan qualité lancé sur les cosmétiques a produit des effets encourageants. De plus, les restrictions spécifiques concernant le bisphénol A et certains phtalates ont vu leur seuil de concen- tration autorisée s?abaisser pour les matériaux de contact alimentaire. Plusieurs règlements devraient prochainement être amendés pour intégrer une approche géné- rique des perturbateurs endocriniens : à court terme pour les jouets, et à moyen terme pour les travailleurs professionnels. Enfin et surtout, la réforme du CLP ouvre la voie d?une définition horizontale des perturbateurs endocriniens au sein de la législation européenne, correspondant à une demande portée par la France. Une vigilance subsiste cependant sur les documents d?accompagnement (Guidance do- cuments) du nouveau règlement CLP, en train d?être définis, pour spécifier les tests requis pour établir la propriété endocrinienne130. Un avenir compromis depuis le renoncement à la révision de REACH Le règlement REACH fait l?objet de nombreuses limites structurelles, exposées supra, et n?est guère adapté à la prise en compte des propriétés de perturbation endocrinienne. La refonte de ce règlement était attendue et annoncée par la Commission dans son « Pacte vert » au titre de l?objectif « Zéro pollution ». Une réforme ambitieuse était envisagée pour remédier aux faiblesses de la réglementation (renforcement de la qualité des dossiers d?enregistrement, procé- dure d?évaluation simplifiée, évaluation par familles, prise en compte des faibles tonnages, évalua- tion des effets cocktails, amélioration des contrôles de conformité, ...). De façon inattendue, ce texte qui devait être présenté en 2022 a été reporté, suscitant de nom- breuses inquiétudes. Une lettre fut adressée par les ministres de l?environnement de 8 pays, dont la France et l?Allemagne, demandant à la Commission de tenir ses promesses. Reportée fin 2023, la réforme a fini par disparaître de l?agenda législatif, la raison invoquée étant la préservation de la compétitivité des entreprises. Les discussions de la mission avec les direc- tions concernées de la Commission rapportent une mobilisation de l?industrie chimique, arguant du coût élevé que représenterait un renforcement des exigences d?évaluation, dans un contexte éco- nomique difficile marqué par l?inflation. En l?absence de publication des études d?impact, il est impossible de chiffrer le coût qu?aurait re- présenté un renforcement des exigences d?enregistrement pour les entreprises, et de le rapporter aux bénéfices sanitaire et environnemental attendus. A titre de comparaison, dans sa propre évaluation du règlement REACH actuel131, la Commission avait estimé que les coûts d?enregistrement avaient occasionné 2,6 Mds ¤ de dépenses pour les 130 A cet égard, la limitation progressive des tests animaux représente une difficulté pour établir la preuve d?une perturbation endocrinienne, bien que la recherche travaille sur le développement d?autres modalités de tests, à l?instar des tests sur des cellules de placenta 131 Rapport général de la Commission sur le fonctionnement du règlement REACH, 5 mars 2018, dans le cadre de l?évaluation REFIT PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 114/203 entreprises, mais que la mise en place de la législation avait permis des avantages potentiels pour la santé et l?environnement estimés à 100 Mds ¤ sur 30 ans. Le report sine die de cette refonte représente donc un recul considérable en termes de protection de l?exposition aux produits chimiques et notamment aux perturbateurs endocriniens. Annexe 3.2. La SNPE3 peut renforcer les réglementations européennes et nationales Annexe 3.2.1 Au niveau européen, un rôle moteur de la France à conforter La France doit soutenir un agenda exigeant dans la prochaine mandature Au vu de la place centrale de la réglementation européenne dans la lutte contre l?exposition aux perturbateurs endocriniens, il est essentiel que la France porte des positions fortes en faveur d?une poursuite des efforts engagés depuis la stratégie européenne de 2018. Ce rôle a été joué par le passé, notamment en soutenant la refonte du CLP, qui était mentionnée dans la SNPE2 (action 32). De même, le vote de la loi AGEC132 au niveau national, qui apporte des obligations d?information sur la présence de perturbateurs endocriniens (cf.infra), a contribué à affermir la position française au niveau européen. Plus généralement, le travail d?évaluation de l?Anses, très investie sur le sujet des perturbateurs endocriniens, contribue à faire avancer les dossiers sur la scène européenne. A la date de rédaction du rapport, la composition de la 10ème législature du Parlement européen, amenée à siéger de 2024 à 2029, est inconnue, et ne permet pas de préjuger du programme que suivra la Commission. Dans ce contexte, il est d?autant plus important que la France, en accord avec les pays alliés sur la question, joue un rôle moteur dans l?avancement de l?agenda, en apportant son soutien à : la refonte rapide et ambitieuse du règlement REACH (cf.supra) ; la mise en oeuvre du nouveau règlement CLP (en veillant à la définition des tests retenus dans les documents d?accompagnement, et en soutenant la mise à jour des règlements sectoriels pour y inclure la définition des perturbateurs endocriniens au sens du CLP) ; l?actualisation de la directive n° 2004/37/C sur les agents chimiques dangereux pour y inclure les perturbateurs endocriniens ; la restriction universelle des PFAS (actuellement en cours d?évaluation sous REACH)133 ; l?inscription des PE dans le système général harmonisé de classification et d?étiquetage des produits chimiques des Nations-Unies. Une absence d?autonomie nationale malgré des dérogations, notamment sur les pesticides La régulation des produits chimiques au niveau européen s?inscrit dans une logique de marché intérieur : il s?agit de favoriser la circulation des marchandises pour éviter toute entrave au com- merce. C?est pourquoi, de façon générale, la réglementation européenne laisse peu de marge de 132 Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire, dite « AGEC » 133 Restriction universelle des PFAS, proposée par l?ECHA le 7 février 2023, sur une initiative de l?Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark, la Norvège et la Suède PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 115/203 manoeuvre aux Etats membres. Cette situation crée un paradoxe : d?un côté, le droit européen impose un certain niveau d?exigence, notamment envers les Etats membres qui ne disposaient pas de standards de protection de la santé et de l?environnement ; de l?autre, il rend difficile une dé- marche plus volontariste des Etats qui le souhaiteraient. Ainsi, une initiative nationale de réglementation d?une substance, qui s?effectue sans coordination européenne, risque de faire l?objet d?un contentieux et d?entraîner une condamnation de l?Etat en question. Cette problématique a été illustrée dans différentes affaires, par exemple lorsque l?ANSM s?est vu reprocher en 2019 par la Commission européenne134 d?avoir exigé d?apposer une mise en garde contre-indiquant l?usage sur le siège des enfants de lingettes contenant du phénoxyéthanol. Pour autant, il serait erroné de conclure que le droit européen empêche toute forme d?action des Etats membres destinée à renforcer la protection de la santé et de l?environnement d?une exposition chimique dans son droit national. De fait, chaque règlement dispose d?une logique propre, qui per- met parfois des exceptions sous certaines conditions. Schématiquement, on peut distinguer le droit relatif au marché intérieur, qui autorise des déroga- tions uniquement sous condition stricte, et le droit du travail européen, qui, à l?inverse, définit un standard minimal qui permet aux Etats membres de disposer de législations plus restrictives. L?analyse de ces différentes logiques permet d?illustrer la marge de manoeuvre des Etats membres, variable selon les réglementations. Le règlement REACH Le règlement REACH n° 1907/2006 ne comporte pas de dérogation : il énonce dans son deuxième considérant que « le fonctionnement du marché intérieur ne peut être assuré que s?il n?existe pas (...) de différences significatives entre les exigences applicables aux substances ». En pratique, dans les rares situations où les Etats adoptent des réglementations nationales plus restrictives relevant du domaine de REACH, ils sont tenus de déposer rapidement un dossier de restriction de cette substance auprès de l?ECHA. L?article 69.4 de REACH dispose ainsi que « Si un État membre estime que la fabrication, la mise sur le marché ou l'utilisation d'une substance, telle quelle ou contenue dans un mélange ou un article, entraîne pour la santé humaine ou l'environnement un risque qui n'est pas valablement maîtrisé et qui nécessite une action, il notifie à l'Agence qu'il propose d'élaborer un dossier (...) ». C?est la procédure qu?a suivi le Danemark en 2020 en prenant l?initiative d?interdire les PFAS dans les mousses anti-incendie des pompiers, et en déposant en même temps un dossier de restriction auprès de l?ECHA. Après évaluation, l?ECHA a rendu en juin 2023 des conclusions recommandant effectivement de placer ces substances sous restriction. Le règlement sur les phytopharmaceutiques accorde une marge de manoeuvre aux agences nationales, confortée récemment par la CJUE Le règlement sur les phytopharmaceutiques n° 1007/2009 vise dans son 9ème considérant à « éta- blir des règles harmonisées pour l?approbation des substances actives et la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, y compris des règles concernant la reconnaissance mutuelle des autorisations et le commerce parallèle ». 134 Lettre référencée (2019)7308531 au directeur général de l?ANSM du directeur de l?unité en charge des produits cosmétiques au sein de la DG GROW (marché intérieur, industrie, entreprenariat et PME) du 27 novembre 2019 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 116/203 Pour garantir la liberté de circulation des marchandises, le principe de reconnaissance mutuelle repose sur une division géographique en trois zones présentant des conditions agricoles, phytosa- nitaires et environnementales (y compris climatiques) comparables (cf.supra). La reconnaissance mutuelle est tempérée au 29ème considérant du règlement qui dispose que : « Toutefois, des circonstances environnementales ou agricoles propres au territoire d?un ou de plusieurs États membres pourraient nécessiter que, sur demande, les États membres recon- naissent ou modifient une autorisation délivrée par un autre État membre, ou refusent d?autoriser le produit phytopharmaceutique sur leur territoire, si des circonstance agricoles ou environnemen- tales particulières le justifient ou si le niveau élevé de protection de la santé tant humaine qu?ani- male et de l?environnement prévu dans le présent règlement ne peut être assuré. » Ce dernier considérant précise que « Des conditions appropriées devraient également pouvoir être imposées au regard des objectifs définis dans le plan d?action national », ce qui renvoie aux plans adoptés conformément à la directive 2009/128/CE du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d?action communautaire pour parvenir à une utilisation durable des pesticides (pour la France, il s?agit du plan Ecophyto). Le règlement sur les phytopharmaceutiques aménage donc une marge de manoeuvre aux Etats membres, mais qui reste circonscrite. Elle opère notamment dans les situations d?urgence, détail- lées aux articles 69 à 71 du règlement en cas de « risque grave pour la santé humaine ou animale ou l?environnement », permettant aux Etats membres, en cas d?inaction de la Commission saisie officiellement, de « prendre des mesures conservatoires provisoires ». La Commission examine ces mesures sous un mois pour en décider le maintien ou non. De façon plus générale, cette marge de manoeuvre permet de retirer un produit du marché national ou refuser un produit contenant une substance approuvée au niveau européen, ce que rappelait le rapport d?inspection conjoint de 2017 sur les produits phytopharmaceutiques 135 : « les Etats membres peuvent à tout moment retirer du marché des produits si les exigences qui ont conduit à son autorisation ne sont plus réunies, notamment s?il est démontré sur le fondement des méthodes d?évaluation acceptées par l?Autorité européenne de sécurité des aliments (l?Efsa) que le produit a un effet nocif immédiat ou différé, direct ou indirect (via l?eau, les aliments, l?air) sur la santé hu- maine ou animale ou sur les eaux souterraines, ou s?il a un effet inacceptable pour l?environnement (article 44 du règlement). Enfin, l?article 36 du règlement 1107/2009 peut constituer une base juri- dique pour refuser sur le territoire national l?autorisation d?un produit contenant une substance ac- tive approuvée au niveau européen, mais ceci n?est possible qu?« en raison de caractéristiques environnementales ou agricoles » de l?État concerné. » Il convient de noter qu?une jurisprudence récente de la Cour de justice de l?Union Européenne (CJUE) est venue conforter la portée de cet article 36, dans deux arrêts de 2024. La CJUE interprète l?article 36 comme signifiant que, lors de l?autorisation de mise sur le marché, un Etat membre peut « s?écarter de l?évaluation scientifique des risques » de l?Etat membre rap- porteur pour la zone, « notamment lorsqu?il dispose de données scientifiques ou techniques plus fiables », dont le premier Etat membre « n?a pas tenu compte », s?il identifie « un risque inaccep- table pour la santé et l?environnement »136. En l?espèce, l?agence néerlandaise n?avait pas tenu compte des dernières évaluations s?agissant de 2 pesticides. Dans un autre arrêt du même jour137 la Cour applique ce raisonnement aux effets de perturbation endocrinienne : « lorsque l?autorité compétente d?un État membre, responsable de l?examen d?une 135 Rapport CGEDD ? IGAS ? CGAAER sur l?utilisation des produits phytopharmaceutiques de 2017 ? IGAS n° 2017-124R 136 Arrêt de la CJUE du 25 avril 2024, ECLI:EU:C:2024:350 137 Arrêt de la CJUE du 25 avril 2024, ECLI:EU:C:2023:717 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 117/203 demande d?autorisation dans cet État membre d?un produit phytopharmaceutique, dispose d?infor- mations pertinentes et fiables, fondées sur les connaissances scientifiques ou techniques actuelles (c?est-à-dire les plus récentes), quelle que soit la source de ces informations, qui indiquent qu?une substance active contenue dans le produit en cause est susceptible de perturber le système endo- crinien, cette autorité doit tenir compte du risque d?effets nocifs que ce produit est susceptible d?avoir, évaluer ce risque et prendre une décision appropriée sur cette demande. » Le règlement sur les biocides aménage une dérogation pour la protection de la santé humaine et environnementale Le règlement biocides n° 528/2012 vise dans son 3ème considérant à « supprimer, autant que possible, les obstacles au commerce des produits biocides ». Il dispose toutefois au 43ème considérant que « des considérations liées à l?ordre public ou à la sécurité publique, à la protection de l?environnement et de la santé humaine et animale, à la protection des trésors nationaux et à l?absence d?organismes cibles pourraient justifier, après accord avec le demandeur, le refus d?un État membre d?accorder une autorisation ou sa décision d?adapter les conditions de l?autorisation». C?est l?article 37 du règlement qui précise les conditions de cette exception : un Etat membre peut déroger à la reconnaissance mutuelle d?un produit biocide en refusant ou en adaptant les conditions d?une autorisation, et ce notamment pour la « protection de la santé et de la vie humaines, particulièrement des groupes vulnérables de la population, ainsi que de la santé et de la vie animales ou végétales ». L?Etat membre communique ses raisons aux demandeurs et essaie de parvenir à un accord. A défaut, l?Etat membre informe la Commission qui peut saisir l?ECHA pour avis ou adopter une décision sur la dérogation. Le règlement sur les matériaux de contact alimentaire prévoit une procédure de sauvegarde en cas de danger pour la santé humaine Le règlement sur les matériaux de contact alimentaire n° 1935/2004 rappelle dans son 13ème considérant que « les différences entre les dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales (...) sont susceptibles d?entraver la libre circulation de ces matériaux et objets, créant des conditions de concurrence inégale et déloyale ». Il prévoit néanmoins dans son article 18 une procédure de sauvegarde, permettant à un Etat membre de suspendre ou restreindre provisoirement une substance en raison de nouvelles données indiquant que l?emploi d?un matériau ou d?un objet « présente un danger pour la santé humaine ». Une telle décision doit immédiatement être notifiée à la Commission, qui rend un avis. Le règlement sur les cosmétiques dispose d?une clause de sauvegarde mais qui n?a qu?une faible portée Le règlement sur les cosmétiques n° 1223/2009 « harmonise de manière exhaustive les règles en vigueur dans la Communauté afin d'établir un marché intérieur des produits cosmétiques » (4ème considérant). Il rappelle dans son article 9 que « Les États membres ne refusent pas, n'interdisent pas et ne restreignent pas, pour des raisons concernant les exigences contenues dans le présent règlement, la mise à disposition sur le marché des produits cosmétiques qui répondent aux prescriptions du présent règlement ». Le règlement n?accorde donc pas de possibilité de dérogation, à une exception près, très encadrée : il s?agit de la clause de de sauvegarde, prévue à l?article 27. Celui-ci prévoit que « lorsqu'une autorité compétente constate ou a des motifs raisonnables de craindre qu'un ou plusieurs produits cosmétiques mis à disposition sur le marché présentent ou pourraient présenter un risque grave pour la santé humaine, elle prend toutes les mesures PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 118/203 provisoires appropriées pour assurer que le ou les produits concernés sont retirés, rappelés ou que leur disponibilité est restreinte d'une autre manière. » La Commission a toutefois rappelé que cette clause de sauvegarde « ne vise que des mesures individuelles concernant des produits cosmétiques mis à disposition sur le marché, et non des mesures de portée générale qui s?appliquent à une catégorie de produits contenant une certaine substance », ce qui affaiblit considérablement sa portée.138 Le droit du travail laisse place à l?initiative nationale sur la perturbation endocrinienne Le droit du travail européen, régulé par directive (cf.supra), définit un « niveau de protection mini- mal » et permet aux Etat membres d?avoir des règles plus protectrices. Il est ainsi possible de fixer des valeurs limites d?exposition professionnelle (VLEP) plus exigeantes dans le droit national que celles définies en droit européen. La SNPE2 prévoyait de revoir les VLEP des substances aux effets PE dans le droit national, mais cette action n?a pas été finalisée (action 39139). A l?heure actuelle, le droit du travail européen ne considère pas encore que l?exposition aux pertur- bateurs endocriniens des travailleurs nécessite des mesures de protection aussi strictes que l?ex- position aux substances CMR. Les perturbateurs endocriniens sont donc couverts par la directive n° 98/24/CE sur les agents chimiques sur le lieu de travail, mais pas par la directive n° 2004/37/CE sur les agents cancérogènes et mutagènes, qui est plus protectrice. Un accord de principe a été trouvé sur le sujet mais ne devrait pas pouvoir s?appliquer avant 2030 (cf.supra). La Belgique a fait le choix d?anticiper cette évolution dans son code du travail, qui requiert désor- mais les mêmes mesures de protection pour les perturbateurs endocriniens que pour les subs- tances CMR, choix cohérent avec la mise en place de la stratégie sur les perturbateurs endocri- niens du gouvernement belge (NAPED). Ainsi, la mission propose d?accorder, dans le code du travail français, la même protection des tra- vailleurs pour les perturbateurs endocriniens que celle existante pour les substances CMR. Une telle mesure concernerait un large panel de travailleurs. L?Institut national de recherche et de sécurité (INRS) avait détaillé les sources d?exposition professionnelle et établi une liste de 76 pro- fessions concernant l?industrie. L?INRS relevait que les travailleurs peuvent être exposés à des perturbateurs endocriniens lors notamment de : la fabrication et de l?utilisation de matières premières plastifiants et monomères dans la plasturgie, ou de solvants dans l?industrie chimique ; la production et la mise en oeuvre de divers produits contenant des perturbateurs endocriniens : peintures, colles, vernis, essences, détergents, pesticides, produits cosmétiques et pharmaceutiques, textiles, emballages ; la manipulation de déchets ou de sous-produits générés par certains procédés : émissions lors de l?épandage routier, nettoyage de fours et de tuyauteries, démantèlement d?anciens transformateurs électriques. 138 Lettre référencée (2019)7308531 au directeur général de l?ANSM du directeur de l?unité en charge des produits cosmétiques au sein de la DG GROW (marché intérieur, industrie, entreprenariat et PME) du 27 novembre 2019 139 En 2022, l?Anses a rendu 2 avis pour proposer des VLEP s?agissant du méthyl tert-butyl éther (MTBE) et de l?éthyl tert-butyl éther (ETBE) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 119/203 Tableau 10 : Activités professionnelles concernées par l?exposition professionnelle aux perturbateurs endocriniens, par nature de substance Principales activités concernées Catégories de produits Exemples de perturbateurs endocriniens Agroalimentaire Agents conservateurs, anti- oxydants, parfums? Hydroxytoluène butylé (BHT), hydroxyanisole butylé (BHA), méthylparabène? Cosmétiques Agents anti-UV, parfums? 2-Ethyl-hexyl-4-méthoxycinnamate, méthylsalicylate? Plasturgie et caoutchouc Plastifiants, monomères, retardateurs de flamme? Bisphénol A, résorcinol, phtalate de diéthyle (DEP), naphtalène? . Energie Additifs pour l?essence Méthyl tert-butyl éther (MTBE), éthyl tert- butyl éther (ETBE)? Textile et ameublement Retardateurs de flamme Chloroalcanes paraffinés, composés perfluorés? Chimie (peintures, encres, vernis, etc.) Solvants, biocides, agents fixateurs? Méthyl p-Hydroxybenzoate, acide borique, perchloroéthylène, octaméthylcyclotétrasiloxane? Bâtiments et travaux publics (dalles, enduits, peintures, etc.) Retardateurs de flamme, solvants? Phtalate de butyle et de benzyle (BBP), polybromodiphényléthers (PBDE)? Commerce Additifs révélateurs (tickets de caisse) Bisphénol A, bisphénol S? Entretien espaces verts Produits phytosanitaires (fongicides, herbicides) Deltaméthrine, terbutryn? Nettoyage industriel Détergents Nonylphenol? Traitement des déchets Retardateurs de flamme Polychlorobiphényles (PCB), polybromodiphényléthers (PBDE)? Source : INRS PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 120/203 Annexe 3.2.2 Au niveau national, des initiatives intéressantes mais qui doivent faire leurs preuves L?information du consommateur visée par la loi AGEC fait face à des difficultés techniques La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire se décline en plusieurs axes : sortie du plastique jetable, information des consommateurs, lutte contre le gas- pillage, action contre l?obsolescence programmée, qualité de la production. L?axe d?information du consommateur porte notamment sur la présence des perturbateurs endo- criniens dans les produits de consommation, information à mettre en ligne sur internet, en accès public et libre de droit. La loi introduit cette disposition par l?article L 5232-5 du code de la santé publique. Celui-ci impose à toute personne, mettant sur le marché français des produits à destination des consommateurs qui contiennent des perturbateurs endocriniens, de mettre à leur disposition des informations per- mettant de les identifier. Pour ce faire, l?Anses définit une liste de perturbateurs endocriniens avérés ou présumées (liste A). L?Anses définit également une liste de perturbateurs endocriniens suspectés (liste B) pour cer- taines catégories de produits présentant des risques d?exposition particuliers. La gamme des produits concernés par l?obligation d?information est vaste puisqu?il s?agit des subs- tances, des mélanges, et des articles (au sens du règlement REACH140) et des denrées alimen- taires. Les médicaments ne sont en revanche pas concernés. Trois arrêtés du 28 septembre 2023 précisent les modalités : La liste A des perturbateurs endocriniens avérés ou présumés y est publiée ; les substances retenues sont les 126 perturbateurs endocriniens recensés par l?Anses sur la liste candidate de REACH (SVHC) 141 , ainsi que 2 substances supplémentaires (mancozèbe et résorcinol). Une application est désignée pour mettre à disposition du public les informations, qui est Scan4Chem (application qui existe au niveau européen pour faciliter le « droit de savoir » prévu par l?article 33 du règlement REACH permettant aux consommateurs d?être informés, à leur demande, de la présence de SVHC à hauteur de 0,1% dans les articles). L?obligation d?information est détaillée : elle s'applique à l'ensemble constitué du produit et de son emballage primaire, dès lors que la concentration d'une substance présentant des propriétés de perturbation endocrinienne avérées ou présumées est supérieure à 0.1% en pourcentage massique, soit dans le produit concerné, soit dans son emballage. En dépit de l?avancée de principe que représente cette législation, plusieurs difficultés techniques en limitent l?impact : Scan4Chem a été conçu dans le cadre de REACH et sa base de données se limite aux « articles », l?application ne permet donc pas d?obtenir des informations sur les « mélanges » et « substances » (ainsi, un consommateur qui scanne un pot de peinture ou 140 Un article au sens de REACH est un objet auquel sont donnés, au cours du processus de fabrication, une forme, une surface ou un dessin particulier qui sont plus déterminant pour sa fonction que sa composition chimique. 141 Ce recensement présenté dans un avis du 5 mars 2021 est une extraction de la base de données publiques de la liste candidate de l?ECHA, et qui indique dans cette base, pour chaque substance, si des propriétés de perturbation endocrinienne ont été identifiées : https://echa.europa.eu/fr/candidate-list-table. Ces 126 substances correspondent aux 118 substances incluses dans la liste SVHC au motif d?une propriété de perturbation endocrinienne, ainsi que les 8 familles de substances identifiées dans cette liste. PUBLIÉ https://echa.europa.eu/fr/candidate-list-table Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 121/203 un pot de crème cosmétique ne peut trouver des informations que sur le contenant, ce qui peut s?avérer trompeur ou à tout le moins décevant) ; Pour la même raison, l?application ne répertorie que les produits SVHC, alors que les décrets d?application de la loi AGEC listent deux PE non SVHC, dont la présence ne pourra pas être signalée142. La diffusion de l?application Scan4Chem au niveau national est encore très limitée : en août 2023, elle avait été téléchargée par moins de 12.000 personnes en France143 (l?obligation d?information s?applique à partir d?avril 2024) ; En pratique, le recours à une application a ses limites : l?accès à l?information nécessite un téléphone portable, de disposer de réseau téléphonique (non systématique dans les magasins en sous-sol), et l?action de scanner un code-barres n?est pas pensée pour le commerce en ligne. Peu de données sont actuellement disponibles directement sur l?application, un temps est nécessaire pour que les entreprises mettent à disposition ces informations ainsi que leurs données de contact (à la date de rédaction du rapport, près de 15.000 fournisseurs européens étaient enregistrés dans la base de données d?Askreach, pour recevoir des requêtes et y répondre, dont 500 entreprises françaises) ; un travail de sensibilisation est mené par l?Ineris auprès des entreprises à ce sujet. Enfin, il est difficile pour les entreprises de connaître avec certitude la présence de SVHC dans leurs produits, en particulier lorsque ceux-ci sont fabriqués hors de l?Union européenne ou assemblés à partir de différents articles produits à l?étranger. L?élimination du plastique à la cantine prévue d?ici 2025 risque d?exiger des délais La loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l?équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire, dite EGalim, comporte plusieurs dimensions : soutien au revenu des agri- culteurs, restrictions d?utilisation de substances nocives, respect du bien-être animal ; lutte contre le gaspillage et réduction de l?utilisation du plastique dans le domaine alimentaire. La limitation du recours au plastique porte notamment sur les bouteilles en plastique dans la res- tauration scolaire, ainsi que les ustensiles en plastique à usage unique (pailles, couverts, assiettes, gobelets ?), interdictions toutes deux en vigueur depuis 2022. Plus spécifiquement, la loi EGalim interdit à partir de 2025 les contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en plastique dans la restauration des établissements scolaires, univer- sitaires et d?accueil des enfants de moins de 6 ans. Cette interdiction s?applique aussi dans les services de pédiatrie, d?obstétrique et de maternité, les centres périnataux de proximité ainsi que les autres services de santé maternelle et infantile, sauf dérogations. Dans les collectivités territo- riales de moins de 2?000 habitants, cette mesure peut être repoussée jusqu?à 2028. Ces dispositions avaient été introduits par amendement, appuyées par une campagne d?une as- sociation de parents d?élèves « Cantines sans plastique ». L?exposé des motifs de l?amendement précisait que « Les matières plastiques peuvent contenir des substances reconnues comme des perturbateurs endocriniens. La migration des molécules de synthèse (additifs dont les bisphénols) dans l?alimentation est favorisée par la chaleur, les aliments gras ou acides ; le phénomène est aggravé en cas d?usure des plastiques. » 142 Un ajout de ces deux substances est en discussion avec les responsables au niveau européen de la maintenance de cette application 143 Sur un total de 147.000 téléchargements en Europe ; ces chiffres sont issus du rapport d?impact : Impact-assessment- report_version-FINAL_19.11.2023.pdf (askreach.eu) PUBLIÉ https://www.askreach.eu/wp-content/uploads/2023/11/Impact-assessment-report_version-FINAL_19.11.2023.pdf https://www.askreach.eu/wp-content/uploads/2023/11/Impact-assessment-report_version-FINAL_19.11.2023.pdf Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 122/203 L?objectif visé par la loi est ambitieux et difficile, en raison du manque de préparation des acteurs de la restauration collective. Un très grand nombre de cantines scolaires opèrent en effet en liaison froide, où la nourriture est réchauffée dans des barquettes plastiques réfrigérées qui ont préparées dans une grande « cuisine centrale », extérieure au lieu de restauration. Ne plus réchauffer dans du plastique implique, pour les établissements concernés, un changement complet de fonctionnement, nécessitant une formation du personnel et des investissements con- séquents, pouvant se chiffrer en dizaines de milliers d?euros. Cet investissement peut cependant être amorti à terme en raison des économies d?achat de plastique, et présente un intérêt en termes de création d?emploi lié à une organisation relocalisée. L?offre de plastique « bio sourcé », dont la moindre nocivité n?a pourtant pas été prouvée144, ajoute de la confusion pour les établissements. Dans un avis de mars 2021145, le Conseil national de l?alimentation considérait que « Il n?y a pas, à date, de « contenant alternatif à usage unique » qui ne soit pas en plastique et qui puisse être utilisé en restauration collective. Ainsi, sauf évolution des technologies, la perspective de contenants à usage unique non plastiques n?existe pas. ». Le même avis ajoutait que « Les plastiques compostables et les plastiques dits « agrosourcés » ou « biosourcés » (par opposition aux plastiques initialement mis sur le marché et dits « pétrosour- cés ») doivent être considérés comme des plastiques au sens du droit européen, sauf s?ils ne sont constitués que de polymères naturels non chimiquement modifiés ». Un groupe de travail piloté par le ministère en charge de l?agriculture et de l?alimentation a été créé à ce sujet pour piloter les efforts de la restauration collective, et notamment les autres dispositions de la loi EGalim portant sur l?approvisionnement en nourriture bio. En l?état, les changements de pratique dans la restauration scolaire demandent un soutien fort des collectivités. S?agissant de la restauration universitaire et de la restauration dans les services de pédiatrie ou de maternité, les difficultés budgétaires représentent également un frein important au changement des pratiques. Enfin, l?absence de sanction assortie à cette obligation n?incite pas les collectivités ni les établisse- ments de santé concernés à se conformer à la loi en temps requis. L?effet de la loi sur la transparence pour les produits hygiéniques reste incertain Près de 3 milliards de produits de protection intime, dont près de 2 millions de culottes menstruelles, sont vendus chaque année en France. En mars 2016, le magazine « 60 millions de consommateurs »146 publiait une enquête révélant la présence dans les produits d?hygiène intime de résidus de substances toxiques : dioxine, glypho- sate, pesticides organochlorés et pyréthrinoïdes (insecticides). Cette publication a fait l?objet d?une forte médiatisation et conduit le gouvernement à solliciter un avis de l?Anses. L?Anses a rendu un avis le 4 juin 2018, qui inclut une enquête sur les pratiques d?utilisation des femmes et la perception des risques. L?Anses considère que le principal risque lié à l?utilisation des protections périodiques est celui du syndrome de choc toxique147. 144 Magazine de l?ADEME n°167 de Juillet-Août 2023 sur les produits biosourcés 145 Avis 87 du Conseil national de l?alimentation : « Substitution des contenants alimentaires composés de plastique en restauration collective », 10 mars 2021 146 60 millions de consommateurs, numéro n° 513, février 2016, sur la base d?essais conduits par l?Institut national de la consommation et le Service commun des laboratoires 147 Le syndrome de choc toxique est causé par un mauvais de protections périodiques internes (tampons et coupes menstruelles), et concerne selon l?Anses une vingtaine de cas par an PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 123/203 L?Anses souligne aussi que les matériaux de fabrication des produits intimes sont mal documentés. Pour les produits de protection externe, ils peuvent être divisés en 3 catégories : produits naturels d?origine dérivée du bois de nature cellulosique ; produits de nature synthétique de type polyolé- fines pour les serviettes et protège-slips ; et super-absorbant pour les serviettes. Pour les produits de protection interne (tampons), ils sont composés de produits d?origine naturelle dérivés du coton, qui subissent un traitement chimique, ainsi que de produits de nature synthétique de type polyolé- fines (qui sont les polymères les plus courants). L?Anses a également évalué les risques sanitaires liés aux substances identifiées dans l?enquête de 2016 précitée, ainsi que par une enquête complémentaire commandée l?Institut français du textile et de l?habillement, sur la base des valeurs toxicologiques de référence (VTR) et du niveau d?exposition des femmes au cours de leur vie. Pour l?Anses, aucun dépassement des seuils sani- taires n?est observé pour les différentes substances toxiques identifiées. Un certain nombre de substances identifiées dans ces protections intimes sont toutefois des per- turbateurs endocriniens suspectés148, pour lesquels l?Anses rappelle qu?il n?existe pas toujours des effets de relations dose-réponses clairement définis, permettant de fixer des VTR en dessous des- quelles on peut conclure à l?absence de risques. L?Anses recommande donc de minimiser autant que possible la présence de ces substances (ainsi que les substances CMR et les sensibilisants cutanés) et recommande la conduite d?études supplémentaires, qui sont très peu nombreuses en la matière. Afin d?améliorer la transparence sur la composition et les risques potentiels liés à l?utilisation des produits de protection intime, le décret n° 2023-1427 du 30 décembre 2023, entré en vigueur le 1er avril 2024, impose aux fabricants et responsables de la mise sur le marché de mentionner sur l?étiquetage et la notice d?utilisation des produits 3 catégories d?informations : la liste des composants (dans le cas des articles en textile, cette liste doit répondre à la législation européenne harmonisée imposant les règles d?affichage de la composition des produits textiles) et, pour chacun d?eux, le détail des substances et matériaux incorporés ; la mention des modalités et précautions d?utilisation (notamment les conditions d?hygiène et le temps de port maximal recommandé de 6 heures) ; et ce en caractères indélébiles, visibles, lisibles et compréhensibles ; les possibles effets indésirables (irritations, intolérances, allergies, microtraumatismes) ou plus graves tels que le syndrome de choc toxique menstruel. Le décret dispose que la composition du produit est présentée « sous la forme d'une liste compor- tant tous les composants qui sont présents et, pour chacun de ces composants, le détail des subs- tances et matériaux incorporés intentionnellement durant le processus de fabrication du produit fini ». Cette mention des « substances et matériaux incorporées intentionnellement » dans le « produit fini », si elle permet de signaler la présence de parfums volontairement ajoutés, laisse toutefois de côté les produits ajoutés non-intentionnellement, à l?instar des résidus de pesticides ou des subs- tances laissées par le blanchiment du coton ou le collage de la serviette. L?effet de cette mesure sur la diminution des substances toxiques et notamment des perturbateurs endocriniens dans les protections périodiques reste donc à ce stade incertain. 148 Parmi les substances identifiées par l?IFTH, plusieurs sont des perturbateurs endocriniens suspectés : Lilial®, HAP, DnOP, lindane, hexachlorobenzène, quintozène, dioxines et furanes, octaméthylcyclotétrasiloxane D4, décaméthylcyclopentasiloxane D5, Tétrahydrofurane, acide octanoïque, dioxyde de soufre, hydroxytoluène butylé, naphtalène PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 124/203 Une proposition de loi de restriction des PFAS en anticipation de règles européennes Le 4 avril 2024, l?Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi interdisant la présence des PFAS dans les vêtements, cosmétiques et farts (revêtements sous les skis) à partir de 2026, ainsi que les textiles à partir de 2030. La proposition de loi exclut toutefois de son champ d?application les ustensiles de cuisine, et notamment les poêles antiadhésives. Les PFAS, surnommés « polluants éternels », sont des molécules issues de l?industrie chimique, utilisées pour leurs propriétés antiadhésives, imperméabilisantes ou résistantes aux fortes chaleurs, et présentes dans de produits de consommation (emballages alimentaires, poêles, textiles, cosmétiques, mousses anti-incendie, batteries, peintures, pesticides...). Extrêmement persistantes dans l?environnement, les PFAS présentent également des risques graves pour la santé, et certains sont suspectés d?être perturbateurs endocriniens. A l?heure actuelle, 3 PFAS font l?objet d?une interdiction au niveau européen (PFOS, PFOA et PFHxS). Le Parlement européen a par ailleurs trouvé un accord avec le Conseil pour interdire les PFAS dans les emballages alimentaires à partir de 2026 (cf.supra). De plus, un dossier de restriction générale pour l?ensemble des PFAS est en cours d?examen par l?ECHA (cf.supra). Dans ce contexte, les initiatives nationales peuvent permettre de limiter l?exposition de la population, en avance de phase du droit européen, à l?image du Danemark qui a interdit les PFAS dans les mousses anti-incendie, les emballages alimentaires et plus récemment les textiles. La proposition de loi française comporte par ailleurs d?autres volets, notamment sur la surveillance dans l?eau potable (obligation de contrôle de la présence de PFAS par les autorités sanitaires), l?information du public (mise à disposition du public du recensement des sites émetteurs ou anciens émetteurs), et la création d?une redevance pollueur-payeur pour le rejet des PFAS dans l?eau. Dès lors, cette proposition de loi, qui devrait vraisemblablement être adoptée, va dans le sens de la logique de la SNPE2, bien que l?exclusion des ustensiles de cuisine en limite la portée. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 125/203 Annexe 4. Parangonnage international La France fait partie des pays fortement engagés sur la question des perturbateurs endocriniens. Une enquête d?opinion de 2022 indique que 88% des Français disent avoir entendu parler des perturbateurs endocriniens, signe d?une attention au sujet. Au sein des instances européennes, la France est également identifiée comme motrice en raison des positions soutenues, comme lors de la refonte du CLP, mais aussi du travail d?évaluation réalisé par l?Anses dans le cadre des évaluations au titre des règlements européens. L?existence de la SNPE2 contribue à affirmer l?engagement de la France sur le sujet. Plusieurs autres pays ont développé des stratégies sur le sujet, pour certains exclusivement sur les perturbateurs endocriniens, d?autres sur des sujets connexes, tels que les PFAS, ou les produits chimiques en général. Cette annexe livre un panorama sans vocation d?exhaustivité des stratégies existantes, sur la base d?entretiens conduits par la mission avec des représentants belges, danois, allemands et américains. Annexe 4.1. La Belgique a développé une stratégie inspirée de la SNPE2 et dispose d?un droit du travail considérant les perturbateurs endocriniens au même titre que les CMR La Belgique a mis en place depuis peu une stratégie nationale (NAPED149) s?appuyant sur certains éléments de la SNPE française. Cette stratégie, validée en 2022 à l?issue d?une consultation pu- blique, est prévue pour 5 ans, avec deux objectifs : diminuer l?exposition de la population et de l?environnement aux perturbateurs endocriniens, et augmenter la visibilité des actions prises par les autorités. Une enquête réalisée en 2020 auprès de la population a révélé une appropriation du sujet encore insuffisante : 49% n?en ont jamais entendu parler, 3 citoyens sur 4 pensent que les produits ne contiennent pas de substances potentiellement dangereuses, et 60% ignorent que l?utilisation des produits de consommation peut avoir des conséquences sur la santé. La NAPED a été élaborée à l?issue d?une concertation avec une centaine de parties prenantes, suivie d?une consultation publique, et avec l?accompagnement de groupes de travail rassemblant les experts dédiés. En termes de gouvernance, le suivi est assuré par trois organes : la NAPED task force (regroupant des représentants des différentes autorités compétentes), le comité des parties prenantes (industriels, associations, fédérations, syndicats, mutuelles, centres de forma- tions) et le comité scientifique. Des outils d?évaluation sont prévus : une évaluation annuelle par les différents comités de suivi, une évaluation à mi-parcours par une institution indépendante, ainsi qu?une évaluation finale sur le modèle des évaluations de la SNPE par les inspections. La stratégie est divisée en trois axes : la prévention, les actions réglementaires et la recherche. Ces axes contiennent 18 fiches-actions, parmi lesquels on peut citer : Axe prévention : formations en ligne accessibles à tous ; campagnes de communication vers les publics vulnérables notamment sur les réseaux sociaux ; incitation des industriels à travailler sur la substitution et partager leurs données sur l?application Scan4Chem. 149 NAPED : Nationaler Aktionsplan für endokrine Disruptoren ? Plan d?action national sur les PE PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 126/203 Axe réglementaire : traitement des perturbateurs endocriniens dans le droit du travail belge avec le même degré de protection aux expositions que les substances cancérogènes150, mutagènes et reprotoxiques (action qui pourrait être répliquée en France, en avance de phase sur le droit européen, cf.annexe n°3) ; incitations financières et fiscales à la substitution des SVHC ; renforcement du contrôle des produits. Axe recherche : investissement dans la recherche ; soutien à PEPPER ; soutien aux études de biosurveillance ; collecte de données pour réaliser de la biosurveillance intégrée (analyse des troubles de la santé en relation à l?exposition environnementale et professionnelle). L?adoption récente du plan n?a pas encore permis d?en dresser un premier bilan. Annexe 4.2. Le Danemark est actif contre la pollution chimique et a pris l?initiative de plusieurs législations sur les PFAS Le Danemark applique depuis 1999 un plan d?action sur les produits chimiques, régulièrement actualisé, la dernière version ayant été publiée en 2022. Ce plan d?action contient un programme de recherche sur les perturbateurs endocriniens associant 3 universités. Un centre des perturbateurs endocriniens existe par ailleurs au Danemark depuis 2009, pour renforcer la recherche et accompagner le gouvernement dans la prévention. Après l?identification d?une pollution importante de PFAS dans les eaux, causée par des mousses anti-incendie, une forte attention a été accordée aux PFAS dans le plan d?action sur les produits chimiques. Au Danemark, ce sont les communes et les régions qui sont responsables de la localisation des lieux suspectés de contamination aux PFAS et de la recherche de la source de la contamination. Il a été estimé que 5% des sources d?eau potable du pays étaient contaminées par des PFAS, avec 15 000 sites potentiellement contaminés. La valeur maximale acceptable de PFAS dans l?eau a été abaissée à un niveau de 2 nanogrammes/litre, soit 50 fois moins que seuil européen de 100 nanogrammes/litre. Le pays a été précurseur sur des interdictions nationales de PFAS dans certains usages : en 2020 pour les contenants alimentaires, en 2024 pour les mousses anti-incendie, et dernièrement pour les textiles qui seront bannis à partir de 2026. Le pays s?est également mobilisé au niveau européen pour porter des propositions de restriction calquées sur celles engagées au niveau national, en application de l?article 69.4 du règlement REACH (cf. annexe n°3) Le Danemark a également déposé une proposition européenne de restriction générale des PFAS, avec l?Allemagne, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède. Le dossier soumis à l?ECHA propose deux options : la première suggère une interdiction totale de plus de 10 000 substances chimiques PFAS, avec une période d?adaptation de 18 mois, la deuxième reprend cette interdiction mais autorise des dérogations pouvant atteindre 12 ans pour des utilisations sans substitution possible. C?est la seconde option qui a été retenue par l?ECHA, qui a lancé une consultation sur le sujet. 150 Arrêté royal du 2 juillet 2023 fixant des mesures afin de protéger les travailleurs contre les agents possédant des propriétés perturbant le système endocrinien PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 127/203 Annexe 4.3. La Suède est également très préoccupée par son niveau de pollution aux PFAS La Suède disposait en 2013 d?un plan d?action pour un environnement non-toxique mais il n?a pas été renouvelé. Le sujet des perturbateurs endocriniens reste toutefois suivi et en 2018, le gouvernement suédois s?est prononcé en faveur de la mise en place d?une plateforme de recherche approfondie afin d?identifier les mesures pertinentes pour minimiser l?exposition aux perturbateurs endocriniens. Ces dernières années, la Suède, à l?instar du Danemark, s?est particulièrement mobilisée contre les PFAS, en raison d?une contamination importante de ses sources d?eau potable, essentiellement due à l?usage des mousses anti-incendie pour les exercices des sapeurs-pompiers. En 2015, l?agence suédoise de l?alimentation, Livsmedelsverket, a réalisé une évaluation de la pollution des eaux potables en Suède, afin de délimiter quelles étaient les zones à risque. Parmi 1819 installations d?eau potable étudiées, 109, soit 6%, étaient concernées par une contamination aux PFAS, parmi lesquelles les installations les plus importantes de Suède comme celle de Järfalla qui alimente en eau potable la population de Stockholm. En tout, 3 millions de consommateurs suédois dans 65 communes étaient directement affectés par les PFAS dans l?eau potable A la suite de cette investigation, l?agence des produits alimentaires a été chargée par le gouvernement de prendre des mesures pour réduire la dissémination des PFAS, ce qui a été suivi d?une mobilisation transversale associant l?agence de la santé publique, l?agence des matériaux militaires et l?agence de l?alimentation. Le sujet des PFAS a rebondi en 2023 avec une étude de l?association de protection de l?environnement Naturskyddsförening (équivalent de France Nature Environnement en termes d?importance nationale), qui a montré que les poissons pêchés dans les lacs Mälaren, Vänern et Hjälmaren et vendus pour la consommation humaine dans les magasins d?alimentation contenaient des taux très élevés de PFAS. Depuis le 1er janvier 2023, les normes suédoises pour l?eau potable ont été abaissées concernant 4 PFAS (PFOA, PFNA, PFOS et PFHxS) à 4 nanogrammes/litre, en-dessous des seuils européens151. L?inspection des produits chimiques suédoise Kemikalieinspektion a émis des doutes sur l?efficacité de la réglementation, constatant que lorsque l?utilisation d?un PFAS individuel est encadrée par la loi, les industriels se tournent vers un autre PFAS non réglementé. Dès lors, l?inspection a proposé différents outils, dont un guide à destination des particuliers et des entreprises. L?agence de l?alimentation Livsmedelsverket diffuse de son côté des recommandations sur la consommation de poisson et d?eau du robinet, et contrôle régulièrement la qualité de l?eau potable dans les localités à risque. La ville de Stockholm se distingue par ailleurs avec son programme environnemental qui comporte l?objectif d?un environnement non-toxique. A ce titre, la ville a développé un « plan d?action sur les produits chimiques » comportant différentes actions : sensibilisation du public, clauses pour les marchés publics, encadrement des matériaux de construction, gestion des déchets, non-recours aux pesticides dans les parcs, surveillance environnementale, retrait des substances toxiques dans les crèches (près de 2 tonnes de phtalates ont ainsi été retirés grâce au remplacement des matelas en PVC dans les crèches). 151 Ces seuils sont inférieurs à ceux édictés par la directive 2020/214 sur la qualité de l?eau potable qui fixe deux limites de concentration à ne pas dépasser à partir de janvier 2026 : 0,1 microgramme / litre pour la somme de 20 PFAS préoccupants, et 0,5 microgramme / litre pour la totalité des PFAS. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 128/203 Annexe 4.4. L?Allemagne publie un premier plan d?action sur les perturbateurs endocriniens Fin 2023, l?Allemagne a publié un plan fédéral pour la protection contre les perturbateurs endocriniens (Fünf-Punkte-Plan der Bundesregierung zum Schutz vor hormonell schädigenden Stoffen) qui s?articule en 5 points : réglementation, information, coordination interministérielle, recherche et coopération internationale. Les trois objectifs principaux sont : améliorer la réglementation en travaillant à l?échelon européen ; améliorer l?information du public sur les risques existants ; renforcer la recherche et notamment la coopération internationale en la matière. Ce plan reste toutefois généraliste, sans horizon temporel, déclinaison régionale ou financement dédié. La particularité de ce plan tient à ce qu?il résulte d?un accord politique de la coalition gouvernementale au pouvoir au moment de son adoption, qui réunit 3 sensibilités différentes. Il n?est pas certain qu?il soit reconduit à l?issue des élections prévues fin 2025. Annexe 4.5. Les Etats-Unis ont relancé leur programme d?évaluation des pesticides perturbateurs endocriniens qui avait échoué Aux Etats-Unis, la régulation des pesticides est exercée par l?EPA (Environmental Protection Agency). Cette agence indépendante du gouvernement américain, chargée d?étudier et protéger la nature et la santé des citoyens, fut créée en 1970, quelques années après la parution du livre « Silent Spring » de la scientifique Rachel Carson alertant sur les effets sanitaires des pesticides. En 1999, un programme national d?identification et d?évaluation des perturbateurs endocriniens (EDSP152) a été lancé, destiné à prioriser et tester des substances déjà autorisées ou nouvellement mises sur le marché, en vue d?une éventuelle interdiction. Le programme EDSP analyse les effets sur la santé et l?environnement des pesticides, sur la base des données produites par les industriels. En effet l?EPA reçoit régulièrement des données d?évaluation des industriels sur leurs produits, données obligatoires pour bénéficier d?une autorisation de mise sur le marché, dont l?approbation dure en général pour 15 ans. La mise en oeuvre du programme a été vivement critiquée dans un rapport de l?Inspection générale de l?EPA de 2021 qui dénonçait qu?aucune évaluation toxicologique n?ait été finalisée. L?EPA a également été condamnée en justice pour son manque de résultats. L?EPA a donc annoncé fin 2023 le lancement d?une nouvelle stratégie d?analyse, reposant sur un processus d?évaluation des substances plus rapide. Le programme se concentre sur les pesticides conventionnels, à partir des données existantes. Le programme se concentre en priorité sur la santé humaine. L?approche retenue est une logique de management du risque, en tenant compte de l?exposition. A l?heure de rédaction du rapport, l?EPA n?a pas encore pris de mesures de restriction de pesticides au nom d?un effet perturbateur endocrinien reconnu. Au-delà du travail de régulation de l?EPA, le caractère fédéral du pays permet à des Etats de prendre des législations plus restrictives, ce qui est notamment le cas de la Californie qui interdit les emballages en PFAS depuis 2023. D?autres Etats tels que New-York, Washington ou l?Oregon sont également plus restrictifs concernant l?exposition aux substances chimiques. Enfin, il faut souligner l?existence de programmes de recherche parmi avancés, grâce à une 152 EDSP : Endocrine Disruptors Screening Programme PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 129/203 communauté scientifique importante. Trois universités notamment se distinguent sur le sujet : North Carolina State University, Duke University, et University of North Carolina at Chapel Hill. Elles travaillent en collaboration avec deux instituts nationaux : l?institut national de l?environnement (NIH) qui se concentre sur les effets des substances sur le cerveau et le comportement, et l?institut national de la santé environnementale (NIEHS). Ces programmes de recherche s?appuient notamment sur des grandes cohortes : SISTERS sur le cancer du sein ; All of us ou ECHO sur la santé environnementale ; CHAMACOS sur les familles de travailleurs agricoles en Californie. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 130/203 Annexe 5. Etat d?avancement des actions de la SNPE2 Tableau 11 : Etat d?avancement établi par la DGS et la DGPR suite au COPIL du 12/12/2023 Actions n° Objectifs Axes Actions Progression Action 1 Former- Informer 1. Etablir une liste des substances chimiques qui peuvent présenter des propriétés de perturbation endocrinienne pour une meilleure gestion des risques, en fonction du niveau de preuve et des incertitudes Expertiser des substances chimiques en vue de proposer la reconnaissance des dangers de PE au titre des règlements européens. Finalisée Action 2 Former- Informer Coordonner les travaux de l?ANSM et de l?Anses sur les perturbateurs endocriniens afin de renforcer l?évaluation des dangers et des risques des substances potentiellement PE dans les cosmétiques et produits de santé (médicaments à usage humain, dispositifs médicaux...) En cours Action 3 Former- Informer Définir une méthode de priorisation des substances qui peuvent présenter des propriétés PE, scientifiquement robuste et partagée avec les parties prenantes et les autres États membres, en vue d?établir une liste hiérarchisée de ces substances qui sera mise à disposition notamment des parties prenantes Finalisée Action 4 Former- Informer 2. Informer les citoyens sur les produits chimiques dont les perturbateurs endocriniens En cohérence avec les travaux au niveau européen et international, étudier la mise en place de dispositifs d?information obligatoires (étiquetage et/ou pictogramme) pour tous publics ou publics ciblés (femmes enceintes?) sur la présence de substances potentiellement PE dans les produits de la vie courante et articles manufacturés, produits alimentaires (aliments, emballages, contenants), les produits de santé et les cosmétiques. En cours Action 5 Former- Informer Mettre en place des événements type « journée sur les PE » pour sensibiliser la population et les relais d?opinion. En cours Action 6 Former- Informer Sensibiliser les élèves dans le cadre des actions éducatives de la promotion de la santé en milieu scolaire et des activités pédagogiques. En cours Action 7 Former- Informer Mener une campagne de communication grand public et créer un site internet de référence, afin d?informer la population sur les risques liés à l?exposition aux produits chimiques dangereux de consommation courante, de partager des bonnes pratiques destinées à limiter les expositions, en ciblant en priorité les populations les plus à risques (femmes enceintes, période des 1 000 premiers jours). En cours Action 8 Former- Informer 3. Former et s?appuyer sur les réseaux des professionnels, notamment des professionnels de santé, acteurs de la prévention auprès de la population Intégrer à certaines formations diplômantes un objectif de formation sur les risques chimiques, dont les perturbateurs endocriniens. En cours Action 9 Former- Informer Permettre le développement de la formation continue des professionnels de santé sur les risques chimiques, liés notamment aux perturbateurs endocriniens, et s?appuyer sur les professionnels de santé pour développer la prévention auprès des couples et des parents. En cours Action 10 Former- Informer Développer la formation des agents des collectivités territoriales (décideurs, acheteurs, agents de nettoyage, responsables et professionnels des services de petite enfance, restauration collective). En cours PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 131/203 Action 11 Former- Informer Renforcer la formation continue des professionnels en intégrant notamment les enjeux de santé environnement au sein des centres de formation continue professionnels (centre techniques professionnels). En cours Action 12 Former- Informer A partir des outils disponibles en santé environnement, permettre la mise en place, dans le cadre du service sanitaire des étudiants en santé, d?actions de sensibilisation dans les établissements scolaires, les lieux de vies et les entreprises. En cours Action 13 Former- Informer Donner plus de visibilité aux actions et bonnes pratiques mises en place par certains établissements de santé (notamment plateformes PREVENIR, maternité et service pédiatrique), des établissements accueillant des jeunes enfants, les collectivités territoriales, et d?autres partenaires (industrie, agriculture, vie sociale et associative) afin de réduire l?exposition aux PE. En cours Action 14 Protéger l'environnement et la population 4. Améliorer la connaissance de l?imprégnation de l?environnement par les PE Assurer une coordination scientifique entre les agences et instituts, afin d?améliorer la connaissance de l?imprégnation des milieux environnementaux. En cours Action 15 Protéger l'environnement et la population Expliciter la relation entre expositions et imprégnation. Action 16 Protéger l'environnement et la population Identifier et mettre en place la surveillance, dans l?air extérieur, de certaines substances identifiées par des campagnes expérimentales afin de collecter des données sur la présence de PE dans l?air extérieur. En cours Action 17 Protéger l'environnement et la population Identifier parmi les polluants de l?air intérieur les polluants susceptibles d?être perturbateurs endocriniens ? Réaliser des mesures dans les logements par l?OQAI et l?Ineris. En cours Action 18 Protéger l'environnement et la population Valoriser les mesures effectuées dans le cadre du réseau de mesures de la qualité des sols (RMQS). En cours Action 19 Protéger l'environnement et la population Préparer et récupérer les données de la prochaine campagne exploratoire prévue au titre de la directive- cadre sur l?eau pour développer le suivi des substances PE. Lien avec l?action 26 du Plan Micropolluants 2016- 2021 « Mener une surveillance prospective sur des molécules émergentes dans les rivières, nappes et eaux littorales et dans les eaux destinées à la consommation humaine ». En cours Action 20 Protéger l'environnement et la population Surveiller les rejets de certains secteurs d?activités industrielles. En cours Action 21 Protéger l'environnement et la population Réaliser des analyses exploratoires sur des produits de grande consommation destinés à des populations sensibles (jouets destinés aux enfants de moins de trois ans) en y recherchant des substances non réglementées présentant des propriétés PE avérées et pouvant exposer ces populations lors d?une utilisation normale et prévisible A lancer Action 22 Protéger l'environnement et la population Recenser les produits de grande consommation utilisant intentionnellement pour leur fabrication des substances PE non couvertes par des restrictions, et pouvant exposer les populations. A lancer Action 23 Protéger l'environnement Centraliser et exploiter les données sur l?imprégnation des milieux par les PE. En cours PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 132/203 et la population Action 24 Protéger l'environnement et la population Mieux prendre en compte le caractère PE dans la construction des normes de qualités environnementale (NQE) et des valeurs guides environnementales (VGE) pour des substances chimiques à enjeux pour les milieux aquatiques. Lien avec l?action 34 du plan Micropolluants 2016- 2021 « Construire des valeurs de référence et des méthodologies pour mieux juger de la qualité des eaux de surface et souterraines en prenant en compte les perturbateurs endocriniens et les métabolites pertinents ». Finalisée Action 25 Protéger l'environnement et la population Développer et promouvoir la surveillance de l?activité perturbatrice endocrinienne dans les milieux et les rejets à l?aide de méthodes biologiques intégratrices (plutôt que le suivi substance par substance). Lien avec l?action 25 du plan micropolluants 2016- 2021 « Évaluer les méthodes et les technologies innovantes de surveillance et de diagnostic ». Finalisée Action 26 Protéger l'environnement et la population 5.Renforcer la connaissance de l?exposition aux PE via l?alimentation et prendre des mesures pour prévenir et réduire cette exposition Analyser dans le cadre de la nouvelle étude de l?alimentation totale (EAT3), la présence de perturbateurs endocriniens afin d?évaluer les expositions alimentaires de la population générale. En cours Action 27 Protéger l'environnement et la population 6.Comprendre l?impact des PE sur la biodiversité Étudier l?impact de l?imprégnation des eaux par les PE sur l?intersexualité des poissons. Étendre la liste des indicateurs de la qualité des eaux développés dans le cadre de l?Observatoire national de la biodiversité à des indicateurs de contamination du milieu par des perturbateurs endocriniens. Finalisée Action 28 Protéger l'environnement et la population Développer les connaissances sur les effets des PE sur la faune sauvage En cours Action 29 Protéger l'environnement et la population 7.Préserver et restaurer l?environnement Renforcer le suivi du rejet des PE dans l?eau en amont et en aval des STEU en s'appuyant sur les structures existantes de suivi de l'environnement. Finalisée Action 30 Protéger l'environnement et la population Sur la base des NQE révisées, adapter les valeurs limites de rejet dans les eaux de surface. A lancer Action 31 Protéger l'environnement et la population Identifier des mesures de gestion des sols adaptés En cours Action 32 Protéger l'environnement et la population 8.Harmoniser la réglementation européenne qui s?applique aux objets du quotidien Définir rapidement et de façon cohérente les PE dans toutes les législations européennes concernées afin d?assurer un niveau de protection approprié pour tous les modes et voies d?exposition. Porter la position de la France au niveau européen pour oeuvrer pour une définition horizontale des PE. En cours Action 33 Protéger l'environnement et la population Vérifier le respect des exigences réglementaires (restrictions, interdictions, retrait d?autorisation) pour les substances inscrites pour leur propriété PE. En cours Action 34 Protéger l'environnement et la population Contrôler les produits importés En cours Action 35 Protéger l'environnement et la population 9.Guider l'action de l'industrie pour substituer et protéger Mobiliser les entreprises dans une démarche d?innovation technologique, organisationnelle et de service autour de la substitution des PE. En cours PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 133/203 Action 36 Protéger l'environnement et la population Promouvoir la substitution au sein des structures d?animation de R&D et auprès des opérateurs. Notamment, impliquer les pôles de compétitivité ou les centres techniques concernés en les encourageant à prendre en compte cette thématique dans leurs actions. En cours Action 37 Protéger l'environnement et la population Contribuer aux travaux de l?ECHA relatifs à la substitution des substances PE. Action 38 Protéger l'environnement et la population En lien avec les actions 1.10 et 1.11 du PST3, intégrer la problématique des perturbateurs endocriniens dans les démarches de prévention du secteur du nettoyage et élargir cette démarche à d?autres secteurs d?activités (par exemple coiffure, onglerie?). Action 39 Protéger l'environnement et la population Pour les PE identifiés : établir des valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP) et/ou des indicateurs biologiques d?exposition (IBE) dérivés des effets PE si cela est pertinent (s'il s'agit des effets les plus sensibles). A lancer Action 40 Protéger l'environnement et la population Susciter des engagements volontaires des industriels et des distributeurs pour supprimer ou substituer, dans les produits de consommation courante, les substances pouvant présenter des propriétés de perturbation endocrinienne, informer les consommateurs par la diffusion de messages de prévention. A lancer Action 41 Améliorer les connaissances 10.Accélérer la recherche pour comprendre et adapter au mieux notre gestion des risques et la réglementation Mettre en place une plateforme d?accompagnement à la validation de méthodes et tests permettant l?identification des effets de perturbation endocrinienne. Finalisée Action 42 Améliorer les connaissances Assurer une coordination pour soutenir la recherche et l'innovation sur les contaminants environnementaux, dont les perturbateurs endocriniens, en appui à la mise en oeuvre des politiques publiques dans le cadre plus large de la thématique santé environnement. Assurer la lisibilité pour l?ensemble des parties prenantes des efforts de recherche et des avancées sur les PE. En cours Action 43 Améliorer les connaissances 11.Développer une recherche appliquée en santé pour mieux prévenir, prendre en charge et traiter les effets des perturbateurs endocriniens Cartographier les recherches appliquées en santé en cours et développer les projets concernant les effets des perturbateurs endocriniens sur la santé, en particulier pour les personnes vulnérables et les travailleurs exposés, et des outils cliniques pour caractériser le lien entre anomalies de santé et perturbation endocrinienne. En cours Action 44 Améliorer les connaissances 12.Élargir la surveillance, en lien avec l?exposition aux perturbateurs endocriniens, à d?autres pathologies humaines que celles de la reproduction et poursuivre la surveillance des expositions humaines Élaborer des valeurs d?imprégnation critique (valeurs sanitaires de référence). En cours Action 45 Améliorer les connaissances Poursuivre et renforcer la surveillance des indicateurs sanitaires déjà développés en lien avec les perturbateurs endocriniens. En cours Action 46 Améliorer les connaissances Élargir la surveillance à d?autres pathologies en lien avec les perturbateurs endocriniens. En cours Action 47 Améliorer les connaissances 13.Définir les nouvelles perspectives du programme national de biosurveillance en se plaçant dans le contexte Développer un réseau national de laboratoires qui analysera les données de biosurveillance. En cours Action 48 Améliorer les connaissances Créer une plateforme nationale de collecte, d?harmonisation et de partage des données de biosurveillance. En cours PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 134/203 Action 49 Améliorer les connaissances européen Définir les nouvelles perspectives du programme national de biosurveillance en se plaçant dans le contexte européen. En cours Action 50 Améliorer les connaissances Identifier des biomarqueurs d?effets et les intégrer dans les études de biosurveillance. En cours Note : Les cases vides n?ont pas été complétées par les pilotes de ces actions. Source : DGS et DGPR PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 135/203 Annexe 6. Recherche Annexe 6.1. Agence nationale de la recherche (ANR) Annexe 6.1.1 Recherche financée par le plan d?action de l?ANR A partir de 2014, les thèmes de recherche en lien avec le PNSE ont été développés dans les différentes éditions de l?appel à projet générique (AAPG) du plan d?action de l?ANR. Si les différents thèmes sont globalement conservés d?une édition à l?autre, leur répartition et leur articulation ont évolué dans les défis 1, 4 et 5, les axes ou les axes inter-défis. Depuis l?AAPG 2018, la notion de défi a disparu ; la thématique « contaminants, écosystèmes et santé » est alors à nouveau identifiée en tant qu?axe thématique. Malgré ces évolutions, la communauté a continué à proposer des projets couvrant bien le champ des thématiques. Le nombre des projets déposés dans le comité « Contaminants, écosystèmes et santé » s?est maintenu à environ une centaine de dépôts par édition après le passage dans l?AAPG en 2014 et le mode de sélection en deux étapes. Au niveau des comités d?évaluation de l?AAPG, de 2014 à 2023, le comité d?évaluation scientifique « contaminants, écosystèmes et santé » a évalué des projets où étaient fortement encouragées la pluridisciplinarité ou l?interdisciplinarité, tous en lien avec des aspects de santé environnement selon une approche « One Health ». Annexe 6.1.2 Analyse de situation de l?ANR sur les projets sur les perturbateurs endocriniens dans le cadre de la SNPE1 (2014-2018) et SNPE2 (2019-2022) Les projets sur les perturbateurs endocriniens entrant dans le cadre des SNPE1 (2014-2018) et SNPE2 (2019-2022) ont été financés via les différents instruments de financement de l?ANR : 21% (SNPE1) et 18% (SNPE2) sont des projets « jeunes chercheurs jeunes chercheuses », 9% (SNPE1) et 12% (SNPE2) sont des projets avec des consortiums internationaux (multilatéraux ou bilatéraux) et 55% (SNPE1) et 49% (SNPE2) sont des projets portés par des consortiums natio- naux. Les projets collaboratifs nationaux avec des partenaires non académiques (privés, associa- tions, collectivités, etc.) représentent 6% (SNPE1 et SNPE2) des projets financés. S?agissant des recherches sur les perturbateurs endocriniens pendant les périodes d?exécution de la SNPE1 (2014-2018) et de la SNPE2 (2019-2022), l?ANR note une augmentation significative des projets financés entre les deux périodes (n=33, 12,5 M¤ pour 2014-2018 vs n= 49, 24,5M¤ pour 2019-2022). L?ANR note également l?influence de l?AAP Chlordécone 1 en 2022 dans ce calcul (6 projets finan- cés, 4,5 M¤). Dans le cadre de la SNPE1 (2014-2018) ; 52% des projets financés étaient en toxi- cologie humaine et 48% en écotoxicologie et pour la SNPE2 (2019-2022), 41% des projets financés étaient en toxicologie humaine et 59% en écotoxicologie. En écotoxicologie, différents organismes ont été utilisés comme les poissons (truite), les mollusques (huîtres, moules), les oiseaux, les in- sectes (abeilles) et les amphibiens. Certains de ces projets s?appuient sur des données issues des cohortes : Cohorte PELAGIE (perturbateurs endocriniens : étude Longitudinale sur les anomalies de la grossesse, l?infertilité et l?enfance) : étude de la croissance, de l'obésité, du développement pubertaire et des troubles neurocomportementaux chez les enfants à 12 ans, en association avec les expositions précoces à des polluants. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 136/203 Cohorte ELFE (étude longitudinale française depuis l?enfance) : exposition et effets Neurotoxiques des retardateurs de flamme. Cohorte SEPAGES (suivi de l'exposition aux polluants atmosphériques durant la grossesse et l'enfance et santé) : ? expositions prénatales aux phénols et santé de l?enfant : analyse longitudinale ; ? microbiote intestinal dans l?enfance et expositions environnementales maternelles ; ? expositions précoces aux perturbateurs endocriniens et neurodéveloppement de l'enfant : le rôle de l'axe hypothalamo-hypophysaire ; ? exposition maternelle à un mélange de polluants organiques : marques épigénétiques placentaires et évaluation des risques pour la santé de la descendance. Cohorte EDEn (étude de cohorte généraliste menée en France sur les déterminants pré- et postnatals précoces du développement psychomoteur et de la santé de l?enfant) : co- exposition intra-utérine et postnatale à un grand nombre de contaminants alimentaires et la croissance et le développement de l'enfant, Cohorte ComPaRe (communauté de patients pour la recherche) : exposition aux polluants organiques persistants et sévérité de l'endométriose dans la cohorte ComPaRe- Endométriose. En comparant les projets financés durant la SNPE1 et la SNPE2, l?ANR a remarqué que les projets sont déposés dans plus d?axes thématiques différents. Lors de la SNPE1, les projets étaient prin- cipalement dans l?axe « toxicologie et écotoxicologie » alors que l?on voit apparaître plus fortement les axes « Méthodologies, instrumentations, capteurs et solutions pour la transition écologique » et « Alimentation et systèmes alimentaires » durant la SNPE2. Cela montre, selon l?ANR, que la thématique des perturbateurs endocriniens a diffusé dans d?autres communautés de recherche. L?ANR note que les recherches ont permis la mise au point d?une ligne directrice (test règlementaire) OCDE, avec le test EASZY (test utilisant des embryons de poisson zèbre transgéniques). Ce test informe des effets endocriniens des substances chez les vertébrés (activation du gène de l?aroma- tase B par les perturbateurs endocriniens : le gène qui convertit les androgènes en oestrogènes sous stimulation par des perturbateurs endocriniens oestrogéniques). Annexe 6.1.3 L?ANR considère qu?il y a eu des avancées issues de la recherche sur les PE L?ANR estime qu?il y a une structuration de la communauté scientifique sur la thématique des per- turbateurs endocriniens. La plupart des projets étaient pluridisciplinaires : endocrinologie, toxicolo- gie, pharmacotoxicologie, écotoxicologie, écophysiologie, biologie, omique, chimie, santé publique, épidémiologie, physiopathologie. Des principales avancées scientifiques portent sur : La caractérisation des effets sur différentes fonctions physiologiques : ? fonction de reproduction et les troubles occasionnés : problèmes de fertilité masculine ou féminine, des impacts sur le développement intra-utérin, la descendance, des effets transgénérationnel, l?épigénétique, l?endométriose ; ? système nerveux, neurodéveloppement, troubles neurocomportementaux, neurotoxiques et psychiatriques ; ? impacts thyroïdiens, impacts métaboliques, la barrière intestinale, le microbiote, le développement de cancer. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 137/203 L?étude des mécanismes d?action au niveau moléculaire et cellulaire : fixation des PE sur les récepteurs nucléaires, des effets synergiques, le développement de méthodes in silico. La recherche de biomarqueurs d?exposition et d?effets. Les effets et modes d?action de différents types de composés. La majorité des travaux a porté sur des micropolluants organiques, mais des effets PE ont également été montré pour des métaux (Cd) et plus récemment de nanoparticules contenues dans les aliments ou encore des additifs chimiques contenus dans les plastiques. L?ANR cite par exemple les travaux sur : le Bisphénol A et ses produits de substitution, des composés pharmaceutiques, des antalgiques, des phtalates, les perfluorés, les retardateurs de flamme (PBDE), les pesticides (ex : Chlordécone), des métaux (ex : Cadmium), des additifs alimentaires, des additifs contenus dans les plastiques. Les méthodes et techniques de détection en vue de l?évaluation de l?exposome humain ou environnemental : spectrométrie de masse haute résolution, techniques analytiques ciblées et non ciblées, quantification de polluants fluorés par RMN du fluor, imagerie chimique haute résolution, ou encore mise au point de biosensor ou de détecteurs. Les techniques de traitement/remédiation des eaux ou des déchets, agricoles notamment (contenant des mixtures de contaminants dont des composés de type perturbateurs endocriniens). Annexe 6.2. Le plan national de recherche Environnement Santé Travail (PNR EST) Depuis la création du PNR EST en 2006, plus de 120 projets relatifs à la thématique des perturbateurs endocriniens ont été financés via les appels à projets de recherche. Les financements confiés à l?Anses à partir de 2018 par le ministère chargé de l?environnement se sont traduits par une forte augmentation du nombre de soumissions de projets et du nombre de projets financés. Alors que 4 à 7 projets étaient retenus chaque année, à partir de 2018 de 8 à 15 projets sont financés. Deux tiers des projets ont pour cible principale d?application les populations humaines et un tiers portent sur l?environnement au sens large (écosystèmes, sols, animaux, plantes). De nombreux perturbateurs endocriniens sont étudiés seuls ou en cocktail sur l?ensemble des projets visés sur la période ; les cibles d?étude sont principalement les populations humaines, les vertébrés et les arthropodes ; les effets étudiés sont multiples, aussi bien au niveau des axes endocrines humains, que des effets sur les organismes des écosystèmes ; l?ensemble des voies d?exposition sont étudiées, avec une majorité des projets qui portent sur la voie alimentaire, l?exposition périnatale, et les eaux dans l?environnement en tant que milieux de vie. Tout ceci montre que l?ensemble de ces projets concourt à mettre en oeuvre une approche globale de l?ensemble des expositions avec un équilibre intéressant entre les études de santé humaine, et les études des écosystèmes, certains projets portant sur les deux approches à la fois, qui est à replacer dans une perspective une seule santé. Annexe 6.2.1 Bilan financier des projets relatifs aux perturbateurs endocriniens entre 2019 et 2023 Tableau 12 : PNR EST, financement depuis 2019 PNR-EST 2019 2020 2021 2022 2023 Total Budget 1 920 524 2 179 926 1 199 633 1 389 621 2 185 332 8 875 036 Nombre de projets 12 11 6 7 14 50 Source : Anses PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 138/203 59 projets relatifs aux PE sont dénombrés entre 2019 et 2023, soit une douzaine de projets en moyenne chaque année. 10,4 M¤ ont été attribués à 59 projets, variant entre 1,2 M¤ en 2021 et 2,2 M¤ en 2020 et 2023. Sur la période 2019-2023, ont été financés : 8 études de faisabilité, chacune recevant en moyenne 50 000¤, et 51 projets de recherche, chacun recevant en moyenne 195 000¤. Graphique 2 : Montant total des subventions accordées par année pour les projets relatifs aux perturbateurs endocriniens Source : Anses Annexe 6.2.2 Bilan des équipes impliquées dans les projets Entre 2019 et 2023, la majorité des projets était portée par deux à trois équipes. Au total, 146 partenaires différents sont associés sur les 59 projets, dont 13 sont associés sur 2 ou 3 projets différents, soit en porteurs principaux soit en partenaires associés. Tous les porteurs principaux des projets sont issus d?équipes françaises. Mais 8 projets associent d?autres équipes européennes (Belgique, Allemagne, Espagne, Portugal), et 4 projets associent des équipes canadiennes. Au total près de 20% des projets présentent une dimension internationale. Annexe 6.2.3 Méthodologies générales mises en oeuvre dans les projets La grande majorité des projets sont des études toxicologiques. Un quart des projets contiennent des études épidémiologiques, dont 12 projets sur des cohortes déjà constituées ou qui réalisent un recrutement. Deux projets sont basés sur la modélisation (sur la structure chimiques153, ou sur la répartition des contaminants). Trois projets cartographient l?environnement. Les études toxicologiques sont de toutes natures : au niveau de l?organisme dans son ensemble (effets reproductifs, développementaux, comportementaux, ?), au niveau cellulaire (modèles cel- lulaires variés : hépatocytes, cellules tumorigènes, cellules cutanées, ?), au niveau moléculaire (chimique, ADN, ARN, protéines, ?), ou encore approche par modélisation (par analogie structu- rale comme le QSAR quantitative structure-activity relationship). 153 Criblage virtuel des modalités de perturbation du système endocrinien 0 500000 1000000 1500000 2000000 2500000 2019 2020 2021 2022 2023 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 139/203 Annexe 6.2.4 Les types de perturbateurs endocriniens étudiés Les plastiques dans leur ensemble constituent l?objet d?étude de 30% des projets : constituants des plastiques comme les bisphénols, ou plastifiants comme les phtalates, ou encore les nano/micro plastiques. Suivant l?ensemble des produits phytosanitaires (pesticides, insecticides comme les néonicotinoïdes, fongicides) qui représentent 20% des projets. De nombreuses autres substances sont étudiées : benzène, hydrocarbures aromatiques polycy- cliques (HAP), perfluorés, parabènes, organochlorés (telle la chlordécone), organophosphorés. Un projet sur huit s?intéresse aux effets cumulés des expositions à plusieurs PE, en effet « cock- tail ». Les résidus de médicaments154 (anti-inflammatoires non stéroïdiens et hormones de synthèse) peuvent être étudiés en tant que tels. Certains paramètres physiques sont aussi étudiés pour les PE engendrés : la lumière sur les cycles circadiens, ou un ensemble de paramètres définissant les conditions de vie aquatique (température, acidification, oxygénation?), ou encore l?approche nanoparticulaire (particules de la pollution at- mosphérique, ou des plastiques). Annexe 6.2.5 Les principaux effets étudiés des PE Les principaux effets étudies des PE sont les perturbations de : L?axe métabolique au sens large pour un quart des projets : hormones thyroïdiennes, obésité, diabète, stress. L?axe reproducteur pour un quart des projets : hormones stéroïdiennes (principalement oestrogènes), axe hypothalamo-hypophysaire. Le système nerveux, et en particulier son développement pour un quart des projets, parmi lesquels on note des projets sur: la mort-subite des nourrissons, l?autisme, la neuro- inflammation, la maladie de Parkinson, la dépression, les modifications comportementales au sens large, la modification de l?olfaction chez les insectes, les rythmes circadiens. Diverses pathologies : pathologies respiratoires (asthme), arthrite rhumatoïde, cancers. Les stades de développement chez les arthropodes (ecdysone et stades larvaires) pour quatre projets. Annexe 6.3. L?investissement de la France dans les projets européens Annexe 6.3.1 Le partenariat européen pour l'évaluation des risques liés aux substances chimiques PARC (partnership for the assessment of risks from chemicals) Ce partenariat de 7 ans s?inscrit dans Horizon Europe 2021-2027 et plusieurs projets sur les PE (dont une partie prévue par la SNPE2) y sont menés notamment sur les bisphénols, les PFAS, la surveillance environnementale ou encore certains pesticides ; 154 Impact des résidus d?anti-inflammatoires non stéroïdiens et d?hormones dans les eaux destinées à la consommation humaine sur la fonction de reproduction et la fertilité PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 140/203 PARC, lancé en mai 2022, n?est pas un projet porté par la SNPE2, bien que certaines actions de la stratégie nationale aient été mises en oeuvre dans le cadre de PARC (surveillance de l?environ- nement, modèles pharmacocinétique physiologique PBPK, réseau de laboratoires de biosurveil- lance?). Par ailleurs la SNPE2 a manifestement permis aux acteurs français de travailler en- semble, ce qui a facilité la préparation de PARC. PARC a pour objectif de soutenir la stratégie de l?UE pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques ouvrant la voie à l'ambition « zéro pollution » annoncée dans le Pacte vert pour l?Europe (European Green Deal). PARC a pris la suite des travaux du programme conjoint européen sur la biosurveillance humaine Human Biomonitoring for Europe HBM4EU, terminé en 2022, et élargit son champ d?intérêt en particulier à l?évaluation des risques pour l?environnement. De plus PARC assure le relais du programme EURION qui va s?achever ou se sont achevés (financés au titre de H2020). Dans le cadre d?Horizon Europe (le programme-cadre de l?UE pour le financement de la recherche et de l?innovation 2021-2027), le partenariat regroupe 200 partenaires de 28 pays de l?échelon eu- ropéen, agences nationales et organismes de recherche dans l?environnement ou la santé publique, Agence européenne des produits chimiques (ECHA), Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), Agence européenne pour l?environnement (EEA). La France y est présente avec 15 membres155 : Anses, Santé Publique France, BRGM, CEA, CNRS, CSTB, EHESP, Ineris, INRAE, INRS, Inserm, IRSN, LNE, OFB, Oniris. Le partenariat est coordonné par l?Anses, qui assure la coordination scientifique et administrative de l?ensemble du partenariat, participe également aux activités transversales et à la production scientifique. Santé Publique France est en charge des programmes de travail sur la biosurveillance et de la coordina- tion du Hub français. Le budget est de 400 M¤, financé à 50 % par l?Union européenne et 50 % par les États membres. Les équipes françaises ont capté 16,3% du budget pour un montant de 9 740 325 M¤ (à début 2024). La gouvernance de PARC est assurée par cinq Directions générales de la commission européenne (DG-RTD, DG-GROW, DG-ENV, DG-Santé, CCR) ainsi que par les ministères compétents des pays concernés. Le secteur privé n?est pas présent dans la gouvernance de PARC, mais les indus- triels sont cependant présents dans les projets de recherche. Les trois principaux objectifs de PARC sont de : Développer les compétences scientifiques, en matière de sécurité des substances chimiques, pour identifier et prioriser les besoins. Fournir de nouvelles données, de nouvelles méthodes et des outils innovants aux évaluateurs et gestionnaires des risques liés à l?exposition aux substances chimiques. Renforcer durablement les réseaux interdisciplinaires, réunissant les acteurs spécialisés dans les différents domaines scientifiques contribuant à l?évaluation des risques. Fin 2023, après 18 mois de mise en place, il est difficile de faire un bilan, mais il y a néanmoins quelques acquis : visibilité du sujet de l?évaluation des produits chimiques, dialogue entre diffé- rentes communautés? Selon le coordonnateur du partenariat, d?ici juin 2025, il serait bien que 155 BRGM Bureau de Recherches Géologiques et Minières, LNE Laboratoire national de métrologie et d?essais, CSTB Centre scientifique et technique du bâtiment, Oniris VetAgroBio Campus vétérinaire PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 141/203 PARC puisse notamment lancer un programme de bio monitoring, une position commune sur les PFAS et un cadre pour les alternatives aux tests animaux. Les premières étapes156 de la mise en place de PARC avaient pour objet de : Poursuivre les travaux en matière de biosurveillance des substances chimiques chez l?être humain avec l?initiation d?études européennes en population générale et en situations de travail, et réalisation d?un état de l?art en matière de surveillance des substances chimiques157. Générer des données pour répondre aux besoins réglementaires et au développement de nouvelles approches méthodologiques pour évaluer des effets chez l?être humain ou sur les organismes cibles de l?environnement. Développer des modèles informatiques et des méthodes d?analyse des données permettant une analyse des effets de mélanges et d?expositions combinées. Contribuer à rendre les données et les modèles accessibles et réutilisables à des fins de recherche et d?évaluation de risque (selon les principes dits « fair ? facile à trouver ? accessible - interopérable - réutilisable »), dans le cadre d?une démarche « science ouverte ». Développer de nouveaux concepts et outils nécessaires à la mise en oeuvre de la stratégie européenne dans le domaine des produits chimiques : la synthèse chimique de nouvelles molécules ou matériaux sans risques pour la santé et l?environnement, la capacité de détecter les substances dangereuses pour la santé ou l?environnement ou à la mise à disposition d?outils de modélisation. S?agissant des PE, en date de fin 2023, plusieurs projets ont été financés dans le cadre de PARC : 13 projets financés sur les PE, pour 53 M¤, dont un projet de bio-monitoring et de surveillance incluant les PE (5,5 ¤), deux projets de surveillance environnementale (8 M¤), huit projets sur la caractérisation du danger, et deux projets sur l'évaluation des risques. EHEN European Human Exposome network (106 M¤), Joint Research Center (JRC). En 2019, 9 projets, pour 106 M¤ d?aides UE, renforcé par d?autres projets en 2020 (126 groupes de re- cherche, 24 pays, les acteurs français sont présents dans 6 des 9 projets, dont une coordination par l?Inserm). EIRENE Europ/Exposome Infrastructure : la participation au portage de cette infrastructure eu- ropéenne sur l?Exposome, doublée de France Exposome (grande infrastructure de recherche). EURION (50M¤) JRC Cluster est lancé le 1er janvier 2019 afin d?optimiser les synergies entre les projets sélectionnés pour un financement dans le cadre de l?appel SC1-BHC-27-2018 « Nouvelles méthodes de test et de criblage pour identifier les perturbateurs endocriniens ». Le cluster est com- posé de huit projets de recherche financés par Horizon 2020 (50 M¤ sur 5 ans). Chaque projet se concentre sur un aspect différent des nouvelles méthodes d?essai et de dépistage permettant d?identifier les PE. L?animation scientifique y est très forte, avec l?existence de groupes miroirs en France. 156 Source Anses 157 Mettre en place de nouveaux dispositifs ou élargir le champ des substances surveillées dans les dispositifs existants et innover sur les méthodes analytiques mises en oeuvre PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 142/203 Annexe 6.3.2 Les méthodes de test La validation des méthodes de test L?évaluation du caractère perturbateur endocrinien des substances chimiques repose sur des mé- thodes analytiques mises à la disposition des acteurs économiques, des laboratoires et des auto- rités de régulation. Elles sont principalement utilisées pour les essais réglementaires de sécurité, la notification et l'enregistrement des produits chimiques. Ces méthodes font l?objet d?un travail de normalisation, notamment au niveau de l?OCDE. L?OCDE a publié en 2012 un « document d?orientation révisé 150 sur les lignes directrices d?essai normalisées pour l?évaluation des produits chimiques de perturbation endocrinienne » ; document mis à jour en 2018. Ce document fournit des principes généraux (critères qualité à respecter, con- seils pour l?interprétation des résultats?), que les méthodes doivent respecter pour être validées par l?OCDE. A ce jour, une cinquantaine de méthodes ont été validées s?agissant de la perturbation endocri- nienne. Les dossiers de normalisation sont portés par les Etats membres de l?OCDE. La France joue un rôle moteur en la matière. Les méthodes sont réparties sur 5 niveaux (depuis la simple analyse de données jusqu?aux tests in vivo sur plusieurs générations en passant par les tests in vitro) et vise 5 modalités de perturbation endocrinienne : perturbation endocrinienne médiée par les oestrogènes, les androgènes et la thy- roïde, ainsi que les substances qui interfèrent avec la stéroïdogenèse. Source : OCDE A ce jour, on dispose de nombreuses méthodes d?analyse pour les voies d?actions relatives aux androgènes, aux oestrogènes et aux stéroïdes. Pour la voie thyroïdienne, les méthodes normali- sées sont moins nombreuses même si plusieurs sont en cours de validation. Pour les autres voies de perturbation endocrinienne qui ne sont pas liées aux récepteurs endocri- niens (transport des hormones, métabolisme?), les tests sont encore peu nombreux. La voie mé- tabolique est particulièrement importante et complexe (par exemple pour les hormones sécrétées par le pancréas?) et de nouvelles méthodes d?analyse sont attendues dans ce domaine. L?impact sur le neurodéveloppement constitue un autre enjeu important. Des méthodes sont en cours de validation sur ce sujet. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 143/203 Enfin, l?OCDE s?intéresse aux nouvelles méthodologies d'approche (NAM), comprenant des essais in vitro (omics, cellulaires, tissulaires, etc.), des modèles in silico et d'autres approches computa- tionnelles. L?enjeu est de fournir des informations sur les dangers et les risques chimiques pour les humains tout en limitant l'utilisation des animaux158. La plateforme PEPPER Historique, moyens et gouvernance PEPPER (plateforme public-privé sur la pré-validation des méthodes d?essai sur les perturbateurs endocriniens) est une association de loi 1901 créée en décembre 2019 dont le but est de soutenir la « pré-validation » de méthodes d?essai (en toxicologie et écotoxicologie) nécessaires pour caractériser des propriétés de perturbation endocrinienne. S?appuyant sur des tests réalisés dans différents laboratoires, la pré-validation est un processus amont qui facilite la validation de méthodes par les instances internationales, en particulier l?OCDE. Le projet PEPPER était déjà inscrit dans la première version de la SNPE. De 2014 et 2016, des négociations ont été menées entre les différents acteurs, à la fois entre ministères et avec les industriels (via les fédérations telles que la FEBEA et France chimie). A sa création, la plateforme a bénéficié des financements du « programme des investissements d?avenir » et de contributions de la part des industriels, selon un modèle de partenariat public/privé. PEPPER est doté d?une équipe de 5 personnes et d?un budget annuel d?environ 2 M¤, en croissance limitée mais constante. 2019 2020 2021 2022 2023 TOTAL M¤ 1.7 1.8 2.5 2.8 9 ETP 0 3 4 5 5 22 Source : PEPPER Environ les deux tiers du budget de l?association (jusqu?à 2 M¤ /an) sont consacrés au financement des essais en laboratoires et les prestations associées (fournitures d?échantillons, analyses statistiques?). Le coût de pré-validation d?un test peut en effet être élevé (jusqu?à 1.1 M¤). PEPPER compte actuellement 18 membres, contre 10 en 2019. On y trouve des ministères (Ecologie, Agriculture et Travail), des opérateurs (Ineris), des syndicats professionnels (FEBEA, France Chimie, ANIA?), des industriels (BAYER, BASF, LVMH?), des laboratoires (Eurofins?), ? La gouvernance est originale, avec un « comité d?opportunité » qui s?ajoute au conseil scientifique et au conseil d?administration. Le comité d?opportunité, composé d?une quarantaine de membres, se prononce notamment sur le choix des méthodes à pré-valider. Il permet d?associer à ces choix les différentes parties prenantes : agences internationales (OCDE, ECHA?), agences et universités de pays membres de l?UE (Pays-Bas, Allemagne, Belgique, Suède), des industriels, des associations de défense de l?environnement, des animaux et des consommateurs, des syndicats de salariés, des organismes de recherche, des ministères... Les résultats Fin 2023, 11 méthodes étaient en cours de pré-validation par PEPPER, dont 6 étaient inscrites au programme de validation de l?OCDE. La première méthode validée par l?OCDE devrait donc intervenir en 2024. 158 No. 377 Initial Recommendations on Evaluation of Data from the Developmental Neurotoxicity (DNT) In-Vitro Testing Battery. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 144/203 Pour pré-valider une méthode, il faut compter en moyenne 3 ans, ce qui est plus long que ce qui avait été prévu par les concepteurs de PEPPER. Pour la validation par l?OCDE, il faut compter de 1 à 2 ans, soit au total de 4 à 5 ans pour obtenir la validation d?une méthode. Si on y ajoute les travaux de recherche préalables, l?ensemble du processus peut prendre une dizaine d?année, voire plus. La cible fixée par la SNPE2 était une pré-validation de 3 méthodes par an, au minimum. Si on tient compte du flux entrant, l?objectif est donc presque atteint. A compter de 2024, on peut espérer que 2 à 3 méthodes soient, chaque année, soumises à l?OCDE. Perspectives Avant d?engager le processus de pré-validation, PEPPER a pour mission d?identifier les méthodes de tests les plus pertinentes. Les principales priorités, telles que présentées lors du Comité d?orien- tation d?octobre 2023, concernent les modes d?action suivants : En santé humaine : thyroïde/neurodéveloppement ; reproduction féminine ; dysfonction métabolique (obésité, diabète) ; rétinoïdes ; cancers hormonaux ; tests sur cycle de vie complet ; métabolisme in vitro/ extrapolation in vitro-in vivo. Pour l?environnement : reproduction, croissance et développement, tests sur les oiseaux et les amphibiens. Cette priorisation est issue d?un travail réalisé en 2017 par la Commission européenne (Joint Research Center). Parmi les perspectives identifiées par PEPPER, figure également l?accompagnement des mé- thodes inscrites au programme de validation de l?OCDE. En effet, lors de la conception de PEPPER, son rôle se limitait à la phase amont de cette validation : sélection des méthodes, organisation des tests et évaluation de leur succès. PEPPER considère qu?il doit aller au-delà et porter la méthode auprès des instances de l?OCDE y inclus, en cas de succès, la rédaction d?une ligne directrice d?essai. Un autre enjeu consiste à accroître la visibilité européenne et internationale de PEPPER, via la publication d?articles scientifiques, la participation à des réunions d?instances de programmes de recherches européens et des séminaires internationaux. Mais le principal frein au développement de PEPPER concerne avant tout son budget qui n?est pas garanti à court terme (visibilité réduite à 1 à 2 ans actuellement). Des soutiens financiers sont recherchés à la fois privés et publics, aux niveaux français et européen pour pérenniser l?activité. Le ministère de l?environnement des Pays-Bas a ainsi apporté une subvention de 100 k¤ à PEP- PER et l?agence fédérale de l?Environnement en Allemagne (UBA) ainsi que le ministère chargé de l?environnement belge ont manifesté leur intérêt. Poursuivre l?européanisation de PEPPER suppose de convaincre les autorités mais aussi les in- dustriels des autres pays européens. Un soutien financier de la commission européenne n?est pas, à ce jour, envisagé comme la mission a pu le constater lors de son déplacement à Bruxelles. Il n?y a pas d?équivalent de PEPPER au niveau international et il semble plus judicieux de fédérer autour de la plateforme que d?en générer d?autres. Enfin, parmi les freins au développement de tests normalisés, on peut citer le manque de méthodes candidates à la pré-validation, en particulier en France. Concevoir des tests est en effet coûteux et n?est pas particulièrement valorisé sur le plan scientifique. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 145/203 Annexe 6.4. France Cohortes L?unité mixte de services France Cohortes159, financée par le PIA, a pour but de mutualiser les moyens techniques et humains au service des cohortes nationales et d?aider la création de nou- veaux projets de cohortes. La migration des premières cohortes nationales vers le SI de France Cohortes a débuté. Onze cohortes ont été refinancées en 2019 par le PIA dont 3 cohortes généralistes. Un renforce- ment du soutien pour ces grandes cohortes a été inscrit dans le plan Santé Innovation 2030, avec une double mesure de soutien aux cohortes populationnelles existantes d?une part (20 M¤) et de création de nouvelles cohortes d?autre part, après état des lieux de l?existant (100 M¤). France Cohortes n?accompagne pas, au moment de la rédaction du rapport, de cohorte orientée spécifiquement sur les perturbateurs endocriniens. Les enjeux liés aux données massives de santé Le rapport de l?IGAS et de l?IGESR de 2020160 indique que « La relance qui vient d?être récemment opérée, au travers du projet France Cohortes porté par l?Inserm et centré sur la mutualisation et l?accompagnement des cohortes, est une initiative intéressante mais qui comporte encore nombre d?imprécisions ». Les imprécisions ayant été en grande partie levées, l'infrastructure nationale France Co- hortes (UMS 47), financée par le programme d?investissements d?avenir, et créée en février 2021, traite des questions concernant la stratégie de développement du réseau, l?allocation des res- sources, la gouvernance des données, l?ouverture du réseau, la déontologie et les principes de valorisation. France Cohortes accompagne les cohortes tout au long du cycle de vie de leurs projets, du recueil des données à leur exploitation et leur mise à disposition : - des fonctions support pour le recueil des données, le nettoyage et l'analyse des don- nées (outils juridiques, informatiques, formation, communication et valorisation) ; - un hébergement performant et sécurisé (RGPD, SNDS) ; - un soutien réglementaire depuis la conception jusqu?à la fin du suivi de la cohorte (avec un appui au développement des plans de partage des données, notamment à l?international ; - un support à la création de données faciles à trouver, accessibles, interopérables et réuti- lisables (FAIR), en lien avec l?open data. Selon la direction de l?infrastructure nationale161, les avancées concernent le catalogue commun, la lisibilité des procédures, l?outil de dépôt des demandes et la traçabilité de celles-ci, les solutions de mise à disposition sécurisée et d?accompagnement réglementaire. En revanche, le recrutement d?experts, le choix des standards de données et de métadonnées dans un domaine très multidimensionnel, mais aussi le peu d?outillage de valorisation adapté sont des points de difficulté. 159 Cette UMS a pour but de mutualiser les moyens techniques et humains au service des cohortes nationales et d?aider la création de nouveaux projets de cohortes 160 Les cohortes pour les études et la recherche en santé, IGAS-IGESR, 2020 161 Interview de la direction sur le site de France Cohortes PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 146/203 Figure 1 : Cohortes hébergées en 2023 et tutelles Source : France Cohortes PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 147/203 Annexe 7. Evaluation des substances Annexe 7.1. Evaluations de substances par l?Anses pour la période 2019 ? 2023 Le tableau ci-dessous regroupe le détail des substances évaluées par l?Anses au regard des prévisions formulées dans le cadre de la SNPE2 pour la période 2019-2023. Initialement, dans son plan d?action, la SNPE2 fixait les objectifs quantitatifs annuels d?évaluations suivants : ? entre 2019 et 2020 : 6 substances par an dont 3 au titre de REACH et 3 substances actives biocides ou phytopharmaceutiques ; ? à partir de 2021 : 9 substances par an dont 6 au titre de REACH et 3 substances actives biocides ou phytopharmaceutiques. Le nombre d?évaluations total attendu pour la période 2019-2023 était donc de 39 substances évaluées dont 15 substances actives biocides ou produits phytopharmaceutiques. Tableau 13 : Liste des substances évaluées dans le cadre de la SNPE2 par l?Anses (données de mi-décembre 2023) Types de substances Résultats de l?évaluation Substances évaluées par l?Anses durant la période 2019-2023 Nombre de substances évaluées attendues (Objectifs de la SNPE2) Substances déjà étudiées dans le cadre de la SNPE1 et réévaluées lors de la SNPE2* 11 Evaluations réalisées et terminées au titre de la SNPE2 Substances évaluées au titre de REACH Substances identifiées PE (SVHC-57f dans le cadre du règlement REACH) 5 Resorcinol, BPB, BPS, BPAF, BPF 24 évaluations substances au titre de REACH attendues Substance perturbant le système endocrinien de manière avérée ou présumée en attente de formalisation règlementaire 2 Lithium, Tetraphenyl m- phenylene bis (phosphate) Substances perturbant le système endocrinien de manière suspectée en attente de formalisation règlementaire 1 MTBE Substances ne 2 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 148/203 perturbant pas le système endocrinien Disulfure de Carbone, Melamine Substances actives (SA) de produits phytopharmaceutiques évalués pour leur caractère PE 5 Acide peroctooctanoïque, Pydiflumétofène, DMDS, Triflusulfuron?methyl, Isoflucypram 15 évaluations Substances actives biocides ou produits phytopharmaceuti ques attendues Substances actives (SA) biocides évalués pour leur caractère PE 3 CO2, glyoxal, (Z)-13- hexadecen-11-yn-1-yl acetate TOTAL 18 39 Evaluations en cours au titre de la SNPE2 Substances REACH nécessitant des données supplémentaires pour pouvoir évaluer les critères d?identification 9 BHT, BHA, Isophorone, Méthylparabene, Galaxolode, Octocrilene, OTNE ; Bis(dibutyldithiocarbamato- S,S')copper, TnPP SA Produits phytopharmaceutiques nécessitant des données supplémentaires pour pouvoir évaluer les critères d?identification 3 Cyprodinil et Fludioxonil fosétyl SA Biocides nécessitant des données supplémentaires pour pouvoir évaluer les critères d?identification 9 Cuivre, Indoxacarbe, C(M)IT, Alpha-bromadiolone, Géraniol, DEET et OIT Chlore actif (généré par électrolyse), Monochloramine Substances en cours de conclusion 4 Fluorure de Sodium, TiO2, TPhP, Triclocarban TOTAL (évaluations achevées ou en cours) 43 * Des substances passées sont remises au programme de travail quand les études supplémentaires sont fournies par les industriels ; ceci n?est d?ailleurs pas spécifique des évaluations au titre du caractère PE, mais ces études peuvent impacter les conclusions sur le caractère PE de la substance. Source : Document de travail de l?Anses, retraitement IGAS/IGEDD PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 149/203 Annexe 7.1.1 Focus sur l?état d?avancement des évaluations des substances au titre des règlements REACH et CLP (données de mi-décembre 2023) Ce tableau détaille l?état d?avancement des substances évaluées pour une formalisation règlementaire au titre des règlements REACH et CLP. Tableau 14 : Etat d?avancement des évaluations des substances au titre des règlements REACH et CLP (données de mi-décembre 2023) Substance Entrée au programme de travail- Sortie du programme de travail Statut Priorité telle que définie dans l?annexe 5 de l?avis 2019-SA- 079 Disulfure de Carbone 2013 ? 2023 Catégorisation finalisée : non PE. RMOA finalisé, CP effectuée/ Finalisation de l?avis en cours II MTBE 2014 - 2023 RMOA finalisé, CP effectuée, avis publié : Dossier Classification comme substance Persistante, Mobile et Toxique (PMT) à préparer II Fluorure de sodium 2021 - 2023 Finalisation en cours de l?évaluation (Classification PE de la substance) Objectif : fin 2023 Liste prioritaire Lithium 2020 - 2023 Evaluation PE Finalisée mais non encore publiée (Évaluation PE intégrée à l?ensemble du RMOA sur les critères écotoxicologiques..) Absent Melamine 2021 - 2023 RMOA finalisé CP effectuée Publication imminente de l?avis Liste prioritaire Titanium dioxide 2021 Update à venir du dossier par les industriels (annoncé en décembre 2023) Attente en conséquence de la publication du RMOA - Réunion avec la DGT pour statuer sur ce point II BHT 2016 Echanges en cours avec les industriels qui ne sont pas d?accord avec les nouveaux tests demandés et cependant nécessaires pour conclure (recours probable en chambre des recours au niveau européen après échange avec les homologues européens) III BHA 2015 Evaluation reprise pour identification PE en cours. I PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 150/203 Avis en cours de finalisation ? RMOA en cours ? (incertitude sur la classification SVHC PE / sinon la classification CLP / cat 2 sera proposée) 3,5,5- trimethylcyclohex- 2-enone appelée Isophorone 2013 Analyse des nouvelles données à effectuer. Absent Bisphenol S 1er S-23 Identification SVHC PE effectuée I Methylparabène 2014 Follow-up SEv+CCH: études reçues. Evaluation PE en cours. I tris(4-nonylphenyl, branched) phosphite dit TnPP 2013 Devrait être identifié SVHC PE d?ici août 2025 Abs Galaxolide RMOA 2018, mis à l?évaluation 2022 Demande en cours de tests environnementaux supplémentaires ? Pas assez de données pour conclure, Classification PE-Human Health (santé humaine) & Reprotoxicité à prévoir III Triphenyl phosphate dit TPP (ouTPhP) (récupérée post Brexit) 2017 Dépôt dossier SVHC PE-ENV en février 2024 I Octocrilene 2012 LAGDA en cours (test sur amphibien) + Dossier de restriction en cours Abs OTNE 2017 Demande de test complémentaires ? Pas assez de données pour conclure Abs BPF BPAF 2022 Identification PE effectuée Abs Butanoic acid, 4- amino-4-oxosulfo-, N-coco alkyl derivs., monosodium salts, compds. with triethanolamine 2023 Demande d?étude complémentaire Abs tert- butylphenyldiphenyl phosphate 2023 Identification SVHC Abs Abréviations : RMOA : Analyse de la meilleure option de gestion des risques / CP : Consultation publique / SEv : substance evaluation / CCH : Compliance Check / LAGDA : Essai de croissance et de développement de larves d?amphibiens (Lignes directrices de l?OCDE pour les essais de produits chimiques, Section 2 Essai n°241) Source : Document de travail de l?Anses PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 151/203 Annexe 7.1.2 Focus sur l?état d?avancement des évaluations des substances au titre des règlements phytopharmaceutiques et biocides (données de mi-décembre 2023) Sont détaillés ci-dessous, l?état d?avancement des évaluations des substances actives (SA) biocides et produits phytopharmaceutiques menées en 2023 et le détail des substances en cours d?instruction à ce jour. Evaluations PE menées en 2023 : ? C(M)IT (nouvelle SA biocide) : les données ont été reçues mi-2023. L?évaluation PE réalisée en 2023 a été transmise à l?ECHA pour évaluation par les pairs (peer- review). ? Alpha-bromadiolone (nouvelle SA biocide) : les données ont été reçues mi-2023. L?évaluation PE est en cours, et sera transmise à l?ECHA début 2024. ? Fludioxonil (SA phytopharmaceutique) : après un arrêt d?horloge 162 pour la fourniture de données, l?évaluation PE a été transmise à l?EFSA en 2023 qui devrait finaliser l?évaluation fin 2023/début 2024. ? Cyprodinil (SA phytopharmaceutique) : après un arrêt d?horloge pour la fourniture de données, l?évaluation PE a été transmise à l?EFSA en 2023 qui devrait finaliser l?évaluation fin 2023/début 2024. ? Fosétyl (SA phytopharmaceutique) : après un arrêt d?horloge PE pour fourniture de données jusqu?à fin 2022, l?évaluation PE devrait être finalisée fin 2023/début 2024. ? Indoxacarbe (renouvellement SA biocide) : les données ont été reçues mi-2023. L?évaluation PE est en cours, et sera transmise à l?ECHA en 2024 sous réserve que les autres sections soient également finalisées. Substance actives phytopharmaceutiques en cours d?instruction en 2024 : ? Pirimiphos méthyl (Brexit) ; ? Prohexadione ; ? Tébufenpyrade ; ? Tétraconazole ; ? Ester méthylique de l'acide 2,5-dichlorobenzoïque ; ? Indaziflam. Substances actives biocides en cours d?instruction 2024/2025 : ? Cuivre : les données ont été reçues mi-2022. L?évaluation PE a été non concluante et de nouvelles données sont demandées, attendues pour fin 2024 au plus tard. ? Géraniol : de nouvelles études ont été reçues début 2022. L?évaluation PE a été non concluante et de nouvelles données sont demandées, attendues pour mi-2024. ? DEET : dans le cadre du renouvellement de la SA, le dossier a été mis en arrêt d?horloge pour demande de données complémentaires mi-2024. ? OIT : après un arrêt d?horloge pour fourniture de données fin 2023, l?évaluation PE est prévue pour 2024. A noter que la France est également autorité compétente évaluatrice (eCA) pour des dossiers de substances actives biocides à base de chlore actif (généré par électrolyse) ou de monochloramine généré in situ. Pour ces dossiers, l?évaluation du caractère PE est menée en concertation avec 162 Depuis l?entrée en vigueur de la méthode d?évaluation du caractère perturbateur endocrinien en 2018, toutes les demandes de renouvellement ou d?approbation d?une substance active sont évaluées selon ce critère. Dans ce processus européen de réévaluation des substances, les agences peuvent demander des données complémentaires afin d?évaluer le caractère de perturbation endocrinienne se traduisant par un arrêt d?horloge (« stop-clock ») d?une durée maximale de 30 mois. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 152/203 d?autres eCA qui ont des dossiers analogues. Les conclusions sur les propriétés PE sont attendues en 2024 pour le chlore actif et en 2026 pour le monochloramine (études 2G en cours de réalisation). Annexe 7.2. Etablissement d?une liste de substances de PE potentiels L?action 3 prévoyait la définition d?une méthode de priorisation des substances qui peuvent présenter des propriétés PE en vue d?établir une liste hiérarchisée de ces substances. Annexe 7.2.1 Méthode de priorisation des substances qui peuvent présenter des propriétés PE potentielles L?Anses a repris la méthodologie DEDuCT qui permet d?identifier les PE potentiels pour la santé humaine à partir d?un screening d?articles scientifiques contenant des preuves expérimentales d?effets PE pour aboutir à une liste de 686 substances. De plus, une étude d?impact de la Commission Européenne de 2016 pour proposer différentes options de définition d?un PE a permis d?identifier 197 substances actives biocides et phytopharmaceutiques comme PE confirmés, présumés ou suspectés sans preuve in vivo dont 45 sont déjà présentes dans la liste DEDuCT. L?Anses a également réalisé un criblage de substances présentes dans au moins un produits biocide ou phytopharmaceutique pour lequel l?Anses a la charge de délivrer des autorisations de mise sur le marché identifiant 81 co-formulants susceptibles de présenter une activité endocrine dont 13 étaient déjà dans la liste DEDuCT. Au total, ce sont 906 substances potentiellement PE que l?Anses a pu identifier. Pour pouvoir les prioriser, cette liste de 906 substances a fait l?objet de différentes étapes de sélection, synthétisées ci-dessous : Graphique 3 : Etapes de sélection des substances à scorer *Ministères chargés de la mise en oeuvre de la SNPE2 : Ministères de la Transition écologique et solidaire (MTE), et des Solidarités et de la Santé (MSS) Source : Anses Revue de la littérature par la liste DEDuCT + Etude d'impact de la Commission européenne de 2016 + Criblage de co-formulants biocides et phytopharmaceutiques : établissement d'une liste de 906 substances d'intérêt 705 substances éligibles à une priorisation (exclusion de 12 substances déjà identifiées comme SVHC, 12 substances actives déjà interdites, 2 substances sans numéro d'identification CAS ou EC) 266 substances enregistrées dans REACH 141 substances enregistrées sans action règlementaire 59 substances pré- sélectionnées par les Ministères* en fonction du niveau d'information 16 substances sélectionnées par l'Anses, à scorer PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 153/203 Les différents critères de sélection ont permis d?aboutir à une liste de 16 substances que l?Anses a hiérarchisé selon un score de priorisation considérant leurs dangers, les expositions et le niveau de préoccupation sociétales qu?elles suscitent. Annexe 7.2.2 Conclusions des substances inscrites au programme annuel d?évaluation de l?Anses à partir de la liste de substances d?intérêts La liste finale des 16 substances d?intérêts du fait de leur action endocrine potentielle élaborée dans le cadre de l?action 3 a permis d?inscrire au programme annuel d?évaluation de l?Anses, 3 nouvelles substances : la Mélanine qui s?est avérée ne pas être PE, après évaluation ; le Fluorure de sodium (NaF) dont l?évaluation en cours de conclusion révèle des propriétés PE et qui sera proposé au titre du règlement CLP ; le Triéthanolamine (TEA) pour lequel l?Anses attend le retour de l?Allemagne qui évalue une substance similaire, le Diéthanolamine (DEA), avant de rendre sa conclusion. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 154/203 Annexe 8. Surveillance sanitaire La surveillance sanitaire mise en oeuvre par la SNPE2 comporte deux volets : la surveillance épidémiologique qui décrit et analyse les pathologies en lien avéré ou suspecté avec les perturbateurs endocriniens, afin notamment d?en surveiller les tendances temporelles et spatiales ; la biosurveillance humaine qui mesure la présence de perturbateurs endocriniens dans l?organisme ou leurs effets précoces. Annexe 8.1. La biosurveillance Annexe 8.1.1 L?élaboration d?un nouveau programme de biosurveillance (ALBANE) La biosurveillance consiste à prélever des matrices biologiques comme le sang, l?urine, les cheveux, le lait maternel et à y doser les substances recherchées, appelées "biomarqueurs"163. La mesure qui est faite intègre toutes les sources d?exposition, quelles que soient les voies d?entrée des subs- tances dans le corps humain (alimentation, respiration, contact?), et quels que soient le lieu d?ex- position (domicile, travail?), l?activité ou la nature des produits en cause. Le principal résultat obtenu par la SNPE2 est la décision de lancer en 2024 un nouveau programme de biosurveillance, l?enquête ALBANE (alimentation biosurveillance santé nutrition environnement). ALBANE, comme ESTEBAN avant lui, vise à décrire les niveaux d?imprégnation de la population française par les polluants de l?environnement. Des prélèvements biologiques seront réalisés dans différentes matrices, principalement l?urine et le sang, afin de mesurer les marqueurs d?exposition et définir des valeurs référence d?exposition de la population. L?enquête comprend un volet biosur- veillance, un volet alimentation, un volet nutrition (activité physique) ainsi qu?un volet santé, qui permettront d?établir des liens potentiels entre les expositions alimentaires et les niveaux d?impré- gnation. Contrairement à ESTEBAN, l?enquête ALBANE comporte plusieurs cycles de deux ans (sur les modèles canadien ou américain), ce qui permet une adaptation du modèle et d?en améliorer la pertinence, à moindre coût (en fonction des cycles, possibilité d?inclure différents types de popula- tions/paramètres/substances). Les plans de sondage seront davantage stratifiés afin d?obtenir une meilleure représentativité temporelle et produire des indicateurs au niveau régional. Ils permettront d?étudier certaines substances communes ou spécifiques par cycle. Le premier cycle est prévu de septembre 2024 à septembre 2026. Trois types de populations seront couvertes (enfants, adolescents, adultes) dans le cadre des trois cycles, avec différentes couvertures géographiques. L?étude inclut 1150 enfants et adolescents de 163Un biomarqueur est une substance ou un indicateur d?activité biologique, qui peut être dosé dans l?organisme et qui peut refléter l?existence d?expositions environnementales, d?effets biologiques, de pathologies, ou encore d?une prédisposition génétique. Le terme « biomarqueurs » comprend des biomarqueurs d?exposition, d?effet, et de susceptibilité (réponse de l?organisme). Dans le champ de la biosurveillance humaine, les biomarqueurs d?exposition sont les plus employés. Ils permettent de mesurer la présence d?une substance chimique ou des métabolites de cette substance dans l?organisme (dans le sang, les urines, les cheveux, le lait maternel, etc.). Cette mesure de l?exposition aux substances chimiques présentes dans l?environnement intègre l?ensemble des sources (air, eau, alimentation, etc.) et voies d?exposition (orale, respiratoire et cutanée). Le terme d?imprégnation est souvent utilisé pour désigner les concentrations d'un biomarqueur d?exposition mesurées dans l?organisme. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 155/203 3 à 17 ans (seront aussi inclus 150 enfants de 0 à 2 ans mais sans prélèvements biologiques). Les adultes de 18 à 79 ans seront au nombre de 2000. Pour le premier cycle, une vingtaine de familles de substances seront analysées, dont une bonne part de perturbateurs endocriniens : phtalates, bisphénols/alkylphénols, PFAS, carbamates, pesti- cides, ions percholorates, métaux?. Des analyses non ciblées pourront être intégrées, afin de disposer de polluants qui ne sont pas analysés habituellement. Des biomarqueurs d?effets seront également intégrés (dès le cycle 1 pour la fonction thyroïdienne mais surtout en cycle 2 et 3) afin de pouvoir relier des expositions à des effets sanitaires et de mettre en évidence des effets pré- coces. Certaines substances sont communes entre les cycles, notamment celles qui présentent une durée de demi-vie courte permettant de suivre des évolutions. Les Outre-Mer ne sont pas inclus dans ALBANE à ce stade. Ils devraient faire l?objet d?une biosur- veillance spécifique. D?ores et déjà, il y a des programmes spécifiques de bio surveillance en cours, en particulier Kanari 2 aux Antilles, axé sur la chlordécone. Le budget prévisionnel d?ALBANE est de 10 M¤. ALBANE constitue la contribution française au volet « biosurveillance » du projet PARC. PARC (partenariat européen pour l'évaluation des risques liés aux substances chimiques), coordonné par l?Anses, comporte 9 volets, dont l?un consacré à la surveillance (« surveiller et mesurer l'exposition à la fois chez l'homme et dans l'environnement, en tenant compte des différentes sources, du de- venir des substances chimiques et des voies d'exposition, en travaillant sur les méthodes et outils analytiques innovants. »). Ce volet est codirigé par l'agence allemande pour l'environnement et Santé publique France. S?agissant de la biosurveillance, PARC prévoit notamment l?alignement des programmes nationaux de biosurveillance ainsi que la consolidation et le développement de la plateforme de biosurveillance humaine mise en place par HBM4EU (cf.infra). PARC prévoit éga- lement de développer un réseau de laboratoires qualifiés pour l'analyse des biomarqueurs. Annexe 8.1.2 L?exploitation des données d?ESTEBAN Autre résultat marquant des 5 dernières années (même s?il n?était pas inscrit dans les objectifs de la SNPE2) : l?exploitation de l?enquête ESTEBAN, qui donne un aperçu de l?exposition de la population française. Ces résultats concernent des prélèvements faits en 2016. Ils ont été publiés en 2021. Dans le prolongement de l?enquête ELFE (volet périnatal du programme de biosurveillance, dont les résultats ont été publiés avant le lancement de la SNPE2), ESTEBAN apporte des informations sur l?imprégnation de la population française à de nombreuses substances, dont plusieurs perturbateurs endocriniens : bisphénols, phtalates, perfluorés, parabènes, retardateurs de flamme, plomb ... A l?exception des parabènes (taux d?imprégnation de 60%), ces PE sont retrouvés dans près de 100 % des échantillons, révélant une imprégnation générale de la population. Pour chaque famille de substances, les principales voies d?exposition (alimentation, cosmétiques, tabac?) sont identifiées. En revanche, ces résultats ne permettent pas d?apprécier l?évolution de cette imprégnation, les perturbateurs endocriniens n?ayant pas été recherchés dans les précédents programmes de bio surveillance, à l?exception du plomb. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 156/203 Figure 2 : Résultats d?ESTEBAN Source : SpF Pour le plomb, on dispose d?une comparaison entre les résultats d?ESTEBAN et ceux du précédent programme de bio surveillance : l?imprégnation est en diminution, qu?il s?agisse de la moyenne générale (MG) ou des personnes les plus exposées (P95). Annexe 8.1.3 Le programme HBM4EU Les résultats d?ESTEBAN ont été mis en perspective européenne grâce à HBM4EU. Le projet européen HBM4EU a été lancé en 2016 dans le but d?améliorer la compréhension collective de l?exposition humaine aux produits chimiques dangereux. Le projet a bénéficié d?un financement de 74 millions d?euros et a été mis en oeuvre conjointement par 120 partenaires de 28 pays participants PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 157/203 ? 24 États membres de l?UE auxquels s?ajoutent la Norvège, la Suisse, l?Islande et Israël et l?Agence européenne pour l?environnement. L?Inserm pilotait le 3ème volet de ce programme consacré au lien entre exposition et la santé. Le projet a pris fin en juin 2022. Les résultats pour le bisphénol montrent une imprégnation plus importante en France au BPA et BPS mais moindre pour la BPF. Les résultats d?HBM4EU montrent également des évolutions temporelles différentes selon les Bisphénols (entre 2014 et 2020, diminution notable pour le BPA et modérée pour le BPF ; augmentation modérée pour le BPS). De même, la France se distingue par un taux d?imprégnation particulièrement élevé des enfants aux phtalates. Annexe 8.2. La surveillance épidémiologique Annexe 8.2.1 La santé reproductive L?infertilité masculine En 2015, dans le cadre de la SNPE1, un groupe de travail international réuni par S PF avait priorisé un certain nombre de maladies en lien avec les PE, au premier rang desquels figure la santé re- productive164. Une étude publiée en juillet 2018 par Santé publique France concluait à « des résultats reflétant une altération globale de la santé reproductive masculine en France, cohérente avec la littérature internationale, probablement depuis les années 1970 pour la qualité du sperme »165. Les auteurs relèvent notamment une baisse significative et continue de 32,2% (entre 1989 et 2005) de la concentration spermatique (léger rebond entre 1998 et 2000, suivi par une reprise de la baisse). Comme l?indique SpF dans sa publication, ces indicateurs dégradés sont constatés dans tous les pays industrialisés. Une méta-analyse réalisée en 2017166 fait apparaître un déclin de plus de 50 % de la concentration spermatique chez les hommes des pays industrialisés entre 1973 et 2011, se poursuivant proba- blement au même rythme depuis cette date. En 2011, la concentration spermatique moyenne observée n?était plus que de 47 millions/ml, ex- posant une large proportion d?hommes à une concentration spermatique inférieure à 40 M/ml, qui pourrait entraîner un allongement du délai nécessaire à concevoir et accroître très sensiblement le recours aux traitements thérapeutiques pour infertilité. A ce rythme, selon cette étude, la concen- tration spermatique moyenne des hommes occidentaux pourrait franchir le seuil de 40 M/ml en 2045, ce qui signifierait une infertilité générale (et donc la nécessité d?un recours à la PMA pour la très grande majorité des couples). SpF concluait son article de 2018 en mettant en cause les expositions environnementales, en par- ticulier les expositions aux PE, « présents de façon croissante et ubiquitaire dans l?environnement 164 Le réseau scientifique collaboratif (HUman Reproductive health and General Environment NeTwork) que coordonnait SpFrance, visait à établir les bases d?un système de surveillance international de la santé reproductive, dans le contexte de l?exposition aux PE. 165 Le Moal J, Rigou A, de Crouy-Chanel P, et al. Analyse combinée des quatre indicateurs du syndrome de dysgénésie testiculaire en France, dans le contexte de l'exposition aux perturbateurs endocriniens : cryptorchidies, hypospadias, cancer du testicule et qualité du sperme. Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire 2018 166 Temporal trends in sperm count: a systematic review and meta-regression analysis ; Human Reproduction Update ; Hagai Levine et al; 2017 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 158/203 et les produits de consommation depuis plusieurs décennies ». D?autres causes étaient mention- nées, comme le tabagisme, des facteurs nutritionnels ou métaboliques, la pollution atmosphérique ou des modifications de mode de vie (sédentarité, stress, chaleur, sommeil). Une étude de 2022167 a montré que le bisphénol A figurait au premier rang des perturbateurs en- docriniens impliqués dans la diminution constante de la concentration spermatique masculine ob- servée depuis une quarantaine d?années dans les pays industrialisés. Un article publié en 2023168 actualise et complète la méta analyse faite en 2017, par la même équipe. Cet article montre que la diminution de la fertilité masculine (mesurée à travers la concen- tration du sperme) n?est pas limitée aux pays occidentaux mais concerne les 5 continents. Il montre également que le problème s?accélère : la diminution de la concentration spermatique après l?an 2000 est deux fois plus rapide qu?après 1972. Les autres paramètres de la santé reproductive La surveillance épidémiologique menée au titre de la SNPE2 a donné lieu à la publication de plu- sieurs articles en 2022 par SpF, sur plusieurs pathologies (cryptorchidie, endométriose, fibromes utérins), complétant les résultats publiés en 2018 sur la fertilité masculine. Une synthèse de cette surveillance sanitaire a également été publiée en 2022 par SpF169. Tableau 15 : les indicateurs de santé reproductive Nbre cas / an Evolution incidence Taux d?incidence (/ 10 000)* Période d'analyse Cryptorchidie 7 000 +2,6% par an 26 2002-2014 Hypospadias 3 000 Pas d'évolution 10 2002-2014 Qualité du sperme - 1,9% par an (baisse de la concentration spermatique) 1989-2005 Cancer du testicule 2 000 +1,5% par an 0,7 1998-2014 Endométriose 30 000 +1,2% par an 10 (femmes âgées de 10 ans et plus) 2011-2017 Fibrome utérin 36 000 Biaisée par l?augmentation de la prise en charge par médicament (+13% par an) 17,1 (femmes âgées de 10 à 54 ans) 2013-2017 Puberté précoce centrale idiopathique 1 500 +4,5% par an 2,7 chez les filles et 0,2 chez les garçons 2007-2017 * Cas et incidences estimés à partir des cas traités ou opérés, enregistrés dans le SNDS (système national des données de santé). Ils ne représentent pas l?exhaustivité des cas rencontrés dans la population générale. Source : SpF 167 Combined exposures to bisphenols, polychlorinated dioxins, paracetamol, and phthalates as drivers of deteriorating semen quality, Environment International, Volume 165, July 2022, 107322 168 Temporal trends in sperm count: a systematic review and meta-regression analysis of samples collected globally in the 20th and 21st centuries ; Human Reproduction Update ; Hagai Levine et al ; 2023 169 « Bilan et perspectives du programme de surveillance des pathologies en lien avec les perturbateurs endocriniens », J. Caudeville et al, 2022 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 159/203 On notera que les indicateurs relatifs à la dysgénésie testiculaire170 datent de 2014 au mieux, par- fois 2005 pour la qualité du sperme. Interrogé sur ce point, Santé Publique France pointe des dif- ficultés méthodologiques et légaux (protection des données médicales) : cela ferait 3 ans que l?Agence essaierait d?obtenir une actualisation des chiffres sur la qualité du sperme. Dans la continuité des publications précédentes, ces résultats confirment une dégradation continue des indicateurs en matière de santé reproductive. Des indicateurs dont la construction a un effet minorant comme le note SpF : « Hormis pour la qualité du sperme, les indicateurs sont construits à partir des données disponibles dans la base de données du système national des données de santé (SNDS), seules données produites en continu et couvrant tout le territoire. Ces indicateurs ne reflètent que les cas pris en charge, en sous-estimant de façon importante le problème de santé publique car le nombre de patients souffrant de ces pathologies est bien plus important. » Ce propos est cependant nuancé par SpF qui indique que cette dégradation « peut être soit le témoin d?une augmentation de l?incidence des pathologies, soit de la sensibilisation des popula- tions voire des médecins à certaines maladies (meilleures connaissances, détections et prises en charge des pathologies), ou une combinaison de ces hypothèses. » Pour l?endométriose, le taux d?incidence en France est dans le même ordre de grandeur que dans les autres pays européens utilisant des données hospitalières. Pour le fibrome utérin, le taux d?in- cidence de l?étude de SpF serait dans la fourchette basse des estimations issues de la littérature internationale. Graphique 4 : Fibrome utérin Source : SpF 170 Syndrome associant chez les hommes quatre anomalies du système reproducteur : cancer germinal testiculaire, cryptorchidie, hypospadias et hypofertilité masculine. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 160/203 Graphique 5 : Endométriose Source : PMSI Autres indicateurs épidémiologiques Sante publique France et l?INCa assurent également une surveillance épidémiologique du cancer du sein ou de la prostate, dont les PE sont un facteur de risque avéré : ? Entre 1990 et 2018, le nombre annuel de nouveaux cas de cancer du sein chez la femme a presque doublé, passant de 29 970 à 58 400 cas annuels, soit +1,1 % par an en moyenne ; entre 2010 et 2023, la progression a été plus faible, estimée à +0,3 % par an. La France était, en 2022, au premier rang mondial pour ce cancer (taux d?incidence de 105.4/100 000 selon le CIRC) ? Entre 2010 et 2018, le taux d'incidence du cancer de la prostate a diminué de -1,1 % par an en moyenne ; cette baisse fait suite à une forte augmentation entre 1990 et 2005 ; 59 885 nouveaux cas ont été diagnostiqués en 2018 en France métropolitaine ; ce cancer figure au 1er rang des cancers chez l'homme (25 % de l?ensemble des cancers masculins). Selon SpF (qui rejoint l?INCa), il est difficile d?évaluer la part des facteurs environnementaux dans la progression de ces cancers, dont la cause est multifactorielle (comportements, génétique, environnement?). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 161/203 Graphique 6 : Taux d?incidence et de mortalité par cancer du sein en France selon l?année (1990-2018) Source : INCa Graphique 7 : Taux d?incidence et de mortalité par cancer de la prostate en France selon l?année (1990-2015) Source : INCa PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 162/203 Enfin, des travaux ont été menés sur l?hyperthyroïdisme infantile, montrant, dans le cadre du dia- gnostic néonatal systématique171, une augmentation de 30.1% du nombre de cas sur la période 2008-2017. L?augmentation est régulière au cours de la décade, pour les garçons comme pour les filles, dans toutes les classes d?âge et dans tous les départements (avec cependant des taux d?in- cidence variables selon les territoires considérés). A la différence de la bio surveillance, la surveillance des maladies en lien avec les PE n?a pas eu de prolongement européen substantiel. On trouve néanmoins dans PARC, une tâche consacrée au « fardeau environnemental », mêlant surveillance intégrée et recherche, avec pour cas d?étude « impact du plomb sur le QI ». 7 pays y contribueront (SpF, Inserm et Anses pour la France). Annexe 8.2.2 La mise en place d?un nouveau système de surveillance sanitaire Une consultation sur les indicateurs sanitaires à suivre dans le cadre de la surveillance sanitaires en lien avec les PE a été lancée en 2021 par Santé Publique France (Projet PEPS'PE, dont les résultats ont été publiés en novembre 2023). Cette méthode de « priorisation des effets sanitaires à surveiller » repose sur un classement des effets sanitaires selon deux critères : le poids des preuves scientifiques ; l?intérêt épidémiologique et sociétal à mettre en place cette surveillance (critère composite incluant la gravité, l?incidence et la préoccupation sociétale). Afin d?évaluer ces deux critères, SpF a mis en oeuvre une méthode (appelée Delphi) combinant, d?une part, les données de la littérature scientifique ainsi que l?avis d?experts et, d?autre part, l?avis des parties prenantes. Cette méthode s?organise autour de deux questionnaires (l?un scientifique, l?autre sociétal) aux- quels ont répondu, chacun pour ce qui les concerne : 52 experts (français et étrangers) dans différents domaines (toxicologues, épidémiologistes, cliniciens...) ; 18 représentants des parties prenantes intervenant dans le champ des PE. SpF relève que le nombre de participants du questionnaire sociétal était relativement faible par rapport aux recommandations faites dans la littérature, malgré des invitations diffusées très large- ment (invitations de l?ensemble des parties prenantes de la SNPE2, multiples relances, présenta- tion du projet aux membres de la SNPE2 pour augmenter l?implication des acteurs). Pour compen- ser cette lacune, les résultats ont été mis à disposition à l?ensemble des parties prenantes du PNSE 4 et de la SNPE2 pour consultation, avant la publication officielle du programme de surveillance de l?agence, afin d?intégrer des avis qui n?auraient pas été pris en compte dans la consultation. En complément, pour s?assurer de la pertinence de la priorisation, une revue de la littérature inter- nationale a été faite. Un total de 59 effets sur la santé étaient à prioriser. 43 d?entre eux ont pu être évalués lors de la consultation, les 16 autres n?ayant pu être priorisés par manque de participants ou par absence de consensus. Parmi les priorités (fortes et modérées), on trouve les troubles de la santé reproductive qui faisaient déjà l?objet d?une surveillance : endométriose, puberté précoce, cryptorchidies, altération de la qua- lité du sperme, cancer du testicule ? S?y ajoutent d?autres pathologies ou effets sanitaires non 171 Avec l?accord des parents PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 163/203 encore surveillés au titre des PE, dans le champ de la santé reproductive (infertilité, cancer de l?endomètre, cancer des ovaires ?) mais aussi des troubles métaboliques (surpoids et obésité, syndrome métabolique, diabète de type 2?) et des troubles du neurodéveloppement (troubles du déficit de l?attention avec ou sans hyperactivité, troubles du comportement, déficience intellec- tuelle ?). Soit un total de 21 pathologies ou effets sanitaires retenus in fine : 13 avec une priorité forte et 8 avec une priorité modérée. Pour chacun, est associé un « niveau de confiance » reflétant, notamment, le degré de consensus des avis rendu par les experts et parties prenantes. Tableau 16 : Résultats de la priorisation PEPS?PE Source : SpF A l?issue de ce travail de priorisation, Santé publique France doit procéder à l?analyse de la faisabilité du nouveau dispositif de surveillance. SpF entend inscrire cet élargissement des pathologies surveillées dans un dispositif de surveillance intégrée, combinant, d?une part, les analyses spatio-temporelles des taux d?incidence et, d?autre part, les expositions environnementales. Cette surveillance intégrée devrait commencer par trois effets sanitaires en lien avec la santé reproductive : cancer des testicules puis qualité du sperme et enfin puberté précoce. SpF devrait ainsi pouvoir publier de nouveaux résultats sur l?impact des PE sur la santé reproductive dans 5 ans, selon une approche intégrée. Les autres pathologies, en particulier les troubles du neuro développement (baisse de QI, déficit intellectuel, troubles autistes et troubles de l?attention), seront également intégrées dans cette surveillance intégrée (en limitant ce croisement au fardeau environnemental). Enfin, les cancers hormono-dépendants (sein, prostate?) seront intégrés dans ce dispositif grâce au croisement entre les données du SNDS (associées aux données des registres) et les données environnementales. L?ambition est d?inclure le concept d?exposome dans cette surveillance, pour selon SpF, « combiner l?ensemble des données disponibles (intégration de données issues d?enquêtes, de cohortes, de registres, de données locales de terrain) et différentes approches méthodologiques (analyses spatio-temporelles, études écologiques et fardeau environnemental notamment) pour mesurer, analyser et interpréter l?impact des changements environnementaux sur la santé humaine ». A ce titre, il est envisagé d?avoir recours à l?intelligence artificielle pour exploiter les bases de données environnementales et de santé (green data for health et health data hub). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 164/203 Annexe 9. La surveillance environnementale Annexe 9.1. La surveillance de l?air ambiant L?arrêté du 19 avril 2017 relatif au dispositif national de surveillance de la qualité de l?air ambiant mentionne que les associations agréées surveillance qualité de l?air (AASQA) surveillent les polluants d?intérêt national dont la liste et les modalités de surveillance sont définies selon une stratégie nationale de surveillance. Les polluants d?intérêt national sont définis comme les polluants autres que les polluants réglementés pour lesquels la surveillance est effectuée conformément au référentiel technique national. Lancée en 2018, avant le démarrage de la SNPE2, la campagne nationale exploratoire sur les pesticides (CNEP) dans l?air ambiant mené sur 12 mois par l?Anses, l?Ineris et le réseau des AASQA portait sur 75 substances sur 50 sites (grandes cultures, viticulture, arboriculture?) et a permis d?obtenir une photographie des substances présentes dans l?air ambiant et leurs niveaux de concentration en France. Cette campagne, prévue avant le démarrage de la SNPE2, n?a pas été construite avec un objectif « perturbateur endocrinien ». Ainsi d?après le rapport de l?Anses seuls 10 substances détectées pendant la campagne sont classées comme étant des perturbateurs endocriniens au titre européen, et 11 substances sont classées par l?Anses comme étant des « perturbateurs endocriniens possibles ». A noter qu?aucune de ces 21 substances détectées n?apparaît dans l?arrêté pris dans le cadre de la loi AGEC, seules 3 apparaissent en liste 2 sur le site EDlist.org et seules 2 apparaissent sur le site de l?ECHA comme étant en cours d?évaluation pour leur caractère perturbateur endocrinien par un Etat Membre. Pour rappel, le site EDlists.org regroupe les conclusions issues des dossiers d?évaluation existant dans une seule et même base de données. A l?initiative de six Etats-membres (Belgique, Danemark, Espagne, France, Pays-Bas et Suède), ce site informe sur le statut PE des substances ou l?état d?avancement des évaluations en cours relatives à ces propriétés dans l?UE, afin d?améliorer la connaissance sur les PE mais aussi la transparence sur les évaluations, leur cohérence et leur homogénéité au sein de l?UE. Les substances de la liste 2 du site EDlist.org sont les substances en cours d'évaluation pour leurs propriétés de perturbation endocrinienne suspectées dans le cadre d'une législation européenne. Ces substances font l?objet d?une expertise collective pour leur propriété de perturbation endocrine qui n?a pas encore été conclue. A partir de 2021, un suivi pérenne national des polluants d?intérêt national a été mis en place, la liste des polluants, publiée le 18/03/2021, contient 75 pesticides. Parmi ces pesticides, 3 sont identifiés comme étant en cours d?évaluation pour leur caractère de perturbation endocrine par un Etat membre et 46 sont identifiés comme étant des substances chimiques d?intérêt en raison de leur activité endoctrine potentielle par l?Anses dans son avis d?avril 2021. Tableau 17 : Perturbateurs endocriniens recherchés dans les campagnes de surveillance de l?air ambiant Campagne Substance N° CAS Information sur le caractère PE de la substance 2018 & 2021 Diuron 330-54-1 Liste 2 de EDlist.org En cours d?évaluation pour son caractère PE par un Etat Membre 2018 & 2021 Etofenprox 80844-07-1 En cours d?évaluation pour son caractère PE par un Etat Membre 2018 & 2021 Deltaméthrine 52918-63-5 Liste 2 de EDlist.org PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 165/203 2018 & 2021 Métribuzine 21087-64-9 Liste 2 de EDlist.org 2021 Terbutryne 886-50-0 En cours d?évaluation pour son caractère PE par un Etat Membre 2021 Prochloraz 677747-09-05 Liste 3 de EDlist.org Source : LCSQA Annexe 9.2. La surveillance de l?air intérieur Plus de 15 ans après la première campagne nationale logement (CNL1) menée en 2003-2005 et visant à effectuer un état de la qualité de l?air intérieur dans les logements français, une deuxième campagne nationale logement (CNL 2) a été lancée fin 2020 par l?Observatoire de la qualité de l?air intérieur (OQAI) pour : Déterminer l?évolution de la qualité de l?air dans les logements en France depuis la CNL1. Rechercher plus spécifiquement des polluants émergents, perturbateurs endocriniens et pesticides. Ces données doivent : Pallier le manque de connaissances sur l?exposition des français au quotidien dans leur logement et mettre à jour les valeurs sanitaires de référence. Permettre de rechercher les contributions de la pollution intérieure parmi les caractéristiques de l?environnement, du bâtiment, du ménage et de leurs activités domestiques. Le début de la campagne CNL2, initialement programmé en 2020 a finalement été décalé en 2021 en raison de la crise sanitaire. Cette campagne cible des logements qui avait déjà été fléchés dans la CNL1 et porte sur des mesures de concentrations de substances déjà analysées dans la précédente campagne à des fins de comparaison ainsi que 40 nouvelles substances. La CNL2 vise ainsi à mesurer environ 170 polluants dans 600 logements, parmi lesquelles les perturbateurs endocriniens suivants : Tableau 18 : Perturbateurs endocriniens recherchés dans la campagne de surveillance de l?air intérieur de 2021 Substances PE N° CAS Règlementation p-nonylphenol 104-40-5 REACH (PE environnement) Bis (2-ethylhexyl)phthalate (DEHP) 117-81-7 REACH (PE environnement & humain) 4-(1,1,3,3-tetramethylbutyl)phenol 140-66-9 REACH (PE environnement) Diisobutyl phthalate 84-69-5 REACH (PE humain) Dibutyl phthalate (DBP) 84-74-2 REACH (PE environnement & humain) Benzyl butyl phthalate (BBP) 85-68-7 REACH (PE humain) 4-tert-butylphenol 98-54-4 REACH (PE environnement) Source : OQAI PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 166/203 La campagne de mesures CNL2 s?est terminée en janvier 2023 et aura permis l'investigation d?environ 600 logements sur près de 2 ans. La publication des résultats de la CNL2 n?est pas intervenue à ce jour. Le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) prépare la publication du rapport à la suite de quoi une réflexion sera engagée sur les suites à donner, notamment dans le cadre du nouvel Observatoire de la qualité des environnements intérieurs (OQEI) en cours de constitution, qui a vocation à succéder à l?OQAI. Des actions à mener pour prévenir et réduire l?exposition aux polluants de l?air intérieur, parmi lesquels des perturbateurs endocriniens seront déterminées dans le cadre des travaux du futur OQEI, sur la base des résultats de la campagne CNL2, lesquels doivent notamment contenir des informations sur les modes de vie ainsi que les différentes sources d?exposition possibles parmi lesquels les produits de construction, de décoration, d?ameublement et de consommation courante dans les logements ciblés lors de la campagne. A noter, qu?en 2024, l?Observatoire de la qualité de l?air intérieur est devenu un observatoire de la qualité des environnements intérieurs, il sera porté conjointement par l?Anses et le CSTB. Aussi, dans le cadre de ce nouvel observatoire, des travaux pourront être menés en 2024 afin de lancer une réflexion méthodologique sur les prochaines campagnes de l?observatoire (hiérarchisation de polluants à surveiller ; suivi continu d?un panel de logements). Par ailleurs, les données de la CNL2 seront exploitées par l?Anses et le CSTB afin d?obtenir des informations concernant notamment l?impact sanitaire de certains polluants (potentiellement PE) présents dans les logements. Enfin, les résultats obtenus seront utilisés pour renforcer l?information et la sensibilisation du grand public et des personnes sensibles à la qualité de l?air intérieur. Des modifications réglementaires relatives à une meilleure information (étiquetage ; création d?un score?) ou à la surveillance réglementaire des polluants de l?air intérieur dans certains établissements recevant du public pourraient également voir le jour à terme. Annexe 9.3. Focus sur les PFAS dans la surveillance des sols Le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) a finalisé un rapport faisant un état de l?art des connaissances sur les composés perfluorés (PFAS) et leur présence dans les sites et sols pollués. Publié en décembre 2020, ce rapport rappelle que la présence des PFAS dans les sols est bien moins renseignée que dans les autres milieux, et renseigne les milieux affectés (sols, eaux de surface, eaux souterraines, sédiments, boues?) selon les sources. Ainsi, l?utilisation de mousses (aires d?entrainement anti-incendie et incendie) serait la première cause de présence de PFAS dans les milieux récepteurs. A noter que la réglementation actuelle prévoit d'ores et déjà l'interdiction de certaines sous-familles des PFAS (PFOS : acide perfluorooctanesulfonique et, à compter du 4 juillet 2025, PFOA : acide perfluorooctanoïque) et que des projets de textes sont en cours de préparation aux niveaux international et européen afin d'étendre les mesures d'interdiction et de restriction des utilisations des PFAS. Le rapport du BRGM met également en évidence le fait que les sites de production des PFAS et l?épandage des boues d?épuration représentent deux autres sources substantielles de pollution des sols par ces substances. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 167/203 Annexe 9.4. La surveillance des milieux aquatiques Le croisement des substances chimiques présentant des propriétés de perturbation endocrinienne figurant dans l?arrêté du 28 septembre 2023 (loi AGEC) avec la liste des substances suivies au titre de la DCE (arrêté surveillance en date du 26 avril 2022) sur la base de leur numéro CAS a été réalisé à la demande de la mission et a permis d?identifier : Parmi les substances prioritaires (SP) mesurées sur l?ensemble du réseau de contrôle de surveillance (RCS) de la DCE à raison de 12 fois par an, et ce deux fois par cycle de gestion (depuis 2010 environ), deux substances identifiées comme des perturbateurs endocriniens au titre de la règlementation REACH sont suivis : Substance PE N°CAS Règlementation Phenol, 4-nonyl-, branched 84852-15-3 REACH (PE environnement) Bis (2-ethylhexyl)phthalate (DEHP) 117-81-7 REACH (PE environnement & humain) Parmi les substances pertinentes à surveiller (SPAS) mesurées dans les eaux de surface 4 fois par an, 2 fois par plan de gestion sur 25% à 100% du RCS, six substances identifiées comme des perturbateurs endocriniens au titre de la règlementation REACH sont suivis : Substance PE N°CAS Règlementation (±)-1,7,7-trimethyl-3-[(4- methylphenyl)methylene]bicyclo[2.2.1]heptan- 2- one 36861-47-9 REACH (PE humain) 4-tert-butylphenol 98-54-4 REACH (PE environnement) 2-[2-(nonylphenoxy)ethoxy]ethanol 27176-93-8 REACH (PE environnement) Diisobutyl phthalate 84-69-5 REACH (PE humain) Dibutyl phthalate (DBP) 84-74-2 REACH (PE environnement & humain) Benzyl butyl phthalate (BBP) 85-68-7 REACH (PE humain) Annexe 9.5. La surveillance des rejets de stations de traitement des eaux usées urbaines (STEU) Les points de rejets des stations de traitement des eaux usées (STEU) urbaines sont une des principales voies d?entrée des perturbateurs endocriniens dans les milieux aquatiques. La 3ème campagne de mesure des micropolluants dans les rejets de STEU, réalisée entre 2017 et 2020, a identifié la présence de perturbateurs endocriniens avérés dans une large proportion des eaux usées en entrée (DEHP à 95 %, les nonylphénols à 57 %, le BaP à 39 %, les octylphénols à 25 %) et en sortie de station (DEHP à 26 %). Le caractère perturbateur endocrinien d?une substance a été évalué en tenant compte des évaluations règlementaires, des évaluations scientifiques et de données émanant de la littérature scientifique, ce travail a abouti au classement des substances en 4 catégories : PE avérés, PE présumés, preuves d?activités endoctrine dans la littérature et absence d?information. La réalisation de cette étape illustre la difficulté à identifier quelle substance est un perturbateur endocrinien. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 168/203 Annexe 10. Formation Annexe 10.1. Formation tout au long de la vie (initiale et continue) Annexe 10.1.1 Formation initiale médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie Il n?existe pas de données consolidées de la formation initiale relative à l?enseignement des pertur- bateurs endocriniens pour ces quatre professions de santé. La formation initiale en pharmacie développe une offre de formation structurée en santé environ- nement (SE) incluant les perturbateurs endocriniens. La conférence des doyens de pharmacie avait procédé à une enquête interne172, qui met en lumière une disparité entre les UFR sur les enseignements concernant les perturbateurs endocriniens mais avec quelques grandes lignes di- rectrices. Ainsi les formations en SE, dont les PE, sont effectuées pour : 90% des cas en tronc commun en 3ième année (DFGSP3) ou 4-5ième années (DFASP1 et SP2) ; 65% en filière officine en 5ième année (DFASP2) dans les UE pharmaciens et environnement ; 30% en conseils à l'officine pour les populations vulnérables et les 1000 premiers jours ; 60%, en 2-3ème années (DFGSP2 et SP3) ou 4-5ème années (DFASP1 et SP2), des enseignements optionnels notamment en environnements domestiques, sur l?exposome? Par ailleurs beaucoup d'enseignements ont lieu dans les masters et diplôme complémentaire : en masters "santé environnementale" (santé publique, biologie humaine, science du médicaments, ingénierie de la santé, sciences des aliments, droit de l'environnement, toxicologie ...) ; en diplômes d?université et/ou inter-universitaires en santé environnementale. Pour la formation initiale en odontologie, à quelques exceptions, les enseignements sont en dé- veloppement sur ce sujet pour l?ensemble des facultés. La mission a adressé un questionnaire à la Conférence des doyens. Pour 1/3 des répondants173, la thématique PE est déclarée non abordée dans l?enseignement, alors que 4 UFR déclarent avoir des projets dans un avenir très proche (mo- dule transition écologique et le développement soutenable, enseignements complémentaires Ecoresponsabilité en odontologie, PE en odontologie dans une UE santé publique. Toutes les an- nées, hormis la 5ème, sont concernée, et la thématique PE est enseignée de manière explicite et spécifique, sous différentes formes (MOOC One Health, MOOC environnement durable, capsules spécifiques PE hébergées par l?UNESS174 , e-learning, cours magistraux spécifiques PE, sémi- naires pluriprofessionnels, conférence inaugurale, analyse d?articles?). Alors que le dynamisme en enseignement des PE est palpable, il existe une grande variabilité quant à la prise en compte du thème PE dans les enseignements d?odontologie, tant en modalités pédagogiques qu?en nombre d?heures ou d?année d?enseignement. La thématique PE se déve- loppe, mais sans partage d?expériences au plan national : le module santé environnement de l?UNESS est par ailleurs très peu cité. 172 19 UFR de Pharmacie répondantes sur 24 173 Taux de réponse en Odontologie : 14 UFR sur 15 et 2 nouveaux sites/UFR sur 8 créés en 2022 174 UNESS Université Numérique En Santé et Sport PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 169/203 La formation initiale en médecine présente un état contrasté entre fort engagement en enseigne- ment de la thématique PE, enseignement SE avec PE, ou sans PE, et plus rarement, absence de formation PE ; près d?un tiers s?appuient sur le module santé-environnement (UNESS) de la Con- férence des doyens de médecine. A la faveur d?un questionnaire adressé par la Mission à la Con- férence des doyens de médecine (taux de réponse 61%175), nous pouvons en tirer les informations suivantes : Pour la moitié des UFR (n=11), il n?y a pas d?enseignement relatif aux perturbateurs endocriniens, dont 3 UFR pour lesquelles il n?y a pas d?enseignement santé environnement du tout. En premier et deuxième cycles, 6 UFR intègrent des enseignements PE dans le tronc commun, pour un volume horaire allant de 30 minutes à 3 heures ; à noter que 2 de ces UFR débutent ces enseignements PE en première année (LAS). 4 UFR proposent des unités d?enseignement optionnelles avec des volumes horaires concernant les PE de 1 à 2 heures (une UFR propose 12 heures sur les PE en UE libre suivie par 50% des étudiants). 10 UFR utilisent le module UNESS santé environnement en deuxième ou troisième année du premier cycle : la Conférence des doyens de médecine indique qu?il serait possible d?y ajouter un module PE. Une UFR effectue une remise à niveau en santé environnement avec un module de 4 heures en 4ème année et en 5ème année. Cette même UFR organise un séminaire santé environnement de deux jours en 6ème année, avec une université japonaise (soutien de l?OMS). Une UFR est très engagée sur la thématique PE à la faveur d?un master biologie santé, parcours santé environnement (6 heures en M1 et 12 heures en M2). Deux UFR font par ailleurs état de masters relatifs à la santé environnement, sans préciser si les PE y sont abordés (master interrégional prévention-promotion-santé, M2 parcours épidémiologie- recherche clinique-évaluation, M1 toxicologie et santé environnement). Un quart seulement des UFR est modérément impliquée dans l?enseignement sur les perturbateurs endocriniens, alors que la moitié des UFR répondantes utilise le MOOC national UNESS176 de la conférence médecine et santé environnementale (sans module PE à ce jour). Deux UFR, d?une même région, sont particulièrement impliquées sur l?enseignement en santé environnementale et perturbateurs endocriniens et il est à noter que, dans celles-ci, des experts du domaine y sont enseignants-chercheurs. Cela démontre une capacité d?entrainement en la matière, mais aussi objective la grande fragilité de l?enseignement sur les perturbateurs endocriniens dans l?hexagone. En formation médicale continue : 1 UFR mentionne un diplôme universitaire (DU) santé environnement médecins collaborateurs : enseignement sur grossesse et travail (incluant les PE) et un DIU santé environnementale (dont 6 heures sur les micropolluants dont les PE). 1 UFR propose un certificat d?études universitaires santé environnementale en périnatalité et fertilité, avec 16 heures relatives aux PE sur les 60 heures de formation (agrément DPC). Ce bilan sommaire expose la très grande hétérogénéité des formations relatives à la santé envi- ronnementale d?une part, et plus encore pour les enseignements sur les perturbateurs endocriniens. En maïeutique, l?enseignement sur le thème des PE en formation initiale est à l?appréciation des 35 écoles de sage-femmes, et représente en moyenne trois heures de formation dans le cursus. Des unités d?enseignement optionnelles existent, dans deux écoles, avec un volume de dix heures. 175 Ce taux de réponse à 61%, peut être interprété par la méconnaissance de ce qui est enseigné sur la thématique PE ou une difficulté à le quantifier (plusieurs cours abordent le problème des perturbateurs endocriniens, sans qu?il soit possible de quantifier exactement le temps d?enseignement qui leur est consacré) 176 Module « Médecine et santé environnementale » : une formation ouverte à tous | Site Uness.fr PUBLIÉ https://www.uness.fr/actualites/module-medecine-et-sante-environnementale-une-formation-ouverte-tous Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 170/203 Annexe 10.1.2 Formation en école d?ingénieurs Pour ce qui concerne certaines écoles d?ingénieurs, AgroParisTech participe à un tronc commun des cadres supérieurs du service public, avec un volet transition écologique et One Health, dont le pilotage, la coordination et l?animation sont réalisés par l?INSP. Cela concerne 1300 élèves en 2024, dans 21 écoles, principalement des écoles d?application. Soutenu par France 203O, l?Institut One Health, porté par l?Ecole universitaire de recherche EID@lyon, a vocation à devenir un institut de référence pour la formation, l?expertise et la décision sur les sujets « une seule santé ». L?IOH est issu de la réunion des établissements de formation du Ministère chargé de l?Agriculture (via l?ENSV-FVI VetAgro Sup et AgroParisTech), de la Santé (EHESP), de l?Écologie et l?Enseignement supérieur et la Recherche. Les publics ciblés sont les décideurs publics, les décideurs privés et les organisations de la société civile. Annexe 10.1.3 Ecole des hautes études en santé publique, seule formation financée par la SNPE2 Au titre de la formation continue, la SNPE2 ne fait état que d?un seul financement, celui de la direction générale de la santé (pour un montant total de 148 458¤ sur la période 2019-2023177), attribué à l?école des hautes études en santé publique (EHESP) pour la formation perturbateurs endocriniens et risque chimique autour de la périnatalité et l?enfance : les outils pour comprendre et agir178. Sur cette période 2019-2023, 1744 stagiaires ont été inscrits au cours de cinq sessions, avec 70% de suivi complet et de réussite. L?EHESP a la volonté d?étendre ses formations. L?EHESP souhaite étendre ses formations. Pour 2024, les perspectives d?évolution relatives aux PE sont les suivantes : le déploiement auprès d?universités (Lille, Bordeaux, Poitiers, Marseille) ; la publication de « Perturbateurs endocriniens : vers une meilleure prévention des expositions, Presses EHESP, 2024 » ; une mise à disposition des ressources auprès des écoles IFSI, sage-femmes et des facultés de médecine (test en cours, en 2024, avec les universités de Rennes) ; l?élargissement au-delà des 400 stagiaires par session (limite actuelle) ; un partenariat avec le CNFPT et le RfVS OMS179, pour valoriser les modules de formation auprès, notamment, des professionnels de santé travaillant dans les collectivités, PMI ... Annexe 10.1.4 Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC) Pour l?ANDPC (des professions de santé), les actions en lien avec l'impact des perturbateurs endocriniens sur la santé, qui ne représentent, sur la période 2021-2023, qu?en moyenne 0,3% des inscriptions, sont incluses dans les orientations pluriannuelles prioritaires de DPC180. Sur la période 2020-2023, l?Agence a constaté 2 962 inscriptions sur ces actions PE (les médecins représentent 82,5% des professionnels de santé inscrits). Même si le nombre d?actions tend à rester stable voire à baisser légèrement, le nombre d?inscriptions, même très faible, tend à augmenter au cours du temps. 177 Financement de la formation PE de l?EHESP par la DGS : 42 656¤ (2019), 22 541¤ (2021), 36 131¤ (2022), 47 130¤ (2023) 178 Cette formation, en ligne et gratuite pour les professionnels de santé, est agréée DPC 179 Les Villes-Santé de l'OMS - Réseau français Villes-Santé (villes-sante.com) 180 Le sujet des perturbateurs endocriniens a été intégré dans les orientations pluriannuelles prioritaires de DPC 2020-2022 ainsi que dans les orientations pluriannuelles prioritaires de DPC 2023-2025 PUBLIÉ https://villes-sante.com/villes-sante-oms/ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 171/203 Annexe 10.1.5 Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) Entre 2020 et 2022, le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), a formé 2937 personnes via un webinaire sur le thème PE (possibilités d?action des collectivités, périnatalité et petite enfance, entretien des locaux-bâtiment-habitat-centres techniques, eau et assainissement, développement de l?enfant, restauration collective). Annexe 10.2. Service sanitaire des étudiants en santé (SSES) Depuis 2018, le service sanitaire des étudiants en santé (SSES) est obligatoire pour les filières médicales et non médicales et cela concerne 50 000 étudiants chaque année. Le SSES représente six semaines de formation théorique et pratique ainsi que les interventions auprès des publics. Pour le recueil des actions menées sur l?hexagone, la Direction générale de la santé explique que la granularité de l?enquête annuelle réalisée auprès des étudiants ayant réalisé leur SSES ne per- met pas d?isoler les actions de prévention sur les perturbateurs endocriniens, qui peuvent être incluses dans différentes thématiques : santé environnement, 1000 premiers jours/périnatalité? Selon l?étude réalisée en 2023 pour Santé Publique France, les thématiques les plus abordées en 2023 sont l?alimentation et l?activité physique (33%) et les addictions (31%). Un module spécifique existe dans le service sanitaire des étudiants en santé, commun avec médecine maïeutique odon- tologie pharmacie (MMOP) et infirmiers. Dans le questionnaire adressé par la mission, à la question « Le service sanitaire intègre-t-il le sujet perturbateurs endocriniens ? », 59 % des UFR de médecine181 répondent par la négative, les autres précisant que la thématique PE peut se faire dans le cadre plus large de la santé-envi- ronnement, dans le cadre des 1000 jours, ou dans un module nutrition. En réponse au questionnaire adressé par la mission, à la même question, 75% des UFR d?odon- tologie182 répondent par la négative183. Parmi les réponses positives, la thématique PE est abor- dée avec les formations hygiène bucco-dentaire, ou ateliers santé environnement - développement durable. La Direction générale de la santé (DGS) reconnait, dans la fiche action N°12 de la SNPE2, que la thématique santé environnement, incluant les perturbateurs endocriniens est importante dans le cadre du SSES pour sensibiliser les futurs professionnels de santé et mener des actions de pré- vention au bénéfice des populations plus vulnérables vis-à-vis des PE (ex : en crèches, maternités mais aussi en écoles, collèges et lycées). Cependant la DGS explique que la priorisation de la santé environnementale (dont le risque chi- mique et les PE) pour le SSES n?est pas constituée aujourd?hui car « les thématiques identifiées au plan national comme prioritaires pour les actions de SSES ont d?abord été les quatre détermi- nants de santé responsables de la plus grande part de la morbidité et la mortalité prématurées, priorisés par Santé publique France et le Haut conseil de la santé publique et mis en évidence dans la Stratégie nationale de santé 2018-2022 : alimentation, activité physique, addictions (alcool, 181 UFR de Médecine : taux de réponse 61% 182 UFR d?Odontologie : taux de réponse 72%, incluant les 8 UFR en création 183 Avec parfois l?expression de l?incapacité à répondre à la question (ex. les PE sont peut-être abordés dans la thématique des 1000 jours de l?enfant, sur laquelle nous n?avons aucun regard) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 172/203 tabac, drogues illicites), éducation à la sexualité dont la contraception et la prévention des infec- tions sexuellement transmissibles ». Outre la proposition de priorisation de la thématique santé environnement, la DGS propose de partager les initiatives locales, les ressources pour la formation des étudiants en santé et les ac- tions de prévention sur les PE, notamment portées par les ARS, les Universités?, afin de les dif- fuser dans d?autres régions et de mettre à disposition des ressources ciblées sur les PE (notam- ment à partir des modules réalisés en région) sur le site de Santé publique France et mieux valo- riser le site auprès des acteurs du SSES. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 173/203 Annexe 11. Actions territoriales Cette annexe ne prétend pas faire un recensement exhaustif des actions initiées et développées localement mais seulement une présentation (synthétiques) des principales initiatives dont la mission a eu connaissance. Ces actions territoriales émanent en particulier de 5 régions que la mission a plus particulièrement étudiées : Centre-Val-de-Loire, Grand-Est, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Provence-Alpes-Côte-D?azur. Elles sont présentées en fonction des acteurs qui les portent : services de l?Etat et Assurance maladie, collectivités territoriales, associations, crèches et maternités. Annexe 11.1. Les actions mises en oeuvre par les services de l?Etat et l?Assurance maladie Annexe 11.1.1 Bilan des PRSE 4 Afin d?évaluer la place occupée par les perturbateurs endocriniens dans les stratégies régionales en matière de santé environnement, la mission a procédé à une analyse des quatrièmes plans régionaux santé environnement (PRSE 4), récemment adoptés ou en voie de l?être. Conduite à la fin de l?année 2023, cette analyse a porté sur 11 PRSE 4 (dont 7 à l?état de projet), complétés par des contributions écrites de la part de 4 ARS, soit un total de 15 régions couvertes. Analyse générale Les perturbateurs endocriniens apparaissent dans la quasi-totalité des PRSE 4 (10/11). Dans trois PRSE 4, ils sont mentionnés plus d?une vingtaine de fois (Ile-de-France, Bourgogne-Franche- Comté et Centre-Val-de-Loire). En revanche, la SNPE2 n?est citée que dans 4 PRSE 4 (Normandie, Centre-Val-de-Loire, Pays-de-la-Loire et Hauts-de-France). Les actions consacrées exclusivement aux perturbateurs endocriniens sont rares. On ne les trouve que dans deux PRSE 4 (Bourgogne-France-Comté et Ile-de-France). Le plus souvent, les pertur- bateurs endocriniens sont inclus dans des actions ou des objectifs plus larges : produits chimiques, expositions aux polluants, qualité de l?air intérieur, environnements intérieurs, formation et sensibi- lisation à la santé environnementale, alimentation, pesticides? Ces actions relèvent de deux types d?approche : ? Populationnelle : une grande partie des actions est dédiée aux femmes enceintes et aux jeunes enfants (1000 premiers jours) et, dans une moindre mesure, aux enfants et aux adolescents ; à l?inverse, peu d?actions ciblent spécifiquement certaines catégories profes- sionnelles (agriculture, bâtiment?). ? Thématique : les actions relatives aux perturbateurs endocriniens s?intègrent très souvent dans des approches globales portant sur les produits chimiques et les polluants domes- tiques et, secondairement, dans des objectifs relatifs à la formation et à la sensibilisation des professionnels de santé et de la petite enfance La majorité des actions visent les 1000 premiers jours et, secondairement, la formation et l?information Une grande partie des actions et objectifs des PRSE 4 consacrés aux perturbateurs endocriniens font écho au volet 1 de la SNPE2 (former et informer). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 174/203 On trouve ainsi dans de nombreux PRSE 4 des actions consacrées aux 1000 premiers jours, incluant (implicitement ou explicitement) les perturbateurs endocriniens : formation des professionnels de santé et de la petite enfance (formations FEES et Nesting notamment), sensibilisation des femmes enceintes et des jeunes parents, accompagnement des maternités et établissements d?accueil des jeunes enfants, prise en charge des couples avec problèmes de fertilité (Plateformes PREVENIR) ? Quoiqu?à un degré moindre, on trouve également plusieurs actions ou objectifs destinées à sensibiliser le grand public (en particulier les jeunes) et à la formation des agents et des élus des collectivités territoriales. Dans ce registre, figurent dans quelques PRSE 4 des actions relatives à la formation professionnelle dans des secteurs particulièrement exposés aux perturbateurs endocriniens et aux produits chimiques en général (BTP, agriculture?). Quelques actions visent la réduction des expositions à la source et l?avancée des connaissances Les objectifs relatifs aux volets 2 et 3 de la SNPE2 sont également présents dans les PRSE4 mais à un degré moindre que ceux du volet 1. C?est le cas des actions visant à réduire les expositions à la source (via l?alimentation, la construction et l?aménagement de bâtiments?), domaine relevant du volet 2 de la SNPE2 (« protéger l?environnement et la population »). On trouve également dans deux PRSE 4 des objectifs relatifs aux pratiques agricoles et aux expositions professionnelles. Quelques PRSE 4 comportent des actions destinées à approfondir les connaissances (Volet 3 de la SNPE2). Il s?agit essentiellement d?actions destinées à la surveillance des expositions aux pesticides et, accessoirement, de travaux de recherche ou de prospective. Des actions absentes ou sous-représentées Alors que la SNPE2 prévoyait d?inclure les perturbateurs endocriniens dans les objectifs du Service sanitaire des étudiants en santé, on n?en trouve mention dans aucun PRSE 4. De même, les actions visant à réduire les expositions professionnelles sont peu nombreuses ; une sous-représentation qui est peut-être due à leur intégration dans les plans régionaux santé au travail. Annexe 11.1.2 La surveillance des rejets des industries pharmaceutiques réalisée par 5 DREAL à l?initiative de la DGPR En 2022, dans le cadre d?une action nationale d?inspection des installations classées pour la pro- tection de l?environnement pilotée par la Direction générale de la prévention des risques (DGPR), 5 DREAL (Bourgogne-Franche-Comté, Centre Val de Loire, Normandie, Occitanie et Pays de la Loire) ont initié une opération consistant à rechercher la présence d?activités endocriniennes dans des effluents de sites industriels pharmaceutiques. Cette recherche d?activités endocriniennes par une approche bio-analytique a été réalisée sur 21 sites industriels. L?objectif de cette action était triple : améliorer la caractérisation des rejets des ICPE ; affiner la méthodologie de caractérisation des activités endocriniennes par les outils bio- analytiques développés par l?Ineris ; mettre en place des actions de réduction des émissions de substances à l?origine d?activités endocriniennes susceptibles d?imprégner les milieux. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 175/203 Les analyses ont mis en évidence la présence d?activités endocriniennes dans une majorité d?échantillons sans qu?aucune conclusion ne puisse à ce stade être tirée de l?interprétation de ces résultats : certains récepteurs nucléaires ont été activés ou inhibés par les substances présentes dans l?échantillon. A noter que les résultats ne permettent pas de statuer quant à la nature chimique des substances détectées et de conclure sur la présence de perturbateurs endocriniens au sens réglementaire. De plus, il n?est pas possible de conclure immédiatement que ce sont les eaux de procédé exclusivement qui sont à l?origine de l?activation ou l?inhibition de ces récepteurs nucléaires. Une analyse plus approfondie est nécessaire. Les résultats de cette première campagne, bien qu?imparfaits et incomplets, convergent néanmoins vers une présence de PE dans la majorité des sites industriels étudiés, cette étude, première dans son genre, esquisse ainsi le paysage de la contamination aux PE et aurait un intérêt certain à être partagée à l?échelle nationale et européenne pour faire progresser la connaissance. En l?état, en gardant en tête l?objectif de la SNPE2 à savoir la réduction de l?exposition aux PE, cette surveillance constitue une première brique pour y parvenir en proposant une première ébauche d?état des lieux mais doit être complétée pour avoir des effets concrets sur l?environnement. Les suites à donner selon les différents cas rencontrés sont actuellement en cours de discussion. De nombreuses perspectives sont possibles. On recensera de manière non exhaustive les idées suivantes : l?élaboration d?une liste de substances susceptibles de générer une activité PE et de se retrouver dans les effluents, la rédaction d?un guide méthodologique pour accompagner les indus- triels dans la revue bibliographique des substances susceptibles d?être PE, l?investigation des tech- niques de traitement des effluents ? Dans la continuité de cette action, la surveillance des rejets d?activités endocriniennes dans les effluents de sites industriels s?est prolongée en 2023 à tout type d?établissement industriel. L?ob- jectif est de caractériser plus finement les activités industrielles à l?origine de rejets d?activités en- docriniennes dans les milieux afin de prévoir des actions de réduction de ces rejets. Les résultats de ces deux campagnes de recherche d?activités endocriniennes dans les effluents aqueux des sites industriels permettront de s?interroger sur les activités/secteurs industriels pour lesquels une surveillance de rejets aqueux serait pertinente à mettre en place. Annexe 11.1.3 La prévention du risque chimique dans le PRST de la région PACA Le risque chimique est, au niveau national, la deuxième cause de maladies professionnelles et la première cause de décès professionnel. Chaque année, il est responsable de près de 1 800 can- cers professionnels reconnus, dont 1400 au titre de l?amiante. Dans la région PACA, c?est un enjeu qui concerne de multiples secteurs (agriculture, BTP, cosmé- tiques, construction navale, énergie et déchets, hygiène, esthétique?) et quelques territoires en particulier (bassin industriel de l?étang de Berre, parfumerie dans les Alpes Maritimes ?). Dans le PRST 3 (2016-2020), le risque chimique occupe une place importante : 13 actions lui sont consacrées, avec 4 modalités de mise en oeuvre : prévention d?un risque chimique spécifique dans un secteur d?activité (par exemple les risques liés à l?utilisation du perchloréthylène dans les blanchisseries) ; prévention intégrée à la démarche générale d?évaluation des risques professionnels (garages automobiles, réparation des navires de plaisance ?) ; prévention des risques chimiques intégrées à la formation initiale et continue (par exemple Certiphyto dans le secteur agricole) ; PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 176/203 études et recherches. A chaque fois, l?approche privilégiée est celle d?un accompagnement des entreprises pour leur permettre de mieux évaluer les risques chimiques et renforcer leur prévention. Un bilan du PRST3 a été fait, dont il ressort un certain nombre de difficultés pour les entre- prises s?agissant de la prévention du risque chimique : réglementation technique, évolutive et complexe ; investissement souvent coûteux notamment en matière de dispositifs d?aération et ventilation ; mauvaise connaissance et perception du risque par l?ensemble des acteurs de l?entreprise ; sujet peu traité en formation professionnelle initiale et continue ; méconnaissance des outils et ressources existants sur l?évaluation et la prévention des risques chimiques? Le PRST 4 (2021-2025) fait du risque chimique l?un des 5 risques prioritaires de la stratégie régio- nale santé au travail (avec les risques de chutes de hauteur et de plain-pied, les risques psycho- sociaux, les risques de troubles musculosquelettiques et les risques routiers). 5 actions lui sont consacrés, dont l?une mentionne explicitement les perturbateurs endocriniens (prévention du risque d?exposition à la silice). En complément de ces actions de prévention, une action destinée à « développer la recherche et améliorer les connaissances » est tournée spécifiquement vers les perturbateurs endocriniens. In- titulée « étude-action sur la prévention de l?exposition des travailleurs aux perturbateurs endocri- niens » et pilotée par la DREETS PACA, cette action se donne 4 objectifs : identifier et analyser les initiatives régionales existantes en matière de sensibilisation et de prévention des expositions des travailleurs aux perturbateurs endocriniens ; proposer des axes d?amélioration en matière de sensibilisation et d?accompagnement des entreprises à la prévention des risques d?expositions aux perturbateurs endocriniens ; développer une approche transversale avec les acteurs de la santé publique et de la santé environnementale ; s?appuyer sur les travaux universitaires (lien avec la plateforme Couple Reproduction Enfant Environnement et Risque (CREER, pôle de compétences de l?Arbois?). Un secteur pilote a été identifié : les « soins de beauté » (cosmétiques, coiffure, esthétique ?) dans le département des Bouches-du-Rhône, qui représente 57 entreprises. Ce choix a été fait car ce secteur est essentiellement composé de TPE-PME (priorité du PRST 4) et parce que les per- turbateurs endocriniens y constituent un risque professionnel important. Annexe 11.1.4 L?action de la DREETS Centre Val de Loire pour la prévention des PE La DREETS Centre-Val-de-Loire, dans le cadre du 3ème PST, a mis en place une démarche partenariale intitulée « mieux connaître les perturbateurs endocriniens et les nanomatériaux pour mieux prévenir les risques sur les lieux de travail ». Cette démarche a été portée par un groupe de travail pluri-institutionnel (Dreets, SPST, Carsat, MSA) et s?est structurée en plusieurs étapes : Sensibilisation des préventeurs : 370 préventeurs (médecins du travail, intervenants en prévention des risques professionnels (IPRP) et infirmiers des services de santé au travail PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 177/203 (IDEST), agents de contrôle de l?inspection du travail, contrôleurs de la Carsat ...) ont bénéficié de réunions dédiées. Identification des substances et des secteurs concernés dans la région : à partir des différentes listes de perturbateurs endocriniens existantes, 60 substances ont été retenues, en priorisant celles pour lesquelles des secteurs professionnels de la région présenteraient des risques d?exposition pour leurs salariés. Accompagnement des entreprises : 121 entreprises ont été ciblées au sein des secteurs repérés et ont été assistées pour faire le point sur l?approche du risque chimique. Il a été constaté que 60 entreprises parmi 121 manipulaient effectivement certains des perturbateurs endocriniens ciblés. Par ailleurs, 88% des entreprises avaient déjà entrepris au moins une action de prévention sur le risque chimique. L?inventaire des produits et le recueil des fiches de données de sécurité étaient les actions les plus réalisées, suivies de l?analyse des dangers. En revanche, seulement un quart des entreprises avait réalisé son évaluation du risque chimique et rédigé un plan d?action. A l?issue de l?opération, le chiffre était passé à 97% pour au moins une de ces actions. Parmi les suites de l?opération, certaines entreprises ont entrepris une substitution des perturbateurs endocriniens qu?ils utilisaient par d?autres substances. Des démarches de prévention collective et individuelle ont également été lancées, assorties de formation à l?intention des salariés. Le bilan positif tiré de cette campagne illustre l?intérêt d?un accompagnement au niveau local pour faire progresser les démarches de prévention et de substitution. Annexe 11.1.5 Les actions de l?Assurance maladie Avec celle de l?Aisne, la CPAM de l?Indre fait figure de précurseur en matière de lutte contre les perturbateurs endocriniens. Dans une région déjà engagée dans cette démarche (signature par le Conseil régional de la charte « villes et territoires sans PE », mise en oeuvre d?un plan d?action régional?), la CPAM 36 a lancé en 2021 des actions de prévention des expositions aux perturbateurs endocrinien (en particulier les phtalates), avec deux volets : sensibiliser les professionnels de santé, d?une part, mener une action de communication auprès des assurés sociaux, en ciblant plus spécifiquement les femmes enceintes et les jeunes enfants, d?autre part. Pour sensibiliser les professionnels de santé libéraux, des visites leur ont été rendues par les délégués de l?assurance maladie, qui leur ont remis plusieurs documents (mémo synthétisant les dernières mesures réglementaires et les recommandations, aide visuelle et argumentaire, affiches et dépliants à destination des assurés). Ont été ciblés, dans un premier temps, les médecins mais surtout les sage-femmes, particulièrement sensibles aux questions environnementales et à leur impact sur les 1000 premiers jours. Une campagne spécifique en direction des pharmaciens d?officine a également été déployée, dans la perspective de « l?entretien court pharmaceutique à destination des femmes enceintes » prévu par la dernière convention nationale. Cette campagne a été complétée par des actions de sensibilisation des assurés sociaux, en particulier les femmes enceintes. A l?occasion des « rendez-vous maternité », les conseillers de l?Assurance maladie ont ainsi sensibilisé ce public aux questions relatives aux perturbateurs endocriniens. Ces actions ont été menées de façon partenariale, dans le cadre des contrats locaux de santé et avec la contribution d?associations telles que le Centre permanent d?initiatives pour l?Environnement Brenne Berry (animation d?ateliers de prévention en santé environnementale pour encourager les femmes enceintes à choisir les bons produits du quotidien). Enfin, la CPAM a soutenu, dans le cadre des contrats de locaux de santé, des expérimentations « 0 phtalates » menés par deux collectivités territoriales (Châteauroux Métropole et Pays d?Issoudun et de Champagne berrichonne) : financement d?opérations de biomonitoring (port de bracelets en silicone et analyse de mèches de cheveux pour une vingtaine de personnes), financement de formations pour les personnels de la petite enfance et les acheteurs publics, PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 178/203 financement d?ateliers de sensibilisation à destination d?un public précaire. Ces actions ont été financées via le fonds d?action sanitaire et social de la CPAM. Dans la foulée des actions entreprises dans l?Indre et dans l?Aisne, une dizaine de CPAM envisagent de lancer des campagnes de prévention des PE. Ces initiatives ont trouvé un écho national dans le « rapport charges et produits » 2023 de la CNAM qui met en avant ces expérimentations dans son chapitre consacré à la santé environnementale. Surtout, la dernière convention d?objectif et de gestion (COG 2023-2027) signée entre l?Etat et la CNAM consacre un chapitre à la santé environnementale et la transition écologique, dans lequel une généralisation des opérations « 0 phtalates » est prévue. Plus globalement, la CNAM s?engage à intégrer la dimension « santé environnementale » dans toutes les campagnes de prévention et de promotion de la santé. La COG stipule également que les accords conventionnels intégreront à l?avenir la promotion de la santé environnementale, à l?instar du nouvel entretien postnatal prévu par un avenant à la convention sage-femmes. Révisée en décembre 2021, cette convention comporte un article relatif au suivi post-natal actant le principe selon lequel les visites à domicile intègreront désormais un volet lié à l?impact de l?environnement sur la santé de l?enfant. D?autres conventions devraient, à l?avenir, intégrer des dispositions de ce type, à commencer par celles des médecins et des pharmaciens, pour lesquels la santé environnement devrait figurer parmi les thèmes abordés lors des « rendez-vous prévention aux âges clefs de la vie ». Annexe 11.2. Les actions portées par les collectivités territoriales Annexe 11.2.1 Le plan régional perturbateur endocrinien de la région Centre Val de Loire Signataire de la charte du RES en 2021, la Région Centre-Val-de-Loire déploie depuis 2020 un plan d?action régional « ma région sans perturbateurs endocriniens ». Ce plan d?action est construit autour de trois axes : « Informer/communiquer » : cet axe s?est concrétisé par l?édition de plaquettes grand public (adaptation des habitudes, sans que cela ne soit trop coûteux) et d?un guide aux collectivités (portant sur la qualité de l?air, la restauration, et la qualité de l?eau). « Connaître » : cet axe matérialise le soutien aux projets de recherche locaux permettant de quantifier l?imprégnation. « Sensibiliser pour réduire » : cet axe se traduit par le soutien à des actions vers les publics prioritaires (jeunes enfants, adolescents, futurs et jeunes parents, femmes enceintes), les citoyens, les professionnels et les collectivités. Les responsables du suivi du plan ont fait part de leur souhait de pouvoir toucher un public le plus large possible, qui dépasse le champ des citoyens déjà sensibilisés sur le sujet. Le comité de pilotage du plan se réunit 2 fois par an. Un appel à projets ouvre des subventions de 3 000¤ à 10 000 ¤, le financement de la région ne pouvant excéder plus de 50% du coût total. Le bilan de ce plan, qui court jusqu?à 2024, n?est pas encore achevé, mais des actions diverses ont été soutenues (actions d?éducation au mieux manger dans les villes, utilisation de matériaux biosourcés pour la rénovation de lycées, campagnes d?information au sein de CPTS ...). Le plan résonne avec le PRSE 4 du Centre-Val-de-Loire, qui accorde également une place forte aux perturbateurs endocriniens dans ses différents axes (sensibilisation, information et formation ; alimentation ; micropolluants ; analyse de l?environnement). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 179/203 Annexe 11.2.2 Le plan d?action régional du Conseil Régional Occitanie Signataire de la charte « villes et territoires sans perturbateurs endocriniens », le Conseil régional Occitanie a adopté en 2019 un plan d?action régional composé de 10 engagements, répartis en 3 axes : améliorer la connaissance scientifique et la diffuser largement, en informant les divers publics, dont les futurs professionnels de santé et en travail social ; déployer une politique d?achats responsables ; intégrer pleinement les enjeux des perturbateurs endocriniens dans les politiques publiques menées par la Région. Par rapport aux mesures habituellement prises par les collectivités territoriales, ce plan d?action se distingue par l?importance qu?il accorde à la recherche et à l?innovation. Les bilans 2021 et 2022 de ce plan d?action régional mettent ainsi en avant : 9 projets relevant directement ou indirectement des perturbateurs endocriniens subventionnés dans le cadre de l?appel à projets « recherche et société(s) » de 2020 ; 6 allocations doctorales en lien avec les perturbateurs endocriniens ; 14 projets subventionnés dans le cadre de l?accompagnement aux projets d?entreprises développant des solutions/produits limitant l?usage et/ou la dissémination de perturbateurs endocriniens dans l?environnement : agriculture, emballages écologiques, cosmétiques ; 2 projets subventionnés dans le cadre de l?accompagnement de cluster/pôle de compétitivité oeuvrant dans le domaine de l?agriculture et de la cosmétique. Le plan d?action régional fait également de la commande publique un levier prioritaire pour lutter contre les perturbateurs endocriniens. Sont ciblés prioritairement les marchés de denrées alimen- taires, de nettoyage des espaces verts, de textile et de travaux. Le bilan 2021 fait ainsi état de 269 marchés de travaux intégrant des clauses non PE et le bilan 2022 met en avant une formation « prescriptions techniques relatives aux matériaux et équipements de construction durable » des- tinée aux chargés d?opération. Autre particularité de ce plan d?action régional : un recensement des crédits consacrés à la mise en oeuvre de ce plan d?action régional. Ils s?élèvent, selon le Conseil régional, à 3,45 M¤ en 2021 et 5 M¤ en 2022. Annexe 11.2.3 La Ville de Strasbourg et les « Ordonnances vertes » La Ville de Strasbourg a rejoint en 2018, la charte « villes et territoires sans perturbateurs endocri- niens » initiée par le Réseau environnement santé (RES) et co-pilote avec la Ville de Paris le groupe "perturbateurs endocriniens" du Réseau français des villes-santé de l?OMS. Afin de limiter l?exposition aux perturbateurs endocriniens pendant la grossesse, la ville propose à des femmes enceintes habitant à Strasbourg, de bénéficier du dispositif « ordonnance verte ». Pour en bénéficier, il est nécessaire, d?une part d?avoir une prescription d?un professionnel de santé (sage-femme, médecin généraliste ou gynécologue), et d?autre part de suivre les ateliers. L?ordonnance verte est un dispositif destiné aux femmes enceintes habitant à Strasbourg. A partir de 2026, il sera étendu aux femmes en parcours de procréation médicale assistée. Le dispositif comprend : PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 180/203 Deux ateliers de sensibilisation aux perturbateurs endocriniens d'une durée d'1h45 chacun : ? atelier 1 : vivre ma grossesse sans perturbateurs endocriniens ? atelier 2 : repenser mon assiette, pour mon bébé et la planète La mise à disposition gratuite d'un panier de légumes issus de l'agriculture biologique et de circuits courts (ferme située à 30 km de Strasbourg), chaque semaine (pour une durée de 2 à 7 mois, avec une modulation de la durée d?octroi selon le quotient familial). Un suivi est effectué, avec évaluation de la pertinence, notamment auprès des populations vulné- rables. Après une expérimentation auprès de 800 femmes en 2023, au succès incontestable (90% de satisfaction, avec des effets collatéraux sociaux positifs sur l?entourage, le lien entre femmes enceintes), la ville a décidé de pérenniser ce dispositif, à compter de janvier 2024, pour une durée de 3 ans. Le coût annuel de cette opération s?est élevé à 345 k¤ (pour la première phase) et devrait atteindre 650 k¤/an avec l?extension du dispositif, dont 65 k¤ de gestion administrative. Annexe 11.2.4 Le « Plan départemental de prévention et de lutte contre les perturbateurs endocriniens » du département du Tarn : focus sur la commande publique Dans la foulée de la signature de la charte du RES « villes et territoires sans perturbateurs endo- criniens », le Conseil départemental du Tarn a adopté en 2019 un « plan départemental de préven- tion et de lutte contre les perturbateurs endocriniens » structuré autour de 3 axes : éco exemplarité : politique d?achats sans PE, entretien des collèges et locaux du conseil départemental avec des produits sans PE, entretien des espaces verts sans produits phyto sanitaires ; prévention : sensibilisation du personnel de la collectivité, mobilisation des collectivités territoriales du Tarn, accompagnement des crèches, sensibilisation des collégiens, formation des professionnels de la petite enfance, restauration collective dans les collèges ? ; sensibilisation de la population. La commande publique constitue un axe prioritaire de ce plan d?action, qu?il s?agisse de marchés de travaux, de services ou de fournitures. Dans nombre de marchés lancés depuis 2020, figure un article introductif mentionnant que le département « souhaite inciter les fournisseurs à proposer une gamme de produits et de services sans perturbateurs endocriniens afin de protéger la popu- lation, les agents du Département et l?environnement ». Des clauses particulières ont également été introduites dans plusieurs marchés, qui vont au-delà des seuls perturbateurs endocriniens. Cette approche a été retenue compte tenu des lacunes de la réglementation, en particulier l?absence d?une liste de PE avérés ou présumés. Ainsi, pour les marchés de mobilier de bureau, le cahier des charges stipule que les équipements (plans, tables, chaises, armoires?) respectent la marque NF environnement pour l?ameublement. De même, dans les marchés de supports de communication (textiles, objets promotionnels) une clause du cahier des charges prévoit que les candidats devront « proposer une gamme de produits à écolabels éventuels ou équivalents, ou à référentiels écologiques reconnus ». Pour les objets commandés sur catalogues, le département demande à pouvoir identifier et commander en priorité des produits écoresponsables. Selon les services du conseil départemental, ces clauses n?ont pas posé de problème particulier aux fournisseurs : le fait d?imposer cette certification n?a pas eu pour effet de restreindre les offres. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 181/203 Pour accompagner la mise en oeuvre de ces marchés, les acheteurs ont bénéficié de l?appui de la responsable de la commande publique recrutée en 2019, qui a apporté conseils et orientations pour la mise en place de clauses environnementales. Un cycle de formation spécifique a également été proposé aux agents de la collectivité à compter de 2020. Dans le secteur des travaux, deux exemples de marchés ont été fournis à la mission : le nouveau collège Thomas PESQUET à Castres et la rénovation de l?hémicycle de l?hôtel du Département à ALBI. Pour ces deux marchés, il a été demandé aux candidats à l?appel d?offre de fournir des « matériaux plus sains afin de limiter l?émanation de particules contenant des perturbateurs endocri- niens ». Pour l?hémicycle, cela s?est traduit par un revêtement mural en PVC acoustique certifié A+ et des dalles de sol vinyle certifiées A +. Pour le collège, ont été retenus : des panneaux composites en zinc pour le bardage extérieur du bâtiment ainsi que des sols, peintures et mobilier éco-certifiés. Ainsi, c?est une démarche pragmatique et progressive qui a été mise en oeuvre par le Département du Tarn, axée sur certains marchés et s?appuyant sur les écolabels et les certifications environne- mentales (faute de produits certifiés « sans perturbateurs endocriniens »). La commande publique fait partie des 12 engagements pris au titre du deuxième plan départemen- tal de prévention et de lutte contre les PE (2023-2025), avec une priorité donnée aux « achats fortement impactant pour la santé humaine ». Notons enfin que le Conseil départemental encourage les collectivités territoriales du Tarn à pren- dre en considération les perturbateurs endocriniens. Pour cela, dans le cas d?opérations co-finan- cées par le Conseil départemental, ce dernier peut accorder un bonus financier aux collectivités qui s?engagent à réduire l?exposition aux perturbateurs endocriniens. Annexe 11.2.5 La Ville de Mouans-Sartoux et son « projet alimentaire territorial » La ville de Mouans Sartoux (06), 10 000 habitants, a un engagement en matière d?écologie, et notamment de santé environnementale, depuis plusieurs décennies et la ville considère aujourd?hui qu?il s?agit d?un facteur d?attractivité. Cet engagement de longue date sur l?alimentation bio et l?économie circulaire, a été renforcé, sur la thématique des PE, par la signature, en décembre 2021, de la charte villes et territoires sans perturbateurs endocriniens. Au moment de la visite de la mission, la commune travaillait encore sur la traduction concrète de cet engagement. Avant la signature de cette charte, la ville de Mouans-Sartoux s?était lancée dans un ambitieux programme alimentaire dans le cadre d?un projet d?alimentation territorial (PAT), dont l?origine remonte, selon l?élu rencontré, à la crise de la vache folle en 1996. Par ce PAT, et pour répondre aux enjeux de santé et d?environnement en lien avec l?alimentation, la commune, alors que les plastiques furent écartés quelques années auparavant, sert aux enfants des écoles et des crèches des repas 100% bio, de saison, depuis 2012. Le passage au 100% bio s?est fait à coût constant grâce à une diminution de 80% du gaspillage alimentaire et l?approvisionnement par la ferme municipale (96 % des légumes en proviennent). Depuis septembre 2022, 50% des repas servis dans les cantines sont servis avec de la viande ou du poisson, 50 % avec des oeufs et des protéines végétales. La commune explique qu?il y a en parallèle une éducation à l?alimentation. Une enquête de 2013 auprès de la population met en évidence que 95% des familles ayant un enfant à l?école avaient changé leurs pratiques alimentaires (davantage de bio, de local et moins de produits transformés). L?étude d?impact de 2022 dans la population générale montre PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 182/203 que l?impact positif est principalement dû au changement individuel dans les habitudes alimentaires (59% ont modifié leur régime alimentaire avec réduction de la viande, des aliments ultra transformés, consommation accrue de produits BIO de saison et locaux). La Maison d?éducation à l?alimentation durable (MEAD) a été créée quant à elle en 2016. Elle est installée sur la ferme municipale et héberge le service alimentaire municipal (5 personnes, financés par l?ADEME, la Fondation Carasso, l?Union européenne?). Le travail repose sur cinq axes : a/reconquête du territoire agricole (aides municipales à l?installation bio), b/ accès à l?alimentation durable (AMAP, marchés de plein air, Biocoop, épicerie sociale?), c/ éducation à l?alimentation durable (jardinage, cuisine,...) pour les enfants, les seniors, d/ travail de recherche (économie, nutrition?), e/partage avec d?autres collectivités (plus de 750 communes sont venues voir Mouans- Sartoux dont Lyon, Bordeaux?). Le Projet alimentaire territorial a ainsi pour but de réunir les acteurs locaux autour de l?alimentation (producteurs, transformateurs, consommateurs, élus?) pour reconnecter l?alimentation au territoire. Dans le cadre du plan de relance, le PAT de Mouans-Sartoux a obtenu un financement de 300 K¤ pour 3 ans. Annexe 11.2.6 Le plan départemental « santé dans toutes les politiques » du conseil départemental des Alpes-Maritimes Dans le prolongement du « green deal » lancé en 2020, le conseil départemental des Alpes Mari- times a adopté en 2023 un plan départemental « Santé dans toutes les politiques » qui s?étend jusqu?en 2028. Ce plan comporte 40 projets dont un certain nombre concernent les perturbateurs endocriniens : « étudier l'impact en santé des actions menées au sein des maisons départementales des 1 000 jours, par exemple au sujet des perturbateurs endocriniens » ; accompagnement des crèches d?Antibes en lien avec SAFE-Li ; sensibilisation des agents du département à la santé environnementale. Pour les crèches (au nombre de 300 dans le département), le conseil départemental s?appuie sur deux opérateurs : l?association Label Vie qui accompagne des établissements collectifs d?accueil du jeune enfant (EAJE) en matière de transition écologique et de santé environnementale (29 crèches accompagnées en 2022 et 15 crèches engagées dans cette démarche en 2003) ; l?agence ALCISE qui, à travers la démarche SAFE-Li et grâce au soutien financier de l?ARS PACA (via le PRSE), accompagne la commune d?Antibes et ses crèches depuis 2023. Les deux démarches (Label vie et Safe-Li) sont très similaires dans leur contenu (diagnostic, for- mations, plan d?action?) avec toutefois des approches différentes : accompagnement individuel des crèches par Label Vie alors que SAFE-Li promeut une logique d?essaimage (choix d?une crèche « pilote » pour engager un processus qui doit s?étendre à tous les établissements du dé- partement). Le plan départemental « santé dans toutes les politiques » s?est également traduit en 2023 par une formation, à grande échelle, des agents de la PMI à la santé environnementale, dont les perturba- teurs endocriniens : alimentation, cosmétique, hygiène, aération des locaux? 145 agents (soit en- viron 80%) ont suivi cette formation d?une journée complétée, pour les « référents thématiques », par des ateliers d?une demi-journée. En 2024, des ateliers ont été mis en place dans les maisons des 1000 premiers jours, de sensibilisation des femmes enceintes, assistantes maternelles et jeunes parents. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 183/203 Annexe 11.3. Les actions portées par les associations Annexe 11.3.1 La charte « villes et territoires sans PE » du Réseau environnement santé Le Réseau environnement santé (RES) est une association loi 1901 qui a été créé le 3 mars 2009, avec l?aide du WWF. Les actions du RES sont les plaidoyers, les interventions publiques, les colloques et les revues de presse. Les dates clef du RES184 2009 : plaidoyer pour une interdiction du BPA dans les biberons ; interdiction votée en 2010. 2012 : interdiction du percholoéthylène dans les pressings, suite aux alertes du RES. 2014 : contribution à la création de la SNPE et intégration du RES dans les instances de travail. 2017 : création de la charte Villes et territoires sans perturbateurs endocriniens. 2021 : création des opérations zéro phtalates à mener avec les territoires. 2023 : lancement du projet européen LIFE ChemBee porté par le RES pour la France, avec 11 partenaires de 9 pays européens et 25 collectivités françaises partenaires. La charte signée par les collectivités Le RES met en oeuvre une démarche centrée sur les perturbateurs endocriniens, qui consiste à faire s?engager les collectivités territoriales à la faveur d?une charte villes et territoires sans perturbateurs endocriniens. C?est ainsi que, fin 2023, 300 communes, 4 régions et 10 départements ont signé la charte. Les collectivités territoriales signataires s?engagent alors à : ? Interdire l?usage des produits phytosanitaires et biocides, qui contiennent des perturbateurs endocriniens (ainsi que des substances cancérigènes, mutagènes et toxiques pour la re- production (CMR)) sur leur territoire en accompagnant les particuliers, les propriétaires des espaces et d?établissements privés désirant appliquer ces dispositions. ? Réduire l?exposition aux perturbateurs endocriniens dans l?alimentation, en développant la consommation d?aliments biologiques et en interdisant l?usage de matériels pour cuisiner et chauffer comportant des perturbateurs endocriniens. ? Favoriser l?information de la population, des professionnels de santé, des personnels des collectivités territoriales, des professionnels de la petite enfance, des acteurs économiques des enjeux des perturbateurs endocriniens. ? Mettre en place des critères d?éco conditionnalité interdisant les perturbateurs endocriniens dans les contrats et les achats publics. ? Informer tous les ans les citoyens sur l?avancement des engagements pris. 184 Selon le RES PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 184/203 Figure 3 : Collectivités signataires de la charte Villes et territoires sans PE Source : RES Les actions engagées par les villes ou territoires sont variables, mais le levier important de la com- mande publique est volontiers mis en avant. Quelques exemples ; association 3AR (achats publics responsables) en Nouvelle-Aquitaine, première signataire de la Charte : mise au point d?un plateau repas pour les crèches en porcelaine de Limoges. ordonnance verte : la ville de Strasbourg propose des paniers bio aux femmes enceintes (cf.supra). Pour le président de l?association, hormis le nombre de signataires, il est encore difficile d?avoir un bilan chiffré de ce que font les collectivités territoriales signataires alors que les initiatives sont nombreuses. La mission a en effet constaté un réel engagement des collectivités signataires de la charte, avec des actions très concrètes pour réduire l?exposition de la population et de l?environne- ment aux perturbateurs endocriniens. La dynamique de réseau été fréquemment citée par les villes signataires, notamment en termes de partage d?expérience. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 185/203 Annexe 11.3.2 Le projet de sensibilisation aux perturbateurs endocriniens dans les lycées d?Île-de-France Première Région à signer la charte villes et territoires sans perturbateurs endocriniens en 2018, la Région Île-de-France s'est engagée avec le Réseau environnement santé à réduire l'exposition des franciliens à ces substances toxiques du quotidien en déployant des actions de sensibilisation en direction des jeunes. Après une première phase pilote menée en 2021 dans 7 lycées (PELIF1), une seconde phase en 2023 (PELIF2) a mobilisé 30 lycées franciliens éco-Responsables185 et sensibilisé ainsi 2126 lycéens, dont 486 ont participé à une expérimentation visant à montrer qu?il est possible de réduire l?exposition aux phtalates (l?expérience bracelet a été limitée à un panel de 10-30 élèves par établissement du fait de son coût). Le choix de mesurer uniquement une famille de perturbateurs endocriniens « non persistante » comme les phtalates s?explique par de nombreux facteurs : De nombreuses publications scientifiques ont démontré la possibilité d?utiliser les bracelets en silicone en tant qu?échantillonneur passif. Les phtalates s?éliminant en quelques heures et les changements de comportements pouvant avoir un impact réel et immédiat, ce choix permet une communication non anxiogène voire positive. Les sources d?exposition sont facilement identifiables (plastiques, cosmétiques, alimentation ultra-transformée, poussières domestiques). La dimension ludique liée au port du bracelet (les volontaires ont notamment fait remarquer le « côté fun »). La phase de sensibilisation a été effectuée en 3 temps : une sensibilisation initiale sur les PE et leurs effets, les sources de phtalates et la méthode d?analyse ; des analyses scientifiques des bracelets en silicone. Le port de ces bracelets durant 7 jours consécutifs (24h/24, même sous la douche), permet de mesurer l?exposition moyenne quotidienne par voie d?inhalation (air intérieur) et par absorption cutanée (transpiration) et contact direct (gel douche, sprays?) ; et une phase de restitution. La présence de 9 phtalates a été analysée (DEHP, DiNP, DiDP, DiBP, BBP, DnBP, DEP, DMP, DnOP). Ce choix de phtalates s?est fait sur la base des mesures effectuées par Santé publique France dans ses études ESTEBAN et ELFE. Au final, 8 phtalates sur les 9 testés ont été retrouvés chez tous les élèves avec des écarts importants entre élèves et entre lycées. Les phtalates les plus présents sont le DEHP, le DiNP, le DiDP et le DiBP. Les résultats ont principalement été restitués aux élèves sous forme de représentation graphique anonymisée de leurs mesures, permettant la comparaison avec les résultats des autres groupes dans d'autres lycées. L?évaluation du rapport entre la médiane d?exposition des lycées (pour la quantité totale des 9 phtalates par bracelet) et les valeurs d?indice de position sociale (IPS, pour les années 2021-2022) des lycées suggère une corrélation révélatrice d?inégalités sociales d?exposition. Cette conclusion mériterait toutefois d?être précisée par des études supplémentaires. Lors des restitutions, les diffé- rentes voies simples de réduction d?exposition aux phtalates ont été présentées aux lycéens. 185 Les lycées Eco-Responsables sont les lycées franciliens ayant obtenu le label d?Etablissement en Démarche de Développement Durable (E3D), destiné à garantir la présence d?une équipe structurée et d?une implication des élèves dans les projets de développement durable. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 186/203 Figure 4 : Document présenté aux lycéens Une des limites du projet PELIF a été de ne pouvoir réaliser qu?une seule opération de mesure de la contamination, ce qui ne permet pas de mesurer précisément l?impact de la campagne de sensibilisation. Toutefois, d?autres projets menés à plus petite échelle montrent qu?il est possible d?en quantifier l?efficacité en procédant à une seconde opération, 15 jours après le rendu des résultats de la pre- mière campagne en ayant sensibilisé entre temps les participants : Le projet EXAPH mené en 2022 par le RES avec le soutien de l'ARS Grand Est et la participation de 40 personnes volontaires des communes de Strasbourg, Schiltigheim et Bischheim : après une première série d?analyses, les 10 personnes les plus contaminées ont bénéficié d?une sensibilisation plus poussée et un 2ème test leur a été proposé quelques semaines après. Sauf pour 2 personnes, une diminution moyenne de -59% entre la première série de tests et la seconde a été observée. En incluant les 2 personnes qui ont vu leur exposition augmenter une diminution moyenne de - 32 % est observée sur le total des 9 phtalates recherchés ; Le projet d?analyses menées dans 3 lycées d?Annecy en 2023 où 2 séries de mesures pour les élèves participants ont été effectuées (avant et après des temps de sensibilisation similaires à ceux de PELIF2), avec un résultat de 70% des 33 élèves participants réduisant leur exposition. En conclusion, l?utilisation des bracelets en silicone s?est avérée un bon support de communication en rendant visible la pollution invisible par les phtalates, mais plus largement en sensibilisant de cette façon à la contamination par l?ensemble des perturbateurs endocriniens et en donnant envie de diminuer cette contamination. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 187/203 Cette démarche est tout à fait transposable dans tous les milieux et à tous les âges. Plusieurs personnes auditionnées ont fait part de leur intention de mettre en oeuvre des opérations analogues dans leur secteur d?activité. Annexe 11.3.3 La surveillance de l?air ambiant par ATMO Occitanie ATMO Occitanie186 a réalisé une évaluation de la présence des pesticides à caractère « perturba- teurs endocriniens probables » lors de sa campagne 2021-2022 sur la base des substances iden- tifié par l?Anses en avril 2021 dans la publication « Élaboration d?une liste de substances chimiques d?intérêt en raison de leur activité endocrine potentielle. Méthode d?identification et stratégie de priorisation pour l?évaluation Contribution à la Stratégie nationale sur les perturbateurs endocri- niens 2019-2022 ». Graphique 8 : Evolution du nombre de pesticides à caractère « perturbateur endocrinien probable » quantifié en Occitanie depuis 2018-2019. Source : ATMO Occitanie 186 ATMO Occitanie, association de loi 1901, est l?organisme chargé de la surveillance de la qualité de l?air et de la diffusion de l?information sur le territoire régional. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 188/203 En 2021-2022, 5 substances actives potentiellement perturbateur endocrinien ont été quantifiées sur l?ensemble des sites de mesures, à des fréquences plus ou moins importantes : lindane, folpel, pendiméthaline, s-métolachlore, propyzamide. A noter que s?agissant du cas particulier du lindane, substance active interdite de longue date et qui cumule à la fois la fréquence de quantification la plus élevée et des caractéristiques de danger fortes, il est important de pouvoir identifier les sources (d?émission voire de ré-émission), estimer les expositions agrégées par différentes voies et milieux d?expositions (air ambiant et air intérieur, ingestion...). ATMO Occitanie a continué ce travail de surveillance en réalisant une campagne test d?évaluation des perturbateurs endocriniens dans l?air ambiant en 2022, en collaboration avec le laboratoire METIS (Milieux environnementaux, transferts et interactions dans les hydro systèmes et les sols). Au cours de cette campagne, près de 55 molécules potentiellement perturbateurs endocriniens, dont des pesticides, des plastifiants, des retardateurs de flamme, ont été recherchées sur Toulouse, afin de confirmer la faisabilité de mesures de ces substances. Les résultats seront disponibles au 1er semestre 2024. A partir de 2024, une campagne d?évaluation des perturbateurs endocriniens dans l?air ambiant sera réalisée sur 5 sites pendant 3 ans. Annexe 11.4. Les actions portées par les crèches et maternités Annexe 11.4.1 Les crèches sans PE du Tarn (Label vie) Dans le cadre de son premier « plan départemental de prévention et de lutte contre les perturbateurs endocriniens », le conseil départemental du Tarn a, en partenariat avec la CAF, lancé en 2021 un appel à projets auprès des crèches du département. L?objectif était de les accompagner dans une démarche de promotion de la santé environnementale en générale et de réduction de l?exposition aux perturbateurs endocriniens en particulier. Neuf crèches (sur les 110 établissement d?accueil des jeunes enfants (EAJE) que compte le département) ont été ainsi sélectionnées et accompagnées par l?association LABEL VIE pour, dans un premier temps, réaliser un diagnostic de leurs pratiques puis élaborer un plan d?action afin de les faire évoluer. Des formations ont été organisées pour la mise en oeuvre de ces plans d?action : éducation à l?environnement, alimentation, nettoyage, hygiène et cosmétiques? Selon le bilan dressé en 2022 par le conseil départemental, cette première expérimentation a permis aux 9 crèches de changer concrètement certaines pratiques professionnelles : utilisation de couches éco-certifiées, suppression de la vaisselle et des biberons en plastique au profit de matières plus saines (verre, inox), entretien des locaux au nettoie vapeur, achat de produits d?entretien éco-certifiés, aération plus fréquente des locaux, utilisation de serviettes, gants et torchons lavables, lavage des jeux au lave-vaisselle, suppression des fournitures toxiques dans les jeux d?art plastiques (paillettes), suppression des bouteilles d?eau minérales au profit de l?eau du robinet? Les crèches engagées ont également relayé l?information auprès des parents et organisé parfois des ateliers pratiques de fabrication de produits d?entretien pour prolonger les écogestes aux domiciles des jeunes enfants. Au-delà de ces impacts environnementaux, les professionnels auditionnés par la mission mettent en avant la baisse de l?absentéisme des enfants accueillis comme des salariés des établissements accompagnés. Ils notent également un effet positif sur la qualité de vie au travail, avec une augmentation de l?engagement et du bien-être professionnel. Parmi les difficultés mentionnées, figure l?absence ? pour certains produits ? d?une offre de produits garantis sans perturbateurs endocriniens, ainsi que le manque de temps des professionnels. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 189/203 Cinq établissements ont, au terme de ce processus qui s?est achevé en 2023, obtenu la labélisation « Label Vie » pour une durée de 3 ans. Le second plan d?action départemental fait de l?accompagnement des crèches un de ses 12 engagements : « développer l?accueil des jeunes enfants en crèche dans un environnement plus sain ». Le conseil départemental entend ainsi encourager « l?ensemble des crèches du Département à engager des démarches de santé environnementale dans leur établissement et à partager les résultats obtenus auprès des parents afin d?encourager ces derniers à adopter les éco-gestes préconisés dans leur cellule familiale. ». Un nouvel appel à projet est programmé avec pour objectif l?accompagnement d?une dizaine de crèches. Pour susciter des candidatures, des sensibilisations à la santé environnementales (webinaires, ateliers?) seront organisées, avec l?appui du CPIE du Tarn, auprès de l?ensemble des EAJE et des relais petite enfance tarnais. Annexe 11.4.2 La crèche 1,2,3 Soleil sans PE à Saintes, accompagné par SAFE-LI Dans le cadre du Contrat local de Santé, sous l?impulsion de l?ARS Nouvelle-Aquitaine et après une sensibilisation aux PE en 2019 à destination des élus et des professionnels de la petite enfance, la crèche 1,2,3 Soleil s?est saisie du sujet de la santé environnementale et a été désignée comme crèche pilote référente du programme SAFE-Li pour la Charente-Maritime. La crèche bénéficie d?un accompagnement sur-mesure par SAFE-Li avec un plan d?actions opéra- tionnelles pour limiter l?exposition des populations vulnérables aux substances chimiques dont les PE. Ce plan intervient dans 6 domaines : « marché de la détergence, soigner la qualité de l?air, faire le tri, jouer autrement, mieux dans son assiette, nettoyer sans polluer ». Pour limiter l?exposition aux PE, la crèche a développé de nouvelles pratiques. Elle a ainsi réduit drastiquement le nombre de produits d?entretien utilisés, passant de 31 à 11 produits en privilégiant une offre éco-responsable et locale. En parallèle, les agents d?entretien ont été formés à l?utilisation de nettoyeur vapeur. Un nouveau protocole d?aération et de dégazage du mobilier187 a été défini et appliqué. Pour terminer, la crèche a développé une politique de sobriété relative aux jouets (choix restreint et moins genré) et animé des ateliers créatifs à partir de matériaux naturels avec l?objectif qu?ils soient repris dans les foyers des enfants. L?équipe de la crèche a pu constater une adhésion générale de l?ensemble des professionnels de la petite enfance et des familles, grâce notamment à un discours commun entre les différentes structures de la région (maternité, PMI ?). Cette sensibilisation collective contribue à faire évoluer la demande dans la région avec un début d?adaptation très progressif de l?offre de certains indus- triels fournisseurs dans la région pour y répondre. Les professionnelles de la petite enfance de la crèche ont, aujourd?hui, acquis des compétences et sont devenues de véritables actrices de la politique achat. La crèche positionnée comme crèche pilote partage et diffuse ces bonnes pratiques auprès d?autres crèches du département. Parmi les difficultés remontées, figurent l?offre et les coûts représentés par la substitution avec des produits éco-responsables, surmontés par un fort portage politique de la collectivité. 187 Les matériaux de construction et d?ameublement (panneaux de bois aggloméré ; mousses isolantes ; laine de verre et de roche ; peintures, vernis, colles ; revêtements muraux et de sol (moquettes, tapis, parquets) ; autres tissus) peuvent contenir du formaldéhyde, un gaz incolore et inflammable reconnu cancérogène de catégorie 1B au niveau européen et présentant des propriétés de perturbation endocrinienne. Il est recommandé de laisser « dégazer » le meuble, à son achat, quelques jours voire semaines dans une pièce aérée. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 190/203 Annexe 11.4.3 Un exemple de maternité labellisée THQSE : La Rochelle La maternité Pernelle Aufrédy de l?hôpital Saint-Louis de La Rochelle, de niveau 2B188, dispose d?un service d?obstétrique et de néonatologie avec des lits de soins intensifs. Elle fait partie du groupe hospitalier littoral Atlantique. La maternité est accompagnée par la structure Primum Non Nocere du groupe Grant Thornton dans une démarche innovante de maternité « éco-responsable ». L?objectif, via un diagnostic RSE incluant un volet sur les perturbateurs endocriniens, est de définir un plan d?actions en vue de l?obtention du label THQSE (très haute qualité sanitaire sociale et environnementale). Cette labéli- sation est attribuée après audit sur site par un organisme évaluateur indépendant, SOCOTEC cer- tification France. En France, 19 maternités sont labellisées THQSE. Afin de financer l?acquisition du label THQSE, l?équipe de la maternité a créé, en 2019, le projet « 1400 jours pour bébé » soutenu par le fond de dotation Horizon Atlantique 17 et a déposé cette marque afin de pouvoir mobiliser des mécènes et ainsi ne plus dépendre des appels à projet. Le groupement hospitalier de territoire (GHT) Atlantique 17 est signataire de la charte de l?association 3AR (achats publics responsables en Nouvelle-Aquitaine) pour la promotion d?achats durables hospitaliers et médico-sociaux. La maternité a également mis en place un SPASER (schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables). Très concrètement, pour l?achat des couches, cela s?est traduit par la définition d?un critère de qualité environnementale prenant en considération les analyses toxicologiques ainsi que les labels ou certifications écologiques des emballages. Pour rédiger cette clause environnementale, le service d?achat s?est appuyé sur les documents de travail de la DGOS. La note de « qualité environnementale des produits » constitue 60% du score utilisé pour l?attribution des marchés, les 40% restant correspondant au prix (25%) et à la valeur technique du produit (5% pour chacun des critères suivants : capacité d?absorption, confort pour le patient, ergonomie de pose pour les patients). Ainsi, depuis 2019, la maternité utilise des couches « éco-responsables ». Cette évolution a représenté un surcoût, peu important à l?échelle de l?hôpital et en partie compensé par les économies faites sur les produits de nettoyage. De plus, avec l?essor du marché des « couches éco-responsables » et le développement de la concurrence, lors du renouvellement du marché, le prix des couches « éco-responsables » a diminué de 24%. En 2022, a été mis en place LILOK, le premier laboratoire d?innovation pédiatrique, à l?hôpital de La Rochelle permettant aux start-ups d?identifier la maternité pour tester leurs produits et répondre aux besoins du secteur. La maternité a ainsi impulsé une démarche d?innovation en formulant un besoin de couches de petites tailles. Si cette innovation s?est concrétisée pour les bébés de 2 kg, l?offre reste lacunaire pour des couches pour les bébés nés prématurés, de moins de 2 kg, ceci s?expliquant par l?insuffisante rentabilité d?une démarche de R/D pour cette gamme-ci. La maternité se fournit également en nourrettes en verre contribuant à inciter ainsi de grands groupes à développer ces produits. La maternité applique la stratégie SSR qui implique, si possible, de Supprimer les produits à risque, sinon de les Substituer par des produits moins toxiques et, en dernier recours, de Réduire leur utilisation. En parallèle, l?ARS Nouvelle-Aquitaine a déployé les ateliers Nesting dans la région. Ces ateliers s?inscrivent dans le cadre du plan QVT 2019-2024 du GHT Atlantique 17 proposant aux agents hospitaliers d?aborder les thématiques de la santé environnementale dont la sensibilisation aux PE. 188 Quatre types de maternités ont été définis par les décrets Périnatalité du 9 octobre 1998. Un établissement de type 2b comporte des services d?obstétrique, de néonatalogie et de soins intensifs néonatals. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 191/203 Ces ateliers ont permis de former des professionnels de santé de la maternité mais aussi le per- sonnel de nettoyage, ce qui a été primordial pour une prise de conscience des enjeux et de la nécessité des changements de pratiques189. Ainsi, la maternité a mis en place un protocole de bionettoyage à l?eau et à la microfibre pour les sols, le bionettoyage des surfaces hautes au Citrus ND+, le nettoyage du cordon à l?eau et au savon, l?utilisation d?un lange lavable pour limiter l?expo- sition à l?oxyde d?éthylène utilisé pour la stérilisation. La santé environnementale est un moyen de valorisation des professionnels hospitaliers : d?après les différents retours, elle donne un sens nou- veau à ces professions avec une acquisition de compétences et d?expertise. Cela permet à cha- cun(e) de prendre conscience des leviers d?actions dans son domaine et de devenir des acteurs pour la santé de tous. Des ateliers Nesting sont également proposés pour sensibiliser les parents. La maternité est également lauréate de l?appel à projet « 1000 premiers jours » avec son dispositif « petit déj? sain à la maternité » proposant des produits en vracs, des produits bios de préférence en circuit court, dans des contenants inertes dans un espace collectif favorisant les liens sociaux. Les séjours en maternité sont envisagés comme une opportunité pour faire passer des messages. L?engagement de la maternité dépassent le champ des PE pour une prévention des risques chi- miques et des actions portant sur la santé environnementale au global. Malgré les avancées d?ores et déjà constatées et les efforts consentis, l?équipe de la maternité rencontre des difficultés pour approfondir et généraliser sa démarche notamment en raison du cloisonnement des services et d?un manque de moyens humains. Le service d?achat est limité par l?offre de produits et doit se fier aux informations fournies par les industriels. Pour se fournir en couche auprès d?une start-up, il a été contraint de procéder, pendant un an, hors marché public. Si le COVID a constitué une fenêtre d?opportunité pour changer des pratiques, il a également engen- dré des retards et difficultés dans le déploiement de certaines mesures. 189 Par exemple, il y a un biais cognitif très ancré de l?association de l?odeur du propre avec celle de la Javel. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 192/203 Annexe 12. Gouvernance de la SNPE2 Annexe 12.1. Le comité de pilotage de la SNPE2 (COPIL) Le COPIL est constitué de 20 membres : 10 directions générales (DGS, DGPR, DGAL, DGCCRF, DGDDI, DGE, Dgesco, DGOS, Dgri, DGT), du CGDD et de 4 agences (Santé publique France, Anses, Ansm, INCa), 2 EPIC (Ineris, BRGM), 2 EPA (OFB, CNFPT). Tous les membres du COPIL participent au COSUI. Dans les faits, quelques 80 personnes sont invitées au COPIL et la mission s?interroge sur le fonctionnement d?un COPIL de cette ampleur. Le COPIL s?est réuni 2 fois en 2020, 3 fois en 2021 et 2 fois en 2023. On comprend que le COPIL ne s?est pas tenu en 2022 compte tenu des travaux des équipes pendant la PFUE. A la lecture des comptes-rendus, la mission remarque une évolution de la fonction du COPIL, avec la mise en place du COSUI en 2021. Les premiers COPIL de la SNPE2 ont une orientation opérationnelle, par exemple : ? l?articulation avec les financements : élaboration du PIA 4 : 3 thèmes proposés dans les- quels il sera possible d'introduire le thème PE/substances chimiques (ex : mieux se nourrir) ; ? la mise en place des actions : réunions en interservices, stabilisation des financements, lien à faire entre certaines actions, action qui dépend aussi de la liste Anses catégorisée, la question des industriels qui revient souvent : « que doit-on substituer ? » ; ? Les projets de lo5i (lien avec la loi AGEC) et des règlementations européennes (action de la France envisagée prochainement sur produits chimiques et PE en fonction des travaux du Parlement européen sur les PE). Le COPIL échange sur l?actualité (loi et règlementations, préparation de la PFUE avec la confé- rence sur les produits chimiques et le forum PE) ... Le COPIL est par ailleurs amené à émettre un avis, par exemple sur la mise en place du comité de suivi, les propositions d?actions prioritaires de la SNPE2 à impulser en 2022). On retrouve, comme pour le COSUI, la présentation d?actions. Annuellement, mais particulièrement à la faveur de la fin de la SNPE2, en décembre 2023, le COPIL a colligé l?ensemble des actions de la SNPE2 et ce fut l?occasion, pour la mission, de solliciter l?ensemble des porteurs d?actions afin d?obtenir un bilan concernant les actions, jalons et indicateurs. L?ordre du jour des Comités de pilotage de la SNPE2 (COPIL) 26/02/2020 (premier COPIL de la SNPE2) Passage en revue environ la moitié des actions de la SNPE2 Un point d?actualité : loi AGEC, PEPPER, EHESP Travaux de l?Anses sur les listes Un point rapide a ensuite été fait sur les autres actions et les actions pour lesquelles des suites à donner spécifiques ont été relevées 13/10/2020 Un point d?actualités Action 3 sur l?élaboration de la liste : actions à venir aux niveaux national et européen PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 193/203 Focus sur 5 thématiques - Imprégnation des milieux au PE (actions 14, 15) (Ineris, OFB, DEB) - Comprendre l?impact des PE sur la biodiversité (actions 27-28-29) (OFB) - Actions sur la substitution (actions 35, 36, 38, 39) (DGE, CGDD, DGT) - Recherche sur les PE (actions 41, 42) (DGRI, CGDD) - Actions de surveillance sanitaire (actions 44, 45 et 46) (SpF) 16/06/2021 Présentation par Santé publique France de l?étude sur la priorisation des effets sanitaires liés aux PE Point d?actualité : suites de la réunion de l?InterCOT PE du 15 avril 2021, Inéris et action 14, règlement CLP, conférence sur les produits chimiques dans le cadre de la PFUE Présentation de l?outil de suivi 23/03/2021 Présentation du bilan intermédiaire de la SNPE2 par la DGPR et la DGS (actions 2, 3, 22, 34, 45, 42) Présentation du test EASZY comme bioessai in vivo d?activité oestrogénique : application à des substances chimiques dans le contexte de l?OCDE et à la surveillance environnementale Présentation du projet Green Data for Health Déploiement d?un outil informatique de suivi de la SNPE2 22/10/2021 Actualités et évolutions règlementaires sur les PE Evolution de la SNPE2 et propositions: mise en place d?un COSUI de la SNPE2 Propositions d?actions prioritaires de la SNPE2 à impulser en 2022 : bilan d?avancement des actions 26/01/2023 Actualités - Travaux réglementaires (révision des règlements CLP et REACH, textes AGEC 13-II) - Retour sur le séminaire du HCSP du 11 janvier 2023 » santé- environnement : quinze ans de politiques publiques » Orientations envisagées de la SNPE2 - Echanges sur les propositions issues de la consultation des membres du COSUI (restitution 9 décembre 2022) - Mission d?évaluation de la SNPE2 par les inspections générales Bilan et mise à jour de l?état d?avancement des 50 actions de la SNPE2 : - Bilan général sur l?année 2022 - Priorités et programme de travail pour 2023 - Echange sur le fonctionnement et les éventuelles évolutions à envisager 12/12/2023 Introduction par le Directeur de la DGPR et du Directeur de la DGS : - Travaux réglementaires (révision des règlements CLP et REACH, textes AGEC 13-II) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 194/203 - Mission d?évaluation de la SNPE2 par les Inspections générales IGEDD et IGAS Etat d?avancement des 50 actions de la SNPE2 et perspectives : Bilan général sur l?année 2023 et perspectives pour 2024 Annexe 12.2. Le comité de suivi de la SNPE2 (COSUI) Le 8 décembre 2021, se tient le premier comité de suivi (COSUI), mis en place dans le contexte du nouveau plan national santé environnement PNSE 4 et de l?évolution de sa gouvernance. Jusqu?à présent, le groupe santé environnement du PNSE était l?instance de consultation des par- ties prenantes pour la SNPE2. Il a donc été décidé de mettre en place un comité de suivi dédié à la SNPE2 associant l?ensemble des parties prenantes, associations, industriels, universitaires, ad- ministrations? et acteurs locaux impliqués dans les actions visant à réduire l?exposition aux per- turbateurs endocriniens, répondant ainsi aux attentes exprimées par les associations et membres du GSE. Le mandat du COSUI est : informer l?ensemble des acteurs de l?avancement des actions de la SNPE2 ; créer une instance d?échanges et de consultation permettant aux parties prenantes de valoriser / partager / mutualiser les initiatives et actions qu?elles ont menées sur les PE ; répondre aux interrogations et préoccupations des parties prenantes. Le COSUI constitue alors une instance complémentaire au comité de pilotage (instance décision- nelle avec les pilotes d?actions), en lien avec les instances du PNSE 4 (GSE, groupe de suivi). Le COSUI prévoit dès sa première réunion, en décembre 2021, la poursuite de la SNPE2 : préparation de la « SNPE 3 » (sur la base du bilan, des propositions du comité de suivi et du rapport d?évaluation des inspections générales) ; lancement de la « SNPE 3 » au second semestre 2024. La composition du COSUI a été établie en sélectionnant des membres du GSE, des personnes ayant participé à l?élaboration de la SNPE2 et des personnes ayant été invités à aux réunions des comités d?orientation thématiques dédiés au sujet des PE (interCOT PE) (Anses) : Les organisations professionnelles/industries (37) : AFISE (détergents), 2 ; ANIA (alimentaire), 2 ; CCFA (automobile), 2 ; COSMED (cosmétiques), 1 ; CPME (confédération PME), 1 ; Elipso (industrie / plastiques), 2 ; Febea (cosmétiques), 5 ; Fédération de la maille, 2 ; Fédération de la plasturgie, 1 ; FIEEC (électriques, électroniques et communication), 2 ; FIPEC (industrie / peintures et vernis), 3 ; FPJ (jouets et puériculture), 2 ; France Chimie, 4 ; Kalei (revêtements), 1 ; Plastics Europe, 1 ; SNIAA (Ingrédients Aromatiques Alimentaires), 2 ; UIPP (phytopharmaceutiques), 3. Les associations d?élus (21) : ADF - Conseillère Environnement et Développement durable, 1 ; AMF, 2 ; Assemblée des Communautés de France, 3 ; Association des maires ruraux de France, 2 ; Association des Petites Villes de France, 2 ; Association des Villes de France, 3 ; Elus, Santé Publique et Territoires, 2 ; France Urbaine, 2 ; Régions de France, 1 ; Régions de France - Conseiller Culture, Santé, Sport, Citoyenneté, 1 ; RFVS OMS, 2. Les chercheurs (17) : CNRS, 1 ; EHESP, 1 ; INRAE, 1 ; INRS, 5 ; Inserm, 2 ; MNHM, 1 ; université Aix-Marseille 1 ; Université de Montpellier, 1, Université Paris Cité, 3 ; Sorbonne Université, 1. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 195/203 Les médecins (11) : AP-HP, 1 ; CHRU de Lille, 1 ; CHU d?Amiens, 1 ; CHU d?Angers, 2 ; CHU de Limoges, 1 ; CHU de Lyon, 1 ; CHU de Nice, 1 ; Groupe hospitalier Vénissieux, 1 ; Hôpital privé de Lyon, 1 ; Mutualité française, 1. Les ONG santé environnement (15) : C2DS, 2 ; Cantine sans Plastique France, 1, FNE, 2 ; Génération cobayes, 2 ; Générations futures, 3 ; HEAL, 2 ; RES, 1 ; WECF, 2. Les associations de consommateurs (7) : CLCV, 4 ; Familles rurales, 2 ; UFC Que choisir, 1. Les organisations professionnelles/distributions (3) : FCD (commerce, distribution), 2 ; Perifem (Grande distribution), 1. Les Association professionnels médecine (2) : AMLP (Alerte des médecins sur les pesticides), 1 ; SFEDP (endocrinologie / diabétologie pédiatrique), 1. Santé Publique Territoire (1) : ARS Nouvelle Aquitaine, 1. Industriel (1) : Arkema (chimie), 1. Association public/privé (1) : PEPPER,1. A noter que l?ARS ARA a été manifestement ajoutée à la liste des membres du COSUI. Outre ces 115 membres, qui représentent 74 entités (certaines entités sont représentées par plu- sieurs personnes), on peut remarquer que 11 associations d?élus sont représentées alors que la déclinaison territoriale n?est pas explicitée dans la SNPE2 : on peut faire l?hypothèse que le GSE ait souhaité opérer ce lien. 25 organisations professionnelles sont membres du COSUI, 5 Orga- nismes nationaux de Recherche et 6 établissements d?enseignement supérieur et de recherche. En consultant la liste des invités aux COSUI, on observe que l?Agence nationale de la Recherche (ANR) n?est pas sollicitée. L?ordre du jour des Comités de suivi de la SNPE2 (COSUI) 08/12/2021 Actualités réglementaires sur les PE Présentation de la plateforme territoire-environnement-santé par le CEREMA Présentation des actions menées par l?ARS Nouvelle Aquitaine Etat d?avancement des actions, perspectives 2022 01/04/2022 Projet de sensibilisation dans les lycées d?Ile de France : RES Surveillance des indicateurs sanitaires et avancement de PEPS?PE, surveillance des indicateurs sanitaires (endométriose et fibrome utérin), programme national de biosurveillance 14/10/2022 Plan national sur les PE (NAPED) 2022-2026, Belgique Sondage sur la perception des Français sur les PE Point d?avancement des actions SNPE2 (actualités règlementaires, évaluation des substances, PEPPER, ressources pédagogiques PE en collèges et lycées) 09/12/2022 Actualités réglementaires Programme d?évaluation des substances d?intérêt PE par l?Anses Bilan des contributions reçues dans le cadre de la consultation sur les orientations de la SNPE PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 196/203 COSUI du 7 avril 2023 Actions de communication et de sensibilisation sur les PE : - Site 1000 premiers jours (action 7) : bilan et perspectives / SpF - Promotion de la santé environnementale et prévention des expositions aux perturbateurs endocriniens, présentation des actions menées en Indre, notamment l?expérimentation zéro phtalates / CNAM et CPAM de l?Indre - Projet de guide de sensibilisation des professionnels de santé sur les PE / DGS 02/06/2023 Point d?avancement des actions de la SNPE2 : - Travaux sur les indicateurs sanitaires en lien avec les PE / SpF : bilan sur les indicateurs sanitaires et perspectives (action 45) ; résultats de l?étude PEPS?PE (action 46) ; enquête ALBANE (biosurveillance) (action 49) - Travaux de l?Ineris sur les PE - Travaux de l'Ineris sur la substitution Information de l'INRS 13/10/2023 Bilan des recherches sur les perturbateurs endocriniens : Anses (PNR EST), ANR, PARC Campagne nationale exploratoire des pesticides dans l?air ambiant (CNEP) et bancarisaton des données de suivi 2021-2022 de la CNEP dans la base Géod?air Actions de prévention sur les PE suite à la proposition sur les phtalates du RES Outils de sensibilisation des professionnels de santé sur les PE 01/03/2024 Présentation des travaux de l?OFB sur le développement de la surveillance des activités endocriniennes dans les milieux aquatiques (actions 19 et 25) Réglementation des produits cosmétiques et récentes évolutions (DGS) Traitement du sujet « One-Health » dans les contenus des formations des grandes écoles (AgroParis Tech, Agreenium/ INSP PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 197/203 Annexe 12.3. Le plan national santé environnement et ses interfaces avec les autres plans et stratégies Source : MTECT PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 198/203 Annexe 13. Proposition non prescriptive et non exhaustive de plan d?actions Afin d?illustrer la recommandation n°2, à savoir assortir la SNPE3 d'un plan d'action ciblé sur quelques mesures prioritaires, la mission s'est attachée à identifier des actions permettant d?assurer une meilleure protection de la population et de l'environnement face aux PE. Cette proposition de plan d?actions, à l'attention des directions générales concernées est non prescriptive et non exhaustive. Elle a été pensée suivant 3 modalités : ? des actions "à soutenir" qui comprennent des actions qui dépassent la seule thématique des PE pour s'inscrire dans une démarche visant les produits chimiques en général ou même globalement la santé environnementale ; ? des actions "à initier" qui comprennent des actions prévues mais non menées dans la SNPE2, des axes oubliés dans la SNPE2 ou de nouvelles actions ; ? des actions "à poursuivre/intensifier" qui comprennent des actions lancées avant ou pendant la SNPE2 et pour lesquelles l'action est soit à poursuivre, soit à intensifier. Objectif de la stratégie Axe associé à l'objectif de la stratégie Modalité (à) Déclinaison en actions P ro d u ir e d e s c o n n a is s a n c e s La recherche soutenir Lancement d'un PEPR Exposome (cf.stratégie d?accélération Prévention) Recherche via les cohortes initier Recherches spécifiques (inégalités socio- économiques, impact sur la faune sauvage, remédiation et restauration de l'environnement...) L?évaluation soutenir Accélération du rythme d'évaluation des substances (niveau européen et national) Soutien aux projets de recherche visant à développer de nouvelles méthodes de tests initier Elaboration d'une stratégie relative aux méthodes de test au niveau européen La surveillance intégrée poursuivre / intensifier Poursuite de l?élargissement européen de la plateforme PEPPER et sécurisation de son financement Intégration du caractère PE des substances dans le choix des substances à surveiller dans les différents plans de surveillance environnementale existants Analyse des données de la surveillance intégrée soutenir Mise en oeuvre du programme de biosurveillance ALBANE et du nouveau dispositif de surveillance PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 199/203 des pathologies en lien avec les PE (suite de PEPS'PE) Structuration de la biosurveillance professionnelle (PST4) initier Lancement d'un programme de biosurveillance Outre-Mer F o rm e r e t in fo rm e r Information du consommateur poursuivre / intensifier Amélioration et promotion de l'application Scan4Chem Information des parents d'élèves sur la loi EGALIM de façon à inciter les collectivités et établissement à la respecter Sensibilisation des populations soutenir Soutien aux actions territoriales visant à réduire les expositions environnementales : - Une plateforme de capitalisation disposant d?une animation - Des recommandations sur les actions les plus efficaces dans le domaine de la prévention des expositions environnementales - Un budget spécifique accordé aux DREAL et ARS pour soutenir les projets dédiés aux produits chimiques (dont les PE) inscrits dans les PRSE 4 poursuivre / intensifier Généralisation des plateformes PREVENIR sur tout le territoire Développement de la Santé environnementale dans la prévention médicalisée (conventions nationales et bilans de prévention aux âges clefs de la vie) Formation des professionnels soutenir Développement de l'éducation à la santé environnementale initier Chaque année, initier une campagne de sensibilisation auprès d'un public particulier (priorité aux métiers à risque) Formation des cadres des secteurs productifs poursuivre / intensifier Amplification de la formation des professionnels de santé, du sanitaire et du social Publier un baromètre annuel de l?usage du module pédagogique numérique médecine et santé environnement de l?UNESS par les UFR de santé (formations médicales et paramédicales) P ro té g e r l' e n v ir o n n e m e n t e t la p o p u la ti o n Restriction voire l'interdiction des substances soutenir Soutien à: - l'inscription des PE dans le système général harmonisé de classification et d?étiquetage des produits chimiques des Nations-Unies ; - au niveau européen : la révision de REACH ; la mise en oeuvre du règlement CLP ; la restriction générale des PFAS et retardateurs de flamme ; l?extension de la directive sur les agents chimiques dangereux aux PE PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 200/203 initier Traduction des alertes résultant de la surveillance intégrée, au niveau national et européen Si pertinent, alignement de la règlementation française sur les initiatives prises par d'autres Etats-Membres Traitement des perturbateurs endocriniens dans le droit du travail avec le même degré de protection que les substances classées CMR Contrôle des produits soutenir Soutien aux travaux sur le contrôle du commerce en ligne au niveau européen initier Contrôle de la mise en oeuvre de l'étiquetage CLP (à partir de 2027) ainsi que de la mise en oeuvre de l'obligation d'information de la loi AGEC poursuivre / intensifier Diversification des campagnes annuelles de contrôle exploratoire Mise en oeuvre d?une EAT ?continue? Substitution soutenir Mise en place d?un appui aux collectivités territoriales en matière de commande publique, à travers la formation des acheteurs publics et la mise à disposition d?outils initier Anticipation des restrictions à venir en ciblant les AMI et AAP poursuivre / intensifier Terminer la démarche d'accompagnement des entreprises pharmaceutiques et l'appliquer à d'autres secteurs Réflexion prospective / Changement de paradigme initier Lancement d?une étude sur l?impact social d'un dossier de restriction, déposé, pertinent au niveau français prenant en compte les conséquences sur la santé humaine, sur l'environnement ... PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 201/203 Annexe 14. Glossaire des sigles et acronymes Acronyme Signification ALBANE ALimentation Biosurveillance sAnté Nutrition Environnement AGEC Loi anti-gaspillage pour une économie circulaire ANDPC Agence nationale de développement professionnel continu ANFH Association nationale pour la formation des hospitaliers ANR Agence nationale de la recherche Anses Agence nationale de sécurité sanitaire, de l?alimentation, de l?environnement et du tra- vail ARS Agence régionale de santé BPA Bisphénol A CLP Classification, Labelling, Packaging CLS Contrat local de santé CMR Substance cancérigène, mutagène, toxique pour la reproduction CNFPT Centre national de la fonction publique territoriale DCE Directive cadre sur l?eau DPC Développement professionnel continu EAT Etude de l?alimentation totale ECHA European Chemical Authority ECOPHYTO Plan de réduction de l?utilisation des produits phytosanitaires EDlist Endocrine Disruptor list EFSA European Food Safety Agency EGalim Loi pour l?équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimen- tation saine, durable et accessible à tous EHEN European Human Exposome network EIRENE Europ/Exposome Infrastructure EPA Environmental Protection Agency ESTEBAN Etude de santé sur l?environnement, la biosurveillance, l?activité physique et la nutrition EURION European cluster to Improve Identification of Endocrine Disruptors HBM4EU European Human Biomonitoring Initiative HCSP Haut conseil pour la santé publique INCa Institut national du cancer INERIS Institut national de l?environnement industriel et des risques INRS Institut national de recherche et de sécurité PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 202/203 Acronyme Signification Inserm Institut national de la santé et de la recherche médicale IRSN Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire MTECT Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires MTSS Ministère du travail, de la santé et des solidarités MSP Ministère de la santé et de la prévention NQE Norme qualité environnementale OCDE Organisation de coopération et de Développement Economiques OFB Office français de la biodiversité PARC Partnership for the Assessment of Risks from Chemicals PE Perturbateur endocrinien PEP?S PE Priorisation des effets sanitaires à surveiller dans le cadre du programme de surveil- lance lié aux perturbateurs endocriniens PFAS Composés per- et polyfluoroalkylés PNR EST Programme national de recherche environnement santé travail PNSE Plan national santé environnement PEPPER Plateforme Public-privé sur la prévalidation des méthodes d?essai sur les Perturbateurs EndocRiniens PEPR Programme et équipements Prioritaires de Recherche PREVENIR Plateforme PREVention ENvIronnement Reproduction PRSE Plan régionaux santé environnement REACH Registration Evaluation Authorization and Restrictions of Chemicals SNDS Système national des données de santé SNPE Stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens SpF Santé publique France SVHC Substance extrêmement préoccupante LEP Valeurs limites d?exposition professionnelle PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 203/203 PUBLIÉ  Sommaire  Résumé  Liste des recommandations  Introduction  1 LA REDUCTION DE L?EXPOSITION AUX PERTURBATEURS ENDOCRINIENS : UN ENJEU MAJEUR POUR LA SANTE HUMAINE ET L?ENVIRONNEMENT  1.1 Les perturbateurs endocriniens, un sujet complexe et un enjeu majeur pour la santé humaine et l?environnement  1.1.1 La perturbation endocrinienne : définition, historique et mécanismes d?action  1.1.2 Les principales sources et voies d?exposition aux perturbateurs endocriniens  1.1.3 Les dangers pour la santé humaine et l?environnement  1.1.4 Des enjeux socio-économiques importants, bien que mal évalués  1.2 Le cadre réglementaire, fixé pour l?essentiel au niveau européen, demeure inabouti malgré des progrès récents  1.2.1 La réglementation des perturbateurs endocriniens reste hétérogène, avec des approches différentes selon les réglementations  1.2.2 La réglementation s?intègre dans la stratégie ambitieuse de la Commission européenne sur la durabilité des produits chimiques  1.2.3 Cette stratégie européenne a abouti à des avancées notables mais achoppe sur la réforme de REACH  1.2.4 Des initiatives françaises prises en complément, voire en anticipation de la réglementation européenne  1.3 Une deuxième stratégie nationale, assortie d?un plan d?action, pour approfondir les actions engagées en 2014  1.3.1 La SNPE1, une initiative jugée pertinente et relativement efficace par les inspections générales en 2017  1.3.2 La SNPE2 : élaboration, objectifs, gouvernance et structure  1.4 Une stratégie originale en Europe, qui répond à une forte préoccupation citoyenne  1.4.1 Une préoccupation forte des Français  1.4.2 La France fait partie des rares pays ayant adopté des stratégies sur les perturbateurs endocriniens ou les produits chimiques en général  2 MALGRE DES AVANCEES, LE BILAN DE LA SNPE2 EST MODESTE  2.1 Connaître pour mieux agir  2.1.1 La recherche a progressé principalement en recherche fondamentale  2.1.1.1 Malgré la fin du PNRPE, la recherche sur les PE a bénéficié de soutiens budgétaires importants  2.1.1.2 La recherche sur les PE et singulièrement les équipes françaises occupent une place importante au niveau européen  2.1.1.3 Un nécessaire élargissement à l?exposome chimique  2.1.1.4 Des domaines de recherche oubliés ou insuffisamment développés  2.1.1.5 La plateforme PEPPER a apporté une contribution appréciable à la validation des méthodes de tests  2.1.2 Un processus d?évaluation des substances lent et complexe  2.1.2.1 Un retard dans l?évaluation de substances au titre des règlements européens malgré une augmentation notable  2.1.2.2 La pertinence d?une méthode de priorisation à questionner  2.1.2.3 Une multiplication de listes dans laquelle il est difficile de s?y retrouver  2.1.3 La surveillance sanitaire a progressé mais reste lacunaire  2.1.3.1 La biosurveillance a progressé, révélant un niveau élevé d?imprégnation de la population  2.1.3.2 Les expositions professionnelles restent mal connues  2.1.3.3 La surveillance des pathologies a progressé mais à rythme modeste et de façon très ciblée  2.1.4 Une faible prise en compte des PE dans les programmes de surveillance environnementale  2.1.4.1 Seule la surveillance de l?air intérieur dans les logements intègre les perturbateurs endocriniens comme déterminant  2.1.4.2 Les plans de surveillance des compartiments environnementaux contiennent des données sur les PE même si ces données ne sont pas valorisées  2.1.4.3 Les faiblesses de la surveillance : listes multiples et surveillance en silo  2.1.5 La surveillance des produits de consommation reste limitée  2.1.5.1 L?alimentation, une voie d?exposition majeure dont la connaissance progresse  2.1.5.2 La surveillance des produits de consommation repose sur des contrôles exploratoires à ce stade limités à la sécurité des jouets  2.2 Agir pour réduire effectivement l?exposition et l?imprégnation  2.2.1 Des progrès limités en matière d?information de la population et de formation continue  2.2.1.1 La loi AGEC prévoit de renforcer l?information du consommateur mais sa bonne application est compromise  2.2.1.2 A l?inverse, le site des 1000 premiers jours a connu un réel succès  2.2.1.3 Des avancées en matière de formation continue, principalement pour les professionnels de santé et les collectivités territoriales  2.2.1.4 La formation initiale sur les PE reste marginale  2.2.1.5 Dans l?ensemble, les branches professionnelles n?accordent pas de place spécifique aux PE  2.2.2 La réglementation des substances et sa mise en oeuvre se heurtent à de nombreuses difficultés  2.2.2.1 La SNPE2 a permis de soutenir l?adoption d?un règlement délégué du CLP instaurant de nouvelles classes de dangers  2.2.2.2 Le contrôle des produits, sur le territoire français et aux frontières, est limité par les moyens techniques et fragilisé par le commerce en ligne  2.2.2.3 Le droit du travail ne réserve pas de traitement spécifique aux perturbateurs endocriniens  2.2.3 Un échec des actions en faveur de la substitution  2.2.3.1 Des outils informatifs ont été produits à l?intention des industries mais n?ont connu qu?un faible écho  2.2.3.2 Les appels à projets consacrés à la substitution ont été infructueux  2.2.4 Un foisonnement d?actions territoriales de prévention  2.2.4.1 Un foisonnement d?actions de prévention portées principalement par les associations, les collectivités territoriales, les maternités et les crèches  2.2.4.2 Quelques initiatives locales de surveillance environnementale  2.2.4.3 Des actions qui se sont déployées avec peu de soutien mais qui suscitent une réelle dynamique de terrain en faveur de la santé environnementale  3 UNE STRATEGIE PERTINENTE ET GLOBALEMENT COHERENTE MAIS DONT L?EFFICACITE EST INCERTAINE  3.1 Une stratégie globalement pertinente mais insuffisamment tournée vers l?action et manquant de priorités  3.1.1 Une stratégie globalement pertinente mais qui ne mise pas assez sur les actions de prévention et de réduction des émissions  3.1.2 Une bonne prise en compte de la dimension européenne mais des lacunes s?agissant de l?approche ?une seule santé?, des inégalités sociales et des initiatives territoriales  3.1.3 Un affichage d?actions souvent déjà lancées et qui dépassent les seuls perturbateurs endocriniens  3.2 Si la SNPE2 est, dans l?ensemble, cohérente avec les plans globaux, elle souffre d?un certain nombre d?incohérences internes  3.2.1 Une cohérence satisfaisante avec les plans globaux mais une articulation moins lisible avec les stratégies et plans sectoriels  3.2.2 Le plan d?action conforte la dimension opérationnelle de la stratégie malgré quelques incohérences  3.3 Malgré quelques avancées, les résultats sont bien en deçà des objectifs fixés en 2019  3.3.1 Des avancées notables sur le plan de la réglementation, de l?information du public et en matière de recherche  3.3.2 Des résultats mitigés en matière d?évaluation des substances et de formation  3.3.3 Des progrès insuffisants sur le plan des contrôles et en matière de surveillance sanitaire et environnementale  3.3.4 Un échec total des mesures prises en faveur de la substitution  3.3.5 Des résultats modestes et difficiles à mesurer qui ne permettent pas de conclure quant à l?évolution de l?exposition de la population et de l?environnement aux perturbateurs endocriniens  3.4 Une gouvernance marquée par un manque de soutien politique et l?absence de suivi des indicateurs  3.4.1 Un comité de suivi, instance de partage de l?avancée des actions, plus que de suivi et un comité de pilotage peu investi dans le pilotage  3.4.2 Un manque de portage politique et un engagement insuffisant de certaines administrations  3.4.3 Malgré l?engagement de la DGS et de la DGPR, les échanges et la coordination entre les acteurs du plan (administrations et opérateurs) sont restés limités  3.4.4 Un suivi défaillant des indicateurs  4 RECOMMANDATIONS  4.1 Principes généraux  4.1.1 Une nouvelle stratégie est souhaitable et même nécessaire  4.1.2 Une stratégie globale assortie d?un plan d?action ciblé  4.1.3 Des principes généraux à inscrire dans la SNPE3  4.2 Les principaux objectifs à assigner à la SNPE3  4.2.1 Une SNPE3, tournée vers l?action et qui se donne pour horizon « zéro exposition aux PE »  4.2.2 Premier objectif : produire des connaissances  4.2.2.1 Développer la recherche en mettant en oeuvre un PEPR exposome  4.2.2.2 Accélérer le rythme d?évaluation des substances et élaborer une stratégie européenne de tests  4.2.2.3 Mettre en oeuvre une surveillance intégrée en couplant la surveillance sanitaire et environnementale  4.2.3 Deuxième objectif : former et informer  4.2.3.1 Garantir une information effective du consommateur  4.2.3.2 Sensibiliser les populations en allant vers les plus vulnérables  4.2.3.3 Généraliser la formation des professionnels concernés  4.2.4 Troisième objectif : réduire les émissions  4.2.4.1 Elargir les restrictions de substances ayant des effets de perturbation endocrinienne  4.2.4.2 Renforcer le contrôle des produits, aux frontières et sur le territoire national  4.2.4.3 Relancer les démarches de substitution et l?accompagnement des professionnels des secteurs émetteurs  4.2.4.4 Traduire sur le plan opérationnel les alertes issues de la surveillance intégrée  4.2.4.5 Engager une réflexion prospective pour des changements de paradigme  4.3 Une gouvernance à refonder et des moyens spécifiques à allouer  4.3.1 Une gouvernance à refonder  4.3.2 Doter le plan d?action d?un budget spécifique  Conclusion  ANNEXES  Annexe 1. Lettre de mission  Annexe 2. Liste des personnes rencontrées  Annexe 2.1. Ministères et directions d?administration centrale  Annexe 2.2. Europe & International  Annexe 2.3. Opérateurs publics nationaux  Annexe 2.4. Instances nationales  Annexe 2.5. Collectivités territoriales  Annexe 2.6. Sociétés savantes & personnalités qualifiées  Annexe 2.7. Structures professionnelles  Annexe 2.8. Associations & réseaux  Annexe 3. La réglementation des perturbateurs endocriniens au niveau européen et national  Annexe 3.1. En dépit de progrès, la règlementation européenne demeure insuffisante  Annexe 3.1.1 Une réglementation complexe qui a connu des avancées récentes  Annexe 3.1.2 Un bilan insuffisant et des perspectives d?évolution compromises  Annexe 3.2. La SNPE3 peut renforcer les réglementations européennes et nationales  Annexe 3.2.1 Au niveau européen, un rôle moteur de la France à conforter  Annexe 3.2.2 Au niveau national, des initiatives intéressantes mais qui doivent faire leurs preuves  Annexe 4. Parangonnage international  Annexe 4.1. La Belgique a développé une stratégie inspirée de la SNPE2 et dispose d?un droit du travail considérant les perturbateurs endocriniens au même titre que les CMR  Annexe 4.2. Le Danemark est actif contre la pollution chimique et a pris l?initiative de plusieurs législations sur les PFAS  Annexe 4.3. La Suède est également très préoccupée par son niveau de pollution aux PFAS  Annexe 4.4. L?Allemagne publie un premier plan d?action sur les perturbateurs endocriniens  Annexe 4.5. Les Etats-Unis ont relancé leur programme d?évaluation des pesticides perturbateurs endocriniens qui avait échoué  Annexe 5. Etat d?avancement des actions de la SNPE2  Annexe 6. Recherche  Annexe 6.1. Agence nationale de la recherche (ANR)  Annexe 6.1.1 Recherche financée par le plan d?action de l?ANR  Annexe 6.1.2 Analyse de situation de l?ANR sur les projets sur les perturbateurs endocriniens dans le cadre de la SNPE1 (2014-2018) et SNPE2 (2019-2022)  Annexe 6.1.3 L?ANR considère qu?il y a eu des avancées issues de la recherche sur les PE  Annexe 6.2. Le plan national de recherche Environnement Santé Travail (PNR EST)  Annexe 6.2.1 Bilan financier des projets relatifs aux perturbateurs endocriniens entre 2019 et 2023  Annexe 6.2.2 Bilan des équipes impliquées dans les projets  Annexe 6.2.3 Méthodologies générales mises en oeuvre dans les projets  Annexe 6.2.4 Les types de perturbateurs endocriniens étudiés  Annexe 6.2.5 Les principaux effets étudiés des PE  Annexe 6.3. L?investissement de la France dans les projets européens  Annexe 6.3.1 Le partenariat européen pour l'évaluation des risques liés aux substances chimiques PARC (partnership for the assessment of risks from chemicals)  Annexe 6.3.2 Les méthodes de test  Annexe 6.4. France Cohortes  Annexe 7. Evaluation des substances  Annexe 7.1. Evaluations de substances par l?Anses pour la période 2019 ? 2023  Annexe 7.1.1 Focus sur l?état d?avancement des évaluations des substances au titre des règlements REACH et CLP (données de mi-décembre 2023)  Annexe 7.1.2 Focus sur l?état d?avancement des évaluations des substances au titre des règlements phytopharmaceutiques et biocides (données de mi-décembre 2023)  Annexe 7.2. Etablissement d?une liste de substances de PE potentiels  Annexe 7.2.1 Méthode de priorisation des substances qui peuvent présenter des propriétés PE potentielles  Annexe 7.2.2 Conclusions des substances inscrites au programme annuel d?évaluation de l?Anses à partir de la liste de substances d?intérêts  Annexe 8. Surveillance sanitaire  Annexe 8.1. La biosurveillance  Annexe 8.1.1 L?élaboration d?un nouveau programme de biosurveillance (ALBANE)  Annexe 8.1.2 L?exploitation des données d?ESTEBAN  Annexe 8.1.3 Le programme HBM4EU  Annexe 8.2. La surveillance épidémiologique  Annexe 8.2.1 La santé reproductive  Annexe 8.2.2 La mise en place d?un nouveau système de surveillance sanitaire  Annexe 9. La surveillance environnementale  Annexe 9.1. La surveillance de l?air ambiant  Annexe 9.2. La surveillance de l?air intérieur  Annexe 9.3. Focus sur les PFAS dans la surveillance des sols  Annexe 9.4. La surveillance des milieux aquatiques  Annexe 9.5. La surveillance des rejets de stations de traitement des eaux usées urbaines (STEU)  Annexe 10. Formation  Annexe 10.1. Formation tout au long de la vie (initiale et continue)  Annexe 10.1.1 Formation initiale médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie  Annexe 10.1.2 Formation en école d?ingénieurs  Annexe 10.1.3 Ecole des hautes études en santé publique, seule formation financée par la SNPE2  Annexe 10.1.4 Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC)  Annexe 10.1.5 Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT)  Annexe 10.2. Service sanitaire des étudiants en santé (SSES)  Annexe 11. Actions territoriales  Annexe 11.1. Les actions mises en oeuvre par les services de l?Etat et l?Assurance maladie  Annexe 11.1.1 Bilan des PRSE 4  Annexe 11.1.2 La surveillance des rejets des industries pharmaceutiques réalisée par 5 DREAL à l?initiative de la DGPR  Annexe 11.1.3 La prévention du risque chimique dans le PRST de la région PACA  Annexe 11.1.4 L?action de la DREETS Centre Val de Loire pour la prévention des PE  Annexe 11.1.5 Les actions de l?Assurance maladie  Annexe 11.2. Les actions portées par les collectivités territoriales  Annexe 11.2.1 Le plan régional perturbateur endocrinien de la région Centre Val de Loire  Annexe 11.2.2 Le plan d?action régional du Conseil Régional Occitanie  Annexe 11.2.3 La Ville de Strasbourg et les « Ordonnances vertes »  Annexe 11.2.4 Le « Plan départemental de prévention et de lutte contre les perturbateurs endocriniens » du département du Tarn : focus sur la commande publique  Annexe 11.2.5 La Ville de Mouans-Sartoux et son « projet alimentaire territorial »  Annexe 11.2.6 Le plan départemental « santé dans toutes les politiques » du conseil départemental des Alpes-Maritimes  Annexe 11.3. Les actions portées par les associations  Annexe 11.3.1 La charte « villes et territoires sans PE » du Réseau environnement santé  Annexe 11.3.2 Le projet de sensibilisation aux perturbateurs endocriniens dans les lycées d?Île-de-France  Annexe 11.3.3 La surveillance de l?air ambiant par ATMO Occitanie  Annexe 11.4. Les actions portées par les crèches et maternités  Annexe 11.4.1 Les crèches sans PE du Tarn (Label vie)  Annexe 11.4.2 La crèche 1,2,3 Soleil sans PE à Saintes, accompagné par SAFE-LI  Annexe 11.4.3 Un exemple de maternité labellisée THQSE : La Rochelle  Annexe 12. Gouvernance de la SNPE2  Annexe 12.1. Le comité de pilotage de la SNPE2 (COPIL)  Annexe 12.2. Le comité de suivi de la SNPE2 (COSUI)  Annexe 12.3. Le plan national santé environnement et ses interfaces avec les autres plans et stratégies  Annexe 13. Proposition non prescriptive et non exhaustive de plan d?actions  Annexe 14. Glossaire des sigles et acronymes (ATTENTION: OPTION biocides et phytopharmaceutiques. Le temps nécessaire pour mener à terme l?évaluation d?une substance pour son caractère PE varie de 2 à 10 ans. Cette durée est dépendante de la disponibilité des données et se heurte à des difficultés d'obtention d?informations complémentaires de la part des industriels, en particulier pour les substances soumises au règlement REACH. L?Anses constate en effet que les demandes de données complémentaires sont plus rapidement satisfaites dans les cadres des règlements sur les produits phytopharmaceutiques et biocides. Pour y remédier, l?Agence européenne des produits chimiques (ECHA) travaille depuis plusieurs années sur l?évaluation de familles de substances, ce qui vise également à éviter des substitutions qui s?avéreraient in fine regrettables. Enfin, bien qu?identifiée comme une action de la SNPE2, aucune évaluation des risques n?a été menée pour les médicaments, les dispositifs médicaux et les cosmétiques. 2.1.2.2 La pertinence d?une méthode de priorisation à questionner Dans le cadre de l?action 3 de la SNPE2, le 15 avril 2021, l?Anses a publié une liste de substances d?intérêt du fait de leur action endocrine potentielle, ainsi qu?un avis et un rapport proposant une méthodologie de catégorisation des substances potentiellement PE en 3 catégories " avérées", 'présumées" ou "suspectées". La méthodologie publiée par l?Anses a permis d?identifier 906 substances avérées, présumées ou suspectées. La liste de ces substances n?a pas été rendue publique. L?application de plusieurs filtres a permis de retenir 16 substances prioritaires (catégorisées avec un score de priorisation de 1 à 16, cf.annexe n°7). Trois d?entre elles ont été inscrites au programme annuel d?évaluation de l?Anses. Le bilan reste donc à ce stade modeste au vu du faible nombre de substances proposées à l?évaluation. Cette liste avait en effet pour objectif de prioriser les substances pouvant présenter des propriétés PE en vue d?une gestion de risque adaptée (par exemple, reconnaissance européenne règlementaire, réduction par prévention ou précaution de l?utilisation). Mais elle n?a pas eu l?effet escompté, ni au niveau national ni au niveau européen. Quant au devenir de la liste, l?Anses a annoncé ne pas la mettre à jour en raison du caractère chronophage de la tâche. Les programmes de travail ne peuvent donc se baser de façon pérenne sur cette liste, relativisant la pertinence de son élaboration. A ressource constante, l?Anses préconise donc de participer à l?effort européen pour identifier des substances à évaluer en priorité plutôt que de prendre en charge cette tâche au niveau national. La mission partage cette position. 2.1.2.3 Une multiplication de listes dans laquelle il est difficile de s?y retrouver Outre la liste des 906 substances établie par l?Anses, une liste, également non publiée, de plus de 7 000 substances potentiellement PE a été élaborée par l?Ineris pour lancer l?action 14 de la SNPE2. 58 Outre les dépenses de personnels, le groupe de travail PE et, pour une partie de son activité, le Comité d?experts spécialisés Reach et CLP contribuent à l?évaluation PE des substances avec des vacations d?experts dont le taux est de 90¤ par demi-journée de présence et vacations pour des travaux d?analyse spécifique excédent le temps lié aux réunions. Cette activité d?expertise peut être estimée à 100K¤ par an. Chiffres fournis par l?Anses. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 32/203 L?établissement, en collaboration entre l?Anses et l?Ineris, d?une seule liste de référence aurait probablement permis des économies de moyens, une meilleure visibilité et compréhension et peut- être favorisé une meilleure valorisation nationale voire européenne. Ceci traduit une insuffisance de concertation entre les deux agences et un manque de séquençage des actions de la SNPE2. D?autres listes existent comme les ED list 59 (à caractère non officiel) ou encore la liste des substances présentant des propriétés de perturbation endocrinienne de l?arrêté du 28 septembre 2023 de la loi AGEC. Cette pluralité de listes crée de la confusion pour identifier les substances PE, ce qui nuit à une information et une action efficace des parties prenantes pour réduire les expositions. La plupart des personnes entendues par la mission ne connaissait pas la portée réglementaire de chacune des listes. 2.1.3 La surveillance sanitaire a progressé mais reste lacunaire La surveillance sanitaire prévue par la SNPE2 comporte deux volets : la biosurveillance et la surveillance des pathologies en lien avéré ou suspecté avec les perturbateurs endocriniens. Ces deux sujets sont détaillés en annexe n°8. 2.1.3.1 La biosurveillance a progressé, révélant un niveau élevé d?imprégnation de la population La SNPE2 accorde une place importante à la biosurveillance60 : 4 actions y sont consacrées et un axe lui est dédié, avec comme principal objectif le lancement d?un nouveau programme national de biosurveillance. Cet objectif a été atteint puisque l?enquête ALBANE (ALimentation Biosurveillance sAnté Nutrition Environnement) devrait être prochainement lancée, avec un premier cycle couvrant la période 2024-2026. ALBANE est mise en oeuvre par Santé publique France, qui a prévu d?y consacrer un budget de 10 M¤. Il s?agit de la contribution française au programme européen PARC dont l?un des 9 volets traite de la surveillance sanitaire et environnementale. Pour le premier cycle, une vingtaine de familles de substances seront analysées, dont une bonne part sont des perturbateurs endocriniens : phtalates, bisphénols/alkylphénols, PFAS, carbamates, pesticides, ions perchlorates, métaux. Quelques biomarqueurs d?effets seront intégrés dès le cycle 1 (et davantage aux cycles 2 et 3) afin de mettre en évidence des effets précoces. Bien que lancée avec retard (2024 au lieu de 2020), ALBANE constitue une réelle avancée qui apportera de nombreuses informations sur l?imprégnation de la population, y compris au niveau régional. La couverture populationnelle est large (1 150 enfants et adolescents de 3 à 17 ans et 2 000 adultes). Des programmes spécifiques aux outre-mer devraient être lancés ultérieurement, à l?image de ce qui est déjà en cours pour la chlordécone aux Antilles. 59 Le site internet « Endocrine Disruptor Lists » a été élaboré en Juin 2020 par la Belgique, le Danemark, la France, les Pays-Bas et la Suède, rejoints par l?Espagne en Février 2021. Il comporte 3 listes mises à jour régulièrement : Liste 1 = substances identifiées comme PE au niveau de l?UE ; Liste 2 = substances en cours d?évaluation pour la perturbation endocrinienne en vertu d?une législation de l?UE et Liste 3 = substances considérées par une autorité nationale comme ayant des propriétés de perturbation endocrinienne 60 Selon la définition donnée par SPF, la biosurveillance humaine permet de surveiller les expositions ou les effets précoces liés à la présence de substances chimiques dans l?organisme. Elle consiste à prélever des matrices biologiques comme le sang, l?urine, les cheveux, le lait maternel et à y doser les substances recherchées, ainsi appelées "biomarqueurs". La mesure qui est faite intègre toutes les sources d?exposition, quelles que soient les voies d?entrée des substances dans le corps humain (alimentation, respiration, contact?), et quels que soient le lieu d?exposition (domicile, travail?), l?activité ou la nature des produits consommés. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 33/203 Autre acquis des 5 dernières années (bien que curieusement absent des objectifs de la SNPE2) : l?exploitation d?ESTEBAN, programme de biosurveillance en population générale lancé en 2014 et clos en 2016 (pour la partie prélèvements biologiques). Dans le prolongement de l?enquête ELFE (volet périnatal du programme de biosurveillance, dont les résultats ont été publiés avant le lancement de la SNPE2), ESTEBAN apporte des informations précieuses sur l?imprégnation de la population française à de nombreuses substances, dont plusieurs perturbateurs endocriniens : bisphénols, phtalates, perfluorés, parabènes, retardateurs de flamme, plomb. A l?exception des parabènes (taux d?imprégnation de 60%), ces perturbateurs endocriniens sont retrouvés dans près de 100% des échantillons, révélant une imprégnation générale de la population. Pour chaque famille de substances, les principales voies d?exposition (alimentation, cosmétiques, tabac?) sont identifiées. En revanche, ces résultats ne permettent pas d?apprécier l?évolution de cette imprégnation, les perturbateurs endocriniens n?ayant pas été recherchés dans les précédents programmes de biosurveillance, à l?exception du plomb pour lequel on constate une nette diminution de l?imprégnation. Grâce au programme européen HBM4EU (European human biomonitoring Initiative), des comparaisons européennes de ces résultats ont été établies : c?est en France (parmi 11 pays de l?UE) que l?imprégnation aux bisphénols A et S est la plus importante (en revanche, elle est moindre pour le bisphénol F). De même, la France se distingue par des taux d?imprégnation des enfants aux phtalates particulièrement élevés. Ces résultats apportent des informations précieuses sur le niveau d?imprégnation de la population, qu?ALBANE viendra compléter dans les années qui viennent. En revanche, on peut regretter qu?aucun résultat n?ait été produit au cours des 5 dernières années sur les inégalités sociales d?exposition, qui étaient pourtant une des priorités de la SNPE2 et une recommandation forte du HCSP. Il en va de même de la surveillance « intégrée » (combinaison des surveillances sanitaire et environnementale) qui est annoncée dans la SNPE2 mais qui n?a pas trouvé de traduction substantielle à ce jour. 2.1.3.2 Les expositions professionnelles restent mal connues La connaissance des expositions et maladies professionnelles en lien avec les perturbateurs endocriniens a peu progressé en 5 ans. Le suivi des maladies professionnelles repose sur deux enquêtes (SUMER et COSET61) qui ne permettent pas d?identifier les pathologies liées aux perturbateurs endocriniens. Des travaux sont en cours à Santé publique France pour améliorer ce suivi, en exploitant notamment les données de la Caisse nationale d?assurance vieillesse (historique du parcours professionnel), couplées avec le système national des données de santé (SNDS) et les registres des cancers. De même, la biosurveillance des expositions professionnelles reste à ce jour embryonnaire et très lacunaire pour les perturbateurs endocriniens comme l?ensemble des produits chimiques (enjeu inscrit dans le plan santé au travail 4 adopté en 2021). 2.1.3.3 La surveillance des pathologies a progressé mais à rythme modeste et de façon très ciblée Confiée à Santé publique France, la surveillance des pathologies en lien avéré ou suspecté avec les perturbateurs endocriniens a produit plusieurs résultats, en particulier dans le champ de la santé reproductive pour laquelle les perturbateurs endocriniens jouent un rôle avéré. Qu?il s?agisse de fibromes utérins, d?endométriose ou de puberté précoce, on constate une hausse continue des taux d?incidence, avec parfois des progressions très importantes (+4,5%/an sur la 61 Enquête Surveillance Médicale des Expositions des Salariés aux Risques Professionnels (SUMER) et Cohorte pour la Surveillance Epidémiologique en lien avec le Travail (COSET) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 34/203 période 2007-2017 pour la puberté précoce). Ces alertes s?ajoutent à celles lancées en 2018 sur la fertilité masculine, notamment sur la qualité du sperme (concentration spermatique) qui a diminué de 32,2% sur la période 1989-2005. Malgré ces signaux très alarmants, connus pour certains depuis 2018, force est de constater que la SNPE2 s?est montrée peu ambitieuse, se fixant comme seuls objectifs de « poursuivre la surveillance des pathologies » et de réfléchir à un élargissement de cette surveillance. Il est notamment frappant de constater que, depuis près de 20 ans, aucune donnée nouvelle n?a été produite sur la qualité du sperme (les dernières en date remontent à 2005) alors que les problèmes de fertilité deviennent des enjeux de santé publique majeurs. De même, Santé publique France accompagne ses conclusions de beaucoup de précautions, en expliquant que la hausse des taux d?incidence peut être due à un meilleur diagnostic des pathologies (endométriose, fibrome utérin) et qu?il est difficile d?établir un lien de causalité entre ces indicateurs et les expositions environnementales. Pour compléter ce tableau épidémiologique, les indicateurs en matière de cancer du sein (un cancer hormono-dépendant pour lequel les perturbateurs endocriniens constituent un facteur de risque avéré) connaissent une dégradation constante, avec une progression du taux d?incidence de +1,1%/an sur la période 1990-201862. Au-delà de la santé reproductive, la SNPE2 s?était donné comme objectif d?élargir cette surveillance à d?autres pathologies. C?est le but de la démarche PEPS'PE63 , lancée en 2021 et achevée en novembre 2023, qui combine critères scientifiques (avis d?experts nationaux et internationaux) et critères sociétaux (classement des pathologies en fonction de leur gravité, incidence et importance sociétale par un panel de parties prenantes). Au final, il en résulte une liste d?une vingtaine de pathologies dans laquelle, outre la santé reproductive et les cancers, on retrouve des troubles métaboliques (maladies cardiovasculaires, surpoids et obésité, diabète de type 2, syndrome métabolique...) et des troubles du neurodéveloppement (troubles du déficit de l?attention, troubles du comportement, déficience intellectuelle). Ce nouveau programme de surveillance sanitaire ? dont le lancement constitue un enjeu majeur au regard des risques que les PE font peser sur la santé humaine - doit s?inscrire dans une démarche « intégrée », combinant analyses spatio-temporelles des taux d?incidence et expositions environnementales, avec à moyen terme l?appui de l?intelligence artificielle pour exploiter les bases des données (SNDS, Green data for health, Health data hub?). Cette surveillance intégrée devrait commencer par trois effets sanitaires en lien avec la santé reproductive puis s?étendre aux troubles du neurodéveloppement et, enfin, les cancers hormono-dépendants. 2.1.4 Une faible prise en compte des PE dans les programmes de surveillance environnementale 2.1.4.1 Seule la surveillance de l?air intérieur dans les logements intègre les perturbateurs endocriniens comme déterminant La surveillance des PE dans l?air intérieur des logements s?est améliorée durant la SNPE2 avec l?ajout de polluants émergents, dont font partie les perturbateurs endocriniens, dans la liste des substances à surveiller. Plus de 15 ans après la première campagne nationale « logement », une seconde, visant à 62 Entre 2010 et 2023, la progression a été plus faible, estimée à +0,3% par an. 63 Priorisation des effets sanitaires à surveiller dans le cadre du programme de surveillance lié aux perturbateurs endocriniens PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 35/203 mesurer la qualité de l?air intérieur a été menée de 2021 à janvier 2023 sur 600 logements avec notamment pour objectif la recherche de polluants émergents dont font partie les perturbateurs endocriniens. Ainsi, la surveillance de 7 perturbateurs endocriniens identifiés dans le cadre du règlement REACH a été ajoutée à cette campagne. La publication des résultats de cette campagne n?est pas encore intervenue, elle devrait avoir lieu courant 2024. Une fois le rapport publié, une réflexion sera engagée pour déterminer des actions à mener pour prévenir et réduire l?exposition aux polluants de l?air intérieur et identifier les différentes sources d?exposition. A l?image de ce qui a été fait dans l?air intérieur, la prise en compte du caractère de perturbation endocrinienne des substances est un critère à intégrer aux différents plans de surveillance existant dans l?air ambiant, les milieux aquatiques et les sols (cf.annexe n°9), ce qui n?a pas été fait jusque- là. 2.1.4.2 Les plans de surveillance des compartiments environnementaux contiennent des données sur les PE même si ces données ne sont pas valorisées Le croisement des données disponibles issues des programmes de surveillance des différents compartiments environnementaux que sont l?air ambiant, les milieux aquatiques et les sols, avec les listes de substances présentant des propriétés de perturbation endocrinienne permet de voir que certaines substances surveillées présentent des propriétés de perturbation endocrinienne. Ainsi, un suivi pérenne national des polluants d?intérêt national dans l?air ambiant a été mis en place depuis 2021. Sont concernés 75 pesticides parmi lesquels 3 sont identifiés comme étant en cours d?évaluation pour leur caractère de perturbation endocrinienne par un Etat membre et 46 sont identifiés comme étant des substances chimiques d?intérêt en raison de leur activité endocrinienne potentielle par l?Anses dans son avis d?avril 2021. Ces polluants d?intérêt national sont définis comme des « polluants autres que les polluants réglementés pour lesquels la surveillance est effectuée conformément au référentiel technique national ». Concernant la surveillance des milieux aquatiques, à la demande de la mission, un croisement des substances suivies au titre de la directive cadre sur l?eau (DCE) [arrêté du 26 avril 2022 établissant le programme de surveillance de l?état des eaux] avec les substances chimiques présentant des propriétés de perturbation endocrinienne figurant dans l?arrêté du 28 septembre 2023 (loi AGEC) a été réalisé. Il en ressort que 8 perturbateurs endocriniens sont suivis au titre de la DCE (cf.annexe n°9.4). D?autres données sur des substances PE ont très probablement été collectées au fil des années par les agences de l?eau64 ou l?OFB, mais elles n?ont été pas été valorisées pour leur caractère de perturbation endocrinienne. Le travail de croisement des données collectées par les différents opérateurs avec une liste de substances PE n?a pas été réalisé dans le cadre de la SNPE2. En 2022, plusieurs composés perfluoroalkylés (PFAS), dont certains peuvent être des perturbateurs endocriniens, ont été ajoutés au programme de surveillance de l?état chimique des eaux souterraines et des eaux de surface. Par ailleurs, comme prévu dans la SNPE2, une méthodologie visant à une meilleure prise en compte des propriétés de perturbation endocrinienne dans les NQE a été proposée, elle doit encore être mise en application sur plusieurs substances et présentée aux acteurs nationaux avant d?être proposée au niveau européen pour une amélioration de la méthodologie existante. Concernant les sols, la présence de substances chimiques, parmi lesquelles des perturbateurs endocriniens, est étudiée dans le cadre du réseau de mesure de la qualité des sols (RMQS). Ainsi, avant tout autre chose, ces données existantes sont à valoriser, comme cela a pu être le cas pour 64 L?Agence de l?eau Rhône Méditerranée Corse assure le suivi de certains PFAS depuis 2019, par exemple. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 36/203 les PFAS pour lesquels un rapport faisant un état de l?art des connaissances de ces substances et de leur présence dans les sites et sols pollués a été publié en décembre 2020. Pendant la SNPE2, le Groupement d?intérêt scientifique sol a fait l?objet de 2 évolutions majeures pouvant avoir un impact sur la surveillance des sols : la mise en oeuvre d?un projet Phytosol pour élargir la surveillance des résidus dans les sols ; l?intégration du Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) en charge du suivi des sites et sols pollués. Dans le cadre de la SNPE2, un croisement des données existantes avec la liste des 906 substances d?intérêt du fait de leur action endocrine potentielle identifiées dans l?avis de l?Anses d?avril 2021 a permis d?identifier que 76 substances d?intérêt sont mesurées dans le cadre du projet Phytosol et 46 dans le cadre du réseau de mesure de la qualité des sols sur les Polluants Organiques Persistants (POP RQMS1). Mais cette première analyse n?a donné lieu à aucune suite. En matière de perspective, le 5 juillet 2023, la Commission européenne a présenté sa proposition de directive relative à la surveillance et résilience des sols dont l?objectif principal est la surveillance et l?évaluation de l?état de santé des sols. La France devra porter dans ses positions l?intégration du caractère PE des substances comme étant un critère de sélection des substances à surveiller. Au niveau, européen le projet européen PARC prévoit le développement d?une campagne de surveillance dans les différents compartiments environnementaux. Démarré en mai 2022, ce projet se terminera en 2027. La France y participe activement. En parallèle des travaux prévus dans PARC, une exploitation des données existantes dans les différents plans de surveillance nationaux permettrait d?avoir une première vision, partielle et incomplète, de l?imprégnation de l?environnement par les perturbateurs endocriniens. 2.1.4.3 Les faiblesses de la surveillance : listes multiples et surveillance en silo La démultiplication des listes et l?absence d?une liste consensuelle de perturbateurs endocriniens avéré, présumés et suspectés est une difficulté commune à l?ensemble des compartiments de la surveillance environnementale. La surveillance environnementale est un outil indispensable pour appréhender l?imprégnation de l?environnement par les perturbateurs endocriniens, environnement qui constitue une des sources d?exposition de la population mais joue également un rôle essentiel pour la biodiversité en affectant la santé des écosystèmes et de la faune (baisse de fertilité, changement de sexe). Un croisement des données issues des différents compartiments environnementaux (que sont l?eau, l?air et le sol) permettrait d?avoir une approche intégrée de la surveillance environnementale et d?améliorer la compréhension de phénomènes observés sur la santé humaine et l?environnement. De la même manière, le croisement des données issues de la surveillance sanitaire avec celles issues de la surveillance environnementale permettrait d?aboutir à une approche intégrée de la surveillance qui pourrait être utilisée comme un indicateur des priorités de recherche et d?évaluation des substances afin d?identifier, parmi ces perturbateurs endocriniens potentiels, lesquels devraient faire l?objet d?une action prioritaire. Pour permettre l?exploitation et la valorisation des données issues de la surveillance, la SNPE2 prévoyait que les sites qui recueillent des données sur les perturbateurs endocriniens puissent transférer ces données via API sur le site data.gouv.fr. Il était également prévu la mise en place d?un datathon afin de croiser différents jeux de données (contamination des milieux, activité économique, catégorie socioprofessionnelle, pratiques sectorielles notamment en agriculture, fonctionnalité des écosystèmes?) pour produire une cartographie et faire ressortir les tendances spatio-temporelles et socio-économiques de la contamination des milieux par les PE et de PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 37/203 l?exposition des populations aux PE. Les moyens disponibles et l?absence d?une liste consensuelle des perturbateurs endocriniens avérés et présumés n?ont pas permis de réaliser ces actions, qui pourraient néanmoins voir le jour dans le cadre du Green Data for Health porté par l?action 18 du PNSE4. La concaténation et la valorisation des données d?imprégnation des milieux restent des actions nécessaires. La mission note cependant que des difficultés techniques telles que l?interopérabilité des données, la propriété des données ? sont à prévoir. 2.1.5 La surveillance des produits de consommation reste limitée 2.1.5.1 L?alimentation, une voie d?exposition majeure dont la connaissance progresse L?exposition de la population via l?alimentation peut être estimée grâce aux études de l?alimentation totale65 (EAT) reposant sur une méthodologie standardisée et recommandée par l?OMS et l?Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Même si le critère PE n?était pas spécifiquement pris en compte dans les précédentes EAT66 , certaines substances PE et d?autres potentiellement PE y ont été analysées. Ainsi, dès l?EAT1 (pour laquelle 39 substances ont été considérées), ont été recherchées dans les aliments plusieurs éléments-traces (cadmium, plomb, etc.) qui font partie de la liste des 906 substances potentiellement PE recensées par l?Anses. Ces substances ont été reconduites dans les EAT successives. Au cours de l?EAT2, d?autres substances PE ont été également recherchées comme des dioxines, des composés polybromés ou encore des PFAS. Ces substances ont toutes été incluses dans l?EAT3 et l?EAT infantile. Dans l?EAT3, le caractère PE (avéré ou présumé) de certaines substances a été spécifiquement pris en compte dans la priorisation des familles de substances à analyser dans les aliments préparés tels que consommés. Ainsi, d?autres PE sont venus s?ajouter à la liste, tels que le bisphénol A ou encore des phtalates. Avec l?EAT3, il sera possible pour certaines substances d?estimer des tendances dans les expositions de la population générale à travers son alimentation depuis les années 2000 ou 2010. En outre, considérant que la nomenclature d?ALBANE (pour la consommation alimentaire) s?appuie sur la nomenclature d?INCA3 qui est partagée par l?EAT3, il devrait être possible de lier les futures consommations d?ALBANE aux concentrations mesurées dans l?EAT3 et ainsi apprécier l?impact des données de consommation d?ALBANE sur l?exposition par rapport à celles calculées dans l?EAT3. Concernant l?EAT3, il est regrettable que le nombre de substances considérées ait dû être réduit (environ 300 substances ciblées contre 445 analysées lors de l?EAT2) du fait des moyens disponibles et surtout que le périmètre soit restreint au territoire métropolitain. La prise en considération des territoires d?outre-mer est en effet très souhaitable. D?un point de vue méthodologique, l?évolution vers une EAT continue, comme cela est déjà pratiqué dans certains pays (Australie, par exemple), doit être encouragée afin d?alimenter les flux de 65 Une étude de l'alimentation totale consiste à prélever sur différents points de vente les aliments régulièrement consommés par la population, les préparer tels qu'ils sont consommés, les mixer en des échantillons dits « composites » pour en réduire le nombre, puis les analyser pour rechercher un certain nombre de substances toxiques et nutriments. Dans la mesure où les aliments sont analysés "tels que consommés", c'est-à-dire lavés, épluchés et cuits le cas échéant, cette méthode présente l'avantage de fournir des données d'exposition "bruit de fond" plus réalistes que les approches fondées sur les normes alimentaires ou les résultats des programmes de surveillance et de contrôle. 66 EAT1 2001-2004, EAT2 2006-2011, EAT infantile 2010-16. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 38/203 données de manière régulière et faciliter la gestion des moyens à allouer (effet de lissage). La prise en considération du caractère PE dans le choix des substances à surveiller doit être encouragée et intensifiée. 2.1.5.2 La surveillance des produits de consommation repose sur des contrôles exploratoires à ce stade limités à la sécurité des jouets Des contrôles dits « exploratoires » sont réalisés par la DGCCRFF sur des produits de grande consommation destinés au public, pour des substances PE non encore réglementées mais susceptibles de le devenir. Ces contrôles ont été ciblés sur les jeux destinés aux enfants de moins de 3 ans, et notamment les cosmétiques jouets (paillettes, peintures pour le visage ...). Les substances testées ont été le résorcinol, les parabènes, et, depuis 2023, le bisphénol B. La DGCCRF effectue ces contrôles dans le cadre d?une stratégie plus large de visites ciblant la sécurité des jouets, dont le nombre est resté stable sur la période de la SNPE2 (708 prélèvements réalisés en 2022). En l?absence de réglementation, les suites de ces contrôles ne peuvent toutefois qu?être pédagogiques. Leur champ est également limité dans la mesure où le service des laboratoires67 ne dispose pas encore de méthode permettant de tester les bisphénols autres que le bisphénol A ou le bisphénol B. A l?avenir, une meilleure connaissance de l?exposition pourrait s?appuyer sur des campagnes vers d?autres produits de consommation, tels que des produits aux usages répétés (ustensiles de cuisine), ou permanents (sols en PVC) ou de contacts avec la peau (protections périodiques, couches, lingettes). 2.2 Agir pour réduire effectivement l?exposition et l?imprégnation 2.2.1 Des progrès limités en matière d?information de la population et de formation continue 2.2.1.1 La loi AGEC prévoit de renforcer l?information du consommateur mais sa bonne application est compromise Comme cela a été mentionné préalablement, la loi AGEC impose à toute personne mettant sur le marché français de produits à destination des consommateurs qui contiennent des perturbateurs endocriniens de mettre à disposition du public les informations permettant de les identifier. Selon l?arrêté du 28 septembre 2023, 128 perturbateurs endocriniens sont concernés68. Cette information doit se faire par voie électronique, dans un format ouvert, exploitable par système de traitement automatisé. L?application « Scan4Chem » a été retenue à cette fin. Celle-ci a été développée au niveau européen pour assurer l?application de l?article 33 de REACH consacrant un droit de connaître la présence de SVHC dans les articles de consommation. Pour autant, la sensibilisation du grand public se confronte à plusieurs obstacles : Scan4Chem a été conçu pour répondre à l?article 33 de REACH qui se limite aux « articles », elle ne permet donc pas de scanner les « mélanges » et « substances » (comme par exemple les cosmétiques ou les peintures). Pour la même raison, l?application ne répertorie que les produits SVHC, alors que les 67 Service commun des laboratoires des ministères économiques et financiers 68 Ces 128 perturbateurs endocriniens correspondent à 126 substances catégories SVHC dans le règlement REACH (dont 118 substances et 8 familles de substance) ainsi que 2 substances supplémentaires : le mancozèbe et le résorcinol PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 39/203 décrets d?application de la loi AGEC listent deux PE non SVHC. La diffusion de Scan4Chem au niveau national est encore très limitée : en août 2023, elle avait été téléchargée par moins de 12.000 personnes en France 69 (l?obligation d?information ne s?applique toutefois qu?à partir d?avril 2024). On peut donc douter que la diffusion de l?information telle que recherchée par la loi AGEC via l?application Scan4Chem soit réellement effective. En pratique, c?est davantage la réforme du règlement CLP, en ayant défini une classe de danger spécifique PE, qui crée les conditions d?une sensibilisation du grand public, en raison de l?obligation d?étiquetage des substances, même si, à l?heure actuelle, il n?est pas prévu qu?il y ait un pictogramme spécifique aux PE. 2.2.1.2 A l?inverse, le site des 1000 premiers jours a connu un réel succès Le site de Santé publique France fait état des risques chimiques (dont les perturbateurs endocriniens) dans la rubrique Agir sur son environnement (alimentation, produits d?hygiène, l?aménagement intérieur et extérieur)70. Une enquête SpF 2021 indique que la moitié des parents sondés connaissaient les 1000 premiers jours. En 2022, 2,5 millions de visites du site sont comptabilisées. L?application du même nom relaie les messages sur la qualité de l?air, les substances chimiques et habitudes de consommation, ou l?étiquetage des produits chimiques. A l?unanimité, les auditionnés connaissent la démarche 1000 premiers jours et s?appuient sur celle- ci. 2.2.1.3 Des avancées en matière de formation continue, principalement pour les professionnels de santé et les collectivités territoriales En matière de formation continue (cf.annexe n°10), les opérateurs de la formation n?ont pu fournir, pour 2019, un bilan précis du nombre de formations ni du nombre de personnes formées sur le thème des PE. Cela ne permet donc pas d?apprécier les évolutions par rapport à la SNPE1. Quoi qu?il en soit, selon les informations recueillies par la mission, le nombre de professionnels de santé formés est très faible. Au titre de la formation, la SNPE2 ne fait état que d?un seul financement, celui de la DGS (pour un montant total de 148 k¤ sur la période 2019-2023), attribué à l?Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) pour la formation « perturbateurs endocriniens et risque chimique autour de la périnatalité et l?enfance : les outils pour comprendre et agir71 ». Sur cette période 2019-2023, 1220 stagiaires ont suivi, avec succès, cette formation. L?EHESP a la volonté d?étendre ses formations. L?Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC) dispose des informations relatives aux inscriptions des professionnels de santé libéraux. Les actions en lien avec l'impact des perturbateurs endocriniens sur la santé sont incluses dans les orientations pluriannuelles prioritaires de développement professionnel continu (DPC)72. Sur la période 2021-2023, cela ne représente en moyenne que 0,3% des inscriptions, dont plus de 80% de médecins. Il convient de relever le travail du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT)73, qui 69 Sur un total de 147.000 téléchargements en Europe ; ces chiffres sont issus du rapport d?impact : Impact-assessment- report_version-FINAL_19.11.2023.pdf (askreach.eu) 70 Substances chimiques et habitudes de consommation (1000-premiers-jours.fr) 71 Cette formation, en ligne et gratuite pour les professionnels de santé, est agréée DPC 72 Le sujet des perturbateurs endocriniens a été intégré dans les orientations pluriannuelles prioritaires de DPC 2020-2022 ainsi que dans les orientations pluriannuelles prioritaires de DPC 2023-2025 73 Le CNFPT, avec ses structures déconcentrée, Inset et Inet, coordonne une offre de formation de préparation aux concours, de formations après réussite du concours et de formation continue PUBLIÉ https://www.askreach.eu/wp-content/uploads/2023/11/Impact-assessment-report_version-FINAL_19.11.2023.pdf https://www.askreach.eu/wp-content/uploads/2023/11/Impact-assessment-report_version-FINAL_19.11.2023.pdf https://www.1000-premiers-jours.fr/fr/substances-chimiques-et-habitudes-de-consommation Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 40/203 a réalisé des journées de formation (webinaires et présentiel) en appui aux collectivités territoriales. Depuis 2022, des podcasts sur la « webradio des territoriaux » sont librement accessibles74. Le CNFPT souhaite mutualiser ses ressources avec l?EHESP, et développer des ressources communes de formation avec l?EHESP et le réseau français des villes-santé de l?OMS. La mission a noté un travail remarquable de capitalisation des actions menées75. Entre 2020 et 2022, le CNFPT a formé 2 937 personnes via un webinaire sur le thème des PE (possibilités d?action des collectivités, périnatalité et petite enfance, entretien des locaux-bâtiment- habitat-centres techniques, eau et assainissement, développement de l?enfant, restauration collective). Pour les professionnels exerçant en établissement de santé ou médico-sociaux, les chiffres fournis par l?Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH) sont quant à eux extrêmement faibles : seulement 3 actions de formation proposées en 2021 et 5 en 2022 en lien avec les PE, totalisant 23 inscriptions en formation. Par ailleurs, l?opérateur de compétences OPCO Santé ne fait état que d?une seule action de formation PE en 2020 (la volumétrie de professionnels formés n?est pas documentée). De nombreuses ressources de formations sur le sujet des PE et plus largement sur la santé environnementale et/ou sur les risques chimiques76, se sont développées, agréées ou non pour le développement professionnel continu (DPC). S?agissant de la diffusion de documents d?informations auprès des professionnels, la mission a particulièrement remarqué : un outil de sensibilisation des professionnels de santé, élaboré par la DGS77, et diffusé notamment aux ordres et syndicats représentatifs des professionnels de santé en décembre 2023 ; un guide à l'usage des médecins libéraux de l'Union régionale des professionnels de santé (URPS) médecins libéraux PACA78 ; la fiche repères de l?INCa « Risques de cancer et perturbateurs endocriniens » 79 (2019) pour les réseaux professionnels. 2.2.1.4 La formation initiale sur les PE reste marginale Pour apprécier la formation initiale des professions de santé médecine-maïeutique-odontologie- pharmacie (cf.annexe n°10), la mission a adressé un questionnaire à la conférence des doyens de médecine et à la conférence des doyens d?odontologie80. La conférence des doyens de pharmacie avait procédé à une enquête en amont de l?audition. Il apparaît que la pharmacie développe une offre de formation santé environnement SE/PE structurée bien que protéiforme au plan national. L?odontologie est, sauf quelques exceptions, en développement sur ce sujet sur l?ensemble des facultés. L?enseignement des PE en facultés de médecine présente un état contrasté entre fort engagement en enseignement de la thématique PE, enseignement SE avec PE, ou sans PE, et 74 https://radio.cnfpt.fr/ 75 www.cnfpt.fr/s-informer/nos-actualites/le-fil-dactu/perturbateurs-endocriniens-document-capitalisation/inset-nancy (2021) 76 Par exemples : AFPA https://afpa.org/formation/perturbateurs-endocriniens-environnementaux-2023/; MOOC sur la Santé environnementale - FUN MOOC - Université de Bordeaux ;MOOC sur les perturbateurs endocriniens - URPS Pharmaciens Nouvelle-Aquitaine ; Syndicat des femmes chirurgiens-dentistes (SFCD) Les perturbateurs endocriniens, MOOC Le Prévention des risques environnementaux chez la femme enceinte et l?enfant ARS-AP-HP 77 Perturbateurs endocriniens - Ministère du travail, de la santé et des solidarités (sante.gouv.fr) 78 www.urps-ml-paca.org/wp-content/uploads/2019/06/Guide-Perturbateurs-Endocriniens.pdf 79 Perturbateurs endocriniens - Réf : FRPERTUBENDOCR19 (e-cancer.fr) 80 Voir annexe n°10 PUBLIÉ https://radio.cnfpt.fr/ http://www.cnfpt.fr/s-informer/nos-actualites/le-fil-dactu/perturbateurs-endocriniens-document-capitalisation/inset-nancy https://afpa.org/formation/perturbateurs-endocriniens-environnementaux-2023/ https://www.fun-mooc.fr/fr/cours/sante-environnementale/ https://www.fun-mooc.fr/fr/cours/sante-environnementale/ https://pe-urps.lemondepharmaceutique.tv/ https://pe-urps.lemondepharmaceutique.tv/ https://sfcd.fr/produit/les-perturbateurs-endocriniens-le-14-12-2023-en-distanciel/ https://sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/article/perturbateurs-endocriniens https://www.e-cancer.fr/Expertises-et-publications/Catalogue-des-publications/Perturbateurs-endocriniens Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 41/203 plus rarement, absence de formation PE ; près d?un tiers s?appuient sur le cours en ligne ouvert et massif (MOOC) national santé-environnement. Enfin l?enseignement sur le thème des PE en formation initiale est à l?appréciation des 35 écoles de sage-femmes, et représente en moyenne trois heures de formation dans le cursus. Les universités développent les programmes en toute autonomie. La mise en lumière, à l?aide d?un baromètre annuel, de ce qui est enseigné en santé-environnement (et sur les perturbateurs endocriniens), serait un bon moyen de stimuler ces enseignements. Pour les formations paramédicales les plus concernées, la mission, sans pouvoir obtenir de données d?ensemble, a pu noter un certain nombre de points convergents : pour les auxiliaires de puériculture, la thématique PE est abordée dans le module 2 du référentiel du diplôme d?Etat d?auxiliaire de puériculture (DEAP) repérage des risques notamment environnementaux ; pour les infirmières puéricultrices, la thématique PE, non obligatoire, peut être abordée dans le cadre d?enseignement en santé environnementale. Un module spécifique existe dans le service sanitaire des étudiants en santé, commun avec médecine-maïeutique-odontologie-pharmacie et infirmiers (cf. annexe n°10). Pour ce qui concerne les écoles d?ingénieurs, AgroParisTech participe à un tronc commun des cadres supérieurs du service public, par un volet transition écologique et One Health, dont le pilotage, la coordination et l?animation sont réalisés par l?Institut national du service public (INSP). Cela concerne 1 300 élèves en 2024, dans 21 écoles, principalement des écoles d?application. Plus globalement, la formation initiale des cadres des secteurs productifs (industrie, agriculture?), n?offre aucune lisibilité en matière de PE, à l?exception de l?Institut One Health (IOH). Soutenu par France 2030, l?IOH, porté par l?Ecole universitaire de recherche EID@lyon, a vocation à devenir un institut de référence pour la formation, l?expertise et la décision sur les sujets « Une seule santé ». L?IOH est issu de la réunion des établissements de formation des ministères chargés respectivement de l?agriculture (via l?ENSV-FVI VetAgro Sup et AgroParisTech), de la santé (EHESP), de l?écologie et de l?enseignement supérieur et la recherche. Les publics ciblés sont les décideurs publics, les décideurs privés et les organisations de la société civile. 2.2.1.5 Dans l?ensemble, les branches professionnelles n?accordent pas de place spécifique aux PE A l?exception des professions de santé, les branches professionnelles concernées par la manipulation de produits chimiques ne réservent pas de traitement particulier aux PE. Ceux-ci sont considérés au même titre que les autres produits chimiques. La réglementation française s?applique selon les règlements européens relatifs aux produits chimiques qui ne distingue pas spécifiquement les PE. Cette situation pourrait évoluer à la faveur d?une réforme européenne, actuellement en discussion, destinée à étendre le champ de la directive cancérigène mutagène reprotoxique (CMR) aux PE81, ce qui rendrait leur manipulation plus stricte, avec des obligations plus fortes imposées aux employeurs sur la substitution et la mise en place de mesures préventives. Les sapeurs-pompiers sont exposés, à travers les fumées d?incendie (10% de leur activité), à un certain nombre de PE malgré leurs équipements de protection individuelle (EPI). Sur une toute petite partie de ces incendies, ils utilisent des émulseurs, qui contiennent des PFAS. Les sapeurs- pompiers n?ont pas de formation spécifique sur les PE, mais sur la fumée et le port des EPI. 81 Un accord en COREPER du 6 décembre 2023 prévoit une réforme pour intégrer les PE dans la Directive 2004/37/CE sur les agents cancérogènes et mutagènes sur le lieu de travail (dite directive CMRD), une évaluation scientifique a été lancée par la Commission à cet effet PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 42/203 Les représentants professionnels soutiennent l?évolution de la réglementation européenne et invitent les services départementaux d?incendie et de secours (SDIS) à faire une transition vers des émulseurs « sans fluor », puisque les produits en contenant seront interdits dans 18 mois. Ils souhaitent suivre les conclusions de l?étude Anses ? SpF sur les métiers particulièrement exposés aux PFAS, notamment pour établir des valeurs limites d?exposition qui n?existent pas aujourd?hui (il n?y a d?ailleurs pas d?étude statistique ou épidémiologique sur la santé de ces professionnels à long terme). Les coiffeurs utilisent des produits à usage professionnel pouvant contenir des PE, pour lesquels ils expriment des inquiétudes tout en ne se sentant pas responsables, étant en « bout de chaîne ». Dans les écoles de formation, le volet préventif porte, lorsqu?il existe, sur l?ensemble de ses dimensions (postures de travail, troubles musculo-squelettiques?), sans volet particulier sur les PE ni sur les produits chimiques globalement. D?une façon générale, les risques liés au PE ne font pas partie des risques professionnels intégrés dans les référentiels enregistrés au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). Pourtant, le Centre d?ingénierie sectoriel industrie de l?Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) considère que 85 métiers sont concernés par l?impact des PE. 2.2.2 La réglementation des substances et sa mise en oeuvre se heurtent à de nombreuses difficultés 2.2.2.1 La SNPE2 a permis de soutenir l?adoption d?un règlement délégué du CLP instaurant de nouvelles classes de dangers La SNPE2 a contribué à consolider le rôle moteur de la France pour renforcer la réglementation européenne. C?est le cas en particulier pour la réforme du règlement CLP qui faisait partie des actions listées dans le SNPE2. Le vote de la loi AGEC au niveau national, qui apporte des obligations d?information sur la présence de perturbateurs endocriniens, a également contribué à affermir la position française au niveau européen. Le règlement délégué (UE) n°2023/707 modifiant le règlement CLP, introduisant des nouvelles classes de dangers de perturbateurs endocriniens pour la santé humaine et l?environnement est une étape importante vers l?harmonisation des réglementations européennes, qui devront à terme intégrer une même définition des perturbateurs endocriniens. Dans le prolongement de cette réforme, la France oeuvre en faveur de l?inscription des perturbateurs endocriniens et d?un pictogramme associé dans le système de classification internationale des Nations-Unies (UN ? GHS : système général harmonisé de classification et d?étiquetage des produits chimiques). 2.2.2.2 Le contrôle des produits, sur le territoire français et aux frontières, est limité par les moyens techniques et fragilisé par le commerce en ligne Les contrôles réglementaires sont destinés à vérifier l?application de la réglementation. Ils sont effectués par la DGCCRF82, ou par la DGDI83s?il s?agit de produits importés. Les contrôles de la DGCCRF sont effectués dans le cadre de son programme annuel de contrôle. Depuis 2019, ces contrôles ont porté sur les matériaux au contact des denrées alimentaires (recherche de bisphénol A et de phtalates), les jouets (recherche de bisphénol A, de parabènes et de phtalates), les produits chimiques et biocides (recherche de phtalates), ainsi que les cosmétiques (recherche de parabènes). Le nombre de visites avec prélèvement s?élève à 1 187 82 DGCCRF : Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes 83 DGDI : Direction générale des douanes et droits indirects PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 43/203 en 2023, un chiffre en légère baisse sur les deux dernières années. Le nombre d?établissements en anomalie sur la période est resté stable autour de 15% environ. La réforme du règlement CLP permettra d?élargir le pouvoir des autorités de contrôle via la vérification de l?étiquetage des propriétés PE des substances concernées à partir de 2025. Les contrôles douaniers sont orientés par des campagnes annuelles, et portent sur une variété de produits (cosmétiques, bijouterie, montres, parfums, colles, chaussures, vernis ...) dans lesquels des perturbateurs endocriniens ont pu être détectés. Ce contrôle douanier est limité par les règles du marché unique : une marchandise ne peut être contrôlée à nouveau si elle a déjà été dédouanée dans un autre Etat membre. Pour les produits dédouanés en France, les contrôles douaniers s?exposent par ailleurs au manque de documentation, dans le cas où le produit ne disposerait pas d?un code spécifique, comme c?est le cas pour les canards de bain, régulièrement ciblés pour la présence de BPA dans leur matériau. Le contrôle douanier n?est enfin pas adapté au commerce en ligne, puisque les prélèvements doivent nécessairement se faire sur 4 échantillons du même produit pour être probants, soit une quantité supérieure à la majorité des achats en ligne. Par ailleurs, dans un contexte de mondialisation, les capacités de contrôle des douanes sont minimes au regard du volume des transactions concernées. 2.2.2.3 Le droit du travail ne réserve pas de traitement spécifique aux perturbateurs endocriniens En matière de droit du travail, l?Union Européenne définit des exigences minimales, que les Etats membres peuvent renforcer en faveur des travailleurs. La protection de la santé et de la sécurité des travailleurs est organisée par la directive n°89/391/CEE qui définit des grands principes (prévention des risques, adaptation des postes de travail, instructions appropriées ...) Cette protection est complétée, en matière d?exposition aux substances dangereuses, par la directive n°98/24/CE sur les agents chimiques sur le lieu de travail, qui fixe les premières valeurs limites d?exposition professionnelle (VLEP) pour les substances chimiques, parmi lesquels figurent notamment des perturbateurs endocriniens. Il existe enfin une directive n°2004/37/CE sur les agents cancérogènes et mutagènes sur le lieu de travail qui pose des règles plus contraignantes, notamment sur les valeurs limites d?exposition professionnelle (VLEP). Cette directive a été révisée en 2022 pour inclure également les substances reprotoxiques. Les substances concernées par cette directive sont donc celles reconnues cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques (CMR), parmi lesquelles on retrouve certains perturbateurs endocriniens, mais qui n?apparaissent pas au titre de leur effet endocrinien. La Commission travaille actuellement à la réforme de cette directive n°2004/37/CE pour inclure les perturbateurs endocriniens en tant que tels, à l?issue d?un vote favorable du comité des représentants permanents qui prépare les travaux du Conseil de l?Union Européenne, le 6 décembre 2023. Une évaluation scientifique a été confiée à l?ECHA, qui pourrait aboutir à un projet de révision de directive entre 2028 et 2030. Le droit du travail faisant partie des domaines où l?Etat membre peut appliquer une réglementation plus stricte, il est possible de fixer des VLEP plus exigeantes dans le droit national. La SNPE prévoyait ainsi de revoir les VLEP des substances aux effets PE dans le droit national, mais cette action n?a pas été finalisée (l?Anses a proposé d?instaurer des VLEP pour deux substances, sans traduction dans le code du travail à ce stade). Il convient de noter que la Belgique a fait le choix de traiter les perturbateurs endocriniens au même titre que les substances CMR, choix cohérent avec la mise en place de sa propre stratégie sur les perturbateurs endocriniens (NAPED). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 44/203 2.2.3 Un échec des actions en faveur de la substitution 2.2.3.1 Des outils informatifs ont été produits à l?intention des industries mais n?ont connu qu?un faible écho Différents supports d?information ont été développés à destination des industriels. L?Ineris a ainsi participé aux travaux animés par l?ECHA et l?OCDE entre 2019 et 2021 qui ont conduit à la publication d?un guide méthodologique. Une autre initiative notable est celle du site destiné à apporter un appui aux acteurs économiques engagés dans une démarche de substitution afin de promouvoir la diffusion et le partage d?informations. Initialement restreint au bisphénol A, le site a été étendu à d?autres substances : bisphénols, phtalates, alkylphénols et PFAS. Le site met à disposition un guide méthodologique réalisé dans le cadre du PNSE3 afin d?aider les entreprises à identifier un substitut. Le site présente également des alternatives, sans toutefois être systématiquement en mesure de déterminer lesquelles sont les plus sûres. Il est bien précisé que la mention d?une alternative ne vaut pas étude de sa viabilité. Néanmoins, la mise à disposition de guides méthodologiques et d?outils de comparaison des alternatives disponibles reste un levier de prévention important pour intégrer l?approche « Safe and sustainable by design » dans la démarche de substitution. 2.2.3.2 Les appels à projets consacrés à la substitution ont été infructueux Les campagnes destinées à promouvoir la substitution volontaire n?ont pas rencontré leur public. Ainsi, le budget de plus de 15 millions d?euros prévus par la DGE84 pour mobiliser les entreprises n?a que peu été utilisé. En 2021, un critère de substitution avait été inclus dans l?appel à projets « Résilience », et seulement deux projets ont été retenus à ce titre : un sur la substitution du BPA dans les boîtes de conserve, l?autre sur l?utilisation de solutions biosourcées. Par ailleurs, l?appel à projet « Safe by design » prévu pour 2023 a finalement été repoussé n?ayant pu être intégré à la maquette France 2030 déjà consolidé, ni être porté par un budget DGE propre. L?appel à manifestation d?intérêt qui l?a précédé n?avait toutefois pas rencontré d?intérêt particulier de la part de l?industrie, un seul projet ayant été reçu, concernant une simulation numérique pour accélérer la recherche vers d?autres substances. De même, l?action de promotion de la substitution auprès des pôles de compétitivité n?a connu qu?une faible mise en oeuvre. De façon plus générale, la promotion de la substitution auprès des entreprises fait face à des dif- ficultés structurelles. D?une part, la substitution est une démarche volontaire qui reste tributaire de la volonté des industriels. D?autre part, il est difficile pour l?administration de disposer d?une vision précise de l?évolution de la recherche et développement de chaque entreprise. Par exemple, la diffusion des connaissances est limitée par le secret industriel, les entreprises ayant intérêt à gar- der confidentiel le développement de nouvelles formules et techniques pour préserver leur avan- tage concurrentiel. Pour autant, le manque de succès des actions de promotion de la substitution à ce jour ne saurait signifier que la réduction de l?exposition aux PE ne peut se faire que par la réglementation. La prochaine stratégie devra donc travailler à renouveler son approche dans la substitution, avec une démarche plus engagée des ministères concernées, assurer le financement des appels à projet (AAP) et envisager d?autres mesures innovantes (intégration dans les démarches RSE, accompagnement sur le modèle de ce qui existe dans l?industrie pharmaceutique, cf.annexe n°11?). 84 DGE : Direction générale des entreprises PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 45/203 Les services Économiques de l'État en région (SEER)85, sous l?impulsion de la DGE, assureront la promotion des actions et seront un relais auprès des industriels concernés. Un ciblage préalable des régions les plus susceptibles d?héberger des industriels concernés par une prochaine restriction d?usage d?une substance PE devra être réalisé par la DGPR et la DGE pour que l?action de communication et de promotion s?y concentre prioritairement. 2.2.4 Un foisonnement d?actions territoriales de prévention 2.2.4.1 Un foisonnement d?actions de prévention portées principalement par les associations, les collectivités territoriales, les maternités et les crèches Les initiatives prises sur le terrain sont nombreuses et même foisonnantes (cf.en annexe n°11, une description des projets dont la mission a eu connaissance). Elles émanent en premier lieu des collectivités territoriales qui ont mis en place de nombreuses actions visant à réduire l?exposition aux perturbateurs endocriniens, souvent à l?initiative du Réseau environnement santé dont la charte « villes et territoires sans perturbateurs endocriniens » a, selon l?association, été signée par près de 300 communes, 10 départements et 4 régions. Dans le domaine de la restauration collective, en particulier les cantines scolaires, les démarches dont la mission a eu connaissance ont permis de réelles avancées, parfois à large échelle. S?agissant de la commande publique, les résultats sont plus mitigés, les démarches se heurtant souvent à l?absence d?offre de produits certifiés « sans perturbateurs endocriniens ». Principale fenêtre de vulnérabilité, les 1 000 premiers jours concentrent logiquement la majeure partie des actions territoriales de prévention, en particulier dans les maternités et les crèches. Nettoyage des sols et des surfaces, produits d?hygiène et d?entretien, alimentation, sensibilisation des parents, jouets, aération des locaux : la prévention des perturbateurs endocriniens (et plus globalement la prévention des expositions environnementales) est une démarche globale qui suscite souvent une forte adhésion des personnels. Cette démarche s?étend généralement à l?ensemble des produits chimiques. De fait, il n?est pas aisé de lutter spécifiquement contre les perturbateurs endocriniens qui ne font pas l?objet d?un étiquetage particulier ni même, jusqu?à très récemment (loi AGEC), d?une liste officielle. Ces dynamiques territoriales reposent également sur des actions de sensibilisation/information à destination, d?une part, des parents et futurs parents et, d?autre part, des professionnels de santé et de la petite enfance. C?est le cas des ateliers « Nesting » dont l?objectif est de sensibiliser les parents ou futurs parents aux risques environnementaux, chimiques en particulier86. Le projet « FEES » (Femmes enceintes, environnement et santé) poursuit un objectif similaire (« réduire l?exposition aux polluants des futurs et jeunes parents »). Porté par l?Association pour la prévention de la pollution atmosphérique (APPA) et la Mutualité française, ce projet se déploie depuis 2011 dans les Hauts-de-France et s?étend dans 7 régions. Dans certaines régions, l?Assurance maladie apporte aussi sa contribution à la lutte contre les perturbateurs endocriniens. C?est le cas notamment dans l?Indre et dans l?Aisne où les caisses primaires d?assurance maladie ont mené des actions de sensibilisation des professionnels de santé et des femmes enceintes ; des initiatives qui ont trouvé un écho national dans la convention d?objectifs et de gestion 2023-2028 de la CNAM qui prévoit notamment la généralisation des expérimentations « 0 phtalates ». 85 Au sein des DREETS, les SEER déclinent la politique économie de l?Etat en région, autour de 3 axes : développer des filières stratégiques, soutenir l?innovation des entreprises, et préserver et consolider le tissu économique. 86 Selon WCEF (en charge de ce programme), près de 800 animatrices (sage-femmes, auxiliaires de puériculture?) ont été formées depuis 2009 à l?animation de ces ateliers qui peuvent se dérouler dans une maternité, un centre de PMI, une crèche? 600 ateliers auraient ainsi été organisés en 2022 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 46/203 2.2.4.2 Quelques initiatives locales de surveillance environnementale En 2021-2022, une évaluation de la présence des pesticides dans l?air ambiant a été réalisée par ATMO Occitanie. Cinq substances actives d?intérêt en raison de leur activité endocrine potentielle identifiées par l?Anses dans son avis d?avril 2021 ont été quantifiées sur l?ensemble des sites de mesures, à des fréquences plus ou moins importantes. Ce travail sera poursuivi dans les prochaines années. En 2022, sous l?égide de la DGPR, une démarche exploratoire d?identification d?une activité endocrinienne dans les effluents d?industries pharmaceutiques a été réalisée dans quelques régions. Cette action a permis d?affiner la méthodologie de caractérisation des activités endocriniennes par les outils bio-analytiques et si nécessaire pourrait aboutir à la mise en place d?actions spécifique pour chaque site afin de réduire ces émissions. Sans tirer de conclusion hâtive sur l?interprétation des résultats préliminaires, les premiers éléments convergent sur la détection d?une activité endocrinienne dans la majorité des rejets. 2.2.4.3 Des actions qui se sont déployées avec peu de soutien mais qui suscitent une réelle dynamique de terrain en faveur de la santé environnementale La plupart des acteurs de terrain engagés dans ces actions de prévention connaissent mal la SNPE2. Au mieux, elle constitue une référence qui permet de légitimer leur action et de mobiliser des partenaires (y compris sur le plan financier), en interne comme en externe. Pour ces acteurs, la SNPE2 n?apporte ni financement, ni cadre d?action : plusieurs interlocuteurs de la mission ont ainsi regretté l?absence de recommandations claires, à commencer par une liste d?outils dont l?efficacité aurait été scientifiquement établie. Cette lacune, qui n?est pas propre à la santé environnementale, conduit les acteurs locaux à recourir à des opérateurs et des méthodes sur la base d?échos favorables d?expériences menées dans d?autres régions. Santé publique France a procédé à un recensement précieux des principales actions de prévention consacrées aux perturbateurs endocriniens. En revanche, il ne lui a pas été possible d?en dresser le bilan et encore moins d?en mesurer l?impact sur les pratiques et a fortiori sur les expositions. Sur le plan méthodologique, le principal appui dont bénéficient les collectivités territoriales provient du CNFPT, grâce à son offre de formation mais aussi par la mise à disposition d?outils87 et par des conférences qui permettent de partager expériences et bonnes pratiques. Le réseau français des villes-santé de l?OMS apporte également un soutien apprécié par les communes et intercommunalités qui en font partie. Les crèches et les maternités bénéficient généralement de l?appui de prestataires qui les accompagnent dans la réalisation du diagnostic, l?élaboration du plan d?action et sa mise en oeuvre (actions de formation notamment). Lors des investigations de terrain, ce qui frappe également, c?est le manque de coordination entre les acteurs. Dans certaines régions se superposent ainsi plusieurs stratégies ou plans d?action sur les perturbateurs endocriniens : conseil régional, conseils départementaux, communes... Au niveau régional, les plans régionaux santé environnement (PRSE) portés par les ARS et les DREAL s?efforcent d?apporter de la cohérence et, ponctuellement, des financements à ces actions de prévention en santé. Ainsi, une grande partie des actions consacrées aux 1 000 premiers jours dont la mission a eu connaissance avaient bénéficié d?un financement ARS. De fait, les perturbateurs endocriniens apparaissent dans la quasi-totalité des PRSE4 mais la place qu?ils y occupent est limitée, centrée sur les 1000 premiers jours. Dans la très grande majorité des PRSE4, les perturbateurs endocriniens ne font pas l?objet d?actions spécifiques mais sont inclus dans des 87 Par exemple le guide « Agir localement en Santé environnement » paru en octobre 2023 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 47/203 objectifs plus généraux tels que l?amélioration de la qualité de l?air intérieur, la réduction de l?exposition aux produits chimiques? Dans le domaine de la santé au travail, les directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) s?efforcent également d?impulser et de coordonner des actions de prévention des expositions professionnelles aux perturbateurs endocriniens, via notamment les plans régionaux santé au travail (PRST). La mission a ainsi eu connaissance de démarches innovantes dans les régions PACA et Centre-val-de-Loire. Là encore, si quelques actions sont centrées sur les perturbateurs endocriniens, c?est une approche globale de réduction du risque chimique qui est le plus souvent retenue. Si les données manquent pour en apprécier l?impact, ces actions de prévention suscitent indiscutablement une dynamique positive sur le terrain qui va bien au-delà des perturbateurs endocriniens (sujet complexe qui se prête difficilement à des actions ciblées). Les perturbateurs endocriniens constituent ainsi un point de départ à partir duquel s?engage une évolution des pratiques et des organisations qui contribue à la « sobriété chimique » et plus largement à la réduction des expositions environnementales, au bénéfice des publics les plus à risque au premier rang desquels figurent les femmes enceintes et les jeunes enfants. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 48/203 3 UNE STRATEGIE PERTINENTE ET GLOBALEMENT COHERENTE MAIS DONT L?EFFICACITE EST INCERTAINE A partir du bilan qui précède, la mission s?est efforcée de dégager les points forts et les points faibles de la SNPE2 en répondant à quatre questions évaluatives : pertinence, cohérence, efficacité et gouvernance. La question de l?efficience n?a pas pu être traitée en raison du manque d?information sur les moyens mis en oeuvre. 3.1 Une stratégie globalement pertinente mais insuffisamment tournée vers l?action et manquant de priorités 3.1.1 Une stratégie globalement pertinente mais qui ne mise pas assez sur les actions de prévention et de réduction des émissions Avec ses trois volets (former et informer ; protéger la population et l?environnement ; faire progresser les connaissances), la SNPE2 couvre l?ensemble des thématiques et questions relatives aux PE. Cependant, sa structure est déséquilibrée, avec des actions visant la connaissance beaucoup plus nombreuses que celles relatives à la prévention et à la réduction de l?exposition des populations et de l?environnement, alors même que « protéger la population et l?environnement » est objectif général de la SNPE2. Les mesures visant l?amélioration de la connaissance, l?information et la formation sont nécessaires, mais leur traduction opérationnelle a été modeste. Ainsi, la biosurveillance, la surveillance sanitaire et la surveillance environnementale sont le plus souvent décorrélées d?actions de prévention ou de réduction des émissions. En matière d?actions de réduction de l?exposition, la SNPE2 mise principalement sur la réglementation, laisse la substitution sur la base du volontariat et soutient peu les initiatives des acteurs locaux (collectivités, crèches, établissements de santé, associations). 3.1.2 Une bonne prise en compte de la dimension européenne mais des lacunes s?agissant de l?approche ?une seule santé?, des inégalités sociales et des initiatives territoriales La règlementation encadrant les perturbateurs endocriniens étant principalement européenne, la SNPE2 met à juste titre l?accent sur la défense de positions françaises ambitieuses au niveau communautaire. Elle affiche une volonté de s?inscrire dans une approche ?une seule santé? et elle s'intéresse en effet à la santé humaine, aux écosystèmes et à la santé animale. Malheureusement, l?approche est limitée, les différentes actions restent compartimentées en silo et les interactions existent peu. De plus, comme le rapport du Haut conseil de la santé publique le soulignait en 2018, les inégalités socio-économiques et les inégalités d?exposition (genre, contexte socio-professionnel?) sont insuffisamment prises en compte. Or, selon des études, notamment américaines, des inégalités sociales dans l?exposition aux perturbateurs endocriniens existent : les personnes aux revenus les plus modestes consomment par exemple davantage de nourriture grasse, contaminée par des phtalates ou de denrées conditionnées dans des contenants contenant du BPA. Une étude permettrait d?éprouver cette hypothèse en France. Enfin, la dimension territoriale, bien que présente dans la SNPE2, reste balbutiante alors même que les acteurs locaux sont actifs sur le sujet et portent des initiatives pertinentes avec des actions de prévention, de sensibilisation et de réduction des émissions. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 49/203 3.1.3 Un affichage d?actions souvent déjà lancées et qui dépassent les seuls perturbateurs endocriniens Une bonne partie du plan d?action de la SNPE2 est constitué d?actions déjà prévues ou engagées par ailleurs, soit au titre d?un autre plan ou stratégie (par exemple le plan micropolluants 2016-2021) soit dans le cadre des programmes de travail des administrations centrales et des opérateurs. Par ailleurs, bon nombre de mesures dépassent les seuls perturbateurs endocriniens et concernent les produits chimiques en général, voire la santé environnementale. Enfin, les actions pour lesquelles un budget est affiché sont très peu nombreuses (moins d?une dizaine). Ces choix ne remettent pas en question la pertinence de la SNPE2. En revanche, ils rendent plus compliqué d?identifier sa « plus-value » et donc de distinguer ce qui est attribuable la SNPE2 de ce qui aurait, de toute façon, été mis en oeuvre. 3.2 Si la SNPE2 est, dans l?ensemble, cohérente avec les plans globaux, elle souffre d?un certain nombre d?incohérences internes 3.2.1 Une cohérence satisfaisante avec les plans globaux mais une articulation moins lisible avec les stratégies et plans sectoriels La SNPE2 est une composante du 4ème plan national santé environnement (PNSE4) et s?inscrit dans un (très vaste) ensemble de stratégies et plans nationaux consacrés à la santé publique, à la santé au travail et à la protection de l?environnement. Plusieurs actions du PNSE4 font écho à la SNPE2, en particulier dans les domaines de la recherche (PEPR exposome), de la formation (formation initiale et continue des professionnels de santé) et de l?information du consommateur (application Scan4chem, étiquetage des produits ménagers?). Le 4ème Plan santé au travail ne fait pas référence explicitement à la SNPE2 mais plusieurs actions, consacrées au risque chimique, incluent les perturbateurs endocriniens (action réglementaire au niveau européen, recherche sur l?exposome, biosurveillance professionnelle ?). Avec les plans sectoriels, la cohérence est plus difficile à établir. C?est le cas notamment des stratégies et plans d?action qui visent des substances (chlordécone) ou des familles de substances (PFAS, phytosanitaires) qui ont, pour certaines, un effet de perturbation endocrinienne. Qu?il s?agisse du 4ème plan chlordécone adopté en 2021 ou du plan d?action interministériel sur les PFAS lancé en 2024, aucun ne fait référence à la SNPE2, alors que leur contenu rejoint, en grande partie, ses objectifs. Il en est de même avec la stratégie Ecophyto 2030 dévoilée en mai 2024. Au total, parmi les 37 stratégies et plans gravitant autour du PNSE4 (cf. annexe 12), près de la moitié ont un lien ? direct ou indirect ? avec les perturbateurs endocriniens. Un tel foisonnement est difficilement lisible pour les acteurs de terrain et même pour la plupart des décideurs nationaux, comme la mission l?a constaté lors de ses auditions. La complémentarité est, en revanche, beaucoup plus explicite avec le plan micropolluants adopté en 2016, auquel plusieurs actions de la SNPE2 font explicitement référence. La stratégie décennale de lutte contre les cancers s?appuie également sur la SNPE2 et inclut les perturbateurs endocriniens dans plusieurs de ses axes (recherche, prévention?). Au niveau territorial, les perturbateurs endocriniens figurent dans la quasi-totalité des 4èmes plans régionaux santé environnement (PRSE4) même si très peu d?entre eux mentionnent explicitement la SNPE2. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 50/203 3.2.2 Le plan d?action conforte la dimension opérationnelle de la stratégie malgré quelques incohérences Conformément aux recommandations des inspections générales, la SNPE2 a été dotée d?un plan d?action destiné à rendre la stratégie plus opérationnelle. D?une soixantaine de pages, ce document a le mérite de préciser les objectifs poursuivis, les résultats attendus et les pilotes, contributeurs et opérateurs en charge de chacune des 50 actions. De fait, il a constitué la feuille de route de la SNPE2 et permis le suivi de son déploiement. Ce plan d?action, globalement cohérent et adapté aux enjeux, comporte cependant quelques incohérences : les indicateurs sont trop nombreux ; certains de ces indicateurs manquent de pertinence, ce qui est d?autant plus regrettable que le HCSP avait réalisé un travail considérable pour proposer des indicateurs « SMART88 », c?est-à-dire spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporellement définis. le découpage en axes est, sur certains sujets, difficilement lisible (l?axe dédié à l?alimentation ne comporte qu?une action alors que celui consacré à la connaissance de l?imprégnation de l?environnement en compte 13). si les volets 1 (formation et information) et 3 (améliorer les connaissances) sont cohérents et homogènes, ce n?est pas le cas du volet 2 qui couvre à la fois la surveillance environnementale, la substitution et la réglementation, sous un titre « protéger l?environnement et la population » qui correspond à l?objectif général de la SNPE2 ; un manque de séquençage temporel, certaines actions n?ayant pas pu être mises en oeuvre dans les délais impartis (voire abandonnées) car tributaires de la réalisation d?autres actions89. Enfin, il y a peu de complémentarité entre le plan d?action et le « document de référence », ce dernier n?ayant pas de caractère stratégique mais plutôt une vocation « communicante ». De fait, c?est le plan d?action qui a tenu lieu de stratégie. 3.3 Malgré quelques avancées, les résultats sont bien en deçà des objectifs fixés en 2019 3.3.1 Des avancées notables sur le plan de la réglementation, de l?information du public et en matière de recherche La France a fait partie des Etats qui ont soutenu la mise en oeuvre de la stratégie européenne pour la durabilité des produits chimiques, dont la principale avancée a été la réforme du règlement CLP créant une classe de dangers pour les PE, et qui a vocation à harmoniser l?appréhension des perturbateurs endocriniens dans la réglementation européenne. Pour autant, l?action de la France n?a pas suffi à inscrire la réforme du règlement REACH dans le programme de travail de la Commission européenne. Les citoyens européens pâtissent donc des lenteurs d?un système qui n?est plus en capacité de faire face au volume croissant des substances à évaluer. Sur le plan de la réglementation française, la loi AGEC représente aussi un progrès, mais sa mise 88 SMART pour Spécifique, Mesurable, Acceptable, Réaliste, Temporellement défini. George T. Doran, « There's a SMART way to write management's goals and objectives » Management Review, vol. 70, no 11, 1981, 35?36 89C?est le cas de l?action 3 qui prévoyait l?établissement d?une liste de substances ayant des propriétés PE, qui a été finalisée en avril 2021 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 51/203 en oeuvre est compromise par les limitations de l?application Scan4Chem. En matière d?information du public, les sondages révèlent que le sujet des perturbateurs endocriniens est de mieux en mieux connu des Français, 88% en ayant entendu parler. Il est possible que les campagnes d?information y aient contribué, notamment avec le déploiement de la campagne des 1 000 premiers jours auprès des familles attendant un enfant. Enfin, la recherche a progressé durant la SNPE2 et permis à la France de contribuer à orienter le programme de recherche PARC vers la thématique des perturbateurs endocriniens. De même, la plateforme « PEPPER » a apporté une contribution notable à la validation des méthodes de tests. Il reste néanmoins des domaines de recherche peu explorés à ce jour, en particulier dans le domaine environnemental et dans celui des sciences humaines et sociales 3.3.2 Des résultats mitigés en matière d?évaluation des substances et de formation Bien que la France fasse partie des Etats les plus actifs en la matière, elle n?a réalisé que partiellement les actions relatives à l?évaluation des substances au titre des différents règlements européens. Par ailleurs, la publication d?une liste de substances d?intérêt du fait de leur action endocrine potentielle, assortie d?une méthode de priorisation, n?a pas eu les effets escomptés, au niveau national ou européen. Les résultats ont également été mitigés sur le plan de formation, avec une formation initiale encore très marginale chez les professionnels de santé, et quasi-inexistante dans les autres secteurs. La formation continue présente des avancées chez certains professionnels de santé, mais avec des prises en compte encore très hétérogènes selon les métiers. 3.3.3 Des progrès insuffisants sur le plan des contrôles et en matière de surveillance sanitaire et environnementale Le nombre annuel de contrôles réglementaires pratiqués par la DGCCRF sur le territoire national est en légère baisse sur les deux dernières années. Il n?a pas été possible de retracer le nombre de contrôles réglementaires pratiqués aux frontières par la DGDI, mais il a été constaté que l?efficacité du contrôle douanier est compromise par plusieurs éléments : impossibilité de recontrôler les produits déjà dédouanés, manque de documentation, et inadaptation au commerce en ligne. Le nombre annuel de contrôles exploratoires pratiqués par la DGCCRF est resté stable, mais les substances testées sont limitées par les moyens techniques dont dispose le laboratoire national de contrôle. Le champ des contrôles s?est par ailleurs restreint à celui de la campagne nationale sur la sécurité des jouets. Dans le champ de la surveillance sanitaire, l?exploitation des résultats du programme de biosurveillance ESTEBAN a permis de révéler l?imprégnation de la population par les PE, mais il n?est pas encore possible de caractériser d?évolution, faute de données précédentes existantes, et dans l?attente du déploiement du programme ALBANE en 2024. La surveillance des pathologies a progressé avec des nouveaux résultats sur la santé reproductive, révélant une augmentation des taux d?incidence de nombreuses pathologies, sans toutefois que le lien avec l?exposition aux perturbateurs endocriniens n?ait pu être systématiquement établi. Par ailleurs, aucune donnée relative à la qualité du sperme n?a été produite en près de 20 ans, malgré une baisse très nette de la fertilité masculine. Au-delà de la santé reproductive, le lancement de la démarche PEPS?PE, qui priorise différents effets sanitaires à surveiller en lien avec les PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 52/203 perturbateurs endocriniens, offre des perspectives intéressantes en matière de surveillance intégrée, mais la mise en oeuvre de cette dernière reste un défi à relever. S?agissant de la surveillance environnementale, la seconde campagne nationale logement a recherché spécifiquement des perturbateurs endocriniens, à la différence de la surveillance des autres compartiments que sont l?air ambiant, les milieux aquatiques et les sols. Pour ces derniers, des croisements de données ont permis de renforcer les connaissances, mais sans harmonisation d?ensemble, et avec la difficulté d?une multiplicité des listes des perturbateurs endocriniens. 3.3.4 Un échec total des mesures prises en faveur de la substitution Les ambitions de la SNPE2 en matière de substitution n?ont pas pu être réalisées. Hormis la production d?outils informatifs, dont le site de l?Ineris de portée très modeste, les appels à projets à destination des industriels n?ont pas trouvé leur public, et les budgets fléchés n?ont finalement pas été mobilisés. 3.3.5 Des résultats modestes et difficiles à mesurer qui ne permettent pas de conclure quant à l?évolution de l?exposition de la population et de l?environnement aux perturbateurs endocriniens Même si des progrès ont été faits, les résultats obtenus sont modestes, traduisant une efficacité limitée. Dans l?ensemble, la faiblesse des données existantes en matière de surveillance, et le suivi lacunaire des indicateurs de la SNPE2, ne permettent pas d?apprécier l?atteinte ? ou non ? de son objectif premier : réduire l?exposition de la population et de l?environnement aux perturbateurs endocriniens. Même si la dimension territoriale ne constituait pas une priorité de la SNPE2, de nombreuses initiatives locales ont sans aucun doute permis de réduire l?exposition de la population aux perturbateurs endocriniens, en particulier celle des femmes et des jeunes enfants (1 000 premiers jours). En l?absence de bilan global, leur impact est néanmoins difficile ? voire impossible ? à établir précisément. Enfin, un certain nombre d?avancées, constatées depuis 2019, ne sont pas directement imputables à la SNPE 2 et auraient - de toute façon - été obtenues grâce à des programmes, plans ou stratégies qui existaient avant le lancement de cette stratégie (par exemple la campagne des 1000 premiers jours). Si la SNPE2 a incontestablement donné de la cohérence et de la visibilité à un ensemble d?actions consacrées aux PE, sa « plus-value » - et donc son efficacité - sont difficiles à établir. 3.4 Une gouvernance marquée par un manque de soutien politique et l?absence de suivi des indicateurs 3.4.1 Un comité de suivi, instance de partage de l?avancée des actions, plus que de suivi et un comité de pilotage peu investi dans le pilotage Le premier comité de suivi (COSUI) a été installé le 8 décembre 2021, en raison du souhait des parties prenantes du PNSE 4 d?avoir une instance spécifique pour les PE. Sa composition très large, environ 115 membres qui représentent 74 entités, lui confère une dimension plus informative (avec quelques débateurs récurrents bien identifiés) que de véritable suivi des actions, ie respect des objectifs/jalons, indicateurs des 50 actions etc. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 53/203 Le comité de pilotage (COPIL), 20 membres90, composé principalement des directions générales d?administration centrale et des agences, assure un suivi de l?avancement des 50 actions de la SNPE2, tâche qui devrait revenir au COSUI (par exemple le tableau de synthèse des actions fin 2023 devrait relever d?un COSUI). En conséquence, le temps consacré par le COPIL aux réflexions prospective et stratégique s?en est trouvé réduit. 3.4.2 Un manque de portage politique et un engagement insuffisant de certaines administrations En 2017, les inspections générales rapportaient que la SNPE avait manqué d?un pilotage réellement interministériel ; ceci reste d?actualité en 2024 : le travail est resté cloisonné, avec un engagement contrasté des administrations, voire une méconnaissance de la SNPE2 par certaines d?entre elles. En outre, le copilotage par les ministères chargés de l'environnement et de la santé est indéniable mais les ministères chargés de l?agriculture et de l?industrie notamment, sont peu mobilisés. Plus globalement, il ressort des auditions que le portage des responsables politiques au plus haut niveau (la "voix" des ministres concernés) a été faible. 3.4.3 Malgré l?engagement de la DGS et de la DGPR, les échanges et la coordination entre les acteurs du plan (administrations et opérateurs) sont restés limités Le rapport d?évaluation de la SNPE1 (2017) faisait le constat que la programmation de l?activité des différentes agences sur les PE manquait de coordination ; les contrats d?objectifs et de performance n?ont pas été assez utilisés pour fixer des objectifs précis aux opérateurs. La mission a toutefois relevé des exemples de bonne coopération (séquençage des AAP ANR/Anses ; OFB/Ineris pour la détermination des normes de qualité de l?eau, organismes nationaux de recherche et agences pour la continuité des grandes cohortes?). La situation en fin de SNPE2 semble donc avoir évolué favorablement bien qu?un certain nombre d?auditionnés font état d?un travail persistant en silos (par exemple Anses versus SpF ; Anses versus Ineris). Par ailleurs un meilleur séquençage temporel des différentes actions pourrait accroître l?efficacité de la SNPE. 3.4.4 Un suivi défaillant des indicateurs Le HCSP91 avait recommandé de définir des objectifs « SMART » renseignant sur les résultats à atteindre dans un laps de temps déterminé, et des indicateurs peu nombreux mais pertinents que l?on puisse renseigner sur la base de systèmes d?information existants et faciles d?accès. Ces recommandations n?ont été suivies que très partiellement. Les indicateurs ne sont pas toujours adaptés aux objectifs, et sont par ailleurs collectés avec beaucoup de difficultés. Les actions ne sont pas priorisées, pas toujours hiérarchisées et le financement n?est que rarement évoqué. 90 Les membres du COPIL sont présents au COSUI 91 Analyse critique du projet de SNPE2 et proposition d?indicateurs de résultats, HCSP, 2018 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 54/203 4 RECOMMANDATIONS Compte tenu du bilan et de l?évaluation qui précèdent, la mission formule un certain nombre de recommandations d?ordre général avant de préciser les principaux objectifs à atteindre dans les années qui viennent. 4.1 Principes généraux 4.1.1 Une nouvelle stratégie est souhaitable et même nécessaire Même si des avancées ont été enregistrées dans plusieurs domaines, le bilan de la SNPE2 est modeste, bien en deçà des objectifs fixés en 2019. La poursuite des efforts engagés depuis 10 ans (depuis le lancement de la SNPE1) est donc nécessaire, d?autant plus que les risques liés aux perturbateurs endocriniens sont majeurs, pour la santé humaine comme pour celle des écosystèmes. Cette action gagnerait à s?inscrire dans une stratégie « une seule santé » (ou une « stratégie nationale santé environnement ») bénéficiant d?un pilotage interministériel au plus haut niveau, comme le proposent plusieurs rapports récents92. A défaut d?une telle stratégie globale (les informations recueillies par la mission indiquent que cette hypothèse n?est pas prévue à court terme), la mission estime souhaitable et même nécessaire d?élaborer une 3ème version de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, à condition d?en revoir profondément le contenu, le format et la gouvernance. Sans un portage politique fort, cette troisième stratégie n?atteindra pas de meilleurs résultats que les deux premières. : Elaborer une 3ème version de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, en revoyant profondément son contenu, son format et sa gouvernance [DGPR et DGS]. 4.1.2 Une stratégie globale assortie d?un plan d?action ciblé Comme tout exercice à caractère stratégique, la SNPE3 doit fixer un cap de moyen terme (10 ou 15 ans), avec des objectifs généraux et des priorités en nombre limité. Comme la mission l?a constaté lors de ses auditions, un tel document présente en effet plusieurs avantages : afficher (et affirmer) clairement les positions françaises à Bruxelles (commission et parlement européen) et auprès de nos partenaires européens. mobiliser les administrations, opérateurs et parties prenantes. envoyer un signal aux acteurs de terrain (en particulier aux collectivités territoriales). Alors que la SNPE2 s?est très rapidement trouvée résumée à son plan d?action, la mission considère que le document stratégique devrait constituer le coeur de la SNPE3 et servir de référence pour guider l?action des pouvoirs publics et leur communication. Pour en donner une traduction opérationnelle, la SNPE3 devrait être assortie d?un plan d?action, détaillant - pour les 5 années à venir - les pilotes, les échéances, les moyens, les indicateurs et les livrables. 92 C?est la première recommandation du rapport de capitalisation « La santé-environnement dans les travaux de l?IGAS » publié en 2022 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 55/203 A la différence de la SNPE2, ce plan d?action devrait être ciblé sur quelques mesures prioritaires, sur lesquelles les administrations et les opérateurs concentreront leurs efforts et leurs moyens financiers. Dans cette perspective, la mission fait quelques propositions (non exhaustives) de mesures qu?elle estime devoir être inscrites dans ce plan d?action (cf. annexe n°13). Au-delà de l?efficacité accrue qu?on peut en attendre, cette priorisation facilitera l?évaluation du plan d?action dont la réussite pourra être mesurée au regard de l?atteinte ? ou non ? de quelques objectifs. Elle peut également servir à orienter l?allocation des moyens financiers et humains. Les actions à mettre en oeuvre ne doivent pas être considérées de manière individuelle mais de façon cohérente, en veillant à leur articulation et à leur séquençage temporel. Enfin, la mission considère que la SNPE3 devrait être conçue comme une « stratégie de transition », destinée à assurer l'intégration de la problématique des perturbateurs endocriniens dans la future stratégie « une seule santé » ou dans les versions à venir des stratégies et plans globaux (PNSE 5 notamment). : Assortir la SNPE3 (document à caractère stratégique fixant un cap pour 10 ou 15 ans), d?un plan d?action ciblé sur quelques mesures prioritaires avec identification des pilotes, livrables, échéances, moyens et indicateurs [DGPR et DGS]. 4.1.3 Des principes généraux à inscrire dans la SNPE3 Parmi les principes généraux qui devraient guider l?élaboration de la nouvelle stratégie figure, en premier lieu, la dimension européenne. Evaluation et réglementation des substances, information du consommateur, contrôle des produits : bon nombre de sujets (parmi les plus importants) relèvent, pour l?essentiel, du niveau communautaire qui devrait constituer le cadre de référence et d?action privilégié de la SNPE3. Outre la contribution active aux travaux des agences (EFSA et ECHA), cela suppose d?intensifier le plaidoyer auprès des instances européennes et des autres Etats membres. Le renouvellement de la Commission et du Parlement européens, à la suite du scrutin du 9 juin 2024, constituent une opportunité pour relancer la stratégie européenne sur les produits chimiques, en particulier la révision du règlement REACH. Cette priorité n'interdit pas - bien au contraire- de prendre des mesures nationales sur des domaines mal ou peu couverts par le niveau européen (formation, surveillances sanitaire et environnementale) ou qui nécessitent des actions complémentaires (recherche, substitution?). Tout en étant résolument tournée vers l?Europe, la SNPE3 gagnerait à affirmer son ancrage territorial, pour orienter et soutenir les initiatives prises par les acteurs locaux et accroître leur impact. Au-delà des actions de formation, d?information et de prévention en santé, cette dimension territoriale a vocation à irriguer tous les volets de la stratégie, y compris les actions relatives à la connaissance (par exemple pour fonder les actions de prévention sur les alertes résultant de la surveillance sanitaire et environnementale). Le concept « une seule santé / one health » devrait également figurer parmi les principes généraux de la SNPE3. Du fait de leurs mécanismes d?action et leur très large diffusion, les perturbateurs endocriniens représentent en effet une menace pour la santé globale dont il convient d?examiner toutes les dimensions et, surtout, les interactions. Enfin, la SNPE3 devrait accorder une place centrale aux inégalités économiques et sociales face aux PE, pour les documenter mais aussi ? et surtout ? pour orienter les actions de prévention, de formation et d?information. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 56/203 4.2 Les principaux objectifs à assigner à la SNPE3 4.2.1 Une SNPE3, tournée vers l?action et qui se donne pour horizon « zéro exposition aux PE » Le maintien d?une stratégie autour de 3 grands objectifs (produire des connaissances / former et informer / réduire les émissions) apparaît pertinent et permettrait une continuité logique entre l?ancienne et la nouvelle stratégie. La mission a toutefois relevé un déséquilibre dans la SNPE2, qui présente un nombre plus important d?actions orientées vers la production de connaissances, et réserve à l?inverse une part insuffisante aux actions de prévention et de réduction des expositions. Au sein de la SNPE3, un meilleur équilibre entre l?action et la connaissance devrait s?opérer. Outre la formation et l?information, la réglementation et le contrôle de sa mise en oeuvre devraient y occuper une place importante, de même que la substitution et la limitation des émissions des substances PE. Plus généralement, il ne s?agit pas de « protéger l?environnement et la population » (objectif général de la SNPE2) mais de tendre vers le « zéro exposition aux PE », à l?instar de la stratégie européenne sur les produits chimiques qui vise « un environnement exempt de substances toxiques ». La mission propose également des évolutions au sein des axes contenus dans les trois objectifs, qui sont détaillées ci-dessous. : Tourner la SNPE3 vers l?action, avec comme ambition de moyen terme d?atteindre le « zéro exposition aux PE » et comme principes généraux : une approche « une seule santé », l?intensification du plaidoyer européen, l?ancrage territorial et la prise en compte des inégalités socio-économiques [MTECT et MSP93]. 4.2.2 Premier objectif : produire des connaissances La mission propose de structurer l?objectif « production de connaissances » autour de 3 axes : la recherche ; l?évaluation des substances et la surveillance intégrée. Ces trois axes intégreraient un certain nombre d?actions qui étaient classées dans l?objectif « protéger l?environnement et la population » dans la SNPE2, dans la mesure où elles relèvent davantage de la connaissance. 4.2.2.1 Développer la recherche en mettant en oeuvre un PEPR exposome La déclinaison du concept d?exposome, qui met en valeur le rôle de l?environnement comme complément du génome et comme déterminant du bien-être et de la santé humaine, est ambitieux, mais peut avoir des impacts majeurs pour la prévention et la gestion des risques en santé. En recouvrant, d?une part, l?impact des facteurs environnementaux sur un organisme vivant, notamment l?être humain et, d?autre part, l?impact des organismes vivants sur les écosystèmes, notamment les modifications d?origine anthropique, le concept d?exposome est le meilleur véhicule du concept « une seule santé ». Cela se ferait en écho aux programmes EHEN et EIRENE déjà en place au niveau européen, et devrait concerner tout le champ de la santé environnement. 93 ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires (MTECT) et ministère chargé de la Santé et de la Prévention (MSP) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 57/203 La recherche en matière d?exposome chimique, dont les perturbateurs endocriniens, doit également se diversifier en développant des champs dont la mission a noté l?insuffisance actuelle : La caractérisation des effets cocktails et des effets non-monotones. La recherche environnementale avec, d?une part, l?impact sur la biodiversité et, d?autre part, la remédiation et la restauration de l?environnement. La recherche en sciences sociales avec l?étude des inégalités socio-économiques de santé. L?organisation et le suivi de cohortes de grandes tailles à l?échelle européenne. La mission recommande donc la mise en oeuvre d?un PEPR exposome dans le cadre de la Stratégie d?accélération prévention (2024). 4.2.2.2 Accélérer le rythme d?évaluation des substances et élaborer une stratégie européenne de tests Bien que la France s?investisse dans l?évaluation des substances, le rythme global au niveau européen reste insuffisant face au nombre toujours croissant de substances mises sur le marché. Il est nécessaire de fixer des objectifs plus ambitieux en matière de volume annuel de substances évaluées, et la France peut jouer un rôle moteur en la matière. L?accélération du rythme d?évaluation suppose de développer par ailleurs une stratégie en matière de tests au niveau européen, afin de développer et proposer à la normalisation des tests pour les voies d?action et effets actuellement les plus mal couverts (voie thyroïdienne, métabolisme, effets sur le neurodéveloppement ...). Afin de pouvoir atteindre cet objectif, l?élargissement de PEPPER à d?autres Etats membres doit être poursuivi et intensifié ainsi que la sécurisation de son financement. Enfin, cela suppose de poursuivre le soutien aux projets de recherche visant à développer de nouvelles méthodes de tests, ainsi que l?accompagnement de leur validation, au niveau national (via le PNR EST et l?ANR) et européen 4.2.2.3 Mettre en oeuvre une surveillance intégrée en couplant la surveillance sanitaire et environnementale Malgré ses ambitions dans ce domaine, la SNPE2 n?a pas abouti à une combinaison effective des données de surveillance sanitaire et de surveillance environnementale. Cette surveillance intégrée devrait constituer une priorité pour la SNPE3, qui pourra s?appuyer sur les résultats des nouveaux programmes de surveillance sanitaire, une meilleure prise en compte du caractère PE dans la surveillance environnementale (en particulier pour le choix des substances à suivre) et le recours à l?intelligence artificielle. La mission considère qu?il s?agit là d?un enjeu majeur, tout comme : Le lancement ? le plus rapidement possible ? d?un nouveau programme de surveillance des pathologies en lien avec les perturbateurs endocriniens (suite de l?étude PEPS?PE), en complément du nouveau programme de biosurveillance (ALBANE). La valorisation des données existantes et une meilleure prise en considération du caractère de perturbation endocrinienne dans le choix des substances à surveiller dans les différents compartiments environnementaux, en particulier les eaux et les sols. Les programmes de surveillance devront garantir l?inclusion des outre-mer au regard des particularités et de l?importance que ces territoires représentent en matière de lutte contre les PE. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 58/203 4.2.3 Deuxième objectif : former et informer La mission propose de structurer l?objectif « Formation et information » autour de 3 axes : l?information du consommateur ; la sensibilisation des populations et la formation des professionnels. 4.2.3.1 Garantir une information effective du consommateur La SNPE3 devra viser à ce que l?information délivrée au consommateur sur les produits soit systématique et effective, en facilitant le développement d?outils garantissant une information accessible, pour donner un plein effet à la loi AGEC et au règlement délégué CLP. Au niveau européen, la France pourra soutenir l?instauration de standards plus exigeants en matière d?étiquetage et d?information du consommateur, sur le modèle de la loi AGEC. 4.2.3.2 Sensibiliser les populations en allant vers les plus vulnérables La sensibilisation des populations devra amplifier les campagnes conduites pendant la SNPE2 (à l?instar des 1 000 premiers jours) en ciblant les populations les plus vulnérables : femmes enceintes, enfants et adolescents, publics en situation de précarité. Ce volet nécessite un appui renforcé aux actions territoriales de prévention des expositions environnementales, avec la mise à disposition de ressources techniques (notamment des méthodes recommandées au regard de leur efficacité) et budgétaires, pour les acteurs concernés (services de l?Etat, assurance-maladie, collectivités territoriales, associations ...). Ces actions de prévention devront mettre l?accent sur les alternatives (produits, comportements et usages) permettant aux professionnels et aux consommateurs de réduire leur exposition aux PE. Ces actions devront être coordonnées au niveau régional et reposer sur des méthodes de prévention dont l'efficacité a été démontrée. 4.2.3.3 Généraliser la formation des professionnels concernés La SNPE3 devra soutenir une vraie politique de formation initiale et continue des professionnels dans les différents domaines concernés en visant, d?une part, les professionnels de la santé et de la petite enfance et, d?autre part, les métiers à risque (industrie, agriculture, nettoyage, hygiène et esthétique?). Pour ces secteurs, il est important de s?assurer que les formations concernent non seulement les personnes manipulant les produits à risque, mais également les cadres et managers afin de sensibiliser toute la chaine de conception et de production. Les secteurs à risques pourraient également bénéficier d?une campagne visant chaque année un secteur professionnel différent. 4.2.4 Troisième objectif : réduire les émissions La mission propose de structurer cet objectif autour de 4 axes : la restriction voire l?interdiction des substances ayant des effets perturbateurs endocriniens ; le contrôle des produits ; la substitution ; la traduction opérationnelle des alertes résultant de la surveillance intégrée. En outre, la mission propose d?initier une réflexion prospective quant aux nécessaires changements de paradigme pour tendre vers l?objectif « zéro exposition aux PE ». PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 59/203 4.2.4.1 Elargir les restrictions de substances ayant des effets de perturbation endocrinienne Les restrictions de substances ayant des effets PE découlent pour l?essentiel des réglementations européennes concernées. A cet égard, la France devra intensifier son activité diplomatique pour que les travaux d?évaluation et de restriction au niveau européen se poursuivent à un rythme ambitieux, mais également pour que les réformes annoncées dans la stratégie européenne de durabilité des produits chimiques de 2020 et n?ayant pas pu être mises en oeuvre soient priorisées dans le prochain mandat de la Commission européenne. Sur le plan réglementaire, la France pourrait ainsi mener une double action : au niveau européen, soutenir la refonte du règlement REACH, la mise en oeuvre du nouveau règlement CLP, l?actualisation de la directive sur les agents chimiques dangereux, et la restriction universelle des PFAS ; au niveau international, soutenir l?inscription des PE dans le système général harmonisé de classification et d?étiquetage des produits chimiques des Nations-Unies. Pour les domaines dans lesquels le droit européen est subsidiaire, à l?instar du droit du travail, la SNPE3 devra encourager de nouvelles restrictions faisant de la France un modèle au niveau européen. Un travail de veille pourra également être effectué vis-à-vis des autres Etats membres pionniers pour s?inspirer de leurs législations. Dès maintenant, il pourrait être envisagé de traiter, en droit du travail, les perturbateurs endocriniens avec le même degré de protection que les substances classées CMR. 4.2.4.2 Renforcer le contrôle des produits, aux frontières et sur le territoire national La SNPE3 devra soutenir la mise en oeuvre de campagnes de contrôle des produits, à la fois aux frontières et sur le territoire national, ce qui implique une diversification des campagnes de contrôles exploratoires, une augmentation des moyens (humains et techniques) alloués aux contrôles réglementaires, et l?élaboration d?un encadrement spécifique pour le commerce en ligne. A l?avenir, les contrôles devront également porter sur la mise en oeuvre de l'étiquetage CLP (à partir de 2027) ainsi que sur la mise en oeuvre des obligations d?informations imposées par la loi AGEC (dès maintenant). 4.2.4.3 Relancer les démarches de substitution et l?accompagnement des professionnels des secteurs émetteurs Malgré le faible bilan de la SNPE2 en matière de substitution, et au regard de l?enjeu important qu?elle représente, la prochaine stratégie devra chercher de nouveaux moyens pour la rendre effectivement opérationnelle. La démarche « safe and sustainable by design » devra être promue auprès des industriels, en s?appuyant sur de nouveaux outils et en ciblant les substances faisant l?objet de discussions en vue d?une restriction au niveau européen. Au-delà de l?offre, la SNPE3 devra aussi agir sur la demande en orientant l?achat public, en développant des guides et formations destinées à systématiser le recours aux clauses intégrant les perturbateurs endocriniens dans les commandes des différentes administrations publiques. 4.2.4.4 Traduire sur le plan opérationnel les alertes issues de la surveillance intégrée La SNPE3 pourra ancrer son positionnement sur la réduction des expositions en veillant à ce que les alertes issues de la combinaison des surveillances sanitaire et environnementale se traduisent PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 60/203 en actions concrètes (mesures de santé publiques, évolution des pratiques agricoles ou industrielles) au niveau national ou au niveau européen selon les domaines concernés. 4.2.4.5 Engager une réflexion prospective pour des changements de paradigme Un monde sans perturbateurs endocriniens constitue très certainement une vision utopiste. Malgré tout, une stratégie « zéro exposition aux perturbateurs endocriniens » doit in fine viser un tel horizon. Si les mesures actuellement mises en oeuvre ou envisagées peuvent permettre de progresser vers une réduction de l?exposition de la population et de l?environnement, la dynamique d?évolution des dix dernières années tend à démontrer que la démarche suivie est insuffisante. Une réflexion prospective, au-delà des seuls critères économiques intégrant la possibilité de changement de positionnement (approche par famille et non par substance), de changements des pratiques du quotidien (produits d?entretien, de soins, de cuisine, achats de produits ...) et de changement de paradigme pour les principaux secteurs productifs semble nécessaire pour préparer les actions futures à déployer dans le cadre d?une approche « one health ». : Structurer la SNPE3 autour de 3 objectifs: (1) Produire des connaissances : développer la recherche en mettant en oeuvre un programme national de recherche sur l?exposome ; accélérer le rythme d?évaluation des substances et élaborer une stratégie européenne de tests ; mettre en oeuvre une surveillance intégrée en couplant surveillances sanitaire et environnementale ; (2) Former et informer : garantir une information effective du consommateur ; sensibiliser les populations en allant vers les plus vulnérables ; généraliser la formation des professionnels les plus exposés ; et (3) Réduire les émissions : élargir les restrictions de substances ayant des effets perturbateurs endocriniens ; renforcer le contrôle des produits aux frontières et sur le territoire national ; relancer les démarches de substitution et l?accompagnement des professionnels des secteurs émetteurs ; traduire sur le plan opérationnel les alertes résultant de la surveillance intégrée ; engager une réflexion prospective vers des changements de paradigme [MTECT, MSP, MTSS, MASA, MEFSIN, MESR et MEN94] 4.3 Une gouvernance à refonder et des moyens spécifiques à allouer 4.3.1 Une gouvernance à refonder Le succès de la SNPE3 nécessite un engagement de tous les ministères concernés, au plus haut niveau (ministres). Au-delà de la coordination assurée par les ministères chargés de la santé et de l?environnement, la mission considère qu?il est indispensable d?impliquer plus fortement les autres ministères les plus concernés (agriculture, industrie, recherche) dès la conception de la stratégie et tout au long de sa mise en oeuvre. Ce pilotage interministériel renforcé nécessite une implication accrue de la part des ministres en charge de la santé et de l?environnement. Cette parole ministérielle est d?autant plus attendue que les Français expriment une préoccupation croissante à l?égard des perturbateurs endocriniens. Il nécessite également un soutien explicite de la part du Premier ministre et une implication du Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) auquel la présidence du COPIL pourrait être confiée. 94 ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires (MTECT), ministère du travail, de la santé et des solidarités (MTSS), ministère chargé de la Santé et de la Prévention (MSP), ministère de l?Agriculture et de la Souveraineté alimentaire (MASA), ministère de l?Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique (MEFSIN), ministère de l?Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR), ministère de l?éducation nationale (MEN) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 61/203 S?agissant des instances de suivi et d?animation, la mission préconise de conserver les deux comités actuels mais de revoir leurs missions. Le COSUI deviendrait le « Comité des parties prenantes » et pourrait ainsi se consacrer aux échanges et au partage d?information sur les actions menées, en laissant au COPIL la stratégie et la prospective (le suivi du plan d?action étant assuré par la DGPR et la DGS). C?est au COPIL, en particulier, que devrait se déployer une vision d?ensemble des plans et stratégies qui, au-delà de la SNPE3, contribuent à l?ambition « zéro exposition aux PE ». Les rôles de ces instances doivent être distincts et complémentaires. Des échanges doivent être organisés entre-elles et ce à double sens, notamment : si l?élaboration de la SNPE3 relève du COPIL, le projet de stratégie devra être présenté devant le comité des parties prenantes ; pour la définition du plan d?action, le comité des parties prenantes pourra être source de propositions et informé de sa mise en oeuvre ; chaque instance pourra informer ou interpeller l?autre instance. : Fonder la gouvernance de la SNPE3 sur un pilotage interministériel renforcé, une implication accrue des ministères les plus concernés (Agriculture, Industrie et Recherche, au-delà des ministères en charge de l?environnement et de la santé) et un soutien ministériel au plus haut niveau [PM/SGPE, MTECT, MSP, MTSS, MASA, MEFSIN, MESR et MEN. 4.3.2 Doter le plan d?action d?un budget spécifique Certaines actions de la SNPE3 nécessitent des moyens supplémentaires, à prendre en compte lors des programmations budgétaires des administrations centrales et des opérateurs. C?est le cas, par exemple, de l?Anses qui, en absence d?un soutien budgétaire, pourra difficilement accélérer le rythme des évaluations de substances. Le plan d?action adossé à la SNPE3 doit donc être doté d?un budget pluriannuel, incluant des financements consacrés à la mise en oeuvre d?actions nouvelles et spécifiques aux PE, au-delà des moyens déjà prévus ou engagés. Au regard des enjeux et des coûts induits par les PE, cet effort financier est à la fois nécessaire et soutenable. Sans prétendre à l?exhaustivité, la mission a identifié certaines actions qui nécessiteraient un soutien financier spécifique : Un abondement du budget de l?Anses à hauteur de 600 K¤/an95 permettrait de doubler les moyens consacrés à l?évaluation (au regard du critère PE) des substances, ce qui ? sous réserve de la disponibilité des experts du groupe de travail PE et de la complétude des dossiers - permettrait de doubler le rythme des évaluations (soit 4 à 6 nouvelles substances/an). Une dotation d?1 M¤/an augmenterait sensiblement les moyens dont disposent ARS et DREAL pour mettre en oeuvre les PRSE496 et soutenir les actions territoriales destinées à réduire les expositions aux PE (et aux produits chimiques en général), en complément de l?animation apportée par une plateforme de capitalisation des initiatives de terrain (budget de fonctionnement d?environ 150 K¤/an). 95 Recrutement de 5 à 6 ETP et complément de 100 K¤ pour les frais d?expertise. Ce budget pourrait être apporté par les 5 ministères de tutelle de l?Anses, au prorata de leur participation au budget annuel de l?établissement. 96 environ 10 M¤/an pour les PRSE3). Cette dotation serait apportée, à parts égales, par le MTECT et le MSP, pendant toute la durée des PRSE4, soit 5 ans. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 62/203 Un abondement du PNR EST à hauteur de 1 M¤/an (en complément de la dotation de 2M¤/an apportée par la DGPR depuis 2019 et de celle de 600 K¤/an envisagée par la DGS au titre du futur plan fertilité) permettrait de lancer des recherches sur des sujets actuellement mal couverts tels que les inégalités socio-économiques, l?impact sur la faune sauvage, la remédiation et la restauration de l?environnement? Un budget d?environ 2 M¤/an (soit le budget prévu par la DGE au titre de la SNPE2) permettrait de soutenir les démarches de substitution, de manière plus efficace grâce à un ciblage des industriels, des substances et des régions. Un budget de 2 M¤/an permettrait de financer des actions de prévention de l?exposition professionnelle, en formant les préventeurs et en accompagnant les entreprises sur le terrain pour faire changer leurs pratiques, sur le modèle de la Dreets Centre-Val-de-Loire ; Avec un budget d?environ 1 M¤/an, il serait possible d?accompagner une cinquantaine de sites industriels pour la caractérisation des rejets et l?identification des émissions de PE, comme cela a été fait pour certains établissements pharmaceutiques en 2022. L?exécution de ce budget (mesures nouvelles et mesures déjà prévues ou engagées) doit faire l?objet de présentations régulières devant le comité des parties prenantes. : Doter la SNPE3 (plan d?action) d?un budget pluriannuel (5 ans), incluant les financements consacrés à la mise en oeuvre d?actions nouvelles et spécifiques aux PE ; rendre compte régulièrement aux parties prenantes de l?exécution de ce budget [MTECT, MSP, MTSS, MESR, MASA et MEFSIN]. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 63/203 Conclusion Au terme de cette évaluation, force est de constater qu?elle présente de nombreuses similitudes avec celle conduite en 2017 pour la SNPE1 : efficacité limitée, gouvernance hésitante, cohérence lacunaire. La répétition de ce constat pourrait inciter à mettre fin à toute stratégie nationale en matière de PE, d?autant plus qu?une part très importante des décisions relèvent de l?échelon européen. Par ailleurs, plusieurs rapports ont mis en avant la nécessité de restreindre le nombre de stratégies et plans d?actions relatifs à la santé ? environnement (une quarantaine au total). Pourtant, les risques que présentent les PE pour la population et l?environnement imposent de continuer à agir et d?intensifier les actions engagées. Une SNPE3 est donc souhaitable et même nécessaire. Une telle stratégie ne doit pas être considérée comme la poursuite des deux premières SNPE. Elle doit traduire un changement radical aussi bien sur les objectifs (zéro exposition aux PE) qu?en matière de priorités : réduction effective de l?exposition aux PE et pas uniquement production de connaissances, formation des professionnels et information du public. Elle doit également être portée beaucoup plus fermement au niveau politique, que ce soit à l?échelle nationale ou européenne et encourager les initiatives prises par les acteurs de terrain. Enfin, la SNPE3 doit être dotée d?un budget spécifique, condition indispensable de son efficacité et de sa crédibilité. Ce n?est qu?à ces conditions que cette stratégie nationale pourra atteindre (enfin) les objectifs fixés il y a 10 ans : protéger la population et l?environnement face aux perturbateurs endocriniens ; avec pour cible « zéro exposition aux PE ». Nicolas DURAND Olivier LABOUX Emilie RASOOLY Inspecteur général Inspecteur général Inspectrice Sacha REINGEWIRTZ Frédéric SAUDUBRAY Inspecteur Inspecteur général PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 64/203 ANNEXES PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 65/203 Annexe 1. Lettre de mission PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 66/203 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 67/203 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 68/203 Annexe 2. Liste des personnes rencontrées Annexe 2.1. Ministères et directions d?administration centrale Nom Prénom Organisme Fonction BRETON Pierre Ministère chargé de l?Organisation Territoriale et des Professions de Santé (OTPS) Conseiller santé environnement VIEILLEFOSSE Aurélie Secrétariat Général à la Planification Ecologique (SGPE) Conseillère écologie BERTHAUD Cecilia ? Secrétaire générale adjointe à la planification écologique en charge du pôle ?ambition? BODENEZ Philippe Direction générale de la prévention des risques (DGPR) ? Chef du service des risques sanitaires liés à l'envi- ronnement, déchets, pollutions diffuses BLATON Elisabeth Adjointe au chef du bureau des produits chimiques LEFRANC Agnès Sous-directrice Santé environnement, produits chimiques, agriculture BOUE Muirgen Chargée de mission au bureau des produits chimiques GRATPAIN Valérian ? Chargé de mission au bureau santé-environne- ment CARMES Joëlle Direction générale de la santé (DGS) Sous-directrice Environnement et Alimentation LEMAITRE Cécile Adjointe à la Sous-directrice Environnement et Alimentation PAUL Caroline Cheffe du bureau EA1 MERLE Carole Adjointe à la Cheffe de bureau EA1 LEFEVRE Barbara Chargée de mission au bureau EA1 LESTERLE Sébastien Chargé de mission SCHWARTZ Bertrand Direction générale de la recherche et de l?innovation (DGRI) Directeur scientifique adjoint du Secteur Biologie Santé PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 69/203 Nom Prénom Organisme Fonction GUILLOTTEAU Solène Direction générale de l?alimentation (DGAL) Cheffe du bureau de l'appui aux politiques incitatives PALIN Sophie Sous-directrice, Sous-direction de l?accompagnement des transitions alimentaires et agroécologiques CORNUAU Caroline Sous-directrice adjoint, Sous-direction de l?accompagne- ment des transitions alimentaires et agroécologiques DA-CRUZ Lionel Direction générale de l?offre de soins (DGOS) Chef du bureau Innovation et recherche clinique (PF4) CHRIESTA-CABANNE Virginie Direction générale du travail (DGT) Adjointe au chef du bureau des risques chimiques, phy- siques, biologiques et des maladies professionnelles de SAINT-JORES Jeremy Chef du pôle risques chimiques et agents biologiques LECOQ Pierre Ingénieur prévention du risque chimique ROUSSEL Romain Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) Sous-directeur « industrie, santé, logement" (Sd5) SIMBELIE Karine Chargé de mission BEY Claire Direction générale de l?enseignement scolaire (DGESCO) Chef de bureau santé et action sociale BULLET Claire Adjoint chef bureau santé et action sociale ASSAYAG-SOURY Doris Direction Générale des Douanes et des Droits Indirects (DGDDI) Politique des contrôles MAHE-DECKERS Caroline Direction générale de l?énergie et du climat (DGEC) Chef du bureau qualité de l?air RUDE Julien Chef de projet coordination du dispositif de surveillance de la qualité de l?air MARCHAND Caroline Chargée de mission politique territoriale de l?habitat CHOL Alexandra Direction générale à l?emploi et à la Formation professionnelle (DGEFP) Adjointe au chef de mission, Mission des politiques de certi- fication professionnelle PASS-LANNEAU Adèle Direction générale des entreprises (DGE) Directrice de projets réindustrialisation POURCHET Lison Cheffe de projet réglementation produits et substances PICHERY Elisabeth Chargée de mission règlementation substances et produits chimiques PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 70/203 Nom Prénom Organisme Fonction METAYER Marie-Laure Direction de l?Eau et de la Biodiversité (DEB) Adjointe à la Directrice KAMIL Isabelle Sous-directrice de la protection et de la gestion de l?eau, des ressources minérales et des écosystèmes aquatiques NICOLAS Véronique Cheffe du bureau de la lutte contre les pollutions domes- tiques et industrielles PINAULT Tiphaine Direction générale de la sécurité civile et la gestion des crises (DGSCGC) Directrice de sapeurs-pompiers, direction générale de la sé- curité civile et la gestion des crises JUGGERY Emmanuel Inspecteur général, adjoint à la sous-directrice de la doc- trine et des ressources humaines CAPART Rémi Chef du bureau de la doctrine, de la formation et des équi- pements POURRET Didier Médecin colonel de sapeur pompiers, médecin conseil au- près de la direction COUDERC-OBERT Céline Commissariat général au développement durable (CGDD) Cheffe de la mission biodiversité, santé et activités anthro- piques JOASSARD Irénée Adjointe- Sous-direction de l?information environnementale JAMET Céline Lutte contre l?antibiorésistance BARBIER Laura Chargée de mission recherche dans le domaine environne- ment santé LAVARDE Patrick Inspection générale Ecologie et Développement Durable (IGEDD) Inspecteur général BARTOLI Fabienne Inspection générale des Affaires Sociales (IGAS) Inspectrice générale LESTEVIN Pierre Inspecteur général SIMON-DELAVELLE Frédérique Inspectrice générale PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 71/203 Annexe 2.2. Europe & International Nom Prénom Organisme Fonction ANNYS Erwin Agence européenne des produits chimiques (ECHA) Directeur de l?unité d?appui et du respect de la légisation TIRAMANI Manuela Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) Cheffe de l?unité en charge de la révision par les pairs pour les pesticides JAMES Mathews Stagiaires aux relations extérieures internationales STRECK Georg Commission européenne / DG GROW Unité REACH (F1) HENDRIX Katleen Juriste (F1) GREFVORS-ERNOULT Charlotte Commission européenne / DG Emploi Chef de l?unité Santé et sécurité au travail et EU-OSHA (C2) PODNIECE Zinta Membre de l?unité Santé et sécurité au travail et EU-OSHA (C2) DE AVILA Christina Commission européenne / DG Environnement Chef de l?unité des Produits chimiques sûrs et durables (B2) WODLI Jordane Chargé de mission unité des Produits chimiques sûrs et durables (B2) FABRE Julien Chargé de mission BEREND Klaus Commission européenne / DG Santé Directeur de la sécurité sanitaire durabilité et innovation (unités E, F, G) RUBBIANI Maristella Unité Pesticides et Biocides (E4) BRINKS Jonathan Unité Technologie de transformation des aliments et nouveaux aliments (E2) COTURNI Flavio Commission européenne / DG Trade (Commerce) Chef de l?unité Agriculture, alimentation, sanitaire et phyto- sanitaire (D3) VARADY Meta Unité Agriculture, alimentation, sanitaire et phytosanitaire (D3) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 72/203 Nom Prénom Organisme Fonction MARQUIS-SAMARI Emilie Représentation permanente de la France auprès de l?Union européenne (RPUE) Conseillère Travail, emploi, inclusion sociale, égalité femmes-hommes LARSEN Henrik Soren Ministère danois de l?environnement Directeur du département Eaux propres et produits chi- miques sûrs JOUAN Sandrine Ministère de la santé publique belge Coordinatrice du NAPED, Service public fédéral MEUNIER Joëlle Service public fédéral KUELLMER Jens Ministère fédéral allemand de l?environnement Ministère fédéral de l?environnement (BMUV) ; division de la sécurité chimique, de l?environnement et de la santé (divi- sion C II) HIRINCHSEN Sinikka BMUV, division C II ARNING Juergen BMUV, division C II KEHER Anja BMUV, division C II SEVCIK Benoît Etats-Unis Conseiller aux Affaires Sociales, Ambassade de France PATISAUL Heather Chercheur, North Carolina State University AUBEE Catherine Conseillère sénior, Programme d?évaluation des perturba- teurs endocriniens (EDSP), Bureau des programmes des pesticides, Agence de protection de l?environnement (EPA) JOE Ronnie Toxicologiste (EDSP) LYNN Scott Biologiste (EDSP) PERRON Monique Conseillère scientifique senior, Bureau des programme des pesticides EMDUR Zoe Chargée de mission Liaison, Bureau de la sécurité chi- mique et de la prévention de la pollution (OCSPP) THOMAS Russell Directeur du centre pour le calcul de la toxicologie et l?expo- sition de l?EPA (CCTE) GUISEPPI-ELIE Annette Directrice associée pour la science, CCTE JUDSON Richard Chercheur, CCTE PAUL Katie Chercheur, CCTE PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 73/203 Nom Prénom Organisme Fonction DIDERICH Bob Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) Chef de la division Environnement, santé et sécurité GOURMELON Anne Administrateur principal du Groupe « Lignes directrices » Annexe 2.3. Opérateurs publics nationaux Nom Prénom Organisme Fonction PRIEUR-RICHARD Anne-Hélène Agence Nationale de la Recherche (ANR) Département environnement SCHOU Cécile Relations institutionnelles BOUVET Philippe Département Biologie santé MOUNEYRAC Catherine Responsable scientifique toxicologie et écotoxicologie SCHULER Matthieu Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l?Alimentation, de l?Environnement et du Travail (Anses) Directeur général délégué du pôle « Sciences pour l'expertise » MICHEL Cécile Directrice de l?unité Reach/CLP/PE DUBOIS Laetitia Directrice de la recherche et de la veille scientifique en santé SANDERS Pascal Coordinateur général PARC GOURLAY-FRANCE Catherine Directrice adjointe à la Direction de l?évaluation des produits réglementés VOLATIER Jean-Luc Adjoint au directeur de l?évaluation des risques ROTH Chris Chef de l?unité Méthodologie et Etudes (UME) CHAMPION Morgane Chargée des projets scientifiques liés à l?alimentation SIROT Véronique Département de l?évaluation des risques PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 74/203 Nom Prénom Organisme Fonction DITTENIT Frédéric Agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM) Directeur adjoint règlementation et déontologie LOUIN Gaëlle Chef du pôle non clinique SIRDEY Thierry Directeur des dispositifs médicaux des cosmétiques et des dispositifs de diagnostic in vitro HOUETTO Paul Évaluateur toxicologue LENOIR-SALFATI Michèle Agence nationale du Développement Professionnel Continu (ANDPC) Directrice générale NATALI Jean-Philippe Directeur du développement et de la qualité du DPC FULBERT Hervé Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) Directeur des titres professionnels ROBERT Tiam Directeur ingénierie sectorielle TRAON Claire Caisse nationale d?assurance maladie (CNAM) Directrice de mission chargée de la transition écologique et de la santé environnementale DISEGNI Alan Directeur de cabinet adjoint, Direction Déléguée à la Ges- tion et à l?Organisation des Soins PHILIZOT Armance Responsable du département prévention et promotion de la santé NGUYEN Dinh-Phong Adjoint du département prévention et promotion de la santé GROSS Stéphanie Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT) Coordinatrice Santé publique, référente Santé environne- ment ROBICHON Nathalie Cheffe de service, service de spécialités santé publique GELY-PERNOT Aurore Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) Maître de conférences BONVALLOT Nathalie Directrice adjointe IRSET HUBERT Philippe Infrastructures de recherche PEPPER Directeur BRETON Thierry Institut national du cancer (INCa) Directeur Général de l?INCa LINASSIER Claude Directeur du Pôle Prévention, Organisation et Parcours de Soins de BELS Frédéric Responsable du département Prévention PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 75/203 Nom Prénom Organisme Fonction FOUCAUD Jérôme Responsable du département Recherche SHS Santé pu- blique Epidémiologie COBIGO Alexandre Responsable de projets - département prévention SERVENKA Iris Département Recherche SHS Santé publique Epidémiolo- gie RICAUD Myriam Institut national de recherche et de sécurité (INRS) Experte en prévention des risques chimiques COINTE Raymond Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) Directeur général MORIN Anne Directrice de la direction Milieux et impacts sur le vivant (MIV) BOUDET Céline Adjointe à la Directrice de la MIV ANDRES Sandrine Responsable de l?unité toxicologie et écotoxicologie des substances LEOZ Eva Direction de la « Stratégie politique scientifique et Commu- nication » TEBBY Cléo Ingénieur en statistiques et modélisation en toxicologie et écotoxicologie BRIGNON Jean-Marc Responsable de l?unité Economie et décision pour l?environ- nement BRION Francois Chercheur AIT-AISSA Sélim Responsable de l?Unité éco toxicologie des substances et des milieux DUFFORT Gaelle Chargée du projet AskREACH BISPO Antonio Institut national de recherche pour l?agriculture, l?alimentation et l?environnement (INRAE) Directeur Unité Info&Sols SLAMA Remy Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) Directeur de l?Institut thématique Santé publique BERNADAC Gérard Mutualité sociale agricole (MSA) Médecin conseiller technique national chargé du risque chi- mique PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 76/203 Nom Prénom Organisme Fonction MUSSARD David Conseiller technique national SALLES Bernard Président du Conseil Scientifique SOULAT Jean-Marc Médecin national PERCEVAL Olivier Office français de la biodiversité (OFB) Chef de service Fonctionnement, préservation et restaura- tion des milieux aquatiques AUGEARD Bénédicte Directrice adjointe recherche et appui scientifique STRAUB Pierre-François Chargé de mission Pollution des écosystèmes et métrologie DENYS Sébastien Santé Publique France (SpF) Directeur de la Direction Santé Environnement Travail (DSET) LE BARBIER-ANDREANI Mélina Directrice Adjointe de la DSET VERRIER Agnès Chargée de prévention en Santé environnementale MENARD Céline Responsable de l?unité Surveillance des Pathologies en lien avec l?environnement et le travail, DSET FILLOL Clémence Responsable de l?unité Surveillance des expositions, DSET CAUDEVILLE Julien Chargé de projets en santé environnement Annexe 2.4. Instances nationales Nom Prénom Organisme Fonction LISOWKI Vincent Conférence des Doyens des Facultés de Pharmacie de France Président CLAVELOU Pierre Conférence des Doyens des Facultés de Médecine Vice-président PAYSANT Sabine Présidente CNP-M PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 77/203 Nom Prénom Organisme Fonction BERANGER Remi Conseil National Professionnel de Maïeutique (CNPM), Collège National des Sages-Femmes de France (CNSF) Collège national des Sage-femmes de France, Maître de conférences BARASINSKI Chloé Doctorat d?université, Université Clermont Auvergne BRIGNON Jean-Marc Haut conseil de la santé publique (HCSP) Commission spécialisée sur les risques liés à l?environne- ment PAYRASTRE Laurence Directrice de recherche INRAE SQUINAZI Fabien Président de la Commission risque environnement de la santé publique CHAGNON Marie-Christine Commission spécialisée sur les risques liés à l?environne- ment HUBERT Philippe Directeur de PEPPER BEAUBESTRE Claude Membre de la CSRE De BELS Frédéric INCa URBAN-BOUDJELAB Soïzic DGS/MSR/SGHCSP VIOLLAND Anne-Cécile Plan national Santé environnement (PNSE4) Députée, Présidente du groupe Santé environnement GRARD Floriane Collaboratrice CHOISY Guillaume Agence de l?eau- Adour Garonne Directeur général BOULP Lauriane Conseillère politique publique en appui à la direction géné- rale REBILLARD Jean Pierre Chef de service SOURZAC Ariette Chargée d?étude COMBOROURE Jean-Christophe Agence Régionale de Santé Centre-Val de Loire Directeur de la santé publique et environnementale BREJON-LAMARTINIERE Vincent Centre régional de pathologies professionnelles et environ- nementales HELLEU Annaïg Responsable du département santé environnement CAFFET Laurent Agence Régionale de Santé Grand Est Chef du département santé environnementale PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 78/203 Nom Prénom Organisme Fonction OSBERY Aline Directrice adjointe de la direction promotion de la santé, prévention et santé environnementale MONIOT Stéphanie Responsable Planification et Actions Transversales HALITIM Ilias Agence Régionale de Santé Hauts-de-France Chargé de mission santé environnement ARS Hauts de France AUTES-TREAND Erwan Agence Régionale de Santé Nouvelle Aquitaine Responsable du pôle vulnérabilité RIOU Anne département « Enfance et Jeunesse » HAUTREUX Sabine Département Santé environnement BEIJAS Marie-Laure Cheffe de projet périnatalité MARGUERON Thomas Agence Régionale de Santé Provence-Alpes- Côte d?Azur Responsable régional santé environnement FLOCH Carine Chargée de mission PRSE PIETIN Clément Chargé de mission Environnements Extérieurs DASSONVILLE Fabrice Chargé de mission Eaux MAALIKI Eliane Responsable du département santé environnementale et veille et sécurité sanitaire MEUR Hervé Chargé de mission au département prévention et promotion de la santé BRETELLE Florence Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (APHM) Chef de service AGOSTINI Nathalie Coordinatrice médicale, Réseau périnatalité méditerranée BIAGI Caroline Infirmière DE, plateforme CRÉER BOUARD Carole Chargée de territoire 1000 premiers jours (83) BREVAUT-MALATY Véronique Praticien-hospitalier maternité, Hôpital Nord, AP-HM CERRI Françoise Sage-femme coordonnatrice de la maïeutique, Maternité Conception CORVISIER Laurianne Chargée de territoire (13) Réseau périnatalité méditerranée MONTEAU Pauline Directrice de la transition écologique, AP-HM PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 79/203 Nom Prénom Organisme Fonction MICQUEL Laura Praticien-Hospitalier, Gynécologie obstétrique, AP-HM MENU Johanne Directrice référente Pôle Femmes, parents, enfants PERRIN Jeanne Biologie de la reproduction, AP-HM SUNYACH Claire Sage-femme coordinatrice plateforme CREER PIBOULEAU Josselin Caisse Primaire d?Assurance Maladie- Indre Directeur Assurance maladie de l?Indre GAFSI Sami Sous-directeur Régulation innovation santé ZAIA Laetitia Centre Permanent d'Initiatives pour l'Environnement du Tarn Chargée de projet BESSON Brice Direction Régionale de l?Alimentation, de l?Agriculture et de la Forêt- Occitanie Chef de l?unité Pilotage et animation du plan Ecophyto VILLEREZ François Direction Régionale de l?Environnement, de l?Aménagement et du Logement- Occitanie Directeur régional adjoint GARNIER Simon Chef de service des risques industriels THERY-DUPRESSOIR Thomas Direction Régionale de l?Environnement, de l?Aménagement et du Logement- Centre-Val de Loire Chef de service risques industriels LEWIS Florian Directeur adjoint LE BER Ronan Chef du département risques technologiques et sécurité in- dustrielle IDRISSI Myriam Référente chimie et réglementation produits chimiques BARBONI Géraldine Direction Régionale de l?Economie, de l?Emploi, du Travail et des Solidarités- Provence Alpes Côte d?Azur Cheffe de projet du PRST CHEVALLIER Raphael Ingénieur de prévention et référent risques chimiques LAVAURE Anouk Direction Régionale de l?Economie, de l?Emploi, du Travail et des Solidarités- Centre- Val de Loire Directrice régionale DREETS ROLSHAUSEN Nadia Responsable du pôle travail ROUSSELLE Sabrina Adjointe de la responsable du pôle travail, responsable du service Santé sécurité, référente pour le Plan Santé au Tra- vail PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 80/203 Nom Prénom Organisme Fonction DEVIN Elodie Ingénieur prévention sur le champ santé sécurité du pôle travail Annexe 2.5. Collectivités territoriales Nom Prénom Organisme Fonction MEILHAC Emeline Conseil Régional d?Occitanie Directrice de projets Santé CROCHET Clémence Inspectrice générale des services BRIDET Jean-François Conseil Régional Centre Val de Loire 8ème Vice-Président délégué à la biodiversité, aux PNR, à la Loire et aux rivières, à l?eau, à l?air et à la condition animale GONZALEZ César Directeur mission santé-handicap MARC Julie Chargée de mission éducation à l?environnement BENOIT-MARQUIE François Chargé de mission transitions écologique et énergétique AUBANEL Isabelle Conseil départemental des Alpes-Maritimes Directeur de la santé, DGA DSH BOUDON Emilie Protection Maternelle et Infantile PIERENS Carine Chef de projet « Plan santé » ARTUSI-BOUTRAUD Isabelle Adjointe chef de service Energies et Fluides NEYEN Joël Conseil départemental du Tarn Directeur général des services MAGNANON Hélène Chef du Service Randonnées et Transition écologique RUBIROLA Michèle Ville de Marseille Première adjointe PEROLE Gilles Ville de Mouans Sartoux Adjoint enfance, éducation, alimentation STURTON Léa Directrice de l?alimentation CHABERT Magali Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 81/203 Nom Prénom Organisme Fonction GILL Nathan Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux THOMAS Jean Paul Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux JAPART Cécilia Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux LAVENANT Gwendoline Membre du GT PE de la ville de Mouans Sartoux CHEMLA Richard Ville de Nice Adjoint au Maire GRIMALDI Martine Chargée de mission santé environnement LANTERI Fabien Directeur de la santé FLEZ Alexandre Ville de Strasbourg Adjoint au maire chargé de la santé ROUILLARD-NEAU Pascale Chef de service Santé environnement THIL Elisa Chargée de mission Santé environnement LANGLOIS Laetitia Chargée de mission Santé autonomie Annexe 2.6. Sociétés savantes & personnalités qualifiées Nom Prénom Organisme Fonction BEAU Isabelle Société Française d?Endocrinologie (SFE) Directrice de Recherche Inserm FINI Jean-Baptiste Muséum national d?Histoire naturelle DESAILLOUD Rachel CHU Amiens STORME Laurent Société Française de Néonatalogie (SFN) Université de Lille- CHU de Lille FISCHER-FUMEAUX Céline-Julie Centre Hospitalier Universitaire Vaudois, Lausanne KALFA Nicolas Université de Montpellier- CHU de Montpellier DEIVA Kumaran Société Française de Neuropédiatrie (SFNP) Président PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 82/203 Nom Prénom Organisme Fonction RANNAUD-BARTAIRE Patricia Personnalités scientifiques Université Catholique de Lille BAROUKI Robert PU-PH, Université Paris Cité, APHP Baptiste Jean Museum national d?Histoire naturelle HAMAMAH Samir Université de Montpellier, CHU de Montpellier LEVI Yves Université Paris Saclay, APHM MARANO Francine Présidente, Commission spécialisée Risques liés à l?envi- ronnement, HCSP MIRAKIAN Pascale Centre PMA hôpital privé Natecia, Lyon SANDERS Pascal Coordinateur PARC RAT Patrice Responsable, Pôle Toxicologie cellulaire et Sécurité sani- taire, Université Paris Cité HOREL Stéphane Le Monde Journaliste FOUCART Stéphane Journaliste Annexe 2.7. Structures professionnelles Nom Prénom Organisme Fonction BERENGUEL Martine Confédération nationale artisanale des instituts de beauté (CNAIB) Présidente CNAIB Spa GOURDIEN Nadège Secrétaire générale CNAIB Spa RODDE Florence Juriste Droit de la Santé Affaires Réglementaires CNAIB Spa BEZES Christine Crèches Directrice de la crèche les P?tits Lis?loups (81) SAUVAN Nancy Fédération des Industries, des Peintures, encres, Couleurs, Colles et adhésifs (FIPEC) Responsable Santé et Sécurité des Produits RICHARD Gilles Délégué général PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 83/203 Nom Prénom Organisme Fonction ALEX Philippe Président Commission Biocides DOUMERC Martial Fédération française des industries du jouet Puériculture (FJP) Ingénieur qualité et affaires réglementaires-produits non ali- mentaires COLIN Valérie Fédération des entreprises de la Beauté (FEBEA) Directrice des affaires scientifiques et réglementaires GUEANT Xavier Directeur des affaires juridiques LEVY Patrick France Chimie Médecin conseil France Chimie LEOPOLD Thomas Toxicologue France Chimie MARTEL Florian FREDON Occitanie Chargé de mission environnement GIROUX Jean-Marie Industrie cosmétique entreprise cosmétique (COSMED) Président BASSONI Caroline Directrice des affaires réglementaires De COURCY Nathalie Directrice des affaires publiques DORE Christophe Union Nationale des Entreprises de Coiffure (UNEC) Président PELKA Christelle Directrice de cabinet Annexe 2.8. Associations & réseaux Nom Prénom Organisme Fonction JACQUET Virginie Association Label vie Responsable Développement BROUSMICHE Delphine Association pour la Prévention de la Pollution Atmosphérique (APPA) Directrice SOUVET Pierre Association Santé Environnement France (ASEF) Président et fondateur PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 84/203 Nom Prénom Organisme Fonction TILAK Dominique ATMO Occitanie Directrice ROBIC Pierre-Yves Directeur adjoint PACHEFF Tania Cantines sans plastiques ex-Présidente DUFOUR Alphée Comité départemental de la protection de la Nature et de l?environnement (CDPNE) Chargée de mission en éducation à l?environnement MOLIERES Véronique Comité pour le développement durable en santé (C2DS) Directrice GARNIER Véronique Élus santé publique et territoires Vice-Présidente de l?association Elus, santé publique et ter- ritoire, co-Présidente du Comité d?animation des territoires du PNSE 4 CHABROLLE Alain France Nature Environnement (FNE) Vice-président VEILLERETTE François Générations futures (et PAN-Europe) Porte-parole CINGOTTI Natacha Health & Environment Alliance (HEAL) Cheffe du programme Health and Chemicals PAPEGAY Nicolas Mutualité Française Coordinateur régional prévention, Hauts de France ROUSSEAU Mélie Coordinatrice FEES, Pays de la Loire PERRAULT Hélène Chargée de prévention, Hauts de France RETAUX Marion Responsable prévention et promotion de la santé, Occitanie WEISSMANN Ragnar Objectif Santé Environnement (O.S.E.) Directeur scientifique CHEVALLIER Laurent CHRU de Montpellier PALAMA Carynn Experte en transformation CICOLLELA André Réseau environnement santé (RES) Président du RES LEMAIRE Nina Réseau français des villes de l?OMS (RfVS) Coordinatrice FELTZ Alexandre Adjoint à la santé de la ville de Strasbourg ROUILLARD-NEAU Pascale Cheffe de service hygiène et santé-environnementale de la ville de Strasbourg PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 85/203 Nom Prénom Organisme Fonction THIL Elisa Chargée de mission santé-environnement à la ville de Strasbourg LANGLOIS Laetitia Chargée de projet santé à la ville de Strasbourg ZAVALLONE Romain Conseiller santé-environnement à la ville de Paris LARBRE Juliette Chef du Laboratoire d?Analyse de la ville de Paris RIVET Nadine Adjointe au Maire de Limoges chargée de la Petite En- fance, des Accueils de Loisirs et de la Ville nourricière PIQUET Julia Apprentie chargée de mission santé environnement RfVS VUILLAUME Xavier Directeur de la santé publique, Aubervilliers PLATEL Sylvie Woman Engage for a Common Future (WECF) Responsable plaidoyer santé environnement PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 86/203 Annexe 3. La réglementation des perturbateurs endocriniens au niveau européen et national Annexe 3.1. En dépit de progrès, la règlementation européenne demeure insuffisante Annexe 3.1.1 Une réglementation complexe qui a connu des avancées récentes La régulation des perturbateurs endocriniens se joue essentiellement à l?échelon européen Un cadre mondial généraliste Un cadre mondial sur la gestion des produits chimiques a été élaboré par les Nations-Unies, et a fait l?objet d?une révision récente en 2023 lors de l?accord de Bonn97. Cet accord s?ajoute à ceux pris sur le climat et la biodiversité afin d?apporter une réponse globale aux crises planétaires mul- tiples : le dérèglement climatique, la perte de biodiversité et les pollutions. Le cadre mondial sur les produits chimiques constitue une feuille de route pour les gouvernements et entreprises, qui promeut des grands principes tels que l?arrêt des pesticides hautement dange- reux, la transparence de l?industrie, la sécurité au travail ou la chimie durable. Il invite les parties prenantes à mettre en place des législations adéquates d?ici à 2030 ou 2035 en fonction des cibles, mais n?est pas juridiquement contraignant en tant que tel. Ce cadre mondial, assorti de 12 résolutions, se concentre sur les grands principes et ne mentionne pas directement la question des perturbateurs endocriniens. Il existe également un système général harmonisé de classification des produits chimiques (SGH), utilisé depuis les années 2000, basée sur une nomenclature associée à des numéros, des picto- grammes et des mentions de danger. Les produits y sont répartis en différentes classes de danger (danger physique, danger pour la santé et danger pour l?environnement) et classés par famille. Cependant, les perturbateurs endocriniens ne figurent pas à ce stade en tant que tels parmi les 28 classes de danger répertoriées. Un corpus réglementaire étoffé au niveau européen La compétence de l?Union européenne en matière de régulation des produits chimiques La régulation des produits chimiques au niveau de l?Union européenne est la plus avancée au monde. Le choix de l?Union européenne comme espace de compétence s?explique par plusieurs raisons. En premier lieu, la normalisation des produits chimiques est une des conditions de fonc- tionnement du marché intérieur, afin d?éviter des barrières à l?entrée déguisées, mais également pour ne pas tolérer une forme de dumping en matière sanitaire qui serait destiné à favoriser l?in- dustrie. En second lieu, la coopération entre Etats membres permet des économies d?échelle en faisant en sorte que les agences nationales compétentes se partagent le travail d?évaluation des nouvelles substances, avec un gain de temps et de moyens. En troisième lieu enfin, cette régula- tion concourt à une réduction de l?exposition humaine et de la pollution environnementale, objectif 97 Cinquième conférence internationale sur la gestion des produits de chimiques de Bonn, septembre 2023, qui a conduit à l?adoption d?un « Cadre mondial relatif aux produits chimiques pour une planète sans produits chimiques ni déchets nocifs » PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 87/203 qui est devenu une préoccupation de plus en plus importante parmi les Etats membres et leurs citoyens. La régulation des produits chimiques repose aujourd?hui sur une multitude de règlements et direc- tives : deux grands textes transversaux (REACH sur l?enregistrement, l?évaluation et l?autorisation des substances, et CLP sur la classification, l?étiquetage et l?emballage) ; des textes sectoriels (produits biocides, produits phytopharmaceutiques, protection et restauration des masses d?eau, eau potable, jouets, cosmétiques, médicaments, dispositifs médicaux, sécurité alimentaire et contenants alimentaires, exposition des travailleurs) ; des textes interdisant spécifiquement certaines substances pour des usages spécifiques (bisphénol A, phtalates, PFAS). Le cadre général du programme d?action pour l?environnement La politique de santé et de l?environnement de l?Union européenne est définie par des documents pluriannuels qui sont les programmes d?action pour l?environnement (PAE), adoptés par le Parle- ment et le Conseil. Le 8ème PAE98 couvre la période de 2023 à 2030 et oriente l?élaboration de la politique environnementale de l?Union européenne. Il vise à « accélérer la transition écologique vers une économie circulaire, neutre sur le plan climatique, durable, non toxique, efficace dans l?utilisation des ressources, fondée sur les énergies renouvelables, résiliente et compétitive, d?une manière juste, équitable et inclusive, et à protéger, restaurer et améliorer l?état de l?environnement, y compris en arrêtant et inversant la perte de biodiversité. Il soutient et renforce une approche intégrée des politiques et de la mise en oeuvre, en s?appuyant sur le pacte vert pour l?Europe. » (article 1, alinéa 2). Il est également posé que « Le 8ème PAE est fondé sur le principe de précaution, sur les principes d?action préventive et de correction de la pollution à la source et sur le principe du pollueur-payeur. » (article 1.5). Le 8ème PAE comprend six objectifs thématiques prioritaires, dont le quatrième est énoncé ainsi : « la recherche d?une pollution zéro, y compris par rapport aux produits chimiques dangereux, afin de parvenir à un environnement exempt de substances toxiques, notamment en ce qui concerne l?air, l?eau et les sols, et par rapport à la pollution lumineuse et sonore, ainsi que la protection de la santé et du bien-être des personnes, des animaux et des écosystèmes face aux risques et aux incidences négatives liés à l?environnement » (article 2.2 alinéa d). La 8ème PAE indique que, pour atteindre ces objectifs prioritaires, « la Commission, les États membres, les autorités régionales et locales ainsi que les parties prenantes, selon le cas, doivent (...) remplacer rapidement les substances préoccupantes, y compris les substances extrêmement préoccupantes, les perturbateurs endocriniens, les produits chimiques très persistants, ainsi que les substances neurotoxiques et immunotoxiques, et lutter contre les effets combinés des produits chimiques, des formes nanométriques des substances et de l?exposition aux produits chimiques dangereux contenus dans les produits, évaluer leurs incidences sur la santé et l?environnement, y compris le climat, et sur la biodiversité, tout en encourageant les produits chimiques et matériaux sûrs et durables dès la conception et en intensifiant et coordonnant les efforts déployés en vue de favoriser l?élaboration et la validation de méthodes de substitution à l?expérimentation animale. » (article 3, alinéa l). 98 Décision (UE) 2022/591 du Parlement européen et du Conseil du 6 avril 2022 relative à un programme d?action général de l?Union pour l?environnement à l?horizon 2030 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 88/203 La stratégie de la Commission relative aux perturbateurs endocriniens Une première stratégie communautaire avait été adoptée par la Commission dès 199999 pour dé- finir le problème de la perturbation endocrinienne, et mettre en évidence l?action politique appro- priée, en recommandant d?appliquer le principe de précaution. Une stratégie plus récente a été publiée par la Commission dans une communication du 7 no- vembre 2018 intitulée « Vers un cadre complet de l?Union européenne en matière de perturbateurs endocriniens ». Cette stratégie fait le bilan de la politique actuelle de l?Union européenne, en ma- tière de surveillance, de recherche et de réglementation. La Commission y reconnaît que, si « des progrès significatifs ont été accomplis (...) les préoccu- pations restent vives ». Elle recommande que l?approche stratégique de l?UE se fonde sur l?appli- cation du principe de précaution, pour « réduire le plus possible l?exposition globale des personnes et de l?environnement », « accélérer le développement d?une base de recherche approfondie » et « promouvoir un dialogue actif » entre parties prenantes. La Commission relève que les mesures législatives régissant les produits chimiques ont été mises au point à des moments différents, donnant parfois lieu à des approches diverses, soulevant des questions de cohérence. Elle souligne deux problématiques : l?absence d?une approche « horizontale » pour l?identification des perturbateurs endocriniens entre les différentes législations : ce que la commission propose de résoudre une adoptant une approche cohérente dans toute la législation, sur la base de la définition de l?OMS ; l?existence d?approches réglementaires différentes des perturbateurs endocriniens selon les textes législatifs (certains textes retenant une interdiction de principe tandis que d?autres privilégient le cas par cas, avec un risque que certaines approches ne soient pas appropriées) : difficulté à laquelle la Commission ne propose de solution immédiate, estimant qu?elle doit être examinée de manière plus approfondie. La Commission annonce en tout cas plusieurs mesures : le lancement d?un bilan de qualité global de la réglementation relative aux perturbateurs endocriniens ; le soutien à la recherche ; l?organi- sation d?un forum annuel sur les perturbateurs endocriniens ; le soutien à l?intégration des pertur- bateurs endocriniens dans le système international de classification des produits chimiques ; et le lancement d?un guichet web unique consacré aux perturbateurs endocriniens. Par une résolution du 15 avril 2019, le Parlement européen a réagi de façon critique à cette com- munication100. Le Parlement y note que la révision de la stratégie communautaire de 1999 a tardé, et que de ce fait, certains Etats membres, dont la France, la Suède, le Danemark ou la Belgique, ont pris une série de mesures au niveau national. Le Parlement considère que la communication de la commission de 2018 ne présente pas de plan d?action concret pour réduire au maximum l?exposition, ni de calendrier dédié. Le Parlement regrette que des dispositions spécifiques aux perturbateurs endocriniens fassent défaut dans des textes clefs (cosmétiques, jouets, matériaux de contact alimentaire) et s?inquiète que le bilan qualité ne soit commandé que pour retarder des mesures concrètes. Le Parlement demande à la Commission de prendre rapidement les mesures pour réduire au maxi- mum l?exposition globale, et notamment, d?ici à 2020, de mettre en place une définition transver- sale des perturbateurs endocriniens, accompagnée de documents d?orientation « dignes de ce 99 Communication 99/0706 de la Commission : Stratégie communautaire concernant les perturbateurs endocriniens 100 La résolution a été voté à une large majorité de 447 voix sur 502. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 89/203 nom », et de formuler des propositions pour insérer des dispositions spécifiques relatives aux per- turbateurs endocriniens dans les règlement relatifs aux cosmétiques, à la sécurité des jouets et aux matériaux de contact alimentaire. La stratégie de la Commission pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques Dans le cadre de l?ambition « zéro pollution » de l?UE du pacte vert pour l?Europe, la Commission européenne a adopté une stratégie pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques le 14 octobre 2020. La Commission y admet que si « certains textes législatifs permettent de recon- naître les perturbateurs endocriniens, le système réglementaire de l?UE est globalement fragmenté et limité, et il est nécessaire de le consolider et de le simplifier pour que les perturbateurs endocri- niens puissent être repérés en temps utile de manière à limiter le plus possible l?exposition des êtres humains et de l?environnement». En conséquence, la Commission annonce différentes orientations intéressant les perturbateurs endocriniens, parmi lesquelles : établir un système juridiquement contraignant d?identification des dangers liés aux perturbateurs endocriniens, en s?appuyant sur les critères déjà définis pour les pesticides et les biocides, et l?appliquer dans l?ensemble de la législation ; veiller à ce que les perturbateurs endocriniens soient interdits dans les produits de consommation dès qu?ils sont reconnus comme tels, leur utilisation n?étant autorisée que s?il est démontré qu?elle est essentielle pour la société ; renforcer la protection des travailleurs en faisant des perturbateurs endocriniens une catégorie de substances extrêmement préoccupantes dans le cadre du règlement REACH ; examiner les informations requises dans l?ensemble de la législation et les renforcer pour permettre aux autorités de reconnaître les perturbateurs endocriniens ; ajouter de nouvelles catégories de substances dans le règlement CLP ; accélérer la mise au point de méthodes permettant d?obtenir des informations sur les perturbateurs endocriniens grâce au criblage des substances et aux essais ; étudier la meilleure façon de mettre en place dans REACH un ou plusieurs facteurs d?évaluation des mélanges dans l?évaluation de la sécurité des substances ; coordonner les évaluations entre textes législatifs, en vue d?une approche « une substance, une évaluation » ; renforcer les procédures d?autorisation et de restriction de REACH. Une appréhension inégale dans les règlements transversaux REACH et CLP Le règlement REACH, texte fondateur, est peu adapté pour limiter les perturbateurs endocriniens, et nécessite une refonte REACH fonctionne sur le principe « Pas de données, pas de marché » Le règlement (UE) n°1907/2006 du 18 décembre 2006 (dit REACH) concerne l?enregistrement, l?évaluation et l?autorisation des substances chimiques ainsi que les restrictions applicables à ces substances. Ce texte vise à mieux protéger la santé humaine et l'environnement, assurer la libre circulation des substances dans le marché intérieur tout en préservant la compétitivité de l'industrie chimique. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 90/203 Ce règlement qui se distingue par sa technicité remplace une quarantaine d?anciens règlements et directives, et a fait l?objet de plus de quatre-vingts modifications réglementaires depuis son entrée en vigueur en 2007. REACH porte sur la fabrication, la mise sur le marché et l?utilisation : des « substances » (naturelles ou fabriquées), comme un solvant ou un métal ; des « mélanges » (deux substances ou plus), comme un alliage ou un produit de nettoyage ; des « articles » (objets dont la forme est plus déterminante que la composition chimique), comme un ustensile de cuisine ; toutefois, REACH ne concerne pas les produits phytosanitaires, les produits biocides, les médicaments ou les cosmétiques, qui font l?objet de règlements distincts. Le règlement repose sur le principe « pas de données, pas de marché » en faisant peser la charge de la preuve sur les entreprises (productrices, importatrices) tenues de déposer un dossier d?enre- gistrement pour chaque substance auprès de l?agence européenne des produits chimiques (ECHA). Celle-ci propose ensuite les mesures appropriées de gestion des risques à la Commission, telle que la restriction voire l?interdiction de l?usage d?une substance. Dans la première phase (enregistrement), les entreprises fabriquant ou important dans l?Union eu- ropéenne une substance pour une quantité supérieure à 1 tonne par an déposent un dossier d?en- registrement auprès de l?ECHA détaillant les propriétés de la substance, les risques éventuels pour la santé et l?environnement, et les mesures de gestion appropriées de ces risques. Plus la subs- tance est utilisée, plus le nombre de données à fournir est important. Dans le deuxième phase (évaluation), l?ECHA contrôle la complétude du dossier de la substance en question mais ne vérifie pas si les informations fournies sont appropriées sur le fond. Le contrôle de conformité relève de l?ECHA et des Etats membres, qui peuvent contrôler tout dossier d?enre- gistrement (l?objectif est fixé à 20% des dossiers) et doivent apprécier si les informations sont con- formes aux obligations légales. L?ECHA et les Etats membres élaborent un plan d?action communautaire (CoRAP101), mis à jour annuellement au gré des nouvelles préoccupations, qui répertorie les substances préoccupantes devant être soumises à évaluation sur une période de trois ans. Les critères de sélection pour l?inclusion sur cette liste s?appuient à la fois sur les quantités et les degrés d?exposition. Ces éva- luations sont réparties entre les agences compétentes des Etats membres. Dans la troisième phase (autorisation et restriction), les substances peuvent être soumises à diffé- rentes mesures de gestion des risques, à savoir l?autorisation ou la restriction selon leur dangero- sité. En premier lieu, les substances concernées par la procédure d?autorisation (listées dans l?années XIV de REACH) sont les substances les plus préoccupantes (SVHC)102 à savoir : les substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) ; les substances persistantes, bioaccumulables et toxiques (PBT) ; les substances très persistantes et très bioaccumulables (vPvB) ; les substances suscitant un niveau de préoccupation équivalent telles que les perturbateurs endocriniens ou les sensibilisants respiratoires. 101 CoRAP : plan d?action communautaire (Community Rolling Action Plan) 102 SVHC : substance extrêmement préoccupante (substance of very high concern) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 91/203 L?inscription sur la liste d?autorisation se fait en 2 étapes. Dans la première étape, les substances sont identifiées sur la base de propositions effectuées par les Etats membres ou l?ECHA. Après consultation publique, elles sont inscrites dans la « liste des substances candidates », dite « liste candidate » à la procédure d?autorisation. A la date de finalisation du rapport (mai 2024), cette liste candidate contenait 259 entrées, correspond chacune à une substance, ou parfois à une famille de substances. Au total, la liste candidate répertorie 486 substances différentes. Cette liste fait l?objet d?une actualisation deux fois par an. Dans la seconde étape, en partant de la liste candidate, l?ECHA recommande une liste de subs- tances à inscrire en priorité à l?annexe XIV, la décision revenant à la Commission européenne et aux Etats membres. Une fois inscrite à l?annexe XIV, une substance ne pourra plus, après des dates fixées, être utilisée, importée ou fabriquée, sans autorisation de la Commission. L?autorisation d?utilisation de la substance ne sera accordée que dans 2 cas : si les risques associés à l?utilisation sont valablement maîtrisés (ce qui est impossible pour les substances PBT ou vPvB) ; si les avantages socio-économiques de l?utilisation de la substance l?emportent et qu?il n?y a pas de substance ou de technologie de substitution dans l?immédiat. En mai 2024, l?annexe XIV comptait 59 entrées, une entrée pouvant réunir plusieurs substances. L?objectif est que ces substances soient progressivement remplacées par d?autres substances ou technologies moins dangereuses lorsque des solutions de remplacement appropriées économi- quement et techniquement viables existent. En second lieu, les substances concernées par la procédure de restriction (listées dans l?années XVII de REACH) sont les substances pour lesquelles un Etat membre ou la Commission estiment que la mise sur le marché entraînerait un risque inacceptable pour la santé humaine ou l?environ- nement. L?inscription se fait à l?issue d?une consultation publique, sur décision des Etats membres et de la commission. La restriction pourra concerner les conditions de fabrication, la limitation de mise sur le marché ou d?utilisation (par exemple : interdiction d?utiliser des phtalates à une concen- tration supérieure à 0,1% dans les jouets et articles de puériculture). En mai 2024, l?annexe XVII comptait 73 entrées, une entrée pouvant réunir plusieurs substances. Au-delà des substances et mélanges, des règles spéciales s?appliquent aux « articles », tels que des articles simples (composés d?une seule pièce, comme une chaise) ou complexes (véhicules, cartes électroniques, ...). Les producteurs ou importateurs d?articles sont tenus de notifier à l?ECHA la présence de substances classées SVHC, dès lors que la concentration de la substance dépasse 0,1% et que la substance est présente dans des quantités dont le volume dépasse une tonne par an. Par ailleurs, les fournisseurs des articles contenant une SVHC sont tenus de fournir au consom- mateur, à sa demande, des informations pour permettre l?utilisation de l?article en toute sécurité. La mise en oeuvre de ce « droit de savoir » a été facilitée par le développement de l?application Scan4Chem développée au niveau européen, et qui sera également utilisée en France pour l?ap- plication de la loi AGEC (cf.infra). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 92/203 Le nombre de substances concernées par des mesures de gestion de risque en raison de leur effet de perturbateur endocrinien est limité Un certain nombre de substances sont classées parmi les différentes annexes de REACH au titre de leur effet de perturbateur endocrinien. Il convient de préciser que l?appartenance à la première liste (liste candidate des substances hau- tement préoccupantes dites SVHC) n?emporte pas en tant que telle une véritable restriction sur le marché, les obligations liées à ce statut étant essentiellement des obligations d?information aux clients et à l?ECHA. Toutefois, l?inscription sur cette liste laisse présager, à terme, une inscription sur la liste autorisation ou restriction, ce qui incite les industries ayant recours à ces substances en amont à préparer leur substitution. A l?inverse, la présence sur la liste autorisation (annexe XIV) ou restriction (annexe XVII) signifie bien que les substances en question sont limitées dans leur usage et leur utilisation. Pour chaque substance, la base de données de l?ECHA indique le motif d?inclusion dans la liste, qui peut être la perturbation endocrinienne. Parmi les 486 substances listées, on en dénombre 118 faisant état d?un motif de perturbation endocrinienne103. Sur ces 118 substances, 104 appartiennent à 8 familles de substances, tandis que 14 sont des substances uniques. Au total on dénombre 22 substances uniques ou familles de substances classées dans la liste candidate au motif d?une propriété de perturbation endocrinienne, ce qu?illustre le tableau suivant. Tableau 1 : Substances classées dans la liste candidate à la procédure d?autorisation, dites SVHC, au motif de leurs propriétés de perturbation endocrinienne Nom des substances et familles de substances Nombre de substances Année d'inclusion dans la liste Motif d'inclusion des propriétés PE Isobutyl 4-hydroxybenzoate 1 2023 Santé humaine 4,4'-sulphonyldiphenol 1 2023 Santé humaine Environnement (±)-1,7,7-trimethyl-3-[(4- methylphenyl)methylene]bicyclo[2.2.1]heptan-2- one covering any of the individual isomers and/or combinations thereof (4-MBC) 7 2022 Santé humaine Phenol, alkylation products (mainly in para position) with C12-rich branched alkyl chains from oligomerisation, covering any individual isomers and/ or combinations thereof (PDDP) 6 2021 Santé humaine Environnement 4,4'-(1-methylpropylidene)bisphenol 1 2021 Santé humaine Environnement Butyl 4-hydroxybenzoate 1 2020 Santé humaine Tris(4-nonylphenyl, branched and linear) phosphite (TNPP) with ? 0.1% w/w of 4- nonylphenol, branched and linear (4-NP) 5 2019 Environnement 4-tert-butylphenol 1 2019 Environnement 1,7,7-trimethyl-3- (phenylmethylene)bicyclo[2.2.1]heptan-2-one 1 2019 Environnement 103 C?est sur la base de cette liste que l?Anses a établi la liste des substances concernées par l?obligation d?information de la loi AGEC relative à la présence de perturbateurs endocriniens dans les produits, cf infra PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 93/203 Dicyclohexyl phthalate 1 2018 Santé humaine Reaction products of 1,3,4-thiadiazolidine-2,5- dithione, formaldehyde and 4-heptylphenol, branched and linear (RP-HP) 2 2018 Environnement p-(1,1-dimethylpropyl)phenol 1 2017 Environnement 4-heptylphenol, branched and linear 25 2017 Environnement 4,4'-isopropylidenediphenol 1 2017 Santé humaine Environnement 4-Nonylphenol, branched and linear, ethoxylated 41 2013 Environnement 4-Nonylphenol, branched and linear 13 2012 Environnement 4-(1,1,3,3-tetramethylbutyl)phenol, ethoxylated 5 2012 Environnement 4-(1,1,3,3-tetramethylbutyl)phenol 1 2011 Environnement Diisobutyl phthalate 1 2010 Santé humaine Dibutyl phthalate (DBP) 1 2008 Santé humaine Environnement Bis (2-ethylhexyl)phthalate (DEHP) 1 2008 Santé humaine Environnement Benzyl butyl phthalate (BBP) 1 2008 Santé humaine TOTAL (familles ou substances uniques) 22 TOTAL (nombre de substances) 118 Site de l?ECHA, retraitement IGAS-IGEDD En ce qui concerne les substances ayant fait l?objet d?une mesure d?autorisation ou de restriction, leur nombre est bien plus limité, puisqu?une substance peut rester sur la liste SVHC de nombreuses années avant de basculer sur l?annexe XIV ou XVII. Ainsi, on ne compte qu?un faible nombre de substances (8 au total) ayant fait l?objet d?une mesure d?autorisation ou de restriction au sens de REACH, au titre de leur effet perturbateur endocrinien. Ce modeste résultat renvoie aux limites du règlement REACH, détaillées ci-dessous. Tableau 2 : Substances faisant l?objet d?une mesure de limitation au sens de REACH au titre de leur effet perturbateur endocrinien Liste autorisation (annexe XIV) Liste restriction (annexe XVII) NPE (4-Nonylphenol) 4-(1,1,3,3-tetramethylbutyl)phenol éthoxylé Bisphénol A / BPA (4,4'-isopropylidenediphenol : concentration maximale de 0,02% dans les papiers thermiques) DEHP (Bis(2-ethylhexyl) phthalate) ; BBP (Benzyl butyl phthalate) ; DBP (dibutyl phtalate) et DIBP (dissobutyl phtalate) (concentration maximale de 0,1% en poids de plastique dans les jouets et articles de puériculture) NPE (concentration maximale de 0,01% du poids des articles textiles) Site de l?ECHA, retraitement IGAS-IGEDD PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 94/203 De fait, REACH est confronté à des limites structurelles et doit faire l?objet d?une refonte attendue de longue date Bien que le règlement REACH représente en soi une avancée majeure, qui a transformé la com- mercialisation des produits chimiques et inspiré des systèmes similaires, notamment en Asie, le système actuel montre ses limites et souffre d?une obsolescence qui lui a valu moult critiques. Dans un rapport d?évaluation de REACH publié en 2018, la Commission104 appelait à traiter de toute urgence un certain nombre de questions : la non-conformité des dossiers d?enregistrement105 ; la simplification de la procédure d?autorisation ; l?équité des règles du jeu par rapport aux entreprises de pays tiers grâce à des restrictions et à des mesures d?application efficaces ; la clarification de l?interface entre le règlement REACH et le reste de la législation de l?Union européenne, notamment en matière de santé et de sécurité au travail (SST) et de déchets. La lenteur du processus d?évaluation est au coeur des critiques portant sur l?efficacité de REACH. Une analyse de l?European Environmental Bureau (EEB) en 2022106 comparait le temps pris par l?industrie pour enregistrer une substance et la mettre sur le marché (moins d?un mois), avec le temps pour classer une substance sur liste « autorisation » ou « restriction », à partir de sa mise sur le marché (près de 20 ans). Cette lenteur s?explique notamment par le fait que les évaluations s?effectuent substance par subs- tance, et non pas par famille de substances, ce qui a pour effet d?emboliser les agences nationales en charge de l?évaluation. Une fois l?évaluation réalisée, le manque de moyens humains de l?ECHA et de la Commission contribue également à ralentir la prise de décision finale. Un avis de 2020 du Conseil environnemental, économique et social107 relevait d?autres faiblesses, comme la difficile mise en oeuvre à l?échelle européenne (disparités dans l?intensité des contrôles selon les pays et faibles moyens de coordination de l?ECHA), et une information difficilement lisible pour les professionnels dans les fiches de données de sécurité, ainsi que pour les consommateurs au titre du « droit de savoir » pour les articles contenant des SVHC. Le règlement REACH est par ailleurs mal calibré pour prendre en compte des propriétés de per- turbation endocrinienne, puisqu?il ne comporte pas de définition précise des perturbateurs endocri- niens. De plus, le règlement ne distingue pas les perturbateurs endocriniens avérés des présumés ou suspectés, ce qui exige une preuve maximale (seuls des perturbateurs endocriniens avérés pourront être reconnus) et rend difficile l?application du principe de précaution. Au reste, les tests requis pour l?évaluation sont incomplets et ne recouvrent pas toutes les voies de perturbation endocrinienne en l?état des connaissances scientifiques actuelles, comme le dé- taille l?analyse faite en 2019 par les professeurs Barbara Demeneix et Remy Slama dans un rapport adressé au Parlement européen108. 104 Rapport général de la Commission sur le fonctionnement général du règlement REACH (dans le cadre d?un programme d?évaluation REFIT), publié le 5 mars 2018 105 Cette faible qualité de l?enregistrement avait été illustrée par une large étude de l?équivalent allemand de l?Anses réalisée en 2018 qui avait relevé que seuls un tiers des dossiers étaient conformes ; 106 Rapport « The need for speed », European Environmental Bureau : l?analyse de 1109 substances régulées dans REACH conduit à trouver un temps médian de 19 ans et 3 mois entre la mise sur le marché et une inclusion à l?annexe XIV ou XVII 107 Avis du CESE « REACH et la maîtrise du risque chimique : un bilan positif, un outil à améliorer », Catherine Tissot-Colle, Janvier 2020 108 « Endocrine disruptors : from scientific evidence to human health protection », B. Demeneix & R. Slama, mai 2019, étude réalisée sur demande du Parlement européen PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 95/203 A ceci s?ajoute plusieurs dérogations qui diminuent encore l?efficacité du règlement : pour les substances à faible tonnage (moins de 10 tonnes annuelles sur le marché), il n?y a pas de données de toxicité chronique demandées ; les tests d?évaluation ne prennent pas en compte les « mélanges » de substances, et passent donc à côté des « effets cocktails » les polymères sont exemptés d?enregistrement sous REACH, ce qui a pour effet d?exonérer une majorité des PFAS d?un enregistrement109. Ces difficultés de fonctionnement général de REACH et de prise en compte la perturbation endo- crinienne appellent une refonte de la législation. Le règlement CLP vient d?être réformé pour introduire une classification des perturbateurs endocriniens Le règlement (UE) n° 1272/2008 du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l?étiquetage et à l?emballage (dit règlement CLP) vise à assurer la protection des travailleurs, des consommateurs et de l?environnement en définissant les règles européennes de classification, d?étiquetage et d?em- ballage des produits chimiques. Le règlement CLP aligne l?ancienne législation européenne en la matière sur le SGH international. Les dangers présentés par les substances chimiques sont communiqués au moyen de mentions d?avertissement et de pictogrammes figurant sur les étiquettes et les fiches de données de sécurité. Comme REACH, le CLP ne s?applique pas aux produits concernés par des règlements sectoriels (cosmétiques, denrées alimentaires, médicaments ...). Réformé par le règlement délégué (UE) 2023/707 du 19 décembre 2022110, le CLP prévoit désor- mais une classification et un étiquetage spécifique pour les perturbateurs endocriniens, qui devra s?appliquer au plus tard le 1er mai 2025 en ce qui concerne les substances ; et au plus tard le 1er mai 2026 concernant les mélanges. Deux classes de danger apparaissent, chacune divisée en 2 catégories : Perturbateurs endocriniens pour la santé humaine : ? catégorie 1 : perturbateurs endocriniens avérés ou présumés pour la santé humaine ? catégorie 2 : perturbateurs endocriniens suspectés pour la santé humaine Perturbateurs endocriniens pour l?environnement : ? catégorie 1 : perturbateurs endocriniens avérés ou présumés pour l?environnement ? catégorie 2 : perturbateurs endocriniens suspectés pour l?environnement Le règlement précise la définition des perturbateurs endocriniens avec 5 critères alternatifs : 1. ?perturbateur endocrinien? désigne une substance ou un mélange altérant une ou plusieurs fonctions du système endocrinien et induisant de ce fait des effets néfastes 109 Le sujet des PFAS commence cependant à faire l?objet d?attention croissante. En février 2023, une première restriction au sens de REACH a visé certains PFAS (Les acides perfluorocarboxyliques (PFCA) en C9-C14). Plus généralement une proposition de 5 pays européens (Danemark, Allemagne, Norvège, Pays-Bas, Suède) a été adressée à l?ECHA en avril 2023 pour demander une restriction générale de plus de 10.000 PFAS, qui devra donner lieu à un avis de l?ECHA en 2024 et une éventuelle restriction décidée par la Commission en 2025. 110 Règlement délégué (UE) 2023/707 du 19 décembre 2022 publié le 31 mars 2023 PUBLIÉ https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32023R0707&from=EN Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 96/203 sur la santé d?un organisme intact, de ses descendants ou au niveau des populations ou sous-populations ; 2. ?perturbation endocrinienne? désigne l?altération d?une ou plusieurs fonctions du sys- tème endocrinien causée par un perturbateur endocrinien ; 3. ?activité endocrinienne? désigne une interaction avec le système endocrinien sus- ceptible d?entraîner une réponse de ce système, d?organes cibles ou de tissus cibles, et qui confère à une substance ou un mélange le potentiel d?altérer une ou plusieurs fonctions du système endocrinien ; 4. ?effet néfaste? désigne un changement dans la morphologie, la physiologie, la crois- sance, le développement, la reproduction ou de la durée de vie d?un organisme, d?un système ou d?une population ou sous-population qui se traduit par l?altération d?une capacité fonctionnelle ou d?une capacité à compenser un stress supplémentaire ou par l?augmentation de la sensibilité à d?autres influences ; 5. ?lien biologiquement plausible? désigne la corrélation entre une activité endocri- nienne et un effet néfaste, basé sur des processus biologiques, lorsque la corrélation est cohérente avec les connaissances existantes. Le règlement pose également les limites de concentration génériques des composants d?un mé- lange qui déterminent la classification du mélange en tant que perturbateur endocrinien : Pour les perturbateurs endocriniens avérés ou présumés (catégorie 1, pour la santé humaine ou pour l?environnement) : concentration supérieure ou égale à 0,1%. Pour les perturbateurs endocriniens suspectés (catégorie 2, pour la santé humaine ou pour l?environnement) : concentration supérieure ou égale à 1%. L?introduction d?une sous-catégorisation entre « avéré ou présumé » et « suspecté » correspond à une position qui avait été réclamée de longue date par la France, afin de mieux s?aligner sur les particularités des perturbateurs endocriniens et les avancées scientifiques. Cette réforme va dans le sens des positions annoncées par la Commission dans sa communication de 2018, dans la mesure où elle est un préalable à une définition dite « transversale » ou « hori- zontale » des perturbateurs endocriniens dans la réglementation européenne. Ainsi les substances enregistrées dans REACH devront être mises à jour pour classer éventuellement leurs substances parmi les nouvelles classes de danger du CLP. De même, les réglementations sectorielles devront harmoniser leurs définitions de la perturbation endocrinienne pour s?aligner avec celle proposée par le règlement CLP. Une reconnaissance grandissante dans les réglementations sectorielles Distinction entre produits biocides et produits phytopharmaceutiques La réglementation européenne distingue entre, d?une part, les produits biocides, qui sont des substances destinées à détruire ou neutraliser des organismes nuisibles (désinfectants, protec- tion, lutte contre les nuisibles, etc. ), et d?autre part les produits phytopharmaceutiques, qui sont des substances actives destinées à protéger les végétaux, de plusieurs manières possibles (pro- tection contre les nuisibles, accélérer leur croissance, détruire les végétaux indésirables ...). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 97/203 Si la distinction n?est pas toujours aisée en pratique d?autant plus qu?un même produit peut être soit un produit biocide soit un produit phytopharmaceutique en fonction de son utilisation, le principe est que le traitement biocide s?effectue dans un but d?hygiène générale ou de santé publique, tandis que le traitement phytopharmaceutique recherche la protection des plantes ou végétaux. Les produits biocides et produits pharmaceutiques sont régulés au niveau européen, dans une perspective de protection de la santé humaine et de l?environnement, et d?amélioration du fonc- tionnement du marché intérieur. Ils font l?objet d?un double processus d?agrément : les subs- tances actives sont approuvées au niveau de l?Union européenne, et les produits sont ensuite autorisés sur le marché principalement au niveau des Etats membres. Le règlement sur les produits biocides n?a abouti qu?à un très faible nombre de restriction de substances en raison de leurs propriétés endocriniennes Le règlement (UE) n° 528/2012 du 22 mai 2012 concerne la mise sur le marché et l?utilisation des produits biocides, qui sont utilisés pour protéger l'homme, les animaux, les matériaux ou les articles contre les organismes nuisibles, tels que les animaux nuisibles et les bactéries, par l'action des substances actives contenues dans le produit biocide. Les produits biocides destinés à être mis sur le marché requièrent une autorisation une fois que les substances actives qui les composent ont été approuvées. Ce principe fait toutefois l?objet de plusieurs exceptions, à la fois pour les substances actives en cours de réexamen, ou pour des substances actives nouvelles qui peuvent bénéficier d?autorisations provisoires pour 3 ans. Le règlement interdit l?approbation des substances cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques, et des substances classées PBT111 ou VPVB.112 De même, l?approbation est interdite pour les subs- tances ayant des effets de perturbation endocrinienne néfastes pour l?homme, ou qui seraient re- connues comme perturbateurs endocriniens au sens du règlement REACH. Pour autant, le règlement aménage des dérogations, qui pourront être accordées : si le risque est négligeable ; si la substance active est indispensable pour prévenir ou combattre un risque grave, pour la santé humaine, animale ou environnementale ; si la non-approbation aurait des conséquences négatives disproportionnées pour la société par rapport aux risques que son utilisation représente pour la santé humaine, animale ou environnementale. Les évaluations des substances actives sont réalisées par un Etat membre choisi par le deman- deur, qui transmet ensuite ses conclusions à l?ECHA. Sur la base de ces conclusions, l?ECHA donne un avis relatif à l?approbation de la substance active, transmis à la Commission européenne, qui adopte un règlement d?exécution portant approbation de la substance active et en détaillant les conditions. Cette approbation doit être renouvelée sous 15 ans, sauf s?il est précisée une durée plus brève. Une fois la substance approuvée, une demande d?autorisation de mise sur le marché, valable pour 10 ans, doit être effectuée dans chaque Etat membre où la commercialisation est envisagée, et examinée par l?agence responsable, qui est l?Anses en France. Une procédure d?autorisation par 111 PBT : persistances, bioaccumulables et toxiques. 112 VPVB : très persistantes et bioaccumulables. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 98/203 reconnaissance mutuelle est également prévue lorsqu?une commercialisation dans plusieurs Etats membres est souhaitée, qui permet une coordination entre Etats membres concernés. Les Etats membres ont la possibilité de déroger à la reconnaissance mutuelle s?ils apportent la preuve que la substance en question a des effets nocifs sur l?environnement ou la santé. Il existe également une autorisation de marché directement auprès de la Commission européenne qui vaut pour tout le marché européen, mais qui est impossible si la substance a des propriétés toxiques pour la santé (ce qui comprend la perturbation endocrinienne). Les substances déjà présentes sur le marché avant l?entrée en vigueur de la réglementation européenne font l?objet d?un programme d?examen initié dans les années 2000 pour répartir les évaluations entre les Etats membres, qui aurait dû théoriquement s?achever en 2024, mais a connu un retard considérable faute de moyens humains dans les agences compétences des différents Etats membres. Bien que le règlement biocides date de 2012, la définition réglementaire des critères d?identification du caractère perturbateur endocrinien d?une substance a seulement été adoptée via le règlement délégué n° 2017/2100 du 4 septembre 2017, en se basant sur les critères retenus par l?OMS. Ce dernier règlement a été complété par le règlement délégué 2021/525 du 19 octobre 2020, qui précise les méthodes d?essais nécessaires pour la détermination des propriétés de perturbation endocrinienne. De ce fait, l?évaluation des effets de perturbation endocrinienne a démarré tardivement, au vu du décalage entre la réglementation initiale de 2012 et les règlements d?application intervenus presque 10 ans plus tard. Ainsi, en octobre 2023, 6 substances biocides avaient été évaluées par la Commission comme ayant des propriétés de perturbation endocrinienne, et parmi celles-ci, seulement 2 avaient été interdites, les autres ayant été approuvées dans la mesure où elles répondaient aux critères prévus par la dérogation. A l?inverse, la Commission a conclu que 13 substances n?avaient pas d?effet perturbateur endocrinien, à partir des nouveaux critères appliqués depuis 2018. De plus, l?ECHA a rendu 26 évaluations dans lesquelles elle a estimé qu?il manquait d?information pour déterminer s?il existait ou non un effet de perturbation endocrinienne, en majorité en raison de données insuffisantes. Tableau 3 : Substances biocides dont l?effet perturbateur endocrinien a été reconnu par la Commission européenne Substance Décision Motif Cholecalciferol (rodenticide) Approbation prolongée jusqu?en 2025 (devait expirer en juin 2024) Délai supplémentaire nécessaire pour l?évaluation Cyanamide (désinfectant, insecticide) Non approuvé (décision de 2023) Impossible de démontrer que le produit n?avait pas d?effets inacceptables DBNPA (désinfectant) Non approuvé (décision de 2023) Malgré la possibilité d?un usage sûr, des alternatives de substitution existaient PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 99/203 Propiconazole (préservation du bois) Approuvé (décision de 2023) La non-approbation aurait des conséquences négatives disproportionnées Iodine et PVP-iodine (désinfectant) Réexamen anticipé (demandé en 2021) Effet perturbateur endocrinien reconnu, en attente d?une évaluation de la substitution et des risques Zinèbe (fongicide) Réexamen anticipé (demandé en 2021) Effet perturbateur endocrinien suspecté Document de travail fourni par la DG Santé, retraitement IGAS-IGEDD Par ailleurs, s?agissant des substances approuvées, une inspection coordonnée en 2023 par l?ECHA à l?échelle du marché européen a démontré que plus d?un tiers (37%) des produits bio- cides113 utilisés n?étaient pas en conformité avec la législation. 18% de ces non-conformités con- cernaient des exigences fondamentales (utilisation de produits non autorisés ou de produits con- tenant des substances non approuvées), tandis que 19% correspondaient à des non-conformités mineures (telle que l?absence d?information sur le contact du fournisseur). Le règlement sur les produits phytopharmaceutiques voit son efficacité limitée par un nombre important de dérogations En principe, le règlement n?autorise pas la présence de substances nocives Le règlement (UE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 concerne la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, à savoir des produits composés de substances actives, qui peuvent avoir plusieurs usages : la protection des végétaux contre les organismes nuisibles, l?action sur la crois- sance des végétaux, la conservation des produits végétaux, la destruction ou la prévention des végétaux indésirables. Les critères scientifiques de détermination des propriétés de perturbation endocrinienne ont été définis plus tard par le règlement (UE) n° 2018/605 du 19 avril 2018, à la fois pour l?homme et pour les organismes non-ciblés par la substance. L?objectif du règlement est de n?autoriser la présence de substances dans les produits phytophar- maceutiques qu?à la condition qu?elles présentent un intérêt manifeste pour la production végétale, et qu?elles n?aient pas d?effet nocif sur la santé humaine ou animale, ou d?effet inacceptable sur l?environnement. Les substances font l?objet d?une évaluation initiale par une agence d?un Etat membre, à partir de données fournies par les industriels demandeurs. L?Etat membre rapporteur remet ensuite un dos- sier à l?EFSA114, l?agence européenne de sécurité des aliments. L?EFSA examine le dossier et peut demander des données supplémentaires, consulter des experts, voire faire réaliser des analyses toxicologiques complémentaires. L?EFSA transmet ses conclusions à la Commission européenne qui adopte un règlement délégué concernant l?approbation ou non de la substance en question et à quelles conditions. 113 Inspection conduite sur plus de 3500 produits utilisés au sein de 29 Etats (membres de l?Union Européenne, de l?Espace économique européen et Suisse). 114 EFSA : Agence européenne de sécurité des aliments (European Food and Safety Agency) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 100/203 Sur la base de ce règlement délégué, les agences nationales peuvent autoriser la mise sur le marché des produits. Des autorisations provisoires peuvent être accordées pour des produits non encore approuvés pour une période maximale de 3 ans, à condition qu?ils n?aient pas d?effet nocif sur la santé humaine ou l?environnement, et que l?autorisation de mise sur le marché n?a pas être attribuée dans les délais usuels. Des autorisations temporaires sont également accordées pour 120 jours pour autoriser des pro- duits phytopharmaceutiques non approuvés (ce qui inclut des produits ayant un effet nocif sur la santé ou l?environnement), et ce uniquement dans des circonstances exceptionnelles, lorsqu?un danger ou une menace compromettant la production végétale ou les écosystèmes ne peut être maîtrisé par d?autres moyens raisonnables (espèce envahissante, maladie, ...). Le territoire européen est divisé en 3 zones géographiques, facilitant les reconnaissances mu- tuelles par zone, la France étant catégorisée en zone Sud. Le règlement distingue 5 types de substances, avec des règles différentes d?approbation : Les substances de base (article 23) : ? ce sont des substances intrinsèquement sans danger, comme le sucre ; Les substances à faible risque (article 22) pour la santé et l?environnement : ? leur approbation est valide pour 15 ans ; ? une substance active ne peut être considérée à faible risque si elle est réputée être un perturbateur endocrinien Les autres substances (approuvées pour 10 ans) ; Les substances soumises à exclusion (annexe II, articles 3.6.2 à 3.6.5) : ? il s?agit des substances classées mutagène de catégorie 1A ou 1B, ou cancérogène de catégorie 1A ou 1B, ou toxique pour la reproduction de catégorie 1A ou 1B, ou perturbateur endocrinien. A moins que cette exposition soit considérée comme négligeable avec des conditions excluant tout contact avec l?homme ; ? toutefois, ces critères ne s'appliquent qu?aux nouvelles substances. Tandis que les substances déjà présentes sur le marché y demeurent jusqu?au renouvellement de leur approbation (dans l?attente, elles seront classées comme substances candidates à la substitution). Les substances candidates à la substitution (article 24) : ? il s?agit des substances à toxicité aiguë, des substances mutagènes de catégorie des substances cancérigènes, ou reprotoxique 1A ou 1B, des substances PBT, et des substances à effet de perturbation endocrinienne pour la santé humaine ; ? toute nouvelle demande d?autorisation de mise sur le marché pour un produit à base de l?une de ces substances peut faire l?objet d?une évaluation comparative, et aboutir, le cas échéant, au refus d?autorisation ou à la limitation de l?utilisation de ce produit ; ? l?approbation se fait pour une période 7 ans maximum, qui peut être renouvelée à condition que des mesures de réduction des risques soient prises. En pratique, des dérogations accordées qui durent dans le temps Ce texte a fait l?objet de critiques au regard des possibilités de dérogation qu?il accorde, en parti- culier via la liste des substances candidates à substitution. Dans sa propre évaluation de politique publique115 , la Commission européenne considérait en 2020 que « Les règles applicables aux 115 Rapport de la Commission européenne au Parlement européen d?évaluation du règlement (CE) n° 1107/2009, publié le 20 mai 2020 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 101/203 substances actives dont on envisage la substitution sont à la fois inefficaces et peu performantes. Les données disponibles montrent que les évaluations comparatives, réalisées par les États membres, des produits contenant des substances actives dont la substitution est envisagée sont complexes et nécessitent des ressources, mais n?ont abouti à aucune substitution, principalement en raison de l?absence de solutions de remplacement présentant un meilleur profil de risque at- testé ». Cette problématique était déjà soulignée dans un rapport d?inspection conjoint sur les produits pharmaceutiques de 2017 qui constatait que « subsistent donc sur le marché des substances ac- tives nocives dans l?attente de l?échéance de leur approbation. Ce point est d?autant plus préjudi- ciable que les durées d?approbation des substances sont souvent prolongées par « paquet » (...) la Commission a fait valoir que ces reports étaient dus à des retards pris par les États membres dans l?évaluation des substances »116. Le rapport pointait aussi que, bien qu?une possibilité soit ouverte aux Etats membres de refuser une autorisation de mise sur le marché pour ces substances, elle était rarement mise en oeuvre en raison de conditions trop restrictives. Cette situation a conduit au maintien sur le marché de substances dont l?effet perturbateur endo- crinien était suspecté, d?autant que les critères de définition de la perturbation endocrinienne n?ont été précisés qu?en 2018. Les restrictions de substances à l?issue d?évaluation des propriétés de perturbation endocrinienne commencent à intervenir A partir de la mise en oeuvre du règlement sur les tests des propriétés de perturbation endocrinienne en 2018, 110 substances ont fait l?objet d?une évaluation de leurs éventuelles propriétés de perturbation endocrinienne, dont les résultats sont présentés ci-dessous. Graphique 1 : Evaluation des propriétés PE de 100 produits phytopharmaceutiques entre novembre 2018 et octobre 2023 Source : DG Santé, retraitement IGAS-IGEDD A la suite de ces évaluations, 8 décisions de non-approbation de substances en raison de leur effet perturbateur endocrinien ont été prises, qu?illustre le tableau ci-dessous. 116 Rapport CGEDD ? IGAS ? CGAAER sur l?utilisation des produits phytopharmaceutiques de 2017 ? IGAS n° 2017-124R 16% 34% 2% 41% 7% 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45% Effets sur l'homme 7% 26% 2% 39% 25% 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45% Effet sur organismes non cibles PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 102/203 Tableau 4 : Décisions de la Commission de non-renouvellement de substances en raison de leur effet perturbateur endocrinien reconnu Substance Date du règlement d'exécution Décision de la Commission Expiration de l'approbation sur le marché européen Mancozeb 14-déc-20 Non renouvelé Janvier 2021 Benthiavalicarb 06-nov-23 Non renouvelé Décembre 2024 Clofentézine 07-nov-23 Non renouvelé Novembre 2024 Métirame 7-nov-23 Non renouvelé Novembre 2023 Triflusulfuron-méthyl 16-nov-23 Non renouvelé Novembre 2023 Asulame-sodium 02-févr-24 Non approuvé Sans objet (demande retirée) Dimethomorph 29-avr-24 Non renouvelé Février 2025 Mepanipyrim 29-avr-24 Non renouvelé Mars 2025 Site de la Commission européenne, retraitement IGAS-IGEDD De nombreuses substances présentant des risques de perturbations endocrinienne subsistent toutefois sur le marché, soit au titre de leur classement sur la liste « substitution », soit en raison du retard pris par les évaluations La mission s?est intéressée à la liste des substances candidates à la substitution, qui comporte à ce jour 52 substances encore approuvées. Parmi celles-ci, la mission a pu identifier 14 substances qui apparaissent dans la littérature comme étant suspectes d?avoir des effets de perturbation en- docrinienne117. Tableau 5 : Liste non-exhaustive de substances candidates à substitution, à effet PE régulièrement cité dans les études, et autorisées sur le marché Substance Approbation jusqu'au : Benzovindiflupyr août-26 Bromuconazole avr-27 Chlorotoluron août-26 Cyprodinil mars-25 Difenoconazole mars-26 Fludioxonil juin-25 Flufenacet juin-25 Flurochloridone mars-26 Metribuzin 118 févr-25 Pendimethalin nov-24 Propyzamide juin-25 Tebuconazole août-26 Ziram mars-25 lambda-Cyhalothrin août-26 Site de la commission Européenne, Rapport PAN Europe de mai 2022 précités, retraitement IGAS-IGEDD 117 Source : rapport PAN-Europe : « Forbidden Fruit », Mai 2022 118 Par un avis du 24 août 2023, l?EFSA a conclu que la substance Metribuzin remplissait le critère de perturbation endocrinienne, mais la Commission n?a pas pris de décision interrompant son approbation à la date de rédaction du rapport PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 103/203 Cette liste, qui n?est pas exhaustive, reflète la problématique du renouvellement régulier des subs- tances sur la liste candidate à la substitution, faute d?alternative identifiée et en raison du retard pris par les évaluations. Le rapport de PAN Europe cité plus haut affirmait par ailleurs que la fréquence du recours aux substances candidates à substitution est passée de 19% à 29% pour les fruits et de 11% à 13% pour les légumes entre 2011 et 2019, sur la base des données de contrôle fournies annuellement par les Etats membres à l?EFSA. Ce constat va à rebours de la stratégie européenne « de la ferme à la table » qui vise une réduction de 50% de l?usage des pesticides les plus toxiques d?ici à 2030. Au-delà des substances présentes sur la liste candidate à la liste substitution, il demeure un nombre important substances autorisées dont l?évaluation n?a pas encore été renouvelée depuis 2018, et qui pourraient donc présenter des propriétés de perturbation endocrinienne. La mission a cherché à déterminer, sans vocation d?exhaustivité, des substances présentes sur le marché et dont l?effet perturbateur endocrinien apparaît dans la littérature, et notamment rapportés dans les tests réalisés par l?industrie en vue de leur approbation.119 Tableau 6 : Liste non-exhaustive de substances à effet PE régulièrement citées dans les études, et autorisées sur le marché Substance Approbation jusqu'au : 2,4-D déc-30 Amisulbrom sept-24 Bentazon mai-25 Boscalid avr-26 Buprofezin déc-25 Fenoxaprop-P août-25 Fludioxonil juin-25 Folpet févr-25 Glyphosate déc-33 Mepanipyrim mars-25 Propyzamide juin-25 Pyrimethanil mars-25 Spinosad mars-25 Thiabendazole120 mars-32 Thifensulfuron oct-31 Tolclofos-methyl août-34 Trifloxystrobine juil-33 Site de la Commission européenne, retraitement IGAS-IGEDD Le calendrier d?approbation laisse donc supposer que des substances dont l?effet perturbateur en- docrinien est suspecté pourraient, pour certaines, rester encore sur le marché plus de 10 ans avant 119 Sources utilisées : rapports Générations futures « Perturbateurs endocriniens, il est temps d?agir : l?exemple des perturbateurs thyroïdiens » de décembre 2021 et rapport PAN-Europe « Identification of endocrine disrupting properties ? trapped in a vicious circle » de novembre 2019 120 Par un avis du 28 mars 2022, l?EFSA a conclu que la substance Thiabendazole remplissait le critère de perturbation endocrinienne, mais la Commission n?a pas pris de décision interrompant son approbation à la date de rédaction du rapport PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 104/203 d?être à nouveau soumises à évaluation. La DG Santé a toutefois indiqué à la mission, lors des entretiens, qu?elle sollicitait auprès des industriels des évaluations de perturbation endocrinienne concernant les produits approuvés sur le marché avant 2018. Il convient de noter que fin novembre 2023, le Parlement européen a rejeté par vote121 une propo- sition de règlement qui visait à mettre en place le principe de réduction des pesticides dans la stratégie « de la ferme à la table », ce qui risque de sérieusement compromettre l?objectif de ré- duction des expositions visé par la réglementation. La réglementation sur l?eau s?intéresse à la recherche de certaines substances au titre de leurs propriétés PE Concernant l?eau destinée à la consommation humaine, la directive (UE) n° 2020/2184 du 16 dé- cembre 2020 sur la qualité de l?eau de consommation humaine établit des mécanismes de vigilance de certaines substances en raison de leurs propriétés de perturbation endocrinienne. Elle renforce le mécanisme de vigilance existant pour prendre en compte le paramètre de la per- turbation endocrinienne. Concernant la protection et la restauration des masses d?eau, la directive cadre sur l?eau (DCE) n° 2000/660 du 23 octobre 2020 définit des règles d?évaluation de l?état des eaux. Cette directive exige des Etats membres d?atteindre un bon état des eaux, en réduisant ou en supprimant les émissions de certaines substances, sur la base de normes de qualité environnementales (NQE) fixant des concentrations maximales, qui peuvent inclure des perturbateurs endocriniens. Une étude est en cours pour prendre en compte les effets PE dans la construction des NQE122. Ces normes de qualité environnementale ont été définies successivement par les directives-filles de la directive cadre, avec la directive 2008/105/CE puis la directive 2013/39/UE. Une nouvelle révision est en cours de discussion, la Commission ayant formulé en 2022 une pro- position de directive mettant à jour les substances prioritaires pour le sol et les milieux aquatiques, incluant davantage de pesticides et de PFAS, proposition soutenue par le Parlement européen. La version de compromis proposée par le Conseil européen en décembre 2023 revoit toutefois ces ambitions à la baisse, notamment sur les niveaux de pesticides, et propose de décaler l?entrée en vigueur des règles sur les nouvelles substances à 2039. Le règlement sur la sécurité des jouets s?apprête à être retouché pour inclure une approche générique des perturbateurs endocriniens La directive (UE) n° 2009/48 du 18 juin 2009 relative à la sécurité des jouets123 indique que les jouets, y compris les produits chimiques qu?ils contiennent, ne doivent pas mettre en danger la sécurité ou la santé. 121 Vote du 22 novembre 2023 refusant la proposition de règlement de la Commission concernant une utilisation des produits phytopharmaceutiques compatible avec le développement durable, qui aurait révisé la directive 2019/128/CE sur l?utilisation des pesticides compatible avec le développement durable 122 Etude Ineris 203222 - 2719249 du 30 novembre 2021 123 Transposée en France par le Décret n°2010-166 du 22 février 2010 sur la sécurité des jouets PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 105/203 La directive interdit ainsi les substances classées CMR au sens du règlement CLP dans la compo- sition des jouets124. La directive énumère par ailleurs une liste de substances parfumantes allergi- santes interdites. En revanche, la directive n?accorde pas de traitement particulier aux perturbateurs endocriniens en tant que tels. Ce texte est toutefois en révision, le Parlement européen ayant voté en mars 2024 en faveur d?une proposition de la Commission d?étendre l?interdiction actuelle des substances pro- hibées dans les jouets aux perturbateurs endocriniens et aux PFAS. Cette préoccupation est liée à des signalements importants de jouets non conformes sur le marché européen, dont une part considérable provient de produits commandés en ligne, en particulier ceux fabriqués hors de l?Union européenne. Il existe déjà une restriction spécifique pour le bisphénol A, avec une limite maximale de migration dans les jouets, qui a été revue à la baisse à 0,04 mg/l par le règlement délégué (UE) n° 2017/898 du 24 mai 2017. Les articles de puériculture relèvent d?un autre texte, la directive sécurité générale des produits 2001/95/CE125 du 3 décembre 2001, qui fixe des règles de sécurité sans prise en compte particu- lière des perturbateurs endocriniens. Cette directive a été abrogée et remplacée par la directive (UE) 2023/988 du 10 mai 2023 relatif à la sécurité générale des produits, qui entre en vigueur en décembre 2024. Le nouveau texte introduit des exigences vis-à-vis des places de marché en ligne, tenues de désigner un point de contact unique avec les autorités de surveillance du marché des Etats membres pour la sécurité des produits, ainsi qu?un point de contact unique pour communi- quer avec les consommateurs sur la sécurité des produits. Le règlement sur les cosmétiques conserve une approche au cas par cas, malgré des efforts récents pris pour restreindre des substances au titre de leurs propriétés PE Une approche au cas par cas pour laquelle aucune mise à jour n?est annoncée Le règlement (UE) n° 1223/2009 du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques concerne « toute substance ou tout mélange destiné à être mis en contact avec les parties superficielles du corps humain (épiderme, systèmes pileux et capillaire, ongles, lèvres, organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses buccales en vue, exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d?en modifier l?aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles ». Il s?agit essentiellement de parfumerie, de produits d?hygiène et de toilette, de produits capillaires, de produits de beauté et de soin. Le règlement pose des règles de sécurité concernent la composition des cosmétiques, leur fabri- cation, les informations affichées et l?étiquetage, l?évaluation des risques, les conditions d?utilisation, les substances interdites ou la concentration maximale autorisée. Une substance considérée comme nocive pourra être traitée de 2 manières : substance interdite (liste négative de 1328 substances, classées dans l?annexe 2) ; substance réglementée : liste positive de 256 substances soumises à restriction (classées 124 Des exceptions existent, sous condition stricte, pour des parties distinctes et inaccessibles aux enfants, permettant par exemple l?insertion de piles. 125 Transposée en France par le décret n° 91-1292 du 20 décembre 1991 sur la prévention des risques résultant de l?usage des articles de puériculture PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 106/203 dans l?annexe 3), avec des listes supplémentaires spécifiques pour les colorants (annexe 4), les conservateurs (annexe 5) et les crèmes solaires (annexe 6) : dans ces annexes, seront indiqués pour chaque substance les concentrations maximales autorisées, les conditions d?emploi et les avertissements à indiquer sur l?emballage. Les listes sont révisées régulièrement par les instances européennes, sur la base des avis d?un comité d?experts indépendants, le Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs (CSSC), suivi d?une décision de la Commission européenne via la Comité technique européen des produits cosmétiques (COMCOS). Le règlement interdit par ailleurs l?utilisation des substances classées CMR par le règlement CLP, à quelques exceptions près : pour les substances CMR de catégorie 1A et 1B (les plus dangereuses), l?utilisation est interdite, sauf à remplir de nombreuses conditions cumulatives (conformité aux prescriptions de sécurité alimentaire, absence de substitution appropriée, usage particulier avec exposition déterminée, et jugé sûr par le CSSC) ; pour les substances CMR de catégorie 2, elles ne pourront être utilisées que si le CSSC les a jugées sûres pour une utilisation dans les produits cosmétiques. En France, la mise en oeuvre du règlement repose sur la DGCCRF pour la mission d?inspection, de contrôle et de surveillance du marché. Et sur l?Anses pour la surveillance des effets indésirables (en remplacement de l?ANSM depuis le 1er janvier 2024). Il n?y a pas d?autorisation de mise sur le marché, mais un dossier d?identification du produit à cons- tituer par la personne responsable, comprenant les informations sur les évaluations de sécurité et effets indésirables identifiés. Un suivi des effets indésirables graves devra également être effectué. En revanche, les perturbateurs endocriniens ne sont pas spécifiquement listés comme substances interdites, toutefois l?article 15.4 du règlement indique que : « Lorsque des critères convenus par la Communauté ou au niveau international pour l'identification des substances présentant des pro- priétés perturbant le système endocrinien sont disponibles, ou au plus tard le 11 janvier 2015, la Commission révise le présent règlement en ce qui concerne les substances présentant des pro- priétés perturbant le système endocrinien ». La Commission n?a toutefois pas tenu ce calendrier et le règlement n?a pas été mis à jour. Pour y remédier, dans le cadre de sa communication du 7 novembre 2018 pour limiter l?exposition aux perturbateurs endocriniens, suivie d?un bilan de qualité de la législation européenne, la Commission a lancé deux appels à données sur les cosmétiques : un groupe A, prioritaire, de 14 substances, lancé en mai 2019, ainsi qu?un groupe B, pour 14 autres substances, lancé en 2021. Le bilan qualité a permis une augmentation récente du nombre de substances restreintes en raison de leurs propriétés de perturbation endocrinienne Cet appel à données a permis la réalisation de nouvelles évaluations qui a conduit à renforcer les limitations existantes ou en créer de nouvelles, pour les substances concernées. La mission a cherché à identifier les substances restreintes dans les cosmétiques en raison d?effets de perturbation endocrinienne, et a dénombré 35 substances, sans prétention d?exhaustivité. Parmi celles-ci, figurent 21 substances présentes dans l?appel à données de 2018 qui sont signalées par une ou deux astérisques (respectivement groupe A et groupe B). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 107/203 Tableau 7 : Traitement des substances aux effets PE dans les cosmétiques Substance Fonction Statut (±)-1,7,7-trimethyl-3-[(4-methylphenyl)methylene] bicyclo[2.2.1]heptan-2-(4-MBC) Filtre UV Interdit (annexe 2) 2-ethylhexyl salicylate Filtre UV Limité (annexe 6) 2-ethylhexyl salicylate Filtre UV Limité (annexe 6) 3-benzylidène camphre Filtre UV Limité (annexe 6) 3-benzylidène camphre Filtre UV Limité (annexe 6) 4,4?-isopropylidènediphénol (BPA) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) 4-methylbenzylidene camphor * Filtre UV Interdit (annexe 2) Acetyl hexamethyl tetralin Agent masquant Limité (annexe 3) Acetylcedrene Agent parfumant Limité (annexe 3) Acide kojique * Eclaircissant Limité (annexe 3) Benzophenone * Absorbant UV Interdit (annexe 2) Benzophenone-3 * Filtre UV Limité (annexe 6) Benzyl salicylate * Filtre UV Limité (annexe 6) Butylated hydroxytoluene (BHT) * Agent parfumant Limité (annexe 3) Butylparaben ** Conservateur Interdit (annexe 2) butylphenyl methyl propanol/BMHCA ** Agent parfumant Interdit (annexe 2) Daidzein * Entretien de la peau Limité (annexe 3) Ethylhexyl methoxycinnamate(EHMC) / octylmethoxycinnamate (OMC)/octinoxate ** Filtre UV Limité (annexe 6) Ethylhexyl salicylate Filtre UV Limité (annexe 6) Ethylparaben Conservateur Limité (annexe 5) Genistein * Entretien de la peau Limité (annexe 3) Homosalate * Filtre UV Limité (annexe 6) Isoamyl p-methoxycinnamate Filtre UV Limité (annexe 6) Isobutyl 4-hydroxybenzoate; Isobutylparaben Conservateur Interdit (annexe 2) methylparaben ** Agent parfumant Limité (annexe 6) Octocrylene * Filtre UV Limité (annexe 6) Phtalate de bis(2-éthylhexyle) (DEHP) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) Phtalate de dibutyle (DBP) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) Phtalate de di-n-pentyle (DnPP) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) Phthalate de butyle benzyle (BBP) Agent plastifiant Interdit (annexe 2) Propylparaben * Conservateur Limité (annexe 6) Resorcinol * Colorant Limité (annexe 3) Triclocarban * Conservateur Interdit (annexe 2) Triclosan * Conservateur Limité (annexe 5) Trimethylbenzoyl Diphenylphosphine oxide Entretien de la peau Limité (annexe 3) Note de lecture : les substances avec une astérisque correspondent à celles incluses dans le groupe A établi par la Commission en 2018, celles avec deux astérisques au groupe B. Les annexes renvoient au règlement n° 1123/ 2009. Site de la Commission européenne, retraitement IGAS-IGEDD PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 108/203 Parmi les 10 substances présentes dans l?appel à données du groupe B qui n?ont pas encore fait l?objet d?une limitation au sens du règlement cosmétiques, certaines sont soumises à des limitations au titre d?autres règlements, comme l?illustre ce tableau : Tableau 8 : Substances présentes dans le groupe B de l?appel à données de la Commission de 2018 en attente de réglementation dans le règlement cosmétiques Substance Fonction Statut Acide salicylique ** Entretien de la peau Non réglementé Benzophenone-1/BP-1 ** Filtre UV Non réglementé Benzophenone-2/BP-2 ** Filtre UV Non réglementé Benzophenone-4/BP-4 ** Filtre UV Non réglementé Benzophenone-5/BP-5 ** Filtre UV Non réglementé Cyclomethicone ** Emollient Limité (via CLP) Cyclopentasiloxane/decamethylcycl opentasiloxane/D5 ** Emollient Limité (Annexe XVII REACH) Deltamethrin ** Antimoustiq ue Non règlementé (Approuvé comme biocide, en cours de réévaluation) Tert-butylhydroxyanisole/Butylated hydroxyanisole/BHA ** Antioxydant Non réglementé Triphenyl phosphate ** Agent plastifiant Non réglementé Sans prétention d?exhaustivité, et à titre d?illustration, la mission a également identifié : 2 substances dont la présence est interdite dans les cosmétiques en raison de leur classement dans d?autres règlements : Substance Fonction Statut Benzotriazole Agent antimicrobien Limité (Annexe XIV REACH) Di-isobutyl phthalate (DIBP) Agent plastifiant Interdit (CLP - R1B) 4 substances présentes dans les cosmétiques, régulièrement identifiées dans la littérature scientifique pour leur effet de perturbateur endocrinien126 : Substance Fonction Statut Méthyléthylcétone (MEK) Agent parfumant Non réglementé (sous évaluation CORAP 2020- 22) Nitrophenol Colorant Non réglementé T-Butyl methyl ether (MTBE) Solvant Non réglementé Thiabendazole Agent antimicrobien Non réglementé (reconnu PE au titre du règlement biocide) 126 Le thiabendazole a été reconnu comme remplissant le critère de perturbation endocrinienne par l?ECHA au titre du règlement biocide ; le nitrophenol et le T-butyl methyl ether sont cités comme PE suspectés en page 27 du rapport de l?IPCP pour l?ONU sur les perturbateurs endocriniens de juillet 2017 ; le méthyléthylcétone, autre nom du butanone, est inclus dans le CoRAP 2020- 2022 au titre de ses propriétés de perturbation endocrinienne potentielles. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 109/203 A terme, le règlement cosmétiques devrait intégrer la nouvelle classification issue du règlement CLP, ce qui permettrait une approche de restriction plus globale, à la différence de l?approche au cas par cas actuelle. Le règlement sur les dispositifs médicaux est conçu pour inciter à la substitution Le règlement (UE) n° 2017/745 du 5 avril 2017 organise la certification des dispositifs médicaux. Il prévoit que la conception et la fabrication de ces dispositifs réduisent autant que possible les risques liés aux substances. A cet effet, il limite à une concentration en fraction massique de 0,1 % : les substances CMR de catégorie 1A ou 1B au sens du règlement CLP ; les substances possédant des propriétés de perturbation endocrinienne pour lesquelles il est scientifiquement prouvé qu'elles peuvent avoir des effets graves sur la santé humaine. Le règlement autorise une dérogation à cette concentration maximale, mais demande que celle-ci soit justifiée par plusieurs éléments : une analyse et une estimation de l?exposition potentielle du patient ou de l?utilisateur ; une analyse des substances de substitution possibles, y compris de la recherche indépendante et des avis scientifiques, et une analyse de la disponibilité des substitutions ; une argumentation expliquant pourquoi, si la solution de substitution est disponible ou si une modification de conception est réalisable, elle ne convient pas pour maintenir le fonctionnement du produit, notamment en prenant en compte les populations particulièrement vulnérables aux substances telles que les enfants ou femmes enceintes ; les orientations les plus récentes du comité scientifique concerné. Cette logique, plus restrictive que l?ancienne qui se contentait de demander d?évaluer le rapport entre bénéfice et risque, commence lentement à produire des effets chez les fabricants en faveur de produits de substitution, notamment avec la substitution des phtalates dans les tubulures ou les pochettes de sang. S?agissant des médicaments, les effets perturbateurs endocriniens ne sont pas interdits en tant que tels, dans la mesure où s?agit souvent de l?objectif recherché (oestrogènes, progestatifs ...). En revanche, l?agence européenne des médicaments coordonne un travail d?évaluation des exci- pients. Celui-ci avait été conduit en France par l?ANSM qui avait notamment procédé aux évalua- tions dans les excipients des phtalates, du methyl et du propyl-parabène, de l'acide borique et de l'hydroxyanisole butyle (BHA). Les règlements sur les matériaux de contact alimentaire comportent des approches disparates Un principe général d?inertie avec des règles particulières pour certains matériaux Le règlement (CE) n° 1935/2004 sur les matériaux de contact alimentaire du 27 octobre 2004127) porte sur les emballages et conditionnements, les récipients et ustensiles de cuisine, les 127 Le règlement sur les matériaux de contact alimentaire fixe des limites de migration des substances présentes dans les contenants vers le contenu, mais ne prend pas spécifiquement en compte les perturbateurs endocriniens, alors même que ces derniers peuvent avoir des effets à très faible dose. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 110/203 tétines et biberons, les matériaux, machines et matériels utilisés pour produire, stocker ou trans- porter des denrées alimentaires. Il pose un principe général d?inertie : les matériaux de contact doivent être suffisamment inertes pour ne pas relâcher dans les denrées alimentaires une quantité susceptible de présenter un dan- ger pour la santé humaine, d?entraîner une modification inacceptable de la composition des ali- ments ou d?altérer leurs caractères organoleptiques. Parmi les 17 catégories de matériau existant, il existe des règles spécifiques d'inertie pour certains (matières plastiques, céramique, pellicule de cellulose régénérée et partiellement pour les caout- choucs, monomères des vernis époxydiques, matériaux actifs et intelligents) précisées dans d?autres règlements et directives. Les règles relatives à ces matériaux comportent chacune des « listes positives » de substances autorisées, détaillant les substances autorisées avec des règles spécifiques de migration, à l?instar du règlement UE n° 10/2011 sur les matériaux et objets en matière plastique de contact alimentaire. L'autorisation d'une substance est délivrée par la Com- mission après avis favorable de l?EFSA. Lorsqu?il n?existe pas d?harmonisation pour un matériau au niveau européen, les listes de subs- tances autorisées relèvent du niveau national. Dans ce cas, pour la France, l?autorisation est déli- vrée par la DGCCRF après évaluation de l?Anses. Malgré l?absence d?une prise en compte générique des perturbateurs endocriniens, des restrictions spécifiques ont été prises pour le bisphénol A et certains phtalates La réglementation relative au contact alimentaire ne réserve pas de règle particulière aux pertur- bateurs endocriniens, traités au cas par cas. A titre d?exemple, des valeurs limites de migration pour les phtalates sont fixées dans le règlement sur les matériaux de contact en matière plastique précités, qui viennent d?être renforcées par le règlement (UE) n° 2023/1442 du 11 juillet 2023 mo- difiant à la baisse les limites de migration spécifique pour le DBP, le BBP, le DEHP, le DINP et le DIDP. L?approche par valeur limite de migration a toutefois été critiquée dans la mesure où une limitation de la quantité de substance n?est pas pertinente pour les effets à faible dose ou les relations non- monotones observées pour certains perturbateurs endocriniens. Il existe toutefois des interdictions complètes s?agissant du bisphénol A, prises à l?issue de l?initia- tive française de l?interdire dans les biberons en 2010 puis dans les matériaux de contact alimen- taire pour enfant en 2012128. Des décisions similaires ont été prises au niveau européen, avec une interdiction du BPA dans les biberons (règlement (UE) n° 321/2011 du 1er avril 2011) suivie d?une limitation de la migration maximale de BPA autorisée dans les contenants alimentaires pour enfant (règlement (UE) n° 2018/213 du 12 février 2018 limitant la migration à 0,05 mg par kilo de denrée alimentaire, un niveau 10 fois inférieur à la norme antérieure). Un avis de l?EFSA de 2023 sur la réévaluation des risques posés par le bisphénol A dans les den- rées alimentaires129 a revu à la baisse son évaluation de dose journalière tolérable, en la fixant à un niveau de 0,2 nanogramme par kilo, soit 20.000 fois moins que la dose fixée dans sa précédente évaluation à 4 microgrammes par kilo. 128 Loi n° 2010-729 du 30 juin 2010 modifiée par la loi n°2012-1442 du 24 décembre 2012 129 The EFSA Journal 2023 ; 21(4):6857 : « Re?evaluation of the risks to public health related to the presence of bisphenol A (BPA) in foodstuffs » PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 111/203 A l?issue de cette évaluation, la Commission a formulé en février 2024 une proposition de règlement délégué, actuellement en discussion, pour une interdiction complète du bisphénol A dans tous les contenants alimentaires, et ce quelle que soit la population concernée. Cette proposition de la Commission ne s?étend toutefois pas aux autres types de bisphénols, tels que le bisphénols F ou S, qui sont régulièrement substitués au bisphénol A, mais pour lesquels les études toxicologiques sont moins nombreuses. Enfin, un accord a été trouvé par le Parlement et le Conseil en mars 2024 pour interdire les PFAS (dont certains ont des effets de perturbation endocrinienne) dans les emballages alimentaires de contact à partir de 2026. Les directives sur la sécurité des travailleurs n?ont pas encore classé les substances PE parmi celles qui nécessitent une protection maximale L?UE définit des exigences minimales de conditions de travail, qui peuvent être complétées par les Etats membres. Le texte de référence est la directive 89/391/CEE du 12 juin 1989 sur la sécurité et la santé des travailleurs, qui pose les principes généraux de prévention des risques profession- nels et de protection de la sécurité et la santé des travailleurs. Concernant l?exposition aux substances dangereuses, deux textes s?appliquent : la directive 98/24/CE sur les agents chimiques sur le lieu de travail : ? elle contraint à réaliser une évaluation des risques et prendre toutes mesures de prévention pour supprimer les risques liés aux agents chimiques dangereux ou les réduire au minimum ; ? des directives ultérieures fixent des valeurs limites d?exposition professionnelles (VLEP) qui sont des niveaux de concentration en polluants dans l?atmosphère des lieux de travail à ne pas dépasser sur une période de référence et en deçà desquels le risque d?altération de la santé est négligeable à partir des connaissances scientifiques ; ces VLEP peuvent être indicatives ou contraignantes ; ? les Etats membres, sur cette base, fixent dans leur droit du travail leurs propres VLEP, qui peuvent être plus strictes que celles proposées au niveau européen. la directive 2004/37/CE sur les agents cancérogènes et mutagènes sur le lieu de travail : ? elle porte sur les agents CMR de classe 1A et 1B au sens du CLP ; et comporte des règles plus exigeantes que la directive 98/24/CE ; ? les employeurs sont tenus de restreindre l?utilisation d?un agent cancérigène ou mutagène en le remplaçant par une substance ou un procédé non ou moins dangereux ; ? si la substitution est impossible, l?employeur doit assurer l?utilisation de l?agent cancérigène dans un système clos ; à défaut, l?employeur doit réduire le niveau d?exposition au minimum ; ? la directive précise les mesures que l?employeur est tenu d?appliquer si un agent cancérogène ou mutagène est utilisé ; et prévoit par ailleurs la fixation de VLEP toutes contraignantes ; ? la directive a été révisée à plusieurs reprises récemment (2017, 2018, 2019, 2022), la dernière révision ayant ajouté les substances reprotoxiques ; ? en revanche, les perturbateurs endocriniens n?y figurent pas en tant que tels. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 112/203 La Commission envisage d?ajouter les perturbateurs endocriniens aux substances concernées par la directive 2004/37/CE, ce qui limiterait davantage l?exposition des travailleurs concernés. Le pro- jet a été validé à l'unanimité par le comité des représentants permanents du Conseil de l?UE, le 6 décembre 2023. La Commission va lancer une évaluation scientifique de l?ECHA d?ici à 2025 pour confirmer la per- tinence d?une intégration des perturbateurs endocriniens dans la directive 2004/37/CE au vu des risques posés, ce qui pourrait aboutir à un projet de directive entre 2028 et 2030. Annexe 3.1.2 Un bilan insuffisant et des perspectives d?évolution compromises Un manque de cohérence à combler entre les différentes réglementations Le manque de cohérence de la législation apparaît dans la présentation des différentes réglemen- tations applicables, qui suivent des logiques diverses. Cette question a été largement pointée et notamment dans la communication de 2018 de la Commission. De fait, ce manque de cohérence renvoie essentiellement à l?existence de : Différentes définitions des perturbateurs endocriniens : REACH ne les définit pas ; les règlements pesticides et biocides ont leur propre définition ; le CLP introduit finalement une nouvelle définition plus large qui a vocation à devenir transversale. Un manque de passerelles entre législations : la restriction d?une substance dans un règlement n?emporte pas sa restriction dans un autre, et les évaluations conduites au titre d?un règlement ne sont pas coordonnées avec celles des autres règlements. Une diversité dans la logique de gestion du risque : certains règlements adoptent une logique de danger (par principe, une substance reconnue perturbateur endocrinien est interdite, sur la base des connaissances scientifiques, à l?instar des règlements phytopharmaceutiques et biocides, bien qu?ils accordent des dérogations) tandis que d?autres retiennent une logique de risque (le danger sera jaugé avec les conditions d?exposition et les mesures de maîtrise du risque, comme dans REACH). Des différences dans les méthodes de test requises : peu de règlements comportent des tests obligatoires pour l?évaluation du caractère de perturbation endocrinienne, et ceux qui en contiennent sont insuffisants dans la mesure où ils ne recouvrent pas toutes les voies de perturbation endocrinienne. Un faible bilan des restrictions adoptées malgré des progrès récents Le croisement des différentes mesures de gestion de risque adoptées en raison d?effet de pertur- bation endocrinienne au titre des différents règlements fait apparaître un faible bilan d?ensemble, avec un total de 53 mesures. Tableau 9 : Substances faisant l?objet d?une mesure de limitation en raison de leur effet perturbateur endocrinien Phytopharmaceutiques Biocides Cosmétiques REACH Annexe XIV Annexe XVII 8 2 35 2 6 Retraitement IGAS-IGEDD PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 113/203 On relève cependant qu?un nombre important de ces mesures datent des dernières années (cf.su- pra), signe d?une meilleure efficacité des règlements sectoriels. La précision des critères de perturbation endocrinienne a en effet entraîné une série de restrictions concernant les pesticides, et dans une moindre de mesures, des biocides, détaillées supra. De même, le bilan qualité lancé sur les cosmétiques a produit des effets encourageants. De plus, les restrictions spécifiques concernant le bisphénol A et certains phtalates ont vu leur seuil de concen- tration autorisée s?abaisser pour les matériaux de contact alimentaire. Plusieurs règlements devraient prochainement être amendés pour intégrer une approche géné- rique des perturbateurs endocriniens : à court terme pour les jouets, et à moyen terme pour les travailleurs professionnels. Enfin et surtout, la réforme du CLP ouvre la voie d?une définition horizontale des perturbateurs endocriniens au sein de la législation européenne, correspondant à une demande portée par la France. Une vigilance subsiste cependant sur les documents d?accompagnement (Guidance do- cuments) du nouveau règlement CLP, en train d?être définis, pour spécifier les tests requis pour établir la propriété endocrinienne130. Un avenir compromis depuis le renoncement à la révision de REACH Le règlement REACH fait l?objet de nombreuses limites structurelles, exposées supra, et n?est guère adapté à la prise en compte des propriétés de perturbation endocrinienne. La refonte de ce règlement était attendue et annoncée par la Commission dans son « Pacte vert » au titre de l?objectif « Zéro pollution ». Une réforme ambitieuse était envisagée pour remédier aux faiblesses de la réglementation (renforcement de la qualité des dossiers d?enregistrement, procé- dure d?évaluation simplifiée, évaluation par familles, prise en compte des faibles tonnages, évalua- tion des effets cocktails, amélioration des contrôles de conformité, ...). De façon inattendue, ce texte qui devait être présenté en 2022 a été reporté, suscitant de nom- breuses inquiétudes. Une lettre fut adressée par les ministres de l?environnement de 8 pays, dont la France et l?Allemagne, demandant à la Commission de tenir ses promesses. Reportée fin 2023, la réforme a fini par disparaître de l?agenda législatif, la raison invoquée étant la préservation de la compétitivité des entreprises. Les discussions de la mission avec les direc- tions concernées de la Commission rapportent une mobilisation de l?industrie chimique, arguant du coût élevé que représenterait un renforcement des exigences d?évaluation, dans un contexte éco- nomique difficile marqué par l?inflation. En l?absence de publication des études d?impact, il est impossible de chiffrer le coût qu?aurait re- présenté un renforcement des exigences d?enregistrement pour les entreprises, et de le rapporter aux bénéfices sanitaire et environnemental attendus. A titre de comparaison, dans sa propre évaluation du règlement REACH actuel131, la Commission avait estimé que les coûts d?enregistrement avaient occasionné 2,6 Mds ¤ de dépenses pour les 130 A cet égard, la limitation progressive des tests animaux représente une difficulté pour établir la preuve d?une perturbation endocrinienne, bien que la recherche travaille sur le développement d?autres modalités de tests, à l?instar des tests sur des cellules de placenta 131 Rapport général de la Commission sur le fonctionnement du règlement REACH, 5 mars 2018, dans le cadre de l?évaluation REFIT PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 114/203 entreprises, mais que la mise en place de la législation avait permis des avantages potentiels pour la santé et l?environnement estimés à 100 Mds ¤ sur 30 ans. Le report sine die de cette refonte représente donc un recul considérable en termes de protection de l?exposition aux produits chimiques et notamment aux perturbateurs endocriniens. Annexe 3.2. La SNPE3 peut renforcer les réglementations européennes et nationales Annexe 3.2.1 Au niveau européen, un rôle moteur de la France à conforter La France doit soutenir un agenda exigeant dans la prochaine mandature Au vu de la place centrale de la réglementation européenne dans la lutte contre l?exposition aux perturbateurs endocriniens, il est essentiel que la France porte des positions fortes en faveur d?une poursuite des efforts engagés depuis la stratégie européenne de 2018. Ce rôle a été joué par le passé, notamment en soutenant la refonte du CLP, qui était mentionnée dans la SNPE2 (action 32). De même, le vote de la loi AGEC132 au niveau national, qui apporte des obligations d?information sur la présence de perturbateurs endocriniens (cf.infra), a contribué à affermir la position française au niveau européen. Plus généralement, le travail d?évaluation de l?Anses, très investie sur le sujet des perturbateurs endocriniens, contribue à faire avancer les dossiers sur la scène européenne. A la date de rédaction du rapport, la composition de la 10ème législature du Parlement européen, amenée à siéger de 2024 à 2029, est inconnue, et ne permet pas de préjuger du programme que suivra la Commission. Dans ce contexte, il est d?autant plus important que la France, en accord avec les pays alliés sur la question, joue un rôle moteur dans l?avancement de l?agenda, en apportant son soutien à : la refonte rapide et ambitieuse du règlement REACH (cf.supra) ; la mise en oeuvre du nouveau règlement CLP (en veillant à la définition des tests retenus dans les documents d?accompagnement, et en soutenant la mise à jour des règlements sectoriels pour y inclure la définition des perturbateurs endocriniens au sens du CLP) ; l?actualisation de la directive n° 2004/37/C sur les agents chimiques dangereux pour y inclure les perturbateurs endocriniens ; la restriction universelle des PFAS (actuellement en cours d?évaluation sous REACH)133 ; l?inscription des PE dans le système général harmonisé de classification et d?étiquetage des produits chimiques des Nations-Unies. Une absence d?autonomie nationale malgré des dérogations, notamment sur les pesticides La régulation des produits chimiques au niveau européen s?inscrit dans une logique de marché intérieur : il s?agit de favoriser la circulation des marchandises pour éviter toute entrave au com- merce. C?est pourquoi, de façon générale, la réglementation européenne laisse peu de marge de 132 Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire, dite « AGEC » 133 Restriction universelle des PFAS, proposée par l?ECHA le 7 février 2023, sur une initiative de l?Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark, la Norvège et la Suède PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 115/203 manoeuvre aux Etats membres. Cette situation crée un paradoxe : d?un côté, le droit européen impose un certain niveau d?exigence, notamment envers les Etats membres qui ne disposaient pas de standards de protection de la santé et de l?environnement ; de l?autre, il rend difficile une dé- marche plus volontariste des Etats qui le souhaiteraient. Ainsi, une initiative nationale de réglementation d?une substance, qui s?effectue sans coordination européenne, risque de faire l?objet d?un contentieux et d?entraîner une condamnation de l?Etat en question. Cette problématique a été illustrée dans différentes affaires, par exemple lorsque l?ANSM s?est vu reprocher en 2019 par la Commission européenne134 d?avoir exigé d?apposer une mise en garde contre-indiquant l?usage sur le siège des enfants de lingettes contenant du phénoxyéthanol. Pour autant, il serait erroné de conclure que le droit européen empêche toute forme d?action des Etats membres destinée à renforcer la protection de la santé et de l?environnement d?une exposition chimique dans son droit national. De fait, chaque règlement dispose d?une logique propre, qui per- met parfois des exceptions sous certaines conditions. Schématiquement, on peut distinguer le droit relatif au marché intérieur, qui autorise des déroga- tions uniquement sous condition stricte, et le droit du travail européen, qui, à l?inverse, définit un standard minimal qui permet aux Etats membres de disposer de législations plus restrictives. L?analyse de ces différentes logiques permet d?illustrer la marge de manoeuvre des Etats membres, variable selon les réglementations. Le règlement REACH Le règlement REACH n° 1907/2006 ne comporte pas de dérogation : il énonce dans son deuxième considérant que « le fonctionnement du marché intérieur ne peut être assuré que s?il n?existe pas (...) de différences significatives entre les exigences applicables aux substances ». En pratique, dans les rares situations où les Etats adoptent des réglementations nationales plus restrictives relevant du domaine de REACH, ils sont tenus de déposer rapidement un dossier de restriction de cette substance auprès de l?ECHA. L?article 69.4 de REACH dispose ainsi que « Si un État membre estime que la fabrication, la mise sur le marché ou l'utilisation d'une substance, telle quelle ou contenue dans un mélange ou un article, entraîne pour la santé humaine ou l'environnement un risque qui n'est pas valablement maîtrisé et qui nécessite une action, il notifie à l'Agence qu'il propose d'élaborer un dossier (...) ». C?est la procédure qu?a suivi le Danemark en 2020 en prenant l?initiative d?interdire les PFAS dans les mousses anti-incendie des pompiers, et en déposant en même temps un dossier de restriction auprès de l?ECHA. Après évaluation, l?ECHA a rendu en juin 2023 des conclusions recommandant effectivement de placer ces substances sous restriction. Le règlement sur les phytopharmaceutiques accorde une marge de manoeuvre aux agences nationales, confortée récemment par la CJUE Le règlement sur les phytopharmaceutiques n° 1007/2009 vise dans son 9ème considérant à « éta- blir des règles harmonisées pour l?approbation des substances actives et la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, y compris des règles concernant la reconnaissance mutuelle des autorisations et le commerce parallèle ». 134 Lettre référencée (2019)7308531 au directeur général de l?ANSM du directeur de l?unité en charge des produits cosmétiques au sein de la DG GROW (marché intérieur, industrie, entreprenariat et PME) du 27 novembre 2019 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 116/203 Pour garantir la liberté de circulation des marchandises, le principe de reconnaissance mutuelle repose sur une division géographique en trois zones présentant des conditions agricoles, phytosa- nitaires et environnementales (y compris climatiques) comparables (cf.supra). La reconnaissance mutuelle est tempérée au 29ème considérant du règlement qui dispose que : « Toutefois, des circonstances environnementales ou agricoles propres au territoire d?un ou de plusieurs États membres pourraient nécessiter que, sur demande, les États membres recon- naissent ou modifient une autorisation délivrée par un autre État membre, ou refusent d?autoriser le produit phytopharmaceutique sur leur territoire, si des circonstance agricoles ou environnemen- tales particulières le justifient ou si le niveau élevé de protection de la santé tant humaine qu?ani- male et de l?environnement prévu dans le présent règlement ne peut être assuré. » Ce dernier considérant précise que « Des conditions appropriées devraient également pouvoir être imposées au regard des objectifs définis dans le plan d?action national », ce qui renvoie aux plans adoptés conformément à la directive 2009/128/CE du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d?action communautaire pour parvenir à une utilisation durable des pesticides (pour la France, il s?agit du plan Ecophyto). Le règlement sur les phytopharmaceutiques aménage donc une marge de manoeuvre aux Etats membres, mais qui reste circonscrite. Elle opère notamment dans les situations d?urgence, détail- lées aux articles 69 à 71 du règlement en cas de « risque grave pour la santé humaine ou animale ou l?environnement », permettant aux Etats membres, en cas d?inaction de la Commission saisie officiellement, de « prendre des mesures conservatoires provisoires ». La Commission examine ces mesures sous un mois pour en décider le maintien ou non. De façon plus générale, cette marge de manoeuvre permet de retirer un produit du marché national ou refuser un produit contenant une substance approuvée au niveau européen, ce que rappelait le rapport d?inspection conjoint de 2017 sur les produits phytopharmaceutiques 135 : « les Etats membres peuvent à tout moment retirer du marché des produits si les exigences qui ont conduit à son autorisation ne sont plus réunies, notamment s?il est démontré sur le fondement des méthodes d?évaluation acceptées par l?Autorité européenne de sécurité des aliments (l?Efsa) que le produit a un effet nocif immédiat ou différé, direct ou indirect (via l?eau, les aliments, l?air) sur la santé hu- maine ou animale ou sur les eaux souterraines, ou s?il a un effet inacceptable pour l?environnement (article 44 du règlement). Enfin, l?article 36 du règlement 1107/2009 peut constituer une base juri- dique pour refuser sur le territoire national l?autorisation d?un produit contenant une substance ac- tive approuvée au niveau européen, mais ceci n?est possible qu?« en raison de caractéristiques environnementales ou agricoles » de l?État concerné. » Il convient de noter qu?une jurisprudence récente de la Cour de justice de l?Union Européenne (CJUE) est venue conforter la portée de cet article 36, dans deux arrêts de 2024. La CJUE interprète l?article 36 comme signifiant que, lors de l?autorisation de mise sur le marché, un Etat membre peut « s?écarter de l?évaluation scientifique des risques » de l?Etat membre rap- porteur pour la zone, « notamment lorsqu?il dispose de données scientifiques ou techniques plus fiables », dont le premier Etat membre « n?a pas tenu compte », s?il identifie « un risque inaccep- table pour la santé et l?environnement »136. En l?espèce, l?agence néerlandaise n?avait pas tenu compte des dernières évaluations s?agissant de 2 pesticides. Dans un autre arrêt du même jour137 la Cour applique ce raisonnement aux effets de perturbation endocrinienne : « lorsque l?autorité compétente d?un État membre, responsable de l?examen d?une 135 Rapport CGEDD ? IGAS ? CGAAER sur l?utilisation des produits phytopharmaceutiques de 2017 ? IGAS n° 2017-124R 136 Arrêt de la CJUE du 25 avril 2024, ECLI:EU:C:2024:350 137 Arrêt de la CJUE du 25 avril 2024, ECLI:EU:C:2023:717 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 117/203 demande d?autorisation dans cet État membre d?un produit phytopharmaceutique, dispose d?infor- mations pertinentes et fiables, fondées sur les connaissances scientifiques ou techniques actuelles (c?est-à-dire les plus récentes), quelle que soit la source de ces informations, qui indiquent qu?une substance active contenue dans le produit en cause est susceptible de perturber le système endo- crinien, cette autorité doit tenir compte du risque d?effets nocifs que ce produit est susceptible d?avoir, évaluer ce risque et prendre une décision appropriée sur cette demande. » Le règlement sur les biocides aménage une dérogation pour la protection de la santé humaine et environnementale Le règlement biocides n° 528/2012 vise dans son 3ème considérant à « supprimer, autant que possible, les obstacles au commerce des produits biocides ». Il dispose toutefois au 43ème considérant que « des considérations liées à l?ordre public ou à la sécurité publique, à la protection de l?environnement et de la santé humaine et animale, à la protection des trésors nationaux et à l?absence d?organismes cibles pourraient justifier, après accord avec le demandeur, le refus d?un État membre d?accorder une autorisation ou sa décision d?adapter les conditions de l?autorisation». C?est l?article 37 du règlement qui précise les conditions de cette exception : un Etat membre peut déroger à la reconnaissance mutuelle d?un produit biocide en refusant ou en adaptant les conditions d?une autorisation, et ce notamment pour la « protection de la santé et de la vie humaines, particulièrement des groupes vulnérables de la population, ainsi que de la santé et de la vie animales ou végétales ». L?Etat membre communique ses raisons aux demandeurs et essaie de parvenir à un accord. A défaut, l?Etat membre informe la Commission qui peut saisir l?ECHA pour avis ou adopter une décision sur la dérogation. Le règlement sur les matériaux de contact alimentaire prévoit une procédure de sauvegarde en cas de danger pour la santé humaine Le règlement sur les matériaux de contact alimentaire n° 1935/2004 rappelle dans son 13ème considérant que « les différences entre les dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales (...) sont susceptibles d?entraver la libre circulation de ces matériaux et objets, créant des conditions de concurrence inégale et déloyale ». Il prévoit néanmoins dans son article 18 une procédure de sauvegarde, permettant à un Etat membre de suspendre ou restreindre provisoirement une substance en raison de nouvelles données indiquant que l?emploi d?un matériau ou d?un objet « présente un danger pour la santé humaine ». Une telle décision doit immédiatement être notifiée à la Commission, qui rend un avis. Le règlement sur les cosmétiques dispose d?une clause de sauvegarde mais qui n?a qu?une faible portée Le règlement sur les cosmétiques n° 1223/2009 « harmonise de manière exhaustive les règles en vigueur dans la Communauté afin d'établir un marché intérieur des produits cosmétiques » (4ème considérant). Il rappelle dans son article 9 que « Les États membres ne refusent pas, n'interdisent pas et ne restreignent pas, pour des raisons concernant les exigences contenues dans le présent règlement, la mise à disposition sur le marché des produits cosmétiques qui répondent aux prescriptions du présent règlement ». Le règlement n?accorde donc pas de possibilité de dérogation, à une exception près, très encadrée : il s?agit de la clause de de sauvegarde, prévue à l?article 27. Celui-ci prévoit que « lorsqu'une autorité compétente constate ou a des motifs raisonnables de craindre qu'un ou plusieurs produits cosmétiques mis à disposition sur le marché présentent ou pourraient présenter un risque grave pour la santé humaine, elle prend toutes les mesures PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 118/203 provisoires appropriées pour assurer que le ou les produits concernés sont retirés, rappelés ou que leur disponibilité est restreinte d'une autre manière. » La Commission a toutefois rappelé que cette clause de sauvegarde « ne vise que des mesures individuelles concernant des produits cosmétiques mis à disposition sur le marché, et non des mesures de portée générale qui s?appliquent à une catégorie de produits contenant une certaine substance », ce qui affaiblit considérablement sa portée.138 Le droit du travail laisse place à l?initiative nationale sur la perturbation endocrinienne Le droit du travail européen, régulé par directive (cf.supra), définit un « niveau de protection mini- mal » et permet aux Etat membres d?avoir des règles plus protectrices. Il est ainsi possible de fixer des valeurs limites d?exposition professionnelle (VLEP) plus exigeantes dans le droit national que celles définies en droit européen. La SNPE2 prévoyait de revoir les VLEP des substances aux effets PE dans le droit national, mais cette action n?a pas été finalisée (action 39139). A l?heure actuelle, le droit du travail européen ne considère pas encore que l?exposition aux pertur- bateurs endocriniens des travailleurs nécessite des mesures de protection aussi strictes que l?ex- position aux substances CMR. Les perturbateurs endocriniens sont donc couverts par la directive n° 98/24/CE sur les agents chimiques sur le lieu de travail, mais pas par la directive n° 2004/37/CE sur les agents cancérogènes et mutagènes, qui est plus protectrice. Un accord de principe a été trouvé sur le sujet mais ne devrait pas pouvoir s?appliquer avant 2030 (cf.supra). La Belgique a fait le choix d?anticiper cette évolution dans son code du travail, qui requiert désor- mais les mêmes mesures de protection pour les perturbateurs endocriniens que pour les subs- tances CMR, choix cohérent avec la mise en place de la stratégie sur les perturbateurs endocri- niens du gouvernement belge (NAPED). Ainsi, la mission propose d?accorder, dans le code du travail français, la même protection des tra- vailleurs pour les perturbateurs endocriniens que celle existante pour les substances CMR. Une telle mesure concernerait un large panel de travailleurs. L?Institut national de recherche et de sécurité (INRS) avait détaillé les sources d?exposition professionnelle et établi une liste de 76 pro- fessions concernant l?industrie. L?INRS relevait que les travailleurs peuvent être exposés à des perturbateurs endocriniens lors notamment de : la fabrication et de l?utilisation de matières premières plastifiants et monomères dans la plasturgie, ou de solvants dans l?industrie chimique ; la production et la mise en oeuvre de divers produits contenant des perturbateurs endocriniens : peintures, colles, vernis, essences, détergents, pesticides, produits cosmétiques et pharmaceutiques, textiles, emballages ; la manipulation de déchets ou de sous-produits générés par certains procédés : émissions lors de l?épandage routier, nettoyage de fours et de tuyauteries, démantèlement d?anciens transformateurs électriques. 138 Lettre référencée (2019)7308531 au directeur général de l?ANSM du directeur de l?unité en charge des produits cosmétiques au sein de la DG GROW (marché intérieur, industrie, entreprenariat et PME) du 27 novembre 2019 139 En 2022, l?Anses a rendu 2 avis pour proposer des VLEP s?agissant du méthyl tert-butyl éther (MTBE) et de l?éthyl tert-butyl éther (ETBE) PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 119/203 Tableau 10 : Activités professionnelles concernées par l?exposition professionnelle aux perturbateurs endocriniens, par nature de substance Principales activités concernées Catégories de produits Exemples de perturbateurs endocriniens Agroalimentaire Agents conservateurs, anti- oxydants, parfums? Hydroxytoluène butylé (BHT), hydroxyanisole butylé (BHA), méthylparabène? Cosmétiques Agents anti-UV, parfums? 2-Ethyl-hexyl-4-méthoxycinnamate, méthylsalicylate? Plasturgie et caoutchouc Plastifiants, monomères, retardateurs de flamme? Bisphénol A, résorcinol, phtalate de diéthyle (DEP), naphtalène? . Energie Additifs pour l?essence Méthyl tert-butyl éther (MTBE), éthyl tert- butyl éther (ETBE)? Textile et ameublement Retardateurs de flamme Chloroalcanes paraffinés, composés perfluorés? Chimie (peintures, encres, vernis, etc.) Solvants, biocides, agents fixateurs? Méthyl p-Hydroxybenzoate, acide borique, perchloroéthylène, octaméthylcyclotétrasiloxane? Bâtiments et travaux publics (dalles, enduits, peintures, etc.) Retardateurs de flamme, solvants? Phtalate de butyle et de benzyle (BBP), polybromodiphényléthers (PBDE)? Commerce Additifs révélateurs (tickets de caisse) Bisphénol A, bisphénol S? Entretien espaces verts Produits phytosanitaires (fongicides, herbicides) Deltaméthrine, terbutryn? Nettoyage industriel Détergents Nonylphenol? Traitement des déchets Retardateurs de flamme Polychlorobiphényles (PCB), polybromodiphényléthers (PBDE)? Source : INRS PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 120/203 Annexe 3.2.2 Au niveau national, des initiatives intéressantes mais qui doivent faire leurs preuves L?information du consommateur visée par la loi AGEC fait face à des difficultés techniques La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire se décline en plusieurs axes : sortie du plastique jetable, information des consommateurs, lutte contre le gas- pillage, action contre l?obsolescence programmée, qualité de la production. L?axe d?information du consommateur porte notamment sur la présence des perturbateurs endo- criniens dans les produits de consommation, information à mettre en ligne sur internet, en accès public et libre de droit. La loi introduit cette disposition par l?article L 5232-5 du code de la santé publique. Celui-ci impose à toute personne, mettant sur le marché français des produits à destination des consommateurs qui contiennent des perturbateurs endocriniens, de mettre à leur disposition des informations per- mettant de les identifier. Pour ce faire, l?Anses définit une liste de perturbateurs endocriniens avérés ou présumées (liste A). L?Anses définit également une liste de perturbateurs endocriniens suspectés (liste B) pour cer- taines catégories de produits présentant des risques d?exposition particuliers. La gamme des produits concernés par l?obligation d?information est vaste puisqu?il s?agit des subs- tances, des mélanges, et des articles (au sens du règlement REACH140) et des denrées alimen- taires. Les médicaments ne sont en revanche pas concernés. Trois arrêtés du 28 septembre 2023 précisent les modalités : La liste A des perturbateurs endocriniens avérés ou présumés y est publiée ; les substances retenues sont les 126 perturbateurs endocriniens recensés par l?Anses sur la liste candidate de REACH (SVHC) 141 , ainsi que 2 substances supplémentaires (mancozèbe et résorcinol). Une application est désignée pour mettre à disposition du public les informations, qui est Scan4Chem (application qui existe au niveau européen pour faciliter le « droit de savoir » prévu par l?article 33 du règlement REACH permettant aux consommateurs d?être informés, à leur demande, de la présence de SVHC à hauteur de 0,1% dans les articles). L?obligation d?information est détaillée : elle s'applique à l'ensemble constitué du produit et de son emballage primaire, dès lors que la concentration d'une substance présentant des propriétés de perturbation endocrinienne avérées ou présumées est supérieure à 0.1% en pourcentage massique, soit dans le produit concerné, soit dans son emballage. En dépit de l?avancée de principe que représente cette législation, plusieurs difficultés techniques en limitent l?impact : Scan4Chem a été conçu dans le cadre de REACH et sa base de données se limite aux « articles », l?application ne permet donc pas d?obtenir des informations sur les « mélanges » et « substances » (ainsi, un consommateur qui scanne un pot de peinture ou 140 Un article au sens de REACH est un objet auquel sont donnés, au cours du processus de fabrication, une forme, une surface ou un dessin particulier qui sont plus déterminant pour sa fonction que sa composition chimique. 141 Ce recensement présenté dans un avis du 5 mars 2021 est une extraction de la base de données publiques de la liste candidate de l?ECHA, et qui indique dans cette base, pour chaque substance, si des propriétés de perturbation endocrinienne ont été identifiées : https://echa.europa.eu/fr/candidate-list-table. Ces 126 substances correspondent aux 118 substances incluses dans la liste SVHC au motif d?une propriété de perturbation endocrinienne, ainsi que les 8 familles de substances identifiées dans cette liste. PUBLIÉ https://echa.europa.eu/fr/candidate-list-table Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 121/203 un pot de crème cosmétique ne peut trouver des informations que sur le contenant, ce qui peut s?avérer trompeur ou à tout le moins décevant) ; Pour la même raison, l?application ne répertorie que les produits SVHC, alors que les décrets d?application de la loi AGEC listent deux PE non SVHC, dont la présence ne pourra pas être signalée142. La diffusion de l?application Scan4Chem au niveau national est encore très limitée : en août 2023, elle avait été téléchargée par moins de 12.000 personnes en France143 (l?obligation d?information s?applique à partir d?avril 2024) ; En pratique, le recours à une application a ses limites : l?accès à l?information nécessite un téléphone portable, de disposer de réseau téléphonique (non systématique dans les magasins en sous-sol), et l?action de scanner un code-barres n?est pas pensée pour le commerce en ligne. Peu de données sont actuellement disponibles directement sur l?application, un temps est nécessaire pour que les entreprises mettent à disposition ces informations ainsi que leurs données de contact (à la date de rédaction du rapport, près de 15.000 fournisseurs européens étaient enregistrés dans la base de données d?Askreach, pour recevoir des requêtes et y répondre, dont 500 entreprises françaises) ; un travail de sensibilisation est mené par l?Ineris auprès des entreprises à ce sujet. Enfin, il est difficile pour les entreprises de connaître avec certitude la présence de SVHC dans leurs produits, en particulier lorsque ceux-ci sont fabriqués hors de l?Union européenne ou assemblés à partir de différents articles produits à l?étranger. L?élimination du plastique à la cantine prévue d?ici 2025 risque d?exiger des délais La loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l?équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire, dite EGalim, comporte plusieurs dimensions : soutien au revenu des agri- culteurs, restrictions d?utilisation de substances nocives, respect du bien-être animal ; lutte contre le gaspillage et réduction de l?utilisation du plastique dans le domaine alimentaire. La limitation du recours au plastique porte notamment sur les bouteilles en plastique dans la res- tauration scolaire, ainsi que les ustensiles en plastique à usage unique (pailles, couverts, assiettes, gobelets ?), interdictions toutes deux en vigueur depuis 2022. Plus spécifiquement, la loi EGalim interdit à partir de 2025 les contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en plastique dans la restauration des établissements scolaires, univer- sitaires et d?accueil des enfants de moins de 6 ans. Cette interdiction s?applique aussi dans les services de pédiatrie, d?obstétrique et de maternité, les centres périnataux de proximité ainsi que les autres services de santé maternelle et infantile, sauf dérogations. Dans les collectivités territo- riales de moins de 2?000 habitants, cette mesure peut être repoussée jusqu?à 2028. Ces dispositions avaient été introduits par amendement, appuyées par une campagne d?une as- sociation de parents d?élèves « Cantines sans plastique ». L?exposé des motifs de l?amendement précisait que « Les matières plastiques peuvent contenir des substances reconnues comme des perturbateurs endocriniens. La migration des molécules de synthèse (additifs dont les bisphénols) dans l?alimentation est favorisée par la chaleur, les aliments gras ou acides ; le phénomène est aggravé en cas d?usure des plastiques. » 142 Un ajout de ces deux substances est en discussion avec les responsables au niveau européen de la maintenance de cette application 143 Sur un total de 147.000 téléchargements en Europe ; ces chiffres sont issus du rapport d?impact : Impact-assessment- report_version-FINAL_19.11.2023.pdf (askreach.eu) PUBLIÉ https://www.askreach.eu/wp-content/uploads/2023/11/Impact-assessment-report_version-FINAL_19.11.2023.pdf https://www.askreach.eu/wp-content/uploads/2023/11/Impact-assessment-report_version-FINAL_19.11.2023.pdf Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 122/203 L?objectif visé par la loi est ambitieux et difficile, en raison du manque de préparation des acteurs de la restauration collective. Un très grand nombre de cantines scolaires opèrent en effet en liaison froide, où la nourriture est réchauffée dans des barquettes plastiques réfrigérées qui ont préparées dans une grande « cuisine centrale », extérieure au lieu de restauration. Ne plus réchauffer dans du plastique implique, pour les établissements concernés, un changement complet de fonctionnement, nécessitant une formation du personnel et des investissements con- séquents, pouvant se chiffrer en dizaines de milliers d?euros. Cet investissement peut cependant être amorti à terme en raison des économies d?achat de plastique, et présente un intérêt en termes de création d?emploi lié à une organisation relocalisée. L?offre de plastique « bio sourcé », dont la moindre nocivité n?a pourtant pas été prouvée144, ajoute de la confusion pour les établissements. Dans un avis de mars 2021145, le Conseil national de l?alimentation considérait que « Il n?y a pas, à date, de « contenant alternatif à usage unique » qui ne soit pas en plastique et qui puisse être utilisé en restauration collective. Ainsi, sauf évolution des technologies, la perspective de contenants à usage unique non plastiques n?existe pas. ». Le même avis ajoutait que « Les plastiques compostables et les plastiques dits « agrosourcés » ou « biosourcés » (par opposition aux plastiques initialement mis sur le marché et dits « pétrosour- cés ») doivent être considérés comme des plastiques au sens du droit européen, sauf s?ils ne sont constitués que de polymères naturels non chimiquement modifiés ». Un groupe de travail piloté par le ministère en charge de l?agriculture et de l?alimentation a été créé à ce sujet pour piloter les efforts de la restauration collective, et notamment les autres dispositions de la loi EGalim portant sur l?approvisionnement en nourriture bio. En l?état, les changements de pratique dans la restauration scolaire demandent un soutien fort des collectivités. S?agissant de la restauration universitaire et de la restauration dans les services de pédiatrie ou de maternité, les difficultés budgétaires représentent également un frein important au changement des pratiques. Enfin, l?absence de sanction assortie à cette obligation n?incite pas les collectivités ni les établisse- ments de santé concernés à se conformer à la loi en temps requis. L?effet de la loi sur la transparence pour les produits hygiéniques reste incertain Près de 3 milliards de produits de protection intime, dont près de 2 millions de culottes menstruelles, sont vendus chaque année en France. En mars 2016, le magazine « 60 millions de consommateurs »146 publiait une enquête révélant la présence dans les produits d?hygiène intime de résidus de substances toxiques : dioxine, glypho- sate, pesticides organochlorés et pyréthrinoïdes (insecticides). Cette publication a fait l?objet d?une forte médiatisation et conduit le gouvernement à solliciter un avis de l?Anses. L?Anses a rendu un avis le 4 juin 2018, qui inclut une enquête sur les pratiques d?utilisation des femmes et la perception des risques. L?Anses considère que le principal risque lié à l?utilisation des protections périodiques est celui du syndrome de choc toxique147. 144 Magazine de l?ADEME n°167 de Juillet-Août 2023 sur les produits biosourcés 145 Avis 87 du Conseil national de l?alimentation : « Substitution des contenants alimentaires composés de plastique en restauration collective », 10 mars 2021 146 60 millions de consommateurs, numéro n° 513, février 2016, sur la base d?essais conduits par l?Institut national de la consommation et le Service commun des laboratoires 147 Le syndrome de choc toxique est causé par un mauvais de protections périodiques internes (tampons et coupes menstruelles), et concerne selon l?Anses une vingtaine de cas par an PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 123/203 L?Anses souligne aussi que les matériaux de fabrication des produits intimes sont mal documentés. Pour les produits de protection externe, ils peuvent être divisés en 3 catégories : produits naturels d?origine dérivée du bois de nature cellulosique ; produits de nature synthétique de type polyolé- fines pour les serviettes et protège-slips ; et super-absorbant pour les serviettes. Pour les produits de protection interne (tampons), ils sont composés de produits d?origine naturelle dérivés du coton, qui subissent un traitement chimique, ainsi que de produits de nature synthétique de type polyolé- fines (qui sont les polymères les plus courants). L?Anses a également évalué les risques sanitaires liés aux substances identifiées dans l?enquête de 2016 précitée, ainsi que par une enquête complémentaire commandée l?Institut français du textile et de l?habillement, sur la base des valeurs toxicologiques de référence (VTR) et du niveau d?exposition des femmes au cours de leur vie. Pour l?Anses, aucun dépassement des seuils sani- taires n?est observé pour les différentes substances toxiques identifiées. Un certain nombre de substances identifiées dans ces protections intimes sont toutefois des per- turbateurs endocriniens suspectés148, pour lesquels l?Anses rappelle qu?il n?existe pas toujours des effets de relations dose-réponses clairement définis, permettant de fixer des VTR en dessous des- quelles on peut conclure à l?absence de risques. L?Anses recommande donc de minimiser autant que possible la présence de ces substances (ainsi que les substances CMR et les sensibilisants cutanés) et recommande la conduite d?études supplémentaires, qui sont très peu nombreuses en la matière. Afin d?améliorer la transparence sur la composition et les risques potentiels liés à l?utilisation des produits de protection intime, le décret n° 2023-1427 du 30 décembre 2023, entré en vigueur le 1er avril 2024, impose aux fabricants et responsables de la mise sur le marché de mentionner sur l?étiquetage et la notice d?utilisation des produits 3 catégories d?informations : la liste des composants (dans le cas des articles en textile, cette liste doit répondre à la législation européenne harmonisée imposant les règles d?affichage de la composition des produits textiles) et, pour chacun d?eux, le détail des substances et matériaux incorporés ; la mention des modalités et précautions d?utilisation (notamment les conditions d?hygiène et le temps de port maximal recommandé de 6 heures) ; et ce en caractères indélébiles, visibles, lisibles et compréhensibles ; les possibles effets indésirables (irritations, intolérances, allergies, microtraumatismes) ou plus graves tels que le syndrome de choc toxique menstruel. Le décret dispose que la composition du produit est présentée « sous la forme d'une liste compor- tant tous les composants qui sont présents et, pour chacun de ces composants, le détail des subs- tances et matériaux incorporés intentionnellement durant le processus de fabrication du produit fini ». Cette mention des « substances et matériaux incorporées intentionnellement » dans le « produit fini », si elle permet de signaler la présence de parfums volontairement ajoutés, laisse toutefois de côté les produits ajoutés non-intentionnellement, à l?instar des résidus de pesticides ou des subs- tances laissées par le blanchiment du coton ou le collage de la serviette. L?effet de cette mesure sur la diminution des substances toxiques et notamment des perturbateurs endocriniens dans les protections périodiques reste donc à ce stade incertain. 148 Parmi les substances identifiées par l?IFTH, plusieurs sont des perturbateurs endocriniens suspectés : Lilial®, HAP, DnOP, lindane, hexachlorobenzène, quintozène, dioxines et furanes, octaméthylcyclotétrasiloxane D4, décaméthylcyclopentasiloxane D5, Tétrahydrofurane, acide octanoïque, dioxyde de soufre, hydroxytoluène butylé, naphtalène PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 124/203 Une proposition de loi de restriction des PFAS en anticipation de règles européennes Le 4 avril 2024, l?Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi interdisant la présence des PFAS dans les vêtements, cosmétiques et farts (revêtements sous les skis) à partir de 2026, ainsi que les textiles à partir de 2030. La proposition de loi exclut toutefois de son champ d?application les ustensiles de cuisine, et notamment les poêles antiadhésives. Les PFAS, surnommés « polluants éternels », sont des molécules issues de l?industrie chimique, utilisées pour leurs propriétés antiadhésives, imperméabilisantes ou résistantes aux fortes chaleurs, et présentes dans de produits de consommation (emballages alimentaires, poêles, textiles, cosmétiques, mousses anti-incendie, batteries, peintures, pesticides...). Extrêmement persistantes dans l?environnement, les PFAS présentent également des risques graves pour la santé, et certains sont suspectés d?être perturbateurs endocriniens. A l?heure actuelle, 3 PFAS font l?objet d?une interdiction au niveau européen (PFOS, PFOA et PFHxS). Le Parlement européen a par ailleurs trouvé un accord avec le Conseil pour interdire les PFAS dans les emballages alimentaires à partir de 2026 (cf.supra). De plus, un dossier de restriction générale pour l?ensemble des PFAS est en cours d?examen par l?ECHA (cf.supra). Dans ce contexte, les initiatives nationales peuvent permettre de limiter l?exposition de la population, en avance de phase du droit européen, à l?image du Danemark qui a interdit les PFAS dans les mousses anti-incendie, les emballages alimentaires et plus récemment les textiles. La proposition de loi française comporte par ailleurs d?autres volets, notamment sur la surveillance dans l?eau potable (obligation de contrôle de la présence de PFAS par les autorités sanitaires), l?information du public (mise à disposition du public du recensement des sites émetteurs ou anciens émetteurs), et la création d?une redevance pollueur-payeur pour le rejet des PFAS dans l?eau. Dès lors, cette proposition de loi, qui devrait vraisemblablement être adoptée, va dans le sens de la logique de la SNPE2, bien que l?exclusion des ustensiles de cuisine en limite la portée. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 125/203 Annexe 4. Parangonnage international La France fait partie des pays fortement engagés sur la question des perturbateurs endocriniens. Une enquête d?opinion de 2022 indique que 88% des Français disent avoir entendu parler des perturbateurs endocriniens, signe d?une attention au sujet. Au sein des instances européennes, la France est également identifiée comme motrice en raison des positions soutenues, comme lors de la refonte du CLP, mais aussi du travail d?évaluation réalisé par l?Anses dans le cadre des évaluations au titre des règlements européens. L?existence de la SNPE2 contribue à affirmer l?engagement de la France sur le sujet. Plusieurs autres pays ont développé des stratégies sur le sujet, pour certains exclusivement sur les perturbateurs endocriniens, d?autres sur des sujets connexes, tels que les PFAS, ou les produits chimiques en général. Cette annexe livre un panorama sans vocation d?exhaustivité des stratégies existantes, sur la base d?entretiens conduits par la mission avec des représentants belges, danois, allemands et américains. Annexe 4.1. La Belgique a développé une stratégie inspirée de la SNPE2 et dispose d?un droit du travail considérant les perturbateurs endocriniens au même titre que les CMR La Belgique a mis en place depuis peu une stratégie nationale (NAPED149) s?appuyant sur certains éléments de la SNPE française. Cette stratégie, validée en 2022 à l?issue d?une consultation pu- blique, est prévue pour 5 ans, avec deux objectifs : diminuer l?exposition de la population et de l?environnement aux perturbateurs endocriniens, et augmenter la visibilité des actions prises par les autorités. Une enquête réalisée en 2020 auprès de la population a révélé une appropriation du sujet encore insuffisante : 49% n?en ont jamais entendu parler, 3 citoyens sur 4 pensent que les produits ne contiennent pas de substances potentiellement dangereuses, et 60% ignorent que l?utilisation des produits de consommation peut avoir des conséquences sur la santé. La NAPED a été élaborée à l?issue d?une concertation avec une centaine de parties prenantes, suivie d?une consultation publique, et avec l?accompagnement de groupes de travail rassemblant les experts dédiés. En termes de gouvernance, le suivi est assuré par trois organes : la NAPED task force (regroupant des représentants des différentes autorités compétentes), le comité des parties prenantes (industriels, associations, fédérations, syndicats, mutuelles, centres de forma- tions) et le comité scientifique. Des outils d?évaluation sont prévus : une évaluation annuelle par les différents comités de suivi, une évaluation à mi-parcours par une institution indépendante, ainsi qu?une évaluation finale sur le modèle des évaluations de la SNPE par les inspections. La stratégie est divisée en trois axes : la prévention, les actions réglementaires et la recherche. Ces axes contiennent 18 fiches-actions, parmi lesquels on peut citer : Axe prévention : formations en ligne accessibles à tous ; campagnes de communication vers les publics vulnérables notamment sur les réseaux sociaux ; incitation des industriels à travailler sur la substitution et partager leurs données sur l?application Scan4Chem. 149 NAPED : Nationaler Aktionsplan für endokrine Disruptoren ? Plan d?action national sur les PE PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 126/203 Axe réglementaire : traitement des perturbateurs endocriniens dans le droit du travail belge avec le même degré de protection aux expositions que les substances cancérogènes150, mutagènes et reprotoxiques (action qui pourrait être répliquée en France, en avance de phase sur le droit européen, cf.annexe n°3) ; incitations financières et fiscales à la substitution des SVHC ; renforcement du contrôle des produits. Axe recherche : investissement dans la recherche ; soutien à PEPPER ; soutien aux études de biosurveillance ; collecte de données pour réaliser de la biosurveillance intégrée (analyse des troubles de la santé en relation à l?exposition environnementale et professionnelle). L?adoption récente du plan n?a pas encore permis d?en dresser un premier bilan. Annexe 4.2. Le Danemark est actif contre la pollution chimique et a pris l?initiative de plusieurs législations sur les PFAS Le Danemark applique depuis 1999 un plan d?action sur les produits chimiques, régulièrement actualisé, la dernière version ayant été publiée en 2022. Ce plan d?action contient un programme de recherche sur les perturbateurs endocriniens associant 3 universités. Un centre des perturbateurs endocriniens existe par ailleurs au Danemark depuis 2009, pour renforcer la recherche et accompagner le gouvernement dans la prévention. Après l?identification d?une pollution importante de PFAS dans les eaux, causée par des mousses anti-incendie, une forte attention a été accordée aux PFAS dans le plan d?action sur les produits chimiques. Au Danemark, ce sont les communes et les régions qui sont responsables de la localisation des lieux suspectés de contamination aux PFAS et de la recherche de la source de la contamination. Il a été estimé que 5% des sources d?eau potable du pays étaient contaminées par des PFAS, avec 15 000 sites potentiellement contaminés. La valeur maximale acceptable de PFAS dans l?eau a été abaissée à un niveau de 2 nanogrammes/litre, soit 50 fois moins que seuil européen de 100 nanogrammes/litre. Le pays a été précurseur sur des interdictions nationales de PFAS dans certains usages : en 2020 pour les contenants alimentaires, en 2024 pour les mousses anti-incendie, et dernièrement pour les textiles qui seront bannis à partir de 2026. Le pays s?est également mobilisé au niveau européen pour porter des propositions de restriction calquées sur celles engagées au niveau national, en application de l?article 69.4 du règlement REACH (cf. annexe n°3) Le Danemark a également déposé une proposition européenne de restriction générale des PFAS, avec l?Allemagne, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède. Le dossier soumis à l?ECHA propose deux options : la première suggère une interdiction totale de plus de 10 000 substances chimiques PFAS, avec une période d?adaptation de 18 mois, la deuxième reprend cette interdiction mais autorise des dérogations pouvant atteindre 12 ans pour des utilisations sans substitution possible. C?est la seconde option qui a été retenue par l?ECHA, qui a lancé une consultation sur le sujet. 150 Arrêté royal du 2 juillet 2023 fixant des mesures afin de protéger les travailleurs contre les agents possédant des propriétés perturbant le système endocrinien PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 127/203 Annexe 4.3. La Suède est également très préoccupée par son niveau de pollution aux PFAS La Suède disposait en 2013 d?un plan d?action pour un environnement non-toxique mais il n?a pas été renouvelé. Le sujet des perturbateurs endocriniens reste toutefois suivi et en 2018, le gouvernement suédois s?est prononcé en faveur de la mise en place d?une plateforme de recherche approfondie afin d?identifier les mesures pertinentes pour minimiser l?exposition aux perturbateurs endocriniens. Ces dernières années, la Suède, à l?instar du Danemark, s?est particulièrement mobilisée contre les PFAS, en raison d?une contamination importante de ses sources d?eau potable, essentiellement due à l?usage des mousses anti-incendie pour les exercices des sapeurs-pompiers. En 2015, l?agence suédoise de l?alimentation, Livsmedelsverket, a réalisé une évaluation de la pollution des eaux potables en Suède, afin de délimiter quelles étaient les zones à risque. Parmi 1819 installations d?eau potable étudiées, 109, soit 6%, étaient concernées par une contamination aux PFAS, parmi lesquelles les installations les plus importantes de Suède comme celle de Järfalla qui alimente en eau potable la population de Stockholm. En tout, 3 millions de consommateurs suédois dans 65 communes étaient directement affectés par les PFAS dans l?eau potable A la suite de cette investigation, l?agence des produits alimentaires a été chargée par le gouvernement de prendre des mesures pour réduire la dissémination des PFAS, ce qui a été suivi d?une mobilisation transversale associant l?agence de la santé publique, l?agence des matériaux militaires et l?agence de l?alimentation. Le sujet des PFAS a rebondi en 2023 avec une étude de l?association de protection de l?environnement Naturskyddsförening (équivalent de France Nature Environnement en termes d?importance nationale), qui a montré que les poissons pêchés dans les lacs Mälaren, Vänern et Hjälmaren et vendus pour la consommation humaine dans les magasins d?alimentation contenaient des taux très élevés de PFAS. Depuis le 1er janvier 2023, les normes suédoises pour l?eau potable ont été abaissées concernant 4 PFAS (PFOA, PFNA, PFOS et PFHxS) à 4 nanogrammes/litre, en-dessous des seuils européens151. L?inspection des produits chimiques suédoise Kemikalieinspektion a émis des doutes sur l?efficacité de la réglementation, constatant que lorsque l?utilisation d?un PFAS individuel est encadrée par la loi, les industriels se tournent vers un autre PFAS non réglementé. Dès lors, l?inspection a proposé différents outils, dont un guide à destination des particuliers et des entreprises. L?agence de l?alimentation Livsmedelsverket diffuse de son côté des recommandations sur la consommation de poisson et d?eau du robinet, et contrôle régulièrement la qualité de l?eau potable dans les localités à risque. La ville de Stockholm se distingue par ailleurs avec son programme environnemental qui comporte l?objectif d?un environnement non-toxique. A ce titre, la ville a développé un « plan d?action sur les produits chimiques » comportant différentes actions : sensibilisation du public, clauses pour les marchés publics, encadrement des matériaux de construction, gestion des déchets, non-recours aux pesticides dans les parcs, surveillance environnementale, retrait des substances toxiques dans les crèches (près de 2 tonnes de phtalates ont ainsi été retirés grâce au remplacement des matelas en PVC dans les crèches). 151 Ces seuils sont inférieurs à ceux édictés par la directive 2020/214 sur la qualité de l?eau potable qui fixe deux limites de concentration à ne pas dépasser à partir de janvier 2026 : 0,1 microgramme / litre pour la somme de 20 PFAS préoccupants, et 0,5 microgramme / litre pour la totalité des PFAS. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 128/203 Annexe 4.4. L?Allemagne publie un premier plan d?action sur les perturbateurs endocriniens Fin 2023, l?Allemagne a publié un plan fédéral pour la protection contre les perturbateurs endocriniens (Fünf-Punkte-Plan der Bundesregierung zum Schutz vor hormonell schädigenden Stoffen) qui s?articule en 5 points : réglementation, information, coordination interministérielle, recherche et coopération internationale. Les trois objectifs principaux sont : améliorer la réglementation en travaillant à l?échelon européen ; améliorer l?information du public sur les risques existants ; renforcer la recherche et notamment la coopération internationale en la matière. Ce plan reste toutefois généraliste, sans horizon temporel, déclinaison régionale ou financement dédié. La particularité de ce plan tient à ce qu?il résulte d?un accord politique de la coalition gouvernementale au pouvoir au moment de son adoption, qui réunit 3 sensibilités différentes. Il n?est pas certain qu?il soit reconduit à l?issue des élections prévues fin 2025. Annexe 4.5. Les Etats-Unis ont relancé leur programme d?évaluation des pesticides perturbateurs endocriniens qui avait échoué Aux Etats-Unis, la régulation des pesticides est exercée par l?EPA (Environmental Protection Agency). Cette agence indépendante du gouvernement américain, chargée d?étudier et protéger la nature et la santé des citoyens, fut créée en 1970, quelques années après la parution du livre « Silent Spring » de la scientifique Rachel Carson alertant sur les effets sanitaires des pesticides. En 1999, un programme national d?identification et d?évaluation des perturbateurs endocriniens (EDSP152) a été lancé, destiné à prioriser et tester des substances déjà autorisées ou nouvellement mises sur le marché, en vue d?une éventuelle interdiction. Le programme EDSP analyse les effets sur la santé et l?environnement des pesticides, sur la base des données produites par les industriels. En effet l?EPA reçoit régulièrement des données d?évaluation des industriels sur leurs produits, données obligatoires pour bénéficier d?une autorisation de mise sur le marché, dont l?approbation dure en général pour 15 ans. La mise en oeuvre du programme a été vivement critiquée dans un rapport de l?Inspection générale de l?EPA de 2021 qui dénonçait qu?aucune évaluation toxicologique n?ait été finalisée. L?EPA a également été condamnée en justice pour son manque de résultats. L?EPA a donc annoncé fin 2023 le lancement d?une nouvelle stratégie d?analyse, reposant sur un processus d?évaluation des substances plus rapide. Le programme se concentre sur les pesticides conventionnels, à partir des données existantes. Le programme se concentre en priorité sur la santé humaine. L?approche retenue est une logique de management du risque, en tenant compte de l?exposition. A l?heure de rédaction du rapport, l?EPA n?a pas encore pris de mesures de restriction de pesticides au nom d?un effet perturbateur endocrinien reconnu. Au-delà du travail de régulation de l?EPA, le caractère fédéral du pays permet à des Etats de prendre des législations plus restrictives, ce qui est notamment le cas de la Californie qui interdit les emballages en PFAS depuis 2023. D?autres Etats tels que New-York, Washington ou l?Oregon sont également plus restrictifs concernant l?exposition aux substances chimiques. Enfin, il faut souligner l?existence de programmes de recherche parmi avancés, grâce à une 152 EDSP : Endocrine Disruptors Screening Programme PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 129/203 communauté scientifique importante. Trois universités notamment se distinguent sur le sujet : North Carolina State University, Duke University, et University of North Carolina at Chapel Hill. Elles travaillent en collaboration avec deux instituts nationaux : l?institut national de l?environnement (NIH) qui se concentre sur les effets des substances sur le cerveau et le comportement, et l?institut national de la santé environnementale (NIEHS). Ces programmes de recherche s?appuient notamment sur des grandes cohortes : SISTERS sur le cancer du sein ; All of us ou ECHO sur la santé environnementale ; CHAMACOS sur les familles de travailleurs agricoles en Californie. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 130/203 Annexe 5. Etat d?avancement des actions de la SNPE2 Tableau 11 : Etat d?avancement établi par la DGS et la DGPR suite au COPIL du 12/12/2023 Actions n° Objectifs Axes Actions Progression Action 1 Former- Informer 1. Etablir une liste des substances chimiques qui peuvent présenter des propriétés de perturbation endocrinienne pour une meilleure gestion des risques, en fonction du niveau de preuve et des incertitudes Expertiser des substances chimiques en vue de proposer la reconnaissance des dangers de PE au titre des règlements européens. Finalisée Action 2 Former- Informer Coordonner les travaux de l?ANSM et de l?Anses sur les perturbateurs endocriniens afin de renforcer l?évaluation des dangers et des risques des substances potentiellement PE dans les cosmétiques et produits de santé (médicaments à usage humain, dispositifs médicaux...) En cours Action 3 Former- Informer Définir une méthode de priorisation des substances qui peuvent présenter des propriétés PE, scientifiquement robuste et partagée avec les parties prenantes et les autres États membres, en vue d?établir une liste hiérarchisée de ces substances qui sera mise à disposition notamment des parties prenantes Finalisée Action 4 Former- Informer 2. Informer les citoyens sur les produits chimiques dont les perturbateurs endocriniens En cohérence avec les travaux au niveau européen et international, étudier la mise en place de dispositifs d?information obligatoires (étiquetage et/ou pictogramme) pour tous publics ou publics ciblés (femmes enceintes?) sur la présence de substances potentiellement PE dans les produits de la vie courante et articles manufacturés, produits alimentaires (aliments, emballages, contenants), les produits de santé et les cosmétiques. En cours Action 5 Former- Informer Mettre en place des événements type « journée sur les PE » pour sensibiliser la population et les relais d?opinion. En cours Action 6 Former- Informer Sensibiliser les élèves dans le cadre des actions éducatives de la promotion de la santé en milieu scolaire et des activités pédagogiques. En cours Action 7 Former- Informer Mener une campagne de communication grand public et créer un site internet de référence, afin d?informer la population sur les risques liés à l?exposition aux produits chimiques dangereux de consommation courante, de partager des bonnes pratiques destinées à limiter les expositions, en ciblant en priorité les populations les plus à risques (femmes enceintes, période des 1 000 premiers jours). En cours Action 8 Former- Informer 3. Former et s?appuyer sur les réseaux des professionnels, notamment des professionnels de santé, acteurs de la prévention auprès de la population Intégrer à certaines formations diplômantes un objectif de formation sur les risques chimiques, dont les perturbateurs endocriniens. En cours Action 9 Former- Informer Permettre le développement de la formation continue des professionnels de santé sur les risques chimiques, liés notamment aux perturbateurs endocriniens, et s?appuyer sur les professionnels de santé pour développer la prévention auprès des couples et des parents. En cours Action 10 Former- Informer Développer la formation des agents des collectivités territoriales (décideurs, acheteurs, agents de nettoyage, responsables et professionnels des services de petite enfance, restauration collective). En cours PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 131/203 Action 11 Former- Informer Renforcer la formation continue des professionnels en intégrant notamment les enjeux de santé environnement au sein des centres de formation continue professionnels (centre techniques professionnels). En cours Action 12 Former- Informer A partir des outils disponibles en santé environnement, permettre la mise en place, dans le cadre du service sanitaire des étudiants en santé, d?actions de sensibilisation dans les établissements scolaires, les lieux de vies et les entreprises. En cours Action 13 Former- Informer Donner plus de visibilité aux actions et bonnes pratiques mises en place par certains établissements de santé (notamment plateformes PREVENIR, maternité et service pédiatrique), des établissements accueillant des jeunes enfants, les collectivités territoriales, et d?autres partenaires (industrie, agriculture, vie sociale et associative) afin de réduire l?exposition aux PE. En cours Action 14 Protéger l'environnement et la population 4. Améliorer la connaissance de l?imprégnation de l?environnement par les PE Assurer une coordination scientifique entre les agences et instituts, afin d?améliorer la connaissance de l?imprégnation des milieux environnementaux. En cours Action 15 Protéger l'environnement et la population Expliciter la relation entre expositions et imprégnation. Action 16 Protéger l'environnement et la population Identifier et mettre en place la surveillance, dans l?air extérieur, de certaines substances identifiées par des campagnes expérimentales afin de collecter des données sur la présence de PE dans l?air extérieur. En cours Action 17 Protéger l'environnement et la population Identifier parmi les polluants de l?air intérieur les polluants susceptibles d?être perturbateurs endocriniens ? Réaliser des mesures dans les logements par l?OQAI et l?Ineris. En cours Action 18 Protéger l'environnement et la population Valoriser les mesures effectuées dans le cadre du réseau de mesures de la qualité des sols (RMQS). En cours Action 19 Protéger l'environnement et la population Préparer et récupérer les données de la prochaine campagne exploratoire prévue au titre de la directive- cadre sur l?eau pour développer le suivi des substances PE. Lien avec l?action 26 du Plan Micropolluants 2016- 2021 « Mener une surveillance prospective sur des molécules émergentes dans les rivières, nappes et eaux littorales et dans les eaux destinées à la consommation humaine ». En cours Action 20 Protéger l'environnement et la population Surveiller les rejets de certains secteurs d?activités industrielles. En cours Action 21 Protéger l'environnement et la population Réaliser des analyses exploratoires sur des produits de grande consommation destinés à des populations sensibles (jouets destinés aux enfants de moins de trois ans) en y recherchant des substances non réglementées présentant des propriétés PE avérées et pouvant exposer ces populations lors d?une utilisation normale et prévisible A lancer Action 22 Protéger l'environnement et la population Recenser les produits de grande consommation utilisant intentionnellement pour leur fabrication des substances PE non couvertes par des restrictions, et pouvant exposer les populations. A lancer Action 23 Protéger l'environnement Centraliser et exploiter les données sur l?imprégnation des milieux par les PE. En cours PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 132/203 et la population Action 24 Protéger l'environnement et la population Mieux prendre en compte le caractère PE dans la construction des normes de qualités environnementale (NQE) et des valeurs guides environnementales (VGE) pour des substances chimiques à enjeux pour les milieux aquatiques. Lien avec l?action 34 du plan Micropolluants 2016- 2021 « Construire des valeurs de référence et des méthodologies pour mieux juger de la qualité des eaux de surface et souterraines en prenant en compte les perturbateurs endocriniens et les métabolites pertinents ». Finalisée Action 25 Protéger l'environnement et la population Développer et promouvoir la surveillance de l?activité perturbatrice endocrinienne dans les milieux et les rejets à l?aide de méthodes biologiques intégratrices (plutôt que le suivi substance par substance). Lien avec l?action 25 du plan micropolluants 2016- 2021 « Évaluer les méthodes et les technologies innovantes de surveillance et de diagnostic ». Finalisée Action 26 Protéger l'environnement et la population 5.Renforcer la connaissance de l?exposition aux PE via l?alimentation et prendre des mesures pour prévenir et réduire cette exposition Analyser dans le cadre de la nouvelle étude de l?alimentation totale (EAT3), la présence de perturbateurs endocriniens afin d?évaluer les expositions alimentaires de la population générale. En cours Action 27 Protéger l'environnement et la population 6.Comprendre l?impact des PE sur la biodiversité Étudier l?impact de l?imprégnation des eaux par les PE sur l?intersexualité des poissons. Étendre la liste des indicateurs de la qualité des eaux développés dans le cadre de l?Observatoire national de la biodiversité à des indicateurs de contamination du milieu par des perturbateurs endocriniens. Finalisée Action 28 Protéger l'environnement et la population Développer les connaissances sur les effets des PE sur la faune sauvage En cours Action 29 Protéger l'environnement et la population 7.Préserver et restaurer l?environnement Renforcer le suivi du rejet des PE dans l?eau en amont et en aval des STEU en s'appuyant sur les structures existantes de suivi de l'environnement. Finalisée Action 30 Protéger l'environnement et la population Sur la base des NQE révisées, adapter les valeurs limites de rejet dans les eaux de surface. A lancer Action 31 Protéger l'environnement et la population Identifier des mesures de gestion des sols adaptés En cours Action 32 Protéger l'environnement et la population 8.Harmoniser la réglementation européenne qui s?applique aux objets du quotidien Définir rapidement et de façon cohérente les PE dans toutes les législations européennes concernées afin d?assurer un niveau de protection approprié pour tous les modes et voies d?exposition. Porter la position de la France au niveau européen pour oeuvrer pour une définition horizontale des PE. En cours Action 33 Protéger l'environnement et la population Vérifier le respect des exigences réglementaires (restrictions, interdictions, retrait d?autorisation) pour les substances inscrites pour leur propriété PE. En cours Action 34 Protéger l'environnement et la population Contrôler les produits importés En cours Action 35 Protéger l'environnement et la population 9.Guider l'action de l'industrie pour substituer et protéger Mobiliser les entreprises dans une démarche d?innovation technologique, organisationnelle et de service autour de la substitution des PE. En cours PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 133/203 Action 36 Protéger l'environnement et la population Promouvoir la substitution au sein des structures d?animation de R&D et auprès des opérateurs. Notamment, impliquer les pôles de compétitivité ou les centres techniques concernés en les encourageant à prendre en compte cette thématique dans leurs actions. En cours Action 37 Protéger l'environnement et la population Contribuer aux travaux de l?ECHA relatifs à la substitution des substances PE. Action 38 Protéger l'environnement et la population En lien avec les actions 1.10 et 1.11 du PST3, intégrer la problématique des perturbateurs endocriniens dans les démarches de prévention du secteur du nettoyage et élargir cette démarche à d?autres secteurs d?activités (par exemple coiffure, onglerie?). Action 39 Protéger l'environnement et la population Pour les PE identifiés : établir des valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP) et/ou des indicateurs biologiques d?exposition (IBE) dérivés des effets PE si cela est pertinent (s'il s'agit des effets les plus sensibles). A lancer Action 40 Protéger l'environnement et la population Susciter des engagements volontaires des industriels et des distributeurs pour supprimer ou substituer, dans les produits de consommation courante, les substances pouvant présenter des propriétés de perturbation endocrinienne, informer les consommateurs par la diffusion de messages de prévention. A lancer Action 41 Améliorer les connaissances 10.Accélérer la recherche pour comprendre et adapter au mieux notre gestion des risques et la réglementation Mettre en place une plateforme d?accompagnement à la validation de méthodes et tests permettant l?identification des effets de perturbation endocrinienne. Finalisée Action 42 Améliorer les connaissances Assurer une coordination pour soutenir la recherche et l'innovation sur les contaminants environnementaux, dont les perturbateurs endocriniens, en appui à la mise en oeuvre des politiques publiques dans le cadre plus large de la thématique santé environnement. Assurer la lisibilité pour l?ensemble des parties prenantes des efforts de recherche et des avancées sur les PE. En cours Action 43 Améliorer les connaissances 11.Développer une recherche appliquée en santé pour mieux prévenir, prendre en charge et traiter les effets des perturbateurs endocriniens Cartographier les recherches appliquées en santé en cours et développer les projets concernant les effets des perturbateurs endocriniens sur la santé, en particulier pour les personnes vulnérables et les travailleurs exposés, et des outils cliniques pour caractériser le lien entre anomalies de santé et perturbation endocrinienne. En cours Action 44 Améliorer les connaissances 12.Élargir la surveillance, en lien avec l?exposition aux perturbateurs endocriniens, à d?autres pathologies humaines que celles de la reproduction et poursuivre la surveillance des expositions humaines Élaborer des valeurs d?imprégnation critique (valeurs sanitaires de référence). En cours Action 45 Améliorer les connaissances Poursuivre et renforcer la surveillance des indicateurs sanitaires déjà développés en lien avec les perturbateurs endocriniens. En cours Action 46 Améliorer les connaissances Élargir la surveillance à d?autres pathologies en lien avec les perturbateurs endocriniens. En cours Action 47 Améliorer les connaissances 13.Définir les nouvelles perspectives du programme national de biosurveillance en se plaçant dans le contexte Développer un réseau national de laboratoires qui analysera les données de biosurveillance. En cours Action 48 Améliorer les connaissances Créer une plateforme nationale de collecte, d?harmonisation et de partage des données de biosurveillance. En cours PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 134/203 Action 49 Améliorer les connaissances européen Définir les nouvelles perspectives du programme national de biosurveillance en se plaçant dans le contexte européen. En cours Action 50 Améliorer les connaissances Identifier des biomarqueurs d?effets et les intégrer dans les études de biosurveillance. En cours Note : Les cases vides n?ont pas été complétées par les pilotes de ces actions. Source : DGS et DGPR PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 135/203 Annexe 6. Recherche Annexe 6.1. Agence nationale de la recherche (ANR) Annexe 6.1.1 Recherche financée par le plan d?action de l?ANR A partir de 2014, les thèmes de recherche en lien avec le PNSE ont été développés dans les différentes éditions de l?appel à projet générique (AAPG) du plan d?action de l?ANR. Si les différents thèmes sont globalement conservés d?une édition à l?autre, leur répartition et leur articulation ont évolué dans les défis 1, 4 et 5, les axes ou les axes inter-défis. Depuis l?AAPG 2018, la notion de défi a disparu ; la thématique « contaminants, écosystèmes et santé » est alors à nouveau identifiée en tant qu?axe thématique. Malgré ces évolutions, la communauté a continué à proposer des projets couvrant bien le champ des thématiques. Le nombre des projets déposés dans le comité « Contaminants, écosystèmes et santé » s?est maintenu à environ une centaine de dépôts par édition après le passage dans l?AAPG en 2014 et le mode de sélection en deux étapes. Au niveau des comités d?évaluation de l?AAPG, de 2014 à 2023, le comité d?évaluation scientifique « contaminants, écosystèmes et santé » a évalué des projets où étaient fortement encouragées la pluridisciplinarité ou l?interdisciplinarité, tous en lien avec des aspects de santé environnement selon une approche « One Health ». Annexe 6.1.2 Analyse de situation de l?ANR sur les projets sur les perturbateurs endocriniens dans le cadre de la SNPE1 (2014-2018) et SNPE2 (2019-2022) Les projets sur les perturbateurs endocriniens entrant dans le cadre des SNPE1 (2014-2018) et SNPE2 (2019-2022) ont été financés via les différents instruments de financement de l?ANR : 21% (SNPE1) et 18% (SNPE2) sont des projets « jeunes chercheurs jeunes chercheuses », 9% (SNPE1) et 12% (SNPE2) sont des projets avec des consortiums internationaux (multilatéraux ou bilatéraux) et 55% (SNPE1) et 49% (SNPE2) sont des projets portés par des consortiums natio- naux. Les projets collaboratifs nationaux avec des partenaires non académiques (privés, associa- tions, collectivités, etc.) représentent 6% (SNPE1 et SNPE2) des projets financés. S?agissant des recherches sur les perturbateurs endocriniens pendant les périodes d?exécution de la SNPE1 (2014-2018) et de la SNPE2 (2019-2022), l?ANR note une augmentation significative des projets financés entre les deux périodes (n=33, 12,5 M¤ pour 2014-2018 vs n= 49, 24,5M¤ pour 2019-2022). L?ANR note également l?influence de l?AAP Chlordécone 1 en 2022 dans ce calcul (6 projets finan- cés, 4,5 M¤). Dans le cadre de la SNPE1 (2014-2018) ; 52% des projets financés étaient en toxi- cologie humaine et 48% en écotoxicologie et pour la SNPE2 (2019-2022), 41% des projets financés étaient en toxicologie humaine et 59% en écotoxicologie. En écotoxicologie, différents organismes ont été utilisés comme les poissons (truite), les mollusques (huîtres, moules), les oiseaux, les in- sectes (abeilles) et les amphibiens. Certains de ces projets s?appuient sur des données issues des cohortes : Cohorte PELAGIE (perturbateurs endocriniens : étude Longitudinale sur les anomalies de la grossesse, l?infertilité et l?enfance) : étude de la croissance, de l'obésité, du développement pubertaire et des troubles neurocomportementaux chez les enfants à 12 ans, en association avec les expositions précoces à des polluants. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 136/203 Cohorte ELFE (étude longitudinale française depuis l?enfance) : exposition et effets Neurotoxiques des retardateurs de flamme. Cohorte SEPAGES (suivi de l'exposition aux polluants atmosphériques durant la grossesse et l'enfance et santé) : ? expositions prénatales aux phénols et santé de l?enfant : analyse longitudinale ; ? microbiote intestinal dans l?enfance et expositions environnementales maternelles ; ? expositions précoces aux perturbateurs endocriniens et neurodéveloppement de l'enfant : le rôle de l'axe hypothalamo-hypophysaire ; ? exposition maternelle à un mélange de polluants organiques : marques épigénétiques placentaires et évaluation des risques pour la santé de la descendance. Cohorte EDEn (étude de cohorte généraliste menée en France sur les déterminants pré- et postnatals précoces du développement psychomoteur et de la santé de l?enfant) : co- exposition intra-utérine et postnatale à un grand nombre de contaminants alimentaires et la croissance et le développement de l'enfant, Cohorte ComPaRe (communauté de patients pour la recherche) : exposition aux polluants organiques persistants et sévérité de l'endométriose dans la cohorte ComPaRe- Endométriose. En comparant les projets financés durant la SNPE1 et la SNPE2, l?ANR a remarqué que les projets sont déposés dans plus d?axes thématiques différents. Lors de la SNPE1, les projets étaient prin- cipalement dans l?axe « toxicologie et écotoxicologie » alors que l?on voit apparaître plus fortement les axes « Méthodologies, instrumentations, capteurs et solutions pour la transition écologique » et « Alimentation et systèmes alimentaires » durant la SNPE2. Cela montre, selon l?ANR, que la thématique des perturbateurs endocriniens a diffusé dans d?autres communautés de recherche. L?ANR note que les recherches ont permis la mise au point d?une ligne directrice (test règlementaire) OCDE, avec le test EASZY (test utilisant des embryons de poisson zèbre transgéniques). Ce test informe des effets endocriniens des substances chez les vertébrés (activation du gène de l?aroma- tase B par les perturbateurs endocriniens : le gène qui convertit les androgènes en oestrogènes sous stimulation par des perturbateurs endocriniens oestrogéniques). Annexe 6.1.3 L?ANR considère qu?il y a eu des avancées issues de la recherche sur les PE L?ANR estime qu?il y a une structuration de la communauté scientifique sur la thématique des per- turbateurs endocriniens. La plupart des projets étaient pluridisciplinaires : endocrinologie, toxicolo- gie, pharmacotoxicologie, écotoxicologie, écophysiologie, biologie, omique, chimie, santé publique, épidémiologie, physiopathologie. Des principales avancées scientifiques portent sur : La caractérisation des effets sur différentes fonctions physiologiques : ? fonction de reproduction et les troubles occasionnés : problèmes de fertilité masculine ou féminine, des impacts sur le développement intra-utérin, la descendance, des effets transgénérationnel, l?épigénétique, l?endométriose ; ? système nerveux, neurodéveloppement, troubles neurocomportementaux, neurotoxiques et psychiatriques ; ? impacts thyroïdiens, impacts métaboliques, la barrière intestinale, le microbiote, le développement de cancer. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 137/203 L?étude des mécanismes d?action au niveau moléculaire et cellulaire : fixation des PE sur les récepteurs nucléaires, des effets synergiques, le développement de méthodes in silico. La recherche de biomarqueurs d?exposition et d?effets. Les effets et modes d?action de différents types de composés. La majorité des travaux a porté sur des micropolluants organiques, mais des effets PE ont également été montré pour des métaux (Cd) et plus récemment de nanoparticules contenues dans les aliments ou encore des additifs chimiques contenus dans les plastiques. L?ANR cite par exemple les travaux sur : le Bisphénol A et ses produits de substitution, des composés pharmaceutiques, des antalgiques, des phtalates, les perfluorés, les retardateurs de flamme (PBDE), les pesticides (ex : Chlordécone), des métaux (ex : Cadmium), des additifs alimentaires, des additifs contenus dans les plastiques. Les méthodes et techniques de détection en vue de l?évaluation de l?exposome humain ou environnemental : spectrométrie de masse haute résolution, techniques analytiques ciblées et non ciblées, quantification de polluants fluorés par RMN du fluor, imagerie chimique haute résolution, ou encore mise au point de biosensor ou de détecteurs. Les techniques de traitement/remédiation des eaux ou des déchets, agricoles notamment (contenant des mixtures de contaminants dont des composés de type perturbateurs endocriniens). Annexe 6.2. Le plan national de recherche Environnement Santé Travail (PNR EST) Depuis la création du PNR EST en 2006, plus de 120 projets relatifs à la thématique des perturbateurs endocriniens ont été financés via les appels à projets de recherche. Les financements confiés à l?Anses à partir de 2018 par le ministère chargé de l?environnement se sont traduits par une forte augmentation du nombre de soumissions de projets et du nombre de projets financés. Alors que 4 à 7 projets étaient retenus chaque année, à partir de 2018 de 8 à 15 projets sont financés. Deux tiers des projets ont pour cible principale d?application les populations humaines et un tiers portent sur l?environnement au sens large (écosystèmes, sols, animaux, plantes). De nombreux perturbateurs endocriniens sont étudiés seuls ou en cocktail sur l?ensemble des projets visés sur la période ; les cibles d?étude sont principalement les populations humaines, les vertébrés et les arthropodes ; les effets étudiés sont multiples, aussi bien au niveau des axes endocrines humains, que des effets sur les organismes des écosystèmes ; l?ensemble des voies d?exposition sont étudiées, avec une majorité des projets qui portent sur la voie alimentaire, l?exposition périnatale, et les eaux dans l?environnement en tant que milieux de vie. Tout ceci montre que l?ensemble de ces projets concourt à mettre en oeuvre une approche globale de l?ensemble des expositions avec un équilibre intéressant entre les études de santé humaine, et les études des écosystèmes, certains projets portant sur les deux approches à la fois, qui est à replacer dans une perspective une seule santé. Annexe 6.2.1 Bilan financier des projets relatifs aux perturbateurs endocriniens entre 2019 et 2023 Tableau 12 : PNR EST, financement depuis 2019 PNR-EST 2019 2020 2021 2022 2023 Total Budget 1 920 524 2 179 926 1 199 633 1 389 621 2 185 332 8 875 036 Nombre de projets 12 11 6 7 14 50 Source : Anses PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 138/203 59 projets relatifs aux PE sont dénombrés entre 2019 et 2023, soit une douzaine de projets en moyenne chaque année. 10,4 M¤ ont été attribués à 59 projets, variant entre 1,2 M¤ en 2021 et 2,2 M¤ en 2020 et 2023. Sur la période 2019-2023, ont été financés : 8 études de faisabilité, chacune recevant en moyenne 50 000¤, et 51 projets de recherche, chacun recevant en moyenne 195 000¤. Graphique 2 : Montant total des subventions accordées par année pour les projets relatifs aux perturbateurs endocriniens Source : Anses Annexe 6.2.2 Bilan des équipes impliquées dans les projets Entre 2019 et 2023, la majorité des projets était portée par deux à trois équipes. Au total, 146 partenaires différents sont associés sur les 59 projets, dont 13 sont associés sur 2 ou 3 projets différents, soit en porteurs principaux soit en partenaires associés. Tous les porteurs principaux des projets sont issus d?équipes françaises. Mais 8 projets associent d?autres équipes européennes (Belgique, Allemagne, Espagne, Portugal), et 4 projets associent des équipes canadiennes. Au total près de 20% des projets présentent une dimension internationale. Annexe 6.2.3 Méthodologies générales mises en oeuvre dans les projets La grande majorité des projets sont des études toxicologiques. Un quart des projets contiennent des études épidémiologiques, dont 12 projets sur des cohortes déjà constituées ou qui réalisent un recrutement. Deux projets sont basés sur la modélisation (sur la structure chimiques153, ou sur la répartition des contaminants). Trois projets cartographient l?environnement. Les études toxicologiques sont de toutes natures : au niveau de l?organisme dans son ensemble (effets reproductifs, développementaux, comportementaux, ?), au niveau cellulaire (modèles cel- lulaires variés : hépatocytes, cellules tumorigènes, cellules cutanées, ?), au niveau moléculaire (chimique, ADN, ARN, protéines, ?), ou encore approche par modélisation (par analogie structu- rale comme le QSAR quantitative structure-activity relationship). 153 Criblage virtuel des modalités de perturbation du système endocrinien 0 500000 1000000 1500000 2000000 2500000 2019 2020 2021 2022 2023 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 139/203 Annexe 6.2.4 Les types de perturbateurs endocriniens étudiés Les plastiques dans leur ensemble constituent l?objet d?étude de 30% des projets : constituants des plastiques comme les bisphénols, ou plastifiants comme les phtalates, ou encore les nano/micro plastiques. Suivant l?ensemble des produits phytosanitaires (pesticides, insecticides comme les néonicotinoïdes, fongicides) qui représentent 20% des projets. De nombreuses autres substances sont étudiées : benzène, hydrocarbures aromatiques polycy- cliques (HAP), perfluorés, parabènes, organochlorés (telle la chlordécone), organophosphorés. Un projet sur huit s?intéresse aux effets cumulés des expositions à plusieurs PE, en effet « cock- tail ». Les résidus de médicaments154 (anti-inflammatoires non stéroïdiens et hormones de synthèse) peuvent être étudiés en tant que tels. Certains paramètres physiques sont aussi étudiés pour les PE engendrés : la lumière sur les cycles circadiens, ou un ensemble de paramètres définissant les conditions de vie aquatique (température, acidification, oxygénation?), ou encore l?approche nanoparticulaire (particules de la pollution at- mosphérique, ou des plastiques). Annexe 6.2.5 Les principaux effets étudiés des PE Les principaux effets étudies des PE sont les perturbations de : L?axe métabolique au sens large pour un quart des projets : hormones thyroïdiennes, obésité, diabète, stress. L?axe reproducteur pour un quart des projets : hormones stéroïdiennes (principalement oestrogènes), axe hypothalamo-hypophysaire. Le système nerveux, et en particulier son développement pour un quart des projets, parmi lesquels on note des projets sur: la mort-subite des nourrissons, l?autisme, la neuro- inflammation, la maladie de Parkinson, la dépression, les modifications comportementales au sens large, la modification de l?olfaction chez les insectes, les rythmes circadiens. Diverses pathologies : pathologies respiratoires (asthme), arthrite rhumatoïde, cancers. Les stades de développement chez les arthropodes (ecdysone et stades larvaires) pour quatre projets. Annexe 6.3. L?investissement de la France dans les projets européens Annexe 6.3.1 Le partenariat européen pour l'évaluation des risques liés aux substances chimiques PARC (partnership for the assessment of risks from chemicals) Ce partenariat de 7 ans s?inscrit dans Horizon Europe 2021-2027 et plusieurs projets sur les PE (dont une partie prévue par la SNPE2) y sont menés notamment sur les bisphénols, les PFAS, la surveillance environnementale ou encore certains pesticides ; 154 Impact des résidus d?anti-inflammatoires non stéroïdiens et d?hormones dans les eaux destinées à la consommation humaine sur la fonction de reproduction et la fertilité PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 140/203 PARC, lancé en mai 2022, n?est pas un projet porté par la SNPE2, bien que certaines actions de la stratégie nationale aient été mises en oeuvre dans le cadre de PARC (surveillance de l?environ- nement, modèles pharmacocinétique physiologique PBPK, réseau de laboratoires de biosurveil- lance?). Par ailleurs la SNPE2 a manifestement permis aux acteurs français de travailler en- semble, ce qui a facilité la préparation de PARC. PARC a pour objectif de soutenir la stratégie de l?UE pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques ouvrant la voie à l'ambition « zéro pollution » annoncée dans le Pacte vert pour l?Europe (European Green Deal). PARC a pris la suite des travaux du programme conjoint européen sur la biosurveillance humaine Human Biomonitoring for Europe HBM4EU, terminé en 2022, et élargit son champ d?intérêt en particulier à l?évaluation des risques pour l?environnement. De plus PARC assure le relais du programme EURION qui va s?achever ou se sont achevés (financés au titre de H2020). Dans le cadre d?Horizon Europe (le programme-cadre de l?UE pour le financement de la recherche et de l?innovation 2021-2027), le partenariat regroupe 200 partenaires de 28 pays de l?échelon eu- ropéen, agences nationales et organismes de recherche dans l?environnement ou la santé publique, Agence européenne des produits chimiques (ECHA), Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), Agence européenne pour l?environnement (EEA). La France y est présente avec 15 membres155 : Anses, Santé Publique France, BRGM, CEA, CNRS, CSTB, EHESP, Ineris, INRAE, INRS, Inserm, IRSN, LNE, OFB, Oniris. Le partenariat est coordonné par l?Anses, qui assure la coordination scientifique et administrative de l?ensemble du partenariat, participe également aux activités transversales et à la production scientifique. Santé Publique France est en charge des programmes de travail sur la biosurveillance et de la coordina- tion du Hub français. Le budget est de 400 M¤, financé à 50 % par l?Union européenne et 50 % par les États membres. Les équipes françaises ont capté 16,3% du budget pour un montant de 9 740 325 M¤ (à début 2024). La gouvernance de PARC est assurée par cinq Directions générales de la commission européenne (DG-RTD, DG-GROW, DG-ENV, DG-Santé, CCR) ainsi que par les ministères compétents des pays concernés. Le secteur privé n?est pas présent dans la gouvernance de PARC, mais les indus- triels sont cependant présents dans les projets de recherche. Les trois principaux objectifs de PARC sont de : Développer les compétences scientifiques, en matière de sécurité des substances chimiques, pour identifier et prioriser les besoins. Fournir de nouvelles données, de nouvelles méthodes et des outils innovants aux évaluateurs et gestionnaires des risques liés à l?exposition aux substances chimiques. Renforcer durablement les réseaux interdisciplinaires, réunissant les acteurs spécialisés dans les différents domaines scientifiques contribuant à l?évaluation des risques. Fin 2023, après 18 mois de mise en place, il est difficile de faire un bilan, mais il y a néanmoins quelques acquis : visibilité du sujet de l?évaluation des produits chimiques, dialogue entre diffé- rentes communautés? Selon le coordonnateur du partenariat, d?ici juin 2025, il serait bien que 155 BRGM Bureau de Recherches Géologiques et Minières, LNE Laboratoire national de métrologie et d?essais, CSTB Centre scientifique et technique du bâtiment, Oniris VetAgroBio Campus vétérinaire PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 141/203 PARC puisse notamment lancer un programme de bio monitoring, une position commune sur les PFAS et un cadre pour les alternatives aux tests animaux. Les premières étapes156 de la mise en place de PARC avaient pour objet de : Poursuivre les travaux en matière de biosurveillance des substances chimiques chez l?être humain avec l?initiation d?études européennes en population générale et en situations de travail, et réalisation d?un état de l?art en matière de surveillance des substances chimiques157. Générer des données pour répondre aux besoins réglementaires et au développement de nouvelles approches méthodologiques pour évaluer des effets chez l?être humain ou sur les organismes cibles de l?environnement. Développer des modèles informatiques et des méthodes d?analyse des données permettant une analyse des effets de mélanges et d?expositions combinées. Contribuer à rendre les données et les modèles accessibles et réutilisables à des fins de recherche et d?évaluation de risque (selon les principes dits « fair ? facile à trouver ? accessible - interopérable - réutilisable »), dans le cadre d?une démarche « science ouverte ». Développer de nouveaux concepts et outils nécessaires à la mise en oeuvre de la stratégie européenne dans le domaine des produits chimiques : la synthèse chimique de nouvelles molécules ou matériaux sans risques pour la santé et l?environnement, la capacité de détecter les substances dangereuses pour la santé ou l?environnement ou à la mise à disposition d?outils de modélisation. S?agissant des PE, en date de fin 2023, plusieurs projets ont été financés dans le cadre de PARC : 13 projets financés sur les PE, pour 53 M¤, dont un projet de bio-monitoring et de surveillance incluant les PE (5,5 ¤), deux projets de surveillance environnementale (8 M¤), huit projets sur la caractérisation du danger, et deux projets sur l'évaluation des risques. EHEN European Human Exposome network (106 M¤), Joint Research Center (JRC). En 2019, 9 projets, pour 106 M¤ d?aides UE, renforcé par d?autres projets en 2020 (126 groupes de re- cherche, 24 pays, les acteurs français sont présents dans 6 des 9 projets, dont une coordination par l?Inserm). EIRENE Europ/Exposome Infrastructure : la participation au portage de cette infrastructure eu- ropéenne sur l?Exposome, doublée de France Exposome (grande infrastructure de recherche). EURION (50M¤) JRC Cluster est lancé le 1er janvier 2019 afin d?optimiser les synergies entre les projets sélectionnés pour un financement dans le cadre de l?appel SC1-BHC-27-2018 « Nouvelles méthodes de test et de criblage pour identifier les perturbateurs endocriniens ». Le cluster est com- posé de huit projets de recherche financés par Horizon 2020 (50 M¤ sur 5 ans). Chaque projet se concentre sur un aspect différent des nouvelles méthodes d?essai et de dépistage permettant d?identifier les PE. L?animation scientifique y est très forte, avec l?existence de groupes miroirs en France. 156 Source Anses 157 Mettre en place de nouveaux dispositifs ou élargir le champ des substances surveillées dans les dispositifs existants et innover sur les méthodes analytiques mises en oeuvre PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 142/203 Annexe 6.3.2 Les méthodes de test La validation des méthodes de test L?évaluation du caractère perturbateur endocrinien des substances chimiques repose sur des mé- thodes analytiques mises à la disposition des acteurs économiques, des laboratoires et des auto- rités de régulation. Elles sont principalement utilisées pour les essais réglementaires de sécurité, la notification et l'enregistrement des produits chimiques. Ces méthodes font l?objet d?un travail de normalisation, notamment au niveau de l?OCDE. L?OCDE a publié en 2012 un « document d?orientation révisé 150 sur les lignes directrices d?essai normalisées pour l?évaluation des produits chimiques de perturbation endocrinienne » ; document mis à jour en 2018. Ce document fournit des principes généraux (critères qualité à respecter, con- seils pour l?interprétation des résultats?), que les méthodes doivent respecter pour être validées par l?OCDE. A ce jour, une cinquantaine de méthodes ont été validées s?agissant de la perturbation endocri- nienne. Les dossiers de normalisation sont portés par les Etats membres de l?OCDE. La France joue un rôle moteur en la matière. Les méthodes sont réparties sur 5 niveaux (depuis la simple analyse de données jusqu?aux tests in vivo sur plusieurs générations en passant par les tests in vitro) et vise 5 modalités de perturbation endocrinienne : perturbation endocrinienne médiée par les oestrogènes, les androgènes et la thy- roïde, ainsi que les substances qui interfèrent avec la stéroïdogenèse. Source : OCDE A ce jour, on dispose de nombreuses méthodes d?analyse pour les voies d?actions relatives aux androgènes, aux oestrogènes et aux stéroïdes. Pour la voie thyroïdienne, les méthodes normali- sées sont moins nombreuses même si plusieurs sont en cours de validation. Pour les autres voies de perturbation endocrinienne qui ne sont pas liées aux récepteurs endocri- niens (transport des hormones, métabolisme?), les tests sont encore peu nombreux. La voie mé- tabolique est particulièrement importante et complexe (par exemple pour les hormones sécrétées par le pancréas?) et de nouvelles méthodes d?analyse sont attendues dans ce domaine. L?impact sur le neurodéveloppement constitue un autre enjeu important. Des méthodes sont en cours de validation sur ce sujet. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 143/203 Enfin, l?OCDE s?intéresse aux nouvelles méthodologies d'approche (NAM), comprenant des essais in vitro (omics, cellulaires, tissulaires, etc.), des modèles in silico et d'autres approches computa- tionnelles. L?enjeu est de fournir des informations sur les dangers et les risques chimiques pour les humains tout en limitant l'utilisation des animaux158. La plateforme PEPPER Historique, moyens et gouvernance PEPPER (plateforme public-privé sur la pré-validation des méthodes d?essai sur les perturbateurs endocriniens) est une association de loi 1901 créée en décembre 2019 dont le but est de soutenir la « pré-validation » de méthodes d?essai (en toxicologie et écotoxicologie) nécessaires pour caractériser des propriétés de perturbation endocrinienne. S?appuyant sur des tests réalisés dans différents laboratoires, la pré-validation est un processus amont qui facilite la validation de méthodes par les instances internationales, en particulier l?OCDE. Le projet PEPPER était déjà inscrit dans la première version de la SNPE. De 2014 et 2016, des négociations ont été menées entre les différents acteurs, à la fois entre ministères et avec les industriels (via les fédérations telles que la FEBEA et France chimie). A sa création, la plateforme a bénéficié des financements du « programme des investissements d?avenir » et de contributions de la part des industriels, selon un modèle de partenariat public/privé. PEPPER est doté d?une équipe de 5 personnes et d?un budget annuel d?environ 2 M¤, en croissance limitée mais constante. 2019 2020 2021 2022 2023 TOTAL M¤ 1.7 1.8 2.5 2.8 9 ETP 0 3 4 5 5 22 Source : PEPPER Environ les deux tiers du budget de l?association (jusqu?à 2 M¤ /an) sont consacrés au financement des essais en laboratoires et les prestations associées (fournitures d?échantillons, analyses statistiques?). Le coût de pré-validation d?un test peut en effet être élevé (jusqu?à 1.1 M¤). PEPPER compte actuellement 18 membres, contre 10 en 2019. On y trouve des ministères (Ecologie, Agriculture et Travail), des opérateurs (Ineris), des syndicats professionnels (FEBEA, France Chimie, ANIA?), des industriels (BAYER, BASF, LVMH?), des laboratoires (Eurofins?), ? La gouvernance est originale, avec un « comité d?opportunité » qui s?ajoute au conseil scientifique et au conseil d?administration. Le comité d?opportunité, composé d?une quarantaine de membres, se prononce notamment sur le choix des méthodes à pré-valider. Il permet d?associer à ces choix les différentes parties prenantes : agences internationales (OCDE, ECHA?), agences et universités de pays membres de l?UE (Pays-Bas, Allemagne, Belgique, Suède), des industriels, des associations de défense de l?environnement, des animaux et des consommateurs, des syndicats de salariés, des organismes de recherche, des ministères... Les résultats Fin 2023, 11 méthodes étaient en cours de pré-validation par PEPPER, dont 6 étaient inscrites au programme de validation de l?OCDE. La première méthode validée par l?OCDE devrait donc intervenir en 2024. 158 No. 377 Initial Recommendations on Evaluation of Data from the Developmental Neurotoxicity (DNT) In-Vitro Testing Battery. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 144/203 Pour pré-valider une méthode, il faut compter en moyenne 3 ans, ce qui est plus long que ce qui avait été prévu par les concepteurs de PEPPER. Pour la validation par l?OCDE, il faut compter de 1 à 2 ans, soit au total de 4 à 5 ans pour obtenir la validation d?une méthode. Si on y ajoute les travaux de recherche préalables, l?ensemble du processus peut prendre une dizaine d?année, voire plus. La cible fixée par la SNPE2 était une pré-validation de 3 méthodes par an, au minimum. Si on tient compte du flux entrant, l?objectif est donc presque atteint. A compter de 2024, on peut espérer que 2 à 3 méthodes soient, chaque année, soumises à l?OCDE. Perspectives Avant d?engager le processus de pré-validation, PEPPER a pour mission d?identifier les méthodes de tests les plus pertinentes. Les principales priorités, telles que présentées lors du Comité d?orien- tation d?octobre 2023, concernent les modes d?action suivants : En santé humaine : thyroïde/neurodéveloppement ; reproduction féminine ; dysfonction métabolique (obésité, diabète) ; rétinoïdes ; cancers hormonaux ; tests sur cycle de vie complet ; métabolisme in vitro/ extrapolation in vitro-in vivo. Pour l?environnement : reproduction, croissance et développement, tests sur les oiseaux et les amphibiens. Cette priorisation est issue d?un travail réalisé en 2017 par la Commission européenne (Joint Research Center). Parmi les perspectives identifiées par PEPPER, figure également l?accompagnement des mé- thodes inscrites au programme de validation de l?OCDE. En effet, lors de la conception de PEPPER, son rôle se limitait à la phase amont de cette validation : sélection des méthodes, organisation des tests et évaluation de leur succès. PEPPER considère qu?il doit aller au-delà et porter la méthode auprès des instances de l?OCDE y inclus, en cas de succès, la rédaction d?une ligne directrice d?essai. Un autre enjeu consiste à accroître la visibilité européenne et internationale de PEPPER, via la publication d?articles scientifiques, la participation à des réunions d?instances de programmes de recherches européens et des séminaires internationaux. Mais le principal frein au développement de PEPPER concerne avant tout son budget qui n?est pas garanti à court terme (visibilité réduite à 1 à 2 ans actuellement). Des soutiens financiers sont recherchés à la fois privés et publics, aux niveaux français et européen pour pérenniser l?activité. Le ministère de l?environnement des Pays-Bas a ainsi apporté une subvention de 100 k¤ à PEP- PER et l?agence fédérale de l?Environnement en Allemagne (UBA) ainsi que le ministère chargé de l?environnement belge ont manifesté leur intérêt. Poursuivre l?européanisation de PEPPER suppose de convaincre les autorités mais aussi les in- dustriels des autres pays européens. Un soutien financier de la commission européenne n?est pas, à ce jour, envisagé comme la mission a pu le constater lors de son déplacement à Bruxelles. Il n?y a pas d?équivalent de PEPPER au niveau international et il semble plus judicieux de fédérer autour de la plateforme que d?en générer d?autres. Enfin, parmi les freins au développement de tests normalisés, on peut citer le manque de méthodes candidates à la pré-validation, en particulier en France. Concevoir des tests est en effet coûteux et n?est pas particulièrement valorisé sur le plan scientifique. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 145/203 Annexe 6.4. France Cohortes L?unité mixte de services France Cohortes159, financée par le PIA, a pour but de mutualiser les moyens techniques et humains au service des cohortes nationales et d?aider la création de nou- veaux projets de cohortes. La migration des premières cohortes nationales vers le SI de France Cohortes a débuté. Onze cohortes ont été refinancées en 2019 par le PIA dont 3 cohortes généralistes. Un renforce- ment du soutien pour ces grandes cohortes a été inscrit dans le plan Santé Innovation 2030, avec une double mesure de soutien aux cohortes populationnelles existantes d?une part (20 M¤) et de création de nouvelles cohortes d?autre part, après état des lieux de l?existant (100 M¤). France Cohortes n?accompagne pas, au moment de la rédaction du rapport, de cohorte orientée spécifiquement sur les perturbateurs endocriniens. Les enjeux liés aux données massives de santé Le rapport de l?IGAS et de l?IGESR de 2020160 indique que « La relance qui vient d?être récemment opérée, au travers du projet France Cohortes porté par l?Inserm et centré sur la mutualisation et l?accompagnement des cohortes, est une initiative intéressante mais qui comporte encore nombre d?imprécisions ». Les imprécisions ayant été en grande partie levées, l'infrastructure nationale France Co- hortes (UMS 47), financée par le programme d?investissements d?avenir, et créée en février 2021, traite des questions concernant la stratégie de développement du réseau, l?allocation des res- sources, la gouvernance des données, l?ouverture du réseau, la déontologie et les principes de valorisation. France Cohortes accompagne les cohortes tout au long du cycle de vie de leurs projets, du recueil des données à leur exploitation et leur mise à disposition : - des fonctions support pour le recueil des données, le nettoyage et l'analyse des don- nées (outils juridiques, informatiques, formation, communication et valorisation) ; - un hébergement performant et sécurisé (RGPD, SNDS) ; - un soutien réglementaire depuis la conception jusqu?à la fin du suivi de la cohorte (avec un appui au développement des plans de partage des données, notamment à l?international ; - un support à la création de données faciles à trouver, accessibles, interopérables et réuti- lisables (FAIR), en lien avec l?open data. Selon la direction de l?infrastructure nationale161, les avancées concernent le catalogue commun, la lisibilité des procédures, l?outil de dépôt des demandes et la traçabilité de celles-ci, les solutions de mise à disposition sécurisée et d?accompagnement réglementaire. En revanche, le recrutement d?experts, le choix des standards de données et de métadonnées dans un domaine très multidimensionnel, mais aussi le peu d?outillage de valorisation adapté sont des points de difficulté. 159 Cette UMS a pour but de mutualiser les moyens techniques et humains au service des cohortes nationales et d?aider la création de nouveaux projets de cohortes 160 Les cohortes pour les études et la recherche en santé, IGAS-IGESR, 2020 161 Interview de la direction sur le site de France Cohortes PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 146/203 Figure 1 : Cohortes hébergées en 2023 et tutelles Source : France Cohortes PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 147/203 Annexe 7. Evaluation des substances Annexe 7.1. Evaluations de substances par l?Anses pour la période 2019 ? 2023 Le tableau ci-dessous regroupe le détail des substances évaluées par l?Anses au regard des prévisions formulées dans le cadre de la SNPE2 pour la période 2019-2023. Initialement, dans son plan d?action, la SNPE2 fixait les objectifs quantitatifs annuels d?évaluations suivants : ? entre 2019 et 2020 : 6 substances par an dont 3 au titre de REACH et 3 substances actives biocides ou phytopharmaceutiques ; ? à partir de 2021 : 9 substances par an dont 6 au titre de REACH et 3 substances actives biocides ou phytopharmaceutiques. Le nombre d?évaluations total attendu pour la période 2019-2023 était donc de 39 substances évaluées dont 15 substances actives biocides ou produits phytopharmaceutiques. Tableau 13 : Liste des substances évaluées dans le cadre de la SNPE2 par l?Anses (données de mi-décembre 2023) Types de substances Résultats de l?évaluation Substances évaluées par l?Anses durant la période 2019-2023 Nombre de substances évaluées attendues (Objectifs de la SNPE2) Substances déjà étudiées dans le cadre de la SNPE1 et réévaluées lors de la SNPE2* 11 Evaluations réalisées et terminées au titre de la SNPE2 Substances évaluées au titre de REACH Substances identifiées PE (SVHC-57f dans le cadre du règlement REACH) 5 Resorcinol, BPB, BPS, BPAF, BPF 24 évaluations substances au titre de REACH attendues Substance perturbant le système endocrinien de manière avérée ou présumée en attente de formalisation règlementaire 2 Lithium, Tetraphenyl m- phenylene bis (phosphate) Substances perturbant le système endocrinien de manière suspectée en attente de formalisation règlementaire 1 MTBE Substances ne 2 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 148/203 perturbant pas le système endocrinien Disulfure de Carbone, Melamine Substances actives (SA) de produits phytopharmaceutiques évalués pour leur caractère PE 5 Acide peroctooctanoïque, Pydiflumétofène, DMDS, Triflusulfuron?methyl, Isoflucypram 15 évaluations Substances actives biocides ou produits phytopharmaceuti ques attendues Substances actives (SA) biocides évalués pour leur caractère PE 3 CO2, glyoxal, (Z)-13- hexadecen-11-yn-1-yl acetate TOTAL 18 39 Evaluations en cours au titre de la SNPE2 Substances REACH nécessitant des données supplémentaires pour pouvoir évaluer les critères d?identification 9 BHT, BHA, Isophorone, Méthylparabene, Galaxolode, Octocrilene, OTNE ; Bis(dibutyldithiocarbamato- S,S')copper, TnPP SA Produits phytopharmaceutiques nécessitant des données supplémentaires pour pouvoir évaluer les critères d?identification 3 Cyprodinil et Fludioxonil fosétyl SA Biocides nécessitant des données supplémentaires pour pouvoir évaluer les critères d?identification 9 Cuivre, Indoxacarbe, C(M)IT, Alpha-bromadiolone, Géraniol, DEET et OIT Chlore actif (généré par électrolyse), Monochloramine Substances en cours de conclusion 4 Fluorure de Sodium, TiO2, TPhP, Triclocarban TOTAL (évaluations achevées ou en cours) 43 * Des substances passées sont remises au programme de travail quand les études supplémentaires sont fournies par les industriels ; ceci n?est d?ailleurs pas spécifique des évaluations au titre du caractère PE, mais ces études peuvent impacter les conclusions sur le caractère PE de la substance. Source : Document de travail de l?Anses, retraitement IGAS/IGEDD PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 149/203 Annexe 7.1.1 Focus sur l?état d?avancement des évaluations des substances au titre des règlements REACH et CLP (données de mi-décembre 2023) Ce tableau détaille l?état d?avancement des substances évaluées pour une formalisation règlementaire au titre des règlements REACH et CLP. Tableau 14 : Etat d?avancement des évaluations des substances au titre des règlements REACH et CLP (données de mi-décembre 2023) Substance Entrée au programme de travail- Sortie du programme de travail Statut Priorité telle que définie dans l?annexe 5 de l?avis 2019-SA- 079 Disulfure de Carbone 2013 ? 2023 Catégorisation finalisée : non PE. RMOA finalisé, CP effectuée/ Finalisation de l?avis en cours II MTBE 2014 - 2023 RMOA finalisé, CP effectuée, avis publié : Dossier Classification comme substance Persistante, Mobile et Toxique (PMT) à préparer II Fluorure de sodium 2021 - 2023 Finalisation en cours de l?évaluation (Classification PE de la substance) Objectif : fin 2023 Liste prioritaire Lithium 2020 - 2023 Evaluation PE Finalisée mais non encore publiée (Évaluation PE intégrée à l?ensemble du RMOA sur les critères écotoxicologiques..) Absent Melamine 2021 - 2023 RMOA finalisé CP effectuée Publication imminente de l?avis Liste prioritaire Titanium dioxide 2021 Update à venir du dossier par les industriels (annoncé en décembre 2023) Attente en conséquence de la publication du RMOA - Réunion avec la DGT pour statuer sur ce point II BHT 2016 Echanges en cours avec les industriels qui ne sont pas d?accord avec les nouveaux tests demandés et cependant nécessaires pour conclure (recours probable en chambre des recours au niveau européen après échange avec les homologues européens) III BHA 2015 Evaluation reprise pour identification PE en cours. I PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 150/203 Avis en cours de finalisation ? RMOA en cours ? (incertitude sur la classification SVHC PE / sinon la classification CLP / cat 2 sera proposée) 3,5,5- trimethylcyclohex- 2-enone appelée Isophorone 2013 Analyse des nouvelles données à effectuer. Absent Bisphenol S 1er S-23 Identification SVHC PE effectuée I Methylparabène 2014 Follow-up SEv+CCH: études reçues. Evaluation PE en cours. I tris(4-nonylphenyl, branched) phosphite dit TnPP 2013 Devrait être identifié SVHC PE d?ici août 2025 Abs Galaxolide RMOA 2018, mis à l?évaluation 2022 Demande en cours de tests environnementaux supplémentaires ? Pas assez de données pour conclure, Classification PE-Human Health (santé humaine) & Reprotoxicité à prévoir III Triphenyl phosphate dit TPP (ouTPhP) (récupérée post Brexit) 2017 Dépôt dossier SVHC PE-ENV en février 2024 I Octocrilene 2012 LAGDA en cours (test sur amphibien) + Dossier de restriction en cours Abs OTNE 2017 Demande de test complémentaires ? Pas assez de données pour conclure Abs BPF BPAF 2022 Identification PE effectuée Abs Butanoic acid, 4- amino-4-oxosulfo-, N-coco alkyl derivs., monosodium salts, compds. with triethanolamine 2023 Demande d?étude complémentaire Abs tert- butylphenyldiphenyl phosphate 2023 Identification SVHC Abs Abréviations : RMOA : Analyse de la meilleure option de gestion des risques / CP : Consultation publique / SEv : substance evaluation / CCH : Compliance Check / LAGDA : Essai de croissance et de développement de larves d?amphibiens (Lignes directrices de l?OCDE pour les essais de produits chimiques, Section 2 Essai n°241) Source : Document de travail de l?Anses PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 151/203 Annexe 7.1.2 Focus sur l?état d?avancement des évaluations des substances au titre des règlements phytopharmaceutiques et biocides (données de mi-décembre 2023) Sont détaillés ci-dessous, l?état d?avancement des évaluations des substances actives (SA) biocides et produits phytopharmaceutiques menées en 2023 et le détail des substances en cours d?instruction à ce jour. Evaluations PE menées en 2023 : ? C(M)IT (nouvelle SA biocide) : les données ont été reçues mi-2023. L?évaluation PE réalisée en 2023 a été transmise à l?ECHA pour évaluation par les pairs (peer- review). ? Alpha-bromadiolone (nouvelle SA biocide) : les données ont été reçues mi-2023. L?évaluation PE est en cours, et sera transmise à l?ECHA début 2024. ? Fludioxonil (SA phytopharmaceutique) : après un arrêt d?horloge 162 pour la fourniture de données, l?évaluation PE a été transmise à l?EFSA en 2023 qui devrait finaliser l?évaluation fin 2023/début 2024. ? Cyprodinil (SA phytopharmaceutique) : après un arrêt d?horloge pour la fourniture de données, l?évaluation PE a été transmise à l?EFSA en 2023 qui devrait finaliser l?évaluation fin 2023/début 2024. ? Fosétyl (SA phytopharmaceutique) : après un arrêt d?horloge PE pour fourniture de données jusqu?à fin 2022, l?évaluation PE devrait être finalisée fin 2023/début 2024. ? Indoxacarbe (renouvellement SA biocide) : les données ont été reçues mi-2023. L?évaluation PE est en cours, et sera transmise à l?ECHA en 2024 sous réserve que les autres sections soient également finalisées. Substance actives phytopharmaceutiques en cours d?instruction en 2024 : ? Pirimiphos méthyl (Brexit) ; ? Prohexadione ; ? Tébufenpyrade ; ? Tétraconazole ; ? Ester méthylique de l'acide 2,5-dichlorobenzoïque ; ? Indaziflam. Substances actives biocides en cours d?instruction 2024/2025 : ? Cuivre : les données ont été reçues mi-2022. L?évaluation PE a été non concluante et de nouvelles données sont demandées, attendues pour fin 2024 au plus tard. ? Géraniol : de nouvelles études ont été reçues début 2022. L?évaluation PE a été non concluante et de nouvelles données sont demandées, attendues pour mi-2024. ? DEET : dans le cadre du renouvellement de la SA, le dossier a été mis en arrêt d?horloge pour demande de données complémentaires mi-2024. ? OIT : après un arrêt d?horloge pour fourniture de données fin 2023, l?évaluation PE est prévue pour 2024. A noter que la France est également autorité compétente évaluatrice (eCA) pour des dossiers de substances actives biocides à base de chlore actif (généré par électrolyse) ou de monochloramine généré in situ. Pour ces dossiers, l?évaluation du caractère PE est menée en concertation avec 162 Depuis l?entrée en vigueur de la méthode d?évaluation du caractère perturbateur endocrinien en 2018, toutes les demandes de renouvellement ou d?approbation d?une substance active sont évaluées selon ce critère. Dans ce processus européen de réévaluation des substances, les agences peuvent demander des données complémentaires afin d?évaluer le caractère de perturbation endocrinienne se traduisant par un arrêt d?horloge (« stop-clock ») d?une durée maximale de 30 mois. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 152/203 d?autres eCA qui ont des dossiers analogues. Les conclusions sur les propriétés PE sont attendues en 2024 pour le chlore actif et en 2026 pour le monochloramine (études 2G en cours de réalisation). Annexe 7.2. Etablissement d?une liste de substances de PE potentiels L?action 3 prévoyait la définition d?une méthode de priorisation des substances qui peuvent présenter des propriétés PE en vue d?établir une liste hiérarchisée de ces substances. Annexe 7.2.1 Méthode de priorisation des substances qui peuvent présenter des propriétés PE potentielles L?Anses a repris la méthodologie DEDuCT qui permet d?identifier les PE potentiels pour la santé humaine à partir d?un screening d?articles scientifiques contenant des preuves expérimentales d?effets PE pour aboutir à une liste de 686 substances. De plus, une étude d?impact de la Commission Européenne de 2016 pour proposer différentes options de définition d?un PE a permis d?identifier 197 substances actives biocides et phytopharmaceutiques comme PE confirmés, présumés ou suspectés sans preuve in vivo dont 45 sont déjà présentes dans la liste DEDuCT. L?Anses a également réalisé un criblage de substances présentes dans au moins un produits biocide ou phytopharmaceutique pour lequel l?Anses a la charge de délivrer des autorisations de mise sur le marché identifiant 81 co-formulants susceptibles de présenter une activité endocrine dont 13 étaient déjà dans la liste DEDuCT. Au total, ce sont 906 substances potentiellement PE que l?Anses a pu identifier. Pour pouvoir les prioriser, cette liste de 906 substances a fait l?objet de différentes étapes de sélection, synthétisées ci-dessous : Graphique 3 : Etapes de sélection des substances à scorer *Ministères chargés de la mise en oeuvre de la SNPE2 : Ministères de la Transition écologique et solidaire (MTE), et des Solidarités et de la Santé (MSS) Source : Anses Revue de la littérature par la liste DEDuCT + Etude d'impact de la Commission européenne de 2016 + Criblage de co-formulants biocides et phytopharmaceutiques : établissement d'une liste de 906 substances d'intérêt 705 substances éligibles à une priorisation (exclusion de 12 substances déjà identifiées comme SVHC, 12 substances actives déjà interdites, 2 substances sans numéro d'identification CAS ou EC) 266 substances enregistrées dans REACH 141 substances enregistrées sans action règlementaire 59 substances pré- sélectionnées par les Ministères* en fonction du niveau d'information 16 substances sélectionnées par l'Anses, à scorer PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 153/203 Les différents critères de sélection ont permis d?aboutir à une liste de 16 substances que l?Anses a hiérarchisé selon un score de priorisation considérant leurs dangers, les expositions et le niveau de préoccupation sociétales qu?elles suscitent. Annexe 7.2.2 Conclusions des substances inscrites au programme annuel d?évaluation de l?Anses à partir de la liste de substances d?intérêts La liste finale des 16 substances d?intérêts du fait de leur action endocrine potentielle élaborée dans le cadre de l?action 3 a permis d?inscrire au programme annuel d?évaluation de l?Anses, 3 nouvelles substances : la Mélanine qui s?est avérée ne pas être PE, après évaluation ; le Fluorure de sodium (NaF) dont l?évaluation en cours de conclusion révèle des propriétés PE et qui sera proposé au titre du règlement CLP ; le Triéthanolamine (TEA) pour lequel l?Anses attend le retour de l?Allemagne qui évalue une substance similaire, le Diéthanolamine (DEA), avant de rendre sa conclusion. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 154/203 Annexe 8. Surveillance sanitaire La surveillance sanitaire mise en oeuvre par la SNPE2 comporte deux volets : la surveillance épidémiologique qui décrit et analyse les pathologies en lien avéré ou suspecté avec les perturbateurs endocriniens, afin notamment d?en surveiller les tendances temporelles et spatiales ; la biosurveillance humaine qui mesure la présence de perturbateurs endocriniens dans l?organisme ou leurs effets précoces. Annexe 8.1. La biosurveillance Annexe 8.1.1 L?élaboration d?un nouveau programme de biosurveillance (ALBANE) La biosurveillance consiste à prélever des matrices biologiques comme le sang, l?urine, les cheveux, le lait maternel et à y doser les substances recherchées, appelées "biomarqueurs"163. La mesure qui est faite intègre toutes les sources d?exposition, quelles que soient les voies d?entrée des subs- tances dans le corps humain (alimentation, respiration, contact?), et quels que soient le lieu d?ex- position (domicile, travail?), l?activité ou la nature des produits en cause. Le principal résultat obtenu par la SNPE2 est la décision de lancer en 2024 un nouveau programme de biosurveillance, l?enquête ALBANE (alimentation biosurveillance santé nutrition environnement). ALBANE, comme ESTEBAN avant lui, vise à décrire les niveaux d?imprégnation de la population française par les polluants de l?environnement. Des prélèvements biologiques seront réalisés dans différentes matrices, principalement l?urine et le sang, afin de mesurer les marqueurs d?exposition et définir des valeurs référence d?exposition de la population. L?enquête comprend un volet biosur- veillance, un volet alimentation, un volet nutrition (activité physique) ainsi qu?un volet santé, qui permettront d?établir des liens potentiels entre les expositions alimentaires et les niveaux d?impré- gnation. Contrairement à ESTEBAN, l?enquête ALBANE comporte plusieurs cycles de deux ans (sur les modèles canadien ou américain), ce qui permet une adaptation du modèle et d?en améliorer la pertinence, à moindre coût (en fonction des cycles, possibilité d?inclure différents types de popula- tions/paramètres/substances). Les plans de sondage seront davantage stratifiés afin d?obtenir une meilleure représentativité temporelle et produire des indicateurs au niveau régional. Ils permettront d?étudier certaines substances communes ou spécifiques par cycle. Le premier cycle est prévu de septembre 2024 à septembre 2026. Trois types de populations seront couvertes (enfants, adolescents, adultes) dans le cadre des trois cycles, avec différentes couvertures géographiques. L?étude inclut 1150 enfants et adolescents de 163Un biomarqueur est une substance ou un indicateur d?activité biologique, qui peut être dosé dans l?organisme et qui peut refléter l?existence d?expositions environnementales, d?effets biologiques, de pathologies, ou encore d?une prédisposition génétique. Le terme « biomarqueurs » comprend des biomarqueurs d?exposition, d?effet, et de susceptibilité (réponse de l?organisme). Dans le champ de la biosurveillance humaine, les biomarqueurs d?exposition sont les plus employés. Ils permettent de mesurer la présence d?une substance chimique ou des métabolites de cette substance dans l?organisme (dans le sang, les urines, les cheveux, le lait maternel, etc.). Cette mesure de l?exposition aux substances chimiques présentes dans l?environnement intègre l?ensemble des sources (air, eau, alimentation, etc.) et voies d?exposition (orale, respiratoire et cutanée). Le terme d?imprégnation est souvent utilisé pour désigner les concentrations d'un biomarqueur d?exposition mesurées dans l?organisme. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 155/203 3 à 17 ans (seront aussi inclus 150 enfants de 0 à 2 ans mais sans prélèvements biologiques). Les adultes de 18 à 79 ans seront au nombre de 2000. Pour le premier cycle, une vingtaine de familles de substances seront analysées, dont une bonne part de perturbateurs endocriniens : phtalates, bisphénols/alkylphénols, PFAS, carbamates, pesti- cides, ions percholorates, métaux?. Des analyses non ciblées pourront être intégrées, afin de disposer de polluants qui ne sont pas analysés habituellement. Des biomarqueurs d?effets seront également intégrés (dès le cycle 1 pour la fonction thyroïdienne mais surtout en cycle 2 et 3) afin de pouvoir relier des expositions à des effets sanitaires et de mettre en évidence des effets pré- coces. Certaines substances sont communes entre les cycles, notamment celles qui présentent une durée de demi-vie courte permettant de suivre des évolutions. Les Outre-Mer ne sont pas inclus dans ALBANE à ce stade. Ils devraient faire l?objet d?une biosur- veillance spécifique. D?ores et déjà, il y a des programmes spécifiques de bio surveillance en cours, en particulier Kanari 2 aux Antilles, axé sur la chlordécone. Le budget prévisionnel d?ALBANE est de 10 M¤. ALBANE constitue la contribution française au volet « biosurveillance » du projet PARC. PARC (partenariat européen pour l'évaluation des risques liés aux substances chimiques), coordonné par l?Anses, comporte 9 volets, dont l?un consacré à la surveillance (« surveiller et mesurer l'exposition à la fois chez l'homme et dans l'environnement, en tenant compte des différentes sources, du de- venir des substances chimiques et des voies d'exposition, en travaillant sur les méthodes et outils analytiques innovants. »). Ce volet est codirigé par l'agence allemande pour l'environnement et Santé publique France. S?agissant de la biosurveillance, PARC prévoit notamment l?alignement des programmes nationaux de biosurveillance ainsi que la consolidation et le développement de la plateforme de biosurveillance humaine mise en place par HBM4EU (cf.infra). PARC prévoit éga- lement de développer un réseau de laboratoires qualifiés pour l'analyse des biomarqueurs. Annexe 8.1.2 L?exploitation des données d?ESTEBAN Autre résultat marquant des 5 dernières années (même s?il n?était pas inscrit dans les objectifs de la SNPE2) : l?exploitation de l?enquête ESTEBAN, qui donne un aperçu de l?exposition de la population française. Ces résultats concernent des prélèvements faits en 2016. Ils ont été publiés en 2021. Dans le prolongement de l?enquête ELFE (volet périnatal du programme de biosurveillance, dont les résultats ont été publiés avant le lancement de la SNPE2), ESTEBAN apporte des informations sur l?imprégnation de la population française à de nombreuses substances, dont plusieurs perturbateurs endocriniens : bisphénols, phtalates, perfluorés, parabènes, retardateurs de flamme, plomb ... A l?exception des parabènes (taux d?imprégnation de 60%), ces PE sont retrouvés dans près de 100 % des échantillons, révélant une imprégnation générale de la population. Pour chaque famille de substances, les principales voies d?exposition (alimentation, cosmétiques, tabac?) sont identifiées. En revanche, ces résultats ne permettent pas d?apprécier l?évolution de cette imprégnation, les perturbateurs endocriniens n?ayant pas été recherchés dans les précédents programmes de bio surveillance, à l?exception du plomb. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 156/203 Figure 2 : Résultats d?ESTEBAN Source : SpF Pour le plomb, on dispose d?une comparaison entre les résultats d?ESTEBAN et ceux du précédent programme de bio surveillance : l?imprégnation est en diminution, qu?il s?agisse de la moyenne générale (MG) ou des personnes les plus exposées (P95). Annexe 8.1.3 Le programme HBM4EU Les résultats d?ESTEBAN ont été mis en perspective européenne grâce à HBM4EU. Le projet européen HBM4EU a été lancé en 2016 dans le but d?améliorer la compréhension collective de l?exposition humaine aux produits chimiques dangereux. Le projet a bénéficié d?un financement de 74 millions d?euros et a été mis en oeuvre conjointement par 120 partenaires de 28 pays participants PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 157/203 ? 24 États membres de l?UE auxquels s?ajoutent la Norvège, la Suisse, l?Islande et Israël et l?Agence européenne pour l?environnement. L?Inserm pilotait le 3ème volet de ce programme consacré au lien entre exposition et la santé. Le projet a pris fin en juin 2022. Les résultats pour le bisphénol montrent une imprégnation plus importante en France au BPA et BPS mais moindre pour la BPF. Les résultats d?HBM4EU montrent également des évolutions temporelles différentes selon les Bisphénols (entre 2014 et 2020, diminution notable pour le BPA et modérée pour le BPF ; augmentation modérée pour le BPS). De même, la France se distingue par un taux d?imprégnation particulièrement élevé des enfants aux phtalates. Annexe 8.2. La surveillance épidémiologique Annexe 8.2.1 La santé reproductive L?infertilité masculine En 2015, dans le cadre de la SNPE1, un groupe de travail international réuni par S PF avait priorisé un certain nombre de maladies en lien avec les PE, au premier rang desquels figure la santé re- productive164. Une étude publiée en juillet 2018 par Santé publique France concluait à « des résultats reflétant une altération globale de la santé reproductive masculine en France, cohérente avec la littérature internationale, probablement depuis les années 1970 pour la qualité du sperme »165. Les auteurs relèvent notamment une baisse significative et continue de 32,2% (entre 1989 et 2005) de la concentration spermatique (léger rebond entre 1998 et 2000, suivi par une reprise de la baisse). Comme l?indique SpF dans sa publication, ces indicateurs dégradés sont constatés dans tous les pays industrialisés. Une méta-analyse réalisée en 2017166 fait apparaître un déclin de plus de 50 % de la concentration spermatique chez les hommes des pays industrialisés entre 1973 et 2011, se poursuivant proba- blement au même rythme depuis cette date. En 2011, la concentration spermatique moyenne observée n?était plus que de 47 millions/ml, ex- posant une large proportion d?hommes à une concentration spermatique inférieure à 40 M/ml, qui pourrait entraîner un allongement du délai nécessaire à concevoir et accroître très sensiblement le recours aux traitements thérapeutiques pour infertilité. A ce rythme, selon cette étude, la concen- tration spermatique moyenne des hommes occidentaux pourrait franchir le seuil de 40 M/ml en 2045, ce qui signifierait une infertilité générale (et donc la nécessité d?un recours à la PMA pour la très grande majorité des couples). SpF concluait son article de 2018 en mettant en cause les expositions environnementales, en par- ticulier les expositions aux PE, « présents de façon croissante et ubiquitaire dans l?environnement 164 Le réseau scientifique collaboratif (HUman Reproductive health and General Environment NeTwork) que coordonnait SpFrance, visait à établir les bases d?un système de surveillance international de la santé reproductive, dans le contexte de l?exposition aux PE. 165 Le Moal J, Rigou A, de Crouy-Chanel P, et al. Analyse combinée des quatre indicateurs du syndrome de dysgénésie testiculaire en France, dans le contexte de l'exposition aux perturbateurs endocriniens : cryptorchidies, hypospadias, cancer du testicule et qualité du sperme. Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire 2018 166 Temporal trends in sperm count: a systematic review and meta-regression analysis ; Human Reproduction Update ; Hagai Levine et al; 2017 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 158/203 et les produits de consommation depuis plusieurs décennies ». D?autres causes étaient mention- nées, comme le tabagisme, des facteurs nutritionnels ou métaboliques, la pollution atmosphérique ou des modifications de mode de vie (sédentarité, stress, chaleur, sommeil). Une étude de 2022167 a montré que le bisphénol A figurait au premier rang des perturbateurs en- docriniens impliqués dans la diminution constante de la concentration spermatique masculine ob- servée depuis une quarantaine d?années dans les pays industrialisés. Un article publié en 2023168 actualise et complète la méta analyse faite en 2017, par la même équipe. Cet article montre que la diminution de la fertilité masculine (mesurée à travers la concen- tration du sperme) n?est pas limitée aux pays occidentaux mais concerne les 5 continents. Il montre également que le problème s?accélère : la diminution de la concentration spermatique après l?an 2000 est deux fois plus rapide qu?après 1972. Les autres paramètres de la santé reproductive La surveillance épidémiologique menée au titre de la SNPE2 a donné lieu à la publication de plu- sieurs articles en 2022 par SpF, sur plusieurs pathologies (cryptorchidie, endométriose, fibromes utérins), complétant les résultats publiés en 2018 sur la fertilité masculine. Une synthèse de cette surveillance sanitaire a également été publiée en 2022 par SpF169. Tableau 15 : les indicateurs de santé reproductive Nbre cas / an Evolution incidence Taux d?incidence (/ 10 000)* Période d'analyse Cryptorchidie 7 000 +2,6% par an 26 2002-2014 Hypospadias 3 000 Pas d'évolution 10 2002-2014 Qualité du sperme - 1,9% par an (baisse de la concentration spermatique) 1989-2005 Cancer du testicule 2 000 +1,5% par an 0,7 1998-2014 Endométriose 30 000 +1,2% par an 10 (femmes âgées de 10 ans et plus) 2011-2017 Fibrome utérin 36 000 Biaisée par l?augmentation de la prise en charge par médicament (+13% par an) 17,1 (femmes âgées de 10 à 54 ans) 2013-2017 Puberté précoce centrale idiopathique 1 500 +4,5% par an 2,7 chez les filles et 0,2 chez les garçons 2007-2017 * Cas et incidences estimés à partir des cas traités ou opérés, enregistrés dans le SNDS (système national des données de santé). Ils ne représentent pas l?exhaustivité des cas rencontrés dans la population générale. Source : SpF 167 Combined exposures to bisphenols, polychlorinated dioxins, paracetamol, and phthalates as drivers of deteriorating semen quality, Environment International, Volume 165, July 2022, 107322 168 Temporal trends in sperm count: a systematic review and meta-regression analysis of samples collected globally in the 20th and 21st centuries ; Human Reproduction Update ; Hagai Levine et al ; 2023 169 « Bilan et perspectives du programme de surveillance des pathologies en lien avec les perturbateurs endocriniens », J. Caudeville et al, 2022 PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 159/203 On notera que les indicateurs relatifs à la dysgénésie testiculaire170 datent de 2014 au mieux, par- fois 2005 pour la qualité du sperme. Interrogé sur ce point, Santé Publique France pointe des dif- ficultés méthodologiques et légaux (protection des données médicales) : cela ferait 3 ans que l?Agence essaierait d?obtenir une actualisation des chiffres sur la qualité du sperme. Dans la continuité des publications précédentes, ces résultats confirment une dégradation continue des indicateurs en matière de santé reproductive. Des indicateurs dont la construction a un effet minorant comme le note SpF : « Hormis pour la qualité du sperme, les indicateurs sont construits à partir des données disponibles dans la base de données du système national des données de santé (SNDS), seules données produites en continu et couvrant tout le territoire. Ces indicateurs ne reflètent que les cas pris en charge, en sous-estimant de façon importante le problème de santé publique car le nombre de patients souffrant de ces pathologies est bien plus important. » Ce propos est cependant nuancé par SpF qui indique que cette dégradation « peut être soit le témoin d?une augmentation de l?incidence des pathologies, soit de la sensibilisation des popula- tions voire des médecins à certaines maladies (meilleures connaissances, détections et prises en charge des pathologies), ou une combinaison de ces hypothèses. » Pour l?endométriose, le taux d?incidence en France est dans le même ordre de grandeur que dans les autres pays européens utilisant des données hospitalières. Pour le fibrome utérin, le taux d?in- cidence de l?étude de SpF serait dans la fourchette basse des estimations issues de la littérature internationale. Graphique 4 : Fibrome utérin Source : SpF 170 Syndrome associant chez les hommes quatre anomalies du système reproducteur : cancer germinal testiculaire, cryptorchidie, hypospadias et hypofertilité masculine. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 160/203 Graphique 5 : Endométriose Source : PMSI Autres indicateurs épidémiologiques Sante publique France et l?INCa assurent également une surveillance épidémiologique du cancer du sein ou de la prostate, dont les PE sont un facteur de risque avéré : ? Entre 1990 et 2018, le nombre annuel de nouveaux cas de cancer du sein chez la femme a presque doublé, passant de 29 970 à 58 400 cas annuels, soit +1,1 % par an en moyenne ; entre 2010 et 2023, la progression a été plus faible, estimée à +0,3 % par an. La France était, en 2022, au premier rang mondial pour ce cancer (taux d?incidence de 105.4/100 000 selon le CIRC) ? Entre 2010 et 2018, le taux d'incidence du cancer de la prostate a diminué de -1,1 % par an en moyenne ; cette baisse fait suite à une forte augmentation entre 1990 et 2005 ; 59 885 nouveaux cas ont été diagnostiqués en 2018 en France métropolitaine ; ce cancer figure au 1er rang des cancers chez l'homme (25 % de l?ensemble des cancers masculins). Selon SpF (qui rejoint l?INCa), il est difficile d?évaluer la part des facteurs environnementaux dans la progression de ces cancers, dont la cause est multifactorielle (comportements, génétique, environnement?). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 161/203 Graphique 6 : Taux d?incidence et de mortalité par cancer du sein en France selon l?année (1990-2018) Source : INCa Graphique 7 : Taux d?incidence et de mortalité par cancer de la prostate en France selon l?année (1990-2015) Source : INCa PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 162/203 Enfin, des travaux ont été menés sur l?hyperthyroïdisme infantile, montrant, dans le cadre du dia- gnostic néonatal systématique171, une augmentation de 30.1% du nombre de cas sur la période 2008-2017. L?augmentation est régulière au cours de la décade, pour les garçons comme pour les filles, dans toutes les classes d?âge et dans tous les départements (avec cependant des taux d?in- cidence variables selon les territoires considérés). A la différence de la bio surveillance, la surveillance des maladies en lien avec les PE n?a pas eu de prolongement européen substantiel. On trouve néanmoins dans PARC, une tâche consacrée au « fardeau environnemental », mêlant surveillance intégrée et recherche, avec pour cas d?étude « impact du plomb sur le QI ». 7 pays y contribueront (SpF, Inserm et Anses pour la France). Annexe 8.2.2 La mise en place d?un nouveau système de surveillance sanitaire Une consultation sur les indicateurs sanitaires à suivre dans le cadre de la surveillance sanitaires en lien avec les PE a été lancée en 2021 par Santé Publique France (Projet PEPS'PE, dont les résultats ont été publiés en novembre 2023). Cette méthode de « priorisation des effets sanitaires à surveiller » repose sur un classement des effets sanitaires selon deux critères : le poids des preuves scientifiques ; l?intérêt épidémiologique et sociétal à mettre en place cette surveillance (critère composite incluant la gravité, l?incidence et la préoccupation sociétale). Afin d?évaluer ces deux critères, SpF a mis en oeuvre une méthode (appelée Delphi) combinant, d?une part, les données de la littérature scientifique ainsi que l?avis d?experts et, d?autre part, l?avis des parties prenantes. Cette méthode s?organise autour de deux questionnaires (l?un scientifique, l?autre sociétal) aux- quels ont répondu, chacun pour ce qui les concerne : 52 experts (français et étrangers) dans différents domaines (toxicologues, épidémiologistes, cliniciens...) ; 18 représentants des parties prenantes intervenant dans le champ des PE. SpF relève que le nombre de participants du questionnaire sociétal était relativement faible par rapport aux recommandations faites dans la littérature, malgré des invitations diffusées très large- ment (invitations de l?ensemble des parties prenantes de la SNPE2, multiples relances, présenta- tion du projet aux membres de la SNPE2 pour augmenter l?implication des acteurs). Pour compen- ser cette lacune, les résultats ont été mis à disposition à l?ensemble des parties prenantes du PNSE 4 et de la SNPE2 pour consultation, avant la publication officielle du programme de surveillance de l?agence, afin d?intégrer des avis qui n?auraient pas été pris en compte dans la consultation. En complément, pour s?assurer de la pertinence de la priorisation, une revue de la littérature inter- nationale a été faite. Un total de 59 effets sur la santé étaient à prioriser. 43 d?entre eux ont pu être évalués lors de la consultation, les 16 autres n?ayant pu être priorisés par manque de participants ou par absence de consensus. Parmi les priorités (fortes et modérées), on trouve les troubles de la santé reproductive qui faisaient déjà l?objet d?une surveillance : endométriose, puberté précoce, cryptorchidies, altération de la qua- lité du sperme, cancer du testicule ? S?y ajoutent d?autres pathologies ou effets sanitaires non 171 Avec l?accord des parents PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 163/203 encore surveillés au titre des PE, dans le champ de la santé reproductive (infertilité, cancer de l?endomètre, cancer des ovaires ?) mais aussi des troubles métaboliques (surpoids et obésité, syndrome métabolique, diabète de type 2?) et des troubles du neurodéveloppement (troubles du déficit de l?attention avec ou sans hyperactivité, troubles du comportement, déficience intellec- tuelle ?). Soit un total de 21 pathologies ou effets sanitaires retenus in fine : 13 avec une priorité forte et 8 avec une priorité modérée. Pour chacun, est associé un « niveau de confiance » reflétant, notamment, le degré de consensus des avis rendu par les experts et parties prenantes. Tableau 16 : Résultats de la priorisation PEPS?PE Source : SpF A l?issue de ce travail de priorisation, Santé publique France doit procéder à l?analyse de la faisabilité du nouveau dispositif de surveillance. SpF entend inscrire cet élargissement des pathologies surveillées dans un dispositif de surveillance intégrée, combinant, d?une part, les analyses spatio-temporelles des taux d?incidence et, d?autre part, les expositions environnementales. Cette surveillance intégrée devrait commencer par trois effets sanitaires en lien avec la santé reproductive : cancer des testicules puis qualité du sperme et enfin puberté précoce. SpF devrait ainsi pouvoir publier de nouveaux résultats sur l?impact des PE sur la santé reproductive dans 5 ans, selon une approche intégrée. Les autres pathologies, en particulier les troubles du neuro développement (baisse de QI, déficit intellectuel, troubles autistes et troubles de l?attention), seront également intégrées dans cette surveillance intégrée (en limitant ce croisement au fardeau environnemental). Enfin, les cancers hormono-dépendants (sein, prostate?) seront intégrés dans ce dispositif grâce au croisement entre les données du SNDS (associées aux données des registres) et les données environnementales. L?ambition est d?inclure le concept d?exposome dans cette surveillance, pour selon SpF, « combiner l?ensemble des données disponibles (intégration de données issues d?enquêtes, de cohortes, de registres, de données locales de terrain) et différentes approches méthodologiques (analyses spatio-temporelles, études écologiques et fardeau environnemental notamment) pour mesurer, analyser et interpréter l?impact des changements environnementaux sur la santé humaine ». A ce titre, il est envisagé d?avoir recours à l?intelligence artificielle pour exploiter les bases de données environnementales et de santé (green data for health et health data hub). PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 164/203 Annexe 9. La surveillance environnementale Annexe 9.1. La surveillance de l?air ambiant L?arrêté du 19 avril 2017 relatif au dispositif national de surveillance de la qualité de l?air ambiant mentionne que les associations agréées surveillance qualité de l?air (AASQA) surveillent les polluants d?intérêt national dont la liste et les modalités de surveillance sont définies selon une stratégie nationale de surveillance. Les polluants d?intérêt national sont définis comme les polluants autres que les polluants réglementés pour lesquels la surveillance est effectuée conformément au référentiel technique national. Lancée en 2018, avant le démarrage de la SNPE2, la campagne nationale exploratoire sur les pesticides (CNEP) dans l?air ambiant mené sur 12 mois par l?Anses, l?Ineris et le réseau des AASQA portait sur 75 substances sur 50 sites (grandes cultures, viticulture, arboriculture?) et a permis d?obtenir une photographie des substances présentes dans l?air ambiant et leurs niveaux de concentration en France. Cette campagne, prévue avant le démarrage de la SNPE2, n?a pas été construite avec un objectif « perturbateur endocrinien ». Ainsi d?après le rapport de l?Anses seuls 10 substances détectées pendant la campagne sont classées comme étant des perturbateurs endocriniens au titre européen, et 11 substances sont classées par l?Anses comme étant des « perturbateurs endocriniens possibles ». A noter qu?aucune de ces 21 substances détectées n?apparaît dans l?arrêté pris dans le cadre de la loi AGEC, seules 3 apparaissent en liste 2 sur le site EDlist.org et seules 2 apparaissent sur le site de l?ECHA comme étant en cours d?évaluation pour leur caractère perturbateur endocrinien par un Etat Membre. Pour rappel, le site EDlists.org regroupe les conclusions issues des dossiers d?évaluation existant dans une seule et même base de données. A l?initiative de six Etats-membres (Belgique, Danemark, Espagne, France, Pays-Bas et Suède), ce site informe sur le statut PE des substances ou l?état d?avancement des évaluations en cours relatives à ces propriétés dans l?UE, afin d?améliorer la connaissance sur les PE mais aussi la transparence sur les évaluations, leur cohérence et leur homogénéité au sein de l?UE. Les substances de la liste 2 du site EDlist.org sont les substances en cours d'évaluation pour leurs propriétés de perturbation endocrinienne suspectées dans le cadre d'une législation européenne. Ces substances font l?objet d?une expertise collective pour leur propriété de perturbation endocrine qui n?a pas encore été conclue. A partir de 2021, un suivi pérenne national des polluants d?intérêt national a été mis en place, la liste des polluants, publiée le 18/03/2021, contient 75 pesticides. Parmi ces pesticides, 3 sont identifiés comme étant en cours d?évaluation pour leur caractère de perturbation endocrine par un Etat membre et 46 sont identifiés comme étant des substances chimiques d?intérêt en raison de leur activité endoctrine potentielle par l?Anses dans son avis d?avril 2021. Tableau 17 : Perturbateurs endocriniens recherchés dans les campagnes de surveillance de l?air ambiant Campagne Substance N° CAS Information sur le caractère PE de la substance 2018 & 2021 Diuron 330-54-1 Liste 2 de EDlist.org En cours d?évaluation pour son caractère PE par un Etat Membre 2018 & 2021 Etofenprox 80844-07-1 En cours d?évaluation pour son caractère PE par un Etat Membre 2018 & 2021 Deltaméthrine 52918-63-5 Liste 2 de EDlist.org PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 165/203 2018 & 2021 Métribuzine 21087-64-9 Liste 2 de EDlist.org 2021 Terbutryne 886-50-0 En cours d?évaluation pour son caractère PE par un Etat Membre 2021 Prochloraz 677747-09-05 Liste 3 de EDlist.org Source : LCSQA Annexe 9.2. La surveillance de l?air intérieur Plus de 15 ans après la première campagne nationale logement (CNL1) menée en 2003-2005 et visant à effectuer un état de la qualité de l?air intérieur dans les logements français, une deuxième campagne nationale logement (CNL 2) a été lancée fin 2020 par l?Observatoire de la qualité de l?air intérieur (OQAI) pour : Déterminer l?évolution de la qualité de l?air dans les logements en France depuis la CNL1. Rechercher plus spécifiquement des polluants émergents, perturbateurs endocriniens et pesticides. Ces données doivent : Pallier le manque de connaissances sur l?exposition des français au quotidien dans leur logement et mettre à jour les valeurs sanitaires de référence. Permettre de rechercher les contributions de la pollution intérieure parmi les caractéristiques de l?environnement, du bâtiment, du ménage et de leurs activités domestiques. Le début de la campagne CNL2, initialement programmé en 2020 a finalement été décalé en 2021 en raison de la crise sanitaire. Cette campagne cible des logements qui avait déjà été fléchés dans la CNL1 et porte sur des mesures de concentrations de substances déjà analysées dans la précédente campagne à des fins de comparaison ainsi que 40 nouvelles substances. La CNL2 vise ainsi à mesurer environ 170 polluants dans 600 logements, parmi lesquelles les perturbateurs endocriniens suivants : Tableau 18 : Perturbateurs endocriniens recherchés dans la campagne de surveillance de l?air intérieur de 2021 Substances PE N° CAS Règlementation p-nonylphenol 104-40-5 REACH (PE environnement) Bis (2-ethylhexyl)phthalate (DEHP) 117-81-7 REACH (PE environnement & humain) 4-(1,1,3,3-tetramethylbutyl)phenol 140-66-9 REACH (PE environnement) Diisobutyl phthalate 84-69-5 REACH (PE humain) Dibutyl phthalate (DBP) 84-74-2 REACH (PE environnement & humain) Benzyl butyl phthalate (BBP) 85-68-7 REACH (PE humain) 4-tert-butylphenol 98-54-4 REACH (PE environnement) Source : OQAI PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 166/203 La campagne de mesures CNL2 s?est terminée en janvier 2023 et aura permis l'investigation d?environ 600 logements sur près de 2 ans. La publication des résultats de la CNL2 n?est pas intervenue à ce jour. Le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) prépare la publication du rapport à la suite de quoi une réflexion sera engagée sur les suites à donner, notamment dans le cadre du nouvel Observatoire de la qualité des environnements intérieurs (OQEI) en cours de constitution, qui a vocation à succéder à l?OQAI. Des actions à mener pour prévenir et réduire l?exposition aux polluants de l?air intérieur, parmi lesquels des perturbateurs endocriniens seront déterminées dans le cadre des travaux du futur OQEI, sur la base des résultats de la campagne CNL2, lesquels doivent notamment contenir des informations sur les modes de vie ainsi que les différentes sources d?exposition possibles parmi lesquels les produits de construction, de décoration, d?ameublement et de consommation courante dans les logements ciblés lors de la campagne. A noter, qu?en 2024, l?Observatoire de la qualité de l?air intérieur est devenu un observatoire de la qualité des environnements intérieurs, il sera porté conjointement par l?Anses et le CSTB. Aussi, dans le cadre de ce nouvel observatoire, des travaux pourront être menés en 2024 afin de lancer une réflexion méthodologique sur les prochaines campagnes de l?observatoire (hiérarchisation de polluants à surveiller ; suivi continu d?un panel de logements). Par ailleurs, les données de la CNL2 seront exploitées par l?Anses et le CSTB afin d?obtenir des informations concernant notamment l?impact sanitaire de certains polluants (potentiellement PE) présents dans les logements. Enfin, les résultats obtenus seront utilisés pour renforcer l?information et la sensibilisation du grand public et des personnes sensibles à la qualité de l?air intérieur. Des modifications réglementaires relatives à une meilleure information (étiquetage ; création d?un score?) ou à la surveillance réglementaire des polluants de l?air intérieur dans certains établissements recevant du public pourraient également voir le jour à terme. Annexe 9.3. Focus sur les PFAS dans la surveillance des sols Le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) a finalisé un rapport faisant un état de l?art des connaissances sur les composés perfluorés (PFAS) et leur présence dans les sites et sols pollués. Publié en décembre 2020, ce rapport rappelle que la présence des PFAS dans les sols est bien moins renseignée que dans les autres milieux, et renseigne les milieux affectés (sols, eaux de surface, eaux souterraines, sédiments, boues?) selon les sources. Ainsi, l?utilisation de mousses (aires d?entrainement anti-incendie et incendie) serait la première cause de présence de PFAS dans les milieux récepteurs. A noter que la réglementation actuelle prévoit d'ores et déjà l'interdiction de certaines sous-familles des PFAS (PFOS : acide perfluorooctanesulfonique et, à compter du 4 juillet 2025, PFOA : acide perfluorooctanoïque) et que des projets de textes sont en cours de préparation aux niveaux international et européen afin d'étendre les mesures d'interdiction et de restriction des utilisations des PFAS. Le rapport du BRGM met également en évidence le fait que les sites de production des PFAS et l?épandage des boues d?épuration représentent deux autres sources substantielles de pollution des sols par ces substances. PUBLIÉ Mai 2024 EVALUATION DE LA DEUXIEME STRATEGIE NATIONALE SUR LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS Page 167/203 Annexe 9.4. La surveillance des milieux aquatiques Le croisement des substances chimiques présentant des propriétés de perturbation endocrinienne figurant dans l?a